Google
This is a digital copy of a book thaï was prcscrvod for générations on library shelves before it was carefully scanned by Google as part of a project
to make the world's bocks discoverablc online.
It has survived long enough for the copyright to expire and the book to enter the public domain. A public domain book is one that was never subject
to copyright or whose légal copyright term has expired. Whether a book is in the public domain may vary country to country. Public domain books
are our gateways to the past, representing a wealth of history, culture and knowledge that's often difficult to discover.
Marks, notations and other maiginalia présent in the original volume will appear in this file - a reminder of this book's long journcy from the
publisher to a library and finally to you.
Usage guidelines
Google is proud to partner with libraries to digitize public domain materials and make them widely accessible. Public domain books belong to the
public and we are merely their custodians. Nevertheless, this work is expensive, so in order to keep providing this resource, we hâve taken steps to
prcvcnt abuse by commercial parties, including placing lechnical restrictions on automated querying.
We also ask that you:
+ Make non-commercial use of the files We designed Google Book Search for use by individuals, and we request that you use thèse files for
Personal, non-commercial purposes.
+ Refrain fivm automated querying Do nol send automated queries of any sort to Google's System: If you are conducting research on machine
translation, optical character récognition or other areas where access to a laige amount of text is helpful, please contact us. We encourage the
use of public domain materials for thèse purposes and may be able to help.
+ Maintain attributionTht GoogX'S "watermark" you see on each file is essential for informingpcoplcabout this project and helping them find
additional materials through Google Book Search. Please do not remove it.
+ Keep it légal Whatever your use, remember that you are lesponsible for ensuring that what you are doing is légal. Do not assume that just
because we believe a book is in the public domain for users in the United States, that the work is also in the public domain for users in other
countiies. Whether a book is still in copyright varies from country to country, and we can'l offer guidance on whether any spécifie use of
any spécifie book is allowed. Please do not assume that a book's appearance in Google Book Search means it can be used in any manner
anywhere in the world. Copyright infringement liabili^ can be quite severe.
About Google Book Search
Google's mission is to organize the world's information and to make it universally accessible and useful. Google Book Search helps rcaders
discover the world's books while helping authors and publishers reach new audiences. You can search through the full icxi of ihis book on the web
at|http: //books. google .com/l
DICTIONNAIRE
r r
GENERAL
DES LETTRES, des BEAUX-ARTS
BT DBS
SCIENCES MORALES ET POLITIQUES
II
A LA MÊME litBtlAIBIfi}
VOYAGE AU CAMBODGE
L'ARCHITECTURE KHMER
Par L. DELâPORTE
Lieutenant de vaisseaa, chef de la Mission d'exploration aax monumenti khmen.
Avec une carte en chromo el plus de 500 gravures d'après les dessins de rauteor.
Grand in-8 jésus. Broché 20 fr. t Richement relié, fers spéciaux, tranches dorées. 28 fr.
Il reste quelques exemplaires numérotés sur vélin. Brochés : 40 fk>«
LA MYTHOLOGIE
DAlrs L*ART ANCIEN Et MODERNE
Par RENÉ MËNARD, avec appendice par Eag. VâRON
Ouvrage orné de 600 gravures dont 32 hors texte.
tJn beau vol. grand in-8 jésus, titre et couverture en deux couleurs, broché 25 fr.
«» richement relié, fers spéciaux, tranches dorées 32 fr.
LE MONDE VU PAR LES ARTISTES
GÉOGRAPHIE ARTISTIQUE, par René MÉNARD
Magnifique ouvrage orné de plas de 600 gravures et de nombreuses cartes.
Un beau vol. gr. in-8 jésus. Broché, 25 fr. : — Riche reliure, fers spéciaux, plats et tranches dorés, 32 fr.
Il reste quelques exemplaires numérotés, sur vélin. Brochés, 50 fr.
LE LIVRE DE LA FERME
2 forts vol. ET DES MAISONS DE CAMPAGNE Prix des 2 vol.
grand in-8 jésus PaBLié sous la direction db M* P. JOIGNEAUX 32 francs.
FORMANT UNS VÉRTrABLE KNCTCLOPéDIB AGRICOLE DE 21 60 PAGES ILLUSTRÉES.
La grande et la petite cullure» les meilleures méthodes et les instruments en usage, les moyens d'amé-
lioralioos, assainissement des terres, défrichement, assolement, engrais et fumure, fourrages artificiels,
céréales, prairies naturelles, etc. Elevage des bestiaux, éducation des abeilles et des vers à soie, entretien
des basses-cours, des volières et des colombiers, des étangs, laiteries et laitages, pisciculture
LÀ DBMl-RBUURB EN CHAGRIN DES 2 VOLUMES BN PLUS 8 PB.
EN SOUSCRIPTION
NOUVELLE ÉDITION, ENTIÈREMENT REFONDUE, 32 LIVRAISONS A 1 FR.
8242-85. — CouBiL. Typ. et stér. CaiTi.
DICTIONNAIRE
GÉNÉRAL
DES
LETTRES, DES BEAUX-ARTS
ET DKS
SCIENCES MORALES ET POLITIQUES
COSI PRENANT
POUR USS UBTTBJESS : La Grammaire; — la Linguistique; — la Rhétorioue, la Poétique et la Versification; — la Critique;
la Théorie et l'Histoire des diflTérents goures de Littérature ; — 1 Histoire des Littératures anciennes
et modernes ; — des Notices analytiques sur les grandes œurres littéraires ; — la Paléographie et la Diplomatique, etc.
POUR USB BEAUX» ARTS : L'Architecture : Constructions civiles, relij^ieuses, hydrauliques, militaires et narales;
la Sculpture, la Peinture, la Musique, la Grarure, avec leur histoire : — la Numismatique ;
le Dessin, la Litnographie, la Photographie ; — la Description des monuments fameux ; — les dirers arts et jeux
d'agrément, de force, d'adresse ou de combinaison, etc.
(y. B, Cette partie est ornée de figures dans le texte,)
POUR UBB 8CISMGE8 K0RAZ<E8 ET POLITIQUES : La Philosophie : Psrcholoffie, Logique, Morale, Métaphysique,
Théodicée, Histoire des systèmes phiIosophi(|ues ; — les Reliions, les Cultes et la Lituivie
~ : Droit civil, politique, pénal et international ; Législation militaire,
de tons les peuples; — la Jurisprudence usuelle: uroit cîvii, politique, p(
■ "i Sci
1
Pédagogie et rB'ducation^
maritime, industrielle, commerciale et agricole; la Science politique; théorie
goutemements ; ta Science de l'Administration, et l^istoire des institutions
administratÎTes. — les Études Historiques et çéoçraphiques ; — le Blason; — l'Économie politique et sociale: Institutions
rite, Banques, Bienfaisance publi.que, Hospices, Salles d*asUei — la Stattstiqae;
la Pédairoffie et l'Éducation, ete.
de crédit et de charité,
PAR
M. ThI^BACHELET
L*un des auteurs-directeurs du Dictionnaire de Biographie et <r Histoire, etc
ancien élève de l'École normale supérieure,
agrégé de l'Université, professeur au lycée Coctteilie, de Rouen.
UNE SOCIÉTÉ
DE LITTÉRATEURS, D'ARTISTES, DE PUBLIGISTES ET DE SAVANTS
et avec la collaboration
DB
M. CH. DEZOBRY
AufSUH DB ROMB AU SIÉCLB d'AUOUSTB
BT L*UN DBS AUTBURS-OIRBCTBURS
DtJ D1CTI0?INAIRB DB BIOORAPilIB BT D*HI8T0IRB, BTCé
DEUXIÈME PARTIE
SEPTIÈMB ÉDITION
Avec supplément rera et auffmaDié*
PARIS
LIBRAIRIE CH. DELAGRAVE
15, RUE SOUPPLOT, 15
1886
Tous droits réservés.
TouL exemplaire non revêtu de ia griffe de f éditeur sera réputé contrefait.
L€
DICTIONNAIRE
DES LETTRES
DES BEAUX-ARTS
BT
DES SCIENCES MORALES ET POLITIQUES
G
G^ 7* lettre et 5* consonne dans Talphabet latin et dans
les alphabets qui en dérivent. Le gamma des Grecs et les
caractères correspondants des alphabets orientaux oc-
capent la 3* place. En français, le G a deux valeurs de
prononciation : il est dur devant a, o, ti, <, n, r {golt,
gosier, guttural^ glu, gnomon, gris)^ et alors c*est une
lettre gutturale; il est doux, avec le son du j, devant 0,
h y {gémir, gUet, gymnase)^ et il est alors une lettre
chuintante. La distinction des deux valeurs du G existe
aussi en italien, en espagnol, en allemand et en an^ais;
mais si le G dur a une prononciation uniforme dans
tontes ces langues, il n*en est pas de même du G doux,
qoi se prononce dj en italien et en anglais, ch en alle-
mand (foeg, wegen)^ et comme la jota en espagnol. En
allemand, la. prononciation du g dur se conserve souvent
devant IV et Vu — A la fin des mots, le G ne se prononce
pas en français, sauf quelques exceptions, comme Joug,
et à moins que le mot suivant ne commence par une
voyelle, et alors il prend le son du k {sang impur, long
espoir, rang élevé). Il est muet aussi quel^efois au mi-
lien dés mots, par exemple dans vingt, dotgt, legs.
Dans le passage d*une langue à une autre, certains
mots présentent une permutation du G avec G (Cadix,
du latin Godes; gras, de crassus: — F. l'art sur la lettre
C), ou do G avec I {fuir, de fugere; lire, de légère)»
Beaucoup de mots allemands, introduits dans le français,
ont permuté W avec G {garde, de ward; gain, de u;tfi;
gwrre, de toar; Guillaume, de WUTiem). La réciproque
existe dans wallon, dérivé de gaulois. De vasco nous
avons fait gascon.
L'articulation gutturo^nasale gn, qvd te trouve dans
beaucoup de mots français {bagne, règne, ligne, seigneur,
agneau, signal, rogner )<t existe aussi : 1<* en italien {se-
gno, signor) ; 2** en anglais, avec les deux mêmes lettres
plac^ en sens inverse {sing) ; 3^ en espagnol, avec un n
surmontée d'un trait {lefio, Mara/fion). Les Italiens ont
une articulation particulière, gli, où Ton entend sucoes-
iÏTement notre l mouillée et l't voyelle.
Dans les abréviations des inscriptions romaines, G est
pour GolMS, Gellius, gens, genius, gratis, gaudium, gUh-
ria, etc. D. G. veut dire Dei gratia; S. G., Sa Grâce ou
Sa Grandeur, Sur les anciennes monnaies françaises, G
étût la marque de la fabrique de Poitiers. — Gonmie
lettre numérale, le G valait 400 chez les Romains : sur-
monté d'un trait horizontal, 400,000. Biais, en fprec, y '
lait 3, et ^ Y 3,000. — Dans le comput ecclésiastique, G
est la dernière des 7 lettres dominicales, et marque sur
le calendrier les dimanches, dans les années où ce Joor
tombe le 7 Janvier. — Dans la notation musicale, G dé-
signe le sol, qoi était la 7* note de la saipme ancienne.
GABÂRE (dn bas latin cabarus, ou de l'hébreu haba-
nh, bateau de passage), nom donné à deux espèces de
navires d« cbai^ : 1* aux lourdes baïquest pontées on
non pontées, à un seul m&t, allant à la voile et à Tavi-
ron, et dont on se sert dans les norts pour porter à bord
des b&timents en rado les objets ae consommation ; 2* aux
grosses corvettes de liOO à 600 tonneaux, qui vont ravi-
tailler les garnisons des colonies, les escaores et les sta-
tions ! elles ont trois mAts, et portent de 8 à 12 canons
ou caronades; les plus petites sont appelées aabarots,
et les plus grandes, gabosses. Dans les ports, la marie-
salope est quelquefois appelée gabare à vase, B.
GABARB, filet à mailles serrées, soutenu à la surface de
Teau par des morceaux de liège. On en fait usage sur
nos côtes de l'Océan, à l'embouchure des rivières.
GABARIT, modèle en bois ou en fer sur lequel tra-
vaillent les ouvriers des constructions navales, et qui
offre la forme, les contours et les proportions qu'ils doi-
vent reproduire en faisant un b&timent.
GABELLE. V, ce mot dans notre Dictionn. de Biogr,
et d* Histoire, et, dans le présent ouvragé, l'art. Sel (Im-
pôt du).
GABELOU, nom donné Jadis aux commis des gabelles,
et qui ne s'emploie plus que dans le langage populaire
pour désigner les douaniers, les employés de 1 octroi et
les commis des contributions indirectes.
GABIE (du bas latin gàbia, cage, hotte), sorte de demi-
hune en àdllebotis appliquée sur un des côtés de la tète
des m&ts à antennes.
GABIER, nom que Ton donne, sur les grands bâtiments,
aux matelots qui, choisis par le commandant parmi ceux
du service des hunes et du beaupré, ont la surveillanoe
des gréements, et sont chargés ay faire les réparations
nécessaires. On les distingue d'après le mât auquel ils
sont attadiés : gabiers de grand^hune, au nombre de 16
pour un valssean, de 10 à 12 pour une frégate ; gabiers
de misaine, en pareil nombre; gabiers d^artimon et de
beaupré, moins nombreux. Le titre de gabier implique
un emploi et non un grade t il ne se porte pas à terre. Les
contre-maîtres sont choisis de préférence parmi les ga-
biers. Dans les nrises faites par les bâtiments de l'État,
chaque gabier a 3 parte 1/29 (arrêté consulaire du 0 ven-
tôse an IV).
GABION, aorte de grand panier eylindrique, sans fond,
formé d'un clayonnage, et qu'on remplit de terre ou de
toute autre matière. Il sert, dans les sièges, à garantir
les troupes et les travailleurs contre la mousqueterie de
la place. Les gabions de sape ou de tranchée, qui ont
0<°,80 de hauteur, et 0'",65 de diamètre extérieur, sont
remplis de terre t placés debout les uns à côté des autres^
ils forment, soit le parapet des sapes, des logements, des
tranchées, soit le cavalier qu'on élève en avant du che-
min couvert. Les gabions farcis ou roulants ont 2",30 de
hauteur, 1™,30 à t'>*,50 de diamètre extérieur, et sont gar-
nis de vingt-cinq à trente fascines, ou de laine, de bourre,
de menus copeaux : on les emploie couchés, et on les
61
GAG
950
GAî
ronle aa moyen d*un crochet en avant des travailleurs.
GABLE, en Architecture, couronnement d'un mur de
façade dans les édifices des périodes romane et ogivale. Il
dérive du fronton antique, mais il n*en a conservé que la
forme triangulaire. Il est simple et uni, ou découpé à jour
«t très-^rné. Ses dimensions ne sont assujetties à aucunt»
règle fixe; la hauteur dépend souvent du comble que le
gable dans la plupart des cas est appelé à masquer. Dans
les monuments romans, il est ordinairement surmonté
d*une croix, tandis qu^à Tépoque ogivale il se couronne
de bouquets en panaches, y. Pignon, Fronton. E. L.
GABLETS, petits gables décorant les niches et les dais,
<{ui même dans le principe en portaient le nom.
GABORD. K. BoRDAGB.
GABURON ou JUMELLE, pièce de bois qui recouvre
un bas-m&t depuis sa naissance iusqu*au quart environ de
sa longueur au-dessous de la hune, pour le renforcer, et
pour le garantir des frottements du m&t supérieur qu*on
monte ou qu*on descend. Gabwron est pour capwron,
dérivé du latin ca'pxui^ tète.
GACHIS (de l'allemand woAchfin^ laver), mélange de
chaux, de sable, de plâtre ou de ciment délayé dans de
Teau, et propre à la b&tisse. Gâcher serré, c'est mettre
du pl&tre dans Teau ]usqu*à ce qu'elle soit tout absor-
bée; gâcher lâche, c'est mettre peu de pl&tre et obtenir
un mélange très-liquide.
GAÉLIQUE, nom que les linguistes donnent à la
branche des langues celtiques (V, ce mot) c|ui comprend
l'idiome des montagnards de TÉcosse et celui des paysans
irlandais. Cependant les écrivains anglais appellent gaé-
lique la langue primitive de TÉcosse, à l'exclusion de
celle de l'Irlande. C'est à elle également qu'ils donnent
les noms averse et d'albanack, La déclinaison du gaéli()ue,
qui a 6 cas, se fait en partie par flexion et en partie à
l'aide de prépositions. Il n'y a pas de genre neutre. La
conjugaison, riche en modes, puisqu'elle a un mode né-
gatif, est pauvre en temps, car elle n'a que l'imparfait et
le futur; les autres temps se forment par périphrases.
Le passif se forme sans auxiliaires, si ce n'est aux modes
optatif et conjonctif. A l'indicatif, la terminaison est
invariable pour les deux genres et pour toutes les per-
sonnes, et le pronom personnel se place après le verbe.
Un certain nombre de particules, en se joignant à un
adjectif, à un substantif ou à un verbe, en modifient le
sens. Dans la construction, l'article, les verbes et les pro-
noms possessifs se mettent avant le substantif, mais le
nominatif ou le sujet est placé ordinairement après le
verbe; les prépositions précèdent leurs régimes. Le gaé-
lique est plein de sons gutturaux. Sans doute on ne
l'écrivait pas avant Parrivée des Romains dans la Grande-
Bretagne ; car on n'a découvert aucun manuscrit, aucun
monument épigraphique antérieur à cette époque. L'al-
phabet que l'on adopta dans la suite n'est autre que le
latin : il se compose de 18 lettres, où ne figurent pas k,
q, V, Xf y et z. L'écriture est hérissée de consonnes, qui
cependant ne se prononcent pas. La prononciation a
beaucoup yarié selon les localités, et l'orthographe selon
les époques. On a distingué Jusqu'à 24 rhythmes dans
la yersincation : l'emploi de la rime finale est rare, mais
on se sert fréquemment des assonances, de l'allitération
et même de la rime dans le corps du vers. Parmi les
poètes dont on a conservé des chants gaéliques, on peut
citer : Lacklan-BIhor-Mhuirich-Albinnich, barde du Lord
des Iles au commencement du xv* siècle; Alexandre Mac-
Donald et Jean Lom Mac-Donald, du xvni* siècle ; Mac-
Intyre, dont les œuvres ont été publiées en 1768 ; Du-
nald Buchanan, en 1770; Kenneth Mackensie, en 1796;
John Mac-Gregor, en 1801 ; Allan Mac-Doupl , en 1800;
Robert Donn, en 18^29. V. Shaw, Dictionnaire gaélique et
anglais, Londres, 1780, 2 voL in-4o; j. Kelly, Gram-
maire pratique de Vancien gaélique, Ibid., 1803, in-4<*;
Stewart, Éléments de la grammaire paélique, 2* édit.,
Édlmbourff, 1812; Armstrong, Dictionnaire gaélique,
Londres, 1825, in-4i^\ Dictionarium sootO'Celticum , ou
Dictionnaire complet de la langue gaélique, publié par
la Société des Highlands, Edimbourg, 1828, 2 vol. in-l».
GAFFE, perche munie d'un fer à deux branches poin-
taes, dont rune est droite et l'autre recourbée. Elle sert
à pousser une embarcation au large, ou à la retenir en
profitant d'un point d'appui quelconque.
GAGE (de l'allemand wage, balance, équilibre), chose
donnée comme sCireté de l'exécution d'une convention,
et contrat qui confère un droit sur cette chose. Le droit
de gage consiste dans la faculté de se faire payer sur la
chose donnée en gage, par privilège et préférence aux
autres créanciers {Code NapoL, art. 2073). Les droits
2,
d*antichrèse , de privilège, d'hypothèque {V. ce mots)*
portent sur des gages : mais l'hypothèque est un droit réel
et de préférence sur les immeubles ou leur usufruit;
l'antichrèse, un droit de percevoir les fruits de l'im-
meuble; le privilège, un droit né de la qualité même de
la créance, qui peut exister sur les meubles ou sur les
immeubles, ou sur tous à la fois; le gage proprement
dit, un droit de préférence sur les meubles seulement.
Le contrat de gage se forme par tradition de l'objet mo-
bilier ; le droit ne subsiste sur le gage qu'autant que ce
gage a été mis et est resté en la possession de celui qui
a dû le recevoir {^Code NapoL, art. 2076). Le gage, pos-
sédé à titre précaire, est imprescriptible ; le créancier ne
peut se l'approprier ou en disposer, et doit recourir à la
justice pour réaliser ses droits ou pour se faire inde!U-
niser des dépeins et pertes que le gage a pu lui occa-
sionner. Le gage est indivisible, et ne peut être réclamé
par portion. Le débiteur peut exercer des recours pour
détérioration de l'objet qu'il a engagé. F. Troplong,
Commentaire du Nantissement, du Gage et de VAnti-
chrèse, 1841, in-8°.
GAGE (Lettre de). V. Lettiib de gage.
GAGERIE (Saisii^-). F. Saisie.
GAGES, salaires des domestiques et des ouvriers.
V. Domestique, Salaibb.
CAGES (Prêt sur). F. Prêt, et MoNT-DE-PiÉri.
GAGEURE. V. Pari.
GAGNE-PAIN , nom donné, pendant le moyen âge, à
ceux qui faisaient profession de nettoyer et raccommoder
les vases d'étain. C'est sans doute parce qu'on les payait
avec un morceau de pain. Ils étaient exempts du service
du guet. On les appelait aussi gagne-denters et gagne-
maules.
GAIDON, un des romans carlovingiens (F. ce mot),
ui peut être considéré comme une suite de la chanson
e Roncevaux. C'est le complément de la vengeance de la
mort des douze pairs. Gaidon, duc d'Angers, est fausse-
ment accusé par Thibaut d'Aspremont, frère du traître
Ganelon, d'avoir voulu empoisonner l'empereur. De là
une guerre entre le vassal et le suzerain. Charles est fait
prisonnier; mais le vainqueur se jette à genoux devant le
vaincu, en le suppliant de lui rendre son amitié. La paix
est rétablie; la vérité parait au grand iour: Thibaut est
mis à mort, et Gaidon épouse la reine de Gascogne. —
La chanson de Gaidon, dans laquelle Charlemagne joue
le plus triste rôle , se trouve à la Bibliothèque natio-
nale de Paris dans deux manuscrits du xiu* siècle
et dans un du xv«. Elle contient 10,887 vers, et a été
publiée par MM. Guessard et S. Luce dans la collection
des Anciens poètes de la France, Paris, 1862, în-i6.
F. V Histoire littéraire de la France, tome xxii; S. Luce,
De Oaidone, carminé gallico vetustiore, disquisitio crv-
ttca, Paris, 1860, in-8°.
GAILLARDE, ancienne .danse, originaire d'Italie, et
qu'on appela d'abord la Romanesca (U Romaine). Elle
s'exécutait à 3 temps, d'un mouvement vif et animé. Il
en est resté le pas de gaillarde, composé d'un pas assem-
blé, d'un pas marché, d'un pas tombé et qui se fait en
avant et de côté.
GAILLARDE. F. CARACTERES D'iMPRIVERIE.
GAILLARDS, parties du pont supérieur situées à Vavant
et à l'ambre des grands b&timënts. Le gaillard d'arrière
s'étend depuis le couronnement (haut de la poupe) jus-
qu'au grand m&t; le gaillard d'avant est compris entre
les apôtres (allonges placées de chaque côté de l'étrave)
et le bout de l'arrière du porte-haubans de misaine. Le
pont supérieur, qui est aujourd'hui de plain-pied, réunit
les deux gaillards; autrefois ils communiquaient par les
passavants. Les gaillards, comme les autres ponts,
portent des bouches à feu, mais d'un moindre calibre.
Le gaillard d'arrière porte généralement une dunette
(F. ce mot). En mer et dans la vie ordinaire du bord,
les ofliciers et les passagers admis à leur table ont seuls
le privilège de se promener sur le gaillard d'arrière. En
rade ou £ins le port, le côté de tribord du gaillard d'ar-
rière est la place d'honneur, et, quand le commandant y
parait, tout le monde passe à b&bord s en mgr, c'est le
côté du vent qui est le côté d'honneur.
GAILLON ( Ch&teau de), à 15 kil. E.-S.-E. de Louviers
fEure). Ce ch&teau, construit sous Louis xm, de 1502 à
1509, pour le cardinal-ministre Georges d'Amboise, non
par l'italien Giocondo, comme on l'a dit, mais par des
architectes français, et détruit en 1792, fut une des pre-
mières et des plus belles productions de la Renaissance
en France. Il se composait de quatre corps de logis de
hauteur égale, enveloppant une cour irrégulière, aa mi-
GAL
951
GAL
}ifude UqaeUe étsAt une fontaine à plusiean vasques de
m<ixl>Te b'ianc superposées. Le clocheton, la dentelure et
Voôve f^othiques s'y mariaient avec les pilastres italiens
et it» arabesques florentines. Les b&timents étaient en-
tourés de parterres^ terrasses, pièces d*eau, orangeries,
serres chaudes, grottes et pavillons à l'imitation des villas
de Vltalie. Sur remplacement du château, s'élève aujour-
d'hui une maison centrale de détention, où Ton ne voit
plus des constructions premières qu'un porche flanqué
de quatre tourelles, une tour de la chapelle, une galerie
et une terrasse. Une des façades, richement sculptée et
ciselée, a été transportée par Alexandre Lenoir dans la
première cour du palais des Beaux-Arts à Paris, où on la
connaît sous le nom d'Arc de Gaillon: elle est de Pierre
Faio, architecte rouennais. La fontaine se trouve au
Louvre, dans le Musée de la sculpture française. Les boi-
series et les stalles de la chapelle sont dans l'église de
S'-Denis. B.
GAINE, étui de couteau, de ciseaux, de poignard, etc.
On donnait autrefois aussi ce nom aux fourreaux de
labres et d'épées, d'où vinrent les expressions dégainer^
rengainer. — En Architecture, la gaine est un support
s^évasant de bas en haut et servant à soutenir un buste :
le corps est censé renfermé dans la gaine, et les pieds
sortent par en bas. Quand la statue est ainsi complétée,
elle prend le nom de terme.
GAINIER, ouvrier qui fabrique les gaines. Les galuiers,
fourreliers et ouvriers en cuir bouilli formaient autrefois
à Paris un corps de métier, dont l'ordonnance d'établis-
sement remontait à Tannée 1323.
GAINS DE SURVIE, en termes de Droit, avantages sti-
pulés entre particuliers au profit du survivant.
GAITÉ (Théâtre de la), le plus ancien des thé&tres
du boulevard du Temple à Paris. Fondé par Nicolet en
1760, sous le titre de Théâtre des grands danseurs du
roi, on y donna des danses funambulesques, des panto-
mimes et de petites comédies bouffonnes, dont l'acteur
Taconnet eut longtemps la fourniture. En 1792, il reçut
le nom de Théâtre d'Emuiation, et, bientôt après, celui
de Théâtre de la Gailé, Vers 1800, on y joua les premiers
mélodrames, puis la célèbre féerie du Pied de Mouton.
Les vaudevilles de Brazier et les drames de Pixérécourt
lui donnèrent une grande vogue. En 1835, un incendie
consuma tout l'intérieur et le matériel de la salle, qui fut
reconstruite la môme année. Le théâtre de la Gaîté a
eu quelques succès prodigieux, parmi lesquels il faut
citer le Sonneur de Saint-Paul, la Grâce de Dieu, et les
Cosaques, V. lo Supplément, B.
GALA, ancien mot qui signifiait un vêtement riche et
somptueux « dont les nobles se paraient pour les fêtes et
les festins de cour. 11 ne subsiste plus que pour désigner
un festin.
GALANDRE, navire. V. Chalande.
GALANTERIE, mot qui désigne les actes d'empresse-
ment, d'égards et de protection de l'homme envers la
femme dans les pays civilisés. Un homme galant est celui
qui montre auprès des femmes cette assiduité, cet esprit
de condescendance; l'expression de galant homme ex-
prime une tout autre idée, celle d'un homme dont la
conduite est probe, loyale et digne d'estime ; appliquée à
la femme, l'épithète de galante est toujours prise en
mauvaise part, et exprime d'une manière à peu près hon-
nête une idée qui ne l'est pas. La galanterie est un sen-
timent moderne, et particulièrement français. Elle a eu
un âge florissant à l'époque de la chevalerie. Impossible
en dehors des hommes bien élevés et polis, elle a dégé-
néré souvent en abus et en scandales, même à la cour,
où la dignité semblerait devoir la contenir dans de justes
bornes : on Ta vue licencieuse au xvi", au xvn* et au
xvm* siècle, et maniérée, pleine d'afféterie au sortir de
la Révolution.
GALANTS, coques de rubans employées comme garni-
tore. Cétait un ornement de toilette au xvn* siècle.
GALAUBAN. F. Galhauban.
GALBE, (de l'italien garbo, bonne çrâce), en Archi-
tecture et en Sculpture, contour arrondi d'un objet quel-
conque. On dit qu*une colonne est galbée, lorsqu'au lieu
d'avoir un fût rectilîgne, elle se renfle au milieu et di-
minue dans les autres parties suivant des règles fixes.
En général, on appelle galbe le chantournement d'un
rase, d*un balustre, d^une console, le profil d'une sta-
tue, etc. E. L.
GALEA, genre de casque romain, en métal fourbi, sur-
monté d'un petit anneau, et s^attachant avec une jugu-
laire. Celui des officiers avait un cimier de plumes ou de
cria. Le casque des trompettes était couvert d'une peau
de lion avec sa crinière. Dans les jeux da Cirque, les
cochers eurent des casques à ailerons, symbole de lé-
gèreté. On voit au cabinet des antiques, â Paris, un
casque romain fondu avec tant de délicatesse, qu'il n'a
guère plus de 2 millimèt. d'épaisseur ei ne pèse qu'un
kilogr. B.
GALÉACE ou GALÉASSE (de l'italien galea, galère],
gros navire à un seul pont, à trois mâts, et à 25 ou
30 bancs de rameurs, employé dans l'Adriatique et la
Méditerranée dans les derniers siècles du moyen âge. La
galéace, étroite en proportion de sa longueur, qui attei-
gnit quelquefois 60 met., avait les mêmes parties que la
galère, mais était d'un tiers plus- longue, plus large et
plus haute. A la poupe et à la proue étaient disposées
deux grandes places pour les soldats et plus tard pour
l'artillerie ; une espèce de rue ou coursive, entourant le
navire à l'intérieur, servait aussi à loger des soldats, qui
pouvaient tirer par des meurtrières en restant à l'twri
des coups de l'ennemi. La galéace figura pour la l*** fois
dans la marine française sous Philippe le Bel. B.
CALÈCHE. V. Cuirasse.
GALÉE, terme de typographie. V. CoMPOsmoif .
GALÈRE, navire. ) V, notre IHctionnaire de
GALÈRES (Peine des). J Biographie et d'Histoire.
GALERIE, pièce plus longue que large, parfois d'une
très-grande longueur, et qui sert dans les palais à réunir
plusieurs appartements. Comme ces galènes offrent un
bel emplacement pour les fêtes où l'on invite un grand
nombre de personnes, on y a souvent placé des meubles
de luxe, de belles tentures, des tableaux. Par suite, on
fit des galeries spécialement consacrées aux objets d'art,
et le mot galerie a désigné des collections artistiques.
GALERIE, nom qu'on donne dans les églises aux espèces
de nefs pratiauées au-dessus des voûtes des bas côtés, et
donnant sur la nef majeure par plusieurs ouvertures. II
n'y en a peut-être pas de plus remarquables que celles
aui entourent le chœur et le sanctuaire de la cathédrale
e Bayeux. Dans certaines églises, comme à Notre-Dame
de Cliâlons-sur-Marne et à Notre-Dame de Laon, les ga-
leries sont aussi larges que les nefs collatérales au-dessus
desquelles on les a construites. Les monuments des xiu%
XIV* et XV* siècles ne présentent généralement pour gale-
ries que d'étroits passiages pratiqués dans l'épaisseur des
murs. Quelquefois les galeries sont seulement simulées
par l'ornementation, et ne font qu'indiquer un étage au-
dessus des grandes arcades et des voûtes des basses nefs.
On voit aussi des galeries extérieures qui coupent la fa-
çade des cathédrales : les plus remarquabl.es sont celles
d'Amiens, de Reiras, et de Paris, Enfin, d'autres jzaleries
extérieures, placées au sommet des murailles, et souvent
construites en encorbellement, sont destinées adonner
passage â la base des combles et des charpentes.
GALERIE, en termes de Fortification, conduit souterrain
servant â l'attague et à la défense des places. La Galerû
de communication mène les assiégés de la place aux tra-
vaux avancés. La Gaierie de mine sert aux assiégeants
pour arriver au pied des murs à l'abri de l'artillerie ;
elle a environ 1 met. de largeur sur 1",30 de hauteur. La
Galerie de contre-mine et d'écoute est destinée à contre-
battire les travaux de mine faits par les assiégeants. Les
galeries souterraines étaient employées par les Anciens
comme moyen d'attaquer les places : on creusait sous les
murs de longues galeries au'on étayait avec des pièces
de charpente. Lorsqu'elles étaient terminées, on y entas-
sait des matières combustibles; le feu, en détruisant les
supports en charpente des voûtes, faisait crouler les murs.
Les assiégés, de leur côté, minaient les travaux d'attaque
pour les renverser et les incendier. 11 se livrait sous terre
de terribles combats, parce que ces travaux étaient alors
beaucoup plus considérables gue de notre temps. La ga-
lerie d'approche s'appelait vinea (vigne, treille^, parce
qu'elle était souvent faite à lour et recouverte d'un fort
treillis en charpente qui la faisait ressembler à un ber-
ceau de verdure.
GALERIE, nom donné autrefois, dans la Marine, à une
espèce de balcon établi à l'arrière d*un navire et un per
en saillie au-dessus du gouvernail. Elle était ordinaire-
ment décorée d'une balustrade, et servait de promenade
au capitaine. Parfois il y en avait deux l'une au-dessuf
de l'autre, et on les appelait Jardins^ parce qu'on les em-
bellissait de fleurs. Elles se fermaient avec des rideaux^
— Aujourd'hui, la GcUerie est un couloir ou corridor pra-
tiqué dans l'intérieur d'un bâtiment de guerre à la flot-
taison, pour faciliter les réparations de la coque pendant
le combat.
GALERIE, espèce de balcon construit aux divers étagei
GAL
952
GAL
d*une ulle de spectacle, et destiné à recevoir, sur des
ftles de banquettes, un ou plusieurs rangs de spectateurs
en avant des loges.
GALÉRIEN, mot synonyme de forçat. V. BAGfiB.
GALERUS. V, ce mot dans notre Dictiotufoire de BiO'
graphie et d'Histoire,
GAL6ÂL. V. Celtiques (Monuments).
GALHAUBAN, la plus longue des manœuvres dor-
mantes d*un bâtiment, servant à assujettir, par le travers
et vers rarrière, les m&ts de hune, de perroquet, et de
cacatois. Les gajbaubans tiennent mieux les mAta élevés
que les baubans. Sur les vaisseaux et les frégates, on en
établit quatre de chaque bord sur le grand mAt de hune,
autant sur le petit, trois au m&t de perroquet de fougue
ou m&t de hune d'artimon, trois aux m&ts de grand et de
petit perroquet, deux ou trois au màt de perruche, un
' ou deux aux trois mâts de cacatois.
GALIBI (Langue). V. CaraIbe.
GALiaEN (Dialecte). C'est un idiome à part, presque
aussi distinct du castillan que le catalan, sans ressembler
cependant à ce dernier, et il présente, au contraire,
beaucoup d'analogies avec le portugais ; mais il a du cas-
tillan la richesse, la tendance aux contractions, aux sup-
Ëressions de certains mots, tels par exemple que Farticle.
e galicien suit à peu prés le portugais dans les formes
de la conjugaison. La situation géographique de la Galice
explique ces analogies. Vers le xu* siècle et le xui*, le
portugais et le galicien ne formaient qu'un seul idiome.
Plus tard, avec le progrès de la nationalité portugaise et
l'établissement d'une cour, la langue portu^dse se déve-
loppa, se polit, tandis que le galicien demeura dans sa ru-
desse primitive, à l'état d'idiome local. Il s'est formé anté-
rieurement au castillan : on connaît des monuments de
la prose galicienne qui datent de 1150, et des fragments
de poésies (|[ui remontent à l'an 1200. Vers la fin du xu«
siècle, le galicien était l'idiome principal ou prédominant
dans la péninsule : le roi de Castille Alphonse X s'en
servit pour écrire sa Chronùme rimée. V, les Mémoires
pour servir à Vhistoire de la poésie espagnole par le
P. Sarmiento, et la fameuse Lettre du marquis de San-
tillane au connétable de Portugal. E. B.
GALTEN RÉTHORE, c-à-d. Galien le Restauré, roman
du cycle carlovingien. Charlemaçne se vantant un Jour
de sa puissance, l'impératrice Im dit que le plus grand
des princes est Hugo, empereur de Gonstantinople. Il
veut s'en assurer, et, accompagné de ses douze pairs, va
faire ses dévotions à Jérusalem et visiter Hugo en pas-
sant. Les extravagances chevaleresques sont poussées à
xu tel excès pendant ce voyage, que l'auteur, selon quel-
ques critiques, aurait voulu faire la satire des composi-
tions de son temps. On y voit, par exemple, Charlemagne
et ses pairs, assimilés à Jésus-Christ et aux Apôtres, faire
de nombreux miracles. F. la Bibliothèque des romans,
octobre 1778.
GALIMATIAS, discours embrouillé et confus, qui
semble dire quelque chose et ne dit rien. En voici un
en manière de madrigal que Collé fit par plaisanterie, et
qu'il lut un jour devant Fontenelle, chez M"' de Tencin :
Qo*U est heureux de ae dtf fendre
Quand le cœur ne a'eet pas renda I
Mais quMl est fftchenx de se rendre,
Quand le bonheur est suspendu l
pana un discours sans snito et tendre,
Egares un cœur éperdu ;
Souvent par un mal entendu
L'amant adroit se &it entendre.
Fontenelle, croyant comprendre ce couplet, voulut le faire
recommencer. « Eh ! grosse bête, lui dit M">* de Tencin,
ne vois-tu pas que ce n'est que du galimatias! »
Huet croit que ce mot est la réunion des deux mots
latins Gain Mathias, dont se servit un avocat, au lieu de
Gailus Mathiœ, au sujet d'un coq appartenant à une des
parties qui s'appelait Mathias : à force de répéter ces
deux mots, l'avocat, s'embrouillant, en intervertit l'ordre;
et c'est depuis que ce mot galimatias, qu'on devrait
écrire Galitmathtas, si l'anecdote est vraie, a été appliqué
à tout assemblage de mots inintelligible. BoUeau a dis-
tingué le geUimatias simple, que l'auteur comprend et
que le public ne comprend pas, et le galimatias double,
que ne comprend ni le i>ublic ni l'auteur. G.
GALION, ancien navire qu'il ne faut pas confondre
avec le galio ou galionus, petite galère ou galiote du
moyen âge, et qui fut en usage aux xvi* et xvn* siècles.
II tenait de la nef ou vaisseau rond par la forme géné-
rale, et de la galère par la longueur. Le port des plus
grands galions était de 1,000 à, 1,200 tonneaux. Dans les
flottes on voyait des galions à '3 et 4 ponts, dont les su-
périeurs portaient des canons. Les galions d'un faible
tonnage marcliaient quelquefois à l'aviron; les grands
n'usaient que de la voile. La m&ture consistait en trois
mâts verticaux, le m&t de misaine, le grand m&t, et le mAt
d'artimon; parfois on en arborait un 4' en arrière de
l'artimon, le contre-artimon. Les voiles du m&t de mi-
saine et du grand m&t étaient carrées et au nombre de
trois, la basse voile, le hunier et le perroquet; celles de
l'artimon et du contre-artimon étaient à la latine, c.-&r-d.
enverguées sur des antennes. L'Espagne, voulant monopo-
liser le commerce avec le Nouveau Monde, formait la
flotte d*argent, convoi de douze forts galions portant les
noms des douze apôtres. Mais ces navires , qui portaient
tant de richesses, mal armés, peu propres au combat,
devenaient souvent la proie des pirates. B.
GALIOTE (de l'italien galiotta, petite galère), ancien
navire léger, rapide & la course, et, par conséquent, tr^-
favorable à la piraterie. Sa construction et son gréement
étaient les mêmes que ceux de la felouque. Il ne faut pas
confondre ce navire, qui fût adopté par les corsaires
barbaresques, avec la g^iote hollandaise, large et lourd
b&timent destiné à porter le plus de marchandises pos-
sible, et dont la marche est pénible et lente. On a encore
donné le nom de galiote aux coches d'eau qui servaient
& voyager sur les canaux et les rivières.
GAUOTB A BOMBES. V. BOMBARDB.
GALLE (Tours de). V. notre Dictionnaire de Biogrch
phie et d'Histoire,
GALLÉE, nom que donnaient les Grecs du Bas-Empire
à un vaisseau long à éperon (navis rostrata)^ allant à la
rame et à la voile.
GALUAMBIQUE (Vers), espèce d'hexamètre latin,
dont la première partie ressemble assez & un vers ana-
créontique ( o s.- ou — ou *> '^ -^ '^ ), et dont les trois
derniers pieds sont un anapeste, un tribraque ou un
ïambe, et un ïambe. La pièce 63 du recueil de Catulle est
écrite en galliambiques. Les Galles, prêtres de Cybèle,
faisaient usage de ce mètre pour leurs danses; de là son
nom. P.
GALLICANE (Église). F. Église gallicane, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d* Histoire,
GALLICISME, idiotisme de la langue française, c-èrd.
manière de s'exprimer particulière à cette langue. Le
gallicisme peut se trouver : V* dans le sens d'un mot
simple; ainsi, le mot sentiment, qui est commun à plu-
sieurs langues modernes, n'a qu'en français le sens d'af-
fection de r&me et de passion amoureuse, d'où est venu le
mot sentimental ; *i^ dans l'association de plusieurs mots r
sage-femme, forte tête, mauvaise grâce , etc. ; 2» dans
l'emploi d'une figure : Comment vous portez-^vous? —
Rompre en visière à tout le genre humain; être à bout;
vous me la baillez bonne; une chose en l'air, etc.; 4<* dans
la construction de la phrase : Que faire ?Jly a deux ans ;
il n'y a pas jusqu'aux enfants qui ne s*en mêlent; U
n'est rien moins que généreux; vous avez beau dire; st
j'étais que de vous, etc.*, — Plus le sujet traité par l'écri-
vain se rapproche du çenre familier ou populaire, plus
le gallicisme abonde. Ainsi on en trouve bien plus dans
les Lettres de M"' de Sévigné, dans les Fables de La Fon-
taine et dans les comédies de Molière, gue dans Racine,
Boileau, Bossuet ou Buffon. — Gallicisme signifie en-
core « faute commise par un Français en parlant ou en
écrivant dans une langue étrangère, » lorsqu'il donne aux
mots de cette langue un tour qui n'est correct ou usité
3ue dans la sienne propre. Ainsi, ce serait un gallicisme
'écrire en latin Venu) ab hoc tibi dicendo, et en anglais
Icome from saying it you, pour dire Je viens de vous le
dire, ce qui s'exprime régulièrement dans ces langues
par Hoc tibi paullo ante dixi, et / hâve just saui it
you. P.
GALLO-BELGE ou FLAMANDE (École), école musicale
célèbre aux xv' et xvi* siècles. Elle se développa sous la-
protection des ducs de Bourgogne, et fournit des compo-
siteurs et des chanteurs à toute l'Europe. Jean Tinctor
ou le Teinturier, de Nivelle, fut le plus savant théoricien
du XV* siècle, et en même temps un compositeur habile :
les ouvrages qu'il a écrits sur toutes les parties de la
musique prouvent que Gaffbrio et les autres théoriciens
de l'Italie y puisèrent leur science. Devenu maître de
chapelle de Ferdinand d'Aragon, roi de Naples, il fonda
la plus ancienne école de musique de l'Italie, et l'on
conserve ses messes et ses motets en manuscrit dans la
bibliothèque de la chapelle Sixtine. A la même épocpie,
les musiciens flamands les plus remarquables étaient
GAL
953
GAN
Cilles ou Égide Binchoîs, Caron, Brassard, Régjs, Guil-
jaame Dafay, Antoine Busnois, maître de chapelle de
Charieale Téméraire, Jean Ockegliem et Josquin Després.
Au siècle suivant appartiennent Adrien Wlllaert, de Bru-
ges, qui devint maître de la chapelle de S*-llarc à Venise,
et V établit une école où se forma Zarlino. le plus savant
théoricien de Tltalie; Cyprien Rore, qui fut maître de
chapelle du duc de Ferrare; Philippe Yerdelot, célébré
par Rabelais, et mentionné par Zarhno comme un excel-
lent maître ; Nicolas Gombert, Clément surnommé non
^op^9 Pierre de la Rue, Jacquet ou Jacaues de Berchem,
Philippe de Mons, Jacques de Kerl, Honrecht, Corneille
Canis, Josquin Baston, Jacques de Tumhout, Thomas
Crécpiillon, Dominique Phinot, Lupus Helling, Arnold
de Prug, Jossen Junkers, Jean Castileti , Pierre Harse-
nus, Matté Lemeistre, Arcadelt, Jacob Vaet, Jean Cres-
pel , Sébastien Hollander, Eustache Barbion , etc. Il est
généralement reconnu que les concerts d$ voix ont pris
naissance en Flandre vers le milieu du xvi* siècle, ouand
€barles-Quint établit sa cour à Bruxelles. Le plus célèbre
compositeur de la seconde moitié de ce siècle, celui qu*on
peut com^er à Palestrina et qui mérita d*ètre appelé
comme lui te Prince des musiciens, est Roland de Lassus
(Oriando Lasso), né à Mons. Depuis le xvi* siècle, Técole
flamande cessa de produire de gprands musiciens : ce fut
seulement au xvw* que les provinces belges virent naître
Gossec et Grétry. F. Bblgiqite (Beaux-Arts en). B.
GALLOIS (Idiome), un des idiomes celtiques, de la
bfanche kymrique, appelé cimraëg ou kymraig par les
habitants du pays de Galles, et welsh par les Anglais. Il
est encore parlé aujourd'hui par les paysans gallois, et
cultivé avec un zèle tout national par les antiquaires du
pays. Ses monuments écrits sont fort anciens et assez
nombreux. VArchéologie du pays de Galles, publiée en
anglais en 1801, en renferme une collection tres-intéres-
santé : il y a là des poésies qu'on peut rapporter, avec
assez de vraisemblance, aux vi", vu* et vin* siècles. Le
gallois forme sa déclinaison à la manière du français, en
modifiant Tarticle ; il n*a que deux genres. Les substan-
tifs ont un pluriel; mais les a^iectin ne varient jamais
leur terminaison, ni par rapport au genre, ni par rapport
au nombre. Les diminutifs sont très-nombreux. La con-
jugaison est riche en temps, qui se forment par flexion
comme dans le latin. On écrit le i;allois avec l'alphabet
latin. V. W. Salisbury, Dictionnaire anglais et welche,
Ldondres, 1547, in-8*; J. Davles, Dictionnaire gallois,
1552, in-fol.; H. Perry, Grammaire welche, 1595, in-4*;
W. Richards, Dictionnaire welchê-anglais, d^ns son An-
tiqwB linguœ britannicœ thésaurus, Bristol, 1753, in-8®;
IV. Evans, Dictionnaire anglais ^tvelche , Carmarthen,
4771, in-8*; W. Owen, Dictionnaire gallois, Londres,
4793, et Grammaire galloise, 1804.
GALLOT, nom donné au patois de la haute Bretagne,
dans lequel se sont perpétuées des expressions qu'on ne
lit plus que dans les auteurs du xv* et du xvi® siècle.
GALOCHES, souliers à semelle de bois, ou à semelle
en cuir très-épaisse et garnie de gros clous.
GALON, bande étroite d'un tissu fid>riqué avec des ma-
tières trèsr-di verses, fil, laine, soie, or, argent, etc. Le
galon est une des marques les plus usitées pour distin-
Sner diverses conditions sociales, depuis la livrée du va-
let Jusqu'à la toque du magistrat ou le riche habit du
fonctionnaire. L'Église fait aussi un large emploi du galon
dans ses ornements. Dans l'armée, les galons servent à
distinguer les grades des sous-officiers : les caporaux ont
deux galons de laine sur l'avantr-bras; les sergents, un
^alon d*or ou d'axvent, selon le corps; les sergents-ma-
jors, deux galons d'or ou d'argent; les fourriers, un galon
d'or ou d'argent sur le haut du bras. Les tambours,
trompettes et musiciens ont, au collet et aux manches,
des nions dont la forme et le nombre ont beaucoup va-
rié. Pour distinguer facilement les galons en or et en ar-
gent, la loi a voulu, sous des peines sévères, que le fil
d'or et d'argent fin fût placé sur de la soie, et que le
chanvre ou le lin servit aux galons en faux. On appelle
ifùhnspleùu ceux qui n'ont point d'envers et présentent
des deux côtés ; galons figurés, ceux qui ont
un
un envers, mais formé des mêmes matières que l'en-
droit; gahns systèmes, ceux dont le dessin et la matière
ne parassent que d'un côté. Le prix élevé des galons fins
a donné une grande extension à la fabrication des galons
eoftoz.
SALOff, en termes d'Architecture, bandelette garnie de
perles.
GALOP, danse à deux temps , d'un mouvement vif et
oéioe emporté, et originaire de U Hongrie ou de la Barière.
Elle parut à Berlin en 1822, et à Paris en 1827 dans le
ballet de la Neige. Le galop de l'opéra de Gustave III, par
Auber, est célèbre. Le galop est devenu le complément
Eresqoe obligé de la contredanse, et le finale de tous les
als.
GALOUBET ou FLUTET (du provençal gai, Joyeux, et
oubet pour aubet, diminutif de auboU, hautbois), le plus
aigu des instruments à vent, espèce de flageolet à oec.
Plus élevé de deux octaves oue la flûte traversière, et
d'une octave que la petite flûte, il est en ton de ré. On
parrient difficilement a en bien Jouer; car la main gauche
seule sert à le tenir et à le mettre en Jeu, afin d'en tirer
avec trois trous deux octaves et un ton. La gamme se fait
de trois vents différents. Le galoubet, instrument cham-
pêtre, ne va pas sans le tanux)ttrin IV.cemot)^ sur le-
quel l'exécutant marque le rhythme et la mesure avec la
main droite. 11 est depuis longtemps abandonné dans le
nord de la France, mais il est encore très-commun en
Provence s là on trouve des gens qui, sans être musi-
ciens, exécutent des passages d'une justesse, d'une net-
teté et d'une rivacité incroyables; s'ils sont en nombre,
ils Jouent à deux parties, et quelque clarinettiste en
improvise une 3'. A la fin du siècle dernier, J.-N. Gar-
bonel, musicien de l'Opéra de Paris, était parvenu à
jouer du galoubet dans tous les tons sans cnanger de
corps; il a laissé une Méthode pour cet instrument.
Plus récenunent, Ghàteauminois eut des succès sur le
galoubet. B.
GALVARDINE, anden manteau dont on se couvrait
pour se préserver de la pluie.
GAMBE, sorte de Jeu d'orgue de forme cylindrique, ftdt
en étain, et ayant ordinairement huit pieds. La eambe,
que l'on nomme aussi viola di gamba, rentre Sans la
série des Jeux dont le «ilapason est étroit. Ce Jeu parle
lentement, et imite le drottement de l'archet sur une
corde de violoncelle. F. C.
GAMBÎSON ou GAMBESSON (du rieux verbe gam-
boiser, rembourrer), espèce de plastron en peau rem-
bourrée de laine, d'étoupe ou de crin , que les cavaliers
du moyen âge mettaient sous la chemise de mailles, et
qui descendait Jusqu'aux cuisses.
GAMELLE (du latin camélia, panier d'osier très^-serré),
grand vase de bois ou de fer-blanc dans lequel étaient
contenues la soupe et la viande de 8 soldats dans l'ai^
mée de terre, de 7 matelots dans la marine, et où ils
mangeaient autrefois ensemble. Une décision du 24 dé-
cembre 1852 a substitué dans l'armée de terre les ga*
melles individuelles aux gamelles conmiunes.
GAMMA, nom donné par quelques auteurs à une es-
pèce de crosse dont la tête a la forme de la lettre grecque
de ce nom.
GAMME, nom de l'échelle musicale moderne, com-
posée de sept degrés différents et de la répétition du pre-
mier degré qui s'appelle alors octave, La gamme, inventée
par Gui d'Arezzo, ne lUt d'abord composée que de 6 notes,
ut, ré, mi, fa, sol, la; mais, par la suite, on y ajouta uno
7* note, le su Une gamme se divise en tons et aemi-4ons,
dont le lieu dépend du mode dans lequel elle est éta-
blie; mais, dans chaque mode, elle ne peut contenir en
totalité, du 1*' au 8" degré, qu'une valeur de 6 tons
pleins. On appelle gamme dicttonique celle qui procède
par tons et demi-tons, tels qu'ils se trouvent dans l'ordre
naturel du ton et du mode où l'on est , et gamme chro-
matique celle qui n'est composée que de demi-tons. Il y
a deux sortes de gammes diatoniques : l'une, majeure,
composée de 5 tons et 2 demi -tons, ces derniers placés-
du 3* au 4* degré et du 7* au 8*; l'autre, mineure, où le»
demi-tons sont du 2* au 3* degré et du 7* au 8*. Le nom
de gamme rient de la lettre grecque gamma, par laquelle
Gui d'Arezzo désigna la note (sol) qu'il aurait ajoutée,
dit^n, au-dessous de la dernière note du système des
Grecs. B.
GANACHE. F. Caquetoibc.
GAMD (Église S*-Bavon, à). Cette église, une des plus
grandes et des plus belles de la Belgique, était primiti-
vement consacrée à S' Jean. Elle prit le nom de S* Bavon
en 1540, lorsque Charles-Quint, voulant élever une cita-
delle sur l'emplacement de l'abbaye de 6*-Bavon, lai
donna pour chapitre les religieux de cette abbaye suppri-
mée, et on l'éngea en cathédrale en 1559. C'est un mo-
nument fort peu orné à l'extérieur: les murs, malgré
leur grande élévation, ne sont renforcés que par de
minces contre-forts; les portails sont d'une extrême sim-
plicité. La tour, b&tie de 1462 à 1534, est également plus
remarquable par la hardiesse de ses proportions que par
la richesse de ses ornements : quatre tourelles d'angles,
GAR
954
GAR
dégagées de la tour elle-mômevqai est octogone, la font
paraître carrée. Cette tour, haute de 90'" ,06, supportait
autrefois une flèche, qui rélevait jusqu'à 122 met., et que
le feu du ciel a dévorée en 1603. La crypte qui s*étend sous
le chœur fut bâtie au x* siècle et reconstruite en 1228 ; le
rond-point du chœur est dans le style ogival du xiii* siècle ;
le chœur, plus élevé que les nefs, paraît n*avoir été ter*
miné qu'à la fin du même siècle; les nefs et les tran-
septs offrent le style ogival du xv* siècle. Le plan général
de réglise de S*-Bavon est celui de la croix latine avec
transepts et collatéraux : il y a, tout autour de Téglise,
des chapelles ornées de précieux tableaux. La chaire,
sculptée en chêne et en marbre blanc, est Tœuvre de
Laurent Delvaux. Le chœur est revêtu d'une décoration
en marbres blanc et noir, dont le style classique n'est
pas en rapport avec celui de l'édifice; on y voit quatre
mausolées, dont le plus remarquable est celui de l'évêque
Triest par Jérôme Duouesnoy, de belles stalles sculp-
tées, et on maltre^utel entouré de trois portes de bronze
an lieu de retable. V. Van Lockeren, Histoire de Vabbaye
de S^^Bavon, 1855, in-8<*.
GANNES (Tours de), i V. notre Dictionnaire de Bio-
GANTELETS, GANTS. ) graphie et d'Histoire.
GARAHOND, ancien caractère d'imprimerie, de la
^sseur du petit-romain, et qui tirait son nom de son
mventeur.
GARANTIE (de l'allemand U)ahren, garder), sûreté
contre une éventualité quelconque. On nomme garant
celui qui la donne, et garanti celui qui la reçoit. Les co-
héritiers sont respectivement garants les uns envers les
autres des troubles et évictions soufferts par les biens
héréditaires {Code Napol,^ art. 884). Le vendeur ga-
rantit à l'acquéreur la possession paisible et durable de
l'objet vendu. L'existence d'une créance, au moment de
sa vente, doit être garantie (art. 1093). Le bailleur doit
garantir son preneur contre les évictions de la chose
louée (art. 1721 et 1727). I^ prêteur garantit celui qu'il
oblige contre les pertes que les défauts à lui connus de sa
chose pourraient occasionner. Les voituriers par terre et
par eau (art. 1782 et suiv.), les aubergistes (art. 19.52 et
suiv.), garantissent les objets qu'ils prennent en dépôt.
L'entrepreneur est, pendant dix ans, responsable des
vices de construction (art. 1 792 ). — La garantie est légale ^
quand la loi la suppose; conventionnelle, quand elle ré-
sulte de l'accofd des parties. Elle n'est qu'une obligation
accessoire au contrat, car les parties peuvent convenir
qu'elles ne garantissent pas l'objet du contrat. On nomme
garantie de droit celle qui porte sur le droit de la chose
ou sur ses qualités capitales, essentielles pour l'usage
qu'on en veut faire; garantie défait, celle qui regarde les
vices et les qualités non essentielles de la chose : la pre-
mière est de rigueur, la seconde doit être stipulée pour
exister. En vertu de la garantie de droit, l'acquéreur a
recours contre le vendeur, soit qu'une éviction on un
trouble quelconque le prive d'une possession paisible,
soit pour défauts cachés de la chose vecdue, lesquels
auraient empêché le contrat ou en auraient modifié les
conditions. Dans l'ancien Droit français, il y avait une
garantie des faits du prince, c-à-d. que si le prince
dépouillait un particulier d'un bien acheté, celui-ci avait
recours contre son vendeur : cette garantie, étant de fait
et non de droit, devait être stipulée. On distingue encore
la garantie formelle, qui oblige le garant à prendre le
fait et cause du garanti à qui l'on intente une action
réelle ou hypothécaire, si celui-ci le requiert avant le
Jugement {Code de Procéd. civ,, art. 182); et la garantie
simple, en vertu de laquelle le garant peut intervenir si
le ^iranti est inquiété par une action personnelle, mais
sans se substituer à lui (/ôûi., art. 183). — Le délai pour
appeler en garantie est de huitaine (/ôid., art. 175),
délai augmenté selon les besoins des distances ou du
nombre des garants.
Dans les sociétés politiques, il existe des garanties in-
dividuelles, nées des droits de chacun ( telles sont la liberté
des cultes, celle de la presse, l'institution du Jury, l'in-
amovibilité des Juges), et des garanties constitution-
nelles, attachées à certaines positions, à certaines fonc*
tions, telles .que l'inviolabilité du roi , des pairs et des
députés établie par les Chartes de 1814 et de 1830. De
même, les fonctionnaires publics ne peuvent être traduits
en Justice, pour abus de pouvoir ou pour délit commis
dans l'exercice de leurs fonctions, qu'en vertu d'une au-
torisation (Loi du 22 frimaire an viii). V. Daunou, Essai
sur les garanties individuelles, in-8<^; Cherbuliez, Théorie
des garanties constitutionnelles, 1838, 2 vol. in-8^
«ARAMTiK DBS MATIÈRES d'or Kt d'arcent, administra-
tion dépendant du ministère des finances, et dont la
fonction est d'examiner et de marc[uer les matières d'or
et d'argent converties en orfèvrerie ou bijouterie, afin
d'indiquer leur degré de pureté pour la garantie des ache-
teurs. Ce contrôle public et obligatoire remonte à l'origine
de la corporation des orfèvres. Les règlements d'Etienne
Boileau, du temps de Louis IX^ rappelaient que, dans nul
pays, l'or n'était d'aussi bon aloi qu'en France, et recom-
mandaient aux fabricants de maintenir cette supériorité.
Les orfèvres de Paris portaient leurs ouvrages à la Mai^
son commune , où ils étaient essayés et poinçonnés sous
la surveillance des gardes du métier. Au xvi" et au
xvu* siècle, le fisc intervint, et perçut un droit sur les ma-
tières d'or et d'argent : ce droit, fixé d'abord (déclaration
du 31 mars 1672} à 20 sous par marc d'argent et à 30 sous
par once d'or, s'était élevé en 1789, par des augmentations
successives, à 6 livres 6 sous par once d'or et à 10 sous
6 deniers par once d'argent (l'or paye aujourd'hui à peu
près le même droit; l'argent paye un tiers en moins).
Tout droit sur les matières d'or et d'argent fut aboli en
1791. La loi du 19 brumaire an vi (9 nov. 1797} rétablit
le centrale et le droit de garantie. Des bureaux oe garan-
tie sont établis sous l'autorité du ministre des finances
dans presque tous les départements, et composés d'un es-
sayeur, d'un receveur et d'un contrôleur. L'essayeur es^
nommé par le préfet; le contrôleur et le receveur sont
des agents de l'administration des contributions indi-
rectes. Les bijoutiers et les orfèvres v portent leurs ouvra-
ges, qui sont essayés, soit à la coupelle, soit aux touchaux,
coupés s'ils sont au-dessous de tout titre légal, et, s'ils
sont reconnus bons, acceptés et revêtus d'un poinçon dif-
férent selon le titre. L'orfèvrerie française paye pour le
seul droit de marque et par hectogramme : sur les ou-
vrages d'or, 22 fr., et sur ceux d'argent, 1 fr. 10 c; pour
(^ droit d'essai à la coupelle, 3 fr. par 120 grammes d'or,
^ centimes par 2 kilogr. d'argent; pour le droit d'essai
au touchau, 9 centimes par décagramme d'or, 9 centimes
par hectogramme d'argent. L'orfèvrerie exportée a droit
à la restitution des deux tiers du droit de marque, et
dans certains cas à la totalité. Les orfèvres srvnt tenus de
porter tous leurs ouvrages sans exception au bureau de
garantie, et d'inscrire sur un livre coté et parafé toutes
les matières d'or et d'argent qui entrent chez eux. Les
employés du bureau, accompagnés d'un officier de police,
font des visites chez les orfèvres, vérifient les livres, pé-
nètrent dans l'atelier, se font présenter les marchandises,
saisissent toutes celles qui sont terminées sans avoir été
revêtues de la marque, et dressent procès-verbal. L'or-
fèvre est condamné à une amende, et, après trois contra-
ventions, défense lui est faite d'exercer le métier. Malgré
cette surveillance et ces rigueurs de la loi , plus du tiers
des ouvrages d'or et d'argent échappent à la marque et
au droit. — Les lingots ne sont pas soumis aux mêmes
règles que les ouvrages fabriqués et destinés à être ven-
dus aux particuliers; ils sont essayés par les essayeurs
particuliers du commerce, dont la rémunération n'est
pas fixée par un tarif. Le maximum du prix qu'ils pren-
nent est do 1 fr. pour un essai de matière d'or, et de
75 centimes pour un essai de matière d'argent. Les lin-
gots portent, outre la marque de l'essayeur, le chiffre
des millièmes de fin, et il se vend sur cette garantie, dont
répond l'essayeur. V. Raibaud, Traité de la garantie des
matières et ouvrages d*or et d'argent, Paris, 1825, in-8°;
Chaudet, VArt de Vessayeur, Paris, 1 835 ; Lachèze, iVou-
veau Manuel simplifié de la garantie des matières et
ouvrages d^or et d'argent, Paris, 1838, in-18. L.
GARCETTES, en termes de Marine, cordes qui servent
à prendre des ris, ou à attacher le tournevire au câble
quand on lève l'ancre. Les garcettes des ris sont plus
grosses au milieu qu'aux deux bouts; celles du tourne-
vire sont d^égale grosseur partout. La garcctte était au-
trefois l'instrument de discipline avec lequel on frappait
sur le dos nu des matelots coupables de quelques méfaits.
GARD (Pont du). V. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire,
GARDE (de l'allemand ti;a/ir6n , garder), nom donné,
1*^ à une réunion de soldats ou autres agents de la force
publique, désignés pour veiller, pendant un temps déter-
miné, au maintien du bon ordre, à la conservation d'un
monument, à la sûreté d'un poste, etc.; 2<^ au service que
ce détachement armé accomplit. Monter la garde, c'est
faire partie de la garde qui prend le service; relever la
garde, c'est remplacer par une nouvelle earde celle dont
le service est expiré; aescendre la garde, c'est rentrer
au quartier ou au logement quand la garde a été relevée.
Battre la garde, c'est exécuter la batterie de tambour qui
GAR
!)55
GAR
appelle les hommes à la garde. On nomme grand*garde
uii corps assez considérable de cavalerie placé à la tête
d'an camp, pour empocher toute tentative de Tennemi ;
Va grand*garde est protégée elle-même par une garde
avancée, — En beaucoup de cas, garde a le sens do gar-
dien, de surveillant, de conservateur.
GâXDE , partie saillante entre la poignée d*une épée ou
d*nn sabre, et qui sert h. protéger la main.
GAKDc-cATiAL, agent chargé de veiller à la conservation
des canaux, et même des propriétés qui en dépendent, de
constater les infractions faites aux règlements, ainsi que
les délits de pèche, et d*en dresser procès- verbal. Ces
agents sont placés sous les ordres des ingénieurs et des
conducteurs des ponts et chaussées.
GARDE cHAMPâriiE, sgcut préposé à la garde des champs.
On rappelait autrefois messier (du latin messis, moisson ;
ou du celtique messoer^ gardeur de bêtes), bangard en
Lorraine, gastier en Auvergne, bannerot dans le pays
Messin, et, dans diverses provinces, bannard, sergent de
verdure, vigner ou garde des vignes, etc. D'après Tancien
Droit français, les messiers devaient être idoines (ca-
pables de remplir leurs fonctions), âgés de i8 à 22 ans
selon les localités, et prêter serment devant le Juge, ou ,
à son défaut, devant l'officier de police (Édit de nov.
1706). Une déclaration du 11 juin 1709 ordonna qu'il
serait nommé dans chaque paroisse un nombre de mes-
siers proportionné à retendue du territoire. Les messiers,
oonunés pour un an , et même pour la seule saison des
firuits, n'étaient pas tenus d'écrire leurs procès-verbaux,
mais faisaient seulement des rapports verbaux au gref-
fier, qui les inscrivait, et ces rapports, affirmés véri-
tables, faisaient foi en justice. La loi du 28 sept. 1791
exige que les gardes champêtres soient âgés de 25 ans au
moins et reconnus pour gens de bonnes mœurs, et qu'ils
prêtent le serment de « veiller à la conservation do toutes
les propriétés qui sont sous la foi publique, et ôe toutes
celles dont la garde leur aura été confiée par l'acte de
leur Domination. » Celle du 20 messidor an m (8 juillet
1795) ordonne qu'il y en ait dans toutes les communes.
Un arrêté du 25 fructidor an ix décide qu'ils seront
choisis parmi les vétérans dont les préfets auront dû
dresser une liste, et que le choix, confié au maire, con-
trôlé par le conseil municipal , sera admis par le sous-
gréfet , lequel délivre la commission. Depuis le décret du
-5 mars 1852, les gardes champêtres sont nommés par
les préfets sur la présentation des maires. Ils sont agents
de la force publique, et doivent prêter main-forte quand
ils en sont requis : tout excès commis contre eux dans
Texercice de leurs fonctions est de la compétence de la
Coar d'assises {Code pénal, art. 228, 2.'^). Ils sont, de
plas, officiers de police judiciaire, auxiliaires du procu-
reur impérial, sous la surveillance duquel ils sont placés
(Cddff ainsir. crtm., art. 17), et jouissent, à ce titre, des
privilèges et garanties des membres de l'ordre judiciaire.
ijBUTB fonctions ne sont pas annuelles comme celles des
messiers, mais d*une durée illimitée; leur salaire est
préleré sur les revenus de la commune, et complété au
oesoln par des centimes additionnels à la contribution
fonciàpe assise sur les biens ruraux.
Incompétents hors du territoire pour lequel ils sont
assermenté, les gardes champêtres parcourent ce terri-
toire, porteurs d'armes autorisées par le préfet , et munis
d'une plaque de métal ou d'étoffe, placée en endroit
apparent et sur laquelle sont écrits leur nom, celui de la
commune, et le titre de la loi. Ils constatent les délits et
cootraventions qui portent atteinte aux propriétés ru-
rales, et leur procès-verbal {V. ce mot) doit être remis
dans le délai de trois jours, y compris celui du délit , au
commissaire de police, ou, à son défaut, au maire ou ad-
joint, devant lequel il faut encore qu'il soit affirmé véri-
t^le. Puis la Juridiction compétente est saisie dans le
délai de 8 Jours; si la poursuite n'est pas ensuite entre-
prise dans le délai d'un mois par la partie lésée ou le
ministère public, il n'y a plus heu à poursuivre (Loi du
S sept 1791 ). Les gardes champêtres sont responsables
des dâits qu'ils auraient négli^ de faire connaître. Si le
délinquant pris en flagrant délit peut encourir, vu la grar-
vitéda cas, la peine de l'emprisonnement, ou si c'est un
indÎTida dénoncé par la clameur publique, ils peuvent
rarrdter pour le conduire devant le juge de paix ou le
nuàre et à cet effet se faire prêter main-forte. Si les
dioces enlevées ont été transportées dans des lieux clos,
ib ont le droit de les saisir pour les mettre en séquestre,
Donrni ou'îls soient accompagnés du commissaire de po-
fiM. dn iuiEe de paix, du maire ou d'un adjoint, qui
• oe àïon ie procôa-verbal. — D'après un décret du
Il juin 180G, les gardes champêtres font connaître leuf
installation aux officiers ou sous-offîcicrs de gendarmerie
de leur canton : ceux-ci surveillent leur conduite et la
font connaître au sous-préfet , peuvent les mettre en ré-
quisition pour les cas qui intéressent la tranquillité pu-
blique, et leur transmettent le signalement des divers
individus qu'ils ont ordre d'arrêter. Réciproquement,
les gardes champêtres informent les maires de ce qu'ils
ont découvert de contraire au maintien de Tordre, et les
maires en donnent avis aux officiers de la gendarmerie.
V. Du four. Manuel pratique des gardes champêtres, des
gardes forestiers et des gardes-pêche, 2« édit., Paris,
1824; Rondonneau, Nouveau Manuel théorique et pra-
tique des gardes champêtres, forestiers et gardes-pêche,
1829, in-i8; Boyard, Nouveau Manuel complet des gardes
champêtres, communaux ou partici^liers, 1844, in-i2;
Sorbet, Petit guide des gardes champêtres, 1851 , în-18;
Larade, Guide et formulaire des gardes champêtres ^ 1858,
in-18; Crinon et Vasserot, Le Forestier praticien , ou
Guide des gardes champêtres, 1852, in-18; Marc Def-
faux, Guide-Manuel général du garde champêtre et du
messier, 1852, in-12; Gère, Nouveau Manuei du garde
champêtre, forestier et particulier, 1853, in-18; Dubarry,
Nouveau Manuel des gardes champêtres, des gardes fo-
restiers, etc., 1850, in-12.
GARDE-CHASSE. Dans l'ancienne monarchie française,
rimportance (pie les seigneurs attachaient à leurs droits
de chasse avait fait créer une vaste organisation pour
veiller à la conservation de ces droits. Au sommet était
un grand veneur, dont la charge, longtemps confon-
due avec celle du grand maître des eaux et forêts, en
fut séparée sous Charles YI, puis fut démembrée elle-
même par l'institution du grand fauconnier. Le grand
veneur, officier de la maison du roi, avait la haute main
sur tous les officiers de la vénerie, auxquels il conférait
les provisions et les emplois. Au-dessous du grand ve-
neur, il y avait : 1° les capitaineries, composées d'un tri-
bunal instruisant et jugeant les délits de chasse, d'un
capitaine, de lieutenants et de gardes, chargés de la sur-
veillance et de la conservation des droits de chasse;
2' les capitaineries des maisons royales, qui connais-
saient exclusivement des délits commis dans un rayon de
trois lieues autour des maisons du roi, même par les
particuliers sur leurs terres, où ils ne pouvaient chasser
sans permission. Les maîtrises des eaux et forêts veil-
laient aussi à la conservation du gibier. Les gardes-chasse
n'avaient d'autre arme qu'un pistolet, et il leur était in-
terdit de chasser. La Révolution détruisit toute cette
organisation, et une loi du 3 nov. 1789 permit aux pro-
priétaires de détruire comme ils l'entendraient le gibier
sur leurs terres. Mais une loi du 30 août 1790 rétablit la
police de la chasse, et la confia aux gardes champêtres,
aux gardes forestiers et à la gendarmerie. La loi du 3 mai
1843 régit aujourd'hui la matière : les officiers qui peu-
vent dresser des procès-verbaux pour délits de chasse
sont les maires et adjoints , les officiers , maréchaux des
logis et brigadiers de gendarmerie, les simples gen-
darmes, les gardes forestiers, les gardes-pêche, les gardes
champêtres et les gardes assermentés des particuliers.
Ces divers agents ne peuvent avoir un permis de chasse,
et, en cas de contravention, le maximum de la peine leur
est appliqué. Les délinquants ne peuvent être saisis ni
désarmés; mais, s'ils sont déguisés ou masqués, s'ils
refusent de faire connaître leur nom, ou s'ils n'ont pas
de domicile connu, ils sont immédiatement conduits de-
vant le maire ou le juge de paix, pour que leur indivi-
dualité soit constatée. Les auteurs des procès -verbaux
contre les délits de chasse ont droit à une gratification.
GARDE DU COVMERCB. V. COMMERCE.
GARDE DBS SCEAUX. V, notro Dictionnaire de Biographie
et d* Histoire.
GARDE-CÔTE. K. 06 mot dans notre Dictionnaire de Bio^
graphie et d'Histoire.
GARDE FORESTIER , agent préposé à la garde des bois et
forêts. L'organisation des agents de la police forestière
remonte très-haut dans l'histoire de la monarchie fran-
çaise. Une ordonnance de novembre 1219 nous apprend
qu'il existait, sous la haute main des premières autorités,
un conseil des gardes, qui connaissait des délits commis
dans les forêts ; puis venait un maître garde, exerçant
une espèce de garde générale, et ayant sous ses ordres
deux classes de gardes, les sergents traversiers, qui fai-
saient des visites extraordinaires de forêt en forêt, et les
simples sergents des forêts, subordonnés aux précédents.
L'ordonnance de 1669 supprima tous ces fonctionnaires'
et créa une hiérarchie nouvelle, ainsi composée : les set »
GAR
956
GAR
$ent8 à garde ou gardes à pied, sardes d'an canton cir-
conscrit ; les gardes généraux a cheval , qui devaient
iorreiller les précédents ; les mattres particuliers, dont
les soins s'étendaient sur une maîtrise ou groupe de can-
. tons ; les grands mattres, chargés d*un vaste départe-
ment forestier. Les gardes forestiers devaient être catho-
liques, connus comme gens de bonne vie et mœurs,
savoir lire et écrire, répondre à un interrogatoire sur tout
ce qui était relatif à leur état, déposer un cautionnement
de 300 livres, payer 12 livres pour leur réception, et prêter
serment devant un maître particulier. Il leur était dé-
fendu de boire avec les délinquants, et de tenir cabaret.
Hs consignaient sur un registre, parafé par le maître
particulier et par le procureur du roi, leurs visites, leurs
procès-verbaux, et tout ce qu'ils avaient pu découvrir.
Les gardes à pied portaient des pistolets, mais ne pou-
vaient s'en servir pour la chasse; les gardes généraux
avaient le privilège de porter un fusil, et devaient, en
faisant leurs tournées, être porteurs d'une bandoulière,
insigne de leur dignité. Ils ne pouvaient pousser leurs
perquisitions dans rintérieur des enclos que s*ils étaient
accompagnés d*un maître, du Juge de Tendroit, du maire
ou d*un échevin. Leurs procâ-verbaux, légalement faits
et affirmés, faisaient foi en justice, jusqu'à inscription
de faux. En 1689, les places de gardes furent érigées en
titres d'offices ; mais les prévarications de ceux qui occu-
pèrent les charges mises en vente amenèrent la suppres-
' ftion de ces charges par arrêt du Conseil en 1719. — De-
puis le Code forestier de 1827, la France est divisée en
Conservations forestières : sous la dépendance Immé-
diate du ministre des finances est un directeur, assisté
de 3 sous-directeurs ; il y a, dans chaque conservation,
un conservateur^ des inspecteurs et sou^- inspecteurs
correspondant à des subdivisions de la conservation, des
gardes généraux, des arpenteurs, des gardes à cheval,
et des gardes d pied. Le directeur nomme les agents
inférieurs Jusqu'au grade de garde général exclusivement;
ils prêtent serment devant le tribunal de l** instance do
leur résidence. F. le Supplément,
Les gardes forestiers ne peuvent exercer d'autres fonc-
tions, soit administratives, soit judiciaires, ni faire com-
merce de bois ou exercer un métier où le bois soit em-
ployé. Leur uniforme se compose d'un habit, d'un gilet
et d'un pantalon de drap vert, avec bandoulière chamois
à bandes de drap vert et à plaque de métal blanc por-
tant ces mots : « Forêts de l'État. » Le collet de l'habit
des gardes à cheval est orné d'un rameau de chêne brodé
en argent. Tous les gardes peuvent porter un fusil
simple. Ils sont responsables des dégâts qu'ils auraient
négligé de constater. Ils arrêtent le coupable pris en fla-
grant délit, et peuvent reauérir main-forte ; pour péné-
trer dans un lieu clos, ils doivent être accompagnés d'un
représentant de l'autorité municipale. Les procès-ver-
baux des gardes à pied, écrits de leur propre main, doi-
vent être affirmés devant le Juge de paix, formalité à
laquelle ne sont pas soumis ceux des gardes à cheval et
des gardes généraux : ces procès -verbaux, signés par
deux gardes, font foi Jusqu'à inscription de faux; signés
par un seul , ils n'ont la même force que pour les con-
traventions n'entraînant pas une condamnation à plus
de 100 fr. d'amende et de dommages-intérêts réunis. Les
agents forestiers ont qualité pour faire les citations et
significations dans les poursuites exercées au nom de
l'administration forestière ; ils taxent ces actes comme
les huissiers des juges de paix. Ils exposent l'affaire et
«ont entendus dans leurs conclusions devant les tribu-
naux correctionnels, seuls compétents pour ces matières.
Comme agents d'une administration putiiq^iu, les gardes
forestiers ne peuvent être poursuivis qu'après autorisar-
tion; en quahté d'officiers de police Judiciaire, ils ont
le privilège de n'être luges que par une Cour d'appel.
GARDB iHPteiALB. Y. ce mot daus notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
GARDE-iNPANT, ospèco de vertugadîus ou de paniers dont
la mode vint d'Espagne en France au commencement du
xvn* siècle.
GAEDB-MEOBLES , édifice OÙ l'ou garde les meubles de
l'Etat ou du prince. Avant la Révolution, le garde-meu-
bles de la couronne de France était le côté oriental du
monument bâti par Gabriel sur la place Louis XV ^auj.
place de la Concorde), et occupé maintenant par le mi-
nistère de la marine. Toutes les résidences royales
avaient leur garde-meubles ; un officier qui portait le
même nom en avait la surveillance. Aujourd'hui, le
Çtrde- meubles de la couronne, placé dans les attribu-
tions du ministre de la maison ae l'empereur, se trouve
dans l'Ile des Cygnes, près du pont d'Iéna, soas la sui^
veillancc d'un directeur et d'un inspecteur.
GARDE -vmES, autrefois conducteur des mines, nom
donné à des agents auxiliaires des ingénieurs des mines
pour la surveillance et la police des exploitations, les
levées et les copies de plans. Les gardes- mines sont
nommés par le ministre de l'agriculture, du commerce et
des travaux publics; ils doivent avoir subi un examen,
et être ftgés de 21 ans au moins, de 30 ans au plus (35 ans
pour les anciens militaires). On en distingue 5 classes,
?ui ne diffèrent que par le traitement (900, 1,200, 1,5U0
,800, et 2,000 fr.) et les frais de tournée.
GARDE NATIONALE. V. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
GARDE PARTicouER, garde qu'un particulier peut établir
pour veiller sur ses propriétés rurales. Autrefois les sei-
gneurs seuls possédaient le droit d'en avoir. Ces gardes,
reçus au siège de la maîtrise forestière du* ressort, ou
simplement à la justice des seigneurs, pouvaient porter
le fusil, mais seulement comme chasseurs de leur maître
et sous condition d'une commission enregistrée au greffe.
La loi du 20 messidor an m a autorisé tout propriétaire
à avoir des gardes ; les fermiers eux-mêmes peuvent en
nommer pour la conservation de leurs récoltes. Les
gardes particuliers, pourvus d'une commission sur papier
timbré, agréés par le sous-préfet, prêtent serment devant
le tribunal de l** instance : ils peuvent alors verbaliser,
comme les gardes champêtres, pour délits de chasse, de
pêche, etc., et leurs procès-verbaux font foi Jusqu'à
{>reuve contraire. Le propriétaire qui a un garde particu-
ier n'en contribue pas moins au payement du garde
champêtre de sa commune ; car celui-ci veille sur les
propriétés protégées par un garde spécial aussi bien que
sur les autres.
GARDE-PÊCHE, agent chargé de veiller à Texécutlon des
lois sur la police des eaux, fleuves et rivières relative-
ment à la pêche, et de plus à la navigation. Aussi lui
donne-t-on en certains endroits le nom de garde-civière.
Les garde»-pêche appartiennent à l'administration fores-
tière; leur condition et leurs droits, semblables d'ail-
leurs à ceux des gardes forestiers (V, plus haut)^ sont
déterminés par la loi du 15 avril 1829 sur la pêche flu-
viale. Ils sont autorisés à saisir les instruments de
pêche prohibés et le poisson péché en délit. Les éclu-
siers, les officiers de police Judiciaire, les cardes cham-
pêtres, les gardes assermentés des particuliers, peuvent
aussi dresser procès-verbal des délits de pêche.
GARDE-PORT, Rgout établi pour la police des porta sur
les rivières navigables ou flottables. D'après le décret du
Si août 1852, les çardes-ports sont nommés et commis-
sionnés par le ministre de l'agriculture, du commerce et
des travaux publics; ils prêtent serment devant le tri-
bunal de l'* instance du lieu de leur résidence. Tout
commerce et toute autre fonction salariée leur sont inter-
dits. Ils surveillent l'amarrage, le garage, le tirant d'eau
des bateaux ou trains, le temps qu'ils doivent rester le
long des quais, assurent la conservation des marchan-
dises pendant et après le débarquement, ainsi que dans
les dépôts où elles séjournent, et ont la police du service
général des quais. Leurs procès -verbaux doivent être
affirmés par^dfevant le luge de paix, le maire ou Ta^joint.
Ils sont responsables des délite cru'ils n'ont pas consta-
tés, et passibles des amendes qui eussent été encourues
par les délinquante ; les pcrtos ou avaries provenant de
leur négligence peuvent donner lieu contre eux à une
action en indemnité. Ils sont sous les ordres des inspec-
teurs des porte et des ingénieurs chargés du service de
la navigation. Leur rémunération consiste en rétributions
dues par l'expéditeur lors de l'arrivage des marchandises,
et par le destinataire lors do leur enlèvement, conformé-
ment à un tarif.
GARDE-VENTE, Rgeut que tout a4|udicateire des coupes
de bois et forête doit nommer pour consteter les délite
commis dans sa vente et autour de cette vente, jusqu'5
Toufe de la cognée. Il prête serment devant le Juge de
paix, inscrit Jour pa* Jour, sur un registre timbré, coté
et parafé par les sous - inspecteurs de l'administration
forestière, les bois di'^iiités, le nom des personnes qui les
ont achetés et leur de»p:ieure, et veille à ce que les ou-
vriers exploitente sp soumettent aux prescriptions et pro-
hibitions que les loM «t ordonnances leur imposent.
GARDERIE, nom qu'on donne quelquefois aux ciïchcs
{V,ce mot).
GARDES (Cent-). T. notre Dictionnaire de Biographie
et d* Histoire^ au Supplément.
GARDIEN JUDICIAIRE , celui que la Justice commet à
GAR
957
GAR
b c^rde d'objets saisis ou mis soos les scellés, moyen-
nant des frais fixés par la loi. Il en répond s'ils sont dé-
trmts, perdus ou endommagés, à moins qu'il ne prouve
\e cas loriuit. Pour négligence, la peine varie selon la
nature des choses mises sous scellé ; mais si le gardien
commet le crime prémédité de bris do scellés , il est puni
de i à 5 ans d'emprisonnement, et queI<|uefois plus.
GARE , petit bassin naturel ou artificiel, qui sert de
port dans les rivières. Des estacades le préservent des
giaœs et d'un courant trop rapide. — On donne encore
le nom de gare aux stations de chemins de fer, aux em-
placements destinés au chargement et au déchargement
des marchandises, et, par extension, aux salles réservées
aux voyageurs.
GARENNE (de l'anglais toarren, dérivé de toard,
garde), lieu entouré de fossés et de murailles ou detreil-
lacpes, pour élever des lapins , et, par extension , tout
bms ou bruyère où abonde le lapin. Une garenne ne
peut être établie sans l'autorisation du sous -préfet et
sans l'avis conforme du conseil municipal, ni à moins de
300 met. des propriétés d'autrui ; le propriétaire est res-
ponsable des dés&ts causés par les lapins. Le droit de
garwiw d^eau consistait autrefois à interdire la pèche
dans les étangs, rivières ou fleuves. L'art. 524 du Code
tlapoléon fait des lapins de gaienne un immeuble par
GARGANTUA, roman satirique en 5 livres composé par
Rabebds. Le 1*' parut en 1533,1e 4* eni552, le 5* en 1558
seulement. Le principal personnage n'était pas une in-
vention de l'auteur : les contes populaires parlaient du
géant Gargantua, et, dans une foule de localités, on ap-
pliquait son nom à des monuments celtiques {V. ce mot).
En 1532, on imprima un opuscule intitulé : Les grandes et
inestimables cronicqties du grant et énorme géant Gargai^
tua^ contenant la généalogie^ la grandeur et force de son
corps, aussi les merveilleux fakts d'armes qu*il ^t pour
le roi Artus, Un grand nombre de passages, spécialement
les prologues du l*' et du 3* livre, montrent en termes tan-
tôt clairs, tantôt enveloppés, quelle a été la pensée de Ra-
belais en écrivant son ouvrage : non-seulement Gargan^
tua, ainsi one Pantagrud qui lui fait suite, contient
quantité d'allusions et. d'allégories aux hommes et aux
choses de l'époque, mais il a été composé dans ce but;
Rabelais s'est plu à construire une fable extravagante
qui lui permit d'amener sur la scène, sous le voile des
plus foUes fictions, toutes les conditions de la vie et tous
les ordres de l'État Mais il ne faudrait pas applicpier à
son œuvre un système régulier et suivi d'interprétation
historique, inscrire, par exemple, sous le nom de chacun
des personnages du roman, celui de quelque personnage
réel, et voir, dans chacune de leurs aventures, le traves-
tissement d'un événement contemporain. Certains com-
mentateurs reconnaissent Louis Xll dans Grandgousier,
François l*' dans Gargantua, ht reine Claude dans Bade-
t>ec, Henri II dans Pantagruel, le cardinal Du Bellay dans
Jean des Entommeures, le cardinal de Lorraine dans Pa-
nai^, Maximilien Sforza dans Picrochole, Anne de
Bretagne dans Gargamelle, la duchesse d'Êtampes ou
Diane de Poitiers dans la Jument de Gargantua, Charles-
Quint dans Bringuenarilles, Jules II dans le grand domp-
teur des Cimbres, etc. : rien n'est plus douteux que la
réalité de ces explications. Ce qui est vraisemblable, c'est
que la majeure partie des personnages de Rabelais ne
sont point, à proprement parler, des personnajges allégo-
riques, mais des personnages imaginaires, destinés seule-
ment à devenir roccasion et le centre d'allusions soit aux
hommes, soit aux choses sur lesquelles l'auteur voulait
8*eq>liquer, et, par conséquent, susceptibles d'être dans un
moment donné la rqsrésentation d'un individu réel. Le
mérite éminent de Rabelais est d'allier au même degré
une extrême folie et une extrême sagesse ; une extrême
folie quand il invente, une extrême sagesse quand il ju^.
« Rabelais, dit un critique, n'est à la surface qu'un rail-
leur trop souvent cynique; au fond, c'est un esprit s^
rieux, indigné des travers dont il rit, jaloux de déraciner
les abus dont il se moque. Le travestissement qp\ le dé-
guise le protège en même temps ; c'est une cuirasse, et
aossi un bouclier derrière lequel il se retranche pour
•anœr Impunément des traits qui portent coup. »
GARGOUILLIS, dégorgeoirs saillants en pierre, placés
sa moyen âge le long des gouttières élevées, et servant à
jeter les eaux loin des murailles. Les artistes leur ont
donné la forme qrmboliqne d'un dragon volant, souvent
i face humaine et grimaçante. Les archéologues y volent
rimÈge du démon ; en peuplant les goottièra et les ga-
kritf aérieniMS de monstres infernaux, on rappelait aux
fidèles qu'ils devaient toujours se mettre eu garde contre
le démon, le tenir esclave et enchaîné, comme l'avait
fait l'artiste, qui le forçait à préserver l'église des eaux
pluviales en les écartant de la muraille. Quelquefois les
gargouilles n'étaient mises que comme ornementation et
pour compléter les façades. Aujourd'hui on ne les con^
serve également que comme décor, parce qu'on a reconns
l'inconvénient qu'il y a de laisser tomber les eaux tout
autour d'un édifice, dont les fondations se trouvent dé-
gradées et les abords difficiles en temps de pluie. On
donne de nos Jours le nom de gargouille à toute tête de
gouttière plus ou moins saillante. — Du temps de Dago-
bert, suivant une vieille légende, un dragon horrible était
né du limon des eaux à la suite d'un long débordement
de la Seine. Ce dragon, qui désolait la contrée, et que
l'évêque S* Romain tua, s^appelait la Gargouille. Voilà,
vraisemblablement, l'origine du nom donné à ces figures
monstrueuses et fantastiques que les sculpteurs-imi^;iers
représentèrent dans les gouttières des ^ises dites go-
thiques. E. L.
GARGOUSSE, autrefois GARGOOCHE et GARGOUGE,
tube en papier ou en parchemin, rempli de poudre, pour
la charge d'un canon ou d'un mortier. Son poids est le
tiers de celui du boulet. Le papier fort est préférable au
parchemin; car celui-ci laisse dans l'âme de la pièce des
fragments enflammés, qui, à la recharge, causent de
graves accidents. Dans l'origine, on introduisait la poudre
à nu avec une grande cuiller appelée lanterne; nôais les'
fréquents accidents qui résultaient de ce mode de charge
le firent abandonner. Lors de la Révolution, on fit des
gargousses avec les parchemins des familles nobles et des
^établissements publics ou religieux : on détruisit ainsi
des titres précieux pour l'histoire. M. de Laborde a re-
trouvé dans les ma^sins de Yincennes un nombre con-
sidérable de gargousses fabriquées de cette façon, et en a
tiré d'intéressants documents nationaux.
GARGOUSSIER, boite cylindrique dans laquelle on
place la gargousse pour l'apporter dans la batterie au
{premier servant chargé de l'introduire dans la pièce. On
a nomme aussi garde-feu.
GARIN DE MONTGLANE, l^* branche de la chanson
de GuUlaume-au^ourt^Nex* Garin arrive à la cour de
Charlemagne, et inspire une vive passion à la reine.
Charles irrité le défie aux échecs : « Si Je perds, lui
dit-il, vous recevrez tel don qu'il vous plaira, même
celui de ma couronne et de ma femme; si je gagne. Je
vous lais aussitôt trancher la tête. » La partie s'engage;
Garin est vainqueur, et demande le fief de Montglane
(Glanum, près de Tarascon?), alors occupé par un vassal
rebelle. Il en fait la conquête, et épouse Mabile, sœur du
comte de Limoges. — Un morceau curieux de cette chan-
son est la description de l'échiquier de Charlemagne,
dont la Bibliotlièque nationale de Paris possède une
pièce; c'est un aufin ou éléphant, le fou du Jeu moderne.
L'histoire de Garin de Montglane est conservée à la même
Bibliothèque dans deux manuscrits, l'un du xiv* siècle,
l'autre du xv« ; à bi Bibliothèque de l'Arsenal, dans un
manuscrit du xiv*; au Musée Britannique, dans un ma-
nuscrit du xui*; enfin au Vatican, dans un manuscrit
daté de 1324. Une histoire en prose du Preux chevalier
Guérin de Montglave a été imprimée plusieurs fois au
XV* siècle et au xvi*; le titre de cet ouvrage est men-
songer ; car il ne raconte que les aventures d^ enfants de
Gann. V. l'ffist. titt. de la France, tome xxii. H. D.
GARIN LE LOHÉRAIN (le Lorrain), 2« partie de la
chanson des Lohérains, faisant suite au roman de Hervts
(7. ce mot). Les Vandales ont envahi la France; Charles-
Maurtel les bat, mais succombe à ses blessures. Pépin,
son fils, est appelé au secours de Thierry, roi de Mau-
rienne ou de bavoie, qu'attaquent quatre princes sarrap-
sins; il tombe malade, et Garin le Lohérain est chargé
du commandement des troupes. A la vue des infidèles,
les Gascons ont peur et idiandonnent Garin, qui, aidé de
son frère Bégon de Belin, défait les Sarrasins. Thierry,
qui a été blessé mortellement, lui ayant confié sa fille
Blanchefleur, il revient en France, et demande au roi
la permisûon d'épouser la princesse, filais Froment, au-
quel Pépin avait promis le premier fief vacant dans son
empire, récUime Blanchefleur avec la Haurienne. Garin
provoque Froment, et le combat s'eneage. Ici finit la pre-
mière chanson de Garin. — Une véritable bataille est
livrée, dans le palais même de Pépin, entre les Gascons
sous les ordres de Froment, et les Lorrains commandés
par Garin; les derniers sont vainqueurs; cependant la
guerre continue pendimt plusieurs années ; enfin on con-
vient de s'en remettre au Jugement du roi* Pépin ordonna
UAR
958
GAU
que Blanchefleur épouse Garin : mais Tarehevêque de
Reims lui représente qu*il ferait mieux de l'épouser
lui-même, et, au moment où Tunion de Blanchefleur
avec Garin va être célébrée, quatre moines viennent
jurer sur les reliques que les deux futurs sont cou-
sins et ne peuvent se marier. Pépin épouse Blanche-
fleur, et fait de Garin son échanson. Le Gascon Bernard
insulte Garin à la table du roi : une lutte s'engage entre
les Gascons et les Lorrains; Bégon, chef des cuisines,
vient au secours de Garin, avec tous ses marmitons
armés de broches et de crochets. La victoire reste aux
Lorrains, et, après des alternatives de victoires et de dé-
faites, les Gascons sont réduits à demander la paix. Ici
finit la deuxième chanson de Garin. — La paix fut ob-
servée pendant sept années. Bégon, dans son château de
Belin (près de Bordeaux), est tourmenté du désir de
revoir son frère : malgré les prières et les pressentiments
de sa femme Béatrix, il se met en route, et tue un san-
glier sur le domaine de son ancien ennemi Froment.
Egaré dans la forôt pendant la nuit, il sonne du cor pour
appeler ses compagnons; les forestiers de Fromont accou-
rent, et le somment de se rendre; il refuse, et succombe
dans une lutte inégale. Fromont reconnaît avec effroi
Bégon, lui fait des funérailles honorables, et offre de li-
vrer à Garin ceux qui ont commis le meurtre. Ses pro-
positions ne sont pas acceptées; la guerre va recommen-
cer. Telle est U troisième et dernière chanson de Garin
le Lohérain.
Le roman de Garin, publié par M. Paulin Paris, et
dont Tinvention primitive est attribuée par Dom Calmet
à Hugues Métellus, chanoine régulier de S*-Léon de
Toul au XII* siècle, se compose d'environ (Quinze mille
vers de dix syllabes ; les trois chansons qu'il comprend
ne sont peut-être pas l'œuvre d'un seul auteur. LÀ 1*^,
telle qu'elle existe aujourd'hui, paraît être moins an-
cienne que les autres ; on y trouve moins de poésie, d'in-
térêt et de vraisemblance. L'auteur fait une singulière
confusion des événements historiques; il place auprès de
Charles Martel S^ Loup et S^ Nicaise, qui vivaient au
iv« siècle; et, au lieu du roi des Wisigoths, c'est Charles
Martel qui périt dans la bataille. La 3* chanson est bien
supérieure aux deux précédentes : les derniers instants
de Bégon et le récit des vengeances ({ue sa mort occa-
sionne sont des morceaux vraiment épiques. Nous savons
par les manuscrits que c'est l'œuvre de Jehan de Flagy,
qui vivait au commencement du xd* siècle. On suppose
qu'il était Champenois. H. D.
GARNACHE, nom d'une tunique à collet et à demi-
manches larges et pendantes, qu'on portait au xiu* siècle.
C'était une sorte de robe de chambre.
GARNI (Hôtel). V. Maisons garnies.
GARNISAIRES. V. ce mot dans notre Dictionnaire 4e
Biographie et d^ Histoire,
GARNISON ( du vieux mot toami, wamesture)y dési-
gnait dans le principe les munitions et les vivres d'un
eorps de troupes. Dans le bas latin , gamisio a la même
signification. Au xv* siècle, le mot aamison commence à
être synonyme d'établies on estaolies;. puis il finit par
signifier à la fois le lieu consacré au logement des
troupes et le corps de troupes lui-même. Ce fut Charles VU
qui accoutuma les villes à recevoir de petites garnisons
royales; c'était la conséc^uence forcée de la formation des
troupes régulières. Les villes votèrent pour l'entretien des
garnisons un impôt qu'on appela taille des gendarmes;
mais elles exigèrent que la garnison ne dépassât pas
30 hommes^ et que le maire seul eût le droit de les passer
en revue. Louis XI grossit les garnisons, et Louis XII
enleva aux maires le droit de surveillance. Machiavel
nous apprend que les garnisons françaises de son temps
étaient pendant la paix divisées en quatre grands corps,
répartis en Guienne, Picardie, Boulogne et Provence;
les municipalités se réservaient la fonte et la garde des
bouches à feu, pour imposer aux compagnies dans le cas
où elles viendraient à abuser de leur force. Sous Henri IV,
les garnisons furent de petits corps de troupes portant le
nom de leurs chefs, isolés des régiments, et changeant
souvent de lieu. Il y eut aussi les mortes-payes, vieux
soldats rassemblés par des gouverneurs, dont ils for-
maient comme la défense et les gardes du corps : ces
troupes irrégulières, n'obéissant qu'au chef qui les payait,
étaient un danger et un sujet continuel de troubles;
Louis XIV les abolit. Aujourd'hui les garnisons s'éta-
blissent régulièrement dans les villes aux frais de l'État
et des communes.
GARROTTE, f V. ces mots dans notre Dictionnaire
GARUM. S de Biographie et d'Histoire,
GASQDET (do casque\ espèce de fez (V. ce mot).
GASCON. V. le Supplément.
GASTRONOMIE (du grec gastér, estomac, et nomos,
loi), science du manger. C'est, selon la définition de
Brillat^Savarin, a la connaissance raison née de tout ce
qui a rapport à l'homme en tant qu'il se nourrit. » Le
gourmet ne sait qu'apprécier; le gastronome remonte des
eflets aux causes, analyse les substances alimentaires,
recherche la meilleure nourriture possible au point de
vue de la conservation des individus, et la veut aussi
hygiénique qu'agréable. Il vit dignement, et doit être
doué de sens sûrs, de jugement, et de fortune. Berchoux
a publié, en 1800, un petit poème descriptif sur la gas-
tronomie; l'ouvrage le plus agréable sur cette matière est
la Physiologie du goût de Brillât-Savarin.
GATE, nom donné pendant le moyen âge à une grosse
galère à cent rames.
GATTE, partie d'un vaisseau très-rapprochée des écu-
biers, et qui est séparée du reste du bâtiment par une
forte cloison élevée à quelques pieds au-dessus du pont
de la batterie basse. Cette cloison retient l'eau qui pé-
nètre par les écubiers, et dont on facilite ensuite l'écou-
lement par des dalots percés dans la gatte.
GAUCOURTE , robe courte, en usage dans certaines
parties de la France au moyen âge.
GAUDES, en latin gaudia, nom donné, dans certaines
localités dtt la Provence, à des cantiques de Joie, à des
espèces de noêls qu'on chante en l'honneur de la S**
Vierge depuis la Nativité Jusqu'à la Purification.
GAUDRON ou GODRON, ornement creux ou saillant,
circulaire ou ovale, et arrondi comme une amande.
Lorsque le gaudron est taillé en creux, il est souvent
bordé d'un filet et orné d'une petite rose. La période
romano-byzantine eh plaça quelquefois sur les chapiteaux.
La Renaissance italienne en orna fréquemment les objets
d'orfèvrerie. Dans la bijouterie, on nomme aussi gath-
drons des ornements ciselés, consistant surtout en rayons
3ui partent du centre du bijou. Au xvi** siècle, les gou-
rons étaient les plis ronds qu'on faisait aux fraises.
GAUFRAGE , opération à l'aide de laquelle on obtient
des gaufrures ou dessins en relief sur du papier, des
étoffes et des peaux. On se sert de fers chauds qu'on
appelle gaufroirs, et qui se composent de deux parties :
la i'*, de cuivre, est en creux ; la 2*, qui en est la contre-
partie, est en relief, et de carton. Des chevilles de re-
père servent à appliquer ces deux pièces exactement
l'une sur l'autre : le papier humecté se place au milieu,
et le gaufroir métallique échauffé lui fait prendre sa
forme. On ne retire la pièce gaufrée qu'après le refroi-
dissement. Ce procédé, bon pour les papiers légers, ne
suffirait pas pour les» cartons et les peaux; le gaufrage se
fait alors au cylindre combiné avec le système du calan-
drage.
GAUFREY, chanson de geste qui appartient au cycle
des romans carlovingiens (F. co mot)^ et paraît avoir été
composée vers le milieu du xiii* siècle. Le sujet en est
assez complexe : c'est l'histoire des douze fils de Doon
de Majrence, mais surtout de l'atné, Gaufrey. Il s'en faut
toutefois que l'intérêt se concentre sur cette famille, à
laquelle, par un manque d'unité dans la composition,
une foule d'autres personnages font ombre : tels sont
Doon lui-même, déjà célébré dans un autre poCme
(V. DooN DK Mayencb), Garin de Montglane, qui est aussi
le chef d'une famille héroïque (K. Garin de Montclanb),
son serviteur Robastre, fils du génie Malabron, Berart
de Montdidier, l'un des douze purs de Charlemagne, etc.
L'auteur inconnu du poème de Gaufrey a imaginé la
fable suivante : assiégé dans son château de Montglane
par Gloriant, roi des Sarrasins, le vieux Garin implore
le secours de Doon de Mayence, dont les 12 fils sont â
la veille d'aller guerroyer en Syrie. Ceux-ci mettent en
fuite les Sarrasins, qui cependant, au milieu de leur dé-
faite, emmènent prisonniers Doon et Garin. La captivité
des deux vieillards dure sept années, pendant lesquelles
Gaufrey et ses frères font les conquêtes qu'ils projetaient
au début du poème. Chacun d'eux se marie, et, tandis
que Grifon, le seul des fils de l)oon qui ait forligné et
failli à l'honneur, donne le Jour au traître Ganelon, si
fameux dans la légende de Charlemagne, Gaufrey épouse
la belle Passerose, dont il a Ogier le Danois, Vun des
héros les plus fameux de l'épopée carlovingienne, celui
dont nos Jeux de cartes perpétuent encore le nom et le
souvenir. Les fils de Doon, Joints à ceux de Garin, son-
gent enfin à délivrer les héros captifs. Robastre tue Glo-
riant, et hérite à la fois de sa couronne et de sa veuve
Mandagloire, préalablement bapUsée. — La chanson de
GEN
959
GEN
Gaatrev, dont il n*existe qu*un seul manuscrit, du
xiv< siècle, conservé à la bibliothèque de la Faculté de
médecine de Montpellier, a été publiée, dans la collection
des Andms poëtes de la France^ par MBL Guessard et
ChabaiUe, Paris, 1850, in-i6. B.
GAULOIS (Art). V. Gbltiqobs (Monuments).
GAULOISE (Langue). V. Cbltiqdbs (Langues).
6ADL01SB (Religion). 7. DaoïDES, dans notre Diction-
nain â/$ Biographie et d* Histoire,
saoijOisbs (Monnaies). V, Françaisbs.
GAUR (Langue). V. Bengau.
GAUSAPB. 7 K. ces mots dans notre Dictionnaire de
GAVOTTE. \ Biographie et d'Histoire,
r,AYno\ V. Gmdon.
GAZETTE. F. Journal, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
GEMARa. V, Talmdo, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
GÉMINtk, se dit, en Architecture, de deux baies, de
denx fenêtres, de deux arcades réunies par une mou-
lure commune, de deux colonnes ayant un chapiteau
commun,etdedeuxcbapiteaux ayant un abaque commun.
— Dans les inscriptions et les médailles, les lettres gé-
minées marauent deux personnes, comme dans COSSet
IMPP^ qui désignent deux consuls et deux empereurs. En
Irançais, MM. (Messieurs^, LL. MM. (Leurs Majestés),
LL. AA, (Leurs Altesses), sont des lettres géminées.
GEMME (du latîn gemma)^ mot que les archéologues
emploient comme synonyme de pierre fine soumise à
l'action de la taille.
GÉMONIES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
GENDARMERIE. Ge nom, qui a désigné autrefois di-
ven corps de troupes (F. Gendarmerie, dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire)^ ne s*applique plus
qu'à une milice établie pour veiller au maintien de l'ordre,
à la sûreté publique, et pour assurer l'exécution des lois
et des arrdts judiciaires. Les attributions de la gendar-
merie ont été fixées par la loi du 28 germinal an vi
(17 ayril 1798). Elle a été réorganisée par décrets des
n décembre 1851,19 février 1852, et l*' mars 1854. Les
corps qui la composèrent alors furent : 1° un riment à
2 bataillons de gendarmerie de la garde impériale, anc.
gendarmerie mobile ou gendarmerie (f élite (supprim. en
1860); 3** un escadron de gendarmerie d cheval de la
garde impériale ; 3» la garde de Parts, précédemment ap-
pelée garde réptiblicaine et garde municipale, composée
de 2 bataillons et de 2 escadrons; 4P la gendarmene dé-
partementale; 5* la gendarmerie colomalef comprenant
4 compagnies pour la Martinique, la Guadeloupe, la
Réunion, la Guyane, et 3 brigades aux lies S^-Pierre et
Miqoelon; &* une compagnie de gendarmes vétérans;
7* les voltigeurs corses. Un Comité de la gendarmerie
est cliargé d'examiner toutes les questions intéressant
l'arme.
La gendarmerie départementale forme 26 légions, qui
iR composent chacune de plusieurs compagnies, et dont
le tableau suit :
UgUnu. ClufsAùux.
i~.. Paris
2*. . • Rouen
3«... Lille
4*... Gh&lons....
d*. .. Nancy
7*... Besançon...
8*... Lvon
^... Marseille...
1(K... Montpellier.
11*... Perpignan. «
12*... Toulouse...
IS'... Bayonne....
14*... Bordeaux...
15^... Nantes. •...
iC«... Rennes...»
17*.. . Bastia
Dépertentents.
Seine , Seine-et-Oise , Selne-«t-
Matne, Oise.
Seine-Inférieure, Eure, Calvados.
Orne.
Nord, Pas-de-Calais, Somme.
Marne, Aisne, Ardennes.
Meurthe-et-Moselle, Meuse, Vos-
ges.
Doubs, Jura, Haute-Marne, Haute-
Saône.
Rhône, Loire, Drôme, Ardëche.
Bouches-du-Rhône, Vaucluse.
Hérault, Aveyron, Lozère, Gard.
Pyrénées - Orientales , Ariége
Aude.
Haute-Garonne, Tarn-et-Garonne
Lot, Tarn.
Basses-Pyrénées , Landes , Gers
Hautes- Pyrénées.
Gironde , Charente - Inférieure
Dordogne, Loi-ei-Garonne.
Loire-In férieure , Maine-et-Loire
Deux-Sèvres, Vendée.
lUe-et-Vilaine, Manche, Mayenne.
Corso.
18*... Tours Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Sar*
the. Vienne.
19*... Bourges Cher, Nièvre, Allier, Indre.
20*. . . Clermont. . . Puy-de-Dôme, Haute-Loire, Cantal.
21*... Limoges.... Haute- Vienne , Creuse, Corrèze,
Charente.
22*. . . Grenobk. . . Isère, Hautes^Alpes, Savoie, Haute-
Savoie.
23*... Orléaui* Loiret, Aube, Eure-et-Loir,
Yonne.
24*. . . Dijon.. ..... Côte-d'Or, Saône-et^Loire, Ain.
25«... Nice Alpes - Maritimes , Var, Basses-
Alpes.
2G«... Brest. Finistère, Morbihan, Côtes-du-
^0^d.
Chaque légion se compose de 29 officiers, 83 maréchaux
des logis, 102 brigadiers, et 760 gendarmes; ensemble,
974 hommes, dont 70 à pied et 875 à cheval. Le chef
d'une légion est colonel ou lieutenant-colonel ; le service
d'un département forme une compagnie, et est com-
mandé par un chef d'escadron; celui d'un arrondisse-
ment est dirigé par un capitaine ou un lieutenant. Les
compagnies sont divisées en brigades; la brigade à pied
est de 5 hommes, commandés par un brigadier ou un
maréchal des logis ; la brigade à cheval est commandée
par un bri^ier, si elle compte 5 hommes, par un ma-
réchal des logis si elle en compte 6.
Les simples ^ndarmes ont rang de brigadiers; ils se
montent, s'équipent et s'habillent à leurs frais. L'arme-
ment seul est fourni par TÉtat* il consiste, pour le ^n-
darme à cheval, en un sabre de cavalerie de li'çne, pisto-
lets et mousqueton , et, pour le gendarme à pied, en un
fusil à baïonnette et un sabre-briquet. L'uniforme est :
habit de dnp bleu, avec collet et parements bleus, revers
et retrouBsis écarlate ; pantalon de drap bleu f blanc en
grande tenue) ; chapeau à cornes (shako en Corse); aiguil-
lettes et trèfles en fil blanc; buffleterie Jaune, bordée en
galon de fil blanc; bottes demi-fortes pour la cavalerie,
guêtres pour l'infanterie. Les ofiiciers portent l'épaulette
d'argent. — La garde de Paris a pour uniforme l'habit
de drap bleu, avec collet bleu, parements bleus à patte
blanche, revers blancs et retroussis en drap écarlate,
boutons Jaunes aux armes de la ville : l'infanterie porte
le pantalon en drap blou, les épaulettes en laine rouge,
le shako orné d'un galon aurore, et Taigrette rouge; la
cavalerie a le pantalon de peau blanc, les contre népau-
lettes et aiguillettes en laine aurore, et le casque à la
dragonne, orné d'un plumet rouge. Les officiers portent
l'épaulette en or. — Les voltigeurs corses ont rhid)it
court, de drap bleu, boutonné droit sur la poitrine, avec
retroussis, collet et parements de drap bleu, passe-poils
Jonquille, trèfles en laine Jonquille, le pantalon de drap
gris-bleu en hiver et de coutil bleu en été, les guêtres
noires ou bleues, le shako.
La Gendarmerie se recrute, soit au moyen de soldats
gradés qui rendent leurs galons pour y entrer, et qui sont
désignés, aux inspections générales, parmi les hommes
ayant encore deux ans de service à faire, soit au moyen
d'anciens militaires qui en ont fait la demande. Les gen-
darmes qui ont accompli le temps de service imposé par
la loi de recrutement sont libres de se retirer en donnant
leur démission, leur séjour dans l'arme étant dès lors
complètement volontaire. Jusqu'au grade de lieutenant
inclusivement, l'avancement est réservé aux militaires de
l'arme; un certain nombre d'emplois dans les grades su-
périeurs est attribué aux officiers de l'armée du grade
correspondant. Les gendarmes ne reçoivent des mariai ns
de l'État aucune prestation en nature, si ce n'est quand
ils sont détachés aux armées pour y constituer la force
publique : dans leur situation normale, ils se nouirissent
à leurs frais et comme ils l'entendent, au moyen de la
solde qui leur est attribuée. V. Cochet de Savigny, Mé-
morial complet dé la gendarmerie, 2* édit., 1851, 3 vol.
in-8* ; Perrève et Cochet de Savigny, Formulaire général
et annoté à l'usage de tous les militaires de la gendar-
merie départementale, 1853, 3* édit.; Rouillard, Manuel
de la gendarmerie, 1853, in-12; Cochet de Savigny, Dto-
tionnaire de la gendarmerie, 5* édit., 1853, in-l8.
GÉNÉALOGIE fdu grec génos^ race, et logos, disooors],
exposition de la filiation d'un individu ou du développe-
ment d'une fifmille, tableau de ses parentés et de ses
alliances. Les Orientaux ont attaché de tout temps une
grande importance aux généalogies, par lesquelles peut
s'établir l'ancienneté des familles : aussi en voitron des
exemples dans le PentaJteuque; le Nouveau Testamenl
GÊN
960
GÉN
nous donne la généalogie de J.-C Les Romains de dis-
sinction conserraient avec soin leurs généalogies, et il
en fut de même an moyen âge, où il fallut souvent, pour
occaper certains emplois, prouver sa noblesse ou au
moins un certain nombre d*aleux. Au]ourd*bui même, la
généalogie est une affaire sérieuse, par exemple pour les
questions de succession.
GÉNKALOGIQUE (Arbre). V. Aasas.
GÉNÉALOGISTE. { F. ces mots dans notre DietUm-
GÉNÉRAL. r fiotr» d$ Bhoraphie et S Histoire.
GÉNÉRALE, batterie de tambour par laquelle on donne
Tjilarme aux troupes. Dans les places de guerre et les
camps, dès qu'on bat la générale, tous les tambours doi-
vent la répéter à Tinstant en parcourant les rues et les
2uartiers, accompagnés de deux hoqimes srmés. Un ordre
u Jour indique aux troupes les positions qu^elles doi-
vent occaper en ce cas. La générale est battue dans les
villes en cas d*incendie ou de révolte, et à Tannée en cas
de surprise. Les chefs de corps peuvent faire battre la gé-
nérale à rimproviste, pour ]u{^ de Texécution plus ou
moins rapide de leurs ordres et tenir les troupes en ha-
leine. Le soldat c[ui, au son de la générale, ne se rend
pas immédiatement à son poste, encourt un emprisonne-
ment d*un mois, et la récidive est punie de six mois de
prison, puis de deux ans de boulet ; l'offider peut perdre
son graae. n y a aussi des peines sévères contre ceux aui
feraient battre la générale sans autorisation.
GiNÉsALB (Proposition), proposition dont les termes ne
s'appliquent pas à une pâraonne ou à une chose plutM
qu^à une autre, on sont applicables à un très -grand
nombre de personnes ou de choses : « Les princes g&tés
{>ar la flatterie trouvent sec et austère tout ce qui est
ibre et ingénu (FAieloii). '— QuMmporte de posséder
une grande étendue de terre et de commander à un plus
grand nombre d'hommes? On n'en a que plus d'emiiar-
ras et moins de liberté. » (In. ) P.
GÉNÉRALIFE, c-è-d. en arabe McMcn des fêtês, sorte
de maison de plaisance bâtie par les Arabes sur une émi-
nence voisine de Grenade. L'extérieur en est fort simple,
comme toutes les constructions orientales, et ne présente
que de grandes murailles sans fenêtres, surmontées d'une
terrasse avec une galerie en arcades, le tout coiffé d'un
petit belvédère moderne. Les délicates sculptures de Tin-
térieur ont été emp&tées par le badigeon des modernes.'
Une des salles contient ta suite des portraits des rois
d*Espagne. Le véritable charme du Génâralife, ce sont ses
iDrdms et ses eaux.
GÉNÉRALISATION, opération de Fesprlt oui consiste
t dégager le général du particulier, à ren séparer, ailn
de le voir siparémsni, La Généralisation est de deux
sortes, médiate et immi^aU, Dans le premier cas, l'es-
prit part des notions concrètes et individuelles des êtres
ou des faits; puis, par l'Abstraction et la Comparaison
volontaire, il forme les notions générales é' espèce, de
genre, de dasse, etc. Les modes et les rapports générali-
sés, et reconnus comme les mêmes ou comme divers, de-
viennent des caractères communs ou dififérents. La pré-
sence de caractères communs dans plusieun objets fait
réunir ces objets en un groupe, auquel nous joutons
par la pensée tous ceux que nous supposons avoir les
mêmes caractères; nous appliquons à cet ensemble la
notion d'unité, et nous avons une espèce. De même, en
saisissant les caractères communs entre plusieun espèces,
et appliquant à l'ensemble la notion d'unité, on obtient
un genre, et ainsi de suite. Dans cette opération il y a
deux choses à observer : la compréhension et Vétendue,
La première renferme le nombre de qualités communes
aux individus contenus dans une classe; la seconde, le
nombre de ces individus. La Généralisation immédiate ne
résulte pas de la comparaison ; elle ne doit rien à la vo-
lonté. C'est une opération de la Raison qui consiste à
s'élever au nécessaire et à l'absolu, au moyen du contin-
gent et du relatif : ainsi, à l'occasion de l'idée d'un temps
limité, nous concevons nécessairement l'idée du temps
sans limite. Cette sorte de Générailsation donne un ré*
sultat tout différent de la première. Par celle-ci on ob-
tient des principes qui résultent de recherches volon-
taires, longues et laborieuses ; dans le second cas, certains
principes nous apparaissent d'eux-mêmes et comme mal-
gré nous; ils ont pour caractères d'être spontanés, né'
cessaires, fsniversels. Ce ne sont plus des idées générales,
mais universelles. V» Inès. R.
GÉNÉRALISSIHE. j F. ces mots dans notre Dictiof^
GÉNÉRALITÉ. I naire de Biogr, et d*ffistoire,
GÊNES (Monuments de). Parmi les édifices religieux
de la ville de Gênes, un des plus remarauables est la
cathédrale S^^Laurent, construite an oommencemeni <iu
XI* siècle, et restaurée au xvi* par Galéas Alessi. A l'exté-
rieur, elle est revêtue de marbres blanc et noir, disposés
en aûlBes alternatives ; une seule des deux toun qui de-
vaient surmonter l'édifice a été exécutée. L'intérieur, où
l'on est frappé d'un singulier mélange de styles arohitec-
toniques, contient beaucoup de statues, de bas-reliefs et
de tableaux précieux. La chapelle de Smean-Baptiste est
particulièrement ornée avec richesse : la châsse du saint,
toute en argent, a été faite au xv* siècle. La belle mar-
queterie des stalles du chœur est l'œuvre de Zabello, ar-
tiste de Bergame. On conserve dans la sacristie le Sacro
Catino (F. ce mot). — L'église de VAnnunziata, bâtie aux
frais de la famille des Lomellini, sur les dessins de Scop-
ticone et de Jacques della Porta, est d'une magnificence
peu commune. Sans parler des œuvres d'art oui la déco-
rent, elle a été presque complètement dorée il y a quel-
(fues années. La façade, revêtue de marbre blanc, est
inachevée. — L'église de S^MariC'de'Carignan ou de
Y Assomption, située sur une hauteur d'où l'on domine la
ville, a été construite par Galéas Alessi, de 1552 à 1600,
aux frais de la famille Sauli. C'est un édifice complet,
bien ordonné, et d'une parfaite unité : il forme un carré
régulier de 50 met., sans compter l'abside, et est divisé
en trois nefs; quatre pilîen supportent une grande cou-
pole centrale, et d'autres coupoles plus petites s'élèvent
aux quatre angles de la croix. L'oi^e passe pour être un
des premiers d'Italie. — An nombre des monuments ci-
vils on distingue : VUniversité, splendide bâtiment, con-
stmit au x\ii*8ièclesur les dessins de Bartolommeo Blancos
le Palais ducal ou ddla Citta, ancienne résidence des
do^, rebâti au xvi* siècle par Andréa Vannone ; le Pki-
lais Doria, csuvre de Perino del Vaga et de Hontorsoli;
le Palais Royal on Palais Durazzo, élevé au xvn* siècle
par Faicone et Cantone; le Palais Brignole^Sale, dît le
Palais rouge â cause de la couleur de sa façade, et conte-
nant une belle collection de tableaux ; le Palais Balbi,
dont Bianco et Gorradi furent les architectes; le Palais
Pallavicini, où se trouve une célèbre galerie de ta-
bleaux, etc. V, Gauthier, Les plus beaux édifices de
Gênes, Paris, 1800, S vol. in-fol.
GENÈSE. I V. ces mots dans notre Dtcfl(m-
GENETHUAQUE. ( naire de Biogr, et ^FHistoire.
GENEVIÈVE (Bibliothèque S*«-), à Paris. Elle date de
1624 : le cardinal de La Rochefoucauld, les savante Gé-
novéfains Fronteau et Lallemand en sont les fondateun ;
Dumoulinet, numismate distingué, Pingre, et Mercier,
abbé de S^-Léger, contribuèrent â son agrandissement.
L'archevêque de Reims, Le Tellier, lui léeua 16,000 volu-
mes. Elle fut placée dans l'étue supérieur du couven*
des Génovéfains (aujourd'hui le lycée Henri IV), for-
mant une galerie en croix latine. Une perspective, peinte
par Lafon, à l'extrémité du petit bras, lui donnait l'as-
pect d'une croix grecque. Dans une coupole, au croise-
ment des bras, Restoul peignit, en 1730, le triomphe de
S ^Augustin. Avant la Révolution, la bibliothèque S^*-Ge-
rieviève passait pour la mieux installée des bibliothèques
de France. Le local en existe encore, mais il est consacré
au service du lycée Henri IV. En 1850, la bibliothèque a
été transférée dans un bâtiment de la place du Panthéon,
construit spécialement pour la recevoir, sur l'emplace-
ment de l'ancien collège Montaigu, qui servait de prison
militaire. Elle se compose de 160,000 volumes et de
3,500 manuscrits. On y peut travailler tous les joun de
10 heures à 3 heures, et le soir do G à 10 heures.
GBiEvifcvs (Ej^ise S**-). F. PAirrafon, dans notre DiC'
tionnaire de Biographie et â^ Histoire,
GÉNIE. Ce mot avait , au xvn* siècle, un sens plus gé-
néral que de nos Joun : il s'entendait ordinairement de
l'esprit et du caractère; 11 exprimait surtout l'intelligence
active et dirigée par la volonté. Bossuet dit de la prin-
cesse Palatine, que « son génie se trouva également propre
aux divertissements et aux affaires. » H va même, dans
rOndson funèbre du srand Condé, Jusqu'à faira du génie
une faculté de rintelligence : « Vivacité, pénétration,
grandeur et sublimité dn sénie, voilà pour l'esprit. >
Cependant, Boileau, dans sa belle épttfe à Radne (Ep. 7),
f»rend déjà ce mot dans le sens où nous le prenons au-
ourd'hui , et l'applique à Molière et à Comcdlle aussi
>ien qu'à son ami :
Mais par les envieux un génie excité
Au eomble de ton art eat mille fois nonttf.
Les écrivains du xviii* siècle n'ont guère vu dans le
génie que le talent porté à un degré supérieur. Voltaire a
dit quelque part : « Au fond» le génie est-il autre chose
GÉN
9C1
6ÉN
«oe le tmlenit Qa*est-oe que le talent, sinoo la dleposi-
«on à réussir dans un art? » Dans le Temple d» (kût^ Il
en fait un synonyme de Timagination :
De fimz brillants, trop de génie
Uettent le Tmm un cran plut tas;
ftUls que ne perdonne-t-on pas
Pour Armide et pour HermliiieT
Ces nuances avaient cependant été indiquées nettement
par La Bruyère, dans cette réflexion qu'il laisse échapper
en passant : « Talent, goût, esprit, génie, choses diné-
rentes, non incompatibles » (Ch. 1*', Dei ùvivragBS dé
l'esprit )• Aujourd'hui , le mot génie s*entend dans une ac-
ception particulière, et représente une idée plus grande,
celle des vastes et hautes conceptions de rmtellTgence;
dans les arts, l'idée de création sublime; dans la vie et
dans le çouYemcment, l'idée d'une énei^e de caractère
nui domme les hommes et les maîtrise, les entraîne par
1 admiration, les soumet par Tétonnement et quelquefois
même par la crainte. U y a le génie de la politique et de^
la guerre, le génie des alfoires et de Tadministration ,
œmme le génie des sciences et des lettres. Il nous
semble que, d'ordinaire, le génie se reconnaît à sa puis-
sance , c esi-à-dlre à ses osuvres et à ses résultats. Le
talent, plus facile à définir, n'est qu'une disposition heu-
reuse de la nature, une supériorité relatlTe. Quelquefois
même on appelle de ce nom, dans les arts ou dans les
aflkires, l*habileté de l'exécution ; il ne s'arit plus alors
que d'une aptitude acquise. Le génie ne s^aoquiert pas,
et il est bien au-dessus de l'aptitude et de l'habileté ; son
caractère essentiel est la grandeur dans l'originalité; le
talent, même supérieur, ne s'élève pas an-dessus de la
distinction, et n'atteint Jamais au génie. Aussi a-t-il pour
effet de satisfoire, d'int&esser, de séduire même ; le génie
éblouit et enlève les hommes, leur ète la râlexion ou en
rend l'usage inutile; le talent ne leur cause que du plai-
sir. U y a donc une Àroite parenté entre le génie et le su-
blime. Dans la politique comme dans les arts, le génie
conçoit et exécute les grandes choses : il est essentifelle-
' ment créateur. Il y a encore une liaison naturelle entre
le génie et l'immortalité, qui est le privil^ et le prix
des actions et des ouvrages sublimes. Toutefois, dans les
œuvres des arts, et surtout de l'esprit, l'immortalité, la
léputation même ne s'attachent pss toujours dès l'abord
nx vues ni aux créations de génie. On ferait une liste
bien longue des inventeurs, des savants, des artistes, des
poètes qui ont vu leurs conceptions méconnues, mépri-
sées, livrées au ridicule par les connaisseurs atûsi bien
Se par les imorants. Les calculs de Christophe Colomb
dent des chimères, la découverte de la vapeur une
folie, U Paradis perdu et Athalie des écrits ennuyeux ,
Jusqu'au Jour où la Providence a réformé les Jugements
du public, et fait rendre an génie Thonneur qui lui était
dû. Ce serait donc une mesure incertaine et sujette à
l'erreur que d'estimer le génie par ses résultats immé-
diats; le sublime n'est pas toujours reconnu, et l'immor-
talité se fait attendre ; mais elle ne fait Jamais défaut à la
vnde grandeur. La popularité d'ailleurs se trompe quel-
quefois, et s'attache aux ouvrages et aux hommes mé-
dioeres. Pompée était l'idole des Romains quand César
commençait à grandir. Les savants et le public du
XVI* siède décernèrent à Ronsard des honneurs divins.
On sait comment la postérité se duurge de redresser de
pareilles erreurs, ausu bien qu'elle corrige les injustices.
Ce serait encore une mesure inexacte que d'estimer les
créations d'un homme de génie, qui pâivent n'être que
des ébauches, d'après les œuvres perfectionnées et pohes
de ses imitateurs. Voltaire n'échappe pas à ce défaut
ipand il fait bon marché de l'invention comparée à l'uti-
lité, et qu'il écrit : « Tous les acheteurs vous diront :
« Jinroue que llnventeor de la navette avait plus de génie
«oue le manufacturier qui fait mon drap; mais mon
« dr^» vaut mieux que celid de llnventeur... Enfin ,
« chacun avouera, pour peu qu'on ait de conscience, que
« nous recpectons les génies qui ont ébauché les arts, et
« que les esprits qui les ont perfectionnés sont plus à
« notre usage. > Or, la Justice veut que nous fassions
honneur au génie des progrès dont il est le premier au-
teur. Il nous faut moins de quinze jours pour aller sûre-
ment et commodément en Amérique; mais c'est Colomb
qui a trouvé le chemin.
Céme de la politiaite et de la guerre. — Les politiques
et les militaires ne sont guère exposés à ce genre de mé-
eomptea, parce qu'ils produisent des résultats positifs,
immédlsits, où Ton reconnaît qu'ils ont la force, à laquelle
les hommes résistant rarement. Depuis Périclès Jusqu'à
JUchelien, depuis Alexandre et César Jusqu'à Napoléon,
l'on a'est accordé à reconnaître tous les caractères du
génie dans ces âmes vastes et puissantes, en qui se per-
sonnifient l'intelligence, les volontés et les passions de
l'humanité, et qui CEMcinent les hommes par la magie de
la gloire, ou les subjuguent par hi supériorité des la-
miâ-es et de l'énergie, ici même, hi Providence a donné
an génie ce singulier privilège d'être loué des hommes à
proportion de ce qu'il leur coûte, parce que la postérité
reconnaît sa grandeur dans les coups mêmes qu'il a
fnœpés, et que, pour emprunter le langage de Bossuet,
« s il n'a pas les cœurs, il force l'admiration. » Montes-
quieu a ingénieusement analysé cette remarquable loi des
choses humaines dans le Dialogue de Sylla et d^Euerale;
lorsque le philosophe dit à ce redoutable politique, cou-
vert de sang plus que de gloire : « Je voyais bien que votre
àme était haute, mais Je ne soupçonnais pss qu'elle fût
grande. » Cela veut dire : « J'avais ignoré Jusqu^à présent
que vous fussiez un homme de génie. » C'est un senti-
ment analogue qui a fait dhne à M. de Lamartine (iVbiH
velles Méditations, vu) :
Et vous, fléaux de Dlen , qui islt si le génie
ITest pas une de voe Yertns?
Génie des sciences et des arts. ^ Le génie des sciences,
des lettres et des arts est peut-être moins exposé à ces
reproches, quoiqu'il y ait de déplorables exemples des
abus auxquels il se prête : l'esprit prodigieux que Voltaire
a dépensé en impiétés et en bouffonneries, l'ardente ima-
gination et la prestigieuse éloquence de Rousseau, em-
plovées à mêler perpétuellement le sophisme et la vé-
rité, tout ce qiU fausse le Jusement, flétrit l'ftme ou
étourdit la conscience, mérite-t-il encore le nom de génie?
Le mot seul semble exclure l'idée du mal et de l'immora-
lité, n faudrait ne pas accorder plus que le talent à des
écarts déplorables, et, quoique la langue ait consacré les
termes de génie malfaisant et dé génie de la destruction,
elle devrait réserver la désignation glorieuse d'écrivains
de génie aux maîtres irréprochables qui ne se sont Jamais
servis de la parole et des arts que pour le beau et le bien.
Nous n'essayerons pss d'en faire une revue qui serait né-
cessairement incomplète, et uni, à l'honneur de l'huma-
nité, serait pour ainsi dire innnie. Il faudrait commencer
par Homère, père de toutes les sciences dans l'antiquité, et
parcourir trente siècles pour s'arrêter où? aux découvertes
de Cuvier ou bien aux Méditations de Lamartine? Ce
n'est pas non plus le lieu de cheroher quel caractère le
génie a pris dans les écrivains chrétiens, ni d'étudier au
point de vue littéraire l'étonnante simplicité de S^ Paul.
Il vaut mieux s'arrêter à notre xvii* siècle, qui nous offre
l'expression la plus parfaite et la plus pure du génie des
lettres, c-à-d. de l'humanité, et saluer dans le xix* les
conquêtes magnifiques du génie des sciences, qui déter-
mine la place des astres sans les voir, endort la douleur,
fixe la lumière, et fkit voler hi pensée humaine aussi vite
que la foudre. Remarquons seulement que les décou-
vertes de la science n'assurent pas à leun inventeura la
même gloire que les créations de l'éloquence et de la
poésie. Buffon en a donné la raison, quand il a dit : « La
« quantité des connaissances, la singularité des faits, la
« nouveauté même des découvertes, ne sont pas de sûrs
« garants de l'immortalité, parce que les connaissances,
« les faits et les découvertes s'enlèvent et se transportent
« aisément... Ces choses sont bon de l'homme ; le style,
« c'est l'homme même. » {Discours de réosption,) Nous
dirons également : le génie, c'est l'homme même, et ses
œuvres les plus durables sont celles qu'il tire de son
propre fonds, c-à^^ de son àme, parce qu'elles traduisent
en termes immortels des vérités qui sont de tous les
temps et intéressent tous les hommes. Cest la gloire des
Anciens, et le secret de ces chefs-d'œuvre qui ont immor-
talisé tant de petites dtés de la Grèce, et ajouté un tel
éclat à la grandeur des Romains. Ce caractère de vérité
neuve et puissante estl'origine d'une expression consacrée,
le génie ancien, que l'on compare et que l'on oppose sou*
vent au génie moderne. Il ne suflBt pas d'entendre par là,
comme Voltaire, « le caractère, les mcBun, les talents
« principaux, les vices même qui distinguent un peuple
« d'un autre. » Cette explication ne regarde oue le carac-
tère d'une nation, et il y a dans le mot génie quelque
chose de plus, une idée de supériorité, de qualités per-
sonnelles et élevées par où excelle un peuple ou une
civilisation. Noua disons le génie ancien et le génie mo-
derne, le génie espagnol et le génie anglais, pour exprimer
plus qu'une singularité, c.-à-d. une ârigiaaUté aooomps»
61
6 EN
962
GÊN
gnée do grandeor, ce qui est le tni sens du mot génie.»
n y a bien des nuances dans une question si générale,
et qui touche à tant d'antres : on peut distinguer encore,
surtout dans la conduite des choses humaines, le génie
de conception et le génie d'exécution, dont la différence
est peut-^Mre plus sensible dans la politique et dans la
Soerre. Un page de GustaTo-Adolphe, Torstenson, à la Tue
'une mancBUTre inattendue des ennemis, change, de sa
propre inspiration, un ordre du roi , qu'il était cbaigé de
transmettre, et le roi le féUdte de cette désobéissance de
génie. Il y a des génies incomplets ; c'est l'effet d'une loi
dÎTine, qui condamne la sagesse et la grandeur humaines
à être, comme dit Bossnet, « toujours courtes par quelque
endroit. » Les critiques du xvm* siècle faisaient même de
l'incomplet une condition ou un caractère particulier du
génie. Marmontel disait : « Le génie est une sorte dinspi-
« ration fréquente, mais passagère ;... les interralles du
« génie sont occupés par le talent; quand l'un s'endort,
« f antre veille; quand l'un s'est négligé, l'antre vient
« après lui et perfectionne son ouvrage. » L'exemple fa-
jon du temps à l'appui de cette théorie , outre bhaks-
peare, que Ton ne comprenait pas, cMtait Corneille, que
la mode sacrifiait à Racine, comme si Polyeucte et Cinna
étaient le fruit d'une inspiration par accès et d'un génie
intermittent. Nous sommes revenus de cette erreur, que
Voltaire avait autorisée le premier par ses jugements, et
nous croyons avec admiration à l'édité du génie de Cor-
neille. Quoiqu'il ait subi cette loi fatale de la décadence
attachée presque toi^ours à la vieillesse, ce n'est pas chez
lui qu'il faut chercher l'exemple d'un génie incomplet ,
non plus que chez Boileau , si ridiculement attaqué de
nos jours. En effet , le génie incomplet n'est pas celui qui
ne suffît pas à tout, et qui n'a pas eu toutes les qualités,
même celles dont il n'avait pas besoin ; c'est celui qui pou-
vait arriver à la grandeur et à la perfection dans le genre
qui lui convenait, ode, drame, histoire, éloquence, et
qui , faute de vérité ou de goût, s'est arrêté en chemin.
Il se rencontre d'ordinaire aux époques de déc^enoe. On
a souvent et justement cité à ce propos le nom de Sé-
nèque : les temps modernes, et notre siècle peut-être
ϻlus que d'autres, fourniraient plus d'un exemple ana-
ogue. Nous avons vu des hommes doués de qualités
supérieures, et nés pour le sublime, s'interdire volontai-
rement de l'atteindre, parce qu'ils manquaient de sincé-
rité et de bonne foi , ou qu'ils méprisaient la critique et
lacriflaient tout à l'idolâtrie d'eux-mêmes et à l'engoue-
ment du public ; ou bien encore parce qu'ils ne respec-
taient pas plus leur personne que leur talent Ce titre de
génie incomplet sera en même temps leur récompense et
leur condamnation ; car la vraie beauté et la vraie gran-
deur, quoique soumises aux imperfections inévitables de
l'humanité , n'existent pas sans l'ensemble et sans l'har-
monie. — Il ne faut pas confondre avec ces génies incom-
plets par leur faute ceux que le malheur a empêchés de
parvenir au degré où ils étaient appelés : André Chénier
en est le plus triste et le plus glorieux exemple ; il a com-
posé des vers impérissables : V Aveugle et la Jeune cap-
Hoe sont des oauvres de génie; et cependant, le regret
amer qui lui échappa en présence de la mort exprimait,
avec la conscience de ce qu'il pouvait faire, la douleur de
perdre si cruellement ses droits à l'immortalité. C'est, au
reste, un des traits supérieurs du génie, et l'un des plus
aimables, que cette défiance de soi -même que Chénier
portait jusque sur Téchafaud, et que Molière avouait no-
blement à Boileau, quand il s'appliquait à lui-même ce
vers du satirique (Sot. 2 ) :
n platt à toat le monde, et ne saanit le plaire.
En effet, l'écrivain de génie, les yeux attachés sur cet
idéal qui recule toi^ours, est souvent d'autant pl|is près
de la perfection qu'il se croit plus incomplet.
Génie dês arts, — On comprend aisément que les lois
du génie sont les mêmes dans les arts ; celui du sculp-
teur, du peintre, du compositeur, se reconnaît aux émo-
tions qu'ils font naître, à l'admiration qu'ils inspirent.
Un artiste de talent fait plaisir ; mais il v a plus que du
plaisir dans les impressions que produisent les chefs-
d'oBuvre de Phidias et de Raphafil, de Gluck, de Mozart, de
Beethoven, et de Rossini ; là, comme dans les lettres, les
conditions et les caractères du génie sont la vérité, l'ori-
^nalité, la simplicité dans la puissance, la sensibilité
qui passe de l'àme de l'artiste dans celle du public Sans
doute, les œuvres des arts n'échappent pas aux caprices
de la mode et aux erreurs du goût (F. ce mot). La mo-
que même est peut-être plus exposée aux méprises que
les arts dn dessin, aoit parce qu'elle vieillit vite, soit
parce qu'elle parie aux sens, et que la beauté de la voix
et l'habileté de l'exécution exercent une séduction qui
profite assez souvent à des œuvres ordinaires ou même
médiocres. Mais ces jugements de passage se réforment
comme tous les antres, et, dans un art si mobile et si
fugitif, c'est le génie seul qui ne vieillit pas. A. D.
oÉKa CIVIL, dénomination sous laquelle on comprend
les corps des ingénieurs des mines et des ponts et cnans*
Bées, r . M«ES, Ponts bt CHAOsséss.
QiKa MAaimn. Ce corps, dont nous avons retracé
l'historique dans notre Dtetûmnaire de Biographie et
(F Histoire, est organisé de la manière suivante t
Grades. Assimilation.
i Inspecteur général . . . Contre-amiral,
il Directeurs des construc-
tions navales (l** et 2*
classes) Après les contre^amiraux.
38 Ingénieurs {V* et 2*
classes) Capitaines de vaisseau et
de frégate.
14 Soua-ingénieurs (1», 2«
et 3* classes) Lieutenants de vaisseau et
de frégate.
Et le nombre d'élèves nécessaire au service. Les traite-
ments sont ainsi fixés : inspecteur général, 12,000 fr. ;
directeurs, 10,000 et S,000 fr. ; iiménieurs, 5,000 et
4,000 fr.; sous-ingénieurs, 3,000, 2,400 et 2,000 fir.;
élèves, 1,200 fr.
oiNiB MiuTAnuL Co coips, dout nous avons indiqué les
vicissitudes dans notre Dictionnaire de Biographie et
éP Histoire f a un état^mijor, qu'*2ne ordonnance du 31 oc-
tobre 1845, modifiée en quelques points en 1860, fixa
ainsi qu'il suit : 5 généraux de division, 8 généraux de
brigade, 29 colonels, 20 lieutenants-colonels, 108 chefs
de batainon, 150 capitaines de 1'* classe, 150 capitaines
de 2 classe et lieutenants; en tout, 470 officiers. Il y eut,
dans ta garde impériale, une division du génie, composée
de 2 compagnies. Le corps du Génie est de 7,000 hommes
environ, formant 3 régiments, plus 2 compagnies d'ou-
vriers. L'armement consiste dans le fusil à baïonnette et
le sabre-poignard. L'uniforme est ainsi réglé : habit bleu,
à revers non adhérents, avec collet, revers, parements
et pattes de parements en velours noir, et passe-poil
écarlate; doublure du collet et des revers, brides d'épau-
lottes, grenades d'ornement des retroussis, en drap bleu,
retroussis et épaulettes écarlate; boutons jaunes, em
prcdnts d'une cuirasse avec casque au-dessus; pantalon
bleu, avec bandes et passe-poils écarlate ; shako en tissu
de coton noir, avec pourtour supérieur en galon écarlate;
plaque à aigle, ayant pour empreinte, dans l'écusson^
une cuirasse surmontée d'un casque et placée au-dessus
d'une bombe ; pompon sphérique à flamme écarlate ; buf*
fleterie blanche. Les officiers portent l'épaulette d'or. Un
corps d'employés, chargé des détails du service des places
fortes, des bâtiments et établissements militaires, est
composé de 73 gardes principaux du génie, de 1 80 gardes
du génie de l'* classe, et 332 de 2*. Les établissements
du génie sont : le dépôt des fortifications, à Paris ; l'ar-
senal du génie, à Versailles; les écoles régimentaires de
Versailles, Arras et Montpellier, places spécialement
affectées comme lieu de garnison aux trois régiments.
GÊNrnF, flexion particulière aux noms, pronoms et
partidpes des lansues à déclinaisons (gr^ latin, alle-
mand). Cestl'un des cas obliques (F. Cas). Il exprime
proprement un rapport de possession, de propriété, d*ap-
psrtenance, comme les prépositions os et d en français t
ainsi, « la maison de Paul; cette maison est à Paul ; Oo-
mus Pauli; Hœc domus Pauli est. » Il détermine la
qualité d'une personne ou d'une chose : « Puer optimie
tndoliSf enfant d'un excellent naturel; » — la ouantité :
« Claasis LXX natTtum, flotte de 70 navires; » —le poids :
« Corona parvi ponderu, couronne d'un faible poids; »
— la forme : « Navis inusitat» magnitudinis , navire
(Tune grandeur extraordinaire ; » — la valeur : « Vestis
magni pretii, un vêtement d'un grand prix. » Il sert de
complément : 1° aux superlatifs et aux mots qui expri-
ment la partie d'un tout : « Dimidium temporis, la moitié
du temps ; AUissima arborum, le plus élevé des arbres ; »
9? aux adjectifs qui expriment les idées de désir ou d'in-
différence, de sécurité ou d'inouiétude, de savoir ou
d'ignorance, de mémoire ou d'oubli, de piartidpation ou
de non-participation, d'abondance ou de disette, de fécon-
dité ou de stérilité, etc. ; 3« avec un certain nombre de
6EN
983
GEN
pwtldpeH pris a4|c€tiveiuent, comme sctêns; 4* avec di-
ten moto «iprimant des idées de poursuite Jadic^aire,
de qmdMniwfction^ d*acquitteinent, de culpabilité, dMnno-
ce&ee^ etc : Proditionis insimulatus, accusé de trahi-
Mn. » lA grec et le latin ont ces divers points de repsem-
blance : mais, sur d'autres, ils se s^Mvent. Ainsi, maintes
fois le otoitif grec répond à l'ablatif latin : par exemple,
lofsqa*il s'agit d'exprimer le temps, le complément d'un
oomparatif ou de tout mot marquant supériorité, infé-
ric-ùà, diflérence, idée de départ, de sortie, d'extraction,
de SMlière, enfin le complément circonstanciel connu
MMB le nom de génitif absolu. Il a très-souvent la force
de DM locations quant à, par rapport à, eu é^ard à, etc.
n s'emploie dans certaines exclamations, et peut résulter
anaal d une ellipse. Il exprime l*idée partitive absolument
comme fait dé en français dans « donnez-moi du pain. »
— Le rapport marqué par le génitif est souvent équi-
vo<iQe ; ainsi, Amar Dn peut signifier, ou activement,
ramour de Dieu pour les hommes, ou passivement,
ramour dont Dieu est Tolriet.
La flexion casuelle n'inmouant pas toi^ours assez nev-
temeot le n^port d'un nom a un autre mot, on a souvent
leeonrs aux prépositions; mais l'emploi de cette partie
du dieooars avec le génitif est particulier à la langue
grecque. Lorsque l'une de ces prépositions entre dans la
composition d'un verbe, le complément ne se met au gé-
oitif que si, sans rien changer au sens du verbe, on peut
en dâacher la préposition et la placer immédiatement
devant son cas. Souvent l'emploi du génitif dépend du
sens même du verbe et non de la préposition. P.
GÉNOIS (Dialecte), un des dialectes italiens, celui qui
■e rapproche le plus du provençal. Il est en outre remar-
quable par la fréquente substitution de Yr à 1'^, et par la
wésence d'un certain nombre de sons rauques et singu-
liers, qui semblent provenir du contact des Génois avec
lea autres peuples dans leurs anciennes courses mari-
times. I>uite reprochât au dialecte génois de son temps
que, si on lui enlevait la lettre Zf il resterait muet : au-
jourd'hui il n'a aucun mot ayant le s toscan. Une pro-
priété qui le distingue des autres dialectes italiens, le
vénitien excepté, c'est la suppression, dans certaines con-
ditions, des lettres /, t, v : dnsi, nolo devient noo; dito,
dio; nave, imm. La lettre l se supprime quand elle est
suivie de d ou de t. Le génois possède les sons eu et u
tençals; il a, comme le piémontais, les sons an^ in, on,
m»; Il ^opprime la voyelle à la fin des mots terminés par
ne, iM, no, et prononce bastion pour bastùme, manjponr
manu II a reçu beaucoup de mots des Arabes, des Espa-
gnole, des Grecs et des Français. Un recueil de poésies
en dlâleetB génois a été publié sous le nom de Çittara
sumeis9, par Gian-Jacopo Cavalli.
GÉNOISE (École), une des écoles italiennes de pein-
ture. Le plus ancien artiste qui la représente est Fran-
ÎdIs d'Oberto, dont on a un tableau portant la date de
368, dans l'église de S^-Dominique, à Gènes. On con-
naît anssi quelques tableaux peints au xv* siècle par Jao-
qnea Ifarone, Galeotto Nebea, Jean Massone et Tucdo
d'AAdria. A la fin de ce siècle, Louis Brea fonda une école
d'oA sortirent Charles de Blantegna, Aurel Robertelli,
Nicolas Corso, André Morellino, Fr.-Laurent Moreno et
Fr. Simon de Camnii. Le sac de Rome par les Allemands
amena à Gènes, en 15^, Perino del Vaga, élève de Ra-
phaël : linfluence ^e ce peintre modifia le ^le de l'école
génoise, à laquelle appartiennent, dans sa nouvelle phase,
Augustin Calvi, ses fils Lazare et Pantaléon, Lucas Cam-
biaso dit Cangiage, Benoît Castiglione, Bernardin Ca^
telle et J.-B. Paggi. Ce dernier eut à son tour un grand
nombre d'élèves, dont les voyages par toute l'Italie firent
perdre à l'école génoise son ouiictere spécial, et parmi
lesquels on distingue Valerio Castello, Dominique Piola,
J,-i. Carlone, Bernard Strozzi dit le Capucin, et Raphaôl
Soprani. Depuis le milieu du xvii* siècle, la réputation
des artistes génois ne s'est plus répandue en dehors de
leorpays.
GENOUILLERE, pièce de l'armure au moyen âge, con-
viant le genou, et reunissant les grèves ou Jambi^es aux
coiisarda. Parfois elle était terminée sur le devant par un
emement conique, et portait sur le côté extérieur une
pointe longue et forte, pour préserver le cavalier d'être
terré de près par d'autres cavaliers, dont les chevaux se
seraient blessés contre ces pointes. — De nos Jours, on
nomme gmouiUère le revêtement intérieur d'une batterie
à embrasures ; sa hantenr est de i'",i9 pour les batteries
deplein fooet, et de i",33 pour celles à ricochet.
(jENRE, le premier des cinq universaux de l'École;
Idée collective qui s'étend à d'autres idées encore oniver-
jKlles. Telle est la substance par rapport au corps et à
Vesprit, Yanimal par rapport à Vhomme et aux autres
espèces, le quadrUatàre par rapport au parallélogramme
et au trapèze. En soi le genre est la collection des espèces
qui se ressemblent plus entre elles qu'elles ne ressem-
blent à quelque espèce que ce soit d'un autre genre.
Ainsi , diuis le genre animal, les espèces les moins sem-
blables entre elles, les mammifères et les mollusques, se
ressemblent plus entre elles qu'elles ne ressemblent
l'une ou l'antre à quelque espèce que ce soit d'un autre
genre, par exemple à une espèce v^^^ale. La notion des
genres, à ses différents degrés. Joue un grand rôle dans
toutes les sciences, les rapports et les vérités dont on
s'efforce d'acquérir la connaissance étant des vérités el
des rapports généraux. V. Universadx. B— b.
GKNas, en Musique, manière d'assembler successive-
ment par tons a par demi-tons les degrés de l'échelle et
d'en former des mélodies. Il y a trois genres, le dto^o-
nique, le chromatique et Venharmonique (V. ces mots),
pENas, forme particulière que prennent les noms, les
adjectifs et les pronoms, suivant le genre des êtres
dont on parle. Naturellement tous les noms qui convien-
nent à l'homme seul ou aux animaux mâles doivent être
du genre masculin : Paul , père, fUs, frère, lùm, cheval.
Tous ceux oui conriennent à la femme seule ou aux ani-
maux femelles doivent être du genre féminin : Pauline,
mère, fUU, sœur, lionne , jument , cavale, La langue
françidse ne reconnaît dans les noms que les deux genres
dont nous venons de parler : il en est de même de J'ita-
lien et de l'espagnol. Le grec, le latin, l'allemand et l'an-
glais en admettent un troisième , sous lequel on devrait
ranger les noms qui ne sont naturellement ni masculins
ni féminins : c'est le genre neutre (du latin neutrum, ni
l'un ni l'autre). Mais on trouve à cet égard infiniment de
caprice dans toutes ces langues : ainsi , en grec, le cœur
est exprimé par deux mots, dont l'un est neutre et l'autre
fcminm; de même en latin, mens, animus, ingenium,
<i esprit », expriment la même idée avec trois genres dif-
férents. Certains noms de femmes de bas étage prenaient
dans ces deux langues la forme du neutre, en restant fé-
minins. En français, en italien, en* espagnol, en all^
mand , môme caprice dans l'application du féminin ou
du masculin aux êtres qui ne sont pas naturellemmit d«
l'un de ces deux genres : ainsi arhre est du masculin,
branche est du féminin; racine est du féminin ainsi que
fige, tronc est masculin ; mont et vallon sont dn mas-
culin, montagne et vallée du féminin, etc. Aussi les
genres sont-ils loin de se correspondre dans les diverses
langues : le mot poitrine, féminin en français, a pour
correspondant en grec un nom masculin, en latin un nom
neutre. — La langue anglaise est celle qui offre le moins
d'anomalies à cet égard; elle a cela de particulier, qu'elle
fait neutres tous les noms d'animaux. P.
GBifaB ( Peinture de), nom sous lequel on comprend la
bambochade ( V. ce mot)^ les scènes de la vie qui n'ont
pas le caractère du style assigné à la peinture d'histoire,
la représentation des animaux considérés isolément et
non comme accessoires du paysage ou du tableau d^his-
toire, les vues d'édifices pris aussi isolément, les inté-
rieurs, les fleurs , les instruments , les ustensiles et tout
ce qu'on appelle la nature morte. Aux tableaux de cette
dernière espèce on réservait autrefois la dénomination
de tableaux de genre; les autres s'appelaient tableaux de
chevalet. En général, les tableaux de genre sont de pe-
tites ou médiocres proportions.
GENRES d'éloquence, DE UTTéBATCaB. V. ÉLOQUENCE,
LiTTéRATDRE.
GENS (Droit des). V. Daorr des gens.
GENS DE LETTRES, qualification de ceux qui se li-
vrent à la littérature et en font profession; elle est d'ori-
gine romaine. Les premiers boni mes de lettres chez les Ro-
mains furent des Grecs, des esclaves ou des affranchis; on
les appelait rhéteurs ( 1^. ce mot). Mais des gens de lettres
proprement dits, cultivant tous les genres de littérature,
il n'y en eut à Rome qu'à dater de la fin de la république
et surtout de l'époque des empereurs ; du temps d'Au-
guste, leur condition fut assez digne : on sortait des guerres
civiles, le pouvoir absolu avait à se faire pardonner son
origine, et l'empereur voulait ne paraître que le premier
magistrat de la république. Aussi , Virgile, Horace, Tucca,
Vanus et d'autres furent autant les amis que les protégés
d'Auguste et de Mécène. Plus tard, particulièrement sous
les mauvais empereurs, les gens de lettres, en générale
n'étaient guère plus mie des parasites. V. sur ce sujet les
Études de mosurs et àe critique sur les poètes latins de là
décadence, par M. D. Nisard, 2« édjt., Paris, 1 840, 2 v. in-8*.
G EN
961
GEN
En Grèce, sauf quelques exceptions pour de srands
Ments ou de gprands Kénies, la profenion des lettres
s'exerçait dans la patne ou m6me à Tétranger; c'était
particulièrement de l'enseignement de la rhétorique que
les lettrés viraient. Les Uttératears sérieux cultivaient
les lettres pour la gloire, pour plaire an peuple, qui quel-
ooefois les en récompensait par une gratification prise
«ans le trésor de TÉtat; ainsi Hérodote ayant la aox
Athéniens les morceaux de son Histoire qui devaient
particulièrement les intéresser, le peuple lui fit don de
10 talents ( &5,000 fr. environ ). Le même peuple voulut
que Ton comptât au poète Cherilus un philippe d'or (34
i 35 fr.) pour chaque vers d'une pièce où il avait célébré
la victoire des Grecs sur Xerxès.
Dans le nouveau monde chrétien , les gens de lettres,
mêlés au clergé, servirent la cause de la civilisation, tout
en perpétuant la tradition des sophistes. Pendant le
moyen âge, aucun écrivain ne compta dans l'ordre social ,
s'il ne faisait partie du clergé, et alors la considération
dont il Jouissait venait du corps dont il était membre, et
non de son propre mérite. En dehors de l'Église, il n'y
eut que des poètes et dea chroniqueurs asses misérables,
qui faisaient profession d'amuser les loisirs des seigneurs
et des princes.
La période de la Renaissance parut être comme an âge
d'or pour la littérature ; Charles-Quint rendait les plus
grands honneurs â Gnichardin, qui était, il est vrai , en
même temps qu'écrivain, homme d'État et guerrier. On
faisait de riches présents aux gens de lettres, on leur
donnait les revenus de riches abbayes, on les chargeait
de missions diplomatiques. Hais ces faveurs étaient pour
ceux qui Joignaient l'esprit des affaires à la culture des
lettres : ceux qui n'étaient que littérateurs ou poètes
étaient flattés et négligés; l'Arioste, par exemple, se plaint
de ce qu'après l'avoir embrassé sur les deux Joues, le
{)ape Léon X le laissait dans la misère. Les cens de
ettres purement lettrés, et mieux avisés, traitaient ces
singuliers protecteurs comme ils le méritaient; ainsi
Paul Jove disait avoir deux plumes, l'une d'or et l'autre
d'argent, afin de proportionner la louange aux dons, et
tous, en général , pensaient comme le sculpteur Cellini :
« Je sers qui me paye. »
La domesticité des gens de lettres étidt comme une tra-
dition qui passa d'Italie en France. Les littérateurs, les
poètes ne pouvaient guère être que les complaisants et les
flatteurs des princes : cela faisait, en quelque sorte, partie
de leur profession. Le cardinal de Richelieu leur imposa
son Joug avec dureté : de la même main qu'il brisait le
protestantisme, il fit son empire de la republique des
lettres.
Louis XIV rendit la position des lettrés plus éclatante,
mais non plus sûre : « L'intelligence, a dit Colbert, prêta
hommage-lige au monarque. » Nous serons plus explicite
et plus vrai en ajoutant qae les gens de lettres prêtaient
leur hommage à tous les grands seigneurs qui pouvaient les
protéger. Dans ce temps, où la noblesse de race avait une
^ haute valeur et possédait de si grands biens, nul auteur
ne publiait un ouvrage sans nne dédicace à quelque puis-
sant du jour ; voyez celles de Corneille et de Racine, pour
ne parler que des illustres : elles sentent la domesticité.
Rappelons-nous qne Richelieu tenait à sa solde nne foule
de gens de lettres, et que Fouquet, longtemps auprès,
avait aussi nombre de pensionnaires de cette sorte, parmi
lesquels on comptait La Fontaine, qui fut si Adèle au sur-
intendant malheureux.
Les auteurs bien accueillis du public trouvaient une
rémunération raisonnable de leure travaux : P. Corneille
tira 2,000 livres de chacune de ses tragédies à'AttUa et
de Bérénice; Molière en reçut autant pour son Festin de
Pierre, 1,100 pour ses Fâcheux et 1,000 pour ses Femmes
savantes; les premières représentations d*Êsope d ta
cour, comédie de Boursault, lui valurent tout près de
3,000 livres. Rappelons-nous qu'alors l'argent avait en-
viron 6 fois plus de valeur qu'aujourd'hui {V, Monhaib),
et les sommes ci-dessus devront se traduire, en chiffres
actuels, par 13,000 fir., 6,600 fr., 6,000 fr., et 18,000 fr.
— Les manuscrits des livres se vendaient un peu moins
cher, car Boilean ne reçut ponr son Lutrin que 600 liv.
(soit 3,600 fr.), et Racine céda le manuscrit d^Andro-
moque pour »)0 liv. (soit 1,200 fr.); on voit que ces
prix sont assez équitables, Roileau était dans tout Féclat
de sa réputation, et Radne conmiencait la sienne. —
Les pensions royales, distribuées en 1663 aux gens de
lettres, étaient fixées avec une vraie magnificence : Méze-
rai , historiographe de France, en avait une de 4,000 liv.
(24,000 tr»)i Chapelain, alon « le premier poète dn
monde pour l'héroïque », d{saltH>n, recevait 3,O0U liv.
(18,000 fr.); P. Corneille, 2,000 Uv. (12,000 fr.); Bense-
rade, 1,500 liv. (0,000 fr.) ; Molière, qui n'avait encore
donné que l'Êeolê des Femmes, sa première bonne comé-
die, 1,W)0 liv. (6,000 fr.); et Racine, qui en était à la
Thibifde, 800 Itv. (4,800 fr.).
La position sociale des gens de lettres s'améliora pen-
dant le xvm* siècle : la hante société, reconnaissant leur
supériorité intellectuelle, vivait avec eux presque sur le
pied d'égalité ; les srands seigneurs, tout en demeurant
des protecteurs, recherchaient les lettrés, les admettaient
dans les Jouissances de l'existence la plus opulente.
Néanmoins, au fond, ils gardaient vis-àp-vis de ces privi-
légiés de l'intelligence la morgue aristocratique. Ils ne
faisaient rien pour eux : les récompenses les plus effectives
qu'on leur accordait étaient des places près des ministres,
des surintendants ou des princes, et des privilèges de
Joumanx. Il y avait ausd des pensions, mais la plupart
du temps le Trésor ne les payait p«i. L'accueil et les gra-
cieusetés du grand monde devenaient une charge pour
les gens de lettres mal rentes, et beauconp fuyaient cette
chax^ en se réfugiant dans la retraite. Chamfort a bien
peint , et sans doute éprouvé leur condition, lorsqu'il s
dit , avec son acrimonie habituelle : « Les gens de lettres,
surtout les poètes, sont comme les paons, à qui on Jette
mesquinement quelques graines dans leur loge, et cpi'on
en tire quelquefois ponr les voir étaler leur qneue ; tandis
que les coqs, les poules, les canards et les dindons se
f>romènent librement dans la basse-cour et remplissent
eur Jabot tout à leur aise. »
Les gens de lettres, en voyant lonre écrits, leura opi-
nions attirer l'attention de la France et de l'Europe, sup-
portaient difficilement cette position inférieure : Us se
sentaient propres â tout, et la constitution de la société
en faisait une espèce de classe d'inutiles, à laquelle au-
cune carrière ne s'ouvrait dans l'administration on le
puvemement de l'État. Aussi , quand vint la Révolution,
ils prirent , de l'autorité du talent , la i
place qu'on leur
fusait depuis trois siècles, et, après n'avoir été rien dans
l'État, ils y furent tout par la presse quotidienne on pé-
riodique, et quelques-uns par la tribune. Lonqne le pays
tomba à la merci de la Terreur, ce gouvernement consi-
déra les gens de lettres comme ses ennemis, et en immola
beaucoup; d'autres purent braver les tyrank, et mon-
trèrent le plus noble courage : Chénier, en faisant ap-
plaudir en plein théâtre, dans la tragédie de Coius GraC"
chus, ces mots qui étaient une réclamation et une
accusation contre les détenteura du pouvoir : « Des lois,
et non du sang; » Delille, en composant, contre Robes-
pierre tout-puissant, son dithyrambe sur l'immortalité
de Tême; Laya, en donnant sa comédie de VAmi des
lois, qui n'était pas un bon ouvrage, comme il le disait
lui-même 30 ans après, mais qui était une bonne action.
Les gens de lettres (et l'on pourrait en citer bien d'antres
encore) se firent alon les vengeun de la morale pu-
blique, de la liberté et de l'hnmanité indignement foo-
lées aux pieds par les plus scélérats comme les plus
ignobles de tous les tyrans.
Ix>r8que le Consulat eut rétabli l'ordre dans le gouverne*
mentd'aboid, puis dans les esprits; quand ensuite l'Em-
pire eut tout pacifié à l'intérieur, les gens de lettres en
général, voyant l'égalité établie et les oroits des citoyens
assurés, d&abusés un peu de la liberté par les excès de
la licence et de la tyrannie qne la France venait de subir,
se rallièrent sousl'&ide du gouvernement rtoarateur d'un
homme du plus puissant génie; ils se prêtèrent de nou-
veau à Jouer devant le souverain le rôle des poètes et des
littérateure du temps de Louis XTV. Ce rêle leur semblait
d'autant plus séduisant, que les preroien d'entre eux
étaient admis aux places, dignités et grands honneura
politiques du nouvel Empire. Les antres recevaient des
pensions, ou, dans les administrations, des plaoBS pen
assujettissantes ; Français de Nantes, par exemple, direc^
teur général de la régie des Droits réunis, avait dans son
personnel' beaucoup de poètes et de littérateurs, qui ne
venaient guère qu'une fois par mois à leur bureau, pour
V toucher les honoraires d'une place donnée comme un
bénéfice n'obligeant pas à résidence.
La Restauration continua ces errements en faveur de
ses partisans; on se souvient que le poète Désaugien fut
pendant longtemps investi du titre officiel de chansonnier
de la ville de Paris, aux appointements de 6,000 fr. par
an. Dans le même temps, a peu près, Roger, poète co-
mique, qui a laissé 2 ou 3 jolis ouvrages, fut directeur
général des postes; plus tard, M. de Barante, l'historien^
occupa la place de directeur général des contributions
GÉN
965
GÉO
Indiraelat: Copier fat conseiller d'Stkt et commissaire
da Tol devant les chambres l^slatives ; Chateaubriand
fut ambassadeor et ministre; SL Guizot et M. Thiers en-
trèrent dans la hante administration, et bien d*autres
eena de lettres prirent rang après eux, conséquence de
la Rèrolution, qui arait ouvert toutes les carrières à
toutes les intelligences.
La prene périodique olTrit un attrait et un refbge aux
écriTUDs plus indépendants, et quelquefois servit de
mardiepied pour arriver à une foule de places, et même
à de hauts emplois publics; M. de Bourqueney, par
exemple, qui occupa successivement avec distinction les
deux graindes ambassades de Constantinople et de Vienne,
sortit de la rédaction du Journal des Débats, et, pendant
Its dernières années de la Restauration, Chateaubriand
fut un des rédacteurs les plus assidus de la même feuille.
Le droit de publier ses pensées, sous quelque forme que
ce fût, concédé, ou plutôt renouvelé par la Charte de
Louis XVni, créa une carrière nouvelle pour les gens de
lettres : 4>n mit tout en Journal ou en revue, depuis la
littératare savante ou sûrieuse Jusqu'à hi littérature lé-
gère et Jusqu'aux romans : en un mot, le livre se fit
foomal, et les écrivains d'un talent véritable trouvèrent
là une Juste et souvent très-libérale rémunération de
leurs travaux. Cette combinaison de la presse périodique
assura l'indépendance de Thomme de lettres, et le classa
dans la société, non plus, comme sous l'ancien régime,
par sa profession, inais suivant son plus ou moins de
mérite.
Yoîlà quel est aujourd'hui l'état, la position, la condi-
tion des gens de lettres. Comme partout dans notre so-
ciécé, lia sont enfants de leurs œuvres, se classent par
leur mérite, et peuvent, dans les cas de talents distin-
gués ma de génie, prétendre aux premiers rangs non-
seulement dans le monde, mais dans nos grands corps
politiques et dans les conseils du souverain.
Mous parlons ici des gens de lettres vraiment doués
pMmr exercer cette noble profession, et des chances pos-
sibles iMur eux d'arriver, par beaucoup de travail, à
conquérir une position dans le monde. Biais outre que
les chances heureuses ne sont pas pour tous, le talent
seul, sans certaines qualités du caractère, peut vous
laisser dans une obscurité misérable. Une autre cause de
non-réu^ite, c'est de prendre un goût, une passion
même, si l'on veut, pour une vocation ; dans ce cas, la
profeMion des lettres est la plus décevante, sous tous les
rapports : ordinairement, elle vous attire le mépris des
IjBtts sensés, ou qnel^efois, à grand'peine et par exoep-
tîoD, ane froide et mmce estime toi;4onrs mêlée de pitié.
Ge que nous disons là existe : comme nous ne fiusons
pas des portraits, plus de détails seraient délacés ici ;
mais nous avons dû constater un fkit, qui est comme une
ombre appartenant à notre tableau.
An milieu de ces deux extrêmes de gloire et de mi-
aère, la condition des hommes de lettres, en général, a
progressé avec celle des autres classes de la société : elle
est, en mcijrenne, meilleure Qu'autrefois. — A Paris, ils
■e sont constitués en Société; ainsi, il y a une Société
des auteurs dranêotiques ( V. Aotboss), et une Société des
gems de lettres: cette dernière est composée, en grande
partie, d'écrivains de la presse périodioue littéraire : elle
a poor objet de veiller aux intérêts ae tous ses mem-
hfèa, dont le nombre est illimité, de leur faciliter les
nMjfsns de tirer tout le parti possible de leurs ceuvres,
de maintenir intacte leur propriété littéraire, enfin de
secourir ceux qui sont dans le besoin. L'État a reconnu
cette Société, ^et, depuis 1857, lui accorde une subven*
tion annuelle *de 5,000 fr. Le principal revenu de la So-
ciété vient de ses memlnres : il consiste en cotisations
qu'un comité d'administration fixe suivant les besoins,
mais qui, dans aucun cas, ne peut dépasser % fr. par
mois. En outre, tout membre nouveau doit, à son en-
trée dana la Société, verser à la caisse une somme de
» Jh C D-tT.
GÉRUFLEXION, acte de respect et d'humilité qui se
ftdt en fléchissant le genou. Il en est fait plusieurs fois
mention dans l'Anden Testament, et l'usage en exista
de bonne heure parmi les chrétiens pendant leurs prières.
De Piques à la Pentecôte on fsisait toutes les prières de-
hont, en mémoire de U résurrection de J.-C Les Abys-
sins, les Russes et les Juifs ne s'agenouillent pas. Au
vm* siècle, la secte des Affonydites regardait la génu-
fiedon comme une superstition. Plusieurs rois exigèrent
qn'on fléchit le genoa en leur parlant. Autrefois les dé-
potés do tien état parlaient à genoux an roi de France.
tn vassanz rendaient de même hommage aux seigneurs.
GEOFFROI rr Bi\(]NlSSËNDE , roman provençal da
cycle d'Arthur. Geo(!h>i vient d'être armé chevalier par
le roi en personne, quand un inconnu entre dans la salle
du festin et tue un des convives d'Arthur. Geoflh)i obf
tient la permission de poursuivre cet insolent chevalier t
à travers mille aventures il l'atteint, et le défait en
combat ringulier. Le prix de sa victoire est la belle Bru-
nissende, dont il a délivré le père. — Ce roman, d'un
auteur inconnu, a été publié par Raynouard, d'après
deux manuscrits du xin* siècle. V* Histoire littéraire de
la France, t. XXII. H. D.
GÉOGRAPHES (Ingénieurs). V. iNGAfima.
GÉOGRAPHIE ou DESCRIPTION DE LA TERRE (dtt
grec ghè, terre, et graphéin, décrire). Elle touche aux
sciences mathématiques, physiques et historiques, sui-
vant que l'on considère le globe dans ses rapports avec le
reste de l'univers, dans sa structure intérieure ou exté-
rieure, enfin dans la manière dont sa surface a été ou est
encore partagée entre les différents peuples. De là trois
grandes avisions : Géogrc^hie mathématique, physique
et politique. — La Terre n'étant qu'un des moindres
globes de l'univers, on ne peut en aborder l'étude sans
connaître quelles attractions réciproques l'unissent aux
autres planètes oui composent avec elle le système so-
laire, combien durent sa révolution autour du soleil
et sa rotation sur elle-même, d'où naissent la différence
des saisons et celle des Jours et des nuits; il faut con-
naître aussi sa forme, ses dimensions, son volume, ses
rapports avec la lune, son satetlite, dont les mouvements
déterminent sur la terre les phénomènes des marées,
toutes choses qui rentrent dans le domaine des mathé-
matiques et de l'astronomie. Aux mêmes sciences appar-
tient la construction des cartes et des globes représen-
tant Ui Terre, puisqu'il est impossible déplacer exactement
les différents lieux du globe sans y avoir tracé préalable-
ment les cercles de longitude et de latitude. La géom-
phie touche aux sciences physiques psr les reiattoni
étroites des phénomènes de Talr et des eaux avec les
climats et les productions du globe, par la nécessité de
connaître les divers terrains qui composent la croûte ter-
restre, d'étudier les végétaux qui la parent et les animaux
qui l'habitent. A ne considérer même que les formes de
la surface du globe, on dîrise encore la géographie phy-
sique en orographie ou étude des parties solides, et ày-
drographie on science des éléments liquides. Enfin, si,
au-dessus des végétaux et des animaux, on examine
l'homme, c'est l'histoire qui apprend les migrations des
races humaines, les déplacements des peuples, et quelle
partie de la Terre chacun a possédée ou possède encore.
De là encore deux parties distinctes : la géographie po^
litique, enseignant les limites et les divisions intérieures
des États d'aujourd'hui, et la géographie historique, celles
des États çiui ne sont plus.
Les trois psrties de la géographie sont si intimement
liées, que la science n'a véritablement commencé d'être
(Tu'apres les premiers développements de Tastronomie et
des sciences d'observation , et avec l'établissement des
grands empires civilisés; mais ces trois parties n'ont
point marché d'un pss égal ; c'est par des travaux com-
mencés seulement au si&Ie dernier que l'on a connu la
forme exacte et les véritables dimensions de la planète i
c'est seulement de nos Jours, après les grandes déeoo*
vertes en chimie, en physique et en géolone, c[u'on a pn
formuler les lois générales de la géographie physique. Et
cependant il existe encore, après tant de navigations et de
voyages, des contrées fermées à notre curiosité : sani
parler des deux pèles, peut-être à Jamais inacoessibles9
personne n'a risité encore le centre de l'Afrique et de
l'Australie. Dans la géographie politioue seule, les An-
ciens nous ont laissé, chez le géograpne Strabon et ches
les grands historiens grecs et launs, des modèles qne
notre siècle n'a pas surpassés.
Histoire de la géographie dans l'antiquité, — A rori-
gine, la gé^^phle est toute ethnographie. Le cha-
pitre X de la Genèse n'est qu'une liste généalogique des
peuples connus des Hébreux. Il en est de même de la
géographie d'Homère, qui n'a fait autre chose que peindre
par quelques épithètes les contrées bien connues des
G3Eecs et entourer de légendes les pays les plus éloignés t
il fiuit un reste de la dévotion superstitieuse dont quel»
ques anciens honoraient leur pcistO} pour trouver un
système géographique dans la descnpuon du bouclier
d'Achille. Cest seulement au milieu du vi* siècle que
commence la science géographique , avec les découvertes
astronomiques et mathématiques de Pythagore qui en-
seigne Ul sphéricité de la Terre,' avec les voyages du 8ap
GÉO
966
GËO
mien GoIctUi dans rEspagne méridionale et au delà da
dâtxxiit de Gadès, avec les recherches des philosophes
ioniens , entre antres d*Anaximandre, qui chercha à dé-
terminer la grandeur de la Terre, enfin avec la fondation
de Tempire des Perses, maîtres des trois contrées où
s'étaient développées d*ahord les sciences mathématiques
et nautiques, la Chaldée, rÉ|^pte et la Phénicie. L'ex-
tension de cet empire vers rOnent, la fondation des co-
lonies grecques sur les bords de la mer Noire et leur
commerce avec les tribus septentrionales, permirent à
Hérodote de donner le premier une idée précise de la
Terre connue de son temps. Hérodote est le père de la
géographie comme de Thistoire. S'il commet des erreurs
tor l'étendue reUtive de l'Europe, de l'Asie et de la
Libye, il connaît bien le bassin de la Méditerranée, prin-
cipalement dans sa partie orientale; il décrit parfaite-
ment la mer Noire et les fleuves qu'elle reçoit; il a vu
r^^te et la plus grande partie de l'Asie occidentale; il
tait d^à (ce qui a été contesté encore pendant cinq
dècles) oue la Caspienne est une mer isolée; les tradi-
tions qu'il a recueillies sur l'Inde, sur la circumnaviga-
tion des Phéniciens autour de l'Afrique, sur le voyage
des Nasamons au centre de ce continent, ont fourni de
précieux renseignements lli la critique moderne; il men-
tionne avec soin le climat et les productions des diverses
contrées, note le caractère de leurs habitants, enrichit
ses descriptions des traditions historiques des différents
peuples, analyse leurs gqpvemements, et fait connaître
les sources et l'étendue de leurs richesses. La géographie
est encore mêlée à l'histoire, mais elle existe déjà comme
science. C'est aussi l'époque où naît la Cartographie,
dont les premiers éléments paraissent avoir été em-
pruntés par les Grecs aux Êgvptiens et aux Phéniciens.
Anaximandre dressa la première mappemonde connue,
où il donnait à la Terre la forme d'un cylindre convexe
\ sa partie supérieure et ayant un diamètre trois fois plus
considérable oue sa hauteur. Un peu plus tard, Aruta-
goras, ^yran oe Bfilet , apporte au roi de Sparte, Gléo-
mène, pour le décider à soutenir les Ioniens contre les
Perses et à aller attaquer le grand roi Jusqu'au cœur de
ses États, une planche de ciuvre où étaient représentés
les contours de la Terre, les mers et les rivières, les
noms et l'emplacement des peuples établis entre la Grèce
et le centre de l'empire persan. Hérodote, après avoir
parlé de cette carte, donne la description d'un Itinéraire,
véritable livre de postes, indiquant, par journées de routes
et par parasanges, la distance d'Épnèse à Suze.
Entre la fondation de l'empire des Perses et celle de
fempire d'Alexandre, qui maûrque la seconde époque de
la géographie ancienne, se placent plusieurs voyages
qui étendent les limites du monde connu , et bientôt
Aristote, ses disciples et toute l'école d'Alexandrie, re-
cueillant ces connaissances, donnent à la science un im-
mense développement. Ainsi, deux Carthaginois s'avan-
cent bien au delà des Colonnes d'Hercule, Hannon sur
les côtes occidentales d'Afrique, Himilcon sur celles d'Eu* *
rope, où il est suivi, un siècle après, par Pythéas, qui
Fenêtre Jusqu'au nord de la Grande-Bretagne et iusqu'à
entrée de fa Baltique. Alexandre le Grand étendit les
connaissances des urecs dans l'Inde, fit relever par ses
bématistes ou ingénieurs-géographes, Diognète et Béton ,
les marches Journalières de son armée, et explorer les
côtes de la mer Erythrée par ses amiraux Néarque et
Onésicrite : cette expédition créa donc la topographie mi"
lUaire et Vhydrographie maritime, branches importantes
de la cartographie. Il ne manouaft aux Grecs que des
connaissances mathématiques plus étendues; déjà cepen-
dant Eudoxe de Cnide avait essayé d'assi^'ettir la géogra-
{>hie à des observations astronomiques, et Pythéas, à
'aide du gnomon, avait déterminé presque exactement la
latitude de Marseille, sa patrie. Biais par l'expédition
d'Alexandre, les nombreuses observations des Égyptiens
et des Chaldéens devinrent accessibles aux Grecs et leur
fournirent des données nouvelles. Aussi voyons -nous
presque aussitôt Aristote enseigner la sphéricité de la
Terre, en évaluer la circonférence presaue aussi exacte-
ment que l'ont fait les modernes, et deviner le Nouveau
Monde. Son disciple Dicéarque chercha à déterminer les
Keux situés sous le parallèle de Rhodes; enfin un biblio-
thécaire d'Alexandrie, Ératosthène, unissant aux re-
cherches antérieures ses propres observations, créa un
système complet de géographie et de cartographie crui
resta classique pendant quatre siècles. Quoique connais-
sant la sphéricité de la Terre, il crut , comme tous les
géographes de l'antiquité, que la partie habitable du
gloM B'oœupait qu'une surface assez restreinte de l'hé-
misphère boréal, entre l'équateur et le pôle, et qu'on
pouvait, sans grande erreur, considérer cette portion
étroite <te la sphère comme une surface plane. De là une
double erreur : d'abord la projection de sa carte, où les
méridiens, comme les parallèles, étaient des lignes
droites, était une projection plate par développement cy-
lindrique qui défigurait les contrées septenoionales; eUe
était ensuite beaucoup plus allongée de l'E. à 1*0. que do
N. au S. De là le nom de longitude ou longueur donné
par les Anciens à l'étendue de la Terre, mesurée d'Orient
en Occident, et celui de latitude ou largeur, du Nord au
Sud, noms conservés par les modernes, bien ou'ils ne
représentent plus aujourd'hui qu'une idée fausse. D'autres
erreurs venaient encore de la fausse direction du prind-
pal méridien et du principal parallèle. Ce dernier était
celui de Rhodes, appelé aussi diaphragme de Dicéarque,
parce que cet astronome, d'après des observations erro-
nées, avait placé sous ce parallèle de Rhodes les points
principaux du bassin de la Méditerranée, les Colonnes
d'Hercule, le détroit de Sicile, le cap Sunium,'lBsas, et
une longue chaîne de montages appelée du nom gtodral
de Taurus, et mi'il supposait s'étendre en ligne droite à
travers toute l'Asie. Le principal méridien était celui
d'Alexandrie, sous lequel Ératosthène, trompé par les in-
dications toujours inexactes du gnomon , avait placé au
Sud Syène et Méroé, au Nord Rhodes, Byzance et l'em-
bouchure du Borysthène. Enfin, refusant de croire à l'as-
sertion d'Hérodote sur l'isolement de la Caspienne, il
faisait de cette mer un golfe de l'Océan septentrional ,
conformément à ses idées systématiques sur la connexité
de toutes les men du dobe. Malgré ses erreurs, le sys-
tème d'Ératosthène prévalut pendant quatre siècles sur
celui de l'astronome Hipparque, beaucoup plus mathéma-
tique. Hipparque démontra qu'on ne pouvait déterminer
exactement les positions respiectives des lieux, qu'en par-
tageant le globe en cercles correspondants et semblables
à ceux de la sphère céleste; il voulut déterminer les U^
titudes et les longitudes au moyen d'instruments in-
ventés par lui ou dont il fit le premier un fréquent
usage, I astrolabe et la dioptre; U sui»titua à la projection
plate d'Ératosthène un châssis à méridiens convergents,
en tenant compte du décroissement des degrés de longi-
tude proportionnellement à l'élévation des latitudes,
c.-à-d. qu'il inventa la projection penpective stéréogra-
phique.
Les empires de Cyrus et d'Alexandre avaient principa-
lement étendu ven l'Orient le domaine de la géographie :
la domination romaine, qui forme la troisième gj^uade
époque de la géographie ancienne, fit principalement con-
naître l'Occident et le centre de l'Europe. L'Afrique car-
thaginoise tut décrite par Polybe à la suite des guerres
puniques : les conquêtes de César dans la Gaule et les
expéditions de ses successeun dans la Grande-Bretagne
et la Germanie doublèrent presque l'étendue du monde
ancien. Mais la géographie mathématiqpe semble oubliée
pendant deax siècles, et la science se nome à la géogra-
phie descriptive et aux itinéraires, comme le prouvent les
ouvrages de César lui-même, de Strabon, oe Pline, de
Pomponius Mêla, de Tadte, les Périples de Denys le Pé-
riégète et d'Arrien, et les Stathmes Piurthiques (stations
des routes) d'Isidore de Charax : ces ouvrages étaient
sans doute accompagnés de cartes itinéraires. César, et,
après lui, Auguste, avaient ordonné à trois géomètres
grecs, Théodote, Zénodote et Polvdète, de mesurer la
surface de l'empire romain, et le gendre d'Auguste,
Agrippa, avait exposé à Rome une carte du monde dont
Pline fait souvent mention. C'est sans doute de cette
carte que les Romains avaient extrait les itinéraires dont
quelques-uns sont parvenus Jusqu'à nous (T. Imé-
RAïass). L'ouvrage de Strabon représente l'état de la
science au commencement de l'are chrétienne. Cet au-
teur oriente mal l'Europe occidentale et les côtes méri-
dionales de l'Asie : ainsi, il pense que les Pyrénées se
dirigent du N. au S., et que le Rhin leur est parallèle ;
que la Grande-Bretagne a une forme triangulaire, et qua
rirlande est située entièrement an N. de la grande lie. U
ne connidt rien au delà de l'Elbe, et, dans la Méditer-
ranée même, il donne à l'Italie une direction presque
entièrement de 1*0. à l'E. Gomme Ératosthène, il fait da
la Caspienne un golfe de l'océan septentrional, et, dans
sa pensée, la côte de l'Inde depuis l'indus Jusqu'en cap
Comorin se dirige tout entière ven l'Orient. Mais la
Grèce et la plus grande partie de l'Asie sont riches de
descriptions exactes et de détails historiques du plus
haut intérêt, et l'ouvrage de Strabon est le modèle la
plus parfait de la géographie politique* Dans le second
GÉO
967
GÉO
ilède do rèie elirôtieime, la géographie mathématique
«■t tiiée ds roubU par deux Grecs, lialin de l^et Pto-
lémée. Marin lenoaTela le système des cartes plates
d*EratoatbèQe ; mais ses cartes, comme ses ouvrages,
tout perdoes, et Ptoiémée seul nous fait comialtre les
unes 0t les motres. L*onvTage de Ptolômée est le résumé
de toute la adenoo géographique de Tantiquité, à Tépoquo
ds la plus grande extension de Tempire romain. E^lé-
mée oriento bien plus exactement que Strabon TEspagne,
l'Italie, la Gaule et les lies Britanniques; il connaît,
quoique on peu confusément, le S. de la Baltique iusque
vers m 58^ de latitude; en Afrique, ses connaissances
sur le Niger et principalement sur le Nil supérieur sont
faites pour nous étonner encore aujourd'hui ; en Asie, il
revient à risolement de la Caspienne, tout en donnant à
cette mer une fausse extension de TE. à rO. ; une partie
de TAsie centrale est désignée sous le nom de Sérique,
et l'Inde an delà du Gange assez bien décrite Jusqu'au
Grand Golfe ( de Martaban }. Mais, à côté de ces mérites,
on renoontre l'hypothèse étrange d'une terre continue
allant de la c6te de l'Inde à celle de l'Afrique, et faisant
de la mer des Indes une immense Caspienne, hypothèse
qui s'est perpétuée pendant une partie du moyen âge, et
a longtemps lait croire aux Européens qu'il éuit impos-
sible d'arriver aux Indes en contournant l'Afrique. 11 ne
fallait rien moins que l'expédition de Vasco de Gama
pour détruire cette erreur. Dans ses cartes, Ptoiémée
sobstîtiia aux nrojecdons d'Ératosthène et d'Hipparque
la frqjêeUon âdimydcfidê (c-à-d. ayant la forme dHm
manteau), projection par développement conique modi-
fiée, et qui se rapproche beaucoup de celle que nous ap-
pelons axjourd'hni projection de Flamsteed corrigée. Les
parallèlee y sont paiement formés d'arcs de cercle con-
centriques et équidistants, et les méridiens conservent
leur espacement réel sur tous les parallèles. Ptoiémée
donne, an dernier livre de sa Géographie, la description
des 26 cartes (10 d'Europe, 4 d'Afrique, 13 d'Asie) qui
accompagnent son ouvrage dans les manuscrits que nous
avons conservés de lui ; mais on pense oue ces cartes
sont, pour le dessin, l'osuvre d'un artiste Alexandrin du
IV* siècle, Agathodœmon, qui les construisit d'après les
calculs de Ptoiémée, et qu^elles ont été plus ou moins
fidèlement reproduites par les copistes du moyen âge.
Les latitudes et les longitudes de Ptoiémée sont loin
d'être toijours exactes, et, par suite, ses cartes nous
étonnent par la configuration souvent bizarre des pays
qu'elles r^résentent : alnd, ses longitudes renferment
principalement des erreurs énormes vers l'Orient, où il
donne à la Méditerranée une étendue de 20 degrés de
plus qu'elle n'en peut avoir, erreur qui a persisté )us-
qu'anx cartes de Delisle au commencement du xvm" siècle.
11 recule les bouches du Gange de plus de 46 degrés au
delà de leur véritable position; mais c'est par cette hy-
pothèse de l'extension exagérée de l'Asie vers l'Orient et
du peu de distance auquel elle devait se trouver de l'Es-
pagne par l'Ouest, que Colomb a été amené à chercher -
vers rOcddent la route des Indes, et a découvert un
Nouveau Monde qu'il prit pour une partie de l'Asie.
Dans l'occident de la Méditerranée, les latitudes et les
longitudes de Ptoiémée sont beaucoup plus exactes, et,
par suite, le dessin de ses cartes, comme leur graduation,
s'éloigne beaucoup moins du dessin et de la graduation
modernes.
Géogra^hiB du Moyen Age, — A partir du v* siècle et
pendant près de 1,000 ans, les travaux géographiques de
i'aatiqoité semblent n'avoir pas existé. Les secs abrégés
d'Agathémère et de Marden d'Héraclée, le poème confus
de Festos Aviénus, les Notices des provinces ou de l'Em-
pire, les Dictionnaires géographiques de Vibius Sequester
et d'EnsèbOt voilà les dernières productions de l'âge ro-
main. Un moine égyptien du vi* siècle, Cosmas Indico-
Çleosiès, représente, dans sa Topographie chrétienne, la
erre comme une vaste surface plane entourée d'une
mursilie; 11 ne peut comprendre la sph^dté de la Terre,
et cette opinion lui semble une héréde et un reste de
paganisme* Le dessin Joint à son ouvrage est la plus an-
cienne mappemonde du moyen âge. Au vn* siède appar-
tient une géographie en latin barbare, composée par un
anonyme appelé le Géographe de Ravenne, et qui ne sert
presooe qu'à nous (jdre regretter tous les ouvraces an*
ourd'hui perdus qu'il a consultés. Les cartes de cette
époque, oeUe de l'abbaye de SMSall an vn* dècle, et la
mappemonde en argent que possédait Gharlemagne , n'é-
taient pas sans doute moins barbares que les livres,
ai l'on en loge par odle qui accompagne un manuscrit
ée VjlpoeeuypM conservé à la Bibtioâièque royale de
Turin. Cette mappemonde parait être du jx* dècle i la
Méditerranée, qui y est représentée par tfn parallélo-
gramme régulier, s'étend Jusqu'au miheu de la carte, où
elle est rejointe à angle droit par une masse d'eau sépa-
rant l'Europe de l'Asie, et se réunissant à l'Océan qui
entoure la Terre; le Nil y est ausd large que la Méditer-
ranée, et toutes les lies sont de forme carrée et d'une
étendue à peu près égde. — Pendant que l'Europe occi-
dentale était ploneée dans l'ignorance, les Arabes recueil*
laient l'héritage de la sdence grecque. Au ix* siède , le
calife Al-Mamoun fit mesurer un degré du méridien dans
le désert de Syrie, entre Rakka et Palmyre, et traduire
en arabe la géographie de Ptoiémée. C'est surtout vers le
centre et l'orient de l'Ade , et vers les côtes orientales
de l'Afirique que la domination arabe étendit les limites du
monde connu. La conquête du bassin de i'Indus mit les
Arabes en rdation avec l'Asie centrale et même avec la
Chine, où ils se rendaient par deux routes, celle de terre
qui leur fit connaître le Thibet, le Turkestan diinois et
la Chine méridionale, et celle de mer qui les mena à Gey-
lan, à Sumatra et à toutes les lies de la Malaisie. En
Afrique, ils étendirent leur religion jusqu'à Sofala, et
colonisèrent Madagascar, qu'ils appelaient Phanbalon.
De ce mouvement de découvertes naquit une riche litté-
rature géographique; parmi les géographes Arabes, on
dte Ma^udi et ibn-Haukal au x* dède, Edrid au xu*.
Ibn-d - Ooardy , HamdouUah , Aboul- Feda , El - Bakoni
au xiv% et, au xv*, Léon l'Africain, qui appartient presque
à la géographie moderne. Mais les cartes de ces géogia-
{>hes sont inférieures à ce (fue pouvaient faire espérer
eurs ouvrages. Les plus curieuses sont cdles, au nombre
de 60, qui accompagnent l'ouvrage d'Edrid, et dont trds
enrichissent la traduction qu'en a donnée M. Jaubert
(Paris, 1836). — Les pirateries des Scandinaves firant
connaître l'Europe septentrionale et même un nouveau
monde trop tôt oublié. Le roi saxon Alfred le Grand
nous a conservé les relations de deux Normands, Other
et WulfÎBtan, qui, dans le ix* siède, explorèrent, lo pre-
mier les côtes de l'Océan Gladal et de la mer Blanche,
le second cdles de la Bdtique. D'autres naviguent an
N.-O., découvrent les lies Féroé en 861, et en 872 lis-
lande, d'où Erik Rauda s'élance en 982 pour aborder au
Groenland, bientôt assez peuplé pour être divisé en deux
cantons et recevoir un évêque. En 1002, Ldf, fils d'Erik,
et Biôm cinglent au S.-0., découvrent une tle rocheuse
qu'ils appellent Uelleland, puis une terre basse. Mark"
land, et un pays couvert de vignes sauvages qui lui m^
ritent le nom de Vtniond. Le jour le plus court y ayant
été observé de 8 heures, on ne peut méconnaître que les
Scandinaves ont découvert les côtes du Canada actud et
des États-lkiis jusque vers le 42* degré, et, par consé-
quent, trouvé rAmérique avant Colomb. Ces contréoi
inrent révélées à l'Europe par deux Vénitiens, les frères
Zeni, qui y firent une expiédition en 1381 : la carte oui
accompagna la relation de leur voyage, imprimée seule»
ment en 1558, représente assez exactement les côtes do
Danemark et de Norvège, l'Idande, et d'autres contrées
dont le nom apparaît pour la première fois dans la carto*
graphie, la Fnslande (éans doute les Féroè), le Groen-
land, enfin Estotiland et Drocoo, voisins du Vinland, et
qui paraissent être Terre-Neuve et la Nouvelle-Éoosoe.
Mais l'invadon d'une flotte ennemie, en 141 8, détruisit ces
colonies normandes de l'Amérique, et le monopoledu com-
merce avec l'Islande et le Groenland que s était arrogé
la couronne de Norvège enleva à l'Europe la connaisaanee
de ces découvertes ; il est probable que Colomb, dans soa
voyage en Islande, en l477, n'en eut aucune connais
sauce, puisque, au lieu de se diriger vers le N.-0., où
il eût été certdn de trouver des terres, il dla au Sud
jusqu'aux Canaries, et de là vers le S.-O., dans les para^
îèles de l'Inde, dont il se flattdt de toucher les extréniités»
— Après les Scandinaves, deux autres peuples firent fsirs
à la géographie des progrès dont les iniits ne fùreat
point perdus pour la sdence; ce sont les Italiens et les
marins de la côte orientale d'Espagne, Catalans et M^|or-
quins. Les Croisades rapprocheront les Européens des
Orientaux, et l'invasion dies Mongols, qui, dans le ooo-
rant du xm* dède, soumirent la plus snuide partie de
l'Ade et détruisûrent l'empire des Califes, détermina
les pi^Ms et les rois européens, entre autres S* Louis, à
envoyer des ambassadeurs à ces ennemis des Musul-
mans. Delà les voyages de Nicolas Ascelin, de Jean dm
Plan-Carpin, de Rubruquis (1245-1295], qui firent asB«
fidèlement connaître la Rusue et l'Ade centrde. Us eoal
tous surpassés par le Vénitien Marco Polo, qui pareomt
de 1271 à 1205 toute l'Asie centrde, la Chine qnm
GËO
968
GËO
appelle Cathay, visite le Japon, qo*il nomme Zipangou,
■ekninie à Sumatra, et revient par le 8ad de l'Asie et
TAÂiqae. Sa relation, sans cesse dtée par Colomb, le
confirma dans la confiance qu'il accordait aux longitudes
erronées de Ptolémée, et le poussa plus fortement encore
à chercher la route des Indes par TOcddent. Les Croi-
ttdes donnèrent encore l'essor aux marines de Venise,
de Gdnes et de Pise, et firent faire de rapides progrès à
U cartographie de la Méditerranée. Les neuf cartes ma-
rines du Génois Visconti, datées de 1318, et conservées à
la Bibliothèque impériale de Vienne, donnent, avec des
formes assez justes et des proportions généralement ob-
servées, la Méditerranée, le Pont-Euxin et l'O. de TEu-
rope. Le Vénitien Sanuto, proposant, en 1321, une croi-
sade commerciale pour arracher le commerce des Indes
au Soudan d'Égjrpte, accompagna son livre ^Sicrsta Pi"
ddium Crucis) d'une carte qui faisait connaître les pays
dont il purlait ; elle a été reproduite par Bongars dans ses
Gesta Ùei per Francos. Ce sont encore des Vénitiens, les
firères Pidgauli, qui publièrent en 1367 une grande
mappemonde (anj. à Parme), où les formes sont déjà
exactes, les détails nombreux et disposés avec sagacité.
De leur côté, les Bfajorquins avaient inventé, à la fin du
xm* siècle, les cartes planes, et les Catalans le disputè-
rent bientôt en hardiesse et en science nautiques aux
républiques italiennes. Aucune carte de cette épooue n'a
une plus haute valeur que VAAom Catalan de 1375 (à la
Bibliothèque impériale de Paris ) ; l'Europe y est Téptê-
sentée avec détaib, particulièrement dans le S.-0. ; le
lac Issikoul, dans l'Asie centrale, y est figuré; mais ce
qui est surtout curieux, c'est la représentation des côtes
occidentales d'Afrique, où l'on trouve le cap Bojador, les
Açores, Madère sous le nom analogue d'Isola di Legname
(lie des forêts), et les Canaries, longtemps avant les
voyages des Portu^s et de Béthencourt, à <jul l'on attri-
bue ces découvertes : la gloire en doit revenir aux Mi^or-
quins et aux Catalans. — Le xv* siècle est une époque
mémorable dans l'histoire de la séographle. Le Normand
Béthencourt oooquiert les Canaries pour la couronne de
Gastille, et, depuis 1415, les Portugids, sous l'impulsion
de l'infant D. Benri, dépassant les caps et les aiîchipeis
visités par les Catalans, voient avec surprise, après avoir
doublé le cap Vert , que la côte d'Afnque, an lieu de
s'étendre à l'ocddent comme l'ensei^ait Ptolémée, se
repliait vers l'est. Ce premier démenti donné par l'expé-
rience aux hypotlièses anciennes fut suivi d'un second,
quand on eut traversé en 1472 la région équatoriale, que
les géographes représentaient comme inaccessible à cause
de la c&aleur. En 148G, Barthélémy Diaz parvint an cap
des Tourmentes, dont le roi Juan il changea le nom de
nianvais augiire en celui de cap de Bonn#-Espârance ;
pen après, les relations de Govilham et de Paiva, envoyés
anx Indes par l'Afrique et la mer Rouge, firent connaître
'la forme ae l'Afrique orientale et la possibilité d'arriver
par mer aux côtes de l'Asie, contrairement à l'hypothèse
de Ptolémée sur la terre continue s'étendant de la mer
Ronge au pays des Sines. Enfin Vasco de Gama doubla
le cap de Bonne-Espérance en 1497, et arriva, l'année
tnivante, à Calicut. Cétait presque un nouveau monde
révélé à l'Europe, séparée depuis tant de siècles de l'Asie
méridionale. &i môme temps l'Espagne marchait sur les
tnœa du Portugal, et le génie de Colomb révélait véri-
tablement à l'anden monde un nouveau continent (1402).
Un si prodigieux mouvement de découvertes devait in-
floer sur la cartographie. Aussi les globes et les cartes
du XV* siècle sont-ils bien supérieurs à ceux de l'âge
précédent; il suffit de citer la mappemonde d'Andréa
Bianco de 1436 (à laBibliot. St Marc de Venise), celle
dn Vénitien Fra Mauro de 1450 (Bibliot. de Murano, près
de Venise), le fameux globe de l'Allemand Martin Be-
balm, compagnon du Portugais D. Cam, en 1484, globe
eonstruit en 1492 (anj. à Nuremberg), enfin la prédouse
mappemonde que Juan de la Cosa, pilote de Christophe
Colomb dans son 2* voyage, composa en 1500 : die est à
la Bibliot. royale de Madrid ; mais un fac-similé de 4 do
ses parties se trouve dans VHutoire de la GéoffraphU du
Nouiveau ConUnerU d'Al. de Uumboldt, t. V.
Histoire de la Géographie dans les temps modernes.
— A la fin du xv* siècle, la route des Indes et celle de
FAmérique étaient trouvées; Tosuvre des siècles sui^uits
tôt de compléter ces deux découvertes par la reconnais-
sanoe de toutes les terres et des océans qui séparaient
Jaa deux pays. Tous les peuples de l'occident de l'Eu-
•eptae jetèrent dans cette voie avec une égale ardeur;
Mis oTest encore anx Portugais et aux Espagnols qu'ap«
yartient la gloire principale an xvi* siècle. Les sueces* I
seurs de Vasco de Gama, Alméida, Albaquerque, Juan dt
Castro, découvrent Madagascar, Geylan (1506), Malacca,
les lies de la Sonde et les Moluques (1511), fondent Bfacao
sur les côtes de Chine (1517), pénètrent jusqu'au Japon,
et fondent un immense empire colonial, absorbé à la fin
du siècle dans la monarchie espagnole. En Amérique, un
de leurs marins, Cabrai, avait découvert en 1500 le Bré*
ail ou Terre de S^*-Croix ; mais sur ce continent la prin«
dpale gloire rerient aux Espagnols. Après Colomb, qul^
dans son 3* voyage (1498), avait longe la côte du conti-
nent méridional jusqu'à POrénoque, Pinson et Vespuoe
s'étaient avancés au Midi jusqu'au delà de l'Equateur
(1490-4500), et Diaz de Solis Jusqu'à l'embouchure du
Rio de la Plata (1516). Mais déjà le grand isthme central
avait été traversé, et le Grand Océan aperçu et touché
par Balboa (1513). De là l'entreprise hardie d'un Portu-
gais au service de l'Espagne, Magellan, qui, cherdiant
au sud du continent nouveau un passage eno^ les deox
océans, traverse en 1520 le détroit qui porte son nom,
franchit le vaste océan auquel il donna le nom de Paci-
fique, et découvre les archipels des Mariannes et des Phi-
lippines, où il est tué. Cano, son successeur, arrive par
U route de l'ouest aux Moluques, que les Portugais
avaient atteintes par l'orient, rerient en Espagne par le
cap de Bonne-Espérance, démontrant ainsi la sphéricité
de la Terre enseignée par Pvthagore et Ariatote, et ayant
accompli le premier, en 1,124 jours, le tour du monde.
Bientôt la conquête du Mexique par Gortez, du Pérou par
Pizarre, du Chili par Almagro et Valdivia (1510-41), l'ex-
Iiloration du fleuve des Amazones par Orellana (1541), de
a Plata par Mendoza, U reconnaissance des côtes de
la Californie par Ulloa (1539-40) et par Cabrillo (1542),
donnent à l'Espaene les vastes contrées situées entre
l'équateor et le 44r de latitude nord et sud. — Cet im-
mense empire, dont Philippe n avait voulu presgue in-
terdire l'entrée aux autres peuples européens, est forcé et
démembré an xvn* siècle par les trois grands ennemis de
l'Espagne, la France, l'Angleterre et la Hollande, qui se
disputent la souveraineté des mers abandonnée par l'Es-
pagne en décadence. Déjà, dès le xvi* siècle, par l'ordre
de François I*', Verazzani en 1524, Jacq. Cartier en 1534,
avaient révélé à l'Europe l'ancien Vinland des Scandi-
naves, et remonté le S^-Laurent ; au xvu*,Champlain par
la colonisation du Canada (1606-8), Cavalier de La Salle
par l'exploration du bassin du Mississipi, qu'il appelle
Louisiane (1670-82;, semblent Justifier le nom présomp-
tueux de nouvelle-France donné à presque toute l'Amé-
rique septentrionale.
Les Anglais et les Hollandais nariguent intrépidement
vers le pôle nord, cherchant de ce côté le détroit entre
l'Atlantique et le Pacifique, que Magellan avait trouvé
dans l'hémisphère opposé. Ainsi, dès 1553, l'Anglais
Willoughby, renouvelant la navigation du Scandinave
Otber, double le cap Nord, et parrient au port russe
d'Arkhangel au fond de la mer Blanche. En 1596-7, les
Hollandais Barentz et Hemskerk pénètrent jusqu'au nord
de la Sibérie, hivernent à la Nouvelle-Zemble et au Spitz-
berg, par 80* de latitude nord. Repousses au nord-est^
les marins anglais cherchent vers le nord-ouest ce pas-
sage que leurs successeurs ont trouvé seulement de nos
jours. Hudson découvre le détroit et la mer qui portent
son nom, et meurt abandonné par son équipage (1610^,
et Baffin s'avance inutilement jusqu'à plus de 70* vers le
pôle nord. Mais c*est principalement aux Hollandais
qu'appartient, au xvii* siècle, la plohre des grandes dé-
couvertes maritimes et des plus importantea conquêtes
coloniales. Lemaire et Schouten découvrent au sud de la
Terre du Feu le cap Hom (1616), route plus abrégée que
le détroit de Magellan, sinon plus sôre, pour pénéâw
dans le Pacifique. Ils forcent l'entrée de ce mystârienx
empire colonial que la jalousie espagnole avait voulu dé-
robor à la convoitise de ses rivaux. Les Hollandais, y
pénétrant d'un autre côté par la route du cap de Bonne-
Espérance, s'emparent des lies de la Sonde, des Moluques,
fondent Bataria (1618), et, jusqu'en 1644, ]& Papouasie,
les côtes de la |;rande terre appelée bientôt Nouvelle-
Hollande, déjà visitées par les Portugais et les Espagnols
de 1511 à 1540, sont explorées par Dirck Nardighs, Car-
penter, Nnytz, et surtout Tasman, qui, s'Avançant le plus
loin de tous vers le sud et l'est, découvre la Terre de
Van-Diémen et la Nouvelle-Zélande (1642). Mais par suite
do la forme défectueuse donnée dana les cartes hoUan-
xviii* siècle et aux navigateurs anglais et français, Car*
CfiO
969
GÉO
MM, Gook, BoagaîiiTllIe et La Peyrouse, qu'appartient
la gloire d'ayoir véritablement fait connaître la cinquième
partie du monde. Pendant oos deux aiècles, la géographie
politique et la géographie mathématique marchent d* un
pai qsal à ce rapide mouvement de découvertes. Les
principaux recueils sont : le Théâtre de l'Univert d'Or-
teihis (1570), VAtlas de Hercator (1595), auquel on doit
la projection plaie corrigée qui porte son nom, V Atlas
Mmor et VAtlas Major de Hondius, qui commence à ré-
duire les dimensions exagérées données par Ptolémée à
TAsie orientale, les Cartes t^ographiques des Blaeu,
desSanson, des Duval, des Jaillot, les Essais de géogra»
phi0 eomjHsrée d*Adrien de Valois et de Quverius, enfin
le Globe et les Cartes de G. Delisle, qui, s*éclatrant
des découvertes astronomiques du premier Cassini, ré-
forma toute la géographie mathématique, et corrigea les
erreurs persistantes dans les dimensions de TAsie et de
la Méditerranée orientale.
Au xviu* siècle, c'est vers la géographie du Nord-Est
4e TAsie, du Nord-Ouest de VAménque et de TOcéanie
centrale que se ]>ortèrent les efforts des marines russe,
anglaiae et française. Les Russes, maîtres de la Sibérie
oeddeotale depuis la fin du xvi« siècle, s'étaient avancés
Jusqn*au fleuve Amour et à l'océan Pacifique à la fin du
XTi^ ; mais rien n'était plus confus^ même dans les cartes
de Delisle, que les contrées limitrophes du Japon et des
extrémités septentrionales des deux continents. Ce furent
deux Danois au service de la Russie, Spangenberg et
Behring, qui reconnurent les lies Kouriles, la mer et le
détroit de Behring, les lies Aléoutiennes, la presqu'île
d*AlB8chka, et les rivages de l'Amérique Jusqu'au mont
S*-Élie. Mais les contours de ces pavs ne furent parfaite-
ment déterminés que par Cook et La Peyrouse ; le pre-
mier, dans son 3* voyaîge, parcourut toute la côte améri-
caine depuis 111e de Sitkha jusqu'au cap Glacé, par 70*
bL nord; le second découvrit le détroit qui porte son
nom entre les lies lézo et Tairakal, et la Manche de Tar-
tarie, entre Tarrakai et le continent (1787). Un an aupa-
ravant, La Peyrouse avait également parcouru la côte de
FAmérique du Nord, au sud du S'-Élie, risitée après lui
par Dixon (1787), Vancouver (170S-94), Brougnton et
Gray, qui explorèrent la Colombia ou (hr^n (1792). On
•iierchait déjà à relier ces découvertes, par des explora-
tions sur terre, aux colonies anglaises de la Nouvelle-
Bretagne. De là les voyages d'Hearne (1771) aux bords de
la Coppermine, et de Mackensie (1789-93) sur le fleuve
qui porte son nom. Dans TOcéanie, Dampier découvrit
tai Nouvelle-Bretagne (1704), Wallis le sud de l'archipel
vaoL et Otahiti déjà entrevu par Quiros en 1606,
i la Nouvelle-Irlande (1707); Bougainville (1708),
avoir touché à Otahiti, découvrit l'archipel diss Na-
nrs et celui de la Louisiade; Cook, dans trois
voyi^ges (1769-70), s'avança jusqu'aux banquises du
> antarctioue, découvrit le détroit qui porte son nom
les lies oe la Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Call-
explora la côte orientale de la Nouvelle-Hollande,
les lloQvelles- Hébrides, appelées lies du S^- Esprit par
Qnim (1606) et Grandes -Gyclades jjieT Bougainville
(1768), enfin découvrit l'archipel Sandwich, où il trouva
la mort. La Peyrouse, après son expédition en Amérique
et en Asie, parcourut aussi la plus grande partie de cet
areliipel, et périt à Vanikoro (1788). D'Entrecasteaux,
envoyé vainement à sa recherdie, explora mieux qu'on
ne Pavait fait jusqu'alors la Papouasie et les lies vol-
aines. — Ce siècle fut aussi très-fécond pour la géogra-
phie mathématique et politioue, par suite du grand dé-
Téteppenaent des sdences mathématiques et économiques.
Les voyages de Maupertuis au cercle polaire et de La Ëon-
damineà l'Equateur (1736), pour mesurer des arcs du
méridien, commencèrent à faire connaître la forme vé-
ritable et les dimensions exactes de la terre s Cassini de
Tliury entreprit et Jacques-Dom. Cassini acheva la grande
carte de France en 183 feuilles, modèle de tous les travaux
de œ genre exécutés depuis par les gouvernements. D' An-
ville perfectionna les xnéthodes de iSelisle, devina souvent
par la foite de son esprit ce que les observations et les
voyages ne démontrèrent que longtemps après, et ne pu-
blia pu moins de 311 cartes et de 78 Hémoires plans
d'émditioa êot tous les si^ets de géosraphle ancienne,
da ffloyen Ige et moderne. Gossellin édain beaucoup de
pofiits otoeors de la géographie mathématique des An-
dèna, et enrfebit de cartes savantes la traduction de
Staboo* Non moins Importants sont les travaux et les
cartes de ilennell aar la géographie d'Hérodote, celle de
flaàoasÈen et lee courants de la mer. La statistique fut
oééa mr Èe ^ëograp^ allemand Btlaching, et la déve-
loppement de cette science produisit un grand nombre
de cartes détaillées dans tous les États de l'Europe : la
carte de Belgique par Ferrari en 25 feuilles, en Alle-
magne celles de Homann et de Sotsmann , de Cary en
Angleterre, de Rizzi-Zannoni en Italie, de Buache, de»
deux Robert de Yaugondy et de Bonne en France.
Les guerres de la Révolution et de l'Empire interrom-
pirent pour 25 ans les grands voyages de découvertes.
On ne cite guère pendant cette période que quelques
voyages scientifiques dans des contrées déjà explorées, et
un grand développement de la cartographie militaire.
Parmi les premiers, on remarque le grand voyage d'Al.
de Humboldt et de Bonpland dans l'Amérique espagnole
M799^804), ceux de Flindera et de Baudin sur les côtes
méridionales et ocddentales de la Nouvelle- Hollande
(1801-3); parmi les cartes de cette époque, VAtlas nch
tùmai, en 85 feuilles, de Gianlaire ; les cartes de Hen-
telle; la belle carte d'Italie de Bâcler d'Albe pour les
campagnes de Bonaparte, en 30 feuilles ; celles d'Éjgypte
et de Syrie, dont Jacotin enrichit la Grande description
de VEgypte due aux savants qui avaient accompagné
l'expédition française. — Avec la paix générale recom-
mencèrent les grands voyages de découvertes, qui, pour-
suiris jusqu'à nos jonra, ont eu pour principaux objets
les deux pôles et le centre des deux continents d'Afrique
et d'Océanie. Le pôle nord fût attaqué le premier, dans
l'espoir de découvrir le fameux passage nord-ouest, oublié
depuis Hudson et Baffin ; les Anglais eurent presque seuls
l'honnear de ces découvertes. John Ross (1818 et 1829)
découvrit les Highlands arctiques sur la côte occidentale
du Grotoland, et la terre Boothia, la plus septentrionale
du continent américain. Parry, dans quatre voyages suo-
cessib (1819, 1821, 1824, 1827), franchit le détroit dei
Lancastre où s'était arrêté Ross, découvre ceux de Bar-
row et de |lelrille, l'immense archipel Parry, et, plus aw
sud, le détroit de Fury et Hekia, l'Ile Cockbum et la»
presqu'île Helville; puis, s'élevant directement ven le
pôle an nord du Spitibeif;, 11 parvient jusqu'à 82° 45' de
latitude. Ces grands résultats ne furent égalés que dans
les voyages de Franklin en 1818 au N.-O. du Spitzberg
jttsau'à 80° 34' de latitude; dans ses expéditions par terre
(1819, 1835), où il reconnut Ih plus grande partie de la
côte du continent, alon totalement inconnue, à TE. et
à rO. des fleuves Coppermine et Mackensie; enfin dans
son 4" voyage (1845), où il périt en 1847, mais après
avoir, comme on le sut seulement en 1859, exploré l'ar-
chipel Parry et atteint presque ven le sud le point où il
était parvenu dans ses précédents voyages par terre.
Dix-huit expéditions entreprises pour retrouver ses traces
ont étendu conshlérablement le domaine de la géogra-
phie. Enfin, en 1853, Hac-CIure, venant par les détroits
de Behring, de Banks et de Melrille, et Inglefleld par
ceux de Davis, de Lancastre et de Barrow, ont résolu le
problème du passage Nord-Ouest. En môme temps l'Amé-
ricain Kane, naviguant directement au nord de lis baie de
Baffin, franchit le détroit de Smith , le canal Kennedy,
et, pénétrant jusqu'au 82*, découvrit une mer libre de
? laces qui seniole ouvrir le chemin ven le pôle arctique
1853-1855 )• — Les découvertes furent moins considé-
rables ven le pôle austral. Au sud de l'Amérique, les
marines anglaise, française et russe rivalisèrent d'ardeur»
Smith (1819), Powell (1821) etBisooé (1832) découvrirent
les Shetland, les Orcades du sud et la terre de Graham f
DumontHd*Drrille, les terres Louis-Philippe et Joinville
(1838); Bellinghausen, les Iles Alexandre l*' et Pierre I*'.
Au sud de rAustraliê, Dumont-d'Urville signala les côtes
Clarie et Adélie (1840); mais l'expédition la plus mémo-
rable est celle de James Clarke Ross, neveu de l'explora-
teur des terres arctiques, qui, franchissant enfin le cercle
polaire austral, trouva une mer libre de banquises, dé->
couvrit la terre Victoria, et releva une immense étendue
de côtes du 10^ au 78* de latitude, où la découverte des
volcans-glacien Erebus et Terror signala dignement le
terme de ses travaux et la limite actuelle du monde an-
tarctique. — L'Afrique, presque oubliée jusqu'à la fin do
xvm* siècle, a été, depuis cette époque, le théâtre de
nombreuses explorations. Le voyage de Bruce (17G9-73),
qui découvrit les sources du Nil Bleu, et surtout la fon-
oation, en Angleterre, de l'Association africaine en 1788,
ramenèrent l'attention sur cette partie du monde. Les
explorations furent glorieusement inaugurées par le double
voyage de Hungo-Park (1795, 1803), qui découvrit le
ooon supérieur et moyen du Niger. Il fut snlri par
Denham et Clapperton, qui trouvent le lac Tchad M8Û)|
les Maee Lander, qui explorent les bouches du Niger i
Gaillié, le premier voyageur qui revint de Tomboudo»
GÉO
970
GÊO
(4828-30} ; Becroft et Laird., qai explorèrent le grand
iffluent au Nig^, la Tchadda ou Benouè, pendant que
de Tripoli partait, en 1850, la grande expédition de Ri-
chardson, Overweg, Barth et Vogel, qui explorèrent toat
le pays entre la Méditerranée et la Tchadda, entre Tom-
bonctoa et le Ouaday. A Test, des expéditions mémorables,
mais jusqu'à présent inrructoeuses, étaient tentées pour
trouTer les sources du Nil. MéhéîaietrAli, envoya deux
expéditions (1839-1841 ), qui, commandées par BL d'Ar-
naud, remontèrent le Nil Blanc jusqu'à 4*42' latitude
nord; le missionnaire allemand Knoblecher poursuivit
ces recherches jusqu'à 4<* 0', Brun-Pollet jusqu'à 3^ Anj;.
Vineo jusqu'à 2*; et aujourd'hui de nouveaux voyageurs,
ritidien liiani, le Français Lejean et l'Allemand Hen^lin
continuent ces recherches. A ces découvertes se relient
celles qui sont entreprises à Test de l'Afrique par les
missionnaires et les officiers anglais partis de Mombaxa.
Parmi les premiers, Krapf et Rebmann découvrirent en
1849 les glaciers- volcans Kenia et Kiliman4iaio , et
Erhardt recueillit de précieux renseignements sur l'exis-
tence de grands lacs intérieurs, iqwrçus enfin en 1857
par Speke et Burton, et appelés par eux Ui^Ji et Ukérévé.
En même temps, au S. de l'Aftique. le missionnaire an-
ghûs liringstone, après avoir, en 1849, découvert le lac
Ngami et les rivières qu'il reçoit, explora tout le cours
du Zambèie, et, le premier des Européens, traversa toute
l'Afrioue australe, de l'embouAhure de ce fleuve à 8^
Paul de Loanda sur la côte occidentale. Andersen, Gai-
ton, Ladislas Magyar, ont poursuiri ces exploration!, et
il n'y a plus aulourd*htti que le centre de l'Afrique, des
•deux cotés de rÊquateur, qui se dérobe encore à notre
curiosité. — La dernière découverte parmi les cinq par-
ties du monde, l'Australie, a été aussi la dernière explo-
rée, et, jusqu'en 1815, on ne connaissait que la ligne des
«ôtes situées entre le Pacifique et les Hontagnes-Blenes.
En 1815, Macquarie rranchlt ces montagnes et découvrit
le fleuve qui porte son nom ; Oxley explora le Laehian
(1817 ) ; Sturt, le Darling et le Hurrumbridge (1829-30).
Au nord du continent, Mitchell et Leichards recon-
nurent la côte et l'intérieur entre Sidney et le golfe de
Carpentarie. Les frères Grégoiy, déjà connus par leurs
«xploratioiis dans l'ouest, remontèrent la rivière Victoria,
découvrirent la chaîne de partage entre les eaux de la
côte et celles de l'intérieur (1855\ et, l'année suivante,
traversèrent tout le nord pour arriver à Brisbane, sur la
côte orientale. Au midi, Eyre découvrit, en 1842, le vaste
lac Torrens. Sturt en 1844^ Babban en 1856, Grégory en
1858, Mac-Dougal Stuart en 1800, parvinrent presque
Jusqu'au centre du continent, mais sans pouvoir encore,
en partant du sud, arriver jusqu'à la côte septentrionale.
Dans des voyages maritimes ou terrestres, sans ftdre
de découvertes nouvelles, on a recueilli d'innombrables
•bservations sur tous les points de la géographie mathé-
matique, physique et politique, et sur les sciences qui
s'y rattachent, météorologie, histoire naturelle, ethno-
graphie, linguistique. Parmi les premiers, nous dterohs
•ceux de Frmrcinei, en 1817 ; de Duperrey, sur la Co-
«uti/tf, en 1822; de Dumont-d'Urville, sur V Astrolabe,
en 1820; de Wrangell et LQtke, qui explorèrent les côtes
de la Sibérie et de la Nouvelle-Zemble (1820-23) ; de
La Place, sur la Fawritë (1830) et l'ArUmisê (1837) ; de
Dupetit-Thouars, sur la Vénus (1837-30); enfin de la
frégate autrichienne Novara en 1857. Parmi les seconds,
•on distingue ceux de Léopold de Buch dans la Scandi-
iiavie, d'Al. de Humboldt dans la Sibérie occidentale
(1829), de Gastren dans l'Altaï, de Middendorf (1844-55),
•de Mourawiew (1854), de Maak sur l'Amour, de Khani-
kow dans la région de F Aral, et plus récemment (1858)
dans le Khorassan ; de Texier et de Tchihatchew dans
l'Asie-Hlneure; de Laborde, Lepsius, Berton, Lynch, de
'Saulcy, Tobler dans la Syrie, la Palestine et l'Arabie; de^
Botta, Fresnel, Layard, Rawlinson, Oppert dans l'an-
> donne Mésopotamie, la Babylonie et la Perse; de Jacqu»-
mont (1828-30), Everest, Hooker et des frères Schlagint-
welt dans l'Hlndoustan. Dans l'Amérique du Nord, les
explorations de Lewis et Clarke sur le cours supérieur
de rorégon (1804), de Pike (1805) et Long (181(^ entre
le Missiasipi et les montagnes Rocheuses, de Frémont
entre ces montagnes et la Californie (1842-45); dans
l'Amérique du Sud, les voyages d'Alcide d'Orbigny (1826),
Aug. de Saint-Hilaire, Gastelnau, Pentland et Bowring;
"Ceox de Squier, de Hellert et de GareUa dans l'Amérioue
centrale, a Toocasion des projets de communication in-
terocéanique. — A tous ces éléments de connaissance
-Tiennent se Joindre les relevés de terrains ou de côtes
•entrepris par les gouremeoieati pour les besoins de l*ad-
ministration ou de la défense, et publiés par les états-
m^ors des armées et les hydrographes de la marine.
Tels sont, en France, les Dépôts de la marine et de la
guerre; en Angleterre, les cartes de l'Amirauté; en AU^
magne, les publications des états- majors autrichiens,
prussiens, bavarois, etc. ; les Dépôts topographiques de
Naples et de S'-Pétersbourg; la Direction hydrographique
de Madrid; TÉtat-Mi^or général hollandais; le Dépôt de
la marine à Copenhague; le Bureau topographique fé-
déral de Suisse; VHyirophical office des Etats- unis et
les belles cartes de F. Biaury. Parmi les grandes opéra-
tions géodésiques, il faut citer la mesure de l'arc de
cercle entre Dunkerque et Fermentera, commencée sous
le l*' Empire par les savants français Delambm., Mé-
cbain, Biot et Arago ; celui de l'Hindoustan, entre THy-
malaya et le cap Comorin, par le colonel Everest, et celui
que les savants russes Struve et Woldstett ont récem-
ment mesuré du om Nord aux bouches du Danube. —
Tous ces travaux et les innombrables productions de sta-
tistique faites par les gouvernements ou les particuliers,
l'enseignement si fécond, en Allemagne, du célèbre Rit-
ter, ont fait aujourd'hui de la géographie, naguère encore
simple annexe de l'histoire, une sdence particulière.
L'Allemagne et l'Angleterre marchent actueUement à la
tète des nations européennes dans les sciences géogra-
phiques, encore peu r^Muidues et peu goûtées en France,
bien que notre pays ait fondé la premiâre Société géogra-
phique à Paris en 1821 : depuis se sont établies celles
de Beriin en 1827, de Londres en 1830, de Bombay en
1831 , de Fhmcfort-sur-le-Mein en 1830, de Darmstadt
et de S^Pétersbourg en 1845, de New-York en 1851, de
Vienne et de (Senève en 1858. Toutes ces aodétés pu-
blient des Bulletins et des Mémoires. Il faut y ajouter
trois établissements particuliers importants : l'institut
géographique de Weimar, VÊtablissemmt géographique
de Vander^Moêlen à Bruxelles, et celui de Perthes à Go-
tha, qui publie un important recueil, les MUthêiluttgênf
dirigé par Petermann. Non moins important est le re-
cueil des Annales des Voyages, fondé à Paris en 1808 par
Malte-Brun, et continué aujourd'hui par son fils. C. P.
GEOLE, logement des gardiens de prison, et autrefois,
par extension, la prison même. Jadis le geôlier, chargé
de la garde des prisonniers, percevait sur eux un geôlage
{ V, ce mot dans notre Oicitotmatr» de Biographie et
d^Histoire)» Depuis la Révolution, on a établi un traite-
ment fixe pour tous les employés de l'administration det
prisons, mais le geôlier perçoit encore des bénéfices dans
les fournitures qu'il est autorisé à fi^re aux prisonniers.
GÉOPONIQUES (du çrec ghè, terre, et ponos, travail),
nom donné par les anciens Grecs à la sdence de Tagri-
culture. Cest aussi le titre d'un recueil d'écrits en
langue grecque, relatifs à cette sdence, recueil formé an
IV* siècle par (^assianus Bassus. La meilleure édition
srecque-laane est celle de Leipzig, 1781, 4 vol. in-4o ; les
uéoponiques ont été trad. en français par Pierre de Nar-
bonne, 1545-50, in-12.
GÊORAMA (du erec gè, terre, orama, spectade), spec-
tacle imaginé en 1823 par Ddanglard. Le spectateur se
pla^t au centre d'une sphère de plus de 30 met. de cir-
coniérence, en toile vernissée, sur laquelle on avait figuré
toutes les terres du globe; il pouvait ainsi tout embrasser
d'un seul coup d'onl, tandis qu'avec de grands glob^
vus extérieurement, on n'aperçoit à la fols qu'une petite
portion de la terre. Un nouveau (xéorama fut ouvert en
1844 par Ch.-Aug. Guérin aux Champs-Elysées, à Paris.
— On donne aussi le nom de Géorama à une représen-
tation en relief, sur une échelle plus ou moins grande,
de l'ensemble ou d'une psrtle de la terre.
GEORGES-DB-BOCHÉRVILLE (Église de Sararw).
Cette église, bfttie pour un collège de chanoines par Raoul
de Tancanrille, chambellan du duc de Normandie, Guil-
laume le Bâtard, entre les années 1050 et 1000, et érigée
en abbaye en 1114, s'élève sur le côté ocddental d'une
haute colline, à 8 kll. S.-O. de Rouen. C'est un monu-
ment roman, que l'achèvement de la construction, l'unité
du style et le développement du plan rendent un des
plus complets qui existent. La fa^e occidentale offine
une porte à arcade pldn dntre, dont les voussoirs sont
décorés de zigzags, de bâtons rompus, de dents de ade,
de pointes de diamant, etc., et surmontée de deux rangs
de trois arcades, le tout couronné par un haut pignon
sans ornements. Elle est circonscrite par deux tourellee
carrées, qui portent à leur sommet des campaniles dans
le style du zm* siècle, et accotées d'ailes basses et étroitea
correspondant aux bas côtés de l'édifice. L'église a , qq
effet, trois ne&t terminées cJiaeune par une abside drcn-
6É0
971
GÉR
Un. A nntenection des traniepts s'élève une lanterne,
fonnaat mi dehors on étage carré de 11 met de côté et
de4 met. de hauteur pour les cloches : cet étage est
eoilTé d'une flèche en charpente recouverte d'ardoise,
liinta de fl met., et passant du carré à l'octogone au
nojrendeooy&ttx sur les diagonales. L'intérieur de l'église
s's qu'une ornementation fort simple, analogue à celle
Al portail ; des feuillages et quelques figures se montrent
lax chapiteaux des piliers, monuments de la sculpture
du XII* ûède dans sa naïveté barbare. On remarque à
l'extrémité de chaque transept une sorte de tribune sou-
tenue par deuiL arâides qui se réunissent sur une même
colonne massive. — Près du flanc septentrional de l'église
est une belle salle ciq)itulaire ohlongue, construite à la
fia da Tin* siècle ou au commencement du xiii* : elle est
^dairée par de hautes fenêtres en lancette, au-dessous
desquelles règinent, du côté de l'entrée, trois arcades à
plein antre. Ce mélange de formes circulaires et de
tonnes ogivales révèle le style de transition. V. Deville,
Bs9tti historique nur Véglise et l'abbaye de S^-Georges-
de-BoehervUU, Rouen, 1827, in-4o, B.
GÉORGIENNE (langue), une des langues caucasiennes
(F. os mot), rattachée généralement aux langues indo-
earopéenne», bien que, selon les Géorgiens, elle en soit,
par l'ét^mologie, complètement indépendante. Elle tient
au sanscrit par l'intermédiaire des antiques idiomes de
la Perse. Legécirgien est riche en flexions grammaticales.
La déclinabon est la même pour les substantifs, les ad-
fectifis et les pronoms. Ces mots n'ont qu'un seul genre.
La langue admet beaucoup de mots dérivés et compo-
sés; ellB ne connaît point Tusage de l'article. Dans le
verbe, les personnes ont chacune leur caractéristique
particidière ; les temps de l'indicatif sont au nombre de
sept, dont trois passés et trois futurs; certaines parti-
cues servent à convertir l'indicatif en conditionnel. Le
sobjonctîf n'existe pas. Le passif se forme par des verbes
aoxiUsires. Les prépositions sont jointes à la fin du nom
qu'elles régissent. On distingue dans le géorgien 5 dia-
lectes, ceux du Karthli, da Kakhéti, d'Imeréthie, de
ICngrâie et du Gouria ; les Russes lui donnent le nom
de ffrounen ou grousinien. Un certain nombre de mots
persans, arméniens et turcs , sont souvent employés à la
place de leurs synonymes dans cet idiome ; on trouve
même des mots latins et français, venus pour la plupart
rla voie de la Russie. La prononciation est rude, à cause
raocumuladon des consonnes. — Les Géorgiens ont
deax alphabets : le mUgaire ou mUilaire, dont ils font
remonter l'usage ]usqu*à Alexandre le Grand, en faisant
honneur de son introduction à Phamavaz, leur l*' roi;
et VeedéMiastique, inventé par l'Arménien Mesrob. Ce
dernier a aujourd'hui une double forme, se composant
de no^juscules et de minuscules. Les philologues re-
oaxient l'alphabet vulgaire comme une transformation
de reodésiastique , et croient qu'il n'a été fixé qu'au
inr* siècle.
Les Géorgiens ont une littérature. Selon Tarchiman-
drite Engénius {Tableau historique de la Géorgie)^ la
jirosodie est fondée sur les tons ou accents; Brosset
prétend, an contraire, que le nombre des syllabes, avec
ta rime finale qui a été empruntée du turc, est la règle
de la versification. Le j>lus ancien livre ^rgien que Ton
poosMe est la traduction de la Bible, faite au viii* siècle
par S^ Enpbémius on Eutiiymius. Un général Roustewel
a compoeé nn poème que quelques critiques pensent
aTOÎr &é en partie tiré de sources persanes, L homme
i ^WÊê peau de tigre, ou Amours de Tarid et de iVe»-
Daredian, On peut encore citer, parmi les monn-
its de la littérature géorgienne, un poème héroïque,
la Tamariani, éloge de la reine Thamar par Tsachru-
daadsé; deux romans en prose, le Visramiam par Sarg
de Tluno^wi, et le Dare^anianx par Mosé de Khoni ; le
Datgyithi€mù recueil de poésies de David Gouramis Chvili;
les satfres de Beasarion Gabas Chvili ; un recueil d'hymnes
relipenx et nationaux formé au tvm* siècle par le pa-
triarche Antoni ; le Code du roi Wakhtang, et la Chro-'
«asQ«i# qui porte le nom de ce prince. K. Maggi, Syntag-
wmala tmsn*arum orientalimn qua in Georgiœ regwnibus
€sidhmtur, Rome, 1643, in-fol. ; Klaproth, Vocabulaire
IféorgimÊr-fremçais elt français-géorpien, Paris, 1827, in-S*;
~ '^ Alter, Sur la littérature géorgienne, en allemand,
1798, in-8«; Brosset, Rscherches sur la poésie
géorgiÊÊsnê, dans le Journal asiatique d'avril 1830; le
m^^^ jfémoires relatifs à la langue et à la littérature
sdbrmffMMf. Paris, 1833; la môme, éléments de la langue
géomtenme, Pâr^ ip^. i"-»*.
GBORGIQDfiS (du grec gé^ terre, et ergon^ travail >•
poème didactique composé par Virgile, à la prière da
Mécène, son protecteur, entre les année» 717 et lih de
Rome (36 et 29 av. J.-C.}, dans le but de remettre en
honneur parmi les Romains l'sgriculture aJt>andonnée
pendant les guerres civiles, et de les ramener à la sim-
plicité des mœurs de leurs ancêtres. Ce poème se com-
pose de quatre chants, dont les s^jets sont : la culture
de la terre, celle des arbres et de la vigne, le soin des
troupeaux, et l'élève des abeilles. Des invocations, des
préceptes sur le sujet spécial de chacun des chants, des
épisodes destinés à prévenir la monotonie d'une exposi-
tion continuellement didactique, telle est la marche con-
stante de Virgile. On lui a reproché le manque d'ordre :
mais, si la méthode n'est pas complètement rigoureuse,
elle est suffisamment nette et claire, et on ne peut pas
exiger d'un poème la même rigueur que d'un traité ré-
gulier en prose. Virgile n'a pas épuisé tout son sujet;
mais s'il a omis plus d'un point important, par exemple,
la culture des ju^ns, c'est volontairement et déterminé
par son goût de poète, ou bien parce que ces parties de
l'a^culture étaient étrangères au but qu'il se proposait,
l'utile, et non l'agréable. — Virgile (n, 175) semble se
donner comme un imitateur d'Hésiode; cependant le
poème les OEuvres elles Jours n'a presque rien de com-
mun avec les Géorgiques que la similitude du genre.
L'auteur latin a beaucoup moins emprunté aux Grecs
qu'à Varron et à Caton : son ouvrage n'est pas seulement
un résumé de la science antique; il contient aussi les
résultats de sa propre expérience, et il est devenu une
autorité pour les Anciens, puisque Pline et Colnmelle le
citent fréquemment. Les (Uorgtques sont un parfait mo-
dèle de l'art de relever et d'embellir les détails les plus
communs de la vie rustique : la variété des tons, la ra-
pidité de la marche, le charme continu du style, tout
concourt à en faire un poème rempli de beautés supé-
rieures, plein d'imagination et de goût, production d'un
génie élevé, qui avait atteint toute sa vigueur et sa matu«
rite. Virgile a eu des continuateurs ou des imitateurs,
mais jamais de rivaux. Colnmelle a traité en vers des Jar-
dins, dans le 10" livre de son Traité De re riÂStica; le
P. Vanière a donné le Prœdium rusticum, en XVI chants ;
le P. Rapin, Hortorum libri IV; l'Anglais Thompson, les
Saisons^ en IV chants, imitées chez nous dans les Soi"
sons de Saint-Lambert et les Mois de Roucher; Rosset
a composé V Agriculture^ en IX chants. Les Géorgiques
ont été traduites en vers français par l'abbé Marolles,
Segrais, Martin, Le Franc de Pompignan, et enfin De-
mie, qui les a fait oublier tous et a composé lui-même
les Trois règnes en VIII chants, les Jardins en IV chants,
l'Homme des champs en IV chants. Toutes ces œuvres
complémentaires, toutes ces traductions, ne servent qu'à
faire sentir plus profondément la désespérante perfection
de Virgile. V. dans le tome II du Génie de Virgile par
Malfll&tre, des Réflexions sur les Géorgiques, des ana-
lyses, de nombreuses traductions et imitations en vers ;
le Discours préitminaire en tète de la traduction de
Delille; les Notices historiques, arguments et appré-
dations littéraires de l'édition de Virgile, par H. Bou-
chot 1860. F. B.
GÉRANT (du latin gerere, administrer), celui qui ad-
ministre les affaires d'autrui, soit d'un particulier, soit
d*une société civile ou commerciale. Dans les sociétés en
commandite, lee commandités seuls peuvent être gé-
rants. Un gérant volontaire est tenu des obligations qui
résulteraient d'un mandat exprès {Code Napoléon , W'
ticle 1372). — Les lois du 11 juillet 1828 et du. 9 sep-
tembre 1835 astreignent les sociétés qui publient un
journal à avoir un gérant responsable, propriétaire d'une
part ou action dans ce journal et d'un tiers du caution-
nement, pour signer la feuille de chaque jour et répondre
de son contenu.
GÉRARD DE NEVERS (Roman de). F. Violette (La).
GÉRARD D£ ROUSSILLON, poème provençal sur lea
démêlés du duc Gérard avec Charles le Chauve, que
l'auteur confond avec Charles-Hartel. Gérard, vaincu et
proscrit, est réduit à errer avec sa femme de forêt en
Ibrèt, d'ermitaoe en ermitage ; bref, il se fait charbon-
nier, et la ducnesse devient couturière. Enfin, il obtient
son pardon, ^pAce aux prières de la reine. Le Gérard du
roman n'est pas un personnage imaginaire ; il fut réelle
ment, au ix* siècle, comte de RousaUlon (près de Châtil-
lon-sur-Seine) et duc de Bourgogne. Élevé dans le palaii
de Louis le Débonnaire, il fut toujours fidèle à ce prince,
et reçut de lui le comté de Pans. Mais, ayant suivi le
parti de Lothaire, il fut dépouillé de ce comté par Charles
le Chauve. Lothaire, avant de mourir, déaigna Gérard
GER
972
GER
Sar être le tuteur du roi de Provence, l'un de ses fils.
I fut taon aue Gérard s'établit à Vienne, d'où il fit plu-
sieurs expéditions contre les Sarrasins établis dans le
delta du Rhône. En 863, le royaume de Provence fut
conquis par Charles le Chauve; alors Gérard se retira
dans son ch&teau de Roussillon, où il mourut en 878.
n avait fondé plusieurs abbayes, dont la plus célèbre est
eelle de Vézelai. Le poSme de Gérard de RoussUlon parait
avoir été composé au xn* siècle; il existe manuscnt à la
Bibliothèque nationale de Paris. — Un poSme en langue
d'oil sur le même sujet a été publié en 1858 par M. Mi-
(;nard, qui le rapporte à l'année 1316. F. Histoire HUé-
raire de la France, tome XXII. H. D.
GÉRARD DE VIÂNE, 2* branche de la chanson de
Guillaume au court nez. Gérard, fils de Garin de Mont-
glane, obtient de l'empereur le fief de Vienne; mais, in-
sulté par la reine, il prend les armes contre son souve-
rain. Assiégé dans Vienne, il résiste pendant sept ans.
Cest à ce siège que Roland rencontre Olivier, et est
fiancé à la nelle Aude. — Cette chanson, imitation du
roman provençal Gérard de RoussUlon, est attribuée à on
certain Bertrand, de Bar-sur-Aube. La Bibliothèque na-
tionale en possède deux manuscrits du xiu* siècle ; le
Musée Britannique en a également deux du xni* siècle
et un du xiv*. Une partie de ce roman a été publiée par
J. Bekkcr à Berlin, 1829, en tête du Fierahrat proven-
çtd. Le texte complet a été publié par Tarbé, Reims,
1820, in-8«. V. VËTisL litt. de la France, U XXD. H. D.
GERMAIN (du laUn germanus)^ se dit des frères et
des sœurs nés du même père et de la même mère, par
opposition aux comanguins et aux utérim, V. Cousin.
GERMAIN -L'AUXERROIS (Église SM, une des plus
anciennes églises de Paris. Fondée par Ghilpéric sous le
nom de S^ermam4e~Rond (à cause de sa forme), elle
fut, lors des invasions des Normands, prise par les pi-
rates, qui, l'entourant d'un fossé, la changèrent en for-
teresse, puis y mirent le feu en l'abandonnant. Le roi
Robert le Pieux la rebâtit en 1010. Il ne reste rien de
cet ancien édifice. Le grand portail actuel parait dater
de Philippe le Bel ; le pignon qui le surmonte supporte
une statue de l'ange du Jugement dernier, exécutée de
nos Jours par M. Marochetti. Le porche à triple arcade
qui fait saillie sur ce portail date de 1429. Lorsque les
rois habitèrent le Louvre, Téglise S^Germain-l'Auxerrois
fut adoptée comme paroisse de la cour, et subit de no-
tables changements : les piliers gothiques prirent une
forme moderne ; on démolit le Jubé qui masquait rentrée
du chœur, et on le remplaça par la grille de fer poli et
doré qu'on voit aujourd'hui, et qui est, d'ûlleurs, un bel
ouvrage de serrurerie; le banc d'œuvre a été sculpté
d'après les dessins de Perrault et de Lebrun ; c'est peut-
être le plus remarquable de ceux des églises de Paris.
En 1831, l'église fut saccagée par une émeute populaire,
et on la ferma Jusau'en le37 : alors elle fut restaurée,
sous la direction ae Laàsus, et rendue au culte. Le
portic^ue fut alors décoré de peintures murales, exécutées
a la cire, par M. Mettez, à l'instar de beaucoup d'églises
d'Italie. La pensée était heureuse, mais l'humidité de
notre climat s'y prêta mal, et ai^ourd'hul ces peintures
sont déjà un peu passées. On remarque, à l'intérieur,
une fort belle chapelle de la Vierge, et des peintures à la
cire exécutées par MM. Amaury Duval, Jean Gigoux et
Couderc; des vitraux par M. Maréchal (de Metz); dans la
croisée, un bénitier tnnitaire en marbre, par M. Joufi'roy,
et surtout les sculptures en bois de la chapelle de la
Passion. S*-Germain-rAuxerrois est un des plus curieux
et des plus gracieux monuments religieux du xiv" et du
zv* siècle. En 1860-61, on a élevé au Nord, à l'aligne-
ment du porche, et y touchant presque, un élégant cam-
panile (K. GaiiPAinLB), beaucoup plus élevé que celui
qui existe au Sud, près du transept, et du haut duquel,
en 1572, partit le signal du massacre de la S^Barthé-
lemy. B.
GERMAIN-DES-PRÊS (Êçlise S*-^, le plus ancien des
monuments religieux de Pans. Childebert I*' la fonda en
543, sur l'emplacement d'un temple consacré à Isis, pour
y placer la tunique de S^^Vincent et une croix qu'il avait
rapportées de sa campagne au delà des Pyrénées contre
les Wisigoths, et la dédicace fut faite par l'évêque S*
Germain en 558. Ce prélat fit bâtir, au midi de l'édifice,
un oratoire sous rinvocation de S^ymphorien, où plus
tard lui-même fut inhumé. Dans plusieurs actes des vn*
et VIII* siècles, l'église est désignée sous le nom de S^-Ger-
main et S^Vincent. Elle était alors décorée de mosaïques
d'or, et sa couverture était en métal. En 754, le corps de
S* Germain, exhumé de l'oratoire, fut déposé dans l'église,
gui bientôt ne fut plus désignée que sous le seul nom de
S'-Germain. Ravagée par les Normands en 845, 856 et 861,
reconstruite par l'abbé Gozlin,puis encore livrée en proie
aux pirates, elle ne se releva de ses ruines qu'aux xi* et
xu* siècles, et le pape Alexandre III, qui la consacra ea
1163, déclara au'elle ne relèverait que du saint-siége.
L'architecture de l'Oise S^Germain-des-Prés marque
une époque fort intéressante dans l'histoire de l'art, celle
où, à côté du plein cintre roman, commence à poindra
l'ogive. L'édifice est en forme de croix ; l'extrémité orien-
tale est circulaire, et autour du rond-point rayonneni
cinq chapelles également circulaires. Les transepts, qui
sont fort courts, datent du xni* siècle. Les piliers de la
nef sont carrés, et flanqués, sur chaque face, d'une co*
lonne engagée; les arcades en plein cintre qui les unis-
sent sont ornées d'un tore élégant sur Tarête. Sur les
chapiteaux, d*un travail assez bvbare, on a représenté des
figures entières, des monstres et des plantes exotiques.
Cette partie-là est évidemment la plus ancienne. Dans le
chœur, les fenêtres de la claire-voie sont à ogives; les
colonnes de la galerie du premier étage sont couronnées
par un entablement horizontal; les colonnes du rond-
point supportent des ogives, tandis que les autres arcades
du chœur présentent des pleins cintres. L'édifice fut ré-
f)arâ en 1653 : ce fut alors qu'on pratiqua des ailes sur
es deux côtés, et qu'une voûte remplaça le vieux lam-
bris qui couvrait les murs. De nos Jours, l'église S*-Ger-
main-des-Prés a subi une nouvelle et entière restaura-
tion : M. Flandrin a peint à la dre divers sujets sur les
murailles du chœur ; les piliers et les voûtes ont reça
une peinture polychrome, qui rappelle la décoration de
la S^'^hapelle; la flèche a été reconstruite en entier;
enfin on a repris en sous-œuvre la tour, que les archéo-
logues regardent comme un débris de l'édifice élevé du
temps de Childebert. F. Bouillard, Histoire de Vabbaye
royale de S^-Germain-des-Prés, Paris, 1724, in-fol. B.
GERMAIN -EN- LA YE (Chàteau de S^-). En 1124,
Louis Yl le Gros fit bâtir à S^-Germain un ch&teau fort,
où ses successeurs séjournèrent fréquemment, et qui fut
incendié par les Anglais en 1346. Les travaux de reédifi-
cation furent commencés par ordre de Charles V, en
1367. François I", non content de les achever, fit élever
l'édifice d'un étage, et le décora de toutes sortes d'orne-
ments, tels que chiffres, armes, salamandres, F cou-
ronnés, et autres fantaisies élégantes dont les artistes de
la Renaissance étaient prodigues. Comme le château avait
néanmoins conservé l'aspect d'une forteresse , Henri IV
voulut avoir une résidence rovale plus moderne, et fit
construire, à une distance de 130 met. environ, par son
architecte Marchand, un CliâUau neuf, dans le style de
la Renaissance. Il était sur le bord de la colline au-dessus
de la Seine, vers laquelle les Jardins descendaient en
terrasses soutenues par des maçonneries; et, sous ces
terrasses, on ménagea des grottes garnies de coquillages
et de figures automates, ouvrage du mécanicien florentin
Francini. Louis XIV, qui naquit dans ce château, dépensa
plus de 6 millions pour l'embellir, puis l'abandonna après
la construction de Versailles. Quand le roi Jacques II
vint chercher un refuge en France, Louis XIV le logea au
vieux chjlteîui de S^ermain. Pendant la Révolution, on
fit une prison do ce chùteau sombre et triste. Sous le
1*' Empire, on y installa une école de cavalerie; la Res-
tauration en fit une caserne de gardes du corps ; après
1830, on le transforma en pénitencier militaire ; Napo-
léon III l'a consacré, en 1862, à un musée celtique et
romain. Le château neuf fut abandonné pendant la mi-
norité de Louis XIV, et il n'en reste aujourd'hui que
quelques terrasses et un pavillon improprement appelé
Pavillon de Henri IV ^ ancienne chapelle transformée en
restaurant. Le vieux château, de forme pentagonale, est
de briques et de pierres, et couvre une supeirficie d*un
hectare 55 ares. Les cinq pros pavillons d'angle, bâtis
par Mansard,en 1687, ont été remplacés de nos jours. La
chapelle ogivale, située du côté de la place du Théâtre,
fut peinte, au temps de Louis XIII, par Vouet et Lesueur .
Autour du château, François I*^ avait fait planter un jar-
din, qui fut agrandi sous Louis XIV et dessiné à nou-
veau par Le Nôtre; les bassins et !es Jets d'eau furent
comblés en 1750. La terrasse, une des plus magnifiques
promenades de l'Europe pour l'étendue du parcours et
du point de vue, fut construite par Le Nôtre en 1676 :
elle a* près de 2,400 met. de longueur, 35 met. de lar-
geur, et est soutenue par un mur élevé, avec cordon et
uiblette de pierre. K. le Supplément.
GERMAINS (Religion des). V. notre Dictionntnrê d9
Biographie et d'Risloire, page 1176, col. 1.
GER
973
GES
GERMANIQUE (Droit). K. Bauavcs (Lois des).
GERMANIQOES (Langues), mape de langues appar-
Isnaat à la famille des langues indo-européennes (V. os
moi), et comprenant le gothique, Tislandais, le suédois,
te danois, Tanglo-saxon, Panglais, le bas allemand (au-
quel se rattachent le frison, le hollandais, le flamand), et
le haut allemand (allemand, souabe ou alémanique, etc.).
Jacques Grimm leur assigne quatre caractères fondamen-
tKix : 1* la propriété qu'a la voyelle de s'adoucir en se
prononçant, pour indiquer une modification dans la si-
gnifleadon ou remploi du mot; 2* la métathèse, c-à-d.
h tranaUormatlon a'une consonne en une consonne de la
mémeclasse, maisqui s'en distingue par une prononciation
plus forte, on moins forte, ou plus aspirée; 3** Tezistence
de oonjo^sons forte» et faibles, c-à-d. de conjugaisons
dans leatraelles la Toyetle radicale change d'après certaines
lois, et de conjugaisons dans lesquelles elle demeure in-
variable; A* des déclinaisons faibles pour les substantifs
et les adjectifs, c-4-d. ôt» déclinaisons dans lesquelles la
foyelle radicale demeure la même aux diflérents cas, ces
cas ne se distinguant que par les terminaisons. Des per-
aratations de leàres s'opèrent non-seulement entre les di-
rerses formes d'un mdme mot, ou en passant du mot
.*adical ao mot composé, mais entre les mots des difFé-
lents «fialectes. Les langues germaniques, très-riches sous
le rapport du vocabulidre, sont assez pauvres quant aux
temps des verbes : elles n'avaient originairement que
deux temps, le présent et le passé, et elles ont dû recou-
rir à des verba auxiliaires pour exprimer d'autres temps
dont les progrès de la pensée rendaient la distinction
GERMANISME, façon de parler propre à la langue alle-
mande, ou encore empruntée à cette langue et trans-
portée dans un autre idiome.
GERMER (Église de S^), à 28 Ulom. O. de Beanvais
(Oise). Cette église, commencée vers 1030, est un re-
msrqoable monument du style de transition entre le
roman et le gothique. Elle a 67 met. de longueur, et
18 met. de Uu^ur. A l'extérieur, on la dirait entière-
ment romane : les fenêtres sont à plein cintre, sauf au
^d, où il y en a quelques-unes en ogive. La façade est
moderne; les piliers qui paraissent au dehors et ceux de
U première travée soutenaient ladis deux clochers, qui
forent minés par les Bourguignons vers 1400. La neî est
composée de 7 travées à arcades ogivales, séparées par
des piliers chargés de 5 fllts engagés, non compris les
etdonnes latérales : au-dessus de ces arcades est un ordre
tfarcades bouchées, en plein cintre surbaissé, tenant la
place du triforium, puis un autre ordre de petites fe-
nêtres carrées bouchées, une galerie étroite portant sur
une oonriche à consoles, et enfin la claire-voie à 7 fo-
Bêtrea romanes étroites, inscrites dans des arcs ogives.
Les voûtes, qui avaient été détruites par la chute des
clocfaers, ont été rétablies en bois vers 1754. Les tran-
septs sont, comme la nef, ogivaux au rez-de-chaussée, et
romaus dans les ordres supérieurs, sauf Quelques chan-
gemeats causés par des réparations. Le chosur présente
7 arcades à archivoltes découpées en rigzag; le triforium
a des arcades romanes pareilles à celles des transepts,
sanf les extrêmes latérales qui sont tripartites; la galerie
à consoles et la daire-voie sont en tout semblables aux
isêmes parties de la nef ; les voûtes oflOrent pour nervures
de gros boudins chargés de bâtons croisés, de rubans, de
feu i lies encadrées, et d'autres ornements d'un effet bi-
zarre. Les collatéraux sont étroits, bas, d'un aspect lourd,
à arcades en fer à cheval ; ils sont continués par une ga-
lerie garnie de chapelles, qui forment autant d'arcs de
oerde sur l'abside. — Par une allée pratiquée aux dépens
de Tascade centrale de l'abside, on arrive à une seconde
^iae, longue de 34 met., large de 9, et éclairée par
i5 fenêtres, dont 5 à l'abside sont géminées, tandis que
cbacane des antres embrasse quatre petites ogives réunies
L groupes. Du côté de l'entrée est une magnifique
dé 7",22 de diamètre. De superbes vitraux aes
et \n* siècles représentaient l'histoire de S' Germer.
mors étalent primitivement peints à fresque; ils
ont été recouverts de badigeon. Uautel portait un beau
letableen pierre peinte, chef-d'osuvre de la statuaire de
Tépoque, oéposé aujourd'hui dans le musée de Cluny
à Pans. Cette ^Ise, chef-d'œuvre de grftce et de !&•
gl^reté, dans le style de la meilleure époque ogivale, n'est
pas sans analogie avec la S*«-Chapelle de Paris. Les fo-
oêtres sont soimontées extérieurement de frontons, dont
OD a tnmqné le sommet. Des contre-forts à clochetons,
«TDÀ d'alcades simulées , s*appuient an comble. Sur le
cùcë méridional s'dlère ane tourelle hexagone, à arcades
ogivales simulées, supportant une balustrade à Jour*
GÉRONDIF, en latin Gertmdittm; forme particulière
de la conjugaison latine, et oui n'est autre chose que la
déclinaison de l'infinitif : uns! amandi est le génitif,
amando le datif et l'ablatif de amare; amemdum en est
raccusatif employé comme complément direct avec di-
verses prépositions. Le gérondif se met là où on mettrait
un nom de radical ou de sens analogue, à un cas expri-
mant un régime indirect : ainsi tempus scribendi (le
temps d'écriro) est pour tempus scriptionis, aptus seri"
benao ou ad tcrioendum (apte à écrire) pour aptus
fcrtp^tont on ad scriptionem, fessus scribendo (fatigué
d'écrire) pour fessus scrjptûme. Les poètes nég^gent sou-
vent l'emploi du gérondif, et le remplacent par l'infinitif:
cantare peritus, au lieu de cantandu Le gérondif a donné
naissance aux participes présents des langues néo-latines:
la preuve en est dans l'emploi tr^videux du gérondif
endok l'époque de la décadence du latin et surtout après
les invasions des Barbares. Ce système est toutefois un
peu contrarié en français par la variabilité qui caractéri-
sait autrefois notre participe présent quant au genre et
au nombre. V. Participe. P.
GÊRONTE (du grec gérân, gérontos , ancien, vlml-
lard), nom que les anciens auteurs comicpies francs ont
donné au père, au peraonna^^ grave de leurs pièces. Les
Gérontes n'eurent d'abord nen de ridicule ; puis on les
fit durs, avares, entêtés, simples et crédules. Rotrou, dans
sa comédie de La S<Bur (1647), a introduit un Gérante ve-
nant de Constantinople, sous If* costume turc Ce person-
nage a reçu de Molière son caractère véritable, dans le Mé'
decin malgré lui et les Fourberies de Scapin, 1660-1671 1
puis, Regnard remploya dans le Joueur, le Retour tm-
prévu et surtout le Légataire vnioersét,
GERYAIS (Église Saint-), à Paris. Commencée en
1212 et dédiée en 1480, cette église de style ogival a un
f>ortall d'un caractère tout dlfiérent , élevé en 1616 sur
es plans et sous la direction de Jacques Debrosses. Ce
portail réunit les trois ordres grecs d^architecture superpo-
sés ; sa masse imposante, mus lourde et sans grftce, forme
contraste avec les proportions délicates du gothique. On
y a placé de nos jours les statues de S^ Genrais et de
S* Protais, dues au dseau de Préault et de lioyne. L'église
S*-Gervais a été dépouillée de ses anciennes richesses : le
musée du Louvre lui a enlevé ses tableaux de Philippe
de Champagne, de Lesueur, de Sébastien Bourdon; les
vitraux de Jean Cousin ont presque complètement péri.
On montre cependant encore un Père étemel , attribué
au Pérugin, et un tableau sur bois, représentant en neuf
compartiments neuf scènes de la Passion, et qu'on dit
être d'Albert Durer. La chapelle de la S^* Vierge a été
richement peinte et ornementée; on y voit une curieuse
clef pendante, exécutée par Jacquet au xv* siècle. Préault
a exécuté pour la chapelle des fonts baptismaux un
Christ d'un effet saisissant. B.
GÈSE, arme. F. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire.
GESTÂ ROMÂNORUH, titre d'une collection latine de
récits généralement apocryphes et empruntés à l'histoire
des Romains célèbres, formée pour offrir aux moines une
instruction intéressante, et où l'on faisait des lectures
dans les réfectoires aux heures des repas. Chaoue cha-
pitre contient une histoire, qui s'appuie sur rautorité
d'un écrivain de l'antiquité, et d'ordinaire on ne trouve
dans cet auteur rien qui s'y rapporte. Les personnages
historiques sont présentés sous des traits tout autres
que ceux qu'on leur connaît. Cette collection, où 11 y a de
la naïveté, une simplicité parfois puérile et un peu de
mystidsme, est attribuée à un bénédictin du xm* siècle,
Bertheur, mort prieur de l'abbaye de S^Éloi, à Paris.
Elle obtint une vogue immense pendant deux siècles i
les prédicateurs la citaient dans leun sermons; plusieurs
conteurs italiens et Shakspeare lui-même lui ont fait des
emprunts. Oubliée depuis la Renaissance, elle a attiré
l'attention des érudits de nos jours : Douce et Swan Tont
fait connaître à l'Angleterre; Gresse, qui en a publié une
traduction allemande avec ample commentaire (Dresde,
1843), croit, en raison des cermanismes et des angli-
cismes qui V fourmillent, qirelle est Tosuvre d'un cer-
tain Elinandus, moine allemand ou anglais. A. Keller a
donné une édition du texte latin à Tubingne, en 1844.
H. Brunet en a publié une vieille traduction française,
qui porte le titre bixarre de Vto^ter des histoires it>-
maines» B.
GESTE, nom donné au langage d^action, aux mouve-
ments du corps, soit naturels, soit artificiels, qui aident à
traduixi nos sentiments et nos pensées. 11 comprend, par
GES
974
GIL
«MMéquent, reipression de la physionomie, la poio du
corps, le» moavements dei bras et des mains. Uart du
geste est une partie importante de l'action oratoire et du
feu théâtral (K. ÂcnoH, DaAMATiQoa-Art , Mimique, Pan-
tovoib). Dans Téloquence de la ciuûre, il eat plus néoea-
saire qu'ailleurs de modérer, de régler les sestes; le
P. Sanlecqne, dans on petit poème sur la Déclamation,
a caractérisé d'une manière assex heureuse les dé&iuts
aniquels on se laisse trop souvent aller :
Songeons k ce doeteur dont U toIx péâanteiqae
Donne un atr de relief k ion air soldatesqne.
Veut le Toyes, campé comme an gladiateur,
Le poing toi^oon fermé nargner ton aoditear :
On dirait, quand 11 veut pousier an syllogieiil^
Qa*i] appelle en dael toat le chrietlanitnie ;
On qae de sa foreur noua prenant pour témoins,
D Teuille défier le diable k coups de poings....
Snrtout n*imitez pas cet homme ridicule
Dont le bras nonchalant fait toujours le pendoto;
Au travers de tos doigts ne tous fUtes point Toir,
Et ne nous prêches pas comme on parle an parloir.
Clies les nouTeauz aetears e*est un geste à la mode
Que de nager au bout de chaque période.
Ches d'aatres apprentis. Ton passe pour galant
Lorsqu'on écrit en Tatr et qn*on peint en parlant.
L*nn semble d'une main encenser rassemblée.
L'antre à ses doigts crochus parait aroir l'onglée;
Oelni-«i prend plaisir k montrer ses bras nos,
Gélul-lii flslt semblant de compter ses éeas.
Id , le bras manchot Jamais ne se déploie;
Là, les doigts écartés font une patte d*ole.
Souvent, charmé du sens dont mes diaoonn sont pleins,
Je m*applandls mot-mème et fais claquer mea mains.
SouTent Je ne veos pas qoe ma phrase finisse
▲▼mat qoe, poor signal , Je ne firappe ma cuisse.
Tantôt, quand mon esprit n'Imagine plus rien,
J*enfonee mon bonnet qui tenait déjà bien.
Qnâqnefols, en poussant ane voix de tonnerre,
Je flûs le timbalier sur les bords de ma chaire.
La science du geste est très-importante pour ceux qui
se liTrent aux beiuiz-arts ; caril n*est pas, pour le sculp-
tenr et le peintre, de moyen d'expression plus puissant
que le geste. Il n*est pas étonnant que les Anciens aient
rôprésenté si souvent leurs personnages nus on presque
nus : en effet, il existe une grande différenee entre la
force de signification d'une figure drapée et celle d*une
figure nue, dont tontes les parties mettent en évidence
tant de signes caractéristiques et correspondante, qui tous
concourent à Tunité de l'expression. B.
GESTES (Chansons de), nom donné aux romans de che-
valerie, où Ton célébrait les actions (en latin mta), les
exploite des héros. Les Chansons de gestes, mvisées en
eonplets monorimes, étaient faites pour être chanté»,
comme les rapsodies des anciens Grecs, avec accompa-
gnement d'instrumente. Fanriel avait émis, à leur si^et,
plusieurs opinions que H. Paulin Paris a combattues
avec succès : ainsi , il leur donnait à toutes le nom de
fomofif caHovingiems, tendis qu'un grand nombre ne se
rapportent ni à Charlemagne ou à sa famille, ni à ses
contemporains; il les regardait, non comme des osnvres
originales, mais comme des imitetions d*épopées proven-
çales aujourd'hui perdues, ce qui est dénué de preuves
sérieuses, car il est avéré, d'une part, que Gmxurd ds
RoussUlon et FUrabrag sont les seuls romans que l'on
possède en provençal , et , de l'autre, que les manuscrite
provençaux ne remontent pas an delà du xiv* siècle ou
tout au plus à la fin du xni* ; il ne croyait pas qu'elles
fassent antérieures au xii« siècle, oubliant que les Trou-
vères de ce siècle en citent les héros, que l'on entonna
une de ces Chansons à la bataille d'Hastinn (1066), et
qn'à la même époque Robert Guiscard se faisait chanter
les vers de la Chanson de Guillaume au court ms;
enfin, psr la raison qu'elles étaient trop longues, il ne
croyait psa qu'on les eût Jamais chantées, comme si l'on
n'avait pas récité dans l'antiquité Vlliade et ses 34,000
vers, non pas chaque fois en entier, mais en prenant
isolément un récit, ane description de combat, ete. Il
est aujourd'hui hors de doute que les Chansons de gestes
ont pris naissance chex les Trouvères, dans le domaine
de la langue d'oïl. Elles furent vraisemblablement l'am-
plification des chante guerriers qu'on appelait cantUènes
dans les siècles antérieurs, et dont on trouve des échan-
tillons dans le recueil de poésies populaires latines pu-
blié par H. Edelestend du Méril : c'est ce one permet de
supposer un fragment d'une épopée intitulée Gomumd H
Isembard, laquelle est b&tie sur le chant composé en
mémoire de la victoire de Louis m sur les Normands en
882. V. Wolf , Sur les poëmes épiquês dês anciens Frai^
çoM, en allem.. Vienne, 1838, in-8«; Paulin Paris, les
Chansons ée çosts, Paris^ 1899, broch. ln-8*; Ch. d'H6-
ricault, Essa% sur Vorigtne de Vépapée française et sur
son histoire au moyen âge, Paris, 1860, in-8*. B.
GHAZ&L. F. Cassidè.
GHEEZ ou GEUZ. V. ÉTHionsmiBS (Langues)»
GHIOLOF (Idiome). V. Wolop.
GHIRIF , sorte de petite flûte chez les Turcs.
GIRAULT ou GIRBE, arme offensive du moyen àge^
massue selon les uns, fronde selon les autres.
GIRECIÈRE, espèce de sac ou de bourse qu'on portait
autrefois à la ceinture. Elle se rapprochait de l'aumO^
nière. Aujourd'hui c'est la poche on cuir et à filet où les
chasseurs placent leurs ustensiles de chasse et leur
gibier, et on U nomme aussi camier ou comosnérs. On
appelle encore gibecière le sac de toile ou de cuir que les
escamoteurs portent devant eux à la ceinture, et qui , di-
visé à rinténeur en plusieurs poches où se placent des
muscades et des boules de toute grosseur, sert, avec les
gobelete, à exécuter les tours dite de qibedère,
GIBERNE. V, ce mot dans notre Ih^kmnaire de Bio^
graphie et d'Histoire.
GIBET, instrument qui sert au supplice de la pendai-
son. On pense que son nom vient de Tarabe gibet (mon-
tagne), ^rce qu'on dressait toujours le gibet sur un lieu
élevé. Gibet est synonyme de potence et de fourches pa-
tibulaires,
GIG ou GUIGUE, canot très-léger, long de 7 à 8 met.,
profond d'environ 00 centimètres, à fond plst, les deax
boute en pointe, et marchant au moyen de 6 avirons et
d'une voile légère que porte un m&t très-court.
GIGANTÉJA, c-èrd. Tour des Géants^ édifice construit,
dit-on, par des Phéniciens dans 111e de Gozzo. Il se com-
pose de deux temples hypèthres, placés parallèlement l'un
à côté de l'autre, et composés de cinq absides à peu près
circulaires, rangîftes autour d'une nef étroite : leur façade
commune, tournée vers l'orient, est percée de deux
portes par lesquelles on pénètre dans Tintérieur. Le plus
considérable des deux temples a 26 met. de longueur, et
23 met. dans sa plus grande largeur. Les murailles sont
en blocs de pierre énormes, placés alternativement debout
et dans le sens de leur longueur; les interstices eont
remplis de pierres plus petites. Ces constructions ont une
grande analogie avec celles des Pélasges.
GIGUE, danse et air dont la«mesure est à six-huit et
d'un mouvement vif et çai. Les gigues de Corelli ont eu
beaucoup de succès ; mais airs ei danse sont entièrement
passés de mode, excepté en Angleterre. Les danseurs de
corde donnent le nom de gtgue à un de leurs pas. — Les
anciens auteurs français parlent d'un instrument de mu-
sique nommé giçue, inventé en Allemagne, où on l'appe-
lait geige ou getqen. D'une forme analogue à celle d'une
gigue ou cuisse de chevreuil , il ressemblait à la mando-
fine moderne : le corps était bombé et à côtes, la table
percée de deux ouïes, et le manche garni de trois cordes.
C'est de cet instrument que la danse tira son nom.
GIL-BLAS, célèbre roman de mosurs, publié en trois
parties par Lesage (1715, 1724 et 1735). L'action, laiige-
ment dessinée, commence vers la fin du xvi* siècle, et se
poursuit pendant la première moitié du xvn* t elle se
passe en Espagne, mais les personnages n'ont d'espagnol
Se le nom et le costume, leurs mosurs sont françaises,
supériorité de l'œuvre consiste moins dans le mérite
de la conception que dans la vérité fn4)pante des détails
et l'habileté de la mise de la scène; un esprit vif, enjoué
et satirique l'anime d'un bont à l'autre ; le s^le est un
modèle ae correction, d'aisance et de clarté. Gil-Blas, le
doeteur Sangrado, rarehevèque de Grenade, sont restés
populaires ; et il s'en faut de beaucoup que tous les per-
sonnages soient de pure invention : lors de l'apparition
du ronum , on cmt reconnaître les originaux d'une foule
de portraite, et l'on publia une def, aujourd'hui perdue.
Les gecs de théâtre, les médecins et leurs querelles, la
prostitution des faveurs de l'autorité, les désordres et les
gaspillages des grandes maisons, les bureaux d'esprit, Le-
sage avait tout sous les youx, sans avoir besoin de rien
emprunter à l'Espagne. On lui a reproché à tort d'avoir
calomnié de parti pris l'humanite : il n'y a en lui rien du
misanthrope, du moraliste sévère, du satirique acrimo-
nieux ; il a simplement montré ce qu'il avût vu, sans en
charger les couleurs, et son ironie est plutôt indulgente
qu'amère et passionnée. — Du vivant même de Lesage,
on nia l'originalité de son roman , et l'on prétendit qu'il
l'avait tiré de l'espagnol. Il en est résulté une controverse
qui a duré iusqu^à nos Jours. Bruzen de La Hardnière,
dans son Nouveau Portefeuille historique, poétique et
littéraire (2« édit., 1757), disait de Lesage à la fin de
6IR
975
GIS
nelqnosTéfleHoossiirson DiabUboiUuœ: « Coït sa ma-
nère d'embelUr extrêmement tout ce qu'il emprunte des
Bapagnols; c'est ainsi qu'il en a usé envers GU-Blas, dont
lia Hait un chef-d'œuvre inimitable. » Voltaire alla plus
k^: ne pardonnant pas à Lesage de Tavoîr désigné
(Uy. X, châp. 4 ) sous le nom du po^ Triaquero ( mot
ri Teut dire en espagnol charlatan, vendmir a orviétan),
raccosa, dans son SUcU d» Louis XIV, d'avoir tout
emprunté à l'ouvrage intitulé la Vida del escudero Don
Marcot éCObregon. Biais, s'il avait réellement connu cet
MTrage, publié par Vicente Eq>inel à Madrid en 1618, il
aanit va que Leôage avait tout au plus arrangé avec tact
■ne dizaine de passages, et que, malgré cette retouche
habile, ce n'étaient pas les meilleurs de GU-Blas. L'ac-
cassâon de plagiat fut renouvelée en 1787 dans un
livre publié à Madrid sous le nom du P. bla , bien que
ce savant fût mort depuis 1781 : on y soutient que Lesage
reçut d'un Andalou, nommé Constantin!, le manuscrit de
Gâ-Blas, qui n'aurait pu être publié sans danger en Es-
pagne, pour qu'il le traduisit en françûs et le fit im-
{ffimer à Paris. Ces assertions ont été victorieusement
réfutées par François de Neufch&teau, dans une Disser-
tation lue en 1818 à l'Académie française. En 1880, un
savant espagnol, Llorente, dans des Observations cri-
tiques sur le roman de GU-Blas, prétendit que le véri-
table auteur de ce livre était Don Antonio de Solis y
Ribadeneira, mort en 1686 , allégation qui fut l'objet d'un
nouveau travail de François de Neufco&teau, et que re-
poussa également Audiffret dans sa Notice historique sur
Lesage (1821). Un professeur de l'université de Berlin,
Frédéric Franceson, dans un Essai sur Vorigtnalité de
QH-'BUu^ a récemment dressé une liste exacte et sûre des
emprunts de Lesage, et il conclut que GH-Blas lui appai^
tient iMen en propre, et que, s'il a imité, c'est à la ma-
nière de Shakspeîffe, de Molière et de La Fontaine. Outre
la Vie de Vécuyer don Marcos de Obregon, Lesage a mis
à contribution diverses pièces du thé&tre espagnol , Plaire
et ne pas auner de Calderon, les Embarras du mensonge
de Mendoza, le Mariage par vengeance de Rojas, Tout est
pége en amour de Diego de Cordova, etc. P— s.
GILLE, personnage de comédie, le niais des tréteaux
et de Ja parade. Il est entièrement vêtu de blanc, et porte
de longues manches pendantes. Rival d'Arlequin pres de
Colombine, il sert de plastron aux deux amants. Son nom
rient pent-ôtre d'un oouifon qui aurait créé ou fait va-
loir remploi.
GTNGRAS. F. Covos.
GTNGRÊE, flûte des funérailles chez les Anciens.
GIPPON, vêtement en usage en France au commence-
ment du XV* riècle. C'était une sorte de gilet rond à
manches, ou veste de dessous.
GIRALDA (La), célèbre tour carrée construite à Sérille
par les Mores Jmîqu'aux trois quarts de sa hauteur ; les
chrétiens ont ajouté le couronnement. Le tout est sur-
monté par une statue de la Foi. La partie qui est Tou-
vnge des Mores est décorée de sculptures d'un genre
beaucoup plus simple que celles de leurs autres édiflces.
Dans l'intérieur de la tour, il y a un escalier tournant
sans marches; il est si large et la pente en est si douce,
que pinceurs hommes à cheval peuvent y monter de
Dont , jusqu'à la hauteur où commencent les travaux des
chrétiens : à cet endroit l'escalier devient plus rapide et
■e compose de degrés. B.
GIRANDOLE, assemblage de tuyaux formant une
figure quelconque par leurs jets d'eau ; — chandelier à
plaaieors branches, qui sert à l'ornement des salons et
des galeries de fête; — espèce de boucles d'oreille for-
mées de grappes de pierres fines.
GIRARD. K. GÉRARD.
GIRBERT DE METZ, roman de chevalerie qui fait
suite à Garin le Lohérain (F. ce mot). Girbert, fils de
Garin, entreprend de venger la mort de son père. Il y
est aidé par l'empereur Pépin. Les Bordelais sont vaincus
et demandent la |Mdx: Fromondin, fils de Froment, est
rétabli dans Bordeaux; sa sœur Ludie est mariée à Her-
nant , cousin de Girbert. Cette paix ayant été rompue par
une trahison de Fromondin, Girbert enlève du cercueil le
crfcne de Froment, le fait monter en forme de coupe, et
y fait boire Fh>mondin. La guerre recommence plus ter-
rible entre les deux familles : Fromondin vaincu se re-
tire en Espagne dans un ermitage. Le hasard fait que Gir-
bert, allant en pèlerinage à S^-Jacques de Compostelle,
s*adicsse à Fromondin pour se confesser; le Bordelais
reconnaît son ennemi et cherche à l'assassiner ; mais il
tombe Joi-môme sous le fer de Girbert. — C'est ici que
flnit la Chanson dss Lohéraias dans la plupart des ma-
nuacrits. Cette branche, qui n'a pas été publiée, est con-
servée à la Bibliothèque nationale de Paris dans dnq
manuscrits du xn" siècle, du xui* et du xiv*. Une traduo*
tion en prose en a été faite au xvi« siècle par Philippe de
GIRGENn (Ruines de). V. Agrigentb.
GIRON, en termes de Blason, une des pièces hono-
rables de l'écu. Il est de forme triangulaire; sa base a
pour Urgeur la moitié de celle de l'écu, au centre duquel
atteint son sommet.
GIRON LE COURTOIS, uu dos romans de la Table ronde
( F. C0 mot), l'un des plus intéressants, et celui où la
morale est la plus pure. Giron , dont le grand-père fut
dépouillé du royaume des Gaules par Pharamond et les
Francs, rit sous les règnes d'Cter Pandragon et d'Ar-
thur. Pour ne pas tomber dans les pièges de la dame de
Maloanc, mariée à son ami Danayn le Roux, il s'éloigne,
se lance dans la carrière des aventures, et est grièvement
blessé en défendant une demoiselle Bloye, attaquée par
des chevaliers félons. Soigné par elle, il se soustrait aux
élans de sa reconnaissance, et va faire de nouvelles
prouesses. A ]& suite d'un tournoi où il s'est distingué
incognito sous les yeux de sa dame, il apprend qu'un
chevalier l'a enlevée; il la délivre en tuant le ravisseur
au milieu d'une forât. Là, il va céder à sa pas^n, quand
son épée, que lui avait léguée en mourant son tuteur
Hector le Brun, sort du fourreau , et il lit sur la lame
cette derise : Loyauté est au-dessus de tout, fausseté
honnit tout. Honteux de la trahison qu'il allait commettre
envers Danajrn, il se jette sur la pointe de son épée, et se
fait une horrible blessure. Danayn surrient, et Giron lui
apprend ce qui s'est passé. A peine rentrée chez elle, la
dame de Maloanc est prise d'une fièvre qui l'emporte au
tombeau. — Le roman de Giron le Courtois se disUngue
des autres du même cycle, en ce qu'on n'y voit ni fées ni
géants; le S^ Graal n'y exerce non plus aucune influence
religieuse. Il fut composé vers le milieu du xui* siècle
par Luce du Gast. Nous en possédons une version en
prose, oubliée en 1510 à Paris. B.
GIRÔNNÉ, en termes de Blason, se dit d'un écu diriséen
6, 8,10, 12 et même 16 girons, de deux émaux alternés.
GIROUETTE (du rieux français gtrer, virer), feuille
métallique placée de champ au sommet des édifices, et
disposée sur une tige de manière à pouvoir tourner libre-
ment autour de celle-ci au moindre vent. Pour juger
de la direction des courants d'air, on place^ au-dessous
de la girouette, des lettres fixes qui désignent les quatre
points cardinaux et quelquefois les positions intermé-
diaires. Cependant ces signes indicatifs ne suffiraient pas
pour les ODservations météorologiques ; on se sert, dans
ce cas, d'un grand cercle dirisé en degrés ; et comme on
ne pourrait atteindre jusqu'à la girouette pour constater
la direction précise du vent et la marquer en degrés, on
obtient par une transmission de mouvement la maïque
des courants sur un cercle inférieur. On constate aussi
avec une machine particulière appelée anémomètre la
force et la ritesse du vent. L'idée de la girouette est fort
ancienne. On raconte qu'Andronic de Gyrrha fit élever è
Athènes la Tour des vents, et graver, i^ur les côtés, des
figures qui représentaient les huit vents principaux : un
tnton d'airain , tournant sur un pivot au sonmiet de la
tour, posait une baguette qu'il tenait à la main sur le
vent qui soufflait. La girouette était, au moyen âge, un
attribut du seigneur, et ne pouvait être placée que sur
les châteaux féodaux : figurée en pennon, elle annonçait
la demeure d'un simple chevalier ; taillée en bannière ,
celle d'un banneret. — Dans la Marine, on nomme gt-
rouette une bande de toile, blanche, bleue ou rouge, pla-
cée aii sommet du grand m&t. Dans les escadres elle sert
de signe distinctif pour les difi'ërents narires.
GISORS (Château de). Ce château, b&ti de 1088 à 1097
par Guillaume le Roux, duc de Normandie, pour son vas*
sal Robert de Bellesme, et augmenté par Henri I*' Beau-<
clerc, est un des plus vastes et des mieux conservés du
moyen &ge. Il pouvait, dit-on, loger 10,000 hommes. Il
se composait de deux enceintes, avec un donjon au milieu
de la seconde. Ses ruines imposantes couvrent une col-
line située à l'extrémité de la rille, près de la ririère do
l'Epte. Les fossés et les remparts ont été transformés en
belles promenades, et quelques constructions servent de
halle : mais on voit toujours, outre le donjon, flanqué
d'une tourelle qui contenait l'escalier , une grosse tour
dite de St-Thomas, parce que Thomas Becket y trouva un
asile, et une tour de la Passion ou du Prisonnier, ainsi
GLA
976
GLa
ippeléc de ce que, dans une de ses salles basses, les mn-
railles sont couvertes de sculptures où un prisonnier dont
la légende n*a pas conservé le nom a représenté, incor-
rectement mais avec naïveté , au moyen d*un clou ar-
raché à la porte de son cachot, plnsieurs scènes de la
Passion de J.-G. et de la vie des Saints. B.
cisoES (Église S'-GeavAis-Ei^^-PaoTAis, à). Cet édifice
est de plusieurs styles. Le chosur (ùt bâti au un* siècle;
on construisit ensuite les nefs; le portail du Nord, très-
richement orné, date du iv* siècle. La façade occidentale
appartient à Tàge de la Renaissance : c*est le plus pré-
cieux monument de cette époaue oui soit en Normandie;
Tordonnance en est belle, les détails et les Usures sont de
récole de Jean Goufon, et presque dignes de lui. Cette
façade est flanquée, à gauche, d*an clocher terminé, et, à
^ite, d*un autre clocher de forme difTérente, dont il
n*existe que la base, mais cependant remarquable comme
oeuvre de la Renaissance. L*église est à 5 nefs, disposition
trte-rare, et dans le pourtour sont 23 chapelles. 43 pi-
liers de styles divers soutiennent les voûtes. Des vitraux
du XVI* siècle ornent les deux étages de fenêtres. Parmi
les cmriosités, sont : la tribune des orgues, un Arbre de
JêiU sculpté dans la chapelle du Rosaire, de nombreux
panneaux peints à Thuile, et un pavage parsemé d'épita-
phes gothiques. V, Tavlor, Voyagn ptttoreviu»M dans
Vancienne France, pi. 100 à 121. B.
GITÂ-GOVINDA, on le Chant du Pastêur, poème sans-
crit dont le principal héros est Krishna, désigné sous le
nom de Gâvinda, qui signifie berger. Cet ouvrage a pour
autenr Jayadèva, et pour s^Jet apparent les aventures
amoureuses de Krishna avec les bergères nommées Gôpis.
Ce n*eet pas une épopée, ni même à proprement parler
une oeuvre épique, bien que cette forme ait été donnée
par les poètes indiens à un grand nombre d'écrits. Son
sqjdt semblerait devoir le ranger parmi les œuvres de
poésie erotique; mais il est incontestable que Fauteur a
voulu composer un poème symbolique et mystique, où les
personnages et les aventures les plus romanesques ne
sont que des figures recouvrant nne doctrine religieuse
et métaphysique. Du reste, à le prendre tel quMl est, ce
poème renferme souvent les analyses les plus délicates
des sentiments intimes du cœur humain. Quant à sa
date, il est difficile de la fixer d'une manière historique ;
mais on peut dire ou'il appartient à une époque avancée
de la littérature inaienne, et, d'un autre cèté, au temps
où le culte de Krishna , l'un des derniers venus de la
religion brahmanique, était dans toute sa vigueur. Em. B.
GIVRK, en termes de Blason , nosse couleuvre, vipère
«a serpent à queue ondulante. Quand elle est en fasce,
OD la dit rampante; droite, on la dit en pal,
GIVRÉE , nom qu'on donnait , dans la seconde moitié
du xvm* siècle, à des surtouts de table imacinés par un
Suisse nommé Soleure, et qui, au moyen d'une poudre
de verre blanc semée sur des endroits gommés, figuraient
le gkfre de l'hiver.
GIZEH (Pyramides de). V, Pyramides.
GLACES. La fabrication des glaces date du moyen ftge,
«I les Vénitiens en eurent longtemps le monopole. Les
l^aoea de Venise étaient légèrement violacées, on plutôt
rwéet. et prêtaient ainsi au teint une nuance agréable.
En 1634. Euatache Grandmont et Jean-Ant. d'Autonneuil
obtinrent, pour la fabrication des glaces à Paris, un pri-
vilège de iO années, qu'ils cédèrent, 0 ans après, à Ra-
phafil de La Planche, trésorier génàal des bUiments du
roi. En 1665, Colbert érieea en manufacture royale ce
premier établissement qui languissait, et fit construire,
dans la me de Reuilly, des b&tlments destinés à faire
des essais. Une manunicture fut fondée à Tour-la-Ville,
près de Cherbourg, où elle n'a cessé d'exister qu'en 4808.
Ce fut en i688 (m'Abraham Thévart, ou, selon quelques-
uns, Lucas de Néhon, imagina, au lieu des glaces souf-
flées d'après les anciens procédés, les glaces coulées ou
laminées : les premiers travaux en ce genre furent faits
dans les ateliers de la rue de Reuilly, vers 1604, mais
on dut les abandonner à cause de la cherté de la main-
d'œuvre et du bois, et ils ne furent repris qu'un peu plus
tard à S^Gobain. La méthode du polissage a été inven-
tée par Dufresny. Les deux compagnies de Tour-)a-ViIle
et de SMjobain, réunies en une seule, se virent enlever
leur privilège en 1701, à cause du mauvais éti^ de leurs
affaires; en 1702, le privilège fut accordé à une compa-
gnie dirigée par Antome d'^ncourt, qui porta la fabri-
ration à un haut degré de perfection. On continua de
souffler les glaces à Tour-la-Vil}e, et de les couler à S*-Go-
bain : les glaces des deux manufactures étaient envoyées
i Paris, et c'est dans la rue de Reuilly qu'elles étaient
polies, étamèes et mises en vente. Plus tard, les atèMen
de polissage furent transférés à Channy, et l'étamage
seul fut exécuté à Paris. L'industrie des glaces tomba,
durant la Révolution, dans un complet allanguisaement :
on la vit renaître sous le i*' Empire, et une mannfacture
du fànboura S'-Antoino à Paris, dépendance de l'établis-
sement de SMfObain, envoya à l'Exposition de 1806 une
glace de 3*,08 sur 1"*,62. Ce fut à peu près vers ce temp?
que les verreries de SMJuirin et de Cirey (Henrthe) firent
concurrence à SMSobain; en 1830. un accord sur lei
prix mit fin à cette rivalité, et dès lors les deux compa-
gnies n'ont eu qu'un seul tarif et qu'un seul dépôt à
Paris; en 1830 aussi, les bâtiments de la rue de Reuilly
furent convertis en caserne. On a vu à l'Exposition uni-
verselle de 1855 une glace de S*-Gobain qui mesurait
18",04 de supofide. une manufacture fondée depuis
quelques années à llontluçon a pris un rapide dévelop-
pement. Il en existe d'importantes à Aniche (Nord), à
Blackwall près de Londres, à Oignies et à Floreflîe en BeU
gique : on en a aréé une à Aix-la-Chapelle en 185.1.
Ce fut peu de temps après la mort de Henri IV qu'on
applimia aux carrosses des fermetures en glace, selon le
modèle importé d'Italie par Bassompierre. Des dernières
années de Louis XIV date l'usage de mettre des glaces sur
les cheminées d'appartement, au lieu des tableaux, bas-
reliefs ou grands ôûendriers qu'on y plaçait auparavant :
l'idée en vint à Robert de Cotte, ou à François Mansard.
De là vint la mode des appartements tapissés de glaces
du haut jusqu'en bas, ainsi qu'on le voit dans les poésies
de Régnier-Desmarais; raffinement de luxe imité de l'an*
tiquité, et dont parle Sénëque ( Ep, 86). B.
GLACBS ET NEiGBs. Los propriétaires et locataires sont
tenus de faire casser la glace, balayer et relever les neiges
qui se trouvent devant leurs maisons, cours et Jardins,
jusqu'au milieu de la rue, et de les mettre en tas le long
des ruisseaux, s'il y a des trottoirs, et, s'il n'y en a pas,
près des bornes. Ils doivent tenir libres le ruisseau et les
bouches d'égouts. En cas de verglas, il faut semer du
sable, de la cendre, etc. L'amende infligée aux contreve-
nants est de 1 fr. à 5 nr.
GLACIÈRE, cavité ordinairement souterraine où l'on
conserve de la glace. Elle a la/orme d'un tronc de cône
renversé, et se termine à sa partie inférieure par un pui-
sard recouvert d'une grille, ou s'écoule l'eau qui se forme
par la fusion de la glace, bien que la température des gla-
cières soit à peu près à 0**. Elle a des parois en maçonne-
rie, qui supportent une charpente placée au-dessus du sol,
recouverte d'une épaisse couverture en chaume, et dis-
posée de manière à donner accès du dehors an dedans
de la glacière an moyen d'un corridor; celui-ci, recouvert
également en chaume, se ferme hermétiquement par pln-
sieurs portes successives. La glace doit être arrangée et
tassée avec soin, lUin que l'air circule difficilement entre
les morceaux. On place ordinaL*ement les glacières sur
le flanc d'un coteau qui regarde le nord ; on les entoure
d'arbres touffus, qui les garantissent de l'ardeur du soleil.
Aux États-Unis, lies glacières sont au-dessus du sol et se
composent de plusieurs b&timents concentriques, dont
les murs, trè»-épais, sont munis d'épais paillassons. —
En 183... on a construit à S'-Ouen , près Paris, une
ffladère souterraine qui peut contenir 8 millions de ki-
logr. de glace, et en 1859, la ville de Paris en a établi,
dans le Bois de Boulogne, vers la Mare d'Auteuil, une
dont la capacité est de 10 millions de kilogr. Il existe en-
core une glacière dans I^ris, au quartier de la Villette, et
40 autres, environ, dans la banlieue; les principales sont
à S'-Ouen, au N. ; Bobigny, au N.-E. ; Gentilly, Vanves,
Issy, au S. ; Chaville au S.-0., etc. Elles tiennent en-
semble plus de 20 millions de kilogr. V* au SupplémerU.
GLACIS, pente de terre ordinairement recouverte de
pzon. Le glacis joue un grand r61e dans la fortification;
il sert à couvrir et à masquer les ouvrages. Le glads le
plus avancé est celui qui relie la contrescarpe à la cam-
pagne; il se prolonge en pente douce sur une grande
longueur. Cest dans les glacis que l'assiégeant établit les
cheminements d'approche et les batteries de brèche. ~-
En Peinture, on donne le nom de glacii à de léeères
couches de couleurs que les peintres appliquent sur leurs
tableaux pour leur donner de la transparence et de l'éclat.
GLAÇURE, nom donné, dans les arts céramiques, à
une sorte de couverte légère. V, CouvBan.
GLADUTEURS. F. notre DietUmnair^ de Biographie
$t dr Histoire.
GLAGOUTIQUE (du slave glagol, iwrole, discours),
nom donné à un alpnabet slave, complètement difiérent
du cyrillien (F. ce moty^^ et employé par le clergé cath^
GLO
977
GLO
I1|M de Dttlmtttie pour écrire le Tieax 8la?on oo langue
eeclédaatique. Gerudns savants ont attribué, nial« contre
tente n«isembl&nce, Talphabet glagolitique à S* Jérôme,
et le nomment hiéronyfnique;\e saint raurait inventé
pour traduire en illyrîen la litui^e du rit latin. D'autres
prétendent que c'est simplement le cyrillien , altéré à
ieanin pour préserver les Slaves de rinfluence du rit
crée, crae les évèques de ce culte cherchaient à intro-
duire. Dobrowski a soutenu, dans ses Glagolitica (Prague,
1807), qa^il jeremontait pas au delà du xui* siècle; mais
KoDitar a publié à Vienne, en 1846, sous le titre de Glc^
goiUa Clozianus, un manuscrit glagolitique du xi* siècle,
appartenaDt an comte Kloz. Jacob Grimm attribue aux
caractères glagolitiques une bien plus haute antiquité,
parce qo'il v trouve reproduits quelques caractères ru-
niqoes. Ce fut en lettres glagolitiques qu'on imprima le
pranier ouvrage slavbn. E^ Fragments glagoliiujues ont
été publiés par Uofler et Schafarik, Prague, 1857, in-8^
GLAIVE, en latin gladiut, nom qui n'est plus usité
Qu'au figuré et en poésie. C'était, chez les Anciens, une
tpét à lame courte, large et à deux tranchants, assez
lemUable an sabre-poignard de notre infanterie. Au
mojen âge, on appela glaive une lance mince, armée
(Tune pointe longue et aigué.
GUÙf AGE, acte de ramasser à la main les épis restés
isolément dans les champs, après la mise en bottes dans
certains pays, et seulement q>rès l'enlèvement des gerbes
dans d'antres. La loi de Moïse prescrivit aux Hébreux de
laisser le pauvre, la veuve, l'orphelin et l'étranger glaner
dans les champs. Chez nous, les lois du 3 et du 8 sep-
tembre 1701, celles du 23 thermidor an iv et du S8 avril
1S32, ont réglementé le glanage. Les femmes, vieillards,
enfants et infirmes hors d'état d'aider à la récolte ont
seuls le droit de glaner; le glanage n'est permis que dans
les champs ouverts et quand le soleil est sur l'horizon ; il
est accordé 2 Jours pour le glanase, et le propriétaire ou
ramier ne peut, avant la fin du 2« Jour, envoyer son bé-
tail dans les champs moissonnés; nul ne peut vendre le
droit de glaner, ni s'opposer au glanage par violence ou
autrement. Le Code pénal (art 471) punit d'une amende
de 1 à 5 Cr. ceux qui glanent dans des champs non en-
llèrenMDt moissonnés, ou avant le lever et après le coo-
cher âa soleil ; un emprisonnement de 3 Jours au pins
peat encore être prononcé selon les circonstances.
. GL^NDÉE (Droit de), droit de mettre les porcs dans les
bois et forêts pour leur faire consommer des glands. 11
appartient aux habitants des communes voisines, on est
concédé annuellement à des adjudicataires.
GLAS (du grec JUaid, pleurer, ou klaxô, faire an bruit
perçant; ou dn latin ctango)y en latin du moyen âge
classicum, tintement lugubre, lent et mesuré d'une clo-
che, qui annonce l'agonie ou la mort d'une personne. Au-
trefois glas signifiait le branle simultané de toutes les
cloches d'un clocher. — Le même nom a été étendu aux
coupe de canon tirés à intervalles réguliers dans les céré-
monies de deuil, aux batteries sourdes de tambour, au
Jeo des instruments exécutant des airs funèbres.
GLASS-CORD, instrument de musique inventé par
Franklin. Cest une espèce de piano dans lequel les cordes
noétalliques sont remplacées par des lames de verre, que
soutiennent des chevalets libres à l'extrémité, et qoe firap-
pent des marteaux soulevés par les touches.
GLÈBE (du latin globus, motte de terre). Ce mot, par
extension, a servi à désigner un fonds de terre. Chez les
Romains, les esclaves attachés à on domaine s'appelaient
servi glétxB adscriptiiii, Vxusgfi de transmettre les
«achives scnc la terre passa du Droit romain dans le nètre.
n a dùqMsru à la Révolution; mais il existe encore en
Russie et aux États-Unis.
GLEE , chant joyeux particulier à Angleterre. H est à
^ 3, 4 oa 5 voix uniques, sans accompagnement, et ne
doit lanuds être chanté en chœur. IHirmi les compositeurs
de gUes, on dte Danby, Harrington, Cooke, Webbe, Cal-
cott, Stevens, Beale, etc.
GLOBE, manœuvre militaire. ( F. notre IHetionnaire
6L0BI, embltoie de souverai- \ de Biographie et
neté. ( d*nisUnre,
CLOBB DB coMPSESSioii, foumeau de mine inventé en
1732 par l'ingénieur Bélidor pour les attaoues de places.
n sert à crever les contre-mines de l'assiégé, ou a faire
sauter la contrescarpe et combler ainsi le fossé qui dé-
fend l'approche de l'escarpe.
CLOBB naaesTRE, représentation de la Terre avec ses
meri, ses continents, les divers accidents du sol, les villes
principales, enfin les cercles mathématiques qui servent
a déterminer les rapports de la terre avec les astres ou
des lieux terrestres entre eux. C'est la seule image exaele
de notre monde et la seule qui donne la véritable po^
tion des lieux, puisque, une sphère n'étant pas dévelop-
pable sur un plan, les cartes planes ne peuvent Januua
offrir qu'une figure et des positions approximatives. Un
globe terrestre se compose de deux parties distinctes, le
globe lui-même, et les différentes pièces qui le supportent
et l'entourent. Celles-ci sont, dans les globes les plus
simples, su nombre de quatre : 1° le pied, qui porte tout
l'appareil; 2<^ un grand cercle de métal appelé méridien
général, sur lequd on marque les degrés de latitude, et
même, dans les grands globes, les minutes et les se-
condes; 3* un second grand cercle de métal, perpendicu-
laire au précédent, qu'il coupe en deux parties égales;
c'est l'Aortson rationnel: 4* un quart de cercle, lame de
cuivre fixée au méridien général et à l'horizon, divisée en
90 degrés, et tenant lieu de compas pour mesurer les
distances. Le globe lui-même, ordinairement en ir.étal,
tient au méridien général ijar des poinçons fixés à ses
deux pèles; mais il est mobile sur un axe dont ces poin*
çons sont les extrémités, et incliné de 06<* 32' sur Thori-
zon. Il porte toutes les mêmes lignes que les cartes,
équateur, parallèles, tropiques, cercles polaires, méri-
diens, etc., et c'est après avoir tracé tous ces cercles que
Ton dessine sur le globe lui-même la figure de la terre.
Mais cette dernière méthode étant longue et coûteuse, on
applique le plus souvent, sur la boule destinée à devenir
un elobe terrestre, une carte générale du monde, con-
struite exprès, et divisée en segments sphériques appelés
fuseaux.
Le plus ancien globe terrestre dont il soit fait mention
est le globe en argent que possédait Roger II, roi des
Deux-Siciles, et pour l'explication du'ruel Edrisi composa
sa Géographie en 1154. Hais ce glot)e a disparu, et le
glus ancien que l'on ait conservé est celui que Martin
ehaim construisit en 1492, et que l'on conserve à la Bi-
bliothèque de Nuremberg : U ofiïe les découvertes des
Portugais sur les côtes d'Afrique Jusqu'au cap Negro, où
aborda en 1485 Diego Cam, que Behaim accompagnait;
le cap de Bonne-Espérance, découvert par B. Diaz en
1486, y est marqué, mais non pas à sa véritable place, et
tout près, au contnure, du cap Negro. Un autre globe de
la même époque, mais dont l'auteur est inconnu, a étâ
récemment trouvé à Laon : M. d'Avezac en a donné Isi
description et le fac-Bimi!e dans le Bulletin de la Sociétk
de Géographie (nov.-déc. 1860). Il porte au sud d(
l'Alrioue la date de 1493; mais le point auquel elle
s'applique n'est autre que le cap Ne^, comme dans le
globe de Behaim. On connaît, de la première moitié du
XVI* siècle, cinq globes importants pour l'histoire des dé-
couvertes en Amérique : le plus ancien , conservé à la
Bibliothèque de Nuremberg, fut exécuté par Jean Schœner
& Bajtnberg en 1520; un autre, de la même époque envi-
ron, sans date ni nom d'auteur, se trouve à FYancfort-
sur-le-Mein ; des trois autres, postérieurs à 1524, puis-
ou'ils représentent, sous le nom de Terra Francesca^ les
découvertes que fit Verazzano en Amérique par les ordres
de François i*', l'un est à la Bibliothèque impériale de
Paris, l'autre à celle de Nancy, et le dernier, construit à
Rouen, sans doute par quelque navigateur rouennais ou
dieppois resté inconnu comme les auteurs des deux pré-
cédents, se distingue par la coi^ecture hardie du détroit
(découvert 200 ans plus tard par Behring) qui sépare
l'Amérique de l'Asie. Ces globes sont en métal, la plupart
en cuivre doré, et gravés en creux. Cependant, dès le
commencement du siècle, existait l'art, attribué à Albert
Dflrer, de dessiner et de graver des fuseaux destinés à
être colIÀ sur une boule; ainsi était composé le globe
qui accompagnait, en 1530, la Cosmographie de Gemme
Frison. Les plus célèbres globes depuis le xvi* sièclf
sont : les deux globes en cuivre construits par L'Hôte er
1618, placés aujourd'hui à la bibliothèque de l'Institut
et remarquables par la beauté de l'exécution ; le globe dit
de Gottorp, œuvre d'OIéarius, en 1664, et qui se trouve
actuellement à S*-Pétersbourg; les deux beaux globes, de
4 met. de diamètre, qui ornent l'une des salles de la Bi-*
bliothèque impériale à Paris, et qui furent terminés par
Coronelli en 1683; celui de Cambridge, qui a 6 met.
de diamètre; enfin les deux beaux globes manuscrits
de Poirson, dessina sur la boule même avec tme grande
exactitude; l'un, construit pour l'éducation du roi de
Rome, a i",07 de diamètre; l'autre, de 0*,65, orne, an
Louvre, la nierie du Musée de marine. C. P.
GLOCESTER. F. Glooccstbs.
GLOCKENSPTEL. V. Clochettes (Jeu de).
GLOIRE» mot 9nufioyé comme synonyme d^awéole
61
GLO
97S
6LY
(F. 00 mot)^ et qui ft*applique également, 1* à toute pein-
ture représentant le ciel ouvert, avec lee trois personnes
de la Trinité entourées d*angBS et de saints; 2* à ces
rayonnements en bois doré dont on décore quelquefois le
fond du sanctuaire, comme à la cathédrale d*Amiens et à
Téglise S*-Roch, à Paris; 3* à une machine de thé&tre,
composée d'un siège et de nuages qui Tenveloppent, et
sur laquelle un personnage est emporté Ters les deux ou
descend sur la aicène.
GLORU m BXCELSIS, hymne de la liturgie catho-
lique, dans laquelle il entra vers le vu* siècle. lies pre-
mières paroles sont celles que les Anges, dans l*ÉvangiIe
selon S^ Luc, adressèrent aux bergers en leur annon^t
la naissance de Jésus. On ne sait qui composa la suite.
Le Ghria in eoDcelsit , qu*on appelle aussi r/i^mne an-
gHiquê, M chante à la messe i^près le Kyrie; on le sup-
prime dans PAvent et depuis la Septuagésime Jusqu'au
bamedi saint, ainsi qu'aux messes des morts.
GLORIA PATRl, verset par lequel on termine le chant
ou la récitation de chaque psaume. On croit que ce fut le
pape Damase qui ordonna, en 368, de Vj placer, bien que
BsjTonius prétende qu'il était en usage du temps des apô-
tres. Philostor^, écrivain du rv* siècle, donne ces trois
formules : Ghire au Pèrt, au Fils et au S^ Esprit; Gloire
Ou Père par le Fils dans le S^-Esprit; Gloire au Père
dans le FUs et le S^- Esprit, Sozomène et Nicépbore disent
aussi : Gloire au Père et au Fils dans le S^Esprit, La
1** formule est en usa^ dans les églises d'Occident; les
trois autres sont d'origine arienne. Le 4* concile de To-
lède, en 533, ajouta au mot gloria le mot honor, et sup-
prima les paroles Sicut erat m principio et nune et
semper. L'Eglise grecque se servit quelque temps de la
formule catholique, et, plus tard, supprima les mots
Séoul erat m prtncqno, qui d'ailleurs n'étaient ^ encore
universellement adoptés au vi* siècle en Occident. V,
DoxoLOGiB, dans notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire,
GLOSE, explication de queloues mots oiMcurs, ou su-
rannés, ou techniques d'une langue par d'autres plus
intelligibles de la même langue. Ce genre d'explication
fut d'abord appliqué chei les Grecs aux mots d*origine
étrangère : la note était écrite à la marge du manuscrit.
Plus tard la glose fut une explication détaillée, mais lit-
térale, du texte d'un auteur, soit dans sa langue, soit
dans la langue du slossateur si celui-ci était étranger. De
ce genre sont les Gloses sur le Droit romain, et en par-
ticulier la Grande Glose ou Glose continue d^Accurse
(xv*etxvi* siècles). — Le mot glose est Taltération du grec
qlôssa, qui, outre sa signification générale de langue,
langage, désignait aussi un terme particidier d un art,
ou introduit par des usages nouveaux, surtout lorsque
ceux-ci venaient de l'étranger. Ce terme avait pour sy-
nonyme glôsséma^ adopté par les grammairiens latins.
Les recueils de gloses s'appelaient Lexiques chez les
Grecs : le mot glossaire a été créé par les Romains.
Quant au mot glossatewr {eMXeur d'une glose), il est
moderne. — Quelques écrivains anciens sur la musi-
que appellent glose tout ornement vicieux et de nuiuvais
goût. P.
GLOSSAIRE (du grec glôua, langue). Dictionnaire ou
Lexique servant à expliquer les mots d'une langue qui
ont vieilli ou changé d'acception. Ce genre de livres est
né en Grèce ( V. Glosb). Il y a des Glossaires généraux
qui expliquent les vieux mots d'une langue, et des Glos-
saires particuliers ou spéciaux qui expliquent les termes
vieillis d'un seul auteur. Les plus estimés parmi les pre-
miers chez les modernes sont : le Glossartum archœolo-
gicum de Spielmann, Londres, i 664-87, in-fol. ; le Glos-
sarium ad scriptores meduB et infimœ grcsdtatis de
Du Cange^ loron, 1688, 2 vol. in-fol. ; le Glossartum ad
scriptores midiœ et infimœ lattnit€Uis du même auteur,
6 vol. in-fol., augmenté du Glossarium novum de Car-
pentler, Paris, 1766, 4 vol. in-fol.; le Glossaire roman
de Roquefort; le Lexique roman de Rajrnouard; le GloS'
sarium germanicum de Wachter, Leipzig, 1737 ; le Glos-
sarium ad scriptores linguœ francicœ et alemanûsœ de
Schiller, Ulm, 1727 ; le Glossarium germanicum medii
œvi de J.-G. Scherz, annoté par Oberlin, Strasbourg,
1781-84, 3 vol. in-fol. On peut citer comme exemples de
Glossaires particuliers les Lexiques d'Homère, de Pin-
dare, de Sophocle, de Thucydide, etc., dans lesquels on
trouve seulement les mots qui figurent dans ces auteurs,
avec les sens qu'ils y ont attachés. Les recueils de locu-
tions techniques s'appellent aussi Glossaires.
GLOUCESTER (Cathédrale de). Cette é^^ise, ancienne
abbi^e de S^Piem, est une des plus belles de l'An-
gleterre. Fondée en 1080, elle ne fût terminée qu'au
xui* siècle. Son plan est en fo^me de croix : la longueur
extérieure est de 140 met., celle du transept de 48 met. ;
la voûte de la nef dans œuvre s'élève à 28 met., celle des
collatéraux à 13 met. L'extérieur de l'édifice n*a rien de
très-remarquable, sauf la tour centrale; le portail est
fort simple. Tous les piliers de la nef sont ronds. Les
fenêtres, larges et hautes, sont traversées de meneau t
perpendiculaires. Les voûtes sont chargées de moulnru
qui s'entre-croisent dans tous les sens. Parmi les tom-
beaux on remaraoe ceux de deux fils de Guillaume le
Conquérant, d'Edouard II, de l'évêque Warburton, de
Jenner. La chapelle de la S**-Vierge, dont l'entrée est
surmontée d'une espèce de tribune très-omée, et dont
chaque côté est flamiué de deux chapelles absidales à
cinq pans, forme une petite ^lise à cinq travées, avec
transept et sanctuaire. A la cathédrale de Glouoester est
attenant un beau cloître carré, de 48 met. de c6té, birge
et haut de 6 met.
GLOZA, sorte de composition particulière aux Espa-
gnols, et que l'on pourrait comparer aux variations de la
musique sur un air donné. Ils prennent un vers et en
étendent la paraphrase en plusieurs stances, de manière
que la même pensée se reproduise dans chacune, en fai-
sant même revenir les expressions du vers fondaimental,
et finir chaque stance par sa reproduction partielle et
totale.
GLOCKISTES et PICONNISTES. V, Fsancb (lln-
sique en).
GLYCONIQUE (Vers), espèce de vers lyrique chez les
Anciens, composé d'un trochée, d'un dactyle, d'un dactyle
ou d'un crétique. Il se trouve fréquemment en système,
avec un phérécratien pour clausule. Le 1*' pied peut être
un spondée. 11 en est de même du 2* ; mais alors les Grecs
terminaient par un choriambe. Ils remplaçaient quelque-
fois le spondée du 2* pied par un tnbraaue, rarement
par un anapeste, plus souvent par un trochée. Quelque-
rois, même lorsqu'il y a un tribraque au 2* pied, le 3*
renferme deux tribraques : c'est que chaque longue du
choriambe a été résolue en deux brèves. On trouve des
exemples de tribraque au i*' pied, avec un dacQrle aux
deux antres. D'autres fois le glyconique se compose d'un
spondée ou d'un trochée entre deux dactyles, dont le
dernier peut être un crétique. Chez les tragiques, les gly-
coniques de différentes espèces peuvent se correspondre
de la strophe à l'antistrophe. Dans les systèmes, on insé-
rait fréquemment des vers de diverses espèces, par-
ticulièrement de ceux qui se rattachent au système
trochaique, ou choriambique, ou dactylique. Quelquefois
ces vers ne sont que des fragments de glyconiques, ou des
glyconiques hypermètres. Parmi les poètes latins, Ho-
race n'emploie jamais le elyconique en système continu;
il l'unit à l'asclépiade. r. Hermann, Épitome doctrines
metricm, p. 200-208. P.
GLYPHE (du grec gluphéin, graver), ornement architec-
tural; canal creusé en portion de cercle ou en angle. Il
sert par ses combinaisons à tracer une inscription, à
graver une effigie ou des ornements sur une pierre tu-
mulaire.
GLYPTIQUE (du grec gluphéin, graver )| mot qui si-
gnifie art de graver, mais que l'on emploie seulement
dans le sens restreint de gravure sur pierres. Avant de
graver une pierre, on la taille en rond ou en ovale, et on
en polit la surface; si cette surface est bombée, la pierre
se nomme cabochon (V, ce mot). Pour graver, on se sert
d'un touret, espèce oe tour auquel est fixée une bouU'
rolle ou tarière : ce petit morceau de fer ou de cuivre,
que le touret met en mouvement, use et entame la pierre,
et, pour aider son action, on emploie des poudres et des
liquides. Les Anciens se servirent du naxmm, poussière
de grès du Levant, puis du schiste d'Arménie, et enfin
de Vémeri, qui est aujourd'hui en usage; on polissait les
pierres avec Vostradte ou os de seiche, et avec la poudre
de diamant, qui a prévalu chez les llodemes. Lespiem»
gravées en creux s'appellent entailles^ et les pierres gra-
vées en relief, camées {V, ces mots). Toutes sortes de
pierres ont été employées par les graveurs : les tendres
ou communes ont ordinairement été travaillées par des
artistes vulgaires, les plus dures et les plus précieuses
par des artistes habiles. On a surtout choisi Vaméthyste,
Vaigue^marine. Vagate, U cornaline, la sarioine, les
jaspes, etc. ( V, ces mots). Quand une gravure est ter-
minée, on la polit avec du tripoli, et au moyen de petits
instruments de bois ou d'une brosse; mais il ne faut pas
un poli trop brilh^it, dont les reflets nuiraient à l'eflet
du travail. Les œuvres de la glyptique sont précieui
GLT
979
GLT
M<4eulement par la matière qu'emploient les artistes,
niôs eneore par la difficulté du travail : il faatiin grand
ut fKMir obtenir la perfe^on des contours, et pour con-
terrer les proportions dans les formes du relief.
La connaissance des pierres gravées fournit d'utiles
nnaelgnements à l'archéologie : souvent celles de TAnti-
qQité représentent des épisodes mythologiques ou histo-
riques qui ont rapport à des passages des poètes i ou bien
eues reproduisent des statues et des basHrelieft célèbres,
dont elliBs nous conservent seules le souvenir; elles peu-
vent servir à restaurer des statues mutilées ou privées
de leurs attributs, en ofirant les mômes sujets (^ans leur
ensemble, avec tous les accessoires ; elles ont conservé
les noms de plusieurs habiles graveurs, et peuvent aider
ainsi à déterminer l'époque à laquelle i^partiennent quel-
ques ouvrages de l'art. Pour réunir une suite de pierres
gravées, il faut d'heureux hasards, des recherches lon-
gues et persévérantes, et beaucoup d'argent; il n*v a
guère que les souverains qui aient pu former des collec-
tions considérables, liais, par le moyen des empreintes
(F. cemot)^ on a mis, pour ainsi dire, les pierres gravées
en la possMsion de tous ceux qui attachent moins de
prix à la matière elle-même qu'aux renseignements don-
nés par ces pierres : une collection d'empremtes a l'avan-
tage de réunir les si^ets épars dans les divers cabinets.
A part quelques traits disséminés dans les œuvres de
Pline le naturaliste, on ne trouve pas, dans les écrits des
Anciens, de détails sur leurs procédés de glyptique. S'il
est présumable que nos procédés d'exécution mécanique
sont plus parfaits, en revanche les meilleurs gruveurs
modernes n'ont pas encore atteint la perfection artîstioue
des Cbrecs. Les pierres gravées ne servirent pas seule-
ment aux Anciens pour leurs anneaux et leurs cachets,
Ua en firent des objets de toilette et de luxe : les femmes
en om^ent leurs coiffures, leurs bracelets, leurs cein-
tores, leurs agrafes, la bordure de leure robes ; les vases
et les meubles pr^eux en furent enrichis.
la glyptique psralt avoir pris naissance chez les Égyp-
tiens. Les plus anciennes pierres gravées sont les scores
béeSf ainsi nonmiées parce qu'elles ont la figure de cet
insecte, oui était sacré en Égrpte : on y voit le plus sou-
vent des niéro^yphes gravés en creux, ou des images et
attributs de divinités. Les Éthiopiens gravaient aussi des
cachets. Le rtUùmal du grand-prètre des Hébreux était
orné de 12 pierres, sur lesquelles étaient gravés les noms
des tribus. Comme monuments de la ^yptique ches les
Babyloniens, nous possédons un certain nombre de cy-
ImdirBs ( F. ce mot), Alexandre le Grand scella des actes
avec le cachet du roi de Perse Darius ni. — Les Étrus-
ques pratiquèrent de bonne heure la glyptique. Leurs
pierres gravées se reconnaissent : 1* à la forme de sca-
rabée, qui leur est assez ordinaire, et qu'ils ont sans
doute empruntée à r£gypta ; 2« à un grènetis formé de
points en ereux qui cernent le champ de la pierre; 3<* aux
inscriptions tracées ^néralement de droite à gauche.
Elles sont toutes perotes de part en part dans le sens de
leur longueur, sans doute parce qu'on les montait sur
anneaux, ou qu'on les employait à des colliers et comme
amulettes. Les sujets qu'elles représentent sont, pour la
plupart, empruntés à la religion ou à l'histoire héroloue
des Grecs. Les foussaires ont beaucoup contrefait les
pierres étrusques. — C'est aux Grecs qu'appartiennent
les couvres les plus remarquables de la glyptique, parce
qu'ils ont en le goût le plus pur. On ne saurait dire à
quelle époque ils commencèrent à cultiver cet art ; mais
n pins ancienne pierre gravée, de travail grec, qui nous
soit parvenue, est une cornaline du cabinet de Berlin, où
est représentée la mort du héros Spartiate Othryadès,
événement du vi* siècle av. J.-C. Les pierres grecques
sont, en général, de forme ovale et de peu d'épaisseur.
Pour lea dioisir on s'attachait à certains rapports de leur
ooulenr apec le sujet à graver ; ainsi, on mvait une
flgmne de FroMrpinê sur une pierre noire, iVisp^un^ et
les TWtont sur de l'aigue-marine, Bacchus sur une amé-
thyste, Marsyas écorché sur du Jaspe rouge, etc. Un
nom gravé sur une pierre grecque doit être généralement
oonaidéré comme oâui dei'artiste qui l'a exécuté, tandis
que, sur les pierres romaines, c'est plutôt celui du pro-
priétaire. On n'a recueilli le nom d'aucun des artistes
^ypliens ou étrusques, mais on connaît bon nombre de
greveors grecs, entre autres Théodore de Samos, Apollo-
nfde, SoloB^ Polyclôte de Sicyone, Pyrgotèle, Dioscoride.
Jb préUMwit le nu aux figures drapées, et les sujets
fflvâologigaes oa héroïques à ceux de l'histoire contem-
oondne^-^ I^ '^'y ^"^ P^ d'école romaine de glyptique;
HP niflRW gmTâee à Borne par les artistes grecs qu'on y
attira appartiennent à l'école grecque, mais représentam
surtout des figures romaines. Toutefois , quelques Ro-
mains s'exercèrent à la glyptique, tels que Quintillus,
Aquilas, Rufus, Félix (qu'on croit avoir été un affranchi
de Cornélius Sévérus). La glyptique survécut aux autres
arts dans le Bas-Empire, parce qu'elle était inséparable
de l'art de sraver les coins pour les monnaies.
En Oecident, après la chute de l'Empire romain, le
goût des pierres gravées s'effaça. Heureusement, les Tiré*
sors des églises conservèrent pendant le moyen âge qxu»
ques œuvres précieuses, dans lesquelles une piété pea
éclairée voyait des objets de dévotion (F. CAMés);
d'autres servirent d'ornements aux châsses, aux reïi^
quaires, aux vêtements sacerdotaux. Depuis la Renais*
sance dias arts, le godt de la glyptique s'est ranimé, les
pierres antiques ont été recherchées avec empressement^
et les artistes ont essayé de marcher sur les traces des
Andens. Au xvi* siècle on remarque surtout Jean et Do-
minique, que leur habileté, l'un dans la gravure en
creux, l'autre dans la gravure en relief^ fit appeler Jean
des Cornalines et Dominique des Camées. Sur leurs tra-
ces marchèrent Michelino, Blarie di Pescia, Castel Bolo-
gaese, Valerio Vicentino ou Valérie Belli, Alessandro
esari dit il Greco, etc. L'Italie a encore produit, an
xvn* siècle, André dit U Borgognone, et, an xvm*, Sir-
leti, les Costanzi, Ghinghi, les Torriccelli, Pichler. Resa.
La glyptique fut importée en France par Ifatteo del Na-
saro, sous François I*'* et, dès le règne de Louis Xm,
Julien de Fontenay, dit Coldori, s'y distingua. Les Siriès,
qui se sont succédé de père en fils comme graveurs de la
galerie et à l'École des neaux-arts de Florence, sont ori-
ginaires de Figeac (Lot). Parmi les artistes français qui
se sont fait un nom dans la glyptique, on remarque :
Ifaurioe, originaire du Milanais, mort en 1732 ; Baiîier,
mort en 174fi; Jacoues Gua^, de Bfarsellle; et, au xix*
siècle, Jeuffroy, Desoœufs, Domard, Faugînet, Mongeot,
Hewite, Simon, Tiolier. Un prix de gravure en pierres
fines et en médailles a été institué, en 1805, à l'École
des beaux- arts de Paris. En Allemagne, la {pnavure en
pierres fines remonte an xvi* siècle, et les srtistes de ce
pays prétendent au premier rang après les Italiens : ils
font encore beaucoup d'armoiries sur pierres dures. Les
plus remarquables ont été Lucas Kilian, les Dorsch,
Laurent Natter. L'Angleterre cite aussi quelques bons
graveurs : au premier rang, Thomas Simon, qui grava
le portrait de CromwelU
Certains caractères servent à distinguer les pierres
gravées antiques des modernes. D'abord, il faut examiner
si la matière de la pierre a été connue et travaillée par
les Anciens, si elle provient d'un gisement d'où ils auront
Su la tirer, si les bons artistes l'ont employée. Puis, le
ni du trevail, la fidélité du costume, le poli du fond de
la mvure, sont encore des Indices assez certains d'anti-
quité. L'entente de la perspective peut rendre une pierre
suspecte, parce que les Anciens ont ignoré Jusqu'à un
certain point cet art. Les faussaires ayant souvent inscrit
des noms de graveurs célèbres sur des œuvres médiocres
ou modernes, on doit examiner si la beauté du travail
répond à la réputation de l'artiste, et le comparer aux
autres ouvrages connus de cet artiste. La manière dont
les lettres des inscriptions ont été gravées peut être aussi
un bon indice : les grands artistes inscrivaient leur nom
eux-mêmes avec beaucoup de soin; quelques graveurs
modernes, tels que Pichler et Natter, se sont servis de ca-
ractères grecs.
V, Rossi, Gemme antiche figurate, Rome, 1707, 4 vol.
in-i**; Gori, Thésaurus gemmarum antviuarum, Flo-
rence, 1750, 3 vol. in-4<>; Uariette, Traité des pierret
gravées, Paris, 1750, 2 vol. in-fol.; Natter, Traité de la
gravure en pierres fines, Londres, 1754; Winckelmann,
Description des pierres gravées du baron de Stock, Flo-
rence, 1760, in-ibl.; Lachau et Leblond, Description des
pierres gravées du duc d'Orléans, Paris, 1780, 2 vol.
in-fol.; Eckhel, Pierres gravées ou Cabinet impérial.
Vienne, 1788, in-fol.; Millin, Introduction à Vétude des
pterres gravées, Paris, 1797, et Pierres gravées'inédites,
1817, in-8«; Dubois, Choix de pierres gravées anttques,
égyptiennes et persanes, Paris, 1817, in-4<*; Lenormant,
Trésor de numismatique et de glvptiqtiê. B.
GLYPTOGRAPHIE (du ginc glupta, choses gravées, et
graphéin, décrire), description des pierres gravées.
GLYPTOTHÈQUE (du grec glupta, choses gravées, et
thèkè^ dépôt), collection de pierres gravées. Marcus Scau-
rus, beau-fils de SyUa, fut le premier qui forma une col-
lection de ce genre. Pompée suivit son exemple. César
exposa dans le temple de Vénus Génitrix les pierres qu'il
60B
980
GOD
vnlx enlevées à Mithridate, et Marcellus, fils d'Octavie,
Saissa le publie Jouir de la collection qu*il avait formée
dana le temple a*Âpollon Palatin. Au xvi* siècle, les Hé-
dids réunirent des pierres gravées, et tronvèrent bientût
des imitateurs dans le reste de TEurope. Parmi les col-
lections publiques, on distingue celles de la Bibliothèque
impériale à Paris, du Vatican à Rome, de Berlin, de
Vienne, de Dresde, de Munich, de Copenhague, de Saint-
Pétersbourg. Au nombre des cabinets appartenant à des
particuliers, on cite ceux de Strozzi et de Ludovlci à
Rome, de Poniatowski en Russie, des ducs deDevonshire,
de Carlîsle, de Bedford et de Ifarlborough en Angleterre,
du duc de Blacas, du comte Pourtalès et du baron Roger
à Paris.
GNOIDQUE (Poésie), c.-à-d« sentencieuse; du grec
m&mè, sentence morale. Elle consistait, chez les Grecs,
à exprimer en vers précis, et dans un style élégant et
naturel, les vérité morales les plus importantes, qui se
gravaient ainsi plus aisément dans la mémoire. Phoçylide
de llilet, Théognis de Mégare, au vi* siècle avant J.-C,
sont les poètes goomiques les plus célèbres; mais nous
n'avons que des fragments de leurs œuvres. V, les re-
cueils de Brunck (1784), de Bekker (iS15), et les tra-
ductions françaises de Lévesque et de Coupé. — Chez les
modernes, on peut compter parmi les pofites gnomiques
Dnfaur de Pibrac (xvi* siècle), dont les Quatrains mo-
raux ont été longtemps célèbres, et Pierre Matthieu,
mort sous Louis XIII. Quant aux Sentences de Publius
Syrus, contemporain de Jules César, ce ne sont que des
vers isolés extraits de ses Mimes, et qui n'appartiennent
pas proprement à la poésie gnomique. P.
GNOMON. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
GNOSnCISME, du grec gn&sis, connaissance. On en-
tend par là Tensemble des doctrines philosophiques et
religieuses, basées sur une prétendue connaissance su-
périeure et mystérieuse. Le gnosticisme se montra dès
les premières années de Tère chrétienne. II eut des ori-
gines diverses, et il comprenait un grand nombre de
sectes; mais il y avait entre elles quelques principes
communs : toutes expliquaient Torigine des êtres spiri-
tuels par émanation du sein de Dieu ( V» Éons) ; à me-
sure que ces êtres s'éloignaient du foyer divin, ils dégé-
néraient et tendaient à se matérialiser. Jusqu'au retour
de tous au |>oint de départ et au rétablissement de Thar-
monie primitive. A ces données générales les gnostiques
ajoutaient quelques doçnes secondaires, qui variaient
selon les écoles, mais qui revenaient à dire oue la gnose
était une tradition réservée à une race privil^ée, et que
le gnosticisme pouvait seul conduire à la perfection.
Tout le gnosticisme se divise en cinq groupes principaux,
qui eux-mêmes se subdirisent en des rameaux nombreux.
Ces dnq groupes sont : !• le groupe palestinien, qui a
pour fondateur principal Simon le Magicien ; 2* le groupe
syriaque, qui se rattache au précédent par son fondateur
Saturnin; 3* le groupe égyptien^ qui comprend trois
écoles: la première eut pour chef Basilide; la seconde,
Yalentin; la troisième, sortie de la précédente, était celle
des Ophites, ainsi nommés du rôle que le serpent Jouait
dans leurs cérémonies; elle comprenait les Caiinites, qui
regardaient Jéhovah comme un mauvais génie et la race
de Cain comme celle des 'élus, et les SSthiens, qui se
rattachaient au Judaïsme ; 4* le groupe sporadique, com-
posé de petites fractions détachées du groupe éf^tien;
5^ le groupe asiatique, dont les principaux organes furent
Gerdon en Syrie, et Blarcion en Asie Mineure. Ce groupe
fût celui qui causa à l'Église les plus vives inquiâudes.
Cependant l'influence du gnosticisme fut bornée; com-
battu par les Pères de l'Église et surtout par S^ Irénée,
poursuivi avec rigueur par les empereurs grecs, il dispa-
rut peu à peu, mais non sans laisser de traces, car on le
retrouve en Orient chez les Manichéens, les Paullciens,
les Bogomites; en Occident chez les Cathares, les Albi-
geois, et chez d'autres sectes qui se rattachaient à ces
dernières. V. Matter, Histoire critique du Gnosticisme et
de son tnfiuence sur tes sectes religieuses et philoso-
phiques des six premiers siècles de Vére chrétienne, 3 vol.
in-8». R.
GOBELET (du bas breton goh?)^ vase à boire dont on
. se servait généralement autrefois. Chez les princes et les
, grands seigneurs, il était d'or, couvert de riches clse-
i lures, et pariois enrichi de pierres fines; chez les bour-
geois, il était d'argent, et d'étain ou de bois dans la classe
pauvre. La forme des gobelets a varié souvent; l'une des
pins communes s'est perpétuée Jusqu'à nos jours dans
les igobelets dont se aenrent sur les places publiques les j
marchands de coco; ils sont évasés du haut, et soutenus
par une base large et peu élevée. Les verres ont détrôné
les gobelets. Des gobelets de fer-blanc servent aux esca-
moteurs pour exécuter leurs tours de glbeci^bv. Parmi les
senrices des maisons royales de France avant la Révolu-
tion, il y avait celui du gobelet, oui se divisait en deu>
parties : la pann^mie^Hiuche et Véchansonnerie-boiuche.
Le chef de ce senrice se nommait chef du gobelet, et ser-
vait le roi l'épée au côté ; il devait, en présence du premier
valet de chambre, goûter de tout ce oui était servi.
GOBEUNS (Manufacture des), célèbre manufacture de
tapisseries et de tapis, entretenue à Paris aux frais de
l'État. François I*', au lieu d'acheter ses tapisseries aux
marchands de Paris ou de Flandre, établit au château de
Fontainebleau un atelier royal, placé sous la direction du
surintendant des bâtiments Babou de La Bourdaisière et
du peintre Sébastien Serlio, et oui, sous Henri H, fut
confié à Philibert Delorme. Henri IV installa des tapia-
series de haute lisse à Paris, dans la maison des Jésuites,
qui venaient d'être chassés de France; après le rappel de
cette compagnie, il les transféra dans les galeries du
Louvre. Des tapissiers flamands, appelés par le roi en
1601, furent placés dans quelques restes du palais des
Toumelles, puis au faubourg S'-Marcel, dans une maison
dépendant des ateliers de teinture de la famille Gobelin.
Ils eurent pour chefs Marc de Comans et François de
La Planche, dont les fils, Charles de Comans et Raphaël
de La Plancïie, se séparèrent en 1633, le premier restant
aux Gobelins, le second allant s'établir au faubouiig S*-
Germain, dans une rue qui porta son nom, là où passe
aujourd'hui la rue de Varennes. Les deux fabriques
furent subventionnées par le roi. En 1662, les ateliers
du Louvre et de la rue de La Planche furent annexés à
celui des Gobelins, où Colbert réunit des peintres, des
sculpteurs, des graveurs, des orfèvres, des fondeurs, des
lapidaires, des ébénistes, des teinturiers, etc. : le tout
constitua la Manufacture des meubles de la Couronne^
sous la direction de Lebrun, peintre de Louis XIV. Tou-
tefois cette organisation ne fut complète qu'en 1667. La
manufacture embrassa dans ses travaux tout ce qui se
rapportait à l'ameublement, et acquit bientôt un grand
renom pour la beauté et l'excellence de ses produits. Les
malheurs de la fin du xvii* siècle lui furent funestes, et,
en 1694, pendant la direction de Pierre Mijpard, on con-
gédia une partie des ouvriers; mais, en 1609, J.-H. Man-
sard, surintendant des bâtiments, arts et manufactures
du royaume, lui rendit sa première organisation, et en
donna la direction à Robert de Cotte. L'établissement des
Gobelins se maintint, avec des alternatives de succès
plus ou moins grands, Jusqu'à la Révolution. On avait
d'abord, pour Cure la tapisserie, coupé les tableaux par
bandes, ou'on plaçait près de la chaîne : en 1747, on
imagina ae prendre sur du papier transparent tous les
traits du tableau, et d'appliquer ce papier sur la chaîne,
comme on le faisait auparavant du tableau même. En
1759, Vaucanson introduisit encore de nouvelles amélio-
rations, ^n 1790, an salaire fixe pour les artistes et les
ouvriers fut substitué au salaire à la tâche. A partir du
1" Empire, la manufacture fut comprise dans la dotation
de la couronne, dont elle n'a été distraite que ds 1848 à
1852. En 1826, la manufacture de la Savonnerie {V, ce
mot) lui fut annexée; il en fut de même de celle de Beau-
vais, de 1848 à 1850. — Les tapisseries des Gobelins sont
remarquables par la perfection des procédés, l'excellence
de la teinture des laines, la beauté de l'exécution; elles
reproduisent avec une surprenante exactitude les tid>leaax
des peintres. La manufacture comprend une galerie d'ex-
position, une école de dessin , et une école spédale de
tapisserie. B.
GOBETIS, nom qu'on donne quelquefois au crépt
(K. ce mot),
GODEBERT, partie du vêtement au .xiv<> siècle. Selon
les uns, c'était une tunique qui recouvrait l'annore;
selon les autres, une forme particulière de camail.
GODEFROI DE BOUILLON (Les Enfances de), cin-
ouième branche du Chevalier au Cygne, Hélias n^tablit
dans ses domaines la duchesse de Bouillon chassée par
un usurpateur; il épouse Béatrix, fille de la duchesse, et
lui impose la condition de ne Jamais chercher à savoir
son nom ni son pays. Après sept ans de mariage, elle
oublie son serment; Hélias la quit<(* aussitôt. Sa fille Ida
est mariée au comte de Boulogne; elle donne le Jour à
Godefroi, qui, encore enfant, se distingue par tant de
prouesses, que sa renommée va troubler dans La Mecque
le Soudan Gomumaran. Ce chef vient en France pour
connaître par lai-même le mérite de GodeSroi, et^ plein
GON
981
fiOD
ffadminsion. Il le déclare digne de Tempireda monde.—
n existe deui leçons manusoltes des Enfances dv Godé*
frot : la plus ancienne est sans nom d'auteur; Tautre, qui
ett une amplification maladroite de la première, est Ton-
v^^se d*an certain Renaut, gui écriTit dans les premières
«nnées da xiu* siècle. V. Histoire littéraire de la France,
t XXII. H. D.
GODILLE, aviron qa*on place dans une entaille arron-
£e sur Tarrière d'une barque, et au*un seul homme
manie en imitant les mouvements de la queue d'un pois-
son. Faire ayancer la barque par ce moyen, c'est gO'
diller. ^ *—
GODRON. F. Gacdron.
GOD SAVE THE KING, c.-à-d. en anglais Diau sauve
te roi! Cest le refrain et le titre d'un chant national
anglais. Ce cliant, d'un caractère grave et d'un puissant
eflfett n*a pas d'auteur cenain. Les uns prétendent qu'il
Alt compoisé et exécuté pour la première fois sur Forgue
en 4607 par un certain John Bull, organiste de la cha-
pelle de Jacques I*'. D'autres disent que les paroles
étaient : God save great James, our king ? que Dieu con-
serve le grand Jacques, notre roi!); qu^n les mit en
musique pour la chapelle catholique de Jacques II ; qu'on
n*06a plus les chanter après la chute de ce prince, et
qu'au hout de soixante ans, après les avoir quelque peu
modifiées, on s'en servit pour les rois de la nudson de
Hanovre. D'après une autre tradition, l'hymne et la mé-
lodie auraient du poète Harry Carrey, qui aurait fait
corriger et compléter son œuvre au point de vue de la
composition muûcale par le célèbre Handel. On a même
dit que l'air du God save the Jàng avait été tiré par
Handel d'une InvoccUion aux Dieux mise en musique par
Lulli sur des paroles de Quinault; on qu'on l'avait pris
d'un Domine salvum écrit par le même compositeur
pour les demoiselles de SM^yr, et transporté à la cour
de Jacques II. Ce c[u'il y a de certain, c*est que l'hymne
national fut imprimé en i745 dans le Gentteman's Ma*
gasine, et qu'il devint immédiatement populaire. B.
GOELETTE (de goëland?), petit et élégant b&timent à
deux m&ts inclinés vers l'arriâne, portant depuis 30 Jus-
qu'à 150 tonneaux. Les voiles inférieures sont trapé-
zoïdal^, et du genre de celles qu'on nonmie latines;
celles de l'avant ou focs sont triangulaires; celles qu'on
hisse au haut des mâts sont carrées comme les humers,
Quelquefois triangulaires et à antennes. La goélette est
ne voilière et bonne marcheuse; mais, surprise par un
grain, elle s'incline, chavire et sombre aisément sous ses
voiles démesurées. Aux États-Unis, où l'on a inventé ce
genre de bâtiments, on les nomme pUots-boats (bateaux-
pilotes). En Europe, on a armé des goélettes en guerre;
elles portent de 0 à 8 câronades. Les Anglais appellent
ces bâtiments scliooners, — On appelle goëlette-orick ou
brick-noëlette un b&timent dont le prand m&t porte une
voilure de goélette, et le m&t de misaine une voilure de
brick.
GOMRErrE (Loi). V. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d^ Histoire.
GONDOLE, embarcation de passage et d'agrément
dont on se sert à Venise. Elle est à fond plat, et peinte
en noir; son bau n'est pas grand en raison de sa lon-
goeor, qui est de il met. environ; l'étrave et l'étambot
(pièces de bois faisant suite à la quille, à l'avant et à
rarrière) sont prolongés à une certaine hauteur, et les
bouts finissent en volute recourbée au dehors; une ca-
bine pour les passagers occupe le milieu. Deux hommes^
S lacés aux extrémités, suffisent pour mener une gon-
ole ; ils sont debout, et rament en poussant devant eux.
Comines dit que, lorsqu'il alla à Venise, on y comptait
30,000 gondoles; au commencement du xix* siècle, il v
en avait 6,500 ; ai^ourd'hui on en trouverait à peine 70(1.
— Des omnibus et des diligences ont aussi reçu le nom
de gondoles. A la bataille de Fontenoy (1745), le maré-
chal de Saxe, qui ne pouvait se tenir à chevd, se fit
porter dans une gondoh d'osier.
GONFALON. K. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et dP Histoire.
GONG, instrument de musique en usage chez les Chi-
nois. Sa forme approche de celle d'une corne, et il est
composé d'un alliage d'argent, de cuivre et de plomb. Cet
instrument, dont le son est aigu et retentissant, s'em-
ploie pour éveiller l'attention des auditeurs. Dans les
châteaux du nord de l'Europe, on se sert d'instru-
ments semblables, au lieu de cloches, pour appeler les
Invités aux repas ; — on s'en sert également mamtenant
les lignes de chemins de fer.
«G. V. T41I-TAM.
sur
oomo
GONGORISME. V. Espagrolb (Littérature).
GONNE, nom d*cm vêtement de dessous à Tosage âc«
hommes et des fenmies vers le xiii* siècle. On appela
Gonnel le petit sayon des paysans.
GORAH , instrument de musique des Hottentots. Il se
compose d'une baguette tendue en forme d'arc au moyen
d'une corde à boyau. A l'une des extrémités de cetto
corde est fixé un tuyau de plume d'autruche. Ce tuyau
étant placé entre les lèvres et soumis au souffle du joueur,
la corde vibre, et l'on peut lui faire produire toutes les
notes d'un accord parfait.
(K)RGE, moulurv» concave qui représente dans son
profil un talon renversé ou une courbe variable. L'archl*
tecture ogivale dans sa 3* période fit un grand usape des
moulures creusées en gorge. La Renaissance en tira un
merveilleux parti pour les corniches des plafonds inté-
rieurs des appartements. Les corniches à grandes mou-
lures creuses se perpétuèrent Jusqu'au siède dernier, et
on semble vouloir y revenir de nos Jours.
GORGE, terme de Fortification. V. Rastion.
GORGERETTE ou GORGIÈRE, nom donné an ziv* siè-
cle à un collet de mailles, attaché le plus souvent aa
haubert, et qui faisait l'office de cravate par-dessous le
camail.
GORGERIN, partie cylindrique et légèrement concave
du chapiteau dorique , comprise entre l'astragale et les
filets, et ornée quelquefois de fleurons et de cannelures.
GOEOERDi, pièce d'armure. V. notre Dictiotxncàre de
Biographie et d'Histoire,
GORGHEGGIO, mot italien par lequel on désigne un
passage rapide exécuté avec la voix, et une vocalise,
GORMONT ET ISEMBART. V. le Supplément.
GOTHIQUE (Architecture). V. Ogivalb (Architecture).
GOTHiQDB f Écriture). V. ÉcarruRB.
GOTBiQCB (Langue, Littérature). V. AtLEMANOE.
GOTHS (Art des). V. Espagnb, Itaub.
GOUACHE, autrefois Guazxe (de l'italien guaat») ^
flaque d'eau), sorte de peinture en détrempe dans la-
quelle on emploie des couleurs broyées et délayées à
Teau gonunée. Elle diffère de l'aquarelle (K. ce mot) en
ce que les couleurs sont en p&te et se posent par couches
successives comme dans la peinture à l'huile. Très-
propre à peindre le paysage d'après nature, elle sert aussi
a faire des esquisses pour de srandes compositions. On
l'emploie pour les décorations de théfttre, pour celles des
fêtes publiques, pour des perspectives. (îette manière de
peindre, prompte et expéditive, a de l'éclat. Il ne faut pas
oublier, en la pratiquant, que les couleurs sèbhent promp-
toment, qu'il est impossiole de les fondre autant qu'on
pourrait le souhaiter, et que les retouches sont à peu
près impossibles. En Î839, à l'Exposition de peinture de
Pïuis, on vit des essais de gouache vernie, qui a pour
but de remédier à cet inconvénient. — Cest la gouache
que les mpines du moyen âge employèrent pour orner les
manuscrits de si^ets empruntés à la Bible. I>arml les
peintres modernes qui excellèrent dans ce genre de pein-
ture, on remarque : le Corrége, dont le Musée du Louvre
possède deux beaux tableaux allégoriques {la Vertu vie*
torieuse des Vices, et VHomme sensuel attaché au Plaisir
par V Habitude); J.-G. Bawr, de Strasbourg, habile dans
le paysage, la perspective et l'architecture, et dont le
même Musée renferme une Cavalcade du pape et une
Marche du Grandr^eigneur; Baudoin, gendre de Bou-
cher, et auteur d'une suite de tableaux dans le genre
libre et familier, entre autres le Coucher de la mariée;
Noël, dont on a des marines très-estimées. Les Persans,
les Chinois et les Indiens ont parfaitement réussi dans
la gouache : on voit à la Bibliothèque nationale de Paris
une série de portraits en pied et bBaucoup de sujets tur
miliers, dessinés et peints avec une grande finesse, B«
GOUDJERATE (Idiome). V. GozEftATB.
GOUILLARDS. V. Clercs-Ribacds.
(jOUJAT. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bto»
graphie et d Histoire.
GOULET, canal étroit qui sert d'entrée à une rade ou
à un port.
GOULETTE, nom donné, dans les cascades, à un petit
canal en pente douce taillé sur des tablettes de pierre ou
de marbre, et interrompu d'espace en espace par de
petits bassins en coquille d'où sortent des bouillons d'eau*
GOUM. V. notre Dictionnaire de Biographie et d'His*
toire,
GOUPILLON, aspersoir en usage dans l'Église catho»
lique. Cest un petit b&ton portant une tète garnie de
soies de porc. Le mot vient du vieux français goupil
(renard), parce que c'était avec une queue de renard que
GOU
982
GOU
ie lUsaient anciennement les aspersions. Le goupillon
est quelquefois tout en métal, et alors la tôte est formée
d*ane boule creuse retenant Tean bénite, mats percée de
petits trous qui permettent d^asper^^er les fidèles.
GOURABE ou GOURABLE, gprande barque à trois mâts
employée sur la mer des Indes, et remarquable par un
gréement très-élancé, par la grosseur et Télévation exa-
gérée de la poupe.
GOURBIL. ) K . ces mots dans notre Dictionnaire de
GOURDE. ] Biographie et d* Histoire.
GOURMANDISE, amour déréglé du boire et du man-
ger. C'est le 4* des pécbés capitaux.
GOURMETTE, en termes de Marine, garde qu*on met
sur un nayire pour veiller aux marchandises. — Les Pro-
vençaux donnent le môme nom à un valet de bord
char^ surtout du nettoyage du b&tlment et du service de
Téquipage.
GOUSSE , ornement architectursl en forme de gousse
Tégétide. On le trouve principalement dans le chapiteau
•unique, mais il s*écarte souvent de la forme naturelle
pour en adopter d'autres variables.
GOUSSET, partie des anciennes armures, qui avait la
forme d'un mangle, et qui garantissait le dessous du
bras. — Dans le Blason, on donnait le même nom à
l'une des pièces honorables de l'écu , prenant en haut
des deux angles et se terminant en pal à la pointe.
GOUT. Le goût est plus facile à définir que l'esprit ou
môme le génie ; et Voltaire, qui en avait tant , est un des
écrivains qui en ont le mieux déterminé les caractères.
« En n&néral , dit-il , le goût fin et sûr consiste dans le
« sentiment prompt d'une beauté parmi des défauts, et
« d'un dêTaut parmi des beautés. » Il a écrit encore, dans
le Siècle de Lows X!V : « Le goût n'est que la suite d*un
« sens dvoit, et le sentiment prompt d'un esprit bien
« fait. » ije goût , en effet, se compose de deux âéments,
rintelligenoe et la sensibilité. L'un sert à discerner le
vrai du faux, le spécieux du solide, à distinguer les
nuances, à pénétrer les secrets et les règles du beau : on
rappelle également sem aritûiue. L'autre est frappé spon-
tanément des défauts et des beautés, remplace le Juge-
ment par l'émotion, et adopte ou repousse avec une é^ue
vivacité ce qui lui plaît et ce qui lui répugne. Nous avons
indiqué ailleurs (r. CaniQUB) le n^port et la propor-
tion de ces deux facultés. Il semble cependant que le goût
doit être essentiellement critioue, et saisir particulière-
ment les défauts. Au reste, réduit à l'intelligence, il de-
viendrait sec^ froid; réduit à la sensibilité, il tournerait
en panégyriques enthousiastes ou en boutades d'impa-
tience, et serait exposé à de fréquentes erreurs. On en
foit la preuve dans les Jugements des connaisseurs et du
public ; les premiers, plus éclairés et plus difficiles, rai-
sonnent leurs impressions, les discutent, les soumettent
à l'analyse, au lieu de s'y livrer fhinchement lorsqu'elles
•ont (ustes et vraies. C'est pour eux que La Bruyère a i
écrit : « Le plaisir de la critique nous ôte celui d'être
^ vivement touchés des belles choses. » Le peuple, qui
Abandonne tout entier aux choses qui le frappent, se !
laisse souvent prendre à la déclamation, à la fausse cha- j
leur, aux artifices grossiers; il vaut mieux, avec lui,
frapper fort que frapper juste. De ces deux manières de
Jpger, laquelle est préférable? Au milieu du xvm* siècle
Dalembert écrivait t « L'impression est le Juge naturel
« du premier moment, la discussion l'est du second. Dans
« les personnes qui Joignent à la finesse et à la prompti-
« tude du tact la netteté et la Justesse de l'espnt, le se-
« cond Juge ne fera pour rordinaire que confirmer les
« arrêts rendus par le premier. » Et il ^joutait , à propos
de cet esprit d'examen et d'analyse, devenu celui de
r^oque sous le nom &esprit philosophique, et dont il
était lui-même un des représentants les plus autorisés :
« Tel est le malheur de la condition humaine. Nous n'ao-
« quérons guère de connaissances nouvelles que pour
« nous désaJ[>u86r de quelque illusion, et nos lumières
« sont presque toujours aux dépens de nos plaisirs... Si
« ces lumières peuvent diminuer nos plaisirs, elles flattent
« en même temps notre vanité. On s applaudit d'être de-
« venu difficile ; oq croit avoir acquis par là un degré de
« mérite. » Ces lignes, écrites en 1757, ne semblent-elles
pas faites pour nous? La métaphysique allemande a, de
nos Jours, remplacé celle de l'Encyclopédie : elle a déve-
loppé et porté plus loin encore l'esprit d'examen appliqué
aux œuvres des arts^ et profondément altéré ce qui pou-
vait nous rester d'émotions simples et naïves. Il est im-
possible de revenir en arrière; mais on peut au moins
s'arrêter sur la pente, et profiter des lumières acquises,
pour mieux sentir des beautés qui n'ont pas toujours été
bien saisies. Nous avons appris à aimer de grands esprits
et des chefs-d'œuvre ii^ustement condamnés avant nous
(V, Critiqoe, GâiiB); c'est un progrès du goût qui doit
nous consoler de l'aSbus de l'analyse. Nous n'avons pas
besoin de nous égarer dans les subtilités de Vesthétique;
et , pour nous en tenir au siècle de Voltaire, un de ses
contemporains les plus sensés et les plus aimables, Vau-
venareues, a dit sur cette question le mot des esprits dis-
tinfp& et des honnêtes gens : « Il faut de l'&me pour
avour du goût. » C'est en effet l'&me, c-à-d. le sentiment
I>as8ionné du vrai , qui place si haut la beauté idéale et
a perfection , qui la cherchait avec Platon au sein même
de la divinité \V, le Banquet)^ et qui, avec Fénelon, la
ramène tout entière à la vérité et à la vertu. — A cette
hauteur, le goût est le privilège d'un petit nombre d'es-
prits trèi-supérieurs ; mais, à tous les degrés, le goût est
toujours un privilège. Il n'est pas, à beaucoup prâ, aussi
répandu ni aussi partagé que le bon sens; et, en effet, il
n'est pas aussi nécessaire; on peut vivre sans avoir du
goût. C'est ce qui faisait dire à Voiture : « On est affligé
« quand on considère cette foule prodigieuse d'hommes
« qui n'ont pas la moindre étincelle de goût, qui n'ai-
« ment aucun des beaux-arts, qui ne lisent Jamais, et
« dont quelques-uns feuillettent tout au plus un Journal
« pour être au courant, et pour se mettre en état de
« parler au hasard des choses dont ils ne peuvent avoir
« que des idées confuses. Le goût est inconnu aux familles
« bourgeoises, où l'on est continuellement occupé du
« soin de sa fortune, des détails domestiques, et d*nne
« grossière oisiveté, amusée par une partie de Jeu. J'a!
« connu un commis des bureaux de Versailles, né avec
« beaocoup d'esprit , qui disait : «t, Je suis bien malheu-
« reox; Je n*ai pas le temps d'avoir du goût. » Toutefois^
nous matons ce reproche neaucoup moins que nos pères.
Les Journaux et l'enseignement public, sans parler da
thé&tre, se sont chargés de nous éclairer; et il serait trop
sévère de répéter après Voltaire, « qu'il n'y a pas dans
« Paris trois mille personnes qui aient le goût des beaux-
« arts ; » car le progrès de l'éducation l'a rendu plus g6-
léral et plus populaire.
Le goût peut donc s'acquérir : il se forme, se déve-
loppe, se rectifie même quelquefois, du moins chez les
esprits droits et sensés ; car, dans les esprits faux et mal
faits, le goût ne se redresse pas plus que le Jugement.
Les modèles y contribuent plus encore aue les leçons,
une fois que nous avons appris à les apprécier; et, d'ail-
leurs, l'enseignement des maîtres, dans les arts comme
dans les lettres, doit s'appuyer sur les chefs-d'œuvre. Les
peuples apprennent et s'instruisent comme les individus ;
leurs impressions et leurs admirations premières sont
confuses, grossières, irréfléchies; la civilisation leur ap-
porte la délicatesse avec la critique. Les Grecs seuls,
merveilleusement doués pour tous les arts, atteignirent
d'abord la perfection; et si leur goût s'est altère plus
tard, dans la poésie et dans l'éloquence, si leur caractère
propre s'est ^té par les côtés mêmes où il était original,
si les défauts enfin ont prévalu sur les qualités, Tarclii-
tecture et la sculpture ont échappé à cette décadence, et,
sous l'Empire romain, ont produit des œuvres compar
rables à celles de Phidias, ou du moins de Praxitèle.
Mais les Romains et les nations modernes ont dû faire
l'éducation de leur goût, et la faire à l'école de leurs pré-
décesseurs. Horace a spirituellement raconté la conquête
pacifique qui soumit a la Grèce vaincue ses farouches
vainqueurs. Le monde moderne a subi le même ascen-
dant, et pris des leçons de goût des peuples ou'il avait
remplacés. Cette éducation ne se fait pas en un Jour dans
les société non plus que chez les hommes. Les délica*
tesses des arts ne sont pas populaires; elles ne se laissent
pas pénétrer et manier indiscrètement; ce sont l'habi-
tude et la réflexion, aidées de leçons intelligentes, qui
nous apprennent à goûter les lettres, la peinture, la mu-
sique, chose à laquelle ne suffisent pas les dispositions
naturelles, à moins d'être singulièrement heureuses. Une
oreille Juste, mais qui n'est pas exercée, ne distinguera
pas les détails et les effets de l'harmonie : l'œil n'est pas
frappé tout d'abord, dans un tableau, de la pureté du
dessin, de la richesse du coloris, de la perspective et de
la lumière ; l'intelligence même et le sentiment ne dé-
mêlent pas à première vue, dans la poésie ou l'éloquence,
toutes les beautés de la composition, de l'unité, de l'in-
térêt. Le goût, d'ailleurs, n'est pas universel, et le beau,
dans sa variété infinie, ne révèle pas tous ses secrets à
tout le monde. On trouvera des écrivains supérieurs par-
faitement incapables d'apprécier les beaux-arts ; un artiste
n'entendra rien à la littérature. Peut^^tre se feront-ils
GOU
983
GOU
Imr édnmtioo Vna h Tautret et bo commaniqiieroiit-iU
tel fmrties de ^ùt qui leur manquent; peat-ètre aussi
n*y réuartront-ils Jamais, parce que leur nature s*y sera
oMpément reruaée. Faire naître et former le goût des
tettres et dea arta, c'est multiplier les jouissances les plus
nobles et lea plua délicates; pour y réussir, il faut prendre
MB à peu Teaprit des bons artistes et des bons auteurs.
On acquiert, dana ce commerce, des idées saines et
iostaa; on apprend à se défier de ces surprises des sens et
de Ternit qiu peuvent égarer le goût; on apprend encore
à ae tanir eo ^ude contre le raffinement et la subtilité,
délaiita ordinairea des époques et des intelligences trop
caltivées. La pente est facile de la délicatesse à Taffectar
tion, et le goût se g&te avec auuint de rapidité quMi a mia
de lenteur à se former. « Ce malheur, dit encore Voltaire,
« arrive d'ordinaire après les siècles de perfection ; les
• artiatea, craignant d'être imitateurs, cherchent des
a routes écartées; ils s'éloignent de la belle nature que
m leurs prédécttsenra ont saisie. Il y a du mérite dans
• leuzB efforts; ce mérite couvre leurs défauts; le public,
m amoureux des nonveautéa, court après eux ; il s'en dè-
■ goûte bientôt, et il en parait d'autres qui font de nou-
• veaux efferta pour plaire; ils s*éloignent de la nature
« encore plus que les premiers. Le ^ût se perd; on est
• entouré de nouveautés qui sont rapidement efiiscées les
• iinea par les autres. Le public ne sait plus où il en est,
• et fl regrette en vain le siècle du bon goût qui ne peut
« ploa revenir; c'est un dépût que quelquea bons esprits
« conservent ajora loin de la foule. » Les bons esprits
ressemblent à cea sagea dont parle le poète Lucrèce, crai
se passent, comme les coureurs athéniens dans le stade,
le flambeau de la vie et de la civilisation. Nous n'avons
pas à redouter ai^ourd'hui que le flambeau des sciences
s'éteigne; nous pourrions craindre plutôt pour celui des
lettrée; car, dans une société très-raffinée comme la
Ddtre, le goût se fatigue et se lasse; et les auteurs ne se
font paa faute de le réveiller, comme on excite les palais
blasés par des mets épicés et des liqueurs fortes. Le seul
remède à cette disposition maladive et dangereuse se
trouTe encore dans les œuvres des grands maîtres et dans
lea livrée dea bons critiques; là sont les destinées et
Tavenir du goût.
Dm variations du goût m France. — Le goût des arts,
dana notre pays, a précédé le goût littéraire. Du xu* au
XIV* siècle, Tarchitecture avait produit dea monuments
admirables, quand la langue et la littérature en étaient à
leurs premiers essais. Sous le règne des Valois, les élé-
eanta édifices de la Renaissance s'élevèrent à côté des
ejglîsee gothiques, pendant que nos écrivains cherchaient
encore la forme la mieux appropriée à l'esprit francs.
On connaît les fortunes singulières que cet art a subies
diea nous, et comment l'architecture gothiaue, si dure-
ment traitée par Fénelon, fit place, avec celle de la Re-
naissance^ à la simplicité tour à tour sévère et imposante
du XVII" siècle et aux pesantes copies de l'antique, œuvres
du siècle suivant et du premier Empire, pour reprendre
faveur à notre époque. Il a fallu bien des études, bien
d» discussions et bien des progrès pour arriver à l'équité
dea jugements, et à cette admiration intelligente de
toutes, les formes du beau que l'on a décorée du nom un
peu prétentieux d'éclectisme. La peinture a eu de même
aea faYeors et ses retours, depuis le Poussin, Lesueur
et Mignard jusqu'à l'école dite impériale; il faut chercher
dana les auteurs compétents l'histoire des différentes
éoolea, de leur populanté et de leur décadence. Nous no
paiiona paa des modes. Volttiire, que l'on cite toi^ours
avec pbuair en matière de goût, a dit : « Le goût est ar-
» bitraire dans plusieurs choses, comme dans les étoffes,
« dana les parurea, dans les équipages, dans ce qui n'est
« paa au ran^ des beaux-arts; alors il mérite plutôt le nom
m de fatUaisie. Cest U fantaisie, plutôt que le goût, qui
« produit tant de modes nouvelles. » — Quant au goût
littéraire, c'est un antre champ de bataille, où nous avons
vu, comme dana lea arta, des luttes acharnées entre les
dasngiMf et les romantiques, ainsi que les deux camps
ennemis s'appelaient eux-mêmes vers 4830. L'histoire du
goût en France, comme dans tous les pays, est plutôt
l'histoire de la littérsM^ et des arta que celle de la cri-
tique. Lea écrivains suivent les idées en vogue au moins
autant qu'ila les dirigent, et il faut une grande force de
bon sens et de courage pour corriger des erreurs accrédi-
tées et applaudies. Ce bon sens courageux a été une partie
de la gloire de noa grands écrivains au xvn* siècle ; mais,
do reste, la perfection de leur génie n'exclut nullement
les béantes dea autres époques ni dea autres littératures.
Li RenaiMance eut dans toute l'Europe le tort de con-
fondre le goût et le génie avec l'érudition. Elle admirait
l'antiquité tout entière, sans choix ni réserve, et saluait
avec enthousiasme les auteurs du temps crui, comme
Ronsard ou Jodelle, essayaient de la traduire littérale-
ment , au lieu de s'en inspirer. Les guerres, les affaires
politiques, les relations continuelles avec l'Italie et l'Es-
pagne mirent à la mode le goût des deux pays, c-à-d.
l'emphase espagnole et l'affectation italienne, et la cour
d'Elisabeth tint en grande faveur la recherche, les pointes
et les ieux de mots, sous le nom A^euphuisme, Ni le génie
de Rabelais et de Montaigne , si profonds érudits d'ail-
leurs, ni celui de Shakspeare, qui ne baissait pas non
plus le langage à la mode, ne corrigèrent le goût de leurs
nations; aussi , pendant le siècle suivant, furent-ils en-
veloppés dans une condamnation générale, qui s'étencUt
à toute la Renaissance. La première moitié du xvn* siècle
se ressent du mauvais goût étranger, malgré les efforts de
Malherbe et ses colères contre Ronsard. Ce n'est pas seu-
lement dans Théophile ou dans Voiture que l'on trouve
les pointes et l'abus du faux esprit : Corneille paya tribut
à la mode, et, malgré la puissance de son bon sens et de
son génie, ne l'affranchit jamais complètement de cette
servitude de sa Jeunesse. La grande société de l'Hôtel de
Rambouillet n'était pas faite pour le corriger : le goût
des Précieuses avait lait de la recherche et de la fausse élé-
gance une loi suprême du beau langage ; le grand fin, le
fin du fin régnait en dépit de la raison de Descartes et de
Pascal. L'esprit fhmçais, si net et si droit de sa nature,
pour revenir et s'arrêter au vrai, au simple et au grand,
eut besoin de la critique incisive et mordante de Boileau
et de Molière, du bon sens de Louis XIV, à qui Voltaire
fait trop complètement honneur du goût général, et de
cette admirable réunion de grands écrivains, d'excellents
esprits et d'honnêtes gens qui formèrent, pendant qua-
rante annéea, la société la plus polie que le monde ait
Jamais vue. On peut seulement regretter que le goût du
grand siècle ait été trop discret à l'endroit des grands au-
teurs contemporains, qu'une sorte de pudeur empêchait
souvent de louer, et trop insouciant des qualités qu'il au-
rait trouvées dans les littératures étrangères : mais lea
imitateurs de l'Italie et de l'Espagne avaient, par leur
faux goût, ramené le public au culte des modèles an-
ciens. — Le xvin* siècle, dont Voltaire fut l'expression la
plus complète, et dont l'esprit demeura notre règle Jus-
qu'à la fin du premier Empire, conserva pieusement la
tradition littéraire du siècle de Louis XIV, tandis qu'il
détruisait toutes les autres. Il la rendit étroite et exclu-
sive : le Jour où Shakspeare pénétra en France, Voltaire
demanda sa proscription en pleine Académie. Le goût
français faisait également loi chez lea étrangers, et l'Al-
lemagne ne connaissait plus d'autres modèles que les
imitateurs de Voltaire, Jusqu'au Jour où Lessing, Schlegel
et Schiller rendirent au génie allemand son véritable ca-
ractère et sa liberté. Ils eurent en France une élève glo-
rieuse, M*"* 'de Staél, dont les ouvrages exercèrent, avec
ceux de Chateaubriand, une puissante influence sur le
goût du public Bientôt, la ResUuration vit l'école ap-
pelée romantique venger les littératures anglaise et alle-
mande d'un mépris long et injuste, nier les principes et
les règles, étemelles ou secondaires, indifféremment,
émanciper la fantaisie, proclamer la théorie de Vart pour
Vart, faire enfin du mot classique le synonyme de rou-
tine, d'aveuglement et d'inepUe. On put craindre que le
goût ne vint à périr parmi ces ridicules écarts, dont il
reste ai^Jourd'hui un souvenir plaisant et des traces mal-
heureuses. Mais la vérité ne change paa. L'esprit français
est de race latine, et non de race germanique ; il s'est
formé de cette langue et de cette littérature si fortes des
Ronmins, qui ont laissé dans l'univers des empreintes
ineffables ( V, Lattob — Langue). Là, plus encore qut
dans le génie grec, est le fonds de notre goût, c-àrd. la
vérité généralA et universelle; les étrangers ne nous ap-
portent que des vérités secondaires. Au reste, les peuples
du Midi n'ont guère d'influence ai^ourd'hui sur notre
littérature ; elle a plutôt besoin d'être préservée de la
bizarrerie anglaise et de. l'emphase nébuleuse des Alle-
mands. A chaque peuple convient son goût, qui est une
partie de son caractère national; et, quoique les diffé-
rences de race et de langue soient peutrêtre destinées à
s'efliscer un Jour, dans ce mouvement de chemins de fer,
d'intérêts et d'idées qui tend à confondre tous les neuples
de l'Europe, les gens de goût doivent en défendre le dépôt
contre l'invasion étrangère et contre l'invasion dômes*
tique, toutes deux également barbares
Goût musical. — La musique, comme tous les autres
arts, est l'expression du goût d'un peuple « nuda toutes les
GOIT
984
GRA
Bitkons De sont pas également organisées ponr Taimer et
la cultiver. Il en est même qui n*y arriveront Jamais ;
et, ches celles qui sont ou se prétendent musiciennes,
elle est particulièrement soumise à Fempire de la mode
et de la fantaisie. Notre éducation, à nous, a été longue
et difficile. La lettre de J.-J. Rousseau Sur VOpéra fran-
cais souleva des tempCtes; et cependant, avec beaucoup
de verve mocrueuse, elle ne disait que la vérité. Les Itar
liens et les Allemands, musiciens par excellence, ont eu
bien de la peine à former les oraMes françaises; et Tltalie
comptait déjà deux siècles de compositeurs, que la France
en était encore k Rameau. Rousseau a beaucoup contribué
à rendre popuUùre le plaisir de la musique; et, dans la
première moitié de ce siècle, le goût a trouvé, pour se
{produire et s*éclairer, des talents et des ouvrages excel-
ents. On peut seulement être surpris de la mobilité du
goût musical. Le ^nie de quelquq^ maîtres, la beauté de
quelques compositions résistent seuls à Taction rapide
et destructive de la vieillesse. Encore Tesprit de révolu-
tion, qui n'épargne pas les beaux-arts, a-t-il menacé de
substituer aux œuvres consacrées par une admiration
universelle ce quMl appelle la musique de Vavenir, Biais
le goût musical , comme le goût littéraire, trouve une dé-
fense dans Tennui que causent les mauvais ouvrages;
son influence est inévitable, irrésistible, et n*est inipuis-
sante que sur le talent et le génie. A. D.
GOUTTEREAU (M^r), nom donné par quelques écri-
vains à la muraille d'église dans laquelle est percée la
claire-voie.
liOUTrES , petits cônes saillants qui ornent le soffite
du mutule de la corniche dorique, ou qui régnent sous
les triglyphes de la frise sur Tarchitrave.
GOUTTIÈRE, conduit ou canal de forme et de matière
variables oui reçoit les eaux d*un toit à sa base, où un
tuyau de oeacente les mène |usqu*à terre. Au moyen âge,
les couvertures ne portaient pas de gouttières, ou bien
on les terminait par des gargouilles (V. ce mot). De nos
fours, la police exige que tout toit ait sa gouttière, pro-
scrit Pusage des gargouilles, et ordonne qu'elles soient
remplacées par des tuvanx de descente.
GOUVERNAIL (du latin gubernaculum)^ machine en
bois, placée à Tarrière des navires, mobile autour d*un
axe, et que Ton fait mouvoir, soit à Taide d'une barre ou
timon qu'on pousse à la main , soit au moyen d'une roue
ou treuil. Il est aux navires ce qu'est la queue aux pois-
sons, et sert à les amener et à les maintenir dans telle
direction que l'on veut. On lui donne ordinairement, par
en bas, le 12* de la plus grande largeur du bâtiment, et,
par en haut, c-àrd. au-dessus de la ligne de flottaison,
les trois quarts de la dimension inférieure. La barre du
gouvernail, qui est horizontale, est établie au-dessus du
pont inférieur des vaisseaux, du faux-pont des frégates,
et du pont unique des b&timents qui n'en ont qu'un seul.
La perte du gouvernail à la mer est un accident très-
grave; car, outre l'impossibilité où se trouve le navire
de suivre aucune direction voulue et d'éviter les écueils,
il présente constamment le travers au vent et aux lames
pendant les tem|)êtes. — Le gouvernail n'était primiti-
vement qu'un aviron attaché au flanc du navire; puis on
en mit un k droite et à gauche. On ne sait à quelle époque
il fut placé à l'arrière.
En Numismatique, un gouvernail posé sur un globe
accompagné de faisceaux marque la. puissance souve-
raine.
GOUVERNEMENT, autorité qui exerce la souveraineté
dans un État (V, ce mot). Le Gouvernement ordonne,
l'Administration exécute. Il y a trois formes principales
de gouvernement , la Jlfonarc^M, V Aristocratie ^ la Dé~
mocratie ( V. ces mots)^ toutes ég^ement légitimes,
pourvu qu'elles soient appropriées aux besoins, aux
mœurs, à l'état de civilisation des peuples. Un gouver-
nement peut être absolu, despotique (V. Absoldtisiir,
Despotisme), ou constitutionnel, c-ànl. réglé dans ses
actes par une Constitution. Ce dernier est dit aussi re-
présentcUif et parlementaire. Le gouvernement a eu pour
principe, selon les temps : 1* la supériorité des qualités
personnelles; î,^ la supériorité de l'ftge ; 3* la supériorité
de la naissance ; 4<* la supériorité de la fortune. Tout
gouvernement n'a que trois fonctions simples , mais im-
portantes, à remplir : protéger la société contre les atta-
ques ou les violences des autres nations indépendantes ;
garantir chaque membre de la société contre les effets
de la malveillance et de rin|ustioe de tout autre membre ;
enfin ériger et entretenir certains établissements utiles
an public, qu'il n'est iamais dans l'intérêt d'un individu
cm d'un petit nombre d'individus de créer et d'entretenir
pour leur compte, par la raison que les dépenses occ»-
sionnées par ces établissements surpasseraient les avan-
tages que pourraient en tirer les particuliers qui les
soutiendraient à leurs frais. Une des règles les plus géné-
rales de l'Économie politique, c'est que les gouverne-
ments ne doivent Jamais diriger le capital et nndnstrie
des particuliers ; ils doivent, au contraire, laisser à cha-
cun, tant qu'il se conforme aux lois, le soin de surveiller
ses propres intérêts d'après ses vues personnelles. L'exé-
cution de cette maxime offre la garantie la plus sûre
qu'on obtiendra des produits constants et uniformes
pour les booins de la nation. Dans les sociétés antiques,
et même à l'origine des socillés modernes, alors que
l'esprit d'assodauon n'avait point encore pris son essor,
le gduvernement seul pouvait exécuter les grands travaux
d'utilité publique : c'est ainsi que s'est établi le principe
d'après lequel l'État doit rendre k la société les services
collectifs dont l'industrie particulière ne se chargerait
pas, et qui sont cependant considérés comme indispen-
sables au bien-être de la société. Aujourd'hui encore,
dans presque tous les pays du monde, à l'exception de
l'Angleterre, de la Suisse et des États-Unis d'Amérique,
le gouvernement est chargé de rendre à la société un
grand nombre de services collectifs, en concurrence ou
non avec l'industrie privée. Lorsque le gouvernement
intervient dans ce qui peut être laissé à l'initiative de
l'individu, il empiète sur la responsabilité des citoyens ;
il dénie à ceux-ci la capacité de Juger eux-mêmes (^
l'étendue et de la nature de leurs besoins, en leur étant
le choix des moyens de les satisfaire, et il prend sur lui
une responsabilité correspondante à toute la somme de
libertés individuelles qu'il anéantit, et eette responsa-
bilité, devenue énorme pour tous les gouvernements in-
terventionistes, est aujourd'hui une des causes princi-
pales de leur instabilité et des fréquentes révolutions
qu'ils subissent. Il en résulte aussi que ces gouverne-
ments, pour se prémunir contre ces dangen, s'entourent
d'appareils et de mesures de sûreté, les uns très-coû-
teux, les autres très-oppressifs, pour les nations ainsi
gouvernées. A. L.
GRAAL ou GRÉAL {Le Saint), du vieux français
graali, gréai on grasal, signifiant un vase en forme de
plat. Cétait, dans les traditions du moyen ftge, un vase
miraculeux, fait d'une seule pierre précieuse, apporté dq
ciel sur la terre, gardé d'abord par des anges, puis par
des hommes d'une pureté angélique, dans un temple
fortifié sur le Mont Salvage {mons salvatumis). Le poète
Çrovençal Guyot ou Kyot, qu'on suppose avoir vécu entre
160 et 1180, fit un poème avec cette légende, qu'il disait
avoir puisée dans un manuscrit arabe d'un More appelé
Flegetanis, et dans une chronique latine de I*AnJou.
Après lui, Chrestien de Troyes et d'autres Trouvères
étendirent la légende en y rattachant celles du roi Arthur
et de la Table ronde : ils confondirent san greal (saint
vase) avec sang real (sang royal, sang du Seigneur ) ; ils
imaginèrent que Joseph d'Anmathie, apètre des Celtes,
avait recueilli dans le Graal , qui avait déjà servi à la
Cène, le sang de Jésus crucifié, et que, ce vase ayant été
perdu après lui, plusieun chevaliera se mirent a sa re-
cherehe. Le Livre du saint Graal et de la TaUe ronde
comprend trois parties considérables , le roman du Seùnt
Gram, le roman de Merlin, et le roman de Lancdot; ce
dernier subdivisé en cinq parties, Gallehot, la Charrette,
Agravain , la Quête du Graal et la Mort d^ Arthur. Les
romans du Saint Graal et de Merlin ont été rédigés par
Robert de Borron, chevalier attaché au service du comte
de Montbéliard, et Gasse le Blond, parent du roi Henri II
Plantagenet; un chapelain de ce monaroue est auteur de
tout le roman de Lancdot. Au xni* siècle, le poète alle-
mand Wolfram d'Eschenbach tira de la iégenoe du Saint
Graal deux romans épiques , Parcival et Titurel ( K.
ces mots).
Le Livre du Samt Graal et de la Table ronde s*ouvre
par un prologue destiné à apprendre au lecteur comment
cette histoire est parvenue à la connaissance des hommes.
En l'an 417 de l'ère chrétienne, dans un lieu écarté et
sauvage de la Bretagne, l'ermite Nascien a une vision :
un personnage d'une beauté surhumaine et entouré d'une
éblouissante clarté, Jésus-Christ lui-même , lui apporte
un petit livre où est contenu ce qui va suivre, et dont il
prend copie. Le romancier n'a pas craint de donner ainsi
a son œuxrre le caractère d'une révélation. Puis com-
mence la l'* partie de cette csuvre, la seule dont nous
nous occupons ici, le Roman du Saint Graal. Le décn-
rion Joseph d'ArimaUiie, s'étant assuré la possession du
vase dont Jésus avait fait usa^e en célébrant la Pique
GRA
985
GRA
ivec te» apôtres chez Simon, obtient de Pilate le dbrps
du San^ear crucillé, recueille les gouttes de sang qui
9oaIent encore des plates divines, et met le cadavre au
tombewDi. Les Juifs irrités s*emparent de lui, et reromô-
nent dans un chftteaa da grand prêtre Caîphe : là, il re-
çoit, de Jésus qui lui apparaît, le graal caché dans un coin
de sa maison. Après 40 anq^ de captivité qui se sont
écoulées sans quMl en sentit le poids, il est dfélivré lors
de la prise de Jérusalem par Titus. Emmenant ses pa-
rents chrétiens et quelques autres fidèles , il se dirige
vers l*£uphnue, et arrive dans la capitale d*un Empire
ippelé Sarras, hercean des peuples sarrasins, où son flls
Josèphe est ordonné prêtre et évêque par un ange. Le
rofl^cier nous raconte ensuite la propsgation de l'Évan-
gile cbex les Arabes; le roi de ce peuple résiste long-
temps; mais quand il a reçu, avec le baptême, le nom
de Mordrain , il fait construire pour le graal un palais
splendide , oui est appelé le PcUais spirituel. Toutefois,
le vase sacré ne doit pas demeurer en Asie; Josèphe re-
çoit Tordre de remporter en Occident. Arrivé an Dord de
m mer, U Ate sa chemise , Tétend sur Teau, et ce radeau
merveilleux remporte avec ses compagnons Jusqu*en
Grande-Bretagne. La conversion de ce pays s'accomplit
rapidement, mais non pas sans danger, et il faut que Mor-
dndn vienne de TOrient avec une armée au secours de
Josèphe. La fin du roman montre comment le graal s'est
transmis de génération en génération. L*évêque Josèphe
le confie à un cousin germain, Alain, Tun des 12 flls de
Bion, qui était beau-lrère de Joseph d*Arimathie. Alain
transporte le pr^eui vase duis le royaume de la Terre
foraine, dont les habitants se convertissent; il le lègue
en mourant à Josué, Tun de ses frères, dont les succes-
seurs font construire, pour le conserver, le ch&teau de
Gorbenic A l'extinction de la postérité d'Alain, le graal
passe aux descendants de Nascien, beau-frère de Mor-
drain, qui émigrent dans la Bretagne armoricaine, et
desquels est issu Lancelot. Quant à Mordrain, il vit pen-
dant 3U0 ans , comme un témoin irrécusable de tant de
mervmlles. — Dans le Roman du Saint Graal, l'élément
chevaleresque occupe peu de place; il n'y a presque pas
de combats, de prouesses, de srands coups d'épée ; ce
qui j domine, ce sont les miracles, les songes prophéti-
ques, les conversions, les ch&timents des chrétiens indi-
gnes ou des païens endurcis. Ce roman a été publié
diaprés un manuscrit de la Bibliothèque nationale de
de Paris par M. Francisque Michel, 1841, in«13. 6.
GRABATAIRES» mot de même sens que Clintques
{V,ce mot),
GRACE , mot qui, dans le langage de la Théologie ,
signifie toute faveur que Dieu accorde aux hommes. On
distingue : les Ikveurs ou grâcee naturelles, que nous
recevons de Dieu par rapport à la vie présente (comme
la vie, les qualités intellectuelles ou morales, la science,
les richesses, etc.), faveurs purement gratuites, puis-
qu'il ne les doit à personne ; et les grâces surnaturelles,
qui se rapportent directement à la vie future, au salut.
Parmi ces oemières, les unes sont extérieures, telles que
l'Incarnation du Fils de Dieu, ses miracles, ses prédica-
tions, la Rédemption, les bons exemples dont nous
sommes témoins, les instructions que nous entendons,
toutes choses qui déterminent notre volonté à la pra-
tique des vertus chrétiennes et nous font avancer unsi
vers nos destinées surnaturelles, mais qui cependant ne
peuvent 6tre pour nous un principe efficace de Justifi-
cation, de sanctification, de salut ; les autres sont mté'
rieures, et se résument en une sorte d'infusion de l'Es-
prit Saint, qui nous identifie à Jésus-Christ , nous fait
agir et mériter en lui. La grftce intérieure est dite ao-
tuelU, quand elle est un secours accordé par Dieu pour
connaître et pratiquer le bien en telle ou telle occasion ;
habiiudle, quand elle est un état permanent de Justice,
résultant, pour l'Ame, de la pratique de la prière et de la
fréquentation des sacrements. Veiïet de la grftce habi-
tuelle est de sanctifier l'homme, de le rendre Juste et
agréable à Dieu : aussi cette grâce est- elle appelée juxti-
fianteon sanctifiante,
L*É^îse enseigne que l'homme, dans son état actuel et
Telativement au salut, a besoin de la grftce ou du secours
de Dieu. Depuis q^e le péché orimnel l'a fait déchoir de
rétat primitif dans lequel il avait été créé, il faut qu'il
trouve en dehors de lui, en Dieu, un secours qui éclaire
ion intelligence et porte au bien sa volonté entraînée par
ose inclination violente vers le mal. Mais la nécessité de
b grftœ est-elle condliable avec l'existence du libre ar-
bitre T L*action de Dieu sur l'intelligence et la volonté
iefboiBiiie est-elle à ce point déterminante, que l'homme
son réduit a l'état de machine en ne fonctionnant que par
une impulsion étrangère, oubienconserve-t-il sa libertél
Ce problème a été fréc^emment discuté. Au v* siècle, le
moine breton Pelage ma la nécMsité de la grftce, et sou-
tint que l'homme avait en lui-même assez de force pour
faire toute espèce de bien et arriver au saluU Sa doc-
trine, condamnée par le pape Innocent I*' et par les évê»
ques d'Afrique, est connue sous le nom de Pétagianisme.
Elle fut propaj^ en Italie par Célestius, et présentée
avec tant d'habileté, qu'elle trompa momentantoient le
pape Zosime. Mais S* Augustin lui porta les derniers
coups : ce Père affirme VeffU:acUé de la grftce; il enseigne
que le libre arbitre , survivant sans doute dans son es-
sence au péché originel, n'a conservé son énexigle que
pour le mal, et que la grftce, en lui rendant son activité
pour le bien, le restaure, le rétablit, et, comme dît
S^ Paul, le recrée dans les bonnes oeuvres. Loin donc
que le secours divin gêne l'action de l'homme, l'homme
privé de la grftce est captif dans les liens du mal et n'a
plus assez de liberté pour agir. Quelques auteurs, entre
autres le P. Sirmond, ont accusé des disciples peu intel-
ligents de S' Augustin d'avoir dénaturé sa doctrine en
l'exagérant, et supprimé complètement hi liberté ds
l'homme; ils les Qualifient de Prédestinatiem , c-èrd.
partisans de la Prédestination, et attribuent la même er-
reur à Gothescalk, moine du ix* siècle. Mais leur asser*
tion ne repose que sur des monuments historiques dont
l'authenticité ou la valeur est suspecte ; les savants de
Port-Ro3ral ont pensé que les prétendus Prédestinatiens
du V* siècle n'ont été que des disciples de S* Augustin
auxquels les Pélagiens auraient Imputé faussement une
doctrine condamnable.
Pelage eut des disciples mitigés, qu'on nomma Semi"
Pélagiens, Tels furent Cassien et les moines de S* Victor
de Marseille, peutrêtre aussi quelques moines de Lérins
et plusieurs évêques de la Gaule méridionale. Ils admet-
taient la nécessité de la grftce pour le salut, mais affir-
maient en même temps que la première grâce n'était
accordée par Dieu qu'à l'homme qui Tavait méritée, et
oue l'efficacité de la grftce dépendait de l'adhésion libre
de la volonté humaine. Ce système est incohérent et hé-
térodoxe. Si l'homme peut mériter la première grftce, 11
peut les mériter toutes; s'il peut les mériter, son action
est bonne en dehors de la nrftce, il peut pur lui-même
faire le bien, la grftce ne lui est pins nécessaire. S'il
donne à la grftce son efficacité par la libre adh^on de
sa volonté, u peut npr librement pour le bien sans la
grftce; le péché originel ne lui a pas imprimé une im-
f)nlsion déterminante pour le mal; il Jouit de toute sa
iberté pour agir dans un sens ou dans un autre. Le
Semi-Pélagianisme ftit condamné par le 2* condle
d'Orange.
On le vit reparsltre au commencement du xvn" siècle
dans le Molinisme, adopté par une grande partie de la
Compagnie de Jésus. Molina n'admettait pas de ^rdct
efficace proprement dite; il soutenait que Dieu donne à
tous les hommes des grâces suffisantes^ qui deviennent
efficaces par l'adhésion libre de la volonté. iUnsi, ce n'est
pas Dieu qui opère par sa grftce sur le cosur de l'homme,
c'est l'homme qui, par son adhésion, donne à la grftce sa
véritable valeur. Cela revient à dhne que la grftce n'existe
pas réellement, qu'elle n'est pas nécessaire, que l'homme
agit sans elle pour le bien avec la plus ennère liborté.
Ce Alt pour dissimuler ce que le Molinisme avait de trop
hétérodoxe, que certains Jésuites imadnèrent le Con-
gruisme {Y, ce mot) : maïs, au fond, le système est le
même. Les docteurs dominicains, disciples de S* Thomas,
et partisans de la grftce efficace, ont admis les grftcet
suffisantes, mais sans attacher à cette expression le
même sens que les Molinistes : pour eux, les grftces suf-
fisantes sont des grftces qui ne suffisent pas, qui n'ont
pas leur effet, et ils se refusent à admettre que la volonté
de l'homme donne ft la grftce son efficacité. L'école de
Port-Royal, qui combattit vigoureusement le Molinisme,
fut accusée par ses adversures de n'admettre que des
grâces efficaces obtenant toulours nécessairement leur
effet, et, par conséquent, de rejeter le libre «rbitre. C'était
une erreur : non-seulement les savants de Port-Royal
ont poursuivi dans les ouvrages des calvinistes Jusqu'aux
moindres traces de la doctrine prédestinatienne, mais ils
ont admis avec S* Augustin des grâces eoDcitantes, dont
l'effet est souvent nul à cause des mauvaises inclinations
de l'homme et de l'abus qu'il peut faire de sa liberté ; si
l'homme correspond à ces giicet excitantes, Dieu l'en
récompense, disent-ils, en loi accordant des grâces effi^
caces, et son libre arbitre en reçoit une telle force, qu'il
GRà
986
6RA
opère , non pas nicessakremmt , mais certamemmU le
bien.
La grâce est-éUe ai abaolament nécessaire, que, sans
elle, on ne puisse faire aucun bient A considérer le bien
en Ini-mème, relatlYement à son objet, il est certain que
rhomme, sans un secours surnaturel , et par Teffet de
qualités morales purement naturelles, peut faire le bien ,
par exemple, respecter ses parente, donner Taumène, etc.
Biais ce bien, relativement à notre action, est défectueux,
en tant qu'il est produit par un être dégénéré. Il n'y a
d'acte réellement parfait, que celui qui est fait sous l'im-
pulsion de Dieu, sous l'inspiration de la grâce.
Quant à la distribution des gr&ces. Dieu en aocorde-t-il
aux uns de tellement efficaces, qu'ils pratiquent aisément
la Tertut Pourquoi n'en accorde-t-il pas à d'autrest Com-
ment se fait-il qu'il laisse tant d'hommes dans l'idoia-
trie, l'hérésie ou le schisme? Comment les laisse-t-il
mourir sans qu'ils aient été régénérés par le baptômet
Ce sont des questions dont S^ Augustin a Jugé la solution
impossible, des mystères que la raison ne peut et ne doit
pas sonder.
ORACB (Délai de). F. Dâju.
rîîr! /î^Ï!lL*^5h l V. notre Dictionnaire de Bwgror
oH^Ssterotsî: î Pki^^^<^ Histoire.
GRACES EXPECTATIVES. V, EXPECTATIVES, dSUS nOtTODiC-
tionnaire de Biographie et d'Histoire.
GRACES (Jeu des), jeu qui ressemble à celui du Tolant.
On se sert de bâtonnets ou petites baguettes, que l'on
croise un peu pour lancer un petit cerceau ; l'autre joueur
doit le recevoir et le lancer de même.
GRACIOSO, personnage comique du théâtre espagnol.
Son nom indique que la grâce, la douceur, l'amabilité et
la légèreté doiTent être les caractères distinctifo de son
Jeu. Ainsi conçu , le Gradoso a presque entièrement dis-
paru de la scène t on l'a transformé en boutfon loquace,
poltron, gauche ou déplacé dans ses plaisanteries.
GRADATION (du latin gradus, degré). Cest, en Litté-
rature, un arrangement d'idées tel que l'effet va en aug-
mentant sans cesse et comme par degrés. Ainsi , un ora-
teur dispose ses preuves en rt^servant les plus fortes pour
les dernières. Dans une œuvre dramatique, dans un
roman , les scènes et les tableaux se succèdent de ma-
nière â produire, chez le spectateur, des émotions de plus
en plus vives et profondes. — Dans la Rhétorique, la gra-
dation est une figure de pensée, que les Grecs nommaient
cHimax, c-àrd. échelle, et qui consiste â présenter une
suite d'idées, d'images, de sentiments qui enchérissent
les uns sur les autres. Elle est dite eucendante, comme
dans cet exemple : Va, cours, vole ! On appelle gradation
descendante une diminution successive et graduelle.
Le mot Gradation s'emploie aussi dans les beaux-arts.
Eo Peinture, il indique le passage insensible d'une cou-
leur â une autre. Les peintres et les sculpteurs appellent
encore Gradation l'arnflce de composition qui consiste â
grouper les personnages de manière que les principaux
soient en relief et que les autres s'affaiblissent gra-
duellement quant â l'expression et au Jeu de la lumim.
« H y a, dit Quatremère de Quinçy, gradation dans le
système des ordres de l'architecture, lorsqu'on les consi-
dère, toit sous le rapport des proportions, soit sous celui
des ornements. Le oorique, qui est le plus fort et le plus
simple, est suivi de l'ionique, plus élégant et plus varié,
après lequel vient le corinthien, plus svelte encore et
plus riche. » B.
GpADE (du latin gradue, degré), nom donné, dans
le langage militaire, aux degrés par lesquels on monte
l'échefie de l'avancement. On en distingue onze dans
l'armée française : caporal et brigadier, sergent et nuy-
réchal des Iciis, souS'4ietUenant, lieutenant , capitaine,
chef de bataulon ou à^escadron, lieutenant^olonel , colo^
fiel jfénéral de brigade, général de division, et mcâréch/od
de France. Les titres de fourrier, sergent-major, maré-
chal des logis chef, adjudant , cidjudant-major, officier
payeur, quartier-inattre, trésorier, major, désignent des
offices, et ne sont ras des grades, puisqu'on peut avancer
■ans les recevoir. Dans l'armée de mer, les grades sont :
quartier^maitre, maitre, aspirant, enseigne de vaisseau,
timUenant de vaisseau, capitaine de frégate, capitaine de
fxnsseau, contre-amiral, «fce-amtrol, et amiral. Depuis
la loi de 1832, les grades sont donnés, soit â l'ancienneté,
soit an choix (V. âvancbment). L'emploi est distinct du
grade : la disponibilité et la retraite enlèvent l'emploi, et
non le grade, qui ne se perd que par la dégradation. —
Dans le clergé, grade se dit de la prêtrise et des deçrés
flua élevés, même de l'épiscopat. — Dans les Univerattés
et les Facultés, on confère les grades de frocMisr, de
licencié et de diocteur.
GRADINS, degrés, marches ou bancs disposés graduel-
lement les uns au-dessus des autres en forme d'escaliers.
Les Grecs creusaient les gradins de leiu« théâtres sur le
flanc d'une colline, et formaient ainsi des sièges natu-
rels; les Romains construisirent ces magnifiques édiflcea
isolés, où d'immenses et solides (pndins recevaient des
milliers de spectateurs.
GRADUEL, répons oui se dit ou se chante â la messe,
immédiatement après rÉpltre. Le nom vient de ce qu'on
le chantait sur les degrés {gradue) du sanctuaire ou pen-
dant que le diacre qui allait dire l'Évangile montait les
degrés de l'ambon. L'usage du Graduel remonte aux
papes S^ Gélestin ou S* Grégoire. — On appelle aussi
Graduel le livre de lutrin qui contient les messes notées.
Il est divisé, comme l'Antiphonaire, en Propre du temps
et Commun des Saints.
GRADUÉS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio^
graphie et d'Histoire.
GRADUS AD PARNASSUM, c.-â-d. degré pour at-
teindre au Parnasse, titre sous lequel on connaît dans
nos écoles secondaires le Dictionnaire poétique latin,
donnant la quantité de chaque mot, ses synonymes, les
périphrases a l'aide desquelles on peut le remplacer, les
épithètes qu'on peut lui adljoindre , le tout à l'usage de
ceux qui s'essayent aux vers latins. Ce fut le P. Aler qui
imagina ce titre de Gradue, adopté plus tard par le P. Va-
nière pour la seconde édition de son Dictionarium poe~
ticum. Sous le premier Empire français, Noèl s'appro-
pria, au moyen de quelques modifications , l'œuvre da
P. Vanière, et son Gradus est encore en usage dans les
écoles.
GRiECOSTASE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d Histoire.
GRAIN, effet ({ue produisent les tailles de la gravura
diversement croisées entre elles.
GRAINS (Commerce des). V. Césléaias.
GRAHMAIRE, terme formé d'un mot de la basse lati-
nité, mais qui remonte au mot grec gramma (lettre,
écrit). La Grammaire est l'art de parler et d'écrire cor-
rectement, c-à-U. conformément à l'usage des personnes
qui parlent bien et des meilleurs écrivains. Les Gram^
maires particulières traitent de telle ou telle langue dé-
terminée et considérée isolément; elles exposent les prin-
cipes de la déclinaison et de la conjugaison, de la varia-
bilité on non-variabilité des diverses parties du discours,
les principes de dérivation, de composition, les r^les de
construction, de syntaxe, et rendent compte des anoma-
lies, c-à-d. des déviations de la forme reçue pour telle
classe de mots, des irrégularités de syntaxe et de con-
struction sur lesquelles reposent les principales figures
de grammaire et de mots et la plupart des idiotismes.
Les Grfxmmaires comparées s'occupent de montrer les
ressemblances et les différences des mots, des formes
grammaticales, de la construction et de la syntaxe en
usage dans deux ou plusieurs langues. Les procédés
grammaticaux d'une langue peuvent être comparés iso-
lément avec ceux d*une autre langue, par exemple le
latin et le français, l'anglais et l'allemand. On peut aussi
établir la comparaison entre un groupe de langues analo-
gues et un groupe d'autres langues ayant entre elles aussi
certaines affinités : ainsi, comparer les procédés généraux
des langues sémitiques (chaldéen, syriaque, hébreu,
arabe, etc.), avec ceux des langues indo-européennes
(sanskrit, grec, latin, tudesque, etc.). On peut comparer
les procédés des langues synthétiques, comme le sans-
krit, le grec, le latin, avec ceux des langues analytiques,
telles que le français, l'italien, l'espagnol, le portu^^, le
grec moderne ou romalque, et exposer, comme conclusion
de cette étude, le tableau résumé des avantages et des
inconvénients attachés â chacun de ces systèmes. L'Ê^-
molope (F. ce mot) est une branche importante de la
Grammaire comparée, lorsqu'on étudie deux ou plusieurs
langues issues d une souche commune, telles que Titalien,
le français et l'espagnol , idiomes formte simultanément
de la dissolution du latin aprte les invaaions barbares aux
V* et VI* siècles. Elle est aussi d'un secours puissant pour
l'étude approfondie de l'anglais, idiome formé principsr
lement du saxon , mais avec des emprunts considérables
â la langue française du moyen âge importée par la con-
quête normande. La Grammaire générale et raisotméê
ou philosophique embrasse ce qu'il y a de commun, d'es-
sentiel, d'invariable dans le langage de toutes les na-
tions, et cherche, dans la nature de l'intelligence hu-
mainoi la raison des faits qui se tnNivent partout les
6RA
987
6RA
DMOMS aa miliea d» la plus grando diyonlté; car il y a
d» principes fondamentaux commons, et, on peut le
dire, antérieure à toute langue qiédale, immuaUea et
aDhersela, comme tenant à la nature de la pensée même.
La Grammaire^ dont les basea ont été posées par les
lodena Grecs, est d*origine relativement récente : les
premièrsa recherches sur les procédés du langage se
trouTent éparees dans le Cratylê de Platon et dans le
Une de VInierprékUion (de la pensée) par Aristote (iv*
siècle vr. J.-C.). Les saTants d'Alexandrie firent faire,
dès le aiède suivant, de notables progrès à la grammaire.
L*Qn des plus distingués est Apollonius I>yscole (n* siècle
de J«-C), qui, le premier, a rtduit la grammaire en sys-
tëoie. Chez les Romains, il faut citer principalement
Varren, contemporain de César, et I>riscien ( vi* siècle de
notre &re). Chex les modernes, Sanchez (Sanctius), Vos-
nos, Amanld et Lancelot {Grammaire d» Port^Aoual)^
DomAnais, Gondillac, Beauzée, Harris, De Brosses, Court
de Gébdin, Sylvestre de Sacy, Destutt de Tracy, de Gé-
rando. Clément, Charma, de Humboldt, etc., sont au-
teurs de Gromifiatreir générales. Comme Grammaires
eomparén, on connaît l'ouvrage de l'abbé Dangeau
(xvu* siècle) sur les Conjugaisons dês langues anctmnet
comparées oti» modernes, le Traité d'Henri Estienne
f XVI* siècle) sur la ConfomUté du langage grec a/oec le
langage français , et les Notions de Grammaire compc^
rés de M. Egger, i852. Pour les auteurs de Grammasres
fariiculiàreSj V. les artides consacrés à chaque langue.
Ghes les Anciens, le mot grammaire, et, par suite, le
mot grammairien, n'avaient pas le même sens que chez
nous : la grammaire, ou, comme ils disaient, la gram-
matique, embrassait l'interprétation philologique, litté-
raira» mythologique, critique, historique des principaux
pofte*, à rétode desquels on passait aussitôt qu'on poa-
iédaît les notions fondamentales sur la langue grecque
on sur la langue ladne : c'était comme le deuxiraie dfr-
gré de l'ensei^iement. Zénodote d'Ephèse, Aristophane
de Byiance, Aristarqoe de Samothrace, se distinguèrent,
le dernier surtout, par leurs études de toutes sortes sur
les poésies homéri<fues, et leurs travaux servirent de base
à œox qui se pubUèrent bientôt sur la grammaire pro-
prement dite, ainsi qu'aux Lexiques et Glossaires, qui
souvent ne se componient que d extraits de ces grands
conunentateurs. Au moyen âge, les grammairiens grecs
prirent le nom de scoliastes. Les andeos Romains dési-
fiaient aussi ces savants par le nom de litterati. Quant
Tétude des grands prosotenrr, elle faisait partie de la
iUléionquey k cause de Ilmportanœ toute particulière
que le talent de la parole et l'étude de ses procédés
eurent pendant longtemps dans la république athénienne
et dans la république romaine. Apres la chute de la li-
berté, ^ entraîna celle de l'éloquence, la même division
fut maintenne dans les écoles. Au moj^n Aj^e, la Gram-
maire était au premier rang des Arts libéraux. Peu à
peu elle se sépara de la philologie et de la critique litté-
raire. — Le maître oui se chargesit d'enseigner les pre^
miers éléments de la langue s'appelait, chex les Giècs,
grasnmaisstef et, chez les Romains, lUterator : il corres-
pond à pen prèa à notre instituteur primaire, maître
élémentaire, professeur de gmmmaire; nos professeurs
i*hnmanitéa, de rhétorique et de Faculté, ne sont pas
sans analogie avec le grammaikiue ou lettré et le rM-
ieur de l'antiquité, considérés coomie hommes d'ensei*
gnement. P.
GRANDESSE. ) F. ces mots dans notre Dicttonaatrs de
GRANDEUR, j Biographie ^ é^Ristwre^
GRAND'GARDE. V. Gardb.
GRAKD-UVRE. V. CoMPTABiuré covmsrciali, et, dans
aocre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire, Livai ob
la Demi posuqok.
GR^^JOuSf: i ^- "^P^J^"^^ ^^
GRANDS OFFiaERS. S oraphut et d^ffutoire.
GRANELLESCHI (Société des), sorte d'Académie qui
«e forma à Venise vers 1740, pour s'opposer au mauvais
goût de l'époque,* moins encore par des ouvrages sérieux
qu'au moyen de productions satiriques et m>uffonnes.
ha italien, un grandli est un sot, un niais, un imbédle.
GRANGE, b&timent destiné à conserver les grains en
Gerbes et les pailles, dans une exploitation rurale. On
doit en éloigner toutes les causes d'incendie. Phas une
grange se raporocbe du cube par sa forme, mieux elle
répond à m destination, oui est de renfermer autant
îTespaca que possibld; si l'on donne à la toiture une
Krande hMtenr, on augmente ainsi la quantité de «erbes ,
qu 00 peot mottre A Tabri. Le sol de la grange doit être I
surélevé par rapport au terrain envlronDant. et tonaé de
matériaux secs. Si l'égrenage se fidt an fléau. Taire à
battre doit être bien dressée, sans trous ni fissures où le
grain pourrait se perdre, et bien ferme pour rédster aax
chocs du fléau : on en fait, soit avec de la terre firanche
un peu aïKileuse, dont on a extrait avec soin les corps
étrangers, et à laquelle on mêle de la fiente de bétes à
cornes, ou du marc d'olive ou du tan, ou de la bourre,
ou du blanc de salpêtre, soit avec du bois, ou de l'as^
jphalte. Dans le midi de la France, en Espagne et en Italie,
où le battage se fait en plein air immédiatement après la
récolte, il n'existe pas de granges. V. Morel de Vindé,
Essai sur les constructions rurales, 1824.
GRANJA (La), château de plaisance des rois d'Espagne,
bâti an villa^ de S^Ddefonse, à 8 kilom. de Ségovie, par
ordre de Philippe V, qui voulait imiter le Venailles de
son aïeul Louis XIV. Il thre son nom d'une ferme ou mé*
tairie {granja en espagnol} qui appartenait aux Hiéro*
nymites de Ségovie, et sur l'emplacement de lamielle on
le construisit Les travaux durèrent de 1710 à 1746 1 Jo-
bara, Sachetti, Procaccini, Sani, Firmin, Thierry et Do-
mandré, y (tirent employés. La Granja occupe la partie hi
plus élevée d'une place en pente, où elle oflre une façade
peu remarquable, limitée par deux tours à flêdies al-
gues, et au centre de laquelle se trouve l'abside de la
chapelle. La façade prindpale est du cêté des Jardins t
des pilastres et des demi-colonnes encadrent les fenêtres
du rez-de-chaussée et de l'étage, que couronnent des
Arotttons de forme baroque, et une corniche ornée de
vases ; au centre s'élève un attique soutenu par quatre
cariatides. Les appartements intérieurs sont remarquables
par leur grandeur et leur richesse, mais présentent une
monotone uniformité. On voit dans les salles basses une
collection d'antiquités formée à Rome par l'ex-reine
Christine de Suède, et achetée plus tard par Philippe V;
les pièces supérieures sont ganiies de belles peintures.
La chapelle, ornée avec peu de goût, contient le tombeau
élevé par Ferdinand VI à la mémoire de son père. Ce
qu'il y a de plus beau à la Granja, ce sont les Jardins et
leurs eaux, dont certains Jets atteignent 40 à 45 met. de
hauteur. Les plus belles fontaines portent les noms de
Bains de Diane et de Fontaine de Neptune. B.
GRAPHIUM. 7. ce mot dans notre Dictufnnaire de
Biographie et d'Histoire.
GRAPPIN, petite ancre à pattes on griflte recourbées,
attachée par un anneau à l'extrémité d'une corde ; elle
sert aux embarcations légères, n y a des grappins d^abor»
dage, qui se lancent dans les haubans des navires qu'on
veut accrocher. Les grappins de brûlots, placés au bas
des basses vergues, sont quelque peu différents de forme.
GRASSEYEMENT, vice de pronondation qui porte sur
la consonne r, don\ il dénature et atténue le son. Il ré>^
suite d'une mauvaise direction donnée à la langue, qui,
au lieu d'être portée vers le palais pour v ribrer au pas-
sage de l'air poussé au dehors, est abaissée vers les dents
Intérieures. Le son de Vr est quelquefois même supprimé,
ainsi que le ftûsaient à dessein les Incroyables et les
Jfs-fwulstwM du Directoire. La grasseyement choque peu^
quand il n'est pas trop prononoift, et il a même une cer-
taine grâce efféminée.
GRATIFICATION, libéralité faite anx employés de cen-
taines administrations publiques et particulières, à raison
des étrennes ou de tout autre événement.
GRAU, petit canal entre un étang et la mer.
GRAVE, qualification de certains sons musicaux, par
nmport à d'autres qui sont aigus ( V. Aion). Plus les
viorations du corps sonore sont lentes, plus le son est
grave. La araf ite des sons dépend de la grosseur des
cordes ou des tuyaux, de la longueur, du diamètre, et
en général du volume et de la masse du corps sonore. —
GrSoe est ansd le nom d'un mouvement un peu plus
rapide que le largo, mais plus lent que l'addaîo.
GRAVILLE (Abbaye de), au Havre. La construction^
commencée à la fin du xi* siècle, ne fut achevée qu'an
un*; elle est de sQrle roman, sauf le chœur, où se trou-
vent des arcades ogivales. L'abbaye de Graville est en
forme de croix latine. A la gauche de l'entrée ocddentalt
est une grosse tour carrée en ruine. Une autre tour
earrée, de peu de hauteur, et surmontée d'une pvramidt
en ardoise, s'élève à l'intersection des transepts. Les cha-
f liteaux des piliers qui supportent la voûte en bois de
'édifice, et les parois extérieures du transept septen-
trional, ont reçu une ornementation grosdère, mais inté-
ressante pour l'histoire de la sculpture. — Le dmetière
attenant a l'abbaye contient une croix de pierre aases
ornée, qui porte d'un cèté l'image du Christ, de l'autrs
GRA
9S8
GRA
mXI» de la Viem, et qui repoM sur an socle octogonal :
cette croix lervit de modèle pour celle qui figura primi-
àvement à rOpéra de Paris dans le 3* acte de Robwt le
Diable.
ORAVURB (du grec graphém, écrire, tracer), art de
tiaoer on dessin sur une matière dure. Après n*avoir
offert pendant longtemps qu*un intérêt secondaire, cet
art a pris tout d'un coup une grande importance, lors-
qu'on eut appris à tirer des planches gravées, par le
moyen de Timpression, un nomiire indôflni d*épreuvee oi\
etkunpeSf auxquelles on donne également le nom de gra-
vurei. Toutes les espèces de gravure se ramènent à trois :
la Gravure en creux, la Gravure en relief, et la Gravure
en bae^elief,
I. Gravdrb en cbbox. La matière employée est toujours
un métal. On prit, à Torigine, de petites plaques d*ar-
jgent, quelquefois d*or, parce que la gravure ne servait
qu'à orner des bijoox. Mais, lorsque luao Finiguerra eut
trouvé, en 1452, te moyen de tirer épreuve dlune plaque
au*il avait gravée pour Tégllse Saint-Jean ^ Florence
V, Nielle), Mantegna, BaodoBaldini, Botticelli, Antoine
Pollajuolo, Frauda, et d'antres ardâtes gravèrent sur
des planches plus grandes, avec Tintention de tirer des
épreuves : depuis ce moment, on fit usage d'un métal
en manière de crayon, en mezzoiinte, au lavis; il faut
ijouter la gravure ae musiqtie, la gravure mécanique, la
gravure en typographie, et la gravure héliograpkique,
La Gravure au buHn ou taille-douce est la pins ancienne
et celle dont on obtient les plus beaux résultats. 11 est rare
qu'on emploie le burin seul ; ordinairement on se contente
de terminer avec cet instrument le travail préparé avec
rean-forte, et les linges, les plumes, les parties les plus
délicates des chairs sont terminées avec fa pointe sèche.
Les tailles sont généralement croisées, excepté dans les
parties qui approchent des lumières; graver avec un seul
rang de tailles est une singularité ou un tour de force.
La manière dont les tailles sont croisées n'est pas indif-
férente : elles sont en carré pour les pierres et antres
objets inflexibles, en losange pour les chairs ou les dra-
peries. Avec les tailles croisées, on doit tâcher d'en avoir
une principale qui soit placée dans le sens des muscles
si c'est des chairs qu'on grave, dans le sens des plis si ce
sont des draperies, et, si c'est un terrain ou un monu-
ment, dans le sens de sa plus grande longueur et suivant
la perspective. On ne multiplie le croisement des tailles
que dans les fonds et quelques parties d'ombre. Elles no
sont pas toujours de même force, mais on les fait plus
fines et plus déliées dans les fonds et dans les demi-
teintes, et souvent môme, en approchant des lumières,
^ on les termine par quelques points qui ont l'air de pro-
' longer la taille, bans lea premiers plans, les travaux doi-
vent être plus larges; mais il faut éviter d*y placer des
taillea qui choquent l'œil par leur épaisseur et qui laissent
des blancs entre elles. — Aujourd'hui les graveura prépa-
ient et avancent beaucoup leurs travaux à l'aide de l'eau-
forte ( K. à la col, suio.) : mais, au xv* siècle, ce moyen
était inconnu; on en faisait encore peu d'usage au xvi*, et,
dans le xvii*, on trouve encore de très-belles gravures exé-
cutées seulement au burin. — L'école française de gra-
vure a commencé dans la seconde moitié du xvi* siècle,
avec Jean Duvet, Etienne Delaulne, Noél Garnier^ Nicolas
Béatrltet, P. Voeiriot, Jacques Périsin, Tortorel et René
Boivin. Sous Henri IV fleurirent Léonard Gaultier, An-
drouet Ducerceau, Etienne Dupérac, Philippe Thomassin
et Thomas de Leu. An temps de Louis XllI, Callot, La-
belle. Chaperon, Pérelle, brillèrent d'un vif éclat. Pendant
le règne de Louis XIV, notre école devint la première de
l'Europe, avec Poilly, Etienne Baudet, Pesne, Guill. ChAr-
teau, Claudine Stella, Gérard, Audran, Ëdelinck, Nan-
teuil, Masson, Van Schuppen, etc. Sous Louis XV, Benoit
ei Jean Audran, Nicolas Dorigny, Charles et Louis Simo-
neau, Gaspard Duchange, Nie- H. Tardieu, Alexis Loir,*
Louis Desplaces, soutinrent la gloire de l'école, et après
eux vinrent les deux Dupuis, Laurent Cars, Phihppe
Lebas, les Drevet et les Balechou. Les étrangers venaient
alors en France apprendre à manier le burin, par exem-
ple, les allemands Wagner, Preisler, Schmidt et Wille,
les anglais Strange, Ingram et Ryland : l'Angleterre nous
enleva même Aliamet, Lempereur et Vivarais. M"* de
pompadour donna l'exemple d'abandonner les principes
sévères de l'école, pour ISàire du Joli et de l'effet; mais
AnI. Trouvain, les deux Chéreau, DauUé, Larmessin,
coBservèrent les bonnes traditions. A la fin du xvui* siè-
cle, SainUAobln, Avril, Duplessis-Bertauz et Boissles
nous amènent Jusqu'à la grande école du xix% formée
d'après les inspirations de David, et qui a pour représen-
tants Bervic, Desnoyers, Massart, Richomme, Henriquei
Dupont, Sixdeniers, Lemaltre, Martinet, François, Blan-
chard, etc. A notre époque on peut aussi mentionner
Toschi, Anderloni, Garavaglia et Mercuri eu Italie, Sharp,
WoUett, Earlom et Green en Angleterre.
Pour la Gravure à Veau-forte, on prend une planche
de cuivre ou d'acier, on la couvre d'un vernis inatta-
quable aux acidea, et, avec une pointe, on dessine eo
enlevant oe vernis, qu'on a eu soin de noircir à la fumée
d'un flambeau. Parmi les artistes, les uns prennent une
pointe fine, les autres une échoppe ou grosse pointe, dont
le bout, en forme de triangle irrégulier, sert à faire des
pleins ou des déliés, suivant la manière de tenir l'instru-
ment. Il en est qui varient la grosseur de leur pointe,
d'après la nature du travail qu'ils veulent faire. Le tra-
vail de la pointe étant terminé, il reste à faire mordre,
ce qui consiste à verser sur la planche de l'eau-forte on
adde nitrique mélangé d'eau, qui entame le métal aux
endroits ou la pointe l'a mis a découvert. On nomme
eauoD-fortes de peintre les planches gravées ainsi d'une
manière définitive, et eauaS^ortes de graveur oeilea où
l'on a seulement préparé un travail qui doit être terminé
an burin. Pour graver sur verre, on emploie l'adde fluo-
rique an lieu d'eau-forte. — Les Italiens ont attribué à
François Iftazzuoli, dit le Parmesan, l'invention de la
gravure à l'eau-forte; cet artiste est seulement le pre-
mier qui ait pratiqué cet art en Italie (1530). Les Alle-
mands ont revendiqué la découverte pour Albert Dorer
(1510). Biais il existe au Musée britannique de Londres
une gravure allégorique et satirioue de Wenceslas d'Ol-
mûtz, où l'on trouve la date de 14te, et qui est, par con-
séquent , antérieure aux compositions de Darer et de
lliàzuoli. Un certain nombre de peintres ont gravé à
l'eau-forte, entre autres, Berghem, Paul Potter, Swane-
velt, Everdingen, Henri Roos, Rembrandt, Annibal
Carrache, le Guide, Salvator fUna, Castiglione, Claude
Lorrain, Bourdon , Coypel. Parmi les graveun qui em-
ployèrent à la fois le burin et l'eau-forte, on remarque
Gérard Audran , qui a porté ce procédé à la perfection,
Chasteau, HoUar, Desplaces, Duchange, Le Bas, Vivarais,
Marc^Antoine Raimondi, les Ghisi, Longhi, Bartolozzi.
Quelques-uns ne se sont servis du burin que pour r^
pren(tare des parties qui n'avaient pas mordu à l'eau-
forte; tela sont Bartoli, La Belle, Callot, Abraham Bosse,
Sylvestre, Chauveau, Le Potre, Lederc, Morin, Pérelle,
Périer, Wagner. Le meilleur graveur à l'eau-forte de
notre temps est Charles Jacque.
La Gravure au pointillé n'emploie pas les taillea, mais
des points disposés par séries. On lea obtient par l'eau-
forte; le burin donne ensuite l'empâtement nécessaire
aux ombres et aux demi-teintes, et la roulette fond ces
dernières avec les lumières. Les plus anciennes estampes
au pointillé, d'origine hollandaise, datent du commence-
ment du xvn* si&le, et présentent un assemblage de
pointa ordinairement triangulaires et d'une grosseur iné-
gale, llorin et Boulanger ont arevé de cette manière
plusieura portraits et des sujets historioues. A la fin do
xvm* siècle, Bartoloszi mit le pointillé à la mode, parti-
culièrement en Angleterre, et l'on vit se répanchre une
énorme quantité de mauvais ouvrages, surtout des scènes
domestiques et sentimentales. Au xix* siècle, Hopwood
a fait des portraits d'un beau fini et d'un Joli ea&L, —
La Gravure au maillet est une variété de la gravure an
pointillé : les pointes avec lesquelles on fait les points
sont enfoncées dans le métal à l'aide d'un petit maillet.
Lutma est presque le seul artiste qui ait opéré ainsi, et
il n'a laissé que quatre tètes ou portraits dans ce genre.
La Gravure en manière de crayon a été inventée en
1756 par François et Demarteau, graveun parisiens.
Pour imiter l'irrégularité d'un crayon passé sur lea grains
du papier, on -prend une planche de cuivre vernie ; on
emploie, au lieu de la pointe ordinaire, une pointe di-
visée en plusieura parties inégales, et on trace ainsi les
contoure; puis on imite les hachures soit avec ces pointesi
soit avec des roulettes qui présentent également à leuf
circonférence des aspérités inégales. Cette manière de
graver, qui était surtout en usage pour l'exécution des
modèles destinés an^ écoles de dessin, est remplacée au-
jourd'hui avec avantage par la lithognq)hie.
La Gravure en mezzotinte on à ta manière noire, dont
l'invention est, à tort, généralement attribuée à Louis
Siegen, lieutenant-colonel an service du landgrave de
Uesse-Caasel, ven 1643, remonte à 1601, et appartient à
?RA
11
989
GRA
PVioQois Aspruck, graTeur tout à fait inconnu, et dont il
«xisiB à la Bibliothèque nationale de Paris plusieurs
pUochea datées. Lea procédés en ont été bien perfeo-
UooQéa depoîa. Oa prend un cuivre ordinairement
iftaoe, plaoé avec grand soin; on y fait faire le grain
psr on oaYiier au moyen d'un h€rc9au, large ciseau
dont le bout, fait en portion de cercle, est stné et pré-
sente des pointes tiés-aigués. L'ouvrier, en berçant sa
main, fait entrer ces pointes dans la planche. Il passe le
bereean sncoesaiTement par bandes parallèles sur la hau-
teur, pais sur la largeur, et ensuite par chaque diago-
osle, en recommençant Jusqu'à vingt fois de chaaue côté.
L'épreaTO qu'on tire alors donne un noir parfait. Puis,
le graveor, ayant décalqué son dessin sur le cuivre, prend
on radoér, lame aiguisée des deux cètés, avec laquelle il
abat Je pfain de la planche, d'abord en entier dans toutes
les pcrtiee claixea, ensuite plus légèrement dans les demi-
teintes et les parties plus ou moins ombrées. On emploie
aoni , an Ueu du radoir, un ébarboir, barreau d'acier à
trois OQ quatre faces, dont les angles moins aigus font un
travail plus doux. Maia, en tout cas, le racloir ne suffit
pas dans les clairs purs, parce qu'il peut occasionner
queli^oes lécères rayures; on les efface au moyen du
t^rum%s8oir^ instrument d'acier très-poli. Cette manière
d'opérer est le contraire de la gravure ordinaire : car la
pointe on le burin semble faire l'effet d'un cnuron noir
sur un papier blanc, tandis q[ue le racloir produit celui
dun crayon blanc sur du papier de couleur. La gravure
à la manière noire est plus orompte et plus expédltive
que Teau-forte et le bunn ; eue est susceptible de grands
effets à cause de l'obscurité qu'elle laisse dans les niasses ;
mais elle manque de fermeté et de hardiesse, ainsi que
de finesse, par suite de l'espèce de velouté produit par le
grain. Vaillant est à peu pres le seul artiste français qui
ait employé la gravure à la manière noire sous le règne
de Louis XIV; on trouve ensuite Leblond sous Louis XV,
et, de nos Jours, JazeL Les Anglais y excellent : il n'est
pas de graTeur plus remarquable que Blartin et Thomas
Landaeer, nos contemporains.
<a Graowr€ au lavis ou aquchtitUa imite les dessins au
lavis faits à Fencre de Chine, au bistre ou à la sépia. Elle
produit à peu près les mêmes effets que la mezzo-tinto ;
mais, comme la gravure à l'eau-forte, elle s'exécute au
moyen d'une action chimique : on grave d'abord à l'eau-
fone les contours de la figure; on couvre ensuite d'un
vernis noir impénétrable à l'acide nitricjue les parties de
la planche où il ne doit y avoir ni trait ni ombre. Puis
:q saupoudre la planche de colophane réduite en poudre
très-fine, et on l'expose à une chaleur ardente jusqu'à ce
qae la résine soit fondue. Par ce moyen, il se forme,
entre lea molécules de la colophane, de petits espaces
-^r lesquels radde nitrique peut s'insinuer et mordre.
L adde est alors versé sur la planche, et on l'y laisse
doq minutes, temps suffisant pour les ombres faibles.
On oouTre ces ombres faibles avec du vernis, et on fait
agir racide une seconde fois, et ainsi de suite Jusqu'à ce
que les ombres les plus fortes soient tracées à leur tour.
Telle est la méthode pour les sujets d'histoire et d'archi-
tecture. Pour le paysage, on emploie un autre procédé,
qui consiste à étendre sur la planche un bon vernis de
graveur; puis on recouvre au pinceau toutes les parties
2ui doivent être gravées^, avec un mélange d'huile d'olive,
l'essence de térébenthine et de noir de fumée. Ce mé-
lange amollit le vernis, qui peut être enlevé avec un linge
tn^ en laissant paraître sur le cuivre les marques faites
avec le pinceau. Alors on agit , comme dans le premier
procédé, à l'aide de la colophane, et on répète l'opération
plusieurs fois, suivant qu'on veut obtenir des teintes plus
on moins foncées. — La gravure an lavis a été inventée
en 1660 par Hercule Zeghars, ou en i762 par Fr.-Phil.
Charpentier, graveur de Paris. D'antres l'attribuent à Le-
prince.
La Gravure sur pisrrs s'exécute sur pierre lithogra-
phique; elle a été imaginée vers 18 ; c^est un procédé
qui a son avantage pour la facilité du travail, mais il ne
réussit bien que pour le dessin au trait, ou le dessin to-
pographique on géographique ; il ne souffre pas de mé-
dîMrité; aussi, en général, ce genre de gravure est sec et
froid, comparé à la gravure sur cuivre ou sur acier.
Pour la Gravurs de musique, on a'est servi d'abord de
planchas en cuivre, puis en étain et en sine. Bien qu'on
efnpkne le burin pour quelques parties, presoue tout le
travail se Mi au moyen de poinçons quon frappe avec
an marteau. S'il y a des paroles à graver, c'est par là
que Ton commence, et c'est l'aflaire du graveur en taille-
wan. C'est an conmienoeaient du xvm* siècle qu'on se
mit à graver la musique, qui était précédemment impri*
mée. L'idée en est attribuée au compositeur allemand
G.-Ph. Telemann.
On a imaginé, de nos Jours, diverses Machines à gra»
ver. Celle de Conté sert à faire avec une très-grande x^
gularité des séries de lignes parallèles, également espa-
cées, comme cela est nécMsaire pour les dâs des grandes
navurea. Elle se compose essentiellement d'une règle ou
d'un cylindre portant des ondulations que l'on fait mon-
voir au moyen d'une vis de rappel parfaitement r^Utos,
et d'une pointe qui trace une ligne le long de cette règle
ou de ce cylindre. La machine de Collas sert à repro-
duire, gravés en taille-douce, sur une planche d'ader on
de cuivre, les effets de relief ou d'enfoncement d'une
médaille, d'un basrrelief.
La Gravure en typographie comprend toutes les opé-
rations à l'aide desquelles se font les poinçons d'ader
servant à frapper les matrices employées pour couler les
caractères d'imprimerie. Elle est très-importante; car de
la bonté et de la beauté de ce qu'elle produit dépendent
les succès du fondeur et de l'imprimeur.
La Gravure hMiographique, qui s'exécute sur ader et
sur verre, n'a pas encore atteint une grande perfection.
Après avoir obtoiu, sur une plaque enduite d'un vernis
de benrine, d'essence de zeste de dtron et de bitume de
Judée, une bonne image à l'aide de la chambre obscure,
on la place dans une boite semblable à celle qui sert à
paaser la plaque daguerrienne au mercure. Dans le fond
de cette boite, que l'on ferme hermétiquement, est une
c^isule de porcelaine contenant de l'essence de spic pure,
que l'on chauffe très-fort avec une lampe à alcool. La
plaque étant bien séchée à l'air, on la nit mordre par
l'ean-forte.
11. Gaawaa en sbuep. Cette manière de graver, plus
lonpe et plus difficile que la gravure en creux, est aussi
moins ancienne ; on rroit que les Chinois la pratiquaient
dana le xi* siècle, liais, comme l'impression en est plus
simple et plus fadle, c'est d'elle qu'on a tiré des épreuves
en premier. La gravure en relief s'exécute ordinairement
sur du bois, mus aussi quelquefois sur cuivre Jaune et
sur ader. An xm* dède on exécutait en Allemagne des
cartes géographiques gravées en relief sur bois; Il en
existe des exemplaires à la Bibliothèque impériale de
Paris.
La gravure en relief sur cuivre et sur ader sert à ex^
cuter les estampilles, les poinçons, les vignettes em-
ployées dans la fabrication des actions des compagnies
industrielles, les ornements que les relieurs placent sur
le dos ou le plat des livres, etc.
On grave sur bois à une ou à plusieurs taUles. Pour
graver à une seule taille, le buis est le plus généralement
employé. On prend aussi du poirier pour les si^ets de
grande dimension, ou quand le travail n'exige aucune «
finesse, comme pour la fabrication de l'indienne ou du
papier pdnt. Lorsque la plandie est bien dressée et
polie, on la couvre d'une légère couche de blanc de cé-
ruse ou de zinc délayée avec de l'eau gommée et un peu
d'alun : le dessinateur trace alors avec un crayon dur la
composition qu'il veut publier, et tout le travail du sra-
veur se borne à enlever les partiea du bols restées blan-
ches, et à laisser en saillie les traits et les hachures que
l'artiste a dessinés et qui deviennent alors autant de
tailles. Dans la gravure en creux, le sillon du burin ou
de la pointe doit être rempli d'encre et produirai^ traits
aperçus sur l'épreuve; dans la gravure en relief, ce qu'on
enlève est la partie qui ne doit pas laisser de trace sur
le papier, et on épargne les tailles qui doivent marquer à
l'impression : de là vient le nom de gravure en taille
d'épargne que Ton donne à la gravure en relief. — Autre-
fois, les graveurs sur bois étaient appelés tailleurs de
bois, et on donnait le nom de taille à \a planche taillée ou
gravée. Aussi, quand on parle de gravure à plusieurs
tailles, il ne s'agit pas du nombre des hachures, ni de
leur croisement, mais des tailles ou planches diverses
qu'on emploie pour graver en couleur. La gravure à plu-
sieurs tailles est aussi connue sous les dénominauons
de gravure en camaieu et de gravure en clair^chscur
{V, Camaïeu).
La gravure sur bois offrit à peine, à l'orighie, les fn^
ractères d'un art: elle servit à tailler des sceaux écono*
miques, des lettres en relief, dont les scribes et enlo-
mineurs faisaient usage pour imprimer les minuscules.
On a des preuves que cette coutume s'établit dès le
XII* siècle. La plus andenne mention d'un graveur en
bois que l'on ait découverte Jusqu'id se trouve dans un
obituaire dea Frandscains, à Nordlingen, lequel s'arrête
GRA
990
GRA
an cammeDcement du xv« siècle : œ grafenr se nommait
Fr.-H. Loger, et était lalmie. Par conséquent, les Alle-
mands sont aussi peu fondés à réclamer iHnvention dç la
gravure sur bois pour Ulrich Vilgrim que les italiens
pour Ugo da Qupi. Au xv* siède, l'art de tailler le bois
pour en obtenir des estampes se répandit des monastères
dans le monde séculier : de nombreux ateliers fonction-
nèrent à Ulm, Nuremberg, Augsbourg, etc., et four-
Bfarent dlmages Tltalie, la France et les Pays-Bas. Bn
même temps que rimprimerie substituait les livres aux
manuscrits, la gravure se substituait à la pdntore en
miniature. Dans les estampes de ee temps, les figures,
aussi bien que les fonds, les terrains, les arbres, les édi-
fices, sont encore faits au trait, à peine ombrés de quel-
ques hachures, et propres à recevoir une enluminure s
e^est Part dans son enfance, avec sa naïveté, sa pàce
quelquefois, mais aussi avec ses incorrections, son igno-
rance de la perspective et du clair-obscur, son peu d'ha-
bileté mécanique. Mais le perfectionnement de Texéeu-
don artistique ne tarda pas à être sensible t pendant
tout le XV* siècle, Tart de graver sur bols fit des progrès
continus; Albert Durer et ses élèves lui donnèrent le
plus grand éclat qu'il ait Jamais atteint avec Tancienne
école. Parmi les graveurs français, on dte Tollat, Raefé,
Pierre Voeiriot, Noôl Gamier, Bernard Salomon dit 1$
Petit Bernard, Jean Le Hattre, Moni , Georges Biathieu,
Cruche, et le célèbre Jean Cousin. Puis, la gravure en
rdief pencha peu k peu vers son déclin, en Jetant sur les
Pays-Bas, pendant la seconde moitié du xvi* siècle, les
derniers rayons de sa splendeur. On remarqua, sous
Henri IV, Leclerc et Pierre Rochienne, et, sous Louis XIII,
Etienne Duval et Palliot. La décadence, un moment sus-
pendue par Rubens, devint plus rapide ajirès la mort de
cet illustre artiste, et, pendant le xvm* siècle, ce fut un
art presque abandonné. La France seule le cultiva d'une
manière aases brillante pour prouver qu'il ne périrait
point : deux familles se distinguèrent principakônent à
cette époque, les Piq>illon et les Lesueur; auprès d'elles
une foule d'artistes secondaires ornèrent les livres de
flrontisplceS', de vignettes, de fleurons, et même exécu-
tèrent de grandes planches. A la fin du siècle, si l'on ex-
cepte Go<kupd d'AIençon, l'école française faiblit à son
tour. Mais l'œuvre fut alors reprise et continuée par l'An-
gleterre, dont les artistes, de 4800 à 1825, furent les seuls
en Europe capables de graver avec goût: on doit men-
tionner Thomas Bewick, Th. Hood, Harv^, Sears, Ta-
bagg, Branstone, Clennell, Nesbitt, Thompson, etc. Us
substituèrent la gravure sur bois debout et au burin à la
gravure sur bois de fil et au canif. En France, la gra-
vure sur bois ne s'était conservée ^'en province, à
Épinal , par exemple, où on l'employait pour illustrer de
rades empreintes les livres populaires, et confectionner
ces images grossières qui tapissaient les cabarets et les
chanmiores. A Paris, ouelques fleurons et culs-de-lampe
étaient exécutés pour les publications de luxe par Best,
Andrew, Leloir et Brevière. Le succès que le Penny Jfa-
gcuinê, le Saturday Maganne et autres recueils illustrés,
vendus à bas prix, obtenaient en Angleterre, donna l'idée
de créer en France le Magasin jnUomque en 1833. Les
fondateurs de l'entreprise, Charton et Lachevardière,
s'associèrent Best, Andrew et Leloir; une nombreuse
école de graveurs se forma sous leur direction, et, après
quelques années laborieuses et pénibles, le Magasin ptt-
toresims a publié de véritables cnefs-d'œuvre de gravure,
bien Apérieurs à tout ce qui se fait en Angleterre. Rurmi
les artistes qui se firent un nom, on distingue Belhatte,
Gherrier, Chevauchet, les deux Lacoste, Maurisset, Por-
ret. Rouget, Tellier. VFUustration et le Monde Ulustré
donnent aqjourd'hui, avec une étonnante rapidité, des
gravures considérables comme étendue et comme valeur.
Nous citerons encore V Histoire des peintres de toutes les
écoles, publiée par Charles Blanc, et pour laquelle Du-
Jardin, Gusman, Carbonneau, Dupré, Gauchard, Trichon,
Ligny, Quartiey, Timms, Whitehead, Pannemaker, etc.,
ont gravé les tableaux des grands maîtres, d'après les
dessins de Cabasson, Pftquier, Hadamard, Bocourt, nree-
man, Beaucé, Gagniet, Marvy, Daubigny, etc. V Histoire
de la Touraine^ publiée par Mame, les tkderves de l'Eu-
ro^, V Imitation de Jésus-Christ, rivalisent avec V His-
toire des peintres.
m. Gravure en bas-reuep. C'est moins un genre de
gravure qu'une espèce particulière de ciselure et de
sculpture. Elle comprend la gravure de médailles et la
gramêre sur pierres fines (7. Gltphqob, Médaillbs).
iCOLXS DE «iRAVORB*
ÊeoU française, — Elle est originaire d'Italie, ainsi
qu'on le verra plus bas. Nous ne dirons qu'un mot de
Noél Gamier et de Jean Duvet, malgré le mérite de ce
dernier; mais on ne saurait reconnaître dans Dnvet,
dessinateur fougueux et confus de VApoealypsef le génio
caractéristique de la nation. Etienne de Laulne, An-
drouet du Cerceau, sont de véritables dessinateurs fran-
çais : l'un et l'autre ont eu le génie de la gr&oe. Rien de
curieux pour l'histoire du temps, pour en connaître les
nuBurs et les traits caractéristiques, comme le recueil de
pièces historiques dû à Tortorel et à Périssim , et les
estampes de Wo&iot, de Thomas de Leu, de Léonard
Gaultier. Dans ce premier Age de la gravure française,
qui a'étend jusqu'au commencement du xvn* siècle,
Testampe se recommande moins par le mérite de l'artiste
que par l'intérêt du sujet. Cette observation est encore
vraie appliquée à Abraham Bosse; son œuvre si vaste
renferme sur l'époque de Louis XIII, la vie domestique
du temps, mœurs, habillement, meubles, etc., des do-
cuments pleins d'intérêt. Callot a une place à part; bien
que né k Nancy, il n'en est pas moins le premier grand
graveur français, par l'esprit, l'entrain, la sagacité mor-
dante, le bon sens sceptique et gouailleur, qui caracté-
risent nos auteurs, artistes et écrivains, les plus popu-
laires. Il a manié la pointe avec une dextérité inimitable.
Une eau-forte de Callot se reconnaît au prunier coup
d'œil entre toutes les gravures du monde. Mais Callot est
une individualité plus remarquable par sa propre origi-
nalité que par son influence sur la marche et les desti-
nées de l'art. En France cette influence fût peu sensible.
En Italie elle fit naître quelques imitateurs, tels que
Canto Gallina, Cantarini, Délia Bella (La Belle). Cepen-
dant la France, le pays des artistes, penseurs et philo-
sophes, un pays où l'art n'est pas pittoresque, où les
peintres mettent dans leurs productions plus d'idées que
de dessin, et plus de dessin que de couleur, devait voir
tôt ou tard la gravure briller d'un vif et durable éclat.
très-remarquable. Btiénne Baudet,
laume Château, les SteUa, Jean Pesne surtout, sans
égaler comme éclat de burin, comme science de l'outil ,
les interprètes de Kubens, ne leur sont pas inférieurs
sous le rapport de la fidélité et du sentiment.
Nous entrons alors dans le second àçe de la gravure
française. Les ^illy, Edelinck, Nanteuil, Masson, Van
Schuppen, élève de Nanteuil, Pierre Drevet, élève de Ma»-
son, portent l'art à une hauteur dont le nom de Gérard
Audran marque le point extrême. On ne se hisse pas
d'admirer dans les portraits et les e^ds sujets traités
par ces maîtres la correction du dessin, l'habile distribu-
tion de la lumière, l'adresse avec toquelle le même
instrument fait reconnaître l'éclat du métal, la fermeté
des chairs, le scintillement de l'eau, la transparence de
la dentelle, hi douceur de l'hermine -et le degré de ve-
louté et de finesse d'une étoff'e. A Le Brun revient une
bonne part dans ce progrès. En possession de la direction
de toutes les branches de l'art, il n'épsrgna pas les con-
seils à Gérard Audran, et celui-ci les mit à profit avec
tant d'intelligence, qu*ett interprétant Le Brun il sut
régler, et rendre quelquefois même sa traduction supé-
rieure à l'original. Les Batailles d! Alexandre, les pla-
fonds de Versailles, presque toutes les pièces gravées
pour le Cabinet du Boi, se recommandent par la fermeté
brillante de l'exécution et la largeur du style.
A partir de Gérard Audran, le sceptre de la gravure
appartient à la France. Ce sont d'abord les élèves de Gé*
rard : Benoist et Jean Audran, Nicolas Dorigny, Charles
et Louis Simoneau, Gaspard Duchange, Alexis U>ir, Louis
Desplaces, Nicolas-Henri Tardieu ; viennent ensuite les
élèves de Tardieu, Laurent Cars et Philippe Le Bas ; ceux
de Le Bas, Alliamet, Cochin, Wille, et puis Bervic,
l'élève de Wille; Boucher-Desnoyers, l'élève de Bervic;
Alexandre Tardieu, M. Henriquel-Dupont, élèves de De^
noyers. Ainsi, de Gérard Audran Jusqu'à nos Jours, les
saines doctrines, par leur transmission, en maintenant
la supériorité de la France, lui ont assuré le glorieux pa-
tronage qu'elle continue à exercer auprès des Écoles
étrangères. On a re<^rché dans leur temps, et on re-
cherche encore, les productions de Bernard Picard, de
Larmessin, de Dupuis, de Daullé, de Beauvarlet, de Le-
prince, de Balechou, de Flipart, de Ficquet, de Sainte
Aubin, etc., avec autant d'empressement que celles des
graveurs que nous avons précédemment nommés. Par
GRA
991
GRE
tiq^ par ces maltreB habiles^ Tart da xvni* siècle Pat
ttqifiiné avec ses qualités séduisantes et ses défauts. La
Stsmre arrive Ters la fin du siècle à une véritable oriç-
aalité dans la vignette ; l*artiste préfère souvent le burin
u pinceau. Mais Tait, dans ce badinage, perd chaque
|oar sooa le rapport de la force et du stvle.
Avec le peintre David, il se relève enfin ; on entze dans
vne manière large et sévère. Toutefois, il ne faudrait pas
attribuer à David une action directe sur la gravure; nn-
flnence fut tout à fait indirecte. L*art ramené h d*autres
Idées y ramena naturellement le goût et la pens^ des
fraveiira. Bervic devint un admirateur passionné d«ai bas-
rdiefa du Panhénon. On pouvait lui reprocher, ainsi
qu*à son maître Wille, Texagératlon du procédé, Taffec-
tatiott de la science et de la dextérité de Toutil; une
étude dea graveurs du xvu* siècle, alors plus assidue que
celle des maîtres dont ils avaient à interpréter Toeuvre.
Leurs élèves, avec moins de talent quelquefois, ont fait
preuve de plus de modération consciencieuse. MM. Tar-
dieu, Boucber-Desnoyers, ont laissé un grand nombre de
productions très-distinguées, et quelques-unes capables
de supporter la comparaison avec les chefs-d^œuvre de
Vbix qôi les avalent devancés. Nous avons encore aujour-
dlml de dignes héritiers de levrs doctrines, et la main
moaraDts de Desnoyers a passé à M. Henriquel-Dupont
ce sceptre de la gravure dont la France est en possession
depuis deux cents ans.
ECOLES éTKANGÈRBS.
Êcoh aUemandê. — Son caractère peut se résumer en
deux mots : Idéal et matérialisme. Le sentiment exquis
de la beauté manque au vieux génie allemand. Albert
Dorer est la personnification la plus complète de Tart de
son pays; toute l'école allemande procède de lui, puti-
cuUàrement Aldegrever et Hans ScheufDsden. Bientôt
l'école d'Allemagne fut absorbée par celle d'Italie, et ne
compta plus, au xvi* siècle, que des imitateurs de Marc-
Antoine Raimondi. De nos Jours, TÉcole allemande s'est
attachée à rendre la pureté des contours et la ligne, plus
que l'efTet pittoresque. On cite parmi ses graveurs les
plus distingués Merz, Felsing, Steinla, Joseph et Fran-
çois Zeller. Le dernier a obtenu la médaille d'or à l'Ex-
position des beaux-arts, en 1859, pour une belle planche
de la Dispute du S^Sacrementf d'après Raphaél.
ÊcoU anglaise. — Les graveurs ont commencé par
marcher dans la voie de tout le monde, aux xvi* et
XVII* siècles : Strange imita Laurent ptrs; Vivarès et
Woolet prennent la manière de Le Bas ; mais les uns et
les antres surpassent leurs maîtres, et Woolet, dans le
maniement de l'outil, a fait de vrais tours de force. Les
Anglais ont, en général, perfectionné les procédés et pro-
duit des oeuvres remarquables, surtout dans la gravure
en manière noire. Un de leurs perfectionnements, dû à
Conaôl, est l'alliance de la manière noire et de la taille
douce. Néanmoins on compte aussi chez eux d'excellents
burinistes, et Raynbach, entré antres, s'est fait une Juste
réputation par ses tiùlles-douces, d'après Willcie, surtout
le Cnlin'MaiUlard, L'École anelaise réussit beaucoup
daos les gravures d^imaux, etles planches de Landseer
sont, ea ce genre, des chefs-d'ceuvre. Le grand style ne
s'accorde pas avec la nature des Anglais; ils tombent
alors dans le rolde et le théâtral.
Èeols Ualimne, — Les premiers paveurs Italiens fu-
rent des dessinateurs originaux, qui reproduisaient par
le burin leurs propres conceptions, tels que Boticelli, An-
ÉréÊL Biantegna, Pollajuolo; ils le firent avec une correc-'
Jon et une fermeté de dessin admirables. Mais à partir
de Maro-Aotoine iUdmondi, l'école des graveurs sur mé-
tal se consacre à populariser les œuvres des grands
peintres, ce qui la mit dans une excellente condition de
progrès. Raimondi, élève de Raphafil, a reproduit, sons
sa dîrectioii, les dessins des cartons de son maître, et a
contribué à les populariser, n est demeuré chef d'école,
et a laissé de nombreux élèves, Augustia de Venise, Marc
de Bavemie, Vioo de l'arme, Buonaaone de Bologne, les
Ghiai, etc., reoiarquablea par un dessin généralement
«errect, un burin précis, serré, nuls sec. Ugo da Carpi
parvint à donner trois et cruatre tons à la gravure en
eamafen, Volpato, Raphaël Morghen, malgré leur repu-
tttion, forant des graveui's monotones, qui ne surent pas
prendre le caractère de leurs modèles, et portèrent par-
tiBt une manière brillante et molle, la même pour tra-
énlre le Grarége et le Poussin. Ils ont dû leurs succès à
nteurenx choix des modèles d'après lesquels ils ont tra*
viillé. Lea MoJIer, malgré leur origine germanique, ap«
rrtfennent à l'École Italienne ; la Vierge à la chaise de
Godard MuUer, et la Vierge de Sixte V de Guillaume
MuUer, sont des œuvres estimables. — Aujourd'hui,
l'École italienne suit les traditions de l'École française :
elle en a U facilité et le brillant Nous citerons, parmi
ses graveurs les plus remarquables, M. Toschi, auteur de
Vmtrie d* Henri IV à Paru, d'après Gérard; Mercurl,
à qui l'on doit les Moissonneurs dans les marais Pan-
tins, d'après Léopold Robert; M. Calamatta, qui a gravé
le Vœu de Louis XFII, d'après M. Ingres, etc.
J^cole des Pays-Bas, — Le créateur de cette école est
Lucas de Lqrde. Il mit dans les estampes te clair-obscnr
et la couleur an moyen d'une distribution profondément
sentie de la lumière. Les antres graveurs de cette école
ont plus de métier qnie de goût et dinvention : Gomdlle
Cort, interprète du 'Titien, manque de sentiment, et Jean
Muller, Henri Goltzins et toute son école, ainsi que celle
des Sadeler, se distinguent par la vigueur et la hardiesse
du burin, bien plus que p«r un vru sentiment de l'art.
— Rubens a créé une véritable école de gravure : il
forma lui-même des graveurs, les dirigea, leur apprit à
s'inspirer, avant tout, de l'œuvre qu'ils devaient repro-
duire par leur burin, et à mettre de la couleur dans leur
travail ; aussi , aucun œuvre n'a été mieux gravé que le
sien. Ses élèves, Vosterman, Pierre Souteman, Pontius,
Bolswert, ont été d*éminents graveurs, et jamais le burin
n'a eu plus d'éclat, ni rencontré plus de ressources. —
Cependant Rembrandt fut un homme à part; il illustra
un procédé de gravure à l'eau-forte, qui lui est particu-
lier, et où il est resté supérieur à tous ses imitateurs.
Nul n'a mieux compris, m mieux rendu les oppositions
d'ombre et de lumière. Ses défauts sont la vulgarité Jus-
qu'au trivial, et l'absence absolue du sentiment de la
OMiuté. Néanmoins, il est resté le plus grand coloriste de
l'École flamande, qui, depuis lui, n'a pas prodoit un gra-
veur digne de prendre rang parmi les maîtres.
F. Humbert, Abrégé historique de Vorigine et des jpro-
grès de la gravure et des estampes en bois et en ttsHle-
douce, Berlin, 1 752, in-8o ; Fonmier, I>issertation sur Tort-
gine et les progrès de fart de graver en bois, Paris, 1 758,
m-8<>; Abr. Bosse, Traité de lagravure à Veau-forte et au
burin, Paris, 1758 ; Traité de la gravure en bois par Pa-
pillon, Paris, i 760, et par Jackson, Londres^ 1830 ; Jansen,
lEssai sur l'origine de la gravure en bots et en taUle-'
douce, Paris, 1808, 2 vol. in-8*; Deleschamps, Des mor-
dants, des vernis et des planches dans fart du graveur,
ou Traité complet de la gravure, 1836, in-S^*; Léon de
Laborde, Histoire de la gravure en manière noire, 1839,
in-8® ; J. Renouvier, Des types et des manières des maitres
^.graveurs, pour servir à l'histoire de ta gravure, Mont-
pellier, 1856, in-4*; Passavant, Le peintre-graveur, con-
tenant Vhistoire de la gravure sur bois, sur métal et au
burin, jusque vers la fin du xvi* siècle, Leipzig, 1860,
2 vol. in-8*; J. Renouvier, Histoire de l'origine et des
progrès de la gravure dans les Pays-Bas et en Alle-
.magne jusqu'à la fin du xv* siècle, Bruxelles, 1860, in-8®;
Enciclovedia metodica délie belle arit, par l'abbé Pierre
Zani, Parme, 1819 (la première partie, donnant la table
des noms propres, renferme 19 volumes in-8*; la se-
conde, inachevée, présentant la liste des sqjets) est en
9 vol. ln-8*; Kiinstler Lexieon, par Nagler, Munich,
1835, 22 vol. in-8»; le Peintre graveur, par Bartsch,
Vienne, 1818, 21 vol. in-8»; le Supplément, par Veigel ,
1 vol. in-8o; le Dictionnaire des Graveurs, de Strutt, en
anglais, Londres, 1785, 2 vol. in-4«; le DicHonnaire des
monogrammes, par Brulliot, 3 vol. in-4«, Munich, 1832-
33-34; le Manuel des curieux et des amateurs de l'art,
ou Notice des graveurs et de leurs principaux ouvrages,
Zurich, 1797-1808, 9 vol. ln-8», par Huber et Rost, etc. ;
le Peinire graveur français y par M. Robert Duménil,
8 vol. in-8», 1835-1850; V Histoire de la gravure fran-
çaise, de M. Georges Duplessis, ouvrage couronné par
l'Académie des beaux-arts, en 1861, 1 vol. in-8<», etc.;
le Discours historique sur la gravure, d'Émeric David;
les excellents articles sur l'Histoire de la gravure, pu-
bliés par M. Henri Delaborde dans la Revue des Deux
Mondes, sont précieux à consulter : conçus à un point
de vue élevé, ils abondent en vues Ingénieuses et pro-
fondes. B.
CRÉAL (Le Saint-). V. Gsaal.
GRECQUE , ornement d'Architecture. V. Frrtb.
oascQDB (Église). V. Égusb oascQui, dans notre Dio-
tionnaire de Biographie et d^HisUnre, page 898, col. 2.
ORECQDE (Langue), une des langues aryennes ou indo-
enropéennes, la plus analytique de toutes celles du
groupe m^dional. Le ré^me dea castes, auquel les
GRE
992
GRE
Anrens d'Asie farent soumlB, ayant été inoonna dans la
Grece , on en peut conclure que les Aiyens oui s'établi-
rent dans oe pays n'y trouvèrent déjà installées ni races
iaunes, ni races noires, comme cela avait eu lieu en Asie.
Issu du fond védique, mais déjà modifié sur sa route,
ridiome qui devint plus tard le grec fut donc une langue
populah«^,la langue de tous, et se forma en quelque
sorte démocratiquement par le travail commun de tout
un peuple. Les antiques hymnes orphiques, autant qu'on
en peut Juger par les imitations alexandrines, ressem-
blaient singulièrement aux hymnes du Véda, et remon-
taient peut-être aussi haut dans le passé.* Mais la période
épique des aèdes nous montre une langue se formant
librement dans la bouche même du peuple et de ses
chanteurs. Cette formation de la langue grecque con-
traste avec celle du sanscrit, qui fût l'œuvre des brah-
manes, c.-4-d. de prêtres philosophes et grammairiens,
plus occupés de saijdr rensemble et les rapports des
choses pour en tirer une théorie, que de les examiner
en partioilier et en détail pour les faire tourner ensuite
à leurs usages. Il est résulté de ces circonstances si op-
posées, que le sanscrit est devenu une langue synth^
tique et le grec une hmgue éminemment propre à l'ana-
lyse; le sanscrit est fait pour la contemplation, et le grec
pour l'action. Toutefois, encore voisin de son oriçine ,
le grec conserva les avantages des langues synthétiques
dans sa grammaire, analogue à la grammaire sanscrite,
et dans la facilité qu'il a de composer des mots ou de
les dériver les uns des autres ; 11 demeura donc tout h ùài
propre à la poésie, comme il Tétait à la science et aux
affaires.
Les anciens Grecs ne nous ont rien appris sur l'origine
de leur langue ; un préjugé invincible élevait dans leur
esprit une barrière infranchissable entre eux et les au-
tres peuples, ou'ils appelaient des Barbares, et ils n'eus-
sent pas imaginé pouvoir trouver au delà des limites de
la Gieœ la racine d'un mot grec Platon seul avoue qu'il
fiuidrait recomir aux langues étrangères, pour découvrir
les sources où ses eompatriotes avaient puisé la leur ;
mais aucun travail de ce genre ne fut tenté. Hérodote
prétend que les Pélasges, habitants primitif^ de la Grèce,
parlaient un idiome spécial, éteint de son temps; mais
on n'avait fait alors aucune étude comparative des lan-
gues, de manière à reconnaître les radicaux sous leurs
transformations diverses: et il n'est pas douteux aijour-
d'hui que l'idiome des Hellènes provenait de la même
source que celui des Pélasges, dont il se distingua seule-
ment par un vocabulaire plus riche et un mécanisme
plus parfkit. -«Le grec, avant d'arriver à l'état sous lequel
nous le connaissons, a subi de grandes modifications.
Dès les premiers temps de l'occupation hellénique, on
distingua trois tribus |)rincipales , la tribu éolisnne , la
tribu doriennê, et la tribu ionienne : de là trois formes
principales de U langue commune, c-à-d. trois dialectes.
Les différences qui séparaient ces dialectes furent sans
doute peu tranchées d abord, à cause des relations à peu
près constantes des peuples grecs entre eux dans les pre-
miers temps de leur histoire» relations attestées par les
exploits légendaires de Thésée, d'Hercule et autres héros,
ainsi que par l'expédition des Argonautes, la guerre de
Thèbes, et surtout la guerre de Troie. Les révolutions
qui suivirent les temps héroïques, les émigrations nom-
breuses des peuples du xu* au x* siècle av. J.-C, ne
permirent pas à la langue de prendre un caractère
d'unité , et, à l'époque d'Homère, c.-à-d. vers la fin du
X* siècle, elle ne présente pas encore une parfaite uni-
formité t l'ionien, sans doute, domine dans ses poésies ;
mais d'autres formes en assez grand nombre y sont mé-
langées, les unes éoliennes, quelques autres doriennes,
d'autres dont il est impossil>le maintenant d'assigner le
caractère. Au slède suivant, où fleurit Hésiode, la langue
poétique, la seule usitée dans les œuvres littéraires, dif-
fère peu de celle de Vlliade et de VOdysséê. Mais, du
n* au VI* siècle, on voit se dessiner nettement chacun
des trois dialectes oui Jusque-là n'avaient pas en de
forme bien arrêtée : rionien apparaît plus net dans Ar-
chiloque, Callinus, Tyrtée, Mimnerme, Anacréon; le
dorien semble se fixer avec Alcman ; Téolien est porté à
sa perfection par Alcée, Sappho, Érinne. Enfin, au
Ti* siècle, l'idiome athénien, modification du dialecte
ionique, se montre avec des caractères bien distincts
dans les poésies de Selon. Au v* siècle, l'éolien est en
décadence comme langue littéraire, et, se fondant avec
le dorien, donne naissance au dialecte éolo-dorien des
poésies de Pindare, de manière toutefois que l'élément
oorien domine; on voit se fixer la prose ionienne, dont
les osuyres d'Hérodote et d'Hippocrate sont les plus il-
lustres'monuments, tandis que la prose et la poésie a tti-
Îues sont portées à leur perfection, l'une par Antiphon,
ndocide, Lysias et Thucydide, l'autre par les grands
poètes dramatiques. La suprématie littéraire et intellec-
tuelle conquise dans ce siècle par Athènes donne à sa
langue, désormais fixée, une prépondérance marquée sur
tous les dialectes, dont elle s'est assimila quelques
formes, surtout dans la poésie ; Téolien semble dispa-
raître définitivement de ut littérature ; l'ionien homéri-
que devient de plus en plus une langue savante, à
l'usage des poètes, et qui n'est plus guère comprise que
dans les écoles et par les gens instruits ; l'iomen cesse
peu à peu de s'écrire Après Démocrite et Ctésiaa; la
Grèce a enfin une langue littéraire uniforme, qui est
celle de Lysias, de Xénophon, de Platon, d'Iscorate, et
de DémosUiène. Cette langue se répand dans tout l'Orient
après les conquêtes d'Alexandre le Grand; mais cette
diffusion même en altéra promptement la pureté; et
l'influence toute-puissante de la Macédoine au lu* siècle
en Grèce, en Egypte et dans l'Asie occidentale, amena
dans le dialecte attique des modifications sensibles,
contre lesquelles on sut réagir à Athènes et dans les
principales écoles des rhéteurs et des sophistes, mais qui
furent irrévocables en Asie, à Alexandrie, et même dans
certaines parties de la Grèce européenne, puisque nous
voyons Polybe écrire dans une langue qui se rapproche
beaucoup plus de l'alexandrin oue de l'élégance et de la
pureté attiques. L'alexandrin subsista Jusqu'au vu* siècle
de l'ère chrétienne sans subir de modifications bien re-
marouables : à cette époque il est définitivement rem-
placé par le byzantin, qui s'est formé dès le v* siècle
après J.-C, et qui, dégénérant peu à peu, devait aboutir
au romalque ou grec moderne, r . Alexandrin, Attiqcb.
DoBisR, ËouBN, lomxN, MacÉDONiER (Dialecte), Byzah-
TncB (Langue^.
Dans les plus anciens monuments de la langue grec-
que (Vlliade et VOdy$sée)j on trouve déjà tous les ca-
ractms essentiels qu'on lui voit conserver dans les temps
postérieurs : une aéclinaison et une conjugaison très-
variées et très-riches; une syntaxe éminemment mrnthé-
tique; l'usage très-fréquent des ellipses, des syUepses,
des attractions, des anacoluthes ; l'usage habituel de l'in-
version, dans la prose comme dans les vers. Considérée
au point de vue littéraire, elle est poétique et pittoresque
entre toutes les langues, en même temps que mdve et
simple. Elle excelle à exprimer, à l'aide de ses nom-
breuses particules, des nuances fines et délicates ; ce qui
contribue à lui donner une précision que les autres lan-
gues ne sauraient atteindre au même degré, et qui fait le
désespoir des traducteurs. Sa syntaxe est d'une merveil-
leuse flexibilité, image de la mobilité et de la puissance
d'imagination des grands écrivains.
L'étude de la langue grecque, très - répandue dans
l'Orient, où elle se maintint Jusqu'à la conquête otto-
mane, s'introduisit à Rome au ii* siècle avant l'ère chré-
tienne , et ne tarda pas à y prendre un grand dévelop-
pement : sous les empereurs surtout , elle fut populaire
dans les classes aristocratiques, et il fut souvent de mode
à la cour de parler grec De Rome elle pénétra dans la
Gaule Cisalpine, puis dans la Transalpine, où elle était
parlée depuis longtemps sur la c6te S.-E., par Marseille
et ses colonies, puis enfin dans l'Espagne. Elle parait
même avoir été cultivée à Carthage, puisque Annibal
savait non-seulement la parler, mais récrire; au temps
de César et d'Auguste, le roi de Mauritanie Juba H com-
posa en langue grecque une sorte d'Encyclopédie âont
nous avons quelques fragments. L'invasion des Barbares
du Nord porta à l'étude du grec un coup mortel dans
toutes les contrées où la langue n'était pas celle des peu-
ples; quelques écrits d'Aristote et de Galion, traduits en
latin d'après des traductions arabes des viîi* et ix* siè-
cles, furent, au moyen âge, les seuls débris connus,
ftarmi nous, de cette lit<éra*»re, qui ne reparut dans
'Occident sous sa forme originale qu'à la fin du xv* siôde.
Cultivée en France avec ardeur par les savants du xn*,
et enseignée an Collège ïioyal, elle pénétra dès cette
époque dans les écoles de l'Université de Paris et des
Jésiutes; interrompue par les guerres religieuses^ cette
étude reprit quelque éclat au xvu* siècle. L'esprit nova-
teur du xvm* affecta de la mépriser, sans s'inquiéter de
connaître les orignaux, et lui fit perdre sa faveur. Res-
taurée sous le I*' Empire, lors de la constitution de
l'Université actuelle, elle a continué d'occuper dans les
études secondaires et supérieures la place importante
Qu'elle mârite à cêté du hitin et du français. Mais nullâ
r.RE
993
GAE
put elle ii*a été ealtlTée avec autant de patteoce et d*ar-
dnir qa^en Allemagne, où cependant le point de yue
aa<pel on Tétudie est plutdt critique et philologique que
vraiment littéraire. — Considérée par rapport à Tutilité
pntîqae , Tétude de la langue grecque est dans tous les
pays un aecoors précieux pour Fintelligence prompte et
nette des nombreux termes de sciences, d^arts et dMn-
dustrie qu'on en a tirés directement ou que Ton a com-
posés à Paide d'éléments et de radicaux isolés, que les
Anciens n'ont pu songer à associer; aussi quelques-uns
sont-ils combinés d'une manière plus conforme à l'eu-
phonie telle crue la réclament nos oreilles françaises,
qu'aux Yéritabies principes de la composition des mots
mes. Étndiée plus à fond, et à un point de vue plus
eleré, la langue grecque nous réYèle le secret merydlleux
d'une alliance intime entre le naïf et le sublime (Ho-
mère), entre le ton familier et la noblesse du stj^le
(Platon et Sophocle); elle nous montre une simplicité
élégante unie au pathétique chez Euripide, la finesse gra-
eieose à une certaine nudité de style chez Xénophon, et,
dans 1>émoathène, tout à la fois la gravité, la véhémence
et le naturel. V. AinasMB.
FrononciatUm du grec ancUn. — La prononciation du
grec ancien est à peu près inconnue; et celle qu'on a
adoptée dans l'Occident, le Nord et le Midi de l'Europe,
est arbitraire et barbare, chaque peuple prononçant le
grec d'après les règles usitée» pour sa propre langue. Au
XV* siède, les Grecs réfugiés de Gonstanunople évident
Importé en Italie, en Allemagne et en France la pronon-
ciadon usitée de leur temps; mais des savants ayant
démontré oue cette prononciation ne pouvait, dans un
gnmd nombre de cas, s'appliquer à la langue de l'anti-
quité, et ne concordait pas avec les observations éparses
dans les critiques ou autres écrivains, avec l'orthographe
de certaioes inscriptions, ni avec celle que les Grecs
avaient adoptée pour reproduire dans leur langue des
mots de la langue ladne, ni avec la manière dont les La-
tins écrivaient certains mots grecs en caractères romains,
elle fut peu à peu abandonnée, et l'on prit le parti de
prononcer comme on fait aujourd'hui. Toutefois, on ne
saurait nier que, tout altérée que doit être, chez les Grecs
modernes, la prononciation de leurs ancêtres, sur beau-
coup de points ils se rapprochent plus que nous de la
▼enté. Le débat entre les partisans de la prononciation
byzantine, représentés par Renchlin, et ceux de la pro-
nonciation arbitraire, représentés par Érasme, roulait
prindpalement sur certaines voyelles et diphthongues :
^, V, i, et, 01, devaient-ils se prononcer uniformément
comme t ? eni se prononçait-il af ou ou, su «fou 017? Telle
est, en effet, la prononciation des Grecs modernes.
Les consonnes présentent beaucoup moins de difficultés
que les voyelles et les diphthongues ; et le système des
partisans de la prononciation moderne est plus solide sur
ce nouveau tenrain. Ainsi, il est à peu près certain que
B avait un son demi-aspiré approchant de notre v : aussi
voiv<»n le mot latin s^rvus écrit en grec aioSoç. Les
lettres 0, f , % ont dû être des signes d'aspiration forte,
et sont à peu pores exactement représentées par le th an-
glais, notre A et le dk allemand.
Bibliograjiiiû, — Un certain nombre de Traités gram-
maticaux de la langue grecque nous ont été laiss& par
les Anciens; on peut consulter : les Fragments d'Aristo-
phane de Byzance, publiés par Nanck, Halle, i848^n-8*;
•ceux de Philémon, édités par Osann, Berlin, i^i; le
Traité d'Apollonius Dyscole. Dé constructions orationis
{édlu de Bekkec, Berlin, iSi7), et celui De pronomine
nbîd., 1813); la Grammaire de Théodose d'Alexandrie,
éditée par Gœttling, Leîpz., 1822, in-8*; et les Gramma-
Hci grwci de G. Dindorf, Leipz., 1823, in-8*. Nous avons
aussi des Lexiques par Hésychius, Suidas, Photius, et
Zonaras; un Onomastioon de Pollux, et un autre d^Orion
de Thèbes. — Parmi les auteurs modernes de Gram-
maires du grec ancien, nous mentionnerons : Constantin
lascaiis, Grœnmaire grecque^ en f^rec, Milan, 147G; Aide
Manuce, Grammaticœ grœcœ instiiuliofnBSy Venise, 1515,
-in-4*; Théodore GtoA^lniroductiom grammaticœ lib.JV,
Paris, 1589; G. Bodé, Commentarii linguœ çreecœ, Paris,
1548, in-fol. ; J. Camerarius, Commentarii hnguœ grœcœ,
Bftie, 1551 ; W. Camden, Grammaticœ qrœcœ institutio,
Londres, 1501, in-8*; Lancelot, Nouvelle méthode pour
' apprendre la langue grecque, dite Grammaire grecque
de Port-Boyal, Puis, 1655, in-8**; Weller, Grammatica
■ liraca, Leipz»^ 1781 ; J.-F. Fischer, Animadversiones in
* Velleri grammaticam qrcecam, Leipz., 1798-1801, 4 vol.
' tD-è*; G. Hennann, De emendanaa ratione gramma-
MctB grœem, Leipz-t 1S91, in-8»; Viger, De prcecipuis
qrmcœ Itnguœ tdiottsmis, 4«édit., 1834; Maittafafe, Greeem
linguœ duUecti^ édit. de Sturz, Leipz., 1807; Ahrens, De
dialectis grœcis, Gœttineue, 1843, 2 vol. ; J.-L. Bumouf,
Méthode pour étudier la langue grecque, Paris, 1813, trte-
souyent réimprimée; Ph. Buttmann, Grammaire greC'
que, en allem., édit. de Lobeck, Berlin, 1830-39, 2 vol.;
Aug. HatthisB, Grammaire grecque, trad. en français par
Gail et Loogueville, Paris, 1831-42, 4 vol. in-S»; Thiersch,
Grammaire grecque, 1826; KQhner, Grammaire grecque,
1835; Rost, Gramm(ùre grecque, en allem., GcBttingue,
1841, etc. — Les principaux Dictionnaires crées mo-
dernes sont ceux de : H. Estienne, Thésaurus linguœ
grœcœ, Paris, 1572, in-foI., réédité de nos jours chez
F. Didot; J. Scapula, LeaÂcon grœco-latinum , 1580;
Schrevelius, Lexicon manuale grœcO'-kUinum, L0yde,
1045, in-8<* ; llcderich, Ijexicon manuale grœco-latinum
et latinO'grcecwn. édit. do Pinzger et Passow, Leipz.,
1825-1827, 3 vol. in-8<>; J. Planche, Dictionnaire grec-
français, Paris, 1809, in -S*, amélioré plus tard par
Vendel-Ueyl et Pillon; Alexandre, Dictionnaire fran^
çais-gree et Dictiotmaire gi'ec- français , 2 vol. in-8».
J.-G. Schneider, Rost, Passow, W. Pape, ont donné pour
les Allemands des Dictionnaires grecs estimés. Benfqr
a publié un Dictionnaire des racines grecques, Ber-
lin, 1839; Goetttfng a écrit sur l'accentuation grecque,
Spitzner sur la prosodie, Leusch sur la métnque. —
Quant à l'histoire de la langue, on consultera avec fruit :
G. Burton, Historia linguœ grœcœ, Londres, 1657, in-8*i
Ingewald Elingius, Historia linguœ grœcœ, Leipz., 1691 ;
L. Reinhard, Historia grœcœ lingtuB eriticoAitteraria,
ibid., 1728, in-8<* ; Harles, Introductio in historiam linguœ
grœcœ, Altenbourg, 1778, 3 toI. in-8*. P.
GBEGQUB (Littérature). Les œuvres littéraires de l'an-
cienne Grèce, lues dans l'ordre où elles ont été compo-
sées, nous offrent un tableau complet et animé des
doctrines religieuses et philosophiques, des conditions de
la vie sociale et de la vie privée, des relations politiques
des cités entre elles, de l'histoire, des arts, en un mot de
tous les éléments de la civilisation d'un grand peuple, et
cela pour une période qui ne comprend pas moins de
dix siècles. En poursuivant cette étude Jusque dans les
siècles oui ont suivi l'introduction du christianisme
en Occiaent, on voit la littérature grecque renaître au ,
souffle de cette religion nouvelle, produire les grandes .
œuvres des Pères de l'Église d'Orient, et se continuer de '
siècle en siècle jusqu'à nos Jours.
Un fait domine l'histoire de la littérature hellénique,
et la distingue de toutes les littératures anciennes et mo-
dernes, à l'exception de celle de l'Inde : c'est son origi-
nalité. Les Grecs n'ont point eu de maîtres : si, dans tes
temps les plus anciens, ils ont eu des relations de pa-
renté avec les races aryennes de l'Asie centrale, et s'ils
ont apporté avec eux, dans leurs migrations vers l'ouest,
les chants, la langue et les traditions de leurs aïeux, il
n'en est pas moins certain que, une fois fixés sur le sol
hellénique, ils s'y sont développés par eux-mêmes, ont
tiré de leur propre fonds leurs œuvres de littérature et
d'art, ont créé les genres, les ont développés et perfec-
tionnés par un travail qui a été le leur et sous lai seule
inspiration de leur génie. L'originalité et la perfection de
leurs ouvrages en tout genre a fait d'eux les précepteurs
et les modèles des peuples qui sont venus plus tard.
Ceux-ci n'ont donc pu, par la force des choses, que re-
faire, dans des conditions et à des points de vue différents,
ce que les Grecs évident fait avant eux : les efforts des
écoles appelées romantiques n'ont pas introduit, dans la
littérature^ des genres nouveaux, oes formes nouvelles;
prenant, comme les écoles classiques, les formes que les
Grecs avaient créées, les romantiques des différents pays
de l'Europe ont moins innové dans l'art d'écrire propre-
ment dit que dans l'esprit même auquel ils ont demandé
leurs inspirations. On pourrait même dire que plusieurs
genres créés par les Grecs et portés par eux à une su-
prême perfection ont été d'abord dénaturés par les Ro-
mains, puis détournés de nouveau de leur origine et de
leurs conditions essentielles par les peuples modernes
qui les avaient reçus de l'Itahe; de sorte que ces genres
n'ont plus été représentés dans les temps modernes, et
demeurent, au moins dans leurs formes complètes. Tapa- ,
nage de la Grèce antique. Telle est, par exemple, l'ode
pindarique; telles sont aussi, à bien des égards, la tra-
gédie et l'épopée.
Les œuvres littéraires de la Grèce, et principalement ,
la poésie, plus étroitement liée à l'art que la prose, ont v
toi^ours, pendant une période de huit ou dix siècles,
emprunté à la religion ses traditions, ses figures et ses
63
Gne
994
GRE
qrmtwles. Il y a une alliance constante entre les lettres
Krecques et la mythologie. La première condition pour
bien comprendre et sentir les œurres du génie grec, c*est
de se pénétrer des croyances religieuses de ces anciens
temps. Mais il ne suffit pas ici de se donner une teinture
de science mythologi({ne, et de savoir que Jupiter est flls
de Saturne; il est indispensable de se rendre compte de
la valeur de ces conceptions symboliques, et de saisir
leur signification; car c'est toujours avec leur valeur
représentative que les dieux et les déesses paraissent dans
.la poésie et dans l'art; les actions qu'ils y accomplissent,
les attributs qu'ils y reçoivent, ou sont consacrés par la
tradition religieuse, ou ne sont inventés par le poète et
l'artiste que conformément au symbole piimitifet fonda-
mental. Ainsi entendue, la portion mythologique des
œuvres littéraires de la Grèce s'anime d'une vie nouvelle,
et tout l'art antique devient intelligible. Cette union
. d'une mythologie symbolique et des conceptions du génie
individuel est si étroite en Grèce, et en même temps si
nécessaire, que Ton peut dater la décadence de la litté-
rature et des arts, dans cette contrée, du jour où les
symboles, perdant leur dgnification et leur empire, ont
cessé d'être respectés par les poètes et les sculpteurs.
Jusque-là, en effet, dans chaque c^nre, le génie propre
de cnaque auteur s'appliquait moins à créer des tvçes
nouveaux qu'à perfectionner, à polir, à rendre plus claire
et plus saisissable à tous l'œuvre créée par ses devan-
ciers. Le mouvement général qui portait l'esprit grec vers
la perfection en toutes choees se produisait donc de
mènie dans chaque genre particulier : il s'agissait moins
de faire du nouveau que de faire mieux. C'est ce qui
explique pourquoi la Grèce ancienne a rempli nos bi-
bliothèques et nos musées des mêmes sujets mille fois
répétés. Mais on doit observer que le fonds de la mytho-
logie et de l'histoire héroïque est d'une abondance et
d'une richesse excessives, et offre des sujets d'une variété
infinie. Lorsque la perfection eut été atteinte dans chaque
genre, c-à-d. lorsque l'on eut fait dire au symbole tout
ce qu'il contenait, les poètes et les artistes se trouvèrent
forcés ou de copier exactement l'œuvre des derniers
« maîtres, ou de dénaturer les types pour faire du non-
. veau. On prit ce dernier parti. Mais c'était là une rup-
ture ouverte avec la tradition; c'était aussi une dé-
gradation véritable de conceptions excellentes, que Ton
changeait, mais qui, ne pouvant plus être perfectionnées,
n'étaient modifiées ou'à leur détriment. On peut dater
de l'époque d'Euripide, vers la fin du v* siècle et le com-
, mencement du nr* av. J.-C, cette sorte de révolte contre
le passé, et cette tentative d'introduire dans la poésie et
les arts des formes nouvelles et un esprit nouveau. Cest
donc pendant la période qui précède immédiatement ce
poète, et à laquelle il appartient lui-même en partie,
qu'il faut placer le point de maturité et de perfection des
œuvres du génie grec. Cest de ce temps qu'il faut dater
la décadence, lente d'abord et presque insensible, mais
3ui ne tardera pas à se précipiter. La fantaisie s'intro-
uit alors dans les conceptions de l'esprit individuel ; on
s'affranchit par degrés de la tradition ; les grands genres
s'épqlsent; l'art et la poésie ne sont plus qu'un jeu, et
leurs œuvres des ob)ets de luxe payés par les princes et
par les riches particuliers.
L'originalité, Jointe au respect de la tradition natio-
nale, a fait qu'en Grèce les genres littéraires se sont
succédé les uns aux autres dans leur ordre naturel, et
sont arrivés à leur temps et, pour ainsi dire, à terme.
C'est la seule littérature qui, en Occident, présente ce
caractère. En effet, les peuples oui sont venus après ont
eu pour modèles, et tous à Hi lois, ces ouvrages qui ne
&*étaient produits en Grèce que successivement et en
vertu d'un développement libre et spontané. A la Renais-
sance des lettres, soit à Rome du temps des Scipions,
soit chez les Modernes à diverses époques, les lettrés et
les poètes ont choisi parmi ces modèles ceux qui leur
agréaient le plus, et les ont imités sans se soucier de
l'opportunité des temps ni des conditions extérieures des
genres. On a vu à Rome et chez les Modernes l'épopée
se produire après les ouvrages du théâtre, et les poésies
lé^rcs naître au même moment que l'épopée. Il en est
résulté des littératures en partie artificielles, et des
OBuvres oui, malgré leur excellence, ne tiennent pas au
fond des idéee nationales et couvent n'intéressent que les
hommes instruits ou spéciaux. La popularité, au con-
traire, s'attachait en Grèce à des ouvTajges nés du cœur
même du peuple et composés pour lui.
Les Bymnêi sont la première forme qu'ait revêtue la
pensée grecque durant une période antérieure à Phls-
toire, antérieure même aux temps héroïques, et dont ii
est impossible de fixer les limites. Les noms d*Orphée,
de Musée, de Linus, sont parvenus jusqu'à nous, mais
non leurs chants; encore ces noms sont-ils entourés de
légendes fabuleuses, qui font de ces personnages des
êtres presque mythologiques. Les poésies connues sous
le nom d'Orphiquei n'ont aucun caractère d'authenticité;
ce sont des productions des derniers temps de la Grèce;
la langue parlée au temps des Argonautes, dont Orphée
était le chiantre sacré, ne ressemblait certainement que
de fort loin à celle des poésies Orphiques. Quant au
fond même de ces poésies, il n'est ni pélasgique, ni hel-*
lénique ; on y reconnaît de la manière la plus claire> à
oêté de traditions grecques conservées dans les sanc-
tuaires, des idées et des noms empruntés à l'Orient et
particulièrement à l'Inde; de sorte qu'il est à peu près
hors de doute que les poésies Orphiques ont été compo-
sa en Egypte, et probablement à Alexandrie, à l'époque
où les enfances de l'Orient et les idées philosophiques
et religieuses de la Grèce tentaient de se combiner et de
s'unir. Ces poésies ne peuvent donc nous donner qu'une
notion très-imparfaite et même fausse de ce que furent
dans les plus anciens temps les chants sacres connus
sous le nom d'Hymnes. C'est d'ailleurs que peut nous
venir sur ce point quelque lumière. En effet, les vieilles
traditions helléniques, les légendes relatives à ces poètes
primitifs les rattachent de très-près au centre asiatique
d'où les populations grecques étaient venues; le nom
même d'Orphée n'a nen de prec, ainsi que beaucoup
d'autres du même temps, et il a, ainsi que plus d'une
légende, son explication naturelle dans les poésies asia-
tiques conservées par les peuples de l'Inde. Ces poésies,
ces hjrmnes, nous en possiédons de volumineux recueils
connus sous le nom de Védas {V. c$ mot). C'est donc
dans les chants des Védas, et plus spécialement du
RiO^Véia, qu'il faudrait chercher le type primitif et ori-
ginal des hymnes Orphiques. Car le Véaa n'appartient
pas plus à rOrient qu^à l'Occident ; il est la source com-
mune des croyances religieuses, de la poésie, de la
langue, en un mot de la civilisation de l'Inde et de la
Perse, de la Grèce, de l'Italie, de la Germanie et des
peuples du Nord appartenant à notre race. Il est donc
vraisemblable que les poésies Orphiques, la langue dans
laquelle elles étaient composées, les circonstances de la
vie publique ou privée où elles étaient chantées, se vap-
Srocbaient beaucoup de l'étot où noua les voyons dans le
fig-Wa.
Les Épopées sont venues après les Hymnes. Les popu-
lations helléniques étaient depuis longtemps fixé^ sur
le sol de la Grèce, des Iles et des rivages de l'Asie
Mineure, lorsque les chants épiques parridrent à la
forme littéraire qu'ils ont dans Homère. Cétait le temps
de ces royautés féodales entre lesquelles le monde hel-
lénique fut longtemps partagé. Chaque coin de terre,
chaque colline dominant la plaine ou la mer, avait son
f (rince héréditaire, à la fois général, administrateur,
^slateur et Juge. Les aèdes ( V. ce mot) chantaient
dans les festins de ces hommes puissants et riches, les
uns attachés, comme Phémius dans VOdi'Ssée. à la cour
dM princes, d'autres voyageant de ville en rille et chan-
tant , la phorminx à la main , dans les assemblées des
hommes et des femmes. Les sujets de ces chants inter-
rompus étaient d'ordinaire empruntés aux légendes hé-
roïques de la Grèce, aux exploits des guerriers de Fàge
précédent, ou même aux expéditions contemporaines.
La grande expédition de Troie, avec f» antécédents et
ses lointaines conséquences, forma le cvcle épique par
excellence, et la source inépuisable d'où découla la
grande épopée des temps homériques. Ce serait une er-
reur de i^Sduire ces œuvres de la poésie épique des Grecs
à oe qui nous est parvenu aous le nom d'Homère : Ho-
mère a été le plus grand des aèdes; mais tout le monde
alors, Achille lui-même, était chantre de récits hérol*
Sues, et chacun contribuait pour sa part à l'immense
éveloppement que prit dans cette période le genre de
l'Épopée. VIliaas n^Bst qu'un épisode de la guerre de
Troie; VOdyssée en est un autre emprunté au même
cycle héroïque. Il est hors de doute que les autres évé-
nements du cycle troyen avaient été chantés en vers
dans tout le monde apnec , et que, si le recueil de ces
chanta avait pu se faire avant l'époque de Pisistrate,
nous posséderions des épopées grecques rivalisant d'éten-
due avec celles de l'Inde et les dressant peut-être. —
Les aèdes épiques n'avaient plus nen de commun avec
les chantres de la période des Hymnes : ceux-ci étaient
des prêtres plus encore que des poètes, et leurs œuvres.
GRE
995
GHE
mnim. ses dans les familles et dans les sanctuaires, ont
composé la litur^pe sacrée; rien de semblable pour Ho-
mère. Les aèdes de son temps et lui-môme n'ont au-
cune autorité publique « et ne psraissent dans les céré-
monies cjoe comme simples psrticuliers ; leurs œuvres
sont donc pour ainsi dire laïques , leur poésie est libre
et sécularisée; leur génie seul donne toute leur valeur à
leurs chants. On retenait, on redisait les meilleurs i
leur nombre allsit grossissant , et à la fin, tous les évé-
nements du grand cycle troyen se trouvant exprimés en
vers dans la mémoire des hommes, il fut possible d*en
rassembler les fragments épsrs et de composer de véri-
tables épopées. Las Rapsodes sont venus presque en
même temps que les aèdes ; mais il y en a eu longtemps
après que la poésie épique se fut éteinte. Cest grâce à
ces couseurs ae chants que les œuvres épiques du temps
d'Homère se sont conservées, puisqu'il est à peu pies
certain qn*à l'époque de ce grand poète les Grecs ne con-
naissaient pss l'écriture. Les Diascévastês ou distribu-
teurs, qui, au temps de Pisistrate, donnèrent de Vlliads
et de YOdysséê une première édition complète, ne firent
qae placer dans leur ordre naturel les pièces détachées
one lem> fournirent les rapsodes. Cette appsrition tar-
oive des épopées sous une forme systématique a sou-
levé dans l'antiquité deux questions sur lesquelles les
modernes sont encore partagés : Homère a-t-il existé, ou
ce nom n'est-il qu'un symbole, une personnification du
génie épique? S'il a existé, est-il également l'auteur de
Viliade et de YOdysséê? Il n'y a aucune raison sérieuse
de douter qu'il y ait eu un grand poète du nom d'Ho-
mère, conune il y a eu un SOmund pour VEdda, un Vàl-
mlki pour le lAmàyana. Biais il est permis de croire
qu'il n'avait pas composé les épopées homériques avec
la forme qu'elles ont ai:^ourd'hui, puisque cette forme
leur fut donnée an temps de Pisistrate. On ne saurait
^'appuyer sur l'unité de chacune d'elles, puisque les évé-
nements eux-mêmes donnent l'unité à l'épopée, et que
cette unité n'est ou'un cadre d'une grandeur indéfinie où
l'on peut intercaler à volonté les épisodes. C'est ainsi
qu'a été composé, on le sait, le Mahdbhârata, Enfin il
est permis de croire que \ Iliade et VOdyssée ne sont
Pœuvre ni d'un même Jbomme, ni d'un même temps, ni
d'un même pays. — Ls langue des épopées homériques
n'est pas la langue grecque usuelle , il n'y avait pas à
cette époque une langue commune; chaque province ou
platdt chaque race avait son dialecte, ueux des cètes
d'Asie étaient mieux compris et plus perfectionnés que
ceux du continent, à cause de leur contact Journalier
avec les peuples civilisés de l'Asie. C'est l'ionien qui do-
mine dans Homère, principalement dans Ylliade; mais
ee dialecte est loin de s'y présenter avec la même pureté
eue dans Hérodote, qui vindtcinq siècles plus tard; d'où
Ton pent conclure que les épopées sont l'œuvre d'un
homme ou de plusieurs hommes ayant ajourné dans
<fiverses parties de la Grèce et ne parlant plus rigoureu-
sement leur langue maternelle. Cette diversité des lieux
et peut-être des temps se remarque aussi dans la grande
épopée indienne.
Les épopées homériques, admirables comme œuvres
littéraires, ont été le modèle primitif imité par les poètes
épiques des temps postérieurs. Mais ce oui leur donne
une supériorité Incontestable, c'est qu'elles n'ont rien
d^utillciel dans aocune de leurs parties, dans aucun
récit, dans aucun tableau, et qu'elles sont l'œuvre de la
nature dans toute sa spontanéité. Elles nous offrent de
plus un tableau fidèle de la société hellénique du temps,
avec ses croyances religieuses, ses symboles, sa vie pri-
vée, ses souvenirs guerriers, ses courses aventureuses.
tJn puissant intérêt s'attache à leur lecture, parce que ,
outre cette curiosité continuellement éveillée en nous et
i chaque instant satisfaite, elles nous offrent l'expression
naïve et vraie des sentiments les plus variés ne notre
natore. Le nombre si grand des personnages et des situa-
tions ne laisse endiHini en nous aucun de nos instincts ;
tous se développent et parlent à leur tour, et cela avec
une convenance et un naturel qui n'ont Jamais été snr-
Cest à cette même période épique qu'appartient Hé-
riode, dont les csuvres ont un caractère de personnalité
incontestable : sa Théogonie est une tentative hardie de
systématiser les croyances religieuses de son temps ;
mais il ne semble pas que cette osnvre ait eu les consé-
quences qne le poâe semblait eo attendre, car le prin-
cipe oppMéà celui cruMl admettait a prévain dans presque
tOQte la Grèce, et ron a continué a regarder le monde
comme Issa d*an principe masculin et non d'nn principe
femelle. Le fond d'idées contenu dans les deux poèmes
d'Hésiode est peu favorable à la poésie, et explique suffi-
samment leur brièveté.
Un espace de temps considérable s'écoula entre l'époque
homérique proprement dite et IJapparition des grands
^nres qui devaient succéder à VÈpopée. Une transition
msensible s'opère durant cette période entre l'état féo-
dal et la constitution des cités oligarchiques ou démo-
cratiques. La poésie se développe dans des genres secon-
daires sur toute la surface du monde grec. En même temps
que l'on continue à chanter ces fragments épiques connus
sous le nom ^Hymnes d'Homère et à célébrer sous cette
même forme les autres événements des temps hârolques,-
Betours des héros, Thébaides, Héracléides, on voit naltri
l'antique ÈlégiSf caractérisée par le vers de cinq pieds
nommé élégos, et dans lamielle brillèrent Callinus et
Tyrtée au vu* siècle av. J.-C. Vers le même temps flo-
rissait aussi la poésie ïambique, qui fut la satire des
Grecs, et à laquelle Archiloque a attaché son nom. La
poésie s'exerçait même dès lors et dans le siècle suivant
sur des sujets purement moraux et philosophiques : Mim-
nerme. Selon, Phocylide, Théognis sont demeurés célè-
bres dans ce genre. Mais ce sont là des genres inférieurs,
et qui le cèdent à l'ode et à la poésie dramatique.
La poésie lyrique est tout entière dans VOde, C'est à
Lesbos, lie éolienne, que l'ode reçut au vn* siècle une
forme définitive ; elle est, comme les autres genres, une
création du génie grec, et rien n'indique qu'elle ait été
conçue à limitation des chants hébraïques, qui n'ont
avec l'ode aucun point commun. L'ode est née en Grèce
avec la musique, et a toujours eu avec elle une union in-^
dissoluble ; c'est de ce rapport étroit qu'est venu à ce
genre le nom de poésie lynaue, et les Grecs sont le seul
peuple littéraire qui ait cultivé la poésie lyrique dans
toute sa pureté. L^ode grecque est caractérisée par l'ab-
sence de vers ; la mesure y est remplacée par le rhythme,
et par ce mot les Grecs entendaient ce que nous appe-
lons un atr. Il est aussi impossible de concevoir une ode
grecque sans musique, qu'un opéra réduit aux paroles.
La pensée lyrique se présentait à l'auteur sous la double
forme d'une prose rhythmée et d'une mélodie. Telle es*
l'essence de l'ode grecque. L'ode ne fut constituée que
par l'invention de l'heptacorde, qui, donnant tonte la
série des notes, permit d'exprimer tous les sentiments
dans les modes musicaux qui leur étaient le mieux ap-
propriés. Chaque dialecte eut ses poètes lyriques dans
un temps où il n'y avait pas encore une langue com-
mune; à chaque dialecte correspondait naturellement un
mode musical déterminé; le plus musical de tous était
le dialecte dorien, comme le mode dorien est le plus
poétique des modes. — Les Ijrriques éoliens se ratta-
chent à Orphée par les traditions de l'école d'Antissa, et
aux provinces de Phrygie et de Lydie par la nature des
modes musicaux dont ils faisaient usaige. Terpandre fat
considéré par les Grecs comme le père de la po^e
lyrique ; mais il appartient à peine à l'histoire. Alcée de
Mitylène mit la Ivre au service de la politique duis un
temps de discordfe, et de la volupté dans Vile la plus
dissolue des rivages d'Asie ; c'est à lui qu'appartient le
rhythme idcalque , si souvent imité par Horace. Sous la
direction enthousiaste de Sapho, de Lesbos, l'école d'An-
tissa se dédoubla en quelque sorte; Sapho institua des
chœurs de leunes filles, dont les chants lyriques eurent
un écho dans toute la Grèce. — A cette époque le génie
dorien ajoutait au lyrisme des rivages de l'Asie l'eu-
rythmie et la sévénté des formes; Alcman à Sparte,
Stésichore en Sicile, constituaient le chœur dithyram-
bique, créé par Arion , et le complétaient par l'épode. ^
Les Ioniens donnèrent ensuite an fond même de l'ode ce
qui lui manquait encore, une entière liberté d'allure.
Cette raoe pnvil^ée produisait à la fois le Joyeux et po-
pulaire Anacréon, le savant et mélancolioue Simonide.
Cest l'époque des grandes théories musicales, nées sous
l'influence de l'école pythagoricienne, et (jui mirent entre
les mains des poètes lyriques et dramatiques une puis-
sance toute nouvelle. A ce siècle (52(M00) appartient le
plus grand lyrique de tous les temps, Pindare. L'ode
triomphale, créée par Simonide, était chantée soit en
séance après les Jeux, soit en marche, soit même avec
danse dans la demeure des vainqueurs. Elle a un carac-
tère essentielleinent national et populaire; elle peut être
écrite dans tons les dialectes, et chantée sur tous les
modes. Elle est héroïque et calme, elle ne procède pas
de la passion ; mais eue passe aisément des événements
ordinaires anx réflœdons sublimes. Elle est religieuse,
comme l'occasion qui l'a fait naître : Pindare compose
6RE
996
GRE
dftns les mêmes conditions que Phidias. En somme, l^ode
triompliale, dans sa perfection pindaric[ue, est un ensei-
gnement moral appuyé sur les traditions, ajrant pour
motif une victoire aux grands Jeux de la Grèce, adressé
aux hommes assemblés, et se fortifiant par le sentiment
musical.
La poésie dranuUique parvint à sa |)erfection pres-
que en même temps que Tode; la Tragédie vint la pre-
mière; la Comédie se forma sur son modèle. Cest vers
le temps de Pisistrate aue le chant en Thonneur de Bac-
chus, appelé Dithyrambe (V. ce mot)^ se transforma par
degrés en tragédie, lorsque le poète, qui récitait ou chan-
tait les aventures du Dieu, admit un interlocuteur, et
mit son récit en action. Peu à peu le dialogue se sé-
para du chant, et ce dernier constitua le chœur ( V. ce
«not), lequel continua ses évolutions autour de Tautel.
Thespis contribua plus que les autres poètes à cette trans-
formation du chant bachique en tragédie; il n*admît
qu*un seul personnage, qu*un seul acteur, lequel était
toujours en scène pendant la représentation, et ne se re-
posait que dans les moments remplis par les chants du
chœur. Au temps d*Eschyle, on faisait encore des tra-
gédies ayant cette extrême simplicité, offrant des chœurs
très-développés, un dialogue assez court et une action
presque nulle. Eschyle donna à la tragédie sa forme
définitive, et nous avons de lui la plus grande œuvre
dramatique qui existe, la trilogie nommée Orestie (F. ce
mot), A cette époque Bacchus avait cessé d'être le
personnage obligé de la tragédie ; les sujets étaient d'or-
dinaire empruntés à l'histoire héroïque de la Grèce, sur-
tout aux landes troyennes et thébaines; mais Eschyle
mettait aussi sur la scène des sc^ets purement mytho-
logiques, comme son Prométhée, ou purement histo-
riques et contemporains, comme ses Perses, U n'y avait
point d'entr'actes; les chants du chœur en tenaient
lieu. Tous les personnages portaient le masque et le
cothurne, le premier, parce que les conditions et l'esprit
de l'art grec n'eussent pas permis qu'un acteur avec sa
figure représentât Jupiter, Minerve ou Agamemnon ; le
second, parce que, le masque étant admis, il fallait
rétablir les proportions du corps de l'acteur en relevant*
sa taille. Ces deux parties essentielles du costume tra-
gique étaient, du reste, favorables à l'effet général dans
les immenses théâtres de la Grèce. Le chœur tragique
ne put parvenir k sa perfection qu'au temps d'Eschyle,
lorsque tous les modes musicaux eurent été réunis dans
une vaste synthèse, et que les poètes lyriques eurent conçu
cet admirable ensemble mélodique connu sous le nom de
strophe^ antistrophe et épode, — La tragédie grecque
n'a Jamais eu plus de puissance et d'audace que dans
Eschyle. Sophocle y ajouta cette justesse des proportions,
cette grâce et cette sensibilité exquise, cette action con-
tinue et progressive qui, sans nuire à la force et à la
simplicité, ont fait de ses tragédies des modèles pour la
postérité. L'art à cette époque atteignait en toutes choses
a sa perfection ; tout ce qu'il y &^<^^ ^^ ^^^ ^°^ ^^
œuvres des précédentes générations disparaissait. C'était
ce siècle, ou, pour mieux dire, cette période de Périclès,
od la civilisation hellénique avait encore toutes les vertus
du passé, sans avoir les vices et les défauto des temps
postérieurs. Pindare, Sophocle, Phidias, Périclès lui-
même, Hérodote, puis Thucydide et un grand nombre
d'hommes d'un génie supérieur ont forme dans les arts
et les lettres à la fois un ensemble qui ne se présente
aussi complet à aucune autre époque de l'histoire. —
Euripide n'est point un auteur de décadence , il est
Îiresque contemporain de Sophocle; mais, concevant
'art d'une autre manière, il y introduisit des usages
nouveaux oui contribuèrent à l'altérer et à le perdre. La
tradition nW plus respectée au même degré; les dieux
et les héros sont amoindris, pour être rendus plus hu-
mains ; la dignité du langage n*est plus observée comme
dans Eschyle et Sophocle; on s'adresse moins à l'intelli-
gence du spectateur qu'à ses passions ; on cherche le
tragique et le pathétique, au lieu de ce odme et de cette
majesté que les personnages conservaient Jusque dans
leurs violences. Nul auteur tragique ne remue plus pro-
fondément le cœur humain qu'Euripide; c'est lui surtout
qui servait de modèle à notre Racine, qui a traduit du
grec quelc^es-unes de ses scènes les plus émouvantes.
La tragédie devient de plus en plus humaine; mais le
niveau de l'art s'abaisse à chaque pas qu'elle fait en ce
sens. — Nous ne citons id que les plus grands écri-
vains. Mais l'histoire nous a conservé les noms de beau-
coup d'antres, et nous montre que, dans la tragédie,
comme dans les autres parties de la littérature, le génie
Ca été d'une extrême fécondité. On fit des tragédies
^temps après Euripide, et l'on en (Usait encore lorsque
la Grèce, devenue province romaine, n'était plus que
l'ombre d'elle-même. Mais la sophistique se mêla de plus
en plus à la tragédie ; les sentiments et les idées, trop
subtilement analysés, nuisirent à l'action ; les grandes
pensées disparurent avec la foi religieuse et politique, et
avec les bonnes mœurs; on peut dire qu'au temps
d'Alexandre la bonne tragédie était morte et ne devait
pas renaître.
La comédie grecque naquit aussi dans les fêtes de
Bacchus, mais de cette partie de la fête que l'on appelait
comos , et que caractérisaient les ris, les chants joyeux
et l'ivresse. Il n'y avait donc aucune tendance possible à
unir la comédie et la tragédie, et à composer ces œuvres
mixtes que les modernes appellent drames. Née presque
en même temps que la tragédie , la comédie grecque ne
tarda pas à prendre un caractère politique, et à devenir
une satire personnelle des hommes du jour. Telle fut
certainement la comédie entre les mains de Cratinos et
d'EupoIis, qui, avec Aristophane, sont les poètes de Van-
cienne comédie athénienne. Une licence extrême la ca-
ractérise, non-seulement dans la critique des actions et
des mœurs des particuliers, mais dans l'invention des
personnages et des situations; une fantaisie sans limite,
3ue les romantiques modernes et les auteurs d'opéras et
e pièces à illusion n'ont pas égalée, anime les pièces
d'Aristophane ; c'est là que s'étale dans toute sa gaieté
licencieuse la vie exubérante des peuples du Midi. Mais
les poètes prirent parti dans les événements politiques,
et le grand nombre des spectateurs auxquels ils s'adres-
saient leur donnant une influence démesurée, le gou-
vernement d'Athènes supprima, en l'année 404, la paro"
t>ase {V. ce mot), discours direct du poète aux spectateurs,
et défendit qu'aucune personne vivante fût mise sur la
scène. Ce décret des trente tyrans ne tut jamais rap-
porté. Sous l'influence de ces conditions nouvelles et de
la philosophie socratique qui se développait alors, la co-
médie chercha quelque temps une voie nouvelle, et
devint à sa renaissance une critique générale des mœurs
et des travers de l'humanité ou de la société du temps.
Telle fut déjà la comédie moyenne d'Antiphane et d'Alexis,
dans ses incertitudes ; telle fut certainement la nouvelle
comédie, qui, à la fin du iv* et au commencement du
ni* siècle, jeta, avec Ménandre et Philémon, le plus vif
éclat. Les siècles postérieurs, soit à Rome, soit chez les
modernes, imitèrent, non Aristophane, qui est à peine
imitable, mais les poètes de la comédie nouvelle, grands
peintres de mœurs et de caractères, sachant faire naître
une action et une intrigue des sentimente et des situa-
tions initiales des personnages.
La prose grecque, avant Alexandre, comprend surtout
l'histoire, 1 éloquence et la philosophie. VHistoire,
comme la poésie , naquit sur les rivages de l'Asie Mi-
neure : Cadmos, Hécatée, sont de Milet ; Hellanicbs est
de Mitylène, Hérodote d'Halicamasse; c'est ce dernier
qui donna le premier une forme littéraire à l'histoire, et
qui créa le genre. Il lui donna la forme d'une épopée ,
prenant pour sujet dominant la grande lutte de la Grèce
et de la Perse qui dépassa de beaucoup la guerre de
Troie, et amenant les histoires particulières des peuples
de Grèce et d'Asie jusqu'au moment où Ils se trouvent
partagés entre les deux camps. Cette forme donnée à
l'histoire est moins humaine, moins politique que la
forme chronologique; mais elle est certainement plus
grandiose et plus littéraire; elle fait d'un livre d'histoire
une véritable œuvre d'art; ; celle d'Hérodote est, du reste,
sous l'invocation des neuf Muses, et elle fut présentée
aux Grecs dans le grand concours des arts et de la po<teie,
aux jeux Olympiques. Cette forme était parfaitement
appropriée aux événements qu'elle revêtaJt, lesquels
n ont rien de politique et sont les péripéties d'une lutte
internationale, d'une guerre des deux mondes. L'his-
toire grecque se présente tout d'abord avec le caractère
de véracité qui 4a distingue des œuvres d'imagination;
les accusations longtemps portées contre la bonne foi
d'Hérodote tombent tour à tour devant les découvertes
modernes. — Les faits qui suivirent la guerre médlqoe
sont d'une nature politique ; la guerre du Péloponèse a
ce caractère, puisqu'il s'agissait là d'un conflit entre
deux constitutions, l'oligarchie de Sparte et la démo-
cratie d'Athène. L'histoire qui la raconte est une his-
toire politique; les récits ae Tliucydide ne sont plus
groupes sous une forme poétique; ils se développent sui-
vant l'ordre des années et des fiiits , comme un drame
où les acteurs sont des hommes réels^ et où les soènet
GRE
9 ri
r.RE
pncMeftt des caractères de chacun deux et des condi-
tions générales où ils sont placés. L*œuvre de Thucydide
n*a été égalée par aucun historien des temps postérieurs ;
car Jamais des formes oligarchiques et démocratiques
aussi pures ii*ont été aux prises, et n*ont trouvé un
homme qui ait su les approfondir et en exposer la lutte
avec autant de génie que Tliucydide. Cet auteur marque
le point de perfection de Thistoire chez les Grecs. —
Xénopbon, qui le conUnue, est loin de régaler : This-
toire entre ses mains est ou une simple narration, à la
férité fort intéressante, ou des mémoires, ou des récits
mêlés de fantaisie et destinés à soutenir un système de
philosophie politique. — Nous n'avons aucun des ou-
vrages historiques composés dans le iv* siède, et qui
faisaient suite à Thucvoide et à Xénophon. ^histoire du
genre ne peut être faite pour cette période que par con-
jecture : Ctésias, Théopompe, Éphore ne nous sont con-
nus que par des citations et des témoigna^ ; Tesprit
de l*histoire se perd durant ce siècle , la fantaisie se mêle
à la réalité. 11 faut descendre Jusqu'à Polybe. Mais ici
inûstoire change de caractère et de matière. Rome a con-
quis une grande partie de l'ancien monde ; c'est à dé-
mêler les causes et les procédés de cet agrandissement
que rhistoire s'applique ; elle devient donc plus générale
et en quelque façon j>lus philosophique et plus instruc-
tive pour les races futures : la vârité a repris tous ses
droits ; elle exige de l'écrivain le savoir, la pratique des
aflaîres, la clarté des déductions , la Justesse des Juge-
ments et leur impartialité. Polybe est demeuré dans ce
genre le modèle des historiens modernes ; mais il est
moins politique que Thucydide. — U y a une grande
décadence de ce genre de Polybe à Denys d'Halicamasse
et à Diodore de Sicile. A cette époque les Grecs étaient
répandus sur toute la surface du monde romain. — Plu-
tarqne, au l*' siècle de notre ère, écrivait en grec dans un
genre qu'il semble avoir orée , la biographie. Les Vies
aes hommes illustres sont en histoire ce qu'en peinture
est le genre du portrait; c'est l'histoire réduite à ses plus
petites proportions. Il u*y a point d'art dans les Vies de
Plutarque ; l'histoire mente à peine sous cette forme de
compter dans la littérature; elle est à la portée des moins
hahUes; c'est l'extrême décadence du genre inauguré par
Hérodote. Cependant l'on continua toujours à écrire l'his-
toire en langue grecque sous l'Empire romain et à Con-
stantinopie; et c'est, de toutes les formes littéraires^ celle
qui a montré le plus de persistance.
UÊloQuencê grôcqne a deux grandes époques, Péridès
et Démosthène. Cest de tous les genres littéraires celui
qui appartient le plus évidemment aux temps histori-
ques; en Grèce elle est née avec eux , elle a grandi avec
rart oratoire; elle s'est montrée essentiellement poli-
tique ou judiciaire; les Grecs n'ont point connu l'élo-
quence sacrée, parce ou'il n'y avait pas en Grèce d'ensei-
gnement religieux ni de chaires. L'éloquence grecque
est liée avec la démocratie, et c'est dans Athènes que
Tune et l'antre atteignent tout leur développement.
L'nnité monarchique de Philippe et d'Alexandre met fin
k réloquence. — Thémistocle peut être regardé comme
le premier orateur qui ait paru en Grèce; en lui se per-
sonnifia l'esprit athénien; après la guerre médique, il fut
déclaré que, par l'art de la parole, il avait sauvé la na-
tion. Perfectionnée rapidement pendant ce siècle, l'élo-
quence parvient à sa plus haute expression dans la per-
sonne de Péridès, dont la parole gouverna Athènes
pendant quarante ans. Cest l'éloquence sans passion ,
sans gestes, sans action apparente, forte d'idées, maî-
tresse d'elle-même, impersonnelle, sans artifices, bdle
et calme oomme une statue de Phidias. Deux fléaux
cbanoent alors l'esprit public, la peste nui démoralise
la viUe, la guerre aérienne oui n'avait plus le génie de
Péridès pour la diriger. La oémagogie est maltresse de
la place publique; elle est armée de tous les moyens
fomnls par la sophistique et la rhétorique ; Cléon, Alci-
biade du cM des démocrates, Antiphon à la ville, Phry-
nidios à l'armée du cèté de l'olig^u^chie, soulèvent des
tempêtes et détournent l'éloquence de son but légitime ;
c'est le règne de la terreur et de la violence. La victoire
de Lysanore et l'établissement des Trente et des har-
moales rendirent silendeuses toutes les tribunes en
Grèce. Quand on fut sorti de cet état violent, on vit
Bsltre râoqaence de cabinet : Lysias, qui la représente,
fat os onteur judiciaire ; mais comme il n'y avait dans
Athèoes ni avocats , ni ministère public , il ne parut
qn'ooe tàiê an tribunal , et tons ses discours ont été
composés pour d'autres personnes et prononcés par
UkL Cett Je plus pur attidsme qui s'y fait remarquer;
les règles de la rhétorique y sont scrupuleusement sui»
vies. — Le professeur Isocrate n'a jamais prononcé un
discours; il a écrit pour d'autres, comme Lysias; il a
aussi composé des plaidoyers pour des personnages hé-
roiques ou pour des causes imaginaires. Cependant il
était regardé comme le plus grand orateur de son temps {
il est donc évident pour nous qu'à cette époque élo-
quence et rhétorique étaient confondues. Les trois grandes
œuvres oratoires d'Isocrate ne sont pas des discours et
n'auraient pu être prononcées; ce sont des brochures ou
pamphlets politiques. — La grande éloquence se ranima
sur les questions du temps : la plus importante , celle
que les guerres médiques avaient soulevée, qu'avaient
élaborée les Dix-mille et Agésilas, était la question de
Perse ou d'Orient. Elle se compliqua, vers le milieu du
IV* siècle , de la question du Mord ou de Macédoine. Les
projets de Philippe partagèrent les orateurs en deux
camps: d'une part Isocrate, Eubule, Eschine, usant d'ha-
bileté et de sophismes; de l'autre Lycurgue, Hypéride,
Hégésippe, Démostliène, s'appuyant sur le sentiment de
l'indépendance nationale et luttant contre Philippe avec
une âoquence qui croissait comme le danger. La dé-
faite de Chéronée et le triomphe de la Macédoine mirent
fin à l'éloquence grecque, à la démocratie et à l'indé-
pendance.
La Philosophie produisit le dernier venu des genres lit-
téraires de la Grèce. Elle parla d'abord en vers, au temps
où, se confondant avec les sciences particuli^ies, eUe
cherchait elle-même sa voie. BAais l'enseignement socra-
tique chaneea ses habitudes, et lui fit adopter la prose
comme sa langue naturelle; toutefois, avant Socrate,
les derniers philosophes des aViciennes écoles, Heraclite,
Anaxagore, avaient composé des traités en prose, dont il
reste des fragments. A cette même époque écrivait Hip>
pocrate, que l'on peut nommer le philosophe de la mé^
decine, et qui fit dans cet art une réforme analogue à
celle de Soarate dans la philosophie. De l'école de Socrate
sortit toute une phalange d'écrivains philosophes, dont
les plus illustres ont été Xénophon et Platon. La vie
aventureuse du premier ne lui donna pas le loisir de se
livrer tout entier à la composition d'ouvrages purement
philosophiques; cependant plusieurs de ses écrits en ce
genre sont demeurés célèbres, et offrent cette clarté de
style et cet agrément dans la forme qui sont le caractère
de cette école. Platon, l'un des plus féconds écrivains de
la Grèce, adopta, pour exposer ses idées philosophiques,
la forme du dialogue, empruntée au thé&tre, et mit en
scène dans ses écrits les hommes les plus distingués de
son temps. Il* n'y a pas moins d'art dans la composition
de ces dialogues que dans les comédies du temps. Quelque
grave que soit le sujet, il y s un charme infini dans ces
ouvrages , et ce charme vient uniquement de la forme
dont l'art grec, qui vit tout entier dans Platon, a su les
revêtir. Les dialogues de Platon ont servi de modèles à
un grand nombre d'écrivains philosophes, soit à Rome,
soit chez les modernes; mais nul d'entre eux n'a pu les
égaler ; car cette forme du dialogue n'est admissible qu'à
la condition que les interlocuteurs ne soient pas des per*
sonnages abstraits, et qu'ils aient autant de réalité que
ceux de la scène. — L'œuvre de Platon est d'une diver-
sité infinie; celle d'Aristote, son disciple et son rival,
l'est également. Mais les écrits d'Aristote se présentent
sous la forme de traités, sous la forme didactique, la-
queUe est beaucoup moins littéraire que celle du dia*
logue. Si le style des œuvres d'Aristote était bien celui
de la littérature philosophique de son temps, la chuta
que ce genre aurait faite ne serait pas moins profonde
que rapide; mais on a lieu de croire que ce philosophe
avait rédigé fort peu d'écrits , et que ceux qui nous sont
venus sous son nom n'étaient que des notes du profes-
seur et peut-être même de ses élèves. — Son successeur
fut Théophraste, plus célèbre comme botaniste que
comme philosophe ; il est difficile de juger de la valeur de
ses écrits d'après les CarMtères qui. nous restent de lui;
car ce ne sont que des fragments épars d'un grand ou*
vrage perdu ; il y a dans ces morceaux plus de verve que
d'art ; ils ont eu le mérite d'être le point de départ de
La Bruyère. — A partir de cette époque les écoles phi«
losophioues ont suoordonné la théorie à la pratique, et
ont proauit un assez grand nombre de traita de morale,
presque entièrement perdus. Épicure, Zenon, Qéanthe^
ont été les modèles imités par les philosophes latins.
Après eux la Grèce n'a pas cessé de produire des écrits
philosophiques; mais, sprès le règne d'Alexandre, un
esprit nouveau se mêle a toutes ses productious ; c*wt
l'esprit oriental. ( V, A^jbjjmbue — Ëoole d'«)
GHB
998
GRE
H nous reste à dire quelques mots d*un genre secon-
daire qui a Jeté en Grèce un certain éclat. La littérature
sicilienne a produit Vldylle, dont les formes, dans Théo-
crite même qui en est le créateur, itont d*une Yariété
très-grande. Quoiaue venue dans un temps de déca-
dence et lorsque les idées de TOrient transformaient
déjà les lettres grecques, Tidylle, dans Théocrite, a le
charme et la gr&ce d'un tableau de çenre, d*un vase bien
dselé, ou d*un bas-relief de petites dimensions, mais d*un
travail fini. Bien et Moschos , ses successeurs, n*ont rien
i^outé aux qualités du genre, et le petit recueil de Théo-
crite, bien supérieur aux Éçlogues de Virgile , demeure
encore le modèle de la poésie pastorale et bucolique.
Le génie grec était alors dispersé dans tout le monde
tntique ; il avait ses centres partout, principalement à
Alexandrie. Là se donnaient rendez-vous toutes les idées,
toutes les doctrines, toutes les religions, toutes les lan-
gues. La critique et Térudition naquirent dans cette ville,
où les Ptolémées s*en firent les protecteurs et les propa-
«iteurs. Le Musée , inspiré par Démélrius de Phalèrê à
Ptolémée Soter, vers Tan 306, réunit des savants et des
professeurs de tout ordre. La flatterie inspira à des poètes
des œuvres de nulle valeur, comme les anagrammes à
Lycophron, les apothéoses de princes vivants à Calli-
maque. Le poème des Argonautiques, qui est une œuvre
d*érudition, et non une épopée, donne la mesure de ce
qui 86 produisait alors en poésie.
Il faut fhmchir le commencement de Tére chrétienne
pour trouver encore de véritables écrivains grecs, liais
dès lors un monde nouveau commence à naître : c*est
Rome avec sa puissante organisation , c'est l'Inde et la
Perse avec leur panthéisme symbolique, c'est la Judée,
la Phénicie et l'Égvpte, et bientôt c'est le christianisme,
qui , luttant avec les idées grecques proprement dites,
ou leur donnant par le mélange une nouvelle fécondité,
suscitent dans un monde décrépit des tentatives litté-
raires animées d'un esprit nouveau. F. Byzantine.
V. Fàbricius , Bibliotheca grmca , s$u notUia xcrtpto-
fum veterum grmcorum, 4705-28, 14 vol. în-4% ouvrage
réédité, mais sans avoir été achevé, par Harless, Ham-
bourg, 1790-1809, 13 vol. in-S*"; Schœll, Histoire de la
liitértUure grecque profane, Paris, 1813-1825, 8 vol.
in-8<»; C-O. MQller, Histoire de la littérature grecque
jusqu'au siècle d*Alexandref en allem., Breslau, 1841,
2 vol. in-8»; Bernhardy, Esquisse âje la littérature
grecquk», en allem.. Halle, 1838-1845, 2 vol. in-8»; Bode,
aistoire de la poésie grecque, en allem., Leipzig, 1838-
1840, 5 voL in-e*; A. Pierron, Histoire die la littérature
arecque, 1850, in-12; Munk, Histoire critique de la
langue et de la littérature de Vancienne Grèce, en an-
imais, Londres, 1850; C-O. MOller, G. -G. Lewis et D' Do-
naldson. Histoire de la littérature de l'ancienne Grèce^
en anglais, 1858, 8 vol. in-8<». Ev. B.
GRECQUB (Philosophie). La philosophie grecque com-
mence environ 600 ans av. I.-G,, et finit dans le vi* siècle
de notre ère. Antérieurement on avait eu les Sentences
des Gnomiques, mais sans aucun caractère spéculatif.
Dans son développement de 1200 ans, la philosophie
grecque se divise en trois grandes périodes : 1* depuis
Thaïes jusqu'à Socrate; 2« depuis Socrate Jusqu'à l'école
d'Alexandrie; 3^ la philosophie néoplatonicienne. La jpre-
mière période s'ouvre avec les écoles Ionienne et Italtque,
Les Ioniens ont pour chef Thaïes de Milet; après lui on
dte Anaximandre, Anaximène, et d'autres moins célè-
bres. Le principal caractère de cette école est d'avoir
conçu le premier prindpe uniquement comme matériel ,
sans tenir aucun compte des choses incorporelles, et de
n'avoir pas déterminé le principe du mouvement. Ne
s'attachant qu'aux phénomènes, elle n'admettait que
l'évidence donnée par les sens, et conduisait au fatalisme
(y. loNiBNHB — École). Anaxagore se distingue des phi-
losophes précédents en ce qu'il introduit l'intelligence
comme principe d'ordre, sans toutefois ôter à l'école son
caractère sensualiste. L'école italique, au contraire, au
lieu de s'arrêter aux phénomènes, ne considère que leurs
rapports; de là son double caractère mathématique et
astro'nomique. Aussi fut-elle entièrement spiritualiste.
Pour elle les nombres étaient les principes des choses,
c.-à-d. des causes. D est probable, car il ne reste rien
des premiers philosophes de l'école, qu'en disant que le
monde s'était formé à l'imitation des nombres, les Pytha-
goriciens voulaient dire que tout est sorti de la substance
primitive comme les nombres naissent de l'unité en
s'i^oatant sans cesse à elle-même. Dieu étant l'unité, la
pearfectiott consiste à s*en rapproche^; aussi l'àme est un
nombre, elle est immortelle et soumise à la métempsy-
cose. L'école d'Italie est de beaucoup supérieure à celle
d'Ionie par sa manière d'expliquer le système du monde
(elle admettait que le soleil est fixe au milieu des pla-
nètes), et par sa morale, qui suppose une sanction après
cette vie(K. PyruAGoaiGiBivnE — Ecole). Elle eut pour fon-
dateur Pythagore; les plus renommés après lui furent
Empédode, qui , le premier, admit plusieurs éléments ;
Épicharme; Archytas de Tarente, célèbre comme mathé-
matiden. Gette école trouva son dernier développement
dans celle d'Élée; en effet, Xénophane, et surtout Par-
ménide et Zenon d'Élée, en vinrent à nier toute réalité
matérielle, toute variété, et à ne plus admettre que l'unité
absolue (k. Él^tiqub — École). Cet excès, opposé à
celui des Ioniens qui n'admetudent que la pluralité,
donna naissance à une secte qui fut celle des Sophistes
{V,ce mot), Geux-ci, prenant les systèmes, démêlant
avec sagacité leurs côtés négatifs et leurs endroits faibles,
les opposant l'un à l'autre, arrivèrent par la confusion et
la contradiction à une sorte de négation universelle. Une
des conséquences de ce procédé était de porter atteinte à
la morale; la philosophie était menacée dans son avenir,
il lui fallait un sauveur; ce fut Socrate.
Avec lui commence la deuxième période. Il détourna
les esprits des hypothèses phvsiques et astronomiques,
matérialistes et idéalistes de l'ftge précédent. Il assigna
pour point de départ à la philosophie la connaissance de
soi-même ; de là le caractère essentidlement moral et
humain de sa doctrine. Il fut le premier moraliste, en ce
sens que, le premier, il enseigna une moralité qui con-
siste à faire son devoir pour le devoir. Enfin A donna
une méthode à la philosophie, et prépara ainsi son bril-
lant avenir. On vu naître après Im plusieurs écoles :
cdle de Mégare, qui se borna à déterminer le bien en
général , et à montrer que le fini ne pouvait être le vrai;
cdle de Cjrrène, qui se rattache à l'épicuréisme, et celle
des Cyniques, qui alla se fondre dans celle du Portique
{V. MéGARiENNE, CyrénaIque, Ctnique). Mals les véri-
tables écoles socratiques furent celles de Platon et d'Aris-
tote. Platon, fondateur de l'Académie, embrassa à la
fois la dialectique, la physique et la morale, en s'atta-
chant surtout aux données de la raison. Les notions par-
ticulières ne sont pour lui qu'un point de départ d'où il
s'élève, par la dialectique Jusqu'aux idées en elles-mêmes,
types éternds dont la réalité en ce monde n'est qu'une
infidèle image. Ces tdées ont leur raison d'être en Dieu,
en sorte que Platon considère la philosophie comme la
connaissance des choses quant à leur notion essentielle,
c-à-d. (niant à leur véritaole existence en Dieu , comme
dans l'onjet infini et universel des conceptions de la
raison. Au contraire, les notions que nous avons des
choses d'après la perception sensible et les simples phé-
nomènes de l'expérience sont des notions trompeuses.
Cette théorie, appuyée sur la réminiscence (V. ce mot),
supposait une vie antérieure où l'àme avait vu de plus
près ces exemplaires en Dieu. Comme pour Socrate, Dieu
est une Providence, organisateur et roi du monde; mais
Pjaton ne va pas Jusqu'à l'unité absolue des Éléates. S'il
est moins hardi sous ce rapport, il est plus moral ; il in-
troduit dans la philosophie grecque des idées qui ont fait
dire à S^ Augustin : « Si Platon et ses amis revendent au
monde, ils n'auraient à changer que bien peu de chose à
leur doctrine pour être chréaens » {V. Platonicieniib —
École). Platon n'est pas idéaliste; mais ses successeurs
immédiats Speudppe, Xénocrate, Polémon, Gratès et
Cranter conduisent l'Académie à l'idéalisme et au pytha-
gorisme. Après eux, Arcésilas, développant les germes de
sceptidsme cachés dans la doctrine platonicienne, fonda
la Moyenne Accuiémie, dont le principe était que la vé«
rite ne doit être considérée que comme une simple con-
viction personndle, une vraisemblance, en sorte que
l'homme est pour ainsi dire condamné à ne rien savoir.
Carnéade, en mitigeant un peu cette proposition, pré-
tendit qu'il n'y a aucun critérium de la venté ; la pensée,
modifiant l'objet, ne le laisse pas arriver Jusqu'à nous
tel qu'il esL Carnéade fût le chef de la Nouvelle Acek-
demie. On en compte une quatrième, sous la condT:dte
de Clitomaque,- qui proclama hautement l'impuissance de
rien comprendre. Bientôt après, sons Philon et Antio-
dius, elle revint au dogmatisme (V. AcAoéifiB).
Avec Maton , la philosophie grecque avait fût dim-
menses progrès, surtout au point de vue moral ; il en ftit
de même avec le fondateur du Lycée, sous le rapport
sdentifique. Si Aristote est un grand métaphysiden, il
est aussi un grand physicien ; avec lui l'esprit humain
trouve et formule les lois du raisonnement déductif. Il
en est de même de la poétique de l'éloquence et de la
GRE
999
GRE
poUtkme. AToe loi la philosophie devient réellemeiil la
sdoQoe des canaes et des premiers principes. L*îdée quil
B*est faite de la philosophie suffit pour montrer qu'il
n'est pas aensualiste. Elle est surtout la science de res-
sence, la oonnaiasance du but ou de la fin , et ce but,
c'est le meilleur en chaque choee ; mais pour lui ce même
but est quelque chose de réel , de concret, par opposition
k Vidée de Platon. Dieu est la cause, le pnndpe, mais il
n'est pas Providence. Du reste, Aristote paraît ne s'oc-
cuper que de choses particulières et ne traiter de Dieu ou
de rabsolu qu*à son tour, tout en reconnaissant qu'il est
œ qu'il y a de meilleur (V. PéaiPATÉnciBNNB — École).
Aristote n*est pas sensualista; mais son Dieu sans Provi-
dence, Tàme dont la personnalité ne survit pas au corps,
la préféreace qu'il donne au particulier et au contingent,
devaient conduira au sensualisme; c'est ce qu'on vit chez
ses disciples Théophraste, Dicéarque, Aristoxène, Straton
surnommé le Physicien. Avec eux, comme avec les de»-
ceudants de Platon , les grands systèmes dînèrent et
font place à l'Êpciuréisme et au Stoïcisme {V\ ces moU)^
environ 300 ans av. J.-C. Le premier, avec la physique
atomistique de Démocrite et d'Épicure, et sa morale de
l'intérêt et du plaisir, conduisait à l'athéisme en méta-
physique et à l'égolsme en morale. Le second , avec sa
morale rigide, fut l'expression de. l'héroïsme moral du
caractère socratique ; il subordonna l'intérêt au devoir ;
mais, en commandant à l'homme de vivre selon la na-
ture, il méconnut les droits de la sensibilité. Ces deux
écoles, environ un siècle avant notre ère, introduisent la
philosophie erecque à Rome ; Cicéron y représenta l'Aca-
démie, Lucrèce 1 Épicuréisme, et Sénèique le Portique ; à
Rome, la philosophie fut classique comme la littérature.
Quand la philosophie semble s'éloigner de la Grèce,
c'est à Alexandrie qu'U faut la suivre. Mais, avant ^'ello
s*^ montrât avec un nouveau caractère, le scepticisme
apparaît comme un résultat du conflit des systèmes an-
térieurs. IM^à il s'était annoncé avec Pyrrhon (340 av.
J.- C), mais c'était trop tôt. Le vrai scepticisme s'établit
avec toute sa puissance dans la personne d'QEnésidème,
qui en fit un système régulier, es lui donnant des prin-
cipes et une méthode. Par là il mit en question toute
crojrance et toute réalité. Ce système fut continué par
A^ippa et Sextus Empiricus. Le procédé général de
l'école consistait à opposer les idées sensibles aux con-
o^tioDs de la raison, pour arriver au doute par la contra-
diction. De là cette formule qui résume tout le scepticisme
pratique de l'antiquité: « Pas plus i'un qu^ l'autre, ovdcv
itôXXow. •
Tel était, deux siècles après J.-C, l'état de la philoso-
phie grecque. Alexandrie avait succédé à Athènes; elle
était devenue le foyer des sciences et des lettres. Les dif-
férents systèmes de philosophie s'y rencontrèrent et de-
vinrent une cause de scepticisme ; mais ce dernier sys-
tème ne pouvait pas satisfaire l'esprit humain ; de là na-
quit l'école d'Alexandrie; son premier caractère fut
réclectisme, ou plutôt le syncrétisme. Elle voulut en
efiet tenter la conciliation entre les différents systèmes,
et surtout entre Platon et Aristote; mais, çr&ce à l'in-
fluence de l'Orient et des idées religieuses qui occupaient
alors les esprits, un second caractère vint dominer le
premier, ce fut le mysticisme. Expliquer la nature di-
vine et la manière dont elle se manifeste, s'élever par
Textaae au-dessus des données de la raison, t^ était
l'objet principal de la nouvelle école, qu'on appela aussi
NéopUUamcienne. Avec Plotin et Porphyre elle reste
dans les limites d'un mysticisme qui n^ rien d'extrava-
gant; mais avec Jamblique et ceux qui viennent après
lui, elle tombe du mysticisme dans la théurgie, elle pra-
tique révocation, elle lait des miracles. Avant de perdre
le droit de narler au nom du paganisme, la philosophie
grecque revint aux lieux où elle avait longtemps bnllé,
et jeta un vif et dernier éclat à Athènes dans la personne
de Ftodns. Bientôt k» portes de l'école furent fermées
par un édit de Justiniea, en 529 (F*. Alixanosib -*
École d'}.
Cçtte philosophie, qui se développa dans un si long
espace de temps, survécut à la nationalité grecque, sur-
tout les doctrines de Platon et d'Aristote, qui se mon-
trèrent dans la civilisation arabe, et qui exercèrent une
influence incontestable et souvent utile sur la civilisation
moderne. Outre les historiens de la philosophie, Brucker,
Hedemann, Stanley, Tennemann, Degérando, Bitter,
F. Bedurehes sur tes opmioiu, la théologie ei la pfctJo-
Mpàfs dês plus anciens peuples, et surtout des Grecs,
jusqu'au temps d^ Aristote (aUem.), in-8% Elbing, 1785;
AoéenoOt us philosophie de VaincwMe Grèce (angL),
in-8% Londres, 1701 ; Sacchi , Storia délia fUosofia grecé,
4 vol. in-«°, Pavie, 1818-1820. B.
GRECQUE (Beligion). L'étude dé la religion des anciens
Grecs présente de graves difficultés, et les savants n'ont
pu se mettre d'accord sur les questions qu'elle soulève.
La Grèce n'eut Jamais de livre sacré, de symbole, de sa-
cerdoce organisé pour la conservation des dogmes ; les
poètes et lia artistes furent les véritables théologiens, et,
la notion des divinités étant à peu près livrée à la concep-
tion arbitraire de chacun, la religion n'eut Jamais de
traits précis et arrêtés. Pourtant Hésiode, dans sa Théfh
gonie, a systématisé les principales idées éparses dans la
Grèce, et âabli un ordre chronologique dans la succession
des dieux.
Les dieux et les déesses, qu'on adorait en nombre
presque infini, ne seraient, d'après une o|Mnion repré-
sentée déjà dans l'antiquité par Évhémère, que des êtres
ht: mains déifiés après leur mort à cause de leurs exploita
ou de leurs vertus, et il ne faudrait voir dans les mythes
que des faits historiques altérés par l'ignorance populaire
et embellis par la fantaisie des poètes. D'autres mytho-
logues, et c'est le plus grand nombre, regardent les dieux
de la Grèce comme la personnification des éléments, des
agents physiques, et croient découvrir sous le voile de la
Fable l'expression figurée du rôle que les phénomènes
naturels Jouent dans l'univera. Divisés quant aux idéet
dont les divinités grecques étaient l'expression, les sa-
vants le sont également sur la question de l'origine ou de
la provenance de ces divinités : naquirentpelles sur le sol
de la Grèce, ou n'ont-elles été que des transformations ds
divinités apportées soit de l'Asie occidentale, soit de
l'Egypte? L'impossibilité de distinguer les traditions po-
sitives d'avec les créations de l'imagination poétique, les
contradictions fréquentes qui existent entre les mythes,
les modifications que ces mythes ont dô subir suivant
les temps et les lieux, tout concourt à jeter de l'obscurité
sur cette matière.
Un fait incontestable, c'est que les divinités grecques
peuvent se ramener à deux classes: i<^ celles qui, d\)ri-
gine pélasgique , et suivant toute vraisemblance, appor-
tées de l'Asie, furent reconnues et honorées dans toute la
Grèce ; 2« celles qui natpiirent des idées et des croyances
particulières à telle ou telle peuplade, et dont le culte,
primitivement propre à certains cantons, se répandit de
proche en proche dans les autres, par suite des rapporta
fréquents qui existèrent entre les habitants de la Grèce ;
oda explique la variété c|u'on rencontre dans les carac-
tères des diverses dirinités, dont on confondit souvent
tes attributs , et dans les cérémonies célébrées en leur
honneur.
Les plus anciens habitants de U Grèce, les Pélasges,
que l'ethnologie rattache à la race indo-européenne,
et qui rinrent d'Asie en Europe à une épooue très-
reculée, eurent un certain nombre de grandes divi-
nités, qui se placèrent plus tard à la tète du panthéon
hellénique, Zeus (Jupiter), Hèra ( Junon), Ares (Alan),
Vesta ou Hestia, Bermès (Mercure), Patios ou Athéné
( Bfinerve). Le culte de Zeus conserva longtemps son im-
portance à Dodone en Épire. Celui d'Hermès fut surtout
en vigueur chez les Arcadiens. En Crète et à Samothraoe,
la religion demeura dans un rapport étroit avec celles dé
l'Asie occidentale, de la Phénicie, de la Syrie. Hérodote
prétend que les Pélasges ne donnaient d'abord ancnn
nom à leun divinités; des colonies égyptiennes leur
auraient apporté les dieux qu'ils adorèrent plus tard el
et qu'ils transmirent aux Hellènes. Mais aucun fait po-
sitif n'établit qu'il y ait eu , dans ces temps reculés, des
relations entre l'É^te et la Grèce; les noms des cÛeux
pélasgiques n'existent pas dans le panthéon égyptien , et
les ressemblances d'attributs qu'on pourrait trouver entra
ces dieux et certaines divinités égyptiennes s'expliquent
par l'identité du principe sur lequel reposaient les an**
tiques religions, la personnification des forces de la na-
ture. Le berceau des. dirinités pélasgiques doit plutôt être
placé dans l'Asie occidentale, ou du moins quelques-uns
de» mythes dont se composait leur histohre autdnt été
empruntés aux dieux de ce pays.
Aux éléments pélasgiques de la religion grecque s'i^oup
tèrent deux autres ordres de dirinités. D'abora, des «►
lonies venues de Phénicie, de Syrie, de Phrvgie, etc.,
apportèrent directement leure dieux, qui se mêlèrent pen
à peu à ceux des anciens habitants de la Grèce. Ensmte,
la religion se développa de bonne heure conforméniont
au génie particulier de diaque contrée et de chaque
tribu hellénique : des cultes et des rites locaux se for-
mèrent en Thessalie, en Béotie, à Samoa, à Bhodes, eto..
URE
1000
GRE
et c*est là principalement qu'il faut chercher les origines
da polythéisme çrec.
Le culte des héros acheva d'imprimer à ce polythéisme
une physionomie distincte. Sous ce nom de héros on com-
S rit les individus nés d'un dieu et d'une mortelle, comme
ercule, ou d'un mortel et d'une déesse, comme Achille,
et tous les personnages des temps fabuleux, chefs de
races on de migrations, fondateurs de villes, protecteurs
de cités et de familles, vainqueurs de bètes féroces, bien-
faiteurs de leurs semblables. Des mythologues ont vu à
tort dans quelques-uns de ces héros, tels qu'Hercule,
Persée, Jason, etc., des divinités de l'Orient défigurées
par le génie grec : si Ton a transporté sur leur tète cer-
tains mythes relatifs à des dieux asiatiques, ces emprunts
furent tardifs.
Vanthropomorphisme (F. ce mot) a été enfin un des
caractères essentiels du polythéisme. Les Grecs finirent
par déifier tous leurs penchants* bons ou mauvais ; en
sorte qu'en adorant leurs dieux, ils adorèrent leur propre
humanité. Les appétits grossiers, l'amour des combats, la
vengeance, eurent, dans l'Olympe, des représentants
aussi bien que la justice et la piété. Les simulacres
mêmes des dieux furent faits à l'image de l'homme, et
les artistes cherchèrent à leur donner l'idéale perfection
du corps humain. Dès le temps d'Homère, les dieux ne
le distinguaient des hommes que par des organes plus
parfaits, une plus haute stature, une voix plus puis-
sante ; une nourriture diviqe éternisait leur vigueur et
leur Jeunesse ; ils avaient en outre la faculté de revêtir
à leur gré toutes les formes imaginables, depuis le cor|>8
subtil et impalpable des météores Jusqu'à celui des ani-
maux.
Cest du VII* et du vi* siècle avant l'ère chrétienne que
date l'importation des dogmes étrangers, qui a dénaturé
le polythéisme hellénique. Les relations avec l'Asie de-
vinrent fréquentes; les écoles pythagoricienne et platoni-
cienne essayèrent tour à tour d'assimiler entre eux les
dieux honorte chez les afférents peuples, afin de réunir
les éléments vraiment religieux qui existaient dans ces
cultes divers; le peuple grec attribua les noms de ses di-
vinités aux divinités étrangères qui avaient avec elles
quelque ressemblance, et ml* sur 16 compte de ses propres
dieux les fables dont les dieux étrangers étaient l'objet.
€e syncrétisme atteignit ses derniers développements à
l'époque de l'école d'Alexandrie, qui voulut opérer une
fusion complète entre les religions de l'Asie, de l'Egypte
et de la Grèce. Alors aussi on prétendit donner aux
m^es paiens un sens et une portée qu'ils n'avaient cer-
tainement pas; on fit de ces mythes autant d'expressions
figurées des phénomènes naturels, des révolutions astro-
nomiques. Le polvthéisme fut ainsi totalement dénatmré,
et ceAui qui le jugerait d'après les derniers éorivains
greca s'en ferait l'idée la plus fausse. Au temps des
Alexandrins, le polythéisme n'avait plus de rapport avec
la religion d'Homère, d'Hésiode et de Pindare; les fables
anciennes n'étaient plus que des allégories; les rites
seuls étaient conservés, parce qu'ils constituaient géné-
ralement pour le peuple toute la religion, et que les phi-
losophes cherchaient à s'appuyer sur la tradition pour
disaimuler la nouveauté de leurs idées; la religion n'était
plua qu'un attachement routinier et inintelligent à des
oMmonies ridicules ou surannées.
Au reste, en défigurant le polythéisme, la philosophie
en teura la doctrine. Le culte de divinités conçues comme
de amples et imparfaites créatures, l'emploi de simu-
lacres qui faisaient confondre l'être adoré et le signe
sensible destiné à réveiller son souvenir, engendraient la
superstition, et, chez le peuple du moins, le polythéisme
* dégénérait en idolâtrie. Aucun dogme précis, aucune
liturgie réglée par un corps sacerdotal, aucun enseigne-
ment moral, ne réprimaient les dérèglements auxquels
lonnaient lieu, par exemple, les fêtes de Vénus, d'Ado-
nis, de Bacchus; les Mystères eux-mêmes, institués sans
doute pour l'instruction des initiés, dégénéraient en cé-
rémonies licencieuses, dont le secret ne faisait qu'as-
■mer l'impunité. En un mot, le polythéisme avait des
excitations pour tous les penchants vicieux ; il livrait
l'homme à toutes ses passions. La philosophie essaya de
corriger les croyances dépravantes par un enseignement
capable de soustraire l'homme à leur Joug; elle repré-
senta comme des fables les actions criminelles ou obscènes
une Ton mettait sur le compte des dieux, ou leur donna
des Interprétations qui en faisaient disparaître l'immora-
lité et l'indécence.
V. Woslcker, Sur la tnythologte des peuples [apéttques,
tr. allem^ Glessen, i824, in-lf ; Fréd. Greuzer, Symbo-
lique des religions de VantiquUé, trad. en français par
M. Guigniaut; O. MQller, Prolégomènes d*une Mythologie
scientifique^ en allem., 1825 ; Lobeck, Âglaophamus, sive
de theologiœ mysticœ Grœcorum causis, Kœnigsberg,
1829, 2 vol. in-8<*; Ph. Suttmann, Le Mythologue, ou
Recueil d'études sur les croyances des Anciens, en allem.,
Berlin, 1829, 2 vol. in-8«; Bœttiger, Idées sur la Mytho-
logis de l'Art, en allemand, Dresde, 1836, 2 vol. in-8*;
E. Jacobi , Dictionnaire de la mythologie grecque et ro^
maine, en allem., Leipzig, 1847,2 vol. in-8®; Alfred
Maury, Histoire des religions de la Grèce antique, 1857 et
suiv., 3 vol. in-8**.
GRECQDB (Architecture). De tous les arts du dessin
pratiqués et perfectionnés par les Grecs, l'architecture a
été le plus idéal, c-iMl. celui qui s'est le plus détaché
des conditions de la matière et des passions qu'elle sug-
gère. Née de l'utile, elle s'en est bientôt détachée ; opé-
rant avec le bois et la pierre, elle les a peu à peu cachés,
au point de les faire disparaître aux yeux du spectateur
pour ne lui présenter que des formes pures et immaté-
rielles. Dans la période de sa décadence, cet art n'a
Jamais fait reparaître la matière dont il s'é^t affranchi ,
et c'est plutôt par l'abus de la forme qu'il s'est éloigné
de sa propre perfection.
Cest une opinion exa^rée et exclusive de faire dériver
toute l'architecture des Grecs de primitives constructions
en bois, et de l'opposer par ce cèté seul à celle des Égyp-
tiens, qui n'ont pas, eux non plus, emprunté leun mo-
dèles uniquement à d'antiques maisons en pierres. La
voûte telle que les Grecs l'ont pratiquée, à une époque
fort ancienne, ne dérive nullement d'un échafaudage de
bois, non plus que les murs des villes, dont les formes
les plus antiques existent encore et ne supposent que la
pierre. Toutefois, les plus beaux édifices de la Grèce, ses
temples, ses thé&tres, ses portiques, ses odéons présentent
des formes évidemment issues de la maison ae bois, de
même qu'en Egypte les édifices d'un genre analogue ne
supposent l'emploi de cette matière que dans quelques-
unes de leurs parties accessoires.
De bonne heure l'architecture, dont les conceptions
sont géométriques, s'annexa deux arts qui lui sont natu-
rellement étrangen, mais qui peuvent ajouter beaucoup
à l'effet idéal des édifices, la sculpture et la peinture.
Mais, jusque dans les dernière temps, les sculpteure et
les peintres subordonnèrent leur conception et leur tra-
vail à l'œuvre de l'architecte; et les ouvrages d'un goût
médiocre que produisit l'âge de la décadence conservèrent
ainsi leur unité et leur ensemble. Ce principe se retrouve
appliqué avec rigueur dans l'art grec tout entier, qui sut
toujoura subordonner la partie décorative d'une œuvre à
l'osuvre elle-même.
Les plus anciens monuments que la Grèce nous ait
laissés se rapportent à l'art de la guerre : ce sont des
mure pour encelndre des villes ou fermer des isthmes
et des défilés ; ils sont connus sous le nom de murs cy-
clopéens. Ces constructions sont l'œuvre des Pélasges, la
plus ancienne migration asiatique dont l'histoire grecque
fasse mention. L'Arcadie et TÉpire, moins mêlées que
d'autres provinces aux guerres ultérieures, en conservent
de grands exemples ; mais le sol de la Grèce, dans toutes
ses parties, est couvert de ruines pélasgiques; l'Asie Mi-
neure en renferme un grand nombre; l'Italie, la Sicile,
le Sud de la France, les lies de la Méditerranée en offrent
assez pour que l'on puisse constater le grand développe-
ment de la race pélasgique autour de cette mer, sur les
rivages du Nord. Les mure cyclopéens sont formés de
blocs de pierre énormes, entassés les uns au-dessus des
autres, sans ordre apparent, sans liaison. Les plus an-
ciens ne portent aucune trace de travail humain; les
angles des pierres y ont leun formes naturelles et pri-
mitives ; ces fornies seules, en s'adaptant grossièrement
les unes dans les autres, ont déterminé la place que le»
constructeun leur ont donnée. Tels sont les mura de Ti-
rynthe en Argolide, le mur qui fermait l'isthme de Go-
nnthe, etc. Plus tard, les arehitectes pélasges firent
tailler avec soin les angles de ces pierres colossales, de
manière qu'elles ne laissassent point de vide dans leura
Jointures; c'est ce que l'on nomme des constructions po-
lygonales. Tels étaient les mure cyclopéens de Mycènes. Il
ne semble pas, du reste, que ces deux manières de con-
struire se soient positivement succédé l'une à l'antre ;
lorsque Ton taillait les blocs dans certaines parties du
monde pélasgique, on bâtissait encore en pierres brutes
dans certaines autres. Mais doit-on aussi attribuer aux
Pélasges, à cet ftge primitif de l'architecture antique, les
constructions où les pierres sont carrées et dia^posées ei>
GRE
1001
GRE
ittim? Nous ne le pensons pas; et cest de cette con-
itniction régaliëre que nous datons Tarcbitecture hellé-'
niqite, La majeure partie des ruines de Mycènes appar-
tifsnt à cet âge, où Ton trouve déjà les portes en trapèze
et la sculpture unie à Tart de b&tir (Porté dês Lions). La
période des temps héroïques est la première en ce genre;
elle a laissé de tr^beaux monuments dont plusieurs
sobsistent encore; le Trésor des Atrides, ap[>elé aussi
Tombeau d^Agamemnon, k Mycènes, est le mieux con-
servé de tous. Cet édifice souterrain est formé d'assises
drcnlaires superposées et de plus en plus étroites; de
aorte qu*il a la forme d'une voûte, mais sans clef; c'est
l'eaoK'bellement proprement dit. A cette époque se rap-
portent les descriptions architectoniques données par
Homère; le sol occupé jadis par les Grecs en offre encore
de nomlMPeux débris.
On ne peut fixer la date deVapparition des ordres dans
le monde grec; on peut dire seulement qu'ils se sont
succédé, et que le plus ancien est Vordre doriqtte. Le
temple dorique est manifestement conçu à Timage de la
maison de bois, dont il reproduit toutes les parties dans
leurs moindres détails. Le vaoç, en effet, est la maison de
la divinité, dont la statue y est conservée, et qu'elle-
même Tient quelquefois habiter en personne ; le peuple
D'y pénètre pas; les serviteurs du dieu seuls y sont ad-
mis. Les premiers temples doriques ont encore la lour-
deur des anciens temps : colonnes courtes et massives,
souvent monolithes, chapiteaux saillants, énormes ar-
chitraves. Mais les éléments essentiels de l'architecture
hellénique s'r trouvent déjà : simplicité des rapports
entre les parties, nombre restreint des membres, grandes
lignes plus ou moins infléchies autour d'un axe vertical
ou dans le sens de la courbure de la terre, portes hautes
en trapèze, colonnades détachées des murs, longues per-
spectÎTes adoucies, cannelures larges et en petit nombre,
peinture plate sur toutes les parties de l'édifice, orne-
ments courants, sculptures aux frontons, aux métopes, et
en frises continues au haut des murs, caissons profonds
et om6s sous les colonnades et à l'intérieur du temple.
A cet Age appartiennent le temple de Némésis à Rham-
nonte et celui de Corinthe; celui de Junon à Olympie
était de la même époque, mids il est détruit.
\Àordrt tonique parut à une époque qu'il est impossible
de fixer, mais qui est certainement antérieure à l'année
580 av. J.-C Les colonnes à bases, avec volutes au char
pitean, le distinguent de Tordre dorique; mais cette pre-
mière différence, unie à la légèreté du fût, en entraîne
d'antres dans toutes les parties de l'édifice. L'élégance
ornée caractérise cet ordre, moins essentiellement grec
que le précédent, et qui ne prit un grand développement
rdans les temps postérieurs. Nous voyons toutefois que,
s les édifices fort anciens, l'ordre ionique était em-
ployé à l'intérieur, même avec de grandes dimensions.
Le temple de Diane k Éphèso était. entièrement ionique,
et ne date cependant que du commencement du vi* siècle ;
l'art de tailler la pierre et la science des formes étaient
donc déjà fort avancés à cette époque {V, Grecque —
Sculpture). — La seconde moitié du vi* siècle et la pre-
mièiê du v* ont été marquées par un progrès rapide de
tous les arts, des lettres, et en général do la civilisation
b^^iqne. Toutes les formes architecturales se perfec-
tionnent, deviennent plus élégantes, plus gracieuses ; le
iond reste le même et constitue la tradition, mais la lour-
deur disparaît sans que la force diminue; l'harmonie,
reurythmie, sont l'objet d'études savantes, soutenues
par un goût de plus en plus épuré. Quand on mesure la
distance qui sépare les édifices de Sélinonte, d'Agrigente,
^Êgine, de Pœstum et d'Assos, des commencements du
siècle de Périclès, on comprend le chemin parcouru par
les architectes et les sculpteurs dorant cette période.
Cest de ce temps que semblent dater les colonnades in-
lérioires, soit simples, soit superposées, et la grande
ouverture centrale des temples hypèthres. Tonte la Grèce
est couverte de ruines appartenant à cette période. Les
édifices étaient de pierre; mais cette matière disparaissait
sous un stnc janne d*une finesse et d'un éclat incompa-
rables. Cest alors que la matière disparaît entièrement à
rœil, et ne laisse plus au spectateur que l'impression des
formes les plus splendides et les plus harmonieuses. Les
édifices saoés, le plus cuvent élevés au sommet des
coUines, se détÎM^haiênt au soleil sur le fond lumineux du
dd bleu, et présentaient vraiment aux fidèles l'image de
la demaure des dieux. Cest durant cette période aussi
que commencèrent à s'élever des édifices utiles, comme
les canaux et tes aqueducs. Les th^tres sont de la pé-
riode suivante. •— I/invasion des Perses causa dans la
Grèce une sorte de révolution, qui se fit sentir aussi bien
dans les arts que dans la politique; la dévastation des
cités détruisit un grand nombre d'édifices religieux ou
militaires d'une date souvent assez récente et qu'il fallut
relever. Le développement politioue et maritime d'Athènes
fit affluer dans cette rille les ricnesses du monde grec, et
lui permirent de sortir de ses cendies avec une magnifia
cence inconnue aux temps postérieurs. L'art était alors
dans toute sa force et touchait à sa maturité. On refit en
marbre, avec une perfection k peine croyable pour nous,
les édifices de pierre dévastés. Les temples, les théâtres,
les Odéons, les Propylées, les portiques ont été construits
dans toute leur beauté noble, granoiose et élégante, avec
toutes les ressources des arts accessoires, à partir de
l'administration de Cimon, et jusqu'à la prise d'Athènes
par Lysandre en 404. Les quarante années de l'adminis-
tration de Périclès ont vu l'architecture s'élever à son
idéal le plus par&it. De Cimon date le temple de Thésée
à Athènes, ouvrage d'une rare élé^ce. Mais un homme
d'un génie supérieur, Phidias, imprima à toutes les
œuvres architecturales de ce temps un caractère de
beauté qui n'a point été égalé depuis : la force sans
lourdeur, l'élégance sans affectation, l'idéal soutenu par
une incroyable science de la statique et des proportions.
Les lignes droites ont entièrement disparu; il n'y a plus,
dans ces édifices qui semblent carrés, aucune surface ho-
rizontale ou verticale sur laquelle une ligne droite puisse
s'appliquer; tout est courbe, du pavé au faite; les murs,
les colonnes, sont inclina avec une science infinie;
l'effet risuel est calculé dans ses plus, petits détails. La
solidité n'a jamais été ménagée avec autant d'art que dans
les œuvres de ce temps. Sous la direction de Phidias, le-
tinos éleva le Parthénon, Mnésiclès les Propylées. Toutes
les constructions de ce temps nous montrent l'art de
b&tir dans sa perfection : grands blocs de marbre égaux
ou symétriques, reproduisant pour leur part les courbes
et les inclinaisons dans lesquelles ils sont compris ; nul^
ciment pour les Joindre ; surfaces polies s'adaptant au
{>oint de devenir indiscermd>les; nul glissement possible,
es courbm et les pentes étant combinées en vue de la
solidarité des parties et de l'unité compacte du tout. Ces
beaux temples de marbre blanc n'en étaient pas moins
couverts du stuc orangé traditionnel; car, pour être le
plus parfait des matériaux, le marbre n'en est pas moins
une matière, que l'art tout idéal des Grecs devait s'atta-
cher à faire disparaître. La sculpture, dont Phidias est à
cette époque le plus illustre représentant, apporta son
concours à la décoration des temples : les frises du Par-
thénon sont les plus grandes œuvres de sculpture que
nous ait laissées l'antiquité; mais elles étident de beau-
coup surpassées par la statue même de la déesse, toute
d'ivoire et d'or, œuvre de Phidias. Sous l'impulsion don-
née par cet artiste et par Périclès, la Grèce se couvrit
d'ouvrages d'architecture d'un caractère grandiose et
d'une richesse tout idéale. On n'éleva pas seulement
des temples, mais aussi des théâtres de pierre contenant
Jusqu'à 150,000 spectateurs, des portiques ou galeries
couvertes ornées de colonnes et de peintures, des salles-
de musique, des hippodromes à gradins, divers ouvrages-
d'utilité publique.
La guerre au Péloponèse, le règne de l'oligarchie, la
prise d'Athènes par Lysandre, la tyrannie des Trente,
ruinèrent une ville dont la peste avait déjà démoralisé
les habitants. L'esprit public se détourna de rintérèt de<
l'État vers les jouissances individuelles. L'architecture se
mit, ainsi que les autres arts, au service des particuliers,
et leur éleva des midsons qui rivalisaient avec les temples
des dieux. On construisit fort peu d'édifices publics de-
puis 404 jusqu'à la bataille de Chéronée; mais les villes-
étalèrent un luxe inconnu aux temps antérieurs; non*-
seulement on abattit les maisons anciennes pour en
élever de nouvdles, mais les rues devinrent plus larges-
et plus régulières. Le Pirée fut rebâti de la sorte, ainsi
queSybans ou Thurii et d'autres cités, soit en Grèce,
soit dans les colonies.
La battue de Chéronée introduint dans le monde*
grec l'esprit macédonien, positif et pratique, et A'envîsa-
geant l'art et Ja littérature que comme ornements d'un
règne ou moyens de gouvernement. Mais l'extension de la
civilisation hellénique vers l'Orient à la suite d'Alexandre
le Grand, et la fonoation des royaumes grecs de l'Asie et
de l'Egypte, ouvrirent un champ immense à l'actirité des
artistes. Des édifices grecs, temples, palais, villes en-^
tièrps, fiirent élevés par des arcnitcctes venus pour la
plupart d'Athènes, ou du moins inspirés par l'art athé^
nien. La réaction de l'Oriont sur cet an fut à oeine aen-
GRE
1002
GRE
dble; car le goût de la magnificence existait, comme le
eonatate Démoathène, avant môme la bataille de Chéronée.
Mais les ricbesaes de VAsie, rabondance et la variété des
matériaux, le travail peu coûteux de masses popolaires ha-
liitaées à une obéissance passive, mirent entre les mains
des princes et des artistes des moyens d'une puissance
Jusque-là inconnue. On doit ajouter aussi que le progrès
npide des sciences, sous Tinfluence de Tesprit nouveau,
créa des méthodes et des Instruments perfectionnés pour
élever rapidement et à moins de frais d'immenses édi-
fices. Les Séleucides, les rois de Pergame, les Ptolémées,
rivalisèrent de sèle et de magnificence ; mais les exigences
personnelles de maîtres enivrés par leur opulence n'exer-
cèrent pas toujours une influence favorable sur Tart des
architectes; on sacrifia beaucoup aux commodités d'une
▼ie pleine de mollesse. C'est sous ces influences combi-
nées que s'éleva de toutes pièces la ville d'Alexandrie,
dessinée et construite par Dinocrate, et qui fut un mo-
dèle pour les temps postérieurs. Antioche ne le céda en
rien à Alexandrie pour la régularité de son plan et la
splendeur des habitations particulières. A cet extérieur
magnifique répondait une décoration intérieure pleine de
5 oui et d'élégance, en même temps <}ue de richesse et
'éclat. Toutefois, cette profusion venait en grande partie
-d'une passion souvent désordonnée pour le luxe et les
plaisirs, et d'une ostentation plus uivorable aux archi-
tectes qu'à l'architecture : car les grands hommes qui
■avaient élevé le Parthénon et décoré les Propylées ne re-
cevaient qu'une rétribution minime pour leur travail;
eeux, au contraire, qui travaillaient à satisfaire le poflt
des princes et de» particuliers s'enrichissaient; mais le
•caractère idéal de leurs couvres s'abaissent avec le but à
atteindre, ils ont élevé en majeure partie des édifices
■sans nom. — Cest pendant cette période que se développa
dans toute sa richesse l'ordrv corinthien, moins élésant,
mais plus somptueux que l'ionique. C'est lui qui fut
adopté de préférence dans les siècles qui suivirent.
. lÀ conquête de la Grèce par les Romains et la soumis-
sion de l'Asie et de l'Afrique concentrèrent dans Rome
la puissance politique et les trésors de ces riches contrées;
sous cette autorité nouvelle, les arts de la Grèce conti-
nuèrent à régner exclusivement. L'originalité puissante
•de l'architecture hellénique avait soumis l'esprit macédo-
nien, résisté aux influences dissolvantes de l'Asie, dressé
*des dtte grecques en Égjrpte à côté de villes bâties sur
un tout autre modèle; elle soumit encore l'esprit romain,
en se mettant à son service. Cest donc encore son hte-
toire qui se continue. Jusqu'à la fin de l'Empire, où elle
devient l'architecture byzantine. L'utile, soit dans la vie
privée, soit dans la vie publique, domine l'architecture
au temps des Romains; mais ce principe est appliqué
d'une manière grandiose et qui ne souffre rien de mes-
quin; quoique l'art de bâtir n'ait Jamais produit sous les
empereurs rien de comparable au Parthénon, cependant
les constructeurs grecs employés par eux ont laissé des
édifices très-solides et parfois d'un grand caractère. L'ar-
•cade avait à peine paru dans les édifices grecs des temps
antérieurs ; elle prend une importance majeure dans cette
dernière période; elle a pour conséquence naturelle la
voûte et le dôme, et pour complément les piliers rempla-
•^ant les colonnes. L'addition ne colonnes, soit détachées,
eoit engafldes, à l'extérieur de ces édifices, produisit un
mélange de formes dont le goût du temps de Périclès
n'eût pas été satisfait : mais ce mélange provenait du be-
aoin de rendre plus légères en apparence les formes
Itmrdes d'arcades portées sur d'énormes piliers. C'est ce
même besoin qui lit naître le chapiteau composite, mé^
lange plus riche encore que le corinthien , mais d'qne
eempositioa toi^ours difficile et rarement heureuse. Les
jprandes dimensions des édifices, composés de plusieurs
^Stages, suggérèrent l'idée de placer les ordres les uns au-
dessus des autres, en commençant par le plus simple;
mais à l'ordre donque,qui n'a point de base, fut substitué
I9 toscan, plus en harmonie avec le genre des nouvelles
•constructions. Tels sont les membres principaux auxquels
se reconnaissent les ouvrages nés sous l'influence du
génie romain. On en éleva dans tout l'Empire, depuis
Tépoque de la conquête, et principalement sous Auguste
•secondé par Agrippa, sous les FUviens et sous les Anto-
nins. Les constructions romaines, que les Grecs d'autre^
Ibis avaient à peine pratiquées ou même entièrement
ignorées, sont surtout les thermes, les aqueducs, les arcs
•de triomphe» les amphithéâtres, les basiliques. La sran-
'daur de ces constructions n'eût pas permis d'y appliquer
r«rt infini du Parthénon ; il fallut donc recourir à des
4Boyena plus économiques : de là l'usage universel alors
de la brique ou des petites pierres carrées à l'extérieur
des murs comme revêtement, et du mortier Jeté à l'inté-
rieur avec des débris de toute forme et se prenant en une
masse unique et presque indestructible; de là aussi l'em-
ploi de pierres de taille dont l'extérieur n'est que dégrossL
— Quant à la valeur architecturale des constructions de
l'Empire, elle est en général tr^petite 1 les membres,
empruntés aux ordres grecs, ne servent plus <(u'à dissi-
muler la lourdeur des formes réelles des édifices; ces
membres, on les modifie, on les accouple, on les engage,
on les superpose, ou bien on s'en sert commode points
d'attache à des ornements étrangers, de manière qu'ils
perdent entièrement leur signification et leur valeur ar-
chitectonique. Par cet abus qui prodigue la variété sous
tant de formes, on tombe réellement dans une déplo-
rable uniformité. Cest par ce mélange arbitraire de toutes
les conceptions antiques que finit l'architecture grecque.
Elle avait commencé par dos formes herculéennes; sous
Périclès, elle avait atteint son point de maturité, forte,
gracieuse, naturelle, idéale ; elle périssait sous le poids
de la richesse, du bien-être et du luxe, accablée par ses
ornements.
K. J.-D. Leroy, Les ruines des plia beaux monumenti
de la Grèce, Paris, 1753 et 1770, in-fol.; Hugues dit
d'Hancarville, Recherches sur les arts de la Grèce, Lon-
drea, 1785, 3 vol. in-8* ; Stieglitz, L'Architecture des Ati"
ciens, en allem., Leipzig, 1706, in-^; le même, Archéo-
logie de l'architecture des Grecs et des Romains, Weiniar,
1801, 3 vol. in-80 ; Meiners, Histoire des arts de la Grèce,
Paris, 1798, 5 vol. in-8*; Winckelmann, Histoire de
l'art dans l'antiquité, Paris, 1802, 3 vol. in-4«; J. Stuart
et N. Revett, Antiquités d^ Athènes, ouvrage traduit de
l'anglais par Feuillet, Paris, 1808-1822, 4 vol. in-fol. ;
Lebrun , Théorie de l'architecture grecque et romaine ,
Paris, 1807, in-fol.; J.-G. Legrand, Monuments de la
Grèce, Paris, 1808, in-fol. ; Aikin , Essai sur l'ordre do»
rique, en anglais, Londres, 1810, in-fol. ; HQbsch , Sur
l'architecture grecque, en allem., 2* édit., Heidelberg,
1824, in-4® ; Rosenthal, Sur l'origine et le sens des formes
architectoniques des Grecs, en allem., Berlin, 1830, in-4o ;
Bôtticher, L'Architecture des Hellènes, en allem., I^ts-
dam, 1842-52, 3 vol. in-4* et atlas in-fol. ; Forchhammer,
Sur les murs cyclopéens de la Grèce, en allem., Kiel,
1847; Brunn, Histoire des artistes grecs , en allem.,
Brunswick, 1850-59, 2 vol. in-8*; Leake, La Topographie
d'Athènes, avec des remarques sur ses antiquités, en an- !
glais, Londres, 1821 et 1841, 2 voL in-8«; Papworth,.
Essas sur l'architecture grecque , en anglais ( en tète de
son édition des Œuvres de l'architecte W. Chambers),
Londres, 1820, in-4*; E. Dodwell, Vues et descriptions
des constructions pélasgiqites ou cudopéennes en Grèce
et en Italie, en anglais, Londres, 1834, in-fol.; Expé"
dition scientifique en Morée, ordonnée par le gouverne-'
ment français ^ Paris, 1835, 3 vol. in-fol.; De Clarac,
Manuel de l'histoire de l'art chex les Anciens, 1847, 2 vol.
in-12; Penrose, Recherche des principes de l'architecture
athénienne^ en anglais, Londres, 1851, in-fol. En, B.
GSBGQDB (I^inture). Les œuvres des peintres grecs
sont perdues : il ne nous reste, pour en faire l'histoire,
que les Jugements des Anciens, les traditions et les pein-
tures d'époques relativement modernes et d'artistes se-
condaires retrouvées dans les villes du Vésuve. Mais cet
ensemble de documents est considérable. Il est difficile de
fixer une date aux commencements de la peinture ; car
cet art se borna longtemps à colorier les statues, les bas-
reliefs et les temples, et à fournir des sujets de broderies
aux femmes de la Grèce et de l'Asie Mineure. Les tradi-
tions la font naître à Corinthe et à Sicyone, villes de po-
tiers qui employaient des coloristes pour orner les vases
de dessins en teintes plates ; nous avons quelques-uns
de ces anciens vases. On ne voit pas qu'avant la guerre
médique, la peinture se soit, comme srt, rendue indé-
pendante de la sculpture, de l'architecture et de la céra-
mique. Mais cette guerre contribua à donner aux Grecs
la conscience de leur génie, et donna un élan singulier à
tous les arts. Cependant la peinture conserva longtemps
encore et peut-être toi^ours l'habitude de modeler ses
conceptions d'après celles de la sculpture, et de disposer
les personnages comme dans des bas-reliefs. Le dessin la
préoccupa plus que la couleur^ et celle-ci ne parvint à
toute sa perfection qu'au temps d'Alexandre. Jusque-là
les figures sont en petit nombre, séparées les unes des
autres de façon à ne pas se couvrir mutuellement; le co-
loris est clair, transparent, peu modelé, les raccourcis
évités comme dans les bss-reliefs, la perspective presque
nulle. -T- La asinture fit un grand pas vers llnd^iendanoe
GRE
100»
GRE
tonque, se détachant des temples et des vases, elle com-
posa libremeiit sur des tables de bois ou sur des surfaces
étendues préparées eiprès. Polygnote, qui Tirait an
temps de Cimon et sous Pôriclès, trouTS rsrt de peindre
presque dans Tenfance, et en ftt un rirai de l'art de Phi-
dias. On nepeut douter que les peintures dont il orna le
temple de Thésée et plus ttuil les temples de Delphes, de
ixiatôe, et la Pinacothèque d'Athènes, n'aient été de
ifanples ornements courants ou des tableaux de dievalet.
Hais ce grand peintre avait décoré les murs de la Lesché
à Gnide et du Pœcile à Athènes : dans le premier il avait
rq)résenté la prise de Troie, le départ des Grecs, et l'évo-
cation des morts par Ulvsse; dans l'autre, la lutte des
Grecs et des Perses. A l'exécution de ces derniers ou-
vrages travaillèrent aussi Mîcon et Panoanus. Dans le
même portique étaient encore représentés plusieurs su-
jets de l'histoire d'Athènes. On voit donc qu'à l'époque
de P^clès et même de Thémistocle on pratiquait déjà la
peinture historique sur de grandes dimensions; et cela,
Don-seulement avec une erande pureté de dessin, oui n'a
rien de surprenant dans Te pays des sculpteurs et des ar-
chitectes, mais avec un coloris approprié aux person-
na^ss, et nne expression en harmonie avec les caractères
et les situations.
Si la sculpture contribua à la perfection du dessin,
fart des décorations scéniques contribua à celle de la
perspective, c-à-d. surtout à la distribution des ombres
et de la lumière. ApoUodore fit en cela une véritable ré-
volution, dont profita largement Zèuxis. C'est donc d'Apol«
lodore que l'on doit dater la seconde période de la pein-
toTB ; car e^est plus encore par l'art ces ombres que par
eelui du coloris ou même du dessin , c^ue l'on donne à un
tal^ean cette magie qui produit l'illusion et charme l'es-
prit. — Les descriptions oue lès auteurs anciens nous
ont laissées des tableaux de ce temps (v* siècle) mon-
trent aue la peinture était, quant à l'expression, dans
nne voie tout autre que la sculpture : celle-ci , dans le
grand art de Phidias et de Poiyclète, évitait de repré-
senter les passions et de tourmenter les traits du visage;
an contraire, les plus grands peintres d'alon, Zeuxis,
Parriiasius, Timanthe, recherchaient ce que les mo-
dernes appellent l'expression, ressource dont la plastique
n'a pas besoin. Ce n'est donc pas seulement la majesté
divine de Jupiter et la grâce ftaiinine d'Hélène, rendues
par une expression générale, que l'on recherchait en
peinture; c'était ou la gradation de la douleur paternelle
dans Agamemnon, ou cette variété des qualités et des
défauts du peuple même, que l'on s'étudiait à exprimer
par la disposition habile des traits du visage, du geste, de
la pose et des draperies.
Sur la fin de ce siècle, les peintres grecs fbrmaient des
éoolef rivales : celle dlonie, dont Zeuxis et Parrhasius
étaient les chefs; l'école de Sicyon»^ sous Pamphyle;
réoole Mlénique ou attique, qui finissait alors et ne
povrut plus rivaliser avec la science nouvelle. De toutes
ces éooles, celle de Simone, venue la dernière, fut celle
qui porta le plus loin l'art de peindre; elle s'étend sur
tout le siècle suivant, et produit des hommes d'un génie
et d'une habileté supérieure. Leur premier maître fut
Pamph]^e<, qui enseigna dans Sicyone pendant de lon-
gues années; il commençait son enseignement par les
mathématiques, c-àpd. par le dessin linéaire, la per-
spective et la projection des ombres; le raccourci était
on objet d'étuds tout particulier; la pureté du dessin la
plus sévère était exigée ; le coloris venait ensuite : rendre
les caractères et les passions ne pouvut être enseigné
dans l'école que d'une manière générale; mais on sait
avec quelle Justesse l'art de l'expression , soit générale,
soit même indiridudle et locale, fht pratiqué dans l'école
de Siqfone. Paosias, Euphrenor, Échion, Bfélantbius,
IGeias, Théon de Samos, Arisdde de Thèbes, appartien-
nent à cette époque, sans compter une foule d'autres ar-
fistes renommés dont l'histoire a gardé les noms. Hais
deux sortont se distingnent dans ce iv* siècle, Protocènes
et Apeile. Geltd-ci, âève de Pamphvle, fut considéré
par les Andens comme le plus grand peintre de l'anti-
quité; Il serait jnste peut-être de distinguer dans ces
âoges la part qui revient de droit à l'art de peindre, et
celle qnl se rapporte au choix même des sc^ets et au
earactère idéal des csuvres. 11 est incontestable que l'art
était pins parfait et avait plus de ressources au temps
d'Apdleqne dans le siècle précédent; qu'Apelle tira des
fÊSis excellents de ces moyens, et porta plus loin que ses
prédécesseurs la grioe des lignes, du dessin, du coloris,
de
ml,
la composition, rédat de la Jeunesse, le charme sen-
el, la vérité de l'expression et d<« ki représentation.
Mais, dans la liste de ses œuvres, on voit dominer, comme
dans tout l'art de cette période, les formes adoucies, les
figures de femmes, les héros et les dieux dont la Jeunesse
a quelque chose de féminin et de sensuel : la Vénus Anc^
dyomène fut le chef-d'œuvre de ce grand peintre. Proto-
gènes se forma lui-même et sans maître, ne sinspirant
aue de la nature ; mais il est érident qu'il était sous
rinfluence directe, non-<6eulement des idées du temps,
mais encore des écoles dominantes et particulièrement
d'Apelle dont il était l'ami ; car il ne faisait aucun con-
traste avec lui et peignait dans le même genre. — C'est
aussi pendant cette période du iv siècle que se déve-
loppa la représentation individuelle des personnes ou le
portrait. Le v* siècle n'en faisait pas, eu du moins ne
s'attachait pas à la ressemblance matérielle ; l'école de
Sicyone, au contraire, conçut le portrait à la façon des
modernes, c-à-d. comme la reproduction du caractère
physique et moral de la personne. Apeile excella dans
ce genre. — Quant à ces tableaux de la nature qae
nous appelons paysagei, il ne semble pas que les Grecs
les aient, à ancune époque, conçus à notre manière;
si parfois la mer, les montagnes, les champs furent
mis par eux en peinture, le paysage ne fbt qu'un fond
de tableau où le sujet principal était une action hu-
maine ou une scène de mythologie, ou un détail em-
prunté à la vie des animaux. Mais il ne parait pas
qu'avant le siècle d'Auguste on ait Jamais représenté un
paysage pour lui-même et par amour pour le site; il n'y
avait pas même en grec de mot pour désigner ce genre
de peinture.
Vencaustique, c.-à-d. la couleur broyée et mêlée à la
cire, et appliquée à chaud sur le substratum. sorte d'en-
duit poli, puis recouverte d'une couche de cne transpa-
rente , fondue avec le cauterium, en manière de vernis t
telle fut la façon ordinaire de peindre de toute l'antiquité
gréco-romaine; mais l'application de la couleur sur une
surface murale encore mouillée, c.-^-d. la fresque, fat
également pratiquée par les Anciens. Toutefois la véri-
table peinture, suivant les Grecs, fut la peinture de die-
valet à l'encaustique.
La période c^ui suivit Alexandre le Grand est marquée
par nne diffusion générale de l'art de peindre, en Asie,
on É^te, en Italie. La construction des grandes villes
de rOnent, composées de palais et de maisons somp-
tueuses, employa un nombre étonnant d'artistes. Mids la
satisfaction du goAt et du caprice individuel des riches
pour lesquels ils travaillaient fit déchoir rapidement la
perfection matérielle et morale de leun œuvres. Cette
période ne peut opposer aucun nom aux grands peintres
de la période précédente : les scènes amusantes, ou vive-
ment écUdrées, les dieux représentés par leur côté co-
mique, souvent des images d'une grossière sensualité,
tels sont les sqjets ordinairement traités dans ces temps
de décadence politique et morale. Les décorations inté-
rieures des maisons prennent une importance mineure
dans la peinture : les arabesques, les encadrements de
panneaux sur le fond desquels se détache ou une scène,
ou un personnage ou un animal ; les tableaux de genre
empruntés à la vie domestique et pdnts sur les mun des
appartements; les guirlandes de fleura aux plafonds; les
eerapectives architecturales prolongeant à l'œil les cham-
res et les galeries; td est l'emploi ordinaire de l'art de
peindre. Cest durant cette période qw naquit la mO'
saujue, appliquée d'abord à terre sur le sol, puis verti-
calement contre les mure, où elle rividisa avec la pein-
ture même dans la représentation des sujets les plus
complexes et les plus passionnés. On peut rapporter k
cette époque la ^nde mosaïque de Pompéi, connue sons
le nom de Bataille ^Arbelles.
La conquête des pays grecs par Rome fit passer en
Italie beaucoup de peintures de dievalet des meilleures
écoles. La vue des cités luxueuses de Y Asie et de TÉgypte
poussa lés Romains dans la même voie qu'elles, et dès
lore les pdntres grecs travsillèrent pour leun maîtres et
se soumirent à leun exigence. Les sujets les plus tra-
giques de l'histoire héroïque et les portraits, voilà pour la
peinture de chevalet; la décoration des maisons et des
villas suivant le goût du temps, voilà pour le plus grand
nombre des artistes. La peinture murale reçut donc un
nouveau développement durant la période ImpMale;
cette scénographie intérieure donna naissance à la véri-
table peinture de paysage, dont la création remonte à Lu-
dius, sous le règne d'Octave; toutefois le paysage était
plutôt emprunté à la campagne, telle que les Romidns
l'avaient faite, qu'à la nature libre des fleuves, des mon-
tagnes et de la mer : des villas, des Jardins, animés par
GRE
1004
GRE
des scènes d'uno gaieté comique, tels étaieat les si^ets de
Ludittfl.
Cette lonsae période de TEmpire est marquée par une
décadence de plus en plus rapide de la pdnture : pas un
nom Y pas un ouvrage qui mérite d'être signalé, à moins
que Ton ne dte, sous Adrien , iEtion et son tableau de
Èoxanê et Aleacandre, Alais du Jour où les esclaves furent
chargés do peindre pour leurs maîtres et que Fart fut
tombé dans ce discrédit, on peut dire que la peinture
avait cessé d'être. Réfugias dans l'empire d*Orient et re-
cueillie par les chrétiens ainsi que ta mosaïque, elle y
devint la peinture byzantine, d*où la peinture moderne
est sortie.
V, Junius, De picturâ veterum^ Rotterdam, 1674,
in-fol.; Durand, Histoire de la peinture ancienne, Lon-
dres, 1725 (c'est une traduction du 35" liv. de Pline);
Grunde, Essat sur la peinture des Grecs, en allem.,
Dresde. 1811, in-8°; C.-A. Bœttiger, Essai sur Varchéo-
logie de la peinture, principalement chez les Grecs,
Dresde, 1811, 2 vol. in-8°; Raoul Rochette, Peintures
antiques inédites. Paris, 1836, in-4*^; Letronne, Lettres
(Ttifi antiqtuùre a un artiste sur Vemploi de la peinture
historique murale, 1835, et un Appendice, 1837, in-8®;
O. MQller, Manud d'archéologie, traduit en français, Pa-
ris, 1842, 3 vol. in-18 ; De Clarac, Manuel de Vhistoire de
Vart chez les Anciens, 1847, 2 vol. in-12. En. B.
GRBCQDB (Sculpture). La vie intellectuelle exprimée au
dehors par des formes sensibles, et cela dans sa généralité
et sa simplicité la plus grande , tel est le caractère do-
minant de la sculpture grecque ; il s*est montré dès les
origines de cet art, et il s'est maintenu Jusqu'à la fin. La
sculpture s'est trouvée engagée dans cette voie, non-seu-
lement par la nature même du génie hellénique à la fois
réfléchi et plein d'expansion , miûs aussi par la poésie
qui elle-même chantait sous l'inspiration des croyances
religieuses. En effet, la religion des anciens Grecs avait
l'avantage d'offrir à rrmagination des symboles en nombre
presque infini, et d'une signification assez précise pour
être représentés aux yeux dans touto leur diversité. Toute
l'antiquité s'accorde à dire que les Grecs n'eurent long-
temps d'autres statues que celles des <Ueux. Ces statues
étaient des idoles, mot qui signifie image, représentation
figurée; on les conservait, soit dans des constructions
sacrées qui étaient la demeure des dieux ( votoç ), soit dans
des encântes {temenos) circoubcrites et inaccessibles au
vulgaire. Les dieux, conçus comme des puissances ayant
chacune son domaine parmi les phénomènes naturels,
reçurent des attributs en rapport avec ces phénomènes
eux-mêmes : ainsi Jupiter, dieu qui préside aux mé-
téores, eut le foudre et l'aigle, oiseau des airs ; Neptune
eut le trident, c.-4-d. le harpon, arme des navigateurs;
Apollon, dieu qui a son trône dans le soleil, eut l'arc et la
flèche, symbole des rayons pénétrants du Jour. Ces attri-
buts essentiels passèrent des sanauaires dans les ateliers
des sculpteurs, avec leur valeur significative. A mesure
aue l'art de tailler la pierre et le bois ou de modeler
1 arçile se perfectionna, les formes des dieux et de leurs
attributs acquirent plus de netteté et de précision. Les
corps divins ne durent plus sembler faits sur un modèle
unique ; il fallut que, par les proportions de leurs mem-
bres, par leurs gestes, par l'action où on les représentait,
ils exprimassent la nature même des phénomènes dont
ils étaient les régulateurs. En effet le symbole n'est autre
chose que la représentation, sous une forme sensible,
d'idées abstraites qui n'ont en soi rien de matériel ni de
figuré. IjSl s}rmbolique contient donc l'explication de la
statuaire antiaue, laquelle reste sans elle une énigme in-
déchiffrable; ta première condition pour comprendre et
sentir les œuvres de la sculpture des Grecs, c'est d'ap-
profondir leur mythologie. Ainsi entendue dans son vrai
sens, la plastique ancienne est l'art spiritualiste par ex-
cellence, puisque, loin de donner aux passions nées de la
matière une expression qui émeut l'àme de sentiments
bas, elle écarte d'abord ces sentiments eux-mêmes, et ne
se sert des formes corporelles que pour exprimer et
rendre saisissables au vulgaire les conceptions les plus
immatérielles de l'esprit. Telle est aussi la cause et l'ori-
gine de ce caractère dominant des œuvres antiques, le
calme du visage, la sérénité d'&me des personnages
divins.
Toutefois, après le grand siècle de Périclès, lorsoue la
majesté des dieux eut été rendue dans son expression la
plus sublime, et que l'esprit public, devenu plus philo-
sophique et moins croyant, eut commencé à faire avec
Socrato un retour sur lui-même , les sculpteurs intro-
duisirent peu à peu la passion dans les conceptions de
la plastique, et accrurent ce que les modernes appellent
l'expression ( ta pathè) ; comme les sujets donnés par
la religion étaient trop symboliques pour comporter la
variété et la violence des passions humaines, ils en vin»
rent à représenter celles-ci directement, et à reproduire
non-seulement des sujets humidns, mais encore des per-
sonnes réelles et vivantes. L'usage des portraits-statues
et des bustes se répandit promptement au temps des rois
macédoniens, et devint universel sous la domination ro-
maine. Les Anciens excellèrent dans ce genre, comme ils
avaient excellé dans la sculpture symbolique; mais,
auelle qu'ait été leur habileté à rendre la ressemblance
es personnes, même idéalisées, on doit reconnaître que
l'usage d'élever des statues à tout venant marque un
abaissement de l'art antique.
L'art du sculpteur comprenait dans l'antiquité, non-
seulement la statuaire proprement dite, dont les matièrea
ordinaires étaient le bois, la pierre, et, bientôt après, les
métaux, mais encore le bas-relief, qui tient le milieu
entre la statuaire et la peinture , la toreutique ou l'art de
ciseler et do repousser les métaux , la céramique même,
dans une certaine mesure, et enfin l'art d'orner les con*
structions de formes en relief empruntées soit à la géo-
métrie, soit à la végétation, soit même au r^e animal.
Les modernes ont suivi en cela les usages des Grecs, et
cultivent d'après les mêmes principes ces différentes
branches de L'art du sculpteur.
On peut diviser en cinq périodes l'histoire de la sculp-
ture cnez les Grecs : les temps primitifs ou la scul|>ture
hiératique, la période des guerres médianes, le siècle
de Périclès, la période macédonienne, et la période ro*
mai ne.
/■'■ Période, — Les servantes d'or de Vulcain et le bou-
clier d'Achille, dans Homère, ne peuvent être considérés
comme faisant partie de l'histoire de la sculpture, et
prouvent tout au plus que les Grecs de cette époque
avaient déjà des notions de la plastique. Il n'en est pas
de même des lions de Mycènes, le plus ancien ouvrage
de sculpture qui nous soit venu de ces temps héroïques,
conception symbolique analogue sans doute aux tètes de
gorgone et aux images de dragon décrites par les anciens
auteurs; ce sont là des sculptures adhérentes ou bas-
reliefs, liais ce qui caractérise la plus ancienne statuaire»
c'est l'usa^, très-général alors, des Çôova ou statues en
bois des divinités. C'étaient de v^tables idoles, conser-
vées, soit dans des temples, soit dans des grottes, comme
le Palladium de Troie et la Cérès de Phigalie ; ces idoles
étaient souvent monstrueuses, parce que l'art, ne distin-
Suant pas encore les doctrines vraiment symboliques
'avec celles qui doivent rester à l'état de mystères,
faute de pouvoir être représentées aux veux, chargeait ces
statues de formes bizarrement assemblées et multipliées.
Ces idoles de bois étaient de toute grandeur, depuis la
taille humaine Jusqu'à celle d'une simple poupée; elles
demeurèrent, comme objets de vénération, longtemps
après que l'art, dégagé des entraves du culte, eut donné
des mêmes divinités des images plus belles, et en réalité
plus Justes. La roideur, l'immobilité» les Jambes réunies
comme celles des statues égyptiennes, les yeux à peine
modelés ou d'une fixité singulière, l'adhérence des mains
et des bras, tels étaient les traits ordinaires de ces anti-
ques ébauches, auxquelles on rendait dans les sanctuaires
les mêmes soins qu'à des personnes vivantes, soins qui
du reste furent rendus dans la suite aux grandes œuvres
des sculpteurs, conservées dans les plus beaux temples
et aux époques les moins crédules. La famille Cretoise de
Dédale, établie en Attique, celle de Smilis à Eglne, furent
de véritables écoles, ou la sculpture, acquérant plus de
liberté, fut enfin un art Dédale ouvrit les yeux aes sta-
tues, détacha du corps les bras et les Jambes, ce oui fit
dire qu'il les anima. Sicyone et l'île de Rhodes furent
aussi des centres où se perfectionnèrent dès cette époque
les représentations symboliques des dieux. En outre, sur
la fin de cette période hiératique, parait l'art de repré-
senter en métal battu, c'est-à-oire repoussé au marteau,
non-seulement des scènes' mythologiques de petites di-
mensions, mais des divinités de la taille d'un homme.
Les potiers modelaient en petit des sigets analogues, et
Ton trouve souvent encore dans l'Attique des terres cuites
de ces anciens temps.
//" Période. — Le développement de la poésie , qui
d'épique devient lyrique et dramatique, c'est-à-dire plus
humaine et plus passionnée ; les relations de plus en plus
suivies des Grecs avec l'Asie ridie et civilisée; le perTeo-
tionnement des métiere et surtout du travail des métaux
dont les outils sont fabriqués ; en un mot le progrès de
GRE
1005
ORE
reipfit public en toutes choses : telles sont les causes de
rtctirité féconde déployée dans la sculpture au temps des
|Qerres médiques. Cette période de puis d*un siècle (de
570 k 450 environ ) n'est pas encore celle de la perfec-
tion; mids elle est marquée par un effort puissant du
génie grec pour échapper aux formes hiératiques, et,
sans perdre la tradition, atteindre le naturel et Texpres-
'don de la rie dans sa plénitude et sa liberté. L*art en
. même temps se Tulganse, et passionne non-seulement
. des individus on des familles crartistest mais des cités et
' des peuples entiers ; les États consacrent à des œuvres
d*aiichitectnre et de sculpture une partie notable de leurs
rerenuB. La plastique, sous toutes ses formes, sort des
sanctuaires, et devient partie intégrante de la vie pu-
blioue et privée. En même temps Te style, encore tout
archaïque an commencement de cette période, devient
de plus en plus naturel en se sécularisant; Tusage des
Jeux {aoônês) et des luttes athlétiques, devenu eénéral,
offre aux yeux des sculpteurs les formes du corps humain
dans ce qu'elles ont ae plus dégagé et de plus mobile;
les pompies sacrées, les théories, les chœurs d'hommes
et de femmes, les montrent dans Teurythmie et la dé-
cence la plus complète : de aorte qu'ii la fin de cette pé-
riode, la roidenr antique, la dureté du dessin, la lourdeur
des proportions, le manque de rhvthme dans les gestes
et de caractère [Hhos) dans les figures, ont en grande
partie disparu. — Il nous reste un assez grand nombre
d'ouvrages de cette période, peu de statues, beaucoup de
bas-reliefe et de terres cuites. En effet, l'usage du Dois
diqMndt dans le milieu du vi* siècle; l'or et les matières
précieuses sont employés pour les statues isolées des
dieux, et en préparent ia spoliation et la destruction ; les
bas-reliefs des temples, par leur position élevée, et les
Uxres cuites, par leur peu de valeur matérielle, échappent
mieux an ravage. Dipœnus et Scyllis de l'école de Dé-
dale, Gitiadas de Lacédémone, Canachus de Simone,
torentiden et fondeur, Agéladas d'Argos, fondeur, Critias
dTAthènes, Onatas d'Égine : tels sont les noms les plus
célèbres de cette période, où l'art se répand dans toutes
les parties de la Grèce. L'emploi de la pierre et bientôt
du marbre, qui font ressortir par leur couleur même la
pureté des lignes, contribue au perfectionnement du bas-
relief; celui-ci est alors pratiqué en grand et dans tout
le monde hellénique, depuis la Sicile jusqu'en Asie Mi-
neure; on en décore des autels, des bases de statues, et
surtout des temples, qui le reçoivent sur quatre de leurs
parties extérieures, le fronton, les métopes, la frise, et
les acrotères. Voici les principaux ouvrages qui nous
restent de cette période: les bas-reliefs de Sélinonte et
ceux d^Asaos, la rssfa Giustiniani aux draperies presque
cannelées, YatUd dês douze dieux (au Louvre), ouvrage
plein d'élégance, les sculptures d'Égine, œuvre considé-
rable conservée dans la Glyptothèque de Munich.
IIJ^ Période, — La prépondérance d'Athènes, devenue
le centre du monde grec par son génie démocratique, se
hàx sentir dans les arts depuis le commencement de
cette période. On avait placé vers la fin le point culmi-
nant de l'art chez les Grecs; une plus Juste appréciation
des oBuvres antiques l'a fait descendre au commence-
ment ; aojourd'hui, c'est aux temps qui ont immédiate-
ment précédé la guerre du Péloponnèse que l'on attribue
les plus beaux ouvrages de la sculpture grecque. Les
formes hiératiques ont entièrement disparu, pour faire
place su naturel le plus libre et le plus vrai ; mais la
sensualité n'est pour rien encore dans les conceptions
des sculpteurs; le nu est traité avec un sentiment idéal
£1 exdut toute passion, toute idée chamelle : le calme
os la dignité, la modération dans la puissance, la sa-
gesse avec la raison supérieure, caractérisent ces person-
nages divins de l'époque de Périclès, uniquement occupés
de leurs fonctions surnaturelles, et n'épousant les pas-
sions humaines que dans une mesure compatible avec
leur majesté. A aucune époaue de l'histoire, la sculpture
if a atteint à une aussi granae hauteur idéale. — Mais la
guerre du Péloponnèse, accompagnée de fléaux, de revers
et dQ crimes, porta un coup k. l'esprit public et le fit d^
choir: on songea davantage h Jouir de la vie; et les
Bcolptears, dont les moyens pratiques se perfectionnaient
disque Jour, lurent entraînés vers des sujets où les pas-
nons humaines et la sensualité pussent trouver niace
(Yoy., sur cette transformation de l'esprit public les ar-
ticles, UUératwre et Architecture grecques). On cessa de
représenter les divinités d'un caractère tout k fait m&le,
d*an âge mûr ou d'une nature impassible, et Ton choisit
de préférence celles dont les formes Juvéniles avaient
^oeiqoe chose de féminin, comme Bacchus, Apollon,
l'Amour; il en fut de même des déesses, et tandis que
Minerve est le grand modèle de l'époque de Périclès,
celui des années postérieures est Vénus. La grâce et le
charme des formes féminines, parfois même avec un
certain mélange de sensualité, remplacent vers le milieu
de cette période la puissance idéale, la beauté sévère et
toute spirituelle du grand art antérieur. — La première
époque nous offre les noms de Phidias et de Polyclète,
qui représentent, le premier l'école athénienne, le se-
cond récole de Sicyone et d'Argos. Autour do ces grands
noms se groupent ceux de Polygnote, peintre et sculp-
teur, de Myron, élève d' Agéladas, de Callîmaque, toreu-
ticien et fondeur, du grand Alcamènes, élève et rival de
Phidias, d'Agoracrite, de Socrate le philosophe, et d'une
foule d'artistes de renom que nous ne pouvons citer ici.
Les grandes œuvres de cette époque si féconde, œuvres
dont une partie nous est parvenue, sont : la Pallas du
Parthénon, grande statue a'or et d'ivoire par Phidias; le
Jupiter d'Olympie, où toute la majesté du dieu était
rendue; la grande Polios promacnos de la citadelle
d'Athènes; Y Aphrodite des Jardins, par Alcamènes; le
Doryphore de Polyclète, devenu le canon des propor-
tions du corps humain ; sa Junon d'Argos, son Atiuuone:
la vache de Myron ; et ces innombrables sculptures qui \
ornèrent les temples grecs relevés à cette époque, et dont
nous possédons de si beaux débris dans les reliefs du
Parthénon, de Phigalie, et dans les caryatides de l'Érech*
theion d'Athènes. — La seconde époque est celle de Ly*
sippe et de Praxitèle. Il n'y a pas de transition entre la
manière de Phidias et la leur : le contraste est frappant;
ils créent un ordre de beauté toute nouvelle, et font dire
au marbre tout ce que la forme humaine peut avoir
d'élégance, de grilce, d'harmonie, de souplesse et de
charme voluptueux. Scopas de Paros entra le premier
dans cette voie, où il fut suivi par toute la nouvelle gé-
nération d'artistes: Polyclès, Léocharès, Euphranor le
peintre, Praxitèle, Timothée, Lysippe, Silanion, etc.
Leurs œuvres furent estimées à une incroyable valeur,
qui s'accrut encore dans les siècles suivants. Voici les
plus célèbres : V Apollon citharède de Scopas, son groupe
d* Achille, sa Vénus populaire, k Élis ; les Niobides, que
nous possédons encore et qui sont l'œuvre ou de Scopas
ou de Praxitèle ; de ce dernier, le Satyre periboètos^ que
nous possédons peut-être sous te nom de Faune, VAmour
de Thespies consacré par Phryné, la Vénus de Cnide
dont celle de Médicis semble être une imitation impar-
faite; le Sauroctone du Louvre; V Hercule Famèse, imité
de Lysippe par Glaucon ; la statue d'Alexandre par Ly-
sippe, dont une copie (la tète seule) existe au Louvre.
tV* Période, — La période macédonienne est marquée
par un développement du génie grec dans les pays con-
quis par Alexandre le Grand, et par une réaction de ces
pays eux-mêmes sur le génie grec. La construction de
villes entières en Asie et en Egypte par des artistes grecs
augmenta le nombre de ces derniers, en même temps que
les richesses de l'Orient, dont les conquérants avaient le
maniement et dirigeaient l'emploi, mettaient aux mains
des sculpteurs, des architectes et des peintres, des res-
sources presque infinies. L'hifluence ue l'Orient sur la
sculpture grecque se remarque surtout dans le goût de
la magnificence et des proportions grandioses; maison
même temps que le goût des beaux-arts se répand chez
les particuliers, les besoins du luxe et d'une vie sensuelle
font pénétrer la sculpture Jusque dans les appartements
privés, et l'on voit se produire alors, k côté des œuvres
colossales faites pour le public, une multitude innom-
brable de petits ouvrages de sculpture, soit de marbre,
soit de métal, soit de pUttre moulé, qui transforment les
maisons en musées. Les autres arts fournissent aussi
leur contingent à ces décorations intérieures, lUtes du
reste avec un goût exquis et une grande élégance. Il est
bien remarquable que, dans cet immense développement
oue reçoit le génie artiste de la Grèce, il n'y a pour ainsi
dire aucun nom qui ait surnagé et que l'on puisse rap-
procher des grands noms des temps antérieurs. Cepen-
dant l'étude de la nature physique et morale de l'homme
étut poussée beaucoup plus loin, et avait atteint ce degré
d'analyse que la sculpture ne peut pss dépasser sans
devenir une dissection anatomique on un traité de psy-
chologie: mais ces connaissances scientifioues, par l'excès
même de leur précision, nuisaient à l'inspiration et
étouffaient l'idée de l'ensemble ; de plus elles mettaient
la sculpture à la portée de iout le monde, et faisaient que
les artistes semblaient tous également habiles. L'art,
durant cette période, gagne donc en étendue ce qu'il
pod en inspiration : il s'est vulgarisé, mais en mêms
ORE
1006
GRE
temps 11 est devenu plus vulgaire ; ses œuvres sont moins
recherchées pour leur beauté idtele que comme des or-
nements de luxe; et ce besoin du luxe, auquel la sculp-
ture répond alors pour sa part, n'est pas moins recon-
naissable dans les ouvrages publics que dans ceux que
commandent les riches particuliers. — L'étude analytique
des formes et des passions conduisit Fart vers Texpres-
sion de l'individuel, où la tendance de la période anté-
rieure le conduisait naturellement. Les rois macédoniens,
les grands personnages, les riches particuliers, les
hommes célèbres, commencèrent à voir leurs traits re-
présentés en marbre ou en bronze; et pour laisser encore
à ces figures privées d*idéal quelque chose qui sembl&t
les relever an-dessus de la nature individuelle; on repré-
senta fîréquemment ces hommes du jour revêtus d*onie-
ments et d'attributs divins appropriés à leur caractère. —
Quelques ouvrages eidstants permettent d'étudier l'art de
cette époque dans ce qu'il a fait de meilleur : citons le
Laocoony comme expression détaillée d'un sentiment
complexe et multiple merveilleusement étudié ; le GlaMa-
Uur d'Agasias (au Louvre), comme étude admirable des
formes anatomioues ; le taureau Pamè$ê, reconnu infé-
rieur à son anaenne renommée; le CoIossê d» Rhodes,
œuvre de Charès, élève de Lysippe.
V* Période. — Les principaux centres de sculpture
avaient été en Asie pendant la période macédonienne i
Rhodes, Pergame, Éphèse, riches cités, avaient vu fleurir
des écoles demeurées célèbres. La conouète romaine eut
pour suite le pillage de la Grèce et de l'Asie, qui virent
transporter à Rome leurs plus beaux ouvrages de sculp-
ture. Cette nouvelle capitale devint comme un musée où
se trouvèrent réunies des œuvres de toutes les époques
et de toutes les écoles; les artistes grecs y furent attirés,
et par ces modèles nombreux, et par les travaux que
les riches patriciens de l'école des Sdpiont leur firent
exécuter. Les villes élégantes de l'Asie Mineure et de
l'Egypte devinrent les modèles sur lesquels se formait la
nouvelle cité romaine; et de plus, les habitudes agricoles
des Romains et les progrès ne la grande propriéîiâ peu-
plèrent les campâmes de villas somptueuses, qu'il fallut
orner des dépouilles du monde grec et des œuvres d'ar-
tistes contemporains; les villes municipales d'Italie ne
tardèrent pas à imiter la grande ville; et ainsi le monde
des artistes grecs émigra pour ainsi dire tout entier dans
eette nouvelle patrie. Biais il fallut travailler vite, et se
conformer souvent aux exigences de maîtres dont le génie
n'a Jamais eu la finesse et la délicatesse exquises du génie
des Hellènes. La cinquième période est donc celle de la
décadence : plus d'inspiration pour des artistes travail-
lant par ordre; plus d'élévation dans les idées; le luxe et
la mollesse, l'amour des plaisirs et l'ostentation, se sont
mis à la place des grandes pensées religieuses ou des tra-
ditions de gloire nationale qui avaient inspiré les siècles
de liberté. Il est digne de remarque cependant que les
moyens matériels dont la sculpture disposait se perfection-
naient chaque Jour : le grand colosse de Nérôn , statue
d'airain fondue par Zénodore, n'avait pas moins de 36 met.
de haut, et dépassait le colosse de Rhodes. L'art de repré^
senter les personnes vivantes se r^nd de plus en plus
et devient véritablement l'art de la période romaine, soit
qu'on les revête d'ornements divins comme dans la pé-
riode macédonienne, soit qu'on les reproduise au natu-
rel. Cette même tendance, désormais invincible, se
retrouve dans la reproduction sculpturale des scènes his-
toriques, où tout est fait d'après nature et sans idéal : tels
sont les baa-reliefs des arcs de triomphe à Rome. Le
nombre des portraits, soit en pied, soit en buste, qui nous
restent du temps des Empereurs, est considérable : ils
remplissent tous les musées de TEurope ; les femmes y sont
en grand nonobre, représentées avec leur costume et leur
coiflVire orielnale, rarement disgracieuse. — Quant aux
sculptures des édifices pnblica, elles sont généralement
lourdes et négligées, souvent grossières et presque bar-
bares; cette remarque s'applique également aux orne-
ments sculptés des temples et des autres édifices romains,
dont la laideur est choquante si l'on rient à les comparer
aux ornements analogues des édifices grecs. — L'époque
de Trajan et d'Adrien produisit plusieurs OBuvres pour les-
quelles la critique peut faire quelques réserves ; nous-clte-
rons la colonne Trajane, la statue de Nerva au Vatican,
celle de lfaro-i4ttré<e aujourd'hui sur la place du Capitole,
ouvrages estimables. Mais les efforts des Antonins ne pu-
rent relever un art marchant vers sa décadence, et qui,
après avoir perdu l'inspiration et l'idéal, avait fini par
oublier le naturel, la grftce des formes, et Jusqu'à la Jus-
tesse dfli proportions. Le dessin devenait incorrect et de
convention. Après l'invasion des idées panthélsdqœa dt
l'Orient dénaturées et amoindries, les figures des dieux
se transforment pour s'accommoder à un idéal indéds, à
une conception mystique et nécessairement informe. Lbs
premières osovres chrétiennes sont sèches et maigres, et
d'ailleurs appartiennent plus souvent k la peinture «ra'à
la sculpture. Les invasions des Rarbares portent le der-
nier coup à un art qoi n'avait pas duré moins de qua-
tone siècles. V* H. Meyer, Histoire tes arts pUutiques
çhes. les Grecs et les Romains, en allem., Dresde, 1824-36,
3 vol. in-8<» ; Thiersch, Sur les époques des arts plas^
tiques chez les Grecs, en allem., Munich, 2* édiu, 1S20,
in-8<» ; Hirt, Histoire des arts plastiques chen les Anciens,
en allem., Rerlin, 1833, in*^. Eu. R.
GRECQUE (Musique). Le système musical des Greca
s'est développé peu à peu depuis les temps les plua
anciens de leur hisloire héroïque Jusqu'au v* siècle av.
J.-C, époque où, sous l'influence directe de l'École py-
thagoricienne, il se présenta dans son ensemble et avee
tons ses moyens. Les instruments se sont aussi perfec-
tionnés par degrés : depuis la simple flûte de Pan et
l'instrument fait d'une écaille de tortue Jusqu'à la ma-
gadis à ringt cordes, il y a une série de changements
dans la théorie et dans la pratique musicales; et ces chan-
gements accompagnent le développement parallèle de la
poésie lyrique Jusqu'au Jour où l'instrumentation s'est
séparée du chant, et a produit dans les Odéons et les
concours musicaux des œuvres plus compliquées. Comme
le système musical des Anciens diffère notablement du
nùtre, nous allons l'exposer en noua plaçant au point de
vue des Grecs eux-mêmes.
Les sons forment une série continue de l'aigu au grave;
on l'obtient en faisant glisser le doigt sur une corde
tendue et ribrante; dans cette série l'on ne distingue
aucune note particulière. Mais, en arrêtant le doigt à
certaines places et en supprimant le glissement intermé-
diaire, on obtient des sons distincts ou notes. Des lois
mathématiques président à la distribution des intervalles
de ces notes et en règlent la longueur. L'oreille observe
dès lors que les sons s'appellent les uns les antres et for-
ment des consonnances mélodiques. Toutefois, ces con-
sonnances peuvent être établies sur une partie quelconque
de la corde, c-à-d. de la série indistincte des sons. On
peut prenibre pour point de départ de la série conson-
nante soit la note aiguë, soit la gprave ; on lui donne alors
le nom de note du ton (tovoç, tension de la corde) : les
Grecs prenaient pour note du ton la note la plus aiguë de
la série, et solfiaient en descendant.
Il n'eixiste dans la série consonnaste que quatre notes
fixes, formant trois intervalles : oe sont celles que nous
nommons la première, la seconde, la quinte et l'octave.
Mais l'octave n'est que la répétition de la première, soit
à l'aigu, soit au grave; de sorte que, si l'on continue dans
ces deux sens à faire résonner ces notes fondamentales
dans toute la portée de l'oreille humaine, on obtient tou-
fours cette même série se répétant elle-même. Les An-
ciens ont nommé ton rintervalle oui s^Mure la première
de la seconde; de la seconde à la cinquième, et de la
cinquième à l'octave. Il y a deux intervalles de quarte.
Le ton, partagé en deux, forme des demi-Ums; les demi-
tons, partage en deux, forment des quarts de ton,
auand les cordes sont entre elles comme 80 et 81, la
ifiérence est appelée oomma; et le comma exprime aussi
la différence du demi-ton maieur et du demi-ton mineur.
Les intervalles de quarte, aans la série fondamenude,
peuvent être dirisés par des notes dont la place n'a rien
de Axe par elle-même, et les intervalles plus petits qui
en résultent peuvent offrir des demi -tons, des tiers de
ton, des quarts de ton, ou des espaces exprimés par
d'antres fractions. Tel est le point de départ de la mu-
sique antique et l'origine des écoles musicales ches les
Grecs.
L'intervalle de quarte est conunun à toutes les mu-
siques humaines, parce qu'il exprime un rapport numé-
rique très-simple et quil fait partie des consonnances
fondamentales. Les musiciens gréco-asiatiques de Phrygie,
de Lydie, etc., ont observé de bonne heure que les mêmes
séries oonsonnantes ou mélodiques se reproduisent sur
l'échelle des sons, offrant la même combinahon de ton|i
et de demi-tons : do ré mi fa — sol la si do; ou bien
ré mi fa sol — la si do ri: ou encore mi fa sol la — si
do ré mi, etc. Telle est l'origine du tétracords ou série de
quatre notes, qui est le fondement de toute la théorie
musicale des Anciens. Ces tétracordes, comparés entre
eux, par exemple celui de do avec celui de ré ou de mi,
diffèrent uniquement par U place du demi-ton, qui est
SRR
J007
GRE
en effel à raiga, au milieu ou au grave. Pendant ploslean
tiocllfia, toa plus anciens Grecs ne connurent que le té-
traooTda, al conapoa^rent leurs chanta dans quelqu*une
de ces comtes sénés mélodiques. Mais on finit par s'aper-
cevoir qu'en mettant à la suite Tun de Tautre deux té-
tncordes semblables, les deux notes extrêmes sont à
Toctave l'une de l'autre, et qu*un ton sépare ces deax
tétiacordea Tun'de l'autre. Toutefois, ce ton complémen-
taire peut se trouver soit au milieu de l'octave, comme
d-deasus soit au grave, comme dans la double série n-
wûf mi-la, soit à l*aiga, comme la série k^ré, ré-sol. De
tonte manière l'octave étant ainsi complétée, l'instru-
ment peut rendre toute la série musicale par une simple
r^étition des notes de l'octave, et faire entendre ainsi
toute la gamme. Réunir deux tétracordes semblables,
avec leur ton cimiplémentaire, s'appela t mettxB sept
cordes à la lyre.
Les modet (en grec amnonia) étaient primitivement de
rimples tétraooidM, que llnvention de l'octave transforma
en vrais pentacordes. Le mode est déterminé par la place du
demi-toQ dans le tétracorde, et il se solfie en descendant;
l'air on mélodie doit toujours finir sur la note extrême
du mode, soit à raig;u, soit au grave. Les modes primitifs
étaient le dorien (mt ré do si la), le phruoi^n (ré do si la
sol), et le lydisi» {do si la sol fa). Ils eurent tipis modes
subordonna, complétant l'octave k l'aigu/: Vhypodorien
(la sol fa mi ré), Yhypophaygien {sol fa mi ré do), et
rhupfriydien {fa mi ré do si). Enfin nn septième mode
appelé mixolydien reposait sur le si grave de l'hjrpoly-
dien, et produisait si ta sol fa mi. On doit observer que
ce système, le seul complet dont l'histoire fasse mention,
permettait de faire reposer une mélodie sur nne note
cpicdoonque de la gamme, et produisait des airs essen-
tieilement difTérents entre eux et d'une grande expres-
sion. Le plain-chant, qui, n'ayant ni rhythme ni mesure,
n'est pas proprement de la musique, tire encore de
beaux effets de ces débris de la musique grecque dont il
est composé.
Nous avons dit qu'il n'y a de fixe parmi les notes que
la 1'*, la 2*, la 5* et l'octave; les antres peuvent ôtre
abaissées de quantités variables à volonté, sans que la
mélodie soit troublée. Quand les intervalles obtenus sont
tous des tons et des demi-tons, l'octave est appelée dto-
(oni^tM, et, par une légère variation, l'on obtient le dia-
tonûiuemou, dur ou moi/en. Biais si la qnantité dont les
notes variables sont abaissées dépasse i/3 de ton, le genre
est cliangé : si, par exemple, on arrive à des intervalles
de i/2 ton à côté d'autres qui soient de i ton lyS, c'est
le genre chromatique. Voici, comme modèle, le mode do-
rien et bypodorien chromatisé : mi, ré b, do, <i, la, sol b,
fa, mi, ri. Ce qui donne de la eoideur à cette gamme,
laquelle n'admet aucune autre note que celles-là, c'est
que l'accord sur une note y est à volonté m^eur ou mi-
neor. Chaque mode a son genre chromatique. — Le
genre enharmonique, entièrement perdu pour nous, fut
ajouté aux deux autres par Olympe le Vieux. Composé
par la même méthode que le chromatique, il n'admet
que des Intervalles de 2 tons, 1 ton et 1/4 do ton. Voici
le dorien enharmonique, en descendant : la, fa, fa 1/4,
mi,, do, do 1/4, si, (a. Que l'on tente avec le violon
d^exécutcr cette simple gamme, on verra qu'elle agit de la
façon la plus puissante sur la sensibilité, lussant loin der-
rière elle les modes diatoniques ou chromatiques les plus
émouvants. Platon proscrivait le genre enharmonique.
n y aurait de belles et curieuses recherches k faire sur
Texécution musicale chez les Anciens, sur leurs instru-
ments (Aristote seul en nomme 33 à venQ, sur les chœurs
tragiques et comiques, sur le chant de la scène, sur les
odes, sur les Odéons ou Conservatoires, sur les concerts
privés et les grands concours de musique de l'antiquité.
Tons œs sujets sont à peine effleurés psr la critique mo-
derne. F. Burette, Ac, des fnse,, XVII; Vincent, Notice
sur divers manuse, grecs, etc., 1847; Tiron, Études sur
la musiq%ie grecque, le plain-chant et la tonalité mo-
derne, Paris, 18C6. £m. B.
GRECS MODERNES (Langue des). Cette langue, qu'on
q>pela aussi romcOque parce que les Turcs du xv* siècle
eonndârèrent comme romaine toute la population de
l'empire grec qui était étrangère à leur race, dérive du
grec ancien. Celui des antioues dialectes avec Iec[uel elle
a le plus de rapport, c'est l'ionien, ou plutôt l'attique. On
la parle dans le royaume de Grèce, en Albanie, en Thes-
Mue, en Roumélie, dans une partie de l'Anatolie, dans
les lleB de l'Archipel, à Chypre, à Candie, et dans les lies
Ioniennes. Quelques cantons de l'intérieur de la Grèce,
is pavs de Mégare, les tles les moins fréquentées de l'Ar-
chipel, sont les lieux où elle a conservé le plus de pureté t
dans les provinces septentrionales, elle est mélangi^
d'albanais; des éléments italiens s'y sont introduits dans
les lies Ioniennes, à Athènes et en Morée. Il y a telles
localités écartées, où l'on a conservé des mots, des locu-
tions, des pbï'ases de l'ancien grec, dont on ne trouve
plus trace dans les villes, telles expressions qui appar-
tiennent au temps d'Homère, et qui ont disparu des
auteurs postérieurs; tantôt les mots de la langue çla^
sique ont subi, dans le pec moderne, des contractions,
des suppressions de désinence, qui les défigurent; tantôt
les mots, en gardant plus ou moins fidèlement la forme
primitive, ont changé de signification. En ce qui concerne
la grammaire, le çrec moderne se distingue du grec an-
cien par les particularités suivantes : le nombre duel
n'existe pas; le datif a disparu de la déclinaison, et est
remplacé par le génitif ou par une préposition qui régit
l'accusatif; le premier nom de nombre sert d'article ind^
fini : les degrés de comparaison se forment à l'aide de
particules, et plusieurs temps du verbe au moyen d'auxi-
liaires; le verbe avoir Çt^tù) sert, comme dans les langues
néolatines, à la formation des temps du passé, et le
verbe vouloir (6£>a>), joint à une forme dérivée de l'an-
cien infinitif, sert à composer, comme en allemand et en
anglais, le futur et le conditionnel; l'infinitif, devenu
hors d'usage, est remplacé par une périphrase dans
laquelle le verbe se met au subjonctif; la voix moyenne
a été supprimée ; enfin la construction est beaucoup moins
transpositive. Le grec moderne a de& dialectes, dont la
plupart ne sont que des patois produits par une pronon-
ciation altérée et par des idiotismes venus de l'étranger.
On distingue surtout le roma^ue propre, avec les sous-
dialectes de Constantinople ou des Fanariotes,de S^onill,
de Janina, d'Athènes et d'Hydra; et Véolo-niorien, com-
prenant le mcUnote{k Sparte), le candiote et le cypriote,
V, Martin Crusius, Turco-Grœcia, B&le, 1584; J.-M. Lan-
gius, Philologia barbaro-grœca, Nuremberg, 1708, in-4*;
Ananias d'Antiparos, Grammatica grœoa vulgans, Ve-
nise, 1784, in-^**; Aibanase Christopoulos, ùrammaire
grecque moderne, en erec. Vienne, 1805; Jules David,
Méthode pour étudier la langue grecque moderne, Paris,
1821, in-8% et Parallèle des langues grecques ancienne
et moderne, en grec, Paris, 1820, in-^**; G. Kutuffîn, Corn--
pendio di grammatica délia lingua greca moderna, Li-
voume, 1885, in-8* ; Lûdemann , Grammaire du grec
moderne, en allemand, Leipzig, 1826 ; Blinolde Minasi
Théorie de la Grammaire de la langue grecque, Paris,
1827, in-8*4 Michel Schinas, Grammaire élémmtaire du
grec moderne, Paris, 1829, in-8<*; Theocharopoulos,
Grammaire grecque universelle, Paris, 1830, in-8<^; —
J. Meursius, Glossarium grœco-barbarum, Leyde, 1614,
in-4<^; Ducange, Glossarium ad scriptores mediœ et in^
fimœ grcBcitatis, Lyon, 1688, 2 vol. in-fol. ; Zalyk, Dùi"
tionnaire français-grec moderne, Paris, 1809, in-8*t
Dehèque, Dictionnaire grec moderne français, Paris,
1825, in-16; Coumas, Dictionnaire grec moderne, en
grec. Vienne, 1826, in-^**; Daviers, Dictionnaire français
et grec vulgaire, Paris, 1830; Scarlatès de Byzance,
Lexique grec moderne, Athènes, 1857 ; — MuUach, Gram*
mcÀre de la langue vulgaire des Grecs dans son évolution
historique, en allem., Berlin, 1856.
GAECS noDBSNBS (UttératuTO des). Les plus anciens mo-
numents de la littérature grecque moderne sont, au
XI* siècle, une Chronique de Siméon Séthos, qui fut pro-
tovestiaire à la cour d'Alexis l**" Gomnène, et, au xn*, les
poésies de Théodore Prodromos. Il faut descendre en-
suite Jusqu'au xvi* siècle, où l'on trouve les ceuvres de
grammaire de Chrysoloras et de Lascaris, et les Annales
universelles de Dosithée. Au xvii* appartiennent l'froto-
crite, roman de chevalerie de Vincent Comaro, et r£ro-
phile, tragédie de Georges Chortatzi. Pendant le xvui*, les
Grecs ont fait de nonibreux emprunts aux littératures
étrsngères : de cette époque datent les traductions de
VHistoire ancienne de Rollin et du Télémaque de Féne-
Ion. Eugène Bulgaris, archevêque de Kherson, traduit les
Géorgiques et V Enéide de Virçle. Parmi les auteurs d'ou-
vrages originaux, on doit citer : Mélétios, archevêque
d'Athènes, qui recueillit les légendes de l'Archipel ; Pho-
tinos, dont on a une Histoire ae la Thrace et de la Tran^
sylvante; le moine Grto>ire de Dodone, qui a publié la
Biographie des patriarches de Jérusalem.
Un mouvement littéraire assez important s'est déclaré
au XIX* siècle; sans parler d'un grand nombre de livres
de morale et d'éducation traduits de l'italien, du fhmçais,
de l'anglais, et de l'allemand, il fout mentionner les trslr*
tés de rhétorique et de philosophie d'QEkonomos et de
GRE
lOOS
GRE
▼ambas, les oavnns théologiquet de Theoclitos Parmaki-
tis« lea écrita polinqaes de Minaa, de Polysoidte^ de PalG»-
logoa et de 8pyri<Uon Vallettas, lea traTaiiz philoiogiquea
de Oony^ de Néophytes Dukaa, de Darbaria, d*Aaopios, de
VaDTaa, de Zenooioa Pop. Dans le genre historique Per-
neboa a donné une Histoire de Souli (i8i5J et des Afe-
moir^s sur la gwrre de Vindipsndanee de I8t0 (1830);
Philippidis, une Histoire de ta Roumanie, 1816 ; Risoa Né*
roules, une Histoire de ta Grèce moderne, 1828 ; A. Sout-
•oa, une Histoire de la révolution grecque, 1829: Sonr-
mélia, une Histoire d^ Athènes à Vêpoque de ta guerre de
Vindàpendance, 1834; K.-D. Schinaa, une Histoire des
anciens peuples^ 1845; Risos RangaTia, des Antiquités
hdténiques, 1842, etc. — La Grèce moderne possède une
poésie populaire, dans laquelle on remarque surtout les
chanta dea KJephtes et ceux qui se rattachent à la çuerro
de rind^ndance; des recueils en ont été publiés en
ihmçala par Fauriel (1825, 2 vol.) et par le comte de
llarcellus (1860, in-12). Mais elle a auasi une poésie sar
Tante qui s*est essayée dans plusieurs genres. Rigas, Kal-
Tos, SalomoB, Angelica Pâli, Karatchoutachaa, ont com-
posé dea hymnes de guerre et de liberté. Les deux Soutzos
et Orphanidia ont cultivé la satire. Christopouloa s'est
exerce dans Tode anacréontîque; Risos Néroulos, Pikko-
loa, Zampelios, les deux Soutzos, dana le genre drama-
tique. Panagoa Soutzoa est auasi auteur d*nn poème
épique et didactique, le Messie, et Alexandre Souuos
d^un poème fort estimé, te Vagabond. Rangavis a chanté,
dana le Séducteur des peuples, le moine monténégrin
Stéphanos , l'un des faux Pierre UI qui parurent sous
la czarine Catherine n. Zalakostas a publié en 1851 un
poème sur le siège de Bflssolonghi, et« en 1853, un poème
Intitulé Armatoles et Klephtes.
GRÉEMENT (du vieux mot gréer, pour agréer, qui
signifiait approprier), totalité dea voilea, dea pouliea et
des cordages propres an service des vergues et des mâts
d*un navire.
GREENWICH (Hôpital de), magniflaue établissement
fondé en 1696, k la place où était un palais des rois d*An-
fleterre, pour recevoir les marins invalidée. Il peut loger
4,000 personnea. L'aspect en est surtout majestueux
qoand on y arrive par la Tamise, sur les bords de laquelle
est un flrand square oCi s'élève la atatue de Geoi^^e II
par Rysbrack. L'hospice se compose de dnq oon>s de
Bâtiments : 1* celui oit du roi Charles, surmonta d'un
dôme avec belvédère , œuvre de Christophe Wren , et
contenant la bibliothèque affectée à l'usage des pension-
nairea; 2<» celui de la reine Anne^ 3° celui du roi Gutî-
laume; 4* celui de la reine Marte, où se trouve la cha-
pelle; 5* V Asile on École, Au point de vue de l'art, la
chapelle est fort Intéressante : les statues de la Foi, de
l'Espérance, de la Charité, et de la Modestie, en ornent le
Tesubule; le portail richement sculpté, les portes d'aca-
jou maaaif, la décoration intérieure, composent un en-
aemble qui n*a pas d'égal en Angleterre; sur l'autel est
on trôs-bean tableau de West, représentant S* Paul
échappé du naufrage. On remarque aussi la Galerie no-
ffale, formée en 1823; elle comprend t 1* nn vestibule,
où sont les statuea de Nelson, de Duncan, de S^ Vincent,
et de Howe, plusieurs peintures de Tumer et de Louther-
bourg, un portiaitde Van Tromp-, 2* une grande salle
ornée de portraits d'amiraux anglais qui étaient autre-
fois à Windsor et à Hampton-Gourt, et a'autrea peintures
de marine; 3* une autre salle renfermant dea objets cu-
rieux, dea modèles de vaisseaux, etc.
GREFFE (du grec graphéin, écrire), dépôt où aont
classés et conserva les registres et les actes des parties,
pour ou'on puisse y recourir lorsqu'on veut en avoir des
expéditions. Cest là aussi que s'acquittent les droits de
Instioe et les amendes. Dans les greffes des tribunaux de
l** instance sont également déposés les doubles des re-
gistres de l'état civil dé chaque arrondissement.
GREFFIER (du grec graphmu, écrivain), fonction-
naire établi prea des Cours et tribunaux pour écrire lea
arrêts, sentences, Jugements et autres actea prononcée
on dictée par les Juges, en «arder les minutes, et en déli-
vrer des expéditions à qui il appartient. Les greffiers des
Juatioea de paix et dea tribunaux de l'* instance et de
commerce doivent être &géa de 85 ana au moine; ceux
dea Cours impériales, de 27 ans. On demande qu'ils
aoient licenciés en Droit et aient suivi le barreau pen-
dant 2 ans. Une Justice de paix n'a d'ordinaire qu'un gref-
fier; lea tribunaux de 1'* instance et de commerce ont
nn on plualeura greffiers-^^djoints ; le nombre de cea
demlera est plus considérable dans les Cours impériales,
^ù le premier des greffiers a le titre de greffier en chef*
Ce fonetionn^re est aaaujetti à un cautionnement, dont
le chiffre varie en raison de la population et du ressort
du tribunal, n est soumis k la surveillance du préaiderit
et du ministère public. Outre un traitement fixe, qui est
médiocre, 11 touche, pour les rôles d'expéditions qu'il dé-
livre, un droit qui, dans certaines localitéa, rend aon
poste très^lucratif. Le traitement fixe des greffiers est de
600 ii 800 fr. pour les JusUces de paix, d^ 600 à 1,200 fr.
rmr les tribunaux de police (6,000 fr. à Paria), de 800
1,800 fr. pour lea tribunaux de commerce, de 1,000 à
2,400 fr. pour lea tribunaux de 1** instance (6,000 fr.i
Paris), dft 2.000 à 4,000 fr. pour les Cours d'appel
(8,000 fr. à Paris). Les droits de greffe aont fixés par les
tarifs du 16 février 1807 et du 18 Juin 1811, par ordon- '
nance du 0 octobre 1825, par arrêt du 8 avril 1848, et par
décret du 24 mai 1854. Le groffier de la Cour de cassa-
tion a un traitement fixe de 46,000 fr., snr lequel il paye
4 commis et les fournitures du greffe. Lea greffiers ont la
qualité de membres des Cours ou tribunaux auxquels ils
sont attadiéa, et prennent rang i^rès lee officiers du mi-
nistère public. La loi du 28 avril 1816 les autorise à pré-
senter leurs successeurs. Ils ne peuvent être parents ni
alliés. Jusqu'au degré d'onde ou de neveu inclusivement,
d'un membre de la Cour ou du Tribunal, et dea dispenses
ne aont accordées que dans les tribunaux composés de
8 Juges an moins (Loi du 20 avril 1810). Leurs fonctions
sont incompatibles avec toute autre fonction publique aa-
lariée et avec tout office. Lk où il n'y a pas de commis-
saires-priseurs, les greffiers des Justices ne paix peuvent
procéder aux ventes publiques de meubles, et ausal des
récoltes pendant par racines. V. GeEPPisa, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
GRÉGORIEN (Chant). Le chant grégorien, nommé
aussi ptain^chant ou chant romain, est le chant ecclé*
élastique en usage dans presque toutes les églises de l'Oc-
cident, n fut r&lé à la fin du vi* siècle. par le pape
S^ Grégoire le Urand, qui, aux quatre modes authen'
tiques (F. ce mot) établis par S^ Ambroise, et formant
la base du chant ambrosien (K. ce mot ), afouta les quatre
modes plagaux {V.ce mot). Le chant grégorien a subi
piusieura modifications dans le cours de son existence :
la plua importante et la plus autorisée a eu lieu an
XVI* aiède, à la suite du concile de Trente et par l'ordre
du pape Grégoire XIII. Il existe un grand nombre d'édi-
tions du chant gr^rien, et, ouoiqu'elles aient un fonds
commun, elles offrent entre elles de notables différencea
{V. Plaim-Chant). V, Nivers, Dissertation sur le chant
grégorien, Paris, 1683, in-8*; Th. Nisard, Études sur la
restauration du chant grégorien, Paris, 1855, in-8*. F. C
eafooaiBN (Rit), rit réglé par le pape S^ Grégoire le
Grand. Le pape Gélase avait réuni, dana un Sacramen-
taire qui porte son nom, les prières conservées par la
tradition ; S' Grégoire les mit dans un meilleur ordre,
précisa lea cérémoniea du culte, et composa ainsi un nou-
veau Sacramentaire, Il fit, d'ailleurs, peu de change-
ments dans la liturgie, abrégeant surtout celle de GéUàe.
GRÈGUES. F. BaAiBS.
GRÊLIER, nom qu'on donnait Jadia à une aorte de
trompe de chasse.
GRÉMIAL (du latin gremium, giron), linge on mor-
ceau d'étoffe que l'on place sur les genoux de Tévèque
officiant, loraqu'il est assis, pour garantir la chaauble.
GRENADE (Cathédrale de). Cet édifice, commencé en
1529 sur les plans de Diego de Siloé, et inauguré en
1560, meaure 119 met. de longueur sur 70 de largeur. Sa
façade à trois portes est ornée de stittues et de bas-relieis.
Il est distribué en cinq nefs, soutenues par d'énormea
pillera en colonnes groupées. Les nefs latérales sont gar-
nies de chapelles, dont les retables et les peintures ont
généralement beaucoup de valeur. La Grande chapMe.
qui occupe la largeur de trois nefs (32 met.), est une dea
œuvres lea plua somptueuses de l'Espagne : ornée de ma-
gnifiques peintures par Alonzo Cano et ses élèves, éclairée
par ne bôtnx vitraux où l'on a représenté la Passion,
elle est recouwte d'une coupole Jadis peinte en bleu et
semée d'étoiles d'or, et dont la clef est à 47 met. au*
dessus du sol. La Chapelle royale contient deux très- \
beaux mausolées, qui recouvrent, l'un les restes de Fer- {
dinand te Catholique et de sa femme, l'autre ceux de '
Jeanne la Folle et de son mari Philippe le Beau. La tour
de la cathédrale de Grenade a 56 met. d'élévation : do-
rique au l"" étage, ionique au 2*, corinthienne au 3*,
elle devait avoir un 4* étage toscan.
caBNADB (l*alhambra de). F. Alhambra.
oaENADB, projectile. F. notre Dictionnaire de Biogreh
vhie et d* Histoire»
GRE
1009
GRI
GRENADIERS , soldats d^élite qui forment une com-
(Agnie dans chaque bataillon d'infanterie de ligne. Us
■ont choisis par le colonel , sur la présentation dâi cbefo
de IxktaiUon , parmi les hommes de hante taille, ayant an
moins six mois de service (une belle conduite à la
gaerre dispense de cette condition), et réunissant les
qualités qm font le bon militaire. Ils ont une solde plus
forte que celle des Aisiliers, sont exempts des corrées oui
roulent sur le régiment ou le bataillon, psrtagent avec les
roHifleurs la garde du drapeau, et portent le sabre, les
épauTettea rouges, et une grenade brodée sur Tuniforme.
Jadis ils avaient le bonnet à poil, qui fut encore en
sBsgB pour les grenadiers de la garde impériale. V. Ga»-
Ràonas, dans notre Dictionnaire de Biographie et d*Bist,
GRENAT, pierre précieuse, de couleur yineusOi qu'on
emploie dans la byouterie. Le symbolisme chrétien en a
fait un des emblèmes de la charité.
GRENEUJi (Puits de). V, notre Dictionnaire de Bio-
ffraphie et d^Histoire.
caafBLLB (Fontaine de). V, Fontaoie, page 901.
GRÈNETIS, bordure de petits grains qui entoure le
type d'une médaille.
GRENIER (du latin granarium, dérivé de granum,
grain) , magasin où Ton cooserre les grains battus, no-
tamment les céréales. Il est bon que, dans une ferme, le
nenier soit à proximité des granges ou de la machine à
battre, et, pour éviter Tinceume, dans un bâtiment isolé.
On ne doit le placer ni an rez-de-chaussée, car la pre-
mière condition d'un bon grenier est d'être parfaitement
8ec« ni an-dessus des étsbles et des écuries, d'où s'exhale
n:i air chaud et humide, nuisible à la conservation du
grain. L'emplacement le plus convenable est au-dessus
des hangars et des remises, ou dans le coxps de logis du
coltivateur. Un grenier n'a pas besoin d'avoir plus de
S à 3 mèL de hauteur, parce que le blé entassé sur une
trop grande épaisseur tend k s'échauffer et que son poids
sor le plancher est considérable; mais on peut super-
poser plusieurs étages de greniers. Le toit doit être assez
saillant, pour que Pintérieur du grenier soit mieux pro-
tégé contre les eaux pluviales; des ouvertures percées en
pâit nombre, an nord et au midi, établissent an besoin
un ooorant qui renouvelle l'air intérieur, et on les tient
exactement fermées à l'aide de volets, afin d'empédier la
dnleiir d'y pénétrer. S'il y a plusieurs greniers super-
posés, une ventilation énergique s'établit au moyen de
trappes ouvertes dans leurs planchers, et qui servent
tont à la fois au montage ou à la descente des grains, et
à la formadon d'un courant d'air de bas en haut. Au-
dessus d'une écurie ou d'une étable, le mieux est de car-
reler le grenier; partout ailleurs un plancher en bols est
préférable, pourvu qu'avant dlntroduire les grains on
Tait nettoyé et brossé pour enlever la poussière et les
insectes. Il est également profitable de blanchir chaque
année les murs avec un lait de chaux, qui atteint les in-
sectes dans les plus petites fissures ; à plus forte raison
doit-on boncher tous les trous qui pourraient servir de
gHe aux animaux rongeurs.
camna, en termes de Marine, lit de pièces de bois ou
de galets, préparé dans le fond de la cale d'un navire, à
la hauteur d'un demi-mètre environ, pour recevoir des
ballota, qui, sans cette précaution, seraient atteints psr
rhumidité.
«aoiiias d'abordaiici. V, notre Dictionnaire de Bio^
graphie et ^Histoire.
GRÈS , un des matériaux employés à différentes
époques dans la construction, surtout pour les édifices
coondérables. Le temple de Jupiter Panhellénien à Êgine
étsit en grès Jaune, et le tombeau de Hidas en ^rès rouge.
Les Égyptiens élevèrent en grès la mineure psrtie de
leurs temples, et taillèrent leurs statues dans une pierre
de grès très^n.
GRÈVE, bord de la mer ou des rivières que les basses
eaox laissent à découvert en y abandonnant du gramier
ou des galets. On donna longtemps à Paris le nom de
grèioe à la portion du rivage de la Seine qui avoisine
rHèiBl de me, et c'est sur la Place de Grève wm se
firent les exécutions capitales Jusqu'en 1890. Gomme
c'est là que les ouvrière en bâtiment se réunissent le
mstitt, dqrais un temps immémorial , pour se renseigner
mutoeUement sur les travaux en cours d'exécution et se
fliire eorèkv par les entrepreneurs, comme ils y sont
plus nombfvnx lorsqu'il y a des interruptions de tnvail,
^assn s'est établi d'appeler arève toute suspension de
travaupar suite de coalition. Y, GoAunon.
GRÈVES, nièce d'armure. 7. notre Dieiiùnnaiire de
Bkgra^km gi SHitUÀre.
I GRIEANE, petit navire de 50 à 60 tonneaux, en usage
sur les côtes de la Hanche. La gribane porte deux mâts
très-courts et un beaupré ; lorsqu'il y a un hunier an
grand mât, on met un mât de hune volant.
GRIEFS, en latin graioamina, atteintes ou lésions
graves contre lesouelles on réclame, soit en politique,
soit devant la justice.
GRIFFE, empreinte destinée à tenir lieu de signature,
dont elle est le fao-simile, et instrument qui sert à la
faire. Comme une griffe peut être facilement imitée, ou
apposée par un autre que celui qui signe, il est interdit
aux fonctionnaires publics d'en faire ussge. La griffe des
commerçants, mise sur effets de commerce rendus à
leure débiteun, vaut libéretion, à moins que ces derniers
ne soient convaincus de l'avoir appliquée eux-mêmes.
GRIFFES, ornement d'architecture de toutes les épo-
2ues. A l'époque romano-byzantine, la base attique s'orne
e griffes, de pattes ou de feuillages enroula sur les
angles du soubassement; c'est un de ses caractères par-
ticuliers. On rencontre des sriffes dans un grand nombre
de meubles antiques et modernes.
GRIFFON, animal fabuleux, Uon ailé â tète d'aigle,
et qui se trouve dans l'ornementation des monuments à
toutes les époques. On le voit aussi sur des médailles an-
tiques.
GRIGNOTIS, tailles de gravure courtes, vagues et
tremblotées , interrompues par des points de toutes les
formes. Ils conviennent principalement pour les feuilles,
les troncs d'arbres, les temins, les vieilles murailles,
les chaumières, les étoffes grossières et velues.
GRIL, espèce de chantier établi â proximité d'un quai
pour réparer les navires. 11 consiste en une plate-forme
composée de pièces de bois disposées en grillai^ On y
laisse échouer le bâtiment soumis à des répsntions que
Ton ne peut exécuter que pendant les basses men.
GRILLE , assemblage de pièces de bois ou de fer qui
sert à fermer une enceinte. Les grilles en bois sont d'un
grand usage; parfois très-riches, comme on en voit à
l'intérieur de certaines édises, parfois très- simples,
conune celles qui ferment les vrâgers et les enclos, elles
ont suivi dans leur construction le goût des différentes
époques, sans présenter des particularités aussi remar-
quables que les grilles en fer. On a déplové dans celles-ci,
surtout â psrtir du xv* siècle, lorsqu'elles étaient desti-
nées â des intérieurs d'émises ou à des entrées de palais
et de châteaux, un luxe inouï, qui en fait des chefs-
d'œuvre de serrurerie. La place Royale à Psris était au-
trefois entourée d'une fort belle grille, qui, sous Louis*
Philippe, a.été remplacée par une grille moderne sans
caractère ; le Palais de Justice est Justement renommé
pour la grille de sa cour d'honneur.
GIULLET , dans le Rlason, grelot qui parait en quel-
2ues écus, et plus flréquemment aux jamoes des oiseaux
e proie.
GRIMBKLTNS, banquiers qui, an xvn* siècle, servaient
d'intermédiaires entre les mîffcbands de bestiaux et les
bouchon.
GRIME, emploi de théâtre. 5e gnmer, c'est donner
à sa physionomie certaines modifications, à l'aide. de
moyens artificiels. Les grimée sont les vieillards ridicules
ou comiques.
GRINgOLÉ, en termes de Blsson, se dit des croix,
sautoin, meubles, dont les extrémités se terminent en
tètes de serpent.
GRIPHE, en grec griphoe, énigme que, chez les An-
ciens, les convives se proposaient mutuellement pendant
le repas. Le mot signifie ^et ou reie d» pécheur, propre â
prendre des poissons.
GRIPSHOLM (Château de). 7. notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire,
GRISAIULES, pdntores formées en quelque sorte
d'une seule couleur blanche ou grise passant par tous les
tons du blanc an noir ; c'eat une espèce de camaïeu (V,ce
mot). On peut citer comme des modèles de grisailles les
magnifiques imiti^ons de bas^reliefs qui décorent la
voûte de la grande salle de la Bourse a Paris, et dues
â MiEQrnier et Abel de Pojol. — On dit que des'vitranx
sont peinuen grissille, lorsqu'on ne s'est servi pour les
sujets et ornements que de la seule teinte grise, lis appa-
rslssent dte le xm* siècle. Quelques-uns de ces vitraux
ne sont composés que de lacis et d'ornements, parfois
rehaussés de touches en couleur qui leur donnent une
grande vivacité. Dans les hautes Tarières des nefs et du
haut chœur, les grands personnages se détachent son-
vent, comme à Reims, à Amiens et à Tournai « sur un
fond en gruaille. Les égUaes de Bourges, de Rouen, de
64
&M
1010
6R0
Mboorg, ele.« en présentent auni des exemples. Au
iiv* siècle, aonrès la découverte du Jaune d*amnt, les
peintres ▼emers exécutèrent entièrement dee ntranx en
grisaille et or. Au xy* et à Tépoque de la Renaissance,
~aTec le perfectionnement de Tart do dessin, surgissent
des yitraux à grands sujets- entièrement en grisaille :
bien oue la facture en soit souvent admirable, on doit re-
connaître qulls sont naturellement froids ; les grisailles
offirent un JEfel aspect pour les ornements, lorsqu'elles sont
légèrement rehaussées de couleurs. E. L.
GRIS-GRIS. V. ce mot dans notre Dtctwnnain dt Bio-
graphie et d* Histoire.
GRIVOIS, nom qu*on donnait, au xvn* siècle, aux sol-
dats pillards qui ulaient partout maraudant et se ^r-
rut de butin , comme les grives qui s*enivrent de raisin
s les vignes. Par suite, on remploya pour désigner
tout homme d*humeur éveillée et hardie, souvent en dé-
bauche. En passant dans la Littérature, le mot grivois
s'est appliqué aux chansons Joyeuses et avinées.
caivois , nom donné sous Louis XTV à une sorte de
tabatière, munie d'une r&pe à tabac.
GROAT, monnaie d'argent d'Angleterre, valant 4 penny
(42 centimes ).
GROENLANDAIS (Idiome ), le mieux connu des idiomes
eskimaux (7. ce mot). Il diffère assex notablement des
antres, pour que les tribus qui habitent au S. du détroit
de Davis et de la mer de Bamn ne le comprennent qo*avec
difficulté : on en peut signaler, entre autres motifs, la
présence d'une assez grande quantité de termes dérivés
du norvégien et que les anciens colons Scandinaves y ont
introduits. Le groônlandais manque des articulations d,
f, hf X et SI ; on n'y rencontre jamais b, g, l eiv comme
initiales. H est rare que, dans le corps des mots, deux
consonnes soient placées de suite; mais l'emploi domi-
nant des lettres t, k etr donne à la prononciation une
Sande dureté. Le çxsénlandais est une langue polysyn-
étique on d'a^utînation, où l'on trouve (tes composés
d*une excessive longueur; toutefois, lés règles fixes qui
président à la formaUon des mots et à la syntaxe donnent
de la clarté k cette langue, malgré son apparente compli-
cation. Il n'y a pas de genre dans ies noms ; les cas so
forment par des suffixes ou désinences. Ce sont aussi des
changements de désinence qui expriment les degrés de
comparaison. On ne connaît que les cinq premiers noms
de nombre ; an delà, et Jusqu'il 20, on s'aide, pour comp-
ter, des noms des doigts des pieds et des mains; puis.
Jusqu'à 100, on emploie le mot signifiant personne pour
exprimer 20, et Ton dit, par exemple, trois personnes
pour le nombre 60. La dédinaison et la conjugaison ont
les trois nombres singulier, pluriel et duel. La xni^ngai-
son, très-riche en modes, n'a que trois temps : le présent,
qui sert à exprimer le présent et un temps passé depuis
peu; le prétérit; et le futur, qui a deux formes pour le
futur indéfini et pour un futur peu éloigné. Il y a une
forme particulière pour la conjugaison négative. La voix
passive des verbes ne diffère de l'active que par une légère
addition à la racine. Les conjonctions s'attachent au verbe,
les prépositions au nom, et les adverbes à l'adjectif, sous
forme de désinences. Les moindres nuances d'une action
s'expriment par des termes distincts : ainsi , l'idée de
pêcher se traduit par autant de verbes différents qu'il y a
désertes de poissons. On dit que les femmes n'ont pas un
vocabulaire identique à celui des hommes, phénom&equl
% été remarqué aussi chez les Caraïbes et les Guaranis, et
qn'on explique par la disparition d'une population m&Ie
primitive, dont les femmes auraient été épargnées par de
nouveaux venus. Balbi distingue dans le groénlandais
tanoit dialectes , celui du Nora ou d'Upemavick, appelé
hamouk ou kamouH; cekd du milieu, parlé dans l'Ile de
Disco et sur la cète occidentale; celui du Sud ou de Julia-
neshaab. V. Barthollnns, De Groënlandorum Unguà
(dans les Tiransactions de médecine et de philosophie de
Copenhague), 1675; Egède, Dictionartum groëtUandicO'
danico-lcUinwn^ Copenhague, 1750, in-8**, et Grammor
tica groènlandico-éanico^atina, 1760, in-8<^; Thorhal-
lesen. Schéma verbi grammatid, Copenhague, 1776;
Othon Fabridus, Dictionnaire groënlandais. ibid., 1804,
in-8^ ; Kleinschmidt, Grammaire groënlawÈeûse, Berlin ,
1851.
GROLLE, ancien vase, en forme de flacon, avec xme
poignée.
GROS, monnaie de France. Vi notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire.
GROS, monnaie allemande. Dans les États de la Confé-
dération germanique, les bons gros {gute groschen)
valent 12 pfennige, et sont le 24« du thaler, qui vaut
4 fir. En Rrusie, le gros émargent {sUbergrosehm) ne
vaut que le 30* du tfaaler prussien de 3 fir. 75 c. En Saxe»
le noîÊwau gros (nengroschm) vautlOprenfii^t.
GROS FA. y. Fâ.
GROSSE, nom donné aux expéditions des actes nota-
riés et des Jugements qui sont prises sur Toriglnal et dé-
livrées en la forme exécutoire. Cest la forme exécutoire
qui distingue la grosse de toute antre expédition, et ellH
donne le droit d'agir directement sans recourir aux tri-
bunaux. Une grosse est ainri appelée, parce qu'on la
copie ordinairement d'une écriture laige et grosse. Ell<»
fait foi dans le cas où l'original viendrait à se perdre. Les
notaires et les greffiers des tribunaux peuvent seuls dé-
livrer des grosses : chacune des parties intéressées peut
en obtenir une ; mais tout notaire ou greffier qui lui en
délivrerait une seconde, sans une ordonnance du prési-
dent du tribunal , encourrait la destitution. Les grosses
des contrats de mariage qui ont subi quelques change-
ments par des contre -lettres ne peuvent être délivrées
sans la mention de ces changements.
eaossB , en termes de Commerce, désigne on compte de
12 douzaines d'objets; c'est comme qui dirait une groase
balle (ballot).
oaossE (Contrat à la). V. PrAt a la oaossi.
GROSSERIE , nom sur lequel on comprend, en termes
d'Orfèvrerie, la vaisselle de table et les vases destinés
aux églises.
GROSSESSE (Déclaration de). En Droit, la veuve qui
reste enceinte doit faire sa déchuration de grossesse, et il
lui est donné un cuirateur au ventre pour prévenir toute
supposition de part ( V. es mot). — La femme condamnée
à mort suspend l'exécution en déclarant une grossesse.
GROSSO, ancienne monnaie de compte de Venise, va^
lait 2 centimes 1/2. Le Grossetto en était la 12* partie,
tandis qu'en Dalmatie c'est ai^ourd'hui la 40" partie d'un
ducat , environ 9 centimes 1/2.
GROTE, monnaie de Brème, valant 5 centimes.
(^OTESQUE, mot qui signifia originairement une de
ces figures de caprice, de fantaisie, que l'on nomma aussi
arabesques {V. ce mot). Du temps d'Auguste, le genre,
dit arabesque par les modernes, était déjà en grande fa-
veur à Rome dans la peinture décorative ; Vitruve le blâme
en s'appujrant sur une fh>ide logique, un rigide bon
sens qui ne tient compte ni de l'ingénieux, ni du gra-
cieux dont brillent habituellement les bonnes composi-
tions de ce genre. Au xvi* siècle, les mines souterraines de
quelques monuments antiques, notamment des Thermes
de Titus, à Rome, offrirent beaucoup de fragments de ces
ci4>ricieuses compositions; les Italiens les nommèrent
grotesques, de grotta, « grotte, » mot par lequel ils dé-
signent tout lien souterrain. — Après les gens de goût,
c.-à-d. les Anciens , vinrent les exagérateurs : outrant
une idée qui était déjà un abus, mais que les inventeurs
se faisaient pardonner à force d'élégance, d'imagimoion
fine, spirituelle, et de correction, ils tombèrent dans le
vulgaire, firent de la caricature, et gâtèrent la chose et le
mot. Sous leur lourd crayon et leur imagination triviale,
les grotesques devinrent des figures grimaçantes, où tout
est tourné en défauts, antipodes du gracieux et de Télé-
gant, autant que du sérieux et du correct, enfin où l'art
véritable du dessin n'entre plus pour rien. A l'époque de
la Renaissance, des graveurs s'attachèrent à produire des
scènes imaginidres comiques ou hideuses, ne chordiant
dans la nature humaine que des types défioctueux, dont
ils exagéraient encore les défauts. Les artistes du moyen
&ge cultivèrent ce genre avec prédilection ; ils en firent
abus dans la sculpture décorative, en attachant aux
églises les figures les plus monstrueuses, et sculptant, sur
les boiseries d'intérieur de ces monuments, sur des stalles
de chœur, les scènes les plus scandaleuses et les person-
nages les plus propres à appeler la dérision. G. D— t.
GROnCH, monnaie d'argent d'Egypte, vahint 30 cen-
times.
GROUP, en termes de factage et de messagerie, sac
plein de numéraire et cacheté, qui doit être transporté
d'un endroit à un autre.
GROUPE, en termes de Beaux-Arts, ensemble de
figures réunies dans une action commune et disposées de
manière que l'csil peut les embrasser d'un seul coup.
L'art de grouper les personnages fût porté à son degré le
plus élevé dans l'antiquité, mais disparut avec la civili-
sation romaine, et ne fiit nullement compris pendant le
moyen ftge. Alors on rangea les personnages à la file, on
leur donna des poses forcées et qui pouvaient prêter à
rire, môme dans les sujets les plus graves. Les peintres
de la Renaissance, abandonnant la routine, mirent dans
GTIA
1011
GUB
kxn grovpoB da penonnagM le jea de la nature et Tex-
pveMlon réelle de Taction. Ce progrès, préparé par les
pebiSraB da xv* riècle, fui surtout réalisé par Miobel-
AngiB, qui , en mettant au Jour son fameux carton de la
faerre de Piae» montra aox artistea la voie véritablOé II
n'est pas poaaible de donner des règles pour Tart de
poaper; les modèles qii*ofire la natora sont en nombre
mflni, et c*est à raruate de soine son inspiration en
dwrehant tov^oars les combinaisons les plus naturelles
et les plus parlantes. Mengs, en voulant éteblir des règles
basées sur le nombre impair, s'est perdu dans des rai-
aonnements diiltis et inutiles. Pour la sculpture, l*aati-
rité nous a laissé des groupes très-heureux, le Laocoon,
Tanrean Flamèse, les Dioecures, les Lutteurs de Flo-
nnoe, etc. B. L«
aacMirs, en italien grupetto, assemblage de trois ou
^inatre petites notes de musique, dont la valeur se prend
en avant de la note qui en est alfBctée, et qui s'exécutent
avec rapidité.
GRUE (La), danse des Anciens, instituée, dit-on, par
Thésée, en mémoire de sa délivrance par Ariane, et qn*il
exécuta avec les Jeunes Athéniens tirés du Ud>yrintbe.
Celui <(ni menait cette danse faisidt et défaisait le cercle,
pour simuler les tours et détours du Labyrinthe, et les
autres danseurs le suivaient, à l'imitation des grues qui
en suivent toujours une quand elles volent en troupe.
GRUBRIË. K. ce mot dans notre DictUmnaiirB de RiO'
ifraphie et d* Histoire,
GRYLLES, nom que les Anciens donnaient aux objets
d'art représentant des sujets grotesques. V. GAaiOLiVRs,
dans le Supplément.
GRYMPE, voile des femmes au ix« siècle.
GRYPHE. V. GaiPHB.
GUACAS ou HUACAS, lieux consacrés à la sépulture
chez les anciens Péruviens.
GCADALAJARA (Palais de), palais des ducs de Tln-
Guitado, dans la Nouvelle-Gastille. C'est un monument
de transition entre le style architectural du moyen âge
et celui de la Renaissance. La construction en fut com-
mencée en 1461 par le marquis Hurtado de Blendoza. La
façade principale, d'un développement considérable, est
semée de pointes de diamant qui marquent la jonction
des pierres, percée de fenêtres de diverses dimensions,
et couronnée d'une galerie saillante à mâchicoulis. Un
srand écasson aux armes de la famille, tenu par deux
Satyres, est au-dessus de la porte, qu'encadrent deux
tourelles. Cette porte, ainsi que dans toutes les maisons
de raristocratie espsgnole antérieures au xvm* siècle,
ne se trouve paa an milieu de la façade, parce que, dit-
oo, le droit d'avoir la porte au milieu du manoir était
jadis un privilège de la souveraineté en Espagne. La dis-
tribution intérieure du monument a subi, depuis l'ori-
gine, toutes sortes de modifications qui ont mélangé les
stf k». La cour est entourée de deux galeries superposées,
soutenues, sur chaque côté, par six colonnes : les co-
lonnes de la galerie inférieure sont rondes, en pierre, et
d^ordre dorique, et supportent des espèces d'arcs mo-
resques dont les tympans sont garnis de lions sculptés;
celles de la galerie supérieure sont torses, et les tym-
pans ornés oe griffons; on retrouve à Tentablement le
style grec le plus pur. Dans les appartements, on admire
la soubassements en azuléjos (V. ce mot)^ les plafonds
k caftsons décorés de peintures, les cheminées vastes et
richement sculptées. La Saile des races, ainsi appelée à
cause de ses peintures qui représentaient les armoiries
de la plupart des familles nobles d'Espagne, a été cé-
lèbre par la magnificence de ses dorures, qui la firent
nommer un brasier d'or; on la laisse dans un complet
abandon.
GU ANCHES (Idiome des). On ne possède qu'un mil-
lier de mots environ de l'idiome des Guanches ou indi-
gènes de l'archipel des Canaries. InsuflSsants pour servir
de base à une étude approfondie de cet idiome, ils per-
mettent néanmoins de le rattacher an berbère {r, ce
mot). Cette filiation, indiquée dès le commencement du
xv« siècle par les chapelains qui firent partie de l'expédi-
tion de Béthencourt aux Canaries, ne résulte pas seule-
ment de l'abeence des copulativea qu'on signale chez les
Guanches et les Berbères, ni de leur prononciation égale-
ment dure et gutturale, mais aussi de la nature des mots.
V, S^n-Beruielot, Jf Anotrsi swr les Guatwhes (dans les
tomes ï et 3 des Mémoires de la Société ethnologique de
Paris) ; Da Costa de Blacedo, Remarques ethnographiques
sur la langue origmaU des (les Canaries (dans le Journal
4$ la Société de géographie de Londres^ 1841 ).
G0ABAMIS (Idiomes), Idiomes parlés par les Guaranis
du Brésil (F. ce moi). Les principaux sont le liipt el le
fftioront propre. Ils diflèrent, selon Balbi, de toutes les
langues ne rAmérique. On y remarque une multituds ds
particules, qui souvent n'ont pas de signification par
elles-mêmes, mais qui, en se groupant, forment des.
termes d'un sens précis. Le guarani manque des oom»*
sonnes fet l; 11 snbsiisue 4 cette dernière, dans les noms
étrangers, la lettre r. L'aspiratiott de l'A y est fMqnents,
mais très-adoucie; il a trois articulations correspondant
au ch allemand, à notre gutturo-nasale gn, et à notre i
mouillée. La déclinaison n'a qu'une seule forme ; le gé*
nitif et l'accusatif lui manquent : le pluriel s'indique par
le sens de la phrase, ou à l'aide d'un mot à part dési-
gnant la pluralité. Les quatre premiers noms de nombre
seuls existent en guarani ; pour les autres, les Guaranis
se servent ai^oord'hui des termes espaignols. Il n'y a pas
de verbe substantif. Les verbes ordinaires se conjuguent
au moyen de préfixes indiquant les personnes, les temps
et les modes. Un nom peut devenir verbe par l'a^oncdon
du pronom personnel. On dit que, comme dans le ca-
raïbe et le groénlandais, le vocanulaire des femmes n'est
pas identique avec celui des hommes. V, Ruiz de Mon»
toya, Tesoro de la Itnptia guarani, Madrid, 1639, in-4*t
Bandini , Arte de la Ungua guarani , avec notes de Res*
tivo, 1724, in-4».
GUARIVE (Dialecte). V, CabaIbb (Langue).
GDARRAZAR (Couronnes de}, couronnes d'or troiH
vées en 1858 à Guarrazar, dans la province de Tolède, et
achetées au prix de 100,000 fr. par le gouvernement
fhmçais, qui les a placées au musée de Quny. Elles sont
an nombre de huit, enrichies de pierreries, garnies de
chaînes d'or destinées à les suspendre, et oméà de pen-
deloques à l'intérieur et à la circonférence. De grandes
lettres d'or suspendues à la plus importante de ces ooi^
ronnes forment le nom de Hecceswntkus , roi des Wis!-
goths d'Espagne à la fin du vn* siècle; l'inscription d'une
croix pendante au milieu d'une autre couronne porte le
nom de Sonnica, qui est peut-être celui de la femme du
même prince , et nous apprend que cette couronne fut
ofierte à la Vieroe de Sonaces. Les couronnes de Guar-
razar ftxrent probablement enfouies lors de l'invasion des
Arabes, et elles se sont conservées intactes.
GUDAK, violon à trois cordes des Rosses.
GUDRUN. K. le SuppUmmU.
GUEDRONS. \ V. notre Dictionnaire de Btographm
GUÉRILLAS. ) et d'Histoire.
GUÉGARIA ou GUÈG13E (Dialecte). F. Albanais
GUÉRITE, petite loge ordinairement en bois, quelque-
fois en maçonnerie, servant d'abri anx militaires en fac-
tion. Dans les édifices du moyen âge, on construisait les
guérites k toute hauteur et souvent en saillie ; après la
découverte de la poudre à canon, on fut obligé d'y re-
noncer, parce qu'elles servaient de point de mire aux
boulets, qui les démolissaient en peu de temps. Les gué-
rites sont maintenant établies dans les murailles épaisses,
en façon de niche architecturale.
GUERRE , lutte de deux peuples ou États cpi tendent
à se limiter, à se subordonner ou à se détruure. Tantôt
elle a pour but la conquête, tantôt elle est un moyen de
contrainte pour obtenir l'exécution d'une promesse ou le
redressement d'un grief. Elle décide les différends des
princes plus souvent que ceux des nations. La guerre est
défensive, lorsqu'elle est résistance à l'attaque ; offenswe,
lorsqu'elle est m vasion sur le territoire ennemi. La guerre
qui se poursuit entre deux armées manoravrant l'une
contre rautre est qualifiée de guerre de campagne, par
opposition à la guerre de siège. Une guerre qm a pour but
la réalisation d'une idée est une guerre de principe,
celle qui n'est que la satisfaction d'une passion est nne
guerre dintérét : ces deux caractères sont rarement sé-
parés, parce qu'on invoque toi^ours une idée, un prin-
cipe, pour excuser l'emploi de la violence. Les guerres
essentiellement politiques sont préférables aux guerres
religieuses et aux guerres nationales, parce qu'elles sont
en général plus courtes et moins acharnées; elles am^
vivent peu a la pensée politique qui leur a donné nais-
sance. On a beaucoup discuté sur la Jusdce ou l'i^Justlcs
de la guerre: en fait, il est presque toujours impoaaibis
de démêler de .quel cûté se trouve le bon droit, à sop»
poser qu'il existe dans l'un des deux; certaines confia
nances, l'orgueil blessé, de mauvaises raisons plaidéas
avec plus ou moins d'art, déterminent souvent les hosti-
lités. Il n'y a qu'un seul cas où la guerre se justifie aux
yeux de la raison et de la Justice s c'est celui où un peuple
défend son tonitoire, ses lois, ses croyances. Plus d'une
fois la guerre a été un moyen de civilisation, et peut-être
GUE
1012
GUI
était-eUe dans les lois de la ProTÎdence : tout dépend de
savoir si le penple envahissant était plus civilise que le
peuple envahi, et si la conquête eut pour but et réelle-
ment pour effet la civilisation. Les causes qui donnent
naissance aux guerres entre États peuvent aussi produire
la guerre entre les membres d'une même société poli-
tique : c*est alors une gu9rr$ cwUe ; là encore, celui-là
teid a raison qui défend contre une oppression violente
sa vie, sa famiue, sa liberté, ses croyances, les produits de
son travail.
aonon (Art delà). V, IfiuTAiRE (Art).
GVBUus (Ck)nseil de^, tribunal chargé de Juger les dé-
lits et crimes des militaires. La loi du 13 brumaire an v
(8 nov. 1795) en a créé un par corps d'armée ou divi-
sion militaire de Tintérieur. Il se compose d'un colonel,
Snteident; d'un ofBder supérieur, de deux capitaines,
*nn lieutenant, d'un sous-lieutenant, et d'un sous-offi-
cier. Juges; d'un rapporteur, en même temps Juge d'in*
strucâon; et d'un commissaire du gouT. taisant les fonc-
tions du ministère public. Ces deux derniers magistrats
sont pris parmi les chefs de bataillon ou d'escadron, ou
les capitaines et les adjoints de 1** et de 2* classe de l'In-
tendante militaire : ils ont des substituts du grade de ca-
Sitaine ou de lieutenant. Les greffiers sont adjudants
'administration ou officiers d'administration ; les com-
mis-greffiers sont «yudants sous-officiers. Les débats
sont publics. Trois suffrages favorables entraînent l'ab-
Bolution ; il en faut cinq contraires pour appliquer une
peine. Le Jugement est rendu sans désemparer; il est
exécutoire 24 heures après que la lecture en a été don-
née au condamné, s'il n'y a pas eu pourvoi en révision ;
et, s'il y a eu pourvoi suivi de confirmation , dans les
S4 heures du renvoi des pièces au Conseil. Les délits
commis par des militaires éloignés de leurs drapeaux
sont JugM par les tribunaux ordinaires, tandis que les
individus à la suite de l'armée sont soumis aux Con-
seils de guerre. Dans les places assiégées, le commandant
choisit les membres du Conseil de guerre, dont les pou-
voirs finissent avec l'état de siège, et duquel tous les
citoyens sont Justiciables. Une loi du 18 vendémiaire
an VI a établi dans chaque division militaire un Conseil
de révision (F. ce mot)^ et un second Conseil de guerre
chargé de connaîtra des jugements que celui-d a réfor-
més. -* Dans la Marine, il y a deux espèces de Conseils
de guerre : les uns, siégeant à bord des bâtiments de
l'État, ont pour Justiciables tons les individus embar-
qués ; les autres, placés dans les chefe-lieux des préfec-
tures maritimes, étendent leur compétence à tous les
officiers ou assimilés, ainsi qu'aux individus embarqués,
lorsque leur bâtiment est dans l'enceinte de l'arsenal ,
et Jugent les faits de perte ou de prise de bâtiments
de rËtat. — On appelle encore Conseil de guerre,
Boit à l'armée , soit dans une place de guerre, une réu-
nion d'officiers tenue pour donner un avis sur le parti
à prendre dans quelques cas difficiles. 7. Uiutaibb
(Justice).
GUBBRB (Dédme de), imposition extraordinaire d'un
décime par firanc en sus des droits d'enregistrement, de
timbre, d'hypothèque, de çraffe, de voitures publiques, de
garantie sur les mati^:es d'or et d'argent, de douane, etc.,
ainsi crue sur les amendes et condamnations pécuniaires.
Cette imposition , établie pour une année par la loi du
6 prairial an vn (25 mai 1799), à titre de subvention de
guerre, s'est maintenue d'année en année jusqu'à pr^nt.
u y a même eu quelquefois le doubU décnn$ de guerre.
GUEPRB (Déclaration de). Chez les Romains, la déda-
radon de guerre s'appelait elarigatio, paroe que c'était
une publication à haute voix {clarà voce)^ faite par les
PédaJs, personnages sacerdotaux qui Jetaient en outre
une Javeune sur le territoire du peuple déclaré ennemi.
Jusqu'au milieu du xvn* siècle, on conserva cet usage de
tUre déclarer la guerre par des hérauts d'armes : au
moyen Age, le héraut envoyé an chef ennemi Jetait à ses
pieds un gantelet en signe de défi ; ou bien, il sonnait du
cor sur la ligne de démarcation des parties belligérantes,
et lisait à haute voix le cartel ; ou encore il l'affichait sur
quelque arbre voisin de la frontière. Ai^o^*^!^ ou pro-
clame l'état de guerre par des manifestes rendus publics
et qu'on se notifie de part et d'autre; on rappelle les am-
bassadeurs, chargés d'affaires et consuls, qui, avant de
prendre leurs passe-ports, déposent les intérêts de leun
commettants entre les mdns des agents de quelque na-
<tion amie ; on rappelle ceux des sc^ets qui sont au scorvice
<militidre ou dvil de l'ennemi, et même ceux qui se
trouvent sans fonctions sur son territoire; on interdit
toute relation de oommeroe.
GDERRB (Dépôt de la). V. Dépôt ob la GoasaB, dans
notre Dicttonnair9 de Biographie et dk Histoire,
GUBRRB (Bfinistère de la). V. MmisràsB db la cuEaaB,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d^Histoire.
onEaRB (Petite), simulacre <to guerre dans lequel des
corps de troupes manœuvrent et feignent de combattre
les uns contre les autres, en tirant seulement à poudre.
GDBsaBS (Commissaires des), officiers qui avaient autre-
fois pour attributions de veiller aux besoins des troupes,
de pourvoir aux vivres et aux i4>provisionnements de
toute sorte. Les sénéchaux et les btuilis remplissaient ces
fonctions dans les limites de leurs bailliages, lorsqu'on
1855 on créa un corps d'administrateurs militaires sous
le titre de conducteurs des gens de guerre; on en compta
12 pour toute l'armée. Une ordonnance db t373 autorisa
les connétables, les maréchaux, les maîtres des arbalé-
triers, à nommer, pour les gens gui étaient sous leurs
ordres, des commis ou commissavres des guerres. Cet
essai d'administration militaire fut abandonné au com-
mencement du règne de Charles VII. Les commissaires
des guerres furent rétablis en 1514, sous la dépendance
du ministre de la gueire, et une ordonnance de 1553 leur
accorda le droit de siéger au parlement ; on leur donna
pour chef, en 1614, un commissaire général ^ qui fut
rempUcé en 1635 par des commissaires ordonnateurs.
Leur solde avait été fixée à 480 livres en 1514 : un arrêt
du Conseil , de l'année 1693, donna à ceux qui avaient
payé 50,000 liv. pour la finance de leur charge, 2,200 liv.
de gages et 3,000 Ûv. d'appointements; à ceux qui avaient
payé 40,000 liv.^ 1,600 liv. de gages et 3,000 liv. d'ap-
romtements; à ceux qui n'avalent financé que 30,000 liv.,
,320 liv. de gsges, sans appointements. Pendant le mi-
nistère du comte de Saint-Germain, il y eut 18 commis-
saires ordonnateurs, assimilés aux colonels, avec 6,000 liv.
de solde; 16 conmilssaires principaux, SO commissaires
de 1** classe, 96 de 2*, tous assimilés aux capitaines, avec
5,000, 4,000 et 3.000 liv. de solde. En 1788, la finance
fut portée à 55,000 liv. Un décret du 20 sept. 1791 établit
une organisation nouvelle, qui dura Jusqu'au 29 Janv.
1800, époque où les fonctions attribuées Jusque-là aux
commissaires des guerres furent partagées entre deux
sortes de fonctionnaires, les inspecteurs aux revues et
les commissaires des guerres. Ces derniers comprirent
35 commissaires ordonnateura, 120 commissaires de
l'* classe, 120 de 2*, et 35 adjoints ; supprimés par or-
donnance du 29 juillet 1817^ ils furent remplacés par le
corps de Vlntendance miiitatre, B.
GUET. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire.
GUET-APENS (c.-à-d. guet appensé, prémédité), ac-
tion d'attendre un individu pour lui donner la mort ou
exercer sur lui quelques violences. Le guet-apens dénote
la préméditation, et est une circonstance acêiravante du
crime ou délit auquel il s'applique.
GUÊTRE, pièce de cuir ou d'étoffe qui couvre tout ou
partie de la jambe et le dessus du pied, et qui se boutonne
ou se boucle sur le côté. Les Anciens connurent les
guêtres sous le nom de tibiaiia. Dans l'armée firançaise^
les guêtres furent, à partir du premier Empire, une pièce
importante du vêtement : l'infanterie de ligne et les dra-
gons à pied les portaient montantes au-dessus du genou ;
celles de l*infanterie légère n'allaient qu'à mi-jambe, et
étaient coupées en cœur sur le devant , avec un gland
et une houppe de couleur. En 1810, les guêtres de l'in-
fanterie de ligne descendirent au-dessous du genou. Au-
jourd'hui l'infanterie française porte des guêtres de cuir
pendantl*hiver, et de toile grise pendant l'été.
GUETTE, nom qu'on donnait quelquefois à la tour la
plus élevée d*an château, parce qu'elle servait à faire le
guet.
GUEULE, mot employé comme synonyme de Cymatse-
(V.cemoÇj,
GUEULES (de l'arabe gui , rose), en termes de Bla-
son, désiçae la couleur rouge. C'était la plus honorable ;
elle n'était portée que par les princes ou ceux auxquc^
la permission en avait été octroyée, et exprimait la Jus-
tice, l'amour de Dieu, la vaillanœ. la magnanimité.
L'émail de gueules est figuré par des nachures verticales
sur le fond de l'écu.
GUI ou BOHE. grande vergue en arc-boutant qui sert
à étendre la partie inférieure de la brigantine. Le gui
tient par un bout au mât d'artimon, sur lequel il tourne
comme sur un centre ; par l'autre, il sort d'un quart de
sa longueur en dehon du bâtiment. Placé trè»-près dv
pont, u y cause un encombrement regrettable.
GUI DE BOURGOGNE, chanson de geste qui appartiea*
GUI
1013
GUI
«1 cyde des romaus carlovingieiis (F. ce mot)^ et qai, à
«n Joger par la langue et par certains détûia de moeurs et
de costume, dut être composée à la fin du xii* siècle ou
au commencement du xm*. Le sujet se rapporte à la con-
^ète faboleose de TEspagne par Gharlemagne. Il y a déjà
tï ans qae la guerre est commencée, lorsque de Jeunes
cavaliers, dont les pères servent sous Tempereur, dé-
cernent la royauté k Tun d*entre eux. Gui de Bourgogne,
personnage qui n'a rien de commun avec celui que les lé-
gendes font figurer parmi les paladins de Gharlemagne
et que Ton trouve dans la chanson de Fierabrcu (V^ee
mot). Gui, au lieu de gouverner paisiblement la France,
enjoint à ses compagnons, après avoir reçu leur serment
de foi et d'hommage, de le suivre en Espagne, où,
^près de brillants exploits, il va se soumettre à Gharle-
magne, et l'aide h prendre la ville de Luiseme, vaine-
ment assiégée depuis sept ans. — Le Trouvère qui a écrit
Gui de Bourgogne est inconnu ; il possède sur ses con-
tempondns une supériorité évidente dans les scènes dia-
loguées. Son poëme n'a été conservé que dans deux
manuscrits du xm* siècle : l'un, conservé au Musée bri-
tannique de Londres, a fait partie de la bibliothèque Har-
léienne ; Fantre, qui est le meilleur, provenant du mo-
nastère de Harmoutiers, et conservé à la bibliothèque de
Tours, est celui qu'ont publié BiM. Guessard et BAichelant
dans la collection des Anciens poëUi de la France, Paris,
1850, ÛM6. B.
GUI DE NAMTEUIL, chanson de geste qui se rat-
tache an cycle des romans carlovingiens (F. ce mot)» Gui
de Nanteuil est flls de Gamier de Nanteuil et d'Aye d'Avi-
gnon; n a pour aïeul Boon de Nanteuil, le second des
douze fils de Doon de Mayence. S'étant rendu k une cour
plénière tenue par €3iarlemagne» il reçoit de ce prince la
faveur de porter l'oriflamme. La famille de Ganelon en
est Jalouse : Hervieu de Lyon, fils du fameux traître Ma-
caîre et neveu de Ganelon, qui a récemment fait à l'em-
pereur un riche présent pour obtenir la main de la belle
Églantine de Gascogne, accuse Gui d'un meurtre. Celui-ci
demande le combat, et Hervieu n'échappe à la mort que
par une lâche intervention des siens. Pendant la mêlée,
Goi a frappé le Jeune Hardré, l'une des espérances de la
famille de Ganelon : poursuivi jusque sous les murs de
Nanteuil par Gharlemagne et Hervieu, il voit arriver à
son aide une armée de 100,000 hommes, sous les ordres
de Ganor, le second époux d'Aye. La victoire n'est plus
un instant douteuse; Hervieu périt sous les coups de son
rival ^ et l'empereur, couvert de honte et de ridicule, est
réduit à demander la paix. Églantine épouse Gui de Nan-
teuil. — Ce roman, de 3,000 vers environ, fait suite
immédiatement à celui ^Aye (F. ce mot); il est l'œuvre
d'un trouTère inconnu, et semble avoir etk composé à la
fin du xu* siècle. On n'en connaît aujourd'hui que deux
manuscrits ; l'un, appartenant à la hibliothèque de la
Faculté de Médecine de Montpellier; l'autre, en fran-
çais fortement italianisé, conservé dans la bibliothèque
de S^Marc, à Venise. Ils ont servi pour la publication
du (rw de Nanteuil de P. Meyer, lequel fait partie de la
collection des Anctens poëiês de la France, Paris> 1861.
GUI DE WARWYKE. V. le Supplément.
GUIBERT D'ANBRENAS, 9* branche de la chanson de
GuiUaumê au court nez. Aimeri de Narbonne, chargé de
gloire et d'années, n'a plus qu'un flls à pourvoir. Il lui
donne la cité d'Andrenas, en Espagne, qu'il possédera
rmd il en aura chassé les mécréaiats. Il part à la tête
tous ses parents et amis pour mettre le siège devant
Andrenas. Cette ville est livrée par la belle Guète ou Au-
^ète, qui reçoit le baptême et épouse Guibert. — Cette
chanson existe à la Bibliothèque nationale de Paris dans
un seul manuscrit du xnr* siècle. V. Histoire littéraire
de la France, tome XJUI. H. D.
GOIBRE, en termes de Marine, synonyme d'^p«ron
{V. ce mot),
GUICHET, petite porte de service pratiquée dans une
grande, pour éviter l'embarras ou l'inconvénient d'ou-
vrir les grands battants. On en voit aux portes des pri-
sons, des châteaux, des édifices publics. A Paris, on donne
le nom de ffuiehete du Louvre aux arcades de ce monu-
ment sons lesquelles passent les voitures et les piétons. On
appelle aussi guichets de petites ouvertures pratiquée»
dans les fendtres ou les portes, comme aux prisons et aux
couvents, pour pouvoir parler du dedans au dehors sans
être obligé d'ouvrir la porte. De là est venu le nom
de ffuiehetiers donné aux geôliers de prison. — En Hy-
dnnlique, les guichets sont de petites portes pratiquées
dus les grandes portes d'écluses ; elles servent à Itusser
l'ean en ^foantité moindre et avec moins de vio-
lence ; on les manoeuvre au moyen de crics et de roues
dentées fixées sur la tête des grandes vannes.
GUIDE (La), en termes de Musique, partie qui entre
la première dans une fugue, et annonce le sujet.
Goms, nom que prennent les sous-officlers sur lesquels,
dans les évolutions, les hommes d'une troupe doivent
régler leurs alignements et leurs mouvements.
GUIDE-ACCORD. V. au Supplément.
.GUIDES, un des r^ments de cavalerie de la garde
impériale en France. Un décret du 10 mai 1852 leur a
donné pour uniforme un dolman et une veste de drap
vert, avec brandebourgs de laine jaune, un pantalon ga^
rance, un colback avec flamme garance et aigrette en
crins blancs. V. Goidbs, dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
GUIDON, mot qui, après avoir désigné une espèce
particulière d'étendard ( V, notre Dictionnaire de Biogra^
phie et d^Histoire)jt ne s'applique plus, dans l'armée de
terre, qu'à un petit drapeau carré dont le manche peut
entrer dans le canon du fusil , et qui sert aux aligne-
ments. Dans la Marine, le guidon , plus court et plus
large que la flamme (K. ce mot), est employé pour les
signaux. — Dans le Plain-chant, on nomme ^tion un
petit signe qu'on place au bout de chaque portée, pour
indiquer la place qu'occupe la 1** note de la portée
suivante.
GUIGUE. V. GiG.
GUILDER. V. GoLD.
GUILDHALL, c-hré. en anglais Salle de la corportt»
tion, nom donaé à l'Hôtel de Ville de Londres. Ce mo-
nument, construit en 1411, brûlé presque entièrement
en 1669, et aussitôt réédiflé, n'a eu sa façade terminée
qu'en 1789. A l'entrée se trouvent les deux célèbres sta-
tues de Gog et de Maeog. La grande salle, qui a 51 met
de longueur sur 16",33 de largeur et 18'»,66 d'élévation,
peut contenir de 6 à 7,000 personnes : c'est là qu'ont lieu
les élections parlementaires et munidptdes, les réunions
autorisées par le corps des aldermen, les repas, fêtes et
bals donnés par la ville de Londres.
GUILLAUME, monnaie d'or de Hollande, valant
20 fr. 70 c.
GoiLLAVHE (Les Enfauccs), 4* branche de la chanson
de Guillaume au court nez. Aimeri de Narbonne envoie
son fils à la cour de l'empereur Charles. Le Jeune homme
rencontre en chemin une troupe de Sarrasins ; il les met
en déroute , et fait savoir à la belle Orable, fille du roi
d'Oran^, qu'il prétend l'épouser un jour. II arrive à
S^Denis pour le couronnement de l'empereur, et y montre
tant de bravoure et d'adresse, que Charles l'arme cheva-
lier. La vie de Guillaume est ensuite remplie par une
long^ue série d'exploits, tels que le Couronnement du rot
Louis, le Charroi de Nismes, la Prise d'Orange, la So-
taUle d^Aleschans. Enfin Guillaume, devenu vieux, songe
à son salut éternel, et alors commence son Moniage, qui
est la 13* branche de la chanson. Il construit le monas-
tère de Gellone, non loin d'Aniane. Chassé bientôt par
les moines d'Aniane, qui redoutaient sa force et sa vio-
lence, il construit dans «une forêt aux environs de Mont-
pellier la fameuse cellule de^S^-Guilhem-du-Désert Enfin
il est appelé par l'empereur pour défendre Paris assiégé
par les Infldèles. Reçu d'abord dans la maison de Ber-
nard du Fossé ( maison devenue historique et qui est en-
core mentionnée comme telle au xv* siècle), il délivre
Paris en tuant le géant Isoré. L'endroit où eu^ lieu le
combat s'appelle encore Tombe fsoùre; c'est la principale
entrée des catacombes au delà de l'anc. barrière d'ArcueU.
Guillaume retourne dans son ermitage, où son dernier
exploit est une lutte corps à corps avec le Diable. H meurt
en odeur de sainteté. — Ce Guillaume n est point un per*
sonnage imaginaire. Gharlemagne l'avait nommé gouver-
neur de Toulouse, et, à ce atre, il soutint de longues
guerres contre les Gascons, qui prétendaient conserver
leur indépendance. La tradition, en se transmettant d'&àe
en à^ se transforma et s'agrandit ; Guillaume devint le
vainqueur des Sarrasins, le conquérant de l'Italie ; on lui
attribua les exploits des Normands. Quant à la sainteté
de sa vie monastique, elle est attestée par un témoin
oculaire, le moine Ardon, qui écrivit en 822 la vie de
S^ Benoit. Les Enfances Cruillaume sont conservées à Ia
Bibliothèque nationale de Paris dans quatre manuscrits i :
le Moniage se trouve aussi dans ouatre manuscrits in«. ^
complets, dont un appartient à la oibliothèque de l'Ar- «
seual. V. Histoire littéraire de la France, t. XXH. H. D. ^
GDiLL&oiiE AU coDST NEZ, srande chanson de geste sur
les exploits d' Aimeri de Narbonne, de ses enfants et pe-
tits-enfants. Cette chanson prend le nom du plus célèbre
)
GUI
1014
GUI
des enCuits d*Aimeri , Gnillanme aa eonrt nei, antroment
dit GaiUaome d'Oranee, GoilIaaiDe Fierebrace, SMaoîl-
laume de Gellone. Elle se compose d*environ 120,000
Ten, et on la divise en 18 branches, savoir :
I. Garin de Montglane;
n. Gérard de Viane;
m. Aimeri de Narbonne;
IV. Les Enfances Guil-
laume ;
V. Le Couronnement du
roi Louis;
VI. Le Charroi de Nismes;
Vn. La prise d'Orange;
VIII. Beuve de Comarchis;
IX. Guibert d'Andemas;
X. La mort d'Aimeri de
Narbonne;
XI. Les Enfances Vivien ;
XII. La chevalerie Vivien
etlabataiUed'Ales-
chans;
Xm. Le moinlage Guil-
laume;
XIV. Raînouart;
XV. La bataille de Loqui-
fer;
XVI. Le moiniage Rai-
nouart;
XVn. Renier;
XVni. Foulque de Candie.
V. les articles consacrés à ces divers romans. H. D.
GUILLEBfETS, signe typographique qui ae place avant
et après une citation. Il est ainsi figuré : « ». L*usa^
■'en introduisit pour la première fois dans l'imprimene
en 1546, et Ton croit qu'un certain Guillemet en fut Tin-
yenteur.
GUILIXXIHIS, ornement en forme de réseau ou de
lignes ondulées, dont on embellit les pièces d'orfèvrerie.
Il se pratique au moyen d'une machine appelée tour à
guillocher, — En Sculpture, guUlochig est synonyme de
grecqu» et de bàtoiu rompus,
GUILLOTINE, instrument de décapitation usité surtout
en France. Cest un pesant couteau d'ader, à tranchant
oblioue, suspendu entre deux poteaux, abaissé ou relevé
par le simple Jeu d'une corde, et qui tombe sur le cou
du condamné garrotté horizontalement sur une planche.
La guillotine est ainsi appelée d'un médecin nommé Guil-
lotin, député à l'Assemblée constituante de 1780; non
qu'il en soit l'inventeur, mais parce qu'il l'indiqua comme
moyen uniforme d'infliger la mort, sans distmction de
noblesse ou de roture, et comme le procédé le plus
intMnpt, le plus sûr et le plus doux; Antoine Louis, se-
crétaire de l'Académie de Médecine, et le mécanicien
Schmidt, venaient de la perfectionner. Elle porta quelque
temps le nom de la proùt Louwm^ la pettU Loution ou
Louueit9^ par allusion au docteur Louis. Des machines
analogues existaient antérieurement : Jean d'Auton ( His-
toire ae Louis Xll) mentionne en 1507 la mamnaja em-
ployée à Gènes; Robertson parle d'un instrument iH[>pelé
moàdsn en Ecosse pour le supplice des nobles. D'an-
dennes gravures allemandes de Pents, de H. Aldegrever
et de Lucas Cranach offrent l'image de pareils instru-
nenta de supplice, ainsi que l'ouvrage publié en 1555
r Achille Bocchi sous le ntre de SymboUcœ quœsiianes
u»to«rfo gensrs. On voit dans les Mémoires de Puy-
■égur que le maréchal de Montmorency fut décapité à
Toulouse, en 163S, au moyen d'une àolwrs glissant entre
deux poutres. Avant la Révolution, on Jouait à Paris, sur
le thé&tre d'Audinot, une pantomime des QwUrs fUs
Aymon, où l'un des personnages était exécuté de cette
flBJçon. V. Dubois, Recherches historiques et physiolo-
guiues sur la guillotine, Paris, 1843, et un article de la
moue britannuiue, décembre 1846. B.
GUIMBARDE , instrument ou plutôt i^pareil vibratoire
en fer, très-commun en Allemagne et dans les Pays-Bas.
Ite forme à peu près ovale, comme l'anse ou poignée des
anciens tire-bouchons, il oifre au milieu une languette de
même métal , élastique, scellée par un bout au haut du
eorps de Tinstrument , et dont rautre bout est recourbé
pour que le doigt puisse aisément l'accrocher. On ap-
plique la guimbarde contre les dents, et on l'y assiOetut
par la pression des lèvres. Pour en jouer, on agite la lan-
guette avec le doigt ; en vibrant elle produit un son , qui
vénérait monotone n ses intonations n'étaient modifiées
par Télargissement et le rétrécissement des lèvres. Les
enfanta font de la guimbarde un Jouet plutôt qu'un in-
strument ; mais il rest trouvé des artistes qui en ont tiré
de prodi^eux effets, entre antres Koch, Eulenstein, Ku-
nert, Deichmflller, Scheibler, an point de se ftdre ad-
mirer dans les concerta. Ces artistes, pour exécuter des
morceaux compliqués et passer dans divers tons, se ser^
talent successivement de plusieurs guimbardes, et les
échangeaient sans interrompre le cours de la phrase mu-
iicale. Scheibler avait façonné, sous le nom d*iliira, un
instrument composé de douie guimbardes, pour lequel il
écrivit une Méthode. B.
GDimàaDB, grand chariot à S ou 4 roues, servant au
transport des marchandiBesi ou des récoltes des champa«
GuniBAani (Jeu de). V. BUaiéa (Jeu de la).
GUIMPE (de l'allemand wùnpel, voile), morceau de
toile qui couvre le cou et la poitrine des relif^eusas, et
qui quelquefois encadre aussi le visage. Le vieux verbe
guimper signifiait se faire religieuse. Les femmes do
monde portent aussi des collerettes en forme de guimpe.
GUDlDER, en termes de Marine, hisser sur les bea-
màts les mâts de pexroquet et de cacatois. On noncme
ffuindaiU la plus grande hauteur à laquelle on puisse
élever une voile; ffuindal , une machine à hisser les fa^
deaux (^u'on doit embarquer sur les navires ; guindectu ,
un treuil à axe horixontal qui sert à retenir les c&bles et
à lever les ancres.
GUII9ÉE^ monnaie. T. notre DKtvmnaxre de Biogra-
phie et d'Histoire.
GUINGUETTE (du vieux mot guinguet , petit vin ; dé-
rivé lui-même de gwnguet, petit, mince, étroit), cabaret
hors de la ville, par delà les barrières, où le peuple va
boire et danser. — On donnait autrefois le même nom
à une voiture découverte à deux roues, qui fut ensuite
appelée PhaéUm,
GUIRLANDE DE JULIE (La), recueil de madrisaux,
que le duc de Montausier fit composer par les beaux
esprits du temps, et dont il composa une partie, en l'hon-
neur de M^* Julie-Ludne d'Angennes de Rambouillet,
dont il était épris depuis 10 ans. C'est un volume manu-
scrit sur vélin, de 00 feuillets in-folio ; 29 contiennent
chacun une fleur peinte en miniature, et les autres un ou
plusieurs madrigaux , au nombre total de 63, se rappoi^
tant à chaque fleur. Après trois feuillets de garde, on
trouve le faux-titre, composé d'une çuirlande de fleurs au
milieu de laquelle on lit : La Guirlande de Julie, Après
trois autres feuillets blancs, on rencontre encore une mi-
niature rel^résentant, au milieu d*un nuage. Zéphyr
tenant une rose à la main droite, et, de la gauche, une
guiriande de 29 fleurs qu'il souffle légèrement sur la
terre. Le volume, relié en maroquin rouge, avec des J. L.
enlacés (Julie-Ludne ), fut envoyé, en 1641 , à M^ de
Rambouillet, le jour de sa fête, comme un bouquet plus
délicat et plus durable ^ue celui de véritables fleurs.
Les beaux-esprits qui assistèrent Montausier dans sa
galanterie lurent : Antoine Amauld, Amauld d'Andilly,
Amauld de Briotte marquis de Pomponne, Chapelain,
Colletet, Conrart, CorbeviUe, Desmarets de Saint-Sorlin,
l'abbé Habert, le capitaine Habert, Malleville, Martin,
Monmort, Racan, Scudéry, et Tallemant des Réaux. D
n'y a pas de bien grands poôtea dans cette eapèce de
Eléiade, et l'ouvrage s'en ressent : c'est de l'esprit alam-
iqué et vulgaire, fade et froid, tourné dans des vers ex-
trêmement médiocres. Les deux madrigaux les plus passa-
bles sont le quatrain suivant de Desmareta sur la violette '
Modeste en ma eonlenr, modeste en moa i^oUf
Franche d*ambition, je me eache eou Therbe;
Mal» ei enr TOtre firont Je imie me roir nn joor,
La plQ» httmble des fleurs sera la plus superbe.
et trois stances do Tallemant des Réaux sur le li$
Devant Tons Je perds la victoire
Que ma blanchenr me fit donner»
Kt ne prétends pins d'antre gloire
Qne odle de tous oonronner.
Le del , par nn bonheur Insigne»
Fit choix de mol seul autrefois.
Comme de la fleur la pins digne
Pour fsire présent k nos rois.
Mais si J^obtenals ma requftte.
Mon sort serait {Ans glorieux
D'être monté sur Totre tôte
Que d'être deecendn des deux.
Montausier composa 16 pièces dans la Guirlande de sa
chère Julie : mais s'il tat inspiré par l'amour, il ne le fut
guère par Apollon. L'écriture seule de ce recueil , en belle
ronde, de la main de Jarry, noteur de la chapelle du roi ,
est Irréprochable; les miniatures, peintes par Robertet*
artiste célèbre alors, ne valent guère mieux que la poésie.
Néanmoins, ce cadeau ai galant exdta une admiration gé*
nérale; il avança un peu les ailUres de Montausier, qin«
quatre ans après, obtint enfin la nudn de Julie. — La di>»
cbesse conserva toii^ours précieusement ce livre; lor^
qu'elle mourut, en 1671, le duc le recueillit. Après
Montausier, la Guirlande passa à la duchease de Gruinol
dlJzès et à aes héritiers, puis au duc de La Vallière; ud
Anglais l'acheta 14,510 livrée; en dernier lien, elle appaiw
tenait à M"** de ChAtillon. Une copie du texte a été im*
primée, Paris, 1784, petit in-S», et 1818, in-18. G. D— T.
GUISARBiE, lança dont le fer avait la famé d'an»
GUL
1015
<rH2
hache à deux tranchants, ou hache qnl portait un dard au
uuunet de s» douille.
GUITARB (dà grec kUhara), instrament de musique
k cordet. I^ corps en est forme de deux tables parallèles,
l'une en ssqtin , rautre en érable ou en acajou, assemblées
par une édiaêe de 8 à 10 centimètres de hauteur. Il
oAre deux dépreasions latérales, comme le riolon , avec
cette différence qu*il n'y a point d*ang^es, tout étant
arrondi. Le manche, divisé par des kmchis sur lesquelles
so pose les doigta de la main gauche, et placées de façon
à correspondre à autant de demi-tons, est terminé par un
tiUet, et garni de chevilles qui servent à monter ou à des-
cendre les cordes de Tinstrument, fixées par l'autre ex-
trémité sur on chevalet fort bas. H n'v eut d*abord que
4 cordes, puis 5; en 1773, Vanfaek, de l'Académie royale
de musique de Paris, imagina des guitares à 12 cordes.
Aujourd'hui on en met six. De ces cordes, les trois
plus graves, dites bourdons, sont en sole revêtue de lai-
ton, et les trois autres en boyau.* On les accorde par
quartes Justes en montant, excepté la 4* et la 5*, entre
lesquelles il n'y a qu'une tierce majeure : on obtient
ainsi , du grave à l'aSgu, les notes mt, la, ré, sol, si, mi.
La mnsiqoe pour guitare s'écrit en clef de sol; mais les
soQs donnent l'octave basse des notes cpii les repré-
seotent. On les produit en pinçant les cordes avec la main
«Iroite. An milieu de la tMe supérieure est pratiquée
une roêoee on rosette, grand trou circulaire au moyen
duquel les sons vont retentir dans la caisse, d'où ils sor-
tent «mpUfléa. La guitare est un instrument de peu de
ressoorceB; les sons en sont voilés et les arpèges mono-
tones. Elle ne peut guère servir qu'à accompagner la voix.
En ofatre, il n'est pas facile de Jouer sur tous les tons :
aussi art-on souvent recours à un petit mécanisme qui ,
s'adaptant an manche, hausse tout le système d'un ton et
demi , oo à la scordatura (désaccordage), qui n*élève les
sons Cfoe d'un demi-ton. — La guitare a existé dès les
temps anciens : on en trouve la figure sur les monuments
de rÉgypte. Les Arabes l'apportèrent en Espagne, où elle
n'a pas cessé d'être en vogue. En France, elle fut connue
depuis le xi* siècle sous le nom de guttariM. Dans notre
siècle, Sor, Aguado, Huerta, Meissonnier, Carcassi, Ga^
mUi , ont été assez habiles sur la guitare pour en foire
un instrument de concert; ils ont laissé des Méthodes.
— Kn 1823, Staufer, luthier de Vienne, inventa une
çuitare d^amour, plus grande que les guitares ordinaires,
avec fond bombé, et montée de 7 cordes. Les sons aigus
ont de la ressemblance avec ceux du hautbois, et les sons
grares arec ceux du corps de basset. Un autre Allemand
a imaginé à Londres la guitare à piano : le doigté pour la
main gauche est le même que dans la guitare ordinaire ;
mais la main droite Joue sur un clavier à six touches
adapté à la partie droite et inférieure de la table d'har-
monie, et qui fait sor^r du trou de résonnance autant de
petits marteaux pour fîrapper les cordes. B«
GDITERNE. K. GurrASB.
GUIVRE. V. Givaa.
CUIVRÉ, Î^.ToRB.
GUIZANDO (Taureaux de). V. Espagrb (Architec-
ture en ).
GULDEN ou GUILDER, monnaie d'Allemagne, dont la
valeur n'est pas partout la même : le guld de Manheim
Tant 2 fir. 85 c D^ns le Brunswick, on distingue le guld
de 1784 (2 fr. 89 c), le guld commun (2 fr. 59 c), et
le guld de 1795 (2 fr. 89 c). Toutes ces monnaies sont
d'argent. Dans la Hesse-Dsrmstadt, le guld n'est qu'une
monnaie de compte,, qui vaut 2 fr. 16 c. Le guld d'or de
Hanovre vaut 8 fr. 70 c.
GULLIVER (Les Voyages de), célèbre ouvrage de Swift,
publié en 1726. Il est <Uvisé en quatre parties, dont on
lit principalement les deux premières : ce sont les voya^
dans Tempire de LUlijnU et dans le royaume de Broàdm^
gnag. L'auteur disait dans une lettre qu'il adressait à
l^pe, un an avant Timpression de son livre : « Le principal
bot qae je me propose dans tous mes travaux est de vexer
le monde plutùt que de le divertir... Voilà la grande base
de misan&ropie sur laquelle J*ai élevé tout l'édifice de
mes Voyages. » Cest, en eflét, la faiblesse, la vanité de
ses 8em]>lâ>les que SwUt a voulu faire ressortir dans une
fiction aussi ingénieuse aue hardie; en conduisant suc-
cessivement son héros des un peuple de pygmées et
chez un peapJe de géants, il le place dans des situations
et des embarras où la misère humaine apparaît sous le
Jour le plus ridicnle, et il fait Jaillir de cette combinaison
une foule de contrastes inattendus et de comiques effets.
• Le voyage à Lillfput , a dit Walter Scott , est une allu-
doo à la OMir et à 1» politique de l'Angleterre; sir Robert
Walpole est peint dans le caractère du premier mlnistie
Flimnap. Les factions des tories et des whigs sont déai*
gnées par les factions des talons hauts et des talons
plats ; les petits boutiens et les gros boutiens sont les pa^
pistes et les protestants. Le prince de Galles, qui traitait
également bien les whigs et les tories, est peint dans le
personnage de l'héritier présomptif, qui porte un talop
haut et un talon plat. Bléfuscu est la France, où Ormond
et Bolingbroke avaient été obligés de se réfugier. Dans le
voyage à Brobdingnag, la satire est d'une application plus
géniale : c'est un jugement des actions et des senti«
ments des hommes porté par des êtres d'une force im-
mense, et en même temps d'un caractère froid, réfléchi
et philosophique. Les mêmes idées reviennent nécessai-
rement; mais, comme elles sont renversées dans le rêle
que Joue le narrateur, c'est plutôt un développement
qu'une répétition. On ne saurait trop louer l'art infini
avec lequel les actions humaines sont partagées entre ces
deux races d'êtres imaginaires pour rendre la satire plus
mordante; à Lilliput, les intrigues et les tracasseries po-
litiques, qui sont les principales occupations des gens de
cour en Europe, transportées dans une cour de petites
créatures de six pouces de haut, deviennent un objet de
ridicule, tandis que la légèreté des femmes et les folies
des courtisans, que l'auteur met sur le compte des per-
sonnages de la cour de Brobdingnag, deviennent mons-
trueuses et repoussantes chez une nation d'une stature
effrayante. » Les deux dernières parties des Voyages dt
Gulliver offrent plus de désordre et de négligence que les
premières ; les fictions y sont encore plus hardies, mais
moins heureuses. Toutefois , c'est la même verve sati-
rique. Dans le voyage à Laputa, Swift tourne en ridicule
les géomètres, les astronomes, les philosophes contemplar
tiCi,.]es amateurs des sciences abstraites, et les faiseurs
de projets. S'il évoque, à propos de l'Ile des Magiciens,
4es ombres de plusieurs personnages illustres de l'anti-
2uité, c'est encore pour faire des nlvélations malignes et
es sidllies de scepticisme historique. Chez les Houyhnms,
il pousse le sarcasme Jusqu'à la violence, et le dédain des
bienséances jusqu'au cynisme, pour sctisfaire sa haine
contre la société et contre l'humanité. En somme, les
Vouoges de CMlwer, écrits d'ailleurs avec un naturel
parfoit, avec une simplicité de langage inimitable, avec
une fécondité dlmasination qui les fait lire par les en*
fants comme de véritables contes de fées^ sont pour les
hommes faits une triste et amère ironie. Les tableaux de
Swift découragent et ne corrigent pas : ce n'est point aux
vices et aux travers, mais à la nature même de l'homme
qu'il fait le procès, et l'homme trouve en lui un accusa^
teur passionné. Sa philosophie est encore plus chagrine,
plus désolante que celle de La Rochefoucauld, en oui ,
disait-il , il reconnaissait son caractère tout entier ; et L'on
ne peut s'étonner que Voltaire, qui le rencontra souvent
dans la société de Pope et de Bolingbreke, ait professé
pour lui une grande admiration, car ils avaient tous
deux la même insouciance en morale, le même mélange
de malice et de gaieté, le même art d'exprimer avec bon*
homie les idées les plus fines et les plus piquantes. B.
GUSU , instrument de musique russe. C*est une sorla
de harpe horizontale, montée de cordes en métal.
GUTTURALES, lettres qui se prononcent du gosier (en
latin guttur) i telles sont, en français, les consonnea
g dur, c dur, k, q (gale, cale, kilo, quand). Plusieurs
grammairiens i^pellent ces consonnes palatales. En grec^
les gutturales y^ x, y* sont quelquefois aussi appelées po»
totales, fin allemand, on compte comme gutturales e, g,
cA, œ. En espagnol , o) et i ont nn son guttural tout par^
ticulier. P.
GUTTUS, petit vase de libations pour les sacrifices^
chea les anciens Romains. Il ne laissut couler la liqueur
que goutte à goutte.
GUYOT (Bible). T. Bdlb.
GUZERATE ou GOUDJERATE (Dialecte), dialecte ia»
dien, parlé non-seulement dans la presqu'île de Guzerate,
mais duis plusieurs provinces arrosées par la Nerbuddha^
parmi les Parais attachés à la religion de Zoroastre; VL
est fi^ voisin de l'hindoustani ( F. iNDnNifBS^ Langues);
c'est la même simplicité de déclinaison et de conJugai<i
son; les règles de la qrntaxe sont à peu pfès identiques
aussi dans les deux idiomes. Le guierate a été assez itit**
tement modîfié par l'invasion musulmane. Son écriture
se distingue par l'absence de U barre horiaontale qoi^
dans d'autres écritures de l'Inde, réunit la partie aupé*
rieere des canctères. K. Drummond, niwtraiions of
the ifrmmnatieal parts of the GuMeruttee, Makratta and
English langmgss, Bombay, 1808.
GYM
lOU
GYN
GUZLA, instrument de musique des Hljnriens. Cest
une sorte de violon très-simple, puisqu'il n'y a qu'une
seule corde de crins tressés. On en Joue avec un archet.
GYBINASE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de BiO"
graphie et d^ Histoire,
GYMNASB DRAMATIQUE, Pun dcs thé&tres de Paris, ouvert
en 1820, sur le boulevard Bonne-Nouvelle. Il ne devait
6tre qu'une espèce de succursale du Conservatoire, un
thé&tre d'essai, où des élèves se seraient exercés dans des
fragments de pièces, tout au plus dans des comédies en
un acte. Mais, 9^ à la protection de la duchesse de
Berry, en l'honneur de laquelle il prit le nom de Théâtre
de Madame, il étendit ses attributions^ et ce fut pour lui
que Scribe composa bon nombre de ses plus ingénieux
outrages. Après la Révolution de 4830, il reprit son nom
de Gymnase. Les pièces de Scribe, de Mélesville, de
Bayard, de Dumanoir, lui donnèrent une vogue durable,
que «ut entretenir le talent d'acteurs tels que Perlet,
GonUer, Bouffé, FerviUe, Numa, M-» AUan, Léontine
Fay (Yolnys), Jenny Vertpré, Rose Chéri, etc. Le Gym-
nase a obtenu le droit de représenter des comédies de
genre en 3 actes, et même en 5 actes, moyennant une
autorisation spéciale.
GTWIASB MJUTAïaK»
OTMIIASB MUSICAL.
GYMNASURQUE.
GYlfNASTE.
GYMNASTIQUE.
GYMNIQUES (Jeux).
GYMNOPÉDIE.
GYMNOSOPHISTES.
GYNÉCÉE.
V. ces mots dans notre 010-
tionnaire de Biographie «f
d^Histoire.
H
H
n, 8* lettre de l'alphabet latin et des alphabets qui en
dérivent. Sa forme vient de celle de Véta grec (H, t)), ca-
ractère qui remplaça Vesprit rude comme signe d'aspira^-
tion. Les Latins n'employèrent pas toujours la lettre H
dans tous les mots où on la voit a^Joiurd'hui, et Cicé-
ron se plaint qu'on l'ait introduite : toutefois, comme le
latin n'avait pas de signes simples équivalents du 9 et
du X des Grecs, il fut avantageux de se servir de TH corn-
binSs avec le P et le G pour Ta transcription de ces carac-
tères. On y trouve même l'H employée pour le ^ (halo,
de xoXàoi ; hortus, de T^ç^^i)* — En français, on distingue
Vh muette et Vh aspirée. Cependant il n'y a véritable-
ment pas d*h aspirée : auUur et hauteur se prononcent
de même. La seule valeur oue présente, au commence-
ment d'un mot, l'H dite aspira, est celle du tréma : son
effet est d'em'pècher !a liaison de la consonne finale du
mot précédent avec la voyelle qui suit l'H {les hasards)^
ou l'élision de certaines voyelles qui aurait lieu autre-
ment {le hautf la hame). Quant à la manière de recon-
naître les deux espèces d*H, l'abbé d'Olivet dit que l'H
doit s'aspirer dans les mots d'origine non latine {la
hanche, le hasard) \ que, pour les mots qui ont une étjr-
mologie latine, l'H s'aspire anand le primitif latin s'écrit
sans H {le haut, dérivé d'altus; il hurle, dérivé d'u/u-
lare)^ et ne s'aspire pas quand le primitif s'écrit avec
une H {Vhomme, l'hutoire, dérivés de homo, historia).
Ce ne sont pas là des règles absolues : ainsi, héros et hé-
rdUme, formés d'un même radical, ont, le premier l'A
aspirée, et le second l'A muette. Les Anglais et les Alle-
mands aspirent l'H au commencement des mots bien plus
fortement que les Français; les premiers ont des mots
qui commencent par une H muette, les seconds n'ont ce
genre de lettre qu'au milieu des roots. En allemand, l'H
placée après une voyelle et devant une consonne ( ehre,
tkn, wohl) ne s'aspire pas, mais indique qu'il faut allon-
ger le son de la voyelle qui la précède. Dans L'ancienne
orthographe des idiomes germaniques, l'H placée au com-
mencement des mots devant une consonne (Hlodwig, Hlo-
thmr) indiquait une articulation gutturale. Dans le pas-
sage du latin au germidn, H a quelquefois remplacé le x
ffree ou le c latin {hom, de xlpo; ou de cornu; hlinian,
de xXCvw ou de clino, Je penche). — En espagnol, H ne se
}>rononce que devant les diphthongues ta et ue (hierro^
ér; huevo, œuf). Il n'y a pas d'H aspirée en italien. —
La lettre H manque dans les alphabets lithuanien et
russe; mais, dans certaines expressions tirées du vieux
tlaron, les Russes donnent la valeur de l'H à leur G ou
gamma. Au contraire, en wende et en bohème, l'H Ini-
tiale se prononce comme G.
n y a eu souvent, dans le passage d'une langue à une
autre, permutation de l'F et de l'H : ainsi, les Latins ont
écrit quelquefois forreum pour horreum (grenier) ; les
Espagnols ont fait hmo du latin fenum, hartna de farina,
haolar de falmlari, etc.
L'H entre dans la composition de plusieurs lettres
doubles des alphabets modernes. En français, on trouve :
le groupe CH, dont il a été parlé ailleun {V. C); le
HAB
groupe PH, qui a le son de l'F, et qui remplace soit le
phi (9) des Grecs, comme dans physique, philosophe, soit
le pAé des Hébreux, comme dans séraphin; le groupe
RH, représentant l'esprit rude qui affectait l'initiale
rho (p) en grec, comme dans rhume^ rhéteur; le groupe
TH, qui équivaut au thêta (6, 0) des Grecs, et qui ne
se prononce que comme T, dans théâtre, thermes,
thyrse, etc., ce qui explique pourquoi on a surprimé l'H
dans certains mots du même genre, comme trâne, trésor.
— En anglais, le groupe TH représente deux articula-
tions, celle du thêta grec (dans think)^ et celle du aêta
(dans that, this, etc.).
Comme abréviation sur les monuments antiques, H a
siçniflé ^fTio, hœres, hora, héros. Hercules, Hadrianus,
Hispania, HostUius, hâve (vieille forme du mot ave),
hic, honor, habet, etc.; HS (pour LLS, libra libra semis)
voulait dire sestertius, HL hoc loco, HE hoc est, HA Au-
jus anni, HOS hostis ou hospes. Sur d'anciennes mon-
naies de France, H était la marque de La Rochelle, Nous
écrivons S. H. pour Sa Hautesse.
Dans la numération des Grecs, H désigna primitive
ment le nombre 100, comme esprit rude du mot ekaton
(cent) ; plus tard, ce fut seulement 8, à cause du rang
que Véta occupa dans l'alphabet. — Chez les Romains,
l'H valut 200 ; surmontée d'un trait horizontal, elle va-
lait 200,000.
Dans la notation musicale des Allemands, H repré-
sente le si naturel. B.
HABEAS CORPUS. V. notre Dictûmnavre de Biogrik-
phie et d'Histoire.
HABILLEMENT. V. Gostcmb.
HABIT, mot qui, dans son acception générale, signifie
un vêtement quelconque. En un sens spécial, comme
(^uand on dit prendre l'habit, c'est le costume ecclésias-
tique ou monacal. Vhabit habUlé ou frac est ce vêtement
d'homme qui couvre les bras et le buste, a un collet ra-
battu, est ouvert par devant, et se termine derrière par
des pans ou basques plus ou moins ajnples : fait en drap
noir, il est le costume civil de cérémonie. H ne date que
du xviu* siècle. Vhabit à la française, dont il dérive,
parut au temps de Louis XIV : il avait alors le collet droit
(ce qui a été conservé), les basques assez larges pour
qu'on les repli&t en arrière, et des parements détachés de
la manche, tandis que l'on se contente aujourd'hui de
les figurer; on le faisait en drap, en vdours, en soie, en
bouracan, etc. Cest cet habit que l'on porte encore
comme costume de cour, et dont la forme a été conser-
vée pour le costume des fonctionnaires civils, qui a, de
Elus, ainsi que les habits de l'ancienne noblesse, une
roderie plus ou moins riche de soie, d'argent ou d'or au
collet, aux parements et aux basques. On fait en draps
de couleur, ou en étoffe plus légère, des habits dits de
chasse, de campagne, etc. L'habit militaire à basques a
été remplacé, vers 1830, par la tunique dans toute
l'infanterie de ligne, et de nos jours, en 1858 par une
veste à basqnines; il subsiste encore chez les grenadiers
et les voltigeurs de la gsrde impérialOi dans Tes armes
HAC
1017
HAC
da génie et de raitillerie, dans les eorps des sapears-
pompion et des sergents de ville. B.
HÀBITACLB, caisse on annoire destinée à renfermer la
boonole dans un navire. L'habitacle se trouve au milieu
da gaillard d*arrière, près de la barre du eouvemail, à
lavoe da timonier; une lumière Téclaire la nuit. Les
planches en sont assemblées à chevilles et sans dous,
pour qu*aQcane pièce de fer n'agisse mal à propos sur
rakaille almantM.
HABITATIONS. V. Uaisons.
HABITUDE (du latin haber€, posséder), pouvoir que
BOUS avdlis de reproduire, sans rSflexion et sans le vou-
loir, certains fidts que nous avons produits plusieurs fois.
L'habitnde supprime l'effort; elle est affranchie de toute
gène; de là son nom. Ce que IMnstinct nous a fait faire
primitiTementy nous le faisons ensuite par habitude, et
cette loi s*éiend soi actes qyà ont été d'abord volontidres ;
la réitéralion les rend habihtels, et développe en nous la
même facUité et la même inclination : elle devient une
sfcoïKis nature. Soit que l'habitude succède à l'instinct ou
à la volonté, elle produit les effets les plus remarquAles.
Au point de vue phyrique, elle facilite nos mouvements,
donne de redresse à la nuin« de U Justesse au coup d'ooil,
et nous aide à eqvrimer nos pensées par le geste, les sons
et récritore. Elle agit de même sur nos facultés : un de
ses premiers effets est de diminuer notre sensibilité phy-
iiqaÎB, car une foule de sensations dont nous n'avons plus
coDsdenoe ont d'abord été pour nous une source de
plaisir ou de douleur; il en est d'autres, au contraire, qui
eodgent le concours de la volonté et de l'intelligence, et
qae Iliabitade rend plus vives, plus délicates, telles ôue
les sensations de l'ouïe, de la vue et du tact. Vintelli-
gence ne doit pas moins à l'habitude; ses facultés et ses
opérations gagnent à un exercice suivi. Ainsi , quelle fa-
cilité ne donne-t-elle pas pour reproduire Ul pensée au
moyen de tant de sisnes conventionnels? C'est au point
de Tae moral et sur la volonté que l'habitude a le plus
d'Importance. L*éducation, qui développe dans l'homme
les bcnltés physiques, Intellectuelles et morales en vue
de In pratique du bien, n'est que l'ensemble et le résul-
tat dû habitudes qnil a contractées dans sa jeunesse et
même dans son enfance. Bonnes et vertueuses, elles
relèvent à ses yeux et dans l'estime des autres; mau-
vaises et vicieuses, elles le dégradent et l'avilissent, et
prennent sur lui un empire que sa volonté est souvent
unpoiaasnte à détruire. lies effets de l'habitude se mon-
trent aossl chez les animaux, dont plusieurs sont suscep-
tibles d'une espèce d'éducation. On remarque même
quelque chose de semblable dans certaines plantes, qui
s'accumatent et s'habituent à un nouveau sol ; mais on ne
voit rien d'analogue dans la matière inorganique. Cette
considération conduit à penser que la force de l'habitude
n'a rien de matériel. F. Reid, Essais sur les facultés ac-
^ees. Essai 3^ ch. m; Dugald-Stewart, PhUosophie de
TesprU humam, u I", ch. u; Maine de Biran, Influence
de rhabUud» sur la faciUté de penser^ in-8<*, Paris, an xi ;
Del'habiHide^ thèse de M. Ravaisson, in-8o, Paris, i838;
Hahn , De consuetudine, Leyde, 1701, in-4« ; Wetzel , De
eonsuetudine circa rerum non naturalium usu, B&le,
1730, in-4* ; Jung, De consuetudinis ef/icacià generali in
mctilms vitalibus. Halle, 1705, in-4o ; Junsnickel, De Con-
snelfêdmê altéra natura^ in-4®^ Wittemberg, 1787 ; de
Ctfdaillac, Études de phÛosophte, section 3, ch. iv et v ;
Datrochet, Théorie de l'habitude, Paris, 1810, in-8*. R.
HABORN-SIP, sorte de fifre ou chalumeau, excessive-
ment criard, aux sons duquel on danse dans quelques
districts de la Hongrie. Autrefois, U servait à appeler les
montagnards à une levée en masse, et, comme le prince
Ragotzki l'emplojra en faisant campagne, on le nomme
Ure de Bagotzki.
HACHE, instrument de fer tranchant, muni d'un
manche, et servant à divers usages militaires ou domes-
tiques. Dans l'antiquité, la bipenne ou hache à deux têtes,
dont l'une était tranchante et l'autre aiguë, ou qui étaient
tontes deux tranchantes, est déjà citée par Homère, qui
la nomme axinè. Quoiqu'elle semble appartenir plutôt aux
peuples du Nord, on la voit quelquefois dans la main des
nétOÊ grecs. Sur le fronton du temple d'OIympie, sculpté
par Alcamènes, on voyait, dit Pausanias, Thésée com-
battant avec une hache les ravisseurs de la femme de
RritboQs. Suivant Plutarque, les Amazones se servaient
4 delà hache avant le temps d'Hercule; celle avec laquelle
ee héros tua Hippolyte fut donnée à Omphale, et, après
avoir pissé de ses successeurs aux rois de Carie, fut dé-
posée dans un temple de Jupiter Labradien (du carien
hbm, hache). On voit la bipenne sur des médailles de
Mylassa en Carie, de Thyatira en Lydie« sur un antel de
Jupiter conservé parmi les marbres d'Oxford, et sur
quelques médailles égyptiennes. Plusieurs figures de la
mythologie étrusque sont aussi caractérisées par cette
arme. L^ Romains se servirent de haches pour les sa-
crifices, les combats sur mer et les travaux de charpente i
ils en avaient placé aux faisceaux des licteurs.
On donne le nom de haches celtiques à des instruments
en silex et en bronze qui ont servi aux premiers habi^
tants de l'Occident, et dont l'emploi a dû être très-varié.
On a trouvé des haches de silex au pied des monuments
druidiques , quelquefois mêlées à des ossements à demi
brûlés; dans les tumulus, sous la tête des guerriers ou à
leurs pieds; d'autres fols, au milieu de débris sanglants
des sacrifices. En certains endroits, qui ont pu être des
centres de fabrication, il s'en est rencontré un assez grand
nombre dont les unes étaient achevées, et les autres a dif-
férents degrés de travail. Le nord et le centre de l'Europe
en ont fourni une quantité considérable, qui ornent les
collections publiques et privées, et qui présentent plu-
sieurs types. Dans les unes, le tranchant taillé régulière-
ment suit une ligne arrondie qui se termine par derrière
en une pointe aiguë; les antres sont à deux tranchants,
mais d'une forme souvent irrégulière et moins gradeose;
d'autres sont à tranchant d'un côté et à pointe mousse
da l'autre. Les haches en bronze, sans être aussi multi-
pliées que celles en silex, sont cependant nombreuses,
et se trouvent aux mêmes endroits. On a découvert en
Allemagne, en France et en Angleterre, d'anciennes fon-
deries de ces instruments, des moules en ar^le et en
bronze, des scories, des débris de fonte et de cuivre. En
1821, les restes d'un établissement de ce genre ont été
retrouvés dans le département de la Hanche par IL de
Gerville.
La hache fut une des armes principales des Francs i
c'est ce oui lui fit donner le nom de francisque par
Grégoire ne Tours. Les peuples du moyen âge, U modi-
fiant légèrement, en firent la hache d'armes, dont les
musées conservent un grand nombre de spécimens. Tantôt
cette hache avait deux tranchants opposés dos à dos,
tantôt un tranchant d'un côté et une sorte de marteau
de l'autre. La hache des compagnies d'ordonnance de
Cliarles VII n'avait pas de marteau, mais la douille du
fer se prolongeait en pointe aiguë su delà du tranchant.
Il y eut enfin des haches dont le marteau fut remplacé par
un dard ou par un croissant à deux pointes. Les muré-
chaux de France accotaient leur écusson d'nne hache
d'armes, comme insigne de leur dignité.
Lorsque la poudre a canon fut inventée, on essm de
faire des hacnes munies de pistolets, mais on réussit
peu ! le Musée d'artillerie de Paris en possède ouelques-
unes. Sous liouis XIV, les grenadiers portèrent la hache i
mais quand on leur fit abandonner la grenade pour le
fusil, on ne laissa la hache qu'à quelques hommes par
compagnie; ce fut là l'ori^ne des sapeurs, dont la mis-
sion est de briser à coups de hache tout obstacle qui
arrêterait les soldats. Les cavaliers et les soldats du génie
portent ai^ourd'hui de petites haches qui leur servent à
dresser le campement. Les marins ont la hache d^àbor*
daoe^ qui oorte, à l'opposite du tranchant, une forte
pointe de fer. desthiée à pénétrer dans les bordages du
navire ennenu et à faciliter l'abordage.
HACHÉES (Moulures), nom donné qae£quefoîs aux
Dents de scie (V,ce mot),
HACHEREAU, petite hache d*armes, courte, 1 '.gère et
sans marteau.
HACHURES, lignes parallèles on croisées qui forment,
dans un dessin ou dans une gravure, soit un fond, soit des
ombres nuancées. Les peintres verriers ont fréquemment
employé les hachures à angles droits pour les fonds ou les
ornements; elles furent remplscées au xv* siècle par des
fleurs et des fleurons, puis vinrent les teintes fondues.
Cependant, au xvn* siècle, quelques peintres à la main
hardie reprirent les hachures pour les ombres, et ob-
tinrent ainsi des effets très-heureux et très-énergiques.
— Dans la science héraldique, les hachures sont des
lignes conventionnelles dont le sens indique une cou-
leur : on marque Vazur par des lignes horizontales, le
gueules ou rouge par des verticales, le sable ou noir par
des hachures croisées à angle droit, le sinople ou vert
par des diagonales de droite à gauche, et le riolet ou le
pourpre par des diagonales de gauche à droite. Ce pro-
cédé commode pour expliquer le Blason ne date que dn
XVII* siècle.
HACQUËBUTE, HAQUEBUTE ou HAQUEBUSB, rieillii
formes du mot arquebuse au xiv* siècle.
HàL
1018
HâM
BADRIANÉBS. V. AoBUNéBS*
HiEMATINON, matière vitreuse d'an beaa ronfle foncée
opaque, plos nuancée que le Terre, susceptible d un très-
grand poli, et dont les Anciens se servaient pour mo-
saïques, vases d'apparat, etc. On la rencontre souvent à
Pompéi.
HAGIOGRAPHE (du grec haipo$, saint, et graphOnt
écrire), qualification donnée primitivement aux auteurs
de TAndeo Testament autres oue Moïse et les Prophètes,
puis aux biographes et légenoaires qui ont écrit sur la
vie et les actions des Saints. V Hagiographie est la science
des écrits de ce genre.
HAGIOSIDÈRE (do grec hagtos, saint, et sidèros, fer),
fer sacré, large de quatre doigts environ et long de seize,
attaché par le milieu à une corde à Taîde de laquelle on
le tient suspendu, et sur lequel on frappe avec un mar-
teau. Cet instrument remplace les cloches, interdites
chez les Grecs soumis aux Turcs. Lorsqu*on porte le
viatique à un malade, le clerc ou remployé qui marche
devtint le prêtre frappe trois fois de temps à autre sur un
hafdosidère.
HAHA, ouverture pratiquée dans un mur de jardin
ou de parc, afin de laisser la vue libre, et qui est dé-
fendue par un fossé extérieur.
HAICANE ou HAICIENNE (Langue). V. ARMéiciEiiNB
(Langue),
HAIE, clôture naturelle ou artificielle des jardins, des
champs, des vignes, etc. On distingue la hâte vive, faite
d^arbres ou arbustes, ordinairement épineux, et la haie
morte, formée de pieux ou de planches. Toute haie séfM-
rant deux propriétés closes, ou dont aucune ne Test, est
réputée mitoyenne; les arbres qui se trouvent dans la
haie sont également mitoyens. Les haies vives, ou les
arbres de basse tige pouvant servir à les former, ne
doivent pas être plantées à une distance moindre d'un
demi^mètre de la ligne séparative des deux héritages; si
les branches se développent trop, le propriétaire voisin
peut contraindre k les couper. Quiconque détruit une
naie, en tout ou en partie, est puni d*un emprisonnement
d*un mois à un an, et d*une amende égale au quart des
restitutions et dommages-intérêts.
HAIK, pièce d'étoffe de laine blanche, que les Arabes
portent drapée autour du corps et attachée sur la tête par
quelques tours d'un cordon de laine brune. Les femmes,
quand elles sortent, s'en enveloppent complètement, ne
laissant apercevoir que leurs yeux.
HAINE, passion qui naît à la suite d'un mal dont la
cause nous irrite parce que nous y voyons de l'inten-
tion, n y a, par suite, un état de râction qui va jusqu'à
la répulsion contre la cause qui nous blesse. La haine
devient alors une colère réfléchie et méditée qui prend
plusieurs formes, telles que la colère et la vengeance.
Aussi, ce qui la fait naître en nous ne sort pas de Tordre
physique, mais de l'ordre moral. Le crime, l'orgueil,
l'oppression, peuvent nous inspirer de la haine, et, dans
tous les cas de même nature, elle est légitime, mais à la
condition de ne tomber que sur le vice ou le crime, et
non sur les personnes. Dans ce dernier cas, c'est la plaie
la plus funeste à l'homme. La haine enracinée dans le
cœur devient une source d'iniquités; c'est elle qui fit de
Gain l'assassin de son frère. R.
HAIRE. V, CiucB, dans notre Dictionnaire de Biogra^
phie et d'Histoire.
HALAGE (Chemin de), espace de 7*", 79 de large oue
les propriétaires sont obligés de laisser libre, sur Ta nve
des cours d'eau qui a le plus de profondeur, pour le pas-
Sl^ des chevaux qui traînent les navires, sans que tou-
oii le terrain cesse de leur appartenir. On ne peut ni
bâtir, ni planter, ni tenir clôture plus près que 9'",7S,
sous^ine de confiscation, de réparation, et d'une amende
de5W)ft'. L'obligation résulte d*une ordonnance de 1669,
d'un arrêt du Conseil en date du 24 juin 1777, et des
art. 5M et 650 du Code Napoléon.
HALECRET , sorte de cuirasse. V. notre Dictionnaire
de Biographie et ^Histoire.
HALER, en termes de Marine, tirer et roidir un cor-
dage pour amener horizontalement une manœuvre , un
m&t, un (krdeau, une chaloupe, etc. On nomme hale^
bord un petit cordage employé à haler dans un bâtiment
tout objet extérieur; haie-bis, une petite manœuvre qui
sert à amener les voiles, pavillons et guidons ; hale-breu,
un petit cordage qui passe dans une poulie et sert â
élever les voiles; haie-dedans, un cot^ijge â l'aide du-
quel on haie en dedans certaines voUes.
HAUEimQUES (du grec halimUikè, pèche], nom
donné, chez les anciens Grecs, aux ouvrages didactiques
sur la pêche. Nous avons sur ce sujet un pofime d'Op-
pien, et quelaues fragments d'un autre d'Ovide.
HALLALI, fanfare sonnée par la trompe de chasse pour
rassembler les chasseurs au moment où le cerf aux abois
va devenir la cqrée des chiens. Cette fanfare, dont l'au-
teur est inconnu, a été placée par Philidor dans la chassa
de Tom Jones, par Ménul à la fin de son ouverture du
Jeune Henri, et par Haydn dans la chasse de son oratorio
des Saisons.
HALLEBARDE. V. notre Dict. de Biogr. et S Histoire.
HALLECRET. V. Cuihassb.
HALLES (de l'allemand hall, salle) , édifices où l'on
concentre et expose, pour la vente en gros â certains
jours, les vivres, comestibles et autres objets de consom-
mation usuelle. Cm établissements d'utilité publique
exigent une architecture simple, une ventilation facile
et permanente , des couvertures qui protègent les mar-
chandises contre les grandes chaleurs et les nands froids,
des abords et des dégagements vastes, la libre disposi-
tion d'eaux abondantes.
HALLES DE PARIS. V, notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire»
HALUER ou TRÊMAIL, filet perpendiculaire qu'on
emploie pour la chasse aux perdrix, aux cailles, aux fû-
sans et aux canards.
HALLUaNATION. Il y a des cas où l'âme, sans être
excitée par le monde extéjieur, croit éprouver des sen-
fiations, où elle croit voir, entendre, toucher des objets
qui n'existent pas réellement; rballucination est cette
sensation fausse, qui donne â l'esprit l'idée d'un corps
adssant actuellement sur les organes, quoique ce corps
n^existe pas. Il y a cependant cette différence entre Thallth
ciné et le /ou, que le premier peut avoir conscience de son
état et faire effort pour en sortir ; il se possède encore, il
accuse ses organes de mensonge, à Texception de certains
cas, tels que l'extase ( V, ce mot) ; le fou, au contraire,
a perdu tout empire sur lui-même. L'halluciné est dans
l'erreur {hallitcinari, se tromper), mais il est en même
temps sur le chemin de la folie; plus il cède à rballuci-
nation, plus il approche du moment où il perdra sa raison
et sa volonté. Il y a certaines hallucinations qui semblent
être des intermédiaires entre la vision et Thalluci nation
du maniaque ; elles ne se produisent que peu de fois, et
disparaissent ensuite pour toi^omrs, sans doute avec le
trouble passager du cerveau qui les avait produites.
L'hallucination accompagne souvent la folie, l'ivresse, le
délire fébrile, et particulièrement l'extase; ses causes
sont ordinairement celles qui mènent à la folie, mais fl
faut citer en particulier une invagination maladive, qui
conduit â la perception imaginaire des phénomènes sen-
sibles. V, Rrière de Boismont, Traité des halluânutions,
1845 et 1852. R.
HALTÈRES, masses de pierre ou de plomb, destinées,
chez les Anciens, à développer la force musculaire dans
les exercices du gymnase. On les tenait dans chaque
main en sautant, courant, dansant, etc.
HAMAC, lit suspendu dont font usage la plupart des
tribus aborigènes de l'Amérique. II est formé d'un mor^
ceau d'étoffe de cOton, long de 3 met., large de 2, de
chaque côté duquel pendent des cordelettes qui servent
à le suspendre à des tiges de bambou. Les femmes riches
des colonies européennes voyagent étendues dans leurs
hamacs, que portent deux ou quatre nègres. Dans les na-
vires, on. suspend des hamacs aux plafonds des entre-
ponts pour le coucher des matelots : on évite ainsi te
désagrément du roulis. Les Anglais garnissent le fond des
hamacs d'un rectangle de bois, i>our oue la personne
couchée conserve la position horizontale. Les Anciens
connaissaient l'usage au hamac, qu'ils appelaient lectus
pensilis, « lit suspendu. »
HAMAÇA (EL), anthologie arabe, ainsi appelée parce
le l*' chapitre comprend des vers sur le courage guer-
rier (hamâça). Elle ftit faite par Abou-Tammàm-Habi)>-
Ibn-Ans, le Tayyte, poète célèbre, vers Tan 835 de notre
ère, et commentée par Tabrizi. Abou-Tâmmâm a distribué
son choix de morceaux en dix chapitres, dont le 1^ tient
plus de la moitié de l'ouvrage, et traite des ikits valeu-
reux et des mœurs guerrières des Arabes antérieurs à
Mahomet; les autres comprennent des élégies, des sen-
tences morales, des vers amoureux, des sabres, des
descriptions, des récits de voyages, des facéties, etc. Le
Hamâça est une source précieuse pour, l'étude de la
langue et de l'état social des Arabes avant l'Islam. Lo
texte, accompagné d'un commentaire de Tabrizi, d'une
traduction hitine et de notes, a été publié par BI. Frev-
tag, à Bonn, 1828-51. Nous avons donné des extraits du
HAR
1019
HAR
Butte dans le Jommal AiioUquê (aTril 4855). G. D.
HâMEIDES^ en termes de Blaaoo, pièces qai repré-
Motent trois chantiers de cave, appelés homes en fla-
maDd«
HAMPE, manche de pinceau; — tige ou manche d*ane
vme quelconcTue, d'un dra^peau, etc.
HAMPTON-COURT, une des résidences royales d*Ân-
^etnre, dans le comté de lliddlesex. On y arrive après
«voir trayeraé la Tamise sur un beau pont. Le palais fut
ooostroit par le cardinal Wolsey, qui en fit don pins tard
agrandit les Jardins,
les appartements contiennent une galerie de tableaux,
9t Ton voit, à cèté d*un grand nombre de toiles insigni-
fiantes, les célèbres cartons de Raphaél (Y, Cartons) et
Selqaes bons ourrages de Mantegna. On remarque à
mpton-€ourt une treille plantée en 1768 : son unique
CBD a près de 80 centimètres de tour à 1 met. du sol ; elle
a 35 met. de longueur, et produit jusqu'à 2,500 grappes,
dont le raisin est réservé pour la table royale.
BANAP. 1^ ce mot dans notre Dtctionuaire d» Btogra-
fftis «t crflûtotrs.
HANCHE, en termes de Marine, partle.de Tanière d'un
b&timent qoi est entre la poupe et les haubans du grand
mit.
HANDICAP, mot anglais adopté dans les coorses, et
qnl indique la charge proportionnelle et variable dconée
anx jockeys, et par suite aux chevaux, suivant la force
présumée de chaque animaL
HANGAR (du celtique han, maison, et gard, garde),
emplacement couvert, mais non clôturé sur tous les
^t^ Dans une ferme, on y met provisoirement à Tabri
les fdns, les pailles, les gerbes même; on y remise
ansri les chariots, brouettes et charrues, les vieux fûts,
les paniers, les équipages de parc, etc. Dans les ports et
arsenaux, on conserve sous des hangars des bois de con-
struction, les mâts, les ancres, etc.
HAN-LIN, c-à-d. en chinois forêt de pinceaux^ Acadé-
mie politique et littéraire fondée h Pékin, au vn* siècle
de notre ère, par Tempereur Hiouan-Tsong. Son nom
vient des pinceaux qui, en Chine, servent k écrire. Ses
membres ne publient que des ouvrages collectifs, qui
sont imprimés par le gouvernement, et distribués aux ni-
bliothèques des villes et aux principaux fonctionnaires.
HANNAQ13E (Dialecte). V. Bohème.
HANOUARDS, nom qu'on donnait autrefois anx por-
teurs de sel et de poisson de mer. Ils étaient attachés aux
greniers à sel, et avaient le privilège de porter les corps
des rois défunts.
HANS, espèces d*auberges à Tusage des ifrançals qui
trafiquaient autrefois dans le Levant.
HANSE. ) V. ces mots dans notre Dtctionna$re
HA7«SW€RST. I de Biographie et iF Histoire,
HAOUSSA (Idiome), idiome parlé dans le Soudan. Sa
eottstraction directe le rapproche des idiomes du bassin
dn Niger et du Nil, et son système vocal rappelle la
langue des Tlbbous, race intermédiaire entre les Nègres
et les Touaregs. D*un autre côté, le haoussa, par sa ten-
dance an monosyllabisme, offre de l'analogie avec les
idiomes de la Guinée.
HAQUEBUTE. K. Hacquebotb.
HAQUENÊE (du latin equina, dérivé d'sgtMM, cheval),
nom donné, pendant le moyen &ge, à tout cheval d'allure
donce, facile a monter, et allant ordinairement à l'amble.
Cétait la monture des dames et des ecclésiastiques. La
kaquenée du gobelet était le cheval oui portait le couvert
et le dîner des rois de France dans leurs petits voyages.
Jusqu'au xvni* siècle, l'ambassadeur du roi de Naples à
Rome offrit tous les ans au pape, à la veille de la S**
Pienre, nne baquenée blanche, en ligne de vassalité.
HAQDET, sorte de charrette, longue, étroite et sans
tididles, composée de deux pièces de bois liées horizon-
talemeat par des barreaux, et à oui une articulation
plaofle près des brancards permet ne faire bascule. Les
Brdeinx qn*on y dépose sont retenus par deux cordes pa-
rallèles, enroulées à la tète de la charrette par le moyen
d^ni moulinet. On attribue l'invention du baquet à Pascal.
HARANGDEt allocution, discours qa*on adresse à une
awmblée, à des troupes, ou qu'un écrivain, soit poète,
soit historien, met dans la bouche de ses personnages.
Htmère s prêté à ses héros d'admirables harangues. Les
hàUtades oratoires de la vie publique ches les Grecs et
les Romains expliquent la présence des harangues qui se,
oÉleot fréquemment au récit dans les historiens de l'an-
tkpdté : Laden a m6me donné des r^es sur la manière
de les écrire. Parmi les modernes, Vossius, La Mothe
Le Vayer, le P. Lemoyne, Laharpe, Blarmontel, Mably,
Vertot, ont regardé les harangues comme utiles et d'un
heureux effet dans l'histoire, tandis que le P. Rapin et
Dalembert les repoussent. Il y a quelque chose d'étrange
à faire parler des personnages qui ont gardé le silence,
à rapporter des discours tenus en secret et dont toute ré-
vélation était impossible; en pareil cas, l'historien ne fait
évidemment que mettre en scène ses propres pensées,
son esprit et son éloquence. On ne saurait douter que les
historiens de l'antiquité môme aient presque toujours
supposé le fond ou façonné la forme de leurs harangues,
et placé des morceaux oratoires là où il n'y en eut pas :
plus du cinquième du livre de Thucydide est en dis-
coomr; quatre auteurs ont mis dans la oouche de Véturie
parlant à Coriolan quatre discours dissemblables; les
tables de bronze retrouvées en 1529 k Lyon porteot les
propres paroles que l'empereur Claude prononça dans le
Sénat romain au sujet d'une demande des Ckiulois, et
elles sont tout autres me celles qu'on lit dans Tacite.
Toutefois, ce serait aller trop loin que de condamner
absolument les harangues dans l'histoire ; car elles don-
nent de la variété et du mourement à la narration, et
sup|)Iéent à son insuffisance. Ce qu'on est en droit
d'exiger, c'est que l'écrivain n'introduise pas de discours
hors de propos, quand il n'en tut pas prononcé, et dans
la bouche d'un personnage qui n^a point parié : ain^
Méaeraî a blessé toutes les convenances de l'histoire en
mettant une harangue dans la bouche de Jeanne Dut
au moment de son supplice. Quant anx discours qui ont
été réellement prononcés, mais dont on n'a pas conservé
le texte, l'historien doit se borner h ce qu'il sait positi-
vement sur l'idée générale,* le caractère et le but de ces
discours : on trouve un exemple contemporain de re-
constitution de ce genre dans certaines parties de l'iSri»-
^otrs de Napoléon et de la grande armée en 484% de
Ph. de Ségur, et dans V Histoire des' Girondins de II. de '
Lamartine. — Aujourd'hui on ne donne plus guère le
nom de harangites qu'à des compliments adressés de
vive voix par les autorités anx souverains et aux princes*
HARAS (du latin hara, étable), établissement où l'en
élève et enmëent des étalons et des Juments pour pro*
pager et améliorer la race. On distingoe les haras «ou»
vages, vastes espaces où les chevaux vivent en liberté,
comme en Russie, en Arabie et en Amérique ; les haras
domestiiiuês omjfrivéSf accessoires aux domaines ruraux;
les haras parqués^ p&turages enclos et gardés, ainsi qu'il
y en a beaucoup en Allemagne, en Hongrie, en Italie ^tea
l!lspagne. Depuis Louis XIII, tous les gouvernements en
France ont attaché la plus grande importance au perfee-
tionnement des races cheviuines, et B]iécialement dé c^es
qui servent à la remonte de la cavalerie. Cestde ce règne
que date le premier essai £ait ponr fonder des haras aux
frais de l'État, mais cet essai, ne fut pas heureux. En 1665^
Çolbert établit une organisation desharasquirepOMit sur
ie concours de l'industrie privée, encouragée et soutenue
par l'État, llalgré les avantages économiques de ce sy»^
tèrae administratif, l'Assemblée oonstitoante le supprima.
Si le mode d'encouragement avait été maintenu tel qu'il
existait avant 1789, on aurait fait des économies cottsl-
dérables; en même temps, les chevaux firançais se se*
raient an moins conservés avec les qualités qu'ils avaient
pour la guerre, et les anciennes espèees légères n'auraienf
pas été dégradées on détruites par linfluenoe malheu-
reuse des croisements, qui n'ont pas donné les résultatii
qu'on en espérait. Cette ancienne organisation des haras
n'était pas onéreuse pour l'État, et ^e offrait de grandes
ressources h l'armée comme au commerce. L'État, en
effet, n'avait pas à sa charge, oomme aii^onrd'hui, de
nombreux étanlissements d'étalons avec tout le person»
nel indispensable; l'industrie privée entretenait la plus
grande partie des tjrpes reproducteurs^ moyennant quel»'
gués privilèges ou des primes qui s'élevaient environ à
3Ô0 ik*. par tète de cheval, tandis qu'avec le système a»*
tuel l'entretien de chaque étalon ne coûte paa moins de
1,000 à 1,S00 fr. à l'État. Cette faible prime suffisait anx
agriculteurs pour élever des étalons auxquels on dut os»
races françaues qui avaient une grande réputation et qui
offrirent tant de ressources aux années de la République
et de r£mpire pendant les lattes que ces deux gouverne^
monta eurent à soutenir contre rEorope coalisée. Lav
haras de Pompadonr et du Pin, établis sous Louis XVv
supprimés en 1790, furent reconstitués par Napoléon l*f
en 18Ô5; Louis XVm en i^eola on 3*, celai de RosièNS
(Meurthe). Louis-Philippe en créa dent à 9-Cloud et à
Headon«'où Ton conservait sovleut les élaloiis de
HAR
1020
IIAR
«nbe; ilft ont été désorgimisés après 1848. Un décret da
SI Juin 1852 n*a conservé qu*un seul haras, celui de
Pompadour. On compte S2 dépôts cPétahns, k Angers,
Ânnecvi Aurillac, Besançon, Blois, Braisne, Cluny,
HenneooDt, Lamballe, Libourae, Montier-en-Der, Pau,
Perpignan, le Pin, Pompadour, La Roche-sur- Yon,
Rhodez, Rosières, Saint-L6, Saintes, Tarbes et ViUe-
neuve-sur-Lot. Après sToir été placé dans les attributions
du ministre du commerce, le senrice des haras a été
constitué en direction générale dans le ministère d'État
par décret du 19 décenobre 1860. On administrateur cen-
tralise, sous les ordres du directeur général, les détails du
personnel de l'administration et da matériel du service.
Le personnel du senrice actif comprend 8 inspecteurs gé-
nénux, 26 directeurs de dépôts d'étalons, 26 sous-direc-
teurs agents comptables, 10 surveillants, 26 vétérinaires,
des brigadiers et des palefreniers en nombre proportionné
aux besoins du service. Le directeur a 10,000 tr, de trai-
tement, les inspecteurs généraux 8,000, les directeurs de
détoôt de 3,500 à 5,000, les agents comptables de 2,000 à
2,600, lea vétérinaires de 1,000 à 2,000. Il y a, aapièi du
gouvernement, un Conseil tupérisur dst haras, compre* •
aant, indépendamment du directeur général et de Tad-
ministrateur, 10 membres choisis par le ministre parmi
les sénateurs, les doutés au Corps législatif, les membres
du Conseil d'État, les officiers généraux de Tarmée, et les
pmonnes versées dans les matières hippiques; et un Co-
mité eariiuUatif des harcu, formé des inspecteurs géné-
raux, ious la présidence du directeur général. B.
HARASSE, oouclier de près de 2 met. de hauteur, dont
•e servaient autrefois les vilains ou roturiers dans le
combat Judiciaire, n couvrait tout le corps, et avait deux
trous pratiqués à la hauteur des yeux. Comme il était
très-lourd, on a tiré de son nom le mot harassé, qui se
dit d'un homme accablé de fatigue.
HARDI, monnaie de billon friippée en Guienne parles
Anglais au xiv* et au xv* siècle. Elle valait le quart du
•ou, c-ènL trois deniers. Le type des Hardis représente
an buste de (Isce, couronné, et armé du sceptre et de
l'épée; au revers est une croix, avec diverses figures et
inscriptions. Louis XI, Charles Vm et Louis XH firent
fhipper aussi des Hardis ; an temps de François f, on les
confondit avec lea liards.
HAREM. K. ce mot dans notre Dtctiormairê de Biogra-
phie et d^ Histoire.
HARENGERS, corporation des marchands de harengs,
formée dès Iol xii* siècle. Un règlement de Louis IX, en
1254, distingua les Poissomniers, qui vendaient le pois-
son fhda, et les Barengers, qui ne conservaient que la
▼ente du poisson saur et salé.
HARIVANÇA, poôme indien, en langue sanscrite, dont
le titre veut dire généalogie de Bari, c-à-d. de Vishnu.
C'est, soas une forme épique, une compilation très-dé-
▼eloppée de récits antérieurs, racontés soit par écrit, soit
dans la tradition populaire de l'Inde, et relatifs à ce dieu,
incarné dans Krishna. A ce titre, il a pour pendant et
pour complément naturel les Purànas ( K. ce mot% prin-
cipalement dans les parties de ces légendes qui se rap-
portent à Vishnu. Hais, pour qui étudie et compare ces lé-
gendes sous les formes diverses où la poésie indienne nous
les présente, le ffarivança est antmeur aux Purànas,
et a même été connu de leurs aatears. D'un autre côté,
one comparaison analogue place le Barivança après le
Mahdbhârata, auquel on le rattache ordinairement. Si
l'on poursuit les recherches au delà de la grande épopée,
trn arrive aa Râmâyana, qui présente sous lear forme la
plus antique les légendes de Vishnu. Enfin, le (Hta-^Sô-
vinda {V,ee moi) semble être d'une date plus récente en-
core que les Purànas, et se rapprocher des temps moder-
nes. L'intérêt du Harivança consiste surtout en ce' qu'il
marque une des étapes où s'est arrêté le culte de Vishnu :
11 n'y a dans le Ràmàyana aucune tendance marcruée vers
ce culte en particulier; cette tendance est sensible dans
le Mahàbhàrata; le Barivança appartient à la secte de
Vishnu d'une façon évidente , mais sans s'arrêter néan-
moins d'une manière exclusive à quelqu'une de ses in-
carnations; les Purànas viennent Immédiatement après;
et enfin le chant lyrique du GUarGâvinda célèbre exclu-
sivement Krishna et Hàdh& sa maltresse, en donnant à
leurs aventures cette valeur mystique et symbolique qui
caractérise une époque avancée de l'histoire. Le /fon-
vança a été traduit en français par M. Lang^ois, 1835,
S vol. in-4». En. B.
HARMABIAXA, voiture ou litière des Anciens, couverte
par-dessus, fermée par des rideaux sur les côtés, et ser-
vant spécialement à transporter les femmes et les enfants.
UARMAUQDE. V. Nomb.
HARMONICA, instrument de musique, auquel on a
donné différentes formes. C'était d'abora un assemblage
de verres inégalement remplis d'eau, accordés par demi-
tons, et placés dans une caisse longue d'un mètre : après
avoir humecté le bord de ces verres avec une éponge
mouillée, on trempait les doigts dans l'eau, et, en les
passant légèrement sur les bords des verres, il résultait
de ce frottement certains sons. Un Irlandais, nommé
Puckeridge, est regardé comme l'inventeur de cet instru-
ment. En 1760, le célèbre Franklin modifia l'harmonica :
il fit fixer de petites coupes de verre, contenant de l'eau
et accordées par demi -tons comme précédemment, sur
un axe commun, que faisait tourner horizontalement une
roue mise en mouvement par une corde attachée au pied
du Joueur i la manière d'en tirer des sons n'était pas
changée; seulement la main droite donnait la mélodie,
et la gauche l'accompagnement. M*''* Davies firent en-
tendre cet instrument à Paris en 1765. L'abbé Mazucchi
imagina en 1776 d'employer, au Heu des doigts, un archet
enduit de poix, de térébenthine, de cire ou de savon. Les
harmonicas à clavier de Rœllig et de Klein furent im»>
ginés pour éviter le contact des doigts et da Terre, r^
sultat obtenu au moyen de touches ganiies et disposées en
conséquence. Une Méthode d'harmonica fut publiée par
Huiler, Leipzig, 1788. Le cUvicylindre (T. es mot) de
Chladni est une espèce d'harmonica. Le» sons des in-
struments de ce genre sont doux et purs, mais agissent
avec énergie sur Te système nerveux. Ce fût pour rem^
dier h cet inconvénient que Rœllig, k Vienne, imagina
Vharmonica à clavecin, dans lequel, à l'harmonica ordi-
naire, était Joint un clavier qui produisait, au moyen
d'un levier, les sons par des tuyaux. — L'harmonica de
Lenormand, dont on voit des imitations grossières entre
les mains des enfants, se compose de lames de verre
d'inégale longueur, formant des séries diatoniques, et re-
tenues entre des fils qui leur laissent toute liberté de vi-
bration : on les frappe avec un petit marteau de liège. B.
HABMomcA, jeu très- doux qu'on place ordinairement
au 3* clavier dans les orgues d'Allemagne, et qui est des-
tiné à produire des effets d'écho. Il est, en général, fait
avec du bois de chêne ou d'érable.
BABHomcA A coaDBS, uom donné par Stein, organiste
d'Augsbourg, en 1788, à un instrument de musique qui
offrait la combinaison d'un piano et d'une épinette, ac-
cordés à l'unisson, et qu'on pouvait Jouer ensemble ou
séparément.
HARMONICON, harmonica perfectionné par G.-C. Mal-
1er, directeur de musique à Brème, qui y avait ajouté
trois registres de flûte et un de hautbois.
HARMONICORDE, instrument de musique inventé par
Kauffinann, k Dresde. C'était un piano à queue, et per-
pendiculaire, accompagné d'un mécanisme que le pied
mettait en mouvement, et dont le son était semblable à
celui d'un harmonica.
HARMONIE, heureux accord des parties d'un touL
Ainsi, V Harmonie de Vunivers résulte de ce divin esprit
d'ordre qui a mis toutes les œuvres de la création à la
place prédbe qui convient à chacune d'elles, et les a en-
chaînées les unes aux autres par des lois Immuables.
Bernardin de Saint-Pierre a décrit les Harmonies de la
ncUure, c-àrd. les rapports extérieurs des êtres entre
eux. Pour les philosophes de l'antiquité, le mot harmo-
nie, appliqué à l'ordre général du monde, rappelait une
idée de musique, et, réciproquement, hi musique s'ex-
pliquait pour eux par des lois numériques, empruntées
aux rapports des corps célestes. Ils appelaient harmonie
céleste ou harmonie des sphères une sorte de musique
qu'ils supposaient produite par les mouvements des pla-
nètes et des étoiles, et par les impressions de ces corps
célestes les uns sur les autres; différents sons devaient
résulter de la diversité des mouvements. Dans les Arts du
dessin, la symétrie des proportions, la perfection des
formes, le rapprochement hid)ile des ombres et de la lu*
mière, l'accord entre les couleurs, la fusion des teintes,
le ton général et les contrastes, l'unité d'action, de mou-
vement, de sentiment, produisent Vharmonie. B.
HAaMONiB, terme de Musique. On dit qu'une voix est
harmonieuse, que des sons sont harmonieux^t lorsque
l'émission, le timbre et la succession des sons ont quel*
que chose qui flatte l'oreille. Mais, indépendamment de
cette accepâon générale et vulgaire, le mot Harmonie a
deux sens spéciaux eh musique; il désigne : 1* un corps
dlnstruments à rent, ou la masse de ces instruments qui
entre dans la composition d'un orchestre; 2* la science
des accords. Cette science, dont le but est l'accompagne-
HAR
t02f
HAR
meot de la mélodi» ( V. ce mot)^ comprend deux parties,
h théorie des accords isolés ( V. Accord), et la théorie de
h SQocession et de renchatnement des accords. L'harmo-
nie entière» dans un ton donné, se rédait à l*empIoi suc-
resrif de deax accords, Taccord parfait sur la tonique et
Vacrord de dominante, soit dans lear état naturel, soit
modifiés |iar le retwersement, la substitution, les aitérch
tions, VantùsvpaHon, le retard^ et ausd par les notes de
pouoge, les pédales et les jnrogressions, et à Tobservation,
Miir les accords dissonants , de la prépcuraiion et de la réso^
mion (F. ces mots). Pour changer de ton, on a recours à
la fliodiitaltofi {V.ee mot), L*emplo! des trois mouvements
£rect, contraire, et oblique, et celui du contre -point
(V, ce mai)^ font aussi partie de Tharmonie. On appelle
Hwnnome appliquée Fart d'assortir telle ou telle variété
d*kccords à on morceau d*une couleur particulière; on y
frit rentrer, entre la détennination des styles, l'art de
Yaecompagnmnent et celui de Vinstrumentation {V, ces
mois). Lluamonie est dite directe quand la base est fon-
damentale, et que les parties supérieures conservent
Tordre direct entre elles et avec cette basse ; renversée
<{nand le son fondamental estjdans ouelqu'une des par-
ties supérieures, et qn*un autre son de l'accord est trans-
porté à la basse au-dessous des autres; figurée lorsqu'on
fiait passer plusieurs notes sous un accord.
Liiabituae d'entendre des accords dès notre en&nce
nous fidt de l'harmonie un besoin dans la musique. Mais
il est des peuples, comme les Turcs, les Aralrâs et les
Chinois, qai, môme de nos Jours, ne sont pas initiés à
rharmonie telle que nous l'entendons, et à qui les effets
de notre mosioue en accords sont importuns, bien qu'ils
reposent sur aes phénomènes acoustiques naturels. B
n'est donc pas incroyable <pie los Grecs et les Romains,
mal^ le développement de leur civilisation, n'aient point
eonnn l'harmonie, et se soient bornés aux unissons et aux
octaves. Bien qu'on ait beaucoup écrit pour* établir le
contraire (Gaffono, Zarlino, Doni, Meibomius, Isaac Vos-
sins, l'ahbô Fraguier), on ne trouve dans les Traités à
mosiqae d'Arlstoxène, d'Aristide Quintilien, d'Âlypius,
de Ptolémée, de Boéce, aucune expression équivalente de
notre mot harmonie, et les consonnances de quarte, de
quinte et d'octave, dont il est fait mention, n'étaient pas
employées simultanément, mais par successions mélo-
diques. Les fhi^ents peu nombreux que l'on a con-
servés de l'ancienne musique grecque n'offirent aucun
vestige d'accord. Enfin la forme des lyres et des ci-
thares, le pedt nombre de leurs cordes, qui ne pouvaient
être modifiées conune sur nos instruments à manche, don-
nent beancoup de probabilité à l'opinion de ceux qui ne
croient pas à l'existence de l'harmonie dans la mtuique
des Anciens, entre autres, Glaréanus, Artusi, Mersenne,
Kireher, Burette, Martini, Marpurg, Forkél, etc. — Les
i**" notions de l'harmonie se trouvent au moyen Age, dans
un écrivain du vn* siècle, Isidore de SéviUe, et elles ont
été sans donte le résultat de l'introduction de l'orgue, sur
lequel on a expérimenté la simultanéité des sons; mais
rharmonie resta dans la barbarie Jusque vers le milieu
du xnF« (F. DupHoms, D^chântJ. Des musiciens italiens
commenoèrent à lui donner des formes plus douces : tels
forent Francesco Landino, dit Cieco (l'aveugle) ou Pran-
eesco degli organi (à cause de son habileté sur l'oreue],
Jacopo de Bologne, Nicolo del Proposto et plusieurs
autres. Les plus anciens écrivains qui .traitèrent de l'har-
monie fiirent Hucbald de Saint-Amand (x* siècle). Gui
d'Arène et Francon de Cologne (xi*), llarchetto ae Pa-
doae et Jean de Mûris (xm*). L'harmonie se perfec-
tionna ensuite, grftce aux talents de deux musidens
français, Guillaume Dufay et Gilles Binchois, et d'un
Anglais, John Dunstaple, qui vivaient dajis la première
moraô dn xv* siècle. Leurs élèves, Jean Tinctor, Gafo-
rio, etc., ijoutèrent à leurs découvertes, et, depuis lors,
rharmonie s'est continuellement enrichie d'effets nou-
veaux;. Joaon'à la fin du xvi* siècle, on ne fit usage
que dTaccoras consonnants et de quelques prolongations
qol produisaient des dissonances préparées : vers 1590,
le Vénitien Glande Monteverde employa, le premier, les
aceords dissonants naturels et les substitutions. Au com-
mencement dn dèele suivant, Louis ^adana, maître
de chapelle de la cathédrale de Mantoue, ima^a, dit-
on, de représenter l'harmonie par des chiifires placés
au-dessus des notes de la basse ( r . Basse cmFFEiB). En
1699, le géomètre Ihmçais Sauveur, reprenant une expé-
rience dn P. Mersenne sur la résonnance d'une corde
métalHqne, distinc^oa le «oii fondamental, donné par
Isi vibrations de la totalité de la corde, et les sons dé-
nois (octave de la quinte du son fondamental et double
octave de sa tierce), provenant de vibrations partiellea.
S'emparant de ce résultat. Rameau chercha les bases
de la science des accords dans les lois de l'aconstiouei
et fit connaître, en 1722, son système de la basse foi^
damentale {V. ce mot)^ qui eut une vogue prodigieuse;
mais il ne pouvait rendre compte de l'accorq parfait mi-
neur que par des hypothèses. Du moins, c'enit la pre-
mière fois qu'on mettait un ordre rigoureux dans les
phénomènes harmoniques, et Rameau avait été aussi le
premier à apercevoir le mécanisme du renversement des
accords. Vers le même temps, le violoniste italien Tartini
proposait un autre système, également fondé sur une
expérience de résonnance. Il andt observé que deux sons
aigus qu'on faisait entendre à la tierce faisaient réson-
ner au grave un 3* son, également à la tierce du son
inférieur, ce qui donnait encore l'accord parfait. Mais
la théorie obscure qu'il établit, et qui fût vantée par
J.-J. Rousseau, n'eut Jamais de succès. Les systèmes
d'harmonie étaient devenus une mode au xvm* siècle : la
France vit édore ceux de Serre, d*Estève, de Balllière, de
Jamard, de l'abbé Roussier, aujourd'hui Justement on-
bliés; en Allemagne, Klmberger déoouvnt, en 1773, la
théorie des prolongations, que Catel reproduisit plus tard
chez nous avec plus de simplicité et de clarté. De nos
Jours, M. Fétis a explioué le mécanisme de U substitu-
tion, et la combinaison de cette substitution avec les pxo»
longations et les altérations.
K. Catel, Traité éPharmonie, 1802, in-4«$ Choron^
PrtnctpM de conwosition des écoles d^Italie, 1809, 3 vol.
in-fol.; Berton, Traité dPharmonie, 1815; Rdcfaa, TVoîU
complet et rauonné Sliarmonie^ Paris, 1819, in-fol.;
Peme, Cours élémentaire d'harmonie et éPaccompagne'
ment, 1822, 2 vol. in-fol. ; Selvagd, Trattato éParmonia,
Naples, 1823, in-8«; Fétis, Méthode élémentaire et abré"
gée dPharmonie et d^aecompagnement^ Paris, 1823, in-4* ;
Doisrlen, Principes enharmonie, 1824; Jelensperaer,
l'Harmonie au commencement du xix* siècle, IfôO;
J.-G. Wemer, Essai d^une méthode facile et claire cTAor-
monte, en allem., Leipzig, 1832, 2 vol. in-4«; J)auvillier8,
Traité de composition élémentaire des accords, 1834;
Gérard, Traité méthodique d'harmonie, 1834; Choron et
Adrien de Lafage, Manuel complet de musique, 1836-38,
G vol. in-18; De Goussemaker, Histoire de l'harmonie a»
moyen âge, 1852, ln-4**. B.
HARMONiB (Table d'). V. Harpe, Piano.
nARMOHix AU STTLB, combiiuâson de sons qui plaisent
à l'oreille, soit par leur accord entre eux, soit par leur
rapport avec les idées et les sentiments qu'ils expriment.
De là deux sortes d*harmonie, Vharmonie m^contigfiM et
Vharmonie imitative. Toutes deux ont une grande Im-
portance : selon Cicéron , c'est l'harmonie qui distingue
l'orateur habile du parieur ignorant et vulgaire, et
l'oreille, suivant l'expression de Quintilien, est « le die-
min du cœur. »
V Harmonie mécanique, qui consiste dans l'accord des
sons que l'on emploie, est, à proprement parier, l'supAo-
nie ou la mélodie du s^le. Elle résulte : \^ du cAoto; des
mots, dans lesquels il faut chercher, autant que possible,
un heureux mélange de voyelles et de consonnes, de
brèves et de longues; 2* de YarrangemmU des mots, où
l'on doit éviter l'hiatus (F. ce mot), la répétition des
mêmes consonnances, toute série de mots d'égale dimen-
sion, toute accumulation de monosvllabes ou de mots
d'une longueur démesurée, les assemblages où dominent
les consonnes fortes et les qrllabes rudes, etc. ; 3* de la
construction des phrases, auxoueUes on s'attache è
donner du nombre et de la période (V. ces mots).
L'harmonie imitatioe est un artifice de s^le qui con-
siste à pdn^bre les choses par les sons des mots ou par
l'habile arrangement de U phrase, qui tantùt est douce
et coulante, tantôt rude et saccadée, tantôt sourde et
tantôt sonore, tantôt se précipite alerte et rapide, tantôt
se déroule avec lenteur on se développe majestueuse-
ment, selon la nature des idées et des sentiments expri-
més. Ainsi, Boileau (Sat 3, le Repas ridiûM) nous fait
entendre le bruit d'une assiette lancée à la tète de quel-
qu'un, et qui revient après avoir manqué son but s
L*aiitro eaqulT* la eonp, et raittotte ToUat
S'en va frapper le mur et rerlent en roahat.
La Fontaine nous met sous les yeux l'inquiétude d'an
avare t
n entaeialt to^Joan;
Il paieait lea nnlti et lee Jonri
A compter, calcaler, supputer laiie relâche.
Calculant, lappntant, comptant oonmie )t la tieha.
La Fominn. xn, s, cfu Thisawiuw ei eu Smge,
ITAR 1022
HAR
n nepoaviit pat mieux peindre Borée, qui, dil-H t
8ê gorg* de Tspeiin, i^eiii« eoimM va teUon,
Fait an Tsesme d« dénen,
Blfito, loaiBe, twipêt*,....
La. Fovtazkb, Pkélnu U Ban§, yi, t.
Badne fdt dire h Orette en proie eux Foriee {Anâro-
moque, V, 5) :
Fùnr qui loiit cm lerpenif qui •tfflent wax tos tAtctf
n peint an monstre en ces mots (Phèdre, V, 6) t
ladompttbte tadreftn, dragon impdtnénZf
Sa «ronpe se reoonrbe «n replia tortueux.
La prose peut recourir, eomme la poésie, à l'harmonie
imitaaTe, ann de peindre les objets par les sons. Ainsi,
Ghateavdiriand a dit : « Le rauque son de la trompette du
Tarlare appelle les habitants des omlires étemelles; les
soiras casernes en sont ébranlées, el le bruit, d'abîme
en abîme, roule et retombe. »
L'harmonie imitatire ne doit Jamais être cherchée pour
élle-mdme ni sentir reffort; et, ches les écriTsins de pre-
mier ordre, elle Jaillit touiours de l'inspiration; il en est
de cette qualité comme de la Justesse de l'expresiion,
qui, chez eux, suit toujours la Justesse de la pensée.
HARMONIE paééTABUi, svstéme à l'aide duquel Leibnis
. prétendait expliquer l'action de l'&me sur le corps et du
eorps sur l'âme. En réalité, il n'admettait pas Tinflaence
réciproaue dés deux substances l'une sur l'autre : car
il imaginait <{ue le Créateur, en les réunissant dans
l'homme, ayait établi entre elles une harmonie parfaite,
de telle laçon que, bien que cliacune se développât sui-
vant des lois propres, les modifications qu'elle éprouvât
eorrespottdaient exactement à des modihcattons éprou-
vées par l'autre; telles seraient deux horloges bien re-
nées, qui marqueraient toujours les m^es heures,
quoicme obéissant à des mécanismes distincts.
HARMONIES DES ÉVANGILES, titre d'ouvrages des-
tinés à montrer l'accord des doctrines et des faits dans
les livres des quatre Évangélistes. Les plus anciens de
ces ouvrages sont attribués h Tatien et k Théophile d'An-
tioche. Eusèiie dressa ensuite un tableau synoptique des
Evangiles. Nous avons de S^ Augustin un livre De con^
jsnstt EvangelitUtrum, Pierre Lombard, S^ Thomas
d'Aquin et Gerson au moyen âge, Oaiander, Jean Buisson,
Calvin, Paulos et Clausen chez les modernes, se sont
anssi oœupés de laooncordance (F. ce mat) deeÉvansilei»
HARMONIFLDTE. K. au St^lémefU. *^
HAUMONIPHON, instrument â vent et â clavier, long
de 0«,42 sur 0«»,12 de large et 0",8 de haut, qui s'in-
suffle an moyen d'un tube élastique, et qui produit si-
multanément plusieurs sons , analogues à ceux du haut-
bois, n a été inventé en 1837 par M. Paris, de Dijon.
HARMONIQUE (Division). F. AsnHMéTiQOB.
HARMONIQUES (Sons) ou sons flûtes, sons tirés de
eertains instruments à cordes, tels que le violon et le
violoncelle, par un mouvement particulier de l'archet,
qn'on approche davantage du chevalet, et en posant lé-
gèrement le doigt sur la corde. Ils diffèrent des sons du
Jeu ordinaire par le timbre, qui est beaucoup pins doux,
et par le ton. On attribue l'invention des sons harmo-
niques à on élève de Tartini, Domenico Ferrari, de Ci^
mone, au milieu du xvm* siècle. — Od donne encore le
nom ^harmoniques aux sons concomitants ou accessoires
qui, par le principe de la résonnanoe, accompagnent un
ton quelconque. Toutes les aliquotes d'une corde sonore
en donnent les harmoniques.
HARMONIUM. F. Orgue expressif.
HARPAGON, machine de guerre. V, notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
HARPALYCE. V. Chanson.
HARPASTUM. V. Balle (Jeux de), dans notre Diotton-
noire de Bioffraphie et d'Histoire.
HARPE, instrument de musique de grande dimension
et de forme triangulaire, monté de cordes de boyau et de
cordes de soie filées en laiton, disposées verticalement, et
qu'on pince avec les deux mains pour en tirer des sons.
La lia^ se compose de trois pièces principales assem-
blées en triangle, la console, la cotonne, et le corps
sonore; les deux dernières sont réunies dans leur partie
inférieure par une quatrième pièce, la cuvette, qui forme
la baae de linstnunent. Le eorps sonore est one caisse
convexe en érable, plus lance â la base qu'an sommet, et
recouverte d'une table d'Harmonie, planche de sapin sur
laquelle sont fixés les boutons qui servent à attacher le»
cordes. La console, partie supérieure de l'instrument, est
une bande légèrement courbée en forme d's, et garnie de
chevilles à l'aide desquelles on monte les cordes fixées
sur la table d'harmonie. La colonne est le montant qui
sert à l'assemblage des deux pièces précédentes. La mu-
sique de harpe s'écrit à deux parties comme celle de
Eiano : on emploie la clef de sm pour la l'* partie, et
i clef de fa 4* ligne pour la ^. — La harpe fut connue
des Anciens; mais elle a dû s'éloigner notablement des
proportions modernes, s'il est vrai que ce soit avec une
oÈi^ que David dansa devant rArche ( V. Kinnor). La
harpe est figurée souvent sur les monuments de l'an-
cienne Égvpte, et l'on en voit une de ce pavs au Muses
égyptien oe Paris. Les harpes égvptiennes n^avaient pas
de console, et étaient en forme ?arc; on en Jouait dans
les processions tout en marchant, le bois de l'instrament
pose sur l'épaule et les cordes tournées vers le ciel. L'in-
strument triangulaire que les Grecs appelaient trigoM, et
que quelques auteurs croient être le même que h sain-
bwiue, correspond à la harpe moderne. Les Romains ne
paraissent guère en avoir fait usage, car on n'en a trouvé
qu'une seule figure dans les peintures d'Herculanum. Les
peuples du Nord, Scandinaves, Celtes, et Germains, firoit
grand usage de la harpe. On la trouve mentionnée pour
la première fois, avec son nom actuel, dans une pièce de
ven de l'évèque Fortunat au vi* siècle. An moyen te, elle
fut l'instrument des troubadoun et des ménestrel On sait
que le nombre des cordes varia alore de 6 à 25. Le plus
souvent la harpe n'avait pas de colonne de soutien sur le
devant; le triangle était ouvert. Comme les cordes étaient
accordées selon l'ordre naturel de la gamme diatonique,
elles ne pouvaient donner les dièses et les bémols, et
toute modulation était interdite. Les habitants du pays de
Galles ont une harpe i triple rang de cordes : les deux
rangs extérieure sont montés à l'unisson, le rang inté-
rieur est celui des notes diésées ou bémoUsées. Cette
disposition offre de grandes difficultés pour l'exécution.
En Irlande on inventa la ^rpe double (à 2 rangs de
cordes), afin d'augmenter la force du son. Luc-Antoine
Eustacne, gentilhomme napolitain et chambellan du pape
Pie V, imagina, pour obtenir tous les demi-tons de
l'échelle, de mettre à la harpe 78 cordes disposées sur
3 rangs : le i^ comprenait cpiatre octaves, le 2* faisait les
demi-tons, le troisième était à l'octave du premier. Les
difficultés de l'exécution firent abandonner cet instrument
compliqué. Vere 1660, un 'Tyrolien ajouta aur la con-
sole dans l'instrument simple, des crochets on sabots qui,
correspondant aux cordes et mus avec la main , accrois-
saient la tension , et donnaient ainsi le demi-ton supé-
rieur. Mais, tandis qu'une main de l'instrumentiste se
portait aux crochets, il n'en restait qu'une pour pincer
les cordes ; en 1720, Hochbrucker, luthier de Donawerth,
remédia k cet inconvénient par l'invention de la pédale ^
mécanisme qui, pressé par le pied de l'exécutant, et pas-
sant an milieu de la colonne, met les crochets en mou-
vement. Ce mécanisme, qu'on a attribué à tort à Jean-
Paul Vetter , d'Anspach , fut perfectionné k Paris par
Nadermann, depuis lequel il y a 7 pédales, une pour
chaque note de la gamme , quatre k droite et trois à
gauche de la cuvette. En cet état, la harpe est dite à
simple mouvement : elle est montée de 43 cordes , ac-
cordées en mi bimol, et comprend 6 octaves. Si le mor-
ceau est dans un autre ton, l'exécutant dispose ses
pédales d'avance. En 1782, Cousineau inventa le méca^
nisme à bàquUles^ qui, avec un double rang de pé-
dales, foisait produire à la même corde le dièse et le
bémol h volonté. En 1787, .Sébastien Érard imagina de
remplacer les crochets par des fourchettes k double bas-
cule, qui pincent les cordes an lieu de les tirer hors de
la li^e perpendiculaire. Chaque corde peut alora re-
cevoir trois intonations, le bémol, le bécarre, et le dièse;
les pédales, toujoun au nombre de 7, peuvent se mou-
voir de deux manières, et se fixer à volonté dans des crans
pratiqués à la cuvette. La harpe d'Érard, dite à double
mouvement, et dans laquelle chaque pédale fait une
double fonction pour élever à la volonis chaque corde
d'un demi-ton ou d'nn ton, date de 1811, et est accordée
en si naturel; elle est presque seule employée aujour-
d'hui. Bothe, de BcHrlin, a disposé dans sa norp^ chro»
maiujue, inventée en 1787, et reproduite en 1804 par
Pfranger, toutes les cordes par demi-tons (12 pour une
gamme), en donnant aux cordes additionnelles une cou-
leur qui les distingue I mais l'instrument est devenu trop
BAS
t»Z3
HAO
ptndf les cordes aont trop nombreuses et trop serrées ,
st le doig;té n^eet plus le même. — L» harpe^ fort en fa-
isor à la fin dâ xvm" siècle et an commencement du xix%
y <te nos JouiB^ presque absjidonnée. Cet abandon a
«oomienoé à la suite des perfectionnements de méca-
niimei qai ont rendu Tinstrument plus difficile a Jouer.
On raccorde, comme le piano, par tempérament {V. ce
SMt). Entre les doigts d'un habile exécutant, elle rend
des sons purs et doux ; mais il est difficile d'éviter la
monotonie, et d*arriver à quelque énergie dans Texpres-
^on. M"** Krumpholz, M. de Marin, Dizi, Baôcker,
Bochsa, Pollet, et. de nos Jours, Labarre et Godefroid ont
été les harpistes les plus brillants. La harpe s'emploie
4Ml<mefoia à Torchestre, où elle produit d'heureux effets,
m fùaon surtout de la différence de son timbre. B.
■ABPB A CLAVBCm. V, CLAVICrrHKRIUM.
BAapB-DCTALE, petite harpe imaginée vers 4834 par le
tetaar Pfeiffer. C'est un instrument, non d'exécution,
mils d'accompagnement. Le mécanisme au moyen du-
quel on élève chaque corde d'un demi-ton se meut par la
pression du doigt, et non par celle du pied comme dans
la haipe ordinaire. Les dimensions de la harpe-ditale la
mettent à la portée des enfants.
HASPB AuJENNB, OU horp^ météorologiqitê, appareil mu-
sical plus curieux qu'utile, destiné à produire des sons
harmonieux par la seule action du vent. Cest une boite
de sapin, de i mètre sur 20 à 30 centimètre», contenant
ans table d'harmonie, sur laquelle sont tendues des
CQvdes en boyau. En exposant ces cordes à un courant
d'air assez fort, elles résonnent d'une façon agréable,
bien que la succession et la combinaison de leurs sons se
lassent sans ordre et sans règle. On ivttribue l'invention
de la harpe éolienne au P. Kircher. En 4785, l'abbé Gat-
toni , à Côme, construisit dans un Jardin une harpe éo-
Benne gigantesque : elle se composait de 45 fils de fer,
longs de 100 met., tendus à l'aide de cylindres, (Uspo-
sés dans la direction du Nord au Sud , et inclinés de
nmnière à former un angle de 20 à 30 degrés avec l'hori-
son. Sous l'impulsion du vent, elle rendait des sons trës-
puûsants. V. AnéMocoROE.
HARPE HaRHoifico-FORTB, hsrpo luventéo vers 4800 par
Keya^*. Cest une harpe ordinaire à laauelle on a ajouté
34 cordes de laiton, accordées deux à deux, qui forment
une espèce de contre-basse de 47 demi-tons, et qu'on fait
vésonner avec le pied par le moyen de 47 touches corres-
pondant à autant de marteaux qui frappent les cordes.
HARPES. V. Atteïitb (Pierres d') et Herse.
HARPIN , ancienne arme, qui. se composait d'un croc
adapté à un long manche.
HARPO-LYRE , instrument de musique inventé à Be-
nnçon, en 1829, par un musicien appelé Salomon. Il a
la forme d'une 1^ antique, et est monté de 24 cordes
r^nrties sur trois manches. Les cOTdes du manche du
milieo sont les mêmes que celles de la guitare à 6 cordes,
et sont accordées de môme. L'ensemble de l'instrument
a 4 octaves et demie.
HARPON, large et solide fer de flèche fixé à l'extrémité
dNm manche en bois de 2 met. de longueur, auauel tient
une longae corde. Cet instrument sert à la pècne de la
baleine et autres cétacés. L'animal frappé emporte le har-
pon; mais, quand il a succombé, la corde le ramène.
HART (Supplice de hi). F. notre Dictionnaire d$ Bio-
graphie H d^ Histoire.
HASARD. L'idée du hasard est la nésation de toute
cause et de toute loi dans la production des phénomènes
et des êtres; c'était la nation du Destin chez les An-
dens, chez les modernes c'est celle de Dieu et de la Pro-
lîdence. Pris dans un sens positif, le hasard est donc une
absurdité et un non-sens, puisque tout ce qui commence
est nécessairement produit gar une cause et selon cer-
taines conditions. D y eut cependant une école qui voulut
élever Tidée du hasard au rang de système scientifique;
ce fut celle d'Épicure. En expliquant l'univers et tous les
êtres par le choc accidentel des atomes, Êpicure livrait
tout au hasard, et méconnaissait l'idée de loi. Ce gros-
sier fatalisme était en contradiction avec les plus simples
données de la raison; celui des Stoïciens reconnaissait
an moins la nécessité d'un ordre étemel et immuable. Le
hasard, s'il était quelque chose, ne serait qu'un principe
de désonfre; il soflSt de promener ses regards sur la
terre, <fe lever les sreuz au ciel, pour y voir des marques
constantes d'ordre et d'harmonie. Pour celui qui l'em-
pkne, le mot hasard veut dire : Je ne sais pas. L'ieno-
nmt en cristallographie peut aâribuer au hasard la
formation des cristaux, HaQy Fexplique par une loi ma-
thématique d'une grande simplicité. Le hasard perd de
son empire à mesure que la science fait des progrêtt ta
science ramène à l'idée de Dieu<en montrant ignorance el
la folie de ceux qui prétendaient pouvoir s'en passer. R.
HAST (Armes d']. ( V, notre Dictionnaire de BiogrO'
HASTATS. i phie et d*Bistoire.
HASUR, instrument de musique. V, Ascior.
HATn-CHÊRYF, T. notre Dictionnaire de Biographie
et d*ffistoire,
HAUBANS, gros cordages destinés à consolider la tète
des m&ts, qui pourraient se rompre par l'action directe
des voiles ou par les ébranlements du navire pendant les
tempêtes. Des moufles permettent de les roidir à vo-
lonté. Le nombre des haubans vane selon la force du
bâtiment et la résistance des m&ts. Plus les haubans sont
attachés loin du pied des mâts, plus ils ont de force; c'est
^ pourquoi, lorsque vint l'usage de construire les navires
à murailles rentrantes, on y adapta des arcs-boutants
saillants ou des plates-formes saillantes, qui prirent le
nom de porte-haubans et qui servent à attacher ces cor^
dages. On a voulu remplacer les haubans en cordes par
des flls de fer et des chaînes; mais cette Innovation,
qui substituait à un ssrstème élastique un système in-
flexible, supprimant toute vibration et causant de fré-
quentes ruptures, dut être abandonné. Toutefois une Idée
lui survécut : ce fut de se senrir, pour le pied des hau-
bans, de crémaillères en fer et de chaînes oui, au moyen
d'un mécanisme, permettent de roidir à volonté les lîau-
bans, en laissant à leur partie supérieure leur élasticité ;
en outre, leur partie inférieure est à l'abri de l'incendie.
HADBERGEON, cotte ou chemise de mailles, ftdte de
petits anneaux de fer, et plus tard de lames articulées.
C'était le haubert des écuyers, moins riche que celui des
chevaliers.
HAOBERT. ( K. notre Dtrftonnairs de Biographie et
HACNET. t d:Histoire.
HAUSSE. V. Baisse.
HAUSSE-COL. Cémit autrefois la paille supérieure de
la cuirasse de fer plein qui entourait le cou et recouvrait
le gorgerin ; ou bien, quand le casque n'avait pas de gor-
gerin, un col ou collet en fer dont on entourait la gorge.
Aujourd'hui le hausse-col est un ornement de cuivre ou
d'ar^nt doré, en forme de croissant et bombé, que les
officiers d'infanterie portent, lorsqu'ils sont de service ou
en grande tenue, fixé au-dessous du cou sur le haut de
la poitrine par deux cordonnets qui s'attachent aux boa-
tons des épaulettes.
HAUTBOIS, en italien chœ, instrument de musique i
vent et à anche, ainsi nommé parce (^e, dans l'anden
système d'orchestration, sa partie était habituellement
toite plus haut que celles des violons, ou parce qu'il
vait à renforcer leurs sons aigus. Long de 0",60 environ,
et fait en cèdre, en ébène, en buis, ou en grenadille. Il se
compose de trois corps ou pièces, qui s'ajustent bout à
bout, et qui forment un tuoe graduellement évasé, ter-
miné par un petit panillon en entonnoir. L'anche est for-
mée de deux lames de roseau. Parfois on adapte au corps
supérieur une pompe : ce sont deux tubes de cuivre rou-
lant l'un sur IHiutre et augmentant de 2 centimètres la
longueur du tube. L« diapason du hautiwis s'étend depuis
Vut grave du violon Jusqu'au soi suraigu : en allouant le
tube, Brod l'a fait descendre Jusqu'au ta. Le hautl>ois a des
sons champêtres et doux, avec plus d'accent et de variété
3 ne ceux de la flûte; malgré. sa petitesse, il a beaucoup
e puissance, et perce au milieu des masses les plus
formidables. On l'emploie également bien pour les effets
d'orchestre et pour les solos. La difficulté la plus oonii-
dârable de son Jeu consiste dans l'acte de retenir le
souffle pour adoudr le son, et pour éviter les couacs, qui
ont lieu quand l'anche seule entre en vibration, sans
faire sortir le son de l'instrument. Il y a aussi des pré-
cautions à prendre lorsou'on joue avec beaucoup de aou-
ceur, parce que le hautbois peut octanier, c-à-d. faire
entendre l'octave aigué du son qu'on veut produire. Dans
un orchestre, le hautbois se divise en 4 '^ et 2* ; il a pour
alto le cor anglais et pour basse le bcuson {V, ces mots),
La musique qu'il exécute est écrite sur la clef de sol. 11
est lé plus Juste des instruments à vent. Quand on em-
ploie le hautbois comme instrument de solo, les tons les
plus favorables k son doigté sont ceux d'ut, de fa, de sol,
de la mineur, de ré mineur, et de mi mineur. Les traits
rapides sont difficiles dans les tons où il y a beaucoup de
dièses ou de bémols.
Le hautbois était déjà en usage en France vers la fin
du xv« siècle : mais alors c'était un instrument grossier,
d'un son dur et rauque, et qui n'avait que 8 trous, sans
clefs. Il dérivait sans doute de l'instrument rustique ap-
HAD
1^24
HEB
pelé hautbois d» Poitau* Son étendue était d*une octave
et d*ane sixte, depuis tU Jusqu'à ki. On distinguait le
premier et le ucSnd deuui d» hautbois. La hauU^ontre
de hauibois ou hautbou d^amour descendait une tierce
environ, et son étendue de fa (au-dessous du sol grave
du violon) Jusqu'à ut. La basse de hautbois, longue de
5 pieds environ, était percée de onze trous, dont quatre
se bouchaient avec des clefs, et se Jouait avec un bocal
en cuivre courbé, conune le basson; le son le plus grave
était le fa grave de la voix de basse. Le fagot et le corve-
ku (F. ces mots) se rapportaient à la basse de hautbois.
Le hautbois de forêt (en italien oboë piccolo)^ oui existe
encore aqjourd*hui, mais qu'on n'admet plus dans l'or-
chestre, sonne l'octave aigué du hautbois moderne. Le
premier hautboïste habile que mentionne l'histoire de la
musique est Filidori, de Sienne, fort applaudi à la cour
de Louis Xin. Ce prince, entendant, quelques années
après, le Français Danican sur le même instrument, s'é-
cria : « Tai retrouvé un autre Philidor. » Telle est l'oriçine
du nom de Philidor que prirent les Danican, musiciens
distingués. Les Besoza, originaires de Parme, perfection-
nèrent la fabrication du hautbois, et se produisirent avec
grand succès comme exécutants en Italie, en Allemagne et
en FïaQce, sans rencontrer d'autre rival sérieux qu'un
Allemand nommé Fischer. L'un d'eux, Jérôme Besozzi ,
oui entra au service de Louis XV en 1769, fonda une
école, d'où sortirent Gamier, Michel, et Sallantin. A cette
époque, un luthier de Paris, Délasse, fabriijua des haut-
bois que l'on recherche encore aujourd'hui, malgré les
additions de clefs que l'on a faites pour ajouter à la Jus-
tesse de l'instrument et dont le nombre s'est élevé Jus-
qu'à 14. De nos Jours, Vogt, Brod, Gilles, Venoust aîné,
triebert, ont brillamment représenté l'école française
de hautbois , et Sellner l'école allemande. L'Espagne a
pradui^ de nos Jours aussi, un hautboïste distingué^ Soler,
— Il existe des Méthodes pour le hautbois par Schickart ,
Amsterdam, 1730; par Vanderhagen et par Garnier,
Paris, 1798 et 1800; par SeUner, Vienne, 1824; par Gh&-
lon, Paris, 1826 ; par Brod, ibid., 1828, etc. B.
HAUTBOIS (Jeu de), un des Jeux d'anche de l'orgue. C'est
un jeu de forme conique, fait en étain fin, et qui sonne
à l'unisson des dessus de trompette. Il se place au récit
et au positif, et il en a toute l'étendue; son harmonie est
gracieuse, et imite assez bien l'instrument dont il porte
le nom. F. G.
HAUT-BORD. F. Bord.
HAUT DE CASSE. V. Casse.
HAUT-DE-CHAUSSES. V. Chausses, dans notre Die-
tionnaire de Biographie et d^ histoire.
HAUTECOBiBE, ancienne abbaye de l'ordre de Ctteaux,
sur la rive occidentale du lac du Bourget, en Savoie. Elle
Alt fondée en ,11 25 par Amédée III, comte de Savoie, pour
servir de lieu de sépulture aux membres de sa famille.
Fort maltraitée pendant la guerre de la succession d'Au«
triche et à l'époque de la Révolution française, elle a été
reconstruite en style gothique , en 1824, par ordre de
Charles-Félix, roi de Sardaigne ; les tombes ont été au-
tant que possible restaurées.
HAUTE-CONTRE, la plus aigué des voix d'homme,
plus élevée que celle du ténor, et ainsi appelée par oppo-
sition à la basse-contre ( V. Basse). Les voix de haute-
contre, très-rares aujourd'hui, se trouvaient principale-
ment dans le midi de la France, étaient cultivées dans les
maîtrises des cathédrales, et exécutaient la partie d*alto
(F. ce mot). Cette partie est trop barae pour la voix de
contralto, et trop^ élevée pour celle de ténor; aussi l'exé-
cution de la musique écrite pour la haute-contre présente
maintenant des difficultés presque insurmontables.
HAUTE-Goirnui, ancien instrument de musique, variété
de la viole (V.ce mot).
HAUTE COUR DE JUSTICE, tribunal dont l'institution
remonte à la Révolution française (F* notre Diction-
naire de Bwgrcmhie et d^ Histoire, page 692 , col. 2), et
qui est chargé de Jucer les crimes politiques et les atten-
tats à la sûreté de l'ÉtaL Conservé par la Constitution
de 1852, il a reçu quelques modifications par le sénatus-
consulte organique du 13 luillet de la même année. Les
juges, pris parmi les menibres de la Cour de cassation ,
formaient une Chambre de mise en accusation et une
Chambre de jugement, toutes deux composées de 5 Juges
et de 2 suppléants. Le jury se composait de 36 mem-
bres des Conseils généraux. La haute cour ne pouvait
être saisie que par un décret de l'Empereur.
HAUTE-USSE. F. Lisse.
HAUTE POLICE. F. Subveillanci.
HAUT-RELIEF. F. Bas-relief.
HAUTS-FONDS. F, Bas-fonds.
HAVAGE. ) V. ces mots dans notre Dictionnaire ai
HAVET. S Biographie et d'Histoire.
HAVRE (du celtique Oder, ou de l'allemand AoT^m), nom
qu'on donnait anciennement à tout port de mer, naturel
ou creusé par les hommes, et qui ne s'applique plus qu'à
certains ports situés à l'embouchure d'une riiaère. Dd
lutvre naturel s'appelle crique.
HAVRE-SAC, de l'allemand hafersack, sac à avoine, sac
à provisions. Les soldats ont de tout temps porté avec
eux une besace ou un sac, où étident renfermai leurs vê-
tements et leurs vivres. Jusqu'au temps de Turenne, ce
sac fut appelé canapsa (de l'allemand Icnapp-sack)^ et se
porta en ^becière sur le côté. Sous le ministre Choiseul,
la peau garnie de poils remplaça la toile pour les sacs de
l'infanterie. Le ministre Saint-Germfdn fit prendre, au
lieu de la simple courroie, une bretelle double pour les
porter. Gouvion Saint-Cyr autorisa , à l'instar des An-
glais, le havre-sac en toile cirée, qui ne plut pas à l'ar-
mée. La garde royale de la Restauration transforma, par
une addition de planchettes, le sac en une espèce de
petijte malle quadrangulaire méplate, dont l'usage est
resté général.
HEAUME. F. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
HEBDOBIADIER (du grec hebdomas, semaine), nom
donné, dans un couvent ou dans un chapitre de cha-
noines, à celui qui est de semaine pour dire les oraisons
de l'office et y présider.
HÉBERGE. V. IflTOYERlIET^.
Hébraïque (An). — I. Architecture. H est à peu près
impossible d'apprécier les caractères et les yicissitodes
de l'art de bâtir chez les Hébreux, leurs monuments
ayant été complètement détruits, et les détails que donne
la Bible sur diverses constructions ne suffisant pas tou-
jours pour s'en former une idée précise. VArche d^al'
tiance, le Tabernacle, le célèbre Temple de Salomon {V.
ces mots)^ les divers palais «élevés par ce prince, ne pea-
vent être aujourd'hui connus que par les descriptions
des livres saints. Certains écrivains ont pensé oue la civi-
lisation hébraïque ne fut qu'un p&le reflet de la civilisa-
tion des Égyptiens, et qu'en matière de beaux-arts les
Juifs se bornèrent à imiter leurs voisins. Jl est cependant
naturel de penser qu'ils communiquèrent à leurs édi-
fices publics un caractère spécial, en rapport avec leurs
croyances et avec leurs mœurs. A propos de la descrip-
tion du Temple, Millin a exprimé l'opinion que la dispo-
sition de l'ensemble, la construction pyramidale des
murs, l'espèce de gnmde porte qui précédait la façade
antérieure, étaient imitées des Égyptiens, tandis que la
toiture en bois et les lambris également en bois dont
l'intérieur était entièrement revêtu rappelaient plutôt
l'architecture phénicienne, ainsi que les colonnes en bois
du palais d'été de Salomon ; que, dans les ornements, les
Hébreux avaient montré le même goût de la magnifi-
cence qui caractérisait les Égyptiens et les Phéniciens.
F. De Saulçy, Histoire de l'art jtêdaique , Paris, 1858,
in-80.
n. Sculpture. — On voit dans l'Écriture que la sculp-
ture et la ciselure étaient cultivées très-anciennement par
les Hébreux. Rachel emporte les petites idoles de son
père Laban ; les Hébreux dans le désert fondent un Veau
d'or; des chérubins, des vases, des candélabres en bronze,
ouvrages de Bézéléel, décorent l'Arche d'alliance. Mais
la loi de Moïse interdisait toute représentation de Dieu
sous une image visible.
III. Peinture. — Il n'v a de traces de la peinture que
dans le livre d'Ezéchiel (vm, 10; xxin, li), et encore
ce livre ertAl été écrit dans le pavs des Chaldéens.
IV. Musique. — La musique fut le seul art cultivé
avec quelque succès par les Hébreux; ils en faisaient
même remonter l'origine avant le déluge, et attribuaient
l'invention des instruments à un fils de Caln. Mais, bien
S l'on ait écrit de nombreux ouvrages sur cette mstière^
le est loin d'être élucidée. Les instruments, par exem*
pie, dont il est fait mention dans la Bible, ne nous sont
pas connus parfaitement : au nombre des instruments à
cordes, on renuurque le kinnor et le nébel, et, parmi les
instruments à vent, Vougab (F. ces mots), sans parler
des flûtes, des trompettes, des tambourins, des cym-
bales, etc. Un des historiens de la musique, Forkel, s
prétendu que toute la musique des Hébreux consista
dans une espèce de récitatif monotone, analogue auv
IIEB
1025
HËB
pnlmodieB des synagogues et des églises modernes :
mais, outre que cette assertion est dénuée de preuves ,
00 ne voit pas pourquoi la mélodie, qui est chose natu-
relle, aurait été refusée à un peuple d*une civilisation
dsseï avancée ; on ne comprendrait pas TefTet merveilleux
de la mnsiciue sur SaQl eu démence, et tout ce que la
Bible rapporte des chants des prophètes. D'ailleurs, il est
rapporté que David forma, pour rehausser la splendeur
da culte, un corps de 4,000 Lévites musiciens, divisés
«0 pluaieoTS chœurs, dont chacun avait un orchestre et
an penonnage dirigeant, chargé aussi de chanter ou de
ioaer les aolos. Ajoutons, toutefois, que la simplicité des
chants et des instruments chez tous les peuples de Tan-
tiouité, et q^ialement Tabsence de toute écriture musi-
cale chez les Hébreux, ne permettent pas de supposer
rieo d'analogue à ce ofue les modernes appellent Thar-
monie. F. Ugolino , Thésaurus antiquUcUum sacrarum,
L XXXn, où se trouvent une quarantaine de traités spé-
ciaux SOT la musique et les instruments des Hébreux;
Porkel, Histoire de la musique, chap. m; PfeifTer, Sur
ia musique des anciens Hébreux, en allem., 1779; Con-
tant de ht Molette. Essai sur la poésie et la musique des
H&freux , Paris, 1781 ; des Dissertations de Saalschûtz ,
Berlin, 1829, et de P.^. Schneider, Bonn, 1834, etc. B.
HteAlQOB (Langue), une des langues sémitiques {V. ce
mot), celle qui est arrivée la première à son complet dé-
veloppement, puisau'elle possédait déjà une littérature
lorsôue les antres étaient encore dans renfanoe. Ce phé-
nonràne n'autorise pas cependant à la regarder, avec
qcelqaes hébralsants, comme la langue mère univer-
selle, ni comme la plus ancienne des langues, encore
moins comme celle qui aurait été parlée dans le Paradis
terrestre. L'hébreu tient le milieu entre les idiomes ara-
méens et l'arabe : s'il se rapproche des premiers par ses
radnes, il a plus d'analogie avec le second pour la ri-
chesse des formes grammaticales; les radicaux hébraï-
ques se rapprochent davantage par leurs voyelles des
radicaux araméens correspondants, mais ils sont plus ana-
logues aux termes arabes par leurs consonnes.
Selon la plupart des hébralsants , '«s racines hébraï-
ques se composent, en général, de trois lettres et de deux
sfllabea, et il n'y aurait qu'un petit nombre de mots
mono^Ilabioues trilittères et de mots bilittères. Si ce
caractère polysyllabique des racines était réel, il serait
une exception h la règle qu'on observe partout ailleurs :
U difficulté de ramener aujourd'hui les mots hébreux à
des radicaux monosyllabiques est l'indice que la langue,
i. Tétai où nous la connaissons, s'était déjà éloignée de
la f<»ine primitive. Le nombre des racines trilittères est
de 3,000 environ ; celui des radicaux bilittères auxquels
Xenmann croyait pouvoir rigoureusement les réduire
lerait à peine de cinq cents. Rumelin, à l'aide de la trans-
position et de la permutation des lettres, réduisit à quinze
ladnes tons les mots hébreux. Il y a en hébreu deux
genres, le masculin et le féminin, et trois nombres, le
sngulier, le pluriel et le duel : ce dernier ne s'emploie
qne pour désigner des objets qui sont doubles par leur
nature. On reconnaît le genre, tantôt à la signification ,
tantôt à la désinence des mots. Dans chaque genre le
pluriel se forme d'une manière particulière. Les substan-
tifs ne se déclinent pas ; les cas sont indiqués par l'article
sons forme de préfixe , et par des prépositions insépa-
rables, n n'y a ni augmentatifs, ni diminutifs : on sup-
]riée aux premiers par certaines locutions, telles que le
saint des saints, le cantique des cantiques. Lorsque deux
substantife qui se suivent expriment un rapport de pos-
seaaion, c'est le mot régissant seul qui affecte une forme
spéciale; il rejette, en outre, l'article préfixe : on a donné
rôle) qui a subi une modification. Si les deux substantifs
qui se trouvent à l'état construit n'expriment qu'une
seule Idée, l'article, s'il doit y en avoir un, se met devant
le mot cooiplémentaire; ainsi l'on dit ange du Dieu pour
Vttoge de Dieu, hommes de la guerre pour les hommes de
guerre, — A la place des a4iectif8,qui sont en petit nombre,
on emploie des substantifs, et les deux noms se mettent h
Vétat construit : homme de Dieu pour homme vertueux,
fUs ds perdition pour homme perdu. L'hébreu ne possède
pas d'adjectifs dérivés de substantifs, comme sont nos
nota dkm, humain^ terrestre. Le comparatif se forme au
moyen de préfixes, et le superlatif absolu par l& répétition
da même mot : très-^aint se dit saùU, saint, saint. Tan-
tôt lea adjectifs déterminatifs et les pronoms sont séparés,
tutôt Os se présentent sous la forme d'affixes et de suf-
fixes s Us s'ajoutent comme suffixes aux substantifs, aux
prépositions, et aux verbes employés au parfait, et comme
préfixes au futur. — Les noms de nombre plaoâs après te
substantif se mettent au singulier; les noms placés i^rès
les disaînea à partir de la seconde rejettent ht marque dn
pluriel, n y a môme des sulratantifs qui, exprimant une
mesure, comme jour, homr/ie, armée^ restent invariables.
— Le verbe admet, aux 2* et 3* personnes, la distinction
des genres. Il n'y a que deux temps : le prétérit, qui sert
pour l'imparfait, le parfait, le plus-que-parfait et môme
le présent ; et le futur, qui répond tantôt au futur simple,
tantôt au futur antérieur, tantôt encore au présent. Par
l'adjonction d'une lettre préfixe, le futur se convertit en
prétérit; au moyen de certains retranchements et de cer-
taines additions à la finale de ce temps, il aomiiert la
valeur du subjonctif, du conditionnel et de l'optatif. L'Im-
pératif n'a que la 2* personne. L'infinitif et le participe
peuvent être considérés comme de véritables noms. Ce
n'est ni par l'infinitif comme les Latins, ni par la l'* per-
sonne du présent comme les Grecs, que les Hébreux
nomment un verbe, mais par la 3* personne du prétérit,
dans laquelle ils voient la racine verbale à l'état le plus
pur. L'hébreu n'a qu'une conjugaison : mais le verbe est
susceptible de revêtir sept formes ou voix, qui modifient
le sens primitif par l'Idée de circonstances nouvelles, et
expriment un sens passif, un sens causatif, un sens fré-
quentatif, etc. A l'aide de ces verbes dérivés, la conju-
ealson acquiert une certaine richesse. — Les adverbes et
let prépositions, dont le nombre estt fort restreint, peu-
vent, dans certains cas, prendre les signes des genres, et
être traités comme de véritables noms.
La plupart des règles de la syntaxe hébraïque sont
conformes à celles des autres langues ; la construction est
directe, et ne présente aucune difficulté. Seulement la
confusion des temps des verbes, le peu de distinction qui
existe entre les manières de parler conditionnelles et lea
manières id>solues, entre les propositions secondaires et
les propositions principales, la facilité avec laquelle on
passe do singulier au pluriel, du masculin au féminin,
ôtent au style la précision désirable.
La Palestine avait trop peu d'étendue pour que pln-
sieun dialectes pussent s'y former. On sait seulement
qu'il y avait, d'u^ Heu à l'autre, des difiérences de pro«)
nonciatlon : aJ^sl, les habitants du royaume d'Israël,'
notamment les Galiléens, altéraient les consonnes guttu-
rales, et, dans la tribu d'Éphralm, on changeait l'ar-
ticulation chuintante eu nfflante. On peut custinguer .
dans l'histoire de la langue hébraloue deux périodes : '
la première, qu'on appelle Vâge aor^ s'étend depuis
l'ongine de la langue Jusqu'à la captivité de Babylone; *
la seconde, ou âge d^argent, qui commence à la captivité
et finit à l'époque des Macchabées, se disthague par les
nombreux emprunts que les écrivains font au dialecte
chaldéen, auquel les Juifs, pendant leur s^our à Babv«
lone, s'habituèrent avec d'autant plus de facilité quil
avait une grande affinité avec la langue hébraïque. Ils
continuèrent à le parler après leur retour, et, de la Umgue
parlée, il passa insensiblement dans la langue écrite, où,
ven l'avénement de J.-C, il avait à peu près remplacé
l'ancien hébreu. Après la dynastie asmonéenne, la langue
hébraïque pure devint une langue morte, et le dialecte
hébreu-chaidéen ou syro-chaldéen fut seul employé. Pa- .
rallèlement à ce dialecte s'était développé, depuis le
VII* siècle av. J.-C, l'idiome samaritain (y, ce mot). Un
hébreu moderne, dit ràbbinique, s'est rormé depuis le
X* siècle de l'ère chrétienne chez les Juifs de l'Espagne :
tout en affectant de se rapprocher de l'ancien hébreu par
sa structure générale, il conserva les formes chaldalques,
et, de plus, emprunta à l'arabe, au grec, au latin, et aux
langues des pays où s'étaient réfugiés les restes du
peuple de Dieu, un grand nombre d'expressions. Les
Juifs modernes, surtout en Allemagne, ont conservé le
ràbbinique comme langue scientifique; quant à l'ancien
hébreu, qui est la langue liturgique, ils ne le compren-
nent généralement guère mieux que les catholiques de
tous pays ne comprennent le latin. ^
Parmi les ouvrages très-nombreux qui ont été oublié.^
sur la langue hébraïque, nous citerons t J. Reuchlin, D,:
rudimentis hebraXcis libri III^ Tubingue, 1506, in-fol. \
Buxtorf, Thésaurus grammcUicus Itngufs sanctœ, B&Ic,
1609, ln-8**; Bellarmin, Institutiones linguœ hehraXcœ,
Rome, 1622, in-8<>; Louis de Dieu, Grammatica linguarum
Hebrœorum, Chaldœorunjk et Syrorum inter se collata"
rum, Leyde, 1628; Hottinger, GrammtUica quatuor lin*
guarum, hebraltca, chaldaxca, syriaca et arabica, harmo-
nica, Heidelberg, 1658; Guarin, Grammatica hebraUca
etchaldaMca, Paris, 1724, in-4«; Masclef, frammatict:
6o
HÉB
1026
HËB
hÊhrtâea, Paris, i731.iii-lS; Schultens, InstUnUumn ad
hu»dammUa Imguœ AebroMi, Leytle, 1737, in-é*; Mi-
cfaaelis. Grammaire h^tnOquê, en allem.. Halle, 1745;
SchroBder, InstihtUonss ad fïmdamênta Itnguœ kebraicm
ncticognoscemim, Groningue, 1766, m*^^'; RoberUon,
Grammatka hO^raXca, 2« édit., Edimbourg, 1783; Wil-
•on, ÊUmaUs d» la Grammaire hébraiquê, en anglais,
S* édit., 4788; Vater, Grammaire héhrOUnte, en aile-
Band, Leipzig, 1798, ln-8*; Fabre d'Olivet, ta Langue
hUfraiquê restUiêée, Paria, 1816, in-4o; Geaeniua, Gram-
maire critique de la langue hebraMque, en allem., Leipdg,
1817, in-8o; Volney, l'Bif>reu simplifié par la méthode
alphabétique, Paris, 1826; Cohen, Cours de lecture hé-
brtOquef 1824, in-8*; Ewald, Grammaire critique de la
langue hébraique, en allem., Leipzig, 1827, in-S"; Glaire,
Prmdpes de grammaire hébraXque et chaldaXque^ Paris,
1832, in-8o; Sarchi, Grammaire hibraUque raisonnée,
Paris. 1844, in-8*; Latoache, Études hOtraXques, Paris,
1836, 3 Tol. in-8«; £. Slaoghter et J. Michaelis, Gram-^
m€Uica hebraica, édition donnée par V. Castellini,
i8M , in-8^ ; — Pagoinus , Thésaurus linguœ sanctœ ,
Lyon, 1577, in-fol.; Forster, Dictionarium hebraicum,
Bàle, 1557, in-fol. ; Buxtorf, Lexicon hfbraHewm et chal^
daicum, Bàle, 1631, in-8*, et Lexicon chaldaicum, thaï-
mudicum et rabbinicum^ 1639, in-8*; J. Cocoeji, Lexicon
A«&rakcttm, 1669 ; G. Robertson, Thesaurusiinguœ sanctœ,
Londres, 1680, in-4<>; Thomassin, Glossarium universale
hebraMcum, Paris, 1697, in -fol.; Bouget, Lexicon he^
braicum et chaldojtco^biblicum, Rome, 1737, in-fol. ;
Guarin, Lexicon hebraicum et chaldaico^iblicum, Paris,
1746,2 vol. in-4''; J. Simonis, Lexicon manuale hebrœum
etckaldcBum, Hall, 1752, in-8*; Michaelis, Supplementa
ad lexica hebraica, Gœttingue, 170S, G vol. in-4<^; Din-
dorf, Novum lexicon linguœ hebroMco-chaldaicœ, Leipzig,
1802, 2 vol. in-S''; Gesenius, Thésaurus philologicus et
criticus linguœ h^aicœ, Leipzig, 1829, in-4* ; Glaire,
Leasicon maamale hebrastcum et chaldaicum, Paris, 1830,
ln-8<^; Latoucbe, Dictionnaire hébraique raisonné, Ren-
nes, 1845; — Postel, De originibus seu de hebraxcœ Iùp-
guœ antiquiUUe, Paris, 1538, in-4''; fiertram. Parallèle
de la langue hébraique et de la lanru^ araméenne, en
latin, GenèTe, 1574, in-8<*; Loesdie;, Décousis linguœ
h^csœ, Francfort, 1706, in-4<^; Haupbnann, Historia
linfluœ hebrœœ, Leipzig, 1750, in-8°; Clemm, Histoire
critique de la langue Mbraiquey en allem., Heidelberg,
1754, in-8« ; Hezel, Histoire de la langue et de la litté-
rature hébralfques, en allemand. Halle, 1770; Gesenius,
Histoire de la langue et delà littérature hébraiqites, en
allem., Leipzig, 1815; Blogg, Histoire de la langue et de
la littératurehébratques^ en allemand, Hanovre, 1820,
in-4«. H.
BéBRAlQUB (Écriture). Les Hébreux ont eu deux formes
d'écriture. Tune dite carrée ou chaldéenne, et Tautre
brisée ou samaritaine. Les hébralsants ne sont pas d'ac-
cord sur la question de savoir quelle est la plus ancienne ;
quelques-uns supposent qu'elles existèrent simuluné-
ment dans tous les temps, et furent employées, la pre-
mière pour la transcription des livres saints et les usages
religieux, la seconde pour les usages profanes, la corres-
pondance et les affaires. La Qualification de chaldéen
donnée au caractère carré semi>le indiquer son origine
étrangère; il aura été importé en Palestine au retour de
la captivité de Babylone. D'un autre c6té, l'identité pres-
que complète de l'alphabet samaritain avec le phénicien
est une forte présomption de son antiquité. Il y a encore
nne écriture ronde ou rabbiniqtu; elle est comparative-
ment toute moderne. — Sous chacune de sea formes,
Talphabet hébraïque contient 22 lettres. Selon Buxtorf,
elles seraient toutes consonnes; Masclef y distingue, au
contraire, 6 voyelles, dont 4 brèves et 2 longues. D'autres
p^admettent que 3 lettres faisant fonctions de voyelles,
a, i, u; les voyelles « et o ne sont, comme en grec, en
latin et dans les langues qui en dérivent, que des sons in-
termédiaires, des dfphthongues qui résultent de la com-
binaison de deux voyelles [ai^ é^ de a et t; au, o, de a et
M), Aussi a-tron appelé les trois voyelles maires lectio-
ms, « les mères, ou les bases de la lecture. » Mais ces
voyelles mêmes ne sont autre chose que des consonnes
faibles, qu'on n'employait comme voyelles que pour les
ions sraves et longs ; les brèves étaient omises, et le lec-
teur dut y suppléer. De là les nombreuses interprétations
auxquelles a donné lieu le texte sacré : car un même mot
change de sens en changeant de voyelle. Souvent aussi
le sens du mot dépend de l'accent tonique. On comprend
combien une pareille écriture dut être impsrfaite et
équivoque. Néanmoins, on ne se servit pas d'autres
voyelles ni d'autres signes phoniqnes pendant tout I»
temps où 11<£ome hébraïque fut une langue vivante ; avec
cette différence, pourtant, que les derniers écrivains mi-
rent firéquemment la voyelle dans les mots où elle avait
été omise antérieurement. L'habitude et la connaissance
de la langue, ainsi qae cela se pratique encore de nos Jonrs
chez les Arabes et les Perses, suppléaient an défaut de la
vocalisation. Mais, à mesure que l'hébreu devenait langoe
morte, la véritable prononciation ^paraissait : aussi
fut-on obligé, pour remédier à cet inconvénient, d'in-
venter des points diacritiques et des points -voyelles.
Suivant Elias Lévita, cette innovation ne date que dn
VI* ou vu* siècle i^rès J.-G. Une foule de modifications,
telles que celles de nombre, de genre, de temps, etc., ne-
sont indiquées que par les points-voyelles. Ces points se
placent presque tous en dessus ou en dessous de la liçne
d'écriture : ils représentent dix voyelles différentes, anq
longues et cinq brèves. Les points diacritiques servent à
modifier la valeur de la consonne à laquelle ils sont atta-
chés, par exemple, à hi faire redoubler dans la pronon-
ciation, à faire disparaître l'aspiration, etc. Â la même
époque on inventa les signes de ponctuation et les ac-
cents. Les Juifs ont cependant conservé par tradition
l'antique coutume ; le Pentateuque écrit sur du parche-
min et dont ils se servent pour leur service religieux est
dépourvu de tout signe qui facilite la lecture. V. Van Hel-
mont, Alphabeti vere naturalis hebraïei brevissima de-
lineatio, Sulzbach, 1667; Samuel Bochart, Dissertation
sur V affinité des caractères samaritains avec les Grecs,
en latin, dans ses Œuvres, Leyde, 1675, in-fol. H.
hébraïque (Littérature). Tous les monuments de l'an-
cienne littérature hébraique qui sont parvenus Jusqu'à
nous forment le recueil connu sous le nom de BtbU
( V. ce mot). Ils sont de différents genres, et souvent
même, dans un seul écrit, on trouve mêlées l'histoire,
l'éloquence et la poésie.
Les ouvrages historiques de la Bible sont : le Penta-
teuque^ qui contient 1 histoire de la création, des pre-
mières générations humaines, et du peuple Juif jusqu'à
son entiie dans la Terre promise ; le livre de Josué ; le livre
des Juges, qui preâd le récit historique à la mort de Jo-
sué et le continue Jusqu'à celle de Samson ; les 4 livrea
des Aots, commençant à la naissance du grand-prêtre
Samuel et se terminant à la destruction du royaume de
Juda; les 2 livres des Chroniqws ou des Paralipo-
mènes, qui reprennent la généalogie de la nation juive à
partir d'Adam, répètent sous une forme très-abrégée la
partie historique des livres précédents, et finissent à
i'édit de Cyrus en faveur des Juifs; les livres d'Esdras,
qui commencent au retour de la captivité de Babylone, et
renferment un espace de 113 ans. La série des livres con-
sacrés à l'histoire nationale est ensuite interrompue par
des récits épisodioues; ce sont les livres de Judith, de
Tobie^ de Jonas, A'Esther, de Daniel. Enfin les livres
des Macchabées contiennent l'histoire des Juirs depuis
Alexandre le Grand Jusqu'à Antlocbus Nicanor.
On trouve dans le PenteUeuque deux morceaux poéd-
quea^ les Cantiques de Moïse au chap. xv de VExode et
au chap. xxxn du DevUéronome. A la poésie ^partlennent
aussi le Cantique de Débora (Juges, chap. v)i le livre de
Job, les Psaumes de David, les Proverbes, VEcclésiaste,
la Sagesse^ V Ecclésiastique, le CarUique des cantiques,
les discours des prophètes, particulièrement dlsale, et
les Lamentations de Jérémie. C'est avec ces diverses
purties de la Bible qu'on se fait la plus Juste idée du
génie hâi>ralque. Plus exempt qu'aucun autre de toute
influence étrangère, il s'y montre dans son originalité
propre. Tout, chez les poètes hébreux, s'anime de bril-
lantes images et de hardies métaphores, et nul style ne
présente un caractère plus pittoresque ; l'expression, à la
ibis simple et noble, revêt une incroyable majesté, et la
pensée s'élève à de sublimes hauteurs. Mais on peut re-
procher aux écrivains de la Bible de manquer souvent
d'ordre et de méthode, et de tomber des plus nobles con-
ceptions aux détails les plus vulgaires.
Plusieurs écrits des anciens Hébreux ont été perdus.
Le livre des Nombres (chap. xxi, v. 14) mentionne un
Livre des guerres de Jéhovah, c.-à-d. des guerres que le
peuple de Dieu eut à soutenir dans le désert. Celui de
Josué (ch. X, V. 13) parle d'un Livre du juste ou des hé'
ros. que l'on croit avoir été un antique recueil de chants
nationaux. Les livres des Rois se réfèrent souvent à des
Annales des rois de Juda et d^ Israël. Divers écrits scien-
tifiques, que nous n'avons plus, étaient attribués à Sa-
lomon.
Indépendamment de la Bible, les Juifs possèdeot un
HEB
1027
BEL
Code de droH clTil etreligienx, qui est pour eux la suite
et le oomidément ; c'est le Taimud ( V, ce mol dans notre
Oidîonnotre de Biographie et d^ Histoire). Ils ont auçsi,
tons le nom de Targunu^ diverses paraphrases cbal-
dslquee de rAncien Testament. Au vi* siècle de notre
ère parut, sous le nom de Massera (tradition), un tra-
vail critique sur le texte de la Bible, destiné à fixer ce
texte d'après les manuscrits les plus authentiques, à arrê-
ter Torthographe de la langue, et indiquant un certain
nombre de Tariantes remarquables.
n y eut en Occident, pendant le moyen âge, une litté-
ratura rabbinique, qui fait suite à celle des anciens Hé-
breux, et dont TEspagne fut le principal centre. Brillante
sortoat au xii« siècle, elle prodaisit le voyageur Benjamin
de Tudèle, le philologue Anen-Esra, le grammairien lexi-
cographe David Kimkhi, et le philosophe Haimooide. Au
xiii* siècle appartient le po6tc Charizi ; au xv*, Abraham
Zachat, de Séville, publia le Juchazin rùvre des familles),
espèce d'Histoire universelle. Les rabbins espagnols ces-
sèrent leurs travaux à partir du règne de Ferdinand le
Catholique, et trouvèrent ailleurs peu de continuateurs.
Cest seulement dans la 2* moitié du xvm* siècle que
deux rabbins allemands, Mendelssohn etHartwig Werely,
firent renaître chez leurs coreli^onnaires le goût de la
littérature héhraiaue.
r. Lowth, Prœtectiones academicœ de sacra poesi Se-
breBorum, Oxford, 1732, in-4<*; Aurivillius, De pœsi 6i-
l>licà, Upsal, 1758; Herder, Leçons sur la poésie des
Hébreux; Delitsch, Histoire de la poésie judaïque, depuis
la ci&hire du canon des Saintes Ecritures jusqu* à nos
jours, Leipzig, 1836; Wenrich, De poeseos nebroJLcœ at-
que arabieœ origine, indole, consensu atque discrimine,
Leipzig , 1843, in-8<»; Beupot, Les Juifs d'Occident ,
Pans, 1824; Kavserling, Mémoires pour serwr à la lilt-
térature et à Vhistoire des Juifs portugais, en allem.,
Leipzig, 1859. B.
■ABaAiQiiB (Versification). Selon Josèphe, les cantiques
de Mf^se, au 15* chap. de V Exode et au 32* du Deutiro-
nome y seraient en hexamètres, et certains Psaumes de
David en pentamètres et en trimètres. Contrairement à
ce témoignage, les rabbins pensent que la poésie hébraï-
que n'a Jamais eu de mètre fixe, et il est, en effet, difficile
d'en reconnaître aucun : on ne voit pas de vers mesurés
par le nombre des syllabes ou par la quantité prosodique.
Ce qui distingue la poésie, c'est d'abord un rhythme ré-
Bohant d'une certaine symétrie entre les membres de la
phrase, et du parallélisme des idées entre les deux par-
ties de la stance ou du verset; ce sont ensuite certaines
formes du langage, les mots prenant des acceptions et les
phrases recevant des constructions spéciales. Le jy Lowth
distingue trois espèces de parallélisme, le synonyme,
Yantithétique et le synthétique. Dans le parallélisme qmo-
oyme, les mots correspondants des dâix membres sont
synonymes, ou renferment des idées analogues :
Ma doctrine dlitiUen oomme la pinte,
lia parole dégouttera eomme la rosée ;
CoDome rarerse enr la rerdiire,
Comme la giboulée tsar Therbe.
(ZVuléronoiM, 8S, t.)
Dans le parallélisme antithétique, les mots correspon-
dants offrent un sens opposé :
Lea conpe de Taml sont fldMes ,
Les baisers de Ténnemi sont perfides.
{ Proverbes, n,€. )
Le parallélisme sjmthétique n'oBre qu'une simple ana-
logie dans Tordre des mots et dans les Idées; les mots ne
sont ni analogues ni opposés les uns aux autres, et l'idée
exprimée dans le premier membre est continuée dans le
second et complétée par un nouveau trait :
La loi de Jéhora est parlklte,
Bécréantl'fime;
L'aTertissement de Jéhova est fldUe,
fiendant sage le simple.
( Ptaumet, IS, 8 et shIt. )
HÉBREUX (Monnaies des). Elles ne furent, dans l*ori-
ne, que des morceaux d*argent d*un poids déterminé,
«qués d*un signe généralement reconnu dans le com-
merce {Genèse, xxm, 16 J : les anciens livres de la Bible
ne parlent pas de monnaies proprement dites. D y avait
des pièces d'un side (poids de 274 grains), des demi-
slclea, des quarts de sicle. Le sicle en monnaie pouvait
valoir environ 3 fr. 10 c Ce fut seulement à l'époque des
Macchabées que les Hébreux frappèrent des monq^iea
réelles ; les légendes des sicles furent tracées en carac-
tères samaritains. Plus tard, les princes de la famille
d*Hérode frappèrent des espèoBs bilingues, à la fois greo-t
ques et hébraïques. De nombreuses pièces d'argent et de
bronze sont parvenues Jusqu'à nous, mais on n'en a au-
cune d'or. Le monnayage cessa lors de la destruction de
Jérusalem par Titus. Les monnaies hébraïques n'oflCrant
aucune représentation de la figure humaine, proscrite par
la loi de Moïse; on y voit la jusquiame, qui faisait partie
des ornements de la couronne du grand prêtre, la verse
d'Aaron, le vase où la manne fut recueillie, des épis de
blé, emblèmes de la religion Juive, la vigne, souvenir de
la fertilité de la terre promise, ou encore le Temple et
l'Arche d'alliance. B.
HÉCATONSTYLON. F. ce mot dans notre Diction^
naure de Biographie et d'Histoire,
HÉDONISME (du grec hédoné, plaisir), doctrine phi-
losophique qui considère le plaisir comme le principe de
l'activité morale, comme le souverain bien. C'est le sys-
tème de l'école cyrénalque et de l'épicuréisme ( F. ces
mots).
HEDYCOMOS. F. Comos.
HÉGÉMONIE, l V. notre Dictionnaire de Biographie
HÉGIRE. \ et d'Histoire.
HEIDELBERG (Ch&teau de). Ce château, élevé de 104
met. au-dessus du Neckar, sur une colline appelée le Jet-
tenbuhl , est un assemblage de constructions de toutes
sortes, qui l'ont fait surnommer TAlhambra de l'Aile-
magne : chaque électeur palatin depuis le xv* siècle vou*
lut ijouter aux travaux de ses prédécesseurs. Cette col-
lection de tours et de palais , fort endommagée pendant
la guerre de Trente Ans, souiOTrit encore les dévastations
de Méhu: en 1688 et 1693, et le château est resté depuis
cette époque dans l'état où on le voit aii^ourd'bui. Quand
on est entré par la grande porte dans la cour principale^
on a devant soi le palais de Frédéric IV (1583-1610),
dont la façade, surmontée de deux hauts frontons trian-
gulaires, off're des entablements largement projetés, et,
entre 4 rangs de fenêtres , les statues finement taillées
de 9 palatins, de 2 rois, et de 5 empereurs ; à gauche, on
a le palais gothique de Louis le Barbu, profondément
troué et crevassé ; à droite, le paljds construit sous Othon-
Henri, de 1555 à 1559, dont la façade exqydse, en sQrle
Renaissance, ea^ garnie de dieux et de demi-dieux grecs,
de héros hébreux, de chimères et de nymphes, et de Cé-
sars romains; derrière soi, sous les ogives d'un porche,
on a 4 colonnes de granit gris, données par le pape à
Charlemagne, et qui ornèrent d'abord le palais du grand
empereur à Ingelheim. Toute la cour est obstruée de dé-
bris de fontaines et de perrons. Le pidais de Frédéric IV
contient le musée Graimberg, amas peu choisi d'anti-
quités et de tableaux. Sur la partie orientale du ch&teau.
on remarque : la Tour fendue, construite en 1450, et qui
contenait le magasin à poudre ; la Tour de la 6t6lto-
thèque, bâtie en 1550, et qui a ronfermé la bibliothèqnie
palatine du Vatican; la Tour octogone ou de la doàie,
o&tie en 1525, incendiée par la foudre en 1764. Du côté
occidental est la Grosse tour, achevée en 1533, et ruinée
par les Français, bien que ses murs aient une épaisseur
de 7 met. Dans les caves du château se trouve un fameux
tonneau, qui présente l'aspect d'un naviro sous la cale :
construit en 1751, il a 11 met. de longueur, 8 met. de
diamètre, et peut contenir 283,000 bouteilles de vin ; il
off're k sa partie supérieure une plate-forme , où l'on
monte par deux escaliers & deux étages. Le château de
Heidelbers a ime magnifique terrasse et de charmants
Jardins. V. le comte de Graimberg, Guide du voyageur
aux ruines du chAtea/u de Heidelberg , 1836. in-fol. «
Pfnor et Ramée, Monographie du chàieau de Heidet»
berg, in-fol. B.
HEIDUQUES. V. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire.
HELDENBUGH, c-â-d. Livre des Héros, nom d'une
collection de poSmes aUemands, composés dans le xm*
on le XIV* siècle, et dont les si^ets, moitié fabuleux,
moitié historiques, se rapportent aux temps d'Attila et
de Théodoric, La plupart de ces poèmes ont été retra-
vaillés et tronqua au xv* siècle pur Gaspard de Roan«
dont le texte a servi â toutes les émtions du Heldei^uch;
mais la forme primitive a été rétablie dans l'édition don-
née par Von der Hagen, Berlin, 1820-24, 2 vol. in-4^
Le Heldenbuch comprend : les Aïeux de Théodoric et sa
fuite chex les Huns , poème qui parait ètro un travail de
seconde main ; la Bataille de Bavenne, écrit prétentieux
et d'un «ntérèt à peu près nul ; la Mort d'Alfart, où l'on
HEN
1028
HËN
paraît avoir imité la lutte da AU d'Attila avec Vitigès,
racontée dans le poëme précédent; (Hnit, poème dans
lequel on a trouvé de Tanalogie avec l*Otieron de Wie-
land ; Wolfdieirich, tableau de la fidélité mutuelle que
se devaient les suzerains et les vassaux : le Gnome Lau^
rm, Sigenot, Eck$, la Cour (PAtiiia à Wonns, poèmes
fleins de trivialité, de fastidieuses redites, et où Pon vit
ians le monde des géants et des nains ; Théodorie $t set
compagnons, ouvrage qui, avant d'être éconrté par Gas-
pard de Roan, portait le titre de Conibctt aivec les dro'
gons; le Jardin des roses, dont l'auteur a visé aux effets
comiques, et qui est la meilleure production du recueil.
HÉLÉPOLE. V. ce mot dsins notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
HÊLIAS, 4* branche du Chevalier au Cygne par la date
de la composition, mais la 1" dans Tordre des idées. Le
roi Lothaire épouse la belle Élioxe, qui meurt en donnant
le Jour à sept Jumeaux. Chacun d'eux vient au monde
avec une chaîne d'or au cou. La mère du roi, qu'un ma-
nuscrit appelle la vieille Matabrune, ordonne de faire
périr ces enfants. Sept ans plus tard, elle apprend qu'ils
ont été sauvés, et leur fait enlever leun chaînes d'or;
aussitôt ils sont métamorphosés en cygnes, et vont ha-
oiter dans les Jardins de Lothaire. Cependant la fille
d'Élioxe a conservé sa chaîne d'or, et n'a pas été méta-
morphosée comme ses frères. Elle raconte à Lothaire ce
qui est arrivé. Le roi fait chercher les chaînes pour les
rendre à ses enfants. One seule avait été fondue par l'or-
fèvre de Matabrune; un seul des fils de Lothaire conserve
la forme d'un cygne : Hélias le place à la proue de son
vaisseau, d'où lui vient le nom de Chevalier au Cygne,
Là Bibliothèque impériale de Paris po«iède quatre ma-
nuscrits de la chanson d'Hélias. K* VBistoire litt, de la
France, u XXII. H. D.
IIÉLICES,en termes d'Architecture, la même chose que
les caulicoles ( V, ce mot).
HÊUCOIDE. V. Escalier.
HÉLICON, une des lyres des Anciens, ainsi nommée en
souvenir des Muses qui habitaient sur le mont Hélicon,
parce qu'elle avait 9 cordes.
UÉLIENNE (Monnaie), monnaie des comtes de Péri-
gord , ainsi appelée du comte Héli au xi* siècle.
HÉLIOGRAPHIB. V, Protogbaphib.
UKLIOPOLIS (Ruines d*). F. Balbeck.
HELLÊiNlQUES , titre donné par Xénophon k l'histoire
en "/ livres qu'il écrivit pour faire suite à l'ouvrage do
Thucydide, et qui s'arrête à la bataille de Mantlnée.
HELLÉNISME, manière de s'exprimer particulière k la
langue grecque. C'est un hellénisme de faire accorder en
cas le râatif complément direct d'un verbe actif avec son
antécédent, lorsque celui-ci est au génitif et au datif. La
formule de salutation et d'adieu, kaire^ est propre aux
Grecs. Un des héllénismes les plus remarquables est fem^
ploi des particiUes \U^&tU mises en corrélation. — On
donne aussi le nom d'héllénismes k certaines tournures
grecques introduites dans une langue étrangère : telle est
cette construction latine : Sensit delapsus in hostes, an
lieu de : se delapsum esse. Racine {Athalie^ III, 4), à
l'exemple du grec, thaumazô ei^ a dit également :
J*admlrais si Hatbaa, dépouillant l'artifloet ete.
Hellénisme s'appliqruait aussi aux fautes de langage que
fidsaient les Grecs lorsqu'ils parlaient latin et qu'ils em-
ployaient dans cette langue oes toun propres à la leur;
par exemple, il pouvait leur échapper de dire turpium
9Mtf parce qu'on disait dans leur langue tân aiskrân
estt, P-
HÉMICYCLE (du grec hêmi, demi , et kuklos, cercle) ,
construction demi-circulaire. C'est la forme la meilleure
que l'on puisse adopter pour placer un grand nombre de
spectateun ou d'auditeurs.
HÉMI-DITON, nom donné, dans la musique des an-
dens Grecs, non pas à la moitié du diton ou intervalle
de tierce mideure, mais à cet intervalle diminué d'un
demi-ton, êila tierce mineure.
HËMIOLIE, navire employé surtout par les anciens
pintes grecs. La moitié des côtés était libre de rameurs,
pour former on pont sur lequel on put combattre.
HÉBIISTIGHE, da grec hêmi, demi, et stikhos, vers.
On appelle ainsi en (hmçais chacune des deux parties du
Yen alexandrin séparées par le repos de la césure i
Le moment oh je perle | est d^ loin de mol.
BOILKÂU, Ép, 3.
HENDÉGASYLLABE (du grec hendéka onze) , vers de
onze syllabes. Dans l'antiquité, on donnait ce nom à trois
espèces de vera : au phaleuce, à ValcaXque, et au sf^thique
{V. ces mots). Dans les temps modernes, il a été propre
k la poésie italienne, dont il est le grand ven. Notre ven
ihinçais de dix syllabes, lorsqu'il finit par une rime fémi-
nine, offre beaucoup de ressemblance avec rhendécasyl»
labe italien. — On trouve quelquefois ce vere dans la
poésie anglaise, mais seulement dans les pièces lyri-
ques. P.
HENNIN. V. CoiPPimB.
HENRI, monnaie. V. notre Dietionnaire de Biogra-
phie et d' Histoire,
HENRIADE (La), poème de Voltaire, en l'honneur de
Henri lY, roi de France. Le sujet est le siège de Paris,
commencé par Henri III, que la Ligue en avait chassé,
et par Henri de Navarre, et achevé par ce dernier. Le
lieu de la scène ne s'étend pas plus loin que de Paris à
Iviy (Eure). Les événements sont : un voyage de Henri
de Navarre en Angleterre pour demander des secoun
contre la Ligue à la reine Elisabeth ; les vicissitudes du
siège, la détresse des assiégés et leur fanatisme; l'envoi
par eux d'un dominicain, Jacques Clément, qui vient
assassiner Henri III dans son camp ; Henri de Navarre
reconnu roi sous le nom de Henri IV par l'armée, et re-
poussé par la Ligue parce qu'il est calviniste; enfin Paris
réduit à toute extrémité, et l'abjuration du roi, qui dé-
termine enfin les révoltés h se soumettre. — Le poème
est en dix chants et en vera alexandrins. Voltaire a
cherché à Jeter de la variété dans cette action, d'abord
par des récits historiques, oui sont comme l'avantr^cèoe
de son poème, et <^'Henri udt à la reine Elisabeth, tels
que les guerres dviles entre les catholiques et les protes-
tants, les massacres de la S'^Barthélemy (chants i, 2, 3);
ensuite par du merveilleux : il fait intervenir, comme
soutien des li^eura, la Discorde, qui va chercher la Po-
litique au Vatican, soulève la Sorbonne et les Seize contre
le parlement de Paris (chant 4), et pousse Jacques Clé-
ment à l'assassinat de Henri III (chant 5); S* Louis des-
cendant du ciel pour arrêter la fureur de Henri IV au
moment où 11 va faire brûler Paris, et le transportant en-
suite en esprit au ciel, aux enfen, où il lui fait voir, dans
le palais des Destins, les souverains qui lui succéde-
ront, et les grands hommes que la France doit produire
(chants 6, 7). — Les contemporains de Voltaire, surtout
lora de la première publication de la Henriade, en 1725,
la saluèrent d'épopée (V. ce mot) ; mais ce poème est bien
loin de mériter un aussi beau titre : son plan manque
d'unité, et l'action de grandeur, d'intérêt, de mouvement;
le développement des faits n'a pas asses d'ampleur; les
caractères sont trop peu variés, les personnages trop peu
agissants. Il y a de oelles descriptions, d'heureux épi-
sodes, des portraits pleins de vigueur, mais il règne dans
l'ensemble une froideur qui permet difficilement da
suivre le poète sans interruption Jusqu'au bout. Point de
ces tableaux de mœun locales, point de ces scènes de la
nature champêtre, qui, dans Homère et dans Virgile, dé-
lassent le lecteur animé des passions ou ému des dangers
de leura personnages : « Il n'y a pas seulement, disait
plaisamment Delille, d'herbe pour nourrir les chevaux,
ni d'eau pour les désaltérer. » Voltaira commença la Hen^
riade à vingt ans, sans savoir, ainsi qu'il le dit lui-même,
ce que c'était qu'un poème épique. Quant au sujet, il
était mal choisi : l'époque de la Ligue, trop récente pour
avoir la penpective et le lointain poétique, était aussi
trop connue, avec ses intrigues et son fanatisme grossier,
avec le cynisme de ses mœurs, pour qu'on yjpùt aisément
trouver des tableaux épiques. Au fond, la aenriade n'est
qu'une Uièse morale contre le fanatisme et en faveur de
la tolérance. Le véritable merveilleux de l'épopée ne pou-
vait y trouver place. Le christianisme admet que les
anges et les démons, substances incorporelles, ont quel-
quefois revêtu des formes palpables, et ont eu commerce
avec les hommes, ceux-là pour les aider au bien, ceux-ci
pour les pousser au mal : dédaignant ou craignant d'em*
ployer ce merveilleux fourni par la religion. Voltaire eut
recoure k de froides allégories : il personnifia, il fit agir
et parler la Discorde, le Fanatisme, U Politique, la Vé-
rité, c-àrd. de pures abstractionB. Malgré les efforts de
Voltaire, l'épopée manque donc encore a la France. Mais
la Benriade sera toujoure un dief-d'œuvre de versifica-
tion noble, élégante et pure.
Le sujet choisi par Voltaire avait été dé[à traité avant
lui ; un auteur de la fin du xvi* siècle, Chillac, écrivit
une Liliade françoise, poème dont Henri IV est le héros.
On a de Sébastien Gamler une Henriade, publiée h
Blois en 1593, et qu'on eut la bizarre idée de réimprimer
HEP
1029
IIER
en 1770. L'Bmricias deQuillet, poSme latin en 12 chants,
est aajourd'hni perdu. Un Énrico de J. Blalmignati
(Venise, 1023, in-8«) paraît avoir été mis à contribution
par Voltaire ponr qnelques détails {V* le Magasin êncy-
çlopiditnu, 5* année, t 1*'}. Un nommé Aillaud n*a pas
cnint, an xthi* siècle, de refaire et de défigurer la Hen-'
riadê^ qui a été en outre parodiée, presque vers par vers,,
par Honhron, sous le titre de la Henriadê travesHet aux
(lipeiu du publie, Berlin, 1758, in-12. Il eiiste un Com-
mentaire mr la Henriadê par La Beaumelle et Fréron ,
Paris, 1775, 2 vol. in-8o. B.
HEPHTHÉMIMÈRE (Césure). V. Césuas.
HEPTACORDE (du grec hepta, sept), nom donné par
les anciens Grecs à une sorte de lyre qui avait 7 cordes,
et à un système musical formé de 7 sons, comme est
notre ommc.
HEPTAHÉRON (du grecAepfa, sept, etém^a, Jour),
recaeil de NouTelles et de Contes composés par Margue-
rite, reine de Navarre, à Timitation du bécaméron de Boc-
cace. Ce devait être aussi un Décaméron; mais la mort
empêcha Marguerite de terminer son œuvre, qui ne com-
prrâd que sept Journées au lieu de dix. La scène se passe
anx Pyrénées; les dix personnages qui y Jouent un rôle
sont i^unts dans une abbave où des pluies torrentielles
les ont contraints de se réfugier : il leur faut attendre
qo*on répare les chemins effondrés et que Ton construise
an pont sur le Gave ; pour passer ce temps sans ennui ,
Us conviennent de se rendre chaque Jour dans une prairie
Toistne, où chacun racontera une histoire. Les récits de
XEe^améron ne se distinguent ni par Tintérèt ni par
Part de la composition ; mais le style a de l'agrément et
de la finesse. Les sujets, dont cpielques-uns se rapportent
à des personnages contemporains, roulent sur les ruses
et les tromperies de l'amour ; ils sont racontés avec une
cradité de détails peu édifiante, à l'appui d*une maxime
contenue dans le prologue dont chacun d'eux est précédé,
et tendent à nne moralité qui est déduite dans l'épilogue;
mais cette moralité est souvent éçiuivoque. Les ^ilogues
sont des conversations entre les interlocuteurs de Vnep^
Uimirtm sur rhistoire qu'ils viennent d'entendre; ils peu-
Tent passer pour de curieux échantillons de la haute so-
ciété de Tépoque, et, à ce titre, ils relèvent la banalité
des aventures auxquelles ils tiennent lieu de dénoûment»
On trouve dans cet ouvrage plus de loquacité que de sen-
timent, plus d'esprit que de tendresse, et le même carac-
tère de subtilité mystique qu'on remarque dans les autres
écrits de Marguerite de Navarre. Elle le composa presque
entièrement en Toyage, conune pour se délasser, et dans
on Age assez avancé pour qu'on ne lui suppose pas d*in-
tentlon licencieuse, quand même sa vie entière ne pro-
testerait pas contre cette imputation. — La l'* édition do
XBe^tamértm^ qui parut sans nom d'auteur, était intitu-
lée Histoire dis amants for tunez, dédiés à VUlustrsprin''
ctssê JfB* Marguerite de Bourbon, duchesse de Nivemois,
Paris, 1558. En 1698, il en pamt nne sous ce titre : Contes
9t Nouvelles de Marguerite de Valois, mis en beau lan-
9009, Amsterdam , 2 vol. in-8", où , sous prétexte de ra-
jeunir le s^le de l'auteur, on le rendit méconnaissable.
La seule édition conforme au texte original est celle de
M. Leroux delJncy, Paris, 1853, 3 vol. in-8*. P— s.
HEPTAMÈTRE (du grec hepta, sept, et ffi^trofi, me-
nre), vers de 7 piedi. On en trouve dans le système
dactylique ( V. Éouqub — Vers). Serrius enciteun exem-
ple latin qui est hypercatalecUque :
YenlcnllM tlbllâsctyllICM oeellnl, puertoptline|, quoa tiA\as.
Le vers dactylico-trochalque est un heptamètre dont
les 4 premiers pieds appartiennent à Tonure dactylique,
'es 3 derniers à l'ordre trochalque :
SolTltarl aerU bllems gratta viee| v«rlt| tt Favlonl. Hoa.
F. SErréNAiBE. P.
HEPTASYLLABE (du grec hspta, sept), vers français
de 1 syllabes. Il remonte aux origines de notre littérature.
U est fréquent dans les chansons. Dans les autres genres
iyrioiies, il compose des dizains harmonieux, comme
celui-d de J.-B. Rousseau {Odes, 1, 10) :
J'ai TV maa triatca Joaméaa
Décliner van leor penchant , etc.
Quelquefois les 6 derniers vers du dizain sont en hep-
■syllabes, et les 4 premiers en alexandrins. D'autres fois
rbeptasyllabe fah partie de strophes de différentes me-
■arês, comme on le voit par les chœurs de Racine. Dana
sa cantate de Dinne. .t.-B. Rousseau a employé des tei^
cets heptasyllabos :
Quel bonheur I quelle victoire !
Quel triomphe! quelle gloire I •
Lea Amoura aont dtfaannéa.
Certains vers métriques des Anciens se trouvent être
heptasyllabes : tels sont le dimètre iambi^ue catalectiquCt
le dimètre trochalque catalectique et le dimètre choriam-
bique catalectique; mais il faut que ces vers soient purs,
c-W. n'admettent aucun pied qui ne leur soit propre,
comme serait l'anapeste pour l'ïambe, le dactyle pour le
trochée. P.
HKPTÉRIS, navire de guerre des Anciens, à 7 rangs
de rames de chaque côté.
HERi£UM, nom des temples de Junon, en grec Héra.
HÉRALDIQUE (Art). V. Blason.
HÉRAUDERIE. > K . ces mots dans notre Dictionwùre
RÉRAUT. \ de Biographie et d'Histoire.
HERBORISTE, celui qui fait métier de vendre des
simples ou plantes médicinales. Dans les grandes villes ,
on ne peut exercer cette profession sans un diplôme de
capacité, qui s'obtient après examen (Lois du 11 avril 1803
et du 13 août 1805). Il y a dea diplômes de deux classes,
dont le coût est de 100 fr. et de oO f^. Les herboristes
sont assujettis aux visites annuelles de la commicudon
médicale. Ils ne peuvent vendre que des plantes indigo
nés ; le débit de toute substance exotique et de toute pré-
paration pharmaceutique leur est interdit.
HERCuLANUM, une des trois villes englouties par
l'éruption du Vésuve, en Tan 79 après J.-C. La masse de
lave accumulée encore sur elle par des éruptions moins
anciennes a une épaisseur qui varie de 21 à 34 met. ;
Résina et nne partie de Portici ont été bâties au-dessus.
Il paraît que, dès la fin du xvi« siècle, on y fit quelques
fouilles, bientôt abandonnées. En 1713, Emmanuel de
Lorraine, prince d'Elbeuf, ayant eu besoin de marbres
pour une maison qu'il faisait b&tir à Portici, apprit qu'on
en avait trouvé en creusant un puits, et fit continuer ce
travail. On atteignit ainsi un théâtre par la partie posté-
rieure de la scène, et c'est encore par ce puits que le
monument reçoit aujourd'hui la lumière. Pendant plu-
sieurs années, le prince d'Elbeuf recueillit des marbres,
des colonnes, des statues, dont il dut restituer une partie
au gouvernement napolitain. Le roi Charles III interdit
aux particuliers de faire des fouilles, et ordonna lui-
même la reprise des travaux en diverses directions dans
le voisinage du puits : ils ftirent poursuiris de 1738 à
1770, mais avec peu d'intelligence, car on remplissait la
plupart des excavations après y avoir fidt des recherches.
Une Académie des Herculantens fut instituée pour pu-
blier la description des antiquités qu'on avait recueillies.
A la suite d'une nouvelle interruption, on travailla en*
core de 1828 à 1837. — C'est à Résina qu'on descend
dans la ville souterraine, aui ne se risite qu'avec des
flambeaux. Les rues d'HercuIanum sont droites, avec des
espèces de trottoirs, et pavées en lave; les maisons, dis-
tribnées comme à Pompéi {V. ce mot)y n'ont qu'un seul
étage, et de nombreuses peintures à fresque nul en or-
naient l'intérieur ont été enlevées. Le théâtre, le premier
et le plus graivl édifice qu'on ait découvert, a 78 met. de
diamètre, et pouvait contenir 10,000 spectateurs : il est
composé de 16 rangs de gradins en travertin, et de 3 rangs
à l'amphithé&tre supérieur; l'orchestre est pavé de mar-
bres anicains. Ce thé&tre, où l'on a trouvé des statues en
marbre et en bronze, et quatre statues équestres en bronze
doré, est obstrué par des piliers massifs, destinés à
étayer les terres supérieures. La découverte du théÀtre
fut suivie de celle de deux temples, situés à peu de dis-
tance, l'un de 50 met. de longueur sur 20 met. de lar-
geur, l'autre de 20 met. sur 15. Une basilique, longue
de 76 met. et large de 44, avec un portique de 42 co-
lonnes, était om& de statues et de peintures ; sur la
place qui la précédait, s'élevaient les deux statues
équestres du fondateur et de son fils. De 1750 à 1760, on
explora la VUla d'Aristide ou des Papyrus : c'est là qne
furent trouvés le Faune ivre, le Faune dormant, le Mer-
cure, l'Aristide, la Minerve étrusque, le groupe du Satyre
et delà Chèvre, les six danseuses, une quantité de bustes»
et toute la bibliothèque de papyrus (près do 3,000 rou-
leaux) qu'on voit au Musée des études de Naples. Les
fouilles de 1828 ont mis à découvert la Maison d^ Argus,
ainsi appelée d'une peinture représentant lo gardée par
Argus, et où l'on a trouvé des comestibles : une plante
recueillie dans le iardin de cette maison a poussé de nou-
veau et produit des (leurs. Dans les différentes foulllesi
HER
t030
HER
on a recueilli un nombre considérable d'instruments et
d^ustensiles de sacrifices ou de ménage, en marbre, en
bronze, en verre, tels que tables, candélabres, lampes,
bassins, vases, flacons, instruments de musique et de
chirurgie, tablettes et stylets pour écrire, colliers, brace^
lets, bagues, pendants d'oreille, épingles, dés à coudre
et à Jouer, linge, chaussures, filets de pêcheur et d'oise-
leur, etc. Ces objets sont, en général, mieux exécutés que
ceux qu'on a tirés de Pompéi. On peut croire <pe la po~
t>ulation d*Herculanum avait eu le temps de fuir lors de
rinvasion de la lave, car on n*a pas rencontré de débris
humains : un seul squelette presque complet fut trouvé
sous l'escalier d'une maison ; il tenait dans une main une
bourse remplie de petites pièces de monnaie ; quand on
essaya de l'enlever, il tomba en poussière. V, Bajardi,
U antichità di Ercolano, Naples, 1752-1792, 9 vol.
in-fol. ; VenuU, Descrvnone délie prime scoperie délV
anttc. città di Ercolano, Venise, 1749, in-8<>; Bellicart,
Observations sur les antiquités d*Herc%Uajiwm, Paris,
1754, in-12; Cochin, Observations sur les antiquités
d^Hercuianum, Ibid., 1757, in-8°; Winckelmann, Lettre
à M. le comte de Briihl sur les découvertes d^Herculor
nwn, Dresde, 1764, in-4°; Fougeroux de Bondaroy, Be-
àherches sur les ruines d*Herculanum, Paris, 1770, in-12 ;
Cramer, Notes pour servir à Vhistoire des découvertes
d^Herculanum^ Halle, 1773, in-8o; Piranesi, Antiquités
d'Herculanum, Paris, 1804-1806, in-4°; Jorio, Notizie
sugli scavi di Ercolano, Naples, 1827, in-8^; Hamilton,
Relation des découvertes fcUtes à Herculanum et àPom^
péi, Edimbourg, 1837, 2 vol. in-4o: Roux et Barré, Her-
culanum et Pompéi, Paris, 1848, 8 vol. in-4®; E. Breton,
Pompeta^ suivie d^une notice sur Herculanum, Paris^
1855, gr. in-8\ B.
HERCULE. Plusieurs statues antiques de ce héros sont
arrivées jusqu'à nous, avec le nom de leurs auteurs. Ce
sont : VBercule au reposi admirable statue mutilée, dite
Torse du Belvédère ou de Michel -Ange^ conservéÎB au
musée Pio-Clémentin de Rome, et œuvre de l'Athénien
Apollonius, fils de Nestor; V Hercule Pamèse, à Naples,
statue par Glycon d'Athènes, dont le nom se trouve aussi
sur un autre Hercule de la collection Guarnacci; V Her-
cule du palais Pitti, à Florence, copie d'une œuvre d'un
Lysippe. On ignore où se trouve actuellement un Her-
cule qui était à Rome au xvi" siècle, signé de deux frères,
Diodote et Ménodote, de Nicomédie. Les bas-reliefs et les
vases peints de l'antiquité reproduisent une fouie de
scènes empruntées à la vie d'Hercule. Le héros est ordi-
nairement représenté sous les traits d'un homme vigou-
reux, appuyé sur une massue, et revêtu de la peau d'un
lion : il est tantôt barbu, tantôt sans barbe, paîrfois cou-
ronné de peuplier bkmc, et armé d'un arc et d'un car-
quois.
HÉRÉDITÉ (du latin hœresy héritier), mot qui se dit,
!• du droit de recueillir en totalité ou en partie les biens
qu'une personne laisse après sa mort; 2^ de l'ensemble
des droits, tant actifs que passifs, qui composent une
succession. On nomme AdUion d^hérédité l'acte par le-
qui se prétend héntière forme sa demande^evant les tri-
bunaux, action qui se prescrit par 30 ans. La CM^to»
éthérédUé peut se présenter sous trois aspects : 1^ vente
d'une hérédité que le cédant déclare sienne et composée
de tels ou tels objets; dans le cas d'éviction d'un de ces
objets, il y a lieu à l'action en garantie; 2® vente d'une
hérédité à laquelle le cédant se déclare appelé; il n'est
pnxkl que de l'existence de la qualité d'héritier, bonne
ou mauvaise ; 3* vente des droits que le cédant prétend
avoir sur l'hérédité; il n'y a lieu à garantie que s'il savait,
m moment de la cession, n'avoir aucun droit à l'hérédité.
— Les Socialistes ont nié la légitimité de l'hérédité. Il
eit vrai que l'hérédité peut faire tomber de grands biens
dans des mains incapables ou indignes, et qu'elle est un
obstacle à Tutople de l'égalité absolue; mais, outre
ca*elle découle naturellement du droit de propriété
(K. ce mot) y supprimer l'hérédité, ce serait tout à la fois
détruire le stimulant le plus puissant du travail chez le
père de famille^ et imposer des embarras Inextricables à
I*État, chargé, à chaque décès, de régler Templol des
biens et de fixer le sort des survivants.
HEREFORD (Cathédrale de), en Angleterre. Com-
mencée après la conquête normande, et achevée seule-
oient à la fin du xni* siècle, elle a les dimensions sui-
vantes : longueur dans œuvre, 105 met.; largeur de la
Mf et des coUatéraax, 25 met.; hauteur des voûtes,
22 met. La tour centrale qui surmonte l'édifice s'élève a
47 met. Le plan de la cathédrale de Hereford est en forme
de croix à doubles croisillons ; l'abside se termine carré-
ment, ce qui est fréquent dans les monuments anglais.
Les contre-forts ne sont pas couronnés de clochetons.
Tous les piliers de la nef sont ronds. Les fenêtres n'offrent
point d'uniformité : U y en a de style ogival primitif, de
style ogival secondaire, et de style perpendiculaire. Au-
dessous de la chapelle de la Vierge est une crypte, parta-
gée en deux nefs par une rangée de colonnes.
HÉRÉSIE. Ce mot, d'après son étymologie (en grec
airéiny choisir), désigne une opinion préférée à une autre,
un choix qui a pour efiét de diviser des hommes précé-
demment unis par la communauté de doctrines. Ainsi,
chez les Anciens, les diverses écoles de philosophie et de
médecine étaient appelées hérésies, ce qui n'impliquait
pour aucune d'elles l'idée terreur. Pour l'Église catho-
lique, Vhérésie est une opinion contraire à une vérité
qu'elle présente comme révélée, à un article de foi ; par
conséquent, le mot est toujours pris en mauvaise part et
entraîne nécessairement l'idée d^erreur. Une hérésie esl
formelle, quand il y a mauvaise foi ou opini&treté; mo-
térietle, dans le cas contraire. On appelle hérésiarque
l'inventeur d'une hérésie; hérétique^ celui aui en est le
sectateur, soit de son propre choix, soit pour l'avoir reçue
dès l'enfance. Les passions de l'homme rebelles à l'austé-
rité de la morale évangélique, l'incompréhensibilité des
mystères humiliante pour la raison , l'invariabilité des
dogmes qui froisse notre amour pour la nouveauté, la
soumission absolue que l'Église réclame pour ses déci-
sions et qui blesse notre indépendance, la nécessité d'ad-
mettre les vérités révélées comme autant de faits indis-
cutables et soustraits à notre curiosité, voilà les principales
sources de l'hérésie. L'Église prémunit les fidèles contre
l'hérésie*, en la condamnant oans les conciles ou par la
voix des papes. Elle la punit, chez les clercs, parla dépo-
sition, et, diez touÂ, par l'excommunication. Il fut un
temps où, de plus, elle livrait les hérétiques au bras sé-
culier, et les punissait de la prison, de la mort même.
L'abbé Pluquet a publié un Dictionnaire des hérésies,
Paris, 1762, 2 vol. in-8», souvent réimprimé.
HÉRISSON, en latin Ericius, ancienne machine de
guerre. C'était une poutre garnie de pointes de fer, et que
les défenseurs d'une place faisaient couler sur les débris
de la brèche, pour empêcher l'assiégeant d'v monter.
HÉRITAGE, tout ce qui vient par voie de sticcession*
(F. ce mot.)
HÉRITIER, celui qui succède à tous les droits actib et
passifs d'un défunt. On nomme héritier légitime ou ab
intestat, celui qui succède en vertu des dispositions de la
loi; héritier institué ou testamentaire ^ celui qui est
nommé par la volonté du défunt; héritier présomptif , le
parent le plus proche, et gui, par cette raison, est pré-
sumé devoir hâlter ; héritier pur et simple, celui qui a
accepté une succession purement et simplement, et qui
est tenu indéfiniment des dettes de cette succession ; né-
rtttsr bénéficiaire, celui qui n'a accepté une succession
que sous bénéfice d'inventaire (V, ce mot) et n'est tenu
des dettes que Jusçiu'à concurrence de ce qu'il a recueilli ;
héritier réservatmre, celui en faveur duquel la loi a éta-
bli une réserve {V, ce mot); héritier apparent, celui
3ui, n'étant pas héritier véritable, s'empare comme tel
'une succession, et en jouit ou en dispose comme si elle
lui appartenait réellement; héritier fiduciaire, celui qui
ne recueille une succession que par fidéicommis ( F. œ
mot). Pour être reconnu héritier, il faut exister au mo-
gient de l'ouverture de la succession : l'enfant qui n'est
pas encore né, mais qui est conçu, est capable de succé-
der, pourvu qu'il naisse viable. V, Exh^rédation .
HERMATHÈNE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
HERMÉNEUTIQUE, du grec herménéia, interprétation.
En Philosophie, l'herméneutique est l'explication des
termes comme préparation nécessaire à l'intelUgenoe
d'une doctrine , telle aue V Herménéia d'Aristote, qui «
pour objet l'exactitude ae la proposition, et où il examine
la valeur des termes dont elle se compose. En Théologie,
elle devient quelquefois V Exégèse, en Joignant à l'inter-
prétation des mots celle de la doctrine, comme on le voit
chez Origène. En Jurisprudence, rherméneutique recher-
che et examine les sources du Droit R.
HERBIÈS , statue de Mercure placée dans une espèce
de gaine ou cippe, de telle sorte qu'il n'y a que la tâte^
une partie du buste et les pieds qui paraissent, et sou-
vent terminée simplement en gaine. Chez les Anciens
on plaça sur les routes et dans les carrefours des her-
HER
1031
IIED
mes à amant de tôtes au*il y avait de directions à mar-
rsr : celai de Prodyde à Ancjrre en avait trois; celui
Télésarchides dans le Céramiaae en avait quatre. On
ioflcriTait sur ces statues les aistances itinéraires ou
des sentences morales. Bacchus et Apollon furent aussi
reprâsentés en hennés. On çerpétua sous forme d*hermès
les images des personnages illustres : en 1742, on a trouvé
Rome un hennés à deux têtes, portant les noms d*Épi-
core et de Métrodore; il en existe aussi qui réunissent
Hérodote et Thucydide, Socrate et Alcibiade. — On appe-
lait Harméraelês les hermés oui réunissaient les têtes
adossées de Mercure et d*Hercule.
HERMÉTIQUE (Philosophie), corps de doctrine th^
des livm attribués à Hermès ou Mercure T^smégiste,
nommé aussi par les Égyptiens Thaut ou Thoth. Il est
démontré ai:Jotûrd*hui que ces livres n*ont aucune authen-
ticité, surtout en ce qui concerne certaines sciences
telles que la médecine, la chimie, Thistoire naturelle. La
ptrtie philosophique parait tenir par quelques points aux
doctrines égyptiennes auxquelles on croit pouvoir rap-
porter le Pœmander^ les fragments qui s*y rattachent, et
VAscUpius, dialogue qui nous est parvenu en latin sous
le nom d'Apulée. Ces écrits sont r^ardés comme des ex-
traits des doctrines secrètes des prèfres de Mempbis et de
Sais ; mais cette opinion n'est pas appuyée sur d» preuves
inoootestables. Ils reconnaissent comme premier principe
rOnité absolue. Dieu, qui n*est connu que par rinteln-
gence. C'est le seul être véritable; la vie répandue dans
ranirers émane de lui, est lui-même. En général, on re-
tnmTe dans la philosophie hermétioue le fond de la doo-
^oe de Platon et de Plotin, mêlé aux mystères des
Égyptiens, à la mythologie des Grecs, et même à certaines
traditions juives et chrétiennes. Tout ce qui concerne
cette philosophie a été réuni par Marsile Ficin, oui en
donna une traduction latine en 1471. On peut consulter la
Symbolique de Creutzer, livre 3; la dissertation de M. Gui-
piaot. De 'Ep^ioû seu Mercurii mythologia, in-8®, Paris,
1S35. — La partie scientifique proprement dite a donné
liea à la prétendue science qui se donnait pour but la
traoamotation des métaux et Part de faire de Tor, Le
PŒtnander fut regardé comme un traité d'Alchimie. K.
Uoglet du Fresnoy, HitUÀre de la philosophie hermé-
<i9iM,1742,3Tol. in-12. R.
HEAMINB, nom d'une des deux fourrures du Blason.
Elle est, en général, d'argent pour le fond, et de sable
pour les mouchetures.
HÉROI-GOMIQUE (Épopée), sorte de narodie de l'Épo-
pée véritable; pofime dans lequel on traite un sujet corn-
mon et presque trivial, avec le ton et les formes épiques.
La dispropoitioQ des moyens avec la fin, le contraste du
foad et de la forme, constituent le comique de ce genre de
composition. Par une raillerie ingénieuse, le poème hérol-
comiqne élève dans les régions héroïques oe qui est vul-
9ùre par nature, et en cela il se distingue du poème bur-
leM|ae ( V. ce tn<^^ qui, par le travestissement des mœurs
et du langage, fait descendre les dieux et les hâros au
Bivean des personnages les plus vulmires. La Batracho-
myomachie attribuée à Homère, le Sceau enlevé de Tas-
soni, le Lutrin de Boileau, la Boucle de cheveux enlevée
de Pope, sont des poèmes héroi-comiques«
HÉROIDES, épltres en vers élégiaques, composées par
Ovide, sous le nom de queloues femmes célèbres des
temps héroïques, comme Bnséîs, Pénélope, Médée,
Phèdre, Hermione, D^anire, Ariane, Hélène, etc. Elles
écrivent à leur amant, ou à leur époux absent ou infidèle.
Ces élégies, au nombre de 21, manquent de passion et de
naïveté; le s^le en est trop souvent artificiel ; les déve-
bppements des pensées et des sentiments, le tour des
TÔâ, font paraître le talent de l'écrivain et du versifica-
teur, mais ne conriennent presque Jamais au personnage
qni écrit, et le font perdre de vue an lecteur. L*unifor-
mité et la monotonie de la plupart de ces pièces contri-
Iment aussi à refroidir l'intérêt. La 16* pièce, la 18% ht
^ aont supposées écrites par des héros , et la 15*
(Sappho à Phaon) n'est pas une véritable hérolde. On
peut en dire autant de cdles de Didon à Énée, d'Uéro à
méandre. — Les modernes se sont aussi essayés dans ce
pre créé par Ovide : dtons YÊpttre dPHéloise à Aboi-
Mrd par le poète anglais Pope, infiniment supérieure à
toutes celles do poète latin, et l*hérotde de Didim à Enée
par GilberL P.
HÉROÏQUE (Poème), sorte d'épopée imparfaite, sans
fiction ni merveilleux, et dont l'action a moins d'impoi^
tioce et souvent aussi moins de durée oue celle de l'épo-
pée proprement dite. Ce n'est pour le fond que de t'ms-
toiiemise en vert. Telle eet la Pharsale de Lucain.
HéaolQOBS (Pieds), nom donné chez les Anciens m
dac^le, au spondée, à l'anapeste.
HBROlQUBS (Vers), vers destinés, ches les Anciens, à
célébrer les exploits des héros (Hercule, Jason, Thésée,
Achille, etc.). C'étaient les hexamètres. En firançais, nous
donnons aussi ce nom aux vers alexandrins ou de dovoê
syllabes.
HÉROON , nom donné chez les anciens Grecs à des
édifices à la fois funéraires et religieux, de dimensions
variables, élevés en l'honneur des héros, et qui avaient
quelquefois, connue celui de Thésée à Athènes, l'im-
portance d'un temple. On en voit deux dans l'Ile de
Santorin.
HÉROS (Le livre des). V. Heldenbcch.
HERSE, forte ^Ue de fer placée derrière la porte
d'entrée des ch&teaux forts au moyen &ge. Elle glissait
dans une rainure, se baissait et se levut à volonté, et
servait de seconde clôture. Il y eut, chez les Grecs et
les Romains, des clôtures de ce genre sous le nom de
portes catarrhactes; au moyen âge, on les appela quel-
quefois sarrasknes, parce qu'elles avaient été empruntées
à l'Orient, et encore harpes,
HsasB, construction en bois ou en fer, ayant la fonns
d'un triangle vertical, armé de pointes pour supporter
des cierges, et qu'on place autour du cercueil ou da
cénotaphe d'un mort, pendant la cérémonie religieuse»
— On donne le même nom aux chandeliers de forme ver-
ticale, à plusieurs pointes, qui servent à faire brûler
plusieurs cierges, soit devant les autels ou à côté , soil
près des tombeaux, ou encore dans le chœur pendant la
semaine sainte, à l'oflice des Ténèbres. Les écrin^ns
latins ecclésiastiques se servent du mot rastrum ou ra»*
teUum (r&telier)j^
HERVIS DE METZ, un des romans des douze Pain^
la première partie de la chanson des Lohérins. On n'es
connaît pas l'auteur. Hervis est le fils du bourgeoli
Thierry, qui avait épousé la fille du duc de Mets. Gmrgé
d'étaler et de vendre des marchandises aux foires de Pxo*
vins, de Lagny, du Lendit, mais ^ant les goûts d'oa
chendier et non d'un marchand, il offre banquets et fooi^
rures à tous ceux qu'il rencontre. Après bien des querellep
et des malheurs, il épouse la belle Béatrix, et devient
duc de Metz. Charles-Martel , attaqué par les Wandros
(Vandales) et. par Gérard de Roussillon, demande das
secours à Herns, qui convo(pie ses compagnons. Là s'ar>
rète le poème, composé d'environ dix mille vers et subdi-
visé en plusieurs chansons. Tel ou'il existe ac^ourd'hui,
il parait être moins ancien que le roman de Gorm. Ob
en a deux manuscrits du xm* siècle, Tun à la BiblicH
thèque nationale de Paris, l'autre à celle de TArsenaJ!^
V, VHisUnre litt^aire de la France, t. xxu. H. D.
HÉTËRES, HÉTÉRIE. V. ces mots dans notre Dictiot^
naire de Biographie et d'Bistotre,
HÉTÉROCLITE (du grec hétéros, autre, et kliném, dé-
cliner), se dit, en Grammaire, des noms grecs et latins
qui suivent à la fois deux déclinaisons; ainsi, fames^
Çén. (amis (3* déclin.), abl. famé {5^); jugerum , ftén»
Sugeri (2* déclin.), abl. jugere, gén. plnr. jugerum , dat*
et ablat jugeribus (3^. On pourrait afouter à cette espèce
de noms ceux qui suivent deux déclinaisons parallèles et
complètes, comme senecta et senectus, materia et mate»'
ries, juventa et juventus,
HÉTÉRODOXE (du grec hétéros, autre, et doxa, opi-
nion), se dit, dans le catholicisme, de toute opinion mh
fânente de celle de l'Église, et de toute personne qui a
cette opinion. On ne peut pas être hérétiti^ sans être hé»
tirodoice: lûais on peut être hétérodoxe sans être héré-
tique, Vhitérodoasw étant une divergence d^opinion sv
une règle de discipline, et non sur un article de fol.
HÉTÉROGÈNE (du grec hétèros , autre, et génoê^
genre ), se dit, en Grammaire, des noms irréguliers om
sont drun genre au singulier et d'un autre genre au plu-
riel , eonune en latin locus, au plur. loea, et en français
délice, orgue, otnaur^ etc«
HËTÉRONOMIE. V. AOTORomB.
HBTÊROSGIENS (du grec hétéros^ antre, et sha,
ombre), habitants de la terre dont l'ombre ne se projette
que d'un seul cèté. Ce sont ceux qui se trouvent entre
les 'nropiqucB et les Cercles polaires, et dont on volt
l'ombre, par les latitudes septentrionales, toujours tour*
née vers le nord^ ou bien , par les latitudes méridionalet,
vers le sud.
HEU, bâtiment à fond plat, tirant peu d^eau, portaftt
un grand mitt, une trinquette, un foc et an petit mât sur
son extrémité de derrière. On l'emploie an cabotage dans
la Muiche et dans la mer du Nord*
niA
1032
nit
HEUQUES, Tètement de cour, en drap de couleur ri-
chement brodé, à Tusage des hommes au xv* siècle.
HEURES, HEUSES, HEXACLINOiN. V. ces mots dans
r notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
HEXACORDE, division de 6 notes établie dans Téchelle
I musicale par un musicien du xi* siôcle dont le nom ne
nous est pas parvenu, et non, comme on Ta dit, par
Gui d*Arezzo. Elle remplaça la division par tétracordes
selon les Grecs, et la division par octaves du pape Gré-
goire le Grand. C*était une des plus graves erreurs ({ue
ron pût introduire (K. MdancesJ. — tiexacorde signifie
aussi un instrument à 6 cordes.
HEXABIÈTRB (du grec hex, six, et mitron, mesure),
nom des vers grecs et latins dont la mesure est de 6 pieds,
autrement, qm ont 6 mesures. Les 4 premiers pieds sont
indifféremment dactyles ou spondées; le 5* est toujours,
du moins en latin, un dactyle; le 6* est spondée ou
trochée:
H lûcry\mâne Qiàt\tMqu/e liû\mèctcit\ grândtbûs \ ôrtt.
' Quelquefois Thexamètre est terminé par deux spon-
déà, ou par un spondée et un trochée ; dans ce cas, le
4* pied doit être un dactyle ( V. SpondaIqcb). Par une
exception infiniment plus rare, le C* pied est quelquefois
un dactyle (V. Dacttliqub). L*Iambe s*y rencontre aussi
^F. Mioaos). L*Iambe et le tribraque se trouvent ouolque •
fois au 1*' pied dans Homère (V. Acéphales). Enfin
Tanapeste forme le i*' pied dans ce vers du l*' livre des
Céorjfiques :
' PUMôrum rex Eridanus, campoeque per omnes,,.
Les pofites grecs terminent leurs hexamètres par des
mots de toute longueur, depuis le monosyllabe Jusqu*au
mot de 7 syllabes ; les portes latins, à partir du siècle
d'Auguste, étaient astreints à n'employer à cette place
qn*un mot de deux ou de trois syllabes : ils ne s*affran-
cbissaientde cette loi, nécessitée par les conditions d'har-
monie particulières à leur langue, que si le mot final du
vers était un nom grec, soit propre, soit commun , ou si
le vers était spondalque, ou bien dans les sujets d*un ton
moins élevé que l'épopée, comme l'épltre et la satire.
Aussi les vers d*Horaco et de Juvénal se rapprochent-ils
plus, en général , du système grec que du svstème latin.
Le rhythme de l'hexamètre est le plus riche et le plus
beau que l'on connaisse, et les Grecs en ont attribué l'In-
vention aux Dieux, qui l'avaient, disait-on, révélé à la
prêtresse Phémonoé. 11 avait le précieux avantage de con-
Tenir à tous les sujets, aux familiers ou gracieux comme
«nx plus nobles et aux plus graves. On a vainement
essayé de le faire passer aans la versification moderne.
^n voici pourtant un exemple asses remarquable d'un
poète du xvi< siècle, qui avait traduit en vers de cette me-
sure VIliade et VOdyssée :
Obaute, dé)eu«, le \ osor ftiri|enz et 1 rire d*A|clilUte.
Pemlcl)eaM qui | fat...
On donne quelquefois improprement le nom d'hexo'
emètre an vers alexandrin français, parce que les syllabes
M comptent deux par deux, ainsi qu'à Tlambique anglais
de 12 syllabes. P.
. HEXAPLES ( du grec heocaploos, sextuple), titre qu'Ori-
4^ne avait donné à un de ses ouvrages, dans lequel il
Avait disposé sur 6 colonnes le texte hébreu de la Bible,
Je même en caractères grecs, la version d'Aquila, celle de
Symmaque, celle des Septante, et celle de Théodotion. Il
lie nous reste que quelques fragments de cet ouvrage.
HEXAPTÉRIGË, c.-à-d. en grec qui a six ailes, instru-
ment en usage dans le culte grec. C'est un disque, ordi-
nairement de bois peint et doré, sur lequel on a repré-
senté un séraphin à six ailes, et fixé au bout a'un
manche. On en voit un à chaque extrémité de l'autel.
Les hexaptériges sont garnis, tout autour, de petites
lames de métal, et on les agite pour avertir les fidèles do
s'incliner. On Iça porte près du célébrant pendant les
processions.
HEXASTYLE, nom donné par les Anciens aux temples
.qoï avaient un portique formé de six colonnes de front.
. HEXERIS, navire de guerre des Anciens, à six rangs
de rames de chaque c6té.
HIATUS, mot latin admis dans le style de la Gram-
maire et qui signifie bâUlement, L'hiatus résulte de la
rencontre de la voyelle finale d'un mot avoc la voyelle
initiale du mot suivant: en effet, les lèvres, restées ou-
fertes en prononçant Ifi dernière syllabe du premier mot,
ne peuvent se refermer pour prononcer la première (ta
second. Par extension, le concours de deux ou de plu-
sieurs voyelles dans l'intârieur d'un mot s'appelle hiaUu,
Les écrivains grecs, prosateurs ou poètes, tantôt se
permettent, tantôt évitent l'hiatus, et l'on ne saunât
a cet égard fixer aucune règle : on sait seulement aa'on
bl&mait dans Isocmte et les écrivains de son école le
soin scrupuleux qu'ils mettaient à éviter le choc des
voyelles. Au reste , les hiatus abondent dans Homère,
dans Hérodote, dans Thucydide, dans Platon. On avait
trois moyens d'éviter l'hiatus : Vélision, la contraction,
la crase (V. ces mots), — En latin, îa rencontre des
voyelles n'était pas toujours désagréable, comme le té-
moignent Cicéron, Quintilien et Aulu-Gelle. On peut
conclure d'une note d'Aulu-Gelle {Nuits attiques, VII,
20) que, tout en faisant l'élision dans les vers, on lais-
sait entendre encore la voyelle élidée, de manière à
rendre l'hiatus sensible à l'oreille. — En français, on
n'évite l'hiatus qu'en vers. Dans la prose écrite, et dans
la conversation surtout, il est assez fréquent. Dans le
style soutenu, on évite les hiatus de ce genre : a Cicéron
aÙa à Athènes; — y ai été étonné. » Souvent on fait, dans
la conversation, des hiatus que ne justifie point l'ortho-
graphe, mais qu'on se permet pour ne pas donner à son
langage un air appr^ et prétentieux. La versification
aussi , telle qu'elle est fixée depuis la réforme de Mal-
herbe et de Boileau, admet l'hiatus dans le corps des
mots, dans les mots composés, et dans certaines locutions
Sroverbiales : Pré aux clercs ; suer sang et eau ; à tort «(
tromers {et, bien que finissant par une consonne, fait
hiatus, parce qu'il ne se lie Jamau au mot suivant) :
Tanl y a qu'il n^ett rien que TOtre dilen ne prenne.
Racixs, Ut Piaidem, 111, 9.
Le Juge prétendait qn'd tort et à trat-en
On ne ■aarait manquer, oondamnant un penrert,
La FoiTTAiVB, Fab., II, S.
Elle l'admet entre une nasale finale et une voyelle ini-
tiale ou même une autre nasale : ainsi Racine a fini un
vers par Néron en colère ; et il en commence un autre
par ces mots : Le dessein en est pris. Il n'y'a pas hiatus
dans le cas où deux voyelles sont séparées par un e muet,
qui s'élide sur la seconde :
Borne entite'e noj^ ou lang éo tes enftmta.
COBKKiLut, Cfnno» I, S.
La même immunité existe pour la voyelle qui précède
une h aspirée :
Un derc, pour quinze loue, sans craindre te holà,
BoiLBAC, Sat. IX.
Voici encore des hiatus tolérés :
Sur Totre prisonnier, huissier, ayex les yeux.
Racivs, tet Plaideurs, II, 8.
J'ai fait parler le loup, et répondre l'agneau.
La FosTAxn, Fables, II, 1.
On évite certains hiatus à Taide de lettres intercalalrea
(F. Euphonie). V, aussi Liaison. P.
HIÉRARCHIE (du grec hiéros, sacré, et arkM, com-
mandement), mot qui signifia primitivement, chez les
Grecs, le pouvoir des prêtres, puis, dans le christianisme,
l'ensemble des pouvoirs eccl&iastiques subordonnés les
uns aux autres, et qui désigne aujourd'hui l'ordre des
pouvoirs, de quelque nature qu'ils soient. Il n'y a point
de société sans' hiérarchie. Dans les administrations, les
correspondances doivent suivre la voie hiérarchique. La
hiérarchie est la base de la subordination militaire ; elle
maintient la discipline et assure l'exécution des ordres.
HIÉRATIQUE (du grec hiéros, sacré), qualification que
reçoit tout art assujetti à des règles fixes pour représenter
les personnes ou les choses saorôes. Dans l'Hindoustan et
VÈfSfpt&y ce fiffent les castes saccordotales qui imposèrent
ces types invariables.
Hi^nATiQUE (Écriture). V» HiéaoGLTPHES.
HIÉROGLYPHES (du grec iéros, sacré, et gluphém,
sculpter, graver), nom donné, dans un sens sénénd, aux
caractères d'écriture employés avec une valeur mysté-
rieuse et conventionnelle, et, dans un sens particulier,
aux signes graphiques de l'ancienne Egypte sculptés sur
les murailles des temples et des palais. Les premiers, que
l'on rencontre, par exemple, en Chine et au Mexique,
sont des imitations d'objets matériels, produisant des
tableaux représenti^ de la pensée. Les seconda, dont la
HIË
1033
niE
def n'a été tiouTée que dans les temps modernes, offrent
one complication plus grande : on ne saurait dire qudle
cn> été l'origine, ni par quelles transfomutticns succes-
snes ils ont |>ris la forme et le âons que nous leur con-
naissons; mais il est certain que cette écriture est d'une
haute antiquité, et que les hiéroglyplies des monuments
<nii remontent à plus de vingt siècles avant Tère chré-
tienne ne diffèrent pas de ceux qui furent gravés au
tempe d^Auguste.
L'étrange des hiéroglyphes avait frappé les Anciens,
oui cependant ne paraissent pas avoir cherché à en son-
der le m^rstëre. Diodore de Sicile et Ammien Bfarcellin
les croyaient entièrement idéographiques, c-ànd. expri-
mant les idées par des images ou des symboles. Clément
d'Alexandrie parle de la valeur phonétique mie recevaient
certains signes, mais en termes concis et onscurs qui ne
permettraient pas de fonder une opinion. Les Modernes
ont fait de nombreuses recherches avant d'arriver à des
résoltata certains. Le P. Kircher, dans son OEdipus
jEfftfptiacus (1652), soutînt que les hiéroglyphes étaient
purement idéographiques. Au siècle suivant, Zoéga (De
angine et usu obeliecorum)^ remarquant oue les sigpies
relevés sur les monuments ne dépassaient guère le
nombre de 800, nombre bien restreint pour une écriture
:déognm>hique, soupçonna que quelques-uns de ces signes
pouraient avoir une valeur phonétique. Le grand ouvrage
publié par la Commission scientifique de l'expédition fran-
çaise d^gypte fournit de nouveaux moyens d'étude. Sil-
vestre de Sacv détermina, sur l'insmption de Rosette
(K. 09 fno()^ la place et les limites des noms propres,
mais sans réussir dans leur analyse, qu'Ackerblad fit le
premier avec ouelque succès. L'Anus Yonng reconnut
sur la même inscription que les noms propres étaient
renfermés dans des cartouches on encadrements, et, sur
12 signes qu'il étudia dans les noms de Ptolémée et de
Bérénice, il détermina exactement la valeur de cinq.
Puis il publia 200 groupes hiéroglyphiques, et donna,
plutôt en les devinant que par une démonstration rigou-
geuse, le sens de 77 de ces groupes : toutefois, il en
interpréta faussement plusieurs, et crut que les hiéro-
glyphes étaient essentiellement idéographiques, excepté
dans le cas des noms propres. GhampolUon aborda l'étude
des monuments grapniques de l'Égypto Avec une con-
naissance approfondie de la langue copte, qui n'est autre
Se l'ancienne langue égyptienne écnte avec les carab-
es de l'alphabet grec; en examinant l'inscription de
robélisque de Phil», dont la base portait une inscrip-
tion grecque de la même teneur, il y trouva le nom de
Qéop&tre, et, dans ce nom, cinq lettres qui lui étaient
communes avec celui de Ptolémée précédemment reconnu
sur la pierre de Rosette; il put lire ensuite sur le temple
d'Esnen les noms de Septime-Sévère, de Géta, de Cara-
calla; enfin, il découvrit que le système graphique égyp-
tien comprenait un certain nombre de figures purement
pkonéiktuês, c-à-d. représentant, non des idées, mais
des sons, et dressa une liste de 260 hiéroglyphes phoné-
tiques. Salvolini étendit plus tard cette liste à 303, mais
en confondant toutes les époques et toutes les valeurs, et
en traitant comme signes simples des caractères qui ont
une valeur syllabique.
A envisager la forme matérielle des signes, il y a lieu
de distin^er trois sortes d'écritures égyptiennes, qu'on
i^ipelle hêéroglyphûtue, hiératique et demotique, L'écri-
tore hiéroglyphique on sacrée, seule employfo sur les
monuments publics, se compose de signes représra-
tant les objets du monde physique, à l'aide d'un tracé
simplement linéaire ou colorié ; ces signes sont au nombre
de 800 environ. Comme on ne pouvait les employer
on'avec la connaissance du dessin, on imagina, en faveur
oe ceux qui ne l'avaient pas, l'écriture hiératique ou sa-
cerdotale, composée du même nombre de signes que
récriture hiéroglyphique, mais de signes ahrégn, facile-
ment exécatables, et pourtant de même signification s
par exemple, au lieu de tracer la figure entière d'un lion
couché, on ne faisait que la silhouette de sa partie posti^
rienre. Cette écriture était particulièrement à l'usage des
piètres t qni s'en servaient pour tout ce qui dépendait
de leurs attributions religieuses. L'écriture démotique,
employée pour les usages ordinaires de la vie, se servait
des mêmes signes que l'écriture hiératique^ mais en
moi os grand nombre : on la nommait encore écriture po-
wuletùre ou épietotographique. Les trois sortes d'écritures
n^en formaient donc qu'une seule en théorie, et, pour la
pratîmie seulement, on avait adopté une tachysraphie
4es stnes primitifo. Clément d'Alexandrie dit qu^Dn ap«
ytenan d*abard l'écritare démotique « puis l'écriture
hiératique, enfin l'écrituçe hiéroglyphique. Elles sonl
souvent employées à la fois dans le même manusorit. —
Quant à leur valeur, les signes sont figuratifs, ou sym*
ooltques, ou phonétiques. Les signes figuratifs expriment
les idées par la figure de leurs objets : pour exprimer
l'idée d'un cheval, d'un obélisque, d'une couronne, on
les dessine. Les signes symboliques, dits aussi tropiques
ou énigmatiques , expriment les idées abstraites par
l'image d'objets physiques : deux bras élevés expriment
ridée d'offrande, un vase d'où l'eau s'épand l'idée de liba-
tion, un cercle avec un point au milieu l'idée du so-
leil, etc. Les signes phonéûques expriment les sons de la
langue parlée, et ont les mêmes fonctions que les lettres
de nos alphabets. Pour les déterminer, on décida que la
figure d'un objet dont le nom dans la langue parlée com-
mencerait par l'articulation b serait dans l'écriture le ca-
ractère 6, et ainsi des autres. A la différence des écritures
de l'antiquité classique et des écritures modernes, qui
n'emploient que des caractères phonétiques, l'écriture
égyptienne emplosrait à la fois, dans le même texte, dans
la même phrase, quelquefois dans le même mot, les trois
sortes de caractères figuratifs, symboliques et phoné-
tiques : ces derniers, dont le nombre ne s'élevait guère
au-dessus de cent, figurent pour les deux tiers dans les
textes égyptiens.
Un certain nombre de caractères hiéroglyphiques (Bun-
sen en comptait 70) ont une valeur, non point alphabé-
tique, mais syllabique. M. Lepsius croit qu'il y en avait
davantage, et que plusieurs oes signes r^ardes aujour-
d'hui comme homophones différaient autrefois, peut-être
par quelque voyelle qui leur était inhérente. Les seules
voyelles que l'on trouve aiijourd'hui dans les inscriptions
sont initiales ou finales : le même savant suppose que la
voyelle principale d'un mot, placée peut-être au milieu
daiis la prononciation, a pu être reportée à la fin dans
l'écriture, comme une sorte de déterminatif phonétique.
La suppression des voyelles médiales établit un rapport
remait[uid>le entre l'écriture égyptienne et les écritures
sémitiques : un autre trait de ressemblance, c'est que
plusieurs hiéroglyphes employés comme lettres initiales
ont tantôt la valeur d'une voyelle, tantôt celle d'un simple
signe d'aspiration. — Certains signes employés symbo-
liquement servent à éclaircir un groupe alphabétique, de
sorte qu'on a en, même temps la prononciation du mot
et une mét^>horequi s'y rapporte. Ces signes, que Cham-
pollion appâa déterminatifs, peuvent indiquer le genre,
le nombre, l'espèce; ils se placent après le mot qu'ils
sont destinés à éclaircir ; ainsi , un bras armé a'une
massue est le déterminatif des actions qui demandent
l'emploi de la force, deux Jambes sont celui des verbes
de mouvement, etc. La liste des caractères déterminatift,
enrichie depuis la mort de ChampoUion, en contient 12(^
chez Bunsen. — Beaucoup de signes sont tout à la fols
idéographiques et phonétiques, et présentent un sens et
un son complets, bien qu'ils puissent être accompagnés
néanmoins de tout ou partie des lettres yû produisent le
même son. Une foule de mots, transcrits en caractères
phonétiques, conservent pour lettre initiale leur signe
idéographique, et, d'un autre côté, le même mot est
transcrit phonétiquement, tantôt en toutes lettres, tantôt
au moyen de signes employés comme de véritables rébus.
V, Langlois de Délestât, Discours sur les hiéroglyphes
égyptiens, Paris, 1583, in- 4» ; Westerhovius, Hiéroglyphes
des Égyptiens, Amst., 1735, in-4«; Warburton, Essaie
sur les hiéroglyphes égyptiens, Paris, 1744, 2 vol. in-12 ;
Tandeau de Saint -Nicolas, Dissertation sur Vécriture
htéroglyphique, 1762; Thomas Astle, TOrigme et les pro»
grès de Vécriture hiéroglyphique, en anglais, 1784, in-4<*;
De Guignes, Essai sur les moyens de parvenir à la lec^
ture et à l'intelligence des hiéroglyphes (dans le 1. 1*' des
Ménk. de VAcad. des lnscriptions)\ Langlois, Discours des
hiéroglyphes égyptietu, Paris, 1784, in-4<*; Bertuch, Essai
sur les hiéroglyphes, Weimar, 1804, in-4°; Quatremère
1804; le même. De Vétude des hiéroglyphes, Paris, 1812^
in-12; Lacour, Essai sur les hi^i)glyphes égyptiens,
1821 ; Spohn, De linguA et litteris veterum ^ypttorum,
Leipzifff 1831 ; Alex. Lenoir, Nouveaux euais sur les
hiéroglyphes, 1822, in-8*;8eyffarth,iïiidtmMito Aûro-
glyphica, Leipzig, 1825« in-4*'; ChampoUion, Précis du
système hiéroglyphique, Paris, 1824, et Grammaire égyp*
tienne, publiée seulement en 1836; Salvolini, Analyse
grammatiajde des différents teoites éqyptiens, Paris, 1826,
in-4*; H. Sait, Essai sur U système dis hiéroglyphes pho»
HIS
1034
HIS
nèh/iues. trad. en franc, oar Deyère, 1827 ; Brown, Aperçu
mr les hiéroglyphes S Egypte, tnduU de Tanelais, Paris,
1837 ; Greppo, Essai stur le système hiêrogïypiuque de
Ckampollion, Paris« 18^, in-8<>; Klaproth, Examen des
travaux de Champollion sur les hiéroglyphes, 1832;
Yoong, Rudiments of an EgypUan dictûmary, 1831;
Leemans, Horapollinis NHoihieroglyphica, kmsL^ 1835;
Noik, Essai sur les hiéroglyphes, en allem., Leipzig, 1837 ;
Lepaias, Lettre à M* Rosellini sur l'alphabet htérogly'
phuiue, Rome, 1837, in-8®; Gh. Lenormant, Recherenes
sur l'origine^ la destination chex les Anciens, et l*utUité
actuelle des hiéroglyphes d^Horapollon, Paris, 1838, in-4«;
J.-A. de Gonliaooff, Archéologie égyptienne, Leipzig, 1839,
3 Tol. in-8® ; Ideler, Hermapûm, siœ rudimenta hiero-
glyp» veter» JEgypt, litteraturœ, Leipzig, 1841, in-4«;
Bunsen, La place qu'occupe l'Egypte dans Vhistoire du
moncle, en allem., Hambourg, 1845; Brugsch, Seriptura
^uptiorum demotica, Berlin, 1848 ; le même. Collection
de documents démotiques, t. !«', 1850. B.
HIÉRON (du grec iéron, sacré), nom donné par les
anciens Greca à la totalité de Tencelnte sacrée qui ren-
fermaift le temple, les terres et les bois consacrés, les ha-
bitations des prêtres, etc.
HIEROTHBaUM, sorte de reliquaire renfermant une
portion de la vraie croix.
HIËROTHYRIDAS ou HIEROTHYRIDION, espèce de
«hapelle portative, fermée par des volets ornés de pein-
tures, et qu'on peut ranger parmi lea diptyques ou les
'tripUFques.
HILARODIE , nom donné, chez les anciens Grecs, d'ar-
bord à une chanson badine, puis à une petite pièce de
tbé&tre tenant le milieu entre la comédie et la tragédie.
Ony a vu Torigine de la parodie ( K. ce mot).
mLARO-TRAGÉDIE, nom que les Grecs donnaient à
ce que les modernes ont appelé tragi-comédie, à une trap-
gédie dont le dénoûment éteit heureux. L'invention de
ce genre de pièces est attribuée par Suidas à Hhinton,
HIMALAYENS (Idiomes), nom donné à un grouçe
d'idiomes -monosyllabiquee, parlés an N.-E. du bassin
du Gange. Les principaux sont le 6odo et le dhimal,
HIMYARITE (Dialecte), dialecte parlé autrefois dans
l'Yémen et dans la région orientale de l'Arabie. Il s'écri-
vait avec un caractère particulier, désigné sous le nom
û*Al Mosnad, et qui était à peu près toi^bé en désuétude
dès le temps de Mahomet; Pococke a voulu voir dans ce
caractère le ehaldéen à l'état primitif. On lui a même
trouvé une ressemblance, évidemment fortuite, avec
qudquea-nns des plus anciens alphabets de l'Inde, et
avec le slave glagolitique. Selon quelques linguistes,
l'himyarite aurât été assez rapproché du s]rriaque ; Gese-
oins croit, ou'il avait plus de rapport avec Téthiopien,
qu'on parlait de l'autre côté de la mer Rouge. MM. Ful-
gsnce Freanel et Th.-J. Arnaud ont recueilli plusieurs
niseriptions himyarites chez les tribus qui occupent Tan-
den pays de Saba ; ils pensent que Vekhkili^ parlé an-
lourd bui dans le Mahra et l'Hadramaout, est un reste de
l'antique dialecte. Le baron de Wrede a composé un petit
Vocabulaire des mots himyarites que contient l'arabe ac-
toel. V. Gesenius, Sur la langue et l'écriture himya^
rites, en allem., 1841.
HINDOUI ET HINDOUSTANI (Langues). V. IifnnainvBS
(Langues).
HIPPODROBIE. V, oe mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
HIPPONAGTIQUE (Vers). F. Chouambe.
HIPPOPHORBE (du grec ippos, cheval, et phorbiia,
lanière de cuir que les Joueurs de flûte se mettaient sur
la bonche)> flûte libyenne, qui rendait un son très-aigu
et semblable an hennissement du cheval. Elle était faite,
dit Pollux, en laurier dépouillé de son écorce et de sa
moelle. Les gardiens de chevatax dans les pftturages en
'fiBùsaient usage.
HIRAU ou HIRIAU, ancien nom des Jongleurs et des
ménestrels.
HIRONDE (Queue d'). V, Qosub d'hoiondb.
HISTOIRE (du grec tstoria, recherche des dioses cu-
-ffieuses, exposition de oe que l'on a vu), un des grands
genres littéraires en prose. L'hiftolre raconte les faits ac-
complis par les hommes réunis en sodété; elle lea coor-
donne, lea rapporte a leurs causes , met leurs eiTets en
lumière , et prononce sur leur moralité. Voilà son objet
-et son but : aussi Gicéron rappelle-t-il le témoin des
temps, la lumière de la vérité, récole de la vie. Observer
des phénomènes tonionrs identiques, qui se succèdent
Invariablement dans le même ordre et suivant les mêmes
Jeia, oomiM les phénomènes astronomiques eu physi-
ques, c'est faire de la science et non de Vhistoire. Le na«
turalist», qui réunit et ciasse les objets de ses observi^
tiens d'après des caractères communs aux êtres de toutes
les époques et de toutes les latitudes, fait encore oeuvra
de savant et non d'historien : le nom d'histoire naturelle
est un abus de termes qui vient de ce qu'on a confondu
la variété avec l'irrégularité, la multiplicité avec la su^
cession ; l'histoire de la nature ne peut dater que des dé«
couvertes modernes, qui ont révélé les révolutions tra-
versées par le monde physigue dan^ ses premiers èges.
Le domaine propre de l'histoire, c'est la vie des hommes,
c.-ànd. ce (jui est inconstant, ce qui change et se trans-
forme capricieusement, du moins en apparence; c'est la
succession des faits unie à la diversité. Dieu ne peut être
l'objet de l'histoire, comme le voulait Jean Bodin an
XVI* siècle; car l'essence des choses divines est l'immu-
tabilité. Dans l'homme seul existe une puissance distincto
des éléments qui composent son corps et des agents phy-
siques qui animent la matière ; seul il a cette préroga-
tive, que non-seulement il peut dérober son âme aux
atteintes du monde extérieur, mais que, luttant sans
œsse et prenant l'empire à son tour, il sait défendre son
corps même contre les influences auxquelles il semble
directement soumis. S'il touche à la terre par un oèté de
sa nature, par l'autre il tient au ciel ; et cette émanation
de la divinité, c'est moins encore l'intelligence que la
faculté de vouloir : de cette faculté dérivent les actes
libres, qui déconcertent toutes les prévisions, qui se dé-
robent à l'analyse, et que l'historien doit précisément
recndllir et expliquer. Les faits humains qui échappent
à la sdence sont proprement le domaine de l'histoire.
L'histoire est sujette à des transformations successives.
Quelle est la loi de son développement? D'abord, elle se
contente de recueillir les faits, plus ou moins altérés par
la fiction, et de les confier une seconde fois à la mémoire,
à l'aide du rbythme poétique, d l'écriture ne peut encore
leur assurer une existence plus durable. L'histoire ra-
conte alors pour raconter ; elle se confond avec l'épopée.
Mais l'esprit humain ne s'arrête pas \k i qudle que soit
l'irrégularité des faits, l'attention, à force d'observer la
génération des eiTets et des causes, finit par découvrir un
fil conducteur ; die s'en saidt, et s'efforce de retrouver
l'ordre dans ce désord^ apparent. De là naît Vhistoire
pragmatique, comme l'ont appelée les Andens, ou philo-
sophique, sdon l'expression des modernes, c.-Im1. le rédt
des faits humains avec leurs principes et leurs consi^
auenoes. Ge n'est pas encore le dernier mot de l'histoire :
rhomme, tourmenté d'un besoin insatiable de connaître,
ne peut se contenter d'une explication incomplète et par-
tielle; il ne tend à rien moins qu'à trouver le secret de
toutes choses, à embrasser d'un seul coup d'œil, en par-
tant d'un principe donné, la génération des idées , des
constitutions, des révolutions. Ge dernier progrès, c'est
la Philosophte de l'histoire (V. ce mot). — Il est évident
que les conditions de l'histoiro varient avec son caractère.
Tant qu'elle est un simple rédt, elle peut se borner à un
peuple, à une ville, à un individu. Dès ou'dle s'élève ans
causes et aux effets, son horizon doit s'étendre : l'événe-
ment est en Grèce, mais la cause peut êtro en Asie.
L'histoire philosophique est donc nécessairement g^6>
raie, n faut plus encore, si l'historien, considérant l'in-
dividu comme le résumé de l'espèce, et l'espèce comme
le développement multiple de l'individu, prétend déter-
miner la loi mil domine tous les faits humains, et les
ramener tous a une théorie savante. Rien alors ne doit
plus lui échapper ; il n'a plus le droit de choisir même les
grands peuples et les grands hommes qui représentent et
résument le mieux l'esprit de l'humanité ; il n'est pas de
fiiit si insignifiant en apparence qui ne puisse Jeter du
Jour sur l'ensemble, pas de contrée d lointaine qu'on ne
doive explorer. L'histoire, parvenue à ce degré, doit donc
être universelle. Mds le génie de l'homme peut-il jamais
s'élever Jusqu'à l'universalité? Cette espérance n'est-dle
pas une chimère? Malgré son impuissance, malgré ses
nombreux échecs dans la Philosophie de l'histoire, l'es-
prit humain tend toujours à la généralisation. Cependant
il ne peut espérer d'atteindre le but qu'il poursuit : du
Jour où la Philosophie de l'histoire aordt tenu tout ce
qu'dle promet, il n'y aurait plus d'histoire, il y aurait
une sdence ; et l'homme, s'élevsnt de de|^ en degré Jos*
qu'à la parfaite intelligence des choses passées, de là
même Jusqu'à la prévision de l'atenir, se confondrait
avec Dieu.
L'histoire est une création de la Grèce. On trouve, à la
vérité, dans les littératures orientales, par exemple ches
les Hébreux, quelques livres dits lûstoriques) nudscs
flIS
1035
HIS
M lont que des réàti composés dans le but tout à fait
pntiqoe de conaenrer le souTenir de certains fiiits, qu*il
srt essentiel de ne pas oublier, et hors desquels récriyain
B's rien Touiu Toir. Ce qui caractérise, au contraire, les
historiens grecs, c'est une curiosité insatiable, un esprit
d'iDresdgation générale, pour qui tous les faits ont une
(f^e Tsleor ; c*est la recherche de la vérité pour elle-
même, sans préoccupation de remploi qu'ils en pourront
(Ure; c'est l'esprit de critique, qui n'admet pas indistinc-
tement toutes les traditions, qui choisit entre les témoi*
fDiges; c'est enfin l'esprit philosophique, qui, sous tous
les actes sodanz, voit une manifestation de l'esprit hu-
main, liais les Grecs ont en sur l'histoire une opinion
particulière, enseignée dans leurs écoles, et que les Ro-
mains ont ensuite adoptée : ils confondaient prescpie
l'histoire avec rélo({uence : NihU est magis oratorium
qnam fûstûria, disait Cicéron. Cette confusion, oaXy^
meot eiprimée dans une préface d'Éphore, livra la théorie
même du genre historique à l'autorité des rhéteurs, et la
confina dsAS un chapitre de leurs traités sur l'art ora-
toire. Aussi, trop préoccupés du soin de la forme , les
historiens de Tanuquité cherchèrent à intéresser et à
plaire , aux dépens mftme de la vérité. Nulle part cette
tendance ne se montre mieux à découvert, et nulle part
oo D'en voit mieux les effets, que dans l'usage des haran-
goe8(K. ce mot). C'est toujours l'art qui prime la science,
toojoors rintérét et le plaisir qui passent avant IMnstruc-
tioD et la vérité.
Las qualités nécessaires à l'historien sont nombreuses,
variées, presque eifirayantes. Pour la recherche des faits,
fl a besoin d*une rare intelligence : non-seulement il doit
lemonter aux différentes sources de Thistoire, traditions
(Bstes, inscriptions monumentales, médailles, livres,
doeufflents publics et privés, etc., et soumettre à une
critique attentive, pénétrante et délicate tout ce qa'U
sors recueilÛ ; il lui faut être veraé dans la connaissance
des lois, de la çuerre, des finances, des institutions ad-
ministratives, des langues, et s'éclairer par la chronologie
et la géographie, qu'on a appelées les deux yeux de l'his-
toira. — La mise en oauvre aes matériaux exige un nand
talent de composition, afin de produire l'intérêt et d'évi-
ter l'ennui ; dans le nombre infini des faits , il importe
de choisir ceux qui méritent de survivre, ceux qui sont
dans un rapport essentiel avec la nature de l'homme, et
dus un rapport anecdotique avec la nature des hommes
à telle ou telle époque. — L'historien doit avoir fortifié,
agrandi ses méditations solitaires par l'expérience de la
rie active : s'il ne connaissait la société que par les livres,
il serait exposé à la juger fort mal , et se trouverait
dans limpoesibilité de la peindre. Tous les historiens de
la Grèce, excepté pentrètre Hérodote, furent des hommes
publics, des orateurs et des généraux ; il en fht de même
i Rome ; chez les modernes aussi, Machiavel, Guichardin,
Paolo SarpI, De Thon, rappellent l'idée de la vie active
mêlée à la spéculation littéraire. — Parmi les qualités
morales qui sont indispensables à l'historien, il faut dter
en première ligne l'amour dé la vérité, et par là on en-
tend, non pas seulement le besoin de cette vérité sèche
6t morte qui n'est que l'exactitude, mais la force de re-
trouver, de sentir et de refiaire la vérité locale et contem-
poraine, de dessiner les physionomies des personnages,
et de les mettre en mouvement, en leur rendant leurs
passions et leurs costumes. On demandera ensuite à l'his-
torien l'amour de l'humanité, c.-à-d. que sa justice im-
partiale ne doit pas être impassible : il faut qu'il ait une
passion, qu'il souff^ ou soit heureux de ce qu'il raconte,
«mblable à un témoin tout ému encore des faits qu'il a
vos. Lncien disait que l'historien doit être un étranger
nos patrie, sans autels, et un écrivain du xvm* siècle ,
qu'il doit n'être d'aucun pays, d'aucun parti, d'aucune
religion : de» rédts compoeés dans de pareilles disposi-
tions, sans principes, sans Idées, sans conviction, ne
pourraient avoir ni vie ni couleur. Cest à l'historien de
soutenir, au contraire, le parti de la justice, qui est de
tous les temps et de tous les lieux, sans qu'aucun intérêt
de patrie, de corps ou de secte puisse le lui faire déserter.
Materé la remarque si vraie d'Aristote, que la distinc-
tion des genres ne repose pas sur la différence de la
Anne, il âni se garder de croire que la forme soit indif-
férents : la pensfe humaine, au contraire, ne peut être
ompUte sans ^e. n y a donc un style historique,
epnune il y a un style oratoire. Ches les Anciens, la poé-
rie et l'histoire avaient été longtemps confondues ; dans
les premiers âges des sociétés, lliomme n'est pas riche
en souvenirs, et H n'a pas encore eu lé temps d'exercer
IwBnconp sa raison; l'Imagination augmente et embellit
de ses inventions tous les événements qui ont vivement
agi sur elle et qu'elle se plaît à célébrer. Cest ainsi quil
y a de l'histoire dans Homère, et de la poésie dans Héro-
dote. De nos fours même, quoique le progrès des tempe
ait démêlé bien des éléments jusque-là confondus , le
divorce n'est pas et ne saurait être complet entre la raison
et l'imagination ; la poésie doit encore puiser ses données
dans l'histoire, et l'histoire emprunter à la poésie ses
formes vives et animées. On a prétendu que les deux
genres devaient rester complètement indépendants l'on
de l'autre, et on a voulu renfermer l'historien dans les
limites étroites de la critique. Mais les auteurs tels que
Suétone sont de simples compilateurs; s'ils ont le mérite
de la conscience et de l'exactitude, s'ils ont rassemblé
tous les matériaux de l'histoire, l'histoire est encore à
faire. Chez eux, tout est froid et décoloré; au lieu de
tableaux, ils n'offrent que de sèches divisions; au lieu de
personnages vivants , les membres épars qui pourraient
servir à les recomposer. La vérité n'est pas tout entière
dans une simple juxtaposition des faits, et une mémoire
fidèle, une recherche patiente ne sont ptA les seules ou»*
lités qu'on doive exiger de l'historien : la puissance de la
réflexion et de l'imagination lui sont tout aussi nécea*
ssires. L'une sert à choisir entre les différents récits, à
discerner la vérité au milieu des contradictions, quelque*
fois même à combler des lacunes profondes, à restaurer
des ruines et à reconstruire un vaste monument; l'autret
rtoandant ses vives couleurs sur cette matière insen*
sible, anime les descriptions, caractérise fortement le
génie des peuples et des individus, évoque pour ainsi dire
les morts, et donne au récit tout l'intérêt d'une action.
L'historien doit éprouver quelque chose de l'émotion ree*
sentie par les penonnagee quil met ea scène, et faire
passer ses sentiments dans ses écrits. Si l'histoire tient à
la fois à la science et à la poésie, elle doit revêtir une
forme intermédiaire entre les deux formes affectées am
œuvres de l'imagination et de la raison.
Eu égard à l'étendue des sujets, l'histoire est dite tmH
verselle, si elle embrasse tous les peuples et tous les
siècles; générale, quand elle s'occupe d'une nation, dont
elle montre l'origine, les progrès et les diverses révolu*
tiens; partictUiàre, lorsqu'elle se borne à une période
isolée, a un événement spécial, à une province, à une
ville, à un homme public. Quand elle entre dans les dé*
tails de la conduite privée d'un personnage, elle devient
une simple Vie, une Biographie (F. ce mot). Si «m per*
sonnage raconte lui-même ses actes et les événements
dont il a été témoin, sa composition rentre dans la classe
des Autobiographies et des Mémoires ( V, ces mots). — An
point de vue des éléments constitutifs de la société «
l'histoire a été divisée en deux grandes parties, Ykistoitê
sacrée et Yhistoire profane. L'histoire sacrée, qui raconte
tous les faits relatifs à la religion depuis l'origine dn
monde jusqu'à nos jours, se subdivise en histoire sainte,
où l'on s'occupe des faits antérieurs an Christianisme et
consifpiés dans les saintes Écritures , et histoire êùdé-
siastujue, qui traite de l'établissement de l'Église et de
son développement à travers les siècles. L'histoire pro-
fane embrasse l'histoire civile, politique et intellectuelle
des différents peuples. On la partage en trois grandes
périodes : histoire ancienne, depuis l'origîae des États dans
l'antique Orient Jusqu'à Is chute du monde romain à la fin
du iv*siède de l'ère chrétienne; histoire du moyen âge,
depuis la ruine de l'Empire romain jusqu'à l'établisse-
ment des Turcs Ottomans à Constantinople en 1453;
^tstotrs des tenM>s modernes, depuis le milieu du xv* siècle
lusqu'à nos leurs. — Pour le tableau des plus célèbres
historiens, V, les articles consacrés à l'histoire des di-
verses littératures. * B.
msToms (Académies d'), Sodétés formées par les sa^
vants de divers pays pour l'étude de l'histoire nationale.
La Société de V Histoire de France, fondée à Paris en
1S33 par MM. Guizot, Thiers, MoIé, de Barante, A. Ben-
gnot , Mignet , Raynouard , Fauriel , etc. , se réunit à la
Bibliothèque impériale, et publie, outre un Annuaire el
un Bulletin, des ouvrages et documents relatifs à Itii»-
toire de la France. Au nombre des Sociétés étrangères, mi
remarque : V Académie royale d'Histoire portii^aise de
Lisbonne, créée en 1720 par Jean V; Y Académie ropalé
d'Histoire de Madrid, confirmée en 1738 par PhllippeY :
Y Académie d^Bistoire et d* Antiquités de Naples , créée
en 1807 par Napoléon l^t la Société historique analaué^
fondée à Londres en 1830 pour l'étude et la publication
des documents antérieurs à Henri Vni; la Société de
rhistoire ancienne de l'Allemagne , fondée en 1810 à
Francfort-sur-le-Mein par le ministre prusriin De Siein
HOL
1036
HOL
la SocUté hutùnqw de la Basse^axe, fondée à Hanovre
en 1834; la SociMé de V Histoire nationale du Wurtem-
berg , créée en 4822 ; la Société historique et archéolo»
guiue de Moscou, créée en 1836, etc.
HiSToïKB (Peinture d*), le premier et la principal genre
ainsi que les compositions allégoriques. Il impiiaue un
caractère noble, un stvle élevé, et quelque beauté idéale«
HISTOiaB AUGUSTE. V, AOGUSTB.
HISTORIÉ, se dit de toutes parties architecturales,
moulures, chapiteaux, etc., sur lesquelles on a sculpté,
Sdnt ou gravé des sujets empruntés à l'histoire ou a la
ble.
HISTORIOGRAPHE. ( V. ces mots dans notre Dict.
HISTRION. } de Biog. et d'Histoire,
HITOPADÊÇÂ,c.-à-d. Instruction saliUaire, recueil de
|iEd>le8 et de contes en langue sanscrite. Cest un abrégé,
de date assez récente, d*un ouvrase plus considérable
et probablement beaucoup pins ancien, le Pantchor-Tan-'
fra. Le Bitâpadéça renferme un extrait des trois pre-
miers livres de ce poème, et d*un autre ouvrage brah-
manique que nous ne possédons pas. On peut donc
considérer l'histoire du Pantcha- tantra comme ren-
fermant implicitement celle du Hitâpadéça; car c'est
l'histoire même de la Fable. Ce recueil fut traduit en
pelhvi, au vi* siècle de notre ère, sous le titre de Calila
et Dimna; puis, du pelhvi en arabe, au vin* siècle; de
l'arabe en hébreu par le rabbin Joël. Jean de Gapoue le
traduisit de l'hébreu en latin au xn* siècle sous le titre
de Direciormn humanm oitm, qui rend le sens du mot
Hitâpadéça, Au xv* et au xvi* siècle on en fit, sur le latin,
des versions espagnole, italienne et française; en 1579,
Pierre de Larrivev les fondit ensemble sous le nom de
Deux Iwres de iUosofie fabuleuse, La Fontaine vint im-
médiatement après. De plus, le CalUa et Dimna pelhvi fut
traduit en persan aux xii* et xin* siècles sous le titre de
AnwaH SohàUi. Le livre des Lumières est la traduction
des quatre premiers livres; imprimé sous le nom de
Fables de Ptlpay^ il a fourni plusieurs beaux si^ets à
notre grand fabuliste. — Le nit&padêça, ainsi que le
Pantchi^Tantra, sont attribués au brahmane Vishnu-
çarma. Schlegel et Lassen en ont donné une traduction
latine, en iâl; Johnson, une traduction andaise, en
1848; M. Lancereau, une française, en 1855. Le PantcAo-
lanira^ traduit imparfaitement par l'abbé Dubois en
1826, vient de l'être fidèlement en allemand par M. Ben-
fey. Ce dernier ouvrage est d'origine bràhmanioue; il ne
renferme aucun trait qui rappelle le bouddhisme, et
semble, sinon antérieur à cette religion, au moins con-
temporain de ses premiers développements. Son style, la
langue dans laquelle 11 est écrit, le reportent également
à cette époque, c.-Ih1. vers le s' ou le m* siècle avant
notre ère. Quant au Hit^padêça, il est difficile d'en fixer
la date, mais il ne semble pas pouvoir être antérieur au
m* ou au IV* siècle de l'ère chrétienne. Il se peut aussi
que les écrividns bouddhiques, à l'époque de leur lutte
contre les br&hnumes, aient emprunté à ces derniers une
forme littéraire éminemment propre à l'enseignement
moral : unsi s'expliaueraient les traits lancés contre les
br&hmanes dans rédition qui a servi de texte au traduc-
teur arabe, traits dont nos textes du Pantchc^Tantra
sont exempts. Eh. B.
HOC (Jeu du) > V, Jbox, dans notre Dict, de Biogr,
HOCA (Jeu de) \ et d'Hist., p. 1436, col. 3.
HOCHE-PLIS. K. au Supplément.
HOIR« ancien terme de Jurisprudence, synonyme
^héritier. Il se disait spécialement des enfants et petits-
enfants, et s'employait plutôt au pluriel ^u'au singulier.
HOIRIE, mot autrefois svnonyme tïheritage, de suc-
cession^ dans la langue du droit. On nomme avancement
dhoirie une donation en avance sur une succession à
reeneillir. Ce qui est ainsi donné est retemi plus tard
dans le compte de la succession.
HOLLANDAISE (École), Tune des grandes écoles de
IMintoxe diex les modernes. Les plus anciens artistes de
cette école sont : Albert van Owater, de Harlem , qui vi-
leh avant l'an 1400; Thierry, également de Harlem, pos-
lérfeor d'un demi-siècle an précédent; et Corneille En-
glielbrechtsen, de Levde, qui, le premier dans sa patrie,
employa la peinture a l'huile. La peinture historique leta
nn certain éclat dans le cours an xvi* siècle, grâce à
Lncas de Lejde, Martin Hecmskerk, Octave Van Yeen
(Otto Venins } , Honthorst , Ant. Moro. L'école est dès
Ions remarqoaole par une parfaite intelligence dn clair*
obscur, une couleur aussi brillante que vraie, et un fini
des plus précieux, sans arriver pourtant à la sécheresse.
Quand le protestantisme se fut répandu dans les Pro-
vinces-Unies, les tableaux religieux furent bannis des
églises. L'art, entrant dans une autre route, n'exploita
plus que le paysage national, car l'amour du sol de la
patrie s'augmentait depuis qu'on avait secoué le joug de
l'Espagne; que la marine, car elle était la défense et la
force du nouvel État ; que le genre, car on aimait à se re»
poser, dans les scènes calmes d'intérieur, de la lutte fu-
rieuse qu*il avait fallu soutenir. Alors surgirent tous ces
grands artistes qui ont rempli le xvii* siéle, les paysa-
gistes Jean et André Both, Albert Cuyp, Ant. Waterloo*
Van Goyen , les deux Van der Neer, Moucheron, Swane-
velt, Abraham Bloemaert, Hobbema, Ruysdaôl, Wynants,
Van Éverdingen , Berghem , Pynacker; les peintres de
genre, Adrien Brauwer, Schalken, Netscher, les deux
Weenix, Gérard Dow, Terburg, Pierre de Hoogh, Jean
Steen, Poelemburg, Adrien et Isaac Van Ostade, Adrien
Van der Werf, Van der Heyden, Pierre de Laar, dit le
Bamboche, Corneille Beça, les deux Koninck, liieris et
Metzu; les peintres d'animaux, Paul Potier, Karel Dn-
Jardin, Hondekoeter et Wouwermans; les peintres de
marine. Van Cappellen, Backhuysen et Van de Velde;
les portraitistes. Bol, Van den Eeckhout et Van der
Helst; les peintres de fleurs, David de Heem et Van
Huysum; et, au-dessus de tous, Rembrandt, le sublime
coloriste, le peintre de l'ombre. F. Descamps, Vies des
peintres flamands, allemands et hollandais, Paris, 1750,
5 vol. in-8».
HOLLANDAiSB (Langue), langue classée par les linguistes
dans la famille saxonne on dmbrique des langues germa-
niques, et formant avec la langue flamande (K. ce mot)
le groupe néerlandais ( V, ce mot). Elle n*a pris ce nom
que depuis que la Hollande s'est séparée des Espagnols,
et, comme cette province était la plus inu)ortante des
Provinces-Unies , son dialecte a été celui du gouverne-
ment et de la nation. Le hollandais ne s'employait guère
encore au xvii* et au xviit* siècle que pour les versions de
de la Bible, les sermons, les ouvrages de théologie et de
controverse religieuse: les meilleurs auteurs éorivaient
en Latin ou en français. Le hollandais a les mêmes radi-
caux que les autres langues du bas-allemand. Il change
assez ordinairement en p Vf des Allemands, en v leur h,
souvent aussi en t leur s et leur s, en d leur t, et parfois
en k leur ch. Il évite les sons sifflants et les accumula-
tions de consonnes, mais traîne les voyelles d'une façon
disgracieuse. Comme en allemand, l'accent tombe dans
chaque mot sur la syllabe fondamentale. Le hollandais
est très-riche en expressions relatives à la mer et à la
marine; mais il est obligé d'empmnter à l'allemand la
{plupart des termes philosophiques. Moins hardi que Tal-
emand dans la composition des mots, il a aussi rejeté «
chez les auteurs modernes, les longues périodes et les
pénibles constructions de cette langue. L'alphabet hollan-
dais a 22, 24 ou 26 lettres, selon au'on admet, ou qu*on
rejette conune faisant double emploi, tout ou partie des
lettres c, g, s et y. La prononciation, généralement sem-
blable à celle de l'allemand , présente les particularités
suivantes : la lettre u a le son de notre diphtbongue eu,
le son ou est rendu par la vovelle composée os, tandis que
les lettres ou forment une diphtbongue qui se prononce
oott; les lettres ij forment une diphthongue ou! répond à
celle qu'on entend dans le mot français veille; le g a le
son du ch allemand. Des différences de prononciation et
l'introduction d'un certain nombre de mots étrangers don^
nent naissance à des dialectes locaux, dont les plus im-
portants sont ceux de Zélande, de Gueldre, de Groningae,
et celui de la ville de Kampen ou de l'Yssel supérieur.
V. Sewel, Grammaire néerlandaise , Amst., 1708, in-8<*;
Ph. Lagrue, Grammaire hollandaise, Amst., 1785, in-8«t
Zeydelaar, Grammaire néerlandaise, Amst.. 1791, in-8^;
Van Moerbeck, Nouvelle Grammaire hollanaaise, en ail.,
Leipzig, 1791, in-8*; P. Weiland, Grammaire néerlan-
daise, 1805; Van der Pyl, Grammaire hollandaise pror-
tique, Dordrecht, in-8* ; W. Bilderdyk, Grammaire néer-
landaise^ La Haye, 1826, in-8* ; Winkelman, Dictionnaire
français-hoUandais et hollandais-français, Utrecht, 1 783»
2 vol. in-8®; P. Marin, Dictionnaire français et hollan^
dais, Amst. , 1793, 2 vol. in-4<>; Van Moock, Nouveau "^
Dicttonnaire français-hollandais et hollandais^rançais, :
2utphen, 1824, 4 vol. in-8o; Olinger, les Badnes de la
langue hoUandaise, €iccompagnées aune Grammaire sim-
plifée^ Bruxelles, 1818, in-ll, et Dictionnaire français-
hmandais, 2 vol. in-8 ; Van Jaarsveldt, Sur les rapports
du hollandais avec Vallemand, Amst.^ 1818; F. Otto»
HOL
t037
ROL
Enoà tMorume H pratiqué sur la lanaue 0t la lUtératttre
hoUmâaist, en «Uem., Erlangen, 1839, 2 toI. in-8*.
Boujkifi>AiSB (Uttératore). Les Hollandais n*ont eii
qu'assez tard une littéraftare nationale. II n^est nulle-
ment prouvé qae la Chronique rimée qui porte le nom de
IQoolas Kolya remonte, comme on i*a prétendu, jusqu'au
xn* nëde. Celle dans laquelle Melis Stoke raconta rhis-
toire des comtes de Hollande iusqu'à Guillaume IH, est
da im*. Le xiv« présente Guillaume Van Hilleggersberg
eides espèces de TOniTères, appelés Sprekers (orateurs^,
qui Tisitaieni les eoars des princes et des seigneurs, débi-
tant des spreuken ou proveroes, maximes, morales en prose
et en Fers. Des traductions ou des imitations de poèmes
carloYineiens, tels que Flor9 et Blanche fletw, Renaud de
Mcntauoan, etc., furent faites en hollandais, mais on
regarde les romans de Charles et Êlégast et des Enfants
U Lânbourg conune des œuvres originales de cette lit-
térature. Au commencement du xv* siècle on vit se for-
sier, dans les yilles importantes, des corporations de
Bedtrijkers (rhétoridens) analogues aux MeistersoBngers
allemands.
Quand les Provinces-Unies eurent échappé à la domi-
nation de TEspagne, la littérature hollandaise prit un
|das grand essor, et devint très-florissante. Le xvi* siècle
rit piuraitre des poètes nombreux et distingués : Koom-
liert, qui combattît, dans des poèmes didactiques, les er-
reoTB et les préjugés de son temps; Philippe de llamix,
ami du prince d*Orange, auteur de chants qui derinrent
populaires, et d'une œuvre satirique en prose, intitulée
B^^enhorf; fl.-L. Spiegel, Rœmer Visscner et ses filles
Anne et Blarie, le chansonnier Laurent Reaal, Dirks
tes; Brederode et Koster, qui donnèrent les premiers
ane forme régulière, Tun à la comédie, l'autre h la tra^
géfie; P. Corn. Hooft, bien supérieur à tous les précé-
dents, et qui excella dans tous les genres ; lan Vos, qui
fbt son rival dans les compositions dramatiques; J. Cats,
dont les csovres sont pleines d'un aimable enjouement
Ia ville de Dordrecht eut son école poétique pamculière,
représentée par Kamphuysen, Hugo Ôrotius, Daniel
lottcktyB^ Daniel Heinsius, Jérémie de Dekker, Van So-
meran. La poésie fut portée au plus haut deeré de per-
fection pendant le xvn* siècle par Joost Van der Vondel,
qui a publié des traductions d'auteurs classiques, des
chants lyriques, des sonnets, des élégies, des héroldes,
des épitres, des satires, des tragédies et une Poétiaue. On
peat dter aprte lui Antonides Van der Goes, poète lyrique
et tragique estimé; Heymann Dullaert, Const. Huyghens,
Joacbun Oudaan, Van Westerbaen ; Reinier Anslo, dont
le poème de la Peste de Naples est toujours estimé ; Van
Fockenbroch, ou'on a surnommé le Scarron hollandais;
Jean Six, Jean deBrœkhuyaen, Elisabeth Koolaert, J.-B.
Weilekens, Rotgans, Moonen, Vlamins, 1. Vollenhove,
toc Schermer, Corn. Poot, qui excella dans la chanson et
r^ltre. — Hooft ne fut pas seulement un poète, mais
on prosateur remarquable t on lui doit une Histoire de
Henri IV, une Histoire de la maison de Médicis et une
Ristoire de la lutte pour l'indépendance des Pays-Bas,
Gérard Brandt écrivit une Vie de Ruyter et une Histoire
de la Riformation , et Gérard Van Loon une Histoire de
la Hollande.
Lorsque les écrivains français du règne de Louis XIV
eurent ébloui l'Burope de l'éclat de leur renommée, on
semât à les imiter en Hollande. Sybrand Feitama, traduc-
teur du TMnaque et de la Henriade, se fit le chef de
récole nouvelle, dans laquelle on compte, entre autres
poètes, Hoogvliet, W. Van Haren, et son frère Zwier Van
Hareo. La scène française fut également prise pour mo-
dèle par André Pels, Buisero, Huijdecoper, Langendijk,
Van SteenwQk. Biais l'imitation étrenêère ne pouvait
être durable : vers le milieu du xvm* siècle, une femme,
Lucr. Wilh. Van Merken, dont on a des poèmes histori-
que et didactiques, ramena la littérature nationale sur
son véritable terrain, et, parmi ceux qui marchèrent en
poésie sur cette trace nouvelle, on distingue BelUuny,
Feîtb,Rieweriand, Van Alphen, Elisabeth Bekker et Agathe
Deken. Le théâtre reprit aussi ses libres allures avec Van
Wînter,Jel8,Nomss, Haverkom, Uylenbroek, Doomik, et
la baronne de Lannoy. Au nombre dea prosateurs, on re-
marque Van Effen, fondateur des journaux hebdoma-
daires te Misanthrope et le Spectateur, et les historiens
Jean Wagenaar, StijI, Kluit, Van Wijn, Van llamelsveld,
llantingbe,Meermann, Stuart, Scheltema, Kampen, Bos-
sciia. Van Gapelle, De Jonge, De Vries, Groen Van Pria-
aerer,etc
Le génie le plus puissant du commencement du xix* siè-
cle a été Bilderdijk, qui brilla dans tous les genres de
littérature. Autour de lui se sont groupés les poètes lyri*
ques Kincker, Helmen, Spandaw, Loots et ToIIens, les
poètes élégiaques Simons et Borger, le poète bucoliaue
Loosjes, les poètes didactiques Hulshoff, Hennert, Vas
der Bosch et Paulus, le satirique Fokke, enfin Lulof, qui
cultiva le genre descriptif. Plus près de nous , la poésie
hollandaise a été repràentée par Isaac de Costa, Van der
Hoop, Ter Haar, Van Lennep, Bogaerts, Wieselius, etc.
ICantelaar s'est fait une grande réputation comme pané*
gyri^ et Van der Palm comme orateur de la chaire. Le
roman a jeté un assez vif éclat avec Maria Post.
V. Noèl Paçiuot, Mémoires pour servir à l'histoùre lit'
téraire des dix-sept provinces des Pays-Bas, Liège, i763
et suiv., 3 vol. in-fol. , ouvrage inachevé ; Siegenbeek,
iTtstotVs de la littércdure néerlandaise y Harlem, 1826,
in-8°; Gravenwert, Essai sur Vhistoire de la littércUure
néerlandaise, Amst., 1830, in-8*.
HOLOPHRASTIQUË (du grec holos, tout, eXphrazô,
je parle), c.-à-d. exprimant Vidée dans son tout; terme
dont se servent quelaues linguistes par opposition à ana-
lytique, et qu'ils apphquent aux langues polysynthétiques.
HOLY-CROSS (Abbaye d'), en Irlande, dans le Muns-
ter, sur les bords de la Suir. Fondée en 1182 par Donald
O'Brien, roi de Limerick, pour recevoir un morceau de
la vraie croix donnée par lo pape Pascal II (d'où lui est
venu son nom, qui signifie Satnte^roix)^ elle n'olRre
plus aujourd'hui que des ruines imposantes, 4es plus
curieuses que TUe possède en style ogival. L'architecture
de la nef est inférieure à celle des transepts, du chœur
et de la tour. Celle-d, carrée et d'une grande élévation,
est supportée par quatre arcades gracieuses, et flanquée
d'élégants arcs-boutants découpés en pointe. Deux cha-
pelles divisent l'aile du nord : l'une, qui contient les
fonts baptismaux et un autel en forme de tombe, est
éclairée par une fenêtre du plus étrange dessin. Dans le
chœur s^élèvent une sorte do mausolée, avec écussons
sculptés aux armoiries des Fitz-Gerald, et un cénotaphe
qui parait avoir été destiné à recevoir, pendant les ser-
vices funèbres, les corps des défunts.
HOLY-ROOD (Palais et Abbaye d'), à Edimbourg. Le
palais d'Holy-Rood, ancienne résidence des souverains
écossais, est un grand b&timent de forme quadrangulaure,
avec une cour centrale : chaque cAté présente un déve-
loppement de près de 80 met. Les quatre toura crénelées
qui garnissent les angles lui donnent l'aspect d'une for-
teresse féodale. Il a subi tant de changements depuis sa
construction, qu'on ne saurait attribuer une date prédse
à aucune de ses parties. Les toura du N.-O., b&ties par
laccpies V, passent pour la partie la plus andenne. Dé-
truit par les Anglais en 1544, le palais fut rebèti peu de
temps aprte sur un plan plus vaste, et on dit qu'il ne
reniermait pas moins de dnq cours. Cromwell le démolit
de nouveau, à l'exception de l'angle du N.-O. ; les autres
parties du monument actuel furent élevées sous le régne
de Charles H , sur les plans de W. Bruce. Au-dessus de
la porte d'entrée de la façade ocddentale, on voit encore
les armes royales de l'Ecosse : de chaque cèté s'élèvent
deux colonnes doriques, qui supportent un entablement
surmonté d'une coupole en forme de couronne impé-
rialo. Cette porte est gardée par des soldats vêtus de l'an-
den costume national. A l'angle S.-E. de la cour inté-
rieure est un grand escalier conduisant aux appartements
royaux, qui furent habités en 1703, et de 1830 à 1833
par les Bourbons exilés de France. Le côté septentrional
du palais contient une galerie longue de 49 met., large
de 8*,50, haute de 6", et où se trouvent 114 médiocres
portraits peints par le Hollandais De Witt : ils passent
pour ceux des rois d'Ecosse, mais n'ont aucune authen-
tidté. La seule curiosité vraiment intéressante d'Holy-
Rood est la chambre à coucher de Marie Stuart, que l'on
a conservée dans l'état où elle se trouvait au temps de
cette rdne : elle est située à l'anele N.-0. Les ducs
d'Hamilton sont les gardiens héréditaires du palais. —
Au N. du palais sont les mines de l'abbaye fondée en
1128 par David I"". Cet édifice, de style ogival, fut pillé
en 1332 et en partie détruit en 1544 par les Anglais. La
nef qui avait été préservée fût d^uiilée de tous ses or-
nements lora de la Réformation. Charles I*' fit restaurer
ces ruines, qu'il transforma en une chapelle royale, où il
fut couronné en 1(533. Pendant hi République, la popn-
hice la dévasta de nouveau. En 1758, on la recouvrit
d'un toit tellement lourd, que, dix ans après, les murs
s'aflàissèreot en partie sous ce poids. Depuis lors elle est
restée une ruine. On y voit les restes de David II, de Jac-
ques II , de Jacques V et de sa femme, de Henri Dam-
ley, etc., car l'intérieur a servi pendant longtemps de
HOM
1038
noN
«fanetière. F. Hutoneal dêscriptîon of th» monasiery
flfid ehapel royal of Holyrood-Hoiue^ Edimbourg,
1819 , iD-8«.
HOMBRE (Jea del*). F. Jbox, dans notre Diction-'
nair$ de Biographie et d Histoire, page 1436, col. 2.
HOMÉLIE (du grec homilia, discours familier, conyer-
Mdon; en latin sermo), nom donné anx discours qui se
fidsaient dans Tégllse , pour montrer que ce n'étaient pas
des harangoes et des diaeoiirs d'apparat comme ceux des
orateurs profanea, mais des entretiens comme ceux d'un
maître à ses disciples on d'un père à ses enCsnts. Nous
«Tons on srand nombre d'homélies des Pères de l'Église
grecqae^ S* Basile, 8* Jean GhrysostAme, S' Qpâginre de
Nsoianae, etc. On en troure chez les Pères latins* dans
8' Augustin entre autres , sous le titre d'Enamiito.
L'ancienne homélie a été remplacée par le Prône ( V.
te mot).
iriOMÉRIDES. ) V, ces mots dans notre
HOMÉRIQDE (Guerre)} Dictionnair» de Biogra-
HOHÉRISTES. I phie et S Histoire.
HOMICIDE (du latin homo, homme, et cesdere, tuer),
acte de tuer un homme, et celui qui a commis cet acte.
La loi française distingue plusieurs espèces d'homicidoi :
Vassassinat, le mmtrtre, le régicide, le pomctds , l'ifi-
fanticide (V, ces mots), Vhomidde par imprudence
(puni d'un emprisonnement de 3 mois à 2 ans, d'une
amende «de 50 à 500 fîr., et donnant lieu à des dom-
mages-intérêts), et Vhomidde par légitime défense {V.
ce mot), La loi prend en considération l'ftge du coupable
( F. Discernement ).
HGMII^TIQUE , nom donné par les ihéteurs allemands
à la partie de la Rhétorique qui concerne l'éloquence de
la chaire. Schmidt, Ammon, Schott, HfliTel, ont écrit des
traités d'Homilétique.
HOMIUAIRE, recoeil d'homélies qui doraient être
lues le dimanche dans la primitive Église.
HOMMAGE. ) V. ces mots dans notre Diettonnatns de
HOMME. S Biographie et d'Histoire.
HOMMES DE LETTRES. F. Gens de lettres.
HOMOEOGRAPHIË. V. LiTHOTTPOoaAPHiE.
HOMQBOMËRIES , particules similaireB en nombre
Infini, qui étaient, suiTant Anaxagora, le principe maté-
riel, lasnbatance de toutes choses ( F. Aristote, Métaph.,
1, 3) . « Il pensait, nous dit Diogène Laêrce ( Vie SAnascor
« gore) , que les principes des choses consistent en pe-
« tites parties toutes semblables les unes aux autres...,
« et que l'unîTen a été formé de corpuscules, de parties
« menues et conformes entre elles. » D'après cela, on se-
rait tenté au premier abord d'assimiler les homœoméries
id'Anaxagore aux atomes des Épicuriens. Mais il faut noter,
entre les deux systèmes, cette différence tout à l'avantage
d'Anaxagore, que les atomistes considéraient leur matière
première comme douée par elle-même de la propriété de
se mouvoir, tandis que la cause du mouvement et de la
réunion des homoBoméries est cette intelligence, ce vouç,
que Platon et Aristote louent Anaxagore d'avoir nommée
pour la première fois le principe de l'arrangement et de
l'ordre de Tonivere. F. la note c de l'article AnaoBogoras
dans le Dictionnaire critique de Bayle, et la thèse delL Zé-
Tort Sur la vie et la doctrine d^ Anaxagore. B— b.
HOMOEOPTOTE et HOMGBOTÉLEUTB (du grec
omoios, semblable; ptôtos, qui tombe; tMeuU. termi-
naison), terme de la Rhétorique ancienne, désiçaant
une figure qui rapproche des mots dont les terminaisons
sont semblables. On a an exemple de cet artifice dans les
fers Boivants d'Horace (Sat. I, 6. v. 55) t
Unltot MRp« vint, nnllls majoribos ortof ,
Et vixlne probot, amplis et honortbaa saotM.
Dana ce retour périodicpie des mêmes oonsonnances on
voit généralement l'origine du mtème de veraificadon
rimée qui fut souvent employé dtms le latin du moyen
Age. La même figure se trouve dans les dictons popu-
laires, parce qu'elle indique bien le parallélittne des
idées ; « Qui terre a , guerre a ; — Jeux de mains, Jeux de
vilotni; — Comparaûon n'est pas raison, »
HOMOLOGATION (du srec omologéin, approuver),
sanction donnée par l'autonté Judiciaire à un acte oui lui
est soumis. Les délibérations des Conseils de famille sur
les intérêts graves des mineurs et des interdits (Code
Na^,, an. 448, 457, 483, 511), les licitations ou par-
tages faits en Justice, doivent être homologuées par le tri-
banal de i'* instance. Lea concordats passés entre le failli
ot aea créanciers doivent avoir l'homolontion du tribunal
de commerce Cocia de Comm*^ art. 521-529). Lea actes
de notoriété tenant lieu, en cas de célébration de ma*
riage, des actes de naissance, doivent être soumis à
l'homologation des tribunaux de i" instance. Les tran^
actions autorisées par les conseils municipaux doivent
être homologuées par le préfet, quand la somme ne dé-
passe pas 3,000 f^., et psr l'empereor si b somme est
plus considérable. Les tarifr des chemins de fer doivent
être homologués psr le ministre de l'agricoHnie, du com-
merce et des travaux publics.
HOMOLOGUMÈNES, nom que reçorentan vr* siècle
les livres du Nouveau Testament dont l'authenticité étsit
prouvée et reconnue de tous, par opposition aux livres
antHogumènes, dont l'authenticité était contestée.
HOMONYME (du grec omof , semblable, et ONoma,
nom), se dit des mots qui se prononcent de même, soh
en s'éierivant difTéremment, comme oourt (Ueu de prome-
nade) et cour (eqiace découvert enfermé de murs), saint
(du latin sanctus, pur), sein (de nmif), sain (de samif).
Ceint (de ctnelut) et seing (de signum)^ mer, mère et
maire; soit en signifiant des choses différentes, comme
port (du latin por<tt5),abri pour les vaisseaux, et port (do
verbe porter)^ manière de se tenir en marchant; cor, do-
rillon aux pieda, et cor, instrument de musique; Hen
fpoids) et liore (qu'on lit), ««11^ (chiffire) et neuf (nouvesn).
On dit aussi mon homonyme, votre Aornonyinc, en par-
lant d'une personne portant le même nom que ceHe qui
psrie ou à qui l'on s'adresse, que ces noms soient ou non
conformes par l'orthographe. Les 'mots homonymes sont
une source féconde de méprises et de fantea pour les
étrangers, et pour les nationaux même qui commencent
à étumer leur propre langue. F. L. Philippon de La Ha*
deleine, Des Homonymes français, 3* éditL, Psris, 1817.
HOMONTiiBs (Rimes). V, Rime.
HOMOPHONIE. F. Antiphonie.
HONCHETS. F. Jonchets.
HONGRELINE; vêtement militaire au xvii« siècle.
Cétait un pourpoint fourré, ouvert par devant, séné à
la taille, et muni de basques assez longues; lea manches,
assez larges, descendaient à peine au-dessoua du conde<
et étaient gsmies par en bas d'un large retroussis.
HONGRIEURS ou HONGROYEURS, nom donné au-
trefois à des artisans qui préparaient des arirs à la ma-
nière de Hongrie , et anx marchands qui vendaient ces
cuirs.
HONGROISE ou MAGYARE (Langue), une des langues
ouralo-finnoises. Les Hongrois ont longtemps prétendu
que leur idiome était seul de son espèce, sana rapport de
filiation ou de générsution avec aucun autre. Tout ce
qu'on peut leur accorder, c'est qu'il était delà formé à
une époque où la plupart des langues actuelles de l'Europe
n'existaient psa ou n'exerçaient point d'influence dans
la Hongrie; c'est encore qu'il oonlient des mots qui ne se
retrouvent pas dans les autres langues connues. -Beancoiq)
de mots honsprois e^ont des analogifes en sanscrit, en
persan, en hébreu, en turc, en slave, en grec, en Istin,
en allemand, en Scandinave, etc., certuna linguistes
n'ont voulu voir, au contraire, dans la langue hongroise
qu'un mélange de tontes sortes d'idiomes : mais les Hon-
grois ont toujours possédé dans l'histoire un caractère
trop tranché, trop original, pour qu'une langue bâtarde
puisse leur être attribuée, et leur contact avec les peo-
ples chez lesquels ils ont passé, on qui dnt passé chez
eux, suflit à expliquer la présence des mots étrangers
dans leur langue. Adelung, ne sachant à quel groupe la
rattacher, la mit, avec l'albanais, à part des autres Isd-
Ses européennes; ce sont Klaproth et Baibi qui l'ont
t entrer dans la famille des langues ooraliennes 00
finnoises.
Le hongrois a des racines extrêmement simples, qni
peuvent usément se ramener à l'état ntononrUabique, et
que n'altèrent jamais les flexions qui s'y atteignent. H
possède beaucoup d'onomatopées, et une grande facilité
pour la composition des mots. On y distingue des voyelles
simples, a, e, t, 0, u, ^ui ont le son sigu, et des voyelles
auiescentes, d, é. i, ô,u, <i, qui se prononcent en traînant,
n'y a pas de aiphtliongues proprement dites. Le hon-
grois a des sons partlculiera, gy, ny, ly, ty^ où l'y ne
sonne nullement comme nn t, mais comme an j se con-
fondant avec la consonne. Il évite dans la prononciation
la rencontre des consonnes, au point de préposer use
lettre euphonique aux consonnes doubles des radicaux
étrangers (ttlpoia, du latin scota). Il ne distingue pas les
genres, et exprime le sexe, quand oda est nécessaire,
par un mot distinct H n*a pss de déclinaisons; les
flexions des cas consistent en particules qui se Jol^oent
au radicalf et que les anciens grammairiens prirent à
HOTT
1039
HON
tKt poor des termiiudsona de cas. Les pronomt possessifs
H 1» prépositions s'expriment par des suffixes. L'article
est exprimé par oz ou par a, selon ooe le substantif qu'il
détermine commence par une Toyelle on par une con-
sonne. L'adlectif est invariable quand il précède le 8al>-
stantif qu'il qualifie; mais, s'il le suit et en est séparé par
le verbe être, il prend les mômes flexions que loi. lies
noms de famille sont considérés comme des adjectifs, et,
poor œla, s'énoncent avant les noms de baptême (^o-
tkory Gabor, Gabriel de Bathor). Le comparatif se forme
an ijeutant la lettre 6 à la fin du positif. Dans le verbe,
la 3' personne du prient est considérée comme le tlième
on radica] pur. Le verbe substantif se sous-entend le plus
souvent. Le verbe avoir exprimant la possession se rend
par le verbe être ayant pour sujet le nom de l'obje; pos-
sédé (un livre est à moi, au heu de foi un livré), La
forme du fotnr dans les verbes ne diffère pas de celle du
présent, et le sens seul ou quelque particule fait distinguer
les deux temps : l'emploi d'un auxiliaire pour exprimer
le futur est relativement récent. Les verbes actifs ont la
propriété d'être conjugués de deux manières, selon qu'on
les emploie dans un sus général on dans un sens détei^
ndné. Le bongrois a trois participes, un pour le présent,
on pour le paué, et un pour le futur.
I^ Juste proportion des voyelles et des consonnes, le
soin que Ton q>porte à bien articuler les syllabes et à
nuancer exactement les sons, donnent à la langue hon-
groise beaucoup d'harmonie, en même temps qu'elle est
redevable d'une singulière énergie à la variété de ses
formes et de ses constructions. La régularité des flexions
et des liaisons la rend claire et précise. La prosodie et le
rbythme y sont tels, qu'on a pu y introduire avec succès
les mètres des Grecs et des Romains. Malgré ses ^alités,
la langue hongroise est peu parlée, ce qw s'exphoue par
la coexistence en Hongrie du slave, de l'allemand et du
ralague, et surtout par cette circonstance que, durant
plusieurs siècles, elle a été exclue de l'Église, de l'admi-
Distradon publique, des écoles, où Ton n'employait que le
latin, et de la haute société, qui préférait le Runçais ou
l'allemand. On y distingue 4 dialectes, diflérendÀ entre
eux par la prononciation : le paloczen, parlé dans les co-
mitats de Hévès, de Neograd et de Honth ; le maçrar d'au
delà du Danube; le magyar des bords de la Théiss; et le
dialecte des Szeklers, oui vivent dans la Transylvanie, la
Bukowine et la Moldavie.
Les Hongrois ont eu une écriture nationale, qui s'est
perpétuée presque jusqu'à nos jours ches les Szeklers :
mais l'alphabet latin a été adopté lors de la prédication
do christianisme. Seulement, comme la langue présente
sn moins 31 valeurs phonétiques, 11 a fallu augmenter
cet alphabet, en multipliant les voyelles au moyen de
trémas et d'accents, et les consonnes en en réunissant
plusieurs qui transcrivent des articulations spéciales {zs,
^2. i. Ç^)' y» Molnir, Grammatica kungarica, Hanovre,
1G10, ia-S^i Komaromi, Grammaire lumgroiee, Otrecht,
1655; Pereszlenyi, Grammatica li$èg%UB Jûmgarica, Tyr*
Dan, i6S9, in-8°; 1. Thomas, Grammaire française et
hongroise, QEdenburg, 1763, in-8®; Gyarmathi, Gram-
maire critique de la langue hongroise, Clausenberg, 1704,
2 voL in-8°; Nicolas Rêvai, Grammatica hungarica,
Pesth, 1809, 9 vol. in-8®; Tospler, Grammaire théorique
et pratùgue de la langue hongroise, en allem., Pesth,
1842 ; J. Eiben, Nouvelle Grammaire hongroise, Lem-
berg, 1843, in-8°; Molnàr, Dictionarium latino-hungari'
eum, Nurembei^, 1606, in-S** ; Pariz Papai, Dictionarium
laUno-hungaricum, Leutschau, 1708 ; Dankowsky, Mar-
gyaricœ linguœ Lexicon critico-etymologicumj Pres-
boui^g, 1833, in-^^" ; Michel Kis et Ignace Paradis, Nouveau
Dictionnaire de poche français-hongrois et hongrois^ra»'
çais, Pesth, 1844, in-12; Vlrag, Magyar prowdia, Bude,
1820, in-8^; Ortelli, Harmonia Imguarum, speciatim
humgaricœ cum hehrîoBà, Wittemberg, 1746, in-8*; Bere^
nazi. Sur la ressenhblance de la langue hongroise avec &s
îangues orientales, en allem., Leipâg, 1706; Gyarmathi,
AflUeitas linguœ hungaricœ cum Itnguis fennicœ originis,
GcBttingue, 1700, in-8o; F. Thomas, Conjectures de ori-
amœ, prima sede et linquà Hungarorum, Bude, 1806,
9 voL; Peringer, Sur la langue magyare, en allem.,
Vienne, 1833, in-e** ; Horvat, »ur les duUectes de la Bon-
grie, 1821 ; Fogarasi, Métaphysique de la langue Aon-
groise, en allem., Pesth, 1834; Benkovich, Sur VoriginM
des Bongrois et de leur langue, Presbourg, 1836.
H01I6B0CSB (Littérature). Dès le xi* siècle, la dvillsatioD
avait }eté, ches les Magyares, d'assez profondes racines
pour qu*nne Ûttérature nationale pût se développer. Mal-
oeureosement, à la suite de l'établissement du christia-
nisme en Hongrie, le latin fut substitué à la laagni
populaire pour Te culte, les procédures devant les triba*
naux, la rédaction des documents authentiquas et dH
actes légaux. Nous ne perlerons ni des écolea et sodétés
savantes, fondées et entretenues pendant plusieurs siècles
par la munificence des souverains; ni des chroniques
latines dont un grand nombre sont encore ensevelies en
manuscrit dans les archives, et dont beaucoup d'antret
ont péri au milieu des bouleversements politiques; ni daa
historiens Simon Von Réza,Calanus, Thomas Spalatensifl«
Rogerius, Jean de Kikellô, Laurent de Monacis, Bonfinioa,
Galeotus, Ranxanns, Tubéro, Vérandus, Ratkai, Sambn*
eus, Istvansi, etc.; ni des philosophes et mathémati*
dens Pierre de Dade, Boscovich, Segner, Ranch, Mko*
vinyi, etc.; ni des orateurs et des poètes, comme Janus
Pannonius, Zalkan, François Hunyade, Dobner, Pal-
lya, etc. Toute cette littérature, qui employait une Ungue
antipathique au génie national, resta le partage exdusif
d'une classe privilégiée.
La langue latine n'étouffa cependant pas complètement
l'idiome magyare, qui se conservait dans les rdations de
la vie commune, dans les camps, dans les fêtes dome^
tiques ou populaires, dans les assemblées politiques. On
a recueilli des fragments d'hymnes guerriers, de chants
populaires et de sermons en bongrois. Les annales de la
Hongrie parlent du Cantus jaculatorum et truffatorum,
La préface du décret de Goloman dans le Corpus juris
Bungaria porte qu'il a été traduit du hongrois, et on pré-
tend que la Bulle d'or d'André H existe encore en ori(dnal
dans cette langue. Ce ne fut toutefois qu'au xiv* siècle^
sous le p)uvemement des princes de la maison d'Ai^ou,
que la littérature nationale sortit pour quelque temps de
son état de proscription et prit un plus libre essor. On
rédigea en hongrois des actes pubhcs et des lettres < de
cette époque date la formule de serment en hongrois, <|ni
se lit encore dans le Corpus juris Bungaria. La Bibho-
thèoue impériale de Vienne possède un manuscrit de l'an
1382, renfermant une traduction de plusieurs livres de la
Bible, essai qui fut suivi de traductions complètes des
Saintes Écritures par Ladislas Bathori en 1450 et par
Bertalan en 1508. Dès 1465, Janus Pannonius composa
une Grammaire hongroise, qui ne nous est pas parvenue.
Avec le XVI* siècle s'ouvre une période plus favorable
pour la littérature hongroise : les mouvements politiques
et religieux donnent aux esprits une rive impulsion»
Bien que les princes de la maison de Habsbourg se soient
efforcés de faire prédominer l'allemand, ou, à son détent,
le latin, Ferdinand I*' doit s'engager solennellement, ea
1526, à respecter la langue et la nationalité des Magyares.
Pour instruire le peuple, dans son propre idiome, des
destinées de ses ancêtres, Szék^, Temesvéri, Heltd,
Bartha, Lisznyal, écrivent leur^ âironlgues bongrolseB.
Des traductions de la Bible sont publléiBs par KomJAti,
Pesd, Sylvestre, Juhész, Félegyhazi, Karolvl, Mdnér,
Kéldl, Komàrômi, Tôtfalusi. Des orateurs éloquents se
révèlent : Gaal, lÀvidis, Kultsàr, Bomemissa, Telegdl et
Detsi au xvi* siècle, Paiman, Ketskemeti, Zvonariti,
Koptsanyi, Margitai au xvu*. Dans la poéde sacrée se
distinguent Batfzi, Pétsi, UJfalri, Skaritzal, Fabridus,
Fazékas, Geld, Di\|ka, Megyed« etc. Jamais on ne com-
posa plus de chants destinés à rap^er les exploits des
héros natkMiaux, à raconter les vieilles histoiràs ou les
rieux contes : panni ceux qui brillèrent dans ce genre
de littérature, on dte, Gséti, Tinédi, Kikonyl, Tnnàdl,
Valkai, Tsàktomy, Tserényl, Szegedi, niesCalTi, Sztair,
Balassa, lUosvai, Verès, Enyedi, SzOllOd, etc. La poéne
épique prend ausd un prend essor avec le comte Niklas
Zrinyi, Ladislas Ussti, Christophe PiskO, le comte
Etienne Kohair, et Etienne de Gy5ngyOsi. Dans la poéde
Ivrique, Rimai et Benitxky se sont filt un nom cdèbce.
On publie une foule de Grammdres, de Dictionnaires et
d'autres ouvrages de philologie.
Cette littérature hongroise, d nleine de sève, d vi^Mh*
reuse dans ses développements, fut éioullée an xvm* d^
de par les winces autrichiens, parce que la langue
nadonde était conddérée comme la source des hérésies
et des révoltes, et le ladn rederint plus florissant que
lamds. Toutefois, le hongrois fut encore employé dans
la poésie parFaludi,Bessenyei, Paul Anyos, KAlmar. Bé-
rotd, Révd, etc. Biais les efforts de Joseph II pour aoolli
la Constitution hongroise et pour imposer l'allemand
comme langue des affaires publiques amenèrent une réa^
don dolente. En 1781 Mathieu Ràth publia le premier
loumd en langue hongroise. En 1700, après la mort de
Joseph n, la Diète hongroise rendit l'étude de cette
langue obligatoire dans les écoles^ et en prescrivit l'emploi
HON
1040
HOH
^buii tous les tctes pnblic&, politiqoes «t JudidalrM; des
théâtres hongrois s'ouvrirent à Ofen et à Pesth ; on fonda
des Revues purement littéraires. Cette nouvelle nériode,
qui commença à la fin du xviu* siècle, a été féconde.
fiant la poésie on remarque Joseph Rajinis, Gabriel
D^rka» Kasinczy, Verseghi, Csokonai, Virig, Jean Kis,
Bmienji, Kisfaludy, Paul Szemere, RAday, Szeutzobi,
K51esey, Witkovics, Szent-Miklosy, André Horv&th, Er-
délyl, kerényi, lâsznvai, Jean Arany, et surtout Giuzcor,
VOrOsmar^ et Petoeff. Parmi les prosateurs nous cite-
ions : le bsron Jésika, qui a pris pour modèle Walter
Scott dans ses romans; les romanciers Kuthy, Nagy,
PA]f^« Tompa, Dobsza; les historiens Etienne et Michel
Hormh, Ssalay, Jaszay; les géographes Fényes et Palu-
gyai ; les auteurs dramatiques Cœtvoes, Ohemyik, Gàl,
BÉaké, Ladislsa Teleki, Szigligeti.
V. WaUaszki, CofuptckM rBipMkœ lUUrarim in
Ungaria, Presbourg, 1785, hi-8*; BndrOdy, Histoire du
théâtre hongrois, Pesth, 1703, 3 vol. in-8* ; Gil, Théâtre
du Hongrois, Brann, 1820; Fanveri et Toldy, Manuel
de la poésie hongroiu, Pesth, 1828, 2 vol. in-8*; John
Bowring, Aperçu de la langue et de la littérature de la
Hongrie et de la Transylvanie, en anglais, Londr., 1830,
ln-8*; Stettner et Schedel, Manuel de la poésie hon-
groise, Vienne, 1836; Toldy, Histoire de la littérature
hongroise, 2* édit., Pesth, 1853, 3 vol.
HONGROYEURS. V. Hongbiburs.
HONNÊTE. Uhonnéte est pris ordinairement comme
monyme du devoir, psrce au'il a comme lui un carac-
tère obligpirtoire; mais il semble entrer encore plus déli-
catement dans tontes les nuances de la vie morale, et
d'aÛleurs nous avons le sentiment de Thonnète avant de
bien comprendre le devoir par la raison. Cependant, s'il
introduit en quelque sorte la loi morale Jusoue dans les
bienséances sociales, il subordonne, comme le devoir, la
passion et Hutérét à la loi universelle et absolue du Juste,
et, comme lui encore, il se distingue de VagréaMe qui
flatte la sensibilité, et de VutUe qui n*est qu'une affure
de calcul : il reste digne d'éloge, dit Gicéron, quand
mâme il ne rapportendt ni utilité, ni récompense, ni
profit. On s'accorde à reconnaître quatre sources de l'hon-
nête : la prudmce on la saqesse, verta nécessaire dans
l'ordre de Tintelligence; la justice, qui n'est qae l'hon-
BéCe considéré dans tontes les relations sociales \ la force
(m fermeté de caractère; la tempérance, qui comprend la
modération en toutotchose. R.
HONNEUR. Cest, dans le sens le plus rigoureux, ce
qoi porte l'homme à conformer sa conduite à Vhonnéte,
oe qui lui mérite l'estime et parfois l'admiration de ses
seoiolables, <piand il fait ce qui est moralement beau.
L'honneur, amsi entendu , est un principe d'action qui
porte à fidre ce qui distingue, ce qui ennoblit, ce qtd orne
la vie. Il suppose le respect de soi-même, la décence et la
loyauté dans les restions. De là résulte un second sens
dn mot honneur, qui est la considération, la bonne répu-
tation; reflet prend le nom de la cause. Ce dernier sens
est le plus commun, et, par suite, Thonneur dépend en
partie de Topinion, qid peut le dénaturer. De là ce qu'on
appelle le potfit d'honnsur, qui pousse quelquefois à faire
ce que défend la loi morale. L'honneur alors n'?st plus
que le respect humain , mal compris. — Honnjîirs, di-
ffnités, se distinguent de Vhonnmir : « On peut être à la
fois couvert d'infamie et de dignités », dit Montesquieu.
Dans certains jeux, tels que le whist, le boston , les
honneurs sont les figures et les as. — On appelle encore
honneurs certains présents qui se font au sacre des rois et
des prélats, comme,' en France, un vase de vermeil , un
pain d'or ou d'argent, des médailles d'or. R.
Homonm, dieu allégorique. ( Y, notre Dict, de
HomiBiJa (Chevaliers, Dames d'). ( Biogr, et d'Hist,
HONNBua (Légion d'). V, Légion.
HONORAIIŒS, mot qui s'emplovait Jadis pour dési-
gner les traitements des fonctionnaires d'un ordre élevé,
et qui ne désipe plus que la rétribution due aux services
et aux soins des personnes qui exercent certaines profes-
dons libérales, par exemple les médecins et les avocats.
HONORAT (La Vie de S<), poôme provençal où l'his-
lohra du saint est rattachée à toutes les traditions de
l'épopée cariovingienne. Cet ouvrage est surtout curieux
parce qu'il fait connaître on grand nombre de romans an-
Joard'hoi perdus. Il fut composé vers la fin dn xm* siècle
par Ramond Feraud, moine de Lérins. Il existe manus-
crit àla RIbliothèque nationale de Paris. V. Histoire lit-
téraire de la France, tome XXII; Sardou , la Vida de
Sont Honorât, analyse et morceaux choisis, avec la tra-
duction, Paris, 1858, gr. in-8». H. D.
HONVEDS, c-èrd. en hongrois défenseurs du 9ay%,
nom qu'on donnait fadis en Hongrie aux soldats indi-
gènes, et plus tard à toute l'armée.
HOPITAL. l V, ces mots dans notre Dictionnaire
HOQUETON. { de Biographie et d'Histoire.
HORATIA (i^lonne). F. Coijonhbs monoveiitales, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire^ page 634,
col. 1.
HORION, casque. V. notre Dictionnaire de Biographie
et d^Histoire.
HORLOGE, instrument propre à mesurer la marche du
temps. Les peuples de l'antimiité n'ont employé à cet
usage que les sabliers, les caonns solaires et les clep-
sydros. On arriva, vers l'époque du Ras-Empire, à ob-
tenir des horloges d*eau à mouvement continu; c'étai
une horloge de ce genre que le calife Haroun-al-Raschid
envoya en présent à Chariemagne. L'horloge exécutée
au a* siècle par Pacifions, archimacre de Vérone, et qui
marquait les heures, le quantième du mois, les Jours de
la semaine, le lever et le coucher du soleil, les signes du
zodiaque, etc., était mue également par une force hy-
dreuliaue. Ce fut au x* siècle que les norioees purement
mécaniques furent inventées, et l'on a attribué cette dé-
couverte à Gerbert (le pape Sylvestre II). Le rouage de
la sonnerie parut au xn* siècle : on en trouve la première
mention dans les Usages de l'ordre de Citeaux^ compilés
vers 1120. Au commencement du xiv« siècle, on com-
mença de fidre des horloges monumentales en Allemagne
et en Italie. Celle qui fut placée en 1344 sur la tour da
palads de Padoue émerveilla les contemporains à un tel
point, que l'auteur, Jacques de Dondi, reçut le surnom
de Horologius, porta aussi par ses descendants. Un Alle-
mand, Henri de Vie, attiré à Paris par Charles V, fit
l'horloge de la tour du Palais de Justice, où l'on trouvait
déjà les principes de l'horlogerie moderne, un poids
pour moteur, une pièce oscillante pour régulateur, et
l'échappement. Cette horloge, dont le cadran fut décoré
par G^main Pilon au xvi* siècle, subit diverses modi-
fications Jusqu'au xvni*, époque où elle fut détruite. Une
autre honose fut faite vera 1380 par Jean Jouvence pour
le château de Montargis. On fit d'assez bonne heure des
horioges très-compliquées : tantôt c'étaient des carillons
qui indiquaient le temps, tantôt des personnages méca-
niques qui venaient jouer des scènes à certains moments.
Celle que Pierre de Chalus, abbé de Cluny, fit placer
dans son église vers le milieu du xiv* siècle, portait un
calendrier pei^iétuel, indiquant l'année, le mois, la se-
maine, le Jour et les minutes, et un calendrier ecclésias-
tique indiquant les fêtes et les ofiîces de chaque jour,
les positions, oppositions et conjonctions des astres, les
phases de la lune, etc.; chaque Jour, dans une niche su-
périeure , se présentaient des personnages mécaniques
Jouant une scène religieuse ; les heures étaient annoncées
par un coq qui battait de l'aile et chantait deux fois ; au
même moment un Ange ouvrait une porte et saluait la
S^* Vierge, le S^ Esprit descendait sur sa tête en forme
de colombe, le Père étemel la bénissait; un carillon har-
monique se faisait entendre ; on voyait s'agiter des ani-
maux fantastiques qui remuaient la langue et les yeux,
et tout disparaissait à la fois après l'heure sonnée. Près-
3ue toutes les églises et les benrois finirent par posséder
es horloges plus ou moins curieuses ; on cite particulière-
ment celle de Courtrai, transportée à Dijon par ordre du
duc Philippe le Hardi (F. Jacqueuast), celles de Lyon,
de Caen, de Ulle, de Metz, d'Auxerre, de Sens, de la Sa-
raaritidne à Paris, du ch&teau d'Anet (V, ce mot)^ de
Moulins, de Eesançon, etc. On voit encore à Berne une
ancienne horloge à jeu mécanique, œuvre de Gaspard
Bruner : à toutes les heures, un coq chante, un fou frappe
sur deux cloches avec de petits marteaux; un personnage
assis sur un trône ouvre une large bouche, et baisse d'une
main un sablier, de l'autre un sceptre, autant de fois que
les marteaux frappent; devant lui défilent de petits ours,
les uns à quatre pattes, les a»tres à cheval ou debout,
quelques-uns couronnés, ou cuirassés et armés. L'I^or-
loge actuelle de la cathédrale de Strasbourg [V,ce mot) \
ne date que de 1842. Aujourd'hui on ne s'attache pins '
aux horloges monumentales à pièces mécaniques; on \
fait encore des horloges mécaniques sous forme de ta- j
bleaux pour l'ornement des appartements. V. Berthoud , ^
Histoire de la mesure du temps par les horloges, Paris,
1802, 2 vol. in-4»; P. Dubois, Histoire et traité de Vhor-
logerie, Paris, 1850, in-4®.
HOIlLOGERSy ancienne corporation, oui avait pour
Îatron S' Éloi. Les statuts qu'elle reçut ae Louis XI en
483 furent confirmés par François P', Henri H, Cha^
HOT 1011
HUD
hi a, Henri IV et Louis XIV. L'apprentlnage était de
San ! le brevet coûtait 54 UTrea, et la maltiiae 900 li-
Ttei. Un airftt da Conseil, en date du 8 mai 1043, aitrei-
Kirit toi horlogers à mettre leur nom aux boites de
DMmtni qnMls Tendraient.
HOmi, chanson de geste qui est le développement
(fane ancienne ballade qu*on chante encore en Ecosse.
Hora est aimé de Rimel, fille du roi; fl est exilé ; mais,
Btiot de partir, il fait promettre à sa fiancée de lui être
lldte pendant sept ans. Ce temps écoulé, il se prtente,
dégoiaé en mendiant , dans la salle du festin on Ton cé-
lénait les noces de lUmel avec un roi. La ienne fille le
reconnaît, et quitte son royal époux pour suivre le men-
diaot; mais Hom était un vaillant chevalier, et RÎmel ,
en partageant son sort, monte bientôt sur un trône. —
Cette ct5mson est conservée dans trois manuaaits qui
appartiennent an Musée britannioue, à la bibliothèque
d'ôiford et "h celle de runiversHé oe Cambridge. M. IVan-
dwpe Uichel a donné à Paris, en 1845, un volume sous
ce titre : Hom H RimenhUd , recueil de ce qui reste des
poèmes relatifo à leurs aventurée, composés en français,
ca an^tais et en écossais, dans k» xm% xnr*, xv* et
m* sKclea, publié d'après les manuscrits à» Londres, de
Giabridge, d'Oxford et d'Edimbourg. Gee morceaux sont,
outre le poicme franods : Thê geste of kyng Bom: Hom
dMê amd maîdefi RmnMj YoungHunhom»; Bynd»'
hom; BUttbrahmUi BadtArani. V. BûUrin littMtre
de la Fnmc€, tome xxn. H. D.
HOROLOGION, livre de chant de rÉ^Hse grecque,
renfermant les Heures (Prime, Tierce, SextÎB et None;.
HORS DE COUR, en termes de Jurisprudence, Juge-
ment qui renvoie les parties parce qu'il n^ a pas siget de
Halder.
HORS-D'OEDVRE, en Architecture, tout ee oui ne Ikit
ponit partie de rordonnance générale ; — en Littérature,
tout ce qui aemble ajouté apri» coup dana un ouvrage, et
peut en être retranché sans nuire à l'ensemble.
HOSANNA , mot dérivé de l'hébreu, où il signifie San^
ses, J0 vous yrts, et qui est une formule de bénédiction
et dlieareox souhait. Les Juifs appelaient Bosawna les
prières ira*i]s récitaient le 7* Jour oe la ftte des Tid>er-
asdes, ûnA que les branches de feuillace qu'ils sciaient
Mdant cette fête; la fête elle-même était dite GramA-
ïotamia. — Dana la Lituri^e catholique, une hymne du
Jeer dea Rameaux a été appelée ffosaniui, parce qu'elle
CMunence par ce mot*
HOSPICE. \
l^mAUrtf • ( î^. ces mets dans notre DfcHo».
BOSPinDM.
HOSPODAR.
HUS'nE. Ce mot* qui avait un sens particulier pour \
Im Anciens (7. notre Dictionfiotre de Biograiphis et éTBis i
trir§)^ dé^gne chei les chrétiens JésusH3irist, qui s'er . ^
iauBolé pour les hommes comme une victime {en latf . .
Aostio), et le p«dn desdné au sacrifice eucharistioue.
H06TnjrnUM. Cétait, an temps des Carlovingiens,
prestation de gfaerre consistant en bosufii et en cha-
fwtrs de Biogn^hk ot d^Bistoire,
nrSSSTnnm l F. notre Diottomiatrs de i^îogra-
H0ÎarD??iLLB,î Phie^d:BistoirB.
HOTEL GARNI , maison meublée, tenue par une per-
mme patentée, qui loue chaooe chambre au Jour on au
Doio. I/hMéi garni a remplacé l'AdteUerte et Vauberge, et
est eomnis aux mêmes règlements. F. Aobergistb.
HOTTE, partie du tuyau d'une cheminée de cuisine
on de taJxM^koire, et Jadb de certains grands apparte-
menta, qui commence ao-deeaos et en retrait du man»
teaiiy mais en saillie sur le mur de Pappartement, et qui
monte en alnclinanten airière Jusqu'au plafond.
HOTTENTOTB (Langue des), une des langues de
rAMqoe. Elle a pirar caractère distinctif une sorte de
doqnement anslogne au petit bruit qui nous est familier
iaaa ui oecès d'impatience, ou à celui oue nous produi-
•one poor ùàn partir un elieval on accélérer ea marche,
et «lof précède immédiatement la prononciation de la plu-
part des mots et des syllabea. « Quand une demi-dou-*
saine de Botlenlols, dit Thunberg, parient ensemble, on
croirait entendre caqueter dos oies. » La Isngue des Hot-
aentots a de fortes aspirationa, dans lesquelles on entend
prédominer des dipnthongues prolongées et ouvertes,
tdlesqœ 00, ooii,aaM, «m. Les lettres i,f, v, «d man-
quent , afaisl que les sUBsntes; le d et le g, le 6 et le d se
eoofendent souvent. Le hottentot est une langue d'affilu-
11 ne possède ni article, ni pronom relatfi!| ni
déclinaisons, ni conjugaisons, ni jethm aadHaireB, el H
fant avoir égard, pour y auppléer, au sens de la phrase,
à l'etpreesion de la physionomie, à llntonation et aux
gestes. Les substantin ont deux genres an singulier, et
trois au pluriel ; le 3* a une valeur collective. Dans les
pronoms, la distinction dee genres s'^nd aux trois per<
sonnes, msis le neutre n'existe que pour le singulier.
L'adiectif ne prend la marque ni du oenre, ni du nombre.
On distingue quatre dialectes dans u Isngue hottentote,
le hottentot proprement dit, le dialecte dM Boschimans,
ceux des Namaquas et des Koranas.
HOUARI (de l'anc^aîs wherry), bâthnent de esbotsge-
àdeux mâts portant deux voiles. Des votlev sont dites
en houari , quand ce sont des voiles triangulaires dont la
ralingue (cordage cousu à l'entour) est élevée psr sa
v^gue au-dessus du màt.
HOUPELANDE on HOUPPELANDE, nom donné au
XV* siècle à une sorte de robe de chambre, garnie de •
manches traînant à terre, fendue par devant, assujettie <
au cou par un collet droit et montant, et serrée à la
taille par une ceinture. Après la Révolution fhmçaise,
on rappliqua à un vêtement laige qu'on porta par-dessus
l'habit pour dissimuler la carma^ole; pendiint l'hiver
on en fit une redingote loncue, garnie et nordée de four-
rures ou de velouTi. L'armée portait depuis longtemps de
longs manteaux ou cabans qu'on appelait ansn houppe-
landes. La douillette, qui fut, au commencement du xn*
siècle, le vêtement de dessus des magittrata, dea méde-
cins et autres personnsges graves, était une sorte de
houppelande I elle n'est plus portée que nar certains
ecclésiastiques. Le nom de houppelande viendrait, dit-
on, de ce que ce vêtement aurait été importé de llJpland :
mais il est bien peu probable qu'une province de la Suède
ait Jamais influé sur les modes de rEurope occidentale.
Avant que nous eussions la houppelande, les Italiens se
servaient d'un vêtement appelé pelando; les mots tl ps-
lando sont devenus, ches les Provençaux, lou peland,
HOURD ou HURDEL, vieux mot désignant une galerie
de bois couverte, posée en encorbellement sur un rempart
et servant de chemin de ronde. Lea hourds s'appelaient
corseras dana le Languedoc.
HOURDIS, rempHuage de cloison de charpente fait
avec dea briqnetons et du plâtre. On se sert aussi du
hourdis pour garnir l'intervalle des solives d'un plancher.
HOURQUE, en anglais howker, bâtiment de transport
en usage dans le Nord, et prindpalement en Hollande.
La hoorque a le fond plat, ravant et l'arrière arrondis,
un màt au centre avec une grande voile et un hunier, un
nuire mftt à l'arrière avec une vdle carrée. Elle navigua
fort mal.
HOUSEAUX on HOUSES (de l'allemand hosen, haut*
de-cbausses), sortes de bottes destinées à garantir les
Jambes contre la plaie et la boue.
HOUSSE, convertore qui se met sar la croupe des che-
vaux de selle; — recouvrement en étoflé d'un fauteuU
on de tout autre menble.
HOUSSETTE, dans le Blason^ meuble représentent nne
bottine autrefois en usage pumi les gens de guerre.
HRADSCHIN. V. Psagob.
HUAGAS. V. GoACAS.
HUASTÈQUE (Idiome). F. MEXiCAniBS ( Langues }•
RUCHERS ou HUCHIER8, ancienne corporation d'ou-
vriera qui fabriquaient lea huches, carnée et bahuts.
Comme ces meubles étaient ornés de sculptures, le hu-
chier était le aculpteur en bols. Au temps de Louis IX,
les huchiers étaient compris dans la corporation des
chsipentiers, sous le nom de cAarpenttsrs de la petitt
cognée,
HUCHET, petite trompe de chasse qui sert à appelé,
les chiens.
HUDIBRA8, poème comique anglais, en 9 chants et ea
vers rimes de 8 syllabes, composé par Samuel Rutler. et
Éublié en 4663. Le vAet est fort simple : le presbvtérien
[udibras. Juge de pux et militaire, veut empêcher un
combat d'ours et de chiens, et fait arrêter panni lea ré-;
caldtranta un ménétrier boiteux; mais la populace se.
soulève, délivre le prisonnier, et met le Juge à sa place.
Cest nne satire contre les puritains et lea andena parti-
aans de la République, écrite par un auteur rosraliste et
attaché à la refi|^on anglicane : aussi le parti des Stuarta
l'accueillit-il avec enthousiaame, et la cour de Gharlea II
éleva le nom de Entier bien au-dessus de celui de Mil-
ton. La gloire de TBudUtras ae soutint Jusqu'au mlliea
du xvm* siècle; le IK Johnson, Jacobite passionné, con-
sidérait ce poème comme l'un des monuments de la lit-
térature an^se, et, quand Voltaire ajourna en Angle-
■UI
104»
Hurv
m», oetteofinioD était gônénlement admlie. n éerlwt,
«n 1734 : « C'est Don Quichotte, c'est taotre Satvr0 Mé-
niippéê fondus ensemble. C'est, de tous les livres <pe i'ai
{smais lus, celui où j'ai trouTé le plus d'esprit; mais c est
aussi le plus intraduisible.^ Presque tout y fait allusion à
des aventures particulières. Le plus g;rand ridicule tombe
surtout sur des théologiens, que peu de gens du monde
entendent. Il ùuidrait a tout moment un commentaire, et
la plaisanterie expliquée cesse d'fttre plaisanterie. Tout
I conmientateur de bons mots est on sot. » At^ourd'hui
ou'on ne se passionne plus pour Cromwell ou pour les
' Dtuarta^ et ^ue les sectes religieuses troublent peu la
paiXy lea critiques ne professent plus que de l'estime pour
le pofime de Butler : l'esprit de cet auteur perd son effet
par l'obscurité des allusions. Voltaire a traduit ou plutôt
imité le début du l*' chant de VHudibras. En 1757, un
officier anglais an service de la France, J. Townley, tra-
duisit en vers français, avec force notes explicatives,
l'ouvrage tout entier, et on y a Joint, dans l'édition de
1819, une Clef, qui est elle-même de médiocre ressource.
Hogarth a composé une série de dessins spirituels, pour
illustrer VUudibroM*
. HOEHUETL, instrument de musique des anciens Mexi-
cains. Cétait un cylindre de bois, d'un mètre de hauteur,
sculpté et peint sur les côtés, et couvert d'une peau de
daim bien tendue, sur laquelle on frappait avec les
doigts.
HUÉLINE et ÉGLÂNTINE. V. JucnBirr d'amous (Le).
HUESCA (Cathédrale de), en Espagne, dans Tancien
royaume d'Aragon. Cette ^lise, bâtie dans la partie la
plus élevée de la ville, sur Tun des côtés d'une vaste place
rectangulaire, est en style ogival du xm* et du xiv* siècle.
Sa façade principale est flanquée d'un clocher octogone à
lourde base carrée; la grande porte présente sept vous-
sures remplies de statuettes, et dont le bas est occupé
par de belles statues d'apôtres et de martyrs, plus grandes
que nature, et qu'on recouvre de riches vêtements à cer-
taines'fêtes. Le milieu du fh>nton est occupé par une
rosace à Jour. L'étage supérieur de cette façade est ré-
tréci, et garni, à ses extrémités, de tourelles cannelées,
sans style et sans élégance. L'intérieur de l'église, en
forme de croix latine, offre une belle nef centrale, d'une
grande élévation ; mais les collatéraux sont bas, étroits et
sombres. Le maître -autel, tout en albfttre, est un ma-
gnifique travail : Damien Florent y a sculpté, de 1.5SM) à
1553, la Passion de J. C.
H l GUES CAPET (Poème de). F. Capbt, au Suftplém*
HUILE (Peinture à V). On a longtemps atoibué à
Jean Van Eyck la découverte de la peinture i Thulle, et
l'oD ttfflrmâit môme que c'était en 1410 que cet artiste
avait imafriné de dissoudre les couleurs dans de rhuile de
noix ou de lin. Bien qu'il soit constant que les Romsins
se servuieut de la peinture à i'buile pour de grossiers ou-
vrages de décoration, rien n'établit nettement qu'ils l'aient
employée à exécuter de véritables tableaux, ainsi que l'a
prétendu le comte de Caylus. Qe qui est plus certain,
c'est que la peinture à l'huile est décrite dans l'ouvrage
Diversarum arthun sckedula do moine Théophile, qui
vivait, selon les uns au x* ou xi* siècle, selon les autres
au xin*; cet auteur fait remarquer que l'huile est lente à
sécher, et cet inconvénient a peut-être empêché les ar-
tistes du moyen &ge d'en faire usage. On a retrouvé,
d'ailleurs, plusieurs peintures à l'huile antârieures à Van
l^ck, et l'on sait que, dès 1355, Jean Costa peignait à
l'huile en France. Van Eyck a seulement imaginé de faire
cuire les huiles ordinaires et d'y mêler une substance ré-
■ioeuse, afin qu'elles séchassent plus rapidement. Ses
procédés furent surpris par Antonello de Messine, por-
la découverte de la peinture à l' huile ^ Gœuingue, 1792,
in-4°. B.
HUILES (Saintes), nom donné, \^ dans l'Église catho-
lique, au saint chréne ( K. ce tnol), à VhuHe des catéchu-
mènes (F. ce mot), et à VhuUe des malades employée
pour l'extréme-onction; ^ dans TÉglise grecque, à l'ex-
^me-onction elle-même.
HUIS, vieux mot signifiant porte. En matière judi-
ciaire, on dit qu'une affaire est Jugée à huis clos, lorsque
le public n'est pas admis aux débats. Il en était ainsi jadis
ievant les Cours prévôtales, les Chambres ardentes, et
Sur les Juoementa au criminel : aujourd'hui que la pu-
dté des débats est un principe admis, les tribunaux ne
peuvent ordonner le huis-clos que si les débats peuvent
tnt rainer du scandale ou de g^vea ipconvénienta pour
l'ordre et lea bonnea moBors {Code de Proeéd.^ art. 87) t
le Jugement n'en doit paa moins être prononcé pubU*
quement.
HUISSERIE, ensemble des poteaux et de U travena
dé menuiserie qui forment la baie d'une porte.
HUISSIER, i K. ces mots dans notre Dictionnaére de
UULANS. S Biographie et ^Histoire.
HUMANITÉS (du latin humanus, poli), mot par lequel
on déaigne la partie de l'éducation universitaire qui
s'étend de la classe de troisième h la rhétorique, et du-
nunt laquelle, avec une étude plus iqiprofondie du grec et
du latin, on se livre à la littérature et à l'histoire, con-
naissances qui font l'homme, oui développent et forti-
fient le plus pniisamment ses facultés intellectneUea et
morales.
HUMOUR, mot emprunté à la langue anghdse pour
désirer une noanoe ds caractère, one toumuro d'esprit
particulière aux Anglais, et qui se reflète dana certaines
de leurs oanvres littéraires. Il est asseï difficile de définir
l'^tmiotir : tantôt c'est quelque chose d'analogue à ce que
nous nommons la fantaisie^ tantôt c'est une mélancolie
souriante, plus railleuse que pensive, ou bien encore la
verve satkique, ou enfin une sorte de gaieté flegmatique,
qui se sent plus qu'elle ne se voit , et qui ne r^ouit rea-
prit que Jusqu'au sourire. On trouve Vhumour sous
toutes ses formes et à tous les degrés ches Sterne, Swift,
Butier, lord Byron , Walter Scott, Lamb et Dickena. Lea
Allemands ont eu aussi quelques humoristes, conune
Jean-Paul Richter et Henri Heine.
HUNE , nom donné autrefois à la gabie ou cage placée
au Ëoaunel des m&ts des navirea, et où l'on mettait en
vigie un homme, qui en reçut le nom de gabier, Dana les
temps modernes, on a modifié la forme des hunes; ce
sont des plates-formea solides et épaisses, mil servent à
relier le b-is mftt au second m&t ou mât de nune, et qui
en même lemps font l'office d'an»-boutanta autour dea-
quels les haubana viennent se roidir. Le m&t de hune
porte une voile carrée dite hunier, et qui s'attache à la
naase vergue, nommée pour cette raison ttergue de hune.
Le hunier se partage en plusieurs bandes horizontales
qu'on nomme ris, et qui, au moyen de garcettes, peuvent
se replier sur la vergue pour mminucr la toile au vent.
Le hunier du grand m&t est le grand hunier; celui du
m&t de misaine, le petit hunier; le ^imtsr d^artûnon a
reçu le nom de perroquet de fougue. Les hunes, dans les
combats natals, se couvrent de gabiers armés de fusils,
de tremblons, etc., dont les feux plongeante aont d'un
terrible effet.
HUON DE BORDEAL^ , Chanson de geste qui fait
partie des romans cariovingiena ( V» os mot). Elle a été
composée par un trouvère dont on ne connaît ni le nom
ni le pays, vers la fin du xii* siècle ou le commencement
dn xw*, à une époque où la veine héroïque commençait
& s'épuiser, où les contes bretons s'emparaient de la fa-
veur Jusque-là réaervée aux œuvrea françaises, et où les
poèmes d'aventures allaient remplacer lea poèmes dits
ulstoriques ou Chansons de geste. En voici le sujet.
Huon et Gérard, fils de Séguin, duc de Bordeaux, sont
accusés auprès de Charlemagne par Amanir de la Tour
de Rivier, qui convoite leurs donoaines, de vouloir se
soustndre à l'hommage. Mandés à la cour, ils sont traî-
treusement assaillis en chemin par Amaury, qui s'est fait
un complice de Chariot, fils de l'empereur : Chariot blesse
grièvement Gérard, mais est tué par Huon. Celui-d
n'échappe à la mort, dont Charlemagne le menace, que
sur les prières de son oncle le duc Naimes : mais il doit
accepter comme ch&timent une mission lointaine et pé-
rilleuse. Alors se déroule une série d'aventures dont le
héros ne serait pas sorti par sa seule valeur, et où il doit
ses succès à l'appui du nain Oberon, roi de Féerie. Ré>
concilié enfin aFoc l'empereur, il recouvre son fief. L'au-
teur de Huon de Bordeaux a donc pris un sujet ou tout
au moins un cadre carlovingien; U a donné à son poème
la forme consacrée de la Chanson de geste, c-à-d. le
mètre de 10 syllabes et les couplets monorimes, mais a
fait de son héros un chercheur d'aventures, et intxt>dult
dans son cBuvre le merveilleux féerique. Un savant alle-
mand, M. Ferdinand Wolf , a pensé qu'il avait existé un
poème plua ancien, dont celuM ne serait qu'on rema-
niement; mais aucun argument sans réplique n'appuie
sa coi^ectnre. Buon de Bordeaux est jin des meilleurs
romans de chevalerie oue nous possédions, et on peut le
préférer an poème allemand que Wieland en tara au
XVIII* siècle. Certains critiques considèrent le personnsge
d'Oberon ou Auberon comme un emprunt fait par le
trouvère français à la Germanie: il ne serait autre qua
HTB
1042
HTM
fAIbeifch des Nûbdungên, du fféldenbuch, da poëme
d* OAitf, etc. M. de La ViUemanpié lui attriboe, ao con-
tndn^ une origine celtique, et Tidentifle avec on penon*
oa^ de la féerie bretonne, Gwyn-Araun. Dans tous les
cas, Tsuteur de Buon de Bordeaux a beaucoup ajouté de
ion fonds à rinveDtion allemande ou celtique. Ce pofime
s été continué, refondu, rajeuni plusieurs fois dans les
âèdes sttiTaots : aa xrr* siècle déjà, il s*était accru d*une
suite, qui le portait de 10,0CO vers à près de 30,000, et
d'une espèce de prologue intitulé le homan ffAuberon,
Dus les manuscrits du xv* siècle, on loi trouve une suite
différente, on bien la forme du roman entier est rema-
niée, Talexandrin ayant remplacé le vers de 10 syllabes.
En 1454, on en fit une version en prose, imprimée pour
is première fois en 1516, puis fréquemment reproduite.
Uoe reouète adressée au parlement, en 1557, montre que
Swm Je Bordeaux fut aussi transformé en une pièce de
tMItre ; elle n'est point parvenue jusqu'à nous. Le poème
Jouit aussi d'une gp:iuide faveur à l'étranger : il y en eut
deux fersions nârlandaises en vers; Tune, dont il ne
nateque des fragments, est de la fin du xiv* siècle ou du
coiBfflencement da xv*i l'autre a été imprimée à Anvers
dans la première moitié do xvi*. Vers le même temps,
parut sussl en Angleterre une traduction en prose de
notre Chanson de geste, par sir John Bourchier, lord
Bernera. Oberon figure dans le drame de Jacques IV par
Robert Greene; Spenser, dans sa Reine des fées, lui fait
Qoe généalogie; Shakspeare lui a donné un rOle dans le
Son0« d'tiiw nuit d'èU, à l'époque où Ton jouait encore
en Angleterre on drame de Huon de Bomeaux; enfin
Ben Johnson, et , en notre sitele, Sotheby, l'ont mis en
leène dans ces pièces de fantaisie que les Anglais nom-
oeot masque. En Allemagne, Wieland prit le sujet de
ion poëme d'Obertm dans l'analyse que M. de Tressan
avait faite de Huon de Bordeaux pour la Bibliothèque
ia romains; il inspira à son tour l'opéra d'Oberon par
Weber, œuvre gai date de 1826, et qu'on n'a jouée à
Paris qu'en 1857. lies manuscrits du poème français de
Hwm de BordeauoD sont an nombre de quatre: il y en a
deux à la Bibliothèque nationale de I^ns, tous deux du
n* siècle, et dont l'un , aux armes de Richelieu, est en
len de 10 syllabes, et l'autre en alexandrins ; le 3*, à la
bMothèque de l'université de Turin, est du xiv* siècle;
le 4% provenant de l'abbaye de Mamioutier et conservé à
la bibliothèque de Tours, date du xiii* siècle, et est en
dialecte artésien. Ils ont serri à la publication de l'édition
dmnée dans la collection des Anciens poètes de la France
par HM. Guessard et Grandmnison, Paris, 1860, in-16. B.
HOQOE, vêtement d'homme au xiv« et au xv« siècle.
Cétait une blouse courte, sans ceinture, sans manches,
OQ arec manches larges qui ne descendaient pas plus bas
que le coude. Bile servait également de pardessus d'été
OQ de cotte d'annes.
HUBDBL. r. Honm.
HUKON (Idiome), un des idiomes iroquois. U n'a pas
les sons correspondants aux lettres b, p, f, m, s, «, u. g
et r de Talphaoet français, et est rempli d'aspirations et
de sons guttoreux. Selon le P. Gharlevoix, le huron est
remarquable autant par la richesse des expressions et la
variété des tours, que par la propriété des termes et par
sa grande régularité. Les verbes simples y ont une douole
ooi^agaiaon, l'nne absolue, l'autre réciproque. Les verbes
actifs ae multiplient autant de fois qu'il y a de choses
tombant sous leur action : par exemple, le verbe qui
«nrespood à manger varie autant de fois qu'il v a de
choses eomestlblea. L'action s'exprime autrement à l'égard
d^ine personne et d*nne chose : ainsi, wiir un homme et
enrnne pierre, ce sont deux verbes. Se servir d'un objet
Appartenant à celui qui s'en sert on à celui à qui Von
perle, s'exprime également par deux verbes différents. On
a poblié deux petits Dictionnaires, une Grammaire et un
Catéchisme de cette langue, dont le système de numéra-
tion est semblable au nôtre.
HUSSARDS. V» notre Dtcttofinatre de Biographie et
^Histoire.
HUSTINGS. V. notre Diet. de Biogr. ef d'Histoire,
HOTTE. V. Babaque.
HYACINTHE, pierre précieuse dont la teinte bleue
Approche de celle d*un ciel serein. Dans la Symbolique
chrétienne, elle signifie la prudence qui tempère le zèle
vdent, U sérénité de la conscience, la paix, le désir des
choses du ciel. On en fait limage de S^Paul.
HTALOGRAPHIE. V. au Supplément,
HYBRIDE, nom par leouel on désigne, en Grammaire,
ha mots composés dont les éléments sont empruntés à
^tta laognw difléientes; tels sont, en français choléro'
morbus, bigamie, btireaucrati», antisoorîmUque , oloi
Cette méthode de composition est vicieuse; néanmoins
l'usage a consacré un grand nombre de moia semblablea.
HYDRAULE. K. Orgob.
HYDRAULIQUE (Architecture). F. ABCHtiscnraB»
HYDROCÊRAMES (du grec udâr, eau, et kéramot,
terre à potier), vases fidts avec une urgile poreuse , et
dans lesquels on met l'eau ou tout autre liquide qu'on
veut rafraîchir. Tels sont les atcaraxas d'Espagne.
HYDROGRAPHES (In^nieurs). F. notre D^ûmnotr»
de Biographie et d'Histoire,
HYDROGRAPHIE, partie de la Géographie physlmw
où l'on étudie les parties on éléments Uquides ou globe.
Dans son domaine rentrent toutes les recherches relatives
tant aux eaux douces qu'aux eanx salées ; pour les pre-
mières, la précipitation des vapeurs atmosphériques qui
se condensent en glaciers sur les hautes montagnes on
se résolvent en pluie dans les plaines, l'examen des
sources apparentes ou souterraines, le régime des lacs et
des fleuves avec tous les accidents qui les caractérisent;
pour les secondes, leur répartition sur le g^obe et leurs
grandes divisions, avec tous les phénomènes qu'elles pré-
sentent, différence de salure et de température, ban-
quises, marées, courants. Cette dernière partie, que l'on
peut appeler, pour la distinguer de la première, fcy-
drographie maritime, a fait, depuis le commencement
de notre siècle , d'immenses progrès , dus anx grands
voyages maritimes, aux nombreuses opérations de son-
dages faites pour la pose des câbles électriques sous-m»*
rins dans l'Océan et la Méditerranée, enfin aux belles re-
cherches de l'américain Maury, qui, par l'étude attentive
des vents et des courants, a fait connaître an commerce
les routes les plus abrégées et les pins sûres de la navi-
gation. L'hydrographie maritime forme une branche im-
portante des connaissances navales, et elle est enseignée
dans des Êcdes dPhydrographiê, établies dans nos prin-
cipaux ports. C P.
HYDROGRAPHIE (Écolos d'). V, ÉcoLBS, dsHs Hotre Dùy
tUmnaire de Biographie et d'Histoire, page 877, col. 2.
HYGIÈNE PUBUQUB (Conseil d'i. V. Conseil, dans
notre Dictionnaire de Biographie et t Histoire, page 656,
col. 1.
HYLOZOISME (du grec ulé, matière, et xôi, vie), forme
générale des systèmes qui regardent comme nécessaire-
ment unies la mnti^re et la vie. L'hvlosolsme prit diffé-
rentes formes, selon qne l'on croyait que le monde était
le résultat d'agrégats matériels, d'atomes animés et vi-
vants^ comme Strabon de Lampsaque, ou que l'oti voyait
en lui un seul et même être, un animal, dont l'âme du
monde était la vie* comme le pensaient les Stoïciens. En
général, tout système qui suppose cette ftme du monde,
sous quelque nom que ce soli tombe dans rhvlozolsme ;
c'est ce qu'on voit depuis les Stoïciens jusqu'à Spinoza.
Pour tous la réponse est la même : la vie proprement
dite ne se montre que dans l'organisme, et celui-ci ne
se voit pas dans toutes les parties de la matière ; d'où il
suit (lue la matière et la vie ne sont pas essentielles
l'une a l'autre. R.
HYMÉE. V. Chanson.
HYMÉNÉE. V. ce mot dans notre Dictumnaire de
Biographie et ^Histoire,
H YMNAIRE, Uvre de chant contenant des hymnes.
HYMNE (du grec umnos)^ louange en vers adressée à
la Divinité. Les premiers hjrmnes eurent un caractère
exclusivement religieux. Ceux d'Orphée étaient célèbres
dans l'antiquité, niais on n'en a rien conservé. Les
Chants des Saliens et le Chant arval, à Rome, étaient
des hymnes. Chez les Hébreux, les Cantiques de Mofse
et de Débon sont aussi de vérit2id>les hymnes. Les hymneC
qui nous sont arrivés sous le nom d'Homère ne sont déjà
plus exclusivement religieux : on y développe les aven-
tures des dieux et des déesses de l'Olympe. Chef Pln-
dare et Callimaque, ils prennent encore un carartère
littéraire plus prononcé. Le bel hymne attribué au stoïcien
Cléanthe en l'honneur de Jupiter a plutôt un caractère
philosophique que religieux, au sens que le vulgaire
donne a ce dernier mot; sous le nom populaire de Jo^
piter, il chante la toute-puissance, l'inmiensité, la provi-
dence de Dieu, tel que le conçoit la raison. Citons aussi
Mésonide, dont on a un hymne à Némésis, et Aristide,
auteur de deux hymnes, l'un à Jupiter, l'antre à Mi-
nerve. Les hymnes recevaient des noms spéciaux selon
le dieu qu'ils célébraient : c'était le Péan pour Apollon^
le Dithyrambe pour Bacchus, etc. F. Wimfelingius, As
hymnorum auctoribus, Strasbourg, 1M5, in-4®; Kries,
Ih hyrnnis wterwn, Gcsttingue, 1742, in-4*; Sneedorf,
BTP
1044
HTP
Ar kymmi oit«nmi GrcÊCorum, Gopenhagoe, 1780, In-S*»;
Sonchay, Sur Us kumnêM dn Anctens, dans les Mém. de
rjc. dês Into. H BêlUê-UUres, U XVniet XXIV. — Les
cturétiens ont donné aussi le nom d'^fmiM aux petits
poèmes consacrés à la louange de Dieu ou des saints.
L*liymne chrétienne (car un usage bizarre a vouln que
l6i hymnes de l'Église lussent du féminin, et les hymnes
antiques du masculin) est exclusivement religieuse et
morale : elle témoigne de la reconnaissanoOf de ramonr
et du respect des hommes pour les bienfaits de la Divi-
nité. Les hymnes les plus connues sont : eelles de S* Am-
broise, Aurora coAum pwrpunU, Conditor almê iidêrum,
Ckristê redêmptor omnium, etc. ; celle de Prudence en
l'honneur des Innocents marQrrs, Salvete flores martw
mm, iàspirée par une foi nalTo, et écrite avec une grâce
charmante; oelies de S^ Grégoire, Ltielf CrmOor opnme,
Audi bénigne conditor, Te lueis ante tenninum, etc.; le
VeocUla régis, de Fortnnat ; le Ponge Imgua, de Glandien
Mamert; le Veni ereator, attribué à Gnarlemagne, ete,
Sedulius, Paul Diacre, Saint Thomas, ont aussi composé
des hymnes. Dans les temps modernes on a beaucoup
fanté celles de Goffin et de Santeul ; elles sont ingénieuse-
ment écrites, mais le style en est trop savant et parfois
maniéré. — Dans les premiers siècles, le mètre affecté
sénéralement à l'hymne était l'Iambigue de quatre pieds
(Sàlvètê florès môAgrOm; VêaHlà régis prodiûnt, San-
teul et Coffin ont employé une plus grande yariété de
métras. Il y a rarement plus de 6 stances de 4 Ters dans
nne hymne; la dernière est une paraphrase du Gloria
patrL Quant aux hymnes du moven ftge, on y tronte gé-
néralement la numération des syllabes et la rime substi-
toées à la mesure. P.
BTimi AiieéuQen. F. Glosia m bxcblsis.
BnoiB cirtauBiQim. F. CHéftOBiQUB.
HYMNOLOGION, livre de l'Église grecque, contenant
le recueil général des hymnes.
HYPAULAGB (du grec upcUlagèf changement), sorte de
trope oui consiste en un renversement dans la corrélation
des idéÎBs t « Rendre Phomme an bonheur, c'est le rendre
à la vie. B On dit la beauté de ces arbres, an lien de ces
beaux arbres, L*hypa11age applique à nne chose nne
épithète q^ ne convient qu'à une personne. Virgile dit
(jEneid.^ m, 44) :
Heal fiigs erudeles terne, tage llttns avarum,
c-à-d., fuis laThraoe où règne un roi cruel et avare. La
même figure fait accorder un adjectif avec un substantif
qui ne semble pas lui convenir (Id., t6td., VI, 268) :
Itant ebeemri eelà nb nocte p«r luabram,
■a lieu de ibant obseurà stdL., G.
HYPERBATE (du grec uper, au délit, par-dessus, et
bainéin, aller), transposition des pensées et des paroles
dans l'ordre et la suite d'un discours. Cest une vulété
de l'Inversion. Voici des hyperbates de pensée : « O fils
de Gambyse, car les dieux veillent sur toi, autrement tu
ne serais passrrivé à une si haute fortune, «m0fs- tôt d'As-
tyace, ton meurtrier • (Hérodote). L'ordre naturel était :
« O fils de Gambyse, venge-toi d'As^age, tu le peux,
puisque les dieux veillent sur toL » Vfrpfle fait dire par
Junon au roi des vents t « Éole, car le père des dieux et
le roi des hommes t'a donné de calmer et de soulever les
Ilots, «fi peuple ennemi de Junon vogue sur la mer Tyr»
fhénienne, portant en Italie Ilion et ses pénates vaincus ;
eh bien, dichaine les vents, engloutis leurs vaissesux
iobmergés; » an lieu de : « Éole, déehaêne les vents et
engloutis les vaisseaux des Troyens, tu le peux, car Ju-
piter t'a donné de calmer et de soulever les flots. » Ces
«ortes d*hyperbates ne sont guère d'usage que dans les
langues anciennes^ Les hyperoates de mots sont encore
nlns propres au grec et au latin. En void un exemple de
ikNsnet : « Le matin, elle fleurissait, avec quelles grâces,
vous le savez. » P.
HYPERBOLE (du flpreciqMr6ol^, excès), figure de Rhé-
torique qui exagère les choses pour faire plus d'impres-
sion. Rien n'est plus contraire au bon goût, rien ne
s'éloigne plus du naturel ^ de la vérité que l'exagéra-
tion: et cependant on trouve de beaux exemples de cette
figure dans lea meilleurs écrivains; c'est qu'alors elle est
employée à propos, et que la grandeur et la mijesté du
e^Jet comportent le grandiose inusité de l'expression et
de la pensée. On conçoit, par exemple, que le poète
inqiiré se laisse emporter à la fougue de son imsglnation|
et qu'alors ses Idées et seo langage revêtent pour idna
dire une forme surnaturelle. Ainsi, Racine a dit
lant de l'impie (Ssthar, m, 0) t
PsraU an cèdr«, U cachait dans lei deiiz
Son front aadacleiiz.
Void une antre hyperbole du même poète {Pbèdre, V, 9) i
L» dél avec borreor volt es momatn lauvige^
La terre t'en émeut, l*alr en cet tailtoetés
Le Ilot qnl rapporta recule éponrantë.
Molière fait dire à Alceste, à propos de civilités rendoes
à des gens presque inconnus (Is Misanthrope^ I« i ) s
Xt il par nn nulbeor J'en sraie Iktt autant.
Je m'irala, de regret, pendre tont k rinatanL
On emploie même l'hyperbole dans la conversation»
quand on dit, par exemple, marehsr comme une tortue,
aUerplus vite que le vent, pleuvoir pour torrents, etc.
HYPERCATALEGTE ou HYPERGATALEGTIQUB (du
grec uper, au delà, et kataUctos, terminé), vers qui finit
an delà de sa mesure légitime t
Jamqne Iter emenel, tnrree aejtecta La|tfiionwi
Ardna eemebant.
YmeiLB, jBndd., Vn, 100.
Dans le vers hexamètre héroïque latin, la syllabe surnu-
méraire est tof^oors susceptible d'élision, et le vers
suivant doit commencer par nne voyelle. Les bypercata-
lectea sont infiniment plus usit6i dans les vers lyriques,
et y constituent des mesures régulières. Ainsi, le mo-
oomètre et le dimètre lambiqne sont souvent hypercap
talecteai
DlierncI)or anllMt
Et dans Horace (I, Od. 9, 19) t
Lenei | qne enblnoetem 1 enaoriti»
De même le monomètre troclialqne t
Deci|dltea»|lo:
le dimètre, le trimètre trocfaaique t
Sentit I orttti, | aenelt | ocealmt.
Yldi)mns ihnn]|ate | dona | moUe | immenlsa.
Le vers adonique est un cboriambique hypereatalectl jue :
Termit nrb|»i.
HonAoa, I, Od. 9, 4.
Le dimètre dioriambique est souvent hypercatalecte. Le
mètre dactylique en offre aussi des ezemples t
PSlTis et 1 nmbra Bnm|ia.
In., IV. Od. 7, IS
Tendit tai ( estemtaa l|re tenelnr|at.
La poéde Italienne olfre quelquea exemples de vers dé-
casyllsbles hypercatalectes; ils sont plus nombreux en
allemand, piuticulièrement dans les lambea on dans lea
mètres lyriques imités de ceux de l'antiquité grecque et
latine. P.
HYPER-DORIEN ou HDCO-LYDIEN, mode de la mu-
dque des andens Grecs, duqud la fondamentale on
tonique était une quarte au-dessus de celle du mode
dorien.
HYPERDULIE (du greeupsr, an-dessns, et douUia,
hommage), cnlte qu'on rend à la 8** ^erge. On le nonuna
aind parce qnll est an-dessus de odui qu'on rend anx
Saints.
HYPER-ÉOUEN. un des modes de la musique greo-
que. qui avait sa fondamentale on tonique une quarte
i-d<
au-dessus de celle du mode éolien.
HYPER-IONIEN, mode de la mndque grecque, qui
avait sa fondamentale ou tonique une quarte an-^tossas
de cdie du mode ionien.
HYPER-LYDIEN, le plua aigu des modes de la mn-
dque grecque, n avait sa fondamentale ou tonique une
quinte an-dessns de celle du mode lydien.
HYPERMËTRE (du grec iiper, au ddà, et métron,
mesure), vers hexamètre qui a une syllabe de surcroit
après le fi* pied. Cette syllabe est toi^ours susceptible
d^élision, et, dans ce cas, le vers suivant commence par
une viqreUe. Tel est ce vers de Virgile {Georg^ O» i42.; -
HTP
1045
nyp
In tnrrls iMmbramiiiM f&têxmaqm
Si feniu cqnormiffl...
Us mn terminés par un dactyle doÎYent rentrer dans la
Dftme catégofrie (Id., Georg.^ Û, 69) :
laseritnr Toro a fbta nads artmtnt horrlda,
St tterilct platanl...
Uny h point d'exemples de cette licence dans la yersi-
fication greoqoe. D'ailienTs, tonte syllabe éUdée y est ton-
Jonn représentée par une apostrophe, et conséqnemment
neasmnonçait famais. P.
HYFER-PHRYGIEN, un des modes de la musique
Lneqae, àroctaye de Thypo-dorien. On le nommait aussi
HYPERTHESB (du grec uper, an delà, par dessus, et
iMttf, position), transposition de lettres. Ex. t xiOà>vpour
Xiwv, pdU^pootoc pour pdroaxoc, mots dans lesquels les
aspirées ont été transposées d*une syllabe à une autre.
iB mot Hyperthèiê désignait aussi en ginec le denré de
copparmiaon qae nons appelons wiperUUif, P.
HYPÈTHRE (du grec tipo, sous, et aithra, air), nom
donné par les architectes à tout édifice découvert ou sans
toit Le grand temple de Paratum en offire un spécimen
encore existant. Les temples de Jupiter et de lûnerve à
Athènes, de Gérés ^ de Proserpine à Eleusis, de Jupiter
Pinhellénien à Ëglne, de Jupiter à Olympie, etc., étaient
hypèthres. On donnait ainsi à Tintérfeur des édlBces un
•ipect moins sombre.
HYPHEN (da grec upo, sons, et en, un seul ; sous-nn-
wil, c-à-dL en un seul tout), terme de grammaire
Deeqoe. Cétait une ligne en forme d*arc renrersé que
roB traçait au-dessus de la finale d*un mot et de Tinitude
fjiû antre, pour montrer qu'ils ne devaient faire qn*un
(il équivaut alors à notre trait d'union ), ou pour indi-
^aer nue crase non faite dans l'écriture. P«
HYPOCAUSTE. F. BAms.
HTPOCRlTIQnE, c-èrd. en grec qtn conênfaU, qui
mite; nom qse les Anciens donnaient à l'art dn geste,
pvtie importante de réloquence et du Jea scémque.
uétait Fart de toat exprimer sans paroles. Les gestes oue
dendeat faire ks comédons et les tragédiens étaient In-
clinés par des aignes au-dessus des vers, et cette sorte
de notation s'appelait la muntiue hypocritiquB»
HYPO-DORIEN, le plus grave des modes de la mu-
aqoe grecone. Il avait sa fondamentale ou tonique une
qavte ao-oeesous de celle du mode dorien.
HYPO-ÊOUEN, mode de la musique grecque, dont la
fondamentale ou tonique était une quarte an-dessous de
ecUe du mode éolien.
HYPOGÉE, r. ce mot dans notre Dictîomiatrs de
Bioffraphù $$ d^Hûtcin.
HYPO-IONIEN, mode de Is musique grecque, dont la
tedimentale oa toniqoe était une quarte au-dessous de
oDe dn mode ionien;
HYPO-LTDIEN, mode de la mnrique grecque, dont la
ffindamentale oa tonique était une quarte au-dessous de
celle du mode Ivdien.
HYPOPHOfUÎ (dn grecpA^r^, porter, et upo, sous),
tome de la Rhétorique ancienne ; objection on allégation
<(Qe Pon Ait valoir pour Justifier un acte ou une préten-
tion. Tel est ce paaiase du commencement de la harangue
nr l'Haionèse, oA Donostfaéne rappelle les termes d'une
Lettre de PhiUppe : « Philippe dit qu'il vous donne cette
Ue oonune sa propriété; que vous la revendiques injuste-
■ent; on'en effet elle n'a été à vous, ni quand il l'a
piie, ni depois cfu'il la possède ; qu'il l'a enlevée aux pi-
nm, et qu'à ce titre elle lui appartient. » Aussi le rhé-
toor Hermosjaie définit^U Justement Thypophore la rai"
«s dt rooMnaérv on ds rsnnsnii. Uhypophore est
tiqjovft iolvie Immédiatement d'une réponse, oue les
rhéteurs appelaient Anihypophore, P.
HYPO-PÉRYGIEN, mode de la muriqne grecque, dont
la fondamentale on tonique était une quarte au-dessous
de celle dn mode phrygien.
HYPORKHÊME , pièce de poésie du genre lyrique,
ttmpoiée, chfls les anciens Grecs, pour les choeurs de
{canes garçons anx fêtes de Délos. Dans l'origine, le poète
Ini-méme, comme cela eut lieu plus tard pour la poésie
jfMPstique, apprenait sa pièce aux danseurs et aux chan-
^nrs; if prescrivait les mouvements, les figures* la ca-
Attce, et veillait à ce que tout cela fiit l'expression exacte
jbsDo petit pofime; en sorte quels donss {prkhèma) avait
neo proprement wtmê (vpo) l'autorité du poète. L'hypor-
uème fut d'abord, comme le Péan, exclusivement grave;
fiwtird il servit aussi à exprimer des idées enjouées et
badinee, et olIHt même queloues rapports avec la danse
comique appelée Ccrdace, Xenodame de Çythère, Prati-
nas de Phhonte et Pindare furent les principaux auteurs
d'hypoiUièmes : on a quelques fragments de ceux dn
poète thébain. P.
HYPOSGENIUM, nom oui signifie sot» la 9cèn$, et que
Pollux donne an mur de devant de la scène tourné vers
l'orchestre, dans les thé&tres de l'antiquité. On le déco*
rait de colonnes et de statues.
HYPOSTASE. Ce mot, qui Joue un si grand rôle dans
les écoles d'Alexandrie et d^Athènes, depuis Plotin Jus-
qu'à Proclus, est l'indication d'une doctrine qui suppose
un Dieu qui, sans sortir de lui-môme, se transforme éter*
neilement en une essence d'un ordre inférieur, pour ne
pas tomber dans^ mouvement nécessaire an Dieu créa-
teur. Plotin, pour expliquer Dieu et le monde, s'appuie
sur la nécessité d'un intermédiaire entre l'absolu et le
mobile. U admet donc en Dieu : !• une hypostase supé-
rieure qui possède la perfection infinie sans mélange
d'action ni de multiplicité ; 2<^ une hypostase inférieure à
la première, l'intelligence en soi; 3* une hypostase ca-
pable de produire le monde, mais mobile et inférieure à
la précédente. Tels sont les trois principes en un seul
être, reconnus par toute l'école néoplatonicienne, l'Un,
ou le Bien, qui est le Père ; l'Intelligence, qui est le Filst
l'Ame, qui est le principe universel de la vie.
Dans l'Église, le mot nypostase fut employé avant celui
de j>er9<mne, en parlant de la Trinité. Pour exprimer Is
distinction de la divinité et les attributs des trois per-
sonnes, on disait qu'il y avait en Dieu trois hsrpostases
en une seule essence. Le mot est grec (upostasis ), les
Latins firent prévaloir le mot personne. (F. Tamrrtf.) R«
HYPOTHÈQUE (du grec upotàkè, gage). Selon U défi-
nition du Codé Napoléon (art 2114), l'hypothèque est un
droit réel sur les immeubles aifectés à l'accpiittement d'une
obligation, c-à-d. qu'une personne qui a un engagement
péoiniaire à remplir donne une garantie spéciale sur un
ou plusieurs de ses immeubles; l'immeuble devient ainsi,
entre lea mains de celui qui est nanti de l'hypothèque, uns
espèce de gage. Ce gage diffère cependant beaucoup du
gage mobiher, delà mutshandise déjxMée en nantissement
chez le préteur. Le préteur, s'il n'est pas payé, peut, sans
beaucoup de formantes et surtout sans une grande perte
de temps, faire vendre les marchandises et recouvrer le
montant de sa créance. L'immeuble hypothéqué, au con-
traire, ne peut être vendu qu'avec beaucoup de difficultés
et de finis ; les entraves dont la lépslatlon a entouré la
saisie des immeubles, dans la pensée d'être utile anx pro-
priétaires ^ de mieux consacrer le caractère de la pro-
priété, nuisent en réalité aux propriétaires qui veulent
emprunter, rendent presque aléatoire le prêt <{ui devrait
être le plus sûr de tous, et élèvent d'une manière artifi-
cielle le taux du prêt hypothécaire; on l'évalue à 6 1/1
et 7 pour 100. — Les règlements sur les hypothèoues,
qui ont été fixés en France par les ordonnances de 1539,
1581. 1006, 1673, 1771, par lea lois du 0 messidor an m,
dn 11 brumaire an vn, par le Code Napoléon, ont été son-
vent attaqués t ils ont été modifiés et rendus un pen
moins rigoureux par la loi de 1841 et par le décret du
28 mars 1852 qui a institué le Crédit foncier (F. es mot).
Avant l'Institution du Crédit foncier, il y avait eu, en
France, un établissement qui prêtait sur hypothèques, et
qui s'appelait Caisse hypothécaire; Il n'a pas pu se sou-
tenir. « La caisse hypothécaire, dit M. Wolowski. a suc-
combé en grande partie par suite des véritables aénis de
Justice qui entravaient vis-à-vis d'elle les formalités rui-
neuses ae l'expropriation. Une seule affaire de cette na-
ture n'a pas duré moins de dix-sept ans. Cette saisie
monstre a donné lieu à près de deux cents incidents, et à
autant de Jugements et d'arrêts ; la Cour de cassation m
été saisie, à cette occasion , de quatorze pourvois, et les
Ihds ne se sont pas élevés à moins de 400,000 francs ! »—
« Le sol , disait à la Chambre M. Dupia en 1835, est ce
qui présente le plus de sûreté en apparence, et cependant
c'est à ce gage qu'on se fie le moins, c*e8t celnl qu'on re-
doute le plus! Pourquoi? Cest qu'il y a un contre-sens
dans la législation; c'est que la loi des hypothèques, qui
devait être faite pour assurer les créances, ne laisse pat
les créanciers sans inquiétude sur leur conservation ; e*
la loi d'expropriation, qui aurait dA être conçue pour en
amurer le recouvrement, agit en sens précisément con-
traire, c'est-à-dire qu'on semble avoir tout fait, toutima-
f^é contre le créancier, pour empêcher ou'il n'ait son
argent à l'échéance. Au contraire, le législateur semble
avoir accumulé les précautions en faveur dn débiteur «
pour favoriser sa résistance et sa mauvaise foL »
»Y<P
1046
HYP
n y a trois fortes d'hypothèque : 1" Thypotbifae k^
etta on légale , celle que dans certains cas la loi écrite
accorde sans stipulation (aux femmes mariées, sur les
biens de leur mari; aux mineurs et interdits, sur les
Idens de leur tuteur; à TÉtat, aux communes et aux éta-
blissements publics^ sur les biens des comptables);
S* rhypothèqueittdtctatVtf, résultant de Jugements qui ont
oondamné un débiteur à payer : ces deux hypothèaues
frappent sur tous les biens présents et à venir; 3° rby-
pothèoue eonventiannêlle, consentie par un acte authen-
tique [Code Napoléon, art. 3,117), et qui n'atteint que les
immeubles désignés dans l'acte. Les créanciers privilégiés
priment les hypothécaires (V. PaiviLéca); par consé-
quent, lorsqu'on veut plac^ ses fonds par obligation avec
hypothèque sur des immeubles, 11 fai^ s'assurer que leur
valeur est suffisante pour que l'hyponièque ait son effet
après l'acquittement des créances privilégiées. On doit
s'informer encore si l'hypothèque offerte ne serait pas
}>rimée par les hypothèques qui appartiennent, soit aux
èmmes pour leurs dots ou conventions matrimoniales,
soit aux mineurs et aux interdits à raison de la gestion
de leur tuteur, ces hypothèques venant en premier ordre
aprte les créances pnvilégiées : 11 est vrai que les maris
et les tuteurs sont tenus de rendre publiques ces hypo-
thèques, sous peine d'être réputés stelûonataires, et,
^mme tels, contraignables par corps; mais si le stellio-
aataire est insolvable, l'argent prêté n'en est pas moins
perdu. Toute hjipothèque est Indivisible, c-à-d. qu'elle
subsiste en entier sur tous les immeubles affectés, sur
chacun et sur chaque portion de ces immeubles : elle les
suit, dans quelques mains qu'ils passent. Les hypothè-
ques prennent rang du lour de l'inscription sur les re-
gistres du conservateur dans l'arrondissement duquel est
utué l'immeuble. Ces registres sont publics, et le con-
servateur est tenu de donner copie des actes à tous ceux
qui le requièrent, ou un certificat qu'il n'existe aucune
^ Inscription. Si les biens assujettis à l'hypotlièque péris-
sent, ou s'ils éprouvent des dégradations qui les rendent
insuffisants pour la sûreté du créancier, celui-ci peut de-
mander son remboursement ou un supplément d'hypo-
thèque (Cot^iVapo^éon, art. 2,131). Les mscriptions con-
servent l'hypothèque pendant dix ans, et restent sans effet
si elles n'ont été renouvelées avant l'expiration de ce dé-
lai (art 2,154). Néanmoins, si, après le délai de prescrip-
tion, le créancier veut renouveler son hypothèque, il le
peut, mais dans ce cas il ne prend rang qu'après les autres
créanciers, s'il y en a. L'hypothèque prend fin : 1° par l'ex-
tinction de l'obligation, 2° par la renonciation du créancier,
Z^ par la prescription de la créance, 4° par la purge que
peuvent opérer l'acquéreur, le donataire, l'échangiste, ou
k légataire particulier des biens hypothéqués {V. Purgb^.
— La conservation des hypothèques est confiée à l'admi-
Bistration de l'Enregistrement et des Domaines. Les droits
Sayés aux bureaux des hypothèques sont perçus au profit
u Trésor public. La loi du 28 avril 1816 prescrit la per-
ception d'un pour mille du capital de la créance; le re-
nouvellement de l'inscription à l'expiration du délai dé-
cennal donne lieu à la même perception. Les frais des
inscriptions sont à la charge du débiteur. Une remise sur
les droits perçus est accordée aux conservateurs; mais,
en outre, il doit leur être payé, pour les actes, copies,
extraits ou certificats qu'ils délivrent, des salaires dont la
quotité a été fixée par décret du 21 sept. 1810. Les con-
servateurs des hypothèques fournissent deux cautionne-
ments, l'un en immeubles, l'autre en numéraire. V. Gui-
chard. Législation hypothécaire, Paris, 1810, 3 vol. in-8o ;
Carrier, Traité des hypothèques, 1818, in-8°; Cotelle,
Des privUéges et hypothèques, 1820, in-8° ; Battur, Traité
des privUéies et hypothèques^^* édit., Paris, 1823, 4 vol.
\d-8* ; Grenier, Traité des hypothèques, 3* éditiop, Cler-
mont-Ferrand, 1829, 2 vol. in-i»; Persil, Régime hypo^
ihécairs, 4« édit., Paris,1833,2 vol. in-8<>; Dufrayer, Ma-
nuel du préteur nw hypothèque, 1838, in-18 ; Despréaux,
Dictionnaire général des hypothèques, 1842, in-8* ; Bau-
dot, Traité des formalités hypothécaires, 1845 , 2 vol.
in-8»; Valette, Trmté des hypothèques, 1836, iD-8*; De-
lamontre. Traité du prêt sur hypothèque, 1M7, in-^*;
Troplong, Commentaire sur les privilèges et hypoMquet,
5' édiu, 1854, 4 vol. in-8<> ; Marcadé et Pont, Commen-
taire des prwUéges et hypothèques, 2 vol. in-8* ; Hervieu,
Bésumé die jurisprudence sur lespnoUéges ethypothèques,
4" édit., 1859, in-4»; Schilling, Traité du droUde gage
et d'hypothèque chez les Romams, trad. de l'allemand par
Pellat, 1840, in-8<>; Anthoinede SaintrJoseph, Concor^
dance entre les lots hypothécaires étrangères et fran-
çaises, 1847, 1 vol. gr. in-8*; Allemand, Examen du
régime hypothécaire établi par le Code civil , 1837, in-8*;
Fouet de Conflans, De la réforme hypothécaire, 1848,
in-8*; Hauthuille, De la réforme du système kj/j^othé-
caire, 1843, in-8*; Hébert, De qwlques modijiicmtwns à
introduire dans le régime hyjiothécaire , 1841, iu-8*;
Odier, Des systèmes hypothécaires, 1840, in-12;Saint-
Nexent, De la réforme du régime hypothécaire ^ 1845,
in-8*.
HYPOTHÈSE (du grec upothésis, supposition), ftdt on
principe admis sans preuves, pour expliquer certains
faits ; par suite , on appelle méthode hypothétique celle
qui pose de semblables principes pour expliquer les faits
observés. H y a trois sortes d'hypothèses : la première
suppose réels des faits non observés, pour en expliquer
d'antres que l'on connaît, mais dont la cause nous
échappe; ainsi Newton supposait dans l'eau la présence
d'un corps combustible, pour expliquer certains faits de
réfraction ; la seconde sorte consiste à admettre une force
comme cause de certains effets, par exemple, Télectricité;
la troisième n'est qu'un moyen imaginé pour rendre plus
facile l'enseignement dans les sciences; ainsi, les chi-
mistes supposent la matière divisée en atomes, pour en
expliquer les combinaisons. La première sorte est la plus
importante, et il est indispensable d'y avoir recours quand
l'observation, l'expérimentation, le raisonnement ne peu-
vent pas suffire. L'hypothèse, dans ce cas, doit être soigneu-
sement vérifiée, et rejetée si l'expérience ne la confirme
pas : l'observation a confirmé l'hypothèse d'Huyghens
sur l'anneau de Saturne; celle de Laplace sur la folia-
tion des planètes, ne pouvant pas être vérifiée, est inad-
'«aissible. L'hypothèse ne peut donc produire la certitude
q4«c lorsqu'on perdant son premier caractère, elle passe
à l'état de fait évident et démontré ; hors de là elle n'est
qu'un moyen souvent indispensable , mais sans caractère
scientifique; Jusque-là elle n'est qu'une supposition qui
doit disparaître cfuand il est prouvé qu'elle est vraie ou
fausse : vraie, elle est acquise à la science; fausse, elle est
convaincue d'erreur et rejetée comme telle. - R.
HYPOTRACHELIUM, nom donné par Vitruve à ce que
nous appelons gorgerin dans la colonne.
HYPOTYPOSE (du grec upo, sous, et tupoô. Je figure.
Je décris), figure de Rhétorique qui peint l'objet avec des
couleurs si vives, des images si vraies, qu'elle le met en
quelque sorte sous les yeux, et que le spectateur ou l'au-
diteur, s'identifiant avec le personnage, s'oublie au point
de se croire témoin des faits qui lui sont racontés. Ainsi,
dans Athalie (I, 2), Josabeth raconte an grand prêtre
comment elle a arraché Joas tout sanglant des mains de
ses meurtriers :
HéUs! Vétat horrible oil le ciel me VolMt
Revient à tout moment effregrer mon esprit s
De princes égorgés la chambre était remplie, ete»
Andromaque (in,8) nous fournit un autre exemple
d'hypotypose :
FIgare-tol Pyrrhus, les yeux tfttncelantB,
^tatraat k la Ineur de nos palais brûlants, etc.
On peut citer encore la peinture de la Mollesse dans Ke
iMtrin de Boileau, la mort de Rocchoris dans le Téléfnaque
de Fénelon, le sacrifice d'Eudore dans les Martyrs da
Chateaubriand. G.
lAM
1047
I^M
I
1, 9* lettre et 3* ToyeHe de Talphabet latin , ainsi qae
des alphabets des lances néolatines et des langnes ger^
maniques. fin lalin, l't était à la fois consonne et voyelle :
csmonne, lorsqu'il était placé derant une royelle dans
on mot d'origine Italique {lanus, conttcto, qui s*écri-
lirent tardivement Jantu, conjicio)\ voyelle, dans les
mots d*origine grecque {iamlms) ; consonne dans certains
mots d*origine hébraïque (Judaus)^ voyelle dans certains
ntres (iacoàus). L*t eut également deux valeurs en
fnnce : ce fut Ramus qui, an xvi* siècle, donna unifor-
mément la forme du j à l'ancien t consonne ; mais il n*y
i encore que fort peu d'années que les chapitres des
lettres I et J ont ceâié d'être confondus en un seul dans
les Dictionnaires. Les Latins substituèrent quelquefois
Tu à l't : Dtcuimui, MaxumiUf pour DecknuSf Maximtu,
En français, Vi perd le son qui lui est propre, en s'unis-
Bsnt à d'autres voyelles, comme dans laid, gam^ sein,
feim, rot\ etc. ; il le reprend à l'aide du tréma, conmie
dans MtOse, Bélùisê, Lais, etc. En anglais, l't pcnrd très-
wavent le son que lui donnent les autres peuples de l'Eu-
rope ; mais, en revanche, ce son est atmbué à d'autres
caractères, à Ve f dans 6«, être), àas (dans sm, voir), à
«a (dans têa, thé). L'usage de mettre un point sur Tt,
pour qu'on n'en fasse pas un Jambage d'une lettre voisine,
ne date que du xiv* siècle. — Gomme abréviation dans
les inscriptions latines, 1 signifie impmxttor, invietus, in~
ferû M», justus, illiutris, jure, etc. Sur les monnaies ro-
maines, il représente l'as, comme valeur et comme poids.
Aatrefois il était la nuurque des monnaies frappées à
Limoges. — Ikine la théorie du syllogisme, I désignait une
proposition aflBrmative particulière. — Signe numéral,
rioto grec valait 10. En latin, 1 vaut i, et représente au-
tant d'unités cpiMl est répété de fois Jusqu'à quatre : mis
devant V et X, il se retranche de ces nombres ; placé après,
U s'y ajoute (IV =4; IX=9;VI=6; XI »= 11). Cepen-
dant, lie expriine 200, HIM 3,000, etc. B.
lALÊNE. K. CBAifsOTi.
lÂHBE, pied cle la versification gregpe et latine, com-
posé d'une brève et d'une longue : atês. Archiloque en
est réputé IMnventeur ; c'est du moins lui qui, le premier,
Ta employé dans les pièces mordantes et satiriques.
lÂHBÉLÉGlAQUE (Vers). Cest le renversement du
vers élégiambique, c-à-d. ou'il se compose de 2 dipo-
ties lambiques suivies de la 2* penthémimère élégiaque ;
il est asynartëte ; Horace a écrit (Epod. 13, v. 10 et 18) :
Dêfôrmïs S\gr^môià[œ J^diUcïMis dlWqf^s.
lèvârè dS\ris pëctôrâ \\ sôlltàttûdXnXlms,
Ce vers passait pour avoir été Inventé par Archiloque,
ainsi que l'élésiambique. P.
lAMBIQUE (Poésie), nom donné chez les anciens Grecs
à ce qui s'appelle spécialement ScUire chez les peuples
modernes. Les diatribes contre les personnes ou contre
les mœurs générales ayant été primitivement composées
en ïambes, le nom d^iambùiue a été donné au poème
kii-mème : on disait vulgairement des ïambes, pour dire
3ne satire mordante, une invective. Archiloque, Hippo-
nax,Timocréoa, sont les représentants les plus connus
de ce i^enre de poésie; mais nous ne saurions apprécier
le mente de leurs oeuvres, dont 11 ne nous est parvenu
que de trop courta fragments. Nous n'avons point de
pièce latine portant ce titre, bien ooe les poètes latins se
serrent fréquemment du mot ïambes pour désigner une
pièce médisante. Mais nous devons rattacher à ce genre
nn grand nombre des pièces d'Horace connues sous le
iMmi ^épodes , et dont quelques-unes sont d'une viru-
lence extrême, notamment les odes 4, 0, 10, 17. Chez
nous, André Chénier a renouvelé ce genre, mais dans un
ml essai inachevé, et, de nos iours, H. Auguste Barbier
i^est fait un nom par ses ïambes. Ils sont composés de
Binds vers alternant avec un plus petit placé en forme
^épode, à rimitation de ce que nous voyons dans Horace,
md lui-même s*était modelé sur les iambographes de la
UMBiQUB (Vers), vers composé d'ïambes, on dont l'IamM
est la base. En grec et en latin, il y a des lambiques d«
2 jusqu'à 8 pieds. On les scande par dipodies, et chaque
dipodie forme une mesure ou mètre : d'où le nom de
monomètre donné au vers de S pieds, de dimètre au vers
de 4 pieds, de trimàtre au vers de 6 pieds, et de Utra-
mètre à celui de 8 pieds.
I. Monomètre, 11 est très-rare. On le trouve employé
comme clausule dans on système de dimètres ou de tri-
mètres. Pur, il a 2 ïambes. Au 1*' ïambe on substitue
souvent un spondée; au 2* un pyrrhique. Les Latins met*
tuent souvent le dactyle au lieu du spondée au 1" pied :
pèssûmà m&ni. U peut être hypercatalectique; alors, outre
la l'* substitution, il peut recevoir un anapeste au 2" pied.
n. Dknètre. 11 est fréquent chez les lyriques, les tra-
giques et les comiques. Alcman et Anacréon paraissent
l'avoir employé les premiers dans un système {V, ce mot)»
n y en a 3 variétés : acatalectique (4 pieds J , catalectiqu^
(3 pieds et demi ), brachycatalectique (3 pieds). La l '^ com-
porte l'ïambe, le spondée, le dactyle rarement, du moina
en grec, au l** et au 5* pied ; l'anapeste au l"*" pied ne se
voit que chez les comiques. Dans la 2«, le 3* pied est né-
cessairement un ïambe, le 1« peut être un tribraque. Dans
la 3*, le 3* pied est un ïambe, ou un pyrrhique, très-sou-
vent précédé d'un anapeste. Horace a employé le tribra-
Sie au 2* pied du dimètre acatalectique. Dans les sys-
mes dimétriques, tel est l'étroit enchaînement des vers,
que chaque dernier pied se comporte comme s*il était
dans le corps du vers, c-èrd. que, i<^ la longue finale
peut se résoudre en deux brèves, d'où résulte un tri-
braque; 2? l'hiatus est interdit d'un vers à l'autre, aussi
bien que toute syllabe douteuse ; d'où il suit que le di-r
mètre peut être terminé par un ïambe ou un tribraque^
jamais par un pyrrhique ni un anapeste, et qu'un mot
peut être interrompu et se continuer au vers suivant.
Les systèmes de dimètres lambiques sont habituellement
terminés par un dimètre catalectique. Les systèmes de di-^
mètres catalecticnies sont eux-mêmes fréquents. Souvent
un système de dimètres renferme les trois variétés, avec
un monomètre hypercatalectique pour clausule. Le di-
mètre hypercatalectique forme le 3" vers de la strophe
al calque.
m. Trimètre. C'est le plus connu, le plus usité des
vers lambiques. Pur, ce vers se compose oe 6 ïambes, si
ce n'est que le 6* doit être remplacé par un pyrrhique.
Archiloque, Simonide et les lambocpraphes en avaient
fait un fréouent usage : néanmoins Us substituaient par-
fois à l'iambe des pieds impairs le spondée, et introdui-
saient à tous les pieds, sauf le 6*, l'anapeste, seulement
lorsqu'il fallait un nom propre. Ces substitutions ont été
adoptées par les tragiques, qui, de plus, admettent le
tribraque aux quatre premiers pieds. Les trimètres lam-
biaues reçoivent principalement la césure penthémimère
et la césure hepbthémimère, quelquefois la césure trihé-
mimère; elle a lieu sur une brève aussi bien que sur
une longue. L'enjambement se fait d'une manière à peu
Srès aussi variée que dans l'hexamètre héroïque; le r^et
'un spondée est assez fréquent, surtout s'il ne temune-
pas complètement le sens; cependant le sens peut s'y
arrêter, s'il en résulte un effet d'harmonie imitative.
Le drame satyrique suivit les règles de la versification des
tragédies, quand le poète mettait en scène un personnage
héroïque ; mais on y prenait plus de licences métriques !
lorsqu'on faisait paner les Satyres et autres personnaset:
burlesques. C'est ce qui avait lieu aussi dans la Vieille
Comédie. Le trimètre de la Nouvelle Comédie se oonfor- *
malt aux règles du trimètre tragique. Au temps de Sé-
nèque, les poètes latins, en admettant le trimètre, y in*
troduisirent toutes sortes de licences, à tel point oue la
mesure de leurs vers est souvent confuse. Horace s est le
plus rapproché de la pureté grecque.
Certains trimètres ont un spondée au 6^ pied (F. Gho-
lumbb). n y a aussi des trimètres catalectiques oui flgn^
rent dans la stropne alcalqne. Enfin le trimètre nrachy-
catalectique est an lambique de 5 pieds, qui a toi^oai» un
ICA
1048
ICO
■iiApeste au 4% et dont le l*' ïambe admet comme tnb-
illtntlon le spondée.
IV. Tétramètre, Llambiqatf de 8 pieds n*admet gnAre
dtetre tubstitation «pie le spondée. On n*en trouve an-
con exemple dans ce qui reste du théâtre grec Chez les
Latins, qui, an contraire, en ont fait un grand usage au
théâtre. Il admet tous les pieds du trimètre libre; le
8* pied doit toi^ours 6tre un ïambe. On le coupait après
la césure qui suit le 4* pied : quelquefois il est coupé en
deux hémistiches, c-èrd, en deux dimètres, et alors il
peut être asynartète.
Les pofites de la vieille comeiîe grecque ont fait un très-
nand usan du tétramètre cataiectique (7 pieds et demi}.
Le 7* pied doit être un ïambe; mais on y trouve quel-
quefois, dans un nom propre, Tanapeste. Le tribraqueest
inquent^x i*', S* et 6* pieds ; il est plus rare au 4*,
qui reçoit régulièrement llMnbe, le spondée, parfois Tana-
peste. Ce vers est la base du vers polUiqtU, né en Grèce
an moven ftge. Le tétramètre cataiectique est également
fort unté dans la comédie latine, mais toujours avec beau-
coup plus de licences. Le dactyle et le procéleusmatique
▼ sont admis an 4* pied; au 7* le tribraque, le spondée,
le dactyle, Tanapeste, le procéleusmatique, ces deux der*
niers plus rarement, ^ à condition que la première brève
m soft pas la finale du mot précédent, n est asynartète
chez les Latins, ce qui n*a pas lieu chez les Grecs. P.
lAMBYCB, instrument à cordes des Anciens, men-
tionné par Pollux. On suppose que c*était une cithare
triangulaife inventée par Ibycus.
IBËRIENNES (Langues), nom des laneues parléea
dans TEspagne ancienne, telles que le turdetan , le can-
tafare, le celtibérien, et dont il ne subsiste plus qu'une
seule, le basque (K. oe mot).
IBSABIBOuL (Temples d*), dans la Nubie inférieure,
sur la rive gaucne du Nil. Ces temples , au nombre de
deux, découverts par Belzoni , sont aussi remarquables
que les plus beaux de TÊgypte, et datent du règne de
Ramsès le Grand (Sésostris). Ils sont entièrement taillés
ians le roc La fa^e du plus grand, coupée à pic, a
iS met. de hauteur sur 34 de largeur, et offre, au centre,
ue porte de 5 met. sur 1 et i/S. Quatre colosses assis,
leprésentant Ramsès, annoncent dignement rentrée de
se temple dédié à Phré; dégagés du sable qui les re-
couvre en nande partie aujourd'hui, ils n'auraient pas
moins de Su met. oe hauteur ; trois seulement subsistent
dans un état parfait de conservation. L'intérieur du
temple est une excavation toute de main d'homme. La
première salle ou pronaos, qui a 16 met. carrés sur 8
d'élévation , est soutenue par deux ranp de quatre pi-
Hers chacun, contre lesquels sont adossés autant de
eolosses debout, représentant Osiris sous les traits de
Ramsès ; les parois de cette salle sont décorées de bas-
reliefs coloriés, o& l'on a figuré les exploits de ce prince
en Asie et en Afrique. Vient ensuite une seconde pièce
ou naos, à peu près de même caractè , longue de
i% met.; et enfin le sanctuaire, où l'on voit, dans une
Biehe très-profonde , les statues assises, plus grandes
que nature et coloriées, d'Ammon-Ra, de Phré, de Phtha
et de Ramsès. Ce monument ne reçoit le Jour et l'air que
par l'entrée. — Le petit temple, à ouelque distance au
N.-B. du nand, a été dédié à la aéesse Athor par la
femme de namsès. Moins élevé ^ moins profondément
creusé, il a une façade en talus, contre laquelle 8*ap-
puient six colosses de 12 met. de hauteur, séparés les
uns des autres par des contre-forts couverts d'niérogly-
phes. A l'intérieur, on remsrque des piliers carrés sur-
montés de tètes de femmes, et des bas-reliefs peints,
d'un excellent style, dont tous les sujets sont mytho-
lodques.
iGARIB, nom donné par le communiste Cabet à la terre
imaginaire où devaient se réaliser ses utopies. Cette terre
a pour capitale Icara, autour de laoueile se groupent
100 villes provinciales i chacune de celles-ci est entourée
de 10 villes communales, placées au centre de territoires
égaux. Tontea sont construites sur le même modèle, et
réalisent, sous le rapport de la propreté, de la commo-
dité et de l'élégance, les plus beaux rêves de l'imagi-
nation. Les établissements agricoles ne sont pas moins
parfaits dans leur genre. Les Icariens ne connaissent ni
propriété, ni monnaies, ni ventes, ni achats; ils vivent
en communauté de biens et de travaux. Cest la répu-
liiique ou la communauté qui recueille les produits de
la terre et de l'industrie, et qui les partage Cément
entre les dtovens : elle les loge, les nourrit, les habille
el les instruit. Le travail n'a, d'ailleurs, rien de ré-
pugnant; des machines très -nombreuses dispensent
l'homme de tout effort pénible, et, toutes les proressioni
étant également estimées, chacun choisit la sienne lai-
vant son goût. Le mariage est admis et renecté. Jusqu'à
ce que, par l'efTet du pro^te des lumières, la promiscuité
des sexes n'inspire plus de répugnance; comme il n'y a
ni dots ni succôsions, les convenances personnelles pié-
sident seules aux unions. Au point de vue politique, une
assemblée de 2,000 membres, élue par le aulErage nni-
versel, est investie de l'autorité législative pour tout ce
qui concerne l'intérêt général; chaque province a aussi
son assemblée particulière où l'on discute ses intér^
spéciaux, et, dans chaque commune, une assemblée pri-
maire ezamine les questions d'intérêt local qui lui sont
renvoyéea par l'assemblée génénle. Il y a un eaoécutoin
national (pouvoir exécutif), et des eocéctUoires provta-
ciaux et concr^tmotia?, dont les membres sont nonunés
par le peuple. Aucun fonctionnaire ne reçoit de traite-
ment. On n'a pas besoin de force publique, parce qu'en
Icarie on ne voit ni partis politiques, ni complots, ni
émeutes, ni violences, ni larcins. Le Journal national,
les Journaux provinciaux et communaux ne contiennent
Sie des procès-verbaux et des statistiques, toute discos-
on leur étant interdite : la liberté de la presse est rem-
placée par le droit de proposition dans les assemblées
populaires. Toutes les religions sont tolérées: noals il est
mterdit de parler de reli^on aux enfants avant qu'ils
aient l'ftge de 16 ou 17 ana. Suivant le catéchisme icanen,
Jésus-CSuist n'est qu'un homme, le premier de tous; les
prêtres sont de simples prédicateurs de morale. On féli-
cite ceux <|ui croient à un Paradis pour les Justes; quant
à l'Enfer, il est inutile, parc* qu'il n'y a pas de méchants
en Icarie. B.
ICHNOGRAPHIB (du grec tcAnot, trace, et graphém,
écrire), opération oui consiste à dessiner les contours
oue forment des objets sur un plan. Ainsi, pour un édi-
fice, le plan est la trace qu'il laisserait sur le sol s'il étidt
rasé.
ICONIQUES (Statues), statues que les Anciens éri-
geaient aux athlètes qui avaient remporté trois victoires.
Elles étaient l'image exacte de leurs formes et de leur
caractère gymnastique.
ICONOGRAPBIB (du grec éUsOn, image, et graphém,
décrire), description des monuments de la statuaire an-
tique et de celle du moyen âge, et, dans un sens plus
restreint, description des images des personnages cé-
lèbres, représentés par des statues, des bustes, des mé-
dailles, des pierres gravées, des peintures, etc. Les
principaux auteurs qui ont fidt des recueils iconogra-
phiques sont : Ifazocchi, lUuitrium imagims, 1517,
in-4**; Flavio Orsini, Illtutrium imaginés, Rome, 1509;
Canini, iconografia, Rome, 1609, et Amst, 1731 ; fiel-
lorio, Vettrum Uluttrium imagines, Rome, 1685; Vis-
conti. Iconographie grscqùs^ Paris, 1811, 3 voL in-4^;
Mongez, honografhù romaine, Paris, 1817-S6, 4 vol. ^.
in-fol. ; Delpech, /coROi^ttipAts dês contemporains. Pans,
1824, In-fol.; Didron, Iconographie chrétisnnê, 1844,
in-4*r l*ebbé Grosnier, Iconoffraphk chrétimnê, Paris,
1848, in-8«; Guénebault, DtetUmnairs iconographuius
dês figurss, Ugsndês tt actss dss saints, 1846, gr. in-S",
ICONOLATRIE (du grec ^tUpdii, fanage, et latrma, ado-
ration), culte des images poussé Jusqu'à l'adoration,
comme chez les païens.
IGONOLOGIE (du grec éikân. image, et Ugéin, dire,
expliquer), explication des emblèmes, des figures allégo-
riques et de leurs attributs. Les auteurs qui ont entrepris
ce genre de travail sont : J. Baudouin, Rscmil d^em*
blêmes, Paris, 1688, 3 vol. in-8*; Lacombe de Presel,
Dictionnaire tconologique, 1755 et 1770, in-12 ; J. Bou
dard, Iconologie^de divers auteurs, Parme, 1750, 2 voL
in-fol. t Gh. Delafosse, leonologie histonque. Paris,
1768; Gaucher, leonologie, ou Traité complet des allé-
gories, emblèmes, etc., Paris, 1706, 4 vol. in-12; Gravelof
et Cochin , leonologie par figures, 1796; F. Pistrucd,
Iconologia, Milan, 1821.
ICONOSTASE (du nrec éikân, imsge, et stasis, pose),
clôture du sanctuaire dans les églises anciennes. Elle était
ainsi appelée, parce qu'on y exposait de saintes images
à la vénération des fidèles. Dans les premiers temps de
l'ère chrétienne, les sanctuaires étaient exhaussés de
Suelques marches au-dessus de la nef, et fermés par une
lèture ornée de colonnes, de mosaïques et de fîresquesi
une ou trois portes y donnaient accès, et permettaient aux
fidèles d'en apercevoir une partie. Plus tard, les Icono-
stase furent remplacées par des tentures et des ^les,
puis enfin portées à l'extrémité du chœur et transformées
ou confondues avec les Jubés. Chez les chrétiens du rilg
•:;•.
•:t
IDE
}049
IDE
me, on donne fb nom à^Iconostases à des niches on ce<>
mM qui renferment des images saintes, et qne Toile
uniideaiia
IGOSI-DRA€HME, monnaie d*or de 20 drachmes, créée
en Grâce en 1833. Elle vatit 17 te. 90 c.
IDÉAL» LMdée exprimée par ce mot est celle d*an mo-
dèle parfait, d*un type de beauté qui n'existe pas dans la
réalitt, et que TarUste imite en cherchant à régaler sans
jamais y iMÛrvenir. Gicéron nous montre Phidias copiant
an modèle intérieur pour faire sa Minerve ou son Jupt-
ter (Hymfrien. Cest sur la théorie platonîdenne des idées
<nie repose la doctrine de Tidéal. Selon Platon, Tesprit
8 élève graduellement et par abstraction Jusqu'aux idées
pores, modèles parfoits, tsrpes étemels comme Dieu en qui
Ils résident. La beauté réalisée par Tartlste n'est qu'une
imparfaite image de cette beauté parfaite, exempte de tout
•Iha^. A cette théorie, qui repose sur le dogme de la ré-
imtscenee ( V. ce mot), on en oppose une autre, consistant
Eor l'esprit à prendre dans les objets de même nature
I parties qui paraissent les plus belles, afin d'en former
on font, qui derient ainsi le modèle idéal de l'artiste.
Dans les deux cas, ce modèle n'est toujours qu'une idée
àboaelle Fart cherche à donner une réalité; mais le se-
eond procédé est empirique; le premier relève surtout de
Il raison, le second de llmagination, et il peut conduire
à confondre la fiction avec Vidéal. Toutefois celui-ci,
((Qelle que soit l'ori^ne qu'on lui attribue, est le ratio-
ialisme dans Tart; il est opposé à cette doctrine qui ne
dôme d'autre mission à l'artiste que de copier grossière-
ment la nature, et oui est aujourd'hui le réeUisme. V,
Abt, Bcaiix-Abts, Reausve. R.
IDÉALISME, système qui a Joué un grand rôle dans la
philosophie, surtout depuis un siècle. Bans son sens le
pins Tulgaire, ce n'est ou'une exagération du Spiritua-
lisme; c'est Vimmatérialisme, puisqu'il prétend que les
sbjets matériels n'existent pas. Tel est l'idéalisme de Ber-
keley. Kant, par une analyse profonde de l'entendement,
arriva à un iaécUisme transcmdantal, qai diffère du prê-
chent en ce qu*il ne nie pas l'existence des objets; mais
en même temps il soutient que ces objets ne nous appa-
raissent pas tels qu'ils sont en soi, mais selon les formes
de notre sensibilité et de notre entendement. De là sortit
Tidielisme objectif de Schellins et Vidéalisme abeotu de
Hegel; dans ce dernier, l'idée confondue avec l'être
constitue l'esseace même des choses. Dans l'antiquité,
les Éléates andent ouvert la voîe à cet idéalisme outré ,
qni conduit au panthéisme. D y a un idéalisme moins
eiuéré, qui fait encore bien grande la part de la ndson,
nob qui ne méconnaît pas entièrement les droits des
KDs. Il est basé sur la théorie platonicienne des idées,
Platon supposant que la yéritable réalité n'est que l'idée
temelle r^MMant au sein de l'absolu. A cette doctrine se
rattachent, à des degrés différents, Desoirtes, Male-
bnnche, Boesaet, Fénelon, Leibniz. R.
IDÉE. L*idée ne peut pas être définie; c^est un fait
tfanple de rîntelligrâce, la rue isolée d'un objet; elle se
distingue par là du jugement^ qui contient l'affirmation.
Les idées se classent t 1* d'après leurs objets, en idée»
de modest litres et de rapports; S* selon qu'dles se
rapnortent à des objets réels, en idées concrètes, indivi"
émles, rdaiives, contingentes, et en idées nécessaires et
absolues; toutes ces sortes d'idées donnent lieu à la
question d'origine; celles à objets non réels sont les
me abstraites, générales et fictives; elles donnent lieu
à rechercher, non leur origine, mais leur formation;
3* sa point de Tue de la qualité, elles sont vraies, exactes,
précises, claires, distinctes, ou fausses, tneacactes, va-
oves, cbscures^ confuses, 4* au point de rue logique, on
les <fistingae en idées simples, complexes, composées,
coOeetioes. Descartes les divisait toutes en idées adven-
tiots, facHcet et innées, les premières acquises par l'ex-
périttce, les secondes par le travail de llmaginadon :
qnant aux idées innées, ce sont celles qui sont naturelle-
ment dans l'esprit et que la raison conçoit. La question de
formation pour certidnes idées ne donne Heu à aucune
difficulté, c^est un fait libre de l'intelligence : il n'en est
pas de même de la question d'origine; c'est par la na-
ture des idées qu'on peut la résoudre. Les idées tmfi-
viduelles et contingentes (sensibles) viennent des sens
ea de la conscience ; les idées nécessaires et (ù)solues
{nUdUctuelUs ou morales) sont des conceptions de la
Taison, ce sont les idées de Platon {V, InéAt), et celles
<pt Descartes appelle innées. Les atmbuer toutes, sans
distiLction, à rexpérienoe, c'est nier les idées néces'
moires de cause, de temps, d'espace, etc. '; c'est rayer la
laisso da nombre des facultés Intellectaellet. Cette
erreur des sensualtstes vient de ce qu'on est porté à
confondre les idées qu'on obtient au début de la eon»
naissance avec celles qu'on obtient ensuite à l'occasion
des premières. L'erreur contraire, en rapportant tout
à U raison • conduit à Vidéalisme. Pour être dans le
vrai, il faut reconnaître : 1*> que les sens nous don-
nent la connaissance des phénomènes du monde exte»
rieur physique; 2* que la coiMCtefics nous donne la con-
naissance des faits du monde intérieur, ou du moi;
3^ uue la raison nous fait concevoir la réalité substan-
tielle du monde physique, et la réalité substantielle du
mot; 4» que la même raison nous révèle immédiatement,
hors de nous, une autre réalité objectioe, un eon-mof
immatériel dont le caractère est absolu ^ nécessaire, et
qvA nous apparaît comme la condition du monde pky^
siaue et du mot; en un mot. Dieu. R.
IDÉES (Association des). V. AssocrATioir.
u>ÉB»-iMAGBs (Théorie des), théorie philosophique dans
laquelle les idées sont considérées, suivant le sens éty«
mologique de leur nom (en grec éidos^t idéa, forme,
image), conmie de véritables imaffes des objets, et comme
étant elles-mêmes l'objet immédiat auquel l'esprit s'ap-
plique dans le phénomtoe de la perception.' La théorie
des Idées-images, on, comme l'on dit encore, des Idées
représentatives, semble avoir eu pour orij^e l'impossi-
bilité de donner une explication posititive de la percep-
tion ; mais, en substituant la perception de l'idée à ceue
de la chose même, on ne faisait que déplacer la difficulté,
si même on ne la compliquait. Cest dans la philosophie
atomistique qu'il semble avoir été fedt pour U première
fois mention des idées. Démocrite supposait que ce que
nous appelons la perception est produit par certaines
émanations des corps, qui pénètrent Jusqu'à l'&me et
viennent s'y imprimer, en passant par les organes des
sens. Ces émanations ou effluves sont des figures sem-
bhibles aux corps dont elles se détachent. Telle fut aussi
la doctrine d'Épicure; Lucrèce, qui nous l'a transmise,
donne aux émanations les noms de vestigia, simulacra
(traces, images), et enseigne expressément que c'est ainsi
que nous connaissons non -seulement les formes, mais
les odeurs, les saveurs, les sons, en un mot toutes les
propriétés des corps. Telle est la théorie des Idées-images
sous sa forme la plus naïve, la plus grossière sans doute,
mais la plus intelligible encore et la moins illogique*
Car, quelques objecuons oue soulèvent toutes les parties
du système, à ne le prendre que dans son principe, on
comprend Jusqu'à un certain point que des images ma»
térielles fiissent impression sur une ftme matérielle, foiw
mée, comme tout le reste, d'atomes agr^^ liais que
penser de l'inconséauence des philosophes qid reconnais-
sent la spiritualité de l'àme et conaervent néanmoins l'hy*
pothèse des Idées-images? Aristote, ses disciples, presque
toute la philosophie scolastique, Locke enfin, ont mérité
ce reproche. Le premier pensait que Time ne reçoit la
notion des objets extérieurs eue par un intermédiaire,
celui-là même qu'il appelle formes ou idées seeuibles •
« Le sens, dit-il, est ce qui est capable de recevoir ces
idées sans en recevoir U matière. » Bt tons les efforts de
l'école tendent effectivement à expliquer comment les
idées se spiritualisent, pour ainsi dire, en passant da
dehors au dedans. On peut prendre une notion som-
maire, mais assez exacte, des artifices et des subtilités
de pensée et de langage auxquelles le pâripatétisme a en
recours pour atteindre oe but, en lisant le cbapitre qoe
Halebranche (Recherche de la vérité, 1. m, n^ parue,
ch. 2) a consacré à la critique de ce système. Quel qu'il
en soit, les doctrines d'Aristote, transportées presque de
toutes pièces dans la scolastique, y perpétuèrent la tra-
dition des Idées-images, sous le nom d* Espèces (F. Bs-
ptee); et, malgré les rares protestations de quelques
esprits plus indépendants, tels que Duns Scot, qui trou-
vait avec raison que l'idée ainsi comprise n'est qu'un
embajus de plus, on continua de croire et d'enseigner
que la perception des objets n'est possible que par rin-
termédiaire des idées, et que celles-ci sont les images
des choses. La phUosophle cartésienne finit, il est vni,
par entendre les idées dans un tout autre sens; mais
Locke conserva l'ancienne théorie : « Il est évident, dit-
« il, que l'esprit ne connaît pas les choses immédiate-
« ment, mais seulement par l'intermédiaire des idées
« qu'il en s, et, par conséquent, notre connaissance n'est
« vraie qu'autant qu'il y a de la conformité entre nos
« idées et leurs objets. » Or, ou ces paroles ne signifient
rien, ou l'idée ne peut être conforme à l'objet qirautant
Îu'elle en est la copie, c-à-d. l'image ; et id se repro-
uisent avec toute leur force les objections qu'on aurait
lUE
1050
IGK
pn également élever contre les itnwlaera des Êpienxiens,
contre les formes ou idées péripatéticiennes, et contre les
MpécM scolâstiqnes. Si Timage est matérielle, en qnoi la
perception de cette matière est-elle plus explicable que
celle de la matière des corps eux-mêmes? Et que ùàtron
antre chose que de doubler la difficulté ou de la dépla-
cer? En ontre, comment concevoir ces images circulant à
travers Tespace, s^ croisant, 8*y heurtant, ces milliers
d'images semblables ou différentes, émises simultané-
ment par un objet oue perçoivent des milliers de specta-
teurs? Et si, avec beaucoup de bonne volonté, on peut
admettre un instant que les images des choses visibles
ftosent impression sur une Ame matérielle, à la façon du
cachet sur la cire, que sera-ce lorsqull s'agira des images
du son, de la résistance, etc., et de l'impression faite
par ces images matérielles sur une Ame immatérielle?
Buppose-t-on des images immatérielles? Ce sont d'autres
contradictions : que peut-on entendre par des images im-
matérielles de la matière? Gomment procèdent-elles des
corps, et comment agissentr-elles sur T&me? Enfin, de
quelque côté qu'on prenne la théorie des Idées-images,
quelques modifications qu'on lui fasse subir, elle aboutit
toujours à un ensemble de résultats absurdes, dont le
plna curieux peut-être est celui aue Berkeley et Hume
ont très-logiquement déduit de la doctrine de Locke, sa-
voir, que les corps n*existent pas, ou, ce qui revient au
même pour nous, que nous ne savons absolument rien
de leur existence, puisque, oe les connaissant que par les
idées et n'ayant aucun moyen de comparer celles-ci à
leurs prétendus originaux, nous ne savons, à proprement
parler, ni si elles leur ressemblent, ni si ces originaux
existent réellement. Ainsi, le scepticisme le plus complet,
ou, si l'on se décide résolument pour la négative, le ni*
hilisme, telle est la conséquence forcée du système des
Idées-images. B — b.
IDENTITÉ (du latin idem, le même), propriété qui ne
peut appartenir qu*à la substance et jamais au pnéno-
mène. Par elle un être est toujours et invariablement le
même, mais elle ne peut pas être attribuée inctifférem-
ment à toute espèce aêtres. Dans les corps inorganiques
l'identité n'est qu'apparente, parce que les molécules ma-
térielles dont ils se composent sont soumises au change-
ment. Chez les êtres vivants, la partie matérielle, se
renouvelant sans cesse, ne comporte pas l'identité; celle-
ci ne consiste pour eux que dans la persistance du type
de chaque espèce; elle dépend par conséquent de la con-
tinuité dans l'ordre et dans le mouvement. iMais la véri-
table identité n'est pas encore là; elle ne peut se trouver
que dans un être un et simple, comme l'&me. L'identité
est donc l'unité continue de l'être qui n'éprouve aucune
altération dans sa substance, dans un être spirituel qui
pense, qui veut, et qui à toutes les époques de sa vie peut
se retrouver tel qu'il était antérieurement. Une telle iden-
tité, qui est celle du mot, est prouvée par la conscience
et la mémoire ; elle est une garantie de la responsabi-
lité morale, et, par suite, de l'immortalité de notre &me
(V, Amm\. -— On donne quelquefois le nom de Principe
tidentiii au principe ae contradiction {V,ce mot), —
La doctrine de Videntité absolue est le svstème de Schel-
Ung, qui regarde comme absolument identiques le sv^et
et l'objet, le moi et le nota-mot, tous les êtres étant con-
fondus en un seul être unique, répandu partout, dans
l'espace et dans le temps, étranger à lui-même, et s'agi«
tant sans cesse dans une évolution indéfinie.
• L'identité se constate, dans les affaires civiles d'un
murticulier, par la production des actes de l'état civil, ou,
a défaut, d'un acte de notoriété. Celle d'un fonctionnaire
public dont on invoque un acte dans un lieu étranger à
ion ressort, se prouve par U légalisation de sa signature.
La personne qui demande un passe-port doit , al elle
n'est pas connue de celui qui le délivre, ou si elle ne
produit un autre passe-port non encore périmé, faire
attester son identité par aeux témoins devant le commis*
■aire de nolice. V. InnivmoALrriL R.
IDÉOGRAPHIQUE (Écriture). V. ÉcairuEB.
IDÉOLOGIE (du grec idea, idée, et logos, étude), nom
que prit le oondillacisme à la fin du xvni* siècle. Con*
dillac avait particulièrement porté ion attention sur deux
points : l'origine de nos connaissances, et la puissance des
signes. L'idéologie s'attacha à ces deux points presque
exclusivement, en traitant de l'analjrse de l'entendement
et de l'origine du langage, y compris quelques vues re-
marquables sur la grammaire générale. Garât, enseignant
f idéologie à l'École normale, était professeur d'onâyia.
Cette Mialyse n'était autre que celle de la sensation, re-
gardée comme la source de toutea nos idées, an mord I
comme an physiqne. La science de fAme était réduite à
n*être qu'une partie de celle dn corps, et la peycbologie
une branche de la physiologie. Le développcânent oom*
plet de l'esprit humain devant sortir de la même sonroe,
Destutt de Tracy, à la suite de Condillac, fait venir la
parole du gloussement, du cri animal. Ce point de départ
admis. Il développe avec un grand talent d'analyse *a
manière dont les langues ont dû se former, et per-
sonne n'a précisé avec plus de netteté le rèle des parties
du discours. L'association des idées, dans ses rapports
avec les signes, occupe aussi une grande place dam
Vidéologie, La morale nSpond entièrement à son principe.
L'unique but de l'homme est de se conserver; le bien,
c'est ce qui conserve et perfectionne l'organisme; le mal,
ce qui le détériore ou le détruit. Volney, dans son Coté"
chisme de la loi nahirelle^ développe cette morale, qui
n'est qu'un affligeant égoîsme.
Outre les idéologues dont les noms précèdent, il y en
eut d'autres également recommandables par leur carac-
tère et leur talent ; tels furent Cabanis, Chénier, Daunou,
Ginguené. Ils firent pour la plupart une opposition au
gouvernement d'alors, ce qui leur attira l'antipathie
et les saroasmes de l'empereur Napoléon I*', antipa»
thie qui alla jusqu'à lui faire supprimer l'Académie des
Sciences mondes et politiques, qu'il regardait comme le
foyer de Vidéologie. Elle vé<»it encore <{uel^e temps
dans la petite société d'Auteuil, pour mounr bientôt mo-
difiée et ensuite abandonnée iMr Laromiguière, Degé-
rando, et Maine de Biran. R.
IDIOME (du grec idtdma, chose propre, particularité).
Appliqué aux langues, ce mot désigne une langue propre
à une nation, et, par extension, le langage particulier à
une province. F. Langub, Dialecte, Patois. P.
IDIOTISME (du grec idios, propre, particulier), mot
qui signifie proprement « locution particulière A une lan-
gue. » L'idiotisme consiste, soit dans l'ompioi des mots,
comme en français aller, se porter, dans le sens de être
dans tel ou tel état de santé ; soit dans la manière de les
arranger, comme : si j'étais que de txms, construction
oui n'est conforme aux règles d'aucune langue, mais <|ue
1 usage a consacrée dans la nôtre. Lorsqu'on veut distin-
guer les idiotismes propres à une langue en particulier,
on leur donne un nom analogue A celui de cette langue:
les idiotismes de la langue française s'appellent galli^
cismes , ceux du grec Mllénismes , ceux du latin lati-
nismes, ceux de l'anglais anglicismes, ceux de rallemaod
germanismes, etc... P.
IDOLATRIE (du grec éidôlon, efligie, image, et latréia,
adoration ), culte des idoles ou images de la Divinité
prises pour la Divinité elle-même. Le fétichisme , le sa-
Déisme , le polythéisme, sont des formes de TidolAtrie.
IDYLLE (du grec eidullion, diminutif de eidos, petite
pièce, morceau détaché). Ce mot, chez les Anciens, s'ap-
pliquait A tous les petits poème» dont le si^et était une
description, un tableau. Ainsi Théocrite a donné le nom
d'idylles A ses poèmes, qui roulent les uns sur des sujets
champêtres, les autres sur des sujets erotiques, ou dra-
matiques, ou même épiques , etc. Ausone a fait de même
pour ses poésies détachées, où l'on trouve des vers sur
la PAque, un éloge funèbre de son père, une description
de sa petite campagne, etc. — Chez les modernes, l'idyUe
est une variété du gente pastoral. Elle diffère de l'églogne
en ce qu'elle est «toHJours un récit ou une description,
qu'elle ne prend point la forme du dialogue, et qu'elle est
moins animée. V. Églogob, Pastorale (Poésie). P.
IF, petit échafaudage de forme pyramidale, destiné à
recevoir des lampions pour les illuminations.
IGEL (Monument romain d'), dans la Prusse rhénane,
près de Trêves. C'est une sorte de tour carrée de près de
5 met. de côté, haute de U met, terminée dans sa partie
supérieure en pyramide, et surmontée d'un globe ter-
restre sur lequel un aigle semble prendre son essor.
Quelques savants lui attribuent un caractère et une des-
tination funéraires; d'autres supposent qu*il fut élevé
pour célébrer, soit la naissance de Caligula, soit le ma-
riage de Constance Chlore avec Hélène. Cette dernière
conjecture expliquerait un bas-relief de ce monument^
représentant un homme et une femme se donnant la
main : on y remarque aussi un repas de famille, des at-
tributs de commerce, un berger PAris, des scènes de
danse et de jeu. Une inscription fruste semble indiquer
Sue la tour fut élevée A la mémoire du marchand Seôin-
Inus Secorus, fondateur d'Igel.
IGNORANCE DU SUJET, Ignoratio eIsncAt, sophisme
qui consiste A s'écsrter du sujet , A prouver autre chose
que ce qui est en question ou ce que personDS ns cou*
ILI
lOSl
ILI
teste, à prêter à Tadvenaire dm opinion qni n*e8t i»s la
■tenue. Ce sophisme est le vice habitael des discussions:
pva l^éfiter, il faut s'attacher an point précis de la qnes-
neo, bien définir le sujet, et fixer le sens des termes.
Dsns YHoracê (acte, iv, se. 2 ) de Corneille, il y a igno-
nmùB d^ tuiet^ et, par suite, méprise, entre le vieil Ho-
iKe, qui croit que son fils a fui par peur devant les
Curiaces, et Valère, qui ne parle que d*une fuite simulée
pour mieux assurer la victoire. L'argumentation de J.-J.
Rousseau contre Molière, dans sa Lettre sur lerspêctade»,
repose sur un sophisme du même genre.
IHRÂM, manteau de pénitence dont se couvre le pè-
lerin musulman en approchant de la Mecque. 11 est com-
posé de deux pièces de laine blanches, sans coutures.
ILDEFONSB (Château de Saint-). V. Graiua (U).
ILIADE, Tune des deux grandes épopées grecques,
psTTenues Jusqu'à nous sous le nom d'Homère. Selon
Hérodote, aie a dû être composée 400 ans avant cet his-
torien, c-j^. au DL* ou au x* siècle av. J.-C; les faits
qu'elle raconte appartiennent au xu* ou an xiii*, de
lorte qu'entre ces faits et le pofime il s'est écoulé plu-
sieurs siècles : mais, comme, dans les temps antérieurs à
rhistoire, la civilisation ne se transforme que lentement,
on peut regarder Vfliade comme une peinture des moeurs
des temps héroiques en ^néral, et, à ce titre, c'est une
eeovre précieuse a consulter quand on veut refaire l'hie-
toire des dges primitifs de la Grèce. Toutefois, dans l'in-
tervalle de temps qui s'est écoulé entre l'/ltode et
YOdysséêf les usages, les idées, les croyances ont subi
des diangements assez considénd>les, pour que la plupart
des savants aient cessé d'attribuer ces deux épopées k un
même poète, et se soient rangés à l'opinion antique des
ChorizotUes (V, ce fnot)^ qui reconnaissaient deux Ho-
mères. Quant à V Iliade elle-même, l'étude des œuvres du
même genre produites d'une manière originale et sans
modèles antérieurs par d'autres nations, soit en Occi-
dent, soit surtout dans llnde, a montré la façon dont
elle a dû être composée par son auteur. On sait par Ho-
mère lui-même qu'au temps de la guerre de Troie, et
SQssi dans les siècles qui suivirent, les actions célèbres
des guerriers, les histoires divines, les traditions, étaient
chantées dans les réunions des hommes par des aèdes ou
improvisateurs, qui accompaf^iaient leurs récits du son
continu et peu varié d'un instrument ( V, Aànss) ; on a
£ea de croire aussi que les Grecs de ces temps anciens
ne pratiqutdent pas encore l'écriture : c'est donc le
rhythme et la mesure qui soutenaient la mémoire des
sèdes ^ perpétuaient le souvenir de leurs chants. 11 se
forma, dans la Grèce asiatique et dans les lies, de véri-
tables écoles d'aèdes, dont l'unique occupation fut de
répéter les chants de leurs maîtres et d'y ajouter leurs
propres rédts. Homère fut le plus célèbre d'entre eux.
Les clumtres épiques des temps postérieurs se rattachèrent
à loi , complétant son œuvre, y mêlèrent des récits qui
forent répétés comme des fragments du maître, et for-
mèrent idnsi la génération des rapsodes hùmérides; il
eo existait encore au temps de Platon, et probablement
longtemps après lui. On ne peut guère douter que, lors-
que Solon entreprit de réunir en un corps les œuvres
d'Homère, il n'ait rassemblé à la fois des firâgments écrits
et de simples chants récités. Le travail de Pisistrate,
Deaucoup plus complet, fit regarder cet homme politique
comme le y^tabie restaurateur d'Homère; en effet,
Ttsuvre des Diascéoastes (V. ce mot) ou arrangeurs ne
fut pas une simple compilation, mais l'unification de
morceaux dispersés et souvent incohérents, dont il leur
Mut rejeter un grand nombre. Les éditeurs qui vinrent
après continuèrent le travail de Pisistrate; l'édition de la
Cassette, composée par Aiistote pour Alexandre, prépara
le minutieux et savant examen des critiques d'Alexan-
drie. C'est après ces remaniements successifs crue fut
enfin arrêtée la forme sous laquelle Vlliade et VOdyssie
sont parvenues jusqu'à nous.
L'unité de VlUade est-^le l'œuvre de Solon el de Pisis-
trtte, ou bien »-t-elle été conçue par Homère lui-même?
Le grand événement historique raconté dans les poèmes
i'HomèrB suffit à donner à une épopée son unité de com-
position; Tunité épique est en elle-même une chose
ligne, et ns constitue qu'un cadre, dont la grandeur
peut s'étenÂre ou te rétrécir à volonté, et où viennent se
plieer, sans fin et sans difficulté, des épisodes plus ou
moins dépendants du sujet principal et au milieu des-
quels œ sujet se développe sans se perdre. Tel est le
plan de VOdyssée; tel est même celui de l'/ltode, et, en
iênénd, de tons les poèmes épiques, anciens et mo-
dines. On doit observer que riltods n'a point pour sH|«t
la guerre de Troie, mais la colère d'Achille, e.«4-d« idi
accès de passion humaine, dont on suit la naissance, le
développement, les effets et la terminaison; c'est là une
unité toute morale, et dont la conception ne peut appar-
tenir qu'à un seul homme. On ne peut donc ôter à Ho-
mère que des fragments plus ou moins secondaires, inter-
calés par des rapsodes. — Un nombre très -grand de
personnages paraissent dans VHiad», hommes, femmes,
déesses et dieux. Leurs caractères lèvent certainement
établis par la tradition longtemps avant Homère; ils loi
étaient donnés tout tracés. Mais il restait à les mettre en
œuvre et à les conserver semblables à eux-mêmes pen-
dant toute la durée d'un grand poème. Cette unité mo-
rale et poétique des caractères dans Vlliad» prouve encore
qu'un seul homme est l'auteur du poëme.
Voici en abrégé le contenu de VHiade. Une querelle
s'élève entre Achille et Agamemnon au sulet de la cm-
tive Chryséis. Achille invoque Jupiter, qm se range ou
côté du héros. Agamemnon aveuglé livre, en l'absence
d'Achille, le combat aux Troyens : mais dès ce moment
les Grecs, auparavant victorieux , sont repoussés par de-
grés loin de Troie, et ramenés Jusque dans leur camp. Ils
comprennent que la retraite d'Achille est la cause de
leurs maux : une députation lui est envoyée ; Achille est
inexorable. Le combat reprend ; Hector et les lYoyens
emportent le camp des Grecs, qui abandonnent la terre
de Troade et se renferment sur leurs vaisseaux. Après
diverses péripéties de la lutte, dont Adiille est instruit
par Patrocle, son ami, celui-ci obtient d'aller combattre ?
il est tué par Hector, et sa mort amène le dénoûment.
Achille s'enflamme du feu de la vengeance, oublie son
ressentiment contre Agamemnon et les Grecs, court au
combat, met les Troyens en déroute, et tue Hector. Les
funérailles de Patrocle, la scène attendrissante où le
vieux roi Priam vient redemander le corps de son fils et
baiser la main qui l'a tué, enfin les funérailles d'Hector et
les lamentations des femmes, terminent de la fa^n la
plus grandiose cette épopée d'une composition si simple
ot d'une si parfaite unité. — Des épisodes de toute lon-
gueur et en nombre infini peuvent se loger dans ce
cadre; il y en a beaucoup dans V Iliade : mais leur
nombre et leurs proportions ont été calculés, soit par
le poète, soit par ceux qui , aux temps de Solon et de
Pisistrate, ont édité le poème, de façon à ne pas nuire à
l'ensemble et à l'intérêu Cette conception de l'harmonie
et des proportions des parties et du tout n'a rien qui
doive nous surprendre , car elle est un des caractères
propres du génie grec à toutes les époques de son histoire.
V Iliade a Joué un grand rôle dans le développement de
la littérature ancienne et moderne. Comme elle renfer-
mait les légendes d'un grand nombre de dieux, de héros
et de peuples, qui intéressaient le monde grec, elle a été
pour les siècles postérieurs une sorte de trâor où presque
tous les auteurs grecs ont puisé. Non-seulement elle s
été répétée par fragmente dans toute la Grèce par le^
rapsodes, et cela pendant plusieurs siècles , fournissant
ainsi à la poésie populaire comme aux hommes lettrés
la matière de leurs chants, mais elle a été un modèle
d'après lequel d'autres poètes épiques chantèrent à leur
tour les héros de cette guerre de Troie, dont Homère
n'avait pris qu'un court épisode (F. Grecque — Littéra»
ture). Les épiques modernes ont eu pour guide Virgile,
et, par Virgile, Homère. En dehors de l'épopée, V Iliade a
fourni des matériaux à presque toute la poésie grecque :
les faits qu'elle raconte souvent en un court résumé, re-
pris par le drame ou chantés sur la lyre, ont reçu sous
ces formes nouvelles un plus grand développement. Les
dieux ont été acceptés parles poètes des siècles suivants,
tels que VIliade les avait dépeints ; seulement leur ca-
ractère et leurs actions ont reçu les lentes modifications
qu'une civilisation plus avancée devait leur faire subir.
De la Grèce, ces dieux ont passé dans la poésie latine ; ils
sont dans Virgile à peu près ce qu'ils sont dans Homère;
et enfin, d'Homère et de Virgile, ils sont venus Jusqu'à
nous, ayant presque perdu leur signification çymbolique,
mais aytpst encore leur figure et leurs attributs. Nous en
dirons autant des héros et des scènes de VIliade : n'ont-
ils pas rempli la poésie ancienne et moderne! Enfin les
arts du dessin ont puisé sans relâche à cette source iné-
puisable : non-seulement les sculpteurs et les peintres
grecs cherchèrent là leurs inspirations, et en tirèrent un
grand nombre d'œuvres adtnirables, mids les artistes
modernes, nos écoles de peinture et de sculpture, ne
trouvent nulle part idUeurs de sujets plus élevés ou plua
pathétiques. On pent donc dire que, de toutes les œuvres
de poésie, il n'en est ancone qui ait une importanoe "^^'^
ILL
I0S2
ILL
Murable à Vlluidê, dans rbistoire des lettres et des arts
de rOcddenu F. It Wood, On Uis origifuU Gmiw ofB<H
«MT, 1769; Wolf, ProlegomênaadHomerumfil^iPajo»
Knigfat, Nouoeaux ProUgomena ad Bamerwn, 1814;
Doffu-Hontbel, Histoire dis poésies homériques. En . B.
lUAQUE (Table), bas-relief ea slac, découvert au
xvn* siècle dans les mines d'un temple sur la voie Ap-
pienne, et ainsi appelé parce qu*on y voit représentés les
principîaux sc^ets de la guerre d*llion ou Troie. Les pas-
sages des poètes dont les si\]ets ont été tirés sont gravés
en deux colonnes qui divisent la Table en trois grandes
parties. On suppose que ce monument servait aux gram-
mairiens pour mieux faire comprendre aux Jeunes gens
les événements racontés par Homère. La table Iliaque est
conservée à Rome, au Capitole.
ILLAPS , en termes de Théologie, celui qui se trouve
dans une sorte d*extase contemplative.
ILLINOIS (Idiome). V. Miami.
ILLUHINATIONS. V. ce mot dans notre Dictiomnatre
d$ Biographie et d* Histoire,
ILLUMÔnSME, sorte de mysticisme vulgaire, dont le
caractère essentiel est, chez les adeptes, la prétention de
s*élever à la connaissance du surnaturel , surtout en ma-
tière religieuse. D'après son principe, énoncé par Swen-
denborp, que TEntendement est le réceptacle de la lumière,
ruinminisme doit mettre rhonune en communication
avec le monde spirituel, en commerce avec les esprits, et
lui découvrir les mystères les plus obscurs. C'est moins
une doctrine qu*un état de Tàme contagieux et suscep-
tible de revêtir des formes différentes. U tient à la théur-
gie chez les derniers Alexandrins , au gnosticisme dans
les premiers siècles de Tère chrétienne ; comme le gnos-
tique, ruiuminé ne contemple pas ce qu*il voit, mius ce
qu'il ne voit pas. Aux xui* et ziv* riècles, les sectes qui
se rattachent au Joachimisme s'en rapprochent plut ou
moins. En Allemagne, les Beg^urds donnent au ioachi-
misme une teinte métaphysique qui annonce l'illumi-
nisme de Jacob Bœhm. Celui -ci devint un des plus
célèbres représentants de la secte : son ignorance le ren-
dait plus propre à recevoir la lumière d'en haut, et ce ne
fut qu*a|>rès trois visions qu'il prit la plume. Avec lui
Tilluminisme devint un obscur système de métaphysique
et de panthéisme. La secte des Rose-Croix le plaça sur
le terrain de la chimie, ou plutèt de l'alchimie, en pré-
tendant découvrir les mvstëres de la nature. Dans les
nombreux écrits du Suédois Svedenborg, rilluminisme
embrasse l'univers entier, le ciel, la terre et même l'en-
fer (K. ZHi Ciel et de.VEnfer, Londres, 1788, in-4*; Des
terres australes el ptatnétaires , et de leurs habita$Us,
Londres, 1758 ). Vers 1754, Uartines Pasqualis affilia l'ii-
luminisme à quelques loges maçonniques, et lui donna
on caractère cababstique, prétendant à des manifesta-
tions visibles au moyen d'évocations théufgiques. Saint-
IfarUn, initié par Martinez, renonça à cette foUe pour
l'enfermer dans la théosophie pure. L*illuminisme de
Saint-Martin se montra chez guelquea personnages de la
Révolution, et ce philosophe inconnu fut enveloppé dans
les poursuites dirigées contre Catherine Théot, Dom Gerle
et plusieurs autres. Mais le véritable illuminisme poli-
tique, au xviit* siècle, remonte au Bavarois Weishanpl ,
oui le répandit par toute l'Allemagne et même en France ;
il no se proposait rien moins que l'abolition de la pro-
priété , de l'autorité sociale et de la nationalité ; il aspi-
rait à faire du ^nre humain une seule et heureuse famille,
arrivant ainsi aux rêveries d'un utopisme extravagant.
F. Illumdiés, dans notre Di^ionnaire de Biographie et
SBistoire, R«
ILLUSION, erreur des sens qui nous fait percevoir les
objets autrement qu'ils ne sont en effet, ou oui nous fait
Ï»rendre l'image, c-à-d. les apparences de l'objet, pour
a réalité. Cette dernière sorte d'illusion est partioulière-
ment celle que peuvent produire les œuvres dramatiques
et les œuvres de la peihture. Selon la remarque de Mar-
montel, l'illusion, dans la tragédie, ne peut pas être
complète, parce qu'il nous est impossible de faire abs-
traction du lieu réel de la représenution , des invrai-
semblances forcées du spectacle qui se déroule sous nos
yeux, du jugement oue nous portons et sur l'csuvre sou*
mise à notre apprédation et sur les scteurs qui en sont
les interprètes. L'illusion ne doit même pas être com-
Slète, car alors elle serait révoltante et péniblement
oulonreuse; il faut qu'une réflexion tadte nous aver-
tisse, par exemple, que le meurtre de Camille ou de
Zaïre, les convulsions d'Inès empoisonnée, ne sont que
des fictions, et modère par là l'impression de la terrour
et de la pitié. Dans le comique, rien ne répugne à une
pleine illusion, et limpresdon du ridicule n% pas besoin
d'être tempérée comme celle du pathétique : toutefois*
des pièces comme le Misanthrope ou l'Avare sont, dans
les détsils et dans l'ensemble, dans le caractère et dans
l'intrigue, des compositions plus achevées qu'on n'en
peut voir dans la nature; et l'illusion théâtrale, si elle
était complète , empêcherait de voir cette perfection «ui
décèle un art suprême, et dont le sentiment est un des
plaisirs du spectacle. — L'illusion semble aux esprits
grossiers le principal ou même l'unique but de la pein-
ture. Mais l'imitation exacte de l'objet, U reproduction
identique des appsrences est fort loin d'être la perfection
de l'ait, soit <|ue l'on considère dans une œuvre la diffi-
culté d'exécution, ou les effets qu'elle produit. Que l'on
cite les raisins de Zeuris, becquetés ]Nur les oiseaux, et
le rideau de Parrfaasius, qui trompa Zeuxis lui-même :
cela prouve le peu de fondement de certaines admira-
tions, et la dispontion qu'on a eue de tout temps à s'en-
thousiaamer pour les puérilités de Part Qui né sait à
aaels leurres grossiers les animaux se laissent prendre ?
n'est point de grissille, point de peinture de décor
quelque peu soifpée, qui ne fssse illusion, même aux
gens les mieux instruits des procédés et des effets de
l'art. D'un autre côté, cette imitation exacte d'où résulte
l'illusion des sens, par cela seul qu'elle exdut le beau
idéal et tout idéal, ne saurait exercer sur l'esprit qu'un
charme très-borné. Si une symphonie oui imite un orage
était prise pour un orage véritable, elle n'exciterait au-
cune admiration pour le musicien et pourrait même faire
naître un sentiment désagréable; si, dans un passage de
musique qui imite le brait de marteaux tombant sur
l'enclume , l'illusion était telle qu'on crût entendre de
véritables manteaux, on ne s'aviserait pas d'applaudir, et
l'on éprouverait tout aussi peu de plaisir que lorsqu'on
passe devant l'atelier d'un forgeron. De même, en pein-
ture, quelle femme soutiendrait le spectacle du massacre
des Innocents, si le tableau lui causait une entière illu-
sion ? Quel homme verrait sans horreur Judith tenant
la tête sanglante d'Holopherne? Si l'imitation pouvait et
devait être portée jusqu'à l'illusion complète, on firémi-
rait au lieu d'éprouver du plaisir. Si liUusion était la
première partie de la peinture, les premien peintres
seraient ceux qui ne traitent que les plus petits détails
de la nature, et le dernier de tous les genres serait celoi
de l'histoire, parce qu'il se refuse plus que les autres à
la parfaite illusion. Des objets de peu de saillie, tels que
des moulures et des bas-feliefs, parfois aussi des fleun
et des fruits, pourront tromper les sens, an point de
mettre les spectateun dans la nécessité de recourir au
toucher pour s'assurer de la vérité : mais l'illusion s'af-
fsiblit à mesure que les objets sont plut «rands, et 11 est
sans exemple qu'un tableau composé de plusieun figures
ait jamais fait croire au spectateur qu'il voyait des
hommes véritables. L'illusion, qui ne ns!t souvent que
de l'inattention et de la surprise, peut être produite par
les plus mauvais ouvrages, ^ ce n'est point l'illusIoD
causée par les ouvrages de Raphaël ou de Michel-Ange
qui leur a obtenu l'admiration des siècles. Les coloristes
sont, parmi les peintres, ceux qui arrivent le plus aisé-
ment a produire l'illusion, et cependant on ne leur donne
pas le premier rang parmi les artistes. L'imitation la
plus prochsine de la réalité n'est pas le seul but de la
peinture : il y a des beautés d'un genre différent et supé-
rieur , oui font la grandeur de 1 w, telles que l'abon-
dance» l'originalité et la hauteur des conceptions, le
choix des attitudes, l'agencement ingénieux des groupes.
La seule illusion que Fart doive toi:4ours se proposer
d'atteindre, c'est que !• tableau puisse rappeler si bien
le vrai par la justesse de ses formes, par la combinaison
de ses tons de couleur et de ses effets, que l'image fasse
tout le plsisir qu'on peut attendre d'une imitation de la
vérité.
ILLUSTRATIONS, nom mi'on donnait jadis aux orne-
ments colœiés des manuscnts, et qui s'applique si^our*
d'hui aux gravures sur bois interôalées dans un texte
imprimé, vée illustrations bien conçues et bien faites
sjoutent à la clsrté du texte, lui donnent plus de lumière
(du latin lux\ d'où le mot a été formé.
ILLYRIEN (Idiome). L'idiome des anciens Rlyriens sa
rattachait à la souche thrace. Aujourd'hui on appelle
Jllyriens les idiomes slaves de ta ^unille orientale,
c'est-à-dire le croate, le v)ende, et le servien on serbe.
Dans un sens restreint, l'illyrien moderne n'est autre que
le dalmate{V, ce mot), V. Dolci, De iUyricœ lingum
vetÊUtate et amçlitudime, Venise, 1754, in-8« ; B. Cassius,
Institutionum lingum iUyricœ lib. b, Roms, lfi04, iii-8*t
IMA
1053
IMI
MeaUa, Grammattea Imguœ Ulyncœ, Lorette, 1649 «
iiH8^,et Thésaurus Imguœ Ulyricœ, ibid. ; WuianouBky,
Qnmnatiea âlyrtona. 177^, in-^ ; Appendini , Gnim-
flutrt de la langue uljfrwnne, en itiu., 1812, in-^;
BeUoBztenecx , GoMophylacium ItUino^Ulyricorum ono*
matum, 1140, in -4*; Stolli, Lesmcon /otitio-tfa/ico-
«lyrtctim, Bade, 1801, S vol. in-4^,et Dic^onarwm
iUynco-toimo-ifaliciim, Raguse, 1806, 2 vol. in^^
DIAGE, en latin imago (dérivé d'tmttan, imiter), imi-
tidon d'un objet naturel qui vient à frapper nos yeux,
quand, pnr nempie, eet objet le réfléchit sur une surface
IwUe, sor on miroir, ou à fa surface de l'eau. Par exten-
ik», le mot tmogs est devenu synonyme de fortrtâJl ou
Hçwn : seulement, il est aujourd'hui réservé pour des
penonnages vénérés, comme linsqu'on dit les images de
Dieu, de la S^ Vierge et des Saints, et, tandis que, chez
les aodens Grecs, le mot éUum (image) servait à désigner
les productions des beaux-arts, nous n'appliquons plus
la qualification d'images qu'à des œuvres grossières.
AiMVs se dit encore de l'effigie en relief qui se voit sur
las monnaies et les médailles. — En Littérature, Vùnage
est une expression qui, pour donner de la couleur à une
pensée, pour rendre sensible l'objet de cette pensée, le
peint aous des traita qui ne sont pas les siens, mais ceux
oTon objet analogue. Ce n'est ni un tableau, ni une des-
~']ytioii achevée, mais un coup de pinceau vif et rapide,
I, sans pdndre les détails, laisse à l'esprit le plaisir
les deviner, n y a image dans chacun des vers sui-
Ktst
Xt monté tvr U fiUie, U atplre k deteendr§.
CouniLLB, Cinna, U, 1.
Lb taosfitf tombe, rhomme resta.
J.^ BooisBAU, Ode$, n» k la Fortmifl.
Le nettar que Ton $ert au mettre du tonnerre,
Xt dont nom tnhronM tons lei dlenx de le terre,
Ceet la êoyang». Iris.....
La FonTAira, Fabtn, X, 1.
lA vie eet vu tombât dont la pelme eet aux cienx.
C. DSLATXOn.
La prose comporte les images, aussi bien oue la poésie.
Boaanet, au lieu de dire que les hommes devenaient de
foor eo Jour |^us méchante, dît qu'tJs aUaÀmt e^enfim-
fmmt dans TtnaguiM. Toute inuge suppose une ressem-
blaiice, et renferme une comparaison; de la Justesse de
eette comparaison dépend la clarté , U transparence de
IMAGE (Droit d'). V, notre />icttoiwiatr0 de Biographie
gt dHistoire.
IMAGIERS, nom donné pendant le moyen Age aux ar^
tiates occupés à peindre, sculpter ou graver les images.
Us formaient deux corporations. La première, dans 1»-
maelle étaient des artistes sortis de toutes les classes de
m société, même des plus élevées, ne travaillatt que pour
FÊ^Sae ; on y sculpta aussi des manches de couteau, mais
CB travail fut abandonné comme profane. La deuxième
corporation travaillait plutôt en relief qu'en statuaire ;
tile ptignait, argentait, dorait et travaillait pour tout le
monde.
IMAGINATION, Faculté par laquelle l'esprit se forme
des idées qui n'ont pas d'objets réels. La nature de ces
idées montre qu'il y a deux sortes dlmagination;!» «pon-
lanét, 2<* réfiécM» on po^t^ua. La prenuère consiste à se
leprésenter vivement les idées ou images relatives an
■tonde sensible : la passion , la rêverie, la peur, iddent
an dévetoppement de cette sorte dlnu^dnittion. Dans oer*
tsdns états de l'ftme, tels que le rêve, le sommeil, le dé-
lire, elle substitue ses hallucinations aux véritables per-
ceptions des sens ; elle peut conduire an soomambnliûne»
Càta sorte dlmagination est commune aux hommes et
■nx animaux. La seconde sorte est hi seule qui mérite le
nom de faeuM eréaJtricê, parce que seule, à raide de ma-
tériaux fournis par la perception, conservés par la mé-
mobe, s^MTéa par TabstracUon, elle crée des formes qui
n'ont que la vie qu'elle leur donne, et qui sont plus on
moins la manifeàation de l'idée. Pour en venir là, elle
est soumise à certaines conditions dont l'ensemble forme
la sdeace do beau {V, BsTHériQVB). La première de ces
conditions est un idéal , un type parfait conçu par la
laison I fl Cuit, en outre , que la combinaison des élé-
ments soit ordonnée par le goût, sous peine de tomber
dans le monstrueux , le bizarre ou le grotesque; c'est
aloit que Malébranche a pu l'appeler la folle du logis.
Limagination est la ikculté estnétique par excellence ,
poiaqu'elle a pour but d'aider Tart a représenter l'idéal
par le réel; mais son action se fait sentir aussi dans lit
sdences, où elle peut conduire l'homme aux plus heu-
reuses découvertes comme aux plus folles hypotiiëses.
Dans la pratique de la vie, elle peut beaucoup pour le
bonheur ou le malheur de l'homme, selon qui! se forme
de la vie une image plus ou moins conforme à la rtelitéi
c'est alors que les déceptions ont parfois de cruelles con*
séquences. — L'Imagination ne doit pas être confondue
avec la Mémoire; elle ne s'en rapproche que lorsqu'elle
rappelle les objets sensibles avec une grande vivacité; on
l'a ^>pelée, dans ce cas, tma^tnaiton reproductive ; mali
il ne faut pas oublier que l'objet du souvenir est donné
comme absent, c'est le contraire pour l'Imagination. Celle-
ci diffère aussi de la conception^ qui a un objet réel, non
perceptible par les sens, mais q^^ nous atteignons par la
raison. F. Descsrtes, Des Passums do Vâme; Maleoran*
che, Rschorche de la fférUé, Entr^iens sur la morale; le
P. André, Essai sur le beau; Voltaire, Encyclopédie,
art. Imagination; Muratori, Délia forza délia Fantasia
umana, Venise, 1745 et 1766, in-8«; Bonstetten, Rechat'
ches sur la fiaturs et les lois de Vlmaginatum, Genève,
1807;Astnic, Disputatiode Phantasiaet Imaginations,
Mon^Uier, 1723, in-8<»; Meister, Sur l'Imagination^ en
allemand, Berne, 1778, in-8<^; Lévesque de Pouilly,
Théorie de l'Imagination, 1803, in-8*. Âkenside et De-
mie ont composé des pofimes sur rima^nation. R.
IMAM. ( V. ces mots dans notre DicttofifiatrvdsIKtH
IMARET. ( graphie et d'Histoire.
IMBLOGATION, nom donné quelquefois à la sépultnie
des excommuniés, dont les corps. Jetés à la voirie, étaient
recouverts d'un monceau de terre ou de pierres.
IMBRICATIONS, ornement d'Architecture particulier
au moyen âge. Il affecte la forme d'écaillés oe poisson
rangées les unes an-dessus des autres, à la manière dm
tuiles (en latin tmMcas) sur un toit. Il sert à décorer les
clochers, les ihmtons et 15P frises. Complètement arrondi
k l'époque romane, cet ornement devient ensuite ogival
et polyiobé. E. L.
IMBROGLIO, mot d'origine italienne, qui signifie dci-
ofKirs, confusion. On l'emploie en Littérature pour dèd-
gner une csuvie d'imagination , surtout une compositlott
dramatique, qui présente une intrigue compliouée, eoH
brouillée, et aont il est diflicile de suivre le fil. VHérOf
cittM de Corneille est un Imbroglio trasiqne, et le Mariage
de Figaro de Beaumarchais un spirituel imbroglio, w
eiige de l'imbroglio, qu'en oflirant une sorte d'énigme il
ne la rende pas tellement obscure, qu'il soit Impossible
ou même trop pénible de la deviner. G.
IMITATION. Le penchant à l'imitation, dont on trouva
des traces ches les animaux de l'ordre le plus élevé, sur*
tout ches le singe, est un des penchants prlmltift et e^
sentiels de l'homme. Cest lui qui enaenmre l'émulation ;
c'est sur loi que repose toute réducabilité. Même quand
l'cBuvre de Téducation est achevée , il continue de Jouer
un rôle important dans la vie humaine, et il peut seul
expliquer l'empire des bons îX des mauvais exemples.
Anstote a été Jusqu'à dire oue l'homme ne diffère des
autrea animaux qu^en ce qu'A est imitateur à un plus
haut degré.
niTTATioif UTTéaaiaB. Diderot, qui était bon Juge des arts,
adéfini l'imitation, larspréstmtatum arti/lcime d^un ohjet,
et rattaché à cette définition celle dn discours oratohre ou
poétique, qu'il appelle imitation par des voix articulées;
de la musique, qu'il appelle imitation par des sons; de
la peinture, qu'il appelle imitation par des couleurs, etc.
Il pouvait dire plus simplement <rae l'imitation est la
reproduction instinctive ou raisonnée des objets de notre
connaissance, et qu'elle est l'origine et le principe de
tous les arts. L'enfant contrefait les gestes et répète les
paroles; l'homme copie d'abord la nature, avec plus on
moins d'adresse, et plus tard en reproduit les Images
mêmes qu'il a tracées. Lindtation est donc le rapport
perpétuel de la nature et de l'art, depuis les ébauches
informes et grossières Jusqu'aux chefs-d'oravre. Ses pro-
cédés et ses règles se multiplient à IHnflni , parce qne lei
applications de l'intelligence sont infinies. La sdence
découvre et démontre; elle nlmite qu'à mesure qu'elle
se rapproche de la pratique et de l'art, comme dans la
médecine et la chirurgie, où 11 t a beaucoup d'écoles ,
c-èrd. d'imitateurs. L'industrie invente souvent, et sur-
tout perfectionne; mais elle vit d'imitations, si bien que
la loi a dû prendre les inventeurs sons sa protection, les
instituer propriétaires, et les garantir de cette imitation
dél<^e qui s'appelle contrefaçon. Le Jour où le brevet
expire , l'invention tombe dans le domaine public . et
appartient à tous les imitateurs. — Dans les arts aiiial
IM^
1054
IMI
fw dans les lettnt, rimitation est de droit ; car œa belles
Qocupatioiis de Tesprit humaio n*eiistent que grioe anx
modèles, pris dans la nature on dans les œurres des mal*
très. ■ Ceux qui ont créé Part, dit également Diderot ,
]i*ont eu de modèle que la nature; ceux qui Tont perfe&-
tionné n*ont été, à les Juger à la rigueur, que les imita-
teurs des premiers ; ce qui ne leor a point Mé le titre
d*bommes de génie, parce que nous apprécions moins le
mérite des ouTrsges par la première invention et la dif-
ficulté des obfltaciea surmontés que par le degré de per-
fection et Teffet..... Celui qui invente on genre d'imita-
tion est un homme de génie ; celui qui perfectionne un
genre d*imittrtioD inventé ou qui y excelle est anasi un
nomme de génie.» Ainsi, la vérité et la beauté, pour être
originales, n*ont pas besoin d*en être à leur apparition
rmière. Uhomme et la nature ne changent pas ; et, si
moade extérieur nous révèle tous les Jours et nous
réserve encore des mystères longtemps interdits à notre
curiosité, il y a longtemps que le monde intérieur, c-à-d.
les passions et les caractères, ne nous offrent plus de
découvertes k faire. La nouveauté dans les arts dépend
donc en général de la forme que le talent sait donner à
des sujets déjà traités, à des idées et à des sentioisnts
exprimés mille fois. Cette forme originale vient de rime,
de rinspiration personnelle; Thomme s*y révèle, non
Tartiste ou l'écrivain (K. Gémx). U faut chercher dans
les grands maîtres les exemples et les secrets de cette
Imitation féconde, qui est tantèt éloquente et sublime,
tantdt ingénieuse et délicate. Elle est bien différente de
limitation timide.et servile, ou purement artificielle, qui
ne volt dans les créations dn talent et du génie qu'une
iWe du oenre on plutôt un procédé dn mâier. Des es-
prits supérieurs et indépendants, comme Chateaubriand,
<mt cependant adopté de bonne fol cette tradition des
Imitationa obligées, ce bagage de machines épiques on
tragiques, telles que les songes, les récita, les voyages,
les combats des hommes et des dieux. Chapelain se
croyait un poète épique, parce qu'il avait semé dans sa
Pvidle les discours, les descriptions, les batailles, le del
et les démons, à la manière de V Iliade et de V Enéide,
Voltaire eut la même illusion, du moins dans sa Jeunesse,
et la fit partager k ses contemporains, qui n'eurent pas
Assez de goQt ou de hardiesse pour dénonoer dans ta
Hênriade des imitations aussi froides et aussi pénibles
que le récit de Henry de Bourboa on ses amours avec Ga-
brielle. Au reste, Ib auraient tous deux invoqué pour
leur Justification rautorilé de Virgile on du lisse. Ne
pouvaient-ils pas dire, eux et tous les faiseurs d'épopée,
qui sont imitateurs par excellence : « Virgile a trouvé
« dans VOdyttée le modèle du récit d'Éoée; il a em«
« pronté à Appolonios de Rhodes les plaintes et les fo-
c renrs de Didoo. Le Taaae a pris à Virgile l'idée de son
« Enfer et quantité d'épisodes, celui de i^amille, devenue
« Glorinde , celui de Soliman, caché dans un nuage, et
« paraissant subitement devant le roi de Jénualem
« comme Énée devant la reine de Carthage. Nous avons
« droit de faire comme nos maîtres. • Et vndment Ils
avaient ce droit, commun à tous les écrivains et à tous
les artistes. Cétait de plus une loi pour eux, une nécessité
Inévitable; car ils se trouvaient imitateurs même malgré
eux, puisqu'ils étaient prévenus dans tous les genres,
et forôès de dire de leurs glorieux devanciers ce que dit
Ëlaisaounent le métromane de Piron (la Métromanie,
a, 7),
Ds noua ont déi^Ma, dérobons nos nerenz.
On rencontre si peu d'esprits créateurs ou originaux,
que rien n'est plus ordinaire, en littérature, que les imi-
tations qui défigurent l'original, et ne sont que des cbu-
fres médiocres, telles que, par exemple, les tragédies de
Duels Imitées de Shakspeare. L'imitation ne mérite
l'attention des bons Jugea que dans deux cas, lorsqu'elle
est très-fidèle , bien sentie et bien écrite, ou lorsqu'elle
est à peine une Imitation, au point de ressembler à une
seconde Invention. Hors de là, imiter est le grand chemin
par où l'on court à l'oubli.
L'histoire des lettres et des arts ne présente que deux
grandes sources d'invention , le génie grec et le christia-
nisme; l'antiquité tout entière s'est inspirée du premier,
les temps modernes de l'un et de Tautre. Les Grecs
eurent le privilège d'être un peuple créateur, privilège,
U est vrai, partagé sur quelques points, au moins avec
les Hébreux pour la poésie lyrique. Mais les modèles des
antres genres poétiques, de la philosophie, de l'élo-
qUMice, de rhlatoirei leor appartiennent en propre, au
même titre que ceux dea beaux-orts. Leur merveDleat
génie fut tout ensemble inventeur et imitateur. Après
s'être Inspiré de la nature et de lui-même , il imitait ses
propres ouvrages. Cest ainsi qu*il tira le drame de Tépo-
pée unie à hi poésie lyrique , et transporta sur la scène
ces héros et ces récita d'Homère et dea poètes cycliques,
destinés à défrayer tant de tragédies Jusqu'au siècle
d'Horace ( V, VEpltre aux Pitons ) et Jusqu'à nos Joun.
Cependant, les véritables modèles de la grande et féconde
imitation doivent se chercher plutêt cbes les Romaine
(V. Latins — Littérature). Ennius, Plante, Téftnœ avaient
traduit ou Imité, non sans gloire, les poêles grecs, et
principalement les comiques. Les grands hommes qni
vinrent après eux demandèrent à la Grèce d'édairer et
de guider leur génie. Lucrèce emprunte anx Alexan-
drins, Cicéron à Démosthène et à Platon, Horace aux
poètes lyriques, Virgile à Homère et même à Apollonius
de Rhodes. Par une succession naturelle, qui est l'efiét
dn temps et des transformations sociales , après la révo-
lution la plus profonde qui ait remué l'univers, ces ad-
mirables élèves des Grecs deviennent des maîtres à leur
tour. Le génie moderne. Quoique soumis à la toute-puia-
sante influence de la religion chrétienne, n'échappe pas
à Tascendant inévitable des chefit-d'csuvre , et pense
tout d'abord à les imiter. Cest même à l'alliance du goût
antique et de l'esprit nouveau qu'il devra son originalité
et les beautéa nouvelles qu'il ajoutera aux immortels
monuments de ses devandera.
Comment donc imitaient Virgile, Horace et Cicéron?
Comment les grands écrivains modernes ont-Ils Imité leurs
illustres prédécesseun? Nos classiques du xvu* siède
sont-ils imitateun et originaux an même titre que Dante
et Hilton 7 La réponse à cette question a été faite d'avance
par l'un des meilleun critiques andens, qui écrivait, il
est vrai, dans la décadence du monde grec et romain,
mais après des merveilles qu'il était digne de comprendre:
Longin a éloquemment exprimé les caractères de l'imita-
tion, telle que l'entendent et la pratiquent' les hommes de
génie. « Celui-là seul est digne d'imiter les grands modèles,
que l'esprit d'autrui ravit hora de lui-même. Ces grandes
beautés que nous remarquons dans les ouvrages des an-
ciens sont comme autant de sources sacrées, d'où s'élè-
vent dea vapeura bienCaisantes qui se répandent dans
l'àme de leun imitateun ; si bien que, dans ce moment,
ils sont comme ravis et emportés de l'enthousiasme d'au-
trui. » Or, à qui ces grandes images s'^ipliquent-elles
mieux qu'à nos grands orateun et à nos grands poètes?
Le plus hardi, le plus impétueux de tous, Bossuet, s'est
fsit^ de l'Écriture sainte et des Pères, mêlés au goût de
l'antiquité et à son propre génie, une éloquence toute à lui.
Ces paroles ardentes qui Jaillissent de son Ame ne sont
souvent que des imitations, soit qu'il prenne à S' Jean
Chrysostome le fameux mot sur Jérémie, ssn/ capable
d'égaUr les lamentations aux oaiamités; soit qu'il simite
lui-même et remanie ses propres inspirations, en ap-
pliqjuant à la duchesse d'Orléans ce qu'il avait dit dea
vanités humaines dans l'Oraison funèbre de Henri de
Gomay. Fénelon est encore un des imitateun les plus
extraordinaires que nous présentent la poésie et rélo-
quence : il emprunte à Sophocle les traits les plus tou-
chante de son PhHoctète; et les vere du tragique grec,
traduite littéralement par l'écrivain chrétien, prennent
son accent et deviennent son langage propre. S'il conduit
Télémaque aux Enfers, et qu'il fasse repasser son héros
et son lecteur par cette route si familière aux poètes épi-
ques depuis Ulysse, le voyageur par excellence, il fait
d'une Imitation dassique et d'un heu commun de l'épo-
pée une création divine ; le sentiment moral et la foi lui
inspirent, dans la peinture des Champs-Elysées, dea ac-
cents qu'aucune voix humaine n'a surpassés. A cette
hauteur, l'imitation est égale aux créations les plus
sublimes. U faut qu'on nous avertisse de ce que le génie
doit à l'Écriture et à S^ Paul, à Homère et à Platon ; nous
n'avons entendu que Bossuet et Fénelon. Passons des
orateun aux poètes : nous trouverons une égale origi-
nalité, puisée aux mêmes sources. Corneille transporte
dans son héroïque dialogue les sauvages fiertés des héros
espagnols; avec ouelques lignes de Tite-Uve il fait le
plaidoyer du vleu Horace; avec une page de Sénèque,
traduite mot à mot, le discoun d'Auguste à Cinna; avec
un fïragment de Lucain , les ven les plus fien et les plus
mâles qu'on ait mis dans la bouche de César. Racine,
qui n'avoue pas toujoun ce qu'il doit à autrui (car il n'a
pas dit un mot de la Phèdre de Sénèque}, imite Euripide
à la manière de Fénelon , et la Bible à la mani^ de
Bossuet. Avec la souplesse admirable de son génie, il
IMI
1055
IMI
uK tels on bârnMMiieax ensemble la ptafllon de Phèdre
fltcflUedê IKâon, éclalréet da sentUnent chrétleii ; et,
tH lait parler Dieia lui-même par la bouche de Joad, les
Unet de Molle, lea Pianmes et les Prophètes Tiennent
M Ibndre dans les plus sublimes élans de la poésie ly-
iii|ae et de réioqaenoe. Tous ces grsnds écrivains se
neonnaiseent imitateurs, et proclament les Anciens leurs
attitrés. Boileau trouve ches Horace les modèles de la
adre, de Tépltre, de la poétique ; il use sans scrupule
des dèpomiUês du poète httin, et y mêle rhorreur des
méchants écrits, le bon sens profond et la rare droiture
de ion esprit. La Fontaine, inimitable par le style, met à
eontribution, pour les sujets de ses Ikbles, Ésope, Phèdre,
Bidpal, les fahliaiii, coaune un dnmaiBe oommun <toele
droit drimitadon poétique a mis à sa discrétion. On sait
le mot de Molière : « Je prends mon bien où Je le trouve. »
Aussi un critique célèbre d* Allemagne qui a*est acharné
inr lui, Schleael, lui reproche-t41 aigrement que si tous
les comiques italiens lui reprenaient ce au'il leur doit ,
ils le laisseraient nu comme la corneille d^Horaoe. H faut
rire d'une assertion pareille, et Ton renverrait Schlegel
m Mûanthrope et au Tartufe, s'il n'avait déclaré qu'il
leur préfère U Médêcm malffr^ ^u*' Ce qui résulte de
rkveu de Molière et de cette attaque puérile , c'est que
Halière est imitateur à ht fiftçon de tous les grands
On comprendra cette précieuse alliance de l'imitation
st de l'originalité, si l'on se pénètre de ces écrivains
wpérieurs, qu'on les compare a leurs modèles, et qu'on
nche retrouver, dans les beautés qui leur viennent du
dehors, leur propre accent et le langage de leur àme.
On la oomprendîra peut-être mieux encore, si l'on re-
garde an -dessous d'eux les imitateurs ordinaires, qui
o'ont que du talent, de l'esprit ou de l'habileté. Nous ne
parlons pas des copistes ni des plagiaires, senrilê Urotà-
]wm qui mettait Horace en coléâe, et qui a, de temps
immémorial, introduit la contrefaçon dans la littérature.
Sans descendre- Jusque-là, nous trouverons aisément,
par exemple en France, au xvu* siècle, de nombreux
exemples d'imitations intelligentes qui ne s'élèvent pas
Jusqu'à l'originalité. Voltaire écrit SémiramU pour avoir
son Athalie, comme il écrit Y Essai sur les mœurs, pour
sfoir son Discours sur VMstoùre universeUe. Au reste, il
ne pouvait rien imiter de Bossuet que l'idée philoso-
phioue de son ouvrage, tandis qu'il est nourri de Racine,
quMl en a constamment les vers sur les lèvres, et qu'a-
prèa avoir découvert chez lui le nom si heureux de
Zaïre, il fidt de Sémiramis une réminiscence conti-
Doelle d'AthalîB, Après Voltaire viennent ses imitateurs,
qui conservent et continuent les traditions secondaireB
de la poéaie et de l'éloquence, mais en ont perdu la vé-
dlable inspiration. Voici une liste de ce qu'on pourrait
appeler les illustrations tragiques des dernières années
du xvn* siècle, de tout le xvni*, et du commencement
du xix% si voltairien encore en tout. Nous suivrons l'ordre
ehronoiogique des succès, car tous en ont eu, et ces chefs-
d'œuvre des poéiea que nous allons nommer se trouvent
dans lea recueils appelés traîtreusement Répertoin du
Tkéâtrm français : Campistron, Longepierre, Lafosse,
Lagrange, Saurin^ Duché, Ijunothe, l^iron. Le Franc de
Pompignan, Guymond de la Touche, Lemierre, Saurin,
Defaelloy, Laharpe, Chamfort, Ghénier, Lemercier, etc.;
sous le 1^ Koapire, Luce de Lancival, Raynouard , Jouy,
Baour-Lormian, etc. ; sous la Restauration, Soumet, An-
oelot, Guiraud, etc. Gela ne ressemble-t-il pas à un né-
crologe littéraire 7 Essayez de mettre sous la plupart de
c« noms les titres des chefs-d'œuvre qui auraient dû
immortaliser ces fervents de la tragédie taillée sur le pa-
tton racinien,vou8 serez peutr^tre embarrassés plus d'une
Ma ; des littérateurs de profession le feraient sans doute :
mais pour eux, comme pour tout le monde, ces tragédies
SMt autant de livres qu'on ne lit plus, sans presque en ex-
cbpter celles de Voltaire; comme œuvre d'ensemble, elles
Bont si faibles, que les plus grands acteurs s'en détour-
nent parce qu'elles offirent trop peu de prise à leur talent,
tandis qu'il trouve toujours à se développer dans les pièces
de Gomeille et de Racine.
l'armi ces imitateurs, le plus curieux par la peine qu'il
se donne pour ijouter à ses titres de gloire celui d'écri-
fain et de poflte français est le roi de Prusse, Frédéric
le Grand. Chez lui, et même chez d'autres, limitation
tourne involontairement à la parodie de bonne fol; mais,
d nous revenons à des écrivains sérieux, nous trouve-
nns, daoa flmitatioa, d'autres caractères et d'autres dé-
finis. L'un dea plus ordinaires et des plus difficiles à
éiiter, c'est le pasticbe, qui n'es» point le nlagiat, mais
un emprant honnèle, adroitement ^os^t ^ lês idées
d'autmi s'encadrent parmi celles qiu appartiennent à
l'auteur. Le Tasse, c^ue nous citions tout à l'heure, cède
souvent à cette tentation, et Chateaubriand beaucoup plus
encore, dans son roman poétique des Martyrs, Le lecteur
y trouve le sacré et le profane, TertuUien et Virgile, in-
dustrieusement assemblés par fragments , et, à cèté de
ce placage, des beautés neuves et saisissantes comm<i(
l'épisode de Velléda , qui, cependant, n'est encore qu'une
réminiscence de Médée, die Didon, et de toutes les amantes
Jalouses et abandonnées.
De ces nombreux exemples, il est facile de conclure com-
ment l'imitation peut et doit être originale, à celles condi-
tions elle est permise et légitime, et àquel pomt le talent y
peut réussir. On voit en effet comment un esprit faeureiH
sèment doué se pénètre des grands modèles, et chercha
à s'approprier, dans la mesure de ses forces, ce oui fait
la supériorité de leur génie et de leur style, ou ae leur
moiitdrs, s'il s'amt des beaux-arts. — Pour que l'imitar-
tion littéraire soit féconde, il est bon ou'elle ne se dia-
perse pas sur un trop grand nombre d'objets. Les Ro-
mains disaient qu*ii fallaU craindre Vhomme qui ne saii
qu'un liwe {timeo hominem unius libri). Cela voulait
dire que l'intelligence d'un homme, concentrée sur un
maître tel que Platon ou Tacite, Pascal ou Bossuet, ac-
quiert, dans ce commerce long et intime , un degré de
pénétration, de vigueur et de puissance où il semblait
qu'dle ne dût Jamais atteindre. Cest alors que l'on peut
essayer d'écrire, si l'on a des idées. Non qu'il soit facile
ou même possible d'imiter le style des maîtres. L'un
d'eux a dit que le style ne peut ni se transporter, ni s'cU"
térer, et il ne s'est pas trouvé Jusqu'à présent d'imitateur
assez habile pour donner sur ce point un démenti à
Buffon. On peut s'inspirer de Tacite, de Bossuet, de Cor-
neille; on n'imite pomt leur magnifique langage, parce
qu'il ne s'apprend pas comme le maniement d'un pin-
ceau ou le mécanisme d'un instrument de musique.
Mais on puise, dans l'étude approfondie de leur pensée
et de leur expression , les qualités essentielles et géné-
rales qui leur sont communes avec tous les bons auteurs,
et qu'ils ont possédées au plus haut degré. Justesse, pré-
cision, rivacité, noblesse, naturel , etc. Les imitations et
les emprunts de détail conviennent aux écoliers, parce
qu'ils n'ont pas encore d'idées , et qu'ils ont besoin de
prendre dans les modèles les pensées et les termes qui
leur manquent; quant aux écrivains, ils doivent se les
interdire, parce qu'une mémoire trop fidèle accuse la
stérilité d'invention. Pour quelques emprunts heureux,
qui peuvent réussir surtout dans les vers, il y a trop de i
réminiscences qui déplaisent et fatiguent. Le même dan-
ger se rencontre dans la musique, où les compositeurs |
ne se font souvent pas faute de formules communes et
de phrases employées d^à , qu'ils déguisent de leur
mieux ; l'ennui du public en fait promptement Justice.
— n y a encore dans le style des imitations minutieuses
et presque mécaniques , destinées aux connaisseurs et
Suelquefois goûtées du public. Elles causent en général
e la surprise plutôt qu'un plaisir véritable ; elles res-
semblent à ces peintures qu'on appelle des trompê-4'œil,
et qui font l'admiration du vulgaire. A ce genre appar-
tient Vharmonie imitative , trop vantée des rhéteurs , et
qui, chez les excellents écrivains, natt souvent toute seule
d'un choix heureux des mots propres et expressifs. Ces
mots ont leur musique, et Imitent par le son la nature
même des objets : on les appelle des onomatopées. C'est
là que se trouve souvent le secret de cette harmonie tel-
lement sensible dans Virgile, dans La Fontaine et même
dans Boileau. Il faut laisser parmi les curiosités litté-
raires du XVI* siècle ces imitations puériles par les-
quelles Ronsurd et ses élèves prétendaient reproduire
Jusqu'au chant et au vol de l'alouette :
Elle eat guindée du séphlre,
SubUme eu Vêir vire et rerire.
Et 7 dëollqne nn joli cri
Qui rit, guérit, et tire Tire
Dee eqprita mieux qne Je n'écri.
Hais ce danger de l'harmonie imitative n'est que se-
condaire t il y an a de plus sérieux dans le choix des
modèles et dans l'usage qu'on en fait. Le poût est la règle
de l'imitation , à laquelle il doit en partie sa naiasiuice.
Nous en avons indiqué les caractères et les lois ( V, ce
mot) ; c'est lui qui Juge les écoles ; ce n'est pas toujours
lui qui les fait. On a nu remarquer dans Horaee la folie
de ces disciples du philosophe Porcins Latro, qui, à force
de boire du cumin, s'étaient rendus pâles comme leur
IMI
1056
IMI
I maître • et croyaient avoir acquis sa sdenoe. Leur his-
toire n*est-elle pas celle des artistes et des poètes éche-
velés de notre siècle? Oiez les esprits communs, Timitar
tîon s'attache aux caractères extérieurs, aux sInguUurités
et môme aux ridicules, par exemple en matière d*art ou
de modes. Nous l'avons vu mille fois , dans ce siècle qui
■emble avoir épuisé à la fois tous les genres d'originalité
et d'imitation. Du reste, on a reproché aux Français
d'être imitateurs par excellence, et de courir volontiers
après les inventions, les idées et même les extravagances
des autres peuples. Peut-être ce reproche est-il mérité ;
cependant, au fond, il s'appli<iue plus ou moins à l'hu-
manité tout entière. 11 y a si peu de caractères et d'es-
1>rits originaux I Après tout, dans les arts comme dans les
ettres, u n*y a qu'un objet et qu'un but. Que le peintre
fiasse des portraits, des paysages ou des tableaux d'his-
toire; que le musicien traduise dans sa langue le senti-
ment et la passion ; qu'il imite même cerudns phéno-
mènes qui sont du domaine des sons ; que l'auteur exprime
dans son style les mouvements et les nuances infinies de
la vie et de l'àme humaines; l'objet est toujours l'homme
et la nature, et le but est l'idéal. Le moyen est l'imita-
tion, qui s'appelle également l'art, et qui doit toujours
proposer aux yeux et à la main de l'écrivain et de l'artiste
oe type de beauté sublime si éloquemment recommandé
par Ûcéron. (V. le commencement de l'Orateur») A. D.
oRTATioii, en termes de Musique , reproduction, dans
un même morceau, d'un motif déjà entendu. Tantôt c'est
ime simple répétition , tantôt une transposition ou tout
antre arrangement du premier motif, qui passe, par exem*
pie, alternativement d un instrument ou d'une voix k une
antre. L'imitation est libre, quand le ^ût du compositeur
en règle l'emploi; elle peut être obltgée et méthodique,
comme dans le canon, où elle est continue, et dans la
ftague, où elle est périodique (F. Caron, Fogvb),
niiTATioif (Dessin d* ). K. Dbssoi mBosmiBL.
iMiTATioif DB lésus-CBRiST, « lo plus bosu llvre, dit
Tontenelle, qui soit sorti de la main des hommes* puis-
que VÊvangtle n'en vient pas. » VlmitaHon est divisée
en 4 livres : le 1", intitulé: Affis utile pour la vie «ptri-
kêelle, engase à imiter J.- G. et à mépriser les vanités du
monde, parle de Thumble sentiment qu'on doit avoir de
loi-même, du bonheur qu'on éprouve dans l'obéissance
et la soumission à un supérieur, des avantages de l'ad-
fersité, et, arrivant à la Vie religieuse, vante l'amour de
lai^traite et du silence. — Le V a pour titre: Avts propret
àconduire à la vie intérieure; c'est une sorte de conver-
sation intérieure, de familiarité intime avec J.-G. — Dans
le 3*, intitulé: De la Consolation intérieure, J.-G. exhorte
le fidèle à renoncer à soi-même, à mépriser le monde, à
ne chercher de vraie consolation ({n'en Dieu. — Le 4*
traite du Saerement de l'EucKari$tte; ce sont des exhor-
tations à s*^>procher de la communion, et à s'unir inti-
mement avec J.-G. — Tout l'ouvrage est fondé sur une
grofonde humilité qui porte à substituer la volonté de
ieu, des supérieurs et même du prochain à la sienne, à
dédaigner les vanités du monde, à supporter avec pa-
tience les misères de cette vie, et k n'espérer de paix et
de bonheur que dans la vie étemelle. 11 a été quelquefois
et Justement appelé le Livre de la Coneolation, Gomposé
en latin, on l'a traduit dans toutes les langues : on n'en
eompte pas moins de 80 versions firançaises en prose, plu-
■leurs en vers, dont la plus célèbre est de P. Gomeille, le
tout ensemble formant at^. (1861) plus de 1500 éditions 1
Quel est l'auteur de Vlmttation? U n'est pas de pro-
blteae qui ait été plus fréquemment agité ; car, en France
feulement , depuis le commencement du xvn* riècle, près
de SOC dissertations ont été publiées pour le résoudre. En
laissant de côté l'opinion qui attribue ce livre à S^ Ber-
nard, et quelques autres récUmations aussi difficiles à
j nstifleTt on ne trouve que trois prétendants sérieux : un
certain Jean Gesen, uessen ou Gersen, oui aurait été
abbé du monastère de S^Étienne à Verceil pendant le
xn^^siècle; Thomas de Kempen ou A Kempis, chanoine
do diocèse de Cologne; et Jean Gerson, chancelier de
L*IBlfver8ité de Paris.
Les Italiens, les Jésuites piémontais, le bénédictin Ga-
lélan, et, de nos lours, Grégory et Paravia, ont pris le
parti de Gersen. Si Vlmitation datait du xm* siècle, com-
ment se ferait-il qu'un ouvrage destiné à une tA grande
popularité, et dont les copies ont été si nombreuses au
XV* siècle, fût resté inconnii pendant près de deux renu
ans, et aû'll n'en eût existe qu'an seul manuscrit? Ce
manuscrit, d'aillenrs, trouve a Arona, ne saurait être, au
iuMOient des melllears paléographes, antérieur à l'an
léOÛ. On aUégue un Journal de la famille des Avogadri,
où U est parié de Vlmttation k la date de 1340: mab 8
serait prouvé seulement qu'en 1340 il y avait des limtOf
lions en drcuhrtion, et il n'en résulterait rien quant an
texte que nous donnent les manuscrits du xv* siècle. Les
italianismes signalés dans Vlmitation ne prouvent rien;
ce sont tout aiusi bien des gallicismes. Il n'est même pas
établi qu'un Gersen ait existé k Verceil : les manuscrits
anciens où se trouve son nom ne l'appellent Jamais Mi
de Verceil, et ceux qui portent cette qualification oAreôl
peu de certitude; plusieurs manuscrits ajoutent à son
nom le titre de chancelier de Paris, ce qui peut (iifae
supposer une substitution de 1*0 à Vo par quelque eneor
des copistes, qui auraient écrit Gersen au heu de Gervm,
Il n'est pas Improbable qu'on aura exploité en Italie celta
méprise, en haine du chancelier de l'Université qui s'ébdt
déclaré l'adversaire de l'infaillibilité papale.
Thomas A Kempis a pour lui le témoignage des cha-
noines réguliers de S^-Augustin, des Jésuites flamaads,
des Bollandistes, un arrêt du parlement de Paris eo
1652, l'autorité du chanoine Eusèbe Amort au xvm* siècle,
et, de nos Jours, Giesder (Histoire de V Eglise)^ Gh.
Schmidt, MS' lialou, etc. On cite un manuscrit de sa
main, daté de 1441, et se terminant par ces mots : FiniUu
et comidetus per manus fratris Tnomœ à Kempis, Biais
cela signifie que Thomas A Kempis est l'auteur de U co-
Eie, et nullement l'auteur du livre : or, on sait qu'il était
abile calligraphe, et qu'il employa sa vie à copier des
manuscrits. De plus, le manuscrit de 1441 ne peut être
un originai, puisqu'on en a d'autres de 1437 et de 1431 :
c'est une simple copie, et elle est défectueuse, car l'ordre
des quatre parties de Vlmitation y est maladroitement in-
terverti. Pour admettre que Thomas A Kempia, qui mou-
rut en 1471, est l'auteur de Vlmitation, Il faudrait sop-
poser, avec la date de i4Sl, qu'il la composa fort Jeune,
et encore est-il certain que le livre était dqà trèa^'épanda
eo Europe au commencement du xv* siècle. L'auteur de
Vlmitatum demande à n'être point connu : il ne pouvait
donc pas signer son ouvrage, sans se mettre en contra-
diction avec lui-même. Qu'fi y ait, dans r/i»itattoii, cer-
taines expressions qui se traduisent mieux en flamand
qu'en italien ou en nrançais, on peut l'accepter ; mais cela
tient k ce que le flamand, resté à l'état de patois, est an-
Jourd'hui plus sembUble à ce qu'il était an moyen âge.
Enfin 11 n'y a qu'à lire Reloue opuscule du dianoine de
Cologne pour s'apercevoir quil n'était pas c^Mible d'écrire
le livre qu'on veut lui attribuer.
Quant à Gerson , sans énumérer ses anciens partisans,
on peut citer dans notre siècle Gence, Onéslme Leroy,
Baroier, Thomassy, Faugère, le chevalier Vert, comme
ayant soutenu le plus vigouron^ement sa cause. Ils s'ap-
puient sur ce que les plus ancieits et les meilleurs ma-
noscrits de Vlmitation^ ainsi que les premières éditions
imprimées, portent le nom du chMicelier de Paris; ils
mentionnent surtout un manuscrit avant appartenu an
neveu de Gerson, portant le nom et la miniature de ce
dernier, et contenant aussi un sermon sur la Passion,
qui est assurément de lui. On leur objecte que l'/mto-
tûm ne figure paa dans la liste des écrits du chancelier
dressée par son firère lui-même : mais l'auteur du Irire
ne voulant pas être connu, son frère peut bien avoir res-
pecté ce vœu; d'ailleurs U liste au'Il a dressée porte un
recneil de pensées courtes et utfles, sans «n donner le
titre, et ce recueil ne serait-Il paa Vlmitation elle-mêmet
Lee partisans de Gerson disent que l'InittaNoii lût écrite
à l'abbave de Mœlk en Autriche, où 11 a'était réfugié après
le condle de Constance, et où l'on a trouvé 23 manuscrits
de son livre ; que les Idiotismes étrangers qui s'y ren-
contrent, s*ils ne sont pas dus aux copUMs, s'expliauent
par le s^our du chancelier en AUemasne, en Ranope et
en Italie; oue l'on retrouve, dans les diflérentes oonvrai
de Gerson, le même hitin, les mêmes tournures de phrases,
les mêmes mots forgés que dans Vlmitation, SI ce livre
était italien ou allemand, ijoutent-Us, d'où vient que c'est
en Franoequ'il a eu le plus d'éditions et de traductions, et
S l'on en trouve le plus de manuscrits? Pouniooi l'Italie
le-même. Jusqu'au xvi* siècle, Imprima-t-eile Vlmita*
tion sous le nom de Gerson?
A vrai dire, la critioue, malgré tant de dlacoaslons, est
encore réduite aujourd'hui à opposer les unes aux antres
les coqiectnres et les probabilités. Chacun démontre pé-
remptoirement que ses adversaires sont dana l'enenr,
mais n'apporte aucune preuve qui lève tous les doutas : la
polémique n'a que des résultats négatife. Peut-on dn
moins dire dans quel pays est né le livre de 17m«(atioiif
M. Renan croit qu'il est originaire dltaUe x il en a,
dit^il, le génie peu profond, mais limpide, éloigné des
V
IMI
1057
IMM
«péeaiatfoiw àbstrmite», mais merfeilleuterocut propre
inx recherches de la philosophie pratique. Selon le
même écriTaIn, les Pays-Bas et les provinces du Rhin
étaient comme prédestinés, par la tranc(uille mysticité
^Mb inspirent , à devenir JH>ar Vlmttatum comme une
seconde patrie. Quant à la France, il repouue nettement
ses prétentions. H. Michelet est d'nn avis tout différent :
« Ce livre n*a ni Télan pétrarcheste des mystiques ita-
liens, encore moins les fleurs bizarres des Allemands,
leur profondear sous des formes puériles, leur dange-
reuse mollesse de cœur. Dans VlmttatUm ii Y a plus de
sentiments que damages; cela est français. » C'était aussi
ropinlon de Corneille. BL Victor Leclerc, dans la préface
Vil a mise à Tédition in-folio de Y Imitation (1855), a
relevé éuts le latin de ce livre un certain nombre de lo-
cutions essentiellement françaises. On peut lyonter que
bi manière dont Tesprit fran^is a su s'approprier 17mt-
tation
voe
primitive.
4ê Vmumellê consolacion, est une présomption que cette
<ceuvTe était foncièrement sienne.
One opinion qui a pris crédit de nos Jours, c*est que
Tlmitatum est une œuvre impersonnelle, née dans le
moyen &ge à une date qu'on ne saurait fixer avec préci-
sion, et arrivée par des développements successifs à la
/orme où nous la trouvons au milieu du xv* siècle.
< Qui sait» a dit M. Michelet, si Vfmitation n'a pas été
^épopée intérieure de la vie monastique, si elle ne s'est
pas formée peu à peu, si elle n'a pas été suspendue et
reprise, si elle n'a pas été enfin l'œuvre collective que le
monachîsme du moyen âge nous a léguée comme sa pen-
sée la plus profonde et son monument le plus glorieux? »
M. Victor Leclerc regarde le 1*' livre comme fort anté-
rieur aux trois autres : « Le langage humble et calme du
premier livre paraîtrait difficilement l'œuvre de cet esprit
pins hardi, plus familiarisé avec l'antiquité profane, et
qui se plaît aux erandes images et aux amples développe-
ments du troisième livre, et ni l'une ni l'autre de ces
deux parties n'a le moindre rapport avec la théologie sa-
vante et subUle dont le quatrième livre est rempli. » Il
est ceruin que, môme au xv* siècle, les manuscrits ne
sont pas identiques : tantôt il n'y a qu'un seul livre de
Thnitalion, tantèt deux, souvent trois, quelquefois quatre,
réunis sous un titre général ou présentés comme des
traités distincte. Le travail de composition de VlmUation
snra commencé vraisemblablement au xii* siècle : le 1*'
et le ^ livre gardent l'empreinte de cette grande époque
du mysticisme. Il y eut là, dans le principe, Quelque re-
cueil de préceptes monastiques livré aux méditations des
lefîgieux, commenté journellement, et auquel chaoue gé-
nération aura apporté sa pensée. Le 3* livre semble ap-
liartenir plus particulièrement au xiii* siècle, par l'inspi-
ration plus hardie, par le mouvement plus rif de la
praaée et du style; la théologie du 4* livre rappelle, au
contraire, le xiv* siècle et ses grandes controverses. Sans
doute Touvrage fait corps, il est coordonné dans son en-
semble : nuiis la rie pâ*manente qui animait ce manuel
monutique aura eflicé les disparates trop saillantes,
fondu tes couleurs et harmonisé l'ensemble. Le même
sujet est pliuieurs fois repris ; on sent la redondance un
peu confuse des interpolations successives. La liaison
n'existe que dans le fond des choses, nullement dans la
forme ; car chaque tivre est un tout, chaque chapitre une
instruction complète, et chaque verset a un sens par lui-
même. VImUatton oifre le caractère d'un centon : or, un
homme ne saurait écrire ainsi; c'est un travail collectif
et sécnlaîre dont la rédaction dernière, œuvre d'un au-
leor inconnu, de Gerson peutrètre, appartient à la fin du
nv* siècle on au commencement du xv*. Ce mode de
production littéraire n*a rien qui doive surprendre : c'est
ainsi qne se sont formées les grandes épopées de l'Inde
et celles d'Homère. Au moyen &ge même, de courtes can-
tilènes guerrières des temps Carloringiens sont devenues
cfasttsons de gestes, puis poèmes épiques, puis romans
d'aventures. — Cependant cette opinion a des contradic-
teurs très autorisés qui, au lieu de difiérences caractéris-
tiqoes dûs l'ouvrage , n'en voient que d'accideo telles ,
produites par la nature diverse des sujets traités. V. G.
de Grégory, Mimokn sur U véritable auUw âm l'Imita^
tkm de J^C, Paris, 1827, in-i2; Pararia, IhU' autor$
dd libro âê InUtatumê Christi, Turin, 1K53; Lécuy,
Essai svrlatriedêJ. Gerson, Paris, 1832, t vol. in-8»;
Ch. Schmidt, Essai sur Jean Gerson, Straisbonrg, 1839;
W Maloa , Recherches historiques et crtiufws sur le
.'ériiabie auteur du livre de VFmtation de J,-C., Paris,
1858, in-8*; Gence, Nouvelles considérations sur Vam»
teur et le livre de Vlmitation de A-C, 1826 ; un article de
Daunou dans le Journal des Savants de décembre 1827 )
Thomassy, Jean Gerson, Paris, 1843; Vert, Études his-
toriques et critiques de VlmUation, Toulouse, 1856; ilsi^
nales de philosophie chréliennSy année 1861 ; Manôeart,
Béponse de la Franc9 à la Belgique relativement àTlmi-
tatUmde y.-C., Paris, 186S.br. in-8\
DOIANENT, en termes d'Ecole, ce oui reste en dedans
(manere m) d'une chose ou d'une idée, et n'en sort Ja-
mais. Spinoa appelait Dieu la catiss immanente du
monde, pour faire comprendre que, par son essence, il
ne difière point du monde. Kant parle d'un emploi ttnma-
nent de la raison ; il entend par là un emploi ue la raison
qui ne dépasse pas les limites du monde risible, par op-
position à un emploi transcendant de la raison, dépassant
ces limites. Une méthode immanente est celle qu'on peut
déterminer par l'objet même de la recherche. Un savoir
immanent est un savoir qui est approfondi dans le si^et
même. En Théologie, un acte immanent est celui qui de-
meure dans la personne oui agit, sans avoir d'effet an
dehors : Dieu a engendré le Fils et le S^ Esprit par des
actions immanentes, tandis qu'il a créé le monde par une
action transitoirt.
naiATf!:RIALITÉ. V, SpiBiTDALiTé.
IMMATRICULATION , action d'inscrire sur un registre
public, dit matricule (K. ce mot).
IMMENSITÉ. V. DiBU.
IMMEUBLES (du latin tmmoftt^û, immobile), biens
qui ne peuvent être considéra comme meubles, c-à-d.
<^u'on ne peut transporter, cacher ni détourner. On dis-
tingue : 1" les Immeubles par nature^ comme les biens-
fonds, terres, b&timents, etc., les récoltes pendantes par
leurs racines, les fruits des arbres non encore recueillis ;
2* les Immeubles par destination , choses qui , mobi-
lières par leur nature, sont incorporées dans un immeuble
pour en faire partie intégrante, de sorte qu'on ne puisse
les détacher sans détérioration, ou qui sont affectées an
service de l'immeuble par le propriétaire, comme les ani-
maux attachés à la culture, les ustensiles aratoires , les
semences données aux fermiers, les pigeons des colom-
biers, les lapins des garennes, les ruches k miel, les
poissons des étangs, les pressoirs, chaudières, cuves et
tonnes, les pailles, les engrais, les ustensiles nécessaires
à l'exploitation d'une forge ou d'une usine , les objets
scellés dans les murs, les glaces faisant corps avec la
boiserie, les statues placées dans des niches ; 3® les /m^
meubles par fiction, par la loi, par coutume^ comme
les offices, les rentes constituées , etc. L'usufruit des
choses immobilières, les serritudes foncières et les actions
oui tendent à revendiquer ces immeubles, sont consi-
aérés comme immeubles par Vobjet ougtM/ Us «'ap-
pliquent. Les immeubles ne peuvent Jamais être consi-
dérés comme marchandises, ni les spéculations dont ils
sont l'objet être rangées parmi les actes de commerce.
IBOIOLATION. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^Histoure.
lAIMONDIGES. Quiconque Jette involontairement des
immondioes sur autrui encourt une amende de 1 à 5 fr.,
outre la réparation du dommage causé. Si le fait a été
volontaire, l'amende est de 6 à 15 fr., et un emprisonne-
ment de 1 à 3 tours peut être prononcé {Coàe pénale
art. 471, 475 et 476). V. Bodbs, Balayaob.
IMMORTALITÉ DE L'AME. La croyance à l'immorta-
lité de l'ftme est aussi profondément gravée dans le cœur
de l'homme oue celle à l'existence de Dieu. L'homme y
croit instinctivement d'abord, et la réflerion rient con-
firmer sa croyance. La foi et la raison, la religion et la
philosophie sont d'accord pour la proclamer, et les
preuves ne manquent pas pour la confirmer. La première
est dans les faits de conscience. L'homme a en lui la no-
tion et le désir de l'immortalité; il la cherche pour ses
ouvrages, pour son nom, pour lui-même, et, dans ses
rêves d'espérance, il pt^nd sans cesse possession d*nn
avenir indéfini : sans cesse il tend à la connaissance dn
vrai, à la représentation de l'idéal , à la réalisation du
bien, sans y parvenir; l'induction nous porte déjà à con-
clure qu'après cette rie il y en a une autre où l'Ame con-
tinue de marcher vers le même but, et d'accomplir sa
destinée. La nature du principe pensant ijoute une nou-
velle force à ces considérations. Le mot est un , simple,
indirisible, identique; par conséquent, il ne peut pas
périr, comme les corps, par décomposition, et son imma*
térialité derient une garantie de son immortalité. Cepen-
dant, simple ou non, l'&me pourrait être anéantie par la
cause qui lui a donné l'être; cette seconde preuve n'est
67
IMP
1058
IMP
pas encore soffisante. D'aiUean, en admettant qa*elle ga*
imntiBse rimmortalité de la substance pensante, elle ne
montre pas suffisamment la persistance de la personna-
Ifté humaine, et c'est en celle-d que consiste la véritable
immortalité. Une troisième sorte de preuve lève tous les
doutes : elle est fondée sur la loi du mérite et du démé-
rite, complément nécessaire et inséparable de la loi du
devoirs elle 'montre que la justice de Dieu s'oppose à
Fanâuitissement de la personnalité humaine, et par con-
séquent de i'àme, parce que la loi morale doit avoir sa
sanction. Le droit qu'a l'homme de bien au bonheur, en
le conformant à la loi du devoir, est inaliénable et im-
prescriptible; de même, le coupable encourt un châti-
ment auquel il ne doit pas pouvoir se soustraire. Si,
dans ce monde, les biens et les maux sont distribués selon
ja règle et l'exacte proportion que veut la justice divine,
si la vertu y trouve la récompense qu'elle mérite, si le
vice et le cnme y sont toujours punis comme ils le mé-
ritent, l'immortalité n'a pas de raison d'être; sinon, il
faut qu'elle soit, elle est nécmsaire comme Dieu lui-
même. Or, l'histoire entière de l'humanité et l'expérience
de chaque Jour montrent que l'harmonie entre la loi du
devoir et celle du mérite et du démérite n'existe pas sur
cette terre, et que la loi morale n'v trouve pas sa sanc-
tion ; il faut donc que cette sanction ait lieu dans une
autre vie. Dans tous les temps et chez tous les peuples
cette vérité a été reconnue et proclamée, et la diversité
d'opinions sur la manière d'expliquer et d'appliauer le
dogme de l'immortalité de l'âme prouve l'universalité du
principe. Les sectateurs de la religion d'Odin en parlident
autrement que les Grecs, Homère autrement qu'Ossian ;
le dogme de la métempsycose diffère du spuîtnalisme
chrétien; mais tous sont d'accord sur le point capital,
rimmortalité de l'âme. Quant aux systèmes qui tendent
à la nier ouvertement ou implicitement, comme le ma-
térialisme et le panthéisme, la réfutation de leurs prin-
cipes montre en même temps l'erreur où ils tombent sur
cette question capitale. R.
IMMUNITÉ (du latin m marquant privation, et mumi»,
charge), exemption de quelque chai^, devoir ou impo-
sition. Chez la plupart des peuples de l'antiquité, les
λrêtres, ainsi que certains lieux consacrés aux dieux,
urent exempts de toute espèce d'impôts et charges.
A Rome, quelques fonctions donnaient (froit à des immu-
nités. Au moyen âge, en France, le mot tfiimiifitMs a été
souvent employé pour franchises, libertés, jHrimiégês:
chaque ordre de l'État avait ses immunités particuliâes;
il en était d'autres spéciales aux habitants de telle ou
telle localité, â telle ou telle profession. La Révolution de
17S9 a fait dispaoraltre toutes les immunités, en déclarant
tous les citoyens égaux devant la loi.
IMMUTÂBIUTÉ. V. Dieu.
IMPANATION. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
IMPARFAIT, temps des verbes, qui s'appelle aussi passé
simultané; en effet, il exprime un état ou une action
passés maintenant , mais présents par rapport à un autre
état ou une autre action également passés : « Je lisais
comme vous entrâtes ; il était là quand Je suis venu. ■
L'imparfait existe en français et en latin à l'indicatif et
au subjonctif. A l'infinitif et au participe il se confond
avec le présent pour la forme; ainsi , « Un coq cherchant
de la nourriture trouva une perle, » équivaut à : « Un
coq qui cherchait.,. ■ L'imparfait indicatif français est
qne altération ,de l'imparfait latin : « J'aimaù, tu ai-
ma», il tAmait, n viennent de amabom. amabos, amabot
(l'ancienne langue ne hiettait pas à* s a la i** personne,
ce qui était plus conforme â l'ét^ologie). Celui du sub-
jonctif est dérivé, non pas de l'imparfait , mais du plus-
qu^parfait du subjonctif latin : ainsi , « que J'aimais»,
que tu aimasses, qu'il aimdt, » viennent de amoM^m,
tanasses, tanasset, et non pas de amarem. Les deux
autres lances néolatines forment les deux imparfaits
d'une manière analogue au français. En- grec, l'imparfait
a pour caractéristique la terminaison ov, souvent modifiée
en ovv et en a>v dans les verbes contractes; il est en tiv
dans les verbes en \u. Il a, de plus, l'augment , qui est
constant chez les Attiques, en vers comme en prose.
L'impariUt du subjonctif n'existe pas à proprement
Îiarler ; mais le présent de l'optatif en a tout â fait la va-
eur : Aderam ik loquerer^ irapYJv tva XÉ^ot^iu P.
IMPARFAITS (Droits). V. DRorr.
IMPARFAITS (Tons), uom donné, dans le plain-chant,
aux tons qui n'atteignent pas les deux notes extrêmes de
leur échelle diatonique. Le ton authentique est imparfait,
f'ii ne s'élève pas Jusqu'à l'octave de sa finale; le piagal
est imparfait, sHl ne descend pas â la quarte au-dessous
de sa finale. F. C.
IMPARISYLLABIQUE (Nom), nom (substantif ou ad-
jectif) qui a, au génitif et aux cas qui en dérivent, une
Srllabis de plus qu'au nominatif. Les substantifs de cette
asse comprennent la 3* déclinaison grecque, la 3*, la
4* et la 5* au latin. Ceux qui se rattachent à ces déclinai-
sons, sans avoir plus de syllabes aux cas indirects qu'au
cas direct, ne sont parisyllabiques qu'en apparence, ces
cas ayant subi une contraction ou une syncope ; ainsi ,
en latin, manûs, génit. sing. et nomin. et accus, pluriel
de manûs, est pour manûïs, manHes, Un certain nombre
de noms grecs en vç et en ic sont parisyllabiques à l'ac-
cusatif singulier, par exemple: icôXtç, icôXiv. Dans la
langue grecque, telle que nous la montrent les poésies
d'Homère, le caractère imparisyllabique se remarque par-
tiellement aux deux premières déclinaisons; ainsi , le gé-
nitif singulier (propre aux Éoliens) est souvent en ôo;
celui du pluriel est fréquemment en àoyv à la i'*, le gé-
nitif singul. en oio à la 2*; le datif plur. de la i'* est en
^<Tt , de la 2* en oto-i ; ti^i marque quelquefois le génitif
et le datif des deux nombres de la i** décl., 091 ces mêmes
cas dans la 2*. Le latin, dans sa forme primitive, avait le
génitif singulier de la l'* décl. en ai, le datif plur. en
abus, et celui de la 2* en obus. Ces deux déclmaisoDs sont
constamment imparisyllabiques au génitif pluriel : rosa
rosarum, dominus dominorum. Réciproquement, la 3*
contient un grand nombre de noms parisyllabiques,
comme collis, nubes^ senex, altare, cubUe; mais aucun
ne l'est au datif pluriel qui est toujoura en ibusj un très-
petit nombre le sont au génitif pluriel , comme juvenum ,
senum, canum, opium; les autres ont une terminaison
dissyllabique : cdlium , nulnum , altarium , etc. P.
IMPASTATION, mélange de plusieun matières, de
couleurs et de consistances différentes, unies et liées par
quelque ciment ou mastic qui durcit au feu ou à l'air :
tels sont les ouvrages de poterie, de porcelaine, les mar-
bres peints, le stuc, le carton-pierre.
IMPENSES (du latin impensa, dépense), en termes de
Droit, dépenses faites sur un immeuble qui appartient
à autrui ou qui ne nous appartient qu'en parUe. Elles
sont dites nécessaires, quand la conservation du bien en
dépend; utiles, quand elles l'améliorent simplement;
votuptuaires, c-ând. de pur agrément , quand elles Tem-
bellissent sans en accroître la valeur. Un donataire qui
fait rapport à une succession, et un possesseur de bonne
foi qui est soumis â l'éviction {V. ce mot)^ sont indem-
nisés des impenses nécessaires et utiles, mais non des
voluptuaires (Code Napd., art 861, 862, 1634, 1635).
IMPÉRATIF, mode des verbes qui sert à exprimer le
commandement (en latin imperium, d'où le verbe impé-
rare) ; « Viens ici; — faites ce que je vous dis; —
n'allez pas lâchas. » Souvent aussi il marque simplement
prière, exhortation, invitation. Quelquefois, dans les
phrases vives, il s'emploie improprement pour un autre
mode avec une conjonction, comme lorsqu'on dit: « Faites-
le, ne le faites pas, Je ne m'en soucie point, » pour dire :
« Je ne me soucie pas que vous le fassiez ou que vous ne
le fassiez pas. » En fîrançais, l'impératif n'a qu'une forme
temporelle, celle du présent; il est défectif quant aux
personnes, n'ayant que la 2* du sing. et du pluriel et la
i" du pluriel. En latin, l'impératif a deux formes, dont
l'une, terminée en a, en s, en t, suivant la conjugaison,
correspond à notre impératif, et dont l'autre, terminée
en cUo, eto, ito, marque plutôt le futur que le présent, et
s'emploie surtout là où nous exprimons un commande-
ment par le futur indicatif, par exemple dans le style
des lois et des édits i • dn se réunira sur la place,
Coeunto in foro; — quiconque franchira cette limite sera
déclaré ennemi public, adjudicatus esto hostis, » — En
grec, l'impératif a trois formes temporelles, le présent,
l'aoriste, le parfait. Le présent s'emploie lorsque la chose
commandée doit avoir de la durée; l'aoriste, lorsqu'on
ne considère que l'instant même où elle sera exécutée;
le parfait correspond à cette tournure française: Ayes
fini quand famoerai. C'est surtout au passif que ce
temps grec s'emploie. L'impératif grec n'a pas de l*** per-
sonne, non plus que le latin : on y supplée, comme en
latin, par la personne correspondante du subjonctif prô-
. sent. P.
m péRATip CATéooRiQOB , nom BOUS lequel Kant désigne
la loi morale, pour exprimer le caractère obligatoire des
devoin qu'elle impose.
IMPÉRIALE , Jeu qui se Joue à deux, et avec 32 cartes.
Chaque joueur reçoit 12 cartes; la 25" est retournée, et
constitue l'atout. Celui qui donne marque un point s'il a
IMP
1059
IMP
ntomé une des canes marquantes ( roi , dama, valet, as
6twpt), Le premier en cartes annonce son plus haut
point en une oonleor; si ce point est supérieur, ou seule-
ment ég»l à celui de VadTereaire, il marque un point.
^Qwhe, on montre les impériales, oui sont les 4 rois, ou
««dunes, ou les 4 valets, ou les 4 as, ou les 4 sept, ou
eoHn une <|uatrième majeure. Il v a aussi Timpériale de
cartes blanches. Chaque impériale oblige l'adversaire à
démanger les jetons qu'il a déjjà acquis. A chaque carte
loaée, il faut fournir ou couper. Les cartes marquantes
Jmâes sans être prises par l'adversaire comptent chacune
on point, ainsi que celles qu'on lui enlève par supério-
rité de figure. Il en est de même de chaque levée faite en
plos. Chaque fois qu'on atteint 6 points, on marque une
impériale. Le capot vaut aussi une impériale. La partie
se joue en un nombre d'impériales convenu d'avance.
L'impériale tire, dit-on, son nom de l'empereur Charles-
Quint, qui l'aimait beaucoup.
ntpéauLB, monnaie russe. V. ce mot dans notre Dio-
tifmnaire de Biographie et d^Histoire,
mvtMiALE , partie supérieure d'une diligence ou d'une
voiture de ▼ovage.
iMP^BiALB (Bibliothèque). F. BmuoTHiQOB rationalb.
IMPERIALE (Chambre). V. Chambre impériale, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
nrp^iALB (Cour), au). d'APPEL, Juridiction de 1"* ordre
en France, ayant pour attribution de connaître souverai-
nement, en matière dvile,des appels de jugements rendus
par les tribunaux de 1** instance et de commerce, et, en
matière criminelle, des appels de police correctionnelle.
Elle statue, en outre, sur les mises en accusation des
prévenus contre lesquels les Chambres du conseil des
tribunaux de 1" instance ont rendu des ordonnances de
prises de corps. 11 y a ^ Cours d'appel {V. notre Die-
Oonnaire de Biographie et d'Histoire, p. 1084, col. 2).
Les magistrats qui les composent ont le titre de Con*
ieillers : leur nombre varie selon l'importance du res-
sort. Chaque Cour a un l"' président, el autant de pré-
sidents qu'elle a de Chambres : elle a une ou plusieurs
Chambres civiles, une Chambre d'appels de police cor-
rectionnelle, et une Chambre d'accusation. Une Chambre
des Tscations est chargée de iuger, pendant les vacances,
leB affaires urgentes. Les Chambres civiles ne peuvent
statuer qu'au nombre de 7 conseillers au moins, et les
Chambres correctionnelles et d'accusation qu'au nombre
de 5 au moins. Les Cours d'appel exercent un droit
<le snrreîilaQce sur les tribunaux civils de leur ressort;
elles reçoivent le serment des présidents et Juges de ces
tribunaux et des tribunaux de commerce, comme aussi
des membres du ministère public près les tribunaux
ôrils. Le ministère public près une Cour d'appel se
eomfpoae d*un proeorear génml , d'avocats généraux, et
de substituls on procureur général. Il y a un greflSer en
ciief et des commis greffiers assermentés pour le s^rice
de la Cour. Des avoués et des huissiers en nombre fixe
ont seuls le droit de postuler et d'instrumenter près
d*éUe.
ncrtaiALs (Garde). Y. Garde mpâiuLs, dans notre
Dietiotmaire de Bio^aphie et d'Histoire,
xHPÉaiAui (Injpnmerie). F. Improierib, dans notre
Dictionnaire ae Biographie et ^Histoire,
DfpÉaiALES, nom que les numismates donnent aux mé-
dailles frappées sous les empereurs romains. Ces mé-
dailles commencent avec J. César, et par celles où sa tête
est représentée. Quel que soit le métal employé, les têtes
des empereurs ont une grande valeur artistique, parce
«ine les coins forent grava d'après de bons portraits. Les
médailles des impératrices sont parfois diffiales à classer,
parce qu*on y trouve des noms corrompus ou omis dans
rnistofre.
I]IIPERSOI*VNEL, nom que Ton donne aux verbes qui
n*ont <|u'une seule personne, à savoir la 3*, et qui , par-
tant, sont considérés comme étant dépourvus de cette in-
flexion. Tels sont, en français, il faut, il pleut , U neige,
ii lofms. On distingue les verbes essentidlement imper-
sommeis, c-A-d. ani ne peuvent Jamais avoir que cette
forme de oonjuguson, comme ceux cités plus haut, et
les verties accidentellement impersonnels, c-à-d. ceux
qui, ayant toutes leurs personnes, sont employés dans
certains cas, comme des verbes impersonnels ; tels sont :
U importe, il arrive. Cela a lieu lorsque le sujet de
ces verbes n'est point le nom d'une personne ou d'une
chose déterminée. — Tous les verbes grecs et latins de
forme active peuvent devenir impersonnels à la 3* per-
sonne du singulier du passif, pns dans un sens vague;
ainsi, dicUÊÊ/Tf fX est dit, on dit; curritur, on court i
ventum est, on est venu. Les verbes neutres ne sont pasi
susceptibles de cette forme en grec. P.
IMPÉTRANT (du latin impetrare, obtenhr), en termes
de Droit et d'Administration, celui qui a obtenu l'objet
de sa demande.
IMPLUVIATA, nom donné par les anciens Romains à
un vêtement de couleur brune, robe carrée à 4 côtés,
comme Vimpluvium d'une maison. N'était-ce pas aussi
un manteau contre la pluie?
IMPLUVIUM. V. Atrium.
IMPORTATION. V, Comhbrcb.
IMPORTATION (Brevets d'). V, Brevets n'invraiTioif.
IMPOSITION, en termes de Finances, mot synonyme
de Contribution {V. ce mot),
IMPOSITION, en termes de Typographie, arrangement
méthodique des pages dont se compose une feuille d'im-
pression. Il doit être tel que, la feuille étant imprimée et
pliée, toutes les pa^ se trouvent dans l'ordre où eller
sont lues. L'imposition est confiée au metteur en pages,
isiPOSrnoN dbs mains, cérémonie en usage chez les Hé-
breux et les Chrétiens. Les premiers, quand ils priaient
pour quelmi'un, mettaient leurs mains sur sa tête, en
adressant leurs voeux à Dieu. Jésus-Christ imposa de
même les mains aux enfants qu'il voulait bénir et aux
malades qu'il guérissait; ses Apôtres les imposèrent aux
hommes qu'ils recevaient dans la foi ou auxquels ils con-
féraient un ministère spirituel. Dans l'Église catholique,
les sacrements de la Confirmation et de l'Ordre se con-
fèrent par l'imposition des mains.
IMPOSTE (du bas latin impostare, reposer sur), cou-
ronnement orné de moulures, qui forme la tête d'un
pilier ou pied-droit à la naissance de la partie cintrée
d'une arcade, et qui, par conséquent, sert de base à l'arc.
On donne le même nom à la moulure qui orne le contour
d'une arcade ou simplement d'une baie de fenêtre, ainsi
qu'à la partie supérieure et dormante d'un chftssis de
porte ou de fenêtre.
IMPOSTEURS (Le livre Dbs trois), petit livre latin,
dirigé contre les religions de Moïse, de Jésus -Christ, et
de Mahomet, et dans lequel Tauteur s'attache même à
démontrer que toutes les preuves de l'existence de Dieu
sont fausses ou ridicules. On a commencé à parler d'un
livre de ce titre au commencement du xvii* âècle, sans
2u'on en eût jamais vu un seul exemplaire, et la reine
hristine de Suède offrit en vain 30,000 livres à qui le
lui procurerait. Il fut attribué à l'empereur Frédéric II
ou à son chancelier Pierre des Vignes, qui s'en seraient
fait une arme contre le Saint-Siége vers la fin de la
gierre du Sacerdoce et de l'Empire, à Campanella, à
uill. Postel, à Machiavel, à Rabelais, à Erasme, à
Etienne Dolet , au Poggio , à Ochino , à Muret , à Pom-
ponace, à Cardan, à Ramus, à Jordano Bruno, à Va-
nini , etc. Le fait est que le livre n'existait pas : telle
était l'opinion de La Monnove, de Richard Simon, de
Grotsus, du P. Mersenne, et de Bayle. On ne saurait dire
par quelle méprise la réalité du traité De tribus impos-
toribtAS fut acceptée : mais il est admis généralement
aujourd'hui qu'un penseur à la fois audacieux et prudent
l'écrivit au xvm* siècle, en imitant avec assez d*art la
latinité du moyen &ge, et que Straub, libraire de Vienne,
en fut le premier éditeur en 1753. La Bibliothèque na-
tion^e de Paris en possède un exemplaire qui a appar-
tenu au duc de La Vallière, et où on lit la date de 1598 ,
date évidemment fausse, car le livre parle des Védcu de
l'Inde avec une connaissance que l'on ne possédait pas
au XVI* siècle. D'autres éditions du livre Des trois im-
posteurs ont été publiées en 1702, 1833, 1846, et 1861.
IBfPOT. L'impôt est la portion du revenu de chacun
que demande tout gouvernement, pour subvenir aux dé-
penses des services publics. Il est nécessaire, il est légi-
time, et, dans bien des cas même, il constitue pour la
société un emploi lucratif de ses fonds. La richesse ne ae
forme dans un pays que grftce à la sécurité dont jouissent
les individus, et cette sécurité ne s'obtient ou'au moyen
d'une bonne et vigilante administration, qu'if faut payer.
Aussi quelques-uns, prenant le mot dans une acception
un peu trop étroite, ont-ils appelé IMmpdt une prime
d'asstêrance. Voici, selon M. Passy, les conditions néces-
saires pour qu'un impôt soit légitime : 1° il doit être
proportionnel, c.-à-d. réparti de façon à n'exiger de
chaque contribuable qu'une quote-part proportionnée au
chiffre total de son revenu particulier; 2<* la quote-part
d'impôt, ainsi que l'époque et la forme du payement, doit
être suffisamment connue de tous, pour exclure toute '
contestation et toute décision arbitraire; 3** la perception
doit être faite aux époques et sous les formes les mohis
IMP
1060
IMP
Incommodes pour les redevables; A^ l'impôt doit être or-
Snisé de manière à n'entraîner que les moindres frais
perception possibles.
Ûimpot, n'étant qu'une part du rerenu de chacun pré-
levée dans l'intérêt du service de tous, doit toiijours se
proportionner au revenu des citoyens et aux besoins de
l'État, il ne faut Jamais exiger des contribuables plus
qu'ils ne peuvent raisonnablement donner, c.-à-d. ne
Jamais leur prendre une partie de leur revenu assez con-
sidérable pour leur enlever les moyens de vivre ou le
désir de travailler à acquérir ce revenu : c'est la première
loi. Mais cette limite que l'impôt ne doit franchir en
aucun cas, il ne doit pas non plus l'atteindre toujours.
Dès que l'État a pourvu aux services utiles à la société,
il doit s'arrêter, et ne pas s'autoriser du superflu de ses
recettes pour se permettre un superflu de dépenses;
l'économie doit présider à tous les actes d'un gouverne-
ment en matière d'impôt, parce qu'il doit se souvenir
sans cesse que les particuliers savent faire un meilleur
osage <^ue lui de la fortune publique : c'est la seconde loi.
Les impôts sont nombreux et divers (K. Comnuu-
TiONs)? Une des formes de l'impôt qui a le plus préoccupé
rÉconomie politique, est Vnnpôt stur le revenu : il serait
l'impôt par excellence, et même devrait être l'unique im-
pôt, s'il était praticable; car il atteint directement la
matière imposable tout entière, le revenu. Les Anglais le
pratiquent en partie sous le nom d^mcome-ttMX ; les
Français l'ont tenté plusieurs fois sous le nom de taille
personnelle, de capUation, de dixième et de vingtième ;
mais ces impôts, établis sous l'ancienne monarchie,
étaient entachés de l'esprit de privilège du temps. L'im-
pôt sur le revenu ne peut pas être complètement et sin-
cèrement établi, parce que le revenu des particuliers, se
composant de mille éléments divers, ne peut être évalué
que d'une manière très-imparfaite, cas où l'imperfection
est une grosse iniquité, et, d'une autre part, parce que le
contribuable, qui seul connaît l'étendue véritable de ses
revenus, a intérêt à les dissimuler : un bon impôt ne
doit porter que sur des objets d'une nature et d'une va^
leur nettement définies, et sur lesquels il n'y a pas de
contestation possible.
Le chiffre des impôts que supportent les citoyens n*est
pas le même dans tous les pays; il est relatif & la fortune
des habitants , à la nature du gouvernement, et s'élève
en général avec la richesse des contribuables et l'impor-
tance des services publics.
La comparaison entre divers pays ne peut pas être très-
rigoureuse, parce que l'incidence des impôts et le mode
de perception modifient beaucoup les charges. Voici ce-
pendant un tableau qui donne, pour les principaux États
de l'Europe, le chiffre des recettes et la part de charge
qui incombe à chaque individu :
BudgeU de 4857-4858.
Angleterre*
France.
Pays-Bas.
Wurtemberg.
Espagne.
Belgique.
États Sardes.
Prusse.
États Romains.
Bade.
Suède.
flanovre.
Autriche.
Danemark.
Bavière.
Toscane.
Russie.
Saxe.
Deux-Siciles.
Portugal*
Grèce.
Norvège.
Suisse.
2,058,075,000
1,790,2^25,838
157,185,000
80,000,000
400,410,478
139,604,990
135,567,300
446,090,000
76,505,700
32,467,768
80,838,000
36,847,000
710,211,917
46,180,000
83,154,000
31,960,000
1,101,880,000
33.541,000
134,726.000
89,343,000
14,712,000
20,289,000
16,540,000
r AE Tftn.
fir. «•
74 50
49 84
45 87
44 80
35 13
30 30
27 59
25 91
24 50
23 89
22 21
20 12
19 »
18 65
18 99
17 75
16 90
16 45
14 87
14 45
14 11
13 05
7 91
F. le marquis de Mirabeau, Théorie de Vtmpôt, Paris,
1760; Grasiin, Essai anaiytiqw sur la richesse et sur
Vfmpdt, Londres, 1767, in-8<> ; Hume, Essai surUsim-
v6U,tnd. de l'anglais, 1706 et 1767, ln-i2; Letrosne,
EssM analytique sur la richesse et sur l'impôt, Paris,
i:07, in-8''; Gorani, Traité de r impôt, 1772, in-8';Duiw
ban. Traité de l'impôt, an vi (i797j, in-8« ; Guiraudet,
Doctrine sur Vimpôt, an vm (1800), in-8«; Broggia,
Traité des impôts, en italien. Milan, 1803; Bailleol,
De la richesse et de Vimpôt, Paris, 1816; Ricardo, Des
principes de V Économie politique et de Vimpôt, trad. de
l'anglais, 1818 et 1846, 2 vol. in-8«; Ém. de Girardln,
Vimpôt, 1851, in-8*. V. aussi notre article Finances. L.
IMPÔT pROPORTionviBL et IMPÔT paoGABSsiP. — L'impôt
proportionnel est celui qui est réparti entre les citoyens
{iroportionnelleraent aux revenus dont ils Jouissent sous
a protection de TÉtat, protection qui sert de base à
l'obligation de concourir aux charges publiques. La pro-
fiortionnalité exacte entre la contribution individuelle et
e bénéfice retiré de l'ordre social , peut être considérée
comme représentant, en matière de taxation, cette Jus-
tice stricte qui est d'abord impraticable, et serait ensuite
par elle-même si sourent voisine de la suprême injus-
tice. L'application de la règle de proportionnalité a pour
première conséquence la suppression des exemptions de
personnes ou de biens, et la condamnation de faveurs
accordées aux fortunes élevées par rapport aux fortunes
très-inférieures, telles que, par exemple, en Angleterre ,
les droits de succession. Elle repousse tout système
d'impôt progressif, soit sur le capital, soit sur le reveno.
La théorie de nmpôt progressif naît de l'idée aue la
société doit, par l'impôt, chercher à réaliser une égalité
de situation absolue pour chaque citoyen , et non re-
lative à la masse des biens et aux propriétés acquises.
Les besoins réels de chaque homme étant à peu près
identiques, les partisans de l'impôt progressif voudraient
que l'Etat retranch&t de tout ce qui excède la somme
nécessaire pour la satisfaction de ces besoins, en un
mot enloTàt le superflu. Avec ce système de taxe, on
demande par exemple, séro à un revenu de 500 fr. ou
tout autre minimum, un faible tantième à un revenu
de 600 fr. ; ce tantième , et ce qu'on appelle la rai-
son en arithmétique, à un revenu de 700 fr. ; ce tan-
tième plus deux fois la raison, à un revenu de 800 fr., etc.
L'impôt progressif a un vice radical : 11 sévit contre les
qualités mêmes quil importe le plus de propager au
sein des populations, et, s'il lui était donné d'atteindre
pleinement son but, 11 en résulterait la stagnation de la
richesse et de l'industrie. Cette taxe, par sa nature, dé-
tourne du travail ; se haussant à mesure que la richesse
s'accumule, elle punit le succès, et semble une prime
offerte à la paresse et à la dissipation. La république de
Florence a pratiqué l'impôt progressif avec passion ; quel-
ques Étais de l'Allemagne en usent modéiïment et rm-
come-tax anglais en a été une application restreinte et
éphémère. L'Assemblée Constituante de 1789 avait éta-
bli, par la loi du 18 Janvier 1791, l'impôt personnel sur
le loyer, d'après la théorie suivante : Un loyer de 200
livres dénotait l'existence d'un revenu à peu près double,
et cette proportion s'augmentait à mesure que le loyer
croissait, de telle sorte, par exemple, qu*nn loyer de
12,000 livres passait pour le signe d'un revenu douze
fois plus fort. L'application de ce système, sans être
maintenue d'une manière (rànérale, a été longtemps to-
lérée indirectement avant la loi du 21 avril 183$, par
l'autorisation donnée à quelques villes, Paris entre au-
tres, de répartir, suivant une échelle progreralve, le con-
tingent d'impôt mobilier dont une part est supportée par
une addition à l'octroi. V. J. Gamler, Éléments de
finances, Paris, 1859, in-18; Dictionnaire de l'économie
politique, A. L.
IMPRÉCATION (du latin imprecoHo). Ce mot ex-
prime l'idée d'une malédiction prononcée au nom des
Dieux. L'Imprécation, expression de la fureur et du dé-
sespoir, est une figure de Rhétorique ihSquemment em-
ployée dans toutes les littératures. En ce qui concerne la
poésie dramatique, on connaît les imprécations d'GEdipe
contre les meurtriers de Laïus dans VOEdipe roi de So-
sainte en offre des exemples également célèbres; telles
sont les Imprécations de Balaam contre les Hébreux, et
d'Elisée contre des enfants moqueurs. On troure au
l*' chant de VIliade d'Homère l'imprécation de Chryaès
contre Agamemnon, et, au 4* chant de VÊnéidc de "ar-
gile, les imprécations de Didon mourante. — Les Anciens
portaient des sentences ou décrets d'imprécation contre
ceux qu'ils regardaient comme impies ou sacrilèges :
c'est le plus souvent aux Furies et aux diyinltés infer-
nales qu^on vouait le coupable. Ainsi Aldbiade fut ma»-
IMP
lOCl
IMP
dH publiquement pour avoir profané les mystères de
Gérés et mutilé les statues de Mercure. — Le respect
qu'on avait pour les tombeaux donnait lieu à des impré-
cstioos d*uD genre dlilérent : les tombeaux étaient chargés
de fonnales qui vouaient le profanateur à la colère et à
la vengeance divines, et des inscriptions sépulcrales re-
cueillies par les antiquaires prouvent que cet usage se
perpétua dies les chrétiens des premiers siècles. Au
moyen âge, les diartes relatives aux privilèges du clergé
et aux donatioDs qui lui sont faites se terminent par des
malédictione da même genre. G.
IMPRESARIO, nom qu*on donne en Italie à tout di-
recteur d*une troupe de comédiens ou entrepreneur de
tbéfttre. Ce mot, qui est presque passé dans la langue
liaoçaise, vient de Titalien impresa, entreprise*
IMPRESSES (Espèces). V. Espèce.
IMPIŒSSION, action matérielle des corps sur TorgSr
oisme, et principalement sur le système nerveux : c*est
DDDhénomënepn^^ique^i devient l'antécédent indispen-
sable de la sensation. L'impression, à ce titre, est triple :
VcrffWM reçoit le premier raction et la communique aux
nmfs, qui la transmettent an cerveau. Cette impression
arganique, nerveuse et eéréhrtUe ne doit donc pas être
amfondoe avec la sensation, qui est un fait purement
psychologique résultant du premier : supprimez l'im-
inssion, ta sensation est impossible. L'analope qui
oiste entre l'impression proprement dite et certains faits
psychologiques a fsit donner son nom à ces derniers :
OD dit des impressicne morales, religietues, etc. ; c'est un
bogige que l'usage autorise et dont on ne peut guère se
ptsser, mais il ne faut pss oublier qu'il est métapho-
rique, et qu'il n'aatorise pas à confondre le monde ma-
Iviel avec le monde spirituel. R.
mpsBssiON, action d'imprimer. VimpressUm typogra-
yUgiM s^exécute à l'aide d'une presse iiue fait mouvoir
la ouvrier on une machine. On applique la feuille de
pipier sur la forme encrée convenablement, et on presse
de façon qae roail du caractère, entrant dans cette
foiille, y dépose l'encre dont il est couvert. Quand on se
sert d'une presse à bras, la feuille ne s'imprime nue d'un
cAté, et il faut recommencer sur l'autre, après avoir
changé la forme : avec la presse mécanique, les deux
cMés s'impriment encore successivement, mais dans une
même opération. On fait aussi des impressions avec des
pluches à Jour, par exemple, les aflfîcnes peintes. L'tm-
prttsto» de la gravure sur bois s'efTectue comme l'im-
pression typognqihique, parce qu'il s'agit encore ici de
reproduire un type qui est en relief. Il en est autrement
prâr l'tmprssstcm de la gravure en creux ou en taille-
dmo0 : là on ne laisse de l'encre oue dans les creux; on
fidt passer la feuille de papier sur la planche entre deux
rooleaux reooaTeits de langea qui font entrer le papier
dsas les creux de la gravure. Les creux et les reliefs ne
suit pour rien dans Yimpression lithographique : l'encre
oe preaid que aor les parties dessinées sur la pierre avec
Bo crayon gras ; une sorte de r&tean fortement fixé sur
la presse, et sous lequel passent la pierre et le papier,
dit décharger Tencre sur le papier. L'imprsMtoa des pa-
piers peints s'opère ordinairement au moyen de planches
de bois gravées en rc^ef : on emploie autant de planches
qu'il y a de couleurs dans le dessin, et on applique bien
exactement les repères les uns sur les autres.
nn«Essioii ( Peinture d'), couche de couleur posée, soit
ter one toile ou une muraille pour recevoir une pein-
lore, soit sur un mur, une boiserie, un ouvrage de ser-
rurerie, pour les préserver des eifeta de l'humidité. Ap-
pliquée sur des ouvrages de sculpture, elle efface toutes
les ftnesses du travail.
IMPRIMERIE, art de reproduire les écrits, au moyec
ée caractérea en métal fondus et assemblés. Cet art se
compose de deux parties, la composition et le tiragt
{V. ces mots). Sur l'histoire de l'imprimerie, V, notre
ÙicHtmnaire de Biographie et d^ Histoire.
IMPRIMÉS (Taxe des). Les imi^imés transportés par
Is poste étalent, avant la réforme de 1878, divisés en
) cfarnes : la -f** comprenait les Journaux et ouvrages
pàiodiques traitant de matières politiques ou d'écono-
Bi« sociale, taxés à 0 fr. U4 par chaque exemplaire du
poids de 40 gr. et au-dessous, et à 0 fr. Ui en plus par
chaqoe 10 gr. ou fraction de 10 gr. au-dessus; — la 2*
comprenait les Journaux, recueils, bulletins, etc., consa-
crés aux lettres, aux sdences, aux arts, à l'agricultnro et
à llndustrie, et dont le port est de 2 cent, par chaque
Sieriiplairedu loidsde'iOgr. etau-desAous, et de 1 cent, en
^ns pourcliM|oe tO gr.ou Traction do 10 gr.en sus; — la
r comprenait les avis, circulaires, prospectus, prix cou-
rants avec Qu sans échantillons, livres, gravures, litho-
graphies, .tutographies, épreuves d'impression avec les
corrections et len manuscrits (sous condition d'une auto-
risation préalable du directeur général des postes) : le
port étaii de \ cent, par paquet ou exemplaire isolé du
goidsde5gr.etau-dessous,etdei cent, en ptusparchaque
gr. jusqu'à 50; de 10 cent, depuis 50 gr. jusqu'à iOO, et
1 cent, de plus par chaque 10 gr. ou fraction de 10 gr.
au-dessus. Les imprimés de la 3* classe pouvaient être
expédiés sous forme de lettres, pourvu qu'ils fussent
plies de manière que les deux extrémités restent ou-
vertes, ou sous enveloppe non cachetée ; ils payaient alors
10 cent, chacun, circulant de bureau à bureau, et 5 cent,
dans la circonscription d'no même bureau (10 et 5 cent,
en plus par chaque 10 gr. ou fraction de 10 gr., s'ils
pesaient plus de 10 gr.). Toute insertion de lettre, ou
môme de note ayant caractère de correspondance, en-
traîne, aujourd'hui encore, une pénalité (V. Poste). Les
imprimés ne circulent aux prix précédents qu'autant qu'ils
ont été affranchis au départ : autrement ils sont taxés
d'après le tarif des lettres. S'ils ont été affranchis en tim-
bres-poste et que l'affranchissement soit insuffisant, ils
sont frappés, en sus, d'une taxe égale au triple de l'insuffi-
sance, taxe qui, en cas de refus du destinataire, est payée
par l'expéditeur. Les imprimés doivent être expédiés
sous bandes mobiles, couvrant au plus le tien de la sui^
face, ou sous une forme qui permette d'en vérifier faci-
lement le contenu. Les cartes, plans et gravures peuvent
être expédiés sur rouleau ou entre cartons maintenus
extérieurement par des ficelles faciles à dénouer. Le
poids des bandes, enveloppes et ficelles est compris dans
Ut taxe. Les paquets ne doivent pas dépasser un poids
de 3 kilog., ni avoir sur aucune de leure faces une dimen-
sion supérieure à 0<",45. V. le Supplément.
IMPRIMEUR. Des lettres patentes, données en mars
1488 par Charles VIII, accordaient aux imprimeurs-
libraires les privilèges et prérogatives de l'université.
Ces privilèges, confirmés le 9 avril 1513, furent souvent
renouvelés depuis, notamment le 28 février 1723. Nul ne
pouvait être imprimeur sans une autorisation du gouver-
nement. La profession devint libre à la Révolution ; mais
un décret du 5 février 1810 replaça l'imprimerie sous la
surveillance du gouvernement. La loi du 21 octobre 1814
décide que nul ne peut être imprimeur s'il n'a obtenu un
brevet ou autorisation du ministre de l'intérieur, qui
peut to^Joun le retirer. L'ordonnance du 24 octobre 1814
oblige les imprimeun à faire, à la direction de la librairie
pour Paris, au secrétariat de la préfecture pour les dé-
partements, la déclaration des ouvrages qu'ils se propo-
sent de publier, et à en déposer deux exemplaires : le
défaut de déclaration aiiant le dépôt, et le défaut de di^pôt
avant la publication, sont punis d'une amende de 1,000 fr.«
2,000 pour la récidive. Indépendamment du dépôt légal,
tous écrits traitant de matières politiaues ou d'économie
sociale et ayant moins de 10 feuilles dimpression, autres
que les Journaux ou écrits périodiques, doivent, aux
termes de la loi du 29 Juillet 18i9, être déposés par
l'imprimeur au parquet du procureur impérial, soqs
peine d'une amende de 100 à 500 tr. Chaque exemplaire
d'ouvrage doit porter l'indication du nom et de la de»
meure de l'imprimeur, à peine d'une amende de 3,000 fr.,
et de 6,000 fr. si cette indication est fausse, sans préju-
dice de l'emprisonnement. Les imprimeun sont tenus
d'avoir un livre coté et parafé par le maire, et d'y
inscrire, par ordre de dates et avec une série de numéros,
le titre aes ouvrages qu'ils impriment, le nombre des
feuilles, des volumes et des exemplaires, et le format de
l'édition. Un imprimeur peut présenter son successeur à
l'agrément du ministre. Tout possesseur ou dépositaire
d'une imprimerie clandestine est puni d'une amende de
10,000 fr., et d'un emprisonnement de 6 mois. V. Pic,
Code des imprimeurs n libraires, etc., Paris, 1827, in-8*;
Grimont , Manuel-Annuaire de Vimprimerie, de la li*
brairiê et de la presse^ Paris, 1855, ln-12.
IMPROMPTU (du latin m promptu, sur-le-champ).
Ce mot désigne une épigramme, un madrigal, ou une
autre petite pièce de poésie, faite sur-le-champ, sans avoir
été préméditée, préparée. L'impromptu demande, avant
tout, de la facilité, de la vivacité, du piquant ou du gra-
cieux. En voici un que fit M"' d^Houdetot sur M"* la du-
chesse de La Vallière, qui, à 50 ans, était encore fort
belle ;
La nature prudente et wege
Force le tempe à respecter
Lea diarmea de ce beau vliage
i^'eUe n*siinlt pa répéter.
IMP
1062
TNÂ
IMPROVISATION. En littérature, c*est Pacte d'expri-
mer ses pensées et ses sentimeats sans préparation, sans
labeur préliminaire {ex improvtso)^ dans l'ordre et sous
la forme que leur donnent ordinairement la réflexion et
le travail. On appelle aussi ImproviscUion le produit de
cette composition immédiate. Converser et causer, même
avec finesse, avec esprit, c'est sans doute composer en
parlant, mais non pas improviser. L'improvisation im-
plique une forme littéraire, une certaine élévation, qui la
distinguent du discours usuel : elle ne peut être qu'oro-
tour$ ou poéliqtte.
Pour un orateur, l'improvisation consiste, soit à parler
dans une circonstance imprévue, soit à prononcer un
discours dont il aura préparé le fond et disposé les prin-
cipales pensées. Dans le premier cas, il ne peut puiser
ses idées que dans une connaissance précédemment ac-
quise du suiet, et demander ses mouvements qu'à son
émotion subite. Dans le second, il a en quelque sorte
parlé déjà en lui-même presque tout son discours, pré-
paré ses preuves et calculé ses effets. En tout état de
cause, l'orateur qui improvise parlera avec plus ou moins
d'éloquence, selon qu'il aura plus ou moins d'habitude
et de facilité pour la parole, et qu'il sera plus ou moins
fortement ému, tout en restant maître de son émotion.
La faculté d'improviser, disait Quintilien, est le plus
beau fruit de l'étude et la plus ample récompense d'un
long travail : c'est qu'en effet, si l'on ne s'est familiarisé
par l'étude de l'art oratoire avec tous les éléments qui
doivent entrer dans U composition d'un discours, si l'on
n'a commencé par écrire et si l'on n'a beaucoup écrit, on
ne parviendra Jamais à posséder un vrai talent d'impro-
visation sur lequel on puisse compter. L'éloquence de la
chaire, ne s'exerçant au'à des intervalles assez longs, qui
laissent toute liberté a la composition écrite, et traitant
généralement des sujets qui nécessitent des méditations
préparatoires, foiupit de rares occasions et peu d'exem-
ples d'improvisation. Cependant Bossuet ne traçait qu'une
aorte de canevas de ses discours. Fénelon, dans ses Dia-
i lo(fU€S sur Véloqumce, ne se montre pas favorable à la
préparation écrite et à la récitation des sermons : « S^ Au-
gustin dit que les prédicateurs doivent parler d'une m&-
niôre encore plus claire et plus sensible que les autres
orateurs, parce que la coutume et la bienséance ne per-
mettent pas de les interroger. Ils doivent craindre de ne
pas se proportionner assez à leurs auditeurs. C'est pour-
quoi, dit-il, ceux qui apprennent leurs sermons mot à
mot, et qui ne peuvent répéter et éclaircir une vérité
Jusqu'à ce qu'ils aient remarqué qu'on les comprenne, se
S rivent d'un grand avantage. Vous vovez bien par là que
^ Augustin se contentait & préparer les choses dans son
esprit, sans mettre dans sa mémoire toutes les paroles
de ses sermons. Quand même les règles de la vraie élo-
ffuence demanderaient quelque chose de plus, celles du
ministère évangélique ne permettraient pas d'aller plus
loin. Pendant qu'il y a tant de besoins pressants dans
le christianisme, pendant que le prêtre, qui doit être
l'homme de Dieu, préparé à toute bonne œuvre, devrait
■e hâter de déraciner l'ignorance et les scandales du
champ de l'Église, Je trouve qu'il est fort indique de lui
qp'il passe sa vie dans son cabinet à arrondir des pé-
riodes, à retoucher des portraits et à inventer des divi-
sions. Car, dès que l'on s'est mis sur le pied de ces sortes
de prédications, on n'a plus le temps de faire autre chose;
pn ne fait plus d'autre étude, ni d'autre travail ; encore
même, pour se soulager, se réduit -on souvent à redire
loï^ours les mêmes sermons. Quelle éloquence que celle
d'an homme dont l'auditeur sait d'avance toutes les
«xpressions et tous les disconn! > Toi^ours est-il que
l'improvisation exige un labeur profond et étendu; car,
mieux vaut prononcer un discours suivi et sensé, préparé
.de longue main, que de débiter des idées incohérentes
.an un style plat, ou de rester court de pensées et d'ex-
pressions. — L'improvisation est bien autrement nécM-
.saire dans les débats Judiciaires et dans les discussions
politiques. Utile pour l'attaque, indispensable à la dé-
fense, provoquée par la contradiction, par les objections
inattenduea, elle est la pierre de touche du véritable ora-
.teur. Mais il est Juste d*observer qu'au barreau et à la
■tribune l'éloauence n'est pas tout entière dans les mots,
dans les sailues de l'imadnation, dans les grands mou-
vements qui naissent de Tà-proposet de l'inspiration du
moment, mais bien aussi dans les intonations, dans le
geste et la physionomie; et c'est la parfaite harmonie
entre la mimique et la parole qui double, dans l'impro-
visation, l'effet produit par l'orateur.
L'improvisation poétique remonte à nne haute anti»
miité, et Ton peut même dire au'à l'origine tonte poésie
dut être improvisée. La simplicité des rhythmes pnmitifi
laissait à l'inspiration des poètes un libre cours, liais
quand les langues eurent pris des formes plus rigoureaies
et plus variées, la poésie, distincte désormais du langage
vulgaire, se soumit à des règles : il fallut un travail par-
ticulier, une certaine science acquise, pour tnulmn;
l'inspiration poétique, et, dans ces con<Ution8, l'improvi-
sation devint une faculté exceptionnelle, partage de
quelques intelligences privilégiées. Les Orientaux et les
peuples du midi de l'Europe, les Italiens surtout, ont
une grande facilité à improviser des vera. Ce talent est
même si commun en Italie, que les improvisateurs s'éta-
blissent en plein air, et, prenant leur auditoire dans la
rue, font de leur art un véritable métier. Serafino d'Aqoila
et Bernardo Âccolti dit l'IThtco Aretino au xv* siècle, Ha-
rone, Quercio et Silvio Antonlano au xvi*, Perfetti, Zucoo,
la Corilla et Métastase au xvui*, Sgrioci, Cicconi, Bindocd,
Sestini, Gianni et Rosa Taddei au xix*, ont été doués, au
suprême degré, de ce talent d'improvisation poétique. En
France, l'improvisation s'est presque toii^ours bornée à la
production de quelques bouts-rimés, impromptus et ma-
drigaux, où la mémoire est principalement en jeu, et
dont le mérite consiste bien plus dans l'à-propos que
dans la valeur intrinsèoue de la poésie. Encore la sou-
daineté de ces compositions, où se distinguèrent les Voi-
ture, les Boufflers, les Neufchàteau, est-elle bien établie?
De nos Joura, Eugène de Pradel a Joui d'une grande
réputation comme improvisateur d'ouvrages. On dte
écrément De Clercq en Hollande, Wolf d'AItona et Lan*
genschwarz en Allemagne.
On doit encore ranger dans la catégorie de l'improvisap
tion poétique certaines pièces, d'une étendue médiocre,
provoquées à l'improviste, composées en une heure ou
deux, et qui sont quelquefois des œuvres que leur mérite
fera vivre ; nous citerons, dans ce genre, la Réponse à
NénUsis^ par M. de Lamartine, qui l'improvisa pen-
dant l'agitation d'un scrutin pour son élection à la dé-
putation , en 1831 , et le Rhin allemand, par Alfred de
Musset, pièce écrite en peu d'instants, à côté d'un salon
où l'on venait de lire la chanson allemande de Becker,
publiée en 1840, sous ce même titre, que Musset lui
emprunta.
n existe aussi une improvisation musicale, principale-
ment sur l'orgue et le piano ; elle est beaucoup plus ré-
pandue en Italie et en France qu'en Allemagne. Pour y
réussir, il ne suffit pas de posséder une grande habileté
d'exécution, des réminiscences plus ou moins abondantes.
Improviser, c'est lire, en quelque sorte, à livre ouvert
dans son imagination ; c'est y déchiffrer une idée nettOf
complète, bien conformée, ayant tous ses membres, avec
le mouvement et la vie; c'est concevoir et produire in-
stantanément nne mélodie régulière, soutenue par une
bonne harmonie, assujettie à la mesure et au rhythme.
Improviser, ce n'est pas exprimer des idées incohéraites
et banales, contrairement à toutes les réglée de l'art et
du goût.
IMPUTATION, en termes de Droit, action d'attribuer à
quelqu'un une chose digne de blâme. L'imputation pu-
blique d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la
considération constitue une diffcancUion ( V. ce mot). ^
On nomme tmputatton de payement l'indication que le
pavement fait par le débiteur s'applique à Tune de ses
obligations. Celui qui a plusieurs dettes a le droit de dé-
clarer, lorsqu'il paye, laquelle il entend acquitter. Lorsque
la dette porte intérêt, le payement qui n'est pas intégral
s'impute d'abord sur les intérêts, à moins que le créan-
cier ne consente à ce quUl en soit autrement.
INALlÉNABIUTË (au latin m privatif, et aiienus, au-
trui), état d'un bien, d'un droit, d'une chose quelconque,
qui ne peut être transféré à autrui. Ainsi, les biens des
mineurs, des interdits, des femmes mariées sous le ré-
gime dotal, des communes et des établissements pubb'cs,
les biens frappés de substitutions on érigés en majorats,
les pensions militaires et celles de la L^on d'honneiff,
les domaines de l*Êtat, etc., sont Inaliénables. Certains
droits naturels, comme la liberté, sont inaliénable», et le
Code Napoléon (art. 1780) dit qu'on ne peut engager ses
services qu'à temps ou pour une entreprise détoiminée.
INAMOVIBILITÉ (du latin tfi privatif, et amoMPi, être
détourné), caractère donné par la loi à toute fonction
publique dont le titulaire ne peut être dépossédé sans son
consentement, à moins d'excès d'âge, de forfaiture ou de
mort civile. Sont inamovibles, en France, les Sénateurs, les
membres de la Cour de cassation, de la Cour des comptes,
des Cours impériales et des Tribunaux de 1** iBstaneet
INC
1063
INC
^iBMlé tes magistrats du ministère public. LMnamoribi-
tttédes Juges, coDcôdée par un édit de Louis XI en date
4a ï\ octobre 1467, fut abolie par la Constitution de
1791, rétablie par la Constitution de Tan viu, détruite de
nouTsau par un arrâté du gouTernement provisoire de
1848, mais consacrée encore par l'Assemblée consti-
toute de la même année.
INADGURATION, cérémonie qui avait lieu chez les
SDciens Romains quand un citoyen était appelé à faire
partie d'un collège de prêtres, ou lorsqu'il s'agissait de
choisir un emplacement pour y élever un temple, une
ville, un théâtre, etc. Le nom venait de ce que Ton con-
sultait les augures sur la bonté du choix. — Pour les
Modernes, le mot Inauguration ne s'applique avec Jus-
tesse qu'à la cérémonie qui consacre les monuments
dvils (colonnes, statues, ooélisques, fontaines, etc.), la
rmière fois qu'ils sont livrés aux regards ou à l'usage
public
INCAPACITÉ, en Droit, défaut de qualité pour faire
quelque acte civil ou autre prescrit par la loi. Les inca-
pacités dérivent de la nature, ou sont fondées sur l'inté-
rêt général de la société; dans tous les cas, la loi les
détermine, parce qu'en principe toute personne est car-
pable. Elles cessent avec les causes çui les avaient pro-
duites. On distingue l'incapactté cwUe et rtncapoctt^
foliiiquB, L'ineapadté civile peut résulter de la faiblesse
de Vâge^ de VmterdictUM, de la qualité de femme mariée,
de la mort civUe ( K. ces mots). En matière de droits po-
litiques, les femmes, marié» ou non mariées, sont inca-
pames; les causes d'inci^acité pour les hommes sont les
mômes ou'en matière civile, et il y en a, en outre, qui
sont spéaales, telles que la dégradation civique etcertaines
condamnations. Pour les fonctions publiques, l'incapacité
résulte soit de l'absence des conditions requises pour
exercer ces fonctions, soit de certaines incompatibilités
(V. ce oioQ. — Les liens de parenté sont, en certains cas,
une cause d'inciq)acité. Ainsi, les parents et alliés, Jus-
qu'au degjcé d'onde et neveu incltûivement, ne peuvent
être simultanément membres d'un même tribunal ou
d'une même Cour, sans une dispense de l'Empereur (Loi
du 80 avril 1810). Il y a des incapacités du même genre
les fonctions de conseiller municipal (Loi du 5 mai
INCARNATION. F. ce mot dans notre Z)tcttonnatr0 de
Biographie et (V Histoire.
INCENDIE. La loi des Francs Saliens condamnait Tin-
cendiaiie d'une maison habitée à paver 62 sons et demi
au propriétaire, 100 sous à chacun de ceux qui avaient
échappé à l'incendie, 200 sous aux parents de chaque
mort, et à restituer ce qui avait été détruit. D'après les
Étabiissements de Louis IX , la peine était la perte des
yeux. Plus tard, un incendiaire de noble origine était
décapité, si le dommage avait été considérable, et, dans le
cas contraire, banni à perpétuité; pour le roturier, la
peine était le feu ou le bannissement, selon la gravité du
mal. — lA loi française actuelle punit de mort celui qui a
mis volontairement le feu à des lieux d'habitation, ou
dont le crime a causé la mort d'une ou plusieurs per-
sonnesft ^e édicté les travaux forcés à perpétuité, s'il
s'agit de lieux non habités, de forêts, de bois taillis, de
récoltes sur pied, les travaux forcés à temps; pour les
bois et récoltes abattus. Celui qui met le feu à des bâti-
ments et antres objets à lui appartenant est passible de la
réclusion, et, s'il en résulte pr^udice pour autrui , des
travaux forcés à temps. La menace écrite d'incendie en-
traîne un emprisonnement de 2 à 5 ans, et une amende
de 100 k 600 fir. Si elle est accompagnée d'injonction ou
condiâon quelconque, elle est punie des travaux forcés
à t^mps. Si elle a été simplement verbale, avec ou sans
condition, la peine est un emprisonnement de 6 mois à
9 ans et une amende de 25 à 300 fir. L'incendie par im-
prudence ou par négligence n'est pas un crime, mais un
délit : il entraîne des dommages-intérêts, et une amende
de 50 à 500 f^. (Code pénal, art. 434475). L'autorité mu-
nicipale prend les mesures nécessaires pour prévenir les
incendies (Arrêté du 5 brumaire an ix), et les contraven-
tions à ses arrêtés sont punies des peines de simple police;
elle peut faire abattre, pour circonscrire un foyer d'in-
cendie, les édiiices qui en sont voisins, sauf indemnité
payable par la commune, ou par toutes autres personnes
responsables. Quiconque est requis de prêter secours en
cas d'incendie, et s*^ refuse, est passible d'une amende
de 6 à 10 fr. L'autorité peut faire prendre Peau des puits
et dtemes, malgré les propriétaires.
INCERTUM OPUS. V.Appabbil.
DICESSIBLBy qui ne peut être cédé on tniuporté.
Sont incessibles : les choses déclarées insaisissables par
la loi ; les droits exclusivement attachés à une personne,
tels que les droits d'usage et d'habitation, le droit de pré^
sentation pour un office, etc.
INCESTE (du latin in né^tif, et castus, chaste), union
illicite des sexes entre ascendants et descendants légi*
times, naturels ou par alliance, parents au premier de-
gré, et entre frères et sœurs, parents au second degré,
La morale inspire une vive répulsion pour ces sortes
d'unions : cependant, les mariages entre frères et sœurs
se sont longtemps maintenus chez les anciens Asiatiques.
Notre Code pénal n'a pas compris l'inceste parmi les
crimes qualifiés. V, Mariage.
INCHOATIFS (Verbes), verbes latins qui marquent
l'action dans son commencement {flHnchoare, commen-
cer). Ils sont ordinairement terminés en sco, toujours
neutres, et ne peuvent prendre en aucune manière la
forme passive. Ceux qui dérivent de verbes se forment de
la 2* personne du primitif : u dormio, dormir, dormisco;
tremo, is, tremisco ; ardeo, es, ardesco; augeo, es, augesco;
labo, as, labasco. Cependant coalesco vient de alo, alir»
Ceux qui dérivent d'un nom ou d'un adjectif intercalent
entre le radical du primitif et la terminaison inchoative
la voyelle aou e : « puer, repuerosco; Juven-û, Juven-
esco; senex, sen-ù, ien-esco; œger, sgr-t, cegr-esco,-
grav-», ingrav-esco. » Ces verbes ne se conjuguent sous
cette forme allongée qu'aux temps qui marquent l'action
non accomplie (présent, imparfait, futur); le parfait et
ses dérivés sont terminés en ui, ueram, uero, etc., comme
s'ils Tenaient de formes plus simples : senm, conoaiui,
indurui, etc. Beaucoup manquent de cette seconde série
de temps. — On peut donner le nom é'InchocUifs k cet*
tains verbes grecs en aoxu, comme i^Sdoxu, juvenesco;
mpounuD, senesco; — et aux verbes français en tr qui
expriment un commencement d'action : vieillir, rajeu»
nir^ s'endormir^ verdir, jaunir; mais c'est plutôt par le
sens que par la forme qu'ils sont incnoatifs. — Certains
verbes latins en scOy comme disco^ nosco, etc., n'appar*
tiennent pas k cette catégorie. P.
INCIDENT, en Littérature, événement fortuit qui sur»
vient au milieu d'une action. Boileau a dit avec raison
{Art poét,, ch. m) :
ITofltos point sn n^et d'incidents trop chargé.
En termes de Palais, on nomme Inctdent une contesta-
tion accessoire qui s'élève dans le cours d'un procès. Les
demandes incidentes se forment par un simple acte, ren-
fermant les moyens et les conclusions ; elles sont Jugées
immédiatement et au préalable, ou bien, si le. fond est en
état de recevoir Jugement, il est statué sur le tout à la
fois {Code de Proced., art 337-341).
INCIDENTE (Phrase), proposiuon subordonnée en-
clavée entre les termes de la proposition dont elle dé-
pend. Ex. : « La terre , qui tout à Vkeure n*était qu'un
chaos, est un séjour délicieux où régnent le calme et
l'harmonie. » — « Le ton de l'orateur et du poète, dès qu$
le sujet est grand, doit toi^ours être sublime. •
Geint quimetun frein d la fiartwr des flots
BsAt aunl des méchants arrêter lea complota.
L. liAcm, la Religion, dl. !•
La phrase incidente est ou explicative^ comme dans
les deux premiers exemples, ou détermmativey comme
dans le second. Incidente parait venir du verbe latin te*
cidere, couper. V, Incise. P.
INCINÉRATION (du latin tn, en, dans, etctnti,oendre)f
réduction en cendres. Le mot se dit spécialement de l'acte
de brûler les corps humains après la mort; on emplie
aussi celui de cnrauitton. La coutume de brûler les corns,
au lieu de les inhumer , fut presque générale chez les
Grecs et les Romains (K. Buoier); on croit qu'elle cesse
à Rome sous l'empire des Antonins. César nous apprend
Se l'incinérstion était également pratiquée dans It
nie. Il en fût de même chez les Scythes et dans l'Index
Chez les modernes, l'inhumation {v. ce mot) a prévalu^
sauf pour des motifs particuliers, tels que le besoin
d'échapper à des épidémies que la putréfaction des ca-
davres aurait pu augmenter, ou la difficulté de creuser lar
terre pour y déposer les corps. Dans les années 1856 ei
1857, on a proposé de revenir k l'usage de la destructioa
des corps par le feu, en faisant surtout valoir l'encom»
brement des cimetières dans les grandes villes et le daa«
ger que fait subir à la santé publique le remaniement
iréquent d'un sol imprégné de matières putrides. Hais
l'incinéntion des morts répugne à nos instincts et à noe
INC
1064
INC
mœurs; elle présenterait d*ailleurB des dURcaltés insur-
montables. V. Jamieson, De l'origine de la crémation^
trad. de Tanglais par Boulard, Paris, 182U
INCISE (du latin tnctnis, coupé), petite phrase qui
forme un sens partiel, et qui entre dans le sens total de
la période ou d'un membrô de la période. Le plus sou-
Tent, rincise n*e8t pas indispensable dans une phrase;
mais elle la rend plus pleine, en y introduisant une nou-
velle idée accessoire. On doit éviter de multiplier les
incises : elles peuvent gêner la marche de la période et
la rendre obscure. 11 y a deux incises dans les vers sui-
vants de Racine {Iphigénie, iv, 6) s
Asaes d'aatres viendront, d noB ordres êoumis.
Se couvrir dea lanrlers qui vous furent promit.
Et, par d'heiireux exploits forçant la destinée.
Trouveront d'IHon la fatale journée. P.
INCOLAT (Droit d*), nom donné, dans quelaues États
modernes, au droit que le souverain accorde à certains
étrangers de Jouir des mêmes prérogatives civiles et po-
litiques que les indigènes {incolœ),
INCOME-TAX. V, ce mot dans notre Dictionnaire d»
Biographie et d* Histoire.
mœMPÂTlBIUTÉ, impossibilité ou*il y a, suivant les
lois, à ce que certaines fonctions puissent être exercées
«n même temps par un même individu. Par suite de la
distinction des pouvoirs dans TÉtat, il y a incompatibi-
lité entre les fonctions militaires et les fonctions admi-
nistratives, entre celles-ci et les fonctions Judiciaires ;
entre le service de la garde nationale et les fonctions des
magistrats qui ont le droit de requérir la force publique ;
antre les fonctions Judiciaires entre elles, et entre les
fonctions administratives entre elles (loi du 24 vendé-
miaire an ui). D'autres incompatibilités sont fondées sur
la hiérarchie des fonctions, sur l'impossibilité de suffire
à deux emplois, et sur des raisons de convenance : ainsi,
des fonctions de Jure sont incompatibles avec celles de
•ministre, de sénateur, de conseiller d'État, de préfet, de
gius-préfet, de juge, de procureur général, de procureur
npérial, de substitut, de ministre d'un culte {Code
instruction crim,, art. 383 ; loi du 4Juin 1853) ; la pro-
fession d'avocat est incompatible avec les fonctions de
Tordre Judiciaire, avec celles de préfet, de sous-pré-
fet, etc., avec toute espèce de négoce; les fonctions de
1u^ sont incompatibles avec les professions d'avoué et
d*huissier, et avec le commerce ; un avoué ne peut être
conseiller de préfecture (avis du Conseil, 5 août 1800);
les fonctions de notaire sont incompatibles avec celles de
Juges, de procureurs, de substituts, de greffiers, d'avoués,
d*hui8siers, de commissaires de police (loi du 25 ventôse
an xi). Les comptables de deniers communaux, les agents
salariés des communes, les entrepreneurs de services
communaux, les domestiques attachés à la personne, les
individus dispensa de concourir aux charges commu-
nales, ceux qui sont secourus par les bureaux de bien-
fidsance, ne peuvent être conseillers municipaux (loi du
5 mai 1855); les agents salariés du maire ne peuvent
être ses adjoints. Les conseillers d'État en service ordi-
naire et les maîtres des requêtes ne peuvent être séna^
tenrs, ni députés au Corps législatif, et leurs fonctions
sont également incompatibles avec toutes autres fonctions
publiques salariées (décret du 25 Janvier 1852). Les mi-
nistres et tous autres fonctionnaires publics rétribués ne
peuvent être membres du Corps législatif. La loi du 22 Juin
1833 désigne un certain nombre de fonctionnaires qui ne
Seuvent faire partie d'un Conseil ^néral ou d'un Conseil
'arrondissement. Le caractère spirituel du ministère
•oclésiastique le rend incompatible avec les fonctions
administratives ou Judiciaires.
INCOMPÉTENCE, état du Juge qui n'a pas pouvoir de
•onnaltre d'une contestation. L'incompétence est maté'
rielle, si le Juge connaît d'une matière attribuée à un
antre Juge ; personnelle, s'il prononce entre des personnes
Sd ne sont pas ses Justiciables. — Relativement à un
nctionnaire de Tordre administratif, l'incompétence est
la négation du pouvoir de faire tel ou tel acte qui n'est
pts de son ressort. V. CoMPéreMCE, Conput.
INCOMPLEXE, c-à-d. qui n*a pas de complément,
s^oppose à complexe. Le sujet et l'attribut sont incom-
plexes dans cette proposition : « La rose est odorante; •
an lieu que le sii^et est complexe dans celle-ci : « Le
parfum des roses est doux. > L'attribut le deviendrait,
•*il y avait : « Il m'est doux, le parfum des roses, » ou :
« Qu'il est doux ! » P.
Inconnu (Le Bel), roman de la Table ronde. Le si]^et
4e la délivrance de la tille du roi Gringars, la blonde
Esmerée, qu'un enchanteur a changée en une golvie
(couleuvre^ monstrueuse, et fait garder par deux cheva-
liers et mille Jongleurs dans un immense chAteau en-
chanté, au milieu de la Cité Gastée (ruinée). Cette déli-
vrance ne peut être accomplie que par un seul chevalier.
Le Bel Inconnu, ainsi nomme de ce qu'il ignorait son
propre nom, obtient du roi Arthur la permission de
tenter l'entreprise, se rend au ch&teau, brave tous les
enchantements, combat tour à tour les deux chevaliers,
met l'un en fuite et tue l'autre. La guivre se montre
alors, s'approche, le fascine de son brillant regard,
s'élance sur lui, le baise à la bouche, et ce baiser détruit
le charme. Elle redevient une belle Jeune fille, se fait
connaître à son libérateur comme reine du pays de Galles,
et lui oflï'e son royaume et sa main. Le Bel Inconnu ao
cepte, après qu'une voix mystérieuse lui a révélé qu'il se
nomme Giglain, fils du chevalier Gauvain et de la fée aux
Blanches Mains. — Ce roman forme plus de 6,0U0 vers
de 8 syllabes, dont 2,000 environ racontent l'aventure
principale : le reste se compose de récits épisodiques de
combats contre des chevaliers ou des géants, que le Bel
Inconnu rencontre, et qu'il tue ou soumet, pendant son
voyage pour se rendre à la Cité Gastée. Parmi ces épisodes,
remarquables par une imagination heureuse, et souvent
l'art et la vivacité de la narration, il y en a un, la Fée de
Vtle d^or, pour laquelle le Bel Inconnu se prend d*une
vive passion, qui parait évidemment le tjrpe de celui
d^Armide et Benaua^ de la Jérusalem délivrée : le nœud,
les détails, et Jusqu'au dénoûment, sont les mêmes, car
le Bel Inconnu n'est arraché à son enivrement que par
l'annonce d'un tournoi où le ni Arthur convoque tous
les chevaliers.
Le roman du Bel Inconnu (ou It Biaus Desconnus) est
de Renauld de Beaujeu, poète du xiu* siècle; il Jouissait
d'une grande vogue au moyen âge, et fut traduit en plu-
sieurs langues, notamment en anglais; mais l'original
était perdu depuis des siècles, lorsque le hasard l'a fait
retrouver en 1855, dans un vieux manuscrit de la bi-
bliothèque du duc d'Aumale, àTwickentaam. M. Hippeau,
qui fit cette intéressante découverte, obtint du prince la
permission de publier ce roman, dont i! donna l'édition
princeps^ suivie de la traduction anglaise et d'un glos-
saire, Paris, 1800 , petit in-8*', dans une collection de
portes finançais du moyen âge. C. D— t.
incorporation, en termes de Droit, mode d'acquérir
la propriété par accession {V, ce mot). Tout ce qui s'unit
et s'incorpore à la chose principale appartient au proprié-
taire.
INCROYABLES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire.
INCRUSTATION, ouvrage d'architecture, de sculpture
ou d'ornementation, composé de plusieurs matières dont
les unes forment des dessins dans les autres. Dès les
temps les plus reculés, les incrustations ont été en usage:
ainsi , on appliquait des yeux de verre et des vêtements
ou ornements de couleur à quelques statues. Les émaux
incrustés sont regardés comme les plus anciens. Le moyen
ftge nous a laissé des pierres tombales dont les incrusta-
tions en métal pour les vêtements offrent une grande
finesse de détails. V, MAHQOBTaaiB, Damasquinorb, Niellk,
Émail, MosaIqdb.
INCULPATION. V. Accusation.
INCUNABLES, nom que l'on donne aux livres qui
sont regardés comme sortis du berceau (incunabula) de
l'imprimerie, c-à-d. ceux qui ont été imprimés dans les
premières années de l'introduction de cet art dans chaque
ville. Jusqu'à l'année 1500, et même 1520 pour quelques
ouvrages. Pour les incunables xylographiques ou tabel'
laires, c-à-d. obtenus au moyen de planches de bois so-
lides et d'une seule pièce, on ne saurait assigner aucune
date certaine; mais la Bible des pauvres et le Donat
{V. ces mots) passent pour antérieurs à 1440. Parmi les
incunables typographiques ou composés en caractères
mobiles, les plus anciens sont > la Bible Mazarine, qui
est de 1450 à 1455; la Bible de Sch^horn, de 1461 au
{dus tard, et que plusieurs bibliographes regardent comme
'œuvre de Gutenberg lui-même; la Bulle d'indulgences
de Nicolas V, 1454; le Psaulief de 1457; le Bationale
dvoinorum offieiorum de Durand, 1459, V. Haittaire, An-
nales typographici, La Hâve, 1719; Meermann, Origines
typographicœ, La Haye, 1765, 2 vol. in-4«; Panser, An-
nales typographici, Nuremberg, 1793^830, 11 vol. in-4";
Audiffredi, Catalogus editûmum seculi XV, Rome, 1783,
in-4**; Uain, Bepertorium bibliographicum, Stuttgard^
1826-38, 2 vol. in-4«.
INCUSKS (du latin m, dans« et euder^, frapper), c-
IND
1065
IND
fn^tpées m creux; nom donn^à des médailles dont le
^jrpe est en creux d^un c6té et en relief de Tantre, le plus
soarent par IMnadrertance du monnayeur pour les mé*
ëailles romaines, et caiact&re de haute andcpiité pour les
médailles grecques.
INDÉCLINABLE, en termes de Grammaire, se dit des
■KMs qui Esrdent une forme immuable parce que l'idée
qails expriment conserve toujours et partout le même
aspect Ce sont les prépositions, les adverbes, les conjonc-
tions et les interjections.
DfDÊFECnBILlTÉ, caractère que possède rÊglise ca-
tholique de ne pouToir périr ou tomoer en ruine. L*in-
dtfectibilité repose sur ces paroles de J.-G. à ses apôtres :
•Je serai avec vous Jusqu*à la consommation des siècles.»
(S* Matthieu, xxviii.)
INDÉFINI, se dît des mots qui expriment une idée
lague ou générale, qu*on n'applique point à un objet par-
ticulier et défini. (M, rien, personne ^ autrui, qui, que,
qm interrogatifs, sont des noms indéfinis; chacun,
^qu'un, run. Vautre, quiconque, sont des pronoms
faidéfinis ; chaque, quelque, aucun, nul , tout, quel , quel-
conque, sont des adjectifs indéfinis. Celui et tel , suivis
(Tan relatif, sont très-souvent employés dans un sens
ragae ; ils doirent être classés alors parmi les pronoms
indéfinis. Les locutions quoi que, qu% que ce soit, quoi
que ce soit , peuvent être rangées au nombre des noms
indéfinis. Dains la conjtigaison française , le mot indéfini
Implique au iKusé ou prétérit formé à Taide du préMnt
de Tauxiliaire é^re ou avoir (fai aimé, U est tombé),
parce que cette forme verbale marque une action faite à
one époque entièrement pauée, qui très-souvent n*est
PM déterminée, ou dans une période de temps qui n'est
pas entièrement écoulée et que Ton considère comme
plus ou moins ysigue ; ainsi : « Les fraits de la terre ont
été la première nourriture des bommes. — J'ai eu la
fièvre cette année, ce printemps, ai:^ottrd'hui , etc. » Dans
eme aoceptioD, le passé indéfini correspond tout à fait à
IWiste des Grecs. Mais souvent notre prétérit indéfini
indique une action récemment terminée, ou du moins
dont les résultats, qi^elque éloignée que soit cette action,
nbsistent encore au moment où l'on parle : « J'ai fini ma
lettre, ma tftdie ; — J'ai envoyé tout ce que tous m'avez
(fit; — je me suis mis dans une bien fâcheuse position ;
— la longueur de cette guerre nous a réduits a de tels
malheurs. » Alors il correspond au parfait des Grecs.
Dans la vivacité de Texpression, le prétérit indéfini rem-
place quelquefois le futur antérieur, de même que le
présent remplace le futur; ainsi, de même qu'on dit :
àtteadez,je viens, poarje mendrai daeis un instant, de
Bâne on dit : Attendez, j'ai fni daeis un moment, pour
i'oMraî fini , je vais avoir fini. Avex-vous bientôt fait, dit
avec vivacité ce oui s'exprime d'ordinaire ainsi : Aurex'
vous bientôt fait r — Enfin le mot indéfini s'applique à
des phrases entières lorsqu'elles ont quelque chose de
vague, qu'elles ne présentent rien de fixe à l'esprit,
(pi'eUes n'expriment qu'une pensée générale, une pensée
^ ne tombe sur aucun objet particulier, déterminé. On
(fit alors que la phrase a un sens indéfini. Ex. : ■ Croitpon
avoir satisfait à tous les devoirs du chrétien, quand on
l'a rendu senrice à personne? > P.
INDEMNITÉ « ce oui est accordé à titre de réparation
dHm dommage (en latin damnum) causé par une per-
sonne à une autre (K. DoMiiAGES-iiimftTs). bans certîdns
cas, l'État ou les communes doivent des indemnités, par
exemple, au propriétaire exproprié pour cause d'utilité
publique (K. Expropriation), à celui qui a été pillé dans
«ne émeute, etc. En 1840, on a indemnisé les proprié-
t^res des colonies françaises dont les esclaves venaient
(Têtre affranchis. On nomme encore indemnité le recours
accordé à la femme sur les biens du mari, pour les obli-
gations auxquelles elle s'est engagée avec lui ; elle doit
être indemnisée entièrement par les héritiers du mari
^and elle renonce à la communauté ; mais quand die
Taccepte, elle n'a son recours que pour la moitié.
nDsmvnrA oe boute» F« notre Dictionnaire de Biogra^
Vhie et d^Histoire,
INDÉPENDANCE. LMndépendaoce réelle n'appartient
qu'à Têtre absolu, à Dieu, car Dieu seul ne dépend d'au-
ean autre être. Pour l'homme il ne peut y avoir d'indé-
pendance absolue; il dépend non-seulement des lois
onrales quo Dieu lui a imposées, mais aussi des faite
résultant de sa nature spirituelle et matérielle, et des
oonditions métaphysiques et physiques du monde où il
est placé. L'indépendance à laouelle peuvent aspirer les
booimes n'est que relative au Droit des gens, aux rela-
tions internationales. L'un des premiers droits qui, pour
un État, découlent de la souveraineté, c'est l'indépen-
dance k l'égard des autres États, et, pour les nanona
asservies par un conquérant, le premier nut est de recou-
vrer leur indépendance. Mais si les sociétés politiques
sont de droit indépendantes entre elles, les inmvidtts an
sein de chaque société sont nécessairement dépendants;
ils dépendent des lois et de l'autorité publique. L'état
social lui-même suppose le sacrifice de l'indépendance
individuelle aux nécessités de l'ordre. Dans la sxJété*
donc l'individu a droit à la liberté, non à Vindépendance,
INDÉTERMINÉ , terme de Grammaire. V, InnénNi.
INDEX , nom donné, en Bibliographie, à la tiible alpha-
bétique des matières des livres grecs et latins. Souvent
dans cette table se trouvent indiqués tous les passages où
un même mot est emplové. Quand les travaux de ce genre
sont publiés à part ae rouvrage auquel ils se rapportent,
ils forment des lexiques spéciaux. V. Lbxiqub.
nuDfix (Gongr^tion de 1'). F. notre Dictionnaire de-
Biographie et (JP Histoire,
INDICATIF, mode des verbes qui exprime l'état ou l'aiv-
tion d'une manière positive, certaine et absolue. U reçoit,
en ihmçaisj 8 modifications : le présent faime, l'impar-
fait j'aimats, le passé défini j'aimai, le passé indéfini-
j'ai aimé, le passé antérieur i'et» aimé, le plus-que-par-
fait j'avais aimé, le futur j'aimerai , le futur antérieur
i'otfnit aimé. — En latin, ces modifications se réduisent
à 6 ; amo, amabam , amavi, amaveram , amabo, ama-
vero. Elles sont en prec au nombre de 7 : 91X&, l^>ouv,
91X^9», ifOa^ti^ ica^CXirpia, èice^tX'^cv, nsoiXvxwc io^»-
ftat. Mais elles peuvent s'élever jusqu'à 10, à l'actif:
ainsi le verbe tuicrso, outre l'aoriste itv4«» a un second
aoriste irvicov, et, outre le parfait et le plua-que-pufait
técv^o, irsTOfecv, un secona parfait et plus-que-parfait
tétuno, èmOicaiv. — Dans beaucoup de cas, l'emploi syn-
taxique de l'indicatif n'est pas le même en ftançais, en
latin, en grec ; ainsi , en innçais et en grec, on dit avec
l'indicatif: ■ Dites-moi ^t vous êtes, ok vous allez, st
vous viendrez, etc. > Il faut, dans ce cas, le subjonctif en
latin. Les Grecs disent : « Envoyea-moi quelqu'un qui-
est capable de me rendre ce service; > dans ce cas, le
latin et le français emploient le suljonctif. Les Grecs-
disent : « Faites en sorte que vous serez digne de l'estime
publique ; > les Français et les lAtins disent « que vous
soyez, » L'indicatif accompagne souvent les conjonctions
grecques et latines signifiant avant que; cela est tout à
fait contraire k l'usage de notre langue. Mais un fait re-
marouable commun aux trois langues, c'est l'emploi de
l'indicatif à la place du conditionnel. Ainsi, Voltaire dit:
■ Stanislas étant pordn, s'il restait , » pour dire « eût été-
perdu, s'il fidt... > On dit dans les trois langues « U faU
lait, oportébai ou oportuit, C&i, Ixpnv > dans le sens
conditionnel ; et l'on dit indistinctement « je yuis citer
on Je powrrais dter. Je potimitf ou J'ottroM pu d*
ter etc. v P
INDICnON. F. ce mot dans notre DictUmnaère dm
Biographie et df Histoire,
INDIEN (Art). I. Architecture. — Les monuments re-
ligieux de l'Inde se divisent en trois classes, les templer
souterrains, les rochers taillés et sculptés, et les pagodes
en matériaux raopor^. Ce sont trois périodes distinctes
et successives de l'art; mais aucune construction ao*
tuelle ne parait remonter plus haut que le vni* siècle de-
notre ère. Les temples souterrains se développent sous des»^
montagnes de porphyre dans une étendue de plusieurs
lieues; les plus célèmes sont aux environs de Bombay et
dans nie de Geyian. Ceux d'Ellora (F. ce mot) passent
pour les plus curieux. On volt encore de nomnreuses*
grottes sacrées sur la cùte de Goromandel , non loin de-
Madras, dans l'antigue ville de Mahabalipour, dans l'ile-
de Salsette, à Karii (entre Bombay et Ponnah), dans*
l'Île Éléphanta (K. ce mot), etc. Le plus ordinairement
ces grottes sont carrées, reposent sur de nombreux piliers,
et s'ouvrent sur un péristyle k colonnades. Au fond , et*
entouré d'un espace libre, se trouve le sanctuaire, mé»
nagé dans une espèce de niche. Les piliers sont pour la
plupart quadrangulaires jusqu'à une grande hauteur, et-
se terminent en forme de colonnes cannelées, supportant
comme chapitean une espèce de coussin déprimé qne^
surmonte un abaque cubique avec des consoles. Les
temples taillés à ciel ouvert dans les rochers n'offrent pas
un travail moins étonnant. On en a également élevé-
dans les villes et dans les résidences des souverains. Les^
forteresses, comme dans les antres contrées de l'Asie,
renfermaient le palais des rois et le temple des dieux, et
elles occupaient un espace considérable. Le palais de*
Madourèh n'a pas moins d'un mille de drcult , et il eo»-
IND
1066
IND
tient dans sdn enceinte des bois, des étangs, des Jardins,
des galeries, des maisons, et une magnifique pagode,
dont ie soubieissement est en pierres de taille et la partie
•apérieure en briques vernissées; cette pagode a 37 met.
de largeur à sa base et 50 met. de hauteur. La pagode de
Tbqjaour a 70 met. de hauteur, et 12 étages; celles de
Ben^Bilore, de Tritchinapaly, de Burramahl et de Bfalssour
se sont pas moins importantes. Biais une des plos com-
plet» est celle de Chalembroum, sur la côte de Goroman-
del. Les pagodes ou temples en plein air se terminent par
one coupole renflée sur les eûtes, ou par un dôme écrasé;
elles ont des plafonds yoûtés et des façades fermées ; le ca-
price a présidé à leur construction : on en voit qui repo-
sent sur le dos de gigantesques éléphants. — Les palais
se composent ordinairement de petites cours entourées
de b&timents, quelquefois découvertes, mais le plus sou-
vent plantées d*arores : une colonnade en forme de
eloltre rè^ne autour de chaque cour. Les b&dments, de
construction solide, ont des toits plats en terrasse, et Ton
peut toi^oors superposer des étages avec régularité. Les
escaliers, étroits et roides, sont pris dans Tépaissenr des
murs. Les maisons particulières sont construites d'après
les mêmes principes. Quelques-unes ont des murs en
«tue blanc, d*autres sont peintes en rouge foncé; à Tinté-
rieur, elles sont couvertes de peintures représentant des
ari>res ou des sujets mythologiques. La coutume de bâtir
des tours aux portes des villes ou des grands monuments
existe dans l'Inde comme dans Tancienne Égvpte t mais
les Hindous n'en élèvent qu'une, au-dessus de la porte,
tandis que les Égyptiens en plaçaient deux, une de chaque
eôté. Les plus grands de tous les travaux des Hindous, ce
■ont peut-être leurs réservoirs : les uns, creusés dans le
sol et près des villes, servent aux bains et à Tirrigation;
les autres sont formés par des vallées dont on a comblé
les issues par des digues immenses. Il y a encore dans
l'Inde une espèce de puits d'une profondeur considérable
et d'une grande largeur, ronds ou carrés, entourés de ga-
leries Jusqu'au niveau de l'eau, et où Ton descend par
de larges aegrés. Il faut enfin compter, parmi les monu-
ments de l'architecture indienne, des colonnes et des arcs
de triomphe carrés, élevés en l'honneur des héros victo-
rieux, et des ponts dont les piles, formées d'énormes
blocs, sont Jointes les unes aux autres par des pierres de
taille d'un seul morceau. — Dans l'Afghanistan se rencon-
trent des monuments funéraires d'une construction parti-
culière, et que l'on nomme topês ou stupas. On en a fouillé
quelques-uns, et on ne peut douter que les salles qui s'y
trouvent n'aient renfermé des restes humains. Le» Dago-
^hoi, monuments funéraires de l'Ile de Geylan, affectent
iine forme et une construction un peu différentes : ce sont
des espèces de tumulus recouverts d'une pyramide. — Il
«erait difBdle de déterminer les bases de l'architecture
Indienne : les rèales imposées par les lois religieuses aux
architectes leur Indiquaient plutôt la disposition et l'im-
portance des édifices que leur forme. On les trouve dans
les chap. xxvi et xxvn du McUsya, le plus important des
Paurancu. Quant à l'ornementation, elle devait être exclu-
sivement hiératique, et frapper sans cesse Hmafrination
•ardente et désordonnée de peuples restés statiennaires
dans leur civilisation. Les musulmans vinrent au moyen
•âge imposer à ces nations leur religion, leurs usages et leur
goût dans les arts. Alors on vit les mosquées et les minar
reta remplacer les temples antiques de rinde. Les princes
leldjoukides , mongols et persans élevèrent un grand
nombre de mosquées et des palais d'une splendeur sans
égale. Enfin sont venus les dominateurs chrétiens, qui
•ont bâti leurs chétifs et maigres monuments dans le
goût classioue, étrange contraste avec les colossales con-
structinns des temps antérieurs. Madras, Bombay, Cal-
cutta, THiandeniagor, semblent autant de villes grecques,
n. Sculpture, — Les règles de l'architecture indienne
étaient tracées dans les livres sacrés, et les architectea,
Tevêtus d'un caractère semi-saoerdotal, ne pouvaient s'en
écarter. Les sculpteurs avaient une latitude plus grande;
leur art avait aussi ses règles et ses principes, ses types
pour les divinités, mais ils avaient toute liberté pour
inspirer le respect et VeXtioi aux Hiodous,en donnant aux
parties architectoniques et aux décorations les formes les
plus bizarres et les plus capricieuses. Les Hindous trou-
vaient, dans leur mythologie, des si^ets inépuisables ; mais
la symbolique arbitraire qu'y rattachaient les idées popu*
laires rendait très-difficile une exécution artistique. L^ar-
tbte, condamné à représenter des divinités à trois têtes,
;à Quatre et Jusqu'à douie bras, ne pouvait arriver k pro*
-duire des oauvres vraiment belles. Les sculpteurs indiens
«tmi tndté le bas relief aussi bien que la rondebosM et to
statuaire. Si quelques-unes de leurs œuvres ont de l'ei-
pression, toutes attestent une grande inhabileté dans la
composition, et une ignorance complète de l'anatomie et
des proportions. lisent mieux réussi dans les arabesaues.
111. Peinture. — La peinture est encore dans l'enJance
chez les Hindous. Les murailles des palais et des mai-
sons offrent des sujets peints avec des couleurs à l'eau,
quelquefois à l'huile, et représentant des scènes mytho-
lo^ques, des batailles, des processions, des luttes, des
animaux, etc. Tout cela est fort grossier. Les miniatoioi
de l'Inde conservées dans les manuscrits possèdent une
certaine grêce, quand elles représentent des scènes de
la vie ordinaire, et, pour la facilité du dessin et l'expres-
sion, elles l'emportent infiniment sur les miniatures chi-
noises. On peut voir à la Bibliothèque impériale de Paris
une belle collection d'œuvres du xvi* siècle, rapporta
par Manucci, et, en manuscrit, une Histoire des Radjahs
de VHindoustan, que le colonel Gentil écrivit en 1772 et
fit orner de miniatures par un artiste indien.
lY. Miuique, — La musique des Hindous compte
84 modes, dont on n'emploie ordinairement que 3G, et
qui ont diacun une expression particulière destinée à agir
sur tel sentiment ou telle affection. Ces modes emprun-
tent leurs noms aux saisons de l'année, aux heures du
Jour et de la nuit, et sont censés posséder chacun quel-
que (qualité appropriée au temps d'où il a pris son nom.
Les airs hindous se ressemblent presoue tous, et sont r&-
marquablement doux et plaintifs : l'exécution la plus
favorable est celle à une seule voix, accompagnée par la
vtna, instrument qu'on appelle la lyre indienne ; mais le
plus souvent on accompagne avec de» instruments à
cordes et des tambours, et les chanteurs ne dominent
tout ce bruit qu'en poussant des cris déchirants pour des
oreilles européennes. La gamme des Hindous procède
par octaves, comme la nôtre; mais ils ne connaissent pas
notre harmonie. Parmi les instruments qui leur sont par*
ticuliers, nous citerons : le song, buccin dans lequel les
Brahmanea soufflent de toutes leurs forces pour appeler
le peuple; le gautha, petite cloche de bronze, oroée
d'une tête et de deux ailes, qu'ils sonnent soir et mstla
dans les vestibules des temples avant de commencer les
sacrifices ; le capliu ou bin, composé de deux calebasses
d'inégale grosseur. Jointes par un long tube de bois sur
leauel sont tendues plusieurs cordes de fil de coton gom-
mées et deux cordes d'acier; le tamboura, dont le corps
est formé d'une gourde avec un long manche, et qui est
monté de trois cordes qu'on frappe avec un plectre; le
sartmgui^t qm a du rapport avec notre violoncelle, bien
que plus petit et monté d'un plus grand nombre de cordes;
le sarindaf violon grossier dont les cordes sont en coton;
Vomerti, espèce de timbale formée d'une noix de coco
qu'on a recouverte d'une pe&u très-mince, et sur laquelle
sont tendues quelques cordes; Ttimt, instrument du
même genre, mais à une seule corde; le hauk, énorme
tambour orné de plumes et de crin, dont on fait usage
dans certaines fêtes, moyennant une permission de l'au-
torité, et le payement d'une certaine somme; l'Iiuia, tam-
bour plus petit dont on bat avec la main; le mirdeng ou
khole, tambour dont le corps est en terre cuite ; le domp,
grand tambour de forme octogone; le thobla, composé de
deux tambours, l'un de terre et l'autre de bois; le tikom,
formé aussi de deux tambours, mais d'inéeale grandeur;
le Hugo ou djumpa, cylindre de terre cuite, sur lequel
on a tendu une peau, et dont on tire une espèce de bour-
donnement par le frottement d'un archet sur cette peau;
le surmongtah, formé de longs morceaux de iMunhou unis
par de petites cordes qui les traversent; le ramsingOp
grande trompette composée de quatre tubes de métal
très-mince qui entrent les uns dans les autres; le batunk,
qu'on peut comparer à notre trompette pour la forme et
pour la qualité du son ; le sunaraé, sorte de clarinette ;
le tabri, qui ressemble à la cornemuse; le bansy, flûts
k bec, et le crishma, sorte de flageolet, qu'on insufile
avec le nez.
V* Langlès, Monuments anciens et modernes de l'Hin-
doustauy Paris, 1810-13, 2 vol. in-fol.; Rammoboun-Roy,
Essay on thê architecture of the Bindus, Londres, 1834;
Kittoe, Fllustrations of Indian arcfUtecture , Calcutta,
1843, 17 part, in-fol.; Lassen, Antiquités de l'Inde^ Bonn.
1844^2. E. L.
INDIENNE ( Littérature). L'Inde eat, avec la Grèce et
l'Italie, la contrée du monde ancien qui a produit le ^us
d'œuvres littéraires : sa fécondité en ouvragée de tous
genres a été immense. L'Europe ne possède pas, à beau*
coup près, tous les livres composés dans l'Inde ancienne
et moderne ; et cependant ceux qu'elle a édités ou donl
IND
1067
IND
iDe 1 tes mamiBcrito ou les textes Imprimés en Orient,
tonnent déjà une grande bibliothèque. Ces onvrages, dont
pliuieors sont fort étendus, ne sont venus entre nos
mains que depuis la fin du dernier siècle ; la plupart ne
oont pas encore traduits dans les langues de TEurope ;
l'Allemagne et TAngleterre ont fait la mijeure partie de
ces traductions, el la France, à présent entrée dans cette
Toie, commence à pouvoir prendre connaissance de
l'Orient sans recourir à ses Toisins. Les œuvres qui com-
poeent la littérature de Tlnde ne se sont point produites
en on petit nombre d'années ni même de siècles : ses
pins anciennes poésies sont antérieures à tout ce qui
reste des plus anciens monuments littéraires de la race
âiyenne, et Ton ne peut pas même dire que la littérature
inscrite soit terminée, puisque, si la langue des anciens
lirihmanes est une langue morte, cependant plusieurs
brahmanes de nos Jours composent encore en sanscrit, et
considërent cette langue comme leur véritable idiome
littéraire. Ainsi , la littérature de Tlnde est grande par sa
darôe comme par la variété de ses monuments. Mais elle
est, an moins dans sa partie classique, restreinte, quant
an territoire où les livres ont été composte, à un espace
de pays assez lx>rné; en effet , si Ton excepte le Véda, qui
est le livre primitif de notre race tout entière et qui n'ap-
partient pas exclusivement à l'Inde, et plusieurs ou-
vrages bouddhiques qui peuvent avoir été éoits môme
en pays étranger par des Indiens, l'immense majorité des
flBuvres sanscrites ont été composées sur les bords du
Gange et de la Yamuni, et , plus spécialement encore,
non loin du confluent sacré de ces deux fleuves. On sait ,
notamment par le premier livre des lois de Manou, que
la caste des briihmanes, qui presque seule cultivait les
lettres, avait pour devoir de ne pas f^nanchir une certaine
limite territoriale comprenant la vallée moyenne et supé-
rieure du Gange avec ses affluents. C'est là que s'éle-
vèrent les dtés d'Aonde, de Delhi, de Bénarès, etc., non
moins célèbres par la g^deur de leur civilisation mo-
rale et littéraire que par leur richesse et le bien-être de
leors habitants.
Au sortir de l'époque védique, l'Inde était en possession
dTane idée qui n'a paru que tard chez les Grecs, et en-
core dans les écrits de quelques philosophes, l'idée de
Fonité de Dieu. Dieu fut conçu dès ces temps reculés,
non-seulement dans ce qu'il peut avoir en lui d'actif
comme principe créateur, nuds dans son abstraction la
ph» hante comme principe neutre et indirisible. La no-
tion panthéistique de Br&hma anime toute la littérature
indienne Jusqu'au moment où le bouddhisme s'en dé-
tache, et oeloi-d même ne l'exclut pas, mais la fait ren-
trer dans un ensemble nouveau d'idées et de doctrines.
De la conception première de l'unité de Dieu et de l'unité
sabatantieUe de tous k» êtres, découle une morale aus-
tère, dont les éléments essentiels furent établis dès les
pins anciens temps. Le panthéisme fut comme le régula^
teor de la vie pratique et de la pensée à la fois; aussi se
retrouT^-t-il constamment dans les œuvres dont l'en-
semble forme la littérature indienne, de même que le
polythéisme est partout dans les productions du génie
grée; mais la morale qui ressort du panthéisme rempor-
tant de beaucoup sur celle du polythéisme des Hellènes,
le milicn moral où se meuvent les personnages et où
écrÎTent les anteon des livres indiens est très-supérieur
à oelai que nous effarent les Grecs. Ajoutons que, dans la
pvntiqae, il n'y a pas une grande différence entre la mo-
mie pantbèistimie et celle qui se fonde sur le dogme de
la création : il en résulte pour nous cette impression
étrange d'une civiliaation constituée au rebours de la
Mtre et d'un ensemble de sentiments moraux que l'on
croirait chrétiens. Ces sentiments s'élèvent souvent à une
Ittoteor que n'ont point dépassée les littératures mo-
dernes de l'Europe, et parviennent à une délicatesse ex-
^olne dont les anciens Grecs n'ont point approché. — Ce
Dièaie système panthéistique a placé les Indiens vis-è^
▼ia de la natnre dans une situation d'esprit toute diffé-
reme des Grecs. Geoz-d n'ont va en elle qu'un théâtre
de ractivité humaine, dans les choses inanimées et la vie
végétative qu'un ensemble de matériaux, dans les bêtes
Que des ennemis ou des auxiliaires qu'il fallait d'abord
dompter: ce que hm modernes appellent le sentimeni de
<a nahure, qui n'est antre chose 4^0 la conception de la
vie oniveraeile dans ce qu'elle a de poétique et de sympa-
thique, n'existe pas chez les Grecs. Il est partout et à
toutes les époques dans les écrits des brahmanes. On a
«Bt que la natnre écrase l'homme dans ces grandes val-
lées, et que, dans les ouvrages indiens, l'homme dism^
mit et s'anéantit devant la nature tonte-pnissanle : <reat
une erreur, (fue la lecture d'un poème quelconque de
l'Inde peut dissiper; au contraire, (Ums aucune littérature
antique la force morale de l'homme ne se déploie avec
autant de grandeur et de pouvoir. Cette puissance de la
science et de la vertu, les Indiens l'ont même exagérée
outre mesure dans certaines doctrines religieuses, et lui
donnent parfois trop d'importance dans leurs poëmes.
La connaissance de la littérature de l'Inde est devenue
pour l'Europe un intérêt majeur. Non-seulement le Véda
est le plus ancien monument écrit des peuples indo-eu-
ropéens, mais il renferme les formes les plus complètes
et les plus significatives de leur langue commune, et doit
être considéré comme donnant la clef de leura langues
particulières. On ne peut donc faire aucun progrès réel
dans l'étude de ces langues, sans la connaissance de
l'idiome vêdiaue, à laquelle on arrive par celle du sans-
crit. De plus, les livres de l'Inde, et surtout le Véda, con-
tiennent les mythes primitifs qui ont servi de point de
départ à toutes les mythologies occidentales, depuis la
Perse , l'Asie Mineure et la Grèce antique Jusqu'à l'Ir-
lande et jusqu'au Portugal ; plus tard , les missionnaires
du bouddhisme propagèrent dans une grande partie du
monde ancien des doctrines dont l'écho retentit Jusque
dans la Grèce civilisée. Au temps des rois macédoniens
en Egypte, le monde grec, dont la civilisation se concen-
trait dans Alexandrie, entendit prêcher et professer dans
le Musée les doctrines de l'Inae quil s'assimila : on a
conjecturé de là qu'elles fiicilitèrent un peu en Orient la
diffusion du christianisme, et qu'elles eurent quelque
iufluence sur la théologie alexandrine. A d'autres épo-
ques, les idées indiennes ont envahi la Chine, le Thibet,
Geylan , la presqu'île au delà du Gange, et un grand
nombre dtles des archipels de l'Orient. Or, nos relations
avec ces contrées, que la science, l'industrie et le com-
merce rapprochent de nous chaque Jour, donnent un
puissant attrait à l'étude des livres originaux où sont
déposées toutes ces doctrines, et la rendent même néces-
saire. Enfin elle est l'unique moven d'action dont dis-
posent ceux qui sont chargés de défendre ou de propager
en Orient les idées chrétiennes.
L'étude de llnde dans sa littérature est difficile, par
l'absence de chronologie, et par la presque impossibilité
de déterminer la date des principaux ouvrages sanscrits :
plusieura échappent jusqu'à ce Jour à toute classification
chronologique ; leur date peut varier quelquefois dans un
intertradle de plus de mille ans. Néanmoins les travaux
des demie» indianistes, surtout ceux de Lassen et d'Ëug.
Bumouf, ont montré que l'examen critique et comparatif
des doctrines qu'ils renferment permet d'arriver à des
dates au moins relatives pour un certain nombre d'ou-
vrages essentiels. En outre, le bouddhisme a commencé
dans l'Inde la période historicpio; il a une chronologie,
conservée dans pluf.ieun parties du monde oriental , et
2ui offre avec les voyages et les histoires des Grecs, des
hinois et des peuples du midi de l'Asie, des synchro-
nisraes précieux. Enfin , la nature des dogmes védiques,
les caractères de la langue védique permettent d'affirmer
que beaucoup d'hymnes dans le Rig- Véda sont antérieurs
à ce que l'Occident nous oWn de plus ancien dans le
même genre, c.-à-d. à Homère et à Zoroastre. Sans arriver
à des dates fixes et précises, on peut donc déterminer
approximativement certaines époques, entre lesquelles
s'opèrent les grands développements des idées et de la
civilisation de l'Inde, et se produisent les ouvrages où ils
sont contenus.
Trois mouvements religieux se remarquent dans la lit-
térature indienne, et donnent Ueu à trois grandes caté-
Sries d'ouvrages : la religion primitive contenue dans
I Védas; le brahmanisme, qui inspire à lui seul la
grande littérature classique de l'Inde; et le bouddhisme,
dont les doctrines ont fait naître dans l'Inde et au d^
bon un grand nombre d'ouvrages composés soit en sans-
crit, soit dans des idiomes qui en sont dérivés immédia-
tement. La période védique commence avec les plus
andens hymnes du Vida, dont la date ne peut guère
être rapprochée de nous au delà du xiv* ou du xv* siècle
av. J.-C., mais peut être reculée davantage dans le passé.
Elle se continue encore Jusque dans la période suivante,
parce que les livres relatifs au Véda, composés ultérieure-
ment par des brahmanes, étaient écrits par eux en langue
védique; de sorte qu'il n'est pas possible de fixer pré-
sentement la date du dernier livre écrit dans cette
langue, et c^u'il est certain d'autre part que ces derniera
écrits témoignent de doctrines brahmaniques déjà très*
avancées. 11 est donc possible que la période védique,
non celle où furent faits les l^ymnes, mais celle des corn-
IND
106S
IND
mentairas, se prolonge jusque dans le ¥01810890 de Tère
chrétienne. — La pénode brahmanique commence avec
les plus anciens chants épiques des aèdes indiens ; elle
répond à rétablissement définitif de la société Aryenne
dans les vallées du Gange; elle est postérieure par ses
commencements aux grandes guerres des fils de Kum,
relatées dans le MahAohânUa, et à l'expédition de R&ma
Ters le sud. Ces événements, qui sont peut-être contem-
porains des guerres héroïques des Grecs, ont été pour les
indiens ce que furent pour les aèdes helléniques Texpé-
ditlon des Argonautes et la guerre de Troie. Cest alors
oue le régime des castes, issu de la conquête, s'organise
naos rinde, et que passent dans les écrits des poètes les
doctrines panthéistiçiues, dont les réunions des prêtres
avaient fait un enseignement officiel dès les plus anciens
temps. Il n'y a pas eu dlnterruption dans le développe-
ment de la littérature br&hmanique depuis lors Jusiqu'à
nos jours; on peut dire qu'elle dure encore. C'est elle qui
porte le nom de littérature sanscrite, par lequel on l'op-
pose à la littérature védique, celle-ci nous offrant une
langue dont les règles et les formes sont encore flot-
tantes, tandis que la langue sanscrite est pour ainsi dire
faite de toutes pièces, d'après un id^ grammatical fixé à
Pavance. — Le bouddhisme n'a pas interrompu ce déve-
loppement régulier et prolongé. Né dans l'Indb, il n'a pu
l'y maintenir ; exilé, il a emporté avec lui ses idées et ses
livres; de sorte qu'il semble avoir traversé le grand sy»*
tème brahmanique comme une comète traverM le sya-
tème solaire, sans le troubler. Toutefois, comme le
bouddhisme lui-même n'est pas arrivé à l'improviste,
mais se rattache étroitement au développement philoso-
phique de rinde, les livres composés avant son apparition
rannoncent en quelque sorte et prennent date à cause de
lui ; il en est de même, à plus forte raison, de ceux qui
l'attaquent ou qui en font seulement mention comme
d'une chose existante. Enfin il y a un certain nombre
d'écrits contenant des allusions £ des faits que les Grecs
ou les Chinois ont eux-mêmes connus et dont ils nous
ont donné la date précise. On voit donc que, par l'examen
intrinsèque des livres sanscrits, et par le moyen des syn-
chronismes, il est possible, dans une certaine mesure, de
rétablir l'ordre chronologique dans cet immense dédale
de la littérature indienne.
Période védique. — Il est question ailleurs des Védas
( F. ce mot). Disons seulement ici que les origines de la
période littéraire qui se rattache au Véda ne sont pas
dans l'Hindoustan, mais dans la région des Qnq-Fleuves
ou Penjàb ; c'est ce que montre la lecture des hymnes du
Véda, où ces rivières, affluents de l'Indus, sont désignées
par les noms mêmes aue les Grecs ont reproduits dans
leur langue en les défigurant. Il est même à croire gue
plusieurs de ces chants sont antérieurs à l'époque fort
reculée où les Aryens émigrants vinrent s*établir dans la
Pentapotamie. Quoi qu'il en soit, ce aue nous devons
constater ici, c'est que la forme primitive que revêt la
la pensée est celle du vers, et que le premier genre poé-
tique est l'hymne : l'ode, qui est la forme lyrique par
excellence, constitue un genre d'une date postérieure.
Dans les littératures d'imitation, les mêmes hommes qui
font des odes peuvent aussi composer des hymnes, mais
U n'en est pas ainsi dans les littératures originales,
c.-à-d. dans l'Inde et dans la Grèce. Tous les hymnes des
quatre Védas pris ensemble forment à eux seuls une pé-
riode littéraire d'assez longue durée ; car, si les plus an-
ciens ont ét4 composés hors du PenJ&b, les derniers l'ont
été certainement dans les vallées du Gange; or, il n'est
pas douteux que les Aryens, avant de descendre dans ces
vallées, n'aient séjourné longtemps sur les Cinq-Rivières,
n'y aient fondé des établissements, n'en aient repouué
les habitants primitifs vers les montagnes environnantes
où on les voit encore, et n'aient composé dans ce séjour
la majeure partie de leurs chants sacrés. Selon nous, c'est
cette période primitive qui constitue la vraie période vé-
dique : car, du moment où la langue aryenne est devenue
le sanscrit ( or elle l'est dans la partie la plus antique de
iTépopée brahmanique), l'idiome védique n'est plus la
S langue vraie de la poésie; elle n'existe dès lors que par
tradition , et c'est en vertu d'une sorte de règle ou d'un
I usage religieux qu'elle sert aux écrivains. Cotte considé-
^ xation« qu^appuie et ce qui s'est passé en Grèce pour les
I poésies orphiques, et surtout ce que nous voyons pour le
t btln dans l'Église catholique, nous fait comprendre com-
fr bien a pu être prolongée et ancienne la coexistence du
^ lanscrit dans l'épopée et de l'idiome primitif dans les ou-
Trages relatifs au Véda. Voici les noms et la nature de
ouvrages t
Les Bràfwnanas servent de complément et d'explica-
tion aux Védas; iU ont été composés pour la plupart
dans la période qui sépare les hymnes de l'épopée brah-
manique. Ils renferment des recueils d'observations expli-
catives transmises dans les familles de prêtres, et dif-
férant entre eux selon les idées philosophiques de cet
familles et selon le Véda auquel ils se rapportenL Beaa-
ooop d'entre eux ou sont peûrdus ou sont encore cachés
pour nous ; mais les principaux sont entre nos mains. Ces
commentaires sont précieux pour l'interprétation des
Védas. — Les Sûtras continuent les Brâfmanas, et sont
aussi des commentaires des Védas; leurs explications
semblent s'abréger à mesure qu'elles sont plus nom-
breuses, et cette concision augmente de plus en plus leur
obscurité. Les Sûtras sont souvent moins clairs que le
Véda lui-même; ils sont, pour la plupart, d'une époque
où la société br&hmanique existait avec sa division régu-
lière en quatre castes; les Brâhmanas indi€|uent tout an
plus que ce régime était en voie de s'établir. C'est pen-
dant ce moyen âge héroïque que le texte des hymnes fat
fixé définitivement et pour totjours dans les écoles des
br&hmanes, et depuis Ion il n'a reçu aucune altération ;
la grammaire, la prononciation, la métrique et la canti-
lène des hymnes furent établies dans des traités qui sont
entre nos mains et oui remontent à cette époque. Les
nombreux travanx relatifs à la grammaire et le soin de
fixer le sens des mots védiques prouvent que cet idiome
n'était déjà plus en vigueur, et était remplacé par la
langue sanscrite, dont les règles furent consignées par
Pànini. — Les Upani^iads, qui sont d'époques probable-
ment fort différentes, sont aussi des Gompléiments dogma-
tiques du Véda; elles rentrent en nu^eure partie parmi
les Brâhmanas, mais plusieurs aussi ont une existence
et une valeur indépendantes; ces dernières surtout ne
sont souvent que l'écho de spéculations philosophiques
propres k telle ou telle école brahmanique : du reste, les
savants ne les ont pas encore classées à ce point de vue
historique.
Période brahmanique. — Cette période est de beaucoup
la plus longue, et celle où se sont produits les ouvrages
les plus variés. Elle constitue proprement la période
sanscrite, non que la langue daÂs laquelle sont écrits
ces ouvrages soit essentiellement différente de Im langue
du VédA, mais cette dernière est le fonds commun de
tous les peuples de langue aryenne, tandis que le sanscrit
est la langue classique de l'Inde. On ne peut guère douter
qu'elle n'ait existé dans œ pays concurrenmient avec la
langue védique; le fait est certain pour la période des
Sûtras brahmaniques; il est probable pour une partie au
moins de la période des Bràkmanas, L'épopée, ou, pour
mieux dire, le genre épique, embrasse les premiers temps
de cette période; les autres genres viennent après, aussi
bien qu'en Grèce; et, comme dans ce dernier pays, le
genre épique ne cesse pas d'être cultivé pendant que les
autres se développent, et reprend, aux époques de déca-
dence, une sorte d'énergie nouvelle : de manière que, si
les deux grandes épopées indiennes se rapportent, comme
VHiade et VOdysue, aux anciens temps de la littérature
classique, les Purânas, ainsi que les Argonautiques, sont
d'une époque bien postérieure et même récente. Entre
ces époques extrêmes de la période classique se placent
les autres genres littéraires, le drame, le genre lyrique,
la poésie I^re, etc. Pendant que le sanscrit (ou langue
parfaite) est employé à la composition des ouvrages sa-
vants par les br&bmanes, l'ancienne langue continue
d'être usitée dans les classes inférieures du peuple et va
s'y altérant de plus en plus t elle prend le nom de pr4-
crit, et parait k son tour dans les œuVrea littéraires où
l'on fait parler d» hommes de basse condition, comme
les drames. La séparation grammaticale de ces deux
langues est de beaucoup postérieure aux épopées primi-
tives. II faut donc admettre que dans l'Inae existèrent à
la fois Vidiome védique comme langue liturgique, le
sanscrit comme langue savante mais libre, et le prdcrit
comme langue populaire. Le prient tient peu de place
dans la littérature brahmanique ou classique ; il en tient
une grande dans les ouvrages bouddhiques.
Le Mahàbhârata semble être, dans sa partie essentielle,
la plus antique des épopées indiennes. Déjà lea aèdes
indiens racontaient depuis longtemps en vers, et en s'ao-
compagnant de la vlna, les exploits des dieux et des héros,
lorsque la grande guerre de deux familles Aryennes dans
le nord de l'Inde, les Gourous et les Pàndous» devint le
s^Jet principal des chants épiques. Il n*est pas douteux
que cette guerre ne fût terminée depuis longtemps, lors-
que le premier auteur du Mahàbhârata la pnt pour aujet;
IND
1069
IND
nais il n*est pas Traisemblable que cette épopée doire se |
fhcer entre Dion CHirysostome et Hégastnène, puisque
•ei navig&teurs grecs antérieurs à ce dernier la trouTèrent
dQà dans le sad de THindoustan. Nous la considérons
aussi cooime antérieure à Pànini, parce que, dans sa
partie la pins antique, les règles de la langue sont moins
ilies que dans ce grammairien. Mais il est évident,
d'un autre côté^ oue la majeure partie de ce poème de
%0,000 Ters, est a*époques fort diverses et relativement
rtcentes, et qne son fonds primitif n*avait guère que le
dotmième de cette étendue. Les recensions successives
dn MahâhhArata l'ont agrandi chaque fois, et en ont fait
VD ouvrage sans unité de laneue ni de doctrine, apparte-
ittnt à des civilisations, à des croyances sensiblement
différentes les unes des autres. Dans le fonds primitif, tout
porte à croire que les hétos humains n'avaient pas en-
core revêtu le caractère mystique quMIs présentent dans
le grand poCme, que c'étaient des rois &ryens et non des
inaunstions divines, et que les dieux ne participaient aux
érénements que dans la mesure où ils y participent
dus Homère. Rédoit à cette dimension, le MtihAbhàftUa
peat se classer avec quelque raison parmi les plus an-
dens ouvrages de lan|ue sanscrite, et remonter aux temps
bérolques <fe Tlnde. Or, ces temps eux-mêmes sont anté-
rieurs anx Sûtras védiques et à plusieurs Brâhmancu;
Û est donc légitime de regarder Tœnvre du grand aède,
looonna peot-ètre,qul composa le pnmiet MAdbhârata,
comme os beaucoup antérieure à ravénement du Boud-
dha, c-èr-d. au VI* siècle av. J.-C, et comme ne pouvant
guère descendre plus bas que le temps d*Homère lui-
nsème. Quant anx additions successives qu*a reçues le
Màk^Màrata primitif, il n*est pas possible, dans Tétat
présent de la science, d*en fixer exactement les époques.
On peut dire seulement qu'on y trouve Técho des diverses
docnines religieuses ou philosophicmes auxquelles Tlnde
a donné naissance. Il y a même telle partie <{ui forme à
elle seule on véritable poème, et dont le lien avec la
grande épopée est purement artificiel : telle est par
eiemple la Bhâgavaa^Uâ {V. ce mot). Enfin la rédac-
tion définitive du poème, telle que nous la possédons,
c-è-d. dans toute son étendue, doit être considérée
comme postérieure à Tère chrétienne. On voit que le
MahâbMrata a eu dans Tlnde un sort semblable à celui
d*Homère chex les Grecs; seulement ce dernier a été sou-
mis par les Alexandrins à un travail de critique qui a
manqué ao ifahdbhàrata(V, ce mot).
Le Bdmâyana, d'une étendue moins grande, ofRre cette
uolté de langue et de doctrine qui caractérise l'œuvre
d"an seul homme ; d'un autre côté, Vyàsa est dans l'Inde
on personnage presque fabuleux, tandis que Vàlmtld a
toajoors été regjirdé comme un homme ayant réellement
véoL Ce seul fait, ajouté à la perfection littéraire du
poème, montrerait que le Ràmâyana est postérieur au
Makâbhârata. En outre, le sujet du poème nous présente
la conqoète ànrenne de l'Hindoustan dans sa dernière
péflode, poisqu il la conduit Jusoue dans l'Ile de Geyian.
Bnfin, le caractère allégorioue des personnages indique
one époqoe plus avancée du développement panthâs-
tiqoe de llnde. Toutefois, il est difficile de ne pas ad-
mettre qoe cette épopée, comme la précédente, repose
sor on fond de traditions réellement historiques, et que
Râma fut véritablement le conquérant et le dvilisatenr
da Sad. Cette œuvre était accomplie, et le poème de Vàl-
mlki existait selon toute vraisemblance, lorsque les an-
ciens navigateurs grecs, antérieurs à Alexandre, par-
coomreot les cètes de la mer Erythrée et connurent les
Inifieos sanscrits. Le Hâmàyana pourrait donc se placer
entre cette époque et celle d'Homère; car 11 ne laisse
soupçonner aucunement l'existence de la religion boud-
dhique, fût an moins singulier dans un poème tout my-
diolog^que et all^rique, si l'auteur de ce poème était
postérieur an Bouddha. Les critiques européens ont, du
reste, relativement à ce poème, à vérifier, comme pour la
grande épopée, les parties réellement antiques et origi-
nales; car il est évident que plusieurs fragments et tout
ce c^ni concerne l'Incamation de Vishnu en Ràma sont
des interpolations. Remarquons id qu'autant les Indiens
ont été respectueux à regard des textes du Vida, autant
Qs se sont montrés libres a l'égard des é^pées : c'est de là
que naissent la mineure partie des difficultés chronolo-
^ques que nous rencontrons avjourd'hui en cette ma»
tim. V, Ramavana.
An genre épique se rattachent les Purànas et quelques
entres poèmes d'une moindre importance, n existait,
^ms les anciens temps, des œuvres poétiques nommées
t, qui ont été perdues on dont nous n*avons pas
les textes : ces œuvres, qui remontaient peut-être an
temps des grandes épopées, ont servi de point de départ
aux Purâiuu actuels. Ceux-d, dont nous possédons les
deux plus importants (K. i>caARAS), sont d'une époque
qu'il est difficile de fixer, mais certainement beaucoup
plus récente que les épopées, et postérieure de plusieurs
sièdes sans doute à l'ère chrétienne. Ils se rattachent,
quant à la forme, aux épopées, et, quant au fond, à la
tradition religieuse. La nature des doctrines qui y sont
développées prouve l'ftge moderne de leur composition :
en eflët, ils se rapportent tous au culte et aux incarna-
tions de Vishnu et de Çiva,c.-à-d. aux deux plus récentes
religions de l'Inde.
On peut ranger aussi dans l'ancienne littérature sans-
crite les Lois de Manou, dont le texte que nous possédons
diffère probablement assez peu de sa plus ancienne ré-
daction. Il est difficile de dire si celle-ci est antérieure au
Bouddha, bien ou'elle ne renferme aucune allusion à ses
doctrines; mais la nature des prescriptions que renferme
ce code, et le degré où en est parvenue la métaphysique,
dénotent une époque fort ancienne. Il n'en est pas de
même du code de YàinaixUkya, dont la composition est
évidemment très -moderne, sans pouvoir toutefois des-
cendre plus bas que le vi* siècle de notre ère. — Les
ouvrages relatifs à la législation et appelés dharmaçâ^
Iras sont en grand nombre dans la littérature sanscrite;
nous sommes loin de les posséder tous, et, dans l'Inde
même, beaucoup d'entre eux sans doute sont perdus, n
en a été composé à toutes les époques, depuis les divers
codes qui ont porté le nom de Manou Jusqu'à nos jours.
A ces ouvrages d'une portée générale, il faut sjouter les
traités spéciaux où sont contenues les prescriptions et les
règles propres à chaque fonction, à chaque exercice, à
chaque métier. Ces traités sont en très- grand nombre
dans rinde.
liO drame indien (en pràcrit nota) est issu de la danse.
Cest ainsi que des fêtes de Bacchus est sorti le choeur,
2ui formait presque à lui seul les drames primitifs de la
Irèce. La danse elle-même parait être issue des cérémo-
nies védiques, ce qui explique pourquoi les Indiens attri-
buent au drame une origine divine, et supposent un
poète dramatique et une troupe d'acteurs divins donnant
des représentations à la cour céleste d'Indra. Toutefois,
le drame ne naquit dans l'Inde qu'à une époque où la
danse était entièrement sécularisée : parmi les drames
que nous possédons, les plus modernes ont seuls un but
et un sens religieux ; les plus anciens empruntent leurs
sujets et leurs personnages à la vie ordinaire. Ce fait,
après tout, ne prouve rien quant à l'origine du drame
indien, puisque nous sommes loin de posséder les pre-
miers essais qui aient été faits en ce genre : si le Chariot
d*argUe du roi Sudraka est le plus anden que nous
ayons, il montre au contiaire par sa perfection que le
drame était cultivé depuis longtemps dans l'Inde lorsqu'il
parut au Jour. Rien n'indique que le drame ait fait partie
des cérémonies sacrées au temps du roi Sudraka; s'il
était Joué aux Jours des sacrifices, il n'était offert aux
assistants qoe comme un amusement royal : ce caractère
de frivolité qui semblait s'attacher aux drames, malgré le
travail sérieux de leurs auteurs, explique peut-être pour-
quoi, d'une part, les anciens drames sont perdus, pour-
quoi, de l'autre, ce genre s'est perpétué si longtemps et
même Jusqu'à nos Jours. Les traités spéciaux et les usages
traditionnels expliquent de même pourquoi la forme des
drames a si peu changé : en offet, à partir d'une époque
fort anden ne, les drames ont fait partie du cérémonial à
la cour des rois indiens. On ne peut guère contester que
le Chariot d^argUe ne soit antérieur à Kàlidftsa, le plus
célèbre poète dnnuitique de l'Inde, que l'opinion com-
mune fait vivre à la cour de Vikramàditya, 56 ans avant
J.-G. Le pràcrit est en usage dans les drames quand on y
fait parler des gens du peuple ; ce langage est très-cor-
rompu dans le Chariot d^argUe; Il l'est moins dans les
drames attribués à IC&lid&sa; mais cela ne saurait rien
prouver quant à leur âge relatif, puisque, dès que Ton
sort du sanscrit, la langue usuelle n'a plus de règles
fixes, et l'usage qu'en fut le poète est arbitraire. D*ail-
leurs, dans plusieurs des meilleurs drames indiens, il y a
des personnages bouddhistes, et, quoique les drames
soient essentiellement brahmaniques, les bouddhistes y
sont traités avec déférence, avec respect : ces drames
sont donc au moins de l'époque où le bouddhisme vivait
dans rinde, et paisiblement, à côté de la religion qui de-
vait plus ttfd l*en bannir ; tels sont les beaux drames de
Bhavabhùti. — Les sujets des drames indiens sont pai^
fois empruntés à la vie ordinaire; mais le plus souvent
IND
1070
JND
Us sont pris dans la tradition ôpiqœ du MahâbhArata
ou du Râmdyana; quelques-uns prennent leurs sujets
dans le Véda lui-même; d'autres, enfin, dans la légende
de Krishna. La manière dont ces si^ets sont traités ne
irappelle en rien le thé&tre erec : ici, en efTet, il n'v a que
les tragédies et des comédies; le genre mixte des Mo-
ternes, appelé spécialement drcane, ne se rencontre que
chez les Romains (par exemple, les Captifs de Plante),
et encore accidentellement, confondu avec la comédie.
L*Tnde n*a point de tragédies : une représentation est
dans ce pays un amusement royal, et, à ce titre, doit
toujours finir bien ; la yertu doit y être récompensée, et
le pécheur y recevoir son pardon. Le chœur n'y tient pas
la même place que dans les pièces grecques; la longueur
des représentations, le nombre des personnages, la com-
plication do rintrigue, sont poussés beaucoup plus loin
ici que dans Ménandre ou Philémon. Il n*y a donc aucun
élément commun entre ces deux thé&tres; et, d'autre
part, il n*y a aucun fait historique d'après leqael on
puisse dire que les Indiens aient tiré l'idée du drame
des théâtres grecs de la Bactriane ou du PenJ&b. » Du
reste , les drames anciens de l'Inde sont ou mythologi-
ques, comme Vikrama et Urvaçi, ou d'intrigue et de
caractère, comme le Chariot d'argile et le Mudrà Ràocasa
(l'Anneau du ministre). 11 n'y avait point de théâtres pu-
blics; le public se composait de la cour et des invités;
les acteurs, qui étaient des deux sexes, ne formaient
point une classe méprisée. Une mise en scène habile et
variée représentait les objets fantastiques comme les ob-
jets naturels; il y avait des scènes à grand spectacle,
faites surtout pour le plaisir des yeux. Lot règle des trois
unités se réduisait à l'unité d'action : le drame lui-même
était romantique, sans être né d'un art matérialiste, et
sans s'écarter outre mesure du naturel et du bon sens.
Un fait singulier nous est offert par le thé&tre indien : il
y avait des pièces entièrement métaphysiques, où les
ÇBrsonnages étaient des idées : tel est le Prcibôdha-
'chandrodaya (Lever de la Lune de l'Intelligence) ; ce
fait suppose un public comme aucun thé&tre de l'Europe
ancienne ou moderne n'en a Jamais contenu, et caracté-
rise la société distinguée de l'Inde.
La poésie lyrique et les genres légers comptent dans
llnde un assez (prand nombre d'écrits. Nous citerons les
deux plus célèbres : le Nuage-Messager ou Mêghadûta,
attribué à K&lid&sa, et qui a été le modèle de beaucoup
d'ouvrages semblables, et le GUa^^iôvinda {V.ce mot%
chant d'amour mystique et symbolique, dont l'auteur est
Jayadêva. Cette poésie romanesque, & l'exception de ce
dernier poème, est d'un style souvent affecté et d'un ca-
ractère sensualiste parfois très-dissolu : elle date, en gé-
néral, des temps ou ont été dans leur videur les cultes
de Çiva et de Krishna, et s'étend depuis le commence-
ment de l'ère chrétienne Jusque durant la domination
musulmane. — La fable et le conte sont représentés dans
rinde par plusieurs ouvrages importants, dont l'existence
se lie à l'histoire des mêmes genres en Occident. Le plus
ancien d'entre eux est le Pantchatantrat dont il est dif-
ficile de fixer la date, mais qui certainement n'est pas le
premier "
c'
de rlnde rapprochait l'homme des animaux, et la vie
commune (qu'ils menaient avec les hommes invitait ces
derniers à tirer de leurs habitudes instinctives des règles
de conduite pour eux-mêmes. Il n'est donc nullement
nécessaire de supposer que les Indiens aient imité les
fables grecques : mais celles-ci peuvent bien aussi s'être
développées sans l'influence de l'Inde; on sait toutefois
que la fable est venue d'Asie avec Ésope le Phrygien ; ce
personna^, presque mythologique, Tavait-il inventée on
la tenait-il lui-même des Orientaux?
Nous ne pouvons traiter en détail ici de la littérature
scientifique, qui forme en sanscrit toute une bibliothèque.
Parmi les ouvrages qui la composent, la philosophie se
place au premier rang, soit par son importance a!DsoIue,
soit par son ancienneté et son long développement histo-
rique ( V. Iudibnne — Philosophie). La période védique
avait déjà discuté ou abordé la plupart des questions de
métaphysique et de cosmologie, avant que ces mêmes
problèmes fussent traités en langue sanscrite. Il n'y a pas
eu d'interruption dans ce mouvement d'idées, non plus
que dans l'usage des deux langues, puisque celles-ci ont
coexisté pendant plusieurs idècles. (Test donc dans le Véda
et dans les plus anciens Bràhmanas qu'il faut chercher
l'ori^ne de toute la littérature philosophique de llnde.
Quant aui écrits philosophiques que nous possédons,
Texistenoe d*andennes écoles demeurées célèbres pnm?e
cni'ils ont été précédés de beaucoup d'autres, dont plu-
sieurs sans doute existent encore dans le pays. La
traités de philosophie portent le nom de Sûtras, fil, en-
chaînement d'idées. Les plus anciens eurent pour auteur
Kapila, qui fut plus tara divinisé, et que l'on considèFe
comme le fondateur du système sànkhya. Cet auteur est
antérieur au bouddhisme, dont la métaphysique est
étroitement liée avec celle de ce système, et dont les lé-
gendes le donnent comme de beaucoup antérieur au
Bouddha. Or l'époque de ce réformateur est ai^ourd'hui
fixée au vi* siècle av. J.-G«; Kapila semble donc remon-
ter à la prenoière pâriode de la langue sanscrite. Patan-
lali, et plus tard Y&lnavalkya, fondèrent et appliquèrent
a la vie pratique la doctrine du Yoga; ces auteurs sont
représentés comme bouddhistes, ou du moins comme
ayant prêté leur concours aux ascètes de cette religion
dans un temps où elle n'était probablement encore re-
gardée que comme un système de philosopLiie morale;
il y a donc une relation étroite entre les livres qui trai-
tent du système sànkhya et ceux qui exposent le yoga oo
la doctrine de l'Union mystique. Parmi ces derniers od
doit remarquer, outre le XII* livre du MahAbhàrata, la
Bhagavadrùità, qui rattache la doctrine du yoga au cuits
populaire de Krishna. Ce dernier fait semble indiquer
que ce poème n'est pas d'une date très-ancienne ; plu-
sieurs passages font penser qu'il est contemporain de la
prédication bouddhiste dans l'Inde, laquelle comprend
elle-même une longue série d'années. (Test donc à cette
époque, voisine de fière du Christ, que l'on peut le mieux
{uacer le plus beau développement de cette partie de la
ittérature philosophique chez les Indiens, -r A côté de
cette école, et un peu après elle, florissait la philosophie
contenue dans les Mtmansà-^ûtras ; l'auteur du plus an-
cien d'entre ces livres est Jaimini, que l'on donne comme
le révélateur du Sâma-Vêda; le Sûtra de Bàdar&yana
représente le second développement de la même doctrine;
et toutefois l'authenticité de ces deux écrits est loin d'être
prouvée; on peut seulement dire qu'ils remontent à une
période assez reculée. Citons encore le Brâhmor-sûtra,
dont le but est d'établir que les différents systèmes phi-
losophiques sont plus ou moins erronés, que le monde
n'a pas de réalité substantielle, et que Dieu seul existe
dans son unité aiisolue. Cet ouvrage est d'une date pos-
térieure aux précédents, mais ancienne. — La logique
est représentée en sanscrit par une longue suite d'ou-
vrages, appelés également Sûtras, qui se rattachent aux
différents systèmes de philosophie et de métaphysique.
Les recherches logiques ont occupé les plus anciens
br&hmanes; il en est déjà question dans Manou. Hais les
anciens traités de logique sont perdus ou ne sont pas
entre nos mains; les autres, qui sont plus récents, sont '
réunis sous les noms de Kan&da et de Gôtama, auteurs
d'une époque incertaine.
Dans la littérature brahmanique se rangent encore les
ouvrages de grammaire. P&nini , considéra comme le lé-
gislateur de Ta langue sanscrite , est d'une époque fort
ancienne, bien qu'il dte les Yavanas (Ioniens ou Grecs),
puisque ce nom désigne peut-être les Occidentaux en gé-
néral. Sa grammidre est un livre d'une grande valeur,
et que les Indiens ont souvent enrichi de commentaires.
Citons aussi le Vocabulaire d'Amarasinha, auteur cité
comme contemporain de K&lid&sa; les traités de Rhéto-
rique, de Poétique, de Métrique composés à différentes
époques, mais dont les principes remontent trè&-haut
dans rhistoire et se rattachent a la période antique des
Vêdas. — L'Astronomie a produit dans l'Inde un assez
grand nombre d'ouvrages, dont plusieurs ont une impor-
tance réelle pour Thistoire de cette science. Ce sont les
Indiens, en effet , qui ont inyenté les chiffres décimaux,
l'ariûimétique et ralgèbre, transmises à l'Occident par
rintermédiaire des Anbes, et plus tard reportées par eux
aux bidiens eux-mêmes avec l'astronomie. — La méde»
cine a eu dans l'Inde un développement orignal : les
traités qui existent ont un intérêt particulier, soit en eux-
mêmes, soit au point de vue de l'histoire de cet art. ^
Enfin nous indiquons seulement en passant les traités
relatifs à la peinture, à la sculpture, à l'art de bl^r, à
l'art militaire, etc., pour faire sentir combien est riche la
mine que la littérature sanscrite offre à l'Occident.
Littérature bouddhique, — Le Bouddha parut dans le
VI* siècle av. J.-C; il prêcha, sans rien écrire. Ses pré-
dications s'adressaient tantôt aux br&hmanes, tantôt an
peuple : au point de vue métaphysique, elles se rattachaient
au système sânkhyaf et n'apportaient rien de nouTeau;
mais elles tendaient à faire une réforme dans les mœurs
INB
1071
IND
nia vie religieiiBe, et proToquaient, par le principe de
réputé des hommes devant la Loi, l'abolition des castea
et par conséquent une révolution politique ( V. Booo-
Dusm). Cette tendance démocratique de la réforme se
fut sentir dans tonte la littérature bouddhique. Il en
rtsolte, en effet, que, s'adressant aux masse&populairea,
les prédicateurs et les moralistes nouveaux sont obligés
(fempioyer leurs expressions, leur langage, leurs figures
de s^le , et de s^écarter par conséquent, non-seulement
des regles de P&nini, mais des habitudes grammaticales
de la société distinguée de leur temps. Dans la littérature
briLhmaniquei le pr&crit n'apparaît qu'accidentellement
dans les drames; dans la littérature nouddhique, il est
partout. En outre, les nécessités mêmes de renseigne-
ment populaire forcent le maître à développer longue-
ment ses idées, à les reprendre sous diverses formes , à
les appuyer par des exemples ou des figures : de là la
diffusion qui règne dans beaucoup d'ouvrages bouddhi-
ques, les répétitions, les redondances; de là aussi des
récits pleins d'intérôt , et des paraboles d'un sentiment
profond et exquis. Le sentiment moral, la charité, forme
ea effet le fond le plus ordinaire des éôits bouddhiçiues,
10 moins des plus sndens; les doctrines métaphysiques
et les règles hiérarchiques ne furent exposées que plus
tard dans des ouvrages spéciaux. Néanmoins, selon la
tradition, le premier concile, qui se réunit dans le Mag-
hada immédiatement après la mort de Çàlcya-muni,
divisa déjà les écrits sacrés en trois séries, comprises en-
semble sous le nom de Tripitaka ou les Trois-GorbeiUes
on Recueils ; la première contenait la doctrine du Boud-
dba lui-même sous le nom de SiUr<is, la seconde les
règles de discipline ou le Vinaya, la troisième la méta-
physique ou lAbhidharma. Cette division primordiale
s*est perpétuée dans les pays bouddhistes du Nord et du
Sud. En dehors de ce premier corps de livres bouddhi-
ques, furent composés un grand nombre de discours,
surtout à partir du règne d'Açôka, le grand propagateur
de la foi nouvelle; car le concile qui fut tenu sous son
règne décida qu'elle serait prèchée en tous lieux par des
missionnairea, ce qui eut lieu en effet. La collection des
livres sacrés fut faite une dernière fois dans le Nord sons
le règne de Kanishka (Kanerki ), quatre cents ans après
la mort du Bouddha : ces livres existent encore; une
partie considérable est entre nos mains, réunie récem-
ment dans le Népal par M. Hodgson ; nous en possédons
en outre la traducàon tibétaine complète en cent vo-
lumes sous le nom de Kah-gyur, et différentes autres
traductions étrangères à l'Inde. Apportés dans Tlle de
Ceylan par l'apètre Blahèndra au milieu du ul* siècle
tv. J.-C, ils s'y conservèrent, et ne furent traduits en
pili qa'an commencement du v* siècle de notre ère:
c'est sous cette forme qu'ils existent encore à Ceylan ,
ainsi que dans le royaume de Siam. Nous possédons en
pâli de Ceylan le McMvança, composé à la fin du
V* siècle de notre ère. Les Sûtras sanscrits du Népal ,
comme Ta établi £ug. Burnouf , sont de deux époques
différentes et se divisent en deux catégories : les Sûtras
simples et les grands Sûtras; ceux-ci, postérieurs pour
la langue , la forme et la doctrine , ne sont que le déve-
loppement des premiers , et montrent la personne du
maitre au milieu d'un cortège de dieux et de personnages
fantastiques dont les Sûtras simples sont exempta ; les
récits de ces derniers et leurs pcuraboles s'y retrouvent ,
mais amplifiés et délayés avec une abondance excessive,
^antériorité des Sûtras simples par rapport aux autres
est démontrée par leur simplicité relative , mais surtout
par le point de développement où la doctrine est parve-
nue dans les uns et d^ns les autres; quant aux grands
Sûtras, ils existaient déjà au temps du voyageur chinois
Fa-Hian , vers la fin du iv^ siècle et le commencement
du V*, épo^e où l'on doit conséquemment penser que le
culte de Çiva était déjà ancien dans l'Inde brahmanique.
Ce fait , Approché de beaucoup d'autres, montre la pos-
tériorité du bouddhisme par rapport à la religion des
brUimanes, et que ces deux reliions sont issues l'une
de Taatre et n'ont pas puisé simultanément à une source
commune. Le panthéon brahmanique a passé presque
toot entier dans le bouddhisme ; mais les Sûtras , sur-
tout les derniers en date, l'ont accru d'une hiérarchie
d*esprits supérieurs, dont le dernier degré est celui de
Bouddha parfaitement accompli; l'antique Br&hma s'j
trouve, mais dédoublé et placé à un rang inférieur. Mais
les dieox brahmaniques sont plutôt des conceptions poé-
tiques et des personnifications littéraires des forces ne la
nature que des êtres dont l'existence ait une valeur réel-
iemeot philoaopbiqae : pour devenir tels et entrer dans
une doctrine où Ton tient à peine compte de la notion de
Dieu , il a donc fallu que ces antiques conceptions vôdi«
ques eussent dépouillé en grande partie leur caractère
primitif pour devenir des notions philosophiques et dé-
signer des degrés dans la hiérarchie céleste. Cette re*
marque porte sur toute la littérature védique, à l'excep-
tion peut-être des plus anciens Sûtras, et sur la majeure
et la meilleure partie de la littérature brahmanique. En
effet , celle-ci , principalement dans l'épopée , nous pré-
sente les dieux sous la figure d'êtres poétiques et symp
boliques, en tout semblables aux dieux de la Grèce. Les
parties où ils n'ont pas ce caractère sont pour cela même
regardées conmie des interpolations et rangées parmi les
écrits relativement modernes; le reste, c.-à-d. le fond
primitif de ces poèmes , doit donc être considéré coouna
antérieur de beaucoup d'années à la naissance du boud-
dhisme, c-à-d. au VI* siècle av. J.-C. Enfin, les plus
anciens Sûtras bouddhiques, ceux qui remontent au
dernier concile, nous offrent le tableau d'une société mo-
ralement et matériellement tojzibée très-bas par l'excès
môme de sa civilisation ; cela seul peut expliquer le
grand succès de la prédication du Bouddha , non-seule-
ment dans le bas peuple , mais dans toutes les castes de
l'Inde. Or, cette civilisation excessive, ces vices, ces
misères, ne se montrent nullement dsLUs les épopées,
comme ils se font sentir par exemple dans Virgile, et
comme ils se voient dans les drames indiens. Ces consi-
dérations essentielles marquent dans quelle phase litté-
raire de rindeon doit placer cette littéi^ure bouddhique,
qui n'jT a fait pour ainsi dire qu'une apparition de quel-
ques siècles, et qui s'en est exilée avec la doctrine eUe-
même et ses représentants.
On doit considérer comme postérieurs à la collection
du TripikUoa les nombreux ouvrages connus sous le nom
de Tantras, Ce titre désignait déjà des écrits brahmani-
ques d'une période littéraire plus ancienne; les Tantras
bouddhiques , qui sont au point de vue litténdre d'une
extrême pauvreté, offrent cet intérêt, qu'ils marquent
une phase du développement des idées bouddhistes dans
l'Inde. Ils portent généralement la marque d'une influence
des cultes brahmaniques sur la nouvelle religion, et d'une
sorte de retour de celle-ci vers l'ancienne. Pleins de for-
mulée de superstition et de magie, les Tantras bouddhi-
ques semblent être le produit d'une alliance entre le
culte du Bouddha et celui de Çiva; de sorte que ce der-
nier, qui est encore en vigueur dans l'Inde, se trouve,
par le tait de son union avec le bouddhisme, rangé
parmi les derniers développements des idées brahma-
niques.
L'étude détùUée de la littérature bouddhique doit être
d'un grand secours pour résoudre plusieurs questions de
chronologie dans les lettres sanscrites. En effet, celles-d
n'ont point de dates; la religion nouvelle en a plusieurs,
qui, par la comparaison prudente des traditions du Sud
et du Nord avec les données des Chinois et des Grecs ,
peuvent se déterminer à peu d'années près. Quand un
ordre définitif sera étabh entre les ouvrages bouddhi-
ques, et la date de chacun d'eux assurée, le rapproche-
ment des doctrines philosophiques et religieuses, de
l'état social, politique, moral, littéraire, matâiel même,
auquel donnera lieu chacun des ouvrages brahmaniques,
pourra indiquer, au moins approximativement, l'époque,
sinon la date de ces derniers, et établir une aorte de
chronolo^e dans cet amoncellement prodigieux de la lit-
térature indienne. On devra aussi ne pas perdre de vne
que llnde a eu son développement littéiâire original ,
qu'elle n'a imité aucun peuple antérieur, qu'à cet égard
elle s*est trouvée dans les mêmes conditions que la Grèce
ancienne : par conséquent, tout porte à croire que les
genres littéraires sont venus chez le» Indiens dans le
même ordre que chez les Grecs; ce n'est là qu'une don-
née à priori , mais que les études faites Jusqu'à présent
tendent à confirmer de plus en plus. L'ordre que non^
avons dû suivre nous-même dans cet exposé n'est pas
fondé sur des résultata toujours certains ; il ne peut que
représenter les probabilités où est parvenue la critique
en ce moment; or, son œuvre est loin d'être finie. Il fau-
drait, pour qu'elle se fit désormais avec quelque certi-
tude , que la majeure partie des textes sanscrits fût non-
seulement publiée, et elle ne Test pas, mais traduite, et
elle est fort loin de l'être. L'état des études sanscrites en
Europe a fait quelques progrès , puisque ces études se
répandent de plus en plus ; m^s elles sont encore tout à
fait individuelles en France, et, malgré une chaire de
sanscrit au Collège de France, elles ne reçoivent à pea
près aacuD encouragement. Toutefois il y a Ûeu dépenser
IND
1072
IND
OQfti Ml réiatlom tenc rOrient s*accroi8aaiit chaque ]oar,
rintMi fera ce qae D*ont pu faire Taaioar de la science
et le déiir éclairé de préparer ravenir.
V. Golebrooke, Essai sur Us Védas, en anglais, dans
les R9eh9rch9S AsicUiques de Calcutta ; Ward, Aperçu de
VhiMtaire, de la littérature et delà mythologie des /n-
diens, Serampour, 1818, S roi. in-4*; Roth, Sur la lit-
UraUere et f histoire des Vidas, en allemand, 1846;
MèTe, Études sur les hymnes du Rig-Véda, Lauvain,
184i, in-8*; Gardn de Tassy, ffistolre de la littérature
hindoue et hindoustani, 1837-47, % toI. grand in-8' ; Lan-
slois. Monuments littéraires de l'inde, ou Mélanges de
Uttérature sanscrite, contenant une eocposition raptde de
e^te littérature, etc., Paris, 18^7, in-8<>; Che(S'd:asuwe
du théâtre indien, traduits de Voriginal sanscrit en an-
glais , par Wilson, et de Vanglais en français par Lan-
giois, 1828, 2 vol. !n-8^; Weber, Études indiennes, en
allemand, 1850-51 ; le même, Histoife de la littérature
indienne, traduite de l'allemand, inr Sadous, in-8% 1859;
Eue. Bumouf, introduction à Vhistoire du Bouddhisme,
in-4*, 1844; LDiseleur-Desloagcham|iSf Essai sur les Fa^
Ues indiennes, 1838; Soupe, Esstù, critique sur la littérO"
îure indienne, 1856, in-12; Eichboff, Poésie hérotquedes
indiens comparée d V épopée grecque et romaine, PaiU,
1860 , in-8*> ; Hsberlin , Anthologie sanscrite , Calcutta ,
I847y recueil de poésies lyriques indiennes ; Gildemeister,
Bildtothecœ sanscritm spécimen , catalogue des ouvrages
lanscrits imprimés, Bonn, 1847. Em. B.
mniBimB (Philosophie). La philosophie remonte aux
plus anciens temps de la race indienne. Elle est anté-
rieure, dans ses premières spéculations, à Tépoque où
les Aryens descendirent dans les vallées du Gange et de
la Yamun& : en effet, les hymnes du Vida ont pour la
plupart été composés dans le Pei^àn ; plusieurs semblent
remonter au temps où les Aryens faisaient encore partie
de ce noyau central de populations bactriennes qui a
produit toutes les branches de la famille indo-euro-
péenne. Or, c*est dans ces hymnes que Ton doit chercher
bs premiers essais de la pensée philosophique : les doc-
trines métaphysiques ne sont pas nées toutes faites à
certaines époques déterminées de nos histoires ; elles se
•ont dégagées par degrés de conceptions obscures, dont
la forme primitive et presque complète se trouve dans
le Véda» Lee écrits composés ultérieurement par les
BrUimanes, soit en langue védique, soit en sanscrit,
et dont plusieurs sont évidemment modernes, portent
louvent la trace de systèmes philosophiques tout faits et
auxquels les auteurs du Véda n*avaient nullement songé.
A ce titre, la plupart des Brâiimanas, les Sûtrae, Tes
Upanishads {Y. Iudibnui— Littérature), sont plutdt faits
pour égarer la critique historique que pour la guider
dans rétude des temps primitifs.
Le Véda, considéré dans ses plus anciens hymnes, ne
porte la trace d*aucune philosophie, d*aucune doctrine
religieuse ayant existé antérieurement. Le spectacle de
la nature avec ses phénomènes réguliers et périodiques,
puis un retour sur la pensée elle-même, inspirèrent aux
Aiyens Tidée que ces grands mouvements étaient pro-
duits el dirigés par des puissances invisibles, auxquelles
ils donnèrent des noms; les astres, les vents, les nuages,
la foudre, les eaux, le feu , f^ppèrent surtout ces âmes
méditatives d*une admiration toute philosophique; ces
objets étant pour les hommes la source visible de tous
les biens,*elles i^outèrent à Tétonnement un sentiment
d'amour mêlé quelquefois de crainte, et, la pensite phi-
losophique prenant un tour religieux, on adora les dieux.
La première conception philosophique fût donc le poly-
théisme pur, sans aucune trace de monothéisme et dans
on temps où Ton était loin encore de Tidée de crâation
et de créateur. Plus tard les chefs de famille, qui étaient
les prêtres, se réunissant pour conférer sur les matières
religieuses, les cultes se rapprochèrent, se groupèrent;
certains dieux furent placés avant les autres dans la
hiérarchie céleste; mais aucun d'eux ne se transfigura au
£oint de devenir Dieu lui-même; leur réalité corporelle
» retint toi]^ours à un niveau inférieur, et les empêcha
de devenir des êtres purement métaphysiques. Dieu
n'existe pas dans le Panthéon védique, non plus que
dans celui des Grecs, des Romains et des peuples du
Nord de l'Europe. Ces rameaux se sont séparés du tronc
commun avant le grand hymne de Dirghatama, où Tunité
de Dieu apparaît pour la première fois dans toute son
élévation métaphysique. A partir de cet hymne, la phi-
losophie indienne a trouve sa voie, le panthéisme est
fondé. Le développement des doctrines Indiennes, depuis
loor origine Jusqu'à nos Jours, a constamment été do*
miné par la pensée védique, c-àrd. par le panthéisme.
Ceux des systèmes ultérieurs qui se rapprochent soit de
l'athéisme et du matérialisme, soit du dogme de la créa-
tion, n'échappent pas néanmoins à la pensée commune
d'un dieu impersonnel, et rentrent par quelque côté dans
la croyance universelle de l'Orient ftryen ; les sectes reli-
gieuses, issues de doctrines philosophiques plus on moins
hétérodoxes, sont néanmoins panthéistes dans le fond de
leurs dogmes.
Les oeuvres qui ont trait à la vie physique ayant été
confiées dans rinde aux castes inférieures, la vie intel-
lectuelle fut l'apanage des deux premières castes, et plus
particulièrement des Brahmanes, puisque les Xatriyaa,
3uoique instruits dans le Vida et dans la connaissance
e la loi, avaient pour fonction essentielle la guerre et
le gouvernement des États. Le développement de la
science, le^ recherches philosophiques et la méditation «
furent le lot des mêmes hommes que la constitution des
castes chargeait des cMmonies du culte, de la conserva-
tion et de l'interprétation des saintes Écritures. Les phi-
losophes indiens sont donc presque tous des Brahmanes;
le Bouddhisme seul, en ouvrant à tous la caste des brah-
manes, sécularisait la philosophie et la théologie à la fois ;
mais, chassé de l'Inde, il ne put recevoir qu'au dehore
ses grands développements. — L'indépendance primitive
des familles aryennes eut pour conséquence l'égalité des
brihmanes entre eux, et l'Impossibilité d'établir on
centra religieux où l'unité de dogme fût conservée. L'in-
terprétation du Véda fut donc livrée à la raison indivi-
duelle de chacun des prêtres, ou tout an plus à certains
collèges de brahmanes , dont l'autorité ne put Jamais
être assez grande pour s'imposer à la caste entière : les
brahmanes, maîtres de ce texte où aucun dogme n'est
énoncé sous une forme définitive, indépendants du pou-
voir dvil et politique, qui leur était subordonné, indé-
pendants spirituellement les uns k l'égard des autres ,
Jouirent de la plus grande liberté philosophique dont
l'histoire fasse mention. Les systèmes purent donc se
développer sans réticences; la sécurité était assurée à
leurs auteurs : ceux même qui créèrent les doctrines à
nos yeux les moins acceptables n'en étaient pas moins
considérés, puisque, tout en se trompant, ils avalent fait
preuve d'une haute intelligence et développé certaines
parties de U science; on attaouait la doctrine, mais la
personne était respectée. — Quant à l'apparition suc-
cessive des systèmes, il n'est pas aisé a'en suivre la
marche. Leurs auteurs, ayant été l'objet de l'admiration
universelle, ont été pour la plupart reportés à des dates
trop anciennes, et toi^ours Indéterminées, parles In-
diens des temps postérieurs. Les livres où ces systèmes
sont exposés n'ont point de date: leur époque ne peut
être assignée que par Fétude détaillée de chacun d'eux,
et par la comparaison toujoun difficile des doctrines ou
des faits qu'ils contiennent. L'apparition du Bouddhisme
dans le courant du vi* siècle av. J.-C. est la première
date à peu près certaine que l'on rencontre, et c'est de là
qu'il faut partir pour rétablir la succession chronologique
des doctrines. Or, Jusqu'à présent, rien ne prouve,
comme on l'a avancé dans la dernière école française,
que cette succession ait obéi à la même loi que celle des
philosophies de la Grèce : au contraire. Il est à peu près
incont^table que le panthéisme, avec le mvsticisme
théorique et pratique, a régné dans llnde dès les temps
les plus reculés, et que les autres systèmes se sont pro-
duits plus tard , tandis qu'en Grèce ils étaient venus les
premiers. Le panthéisme, c-à-d. l'unité absolue de l'être,
était une doctrine védique avant d'être le fondement de
la société brahmanique, et ainsi toute la philosophie in-
dienne est postérieure à cette idée; tandis qu'en Grèce
cette même idée, indiquée peut-être par Platon, qui avait
quelque connaissance des doctrines orientales enseignées
par les Pythagoriciens, n'est devenue le fondement d'un
grand système que dans l'école d'Alexandrie, à U fin du
développement des Idées grecques, et dans une ville où
depuis plusieurs siècles l'Onent et l'Occident se don-
naient chaque Joor la main. Il faut donc se garder de
reconstruire à priori la chronologie philosophique de
l'Inde en la calquant sur celle de la Grèce t lire les textes,
les comparer, s'éclairer par les sjmchronismes grecs,
arabes, chinois, etc., telle est la seule manière de ré-
soudre cet immense problème, non encore résolu* La
tradition brahmanique doit aussi être mise en compte,
malgré ses exagérations; car, si les brahmanes , dans
leur enseignement traditionnel, ont peu à peu outié l'an-
tiquité de leurs auteurs, 11 est probable n&nmoins qu'ils
ont conservé leurs dates relatives , dates qu'une critique
IN9
107}
INP
pmdente peat rdCablir appioximallvenieat dans la chr»-
Dolo^ onifenelle. .
On peat conaidérer toute la philosophie indienne
oomme lUsant parde du Brahmanisme. Issu de la philo-
lophie nommée SànMya, le Bouddhisme n'a pas apporté
une métaphystoue nouvelle ; il n*a fait que développer et
appliquer les doctrines enseignées depuis longtemps.
TtMitefoîs, à partir du Jour où il prit dans Tlnde une im-
portance menaçante pour le rédme des castes, il se sé-
pan métaphysiquement du Brahmanisme, comme il s*en
était séparé socialement, et 11 eut son développement
propre en matière de philosophie.
Ecoles bràkmamquet, — Îa durée de ces écoles n*a pas
été limitée par les antres : de beaucoup antérieures au
Bouddhisme, ellea ont reçu encore de nouveaux déve>
loppements après lui. Le VédAnta, qui porte aussi le
Dom de Uttara^mimàniâ, contient, avec la fHlrva-m»-
mÔMâ (ancienne MimânsA)^ les premières spéculations
br&hmaniquea. Cependant plusieurs critiques considè-
nat le qfstème SAn^ù^fa comme plus ancien encore,
qQoiquIl s'éloisne davantage de Torthodozie fondée sur
le Vida. Hais II semble que les doctrines de ce dernier
système aient quelque chose de plus moderne, et aient
été en partie développées par opposition avec les spécu-
btioas fondées exclusivement sur les Livres saints. En
effet, ce qui caractérise le plus profondément ces deux
kUes, c'est que les Mimânm sont essentiellement théo-
loçques tandis que le Sânkhya contient l'effort indivi-
diKl fait par sea auteurs pour séculariser les spéculations
philosophiques et les soustraire k la tyrannie du texte du
Tida, C'est œ texte que les Vèdàntlstes opposent aux doc-
trioes libres du Sânkhya^ comme c'était aussi sur des
textes védiques que les auteurs de la première Mimànsâ
appuyaient leurs doctrines. Le SànlAya, au contraire,
ae fonde d'ordinaire sur la libre autorité de la raison, et
ne tire des textes du Véda que les conséquences con-
formes à sa doctrine; plus tard les Yôgls en vinrent Jus-
qu'à rejeter l'autorité du Véda lui-même, sous prétexte
que l'on trouver tout ce aue l'on veut dans le Véday et
que ce recueil est semblable à un puits qui déborde de
tous c6tés ; enfin la tentative du bouddha G&kya-Muni
prenait son point de départ dans le Sânkhya, oomme
dans le système le plus libre et le plus propre à fonder
on noovêl ordre de choses. Or, Il est naturel que la doc-
trine précède la réforme, et que l'autorité soit antérieure
à Teflort que l'on fait |>our sy soustraire. Cette autorité,
qoi du reste ne réussit lamais à s'établir dans l'Inde,
c'est celle qui s'appuyait sur le Livre saint, en commen-
tait le texte et en conservait la lettre. Si le VédAnta (ou
seconde MimAnsà) est postérieur au système Sânkhya^
il est donc au moins vraisemblable que la Pûrvarmi-
siéatd l'a précédé. Ce dernier mot signifie simplement
tpécuhtion; il est employé dans les BrAhmamu, ainsi
qœ le mot SàMiya, mais tous deux probablement dans
leur aena général , et non pour désigner des systèmes
phiknophiquea, qui sont postérieurs aux Brdhmanas, du
moins aux plus anciens. La PùrwMntmànsA est à peine
on système; elle porte aussi le nom àeKarma^mnnAnsA,
OQ doctrine des œuvres; elle n'apporte aucun développe-
ment métaphysique réel aux spéculations contenues dans
le Vida ; et cette mtmdiwd tout entière ne vaut peut-
être pas, comme philosophie, le seul hymne de Dlrgha-
tama. Elle est purement théologique et surtout pratique;
son but est de mettre d'accord les textes contenus dans
les commentaires védiques et d'en donner le véritable
KQs; mais son prindiMil objet est de formuler des pré-
ceptes pour raccomplissement des œuvres. Le sûtra
biihfflaoique où est exposée Fancienne Mimànsâ est
ftttribuéà Jaimittî, oui plus tard, ayant reçu les hon-
neurs d'une sorte d apothéose, fût considéré comme le
ré?âateor du SAnuMféda, Hais ce sûtra nomme Bàda-
rtyana, auteur de la seconde Mmânsâ : toutefois, comme
Is réciproque a lieu également, on n'en saurait conclure
que Fandenne Mimànsâ soit postérieure & la seconde.
Ces noms ont pu être Intercalés par la suite dans ces
anciens écrita. Les doctrines philosophiques admises
dans l'andenne Mùnânsâ y sont touiours subordonnées
à la tradition religieuse (c-à-d. au Véda)^ qui est pour
ns théologiens la principale source de la connaissance
en matière de science et la seule en matière de moraleu
Ua procédés philosophiques, appliqués par eux au déve-
loppement et à l'interprétation des textes sacrés, sont
d*aoe uniformité tout htératique, et nous montrent, dans
li période 06 cette théologie s'est produite, une sorte de
moyen lige assez semblable au uètre. Comme lui aussi,
la théologie de l'andenne Mimâmâ s'est n^ue, ches
les commentateurs des siècles suivants, dans une véfi*
table casuistique. Du reste, elle est intimement liée avocj
le développement des questions de logique pure et ap-
pliquée, de grammaire et de rhétorique; elle a abordé,,
sinon poulevé, la question de l'origine du langage et de
ses rapports avec la pensée : fondée sur un principe
panth«istique, elle a été conduite k admettre l'éternité
du largage (Xôyoc) comme expression de la pensée conçue,
el^-mème comme étemelle; cette expression, dont la
VI "ité est nécessairement absolue , c est le Véda lui-
même, source de toute sdence. j
Le Sànidiya (doctrine rationnelle, rationalisme) n'est
guère moins ancien que la Mimànsâ; mais il en diffère
essentiellement par son point de départ ; en effet, il n'est
au fond qu'une réaction contre l'andenne doctrine , de--
venue formaliste et en quelque sorte pharisaique. Kapila,
auteur du Sânkkya primitif, parait avoir attaqué dans ses.
procédés, dans ses résultats et dans ses dogmes la doc-
trine des théologiens. Cest lui qui fit cette première
tentative d'émancipation, au nom de la raison humaine;,
mais sa raison , non encore dirigée par des méthodes
bien conçues, se porta tout d'abord aux dernier» excès
de la négation. Selon Kapila, c'est d'une substance pri-
mitive (atfyaktcun) que le monde est sorti, et non d'une
émanation de Br&hma ; et c'est aussi de ce prindpe in-
saisissable qu'est issue l'&me, soit sous sa forme univer-^
selle, soit dans les individus. L'&me est le véritable objet
de la sdence, étude pour laquelle le Véda est d'une
médiocre utilité; en effet, ce nfesi point par une révéla-
tion antique, mais par une étude personnelle et libre^
que l'on peut arriver à la connaissance de l'âme, de son
origine, de sa destinée ; au contraire, celui qui connaît
l'ème et sa nuurche, c-èrd. sa destinée, est non-seule-
ment savant , mais plus réellement pieux que ceux qui
lisent le Véda et accomplissent les cérémonies sacrées.
On voit quel genre de révolution fut tenté par Kapila
dans les idées philosophiques de son temps, et combien
il s'écartait des théologiens et de leur méthode. Vold
quels sont les traits les plus essentiels de sa philosophie,
telle qu'elle est contenue dans le Sânkhya-karika, Ce
3ul n'est pas ne peut être, et ce qui est ne peut cesser
'être; il faut donc admettre que, sous les apparences
continuellement variées que nous atteignons par nos
divers moyens de connaissance. Il existe un principe
immuable et invariable d'où ces choses dérivent et qui
est lui-même imperceptible aux sens. Cet Indirisible ne
pouvant pas ne pas être, pi:dsqu'il est, est doué d'une
vertu productive, puisque c'est de lui que naissent
toutes choses. Cette vertu porte le nom de jnrakriti (en
latin procreatio) ou wUure. Envisa^ au point de vue
psychologique et moral, la prakriti engendre les trois
qualités, qui sont la bonté avec la sdence, la passion, et
Vobscurilé avec l'ignorance et l'erreur. L'&me elle-même,
qui est le fond sur lequel se manifestent tous les phéno-
mènes de la pensée, est impérissable, et différente pour
chaque individu ; c'est ce que montre l'expérience. Elle
existe donc au même titre que la nature. Le second
Sânkkya, celui de Patanjali, qui semble avoir paru anté-
rieurement au Bouddhisme et lui avoir senri de fonde-
ment, poussa beaucoup plus loin cette doctrine de l'&me,
et fit apercevoir qu'en raisonnant sur le même fonde-
ment, il fallait admettre une &me universelle ( mahât-
man) comme on admettait une prakriH, et, ne voir dans
les &mes Indiriduelles que des formes particulières de
cette grande &me. Dès lors l'existence de l'indiridu s'ex-
pliquait par l'union de l'&me et de la matière, produite
dans le fait de la génération; la grande &me volt par là
sa consdence suprême, son mol (ahamkâra)^ se mviser
et s'amoindrir, et tomber sous la condition des trois qua-
lités; la proportion relative de ces qualités Ait la diffé-
rence des natures individuelles. En même temps que le
5dn/chya recevait ces développements pqrchologiques. Il
se rapprochait métaphysiquement de randenne doctrine
védique, en présentant la prakriti conune une simple
condition abstraite des être^ une simple loi qui se dé-
double en deux antres, rémanatlon (pramritti) et le
retour {nioriUi) ; dès lors, en effet, l'&me reste le seul
élément substantiel du monde, et c'est en elle que réside
toute la perfection et la réalité. Mais, si l'&me Indiriduelle
n'est qu'une forme de la grande &me, celle-d & son tour
n'est pas la forme primitive du souvcôraln être, elle n'est
pas Dieu. Par un désagement progresdf des con<Utlons
qu'elle subit, le Sânkhya parrient à cette définition %
• Dieu est le inrindpe neutre . étemel et Indirisible. s
Br&hma lid-même est appelé la matrice où s'engendre
cet Invisible, que la pensa ne peut comprendre. Alndt
68
IRV
1074
IND
nr néanùer pati le Sânkkya imnrave le principe môme
wArttunfiiâuiie et le dépane.
On i(àl eomfalM celte doetrinar a fateé loin derrière
iHe la théologie. Gdlie-ef néanmoina sut se défendre; et
^Mt dana cette lotte ifoe aend^ êCfe née la seconde
Èflmântà, appelée anaai le Vidamta on Brâhmorm^
wiânsâ, A quéHe époqne se prodaint cette nouTelle théo*
iDgIa f^édiqneT On ne peot le dite exactement ; maie les
eircoairtanoes eft éBe parait tf'tee déveleppée, et le nom
Iraditionoel, qnoiqne mytiiologiqtie, de son abteur, Vyàsa,
Indiquent qu*eUe est antârtenre an Bouddhisme, bien
q«*eiie ait oontinné à régner longtempa après et (m*eUe
toit encore admise acdoeonfhm par la plupart des Drfth*
mnnes. L'opposition an rationalistes força les tbéolo-
riens à aortn* de rfnterprétaidon littérale et étroite du
rida, el à fonder aor le Utre saint une Téritable philo*
■ophie, dont yold lee prlneipenx traits. Brfthma ou Dieu
existant par lui-même, infini a^on Tespaoe et le temps,
«aique, éternel, in<&Tisihle, n*a rfen an-dessus de lui;
9tre des ènres. Il est la seule Téritable substance, dont
Ibb êtres divers, depuia les (fieux Jusqu'aux atomes de la
matière, sont les manifostationa ou plutôt les émana-
tions ; 80U8 le nom masculin de Brfthma , Dieu est le
producteur et le père des êtres viTants. Tous ces êtres, à
partir de Br&hma, aont soumis à la loi de la périodicité,
que les Indiens diésignent par ces mots : « le Jour et la
anit de Brêbma, la veille et le sommeil de Bràhma. »
Gomment cette production est-elle rendue possible, Dieu
étant ImfiTisibn et toujours le même? En vertu d'un
principe métaphysique, que la philosophie poétique des
mhmanes a quelquefois personnifié, et qu*elle désigne
sons le nom de maya. Cette màyà est souvent Tillusion,
la magie trompeuse des objets sensibles; mais elle est,
avant tout, te principe de la mesure (ma, mesurer), la
pessiUIité du plus et du moins, ce que Platon appelle
h grand 9t lé petit, en un mot La nouon métaphysique
<fe matière, mot dont la racine eat aussi ma, mesurer.
La màyà Joue un ttle trèa-important dans le panthéisme
biAhmanione; elle n'est point Ténergie créatrice, la-
ie seule appartient au principe substantiel masculin
itt/ki), mus elle rend possible la production des
; eDe est, comme dans Platon, la matrice, la mère
dn monde. H n'y a ici aucune trace de dualisme, puia-
qn'au fond la màyà n*est rien, et n'est qu'une condition
tout abstraite de l'existence des choses, condition qu'il
est impossible de ne pas admettre. Cest ici que trouve
aa place, dans la théologie orthodoxe, le panthéon indien
avec toute sa hiérarchie de dieux et de déesses, dont les
trois premiers formèrent la divine trinité {trimurti)\
mais cette dernière conception appartient aux temps pos-
térieurs. Ces dieux sont eux-^nêmes , ainsi que les
mondes , soumis à la loi de périodicité, et n'ont qu'une
existence limitée, dans les conditions du monde présent.
Les hommes , comme les dieux, sont des émanations de
Bràhma, et ont aussi leur màyà : ce principe abstrait
descend à tous les degrés de Fémanation, et s*y manifeste
de plus en plus h mesure que Ton s'éloigne du premier
principe ; les choses matérielles sont donc celles où la
màyà a le plus d'empire ; elle prend en elles une telle
taiportance, que Télément divin ne s'y rencontre presque
pins, aux yeux de certains philosophes, et que, pour eux,
ce monde sensible est tel qu'un rêve et une illusion. —
Les Vêdàntistes, comme les rationalistes, admettent les
trois (Tualités, bonté, passion, obscurité. La bonté do-
mine dans les émanations supérieures, qui sont les dieux ;
et ceux-ci même ne sont pas exempts de tonte passion
et de toute ignorance, puisqu'ils ne peuvent saisir entiè-
rement rétemel dans son unité infinie. Les êtres infé-
rieurs sont au dernier degré de l'obscurité , puisqu'ils
•ont entièrement privée d'intelligence. Entre deux sont
les hommes, qui eux-mêmes ne sont pas tous au même
dei^, et sont liés dans des proportions trèa-diverses aux
trois qualités. On voit Ici comment la psychologie brah-
manique se rattache à la métaphysique, et combien ce
mnd système ressemble à celui de Spinoza et des pan-
théistes modernes. La rèele des œuvres, ce que nous ap-
Kdons la morale, s'ensuit naturellement, et consiste au
nd dans la loi du retour, qui fait partie essentielle de
tonte doctrine panthéistlque. Seulement la loi du retour
cet beaucoup plus étendue que la loi morale, puisqu'elle
embrasse le monde entier, depuis la mati^ inerte Jus-
qu'aux dieux les pins élevés : c'est en vertu de cette
loi que les mondes retournent à Bràhma, lorsque son
four est fini et que la période du sommeil s'avance. La
loi morale ne s'applique qu'aux êtres intelligents ; simple
•B elle-même f elle se di versifie smvant la nature de
chacun d'eux. Le devoir, en eiTet, conilate à ae dégagei
autant qu'il est possible de la màyà , ou, ce qui rerient
au même, à développer en sot la bontés et à se rapprocher
ainsi de l'easence divine. Or, on y arrive par la adeooe
et par la vertu ; la jpremière noua fidt éclmpper à l'oba-
curité, c-èrd. à l'ignorance et à Terreur; la seconde
nous rend maltree de la pasaton. Par cette donble voie
l'on parvient à la délivranoe (mdaNi)* Ici ae placent,
dans la doctrine briHimaniqne , la morale pratiqae des
hommes, lea Ida oommunea à toua, et lea loia ph>prea à
chaque caste, à chaque condition, lois qui ae réaument
dana cette formule générale i « Il vaat mieux tuivre aa
loi, même mohia parfoite, que celle d'antrol, même
meilleure. » La phlloaophie morale dea bràhmanea, ad-
mirée par tonte l'antiquité depuis le Jour où elle a com-
mencé à l'entrevoir, a répandu dana leurs œuvres litté-
raires un esprit de douceur, d'aménité, de décence, de
pureté touchante, qu'aucune autre Uttéfmture n'a é^é.
La lutte dea paaaiona contre l'homme qai cherche à les
aoumettre ou à a'y aoustraire est rendue avec un aens
moral d'une singulière profondeur, aoit dans iea œuTrea
épiquea, aoit même dans lea dramea dea tempe posté-
neura. En effet, l'austérité {tapât) et la diàsteté sont lea
deux vertna sana oesae reoommandéea par la morale dea
brahmanes, comme la science de l'àme et du principe
suprême est à leurs yeux la première dea sciences. Ce
double caractère se rencontre sans oeese dans lea prea-
criptions écrites aux livres de la loi^ et dans les héroe
Présentés par lea poêtea pour servir de modèles aux
ommes. Telle est l'essence de la morale dans tontes lea
écoles panthéiaies anciennea et modernes, bien que lea
écoles et lea théologiea rivalea aient tiré des mêmea prin«
cipes de tout autrea conséquences.
Du reste, ces conséquences ont été tirées par quelqœs
bràhmanea, et mises en pratique par dea àroea ardentea
et passionnées. Hj» mysucnies n'ont paa été plus rarea
dana l'Inde que dana l'Occident, et les règles pratiquée
dont raccomplissement procure Id-baa la vision divine
et la béatitude ont été données en aanscilt de la manière
la plus détaillée. Mais ces pratiques ne aont pas la règle
commune dea bràhmanea, ne l'ont jamais été, et les
hommes qui s'y sont livrés ont toiqours été présentés
par eux comme dea exceptiona. D en a été ainsi cfaea lea
chrétiens; dana l'Inde comme ches eux, un caractère de
sainteté a été d'ordinaire attribué à ces pieux pénitents.
C'est à cette tendance vers le mysticisme que ae rattache
le Yoga. Ce mot signifie union avec Dieu, communion
spirituelle ; et ceux qui suivent cette docnrine sont les
yogis. Le Yoga se rattache al étroitement an tànkhyan
que Patanjall en est souvent désigné comme l'auteur, et
que l'on trouve perpétuellement réunis les mots sành-
nyayôga. Cette doctrine mystique, dont Yàfnavalkya est
la principale autorité connue, et dont la Bnagavcàrgità
oftcQ la plus belle expression, est certainement antérieure
au Bouddhisme, et a continué d'exister dans l'Inde et
d'y être suirie Jusqu'à nos Jours. Il semble qu'elle ait
fleuri surtout à l'époque où les prédications bouddhiques
commençaient à émouvoir les masses populaires et à les
détourner des fonctions que la loi leur avait assiçiéoB ;
car il est fait à cela même une allusion presque évidente
dans la Bhagavad-gttà, Le Yâga n'apportait aucune
doctrine métaphysique nouvelle ; mais, adoptant celle de
Patanjall, tout en se rattachant à l'antique aystème de
Kapila, il se rapprochait beaucoup de la philosophie
brahmanique, soit pour la métaphysique, soit pour la
monde. Le but du Yoga est de conduire l'homme à la
délivrance, en le soustrayant d'abord à l'ignorance et au
péché, puis en lui donnant les moyens de s'Identifier
dès cette rie avec le principe suprême. C'est d'abord par
la purification que doit se préparer l'àme du yôgl; la pu-
rification s'obtient par la pénitence, et se complète par
la science. La science elle-même s'obtient par la médi-
tation , non point par une contemplation errante et par
une sorte de rêverie, mais par une suite d'idées claires
et de vérités bien enchaînées. Celui qui dirige ainsi son
intelligence ne tarde pas à s'apercevoir que les diffé-
rences passagères des êtres s'effîacent d'elles-mêmes, et
2u'il y a en eux tous un principe, un fond identique,
èncevant l'identité, le yêgl, dont la raison s'affranchit
par degrés des liens et dea illusions de la màyà, ae seni
vivre de U vie de tous les êtres, et atteint la grande àme^
quil reconnaît en lui-même et dans tous les rivants. Sa
nison a pu le conduire jusque-là ; le donier degré de la
science est un mystère suprême qui ne se dévoile qu'à
un petit nombre d'élus, et cela peur une grâce toute par-
ticulière s celui qui a pu le pénétrer voit Dieu, non plus
IND
1075
IND
Mulement flica à fiue, mais eo flol-mAme* comme le pre-
mier principe, neutre et indivlBible, dans lequel tous les
ë&ax et les mondes sont éternellement contenus. Cette
TUS le remplit à la fois de terreur et d*amonr, et le sou-
venir qu'il en conaenre lui est une source intarissable de
Joie. Cette marche progressive et ré^ée de Tintelligenoe
rtn le premier principe conduit Thomme à la béatitude,
li poiifie de ses souillures, et l'illumine d'une science
qaVucttne autre ne peut é^er ; le faisant édiapper aux
DOIS de la matière, cdle le conduit à la délivrance. La
Bka(fœoad~gUàf où est eiposée cette doctrine avec sa
oéthode, se donne elleHOnème pour un livre consolateur,
et produit, en effet, cette impression sur les âmes bien
préparées : car telle eet la vertu du mysticisme, quand il
oe s'écarte pas trop des rèsles ordinaires de la raison.
Le eueoès de la philosophie du Yoga fut très-grand dans
Itnde, non-eenlement parce qu'il était en lui-même
d'âne grande élévation métaphysique et morale, mais
ioiii parce que, se fondant sur le SarMiya, il conduisait
\» hommes au même but que le Védânta, mais libre*
meot et sans les astreindre à des pratiques religieuses
détenues pour ainsi dire tyranniques en même temps
surannées. Chez les modernes, les yôgls ne sont le
Iqs souvent que des mystiques outrés et des dévots
"un ascétisme parfois ridicule.
Les Sûtras logiques de Kanàda et de Gôtama, tels que
D0Q8 les possédons, sont vraisemblablement d'une époque
trè»-réoente. liaia les systèmes qu'ils renferment n'en
sont pas moins d'une assez haute antiquité, fin effist, les
anciens sûtras brahmaniques commencent presque tou->
jours par des considérations logiques, au moyen des-
ooelles les auteurs de ces traités se dirigent eux-mêmes
OBDS leurs raisonnements. Les études de logique pure
et appliquée remontent donc à une époque ancienne de
Pbistoîre philosophique de l'Inde. Mais la formation po-
litive d'écoles de logique, et notamment des deux écoles
dont nous venons de nommer les fondateurs, semble
avoir en lieu à des époques plus rapprochées de nous.
Ob daix écoles et les traités qu'elles ont produits ne sont
pas seulement logiques; ces ouvrages renferment de vé-
ritables systèmes de philosophie; mais l'élément logique
7 domine. Ce sont les écoles atomistes de l'Inde, en ce
ms que, dans les doctrines de Kani^ et de Gôtama, le
monde est originairement composé d'atomes; mais bien
(fiflfireotes des doctrines d'Épicure et de Démocrite, elles
admettent l'inertie absolue de ces atomes, et rapportent
ieor mouvemeiat initial, leur oi^ganisation et leurs lois à
Qo principe supérieur et intelligent, qui est Dieu. Les
doctrines de Kanàda forment un s;ptème connu sous le
Bom de Vaçéshika^ du mot sanscrit mçésha qui signifie
différence, parce que la théorie des atomes est surtout
appayée par Kanftda sur la catégorie logique qui porte ce
QODL On appelle Nyâya le système logique de Gêtama.
n n'est pas fsunle de dire lequel des deux a précédé
Tautre. Toutefois, comme le système de Kanàda est l'oblet
de réfutations dans le VédântaSiUra, tandis que cdui
<le Gôtoma n'y est pas mentionné, on en pourrait induire
que Kanàda est antérieur à ce Sùtra, et que.Gêtama lui
est postérieur ; mais comme ce Sûtra lui-même est pro-
bablement très-récent, il y a lieu de croire que ces oeux
anteors vivaient longteaaps peut-être avant qu'il fût com-
posé. Si la data de la Bhagaioad^(tA est celle que nous
avons indiquée approximativement, le V<Bçéshim lut se-
rait même antérieur; car il y a dans ce célèbre dialogue
certaines paroles de dédain pour la science qui s'occupe
des différences, au lieu de chercher tout de suite le gé-
néral. Quoi qu'il en soit, l'œuvre principale de ces deux
^pstèmes, et oe qui fait encore ai^jourd'hui leur réputa-
tion dans llnde, est d'avoir classé les idées dans des caté-
gories logiques ; en effet, l'établissement de ces catégories
est une otes premières conditions pour arriver sûrement
à la science, et par elle au but de la vie, qui est la déli-
vrance ou le repos. La question des méthodes et des pro-
cédés naturels de l'intelligence pour arriver à la connais-
aance de la vérité a donc préoccupé particulièrement les
écoles logiques; de sorte que leurs fondateurs se rappro-
chent, par plusieurs côtés, d'Aristote, de Bacon et de
Descartes. & qui concerne la certitude et l'éridence, le
raisonnement et la preuve d'une part, et d'autre part la
perception sensible, l'induction, la comparaison, l'ana-
logie et le témoignage, forme l'objet d'analyses longues
et intéressantes, n en est de même des pnncipes de la
laisoa et des diverses sortes de causes. Les résultats aux-
qnels sont arrivés les logiciens de l'Inde ofltent une
analo^e frappante avec ceux que les Grecs et les Mo-
tenea ont obtenus : le seul point peut-être sur lequel ils
diffèrent profondément, c'est la cause efficiente, puisque
personne dans l'Inde ne semble avoir admis ni conça
ridée de création, telle qu'elle se présente à Tesprit des
Modernes ; ils ne conçoivent pas, en effet, que quelque
chose puisse être fait de rien, ni par conséquent qu'il
existe des causes réellement efficientes : l'effet, selon eux,
ne saurait s'étendre Jusqu'à la substajwse, laquelle est une
et étemelle ; il est nécessairement borné au phénomtoe
et aux relations des phénomènes entre eux. La cause
effidentB se réduit ainsi à la cause formelle^ qui est en
même temps ordonnatrice. Las logiciens sanscrits ont
aussi analysé avec sagacité ce qui concerne les arguments
et les discussions, les sophismes et les causes logiquei
de nos erreurs : dans ces analyses et dans l'ânumératioii'
des fausses preuves^ ils n'ont pas même été surpassée eh
subtilité par nos logiciens du moyen âge.
Jaco^ héréUquês ou Mtérodoxes. — Las divers sys*
tèmes dont nous venons de parler se rattachent tous piui
ou moins directement au Brahmanisme, ou du moins
étaient considérés par les brahmanes comme des déve-
loppements divers de la science, admissibles dans une
certaine mesure et à des titres différents. A côté de ces
systèmes s'élevèrent, soit dans le sein même du Brahma-
nisme, soit à côté de lui, des sectes moitié religieuses,
moitié philosophiques, en opposition réelle avec ses doc-
trines fondamentales. La plus célèbre de toutes, surtout
à cause de la lutte qu'elle a soutenue dans l'Inde et de
l'immense développement qu'elle a pris au dehors, est
celle des Bouddhistes. N*ai>portant pas une métaphysique
nouvelle, et se fondant principalement sur le Sànkhya,
elle tentait particulièrement une réformation morale dans
la société (V. Bodddhismb). Ibis une fois constitués, les
sectateurs du Bouddha durent s'occuper de fixer pour
ainsi dire le dogme, et d'énoncer le système mét2q>hy-
sique auquel il convenait de s'arrêter. Cela était d'autant
plus nécèuaire, que la prédication s'adressait non-seule-
ment aux brahmanes, mais encore à des castes que leur
éducation n'avait pas préparées à recevoir et à com-
prendre un enchaînement de notions philosophiques. Le
corps de la métaphysique bouddhique est compris dans ■
la troisième partie du Tripitaka (K. limiEimB, — litté-
rature], connue sous le nom é*Abkidharma. Bien que la
rédaction des ouvrages de ce recueil soit de beaucoup
postérieure au vi* siècle av. J.-C, il n'en est pas moins
certain que le Bouddha connaissait à fond les doctrines
philosophiques de son tem[»s, que ses prédications rou-
laient souvent sur des matières de ce genre, et que, s'il
s'arrêta au qrstème sânkhya, ce ne fut point par un effet
du hasard et sans qu'il eût conscience de son choix.
Cest dans les sûtras les moins développés que l'on doit
chercher les doctrines les plus rapprochées die celles qu'il
admettait. Dans la suite, chacun des docteurs bouddhistes
voulut avoir sa doctrine philosophique, et l'église se par-
tagea entre un grand nombre, d'opinions, toutes fondées
sur les paroles du maître, mais comprenant des consé-
quences auxquelles il n'avait Jamais songé. Le SAnkhya,
au point où il était parvenu à l'époque du Bouddha,
n'était point un système athée; mais donnant d^à nais-
sance au Yoga, il admettait comme principe absolu des
choses un objet tellement métaphysique, qu'à peine pou-
vait-on dire s'il était un être ou non. Cette conception
n'était point accessible à la foule, et ne pouvait offrir à
personne un objet d'adoration et de culte. Hais la doctrine
tx>uddhique admettait, comme celle des brahmanes, avec
quelquea différences, la grande hiérarchie des êtres de-
puis les dieux supérieurs Jusqu'aux derniers objets phy-
siques. Elle admettsit aussi la mâyà^ principe abstrait
du mal, personnifié dans la suite sous le nom de Màra^
le tentateur. Le point de la métaphysique bouddhique qui
a soulevé de nos jours les plus graves discussions est la
question de la personnalité, qui, dans la philosophie
sâtUskya, comme en général dans le panthéisme, est ré-
solue tout autrement que chez les chrétiens. En effet,
chez ces derniers, la personnalité est considérée comme
une perfection, et donnée à Dieu comme un de ses attributa
les plus incontestables : il en est tout autrement dans lea
systèmes orientaux. Id la différence des êtres est considérée
comme provenant du même prindpe que leurs imperfeo*
tiens, c-àrd. de là mAyA; les êtres raisonnables, qui sont
identiques dans la partie la plus élevée de leur intelli-
gence, la raison, ne diffèrent entre eux que par les rap-
ports divers qu'ils ont avec les choses finies, rapports
dont la mAyA est la condition essentieUe : or, c'est cette
diversité des rapports qui constitue la personnalité; elle
est donc elle-même une imperfection, un mal ; elle est
l'origine de rignorance« de l'erreur et du péché. A me-
IND
1076
IND
•are que par la edence et par la verta on ee floastrait de
plus en plus à la magie des contacts, e.-à-d. aux vérités
contingentes et aux objets sensibles, on sent à la fois la
▼ie de l'intelligence s*agrandir en se concentrant et la
personnalité se restreindre. Que par un effort suprême
on parvienne à briser la dernière relation, on éteint par
cela môme la personnalité, on se perd dans le principe
absolu des choses; c'est à la fois la délivrance (mdoMi) et
Textinction (ntrvdna). Les chrétiens disent : c'est l'anéan-
titsement complet; les philosophes bouddhistes disent :
c'est l'anéantiasement complet des conditions de l'exis-
tence. Telle est la nature au nirvana, laquelle ne peut
être comprise si l'on se place au point de vue d'un dieu
personnel et créateur. On voit ou'en définitive il n'y
a pas id une doctrine essentiellement différente du
Sànkhya-Yôga, et qu'après tout la philosophie religieuse
des Bouddhistes n'est pas le nihilisme. D'ailleurs, une
Êhilosophie qui prêcherait le néant et promettrait comme
ut de la science, et, comme récompense des vertus les
plus hautes et les plus pénibles à acquérir, l'anéantisse-
ment final et alraolu, ne deviendrait Jamais la religion de
Slusieurs centaines de millions d'bonmies et n'eût pas
uré déjà vingt-quatre siècles.
Nous ne pouvons entrer dans l'exposé des doctrines
propres à chacune des sectes bouddhistes. Disons seule-
ment que, dans la suite des siècles, la conception du
Bouddha se généralisa, eut sa place dans la hiérarchie
métaphysique des êtres, et devint le type de la perfec-
tion, au point que le principe absolu des êtres fut daigné
•ous le nom de Bouadha suprême ou primordial, Adhi-
bouddha. Enfin ce fut par des incarnations successives de
ce Bouddha primitif que fut expliauée l'existence des
hommes supérieurs, des sages {b<ntadkas) qui viennent
tour k tour enseigner au monde la doctrine du salut. Ces
explications n'étaient pas une nouveauté dans l'Inde,
{puisque l'unité absolue de la substance, admise généra-
ement dans la philosophie comme dans la théologie
indienne, a pour conséquence que les êtres sont substan-
tiellement contenus en Dieu, et ne sont individuellement
nue ses émanations; émanations d'autant plus voisines
de leur source, qu'elles portent davantage le double signe
de la perfection, la science et la vertu.
Si nous jetons un coup d'œil sur les effets de la philo-
sophie bouddhique, nous reconnaîtrons que son principal
mérite fut d*avoir appelé tous les hommes à la participa-
tion de sa lumière, en d'autres termes d'avoir vulgarisé
la science en remplaçant la petite caste des brahmanes
par une église véritablement universelle {sangga)^ c-àr-d.
libre et ouverte à tous. En ce sens, le Bouddhisme a ac-
compli dans l'Asie, quoique banni de l'Inde centrale, la
sécularisation que Kapila avait tentée an sein du Brah-
manisme : c'est là l'œuvre philosophique du Bouddha.
En second lieu, la conviction personnelle, la foi libre
(ortMhà) étant substituée- à l'autorité brahmanique du
Védaf la morale fut fondée pratiquement sur l'effort in-
dividuel et non plus sur la pratique de cérémonies tradi-
tionnelles dont le sens était perdu, métaphysiquement sur
l'unité de la substance qui engendre l'universalité de la
loi et la fraternité des hommes : la charité devint donc
la forme la plus essentielle de la morale sociale, et la
régulatrice de toutes les relations des hommes entre
eux. C'est là l'œuvre religieuse de la philosophie boud-
dhique.
La doctrine philosophique des Jainas, qui dans l'Inde
semblent avoir succéaé aux Bouddhistes bannis, est en-
core peu connue; ils se rattachent aussi au svstème an-
tique de Kapila. Biais ils paraissent aussi avoir une ten-
dance prononcée vers la théorie des. atomes, qui est en
grande partie matérialiste. En effet, les br&hmanes mo-
dernes, qui s'appuient sur le Védànta, opposent aux
Jainas que la matière, de (pielque façon mi'elle soit com-
binée, ne peut produire l'intelligence ni rendre raison
des facultés et des opérations de l'esprit. Si l'athéisme
est au bout de cette doctrine hétârodoxe, les mêmes
brahmanes lui opposent la nécessité d'un principe orga-
nisateur de la matière, principe que la matière elle-
même ne saurait ni contenir ni constituer. Du reste, la
secte des Jainas est plutêt religieuse que philosophique;
et l'on doit observer que c'a été la destinée commune
des divers systèmes philosophicrues de l'Inde d'être
d'abord purement spéculatifs, puis de développer leurs
conséquences morales, et enfin d'aboutir à la simple
pratique et de passer ainri à l'état de sectes religieuses.
Les Jainaa sont peu nombreux dans l'Inde, surtout dans
la partie de cette contrée qui est sous l'influence pré-
pondérante doi bràhmanfla orthodoxes ; et il ne parait pas
que cette secte ait jamais reçu un très-grand développe-
ment.
Nous en devons dire autant de plusieurs autres sys-
tèmes hétérodoxes ou hérétiques, tels aue ceux des BlÂs-
haspatyas, desTchftrvàkas, des Lôk&yatikas. Nous n'avons
en Europe aucun des ouvrages composés par ces sectes,
et nous ne pouvons connaître leurs idées que par les d-
tations assez rares et les réfutations accidentelles conte*
nues dans les ouvrages de philosophie orthodoxe.
Enfin, dans les derniers siècles, la majeure partie des
dissidents, soit qu'ils se rattachent à un nom connu et
forment une secte, soit qu'ils aient eu des idées à eux,
se sont élevés beaucoup moins haut en matière de phi-
losophie que les anciens auteurs. Le milieu dans lequel
ils vivaient allait s'abaissant d'année en année; l'antiqtie
panthébme, dont le développement, unique dans l'his-
toire, avait produit de si giands effets, dégénérait en des
cultes particuliers et véritablement polythéistes et idolà-
triques, les seuls qui subsistent aujourd'hui de Tandenne
religion fondée sur le Véda, Bfalgré l'attachement des
brahmanes, nos contemporains, à leurs dogmes philoso-
phiques, malgré la vénération qu'ils professent pour
leurs anciens auteurs, on peut dire que l'esprit de Ka-
pila, comme celui de Vyàsa, de Patanjali et de Yàjna-
valkya, les a quittés, et que les systèmes philosophiques
de l'Inde ont dit leur dernier mot.
Le développement de la philosophie indienne a été
original pendant toute sa durée. Les Grecs ne semblent
pas avoir exercé une influence sensible sur elle : on a lien
de croire, au contraire, qu'à l'époque où les andens philo-
sophes de la Grèce rapportèrent les premiers éléments de
la sagesse de leurs lointains voyages en Orient, l'Inde avait
déjà vu paraître ses premiers grands systèmes de philo-
sophie védique , la réaction libérale qui amena la tenta-
tive de Kapila, et la profonde fermentation d'idées d'où
sortit le Bouddhisme. En effet, le Bouddha Ç&kya-Muni
vivait au vi* siècle avant notre ère, et, à cette époque, la
Grèce en était encore aux tâtonnements des philosophes
de rionie et de la Grande- Grèce; le Bouddha, au con-
traire, avait été précédé par la doctrine du Sànmya, ré-
forme rationaliste qui suppose un long développement
antérieur de la théologie. Plus tard, lorsque se fondèrent
en Orient les royaumes grecs des successeurs d'Alexandre,
ni le Bouddhisme alors florissant, ni le Brahmanisme
n'avaient rien à demander à Platon, ni à Âristote, à plus
forte raison aux écoles de philosophie morale, que ces
deux religions laissaient bien loin derrière elles. Les
mêmes considérations s'appliquent aux influences exté-
rieures que l'Inde aurait pu subir dans des siècles moins
reculés, soit à l'époque des premiers voyages des apêtres
chrétiens vers l'Orient, voyages qui ne laissèrent après
eux aucun prosélyte, soit plus tard à l'époque des mis-
sions chrétiennes : en effet, dans l'état de décadence où
sont tombée les croyances indiennes et la philosophie
avec elles, la civilisation de nos jours, avec toutes les
forces dont elle dispose, trouve une résistance invincible
dans les doctrines panthéistiques des brahmanes, et ne
{parvient à rattacher au christianisme aucun d'entre eux.
1 y a donc dans les hommes de cette race une grande
force de croyance, et par conséquent une grande origi-
nalité.
V. Colebrooke, On the Vedas, dans les Asiatic As-
searches; le même. Essai sur la philosophie des Hindous,
traduit par Pauthier, 1833, in-8<»; le même, Thê csDpoH-
tion of the Vedanta philosophy, dans le Asiatic Journal,
1835; Windischmann , Sankara.sêu de the(^ogumenu
Vedanticorum, 1833, in-8<>; Rig-Védat trad. en français
par Langlois, A vol. in-8°; Lois de Manou, trad. par
Loiseleur-Deslongchamps, 2 vol. in-8^ ; Bhogavad^GUà,
trad. par £m. Bumouf, in-8% 1861 ; Sànkhya Karika,
trad. par Colebrooke, 1837, in-4o; A. Blazure, Essai sur
la langue et la philosophie des Indiens, Paris, 1837,
in-8° ; Mémoire sur le Sànkhya, par Barthélémy Saint-
Hilaire, dans les Mém, de VAcad, des Scimces morales
et politiques; Introduction à Vhistoire du Bouddhisme.
par Eus. Burnouf, Paris, 1844, in-4<';Bird, Historical
researcnes on the origine of the Bouddha and Jaina re*
Itgion, Bombay, 1847, in-fol. En. B.
INDIENNES (Langues). La langue que les Brahmanes
apportèrent dans l'Inde à une époque inconnue, et que
l'on désigne par le nom de sanscrit {V, ce mot ), a été la
langue dominante pendant pludeurs siècles, ainsi que le
prouvent les traces qu'elle a laissées dans presque tons les
dialectes postérieurs. Vers le m* siècle avant l'ère chré-
tienne, elle fit place, comme langue vulgaire, au prâkrit
idirivif inférinêr, imparfaU)^ en qui certains Kngnislai
IND
1077
IND
foient le reste d*«iitiqu«i idiome» parlés dans la. pteln-
lole avant rarrlTée de la race brahmanique , mais dont
J*opinion générala fait un sanscrit négligé et corrompa
(F. Psakiit), et oe sunrécat plus que comme langue sa-
vante dans les écoles et dans la littérature. D*ua dialecte
prtJoit naquit» Ters le vi* siècle de notre ère, le poli (F.
c$ mot), que les Bouddhistes employèrent pour la rédac-
tion de leurs livres sacrés, et qu'ils transportèrent à Gey-
iao et dans Tlnde transgangétique. Dès avant le x* siècle,
une autre langue dérivée du sanscrit, et écrite comme lui
avec l'alphabet dévanagarù la langue hindouiê, se répan-
dt dans tout le Nord de l'Inde : on la retrouve encore
aajoard'htti, sous le nom de braj-^àhakhat dans le p^ys
de Bai (Bondelkund). L'hindoui, modernisé par les
Hindous euz-^ndmes, mais conservant encore d'ordinaire
Je dévanagari, porte le nom d*hindi; il est de préférence
la langue littéraire des peuples iion musulmans de l'Inde,
et on lui donne, dans le pays d'Agpra et de Dehll, le nom
de làiàri Mi (langue pure). Depuis le.xii* siècle, les
Hindous musulmans emploient Vhmdoùstani, qui est
fflèlé de mots arabes et persans, et dans lequel on dis-
tiogoe deux dialectes principaux, Vourdou (langue des
camps], parlé dans le Nord , et le dakhni, parié dans le
Sod. L^hindouatani, adopté à la cour des Grands-Biogols,
compris dans presque toutes les grandes villes, est resté,
MUS la domination anglaise, la langue de la diplomatie ,
de l'administration et du commerce. La grammaire de
lliindoustani, dit M. Vaisse, est beaucoup plus simple
rie celle du sanscrit : on n'y compte oue 2 genres,
nombres et 6 cas pour les noms, les adjectifs et les
pronoms. Dans plusieurs temps de la co^Ju^edson, on fait
osage de deux auxiliaires, dont l'un, qui s'emploie avec
la Toix neutre et la voix active, signifie être ou oeventr, et
l'autre, qui s'emploie avec la voix passive, signifie aller.
Chaque voix se conjugue sur un seul paradigme; mais
les verties composés peuvent, d'après la forme particu-
lière que leur donnent certaines modifications apportées
10 sens primitif, être partagea en 10 classes (nominaux
ea adverbiaux , intensitifs, potentiels, oomplétifo, in-
choaûfs, permissifs, scquisitifs, désidératifa, fréquenta-
tif, condnaatifs). Les voyageurs donnent le nom de
moonk une forme corrompue de l'hindoustani, patois
plein de termes empruntés a toutes les nations avec les-
queUea la popalation des côtes s'est trouvée en rapport,
principalement aux Portugais. Enfin, il existe dans l'Inde
certains dialectes provinciaux, dérivés du sanscrit : les
principaux sont le bengali ou gaw, Vorissa, le mahratU^t
limaerate, le eindhi, le pendjabi^ le cingalais, le kawi
{Y. cet mots). — Indépendamment des idiomes de la
soQche brahmanique, on parle dans le Dékan plusieurs
dialectes qui ne leur sont paa apparentés, le tamoul ou
malabar, le kanara ou kamalutuê, de malayàla, etc.
F. DaAvimEHNBS (Langues).
V. Schults, Grammatica hmdostanica. Halle, 4745,
ia4*; Fergusson, Dictionary ofthe Hindostan language,
Londres, 1753 ; J. Gilchrist, Dictionary English and Htn^
doostane$^ Calcutta, 1787, 3 vol. in-4<», et Hindoastane»
fhUology (Dictionnaire hindoustani), Edimbourg, 1810,
io4«; Harris, A Dictionary English and Hindostany, lla-
dras, 1700, in-4»; J. Taylor et W. Hunter, Dictionary
BMuitam and Engluh, Calcutta , 1808, 2 vol. in-4* ;
J. Shakespear, A Grammar of th» Hinduttani language ,
Londres, 1818, in-4<» , et Dictionary Hindustani and En-
lM» 5* édiC, 1846, in-4«; W. Price, Grammar of the
Bindoostemêê kmguage, Londres, 1827, in-4» ; W. Yates,
IntrodmcUon to the Bindooitanea languaqa, Calcutta,
1827, in^; Sandford Amot, Hinduitam grammar,
Londres, 1831, in-««; Gardn de Tassy, Rudiments de la
Umgue hindoustam, Paris, 1833, in4% et Rudiments de
lalanguehmdauXe, Paris, 1847, in-8o; Dunkan Forbes,
A grammar of the Hindustani language, Londres, 1848,
in-8*; Baliantjrne, Eléments of Hindt and BraH>hakha
grammar, Londres, 1839, in-4*; Thompson, Diction^
noire hindi, G. Hadley. CompsiuitotM grammar of the
jargon of Indoostan caUed moors, Londres, 1804, in-8*.
laDUHiiBs (Religions). V, Véda, Bsahiianisiib, BIanou
(Lois de), Booddusmb.
INDIGENCE (Certificat d'), acte qui a pour objet de
constater Tétai indigent d'un individu. Les maires, les
commissaires de police, les bureaux de bienfaisance, dé-
Hvrent des certificats de cette nature à ceux qui en ont
besoin, soit pour obtenir des secours, ou un passe-port
gratuit, soit pour entrer dans certaines maisons de re-
^. Le certificat d'indigence peut donner lieu à l'exemp-
tioQ des droits d'enregistrement et de succession . h h\
vttnise ou modération des impôte, à la déUvxancd g!AF>
tuite des actes de l'état civil, à la dispense de ooBa%nir
l'amende en cas de pourvoi en caasation , au bénéfice de
l'assistance Judiciaire, à l'inhumation sans frais, etc.
INDIGENTS (Secours aux). V, Assistance pusuQoai
BoaiAUX DB BUBNFAISANCB, CHARTré LÉGALE, PABPéRISMB.
INDIGNE, en termes de Droit, celui que la loi prive
d'une succession ou d'une libéralité exercée en sa faveur,
pour avoir manqué à un devoir essentiel envers la per-
sonne à laquelle il devait succéder ou envers l'auteur de
la libéralité. L'indignité doit être prononcée par les tri-
bunaux. Le Code déclare indignes : 1* celui qui aurait
été condamné pour avoir donné ou tenté de donner la
mort au défunt ; %* celui qui a porté contre le défunt une
accusation capitale jugée calomnieuse ; 3« l'héritier ma*
jeur qui, instruit du meurtre du défunt, ne l'aura pas
dénoncé à la Justice ( ce défaut de dénonciation ne peut
être opposé aux ascendants et descendants du meurtrier^
ni à ses alliés au même degré, ni à son époux ou épouse,
ni à ses frères et sœurs, ni à ses oncles et tantes, ni à
ses neveux et nièces). Les enfknts de l'indigne qui vien-
nent à la succession de leur chef, et sans le secours de
la représentation , ne sont pas exclus par la faute de
leur père.
DiDlVIDUAUTÉ (du latin indioiduum, chose qui ne
peut être divisée), ensemble des propriétés qui distin-
guent un être de tous les êtres de son espèce. Le mot m-
aividuel désiçne ce oui appartient à un objet d'une ma-
nière indivisible et inséparable, de telle sorte qu'on ne
peut l'en détacher sans détruire sa nature en tant qu'être
f particulier. Vindividuel ne peut être reconnu que par
'observation, tandis que le générai se détermine par la
comparaison et la réflexion.
monriDDAUTé (Certificat d') ou d'iDErniré, acte délivré
par un notaire, par le. maire ou un Juge de paix à une
personne, pour attester d'une manière authentique ses
nom, prénoms, êge, qualité et demeure. Le créancier
d'une rente publique non viagère est tenu de le produire
au payeur du Trésor, pour en obtenir le payement (Dé-
cret du 34 août 1793). Les agents de change l'exigent,
lorsqu'ils ont à opérer le transfert d'une rente appartenant
k un individu qui leur est inconnu.
INDIVISION , état des biens tndwis, c-à-d. possédés
en commun par plusieurs personnes, et dont elles se par-
tagent seulement les fruits. Nul ne peut être contraint à
rester dans l'indivision , et le partage peut toi^ours être
provoqué , nonobstant prohibitions et convenâons con-
traires {Code Napol.^ art. 815).
INDO-EUROPEENNES (Langues), une des grandes fa-
milles de langues, à laquelle M. Lassen a donné le nom
d'drysiMief , généralement adopté aujourd'hui par les sa-
vants. Quelaues-uns opposent ce nom à celui d'iro-
metmes, qu'ils donnent aux langues dont le send est la
souche , réservant celui ^aryennes aux langues qui se
rattachent directement au sanscrit : cette custinction ,
historiquement inexacte, a l'inconvénient d'exclure en
oueloue sorte de la fiuniUe plusieurs langues de rEurope,
dont Vorigine doit pourtant être cherchée dans l'Asie cen-
trale. — Le sanscrit n'est pas la source d'où découlent
les langues êiyennes ; il nW lui-même qu'une de ces
lanpies, plus semblable peutrêtre que les autres à
l'idiome primitivement parié dans le centre géographique
de la race lapétique, niais non plus ancienne que cei^
tainee de ces langues. Toutefois , comme il a été formé
plus régulièrement, et que, dans la période où il s'est
développé pour parvenir à sa perfection, il a subi moins
d'altérations et reçu moins d'exceptions aue la plupart
des langues êiyennes, il peut être considéré comme le
type le plus pur de toute la famille. Plus une langue de
famille &ryenne se rapproche du sanscrit, plus elle se
rapproche des formes primitives de l'idiome commun. Le
berceau de cet idiome comprenait l'Arie, laSogdiane et la
Bsctriane, c'est-à-dire les prorinces d'Hérat, de Balk et de
Samarkande ; les Aryas occupaient donc les vallées ds
l'Hindou-Khè ou Caucase indien , tant an Nord qu'an
Sud , et les plaines dominées par cette chaîne de mont»-
Saes. C'est de là qu'ils se répandirent dans plusieurs
irections et s'établirent dans des contrées séparées, oft
ils formèrent des peuples indépendants et ignofés les
uns des autres. Une portion notable du Véda, nous poui^
rions même dire le Rig-Véda presque entier ( F. Mtbk\
existait déjà avant que la migration orientale ou brftb-
manique fût arrivée daua l'Inde; les dogmes encore flot-
tants et vagues contenus dans ces hymnes, ont été éga-
lement le point de départ du magisme contenu dans
VAvesla (F. Zerd-avesta) ; et quand on veut se rendre
I ttA compte exact de la plupart des traditions grecques.
IND
1078
IND
'Mses^ sermftiiiiiMft, slaves et scandinftfMf e'est encore
an Véda qa'il faut avoir reeoon. Le Vida est donc un
monnmeot commun de tons les peuples Aiyens, et la
Umau9 védùguê la soacbe commune de leurs langues ,
ridiome central autour duquel les langues indonraro-
péennea ont rayonné en s'en détachant. Quand les peu-
ples de race aryenne se furent éloignés de leur demeure
primitiTev ils ne consenrèrent de relations suivies, ni
entre eux, ni avec leur berceau % leurs idiomes prirent
des développements divers et des formes variées, nées de
la variété oes besoins, et n'eurent plus de commun entre
eux que les racines des mots ; de oes racines elles-mêmes
fifaiaiears ontpa s'oublier et se perdre, comme aussi
quelques racines nouvelles ont pu être inventées; mais
le fond de oes langnee est demeuré le m6me, et c'est en
les comparant que nous retrouvons aujourd'hui leur
.parenté.
On peut partager en deux grandes classes les langues
de famille Aryenne ; i** celles du midi, formant trois
groupes, les langues $antentiqws, les langues tro-
niênnês, et les langues. p^eu^iQiMs; 2* celles du Nord,
-formant aussi trois groupes, les langues slams, les lan-
gues gtrmaniqtus , et les langues celtiques. Les temps
modernes, conunençant à la conquête romaine et se con-
tinuant après l'invasion des Barbares, ont vu naître des
Idiomes nouveaux du mélange et de l'action mutuelle
des langues anciennes de l'Europe; un fiidt analogue s'est
- produit en Asie après la conquête des contrées méridio-
nales par les Aryas de l'Inde et par lee Iraniens , et, plus
tard, après le conquête musulmane, qui a introduit un
.élément sémitique dans des idiomes pnmitivement issus
de la souche védique.
I. Lanoubs no Mmi. — Les Aryas, partis de l'ffindou-
Kbô, qrant pris leur direction vers l'Est, traversèrent
rindus entre Attok et Badakchan , et, tenant à leur gauche
les Himâlayas, descendirent dans les hautes vallées du
Gange, où ils s'établirent. La langue védique, dont ils
emportaient avec eux les monuments sacrés, se trane-
.formant peu à peu, devint le sanscrU (V. et mot), —
Le sanscrit pur était surtout la langue des Brahmanes,
c'est-à-dire de la caste supérieure , qui possédait le do-
maine de la religion, de la science et de la poésie. En
contact perpétuel avec lee races Jaunes et noires qui peu-
.|>laient la presqu'île indienne avant l'arrivée des Ai^as,
'les Brahmanes ne parvinrent à conserver leur langue
•qu'en établissant entre eux et ces races la barrière in-
Iranchissable des castes ; et c'est à cette institution qu'est
due la conservation de la race blanche dans l'Inde, de sa
religion, de ses productions littéraires, et enfin de l'idiome
•sanscrit, devenu la langue sacrée. Toutefois, malgré la
défense formelle de la là de Hanou, le mélange s'accom-
plit par degrés surtout entre les castes inférieures, moins
éclairées que les autres et qui recherchaient l'alliance
•des purs Aryas autant que ceux-ci fuyaient la leur. Le
sanscrit se corrompit, particulièrement dans le bas peu-
ple, dont il n'était pss la langue primitive et naturelle.
Ainsi se forma le pràcrit, qui n'est pas une langue dé-
rivée, mais une langue altérée : le peuple parlait ainsi au
temps du roi Vikramftditya, qui commença à régner 56
.ans av. J.-G. — Le ^t est dérivé du sanscrit h peu près
an même titre crue l'italien l'est du latin. Cest la langue
-des livres boudohiques, et celle qui, avec eux, s'est le
•plus répandue hors de l'Inde; elle est en usage, au moins
comme langue sacrée, dans beaucoup de pays où le boud-
dhisme est en vigueur, à Geylan, chez les Birmans et les
Siamois. — Nous ne donnerons oas ici la liste des nom-
breux idiomes nés du sanscrit plus ou moins intimement
combiné avec les idiomes barbares des peuples du Sud,
lesquels ne fbnt point partie de la race aryenne. Biais
nous ne pouvons passer sous silence les langues hindiê
ethindawê, qui ont succédé au sanscrit, et qui sont
pvrlées et écrites dans la majeure partie de llnde cen-
Le Mnd est la souche des langues iraniennes, et la
plus Importante d'entre eUes. VAvetta, le seul monu-
ment écrit qui nous en reste, énonce clairement l'origine
des peuples de l'Iran t le lien d'où ils sont venus est la
Sogdifuae. Cette tradition, conservée dans le livre de
Soroastre, et puisée à sa source première, établit la pa-
.renté des peuples iraniens avec ceux de l'Inde, et les rat-
tache comme eux à des origines védiques. Les hommes
oui, partis des vallées de li>xus, principal fleuve de la
•Bogdiane, formèrent cette branche de la race ftrvenne,
tirent aussi pour eux le nom d'Ams, commun a toute
race, et qui demeura celui de l'Arie et de la ville d'Hé-
lat, sa capitale; c'est ce nom qui, par une modification
légère, est devenu celui de l'Asie entière , eostrée dss
Aryas, et que les modernes donnent encore à la Perse«
nommée par eux Iran. La langue iranienne, probable
ment avec des dialectes variés, se répandit alosl vers le
Sud ; et nous savons par les livres lends qu'elle était
admise dans toute l'Ane centrale, depuis la chaîne ({ni
borde llndus à l'Occident Jusqu'aux confins de la Hédie.
Faut-il considérer la lansue zend comme identique an
perse de la période acheménideT Non, si l'on en Juge
d'après les inscriptions cunéiformes dePersépolie, où s'est
révélée une langue très-voisine du lend, mais non abso-
lument la même. Quoi qu'il en soit, le seod Ait, sans
contredit, la langue sacrée du vaste empire des Perses,
et, par cela même, plus ancienne que la langue vulgaire.
Par le fait, elle se rattache de très-près à la langue du
Véda, et prfaente des caractères qm ne permettent pas
de la considérer comme plus Jeune que le sanscrit et
comme tirant de lui son origine. On peut diviseren quatre
groupes les racines de la langue zende : 1* celles fpû
appartiennent également au sanscrit, an grec, au latin,
au slave, au celtique et à l'allemand; ce sont de beaucoup
les plus nombreuses; 3* celles qui ne se retrouvent pu
dans le sanscrit classique, mais qui sont mentionnées
dans les vo<abulaires indiens comme lui ayant primitive-
ment appartenu ; 3* celles qui appartiennent exclusive-
ment à ridiome du Véda, rares en latin et en grec, plus
communes dans les langues germaniques; 4*eiân, celles
qui n'appartiennent ou'an zend et au persan moderne.
Ces faits prouvent à la fois l'origine vêdiqae du lend et
sa hante antiquité, puisqu'une portion de cet idiome se
trouve contemporaine du TAIa. Telle racine qui, en sans»
oit, est demeurée solitaire, a eu, dans le zend, une f)i-
mille de mots ; telle antre n*a reçu que ses premiers
développements, tandis qu'elle a sa famille complète dans
une des langues de l'Europe. Cela établit simultanément
la parenté et l'indépendance de ces langues. — Il ne nous
reste des langues parlées fadis dans 1 Asie Ifinenre que
des noms, souvenirs à la vérité très-persistants du séjorn*
des peuples dans une contrée, mais qui ne suffisent pas
à refaire une langue perdue ; toutefois ces noms de mon-
tagnes, de fleuves, de pays, de villes. Joints aux tradi-
tions de cette presqu'île conservées par les auteurs grecs,
prouvent oue l'influence iranienne s'était étendue fort
loin vers rOcddent longtemps avant les expéditiona de
Darius et de Gvrus lui-même. — Entre le zend et le per-
san moderne les deux principaux chaînons de l'idrame
antioue transformé sont le perte et le parsi, le premier
parlé dans les temps historiques les plus andens du
royaume médo-pmique, le second parié avant l'époque
des Sassanides. Le persan date de cette époque, et a subi
Iiû-même, au milieu des révolutions de l'Asie centrale,
des modifications successives. Cette langue , encore en
usaee dans la contrée qui s'étend de la mer Caspienne
au détroit d'Ormuz, s'est assez bien conservée dans les
livres et dans la société instruite, mais s'est profondé-
ment dénaturée dans la bouche du peuple; elle a fourni,
do reste, une abondante littérature. — Les idiomes parlés
dans l'Afghanistan, le Kurdistan et le Béloutchistan ,
idiomes privés de littérature, parce que, depuis leur for-
mation, les peuples de oes pays n'ont pu parvenhr à une
civilisation suffisante, se rattachent directement à la
langue zende, au même titre que le persan. — Varmé-
ntsn ne tire pas son origine du zend par la même vole
que le persan ; il parait en venir plus directement, et 11
est au moins l'égal de ce dernier en ancienneté. Cest à
l'arménien, et peut-être même immédiatement au zend ,
2ae se rattachent aussi les dialectes parlés au pied du
aucase russe, vers le Midi. Gomme l'ont prouvé les tra-
vaux ftdts de nos Jours, les populations de oes contrées
parlaient une langue éminemment àiyenne : tel était
ridiome de la Colchide. — Il nous reste à citer encore le
péMvi {pahaloM ), langue dont nous ne possédons qu'un
seul monument, le Binn^ni^iêch (F. ee mot), dont la
rédaction n'est peut-être pas antérieure an vn* siècle de
notre ènre. Il paraît avoir été parié dans la Biédie dès le
milieu du m* siècle, au temps d'Ardeschir. Ce diidecte
Présente ce fait remarquable dans l'histoire des langues,
'être aryen par la plupart de ses racines, et sémitique
Î>ar sa grammaire; aussi, quand on aborde l'étude des
ivres contenus dans VAvesta, est-on fnppé de trouver
plus de ressemblance entre le zend et le pman moderne
ou'entre le pêhlvi du Ikmn^hech et le zend du Vend»»
aad'Sadé,
Le nom de pélasgiqfus a été donné en commim à deux
langues qui dlfl%rent en beaucoup de points Tune de
Tantre, mais qui se rattachent également à TAsie centrale
IND
1079
IND
par les tnditloiis relstÎTes aux PélasfeB t oe sont le grdo
etleloim.
Us origines de la langue greoqae sont diverses. Un
premier fond fat apporté d^Asie par les Pélasges, partis,
probablement en mâme temps que les Iraniens, de la
chstaie de rHiadoii*ICh6. Les populations de la Grèce qui
sneoédèreni anx Pélasges ne parlaient pas une langue
différente de la leur qusnt an fond; mais, comme elles
paraissent a'dtre avancées de proche en proche par TAsie
Mineure et aToir longtemps séjourné dans la Phrygie et
sur les rivagee ocddentanx de la presquMle, elles furent
pendant ce temps en contact avec les peuples iraniens
déjà dviliaée , et, à leur arrivée dans la Grèce, ces nou-
veilea migrations se trouvèrent mieux policées et plus
savantes que l'antique génération des Pélasges. H en ré-
sulta que la langue encore rudimentaire de ces derniers
fit place presque partout aux dialectes venus d'Asie tout
fiftrméa et presque parfaits, Téolien, le dorien et l'ionien.
D'un autre o6té, la plupart des grandes familles de la
Grèce prétendaient se rattacher à la Crète, paya où revi-
vaient des traditions presque brahmaniques. Une partie
de la langue grecque tira également son origine de cette
Ue, dont la population, partagée en castes sons les lois de
HinoB (llanou)et de son Irare Rhadamanthe (Dharma-
r&ja, le m^me ({ue Yama et oue le Djem-schid d»rAvêsta),
venait de l'Asie par Carpathos et le pa^s des Cariens. Ge
qui nous reste de ce courant méridional des langues
gréoo-asiatiqiies établit en partie la transition entre le
grec et l'idiome de l'Asie centrale; et s'il est vrai que le
nom même des Crêtes , des Cariens et de plusieura peu-
plades et vUles du Péloponnèse soit venu de la Cannante,
contrée kryenaià sur les frontières de la Perse, on aura
roue des sources de la langue grecque, source qui n'est
nullement pélasgique. Quoi qu'il en soit, le grec, consi-
déré en lui-même, se rapproche du zend beaucoup plus
que du sanskrit, et nous dit en quelque sorte quil est
veao, comme la langue des anciens Perses, d'une migra-
tion occidentale des Aryas. — Il est remarqui^le que le
grec n'a engendré aucune langue, et que le grec moderne
ne diffère presque pas de l'ancien.
L'histoire de la formation du latfn est encore pleine
d'obscurités; mais son origine asiatique ne laisse aucun
dente. On ne saurait dire quelle part ont eue dans le
déretoppement primitif de œtte langue les Pélasges-I^r-
fliôuiens, ni ce jiu'ont i^fouté au fond venu d'eux les
migrations postérieures et les colonies asiatiques , dont la
plus prdblânatique est celle des Tlroyens. Le fait le plus
uappant est la ressemblance de racmes « de grammaire
et de génie, que le latin présente avec le sanskrit. Cette
parenté est cependant moins prochaine que celle du grec
avec lesend« Quoique le latin ne soit pas la langue de Rome
seulement, mais celle d'une portiou considérable de l'Ita-
lie, le génie i^stique, Cv-IhI. politique et militaire des
Bomains, a exercé sur son développement une influence
prépondérante, jusqu'au jour (vers 240 av. J.-C. ) où la
ottératore grecque commença h le modifier. -* Le latin
fut porté par la conquête romaine dans une grande partie
de l'Europe, en expulsa presqae entièrement les idiomes
locauXf ou se combina avec eux et produisit les langues
méolatmea. Dans chacune de ces langues, on retrouve, à
des degréa diven, ces anciens idiomes mêlés au fond néo-
latin. L'f£a/tf» reproduit le latin' presque pur dans ki
Toscane et les États du Pape, quoique là même il con-
tienne un certain nombre de mots ostrogothiques ou lom-
bards; mais le provençal, le génois, le napolitain ren-
ferment de nombreux vestiges du grec, sans compter les
expreasioïis empruntées aux idiomes des Barbares; le
vémiiwn est à peine de l'italien. Le portugais et surtout
f espagnol , latms en majeure partie, rappellent souvent
aoasi l'arabe, et même l'antique ibérien, langues étran-
gères à la famille ftiyrane. — Le français ne contient
guère moins de mots latins que l'italienv et ne présente
qiae de loin en loin des mots celtiques, niliques ou ger-
aasa^pies. Hais la modification ou plutôt la destruction de
la grammaire latine a été beaucoup plus complète dans
notre langue que dans eelles du Midi. La suppression de
l'accent tonique a entraîné une extrême confusion entre
les sons des voyelles et des diphthongues et la dliparition
fréquente de «yllabes entières. Si nous ne possédions des
monomenta de presque tonales Ages de notre langue, l'ori-
giae d'une foule de mots serait méconnaissable, ce qui se
voit aussi parfois dans l'espagnol. L'influence latine s'est
ADcore propage dans la (kwde-Bretagne et la Germa-
■ie^ msia avec moins d'empire. Le valaquê n'est pas
■MMns latin qoe le français. Valbanau rappelle aussi les
langnes Haliqnest toMàê^ an llei» d'être venu du latin, il
semble tenir d'aussi près oue lui, de alus pues pentlMli
à l'idiome des antiques raasgea-T^rniéBiiena.
n. Lansdis no Deaa. — * A mesura que l'on s'élolgee dit
foyer natal des Aiyaa, lea laajsnes issues de leur idiome
primitif sont de nîains en moins littéraires, et s'éveiUsét
de plus en plus tard à la civilisation. QuelquesHmas
n'ont jamais pu la voir ; les autres n'ont fait que la rees-
voir des Latins, qui eux-mêmes la tenaient des Grem;
de sorte que le foyer de la civilisation ooddentale a dié
la Grèce, et auriout Athènes, comme llnde a été œlui
lie l'Asie orientale et la Perse celui de l'Asie centrale.
Le celtique, comprenant ridiome des Cirabres ou Ere-
tons, et celui des Gaulois ou Gaôls, est encore parié,
mais fortement impr^né de latin, dans les pônimmles
les plus occidentales de la France et de l'Angleterre; il
a été la langue de l'andenae Gaule et d'une portion coo»
sidérable de la Grande-Bretagne; mais, si l'on en exoeoÉe
certains chants ixiadadsis en gaéUqne, il n'a pu, dans las
temps modernes, devenir autre oiose qu'un patois. Oe
qui nous en reste, surtout en Irlande, «appelle très*
clairement l'Arie et la Bactriane, le nom même de ostli
lie (Érin) n'étant peut-être que celui des Aryas. Le
cimlnre occupait une asses vaste étendue de p^jrs sur
l'Océan septentrional, et comprenant, avec le Daneoaail:
actuel, la Belgique (BaU:T) et le sud de l'Angleterre.
La branche slaloe^ surtout dans quelques-uns de sas
rameaux, le lithmamten par exemple, offre ce fait singu-
lièrement frappant d'une lannie reproduisant l'idiome
védique presque pur, à tel pomt que beaucoup de nmts
lithuaniens sont en même temps sanacrita. Si l'on prend
cette langue pour terme de comparaison entre les idiomes
slaves, c est elle qui établit le mieux leur parenté avec
la langue du Véda, et qui montre le mieux de quel lien
du monde sont venues ces pç^ulations du Nord. Le li-
thuanien, parlé aajoordlmi par pkia d'un million
d'hommes en Prusse et en Rus^ est une langue tout à
fait antique, égale peut-être en durée au latin, au grae,
au send et au sanscrit. Le lithuanien a donné naiasanaB
à l'ancien pnaiM», mû a été en grande juurtie remplacé
par l'allem&nd : touluoîs la CamiUe alave est celle dont la
lan^e offre le plus d'uniformité et le moins de dialeolBa,
quoiqu'elle soit pariée par on grand nombre d'hommes .
Parmi ces différents dialectea, aens ne dterons que le
russe, la langue qui, en Eumpe, posaède le plus gmod
nomme de sons et la plus parAdte euphonie. Elle est, de
nos jours, de plus en pins pénétrée par l'influence gréoH
latine, à la<|uelle elle flnira par céder entièrement.
Vislandau, qui est llancienae langue des Scandinaves
ou Normands, avant d'avoir produit le suédois et le dth
nois, pouvait être considéré comme le ^rpe des lan^is
germaniquea. Toats&iis il était lui-même issu da goiksqu^
langue fort ancienne et nqnelaat de trèa près eelles de
l'Asie centrale. Ge dernier , dont ISphilas nous a légué un
monument fort canaux, est donc la plus ancienne fimne
que nous ayons d'une langue germani^pm : il est du
même ordre qoe le lithnanien dans la philologie. — ^ H y
a déjà loin du gothique au mewûD sassom, qui constitue «n
grande partie la langue des Clandres; Buda Vamgkhsaxon,
qui a produit Vanflais, s'en éloigne encore davuitaga;
et, dans cette dernière langue, M seule du groupe oui
ait donné lieu à une grande littérature, un nombre très-
grand de mota viennent du latin et sMt empruntée au
français. — Sans faire acception des dialectes divers de
l'Allemagne, le drinfanè on Isirfonitns, que noua nom-
mons en général roilsnMmd, est, entre les langues litté-
raires de l'Europe contemporaine, ceHe qui a n plus las
caractères d'une langue antique. Mais on ne doit pas
exagérer ici la vérité; car les fennea gramaiaticalea de
cette langue sont paavrea, et rappellent que l'idiome d'eu
le deutsch est sorti a travesaé une longue période de
barie. L'anden haut sHsmimd tient la milwn entre l^alie-
mand moderne et lea langnm de l'Asie centrale, eifonn
ici la véritable transition ; tomefoia, eomme les mena-
ments écrits de l'tecian haut alleniand ne ramoalent pas
à uneépoque reculée. Il y a lieu de croire qu'entre lui
et l'idiome primitif conservé dana le Véda il s^eat écoulé
un grand nombre de liAcloi, pendant lesquels a au lise
U transformatien de cet idisme Im-mêma.
V. Adelung, MiOtHdaUs, Berièn, iSM-IT, Asol. in^^
Vater, roMsaufl?4Miwipwa<ii^* dat grammumm àes Imnanêi
de VBuropest detMiê, Salle, iâ2S ; A^monaod, LeeSqm
roman , on Dkaomnaùm 4e m iaaoïis dee tnmkaàûmtts
comparée meus autres iaetgmm de r Europe iaUney Paris,
1838-44, 6 soU gc. ;in4^; JfcuBaQr, llttiDfy of As i?iii(a-
pean lonpvagsa, or MeeeéenAm mto As «ifllattiBs ^ tfts
Tfliifnnir. fflnssir, CUIml S^mwnic
IND
1080
IND
fidlmb., 18S3, 9 Tol. in-8**; F. Bopp, GrafMnaén com-
parée du sanikrU, du Mnd, du gnc, etc., en allemand,
Berlin, 3 vol. in-4^ et ObnrwUùmt nr cêtU grammaire,
par Ea«. Bumoof (/oum. dêi Savants, 4833) ; Pott, Ety-
mologw!hê ForMchungen, Lemgo, 1833, in-8*; Ghavée,
Lsxicolooi9md(heuropéennê. Paris, 1849, in-8^; Eichhoff,
ParaUiU dês lançun de VEwrope et de l'Inde, Paris ,
1836, in-4®; Pictet, Les Origines indo-européennes,
Genève et Paris, 1859. Ev. B.
INDUCTION, opération de Tintelligence qui consiste à
étendre naturellement et spontanément une croyance,
dans le temps et dans Tespace, à tous les êtres et à tons
les faits d*une même classe, iinsi, lorsque nous perce-
vons un mode dans un com, nous croyons que ce mode
y enste actuellement; mais, de plus, nous croyons na-
turellement que ce mode était dans ce corps avant la
perception, et qu'il continuera d*y être quand celle-ci
tara cMsé. La croyance, en s*étendant à la fois dans le
passé et dans Tavenir, érige en qualité on en propriété
permanente le mode qui a été perçu comme instantané.
L'enfant -qui s'est une fois brûlé en touchant an feu, croit
qu'il se brCUera de nouveau s*il y touche. Ce raisonnement
uiductif que l'esprit fait pour le temps, il le fait aussi pour
Tespace, et les modes oiMervés deviennent des propnétés
non-seulement permanentes, mais encore générues, et
les rapports conçus comme constants et généraux de-
viennent des lots. Ainsi, par l'Induction, l'esprit s'élève
du particulier au général, des faits aux lois, des effets
aux causes. — L'Induction est légitime dans deux cas :
1* quand elle conclut de l'universalité des parties au
tout, en s'appuyant sur l'idée môme du tout; une énu-
mération complète est la condition indispenûble de sa
légitimité; S* quand de quelques parties seulement ob-
servées, elle conclut à un tout idéal collectif, espèce,
genre, classe, etc., dont toutes les parties sent réputées
semblables et soumises aux mêmes lois, ce qui suppose
la croyance primitive à la fixité des espèces et des genres,
à la stabilité et à la généralité des lois de l'univers. Cette
dernière sorte d'induction est supérieure à la précédente,
et la seule que Bacon admette comme réellement scien-
tifique. Les règles à suivre dans l'induction ont été don-
nées par Newton dans ses Begulœ philosophandi, et par
Bacon dans son Nopum Organum. L'Induction est un
procédé naturel à l'esprit humain ; le philosophe anglais
eut le mérite d'appeler l'attention sur une méthode jus-
qu'alors trop négligée, et d'en faire sentir la néoesdté :
à partir de ce moment, les sciences d'observation et
d'expérimentation firent de rapides progrès. Cependant il
&ut remarquer que toute connaissance inductive n'est,
à parier rigoureusement, qu'une probabilité souvent très-
grande, et qui peut inA&flniment approcher de la ceorti-
Inde, sans y airiver jamais, parce que le progrès des
idenoes d'observation et d'expérimentation consiste à
remplacer les théorise par des théories plus exactea et
plus complètes, à faire rentrer une loi générale dans une
«utre plus générale encore. F. Bacon, Novum Organum,
liv. I, S 105 et suiv., et liv. II; Port-Royal, Logique,
4^ partie; Coumot, Essai sur les fondements de nos con-
uausanees, ch. iv. R.
INDULGENCES, i V. ces mots dana notre Dietionn.
INDULT. i de Biographie et d'Hisloire.
INDUSlUBi, nom de la tunique des femmes ches les
anciens Romains.
INDUSTRIE. Dans le langage ordinaire, l'industrie est
opposée au commerce et à l'agriculture, et désigne le
travail de l'atelier. Dans la langue de l'Économie poli-
tique, le mot industrie a une acception plus générale :
c'est l'activité humaine appliquée a la matière, et l'ap-
propriant aux besoins de la société. L'industrie existe à
peine dans une société naissante; elle se développe, au
contraire, dans une société civilisée; elle derient le lien
des hommes et des nations, qu'elle tient plus éUDite-
ment unis que ne peuvent le faire les institutions et les
alliances politiques. Un individu quelconque peut livrer
les Aruits de son travail à ses voisins, et, pourvu qu'il les
ait fait agréer par eux, s'en faire restituer l'équivalent
dans toute autre partie du monde que celle qu'il habite
lui-même. Il a travaillé pour des Français, des Alle-
mands, des Russes; il peut se faire rendre le prix de son
travail par des Américains, des Indiens ou des Chinois.
Tous les peuples se prêtent mutuellement assistance par
l'industrie. La laine des troupeaux nourris par lea Aus-
.traliens est apportée en Europe par des navigateun an-
-glais; elle est versée par des négociants anglais sur le
continent européen; là, convertie en fils et lainages par
des travailleurs allemanda, belges .on licançais, teinte à
l'aide de mattèrea fournies par les Américains du centre^
elle est transportée de nouveau, à l'état de drap confec-
tionné, par des navigateun de tous les pays, dans toutes
les paraes du monde. L'industrie constitue donc une
grande organisation sociale, qui a pour principe l'intérêt
personnel, pour objet fondamental la production, pour
régulateur \h concurrence, pour moyens d'action Véchange
et la division du travail ( V. ces mots). L.
Dans les temps antérieurs h la conquête romaine, I*ln-
dusUie de ht Gaule fut sans importance et sans activité :
elle ne commença à se développer qu'après J. César,
lorwjue les besoins d'une civilisation nouvelle firent
sentir la nécessité de la production. Dea manufactures
s'établirent dans les grands centres créés par l'adminis-
tration romaine : Arras, entre autres viUea, eut dea fia-
briques de draps qui ne le cédaient en beauté et en
finesse, (Kt S^ Jérôme, qu'aux étoffes de sole. Lea boule-
versements dont fut accompagnée l'invasion des Bar-
bares réduisirent l'industrie a quelques produits grossiers
et aux arta de première nécessité. Pendant lea temps mé-
rovingiens, la fabrication de la draperie, des cuira et des
armes eut seule quelque importance, et, dana dea ate-
lien ouverte par les moines au milieu de leura couvents
et par les rois sur leun grandes métairies, ouelquea fa-
milles gauloises, ainsi que les lètes venus de la Germanie
avec lea conquérants, cardèrent le lin et le chanvre, tis-
sèrent la toile, ou firent un peu de broderie en soie et en
or. Gharlemagne essaya d'activer l'industrie par de sages
règlements ; on voit dans son Capltulaire De viUis qu'on
employait la garance et le pastel pour teindre les étoffes :
mus, d'un autre côté, il restreignit la libre production
par des lois somptuaires. Après lui, les invasions des
Normands, et l'établissement du système féodal retar-
dèrent les progrès industriels de la France. Le droit
d'exercer une industrie, d'ouvrir un atdier, s'acheta des
seigneurs, et encore l'ouvrier n'était-il pas toujours ga-
ranti contre les violences de ces maîtres qui prenaient
tout ce qui était à leur convenance. Aucune législation
précise, aucun pouvoir supérieur et respecté ne protégeait
les producteun.
Ce fut seulement aux xn* et xm* siècles, à l'époque où
s'orcanisèrent les Communes et les corporations d'arts et
mènera, que l'industrie put renaître {V, Aats bt Mé-
Tiaas), et les Croisades contribuèrent à lui donner une
nue impulsion en rendant les communicationa plna
es et les marchés plus nombreux. On peut voir oans
le Umre des métiers , rédigé au temps de Louis IX, par
Etienne Boileau , quelles étaient alon lea corporations in-
dttstri^es, les conditions de l'admission k l'apprentissage
et sa durée, les conditions de la maîtrise, les procédés
de fabrication, etc. Les classes industrielles comptèrent
désormab dans l'État, non-seulement comme associations
laborieuaes, mais aussi comme corps politiques, puis-
qu'elles interrinrent dans les élections municipales et
purent prétendre aux magistratures de la cité, et comme
corps militaires, puisqu'elles entrèrent dans les milices
bourgeoises. Avec cette organisation, les pregrte de l'in-
dustrie forent sensibles : des halles s ouvrirent dans
toutes les villes pour la vente des produits; des fabriq^nes
de coton s'étaburent en Provence, et des fabriques de
soieries à Lyon, Nîmes, et Beaucaire; Provins eut jusqu'à
3,S00 métien battants pour la confection des draps, et
1,700 ouvrière coutelien. Montpellier derint célèbre par
l'habileté de ses énudlleun, Reims par ses toiles, les viUes
du nord par leun tanneries, leun teintureries, et leurs
tapisseries. Cambrai par son orfèvrerie, etc. Toutefois,
la guerre de Cent Ans fut encore un obstacle à l'indus-
trie, qui ne se releva qu'après l'expulsion des Anglais,
surtout sous le règne de Louis XI. Ce prince établit , aux
enrirons de Toun, des plantations de mûriere et des fa»
briques de soieries, et encouragea l'industrie minière.
Les guerres d'Italie donnèrent aux Français le goût du
luxe, et l'industrie dut se faire plus savante, plus délicate
dans ses procédés. François I** attira des ouvriera itallena
habiles dans la fabrication des soieries, qui, à la fin de
son règne, occupait 8,000 métiera en Touraine seulement ;
pour encourager les producteun nationaux, il firappa de
j droits considérablea les draps étrangère et les étoffes d'or
et d'argent Sous Henri II, Mutio de Bologne introduisit
en France les verreries vénitiennes. A la même époque,
l'ébénisterie produisait des meubles encore admirite au-
jourd'hui. Bien que l'industrie ait eu beaucoup à souffrir
des guerres de religion, le gouvernement n'en oublia pas
complètement les Intérêts : ainsi, un édit de janvier IS7S
prohiba l'exportation des matières premières et l'impor-
I talion des matièrea ouvrées ; dix ana plus tard, CatlmiM
IND
1081
INF
de Médias entr^rit de fonder à Orléans des manufac-
tures de soieries et de tapisseries. Après le rétablisse*
ment de la paix intérieure, Henri Iv relera Tindustrie
Isngaisaante, et favorisa, malgré la résistance de Sully,
la production des objets de luxe : un tanneur nommé
Roze alla dérober aux Hongrois leurs secrets de prépa-
ntion des cuirs; le célèbre établissement des Gobelms
{V,ce mot) s*ouTrit; la production des soieries devint
telle, qu*0D en exporta en 2 ans pour 48 millions, mon-
naie du temps; on fonda des manufactures pour filer For,
sder et marteler le fer, fabriquer des bas de soie, des
tentures en cuir doré, des vases de cristal, etc. Les
États-(>énéraQx de 4614 formulèrent des vœux en faveur
de rîndustrie, demandant spécialement qu'on la protè-
ge&t jpar la prohibition des produits étrangers. Pendant
radministration de Richelieu et de llazarin, les dissen-
lioDs intestines et les guerres extérieures arrêtèrent Tes-
•or de rindustrie, qui ne se ranima, mais avec un grand
éclat, que sous le ministère de Colbert.
Golbert voulut affranchir rindustrie française de toute
iépendance par rapport à l'étranger, et créer les genres
de fabrication que l'on ne possédait pas encore. Dà ma-
Dolacturea de glaces, étulies à Tour-la-Ville près de
Gherbours, et à S^-Gobain en Picardie, donnèrent des
produits égaux à ceux de Murano et de Venise. La culture
des mûriers prit assez d'extension pour ou'on pût se
passer des soies étnuigères, et le produit des manufao-
tores de soieries s'éleva à plus de 50 millions. Des ate*
Vers pour la fabrication des dentelles forent formés au
Quesnpy, à Arras, Reims, Sedan, Chàteau-Thieny, Alen-
çon, Londun , Aurillac, etc. Les tapis de Turquie et de
Perse forent surpassés par ceux de la Savonnerie (F. ce
fliol), et les tapisseries de Flandre par celles des Gobe-
lins ; d'antres manufactures de tapis furent créées à Beau-
vais et à Aubusson. Abbeville, Sedan, Louviers, fabri-
Qoèrent les draps fins, qu'on était auparavant obligé de
oonander à l'Angleterre et à la Hollande. Louis XIV
avançait aux manufacturiers en lainages 2,000 livres par
chaque métier battant: aussi , dès 1666, on en comptsit
44,200 dans le royaume. Les porcelaines sorties des ate-
liers de Sèvres n'eurent pas de rivales en Europe. Gol-
bert, tout en développant les industries de luxe, fut loin
de négliger la production des objets de première néces-
sité : il établit des fabriques de bas d'estame, de toiles à
nrile, et de savon blanc, appela en France des ouvriers
suédois pour enseigner à extraire des pins les matières
résineoses et à Cure du eoudron, fit venir également
d'Allemaçne des ouvriers ferblantiers, et déroba à l'An-
gleterre Te secret de la trempe de l'acier. Il multiplia
enfin, pour favoriser l'indusme nationale, les mesures
prohibitives, cpi'on regardait alors comme indispensables
(F. PsoBiamoii, pRorscTEca — Sjrstème).
La mort de Colbert, et la révocation de l'édit de Nantes,
qoi fit sortir de France des milliers de familles indus-
trieuses, portèrent aux manufactures un coup dont elles
se ressentirent pendant plus d'un siècle. Les Hémoires
que les intendants des généralités furent chargés de rédi-
ger, en 1008, prouvent, par exemple, que déjà la fabri-
cation des soicôries, oui avait occupé en Touraine S0,000
ouvriers, et un nomore double de femmes et d'enfants,
n'employait plus que 4,000 ouvriers des deux sexes, et que
Lyon, ou Ton comptait naguère 18,000 métiers, en avait
perdu plus des trots quarts. Le xvm* siècle fut moins re-
marquable par les progrès de l'industrie que par les de-
mandes de réforme dans le svstème des corporations :
les économistes réclamèrent la liberté du travail , et,
après une suppression momentanée des maîtrises et des
jurandes pendant le ministère de Turgot, elles dispa-
rurent tout à fait iMir décret de l'Assemblée constituante
en date du 43 février 1791. L'essor que la libre concur-
rence n'aurait pas manqué d'imprimer à lindustrie fut
mslheureusement arrêté par les guerres dviles et exté-
rieures qui signalèrent les premières années de la Rteu-
hlique : cependant, à cette époque appartient la créauon
du Gonsenratoire des arts et métiers, destiné à collec-
tionner les modèles de toutes les machines industrielles,
et auquel furent a4ioints , à partir de 1819 , difTérents
eoois publics d'enseignement. De la République date
éçdement la législation relative aux brevets d'invention,
pour garantir aux inventeurs les profits, au moins tem-
pondrea, de leurs découvertes. A partir de 1798, l'indus-
trie se releva : cette année-là môme, il y eut une Exposi-
tioa de ses produits à Paris, et les solennités de ce genre
revinrent plus tard à des épooues périodiques. La SodéU
émamragmiMU, fondée le 9 brumaire an x, exerça sur
le développement de l'industrie la plus heureuse in-
fluence, par les prix qu'elle distribua chaque année, et
qui s'élèvent aujourd'hui à plus de 200,000 ît. Sous le
4" Empire, la production de la laine et de la soie, la fa-
brication des lainases, des cotonnades, des fers, des
cristaux, de la coutellerie, de l'horlogerie, fit d'immenses
progrès; les casimirs, les couvertures, la ganterie, les
nanxins de Rouen, lurent surtout remarqua; la Fktmce
se trouva afihinchie du tribut qu'elle payait à l'étranger
pour un grand nombre d'objets, tels que les aciers, les
faux, les limes. Lors du blocus continental, l'industrie
fhmçaise fit des effbrts prodigieux pour suffire à la con-
sommation de l'Europe privée des produits anglais. Les'
primes et les encouragements furent multiplia par Na-
poléon I"', surtout pour la fabrication du sucre de bette-
rave. Un décret du 7 mai 1810 promit un million de firancs
à celui qui construirait une machine à filer le lin, et les
malheurs de la fin de l'Empire empêchèrent seuls de ré-
compenser Philippe de Girard , l'auteur de cette inven-
tion. Depuis la Restauration, les perfectionnements de
l'industne ont été nombreux et rapides : ils n'ont eu que
deux temps d'arrêt , produits par le malaise général qui
suivit les révolutions de 1830 et de 1848. Au commence-
ment du XIX* siècle, il existait à peine quelques mar
chines à vapeur; on les compte ai^ourd'hui par milliers.
La filature du coton, de la laine et du lin se fait sur une
grande échelle; les draps, les stoffs brochés, les châles,
ont atteint une perfection qu'il semble impossible de sur-
passer; l'application du métier à la Jacquart a permis
aux manufacturiers de l'Alsace de fabriquer des percales
et des Jaconas dignes de rivaliser avec les produits an-
glais de ce genre; les machines à papier continu ont été
créées ; la bougie stéarique et le bleu de Prusse ont aussi
pris place dans l'industrie; les progrès de la fabrication
des alguillea ont rendu moins fréquentes les importations
de l'Angleterre; nos soieries, nos cuirs vernis, nos maro-
ouins, notre parfumerie, nos instruments de chirurgie,
de mathématiques et de physique, nos meubles, nos
bronzes, notre byoutèrie, nos modes, etc., obtiennent
une préférence marquée sur tous les marcha. Aussi, les
inquiétudes éveillées par une extension de la liberté des
échanges internationaux à partir de 1861 n'ont-elles pas
été généralement Justifiées : un abaissement prudent et
nécessairement progresdf des droits qui frappât les mar
tières premières, la réduction des fnus de transport, un
outillage plus parfait qui permette une production plus
rapide, plus abondante et moins coûteuse, enfin la con-
viction qu'on ne doit ni s'engourdir dans la routine, ni
compter sur l'État ou sur personne autre que soi-même,
telles sont les conditions de succès dans une lutte in-
ternationale dont le but final doit être l'avantage des con«
sommateurs. L.
mnosTS» (^.positions de). | *! 5^5^*Î2^SS!
mDDSTRiB((Jidsder). I ^wgraphu^tdHw
INDUSTRIEL (Dessin). V. Dessin.
iNDusraïKL (Enseienement). Get enseignement n*exis-
tait pas en France ni en Europe avant 1789 : les gens de
métier suivaient des usages établis, acceptaient Sm pro-
cédés introduits dans la pratique, et faisaient tout ce
qu'ils avaient vu faire, sans chercher à innover. Depuis
la Révolution, on s'est préoccupé de l'instruction profes-
sionnelle; les Écoles primaires supérieures, Ubres on
annexées à des collèges, les Écoles d'arts et métierii
l'École centrale des arta et manufactures, le Conserva-
toire des arts et métiers, forment at^ourd*hui un en-
semble d'enseignement industriel qui semble ne laisser
rien à désirer.
INDUSTRIELLE (École), nom donné au groupe d'éco-
nomistes qui proclament que la première source de la
richesse est le travail. Adam Smitn a été le fondateur de
cette école
. INDUSllUELS (Arts). V. Arts et Mtfnsas.
INDUT fdu hitin mdulm, habillé, revêtu), nom donné,
dans certaines églises, à des clercs revêtus d'une aube et
d'une tunique, qui, dans les messes solennelles, M»ifft^nt
le prêtre, le diacre, et le sous-diacre à l'autd.
INFAILLIBILITE, privilège de ne pouvoir ni ee tromper
soi-même, ni tromper les autres en les enseignant. Lln-
faillibilité de l'Église n'est autre chose, comme le fait ob*
server Bossuet, que « la certitude invincible du témoignage
qu'elle rend de sa doctrine, et l'obligation dans laauelie
est chaque fidèle d'acquiescer et de croire à ce témoi-
gnage. » Elle a pour base les promesses de son fondateur.
« Je suis tous les jours avec vous Jusqu'à la consommsf
tion des siècles (s^ Hathleu, xxvu), » dit Jésus aux pas-
teurs de l'Église en U personne des Apôtres, c.-4hL qu'A
lut
1082
INF
est »Fec eai pour les prteerrer dt rerrenr. H dit encore :
« Celui qui vous écoute m*éooute (S' Luc, x) ; » or, serait-
ce écouter Jésue-Christ que d*écouter l*errear, si l'Êslise
▼enait à l'écouter? On lit enfin dans S* Jean (uv) : « Mon
Père vous donnera un autre Paraclet, afin qu'il demeure
'avec vous pour toi^ours ; c'est Tesprit de vérité. » Chaque
évôgue en particulier n'est pas infaillible ; il n'a part à
l'iniaillibilité qu'autant qu'il concourt au témoignage una-
nime^ qui est la marque de la vérité. Les théologiens
d'Italie soutiennent que le pape est infaillible, même
sans le reste des pasteurs. Ce qui est avoué de tout le
monde, c'est que l'Église universelle est infaillible dans
ses décisions dogmatiques ou morales, et que les Juge-
ments du pape ont la même infaillibilité que les déc&iotts
des conciles dès qu'ils sont appuyés du consentement des
pasteurs de TÉglise.
INFAMANTE (Peine). V. Pewk.
INFANT. V. ce mot dans notre Dietionnaire de BiO'
graphie Bt d* Histoire,
INFANTERIE (de l'italien fantef homme de pied), nom
générique des troupes combattant à pied. Linfanterie,
chez les Grecs ot les Romains, fut la pnurtie principale des
armées; au moyen âge, elle céda le pas à la cavalerie,
pour reprendre toute son importance après l'invention
de la poudre à canon. De même qu'on distinguait chex
les Anciens diffârents corps d'infanterie (F. AaiiéB), on a
séparé chez les Modernes Vinfanterie de ligne et réifan-
forts Ugère : mais on était arrivé, en France, à ne plus
les distinguer que par la couleur du collet et des bou-
tons, l'hahillement, l'armement, l'organisation, l'instruc-
tion et le service étant Identiques; c'est seulement en
i854 qu'on a supprimé la distinction des deux infanteries.
La véritable infanterie légère se compose aujourd'hui des
chasseurs à pied, dits chasseurs de Vincennes. L'infan-
terie française est distribuée par régiments, subdivisés
en batailhns, et ceux-ci en compagnies : on forme des
brigades avec les régiments, et des divisions avec les bri-
gades (F. ces mots). Vinfanterie légère d^ Afrique n'a rien
dans son organisation, ni dans son service, de ce ffii con-
stitue une troupe légère; cette qualification conviendrait
beaucoup mieux aux r^ments de zouaves. On nomme
infanterie de marine un corps chargé de défendre les co-
lonies, de garder les ports et les arsenaux, de faire toutes
les expéditions de guerre maritime, et d'accroître la force
militure des vaisseaux.
INFANTICIDE (du latin infans, enfknt, et cœdere, tuer],
meurtre d'un enfiuit nouveau-né, commis par le père ou
la mère. Il est lidte en Chine, et beaucoup de peuples
anciens ne l'ont pas considéré davantage comme un
crime. Notre Code pénal (art. 300-302] le punit de mort;
la loi du 25 Juin 1824, qui avait réduit la peine pour la
mère à celle des travaux forcés à perpétuité, a été abrogée
rir celle du ^ avril 4832, qui autorise, du reste, le Jury
admettre des circonstances atténuantes. Lenomibre des
infanticides a continuellement et progressivement aug-
menté en France; cela tient peut-être aux mesures prises
pour rendre plus difiicile l'admission aux hospices d'en-
fants trouvés, ou tout simplement à ce que la constata-
tion des crimes se ftdt avec plus de soin et de certitude.
INFÉODATION. ) K ces mots dans notre Dtch'ofinoîrs
INFÉRIES. ( de Biographie et d'Histoire.
INFIDÈLE, en termes de Théologie, celui qui n'a pas
reçu la foi chrétienne, ou qui, l'ayant reçue, l'arepousside.
Dûis le premier cas, c'est un infidèle négatif; dans le
second, c'est un infidèle positif,
INFINL y. Ftiti.
INFINITIF, mode des verbes marouant l'état ou l'ac-
tion d'une nianière indéfinie, et, dès lors, sans aucun
rapport exprimé de nombre ni de personne : être, aïooir,
aimer. En français, l'infinitif est susceptible des trois
temps à l'actif et au passif : présent, frapper, être frappé;
passé, avoir frappé, avoir été frappé: futur, devoir frap-
per (peu nsité, surtout au passif}. En latin, il a, de
plus, le futur passé, mais à l'actif seulement. En srec,
}l a le présent, le futur, l'aoriste, le parfait, et le futur
liasse aux trois voix.
. Dans les trois langues, rinflàitif lUt fonction ou de
tajetouderéghne, soit direct, soit indirect; mais, en grec
'et en français seulement, on peut le faire précéder d'une
^préposition. En grec, cela est toujours possible, pourvu
quil y ait un article; en français, seulement avec quel-
3ues prépositions : ainsi, dans, en, sur, contre, à cause
$, etc., ne peuvent aller devant un infinitif; à, 00, pour,
*iafit, sont les plus usitées. Cette faculté de mettre une
uréposition devant lifinnitif est suppléée en latin par
Pusage du gérondif {V*ce mot). Néanmoins les poètes,
fort rarement les prosateurs, emploient rinflnitif à la
place du gérondif; ils l'emploient aussi là où l'usage gé-
néral de la langue demandisit un supin en trni ou en u :
« Quod si tantus amor casus cognoscere nostros, » au
lieu de cognoscendi; — « Non ferro Libycas poimiafs
pénates Venimns, » au lieu de populatum ; — « Niveus
videri, » pour vtsti.
Dans les trois langues, surtout en grec, l'infhiitif de^
vient quelquefois un véritable substantif ; le savoir, le
devoir, le pouvoir, le vivre, le dormir, le manger, le
boire, le rire; td est son dire;
Arec 9om mardur lent quand arrivermit-eU«?
La, TowtàXtrK, PtAiêê, XII, 11.
On platftt que ne pnle-je, an doux tomber du jour.m
Lamaktimk.
Perse a dit scure tuum; nostru/m istud vivere. Ces ob-
servations s'api^quent généralement aussi aux langues
modernes, comme ritalien, l'espagnol , l'allemand, Pan-
glais : seulement ces'deux dernières langues offrent cette
particularité que, dans l'une, l'infinitif est précédé de la
particule su, et, dans l'autre, de la particule to. Autre-
fois notre langue fiûsait un usa^ plus hardi de l'infinitif
employé comme complément soit avec, soit sans l'article;
les auteurs du xvi* siècle en offrent des exemples remsr-
quables, ceux-d entre autres : « Gardant ses gens d^étre
oisifs, » c-èpd. de l'oisiveté; « Fuyant Vitre souvent vus
du peuple, » etc. Ce sont des héllénismes qu'on cher-
chait à introduire dans la langue, mais auxquels on a
renoncé, parce qu'ils ont quelque chose d'étrange et de
contraint.
En grec, en latin, en français, l'infinitif employé
comme complément Joue le rOle d'une proposition com-
plétive précédée de ort, quod, que. En français, cela a
lieu seulement lorsque le sujet des deux propositions est
le môme : « Crésus croyait être le plus heureux des
mortels, » c-à-d. Crésus croyait qu^U était. En grec, les
deux syntaxes étaient facultatives et ont toujours existé
simultanément, excepté avec les verbes BouXo|iai,5e7, xp^i,
et quelques autres analogues. En latin, rinfinitif fut long-
temps seul admis : « Cnssus se esse felicissimum omnium
puuubtat; » l'usage de quod, remplacé quelquefois par
quia, quoniatn, ne devint général qu'au v* siècle après
J.-C. : « Crœsus putabat quod esset felicissimus. » Ce
tour eût semblé barbare au siècle d'Auguste. En firançala
et dans toutes les langues modernes, l'infinitif a été gé-
néralement remplacé par l'emploi de la coi^onction que
et de celles qui y correspondent.
Un usage remarquable de l'infinitif en français, c'est de
suppléer quelquefois l'impénitif ; nous disons : Bêcher-^
cher les origines de tdle institution; au lieu de : qu'on
recherche, ou on recherchera. Il en est de même en grec
L'Infinitif présent s'emploie très-souvent en latin à la
place du présent et de l'imparfait de llndicatif dans le
style de l'histoire et dans les narrations de tout genre t
c'était une manière de donner plus de rapidité et d'entrsin
au style. Le sujet est toujours au nominatif : « Numidm,
alH postremos cadere, pars a sinistra ac dextera ten^
tare. » Cette syntaxe, inconnue aux Grecs, a passé en
français, mais seulement dans le style familier; rinfinitif,
en ce cas, est toujours précédé de la préposition de •
Rats en campagne anaeitOti
EtUettadindedtr§:
Aehevona font notre rSt
Ié4 Foutaiics, Pab. I, 9.
Cette préposition de s'employait fréquemment aatrefda
lorsque l'infinitif, jouant le rôle de sujet, commoaçait la
phrase; ainsi l'on disait : « De mentir, c'est bien hon-
teux, a comme nous disons encore ai^ourd'hul : « Il est
bien honteux de mentir. » On lit dans Boileau :
Mala de blâmer dea vera on dnra on langnlManta,
De ehogver nn «ntenr qnl «hoqne le bon lens.
De rmUr nn plaisant qni ne aatt paa nona plaire,
Cett ee que tont lectenr ont toc^oars droit de foire;
LMnfinitif s'emploie dans 'tontes les langues pour mar-
quer rétonnement, l'indignation t
ifo<, le foire emperenr ! Ingrat, ravea-Tona emf
BAOon, BrUannieus, rv, t.
... Mené laeepto deststere Tictani«
▼iB«iLB, ÉnMe, U éU
LMnfinitif s'emploie très-souvent en français après les
mots interrontifs, que la phrase soit directe ou indirecte :
Que faire? Pourquoi rester? Comment sortir? Rs m
INI
1083
INS
fwmi (tu» Irociwr, comment ^y prmdn, oU aUer ? etc.
En grec et en latin, l'infinitif 8*empIoyait aussi, mais
du» on cas diflérent, après les interrogatlfs et les exdà-
ipstiffl; c'était dans les disconrs indirects. P.
INFIRMERIE, local spécialement affe(^ an traitement
des malades dans tout établissement où Tivent en com-
mon on certain nomlire d*indiTidns, par exemple dans
les coarents, séminaires, collège, prisons, etc.
INFIRMIERS, préposés à la garde et au service des ma-
lades dans les bôpitanx. Ce sont des soldats organisés par
eompamies et par escouades, soumis aux r^es de la
hiénrchie et de la discipline, qui remplissent ces fono-
doos dans les hÔ|>itaux militaires : leurs caporaux et ser-
pits, dits infirmier^^majors, sont placés sous les ordres
immédiats des officiers d*administration comptables.
INFLEXION ou FLEXION, propriété que possèdent les
mots déclinables de sHnfiéehir, ae se modifier selon les
lapports qui modifient ridée même exprimée par le mot.
Cette propriété est d'autant plus commune dans une
langue, que cette langue est plus apte à recevoir une
grande variété de terminaisons : telles sont les deux
bagnes anciennes et la langue allemande. Ainsi, dans ces
trois langues, selon qu'un nom ou pronom est sujet, ou
eomplément soit d'un nom, soit d'un adjectif, soit d'un
TerhB, aoit d'une préposition, et selon ou'un verbe a
rapport à un ou à plusieurs sujets, ou à rune des trois
personnes, la désinoice ou terminaison de ce nom, pro-
nom ou verbe, est modifiée d'une manière i^éciale.
Ainsi ! « PaultM mnat Petrum; Pault frater a Petro
amotur; Ego Ulos amo; tu me cum summo studio di-
iigif ; nos sumua lllts carissimt, etc. » Les langues néo-
iatines et la laneue anglaise sont beaucoup moms ricbes
à cet égard que le grec et le latin ; et l'allemand forme
eomme une sorte d'intermédiaire, se rapprochant plus,
Déanmoina, de la pauvreté des langues modernes. P.
INFORMATION. F. Enqdétb.
INFRACTION (du latin frangere, briser), toute viola-
tion d'une loi, d'un traité. Les infractions aux lois se
divisent en contraventions , délits et crimes (V, ces mots).
INFULE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio^
fraphie et d: Histoire.
INGÉNIEUR, autrefois en^egnour, ingegnour (de l'italien
M^^l^, engin, machine), savant qui conduit et dirige les
ttïïnxa d'art à l'aide aes sciences appliquées. On dis-
tingoe, en France, les Ingénieiurs de lÊtat, chargés de
serrices publics, et les Ingénieurs doUs, employés par
les particuliers ou par les villes. Les premiers compren-
nent : 1<* les Ingénieurs des eattx et forêts, chai^ de la
eonservation des bois et forêts, de la construction et de
Tentretien des rives, canaux, aqueducs, etc. ; ^ les Ingé-
ei»ers-{kographes, institués sous Louis XV pour drerâer
des cartes civiles et militaires, lever les plans des champs
de bataille, etc.; ils sont, depuis 1831, réunis au corps
de l'État-maJor ; 3* les Ingénteurs-Bpdrographes {V» Hy-
noGaaPHBS, dams notre Dictionnaire de Biographie et
iBist.); 4f* les Ingénieurs de la marine {V. GâviE UAja-
nxE); 5<> les Ingénieurs militaires ( V, GtmE miutaihe;
^ les Ingénieurs des mines (V. Mines) ; 1^ les ingénieurs
étt ponts rt cAatwa^ (F. Poirrs et Cbaqssébs).
INGÉNUE, emploi de tbé&tre, celui où l'on représente
les Jeunes filles naïves. L'Agnès de VÊcole des Femmes
de MoHère est le type des rôles d'ingénues. M*^ Gaus-
nn, Mars, Anab, et Plessy ont été les actrices les plus
renommées dans cet emploi.
INGRÈS, terme de Droit canonique, désigne le droit en
lertQ duquel celui qui a résigné, avec ràpulation de re-
toor, on bénéfice dont 11 n'a pas pris possession, peut
raitrer dans ce bénéfice (ingredi m beneficium) au cas
ponr lequel le retour a été stipulé.
INHUMATION. V. ce mot dans notre IKcttofiitatrs de
Biographie et d^ Histoire,
INTriALB (do latin mttttim, commencement), lettre
noonençant on mot. Elle doit totdours être minuscule
la conunencement d'une phrase, et oans les noms propres
Mt dans les nonos communs personnifiés. En allemand,
tous les substantife et adjectira pris substantivement re-
pùnat une initiale ma|uscule; Une lettre initiale sert
soQTent k désigner un nom, soit propre, soit conmmn,
<ine Ton ne veut pas laisser connaître de tout le monde,
SQ qa'on ne veut pas écrire en entier pour des motifs de
l'ieûé&nce. La plupart du temps, les prénoms se mar-
JKot par une mmple initale : J. Racine (Jean Racine),
r. Gomeine (Pierre Corneille). — Les lettres initiales
>OQt aossi employé» comme abréviations. V, Abr<via-
tions, Majuscol», et le i**" article de chacune des lettres
^l'alphabet dans ce Dictionnaire.
INITIATION, cérémonie par laquelle on était admis,
chez les Anciens, à la connaissance et à la participation
de certiUns mystères de la religion. Les Modernes em-
ploient le même mot pour désigner l'admission dans une
société secrète.
INITIATIVE, en Droit politique, pouvoir de proposer
des lois. La Constitution de 1791 l'attribua à l'Assemblée
l^slative; celle de l'an m le réserva au Conseil des
Cinq-Cents, mais le Directoire avait le droit de provo-
Siier par un messa^ l'action de la puissance législative,
'apiès la Constitution de l'an vm et sous le premier Em-
fùre, l'initiative des lois appartint au gouvernement. Soqs
e régime de la Charte de 1814, le roi seul proposait les
lois ; mais les Chambres pouvaient le suppUèr de fidre
présenter tel ou tel projet, et indiquer ce qu'il devait
contenir. D'après la Charte de 1830, la proposition des
lois appartint au roi, à la Chambre des pairs et à la
Chamm des députés. Sous la Constitution de 1&48, le
président de la République partagea l'initiative avec l' As-
semblée nationale; do%<tô9d»o70 elle fut réservée an
fouvemement.
' INJURE (du latin m, contre, et 3us, droit), expression
d'outrage ou de mépris adressée à autrui. Vinjure quo-
lifiée est celle qui a été proférée dans un lieu public t elle
est punie correctionneliement d'une amende de 16 fr. ^
500 fr. Si l'injure n'a pas été proférée publiquement, elle
se poursuit devant les tribunaux de simple police, et est
punie d'une amende de 1 à 5 fr. ; la contravention dis-
paraît même s'il y a eu provocation préalable {Code pénal,
art. 471). Les injures proférées à l'audience d'un tribu-
nal peuvent être Jugées immédiatement. L'injure contre
l'Empereur prend le nom d*offense (V. ce mot) ; celles
contre les grânds corps de l'État, les officiers ministériels
et les fonctionnaires publics se nomment outrages {V, ce
mot). En matière de Presse, l'injure est toute invective
ne renfermant l'imputation d'aucun fait déterminé, ce en
quoi elle diffère de la diffamation (V, ce mot),
INKRAN (Idiome). V. Agsa.
INONDATION, débordement des eaux qui sortent de
leur lit. Quand elle est l'effet d'une force majeure, per-
sonne n'en est responsable ; mais si elle résulte d^ou»
vrages pratiqués dans une propriété, celui qui a fait
exécuter ces ouvrages est responsable du dommage qu'il
a causé à autrui. Les propriétaires, fermiers ou autres,
jouissant de moulins, usines ou étangs, et qui, par l'élé-
vation du déversoir de leurs eaux au-dessus de la hau-
teur déterminée par l'autorité, ont produit une inondation,
sont passibles d'une amende de 50 fr. an moins (Code
p^MU, art 457); si cette inondation a fait quelques dé-
gradations, la peine est augmentée d'un emprisonnement
de 6 Jours à 1 mois.
IN PACE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bù^
graphie et d^ Histoire.'
INSAISISSABLE. Le Code de Procédure (art 580-502)
déclare insaisissables: 1® les provisions alimentaires;
2® les sommes et objets disponibles déclarés insaisis-
sables par le testateur; 3<^ les choses déclarées insaisis-
sables par la loi, comme le coucher des saisis, les habits
dont ia sont vêtus, les livres, instruments ou outils né-
cessaires à leur profession; une vache, deux chèvres ou
trois brebis, an choix du saisi ; 4^ les immeubles par des-
tination {V. ImiBUBLES). Les rentes sur l'État sont insai-
sissables ; les traitements et pensions dus par l'État ne
peuvent être saisis que pour une portion (F. Appointa-
MENTs). Ia solde des militaires inférieure à 600 fr. est
insaisissable; elle n'est saisissable que pour un 5' lors-
qu'elle dépasse cette somme.
INSCRIi^ON , en grec épigramma, épigraphe, en latin
inscriptio, tikUus, se dit de tout texte gravé ou peint sur
le marbre, la pierre ou les métaux. On joint aux mono-
ments de ce genre les papyrus de l'Egypte. La science
des inscriptions se nomme Vépigraphie, et celui qui s'en
occupe, épigraphiste. Les notions que fournissent les in-
scriptions peuvent être incomplètes; mais ces inscrip-
tions, génmlement contemporaines des événements et
des hommes dont elles ont perpétué la mémoire, expo-
sées pendant des siècles au milieu de populations qui
pouvaient les contredire si elles étaient mensongères,
ofErent ^un caractère d'authenticité et de certitude que
ne possèdent pas toujours les relations des historiens»
L'épigraphie rend des services importants à la linguis-
tique : cW par les inscriptions cunéiformes (F. ce mot)
que les savants de nos jours ont retrouvé l'idiome des
anciens habitants de la Babylonle, de laMédie, et de
la Perse; les inscriptions leur ont également permis de
reconstituer celui de la vieille Egypte (V. HiiaoGLTPHBs};
INS
1084
ÎNS
Dont leur derons enfin tout oe que nous savons des
langues parlées par les Lyciens, les Lybiens, les Êtrus-
Îaes, les Oaques, les anciens Scandinaves {V. Rorbs).
"utilité des études épigraphiques pour rhistoire an-
cienne est de toute évidence : les Marbres de Paros pour
la Grèce, les Fastes consulaires pour Rome, ont assuré
et complété la chronologie ; la Colonne de Dwlius a con-
servé le souvenir de la première victoire navale des Ro-
mains; le Monument d^Ancyre est une des sources les
plus précieuses de Thistoire de l*empereur Auguste. Les
inscriptions confirment le témoignage des historiens, ou
suppléent aux lacunes que le temps a faites dans leurs
ouvrages. La science du Droit romain a tiré des inscrip-
tions une foule de textes, de formules, avec leurs appii-
o^ns; enfin ce n*est que par les inscriptions recueil-
lies dans notre conquête de l'Algérie, que l'on a connu
toute rétendue des possessions romaines dans ce pays.
Malgré tant de faits, que nul ne conteste, les Bfodemes
font à peine usage des inscriptions pour eux-mêmes : ils
semblent croire, bien à tort, que l'imprimerie et la gra-
vure doivent tout éterniser. V, MaflTei, Ars crilica lapida^'
ria (dans le Supplément au Thésaurus de Biuratori);
Oudendorp, De veteribus inscriptùmihus et monument
torum usu, Leyde, 1745, in-4°; Zaccaria, Istituzione
antiquariO'laptaaria , Rome, 1770, in-8<^; Sportono,
Trattato dell* arte epigrafica, Savone, 4813, 2 vol. in-8<»;
Sainte-Croix, Essai sttr les inscriptions antiques, dans
le Magasin enqfclopédique, 2* année , t. V; Le Ras, Sur
l'utilité qu'on peut tirer de Vépigraphie pour Vintelli"
aence des auteurs anciens , Paris, 1829, in-4<*; Riseu-
hardt, 00 auctoritate et tuu inscripttonum m jure,
Helmstadt, 1740, in-4<*; Vunderlich, De tuu inscriptU)-
fMifn... in jure, 1750, in-4^
Dans l'antiquité même, sans parler des historiens qui,
comme Hérodote et Pausanias, ont inséré des inscriptions
dans leurs ouvrages, il y eut des collecteurs grecs d'épi-
grammes; mais aucun de leurs recueils, à l'exception de
YAntholoqie, ne nous est parvenu. Il ne parait pas que
les Romains se soient liviés à ce genre de recherches.
Mais, chez les modernes, les collections épigraphiques
sont nombreuses. Parmi les savants oui les ont formées,
nous citerons : Gyriaque Pizzicoli, dit Cyriaque d'An-
cône, Inscriptiones et epigrammata grcsca et latina,
Rome, 1747, in-fol. (l'auteur appartient à la fin du
ivi« siècle); Gruter, Inscriptiones antiques totius orbis
romani, Heidelbeig, 1602, In-fol., ouvrage réédité à
Amsterdam (1707, 4 vol. in-fol.) par Grsvius, qui y com-
prit les collections publiées par Reinesius (Leipzig,
1082), Spon (Lyon, 1685) et Fabretti (Rome, 1600);
Gori, Inscriptiones antiqtue m Etruriœ urbUms exstantes,
Florence, 1726, 3 vol. in-fol.; Marquard Gude, Antiques
inscriptiones, Loeuwarden, 1731, in-fol.; Pococke et
Milles, Inscr^tiones grescœ et UUinœ, Londres, 1752,
In-fol., Doni, Inscriptiones antiques , Florence, 1781,
In-foi. ; Blaffei , Galtiœ antiquiteites selectœ , Vérone ,
1731, in-fol., et Muséum Veronense, ibid., 1749, in-fol.;
Muratori , rfovus Thésaurus veterum inscriptionum ,
Milan, 1737, 4 vol. in-fol.; Passionei, Iscrizioni antiche
disposte per ordine di varie classe, Lucques, 1760, in-fol.;
Ghandler, Inscriptiones antiques, Oxford, 1774, in-fol.;
Donati, Ad wwum Thesaurum MurcUorii supplément
tiffn . Lucques^ 1765-75, 2 vol. in-foL; Guasco , Musei
CapÙolini antujuœ inscriptiones , Rome, 1775, 3 vol.
in-fol.; Torremuzza, SiciluB et objacentium insularum
veterum inscriptionum nova collectio^ Païenne, 1784, In-
fol.; Biagi, Monumenta grœca et latina, Rome, 1787,
in-4*; Boeckh et Franx, Corpus inscriptionum gresca-
rum, Berlin, 1828-51, 3 vol.; Orelli, Inscriptùmwm loti"
nar%mi selectarum amplissUna coUectio, Zurich, 1828,
S vol. gr. in-8^, et supplément, par Henzen, Zurich,
1856, gr. in-8<*; Osann, Sylloge inscriptionum, léna,
1832; Welcker, Sylloge eptgrammeUum, Bonn, 1828;
Franz, Elementa Epigraphices grœcœ, Berlin, 1841;
Baille, Inscriptions asieUiques^ Londres, 1844-46, 2 vol.
in-8*; De Wal, Mythologiœ septentrUmeUis monumenta
epigraphka latina, TJtrecht, 1847, in-S*» ; L. Renier, In-
scriptions romaines de l'Algérie, Paris, 1855 et suiv.
« vol. in-4o.
INSCRIPTION, en termes de Droit et d'Administration ,
enregistrement d'un nom, d'une qualité, d'un droit ou de
Îuelque autre chose sur des registres établis à cet effet.
In étudiant prend ses inscriptions en se faisant inscrire,
BU commencement de chaque trimestre, sur le registre
de la Faculté dans laquelle il étudie pour obtenir des
grades. Il faut 12 inscriptions pour être admis à l'examen
as licencié en Droit, et 16 pour le doctorat, soit en
Droit» soit en médecine. Les inscriptions de Droit eoAtSBt
chacune 15 fr.; celles de médecine, 50 lîr.; celles des Flih
cultes de Lettres, 3 fr.
mscaiPTioN DB FADX , scto psT lequol on soutient en
justice qu'une pièce produite dans un procès est faune
ou falsifiée. Les tribunaux de commerce et les Juges de
paix ne sont pas compétents pour admettre ou rejeter les
inscriptions de faux. La Cour de cassation peut les ad-
mettre ou les rejeter; une fois admises, elle ne peut
statuer sur elles, et doit renvoyer aux tribunaux oi^
dinaires.
INSCRIPTION DB asNTB, titre délivré par l'État et inscrit
sur le Grand-Livre de la dette publique, qui constate la
propriété d'une rente perpétuelle due par le Trésor. Ce
titre peut être nominatif ou au porteur. H est insaisisp
sable. En cas de perte d'un titre, le propriétaire doit en
faire la déclaration devant le maire de la localité, en se
faisant accompagner de deux témoins qui attestent son
individualité : le remplacement du titre a lieu dans le
semestre qui suit celui de la déclaration.
INSCBIPTION FONéRAlBB. F. ClHBTlèSE.
iNscaiPTioN HYPomécAiRB. F. Htpothèqdb.
iNscaiPTiON MAaiTiME. K. co mot dans notre Dtctum'
noire de Biographie et d^Histoirâ.
INSCRIPTIONS ET BEU.ES - LETTRES (Académie
des ). Établie t>ar Golbert en 1663, elle reçut de Louis XIV
le nom de Petite Académie, soit narce qu'elle ne comprit
d'abord que quatre membres (Charpentier, Quinault,
l'abbé Tallemant, et Félibien le père), pris dans TAcadé*
mie française, soit à cause du peu d'importance de ses pre-
miers travaux, qui se bornaient, en effet, aux inscriptions
pour les monuments publics, aux dessins des tapisseries
du roi , aux devises des jetons du Trésor, à l'examen des
projets d'embellissement de Versailles, etc. On la char-
gea ensuite de retracer l'histoire de Louis XIV à l'aide de
médailles, et, sous le ministère de Pontchartrain, elle
reçut le nom d'Académie des Inscr^tions et des M^
dailles. Elle était arrivée progressivement à 10 membres,
lorsqu'un règlement du 16 juillet 1701 la composa de
40 membres, dont 10 vétérans, 10 honoraires, 10 pen^
sUmnaires et 10 élèves ; un local lui fut assigné an Louvre
pour ses séances, qui s'étaient tenues primitivement chez
Colbert, puis chez Louvois; on lui accorda des armoiries
et des jetons de prince. Des lettres patentes de février
1712 confirmèrent son établissement. En 1715, on }
admit pour la première fois, comme honoraires, trois sa-
vants étrangers. Un arrêt du Conseil d'État, du 4 Jan viei
1716, donna à la Société le nom assez vsgue d'Aôtdémie
des Inscriptions et Belles-Lettres, supprima la classe des
élèves, et porta à 20 le nombre des associés; bientôt
après, on rédidsit le nombre des vétérans. Plus tard,
l'Académie fût augmentée d'une classe d'Académiciens
libres, qu'on divisa depuis en résidents et non^résidmUs,
et le nombre des pensionnaires fut porté à 20. Un senti*
ment de Jalousie avait fait décider que les membres qui
se présenteraient à l'Académie française seraient exclus
de la compagnie; Louis XV annula cette délibération. Un
décret de la Convention, en date du 8 août 1703, sup-
prima l'Académie des Inscriptions, ainsi que toutes les
autres : lors de la création de l'Institut en 1705, elle fut
comprise dans la 2* classe, dite des Sciences morales et
politiques; sous le Consulat, en 1803, elle devint la
3* classe, dite d'Histoire et de littérature anciennes, et
se composa de 40 membres (pensionnés à raison de
1,500 fr. par an), de 8 associés étrangers, et de 60 corre^
fondants. En vertu de Tordonnance royale du 21 mars
816, elle devint 2* classe de l'Institut, reprit son ancien
titre, et conserva sa même orranisation, sauf la création
de 10 places d'académiciens libres. En 1823, le nombre
des membres pensionnaires fut réduit à 30« pour au|^
menter leur traitement: mais, en 1831, le chiffre de^
fut rétabli. Depuis 1717, l'Académie des Inscriptions et
Belles-Lettres publie des Hémoires tré»-estimâ sur les
matières d'érudition , d'antiquités nationales et étran-
gères, de langues anciennes et orientales. Sa collection se
compose de 51 vol. in-4% dits ancienne série, 1701-1 844,
et de 25 vol. in-4*^, dits nouvelle série, dont le premier
est de 1800. Une Table générale et méthodùiue a été pu-
bliée par de l'Averdy, en 1701, et revue, corrigée, aug*
mentée de l'index des mémoires depuis l'or^ne de I* Aca-
démie jusques et y compris 1850, par MM. de Rorière et
Chàtel, Paris, 1856, 1 vol. in-4*. H y a une édic in-18
de ces Mémoires, La Haye et Paris, 1719-81, mais qui
ne va oue jusqu'à 1776, et ne représente que 41 voL
in-4*. L Académie est aujourd'hui divisée en commissions
qui dirigent des publications importantes, telles que
INS
1085
INS
NaUces et Extraits des manuscrits, les Historietu des
GauUs et de la France, les Historiens des Croisades,
VHistoire Uttirairê de la France, etc. Elle décerne des
prix chaque année. B.
INSERTDM OPU8. F. Appakbiu
INSIGNE, qualification donnée autrefois à certaines
églises collégiales, supérieures aux autres par le nombre
des eodésiastîques qui les composaient ou par la gran-
deur de leurs revenus. Ces élises sTaient dans les pro-
cessions et les cérémonies une bannière spMale comme
marque de leur insignité, et leur chapitre prenait le pas
Kir les autres.
INSIGNES , signes extérieurs de puissance et de di-
pité. De tout temps, les hommes placés à la tète de
lenrs semblables ont porté des marques çlus ou moins
apparentes de leur puissance. Ghex les nations de l'Asie,
le souverain 'se distingue de ses sujets surtout par la
splendeur de ses vêtements. Les insignes royaux chez les
Romains étaient la couronne d*or, le siège divoire, et les
douze lictaors que les consuls conservèrent. Ceux des
empereurs d^Allemagne étaient la couronne d*or, le sceptre
et la boule impériale, Fépée de Charlemagne, celle de
S' Mauricet les éperons d'or, la dalmatique, et de riches
1h]'ouz, dont une partie se trouve encore dans le Trésor
d'Aix-la-Chapelle. Les chevaliers du moyen âge avaient
le casque et Técu. Les évoques portent le paltium, la
mitre, la crosse et l'anneau. Les souverains actuels ont
la couronne, le sceptre, la main de Justice, l'épée, etc.;
les maréchaux de France, le bâton ; les nachas turcs,
trois queues de cheval; les mandarins chinois, des plumes
de paon, etc. Les costumes, décorations, médailles, etc.,
sont des insignes.
INSINUATION. C'était, chez les Romains, le dépôt,
dans les archives publiques, des actes que Ton voulait
rendre authentiqu». Dans l'ancien Droit français, Vlnsi-
muatian était ce que nous appelons enregistrement et
transcription (V, ces mots). En Droit canon, Vlnstnaa-
tion était la déclaration de leurs noms et surnoms que
les gradués devaient faire tous les ans h leurs collateurs.
INSOLVABILITÉ (du latin tn négatif, et solvere,
payer), état de celui qui ne peut payer ses dettes. Toute
personne insolvable et poursuivie pour dettes est déclarée
en faillite, si elle est commerçante, et en déconfiture, si
•Ue ne Test pas (K Failutb, D^confiturb), Les per-
sonnes notoirement insolvables ne peuvent devenir adju-
dicataires {Code de Procédure, art, li3). Les cohéritiers
sont tenus de payer la part de celui d entre eux qui est
insolvable, lorsqu'il s'agit d'une dette hypothécaire ( Code
Napol.,, art. 876). H en est de môme dans le cas ou l'un
des codébiteurs d'une dette solidaire se trouve insol-
vable {Ibid., art. 1214). Si un mari était insolvable lors-
que le père a constitué une dot à sa fille, celle-ci n'est
tenue de rapporter à la succession du père que l'action
qu'elle a contre celle de son mari ; si le mari n'est de-
venu insolvable que depuis le mariage, la perte de la
dot tombe uniquement sur la femme ( art. 1573 ).
INSOUHISSlON, état du Jeune soldat qui n'a pas ré-
pondu à l'appel sous les drapeaux. Celui qui a reçu un
ordre de route et n'est pas arrivé à sa destination doit
être, après un mois de délai, traduit devant un Conseil
de guerre, et, hors le cas de force majeure, puni, comme
insoumis, d'un emprisonnement d'un mois à un an. Le
temps pendant lequel il a été insoumis ne peut compter
en déduction des années de service exigées.
INSPECTEUR (du latin inspieere^ examiner), fonc-
tionnaire ayant pour mission de surveiller, d'examiner
les actes de fonctionnaires subalternes, et d'en rendre
compte à une autorité supérieure. H y a des inspecteurs
des finances, de l'enregistrement et des domaines, des
forets, des postes, des contributions directes et indi-
rectes, de Tagriculture, de la navigation, de la marine,
des ponts et chaussées, des mines, des prisons, des mai-
sons centrales de force et de correction, des établisse-
ments de bienfaisance, du travail des enfants dans les
manufactures, des poids et mesures, des poudres et sal-
pêtres, des tabacs, des théâtres, des fortifications, des
barss, des écoles vétérinaires et des bergeries impériales,
des eaux minérales, de la voirie, des bAtiments civils et
monuments publics, des beaux-arts, des monuments his-
toriques et antiquités nationales, des halles et marchés,
des chemins de fer, etc. Les inspecteurs généraux et spé-
cbux de police, créés par décret du 30 Janv. 1852, ont été
tappriméi par décret du 5 mars 1853. — L'Université a
des mspecteurs généraux de renseignement supérieur
ri2.000 ir. de trâiement), de l'enseignement secondaire
(10^000 £r.), et de l'enseignement primaire (8,000 fr.\
des inspecteurs d'académie (6,000, 5,500 et 5,000 fir.), «t
des inspecteurs de l'instruction priîmaire (trois classes
à 2,400 fr., 2,000 fir. et 1,000 fir. de traitement). — Dans
l'armée, il y>eut, au temps du Consulat et du raemier
Empire, des Inspecteurs aux revues, chargés de l'em-
brigadement, de l'incorporation, de la levée et du licen-
ciement des hommes, de l'organisation, de la solde et de
la comptabilité des corps, de la tenue des contrôles et des
revues; ils ont été remplacés par les Intendants mUi-^
taires. Aujourd'hui, les inspections des troupes sont
faites chaque année par des sénéraux de division, dont U
mission est toujours temporaire.
INSPIRATION , en termes de Théologie , état des
hommes qui agissent sous l'influence de l'Esprit divin ,
par une communication immédiate et surnaturelle avec
Dieu. Mofse, les prophètes, les apôtres, ont été inspirés
de Dieu. Tous les fondateurs de religions ont prétendu
avoir été instruits immédiatement par la divinité. Une
idée universellement répandue dans l'antiquité païenne,
c'est que les sages, les poètes, les artistes, tenaient de
quelque dieu le don de mieux parler que leurs sem-
blables : dans la littérature et dans les beaux-arts, être in-
spiré, c'est inventer, disposer et exécuter une osuvre en
quelmie sorte tout d'un trait , c'est trouver d'abondance
les idées, les images, les expressions, les mouvements
magnifiques. Cette inspiration, essentielle au génie, est
un don de nature; on la reçoit, mais on ne l'acquiert pas.
INSPRUCK (Cathédrale d'). Cette église, dite des Fran^
ciscains, ou de la Cour, ou de la S^^rotx, fut con-
struite de 1553 à 1563 par Ferdinand I**". Si elle n'a rien
de bien remarquable au point de vue architectural, les
œuvres d'art qu'elle renferme en font une des églises les
beau, qui ne contient pas les restes du mort, est entouré
d'une grille de fer, et repose sur trois degrés de marbre.
H est haut de 2 met., long de 10, surmonté d'une statue
en bronze de Maximilien agenouillé, et orné aux angles
des statues éndement en bronze de la Justice, de la Pru-
dence, de la Force, et de la Modération, fondues par Lu-
dovico délia Duca, artiste sicilien. Les quatre pans
latéraux sont décorés de 24 bas-reliefs en marbre de
Carrare, que séparent 16 pilastres de marbre nohr; 20
de ces bas-reliefs ont été exécutés par Alexandre Colin ,
de Ifalines , et les 4 autres par les frères Bemhard et
Arnold Abel, de Cologne. Ils représentent les princi-
paux événements de la vie de Maximilien, et l'exécution
en est admirable : les nombreux personnages qu'ils con-
tiennent, et dont les tètes sont quelquefois des portraits,
sont très-bien groupés , et les vues ues villes et des chA-
teaux sont rendues avec un rare bonheur. Autour de ce
magnifique mausolée se tiennent, comme pour veiller
sur le monarque endormi, 28 statues en bronze , plus
grandes que nature, représentant des hommes et des
femmes de maisons princières, surtout de la maison de
Habsbourg, et quelques héros qui excitaient l'admiration
de Maximilien (Cloris , Théodoric le Grand, le roi Ar-
thur, Godefiroi de Bouillon ). Les personnages des bas-
relieb et les statues portent les costumes et les armes
du temps, ce qui leur donne une grande valeur histo-
rique. Indépendamment du tombeau de Maximilien I*', la
cathédrale dlnspruck contient : à eauche, le monument
et la statue d'André Hofer, par Schaller; à droite, la
Chapelle d'argent, ainsi nommée d'une Vierge en argent
et d'un bas-relief de même métal qui en ornent l'autel ,
et contenant, entre les tombeaux de l'archiduc Ferdinand
et de sa femme Philippine , 23 statuettes de bronze de
saints, princes ou nobles, fondues, comme les grandes
statues de la nef, de 1563 à 1583, par les frères Etienne
et Melchior Godl, Grégoire Lceffler et Hans Landen-
streich, et qui appartenaient aussi Jadis au ton^beau de
liaximilien.
INSTALLATION (du latin in, dans, et stAilum, siège,
chaire ), action de placer quelau'un sur le siège qu'il doit
occuper, de le mettre solennellement en poes^sion d'une
place, d'un emploi, d'une dignité.
INSTANCE ( du latin store in judicio, être en Juge-
ment), action intentée ou poursuite portée devant un
tribunal quelconque. On nomme Demande introductive
d^instance celle qui saisit le Juge d'une cause. Une in-
stance peut être uéclarée périmée, si le demandeur laisse
s'écouler trois années sans faire aucun acte de procédure;
mais tant que la péremption n'aura pas été réclamée, le
demandeur peut raviver son action en assignant l'adver-
saire en reprise d^tnstancs. L'instance est prescrne par
INS
1086
INS
M ans. — La mot tn$tamo$ dérigne ansal la Jaridlctloii.
mn en prmmikw kutance, c*est plaider devant le tri-
banal du premier depré : les trihanaux d¥Us sont dits d$
pnmière mstane$, meo qu'ils prononcent souvent par
appel sur les décisions de la Justlee de paix. Dans les
BÔatièrea administratives, le Conseil de préfecture est Ju^
de i** instance reladTement an Conseil d'État. La Juri-
diction du second degré est la seconde mstancê; mais, au
Ben de cette eiqireasion, on emploie le mot appri.
msTÉMca M CABoiBr. V, Cauiht.
mSTOSIGT, en latin mstmctus (du grec mutîMÔ, piquer,
eicIftBr à rintérieur ), principe d'action que l'on trouve
ehes Ffaomme, ckes raBimal , et jusqu'à un certain point
4ans la plante, et dont les diflérentea yariétés détennl-
aant cbes les êtres, suivant leur nature et leurs besoins,
et pour la satisfaction de ces demiera, des mouvements
auxquels IHnlelligence et la volonté sont éCrangtoea; mou-
f ements proprement dits, lorsqu'il s'agit de beaoins phy-
siques i développements de l'activité morale, lorsque e^est
TAme qui est en cause.
Des végétaux, qui, pour se développer, ont besoin
d'air et de lumière, sont placés dans une cave où l'air et
la lumière ne pénétrait que par un soupirail; sils sent
d'ailleurs de nature à ne pas succomber immédiatement,
on verra leurs tiges s'allonger dans la direction du jour,
^oili, dans un être dépourvu d'intelligence et de volonté,
un mouvement dont le but évident est de replacer la
plante dans les conditions les plus favorables à la satis-
Mctîon d'un besoin de sa nature, n en est de même du
mouvement des radnee pour chercher le sol qui leur est
le plus favorable et v prendre la diiectlon am leur con-
vient le mieux, et de la facilité avec laquelle certaines
fleurs tournent sur leurs tiges pour suivre pendant toute
la loumée le mouvement du soleil. Il en est de même,
pourrait-on dire, de toutes les fonctions de l'existence vé-
It^tale; seulement noua remarquona mieux celles qui
téxécnient dans des circonstances exceptionnelles et
anomales.
Dans l'animal, l'instinct se dessine bien plus nette-
ment : il produit, chez les espèces inférieures, où l'intel-
ligenoe et, par suite, la perfectibilité font le plus com-
plètement défaut, les merveilles, tant de fois décrites,
des ruches, des fourmilières, etc. Tout en présentant une
apparence moins mécanique, l'instinct n'est ni moins
q>ontané ni moins sur diez les espèces supérieures. Les
besoins de l'alimentation, de la conservation , de la re-
Ïiroduction, de l'éducation de la famille, font exécuter k
'animal une foule d'actes qui ne sont, bien évidemment,
ni réfléchis, ni voulus; de là les émigrations périodiques
ou accidentelles, la construction des mds, des terriers, les
mille artifices, les mille ruses (si l'on peut appoler ainsi
ce dont Tintelligence est absente) que les animaux em-
ploient pour assurer leur sécurité, leur subsistance et
celle de leurs pedts. Ainsi, les besoins de la nature ani-
male se manifestent par autant d'impulsions aveuglea et
spontanées , et ces impulsions sont les instincts des
animaux.
Des principes analoguea existent aussi chex l'homme :
Fenfant <{ui va chercher au sein de sa nourrice la nour-
riture qui lui convient ne met , dans cet acte, ni plus de
réflexion^ ni plus de volonté que l'agneau. Plus tard, lors-
au'au nulieu des occupations, des peines et des plaisirs
e la vie, la faim vient impérieusement rappeler à
rhomme la nécessité de satisfaire le besoin naturel d'ali-
mentation, sans doute l'instinct n*aj;it plus seul; il sub-
siste cependant, et se laisse assex facilement distinguer
de la connaissance, acquise par nous, de la nécessité de
prendre des aliments, et de la volonté d'en prendre.
Ainsi se manifestent chez l'homme tous les besoins pu-
rement physiques. Mais l'homme ne vit pas seulement
de la vie animale, et il y a lieu de se demander si c'est
aussi par des instincts que se manifestent primitivement
chez lui les besoins de la vie intellectuelle et morale;
besoins réels, car l'esprit ne peut pas pins se passer de
connaissances ou son cœur d'aff'eetions que son corps
d'aliments. Or, sur ce point les auteurs diffèrent d'avis,
dans la forme peut-être plus que dans le fond, mais
isses enfin pour que la ouestion mérite d'être examinée.
Cest abuser des mots, disent les uns, que d'appliquer le
nom d'instinct à ces affections spontanément ressenties,
mais acceptées par l'âme en toute conscience et en toute
liberté. Hais esUil bien certain que ce soit en toute con-
sdenoe et en toute liberté? Qu'y a-t-il de réfléchi et de
volontaire dans l'amour qu'une jeune mère éprouve pour
son enfant nouveau-né? Ce n'est pas un devoir qu'elle
rsmplit; c'est un besoin de son coMir qu'elle sattsfait*
c'est une impolsion à laquelle elle cède. Que, chei elle,
ce besoin, œtte impuldon revêtent des caractères plus
touchants et plus nobles que ches l'animal, parce que,
après tout, il s'agit d'un être en qui lea fhonltéa marales
ne sont pas séparables des tendances primitives et ne
tardent paa à les modifier et à en changer la physio-
nomie, cela est vrai t mais, au fond, les premiers mou-
vements de l'amour maternel sont chez la femme ce
qu'ils sont chez la femelle de tout animal, le réaultat d'on
instinct. Affirmer qu'il en est ainsi , ce n'est rien ra-
baisser, rien diminuer ; car c'est rspporter à la Providence
la première impulsion donnée à toutes nos facultés, à
l'intelligenoe, à la volonté elle-même. La personnalité et
la liberté de l'homme n'en souffrent d'ailleurs aucune
atteinte; car cet état est éminemment transitoire, et
l'homme, saisissant, à mesure qu'il se développe, la di-
rection de ses facultés, substitue en lui-même le règne
de la raison et de la liberté à celui dea instincts. Il con-
vient donc d'étendre le nom d'instinct ansri bien aux
tendances primitives de l'intelligence et du coeur qu'aux
impulsions de la vie phjrrique et animale, et noua oonai-
dérona comme une classifiôition exacte des instincts celle
qu'en ont ftute lea psvchologwBS de l'école écossaise, Reid
et Dugald Stewart : 1* AppmU, reladfii an corps, oom-
muns a l'homme et aux animaux; 2^ Disin ou penchants
de l'intelligence; 3* AffectUm$, principes sociaux, impli-
ouant une certaine expansion de la bienveillance à l'é^uti
des êtres qui en sont l'objet. V. nos articles Appert,
Désia, Affectioii). V. l'art. Iiumcrdu Dictionnain dn
tcimces phUosopniques, t, III, Paria, 4847; Bossuet,
Connaissatuie de Dieu et de arirmime, S^ partie; Fénelon,
Existence de Dieu, 1" partie; Reid, Essais smr Us far
cultes actives ; Dugald Stewart, Esquisses de pkUosopkië
morale, et Philosophie des faàdtés actives et morales;
Ad. Garnier, Précis ^un cours de psya^kxAooie: Réanmor,
Mémoires pour seroir à Vhistoire ntUurem des insectes;
Hilne Edwards, Cours de zoologie élémentaire. De Vin-
telligence et de V instinct; qucSques pagea charmantes
de Chateaubriand, Génie du christianisme, 1" partie,
liv. V. B— B.
INSITTA. V, ce mot dans notre Dtctionnotrs de 0to-
graphie et d'Histoire.
INSTITUT (du latin tnstitutwn, établissement), mot
qui, dans son acception première, signifia règle, consH"
tution, particulièrement en parlant de certains ordres
monastiques, et qui s'est ensuite appliqué à toute soctélé
d'hommes suivant une même règle.
msTrnrr agsoiiomiqob. V. Agriculturb (Écoles d').
IRSTRUT DB GOaRBSPONDANCB ARCHfoLOGIQDB , Société
libre d'archéologues, d'antiquaires, et d'amateurs de tous
les pays, qui s'occupe de recherohes et d'études sur l'an-
tiquité. Elle siège à Rome : un comité de 6 membres et
deux secrétaires président à ses travaux. Chaque année
elle publie 1 vol. m-8^ d Annales , composé de mémoirea
et de dissertations, avec un atlas in-fol. de planches
d'objets inédits; et en outre, un Bulletin mensuel, pour
les procès-verbaux de ses séances, les nouvelles di-
verses, et les découvertes arehéologiques les plus ré-
centes. Ces deux recueils ont paru régiilièrement depuis
la fondation de la société. Les pièces en sont écrites en
italien , et quelquefois en latin ou en français. Jamais en
d'autres langues. — Une colonie d'antiquaires prussiens,
Gerhard, Bunsen, PanoCka, Millengen, auxquels se Joignit
le duc de Luynes, fonda l'Institut de correspondance ar-
chéologique, en 4829. Le roi de Prusse, Guillaume IV,
alors prince royal, fut et est demeuré le protecteur de
cette Société, qui tient ses séances au mont Capitolin ,
dans une belle salle située derrière le palais des Conser-
vateurs. C. D — ¥.
msTiTirr db psarcb, corps institué par l'art. 298 de la
Constitution de l'an m (1794), sous le nom d*Institut na-
tional, pour remplacer les anciennes Académies sup-
primées par la Convention en 1793. Il devait être chargé
« de recueillir les découvertes, de perfectionner les arts
et les sciences, n La loi sur l'instruction publique, dé-
crétée le 3 brumaire an iv (25 oct. 1795), décida crue l'In-
stitut serait composé de 144 membres résidant à Paris,
d'un pareil nomnre d'associés dans les départements, et
de 24 associés étrangers; qu'il formerait trois classes :
l** Sciences physûtues et mathématiques, comprenam
10 sections (60 membres résidants, et 60 dans les dépar-
tements); 2^ Sciences morales et politique, comprenant
6 sections (36 membres résidants, et 36 dans les dépar-
tements;; 3<* Littérature et BeauX'Arts, comprenant
8 sections (48 membres résidants, 48 dans les départe-
ments). Aucun membre ne pouvait appartenir à deux
INS
10S7
INS
Mettons dMèrantM; ma!» chacun poaYait aaslstar aax
léiacw «I. concourir aux traTaux des autres classes. Les
NaMns éoBicliMea étaient temporaires. Pour la pre-
mièfe formation , le Pireolsiio (M oof. 1796) nomma
48 membres, qoi élorent les 06 autres, et lea 144
rfonis choisirent les associés. Une fois organisé, rinstitut
poonrat senl au places tacantes, sur une liste au moins
triple, présentée par la classe où il y avait une vacance,
n fat installé an Louvre. — En 1803, la classe des Sciences
morales et politiques fut supprimée, et l'Institut fut par-
tagé en 4 classes, Scimces phyiiqws $t mathémaHoun,
Ijimgm tt litténùure françcùsn. Histoire 9t liUéraiwr$
OHcmuèes, B€aiua>'Arts, A la 1** on ajouta une section do
SéograplMe et de navigation , ce qui porta le nombre des
membrea réridants à o3 ; la 3* fût composée de 40 mem-
bres; !• 3*, d'un pareil nombre, put avoir 8 associés
ètranisani et 60 correspondants; la 4*, divisée en 5 seo-
tioDs, comprit S8 membres résidants, 8 associés étran-
gars, et 38 correspondants. Chaque classe eut un sécré-
tera perpétuel. La traitement des membres de rinstitut
était de 1,500 tr. En 1806, YlnstUtU national prit,
dans son Annuaire, le titre d'Institut de Fnmce, et
reçut, dans TAlmanacb impérial, celui d'Institut des
Sei9mcê$, Lettres et Arts. En 1811. il devint Institut tm-
périai, et, en 1814, Institut roycU. En 1816, l'Institut,
conservé avec son titre, cessa d'exister comme corps or-
ganisé tel que l'avaient compris ses fondateurs : le lien
qui existait entre les classes fut rompu, et leurs dénomi-
aaiions fiirent rem|>lacées par les noms des anciennes
Académies, Académie francaisef Académie des Inscrip-
tions et BeUeS' Lettres, Académie des Beaux^Arts, et
^cad^ts dês SdMices. Des membres libres remplacèrent
les anciens Académiciens honoraires. Ce fut seulement
en 1833 qu'on rétablit V Académie des Sciences morales
et politiques. Les H&noires de l'Institut fusqu'en 1816
forment 25 vol. in-4<*, dont 14 pour les Sciences, 5 pour
tes Sciences morales, 5 pour la Littérature et les Beaux-
Arts, 3 pour le système métrique, et 2 pour les savants
étrangers. Les cinq classes de lînstltnt ont tenu an-
nuellement one séance publique (au 15 août. Jour de la
S^Napoléon, d'après un décret du 14 avril 1855), où
l'on faisait des lectures et décernait des prix. B.
mmruT db fsance (Palais de V). V, notre Otcttonnotr»
ds Biographie et d*Htstoire,
msirroT d'égtptb, corps formé par le général Bona-
parte an Caire, en 1798, avec les savants et les artistes
qu'il avait amenés de France. Les uns devaient s'occuper
à bîre une description exacte de TÉgypte, et à en dresser
la carte; les autres étaient chargés d'en étudier les
ruines, et de fournir de nouvelles lumières à l'histoire :
ceux-ci avaient à examiner les productions, à faire les
observations utiles à la physique, à l'astronomie, à l'his-
toire natarelle; ceux-là devaient rechercher les améliora-
tions qu'on pouvait iq>porter à l'existence des habitants
par é» machines, des canaux, des travaux sur le Nil.
Monge foi le président de l'Institut d'Egypte. La Décade
égyptienne , imprimée au Caire en 3 vol. in-4<*, contient
les prindpanx Mémoires lus dans les séances. En 1803,
Bonaparte ordonna l'exécution d'un ouvra^ renfermant
toutes les observations de l'Institut; il est intitulé : Des-
eription de l'Egypte ou Recueil des observations qui ont
été faites en Egypte pendant l'expédition de Varmée fran-
çaise, Paris, impr. impériale, 1809-13, et impr. royale,
181&-28s 10 vol. in-fol. de texte, avec 31 pi., et 12 vol.
in-lbl., atlas de 894 pi. — Le même ouvrage, 2^ édit.,
PariB, Panckoucke, 1820-30, 24 tomes en 26 vol. in-8% et
12 vol. in-fol. de planches.
msirruT des provinces. V, GoNCRte.
oiSTinJT msTORiQUB, société savante fondée h Paris
OB là3 par M. de Honglave et plusieurs autres per-
et (TBistoire,
INSTITUTEUH, mot qui, dans sa plus grande extension,
désigne quiconoue s'applique à l'enseignement ou tient
une maison d'éaucation. Un décret de la Convention, du
mois de décembre 1792 , a appliané aux maîtres d'école,
ehaargés de Tinstruction du premier degré ou instruction
wfnnire, le titre officiel d'Instituteurs primaires. V,
Bcous paniAmBS, dans notre Dictionnaire de Biogror
pk»e et S Histoire,
INSTITUTION (du latin statuere tn, établir sur), toute
dioee fondée dans un intérêt public. Les Caisses d'épar-
gne, la Banque, l'Université, etc., sont des institutions,
nsimmoii, maison particulière d'instruction secon-
3
daire. Pour qu'elle reçût ce titre, il fallait autrefois qoa
le chef fût bachelier es lettres et bachelier es sciences,
tandis que le baccalauréat es lettres suffisait pour être
maitre de pension : cette distinction n'a pas été main-
tenue par 1» loi du 15 mars 1850. Les institutions pe
pouvaient élever leur enseignement au-dessus des huma-
nités, les ^usions au-dessus des classes de graminalft •
dans les villes où existait un lycée ou un collège, éOm
étaient tenues d'en faire suivre les cours par leurs âèvea»
Une institution était dite deplein exercice, quand elle don-
nait le même enseignement que les lycées et les collégeai
et conduisait les élèves an terme des études classiques s
mais on n'autorisait d'établissements de ce genre que
dans les localités dépourvues de lycées ou de collèges.
Les chefs d'institution étaient soumis à un droit annuel
de 150 fr. à Paris, 100 fr. dans les départements; les
maîtres de pension, à un droit de 75 fr. et 50 fr. : de plus,
ils devaient la rétribution universitaire, fixée au 20* du
prix de la pension de chaque élève. Toute institution
peut aujourd'hui se suffire à elle-même, ou bien envoyer
ses élèves au lycée ou au collège de l'endroit, faire dors
la répétition de toutes les classes, et borner les leçons de
rintérieur aux matières qui ne font pas partie de l'en-
seignement public. On peut même ne s'y occuper que
de ce oui convient particulièrement aux professions in-
dustrielles. D'après l» loi du 15 mars 1850, pour avoir le
droit de tenir un établissement d'instruction secondaire,
il faut être âgé de 25 ans au moins , être bachelier es
lettres ou es sciences, ou pourvu d'un brevet de capacité
que délivre dans chaque département une commission
instituée à cet effet, et avoir fait un stage d'au moins
5 ans comme professeur ou surveillant dans un établisse-
ment public ou libre. Ld ministre de l'Instruction pu-
blique peut accorder dispense du stage. L'inspecteur
d'académie a droit de surveillance sur les institutions,
seulement en ce qui concerne l'hygiène et la salubrité,
et pour s'assurer qu'on n'enseigne rien de contraire à la
morale, à la constitution et aux lois. Le chef d'institution
ui se refuserait à ces inspections encourrait une amende
e 100 fr. à 1,000 fr., et, pour U récidive, de 500 à
3,000 fr. Deux condamnations dans une même année en-
traînent la fermeture de l'établissement. Pour inconduite,
immoralité, etc., tout chef d'institution peut être traduit
devant le Conseil académique, et encourir la réprimande,
la censure, l'interdiction temporaire ou définitive, sans
préjudice des peines encourues pour crimes et délits pré-
vus par le Code pénal. La loi de 1850 détermine les inca-
pacités qui empêchent de tenir un établissement d'in-
struction publique. B.
iNSTiTcnoN CANONIQUE, missiou que les supérieurs ec-
clésiastiques donnent à ceux qui sont pourvus de bénéfices
ou de titres, en leur accordant le visa ou les provisions.
En France, où il n'y a plus de bénéfices , tout ecclésias-
tique nommé évêque par le gouvernement doit obtenir
l'institution du pape (Loi du 18 germinal an x). Les évê-
ques nomment les curés, mais ne leur confèrent pas
l'institution avant que la nomination ait été agréée par le
chef de l'État.
INSTITUTION CONTRACTUELLE , donatiou faite par contrat
de mariage aux époux et aux enfants qui naîtront d'eux,
des biens existant au moment du décès du donateur. Elle
est irrévocable comme la donation entre-vifs.
iNSTrruTiON d'héritier, disposition par laquelle, dans
nos anciens pays de Droit écrit, un testateur nommait
son héritier. Elle constituait, comme dans le Droit ro-
main, l'essence du testament, qui. sans elle, était frappé
de nullité. Dans les pays de Droit coutumier, l'Institu-
tion d'héritier n'était nas nécessaire pour la validité du
testament. D'après le CbdsiVispoi^on; toute personne peut
disposer par testament, soit sous le titre d'institution
d'héritier, soit sous le titre de legs, soit sous toute autre
dénomination propre à manifester sa volonté.
INSTRUCTEUR, officier ou sous-officier champé d'ensei-
gner aux soldats l'exerdce et le maniement des armes.
INSTRUCTION (du latin struere in^ construire inté-
rieurement ), mot qui s'entend du savoir acquis par l'é-
tude, de la culture de l'esprit. Vinstruction diffère de
Véducation, en ce que celle-ci emporte l'idée d'un bon
usage de celle-là : on peut avoir de l'instruction et une
mauvaise éducation.
m STROCTioN , petite allocution religieuse. Quand elle
est faite par demandes et par réponses, elle prend le nom
de catéchisme,
msTRocTioN CRimmLLB, ensemble des procédures et
formalité qui précèdent, accompagnent et suivent les
jugements criminels et correctionnds. Cest le Ministère
INS
IQit
INS
public et le jug9 é^instmction (K. ces mots) qai en ont
été chargés par la loi. Ils constatent le corps an délit et
tous les vestiges que le crime a laissés ; ils recueillent
les écrits , pièces et documents qui y ont rapport , les
déposiUons , réponses et explications contradictoires des
témoins et parties intéressées, en un mot, tout ce qui
peut être produit devant les Juges comme élément de
conviction (K. PaëvEirrioii, AccnsA-non). — Dans Tan-
cienne Rome, il ny avait ni instruction écrite, ni mise
en prévention ; Faction publique pouvait être exercée par
nn citoyen quelconque, à ses frais et risques, sans qu'il
eût été personnellement lésé, mais pour signaler son
patriotisme. An moyen âge, chez les peuples d'origine
SBrmaniqne, les épreuves judiciaires , et, plus tard, le
i4«l ou comixtl Sudicicùre (K. ces mots dans notre Dtc-
tionnaire de Biographie et d'Histoire)^ tinrent lieu de
rinstruction criminelle : c'était employer , selon la re-
marque de Montesquieu , des preuves qui ne prouvaient
point, et qui n'étaient liées ni avec Tinnocence, ni avec
le crime. En France, avant 1789, les officiers chargés
exclusivement de poursuivre, au nom du souverain, la
répression des crimes. Jouissaient d'une grande indé-
pendance; car ils tenaient leur charge à titre d*office, ce
3ui les rendait Inamovibles. Aujourahui ils ne sont que
e simples fonctionnaires, nommés par un ministre, et
révocables. V» Bourguignon, Manuel d^ Instruction cri~
minelle, 3' édit., 1811, 2 vol. in-S^"; Daubenton, Traité
pratique du Code S Instruction criminelle, 1809, ln-8°;
Camot, De l'Instruction criminelle, Paris, 1829-35,
4 vol. in-4<*; Mangin, Traité de l'action publtque et de
l'action civile en matière criminelle, 2* édit., 1844, 2 vol.
ln-8<*, et De l'instruction écrite et du règlement de la com-
pétence en matière criminelle, 1847, 2 vol. in-8^ ; Trébu-
tien. Cours élémentaire de Droit criminel, 1854, 2 vol.
in-8®; Faustin Hélie, Traité de l'Instruction criminelle,
i845-(H), 9 vol. in-8».
Notre Code d'Instruction cnmtnelle fut promulgué le
27 novembre 1808. Il se compose de deux livres, pré-
cédés de dispositions relatives à Texercice des actions
Eublique et civile en général, et contient 643 articles.
e 1^ livre traite de la Police Judiciaire, c-àni. de la
recherche et de la constatation des crimes, délits et con-
traventions, et des officiers qui l'exercent. Le 2' s'occupe
du mode de procéder devant les tribunaux correctionnels
et de police et devant la Cour d'assises; de l'exécution
des Jugements criminels; des demandes en cassation, en
révision, en renvoi, ou en règlement de Juges; de la pro-
cédure en matière de faux et de contumace; des infrac^
tions commises par certains fonctionnaires ou contre leur
autorité; des dépositions des princes et fonctionnaires;
des prisons, maisons d'arrêt et de justice; des détentions
lUé^Ies; de la réhabilitation et de la prescription. Dès
1815, le titre vi de ce Gode, relatif aux Cours spéciales,
disparut avec ces Cours. Plusieurs modifications de dé-
tail furent ensuite introduites par les lois du 10 déc. 1830
sur les Juges auditeurs, du 4 mars 1831 sur les Cours
d*assises, du 28 avril 1832, qui a changé les art. 206, 339,
340, 341, 345, 347, 368, 372, 399 et 619, et du 10 avril
1834 sur les associations ; par les décrets du 25 fév. 1852
sur les délits politiques et de presse, du 1" mars 1852
sur les juges d'instruction, des 28 mars 1852, 17 Janv.
et 5 mars 1853 sur les commissariats de police; par les
lois des 9 et 10 Juin 1853 sur le jury, du 3 Juillet 1852
sur les réhabilitations, du 4 avril 1855 sur la liberté pro-
visoire, les mandats de dépôt et d'arrêt, etc. F. Duver-
fier, Code d'instruction criminelle et Code pénai annotés,
833, in-8* ; Benoid, Traité et Manuel synthétique et pra-
tique des Codes pénal et ^instruction criminelle, 1845,
in-8®; Bonnin, Commentaire du Code d'instruction cri^
minelle, 1845, in-8<»: Rosron, Codes d'instruction crt-
minelle et pénal ecopliqués. A" édit. 1849, 2 vol. ; Berriat
Saint-Prix, Traité de la procédure des tribunaïUD crimi-
nels, 1851-54, 3 vol. in-80; GraUier, Code d'instruction
crimmelle et Code pénal expliqués, 1854, in-8° ; Boitard
8t Colmet d*Aage, Leçons sur les Codes d^instruction cri-'
ninelle et pénale, 7* édit., 1856 , in-S».
DfSTRDCTiON PUBUQUB« enseignement donné ou sur-
feillé par l'État. La surveillance et la direction des étsr
blissements d'instruction forment, dans la plupart des
pays modernes, une des principales branches de l'admi-
nistration. On peut voir, dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et â^ Histoire , aux articles Êcolbs chez les an-
QENS, Écoles MiimaPALBs ou iMPéniALBS, Écoles CATHé-
DEALBS, ÉCOLES MONASTIQUES, UlflVERSmiS, CO qu*a été
rinstruction publique Jusqu'à noslours, et, à l'art. France
(page 1085), quelle en est l'organisation actuelle. V, aussi
les articles consacrés à chaque genre d'établiaMOMOls
d'instruction, et Enseignement*
INSTRUCTION puBUQUE (Conseil Supérieur de H. F. Cou-
SEIL, dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
page 656, col. 1.
INSTRUCTION PUBUQUE ( Ministère de I* ) bl des cultes
V. HiNisTiniB, dans notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire, page 180i, col. 2.
INSTRUCTIONS, explications écrites ou verbales qu'on
donne à une personne pour la conduite de quelque affaire.
INSTRUMENT, mot qui signifiait autrefois charte et
acte. Dans la langue du Droit, il s'applique encore,
quoiq^ue assez rarement, à tout acte destiné à constater
un fait ou une convention.
INSTRUMENTAL (Cas), terminaison spéciale des noms
de cwtaines langues pour marquer l'instrument, et, par
extension, le moyen, la manière. Dans le sanscrit, cette
désinence est A au singulier, bhis au pluriel. En grec,
certaines désinences adverbiales, comme i\ dans uqcvtt)
( de toute façon)^ comme cpi ou 91c dans If i (par la force,
avec force)y et Xixpiçtc (obliquement)^ comme n dans
à{Awif2t( {en se défenaant% comme et ou i dans meveOveC
{en masse) et icocvoixC {en employant toute la maison)^
peuvent bien être des restes d'une ancienne déclinaison.
Les désinences adverbiales a^ i^ u|, dans les mots 68aC
{avec les dents\ xoupiÇ {par les dieveux)^ nu^ {à cot^
de poing )^ expriment aussi l'instrument, et se rattachent
à la classe des mots précédemment cités. P.
INSTRUMENTATION, art d'exprimer la musique par
des instruments, et, dans une acception moins étendue,
art de distribuer dans une partition les divers instru-
ments de manière à produire toutes sortes d'effets par le
choix et la combinaison des timbres. Cet art suppose
non-seulement une science profonde de l'harmonie, mais
la connaissance de tous les instruments orui composent
un orchestre, de leur portée, de leur étendue respective,
de leurs différentes qualité de son, des tons qui leur sont
favorables, des traits qu'ils peuvent exécuter facilement.
« Les aocompaffnements d'une musique bien faite, dit
M. Fétia. ne se bornent point à soutenir le chant par une
harmonie plaquée; souvent on y remarque un ou deux
dessins qui semblent au premier abord devoir contrarier
la mélodie principale, mais qui, dans la réalité, concou-
rent à former avec elle un tout plus ou moins satisfai-
sant. Ces systèmes d'accompagnements flçurés peuvent
importuner une oreille peu exercée, mais ils complètent
le plaisir des musiciens instruits et des amateurs éclai-
rés. Quelquefois ils deviennent la partie la plus impor-
tante du morceau, et les voix leur servent en quelque
sorte d'accompagnement : dans ces circonstances, il est
nécessaire que les formes de l'accompagnement soient
gracieuses et chantantes, ou sémillantes et vives. » L'in-
strumentation est de création moderne. Jusqu'au milieu
du xvui* siècle, les compositeurs se sont presque tou*
Jours bornés dans leurs accompagnements à soutenir les
voix ; le petit nombre et rimp^riection des instnuneiits
étaient un obstacle presque insurmontable au progrès.
Les opéras du xvu* siècle n'étaient accompagnés que par
des violons, des violes et des basses de viole; au corn*
mencement du xviii% on ajouta des flûtes et des hautboia.
Puis, les ressources augmentant successivement, Pinstra-
mentation prit un essor rapide avec Handel, Gluck,
Hajrdn, Cimarosa, Mozart, Paisiello, et elle se développa
encore entre les mains de Méfaul, de Cherubinl, de
Beethoven et de Rossini. L'abus n'a point tardé à Boivre;
aujourd'hui, toutes les richesses de l'orchestre sont em-
ployées pour produire de l'efifet, quel que soit le carac-
tère des morceaux, et cette profusion de moyens a pour
conséquence de fatiguer, d'enduroir l'oreille, oui ne
trouve plus, dans ce qui en est dépourvu, que faiblesse
et pauvreté. V. Gafun, De harmonta musicorum metru"
mentorum. Milan, 1518, in-fol. ; Agricola, Musica instru-
mentalis, Wittemberg, 1529, in-S** ; Galilei, Dialogo topra
Varte del bene intavolare e rettamente suonare la mu"
sica negli instrumenti, Venise, 1569 ou 1584, in-fol.;
Th. Merck, Éléments de musique instrumentale, en alle-
mand, Augsbourg, 1695; Francœur, DiajHUon général de
tous les instruments à vent et Observations sur chacun
d^eux, Paris, 1772, in-fol.; Vandenbrook, Traité de tous
les instruments à vent, à l'usage des compositeurs,
G. Kastner, Traité d'instrumentation, Paris, 1836, et
Cours d'instrumentation, 1837 ; Berlioz, Traité d'orches*
tratUm et d^instrumentation, in-fol. B.
INSTRUMENTER, en termes de Pratique, faire on acte
destiné à constater un fait, à fixer les termes d'une con-
yention, tel que procès-verbal, contrat, etc. Cela ae dh
INT
1089
INT
sfftoulées notaires et des hulsaien, eonsidérés comme
lu mttniment^ de la loi.
INSTRUMENTS DE MUSIQUE. D y a trow manières
de prodaire des sons : 1* par les vibrations des cordes;
î* pir les vibrations de l'air dans les tubes; 3* par les
vibrations de certains corps élastiques en formes ae pla-
qaes, de lamea ou de tiges. De là trois familles d'instru-
ffleots : les instrwnenU à cordes, les instruments à vent
et les mstrwmênts de percussion. Chaque famille offlre
bieo des subdivisions. Parmi les instruments à cordes, il
es est dont les cordes résonnent librement dans Tair,
eomme la lyr» et les anciennes harpes, tandis que, dans
d*iatres, conune le vioUm et le piano, les cordes sont dis-
posées au-dessus d'une caisse de résonnance qui renvoie et
reoforce le son. Tantôt on pince les cordes avec les doigts
(guUare, harpe) ; tantôt elles sont frottées par une roue
(vieUe) on par un archet (iriolon, alto, viole â^amour,
mUmcelU, contre-basse) ; ou bien on les attaque par un
petit instrument tenu dans les doigts (lep(ecirutn de la
lyre antique), par un mécanisme qui lui est analogue
(ofoiMctfi), par un système demartelets qui correspondent
à un davier (piano). — Les instruments à vent sont de
différentes sortes : l<* ceux qui se composent de simples
tayam dansleeouels on soume de Tair {ûiUe,fiflre,chalyF'
9»eau,svrinxU 2* ceux à anche simple (clarinette, cor de
bas$9t,9aaDopnone) ; 3<* ceux à anche double {hautbois^ cor
an(fiai$, basson )i 4« ceux à embouchure (cor, trompette,
cornet, trombone, ophieléide, serpent, basson russe);
5» ceux à clavier et qui reçoivent le vent, non plus par
la bouche de Thomme, mais au moyen d'un soumet
{orgue, harmonium, accordéon, concertina). — Les in-
struments de percussion sont de deux espèces : 1® à son
Aie et appréciable {timbales, timbres, cloches, harmo-
9ke^\ %• à résonnances indéterminables (caiese, tam-
bour de basque, cymbales, triangle, chcq^eau chinois,
tam-tam, castagnettes). Ghes les anciens Asiatiques, les
Grecs, les Romains et les peuples du Nord, les instru-
ments à cordes pincées ont tenu la première place: dans
la moaiqQe modteme, ils ont perdu la prééminence, parce
qu'ils sont bornés dans leurs moyens et peu propres à
suivre les progrès de Tart. V. Maupertuis, Mémoire sur
la forme des tnstruments de musique, dans les Mémoires
àeV Académie des Sciences, 1724; Bianchini, De tribus
99MrÔms instrumentorum mususœ veterum organicm,
Rome, 1742, in-4<>; Bonanni, Descrieption des instruments
kamimiquês en tout genre, en ital. et en franc., Rome,
lllft, gr. in-4*; Bottée de Toulmon, Dissert€Uion sur les
hutniments de musique employés au moyen âge, dans le
t XVn des Mém. ds la Soc. des Antiquaires de France,
1844; B. de Gouasemaker, Essai sur les instruments de
wmk!ue au moyen âge, dans les t. lU, IV, V, VII et IX
des Amèoles archéologiques. V. aussi, dans le présent
«mage, les articles consacrés à chaque instrument. B.
INSUBORDINATION, dans le langage militaire, acte
d'faidlsdpline, de désobéissance, de désordre. C'est un
délit qui a plus ou moins de gravité selon les temps, les
bsbitodes reconnues, le grade, etc. V. Disapuna.
niSULTB. V. IiuuBB.
INTAIIXE (de l'italien intaglio, dselure), pierre fine
gravée en creux. Parmi les intaiUea célèbres, on peut
citer le Mnosthène, VIo, le Persée et le Mercure de IMos-
coride, la Méduse âid Selon, Ih Julie d'Évodus, la coma-
Inw dite cachet de MicheUAnge. Les intailles, que les
Anciens appelaient diaglyphes, servaient de sceaux et de
Qcbets, et on les montait ordinairement en bague.
INTELUGENCB, l'une des trois facultés générales dont
reosemble constitue la nature de l'homme (de intellir
9fre, comprendre par Pattention ; légère inter, choisir,
disoemer). Cest, a proprement parler, le mentis acies
des Ladns; de là vient qu'on la nomme aussi raison,
Buds oeDe-d n'est que la faculté de connaître par excel-
en activité, intellect agent. Cette faculté est le mot pen-
iBot et prenant connaissance des objets, et son véritable
ab|et, c'est la réalité; elle a pour but et pour résultat la
aMtf. La réalité se montre sous différentes formes; de
^ <Sverm modes de Tintelligence auxquels on donne le
BQOi de facultés intellectuetles, et qui ne sont oue l'in-
tsQlgeiice elle-même. Ainsi, elle est la faculté ae perc^
^ extérieurement par les sens, intérieurement par la
^o^seience; puis le jugement, quand on affirme un rap-
port; rînîucfton, quand l'esprit s'élève du particulier au
Salerai ; la d^iuctum, quand il descend du général au
Mnicuiier; la raisùn, Vexpression la plus haute et la
plus noble de rintelligence, et par laquelle Tesprît a
çoit le nécessaire et l'absolu. A cesfatktltés dites d^acqui»
sition se Joignent cellee dites de conservation, la m^otra
et Vassoâation des idées; enfin Vimagination, faculté
créatrice. L'intelligence entre en exercice d'abord d'une
manière fatale, l'àme pense et ne peut pas ne pas penser;
ensuite elle devient une faculté à un titre plus élevé que
la sensibilité, par l'intervention de la volonté, ce qui
constitue Vattention. De là une différence entre voir et
regarder; dans le premier cas l'esprit est passif, dans le
second il est actif : en réduisant ces deux faits au pre*
mier, on arrive à une théorie de l'entendement passif,
comme celle de Bialebranche, qui a le tort de méconnaître
le rôle de l'activité dans Fintelligence. Celle-ci se dis-
tingue : 1° de la sensibilité, d'abord par son double ca-
ractère d'objectivité et d'impersonnalité, ensuite par son
but oui est le vrai et le beau; 2® de la volonté, en ce
ou'elle est fatale, l'esprit ne pouvant se refuser à recevoir
des notions relatives à la nature des objets de la connais-
sance. Mais comme l'intelligence se confond avec les deux
autrea facultés dans l'unité du moiy il en résulte une
influence réciproque, et qui a pour l'intelligence une
florande importance. V, Aristote, Essai sur Vâme; Locke,
Essai sur l'entendement /lumam,- Leibniz, Nouveaux
essais sur Ventendement; Condillac, Essai sur Vorigine
des connaissances humaines; Ad. Gamier, Traité des
facultés de Vâme; Cbauvet, Des théories de Ventendement
humain dans l'antiquité, 1855, in-8*. R.
INTENDANCE, INTENDANTS. F. notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
INTENTION, acte de la volonté par lequel le moi se
tourne vers un but qu'il se propose d'atteindre. L'inten-
tion est par là une condition indispensable de la mora-
lité : on peut être coupable devant Dieu, sans avoir con-
sommé un crime prémédité, de même qu'on peut être
innocent tout en manquant aux prescriptions de la loi.
C'est une distinction que les tnbunaux ont soin d'ad-
mettre (V. DiscBBNEiiEirr et PaâiéorrATiON), et d'aprèa
laquelle chacun se Ju^ soi-même; aussi la Morale s'oc-
cupe plus de Vintentton que de Vaction^ celle-ci relève
plus particulièrement du Droit. R.
INTERCALATION, insertion d'un ou de plusieurs mots
ou même d'un passage plus ou moins étendu dans le
texte d'un auteur ( V. Interpolation, et Interugne. ^ —
Insertion d'une lettre au milieu d'un mot. F. Épbnthbsb.
INTERCIDENGE. F. Diaptosb.
INTERCOURSE, mot d'origine anglaise, désignant la
droit réciproque à la libre pratique des ports dans l'en-
semble des relationa commerciales d'un pays avec un
autre.
INTERDICTION, en Droit, état de prohibition dans
lequel une personne est placée à l'égard de certains
actes. Le Code Napoléon déclare que celui qui est dans
le cas d'imbécillité ou dans l'état habituel de démence
ou de fureur doit être interdit, même lorsqu'il y a, des
intervalles luddes. Les parents, qu'on est en droit de
considérer comme affectionnés, peuvent seuls provo-
quer l'interdiction : toutes autres personnes ne peuvent
qu'adresser un avis ou une sollidtation à l'autorité com-
I détente, laquelle peut Juger convenable de demander
'interdiction, et le doit même dans le cas de fureur.
L'interdiction est prononcée par le tribunal de l'* in-
stance, sur le rapport d'un Juge commis à cet effet, et
après avis du Conseil de famille, interrogatoire et audi-
tion des parties; on peut en appeler de sa sentence. Le
Jugement d'interdiction est signifié à partie, affiché dans
rauditoire du tribunal et dans les études de notaires.
L'effet de rinterdiction est d'assimiler l'interdit au mi-
neur pour sa personne et ses biens : 11 n'a plus la dis-
{ position ni l'administration de ses biens, et les lois sur
a tutelle des mineurs lui sont applicables. L'interdiction
peut n'être pas complète, mais partielle, c-à-d. ne por-
ter que sur certains actes déterminés, comme ceux de
{>la{der, de transiger, d'emprunter. A proprement parler,
e prodigue n'est pas interdit; il est (usisté d'un Conseu
jwticiaire (F. ce mot). L'interdiction cesse avec les causes
qui l'ont motivée; mais la mainlevée ne peut être pro-
noncée que par un Jugement (Code Napol.^ art. 489-512).
— On nomme interdiction légale la privation totale ou
partielle des droits civiques, dvils ou de famille; cette
interdiction n*est plus, comme la précédente, une protec-
tion donnée à l'interdit contre la faiblesse de son esprit,
c'est une peine qui résulte de la condamnation aux tra-
vaux forcM, à la détention, à la redusion, ou qui est
prononcée par les tribunaux correctionnels {Code pénal,
art. 29-31, 142, 143). — Quelquefois l'interdiction eil
69
INT
1090
TNT
QM peine Infligée à un fonctionnaire : le mot, dans ce
cas, a le sens de suspension ou de dêstUtUion.
INTERDIT. F. ce mot dans notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d^ Histoire,
INTÉRÊT, profit que I*on retire d*une somme d*ar|pBnt
prMée pour on temps déterminé. Le pr6t k intârât existe
depuis qu*il y a entre les liommes des relations commer-
ciales, et le taux de Tintérôt a Tsrié avec l'abondance
des capitaux, la sécurité des prêteurs, les facilités ou les
restrictions apportées à ce genre de commerce par les
lois et les mœurs. Ghex les Athéniens, la loi ne déter-
minait pas le taux de Tintérêt, et, depuis que Selon eut
réduit les dettes et dégrevé les terres, Januûs il n*y eut de
{ilaintes sérieuses ni d*émeutes populaires au si^et de
'usure. — A Rome, la loi des Douxe Tables avait établi
l'intérêt légal à 8 l/2 p. 100; plus tard, U fut réduit à
4 1/2; mais ces lois étaient mal observées, et le taux de
rintérôt s^élevait en réalité beaucoup plus haut. La ques-
tion de l'usure agita pendant plusieurs siècles la Répu-
blique romaine, et uit le grand moyen dont le parti
démocratique se servit pour soulever les plébéiens contre
les patriciens : Brutus, celui qui prit part à Tassassinat
de César, prêtait à 48 p. 100. Sous l'Empire, l'intérêt
était de i% p. 100; la loi parait avoir été mieux observée
que sous la République, et les plaintes cessent de se
faire entendre. — Le moyen Age proscrivit absolument
le prêt à intérêt. Aristote {PoKtique, I, 4), confondant
svec l'usure l'intérêt légitime que peut rapporter un
capital en numéraire, l'avait condamné; les docteurs
acceptèrent cette condamnation comme un acte de foi,
et s^armèrent de l'interprétation de quelques passades
de l'Écriture, et d'un sentiment exagéré de charité. L'in-
terdiction psssa de la loi ecclésiastique dans la loi ci-
file. Le capitulaire d'Aix-la-Chapelle (789) proscrivit
formellement l'intà^t, et il resta ainsi condamné jus-
ri'à 17^. Ce n'est pas k dire que pendant mille ans
n'y ait pas eu d'argent prêté : si la loi ne reconnais-
sait pas le prêt direct, elle admettait la lettre de change,
la constitution de rentes; les prêteurs se servaient de
ces moyens détournés, et faisaient payer cher aux em-
prunteurs les risques et les embarras de leur position.
Calvin est un des premiers gui aient proclamé haute-
ment la légitimité et l'utilité du prêt à intérêt, et sa doc-
trine, adoptée dans tous les États calvinistes, n'est peut-
être pas étrangère au rapide développement industriel et
commercial de ces États. Les écrivains du xvni* siècle,
entre autres Montesquieu et Turgot, protestèrent contre
l'injuste proscription du prêt à intérêt. L'Assemblée
oonstituanteleva enfin l'interdiction psr la loi du IS oc-
tobre 1789,'portant : « Tous particuliers, corps, comma-
nantés et gens de mainmorte pourront à l'avenir prêter
l'argent à terme fixe, avec stipulation d'intérêts suivant
le taux déterminé par la loi. » La loi du 3 septembre 1807
a fixé l'intérêt de l'argent en matière civile à 5 p. 100,
et en matière de commerce à 6 p. 100. On a bl&mé cette
limitation du taux de l'intérêt, qui gêne la liberté des
transactions, et à laquelle échappent Tes prêteurs à l'aide
des commissions et des droits divers qu'ils exigent. Quel-
ques années auparavant, à l'époque du Consulat, l'ar-
moat variait de 12 à 20 p. 100 sur la place de Paris. En
Angleterre, l'intérêt de l'argent n'est limité (à 5 p. 100)
Siepour les prêts hypothécaires et les prêts mobiliers
férieurs à 10 livres sterling : or, l'argent est moins cher
en Angleterre que dans les pavs où la loi fixe un maxi-
mum. La Banque de France a été affranchie, depuis 1857,
de la limite d'intérêt, et cette concession doit un Jour,
sans doute, devenir générale. V, l'abbé Blignot, iVaUé
des prêts, ou del'inUrét légitime et illégitime, 1738;
Turgot, Mémoire sur les prêts d'argent; Laforest, Traité
de Vusure et des intérêts, 1769; J.-L. Gouttes, Théorie
de IHntérêt, 1780; A. Rendu^ Considérations sur le prêt
à intérêt, 1806; Meyer, Essai sur le principe fondamen-
tal de Vintérêt, Amst., 1809; le cardinal de La Luzerne,
Dissertation sur le prêt du commerce, Dijon, 1823; Ba-
connière. Du taux de Vintérêt, 1824; Cotelle, Traité des
intérêts, 1826. V, aussi, dans le présent ouvrage, les
articles Anatocishb, Escompte. L.
INTÉRÊT. En Morale, l'intérêt est un principe d'action
qui s'accorde quelquefois avec le devoir, mais qui le plua
souvent s'y oppose, et qui, en aucun cas, ne peut le rem-
placer, n n'en a pas le csractère obligatoire; il n'est pas,
comme lui, universel, immuable, d&intérrâsé. En pui-
sant ses motifs d'action dans les divers ju^ments d'uti-
lité, dans celui du mérite et du démérite, il nous fournit
les deux règles de l'intérêt bien entendu, qui se rapporte
au bien-être de l'individu ou à celui des masses : de là
Vintérêt personnel et Vintérêt général. Le premier, se d^
naturant facilement, conduit à l'amour du plsisir «t à
l'égolsme : Aristippe et Épicure chez les Andens, chet
les Modernes Hobbes, Bentliam, et, en génèrsl, toute docp
trine qui met en doute la réalité d'une autre vie, loot
des organes de l'intérêt personnel. L'intérêt générsl,avec
un canctère plus noble, puisqu'il se rattache an principe
d'expansion, ne peut pas davantage remplacer la morale
du devoir, comme le prouvent le système de la fymp»>
ihie d'Adam Smith, cdui de la bienveillance de Ferguaon,
et encore bien plus le svstème de l'intarA politviw ou
salus populi suprema (ex. Si ces doctrines ne penvent
pas être la base de la Morale, elles aident cependant à
l'accomplissement des devoirs sociaux, et à diévelopper
chez l'individu l'amour de ses semblables. R.
INTÉRÊT, en termes de Littérature, attrait qni attache
le spectateur à ce qu'il Toit, le lecteur à ce qa'il Ut,
l'auditeur à ce qu'il entend. Nous prenons plaisir à être
émus de curiosité, d'inquiétude, de crainte, de pitié,
d'admiration , etc. L'intérêt peut résulter de divers élé-
ments, par exemple, de csractères bien tracés, de situa-
tions fortes, de scènes habilement conduites. 11 peut être
dans l'exécution comme dans le plan , dans k forme
comme dans le fond , ainsi que le prouve la poésie, qoi
réussit à charmer l'esprit et les oreilles par son harmo-
nie, même quand sous cette harmonie ne se cache au-
cune idée grande et sérieuse : toutefois, l'intérêt qu'excite
l'art de l'écrivain n'est guère durable , s'il n'est soutens
par l'intérêt du sujet.
INTÉRIEUR (Ministère de 1'). F. Mnnsrftai, dans
notre Dictionnaire de Biographie et éT Histoire,
INTÉRIM , mot latin signifiant en attendant , prm-
soirement , et qui dMgne l'espace de temps pmdant le-
quel une fonction est accidentellement remplie psr un
autre que le titulaire.
INTERJECTION, partie du discours, introduite dsM
la Grammaire par les Romains : les Grecs la faisaieot
rentrer dans l'adverbe. Cest principalement un son, on
cri arraché par la douleur, la Joie, la crainte, le méprii,
la dérision, l'admiration, la surprise, etc. Ce cri étant
d'ordinaire jeté au mUieu d'une phrase (jactus, vUer)^
le mot qui l'exprime a été appelé interjection. L'inter-
jection la plus fréquente, celle qui s'applique au plos
grand nombre d'afiections subites de l'&me, est l'excla-
mation ah l ha t Où considère encore comme interjec-
tions certains mots qui servent à encourager, à avertir,
à imposer silence, et <rai appartiennent à d'autres partiel
du discours : ainsi. Allons ! Voyons! Paix! Tout beaut
Bon Dieu! Corbleu ! etc. Certaines intexjections sont sui-
vies d'un cas indirect , comme en latin Bei mihi! 0 ms
miserwn! Mais alors on suppose l'ellipse d'un mot gou-
vernant ce cas, qui n'est qu'en apparence dépendant de
l'interjection. P.
INTERLIGNE (du totin nUer, entre, et lénea^ ligne),
espace entre deux lignes écrites ou imprimées. DanÎB les
actes notariés, il ne doit y avoir ni interligne ni addi-
tion , et les mots interiignés sont nuls ( Loi du 25 ven-
tôse an XI) ; le notaire contrevenant est passible d'une
amende de 10 fr., et, Vil y a eu fraude, de dommsges-
intérêts, et même de destitution. L'amende pour les con-
servateurs des hypothèques est de 1,000 à 2,000 fr., sans
préjudice des dommages -intérêts des parties. Les autres
officiers ministériels ne doivent non plus rien écrire
entre les lignes de leurs actes. Dans un acte sous seing
privé, les mots interlignés ne sont pas nuls, (fuoique non
approuvés, s'il est établi (pi'ils sont de là même maio
que le corps de l'acte. Les livres des agenta de chan^ et
aes courtiers ne doivent pas contenir d'interii^es ( Cods
de Comm., art. 84). — En Typographie, les interl^fn»t
sont des lames de métal, moins hautes que le caractère,
qu'on place entre les lignes pour les sépmr et les main-
tenir.
INTERLOCUTOIRE (Jueement), décision Judidairs
qui ordonne, avant faire droit au fond^ que préalable-
ment il sera fait une production de pièces, une vérifics-
tlon, une preuve, une instruction, ou tout autre scte
Jugé nécessaire pour l'éclaircissement de la cause. Il peut
être fait appel d'un Jugement interlocutoire avant le Ju-
gement définitif {Code de Procéd,^ art. 4M-473).
INTERLOPE, mot anglais qui signifie mtnis, et qu'on
applique comme qualification : 1* à tout navire qui tra-
fique en fraude; r aux hommes qui font ce oommeros
Arauduleux ; 3® à ce commerce lui-même.
INTERLUDE, nom qu'on donne : 1« à la partie de la
fugue appelée aussi divertissement; 2* à tout ^isode
qu dans une pièce quelconque de musique, ne tient ps^
INT
1091
INT
mentieUemeiit au si:det; 3<* aax petite morceaux d*orgue
<IQe Ton joue entre les strophes d*une hymne, ou entre
on psaume et un autre.
INTERMÈDE, courte composition dramatique, musi-
cale on chorégraphique, placée entre deux grandes pièces
oa entre les actes d^une pièce de longue haleine. Les
duBUTB des tragédies antiques , ceux d*Esih»r et dMtAo-
Im, sont de véritables intermèdes. Molière a placé des
intermèdes burlesques dans le Bourgeois gentilhomme ,
et dans U Malade imaginaire. Au xvin* siècle, les petite
opéFM en on acte étaient qualifiés d'intermèdes : telle
est la Servapadrona de Peiîsolèse.
INTERMÉDIAIRES. V. le Supplément.
INTERNATIONAL ( Droit). K. Daorr des obis.
INTERNE, élève qui habite dans un établissement
(Tinstniction. — On donne le même nom aux étudiante
en médecine attachés an service des hôpiteux civils, et
qni y font leur demeure. Reçus par concours, ils montent
tour k tour la garde, font les pansements, pratiauent les
opéntions chirurgicales les plus simples, et suivent les
visites des médecins et chirur^ens, dont ils enregistrent
les prescriptions. L'internat dure 4 années*
INTERNEBiENT. V. Sorveillangb.
INTERNONCE. F. notre Dictionnaire de Biographie
et d^ Histoire,
INTERPELLATION, dans le langage parlementaire,
question adressée dans une Chambre à un ministre sur
on point ordinairement en dehors de la discussion des
lois, mais touchant U situation intérieure ou extérieure
du pays, Texécution des lois, etc. En général, Tobjet de
l'interpellation e^^ inc^qué d'avance, et l'Assemblée fixe
on Jour pour en étendre le développement. Les inter-
pellations sont f récentes dans lé" Parlement anglais. V.
le SupplémenS,
INTERPOLATION Mu latin tn^erpolare, rajeunir du
TÏeai en y mêlant du neuf), se dit spécialement, dans le
langage de la critiqua littâraire, de tout passage qui a
été, soit par fraude, soit par ignorance, inséré dans le
texte d^un écrivain. Il n'est point d'ouvrages où les inter-
MlatioDs aient été plus nombreuses que dans VIliade et
YOilfSsée d'Homère, poèmes qui, pendant plusieurs siè-
cles, ne se sont conserva que par la tradition orale, et où
le rapsodes durent souvent introduire des vers ou des
déreloppementa , soit pour les mettre en harmonie avec
le goût et les idées de leur temps ou avec l'esprit de telle
w telle cité, soit pour flatter quelque famille puissante
00 inaérer quelque tradition mytholo^que inconnue aux
temps anténeora, soit enfin par défaillance de leur mé-
iBoire. Lorsque les poésies homériques furent écrites ,
dos d'une interpolation dut se glisser encore par le fait
des copistea ou des diascâvastes (F. ce mos). Dès le
n* siècle avant J.-C, mais surtout à partir du m*, la
critique grecfiae nota de signes convenus bon nombre de
ces interpolations. Plusieurs interpolations doivent être
toasi imputées aux grammairiens d'Alexandrie eux-
mêmes : ainsi, lorsque fut établie la division en 24 rap-
sodes, on inséra souvent, pour éviter une fin. ou un
commencement trop brusque, un ou plusieurs vers, tou-
jours assez communs, et souvent empruntés au poète
îtti-fflème.
Une autre source d'interpolation, plus ft^uente chez
les prosateurs que chez les poètes, ce sont les gloses
qoe œrtaina copistes, ou lecteurs, ou critiques, mel^
talent à la marge du manuscrit, et ou'un autre copiste
inattentif ou ignorant transportait oans le texte, soit
comme addition, soit comme substitution. Dans les
écoles de l'antiquité, ces insertions de gloses étaient in-
di<}uées soigneusement aux auditeurs, et les bonnes
éditions en purgeaient toi:jours le texte ; malheureuse-
ment, les manuscrite qui nous sont parvenus en sont
remplis, parce qu'ils remontent à une époque relative-
ment peu éloignée de nous, et où les bons copistes de-
venaient de plus en plus rares, c-jmI. au milieu du
moyen âge. Les critiques modernes en ont rdevé un
grand nombre dès le xvi* siècle ; mais il ne leur a pas
été aussi facile de prononcer avec certitude et autorité
sur la véritable expression originale; de là tant de cor-
rections par conjectures. Les érudite qui ont porté le pins
de lumières daîis cette partie de la critique des textes
sont, au XVI* siècle, Henri Estienne ; au xvn*, Saumaise et
Caaanbon ; plus tard, Bentley, Porson, Hermann, Heyne,
Jseobs, Reiske, Brunck, Boedch, Bekker, Coray, Hase,
BoisBonade, etc.
Des interpolations importantes ont été signalées éga-
lement dans les Livres sainte. F. Bole, Apocryphes.
Llnvention de l'imprimerie n'a pu préserver de toute
interpolation les ouvrages modernes eux-mêmes; c'est
prinapalement dans les œuvres dramatiques qu'elles ont
été remarquées ; et elles doivent la plupart du temps être
attribuées aux acteurs. Shakspeare chez les Anglais et
Molière en France ont dû être de bonne heure l'objet
d'études critiques , gr&ce auxquelles nous possédons au-
jourd'hui trèe-purs les textes de ces deux grands écri*
vains. P.
INTERPOSITION DE PERSONNE, acte de celui qui
prête son nom à quelqu'un , pour lui faciliter des avan-
tages qu'il ne pourrait obtenir directement. Toute dona-
tion faite à des personnes interposées est nulle. Sont
réputés interposés les père et mère , les enfante et des*
cendante, et Vépoux de la personne incapable {Code iVa-
poUon, art. 911, 1099, 1100).
INTERPRÉTATION, traduction accompagnée d'expli-
cations. Elle prend les noms d'Ea>égèse et aHerménevt»
tique (F. ces mots) s'il s'agit de livres sacrés. V. Hnet,
De interpretatione libri II, Paris, 1661, in-4<^; Beck, De
interpretatione veterum scriptorum, Leipzig, 1798, in-i«;
G. Meyer, Essai dune Herméneutique générale^ en al-
lem.. Halle, 1756, in-S»; Rosenmûller, Historia inter-
pretationis librorum sacrorum, Leipzig, 1795-1814;
W. Meyer, Histoire de V Herméneutique sacrée, en allem.,
ibid., 1802-1808; J.-A. Emesti, Instttutio interpretis
Novi Testamenti, édit. d'Ammon, 1809. — L'interpré-
tation d'une loi dont le texte est obscur ou équivoque
est donnée par les Juges chargés de rappllq[uer; ils se
guident tantôt par les règles que la lé^slation a elle-
même fixées (analogie des lois, principes naturels du
Droit, etc. ), tantôt par l'autorité des Jurisconsultes qui
ont écrit sur la matière, ou encore par les décisions
qu'ont rendues les Cours supérieures. Quand l'obscurité
est telle qu'on ne peut déterminer la véritable intendon
du législateur, et que les divers tribunaux prononcent
chacun d'une manière différente, une interprétation au-
thentique est donnée par la Cour de cassation. — L'inter-
i)rétetion des conventions appartient aux tribunaux, et
e Code Napoléon (art. 1156-66) en a tracé les règles.
V. Clause; Mailher de Chassât, Traité de Vmterprétation
des lois, 1845, in-8«; Delisle, Principes de l'interpr^ation
des lois, des actes et des conventions, 1852, 2 voL in-8«*
INTERPRÈTE, celui qui traduit d'une langue dans une
autre. Des interprètes organisés militairement sont attar
chés aux troupes françaises d'Aloérie. Les interprètes des
ambassades en Orient, appelés drogmans, sont des fonc-
tionnaires d'une certaine importance. Les nUerprètet
jurés ou treiducteurs assermentés près les Cours ou tri«
bunaux sont choisis par le président, doivent être &gés
de 21 ans au moins, et prêter serment de traduire avec
fidélité ; on ne peut les prendre, ni parmi les juges, ni
parmi les jurés, ni parmi les témoins (Code ff Instruction
criminelle^ art 332 et 333). Us sont sujete k récusation*
Pour les actes de commerce déférés aux tribunaux, il y a
des courtiers interprètes, V, Courtiers.
INTERRÈGNE , temps pendant lequel un royaume se
trouve sans roi, un empire sans chef.
INTERROGATIF (Mot), ac^ectif, pronom ou adverbe
servant à marguer une interrogation. Tels sont, en fran-
çais, qui? quel? lequel ? quoi? que? quand ? commetU?
où? combien? Ajoutons la périphrase interrog^tive et^
ce que? Le latin et le grec sont plus riches en particules
interrogatives. P.
iNTBRaoGATip (Tour), tour de phrase servant à indi-
3uer l'interrogation. Telle est, en français, l'inversion
u si^et, lorsque ce sujet est un pronom : Viendrex-ixms ?
Sommes-nous prêts ? Ont-Us éU avertis ? Si le sii^et est
un substantif, l'inversion ne peut avoir lieu en français |
mais, après le verbe, on exprime pléonastiquement le
pronom t Votre frère «st-tl parti? Mes soeurs resteront'
elles 0090 nous? Le tour interroçatif est souvent em»
ployé pour remplacer la conjonction si , quand même ,
quoique, Ex. : « ArchélaUs estpuissant? Peu m'importe,
s'il n'est vertueux. — Eussiex-vous d'ailleurs cent celles /
oualités, si vous n'êtes aimable, vous ne trouverez qu'in-
différence. » Le tour interrogatlf est très-fréquent dans '^'
la conversation , lorsqu'on veut exprimer vivement une
affirmation ou une négation :
Comment peat-on Jnger d'une pi^, en effet,
An tintamarre aArenz qu'an parterre on a ftiitf
PiROH, la Métromanie, V, 2.
c-à-d. on ne peut pas juger, etc.
ITett-ce pae )t tob yeux un tpectaele asaei dou
Que la veuve d^Heetor pleurant h ros genoux?
BAOïn, Andronaqitê, III, 4»
ÎNT
1092
INT
Ce tOQ? 8BÎ d'en grand usage dans les discours; de là le
nom de Umr oraUnm que les rhôteura lui ont donné. P.
INTERhOGATION, proposition tournée de manière
qu*elle indioue Tignorance ou Tinoertitude de celui qui
parle, et le aésir qu'il a d'être instruit ou fixé sur tel ou
tel point : « Qui a créé le monde? Comment la terre se
soutient-elle dans l'espace? Quel est votre avis? Quel
parti prendre? » On voit que l'interrogation, peut porter
sur le sujet, l'attribut, ou l'un de ses compléments.
L'interrogation est souvent une Figure de pensée, qui
consiste à prendre le tour interrogstif, non pourmaitiuer
un doute réel , car l'expression serait alors toute simple
et sans figure, mais pour exprimer une persuasion plus
grande par l'espèce de défi que l'on parait fairç à l'au-
diteur de nier ce qu'on avance ; pour réveiller l'attention
par cette espèce de vivacité; pour marquer la surprise,
la crainte, la douleur, l'indignation, et autres mouve-
ments de r&me; quelquefois pour presser, convaincre,
confondre ceux à qui on adresse la parole. C'est la figure
la plus fréquente peut-être dans le langage familier et
dans le langage populaire. Aussi en rencontre-t-on de
nombreux exemples chez les poètes et les orateurs, les
deux classes d'écrivains qui ont le plus d'occasions de
recourir aux mouvements passionnés du style. Quelque-
fois l'interrogation et la réponse se font tout à la fois, ce
qui est un moyen d'éveiller l'attention et de la fixer sur
la réponse qui suit immédiatement. Lorsque la réponse
n'est pas faite, si elle doit être négative, l'interrogation
se fait purement et simplement :
La fol qni n'agit point, est-ce nne fol 8lnob«?
Raoimb, AthaUe^ I, t.
Si la réponse doit être affirmative, Tinterrogation prend
un tour négatif : « Ne vous avais-Je pas fait toutes les
recommandations nécessaires? n Les interrogations accu-
mulées sont l'expression de la véhémence des sentiments
et des passions. P.
nvTBRROGATioN (Méthodo d'), procédé qui consiste à
poser des questions à ceux qu'on veut instruire, pour les
amener à cherclier eux-mêmes ce qu'ils ont besoin de
savoir. C'était la méthode que Socrate employait avec les
sophistes et avec ses disciples : avec les premiers, pour
les confondre et les forcer à avouer ou'ils ignoraient ce
qu'ils prétendaient enseigner ; c'était rtronta socratktae
r promeut dite; avec les seconds, pour les mettre sur
voie et les conduire , par l'analyse, à envisager une
idée ou une question sous toutes ses faces, et à se rendre
compte de leurs pensées. Socrate se disait pour cette
raison Vaccoucheur des esprits. Cette méthode, appelée
aussi ditUectique, est préférable, quand elle est pratiad)le,
à la méthode exclusivement dognîatique. R.
I1ITBRRO6ATI0N (Poiut d'). K. PONGTOATION.
IMERROGATOIRE , ensemble des questions qu'a-
dresse un magistrat et dos réponses que fait celui qui est
interrogé. En matière criminelle, l'interrogatoire est un
des actes les plus importants de Vinstruction (V, ce mot) ;
la manière dy procéder est réglée par le Code d^instruc-
tion crimindiB, Dans le cas de flagrant délit, le coupable
doit être interrogé sur-le-champ par le procureur impé-
rial et les officiers auxiliaires, et le procès-verbal, rédigé
en présence du commissaire de police, du maire ou d'un
adjoint, ou de deux citoyens aomiciliés dans la com-
mune, est revêtu de leur signature fart. 40}. Tout in-
culpé doit être interrogé par le Juge d'instruction, sur-le-
champ en cas de mandat de comparution, dans les
S4 heures en cas de mandat d'amener (art. 93) ; le pro-
cès-verbal , rédigé par le greffier, doit être signé du pré^
venu, et, en cas de refus ou d'impossibilité, il doit en être
feit mention. Le juge d'instruction peut renouveler ses
interrogatoires autant de fois qu'il le croit utile à la dé-
couverte de la vérité. Si le prévenu doit être ti^uit de-
vant le tribunal correctionnel , il n'a plus, en sortant des
mains du ]uge d'instruction, qu'à être interrogé à l'au-
dience. Mais, s'il est renvoyé devant la Cour d'assises, le
président de cette Cour, ou un juge commis par lui, l'in-
terroge de nouveau, 24 heures au plus tard après la re-
mise des pièces au grefi'e et l'arrivée de l'accusé dans la
maison de justice (art. 293) ; cet interrogatoire a lieu en
l'absence du conseil de l'accusé (art. 302 et 574); procès-
verbal en est dressé par le greffier et signé par l'accusé.
Quand les débats sont ouverts, le président procède pu-
bliquement et en présence du jury à un dernier interro-
gatoire, pendant lequel l'accusé est assisté de son conseil,
qui peut s'opposer a ce que certaines questions lui soient
posées. Des questions peuvent être adressées par les
juges, le procurer. r g>SnéraI et les jurés, en passant par
la bouche du plaident. — En Ani^eterre, la loi ne permet
{>as qu'on interroge les prévenus, ni qu'on se prévale de
eurs aveux; le magistrat se borne à leur demander s'ils
sont coupables ou non.
En matière civile, le mot Interrogatoire ne s'emploie
seul que pour daigner les questions faites par le juge à
une piersonne dont l'interdiction est pqursmvie. En tout
autre cas, on dit Interrogatoire sur faits et articles : les
parties peuvent, en toute matière et en tout état de
cause, demander de se faire interroger respectivement,
sans retard de l'instruction ni du Jugement (F. le Code
de Procédure dmle, liv. II, tit. 15).
INTERVALLE, en termes de Musique, distance qui sé-
pare deux sons dans l'éclielle de la gamme. Une note
étant donnée, celle qui la suit immédiatement au-dessos
est à l'intervalle de seconde; un degré encore plus haut,
c'est la tierce, et successivement la quarte, la quinte^ la
sixte, la septième, Voctave, la neumème, la dixième, etc.
En mélodie, les intervalles sont successifs; en harmo-
nie, ils sont sfêccessifs dans les parties et simultanés
par l'accord des parties entre elles. Dans la pratique de
l'harmonie, on est convenu de conserver aux intervalles
qui excèdent la distance d'une neuvième les dénomina-
tions de tierce, quarte, quinte, sixte, etc., parce qu'ils
ne sont, à proprement parler, que les doubles de ces der-
nières. Les intervalles sont dits simples^ quand ils ne dé-
f lassent pas l'octave, et multiples ou composés^ quand
Is dépassent cette étendue. Suivant l'efi'et qu'ils prodai-
sent sur nos sens, les intervalles simples sont conson-
nants ou dissonants (V. Consonnance, Dissorarcb). La
quarte, la quinte et l'octave sont des consonnances par-
faites, parce qu'elles ne peuvent être modifiées ; la tierce
et la sixte sont dites imparfaites, parce qu'elles i>euvent
varier d'un demi-ton, et être, par conséquent, mineures
ou majeures. Les dissonances de seconde et de septième
peuvent aussi être majeures ou mineures. Un intervalle
quelconque est dit superflu ou augmenté, quand il est
augmenté d'un demi-ton ; diminué, quand on le diminue
d'autant : dans les deux cas il est altéré. Autrefois on se
servait des qualifications de juste et de faux pour les
variétés d'extension de la quarte et de la quinte; mais,
ce qui est faux ne pouvant trouver place en harmonie,
on a renoncé à ces mauvaises expressions. Un intervalle
est didUonique quand il a lieu sur les tons naturels de la
gamme; ctû^omatique quand il a lieu d'un ton à un demi-
ton; enharmonique çruand il est produit sur le même
degré par un dièse. V, Scheibe, Sur les intervalles et les
genres en musique^ en allem., Hambourg, 1739, in-S**;
Riedt, Essai sur les intervalles en musique, en allem.,
Berlin, 1753, in-4'>; Rœllig, Essai d'une table d^inter-
valles musicaux, en allem., Leipz., 1789 , in-fol.; Dau-
prat. Nouveau Traité théorique et pratique des accords,
Paris 1857 in-4**. B.
INTERVENTION, en termes de Droit, action par la-
quelle un tiers s'introduit dans une instance civile, afin
de participer aux débats et de faire prononcer par le
même Jugement sur l'intérêt qu'il a dans l'affaire. L'in-
tervention^oit être formée par simple requête et conclu-
sions motivées, sans aucun développement {Code de
Procéd,, art. 339). Elle est dispensée du préliminaire de
conciliation (art. 49). Elle ne peut retarder le jugement
de la cause principale, si cette cause était en état d'être
jugée. Une intervention n'est reçue sur l'appel que de la
part de ceux qui auraient le droit de former tierce oppo-
sition (F. ce mot), — En Droit commercial, il peut y
avoir intervention lors du protêt d'une lettre de change on
d'un billet, si quelqu'un se présente pour faire honneor
à l'une des si^atures de cet effet : l'intervention et le
paiement sont constata dans l'acte de protêt ou à la
suite.
Dans le Droit politique, on nomme Intervention l'acte
d'un État qui prend parti dans la querelle de deux autres,
ou dans les dissensions civiles d'un pays étranger. Cetto
intervention peut s'effectuer, soit en fournissant des
armes et des subsides à l'un des belligérantSf soit par des
conseils et des menaces, soit par la force ouverte ; elle est
donc tantôt officieuse ou pacifique, tantôt armée. Elle
peut être spontanée, ou résulter d'engagements anté-
rieurs, ou être provoquée par la demande de l'une des
puissances en lutte. L'intervention déterminée par des
motifs d'ambition personnelle, exécutée en vue d'une
conquête, est une hypocrisie et un crime. C'est égale-
ment un crime pour un gouvernement d'intervenir dans
un pays étranger pour implanter par la force des institu-
tions et des hommes dont ce pays ne vent pas. Une in»
INT
1093
ixr
tarrentlon dans la querelle de deux peuples n*a de raison
d'être pour un autre peuple, que s*il lui faut pounroir à
tt propre aécorité, défendre son principe ou tout autre
gnûid intérêt national.
Sous la Restauration, il y eut en Europe abus de Tinter-
vention année : c^était une des conséquences du principe
ie celte ligue appelée du trop beau nom de Sainte-Alliance,
et qui fut un prétexte aux étrangers pour envahir notre
pays en 1815; aussi , la première chose que fit la France,
sprës sa RéTolution de 1830, fut de proclamer le principe
de Don-intervention pour elle-même et pour les autres.
Par cette déclaration aussi hardie que flère, elle se donna
uso force morale de plus, et se fit respecter de TEurope.
Le parti^ ultra-libéral voulut appli<}uer ce principe avec la
même rigoeur absolue doux la Sainte-Alliance avait fait
.preuve k regard du principe contraire pour réprimer les
'tentatives d'émancipation politique : ainsi, en 1831, les
Romagnes a*étant insurgées, les Autrichiens marchent
pour les fiiire rentrer sous Tautorité légitime. Alors l'oppo-
lition demande ^e la France intervienne à main armée,
puisque les Autrichiens violaient le principe de non-inter-
TCQtion. Biais, en Politique, il ne peut y avoir de principe
absolu, parce que le premier principe comme le premier
devoir d*un gouvernement est de songer à Tintérêt de son
propre pays. Washington, Tun des fondateurs de Tindé-
pendanco américaine, a toujours proclamé et pratiqué
cette doctrine, même vis-à-vis de la France. Casimir Pé-
rier, président du conseil des ministres au moment de
rinsnrrection des Romagnes, répondit à ceux (jvlï vou-
laient qa'ane armée française fût envoyée en Italie : « Un
principe est pratiqué, est professé par nous ; est-ce à dire
que noua porterons nos armes partout où ce principe ne
sera paa respecté? Ce serait une intervention d*un autre
genre. Le droit de non-intervention idnsi entendu servi-
rait de masque à Tesprit de conquête. LMntérêt et Thon-
neur de la Fiance pourront seuls nous faire prendre les
armes ; le san^ français n'appartient qu*à la France. » Le
bon sens public applaudit à ces paroles, et Tiotervention
année n'eut pas heu. B. et G. D— t.
INTESTAT (Ab). V. Ab Intestat.
INTIMATION (du hitin intimare, enjoindre), assigna-
tion que rappelant d*un Jugement donne k la partie oui
a obteaa gain de cause, pour qu'elle ait à comparaître oe-
vant de nouveaux Juges. Vmtimé est le défendeur en
appel, y. DéPEiiDEim.
INTINCnON, en termes de Liturgie, mélange qui se
fait à la Messe, entre la consécration et la communion,
d^one petite partie de Thostie consacrée avec le sang
d8j..a
INTOLÉRANCE. F. Tolérance.
INTONATION , manière de donner à ce qu'on lit ou ré-
cite le ton convenable, en pliant la voix aux diverses in-
flexions qui expriment, selon la nature des pensées et des
sentiments, la force ou la douceur, la gaieté ou la pas-
sion. Les nuances de l'intonation consistent dans le plus
on moins d'élévation, dans le plus ou moins de lenteur ou
de brièveté des sons. Au milieu de la conversation même,
il est rare que l'idée instantanément conçue n'emprunte
pas, pour se présenter au dehors, le ton le plus naturel
et le plus vrai. Dans le débit oratoire ou thé&tral , les in-
tonations fausses résultent de l'ignorance, de l'insensi-
Mlité ou du mauvais goût. — En Musique, VlnUmation
est l'acte d'émettre le son. Sa Justesse dépend de la voix
et de l'oreille ; sa netteté s'acquiert par l'exercice. Les
clefs et leur armature sont dites signes d'intonation. —
Dans le Plain-chant , V Intonation est la manière de com-
mencer le chant ^u premier verset d'un psaume. Il y a
trois espèces d'intonations : 1<* les intonations solennelles,
qui servent à chanter le verset du psaume qui suit l'in-
troït, et les deux versets de la doxologie; elles ne sont
d'usage qu'à l'introït de la messe ; 2° les intonations fes-
tfroies, qui sont celles des psaumes et des cantiques des
Matines, liiudes, ou Vêpres; on ne les emploie que les di-
maoches et les Jours de fête ; 3» les intonations fériales,
Sd sont appliquées aux mêmes parties de l'office que les
looations précédentes, mais dont on se sert aux fêtes
simples et aux Jours fériés.
INTRADOS , en termes de Construction , partie inté-
rieure et concave d'un arc, d'une voûte. Vextrados en
est le parement extérieur. On dit aussi douelle intériewre
et douelle eaOénewre.
INTRANSmF, se dit des verbes exprimant un état ou
une action ne sortant pas du snjet : tels sont, en français,
bianckir (dans le sens neutre), dtner, souper, marcher,
parler, fleurir, dormir, etc. 'Tous les verbes intransitifs
•it neutres; mais tous les neutres ne sont pas intran-
sitifs : ainsi venir, aller, entrer, sortir. V, Nbdtkb. P.
INTRIGUE (du latin intricare, embamuser, em-
brouiller). Cest, en Littérature, l'ensemble des moyens
par lesquels est développé le sujet d'une tragédie, d'^^une
comédie ou d'un drame.
Dans les littératures grecque et latine, les intrigues de
tragédie sont extrêmement nmples, et sacrifiées ordinal-
rement aux développements des caractères principaux. Le
personnage collectif qu'on appelle le chœur y prend une
part importante, et qui fait ressembler, en plusieurs
points, la tragédie antique k nos grands opéras.
L'intrigue de la comédie grecque était encore plus
simple, puisque Térence, en imitant Ménandre, prenait
deux de ses comédies pour en composer une seule, ce qui
le fit appeler demi-Ménandre. La construction même des
thé&tres des Anciens, leur immensité, était une des causes
Î[ui imposaient aux poètes une composition simple, si dif-
érente de nos intngues dramatiques , représentées de-
vant un auditoire douze ou quinze fois moins nombreux,
et dans des salles où tout est arrangé pour l'illusion à»
la scène. Je m'imagine que, chez les Grecs et chez les
Romains, le public n'était attentif qu'à ceartaines scènef
capitales d'un ouvrage, et n'écoutait guère le reste, à peu
près comme, en Italie, on écoute les opéras italiens. L'in-
trigue tragique étant toujours un fait de l'histoire ou de
la religion nationale, le titre seul de la pièce suffisait pour
mettre les spectateurs au courant du sujet traité ; mais
l'intrigue comique n'offrant pas la même ressource, et,
d'ailleurs, étant un peu plus compliquée, les poètes
l'expliquaient tout au long dans un prologue^ On voit,
par ce fait seul, que le principal intérêt des pièces devait
être dans certaines mènes, dans certains rôles, dans le Jeu
des acteurs, et que l'intrigue n'occupait qu'un rang très-
secondaire. Chez les Modernes, le thé&tre comique prend
ou cherche ses types dans la société, parmi les spectateurs
même, pour ainsi dire; chez les Anciens, les types de la
comédie sont des esclaves, des aifranchis, des maqui-
gnons , en un mot , l'image d'un monde de bas étage, de
gen% de mauvais lieu, et qui n'étaient Jamais admis dtians
la société civile, ni surtout dans celle des femmes hon-
nêtes. Il était interdit aux poètes de mettre sur le théâtre
aucune imitation de la vie de famille. On voit combien
ces différences si tranchées, dans le choix possible des
si^ets, dans la construction des thé&tres, et dans la na-
ture des spectateurs, ont dû en mettre dans la composi-
tion des intrigues, surtout pour la comédie.
Chez nous, où la tragédie n'est qu'une imitation plus
ou moins perfectionnée de celle des Anciens, elle a
aussi , presque toujours, pour point de départ une donnée
historique, sur laquelle le poète dispose des incidents,
bien liés les uns aux autres, bien combinés pour exciter
la terreur ou la pitié, et qui conduisent à un dénoûment
souvent aussi donné par l'histoire. Horace, Cinna, la
Mort de Pompée, de P. Corneille, sont des sujets dont le
dénoûment est forcément historique. Nous dirons la
même chose d'Esiher, é^Athalie, de Britannicus, de Ra-
cine, et même de toutes nos tragédies, puisque, depuis
l'origine de notre thé&tre, les poètes semblent avoir
admis, comme règle inriolable, <{ue le s^jet d'un poème
tragique doit être pris dans l'histoire, la légende ou la
fable.
L'intrigue de comédie est de deux sortes : celle de la
comédie de caractère et celle de la comédie d'intrigue; on
donne à la première moins d'importance, afin de laisser
plus de place au développement du caractère, comme
dans le Misanthrope de Molière ; la seconde est plus forte,
plus compliquée, parce que les événements mêmes de la
pièce en font le principal intérêt.
Les ouvrages de théâtre étant essentiellement fidts pour
être représentés plutôt que lus, une intrigue bien conçue,
bien tissue, bien composée, en un mot intéressante, tou-
chante ou comique, est presque toujours un puissant
élément de succès. Si l'on Juge une tragédie ou une co-
médie au point de vue purement littéraire, l'intrigue bien
faite est sans aucun doute un mérite ; mais si l'exécution
ensuite est faible ou médiocre, c'est un genne de mort
pour l'ouvrage. On a, dans l'histoire du thé&tre, des
exemples de trè»-grands succès dus à une intrigue inté-
ressante, et, néanmoins, comme les pièces étaient faible-
ment exécutées, elles sont tombées dans l'oubli, dès
qu'elles ont pu être Jugées de sang-froid. Thomas Cor-
neille a été plusieurs fois dans ce cas, par exemple pour
ses tragédies de Timocrate, de StUicon, de Ùamma^
d* Ariane, qui obtinrent un succès de cent représentations
consécutives, et que personne ne connaît plus depuis
deux siècles. Les intrigues des tragédies de Pradon ^
INT
1094
INV
t»nt pas beanooap inférieures à celles de Racine; mais
tezécution a tout tué.
Dans la comédie, surtout la comédie en prose, Texécu-
tion a moins d'influence parce qu'elle est oeaucoup plus
bcile ; aussi , avec un sujet heureux , habilement (Ûsposé
et composé, un auteur peut espérer le succès. Molière et
Regnard ont laissé, dans la plupart de leurs comédies,
des modèles dMntri^es. Parmi les auteurs secondaires,
Beaumarchais, Sedaine, Picard, Alex. DuTal,-et, de nos
Jours, Casimir Delavigne, Scribe, ont beaucoup de comé-
dies bien intriguées; nous citerons de Beaumarchais, le
Barbier de Séville et le Mariage de Figaro; de Sedaine,
U Philosophe sans le savoir j le Déserteur, Richard Coeur
de Lion; de Picard, le Collatéral , Du Hautcours, les Ma-
rionnetteSf le Conteur, les Deux Philibert, les Trois
auartiers; d'Alexandre Duval, la Jeunesse d'Henri V, le
Turan domestique ^ Edouard en Ecosse; de G. Delavigne,
Marino Faliero, Louis XI, les Enfants d^Êdouard, tra-
gédies; VÊcoledes Vieillards, Don Juan d'Autriche, co-
médies; de Scribe, la Camaraderie, les Mariages aar^
aent, Une Chaîne, Bertrand et Raton, comédies, la Dame
blanche, VAmbassadrice, le Maçon, te Domino noir, Fra
Diondlo, la Sirène, les Diamants de la couronne, Haydèe,
la Part du Diable, etc., opéras-comiques. Une œuvre
dramatique bien écrite et mal composée, ou bien com-
posée et mal écrite, ont Tune et l'autre chance certaine
de naufrage devant les spectateurs ou devant les lecteurs.
L'intrigue fait donc partie intégrante de la composition
e* de l'exécution, et ce n'est qu'en réunissant ces deux
aualités qu'un ouvrage approche de cette perfection rela-
ve, qui lui assigne un rang durable parmi les produc-
tions littéraires. Entrer dans les éléments de l'mtrigue
tragique ou comique serait subtiliser sur la question ; nous
tenons pour bon l'axiome que :
Toua les genres sont bons hors le genre oinnxeiix.
Peu importe dor^ qu'il y ait dans presque toutes les in^
trigues dnunatiqi J une passion d'amour plus ou mdlns
importante. Noub noterons seulement qu'au xvii* et au
xvin* siècle on en a fait abus dans le tragique, comme
dans le comique; et que cette passion, ayant le but hon-
nête du mariage, est le fond de toutes les intrigues co-
miques des deux derniers siècles. Les auteurs de nos
Jours, en voulant sortir du chemin battu, ont pris le
contre-pied, et mis en scène des amours malhonnêtes, ce
qui fit plus d'une fois du théâtre une école de mauvaises
mœurs. Néanmoins, comme de tout effort de l'esprit il
sort presque toujours un progrès à côté d'un abus, le ma-
riage n'est plus maintenant le pivot unique ou principal
Bar lequel tournent toutes les comédies ; le sujet et les
intrigues sont pris plus dans le vrai de la vie, et c'est en
cela que le théâtre du xix* siècle se distingue de ses de-
▼anders, de même que tout le théâtre moderne, depuis
le xvu* siècle surtout, est très-supérieur à celui des An-
ciens, sous le rapport de l'intrigue. G. D— y.
INTRODUGTEURS DES AMBASSADEURS. V. notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
INTRODUCTION, espèce de discours préliminaire mis
an devant d'un ouvrage littéraire ou scientifique; il est
destiné à faire entrer Te lecteur dans l'esprit qui a pré-
•idé à la composition du livre, ou à lui présenter un ta-
bleau général soit de l'état antérieur de la science, soit
des faits historiques, litt^jraires ou autres, dont la con-
naissance préalable lui peut être utile ou indispenssd)le
E'ur bien saisir l'ouvraée offert à sa curiosité. Certaines
troductions forment un véritable livre qui peut se dé-
tacher de l'ouvrage principal : telle est celle que Voltaire
a mise en tète de son Essai ^ur les moeurs et qu'il a in-
titulée Philosophie de l'histoire, et celle dont Robertson
a fait précéder son histoire du règne de Charles-Quint,
beau tableau de l'histoire générale de la civilisation euro-
péenne depuis la destruction de l'Empire romain Jusqu'au
xvT siècle. — Certains ouvrages isolés ont reçu de leur
anteur le titre d'Introduction; telle est V Introduction à
la vie dévote, de S* François de Sales. P.
niTRODucnoN, morceau de musique d'un mouvement
grave, composé d'un petit nombre de phrases, souvent
même de quelques mesures ou de quelques accords, et
qni annonce le premier allegro d'une pièce instrumen-
tele. Ainsi 9 l'ouverture de la Flûte enchantée de Mozart
commence par une introduction. Quelques compositeurs,
donnant plus d'extension et de mouvement k ce morceau,
loi ont fait tenir la place de l'ouverture; le Robert le
Diable de Meyerbeer en fournit un bel exemple. On
dono aussi le nom d^ Introduction aux morceaux ds
chant qui viennent immédiatement après l'ouvertore et
où se trouve l'exposition du drame musical : les Nocet
de Figaro et le Don Juan de Mozart, la Dame blanche de
Boieldieu, la Gazza ladra^ Sémiramis, la Cenerentola et
Guillaume Tell de Rossini, offrent des modèles de ces in-
troductions scéniques. B.
INTROÏT (du latin introihu, entrée), début de la
Messe, comprenant : i* un dialogue entre le célébrant et
le servant au bas des degrés de l'autel, dialogue dont les
premiers mots sont : IntrtiKbo ad altare Dei; ^ une an-
tienne avec verset que le prêtre récite à l'autel, du côté
droit, et qui annonce le si^et du mystère et de la fête
qu'on va célébrer. Dans les grandes messes, le chœur
chante en même temps cette antienne, qui a aussi le
nom d'IntrcHt; elle précède le Kyrie» Il ny a pas d'In-
troït le Samedi saint ni la veille de la Pentecête, parce
crue, ces Jours-là, dans l'ancienne Église, le peuple était
déjà assemblé depuis longtemps pour le baptême des ca-
téchumènes. Pendant longtemps on ne distingua chaque
dimanche de l'année que par le premier mot de llntroit
de ce ]our : le dimanche de Lœtare, d'Oculi, de Quasi-
modo^ etc. L'usage d'une antienne à l'Introit remonte an
pape Célestin.
INTRONATI (Académie des), c-ènl. des hébétés, des
imbéciles. Société formée à Sienne vers 1450, dans le but
de cultiver la langue italienne. Leur nom était une anti-
phrase, ou marquait le peu de prétention qu'ils avaient
à l'esprit. Il y eut une Académie du même nom à Naples.
INTRONISATION, nom donné à l'installation d'un
évêque, parce qu'on le fait asseoir sur la chaire en forme
de trône qu'il doit occuper.
INTRUSION, en termes de Droit canoni({ue, action
d'usurper une dignité ou un ollice ecclésiastique. Celui
qui s'en rend coupable est qualifié d'intrus. On distingue
trois sortes d'intrusion : la 1'* consiste à se mettre en
possession d'un bénéfice ou office, sans avoir ni demandé
ni obtenu aucun titre; la 2* à se mettre en possession
avec un titre vicieux et nul ; la 3* à prendre possession
avant d'avoir reçu les lettres de visa de l'ordinaire. L'in-
trusion emporte une incapacité perpétuelle de posséder
le bénéfice usurpé. On a quelquefois donné le nom d'm-
trtu, mais improprement, au bénéficier gardant son bé-
néfice après en avoir encouru la privation.
INTUITION (du latin intueri, regarder). Ce mot eut
d'abord un sens exclusivement religieux : la théologie
entendait par là une vue immédiate et surnaturelle, ac-
cordée soit aux élus dans le ciel, soit à quelques privi-
l^és id-bas; c'était un des effets de l'extase. La philo-
sophie a pris le même mot en modifiant sa signification.
Kant nomme intuition }b. perception par les sens, et il
distingue les mtuitions pures, comprenant le tem]» et
l'espace , et les intuitions empiriques ou représentations
sensibles. Toute connaissance qui résulte d'une intuition
est dite intuitive, tandis que celle qui résulte d'un rap-
ligence saisit l'absolu. Les écoles écossaise et français
appellent intuitifs tout Jugement et toute croyance qui se
présentent spontanément à l'esprit, en appliquant cette
appellation aux résultats donnés par les sens et à ceux
produits par la Raison. R.
INTUSIATA, sorte de robe que les femmes de Tan-
cienne Rome mettaient dans l'intérieur de la maison.
INVALIDES, y. notre Dictionnaire de Biographie et
d*Histoire,
INVENTAIRE. Tout commerçant est tenu [Code de com-
merce, art. 9) de faire tous les ans son inventaire, c-èrd.
le relevé exact de toutes ses dettes et de toutes ses
créances, de son passif et de son actif, et d'établir nette-
ment par la balance sa situation commerciale. Il doit
écrire cet inventaire sur un livre spécial, signé et para-
phé. Il en est beaucoup qui négligent cette prescription de
la loi; et c'est un grand tort, puisque, en cas de faillite,
des livres tenus irrégulièrement peuvent entraîner la
bancperoute simple, et que l'absence des livres exigés par
la loi peut entraîner la banqueroute frauduleuse ( K. Ban-
queroute). L'inventaire ne contient qu'un abr^ som-
maire de chacun des chapitres de l'actif et du passif:
les détails se trouvent sur les livres. — On nomme en-
core Inventaire l'état des biens, meubles, titres, papiers
d'une personne ou d'une société. Le Code Napoléon
(art. 1414 et suiv.) trace les règles qui concernent l'in-
ventaire par rapport au mariage; le Code de procédure
(art. 928, 941-944), celles à suivre ponr dresser un inven-
taire après décès. Un inventaire est exigé de la part de
ceux qui sont envoyés en possession provisoire des bieot
INV
1,095
ION
^im absent; de la part du tuteur à son entrée en fonc-
tions; de rhéritier qui veut accepter une succession sous
bénéfice dMnventaîre ; du curateur à une succession va-
cante ; d« Texécuteur testamentaire lorsquMl y a des hé-
ritiers mineurs, interdits ou absents; de celui qui est
grevé de restitution ; de Tusufruitier à son entrée en
jouissance; de celui qui a un droit d'usage ou d^babita-
tion à exercer ; du mari, lorsqu'il survient une succession
aux èpoQX vivant en communauté ; de la veuve commune
en bâsns et survivant, qui veut conserver la faculté de
renoneer k la communauté ; et des époux qui se marient
sans communauté. L'inventaire peut être dressé par acte
sous seing privé; mais celui après décès doit être fait
devant notaire. Les frais se prélèvent sur les biens in-
ventoriés. V. De Madré, Formulais pour inventaires,
1852, in-4«.
ofVE^rrAniB (Bénéfice d*}. F. Bâiéncs d'inventaire.
INVENTION, première partie de la Rhétorique. Elle
eoDsiste, dit Cicéron, dans la recherche des raisons vraies
on vraisemblables qui peuvent appuyer la cause. Elle
a donc pour objet de trouver les moyens de convaincre et
de persuader. L'orateur doit chercher d'abord les moyens
de convaincre ; car il lui faut, avant tout, établir la vérité
de son discours : quand une fois la conviction sera passée
dans l'esprit des auditeurs, il s'efforcera de les émouvoir, et
U leur persuadera de faire ce dont il les aura convaincus. Il
est nécessaire que la persuasion repose sur la conviction ;
car, le premier entraînement une fois passé, elle pourrait
tomber d'elle-même, faute d'un fondement solide, ou
être détruite par un discours plus convaincant de l'ad-
fersaire. Instruire et toucher sont donc les premiers de-
voirs de l'orateur; mais, cour y réussir, il faut qu'il
plaise et ^'il sache se concilier la confiance, l'estime et
la bienveillance des auditeurs. A ces trois points : ins-
truire, plaire, Umcher, correspondent trois parties de
VlnvenUon. On instruit par les preuves, on plaît par les
nweurs, on touche par les passions. Il nous reste de Ci-
céron deux livres De VInvention.
Les Anciens étudiaient llnvention surtout en vue de
Fart oratoire, et tous leurs Traités de rhétorique ne
s'adressent qu'à l'orateur. Mais le poète, l'historien, le
philosophe, tous ceux en un mot qui veulent écrire, sont
obligés aussi de chercher d'abord le sujet qu'ils veulent
tiiiter, et ensuite la manière la plus convenable de com-
moniquer leurs idées à autrui. H. D.
avnrnoN (Brevets d'^. V» Brevets d'invention.
INV'ERSION, disposition des termes de la proposition,
ou des membres de la phrase, dans un ordre différent de
cdoi qui a été consacré par l'usage général. Ainsi, en
français, où il est de principe que le sujet se place
d'abord, puis le verbe, puis l'attribut, et que la proposi-
tion principale soit suivie des propositions qui lui sont
subordonnées logiquement, il y aura inversion toutes les
fois qu'il sera dérogé à cet ordre. C'est en ce sens que
nous disons que les langues anciennes sont des langues
à inversion, parce que généralement le verbe y est placé
h la fin ; que les adjectifs, soit attributs, soit qualifica-
tifs, y sont plus généralement placés avant les substan-
tifs, et que les compléments d'un substantif ou d'un
adjectif le précèdent ordinairement au lieu de le suivre.
Ce n'est pas cependant que notre langue, surtout en
poésie, ne puisse user de cette ressource souvent pré-
cieuse; ainsi Racine a dit {AthcUie, II, 5) :
Dans le temple des Jtilfs un Instinct in*a pcusiie.
Et d'opoijer leur Dien j*ai conçn la pensée.
Bans nntf petite pièce de poésie légère (le Mondam)^
Vohaire a employé l'inversion d'une manière heureuse
pour un effet imitatif ; voulant parler d'un gourmand
mort d'indigestion, il a dit :
Oppressé fut d'une indigestion
à l'harmonie de la phrase, ou même à la clarté. « Restait
cette redoutable infanterie d'Espagne, » a dit Bossuet,
qai ailleurs dit encore : « Aussi vifs étaient les regards,
ausst vite et impétueuse était l'attoflue, ausst fortes et
inîvilables étaient les mains du prince de Condé. « —
c Avec le mot de gloire, on obtenait tout de lui, » dit
Voltaire en parlant de Charles XII. L'inversion est sou-
vent commandée dans notre langue par l'usage : « Que
mûes-^vous? Ne me Vavez-^vous pas fait connaître? » —
Plos une langue est riche en inflexions grammaticales.
plus elle a une tendance synthétique, plus aussi elle
peut librement user de l'inversion. Voilà pourquoi le
grec et le latin sont des langues essentiellement transpO'
sitives. De là cette variété presque infinie de leurs con-
structions ; de là cette faculté de suivre, dans la disposition
des éléments de la phrase, soit l'ordre logioue de la pen-
sée, soit l'ordre capricieux de la passion ; ae là ces c^ets
merveilleux de style que nos langues modernes sont
presque touiours impuissantes à reproduire. Mais ce sont
là surtout des ressources précieuses pour la poésie et
l'éloquence. P.
INVESTIGATION (Méthode d'). F. Analyse.
INVESTISSEMENT, opération de siige consistant à en-
velopper de troupes une place attaquée.
INVESTITURE. F. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire.
INVIOLABILITÉ, privilège ou droit d'être à l'abri de
toute action violente. Le premier droit de la souverai-
neté est d'être inviolable ; ce principe est fondé , dans les
gouvernements absolus, sur l'idée que le roi est le repré-
sentant de Dieu sur la terre. Dans les monarchies consti-
tutionnelles, l'inviolabilité du roi repose sur ces maximes
d'ordre public, que « le roi ne peut mal faire, » que « le
roi règne et ne gouverne pas ; » mais elle implique comme
corollaire indispensable la responsabilité des ministres.
La représentation nationale est inviolable au même titre
que la souveraineté du peuple : chaque député , manda-
taire de la nation, est inviolable, ou du moins aucune
poursuite ne peut être exercée contre lui , même en cas
de culpabilité , sans l'autorisation de l'assemblée dont il
fait partie. Les ambassadeurs sont inviolables de par le
Droit des gens. A la guerre, la personne des parlemen-
taires est inviolable. L'inviolabilité du domicile des ci-
toyens est une des garanties de la liberté individuelle ;
l'autorité publique ne peut y pénétrer qu'après l'accom-
plissement des formalités l^ales. L'inviolabilité des let-
tres et de la correspondance privée est un devoir pour les
gouvernements.
INVITATOIRE, nom de l'antienne par laquelle on ré-
pond, dans l'Église romaine, au psaume des Matines
Venite exultemus, qui est une invtUUion à chanter les
louanges de Dieu.
INVOCATION (du latin in, dans, eivocare, appeler),
appel que l'homme adresse à la divinité ou à toute autre
puissance supérieure. L'Invocation était en usage chez
les Anciens aans leurs mystères, leurs sacrifices, leurs
hymnes, et jusque dans leurs chœurs dramatiques. Les
devins invoouaient les démons. Chez les cnrétiens, l'In-
vocation de la S** Vierge et des Saints est aussi andenne
que l'Église. Dans la liturgie grecque et orientale, aprèe
que le prêtre a rapporté, dans le sacrifice de la messe,
les paroles de J.-(!., il prononce une prière dite invoca-
tion du S^-Esprit , et que l'on croit essentielle à la con-
sécration.
INVOCATION , partie du début d'un poème épique où le
poète appelle une divinité qui l'inspire. Au commence-
ment de V Iliade, Homère invoque simplement la Muse;
il en est de même de Virgile dans VÊnéide, On trouve
de belles invocations dans les Georgiqt^s du même poète
(à Bacchus, à Cérès, à Neptune, à Minerve, etc.), dans
le poëme De la nature des choses par Lucrèce (à Vénus),
dans les Métamorphoses d'Ovide, etc. On les comprend
quand on se rappelle les habitudes de la religion païenne;
mais, chez les poètes modernes, toutes les invocations de
ce genre sont factices.
INVOCATION , terme de Diplomatique. F. Diplôme.
lOLOF (Idiome). F. Wolop.
IONIEN (Dialecte), un des quatre principaux dialectes
de l'ancienne Grèce. On le parlait surtout dans les colo-
nies de l'Asie Mineure et les lies de l'Archipel. Il se divise
en ancien et en nouveau. Homère et Hésiode ont, en géné-
ral, écrit dans le premier des deux, qui originairement dif-
férait peu ou point de l'ancien attique. La mollesse plus
récente de ce dialecte prit naissance lorsque les Ioniens
commencèrent à se mêler avec d'autres peuples par le
commerce, et à envoyer des colons au dehors. Ana-
créon, Hécatée, Hérodote, Hippocrate, Phérécyde, Dé-
mocrite, en ont fait usage. Le dialecte ionien était le
plus doux de tous les dialectes grecs, à cause de la f^
guente rencontre des voyelles, et de l'absence non moins
fréquente des aspirations. F. Guill. Dindorf , Comment
tat%o de dialecto Berodoti cum dialecto attica vetmi
comparata (dans l'Hérodote grec -latin de Diflc^
Heyne , Observations sur V Iliade, Raps. vnf , vers 226
et suiv., Sur la différence du dialecte ionien ions Homère
et dans Hérodote. P.
ION
1096
IRL
MNiiEN (Mode) , un des modes de la musique des an-
dens Grecs, le plus efféminé de tous. Il était placé entre
le dorien et le pjirygien. Il convenait aux fôtes et aux
danses voluptueuses. Dans la suite , le aystème musical
s*étant étendu k l'aigu et au grave, il y eut un mode Ay-
per-ionien, c-à-d. ionien aigu.
IONIENNE (École), école de philosophie grecque, ainsi
nommée parce que la plupart des philosophes qui en fai-
•aient partie étaient nés en lonie. Cette école chercha à
Ainsi, Thaïes, son fondateur, né en 040 av. J.-C, partant
d*une observation insuCBsante, regarda Teau comme Télé-
ment dont toutes choses étaient faites; pour Anaxi-
se séparant à beaucoup d*égards des précédents, il faut
dter Heraclite, qui attribuait au feu le rôle de principe
élémentaire. Anaxagore, reprenant un siéde plus tard
l'hypothèse d'Anaximandre, y ajouta un esprit supérieur,
distinct du chaos, auquel il communiquait te mouvement
et rharmonie; il proclamait ainsi une intelligence di-
vine, et faisait entrer TÉcole dans une voie nouvdle. Les
systèmes panthéistes des autres Ioniens étaient indépen-
dants des croyances populaires , sans les exclure ; celui
d'Ânaxagore leur parut hostile ; il fut poursuivi. Peu de
temps ayant lui avait paru Hermotime de Glazomène,
3ui porta son attention sur le principe pensant. Les deux
erniers philosophes de TÉcoIe furent Diogène d^Apol-
lonie, qui suivit les traces d'Anaxagore, et ArchélaOs de
Milet, qui fut un des maîtres de Socrate. En prenant le
monde physique pour l'unique objet de ses spéculations,
l'École ionienne s'attacha spédalement à la certitude des
sens; elle fut, pour cette raison, regardée comme la pre-
mière école sensualiste. V. Tiedemann, Premiers pnUo-
sophes de la Grèce, in-8S Leipzig, 1780 (en ail.); Bou-
terweck, De primis phUosophorum grœcorum aecrelis
physicis, dans les Comtnentaires de la Société de Gœt-
Ungue, 1811; Henri Ritter, Histoire dj la philosophie
ionienne^ in-8S Berlin, 1821 (en alL); Mallet, Histoire
de la philosophie ionienne, in-8<*, Paris, 1842. R.
IONIQUE (Ordre), un des ordres de l'architecture
tf icque. Entre la mi^esté un peu pesante de l'ordre
ûdrique et rextrème richesse de Tordre corinthien. Il
représente les qualités intermédiaires , la gr&ce et l'élé-
gance. Son nom n'implique pas qu'il ait été inventé en
lonie (on ne sait qui s'en servit le premier), mais qu'il
fut particulièrement en faveur dans ce pays. On en cite
peu d'exemples dans la Grèce proprement dite. Le» Ro-
mains ne l'employèrent qu'accidentellement, par exemple
au temple de la Fortune Virile, au thé&tre de Blarcellus,
et aux thermes de Dioclétien. Des savants ont soutenu
que, dans l'origine, l'ordre ionique servit exclusivement
pour les monuments funéraires. V, Colonhb, Base, Or-
dres, ARCHnnAVR, Corniche.
IONIQUE (Pied), pied de la versification grecque et la-
tine , composé de six temps , soit deux longues et deux
brèves (c'est l'ionique majeur)^ soit deux brèves suivies
de deux longues (c'est l'ionique mineur).
IONIQUE (Vers), vers grec et latin, dont l'invention est
attribuée au poôte Ion, de Chios, et qui était composé,
en tout ou en partie, de pieds ioniques, soit mineurs,
soit mineurs. La forme la plus usitée de Vionique ma-
jeur parait avoir été le tétramètre catalectique, de trois
ionimies et d'un trochée ou spondée final, la àxsnûèm
qrllaoe étant indifférente :
Pansa optime, \ divos cole | si vis bonus \ esse.
Le 3* pied est fréquemment un dichorée ou ditrochée :
Ter corripui terribi \ lem mUnû bï \ pennem.
Pbtboss.
L*ttne des longues, particulièrement la 2« de chaque pied,
le résout fréquemment en deux brèves :
^sè difmXniP \ diuès Hpèrïs \ et laboris | expers.
Pladtb.
Dans l*ionique suivant, c'est la i'* qui soufl^ la so-
lution:
Bèmmtà rû \ des qua puer \ os docent mag \ tstru
On voit au 3* pied an épitrite second, dans ce vers d'En-
niuB :
Nam qui lepid \ e postulat \ âltèriim frùttr \ aru
Le ditrochée se rencontre quelquefois au l*' pied. Planta
a substitué le molosse à Tionique ou au ditrochée initial.
Quô facto âut I dicto adest op | us quietus \ nesiL
Le 3* pied de ce vers peut être considéré^ soit comme
épitrite, soit, en supprimant s final de qmetus, comme
ditrochée. — On voit que l'ionique majeur tétramètre a
souvent, après le 2* ou le 1*' pied, une césure, qui pa-
rait toutefois n'avoir pas été indispensable, car il n'est
pas rare de la voir négligée.
Dans le vers ionique mineur, le ditrochée est remplacé
par le diiambe (^~^~'), qui s'introduit en se partageant
entre deux pieds consécutifs, c-à-d. que si la derniers
syllabe d'un pied devient ïambe, le pied suivant perd
une brève, de sorte que les deux pieds réunis équivalent
effectivement à deux ioniques mineurs purs; en effet,
w w — V V — a pour équivalent w w - w - ^ — . Autr^
ment dit , lorsque la substitution lambique a lieu, le
1*' pied devient un péon 3*, et le suivant un épitrite se-
cond. Cette particularité métrique de l'ionique s'appdait
anacliue, c-à-d. réfraction, repli. On n'en trouve pas
d'exemples dans ce qui nous reste d'ioniques latins. Les
lyriques éoliens paraissent avoir affectionné les ioniques
mineurs purs ; les lyriques d'Ionie, ïanaclcue iambiquf'
les tragiques d'Athènes se rapprochent davantage des
Êoliens, les comiques des lomens. Il y a des ioniques
mineurs de différentes mesures : i** des dimètres acata-
lectiques ; 2* des dimètres catalectiques; 3<* des trimètres
acatalectiques et catalectiques ; 4** des tétramètres acata-
lectiques et catalectiques. Le dernier pied des différents
catalectiques est l'anapeste. On trouve, mais seulement
dans les pièces b^ntines, lecholiambe substitué au
l*' ionique des tnmètres. Les solutions de longues en
brèves, ou les contractions des deux brèves en une lon-
gue, sont bcHUicoup moins fréquentes que dans l'ionique
majeur. — Il nous reste peu de pièces composées entiè-
rement d'ioniques mineurs. Celle qu'on trouve duis le
3* Uv. des Odes d'Horace est en tétramètres mêlés de
quelques ^mètres. On trouve chez les tragiques grecs
un assez grand nombre de vers ioniques mineurs dis-
posés en systèmes; ce sont des dimètres, des trimètres
et des tétramètres entremêlés : on peut citer comme
exemple le dernier chœur des Suppliantes d'Eschyle, de-
puis le V. 1015 Jusqu'au v. 1050. P
IRANIENNES (Langues). V. Indo-Europ<eiines.
IRLANDAIS (Idiome), un des idiomes celtiques (K. ce
mot)^ de la branche nélique, appelé ErinacK par ceux
qui le parlent, et Irish par les Anglais. Il est rempli de
sons gutturaux , et on trouve peu de langues dont l'or-
thographe s'éloigne autant de la prononciation. On dit
qu'autrefois les Druides du pajrs l'écrivaient au moyen
d'une sorte de runes qui portait le nom d'ogom, et se
composait de petites lignes tracées perpendiculairement
ou obliquement à une longue ligne horizontale qui les
réunissait. Dans les plus anciens manuscrits qui nous
sont parvenus, il est écrit au moyen d'une variété parti-
culière de l'alphabet latin, dont l'invention est attribua
à S^ Patrice. V. BfacCurtin, Eléments of the Irish lan-
guage, Louvain, 1728, in-S", et Enalish^irish Dictùmary,
Paris, 1732, in-4« ; O'Brien , Irish-English Dictionary,
Paris, 1768, in-4*, et Irish Orammar, Dublin , 1809,
in-8®; Vallencey, An Essayon the antiquUy of the Irish
lanauage,J)nb\in<, 1772, et Grammar of the Ibemo-Celtie
or Irish lanquage, ibid.,1782,in-8<*; J.-J. Marcel, i4/p^
bet irlandais^ précédé d*une Notice historique, Paris,
1801, in-8o ; O'Reilly, Irish-English Dictionary, to which
is anneaoed an Irisn Grammar, Dublin, 1817-22 ; O'Do-
novan, Grammar of the Irish language, Dublin, 1845.
IRLANDAISE (Uttérature}. La littérature irlandaise
comprend deux classes distinctes de compositions, les
vieux chants des bardes païens que nous a conservés la .
tradition, et les œuvres chrétiennes des anciens moines.
Quelques chants irlandais remontent trè»-probablemeat
aux vu* et vi* siècles ; on les trouve réunis dans l'impor-
tant ouvrage publié par le D*" O'Connor sous le titre de :
Rerum hibemicarum scriplores veteres, 4 vol. in-i*.
Du v< au vm* siècle, période pendant laquelle les pays
du continent tombèrent dans la barbarie , la tradition
des lettres latines et grecques se conserva en Irlande : il
y eut à Hy, Lismore, Bangor, CHonfert, Clonard, Ar«
magh, etc., des écoles où Ton allait étudier de toutes lei
IRR
1097
ISA
filgloi» Tobliies. Les maîtres irlandais se répandirent à
kor tour lur le continent : parmi eux on distingue, aux
n^ et vn* siècles, S^ Golomban, qui Yisita la Gaule, la
Saine et la Lombardie ; S^ Gall, son disciple; S^ Roding,
fondatetir de Beaulieu en Argonne; S^ Furcy, fondateur
de Lagnjr ; S* Uvin, qrni prêcha la foi chrétienne aux Gan-
tois; — au vin*, S^ Virgile, qui fut évoque de Salzbourg,
et ses compagnons de prédication en Bavière, S^ Declan
et S* Alto; Dobdan, dit le Grec, évoque de Chiemsée; les
(fimmairiens Colchut ou Coelchu le Sage, Cruindmelus
et Halnchanus; — au n*, Clément, qui fut appelé à la
ooor de Charlemagne ; le moine Dicuil , auteur du De
flWMura orbis terrée , publié par Walckenaér en 1807 ;
Qaade, gui a laissé des gloses sur presque tous les livres
de l'Écnture sainte; Dungal, chargé par Charlema^e
dlostmire la Jeunesse de Pavie; Mannon et Jean Scot
Erigëoe, qui vinrent en Fhmce à Tépoque de Charles le
Chauve, etc.
IRON (Idiome). K. Oss^tb.
IRONIE (du grec eironiia^ ironie et interrogation),
Igore de Rhétorique oui cache un sens opposé au sens
propre et littéral, et qui n^est qu'une contre-vérité, comme
dans ces vers de Gilbert (Le dix-huitième siècle ) :
ITflbord eomme on prodige on le prftne partont :
Il nous Tante t en effet , c*e«t nn homme de goût :
Son chef-d'œnTre est toc^oars récrit qnl doit éclore;
On réeite déjà lee vers qa*il fait encore.
On distingue deux sortes dironie : Tune, enjouée, légère,
qui plaisante avec finesse; l'autre, aigre, mordante, qui
répand ramertume et le fieL En voici un exemple, pris
de Chamfort, qui, en ce genre, avait Tesprit et le cœur
mez riches. Il parle de la France du temps de Louis XV :
■ n y aurait une manière plaisante de prouver qu'en
France les philosophes sont les plus mauvais citoyens
âanu)nde; la preuve, la voici : c*est qu'ayant imprimé
une ptinde quantité de vérités importantes dans 1 ordre
politique et économique, ayant donné plusieurs conseils
utiles, consignés dans leurs livres , ces conseils ont été
niTis par presque tous les souverains de l'Europe,
presque partout, hors en France; d'où il suit que la
prospérité des étrangers augmentant leur puissance,
tands que la France reste aux mêmes termes, conserve
tes abus, etc., elle finira par être dans l'état d'infério-
rité, relativement aux autres puissances; et c'est évidem-
meot la foute des philosophes. »
Quelquefois Tironie est la dernière ressource de \& fu-
leor et du désespoir. Oreste apprend qu'Hermione n'a
a survivre à Pyrrhus, qu'il vient lui-même d'immoler ;
s'écrie {Androenaque, V, 5) :
Moe anx dleoz, mon malbeor pasie mon eepërancet
Oui, Je te loue, 0 Ciel I de ta pcruévéranoe 1
Et 0 termine cette affreuse ironie par un vers qui y met
la comble:
Bi Men! Je meurs content, et mon lort est remplit
Cest le sublime de la rage. — Les pamphlétaires affec-
tioDDent particulièrement l'ironie, dont ils tirent de
poinants effets ; mais c'est là un genre de mérite qui ne
dénote le plus souvent qu'un esprit envieux , médisant
et satirique, et que, sous ce rapport, tout écrivain sérieux
doit généralement sMnterdirc. V. Antiphrase, Astéishe,
CiuuesmsuE, Cbleuasme, Mmàse. G. D—y.
laoRiB socKATiQOE. F. Intkrrogatioiv (Méthode d').
e
etp manquent à ces idiomes.
IRRÉGUIJER , en termes de Grammaire, se dît de ce
qui n'est pas conforme aux règles établies et consacrées.
Ainsi , en français , un nom est irrégulier quant au
nombre, lorsque son pluriel est terminé par un x^ au
Heu d'un s, oui est le véritable signe du pluriel. Il y a
irrégularité dans la formation du féminin de l'adjectif
(ierf, qui fait tierce au lieu de tierse, que demande 1 ana-
logie. L'orthographe du mot absous, formé du latin abso-
'tUitf , est irr^gulière au point de vue de Tétymologie aussi
bien ^'aii point de vue de l'analogie avec le féminin,
qui fait ahsfntte (^abeoluta) ; il en est de même de favori .
<iiii devrait s'écrire par un ^. — La conjugaison française
est remplie de formes irrégulières : aïod Je suis, nous
sommes, je sertU, appartiennent au verbe être ;i* enverrai
est formé de envoyer. Je tiendrai vient de tenir. Je c***^"^
rieot do cueMw , on dit je Aati, tandis qu'on dit nous
haussons et haXr; j'ai, tu as, il a. Je wsu (autrefois ]e
tMu), tu vas, il va, ne peuvent se rattacher à aucun para-
digme ; yassieds, nous asseyons, assis, ont peu de rap-
port avec l'infinitif asseoir, et le participe de celui-ci fait
asseyant , lorsque le simple fait séant; Je puis, tu peux,
Je pourrai, ne rappellent guère au premier abord 1 infi«
nitîfpotttxnr; Je sais et sachant appartiennent à savoir;
quatre verbes, ils ont^ ils sont, ils font, ils vont, s'écar*
tent de la forme générale des troisièmes personnes du
pluriel , qui est ent, Naitre fait né au participe passé, et
naquis au passé défini; vivre fit longtemps véquis, auj.
remplacé par vécus, non moins irnîgulier, etc. Nous
avons des pass^ définis terminés tantôt en ù, tantôt en
ins, tau tôt en us, et des participes passés sans analogie
avec le passé défini , comme Je vins et venu , je mounu
et mort. Beaucoup de ces irrégularités s'expliquent par
l'existence de formes anciennes, que le temps a fait
disparaître : ainsi , Je cueille suppose une ancienne con-
jugaison cueiller, usitée encore dans les campagnes.
D'autres se Justifient étymologiquement : par exemple,
vous faites j vous dites, sont analogues aux formes la-
tines facitts, dicitis. Les irrégularités dans la décli-
naison et dans la conjugaison latines s'expliquent aussi ,
pour la plupart , par des archaïsmes oui se sont mêlés
aux déclinaisons et aux conjugaisons de la langue une fois
formée, quelquefois par des syncopes ou des contractions,
par des permutations de lettres, etc. La coqjugaison
grecque, bien que très-compliquée, est plus régulière et
plus méthodi^e.
Quant aux irrégularités de syntaxe et de construction ,
la plupart doivent être rangées parmi les figures de gram-
maire, telles que la syllepse, le pléonasme, Yellipse, l'tti-
version ou Vhyperbate, la suspension, Vanacolulhe, Vat'
traction (F. ces mots). — La prosodie et la versification
sont soumises à des règles fixes établies d'après l'usage
des meilleurs poètes; les irrégularités qui consistent à
s'en écarter sont généralement comprises sous le nom de
licences poétiques (F. Leceiige}. — En général, toute
irrégularité cesse d'être bl&maole si elle contribue à la
brièveté, à la concision, à la rapidité, à l'énergie de l'ex-
pression ou à l'euphonie, sans répandre sur le style au-
cune obscurité ou un air d'affectation; ce qui suppose
toujours une connaissance approfondie des ressources et
du vrai génie de la langue dans laquelle on écrit, P.
iRRéGuuERS (Tons). On nomme ainsi, dans le plain-
chant, les tons qui ne se terminent pas par leur note
finfUe régulière. On range aussi quelquefois parmi les
tons irréguliers des morceaux de plaln-chant qui ont dû
être transposés par suite de la réduction des douze modes
à huit. G'est'à tort; car, lorsque la finale se rapporte ré-
gulièrement à la quarte ou k la quinte normales de ces
tons, ils ne présentent aucune particularité qui puisse les
faire classer dans les tons irréguliers. La transposition ,
qui reproduit, dans une autre partie de l'échelle des
tons, un morceau bien composé , ne peut être regardée
comme une irrégularité constitutionnelle. F. C.
IRRIGATIONS. F. Coors d'eao.
ISAGOGE (du grec éis, dans, et agôgè, action de con-
duire), mot d*un emploi assez rare, et synonyme d*/rt£ro-
duction. Il a été appliqué aux interprétations des écrits
logiques d'Aristote, particulièrement de VOrganon et des
Catégories, et alors il signifie éclaircissement, com^
mentaire,
ISAIE LE TRISTE, un des romans de la Table ronde,
composé sans doute après celui de Tristan ( F. ce mot)^
auquel il fait suite. Le nom d'Isale le Triste rappelle ceux
de sa mère Iseult et de son père Tristan. Confié après sa
naissance aux soins d'un saint ermite, Isale est protégé,
au sortir de l'enfance, par quatre fées, dans lesquelles il
est facile de reconnaître les quatre vertus morales, la
Prudence, la Force, la Tempérance et la Justice. Ces fées
lui donnent pour écuyer le nain Tronc, qui n'est autre
qu'Obéron, condamné, pour quelques fautes qu'il a com-
mises, à passer un certain temps sur la terre sous une
laide enveloppe : Tronc sera fustigé et puni toutes les
fois que son maître fera une sottise, et cette invention
donne lieu à des scènes comiques fort originales. Isale se
rend à la cour du roi Irion : après avoir séduit la fille de
ce prince, Bfarthe, qui met au monde un fils nommé
Marc, il part , avec l'idée de faire des chrétiens, mais
fait périr sous ses coups beaucoup plus d'hommes qu'il
n'en baptise. Il a couru déjà les aventures pendant plu-
sieurs années, lorsque 50,000 Sarrasins, embarqués sur
une flotte commandée par l'amiral de Perse, descendent
C- Cr::nde-Bretagne. Marc taille en pièces le corps d'In-
I fidèles qui reste près de hi flotte pour la garder; Isale dé«
TSL
1098
ISO
Uvre de rinvasion le royaume dlrion, pais il épouse
Marthe, et Tronc reprend sa forme et sa qualité d'Obéron.
ISCHIORROGIQUE (Vers), c-à-d. dégingandé, d^
hanche, nom donné par les anciens Grecs au cho-
liambe (F. ce mot)^ tel gue Templova le poète Ânanius.
D*après les règles ordinaires, les pieds impairs pouvaient
être indifféremment des spondées ou des iambtt ; Ana-
nius se fit une loi de mettre partout on spondée au
l^pied.
ISIAQUE (Tsble). i V, ces mots dans notre Diction-
ISIS. S notre de Biographie et d'Histoire,
ISLAMISME (de Tarabe islam, résignation à la volonté
de Dieu), nom donné à la religion de Mahomet. V. Co-
■AN, dans notre Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire,
ISLANDAISE (Lan^e), une des lances Scandinaves
iV, ce mot)^ celle qui a conservé le oueux jusqu'à nos
ours ridiome parlé primitivement dans les trois royaumes
du Nord, et appelé pour cette raison ancien scai^inaioe
ou langue du Nord. La parenté de cette langue avec le
gothique est si étroite» que les radicaux de môme signifia
cation présentent le plus souvent les mêmes consonnes,
et ne diffèrent guère que par leurs voyelles. L'évéque
suédois Troll, dans ses Lettres sur l Islande, dit que
l'islandais était divisé en 4 dialectes, qui se distinguaient
seulement par certaines nuances de prononciation. L'or-
thographe n'était pas encore bien fixée aux xn* et
XIII* siècles, comme le prouvent les différences notables
qui existent dans les manuscrits de cette époque. Après
la réunion de l'Islande au Danemark dans les dernières
années du xiv* siècle, bien des mots et des formes du da-
nois pénétrèrent dans l'islandais, auquel vinrent ensuite
se mêler, par l'effet des relations commerciales ou intel-
lectuelles, un certain nombre de termes hollandais, an-
glais et même français. Toutefois, ces altérations n'ont
guère atteint que le langage de la population des côtes,
et la vieille langue s'est maintenue presque intacte dans
les cantons de l'intérieur. — On ne rencontre dans l'is-
landais ni les rudes gutturales de l'allemand, ni les nom-
breuses sifflantes de l'anglais; son articulation la plus
dure est une h fortement aspirée. Aussi la prononcia-
tion est-elle douce et sonore. L'islandais admet les combi-
naisons grammaticales les plus compliquées et de nom-
breuses modifications de mots, ce qui lui donne une grande
ressemblance avec l'allemand. Il a 3 genres, et des décli-
naisons pour les noms et les pronoms. L'article défini se
place à la fin des substantifs. Les verbes forts ou primitifs
forment leur prétérit par un changement dans la voyelle du
radical, et les verbes faibles ou dérivés par l'addition du
suffixe ta. La syntaxe est simple, et les phrases fort courtes.
Quand l'introduction du christianisme en Islande, vers
l'an iOOO, y fit connaître la langue latine, celle-ci donna
bien son écriture à la langue nationale, qui Jusqu'alors en
avait été dépourvue, mais elle ne put point exercer une in-
fluence perturbatrice sur un idiome à qui une riche litté-
rature avait déjà imprimé un caractère distinctif, ni même
en restreindre l'usage. V, Runolph Jona, Grammaticœ
islandicœ rudimenta, Copenhague, 1651, iii^<*; Gudmund
Andréa, Lexicon islandicum, publié par P. Resen, ibid.,
1683, in-4o; Magnus Olafsen, Dictionnaire islandais^ pu-
blié par Ole Vorm, 1683; Ole Verelius, Dictionnaire
islandais, publié par Rudbeck, 1691 ; Rask, Introduction
à la langue islandaise, en danois, 1811, in-8<*; BjOm
HaldorsOn, Lexicon islandicoAaiino-danicum^\%\i^ 2 vol.
tn-8*> ; L.-€h. MQller, Grammaire islandaise, Copen-
hague^ 1837, in-8°; Holmboe, Sur la tangua du Nord,
Vienne, 1852.
iSLANDAisB (Littérature). La poésie fût très-ancienne-
ment cultivée par les Islandais. Leur versification repose
tour à tour sur l'allitération, l'assonance et la rime.
L'allitération est la règle la plus ancienne et de l'emploi
le plus fréquent : elle se fait au moven de trois mots com-
mençant par la même lettre, et oont deux se trouvent
dans le premier vers du distique, l'autre conunence le
second vers. Les anciens Traités de versification comptent
136 variétés de vers, qui reçurent des noms particuliers ;
mais Rask les réduit à trois principales, selon qu'on se
isert de l'allitération seule, ou de l'allitération et de Taa-
«onance, ou de l'allitération et de la rime. Dès le vii* siècle,
les Skaldes, poètes guerriers comme étaient les Bardes
ches les notions celtiques, célébraient les dieux et les
héros : leurs chants, transmis de bouche en bouche, ne
Airent fixés par l'écriture qu'au xi* siècle, après la con-
version de l'Islande au christianisme. Bien que ce soit
principalement aux Islandais que l'on doive ce qu'on sait
sur les Runes (F. ce mot), il ne parait pas que les inscrip-
tions coniques de leur lie nous aient transmis des produc-
tions de portes. Les poèmes les plus anciens sont ceux
que recueillit, dit-on, Semund Sigfusson au xii* siècle,
et dont se compose l'ancienne Edda(V, ce mot dans
notre Dictionnaire de Biographie et & Histoire) : ils font
bien comprendre tout ce ^u'il y avait de haute inspira*
tion et de puissante énerae dans les anciens temps de la
Scandinavie. Parmi les Skaldes antérieurs à la prédica-
tion de l'Évangile, on cite Thorwald Hialteson, Inguna
Seimund, Erpur Luitand, Brage, Thiodolf de Hvin, Tbor-
bi&m Homklofi, Einar Skalagmann, Thorluf, Egill Ska-
lagrimsson, et Eyvind, surnommé SkaldaspiUr (des-
tructeur drâ Skaldes, parce qu'il les surpassa tous). A
partir du xi* siècle, la poésie dé^néra pour le fond et
pour la forme : la simplicité antique fit place à la re-
cherche ; les Skaldes mirent leur gloire à vaincre dans la
versification les plus grandes difficultés possibles; ils
visèrent à un style pompeux, et ne produisirent plus que
des compositions ampoulées ; au lieu de chants épiques
ou religieux, on eut surtout des œuvres gnomiques, des
proverbes et des sentences. Il en fut ainsi jusqu'au milieu
du xm* siècle, époque où les Skaldes, cessant d*être prê-
tées et favorisés comme poètes de cour, ne tardèrent
pas à disparaître. Ce fut le temps où Snorre Sturleson
recueillit les légendes historiques en prose, les traités de
grammaire, de rhétorique et de poésie, qui composent la
seconde Edda, et où commença une poésie ecclésiastique
et chrétienne, consistant en hymnes et en imitations
d'histoires bibliques et de légendes de Saints.
La prose date en Islande du commencement du xn* siècle.
Ari le Sage écrivit alors VIslendigabok ( livre des Islaa
dais), histoire rapide du pays, qui s'arrête vers l'an 1120,
et commença le Landnamabok (livre de la prise de posses-
sion du pays), ouvrage plus complet , terminé dans la se-
conde moitié du xin* siècle par Sturle Thordsson. Au xn*
appartiennent également : 1^ le Konungsskuggssaia (Sfi-
roir du roi ), collection de notices relatives à l'histoire
naturelle et à la géographie, et de règles pour vivre à la
cour ; 2° le code connu sous le nom de Gragas, formé avec
les tiisditions du Droit ancien , à la demande du légiste
Bergthor, et dont on a une édition par SveinbJOmsen en
1829; Z^ le Kristinrettr, qui est le Droit canon chrétien,
composé par l'évêque Thorlak en 1123, et publié par
Thorkelin en 1755. Une source non moins précieuse de
l'ancienne histoire de la Scandinavie, ce sont les Sagas
(traditions verbales), récits en vers ou en prose, com-
posés aux xm*, xiv« et xv* siècles, et dans lesquels sont
célébra les faits d'armes des antiques héros, les exploits
des rois et des familles illustres. Enfin, indépendamment
des traditions indigènes, la littérature islandaise s'enri-
chit, par des traductions ou des imitations, d'un grand
nombre de légendes des pays méridionaux, telles que
celles d'Arthur, de Merlin, de Tristan, d'Alexandre, de
Charlemagne, etc.
Depuis la réunion de l'Islande an Danemark en 1397,
l'esprit littéraire s'est affaibli. La première traduction
islandaise de la Bible a été l'ouvrage d'un évêaue d'Hol-
lum , Gudbrand ThorlaksOn, qui l'acheva oq 1584. Hai-
çrim PeterssSn rima des Psaumes, qui sont devenus la
lecture habituelle du peuple. Au xvin* siècle, Torfeos
s'est fait une réputation européenne par sa Chrontque de
Norvège et sa Chronologie des rois de Daïiemark; Ame
Magnussen a révélé au monde littéraire les anciens mo-
numents poétiques et historiques de son pays; Finnsen s
écrit son Histoire ecclésiastique d'Islande, Psrmi les
œuvres poéticnies du même siècle, on peut dter des tra-
ductions de VOdyssée par SveinbJOrn EgilssOn,du Paradis
perdu et de la Messuxde par le curé ThorlaksSn , et on
poème sur la vie champêtre ( Bunadarbalkr) par Eggert
OlafsOn. De nos Jours, Bénédict GrOndall et Thorareoseo
se sont montrés véritablement poètes. V, Halfdan Einard-
sOn, Histoire littéraire de VIslande, Leipzig, 1786; Lind-
fors. Essai sur la littérature islandaise, Lund, 1824,
in-8°; Legis, Mines du Nord ancien, en allem., Leipzig,
1829 ; Bersmann, Poëmes islandais, Paris, 1838 ; Schlozer,
Histoire de la littérature islandaîse, en allem.; Grsberg
de HensO, Essai sur les Skaldes; Edélestand du Méril,
Prolégomènes à Vhistoire de la poésie Scandinave, Paris,
1839; Marmier, Lettres sur VIslande,
ISOCHROMIE (du grec isos, égal, et chroma, couleur)»
mot employé quelquefois comme synonyme de lithochro»
mie (V, ce mot).
ISODOMON. V. Appasbil.
ISOGRAPHIE (du grec isos. égal , pareil , et graphéiïï,
écrire), se dit, 1** de la reproduction des écritures, 2^ de
tout recueil de fac-similé ou d'autographes.
ISON (Chant en). V. Chant gv ison.
ITA
1099
ITA
BOBÊ LE SAUVAGE, roman carloyingien attribué à
Jtto de BapttQiae. Isorô est un fidèle et habile conseiller
mie Gbarleoiagne a placé auprès de son neveu Anséis de
CirthagB, roi d'Espagne. Obliigé de faire un vojrage loin-
tun pour le senrice de son maître, il lui fait jurer de res-
pecter sa fille pendant son absence : Anséis viole son ser-
ment sans le savoir, et Isoré se venge en appelant les
Haies en Espagne. Les chrétiens, tant6t vainqueurs,
tiirtôt vaincas, finissent par exterminer les ennemis,
ptoe à lintervention de Gharlemagne. Anséis épousa
Gndiae , fille du roi des Mores. — La Bibliothèque na-
uanale de Paris possède deux manuscrits de ce poème,
l'on de Jean du Ryer, Tautre de Jean Le Chat de Bo-
logne. F. Histoire littéraire de la France, tom. xn. H. D.
ISSANT, en termes de Blason, se dit d*un animai dont
on ne voit que la partie supérieure, qui semble issir ou
sortir d^une pièce de Técu.
ISSOUŒ (Église d*), département du Puy-de-Dôme,
an des plua beaux exemples du style roman qu*il y ait en
fnoce. Cette église, qui faisait partie du monastère de
S*-Au8tremoine, date du commencement du x* siècle,
sauf les voAtes de la grande nef, qui sont ogivales et
appartiennent an xn* siècle. La construction est très-ré-
gnllère à l'extéiieur ; mais le travail intérieur présente de
grandes négligences: ainsi, les colonnes ont des dia-
mètres différents et sont d'in^Ies hauteurs. Les pare-
ments sont apparents, et les Joints, garnis, accusent net-
tement la forme du moellon. Les matériaux employés
sont le grès à gros grain pour les masses, et le grés cal-
caire pour les ornements ; les mosaïques de Textérieur
sont fiiitea avec des scories rouges et noires. L^édifice a
nne ciypte qui présente un modèle curieux de chapelles
rayonnantes. V. Taylor, Voyages pittoresq^es en France:
Maliej, Essai sur l'architecture des églises romanes et
nmumo-t>ysantines du Puy-de-Dâme, in-fol.
ISTHMIQUES, titre de Tun des quatre livres d*odes
triomphales que Pindare nous a laissées. Les Istkmiqiies
chantent les vainqueurs des Jeux célébrés en Fhonneur
àe Neptune sur Tisthme de Corinthe.
ITALIANISME, manière de parler propre à la langue
italienne; tour italien, expression italienne transportée
dans une autre langue.
ITALIE ( Architecture en ]. L*art italien ne date que de
la fin dn iv* siècle de Tère chrétienne : c*est le moment
où s'écroule la puissance romaine, et où le christianisme,
devenu la religion dominante, ouvre aux artistes des
seorces nouvelles d*inspiration. Les monuments de Tan-
tiqnité sont encore debout, comme autant d'exemples
vivants, et lea traditions de Tart païen se perpétuent tou-
jours dans lea écoles : mais le goût, perverti par un long
commeroe arec TOrient, méconnaît les règles sévères du
ample et du beau; on travaille hâtivement en vue du
lucre, sans études lentes et profondes; les exigences du
Inxe, aussi bien que le dérèglement des imaginations,
prodtoisent une exubérance de détails et d'ornements
soos lesc^els les grandes formes disparaissent. Les mo-
dèlea antiques vont périr, en même temps que les vrais
principea. Déjà, au temps de Théodose, il ne reste plus à
Rome que le naptistère de SMean-de-Latran et le mau-
solée de S^* Constance qui remontent k Constantin; il
faudrait réédifier la plupart des monuments, dégradés ou
abattus; mais les premiers empereurs chrétiens, non
moins que les Barbares venus de la Germanie au v* siècle,
pooranivent l'œuvre de destruction : Constantin, Théo-
dose, Honorius, ferment ou ruinent les édifices consa-
crés au paganisme.
Sortie des Catacombes, où la persécution l'avait con-
trainte de chercher un asile, la religion nouvelle ne pou-
vait d*an seul coup enfanter un art nouveau. Elle com-
mença par approprier à ses besoins quelques-uns des
monuments encore existants : les basiliaues romaines
furent converties en temples chrétiens ( K. Basiuqdb),
et, jmqu'au dl* siècle, ce fut leur plan qu'on adopta pour
la construction de toutes les églises de TOcddent. Con-
stantin avait fait élever à Rome, avec les colonnes et les
dâiris d» monuments païens, les basiliques du Sauveur
on de SWean-de-Latran, de S*-Pierre, de S^-Paul-hors-
les^murs, de S^-Groix, de S'-André, de S*"-Açnès, de
6^-Laurent, des SS.-Marcellin-et-Pierre; ces églises pri-
mitives, oeuvres h&tives d'un art fort imparfait, durent
être reconstruites par Théodose ou par les papes des v<
et v]« siècles. Puis on bAtit S**-Biarie-Majeure, S'*-Agathe,
S**-Bibiane, S^Pierre-ès-liens, S^-Pancrace, S^"-Puden-
tienne, S<«-Sabine, S*«-Praxède, S'-Sylvestre, S**-Blarie-
Araceli , S**-Marie-in-Gosmedin« S^*-Marie-in-Trastevere,
Smiéoieat , toutes imitations de la basilique. Sous Va-
lentinien III , la ville de Ravenne, où résidèrent la plu-
part des empereurs d'Occident, vit s'élever la basilique
Mineure, S^'-Anithe, S^-François, S^-Jean, la chapelle sé-
pulcrale des SS.-Nazaire-et-Celse. Les seules modifica-
tions graves que l'on apporta au style de l'architecture
furent: 1<» la substitution de l'arcade à l'architrave qui
régnait précédemment sur les colonnes ; 2^ l'allongement
de la partie transversale de la basilique, de manière à
figurer la croix; 3° hi construction, en dehors et tout
près de la basilique, d'un baptistère (F. ce mot) où l'on
conféra le baptême.
Les mêmes règles architecturales furent suivies pen-
dant la domination des Ostrogoths. Le grand Théodoric,
élevé à Byzance, où il avait pris le goût des arts, fit b&tir
à Ravenne la basilique de S^-Apollinaire, celle d'Hercule,
S^-Théodore, le baj^stère de Santar-liaria-in-Cosmedin,
un palais, et un mausolée dont la coupole était creusée
dans une seule pierre d'Istrie, et qui parait être aujour-
d'hui l'église de Santa-Maria-della-Rotonda. Symmaqua
nous a conservé le nom de l'architecte Daniel , qui con-
struisit ces monuments. Un autre architecte, Alolsius,
fut chargé de restaurer les édifices de Rome. Beaucoup
d'églises, de palais, de bains, s'élevèrent à Pavie, à Monza,
à Naples. Lorsque Cassiodore, l'un des ministres de Théo-
doric, se retira du monde, il fonda la célèbre abbaye du
Mont-Cassin. Amalasonthe, fille de Théodoric, continua
à orner Ravenne : à son règne appartiennent l'église de
S*-Vital et le baptistère de S*-Jean, construits duis le
style byzantin {JT, ce mot\ dont ils sont les seuls monu-
ments purs en Italie, car la basilique latine resta le type
universellement adopté. Toutefois la coupole byzantine
( y. Coupole) demeura accpise à réalise chrétienne, et
s'éleva, dans la suite, du milieu de la nasilique.
Bien qu'on emploie dans l'histoire des arts la dénomi-
nation de style lombard, les Lombards, qui occupèrent
l'Italie septentrionale de 568 à 774, n'eurent pas un style
d'architecture qui leur fût propre. Venus des forêts de la
Germanie, ignorant les premiers éléments de la con-
struction, ils ne purent qu'adopter l'art des vaincus,
c.-JMi. l'art romain dégénéré. Les monuments, d'ailleurs
assez rares, de cette période se reconnaissent à leurs
formes courtes et trapues, aux colonnes basses reposant
sur un simple bloc de pierre, aux chapiteaux coniques et
ornés de feuillages ou d'animaux, aux voûtes en maçon-
nerie remplaçant les toits de charpente, à une grossière
ornementation de colonnades et d'arcs engagés dans le
mur, aux cordons qui marquent extérieurement les étages,
aux fenêtres étroites comme des meurtrières. On voit
dans les lois lombardes que la ville de Côme fournit
alors les meilleurs architectes et tailleurs de pierre.
Jusqu'au xi* siècle, soit effet de l'habitude, soit ini-
mitié contre les Grecs, soit rigidité des papes à ne pas
laisser altérer sensiblement le type primitif de la basi-
lique, les Italiens s'en étaient tenus au st^le latin. Mais
les relations commerciales d'Amalfi, de Pise, de Gènes,
d' Aucune et de Venise avec l'empire d'Orient amenèrent
une alliance de l'élément latin et de l'élément byzantin,
d'où rteulta un nouveau style, appelé roman^ romanO'
byzantin, et quelquefois lombard de la seconde époque»
Par le contact de l'Europe avec l'Asie pendant les Croi-
sades, le nouveau style, surtout à Venise et en Sicile, reçut
l'empreinte du fantastique et du merveilleux oriental,
visible principalement dans l'ornementation. Entre autres
changements survenus dans l'architecture, on prolongea
de plus en plus la partie transversale qui formait la croix
latine, et on en garnit de chapelles les extrémités; l'ab-
side fut agrandie, et le chœur plus ou moins exhaussé
au-dessus de l'élise; la crypte ou confession, dans la-
quelle on déposait les reliques, s'agrandit et devint une
{>etite ^lise souterraine ; lea ailes de la basilique, pro-
ongées au delà du transept, prirent la forme absidale;
une coupole s'éleva au point d'intersection de la nef prin-
cipale et des transepts; les plafonds en solives horizon-
tales firent place aux plafonds voûtés en bois ou à des
voûtes d'arête; des piliers, souvent avec des colonnettes
engagées, se substituèrent généralement aux colonnes;
les formes de leurs chapiteaux varièrent à l'infini , et les
socles s'élevèrent sensiblement ; on fit les fenêtres plus
nombreuses, plus ouvertes, et souvent géminées; les
portes furent décorées de sculptures, et précédées de
porches à Jour; des clochers surmontèrent les édifices de
moindbre importance, tandis que les dômes ou cathédrales
conservèrent, comme par le passé, des campaniles isolés;
les arcatures ou arcades simulées ne servirent plus seu-
lement à marquer les étages sur les murs extérieurs, on
les prodigua sans raison ; la façade principale s'orna d'une
ITA
1100
ITA
rose ou roue, yaste fenêtre dicalaire; les égUses prenant
de jour en ]our plus d^élévation, on en soutint les mu-
railles par des contre-forts extérieurs; les pierres de dif-
Cérentes couleurs employées dans la construction, le mé-
lange et les combinaisons de la pierre et de la bricme,
Srésentèrent à l*œil une diversité agréable. Au nombre
es monuments de cette période , qui s*étend jusqu'au
xin* siècle, on peut citer S'-Ambroise de Milan, S'-Zénon,
5^-Fermo, et S^Antoine de Vérone, S^-Étienne de Bologne,
S*-Giriaque et S^«-Marie d'Ancône, S^*-Marie de Monza,
les Dômes de Parme, de Plaisance, de Modène, de Gôme,
de Mantoue, de Crémone, de Ferrare, de Pise, etc., les
Eremitani de Padoue, S^Michel de Pavie, S^-Michel de
Florence, S^«-Marie de Bergame, les éslises S^«-Marie-
Uajeure, SWean et S*-Paul, S^*-Françoise à Rome, etc.
--^s doltres annexés aux monastères datent aussi do
cette époque. Les plus remarquables sont ceux de S^ean
de Latran et de S'-Paul à Rome, de S^Zénon à Vérone,
de Subiaco, etc.
L'architecture civile suivit le mouvement de Tarehitec-
lure relideuse. Dans toutes les villes s'élevèrent des pa-
lais publics, dans lesquels on retrouve des principes com-
muns de construction : c'est un carré enveloppant une
cour intérieure, et dont un portique forme le rez-de-
chaussée; au-dessus sont les salles aassemblée, éclairées
par de vastes fenêtres ; des statues ornent ordinairement
les façades. Les rivalités des villes entre elles ou des
partis dans une même ville engendrant des luttes fîré-
qruentes, les édifices municipaux et même les hôtels des
nches citoyens sont fortifiés, crénelés, de manière à pou-
voir soutenir un siège. Tels sont les vieux palais de Flo-
rence, de Vérone, de Vicence, le palais ducal de Ferrare,
le palais d'Eccelin à Padoue, le ch&teau Délie Torri à
Turin.
Malgré la multitude des monuments élevés en Italie
pendant la période romane, c'est à peine si quelques
noms d'arohitectes sont arrivés jusqu'à nous. A Inse,
Buschêtto fit le Dôme, DiotiscUvi le baptistère, Bonanno
la Tour penchée ; Nicolas et André b&tirent S^-Bfichel-
in-Borgo, le Campo-Santo, et le campanile de S*-Nicolas.
On doit encore à Nicolas le palais des Anziani à Pise, la
Trinité à Florence, et S*-Antoine de Padoue. Giudêtto
éleva la façade de S*-Martin à Lucques; Marchione
SAresso, les cathédrales de Pistoia et de Volterra, la
Pièvc d'Arezzo, et la tour des Conti à Rome ; Egidio de
Milan, le palais d'Eccelin ; Leonardo Boccalecca, le Sa-
loue ou palais communal de Padoue ; Lorenzo Mastani ,
le Dôme d'Orvieto; Augustin et Agnolo de Sienne, le pa-
lais de cette ville; frère Ristoro de Cambio, l'église
S^«-Marie-Nouvelle à Florence; Amolfo d% Lapo, la ca-
thédrale, et frère Jean, le pont de la Carraja, dans la
même ville. A Rome, on remarqua la famille des CoS'
mates, ainsi appelés de leur chef Cosma, et qui , très-ha-
biles dans l'art des incrustations en mosaïque, furent
aussi les architectes des ambons de S*-Laurent, de S^*-
Marie-Araceli et de S*-Gésaire, du cloître de Subiaco, et
du portique de la cathédrale de Civita-Castellana. Deux
de leurs élèves, Pierre et Jean, construisirent les cloîtres
de S'-Jean de Latran et de S*-Paul à Rome.
A partir de la fin du xiii* siècle, on voit paraître un
nouveau style, le style ogival , que les Italiens appelèrent
gothique ou allemand, et même barbare, parce qu'il fut
importé chez eux par des Allemands, liais il est plutôt
employé comme ornementation que comme système ar^
chitectural. Tandis que les façades et les portails afiTectent
la forme ogivale et s'ornent ouelquefois de clochetons, on
conserve à l'intérieur des églises l'are à plein cintre, les
voûtes d'arête, les colonnes rondes, les chapiteaux, les
corniches, etc.; la coupole octogone ne se laisse pas sup-
planter par le clocher et la flèche. Les architectes italiens
repoussent cette exubérance d'aiguilles et d'ornements à
Jour, qui plaisaient aux artistes des autres pays; en em-
ployant les formes ogivales, ils cèdent à une mode pas-
sagère, à un goût étranger. Deux édifices seulement ont
été conçus et exécutés dans le style purement ogival,
l'église supérieure de S^François à Assise et le Dôme de
Milan ; et tous deux sont attribués à des architectes alle-
mands, maître Jacob et Henri de Galmodia. On trouve le
«tyle ogival simplement mélangé avec le style roman h
S'-Pétrone de Bologne, au Campo-Santo et a S^-Marie-
deilu-Spina de Pise, à S^'-Anastasie et au Dôme de Vé-
rone, à S*-Antoine de Padoue, aux Dômes de Florence,
d'Arezzo, de Sienne et d'Orvieto, à SWean de Napies, etc.
Giotto, plus connu comme peintre, éleva le campanile de
Florence ; André Orcagna fut l'arehitecte de la Loggia dei
tanii de la même ville.
Avec le xv« siècle commence un âge nouveau pour l'ait
italien, qui rompt les entraves dans lesquelles récole ro-
mano-byzantine tendait à l'immobiliser. Les modèles an-
tiques échappés aux ravages des hommes et du temps
sont étudiés avec passion. Dans cette période qui a reçu
te nom de Renaissance, on ne pouvait adopter les divi-
sions, les dispositions architectoniques des édifices gréoo-
romains, puisque le plan des monuments modernes était
résulté de besoins inconnus aux sociétés pafennes ; mail
on revint à l'antiquité pour les proportions, les profils et
la d^ration. Le style de la Renaissance fut moins un
système nouveau d'architecture qu'un mode de revête-
ment et d'ornementation. Brunelleschi , de Florence, en
fut le promoteur; on lui doit la coupole de la cathé-
drale de Florence, les églises du S*-Esprit et de S^Lau-
rent, le palais Pitti, dans la même ville. L'alliance de
l'art antique et du style roman , quelquefois aussi de
l'ogive, qui distingue les œuvres de ce fjnné architecte,
caractérise aussi les travaux de ses élèves et de ses imi-
tateurs : tels sont les palais Ricardi , Tomabuoni et Gafa-
reçsi à Florence, et le ch&teau de la Faggiuola, par
Michelozzo Michelozzi ; le palais Strozzi à Florence, par
Benoit Majano et Gronaca; les palais élevés à Sienne et à
(Irbin par François di Giorgio et par Rosellini ; les églises
de S*-Aueustin et de S^'-Mariendu-Peuple à Rome, par
Pintelli ; les portiques intérieure du palais dit de Venue,
dans la même ville, par Julien Majano; le grand hôpital
de Milan , par Antoine Filarète. Miéds l'arrivée des Grecs
fugitifo de Gonstantinople, en 1453, donna une nouvelle
force au goût de l'antique, et l'on ne tarda pas à voir dis-
paraître les dernières traces des styles du moyen àg%
Vers la même époque on retrouva les livres de Vitruve,
oui, étudiés et commentés, derinrent l'unique code de
1 arohitecture. Albert! écrivit son grand ouvrage De re
œdificatoriâ, d'après les préceptes de l'auteur latin, qnH
mit en pratique dans le palais Ruccellai et le chœur de
l'Annonciade à Florence, dans les églises de S^-André à
Mantoue et de S*-François à Rimini.
De la Toscane le style de la Renaissance se répandit
partout. A Venise, où les monuments de style byzantin
s'étaient couverts d'ornements dans le goût oriental , ' 'ait
antique ne put pas conserver non plus la simplicité et la
pureté de ses lignes, et les œuvres conçues d'après ses
principes ofirirent éealement une grande richesse déco-
rative. L'imitation de l'antique, qui n'était pas encore
très- sensible et n'étouffait pas l'originalité dans les
œuvres de Giov. Giocondo, est manifeste dans les con-
structions dirigé^ par une célèbre famille d'architectes,
les Lombard! : Pierre Lombardi élève S^"-Marie-des-Hi-
racles, S^*-Marie-Mère-de-Dieu , les palais Contarini,
Vendramin et Corner, les monuments Zeno et Mocenigo;
Martin Lombardi fait la scuola de S^-Marc et la façade
de S*-Zacharie; More Lombardi, l'église S^Michel de
Murano. A la même école appartiennent Barthélémy
Buono, qui éleva les Procurattes vieilles; Bergamasco,
architecte de la chapelle Émilienne et du palais des Ca-
merlingues; Riccio, qui fit l'escalier des Géants, et la fa-
çade intérieure du palais des Doges; Scarpagnino, auteur
de la façade de l'école S^Roch. — Une protestation vive
contre ce luxe d'ornementation de l'arehitecture véni-
tienne partit de la Lombardie, et eut pour organe prin-
cipal Lazzari Bramante. Aux églises S^*-Marie-des-Anges,
S^-Satire et S'-Eustorge, au cloître de S^Ambroise, ao
Lazaret, au palais Castiglioni, oue cet architecte bfttit à
Milan, on trouve encore un mélange du style roman et
du style de la Renaissance ; mais les monuments qu'il fit
à Rome, le palais de la Chancellerie, le pakdt Giraud, la
cour du Vatican dans sa forme primitive, l'Oise de
S*-Pierre telle qu'il la conçut, sont l'expression la ploi
parfaite du style classique italien dans sa sobriété et ta
beauté. Parmi les élèves ou les émules de Bramante, on
compte Peruzzi, qui éleva à Rome la Famenna, les pa-
lais Chigi et Massimo ; Raphaël , dont on possède à Rome
les palais Berti et Vidoni , à Florence les palais Gan*
dolfini et Uguccioni ; Sangallo, qui fit à Rome le palais
Farnèse; Ligorio, arehitecte de la villa Pia dans la même
ville ; Serlio, qui alla en France travailler aux pidais do
Louvre et de Fontainebleau.
Cependant, un élément nouveau, le pittoresque, allait
s'introduire dans l'arehitecture, et en altérer la pureté.
Jusques-là les édifices, créés dans un but d'utilité oq
pour une destination sérieuse, avaient été grands et
simples: maintenant, dans le dessein de satisfaire le
goût des princes et des seigneurs pour le luie, les archi*
tectes vont se livrer à la recherehe de formes, d'arrange-
ments et d'effets qui i>laisent à la vue. Michel-Ange, avec
ITA
1101
ITA
toau i'aatoiitô de son génie, consacra cette introdaction
de réiément pittoresque dont les artistes vénitiens avaient
déjà donné Texemple : S'-Pierre de Rome et son imnoense
eoapole, la déccvation extârieure du Capitole, le doltre de
S^-Xarie-des-Anges, la bibliothèque Laurentienne à flo-
RDce, sont ses pnncipaux ouvrages. Après lui , quelques
talents supérieurs, Jules Romain à Mantoue, Fontana à
Borne, Sansovino, Scamozzi et Da Ponte à Venise, sou-
tinrent le système pittoresque, qui, cependant, privé du
lOQiBe puissant dont Hichel-Ange Favait animé, laissait
déjà entrevoir ane prochaine décadence. Vainement Vi-
gnole, Alessi, Ammanati, San-filicheli , Palladio, s*en
tenant aux préceptes antiques et à Técole de Bramante,
protestèrent contre Fenvahissement du pittoresque : on
en Tint, pendant le xvii* siècle, à ne plus se préoccuper
({ae de la .pompe et de la richesse. On fit de la décora-
tion qui étonnait les yeux ; de là ce que les critiques ita^
fiens ont appelé le style des machinisUs. En voulant con-
stamment renchérir sur ce qui existait , l'art tomba dans
Teitravagance ; on eut le style baroque. Les cannelures
des colonnes furent ornées; les chapiteaux, les archi-
tnTes, les corniches, les frises, se chargèrent de volutes,
de rinceaux, de guirlandes, de chapelets et d*oves, sous
lesquels disparut la ligne droite. Carlo Uademo, qui
•cfaeva S^-Pierre de Rome, fut un des promoteurs de cette
architecture corrompue. Lorenzo Bemini , dit le Bemin,
ÏQÎ éleva la colonnade, le baldaquin et la chaire de
^Pierre de Rome, le grand escalier du Vatican , le pa-
his Barberini , fit encore davantage du grandiose et de la
décoration. Ponzio et Ramaldi à Robie, Buontalenti , Pa-
riai y Nigetti et Silvani à Florence, Meda et Mangoni à
Milan, Vittorim et Gampagna à Venise, suivirent la même
voie. Mais ils forent tous surpassés, pour le dévergondage
da goût, par Borromini , sur les traces duquel mar-
dtèieot Guarini à Turin, Sardi, Pozzi, Roaâ et Lon-
gbena à Venise.
Ce qu*a produit le xvui* siècle ne mérite guère le nom
d'art : les artistes italiens ne font qu'imiter les étian-
gen. Ivara et Vanvitelli, l'architecte du ch&teau de Ca-
serte, s'efforcent, mais en vain, de ramener l'architecture
mi vrais principes. Piranesi et Milizia furent plus heu-
reax plus tard, et alors se forma une école meilleure,
celle du marquis Gagnera, de Simonetti , de Campesi et
de Stem, à qui Bfilan, Rome et Naples sont redevables
de lears plus récents édifices.
7. Samelli, Antica basilicoçirafta , Naples, 1702;
l. Blaeo, Nouveau Théâtre d^Italte, en holl., Amsterdam,
1704, A vol. in-fol.; Burmann, Thesaunu antiquUatum
Italks; Séroux d*Agincourt, Histoire de Vart par les
mmmmts, Paris, 1809-23, 6 vol. in-foL; Cordero, MIa
itdiana ArMtetiura durante la domhuuionê Icngo'
haria, Brescia, iS29; Knight, l'Architecture ecclésias'
t¥t*u de V Italie, en anglais; L. Taylor et D. Cresy, Ar-
dâitcture du moyen âge en Italie^ en anglais, Londres,
iS29, iih4« ; Selvatico, Délia ArchiUttura et delta Scultura
di Venexia, Venise, 1847; Letarouilly, Les Édifices de
Borne moderne, Paris, 1840-S5, 3 vol. in-fol. de planches,
et 1 vol. in-4* de texte.
iTAUB (Sculpture en). Au dernier siècle de l'Empire
romain, la sculpture, même quand elle rappelait la com-
position, l'ajustement, la pose et l'expression des œuvres
plos anciennes, trahissait une grande ignorance dans
Texécation : les bas-reliefs de Tare de Constantin à Rome,
les larcophages de l'impératrice Hélène, de S^-Constance,
de Jonins Bassos, de Probns Anicius et d'Olvbrius, et
les antres monuments du même genre que l'on a re-
coeiliis au musée du Vatican, montrent que l'habileté
{ffitique manquait aux artistes. Le christianisme était
encore trop jeune pour créer des types nouveaux : aprèi
avoir renvené beaucoup d'idoles du paganisme, les chré-
tiens qui se livrèrent aux beaux-arts se bornèrent à
imiter les modèles échappés à la destruction; seulement,
«os l'influence d'idées morales plus austères, le nu lût
▼oilé et les formes plus enveloppées. La sculpture fut
onployée de bonne heure à décorer les basiliques chré-
tiennes. La plupart des statues étaient alon en métaux
précieux, et faites au repoussé : le bibliothécaire Ana»-
taae en mentionne un très-grand nombre qui furent don-
nées par les empereun aux papes ou exécutées aux frais
<fe ces demien, mais pas une n'est arrivée jusqu'à nous;
^a ont disparu dans les pillages de Rome par les Bar-
oares, n en est de même des croix, patènes, vasM sacrés,
cooeosoirs, chandelien et lampes, que l'on faîsiut égale-
oieat au repoussé, avec ornements et figures; quelques
nres débris en ont été conservés dans le Trésor de Rome.
Us statues équestres de Théodorie le Grand, fondues à
Rome, à Bavenne, à Naples, à Pavie, pronrest que l'an
du fondeur n'était pas encore perdu au n* siècle, ou du
moins qu'il avait- repris ({uelque activité pendimt la do*
mination des Goths. liais les œuvres les plus remar-
ouables de ces premiers siècles de l'Italie chrétienne ont
été faites en ivoire : ce sont des diptyques, des tableaux
d'autel, des crosses et des sièges épiscopaux, des cou«
vertures d'évangéliaires, des autels portatifs, des reli-
quaires, etc.
Jusqu'à l'époque de l'invasion lombarde, la sculpture
n'avait guère franchi l'intérieur des basiliques, soit para
que les statues en matières précieuses ne pouvaient être
exposées au dehon, soit pour ne point rappeler à la foule
à peine convertie le culte des idoles. Sous les Lombards,
les portails commencèrent à se décorer de sculptures :
les statues de Roland et d'Olivier, qu'on voit encore an*
jourd'hui à la cathédrale de Vérone, datent de cette
époque ; elles attestent la barbarie des artistes, aussi bien
que les bas-reliefs de la Porte Romaine à Milan, qui leur
sont cependant postérieun de deux siècles. Ce fut seule-
ment sous l'influenee du goût byzantin que la sculpture
entra dans une voie de progrès. Dès la fin du ix* siècle,
un artiste lombard, Voivinus, exécuta en orfèvrerie au
repoussé le célèbre revêtement d'autel de l'église S^Am-
broise à Milan. Au xi% les portes de bronze sculptées ,
qu'on apporta de Grèce pour décorer les portails <k8
^lises de S^Marc à Venise , de S*-i%ul à Rome, et du
Dôme de Naples, serrirent de modèles aux portes des ca-
thédrales d'Amalfl et de Bénévent, plus tiurd à celle de
Pise, coulée en 1180 psr Bonanno, et à celle du bwtis-
tère de S*-Jean-de-Latran, à Rome, exécutée en 1203 par
Pierre et Hubert de Plaisance. Les noms de quelques
autres artistes du xii* siècle nous ont été conserva ; ce
sont : Guillaume, qui fit les bas-reliefs du D6me de Mo-
dëne; Nicolas de Ficarolo, qui décora S^-Zénon de Vé-
rone et le Dôme de Ferrare; Antelami, qui travailla à
Parme, Robert à Pise, Biduino à Lucques, Gruamonti à
Pistoia. Leun œuvres offrent une certaine élévation de
conception, mais l'exécution est encore barbare.
Au xm* siècle, Nicolas de Pise, sculpteur en môme
temps qu'architecte, donna une nouvelle direction -aox
études. Élève de maîtres grecs qui travaillaient au Dôme
de sa patrie, il suivit d'abord leur manière : mais, firappé
de la beauté de certaines sculptures antioues oui avaient
été rapportées de Grèce par les Pisans, il médita sur ces
modèles, suivit les principes on'ils enseignent, et ramena
l'art à l'étude de la nature. Les sculptures des chaires
de Pise et de Sienne, celles du tombeau de S^ Dominique
à Bologne,, attestent les progrès au'il accomplit. Au
siècle suivant, André de Pise fit l'une des portes du
baptistère de Florence; parmi ses élèves ou imitateurs,
André Orcagna sculpta l'autel d'Or San Michèle, Massudo
les tombeaux du roi Robert et de la reine Sanche à Na-
ples, Alberto di Amoldo la madone du Bigallo à Florenoe,
Lamberti celle de la Miséricorde à Aràzo, Lanfrani le
tomb^ui des Pepoli à Bologne, Bononi da Campione le
tombeau de Gan délia Scala à Vérone, Balducdo celui de
S* Pierre martyr à Milan, Galendario les chuiiteaux ornés
de statues du palais ducal à Venise, etc. Dans le même
temps, Qone, père d'Orcagna, son élève Léonard, Pierre
de Florence, Giglio de Pise, Jacob d'Ognabène, faisaient
l'autel de la cathédrale de Pistoia et câui du baptistère
de Florence, deux couvres remarquables d'orfèvrerie.
Quand vint la Renaissance, la sculpture se développa
rapidement par l'étude de l'antiquité, et acquit cette
haLoUeté d'exécution pratique qui manquait à l'âge préc^
dent. Une école se forma à Sienne, sous la direction de
Jacopo délia Querda, surnommé délia Fonte à cause de
la fontaine Gaja (charmante) qu'il y exécuta, et dont on
voit aussi de beaux ouvrages à Lucques et à Bologne x
elle compta d'excellents artistes, Mathieu de Lucques,
Nicolas de l'Arca, Vecchietto, Nicolas di Piero, etc.* Hais
Florence produisit des sculpteun plus remarquables en-
core. Laurent Ghiberti fit ses deux célèbres portes en
bronze du Baptistère, dans les bas-reliefs desquelles il
sut allier à la simplicité et à l'élévation de la conception
la noblesse de l'ajustement, la beauté de la forme, la pii>
reté de l'exécution et l'effet pittoresque, n fit encore pln«
sieun statues en bronze pour l'telise d'Or San Michèle, les
tombeaux de S^Zénobius et de S* Protus, des bas-reliefii
pour l'église Smean de Sienne, diven ouvrages d'orfè-
vrerie aujourd'hui perdus, mais dont Vasari vante le goût
et la délicatesse. Dooato ou Donatello fut celui qui im*
prima le mieux à l'école florentine, et même à toute la
sculpture italienne, le caractère de naturalisme qu'elle a
to^jours conservé depuis. Exdusivement préoccupé de la
ITA
tl02
ITA
fértté et de rimltation exacte, oubliant que la beauté est
une des conditions Tîtales de Fart, il descendit Jusqu'au
réalisme. Ses csuTres se distinguent moins par la force
et la noblesse de la pensée que par l'expression profonde
des formes t dies révèlent une grande science anatomi-
foe, ane rare habileté d'exécution, et la connaissance des
lAla des passions de l'toie sur le corps. Ses principaux
oonages sont, à Florence, les statues de S* Pierre, de
S> Marc, de S» Geerges, de Judith, de David, et divers bas-
reliefs à S<>Laureot et dans le Dôme; à Padoue, des bas-
reliefs dans la cathédrale, et la statue équestre de Gatt»-
melata. On doit une place à part h Lucas délia Robbia
pour ses sculptures en terre cuite et vernissée, où la pu-
reté dn goût et un s^le presque antique s'unissent à la
naïveté du moven âge. A la suite de Gniberti, de Donato
et de Lucas délia Robbia, citons l'architecte Bruneltes-
chi, dont on voit un beau crucifix de bois à S"-Haria-
Novella ; FUarete, qui sculpta les portes de S*-Pierre de
Rome; Antoine Rossellini, auteur des tombeaux du car-
dinal de iH>rtugal à San-Miniato et de Marie d'Aragon à
Naples; Bernard Rossellini, son frère, qui fit le mausolée
de Marsuppini à S*M>oix de Florence; Benoit Majano,
dont on a le mausolée Stroszi à Florence; André Verro-
chk), dont Venise possède la statue deCoIleoni, coulée
en bronxe après sa mort par Alexandre Leopardi ; André
Sansovino, dont le groupe de 5^* Anne, la Vierge et Ven-
tant Jésus à StF-Augustin de Rome est la plus belle pro-
duction; Vellano, Jean de Pise, Bertoldo,Nanni di Banco,
élèves de Donatello; Désiré de Settignano, Augustin de
Gnodo, Minio de Fiesole, les frères délia Robbia, qui
suivirent plutôt ht manière de Ghil>erti; enfin Rusticci,
Bacdo de Montelnpo, Benoit de Rovezzano, etc. — A
Rome s'illustra Paolo Romano, qui fit les statues en ar-
gent des Apôtres, fondues par les Allemands lors du sac
âe la ville en 1527. — A Naples parurent André Giccione,
auteur du tombeau de Ladislas, et Aniello Flore, dont
Téglise Si-Dominique renferme les ouvrages. — Les pro-
grès de la sculpture furent plus lents dans l'Italie septen-
monale, presque entièrement dépourvue de monuments
antiques ; cependuit on peut citer à Venise deux familles
de sculpteurs, celle des Bon (Jean, Pantaléon et Barthé-
lémy^, dont le faire naïf rappelle encore les traditions de
Pécole byxantine, et celle des Lombard!, célèbres aussi
eomme architectes, et qui ont subi davantage l'influence
des modèles antiques. — La sculpture d'ornement est
devenue une branche importante de l'art. Là encore il
fant cher Ghiberti, Brunelleschi, Lucas délia Robbia, qui
avalent commencé par être orfèvres, et les Lombardî. Au
nombre des ornemanistes célèbres figurent aussi Riccio
BrioBoo, qui fit le candélabre de S*^Antoine de Padoue;
Alexandre Leopardi, auteur de» piédestaux en bronze de
la place S^Marc à Venise ; Basti, Bamb^a, Brambilla,
Agrate, qui travaillèrent à la Chartreuse de Pavie. — L'or-
fèvrerie a pris aussi un développement considérable :
Leonardo di Ser Giovanni, Bartoiuccio Ghiberti, Verro-
<dilo, GenninI, PoUij^oIo, et surtout Benvenuto Cellini,
la portèrent à un haut degré de perfection. Le dernier a
laissé aussi des oouvres de statuaire, telles que le Persée
de la Loggia des Land, k Florence, et la Nymphe de Fon-
taineblean.
Gomme il avait foit pour les formes architectoniques,
Michel-Ange se mit presque toi^ours au-dessus des règles
de la sculpture, et employa la forme humaine à des
créations colossales, dans lesquelles le style et l'expres-
don ont un caractère en quelque sorte surhumain. Ses
principales oravres sont : les statues du Matin, du Midi,
du Soir et de la Nuit, au tombeau des Médicis ; la statue
de Laurent de Médicis, connue sous le nom de Pensiero;
le Mcfise du tombeau de Jules II à Rome; les deux figures
d'esclaves que possède le Musée du Louvre. Le Baechus
et le Dama de Florence, la Pitié à S'-Pierre de Rome,
le Christ de l'église de la Minerve, VAnge qu'on voit à
l'église de S^-Dominioue de Boloene, tous ouvrages de
la jeunesse de Michel-Ange, n'ornent pas la même re-
cherche du grandiose, et ont une vérité plus humaine.
Les élèves les plus illustres de Michel-Ange furent x
MontoTBoli, Montelnpo, Guillaume délia Porta, auteur
dn tombeau de Pie m à S^-Pierre de Rome; Ammanati,
qui fit la fontaine de la place du Grand-Duc à Flo-
rence; Danti, Bandini, etc. Il eut aussi un rival, Baccio
BandlnelU, qui décora de statues et de bas-reliefs le
dMBur de ht cathédrale de Florence, et dont la fausse
grandeur, l'exagération, le mauvais goût, contribuèrent
puissamment à la décadence de la sculpture italienne.
A partir du xvn* siècle, en effet, les sculpteurs re-
dierchent, non plus la beauté de la ligne, mais l'expres-
sion et l'effet pittoresque. Le Bemin eut le carsetèrs
théâtral et alTecté en sculpture comme en architecture :
rien de plus pompeux que les statues de Constantin et
de Lonsin à S>-Pierre de Rome, de plus expressif que It
figure oe S** Bibiane, de plus sensuel que celle de S**
fl^érèse à l'église de la Victoire. On voulait donner alon
au marbre la souplesse de la chair et des étoffes. Moochi,
Raggi, Bolei, Ferrata, Aspetti, Baratta, Fansaga, Algsrdi
(tombeau dfe Léon XI, sculptures de la villa Pamfili, etc.),
prirent le Bernin pour modèle. Cioli, Foggini , Mosca,
Scalza, Lorenzetto, sacrifièrent moins à l'extravagance.
Les œuvres de Jean de Bologne sont également conçues
et exécutées dans un meilleur style que celles du même
temps-: il suffit de citer V Enlèvement des Sabines à Flo-
rence, le Mercure de Bologne, la fontaine de Boboli.
Stefano Mademo est aussi l'un des artistes qui protes-
tèrent, mais à peu près en vain, contre les erreurs de
l'art. — La décadence a continué pendant le xvui* siècle,
où Rusconi et Pompeo Battoni sont les seuls sculpteon
(pli méritent une mention. Veirs la fin du siècle, le Véni-
tien Canova entreprit de ré^nérer la statuaire, en la
ramenant vers l'étude de l*aatiauité : mais ses œuvres i
lui-même ne sont que des Imitations asses pâles, sans
énergie, où la gr&ce remplace la véritable beauté. Parmi
ses élèves on peut citer : Antonio d'Bste, célèbre par ses
bustes et ses reliefs; Giuseppe de Fabrls, auteur des mo-
numents du Tasse et de Léon X; C. Tadollni, G. Finelli,
les deux Ferrari, et surtout Bartolini et Pompeo Marche»,
les premiers de tous. En dehors de cette école, Gaélano
Monti, B. ComoUi, Sangiorgio, Putti, Pampaloni, Persico,
ont acquis une certaine réputation. Enfin, le Danois
Thorwaldsen, pendant son séfour en Italie, a formé quel-
Sues disciples, Galli, Benzoni, Tenerani, etc. V, Cicognara,
toria delta Scultura, Florence, 1813-18, 3 vol. in-fol.
RAui (Peinture en). C'est dans les Catacombes de
Rome que se trouvent les plus anciens monuments de Is
peinture chrétienne; mais rien n'autorise à affirmer
qu'aucun de ces monuments soit antérieur au v* siècle.
Nul écrivain des ftges précédents ne parie de peintures
existant dans les Catacombes, et le poète Prudence, qui,(
le premier, mentionne une représentation du martyre de
S* Hippolyte, n'indique pas le lieu où elle était placée.
On voit dans une lettre d'Adrien I*' à Charlemagne qae
le pape Célestin I*' (424-43S ) fit orner de peintures le
cimetière de S**-Priscille. C'est donc vraisemblablement
après le triomphe du christianisme que l'on décora les
lieux où avaient été enterrés ses premiers saints et ses
martyrs. Dans les Catacombes des Ss. Marcel lin et Piene,
de S' Calixte, de S** Agnès, réputées les plus anciennes,
les artistes chrétiens ont peint le Christ sous les figures
symboliques d'Orphée, de Moïse, de Tobie, de Daniel, de
Jonas, du Bon Pasteur; on y voit aussi des images des
martyrs entourées de couronnes de laurier, Jésus an mi-
lieu de ses apôtres, la Vierge et le Christ, les repas des
agapes, les Jeunes Hébreux dans la fournaise, et antres
scènes de l'Ancien Testament. Le style de ces œuvres e^t
barbare, bien qu'il atteste une imitation des modèles de
l'antiquité païenne. Au reste, les peintures décoratives
des uitacombes ont été faites à diverses époques, et
probablement Jusqu'à la fin du viii* siècle: celles de
S^ Pontien et de S' Valentin présentent des figures moins
païennes, des ajustements plus austères et des sujets
d'invention plus récente, tels que le Baptême du Christ,
leOrucifiement, de saints ermites couronnés par Dieu, etc.
— Des peintures furent également exécutées dans les
églises. Prudence parle d'une peinture de S* Cassien dans
l'église d'Imola; S* Paulin, évêque de Noie, orna de pein-
tures la basilique de S^-Félix; le pape Symmaque fit
peindre la confession de S* Pierre, et Léon I**^ les por^
traits des 46 premiers papes dans la basilique de S^PauL
Les peintures dont on couvrit les murs des édifices sa-
crés et des palais ont presque toutes péri : celles qui
exhtent dans l'église des S^*-Nazaire et Gelse à Vérone
sont du vn* ou du vm* siècle.
Durant la même période, la mosaïque fut souvent pré-
férée à la peinture proprement dite : outre qu'elle avait
plus de solidité et pou^nEdt braver les intempénes, elle plar
çait ses figures sur fonds d*or qui ajoutaient à la richesse
du travail, et exigeait moins d'étude pour l'exécution.
Les mosaïques de S^Marie-MaJeure et du baptistère do
SWean-de-Latran au v* siècle, des S**-Cosme et Damien,
de S^Pjidentîenne au vi*, sont exécutées dans le style
latin, dont elles repiMuisent les formes courtes et rudes,
mais mouvementées ; elles sont sans doute l'œuvre de
maîtres italiens. Mais les violences des iconoclastes dans
l'Empire d'Orient firent refluer en Italie une foule d'ar-
ITÂ
1103
TTA
Inmatins x on reconnaît leur style plus calme, plus
Mbce de gestes, moins expressif peut-être, mais plus
âancé dft fociiies, dans les mosaïques de S**-AgnAs^ de
S"M>mède, de S*^ément à Roma» de S^^ViUl à Ra-
▼enno, de S^Blarc k Venise, de S^Ambroise à Milan, de
S^Pierre à Pavie, de S'-Étienne à Naples, exécutées du
vn* an xi* siècle. — La peinture sur manuscrits a laissé
anasi quelques œuvres. Le VirgiU du v* siècle, que pos-
eàde la bimiothèque du Vatican, contient des miniatures
dont la ressemblance avec les peintures des Catacombes
est firappante. Dans le Térmce du ix* siècle que conserve
la mfime collection, Timitadon de Tantique est beaucoup
noins sensible, et le dessin plus barbare.
Les bouleversements politiques de Tltalie, Tinsuffi-
aanee des artistes et de leurs procédés, la sévérité de
Farchitecture romane, qui se prêtait moins que la basi-
lique primitive à la décoration picturale, avaient fait
tomber la peinture dans la barbarie, lorsqu'au xi* siècle
8*opéra une véritable Renaissance, sous Tinfluence de
Tart b^rzantin. Une école grecque s^établit alors à Rome;
les peintures du cloître de S^Urbain et de celui de Sn-
btaoo lui appartiennent sans doute. Désiré, abbé du
M ont^^Iassii^ fit venir de Gonstantinople des artistes ha-
biles dana la mosaïque, et l'on croit pouvoir leur attri-
buer les mosaïques de S'^-Harie-in-Trastevere et de S*^
Grégoire à Rome, de San-Miniato près de Florence, et de
Toroello près de Venise. Héraclius Romain au xi* siècle,
TbéophUe Lombard au xn*, écrivirent sur la peinture,
et, an xm*, Venise appela Théophanes de Gonstanti-
nople pour ouvrir une école. Un certain nombre d'ar-
tistes ne Sienne suivirent les pratiques de l'art byxantin,
mais en modifièrent l'austénté par la gr&ce; ce furent
Guido, Parabuoi et Diotisalvi. Mino de Turrita, égale-
ment originaire de Sienne, décora à Rome quelques par-
ties de S^*-Blarie-BCaJeure et restaura la mosaïque de St-
Jean-de-Latran. Gaddo Gaddi, habile mosaïste, travailla
à Florence et k Rome, et ses œuvres, comme celles de
Hino, olErent le mélange de la manière grecque et du
style latin. Margaritone d'Arezzo, au contraire, suivit la
manière grecque sans modification ni progrès. Giunta de
Pise fat celui qui, pendant le xni* siècle, donna le mieux
à ses figures l'expression humaine.
Cétait aussi sous la direction d'Apollonius, Tun des
maîtres étrangers qui ornaient de mosaïques l'église S*-
Marc de Venise, et qui fut amené k Florence par André
Tsfi, que Gimabué avait foit ses premières études. Hais
l'exemple de Nicolas de Pise, qui régénérait la sculpture
par l'étude et l'interprétation de la nature, le fit sortir
des voies traditionnelles. Les progrès qu'il fit faire à l'art
excitèrent l'admiration des contemporains, et sa Madone
de S^VIfaria-Novella, regardée comme la merveille du
temps, fut portée procesuonnellement par les Florentins.
Quelques-unes de ses peintures existent aussi à Assise.
Si l'exifcutioo en est imparfaite, la conception ne manque
pas d'originalité et de gpmdeur. Avec Gimabué commen-
cent le véritable stvle italien et Vécole fiomUine (F. ce
mot), Giotto, son élève, le surpassa en gr&ce : l'expression
devint chez lui plus humaine, plus vraie; les formes de-
vinrent plus correctes, les drsperies plus naturelles, et
les raccofirds commencèrent k être étudiés. Il y eut pen-
duit le ;ziv* siècle une école giotteeque, composée deè
âèves de Giotto, Stefano de Florence, Taddeo Gaddi,
Simon 'Memmi, Cavallini, Capanna, Lanrati, Giottino,
Simon de Naples, Jean de Milan, Menabuoi de Padoue,
Goillanme de Forli, Antoine de Venise, Angiolo Gaddi, etc.
D^auoes artistes, tels que Buffalmacco, les Orcagna,
TMni, furent plus fidèles à l'ancien style, dont ils con-
servèrent les traditions typiques. Les artistes des deux
écoles rivales déployèrent k l'envi leurs talents dans la
décoration du Campo-Santo {V. ce mot) k Pise, monu-
ment unique de la peinture k fresque. — L'école de
Giotto ne prospéra pss seulement en Toscane : elle se ré-
pandit en Lombaidie, où elle compta parmi ses membres
^tefisno et Jacques de Vérone, Giusto, Jean Ifiietto, Al-
tîcfalero, Jacques Avanzi. Là encore, son influence fut
combattue perdes peintres qui firent briller d'un dernier
éclat l'ancienne école, Guanente, Jean et Antoine de Pa-
doue, Laurent de Venise, Semitecolo, etc. — A la même
fooque, récole de Sienne, représentée psr Simone de
lurtlno, continuait de se distinguer psr la douceur de
son style, qui devait dégénérer assez vite en faiblesse et
en épuisement : les peintres auxquels on à donné le nom
de mmiaiuristes , et parmi lesquels figurent Oderid
d'Agnbbio, Franco de Bologne, Vitale délie Madone, <a-
nnello, IJppo Dalmasio, Gentile da Fabriano, Guido
Mmerocci, Fia Angelico de Flesole, se sont inspirés de
son esprit; c'est la même façon de peindre en teintes
plates, le même soin à éviter tout accent trop marqué da
la vie réelle et k spiritusiiser la nature humaine.
Avec le xv* siècle se manifesta, dana la peinture ita-
lienne, une tendance de ]our en jour plus forte à. re-
produire la nature dans toute sa vérité, k secouer les
entraves imposées jusqu'alors k l'art par les exigences du
style reli^eux, et à embrasser avec une li^rté illi-
mitée les sujets profanes comme les sujets sacrés. Le
domaine de rart va s'agrandir : forme, expression, dis-
position, ajustement, modelé, claÛM>bscur, coloris, tout
sera étudié et calculé. Trois peintres de l'école floren-
tine ont eu la plus grande influence sur ce développe-^
ment de la peinture dans la voie du naturalisme : Paolo
Uccello, ^ui appliqua k son art les principes de la per-
spective hnéaire; Biasolino, avec qui l'exécution pratique
fit de grands progrès; et surtout Masaccio, qui se dégages
des derniers vestiges de l'art traditionnel, et inaugura ce
qu'on pourrait appeler le style dramatique. A leur suite
on peut mentionner Filippo Ûçpi, qui plaça le premiei
des paysages d'une certaine importance dans les ta-
bleaux, Botticelli, Baldovinetti, André del Castagne, Be-
nozzo Gozzoli, Roselli, Ghirlandsjo, Polla]uolo, dont les
peintures se distinguent par la science anatomique, Luca
Signorelli, Fra Bartolomeo délia Porta, etc. Un caractère
commun à tous ces peintres, c'est l'introduction des por-
traits de contempondns dans leurs œuvres. — Le natura-
lisme fut également praticrué dans la Lombardie : si on
ne le trouve pas encore oans l'école dont font partie
Foppa, Giverchio, Bevilacqua, Fossano et Montoriano, il
inspira l'école de Padoue, (ondée par Souarçione et
André Montegna; de là il se répandit dans les États vé-
nitiens avec Parentino, Pizzolo et Buono, à Bologne avec
Lorenzo Gosta, en Ombrie avec FiorenrdO di Lorenzo, k
Parme avec les frères Mazzuoli, à Lodi avec les frères
Piazza, à Milan avec Bramantino et Borgognone. — Ge-
pendant il y eut en Ombrie, particulièrement à Pérouse,
une école qui, tout en adoptant les progrès que faisait la
peinture dans l'exécution pratic[ue, conserva les tradi-
tions du style pieux, sans les laisser s'altérer au contact
des idées antiques et païennes, et que l'on peut regarder
comme issue de l'école de Sienne et des miniaturistes du
XIV* siècle. Après avoir compté parmi ses maîtres Taddeo
Bartolo de Sienne, Martinelli, Antoine de Foligno, Buon-
Agli, Nicolas Alunno, elle jeta un vif éclat avec Pintu-
ricchio et Pierre Vanuoci, dit le Pérugin; ce dernier eut
à son tour pour élèves Luigi l'Ingegno, Manni, San-
Giorgio, Paccniarotto, et enfin Raphaël Sanzio, destiné à
les éclipser tous. Bologne avait aussi dans Francesco
Francia un chef d'école, qui se rapprochait des artistes
de Pérouse par le sentiment pieux et par la finesse de
Texécution.
Outre les progrès du naturalisme dans l'art, le xv* siècle
vit s'opérer une autre révolution, dont le signal fût donné
par Vécole vénitienne ( K ce mot)^ attachée plus long-
temps que les autres à la peinture byzantine. Antonello
de Mesnne, en possession du secret par lequel Jean de
Bruçes avait rendu plus facile l'emploi de la peinture à
l'huile ( F. ce mot)^ le porta k Venise vers 1450, tandis
que Dominique le fit connaître k Florence. Partout ce
genre de peinture fût adopté pour les tableaux de cheva-
let; mais les artistes vénitiens s'en servirent les premiers
pour remplacer la fresque dans les grandes compositions.
Jean Bellini, et son frère moins illustre Gentile Bellini,
donnèrent k l'école vénitienne cette supériorité de coloris
qui l'a toii^ours distinguée. Parmi leurs élèves ou leurs
émules, on doit citer Gima de Conegliano, Basaiti, Buon-
consiglio, Msrescalco, Previtali, i^nacchi, Catena, Bis-
solo, Santa-Groce, Rocco Marcone, Jean d'Udine, Cariano
de Bergame, Pellegrino de San-Daniele, Garpaccio, Man-
sueti, Lazzaro Sebastiani, Libérale, Francesco Morone,
Girolamo dal Libri, Montagna de Vicence, etc.
Qud que fût le mérite de tous les peintres précédents,
ils furent tous surpassés par des artistes qui portèrent
l'art an point extrême de la perfection, Léonard de Vinci,
Michel-Ange, Raphaôl, le Giorgion, le Titien et le Gor-
rége. Parce qu'ils naquirent vers la fin du xv* siècle, on
les désigna, eux et leurs élèves, sous le nom de Cinque-
centislû Léonard de Vinci, après avoir étudié k Florence
sous Verrochio , alla porter k Vécole milanaiee une vie
nouvelle et féconde : aucun artiste ne réalisa si complè-
tement l'idée qu'on se fait delà peinture antique, science
de la perspective et de la lumière, étude minutieuse de
la forme, art du modelé, laj^ur du dessin , profondeur
de Texoression ; il ne lui a manqué que le génie créateur de
Mich^- Ange ou de Raphafil pour être le plus grand peintre
ITA
1104
ITA
ées temps modernes. Sans parler de la fameuse Cène de
de Itilan, fresque aujourd'hui fort altérée, on peiii dter
deux toiles que possède le Musée du Louvre, la Vierge,
VEnfant Jésue et S^* Annef et cette Joconde^ peinte^ se-
lon les expressions de Vasari, « de manière à faire trem-
bler tout artiste robuste. » Après Léonard de Vinci,
l'école milanaise fut représentée, au xvi* siècle, par
Bemardino Luini, Helzi, Salidno, Marco d'Oggione, Ci-
gare da Cesto, Salarie, Beltraffio, Gaudenzio Ferrari,
Raud dit le Sodoma, Beccafumi, etc. — Michel-Ange se
flraya une voie indépendante. Il n'a guère laissé qu'une
OBuvre en peinture, la célèbre fresque du Jtêgement der^
nier, ui orne la voûte de la chapelle Sixtineà Rome;
car le tableaux qu'on lui attribue furent exécutés par
( élèves d'après ses dessins. Sa chaleur de composition,
connaissance profonde de Tanatomie, la hardiesse de
contours et de ses raccourcis, lui donnent, comme
dans l'architecture et la sculpture, une originalité puis-
sante, qui devint de l'exagération duis ses imitateurs. Si
l'on excepte Daniel de Yolterre et Sébastien del Piombo,
trop éminents pour reproduire les défauts du maître, il n'y
a plus, après lui, que des peintres qui tombent dans le
faux et l'efiflure en cherchant l'efTet, Yasari, Rossi, Nal-
dini, les Zuccari, Vanni, le chevalier d'Arpino, Fontana,
Gesi, Semini, Cambiaso, etc. Dans la peinture de portrait,
Angelo Allori dit Bronzinoet son neveu Alessandro appar-
tiennent à la même école. Il faut faire exception pour
André del Sarto, dont la peinture se rattache à l'école na-
turaliste, mais tempérée par une grande naïveté et une
grande finesse de dessin et d'expression, et qui eut pour
élèves Frandabigio, le Pontormo, le Rosso. Vers la fin du
XVI* siècle, Ludovico Qgoli et Gresorio Pagani revinrent
à la nature et à un goût meilleur dans l'emploi du clair-
obscur. — Raphaël Sanzio, dit le Divin, est le chef de
Vécole romaine. Il a réuni les qualités des autres maîtres,
non pas au même degré de perfection ou de puissance,
mais dans une mesure qui fait de lui le premier des
Seintres : élève du Pérugin, il puisa dans l'école om-
rienne cette expression pieuse, cette grâce et cette dou-
ceur qui convenaient à sa nature; plus tard il étudia la
perfection dassique de Léonard de Vinci, la couleur ma-
gistrale de Fra Bartolomeo, le naturalisme des andens
Florentins, l'antiquité dans les collections de Rome, et,
de tous les caractères qu'il sut s'assimiler et transformer
à son image, résulta le plus harmonieux, le plus mervdl-
leux ensemble. Raphafil a eu la plus sublime conception
de la noblesse idéale de la nature humaine, et son génie,
sans Jamais faiblir, apparaît dans toutes ses œuvres avec
la môme beauté chaste et solennelle. Il suffit de dter la
la DisptUe du S^-Sacrement, V École d^ Athènes^ la Trans-
figuration, les Sibylles, le Triomphe de Galathée, les
Noces de Psyché, la décoration des Loges du Vatican, la
Bataille de Constantin, la Vierge de Foligno, la Madone
de Sixte-Quint, la 5** Famille du Louvre, les portraits
de Jules u et de la Pomarina, Les meilleurB maîtres de
l'école romaine après Raphaél ont été Jules Romain, le
Primatice, Niccolo dell' Abbate, François Penni, Perino
del Vaga, Polydore de Caravage, André Sabbatini, Pelle-
grino, Benvenuto Tisi dit U Garofalo, Giacomone de
Faenza, Timoteo Viti, les Camp^, etc. — Le Giorgione et
le Titien, élèves de Jean Bellini, ont donné à Vécole véni-
tienne tout son éclat. Les portraits de l'un sont remar-
quables par leur chaleur et leur vérité. L'autre, admi-
rable comme peintre d'histoire et de portraits, et le
premier grand maître que le paysage ait compté, posséda
au suprême degré la puissance et l'harmonie de la cou-
leur, qui est le caractère distinctif de l'école. Après eux
linrent Palma le Vieux, Bonifado, Lorenso Lotto, Schia,
vone, Paris Bordone, Pordenone, Moroni, Romanino-
Maganza, Brusasorci, Moro, Moretto, Farinata, Gampa-
gnola, Zelotti, Savoldo, enfin le Tintoret et Paul Véro-
nèse, ce dernier, maître à son tour de Cagliari, de Palma
le Jeune et des Bassan. — Quant au Gorrége, s'il pèche
au point de vue de la pureté et de la gravité du style, il
excelle par la largeur du modelé, la distribution de la
lumière et des ombres, la qualité du ton, le bel emp&te-
;ment et la solidité de la peinture. Ses mérites étaient le
■produit d'un instinct et d'un sentiment particuliers, et ne
pouvaient se formuler en doctrine : aussi n'ouvrit-il pas
d'école. Son seul élève fut peut-être Rondani, car il n'a
eks môme instruit son propre fils, Pomponio .Allegri.
ais comme ses œuvres excitèrent un engouement gé-
néral, il eut beaucoup d'imitateurs, tels que François
Maxzuoli dit U Parmegiantno, et Schidone de Modène,
chez qui la douceur dégénéra en mollasse, le sentiment
m affectation, la facilité en licence.
Après cet âge glorieux de la peinture italienne, la d^
cadence commença au xvu* siècle. Trois frères, Louis,
Annibal et Augustin Garrache, essayèrent de l'arrêter, et
se firent chefs d'une école dite éclectuiue, dans laquelle
on chercha à réunir comme en un faisceau les qualités
distinctives des maîtres précédents. De cette école sor-
tirent Tiarini, Gavedoni, Spada, Massari, Salvi dit Sasso-
ferrato, éclipsés bientôt par des condisciples qui eurent
à leur tour des élèves aistingués : le Guide, maître de
Gagnacd, de Semenza, de Ganuti, d'Elisabeth Sirani;
Barbieri, dit le Guerchin (le borgne); Domenico Zazn-
pieri, dit le Dominiquin; l'Albane, maître de Mola et
d'André Sacchi. Louis Cardi dit Gigoli et Ghristofano
Allori suivirent l'école de plus loin. — Malgré les efforts
des Garrache, les peintres adoptèrent de plus en plus le
style décoratif et théâtral qui leur a valu le surnom de
machinistes, et prirent souvent pour modèle la nature la
plus vulgaire. A leur tête était BÎichel-Ange de Garavage,
qui eut pour prindpaux disdples ou imitateurs Lanfranoo,
Pierre do Gortone, Garlo liaratta, Antonio Ganaletto, et
Garlo Gignani. Les mêmes principes furent appliqués dan»
Vécole napolitaine, qui, jusqu'à l'arrivée de Penni et de
Polydore de Garavage, n'avait produit que Golantonio del
Fiore et Antonio Salario dit 2e Zingaro : Ribeira dit VEs-
pc^fnolet, Preti dit il Calabrese, Salvator Rosa, Luca Gior-
dano et Solimena en furent les plus fameux représentant».
Le style des machinistes fut enfin porté à Venise par
Turchi et Bassetti, à Vérone par Salmeggia, Tiepolo et
Ricci. Un autre peintre, le Baroche, mit à la mode la
grâce mignarde et le sentimentalisme, qui furent auasi
les caractères de Garlo Dolci.
Pendant le xvm* siède, l'Italie n'a guère produit que
Pompeo Battoni, qui se rattache à l'école éclectique, et
dont l'influence fut à peu près nulle. Depuis cette époque,
AppianiàMilan,Benvenuti à Florence, Ounuccini à Rome,
subissant plus ou moins l'influence de l'école française de
David, n'ont pu être rattachés, par leurs grandes décora-
tions à fresque, qu'à l'école des machinistes. On dte en-
core le peintre français Fabre, fixé à Florence, et dont les
paysages ne sont pas moins remarquables que ses tableaux
historiques ; Hayez et Pelagio Palage, pdntres d'histoire
à Milan; Migliara, peintre d'architecture; Ermini, <iui a
exécuté à Florence de Jolies miniatures; Sabbatini, qui
jouit d'une grande réputation pour ses dessins à la plume.
F. Vasari, La Vita de* pittori, Florence, 1550, in-fol.,
trad. en français par Jeanron et Lédanché, Paris, 1840,
10 vol. in-8o; Lanzi, Histoire de la peinture en Italie,
trad. en français par M** Dieudé, Paris, 1824, 5 vol.
in-8«; Artaud, Considérations sur l'état de la peinture
en Italie, dans les quatre siècles qui ont précédé celui de
Raphaël, Paris, 1808 et 1812, in-8o ; Andy, Histoire de la
peinture en Italie, Paris, 1817, in-12; Bourbet, Histoire
de la peinture en Italie, Paris, 1817; G.-T. James, The
Italian schools ofpainttng, Londres, 1820, ln-8*; W.Ott-
ley. Histoire de la peinture en Italie, en anglais, in-fol. ;
Huard, Histoire de la peinture italienne, Paris, 1834,
in-8<*; Rosini, Storia delta pittura italiana, Pise, 1840;
J. Goindet, Histoire de la peinture en Italie, Paris, 1 vol.
in-12 ; De Stendhal, Histoire de la peinture en Italie,
nouvelle édition, Paris, 1860, in-i2. B.
rrAUB (Musique en). Dans les premiers sièdes qui sui-
virent la chute de l'Empire romain, la musique ne fut
autre chose que le plain-chant, avec ses deux formes suc-
cessives qu'on nomme le chant ambrosien et le chant
.grégorien {V, PLAi2«-CHAirr, Ahbrosisn, GaicomiEN) ; son
échdle, imparfaite et restreinte, servait également pour
les compositions du genre profane. Il est impossible
de déterminer dans qudle proportion l'art dirétien em-
ploya les éléments de la musique hébraïque et de la mu-
sique grecque. On ne saurait dire avec plus d'exactitude
l'époque à ifi({uelle les instruments furent introduits dans
le service divin : sdon l'opinion générale, on commença à
se servir de l'orgue dans l'ÊKlise romaine sous le pape
VitaUen, vera Tan 670. Puis, jusqu'au xi* siècle, les faits
rehitifs à l*histoire de la mudque en Italie sont très-nres t
un prêtre vénitien, nommé George, se rend, en 836,
auprès de Louis le Débonnaire, qui lui fait construire uo
orgue hydraulique à Aix-la-Ghapelle; le pape Silvestre II,
mort en 1003, Jouit d'une grande réputation comme mu-
sicien, et scoute quelaues perfectionnements à l'orgue.
On a attribué à Gui d'Arezzo, moine bénédictin, mort
en 1050, de grandes réformes dans le système musical : il
aurait, dit-on, créé la gamme moderne en convertissant les
tétracordes des Grecs en un hexacorde, donné aux notes
les noms qu'elles portent encore aujourd'hui, imaginé la
portée, établi l'usage et la distinction ^es clefs, etc.
ITA
110»
ITA
iofkfll a oombatta cette tradition aTee saceès; mais il n'en
mte paa moine aYéré que Gai d*Areito recueillit lee pré-
cqNes de musique, peu répmdus alors, de ses prédéces-
tmat et de ses contemporains, et qu*il introduisit une nou-
relie méthode pour renseignement du chant. Les guerres
dont ritalie fût le théâtre pendant tout le moyen âge arrê-
tèrent les progrès de Tart musical, et il faut arriver Jus-
qu'à la fia da xiii* siècle pour trouver de nouveaux
renseignements. Dante, dans sa Dnm» Comédie, célèbre
an màmcien <da nom de Casella, dont il ne reste aucun
sntie souvenir, et un ami* du même poète, Scocchetti,
met en musique quelques-uns de ses vers. Vers le même
temps, Harchetto de Padoue, commentateur de Francon
de Colore, écrivait un LiuHdariutn musicœplanm et un
Nmeammh musiem mênsuratœ^ insérés par Gerbert dans
tt collection des Scriptons ecclesitutici de musieà eacrà
(L m). — ^Au XIV* siècle, un Florentin, Francesco Landino,
mmommé Gieco O'aveugle), fut célèbre comme composi-
teur et comme organiste ; quelques-unes de ses œuvres se
trouvent dans un manuscrit de la Bibliothèque impériale
de Psris. En 4310, une société de musiciens exécuta à
Florence des Laudi spiritualû Boccace nous représente
les personnages de son Décaméron Jouant de la viole et
du luth, chantant et dansant; on peut en conclure que la
musique était alors cultivée par les gens du monde. Il
parie aussi d'un certain Minuccio d'Arezzo, excellent
joueur de viole et chanteur parfait. On signale enfin une
bulle du pape Jean XXII, en 1322, pour interdire les
umi4>rèves, les minimes^ les harmonies barbares (7. Dé-
auRT, DiAPHoma), et tous les ornements qui avaient
altéré la pureté primitive du chant ecclésiastique.
Pendant le xv* siècle, ce furent des srtistes de Técole
gslio-belge (K. ce mot) qui vinrent donner Timpulsion
au génie Italien. La chapelle du pape et celles des autres
cours de Tltalie recrutèrent des compositeurs et des chan-
teurs flamands, français, espagnols, allemands même.
Jean Tinctor vint de Bel^que fonder une école à Naples
vers 1450. Un Allemand, Henri Isaak, fut le premier qui,
vers 1475, écrivit à Florence des chants camavaleeques
(K. ce mot). Parmi les Italiens dont Texemple des étran-
gers exdta l'émulation, on dte un fameux organiste de
noieoee, Antonio degli orgmU. Le peintre Léonard de
Vlnd Alt mnaicien, et Joua de divers instruments. Une
éeole publique de musique fut créée à Milan, en 1483,
^ar le duc Loois Sfona. Hais ce Hit principalement des
théoriciens qae produisit lltalie : Jean de Hantone, dit
le Carthuaiem (le Chaotreux), né à Namur et élevé en
Italie; Proedocimo de Beldemandis, né à Padoue, auteur
de Traités sur la musique mesurée et sur le contre-point;
F^anchino Gaforio, de Lodi, oui ouvrit des cours publics
sur la musique à Mantoue, a Vérone, à Milan, et dans
les ouvrages duquel le svstème musical de Tépoque est
complètement exposé {Theorica musica, Milan, 1402;
Praciéca musieœ, 1406; De hormonia musicorum imtru-
vuntorum, 1518).
Avec le xvi* siècle commence une période brillante
pour Fart italien. En 1503, Ocuve Petrucd de Fossom-
omie invente les caractères pour l'impression de la mu-
sique, et désormais les ouvrages des compositeurs vont
avoir un moyen de propagation. Des écoles sont établies
kfi9p]^SanUirMariadr Loretta en 1537, to Pieto déi
Tfârchmi et Sant^ Onofrio en 1583, / poveri di Giesu
Christo en 1580. D'autres établissements du même genro
ilearissent à Rome, à Florence, à Venise, à Milan. Les
genres de composition se distineuent les uns des autres,
et sont tous cultivés avec succès. Palestrina, élève du
Français Goudimel, et successeur d'Animuccla comme
maltie de chapelle de S^Pierre de Rome, a été sur-
nommé le créateur de la musique d^église moderne. Si
cjompodtions manquent parfois de mélodie, elles se
pent par la clarté et la mi^esté du style, la vérité
de l'expreMion, la simplicité dans la modulation, l'ob-
servatioa sévère dea règles de l'harmonie. Chef de l'école
Tmmdne, il a eu pour disciples ou imitateurs les frères
Jean-Marie et Bernard Nanini, Felice Anerio, Antonio
Gilim, Rngpero GiovaneUi. L'éDole lombarde devint égi^
lemeot cmtoe : après son chef Costanzo Porta, on y
compte Pietro POnzio de Parme, Orazio Vecchi de Milan,
l^lo Cima. Rooco Rodio fut la principale gloire de
Vioolle napolitaine. L'école vénitienne, fondée par le Fia-
mmd WiUaert, eut pour représentants Giovanni Croce,
Giovanid Fereiti, Matteo Atola, Andréa Gabrieli, son
wven Giovanni Gahrieli, Antonio Sartorio, etc. Une nou-
lelle forme de composition sacrée, l'Orotorto (F. ce
•oC), date du même siècle.
lA vnsique profane prit son essor en même temps
que la musique sacrée. Les mélodies (topnlairea napoll»
taines, connues sous les noms d'oris, de canMonette, de
vUlanelle , furent à la mode dans toute l'Europe, comme
l'avaient été, au moyen âge, les chants des Troubadours.
Des sociétés d'amateurs exécutèrent des madrigaux (F*
ce mot), composés à plusieurs voix et dans un style lii-
gué, sur des vers de Pétrarque, d'Arioste ou du Tssse,
par Animuccia, Palestrina et Luca Marenzio de l'éoole
romaine, le prince Gesuaido de l'école napolitaine, Joseph
Caimo et Giacomo Gastoldi de l'école lombarde, Cos-
tanzo Festa et Ant. Biffi de l'école vénitienne. Vers 1583,
une nouvelle espèce de musique, la musique concertante,
prit naissance à la cour des ducs de Ferrare et à Venise x
on en attribue l'introduction à un compositeur de l'école
romaine, Annibale Melone. Enfin, le système de l'har-
monie fut considérablement perfectionné en 1500 par
Claude Monteverde, de l'école vénitienne, qui le premier
osa se servir des dissonances (F. ce mot), et l'emploi de
la basse chiffrée , d'autres disent de la basse continue
(F. ces mots), fut imaginé, queloues années après, par
Louis Viadana, maître de chapelle à Mantoue. — Pln-
sieurs écrivains contribuèrent aux progrès de l'art, par*
ticulièrement Pierre Aaron, Louis Fogliani, Jean-Marie
Lanfranco. le P. Ange de Piciton, Nicolas Vicentino,
l'abbé Aiguino, Zarlino, qui est le plus remarquable de
tous, Jean-Bfarie Artusi, Vincent Galilée (père du ma-
thématicien), Orazio Tigrini, Hercule Bottrigari, le
P. Valérie Bona, le P. Ludovioo Zacconi.
Le XVI* siècle a vu les débuts d'un genre nouveau, le
genre dramatique, destiné à prendre, mms les âges Mil-
vants, une supériorité incontestable. L'application de la
musique à des drames était sans doute plus ancienne :
car une Conversion de S^ Paul, avec musique de Fran-
çois Baverini, fut représentée à Rome, selon les uns
en 1440, selon les autres en 1480 , et on Joua de même
un drame d'Ange Politien, Orfeo, en 1475; on dit même
que, dès l'année 1300, on récitait en vers les belles ac-
tions des grands capitaines, en y Joignant de la musique.
Ce n'étaient là que des essais informes. Alfonso dtfla
Viola, maître de chapelle à Ferrare, passe pour avoûr, le
premier, uni le chant avec la déclamation dans les re-
présentaydons scéniques : il est certain que la plus an-
cienne pièce ayant forme d'opéra est VOrbioche de Giraldi
Qnthio, tragédie dont il écrivit la musique, et qui parut
à Ferrare en 1541. Claudio Menda, Oraao Vecchi et Emi-
lie del Cavaliers, firent quelques tentadves du même
genre. Ce n'étaient encore que des espèces de monolo-
gues composés dans le style des madrigaux, et chantés
par plusieurs voix, faute d'instruments pour accompa-
gner. On fit un pas avec la Dafne de Péri, représentée à
Florence en 1507, et dans laquelle le récitattf ou décU^
madon lyrique remplaça la déclamation parlée. Le succès
de cette innovation fut consacré par r^ifridtoa de Péri et
de Julio Caccini , représentée k Florence en 1600 à l'oc-
casion du mariage de Henri IV avec Marie de Médids,
par l'ilrtodns et VOrfeo de Monteverde (1607). On com-
mençait en même temps à employer quelques instru-
ments d'orchestre.
Le drame lyrique demeura stationnaire pendant les
premières années du xvu* siècle. Puis, Francesco Ca-
valli, maître de chapelle à Venise, chercha, dans son
opéra de Jason (1640), à mettre l'expression de ses airs
en rapport avec la situation des personnages. Carissimi
donna plus de grêce au récitatif, plus de mouvement, de
variété et d'élégance aux accompagnements de basse,
donna aux oratorios une forme plus régulière, et intro-
duisit les instruments d'orchestre dans la musique
d'alise. Aleiandre Scarlatti dégagea du récitatif l'air
qui se confondait trop souvent avec lui, et crédi Vouver-
ture. La construcdon de théâtres permanents et publics
permit de multiplier les '.'eprésentations, qui avaient
eu lieu Jusque-là dans des salons particuliers. Domi*
nique Mazzocchi, musicien de l'école romaine, se distin-
gua dans la composition des madrigaux, Gregorio Allegri,
Valentini, Bemabei, Benevoli, Pertl et Steffani dans la
musique sacrée. Colonne dans l'oratorio. Horace Bene-
voli, mettre de chapelle du Vatican, perfectionna la
science du contre-point. La cantate {V, ce mot), destinée
à remplacer bientêt le madriml, fût cultivée par Caris-
simi, Stradella, Scarlatti, Cesti, Ludovico Rossi, Bassani^
Gasparini, Lotti, etc. — La musique instrumentale mar>*
chait de pair avec la musique vocale. Deux familles de
luthiers oe Crémone, les Amatl et les Stradivari, portè-
rent au plus haut point de perfection la fabrication dea
violons. Une école de violon, fondée par Gorelli, produi-
sit» entre antres exécatanu distiogo^ Flraneesco Geuu
70
ITA
1106
ITA
les fipàrai Somis de Tarin, Albinoni de Venise,
Joseph ToreUi de Vérone, Joseph Vaientini, Bfarietto de
Maples, Pierre LocateUi de Bergame, Veracini de Flo-
TCDce. Un c^èbre musicien de Ferrare, FMscobaldi ,
organiste du Vatican, inventa une nouvelle maniène de
Jouer de Torgue, qui consistait à lier et à soutenir les
■ons, à proposer et à reproduire alternativement quel-
ques sujets dlmitation. La ville de Bologne se distingua
•atre toutes par ses institutions musicales : trois sociétés
■Pt formèrent, celle des FUmdi, fondto en 1615 par
Adrien Banchieri, celle des Filomusi et des Filoscnici
établies par Jérôme Giacobbi en 1G22 et 1633, et toutes
làrent absorbées par V Académie philharmoniqve , insti*
tuée en 1666 par Vincent Carrati. Parmi les auteurs
d'ouvrages théoriques, nous mentionnerons Lemme Rossi,
Lorenzo Penna, Scipion Ceretto, Etienne Bernard!, Ca-
mille Angleria, Jean -Marie Buononcini, Angelo Berardi,
le P. Daniel Bartoli, et surtout J.-B. Doni.
Le xvm* siècle a été, sans contredit, l'époque la plus
lemarquable et la plus féconde de la musique italienne.
Des maîtres renommés ont tenu des écoles d'où sont
sortis de grands talents en tous genres, les Fedi et Ama-
dori à Rome, Pistocchi à Bologne, Redi à Florence, Bri-
Tio à Milan, Peli à Modène, Gizzi, Porpora, Léo, Du-
rante, Feo, Sala, Fenaroli et Tritto à Naples. Dans aucun
temps on ne vit Fart du chant pratiqué avec un tel
éclat : l'école romaine donna Bemaccm, Pasi, Fabri,
Guarducci, Ansani, Gicognani, Pacchiarotti, Grescen-
tini, la Gabrielli , la Gatalani ; l'école napolitaine fut il-
lustrée par Farinelli, Caffiffelli, Gizdelli, Millico, Aprile,
Mattucci, la Mingotti; à l'école lombarde se rattachent
Appiano, Salimbeni, Monticelli, Guadagni, Giov. Paita,
Carlo Scalzi, Aug. Fontana, Ottani, I&vid, Marohesi,
Viganoni , la Viscontina , la Grassini ; le Porporino et la
Bordoni se formèrent à Venise, Manzuoli et la Tramon-
tin! à Florence. Les écrits théoriques se multiplièrent :
il suffit de citer, parmi ceux qui en furent les auteurs,
Zacharie Tevo, le P. Bfartini, le P. Sacchi, le comte Algar
rotti, le P. Paolucci, le chevalier Planelli, SignoreTli,
J.-B. Mandni, Manfredini, le P. Valottl, le chanoine
Belii, le P. Sabbatini.
Les ressources se multipliant, le travail de la compo-
sition devient plus abondut et plus riche. La musique
sacrée, qui ne cède que peu à peu le premier rang,
compte parmi ses trésors les œuvres d*Ottavio Pittoni ,
de Porpora, de Léo, de Durante , les Stabat de I^ergolèse
et de Boccherini, les Psaumet de Marcello, une foule de
morceaux écrits par Fioroni , Salulini , Mei , San-Mar-
tini, Santarelli, Bertoni, Casali, les PP. Martini et Va-
lotti, Zanotti, Vignoli, Ottani, Orsoni, etc. — La poésie
du drame Ivrique, portée à une rare perfection par Mé-
tastase, était de nature à provoquer l'inspiration des mu-
siciens. Trois générations de compositeurs dramatiques,
en progrès l'une sur l'autre, se succédèrent dans le cours
d'un même siècle. A la première appartiennent : Por-
pora; Leonardo Vind, qui sut donner aux airs plus de
développement et une forme régulière ; Pergolèse, dit le
Divin, dont les mélodies pleines d'expression, mais peu
goûtées de son vivant, excitèrent, après sa mort préma-
turée, le plus vif enthousiasme ; Logroscino , que les Na-
politains surnommèrent le Dieu de l'opéra bouffe; Buo-
noncini, qu'un parti ne craignit pas d'opposer à Handel ;
DunI, qui alla écrire ses opéras-comioues à Paris; Pisto-
rini, dont le talent dans les intermèdes et l'opéra bouffe
était plein de gr&ce et de flexibilité; Galuppi, un des
meilleurs compositeurs pour l'opéra comique. La seconde
génération comi^rend : Jommelli, dont la musique de
chambre et d'église, aossi bien que les œuvres thé&trales,
«e distingue par l'originalité des idées, la simplicité
touchante des mélodies, et la richesse de l'harmonie ;
Piccinni, musicien d'une rare abondance, qui Intro-
duisit dans l'opéra les morceaux d'ensemble, détermina
ia juste forme du dao, et, pendant quelques années de
séjour en France, se posa comme le rival de Glu^ ( V,
FiUNCB — Musique en); Sarti, qui manqua de profon-
deur, mais dont les mélodies et la facture générale
étaient d'une élégance remarquable; Sacchini, que la
l?Vance put louer pour la pureté et l'expression de ses
chants, pour la facilité et la richesse de ses accompagne-
ments. Enfin, trois maîtres ont encore surpassé leurs
prédécesseurs, Guglielmi, Paisiello, et Qmarosa, dont les
ouvrages sont des chefs-d'œuvre de chant, de grftce,
d'esprit et d'originalité. — D'autres compositeurs drama-
4ques parurent encore au xvm* siècle, mais sans atteindre
ku premier rang : tels furent Orlandini, Polarolo, Cal-
Wa, Vivaldi, Porta, Giacomeili, Bertoni, Trafitta, etc.
Dans la musique instrumentale, le xvui* siècle a pro*
duit aussi des artistes très-distingués. Joseph Tartinl,.
célèbre par l'invention d'un système d'harmonie, forma
une école de violon, dans laquelle il enseigna la nouvelle
manière de condidre l'archet que lui avait apprise ioq
maître Veracini. Il eut pour élèves Nsrdini, Morigi, Fer-
rari, C^inxTJ, Celestini, et Pugnani , maître à son tour
de Viotâ et de Bruni. Alexandre Rolla se fit connaître
par son talent sur la viole et sur le violon. Antoine
Lolli, de Bergame, figure aussi parmi les violonistes.
Les finères Alexandre et Jérôme Besozzi eurent une grande
réputation, l'un sur le basson, l'autre sur le hautbois.
Les dernières années du xvm* riècle et les premières
du XIX* forment une période intermédiaire, qui se pro-
longe Jusqu'à l'avènement de Rossini, et durant laquelle
les oompositeun se sont bornés à imiter les modèles de
l'âge précédent, à perfectionner les procédés, sans qu'il
y ait de progrès bien sensibles au point de vue de l'in-
vention. Les uns allèrent s'établir et faire Jouer leurs
oBuvres à l'étranger; ce sont Salieri et Righini en Alle-
magne, Bernardo Mengozzi, Bemardo Porta, Délia Maria,
Spontini, Cherubini, Paér et Carafa en Fnnce; ceux
d'entre eux qui vécurent assez longtemps reçurent le
contre-coup de la révolution opérée par Rossini, et mo-
difièrent leur style dans leurs derniers ouvrages. Les
autres, qui demeurèrent en Italie, n'eurent qu'une vogue
momentanée, à laquelle le nouveau compositeur mit fin
d'un seul coup ; ce sont : Nazolini, musicien gracieux ,
mais dépourvu de force ; Vincenio Federici, qui écrivit
pour les théâtres de Londres et de l'Italie; François
Mosca, d'un savoir très-borné, et à qui l'on attribue le
premier emploi du crescendo (V. ce mot)% François
Gneoco, dont le stvle est lèche, tririal et incorrect; ZSn-
garelli , directeur du Conservatoire à Naples ; Simon Hsyr
ou Mayer, originaire de la Bavière, et imitateur de Mo-
zart; rioravanti, qui prit pour modèle la manière de
Guglielmi, et abandonna le théâtre, où il avait eu quel-
ques succès dans le genre bouffe, pour remplir les fonc-
tions de maître de chapelle à Rome; Jos^h Farinelli,
imitateur de Cimarosa ; Joseph Niccolini, plus nerveux,
mais inégal ; les frères Orgitano, qui eurent qoelaue
originalité dans la forme des cantilènes et la coupe des
morceaux ; Generali, doué d'un génie heureux, que les
excès d'une vie de désordre ne tardèrent pas à étouffer;
François Moriacd^, musicien assez fécond et estimable;
Charles Cocda, longtemps directeur de l'opéra italien à
Lisbonne et à Londres. — Dans cette période se place la
fondation du Lycée muncal de Bologne (1805), où en-
seigna le P. Mattei, et, en 1801, celle du Gonserratoire
de Milan, dont Asioli fut le premier directeur.
La gloire de l'Italie pendant le xix" siècle rédde dans
le génie de Rossini , dont les chefs-d'œuvre ont eu un
prodigieux succès dans le monde entier. Il suffira de
citer Tancrède et Vltaiienne à Alger (1813), le BarbUr
de Séville et Otello (1816), la Gazsa ladra et la Cène-
rentola (1811), Moee m EgiUo (1818), la Donna dd Lago
(1810), Sémiramis (1824), U Siège de CoruUhe (1821],
qui n'est qu'un Maometto retond pour la scène fran-
çaise, le Cornu Ory (1828), et GuOlamne Tell (18S9). U
popularité de cette musique ne peut être comparée à sn-
cune antre : il y a là une quantité prodigieuse de chsnts
heureux et d'inspirations dramatiques, d*élégantcs mé-
lodies qui plaisent à l'oreille et au cœur. Les opéras des
anciens maîtres contenaient trop de récitatifs, d'aira et
de duos, et pas assez de morceaux d'ensemble : Rossini
mit peu de récitatifs dans ses oauvres, les soutint par de
riches dessins d'orehestre, donna plus de mouvement à
l'action, plus d'importance aux masses chorales, et ne
laissa pas l'intérêt faiblir dans l'intervalle des morceaux.
Tous les moyens matériels dont les compoMteurs précé-
dents avaient usé, tels que les différents rhythmes, les
coupes des aire, duos et morceaux d'ensemble , le en»'
eenaOf les canons, les divers genres de modulations et
d'accompapements, Rossini a su se les aporoprier; ces
moyens , improductifs entre les mains des hommes mé-
diocres, il leur a donné la vie par la fécondité, la grâce
et la chsleur de ses inspirations. On lui a reproché' une
certaine monotonie dans les termes de ses morceaux, et
un style de chant beaucoup trop orné ; ce dernier cano*
tère a pu être l'efTet de la médiocrité des chanteurs, qui,
incapables d'embellir avec goût, comme on le faisait au-
trefois, les mélodies des compositeun, avaient besoin
qu'on leur écrivit tous les agréments du chant. Rossini
a cependant trouvé des inteiprètes habiles, Velutl, Robi-
ni, Nozzari, Galli, Lablache, A. Nourrit, Duprez, M"*« Pi-
saroni et Pasta. — Les autres compositeun italiens du
ITA
1107
ITA
ux* dède ont suivi la voie tracée par Rossini^i dont ils
Q^ont guère folt qu'imiter les chants, les formes et Tin-
itmmentacîoii : tels sont Pacini , Vacci^, Valentini , Per-
siani, Balducd, Aspa, Petrelli, Ricci, Raimondi, Bon-
flchi, Sapienza, Coppola, Gostamagna, Negri, Nini, Lillo,
Caaamorala. Au-dessus d*eux on doit placer trois maîtres
aosal couDUB à Tétranger cni*en Italie, Mercadante, Bel-
liai, et Donizetti. Aujoura*hui, le compositeur drama-
tique le plus renommé est Verdi, qui a su donner un
grand intérêt au travail de rorchestrê, mais qui ne pos-
sède pas une veine mélodique fort abondante ; en outre,
on doit le bl&mer de donner au chant et à Tinstrumenta-
tion un excès de sonorité.
la musique d*église n*occupe plus un rang aussi élevé
que par le passé. Si Ton exécute encore avec talent les
compositions des anciens maîtres, on ne produit plus
d*aaQvre8 appartenant au style véritablement religieux, et
les formules rossiniennes ont pénétré presque partout. II
n*est guère permis de citer que Fabbé Baini, compositeur
et chanteur de la chapelle pontificale, Terziani, maître de
chapelle de S^ean-de-Latran, et Guidi, maître de cha-
pelle de S^'-Marie-in-Trastevere. — Dans la musique
instrumentale, on distingue Torganiste Parisi, et les vio-
lonistes PoUedro et RoveUi, que le merveilleux talent de
Paganfni fit oublier, puis Bazzini, Sivori, etc. B.
rrauE (Gravure en). V, Gravcrb.
ITALIENNE (Comédie). V. notre Dictumnaire d$ Bio-
graphie et d'Histoire.
iTAUBiiifB (Langue), une des langues néolatines (F. ce
mot). Elle doit être considérée, dans sa plus haute ori-
gine, comme une deuxième forme de Tancien latin. En
effet, le ladn primitif, suivant une loi générale des lan-
gues, alla toujours en perdant les formes compliquées de
ses déclinaisons et de ses conjugaisons, pour en adopter
de plus claires, de plus analytiques; à côté donc du
latin littéraire, fixé par les éoivains de génie, et parlé
par les classes cultivées de la société romaine, se trou-
vait une langue moins correcte, mais aussi logique, dite
langue rustique et langue des camps, celle des paysans,
de la plèbe, et des soldats. On rencontre des traces de
cette langue dès le n* siècle de J.-G., dans les inscrip-
tions des catacombes, où Ton voit déjà un des princi-
paux caractères de ce qui deviendra un Jour Titalien, la
suppression des déclinaisons, et la tendance vers une
terminaison unique des substantifs. Avec le temps, et
sous l'influence des événements, cette langue populaire
finit par se substituer à Tancien latin dans le langage or-
dinaire. Le premier monument connu de cette langue
nouvelle, que Ton peut déià appeler italien, date de iiS5 ;
c'est une inscription en vers, gravée sur une pierre de la
voûle de la cathédrale de Ferrare : mais, dès le ix* et
mèoie le vni* siècle, on trouve des vestiges de la nouvelle
lanoie dans les noms propres d*hommes et de lieux que
renferment les actes priva ou publics. Les caractères de
cet ancien Italien, qui sont restés ceux de Titalien mo-
deme, consistent : 1* dans une terminaison invariable
ou presque invariable, substituée aux désinences variées
de ui dédinaiaon latine, et qui fut, généralement, celle de
Fahlatlf latin singulier. Ainsi, on dit 0^"^*^^» domino,
su Heu de genitoris, geiUtorem, domini, aominum;
9» ntalien décomposa les formes compliquées par les^
quelles Tancien laan marquait les divers temps du verbe,
au moyen de verbes auxiliaires, comme Are, aootr, faire,
aller, ffemr; 3<* la suppression des cas qui marquaient
les rapports sous lesquels Tesprit conçoit les objets ext^
rieurs amena Tusage de mots particuliers (prépositions)
pour continuer à marquer ces mêmes rapports : liber
Pétri devint U libro di Pietro; A» Tancien Adjectif latin
Ule, Ula^ employé déjà même par Qcéron avec le génitif
dHine façon déierminative , devint l'accompagnement
oblifçâ du substantif, et forma Tespèce particulière de
mots appelée article : il, lo, la, igli,
La gnmde masse des mots de la langue italienne est
lœontestablement d'origine latine ; néanmoins l'Italie a
été si longtemps bouleversée par les invasions, qu'on peut
dbe que sa langue a une physionomie moins latine que
iTespagnol. L'italivsn a conservé un grand nombre de mots
appartenant aux langues des peuplades qui précédèrent
ns Latins, telles que l'ibérien, l'étrusque, l'ombrien,
fosqne, le sabin. H a emprunté quelques expressions aux
nées conquérantes. Gaulois, (îermains, Slaves. Il en a
reçu quelques autres des Sarrasins et des possesseurs
grecs de la basse Italie.
Plus harmonieux , mais moins sonore que l'espagnol ,
ntafien en a l'abondance et la naïveté : sa naïveté tient
à Torigine démocratique de la langue, qui se forma dans
I les fortes républiques de Pise, de Florence, de Pavie, etc.
D'ailleurs, le grand nombre de génies divers qui ont écrit
dans cette belle langue l'ont pliée à tous les tons, depuis
les plus simples Jusqu'aux plus sublimes. On peut y
noter les différentes phases de la vie politique de lltalie :
simple, concise et en progrès tant aue le peuple de ces
républiques, en déployant son énergie, conserve dans ses
mœurs la rudesse et la simplicité, la langue italienne
s'effémine et s'amollit aussitôt que les mœurs se cor-
rompent et que la nation ne sait plus défendre son indé-
pendance.
L'italien est loin d'être parié avec la même pureté dans
toute la Péninsule : il existe un grand nombre de dia^
lectes, fort éloignés de l'italien classique, et qui ont leur
origine dans l'invasion et la conquête. Les plus incorrects
sont le lombard, le vénitien, et surtout le napolitain des
Calabres et des Abnizzes. Le toscan de Florence passe
pour l'italien le plus pur et le plus harmonieux. Dans la
bouche des Romains, il prend un accent particulier de
noblesse. Il semblerait donc que l'italien classique ne
soit que le dialecte toscan, élevé par la culture et par la
destinée au rang d'idiome national. Toutefois il est une
opinion qui regarde l'italien littéraire comme formé ni-
distinctement de tous les dialectes italiens, en conser-
vant de chacun ce qu'il avait de plus parfait. Cette opi-
nion, qui est celle de Dante, a pris récemment un certain
crédit en Italie.
V, Accarisio, Grammatica ix>lgare, Bologne, i53G,
in-8**; De Mesmes, Grammaire italienne composée en
françoys, Paris, i548, in-8°; Scipio Lentulus, Italicœ
grammaticœ prœcepta ac ratio, Naples, i5C8, in-8**;
Nouvelle méthode de MM. de Port-Royal pour apprendre
la langue italienne, Paris, 1660; Yeneroni, Le maître
italien ^ Amst., 1691; Corticelli, Regole ed osservassioni
délia Itngua toscana ridotta a metodo, Bolocpe, 1745,
in-8°; Soave, Grammatica ragionata délia Itngua ita-
liana, Parme, 1772, in-8°; Luneau de Boisgermain,
Cours de langue italienne, Paris, 1783, 3 vol. in-iS^ ; Bar-
beri , Grammaire des grammaires italiennes, Paris, ISlt
2 vol. in-S^' ; Martelli, Grammaire italienne élémentaire,
Paris, 1826; les Grammaires de Yeneroni, de Biagioli, et
de Yergani ; Cerutti , Grammatica /Uosofica délia lingua
italiana, Rome, 1839 ; — Accarisio, Vocabolario ed orto-
grafla delta lingua volpare, Cento, 1543, in-4<^ ; Il Vocor
bolario degli academtci aella Crusca, Yenise, 1612,
in-fol.; Antonini, Dizionario italiano, latino e francese,
1735, 2 vol. in-4^; Alberti di Yillanova, Dictionnaire itor
lien-français, Nice, 1778, 2 vol. in-4^, et Diiùmario
unioerscUe, critico, enciclopedico délia lingua itiUiana,
Lucques, 1797, 6 vol. in-4**; Barberi^ Dictionnaire itt^
lien-français, Paris, 1825, 2 vol. in-4*; Bonavilla, Vbco-
bolario etimologico, Blilan, 1825, 5 vol.; Tomaseo, Nuaoo
dizionario dei sinonimi ddla lingua italiana, Florence,
1830; Morlino et de Roujoux, Dictionnaire classique tto-
lien-français et français-italien, Paris, 1832, 2 vol. in-8® ;
Dizionario délia lingua italiana, Bologne, 1819^26, 7 vol.;
Vocabolario universale italiano, Naples, 1829-40, 2 vol.;
— Fr. Alunno, Le richezze délia lingua italiana, Yenise,
1543, in-foL; Giambullari, Il Gello, cioè ragionamentt
délia prima origine deUa toscana lingua^ Florence, 1540,
in-4^; Persio, Discorso intomo alla conformita ddla
(in^ua italiana con la greca, Bologne, 1592, in-8®; Buon-
mattei , Deila ling%êa toscana liSri II, Florence, 1643,
in-4<^ ; F. de Diano, Fiume delV origine délia lingua ita~
liana e lalina, Yenise, 16S6, in-8^ ; Oct. Ferrari , Origines
linguœ italicœ, Paris, 1676, in-fol.; Cesarotti, Saggio
sopra la lingma ttajtona. Ylcenoe, 1788, in-8<»; Galeani,
DelV uso ede^ pregi délia lingua italiana, Turin, 1791,
3 vol. in-8"; TozzeUi Mazzoni, Origine délia lingua itO'
liana, Bolofne, 1831 ; Romani. Opère sopra la lingua
italiana, Mflan, 1825, 8 vol. in-80( Castlglia, Studiisulla
lingua italiana. Païenne, 1836. E. B.
rrALiEifivB (Littérature). L'histoire de cette littératurt
peut se diviser en dnq périodes. La l'*, oui s'étend Jus-
qu'au XIV* siècle, comprend le réveil des lettres en Italie
après l'invasion des Barbares, et les premiers essais des
poètes sous l'influence des modèles provençaux ; la 2* est
dominée par trois grands noms, Dante, Pétrarque, et Boo-
cace; la 3*, comprenant la seconde moitié du xv* siècle
et tout le XVI*, est l'âge de la Renaissance, et renferme ce
qu'on appelle le siècle de Léon X; la 4* se compose du
XVII* siècle, pendant lequel l'Italie, malgré sa décadence,
agit encore sur les littératures voisines, et du xvm*, où
elle subit l'influence française; la 5* est l'âge contem-
porain.
Première période, — La littérature italienne ne procède
ITA
1108
ITA
!•»!« immédiatement de la littérature latine : les lettres
ro maines, tombées en décadence dès Tépoque des empe-
reurs, allèrent en déclinant Jusqu'à Constantin, qui , en
délaissant Rome pour Byzance, donna le coup mortel aux
lettres et aux arts en Italie. A dater au triomphe de la
religion chrétienne sous cet empereur, la littérature
ecclésiastique seule fournit des ouvrages remarquables.
Mais bientôt Tinvasion des Barbares anéantit toute cul-
tare morale, et, si elle introduisit un élément nouveau
dans le sol épuisé de la vieille Italie , elle ne Ten rendit
pas moins pour longtemps stérile. Touterois, Tétat de
ritalie sous les rois goths et lombards ne fut pas aussi
aiR^ux qu'on serait tenté de le croire : les vunqueurs
prirent quelque chose de la civilisation des peuples con-
quis, et il suffit de citer Théodoric pour prouver que les
rois goths tinrent à honneur de protéger les lettres. A
répoque de Charlemagne, Tltalie étal; plus civilisée que
les autres contrées de l'Europe ; on voit ce prince attirer
à sa cour des littérateurs et des artistes italiens, entre
autres Théodulfe, Goth d'origine, au'il fit évêque d'Or-
léans. Sous les successeurs de Charlemagne, les ténèbres
vont s'épaississant de plus en plus : les seules études de
ces &ges reculés sont la jurisprudence et la théologie ; et
encore de misérables disputes d'école absorbent-elles le
petit nombre d'esprits qui se préoccupent encore de ces
sdences. Les mots se substituent aux idées ; la subtilité
et le sophisme prennent la place de la simplicité des
Le pontificat de Grégoire Vn (1073-1085) vit apparaître
les premières laeurs de la renaissance des lettres en
Italie. Ce pape donna ordre aux évèques d'entretenir
chacun prik de son église une école pour l'enseignement
des lettres. Dans le même temps, la comtesse lAathilde
fondait l'université de Bologne, où l'on se mit à étudier
le Code Justinien. Tous les grands hommes de cette
époque sont des hommes d'église, et les deux plus cé-
lèbres, nés en Italie, passèrent leur vie loin de leur pays;
ce sont : Lanfranc, de l^vie, qui fit de l'abbaye du Bec,
en Normandie, une école fameuse, et combattit l'hérésie
<le Béranger ; et S^ Anselme d'Aoste, son disciple, comme
lui abbé du Bec et archevêque de Cantorbéry. Leur plus
grand titre de gloire est l'admiration de leur siècle ; leurs
ouvrages sont oubliés , comme les disputes théologiauea
qui y avaient donné lieu. — Le xii* siècle fit entrer clans
la dvilisation européenne un élément nouveau : les Croi-
sades établirent des communications entre Constantinople
et l'Italie , et les évêques italiens fréquemment envoyés
en ambassade dans l'empire d'Orient s'initièrent à la
connaissance de la langue et de la littérature des Grecs.
Halheureusement, l'Église et l'Italie étaient souvent trou-
blées : les élections des papes amenaient des conflits dont
les empereurs d'Allemagne décidaient; plusieurs anti-
papes provoquaient des schismes; Arnaud de Brescû
cherchait à établir à Rome une république, que le pape
Adrien IV ne renversa an'avec l'aide de l'empereur rre-
déric Barberousse. Pendant ces troubles, les lettres lan-
guissaient, et l'Italie ne fournissait d'autre homme cé-
lèbre que Pierre Lombard, {0 maitrB des sentences, qui
alla tenir école à Paris. Cétait l'époque de la grande au-
torité d'Aristote. Les lettres se réduisaient à la grammaire
et à la dialectique. La querelle des Réalistes et des Nomi-
naux envahissait les écoles. LMtalien n'existait pas en-
core, ou, si une lan^e vulgaire se parlait communé-
ment , elle ne s'écrivait pas. Le latin, déjà passé à l'état
de langue morte, était la langue des auteurs, et il avait
bien perdu de sa pareté sous leur plume. Ce qu'il y a de
1>1us intéressant à cette époque, ce sont les Chroniques
ocales, qui abondent, et dont Huratori a fait l'analyse.
Pise, Gènes, Bfilan, avaient leur historien officiel, ra-
contant les événements dont il avait été témoin, avec
partialité sans doute, mais non sans intérêt.
Biais pendant que la langue italienne s'élaborait len-
tement et obscurément , il existait déjà dans le midi de
la France une langue toute formée et une école de poésie
florissante. Les Troubadours, appelés en Italie, ne pou-
vaient manquer d'y avoir des imitateurs. Le premier Ita-
lien signalé comme poète provençal est Alberto llala-
spina, qui florissait à la fin du xii* siècle. On cite encore
Sordello de Mantoue, auquel Dante a consacré, dans le
Putrgatoiref quelques-uns de ses plus beaux vers ; ^lan-
ftranco Cicala deuènes, Bartolomeo Zorri de Venise, Lam-
bertini de Bologne, Laofranchl de Pise, etc. — Mais Tin-
fluence des Troubadours ne produisit pas seulement des
poètes provençaux en Italie, elle fit naître les premiers
poètes Italiens qui se servirent de la langue de leur pays.
A partir de l'année 1220, Frédéric II tint en Sicile une
cour brillante, où Ton cultiva U poésie nationale, et cette
école fut si célèbre, qu'au dire de Dante on donnait de son
temps à tout ouvrage en vers le nom de SkUien, Entre
autres poètes, l'école sicilienne compta Ciullo d'Alcamo,
Frédéric U lui-même, son chancelier Pierre des Vignes,
Jacopo da Lentino, les deux Colonna fGuido et Odo), Ra-
niert et Ruggiere de Païenne. De 1250 à 1270, II se forma
à Bologne une nouvelle école de poésie, dont le chef Tut
Guido Guinicelli. Quand on compare les œuvres de cet
aatear à celles de ses devanciers, on y trouve plus de
suite et plus d'art dans l'ensemble, plus d'imagination et
de traits ingénieux dans les détails , plus d'élévation de
sentiments et d'idées, une langue plus souple, plus polie,
plus originale; mais, à peu d'exceptions près, les pièces
de Guido sont aussi dans le goût et le système proven-
çal ; elles roulent sur l'amour chevaleresque. A l'école
de Bologne appartient aussi Guidotto, remarquable par
une exquise sensibilité. Puis fleurirent en Toscane ou
dans les pays voisins un assez nand nombre de poètes
qui l'avaient, à ce qu'il semble, reconnu pour leur
maître : le plus célèbre fut Guittone d*Arezxo, qui com-
posa non -seulement des canzone, mais des Litres es
prose remarquables par l'énergie et la chaleur du sen-
timent. Citons encore le franciscain Jacopo da Todi,
Buonagiunta de Lacqaes, Guido Lapo de Mantoue, Fol-
calchiero de Sienne, et, à Florence, Ugolino Dbaldiol
et Dante da Majano. Vint ensuite Brunetto Latini, le
maître de Dante, qui fit quelques vers amoureux , parce
qu'il fallait en faire pour être réputé un homme bien né
et de belles manières ; mais il n'y avait en lui rien de
bien poétique. La science, la philosophie et la littérature
ancienne furent ce qu'il cultiva de préférence. Il traduisit,
dit-on, en italien la Rhétorique et divers fragments des
harangues de Cicéron, et répMsndit de la sorte des prin-
cipes de goût et de composition littéraire plus généraux
et plus relevés que ceux qui avaient Jusque-là dominé.
Le principal ouvrage de Brunetto, intitulé le Trésor, est
le résumé de toute la science de son temps, qu'il avait
recueillie dans de nombreux voyages. Par le double effet
des préceptes et des exemples de Brunetto Latini , la ten-
dance vers les études et les spéculations philosophiques
se fortifia ; elle se fit sentir Jusque dans la nouvelle école
de poésie qui venait de se former à Florence, et où l'on
se piqua moins d'exprimer l'amour que de le définir
subtilement dans le sens des opinions d'Aristote. Guido
Cavalcanti, le poète de cette école qui, grâce aux éloges
de Dante, en est ^néralement regardé comme le chef,
est du moins celui qui en représente le mieux le côté sa-
vant, abstrait, philosophique : 11 composa des ballades
et des canxones, où il introduisit assez mal à propos ses
dissertations 4>hiloaophiques et ses souvenirs de l'anti-
quité.
Deuxième période, — Dante inaugure magnifiquement
une civilisation nouvelle. Outre le poème ^ique par le-
3uel il est surtout connu {V, Divras comédib), il a laissé
'antres ouvrages importants. Le premier est la Vita
nuova (Vie nouvelle), qu'il écrivit en 1291, à l'âge de
21 ans. n y réunit tontes les pièces de poésie qu'il avait
faites pour Béatrix, morte depuis un ou deux ans, et les
lia entre elles par un commentaire historique ou psycho-
logique, dans lequel entra tout ce que sa mémoire lai
rappelait des motifs qui l'avaient porté à composer ces
poésies, et des impressions au milieu desquelles il les
avait écrites. — Le traité latin De Eloquio vtUgcuri (De
la langue et de l'éloquence vulgaire) est divisé en deux
parties. La première est consacrée à l'histoire des dii^
iectes italiens. Dante les classe avec méthode, et de ma-
nière à rattacher leun rapports intrinsèques à leur posi-
tion géographique; il donne de plcusleun des échantilloos
curieux. Selon lui, le dialecte dans lequel éorivaient
les poètes du xm* siècle n'est le dialecte particulier
d'aucune des provinces ni des villes de l'Italie , mais un
dialecte de cour, un dialecte idéal, modèle, formé indis-
tinctement de ce qu'il y avait de plus parfait dans les
dialectes locaux, et il lui donne le nom de dialecte cat'
dinal ou illustre. Dans la deuxième partie du Traité de
l'éloquence vulgaire, Dante a posé les principes d'une
théorie de la poésie. Après avoir parlé de la poésie en
général, il traite de sa forme, et de ses divers styles, qui
sont le tragique, le comùiue et V^iaque,- mais il prend
ces termes dans un sens tout différent de leur sens clas-
sique et convenu. Par tragique, il entend le style noble
et élevé ; par comique, le style bas et médiocre ; par élé-
daque, le style bas à l'exclusion de tout autre. Il n'entre
dans aucune explication particulière relativement aui
styles élégiaque «I comique; qnant au tragique, il ne
ITA
1109
ITA
troirre que trois snjets auxquels il condeone, la bravoure
Serrière, Tamour, la vertu. — Un troisième ouvrage de
Lote, le Banquet {Il contnto), est un commentaire
identiflque et philosophique de 14 canzones des plus
belles qu'il eût faites Jusqu'alors. Enfin on a de lui un
traité latin De monarchia, écrit pour soutenir le parti
de fempereur Henri Vn. Dans cet ouvrase divisé en trois
li«Tes, Dante examine : 1* si la monarchie universelle est
nécessaire au bonheur du monde ; 2° si le peuple romain
avait eu le droit d'exercer cette monarchie ; 3^ si l'auto-
rité dn monarque dépend de Dieu ou d*un autre, mi-
nistre ou Ticaire de Dieu. H résout affirmativement les
deux premières questions ; Il s'attache , surtout dans la
li* partie , à démontrer que l'empereur est indépendant
du pouvoir du pape, soutient que les souverains dépen-
dent directement de Dieu, et tend à ne reconnaître l'au-
torité du pape qu'en matière spirituelle.
La renommée de Dante domine son siècle; mais ce
serait une intustice que de ne pas noter le mouvement
littéraire oui se proauisait en même temps. C'était
répoque ou Robert d'Anjou , roi de Naples et comte de
Provence, protégeidt les savants et môme avait la noble
émulation de les égaler. La plupart des princes de l'Ita-
lie, et, à leur exemple, les riches citoyens, se faisaient
une gloire de protéger les écrivains et les artistes, à qui
l'on ne donna peut-être Jamais plus d'encouragements et
d'honneurs. Les Unlveraités de Bologne et de Padouo
contribuèrent à propager et à étendre le goût des lettres
en Italie : leurs professeurs étaient, pour la plupart, des
hommes de grand talent, tels que Pierre d'Aibano et
Cecco d'AscoTl. Ci no da Pîstoia, professeur de Jurispru-
dence, était également connu comme poète, et Pétrarque
lui fit l'honneur de l'imiter. Giovanni d'Andréa, de Bolo-
gne, était un canoniste célèbre, et sa fille Novella était
assez savante pour le suppléer souvent. L'Histoire, genre
dans lequel les Italiens se sont le plus distingués, com-
mençait à avoir des Interprètes, qui font autorité pour la
langue et pour les faits. Dino Compaeni, florentin, écrivit
nue Chroniguê qui s'étend de 1280 à 1312. Jean Villani
rédigea aussi, mais avec plus d'étendue et de talent, avec
une sorte de dignité, quoique dans un style naïf et
simple, une Histoire de Florence depuis sa fondation
Jusqu'à l'an 1348, ouvrage que Matteo Villani, son frère,
et Philippe, fils de Matteo, continuèrent Jusqu'à l'an 1364,
rt qui est rangé parmi les classiaues italiens. Venise eut
aussi son historien, le doge André Dandolo, dont le livre,
écrit en latin, comprend depuis les premières années de
l'ère chrétienne Jusqu'à l'an 1342. Albertino Hussato,
de Padoue, fut historien et poète. Il a laissé une histoire
floos le titre d'Augtuta, parce qu'elle contient en 16 li-
vres la Tie de l'empereur Henri vn. Dans 8 autres livres.
Il raconte les événements (fui suivirent la mort de ce
pHnoe, lusqu'en 1317; 3 livres en vers hérolaues ont
pour sujet le siège de Padoue par Can Grande de la
Scala, et, dans un dernier livre en pose, Mussato décrit
les troubles qui déchirèrent cette ville et la firent passer
sous la domination des seigneurs de Vérone. Les frâésies
de Mussato, épltres, élèves, églogues, sont en latin, d'un
style abondant et facile. Il composa aussi deux tragédies
latines, les premières oui aient été écrites en Italie :
l'une, Eccerinus, dont le fameux Ezzelino est le héros ;
Tautre, Achilles^ qui a pour sujet la mort d'Achille.
Pétrarque partage avec Dante l'honneur d'avoir formé
la poésie itahenne. Ses osuvres latines, sur lesquelles il
fondait tout l'espoir de sa renommée, et qu'on a complè-
tement oubliées, ne sont pas sans mérite : il sontit, le
premier, qu'il fallait œ^ller le langage barbare de l'école,
et remonter à Qcéron et à Vh^le. Ce furent les deux
modèles qu'il se proposa dans sa prose et dans ses vers.
Lm principaux de ces ouvrages sont : un Traité d$
Vunê §t de Vautre fortune^ où lia développé l'idée philo-
sophique , qu'il est souvent plus difficile de soutenir la
bonne que la mauvaise fortune; des Traités De la vie
joittotr», et Sur le Unsir des religieux; un Traité Du
wiipris du monde, en forme de dialogue entre l'auteur et
8* Augustin ; un écrit singulièrement original, intitulé :
De 9a propre ignorance et de celle de beaucoup d' autres,
«1 r^nse à des Jeunes gens qui l'avaient traité d'igno-
lant parce qu'il ne parta^ndt pas leur exclusive admiration
pour Aristote ; un poème inachevé, V Afrique, en l'hon-
mnr de Sdpion l'Africain ; douze églogues , dont quel-
qoes-unes sont de vraies satires contre les papes et les
•DOS de rÉglîse ; une Correspondance avec tous les grands
bommes d'alors, où l'on retrouve l'histoire politique et
littéraire de l'époque. — Le Canzoniere, recueil de poè-
te ta langue Tulgaire, et que pour cette raison Pé-
trarque regardait presque comme une erreur de son
génie, est cependant ce qui a fait de lui un des premiers
poètes de l'Italie. Un seul objet remplit cette suite de
petits poèmes, la passion toute platonique de Pétraroue
pour Laure de Sades, dame vertueuse autant que belle ;
mais la monotonie <}u sujet est rachetée par le coloris de
l'imagination et la magie du style. La rudesse sublime
de Dante n'existe plus; tout est châtié, élé^nt, correct;
la langue poétique vulgaire est fixée en Italie, et restera
ce que Ta faite Pétrarque.
Boccace fut pour la prose ce que Dante et Pétrarque
furent pour la poésie; ses écrits sont le type du langage
correct et élégant; son style pittoresque et gracieux,
libre dans ses allures, mais toujours ch&tié dans ses
termes, est demeuré le modèle des prosateurs italiens.
L'œuvre principale de Boccace, le Dhavi\éron, a été ap-
préciée ailleurs {V, DécAMéaoïij. Parmi ses ouvra^ la^
tins, nous citerons : un Traité de la généalogie des Dieux^
où il a réuni tout ce que ses études lui avaient appris
sur le système mythologique des Anciens; un petit Traité
sur les montagnes, les forêts, les fontaines, les lacs, les
fleuves, les étangs et les différents noms de la mer, le-
quel put être alors très-utile pour l'étude de la géogra-
phie ancienne, dont les notions étaient aussi confuses
aue celles de la mythologie; un Traité des infortunes
des hommes et des femmes illustres; un livre Des femmes
célèbres; 16 églogues, roulant presque toutes sur des
faits qui lui sont particuliers ou des traits de l'histoire
de son temps, ce qui. Joint à la dureté et à l'obscurité
du style , les rend souvent difficiles à entendre. Boc-
cace avait composé des sonnets et des poésies amou-
reuses en langue vulgaire : il les brûla quand il connut les
vers de Pétraroue, mais il conserva les grands poèmes;
il en retira la gloire d'avoir inventé Vottawi rima, forme
poétique si heureuse, qu'un seul poète excepté ( le Tri»-
sin ), elle fut ensuite adoptée par tous les épiques iti^
liens. La Théséide fut le premier poème où, renonçant
aux fictions et aux songes, qui étaient devenus comme
un cadre universel , Boccace , à l'exemple des anciens
poètes, imagina une action bien tissue et intéressante.
Le PUostrato, poème en dix parties, a pour sujet l'a-
mour de Trolle, fils de Priam, pour Curyséis, la tra-
hison de celle-ci, et le désespoir de l'amant trompé;
l'Académie de la Crusca a mis ce poème au nombre des
ouvrages qui font autorité pour la langue italienne. Le
Ninfale fùsolano est un petit poème sans division de
chants, où sont racontées los amours du berger Africo
et de la nymphe Mcnsola. VAmorosa visions, selon
l'usage alors très-commun, est écrite en tercets, et forme
un grand acrostiche : en prenant la première lettre du
1*' vers de chaque tercet, depuis le commencement Jiu^
qu'à la fin, on en compose deux sonnets et une canzone,
en vers très-réguliers, que le poète adresse à sa mal-
tresse , et dans lesquels se trouvent cachés leurs deux
noms, Madama Maria et Giovanni di Boccacio da Cer^
laldo; Boccace avait pris cette singulière Idée aux Pro-
vençaux. Le FUocopo parait être son premier ouvrage en
prose italienne ; c'est un roman de chevalerie avec tontes
les aventures et les invraisemblances d'usage. La Ftom-
metta, autre roman divisé en 7 livres, est d'un style
8 lus naturel ; l'héroïne, qui n'est autre que la princesse
iarie de Naples, y raconte ses amours avec Pamphile,
qui représente Boccace. Le Corbaccio ou Ijiberinto d'à--
more est une satire violente et souvent cynique contre
une veuve dont Boccace était devenu amoureux, et dont
il avait été dédaigné. Citons enfin VAmeto ou Admète,
pastorale mêlée de prose et de vers, premier essai d'une
invention nouvelle, et VUrbano^ court roman dont l'em-.
pereur Frédéric Barberousse est le héros. — L'habitude
d'écrire des romans fit qu'en composant son Origine,
vita e costumi di Dante Alighieri , Boccace en fit plutôt
un roman ou'une histoire : il passe légèrement sur les
actions, les infortunes et les ouvrages du grand homme,
et parle fort au long de ses amours. Les leçons gue Boc-
cace donna dans ses dernières années sur la Dwine eo-
médie sont beaucoup plus estimées; Imprimées seule-
ment en 1724, elles ne s'étendent que Jusqu'au 17* chant
de V Enfer; c'est le premier modèle Italien de la prose
didactique.
La seconde moitié du xiv* siècle se ressentit de Tim-
pulsion donnée par Dante, Pétrarque et Boccace ; ce fàt
une époque de grande activité intellectuelle. Les Univers
sites roumissalent des hommes remanruables dans toutes
les branches du savoir. Louis Marsidi, Louis Donato et
bcAucoup d'autres occupaient avec honneur les chaires
de th^logie. L*astrologie, science chimérique, mais chère
ITA
1110
ITA
au moyen ftge, était cultivée par Andolone del Nero,
Génois, et par Thomas de Pisan, que sa renommée fit
appeler en France par Charles V, et dont le plus beau
titre est d'être le père de notre Christine de Pisan. Paul
le géomètre ne se borna pas, comme l'indique son sur-
nom , aux raines recherches de Tastrologie. Pierre Cres-
cenzio écrivit sur Tagriculture. La jurisprudence, cultivée
de tout temps avec succès dans l'Université de Bologne,
reçut un nouveau lustre des ouvrages et de l'enseigne-
ment de Bartole, auteur des Traités De$ Guelfes et des
Gibelins, De l'administrcUion de la république, De la
tyrannie, etc., et dont Balde, son élève, partagea la ré-
putation. Pierre Villanl écrivit les Vies des hommes
Illustres de Florence, et eut la gloire d'être choisi en 1401
pour remplacer Boccace dans l'interprétation de la Di-
vine comédie, que commentait vers le même temps
Benvenuto da Imola, auteur d'une Histoire des Empe-
reurs. Biarino Sanuto, noble Vénitien, écrivit une rela-
tion remarquable de ses voyages en Orient. — Pétrarque
se plaignait d'avoir créé une foule de poètes qui l'acca-
blaient de leurs poésies latines : l'exemple d'un grand
poète et le goût du temps avaient causé cette épidémie.
Un poète aujourd'hui oublié , Zanoli da Strada, n'en ob-
tint pas niioihs les honneurs du triomphe. Landino,
poète et musicien, laissa des poésies latines qui égalent
celles de Pétrarque. Enfin Coluccio Salutato écrivit en
vers et en prose , et ses contemporains le comparent à
Cicéron et à Virgile. Le nombre des versificateurs en
langue vulgaire était encore plus grand, et parmi eux on
compte des femmes : S^ Catherine de Sienne est restée
célèbre par la pureté et la vivacité de son style, et fait
autorité pour la langue. Federigo Freui voulut imiter ,
dans son Quadriregio owQuadriregnOy la Divine Comédie
de Dante ; Fazio degli Uoerti fut moins heureux encore
dans le Dttia Mondo (Dicta Mundi), Buonacorso de Mon-
temagno égala presque Pétrarque dans ses poésies, et ce
même poète eut encore pour imitateurs Antonio da Fer-
rara, Francesco d^i Albizzi, Sennuccio del Bene, Ze-
none de' Zenoni. mnco Sacchetti fut en même temps
poète et prosateur : il a laissé des Nouvelles dans le
genre du Décameron, moins l'immoralité. En 1378 parut
un autre recueil de contes supérieurs à ceux de Sac-
chetti, et que l'on peut placer à cèté de ceux de Boccace :
c'est // Pecorone (la Pécore); l'auteur est Giovanni Fio-
rentino. De ce recueil, connu dans toute l'Europe du
moyen &ge, Shakspeare a tiré plusieurs détails de ses
ouvrages, en particulier l'histoire du Marchand de Ve-
nise, On a enfin d'Antonio Pucci un capitdo satiriqne
(F. Capitolo ) sur Florence, où, prenant tour à tour le
style comique et le style grave, il signale les abus de son
temps avec force et avec esprit.
Troisième période, — Nous voici arrivés au siècle de
rérudition. Encouragés par des princes qui, pour la plu-
part, cultivaient eux-mêmes les lettres, surtout par les
llédicis, les savants entreprirent de faire revivre l'anti-
quité : les manuscrits des anciens furent découverts;
ceux que l'on avait déjà furent expliqués. La plupart
des grands hommes qui ont illustré cette période sortirent
des écoles de deux grammairiens célèbres, Jean de Ra-
venue et le savant grec Emmanuel Chrysoloras. Guarino
de Vérone, élève de Jean de Ravenne, se rendit à Con-
stantinople uniquement pour apprendre le grec à l'école
de Chrysoloras. De retour de ses voyages, ou il avait re-
cueilli des manuscrits précieux, il professa à Vérone, à
Padoue, à Bologne, à Venise et à Ferrare. Ses principaux
ouvrages sont des traductions latines de plusieurs Vies
et de quelques OEuvres morales de Plutarque, et sur-
tout de la Géographie de Strabon. Il écrivit aussi la vie
d*Aristote, celle de Platon, et composa une grammaire
Ocecque et une grammaire latine. Son meilleur titre de
âoire est d'avoir découvert les poésies de Catulle. — Jean
Aurispa professa aussi dans les principales villes d'Italie,
alla à Gonstantinople étudier le grec, en rapporta les
poésies de Callimaque, de Pindare, d'Oppien, lès cBuvres
de Platon, de Plotin, de Xénophon, etc., les expliqua et
«D multiplia les copies. — Ambrog^o le Camaldule ne
professa point, mais, par ses relations, ses correspon-
dances et ses travaux, il entretint le goût des bonnes
études, que de célèbres professeurs, ses amis, répan-
daient par leurs leçons. — Leonardo Bruni, élève de
Jean de Ravenne, secrétaire apostolique, et plus tard
chancelier de la république de Florence, a laissé un
nand nombre de traductions des auteurs grecs et des
Pères de l'Église, et une Histoire de Florence, depuis
Toriffine de cette ville Jusqu'à l'an 1401. Il a aussi écrit
des Mémowes ou Commentaires sur les événements pu-
blics de son temps, et les biographies de Dante et de Pé-
trarque, toutes deux en italien. — Poggio Bracdolino,
connu en France sous le nom du Pogge, principalement
comme auteur d'un recueil de bons nurts et de facéties
licencieuses, fut un personnage très-grave, d'une grande
autorité dans les lettres, et l'un de ceux qui leur ren-
dirent à cette époque les services les plus signalés, n re-
trouva un grand nombre de manuscrits dans les monas-
tères de France et d'Allemagne, entre autres Quintilien,
Vitruve, un ouvrage de Lactance, et quelques Discours
de Cicéron. Il a composé plusieurs traités philosophiques
remarquables. Du malheur des princes^ Des vicissitudes
de la Fortune, De Vhypocrisie; un dialo^e Sur le mal-
heur de la destinée humaine; une Bistotre de Florence,
depuis 1350 Jusqu'en 1455. Poggio eut de grandes que-
relles avec les érudits contemporains : le plus célèbre de
ses adversaires fut Filelfo, qui étudia à Gonstantinople,
{professa à Bolog^ne et à Florence, laissa des traductions
atines de la Rhétorique d'Ariatote, de deux traités d'Hip-
pocrate, de plusieurs Vies de Plutarque, de la Cyropédie
de Xénophon, et composa plusieurs traités philoso-
phiques, des Dialogues sur le modèle du Banquet de
Platon, des poésies latines qui lui valurent la couronne
poétique des mains du roi de Naples, des satires et des
épitres curieuses pour l'histoire de son siècle. — Laurent
Valla succéda à FiIelfo dans la réputation du plus savant
professeur de son temps. On a de lui une Histoire de Fer-
dinand d'Aragon et quelques traités de linguistique.
Le XV* siècle vit le commencement de cette émigration
des Grecs en Italie, qui contribua si puissamment à la re-
naissance des lettres. Hais s'ils mirent à la mode la
science, ils inaujgurërent aussi ces disputes souvent
oiseuses qui passionnaient les esprits. Ce fut le temps
des querelles sur Aristote et Platon. Deux Grecs, nommés
tous deux Georges de Trébizonde, écrivirent Pun pour,
Tautre contre Platon. Après eux, le cardinal Bessarion
t»rit parti pour Platon, et le GrecThéodore Gaza de Thessa-
onique pour Aristote. Cosme de Hédicis fonda à Florence
une Académie platonicienne, consacrée à l'explication et
à l'étude du philosophe dont elle portait le nom. Les
principaux membres furent : Marsile Ficln, qui écri-
vait à 23 ans ses quatre livres des Institutions p/otont-
ciennes, traduisit Platon, et l'expliqua publiquement; Pic
de La Bfirandole, le type de l'étude et au savoir précoces,
beau génie fourvoyé par les subtilités de Técole, auteur
d'une thèse De omni re scibili,qm est un prodise de talent
mal employé, et d'un livre intitulé Heptapte, où la Genèse
est expliquée par les allégories de Platon; Christophe
Landino, qui fut le maître de Laurent de Hédicis.
On ne se borna pas dans ce siècle d'érudition à la re-
cherche des anciens, à l'étude de leurs langues, à l'intei^
prétation de leurs chefs-d'œuvre; on y Joignit la re-
cherche des antiquités, des médailles, des monuments de
toute sorte ; on en formait des collections, on expliquait
les inscriptions, on s'en servait pour l'intelligence des
auteurs, qui aidaient à leur tour a expliquer les monu-
ments. L'un des premiers qui employa cette méthode fat
Flavio Biondo; dans deux ouvrages de Rome renouvelée
et Rome triomphante, écrits en latin, il montra une éru-
dition prodigieuse pour le temps. Pomponius Leto on
Letus explora les antiquités de Rome avec succès ; il a
laissé divers traités sur les lois et les moeurs des anciens
Romains, et une histoire des empereurs. — Son ami Pla-
tina est surtout connu par une nistoire des Papes, écrite
avec élégance et impartialité. — Mais le plus célèbre his-
torien de ce temps fut iEneas Sylvius Piccolomlni, qui
devint pape sous le nom de Pie II. Il a écrit des Com"
mentaires en 12 livres sur les événements arrivés de son
temps en Italie, divers opuscules philosophiques, des
traités de grammaire et de philologie.
La littérature italienne est très-riche en historiens; le
morcellement du territoire a pu favoriser ces histoires
particulières. Au xv* siècle, Sambellico et Bemardo Gius-
tiniani écrivirent l'histoire de Venise; Verserio, celle des
princes de Carrare; Jean SimoneUa, celle de François
Sforza ; Bernardine Corio, celle de Milan ; Giorgio Stella,
celle de Gênes. Il n'v eut pas de petit prince qui n'eût
son historiographe, le plus sourent partial, parce qull
était dépendant. La plupart de ces ouvrages étuent écrits,
en Utin. Cependant Pandolfo Colienucao écrivit l'his-
toire de Naples en langue italienne.
Le débordement des poètes latins fut encore plus foi^.
que dans le siècle précédent. Il est inutile de faire l'éno-
mération de compositions presque toutes sans talent, ec
complètement oubliées. Cest aussi dans ce siècle qu'ap-
paraissent les improvisateurs : plusieurs excitèrent l'ad-
ITA
1111
ÏTA
fflintion de leurs contemporains; mais il en est des im-
■profisaleiirB comme des grands acteurs, ils meurent tout
«nders, laissant à peine un nom. On cultivait la poésie
latine ayec plus de succès à Naples que dans le reste de
ritalie : Pontano fit des rers aussi semblables pour Télé-
gance et la grftce à ceux du siècle d*Auguste quMI était
possible à des modernes de le faire; Beccadelli, sur-
nommé Palermita (de Païenne^, a laissé des tragédies,
des élégies et autres poésies latines remarquables, mais
d*ime liberté par trop antique.
Ia poésie italienne n'était pourtant pas abandonnée.
L'exemple de Laurent de Médicis devait stimuler les
portes : ce prince a laissé des canzones, des é^ogues,
des poésies morales» remarquables par Télégance du style
et la force des pensées; le premier il écrivit pour le
peuple : on a de lui des cantiques, un Mystère de S^ Jean
et S^ Paul , quMl Qt représenter au mariage d*un de ses
eniants, enfin des chansons restées populaires, pleines
d^esprit et de gaieté. — Auprès de lui se place Politien ,
savant universel , philosophe pour obéir au goût de son
temps, mais poète par nature. Dès Tàge de 15 ans, il pu-
blia des épltres et des épîgrammes. Il célébra Julien de
Médicis dans un poème qu'il dédia à Laurent, composa
des chants populaires ou canzoni a ballo , d*un tour
spirituel et él^ant , reprit et perfectionna Vottava rima,
Ibventée par Boccace, et donna, dans la Fawla di Orfeo^
le modèle de la première composition dramatique mo-
derne. — Sannazar exprima ses sentiments patriotiques
dans des sonnets harmonieux. Sa pastorale de VArcadie,
malgré la pauvreté du si:ûe^ ent, dans le xvi* siècle seule-
ment, 60 éditions. — Les autres poètes italiens de l'époque
sont restés bien au-dessous des précédents. Giusto da
Conti imita servilement Pétrarque dans des canzones qui
ont presque toutes pour su^et la belle main de sa dame.
BuTchiello, poète populaire, écrivit des poésies presque
toafours incohérentes, mais qui ne manquent ni de
verre, ni d'originalité. Les trois frères Pulci, Bemardo,
Lacca et Lnigi, écririrent des élégies, des églogues et des
poèmes en Thonneur de Julien et de Laurent de Médicis.
Serafino Aquilano fut le plus célèbre de tons ces poètes ;
on régalait à Pétrarque; mais sa réputation ne lui sur-
Técot que d*un siècle. Il est juste aussi de tirer de la
foule Matteo Palmieri, dont la Città di Vitd est un der-
nier écho de la poésie de Dante, Feo Belcari, Francesco
Cei, et enfin Girolamo Benivieni; il y a dans ses poésies
«me darté, un naturel et une pureté de goût, qui sem-
blent les qualités distinctives de Técole de Florence.
Les femmes ne restèrent pas en arrière dans le mouve-
meai littéraire de ce siècle. On en vit un grand nombre
écrire des vers agréables, soit en langue vulgaire, soit en
latin et même en grec, haranguer en latin, comme la
jeune Hippolyte Sforce, le p^)e Pie n, ou, comme Cas-
âandra Fedele, se distinguer dans l'étude des belles-
lettres et de la philosophie, discuter contre les plus sa-
vants, et mériter les éloges de Politien.
Le XVI* siècle est la grande époque de la littérature ita-
lienne. Les énidits du xv* avaient préparé des matériaux
Immenses à la génération suivante, et les héritiers se
trouvèrent dignes de recueillir la succession de leurs de-
vanciers. L'épopée chevaleresque, qui a fourni plusieurs
chefs-d'œuvre, s'est inspirée de la Chronique de Charle-
magne et des douze pairs, attribuée à l'archevêque Tur-
pin. Mais, tout en se servant du nom de Turpin pour faire
passer bien des histoires incroyables, chaque auteur in-
troduit sans scrupule les inventions et les caractères que
son imagination lui fournit : la famille de Gharlemagne
se modifie au gré de chacun , et presque toujours le naif
auteur trouve moyen de rattacher au grand empereur la
famille du petit prince italien qui le protège. Tous ces
poèmes ont un air de famille par l'incohérence dans le
style, la profusion des détails et tes mêmes formules : Tau*
teor commence chacjue chant par une prière, et la finit en
interpellant ses auditeurs, le plus souvent en vue de pro-
nner leur générosité. Il serait donc Inutile de s'arrêter
es compositions comme Buwo d^Antona, I reali di
Praneia, VAncrûia, la Spagna, etc., qui n'ont guère fait
qoe fournir l'idée dej>oèmes restés célèbres. Le premier
qui mérite une mention particulière est celui de Pulci ,
intitulé : MorganU U Grand (F. ce mot). Puis, un poète
connu sous le nom de V Aveugle de Ferrarey mais dont
le nom de famille était Belle, tira aussi des vieux romans
carlovingiens un sujet qu'il traita d'une manière origi-
nale, et sans s'astreindre, comme le Pulci, à toutes les
formes établies par les romanciers populaires. Son poème,
îstitulé Mambrumo, a pour héros Mamljrin, roi de Bithy-
nla, qui, dans le but de venger la mort de son oncle, part
pour aller défier Renaud de Montauban, fait naufrage dam
nie de la fée Cuiradine, et assiège Montauban, défendu
par les quatre fils Aymon et leur soeur Bradamante. Ce
poème n'a pas été achevé. Vinrent ensuite le Roland
amoureux (V. ce mot) du comte Bojardo, refait plus tard
par le Bemi, et le Roland furieua> (V. es mot) dt
l'Arioste, inimitable modèle de l'épopée héroï-comique.
— Louis Dolce composa cinq ou six romans épiques^
dont le plus connu a pour sujet l'enfance de Roland et
ses premiers exploits; quelques incidents de ce poème ne
manquent pas d'agrément. — Citons encore VAng^Ujm
amoureuse de Vicenzo Brusantini , et la tentative médio-
crement heureuse d'une femme, TuUie Aragon, qui éoi-
vit II Meschino o il Guerino , dans la louable intention
de remplacer par un ouvrage honnête les productions
généralement immorales de ses devanciers.
Après les poèmes de Gharlemagne et des douze pairs,
vinrent ceux tirés de sujets antiques, surtout de V Iliade et
de VOdyssée, Tels sont la Destruction de Troie, VActUllê,
VEnea et V Ulysse de Dolce, toutes froides imitations
d'Homère. Il y eut aussi des romans de la Table rondOi
Lancelot du Lac, Tristan de Léonois, connus de très-
bonne heure en Italie par des traductions en prose de nos
vieux ouvrages français. Le plus célèbre des romans de
cette famille fut Giron le Courtois,^ dont l'auteur, Luigl
Alamanni , reçut le sujet de François I^, et qui est con*
duit avec art. Le même auteur a laissé une Avarchid$
(le siège de Bourges, en latin Avaricum)^ calquée sur
VIliade. On a du Trissin une Italie déliffrée des Goih»^
Bernardo Tasso, père du Tasse, envoyé en Espagne
en 1535 par Ferrante Sanseverino, prince de Saleme«
y connut VAmadis de Gaule de Montalvo , et composa
sur les principaux épisodes de ce roman un poème
d^Amadigi di Francia : c'est une imitation libre de
l'original , sans autre modification importante que l'ad-
dition de deux personnages, Alidor, frère d'Oriane,
et Mirinda, sœur d'Amadis; mais le style est très-eoigné«
la versification pure, noble et agréable. Aussi ce poèOM
oocupe-^il le second rang de l'épopée romanesque sa
Italie; il ne le cède qu'au Roland furieux.
Nous n'avons à parler ici que des moindres ouvragot
de Torquato Tasso, dit le Tasse, des articles particulieit
étant consacrés à la Jérusalem délivrée et à VAminte, Le
Tasse composa à 18 ans un poème épique en 19 chanta^
dont le héros est Renaud, fils d' Aymon et cousih de Ro*
land ; son amour pour la belle Clarisse, ses premiers faits
d'armes entrepris pour l'obtenir, les obstacles qui les sé-
parent , et enfin leur union, en sont le sujet, le nosud et
le dénoûment ; ce poème est peu lu , et mérite peu ds
l'être. Le Tasse, vers la fin de sa vie, refondit la Ji^m-
scUem délivrée dans un second poème, Jérusalem coh^
quise , qu'il préférait au premier, jugement que les gens
de goût n'ont pas ratifié. Vers la même époque, son es-
prit étant de plus en plus tourné aux idées religieuses, il
écrivit les Sept journées, poème sur la création du monde;
il en prit peut-être l'idée dans un poème français pom-
peusement ridicule, la Semaine, de Du Bartas ; c'est une
œuvre inachevée, où se trouvent néanmoins des mor-
ceaux d'une grande beauté.
La gloire du Tasse éclipsa celle de tous les autres
poètes de son temps ; lui seul fit l'éloge de V Amant fidUê
de Gurzio Gonzaga; les contemporains n'y prirent pas
garde. Le Nouveau Monde de Giorgini , la Maltéide de
Fratta, la Jérusalem détruite de Potenzano, VAngeleida
de Valvasone, n'ont pas vécu plus longtemps. Les Larmes
de S^ Pierre par Tansillo eurent un plus grand suc-
cès. Le temps de l'épopée chevalerœque était passé,
et, comme toujours, après le sérieux vint la parodie. Par
une tendance déplorable du caractère italien, on vit de
toutes parts paraître des railleries de la valeur guerrière^
Merlin Coccajo, pseudonyme de Teofilo Foleneo, tnventa
le style macaronique, mélange burlesque de latin et
d'italien, et écrivit dans ce style VOrlantUno, poème
extravagant, où, donnant un libre essor à son caprice, il
a su exprimer d'une manière vive et pittoresc^e toutes
les folies de son cerveau. — Antonio Graznni, plus
connu sous le nom de I^uca, écrivit des poésies badines^
et fut le premier fondateur de l'Académie de la GruscSé
Il composa aussi un petit poème intitulé : la Guerra d/i
Mostri, On lui attnbue un autre ouvrage du même
genre, la Nanea, composé pour se moquer d'un poèms
de Benedetto Arrighi, intitulé : Gigantea ou Guerre dsi
Géants. Ces inventions, la plupart plus grotesques que snl*
rituelles, ne méritèrent pas d'obtenir une renommée an*
rable. — L'épopée hérol-comique fut créée par Tassonl^
dont le poème, la Secchia rapHa, raconte une gnem
ITA
1112
!TA
t
des habitants de Modène et de Bologne au sujet d*un seau
de bois. Lalli travestit V Enéide, et BraccioUni persifla
les dieux du paganisme.
L*art dramatique se forma en Italie plus tôt que dans les
autres pays de TEurope. Dès le xiv* siècle, lorsque nous
en étions encore aux Mystères et aux Confrères de la
Passion, les Italiens avaient des tragédies régulières.
Âtt XV* on citait la Catinia de Polentone , V Amphitryon
et le Joseph de Gollenucdo. Au xvi*, les représenta-
tions drainatiqnes formèrent le principal divertissement
de toutes les cours, sans en excepter celle de Rome.
Léon X fit représenter à ses frais la tragédie de Sopho^
nisbe que le Trissin lui avait dédiée. Ce poète se dis-
tingua par une imitation servile du thé&tre grec ; ceux
oui vinrent après lui Timitèrent à leur tour. On lui
doit d*avoir affranchi le théâtre italien du Joug de la
lime : les vers libres qu*il employa étaient cependant
mêlés avec (quelques vers rimes. Sophonisbe marque un
progrès sensible dans la tragédie italienne, et dénote un
grand talent ; aussi le succès de cette pièce fut^-il général ,
non-seulement en Italie, mais en France, où elle fut plu-
sieurs fois traduite. — L'exemple du Trissin fut promp-
tement suivi par le Florentin Ruccellal : pour sa première
pièce, intitulée : Hosemonde , il choisit un sujet histo-
rique, et le disposa à la manière des Grecs, employant
les chœurs, et les vers libres pour le dialogue. Son
Oreste n*est autre chose que Viphiginie en Tauride,
imitée et même le plus souvent traduite d'Euripide. —
Ifartelli, auteur de Tultia, prit son sujet dans Tite-Uve :
malsré le caractère odieux de rhéroine et les défauts de
la pièce, les Italiens accordent à la TuUia un des pre-
miers rangs parmi les tragédies qui signalèrent chez eux
la renaissance de Tart. — Alamanni, qui figure dé|à dans
Tépopée, se distingua aussi dans la tragédie; mais il se
I, contenta de faire passer dans sa langue les beautés de
•■ VAntigone de Sophocle. — Nous ne parlerons que pour
1 mémoire des neuf tragédies de Giraldi Cinthio, de celles
! de Louis Doloe, et même de la Canace de Sperone Spe-
*roDi. Le Tasse composa à deux reprises différentes une
tngédie de Torismond, pièce toute d'invention et mise à
I la mode par Giraldi. Les Italiens la comptent au nombre
' des plus Délies du xvt« siècle : on y remarque de nom-
breuses imitations de VOEdipe roi de Sophocle. Ce chef-
d'oBuvre grec fut traduit quelque temps après avec talent
par Anguillanu Citons aussi comme sujets empruntés à
i'antiqmté celui de Mérope, traité pour la première fois
par le prince Torelli. Nous finirons cette nomenclature
par une pièce où se trouve un singulier contraste entre
ranteur et le sujet, VHorace de Pierre Arétin. Ce poète,
Sii ajoutidt sa propre licence aux sujets les plus licen-
eux, traita dans toute son austérité ce grand sujet; il
fkit aussi fidèle à l'histoire qu'il est possible de l'être en
la transportant sur le thé&tre ; et, dans ce qu'il ajouta au
récit de Tite-Live, il fit voir beaucoup de connaissance
des usages civils et religieux de l'ancienne Rome.
La comédie n'avait existé en Italie, avant le xvi* siècle,
qn'à l'état de farce ou de pantomime. A cotte époque de
renaissance, on commença à revenir aux moaèles an-
tiques. Les comédies de Plante et de Térence furent étu-
diées, et même représentées, soit traduites, soit même en
latin : à cette école se forma une pléiade d'auteurs co-
miques, aussi remarquables par le talent que par l'im-
moralité. Le premier fut le cardinal Bibbiena, qui fit re-
présenter devant Léon X sa Calandria, dont nous ne
pouvons pas même indiquer le sujet. L'Arioste, dès sa
S lus grande Jeunesse, s'exerça à écrire des comédies
'aprte Plante et Térence : la Cassaria, I Suppositi, la
Lena, Il Negromantey et la ScoUutica, restée imparfaite.
Ces pièces, moins libres dana l'expression que la Calan^
iria, n'en sont pas moins immorales; mais, ces réserves
faites, on ne peut trop louer le style de l'auteur, qui,
pour l'aisance et la clarté, n'a pas d'égal dans tonte la
poésie italienne; peu d'écrivains ont eu au même degré
que i'Arioste le don de peindre les caractères, les vices et
les ridicules des hommes. — Une comédie plus connue en
France est la Mandragore de Machiavel, traduite par
J.-B. Rousseau : rien de plus vif et de plus libre que le
Ion de cette comédie; Léon X voulut qu'elle fût jouée de-
vant sa cour, ce qui semble d'autant plus étonnant que,
outre la licence du sujet et des détails, elle renferme
une satiro violente contre le clergé et la relieion. Ma-
chiavel composa encore la Clithia, comédie imitée de la
Casina de Plante, également fort libre, et une traduction
de VAndr%enne de Térence. — Nommer l'Arétin, c'est
dire à quoi l'on doit s'attendre : ses prindpales
sont : le Maréchal, la Courtisane, V Hypocrite, la
pièces
Taranta et le Philosophe; on y remarque en général
assez peu dinvention, mais des détails piquants qui font
connaître les mœurs du temps. — Jean-Marie Gecchi fut
l'un des meilleurs et le ptos fécond des auteurs comic^uea
de son siècle; on a de lui 10 comédies imprimées, qui ne
sont que la moindre partie de ce qu'il avait écrit; la plu-
part sont tirées de Plante et de Térence. La plus co-
mique, mais aussi la plus libre, est VAsiuolo, — Le
Lasca, auteur de Nouvelles dans le genre de celles de Boc-
cace, le fut aussi de comédies moins piquantes, mais
moins libres que celles de Cecchi. — Louis Dolce, poète
fécond et plus laborieux que brillant, écrivit cinq comé-
dies, les unes en vers, les autres en prose ; la plupart ont
pour sujet des aventures contemporaines. — Les trois
pièces composées par Francesco d' Ambra sont des chefs-
d'œuvre dans le genre alors le plus en vogue, la comédie
d'intrigue; l'Académie de la Crusca les compte au nombre
des autorités pour la langue. — Nous trouvons presque
tous les noms illustres de l'époque sur la liste des au-
teurs comiques : Annibal Caro, le célèbre traducteur de
Y Enéide; Guarini , l'auteur du drame pastoral /{ Pastor
fido (7. ce fnot)\ le Bemi, Firenzuola, Caporali, Tan-
sillo, qui marchèrent sur les traces de l'Arétin ; Gelli et
Beolco , dit Ruzzante , qui acquirent de la célébrité par
leurs farces de carnaval.
Ce fut encore Bemi qui créa un genre de poésie rail-
leuse, appelé de son nom poésie bernesque, et, où il eut
pour imitateurs et rivaux Caporali, lAauro, Molza, Gio-
vanni della Casa, etc. Dans la satire savante se distin-
guèrent Vinciguerra et Ercole Bentivoglio. — La poésie
didactique, pour laquelle Virgile servit toujours de mo-
dèle, peut citer le poème de V Agriculture par Alamanni,
celui des Abeilles par Ruccellal, d'autres sur la Naviga-
tion par Baldi, sur la Chasse par Scandianese et par
Valvasone. — Quelques femmes du xvi* siècle ont acquis
une certaine réputation dans la poésie, telles que Vit-
toria Colonna, Veronica Gambara , Gaspara Stampa «
Laura Terracina, etc.
Le XVI* siècle vit naître l'hérésie de Luther et celle de
Calvin ; aucun thà)logien ne se crut dispensé de les com-
battre selon ses forces; plusieurs le firent avec grand ta-
lent; mais les plus remarquables furent les cardinaux
Bellarmin et Baronius. Le premier composa des ouvrages
de controverse proprement dite, et les protestants, qui ne
pouvaient refuser leur admiration à ce redoutable aidver-
saire, fondèrent des chaires dont les professeurs n'avaient
point d'autre emploi que de le réfuter. Le second con-
sacra sa laborieuse carrière à écrire les Annaies ecclé-
siastiques, travail immense et d'un grand talent, pour
lequel il a fallu des recherches vraiment prodi^euses.
Au XVI* siècle, les Universités continuèrent d'être
florissantes. Les princes se disputaient les savants pro-
fesseurs qui, comme les deux Béroalde, Amaseo Battista,
Egnazio, élevaient la jeunesse dans l'amour des lettres.
Le Droit civil et le Droit canon, études favorites du moyen
ftge, n'avaient pas été délaissés : Alciat et ses succes-
seurs les avaient tirés de la barbarie, et Joignaient à la
science les ornements littéraires oui avaient trop manqué
à leurs devanciers. L'étude des langues anciennes était
plus répandue que jamais. De magnifiques imprimeries
multipliaient les chefs-d'œuvre de l'antiquité : les Aides
no se contentaient pas de donner i>endant trois généra-
tions leurs soins assidus aux éditions qui sortaient de
leurs presses, ils annotaient eux-mêmes les textes an-
ciens, et s'entouraient d'érudits pour les aider dans leurs
travaux. Les langues orientales, surtout l'hébreu, étaient
étudiées comme le grec et le latin : une imprimerie
pourvue de caractères orientaux fût établie à Rome. On
ne se contentait plus d'étudier les mœurs des Anciens
dans les livres; les antiquités étaient consultées, les
inscripUons reproduites ; et de savants antic^uaires, comme
Sigonius, Panrinio Valériane, interro^ient les monu^
ments romains, grecs et égyptiens. Ils furent yérita-
blement les fondateurs de cette branche de la science
historioue. — La langue latine était toujours celle de
l'érudition. La plupart des savants dédaignaient d'écrire
en italien. Toutefois, sous ce rapport, il se fit une révo-
lution dans les esprits : on commença à soupçonner les
beautés de la langue vulgaire, et à écrire des traités pour
en faire connaître la richesse et en fixer les règles. Le plus
célèbre de ces ouvrages est le Prose de Bembo. Il mérite
le succès universel dont il a joui. L'auteur y apprécie avec
Justesse 1& langue elle-même et les plus grands écrivains.
Il assaisonne toujours de réflexions utiles ses discussions
et ses jugements. Les OhserwUions de Dolce sont restées
au nombre des li\Tcs utiles sur la langue itaUenne. Ri-
ITA
1113
ITA
uddo Corso, aateur des FondametUt dd parlar toscano,
le (fistîngaa dans la foule des grammainenB contempo-
ralDS par son savoir et Télégance de son style.
U guerre que le dècle précédent avait vu s^allumer
entre les philosophies d*Aristote et de Platon parut ter-
minée parla défaite de la première. Le cardinal Bessarion
et rAcadémie platonicienne de Florence avaient donné
unt d'autorité à Platon, qu*il semblait devoir régner seul
dans les écoles ; mais au xvi* siècle Aristote reprit le
dessus, et cette dispute oiseuse recommença de plus
belle. Parmi les aristotéliciens était Pomponace, qui pro-
fessa avec grand succès à Padoue et à Bologne. Il eut
pour disdple Simone Perzio, plus savant que lui dans
les langues anciennes. Parmi les plus célèbres platoni-
ciens, on trouve Jacopo Zabarelli, les deux Piccolomini,
Chirio, Strozzi, Patrie. — D'autres hommes distingués
écrivirent des traita philosophiques sans se soucier des
ouerelles d*école; tels furent Télésio, Cardan, et le comte
de Castiglione, auteur d*un traité Du Courtisan, dans le-
quel il trace les devoirs du courtisan honnête homme et
professe la morale la plus élevée. On peut aussi ranger
le Tasse parmi les philosophes : ses Dialogues, où il prit
Platon pour modèle, furent composés aux Jours les plus
malheureux de sa rie; il y traite les sujets les plus divers
avec un rare talent, et chez lui le philosophe ne fait pas
disparaître le poète. Un des charmes de ce remarquaÎDle
écrit est dans les allusions qu*y fait le Tasse à ses mal-
hears.
BAachiavel est le plus grand écrivain politiqye de son
siècle. Mêlé aux affaires de Florence, sa patiie, envoyé,
comme négociateur, en France, à César Borgia, à Tempe-
reur d'Allemagne, il mit dans ses écrits l'expérience de
sa vie. On lui a reproché, surtout dans le fameux traité
du Prince, d'avoir émis des principes corrupteurs. En
^et, mettant à part l'intérêt des peuples, dont il ne parle
pa% Machiavel n'a pour objet que celui du prince, et ne
considère encore cet intérêt que relativement à l'acqui-
sition, à la durée et à la stabilité du pouvoir. Les con-
seils qu*il donne pour parvenir à ce but sont uniquement
politiques, c-à-d. plus grossièrement intéressés qu'hon-
nêtes. S'il eut une excuse, ce fut la corruption du temps
où il vécut et des hommes qu'il fréquenta. Mais on ne
lui pardonne pas de raconter sans la moindre indignation
1» meurtres de César Borgia. Machiavel écrivit aussi
une Histoire de Florence, et des discours sur VArt de la
quare et sur Tite-Live, Après les réserves que nous
avons faites, on ne peut trop admirer la profondeur des
vues, le style nerveux et élégant, qui feront durer ces ou-
vrages autant que la langue italienne. — La réputation
de Mschiavel a tellement éclipsé celle des autres écrivains
politiques de son temps, qu'on connaît à peine les noms
de Gianotto, de Gontarini, et même du Vénitien Pamta :
des Discours politiqiues^ formant deux livres, lui assurent
cependant nn rang distingué parmi les publlcistes ita-
liens.
L'histoire fut nn des genres les plus cultivés au
XVI* siècle. Le plus connu peut-être des écrivains qui
traitèrent de l'histoire générale est Paul Jove. VBistoire
de mon temps est le premier ouvrage ou'il entreprit, et le
dernier qu'il publia ; c'est celui qui lui a valu le plus
réloges et de critiques. Tout en louant la clarté, la raci-
âté et l'abondance de son style, on doit bl&mer la par-
tialité avec laquelle il a loué ses protecteurs et dénigré
les hommes qui s'étaient montrés moins généreux à son
égard. Outre son Histoire, Paul Jove écrivit les Vies
if Alphonse I*', duc de Ferrare, de Gonzalve de Cordoue,
de Léon X, du marquis de Pescaire, du cardinal Pompée
Golonna; une description de la Grande-Bretagne, de la
Moscovie. Tous ses ouvrages sont en latin, à 1 exception
d'un commentidre sur la guerre des Turcs. — La même
période de temps que Paul Jove avait parcourue dans sa
grande histoire latine le fut en italien par Guichardin,
historien qui n'a pas moins de renommée, et qui mérite
plus d'estime; mais il se renferma dans les fwmes de
ritalie, an lieu de s'étendre, comme Paul Jove, aux évé-
r.'^ments dn monde entier. On reproche à cette histoire
des harangues et des réflexions trop longues, et le style
manque de clarté. L'histoire d'Adriani, qui embrasse de
1536 à 1574, est regardée comme la suite de celle de
Guichardin. — Machiavel, par sa belle Histoire de Flo^
rence, avait appelé sur lui trop d'éclat pour n'être pas
imité. Le premier qui suirit son exemple fut Jacopo
Nardi,qui appartenait au parti républicain vaincu par les
Médids : son Histoire, composée dans l'exil, porte en soi
le caractère de tous les ouvrages de parti, et a peut-être
«oms contribué à sa renommée littéraire que sa belle
traduction de Tite-Uve. — Le sénateur Philippe Nerlt
écririt des Mémoires sur ce qui s'était passé dans sa pa-
trie depuis 1215 jusqu'en 1537; tout dévoué aux Médias,
il se montra partial, comme Nardi, mais dans le sens con-
traire. — V Histoire de Florence de Bemardo Segni, qoe
l'auteur s'abstint de publier de son rivant pour ne com-
promettre ni les intérêts de la vérité, ni sa propre sft-
reté, est écrite avec sagesse et impartialité. — Varchi, lit-
térateur, poète et même mathématicien, est auteur d'une
Histoire de Florence qui va de 1527 à 1538 t malgré la
diffusion du style, elle est écrite avec beaucoup d'exacti-
tude et de sagesse. — Le Vénitien Bruto écrivit en latin
une Histoire de Florence^ remarquable par la liberté de
ses Jugements sur les Médicis. — Sdpione Ammirato, né
dans Te royaume de Naples, est regardé comme plus
exact que les historiens de Florence qâ l'avaient précédé»
Venise a eu aussi ses historiens t le cardinal Pierre
Bembo, célèbre à tant de titres, fut nommé, en 1529,
historiographe de cette république. Son Histoire, œuvre
de sa rieillesse, est en 12 livres, qui se terminent à
l'année 1522, et ne comprennent qu'un espace de 25 ans t
elle parut d'abord en latin; mais Bembo en avait fait vm»
version italienne qui fut ensuite publiée. Le mérite de
cette Histoire est plutôt dans le style que dans la manière
dont les faits sont exposés et Jugés. — Le plus célèbre
historien de Venise est Paul Paruta. Sa profonde connais»
sance des affaires publiques et des relations extérieures de
son pays donnent à son Histoire une grande autorité el
un puissant intérêt. — Paruta fut imité par J.-B. Naoi.
— Paul Sarpi, sénie encyclopédique, traita un sujet dont
l'actualité faisait une bonne partie de l'intérêt ; il écririt
V Histoire du Concile de Trente. — Le cardinal Pallavl-
cini traita le même sujet; mais s'il surpasse Sarpi par
la correction du style, il est loin d'avoir sa manière ori-
ginale d'exposer et de Juger les faits.*— Catarino Davila,
tout Italien qu'il était, publia une Histoire dès guerres
civiles de France, aussi correcte que sincère et précise*
— ^^Le cardinal Guido Bentivoglio composa aussi une ffû-
toire des guerres de Flandre^ très -supérieure par ses
vues politiques à celle que publia en latin sur le même
sujet le P. Strada, iésuite. Au xvi* siècle, où les lumières
de l'Italie surpassaient de beaucoup celles des autres na-
tions, les Italiens se fdsaient les historioçaphes des
peuples étrangers. Appelé en France par Louis XH, Paul
Emile récompensa l'hospitalité du roi en écrivant une
Histoire de France qui excita l'enrie et l'admiration des
savants français. Polydore Virale écririt aussi rfftftotrt
d'Angleterre, Davanzatî Bostichi VHistoire du schisme
d^Afigleterre , et Luclo Bfarineo VHistoire d^Espagne.
Dans le genre de la Nouvelle, nous retrouvons eneoro
Machiavel, dont le Belphégor est une satire des femmes
en général, et de la sienne, dit-on, en particulier. Gomme
toutes ses œuvres, elle est écrite d'un style vif et bril*
lant, et avec une élégance qui Ta fait mettre au nombre
des textes de la langue. — Flrenzuola et le Lasca écri-
virent aussi des Contes charmants, remarquables par
l'originalité de l'invention et la pureté du style. — Les
nombreuses Nouvelles de Straparola eurent plus de vogue,
quoique avec moins d'élégance; la licence et la bizarrerie
leur tiennent souvent lieu de mérite. — On en peut dire
autant de quelques Nouvelles de l'Arétin. — Cinthio Gi-
raldi et Sébastien Erizzo cherchèrent à modérer par leur
exemple la licence de la plupart de ces conteurs; mais ils
eurent peu de succès au milieu de la corruption géné-
rale. L» seules Nouvelles qui fussent exemptes de cette
tache étaient celles du genre tragique. De ce nombre est
Homéo et Juliette de Luig^ da Porta, imitée et développée
depuis par Bandello, et immortalisée par Shakspeare.
Bandello a écrit un très-grand nombre de Nouvelles, dans
lesquelles, à défaut de puretâ et d'élégance, on retrouve
les usages, les mœurs et les aventures du temps, ainsi
que les csractères des personnages qui y florissaient. Il
faut ajouter à la louange de cet auteur que, s'il est son*
vent libre et grossier. Il n'est Jamais immoral, et prend
toujours le parti de la vertu et de la religion.
Les Romains, qui sont en quelque sorte des nouvelles
très-étendues, furent aussi rares qu'auparavant. On re-
marque à peine durant cette période la Finela de Ni-
colas Franco. — On peut également citer les inventions
fantastiques de quelques auteurs, moins élégants que bi-
zarres: tels sont les Discours des Animaux {Discorsi de^
gli Animali) de Firenzuola, les Caprices du Tonnelier, et
la Circé de J.-B. Gelli.
Presque tous les ouvrages didactiques de ce siècle
firent écrits en forme de dialogue; tels sont les Asàlant
de Bembo, et VErcolano de Varchi, sor la langue *-ul-
ITA
nu
ITA
gre; mais plus célèbres encore forent les Dialogues de
arone Speroni, et le Courtisan de Castlglione. On doit
à TArétin le premier recueil de Lettres; il en publia sur
Iflft sujets les plus divers, qu'il traita avec sa licence ac-
coutumée. Son exemple fut bientôt suivi, et Tltalie se vit
inondée d'épitres. Les plus fameux recueils sont les
Lettres de Garo, de Tolomel, de Fracastor, et surtout de
Bonfadio.
Quatrième période» — Avec le xvn* siècle, la décadence
est sensible. Dans la poésie lyrique, on doit mentionner
d'abord Gabriel Ghiabrera, qui, abandonnant les traces
de Pétrarque, entreprit d'imiter les Grecs, et surtout
Pindare et Anacréon. Il le fit quelquefois avec bonheur
et toujours avec grftce. Cependant on reproche à son style
on peu trop d'art et de recherche. — J.-B. Alarini, le
grand corrupteur de la poésie italienne, acquit une im-
mense réputation , non-seulement en France, mais dans
toute l'Europe, où il répandit son déplorable système
poétique. Doué de talents réels et d'une facilité merveil-
leuse, il mit une versification heureuse, un style vif et
pittoresque au service d'une imagination sans frein ; et
les contemporains finirent par croire après lui que plus
on s'éloignait du naturel, plus on était poète. Les con-
eeUi de Marini eurent surtout des admirateurs en France,
où la langue était à peine formée, parce onie rien ne sé-
duit plus les peuples qui sortent de la barbarie que la
recherche et l'abus de l'esprit. Outre un grand nombre
de madrigaux et de sonnets, Marini écrivit VAdone, qui
lui valut la plus grande part de sa célébrité, et qui est
un résumé des qualités et des défauts de l'auteur. — Le
succès de Marini suscita un grand nombre d'imitateurs.
Quelques poètes, tels que Fulvio Testi, Benoit Menzini,
Francis Redi, conservèrent cependant les traditions du
bon goût et de la simplicité. Mais la poésie lyrique fut
portée au plus hau# degré d'élévation par Vincent Fili-
caja, le plus noble, le plus moral et le plus patriotique
des poètes italiens. Beaucoup de ses pièces ont pour sujet
l'Italie déchue de son ancienne splendeur. Il fit plusieurs
eanzones pour célébrer les victoires des chrétiens sur les
Turcs qui avaient assiégé Vienne : on admire principale-
aient celle qu'il composa pour Jean Sobieski, roi de
Pologne. — Guidi déploya encore plus de liberté et de
hardiesse que Filicaja, et, sans imiter Pindare, dont il
ignorait le langage, il s'éleva à la même hauteur dans ses
âes, où, dédaignant toute règle, il tire de cette liberté
de grandes richesses d'harmonie et d'invention. — On doit
àMarchetti,outre la traduction de Lucrèce et d'Anacréon,
des sonnets d'un caractère grave.
Dans la poésie didactique, Baldi, savant mathémati-
den, auteur de quelques églogues imitées de Virale,
composa en vers sciolti un poème de la Naingation,
semé d'épisodes intéressants; le style en est vif et coloré.
— On peut placer ici U Séréide d'Alexandre Tesauro,
poème sur le vers à soie ; le poème latin de Benoit Ro-
gacd, où, sous le titre d'Euthymie, il traite de la philo-
sophie morale; mais surtout VArt poétique de Menzini,
émt en tersa rima, et où l'auteur traite principalement
de la langue et de la versification italiennes.
A la fin du xvi* siècle. Caporal! avait donné l'exemple
-dvL Style satirique dans son Voyage au Parnasse, H fut
imité par Chiabrera dans ses Sermoni, où l'auteur se
propose Horace pour modèle. Ludovico Adimari exploita
le sujet toujours si fécond de la critique des femmes.
Enfin Salvator Rosa, peintre et poète, composa des satires
devenues populaires, où il fronde avec grande liberté les
vices de son temps.
Dans la comédie, J.-B. Porta, Napolitain , disciple de
Plante et de Térence, Joignit à une grande richesse d'in-
vention an style noble, pathétique ou plaisant, suivant
les situations où il place les personnages. Ses principales
comédies sont l'Emportée^ la Cinthia.les Frères rivaux,
la Sceur, et le Maure, — Buonarotti le Jeune, neveu du
grand Michel-Ange, tenta la singularité de donner cinq
comédies de suite sur le même plan. Cet ouvrage porte
pour titre la Foiref dure cinq Jours, et chaque Journée
•comprend cinq actes. Le mérite principal de cette pièce
consiste dans la pureté du langage. Mais la comédie qui
Ht le plus d'honneur au jeune Buonarotti est la Temxa,
•écrite en ottana rima, dans la langue des paysans de
Toscane. Cet essai d'introduire les dialectes italiens au
théâtre eut plusieurs imitateurs. — Les Troubles du
Parnasse de Sdpion Ericeo consistent surtout en un
•cadre ingénieux où Tauteur a placé la critique souvent
Juste et piquante des premiers poètes de son temps*
C'est au commencement du xvn* siècle que date Fin-
^ention du drame en musique nommé opâra* Le pre-
mier, Daphné, fut représenté en 1594, à Florence. Rlnuo*
cini améliora ce nouveau genre, et fit repr^enter, à
Florence aussi, VEurydice, h Mantoue V Ariane. L'intro-
duction de l'opéra contribua h exiler du théâtre italien
la vraie tragédie. La vogue des Comédies de Vart^ espèce
d'impromptu sur lequel chaque acteur brodait à son gré,
et qui fut une importation de l'Espagne, acheva d'éloi-
gner les auteurs des compositions sérieuses. C'est à ce
genre faux ^ue nous sommes redevables de Polichinelle.
Au XVII* siècle appartiennent, dans le genre historique,
VHistoire de Naples, par Capecelatro, et les nombreux,
mais peu solides ouvrages de Gregorio Leti.
La littérature italienne avait eu une grande influence
en France au xvn* siècle; ce fut, au contraire, l'influence
française ^ui prédomina en Italie au xviii*, et y intro-
duisit les idées philosophiques, qui alors occupaient tous
les esprits. Déjà les Italiens avaient cherché à réagir
contre l'école de Marini, et à ramener la langue à une
élégante simplicité; dans ce but, on avait fondé à Rome
V Académie des Arcades {V. ce mot)^ qui recruta bientôt
des membres dans toute l'Italie. Les chefs de cette Acadé-
mie furent Gravinaet Crescembeni. Les Arcadiens prirent
pour modèles Théocrite, Virgile et Sannazar, et inondè-
rent l'Italie de sonnets pastoraux, liais leurs principaux
titres de gloire sont les travaux de critique qu'ils firent
sur la langue italienne. Gravina écrivit La raison poé»
tique et un Traité de la tragédie ; Crescimbeni , un
Traité sur la beauté de la poésie italienne, La Biblio-
thèque de l'éloqiience italienne, de Mf^ Fontanini, les
divers écrits d'ApostoIo Zeno et du marquis MafTei, la
Parfaite poésie de Muratori, sont des guides d'une grande
utilité pour l'étude de la littérature italienne.
L'influence de l'école philosophique se fit sentir non-
seulement dans les idées, mais encore dans le style;
les auteurs italiens prirent à l'école de Voltaire cette élé-
gante précision, ce tour vif et heureux de l'école du
xvni* siède, et cette imitation alla jusqu'au néologisme.
Joseph Baretti, qui avait longtemps voyagé en France,
et surtout en Angleterre, fut un des premiers propaga-
teurs des idées nouvelles. Vico fonda en Italie la philo-
sophie de l'histoire. L'abbé Genovesi, qui suivit et éclair-
cit à la fois \fis théories de Vico, t&cha de mettre sa
nation au niveau de celles qui venaient de la précéder
dans la carrière scientifique : il publia des Méaitations
philosophiques imitées de celles de Descartes, et des
Leçons de commères justement estimées. — César Bec-
caria, célèbre surtout par les services qu'il rendit à la
législation criminelle , entreprit d'exposer la théorie
philosophique du style. — LÀ jésuite Xavier BettinelU
se fit le disdple ardent de Voltaire. — Melchiore Cesa-
rotti rendit un ^and service aux lettres en publiant un
Essai sur la philosophie des langues. — Enfin François
d'Alberti m^te d'être cité pour l'immense entreprise
du Dictionnaire universel , critique, encyclopédique.
Les idées philosophiques firent aussi leur révolution
dans l'histoire, et y introduisirent un esprit de critique
plus sévère. Pierre Giannone , dans une Histoire du
royaume de Naples, ouvrage plus savant qu'élégant, se
fit remarquer par la hardiesse de ses recherches et de
ses vues. — Louis-Antoine Muratori , avec un style plus
simple et plus correct, rédigea les Annales ^Italie, où
il a fondu les résultats de ses nombreuses recherches
critiques. — Charles Denina fit, dans un style noble et
correct, le Tableau des révolutions d'Italie, suivi du TO"
bleau des révoltUions d'Allemagne. — Enfin Pierre Verri
composa une instructive Histoire de Milan, sa patrie.
Les Italiens ont toujours plus brillé dans l'histoire
littéraire qile dans l'histoire civile , au xviu* siècle. Le
P. Benoit Bacchini, Apostolo Zeno, et le marquis Maf-
fei, donnèrent l'exemple des premiers Journaux litté-
raires : on consulte et on cite encore le Journal des
hommes de lettres de V Italie, et les Observations lit'
téraires* L'Histoire littéraire d'Italie est vraiment rede-
vable de ses progrès à trois écrivains, Bettinelli, Decina,
et Tiraboschi ; ce dernier embrassa toute l'histoire de la
littérature italienne, et son ouvrage fait autorité.
Les essais midheureux, tentés depuis l'Arioste et le
Tasse dans le penre épique, ne découragèrent pas les
Italiens. Antonio Caracdo publia un poème épique sous
le titre de l*Empire vengé, où il célèbre les pnnces d'Oo
cident qui s'allièrent pour relever l'Empire d'Orient; il
se montre faible imitateur du Tasse. — Les traducteurs
furent plus heureux : la traduction de VÊnéide de Beve-
rini est supérieure à celle d'Annibal Caro; Cornélius
Bentivoglio publia la traduction de la Thébaïde de Staoe,
et l'abbé Cesarotti donna une version des poèmes attri-
ITA
1115
ITA
boés à Oasian, généralement regardée comme un chef-
d'cBavre^ et une tradaction moins heureuse de Ylliade.
L'époDée hérof-comique fil quelque progrès pendant cette
pèrifioe : le Biceîarcktto de Nicolas Forteguerra est une
pbiauite parodie de TArioste.
Uopéra, composé de drame et de musique, était par
xla même trajet à dégénérer. En effet, au commence-
ment du ïvm* siècle, la musique atait tellement dominé,
qoe la partie littéraire était complètement sacrifiée;
Apostoto Zeno entreprit une réforme devenue nécessaire,
fidmirateur des Grecs et de la tragédie française, il traita
des sujets grecs d*après la méthode classique de nos
grands tragiques. Le résultat fut que le li^retto reprit
tellement Te dessus dans Topera, oue la musique fut
ncrifiée à son tour. Cependant la réforme de Zeno pro-
fita ail théâtre, et à Métastase, oui devait le plus illustrer
ce genre de composition. Disciple de Zeno, il évita les
défauts de son maître; tout en restant fidèle aux tradi-
tions françaises et aux sujets tirés de Thistoire grecque,
il mit plus de goût et de sentiment musical dans ses
compositions. Cest ce qui explique ses défauts et ses
qualités. En effet, les mélodrames de Métastase sont
écrits dans un style coulant, harmonieux; le rhythme
des vers est varié et propre à faire éclater tous les res-
sorts de la mélodie ; mais les caractères manquent de
pn^ondeoT, les situations de développements : malgré
cela, VArtaxercê^ l'Olympiade, le Démophoon, etc.,
prodaisirent ane immense sensation en Italie, et y sont
€Dcore Justement appréciés.
Ia tragédie, abandonnée pour Topera, fit de courageux
«ffortB pour se relever. Les premiers écrivains qui repri-
rent cette route abandonnés furent Delfino MÛtelli, et
le marquis Me^ei , dont la Mérope causa une révolution
dans Itart dramatique. L'auteur entreprit dans cette pièce
dlntéreaser ses compatriotes par une nouvelle tragédie
qui réunit à la fois le naturel et le pathéti<]ue des Grecs,
le moaTement et la régularité des Français, sans autre
mobile d'intérêt que Tamour maternel. Le succès de
Èférope lut immense en Italie, et même en France, où
Voltaire, après Tavoir critiquée, lui rendit Justice en
liaiitant. — Entre Blaffei et Alfieri, il y eut quel(][ue8
essais tiagiques : les tragédies chrétiennes d'Anmbal
Marchese et du P. Bîanchi; celles assez remarquables
vue Xavier Pansuti tira de Thistoire romaine {Brutus ,
VirohM, Sophonisbé) ; enfin les pièces d'Antoine Conti,
écrites dans un s^le sévère et avec un vrai sentiment de
Tantiquiié. Gigli et Fagiuoll firent aussi tous leurs efforts
pour inspirer aux Italiens le coût Vie la simplicité et de
la roulante des pièces françaises.
Vittorio Alfieri entra dans la carrière littéraire avec un
plan de réforme bien arrêté : son dessein fut de réagir
contre ce qu'il appelait la corruption du théâtre italien
et la mollesse de Métastase. Son système poétique n'avait
pas seulement pour but de relever le goût littéraire des
halieos, mais encore de leur rendre le sentiment de la
liberté. Cest dans cet esprit qu'il composa princioale-
ment Virginie, la Conpiration des Pazzi, le Timotéonf
lea deux Brutus, Agis, Dan Carlos, etc. Alfieri, écrivant
poor la réforme morale et poétique de son siècle, avait
dû se faire tout an système dramatique ; il ramena, au-
tant que possible, son style à la simplicité énergique de
Dante, et, dans ses efforts vers le grand, ne sut pas tou-
jours éviter la rudesse. Il se créa une versification nette
et forte, nmplifia Taction tragique, et développa les ca-
ractères aux dépens des événements. Mais, tout en admi-
rant la noblesse des sentiments qu'il exprime, on peut
loi reprocher d'avoir trop chargé les ombres de ses ta-
bleau, et représenté ses traîtres trop complètement
maavaja, ce qui est une faute au point ae rue de l'art et
de la connaissance du cœur humain. — L'entreprise
d'Atteri, d'abord criti^ée comme toute réforme, finit
par oiMOTir l'approbation générale, et toute une géné-
ratioD de poètes se forma à son école. Le comte Alexandre
PepoU» tnppé des beautés des premières tragédies d'Aï-
fien, eut le mérite rare de se réformer à son exemple.
n refit les tragédies qu'il avait déjà publiées, et en com-
posa de noarelles. Dans quelques-unes il reproduisit les
mêmes sujets qu'Alfieri avut déjà traités; tels sont
VAgamênmùn et le Don CaHos. Jean Pindemonte fut en-
core pins le ifiscîple des poètes tragiques fhmçais que
d'Atteri. n sacrifiait souvent la profondeur des pensées
à réclat de la scène. Ses principales pièces sont les Bac-
€iunaUs, le Saut de Leucade, Agrippine, les Colons
de Cimdie^ Geneviève d^ Ecosse, etc.
La comédie avait été négligée au xvn* siècle pour
repéra, et tons les littérateurs du commencement du
xvm* comprenaient la nécessité de la relever et de If
régulariser. Dans ce but Jérôme Gigli traduisit le Tar-
tufe de Molière, les Plaideurs de Racine, et donna
ainsi le premier aux Italiens Tidée de ce que devait être
la bonne comédie. — Le marquis Maffei publia les Céré-
monies et le Raguet; dans la dernière de ces pièces, 11
tâchait de tourner en dérision les Italiens qui dénatu*
raient leur langage, en y introduisant des locutions
françaises. Ces comédies auraient eu plus de succès, si
l'auteur ne les avait écrites en vers. — Jules-César Becelli
attaqua les pédants de son temps dans les Faux savants,
l'Avocat , les Portes comiques , etc. — Riccoboni essaya
de faire revivre Tancienne comédie nationale; mais il
échoua pour avoir voulu changer trop brusquement le
goût de son temps. — Les efforts du marquis de Liveri
portèrent surtout sur les effets scéniques : il rendit la
scène plus animée, disposa les personnages par groupes,
et les fit habilement concourir à l'effet général. — Toutes
ces réformes partielles préparaient la voie à Goldoni»
Doué d'un esprit vif et original, d'une grande facilité, il
composa 150 pièces où Ton rencontre une étonnante va-
riété d'intrigues, de caractères, et de situations. S'il n'a
pas un style très-correct, et si ses ouvrages sentent
quelquefois la précipitation, on ne peut lui refuser une
verve singulière et une grande connaissance du caractère
italien. Ce mérite est surtout appréciable dans son pays;
car les étrangers sont souvent frappés du peu d'élévation
des caractères qu'il peint avec tant de naturel. Ses prin-
cipales comédies sont l* Honnête fille, la Bonne femme,
le Café, le Chevalier et la Dame, la Paméla, V Amant
militaire, VAvocat vénitien, et le Bourru bienfaisant,
cette dernière pièce faite pour le Thé&tre-Français. —
Chartes Gozâ vint ravir à Goldoni une partie de sa popu-
larité. Plus habile érrivain que son rival, avec une ima-
gination extravagante, il se plut à composer les pièces
les plus romanesques et les plus absurdes i les titres de
quelques-unes donneront une idée de sa folle entreprise;
ce sont : l'Amour des trois oranqes, le Roi cerf, la Dame
serpent, le Monstre bleu turqmn, le Petit oiseau d^un
beau vert, etc. Avec de pareils ouvrages, il trouva néan-
moins le moyen de plaire, tant il est vrai que l'impor-
tant est d'avoir de l'esprit et de la verve comioue.
Le sonnet, genre cher à TItalie, fut cultivé au xvm*
siècle par J.-B. Cotta, Julien Camani, et Onofrio Min-
zoni, qui s'appliquèrent à perfectionner ce petit poème.
— Frugoni écSrivit non-seulement des sonnets, mais en*
core des odes, des égfogues, des épltres, des satires, etc.
Dans ces divers genres, il montra une imagination très-
riche. Jointe à une grande hardiesse d'expression. Ange
Mazza fut le dernier poète lyrique; il fit parier à sa
muse le langage de la philosophie. — J.-Charles Passe-
roni et Laurent Pignotti s'essayèrent dans l'apologue; le
Jésuite Roberti y déploya quelcfue invention; Bertola
surpassa quelquefois ses devanciers par la simplicité et
la gr&ce. — P. RoUi, outre de nombreuses traductions,
composa des cantates estimées. — On doit à Spolverinl
un poème didactioue sur la Culture du riz» — Mention-
nons enfin, parmi les poètes satiriques, G. Casti, Tauteur
des Animaux parlants.
Les Italiens, si riches en Nouvelles versifiées, et qui,
au xvm* siècle, comptent encore celles de Batacchi et de
Costa, eur^it de tout temps fort peu de romans en
prose; la seule production de ce genre qui se fasse re-
marquer est le Congrès de Cythère du comte Algarottl ,
espèce de satire contre les femmes. Le comte Alexandre
V^ri, érudit très-versé dans Thistoire ancienne, publia
une Vie dÊrostrate qu'il disait avoir découverte dans un
ancien manuscrit, et les Aventures de Sapho, où il s'attache
à imiter la simplicité élégante des Grecs. Mais l'ouvrage
auquel cet écrivain dut principalement sa réputation est
celui des Nuits RomcUnes : ce sont divers entretiens qu'il
suppose avoir eus avec les ombres dos anciens Romains
les plus illustres, et surtout avec celle de Cicéron ; il
tire de ce sujet dies comparaisons ingénieuses entre les
institutions de Tancienne Rome et celles de lltalie mo-
derne. Ce qu'il faut surtout remarquer dans cet écrivain,
c'est la gr&ce et le naturel de son style formé à Técole
des premiers prosateurs italiens.
Cinquième période, — Les bouleversements oue la
Révolution française produisit en Italie, l'esprit militaire
et les idées de liberté qu'elle réveilla, les aspirations à
l'unité politique qui ea ont été la suite, eurent leur
contre-coup dans la littérature. Dans la langue, le parti
des Puristes eut une tendance prononcée à s'affranchir
des locutions fï'ançaises, à remonter à la source nationale
de Dante et des autres écrivains anciens. Dans la poésie.
ITA
1116
ITA
vne latte s'engagea entre les classiques, qai restaient
fidèles à la tradition mythologique, et les romarUiques,
à qui la connaissance des littératures anglaise et alle-
mande aTaient ouvert des horizons nouveaux. Les pu-
ristes ont triomphé ; mais les états successifs d'oppression
et de révolte, de découragement et de surexcitation poli-
tique par lesquels l'Italie a passé Jusqu'à nos Jours,
n'ont point laissé aux esprits assez de calme pour s'atta-
cher fortement aux qurâtions littéraires, et la querelle
des classiques et des romantiques n'est pas encore dé-
cidée.
A la tête des Puristes s'est placé Antonio Gesari , qui
a poussé Jusqu'à raffectation sa prédilection pour la langue
du XIV* siècle, et dont le système exclusif a été exagéré
encore par Pellegrino Fsrini. Vincenzo Monti a été pu-
riste et classique, mais avec plus de coût et d'esprit,
ainsi que son gendre Giullo Pertican, profondément
versé dans la connaissance des antiquités italiennes.
Sans se mêler aux luttes politiques comme ces divers
écrivains, Giuseppe Parini se fit, dans ses poésies, un
style énerjpque et original. Ugo Foscolo écrivit des tra-
fféidies imitées de celles d'Alfieri ; elles ont moins contri-
bué à sa réputation que ses Ultime Lettere di Jacopo
Ortts, imitation du Werther de Goethe, et ses travaux sur
Dante, Pétrarque et Boccace. Les œuvres dramatiques do
Silrio Pellico, connu parle livre intitulé Mesprisons, celles
de Maroncelli, de Luigi Scevola, de Cesare délia Valle,
de Francesco délia Valle, de Gosenza, sont assez faibles.
Niccolini s'est, au contraire, placé au premier rang des
classiques ; après avoir emprunté ses sqiets à la mytho-
logie et à l'antiquité, il puisa plus tard, avec un égal
bonheur, dans l'histoire du moyen âge. — Du côté des
romantiques, il faut placer d'abord Alexandre Manzoni,
qui, dans deux tragédies, Il conte di Carmagnola, et
Adelchi, ouvrit des voies nouvelles à l'art dramatique
italien. Il eut pour imitateun assez faibles Tebaldo Fores,
Gristoforis, Rosini, Carlo Marenco, qui mirent à la scène
las grands événements arrivés au moyen âge dans leur
patrie. D'autres poètes donnèrent modestement le nom
de drames à leurs tragédies : tels sont Giuseppe Révère,
Antonio Gigliani, Felice Turatti, Giacinto Battaglia, etc.
Les Drames historiques de Giov. Sabbatini sont moins
des œuvres dramatiques que des scènes historiques.
Dans la comédie, Gberardo del Testa s'est fait une place
honorable; Gher. de'Rossi est estimé par son style sati-
rique et mordant; Albergati moralise d'après Voltaire
et Goldoni ; Avelloni s'est inspiré de Beaumarchais, comme
Federici des Allemands ; Alberto Notaexoellait parle dessin
des caractères, et le comte Giraud par la sensibilité. Au-
Joard'hui les traductions des piècâ ftançaises, spéciale-
ment de celles de Soribe, ont à peu près tout envahi.
Felice Romani a eu des succès dans l'opKSra.
On ne trouve plus d'épopées^ dans le sens antique at-
taché à ce mot, mais un assez grand nombre de récits
épiques. Le plus important est celui de Tommaso Grossi,
lUmbardi alla prima crociata, en 15 chants. Florio
et Arici sont auteurs d'une sorte d'épopée romantique,
la Destructton de Jérusalem, Silrio Pellico a publié des
poésies sous le titre d'Antiche, Costa un poème sur la
découverte de l'Amérique, Domenico Biord la Pace
d^Adrianopoli, Giovanni de Martine la Grecia rigenerata,
ces deux derniers poèmes inspirés par l'affinancûssement
de la Grèce. — Au nombre des podtes lyriques figurent
Clem. Bondi, G. Fantoni, A. Paradisi, Gher. de' Rossi.
G. Meli, Monti, Silrio Pellico, Manzoni, le comte Leo-
pardi, Luigi Carrer, Giovanni Berchet, Amatino Cagnoli,
Giov. Prati , Giuseppe Giusti , Broffeiio , Giov. Mar-
chetti, etc. — Un Florentin, Angelo d'Eld, a mérité par
■es satires le surnom de Juoénal italien.
Le roman a pris une extension considérable. Ici en-
core, Manzoni donna l'impulsion par ses Promessi sposi
(les Fiancés), tableau brillant des mœurs et de l'his-
toire du xvn* siècle dans le nord de l'Italie. Vinrent
ensuite la Menaça di Monsta et Luisa Strozzi par Ro-
sini, VEttore Fieramosca, et le Niccolo de* Lappiper
Massimo d'Azeglio, le if orco Visconti de Grossi. Varese,
Bazzoni, Falconetti, Lansetti, Guerazzi, Sacchi, Blarocco,
Zorzi, Vigna, le prince de Santa-Rosa, Battaglia, Ra-
nieri, etc., sont aussi des romanciers distingués.
Vhistoire est cultivée au xix* siècle avec autant de soin
:iue de succès. Parmi les recherches savantes, on doit
mentionner en première ligpe celles de Micali, Vltalie
noant la domination romame, et de Garzetti. Le plus
remarquable ouvrage a été sans contredit V Histoire iini-
mrselle de Cesare Cantù, à qui l'on doit encore une i7ts-
toire des Italiens, Cesare Balbo« Luigi J^arti, Giuseppe
Compagnon! et Ant. Goppi se sont également occupés de
l'histoire générale de l'Italie. L'histoire spéciale dû pro-
rinces et des villes a été aussi l'objet de nombreux tra-
vaux : nous citerons VHistoire de Ncmtes par Pagano,
les Vêpres Siciliennes d'Aman, les Tables càronotogi-
ques de Vhistoire de Florence par Reumont, VBistoir$ de
Toscane par Lorenzo Pignotti, VHistoire de MUanjau
Pietro Custodi, VHistoire de Pise par Bonaini, VHih
toire de Gênes par Carlo Varese et par Girolamo Serra,
VHistoire de la Sicile par Giuseppe Alessi, VHistoire de
la réoolution de Napfes par Cuoco, VHistoire moden»
de Naples par Collette , VHistoire de la Sicile par Pictrc
Lanza, prince de Scordia , VHistoire d'Italie par Carlo
Botta, auteur également d'une Histoire de la guerre de
Vindépendance des États-Unis d'Amérique, Le comts
Pompeo Utta a publié les FamUles célèbres dlUdie,
L'histoire des beaux-arts a occupé Land, Cicognara,
Giuseppe Bossi, Fumigalli, Ferrano, Inghirami, Rosini
et Visconti.
V, Alacd, Poeli antiche^ Naples, 1661; Cresdmbeni,
Storia délia vclgar poesia, 1096; Muratori, Délia per-
fetta poësia iialiana, Modène, 1726, 2 vol. in-4* ; Quadrio,
Storia e regione Sogni poesia, Bologne, 1739; Giinma,
Idea délia storia delV Italia letterata, Naples, 1 72 1, 2 yoL
in^*; Mazzuchelli, Gli scrUtori d:" Italia, Bresda, 1753;
Tiraboschi, Storia délia letteratura italiana fino aif
anno 4700, Modène, 1772-81, 14 vol. in-4o; Coroiani,
/ secoli ddla lettenUura italiana, Brescia, 1818, 9 vol.
in-8®, avec une continuation par Ticozi, Milan, 1832-33,
2 vol. in-^ ; G. Maffei, Storia ddla letteratura italiana
fino al secolo xix, Milan, 1834, 4 vol. in-8*; Ugoni, DeUa
letteratura italiana nella seconda meta dd secolo xvui,
Bresda, 1820-21 . 3 vol. in-8»; Ambrosoli, ManuaU
ddla letteratura italiana. Milan, 1831-33, 4 vol. in-8^
Levati, Saggio sulla storia délia letteratura italiana
deiprimi & anni del secolo xa. Milan, 1831 ; Gingueoé,
Histoire de la littérature italienne^ continuée par Salfl,
Paris, 1811 à 1835, 13 vol. in-8*; Salfi, Résumé de l'his-
toire de la lUtérature italienne, Paris, 1826, 2 vol. in-18;
Sismondi, De la lUtérature du midi de VEurope, Paris,
1829, 4 vol. in-8«: Ruth, Histoire de la poésie italienne,
en allem., Leipzig, 1844; Riccoboni, Histoire du théâtre
italien, Paris, 1727, 2 vol. in-8*; Rannucd, Manuale ddla
letteratura dd primo secolo, Florence, 1837 ; Cimorelii,
Origine e progressi délie belle lettere italiane. Milan,
1845; Giudid, Compendio délia storia ddla letteratura
italiana, Florence, 1851 ; Rathery, Influence de Vltalie
sur les lettres firançaises, PariM^ idSA, \n-%\ E. B.
iTAUENiiB (Versification ). Elle est fondée sur l'accent
prosodique , et sur le nombre déterminé des svllabes.
La rime, simple accessoire d'harmonie, n*est nullement
nécessaire; d'excellents poèmes, en particulier toutes les
poésies dramatiques, sont écrits en vere blancs ou non
rimâi {versi sciolti), La rime en italien part de la der«
nière syllabe accentuée; dès lors ce n'est pas toujours la
dernière syllabe qui la constitue. — On distingue chaque
espèce de vere par le nombre de syllabes dont il est
composé, n y a élidon lorsqu'une voyelle ilnale se ren-
contre avec une voyelle initiale : dans ce cas, ces vovelles
ne comptent que pour une seule syllabe. Ainsi, tel vers
dont les mots donnent seize syllabes se réduit psr Téli-
sion à onze. Il Ikut ériter de faire rencontrer, dans Téli-
sion, des voyelles accentuées, comme potri io. Cest
aussi un défaut de compter l'élision pour deux syllabes
dans la mesure du vers. — On appelle versi tronchi les
vere qui sont terminés par un mot tronco {tronqué,
dont l'accent est sur la dernière syllabe); versi piam,
ceux qui sont terminés par an mot piano (doux, dont
l'accent est sur la pénultième) ; versi sdruccioli, ceui qui
sont terminés par un mot sdrucciolo {glissant, dont
l'accent est sur l'antépénultième). Les vere de la langue
italienne sont considérés généralement comme piam;
les autres vere se rapportent tous à cette dasse. Donc, le
vere tronco, par nppiort au vere ptano, doit avoir une
syllabe de moins, parce que la dernière syllabe d'u»
mot» quand elle est accentuée, est égale à deux syllabes
brèves, ou à une brève et à un repos ; les ven sdruO'
cioli, par nmport aux vere piant, doivent avoir une
syllabe de plus, parce que deux syllabes brèves après
une syllabe accentuée doivent se prononcer avec b
même vitesse qu'une seule syllabe brève.
La langue italienne compte 8 espèces de vers, de on»
à quatre syllabes. Le plus long ou endécasyllabe est en
même temps le plus harmonieux, le plus mijestueux, et
le seul qu'on emploie dans les grandes compositions
poétiques. Il peut avoir trois, quatre, et même dnq syl-
• I
ITA
1117
ITA
libeB «ecentuéet, dans différentes positions, os qui
donne liea à une infinité de combinaisons, dont chacune
ofte une hannonie ▼ariée, selon le sentiment que le
po^ veut exprimer. Après les endécas^Uabes, les vers
de sept sylIsDes sont les plus harmomeui et les plus
asités. Les Yera de six syllabes ne sont employés que
nrement, à cause de leur harmonie trop uniforme.
Panni les différentes combinaisons de Ters, nous dis-
tinguerons : 1* Voltava rima ou strophe de huit vers,
del*inTenlîon de Boccace; c'est le mètre de la /^rt*-
$aUm délwrée. Cette heureuse division, qui oflire à Tes-
prit d*sgréable8 repos, a été empruntée aux Italiens psr
les Espsgnols, les Portugais, les Allemands et les Au-
rais; 2* la sêstma ou strophe de six Yors, également de
création italienne. (Test le mètre dans lequel s'expri-
meot répigramme« la satire, l'ironie, sous l'apparence
de la gra?ité et du sérieux ; par exemple la Sêcchia ror
fUa & Tassoni ; 3* la t9r%a rtma, couplet de trois yots
endécasyllabes, aTec des rimes croisées qui s'enchaînent
d'un tercet à Taatre. Cest le mètre de la /)ivtfM com^t».
D m ordinafrement affecté à la poésie satirique, bien
qae quelques poètes aient écrit en terss rime des élé-
gies, des égioguas, des éplties et même des odes, non
su» quelque saociès. — La causons ou ode, les poésies
dite» snaôéontiqnes, renferment des strophes de toute
mesore et de toute espèce de yen, selon le goût et l'in-
testion du pofite. — Vient enfin le somMi, rfavthme
eneotiellemeiit italien, qui a fait le tour de rËurepe
avec un succès prodigieux. On croit que les Italiens l'ont
emprunté aux Troubadours. Ce genre de poésie est insé-
ptnble du nom de Pétrarque. Bunhiello et Berni ont
breoté le sonnet burlesque ou épigrammatique, et l'ont
aileogé d'une queue plus ou moins longue, selon la dose
de plaisanterie qn*ils avalent à exprimer : ces sonnets
t'appellent soneUs colla coda. E. B.
iTAUBiniB ( Numismatique). Après la chute de l'Empire
romain d'Ooddent en 476, l'Italie fut occupée par les
Héroles. On ne connaît aucune monnaie de cette peu-
plade germanique : celles qu'on a touIu attribuer à son
dief Odoacre sont fausses ou ont été mal interprétées.
Tliéodorie le Grand, I*' roi des Ostrogotlis en Italie, a
fait Crapper des monnaies de tous métaux. Sa monnaie
d'or est calquée sur Yaurma romain, et elle ne se dis-
tingue du sou impérial d'Anastase que par le mono-
gFNBme dn roi, caché à la fin de ht légisnde ; sur les
<iwssir«r, on Tolt, au droit, la tète de l'empereur, et,
au isfers, le monogramme de Théodoric ; le nom et
l'effigie de ce prince figurent sur le bronze. Les autres
nia oitrogotlis n*ont pas laissé de pièces d'or; leure qui-
sairea portent ordinairement leur monogramme, et quel-
quefois leur nom en toutes lettres ; leurs monnaies de
mue, quand ellee ont été frappées à Rome, portent ,
outre TefiDgie royale, la louve et l'i^le romaine, la Vic-
toire et un guerrier, avec la légende VICTORIA PRIN-
QPVIi, et, quand elles sortent de l'atelier de Ravenne,
nmsge de cette ville et la légende RAVENNA FELIX. —
la monnaie des Lombards est mal connue. H est certain
que le système romain continua d'être en vigueur ches
enx : le reven des pièces porta Tanden type de la Vlc-
toîie; an droit on inscrivit le nom de l'empereur Jusqu'à
Is fin dn n* siède, puis celui des rois lombards.
Quand Charlemagne eut soumis l'Italie septentrionale,
OD y adopta le système monétaire des Francs. Toutefois,
on frappa encore à Lncques quelques trtsnt d'or, avec
randenne légende FLAVIA LVGA. Charlemagne ayant
socordé an jMpe le droit de battre monnaie, les souve-
rains pontilee frappèrent depuis cette époque des de-
niers dans le système franc, portant d'un côté leur nom
ou le buste de S^ Pierre, de l'autre. le monogramme de
l'empereur. Les ducs de Bénévent frappèrent des espèces
d'or et d'argent sur lesquelles ils inscrivirent» avec leur
nom, celui de Chariemagne; mais, après la mort de ce
prince, ils firent disparaître cette marque de soumission.
Quant au midi de l'Italie, qui restait en la possession
dea Grecs, on y maintint le monnayage byûntin, et,
rnd les Sarrasins vinrent prendre pied dans le pavs,
y apportèrent leurs espèces à légendes arabes. Les
Normands, maîtres de la Sidle et de l'Italie méridionale
depuis la fin du xi*siède, eurent un monnayage bizarre :
le même prince lrap]»it des pièces dont les types étaient
emprunta aux empreintes accréditées ches les Grecs, les
Latins et les Arabes, et dont les légendes appartenaient à
ieon troia langues.
Bès le xn" siède, la fabrication monétaire était moins
lisriMue en Italie que partout ailleun : Rooer, duc de
fislenie, fit alon frapper des oursut, qui de son titre
prirent le nom de dueals. Au xui*, les otirma de FM-
dériell, connus sous le nom ^auquiiaUt, sont des
chefs-d'oBuvre de gravure. Les républiques italiennes,
fières de leun libertés, inscrivaient alon sur lenn mon-
naies leurs titres de gloire : Bologne reppelait , par te
légende BONONIA DOCET, sa célèbre Université; Man-
toue mettait sur ses deniers le nom de Virgile. Les /loHsw
de Florence et les ducali de Venise étaient imités dans
toute TEurope; à Chypre et en Morée on copiait les types
de Gènes. A Naplea, la maison d'Anjou introduisit un
système moitié fhmçais, moitié italien; on trouve le
nom du roi Charles te Boiteux, qui eut le titre de séna-
teur à Rome, sur des pièces purement romaines et qui
portent la vieille légende ROMA CAPVT MVNDI. — Au
XIV* siède, quand les papes résidèrent à Avignon , ils y
eurent un atelier monétaire fort actif, où furent flrappées
des espèces d'or et d'argent. Au xv*, les types moné-
taires de la France ou de TEspagne prévalurent dans le
royaume de Naplea , suivant que la nudson d'Anjou ou
la maison d'Aragon l'emporta. Charies VIII, pendant son
expédition en Italie, fit frapper à Aquila, en Calabre, des
espèces avec cette légende QTÉ DE L'AIGLE, tandis
que le duc d'Orléans, maître d'Asti , répandait des mon-
naiea à titre de duc de Blilan. Le système fhmçais était
adopté, à la même époque, psr les ducs de Savoie, et
les Génois, selon la domination qu'ils subissaient, asso-
ciaient sur leurs pièces au nom de Conrad II, qui leur
avait jadis accordé le droit de monnayer, ceux de Ga-
léas Sforza, de Ludovic le More, de Louis XII, ou de Fran-
çoial**.
Au XVI* dède, l'Italie, tout en perdant son indépen-
dance, influait sur le reste de l'Europe par ht supé-
riorité de ses arta. Jamais la fabrication monétaire n'y
atteignit une plus grande perfection. On peut dter comme
exemples les monnaies d'or et d'argent frappées par les
doca de Savoie, celles de Florence, de Venise, de Fer-
rare et de Rome, enfin les magnifiques Uêtom fabriqués
à Milan, et qui portent d'un côté l'efligie de Charlee-
Qnint ou de Philippe II, de l'autre l'image de S^ Am-
broise. — Avec le xvn* nède la décadence de l'art
monétaûe commence. Si les ducs de Savoie continuent
de firapper de belles et bonnes monnaies, une foule de
petite souverains, comme ceux de Monaco, de Mantoue,
de Piombino, de Massa et de Canare, se font faux-mon-
nayeurs. La Corse ofl^, pendant le xvni* siède, un fut
monétaire curieux : c'eat la fabrication de pièces au nom
de son roi charlatan, Théodore. Depuis la Révolution
française de 1789, c'est surtout au système fhmçais que
l'Italie a fait des emprunts : non-seulement on a pris
presque nartout pour osse le ^stème dédmal, nuis les
ateliers ae France ont souvent fabriqué pour les princes
italiens les pièces métalliques, aussi bien que les billets
de banque. V. Carli-Bubbi , IMU mùfMU e delV tftttu-
stOfM délie Z9cch9 d^Italia, 1754-60, 3 vol. in-8; Argd-
lati. De monetis Italiœ wjuriorum illuttriwn mrorum
diêierkUwnes, Milan, 1750-59, 6 voL in-4*; Zanetti,
Raccfdta délie monete e seceke iltalia , Boloône, 1775-
1789, 5 vol. in-fol.; Promis, Mcnete dereali ai Savoia,
Turin, 1841, 2 vol. in-8*.
iTAUsmiB (Philosophie). S'il lUlait faire remonter la
philosophie italienne jusqu'à l'époque où l'on vit pa-
raître des philosophes en Italie, on devrait partir de
Pythagore et descendre jusqu'à l'époque romaine inclu-
sivement ; mais toutes ces diverses périodes sppartien-
nent à la philosophie grecque. Cest à pdne si au moyen
âge l'Italie occupe une place un peu marquée dans la
scolastique. Les eflbrts de quelques hommes depuis Cas-
dodore et Boéce jusqu'à Gerbert n'avaient pas été infruo*
tueux; le monastère de Bobbio était devenu l'asile des
lettres dans l'Italie septentrionale, nuiis tout se bornait à
sauver qudquea débns du passé. Au xi* dède, il y avait
à Milan deux endroits où l'on enseignait la philosophie;
on cite Anselme le péripatétlden et Drogon son maître :
cependant il n'y avîdt aucune école de renom ; c'était à
Paris qu'Anselme d'Aoste, Lanfranc de Pavie, Lotulfe de
Lombardie, Anselme de Bamo, et tant d'autres, parmi
lesquds brillèrent au i>remi«r rang S^ Thomas et S^ Bo-
naventure, vendent s'instruire et briller. Mdné Bru-
netto Latini, Guido Cavdcanti, et leurs disciples Dante et
Pétrarque, ce ne fat qu'à partir de la Rendssance que
ritdie vit ndtre ouelques écoles dignes d'être citées.
Gémiste Pléthon et le cardind Bessarion y font connaître
Platon quelques années avant la chute de Constanti-
nople. Après cet événement, l'étude de l'antiquité philo-
sophique donna naissance, en Italie, à deux écoles, l'une
platomdenne, et l'antre péripatétidenne. La première
ITA
1118
rTI
eut pour ehef Mvsile Ficin, qui traduisit Platon, Plotin^
une partie des écrits de Porphyre, de Jambllqae, de
Proclos, et qui laiaaa ane ryofogte plaUmicimnê. On
dte Jean Pic et François de la Hirandole, Franoesco Pa-
trini , qnl tenta une conciliation entre Platon et Aria-
tote, et Jordano Brono, le plus célèknne de cette écolo
idéaliste. Jordano Bruno reproduiait la doctrine des
nomlirea de Pythagore, ce qui le conduisit à soutenir le
système de Goperaic. — L'école péripatéticienne com-
5 rend deux branches : Tune, dite alKDandrUtê^ du nom
'Alexandre d'Aphrodîse qu'elle prit pour guide, est sen-
iualiste pure; l'autre, dite iMMfroUtê, d'Averroès, qu'elle
âTait pris pour maître, avait adopté un sensualisme qui
conduit au panthéisme. Dans la première, qui fleurit sur-
tout à Bologne, on remarque P. Pomponaœ, Zarabella, F.
Piooolomiiu, et Cremonini; dans la seconde, Alexandre
Achillini, qui commence à suivre Averroès, Zimara, Gésal-
pini d'Arezzo, et Julea-Gésar Vanini, qui fut brûlé à Tou-
louse comme J. Bruno l'avait été à Venise. La philosophie
en Italie (xvi* siècle) cherche, avec Telesio etCampanella,
à secouer le Joug de Tantiquité, mais sans y parvenir :
Telesio rappelle Démocrite et Parménide, il en appelle à
l'expérience; Campanella voulut entreprendre une ré-
forme de toutes les parties de la philosophie ; en réalité
il est sensualiste comme le précédent. Au xvn* siècle la
philosophie Jette peu d'éclat en Italie ; la révolotlon opé-
rée pir Descartes y trouve à peine quelques représen-
tants. Th. Gomelio et Ch. Majillo ; Desôurtes y trouva
un adversaire illustre, Vico, si connu par sa théorie de
la ohilosophie de l'histoire, théorie qu'il développa dans
la Science nowMe; en outre il prétendit donner la so-
lution du problème de la certitude en plaçant le critérium
de la vérité dans l'assentiment unanime du genre hu-
main; c'était le fond de son opposition au cartésianisme.
Malebranche trouva un sectateur zélé dans Fàrdella,
professeur i Padoue; mais cet idéalisme ne réussit pas
en Italie, sortout au xvm* siècle. L'Économie politique
fnt cultivée avec succès, ainsi que le Droit de la nature
et des gens par Filangieri, Mario Pagano, Beccaria et
Verri ; la Monde fut représentée par Muratori et Stellini.
Dana le siècle actuel, Rosmini et GiobertI se sont dis-
tingués comme métaphysiciens; mais, en général, le pro-
cédé éclectique aemole dominer entièrement, avec une
tendance au spiritualisme, comme on le voit chez Ga-
Inppi et Mamiani, Tedeschi et Mancini. Ce qui a toujours
manqué à la philosophie en Italie, c'est un canictère
d'originalité et d'indépendance, que les circonstances ne
loi ont pas pu: mis de prendre Jusqu'à présent. R.
rrAUOTBS (Médailles), nom que l'on donne aux mé-
daillea frappées psr les peuples de l'ancienne Italie autres
que les Romains, spécialement par les Grecs de la partie
méridionale. Les plus anciennes sont incuses {V,ce mot)^
«t paraissent remonter Jusqu'à l'an 620 av. J.-G. Une
particularité qui ne se rencontre nulle autre part , c'est
oue le revers des pièces de Populonia est lisse. Chez les
Grecs, la monnaie véritable était l'argent; ils regardaient
Tor comme une marchandise, et le bronze comme un
appoint : chez les Itallotes, au contraire, le bronze senrit
d^etalon à la monnaie. On mettait d'ordinaire pour type
Pimage de la divinité principale honorée dans la ville où
la pièce était flnappée : ainsi, à Tarente, c'était Taras, fon-
dtteor de la ville; à Cumes, l'amazone Gymé, fondatrice
de Gyme en Éolide, dont cette ville était une colonie; à
IHwiaonia, Neptune (en grec Po^^tddn). — Une clasae
particulière de monnaies Italiotes se compose de celtes
qui Airent frappées pendant la Guerre sociale (90-88 av.
J.-C). On y trouve les noms de plusieurs des chefs qui
s'y distinguèrent. Les types r^résentent ht tète de l'Italie
personnifiée, un groupe de guerriers fSdsant alliance,
limage de la Victoire ou de Mars, le taureau italique ter-
rassant le loup romain, etc. V, MarcM et Tessieri, L'eu
graioc de/ museo KireherianOf owcro le monete priinitim
de^ popoli detV IkUia média ordinate e descritte, Rome,
1839, in-4<* et atlas ; Blilliogen , Considérations sur la nu-
mitmatique de l'ancierme Italie, Florence, 184i, in-8*>;
Avellino, Italiœ veteris numismataf Naples, i8(^, 2 vol.
in-4* ; un travail de Raoul Rochette sur la Numismatique
tarentine, dans le t. XIV des Mémoires de l'Institut,
4840; un travail de M. Mérimée dans la Bévue numismor-
tique de 1845.
ITAUQUE (Droit). 7. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et dHistoire,
irauQDB (École). F. {Pythagoricienne.
rrAUQDB (Ordre). V, Ordre de bataille.
ITAUQUES (Caractères). 7. CaractI^bs d'imprimerie.
nàUQOB (Langues), nom sous lequel on comprend les
langues parlées en Italie avant la conquête romaine, tellei
que Vitrusque, l'omMen, Vo9q^e, etc.
ITÉRATIF, mot employé par quelques grammairiens
latins et modernes pour fréquentai^ {V, ce mot). En
grec, l'optatif dans les propositions dépendantes, et la
particule dv avec l'imparfait, l'aoriste et le plus-que-par-
fait de lindicatif , dans une proposition principale, ont
sonvent une valeur itérative. Un sens itératif est égale-
ment attaché à la terminaison <ntov et <raoxov des impar-
faits et aoristes de la langue homérique et du dialecte
ionien. L'infinitif dit de narration s'emploie de même en
latin, toutes les fois que le sens indique l'ellipse du verbe
soleo (J'ai coutume) ou tout autre vûi)e analoeue. P.
ITH08 ( du grec éthos, mœurs, prononcé îth>s par les
Grecs modernes), nom que l'on donnait iadis dans les
écoles à la partie de la Rhétorique qui traite des monirt
de l'orateur. On l'opposait à pathos, employé comme sy-
nonyme de pathétique ou de passions. Molière, se servant
de ces termes, a dit dans les Femmes savantes (III, 5) :
Vous aT6s le tour libre et le beau choix des mots.
— On Tott partout ches toub Viihos et le pcUkûS.
ITHYPHALLIQUE, vers grec Cest le dimètre tn>-
chaique brachycatalectique, c-àrd. de S pieds et demi.
Il sert de clansnle dans les moroeaaz lyriques du thé&tre,
et d'épode ehes les lyriques proprement dits. Gomme
substitutions, il admet le tribraque aux deux premiers
pieds, le spondée an 3«. L'ithjfpnallique, qui n'est pas
très-usité isolément , forme la démise partie du gnnd
archiloquien, du phaJécien et du satamien. P.
ITINERAIRE (du latin iter, gén. iHnaris, chemin),
nom donné à des ouvrages où l'on décrit , soit certaÏDes
routes, soit toutes les routes d'un pavs ou d'un Éiat Ces
sortes de livres sont précieux pour les géographes, sur-
tout ails se rapportent à Tantiquité. Il est vraisemblable
que, dans rempire des Perses, où les routes militaires et
le service postal étaient l'objet d'une attention toute par-
ticulière, le gouvernement possédait des documents sur
la direction et la longueur des routes, les localités qu'elles
traversaient, lea distances qui séparaient les stations les
unes des autres. Ces documents ont dû être connus d'Hé-
rodote. Nous avons quelques fragments d'Itinéraires ré-
digés par des Grecs, tels que les Statkmes (stations)
dAsiê par Amyntas, écrivain d'une époque Inconnue, les
Statkmes de l expédition d*Aleocandre par Béton et Dio-
gnète, et les Staùimes parthiques rédigés an temps (TAn-
guste par Isidore de Charax.
Lm Ronwina eurent deux sortes dldnéraires : les /(t-
néforta ptetc* ou cartes routières, et les Itineraria ser^
ou annotata, itinéraires écrits, donnant différents geûes
de renseignements. Agrippa avait consigné dans ses Com-
mentaires les résultats des opérations géodédques décré-
tées par tout l'empire romain au temps de J. César;
d'après cet ouvrage de son ami , Auguste fit représenter,
par la peinture ou en mosaïque, sur les murs du Por-
tique que Pola Vipsania, sœur d'Agrippa, avait élevé
dans le Ghamp-de-Mars, un Orbis terramm que Pline
l'Ancien a certainement consulté. On croit qu'une réri-
rion de cet Orbis fut faite au temps d'Alexandre Sévère,
et qu*il servit ensuite pour l'exécution de la Table dite di
Peutinger gui nous est parvenue (7. PsornnoEa, dans
notre Dictkmnaire de Biographie et d^Histoire). Parmi
les Itinéraires écrits, le plus important est l'/nnêratr»
d^Antonin, divisé en deux parties, Vitinéraire des pro-
ffincês et VHvniraire morttoné. Henri Estlenne, qui le
publia en iM2, l'attribuait à Antonin le Pieux ou à Uaro-
Aurèle, opinion qui n'est pas adoptée. Quelques savants
ont prétendu qu'il fut fait au temps de J. César par trob
géographes ou ingénieurs, et reçut sa forme d'Antonio :
mais if y a des noms de villes qui n'ont pu être donnés
que plus tKTûj comme Dioclétianopolis, et d'ailleurs les
routes de la Garnie et de la Grande-Bretagne s'y trouvent
D'autres supposent que Vitinéraire dAntonm est l'ou-
vrage d'un géographe du m* ou dunr* siècle, qui eni-
prunta le nom de cet empereur pour lui donner crédit,
ou qu'il fut composé longtemps après, en exécution d'un
projet conçu par lui. Ce qu'on peut tenir pour certain,
c'est que le premier fond de Vitinéraire a été enrichi par
des additions successives. — Certains Itinéraires latins ne
donnent qu'un seul routier : tels sont les trois Itinéraires
de Cadix a Rome, gravés sur trois vases d'argent qu'on a
découverts en 1852 à Vicareîlo (près du lac de Braociano',
et Vltinerarium burdigalense ou hierosolymitanum, qu'un
pèlerin composa en 333 pour l'usage des vovageiirs qui
voudraient se rendre de Bordeaux à Jérusalem. Angelo
IVO
1119
TZK
MU % publié à Milan, ea 1817, sons le titre d'/ttfMro-
rium AUsamdri, une courte deÎKiiption de l'expédition
d'Alexandre le Grand en Pêne, oavrage dédié par an in-
connu à Temperear Gonatanoe lorsqu'il entreprit, en
Tan 345, sa aeconde expédition contre lea PerBea.
Lea Itmérairet poétûntes pourraient bien ne paa figurer
atec grand firuit dans lea collectlona utiles à la géogra-
Bbie. Sana parier de cotaina voyages chantés par Luci«
08, par Horace et par Ovide, on sait que J. César avait
laconté en vera son voyage de Rome dana TEapagne Ulté-
rieure; que Perse composa dans sa Jeunesse des oelotpo-
riea; que Lactance décrivit également en vers son voyage
d'Afrique à Nîcomédie. Nous avons Tltinéraire de Rome
en Gaule par Rutiliua Numatianus (en iiO), et le voyage
Se fit à Limoges Tbéodulfe, évéque d'Orléans sous
arlemagne.
Certaine voyages à la Terre Sainte, écrits au moyen
âge, portent le nom dltinérairea ; tels sont : Itinêranum
ÏÏ. AnUmimmart^friSy vers Tan 600; 5. WUlUbaldi wta
MU Hodœporicon, 722; ^mardt monaehi Stvpiêntis
Itinerarium ad loea sancta, 870; Itinéraire de Benjamin
de Tttdèle, 1160 ; Gerardi Fridarici I m Mgyptwm et Sy-
riam ad Saladinum tegati Ittnerariutn, 1175; Maaistri
Jhetmari Uer ad Terram Sanctam, 1217, publié par
T. Tobler, Berne, 1851. — Les modernes ont quelquefois
donné le nom d'Itinéraires à de purs récits de voyage; tel
est Vltméraire de Pcaris à JérusaUm, par Chateaubriand.
IVOIRE. L'ivoire a été employé pour les objets de luxe
dès lea tempa Jes pins reculés. Certaim meablea dn pa-
lais de David et le trône de Salomon étaient en ivoire,
Homère parle de poignées et de fourreaux d'épée, de lits
et autres objets faits en cette même matière. Phidiaa
sculptait les plus grandea statues (V. CeRTsâLéPHaimini
— Sculpture) en or et en ivoire. L'ivoire servit à faire dea
incruatâtions : on en orna lea clefs des maisons, les brides
des chevaux, les meubles. La chaise curule des Romaina,
les lyres, des tables même, étaient en ivoire. Les tié-
phanta étaient beaucoup plus nombreux dans l'antiquité
et même au moyen Age que de nos fours, et, par consé-
quent , l'ivoire plus abondant. Les musées possèdent de
nombreux diptyques, triptyquea, et autres objets en ivoire
exécutés au moyen Age. On dte comme un habile sculp-
teur Jean Lebraellier, qui vivait sous Charles V. La
Renaissance fit aussi un arand usage de l'ivoire pour
fabriquer des coupes, des hanaps, des cornes, des pou-
drières, etc., qui sont de véritables chefs-d'œuvre de
sculpture. Au xvm* siècle, Rosset de S^-Claude slUustra
comme sculpteur en ivoire. De nos Jours, l'ivoire devient
de plus en plus rare et cher ; on ne l'emploie guère que
pour des objets de petite dimension, tels mie statuettes,
manches de couteaux, cassolettes, pommes de canne, bra-
oeleta, broches, étuis, etc. L'ivoirerie est depuis long-
temps une spécialité de la ville de Dieppe. V. Eug. Piot,
Histoire de la sculpture et des sculpteurs en ivoire, dana
le Cabinet de l'amateur et de Vantiqiuiire, février 18^
IZESCHNÉ. V. Yaçna.
J
J, 10* lettre et 7* conaonne de l'alphabet français.
On l'a définie , tantôt une consonne linguale , sifOante
et faible, tantôt une palatale sifOante, ou encore une
chuintante. Elle a le son de notre g doux. L'articulation
qu'elle représente existe en portugais conune en Iran-
çais. Elle parait avoir été inconnue aux Celtes, à en Ju«er
pir le dialecte baa breton, où le i ne figure que dans des
motA d'importation moderne ; on ne la trouve paa davan-
tage dans le basque et Tallemand, et, quand le j se ren-
eootre dana une langue étrangère, lea Allemands ont
peine à le rendre autrement que par ch {ehe ne chuche
diamais, pour je ne juge jamais). L'articulation j existe
dans certains mots anglais, où elle est représentée gra-
phiquement par une s {treasure, measure) ; en polonais
et en bohème, où on l'écrit par un a accentué; en russe,
eo serbe, en arménien, en persan , où l'on a également
des caractèrea apéciaux pour l'exprimer. Le défaut d'ar-
ticulation oue nous appelons xézeyement , consiste h
donner an j le son du s, ce que font d'ailleurs beaucoup
dltaliena quand ila prononcent nos mots commençant
par i. On pense généralement que la valeur phonétique
doDuée par le français au j n'était paa connue des Ro-
mains : ai cela était, dans les mots latins que nous com-
mençons par un j, l'i qui tenait la place de cette lettre
(dansjom, Jotna, etc.) se serait élidé en poésie, et cepen-
dant on ne voit paa quil en ait été ainsi. — Il est des
langues où l'articulation j se rencontre comme second
élément d'une consonne double, dont le premier élément
est l'articulation d. Cest ainsi que les Italiens prononcent
leur g {gia, gelo)^ et lea Anglais leur j (joy), quelque-
fois leur g {gentle). Le même fait se remarque pour le
dja sanscrit et pour le djim arabe.
Le caractère^ est d'invention relativement récente. On
snM qu'il fut en usage chez les Romains avant la chute
de l'Empire, et qu'ilslui donnaient la valeur phonétlaue
de notre l okouiUée, comme le font les Allemands, les
Danois, les «ftiiftnHRU et les Flamands. En français, l'ar-
ticulation i fut longtemps représentée par la lettre t,
noomiée en œ cas t consonne : Jacques Pelletier et Ramus
forent les première, au xvi* siècle, h réclamer l'emploi
du j pour Tune dea deux valeurs assumées Jusqu'alors
par l't, et ce n'est même qu'à la fin du xviu* qu'on sépara
dé&nidvemeat dana les Dictionnaires les mots commen-
çant par un i et ceux commençant par un j. Les Hollan-
dais employèrent les premiers le j dans la typographie,
et pour cette laison on l'appela longtemps t de Hollande.
JAC
Les Italiens donnent au j le nom d't longo, et ne l'i
ploient qu'à la fin dea mots comme équivalent de deux t
brefs. Dans l'alphabet eapagnol, le j se nomme joto, et
représente une articulation gutturale aspirée, analogue an
ch allemand.
Le J sert quelquefois d'abréviation, pour Jean, ^acqu»^
Joseph, Jules; J.-J. veut dire Jeannlacques^ J.-B. Jean-
Baptiste, J.-C. Jésus-Christ. On explloue J. H. S., mono-
grûnme de Jésus-Christ, par Jésus hominum salvator
(Jésus sauveur dea hommes), ou comme étant les trois
premières lettres du nom de Jésus en grec, IH£Ori:. -^
Quelques auteun ont fait du J le aigne numéral de 100.
JABOT, bande de mousseline ou de dentelle empesée,
{tlissée ou tuyautée, qu'on attachait comme ornement è
'ouverture de la chemiae, au devant de l'estomac, et oui
faiaait souvent saillie au delà de l'habit, comme l'espèce
de poche que les oiseaux ont sous la gorge. La mode en
vint à la fin du xvii* siècle, et s'est perdue quelques
années après le commencement du xix*.
JACENT (du latin jocanj, étendu à terre, abandonné),
se dit, en Droit, d'un bien qui n'a aucun propriétaire,
d'un héritage auquel personne ne peut prétendre.
JACOBITË ( Poésie), nom que Ton donna en Angle-
terre, au xvui* siècleî, aux chants composés contre la
dynastie de Brunswick par les partisans de la postérité
de Jacques II, et qui eurent cours principalement en
Ecosse, où ils étaient comme une réclamation dernière
en faveur de la nationalité. Gilchrist, James Hogg et
Allan Cunningbam ont recueilli et publié un assez grand
nombre de ces chants.
JACOTOT (Méthode). V. ENsncNBifBNT.
JACQUE. V. notre Dict. de Biogr. et d'Histoire.
JACQUEUNES. V. wa Supplément.
JACQOEBfART, grosse figure de fer, de pknnb on de
fonte, qui représente un homme armé, et qu'on plaçait
sur une tour pour frapper les heures avec tm marteau sur
la cloche de l'horloge. Il y en a en Belgique, dans le nord
de la France, à Diion, à Moulins, etc. Jacquemart, ou
mieux Jacquemard, vient de jacque, casaque de paysan,
nom qu'on a donné enauite à ceux qui la portaient, et de
la terminaison ard^ exprimant l'excèa, l'étrangeté, et que
l'on fait précéder de m euphonique. Jacqumlart signifie
donc gros Jacque.
JACQUES DE COMPOSTELLE (saurr-). V. SairnifiO.
JACQUES-LA-BOUCHERIE (Tour de S^), à Paria.
V. notre Dictionnaire de Biographie et dHistoirem
lAP
lt20
JAP
JACQUET, terme du^ Jeu de trietnc F. Tucnukc
JACULATOIRE (Ondaon). F. Oiaison.
JAEN (Cathédrale de), en Espagne. Cet édifice, qoi n'a
élé acheré qa*en 1801, occupe remplacement d*nne moa-
«uée anbe, que S' Ferdinand, auxm* aiècle, avait tran»-
rormée en égiise. La façade principale, percée de trois
portes, a 19 met de hauteur, et 32 met. de largeur, non
compris les tours qui la flanquent, et qui, larges de
il* 50^ à la base, s*élèvent en quatre étages JusquJL une
hauteur de 02"; la corniche de cette nçade est sur-
montée d'une balustrade partagée par des piédestaux sup-
portant les statues de S' Ferdmand, des Évangélistes, et
des Docteurs de la loi. Le plan de la cathédrale est une
croix laUne. L*intérieur, divisé en trois nefs, a la forme
d'un parallélogramme rectangle de 86" de longueur sur
44 de largeur au transept. La nef du milieu est pavée en
marbre; les chapelles des collatéraux sont ornées de ta-
bleaux et de sculptures estimables : l'une d'elles contient
une précieuse relique, la 3** Face, imprimée sur le mou-
dioir de S^* Véronique, et que l'on prétend posséder
aussi à Alicante. Le chœur est décoré avec beaucoup de
richesse, et le sanctuaire, surélevé de près d'un mètre;
le maltre-autel, en Jaspe rouge, est surmonté d'un beau
tabernacle, et couvert d'une nappe exécutée en bronze.
JALOUSIE, sentiment pénible qu'excite en nous la su-
périorité d'autrui , et qui s*aggrave en raison de notre va-
nité. V Encyclopédie établit entre l'envie et la Jalourie la
distinction suivante : « Envieitx dit plus que jaloux. Le
premier marque une disposition hi^ituelle du caractère,
l'autre peut désigner un sentiment passager; le premier
désigne un sentiment actuel plus fort que le second. On
peut être quelquefois jaloux sans être naturellement en-
vieux. La Jalousie, surtout au premier mouvement, est
un sentiment dont on a quelquefois peine à se défendre;
l'envie est un sentiment bas, oui ronge et tourmente
eelui qui en est pénétré. » La Jalousie et l'envie ne dif-
fèrent pas seulement par le deçé, mais aussi par leur
nature: « La ialousle, dit La Rochefoucauld, est, en
quelque manière. Juste et raisonnable, puisqu'elle ne
tend qu'à conserver un bien qui nous appartient ou que
nous croyons nous appartenir; au lieu que l'envie est une
ftareur qui ne peut souflMr le bien des autres. » n n'y a
■nère que la Jalousie amoureuse qui ait été traitée dans
ws couvres dramatiques t Molière a consacré toute une
pièce à la peindre, Don Garci$ dé Navam; elle est
aossi le ressort principal de VOthdlo de Shakspeare.
jAUiosii, espèce de contre-vent formé de planchettes
de bois ou de fer assemblées parallèlement, qu'on incline
pins on moins, qu'on remonte et qu'on baisse à volonté
au moyen de poulies et de cordons. On peut voir, sans
être vu, par les interstices des planchettes. Le nom de
cette espèce de fermeture indique le motif oui prolMsble-
ment l'a fait inventer chex les nations où l'on tient les
femmes enfermées. Les Jalousies servent aussi à garantir
contre le soleil ou une lumière trop vive.
JAIIBAGE, en termes de Construction, montant latéral
d'une baie quelconoue ou d'une cheminée. Les Jambages
des portes et des renètres sont susceptibles de recevoir
une riche ornementation et des formes trë^-diverses, sui-
vant le sÇIe et le caractère de Tédifice.
JAMBES DE FORCE , grosses pièces de bois an nombre
de deux, qui, posées sur les extrémités de la poutre du
denier étage d'un bâtiment, vont se Joindre dans le
poinçon pour former le comble.
JAMBIERES, la même chose que les Grèves (F. ce mo^.
JAN. F. Trictrac.
JANGADA, radeau léger du Brésil, long de 7 à 8 met,
large de 2'"60, formé de cinq ou six pièces de bois poin-
tnea aux extrémités, et réunies par quelques attaches et
des chevilles. Des piquets plantés sur les madriers exté-
rieurs supportent trois bancs transversaux : celui de
l'avant est percé d'un trou pour le passage du m&t, celui
du milieu sert de siège, et l'on pose sur celui de l'arrière
la voile quand elle est serrée. L'embarcation est gou-
vernée au moyen d'un grand aviron attaché au milieu de
l'arrière.
JANISSAIRES. ) 1, ^ . ._ n- *■
JANsâ^ISME l ^' ^^ ™o^ <^°3 ^^^^ Dtctwmuurê
' JANUS. V de Biographie et d^Bistoire.
JAPON (Porcelaine du). Elle dérive de la porcelaine
de Chine. D'après les chroniques du Japon, la suite d'un
prince de Corée vint s'établir dans ce pays, vers Tan 27
avant notre ère, et v fonda la fabrication de la porcelaine.
. Cette branche d'industrie se répandit avec lenteur, et ne
, se perfectionna guère. En Tan 1211 , un fabricant Japo«
uùi, Katosiro Ouye-Mon, se rendit en Chine pour étu-
dier à fond les secrets du son art, et les onvragea qall
fabriqua après son retour furent très-recherchés. Toutefois
la porcelaine de Chine conserva sa supériorité ; car, ver»
la fin du xvm* siècle, des ouvriers chinois ftirent encore
appelés de la Corée.
JAPONAISES (Langue, Écriture et Littérature). La
prétention qu'ont les Japonais d'avoir eu les mêmes an-
cêtres que les Chinois est démentie par la nature de leur
langue : le chinois, en effet, est mono^llabique, tandis
oue le Japonais est polysyllabique et susceptible de
flexions. Il forme, avec le coréen, un des groupes des lan-
gues ouralo-altalques (F. ce mot)» En Japonais, on trouve
une variété extraordinaire de termes : ainsi , les noms
des objets dépendent souvent de la position personnelle de
celui qui parle, et diffèrent dans la bouche d'un homme
et dans celle d'une femme; les particules postpositives à
l'aide desquelles se fait la déclinaison sont multiples pour
chaque cas, chacune s'employant d'après des règles rela-
tives à la condition sociale des interlocuteurs ou à la na-
ture du sujet du discours; les noms de nombre diffèrent
selon les objets que l'on énumère; il y a plusieurs pro-
noms pour chaoue personne. La distinction des genres
grammaticaux n'existe pas en Japonais; mais les genres
naturels, les sexes, sont indiqués, dans les êtres qui en
sont susceptibles, le masculin par la particule vo, le fé-
minin par la particule me. Il n y a pas d'article. Le verbe
arou (être), en se Joignant à un nom, forme un grand
nombre de verbes composés. Les temps et les modes sont
différenciés par des désinences. La construction est géné-
ralement inverse. La prononciation du Japonais est har-
monieuse, la plupart des mots finissant par des voyelles;
les consonnes s'articulent moUemenL II faut distinguer la
langue écrite et la langue parlée : la première, plus an-
cienne, s'appelle le jamato ; elle a des terminaisons, des
particules et des constructions inconnues à la seconde, et
néanmoins tout le monde la comprend : elle se divise en
deux dialectes, le noikim, employé pour les ouvrages re-
ligieux, et le gheden, dont on fait usage dans les compo-
sitions profanes. La langue parlée ou vulgaire est forte-
ment mélangée de mots chmols. F. Rodriguez, Arie da
Iwgoa de Japam, Nagasaki, 1604, in-4^, dont un Abrégé,
traduit du portugais par Landresse, a été publié à Paris
sous le titre d* Éléments de la grammatre japonaise,
1835 ; Didaco Collado, Ars grammaUcaiaponicœ linguœ,
Romêi 163S, in-4*, et Dictionanum sive Thesauri linguœ
japonwŒ eompendium, Rome, 1638, in-4^; Oyanguren,
Arte de la ienguajapona, Mexico, 1738, in-4*; Thun-
berg, Observattones m lingttam japonioam, dans les Mé»
movres de la Société d'Upsal, 1702; Siebold, Epitotne
iingum japonieœ, dans les l^ansaelùms de la Soctété des
arts et des sciences de Batavia, 1820; Medhurst, Diction-
naire anglo^aponais et japono-anglais. Batavia, 1830 ;
Léon de Rosny, Introdiâction à Vétude de la langue japO"
notfs, Paris, 1856, in-é", et Dictionnaire japoneûs-fran^
çais-anglais, 1856, in-4°.
Avant le m* siècle de notre ère, les Japonais ne coih
naissaient pas l'écriture : ils l'empruntèrent aux Chinois
vers l'an 285. Biais leur système ne se rencontre chei
aucun autre peuple. En effet, ils ont, non des signes
diversement altéiés, comme les Chinois, non des lettres,
un alphabet, comme presque tous les jpeuples, mais des
caractères syllabiques, un syllabaire. Ces caractères syl-
labiques ne naquirent pas de la réunion de telles ou telles
lettres, et n'étaient pas décomposables en caractères
alphabétiques; ils étaient syllabaires à priori, d'original
et d'emblée, chacun d'eux ayant été appliqué à un soiu
De ces signes chinois on tira, au a* siècle , par diverses
altérations, deux autres syllabaires, composés chacun de
47 signes ou syllabes, dont plusieurs ont une double va-
leur selon l'accent ou la prononciation : l'un appelé k/UO"
kana, comprend les signes dont on se sert pour les
inicriptions et les titres d'ouvrages ; l'autre, le fUr}-'kana,
est composé des caractères courants, (jui sont le plus en
usage. Il y a, entre ces deux syllabaires, à peu près le
même rapport qui existait en ^yptien entre les signes
proprement hiéroglyphioues et l'écriture démotique. On
distingue encore le syllabaire man-yo-kana, compté de
caractères chinois entiers, mais auxquels on ne conserve
qu'une valeur purement phonétique, et le yormato-kana,
formé de caractères chinois extrêmement simplifiés. Les
Japonais écrivent en lignes perpendiculairea, qui pro-
cèdent de haut en bas et se succèdent de droite à gaudie :
l'usage où ils sont de mêler ensemble les caradtières de
plusieurs syllabaires, et de les lier par des traits oui leur
sont étrangers, en rend la lecture très-difficile. F. Kla-
proth, Mémoire sur l'introduction et l'usage des coroo-
JAR
llSl
JAR
tint ckmats au Japon, 91 sur VonoiiM dêt âiffénnts
lyUaboim iaponais, Paris, i8S9.
UUtténtare laponaise eit, dit^on, fort riche, mais on
m CMiDalt pea de chose en Europe. La poésie se sert de
dsn mètres principaiix. Tan de cinq syllabes, l'autre de
Npi; elle a un grand nombre de Tere différents, et deux
espèesB de poèmes, les uns composés d*une suite de dis-
tMJQss, les autres partagés en coants de 100 ou de 1,000
m. B ▼ a, dans les grandes Tilles, des représenta-
tiooi IhAtrales avec aeeompaenement de musique; les
dnmes, soit héroïques, soit gais, n'admettent Jamais que
deox penonnages à la fois sur la scène, mais les danses et
leiprâtomimes s'exécutent à beaucoup de personnages et
ifsc magniftoenoe. Les Japonais paraissent s'être occupés
spécialement d'histoire et de séoçraphie : il existe à Jeodo
one Académie, chargée de rédiger les Annales de l'Em-
pire et PAlmanach impérial; d'autres savants dressent
des cartes géographiques. Tout en fermant leur pays aux
étrangers, ils se sont procuré, par l'intermédiaire des
Hollandais, one foule de liyres, de revues, de Journaux,
et ils connaissent ee qui se passe en Europe et dans les
autres parties du monde. Klaproth a traduit en français,
sn 183S,aoaa le titre ^Aper^ gMral du trois royaumes,
on de leurs traités historiques et géographiques; deux
ans après, il a publié une Histoire dss empereurs du Ja-
pon, traduite par le Hollandais Isaac Titsing. Abel Re-
muant a donné, dans le t. IX de ses Notices et Extraits,
la table des matières de l'Encvclopédie chinoise et Jq)o-
nsise. Vn roman Japonais, les Six paraoeuts représentant
le pané, a été traduit en allemand par Pfitzmayer,
Vienne, 1847. Enfln le Catalogue des Iwres et manu-
ecriU Japonais recueillis par Siebcld a été publié par
Hoffmann, Leyde, 1845, in-fol.
JAPOORIA (Dialecte). F. Albanais.
JAQDE, JAQOEBtART, V. Jacqdb, jAOQusHAaT.
JAQUETTE, vêtement de dessus, descendant Juaqu*aux
genoux ou plus bas, et qui était autrefois à l'usage des
paysans et du bas peuple.
JARDIIffÈRE, meuble d'ornement qui supporte une
caisse dans laquelle on met des fleurs.
JARDINS (Art des). Nous avons peu de renseignements
pour rhistoire ées Jardins antérieurement à l'époque
romaine. Les Orientaux ont de tout temps recherché
rooibre et l'eau, et tout Uen qui en était abondamment
poonru s'appelait paradis ches les Perses. Les Anciens
5 laçaient an nombre des sept merveilles du monde les
ardins suspendus de Babylone (F. notre Dictionnaire
dm Biographie et â^RisUÀre). Chez les Grecs, les descrip-
timis des Jardins des Hespârides, d'AldnoQs, de Calypso,
de Ifidas, sont né» dans l'imagination des poètes; mais
on vanta les Jardins d'Académus, de Gimon, d'Épicure,
de la eourtisane Phxyné. On dte aussi le Jardin de
Cbanon en Médie, visité par Alexandre le tirand, les
lardins dea bords de TOronte, dits de Daphné, près
d'Antiocbe, décrits par Strabon, et les Jardins de Qéo-
pâtre. — On peat se faire dea idées nn peu plus arrêtées
■ur ce que forent les Jardins romains. Dans l'&ge primitif
de RodÛb, Tarquin, au témoignage de Tite-Live, posséda
des Jardina. LocuUus, Pompée, César, et d'autres riches
Romaîns, eurent de ^lendides Jardins dans les fknbourgs
de Rome. A l'fooqne d'Auguste, un eartain Matins intro-
duisit rusage de tailler les arbres. Nous avons one des-
eripdoD complète d'un Jardin romain dans îa lettre que
Pline le Jenne consacre à sa villa de Toscane, et dont les
détails sont confirmés par les peintures muralea de Pom-
péî : les parterres, les plates-bandes, les longues ailées
d'arbres, lea massifs, les ifs et les buis taillés en figures
selon les i^es de Vars topiara, les serres, le potager,
les promenades couvertes, les sentiers coupant en tous
sens une place circulsire, tout cehi montre que les Jar-
ffins rooiatns servirent de modtie aux Jardins réguliers
créés plus tard par les Fran^ (F. Desobrv. Rome au
siècle d^ Auguste, lett. 33). n se peut, toutefois, que les
Jsrfins de Néron, d'Adrien et des empereurs ultArieurs se
soient rapprochés davantage des paysages naturels; on
«n verrait volontiers la preuve dans la funeuse villa
qu'Adrien créa aux portes de Tlbur.
La chute de l'Empire romain entraîna la décadence de
rhortienitnie, qui parait ne s'être relevée ou'à partir dn
XB* siède. Boocaoe décrit des Jardins qui ressemblent
feit à des parcs. Au xv« et au xn* siècle, du temps des
llédieis, le goût des grands et beaux Jardins devint très-
répandu : ceux de B<moli au palais Pitti, de Pratolino, de
Tivoli, des palais Borjlièae et Aldobrandini, d'Isola-
Beila, etc., sont demeuras Jusqu'à nous comme les spé-
de Fart décoratif des Jardins pendant la Renais-
sance en Ttsdfe. C'est ce même style épanoui, fleuri,
ingéinieux, riche et délicat, qui avait triomphé dans les
autres arts : une profusion de terrasses, de temples, de
statues, de bustes, de vases, de fontaines, de rochers ar«
tifldels, d'étangs creusés géométriquement, d'allées droites
et régulières, de charmilles artificiellement contenues.
En un mot, l'architecture et la sculpture dominaient; la
verdure et les arbres n'étaient presque que les accessoires.
Le style italien fût adopté dans les autres États : aux xvi*
et xvn* siècles, en Allemagne, pour les Jardins des ban«
quiers Fu|gger et de Wallenstein ; en France, pour ceux de
S'-Germain et de Fontainebleau, plus tard encore pour les
Tuileries, le Luxembourg, et S^Ioud, dont Claude Mol-
let dessina les parterres; en Angleterre, pour ceux de
Hampton-Court. La direction que l'on suivait était telle-
ment contraire à la nature, que le chancelier Bacon l'at-
taqua avec rigueur (1820). Néanmoins, ce fut seulement
un demi-siècle apr& que Le Nôtre créa dans les Jardins
de Versailles un style un peu différent du style italien t
des plantations régulières d'arbres, des plans obliques au
lieu de terrasses, une grande quantité d'ornements ar-
chitectoniques, des ouvrages hydrauliques, des haies et
des arbres bizarrement taillés, des statues et des oran-
geries, tels furent les caractère du style français. Appli-
qué aux anciens Jardins de Heudon, de Vaux, de Chan-
tilly, de Rueil, de Marly, ce système eut à son tour les
honneurs de l*Unitatioo : vers la fin du xvii« siècle. Le
Notre le porta a Londres, où il dessina le parc de Saint-
James; vers le même temps, et au xviii* siècle, on
l'adopta pour les lardins de Schoenbrann près de Vienne,
de Sans-Souci près de Berlin, de Nvmphenburg près de
Munich, de la Favorite près de Stuttgard, etc. Mais
nulle part on ne le porta aussi loin qu'en Hollande, où
les Jardins furent le type db la syméuie, de l'ordre, de
la régnlaritfi la plus minutieuse et la plus puérile, où
Ton en rint à avoir des Jardins de pierres et de coquil-
lagea, garnis de gros vases contenant dea fleurs en por-
celaine.
Une réaction s*opéra au commencement du xvm* siècle
en Angleterre t Wise, lord Bathurst. Pope et Addison
attaquèrent le style des Jardins français, et un nouvel art
fut créé, vers 1720, par William Kent dans les parcs de
Carlton-House, de Glaremont, d'Essex et de Rousham.
Les jardins dits angUUs, reposant sur le même principe
3ue la peinture de paysaae, firent une habile imitation
e la nature. Les procédés de l'école anglaise, perfec-
tionnés par Browne à Blenheim, enseignés par Shenstone,
Uason, Repton, Whateley, Alison, Hilpin, H. Walpole«
Uvedale Prioe, furent promptement acceptés en Alle-
magne; on en fit usage paiticulièrement à Wilhelms-
hœhe près de Cassel, à Charlottenbourg près de Ber-
lin, etc.; et Hirschfeld, professeur d'esthétique à Kiel,
iugea utile de les protéger par de nombreux écrits contre
la corruption dn goût. Aux Jardins anglais, introduits en
France aprèa i763, on essaya de substituer les jardins
chinois, remarquables surtout par la sinuosité des allées
et psr le caprice des détails. Girardin, Morel et J.-J. Rous-
seau oombatûrent cette tendance, tant en théorie qu'en
pratique, par la crtetion des Jardins d'Ermenonville. Le
hameau de Chantilly, le charmant Jardin andais du
Petit-Trianon, à Versailles, sont de ce temps, ainsi que
{»1usieurs beaux parcs paysaristes, tels que Casant, près de
'Isio-Adam (Oise), Mérérille, aux environs deCorbeil,
Horfontaine, près de Senlis. Dans Paris même, la FoUe-
Beauion, aux Oiamps-Élysées, le jardin Boutin, dans la
rue de Clichy, et le parc de Monceaux, an faubourg du
Roule, eurent et méritèrent leur célébrité, comme Jardins
de médiocre étendue, mais disposés avec art et avec goût
Monceaux, aujourd'hui Jardin public, et très-diminué,
n'est plus sum que l'ombre de ce qu'il fût. C'était alors
la mode des Jsrdins imitant la nature, et c'est à cette
époque, en 1782, que Delille composa son poème les
Jarams, — L'art des Jardins acquit quelque chose de
plus libre, de plus sérieux, de plus élevé, après la nou-
velle réforme opârée par Sckell en Allemagne i les Jardins
Ïu'il fit à Munidi et à Monb^ou, ceux du prince de
uckler-Muskau à Muskau et à Branits, eenx qui ont été
tracés psr A. de Hake à Hanovre, W^yhe à Duaseldorf.
Lenné à Berlin, Siebeck à Leipzig, sont de véritables mo-
dèles, qui ont inspiré Thouin, Bardy , Vlart et Lalos en
France, Nash et Paxton en Angleterre. Ceshabilea desai-
natenrs ont cherché à produire des elTets naturels, des
embellissements pittoresques bien entendus , à grouper
avec grftce, et h composer des ensembles harmonieux. Cet
art a été appliqué de nos Jours aux bois de Boulogne et
de Vincennes, à la porte de Paris, convertis l'on et
74
JAO
1122
JEA
Vwatn ea mamiJlqaes parcs paysagistes (i^. bouuMuiB
— Bois de). K. Bacon , Essai sur Us jardins^ en anglais,
Londres, 1620; Jacques Boyleaa, Traité wjardmojge
M^an les principes de la nature et de Vart , Paris,
1638, in-foL ; Blason, Essai sur le dessin des Jardins,
ibid., 1768; Whateley, ObsenxUUms sur les jardins mo"
demes, ibid., 1770; Price, Essais sur le pUtoresque dans
lêsjaréUns, ibid., 1780; Hirschfeld, Théorie des jardins,
en ailem., Leipzig, 1775-80, 5 vol.; Morel, VArt de dis-
tribuer les jardins suivant Vusage des Chinois, Paris,
1757, et Théorie des jardins, 1116; Watelet, Essm sur
les jardins, 1774; Girardin, De la composition des pay-
sages, Paris, 1777;SiIva, Art des jardins anglais, en
itiU., Florence, 1803; Thoiiin, Plans raisonnes de toutes
les espèces de jardins, 3* édit., Paris, 1828, in -fol.;
De Laborde , Description des nouveaux jardins de la
France, Paris, 1808-1814 ; Viart, I^ Jardinisle moderne,
1827; Vergnaud, L'art de créer les jardins, 1839; le
comte de Ghoulot, VArt des jardins, Paris, 1857. B.
jaanns botamocss, établissements dans lesquels on
eultive des plantes de tous les pays et de tous les cli-
mats, pour servir aux progrès de l*instruction et de la
science. Le premier ftit établi à Saleme par Ifatthieu Sil-
vaticus au commencement du uv** siècle. En 1333, Venise
créa un Jardin médicinal public. Vinrent ensuite les Jardins
botaniques de Ferrare, de Padoue (1533), de Pise (1543),
et de Bologne (1568). Celui de TUniversitt de Leyde date
de 1577. Le plus ancien de France est celui de Montpel-
lier (1597), et on en établit un à Paris en 1635 (F. Jardin
DBS Plantes, dans notre Dictionnaire de Biographie et
d^Bistoire). L*Angleterre et TAUemagne n*0Qt créé de
Jardins botaniques que depuis la fin du zvi* siècle : Leip-
zig en 1580, Kœni^berg en 1591, Breslau en 1587,
Heidelberg en 1593,Geissen en 1605, Ratisbonne, léna
et Ulm en 1029, GtstUngue en 1727; Oxford en 1640,
Chelsea en 1752 , Kew en 1760. Celui qu^OIaOs Rudbeck
fonda à Upsal en Suède, en 1657, est le plus important
imrès celui de Paris. Aujourd'hui il n*est pas de grande
ville qui n'en possède.
JARGON, mot d*une étymologie incertaine, qu'on ap-
plique à tout langage corrompu, factice, plus ou moin s
inintelligible. Le Jargon est particulier à telles ou telles
personnes; en cela il se distingue du patois, qui a ses
règles et est propre à tous les gens d*un même pays, et
de Vargot, qui est toujours un langage de convention.
JARRE (de l'espagnol yaro, pot), vase en terre cuite, à
deux anses et à gros ventre, et qui sert à renfermer des
liquides.
JARRETIÈRE, oblet d'habillement, oui fut autrefois
un ornement de toilette. Sous Louis XIV et Louis XV,
les bas de soie, roulite par dessus la culotte, étaient re-
tenus au-dessus du genou avec une Jarretière de galon
d'or à boucle de diamant. Les dames de grande maison
faisaient broder leurs armoiries sur leurs Jarretières.
JASERAND, nom qui fut donné quelquefois à la cotte
de mailles.
JASPE, sorte d'agate employée dans la Symbolique
chrétienne pour représenter la loi. Son opacité est l'image
de l'impénétrabilité des mystères; sa dureté exprimera
fermeté de la foi. liO Jaspe figure aussi la tribu de Cad,
qui précédait les autres (&ns la marche et au combat, et
aussi S^ Pierre, sur qui Jésus a fondé son Église.
JAUFRE (Roman de), poôme de 11,160 vers de 8 syl-
labes, écrit en - langue provençale du xii* siècle, et se
rattachant au cvcle d'Arthur. Le Jeune écuyer Jaufre se
rend à la cour du roi Arthur : pendant un repas, un vas-
sal de ce prince, Taulat de Rugimon, redouté pour sa
force et sa cruauté, vient frapper mortellement un che-
^ndier. Personne n'osant le poursuivre, Jaufre se propose,
et obtient d'être armé chevalier sur-le-champ. Après une
série d'aventures merveilleuses et de glorieuses prouesses,
il arrive au pied d'une tour où gémit la belle Brunis-
sende, dont le père est retenu depuis sept ans prisonnier
par le même Taulat. Victorieux de ce félon, il emmène
Brunissende, qu'il doit épouser : sur la route, attiré par
les cris d'une dame qui se noie, il se plonge au milieu
des eaux, et se trouve dans une contrée délicieuse ; cette
dame est une fée, (^ui réclame son secours contre un
oppresseur. Il la déhvre, remonte sur terre, et conduit
Brunissende, qui le cro^t perdu, à la cour d'Arthur.
Leur .mariage est célébré avec une grande pompe et au
milieu de nouveaux enchantements. — Le roman de
Jaufre offre des tableaux intéressants de la société féo-
dale, avec ses fictions chevaleresques et ses féeries ; on y
reconnaît l'influence des idées arabes, qui s'étaient r^
pandaes de l'Espagne dans le midi de la France, et Cer-
vantes parait lui avoir emprunté plus tard quelques-unei
de ses inspirations. Ce roman fut commencé par un Trou-
badour qui en avait entendu raconter le sujet à la cour
d'Aragon, et fut achevé par un autre poète, assez mo-
deste pour cacher son nom et celui de son prédécesseur,
n en existe deux manuscrits à la Bibliothèque natioiiala
de Paris. B.
JAUGEURS, officiers publics chargés de déterminer la
capacité des navires, et de délivrer, dans les formel
prescrites par les règlements, le certificat de Jauge dont
tout bâtiment français doit ôtare muni. V, un arrêté con-
sulaire du 7 brumaire an ix (30 oct. 1800) et une loi da
29 floréal an x (19 mai 1802).
JAVANAISE (Langue), une des langues malaises, dé-
rivée duJicatot (K. ce mot). Elle se compose de trois dia-
lectes, ou plutÀt de trois formes de langage, dont deux
ont une nomenclature tout à fait à part, mais qui ne
constituent dans leur ensemble qu'un seul et même
idiome. L'usage de ces trois formes de langage, qui se
mêlent dans les ouvrages de littérature aussi bien ^
dans la conversation , est déterminé par la sapérionté,
l'égalité ou l'infâionté de rang social ou d'&ge dans
laquelle se trouve la personne qui parle relativement à
celle à qui elle s'adresse; c'est une règle d'édquette.
Ainsi, en parlant à un soaverain, à on grand, à un vieil-
lard, on emploie le kromo, haut Javanais ou langue de
cour, qui exprime la déférence et le respect; entre é^ux,
on se sert du maâhjo^ sorte de langage intermédiah^;
en parlant à un inférieur, on teïx usage du nycko ou dia-
lecte populaûe. Outre la difficulté qui résulte de cette
triple forme, il en est une autre provenant de ce que les
radicaux, en se groupant pour former des mots composés,
en se combinant avec les préfixes et les suffixes qui rem-
placent nos terminaisons, subissent, par l'eflét de per-
mutations de lettres, une transformation orthographique
qui les rend méconnaissables. Le Javanais n'a ni article
ni genres, et seulement deux nombres. La conjugaison
ne distingue ni les nombres ni les personnes, et, comme
dans tous les idiomes malais, le même mot peut être
verbe et substantif. On distingue quelquefois dans la
langue Javanaise le dialecte de l'intérieur, baeardolam^
et le dialecte des côtes, basa-luar. Dans les montagnes
de l'ouest, on parle le sœnda, idiome indépendant du
Javanais. L'alphabet Javanais compte 27 lettres, dont
5 voyelles. — Les Javanais aiment passionnément le
thé&tte, la danse et la musique. Tout dâlang ou direc-
teur de troupe est poète, et compose ; il a le privilège de
parler dans les représentations ; les autres acteurs , tous
masqués, ne font que de la pantomime. La déclamation
du dàlang est une sorte de mélopée, que la musique
accompagne. Les pièces, appelées topeng, sont tirées de
la myûiologie et de l'histoire héroïque du pays. Entre ces
pièces, des bouffons grotesquement costum& Jouent des
espèces d'intermèdes, où ils imitent les idiots, quelque-
fois même des animaux, surtout les chiens et les singes.
Les Javanais ont aussi des spectacles de wayang ou om-
bres chinoises, et des wayang beber, exhibitions de
papiers peints h personnages, que l'on déroule tandis
que le dàlang en donne l'explication. V. Gottlob Bruck-
ner. Introduction à la grammaire javanaise, en hollan-
dais, Serampour, 1830, in-8**; Gericke, Premiers éléments
de la langue javanaise, en hollandais. Batavia, 1831;
Cornets de Groot, Grammaire jatanaise, en hollandais.
Batavia, 1833, in-8®; Roorda, Dictionnaire néerlandais
et javanais y Kampen, 1834; A. de Wilde, Dictionnaire
néerlandais^ maiais et soenda, Amsterdam, 1841 ; Du-
laurier, Mémoire, Lettres et Rapports relatifs au cours
de langues malaise et jovanaise^ Paris, 1843, in-8^.
JAVELOT. ( V. ces mots dans notre Die-
JEAN (Feu de la S*-).f tionn. de Biogr. et d^Histoirt,
JEAN-DE-LATRAN (Église Saqit-), à Rome. Elle est
regardée comme la première église patriarcale de toute la
chrétienté, et c'est dans cette basilique que le Pape prend
solennellement [)ossession de sa dignité épiscopale. L'em-
pereur Constantin fonda S^-Jean-de-Latran vers 324, sur
le mont Cœlius, près d'un palais qui avait appartenu à un
?aien du nom de Plautius Lateranus (d'où vient le nom de
atran),et la donna h Silvestre P',qui la dédia au Christ
Sauveur, parce que l'image du Sauveur apparut, ditron
sur les murs pendant qu'il en faisait la dédicace. On l'ap-
pela aussi Basilique Constantinienne. En 1114, LuceH
ayant attaché k cette église le culte particulier de S^ Jean-
Baptiste et de S^ Jean l'Êvangéliste, elle prit le nom de 5**
Jean, L'édifice de Constantin subsista près de mille ans,
au moyen de restaurations successives. Deux incendies
le détruisirent presque entièrement, en 1308 et en 1361.
JEH
1123
JfiR
Qottd «A Veut rétabli, Sixte- Qoint fit jouter tor la
(içad» septentrionale, construite lous Pie IV, an double
portkme, 0Ba,yTB de D. Fontana; puis Clément VIQ cbar-
pa, en i6Û0,.Giaconio délia Porta de reconstruire toute
k nef transversale. Sous Innocent X, Borromini coniolida
la grande nef en enveloppant de forts, piliers de granit
iM ancieimes colonnes. Enfin, Clément XII fit élever, en
1734, par Galilei la &çade actuelle. C'est une ordonnance
àè dnq longues arcades, emlurassan^ toute la hauteur de
rédiiice, et dont les piedandroits sont ornés de pilastres
eempoiitea, i Texception de Tarcade du centre, qui est
cantonnée de 4 colonnes adossées, surmontées d*un tron*
ton. Cn balcon rentrant règne, ^ moitié de la hauteur des
arcades environ, dans toute la largeur de la façade; l'ar-
cade centrale forme une loge,. d*où le Pape, à certains
Jours, donne sa bénédiction au peuple. Les statues colos-
sales des 13 Apôtres couronnent Tédiflce ; au centre, le
Christ, tenant sa croix, domine toutes les autres. La ga-
lerie inférieure, sous le balcon, est appelée atrium; là
sont dnq portes qui donnent entrée duos cinq nefs,
composant Tintérieur de Téglise. La porte centrale, en
bronze, vient, dit-on, de Tancienne basilique iEmilia,
sur le Forum. La dernière porte, à droite, est la porte
stûnte: elle demeure murée, et n*est ouverte qu*aux
époques du Jubilé. — LMntérieur de T^se, long de
119™, 50, large de 53'",75, offre une magnifique per-
spective : la nef centrale est composée de 5 grandes
arcades «à larges piliers, ornés chacun de 2 pilastres
corinthiens cannelés. Dans leurs intervalles sont 12 ni-
ches en architecture, contenant les statues colossales
des .^>6tres. Un riche plafond soffite, sculpté et re-
haussé de dorures, couvre cette longue nef. Le maître
autel ou autel papal est placé dans te milieu de la nef
transversale; il a un tabernacle d*architeaure sarrasine,
Qù Ton conserve les têtes de S^ Pierre et de S' Paul, re-
trouvées en 1307 ; le pape seul peut officier à cet autel,
à moins qu'il n*en donne la pennission k quelque haut
personnage, et seulement pour une fois. Parmi les ri-
chesses de la basilique, il faut mentionner la brillante
chapelle Gorsini, que Gément XII fit ériger par Galilei.
On y remarque un sarcophage de porphyre pris au Pan-
théon d'Agrippa, et Tautel du S^-Sacrement, élevé sur
les dessins de P. Ollvieri. On montre aussi la table où
Jésus fit la cène, celle où S^ Pierre et les Apôtres pre-
naient leurs r^pas, la colonne du temple de Jérusuem
qui se brisa à la mort du Sauveur, la pierre sur laquelle
on joua ses vêtements, les colonnes qu* Auguste fit mouler
avec le bronze des rostres arrachés aux vaisseaux pris h
la bataille d'Actium. On peut signaler dans Té^se de
SWean-de-Latran beaucoup de détails de mauvais goût,
%da qoe des frises et des architraves interrompues ^ des
cioîsees mesquines et incorrectes, des niches a frontons
angaHmi, arrondis et déversés, ou bien les statues oo-
loasales diss Apùtres dans la grande nef. — Le Baptistère,
de forme octoèone, contient des fonts baptismaux, grand
Inssln de porphyre antique avec couvercle en bronze ; sa
coupole a été peinte par A. Sacchi, et ses murs par Ge-
mîgnsnl, Camassei et C. Haratta. Dans un cloître du
xm« siècle, contigu à la basilique, se trouve la chaise
de porphyre sur laquelle chaque pt^ s^assied devant
la porte quand il vient prendre possession de sa dignité.
Au milieu de la place de Smean-de-Latran 8*élève le
plus grand obélisque de Rome, apporté d*Héliopolis en
Egypte an temps de Constance pour être placé au Cirque
Uaxime, et qui, retrouvé sous terre en 1587, fut redressé
par D. Fontana ; il est en granit rouge, orné d*biâroglirphes,
et atteint une hauteur de 33 met., sans la base et le pié-
destal. A droite de la basilique est un palais pontifical
qu*é(Ulla D. Fontana, et que Grégoire XVI a converti en
musée d^antiquités, et un édifice oui conUent le saint
«scolter (scaia santa)^ formé de 28 marches en marbre
blanc provenant, dit-on, du palais de Ponce-Pilate à Jé-
rusalem, et qu*on ne monte qu*à genoux. B.
JEDBURGH (Abbaye de), en Ecosse, dans le comté de
Roxbuxgh. Cette abbaye, dolée par le roi David I^, sou-
vent assiégée, saccagée et brûlée pendant les guerres
dvilea, détruite enfin par le comte de Hertford lors de la
Réformation, est considérée comme le plus parfait et le
plus curieux monument de Tarchitecture saxonne et nor-
mande en Ecosse. Les parties qui en restent encore de-
bout sont la nef, presque tout le chœur, Faile méridio*
oale, la tour du centre, et le transept du nord, qui a
longtemps servi de cimetière particulier à la famille des
marquis de Lothian. Malheureusement on a établi au mi-
hea de ces lielles mines une église paroissiale.
JEHAN DE LANSON, chanson de geste sur le siège
d*un château par CSiariemagne et les douze pairs. Jehan
de Lanson (Lanciano, dans rAbruzze citérienre), neven
des traîtres Ganelon et Hardré, donne asile aux ennemlt
de Tempereur, et refuse de hii iaire hèmmage de ses
terres. 11 est fait prisonnier, et meurt dans un monastère
de FnMioA. -^ Cette chanson est à la Bibliothèque natfo-
wOe de Paiis dans un manuscrit du xiii* siècle, et à b
bibliothèque de l'Arsenal dans un manuscrit du xyK
JEHAN DE PARIS. V. le Supplément,
JÉRUSALEM (Monuments de). V, Tbmplb, dans notre
Dictioftnatr» de Biographie et d'Histoire^ et, dans le pré-
sent ouvrage, Sâ»DLcas (Église du Saini^).
jéassALEM (Assises de). V, Assises, dans notre Z>te-
ttonnatre de Biographie et d'Histoire,
jéaDSALBM, 2« brandie du Chevaiier au Cygne, C*est le
récit des combats que les CrolBés soutinrent sous* lef
murs de la ville sainte avant de Fenlever aux Turcs. Ce
poème, comme les autres parties de la même chanson, »
été arrangé par Graindor. Il est conservé dans six ma»
nuscrits, dont cinq h la Bibliothèque nationale .et un è
la bibliothèque de TArsenal , à Paris. V, Histoire litté-
raire de la France, t. XXII. H. D.
JâiosALBii (La Destruction de), poôme du xm* siècle
sur la ruine de Jérusalem par les Romains. Vespasien,
affiigé de la lèpre, est guén par Tapplication d*un voile
qui conservait Tempreinte des traits de Jésus-Christ*
Pour reconnaître ce bienfait, il permet au pape de prê-
cher la religion nouvelle, et fait serment de venger la
mort du Sauveur. Il détruit donc Jérusalem, et envoie
Ponce-Pilate dans la prison de Vienne. La prison s'éoroule,
et le gouverneur de la Judée est englouti dans un abîme.
—La tradition de Temprisonnement et de la mort de Hlate
à Vienne est encore populaire dans le Dauphiné. Il existe
deux manuscrits du poème à la Bibliothèque nationale
de Paris. V. Histoire littér, de la France, U XXH. H. D.
JéansALEM cëLBSTB, OU Architecture, représentation
plus ou moins grossière de la ville de Jérusalem par un
groupe de petits monuments formant dais au-dessus
d'une niche qui contient un saint. — Ce couronnement
symbolique, particulier à Tépoaue romane, indique la
Jérusalem céleste, où le^saint aoit Jouir d*un bonheur
éternel.
jéausALEM Déuvaés (La), poème épique du Tasse, dont
le sujet est la conquête de Jérusalem par Tarmée des
Croisés, sous la conduite de Godefroy de Bouillon.
L'ange Gabriel porte à Godelh>y, élu chef de Tarmée
chrétienne, les orores du Très-Haut. Godefroy harangue
ses troupes, dont le poète nous fait un dénombrement
imité d'Homère. Aladin, tyran de Jérusalem ou Solyme,
instruit de l'approche des chrétiens, s'apprête à les re-
pousser. 1^ les conseils de l'enchanteur Ismen , il fait
enlever une image de la Vierge particulièrement chère
aui chrétiens; mais le simulacre sacré disparaît de la
mosquée où il a été transporté. Pour sauver fe peuple de
Jérusalem des conséquences du courroux d'Aladin , une
vierge chrétienne, Sophronie, se déclare coupable du
larcin : cdle va expirer dans les flammes, k côté d'Olinde,
son amant, lorsque arrive au secours du tyran la guer-
rière Glorinde, qui obtient la gr&ce du couple infortuné.
Cet épisode, où le Tasse a déployé tout son talent dans
l'art d'intéresser et d'attendrir, ne tient en aucune
façon au reste du poème. — Cependant les chrétiens
s'approchent de Jérusalem : le combat s'engage avec les
Sarrasins: Tancrède se mesure avec Glorinde sans la
connaître. Herminie, assise au haut d'une tour, près
d'Aladin, nomme k ce monarque les principaux chefs des
Croisés. Irrité des progrès des chrétiens, Satan assemble
les démons, et les excite contre eux par ses discours. Sous
l'influence de l'Enfer, Hidraot, roi de Damas, envoie sa
nièce, la magicienne Armide, au camp de Godefroy, pour
t&cher de séduire les chefs de son armée : par ses arti-
fices et ses séductions, Armide obtient le secours de dix
guerriers chrétiens, destinés à la rétablir sur le trône de
son père. Cn défi entre Gernaud et Renaud amène la
mort du premier. Godefroy, irrité, censure vivement ces
querelles fratricides : sur le conseil de Tancrède, Renaud
quitte le camp des Croisés; mais bientôt des chrétiens
apportent son armure ensanglantée. Arg^illan, inspiré par*
l'Enfer, accuse Godefroy d'avoir fait pénr ce Jeune guer- •
rier, l'Achille des chrétiens, et cette calomnie allume nnC ]
sédition, que Godefroy apaise par sa fermeté. Alors Bel-
phéffor, sous les traits d'Araspe, va trouver Soliman , le
chef des Arabes, et réveille sa fureur. Le sultan , dans
l'ombre de la nuit, attacpie les chrétiens. Le Très-Haut
ordonne k Michel de précipiter dans les Enfers les esprits
infernaux qui tourmentent ses guerriers; ceux-ci repren-
JET
1124
JEU
nent l'afaDtage, gr&oe à rarrivée des cheraliert ehrédens
que la perfide Amide retenait prlsonoiers, et qa*a déli-
frés répée de Renaad. Alors le eiége de Jérusalem se res-
serre. Ârmnt et Clorinde prennent la résolution d'aller
«mbraser la tour que les chrétiens ont élevée pour donner
l'assaut. Ils sont découverts et poursuivis. Argant rentre
dans Solyme, mais Clorinde reste seule au milieu des en-
nemis, "nuidis qu'à la faveur de la nuit elle cherche à se
perdre dans la foule, Tancrède l'aperçoit, et lui propose
le comhaL Clorinde succombe, et reçoit le baptême des
mains du héros. — La mort de la guerrière répand
l'alarme dans Jérusalem, bmen enchante la forêt d'où
les chrétiens tirent le bois pour leurs ouvrages. Vaine-
ment Godefiroy de Bouillon y envoie les .principaux guer-
riers : Tancrède lui-même est contraint à fuir, dupe des
artîices des démons. 0ans cette extrémité, Hugues appa-
raît h Godefroy, et lui persuade de rappeler Renaud :
deux guerriers. Guelfe et Ubalde, sont chargés de cette
entreprise; ils partent, rencontrent un rieiliard sur les
bords du fleuve qui osigne Ascalon, et apprennent de
lui le aân du jeune Renaud, et l'amour subit qu'Armide
avait conçu pour lui. Sous la conduite d'une femme In-
connue, ils abordent aux Iles Fortunées, séjour de l'en-
chanteresse, triomphent de mille obstacles, et arrivent
dans le palais d'Armide. Ubalde présente aux regards de
Renaud le bouclier de diamant : à cet aspect, le courage
du héros se réveille, et il quitte le palais. Armide, fu-
rieuse. Jure la perte de Renaud, fait détruire par les dé-
mons son magique palais, et s'envole sur son char à
Gaza, où s'assemble l'armée que le sultan d'Egypte en-
voie au secours de Jérusalem. Renaud rentre dans le
eamp, et témoigne à Bouillon son amer repentir ; seul et
couvert de ses armes, il va dans la forêt enchantée. En
vain le fantôme d'Armide se présente à tes yeux ; en vain
VEnfer lui oppose mille obstacles. Il en triomphe, et
branche le cyprès funeste auquel le charme était attaché.
On reconstruit alors de nouvelles machine», et Bouillon
ordonne l'assaut. Renaud le premier escalade les rem-
parts ; les infidèles ftiient , et les chrétiens pénètrent dans
Solyme.
Le s^|et de la JimsaUm délivrée est peut-être le plus
grand qu'on ait choisi, et le Tasse l'a traité avec autant
d'intérêt que de grandeur : l'ouvrage est bien conduit;
presque tout y est lié avec art, et des contrastes habiles y
entretiennent l'intérêL D est écrit en ottaioa rima ( strophe
ie 8 vers); le style, sauf quelques conoêtti, est pres-
3ue partout clair et élégant , et , lorsque le si^et deinande
e l'élévation, on est étonné de voir la mollesse de la
lan^e italienne prendre un nouveau caractère sous la
main du poète, et se chanser en majesté et en force.
L'épisode d'Armide est un obef-d'œuvre, et celui d'Her-
minie ches les bergers une pastorale charmante, destinée
à soulager le lecteur de la description des combats. Un
génie admirable éclate dans la variété des caractères, la
manière dont ils sont annoncés, et l'art savant avec lequel
ils sont soutenus. Jjbl JérnsaUm dAivrée, depuis long-
temps chantée en Italie, doit être placée à cèté des
œuvres de Virgile et d'Homère, nud^ré ses Duites et mai-
gré la critique de Boileau. E. B.
JESSÉ (Arbre de). V. Arbrs oiN^ALOCiQUE.
JESUS (Images de). F. Christ (Images du), Bon Pas-
mm, Caucinx, Crccifiembnt.
i^SDS (Ptpier), papier employé pour les ouvnwes d'un
grand format et pour l'impression des gravures. Son nom
lui vient de ce qu'autrefois il portait pour marque 1. H. S.,
premières lettres du nom de Jésus en grec
I JET D'EAU , ornement des bassins et des fontaines,
principalement depuis le temps de Louis XIV. Tantôt le
{et est isolé, comme dans les Tuileries; tantôt il forme
es gerbes, comme au Palais-Royal ; il entre encore dans
la composition des scènes qui animent les pièces d'eau,
ainsi qu'on le voit à Versailles. Les Anciens connaissaient
les Jets d'eau, puisqu'on en a trouvé une représentation
lans les peintures de Pompél ; d'ailleurs, il y en avait
ouvent un dans Vimpluoium des maisons romaines.
JETÉ, JETÉ BATTU. V. Pas.
JETÉE, construction élevée en maçonnerie à l'entrée
d*nn port pour protéger l'entrée et la sortie des navires,
Maer les fortes lames oui arrivent de la haute mer, et
ttrêter l'invasion des galets ou du sable. Par conséquent,
!• ^fstème des Jetées doit être combiné avec la direction
des courants et la force de la mer. On les construit sur
deux lignes parallèles, entre lesquelles se trouve la voie
du port n y en a de très-belles aux Sables d'Olonne, à Ca-
!)!s, et h Dunkerque. Les Jetées sont ordinairement élevées
par les ingénieurs du gouvernement, et • si elles se trou-
I
vent à l'entrée d'un port de guerre, elles entrent dans le
système des fortifications. — Les andens Romains avaient
inventé et appliqué un système de letées pour protéger
on port , tout à la fois contre les antations de la mer et
contre les ensablements : c'étaient des Jetées en arcades,
comme des ponts, mds avec des piles plus fortes. La
partie supérieure de l'arcade était fermée par des portes
trempant un peu dans l'eau, et laissant tonte la partie
inférieure ouverte. La vague, poussée sur la digue, en-
trait dans le port par le bas des arcades ; mais, ne péné-
trant qu'à une certaine profondeur sous le niveau de
l'eau intérieure, elle l'agitait fort peu; ensuite, par son
mouvement naturel de reflux, elle ramenait avec elle le
sable qu'elle pouvait avoir charrié, de sorte qu'il ne pou-
vait Jamais y avoir d'accumulation dans le port. U existe
au cap Misène et à Pouxzoles, auprès de Naples, des
ruines antiques de Jetées de ce genre. Celles de Pouzzoles
sont appelées vulgairement le pont 4$ CcUigula. V, de
Fazio, ïntemo al migliar tisUnui di costnaionê dt^ porti,
Naples, iS28, in-4*. C. D— v.
JETON, pièce de métal, dlvolre, de nacre, d'os, de
bois, etc., plate et généralement ronde, dont on se servait
autrefois pour odculer, et qu'on emploie encore, en lui
donnant une valeur de convention, pour compter et payer
an Jeu. Suivant Hérodote, les Égyptiens comptaient avec
de petites pierres plates, polies et arrondies. Les Romains,
qui en firent paiement usage, les nommèrent calculs
{calctUi), Des Jetons en pierre blancs ou noirs servaient
à marquer les Jours fastes ou néfastes. On en avait
d'autres en bois mince, polis et firottés de cire, pour voter
dans les assemblées. Depuis le xiv* siècle, les rois, les
seigneurs, les villes, les compagnies firent frapper des Je-
tons à leur nom, comme bons de payement pour une
somme réelle. De grandes cités en eurent de purement
honoraires, qui fournissent ai]4ourd'hui d'ntitos rensei-
gnements sur l'histoire municipale des villes, leurs ma-
gistrats, et particulièrement leurs maires. La Biblio*
tbèque impériale de Paris conserve de belles séries de
ces médailles, entre antres des midres de Tours et de
ceux de Nantes. Elles sont frappées en argent , et quél-
ouefois en cuivre. — On appelle ^stoi» de présence un Jeton
donné dans les Académies et autres Sociétés à chaque
membre présent k une séance : 11 a une valeur réelle, et
s'échange contre de l'argent monnayé. Les méreaux
(V, cê mot) étaient des Jetons de cette nature. Ce fut en
1701 que la munificence royale accorda des Jetons de pré-
sence à TAcadémle française. De nos jours, certaines
corporations et les grandes compagnies industrielles dis-
tribuent aussi des Jetons de prâence pour les réunions
périodiques ou extraordinaires de leurs conseils d'admi-
nistration. Ils sont en argent, et de forme hexagonale phis
souvent que circulaire.
JEU (du latin jocut), amusement quelconque. Il y a
des Jeux où le corps principalement est en exercice, et qui
développent la rigueur, l'sigilité et l'adresse: tds étaient,
ches les Anciens, les Jtiux publics ( V. ce mot dans notre
Dictionnaire d$ Biographe st iHttUÀrê)^ consistant en
lutte, pugilat, saut, course, etc.; au moyen Age, lei
ioûtês et les towmou; chez les modernes, les earnustis,
les Jeux de halls, de panam», de barrss, etc. D en est
d'autres qui sont purement Jeux d'adresse , comme ceox
de boulês, de quiUss, de bamtês, de billard, de bilbo-
quet, etc. On nomme Jeux Œsspf*it ceux qui supposent
quelque chose k trouver ou à deriner, tels que Vénigms,
\& charads, le logogriphê, le rébus, Vacrostiche, l'ona-
qramme, les bouts-rimés. Les Jsuœ de calcul ou de oom-
binaison, comme les damês et les échecs^ exigent un»
tension plus grande de l'intelligence. Les Jeux de hasard
sont le pfMir ou non, le creps, les dés, la roulette^ le loto,
les loteries, et. parmi les Jeux de cartes, le burQn, lé
lansquenet, le baccarat, le pharaon, etc. Dans certsist
Jeux de hasard, le talent du Joueur peut aider ou corriger
la fortune : tels sont les dominos, le trictrac, Vécarté, le
piquet, Vimpériale, le whist, la bouillotte, le boston, etc
Les petits jeux ou jeux innocents sont des amusementr
de société qui varient selon les pays et les temps.
Dans les Jeux de hasard principalement, les Joneo»
engsgent quelque argent. Les entraînements de la pss-
sion du ieu ont rendu nécessaire l'intervention des pou-
voirs publics. Les lois romaines défendaient de Jouer de
l'argent : non-seulement elles refusaient toute action Ju-
diciaire pour payement des dettes de Jeu, mais eue»
accordaient an pôrdant le droit de réclamer ce quil avait
pa^é. Justinien décida que, pour les Jeux qui étaient per-
mis, on ne pourrait engager plus d'un écn d'or par
partie, et que« pour les Jeux prohibés, si le perdant né-
lEt
1125
JOB
glig^t de Tftclamer ce qu'il vnâi peflin, les offiden
omiiicipanx poniraient en poursuivre la r^édtioii, et
appliquer la somme à des ouvrages d'utilité publique.
Chsriemagae, dans ses Capitulaires, défend les Jeux de
iassrd^ à peine d'être privé de la communion des fidèles,
lioais IX condamna à une amende les gens qui Jouaient
m échecs. Charles V, par une ordonnance de 1369, in-
terdit la boule» la paume, les quilles, le palet , et tous les
antres Jeux qui ne contribuent pas à apprendre le métier
das armes. Hais d'autres rois donnèrent eux-mêmes ^
Penmple de la passion du Jeu : Louis XI , Charles VIII,
Henri 111 et Henri IV étaient Joueurs. Les courtisans ne
te firent pas faute d'imiter le maître ; la ville imita la
coor, et il s'ouvrit un grand nombre de tripots publics,
décorés du nom d'Académiâs de Jeu. Suivant L'Estoile,
Paris, au tempe d'Henri IV, ne comptait pas moins de
47 maisons autorisées, dont les principaux magistrats r»-
lindent chacun une pistole par Jour. Ces maisons ftirent
fermées an commencement du règne de Louis XHL Une
déclaration, en date du 30 mai lôii, accorda à celui qui
anrait perdu au Jeu une action en Justice contre le pro-
priétaire ou le locataire de la maison où le Jeu se serait
tenu, pour se fidre restituer par lui le montant de sa
perte. La foreur du Jeu fit de nouveaux ravages pendant
la minorité et la Jeunesse de Louis XIV, et les femmes
ellea-mémes s'y laissèrent entraîner : plus tard, le roi
pabUa plus de vingt ordonnances et déclarations pour y
remédier. Au mépris des édits, la noblesse se Ima au
jeu aTee fbreur : on Jouait à la promenade, en voiture, à la
porte des tbé&tres. M"** de Montespan perdit en upe
soirée 4 millions. Parmi les tripots qui eurent de .la tA-
lâ»rité au xvni* siècle, on remarque le salon de M"^ de
Sainte-Amarante, dont la fille épousa M. de Sartines.
Après la Révolution de 1789, des maisons de Jeu k
rasage de la bourgeoisie s'organisèrent de tous côtés ; le
mal prit des proportions eflrayantes sous le Directoire. Le
gouvernement consulaire réduirit à 9 le nombre des mai-
■ODS de Jeu, et astreignit les entrepreneurs à {Mtyer à l'au-
torité une redevance. La ferme des Jeux à Paris appartint
snooesalvement aux frères Perrin (de Lyon), à Bour-
aanlt Malherbe, aux frères Chalabre, et à Benazet : les
eomtea de Chalabre versaient annuellement 5 millions
dans les caisses de la ville de Paris. La loi du 18 Juillet
iS36 aoppiima cette ignoble institution ; les maisons de
ien étaient alors au nombre de sept : quatre au Palais-
Boyai, soos les n** 36, 113, 127, et 154; une sur leboule-
vanl des Italiens, au coin de la rue Favart ; deux dans la
me de Richelieu, sous les noms de Frtucati (où les
femmes étaient a^oDdses), et de Cercle des étrangers. Ces
maiaona ouvraient k midi, et fermaient à minuit. Notre lé-
malation actuelle n'admet d'action Judiciaire pour dettes
de jeu^ «loe s'il s*agit de Jeux qui tiennent à l'exercice du
eorpe, comme les courses, le Jeu de paume, etc. ; mais les
tribunaux restent maîtres de rejeter la demande, quand la
somme leur naratt excessive. Le Code pénal prononce
une amende oe 100 fr. k 6,000 fr. et un emprisonnement
de 2 à 6 m<^ contre quiconque aura tenu une maison de
jeu; l'Interdiction de certains droits ciriques, dvils et de
fhmille, peut être aussi prononcée pour 5 ans au moins
et 10 ans au plus ; les fonds et effets destinés au Jeu, les
meubles et uistruments employés, sont confisqués; le
sinmle joueur n'est pas puni. Une amende de 6 à 10 fr.
eat infligée à quiconque a établi des Jeux de hasard dans
les mes, cheânins et places publiques; ses engins sont
ansal conflsoués; pour la rô^dive, la peine est une
amende de lo à 200 fr., et un emprisonnement de 6 Jours
à 1 mois. — Les maisons de Jeu ont été supprimées en
Angleterre à psrtir du 1*' déc 1853. liais, en Allemagne,
pihiGipalement sur les bords du Rhin, les États s'en
sont cyt un monopole lucratif, quils adju^^nt à des fer-
miera. F. Duasaulx, De la passion du jeu depuis les
CeiRpf amciens iusqu*d nos jours, Paris, 1779, in-8*. B.
ne , nom donné pendant le moyen âge à de petites
eompositions dramatiques. Matthieu Paris mentionne un
certain Godefroy, mort en 1146, qui fit représenter au
monastère de S^Alban un jeu intitulé laVtedeS^Ca-
tfttfrtne. Un manuscrit de la Bibliothèque impériale de
Paria (fonda de La Vallière, n« 9736) contient plusieurs
pièces de oe genre, entre autres le Jeu du PHertn, le Jeu
de Robm et de MarUm, le Jeu du mariage , le Jeu de
S^^Nieoias.
juj, nom donné dans l'orgue à une série de tuyaux de
la même eepèee^ ne diflérant entre eux que par leur, tona-
lité, rintensité et le timbre de leurs sons, et formant une
iuile-eiiiomatlcrae plus ou moins étendue. Les Jeux corn-
pleis ont actuellement 54 notes; les incomplets ont trois
ou deux octaves. Les Jeux d'orgue se ^Ovtient en den
grandes classes, les jetix à bouche et les jeux d*anek
{V. ces mots). F. C.
JBo (Grand-), nom donné dans l'orgue à la réunion
des Jeux d'anche, auxquels on ajoute quelques autres
Jeux, tels que les prestants. Pour obtenir le grand Jeu, on
met les claviers ensemble, et on se sert des cornets, des
prestants, des trompettes, des clairons et des cromomes
dans le nand orgue et dans le positif; quelquefois même
on fait Jouer le récit et l'écho. On emploie les mêmes
pédales qu'au p{0if»-jett. F. C.
JBU (Plem-K nom donné dans l'orgue au mélange des
montres, des huit-pieds ouverts, des bourdons, des pre^
tants, des doublettes, des fournitures et des cymbales
dans le grand orgue et dans le positif. Pour le plein-Jeu,
on met les claviers ensemble, et on se sert des pédales
de trompette, de clairon et de bombarde; quelquefois
on remplace les pédales de trompette et de clairon par
des pédales de flûte, ce qui se fUt lorsqu'il y a des seize-
pie<u. — On désigne aussi rar le nom de pleki^eu le
registre sur lequel sont réunies la fourniture et la çynn
bue. Ce mélange sert à accompagner le plain-chant, et
est un prédeux reste de l'harmonie telle qu'on la com-
prenait pendant le moyen ftge. F. C.
JEU DB MOTS , espèce d'équivoque fondée sur l'emploi
de deux mots qui s'accordent pour le son, mais qui dif-
fèrent de sens. Telle est cette réponse du marquis de
Bièvre k la reine Marie-Antoinette, qui avait des pan-
toufles vertes, et qui lui demandait de faire un calem-
bourg sur sa personne : « Madame , l'uni-vert ( l'uni-
vers) est à vos pieds. » On fit souvent usage des Jeux <to
mots dans les devises des armoiries, dans les madri-
gaux, les épigrammes, les impromptus, etc. Alors c'est à
peu près une énigme, comme dans cette devise de
Henri II , gravée sur le Louvre à côté du chifOre de Diane
de Poitiers, et de son croissant emblématique : Doneo
totus impleat orbem^ « Jusqu'à ce qu'il ait rempli l'uni-
vers, ou son plein. » C. D— t.
jBo-PARTi, genre de composition poétique emprunté
aux troubadours par les trouvères, et nommé quelquefois
parture (F. Teuson). Les principaux trouvères dont on
connaît des jeuœ-partis sont : maistre Richart et Gau-
tier de Dargies ; Guillaume le Viniers et Frère ; Andrieu ;
mai^ Adam de Givenci, etc. V. AitfransOsische Lieder,
par Edouard Mfttzner, Berlin, 1853, in-8<>. E. B.
JBO SATTRiQOB, nom qu'ou doonalt, au xvi* siècle, à
une petite pièce du genre de la farce, qui servait de lever
de rideau avant une tragédie ou une comédie. Les Jeux
satyriquea s'appehdent aussi les Veaux, on ne sait trop
pourquoi. Peut^tre était-ce le nom de quelque confrâfie
Joyeuse ; ou bien, des veaux avaient figuré de leur per-
sonne ou de leur noni dans quelque bouffbnnerie fa«
meuse.
JEUNE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra*
pkie et d^ Histoire.
JBONB PSBMIBR. V. AmOURBOX.
JEUNES DE LANGUES (École des). V. Égolb sbs
jbiinbs DB LAffouBS , dsus notTO Dictionnoire de BiogrO'
pMe et d^RisUnre^ pase 878, col. 1.
JBOIIBS AVBOOLBS. V, AVBDGLBS.
JEUNB8 DETENDS. F. DETENDS.
JEUX. K. Jbc.
JOAILLERIE, art de monter les pierres précieuses sur
des ornements en or ou en arsent. Le montage à jour est
surtout en usage pour le diamant et pour les objets
composés, comme les parures, qui prennent la forme de
guirlandes, de bouquets, etc. : on se sert du montage
plein pour les pierres de couleur et pour les objets sim-
ples. L'opération par laquelle la pierre est fixée au métal
s'appelle sertissage. Pour les bagues, les pierres sont
fixées dans un chaton, que l'on soude ensuite à l'an-
neau. L'argent dont se sert le joaillier est au titre de 980
millièmes, et l'or, pour les doublures, k celui de 500 mil*
lièmes. F. Buouterxe, ORPévRBRiK.
JOANÈSE, monnaie d'or portugaise, valant 45 fr. 05 c
JOB (Livre de), un des livres canoniques de l'Ancien
Testament, écrit on ne sait précisément ni dans quel
temps ni dans quel lieu. Les commentateurs Juifs ou chré-
tiens, ainsi que la plupart des savants modernes, acceptent
Job comme un personnage réel, et le font vivre, les uns
an XIV* siècle, les autres au vm* av. J.-C. Quant au
poème qui porte son nom, et dont l'auteur est demeuré
inconnu, non-seulement 11 est indépendant des autres
livres de la Bible, mais il en difTère par le style, par l'ori-
ginalité des tours et des expressions. Il contient tous les
genres de beauté; c'est un des plus admirables monu-
JOC
tt26
JUA
xOMntB litkénim et philosophiqaM, le phn éloquent
. Inité de la douleur et de la Providence qu'il ait été
donné à un génie humain de composer. La conclusion
naturelle de cette œuvre sublime et pleine d'enseigne-
ments , c*est que Thomme ne pouvant rien savoir sur sa
rpre destinée, ni sur le gouvernement de runivers,
vraie sagesse consiste à sinclioer devant la volonté
. divine , à en accepter les décrets avec une pieuse rési-
gnation. V. Essat philosophioMê sur le po»n$ de Job ,
par Gaben ; Cours familier de littérature par M. de La-
martine. 11* et 12* Entretiens, Paris, 1856 ; le Livre de
Job, traduit de l'hébreu par Ernest Renan, Étude sur
Vàge et le caraetèredu poème, Paris, 1858. P— s.
JOBBERS , agioteurs de la Bourse de Londres, dont le
nom, pris aénéralement en mauvaise part, est presque
. synonyme de wÀeurs* Jh font des achats et des ventes à
terme, sans posséder ni argent ni titres, et, quand vient
l'époque fixée, règlent leurs marchés par des différences
( K. Bourse). Ils ont beaucoup d'analogie avec lies cour"
tiers-^narrotts de la Bourse de Paris.
JOBEUNS. V. DRAHisnft.
JOCKEY, mot anglais, passé aujourd'hui dans la plu-,
part des langues de l'Europe, et qui désigne le valet*
d'écurie chargé de soigner et d'exercer les chevaux, de
les monter daîns lea courses. Par extension, on l'applique
à tous ceux qui font courir ou qui courent eux-mêmes.
JOCKET (Jeu du). V. TaiCTRAC.
JOGKBT-CLUB, c-à-d. club dss jockeys, société d'ama-
. tours de chevaux, formée en Angleterre par des membres
.de l'aristocratie qui se proposent l'amélioration de l'es-
. pèce chevaline. Un Jockey^lub s'est constitué par imi-
tation à Paris ; chacun de ses menobres paye une cotisa-
tion annuelle de 500 fr.
JONCHETS ou HONCHETS, petits bâtons d'os, d'ivoire
ou de bois, fort menus, dont quelques-uns sont sculptés
»Êa foi, en reine, etc., et que l'on jette confusément les
.uns sur les autres, pour louer à qui en retirera le plus
avec un crochet, sans en faire remuer d'autres que celui
.'Ou'on veut dégager. On s'est primitivement servi de brins
de Jonc, d'où est venu le nom de jonchets. Ce Jeu est
très-ancien : il en est fait mention dans Ovide.
. JONES ( Tom ). V. Ton Jonbs.
JONGLEURS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire,
JONQUE (du portugais iunco), nom que les Européens
donnent aux grands navires de la Qiine, appelés tckouen
par les habitants de ce pays. La coque, Jusqu'à la ligne
46 flottaison, est en bois ordinaire, mais toutes les hautes
œuvres sont en teck. On emploie les chevilles de fer pour
lier les couples et lea bordages. Les coutures sont très-
bien calfatées avec une étoupe tirée du bambou, et le
fond avec une espèce de résine d'une grande adhérence.
L'avant et l'arrière sont plats ; mais le premier est plus
petit, sans quille et sans taille-mer; l'arrière renferme
une chambre immense, où le gouvernail est h l'abri des
coups de mer. Les Jonques ont de deux à ouatre mâts ,
sans aucune proportion entre eux. Un carré de bembou
fendu et étendu sur une vergue ou canne tient lieu de
voile, n n'y a qu'un seul pont; l'intérieur est divisé en
cabines ou compartiments pour les marchandises et les
passagers. Une Jonque offire h l'œil quelque chose de bi-
zarre : le pont a la forme d'un croissant; les extrémités
•ont si hautes et si pesantes, que l'on croirait qu'au pre-
mier coup de vent le bâtiment doit sombrer. Il n'en est
rien cependant : quelque défectueuses qu'elle» nous pa-
raissent au point de vue de l'art européen, les Jonques
sont très-soIides à la mer ; mais, à moms que le vent ne
soit très-favorable, elles marchent mal, et la manœuvre
en est très-difficile. Quatre hommes pour 100 tonneaux
gouvernent facilement un vaisseau marchand d'Europe ,
mais une Jonque en exige cinq fois plus. On en a vu des
plus grandes avoir une vingtaine et plus de matelots à la
jbaire seulement. Leur d^iacité varie entre 60 et 500 ton-
neaux : quelques-unes atteignent une longueur de 35
met., et une largeur de 8 mèu Le premier navhre chinois
Îui soit venu en Europe arriva en Angleterre en mars
848 : il avait 20 met. de long sur 11 de Urge. B.
JOUÉE, partie d'un pied-droit « qui comprend le ta^
bleau, la feuillure et l'ébrasement.
JOuELLE, vieux mot synonyme de joyau.
JOUISSANCE , en termes de Droit, un des attributs
de la propriété, consistant à en recueillir les fruits, à en
percevoir les revenus. La Jouissance et la propriété sont
aouvent séparées l'une de l'autre, et établies sur des per-
jonnes différentes, par exemple dans le cas d'uiu/hiti
XV* ce mot)m
jODissaiiCK (Action de) V. Action.
JOUQUB i nom qu'on donnait quelquefois à la cotleâe
mailles.
JOURDAIN DE BLAIVES, poCme de chevalerie, qui fait
suite à celui d*Amis et Amyle, Jourdain de Blaives ou
Blaye était petit-Als d'Amis et de Belissent. Son père
^rart a été assassiné par le traître Froment, neveu dn
traître Hardré; il est sauvé par le dévouement de son
parrain Renier, qui livre son propre fils à la vengeance
de Froment. Devenu grand, Jourdain délivre le royaume
de Marcasille attaqué par les Sarrasins, et épouse Oria-
bel, fille du roi Maôrcon. U marie sa fille à l'empereur de
Gonstantinople, et revient en Gascogne pour tuer Fro-
ment; enfin il succède à son b^u-père Marcon. — Cette
chanson est conservée à la Bibliothèque nationale de
Paris dans un seul manuscrit. La Bibliothèque de Tour-
nai possède sur le même sujet un long poème, traînant,
insipide et mal rimé, qui fut écrit par Druel Vignon vers
1461. V. Histoire littéraire de la France, t. XXII. H. D.
JOURNAL. V, ce mot dma notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire, et, dans le présent ouvrage, l'ar-
ticle Presse.
JOURKAL, livre de conmierce. V. GoMPTABiuré commer-
ciale.
JOUTE. V. ce mot dans notre Dtclioniuitra de Biogra-
phie et d'Histotre,
JOUY (Aqueduc de), ou de Met%, aqueduc romain ,
construit et voûté en maçonnerie, et qui amenait à Mets
les eaux de sources situées an village de Gorxe, à plus
de 22 kilom. au N.-0. de la ville. Au vallon de Jouy,
l'aqueduc était en élévation dans une longueur de
1092 met., et passait sur des arcades, dont quelquea-
unes avaient une hauteur considérable. On en voit en-
core 17, dont plusieuiis sont entières et les autres plus ou
moins dégradées. Les plus élevées ont environ 10 met.,
et ne forment pas toute la hauteur dea collines ; leor
épaisseur est de 3"",52<^, sur 5 met. d'ouverture. Les gens
du pays nonunent cet aoueduc, construit en petits ma-
tériaux, le Pont du Diable. On conjecture qu'il fut établi
avant l'an 70 de J.-C. C D— t.
JOYAU, ornement d'or, d'argent et de pierreries, qui
sert h la parure des femmes. U implioue une matière
plus riche et plus précieuse que le mot hijou.
JUAN (Don) , personnage mythique, dont la littératun
s'est souvent emparée, et dont elle a fait l'idéai du maté-
rialisme, de la débauche et de l'impiété. Il est, comme
Faust {V. ce mot)^ un symbole de l'étemel problème de
la vie ! après avoir suiri une voie différente, il arrive an
même but, il se rencontre avec fui dans une même idée
de doute, dans le môme sarcasme contre le monde et
contre Dieu. La légende de Don Juan est d'origine espa-
gnole. On racontait qu*à Séville, sous le règne de Pierre
le Cruel selon les uns, au temps de Charles-Quint seton
les autres, un certain Don Juan, de l'illustre famille
Tenorio, s'était proposé d'enlever la fille du gouverneur
ou commandeur de la ville, pour la sacrifier à ses pa»>
sions; qu'après avoir tué en duel le père de sa victime,
il descendit dans son caveau sépulcral du couvent de
S^-François, et, s'adressant avec raillerie à la statue de
pierre placée sur le tombeau, l'invita à être son hMe ;
que la statue, exacte au rendez-vous, le contraignit de la
suivre, et le livra aux puissances de l'Enfer. Tel est le
thème que dévdoppa la poésie. On y mêla l'histoire
d'un autre débauché. Don Juan de MÛafia, qui s'était,
dit^on, donné au Diable, mais qui finit par se convertir et
mourut en odeur de sainteté. Gabriel Telles (Tirso de
Molina^ traita, le premier, la légende de Don Juan, dsns
son El Burlador de Sevilla y convivado de piedra :
dans ce drame. Don Juan, type du sensualisme raffiné,
est un personnage hardi, entreprenant, qui court d'un
pays à l'autre, d'un duel à un rendex-vous, de.U grande
dame à la simple servante, et ches qui Ilmpiété li
plus téméi'aire s'unit d'une manière très-puissante à l'é-
goisme et à la dépravation. Le même sn^et fut transporté
sur la scène française par De Villiers, en 1650, sous le
titre de : Le Festin de pierre ou le Fils criminel. Vint
ensuite Don Juan ou U Festin de pierre, de Molière
(1665) : mais ici Don Juan n'est qu'un mauvais sujet
qui nous amuse , sans nous étonner) Sganarelle est siîn-
plement un drôle de la Camilie des Soapin; la ststue du
commanaeur n'inspire aucun eflh>i , car on est trop dis*
posé à rire pour se prêter à cette demi-soroeUerie. En
1660 parut un Festin de pierre ou l'AMe foudroyé^ par
DumesniU dit Rosimon. Puis, Thomas Corneille mit en
vers la pièce de Molière, et. en 1677, Sadwell adapta ce
sujet A la scène anglaise, dans son lÀbertiM* Veis k fia
JUB
1127
JUD
du HA* dède, rœoTre origiDale de (Sabriel Tellex fut
iDodttée et remise à la scène espagnole par Antonio de
Zamora. Quelques années plus taôrd, Goldoni fit Jouer en
ItiKe xm Giovanni Tenorto, ossia il dissoltUo punito,
fA les ^tuations sont invraisemblables, les caractères
nides et goiDâés, et qui fait de Don Juan un être misé-
nble, nlnspirant aucune pitié, aucune sympathie. Vers
17(S6, Gluck en fit le sujet d*un ballet. Le premier com-
positeur qui en ait fait un opéra fut Righini, sous le
titre d'il Convitato di pietra, ossia il dissduto (1777).
Le Dom Jwm de Mozart, dont le lîbretto fut écrit par
Lorenzo da Ponte (1787), a le plus popularisé la légende
en Burope : si Jamais elle fut bien comprise et bien ren-
due, c*est dans cette musique profonde et passionnée,
dans oeitte Joie farouche et ces chansons moqueuses qui
courent d'un bout.de la pièce à l'autre. Le Don Juan de
lord ^vron est un beau po6me : mais nous n*y retrou-
fons plus le personnage espagnol, nature ardente, in-
quiète, toujours avide de changements et de nouvelles
émotions, qui cherche les occasions et domine les circon-
stances pour satisfaire ses passions; le Don Juan de
Byron est un être fictif, par la bouche duquel le poète
' exprime ses propres doutes et prononce tous ses para-
doxes. Nous avons vu paraître encore un Don Juan de
Marana, ou la Chute cT un ange^ drame par M. Alexandre
Dumas, 1836; Les Ames du Purgatoire, ou les deux Don
Juan, nouvelle par H. Mérimée, 1834 ; Mémoires de Don
Juan, par M. MalIeflUe, 1858. En Espagne, Zorilla a
donné trois ouvrages, Don Juan Tenorio (1844), El De-
safio del diablo et Un Testigo de Bronce (1845). En
Allemagne, Grabbe, Braunthal, Wiese, Hauch, Lenau
et Holtâ ont aussi, de nos Jours, traité des sujets ana-
logues. Grabbe surtout a trouvé une belle idée dans son
drame 'de Don Juan et Faust : c^était de mettre en pré-
sence ces deux caractères, T&me et les sens, l'idéalisme
du savant et le matérialisme de Thomme du monde; il y
avait là un vaste champ pour l'imagination d'un poète,
trop vaste pour Grabbe, qui n'a fait de son Faust qu'une
pAIe copie de celui de Goethe, et créé un Don Juan trop
rêveur et trop métaphysicien. B.
JUBAL, jeu de flûte ouvert de huit pieds et de quatre
pieds, n se trouve aux pédales dans l'orgue de Gcsrlitz,
oà il semble tenir la place d'un Jeu d'octave. Un J'ubal de
buit pieds, avec double lèvre, se trouve en clavier supé-
lieor dans l'orgue de Francfort-sur-le-Mein.
JUBÉ, construction plus ou moins riche, élevée à l'en-
trée du chœur de quelques églises, et formant une galerie
ou tribune qui le sépare de la nef. Il a remplacé l'amfron
(V. cê mot). Autrefois on y chantait , dans les fêtes solen-
nelles, les leçons des maânes, l'épltre et l'évangile de la
nsesse. Les Jubés furent ainsi nommés du premier mot
que prononce le diacre en demandant la bénédiction de
rofficiant avant de commencer la lecture de l'évangile :
Jubé, domine, benedicere (veuille^ seigneur, me bénir).
Ds ne datent guère que du xiv* siècle. Les calvinistes en
ont détruit un grand nombre pendant les guerres de re-
ligion, et on en a abattu d'autres pendant le xvm* siècle
pour de prétendues raisons artistiques. Les dessins de
quelques-uns ont été conservés, comme celui de Notre-
Dame de Paris (au Cabinet des estampes) et celui de
S'-Ouen de Rouen (dans l'histoire de cette abbaye par
La Pommeraye). Le Jubé de Chartres s'wpelait la lé"
(fende, parce <{u on y lisait les leçons des Ifetînes. Parmi
ceux qui subsistent en France, les plus célèbres sont ceux
des cathédrales d*Albi et de Rodez, de l'église S^^Ma*
deleine à Troyes, et de S^-Étienne-du-Mont à Paris.
Il y en a même dans de petites églises , comme celui de
Folgoat en Bretagne, et celui en bois richement sculpté
de Villemaure (Aube). La cathédrale de Limoges (V. ce
mot) contient un Jubé qui n'occupe pas la place ordi-
naire. Celui de l'élise de la Chaise-Dieu, en Auvergne,
est à Ventrée de la nef. 11 en existe de beaucoup plus mo-
dernes, et d'un goût détestable, dans certaines églises,
par exemple, à la cathédrale de Rouen; celui de Bayenx
S été récraiment abattu. £n Belgique^ on admire le Jubé
e r^se S'-Pierre à Louvain , reproduit dans l'éfflise
de Brou à Bourg-en-Bresse, ceux des églises d'Aerschot,
de Tessenderloo , de S'-Gomaire à Lierre, de l'église pa-
toiasiale de Dixmude, et de la cathédrale de Tournai i On
voit aussi un assez grand nombre de iubéa en Alle-
magne et en Angleterre. Souvent on y a placé des buffets
fforgae^ qu'ils frétaient nullement destinés h supporter \
0 en est ainsi à Tolède. B.
JUBILÉ. V. ce niot dans notre Dictionnaire de Biogra-
^ne et ér Histoire.
JCBILUSt mot <|ui signifia d'abord chant joyeux, n
désigna ensuite un chant de guerre, espèce de cri et d'ac-
clamation militaire en siane de Joie et de triomphe. Enfin,
certains liturgistes donnèrent le nom de jubUuskeeqa»
d'autres ont appelé neume {V. ce mot),
JUDAÏSME, dénomination sous laouelle on comprend
la croyance, les lois et les idées religieuses des Juifs,
y. Jdjfs et MoIsB, dans notre />icttonnatr« de Biogra»
phie et d'Histoire,
JUDICIAIRE (Combat). V. Combat imiciAutB, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire,
JUDiciAiRB (Conseil), Conseil donné au prodigue qui
dissipe ses biens. Le Droit romain et notre ancien Droit
mettaient le prodigue en état d'interdiction ; ce fut seu-
lement lors de la présentation du projet de Code dvil au
Tribunat, et sur les observations de Treilhard et de Por-
tails, oue l'on erut sufitoant d'employer ce terme moyen
entre l'interdiction et la liberté. La cause qui peut en
modifier l'application, c'est la prodigalité: mais quant à
l'appréciation des circonstances qui la constituent, elle
est réservée aux tribunaux, qui ont, h cet égard, un pou-
voir discrétionnaire. La nomination du Conseil peut être
provoquée par tous ceux qui ont droit de demander rin«
terdiction; elle est Jugée de la même manière; le choix
est réservé au tribunai ; et la même publicité est donnée
au Jugement qu'à celui qui ordonne l'intendJction. La
conséquence de cette nomination est d'empêcher le pro-
digue de plaider, tran^ger, emprunter, recevoir un ea^
pital mobilier, en donner déchaiîge, aliéner, hypothéquer
sans l'assistance de son conseil (Code Napol,^ art. 513
et 514 ) ; mais l'administration de ses biens reste toujours
entre ses mains, et, dans les autres actes, il figure tou-
jours d'ailleurs en son propre nom. Le Conseil n'est, du
reste, ni comptable, ni responsable. Les actes postérieurs
à la nomination du Conseil, et souscrits sans son assis-
tance, sont nuls, sauf pour ce dont aurait profité le pro-
digue ; les actes antérieurs sont valables, sauf les cas de
dot et de fVande. La défense de procéder sans l'assistance
d'un Conseil ne peut être levée qu'à l'aide des formalités
au moyen desguelles elle a été posée* R. n'E.
jUDiGiAïas (Eloquence) ou do BAsasAi), titre sous 1^
quel on range non-seulement lM/)>laidoyers et tous les
discours prononcés par les avocats et les magistrats dans
rexercice de leurs fonctions, ou sur les matières de leur
état, mais tout discours admsé directement ou indirec-
tement à une assemblée faisant ofiice de tribunal. Ainsi,
d'un cAté \ee plaidoyers offensifs ou défensifii, les m«rcif-
riales, les liarangues d'installation, d*ouvertare ou de
clôture ) de l'autre, les consultations, mémoires, foctuiéis,
appartiennent à l'éloquence Judiciaire. En France, an
temps des parlements, il y avait aussi les remontrances
adressées au roi : elles demeuraient, suivant la nature
du sujet, purement Judiciaires, on prenaient un caractère
administratif et politique. V, Delamalle, Essai d^lnsli"
tuHons oratoires à l'usage de ceux qui se destinent au
barreau, 9« édit.., 1822, 2 voL in-8«; Lacretelle, Élo-
quence judiciaire et philosophie législative, 1823, 3 voL
in-8»; Pinard, Le Barreau, 1843, in-8o; Paignon, Elo-
quence et improvisation, art de la parole oratoire^
1854, in-S».
L'éloquence Judiciaire fut nulle chez les Ghaldéens et les
Égyptiens : leurs tribunaux étaient silencieux, leur procé-
dure sommaire. Les parties comparaissaient , exposaient
leurs raisons, souvent par écrit; A défaut de leurs propres
lumières, elles pouvaient s'aider de celles des sages; les
témoins étaient entendus : le tribunal délibérait et pro*
nonçaiU Telle est encore aujourd'hui la Justice asiatique.
L'Ai^topage, ce tribunal muet d'Athènes, était une impor-
tation égyptienne.
L* éloquence à Athènes, — Mais, dans tonte ht Grèce et
dans Athènes, surtout en dehors de l'Aréopage, la parole
fut libre, et, de bonne heure, il y eut une élocpience judi-
ciaire. Dans Homère, la description du boucher d^Achiile
présente les scènes oratoires destribnnauxet des places pu-
bliques. Chez le peuple d'Athènes, plaideur et discoureur
entre tous, l'étoquenoe judiciaire dc^t se développer. Les
Institutions démocratiques y aidèrent puissamment ; les
discussions politiques deventrient aisément des querelles
personnelles; les adversaires prenaient le rôle d'accusi^
teor et d'accoBé4 et la lutte commencée devant les citoyens
se terminait devant lea juges. Certaines dispositions des
lois étalent de véritables appels à la dénonciation. La
passion de plaider et de juger devint un trait distinctif du
^caractère national. IVun autre côté, l'éloquence, étudiée
par des hommes habiles, devenait un art : k Athènes,
Selon fonda une école dWoquence; après lui, Mn^sl*
phile, Sophile, Antipbon, développèrent la théorie o^«
JUD
1128
JUD
tolrei lear travail, repris par les rhéteurs siciliens (Gorax,
Tisias, etc.), et par les sophistes de la première époque
( Protagoras, Hippias, etc.}, fut achevé plus tard par tes
maîtres du temps de Philippe et d*Aleiandre (Isée, Iso-
erate, Aristote, etc.). L'éloquence put donc se déployer
dans toute sa liberté, avec toutes ses ressources, devant
les tribunaux d*Athènes. Là , d'ailleurs, aussi bien que
sur la place publique, elle n'était le priviléf^ de per-
sonne : chacun pouvait être orateur, ou du moins avait
droit de l'être. Au temps de Démosthène, l'éloquence
polltfque avait reçu une sorte d'organisation; il y avait
des orateurs do peuple, investis d'une espèce de ministère
public : il n'en était pas de même dans les tribunaux ;
on pouvait parler soi-môme, ou se faire représenter par
un autre ; on lisait son discours, ou on le débitait; on le
composait soi-même, ou on le donnait à composer à
quelque habile. Ces habiles étaient le plus souvent des
professeurs d'éloquence, sophistes ou rhéteurs, des ora-
teurs publics , ou tout simplement des hommes versés
dans les lois et les affaires, capables de parler ou d'écrire.
GBtte liberté pourtant eut quelques limites : il y avait
des lois contre les calomniateurs; une peine atteignait
tout accusateur qui ne gagnait pas h sa cause un certain
nombre de suiTrages. On réglementa aussi le geste et
l'action des orateurs; on détermina la durée des plaidoi-
ries. Enfin, on interdît l'accès des tribunaux aux gens lié-
tris par les lois et par l'opinion publicpe.
Dans l'histoire de l'éloquence Judiciaire ches les Grecs,
Il ne fout point parler des Sophistes : VÊloge d^Hélène et
VApoloffie de Palamède, fussent-ils même authentiques,
n'apjMurtiennent pas au genre Judiciaire, non plus que le
Plaidoyer dt Ulysse. Mais les hommes politiques ont laissé
des souvenirs de leur éloquence : Péridès eut à défendre
Damon, Anaxagore, Aspasie; Critias fit condamner Thé-
ramène. Géon , Hyperbolus, Gléopbon, Aristophon, sont
assez connus par le r61e qu'ils Jouèrent à la tête de la fac-
tion démagogique; pour montrer quel usage ils faisaient
de l'éloquence Judiciaire, il suffit de rappeler qu'Aristo-
Shon fut accusé 75 fois devant le peuple, et qu'il se ren-
it à son tour l'accusateur d'Iphicrate, de Timothée et de
tous les meilleurs citoyens. On a d'Andocide un discours
contre Alcibiade, une apologie pour lui-même à son re-
tour de Texil , et un discours sur les mystères, en réponse
à Lysiaa qui s'était porté son accusateur. On a aussi le
discours ae Lysias, et six plaid<^ers du même orateur,
reconnus pour authentiques; beaucoup d'antres lui sont
attribués. Cette première période est celle des Attiques
purs, remarquables par la simplicité et l'élégance.
Un autre âge commence avec Antiphon, flls de So-
phile, le premier qui se fit payer par ses clients et qui
vendit des discours : on peut le considérer par là comme
ayant Jusqu'à un certain point créé la profession d'avo-
cat. Après lui , vint Isocrate. Ne pouvant vaincre la timi-
dité <|ui l'écartait de la place publique et des tribunaux,
il écrivit, pour d'autres, des plaidoyers dont quelques-
uns nous sont parvenus. Par ses leçons comme par ses
écrits, il exerça une grande influence, perfectionna la
composition et le style, et introduisit dans les discours
politiques et Judiciaires, en même temps qu'une harmonie
plus raffinée et plus savante, la grâce des détails et l'usage
des idées générales et des développements moraux. Isa,
Hypéride, Céphisodote, Léodamas, Démosthène, et bien
d'autres, étudièrent sous sa direction. — Isée se distin-
gua au barreau et dans l'école; onze plaidoyers nous
restent de lui. Denys d'Halicamasse trouvait en Ly^as
plus de variété, de délicatesse et de grâce, en Isée plus
de force et de gravité. — Signalons en passant F^Dly-
crate, qui composa, ditr-on, pour Anytus le discours de
dénonciation contre Socrate. — Lycnrgue avait écrit
quinze discours, tous d'accusation : on a encore celui
contre Léocrate, et on y retrouve la simplicité un peu
rude, la véhémence et rhonnêteté qui distinguaient son
caractère et son éloquence. — Eubule, ennemi de Dé-
mosthène, s'eflbrça de l'impliouer dans une affaire capi-
tale avec Arista^^ue, et défenoit contre lui d'abord Hi-
dias, puis Eschine dans raifaire de l'ambassade. Le seul
avantage qu'il eût procuré à la ville, disait^on, c'est
qu'on pouvait désormais s'avouer publiquement mauvais
citoyen. — Pythéas, après la mort de Lycurgue, attaqua
ses enfants en justice, les fit condamner à une amende
et mettre en prison ; il se constitua un des adversaires
de Démosthène dans l'aflkire d'Harpalus. — Hypéride .
composait des plaidoyers à l'usage d'autrui ; c'est lui qui '
défendit Phryné accusée d'impiété, et lui que les Athé-
niens chargèrent de poursuivre Démosthène accusé de
s'être laissé corrompre par Uarpaius. Les Anciens admet-
taient comme authentiques 52 discours parmi 77 qu'on
lui attribuait. Nous en avons quelques fragments; Tua
semhle appartenir à un pliddoyer en faveur des enfanta
de Lycurgue. — Dinarque s'ennchit à vendre des discours
à ceux qui en avaient besoin. On lui en attribuait plus
de 160; trois sont restés : contre Démosthène, contre
Aristogiton, contre Philoclès ; un 4*, contre Théocrino, a
M aussi attribué à Démosthène. — Eschine, illustre sur-
tout par sa lutte contre Démosthène, était aussi un des
habiles orateurs de son temps. Nous avons de lui trois
discours, que les Anciens appelaient Us trois Grâces : S9
défense contre Démosthène au sujet de l'ambassade; soo
plaidoyer contre Timarque; son discours contre Ctcsi-
phon. — Le» discours Judiciaires qui nous reatent de
Démosthène sont assez nombreux : à 18 ans il plaida
contre ses tuteurs (contre Aphobus, trois discours;
contre Onétor, deux); plus tanl, il composa pour Dio-
dore un discours d'accusation contre Androtion ; viennent
ensuite l'accusation contre Aristocrates, le procès contre
Eschine au sujet de l'ambassade, une série de plaidoyers
civils ou politiques contre Néœra, Stéphanus, Enbn-
lide, etc. Victorieux dans le procès qu'Eschine loi liH
tenta, à lui et à Ctésiphon, Démosthène fut molai
heureux quand on l'accusa d'avoir reçu l'or d'Harpaluei
nous n'avons plus ni le discours qu'il avait prononel
pour sa défense, ni beaucoup d'autres, dont on voit
la liste générale dans la Bibliothèque de Ftabridnet
mais il en reste assez pour nous donner une idée com-
plète de son éloquence Judiciaire, civile et politique. Ls
Discours sur la Couronne est le chef-d'œuvre de l'élo-
quence humaine : inspirations généreuses, récits entraî-
nants, mouvements passionnés, diatribes véhémentes,
sentiments religieux, tactiaue liabile, toutes les forces,
toutes les ressources du génie et de l'art sont concentrées
dans cette protestation suprême de la Grèce vaincue par
la fortune macédonienne; c'est le cri d'un peuple qui
tombe en attestant son droit. Les autres plaidoyers n'of-
firent point ce grand spectacle ; mais ils portent presque
tous quelque empreinte du génie de leur auteur, et ils
sont en outre, pour la connaissance des mœurs, des lois
et des institutions de la Grèce et d'Athènes, comme poar
l'histoire politique de ces temps, des sources abondantes
et précieuses.
Après oue l'influence ou la domination macédonienne
se fut établie sur toute la Grèce, Athènes continua d'être
la ville des beaux discours, des disputes et des plaidcK
ries. Mais il semble que Féloquence Judiciaire tir&t tout
son éclat des inspirations et des passions politiques : de-
puis Démétrius de Phalère Jua^'à la fin de l'Empire ro-
main, elle n'a pas produit, ou il ne nous est pas resté un
seul monument. Beaucoup de noms ont survécu ; beau-
coup d'orateurs ont eu de leur temps une grande renom-
mée; la plupart étaient des rhéteurs qui brillaient à la
fois dans l'école et au barreau. Ce qui reste de leurs
déclamations ne fait guère regretter la perte de leurs plai-
doyers. Nicétas de Smyme, Polémon de Laodicée, Théo-
dote, Antiochus, Lucien (de Samosate), Damien, Cyrî-
nus, plaidèrent avec éclat : mais c'était le temps des
déclamateurs, leur mauvais go&t envahissait tout, ils ne
se contentèrent pas de gâter l'éloquence Judiciaire, ils en
créèrent une nouvelle espèce. On reprit les discours pro-
noncés par les anciens ou les questions traitées par eux;
on refaisait ainsi le discours d'Eschine ou celui de Dé-
mosthène, on défendait Léocrate contre Lycurgue, Aris-
togiton contre Dinarque. Dans les écoles, on plaidait des
causes imaginaires, on s'ingéniidt, sur des données ro-
manesques, à bâtir des arpimentations surprenantes ; et
l'éloquence qu'on déployait dans ces exercices répondait
à la puérilitâ de la matière. On ne trouve donc point
chez les Grecs de Tépoque romaine les traces de îélo-
quence Judiciaire, et le meilleur titre des dédamateun
de divers genres dont la Grèce pullula dès le commence-
ment de sa décadence, c'est qu'us contribuèrent à former
les premiers orateurs de Rome.
Véloqu&nce à Borne, — Les Romains, ce peuple orateur
et légiste, étaient dignes d'être les élèves des Grecs : ils
n'attendirent même pas leurs leçons, et, avant que Car-
néade, Gritolatls et Diogène eussent fait admirer dans
Rome les merveilles de leur parole, on y comptait de
nombreuses générations d'orateurs. L'éloquence Judi-
ciaire néanmmns ne trouva pas d'abord, dans les instito-
tions de l'État, des conditions aussi favorables que Télo-
quence politique. Les patriciens seuls connaissaieat les
lois et la procédure; tout était en formules, et il y avait
S en de place à la faconde. L'établissement de la répu-
lique, le droit d'appel an peuple, les réfvélations du
jnn
1129
JUO
greffier Ftevins, qui divulgua les fonnules. Jusqu'alors
secrètes^ des jurisconsultes, rusage des consultations pu-
bliques, Introduit par Tlbérius Coruncanlus, le premier
plébéien oui fat g;nuid pontife, l'influence croissante îles
danes plebéiennea, les luttes topJours plus vives des in-
térêts, oes idées et des partis, et ragrandissement même
de rempire, développant rapidement Téloquence, et
BDltiplierent iea causes et les orateurs. Corn. Sdpion ,
Appius Cbnidiiia Cecus, Q. Fabius Bfaximus, Cornélius
Cétbégus, s'étaient fait une réputation d'éloquence. Après
eoz était venu Caton, dont la parole vive, abrupte, éner-
S 'que et pittoresque, se forma dans les luttes journalières
i la tribune, et dans 90 procès où il avait figuré comme
aocosé ou comme accusateur. Les Grecs arrivèrent alors,
et l'éloquence prît un essor nouveau. Pour citer tous les
ofsteurs de la République, il faudrait nommer pres(^ue
tous ceux qui Jouèrent un grand rôle, depuis le premier
Africain Jusqu'à César. La défense des clients devant les
tribnnanx était la charge la plus lourde, la plus hono-
laUe aussi, du patronat; elle aonnaitle renom, la popu-
larité et iea honneurs. Lei esprits hardis ou agressifs,
pour mieux se signaler d'abord, s'en prenaient h quelques
grands personnages, et se faisaient pour ainsi dire accu-
aateors publics. Les magistrats, les gouverneurs de pro-
finœs, les chets d'armées , les candidats aux grandes
âections populaires, passaient tour à tour devant les tri-
buniox, et 11 se trouvait toi^ours quelqu'un pour leur
demander compte légalement de leurs bripes, de leurs
Entes, de leurs péculats et de leurs prévarications. Dans
(M grands proœs où les matières criminelles, civiles,
administratiTes et politiques étaient le plus souvent mè-
Ito, l'éloquence avait large carrière; la puissance des
parties, la force des cabales, l'importance des questions
et des intérêts débattus, surexcitaient les orateurs, avi-
faient leurs passions et enflammaient leur parole. Ainsi,
saos parler des Gracques, s'illustrèrent Galba, Catulus,
Snlpitius, Grassus, Antonius, Cotta, et Hortensius enfin ,
le prédécesseur immédiat, le contemporain et le rival de
Qcéroo. Gicéron avait entendu les uns, et lisait les ou-
nagn des autres : nous n'avons plus que leur souvenir,
et nous ne pouvons les Juger que par les brillants éloges
qi» Gicéron leur accorde. L'œuvre Judiciaire de Gicéron
loi-même n'a pas tout entière survécu; le temps en a
épvgné de grandes parties, et, dans la collection de ses
plaidoyers, on peut étudier l'art admirable du plus parftdt
des orateurs qui aient Jamais plaidé devant un tribunal.
Si on eicepte, en effet, le discours de Démosthène sur la
Couronne, il n'y a rien dans les fastes judiciaires que l'on
pmne comparer aux plaidoyers de Gicéron. Après avoir
soiTi les tribunaux et le Forum, après avoir io<*n les le-
(ODs de maîtres latins, puis de maîtres grecs, il >»vait dé-
buté par la défense de Quinctius et celle de Roscius
d'Amérie. Il voyagea alors, entendit les professeurs et les
snteurs les plus Illustres de la Grèce et de l'Asie, et ré-
parât au baireau de Rome pour défendre Roscius le co-
médien. Rappelons les plaidoy^ers qu'il prononça contre
Verres, pour Cluentius, Rabirius, Moréna, Bfilon, Har-
oellQe, Ugarius, et tant d'autres où l'on retrouve l'abon-
dance, la grftce, l'habileté de discussion, la persuasion
tantôt pathétique et tantôt captieuse, les mille res-
sources du génie le plus souple, de llmagination û plus
féconde, de la langue la plus opulente.
Après Gicéron, l'éloquence déchut à Rome. Le peuple
ne aisposait plus des charges publiques; la popularité
des orateurs ne leur valait plus les honneurs; la triboine
étant supprimée, l'éloquence Judiciaire ne pouvait plus se
retremper dans l'éloquence politique; les avocats n'étaient
plus en même temps des hommes d'État Réduit à lui-
même, le barreau fut amoindri. D'un autre côté, l'art, le
box art des déclamateurs, étendait sur Rome sa pemi-
deoae influence. Dès le commencement de l'Empire, les
Séaèques apportèrent le goût espagnol, l'amour ae l'em-
phase et le culte de l'antithèse. Les traditions et les
instincts du génie romain ne résistèrent pas longtemps.
Us monuments de cette éloquence nouvelle ont pari, et
nous ne pouvons Juger du barreau impérial que par les
témoignages qu'en ont rendus les auteurs contemporains
et d'après les caractères généraux de la littérature. Plu-
iieurs y gagnaient encore une brillante renommée; et
quelques-uns sans doute la méritèrent en déployant des
qualités brillantes en même temps qu'Us échappaient en
partie aux défauts de leur temps. Les premiers qui vin-
rent après Gicéron, Messala, PoUion, Gassius Severus,
Montanus, avaient évidemment retenu quelque chose du
grand siècle. Plus tard, Domitius Afer, Ëprius Marcellus
et Matemns sous Néron et Domitien Tacite et Pline le
Jeune sous Tnjan, Régulus même et quelques autres
core, durent montrer au barreau un incontestable talent
ou quelque chose au moins de leur génie. D'ailleurs, il v
eut toujours deux écoles : si l'une préconisait l'espnt
nouveau, l'autre rappelait l'art antique, et cette résis-
tance des anciens ralentissait du moins l'entraînement
des tnodemes. L'éloauence Judiciaire et ses traces s'ef«
facent à mesure que la sodétié grecque et romaine avance
vers sa fin. Il nous est parvenu quelques œuvres des so-
phistes et des rhéteurs latins et grecs des derniers siècles;
plusieurs d'entre eux ont plaidé : pourquoi ne demeure-
t^il rien de leurs discours Judiciaires? Ne les écrivaitron
plus? Ou avaient-ils si peu de mérite, qu'on n'ait pas cm
devoir les conserver, quand on admirait, quand on trans-
mettait d'ailleurs des ouvrages souvent si médiocres?
Ce que le barreau avait perdu en éloquence, il l'avait
gagné en organisation. Dès le temps de Domitien, les
avocate eurent un nom et formèrent une classe : on les ap-
pelait caundici, comme qui dirait plaideurs de causes.
Autour d'eux se groupaient d'autres gens de métier, pr^
nant part aux plaids : les iegtUeii s'appliquaient à con-
naître tons les textes des innombrables lois romaines; les
formtUarii et les cognitores étudiaient la chicane et se
chargeaient de veiller h la procédure; l'avocat, quand il
parlait, avait auprès de lui le monitor, avocat subsidiaire
qui improvisait les répliques, et derrim lui un autre ffio-
nttor prêt à venhr en aide à son imagination et à sa mé-
moire; un fnorator, enfin, ftutre auxiliaire qui se chargeait
de tenir le tribunal et la partie en haleine, si l'avocat avait
besoin de se reposer. Au temps d'Ulpien, les avocats consti-
tuaient une corporation honorée. Valentinien et Valons
établirent que les plus hauts dignitaires pourraient être
avocats sans déroger : aux avocats émérites Anastase ac-
corda le titre de clarissimes. Les édits impâriaux ne
leur rendirent point l'antique éloquence. On des noms
sous lesquels on désigna le plus souvent les avocats dans
les premiers siècles du moyen Age est celui de clamo'
tor$s : les Barbares n'y mettaient point sans doute une
intention maligne; mais on peut croire qu'un pareil nom
avait sa raison d'être. V, Grelletp-Dumazeau, Le Barreau
romain, 1858, in-8*.
L'éloquence en Gaule et en France, — La Gaule sous
la domination romaine n'avait point manqué d'avocats,
ni ses avocats manqué d'éloquence ; les écoles d'Autun,
de I^on, d'Arles, de Marseille, de Bordeaux, Jusque dans
les cienuers temps, étaient fameuses : on y venait de
l'étran^, même de l'Italie. Sous les Barbares, tout, plus
ou moms rapidement, disparut, et on ne doit plus cher-
cher l'éloquence Judiciaire en France qu'à l'origine de la
magistrature elle-même , sous Philippe le ^el. H y eut
foule bientôt pour entendre Raoul de Presie, Pierre de
Cugnières, Jean et Guillaume de Dormans, Jean Desma-
rets. On avait perdu depuis longtemps l'habitude de dira
et d'entendre de beaux et surtout de longs discours ; pour
la retrouver, il fallut un peu de temps aux nouveaux
orateurs, plus encore au public. « Quand les avocats
content leurs plaids, dit Beaumanoir, beau métier est
qu'ils comprennent leur fait en le moins de paroles qu'ils
pourront. » liais une fols que l'éloquence eut pris son
cours, elle ne s'arrêta plus : dès le xiv« siècle on essaya
de la modérer par des règlements, par des amenda ; les
lois n'v réussirent pas mieux que les conseils, et, pen-
dant bien longtemps, la surabondance demeura le défaut
le plus commun des orateurs du barreau. Cependant,
au XV* siècle, l'abbé de S^Fiacre et surtout Gerson trou-
vèrent un langage et des mouvements oratoires. Philippe
de Morvilliers, Halle, Bréban, Nicole Bataille, de La Vao-
querie, eurent aussi quelque talent. Le barreau aussi pour-
rait accuser peut-être la Renaissance de l'avoir troublé
dans les progrès naturels de son éloquence : elle lui ap-
porta, en eflTet, Térudition, qui devint, avec la prolixité,
le second fléau de l'art. Celui qui y échappa le plus sou-
vent et le plus heureusement fut Etienne Pasquier, dans
quelques-uns de ses plaidoyers, et dans son fameux dis-
cours pour l'Université contre les Jésuites, où son style
est net, ferme, rapide, avec une certaine force et beau-
coup de passion. Diès ce temps aussi, dans quelques pages
de Julien Péléus, se manifestait le tour agréable et pi-
quant de l'esprit français.
Au 'commencement du xvii* siècle, Expllly, Servfn et
Gautier étaient les coryphées de l'éloquence Judiciaire;
le premier et le troisième ont quelques belles pages. On
s'attendrait h trouver dans leurs successeurs une élo-
2uence plus ou moins comparable h celle que Bossuet,
ourdalone et Fénelon faisaient briller dans les chaires
chrétiennes : il n'en est pas ainsi, et les hommes du bar-
JUD
1130
JU6
tmxk wmbleQt s'être dérobés longtemps k css heureuses
influences qui sgisssîent alors sf puissamment sur tous
les travaux de Fesprit. Le plus souvent, la plupart d'entre
eux gsrdèrent, en plein siècle de Louis XiV, le fatras, le
désordre, Térudltion et Temphase de l'&ge précédent. Ce-
Sendant« on rencontre, dans les discours de Rouillard et
'Orner Talon, des pages d*un goût pur et d'une noble
éloquence; Charles de Févret a de beaux plaidoyers ; An-
toine Le Maistre, qui plaida trop peu longtemps, se mon-
trait, par les fortes qualités de sa parole correàe, élégante
et chaleureuse, digne d'appartenir à cette maison de
Port-Royal où il se retira en sortant du Palais. Patru,
conune Le Maistre, mérite sa renommée : on trouve dans
ses plaidoyers, notaomient dans ceux pour les religieux
delà S'*-Trinité, pour un gradué de l'Oniversité, pour
maître Galichon, etc., un style pur et soutenu, de belles
peintures, de nobles pensées, et quelquefois sa plai-
doirie tout entière emprunte h la vivacité de ses senti-
ments honnêtes une véritable éloquence. Le plaidoyer de
Fourcroy pour le sieur de S^-Aignan est plein de choses
bien pensées, bien dites, ingénieuses ou spirituelles.
Érard a quelquefois des mouvements d'une éloquence
saisissante et des développements du plus beau langage.
Gillet se recommande par l'élégante pureté de son style.
Mais les trois discours supplicatifs de Pellisson, adressés
à Louis XIV en faveur de Fouquet, du fond de la Bastille,
où l'avocat lui-même était retenu, sont le principal mo-
nument que nous ait laissé l'éloquence judiciaire du
xvn* siècle. Ces discours furent à la fois une belle action
et une belle œuvre. « Si les amis de la franche et noble
interprétation des sentiments, dit M. Berryer. bl&ment
l'air agenouillé de ces admirables discours, qu'ils se rap-
pellent dans quel état désespéré ils furent composés, et à
quel orgueilleux monarque ils s'adressaient. » Nous ajou-
terons : qu'ils considèrent encore que Pellisson parlait
|>our an autre; c'est là sans doute sa meilleure justifica-
tion. Le barreau du xvii* siècle n'est pas à dédaigner
antant que beaucoup le croient peut-être. Deux tnits
communs à tous les avocats les recommandent et les ca-
ractérisent : tous écrivent avec soin, et, là où ils sont
bons. Us sont excellents; tous sont honnêtes et chrétiens,
et ils ont dû à leur vertu et à leur foi une partie de leur
mérite, et leurs plus belles inspirations.
Daguesseau et Cochin, deux noms fort inégaux d'ail-
leurs, forment la transition du xvii* au xviii* siècle.
Daguesseau est, avec L'Hôpital, le plus grand honneur
de la magistrature fhmçaise. Écrivain, poète, juriscon-
sulte, administrateur et législateur, honnête homme,
chrétien et philosophe, grand par son caractère comme
par son esprit, 11 ne fit pas seulement des plaidoyers où
la force de la pensée et l'éclat de l'imagination s'unissent
à l'élégance du langage, des mercuriales où l'éloquence
de la parole est égale à la noblesse des pensées : u dota
la France d'une foule de Ipis, d'édits et de règlements, qui
furent pour le pays entier ou pour diverses classes de
citoyens autant de bienfaits. Cochin fut le plus brillant
des avocats de son temps; ses improvisations étaient, dit-
on, pleines d'éclat et entraînantes; dans ses discours
écrits on ne retrouve point les grandes qualités oratoires,
mais le style en est soigné et plein de goût Par son ta-
lent comme par son caractère, il se rattache à la tradition
littéraire et chrétienne du siècle passé; il ne participe ni
au mauvais goût, ni aux travers pnilosophiques de la plu-
part de ses contemporains. Mannory est un plaisant plutôt
encore qu'un avocat; Loyseau de Mauléon est un senti-
mental, et fait du plaidoyer un roman; Servan est un
déclamateur. Dupaty, dans un Mémoire justificatif pour
trois hommes condamnés à mort, a des morceaux vigou-
reux et pathétiques. Linguet, esprit souple, étendu, fé-
.cond, actif, mais passionné, querelleur et méchant, s'était
distingué dans le barreau avant d'en être chassé; son
Mémoure pour le comte de Horangiès est excellent. Ger-
bier n'a laissé aucune œuvre saillante : pourtant, du
Parlement de Bretagne, où il plaidait, sa renommée
s'étendit par toute la France. Citons encore Monclar, Élie
de Beaumont, Target, Tronchet, Bergasse. Les chefs-
d'oBuvre de l'éloquence Judiciaire à la fin du xviu* siècle
sont des Mémoires : ceux de La Chalotais , de Lally, et
de Beaumarchais. Leurs mérites sont singulièrement
divers t ce qu'on trouve dans le Comptt^endu sur les
Constitutions des Jésuites et dans les Mémoires justifia
eatifs écrits des prisofij du mont S^^Michd, c'est une
parole ferme, nerveuse, simple, un peu âpre; duis les
Mémoires de Lall v pour la réhabilitation de son père, c'est
une éloquence châtiée, élégante et noble, quelque peu
icadémique; quant à ceux de Beaumarchais, l'auteur s'y
est ndstout entier, et c'est assurément son chef-d'cravre,
plus dramatique mie ses drames, plus comique que sei
comédies ; il s'y élève par accident Jusqu'à l'éloquence
philosophique, et presque à l'éloquence relideuse.
Beaumarchais et Linguet nous amènent à laRévola-
jtion. Mentionnons le procès de M"** de Marignane, où
Portails et MirabcAu tinrent la parole; citons les noms
vénérés de de Sèze et de Malesherbes, de Thouret, Meu-
nier, Chapelier, Bamave, Lanjuinais, Vergniaud , Dela-
malle, et Tronçon du Coudbray. Nousarrivons au xix* siëclSb
Beaucoup de noms y brillent, bientôt obscurcis : les avo-
cats sont orateurs quelquefois, presque jamais écrivains;
c'est là le mal de leur gloire, ou le défaut de leur talent
Sous la Restauration, nous trouvons Bonnet, Billecoq,
Guichard, Bellart, Marchangy, Berville; et, après eux,
nos contemporains, MM. Dupin, Marie, Berryer, Paillet
Teste, Delangle, Chaix-d*li)st-Ange, Dufaure, Odilos
Barrot, Crémieux, Jules Favre, Léon Dnval, Beth*
mont, Liouville, etc., pléiade nombreuse et brillante.
V, Falconnet, Le Barreau français moderne, ou Choix
de plaidoyers des plus célèbres avocats, 1806, 2 vol.
in-4°; Gair et Clapier, Barreau français, ou Col-
lection de chefsSœuvre de Véloquence judiciaire m
France, 1821, 16 vol. in-S®; Annales du Barreau franr
çais,;, depuis Le Maistre et Patru jusqu'à nos jours,
1833-47, 20 vol. in-8°; Berryer, Leçofts et Modèles rf^o-
quence, du xiv* au xix* siècle, 1838, in-4<> ; BoinviUiers,
Principes et ntorceaux choisis d^éloquence judiciaire,
xvu* siècle, 1856, in-8''; Sapey, Études biographiques
pour servir à Vétude de Vancienne magistrature fran-
çaise, 1858, in-8». T. de B.
JUDiciAïas (Organisation). V. Psarcb, dans notre Dio-
tionnaire de Biographie et d^ Histoire, page 1084, col. %
JUDICIAIRE (Pouvoir). V, Pouvoir.
JUGE, mot qui, après avoir reçu diverses acceptions
{V. notre Dictionnaire de Biographie et d* Histoire)^ ne
désigne plus qu'un magistrat chargé f»t l'autorité pa-
blique de renors la justice aux particuliers. Il sert à
qualifier spécialement les Juges de paix, les membres
des tribunaux de commerce et ceux des tribunaux de
V instance. Les magistrats des Cours d'appel et de
la Cour de cassation ont titre de conseillers,
JUGE coHMissAïas, jugo commls par un tribunal pour
une opéiation quelconque.
JUGE DE paix. F. ce mot dans notre Dicttonnaire as
Biographie et d^Bistoire.
JUGE d'instruction, magistrat qui, dans cha(|ue arron-
dissemti.t, est invesà de la mission d'instruire, c-â-d.
de recueillir tous renseignements, entendre tons témoins
et faire toutes constatations relativement aux crimes et
délits. Aux termes du Code d'instruction criminelle
(art 55), il devait être choisi parmi les membres du tri-
bunal civil pour trois ans, et conservait séance au juge*
ment des aluùres civiles, suivant le rang de la réception.
Un décret du ^^^ mars 1852 permet de confier les fonc-
tions de l'instruction aux juges suppléants. V. Delamorte*
Félines, Manuel du juge d'instruction, 1836, in*8«;
Do verser , Manuel du juge d'instruction , 2" éditi 1844,
3 vok in-8°; Cassassoles, Guide pratique du juge ^in-
struction, 1855, in-8».
JUGEMENT. En Psychologie, le Jugement est un fait
par lequel on affirtne qu'une chose est ou n'est pas, on
bien qu'elle est d'une façon et non d'une autre. On s
donné aussi le nom de jugement h la faculté qui produit
le fait et au résultat du fait ; mais la faculté n'est autre
chose que l'intelligence elle-même, et le résultat, la
croyance qui en est l'effet Le caractère essentiel du ju-
gement est l'affirmation ; le mot qui donne la vie à la
proposition est le verbe. Tout {ugement renferme trois '
notions : celle de l'antécédent, substance ou cause, être
modifié ou agissant, le sujet; celle du conséquent, mode
ou acte, effet souffert ou produit, Vattribut; celle da
r<tpport, exprimée par le vorbe, lorsque le Jugement est
énoncé par des mots. Le Jugement entraîne irrésistible
ment à croire que ce qui a été jugé est ou eonste, et à as
l'affirmer. C'est cette affirmation mentale que le moi
porte au dehors à l'aide des signes, sous la forme de
proposition; elle conduit à la certitude. — On distin^e
dans le Jugement la matière et la forme, La maitire
varie, parce qu'elle peut provenir d'une notion concrète
et individiAelle , ou abstraite, générale, universelle; ce
qui donne lieu à autant d'espèces de jugements. La forme
ne varie Jamais, elle contient toujours l'affirmation. Be»
JU6
1131
JUN
]aUv«aMot à la fonne, les jagaaenu doivent être consi*
dârés 80U8 aoatre points do rue; le dernier toutefois
B'est pas exciluiTemeni formel : 1* par rapport à Vexte»-
non, aelon le nombre des objets compns dans Tidôe;
c'est le point de Tue de la quantité; il donne lieu aui
logaments généfraux, partùnUiêrs , indmduêU; 3° par
rapport à la compréhension, selon que les idées peuvent
être ou ne peurent pas être unies; c*est le point de vue
de iagiMiZtM; les lugements sont alors affirmatifs, né-
aatifSy indâtêrminis; 3<> par rapport à la relation^ diaprés
te rap|>ort entre les objets que le Jugement rapproche ou
sépare; si Ton affirme purement et simplement» le Juge-
nent est catégorique: si l'on affirme avec condition, il
est hifpothétique^; si 1 on affirme la nécessité de choisir
par voie d'élimination entre deux attributs qui s'ex-
cluent, il est disjonctif; 4^ sous le point de vue de la
modalité; celle-ci désigne le rapport du Jugement à l'es-
prit, ou la manière dont œlui-d conçoit l'existence des
cboses, ce qui donne lieu aux Jugements problémati-
fan, auertoirêM, ajKMJictigrtiM. — On distingue encore
les jugements en t 1* anatvPiques, quand Tattribut est
nécessairement contenu dans le si^et; 2<* s\fnthétiques ,
quand il n'y a pas identité entre le sqjet et l'attribut,
ils sont substantif ij quand ils affirment simplement
Tedstence ; aUnbuX^s , quand ils affirment la conve-
Qince ou la disconvenance d'un suiet par rapport à une
qualité; primitifs ovi spontanés, réfléchis ou Sêcondairss,
— Le sens {philosophique du mot jugement explique cer-
tûaes locutions, comme : c'est un homme de bon , de
grand jugement, ou dénué de jugement, c-à-d. qui saisit
bien ou mal les rapports des choses»
En Droit, un. jugement (du latin jus, droit, et dicere,
dire) est une décision émanée de l'autorité Judiciaire ;
c'est le nom doané à toute décision des tribunaux infé-
rieurs, celles de la Cour de ûissation et des Cours impé-
riales sont des arrêts^ A la suite d'une enquête, la déci-
sion d'un seul Juge est une ordonnanoe. Les Jugements
en 1** instanœ ne peuvent être rendus par moins de
ffoia Juges, à peine de nullité. Les Jugements émanent
de Is iuridictioQ criminelle ou de la Juridiction civile;
dans le l*' cas , ils sont ou de simple police ou correc-
Uonnets; dans la %\ on les distingue en jugements con-
tradictoires, par' défaut^ et, au criminel, par contumcœe,
frwisoires, préparatoires, interlocutoires, définitifs. On
diatiogoe aussi l«s jugements sur requête, ceux d'expé-
dknts, et ceux ^^homologation. Ils sont en premier ou
f» dernier ressort. Le ju^ment doit contenir les noms
'^jiiges, du pTocureur impérial ou de son substitut,
s'il a été entendu, ainsi que des avoués; les noms, pro-
fessions et demeures des parties, leurs conclusions, l'ex-
position somniaire des points de fait et de droit, les
motils et le dispositif (Coos de Procédure^ 141). Les Juge-
ments ont pour eflet de lier les parties entre lesquelles
ils sont rendus s c'est là l'autorité que la loi attribue à la
chose Jugée (Code Napol., 1350 et 1351). V. Poncot,
Trotté des jugewnents, 1822, 2 voL in-S"». R.
iMiMENT n'awooa (Le), poème allégorique et satiriquo
du im* siècle. Deux demoiselles se querellent pour le
mérite de leurs amis. Blancheflor aime un clerc, et Flo-
noce un cbevaUer. Elles portent leur différend devant
te trS>unal du Pieu d'amour. Bien des oiseaux parlent
tour à tour, les uns pour les clercs, les autres pour les
cherallers. Enfin le roi décide que la querelle se videra
par un combat singulier entre le rossignol , défenseur
des clercs, et le papegaux (perroquet), défenseur des
cbevaliers. Le papegaux rend son épée, et la cour décide
qœ les clercs ont plus de vaillance et de courtoisie que
tes chevaliers. Floiwice en meurt de chagrin. — Le même
SQjet a été traité par deux autres auteurs sous les titres de
Florance et Blanchefleur et de Buéline et Êglantine,
V. Bistmre littéraire de la France, t XIX. H. D.
JvcmiNT DEBiiin, Jugement solennel et général que
Jésos-Christ, suivant la doctrine catholique , doit faire
ém vivants et des morts, au dernier Jour, à la consom-
mation des siècles. — Parmi les œuvres d'art qui ont
pour si^et le Jugement dernier, on peut citer un bas-
rdief du portail de Notre-Dame de la Couture, au Mans;
d'auu^es au grand portail de Notre-Dame de Paris, de la
ouhéiirale dVLutun, del'égUae SWean à Nuremberg; les
peiaturas d'Ôrcagna au Campo-Santo de Pise; le tableau
de lean Cooain an Musée du Louvre, et, à Rome, la
liesque de Micbel-AiigB dans la chapelle Sixtine, dont il y
a one belle copie« par Sigalon, au Palais des Beaux-Arts,
à Paris. — Le Juiçement denier est un sm'et trop su-
biinie ei tiop terrible pour la peinture; aussi les plus
puds artistes, sans en eicepter MicheUAnge, y ont
écbood. One mào» dn Galvràre excitera la plus donkm*
reuse émotion, et il n'est pas très-rare que des artistes
éminents y aient réussi; xnais devant ces tableaux dits
du Jugement dernier, on n'est frappé que de l'imagina»
tion du peintre : le cœur et l'esprit restent froids, an
lieu d'être oonsteméa de respect et de terreur. C D— t.
JDGEM ENT DE DIEU. V, EPSEUVES JimiOAISES, daUS nOtTS
Dictionnaire de Biographie et dBistoire.
JUIFS (Langue et Littérature des). F. H<braiqiib.
JDIFS (Relifflon des). F. Jdifs et Moisb, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
JUILLET (Colonne de), V. Colonnes mondiientalbs,
dans notre Dictionnaire de Biographie et dffistoire.
JULES, monnaie d'argent des États romains, ainsi
apoelée du pape Jules II, et valant environ 30 centimes^
JUMELÉ , en termes de Blason , se dit d'un sautoir^
d'un chevron ou de toute pièce formée de deux jumelles*
JUMELLE , terme de fiisrine. V. Gabdron.
JUMELLES , en termes de Blsson, se dit de deux pe-
tites fasoes, bandes, barres, etc., parallèles, qui n'ont que
le tiers de la largeur ordinaire.
JUMIÉGES (Abbaye de), k 27 kilom. O. de Rouen, près
de la Seine. A l'époque où S\ Philibert fonda un monaa-
tère en cet endroit, en 655, on y voyait deux églises con-
tigués, consacrées l'une à la S^« Yierge, l'autre à S^ Pierre.
En 851 , les pirates normands saccagèrent et brûlèrent
le monastère, ainsi que l'église Notre-Dame. Guillaume
Longue-Épée fit reconstruire le couvent et réparer l'église
en 940. Sur l'emplacement de celle-ci, on bâtit plus tard
un autre édifice, qui fut consacré en 1067, et ou se troïk-
veni quelques portions con^rvées de l'ancien. La noi^
velle église Notr&-Dame est celle dont on admire aujour-
d'hui les ruines : une partie considérable en fut abattue
à la Révolution, avec tout le couvent, dont il ne sul>-
siste que la maison du portier, convertie en maison
d'habitation; mais les portions qui restent sont heureu-
sement les plus anciennes, et en même temps les plus
remarquables; les constructions en ogive sont en ruines,
mais les tours normandes ont échwppé k la destruction.
L'église abbatiale, qui avait 87 met. de longueur sur 21
met. de largeur, est un bel exemple de la simplicité du
style architectural des anciens Normands, ses fon<Uk-
teurs : les ornements y sont trte- rares. C'est ôaxïs les
magniflcpes arcades placées sous la tour centrale, dans
la nef si lonçie, si large et si haute, dans l'élévation de
la façade occidentale, qu'il faut chercher le secret de
l'effet imposant produit par l'édifice. La façade , corn*
f>létement unie, a le caractère roman ; son arcade circu-
aire, dépourvue de toute espèce de moulures, repose
sur deux colonnes. Aux angles de cette façade sont deux
tours de forme octogonale, qui avaient 51 met. de hau-
teur, et entre lesquelles existent de légères différences.
Is. tour centrale est eh partie ruinée. Le toit de l'église
a entièrement disparu. Les arcades de la nef reposent
sur des piliers auxquels sont attachées des demi-co-
lonnes ; tous les chapiteaux sont unis; quelques-uns ont
conservé des traces de peintures imitant grossièrement
des feuilles. On voit de larges galeries à la partie sup^
rieure des colhitéraux. Quant à l'égUse de S*-Pierre, sea-
proportions étaient beaucoup moins vastes que celles de
Notre-Dame, parce que, lors de sa reconstruction, on
n'en avait conservé que la partie d'en haut : elle n'avait
plus d'issue au dehors, et l'on y entrait par l'autre
église, au moyen d'un corridor voûté, de 5 à 6 met. de
longueur. Les deux églises de Jumié«es renfermaient
plusieurs tombeaux qui ont été détruits, entre autrea
celui des Enervés (V. JoMiéGBS, dans notre Dictionnaite
de Biographie et d'Histoire) ^ rapporté sans raison au
vm* siècle, et qui ne remontait certainement pas au delà
du xiii^ LÎb cloître, b&ti en 1530, renfermait la salle des
sardes de Charles VII, longue de 33 met. et large de
il met. , seul reste des appartements que ce roi avait
occupa pendant son s^our à Jumi^^es , où mourut sa
maîtresse Agnès Sorel. V. Deshays, Histoire de Vabbaye
noyale d» Jumiéges, Rouen, 1820, in-8<'; Langlois, Essai
sur les Enervés de Jumiéges, 1838, in-8^
JUNIUS (Lettres de). V. notre Dictionnaire de BiO"
graphie et d Histoire.
JUNON. Les monuments antiques représentent cette
déesse sous les formes les plus nobles. Son visage a les
traits de la jeunesse avec la maturité de la beauté; il est
doucement arrondi sans être trop plein , et commande
le respect sans avoir rien de rude : le front est entouré
de cheveux .qui sont arrêtés obliquement par derrière i
les yeux regardent droit en avant. Junon est couronnée
de la Stéphane ou diadème; lea coiffures qu'on y ajoute»
s\m
1132
JUS
le polo$ , to calalhas, le modios , ne font qa» mieux
sortir son caractère de diTînité du Ciel et de la Nature.
Vhimation ou voile gui Teoyeloppe , le cMUm dont elle
est yetne et qui ne découvre que le cou et les bras, im-
priment à son maintien, par là sévérité de leurs drape-
ries, un caractère de réserve et de pudeur qui sied à
l'épouse et à la matrone. Polyclète passait pour avoir
fixé ce type : il avait fait une statue colossale en or et en
ivoire pour le temple ériflcé à Junon entre Argos et My-
cènes ; la déesse tenait d'une main une grenade, sym-
bole de la Nature, et de Tantre un sceptre, à rextrémité
duquel était perché un coucou. Le paon fut aussi un
attribut de Junon. Plusieurs impératrices romaines affec-
tèrent de se faire représenter sous les traits de Tépouse
de Jupiter : aussi, la plupart des statues de Junon que
nous possédons sont des statues dlmpératrices. B.
JUNTE. V. notre Dictùmn. de Biog. et d*Bistoire,
JUPITER. L*art antique nous représente ce Dieu, tan-
tôt debout et nu, tantôt assis sur son trône, et la partie
Inférieure du corps vêtue. Le Jupiter d*01ympie, osuvre
de Phidias, était couronné d*olivier sauvage, tandis que
celui de Dodone avait une couronne de chêne. L'attribut
ordinaire de Jupiter était la foudre, gu'il tenait à la main
ou faisait porter par un algie placé à ses côtés. Il est
Teconnaissax)le en outre à une patère ou coquille ^ au
sceptre, ou à la déesse de la victoire qu'il tient à la main.
Ses cheveux, relevés sur le front, retombent en ondes
serrées sur les côtés, et ont quelgue ressemblance avec la
crinière du lion. Les plus célèbres temples de Jupiter
étaient ceux d'Olympie, d'Âgri^nte, et de Rome (V; Ga-
KTOLB, Oltmpib, dsiis uotro Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire, et, dans le présent ouvrage, l'art Acai-
«shtb). Au temps des Romains , on fit plusieurs statues
colossales de ce dieu : tels tarent le Jupiter roscoti, élevé
par Sp. Curvilius, l'an 482 de Rome, avec l'airain enlevé
aox Samnites, et le Jupiter une l'empereur Adrien fit
éri^ à Athènes. Les amours ae Jupiter ont fourni aux
artistes le sujet d'un grand nombre de compositions.
F. WsBlcker, Sur le temple et la statue de Jupiter à
IXympie, en allemand, Leipzig, 1704; Seebenkees, Sur
U temple et la statue de Jupiter d Œympie, en allemand,
Nuremberg, 1795; Hans, Essai sur le temple et la statue
de Jupiter d Olympie, en ital.. Païenne, 1814; Klenze,
Sur le temple de Jupiter Olympien à Agrigente, en alle-
mand, Stuttgard, 1821, in-4°; Émeric David, Jupiter,
recherches sur ce Dieu, sur son culte et sur les monU"
ments qui le représentent , Paris , 1833, 2 vol. in-8^ B.
JURANDE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
•graphie et d* Histoire.
JURASSIEN ou BRESSAN (Patois), dialecte parlé dans
les campagnes an midi de la Bourgogne, dans les an-
ciens pays de Bresse, de Bugey, de Val-Rom^ et de
Dombes (département de l'Ain, et partie de ceux de
Saône-et-Loire et du Jura). Il participe du celtique, de
Fallemand, du latin, du français, et aussi de l'idiome
bourguignon : certains indices révèlent l'arabisme dans
le patois des Burrins, habitants du village de Boz au
bord de la Saône, et que la tradition fait dmcendre d'une
colonie de Sarrasins. Voici un exemple de cet amalgame,
emprunté à un noél bugiste (de Nantua) :
Venian don dar, o tare Un itranzo
Venant da ciel, 11 serait bien étrange
Qnt votufate no çMcona,
Qu'il voolût nous tromper.
Venian s'éloigne peu du latin ventens; qu'i voluisse a
bien detl'analogie avec quod voluisset ; dar est pur bour-
guignon; itranzo est provençal. Un des caractères dis-
'ânctifs de ce patois est le retour fréquent de la termi-
naison 0 prononcé grave et très-allongé ; cette terminaison
1M change en a long et ouvert dans le patois du Bugey.
Le paysan |urassien parle un langage peu figuré; il ne
connidt pas les métaphores, et se contente de dire sim-
plement sa pensée. L'habitant de la plaine prononce
mvec une volubilité qui contraste avec la lenteur de son
geste ; le montagnard, au contraire, a des manières vives
et une parole pesante. La littérature du patois bressan
n'est pas riche : cependant Jacques Brocard de Mon-
taney, conseiller au présidial de Bourg, qui vivait au
XVII* siècle, a laissé des chansons, une comédie, VEn-
ràlement de Tiwin, et des noéis qui, avec ceux de Bor|on,
forment un recueil assez intéressant. Des Noèls bressans
ont été publiés en 1845. P— s.
JURAT, r. ce mot dans notre Diettonnasre d» Bùh
fraphie et d^ Histoire.
JURATOIRE (Caution), serment qae fait quelqu'un en
Justice de rmésenter sa personne ou de rapporter une
chose dont if est chargé.
JURÉ. F. ce mot dans notre Dictionmasre de Biogra-
phie et d'Histovre,
JURIDICTION. V, CovpéTBRCB.
JURISCONSULTE (du latin jus, gén. iiirû, droit, et
consultus, savant, expert, qui a médité), celui qui est
versé dans la science du Droit et des lois, et qui fait
profession de donner des conseils et avis sur cette ma-
tière. Dans l'ancienne Rome, les Jurisconsultes étaient
distincts des avocats plaidants, et leurs décisions fai-
saient autorité : ainsi, Valentinien m et Tbéodose le
Jeune décidèrent oue les ouvrages de Papinien , de
Gains, de Paul, d'UIplen et de Modestns auraient force
de loi. Le Digeste nW quHm recueil d*avis des Juris-
consultes. L'action des Jurisconsultes a été moins puis-
sante en France, quoique considérable encore : sous
l'andenne monarchie, Cujas, Domat, Pothier, Duaiou»
lin, Lo^rseau, Lauriers, firent les plus oâèbres. Le Code
Napoléon est sorti des travaux ae tpielques Juriscon-
sultes , et ce sont encore aujourd'hm des savants en
Droit qui expliquent les lois, qui en recherchent l'espri^
et préparent ainsi les décisions de la Justice.
JURISPRUDENCE, mot qui s*entend de la science du
Droit, mais plus exactement de l'art d'appliquer à la
Sratique la connaissance des principes. A un autre point
e vue, la Jurisprudence est l'uniformité non Inter-
rompue de plusieurs arrêts sur des questions sembla
blés : c'est en ce sens qu'on dît la jurisprudence des tri'
bunaux, la jurisprudence est fixée sur tel ou tel point.
Le soin de fixer et de maintenir la Jurisprudence en
France appartient à la Cour de cassation.
JURISTE , celui qui écrit sur les matières de Droit.
j*jn Y ( F. ces mots dans notre Die-
JUSSION (Lettres de )• j fgiS^t ^'"^"^^ ^
JUSTAUCORPS (pouritisto ai» corps), vêtement étroit,
à manches, qui serre le buste et descend Jusqa*aux ge-
noux. Ce mot était en usage surtout au xvn* siède.
JUSTE (du latin jus, droit). Cest le caractère de ce
qui est conforme aux règles étemelles de la raison : 6tre
Juste, c'est respecter tous les droits, et en particulier
ceux de la nature humaine; être injuste, c'est les violer.
Le Juste, en Morale, donne l'idée de l'absolu ; il est dans
la consdenoe de chacun, fixe. Invariable et indépendant ;
il trouve son application dans )e>. justice^ R.
JUSTE, vieux mot désignant un vase ou flacon de table,
en forme d'àiguière, avec un couvercle et des anses. On
faisait de ces vases en or, en arj^t. et surtout en étain.
Une petite Juste s'appelait moa iusUiette.
JUSTICE. Elle consiste à traiter chacun selon son
droit , Justitia m suo cm<iue trUbuendo (Cic.) La Jastioe
est ordinairement regardée comme le droit écrit, et dont
l'exécution peut être exigée par la contrainte; c'est ce
oui la distingue de Yéquiti, qui comprend tel ou tel
droit qui peut n'être pas inscrit dans le Code, mais qui
est reconnu par la consdence, au-dessus de toute con-
vention. Cette distinction vient de ce que la loi potitim
peut n'être pas exempte d'erreur; ma», au fond, la Jus-
tice et l'équité sont identiaues dans leur essence. La jtis-
tice se distingue aussi de la chariU ou a$nowr, en ce que
oelle-d a des degrés et que la Justice n'en a pas. La
charité peut conduire à Vinjustice;^ mais, si elles diffè-
rent, elles doivent s'unir pour éviter la faiblesse d'un
côté et la tyrannie de Tautije. Elles se complètent par
ces deux préceptes oui formulent la loi du juste dans
toute son étendue : m fais pas à oufrut ce que tu ne
penses pas gu'uti autre ait le droit de te faire ; fais pour
tes autres ce que tu désirerais que les autres lissent pour
toi, — A ridée de Justice se Ile nécessairement celle de
mérite et de démérite, qui annonce une sanction ( F. M£-
Rrrs). U appartient aussi h ta Justice de réaliser cette sanc-
tion; c'est ce que fait ISijustwedistrUnUioe. La sodâté ne
peut y satisfaire que d'une manière très-limitée, et Isl jus-
tice aistributive. se confondant nécessairement avec la
sagesse et la miséricorde de Dieu, devient la justice dî'
vine. Hais dans ce monde 11 y a \ti justice humaine, qui se
règle, autant que le permet notre nature, sur la pre-
mière. La justice kumaine rég^e les rapports des hommes
entre eux , et assure la conformité de leur conduite ré-
ciproque avec l'ordre dvil et les lois positives : elle est
distrioutwe et commutative. Toute Justice s'administre
au nom du souverain, quelle que soit la forme de la
souveraineté. La Justice distributive a pour but de pro-
téger et de récompenser chaque memrae de la société,
suivant sa position sociale et son mérite; de punir, sui-
JDS
1133
JUX
lant la gim?ilé du délit. La Jaitiee oommotaftive Tègle les
npporu des ciuqrens entre eox , soiTant les drmts de
ebioiD. Le povre&r de reodre la lostlce étant néoettel-
lement délégaé par le souTerain, la Justice prend qiiel-
fMfoia le nom de fwndictkm, et, selon la nature da
pMfoir attriboé an magistnt, on dit : JusUeê eioile, /«f-
tia eriminêlU , Juêtke conttUair§, etc. R.
JcsncB, déesse. i V. notre DicHofuiatr» lU Buh'
josnci (Chambre de). \ graphk 0t (THittoin.
nsncM (Déni de), v, Ùtm db joshce.
josncB (Droit de). F. notre Dicttonnoire de BiogropM»
d et Histoire.
nsncE (Hante Gonr de). F. Haute Goctu
nsncB (Ut de}. F. Lit m lumci, dans notre DicHim-
soin da Biographie et ^Histoire,
nsncM nttain de). F. Bator a sioima.
josncB (Ministère de la). F. MunsTlniB, dans notre
Dictwmturê do Biographie et d! Histoire, page 1803,
col. 2.
fcsncB (Palais de). F. Palais de josnce.
JUSTICE ns CABunET. F. Gabinbt.
JUSnCB DB PAIX. F. JWB DB PAIX.
JUSTICE «ARTTIIfB, laUTAIBB. F. MASmilB , MlUTAnB.
JUSTIFICATION, en termes de Théologie, passage de
rétat de péché à l'état de Justice. La Justification est
reffst des sacremeots de Baptême et de Pénitence, et de
riofosion de la Grâce. Les protestants la fondent sur la
ki nale, les cathoUqnes sur les bonnes oBuvres Jointes à
Itfoi.
JusnncATioH, en terme de Typographie, longueur des
ligDes; éDe est iixée, pendant tonte la durée d*nn ou«
vrsge, par la dimension du composteur (V. oe mol). -*
Lss fondeun en caractères donnent le nom de /us <4l0e*
tion à Topéntion qui donne la même longnenr à tentée
les lettres fondues, et qui s'exécute au moyen d*nn Instm-
mentjmelé ooiipotr.
JUSTINE, en italien Ghutina, monnaie d'argent de
Venise, valant 5 fr. 9Î c.
JUSTINIEN (Code). F. Gode et JosnmBii, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d^Histoire.
JUXTAPOSITION, terme de Grammaire appliqué aux
mots composés dont les éléments ne se sont pas fondus
intimement les uns avec les autres et consenrent plus on
moins intacte la forme qu'ils auraient s'ils étaient déta-
chés. Cest ce qui a lieu presque sans exception en fran-
çais; ainsi, les mou petit-iait, petii^maitre, bUme^eing,
chef4ieu, chef-d^œuvre, cAoi*-/lêtir, Aorf-d'amers, aprèO'
dinie, partout, pourtant, cependcuU, ots-dH^tt, près-
qu'ile, porte-^roix, porto-drapeau, tire-bourre, pommo
de terre, dorénavant , ^tc., sont formés par Juxtaposition.
Les langues anciennes offrent aussi de nombreux exemples
de ce procédé; par exemple, en latin : prœterea, gtiotidd-
quidem, namque, eUnitn, agricultura, legislator, pater-
famUias, etc. Les verbes dans la composition desquels
entre une préposition n'ont réellement que des éléments
Juxtaposés. Enfin, doivent être considérés comme formés
par Juxtaposition de leurs divers éléments les mots com-
posés dont les parties composantes, si elles étaient déta-
chées, seraient lointes les unes aux antres |>ar une con-
jonction copulative, par exemple : tragi-eomique, c-à-d.
tragique et comique; a/f^lo-français , c-à-d. anglais ei
français, ou forme à la fois d'anglais et de Ihmçais, etc. P.
K
EAL
EAL
K, endème lettre et 8* consonne de l'alphabet tnn^
çàt. Cest une gnttorale dérivée du « (Icappa) des Grecs,
et ooe nous n'emplirons guère que pour des mots tirés
de oogues étrangères. Les Romains paraissent ne s'en
être i^vis qu'à partir du dernier siècle de leur Répu-
blique, et l'on prétend qu'elle fut introduite par Salluste :
hieo qu'on le troure dans certains mots [Kalendm,
Kelwnnia, Kapnt, Kaius, JBTcb^o), (>uintilien se refuse
à Tadmettre comme lettre latine. Priscien voulait qu'on
M remplc^àt qae dans les mots dérivés du grec. Les ca-
kmniateun étalent marmiés au front d'un fer rouge por-
liDt un K. Sur les médailles antiques, K est pour CAar,
Qouâe, CoÊupaeine, Carthage, etc. -^ Quelques auteurs
QDt fait de cette lettre un caractère numéral , valant 250,
Cl, eo le surmontant d'un trait horixontal (C), 250,000.
Qwx les Grecs, x' valait 20, et ,x 20,000. — An m^yen
Ige, Ghariemagne signait K pour Karl. Dans les chartes
et diplômes, on troure souvent les abréviations suivantes :
KR, chorus; K R. C, eoro doittu; KRM«, cartnen; KS,
chaos; JL T.*e€Êpite tonsus, etc. Le K a été employé
poor C duis Kaiendrier, Kwrolus, etc. Au temps de Pi^
qnier, il remplnct^t qu. Il a été la marque des monnaies
inppées à Bordeaux.
Daos les langues gsrmaniques, le K s'emploie à la place
du C, sartoat lorsque, par l'effet de la voyelle qui suit
immédiatement, cette dernière lettre ne pournut con-
lerver son caractère de gutturale et deviendrait sifflante.
Le K initial peat ne pas appartenir à la racine du mot,
et œ représenter qu'une simple aspiration : ainsi , en
sablais, il est muet dans les mots où la consonne N le
soit (l9M9, knife, knit, knoll, etc.). (3iez les Serbes et
la RuKea, qoi donnent an C la valeur de notre S, le K a
ssturellement on fréquent emploi. B.
KAABA (La). 1 r . Gaba, Gabalb, dans notre Diction-'
KABBALE ( La), t wsire de Biographie et d: Histoire.
KABYLE (Langue). V. Bnetes.
KACHEMTR (Langue dn pays de). V. CAcmnai.
KACHIQUEL ndiome). V. Mbxiqub (Langue du).
KAFTAN. F. Gafbtar.
KAIMAKAlf • F. CaIvacah.
KAKATOES. V. Cacatois.
KALâDOSGOPE (du grec haios, bean, eidos^ image,
CI sfcoipéjii, vegarder). Jouet d'enHuit inventé en 1817 par
l'Écossais Brewster. Cest un tnbe de carton on de métal,
fermé à une extrémité par un obturateur, dont le centre
est percé d'une petite ouverture servant d'ocidalrei
l'antre extrémité présente une capacité fermée à llnté-
rieor par une lame de verre transparente, à l'extérieur
par une lame de verre dépoli, et contenant divers petits
objets, comme des firac^ents de verre colora, des
feuilles, des morceaux de dentelle, etc. Le tube est nmi
intérieurement de lames de verre plus ou moins incluées
les unes à l'égard des autres, et dans lesquelles ces
objets peuvent se réfléchir. Quand on place l'instrument
dans une direction horizontale et qu'on regarde par Tocn-
laire, on aperçoit des Imans variées, qui changent sans
cesse si l'on déplace les oojets renfermés dans la calue
vitrée en imprimant au tube un mouvement de rotation.
Les dessinateurs en broderies et en toiles imprimées se
servent du kaltidoscope comme producteur de deaslns
modèles, quils peuvent varier à l'inlini. — L'idée, pre-
mière du Kaléidoooope n'appartient pas à Brewster : on
la trouve dans la Magie naitureUe de Porta (Naples, 1558)|
dans VArs magna lucis et umbrœ du P. Kircher (Rome,
1646), et dans la ifoi^ta tMitvsrso/tf natures et artis dn
P. Schott (Wttrxbourff 1657).
KALEWALA, épopée nationale des Finnois, qui a pour
sujet les guerres des hsbitants du pays de Kalewa (Fin-
lande) et des Pohiolas (Lapons). Des fhigments en
avaient été recueillis et publiés au siècle dernier et an
commencement de celui-ci : L5nnret en a fidt une nou-
velle collection, et les a publiés en 1835 sons le titre de
Kalewaia (pays de Kalewa); l'édition de 1840 contient
22,800 vers, partagés en 50 runes ou chants. Une autre
édition ra a été donnée par Schlefner, à Helsingfors,
1852. L'opinion générale fait remonter Jusqu'au xi* nède
l'origine de ce poème demi-païen, demi-chrétien. Noua
en avons une traduction française dans l'ouvrage de
M. Léonzon-Leduc, la Finlande^ son histoire primitim,
sa mythologie, sa poésie épique, etc., Paris, 1845,1
vol. in-8*. ♦
KALILA et DIHNA. V. Gaula.
KALMOUKS (Langue des), une des langues tartareiii
Bien qu'elle renferme un grand nombre d'expressions
étrangères au mongol, les mots qui forment le fond des
deux idiomes ont une dérivation commune. Leur i^ystème
KEM
nu
Km
^Noiautiad est à peu près le mftne » ienleoieBt lekal»
■Mmli adee. fonMs phis simipIeB pour U déclinaiBOo dee
— befnntifi, et une eoi^ugaiioa pliu safante. Son alphabet
■e dMn anni ém mongol que par Taditition d*an petit
nombre de lettres. — Les Kalmouka ont une fittémtore;
Pirad lea ouna^ss ou*eUe oomprend, on cité : te Yêt'
êunchi tooli (Miroir du monde), sorte de cosmographie
abrégée, oft les idées des Hindous su^ la constitution de
l'oniTers sont fidèlement reproduites; le Bogdo (fssnir-
khtmf oamrage moral, prenant son titre d*un personnage
iidmienx qui y joue le principal rôle ; VOuchandeur^khanf
onrrage mythologique; Ooh4ehikitu, roman mytholo*
aique. F. Bergmann, Voyagé eh$x 1er KalmfmkSf trad.
de Tallem. par Moris, Chfttiilon-«ur-Seîne, 1825, in-8%
KÂNARA (Idiome). V. KAanAnQOB.
• KANOUBI (Langue), une des langues africaines, parlée
dans le Bomou. La déclinaison a cmq cas. Il v a habi*
tueUement absence dindication des genres. L'article se
confond avec le pronom déasonatrafif . Les vois des verbes
sont nombreuses; on remarque un mode négatif, comme
en copte.
KAimSIlE, philosophie de Kant. T. Aiuoiam»! (Phi-
hnophie).
KARLI (Temple de), près de Bombay. Il est coiMacré
à Bouddha, et formé par une suite de grottes distri«
bnées autour d'un sanctuaire prindpai. Ce sanctuaire a
39 met. de profondeur, 20*,S^ de laqseur, et la voûte en
est soutenue par des colonnes reposant sur des éléphante,
lesouels portent en outre divers personnages. De tous
c6tes sont des' bas-reliefs représentant des scènes de la
vie de Bouddha, et des inscriptions accompagnent ces
fleures. Un péristyle sculpté donne entrée dans le tem-
ple. Les grottes contiennent un grand nombre de pièces
destinées à Thabltation des prêtres et des gens de service.
KARNAC (^Ruines de). V, Tutus,
KABNATIQUE (Idiome), un des dialectes indiens, de
la famille dravidienne {V, ce mot), Qn dit aussi Kamon
taca et KoÊMra. Il se parle dans le centre du Dekkan, et
a*écrit avec le caractère télinsa on le caractère malabar.
V. Thomas Estevans, Arte daiinffua canarinaf Goa, 1640,
in-8*; W. Carey, A Grcunmar of the kumata language,
Serampour, 1817, in-8«; J. Ifackerell, A Grammar ofthe
camataca ianguag9t Bladras, 1820, in-4^, D existe un
Dictionnaire de cette langue par Reeve, Madras, 1834-32,
4 vol.
KARÛUBAHL, monnaie d*Alger. 80 valent 2 fr. 70 c.
KAS, sorte de tambourin des habitants du pajrs d'An-
gola, fidt d'un bloc de palmier creusé, et recouvert d*une
planche au'on frappe avec une baguette.
KASSuTO, instrument de musique des habitants du
Congo. C'est une pièce de bois longue d'un mètre et
demi environ, creusée, et recouverte d'une planchette
qui présente, de distance en distance, de petites tranches
sur lesquelles on racle avec un b&ton.
KAwI (Idiome), ancien idiome de Tlle de Java, où
il est la langue littéraire et sacrée. Cest une corrup-
tipn du sanscrit, dans laquelle celui-ci est privé de
ses inflexions et a pris en échange les prépositions et
les verbes auxiliaires du Javanais vulgaire. Le kawi,
qu'on parlait également à lladura et à Bali , cessa d'être
en usage au xiv* siècle de notre ère : sanscrit par sa no-
menclature, il a généralement la grammaire du Javanais
et des autres langues malaises. Sa littérature est riche,
mais elle est en grande partie une imitation de celle de
rinde; au nombre des ouvrages qu'elle comprend, on
cite : le Kanda, poëme dont l'original parait être perdu,
mais dont il reste une traduction en javanais, et <ïui re-
Eréaente la lutte des divinités indiennes avec les divinités
idigènes; le Brata Youdha (la Guerre sainte, ou la
Guerre du malheur), poëme de 719 stances de diverses
rimes, composé au vui* ou au xii* siècle par Pouseda, qui
en emprunta le sujet à l'épopée indienne du Mahabhc^
rata; le Manék-Maya (l'Homme), poème où est exposée
la cosmogonie des Javanais, d'après le dogme boud-
dhique; le NUisoitra, traité de morale du xii* ou
iuii* siècle. F. Guillaume de Humboldt, Sur la langue
kawi, en allemand, Berlin, 1836-40, 3 vol. in-4o.
KAZNEH, nom donné en Égvpte à la somme représen-
tée par 1,000 bourses de 500 piastres, environ 125,000 fr.
KEEPSAKE, mot anglais désignant ces livres élégam-
ment imprimés, illustrés et relia, qui se donnent en ca-
deau. Il signifie qu'il faut les garder (ka^) avec affection
{sake),
KEES ou KIS, nom donné en Egypte à une bourse de
500 piastres, environ 125 fr.
KEBIANGÉH, instrument à archet des Arabes. On en
dtathume plutiean sortes. La Kemâttgti^ nmmy, de la
taflle a*un violon ou d'un alto, est montée de 6 cordes en
bo^rvu et de 6 cordes en faûton : l'archet ne sert que pour
lee cordes en boyau, qui sont montées par qnartes, à
l'exception de la 3* et de la 4* qui son» à la tierce l'one
de l'autre; les cordes en laiton sont passées sous le
manche, et résonnent à vide harmoniquement. La Ke^
màngth^goux n'a que deux cordes : son manche est
cvlindrique de leur cOté; la table d'harmonie, au lieu
<f être en bois, consiste en une peaa de requin collée sui
les bords d'une noix de coco, qui forme le corps de Tin-
strument; les cordes sont accordées à la quarte, La Ke^
mângéhr-farkh ne diflère de la précédente que par son
accord, qui est d'une quarte plus élevé. ^ Les Turcs ont
trois instruments du même genre, quils appellent
Keman, AjakH-kema» et Sine^keman,
KSPnLWORTH (Château de), en Angleterre, dana le
comté de Warwick. Ce château, immortalisé par un ro-
man de Walter Scott, remontait au roi Henri I^, et fat
donné par la reine Elisabeth au comte de Leicester.
Cromwell le flt démanteler, mais les mines en sont
tot^ours magniflques. Le donjon, vulgairement appelé
IVNÎr de César, et dont les nnuaiiles ont en certains
, points Jusqu'à 5 met d'épaisseur, présente encore la
salle bioronale. longue de 28 met., sur 15 de large.
KENSINGTÔN (Palais de), palais situé à l'extrémité
ocddentale de Londres, dans le quartier de l'aristocratie.
Son architecture est irrégulière, et il n'a dHmposant que
ses proportions* Guillaume III l'acheta au lord chancelier
Finch, et, apH» lui, les reines Harie et Anne aimèrent à
y habiter. Les apparlenenta sont ornés de portraita et
de tableaux de prix; Kent a peint le grand escalier ei les
{>lafonds de plusieurs salles. Biais ce qui a fait surtout
a réputation de Kensington, ce sont ses Jardins, des-
sinés sous la direction de la reine Caroline, femme de
George n. Six portes, dont quatre ouvrent sur Hydc-
Park, donnent au public accès dans cette promenade.
KÉPI , sorte de casauette légère, en drap, un peu co-
nique, et avec une visière de cuir verni. Il fut d'abord
adopté par qudques corps des troupes françaisea en
Afrique, après la conquête d'Alger, puis se répandit dans
le reste de l'armée. On le porte en petite tenue pour
remplacer le shako.
KERATION, monnaie. F. notre Dictionnaire de Bio-
graiphie et d'Histoire.
KÉRADLOPHONE, Jeu d'orgue qu'on appelle aussi
Flûte à entailles. B appartient à la catégone des Jeux
ouverts à bouche. Son intonation est celle du huit-pieds;
mais le procédé des entailles peut s'appliquer à tous les
Jeux àtuyaux ouverts, quelle que soit leur intonation. Le
timbre distinctif de ce jeu, qui rappelle dans ses notes
graves celui du cor, est produit par un trou rond ou
carré convenablement disposé dans la partie supérieure
du tuyau. F. C.
KERMESSE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
KETCH, navire anglais de 50 à 200 tonneaox, à poupe
carrée, portant un grand m&t et un mftt d'artimon,
gréant ses voiles sur des cornes, et portant deux grands
focs sur son beaupré, qui est peu relevé.
KHAN, nom que les Orientaux donnent à tout cara-
vansérai situé dans l'intérieur d'une ville.
KHARl BOU. V. Indiennes (Langues).
KHILAT, nom commun à tous les dons que font les
sultans de l'Orient, comme témoignage d'honneur; ce
sont des pelisses, des ch&Ies, des turbans, des pièces de
brocart, des armes, des chevaux, des éléphants, etc.
KHOTBAH, prière musulmane pour le prince.
KIBITKA, voiture russe, munie à l'arrière d'une ciqxMe
en tresse, qui garantit contre l'intempérie des saisons.
KIN, instrument de musique. V. GmNB (Musique en).
KING (Les^. V. Chinoisb (Littérature).
KINNOR, instrument à cordes des Hébreux. Il avait,
selon Josèphe, 10 cordes, qu'on touchait avec un plec-
trum; cependant la Bible dit positivement que David
jouait du kinnor avec la main. Quant à la forme de cet
ustrument , les uns croient qu'elle était celle de notre
harpe ; les autres inclinent pour la guitare. S^ Jérème lui
attribue la figure du delta grec f A) et 24 cordes. U paraît
qu'il y avait une espèce particulière de kinnor à 8 cordes,
appelé Scheminith. B.
KIOSQUE , mot d'origine turque, désignant un petit
pavillon ouvert de tous côtés, placé sur une terrasse ou à
l'extrémité d'un Jardin, et consacré à prendre du repos
pendant les chaudes heures du Jour. On a imité coea
nous ces constructions, en leur donnant le plus souveni
KOR
1116
RYR
des loltB à la chinoise; mais notre climat exige qu'elles
ment presque toujours fermées. Vers i855, des kiosques
ont été placés dans les jardins publics et sur les boule-
nids de Paria, pour senrir d'abri à des marchands de
jouets d*enfants ou de journaux.
KITÂB EL-AGHANI, c-à-d. lAvrt dès poésies, recueil
nés-important de morceaux de la littérature arabe, dont
il existe un numuscrit à la Bibliothèque impériale de
Pferis et un antre à celle de TAcadémie des Sciences de*
S^Pétersbourg. L*auteur de ce recueil est El-Isfahanl.
Sylvestre de Sacy et Kosegarten en ont publié dea extraits.
KUFPBR. V. Cuma.
KLOSTERNEUBURÔ (Abbaye de), prèa de Vienne en
Autriche. Cette abbaye d*Augustins, Tune des plus riches
derEmnire autrichien, fut fondée au commencement du
in* siècle par le margrave Léopold le Saint. Les b&ti-
ments actuels du couvent ont été pour la plupart con-
struits en 1730 et agrandis en 1834 : ils contiennent une
im])ortante bibliothèque, un cabinet d'objets d'art et
d'histoire naturelle, une galerie de tableaux, et des caves
immenses. L'église, rebfttie à la suite d'un incendie en
1318, a conservé quelques débris des anciennes construc-
tions. L'une de ses tours date de 1584, l'autre de 1637. A
l'intérieur de Tédiflce, on remarque les stalles du chœur,
la cliaire en nuu-bre, une ch&sse émaiUée qui contient
les restes de S* Léopold, un autel à volets, exécuté en
1181 par Nicolas de Verdun, et recouvert de 51 plaques de
métal où sont niellés divers épisodes de la Bible, enfin
la couronne archiducale de Bfaumilien, fils de l'empereur
Maximillen II, reproddte exactement dans la couronne
colossale en cuivre qui surmonte l'une des tours de
révise. Le cloître, de 1285, renferme une croix de bois
sculpté, véritable chef-d'œuvre.
KTiOCT. ) y. ces mots dans notre Diction-
KNOW-WOTHING. ] nair» de Biogr. et d^Histoire.
KOBANG, monnaie d'or du Japon. Le vieux kobang
vaut 63 fr. 75 c, le nouveau 30 fîr.
KOBIZE , instrument de musique des Kirghizes. C'est
une espèce de violon ouvert à la partie antérieure, con-
care A Tintérieur, et monté ordinairement de trois
grosses cordes en crin de cheval. Pour en jouer, on le
tient entre les genoux : les sons n'en sont ni agréables ni
purs. Quelques Kirghizes savent imiter avec cet instru-
•ment le chant de plusieurs oiseaux.
KOBSA, instrument de musique en usa^ chez les
Vddo-Valaques. Cest une espèce de mandohne à cordes
de métal , qui sert de basse au violon et à la flûte de Pan.
KOGS, nom donné en Danemark aux terrains que l'on
gagnr^ SUT la mer en les entourant de digues.
KOLBACK, coiffure^ F. Colback.
KOLENDA, nom que l'on donne, en Pologne et dans
les provinces roumaines, à des cantiques ou chansons
populaires, chantés par des tfxmpee d'enfants devant les
fenêtres des maison» seigneuriales, la veille de Noél et
du nouvel an. Ce sont les Noëls de notre moyen &ge.
KOLOUCHE (Langue), langue parlée sur la côte N.-O.
de l'Amérique septentrionale. Phisteurs mots y commen-
cent et d'autres finissent par t2, comme en mexicain; dans
aucun on ne trouve l'r. Le nombre et le genre ne sont
pas indiqués par des terminaisons diflérentes. Plutôt que
d'emprunter dee mots aux étrangers, les Kolouches
créent des mots nouveaux chacune fois qu'ils ont à dési-
gner des objets précédemment inconnus.
KOKK , monnaie russe, en cuivre, valant 4 centimes
de notoe monnaie.
KOPFSTUCK, c-à-d. pièce à tête, monnue d'argent
autrichienne, vaJant 80 kreuzer ou 86 centimes et demi.
KOPPA, ancienne lettre grecque,, en usage surtout
cfaex les Doriens, et dont les Romains firent le Q. On ne
l'employa ensuite chez les Grecs que comme lettre nu-
n^rale, valant 00.
KORAN. V. CoRAH, dans notre Dictionnaire de Bio-
§raphu et d^Histoirei
KORÉISCH ou KORÉISCHITE (Dialecte), ancien dia-
lecte de l'Arabie, parlé à la Mecque et dans le Nord. II
fut, dit-on, primitivement composé d'hébreu mêlé à la
angoe des Joramites, tribu avec laquelle Ismaôl fit
sDianoe après son arrivée dans le désert. Par suite de
l'aflloenoe des pèlerins de diverses tribus qui venaient à
la Hsoque visiter la Càba, il s'appropria les expressions
les plus heureuses du dialecte de chacune, et acquit ainsi
une grande ahondanoe, sans perdre son hoinoMénéHé»
Au temps de Mahomet, il devint le fond même de la
langue arabe.
KOUAN, monnaie de compte de l'Empire d'Annam,
valant en moyenne 1 fr. 10 c.
KOUAN-HOA (Langue). F. Choioisb (Langue).
KOUFIQUE (Écriture). F. CocnguE.
KOURDE ou KURDE (Idiome), idiome de la même fa-
mille que le persan moderne. Il s'est, plus que lui en-
core, éloigné du zend. D n'a point de flexions pour indi-
quer les nombres et les cas, et manque également du
verbe substantif. Gonnne en hébreu, le sufel et l'attribut
s'énoncent sans l'intermédiaire dHine copule verbale. La
conjugaison n'a que deux temps, dont l'un n'est que l'in-
finitif précédé du pronom personnel , et l'autre répond à
l'aoriste persan. On trouve dans le kourde un certain
nombre de termes arabes, turcs, araméens et grecs, ap^-
portés psr les révolutions religieuses ou politiaues, mais
qui ne peuvent se confondre avec le fonds de la langue.
K. Garzoni, Grammatica e wcaJMario deUa lingua
kurda^ Rome, 1786, in-8<>; Rédiger et Post, Études
kourdes, dans le Jourtèol asiatique aUemand, Bonn,
1840.
KOURGANES, élévations coniques en t^re que l'on
rencontre au N. de la mer Noire et de la mer d'Azow.
Recouvertes de gazon, elles offrent une analogie frap-
pante avec les tumulus, les barrows, et les gtugals; il
est rare que leur hauteur soit moindre de 3 met. et dé*
passe 8 à 10 met. On croit que les Kourganes servirent
de lieux de sépulture. Peut-être les érigea-t-on dans les
endroits de campement des tribus nomades, ou pour
faire reconnaître la route à suivre au milieu des steppes.
KOURUJEN (Idiome), idiome parlé non -seulement
dans l'archipel des Koauiles, mais dans l'Ile Tairakaî , et
sur le continent asiatique, vers l'embouchure de l'Amour.
Dans les lies, on le nomme encore aifno. Il offine plusieurs
racines communes aux idiomes sibériens, et spéciidement
au samoyède.
KOURNA (Palais de). F. Thèbes.
KOU-WEN (Langue). F. Chjmoisb (Langue).
KRABS, jeu. F. Crbps.
KREBiLIN. F. Moscou.
KREUZER, monnaie allemande, dont la valeur varie
suivant les États, et dont le nom dérive de la croix (en
allemand kreuz ) dont elle porte l'empreinte. On compte '
ordinairement 00 kreuzer au florin, et 90 au tfaal^ : c'est
enviren 3 centimes 6/10 par kreuzer. En Autriche, le
kreuzer est une monnaie réelle, en cuivre, valant 4 pfen*
nings, c.-à-d. à peu près A centimes, et on frappe des
1/2 et des 1/4 de iureuzer : il y a aussi des pièces d'argent
de 3, de 5, de 10 et de 20 kreuzer.
KROXENTHALER, monnaie d'argent allemande, dont
la valeur a varié entre 5 fr. 65 c et 5 fr. 72 c.
KRUMHORN. F. Cromornb.
KUblQUE (Écriture). F. CounQus.
KURDE. F. Kourde.
KURTKA, sorte d*habit- veste d'origine polonaise,
adopté, sous le premier Empire ftunçais, pour les lan-
ciers de la garde impériale et les bmciers polonais.
KUSSIR, instrument de musique des Turcs, composé
de 5 cordes tendues sur une peau qui couvre une eapèoe
d'assiette de bois.
KWETZ, instrument de musique. F. Agada.
KYMRIQUES (Langues). F. Celtiques.
KYRIE ELEISON, mots çrecs oui signifient Seigneur,
ayez pitié. Cest une invocation qui fait partie de la Messe,
et qui se place entre VlntrcU et le Gloria in excelsis.
On répète trois fois Kyrie eleison^ puis trois fois Christe
eleison, et encore trois fois Kyrte eleison, pour adorer
successivement et également les trois personnes de la
sainte Trinité. On récite aussi le Kyrie au commence-
ment des Litanies. Le Kyrie est en usage dans l'Église
depuis le iv* siècle ; ce fut le pape Sylvestre I*' qui T'in-
troduisit en Occident. Pendant plusieurs siècles encore,
le diant des hynmes et des psaumes resta confié aux
prêtres : les fidèles, qui n'y comprenaient rien et qui
avaient de la peine à prononcer les paroles latines, ne
chantèrent que des suites de Kyrie eleison, ou, comme
on a dit, oes Kyrielles, Le Kyrie fut aussi employé
comme refrain de chants de guerre écrits en langue vul-
gaire. £»
L| 13* iBttra n e* eontonne de notre alphabet. Elle eM
■ne dM eoDHQnea qualifléoB de lùpùdM et de Imguaiti
(V> cee mota). Nous diatiagaoDa l'f ordinaire, dan» mo-
iâd», eéittU, ehaitmr, etc., M l'f mooillëe, dont le un est
tout «Uirérttit, dans famiiU, brillant, somtoml, rouUlt,
itail, etc. La conionna I n'eit juniia mouillée au com-
mBDcementdwmotai k toute antre place, il nVapaide
rt^e. e'eat Twage qal en décide. Le boq de notre 1
mouillée CM donné en eepa^ol ani deux 1 qui commen-
cent no mot (llMwr, tlamar, etc.), et en portugais au
groupe 16 {Ihmo, umtiêr), comme en tanfaia dan* gm-
ttUomiM. A la fin de certaine meta, I wt muette : outU,
fWtil, foah. SouTent aiuai en «n^ais on ne la prononce
pM, comme dan* unmU, eouU, heif, talmon. Dani le
paaèage d'nne lancne à une autre, I môinute aouTent arec
r : ^nsi, lea Launa TormArent batatimi du grec bara-
lAm; DODi aTDM fait )>él«rin, dn latin pwsirriniu, et, par
KO» nbitittitlon InTsne, 07in«, de ulmus. Les Cblaoia,
ifnl ne peuvent prononcer la lettre r, lui substituent i, ce
qne font ouelquefoii chei nous lee eabots, qai disent,
par exemple, moi pour bnu, gloi pour çroi. En passant
do latin en français, la syllabe ai eet sourent dsTonue
Mt ; almi aiba a fait aube. One subatltutian de ce der-
nier genre a'eet faite de eotUd, fcel, col, wl, i eouUau,
•ceoH. cou, (OU, et »e fait encore en formant le pluriel
deeiMiMen(il(MaJ,nHMtz; Omal.dmaïuB, etc.) —
Comme abrériatlon, let Ixtim emplmlent L povr la-
ItMt, iMchu, Larm, lepio, Ugatui, Ux, tibra, libiKi,
tthrlui, etc.! LLS pour tetttrtiiu (libra ttrnu). Dm*
lêa dlpIOmee do moyen Ige, LS slgniBe lociu hgilli; dana
iManconp de lime modernea, J. e. et I. d. teulent dire
tooo eitoio, loëo Itmioto (paasage cité). En fïançAia, L
s'emploie pour Loau, Lactm; LL. AA. pour Lturt Àl-
JH«M,' Ub HM. pour Lturt MajitUs : J signille limu on
ïttn;!. c, JieiM earrie:i.it., iiurt ittrUng. Lei Anglais
■e serrent de L pour lord, I~ L, pour t(r-d-linUmant,
{LL. D. pour doclfur ii lois civtiet tt et IM* toclitiat-
tùpiti. — Chez lee Greca, le lambda (X], employé comme
risne muni'
on 30,000 1
L 50,000. - ._ ,
ftappéa i Savonne.
LA, iwto de mudoue, la 0* de notre gamme d'»l. An-
treTota on la nommait A. — La eat aussi le nom de la
S* corde du riolon, et de la cbanterelle ou 1" corde de
l'alto, du Tloloacella et de la contre-beaee, Ceit sur cette
note qne s'accordent lee instrument* et qu'est r^é le
^paaon (C M mol); de là le* expressions donn«r et
fnndr» la lu. B.
LAACH (Abbaye de), dans la Pnisoa rhénane. Cette
■bbaye, fondée eo 1003 par Henri de Uach, comte pala-
tin du Rhin, fnt une dee pins richea de l'Allemaigne. Le
monantee comptait plus de SOO cbambrea : une aile
ét^t réserrée aux étrangère de passage, une autre aux
btralide* et aux paunes de la contrée i il y iTsIt aussi
ane bibtiothigue et une islerie de tableaux. Sécularisée
en 1803, rabbaye de Laacli tnt Tendue et transformée
•n ferme et en anbern. L'4diae seule est restée la pro-
priété de mat, qui l'eDtretlBnt i c'eat no de* échantll-
nns Im plu* complets qui eilHent dn s^ls roman. On
T entre par an beao doUre.
LABAROM. V. ce mot dan* notre Dietionnain d» Bto-
iraphi* tt tHUtoin.
LABDACISUB, mot formé de idbda ou lanAda, nom
de la 11* lettre de l'alpbabet grec. Il désignait la pronon-
ciation Tldeiiae et trop pleine du X, ou la répétition tré-
qoeole de cette lettre dana ane phrase ou dans plnaleun
meta de aulte. IM Romain* désign^ent par le même mot
la répétition multipliée de j, comme dans cette phnae i
mI tt Ima tue* JuMnt aibi, Uoi, iaettà; ou la pronon-
dailea trap fwte de cette lettre dana lee mots où ^e de-
Tah 10 prononcer légèrement (comme tll*. nlliiim, Jana,
Itgo), xnp bibie dana ceux oA on devait Is marquer da-
notage (comme olbui, olpa). L'emploi de t'I par attrac-
tion poBRtft être anid désigné de même : illiMlrot pour
Mhuîral. ediDqmum poor eonJaquitun, etc. P.
LABIALES (ConaonaBs), dn lattn tabla (lérras) i cm
sonnes qui se prononcent par le mouvement des Itnd
ou plutAt L la prononciation desquellsa le mouvammi
des lèvres contribue printipalement. Tellea swit o, (, b,
p, m; cette dernière est demi-laUale et demi-nasale. Le*
labiale* ont entre elles une telle affloité, que, dans la
compositian et dana la dérivation, elles se prennent k*
unea pour le* autres : ainti les mot* tatina noinu et •»
Mm sont derenuB iwti^ en lïançais ; boM^a formé 6oooHr;
lo latin «ertieii; a formé btrbû et brtbit, tountmt estlt
même mot que le latin tubindt; qtùeopiu eat dartn
oMCOto en Italien, bitchoff en allemand , bithof en *a>
Elais; marmor est derenn marbri. Le grec a troi* la>
laies. S, c, o. P.
LABOimOlN (Dialecte}. V. BasQoa.
LABRUM, vase ou basaln dont les Romains ae aer-
valent pour leurs ablution* dans lea bains et dam les
temple».
LABYRINTHE. Ce mot. appliqué i plusieurs :none-
menu de l'antiquité {V. aotre Dtctionnatrc d» Bioifrajilm
et d'Hitlûirej, nq>pelle anssi une disposition particulièie
du pavage Aet églises an moyen ïge. L'an»ngameiit, la
coupe et la couleur dee pevés formuent. par leurs eont-
binations, des ligne* linoeuses conduisant par de noiD>
breux détours à dilfâwites station*, et flnalement i n*
Calvaire Ognré. Les fldèlea qui ne pouvaient accomplir le
Èlerinage de la Terre Sainte venaient parcourir ta
tyrlnthea mystiques, pieds nus ou à gononi, s'an^
tant aux diveraes station*. Jusqu'à ce qnlls rossent snivés
au pied du Calvaire. Quelque* abn* sortirent de cet*
coutume religieuse i les enl^ta en faisaient un amne»
mant. Peu à peu lliabllade de ce pèlerinage en minia-
ture disparut avec celle des pèlerinages loinUdns, et k
clergé Ht enlever en beaucoup d'endnrfts les labyrinlbes
comme Inatiles et gSnania. Le labyrinthe de Sens, d^
tnilt en 17G8, et celui d'Amiens, détruit en lS15,avtdeDl
' Qtnieur: celui de Chartres, ool sobslsle
I. On en
EdïyrMb ib SaM-QmrUm.
Bayeux. Dans le iabyriothe de Reims, appelée Chem»
di Jiruialmt, et détroit en 1779, on décblRtalt le nom
des quatre architectes de l'ésllse. Le dessin da labyrtntta*
de l'ancienne ^Uae S'-BertTn i S>-Omer noua a été mo-
•orvé, E, L.
LAanuNTsa, nom donné k dea allées concentriqo** éta-
blies pour l'oriMinant des parcs et de* lardins. On en a na
mod^ an lardln des Planlea da Paris, au monticule »•
marquaUe par on vieui cèdre du Uban. Ce labyrlniM
est urminé mr.nnjolikiosqueàjour, tout eol»eiuat*>
LAC
1137
LAE
^9ù Ton Jouit d*iixie assez belle Tue sur une partie de
Faris.
LAC, amas d*eao entourée de tous côtés par ta terre et
n*ayant avec la mer aucune communication, au moins tm-
meoiata. Parmi les lacs sans écoulement, les uns, comme
celui d*Albano près de Rome, sont d'andens cratères de
Yokan remplis d*eau, ne reçoivent aucune eau courante,
3t sont alimentés par des sources souterraines; les autres,
situés sur des plateaux élevés ou au milieu de dépressions
profondes, reçoivent souvent des fleuves considérables
sans que leur niveau s*élève, parce oue la quantité d^eau
qui s'en évapore est égale à celle qui s*y verse, ou bien
parce que le fond de ces lacs est de nature poreuse et ab-
sorbe une partie de leurs eaux : tels sont le Balaton et le
Neusiedel en Europe, la Caspienne, TAral, les lacs Bal-
kasch, Dzalsang, Issikoul, Van et Ourmiah en Asie, le
Tchad, le N'gami, le Nyassi, rUkerewe, et TUJiji, en Afri-
que, etc. En Amérique, les lacs sans écoulement sont réunis
entre eux par des rivières, oui sont de véritables déversoirs
appelés par les Espagnols besaguaderos ; par exemple, le
Titicaca et le Pansa, le Salé et TUtah. Dans TAustralie,
les lacS'Tiorrents Gairdner, Grégory, généralement peu
profonds, varient étrangement d'étendue, suivant Tépoque
de la saison sèche et pluvieuse. Le caractère général des
lacs sans écoulement est leur salure extrême, souvent
plus prononcée que celle de TOcéan, et qui augmente
lans cesse, les misères salines apportées par les eaux se
déposant au fond des lacs sans Jamais être emportées par
les courants. — Les lacs à écoulement sont aussi de deux
sortes : ceux qui, placés souvent à de grandes hauteurs,
Boorris par de petits filets d'eau presque invisibles ou
par des canaax souterrains, servent de sources à de
grands fleuves, comme Tltasca au Missîssipi ; et ceux qui
reçoivent et émettent des eaux courantes qui les traver-
sent. Ces derniers se rencontrent surtout au sortir des
contrées montagneuses, à l'endroit où les fleuves, dont ils
ne sont proprement que des dilatations, rencontrent une
vallée, s^y précipitent, et la remplissent Jusqu'à ce que
leurs eaux soient arrivées au niveau du bord opposé et le
dépaasenL Ainsi se sont formés les lacs de la Suède,
eeox de Constance, de Genève, de Garde, de Gôme, le
lac Mi^^Bor* le Baikal en Asie, le Dembéa en Abyssinie.
Les lacs à écoulement reçoivent et absorbent les matières
tcrrenaes qne les fleuves charrient : ainsi , le Rhône,
très-troable à son entrée dans le lac Léman, en sort clair
et limpide à Genève. Seulement cet apport d'alluvions
rétrécit sans cesse l'étendue des lacs et augmente d'au-
:aat la Tallée solide des fleuves. Le caractère le plus re-
marquable de ces lacs, et qui leur a fait donner le nom de
Ues régtUaUurs, c'est d'établir une sorte de système de
comperâation entre les saisons. Quand la masse d'eau
qm descend des montagnes est très-considérable, le lac la
reçoit sans que son niveau augmente brusquement, et
par coq^équent sans que l'affluent qui déverse le surplus
des eanx grossisse subitement en dévastant les cam-
pagnes; de même, quand les ruisseaux qui alimentent
le ne se dessèchent ou diminuent, le niveau du lac baisse
très-lentement à cause de la vaste étendue de sa surface,
n> le fleuve auquel il donne issue n*est point sensible-
ment amoindri ; les lacs régulateurs gardent les eaux de
nnondation pour les Jours de sécheresse. Dans les pays
pourvus de ces lacs, comme la Lombardie, les inonda-
tions sont régulières, maîtrisées à volonté, et les eaux,
réparties dans d'innombrables canaux, servent à la dé-
fense on à la fécondation du sol, comme dans les fertiles
plaines et les rixières de la Lombardie. Dans les autres,
eOes sont des fléaux dévastateurs : il en est ainsi dans le
faaann inférieur du Rhône, parce que ce fleuve, grossi
par la Saône, l'Ardèche, l'Isère, la Durance, n'a plus,
comme en Suisse, de grand lac qui retienne le surplus de
ses eanx. Aussi sonse-t-on aujourd'hui à combattre et à
inéfeolr même les inondations, non plus par des levées
au» cesse emportées, et qui ne servent qu'à exhausser le
fit des fleuves en arrêtant les alluvions, et conséquemment
tD anmentant le péril, mais par des barrages et des lacs
irtûdâs qoi Joueraient le rôle de lacs régulateurs. Les
Andeos en ont donné l'exemple, puisque les rois d'Egypte
et de Babylone firent creuser ou agrandir les lacs Mceris
tt Pallaoopas pour servir de régulateurs aux inondations
da NU et de TEaphrate. — Quelouefois, au lieu d'un
■ail bc régniatenr, il y a plusieurs nassins superposés et
cnmmf |]es étagBS successifs de lacs : ainsi, en Suisse,
^Aar parcourt l'un après l'autre les lacs de Brienz et de
Ibun, la Thiële ceux de Neufchfttel et de Bienne; en
Âonje, le lac Lagoda reçoit par la Svir les eaux du lac
0D^^ par le V^olcbow celles du lac Jlmen, et les dé-
verse par la Neva dans le golfe de Finlande; en Amé^
rique, cinq lacs, qui semblent des mers d'eau douce, let
lacs Supérieur, Mlchigan, Huron, Érié, et Ontario, se dé-
versent l'un dans l'autre, les deux derniers par le Ni»-
gara, et arrivent enfin à la mer par l'estuaire du S^
Laurent. G. P.
LAC, bassin de fontaine chez les anciens Romains.
F. notre Dictionnaire de Biograptiie et d^ Histoire,
LACS ET ÉTANGS. Chacuo pout fidro des lacs et étangs
sur sa propriété, pourvu au*ils ne nuisent pas aux droits
d'autrui, et que les propriétés voisines soient garanties de
tout dommage. Les propriétés inférieures doivent recevoir
les eaux quand on met ces lacs et étangs à sec pour pê-
cher : c'est une servitude imposée par la situation natu-
relle des lieux. La suppression des lacs et étan^p peut
être ordonnée par le préfet, et sans indemnité, s'ils sont
reconnus cause d'inondations ou d'insalubrité.
LACS , mot employé autrefois, en termes d'Architec-
ture et de Passementeriei comme synonyme d'entre-lacs
{V, ce mot),
LACEBNA, vêtement romain. ) F. ces mots dans
LA CHAISE (Cimetière du Père), f notre Dictionn» de
LACINIENNE (Table). \ Biogr. et d'Hist.
LACK, expression monétaire usitée dans l'Inde, et dé-
signant une somme de 100,000 rouptei (240,000 fr.)*
LACONICUH. F. Bains.
LACONISME, lanpge bref et succinct, particulier aux
anciens Lacédémoniens ou Laconiens. Aux sommations
de Xerxès <|ui lui demandait de rendre ses armes, Léoni-
das répondit : Viens les j^endre. — Ne voulez-vous pas
me recevoir dans votre vtlle ? faisait demander un Jour le
roi Philippe de Ifacédoine aux magistrats de Sparte i
Non, répondirentrils. Le même prince insultait à leur
abaissement depuis les rudes coups qu'ils avaient reçus
d'Épaminondas : Denys à Corintne fut leur réponse, qui
faisait allusion à la disgrâce du roi de Syracuse, réduit è
se faire maître d'école. La dépêche qui annonçait à Sparte
la victoire de Platées (479 av. J.-C.| contenait ces seuls .
mots : {Les) Perses (sont) humiltés. Après la chute
d'Athènes à la fin de la guerre du Péloponèse, le vain-
queur écrivit à Lacédémone : Athènes (est) prise. Le Vent,
vidi, vici de César est un laconisme. — Par extension,
le mot Laconisme désigna souvent, chez les Anciens
comme dans les temps modernes, l'affectation du style
bref et sentencieux, l'union de la sécheresse à un excès
de brièveté. Le laconisme ne doit donc pas être confondu
avec la concision : il en diffère en ce <)u'il dit les choses
avec le moins de mots possible, et qu'il emploie à peine
les mots nécessaires, tandis que la concision consiste à
n'emplover que les paroles nécessainv; '^ l'intelligence de
la pensée. La concision n'exclut piui Ifdée de certains
développements : ainsi. Tacite et Montesquieu sont des
écrivains concis, mais leur style ni leurs ouvrages n'ont
rien de laconique. Homère est concis lorsau'il prête à
AJax, enveloppé dans une soudaine obscurité, cette excla-
mation adriœsée à Jupiter : Lumière, même au prix de la
vie! Un Spartiate y eût trouvé de la redondance. Le mot
d*Athalie dans Racine : Toi voulu voir, j'ai vu, est
concis, mais non point laconicpe. L'éclat, la grâce, peu-
vent se concilier avec la concision, mais sont incompa-
tibles avec le laconisme. En un mot, le laconisme ne
saurait ê^e une qualité littéraire; maà il convient mer-
veilleusement aux dépêches télégraphiques. Voici un
exemple du laconisme porté à ses dernières limites : deux
amis. Joutant à qui ferait la lettre la plus courte, le pre-
mier, afin d'atteindre plus aisément son but, emprunta
la langue latine, et écrivit : eo riM (Je vais à la cam-
pagne) ; l'autre répondit : t (va). . P.
LACRYMATOIRE. F. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d^ Histoire.
LACTAIRE (Colonne). F. Colonnes monumentales,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d*Histoire,
page 634, col. 1.
LAC13NAR, expression qu'on trouve dans les écrivains
ecclésiastiques pour désigner un plafond en bois, plus ou
moins orné, par opposition à caméra, qui signifie voûte.
LADÈRES, nom des menhirs dans le pa^s chartrain.
LACUSTRES (Habitations). F. au Supplément.
LADRERIE. ( F. ces mots dans notre Dictionnaire de
LADY. ) Biographie et d^ Histoire.
LAEKEN (Palais royal de), dans le faubourg de ce nom,
au N. de Bruxelles. Ce palais, destiné à la résidence d'été
des gouverneurs autrichiens die» Pays-Bas, fut b&ti, de
1781 à 1784, sur les plans de l'archiduc Albert de Saxe
Teschen,par les architectes Montoyer et Payen. En 170 T.
après la bataille de Jemmapes, les archiducs, obligés de
7«
LAI
1138
LAH
Fibandonner, en enleràrent une grande quantité d'ob-
jets précieux. Le chirurgien Brahamon. oui racheta quel-
ques années après, commençait à lui laure subir d*étran-
oQs mutilations, lorsque Bonaparte, l*' consul, s*en rendit
acquéreur en 1802, et le fit remeubler. Le palais a reçu
de notables accroissements depuis 1814. La façade d*en-
frée, élé^te et spacieuse, est précédée d*une cour d'hon-
neur. Elle est ornée d'un portique de quatre colonnes
ioniques qui soutiennent un bel entablement où Gode-
vhanes a représenté en bas-reliefs le Temps présidant
%ux heures, les quatre époques du Jour, et les Saisons. l«s
ailes sont formées de pavillons ornés de pilastres qui
embrassent le premier et le second étage. Vu du parc, ce
oàtiment présente une façade en forme de rotonde, avec
des pilastres qui soutiennent l'entablement et l'attique
surmontés d'une coupole, et ornés aussi de bas-reliefs par
xe môme Godecharles ; les ailes sont également décorées de
pilastres. De ce côté, une belle pelouse, encadrée de mas-
sifs d'arbres, descend vers la Senne. Des parterres, des
fleurs, des serres, une orangerie, une grande cascade, un
temple du Soleil, contribuent à l'embellissement de ce
parc.
LiENA, vêtement romain. V, notre Dictionnaure de
Biographie et d^Histoire,
LiETARG, nom du 4* dimanche de Carême. Il est tiré
de ce que l'introït de la messe de ce Jour commence par
les mots Latare, Jérusalem (réjouis-toi, Jérusalem).
LAGARES (Vers), c-à-d. en grec vers éreintés, nom
donné par quelques grammairiens anciens à certains vers
d'Homère au milieu desquels on trouve un trochée au
lieu d'un spondée.
LAGUNES, amas d'eau peu profonds qui se forment
sur les parties basses des rivases, princiiMiIement entre
les bras des fleuves à deltas ou dans leur voisinage, et sont
séparés de la mer par des flèches ou cordons littoraux^
qu'interrompent de fré^entes ouvertures. On les ren-
contre aussi sur des rivages où ne débouche aucun
fleuve, mais dont le sol est très-abaissé et baigné par des
mers peu profondes et limoneuses : la principale de ces
lagunes est la mer Putride, formée par la mer d'Azow
entre la cête orientale de Crimée et la flèche d'Ara-
bath, et qui présente une étendue de plus de S,000 kilo-
mètres curés. Les lagunes sont redoutées pour les fièvres
dangereuses et les maladies pestilentielles auxquelles
elles donnent naissance. — On nomme aussi Lagunes des
réunions d'Uots nombreux et bas, sur une côte maritime.
La Hollande en a beaucoup, et Venise entière est bâtie
sur des lagunes de ce genre, formant une série de petites
baies que des barrages naturels appelés lido (nvage)
séparent de la mer. C. P.
LAI, c.-èr-d. chant, pièce de poésie fort en vogue chez
nos anciens poètes. Le mot était à peu près synonyme de
fabliau (K. oe mot). Le lai était primitivement un récit
de grandi et nobles faits; puis il devint un conte, une
nouvelle quelconque, où le merveilleux se mêlait pr^ue
toc^ours aux événements historiques. On le chantait en
•'accompagnant de la harpe ou de la rote. Il n'avait pas,
à la vérité, la forme lyrique favorable à la musi({ue, et
n'était point divisé en stances ; mais le chant n'était pro-
bablement qu'une sorte de déclamation rhythmée. L'abbé
de La Rue donnait aux l^s une origine armoricaine;
M. Ampère lee rapporte plutôt à la Germanie, soit à cause
des allusions aux croyances Scandinaves qu'ils renfer-
ment, soit pour la ressemblance du mot lai avec les mots
lêoih en saxon et lied en allemand. Quoi qu'il en soit,
les lais bretons, qui ont inspiré bon nombre de romans
4e la Table ronde, ne nous sont point parvenus généra-
. unent dans la langue originale; des traductions les ont
jauvés de l'oubli (v. Bitson, Ancient english metrical
romances; Ellis, Spécimen of the english poets). Un des
S lus anciens lais français est le Lai du prisonnier ou
'lanaurèSf par Renaud, lequel remonte au moins à l'an
1200; il a été publié par Monmerqué et Francisque Mi-
chel (Paris, 1832, in-8o}. Parmi les Trouvères qui ont
écrit des lais, nous citerons Marie de France, Christine
de Pisan, Froissart, Guillaume de Machau, Eustache Des-
champs. Beaucoup de compositions de ce genre sont
anonymes. Les écrivains des &ges suivants y ont souvent
puisé : ainsi, le Lai du Frêne est le premier type de la
nouvelle queBoccace a composée sous le titre de GrisHi'
dis; Marmontel, dans son conte du Philosophe, a imité
le Lai d'AristoU d'Henri d'Andeli. V. Lais inédiU des
xn* et xm* siècles, publiés par Francisque Michel, Paris,
1836, in-i2; F. Wolf, Sur les Lais, en allemand, Hei-
dolberg, 1841, in-8*.
L'ancien lai était une suite de vers de 8 pieds; mais.
le chant appelant la forme lyrique, n devint ime sorto ds
romance, et fut alors partagé en stances. Au xiv* siècle,
il se composait ordinairement de 24 stances, ayant cha-
cune 4, 6, B ou 12 vers, sur deux rimes au plus. Souvent
ces vers étaient coupés de deux en deux par an vers
plus court. En voici un exemple :
Sar l'appnl da inonda
Qne fant-il qn'on fonde
D'espoir ?
Cette mer profonde ,
En dtfbrtâ féconde»
Fait Toir
CUme an matin Tonds,
Et l'orage y gronde
Le aoir.
Quand, après la 1** stance , on faisait virer (tourner)
les grands vers en petits, et les petits en longs, la pièce
devenait un Virelai. Au xvi* siècle, ces mocÛllcations
avaient enlevé au lai son caractère primitif; ce n'était
plus qu'une forme poétique, à laquelle on renonça
bientôt. M. Victor Hugo, dans son drame de Cromwell, a
écrit la ballade du fou sur le rhythme d'un lai. B.
LAI (Frère). j V. ces mots dans notre ZMction-
laïc ou laïque, s naire de Biographie et d^HÎM-
LAIRD. ) toire.
LAIS, terrains que la mer et les rivières forment
par alluvion. On nomme relais les terrains qu'elles
abandonnent en se retirant. Les lais et relais de la
mer font partie du domaine public, et le gouverne-
ment peut les concéder aux conditions qu'il Juge conve-
nable; ceux des rivières appartiennent aux propriétaires
riverains.
LAKISTES. F. cemotdansnotreDîctioiMuitrscbBîo-
arapfcM et d'Histoire.
LALLATION, vice de prononciation qui consiste à sub-
stituer la lettre I à la lettre r : Malte pour Marie, Le
grasseyement d'Aldbiade disant Théodole pour Théodore
était une lallation.
LABIA. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra--
phie et d^ Histoire.
LAMANEUR. F. Pilotb.
LAMBEL, en termes de Blason, barre borisontale, gar-
nie de trois pendants en forme de trapèze.
Set placée à la partie supérieure de l'écu,
toutefois sans toucher les bords; sa lar^geur
doit être la 0* partie du chef. F. la fig. ci-
contre. Le lambel servit d'abord à distin-
guer les enfants du père, parce que ceux-
là seuls qui n'étaient pas mariés en portaient; puis on
en fit la brisure des premiers cadets.
LAMBOURDE, nom donné aux pièces de bois de adage
Su'on couche et qu'on scelle sur un plancher pour j
louer le parquet.
LAMBREQUINS, étoffes découpées en festons et flot-
tantes, dont on couvrait autrefois le casque et qui des-
cendaient sur la cuirasse, qu'elles protégeaient contre la
pluie et la poussière. On donna le même nom à des
bandes fixées an bas de la cuirasse, ainsi qu'à des rubans
oui arrêtaient le chaperon sur le casque et qu'on entor-
tillait autour du cimier. Ces ornements, appelés aussi
volets, parce qu'ils voltigeaient au gré du vent, passèrent
des armures dans les armoiries, et, en termes de Blason,
les lambre(mins furent des festons oouronoant et em-
brassant l'écn, avec la même cooleur qne les émaux. —
Les tapissiers nomment lambrequins des découpures
d'étoflé, de bois ou de tMe couronnant un paivillon, une
tente, un store, etc.
LAMBRIS, boiserie qui revêt les parois d'un mur. On
nomme lambris de rwétement celui qui règne du bant
en bas; lambris d^ appui, celui qui n'existe qu'à la partie
inférieure, sur une hauteur de 70 à 120 centimètres.
LAME, mot qui, dans les vieux auteurs français et
dans les inscriptions, est synonyme de tombeau, de
pierre sépulcrale.
LAMENTATIONS, nom donné aux chapitres des can-
tiques de Jérémie que l'on chante aux Matines le mer-
credi, le leudi, et le vendredi de la Semaine Sainte dûs
l'Église catholique.
LAMPADAIRE, porte-lampe ches les Anciens. C*était
un pied, plus ou moins élégant, haut de 20 ou 25 centi-
mètres, et que l'on posait sur une table ponr recevoir une
lampe, afin de lui faire projeter sa lumière pins loin. D
V avait des lampadaires en forme d'arbres chargés de
fruits, dont chacun était une lamix^; d'autres, en forme .
de tronc d'arbre desséché, avec 4 ou 5 branches seule-
Btot, d'où p«ndu«iit des lunpe» secroebâes me des
cbilnetw». u Sgure ci-deMOUS raprteDte un lamps-
dilre de ce gaon, «a «Inln, trouTd lùiu le» rolnet dller-
, flkareiit de» rlncetui, et dont on u lert duis
ICI gnndea Tillea pour porter les lantsrnea h gai de
ridainge pnbllc (Uds les rues «trolies. L> figure ci-
' '-'-M un lampadaire de ce genre. Cest le
adopljt pour la ville de Paris, dont ils
cean. Cea Umpadalrei ont de 1 met. à 1 met. 50 de lon-
gueur, et sont scellés, en encorbellement, d&ns le mur de
Jàce dés m^aoti», fc 4 mèk enTiron du mI. C. D—t.
UMPC (du gtecJompM, Oambean). CeU,
n implicite, na petit Tua dans leqnu brûle une mèche
doat la flamme est ftllmenlde par de l'huile. On en attri-
bat l'inTentioia aux Ërâpiiens, aoiquels les Grâce l'au-
'.— r On Bt des lampes ea lem râite, en
brome, «a argent, et mCme en or; !«■ coUecttonaen len-
raleot empruntée. On 1
(trniHit de formes trè»-Tari«ei, et quetqoefoti d'nn dessin
Bnd par que gradenx : lantât c'est une cbauTe-BOuris,
qmbale de la noh, oui a prâté ses formes an Tase sus-
pendu; tantôt un biboo, tantM des flgurea humaines,
de* entants, dea esdafei, serrent de support k la lampe,
qu'ils semblent entretenfr d'huile. Le* lunpea serraient
i tous les usages domestiques i on en plaçait dans les
templea, sait pour les 4clHrer peoduit les cérémonieb
Doctanies, soit pour honorer les dieux dsTant les statues
detoueb elles brOlalent: on en suspendait aussi dans les
tombeanx. H n'y a gnin qu'une soliantaine d'années quv
ka Ismpei'saat parfèctfoanéea ; jusqu'alors elles aTaleat
httit k tir Hbre, comme dan* l'anUquIté i les chandelle<
rtdM
:, pbamaden à Paris, Tut 1«
J9 LAN
premier qui entra dans la voie des amélioralions an p\^
tant au-desaus de la flamme des lampes un toyaa da
-tirage qu'il ^tpela tayau-chnnmée. En 17S3, Ar^nd,
pbyMcien et médecin de Genève, disposa la mèche dans
un double (^liodre creux, où Tair passait, et donna à la
Oamme de la puissance et de la netteté. En 1800, Csrcel
plaça le rtsarroir dans le pied da la lampe, et fit monter
l'hnlle an moyen d'nn mouTement d'horiagerie. Vinrent
ensnile les lampes hjrdrostadqnes des lïâes Girard en
1803, pub les lampes fc modéralenr de Franchot, 1830,
où le mouTament aliorloeerie est remplacé "par an rea<
tort d'ader en spirale, dont l'ei^slon sert de force
motrice. V. liceu. De Itnxntâ aatiguonàm rsconditia,
Venise, 1021. E. L.
uaras n'fousE. C'est une prescriptioa très-andsnne
que déplaça-, devant l'autel où est déposée l'Eucharistie,
au moins une lampe allumée, ponr montrer k tous les
jeux qoe Jésn»-Christ est la lumiâre du monde. La
lampe a toujaon été, d'ullaurs', considérée comme une
"[ne d'honneur : les empereurs du Bu-Empira en
marque d
les ^ses posaédërei]
d'or — -"
nunémeot des lampes
it d'ordinaire
. .. . __„ maintenante*
BQ cuivre argenté ou doré. On an suspead k
devant le nultro-autel, en mémoire, dit-on, de la S"
Trinité. Le vase qui contient l'huile est supporté par
trois chaînettes attachée) ani chaînes de la lampe.
LAHPIER. svnaavmB de Fanal da einutièrt (V. m
LAMPION, godet en terre cuite, en for-blanc, ou en
verre, dans lequel on met du suir ou de l'huile avec une
mèche, et dont on se sert surtout pour les JtlumiDaÛons.
On a renoncé, dans les grandes villes, depuis l'invention
du pa, k illumioer avec des lampions.
LANCE, arma. V. notre Dtclionnotra d* ffiograpAu tt
d'Hùloire.
LucE s FED, futée emoiaochée, servant k mettre le feu
k des pièces d'artillerie on d'ardSce.
LAKCELOT (U Roman de), 3* partie du cvcle du
Sainl-Graai ou de la Tabt» ronds (V. GauL, et Uisun),
écrite par Gautier Map, chapelain du roi Henri n d'An-
S leurre. Les Étais du roi armoricain Ban de Benoic,
esceodant de Nascien, sont envahis par les soldats dn
roi Clandas de la Déserte; son-flls au berceau va périr
I fée
Viviane, l'élève, l'amante et la geôlière de t'encbanteor
Herlln. Les soldats la ponrsnivent; Ils vont l'atleindrE),
quand elle se précipite dans un lac avec son brdeau. Ce
lac n'était qu'une illusion trompeuse, et sa surface re-
couvrait de magiques palais, où le royal orphelin est
élevé soua le nom de l'oncdol (le jeune garçon), dont on
Ht plus tard lane»lol du Lac. I^enn i la Jeunesse,
Lancetot est condoit par Viviane k la cour du roi Arthur.
La série de ses aventures amoureuses et guerrières se dé-
roule dana dnq romans, GaUehol, la CharrMe, Agra-
vam, ta Quit* du GrouJ et la Mort d'Arthur. Les deei
premiers ne sont qu'une longue dizrMsion k la légende
du Salnt-Giaal, sans aucune trace de l'inspiration mys-
tique qui a enfonté cette légende, et qui fait place ici k
l'amour chevtlenaqne, ardent, délicat et raffiné. Galtebot,
rot dM lomloinM iUi, est un pasonnage qui introduit
lAocelot, sous le nom du ChmùJwr otu; armât noirst,
auprès de la reine Genièvre, et qui sert son amoor avec
beaucoup de lèle. L'épisode de la CharratI» noua montr»
I^ncelot k la recherche de Genièvre enlevée par le fils dn
rot de Gorre, et encourant momentanément «es dédaini
pour être mont4 snr une charrette, véhicule indigne d'an
chevalier.
Cest dans la 3* par^e du roman de lAncelot, désignée
ordinairement sous le nom iAgraitain, un des chevalier*
d'Arthur, que la légende dn Sniut-Graal reparaît. Juaque-
Ik les cbevàliera de la Table ronde ont bien bit quelques
courses k la recherche du vaae sacré, mais, trop distraits
de leur but par des préoccupations IHvoles, ils ont échoué
dans leur entr^trlse. Le roman d'Agraoain nous raconte
l'arrivée des premiers chevalien dans la Terrt fOraint :
mais ni Gauiàin, neveu d'Arthur, ni Lancdot, protégé de
HerllD, n'obtiendront la divine reliqne; pour la conqué-
I Idéal nécessaire, Galaad, flls de I^ncelot, Perceval, ne-
veu du roi qui a la garde du saint Graal, et Boor, flls du
roi de Ganae*. La OitiU du laint Qraal noiu montre Gs-
LAN
1140
LAS
iMd prenant pl«ee au si6ge réservé de la Table ronde^ |
•t donnant le signal de la croisade nijrstique et gaerrière.
Les miracles, Ui prophéties, les visions succèdent aux
passes d'armes mondaines; Arthur « Gauvain, Lancelot,
ne Jouent plus qu*un rôle secondaire et sacrifié. Galaad,
Perceval et Boor, après une longue suite d'aventures
merveilleuses, parviennent au château de Corbenic ; dix
antres chevaliers, également dignes de la souveraine ré-
compense, arrivent en même temps de Gaule, d'Irlande et
des autres contrées de TEurope. Tous treize sont admis
à ta contemplation du saint Graal, et communient de la
main de Tévéque Josèphe, descendu du ciel. Puis, comme
les peuples d'Occident, livrés aux passions terrestres, ne
méritent plus de posséder parmi eux le vase divin, le
Seigneur ordonne à Galaad, Perceval et Boor de le re-
porter en Orient. Les trois chevaliers s'embarquent sur
u nef de Salomon, qui les attend au rivage de la mer,
abordent en Asie, non loin de l'antique cité de Sarras, et
déposent le Graal au Palais Spirituâ, sa première rési-
dence. Après avoir régné un an sur Sarras, Galaad meurt
dans une des extases que procurait l'adoration du Graal,
«t ton âme, accompagnée par l'évèipie Josèphe, monte au
del. Une main dont le corps est invisible s'empare du
vase, que personne ne doit plus voir; Perceval se retire
dans un ermiiage, et Boor retourne à la cour d'Arthur
poor raconter ces événements suprêmes.
Id finit la légende. Mais les chevaliers de la Table
londe demeuraient, et trop d'intérêt s'était attaché à
leurs aventures pour qu'il ne fût pas nécessaire de ra-
conter leur fin : tel est le but d'une cinquième œuvre, la
Mort (T Arthur, Arthur est instruit des amours de sa
femme Genièvre avec Lancelot du Lac, et la guerre
éclate : avec le roi combattent Gauvain, Kex, Yon, Ka-
radoc, ettous les chevaliers d'origine bretonne; du côté
de Lancelot sont les descendants de Nascien, Boor, Lio-
nel, Bliomberis, etc., qui ont leurs domaines dans la
Petite- Bretagne. Arthur traverse l'Océan, et assiège la
cité de Gannes : sur la nouvelle que Mordred a envahi
ses États, il ramène bientôt sea troupes, tue l'usurpateur
dans une bataille près de Salisbury, mais voit pénr tous
ses chevaliers et est lui-même blessé mortellement. Lan-
celot et les siens accourent pour le venger, et massacrent
les fils de Mordred à Winchester : tout finit par une re-
traite volontaire de Lancelot et de Genièvre dans un
couvent. B.
LANCÉOLÉ , qui a la forme d'un fer de lance. On dit
an arc lancéolé ; les divisions des roses gothiques sont
quelquefois lancéolées.
LANCETTE (Style à). K. Ogivalb (Architecture.)
LANCHE, embiurcation en usage sur les côtes du Bré-
sil. Elle a un mât droit à l'avant, on autre mât plus
grand et très-couché sur l'arrière, et n'a qu'un faible
tirant d'eau.
LANCIERS, corps de cavalerie de li^e, dont nous
avons donné l'historiqne dans notre DicPumnaiir^ de Bio-
graphie et d^ Histoire, L'uniforme est : habit bleu ; collet,
retroussis, parements et passe-poils de couleur variable
selon les régiments; bricles d'épauleties garance, avec
passe-poil bleu; boutons blancs à numéro; épaulettes
garance, avec franaes et torsades blanches; pantalon ga-
rance, à deux bandes bleues sur les côtés ; czapska ga-
rance, avec soutache et galon bleu, cordon en fil blanc,
avec nœuds et coulants en laine garance ; plumet en crin
noir tombant ; ceinture en tissu à 5 bandes, dont 3 bleues
et S garance; buifieterie blanche. Les officiers portent
Tépaulette d'aroent. Les armes sont la lance garnie d'une
bandenole tricolore, le pistolet et quelquefois le moua-
queton.
LANQS, mode de réparation d'un mur qui consiste à
«Dfoncer des moellons ou des pierres dans les parties dé-
gradées. — On donne le même nom aux deux pierres
plus longues que le pied-droit dans les Jambage d'une
porte ou d'une croisée.
L^DES^**^' l ^' ^ ™^ <^* ^^^ Dictionnaire
LANDGRAVE. \ de Biographie et ^Histoire.
LANDIERS. 7. Chznbts.
LANDIT. F. ce mot dans notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d^ Histoire.
LANDLER , espèce de valses en usage en Autriche et
dans quelques autres parties de l'Allemagne. Leur mé-
lodie, d'une aaieté sautillante, s'exécute dans un mouve-
ment modéré, en mesure à 2/4.
LAND-TAX , nom de l'impôt foncier en Angleterre.
LANDWEHR. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et ^Histoire.
LANGACSE. La pensée est un (ait intérienr, qui a be-
soin, pour se manifester, des secours de l'orgsnisme , sa
moyen duquel se produit le langage. Celui-ci est donc
tout mouvement organique, spontané ou volontaire, qui
a pour but d'exprimer un phénomène interne. D'où il suit
2u'il y a autant de sortes de langages qu'il y a de sortes
e signes propres à manifester la pensée. Parmi eux, les
uns sont natitrels, et les autres arti/U:iels : les premiers
résultent de l'organisation naturelle de l'être qui les pro-
duit, ils sont passagers, tels que les gestes, les cris, la pa-
role; les seconds, pris hors de nous et au moyen de mo-
difications matérielles oui ne 'sont pas données par la
nature, sont plus ou moins durables, tels que le dessin,
la sculpture, les emblèmes, l'écriture, etc. Le langage
naturel est encore, 1* absolu, parce que de lui-même, et
indépendamment de toute convention, il est compris par
tout le monde, quelquefois même par les animaux,
comme les gestes, les cris dus à la colère, ou les accents
de la bienveillance et de l'amitié; 2^ conventionné,
parce que ce langage, indépendamment des éléments
fournis à l'homme par sa nature, a une valeur de conven-
tion; tels sont les mots dont l'ensemble forme une
langue, et dont le sens a été fixé arbitrairement. II en
est de même pour les langages artificiels, qui sont
absolus quand les signes ont un caractère de fixité,
comme le dessin, et eonnentionnels, quand les signes
sont arbitraires, comme les emblèmes, les signes téli<
naphiques. En outi^ le langage est sgnthétiqus ou ana-
ryttqiM. Le langage synthétique exprime le sentiment,
l'émotion, la pensée dans leur ensemble, sans distinguer
leurs éléments, sans les décomposer ; il est expressif,
c'est celui de la passion, mais il ne suffit pas touipurs,
l'homme a besoin du langage analytique. Celui-ci dé-
compose le fait de conscience ; il donne un signe particu-
lier et propre à chacune de ses parties, un pour le sujet,
un pour l'attribut, un troisième pour le verbe; au lieu
de pousser un cri pour marquer sa Joie, l'homme peut
dire : je suis heureux. Parmi les langages analytiques, il
n'en est pas de plus beau, de plus parfait que la parole ;
nul n'exprime si exactement, ni si complètement U'
pensée (V. ce mot). Après la parole, le langage analy-
tique le plus employé est Vécnture (K. ce mot). — Les
signes en général et le langage parié en particulier for-
ment un Uen social entre les nommes. Les signes in-
stinctifs et naturels manifestent les sentiments les plus
naturels qui attirent les hommes les uns vers les autres;
la parole et l'écriture transmettent les idées soit dans le
pr&ent, soit dans l'avenir, et augmentent ainsi d'âge en
âge la somme de nos connaissances. Il ne fiuidrait pas en
conclure, comme cela est arrivé, que la pensée dépend
entiteement des signes : l'homme pense sans avoir besoin
de signes, et, s'il parle, c'est parce qu'il pense; mais,
d'un autre côté, le langage parlé aide infiniment à la for-
mation et au développement des idées (V. Pasolb). Si*
le langage rend à l'homme d'immenses services, il a aassi
ses inconvénients, an point qu'on a prétendu qu'il était
la source de toutes nos erreurs, ce qui est exag&ré ; mais
il est certain , d'une part, que les signet ne sont pas tou-
jours la représentation exacte des objets ou des idées;
d'autre part, aue l'esprit s'attache parfois tellement aux
signes, ôu'il s'nabltue à se payer de mots.
Au point de vue historique, l'origine du langage tient
à celle du genre humain ; en théorie, cette question con-
siste à examiner si l'homme, doué des facultés qu'il pos-
sède, pouvait arriver à se former un moyen de commu-
niquer ses idées. Les signes naturels absolus constituent
un langage primitif qui a son origine dans la constitution
de l'homme ; mais déjà chez celui-ci l'attention s'attache
au fait primitif pour reproduire la même impression par
le même signe. On est conduit par là à rechercher l'ori-
gine du langage parlé; on a cnerché à résoudre cette
question de trois manières difTérentes. Selon les uns, Is
parole et les langues primitives sont de pure convention
et se composent de signes arbitraires. On voit dans le
Cratgle de Platon, où Hermogène soutient cette opinion
qu'elle existait déjà dans l'antiquité ; chez lee modernes
on la trouve dans réa>le qui se rattache à CondiUac Ce
philosophe admettait en fait la révélation de la parole à
Adam et Eve; mais, en théorie, il n'en voit l'origine qne •
dans certains cris, certains mouvements de la langue
auxquels on finit par attacher un certain sens; c'était ra-
mener l'origine du langage au hasard et à l'arbitraire. Un
autre système, qui fut développé par M. de Bonald,
attribue à la parole et même à l'écriture une origine en-
tièrement divine; les gestes eux-mêmes viendraient aussi
d'une source surnaturelle, et ne seraient qu'une imitatîoo
LAN
1141
LAN
és ce m rhomoM aurait vu. De plus, lelon la mâme
bfpothlse, rhomme pense sa parole arant de parler sa
pensée; c'était retomiier dans Técueil de Condillac et de
If. deliracv. Le principal défaut de cette théorie consiste
i méconnaître la part d*actiTité réfléchie et d'intelligence
3 as lliomme apporte nécessairement dans Tusage et
80S la formation des signes, et [Muticalièrement de ceux
du langage parlé. Rousseau a?ait émis une opinion à peu
près semblable dans son Discours sur Vorigin$ et les (on-
àtmmds à» l'méQolUé parmi les hommes; mais, dans son
Essai sur rorigtne des langues, il cherche à établir que
« la parole, étant la premier institution sociale, ne doit
sa forme qa'k des causes naturelles. » Il rentrait ainsi
dans la troisième explication, qui pose en principe que
la parole est une faculté naturelle, qui s'est développée
graduellement comme la pensée, et que les signes dont
elfe fait usage ont des rapports avec les choses. Déjà in-
diquée dans le Cratyle, où Socrate réfute Hermogène,
elle fat développée par le président de Brosses et par
Court de Gébeiin. En résumé, pour trouver la solution
du problème psychologique de l'origine du langage, il ne
faut pas oublier que nous tenons de la nature les signes
naturels absolus, un organe vocal propre à émettre des
wns articulés, la faculté d'analyser la pensée et d'abs-
traire, enfin la raison et la volonté, au moyen desquelles
nous pouvons attacher un sens ai)x signes que nous em-
ployons.
Tout langage repose sur le rapport qui s'établit, soit
naturellement, soit artificiellement et par convention,
entre une idée et un signe, et sur la puissance qu'a ce
rapport de provoquer en nous la conception de l'idée à
la simple perception du signe. Une langue ne peut donc
nous faire concevoir fidèlement la pensée d'autrui qu'à la
triple condition que chacun des signes qui la composent
aoit attaché à une seule idée, corresponde toujours à la
même, et ne devienne Jamais le signe d'une autre ; oue
ti cette idée vient à être modifiée, il le soit d'une manière
analogue; enfin que si d'autres idées proviennent de
celles-là, par filiation ou par composition, du signe pri-
mitif sortent de même d'autres siçnes qui soient avec lui
dan» le môme rapport. De là trois caractères essentiels
(fune langue bien faite : 1<* la précision, qui est le rap-
port exact du signe à la chose signifiée; à la riçueur,
elle exige autant de mots que d'idées et pas plus aidées
que de mots ; la langue seule des mathématiques atteint
à cet idéal ; il est impossible pour celles des autres
idencp3 et des arts, et pour le langage vulgaire; —
9* Vanalogie , qui consiste à faire passer dans les termes
tous les rapports de ressemblance ou d'opposition qui se
trouvent entre les idées. L'analogie suppose une analyse
saflisante de la pensée humaine ; cependant, les langues
primitives, et celles qui ont pu se former d'elles-mêmes
et en suivant le mouvement naturel et spontané de l'es-
prit humain , la possèdent à un certain degré ; — 3* la
darté, qui résulte en partie des deux caractères précé-
dents, et en partie de l'ordre et de l'arrangement des
mots, de manière à éviter l'ambiguité et les sens équi-
voques. Les langues qui aiment l'inversion sont plus
exposées à tomber dans ce défaut que celles qui suivent
Tordre logique ; celui-ci est l'ordre même de la réalité et
de la science. Toute langue oui s'y soumet a un avantage
marqué dans la pratique et les travaux scientifiques. La
langue françidse, qui admet à peine l'inversion en poésie,
a cet avantage sur la plupart des autres langues : ce
qu'elle perd en vivacité et en éclat, elle le regagne en ce
qui fait la qualité essentielle et fondamentale de toute
expression de la pensée, la clarté. A ces caractères, une
Isngue parfaite Joindrait une facilité de construction qui
le prêterait également à l'esprit, à l'imagination, au sen-
timent et à l'oreille, c-àr-d. qui serait propre à satisfaire
nntelligence et la sensibilité.
L'idée d'une langue universelle préoccupa les esprits
les plus éminents du ivn* siècle, surtout ceux qui se
fixaient à l'étude des sciences, Bacon, Descartes, Pascal,
Leibniz. Ce dernier surtout s'en occupa sérieusement; à
la même épooue, Wilkins; évêque de Ghester, et Dal-
garno y travaillaient de leur côté ; mais Leibniz , n'es-
pérant rien de leurs travaux, se proposa de construire
une espèce ^alphabet des pensées humaines. Cet alphabet
devait se composer d'un certain nombre de caractères
correspondant à toutes les idées simples et les plus élé-
mentaires, ou plutôt aux éléments de nos idées. Les
combinaisons diverses de ces caractères devaient servir à
exprimer les idé^ complexes et les diverses opérations
de la pensée. Cétait sur cette donnée que reposait la re-
cfaercne de la Caractéristique universelle (V. ce mot), l
Appliquer une espèce d'algèbre au langage parlé était qm
tentative probablement Impossible, parce qu'il faudrait
que les hommes n'eussent Jamais que des idées à expri-
mer, et oue chez tous elles pussent avoir le même dearé
de clarté. D'ailleurs, en supposant trouvé cet alphabet
des pensées humaines, « il faudrait encore, dit Fonta-
nelle, trouver l'art de persuader aux différents peuples de
s'en servir. » De nos Jours, on a prétendu arriver à une
langue universelle par l'étude comparée de tous les dia-
lectes primitifs, et en cherchant à engendrer, par la
combinaison d'un nombre limité d'idées simples, lin*
flnité des idées qu'enfante l'esprit humain. Il est per-
mis de mettre en doute le succès d'une telle entrepriseb
F. Langue.
F. De Brosses, Traité de la formation mécanique des
langues, Paris, 1765, 2 vol. ln-12; Herder, Sur i'origine
des langues, Berlin, 1772; Copineau, Essai synthétique
sur l'origine et la formation des langues, Pfuis, 1774^
en anglais, 1774-99, 6 vol. in-8<>; W. Beatie, Sur la
théorie du langage, en ani^lais, Aberdeen, 1783; Hervas«
Origine, formation, mécanisme et harmonie des langues,
en ital., Césène, 1784, in^<> ; Cesarotti , Essai sur la pÂi-
losophie des langues, dans ses Œuvres complètes, Pise,
1805-13; Reid, Recherches sur Ventendmnent humain,
t. II , ch. 4; Adam Smith, Considérations sur la formth
tion du langage, à la suite de sa Théorie des sentiments
moraux; de Gérando, Des signes et de Vart de penser
considérés dans leurs rapports mutuels ; Charma, Essas
sur le langage, 2* édit., 1846, in-8<»; Sotos Ochando,
Projet d^une langue universelle^t traduit de l'espagnol par
Touzé, Paris, 1855, in-8<». H.
LANGAGE DBS PLEUnS. F. FlEURS.
LANGRES ( Arc de ), monument romain , enclavé au-
jourd'hui dans la muraille de la ville qui regarde le N.-E.«
entre les portes du Marché et de S^Dizier. Il terminait
la voie qui conduisait de Langres au camp de S^*-Ger-
maine, près de Bar-sùr-Aube. Cet arc, large de 19"*,9i9
à la base, haut de 13"*, 70, est à peu près complet sur la
face extérieure, à l'exception de l'attique, qui n'existe
plus. La décoration se compose de 5 pilastres corinthiens,
dont 2 à chaque extrémité ; le 5*, au centre, sépare deux
arcades qui ont 4*", 25 de largeur dans œuvre et 9"*, 30
de hauteur sous clef. Des cinq chapiteaux, trois sont bien
conservés. Quelques parties de l'architrave ont été dé-
truites pour pratiquer des meurtrières et des embra-
sures. La frise était ornée d'armures sculptées en demi-
relief. La corniche est très-mutilée. Tout l'appareil est
d'une grande beauté. Les blocs sont liés entre eux par des
crampons de métal. On ne saurait préciser l'époqifb de
la construction de l'arc de Langres : les uns penchent
pour le commencement ' du iv« siècle; les autres s'at-
tachent au règne de Marc-Aurèle ; d'autres enfin croient
au*il fut érigé, ven l'an 240, en l'honneur des deux Gor-
diens, les deux arcades égales signifiant l'union des deux
empereura, oui triomphèrent le même Jour.
LANoass (Cathédrale de). Cette église, placée sous l'in-
vocation de S' Mammès, est un des monuments les plus
curieux de l'école bourguignonne du xii* siècle, et repré-
sente l'âge de transition entre le style romano-byzantin
et le style ogival. Le plan est en forme de croix latine, avee
collatéraux et nefs déambulatoires. Le triforium s'ouvre
dans les combles couvrant les bas côtés. Le plein cintre
se montre aux portes, aux fenêtres et au triforium, tan-
dis aue l'ogive apparaît presque constamment dans les
arcades inférieures et dans les voûtes. On a prétendu que
la cathédrale de Lan^p-es avait été b&tie sur l'emplace-
ment d'un temple antique consacré à Jupiter Ammon, et
que l*on voyait dans l'abside quelques traces de la con-
struction païenne : mais les têtes de béliere et les chapi-
teaux corinthiens qu'on allègue en faveur de cette opi-
nion sont de simples imitations décoratives de l'arc de
triomphe romain qui est dans la ville. Les fenêtres de
l'extrémité de l'abside ont été refaites au xiii* siècle.
Pendant le xiv*, le xv« et le xvi*, on bâtit les chapelles de
l'abside et des bas côtés. Les piliers de la nef sont carrés,
avec pilastres cannelés et chapiteaux corinthiens; ceux
de l'abside sont cvlindriques, (Cément à chapiteaux co-
rinthiens. Des pilastres corinthiens séparent les arcades
du triforium ; à l'extrémité du chevet , ils alternent avee
des colonnes ^minées, ce qui est encore une imitation
de l'arc de triomphe. Comme à la cathédrale d'Antun ,
le chœur commence par une travée semblable à celles de
la nef. Le chevet n'a qu'une chapelle ; cellea qu'on a i^ou*
LAN
iui
LAN
tées au uv* siècle le Idbg da iws oMé qui tomne aatour
du saoctuaire n'appartiennent pas au plan primitif. Le
portail primitif de la cathédrale de Lançres a été rem-
placé, de 17G1 à 1768, par une construction en style du
xvni* siècle. On remarque, à Tintérieur de Tédifice, un
Jubé qui date de 1555, une chaire épiscopale en marbre
rouge, et le derant du maître-autel, qui est en argent, et
où Ton a représenté Thistoire de S* Hammès et de S^ Jean
TEvangéliste. B.
LANGUE, nom sous leçiuel on désigne la totalité des
usages propres à une nation pour exprimer les pensées
par la parole ou par récriture. Dans toute langue, on
distingue les mots considérés isolément, et les mots as-
semblés dans un certain ordre qui constitue la phrase.
La nomenclature et Tétude des mots isolés font Tobjet
de la lexicologie et de la lexicographie, L*ordre des mots
entre eux et des phrases entre elles est réglé par les lois
de la construction et de la syntaxe, lesquelles consti-
tuent la phraséologie. Les langues des diverses nations ,
arec de nombreux rapports généraux qui tiennent à la
conformité naturelle de toutes les pensées dans Tespèce
humaine, ont aussi, dans le détail, des différences re-
marquables qui tiennent à des circonstances particu-
lières de temps, de lieu, de civilisation, de religion , à
une tournure propre de l'esprit national, etc. Ce sont
ces différences qui constituent le génie des langues. Tou-
tefois, il y a certaines classes de mots qui doivent offirir
dans presque toutes les langues, sinon une ressemblance
complète, du moins une très-prande analogie ; tels sont
les mterjections proprement dites, les premiers mots en-
fantins, et ceux qui sont formés par onomatopée, pro-
cédé ((ui a dû être employé, à peu près exclusivement, à
l'(Mrigine de toute langue, pour former les appellations
des choses physiques, et que l'on retrouve dans oeaucoup
d'idiomes de rOcéanie.
On a pu classer JusquMci environ 2,000 langues ; niais
ee classement présente, dans son ensemble comme dans
ses détails, de grandes difficultés, parce oue nos connais-
sances en linguistique, quelques progrès qu'elles aient
faits aujourd'hui, sont encore bien imparfaites. Cepen-
dant, on peut adopter deux systèmes : l'un, consistant à
les énumérer selon Tordre des continents, en commen-
çant par celui qui a été le plus anciennement connu, et
aies grouper selon leur degré d'affinité ; l'autre, à les dis-
tribuer d'après leur plus ou moins de simplicité, en
commençant par celles qui nous paraissent se rappro-
cher davantage du caractère que Ton suppose avoir été
propre aux langues primitives. D'après le premier sys-
tème, la distribution géographique, à son point de dé-
part, se fera ainsi : langues asiatiques , langues euro-
péer^es, langues africaines, langues américaines, langues
océaniennes (V. ces mots); puis, les langues partielles
de chacun oe ces continents se classeront par ordre
chronologique ou par groupes de familles. D'après le
deuxième système, on Tes classera en trois groupes gé-
néraux : langues monosyllabiques, langues d*agglutina-
iion^ langties fiexionnelies {V,ces mots ). Cet ordre peut
être suivi conjointement avec la distribution par conti-
nents; lùnsi, dans la région asiatique, on classera ,les
langues monosyllabiques , puis les langues d'agglutina-
tion, puis les langues de flexion. Les idiomes s'élèvent-
lls par degrés de l'état monosyllabique à l'état d'agglu-
tination , pour aboutir enfin à l'état de flexion? Non :
{lar exemple, le latin est plus riche en formes que les
diomes romans qui en proviennent; les langues mo-
dernes de l'Inde qui dérivent du sanscrit sont d^énérées;
le chinois est aujourd'hui aussi monosyllabique qu'au-
trefois. Il est donc difficile de constater , dans la crois-
sance des langues, une marche ascendante et régulière.
Une langue est dite ancienne ou morte, quand elle
n*est plus parlée et n'existe que dans les monuments
littéraires; telles sont ai;Jourd*hui les langues sanscrite,
hébraïque, grecque et latine. Une langue mère est celle
3ui est censée n'avoir été formée d'aucune autre, mais
e laquelle, au contraire, plusieurs autres sont dérivées :
tel est le latin, souche commune de l'italien, du fran-
çais, de l'espagnol et du portugais. Une langue est dite
classique, lorsqu'elle a produit des œuvres propres à
former le goût, à servir de modèles aux ftg^ futurs et
de base à une éducation libérale : telles sont, en France,
la langue grecque ancienne (depuis Homère Jusqu'à
Théocnte ), la langue latine ( depuis Plante Jusqu'à Ta-
cite), la langue française (depuis Bfalherbe Jusqu'à J.^.
Rousseau ). Une langue vivante ou vulgaire est celle qui
est actuellement parlée par toute une nation. Dans une
langue vivante on distingue la langue famUiihre et la lan-
gue écrttê : Fane a plus d'abandon, et comporte certalnei
négligences, que l'antre, plus soignée, plus sévère, s'in-
terdit habituellement, tout en s'efforcant de concilier
Part avec le naturel. L'une est à l'usage de tout le monde;
l'autre exige, pour être parfaitement comprise, une cer-
taine culture intellectuelle. — Une langue est dite /{(Mi-
rais, par opposition à une langue vulgahre qui en est
l'altération plus ou moins profonde : ce terme s'appliqae
spécialement : 1* au grec tel qu'on le trouve dans les
écrits du moyen âge et qui différait beaucoup du grec
populaire, lequel arrivait de degrés en degrés au grec
moderne ; 2^ au latin ecclésiastique des temp barbares
de rOcddent, qui se rapprochait beaucoup plus du latin
classique que celui du peuple on roman rustique; 3* à
l'arabe du Koran et du moyen âge, par opposition avec
l'arabe moderne on vulg^re. F. Langage.
V, Bibliander (Buchmann J, De rations communi <m-
guarum, Bàle, 1518, in^**; Conrad Gesner, Mithridates,
De differentiis linauarum , Zurich, 1555, in-8<* ; Qaude
Duret, lYésor de l'histoire des langues de œt univers,
1613, in-4^; Algarotti, Essai sur les langues , dans le
3* vol. de ses OBuvres complètes, Venise, 1791-04, 11
vol. in-8* ; Adelung, Mithridate, ou Scwnce générale
des langues, Berlin, 1806-17, 4 vol.; Vater, Tableaux
comparatifs des grammaires des langues de l'Europe et
de VAste^ Halle, 1822 1 De Mérian , mnctpes dé Vétudt
comparative des langues, Paris, 1818, in-8'>; Eicfahoff,
Parallèle des langues de l'Europe et de l'Inde , Paris,
1836, in-4* ; G. de Humboldt, Science des langues (Ber-
lin, 1848), Classification des langues (1850), et Onffine
des langues (1851} ; Btnlasw^ Aperçu général de la science
comparative des langues^ in-^; Breulier, De la formor
tion et de Vétude des langues^ 1858 , in-8*. P.
LANGUE (Écoles de). V. Écoles de langue, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire^ p. 878, col. 1.
LANGUE DE SERPENT, petit ornement architectural
oui sépare ordinairement deux oves, et qui a hi forme
Œune tète de flèche à pointe triangulaire.
LANGUE D'OC, une des langues néolatines (V. ce
mot)^ appelée quelquefois langue provençale, Cest
l'idiome originairement parlé du Sud de la Loire aux
Pyrénées. On le distingue de la langue d^oU ou roman
du nord^ et de l'espagnol, de l'italien et du portugais,
désignés sous le nom de langues de si, distinction tirée
des particules oc, oil (oui), si, par lesouelles les Fran-
çais du nord et du miui, les Ewagnols, les Italiens et les
Portu^s font une réponse affirmative. La particule oc
est le neutre de l'adjectif latin hic, hcec, hoc, qui û-
gnifle « cela, » comme le si des Espagnols et des Italiens
est l'adverbe latin sic, qui signifie « ûnsi. » La langue
d'oc est quelquefois exclusivement désignée par le nom
de romane; cW, en effet, le terme par lequel les trou-
badours nomment toujours leur propre langue. Il est cer-
tain que les pays de langue d'oc furent ceux qui perdi-
rent les derniers les traditions romaines ; d'où vient que
la renaissance de la poésie eut lieu dans leurs limites.
Toutefois, cette expression est mal fûte; car le dialecte
du nord , qui, en se polissant, est devenu le français, est
une langue tout aussi romane, c-à-d. tout aussi formés
du latin, langue des Romains, que le dialecte du midi.
— Bien des écrivains prétendent que la langue d^oc pro-
vint de la corruption du latin amenée par la conquête
gsrmanique : c'est une erreur. Elle est bien un latin
écomposé; mais cette décomposition remonte Jusjiu'aa
temps de la conquête de J. Câar, où le latin fut intro-
duit dans la Gaule. Les peuples de cette contrée, amenés
par la politique de Rome à adopter le latin, y transpor-
tèrent le génie de la langue celtique, parlèrent et écrivi-
rent la nouvelle langue selon leur génie, et selon la con-
formation particulière de leurs organes. Les gens instruits,
les habitants des villes, purent parler un latin correct;
mais la masse du peuple, particulièrement dans les cam-
pagnes, dut insensiblement créer un idiome çiui, dans le
midi de la Gaule, ne devait pas beaucoup différer de la
langue d'oc. — La langue d'oc a dû garder des traces
des idiomes divers parla en Gaule au moment de la con-
quête romaine. Outre le latin, qui devint la principsle
langue, on y parlait, au v* siècle , le celte, le grec et
l'ibérien, qui n'eet autre que le basque. On retrouve
dans la hingue d'oc des échantillons nombreux de ces
langues, auxuuels s'ijoutèrent, mais en petit nombre,
certains rocanles teutoniques introduits par les Ger-
mains. — Quoique plus analytique que le latin, puis-
qu'elle possède l'article et les verbes auxiliaires, la
langue d'oc présente moins de caractère oue le français,
et se rapproche beaucoup plua, en général, de sa mèrsf
LAN
1U3
LAO
sinsi, elle rapprime le pronom dans la conlogaison , et
désire les personnes par des flexions particullôres. Ses
locotions sont, en général, moins chargées de mots, plus
coDCtses ({ue celles du français; ce qui explique la ?olu-
bilité qa*aDportent les méridionaux dans la prononcia-
tion de la langae française. — La langue d'oc comprend,
comme dialectes importants, le languedocien, Vagénais ,
ViUÊnergnat^ le limousin, le catalan, le provençal, et
des ious-variétés telles que le béarnais, le pottooin, le
tahUongeois, le périgourdin, V. Honnorat, Dictionnaire
prooençal-français, ou Dictionnaire de la langue d^oc
ancienne et moderne, 1846-50, 4 vol. in-4« ; Blary-Lafon,
Tableau historique et littéraire de la langue parlée dans
le midi de la France, 1842, in-i8. E. B.
LANGUEDOCIEN, un des grands dialectes issus de la
langue d^oc. 11 se distingue par ses terminaisons en a et
en el. n a supprimé Vr final des deux premières conju-
gaisons, et dit^ par exemple, ama, fini, tandis qu'en pro-
vençal on dit amar, finir.
LANGUE D*OIL, nom donné à la langue romane pariée
au moyen tçà dans le N. de la France, depuis la Loire
jusqu'au Rhin. On y distingue trois dialectes princi-
paux, le bourguignon, le picard, et le normand^ dont les
aatr», tels oue le franc-comtois, le champenois, le lor-
rain, le wallon, ne sont que des variétés. La langue
cToiï est, dans tous ces dialectes, identique au fond, et
n'offre de différences que pour les détails. Le fond, c'est
le langage des vieilles populations gallo-romaines, com-
biné avec le dialecte de haut allemand que parlaient les
Franka. Les mots d'origine allemande y sont en petit
nombre, comparativement aux mots latins; l'influence
germanique a été un peu plus grande, sans l'être beau-
coup encore, sur les formes grammaticales : mais l'action
du langage francique a été considérable sur la pronon-
ciation et sur les formes que celle-ci imprime aux mots ;
c'est elle cpii a dénaturé le latin. Les différences des dia-
lectes qui composent la langue d^oil existent principa-
lement dans la prononciation et dans les formes des
mots, car les règles grammaticales étaient les mêmes
pour tous, c'était la môme grammaire. La langue fran-
çaise est née du mélanse et de la fusion de ces dialectes;
die les a peu à peu fait déchoir du ranp de langages
écrits, et les a relégués au rang de patois : les circon-
stances qui établirent entre eux des communications
dans un centre commun, le domaine des rois Capétiens,
ont fait naître et dégagé d'eux tous une langue com-
moae, plus parfaite qu'aucun d'eux, plus ample dans
ses ressources. V. Burguv, Grammaire da la langue SoU,
ntme d'un glossaire,,. 1853-56, 3 vol. in-8**.
LANGUES ORIENTALES (École desj. F. notre Diction^
noire de Biographie et d'Histoire, p. 878, col. 1.
LANISTE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
puphieet d^Bistoire,
LANLEFF (Temple de), à 8 kilom. de Paimpol (Côtes-
da-Nord). Ce monument, servant de vestibule ou de
porche à T^ise du village, est circulaire, et se com-
pose de deux enceintes concentric^ues en pierre , dont
rane est en partie détruite. L'enceinte intoieure, de 10
met, de diamètre, et de 8 met. de hauteur, est percée de
13 arcades voûtées en plein cintre , et ayant un peu
moins de 2 met. d'ouverture. Douze colonnes de hau-
teur in^^e (3 à 5 met.), dont plusieun paraissent
avoir soutenu une voûte qui n'existe plus, sont adossées
à la muraille, une entre chaque arcade; les chapiteaux
en sont complètement dé^^és. L'enceinte extérieure,
un peu moins élevée que l'enceinte intérieure, en est
séparée par on espace de,3 met., et lui était unie par un
toit : elle est percée de 16 arcades, hautes d'un peu plus
de S met., et dont le cintre est surélevé. Son pourtour
est de 55 mèt« environ. Elle ofllre, vera le milieu de sa
hauteur, on cordon uni , et, à son sommet, une espèce
te corniche saillante. Le monument, tout en granit du
pays, avait une seule porte d'entrée, située à l'orient.
Les ans voient dans le temple de Lanleff une construc-
tion romaine, les autres un Baptistère des chrétiens pri-
niti&« ceux-ci un hôpital pour les pèlerins revenant de
k Tem Sainte, ceux-là une église de Templiers : selon
Topinion la plus vraisemblable, c'était un temple cel-
tique, consaoé au Soleil. En effet, la figure du soleil y
est sculptée, et les 12 arcades paraissent représenter les
aisis d3 l'année ou les aimes du zodiaque. B.
LANSQUENET (Jeu du). V, notre Dictionnaire de
Biographie et Sffutoire, p. 1437, col. 1.
LANTERNE , enveloppie d'une forme quelconque, dans
laquelle on place une lumière que les courants d'air ne
^eafeoC éteindre. Les lanternes les plus communes sont
en fer-blanc, avec une petite porte en verre ou en corne
transparente. On les nomme lanternes sourdes, quand
elles ont une sorte de volet cru'on peut amener sur le
verre pour cacher la lumière. On fait aussi des lanternes
en papier, en toile, en gaze. Celles dites vénitiennes, en
papier de diverses couleura, servent aux illuminations.
Les Chinois fabriquent d'élégantes lanternes avec des
châssis sculptés et des verres peints. — Les Anciens ont
connu l'usage des lanternes, qu'ils faisaient en bois,
en terre cuite, et plus souvent en bronze. Empédocle
d'Agrigente et le poète comique Théopompe sont les pre*
miere auteun qui en aient parlé. L» mots grecs phanos
(d'où est venu probablement fanal ) et lychnoukhos , le
mot latin latema, désignaient la lanterne. Bien aue l'on
connût le verre, il ne paraît pas qu'on en ait fait usage
pour laisser passer la lumière ; on se servait de corne,
de vessie ou de toute autre membrane transparente, et
même de toile humectée d'huile. Plutarque dit que les
Augures avaient des lanternes pour leura fonctions. Les
Anciens les employèrent fréquemment dans les camps :
les troupes, quand elles marchaient de nuit, en portaient
qui, fixées au haut d'une pique, n'éclairaient qu'en ar-
rière. Il y en avait aussi sur les navires. Les rondes noc-
turnes militaires se faisaient avec des lanternes; on en*
plaçait auprès des sentinelles sur les mura des villes de
guerre. Dans des siècles où les villes ne possédaient pas
d'éclairage public, les particuliers s'aidaient de lanternes
le soir pour regagner leur demeure : les riches se fai-'
salent précéder par un esclave porte-lanterne, latemaf
rius. Ce ne fut que ven le xii* siècle qu'on sid)8titua le
verre à la corne dans l'un des côtés des lanternes. Cest
l'usage dans l'Église catholique de porter une ou plu-
sieun lanternes devant le S' Sacrement dans les proces-
sions, et devant le prêtre qui va administrer le viatique
à un moribond. B.
LANTERNE, tourello élovéo au-dessus d'nn dôme ou
d*une coupole, dont elle forme l'amortissement, comme
au Panthéon et aux Invalides de Paris. — Au moyen âge,
pendant la période romane, on appela lanterne la tour «
ou le clocher qui s'élève au-dessus de la croisée des *
églises, et dont on voit l'intérieur quand on se place au '
milieu du transept. Dans le Ifidi et dans l'Est de la
France, ces lanternes présentent à l'intérieur une cou-
pole sur pendentifs, et, dans l'Ouest, très-souvent une
voûte d'arête. A l'époque ogivale, les lanternes furent
fermées à l'intérieur par des voûtes ogivales aux fines et
élégantes nervures, et elles se couronnèrent en dehon
d'une flèche gracieuse et élancée. Les Joura de fête, on
illuminait ces lanternes. Une des plus reman{uables est
celle de la cathédrale de Coutances, qui existe encore.
On en voit également aux cathédrales d'Évreux , de Li-
sieux, de Laon, etc. Celle qu'on doit regretter le plus
s'élevait au-dessus de la cathédrale de Beauvais. E. L.
LANTERNE DE OéMOSTHENE. F. ChORAGIQUES ( Moua-
ments).
LANTERNE DE DIOGÈNE. V. ClX>UD (SaINT-).
LANTERNE DES MORTS. V. FaNAL DE UMETIÈRE.
LANTERNISTES, société littéraire qui se forma anf
commencement du xviii* siècle à Toulouse, et dont les
membres, ne se réunissant que le soir pour n'être pas
troublés, évitaient de se faire conduire avec des flam-
beaux et prenaient seulement une petite lanterne. Ils
acceptèrent le sobriquet que quelques plaisants leur
avaient donné, et prirent pour devise une étoile avec ces
mots : Lucema in nocte, lis distribuèrent chaque année
une médaille à l'auteur du meilleur sonnet composé en
l'honneur du roi sur des bonts-rimés proposés par la
compagnie,
LANTERNON, petite tourelle à toit conique, placée au-
dessus d'un escalier de tour ou de clocher, pour le proté^
ger contre la pluie.
LAOGOON ^Groupe du). F. notre Dictionnaire de 9to-
graphie et dnistoùre.
LAON (Église Notre-Dame de). Cette ancienne église
cathédrale, dont on fait remonter la première fondatioii
à l'évoque S> Rémi, fut incendiée en 1112, pendant lerf
luttes qui signalèrent rétablissement de la commune de
Laon. Deux ans après, on commença l'édifice actuel, qui
ne fut terminé quà la fin du xu* siècle ou dans les pre-
mières années du xni*. Les dimensions en sont vastes t
longueur, 107 met ; largeur du transept, 40 met. ; largeur *
de la nef, y compris les collatéraux, 35 met. ; hauteur
sous voûte, 30 met. ; hauteur de la lanterne, 40 met. On
remarque, entre autres particularités de la construction «
que l'abside est carrée, ainsi que les bras de la creix,
qui ont seulement, du c6té du chœur, une chapelle cir-
LAP
114«
LAO
colaire. La cathédrale de Laoo devait aToir sept tours,
deax au portail principal, quatre aux angles des croisil-
lons, et une à la croisée : on n*en a élevé que quatre ,
dont deux au grand portail, et deux aux extrémités des
transepts. Rien n*égaie la hardiesse, la légèreté et, pour
ainsi dire, la transparence de ces tours; Faction des vents,
Soi sont très-violents sur la montagne où Tédiflce est
evé, n*aurait pas tardé à détruire des masses plus com-
pactes. Toutefois, comme la construction fut faite trop ra-
pidement, il y eut, à la façade, des tassements et des dé-
chirements, qui ont nécessité de nos Jours une importante
restauration. Les tours étaient autrefois surmontées de
flèches; elles sont aujourd'hui terminées par des beffrois
octogones, flanqués, sur les faces parallèles aux diago-
nales du carré, de pinacles à deux étapes ajourés, où sont
des figures colossales de bœufs. L'intérieur de l'éf^ise pré-
sente une disposition architecturale remarquable. Les
chapiteaux des piliers monocylindriques sont tous d*nne
sculpture différente : sur ces chapiteaux s*appuient des
colonnettes qui s'élancent Jusqu'à la voûte pour en rece-
voir les nervures, et qui sont imrtagées par cinq annelets.
Quatre des piliers de la grande nef sont formés d'une
eolonne centrale et de six colonnettes séparées et isolées
dans tonte la longueur de leur fût. Un pilier du transept,
à la travée centrale, est composé de quatre colonnes
sroupées. La lanterne de là croisée est d'une grande
flégEince. La galerie s'étend sur toute l'étendue des col-
latéraux, comme à Notre-Dame de Paris, à S*-Étienne de
Gaen, à Notre-Dame de Ch&lons-sur-Blarne et à No^on.
Au-dessus se trouvent des arcades à plein cintre qui si-
mulent un triforium, et des fenêtres ogivales. Dans le
chœur, on trouve également des arcades ogivales ap-
puyées sur des colonnes monpcylindriques, une galerie
aussi profonde nue sur les bas côtés, une seconde galerie
aveugle, et des fenêtres ogivales de dimension médiocre.
Les chapelles qui entourent la cathédrale de Laon sont
fort petites et plus récentes que le corps de l'édifioe; eUes
ont été pnoiquées entre les contre -forts extérieurs, au
XV* et au XVI* siècle, et sont fermées du côté des colla-
téraux par d'élégantes clôtures en pierre dans le style de
a Renaissance. Parmi les richesses du monument, on |
peut encore dter le buffet d'orgues, les rosaces, ornées
de beaux vitraux, et les pierres tombales dont il est en-
tièrement pavé. Le long du flanc méridional de la nef, il
existe un cloître voûté en arcs d'ogive . V. J. Marion ,
Essai historique et archéologique sur l*église cathédrale
de Notre-Dame de Laon, 1843, in-8*. B.
LAPA , grande trompette des Tartarea, fidte d'un tube
de cuivre long de 2 à 3 mètres.
LAPIDAIRE (du latin lapis, pierre), ouvrier qui taille
et polit les pierres précieuses, artiste qui y grave ou
sculpte des figures. Les lapidaires, formes autrefois en
corporation, avaient pour patron S' Louis.
LAPIDAIRE (Style), style employé dans les inscriptions,
qui sont le plus souvent gravées sur la pierre. L'étude
en est assez difficile à cause des signes conventionnels,
des abréviations nombreuses et des particularités propres
au texte ordinaire des inscriptions. Ces particulantés,
pour les inscriptions grecaues et latines, sont désignées
sous le nom de figures, telles que, par exemple, Vanaco-
luthe on manque d'accord entre le verbe et le sujet, le
mrotoustère ou expre.^on qui n'est pas à sa place, et
Vantiptose ou cas mis pour un autre. A ces difiîcultés se
Joignent celles qui résultent de la différence des dialectes,
des expressions locales, et des fautes qui ont pu être com-
mises par l'ignorance du graveur. Le plus souvent, les
Inscriptions grecques et latines sont en prose; on en
trouve pourtant un certain nombre écrites en vers, et
qui sont app^^^ métriques; d'autres enfin offrent un
mélange de vers et de prose, et parfois même de grec et
de latin, comme on le voit sur le dppe iunéraire trouvé
Il y a quelques années à Lyon. Dans le style lapidaire,
las mots sont le plus souvent séparés par des points,
•nssi bien les mots écrits en toutes lettres (pie ceux écrits
en abrégé ou indiqués seulement par l'initiale. B.
LAPIDAIRES (Signes), marques variées et nombreuses
S 'on trouve sur les pierres des édifices du moyen âge.
s maîtres tailleurs de pierre et même les ouvriers
avaient l'habitude d'appliquer sur les pierres ou'ils tail-
laient une espèce de monogramme, chiffre ou signe, sur-
monté généralement d'une croix. On trouve aussi, à côté
de ces signatures symboliques, de nombreux repères de
tidlle également croisetés. Des rapprochements ont été
faits pour trouver qudaue analogie entre les marques des
pierres des édifices de différents pays, ce qui eût expliqué
les rapports maçonniques des grandes compagnies ou-
vrières du moyen âge; mais l'immense multiplicité de
ces signes a dérouté tous les calculs. Ainsi les murs d'en-
ceinte d'Aigues-Mortes seuls ont donné 237 variétés de
signes, la cathédrale de Strasbourg en a offert près de
350, le château de Nuremberg 157, etc. E. L.
LAPIDATION, action de tuer quelqu'un à coups de
Eierres. Ce fut un genre de supplice usité chez 1» Hé-
reux pour l'idol&trie, le blasphème, l'adultère, l'iDceste,
la violation du sabbat, etc. C'étaient les témoins qui Je-
taient la première pierre au coupable.
LAPITHES (Danse des), danse exécutée chez les an-
ciens Grecs au son de la flûte à la fin des festins, pout
célébrer quelque grande victoire. Elle avait été inventée,
dit- on, par Pirithoûs, en mémoire du combat des Cen«
taures contre les Lapithes.
LAPON (Idiome), un des idiomes finnois ( F. ce mot),
différencié des autres du même groupe par l'emploi du
nombre duel dans les pronoms et dans les verbes. C'est
avec le hongrois qu'il a le plus d'aflinité. On y reconnaît
trois dialectes, que distinguent entre eux des éléments
suédois, norvégiens et russes. Lé lapon contient beaucoup
d'onomatopéoi; il n'a pas de mots exprimant des idées
abstraites. Il y a huit cas, et deux déclinaisons entre les-
quelles se partagent les substantifs et les adjectifs, selon
que leur nominatif se termine par une voyelle ou par une
consonne. Il existe également pour les verbes deux conju-
gaisons, que détermine la terminaison de la 3* personne do
présent de l'indicatif. Le pluriel se forme dans les noms,
tantôt en affaiblissant ou en retranchant, tantôt en renfor-
çant ou redoublant les consonnes radicales. L'emploi de
flexions [Muticulières dans les verbes permet de rendre par
un seul mot ce qui exige des périphrases dans la plupart
des lances. V. FlellstrOm, Grammaire suédoise-laponne,
et IHcttonnaire suédois-lapon^ Stockholm, 1738, in-8<*;
Ganander, Grammaire laponne (pour le dialecte suédois),
1743, in -8^: Knud Leem, Grammaire laponne, Copen-
hague, 1748; le même. De Lapponibus Finmarchiœ
eorumque linpuâ, 1767, iii-4**; le même, Lexicon lappo-
ntco-dantco-Tatinum (piour le dialecte norv^en), 1768;
Lindahl et CEhrling, Lexicon lapponicum, Stockholm,
1780, in-4**; Rask, Grammaire laponne^ Copenhague,
1832, in-8*; Possart, Grammaire laponne, Stuttgard,
18i0; Sainovicz, Demonstratio idioma Hungarorumet
Lapponum idem esse, Copenhague, 1770; Ihre OEhr, De
conveniefUiâ linquœ lappdnicœ cum hungaricà, Upsal,
1777 ; J. Hager, Nouvelles preuves de la parenté du hon-
grois avec le lapon, en allem.. Vienne, 1734. in-8*.
LAPSUS, mot emprunté au latin pour aésigner une
erreur, une faute échappée par méspsrde dans le discours
{lapsus linguœ) ou dans l'écriture (fapsus ca/amt).
LAQUE , sève de deux arbres de la Chine et du Japon,
Vaugia sinensis et le thus vemix. Cest ane gomme-ré-
sine d'autant plus fine et noircissant d'autant plus vite
à f air, que sa couleur café au lait tire plus sur le rouge.
On s'en sert pour vernir des meubles, fabriqués le plus
ordinairement en cjrprès. Les opérationa de vernissage
sont longues et minutieuses. Le bois reçoit d'abord une
couche de fiel de buffle et de grès rouge pulvérisé : ce
premier fond est poli avec un brunissoir de grès, pois
gommé ou ciré , et l'on étend par-dessus, avec un pin*
ceau plat fait en cheveux , une couche de vernis, com-
posé de 605 grammes de laque fine étendus dans 1 ,310
grammes d'eau avec addition de 38 grammes d'huile de
camellia sesanqiui, d'un fiel de porc, et de 19 grammes
de vinaigre de riz. Quand le bois ainsi préparé est resté
quelque temps dans un séchoir humide, on le plane à
reau avec un schiste d'un grain très-fin ; on donne une
deuxième couche de laque, puis un deuxième poli, et
ces deux opérations se succèdent Jusqu'à ce que la sur-
face soit parfaitement unie et brillante. Il n'y a jamais
moins de 3 couches, ni plus de 18. L'artiate qui veut
orner de dessins cette surfitce polie fait d'abord une
esquisse avec un pinceau blanchi d'un pea de cérose :
s'il est satisfait de son croquis, il le burine, et trace les
mille petits détails du s^|et, puis il le peint avec la laque
du Kouang-si camphrée, qui sert de mordant, et enfin fl
dore au tampon et an pinceau. On obtient des reliefs
avec une ou deux couches de hoorkinn^i, et l'on enjo-
live ces miniatures dorées avec la laque du Fo-Kien. Les
laques de Sou-tchou et de Nan-King sont remarquables
par la pureté et l'éclat du vernis, la finesse merveilleuse
du décor, et la correction du travail d'ébénisterie. La
fabrication des meubles en laque est encore supérieure
dans le Japon : on y incruste des fragments d'haliottde
et d'avicule, diversement découpés et colorés. Ce fut
vers 1675 que les missionnaires apportèrent en fnacs
LAT
1145
LAT
les premiers laques de Chine. On les imite aujourd'hui
CD France et en Angleterre. On commence par poser sur
le bois (ordinairement du tilleul, du hêtre, du frêne ou
da mensier) un fond de noir de fumée et un apprêt à
Pocreon à la céruae; puis on polit au papier verre, on
passe deux couches de noir mat, on donne deux pon-
çages, on applique une couche de noir dMvoire broyé
arec de Thuile et de l*essence, et l'on termine par deux
glads et UD frottis au Ternis teinté. Le brillant est dû
priDcipalement au vernis, tandis qu'en Chine on l'obtient
arec le poli. En Angleterre, surtout à Birmingham, on
laqoe toutes sortes d'ouvrages de tabletterie en papier
mftché et en carton verni , et ces ouvrages peuvent être
\ijTes à bas prix.
L\RAIRE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d*Histotre.
L\RGO, mot italien qui signifie largement, et qui,
placé au commencement d'un morceau de musique, in-
dique un mouvement plus lent que Vadagio, et le plus
leot de tous. Il faut qu'un pareil morceau ne soit pas
lODg pour ne point devenir ennuyeux. — Larghetto^ di-
fflioatif de largo, indique un mouvement un peu moins
lent, très-approchant de Vandantino,
L\RGUE, terme de Marine qui signifie lâche, non
tendu. Larguer^ c'est élargir, rel&cher, détendre. Largue
désigne encore l'allure d'un bâtiment, celle où il reçoit
le Tent dans une direction oblique par rapport à la quille.
Les voiles sont alors peu ouvertes. Le vent est largtie^
qaand il souffle dans cette direction.
lARIDON, nom que l'on donnait Jadis à la hastê de
m,
LARIGOT (Jeu de). V. Nasard.
lARIN, monnaie de la Perse, qui fut primitivement
propre à la ville de Lar, et valant \ fr. 21 cent. Cest un
fil d'argent plié en deux, et sur lequel on voit le nom du
fionrerain.
URBUER, partie d'une corniche qui est le plus en
niUie. 11 présente en dessous un plafond, qui reçoit une
ornementation en rapport avec l'ordonnance architectu-
nie: dans tous les cas, ce plafond doit porter vers le bord
extérieur un canal appelé motic^tto, qui arrête les gouttes
d'eau pluviale et les Ikit tomber verticalement, en larmes,
saos baver le long de la corniche. La saillie du larmier
nrie suivant les ordres : elle est d'un module pour le
tOKan, de 1,72 pour le dorique et l'Ionique, de 2,374
poor le corinthien et le composite. Dans l'ordre dorique.
Je plafond du larmier est incliné en avant, pour offrir un
obiticle de plus à la goutte d'eau qui aurait franchi la
OKKKhette. Le larmier lui-même s'orne quelquefois de
euaax. A l'époque romane, le larmier a perdu sa forme
classique ; ce n'est plus qu'une forte moulure inclina,
et ornée parfois de modillons et de corbeaux. Le larmier
gsthique se modifie encore dans sa forme; il prend un
pea plus d'importance, et se compose d'un plan incliné
lop^ear, très-saillant, et d'une face étroite, ornée en
dessous d'une gorge et d'un listel. La Renaissance a ra-
mené les larmiers classiques. E. L.
LARMOYANTE (Comédie). V. Com«dib.
LARUETTE. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
BioQraphie et d^ Histoire,
^ LàSCARS, nom donné aux matelots indiens, particu-
lièrement à ceux qui servent sur les bâtiments européens.
Os sont tirés de la classe des Parias.
LASSO, forte lanière de cuir, longue de 45 à 20 met.,
pnie de plomb à ses extrémités, et que les indigènes
de PAménque du Sud Jettent avec une étonnante a<fresse
pour enlacer et prendre les chevaux et les bosufli sau-
vages.
LASTRIGA, aire aveclaquelle les Napolitidns font leurs
pbuichers intérieurs et les terrasses qui couvrent leurs
bâtiments. Elle est composée de deux parties poosxolane,
loe partie tuile, et deux parties chaux vive.
lATICLAVB. y. ce mot dans notre Dietiomiairê de
Siograi^ H d^Hittùire.
UTDf (Style). V. AacHiTBcnmi.
lATWB {CnAs). V. Cboix.
.utniB (ÊgUae). V. Églisb cathouqob, daos notre Dto-
tomoiracie BwgraphM et d'Histoire,
UTras (Lansa^. Ses caractères spécioua, « La lannie
laiioe, dit un éaunent philologue, am>artient à la famille
des langues tgtUhéUques, c-à-d. qm tendent à exprimer
piasieurs idén à la fois par un seul mot, et qui abondent
en formes et en flexions grammaticales. » {Élémmts de
trmmaire comptai, par M. Egger, ch. xxii.) En effet,
as y rencontre tout d'aoord une grande Tariéie dans les
Minaisons, soit qu'on en admette cinq, suivant la divi*
sion vulgaire, soit qu'une grammaire plus rigoureuse lef
réduise a trois, toujours aussi fertiles en désinences.
Trois genres dans les noms et les a(]yectifs, comme en
grec et en allemand (le français n'a pas de geinre neutre)!
deux nombres, comme en français (le grec en avait un
troisième, le duel, qui, sans être nécessaire, ajoutait à Ui
facilité et à l'élégance du langage); point d'articles, et,
par conséquent, moins de clarté que dans la phrase gireo-
que ou française, plus d'ambiguïtés et d'équivoques è
craindre ; dans les verbes, quatre conjugaisons, réduc-
tibles, si l'on veut, à une seule, mais riche en terminai-
sons variées, sonores, et par conséquent significatives ;
une forme passive analogue à celle des Grecs, et qui
n'exige pas, comme en français, une proposition tout en-
tière : tels sont les premiers éléments et les conditions
constitutives de la langue latine. — Le français, qui n'a
pas de déclinaisons, et dont les rares désinences no
s'adressent guère qu'aux yeux, exprime les rapports des
idées et des mots par l'emploi des prépositions ou par la
place qu'ils occupent dans la phrase; le latin fait servir
toutes ses désinences à exprimer ces mêmes rapports, et
multiplie les régimes immédiats des substantifs et des
verbes. « Les règles d'accord et de dépendance, dit en-
core le même savant, dominent dans la syntaxe latine t
les règles de position y sont plus rares et moins rigou-
reuses. Dans notre syntaxe, les règles depo^thon, quoi-
que simples et moins nombreuses, l'emportent sur les
règles d'accord et de dépendance, » (Ibid.) — Aussi le
latin est-il, comme le grec, une langue essentiellenïent
inversive. Les mots s'y rangent dans l'ordre de leur va-
leur et de leur Importance, d'après la force et la progres-
sion des idées, ou bien encore selon les lois de l'harmo-
nie, et donnent naturellement à la phrase, en prose
comme en vera, un tour expressif et musical. Grftce à cet
heureux privilège, les langues grecque et latine méritent
par excellence l'estime que Boileau professait pour les
mots mis en leur place. On a justement remarcpié que
l'inversion, si favorable à l'effet et à l'élé^nce du
style, convenait à merveille au génie artiste des Grecs, et
même des Latins, quoique moins heureusement doués, et
lentement parvenus au sentiment et à la culture des arts;
tandis que la constitution essentiellement méthodique de
notre langue et l'ordre successif de notre phrase, en les
rendant plus claires et plus rigoureuses, semblent les-
destiner à l'expression des ventés scientifiques et des
conceptions de la raison. Ajoutons encore que ces qualités
conviennent aux discussions et aux conventions diploma-
ti(fues, où les Romains, lorsqu'ils traitaient avec les
vaincus, ne se faisaient pas toujoun scrupule d'employer
des éouivoques plus politiques qu'honorables. Un juge
singulièrement sensible aux qualités expressives des
idiomes anciens, Fénelon, a caractérisé Ilnveraion avec
la délicatesse habituelle de son goût et ouelque peu d'in-
justice pour sa langue nationale, qu'il avait pourtant
maniée si admirablement. « Les Anciens, dit-il, facili-
toient par des invereions fréquentes les belles cadences,
la variété et les expressions passionnées. Les invendons
se tournoient en grandes figures, et tenoient l'esprit sus-
pendu dans l'attente du merveilleux... Notre langue n'ose
jamais procéder que suivant la méthode la plus scrupu-
leuse et la plus uniforme de la grammaire. On voit tou-
joura venir d'abord un nominatif substantif qui mène
son adjectif comme par ta main ; son verbe ne manque
pas de marcher derriènre, suivi d'un adverbe qui ne souffre
rien entre eux deux, et le régime appelle aussitôt un ac-
cusatif qui ne peut jamais se déplacer. Cest ce qui exclut
toute suspension de l'esprit, toute attention, toute sur-
prise, toute variété, et souvent toute magnifique cadence.»
{Lettre sur les occupations de V Académie, v.) — A oet>
caractères essentiels, il faut ajouter la facilité de former
les mots, moins par composition que par dérivation, faci-
lité que Fénelon enviait encore aux langues mortes, et
ou'il désirait voir passer en firançals, malgré l'exemple
oécourageant de Ronsard. Les éléments des mots com-
posés ne se multiplient pas indéfiniment en latin comme
en allemand. En général, ils se réduisent à deux ter-
mes ; l'expression y gagne en facilité, sans être surcharj^
d'une stérile et oonmse abondance. Au reste, le latin ne
se prêta iamais avec autant de facilité que le grec à Is<
combinaison des mots composés. Les longs mois twffiè-
plaisamment par Plante à l'imitation d'Aristophane ne
sortaient pas du style comique. Les Romains n'avaient
pas la flexibilité de cette bouche harmonieusemmi ar^
rondie, dont la Muse, dit Horace, avait doué les fUs pri-
vilégiés d' la Grèce. Mais la langue romaine, destinée t
s'imposer au monde avait d'autres qualités, d'aotrea
L.\T
1146
LAT
«▼«DtaigeB; elle les posséda sans doate avant même de se
polir au contact d*un idiome étranger. Un peuple formé
dans las assemblées publiques et les tribunaux à la pra-
tiqpie des aiblres et des lois, partagé entre la guerre et
les luttes du Forum, acquérait naturellement à cette
double école la précision, la force et la grandeur avec la
brièreté du commandement. Lorsque les relations avec
la Grèce eurent apporté à Tidiome des vieux Latins un
peu de la politesse et de Tabondanoe qui lui manquaient,
il prit cette solidité et cette ampleur oratoires qui de-
vaient faire son originalité, sa puissance et sa durée.
Cette belle forme de la période, que les Romains appe-
laient le ctrctttt, le cadré de la parole, ou plut6t le tour
par où la parole se développe (circuttuf, ambitus, com^
prehengto vérborum)^ semble presque leur appartenir en
propre, bien quils en eussent trouvé le modèle dans la
Ehrase admirablement nette, précise et abondante de
^émostbène. Cicéron nous donne presque la date pré-
cise de Tapparition de la période, avec Télégance grecque;
il en fait honneur à M. Emilius Lépidus, surnommé
Porcins, créateur de ce qu'il appelle d*un terme tout mo-
derne le style curtistê, artifex (an de Rome 617, av. J.-C.
437). Dès lors, la g^vité des assemblées publiques et
l'autorité que donnait la parole auprès du Sénat et du
riple, conduisirent naturellement la langue oratoire
rfaarmonieuse nujesté de Grassus et de Cicéron,
comme à la m&le toergie de Brutus. « Rien n'égale la
dignité de la langue latine. Elle fut parlée par le peuple-
roi qui lui imprima ce caractère de grandeur unique dans
rhistoire du langage humain , et que les langues , même
les plus parfaites, n*ont jamais pu saisir. Le terme de
majesté appartient au latin. La Grèce Tignore, et c*est
par la majesté seule qu'elle demeurera au-dessous de
Bome, dans les lettres comme dans les camps. Née pour
commander, cette langue commande encore dans les
livres de ceux qui la parlèrent.» ( J. de Haistre, du Pape,
I , XX. ) — Un autre caractère propre à la langue latine
-est de se prêter merveilleusement an style lapidaire
(V, ce mot). Brève et concise, elle réduit les termes
•et ménage 1 espace au profit des idées; libre dans sea
constructtons, elle peut placer les mote dans l'ordre
le plus avantageux et le plus éloquent. Ces qualités ont
'fait préférer longtemps le latin aux langues modernes
•pour les monuments et les médailles, et le font quelque-
fois adopter, même de nos jours, quoique nous ne pen-
sions pas toii^ours à rechercher dans nos inscriptions
modernes la vigueur ni l'élégance. « Le signe européen,
dit encore de Maistre, avec sa verve éloquente, c'est la
langue latine... Les médailles, les monnaies, les tro-
phées, les tombeaux, les annales primitives, les lois, les
canons, tous les monuments parlent latin : faut-il donc
les effacer, ou ne plus les entendre?.. • Au lieu de ce
noble laconique, vous lires des histoires en langue vul-
Saire. Le marbre, condamné à bavarder, pleure |a langue
ont il tenait ce beau style qui avait un nom entre tous
les autres sQrles, et qui, de la pierre où il s'était établi ,
• s'élançait dans la mémoire de tous les hommes. • {là. )
Origines et histoire sommcUre de la langue latine. —
Les origines du latin sont très-obscures et trè»-difficiles
. à déterminer. Les grands maîtres de la prose historique
• chez les Romains, plus soucieux d'éloquence que d'éru-
dition, ne nous ont rien appris de leur histoire et de leur
langue. Varron, dans les six livres incomplets qui nous
restent de son traité Sur la langue UUine, Festus, dans
son livre de la Signification des mots, quelques débris
■ de l'ancien langage, recueillis çà et là par une critique in-
génieuse dans la poussière des monuments mutilés ou
dans les erammauiens ( V. Bgger, Laiini sermonis r«i*-
çwûs), voua où il faut puiser les éléments d'une histoire
de la langue latine dans les premiers siècles de Rome.
« Notre langue, dit Varron, n'est pas tirée toute des
^termes nationaux » (liv. IV, init.). Il est étobli, du moins,
>4iue le latin des vieux âges avait une origine commune
. avec le grec. Les immigrations de peuplades helléniques
avaient apporté sur le sol Italien une langue d'origine
> indienne, issue du sanscrit, et destinée à se perpétuer en
Italie comme en Grèce, mais avec des fortunes bien dif»
férentes. Une vie agricole et guerrière, point de sentiment
des arts, c'étaient là des conditions faites pour maintenir
le langage à l'état rudimentaire, et réduue le rustique
Latium, comme l'appelle dédaigneusement Horace, à la
dégoûtante âpreté du grossier mètre saturnien (grave
virus). Dans quelle proportion les populations italiques,
les Osques, les Sabins, les Étrusques, modifièrent-ils
ces éléments primitifs? Il est impossible de le dire. La
langue latine dut TieiUir dans une enfancede cinq siècles,
jusqu'au moment où le progrès des armes romaines la
mit en présence de la langue grecque, et fit subir aux
rudes fils de Romulus l'sscendant d'une civilisatioa en-
core inconnue. Les deux idiomes, bien que sortis d'une
même souche, avaient singulièrement changé pour se re-
connaître après une séparation si profonde. Toutefois, on
put retrouver peu à peu les traces de la commune ori-
gine, un air de famille, et adopter les mots grecs avec
d'autant plus de facilité. Cest depuis ce moment, c. à-d.
depuis la guerre de Pyrrhus, que le latin se forme et se
polit. Il suit alors un progrès constant, du moins à nos
yeux, jusqu'au siècle de Cicéron et d'Auguste, jusqu'à la
perfection de la langue oratoire et de la langue poétique.
Remarquons cependant que Cicéron, meilleur Juge que
les modernes , cherche la vraie pureté de la langue dans
les âges qui l'avaient précédé, et en fait honneur an
siècle de Caton, d'Ennius et de Térence. Comment s'ex-
pliquer cette infériorité de langage dont Cicéron semble
accuser son siècle? Sans doute, il veut dire que la langue,
à cette époque, était essentiellement latine, peu mêlée
de grec et dMdiomes étrangers, tandis que, de son temps,
les poètes de Cordoue même apportaient à Rome, avec
leur langue, l'enflure particulière à leur pays. On le voit
d'ailleurs insister, lorsqu'il raconte dans le BnUus l'his-
toire de l'éloquence, sur le mérite des orateurs qui par-
laient bien le latin, et en faire une partie de la gloire
d'Antoine {Brutus, xxxn). — Du reste, si le latin s'alté-
rait déjà, ce n'était point par la recherche des archaïsmes.
Au temps de César, Salluste lui-même, malgré son goût
affecté pour l'antiouité, ne s'inquiétait gum plus des
vieilles sources de rhistoire et du langage que de la pré-
cision géographique. Varron écrivait, il est vrai : « Hieux
« vaut approuver celui qvA donne facilement beaucoup
« d'explications sur les ongines des moto que de critiquer
« celui qui ne peut pas les donner toutes; d'autant plus
« qu'en matière d'étymologie on ne peut pas rendre rai-
« son de tout » (liv. VI). Hais les écrivains supi^rieurs
aimaient mieux mépriser, comme Horace, tes poudreuses
annales dês pontifes, et déclarer ininMigÙtles des humtus
saliens de ffuma, que les étudier, ou tout an moins les
sauver de la destruction. Ainsi se sont perdus, avec ces
hvmnes salions, le chant des frères Arvals, le texte com-
plet et original des lois des Douze Tables, les Grandes
Annales, une foule enfin de documente où la philologie
moderne retrouverait certainement, à force de patience
et de sagacité, les éléments du ladn. — La langue du
Droit avait dû se former, et la langue oratoire avsit pu se
préparer ches les Romains avant le commerce des Grecs;
mais celles de la philosophie et de la poésie furent une
conquête de Rome sur la Grèce, ou plutot encore de la
Grèce sur Rome. Après le laborieux enfantement d'En«
nius, ce sont Lucrèce et Catulle qui assouplissent l'instru-
ment poétique dont Virgile et Horace feront un si mer-
veilleux usage. Après les effbrte de Lucrèce pour rompre
aux sqjeto philosophiques l'idiome rebelle de son pays,
dont il accuse si fréquemment l'indigence, c'est Cicéron
qui, dans ses grands traités, donne à ses lecteurs et à son
pays la lançue de la philosophie, en même temps que
celle de la cntique littéraire. — D^à, cependant, le latin
subissait une modification nouvelle par un effet de cette
loi inévitable qu'Horace exprime en termes d poétiques
quand il compsre les mots qui s'en vont a»*x feuilles qm
tombent. Lui-même, avec tout son génie, contribuait à
cette altération par l'emploi trop fréquent et trop heu-
reux des héllénismes. Le temps n'était pas très-éloigoé
où les mote grecs viendraient reprendre, dans les vers de
Juvénal lui-même, la place qu'ils avaient eue jadis dans
ceux de Lucilius. A cùté de la langue poétique, les formes
de la prose changeaient également : Sénôoue coupe et
brise la période; Tacite introduit dans la langue histo-
rique les termes, les tours, les hardiesses propres à la
poésie. Les règles de la grammaire commencent à s'on*
Dlier, ou, du moins, le grand écrivain se permet dei
licences comme Horace s'en était permis. Bientùt rété*
ment barbare arrive à la suite de l'élément grec. Les
guerres lointaines, les rapporta perpétuels et inévitables
avec des vaincus tout près de devenir vainqueurs, cor-
rompent le latin, surtout en Gaule et même en. Italie.
Vienne le règne de Théodose, et la langue, déjà réduite à
la stérile élégance de Claudien, s'abiâsera encore dans
les vers d'Ausone, pour descendre aux poèmes de Sidoine
Apollinaire et de rortnnat, et à la prose de Grégoire de
Tours. La transformation s'opère à travers les révolutions
de l'Europe, et la corruption de la langue mère forme les
langues néolatines, telles que le francs, l'italien et ras*
pagnol. On pourrait fixer sans doute au serment des fili
LAT
1U7
LAT
de Lirais te Débonnaire, en 843« la disparition du latin
comme langue politique en France, de même qne Ter-
doonâflce de Villere-Cottereta, en 1539, le bannit de la
langue Judiciaire et des arrêts du Parlement. II demeure
encore, comme au moyen âge, la langue de la théologie,
dn Droit, de la philosophie sootastique, de réniditîon,
même des sdenoes naturelles { car, au xvii* siècle, Des-
cartes écrit encore ses traités de physique en français et
eo latio. Il est également. Jusqu'à la Révolution, la langue
de rOniversité ; le prince de Conti félicitait Rollin de
parler U froHçatM comme si à'eiU été sa langue naturelle;
et rUaiTenité, en mémoire de ces vieilles traditions, l'a
oooeenré dans ses distributions du concours général.
Eollo, il est la langue de TÊglise catholique, et doit à
cens coDsécration, &ns les soaétés modernes, cet usage
onifenel et ces Immortelles destinées que l'orgueil des
Romaine mesurait autrefois à la durée du Capitole et de
taroehsrs inébranlables.
Bibliographie. — La bibliographie de la langue latine
foorninit une nomenclature trës^longue; nous n'en pou-
vons indiquer que quelques ouvrages importants : parmi
ia Andeos, Vairon, Festus, et les grammairiens de se-
cond ordre, tels que Macrobe et Aulu-Gelle; parmi les
Dodemes, Laurent Valla, Do latinœ linguœ elogaïUiâ
lihri VI, Rome, 1471, in-fol.; le cardinal Adrien, De
mrnone Itttino et do modis latine loquondi^ 1515, in-
toL ; Et Dolet, Commontariorum lingua latmœ tomi H,
Ljroo, 1536, in-fol. ; J. Camerarius, Commentaire dos
(aii9«es grecque et laiinOf Bàle, 1551, in-fol.; Func-
dus, De ongino ot puoritia latinœ linguœ,.,^ De ado^
leeôuia, oirUi œtato, imminonto senectute linguœ la-
(Ma..., De vegota senectute, etc.... De inorti ac decrepita
micdile, etc., lfarboui]g, 1123-50, in-8^ Walch, His-
tem criHca lingtsœ latinœ, Leipzig, 1761 , in-4<* ; Pop-
Bui, Fragmonts do Varron, des anciens historiens la-
tw, etc., 1580, in-S^"; Fabricius, Bibliothèque latine,
Emb., 17il, Leipzig, 1773, 3 vol. in-8<»; Nahmmacher,
hkoduction à la connaissance de la langue latine ,
Leipzig, 1778, en nllem. ; Reisig, Cours de langue latine;
Giyur, Théorie du stule latin; Bopp, Grammaire com-
pris des kmguos indo-germaniques, 1833, ln-8<»; Rav-
moard. Lexique romop..... Grammaire comparative aes
laasm de V Europe latine, Paris, 1838-U, 6 vol. in-8»;
Aide M&ouce, Hudimenta grammatica linmue latinœ,
Venise, 1501, in-4**; Jean Despautère, CommentarH
grummatiei, Paris, 1537, in-fol., et Lyon, 1563, in-i»;
D. Tliomas (le cardinal Wolsey), Rudimenta grammati-
ca d éocendi mothodus, 1637 ; J.-C. Scaliger, De causis
Ungem latinœ libri Xll, Paris, 1540, in-8* ; Melanchthon,
Grammatica laténOy Nuremberg, 1547, in-8^ ; Sanctius,
Maerw, seu de causis linguœ latinœ, Salamanque,
1587, ouvrage réédité par Bauer, Leipzig, 1793-1801,
Srol.in-8«; Scioppius, Grammatica phuosophica, Bfllan,
i628, io-8>; G. Vossius, Grammatica latina^ Amst.,
i^, 2 vol. in-4**; Lanoelot, NouMlle méthode pour
apprendre la langue latine, dite Grammaire latine de
Port^Roifol, Paris, 1655, in-8<*; Ruddimann, Grammor
tk9 latmœ institutiones , Edimbourg, 1725-31, 2 vol.
!i>-S»,oavrage réédité par Stalbaum, Leipzig, 1823, 9 Vol.
in-^; P. C Gneroult, Nouvelle Méthode pour étudier
^ Imgue latine, Paris, 1708, in-8o; Lemare, Cours
ArânQve et pratique de la langue latine, Paris, 1804,
3 vol. io-8*; Bnmouf , Méthode pour étudier la langue
letme, 1841 , in-8*; Guérard et Moncourt, Grammaire
lottM, 3* édit., Paris, 1861, in-12; les Grammaires
écrites pour les Allemands par G. Schl^el, Brœder,
Gnrtefend, Schneider, Zumpt, Madvig, etc.; le Thesati-
nu (tii0iHS latmœ de Robert Estienne; les anciens dic-
tionnaines de Calepin, Boudot, Danet; les dictionnaires
de Faeciolati, Forcellini, Freund, etc. A. D.
UTniXUttâratare.) Caractères et divisions,— Ia litté-
ntore Uohie, originale dans certains genres, tels que la
Btire, Tépltre, et peut-être encore l'éloquence, a imité la
t<Tke dans la poésie, la philosophie et la science, mais
21 devant rimitation à la beauté des modèles (K. Imi-
Amm'. Dramatique et positive comme le génie tout poU-
8q«e des Romidns, elle donne peu à l'imagination et à
[a lamaisie, beaucoup à la raison sérieuse, aux applica-
tioas de la conduite et de la vie. Peu spiritualiste , elle
s'ittiehe à Faction, à la politique, aux sITaires, à la mo-
sle pratique : les facultés de l'âme et les problèmes de
la dôtinée humaine n'y tiennent guère de place. Ce que
la philosophie romaine a dit de ces grands sijets n est
qu'ira reflet de la Grèce; ce qu'en disent les Pères de
l'Egtise n'appartient plus à la littérature classique; c'est
«notre monde. Là est le défont des lettres latines, défont
plus sensible encore si l'on se reporte anx puissants et
admirables efforts du génie grec sur ces questions mys-
térieuses et infinies, llalgré des affinités certaines d'ori-
slne et de climat, la race latine n'avait pas cette richesse
inépuisable d'imagination qui, pendant les beaux siècles
de la Grèce, se répandit dans tous les genres de la poésie,
inspirant un nomore prodigieux de <mefs-d'œuvre lyri-
ques ou dramatiques dont il nous reste à peine la
moindre partie. Rome, autrement douée, laborieuse et
guerrière, prit d'alM>rd et garda les habitudes impérieuses
de l'autorité militaire, de la gravité patricienne et sacer-
dotale, et les goûts poritifs d'épargne et d'avidité que
donnent la vie des champs et la pauvreté. Le mérite et
l'oriçinalité de la littérature latine est d'avoir égalé la
précision et la vigueur de son langage à la solidité et à
l'énergie du peuple-roi, à ces qualitâ sévères, que Cicé-
ron énumère avec orgueil dans la préface des Tùsculanes^
« gravité, grandeur d'Ame, probité, bonne foi, toutes les
vertus qui mettaient ses ancêtres au-niessus de toute
comparaison. » {Tusc. 1, 1). On sait en quels termes ma-
gniftoues Bossuet a résumé ce qu'il appelle le fonds du
peuple romain, « le plus fier et le plus hardi de tous les
peuples du monde, mais tout ensemble le plus réglé
dans ses conseils, le plus constant dans ses maximes, le
plus avisé, le plus laborieux, et enfin le plus patient. »
{Histoire universelle, III, 6). La gloire de la littérature
latine est d'exprimer dignement ces caractères plus so-
lides que brillants. Non pas cependant qu'elle soit tou-
jours solennelle, ni majestueuse Jusqu'à la monotonie ;
quelquefois déclamatoire, plus souvent grossière et même
triviale, non-seulement dans les comiques, mais parfois
même chez les orateurs et les poètes sâieux, elle se res-
sentira. Jusque dans ses plus beaux Jours, de la rudesse
naturelle à une nation de laboureurs et de soldats; on
peut en croire le témoignage d'Horace. Mais, dans la
crudité même du langage, elle conserve encore un cer-
tain air de grandeur, un sentiment de la valeur et de la
puissance personnelles : c'est toujours l'expression de la
pensée d'un peuple conquérant, légiste, organisateur, qui
a dominé le monde penduit des siècles
Par 1m lois, par lee nwitrs^ et rartoot ptr U goarre.
An premier conp d'œil, l'histoire de la littérature latine
se divise en deux grandes périodes : la première , qui
s'étend Jusqu'à l'Empire, est remplie par le progrès poli-
tique et la pratique des gprandes affaires au dedans et
au dehors. L'action domine ; la pensée n'en est, pour
ainsi dire, que l'instrument. Dans cette vie pénible et
sans loisirs, toutes les intelligences sont occupées à sou-
mettre, à constituer, à gouverner. Les genres cultivés de
préférence se rapportent à la vie publique, et, malgré la
puissante influence des Grecs, l'esprit romain n*a guère
changé de Caton à Cicéron.
La seconde période, qui commence à l'avènement d'Au-
guste, est celle où l'action s'affaiblit et disparaît, pour
laisser la place aux loisirs. La vie politique a cessé ; la
force et l'intérêt se retirent de l'éloquence, qui expire
dans l'enceinte étroite des basiliques, ou dans la sténlité
des écoles. Alors les esprits supérieurs se replient sur
eux-mêmes, et cherohent leur voie dans la poésie, la
philosophie, et l'histoire. Les lettres sont cultivées par
plaisir et par dédommagement de la vie politique à Jamais
disparue. Jusqu'au moment où elles se perdent dans le
naufrage de la société.
La première période se subdivise naturellement en
deux époques, la littérature avant et après les guerres
Puniques. La première époque, qui embrasse les cinq pre-
miers siècles de Rome, est inféconde, et présente à peine
des germes littéraires : Rome est tout occupée à com-
battre pour son existence et sa conservation. La seconde,
qui s'étend des guerres Puniques à l'Empire, est celle où
Rome combat pour la conquête et la domination. BAise
en rapport avec la Grèce, elle l'imite, à regret d'abord,
en se défendant contre cet ascendant irrésistible du génie
et de l'élégance; mais elle cède à mesure, et puise dans
cette défaite pacifique les moyens de lutter avantageuse-
ment contre la Grèce au siècle de Cicéron. — La seconde
période se partage Clément en deux époques, la littéra-
ture avant et après les Antonins. Dans la première, après
la splendeur littéraire du règne d'Auguste, Rome con-
serve encore une partie de ses grandes qualités. Pendant
qu'elle résiste aux Barbares, sans en être ébranlée, elle
accueille avec une faveur marquée tout ce que lui donne
la Grèce, les vices comme les arts. L'esprit grec s'iden-
tifie avec le caractère romain. La littérature latine a cessé
> I
LAT
11IS
LAT
d'être ftOBsl pratique, aussi forte qu^autrefols; cependant,
elle cache son déclin sous des apparences imposantes.
Dans la seconde époque, celle des Antonins et de leurs
•accesseurs, la décadence se précipite : les conditions po-
litiques, la dégradation des mœurs, rentrée des Barbares
dans TEmpire et dans la société, ont enlevé au caractère
romain le peu qui lui restait de ses vieilles qualités. Nous
avons indiqué comment la langue latine (V. ce mot) s*al-
tère et se corrompt, surtout après Théodose. Les restes
de la littérature t;omme de la langue dureront Jusqu'au
siècle de Charlemagne, c.-à<d. Jusqu'à la naissance des
idiomes modernes , puis deviendront lettre morte, sinon
dans la science et dans la religion.
Première période : Première époque, Utiérature lalime
aoant les guerres Puniques, — On a vu qu'il ne faut pas
chercher à Rome , pendant les cinq premiers siècles de
son existence, les hautes inspirations religieuses et mo-
rales de ces interprètes sacres des dieux, comme Horace
les appelle, qui civilisaient par leurs chants les peuples
de la Grèce, et les initiaient au monde supérieur des
dieux et des génies (V. Grecqob — Littérature). Rome est
plus occupée de vivre, de labourer, de combattre, d'obéir,
que de rechercher les origines et les lois de la nature,
eu de célébrer l'aspect éblouissant de la terre et des
deux. Elle ne chante pas non plus ses héros ni ses lé-
gendes: elle n'a ni Orphée, ni Homère, ni même Héro-
dote; le chant des frères Arvals, invocation aux dieux
Pénates et au dieu Biars, les hymnes des prêtres Salions,
où Vénus n'était pas nommée, puisque, au témoignage
de Varron, cette déesse n'avait même pas de nom en latin
au temps des rois, des oracles en vers, objet des railleries
d'Horace, qui les déclare inintelligibles , les prédictions
transcrites par Tite-Live sous le nom du devin Marcius ,
contemporain de la première guerre Punique, voilà les pre-
miers essais poétiques « de ces vieux laboureurs, coura-
oeux et riches de peu, qui ne connaissaient de repos et de
fête qu'après la moisson rentrée». (Hor., Ep. Il, i,i39.)
AJoutons-y les vers fescennins, satires dialoguées écrites
dans le mètre saturnien, qui n'était guère que de la prose
rhythmée , et connues surtout par quelques vers d'Ho-
race. Ce qu'on en sait de plus clair, c'est que, nées de
l'esprit grossièrement railleur des paysans, elles tournè-
rent en satires personnelles et sanglantes, et que la loi
des XH Tables les fit taire, en réduisant les moaueurs
menacés du bâton « au seul plaisir de bien dire et cl'amu-
ser. B Cette interdiction fut^-elle toujours observée? On
vit Octave composer des vers fescennins contre son ami
Pollion, lequel n'avait garde « d'écrire contre un plaisant
Îiui pouvait prosoire ». Mais, populaire ou non, la satire
escennine ne parait pas avoir Jamais compté, même à
Rome , pour un titre poéticjue. — Quant à la prose, une
religion positive et superstitieuse, qui relevait du patri-
dat, et fut. Jusqu'aux derniers Jours, une partie de l'au-
torité et de l'empire, donna aux Romains les premiers
germes de Vhistotre; c'étaient les Grandes annales et les
Livres des pontifes, où se consignaient tous les événe-
ments importants, mauvais présages, revers, fondation
des temples, etc. L'histoire, chez les Grecs, était née de
la poésie ; à Rome, elle sortit du calendrier. — Ia juris-
prudence ne tient guère de place dans la littérature ;
cependant, les Jurisconsultes romains s'y rattachent par
l'histoire de la langue ( c'est dans le Droit comme dans
la religion qu'elle varie le moins), par le caractère na-
tional , dont la législation est une expression vivante ,
par les documents politiques et Judidaires, indispen-
sables à l'intelligence des historiens, des orateurs, et
même des poètes comiques, n suffit d'indiquer ici la
forme impérieuse et militaire de ces lois, la condsion do
leurs formules, en joutant qu'dles furent d'abord la
propriété exclusive, et, plus taira, le privilège des patri-
dens. La science du Droit, au siècle de César, devait affeo
ter pQur un temps une forme littéraire, dans le Dialogue
perdu de Brutus, et le Traité des Lois de Cicéron, imité
de Platon. — L'agriculture n'est ni politique, ni élo-
quente; mais elle a, ches les Romains, une physionomie
à part, et mérite une place dans l'histoire littéraire. On
n'en rencontre pas de monuments avant Caton; mais le
livre du fameux censeur, qui fut à la fois agriculteur,
soldat, historien et orateur, est un monument curieux
de la langue, des mœurs et du caractère romains, dont
Caton est l'expression la plus vigoureuse. — Nous pouvons,
pour terminer immédiatement ce qui re^^de cette ma-
tière vraiment romaine de l'agriculture, citer Varron et
Columelle, qui la maintiennent en honneur dans la litté-
rature, Jusqu'à l'époque où les immenses parcs des riches
ibsorbenl au profit du luxe le sol de l'Italie. Varron,
contemporain de Cicéron, a composé, dans la forme à la
mode d'alors, des Dialogues sur la vie rustique, très^-sa-
vants, mais pesamment écrits, avec un mélange de bon-
homie et de pédantisme. Columelle, contemporain de
Tibère, philosophe et moraliste selon le goût de son
époque, écrit avec une élégance où se fait sentir Tio*
fluence des dédamateurs, professe une grande admiration
pour Virgile, et pense plus aux gens de lettres qu'aux cul-
tivateurs. Jusque-là qu'un livre de wn Agriculture est
écrit en vers. — Nous venons d'antidper sur les temps,
pour esquisser brièvement ce qui regarde ces deux genres
très-inférieurs, qui ne tiennent à la littérature que par
les côtés accessoires. Reste le genre par excellence, celui
qui convenait le mieux aux goûts d'un peuple laboureur,
politique, légiste et soldat, Véloquence. Populaire dès les
premiers temps, au témoignage de (Scéron, elle dut,
comme il le pense, séduire d'abord tous les Jeunes gens
ambitieux de gloire, et provoquer des efforts que paraly-
sait le défaut de méthode et a'exerdce. Les guerres Pu-
niques, en faisant connaître les modèles et les maîtres
grecs, portèrent au plus haut point cette ardeur oratoire,
désormais plus intelligente, et entretenue par la gran-
deur des causes et la magnificence des récompenses.
Mais, sur ces origines de l'éloquence romaine, il ne reste
que les hypothèses de Cicéron. Les luttes politiques sup-
posent, il est vrai, l'usaçe et la puissance de la parole ;
et Virgile même introduit des orateurs dans les récits de
l'épopée, où Homère n'avait placé que des aèdes. Cepen-
dant, ni l'éloquence militaire, ni l'éloquence sénatoriale,
ni même l'éloquence tribunitienne n'ont laissé de monu-
ments. Les admirables discours de llte-Live sont, comme
on le sait, un exerdce de son imagination dramatique
ausd bien qu'un complément de son Histoire. Sans donte,
même ces premiers orateurs n'ont eu que les qualités
auxquelles Buffon réduit dédaigneusement l'éloquence
populaire : « Un ton véhément et pathétique, des gestes
expressifs et ft^uents, des paroles rapides et sonnantes. «>
En fallait-il plus avec des auditeurs qui n'avaient aucune
idée de Tart, et ne comprenaient que l'activité, Tîntérèt
positif et l'obéissance? À l'éloquence suppléait une cer-
taine habitude de la parole, et comme une tactique des
combats du ForuQi, dont l'expérience et le goût formè-
rent cette langue oratoire que C&on devait illustrer le
premier, et que parlait sans doute avant lui l'harmo-
nieux Cornélius Céthégus, l'orateur « à la bou<:he moel-
leuse et persuasive », célébré par Ennius.
Première période : Deuxième époque, i^ Les gtserres
Puniques; influence des Grecs ; littérature latine jusqu'où
siècle de Cicéron. — Les noms de Caton et d'En ni us
marquent dans les lettres latines une époque nouvelle ;
c'est l'éveil du sens littéraire, devant l'éclatante révéla-
tion du génie grec ; et l'on peut croire, sans taxer d'exa-
gération l'orgueil national des écrivains romains, qu'ils
eurent bientôt des monuments dignes d'une telle école.
Les discours de Caton, dont Cicéron fait un si magni-
fique éloge, et dont il reste des fhigments précieux, pré-
sentent le plus haut degré de puissance où s'élève Télo-
quence pnmitive, formée par la pratique des afTaires,
sans les qualités littéraires que donne l'étude. Caton ne
devait qu^à lui-même cette grandeur morale qui lui in-
spira le fameux mot adressé à son fils Blarcus : « L'ora-
teur est l'honnête homme qui sait bien parler >; et il y
Joignait la verve, la finesse; l'àpreté moqueuse, la v^é-
mence. Vigoureux ennemi des rhéteurs et des sophistes
grecs, qui commençaient à enseigner à Rome l'art de
plaider également le pour et le contre, il fit fermer leurs
écoles ; et cependant il apprit le grec dans sa ▼ieillesse,
pour lire Thucydide et Démosthène ; et ce fut une des
conquêtes les plus précieuses de l'esprit grec, d'avoir en-
fin subjugué ce rude adversaire.
Une autre victoire non moins considérable, oe fut l*im-
portation et les succès de l'art dramatique. inlh>dnit à
Rome par Livius Andronicus, six ans avant la naissance
de Caton. Déjà le Sénat, par un singulier mélange du
sentiment religieux et de la pensée politique, avait ap*
pelé de TÉtrurie les acteurs et les jeux scéniques, pour
apaiser la colère des dieux pendant une épidémie* et
pour amuser les esprits épouvantés par la ténacité de la
contagion ( an de R. 390, avant J.-C 963 ). Rome eut.
d'aborîd des dialogues moqueurs, accompagnés de gestes
et de danses à la mode toscane, puis des saUres, c-à-d.
un mélange de prose et de vers, accompagné par la flû.te»|
et dansé ou fl^ré par les histrions. Enfin, le Tarentini
Livius Andronicus ose le premier substituer à ces chantsj
informes une véritable intrigue sur un sujet diamatique^j
imité sans doute des Grecs. Il laisse aux Romains, aux
LAT
1149
LAT
]nnea geos do condition libre, le monopole de leurs Kh
^ntt derenoes les «Dodw et les aUUanM, espèce de pa-
ndes peut-être improvisées, que le go&t ombrageux des
dtoyeos se résenre, et qu*il interdit aux histrions, désor-
mais notés d'infamie. A ces essais de comédies ou de tra-
gédie», liyius i^oute une traductionde VOdyiiéô en vers,
ctToilàle drsme et Tépopée admis parmi les divertisse-
ments des rustiques « Câhégus à la robe relevée », ainsi
S'Borsce les appelle. — Un contemporain de Caton, le
Dpanleo Nénus, suit, non sans talent, la voie ouverte
?ar Livius, compose un poème épique sur la guerre Punl-
ijoe, et essaye de transporter la liberté grecque au thé&tre.
itàs û avait méconnu le caractère de son public : l'esprit
d'obéissance dominait à Rome, avec un profond mépris
poor lesscteurs, qui étaient esclaves. Gomment permettre
SOI histrions d'attaquer les magistrats, les patnciens, les
coosulsires? Comment endurer qu'un Névius os&t dire à
rAfricain et aux Métellus de mordantes vérités? Le
puTre poète y gagna la prison , puis l'exil après réel-
dire, sans exdter même la pitié de ses confrères les
piNUes comii|ues, exposés cependant au même danger.
Ao ffloitts laissait-il des œuvres très-estimées, et une
zépatatioa d'écrivain asses bien établie pour résister
alèoe à la perfection du siècle d'Auguste et à la mau-
nise humeur dSHorace, qui n'aimait pas le vieux latin,
etprdait aux vers de Névius une rancune d'écolier. —
Mus le plus grand nom poétique parmi les contempo-
niss de Caton est celui d'Ennius, qui se prétendait
rbéritier direct du génie d'Homère, par la loi de la mé-
toBpsycoee, et avait fait accepter la suprématie exclusive
de tt gloire aux Romains qu'il avait chantés. Ami des
soUeset protégé de Caton, il consacre dans Rome les
deux genres déjà naturalisés par ses devanciers, la tn^
gédie et l'épopée. Énergique, élevé, pathétique, malgré la
doreté et la sécheresse inévitables de son époque, il fut
admiré de Lucrèce et de Qcéron, et conteste dllorace et
de Virgile, qui cependant n*a pas dédaigné de lui faire des
eopnints; car il avait déjà, dans ses AnnalM romaines ,
5Qelqije chose de l'accent et de la grandeur épiques; et
il tTùt, le premier, employé en latin l'admirable forme
de Iliexamètre. — Viennent après lui son neveu Pacw-
mt, ■ le docte vieillard », selon l'expression un peu
iromqae d'Horace; ^ccii», « le vieillard profond », rival
dePacavios, et nue Cicéron put connaître, lequel, s'écar-
tui des routes obligées, traite des sujets romains (pres-
^ toujours les poètes tragiques traduisaient les roo-
wies grecs ) , et crée la tragédie pritexU , où les
penoonages .étaient latins comme la langue. Horace a
recomia le mérite de cette tentative , s'il n'en fait pas
(firectement honneur à Accius. Enfin, après Acdus,
neodroot les compositions tra^ques des contemporains
d'Auguste, Variu9, Pollion^ Omde, oui témoignent, dnon
deb popularité acquise à des chefs-d'œuvre, au moins
de 2a haute estime où les meilleurs esprits de Rome te-
naient la tragédie, puisque Horace écrit en grande partie
<ar cette matière son épltre aux Pisons Sur VArt po^
Pour compléter cette histoire sommaire de la poésie
latine pendant la première période, et avant le siècle de
Ccsar, il nous reste à parler de deux genres, la comédie
et U satire, tous deux considérables à des titres divers ;
le premier, par le génie des poètes, le second par sa con-
fcrmité parfaite avec le caractère et les goûts des Ro-
maii». Dans la comédie, deux grands écrivains s'immor-
talisent entre beaucoup d'autres; ce sont Plante et
Térenc9, imitateurs et traducteurs des comiques grecs
Tua comme Tautre, mais avec des qualités bien diffé-
rentes. Nous n'hésitons pas à donner de iseaucoup la
supériorité à Plaute, le seul de tous les poètes comiques
dont la verve originale et entraînante, le dialogue joyeux
et cordant rappâlent le génie de Molière. Trop de bouf-
fonnerie et l'exquise élégance de son successeur lui ont
£ut tort auprès de tous les modernes; mais, malgpré la
bTeur sceordée par Boesuet à Térence, l'élégance ne sup-
plée pas à la gaieté, et nous adoptons sans réserve le Ju-
gement de Câar, qid se connaissait en matière de goût,
et regrettait, dans de fort Jolis vers, de ne pas trouver
'heice demi'Ménamdre la puissance comique unie au ta-
eat de Técrivain. — Qtons encore, parmi les auteurs de
* «tiédies, CécUiiàs, le protecteur de Térence, recom-
mandé au souvenir de Thistoire par l'admiration des Ro-
ip^as, et n'oublions pas, en voyant la poésie drama-
tique, et principalement la comédie, cultivées par des
geos d*hamb1e condition, des esclaves, des affirancbis ,
des étranaers, que les citoyens auraient dérogé à se per-
mettre publiquônent la culture des lettres; ils les prot^
geaient par amusement, par orgueil arlstocradqne, el
aussi par une supériorité naturelle de l'intelligence et du
goût, comme les Scipions ; mais ils n'avaient garde de
s'exposer au surnom de méchant Grec {GreBculuà). La vie
politique les absorbait tout entiers ; ils laissaient aux
vaincus et aux affranchis la satisfaction d'écrire pour le
plaisir et pour la gloire de leurs maîtres. Aussi la tragé-
die prétexte et la comédie à toge, c-à-d. à sujets ro-
mains, ne furent-elles que des essais passagers et promp-
tement abandonnés. Les Romains ne tenaient pas à
s'attendrir sur leur histoire, ni à laisser les poètes comi-
3ues les railler de leurs travers. Ils aimaient mieux (ceux
u moins qui goûtaient les œuvres dramatiques : car te
petit peuple préférait volontiers des combats d'ours et de
gladiateurs), ils aimaient mieux pleurer sur les infor-
tunes de Télèphe et de Pelée, et dépayser leurs ridicules
et leurs vices, en se transportant, avec Plaute, en Épire
ou en Étoile. — Ils soûtaient cependant ce genre de plai-
santerie satirique; ils lui ont donné même sa forme
propre, celle de la satire didactiqw, telle que l'ont
adoptée les modernes ; et les Grecs ne les avaient pas
devancés là comme dans toutes les créations littéraires.
Les immortels moqueurs de Paros et d'Athènes, Archi-
loque, Aristophane, toute Vancienne comédie enfin,
avaient épanché leur impitoyable malignité dans la poé-
sie lyriaue et sur le théâtre. Un chevalier romain, Lnci*
liua, a l'idée de se mettre à leur école; il change le
mètre, le rhythme, les conditions dramatiques qu'il trou-
vait dans ses modèles (il en coûtait cher pour railler aa
théâtre) : il reprend la vieille forme latine de la satire
{satura lanx^ pot-pourri), et attaque hardiment les
vices, à l'abri de sa naissance et de ses hautes relations»
Ainsi comprise, la satire tenait encore de la vie publique.
Morale et générale sans être personnelle, du moins an
même degré que la comédie çecque, elle gardait quelque
chose du grsnd air des magistratures romaines, de la
censure, par exemple. Nous n'avons de « Ludle, appuyé
de Lélie, » que des fragments très-courts , ain^ que de
presoue tous les poètes de cette époque. Mais, quand on
voit l'esprit satinque, inné chez les races mobiles et mo-
queuses de l'Italie, si commun à Rome, si approprié
aux habitudes rustiques, militaires, politiques, oratoires^
on comprend comment Quintilien a pu diro, avec un or-
gueil Justifié : « La satire est toute à nous. »
Lttcilius était, dit-on, l'oncle du grand Pompée. La date
de sa mort (105 av. J.-C. ) nous amène presque au siècle
de Cicéron et de César. Mais, en suivant le développe-
ment de la poésie durant cette première période, nous
avons laissé derrière nous et nous devons reprendre les
orateurs et les historiens, depuis Caton et les giMrrea
Puni<|ues. Cicéron nous a transmis, dans le Brutus, mot
magmfique histoire de l'éloauence latine. On y voit le
progrès rapide des orateurs importants et célèbres qui
se succédèrent à Rome : Galba, abondant, pathétioue à
la tribune, flasque et mou la plume à la main ; Scipion
Émilien et Lélius, représentants de l'éloquence patri-
cienne et aristocratique ; Carbon, plus harmonieux que
fort, mais le meilleur avocat de son temps; les Grecques,
orateurs populaires élevés par des maîtres grecs , mais
dont le second seul a l'honneur d'être caractérisé en dé-
tail par Cicéron, qui loue son éloquence, la vigueur et
l'abondance de son style , auquel, dit-il, a manqué la
dernière main; enfin, parmi beaucoup de noms secon-
daires, les deux glorieux précurseurs de Cicéron, Crassus
et Antoine, le premier plein d'abondance, de force, de
sel, concis et orné tout ensemble, pathétique et sublime,
écrivain distingué, le plus parfait de tous les orateursi
au Jugement de Cicéron, qui se plaît, dans ses Dialoffues,
à le substituer à sa propre place, et à le prendre pour
interprète de ses opinions et de ses principes; le second,
improvisateur admirable, inférieur pour la langue, in-
comparable dans l'action oratoire, qui était comptée pour
une si grande partie de l'éloauence sur le vaste théftlze
du Forum et avec la vivacité des impressions populaifos.
Tous deux malheureusement ne sont connus que par les
belles analyses de Qcéron et les allusions perpâuelles
qu'il fait à leurs discours ; car ceux de Crassus sont
perdus, et Antoine n'écrivait pas les siens, pour éviter
la responssbilité gênante des contradictions si ordinaires
dans la profession d'avocat. Crassus mourut à la veille
des guerres civiles ; Antoine fut une des plus dépkmp
blés victimes de Marius ; c'est dire que le siècle de Cicé-
ron était commencé.
Un autre genre de la prose, qui convenait également à
l'esprit positif et à la gravité des Romains, c'est l'hia»
toire ; et cependant, de Caton à Salluste, elle préMQl»
LAT
1150
LAT
MU dMntérftL On eo a va plos haut les MiivceB et la
forme première, dans les Annales d9s Pontifes. Il n'eet
]Ma sûr que Fabius Pictor, le premier historien dont le
nom se soit conserré, ait écrit en ladn ; et il est certain
qae Cindos Alimentas écrivit en grec Thistoire de Rome
Jusqu'à son époque, fait assez singulier, qui se reproduit
ehes le flls du prender Africain et chei beaucoup d'antres.
Les OfriginM de Coton, que nous n'avons pas, étaient au
moins une histoire latine, d'autant plus précieuse Qu'elle
contenait les origines die toutes les vUles d'Italie. De
Bombfw historiens, à peu près inconnus, se livrèrent
après loi à ce genre de composition, depuis Calpumius
Pison « l*hoaime de bien » ^ /ruflr* )« Jusqu'à Lutatius G»-
tulus, le collègue et la victime de Marias. Les hommes
célèbres commençaient aussi à écrire leurs Mémoires .
pour se reposer de la vie et des Ibnctîons publiques, et
donnaient un exemple qui fut suivi pendant toute la du-
rée de l'Empire, liais ici encore, nous ne rencontrons
guère que des regrets et des pertes irréparables. Mé-
moires de S^Ua, Mémoires de Cicéron, Mémoires de la
seconde Asrippine , Mémoires d'Adrien. Les Commsti-
iaim de Cisar nous apprennent comment les Romains
parlaient d'eux-mêmes et de leurs actions.
Premiers périods : deuxième époque, 2* SiMe de
Oicéron et as César jusqu'au règns ^Auguste. — Le
Tfaéteur Apollonius Molon disait à un Jeune homme qui
écoutait ses leçons à Rhodes : « Je te loue et t'admire;
mais le plains le sort de la Grèce, en voyant que la seule
•upérionté qui nous reste, celle du savoir et de l'élo-
quence, va par toi passer du c6té des Romains. » Ce Jeune
homme était Cicéron, qui, après une victoire sur Horten-
sius et une cause gagnée malgré Sylla, parcourait la
Grèce et l'Asie pour compléter son éducation : il avait
alors vingt-huit ans, et C&ar en avait vingtrdeux. Nous
n'avons pas à raconter sa vie; à peine même pouvons-
nous esçtuisser les plus grands traits de cette histoire de
son génie, qui est celle de Télo^ence et de la philosophie
romunea. Compatriote de Manus , il n'appartenait pas à
ees familles patriciennes où les Jeunes gens s'élevaient au
milieu des affaires, et se formaient, presque à leur insu,
par l'habitude des conversations politiques. Il n'aborda
la tribune qu'à près de quarante ans, et ses discours po-
litiaues datent ae son consulat, qu'il obtint peu de temps
après (l'an 600 de Rome, 63 av. J.-C). Biais il avait déjà
Ç laide, parmi bien d'autres causes, le grand procès contre
erres, où il revendiquait hardiment sa qualité d'homme
nouveau, comme un titre à la faveur populaire, et tra-
^t, dans les pages immortelles des Verhnes, ces pein-
tures tour à tour plaisantes ou pathéticpies des rapines
et des cruautés d'un préteur. Le discours pour ta loi
ManUia n'était encore qu'une sorte de harangue d'ap-
parat, à la louange de Pompée, plus harmonieuse ou au
moins plus intéreuante que les panégyriques d'Isocrate.
Le consulat lui fournit l'occasion des quatre discours sur
la loi agraire, où il toama si habilement les volontés du
peuple contre elles-mêmes, et des CatUinaires, qui sont
demeurées, avec les Philippiques de Démosthène, le type
presque proverbial de l'éloquence agressive et militante.
Bientôt, en plaidant pour le poêle Archias, il donne un
modèle exquis du genre démonstratif, où il excellait.
Exilé par l'influence de Clodius, et ramené à Rome sur
les bras de l'Italie tout entière, il marque un nouveau
point de sa carrière d'avocat par la oélèbre MUoniennê;
un autre par la défense de Ugarius, sous la dictature de
César, et atteint, dans le remerclment pour le rappel de
Marcellus, la perfection de l'éloquence tempérée. Rap-
pelé à la tribune par les guerres civiles, il prononce ou
publie quatorze PnUippiques contre Antoine, et paye de
sa tête son dévouement à la liberté expirante et sa haine
contre le triumvirat. — Cette grande vie avait encore été
occupée de compositions poéti(|ues estimées, telles que le
poème de Marius et la traduction des Phénomènes d'Arar
tas; d'une immense Correspondance, dont nous n'avons
que la moindre partie, environ neuf cents lettres, infini-
ment précieuses pour l'histoire politique et intérieure de
la société d'alors. On f fait connaissance avec des
hommes supérieurs, le spirituel et prudent Atticus, Caton
d'Utique, Brutus, le vif et mordant Célius, Q. Cicéron ,
le frère de l'orateur ; plusieurs de leurs lettres se sou-
tiennent dignement à côté de celles de Cicéron. Enfin,
l'illustre consulaire, l'avocat par excellence, avait encore
trouvé le temps d'écrire quantité d'ouvrages de rhéto-
rique et de philosophie, dont un seul eût suffi à son im-
mortalité. Citons, parmi les premiers, les trois Dialogues,
De l'Orateur, le Brutus ou Dialogue sur les orateurs cé-
lèbres, et l'Orateur, et disons en un mot que Cicéron
apporta, dans la critique et l'histoire de l'art oni faisait
sa gloire, une éloquence peut-être égale à celle de ses
plus beaux discours; c'étaient en quelque sorte les confi-
dences de l'âme et du génie. — Amoureux de la gloire
pour sa patrie autant que pour lui-même , Cicéron rem
lui donner une philosophie, et enlever à la Grèce le mo-
nopole de cette science. Les philosophes enseignaient de-
puis longtemps à Rome, cachés sous le nom de rhéteurs,
méprisés comme Grecs, mal vus depuis Caméade, qui
avait payé du bannissement sa popularité de maavaii
aloi. Et cependant, épicuriens et stoïciens, avec leur phi-
losophie positive et pratique , avalent trouvé des parti-
sans : le stoldsme avait même bit des disciples parmi
les Scipions. Nous retrouverons Épicore chez les poètes,
dans les vers de Lucrèce. Gcéron, stoïcien tempéré en
morale, admirateur de Platon et élève de la nouvelle Aca-
démie, consacra à ces grandes doctrines les loisirs que lai
avaient faits les révolutions, et, dans la République, les
Lois, les TusctUanes, la Nature des dieux^ les Devoirs,
les traités de VAmitii et de la Vieillesse, il enseigna aui
Romains la seule science qui put un Jour consoler les
ftmea élevées de la liberté perdue. Lui-même avait dû à
ces nobles effbrts le plus précieux délassement des cha-
grins politiques et un rang des plus élevés, sinon parmi
les inventeurs, an moins parmi les écrivains philoso-
phiques, dernier trait d'une rie si complète, qu'a>^
remplie tout entière la double passion des lettres et de la
gloire.
Si le nom de Cicéron est, comme le dit Qnintilien, le
nom même de l'éloquence, l'iûsloire du genre, se rédait
singulièrement après lui. Hortensias, qui l'avait précédé
dans la cairière, et mourut sept ans avant lui , n'a laissé
qu'une grande réputation, éclipsée d'aflleors dans la sê*
conde moitié de sa rie, et un de ces nombreux exemples
du talent qui se surrit à lui-même. Son heureux riTsl,
qui le fait connaître dans le Brutus, caractérise eo loi
une des écoles oratoires de son temps. Rome avait tu
déjà des orateurs antiques, par goût d'archaïsme; des
orateurs stùleiens, c-à-d. logiciens rigoureux, et trop secs
pour être populaires : Caton d'Utique en était un ; des
épicuriens, peu élégants, mais très-habiles à discuter
nettement les intérêts positifs. A ces diverses cat^o-
ries. Il faut i^outer les deux grandes écoles asiatique ci
attique, l'une abondante Jusqu'à la diflfusion, et souvem
déclamatoire : Hortensius en était le représentant le pln>
accrédité; l'autre, élégante et pure dans l'expression.
mais sèche, fh>ide, maussade psr système, outrant h
simplicité de Lysias , et accusant Démosthène d'affecia-
tion ; le stoïcien Brutus n'était pas éloigné de comprendre
ainsi l'atticisme. Biais ces différentes écoles, à Tavéoe-
ment d'Auguste, allaient inéritablement s'éteindre dso^
le silence qu'imposait le nouveau régime. L'éloquence,
bannie de la lie publique, était oondsmnée à s'altérer et
à se corrompre dans l'ombre des écoles, an stérile exe^
doe des déclamations.
Pendant que Téloouence politique et Jadidaire jetait
un si grand éclat, l'histoire s'élevait aux qualités litté-
raires qui devaient en faire prochainement un dédom-
magement de la tribune muette. On a va qu'elle avait
été préparée à Rome par une étude grave et ^>profondie;
seulement, elle s'attachait au point de vue romain, et
s'occupait uniquement des guerres et de la politique ro-
maines ; encore celle-d lui échappait-elle souvent; la
historiens ne regardaient guère que l'extérieur des aflaire
au Forum , et n'étudiaient pas ces grandes traditions do
Sénat dont Bossuet et Montesquieu ont si éloquemmeot
expliqué le secret. Nous pouvons croire le progrès litté-
raire accompli dans l'histoire, au moins en partie, ren
le temps de Cicéron, malgré ses plaintes sur rinsoffi-
sance oes auteurs. Ne faut-il pas supposer une certaine
i^eur à Cornélius Sisenna, à Gœlius et à bien d'autres,
parmi lesquels Luccéius, auquel est adressée la fameoie
lettre de Cicéron sur son consulat? Tous les «eares his-
toriques existaient , histoire religieuse et poirti(|oe, mé-
moires, biographie; enfin, trois écrivains sopéneurs «i
donnèrent Tes modèles: — Salluste, moins originii
qu'imitateur, car son goût affecté pour l'archidsme n'est
tout au plus qu'une singularité, a tout à fait le caractère
romain ; il ne voit les choses qu'au point de vue natio-
nal. La vie publique était tout aJors ; aussi ne trouve-t-on
chez lui que les choses de la YÏe publique ; par exempl^
les événements politiques et militaires de la guerre de Jo-
gurtha, oui intéressaient le Forum, la topographie des com-
bats, mais presque rien sur les mœurs et la géographie d'op
pays si curieux, ou'il avait cependant gouverné. H ne fait
pas comprendre l'influence, ni connaître la politique de
LAT
1151
LAT
Gitilina; il «ocoeUle &cilement toutes les imputations
odieuses qui plaisent à ses préventions d*hoinme de parti.
Mus il se montre grand ôcrirain : ses portraits, em-
pmntés au genre oratoire , sont traités supérieurement;
son style est plein , rapide, conds, avec quelque gène et
quelque obscurité; enfin , il a porté dans Thistoire deux
qualités de premier ordre, Fintelligence politique et le
talent littéraire. — César, grand écrivain, gnnd orateor,
poète élégant , ami dei lettrée et des arts, a troové, dans
cette vie u pleine el si agitée, le tempe d'écrire beaucoup :
te harangues, des lettres, des vers, des traductions, un
traité de grammaire, un libelle contre Gaton, titre ttr-
efaeiix à la renommée: enfin , les Cofnmentaires sur la
fvarre dn Gaules et la guerre ewUe, écrits, a-t-on dit
^stement, avec le môme esprit qui les avait conduites.
Netteté, précision, simplicité, absence de toute préoccu-
liatîoa personnelle, élégance et pureté de style hautement
louées par le meilleur Juge du temps, c.4Mi. par Qcé-
ron, toutes ces qualités font admirer César comme « un
excdleot maître pour faire de grandes choses et pour les
écrire » (Bossuet, Lettre au pofpe Innocent XI sur Vidu-
taikmdu Dauphin). — Salluste avait écrit Thistoire gé-
nérale de son temps. César ses Mémoires, Coméhus
Népos composa des biographies. Un copiste nous a rendu
le Ûcheux service de 1» abréger presque toutes ; au
ffloios savons-nons que Cornélius y avait porté la pureté
et l'élégance de C&ar. Tous deux pourraient former
oomme une école attique parmi les historiens latins; il
étut réservé à Tite-Live de réaliser la manière dont
Gcéron avait conçu Thistoire dans son traité des Lois.
Reste, pour compléter ce tableau de la prose au temps
de César et de Gcéron, un genre bien secondaire, mais
qui doit sMntroduire de plus en plus dans les goûts et
les habitudes des Romains, comme dans toute littéra-
tare, à mesure que s'useront, dans les genres supérieurs,
rinspiration et Foriginalité; nous voulons parler des
grammairiens. C'était le nom que les Anciens donnaient
SOI commentateurs, aux critiques, aux gens de lettres.
Leurs études, introduites de bonne heure à Rome, plai-
saieot aux meilleurs esprits et aux plus grands penon-
nages; César écrivit on traité sur V Analogie, et Ton sait
qae Tibère et Claude se mêlaient de régler le langage. Un
homme très-savant, one Cicéron appâa « le plus prend
ées polygraphes, » admirable d'activité et de patience,
Varron, se distingua dans ce genre. Nous avons déjà ren-
contré son nom parmi les écrivains de la vie rustique.
Ses Satires Mémppées forent probablement un mélange
de philosophie, d'observation de mœurs, et de plaisante-
ries; son traité de la Langue (Ui$ie, plus utile que facile
à lire, à cause de la pesanteur du style et de la bisarrerie
des expressions, ouvre pour la grammaire une époque de
PRMpâité éclatante.
Poésie, — L'histoire de la poésie latine ne se borne
pas, hemeuflement pour nous, aux essais de Cicéron et
de César, assez pands tous deux pour se passer de la
gloire des vers. Ces divines régions de llmagination et
de lidéal, où les Grecs dominaient en maîtres, n'étaient
plus fermé» au géuie romain. Déjà, « depuis les guerres
paniques il avait cherché à quoi ouvaient servir Thespis,
Eschyle et Sophocle. » L'épopée et la poésie didactique,
c4-d. l'histoire et la science en vers, ne devaient pas
trouver moins de faveur. Le vieil Ennius est encore le
père de la poésie ^dactique chez les Romains. Cepen-
dant, elle s^nble languir après lui. Rome, au fond, n'en-
coungeait guère que ce cjui se rattachait à la vie poli-
tique, l'époj^ qui célébrait ses triomphes, le théâtre qui
l'amusait, et, d'ailleurs, oflîrait un puissant moyen de
candidature, la satire, qui était en quelque sorte œuvre
de censeur. Pour mettre en lumière ce ^enre didactique
oii les Oecs avaient si bien réussi, il fallait un homme
de génie, Lucrèce, contemporain de Sylla, mort par un
suicide le Jour peut^^tre de la naissance de Virgile. En-
core fut -il peu lu, peu goûté de ses contemporains.
Cicéron lui trouvait beaucoup d'art, un génie médiocre;
mais l'admiration d'Ovide et e Virgile l'a vengé de cette
injustice. Physicien et naturaliste comme on pouvait
l'être de son temps, philosophe matérialiste, sinon athée,
parce qu'il soutient le système d'Épicure, il est poète, et
poète de premier ordre, par le sentiment admirable des
grandes choses, de la science , de l'humanité et de ses
misères, par la pdnture immortelle des sociétés et des
révolutions. R a le style didactique serré Jusqu'à la roi-
deur et la sécheresse, mais d'une excellente précision, le
style descriptif et le style oratoire poétiques et sublimes
au plus haut degré. R est original par la conviction, par
timpression de son caractère personnel^ si fortement
marquée dans son poème ; pour le reste, il est Grec t il
aime Athènes de passion ; il chante la paix et invoque
Vénus au milieu d'hommes oui adoraient le dieu Mars,
et lui offraient les affreuses nécatombes des guerres ci-
viles. Atteint peut-être de folie, il a laissé un p>éme ina-
chevé, et une langue philosophique, œuvre laborieuse et
forte, qui suffit à l'expressisn du sublime, mam n'est pas
encore assouplie Jusqu'à donner de l'intérêt et de la ^âtce
aux détails arides et techniques, dernier terme de l'art
où Virgile excellera. La poésie didactique, la poésie lé-
gère, l'épigramme florissaient à l'époque de Lucrèce, avec
Hortensius, Cicéron, César, Calvus, Varron d'Atax; les per-
sonnages illustres formés par les grammairiens se diver-
tissaient à ce genre d'exercice: mais Catulle est le seul
oui soit parvenu à la postérité et qui ait mérité la gloire.
Spirituel et brillant, Cadle et gracieux dans sa poésie
comme dans sa conduite, il a surtout le sentiment exquis
d'un artiste, dans la poésie erotique ainsi que dans l'épi-
gramme. U essaye de la poésie lyrique, adresse à César
de mordantes épigrammes, porte dans l'élégie plus d'es-
prit que de sentiment; il est peintre par excellence, dans
des ven pleins d'élégance et de précision, de laisser-aller
et d'harmonie. — Catulle et Lucrèce, César et Cicéron
nous ont conduits Jusqu'au second triumvirat, et à l'éta-
blissement du pouvoir monarchique, où s'arrête la pre-
mière période de l'histoire de la littérature latine. A ce
moment nous voyons l'éloquence, arrivée à la perfection,
et condamnée fatalement à la décadence; la philosophie,
développée par Cicéron, et appelée à exercer une puis-
sante influence sur quelques âmes d'élite; l'histoire,
élevée, grâce à l'éloquence, au rang de composition litté-
raire; la poésie, enfin, œuvre d'art plutùt que d'inspira^
tion, mais préparée aux matières sérieuses et sublimes
aussi bien qu'aux sujets légen, et à la veille d'enfanter
des chefs-d œuvre.
Deuxième période : LUtéraiure latine ammt et après
les Antonins; caractères oénéraux, — L'établissement
du pouvoir monarchique vient transformer la vie des Ro-
mains, et les enlever à la politique. La littérature cesse
de se rapporter tout entière à l'éloquence, et d'être, pour
les citoyens considérables, un délassement des charges et
des fonctions publiques; elle est plus estimée, perce que
les loisirs se multiplient. Gcéron ne se croirait plus
obligé de s'excuser au temps qu'il donne à la poésie; les
vers ont proilté de tout ce qu'a p.<^u l'éloquence. A quoi,
du reste, serviraient les harangues? U ny a plus de tri-
bune, plus de comioes; le barreau même déchoit, il est
banni du Forum, et les causes importantes sont devenues
plus rares. Toutefois, les habitudes oratoires se retrou-
vent dans l'histoire, l'épopée, la satire. Sous le règne de
Tibère, la parole est aux délateurs; le Sénat n'entend que
leur éloquence toute de lucre et de sofip, comme l'appelle
Tacite; rhistoire elle-même se tait. On la verra renaître,
en même temps qu'un fantùme d'éloquence, sous Nerva
et Trajan. Hais alors la déclamation et la mauvaise rhé-
torique ont envahi les écoles; et elles se sont emparées
de U poésie, qu'elles dénaturent en la réduisant aux
succès frivoles des lectures publiques : on ne rencontre
partout que rhéteure et grammainena. Quant àla philo-
sophie, comme la réflexion et la vie personnelle ont rem-
placé l'action et la rie publique, l'Empire fait des mora-
listes, tandis que la Rmublique, avant Gcéron, n'avait
connu d'autre philosophie que le Droit. L'Épicurâsme est
la doctrine du grand nombre, le Stoïcisme celle des ca-
ractères d'élite qui cherchent dans sa morale énergique
un soutien et une consolation. Enfin les sciences, faute
d'observations bien faites et d'applications industrielles,
tournent aisément à la déclamation, par exemple ches
Sénèque et chez Pline. — R n'y a point là d'ailleure d'in-
vention originale; les Grecs avaient précédé les Romains
dans tous ces différents genres; c'est pourquoi la littéra-
ture se fatigue et s'épuise de Jour en Jour. Au commen-
cement de cette p^ode, dans la ferveur des illusions
causées par l'avènement d'Auguste et la satisfaction d'une
paix d'autant plus ardemment désirée qu'elle avait été
payée cher, l'inspiration produisit des chefs-d'œuvre.
Les idées d'ordre et de grandeur régulière et pacifique,
mêlées aux restes de l'ancienne indépendance, la fierté
romaine, la foi aux destinées de l'Empire, et, d'autre
part, l'imitation habile et originale des Grecs, l'érudition
des grammairiens, et le solide bon sens du prince et de
ses amis, qui empêchaient la politesse et réléganoe de
tourner à l'affectation, furent les caractères du siècle
d'Auguste et les causes de sa splendeur. Biais lorsque
Tibère eut inauguré le despotisme inquiet, sanguinaire
et dépravé, d'où devaient sortir les guerres civiles, la vie
LAT
llSi
LAT
^■lellectiielle et monle se rédaitit aux doctrines d*Épl*
eure et de Zenon, Tune enieignant Tindifférence, Tiiutro
ftuiBsant l'esprit ptr ses exagérations. Le naturel était
rare et sans rigneur ; Tintérét provoquait la flatterie et
les bassesses. Nerra et ses successeors ramenèrent poar
an temps, dans les aflkires et dans les idées, une vérité,
une liberté dont on avait perdu Phabitude. Dans ce retour
à là source unique du beau, la littérature latine retrouva,
comme TEmpire, une prospérité passagère ; il se forma
des historiens, des satiriques, des moralistes, des littéra-
teurs. Hais cet éclat n'était pas durable. Il s'éteignit avec
les vertus des princes, et la dernière période d« lettres
latines reproduisit avec une fatale et déplorable fidélité
la décadence et la décrépitude du monde romain.
Siècle d'Auguste : Poésie. — Les noms de Virgile et
^THorace n'ont pas besoin d'une longue histoire. Le pre-
mier appartient à la famille des génies privilégiés qui
«nt réausé dans les srts l'idéal de la beauté toujours
égale, toujours pure et Irréprochable ; c'est la famille de
Radne, de Raphafil et de Mozart. Original par l'élévation
sublime de son génie et l'exquise sensibilité de son âme,
il est imitateur, comme tous les Romains, dans le choix
des sqjets et même dans les détails. Il emprunte à Théo-
crite le eenre pastoral, et, malgré la sràce mélodieuse
des Bucoliques, il n'arrive pas à la yénté dramatique et
saisissante de son modèle. Le fond des Géorgiques était
à tout le monde, depuis Hédode; mais c'était un fond
tout romain, où Virgile porta l'amour de la campagne,
des antiques vertus, de la paix et de la grandeur nfUio-
nale, exprimé avec une perfection de langage et de poésie
que sans lui les Romains n'eussent peut-être Jamids
connue. Peintre Incomparable de la nature et de la
réalité, il avait élevé la poésie didactique {V,ce mot) à
un d^fré de perfection désespérante, et consacra, dans
VÉnétde, la maturité de son génie aux origines de Rome,
de sa religion et de sa gloire. Il y montra Auguste der-
rière Énée, et les splendeurs de la ville étemelle d^rière
l'humble royaume d'Êvandre, avec une admiration sin-
cère pour le génie qui fonde et pacifie, et sans idol&trie
du succès et de la puissance. Il mourut sans avoir
achevé son œuvre, sans avoir atteint à la sublimité
d'Homère, mais en laissant derrière lui tous les Imita-
teurs de l'avenir, condamnés à le reconnaître, comme le
Dante, pour leur guide ^ leur seigneur et leur maUre,
« Aussi^ dit un homme de goût qui aime Virgile comme
on doit l'aimer, aux époques si tristes du moyen âge est-
Il révéré comme on saint; c'est un oracle qui, dans les
sortes VùrgUianœ, surrit au paganisme. Ces pauvres ha-
bitants de l'Italie étaient encore émus aux accents de
cette voix divine s Ils retrouvaient dans quelques-unes
de ses églogues le tableau de leur misère présente, et
dans son poème national le sentiment de leur grandeur
passée. » {Notes sur la versification et la composition
latines, par M. Chardin, Paris, 1861.)
Horace, son ami, et peut-être son égal dans un autre
genre, presente une physionomie à part, et l'une des
glus originales de la littérature latine. Promptement dés»-
usé de la politique, où son rùle n'avait pas été brillant,
il avait obtenu par son talent, et surtout grâce aux bons
offices de Varius et de Vh^le, l'amitié de Mécène et d'Au-
guste. Il fut toute sa vie épicurien,. ami de son indépen-
dance et grand poète. Il commence par les Satires^ œuvre
de bon sens, de bonhomie piquante, de raillerie sans'
méchanceté, véritables conversations morales dont les
stoïciens font quelquefois les frais. Dans les Odes, il re-
vient à l'imitauon des lyriques grecs; Il emploie leurs
formes et leur métrique avec une facilité et une élégance
merveilleuses. Sa vraie inspiration, c'est la grandeur de
Rome et d'Auguste, ou bien la fragilité des plaisirs; hors
de là, c*est un artiste excellent qui applique aux détails
du style la studieuse et brillante flexibilité de son génie.
Enfin les Êpitres le ramènent au genre didactique : il y
raconte sa vie et son caractère, les mœurs et les idées de
son temps, sans prétendre aux grands effets, mais avec
ane raison et une finesse Inimitables. La dernière,
•dressée aux Pisons, est demeurée pour le fond, sinon
pour l'ordre et la méthode, le type de toutes les Poéti-
qaes modernes, et, sans quitter le caractère familier de
la causerie, le manuel du bon sens, du goût, et de l'art
d'écrire en vers, surtout pour le théâtre. N'oublions pas
Aon plus, dans les titres d'Horace, celui de maître et de
modèle de Boileau.
La gloire des poètes élégtaques, sans être du même
ordre, est une des richesses du siècle d'Aueuste. Déjà
facile, précise et brillante dans les vers de Catulle,
l'âégie convenait aux mœurs comme au goût littéraire
de l'Empire. Gallus, mieux connu par la belle églogue ds
Virgile que par des pièces apocrypnes; Tlbulle, écrivalii
Î;racieux, ami de la paresee, épicurien dont la sensibilité
éininine ne ressemble guère au sang-froid philosophique
d'Horace, et nous montre où l'esprit romain s'abaissait
par la haine de la guerre et le goût des plaisirs; Pro-
perce, imitateur de Callimaque et de Phllétas, moins na-
turel et moins passionné que Tibulle, mais plus nerveaX|
et quelnuefois même élevé et noble, vécurent pendant
la première moitié du règne d'Auguste , et moururent
Jeunes. Ovide, pour son malheur, prolongea Jusque sous
Tibère une vie empoisonnée par la disgrftce; mais il ap-
partenait à la grande époque, à Vâge aor de la littéra-
ture latine, comme on l'appelle quelquefois ; il en ^
sinon par la sûreté d'un goût irn§prochable, au moins
par l'élégance et la pureté de la langue, la facilité et
l'agrément du stvle. Son tort le plus grave, aux yenx de
la critique, est d^avolr eu trop d'esprit. Au point de vae
de la morale, il est bien plus coupable; mads tous les
élégiaqUesettous les poètes latins, sauf Virgile et Lucain,
mârltent les mêmes reproches, et de plus graves encore;
c'était la faute de la civilisation, des mœurs et du temps.
Oride, ingénieux et léger dans la poésie erotique, pea
digne dans les Tristes, inégal, mais intéressant dans les
Fastes, qui sont encore une Imitation de Callimaque,
mérite vraiment le titre d'écrivain supMeur dans les
Métamorphoses, où la variété Infinie des si^ets lui four-
nissait tour à tour des descriptions brillantes, des ana-
lyses délicates, des peintures gracieuses et même tou-
chantes : son poème est l'histoire de la mythologie
grecque et latine, le cycle des dieux et des héros. Coin-
C remis dans une obscure Intrigue de palais, Oride avait
rûlé son ouvrage avant de quitter Rome ; heureusement
pour le poète et pour les lettres, ses amis en avaient
gardé copie. De sa tragédie de Médée, il ne reste qn*un
souvenir. Jusqu'à Phèdre et Lucain, la poésie n'offre
guère que des noms : celui de Pollion, loué d'Horace
pour son talent éplaue; celui de Varius, dont le Thyesti
partageait l'admhration du public avec la Médée d'Ovide.
Si la tragédie fut alors le travail de prédilection, le dé-
lassement préféré des gens d'esprit, comme on peut le
conclure de l'épttre d'Horace sur VArt poétique, elle n'a
pas laissé de monuments. — Les poèmes de Gratius Fa-
liscus sur la Chasse^ de Manilius sur V Astronomie, mé-
ritent peu d'attention après Virgile, Horace, et même
Ovide; le oénie poétique des Romaina semble fatigué de
sa gloire : Il se repose ou se tait.
Prose, Histoire, — L'esprit politique et l'éloquence
s'étaient retirés dans l'histoire. Là se troandt le reToge
naturel dea citoyens élevés pour la carrière oratoire, à
3ui la monarchie avait fait des loisirs, en leur laissant
'ailleurs la connaissance des affaires pnbûoues, an moins
dans le passé, et même quelques restes de liberté. Tacite
fait dater de la bataille d'Actium le silence des hummes
de génie; il serait plus juste de le reporter au règne
de Tibère; Au^ste avait voulu amortir plus encore
qu'étouffer le vieil esprit républicain, et appelait Tite-
Uve un Pompéien. Lui-même avait hiissé des Mémoires;
son lieutenant et son ministre avalent écrit l'his-
toire de leur temps; les biographies, les compositions
historiques abondaient. De tous ces livres, il ne reste, à
proprement parler, que l'ouvrage mutilé mais admirable
de Tite-Live. Trop orateur et trop poète pour nos goûts
et nos idées modernes, il donne trop sans doute à lima-
gination, au goût de l'éloquence, à la passion de la gloire
nationale; quand il trouve un gîiide sûr comme Polybe,
il ne lui est pas toujours fidèle : mais il a tant de vérité
dramatique et morale, tant de chaleur et de vie, il parle
une langue si belle, que nous n'avona paa le coura^ de
lui reprocher ses défauts. Sommes-nous donc si à plaindre
d'avoir à le rapprocher d'Hérodote, comme a fait Quin-
tilien, et peutp-être même d'Homère et de Vîreile? « On
voudndt croire, dit un excellent Juge, que Virgile et Tite-
Live se sont connus et aimés, que, dans ce palais d'Au-
guste qui leur était si hospitalier. Ils se sont entretenu!
de Rome, de sa gloire passée, de ses grands hommes, et
Sue, sans médire d'AuguBte,iIs se sont quelquefois stten-
ris pour Pompée et exaltés pour Caton. » (M. D. Nissrd,
Etude sur Tite-Live.)
Après Tite-Uve, il faut citer Trogue Pompée pour
l'estime qu'en faisaient les Romains, car nous n'avons
que l'abr^ de son histoire, fait par Justin ; il y racon-
tait le plus grand empire avant l'Empire romain, celui
d'Alexandre, Jusqu'à la conquête de la Macédoine, et gar-
dait, comme tous ses prédécesseurs, la religion de la
grandeur romainoi
LAT.
ltS3
LAT
£loqu»o»» Dédamaticn, Grommatr». — Cest on fait
nmarqaatble que VBmpire ait (irappé de mort réloqnence
btÎDft, malgré toutes les raisons secondaires de snccès et
de popu\anté qui sobsistaient toii^ours. Le genre oratoire
était en honneur; il faisait le fond de Féducation libé-
frappé âlmpuissance, parce que
eear ne parlait plus an peuple, qu*ll trouvait, au Sénat,
les dédatons^ prises dans le conseil da prince, et, au bar-
reau, la crainte des délateurs, de leur nrutale énergie et
de leurs armes redoutables. Réduite à Tombre des écoles,
fintellieenoe s*épuisait dans le déplorable jeu des causes
romaneequee et imaginaire^, combinait des extrava-
gaacQB, pour avoir le plaisii de soutenir le pour et le
contre» et faisait grand bruit . les modèles qu*àle imitait
mal oa qu'elle attaquait. Le père de Sénèque, qui avait
pu entendre Cicéron, et qui publia ses Sow>enirs sous
Tibère, noua a laissé un recueil curieux de ces tristes
compoêitiona, où Ton ne rencontre que pirates, parri-
ddeâ, tyranniddes, inventions imposswles ou absurdes.
— Les grammairiens valaient mieux, sans que les noms
d'Hygin ou de Verrius Flaccus soient bien intéressants,
et les arts produisaient au moins un Hvre utile, sinon
éltomment écrit, celui de Vitruve sur VArchUtcture,
&ècU d» Jïbèn. PhUosophne. — Lliéritage de Télo-
quenoe devait passer de rhistoire à la philosophie. Après
Ks dernières et sombres années d'Auguste, le défaut ab-
sola de liberté sous Tibère arrête et réduit au silence
quicompie n*exalte pas les idées du )our par dévouement
ou par flatterie. L*esprit revient alors sur lui-même, il a
bsMÎn de savoir les moyens de se conduire sous un ré-
gime de délation et de tyrannie ; on étudie le devoir et les
condliasions du deveh* avec les ménagements obligés.
Peu de métaphysique, beaucoup de morale, une gran-
deur véritable et quelquefois sublime dans Tapplication
des précités, tels sont les caractères de la philosophie
sous TEmpire. Elle ne compte pas beaucoup d'écrivains :
Qttintilien donne peu de noms après Cicéron. On ren-
contre parmi les philosophes quelques délateurs, et un
grand nombre de maîtres greos, à demi grammairiens,
car la philosophie se rapproche de la philologie. Ces
sisltres habitent souvent les grandes maisons : on en voit
an, 80U8 Galigula, accompagner Canus Julius à la mort,
comme une sorte de confesseur. La foule les harcèle et
lei tourne en ridicule, et le pouvoir ne les aime pas; les
empereurs les persécutent souvent , Jusou'au Jour où Do-
mitien chasse de Rome les professeurs de la sagesse, sui-
vant Texpreesion de Tadte. Gcqpendant, les grands noms
et les grands caractères se rattachent tous plus ou moins
étroitement à la philosophie. — Sénèque, exemple si ce-
lâne des fortunes de cour, de l'abus de l'esprit, et des
inconséquences de caract^, partage avec Cicéron le
premier rang parmi les philosophes romains. VApocolo^
cyatose, espèce de Ménippée dont Claude est le triste
héros, ne fait pas honneur à la dignité du précepteur de
Néron; maia les traités de morale Sur la Colère, la Clé'
menée, les Bienfaits, etc., suffiraient à lui assurer un
Tiag tr^-^onorable dans la littérature latine, et ses
ÏÂ^res à LucUhu, par la grandeur des idées et la pureté
toute nouTelle de la monde, ont mérité au philosophe
t'boanear d'être considéré comme un précurseur du
diristianisme. N'oid)lions pas les Questions naturelles,
ouvrage de philosophie plus que de science, où l'on trouve
peu de physique générale et beaucoup de détails et
(Tinecdotea. Homme d'esprit et de cour, Sénèque était
parfaitement placé pour l'observation et l'analyse; c'est
DU de ses grands mérites. Sa doctrine est élevée; mais la
subtilité , rexagération, les habitudes de rhéteur en atté-
ooent reffet. L'application des idées morales à la vie pu-
blique loi inspire des pages touchantes, sur les esclaves,
par exemple. Son style, coupé, spirituel , semé de traits
piquants et d'antithèses que l'auteur multiplie à plaisir,
a été sévèrement Jugé par Rollin et bien d'autres cri-
tiques ; et, en effet, il a pu contribuer à la corruption du
Roût s mais il ne faut pas oublier que cette altération
Q*e8t pas l'ouvrage de Sénèque; elle avait commencé
avant hii; et, pour être populaire, il se trouvait forcé
d'être de son temps. — U est moins excusable d'avoir
mivi la mode dans les tragédies qui portent son nom ,
et que l'on est très-fondé à lui attribuer (la dixième,
Oelavie, est Fceavre d'un imitateur inconnu]. Ces tragé-
dies n'ont que la forme du drame ; ce sont des déclama-
tkms dialognées, pleines d'antithèses et de descriptions
èmdites et prétenâeuaes, où des Stoïciens, suivant la re-
marque de M. Nlsard, discutent par aphorismes avec
toute l'enfiore et Taffectation des pins mauvais jours- de
la décadence. N'oublions pas cependant que Racine a fait
des emprunts à VHippdyte, et qu'il n'en a rien dit.
Sciences. — Le nom de Sénèque appurtient à la science
comme à la poésie, par des œuvres secondaires. On a vu;
depuis Cicéron Jusqu'à Vitruve, ce que pouvaient être les
saences spéculatives et appliquées ches un peuple dédai-
gneux de la science proprement dite, qui confondait l'as-
tronoooie et l'astrolosie, et avait pris, dans l'origine, les
médecins pour des bourreaux. La guerre lui convenait
mieux, et plusieurs hommes du métier en avaient écrit;
le plus important des traités de ce genre est celui des
StrcUaghnes de Frontin, qui appartient à l'époque de
Tacite et de Trajan. La médecine, pratiquée par Caton
pour les bestiaux plus que pour les hommes, et long-
temps abandonnée aux Grecs , offrit enfin un nom latin
considérable, celui de Celse le Gaulois, philosophe et po«
lygraphe du temps de Qaude, qui écrivait avec pureté et
élégance. Nous avons parlé déjà de Columelle et de sa
Vie rustique. Mais le grand nom de la science chez les
Romains est celui de Pline l'Ancien, cet homme d'une
érudition et d'une activité prodigieuses, qui avait écrit
sur tous les sujets, y compris le maniement de la jave»
Ime, avait rempli de grandes fonctions, trouvé le temps
de iaire, outre ses ouvrages, cent soixante volumes de
notes et d'extraits, et mourut, comme un soldat au
champ de bataille, en étudiant la grande éruption du
Vésuve. 11 reste, de cette vie si occupée, les trente-sept
livres de VHistoire ncUurelle. « Il avait, dit Buffon, cette
facilité de penser en grand qui multiplie la science... Son
ouvrage est, si l'on veut, une compilation de tout ce qui
a été fait d'excellent et d'utile à savoir; mais cette copie
a de si grands traits, cette compilation contient des
choses rassemblées d'une manière si neuve, qu'elle est
préférable à la plupart des ouvrages originaux qui traitent
des mêmes matières. » Il faut cependant réduire ce bel
élo^ et remarquer que Pline est un homme politique et
actif, qu'il expose les faits sur parole, et qu'il manque
souvent de cntique et même de Jugnnent. Cuvier, de
môme, a trop loué l'écrivain dans Pline; il aurait dû faire
la part du mauvais goût et de l'obscurité prétentieuse où
il se laisse aller fréquemment.
Poésie, — Tibère et Néron faisaient des vers, mais ce
n'étaient pas eux qui pouvaient arrêter la décadence
inévitable de la poésie latine. Le règne du premier
compta plus de poètes que de prosateurs; toutefois, ai
l'épopée était en honneur, le gôire lyrique et le genre
didactique se mouraient lentement. Le premier vrai poète
de ce temps écrit dans un genre nouveau : c'est le fabu-
liste Phèdre, affranchi d'Auguste, persécuté par Séjan ,
et mort probEiblement sous Qaude. Dédaigné pendant sa
vie, dépossédé de la propriété de ses fables jusqu'à nos
jours, il n'en est pas moins, dans sa simplicité et sa con-
cision élégante, l'un des meilleurs écrivains de son
siècle, surtout dans les fables toutes romaines où l'allu-
sion a remplacé l'imitation. — Le règne de Néron pro-
duisit un homme de grand talent, capable sans doute
d'aller plus loin que le point où la mort l'arrêta, Lucain,
qui rendit à l'épopée dégénérée une vie au moins passa-
gère; malheureusement, les conditions du genre et du
sujet n'étaient pas favorables, et la mode des lectures
publiques avait mis en faveur universelle l'enflure, les
antithèses, la recherche du trait, tous les moyens enfin
d'enlever les applaudissements dans une séance à grand
effet et à grand étalage. Lucain, stoïcien de cour et dé-
clamateur, ami de Néron Jusqu'aux persécutions littéraires
du prince, n'apportait guère de conviction et de foi à ce
terrible sujet des guerres civiles, oui d'ailleurs convenait
mal à l'épopée {V. ce mot). Membre de la brillante fa-
mille des Annéus et neveu de Sénèque, Espagnol par le
goût aussi bien que par la naissance, plus orateur que
poète dans le génie et même dans le style, il exagère et
fausse l'histoire, dont il ne peut pas s'écarter, fait de
Caton un caractère grandiose, mais forcé, de César une
sorte de capitan dont la grandeur éclate encore, en dépit
du poète; u ne connaît ni vertu ni grandeur en dehors
de l'exagération stoïcienne : ses vers, vigoureux et quel-
Suefois sublimes, fatiguent par la monotonie des procé-
és, et Fénelon pensait peut-être à lui auand il a dit : « Un
auteur qui a trop d'esprit lasse et épuise le mien... Il me
tient trop tendu; la lecture de ses vers me devient une
étude. » Et cependant Lucain, mort à vingt-six ans, avec
l'orgueil du stoïcien et du poète, qui ne l'avait pas préservé
d'une lâcheté odieuse et inutile, peut Justifier le goût de
l'auteur des Essais, « qui aime Lucain et le pratique vo»
lontierB, non pas tant pour son style qœ ponr la valeur
73
LAT
1154
LAI
46 «i optaioiu «t iygonMQtt ». -» A|irèi loi, il ftuik dltf
Piétroiie «t 80B méaiocre essai de Guem cwUê; el« pour
ne psft BBTenir à ce penonmige peu hononble, qu'il soit
•a non VarbUrê du goût dont parle Tacite, il Crât men-
tlomier immédfaitement ie Satyricon^ métange bizarre et
matilé de vers et de prose, espèce de romaa où Toc
ttwiftt des pages piquaatsa» et surtout des récits im-
mendea, avec quelques obsemtioiis littéraires, empreiiites
du manvais goût même que eondamue Tanteur. -* Ce sont
des hommes d'un antre caractère, et d'un talent plus sé-
rieux que Staoe et Silius Italicus, les derniers poêlas
épiques de Rome, avec Valérius Flaccus. Celui-ci, con-
temporain de Pline rAncien, n*a fait qu'amplifier, avec
plus de prétention que d'esprit, les ArgonauUqtêei
d'Apollonius de Rhodes. Staee et Silius étaient contem-
porains tous deux des Flaviens ; le premier, très-popu-
laire dans les lectures publiques, recherché, mais IvUlant
et quelquefois même touchant dans la ThAwtdêf curieux
et spirituel dans les SUv^s^od il met élégamment en vers
les événements du Jour, adorateur de Virgile et élève
d'Ovide, selon la remaroue Ingénieuse et solide de M. Ni-
■ard; le second, bien inférieur, érudit sérieux qui versifie
rhistoire de la Guerre Punique, déclamateur qui prétend
Imiter Virgile, et ne laisse pas d'avoir quelmies vers
heureux. — Restent, pour terminer l'histoire de la poésie
latine, la satire -et l'épigramme ; car nous ne tenons pas
pour œuvre poétique la Métrique de Terentianus Maurus,
Zui n'est que de la grammaire on de la prosodie vernflée.
'esprit satirique n'avait pas sommeillé sous l'Empire; la
dépravation et la servitude n'avaient fait oue l'animer,
malgré les ligueurs du pouvoir. Il éclatait dans les pam-
phlets, les testaments, les libelles posthumes, comme les
adieux de Pétrone à Néron < il perçait même dans les
déclamations et dans la philosophie ; on le retrouve dans
Sénèque ettlans Pline. Laissons de cMé les imprécatiotis
de Valérius Gaton, ouvrage assez insignifiant et de ca-
ractère indécis, et parlons tout de suite de l'^ève d'Ho-
nu». Perse le stoiden, homme indépendant et honnête,
écrivain pénible et obscur, mai préparé peut-être à la
satire par une vie trop retirée, mais poète original, éner-
gique, remarquable surtout pour les idées, car il a con-
j tribué pour sa part à l'altération de la langue et du stvie.
i — Plaçona à côté de lui Sulpicia,pour ses vers estimables
sur l'expulsion des philosopnes par Domitien, sans oublier
qu'elle avait composé des vers amoureux ^.^r milliers, et
arrivons à Juvénal, qui est aussi supérieur à Perse par
. le génie qu'il en est loin par l'honnêteté. On peut adopter
le Jugement que Boileau a porté sur sa « mordante hy-
perbole et ses beautés sublimes. » « Son livre, dit l'élo-
quent historien des Poëtee latins de la décadence, est nn
admirable complément de celui de Tacite; c'est la chro-
nioue privée d'une époque dont Tacite a écrit l'histoire
pubiiaue... Il semble que la langue latine ait fait un dttn-
nier effort pour se prêter au rude génie de son dernier
poète. » Est-Il toujours de bonne foi dans ses invectives
contre le vice? Des Juges sérieux en ont douté pour de
bonnes raisons ; mais on a eu raison de leur répondre
« qu'il n'aurait pas exprimé ces affreuses vérités avec tant
d'éloqnenoe, s'il ne les eût bien senties ». (Pierron, Hist,
de la lÀtt, rom. ) — L'épigramme, si populaire à Rome,
mais cultivée Jusqu'alors par des hommes qui écrivaient
en d'autres genres , eut son poète particulier dans Mar-
tial, Espagnol comme Sénè({ue et Lucain; car, depuis
le siècle d'Auguste, les écrivams latins se recrutaient vo-
lontiers hors de l'Italie. Martial diffère de Catulle, en ce
qu'il vise an trait final, devenu depuis une règle du
genre. Facile, spirituel et fin, libre souvent Jusqu'à l'ez-
trême licence, il est encore de la bonne école pour le
style et le langage, mais il en est le dernier poète, et
meurt à la fin du i**" siècle de l'ère chrétienne.
Éloquence avant lee Antonins, — On a, dans cette
histoire de la poésie, rencontré à chaque pas les rhéteurs,
les déclamations, les lectures publiques ; on en conclura
facilement ce que pouvait être l'éloquence avec de tels
maîtres et de tels objets. La rhétorique cependant revint
aux grandes leçons de Cicéron grâce à Quintilien, Espagnol
comme tant d'autres, et naturalisé Romain par le goût et
le style. Son Institution oratoire prend l'enfant au ber-
ceau, et ne l'abandonne qu'après en avoir fait un orateur
'conforme à l'idéal ancien. Mais QtdnUlien, consciencieux
et (h>id, n'était qu'un bon maître et un bon écrivain.
Quand il aurait eu le génie de Cicéron, il eût été impuis-
sant à remonter le cours de la décadence. Il n'avait,
d'ailleurs, pour combattre les défauts séduisants de Sé-
nèque, qu'une méthode solide et un style pur, correct et
abondant qui n'était pas tonloura exempt d'enoui —
Un mommaol tiè»4mportant de l'étoquenoe du lompi
est le DitUogm du Oratmirs, faussement attribué à QniD*>
tilien et à Pline le Jeune, et probablement composé par
Tsdte daoa sa Jeunesse, comme Tladiquent les mana*
serits. A quel autre écrivain attribuer ees magnifigoei
éloges de l'éloquence et de la poésie, ces diseussions £ril*
lantes sur lesAndens et sur lesModêmea, toutes ces beU«
idées rendues avec tant de raison et de chaleur, dans on
style si latin et si beau? — Qiiintilien eut pour élève
Pline ie Jeune, à qui aon fkmeux Pat^égyrique de Trajan
fit une grande- réputation oratoire, bien aflkiblie avjour-
d'hui. Pourquoi PUae, en effet, râduisait-ll les grandet
qualités de Pempereur à des riena ingénieux, à des traits
heureux qui n'étaient guère que des madrigaux pleins de
grâce et d'esprit t Ces Jolies qualité étaient plus à lear
place dans une Correspondance : aussi les Lettres é»
Pline sont-elles le titre le plus intéressant et le plus pré>
deux de leur auteur, qui s'y montre honnête homme,
honorablement occupé, trop vaniteux sans doute, mais
toujours estimaiile et toujours spirituel. Il n'y a plus là
d'étoquence ; mais nons avons dit adieu depuis longtemps
an grand style oratoire, dont le Dialogue des Orateurs
est le dernier écho, et ce n'est paa dana le misérsble re-
cueil des Panégyriqum imités de Pline qu'il fkudtsit
aller le chercher
Histoire aioant lee Antomnsm — Ce iQie oe eonsemtt
encore dans l'histoire. Vellélua Paterculna, offlder de
Tibère, et trop favorable à son ancien général, dont il ne
rit paa du reste les années les plus odieuses, avait ré-
sumé rhistoire de son pays avec exactitude, netteté et
intérêt; il avait du trait, de l'éloquence, et le style de Is
bonne époque. Valère BAaxime, plus souvent cité que
Velléius, mais bien inférieur pour le talent, et arili de-
vant Tibère sans avoir les mêmes excuses , n'était ao
fond qu'un rhéteur, et faisait, sous le nom d*histoire, un
recueil d*anecdotes et de morale en action, où il louait la
cruauté et insultait les vaincus; il représente le plus
mauvais esprit du rè^e de Tibère. Après ce redoutable
prince, l'histoire, moins dangereuse, fut bien plus culti-
vée; mais elle ne nous présente ^ère que des nomsoD
des incertitudes. Où placer Qunte-Curce et FlonuT
Quinte-Curce semble un contemporain de Quintilien. Il
a, dans son histoire d'Alexandre, la suite, la facilité, la
poétique élégance de cette époque; il décrit et fait def
romans à la manière des déclamateurs; il tient peu di*
compte de la critique, de la géographie, de la chronologie,
et sacrifie à peu près tout a la rhétorique. 11 revient à
l'école de Tite-Live, mais par les petites choses, et n'a
paa le génie du maître. Florus est encore an déclamateur,
qui résume l'histoire du peuple romain, de son enfonce
à sa virilité, a?ec une rivadté brillante et poétique, qui
se ressent de l'Espagne (peut-être était*il de la fomille
des Sénèques). Suâone, écrivain bien plaa Ikible, mais
d'une grande autorité historique, « écrit, dit S^ Jérôme,
la rie des douze Césars avec une liberté égale à celle de
leur ^e. » C'est Tacite, son contemporain, qui est un des
maîtres du genre par la profondeur de son génie et l'ad-
mirable énergie de son style. Salluste avait écrit l'his-
toire en politique, Tite-Live en Romain passionné pour
la gloire nationale, Quinte-Curce en romancier; Tsdte
récàrit en moraliste. Passionné peutp-être, quoiqu'il s'en
défende, et parfois exagéré, comme l'ont remarqué de
bons Juges, il n'a certainement calomnié personne; n
aime à croire au bien, et il porte dans le stjrle une di-
gnité perpétuelle, une '^blesse exempte d'enflure; il est
positif et grand, plein de rai^n et de poésie, profond sans
être rêveur. On peut reprocher à aa diction si forte et si
colorée l'abus des tours poétiques, le goût du trait, et
une concision quelquefois obscure; maia il est, eo
somme, bien difficile d'être sévère avec un si grand et si
honnête homme, qui a mérité d'êtie appe)A par Racine
« le premier peintre du monde. »
Deuxième époque : littérature après les Antonins. —
Nous en avons fini malheureusement avec les grands écri-
vains et les épo^es intéressantes. On ne trouve, dans le
second et le troisième siècle de l'ère chrétienne, qu'une
stérile nomenclature, et les vertus des Antonins ne dé-
fendirent pas la littérature latine d'une défaillance dé-
sormais sans retour. Fronton, précepteur de Marc-Aurële,
n'est qu'un rhéteur puéril et ennuyeux; Marc-Aurèle
écrit ses Mémoires ou ses Psti^st en grec; Aulu-Gelle
est un grammairien érudit; il a laissé dans ses PMt
attiques, qui seraient mieux appelées Veillées, une com-
pilation précieuse; Apulée est un Africain, nul en philo-
sophie, mais très-amusant, malgré l'étrangeté de sa
langue, dans son roman de l'Ane aor, imité de Uiden-
lAT
m%
hkt
*{!i è^ «uivant^ les po&nes didactique» de iTémésien
et les Eglogtiss de Calpurnius, contemporains Tan et
TS? ^* ^Tittes emperenn Garus, Carin et Namériens
Boffineot <iu*un mincô intérêt t à plus forte raison le^
gnmmsiiienft Festus, Nonius, Marcellus^Censorinus. Les
éoÎTBins marne» de VEùtoirê Atiffutte, contemporains de
Diodétieii, ne Jettent pas pins de lustre sur le r/* sièclOi
malgré les tristes emprunts que Ghatesubriand leur à
frits dans ses Etudes hiêUtri^ue». Le titre d'historien ne
âedçaère à AméHiis Victor ni à Entrope, simples, clairs
et fi£bles; il oonviendrut mieux à Ammien Maroellin,
qd écrivit rhistoire de l'Empire, depuis les FlaWens Jus-
£*au règne de Valeos, airec non sens et vigueur, ouoique
os un style & demi bsitere. Svmmaque, apolofpste in-
téressant des beaux souvenirs de Rome païenne et de
rsntel de la Victoire, vivsit sous le ré^e de Tbéodose, et
composait avec esprit des Lettres agréables et des DiS"
covtn que ses contemporains comparaient à ceux de Gi-
céron. Son ami Hacrobe compilait, dans ses SatumuUes,
beaucoup de documents précieux, comme avait fait Aulu-
Celle, les âoyait dans des commentsires Illisibles, mais
conservait, sans le savoir, pour la postérité, un beau pro-
logue de Labérius et le Songe a» Sdpion. Triste ma-
tière pour rhistoire de Is prose latine! Quant à la poésie,
Anaone nous apporte les descriptions maniérées et obs-
cures de son pofime de la MaseUe; Rutilius, la grftce
prolixe de son Itinéraire, où l'on trouve au moins un peu
d*ftme et de sentiment. Claudien seul, dans les satires
eomtre Ritfin et Eutrope, dans V Éloge de StUicon, surtout
dans VEnlèvement de Proserpine, arrive, par une versi-
fication habile et sonore, à cet éclat apparent, à cette
pompe facile et vulgaire qui abuse le public des époques
de décadence. Jusqu'à faire évoquer, en l'honneur de
l'écrivain, rftme de Virale et la muse d'Homère. La
poésie de Claudien s'est abîmée dans la çrande catar
strophe de l'Empire romain; mais elle n'avait pas besoin
de l'invasion des Barbares pour être plongée daôis l'oubli.
— Et cependant c'est la dernière lueur de la vraie langue
latine; car Sidoine Apollinaire, Fortunat et Grégoire de
Tours, qui appartiennent à l'histoire de l'invasion ger-
maniqpae, ne peuvent plus compter même parmi les der-
niers dâiris des classiques; ils s'éteignent avec la société
romaine dans la barbarie. — Qaant aux Pères de l'Église,
ce sont des écrivains d'un ordre et d'un caractère tout
nooveeax, qui n'appartiennent plus à la littérature clas-
sique, nuds à la littérature sacrée. Le vieux monde latin
a trouvé, à la mort de Glaudien, le dernier terme de sa
décrépttade, après avoir épuisé tout ce que pouvaient en-
fanter, soit à l'école des Grecs, soit par eux-mêmes, un
9écde poissant et une grande cinlisatlon. V, au SuppUm.
F. J.-N. Fonck ou Funccius, De Origine Imguœ lor-
tmœ, Giessen et Francfort, 1720, in-4<>; De pueritta, de
adoinoanUa, de wrili œtatê, de imminenti senectute,
da végéta seneetute, de inerti ae decrepita senectute,
Uarbourg, 1720-1744, ln-4», et Lemgo, 1750; Fabricius,
B&d. ItU,, Hamburg, 1721, édit. Emesti, Leipzig, 1773;
G. E. Millier, /ntroîeitictiofi historique et critique à la
œnmaissaince des écrivains latins, Dresde, 1747-51 (en
allem.); T.- G. Harles, Brevior notitia Litt, Rom.^ avec
les SupplémenU de Klugling, Leipzig, 1790-1817, 3 vol.
in-^; F. A. Wolf, Histoire de la Tittérattire romaine,
Halle, 1787 (en allem.); Cours d^histoire de la littéra-
ture romaine, publié par Gûrtier, Leipzig, 1832 (en al-
lem.} ; J.-T. Bergmann, Comment, de Litter. conditione
apud Bomanos inde a bello punico primo usque ad VeS"
pasianum, Leyde, 1818; F. Schœll, Histoire de la litté-
ratture romaine, Paris, 1815, 4 vol. in-8<*; Dunlop, His-
toire de la littérature romaine au siècle d'Augtiste^
Londres, 1823-1828 (en anglais); Gavriani, Délie scienie,
lettsrs ed arti dei Romani dalla fondazione di Roma /Ino
odAuffUsto, Mantoae, 1822, 2 vol. in-8<*; Charpentier,
Études morales et historiques sur la littérature romaine
depuis son origine jusqu*à nos jours, Paris, 1829, in-8® ;
Bemhardy, Esquisse de la littércUure romaine, Halle,1830
(en allem.); Bœhr, Histoire de la littérature romaine,
(en allem.), 3« édit., Garlsruhe, 184i-45, 2 vol. in-8o : un
abrégé ea a été fait en français et publié à Louvain par
Roules; Krause, Histoire delà littérature romaine, Ber-
lin, 1835 (en allem.) ; D. Nisard, Études de mœurs et de
critique sur les poètes latins de la décadence, Paris, 1834,
2 vol. in-8«; 2« édition, Paris, 1849, 2 vol. in-8o;
A. Pierron, Histoire de la littérature romaine, Paris,
1852, in-12. A. D.
LATINES (Fériés). V, F^ribs, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
uxam (VoUai). K Voiles.
LATINISIfE, expression ou tour de phrase particuliei
à la hingue latine; — locution imitée du latin, qu'elle
soit ou non conforme à la construction grammaticale et
logique. Il- y a un laUnisme dans le ven ci-dessûus ds
La Fontaine (I, 22, I^ Chêne et le Roseau) :
OUqI de qui la tSfte au dal était voisine.
LATITUDE. ) F. ces mots dans notre Diction-
LATIUH (Droit de). [ naire de Biographie et d'His-
LATOMIES. ) toire.
LATRAN (Palais et Basilique de). 7. Jean-de-Latran
(Sahit*).
LATRIE. V. CoLTE.
LATRUNCULI. V, ce mot dans notre DictUmnavre de
Biographie et d'Histoire.
LATVÉGE. r. Letton (Idiome).
LAODATIF (Genre). V. DéMONSTRATrr.
LAUDES. V. ce mot' dans notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d'Histoire.
LAUDl SPIRITUAL! , nom qu*on donne en Italie aux
cantiques religieux. Us (tirent surtout à la mode au xv*
et au xvi« siècle. Ange Politien, le Bembo , Laurent de
Médicis , le Pelci , Flliciya, etc., en firent les paroles : 1^
chant fut d*abord pour une seule voix, puis à 3, 4 et 5
parties.
LAURE (do grec laura ou labra, chemin creux, ruelle),
réunion de cellules ou petites demeures habitées par des
moines, qui vivent indépendamment les uns des autres,
quoique soumis à la juridiction d*un abbé. Les laures
ont précédé les couvents : on pense que la première fut
établie près de Jérusalem par S^ Euthyme, au v* siècle.
LAURÉAT (Poète). V. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire.
LAURET, monnaie d'argent firappée en Angleterre
sous Jaccpies I*', et ainsi nommée du laurier dont la tète
de ce prince y était couronnée.
LAURIER , arbre consacré à Apollon , soit parce que
Daphné, qu*il avait aimée, fut changée en laurier, soit
parce que les feuilles de cet arbre servaient à tirer des
présaçes. Le trépied d* Apollon était primitivement fait
de bois de laurier, ou c*était près d'un laurier tenant au
sol par trois racines qu'on rendait les oracles. La Pythie,
les devins de toute sorte, ceux qui consultaient les dieux
sur revenir ou qui faisaient des expiations, portaient du
laurier. On en brûlait dans les temps où Tencens n'était
pas encore connu. On se servait du laurier dans les en-
chantements, et de ses feuilles on composait des guir-
landes pour orner la tète des victimes. Non-seulement
Apollon, mais Esculape, Vulcain, Hercule, Vesta, Janus ,
les dieux Pénates furent représentés couronnés fie lau-
rier. Lorsque le feu des Vestales était éteint, on le
rallumait en frottant vivement deux morceaux de bois
de laurier l'un contre Tautre. Dans presque toutes les
solennités publiques, les Romains décoraient leurs portes
de lauriers. On mettait du laurier la nuit sous l'oreiller,
pour avoir des rêves heureux. Souvent les soldats en
prenaient pour marcher au combat, en paraient leurs
armes dans les cérémonies du triomphe, et il devint un
svmbole de victoire : de là l'expression de litterœ laureatm
(lettres laurées) pour désigner des lettres qui annon-
çaient de bonnes nouvelles. Enfin les poètes se couron-
naient souvent de laurier pour réciter leurs vers, et le
laurier était aussi le prix qu'on leur donnait, ainsi qu'aux
autres vainqueurs dans les Jeux publics. B.
LAUSANNE (Cathédrale de). Cette é^ise, une des
plus belles de la Suisse, présente un mélange de diverses
architectures. Fondée vers l'an 1000, elle ne fut sérieu-
sement entreprise qu'au xm« siècle, et le pape Grégoire X
en fit la dédicace en 1275. Plus tard, on la reconstruisit
en partie, et elle fut encore réparée en 1506. Elle a la
forme d'une croix latine : sa longueur est de 93 met. Le
grand portail, construit dans les premières années du
XVI* siècle, est flanqué de deux tours : celle du Midi ,
seule achevée, contient dans sa partie inférieure les ar-
chives du canton de Vaud, et dans sa partie supérieure
le befiîrol ; la terrasse qui recouvre le beffroi est à 47
met. au-dessus du sol ; une flèche à huit pans s'en élève
à une hauteur de 13 met. Le chœur est surmonté d'une
lanterne, d'abord rectangulaire, puis octogone, haute de
40 met, et qui se termine par une aiguille en charpente.
Le portail du midi, nommé Porte des Apôtres, se com-
pose de 72 colonnes et d'ogives surmontées d'un fronton
aigu; au-dessus de la porte sont figurées la mort et la
résurrection de la S** Vierge. Llnterieur de l'église est
éclairé par 70 fenêtres ; on remarque principalement la
LAZ
1156
LEG
rose, oamie de vitraux qui représentent des si^ets de >
îlUstorre sacrée. On voit dans le chœur plusieurs tom-
beaux intéressants.
LAVABO, mot latin qui signifie je laverai, et qui dé-
signe un acte Uturgimie du rite catholique. Autrefois ,
iprçs Toffertoire de la messe, le prêtre se lavait les
nuùns : il y avait pour cet usage, dans un des murs laté-
laux du sanctuaire , un laoatorium ou piscine. Depuis
longtemps le prêtre se contente de présenter au-dessus
d*un bassin ses doigts, sur lesquels le servant verse
quelques gouttes d^eau. Cette cérémonie , suivant S* Cy-
rille, est destinée à rappeler symboliquement la pureté
du prêtre célébrant les saints mvstères. On donne aussi
le nom de laoabo au linge avec lequel le prêtre s*essuie
les doigts, et au canon d'autel qui, placé du côté de
Tépltre, contient les versets du psaume 25 qui doivent
être récités à ce moment. — En termes d'ébénisterie, un
lavabo est un meuble de toilette garni des ustensiles
nécessaires pour se laver, pot à eau, cuvette, verres,
brosses, flacons, etc.
LAVATORIUM. V. Cloitrb.
LAVEMENT DES PIEDS. V. notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
LAVIS, genre de peinture dans \e(^ue\ on emploie sur
le papier, avec Teau pure et des pmceaux, Tencre de
Chine et les couleurs gommées. Si Ton se sert de papier
blanc, on opère avec du bistre, de la sanguine, de l'encre
de Chine, de l'indigo, de l'outremer, ou de la sépia; si
Ton prend du papier coloré et teinté, dit papier d$ pàU,
on opère avec les mêmes couleurs rehaussées par le
blanc et la gouache. Une seule couleur suffit au lavis ;
les ombres et les clairs sont déterminés par des teintes
plus ou moins fortes. On a des lavis de Van Ostade, Ru-
gendas, Paul Bril, Ruysdael, Both et Winants. Raphaël,
Lesueur, Mignard et Lebrun, avant d'exécuter leurs fres-
ques, en faisaient des esquisses au lavis. Le lavis a au-
jourd'hui cédé la place à l'aquarelle : il n'est plus guère
en usage que pour des dessins sans conséquence ou des
croquis. Les ingénieurs et les architectee s'en servent
pour leurs plans.
LAVIS (Gravure au). V, GRAvims.
LAVOIR, emplacement disposé sur le bord d*un étang ,
d'une source ou d'une rivière, pour qu'on puisse y laver
commodément. Les lavoirs complets doivent se com-
poser de stalles, de pierres plates pour presser le linge,
de buanderies, sècheries, salles à repasser, etc. On crée
a^Jourd*hui dans certaines villes des lavoin publics,
établissements précieux pour les classes populaires. A
Paris, le droit d'entrée dans un lavoir public est de 10
centimes par Jour.
LAXEMBOURG (Château de), dans la basse Autriche,
à 10 kilom. de Vienne. Ce cnâteau, appelé aussi la
Maison bleu», sert, alternativement avec Schœnbrunn,
de résidence d'été à la famille impériale. Composé d'un
vieux ch&teau bâti de 1378 à 1380 par le duc Albert m,
sur l'emplacement d'un autre ch&teau détruit par un in-
cendie en 1377, et d'un ch&teau neuf qui ne date que de
Marie-Thérèse, il n'est remarquable ni par l'ampleur
de ses proportions, ni par son architecture. On y voit un
manège, une salle de spectacle qui peut contenir 1,200
spectateurs, une bibliothèaue avec G beaux tableaux du
Canaletto, un tableau de Van Dyck sur l'autel de la cha-
pelle. I«e parc, composé de 17 lies formées par la Schwe-
chat, est un des plus magnifiques Jardins anglais qu'il y
ait en Europe : au milieu d'un lac se trouve le Franzens^'
burg , reproduction minutieusement exacte d'un ch&teau
gothique b&ti par Maximilien I*' dans le Tyrol, et qui
contient une collection d'antiquités tirées de divers cou-
vents et ch&teaux d'Autriche.
LAYETIERS-EMBALLEURS , ouvriers qui fabriquent
des caisses , malles, boites (autrefois layettes; de laie,
laye, bois), et qui emballent les objets nragiles destinés
à être transportés. Us furent érigés en corps de métier,
au commencement du règne de Louis XIV, et prirent
S' Fiacre pour patron.
LAZARET. K . ce mot dans notre Dictionnaire de BUh
graphie et d'Bistotre.
LAZZARI ( Thé&tre ), nom que prit, en 170S, un thé&tre
ouvert en 1779 sur le boulevard au Temple à Paris, vis-
à-vis de la rue Chariot , sous le titre de Salle des élèves
de VOpéra, puis connu sous celui de Lycée dramatique,
Lazzari était un mime italien, qui Joua des arlequinades
•avec un grand succès. Son thé&tre fut incendié en 1798,
remplacé par un café-chantant, et, de 1821 à 1823, par le
Panorama dramaHigue, où Bouffé fit ses débuts. Cette
nouvelld salle fut démolie; un autre thé&tre » dont Bo-
bèche illustrait les tréteaux, prit alors le nom de Retii-
Lazzari.
LAZZARONI. V. ce mot dans notre Dtctionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
LAZZI. Ce mot italien , <iui est le pluriel de lax%o
(plaisanterie, badinage), désigne les Jeux de scène comi-
ques, les grimaces, contorsions, gestes burlesques psr
lesquels les comédiens cherehent & faire rire. En passant
dans la langue française, il a pris un sens figuré, et si-
gnifie les sttUlies bouffonnes, les plaisanteries qui se débi-
tent dans les parades.
LEADER, c-à-d. en anglais conducteur, homme poli-
tique autour duquel se groupent, dans le Parlement an«
C^ais, ceux oui partamnt la même opinion et tendent au
même but. u discipnne le parti , et lui donne le mot
d'ordre.
LÉCHÉ, en termes de Pdnture, se dit d*nn ouvrage où
le fini est poussé à l'excès. Cest un mot qui se prend en
mauvaise parL
LEÇON, mot formé du latin lectio (lecture), et dési-
gnant une instruction donnée, surtout du haut d'une
chaire, par le moyen d'une lecture, ou d'un discours im-
provisé. — Chez les Jurisconsultes latins , ce mot dési-
rait le texte d'un article de loi , c-&-d. la manière dont
il était ^crtl et par conspuent dont on le lisait. De là le
sens moderne introduit par les critiques paléographes :
Manière particulière de tire un mot ou une phrase dans
les anciens manuscrits. Certaines éditions étalent tout
au long, au bas des pages ou à la fin du volume, les di-
verses leçons {lectiones variœ) données par les ma-
nuscrits ou adoptées par des éditeurs antérieure. La
discussion des leçons exige de la part du critique une
grande sagacité unie & une érudition aussi sûre qu'éten-
due ; c'est un genre d'études dans lequel les Allemands
réussissent d'une manière remarquable. P.
Liçoii , en termes de Liturgie , lecture qui se fait , &
chaque Nocturne des Matines, de quelques extraits de la
Bible, des Pères, ou de la légende du Saint du Jour. U y
a trois leçons à chaque Nocturne. On ne les chante pss,
ou fait seulement une inflexion sur la dernière syllsbe
de chaque phrase.
LECTEUR. V, ce mot dans notre DicUonnaâre de Bûh
graphie et d'Histoire,
LECnCAIRËS, mot de même sens que Cliniques
(V. ce mot),
LECnONNAIRE, mot synonyme à'Êpistoliër ( V. ce
mot),
LECnSTERNE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
LECTRIN, vieux mot synonyme de/uM et de pupUre,
LECTRUM, vieux mot signifiant prte-Dieu,
LECTURE , art d'assembler par la pensée et psr la
ftarole les lettres d'abord, puis les syllabes , les mots et
es phrases. On distingue plusieurs méthodes pour en-
seigner & lire. La Méthode <inaly tique, dite aussi Méthode
mécanique , consiste & faire apprendre d'abord des mots
entière aux enfants, pour descendre ensuite des mots sax
syllabes et des syllabes aux lettres : on met aous leois
Îreux les mots qui leur sont le plus familiers, et on les
eur fait retrouver, soit complets, soit par parties, dans
d'autres mots plus étendus , de manière & découvrir les
syllabes élémentaires, puis les lettres. Cette méthode,
exposée en 1790 dans un livre intitulé la Vraie manière
dk apprendre une langue, et perfectionnée par Lemsre,
fut celle qu'employa Jacotot ; elle a été reprise de nos
Joure par Laffore sous le nom de StaJtiLégie, On lui re-
proche avec raison d'être trop mécanique, et de ne s'sp-
pliquer oue très-difficilement & un enseignement oollectifl
— La Méthode syllabique, en usage dans un grsnd
nombre d'écoles d'enseignement mutuel , procède, non
par mots entiers, mais par syllabes , que l'enfant pro-
nonce d'un seul Jet, sans les décomposer. — D'apr& la
Méthode synthétique ou Méthode d^épellation, qui a été
constamment employée depuis la plus haute antiquité,
on va des éléments auz composés, c.-à-d. que l'enfant
apprend d'abord le nom et la valeur des lettres, puis les
réunit pour former des syllabes , et arrive ^n aox
mots. Quelques doutes furent émis vere la fin da
XVI* siècle sur l'efficacité de cette méthode : mais la seule
modification qui ait été utilement apportée au mode
d'épellation nous vient de la Grammaire raisonnes de
Port-Royal ; elle consiste à désigner les consonnes psr
les sons qu'elles rendent dans la pratique, h leur donner
à toutes une terminaison uniforme, celle de l'a muet,
sans autre règle que celle de l'élision de Ye, Ainsi, l'en-
fant épdlera plus aisément quand om lui ann dit que les
LÉ6
115^
LÊ6
Mtns f, I, m, r, «, ds, se nomment fê, le, fiM, ra, $é, œe,
(|oeft*il lai faut commencer par les appeler effe, »ll$,
mm», 9rre, «sse, ix, pour supprimer aussitôt, dans le
Km i^ttabique , lia première intonation et ne conserver
((ne rintonation radicale. Quant à ces procédés plus ou
moins ingénieux à Taide desquels on a prétendu rendre
Is lecture agréable et facile, tels que les dés, les dominos
«t les /Iches couverts de lettres, ou bien les abécédairss
ei syllabaires à images, ils peuvent assurément plaire
aux enfanta : mids on B*en est exagéré limportance, et
Os sont généralement trop compligu& pour supplanter la
méthode onttnaîre. On voit dans Quinulien (Instit. orat,^
1, 9) que déjà les Romains avuent fait un Jeu de Ton-
leiçaement de la lecture, en mettant, comme des hochets,
aux mains des enfants des lettres en ivoire ou en bois.
ucmas A HAUTS VOIX. Cest Vart de bien lire, qui
consiste à donner aux mots et aux phrases la vmleur
S'ils doivent avoir, n exige : 1^ de Ytntelligence^ car il
it avoir bien compris pour bien exprimer; 2^ de la
voix, car elle est Tinstrament de rintelligence, et, pour
s'en passer, il faudrait avoir tout l'esprit, toute l'habileté
d*Andrieax, qui sut se faire entendre au Collège de
France à force de se faire écouter; 3<^ une bonne pronoi»-
eiation, sans aucun de ces vices qui viennent de la na-
ture oa des habitudes d'enfance ; 4® de Vintonation, dont
la justesse est la conséquence de l'intelligenoe du lecteur
et FeCTet presque constant d'une inspiration soudaine.
On a quelquefois érigé en règle la lenteur du débit; elle
contribue sans doute à la netteté de la prononciation ;
mais la diction n'a réellement d'autre règle que celle de
suivre la pensée de Técrivain et le mouvement de sa
phrase. L art de bien lire a toujours été un rare privi-
lège, et les bons lecteurs sont plus rares que les bons
écrivains.
On a défini la lecture « une conversation que l'on a
avec les plus beaux. génies et les plus rares esprits de
tous les siècles ». Cette pensée n'est Juste qu'en tant
qu'elle s'applique à la lecture des modèles; lire des ou-
vrsges mauvais ou médiocres, en effet, c'est pour l'es-
prit ce que la mauvaise compagnie est pour les manières
et la conversation. Lire , ce n'est point parcourir rapide-
ment des livres, pour charmer ses loisirs ou satisfaire
une curiosité frivole, mais, comme l'indique le mot latin
leoere, choisir ce qu'il y a de bon et de beau dans les
pensées, dans les sentiments des écrivains, et se l'appro-
prier ensuite par la mémoire et la réflerion. La lecture
■Inâ entendue est un puissant moyen de se former à
Part d'écrire. Si l'on n'écarte pas les ouvrages qui por-
tent atteinte à la religion et aux bonnes mœurs, on perd
bien vite cette noblesse et cette générosité de nature sans
Vsquèlles il est impossible de Irien penser, de bien vou-
blr et de bien agir. Quiconque veut cultiver son esprit,
doit slattacher aux chefs-d'œuvre des plus beaux siècles,
et se gsrder des auteurs médiocres, au commerce des-
quels le goût s'altère et se corrompt. Enfin , selon la re-
marque de Pline le Jeune, ce n'est pas en lisant beau-
coup de llrres que Ton s'instruit, mais en lisant beaucoup
an même livre : rien n'est plus propre à détendre les
ressorts de l'intelligence, à engendrer la confusion, que
les lectures trop variées et décousues, et l'on doit se
larder de cette passion de lire oui est une sorte d'intem-
pérance, fort dangereuse pour resprit. François de Neuf-
chSteau a écrit, sur l'art ae lire les vers, une Jolie épttre.
Delille poeséduit ce talent à un rare de^. B.
LBcnniB (Cabinet de). K. Cabinet.
LECTVaSS PUBUQOIS. V. RéOTATIOll.
LÉGALISATION, déclaration par laquelle un fonction-
naire public qui en a le pouvoir affinne une signature
apposée à un acte et la qiûdité de la personne dont elle
énâane. Ainsi, le maire tégalise la rignature du citoven
de sa commune; le préfet, le sous-prefet ou le président
du tribunal dvil légalise celle du nialre, etc. Les greffiers
des tribunaux perçoivent, pour la légalisation, un droit
de tt centimes. En général, la signature des fonction-
naires est légalisée par leur supérieur immédiat. La léga-
lisation p'est qu'une forme extrinsèque de l'acte, et aie
n'en préjuge en rien le contenu : elle a seulement pour
effet d'étendre l'authenticité de l'acte d'un lieu h un
antre. Les actes passés en pays étranger et dont on veut
se servir en Ftancet ceux passés en France et dont on
vent faix» usage à l'étranger, doivent être légalisés par les
agonts diplomatiques des puissances respectives.
LÉGALITÉ, conformité d'un fait avec la prescription
de la loi.
LÉGAT. V. ce mot dans notre Dictionnatre de Biogra^
phie et d^BisloirB»
LÊGATAIRB. F. Laos.
LÉGATION, en Diplomatie, s'entend de lent le pm>*
sonnel d'une ambassade.
LEGATO, adjectif italien qui signifie It^, et qui, placé
en tète d'un morceau de musique, indique qu'il faut en
lier les notes. Il a ausri le sens d^ooUgé, de contraint par
certaines règles : un canone legato, une fugha Ugata,
c'est un canon, une fogue qui doivent se renfermer dans
telles bornes prescrites.
LÉGENDE (dn latin legendum., à lire, qui doit être
lu), nom donné d'abord aux versets que l'on récitait dans
les leçons des Matines , puis aux Vies des saints et des
martyrs, qu'on lisait dans les réfectoires des couvents.
En ce dernier sens, les légendes sont comme la mytho-
logie du christianisme , et forment une paitie importante
de la littérature du moyen âge, principalement au vn* et
au vm" siècle. Elles ont toutes certaines parties com-
munes, la prophétie qui annonce les destinées du
Saint, la rision qui lui révèle son avenir, les miracles
qu'il opère, le songe qui l'avertit de sa fin, et les mer*
veilles (jui s'accomplissent sur son tombeau ou dans la
translation de ses reliques. L'Ancien et le Nouveau Tes-
tainent étaient des choses sacrées, que la fantaisie ne
pouvait modifier : l'imagination des peuples s'en prit à
la rie des saints. L'enthousiasme de la foi dans le narra-
teur, la crédulité naïve et l'amour du merveilleux chei
les premiers fidèles, le désir de convaincre par des pro-
diges les Barbares de la Germanie qu'il s'agissait de con-
vertir, l'émulation des dévotions locales cherchant à
illustrer leurs patrons, tout conspira pom* développer et
propager les légendes. Le premier légendaire ou coUeo-
teur de légendes fut Siméon , dit Métaphraste (gloss»-
teur, traducteur), qui éoririt en grec au commencement
du X* siècle. D'autres auteur» grecs , tels que Psellus el
Nicéphore Calliste, s'exercèrent ensuite à ces pieux ré-
cits. Flodoard, chanoine de Reims, contemporain de Louis
d'Outre-Mer, rédigea en latin les Vies des saints pour
chaque mois de l'année. A la fin du xi* siècle, Gosselin.
moine de l'abbaye de S^-Bertin à Saint-Omer, fut appelé
en Angleterre par S* Anselme de Cantorbéry, qui lui fit
écrire un grand nombre de ^es de saints. Au commen-
cement du xm«, Césaire, de l'ordre de Clteaux, composa
en dialogues IS livres de miracles et d'histoires me^
veilleuses. Jacoues de Varase ou de Varagto, appelé
aussi Jacques de Voragine (du gouffre) parce qu'il fut
un gouflîre de science, est auteur de la Légende dorée^ quff
eut un prodigieux succès pendant plusieurs siècles.
Pierre Calo, Bernard Guidonis ou de Guv, Pierre Natal
ou de Natalibus, ont recueilli aussi des légendes moins
connues. A la fin du xvi* siècle, le P. Ribadenoira publia
la Fleur des Saints. La collection des Bollandistes
(V, Actes dbs Saoits) naquit du désir de réunir toutes
les landes et d'y appliquer un peu d'esprit critique.
V. Alfred HIaury, Essat sur les légendes jeteuses au moyen
âge, Paris, 1843, in-8». B.
LéGBNDB, en termes de Numismatioue, se dit de tonte
inscription placée sur les monnaies, médailles. Jetons, etd
Les landes peuvent se trouver sur l'une et l'autre face
de la pièce, ou encore sur la tranche. Sur les faces, elles
peuvent être disposées drculairement, ou en ligne droite,
ou en sens divers; quelquefois on les place sur une partie
du type, comme sur un oouclier, on dppe, un autel, etc.
Depuis longtemps la face proprement dite ofli^ une lé-
gende circulaire, donnant les nom et titres du person-
naoe représenté; sur le revers, la légende est rectillgne ,
et Indique la valeur de la pièce, l'année, le lieu, l'événe-
ment, etc. Beaucoup de ces indications sont en abrégé
ou symboliques. — Dans les premiers temps du mon-
nayage, les légendes furent très-courtes, et se bornèrent
h l'indication du peuple ou de la ville. Puis elles renfer*
mèrent les noms des divinités locales, des magistrats,
des rois, la valeur nominale de la monnaie, etc. Les
pièces consulaires romaines ofl'rent des légendes inté-
ressantes sur les principales fomilles de Rome, sur les
hauts laits qui les ont illustrées, sur leur origine. An
temps de l'Empire, les légendes contiennent invariable-
ment des formules aduhitrices, et n'ont plus rien d'inté-
ressant que les faits et les dates. Au moyen âge, les
légendes sont presque toi:Jours en latin. En France, sous
les Méroringiens, elles n'ofi^rent que le nom de la rille et
celui du monétaire, très-rarement le nom du roi. Sons
les Carlovinriens, il n'y a plus gue le nom du roi, avec
la formule Gratta Dei ou Misericordta Det, Au xii* sièds
apparaît sur les monnaies d'or la légende XPG (Christus)
vtncit, XPC régnât, XPC imperat. qui s'y maintint Jus-
qu'en 1789. De Louis XI date la légende Sit nomen Do^
LÉG
11 Si
LEa
mmt beneâkUim, acd devint presque européeiuie et oui
nbsista Jusqu'à la Révolution française. Les sj^nels et les
moutons d*or portèrent ces mots : Agnus Dei, qui toUis
fêccata mundt, mtserere nobis. Les monnaies des barons
et des prélats reçurent des légendes très-variées. En
1685, on commença de mettre sur la tranche de la mon-
naie royale les mots Domine scUvum fac regem. En 171K),
FAssemblée Constituante rétablit dans la légende de la
fiuse le titre de Roi des Français, oui datait de Cbarle-
magne , et qu*Henri III avait remplacé par celui de Roi
de France ; on lut au revers Règne de ta loi, et, sur la
tranche, La «otton, la loi. et le Rot. En 1793, le nom du
roi fit place aux mots R^inAlique française, et, sur les
pièces de cuivre, on mit : Liberté, égalité. Les hommes
sont égaux devant la Un, — Au temps de Napoléon I*',
en lut, d'un côté de la monnaie. Napoléon empereur,
de Tautre République française, et plus tard, à dater de
1809 seulement. Empire français, et, sur la tranche, avant
•t depuis cette époque. Dieu protège la France. La Restau-
zstion fit reparaître les titres de Roi de France et de Na-
varre et Domine salvum fac regem, Louia-Philippe reprit
la titre de Roi des Français^ avec la phrase de la tranche
Dieu protège la France^ qui a toujours été conservée d^
puis. Après la Révolution de 1848, on rétablit les lé-
aendes République française, et on ajouta : Liberté^ éga-
XiU, frot^mit^. Après le coup d'État de 1851, les monnaies
portèrent Napoléon Bonaparte d'un côté. République
française de l'antre ; depuis 1852, les lé^ndes sont JVo-
jfoléon III, empereur, et Empire français. — Beaucoup
^e Jetons du xv« et du xvi* siècle portent des légendes
barôques, dont on ne peut déterminer ni le sens ni le
but. Au xvii*t les légendes des jetons sont ou bibliques,
ou mythologiques, ou historiques; au xvm*, on y trouve
généralement le caractère galant. B.
. LEGILE (du latin UgUis, qui sert à lire), pièce d'étoflTe
dont on couvre le pupitre sur lequel on chante l'épltre et
révangile aux messes solennelles.
LÉGION. V, ce mot dans notre Dictkmncùre de Bio-
graphie et d*Histoire,
i^GioN d'honneur. ) V. notre Dtcttonnaire (20
. LÉGION D'HONNBua (MaîsoQs / Biographie et d'His-
d'éducation de la). ; toire.
uSgion ÉTRANGfcRB, corps de troupes formé en 1831 avec
des' réfugiés et des volontaires de divers pays étrangers,
et employé par la France en Algérie. Ce corps fut cédé
à l'Espagne en 1835. Mais on en constitua presque aua-
sitôt un nouveau, qui s'est composé de 2 régiments à
4 bataillons chacun, et qui, en décembre 1861, a été ré-
duit à un seul régiment.
LÉGISLATIF (Corps). V. Corps législatif et Palais,
dans notre Dictionncdre de Biographie et d'Histoire,
LÉGiSLATipJ Pouvoir). V. Pouvoir.
LÉGISLATION ( du latin lex, legis, loi , et latio, action
^ porter), se dit de l'acte de faire des lois, et plus gé-
néralement du corps des lois d'un pays.
LÉGISLATURE, mot qui désigne, soit les pouvoirs
collectifs qui, dans un État, font les lois, soit le temps
légal d'existence d'une Chainbre ou d'une Assemblée lé-
gislative élue.
LÉGITIMATION, acte par lequel un enfant naturel est
admis à tous les avantages d'un enfant légitime. Le Droit
romain reconnaissait six moyens différents de légitima-
tion : per oblatùmem curiœ , lorsque le père faisait en-
trer son fils naturel au nombre des décunons d'une cité;
par adoption; par testament, si le père avait de justes
motifs pour ne pas épouser la mère de l'enfant; par re-
eonnaissance^ lorsque le père avait nommé son fils dans
un acte sans ajouter la mention qu'il était enfant na-
turel; par mariage subséquent des père et mère; enfin,
par lettres du prince. Ces deux derniers moyens furent
en usage dans notre ancienne législation ; les b&tards lé-
gitimés avaient le droit de porter le nom et les armes de
leur père, mais devaient mettre dans leurs armes une
barre qui les distinguait des enfants légitimes. Notre lé-
gislation actuelle n^uimet plus crue la légitimation par
mariage subséquent. Pour que des époux dont l'union
anndt été stérile ne puissent se créer une postérité légi-
time par consentement mutuel , et aussi pour empêcher
qja» 1 un d'eux n'amène l'autre à reconnaître un enfant
gui lui serait étranger, il faut que l'enfant soit légale-
ment reconnu avant le mariage, ou tout au moins dans
l'acte môme de célébration. La légitimation peut avoir
lieu même en faveur des enfants décédés qui ont laissé
des descendants, et alors elle profite à ces derniers. Les
droits acquis par l'enfant légitimé ne datent (jue de
l'époque de la légitimation; il ne peut, au préjudice des
tiers, élever de prétention à des droits qui auraient pris
naissance antérieurement. La lé^timation, assimilée en
cela à la survenance d'un enfant, a pour effet d'annuler
toute donation entre-vifs. La loi n'accorde pas aux en-
fants incestueux et adultérins le bénéfice de la légitima-
tion. — Il a paru en France que la légitimation par ma-
riage subséouent était propre à favoriser le repentir et le
retour aux iwnnes mœurs. En Angleterre, au contraire,
où on la Juge Immorale et favoranle à la licence, elle
n'existe en aucun cas.
LÉGITIME, portion d'hérédité ({ue notre ancien Droit
assurait aux héritiers du sang, indépendamment de la
volonté du défunt. La légitime se nomme aujourd'hui
Résen>e légale (V. ce mot).
LÉGimiB (Enfant). V. Enfant et LéciTmrrÉ.
LÉGirniE DéFENse. V. Défense (Légitime).
LÉGITIMITÉ, état de l'enfant conçu dans le mariage.
Aux termes du Code Napoléon (art. 312 et sulv.)* Tea-
fant né après le 180* tour du mariage, ou moins de
300 jours après la dissolution du mariage, est réputé lé-
gitime. La légitimité ne résulte que aun mariage va-
lable: si le mariage est nul, les enfants qui en naissent
sont naturels, mais il produit néanmoins a leur égard ses
effets civils, s'il a été contracté de bonne foi, ne fût-ce
que par l'un des époux. Qu'un homme mort civilement
se marie avec une femme qui l'ignore, les enfants nés de
ce mariage seront légitimes. La légitimité peut être
prouvée de trois manières ( V. Filiation). Bien que le
mariage opère une présomption légale de légitimité, cette
présomption peut être détruite en certains cas par le
désaioeu de paternité (V. ce mot),
utormiiTé, en termes de Politique, caractère de tout
pouvoir institué conformément au Droit constitutionnel,
que ce pouvoir découle de l'hérédité ou de l'élection. En
France, le mot légitimité, avec un sens plus restreint,
et dans le langage des partis, signifie le droit d'hérédité
par ordre de primogéniture, spécialement dans la famille
des Bourbons, et Ton donne le nom de légitimistes aux
partisans de la légitimité ainsi entendue.
LEGS, toute disposition de biens faite par testament
On nomme légataire la personne au profit de laquelle un
legs a été fait. Le mot vient de lex (loi), parce (jue la
volonté dernière du testateur est comme une loi qu'il
impose, ou de legare (lier), parce <)ue cette volonté en-
chaîne ceux qui survivent. On distingue trois sortes de
legs. Le legs universel est la disposition testamentaire
par laquelle le testateur donne k une personne, ou i
plusieurs conjointement, l'universalité des biens qu'il
laissera à son décès. S'il y a des héritiers réservataires,
c.-4-d. au profit desquels la loi rend indisponible une
quote-part des biens laissés, ces héritiers seuls sont
saisis de plein droit de la totalité de la succession, et le
légataire universel est tenu de leur demander la déli'
vrance des biens légués (Code Napol.^ art. 013, 915,
1004). S'il n'y a pas d'héritiers à réserve, le légataire est
saisi de droit, par la mort môme du testateur ; toutefois,
s'il est institué par un testament olographe ou mystique
(V. Testament), il doit se faire envojrer en possession
par une ordonnance du président du tribunal civil [Code
Napol.y art. 1007-1008). Le légataire universel, s'il y a
un ou plusieurs héritiers à réserve, est tenu, personnel-
lement pour sa part, et hypothécairement pour le tout,
des dettes et charges de la succession ; à défaut d'héri-
tiers réservataires , les dettes et charges lui deviennent,
{»ar le fait de l'acceptation , propres et personnelles. Le
égataire universel est tenu d'acquitter les leei particu-
liers ; si les legs dépassaient la ouotité disponinle, on les
réduit au marc le franc. — Le legs à titre universel est
celui par lequel le testateur lègue une quote-part des
biens doqt la loi lui permet de disposer, telle qu'une
moitié, un tiers, ou tous ses immeubles, ou tout son mo-
bilier, ou une quotité fixe de tous ses immeubles ou de
tout son mobilier. Jamais le légataire à ce titre n'est saisi
de droit de la propriété de la chose léguée ; il faut tou-
jours qu'il en demande la délivrance aux héritiers. Il est
tenu des dettes et charges de la succession, personnelle-
ment pour sa part, et hypothécairement pour le tout; il
doit aussi acquitter les legs particuliers par contributioD
avec les héritiers naturels [art 1010-1013). — Toute
disposition testamentaire qui n'est ni de Tuniversalité
des biens ou de la portion disponible de ces biens, ni
d*une quote-part de ces biens ou de la portion dispo-
nible, est un legs particulier^ Le lé^taire à titre parti-
culier est obligé de demander la délivrance de son legst
il n'est pas tenu des dettes de la succession. Si la chose
léguée est grevée d*un usufruit ou hypothéquée, 'béri-
LEO
115»
LET
tf« «*«Bi ipas teou de la dégager. ^ fjc legs eA caduc ^ù
planeur» ca» (F. Cadcc).
LEKH1QUE (Langue). V. Polonaise
IaMUE (da greclAiima, proposition admise), proposi-
tioa préliminairo que l'on établit pour servir à la dé-
momtralioii d'un antre proposition.
1£MNISQITB. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographe et d^Bistoirt.
LËMOSINE (Langue). V. LnocsiNE.
LEMNl-LENAPB adiome). V. Dblawakb.
I£N1T]IVLU^ jeu de cartes, le même que la Mouche
(F. ce mot),
LÉON (Cathédrale de)> magnifique église de style ogi-
val, la plus belle qui existe en Espagne. Suivant un vieux
dicton, la cathédrale de Séville est grande, celle de To-
lède est riche, celle de Santiago e^t solide, mais celle de
tAom les surpasse. B&tie au xm* siècle, elle est digne de sa
célébrité par la légèreté et la hardiesse de sa structure.
Le gnnd portail, tourné vers TOccident, offre cinq arcs
en ogive, dont trois donnent entrée dans les nefs de
régiise : les piliers de ces arcs forment un portique sur-
EDMité d*un balcon tout à Jour, que dominent deux tou-
reUea hexagonales. On compte plus de 40 statues, un peu
pins grandes que nature, autour des piliers et entre les
portes. Des deux c6tés du portail s*élancent deux tours,
belles aans doute, mais moins aériennes et moins déli-
cates que celles de Burgos, moins sévères et moins ma-
jestueuses que celles de Palma. Tout Textérieur du mo-
nument pràente une étonnante profusion de statues et
de scalptnres. L'admiration redouble quand on pénètre
à rintérieur : les piliers qui supportent les arcs des
vofttes sont d'une finesse extrême; les murs du contour,
qu*aneiine chapelle ne couvre, ont été tellement fouillés
par les sculpteurs, qu'en quelques endroits ils n'ont pas
plus de 30 centimètres d'épaisseur, et l'on a peine à com-
prendre qu'ils puissent se soutenir; une galerie cpii fait
le toor du vaisseau est du plus merveilleux travail; des
coupes de cpiatre statues séparent les fenêtres, et celles-
ci, finement découpées, sont garnies de vitraux de cou-
leurs; dMmmenses rosaces se développent à l'entrée de la
grande nef et aux extrémités du transept. Les collatéraux
OB Tafaside ont des chapelles fermées par de belles grilles
en fer, et quelques-unes possèdent de précieux rétables.
Le chœur, séparé de la nef par un mur orné de figures
en demi-relief peintes et dorées, est entouré de stalles
sculptées en bois, et renferme les orgues, ainsi qu*une
tribune haute pour les musiciens et les chanteurs ; son
pourtour et celui du sanctuaire sont clos par une. grille
en fer rehaussée d'ornements en bronze. L*une des cha-
pelles donne accès dans un cloître carré, qui a sur chaque
côté six arcs gothiques, décorés avec moins de goût que
la cathédrale elle-même.
LÉONIN (Cîontrat), contrat dans lequel une des parties
s'est fait la part du lion, par exemple, quand elle s'est
mise à l'abri de toute perte en stipulant une part dans
les bénéfices, ou quand les chances de perte ne sont pas
en rapport direct avec les chances de bénéfice. La loi
condamne ce genre de contrat {Code Na/poU, art. 1855).
LÉONINS (Vers), vers latins qui offrent une même
consonnanoe à l'hémistiche et à la fin ; tel est celui-ci de
Vîi^le {Georg, I, 497) -
Grandiaqne effosatt mlrtbltar osas Mpnlerit,
« n contemplera avec effroi, dans les tombeaux entr'ou-
verts, la grandeur des ossements. »
Des curieux ont eu la patience puérile et stérile de
rechercher combien il y a de vers léonins dans les
12,900 vers que contiennent les œuvres do prince des
poètes latins, et ils en ont trouvé 924. Cela ne prouve pas
que les portes de la bonne latinité aient recherché comme
un ornement ce penre de consonnances qui est une véri-
table rime. Le fait s'explique par l'habitude où étaient les
Latins de placer après la césure du 3* pied un mot qui se
rap|K>rtait grammaticalement au mot terminant le vers. —
Ce 'fui n'était qu'un accident dans la versification antique
détint une règle au moyen ftge, surtout pour la composi-
tion des proses et des hymnes de l'Église. La qualification
f^tiuveau Testament, conservée en manuscrit à la Biblio-
thèque impériale de Paris, et dont tous les vers riment
à chaque hémistiche. Hildebert, évêoue du Mans, a laissé
ao grand nombre de pièces en vers ae cette espèce.
On a quelquefois donné le nom de vers, léonins à ceux
qui sont entremêlés de firançais et de Isitint tel est lé'
couplet suivant du chansonnier Panard :
Bacelios, oher Qr^ire,
A^o6i« imperai * ;
Chantons tous as gloire.
Et quitque bibat K
Hfttona-noua de fairo
Qvod detidtrat * ;
Il aime an bon frère
Qui sape bibat *,
1. Noua commande. — t. Et que chaenn boive. — s. Ce qu'il
dësire. — 4. Qai boive aonveot.
LEOPOLDINO, monnaie d'areent de Toscane, valant
2 florins (2 fr. 80 c). Le leopolaone a une valeur double.
LEPSIS, terme de la musique grecque. V, Anabase.
LEPTON, monnaie des anciens Grecs, le 7* du chalcus
( V. cê mot). Chez les Grecs modernes, le lepton est une
monnaie de cuivre, valant à peu près un centime.
LESCHÉ. ) V, ces mots dans notre Diction^
LÈSE-MAJESTÉ. ] naire de Biographie et d'Histoire.
LESGHIZE (Langue), une des langues caucasiennes
( y. ce mot)^ parlée dans le Daghestan avec des dialectes
tellement <tissemblables, qu'il faut la plus grande atten-
tion pour distinguer les ressemblances qui les rappro*
chent. Les principaux de ces dialectes sont Vaware et
Vakuscha.
LÉSION , en termes de Droit , dommage souffert par
suite d'une convention, et qui autorise à demander la
rescision (F. ce mot). Ce dommage doit être d'une telle
importance relativement à la valeur totale, qu'il soit éri-
dent que la partie lésée a été rictime d'une fraude.
LEST (de l'allemand last, charge), réunion de tous
les poids embarqués à bord d'un narire en sus dé son
chargement , pour le maintenir sur l'eau dans la position
la plus favorable h sa marche et à la sécurité de la navi-
zation. Il y a le lest dormant, placé à fond de cale, et le
Test volant^ qu'on transfère au besoin. La marine militaira
n'emploie guère pour lest oue des gueuses en fonde de
fer; dans les bâtiments marcnands, le lest se compose dé
pierres, de briques, de sable, etc. Dans le commerce, no-
viguer sur lest, c'est navieuer sans cargaison. Le lestage
est l'action de lester ; le délestage est l'opération Contraire.
Il est défendu de jeter le lest dans les ports, bnsins èl
rades, sous i>eine de 500 fr. d'amende pour la prenrière
fois, et de saisie du b&timent pour les récidives.
LETTIQUES (Langues), branche des langues slaveè-
(V, ce mot), formée du borussien ou vieuar prussien^ du
lUlntanien et dvL letton {V. ces mots).
LETTON ou LIVONIEN (Idiome), idiome slave de to
branche, lettique, appelé aussi UUvège et letwa» On le
parle dans la portion de la Livonie désignée quelquefoh^
sous le nom de Letland ou Lettonie, et dans l'ancienne
Semigalle (Courlande). La moitié de ses racines est
slave; l'autre moitié peut être attribuée par portions à
peu près égales au gothique, à l'allemand et au finnois :
quelques mots russes s'y sont également introduits. Ce
mélange d'éléments étrangers le rend moins original <fue
le lithuanien ( K. ce mot), mais donne à sa constructioa>
plus de variété, à sa syntaxe une flexibilité plus grande.
Les deux idiomes ont, en général, les mêmes traita
grammaticaux. Le letton est au lithuanien comme l'ita-
lien est au latin : il possède, par exemple, l'article, qui
est étranger au lithuanien. Il n'a que deux genres. Les*
cas de la déclinaison sont au nombre de dx. La pronon«
ciation est hérissée de sifflantes. Le letton s'écrit avec
l'alphabet allemand, dont il a même adopté l'A pour mar*
quer la longueur de la voyelle précédente. Certains sons
particuliers s'expriment par des signes diacritiques, ijou-»
tés aux lettres allemandes. L'orthographe a une bizarrerie
qui rend difficile l'étude de la langue.
Le Letton a été d'assez bonne heure une langue litt^
raire. Ses plus anciens monuments écrits sont des doca«
ments officiels qui remontent au xiû* siècle. Vers 1630,
Ramm traduisit les Psa/umes en letton. Un siècle après,
Einhom composa en latin une HisUnre des Let$es* Manael
fixa l'orthographe et les règles de la langue lettone par
sa traduction des EpUres^ par ses Cantiques, et par la
composition d'nn Vocabulaire. La Bible entière parut en-
1G89, traduite par Fischer et GlOck. Au lYUi" sièele^
Graven composa d'excellents Cantiques. Mais le plus nand*
écrivain letton est Stender, à qui l'on doit des Récits
épiqtiee, des Fables, des Chants nationaux, une Gram^
maire lettone {Brunswick, 1761), et un Dietionmawe
letton^Ulemand (Mittau, 1789). Après lui on doit citer
Baumbach , poète lyrique } Stobbe, rédacteur d'un Jour-
LET
1160
LET
iil Utléraire ott flê troavent réunies les poedes cootem-
Ï moraines; Elverfeld, auteur de gracieuses pastorales;
ndrick, chansonnier populaire ; Bâ^;mann, émteur d*ou-
rra^ d'instruction ; Rosenberger, auteur d'une Gram-
maire Uttone, 1830 ; et Zlmmermann, qui a écrit une
Histoire littéraire.
LETTRE, nom donné aoi signes ou caractères inven-
tés pour figurer par l'écriture les émissions de la parole,
et dont se composent les alphabets (F. Alphabr, Écri-
tobb). Les lettres se divisent en deux classes, les voyelles
et les coMotifiM ( F. ces mots). Certaines combinaisons
de voyelles forment des diphthongues ( V. ce mot). Les
lettres servent à former des syllabes, les syllabes des
mots, et les mots des phrases. Avant Finvention des
chiinrés arabes^ on emplova les lettres pour marquer les
nombres : dans ce cas, elfes sont dites lettres numérales,
LBTTSB f La) et TEspRiT. V, Esprit.
Lcme (Avant la). V, Épreovb.
LETTRB ou LBTTRB MISSIVE, écrit destiué à être envoyé
à une personne absente, ou publié sous la forme épisto-
laire sans être adressé à un correspondant réel. V. Épi-
STOLAiBB (Genre). — L'administration des Postes trans-
porte les lettres des particuliers moyennant l'acquittement
d'une taxe ( V. Taxe). Les lettres chargées, c-à-d. dont
l'expéditeur fait constater le dépôt dans un bureau de
poste, par un reçu qu'on lui donne, doivent toujours être
affranchies, et payent une surtaxe de 20 centimes : une in-
demnité de 50 fr. est accordée pour la perte de toute lettre
chargée, mais dont la valeur n'a pas été déclarée au mo-
ment de l'afnranchissement. Dans le cas de déclaration,
la quotité de la somme incluse dans la lettre doit être écrite
d'avance, par l'expéditeur lui-même, sur l'adresse, sans
rature ni surcharge; alors l'administration est responsable
de l'intégralité de la somme, si la lettre est perdue, sans
cas de force majeure. Une lettre ne peut contenir plus de
2,000 fr. ; l'administration ne répond que de cette somme
pour une seule lettre. Il est interdit aux messagers, voitu-
rlers, conducteurs de diligence, et à tout voyageur de por-
ter des lettres, soit à découvert, soit dans aes paquets ou
ballots fermés, sous peine d'une amende de 150 à 300 tr. :
on excepte les lettres qu'un particulier adresse à un autre
par son domestique ou par un exprès. On ne doit insérer
dans les lettres conilées à la poste ni effets au porteur,
ni espèces monnayées, ni matières d'or ou d'argent, ni
autres objets prédieux : l'administration ne répond pas
de la perte de ces objets. Pour retirer une lettre Jetée
dans une boite de bureau, il faut signer une déclaration
qu'on est l'auteur de cette lettre, garantir la responsa^
bilité des effets de sa suppression ou de son retard, être
connu du directeur, ou se présenter accompagné de deux
témoins domiciliés et connus; la lettre est ouverte en
leur présence pour constater l'identité de la signature do
la lettre et de celle du réclamant. Pour pouvoir retirer
une lettre adressée poste restante, il faut Justifier de son
Identité, soit^par la production d'un passe-port ou d'autres
lettres adressées au même destinataire, soit par des té-
moins connus et domiciliés. Il est IntOTdit aux employés
des* postes de chercher à pénétrer le contenu des lettres,
et même de chercher à connaître et de divulguer que tel
exnédie ou reçoit des lettres (Lois des 10, 14 et 26 août
1790). Toute suppression, toute ouverture de lettres,
commise ou facilitée par un fonctionnaire, est punie
d'une amende de 16 fr. à 300 fr., et de l'interdiction de
toute fonction ou emploi public pendant 5 ans au moins
et 10 ans au plus. X'employé des postes qui a supprimé
ou soustrait une lettre, pour s'emparer des valeurs qu'elle
contenait, subit la peine des travaux forcés à temps; s'il
n'est pas constaté que la lettre renfermait des valeurs, il
encourt la peine de la reclusion {Code pénal, art. 173,
187, 386^. Les lettres adressées à un né^iant constitué
en état de faillite sont remises aux agents ou aux syndics
constitués par le tribunal pour gérer la faillite; celles
adressées à des individus en état de prévention ou d'ac-
cusation peuvent être saisies en vertu d'une réquisition
dn procureur impérial. Les lettres adressées à une per •
senne décédée sont portées au domicile désigné, aussi
longtemps qu'elles y sont reçues, à moins que le directeur
je la poste n'ait été autorisé par un acte légal à les re-
mettre ioit à un exécuteur testamentaire, soit à un tu-
leor, soit à un héritier ou h toute autre personne. Les
lettres refusées, ou dont les adresses sont erronées ou
illisibles, sont renvoyées à l'administration, qui les re-
toome à leurs auteurs, ou qui, faute de renseignements
suffisants, les laisse au bureau des rebuts, puis les détruit
après un temps déterminé. — En Droit, les lettres mis-
nvet, écrites et signées par ceux dont elles émanent,
forment des actes aeos seing privé ma peuvent établir
des conventions, des engagements, des oécharges. Mais
on ne pourrait produire comme preuve d'une convention
une lettre qu'une des parties aurait adressée à un tien;
de plus, une lettre ne peut être produite en Justice sans
le consentement de la personne qui l'a reçue, et elle ne
doit Jamais l'être si elle avait un caractère confidentiel,
indiqué dans la suscription ou l'adresse. Avant d'être pro-
duites en Justice, les lettres missives doivent être visées
pour timbre, sous peine de 5 fr. d'amende : elles payent
un droit fixe de 2 fr. si elles ne contiennent ni obuga-
tion, ni quittance, ni convention; celles-là seules sont
soumises au droit proportionnel, qui servent de titre an
cr^cier pour l'obligation, ou au débiteur pour sa libé-
ration.
LBTTBB (COIITBE-). V, GONTBB-LBTTBB.
LETTBB CLOSB, lettre du chef de l'État, scellée de son
sceau.
LETTBE DB CACHET, nom doutté, avant la Révolutîon, à
une lettre signée du Roi de France, scellée de son soeaa
privé, et adressée à une autorité pour lui signifier la vo-
lonté de S. M. C'était pour convoquer à quelque grande
assemblée, pour commander une cérémonie publique,
telle qu'un te Deum, par exemple ; mais le plus souvent,
c'était un ordre arbitraire et personnel contre la liberté
d'une pœsonne, ordre d'exil ou d'incarcération. Cest dans
ce dernier sens que les lettres de cachet sont surtout
célèbres. Sous Louis XIV, la Régence, et Louis XV, on en
fit abus pour envoyer dans les prisons d'État des gens de
toute condition, qui n'avaient d'autre tort que d'avoir dé-
fdu à la Cour, aux ministres, ou à leurs protégé. La
ettre de cachet était imprimée : il n'y avait à remplir
que les noms du prétendu criminel d'État, celui du Ahr
teau fort où il fallait l'incarcérer, et la date du Jour. La
lettre était signée d'avance (du moins sous Louis XV)
par une griffe de la signature du Roi, confiée à un estam-
pilleur chargé de cet office. Il existe à la bibliothèque
impériale de S*-Pétersbourg, au département des manu-
scrits, beaucoup d'exemplaires authentiques de ces impri-
més; void leur libellé uniforme :
« Mons , Je vous fais cette lettre pour vous dire de
« recevoir IL., dans mon ch&tean de •••..•., et de l'y r^
« tenir Jusqu'à nouvel ordre de ma part.
« Sur ce. Je prie Dieu qu'il vous ait, Mons , en sa
« sainte garde.
« Écrit à. LoDis. v
Pour peu que l'on eût de crédit auprès des ministres
ou du lieutenant-général de police, on obtenait aisément
de ces imprimés, dont ils avaient provision. Les châteaux
de S. M. étaient la Bastille et Vincennes, et, quand ils
étaient encombrés, Belle-Isle et Charenton.
La lettre était envoyée à un huissier, qui se mettait en
quête de la victime, venait l'arrêter à son domicile, et la
conduisait au lieu désigné. Sur le vu de ce passe-port
banal d'incarcération , le gouverneur recevait le prison-
nier qu'on lui amenait, et le gardait Jusqu'à noutwiordrs.
Le nouvel ordre était ausâ une lettre de cadiet, avec
un court, nuiis très-grave changement dans la rédaction.
En voici un spécimen provenant de la même source que
plus haut :
« Mons , Je vous fais cette lettre pour vous dire de
« mettre en liberté M que vous détenei par mes
« ordres, dans mon ch&teau de
« Sur ce. Je prie Dieu qu'il vous ait, Mons , en sa
a sainte garde.
« Écrit à.
a LODES. »
Vers la fin du règne de Louis XV, les prisons d'Étal
regorgeaient de victimes des lettres de cacnet; des mal-
heureux y languissaient depuis de longues années, pour
des causes où il n'y avait de grave que la haine ou la
dureté des gens puissants qui les y maintenaient; mais,
hors ces cas exceptionnels, la détention ordinaire variait
de 8 à 15 Jours. Sous Louis XVI, en 1788, les prisons
étaient presque vides.
Les autorités et les grands seigneurs puissants fUsalent
détenir les prisonniers aux ferais du Rot, comme oo disait,
c.-à-d. de l'État; mais la lettre de cachet était si bien
passée en habitude, ou'on en donnait aussi aux chefs de
familles qui en sollicitaient , contre leurs enfants, leon
femmes, leurs descendants : dans ce cas, ils payaient
l'entretien des prisonniers. Cette lettre de cachet privés
était ainsi conçue s
LET
1161
LÊT
■ De IMT le Roi, il est ordonné à. . • . • . d'arrêter et de
c eonduire à . • • • • • le nommé aux dépends
« de (son pèrot son grand-père ou sa grand*
mère, etc.)
« Fait à Versailles , le »
Vwa citer an exemple, entre mille, de cette tyrannie
domesdqae, nous rappellerons qae le marquis de Mira-
beaa, qai s'appelait lui-même Vomi des hommes, le père
du gmnd orateur de la Révolution, avait sollicité et obtenu
54 lettres de cachet, tant contre son fils que contre sa
femme! Il en fit, plusieurs fois, un moyen de se débarras-
ser de procès en réclamations de biens qu'il eut à soute-
nir contre eux. Le» lettres de cachet tombèrent avec la
Bastille, le 14 juillet 1789. C. D —y.
LBTTBV DB CHAiiGs. Lo contrst de change (V. Change)
consiste à livrer dans un lieu une valeur fournie dans ud
antre lieu. La lettre de change constate ce contrat. Elle
ressemble sous certains rapports au mandat; mais elle
doit être accepta (te refus d'acceptation est constaté par
un acte qu'on nomme Protêt faute d^acceptation), et
entraîne des conséquences plus graves en cas de non-
payement. La lettre de change, dit le Code de Com-
merce (art. 110), doit être tirée d'un lieu à un autre.
Elle est datée. Eue énonce : 1® la somme à payer; 2<* le
nom de celui qui doit payer ; 3* l'époque et le lieu où le
payement doit être effectué ; 4<» la valeur fournie en es-
pèces, en marchandises, en compte ou de toute autre ma-
nière. Elle est à l'ordre d*un tiers ou h l'ordre du tireur
hn-même, suivant le libellé ci-dessous :
Paris, et l«r vnan 1802. B. P. P. 1000.
A qaannte Joins de date, payes par cette
première de change, à l'ordre do M. Paul, la
eomme de millb francs, valeur reçue en esçècea
que TOUS passerez sana antre avis ( ou suivant
avis du 1868).
U. Jacquss, Pibrrb.
Négociant i Besancon.
Quand on fait plusieurs exemplaires d'une même lettre
de change, dans la crainte que l'un d'eux ne soit perdu
dans le voyage, on le mentionne, en disant :
a A quarante Jours de date, payez par cette deuxième
de change, la première ne Tétant pas (ou la 2*, ou la
3*, etc.) « à l'ordre de »
On appelle tireur celui oui tire la lettre de change,
c'est id Pierre; et tiré^ celui sur qui on la tire, c'est ici
Jacques. Quand le tiré a une fois pris l'engagement, tou-
jours nécessaire pour la validité du titre, de payer la
lettre, il devient accepteur. Le bénéficiaire est celui qui
la reçoit ; le premier bénéficiaire est toujours celui à l'oi^
dre de <rai elle est tirée, c'est ici Paul. Le porteur est
celui qui l'a en sa possession au moment de l'échéance.
n Caot avoir le soin de mettre en tète, d'un côté, la date
et le lieu auxquels la lettre est tirée, de l'autre B. P. F.,
c-à-d. Bon pour francs, et, à la suite, la somme en
chiffres. Dans le corps du billet, la somme doit être écrite
en toutes lettres et en gros carsctères. Si la somme était
payable en livres sterling, on mettrait en tète : B. P. L. st.;
car une lettre de change doit toujours désigner la mon-
naie dans laquelle elle doit être payée. On peut exprimer
f époque de l'échéance en jours ou en mois. Au lieu de
par cette première, ou seconde, ou troisième de change,
on peut mettre : par cette seule de change, ou par cette
lettre de change, si on ne fait qu'un seul exemplaire. On
désigne toujours la nature de la valeur fournie : valeur
en espèces ou valeur comptant signifie que le tiré a reçu
de rargent; valeur en fournitures ou valeur en mar-
duÊHdîses, qu'il a reçu des marchandises; valeur en
compte, qu'il y a un compte-courant entre le tireur et le
tiré. Que vous passerez veut dire : « Que vous passerez
sur T3S livres au débit de mon compte. » On peut tirer
une lettre de change sur un débiteur sans le prévenir,
surtout quand on a de fréquentes relations avec lui et
£'oo est dans l'usage d'agir ainsi ; c'est dans ce cas qu'on
ît : ums autre ams. JÙtais il est bien plus sage oie le
jfféveolr, puisque la lettre de change suppose acceptation
dfe la part du tiré; dans ce cas on écrit : suivant avis
Al...., arec la date du Jour où on l'a fait prévenir par
Boe lettre d'ntris. Au-dessous du nom du tiré, il ne faut
qui sera porteur de la lettre au moment de Téchéance en
quel lien il devra être pavé. Pour qu'une lettre de change
soit valable, il faut qu'elle ait été réellement tirée d'un
lieu sur un autre, et que le tiré soit bien commerçant.
La loi s'est montrée tres-sévère à cet égard. « Sont rou-
tées simples promesses toutes lettres de change contenant
supposition soit de nom, soit de qualité, soit de domicile,
soit des lieux où elles sont tirées ou dans lesquels elles
sont payables (art. 112 du Code de Commerce). » Cette
sévénté a pour but d'empêcher les simples créances or-
dinaires de particuliers de revêtir la forme du contrat de
change, entraînant après lui la poursuite devant les tri*
bunaux de commerce et la contrainte par corps. Cepen-
dant il arrive tous les Jours que la loi est violée malgré
ces précautions. La lettre de change peut se transporter
par voie d'endossement ( V, ce mot), La loi a fixé les ter-
mes d'échéance suivants : la lettre à vue est payable à sa
{>résentation ; la lettre après délai, à l'échéance fixée par
a date de Tacceptation ; la lettre à usance est de 30 Jours;
la lettre payable en foire est échue la veille du Jour de la
clôture de la foire. V, Schiebé, Traité théorique et pratique
des lettres de change, 1819, in-8<> ; Fœlix, Des Lettres de
change et billets d^ Angleterre, 1835, in-S^; Persil, Traité
de la lettre de change, 1837, in-8« ; Pardessus, Traité du
contrat et des lettres de change, 1800, 2 vol. in-8^; Vèche,
Traité de la lettre de change^ 1846, in-8* ; Nouguier, Des
lettres de change et des effets de commerce en général ,
2* édit., 1851, 2 vol. in-8«. — V, aussi Lbttrb de change,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d^Histoire, L.
LETTRE DE CSéANCE. V, CRéANCB.
LETTRE DE CRéOlT. V, CséofT.
LETTRE DE GAGE, uom douné sux tltros de crédit ou
obligations qu'une Société de crédit foncier émet, et qui
ont pour garantie le fonds social et l'ensemble des pro-
priétés sur lesquelles la Société a hypothèque. Les lettres
de gage sont nominatives ou au porteur, et portent inté-
rêt. 11 est procédé chaque année à leur remboursement
au prorata des sommes affectées à l'amortissement des
emprunts.
LETTRE DE MARQDE, sutorisation dounéo par un État &
ses nationaux, et pour un temps déterminé, d'armer des
b&timents en guerre, et de fure la course sur les vais-
seaux ennemis {V, Course). On fait dériver l'expression
de l'ancien mot mark (frontière), parce que c'est comme
une autorisation de franchir les frontières du pays avec
lequel on est en gi^erre. En France, les lettres de marque
étaient délivrées par le ministre de la marine ; dans les
colonies, par les gouverneurs (V. la Ix>i des 31 Janvier-
1*'' février 1793, et l'arrêté du 2 prairial an xi, — 22 mai
1803).
LETTRE DE MBB, OU tcrmos de Marine, est synonyme de
congé (V. ce mot),
LETTRE DE NATURAUSATION. V, NATCRAUSATION.
LETTRE DE RAPPEL, notificatiou adressés à un ambassa*
deur pour mettre fin à sa mission et le rappeler dans son
pays.
LETTRE DE RECséANCB, lettre qu'uu souvendu envoie à
son ambassadeur pour la présenter au prince d'auprès
duquel il le rappelle. On donne le même nom à la lettre
3u'un prince remet à un ambassadeur qui prend congé
e lui pour le prince qui a notifié le rappel.
LETTRE DE RELIEP. Y, DéROGEANCE.
LETTRE DE SERVICE, lettre ministérielle par laquelle un
officier en disponibilité est appelé h remplir les fonctions
de son grade.
LETTKB DE VOITURE, fouiUe ouverto, adresséc à toute per-
sonne à qui l'on envoie des marchandises par voitures
ou bateaux. Elle doit être datée, exprimer la nature et le
Soids ou la contenance des objets à transporter, le délai
ans lequel devra se faire le transport, les nom et domi-
cile du commissionnaiie par l'entremise duquel ce trans-
port s'opère s'il y en a un, le domicile du voiturier, le
nom du destinataire, le prix du transport , et l'indemnité
due pour cause de retara. Elle est assujettie à un timbre
fixe de 35 centimes, et signée par l'expéditeur ou le com-
missionnaire. Le commissionnaire est tenu d'en avoir U
copie sur un registre coté et paraphé sans intervalles.
LETTRE DOMINICALE, è V. CM mots dsDS notro Dictioi^
LETTRE PASTORALE. > natfs de Biogr. et SHistoire,
LETTRES, mot qu'on emploie souvent pour désigner
l'ensemble des connaissances qui concourent à l'ornement
de l'esprit. On appelle spécialement Belles- Lettres la
grammaire, l'éloauence et la poésie, ce gue les Romains
désignaient sous le beau nom de humantores litterœ, \e$
lettres les plus humaines.
LETTRES (Fruités dcs), corps de professeurs chargés
LE¥
1162
LIA
de l'ttiiMigiMiiieiit SQpârieor des Lettres dans rUniTenité
de France. On en compte 16, siégeant à Aix, Besancon,
Bordeaux, Gaen, aermont^Ferrand, DHon, Douai, Gre-
noble, Lyon, Montpellier, Nancy, Paris, Poitiers. Rennes,
Strasboorg et Toaiouse. Les FM^ultés ont des chaires de
littérature ancienne, de littérature française, de littéra-
ture étrangère, de philosophie, et d'histoire. A la Faculté
de Paris, ces divers enseignements sont morcelés : ainsi,
il T a des chtthiBs pour la littérature grecque, Téloquence
latine, la poésie latine. Téloquenoe française, la poésie
fipsnçidse, la philosophie, Tbistoire de la philosophie,
Thistoire ancienne, Thistoire moderne, la géographie, etc.
Toutes les FactLltte confèrent les trois grades universi-
taires, baccalauréats licence et doctorat. Le traitement
des proressenrs se composa de deux éléments, Tun fixe
et Pautre éventuel : le traitement fixe fut de 7,500 fr.
à Paris, et de 5,000 fr. dans les départements. Le trai-
tement éventuel fut le droit de prMence aux examens :
ce droit fut de 7 fr.; un décret du 20 déc 1854 fixa,
à Pnri8« un maximum de prodoit éventuel, qui fut de
5,000 fr. pour les professeurs et le secrétaire, de
9,500 fr. pour les asrégés. (F. AeaisATioif.) Un arrêté
du 7 mars 1853 a réglé la distribution des matièrea de
chaque enseignement F. le SupplémeiU,
LgTTRBs (Hommes de). F. Gras db LEiraBS.
LETTRINE (diminutif de Uttre), nom que l'on donne,
en lyposraphie, 1* aux petites lettres placées an-dessus
ou à côté d*un mot pour renvoyer le lecteur h des notes
placées à la marge ou au bas de la page; î? aux minus-
cules placées au haut des pages ou des colonnes d*un dic-
tiennaire pour indiquer les initiales des mots qui s'y
trouvent.
LETTRISÊS (Vers), nom donné aux vers dont les
mots commencent par la même lettre, V» AixiriBATiON.
LEU D*ESSER£NT (Église de Saint-), dans le dépar-
tement de rOise, à 6 kilom. S.-O. de Greil. Cest un re-
marquable monument de la transition entre Tarchitec-
ture romane et l'architecture ogivale. Le portail consiste
en une grande arcade romane ornée de trois rangs de
zigzags et reposant sur de courtes colonnes à chapiteaux
rustiques. A droite, le clocher, haut de 50 met., présente
deux étages de légères arcades romanes, surmontés d'une
flèche octogone à écailles de poisson et dont chaque angle
est garni d'un clocheton élégant. Derrière le portail, un
porche, aussi large oue l'église, et profond de 6 met.,
supporte une vaste salle voûtée, reposant sur des piliers
à chapiteaux fantastiquement historiés, et éclairée par
des fenêtres romanes. L'église, longue de 71 met., large
de 21 met., haute de 27 met. sous voûte, est dépourvue
de transept , et se termine en hémicycle à l'orient. Les
In» côtés, qui tournent autour du chœur et du sanc-
tuaire, sont séparés de la nef par de larges arcades à
ogives surbaissées, portant sur 24 gros piliers romans à
chapiteaux ornés de feuillages. De minces colonnes, ados-
sées à une partie de ces piliers, s'élancent jusqu'à la
naissance des voûtes, tandis qu'aux autres les colon-
nettes s'élèvent seulement à partir des chapiteaux. Au-
dessus des arcades règne une galerie, qui s'ouvre sur
Féçlise par de petites ogives géminées très-simples, et
^ qui était éclairée extérieurement par de petites fenêtres
romanes, aujourd'hui bouchées, et alternant avec des ro-
saces. La galerie est surmontée de 42 larges et hautes
fenêtres à ogive. Le chœur et le sanctuaire ont presque
la même longueur que la nef. Sur chaque Imis côté, pa-
rallèlement au sanctuaire, s'élève une tour romane sans
flèche. L'abside est garnie de cinq chapelles.
LEVAGE, en termes de Construction, pose, sur un bâ-
timent, des différentes parties d'une charpente taillée au
chantier.
LEVÉ , en termes de Musique, se dit du temps de la
mesure où on lève la main ou le pied. Cest toujours un
temps faible.
LEVÉE, élévation de terre ou de maçonnerie en forme
de digue pour retenir les eaux d'un canal, d'une rivière,
ou pour servir de chemin à travers un marais. La plus
belle levée ouMI v ait en France est celle des bords de la
Loire, depuis Orléans Jusqu'à Nantes.
LEviB MiuTAisB. V, notTO Dictûmnatre d$ Biographie
et SHi$toir$,
LEVÉES (Pierres). V. Gbltxqubs (Monuments).
LEVER-DIEU, moment de la Messe où le prêtre élève
Pbostie consacrée.
LEVIER PNEUMATIQUE. Cet appardl, qu*on appelle
•nssl mécanisme BarkHr, du nom de son inventeur, est
^pliqué au mécanisme ordinahre des claviers de l'orgue,
et a pour objet de rendre rabaissement des touches aussi
facile que sur le piano, et de donner une légèreté psiftits
an toucher, même dans le cas où plusieurs claviers se
trouvent réunis sur un seul. Cet appareil se oomposs :
1* d'une série de petits soufflets, dont un pour chaque
touche du clavier principal ; 2» d'une série de soupapes ft
double effet attenantes anxdits souflleU, et destinées à
être mises en Jeu par l'action des touches; elles ont pour
objet de laissÎBr pénétrer de Pair comprimé dans les
soufflets, de manière à les gonfler lors de la dépression
des touches , et de les dégonfler quand ces dernières as
relèvent, afin d'établir une succession de mouvementi
identioues avec ceux des touches, et qui, transmis par le
mécanisme ordinaire Jusqu'aux soupapes propres de l'or-
gue, admettent le vent aux tuyaux sans qu'il y ait aucune
résistance sensible sous les doigts de l'organiste ; 3® d'une
série de pédales qui ont pour effet de porter l'action do
levier pneumatique sur tel ou tel clavier, de constituer
des accouplements de toute nature, soit à l'unisson, soit
à l'octave grave ou aiguô, d'augmenter ainsi presque îd-
déflniment la puissance et la variété des effets. Le ICTier
pneumatique, appliqué généralement aujourd'hui à toutes
les grandes orgues, est le jplus ingénieux et le plus utile
perfectionnement qu'on ait introduit dans la facture des
orgues. F. G.
LEVIÇAT. )
LÉVITES. ( F. ces mots dans notre Dtctionnotrt
LÊVITIQUE. ( de Biographie et d^ Histoire.
LEXIARQUES. ]
LEXICOGRAPHIE, ensemble des règles qui concernent
la composition des Lexiques , Vocabulaires ou Diction-
naires de mots d'une langue. Quelques grammairiens ont
donné le même nom à la partie de la grammaire qoi
traite des mots considérés isolément et en eux-mêmes,
sans tenir compte des reports qu'ils ont les uns avec
les autres, lesquels font l'objet de la SytUaœe. D'autres
disent Lexicologie, d'autres Lexigraphie, P.
LEXIQUE (du grec lexicon, livre de mots). Chez les
anciens Grecs, ce mot correspondait à ce que nous appelons
Dictioinnaire ou Vocabulaire, Les Lexiques n'étaient pas
chez eux des recueils simplement destinés à donner l'or-
thographe et l'accent de chaque mot de la langue, mais
des recueils tout à la fois orthographiques, philologiques,
littéraires, critiquée, interprétatifs, comme nous pouvons
en juger par les monuments, fort inconipiets d'ailleurs,
qui nous sont parvenus en ce genre. Quelques-uns de
ces Lexiques sont de véritables commentaires : par exem-
ple, celui d'Harpocration , qui contient le catalogue et
l'explication de tous les termes judiciaires , législatif,
administratifs, politiaues, employés par les dix orateurs
athéniens qui avaient laissé des ouvrages ; celui de Suidas,
à la fois biographique, historique, géographique et litté-
raire, et rempli de citations. VEtymologicum magnum,
VOnomcuticfin, etc., ne sont que des variétés de ce genre
de recueils. — La littérature latine a été beaucoup moins
riche en Lexiques que celle des Grecs. Il ne nous en est
parvenu aucun monument complet; le plus important qui
nous en reste est l'abrégé de seconde main du Diction-
naire de Verrius Flaccus. — Chez les Modernes, le mot
Lexique ne s'est guère appliqué qu'aux recueils de mots
des langues mortes. Tels sont les Isxica grafco-latina de
Craston (xv* siècle), de Constantin (xvi* siècle), de Sca-
pula et de Schrevelius (xvii* siècle), etc. Les Lexioues les
plhs importants datent du xvni* siècle ; ce sont : Lsxicon
totius IcUinitatis de Facciolati ; Lexicon technologie grm-
corum rhetoricœ^ et Lexicon technologiœ IcUinorum rhe-
torum, d'Emesti. On a sous le nom de l'abbé Prévost
(1755) un Manuel-Lexique pour la langue française, qui
n'offre rien de remarquable. En général, pour les langues
modernes, on se sert du terme Vocabuûitre ( K es mot).
Certains Lexiques relatifs aux langues anciennes portent
le nom de Thésaurus {V, es mot). Les Lexiques renfer-
mant les mots propres à certains dialectes ou patois, soit
du moyen âge, soit des temps modernes, s'appellent
Glossaires (V, ce mot). P.
LÉZARDÉ, fente qui se produit dans un mur à la suite
d'un tassement ou de ouelque rupture ou écrasement.
Lorsqu'un b&timent se lézarde, on doit l'inspecter et se
rendre compte de la marche de la détérioration par celle
des lézardes : pour cela on place, en travers des lézardes
et par-dessus, de petits tasseaux en plâtre, oui se fendent
au plus petit mouvement de l'édifice, et inoiquent sAre-
ment les progrès plus ou moins rapides du mal ; ou sim*
Clément on colle du papier dessus. £. L.
LIAISON, en termes de lecture et de débit, désigne
l'union qui se fait dans la prononciation entre une con-
sonne finale habitueUement muette et la voyelle Initiale
LIA
1163
LIB
ékmanmànai afin «TéTiter ua hiatus, poomi toutefois
qw les deux mots Toisins se lieot DatareUement entre
eux par la force da aena. S et ses analogues X et Z, T et
MD analogue D^ sont les consonnes qui se Uent le plus
Tolontien ajec le mot suivant. La liaison de s et «se fait
looJoQis avec le son de x :
Les rastot oppMtt d^B]l faliear d* oonquétat...
SI le del k ces mAns oralt borné ma peine...
F^niUetes d loUir toni lee eièdee peiêée.
D sonne comme T :
QuUe tftallen eeeret ma limite et um èhagitasl
Et tout ce granl èdat de leur gloire tende...
i^ réglé sur Teuphonie, supprime eertainea de ees
liaisons, par eseniple dans les mots chaud, froid, pM,
fond, 0OW, etc. On dit toutefois, arec la liaison : « De
pied fil cap, de fond «n comble. » D ou T final, précédé de
r, est toiigoura muet : dépar[t) imprévu; û sor{t) en
wwrant; le Mor{t) en est jeté; tl cour{t) à bride abeUtue;
idor{() à Vomare; un r$gar{d) effroyMe; un bor{d) es-
cuvé; Malherbe Mr(Q encore de modèle. Au pluriel, ces
mots font sonner leur « : « des bordi escarpés ; des efforts
indomptables. » Pour le mq( remords, qui s'écrit au sin-
gulier comme ao pluriel , «[uelques pcorsonnes prétendent
qali faut supprimer la liaison au singulier, et dire un
rmnorids) importun, mais la rétablir au pluriel et dire
•lore aes remor{é^ tmportuns. Cette règle nous parait
subtile; car, en raison surtout de Tétymologie (mTiornif),
I doit sonner dans Tun et Tautre cas, comme cela a lieu
pour le mot cotir« et ses dérivés concours, recours^ se»
contrs, etc., du moins dans le débit soutenu.
Dans les mots terminés en et, t est fort souvent muet,
particulièrement dans les mots respect, aspect, instinct;
la liaison avec le mot suivant se fait par le c : respec(t;
fotmain, aspec(t) affreux, in8tinc(t) impérieux, a II y a
incertitude et d^ccord pour les mots suspect, drcon-
sptct. Dans le mot abject, on fait sonner toujours le t. Il
faat avouer qu'à cet égard les règles ne sont ni sans con-
fusion ni sans bizarrerie. Aussi , dans le langage familier,
sopprime-t-on avec beaucoup de raison, même devant
les voyelles, la iHt>nonciation du c et du t, oue Tinstinct
populaire a toujours laissés muets. Au pluriel, liaison par
U seule.
Après les consonnes s,x, 2, t, d, la lettre qui est le
plus communément susceptible de liaison est r, mais seu-
lement aux iniinitifs :
Anenn traite pent-tl
Forcer nu chat k la reconnaIttaDce?
L*e qui précède a toujours en ce cas un son plutôt ou-
fot que fermé. Partout ailleurs la liaison ne peut avoir
lieo sans une bizarrerie inintelligible ou ridicule : ainsi,
on ne peut Jamais modifier la prononciation de la finale
de berger^ panier, diner, cuisinter, etc.
Je prendrai mon dîner dans le i>snl0r an pain.
Et ce beau cniaiDi«r ann< d'un grand eouteao.
Eo prose et dans le langage familier, Tinfinitif en er ne
laisse pas sonner r, dès qu^il y a une légère pause exigée
par le sens; mais, en vers, cette liaison est généralement
obligatoire, comme dans ce vers de La Fontaine, où elle
forme même une sorte d*onomatopée :
Et mon dwt de ciUr, et le rat d^aœourlr.
Les autres consonnes, telles que c, g, {, n, p, ne se lient
qa* accidentellement à la voyelle initiale du mot suivant.
C sonne dans les mots estomac, tabac, franc^ croc, etc, :
« mon estomac «st plein ; le tabac est divin ; courir à franc
Arier, donner un croc m Jambes, etc. » G se lie avec le
ion ic : « un rang ^evé; sangr artériel; long entretien ; ce
loD0 mnas d*^eux, etc. L se lie avec le son mouillé :
« gentil toiune, gentil enfant. » N n*est susceptible de
Uaison que dans la préposition en et dans Tadverbe de
même son ; dajis le nom indéfini on { sauf les inversions) ;
dans les adje<^fa mon, ton, son; et dans les a4|ectifs en
M, Ml, am {pmcien, plein , certotn, t;tlam , vam) ; dans
lÛiverbe bien , lorsan'il est proclitique (cela est oten ai-
naUe)^ ou lorsquMl forme locution avec les mots sui-
vants (il fallait 6m» et beau); enfin dans le nom indé-
fini rien, Maia aucune liaison ne saurait avoir Heu dans
les mots terminés en in, on, un; il n'y a d'exception que
«mr le mot un et son dérivé aucun. P se lie très-rare-
•wnt, comme dios les mots trop, coup : « on coup inat-
tendu (mais seulement en vers); il est trop ftonnète
homme. » L'adverbe beaucoup admet aussi la liaison, mais
non pas les locutions pour te coup, tout à coup, sur le
coup, après lesquelles l'usage a consacré l'hiatus. En
vers, pour ériter un hiatus désagréable , on ménase en ce ,
cas dans le dâ>it un léger intervalle, comme dans cet
vers de La Fontaine :
Dane nn champ — k Ttfcart — volt do blé répandu.
Seigneur lonp — étrangla le luindet aane remMe.
Les liaisons ne sont de rè^e que dans la lecture et dans
le débit soutenu , surtout en vers , lorsque la mesure et
rharmonie en font une loi impérieuse. Dans la conversa-
tion familière, il est de bon goût de supprimer toutes
celles qui ne peuvent pour ainsi dire passer inaperçues :
ainsi, généralement, on néglige de prononcer r de l'in-
finitif à la 1** conjugaison ^ s oui ou x, signes du plu*
riel; on dit plutot : « les Françai{s) ont été vainqueurs
que les Françai-g-ontété,.,, plutôt trois heure{s) et demie
que trois heure-z-et demie, qui a quelque chose d'affecté.
Gerteines liaisons se sont établies d'une manière tout à
fait arbitraire dans le langage familier, et cela depuis un
temps presque immémorial ; de là dans l'orthographe des
modifications que la raison et Tétymologie n'autorisent
guère. Tel est l'usage de faire entendre « à la 1** per-
sonne des verbes de la 2*, 3* et 4* conjugaison : je /Uiit-d
l'instant, je avis-en Dieu, jjattends-encore. Primitivement
on écrivait ie fini,jecroi, j*attend^ conformément à l'anaF*
logie du laàn /Inio, ored^, aUendo. De même, l'imparfait
n'avait paa s, mais e muet à la i** personne ; s ne parais-
sait an'à la H* personne, comme t à la troisième, ainsi
que oans la conjugaison latine. Ce n'est que dans la pro-
nonciation que cette s intei^calaire s*est fait entendre d'a-
bord ; mais, dès le xvi* siècle, elle s'introduit peu à peu
dans récriture, où elle est aujourd'hui consacrée. La même
observation s'applique aux mots certes^ jfisques, guères,
dont la double orthographe , encore autorisée , s'étendait
autrefois aux mots mêmes et m>ême , presques et presque,
ore et ores, encore et encores, aveci^ et avecques, oncque
et oncques, etc, Récipromiement, le t final, exigé par l'é-
tymolojgie, a disparu de la 3« pers. du sing. de l'indicatif
présent et passé défini, à la 1** conjugaison, et dans les
verbes U a, U va : il ne s'est maintenu que dans la tour»
nure inversive aime-4-il, tH^-^-il, a^t-tl, dansort^il? U a
également disparu au futur : U viendra à trois heures:
mais il reparaît dans le tour interrogatif viendr(»^t-U r
( V, Cum.) Sur les liaisons, on trouve des développemente
dans le chap. 2 de la Grammaire des Grammaires de
Girault-Duvivier, p. 33-78, de l'édition de M.-A. Le-
maire. P.
uAisoN , en termes de Construction , manière de dispo-
ser les pierres ou les briques par enchaînement les unes
aux antres, de sorte que les Joints verticaux se croisent^
et ne tombent pas, pour deux assises consécutives, les
uns sur les autres. La liaison est dite à sec, quand les
pierres sont posées sans mortier. Quand on se sert de
mortier ou de pl&tre détrempé pour Joindre les pierres
ou les briques entre elles, on fait une liaison de joint.
LIAISON, en Calligraphie, trait délié qui Joint une lettre
h une autre ou les parties d'une même lettre. — En Mu-
sique, trait recourbé qui Joint les notes liées, c.-à-d. des-
tinées à être exécutées du même coup d'archet, ou du
même souffle, ou du même coup de ^sier. C'est là ce qu'on
nomme liaison de chant. Il y a liaison d'harmonie^ lors-
qu'une note d'un accord demeure dans l'accord suivant,
par exemple dans les accords de la tonique et de la sous-
dominante, où le même son sert de quinte à Tune et
d'octeve à l'autre. Dans le plidn-chant, on nomme liaison
une suite de notes passées sur la même syllabe.
UARD. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Btogm-
phie et d^ Histoire»
UBAGES ( du latin libare, effleurer) , en termes d'Ar-
chitectnre, quardersde pierres dures qu'on emploie pree*
que brutes dans les fondations, où elles servent de plate-
forme pour asseoir la maçonnerie de pierres de taille ou
de moellons.
LIBATION. { F. ces mots dans notre Dictionnaire de
LIBELLA. ) Biographie et d'Histoire.
LIBELLE (du latin It6ellu< , petit livre). Ce mot n'em-
portait pas originairement une idée défavorable ; il avait,
dans la langue du Droit, le sens d'acte Judiciaire. Ainsi,
le libelle de divorce était l'acte par lequel un mari noti-
fiait à sa femme qu'il la répudiait ; le libelle de proda^
malien, l'action intentée en Justice pour obtenir la répa^
ration d'un dommage; le libelle Saceusation, l'acte dans
lequel un accusateur s'engageait à subir la peine portée
LI6
1104
L1B
pir la loi, s*il tuecombait dans nm accusation. Ai^our-
a*hui on Ai encore libdler an réquisitoire, une sentence.
Mais le mot liMle a pris depuis longtemps le sens d*écrit
diffamatoire, et la qualification de twdltste est doTeoue
méprisante pour un auteur. Une distinction, que l'on ne
lait pas to^|oorb, existe entre le libellé et le pamphlet :
le premier, dénonciation haineuse, souvent anonyme,
contre des particuliers, ne survit guère à Tintérêt qui Ta
inspiré ; le second, attaque passionnée, mais courageuse
contre le pouvoir, peut vivre longtemps, sMI a été Vex-
pression d'une venté générale et la revendication d'un
droit. Voltaire a fait avec raison la remarque suivante :
c Tous les honnêtes gens qui pensent sont critiaues, les
malins sont satiriques, les pervers font des libelles. > Le
libelle a existé de tout tomps, parce qu'il y a toujours eu
des passions et des querelles. La loi des Douze-Tables
défendit, sous peine de mort, les chansons dirigées contre
les citoyens. UAnti-Caton de César était un libelle. Sous
l'Empire romain , les libelles contre le prince tombèrent
sous l'application de la loi de lèse-majesté. Julien , raillé
par les habitants d'Antioche, ne fit point usage de la puis-
sance impériale ; il se contenta de répondre par le Èfiso-
pogon. Le Code de Justinien déclare inhabiles à tester
ceux qui auront été condamnés pour des libelles. Dans
l'ancienne France, les libelles contre les souverains et
les personnes puissantes étaient rigoureusement punis :
la peine, laissée à l'arbitraire des Juges, fut souvent la
mort pour l'auteur, quelquefois même pour l'imprimeur;
les simples détenteurs n'étaient pas à l'abri des pour-
suites. Il y a eu, dans les deux derniers siècles, des
Ubellistes fameux. Garasse, Nonotte, Kréron, La Beau-
melle, Linguet, eto. Ce dernier a composé contre les li-
bellistes une Théorie du libelle, ou VArt de calomnier avec
fruit, 1775, in-12. De nos Jours, le libelle s'est souvent
incorporé au Journal , ou a pris la forme de biographies
•candaleuses. Il est réprimé par la loi sur la dif&mation
(V. ce mot). B.
LIBÉRAL, mot du langsse politique depuis la Révolu-
tion, et s'appliquant à touthomme dévoué à la défense de
la liberté et des autres droits conquis par cette Révolu-
tion. Le libéralisme est la doctrine professée par les libé-
raux. Ces mots furent surtout en usage du temps de la
Restauration.
LIBÉRALITÉS, terme de Droit. V. Doiiatio:<i.
LIBÉRATION, action de se libérer d'une dette, d'une
obligation envers un particulier, et du service militaire
envers l'État. Dans le premier cas, la libération s'opère
par le payement , par la novation ( V. ce mot ) , et par la
remise volontaire du titre. Dans le second, elle a lieu,
soit quand le Conseil de révision a reconnu des droits lé-
gitimes à l'exemption du service , soit par l'exonération
et le remplacement (V.ces mots ) , soit pour infirmités
contractées au service, soit après parfait accomplissement
du tomps de service.
LIBÉRAUX (Arts). V. Arts uséRAUX.
LIBÉRÉS, reclusionnaires et forçats qui ont subi leur
peine, et qui sont sous la surveillance de la haute police.
Le décret du i" Janv. 1807 mettait les forçats libérés à la
disposition du ministre de la police générale; le Code
péncU (art. 44) donnait seulement à l'administration le
droit de déterminer les lieux où il était interdit aux libé-
rés de paraître. Le décret du 16 avril 185'2 et la loi du
30 mai 4854 décident que les forçats libérés dont la peine
était inférieure à 8 ans de travaux doivent résider à la
Guyane française pendant un temps égal à la durée de
leur condamnation ; que, si la peine était de 8 ans et au
delà, ils sont tenus de résider dans la colonie pendant
toute leur vie t qu'en cas de grftce ils ne peuvent être dis-
pensés de la résidence que par une disposition spéciale ;
que le gouverneur peut les autoriser à quitter momenta-
nément la colonie, mais Jamais pour se rendre en France ;
que des concessions provisoires ou définitives de terrains
peuvent leur être faites; que tout libéré qui sort de la
colonie sans autorisation est envoyé aux travaux forcés
pendant une durée de 1 à 3 ans; que les infractions,
crimes et délits des libérés sont Jugés par le Conseil de
guerre de la colonie , auquel sont adjoints deux officiers
du commissariat de la marine. V. Bernéol , Essai sur les
condamnés libérés, 1854, in-S*".
LIBERTÉ. La liberté, considérée comme fait interne,
prend le nom de liberté morale, et consiste dans le pou-
roir de se déterminer; la détermination supposant ordi-
nairement un choix, la liberté est aussi appelée libre
arbitre (du latin libta, balance). Rigoureusement, la
liberté ne se démontre pas; elle se montre par des actes
qui se répètent à chaque heure de la vie et que la con*
science proclame. Mais, pour ceux qni feulent des preoret»
il y en a de deux sortes, les preuves psychologiques et les
preuves morales. Les premières sont : 1* le sentiment
immédiat que l'homme a de sa liberté; « un homme qoi
n'a pas i'esprit gâté, dit Bossuet, n*a pas besoin qu'on
lui prouve son franc arbitre, car il le sent, et ne sent pas
plus clairement qu'il voit et qu'il raisonne; » — ^ h
notion du devoir; car il n'y a de devoir que pour l'être
qui est libre de se conformer à la loi ou de la violer; -^
3<* certains faits qui précèdent ou suivent les actes libres,
tels que les engagements, les promesses, la délibération,
le choix^ la satis&ction morale, le remords; « la notion
si claire que nous avons de nos foutes, dit encore Bossuet,
est une marque certaine de la liberté que nous avons eue
de les commettre. » Les preuves morcàes consistent dans
l'universalité de l'idée de liberté, constatée dans toutes
les langues par un mot qui l'exprime; dans l'universalité
de certains faits moraux qui seraient impossibles si
l'homme n'était pas libre, comme les lois, les traités, les
contrats, le mépris, l'admiration, etc. Une dernière con-
sidération se joint à ces preuves. Il y a des cas où
l'homme n'est pas libre; ainsi, dans le sommeil, l'ivresse,
la folie, l'extase, eto. : tout le monde sait la différence
qu'il y a entre ces divers états et celui de liberté; la
Justice en tient compte, ce quin'aurait pas lieu si l'homme
n'avait Jamais la liberté morale ou s*il l'avait toujours.
Aucune objection ne peut la détruire : celle tirée du mo-
tif déterminant {V. Motif) repose sur une fausse analogie
entre les motifs et les poids d'une balance; une autre,
s'appu^ant sur la nature divine, sacrifierait la bonté et
la justice de Dieu pour sauver sa prescience {V. ce mot),
ce qui conduirait à une absurdité révoltante. — La liberté,
si évidente en fait, a donné lieu à de longues controverses
dans la spéculation. Le fatalisme (V. cemot)^ professé
par l'École du Portique, faisait en quelque sorte partie
de la religion dans l'antiquité; Oreste et Œdipe en sont
la preuve; il dominait dans l'Asie. La doctrine de la
grâce {V. ce mot) n'était autre qu'une lutte entre le fata-
lisme et la liberté, lutte soutenue, à des degrés divers,
par S* Augustin contre Pelage, par Gomar contre Armi-
nius, par Port-Royal contre les Molinistes.
Si la liberté est contestée en théorie, elle ne l'est pas
dans la pratiaue; elle est, au contraire, reconnue dans
toutes les sphères de Tactivité humaine. En l'envisageant
donc dans ses manifestations, il y a lieu de distinguer ;
la liberté naturelle, droit qu'a l'homme d'user de ses
facultés en vue de son bien ; l'état social met nécessaire-
ment, dans l'intérêt commun, des limites à cette liberté;
la liberté civile, droit de faire ce qui n'est pas défendu
par la loi, et de s'abstenir de ce qu'elle n'ordonne pas;
fa liberté politique, jouissance de certains droits poli-
tiques réglés et accordés par la Constitution ; la liberté d$
penser, droit de faire connaître son opinion avec une en-
tière indépendance sur toutes matières, religion, philo-
sophie, politique, eto. ; la liberté de conscience, droit qu'a
tout homme de choisir et de préférer les cro3rances reli-
gieuses qui lui paraissent le plus conformes à la vérité,
sans pouvoir être inquiété ; la liberté des cultes, droit
qu'a chacun de manifester par des actes extérieurs son
hommage à la divinité, selon les rits de la religion qu'il
professe, et de manière à ne pas troubler l'ordre puolic
(F. Cultes) ; la liberté de la presse, droit de manifester sa
«nsée par des écrits, et en particulier par les joumaax
V. Presse) ; la liberté de l'industrie et du travail, droit
'exercer sa profession sans être soumis à aucune en*
trave; la liberté du commerce^ droit de vendre et d'ache-
ter, à l'intérieur ou au dehors, sans être soumis à des
règlements prohibitifs ou restrictifs (V. Libre ^hangb);
Isiliberté des mers, droit commun à tous les peuples de
naviguer sur toutes les mers. R.
LIBERTE, divinité allégorique du paganisme. On la disait
fille de Jupiter et de Junon. Elle était représentée sons
la figure d'une femme vêtue de blanc, tenant un sceptre
à la main, quelquefois une lance, et coiffée du bonnet
phrygien, par allusion à la coutume des Romains d'en
remettre un à l'esclave qu'ils voulaient affranchir. A se»
pieds était un chat, animal ennemi de toute contrainte.
Pendant la Révolution, on vit, sur les places publiques,
des statues de la Liberté à la place de celles des rois, et,
dans certaines solennité publiques, des femmes repn^
sentèrent la Liberté, ainsi nue la déesse Raison. R.,
UBERTâ (Arbres de la). F. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
UBERTé d'enseigremint. V. Ensbionbiient.
LiBERTé mtovisoiBB (Mlso ou). EUo peut être accordés
tous caution on sans caution. Au premier cas, elle n'est
LIB
1169
LIB
«ilODnèe qQ*mn matière Gorrectionnelle, par décision de
la Chambre do conaeil, et sous condition que le prévenu
donneFa, en aroem on en immeublea, une caution qui
o*eit Jamais moiDdre de 900 fir. On ne l'accorde pas aux
repria de justice. Rectifiant Tart. 04 du Codé (f/tutmo-
tÙNi crimme(l«, une loi de 1855 porte que, dans le cours
de rinstruction, le Juge peut, sur les conclosiona con-
formes du procureur impérial, donner mainlevée de tout
mandat de dépôt, à la charge par le prévenu de se pré-
senter à tous les actea de la procédure etnour Teiécution
du Jugement aussitôt quMl en sera requis. V, au Suppl,
IIBERTÉS DB L*i6USB GALLICAICB. V. EgiJSB QALUCAHB,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire,
UBERUM VETO, i V, ces mots dans notre Dictiot^
UBITINAIRE. > noire de Biographie et d'His-
UBITINE. ) totr».
LIBRAIRE, marchand de livres. S'il achète des ma>
BQscrits pour les publier, il est dit éditeur4ibraire {V. ce
Mol), et n airive, moins souvent aujourd'hui qu'autrefois,
qu'il imprime ses ouvrages lui-même. Celui qui ne fidt
eue placer et expédier, moyennant certaines remises, les
Évres édités par d'autres, s'appelle itôroire-commiwto»-
mmre ou d^auortimmU, Le commerce des livres d'occa-
sion est le fait du bouquiniste ( F. BooQom). — Un pas-
sage de VAnabasê ( vn, 5) de Xénophon parait être la
plus ancienne mention du commerce des livres. Diogène
Laeroe {Vte de Zenon, VU, 3) perle de libraires athéniens.
JHooB avons indiqué, dans notre Dictionnaire de Biograr
pAtf st d Histoire, les différents personnages auxquels les
aociens Ronwins donnaient le nom de libraires. En
teHn, librarius ne si^piflait que copiste, et le marchand
de livres s'appelait bibliopola; les deux professions fu-
rent, au reste, souvent confondues, et s'^outèrent môme
rfois à celle d'auteur. On voit par Pline le Jeune que
Tille de Lyon avait des libraires dès le i*' siècle de
notre ère. Cétait sans doute l'asage, comAie chez les
Modernes, de placer le nom du libraire sur les livres
qu'il mettait en vente ; d'où il résulte que l'on a pu
prendre, sur d'anciens manuscrits, le libraire pour l'au-
teur ; Eckard pense, par exemple, gue l'iEmilius Probus,
à qui l'on a attribué l'œuvre de (!omélius Népos, était
on libndre du temps de Théodose. Pendant les premiers
siècles du moyen &ge, les moines forent les seuls à s'oo
cnper de copier et d'échanger des livres. Au xm* siècle,
rtiniversité de Paris s'adjoignit des clercs libraires jurés-
chargés de débiter les livres sous sa surveillance : on les
appd^ait quelquefois en latin stattonarii; en anglais,
JtatiofMr est encore le mot qui veut dire libraire. Les
HhralTeB, formés en communauté, étaient obligés par
leors statuts de soumettre aux Facultés les copies des
manuscrits originaux; Ils ne pouvaient les mettre en
feote que lorsqu'elles avalent été revues et approuvées.
Linvention derimprlmerie donna une forte impulsion au
eommerce des llTies; mais, à partir de Henri II, les 11-
tiraires ftirent assujettis à des règlements sévères. Ainsi,
d'après une ordonnance du 27 Juin 1552, Ils ne pouvaient
Gûre venir des livres des pays non catholiques, et l'au-
torité ecclésiastique devait assister à l'ouverture des bal-
lots de provenance étrangère. Une ordonnance du 27 Juin
1553 leur interdit de vendre d'autres livres que ceux qui
fttaleiit inscrits sur leur catalogue. La publication d'une
simple gravure sans l'autorisation du roi, la vente ou
distribution de livres sans permission spéciale, étaient
punies de mort. L'ordonnance de Moulins en 1566 mo-
difia les pénalités, mais on abandonna l'application à
^^arbitraîre des juges. Henri IV apporta quelques adou-
dasements à la lé^slation. En 1615, un arrêt du Parle-
ment fixa à 4 années la durée de l'apprentissage, que l'on
réduisit plus tard à 3 ans, et nul indiridu marié ne pou-
vait être reçu apprenti. Le nombre légal des membres de
la corporation des libraires était alors de 24. En 161 8, une
Chambre syndicale de la librairie et de Vimjnimerie fut
instituée (k. CHAMsas). La vente des livres ne se faisait
pas seulement par les libraires en titre, mais aussi par
des marchands ambulants et par des bouquinistes ou éta-
lagistes : les Ubraires obtinrent en 1640 la suppression de
eette concurrence. En vertu d'un édit de 162o, la peine de
mort fut rétablie contre Jes auteurs ou distributeurs d'ou-
vrages attaquant la rell^on et le gouvernement. Ce même
édit exigeait que les livres fassent imprimés « en beaux
earactères, sur de bon papier, et bien corrects,» que
tout Imprimeur ou libraire fôt « congru en langue la-
tine » et sût lire le grec. La résidence dans le quartier
derUniversité était obligatoire; les Infractions à ce règle-
ment furent si réitérées, qu'un édit du l** avril 1620
de mort les délinquants, et que d'autres édita de
1686 et 1725 portèrent contre eux les peines « de i^nftr^a-
tion des livres, presses, caractères et ustensiles servant à
l'imprimerie, de privation de la maîtrise, et de punition
corporelle en cas de récidive. » L'édit de 172d soumit
aussi à des examens sévères les candidate qui ae desti-
naient à la profession d'imprimeur-libraire. Bien que les
Parlements eussent refusé de Tenregistrer, un amt du.
Conseil de 1744 en étendit Tapplication à tout le com-
merce de la librairie en France. De leur c6té, les Parle-
ments publièrent des arrêts de règlement sur le fait de
la librairie; mais ces arrêts difléndeot entre eux dans
leurs principales dispositions, et la législation offrait sur
ce point un incroyable pèle-mèle. En 1777, divers arrêts
du Conseil organisèrent la librairie sur de nouvelles
bases. Le nombre des libraires fut illimité : la maîtrise
de libraire coûta 1,000 livres, et celle d'Imprimeur 500»
Pour être reçu libndre, il fallut être de la religion catho*
lique, de bonne rie et mœurs, et avoir subi un examen
en présence des syndics, adjoints et autres préposés. La
recteur de l'Université, entre les mains du(]|uel les li-
braires et les imprimeurs prêtaient serment, faisait expé-
dier les lettres, qui étaient soumises au lieutenant génâral
de police et au g^e des sceaux avant l'arrêt du u>nseiU
La durée du droit de propriété des libraires sur les livret
fut restreinte à la vie des auteurs. A la RévoIotloUf
l'exercice de la profession de libraire fut déclarée libiei
et sans autre condition qu'une patente. Le décret impé-
rial du 5 février 1810, les art. 283, 487 et 477 du Codé
pénai, les diverses lois sur la presse des 21 octobre 1814,
17 et 26 mai 1810, 0 septembre 1835, et le décret du
24 mars 1852, forment aujourd'hui le code de la librairie.
Nul ne peut exercer la profe8sion\ de libraire sans un
brevet délivré par l'autoritâ, et que l'on obtient en adres-
sant au ministre de l'intérieur pour Paris, aux préfets
pour les départements, une demande accompagnée de
Pacte de naissance du demandeur, d'un certificat de me*
ralité délivré par le mdre du lieu où il râ&lde, et d'un
certificat de capacité signé par 4 Imprimeurs ou librairea.
Ce brevet, accordé gratuitement, est personnel et local;
il doit être enregistré au tribunal de l'* instance. Le
libraire prête en même temps serment de ne vendiê, dé-
biter ou distribuer aucun ouvrage contraire aux devoirs
envers le souverain et à l'intérêt de l'État. L'exerdce de
la librairie sans brevet entraîne un einprisonnement de
l mois à 2 ans, et une amende de 100 fr. à 2,000 fir., in-
dépendamment de la fermeture de l'établissement. Lapa-
tente de libraire-éditeur est de 100 fir. à Paris; elle n'est que
de 80 fir. et au-dessous, dans les départements, selon l'inH
portance de la localité ; celle du simple libraire et du bon*
quiniste en boutique est de 50 fir. à Paris. Les libralree-
éditeurs sont tenus au dépôt légal {V. ce mot)', chaque
livre qu'ils éditent doit porter leur vrai nom, à peine de
0 Jours à 0 mois d'emprisonnement La vente ou distri-
bution d'ouvragea contraires aux bonnes mœurs est [mnle
d'un emprisonnement d'un mois à un an, d'une amende
de 16 fir. à 500 fr., et ces ouvrages sont confisqués et mis
au pilon. Le débit d'ouvrages contrefaits entraine une
amende dont la quotité varie selon les cas. La vente ou
diatribution d'un ouvrage sans nom d'imprimeur est
punie d'une amende de 2,000 fir., qui est réduite à 1,000 fr.
si l'on fait connaître le nom de l'imprimeur. — Une Di»
rection de la librairie et de l'imprimerie a été créée en
1810 pour veiller à l'exécution des lois et règlements qui
concernent ces deux industries : annexée d'abord au mi-
nistère de l'intérieur, elle a été placée en 1852 dans les
attributions du ministre de la police générale; dès l'an-
née suivante, on l'a rendue au ministère de l'intérieur.
V. Fritsch, Tractatus de typographie, bibliopolis, etc.,
léna, 1675, in-4'*; Batta^ini, Dissertazione academica
sut commercio dêgli antuihi e modemi librai, Rome,
1787, in-8°; Peignot, Essai historique et archéologique^
sur l*état ds la libraine chez les Anciens, Dijon, 1834,
in-8<>; Géraud, Essai sur les livres dans y antiquité,
Paris, 1840, in-8°. B.
LIBRAIEUE, boutique de livres. Elle a'^ipelait, chei
les anciens Romains, apotheca (du srec apothM, maga-
sin), ou tabema libraria, ou amplement libraria. Les
librairies se trouvaient pour la plupart dans la rue Argi'
letum et dans le Vicus scandalarius ; il y en avait aussi
près des temples de Vertunme et de Janus. Les devan-
tures étaient couvertes d'inscriptions et d'a£Bches indi-
quant les ouvrages en vente x à l'intérieur, la forme de
rouleaux étant la plus usitée pour les livres, les mon
étaient garnis de cases aaseï semblables à cellflé que pré-
sentent les colombiers, et ^>pelées nids (nidi) par Mar-
tial. Les libniriet étatat on Ueo de féonioir pour kê
LIB
1169
LIB
oisMl et 160 gens ée lettres; AoliMïelle (XIH, 3fl^ nous a
IttiBé on coneux tableau île œ ifoi 8*y passait. Rome eut
aussi des étalages de livres sous les portiques ei dans
d'autres lieui pablics. — En France, Jusqu^an xvii* siècle,
le mot iibftuHs désigna une bibliothèque : la tour de
ranciei Louvre où étaient renfermés les livres du roi se
nommait Tour ds la Uhrairie. B*
UBRE ARBITRE. V. Ldbrté.
I<IBREfiCHANGE(Systèmedtt),o|iinion diaprés laquelle
le commerce entre les nations doit Ôtre libre, c-àrd.
esempt de taxes, on ne supporter que des droits établis
avec précaution dans llntérftt exclusif da Esc, eonmie en
Fkanoe les droits de douane perçus sur le coton et sur le
café. Un droit établi sur le fer, la houille on toute antre
matière que notre pays produit, permet anx producteurs
de fer, de houille, etc., de vendre a un prix trM-supérieur
à celui qu'ils eussent pu demander si ces matières
eossent été admises en franchise : en supposant que
eette hausse artifldelle soit de 100 fir. seulement par
tonne ou 1,000 kilogr., ai la Fhmce consomme annuel-
lement 400,000 tonnes de fer, de houille, etc., fàbri-
onés ou extraits à rintérienr, c'est une redevanee de
40 millions payée aux maîtres de forge ou aux proprié-
ttdres de mines de houille, etc., outre les droits de
douane perçus au profit de l'État à raison du fer ou de la
houille qui aura été importé. Le système de libre échange
«'«^plique anx cas de cette nature.
Echanger est un droit naturel : chaque productenr doit
pouvoir se procurer les matières premières aux condi-
tions on'il JuM être les plus avantageuses, sans qu'un
tiers vienne s'interposer dans le débat, au risque et en
vue même de fausser l'équivalence qui doit présider à
tout échange. Chaque consommateur a également le droit
de vivre au meilleur marché possible, c-à-d. de ne payer
les choses que ce qu'elles valent naturellement : toute sur-
taxe imposée par une autorité supérieure, le condamnant
à payer on produit au delà du prix tel qu'il résulte de
l'état de l'ofire et de la demande, et par conséquent l'obli-
geant adonner plus qu'il ne reçoit ou qu'il ne recevrait si
réchange était libre, porte atteinte à la liberté naturelle
da consommateur, à son intérêt légitime, à la sincérité
des transactions. Toute mesure qui place le consomma-
teur dans une infériorité forcée devant le producteur,
telle que celle qui met celui-ci à Tabri de la concurrence
pour la vente des produits similaires, lui livrant ainsi
totalement on en partie le marché national, est injuste.
Les raisons économiques qui poussent les peuples à se
livrer à de mutuels échanges sont très-puissantes. 11 n'est
point de nation capable de se suffire à elle-même. La di-
versité des propriétés naturelles de la terre donne lien à
l'échange des différents produits naturels au'elle fournit.
Chaque pays donne certains produits ou plus parfaits ou
«xdusivement à toute autre contrée. Toute l'Europe pro-
duit du Un, mais celui de la Russie Blanche et de Bologne
est le meilleur; plusieurs pays abondent en cuivre, mais
celui de la Suède et du Jaîwn est d'une qualité supé-
rieure; les vins renommés, le sucre, le café, les épices,
ne viennent que dans certains climats où se rencontrent
rarement avec abondance la houille et le fer. Surabon-
dance d'une part, indigence de l'autre, d'où naît la né-
cessité pour chaque nation d'écouler le trop -plein de
certains produits, et de s'approvisionner de ceux dont
elle manque t sinon, U civilisation resterait stationnaire;
pour certains peuples la vie serait fort limitée, pour les
antres elle deviendrait presque impossible. De même
que les productions réparties entre les territoires, les
aptitudes des hommes sont diverses. Telle population
excelle dana telle ou telle catégorie de production, et alors
il s'établit une sorte de division du travail entre les na>
tions, comme il s'en établit une entre les membres d'un
même État. Les avantages de cette division sont l'éco-
nomie dans les frais de production, l'abondance des pro-
duits, la perfection plus grande de ces produits, obtenue
avec moins de sacrifices, de capital et de travail. Un
autre grand avantage du libre échange, c'est la paix uni-
verselle* En effet, lorsque, faute de communications, les
nations vivaient isolées, deux peuples pouvaient dévorer
leur activité et leurs finances dans des guerres intermi-
nables, sans que les autres eussent rien à perdre ou à
gagner; aussi restaient-ils spectateurs indifférents en pa-
reille circonstance. Ai^ourd'hui que les chemins de fer,
les bateaux à vapeur et une demi-liberté commerciale ont
établi des relations d'intérêt entre les pays les plus éloi-
gnés, il ne peut se tirer nulle part un coup de canon
sans qu'il en résulte un dommage pour tout le monde.
QuMque toute l'Europe ne prenne pas part à une guerre,
cependant les Bourses des psjs neutres sqkvBOit les oscil-
lations des Bonrses des pays engagés dans la lutte* et les
titres de propriété se déprécient dans toutes les mains.
Cette solidarité d'intérêts, qui arrêts déjà les guerres à
leur début, développée par la multiplicité des échanges et
poussée Jusqu'aux pavs les plus reculés, en rendra le re-
tour presque impossible par l'intervention des puissances
qui, sans y prendre part, auraient néanmoins à en soafl!rir*
Malgré les entraves qui résultent, pour le développa
ment des échanges, de rétablissement des droits fiscaux,
ces droits ne peuvent soulever aucune objection.de prin-
cipe. S'ils restreignent la sphère des échanges, c'est par
un accident inévitable; mais ils n'ont pas pour but de la
restreindre. Il en est tout autrement des droits proteo-
teurs ou prohibitifs (V. Proiiditioii), oui sont directi^
ment établis en vue de limiter le rayon aes échanges.
La théorie du libre échange n'est pas nouvelle : au
xvi« siècle, Bodin , dans son ouvrage sur la République,
réclamait déjà, non-eeulement l'abolition des douanes In-
térieures, mais l'entrée libre de la plupart des marchan-
<yses étrangères. Au commencement du siècle suivant,
Barthélémy de Laffemas, dans un opuscule intitulé : Lu
mou9n$ de chcus^r la gueus^rye, tte., soutint à son tour
les bienfaits du libre édiange. Plus tard, Vanban, et Boia*
gnillebert attaquèrent le système mercatUiU ( F. ce mot ),
et fàrent imités, sous Louis XV, par François Queanay
et ses disciples : la fameuse maxime des physiocialea :
« Laissez faire, laissez passer, » s'applinue aussi bien ani
rapports internationaux qu'aux conditions économiques
sur lesouelles repose l'ordre à l'intérieur, et Mercier de
La Rivière s'est surtout attaché à ce o6té de la doctrine
ph3rsiocratique. Adam Smith, qui publia en 1776 ses cé-
lèbres Recherches sur la nature et les causes de la ri»
càesse des nations, % vol. in-4°, n'est donc pas, ainsi
qu'on le crdt assex conmmnément, le premier qui ait for-
mulé et développé la théorie du libre échange. Les idées
de cet économiste anglais ont été, de nos Jours, vulpui-
sées en France par J.-B. Say. Le véritable métaphysicien
du libre échanêe est Frédéric Bastiat. qui dans son livre
les Sophismes économiques, Paris, 1846, in-16, a battu en
brèche le système prohibitif; après Ini, le mouvement
purement théorique est épuisé : on n'a plus fait que ré-
péter et ressasser ses arguments.
Parmi les gouvernements qui ont mis plus ou moins
en pratique Tes principes de la liberté commerciale, il
faut dter celui du grand-duc Léopold II« en Toscane,
qm établissait dès 1766 la liberté du commerce des crains
et de la boulangerie; celui de France sous le ministère
de Turoot, du 20 Juillet 1774 au 13 mai 1776, relative-
ment libre-échangiste, sous l'inspiration des économistes
physiecrates; celui de l'Assemblée constituante de 1789;
celui d'Angleterre en 1825, sous le ministère d'Huskisson,
et depuis 1842, époque où ont commencé, par l'initiative
de Robert Peel et sous l'impulsion de l'Association de
Manchester, les râfonnes lib^ales qui ont contribué à la
prospérité actuelle de l'Angleterre; la Suisse, qui n'a
pour ainsi dire que des douanes presque nominales de-
puis la chute du système continental, puisque tout peut
entrer en payant des droits minimes; enfin la France,
qui, sous le règne de Napoléon III, depuis 1861 , est
entrée dans la voie du libre échange par un traité de
commerce avec l'Angleterre, et des traités de même n^
ture avec onelques autres nations européennes. V. Men-
gotti. Du Colbertisme ou de la lU^srlé du commerce des
produits du sol, en italien, Blilan,1802, S vol.; Rodet,
Questions commerciales, Paris, 1828, in-8«; Billiet, Du
commerce, des douanes, et du système des prohibittons,
Paris, 1828, in-8«; Gastaldi, ùe la liberté eommsrciaU,
du crédit et des banques, Turin, 1840, in-8<»; GoIdenbei%
Libre échange et Protection, Paris, 1847, itt-4*; Rœderer,
Études sur les deux systèmes opposés du libre échange
et de la protection, Paris, 1851, in-8*; Ch. Gouraud,
Essai sur la liberté du ^mmerce des no^tofis, 1853,
in-8^; Emile de Lavelye, Etudes historiqmf s et critiques
sur lesprvncipes et les conséquences de la liberté du ootn-
msrcs international , 1857, in-18. A* L.
LiBSB BXAMBi. C'ost Is liberté humaine considérôe au
point de vue de l'exercice de la raison; en d'autres
termes, c'est le droit que nous avons de chercher, au
moyen de notre raison, le redressement ou la confirma-
tion de nos opinions et de nos croyances.
LIBRES (Vers), en termes de Poésie, vers de diffé-
rentes mesures dans une même pièce, et qui ne sont pas
soumis au retour d'un rhythme régulier. Les Fables de
La Fontaine, par exemple, sont en vers libres*
UBRETTO. 7. Opéba.
Lie
1167
Lie
UBKffOB, > F* cet mois dans notre IHeUomutùrê de
Uftimm. s Biooraphiê et S Histoire.
LIBYENNE (Langue), v. BEaaèRB.
UCB (du kan Viciât, clMiur»), enceinte préparée ponr
flB oombat, on tonmoi ou une course. On appela lieet
uBoyen âge Tespace laissé entverenceinte d'une place
et 006 muraille extérieure ùa une palissade de bois que
roo «sbHassH en dehors, et qui formait une sorte de
chemin csofterl r presque tot^oors un fossé peu profond
pfoiégeiH les iioes, et quelquefois un seoôod fossé se
troaTsit entre elles et les murs.
uo. terme de Tapissorie. V. Ussa.
LICENCE (du latin liceutia, permission), autorisation
accordée psr Tadministratlon : i* pour importer ou ex-
porter exceptiomiellement certaines denrées et mar-
ehaodises prohibées; i* pour trafiquer avec une nation
étnogère, quand la guerre a interrompu les relations
eommerdsles avec elle ; 3* pour exercer certaines indus-
tries (entrepreoear de voitures publiques, 5 fr. par voi-
ton à quatre roues. S fir. par voiture à deux roues ; fabri-
eut de salpêtre, iO fr. par an; — de cartes, de sucre
Miaène, 50 f^.; — etc. ), ou vendre certains objets ( piin-
dpsiement les boissons ; de 6 fr. à 50 fr., selon la popu-
btioo de la commune). Dans ce dernier cas , TÉtat per-
çut 00 Droit de liosncs.
uciRci, grade universitaire. Intermédiaire entre le
bocealauriat et le doctorat ( F. ces mots ). H existe dans
tintes les Facultés, sauf celle de médecine. Son nom
Tieot de ce que Jadis 11 conférait la permission (licmtia)
de pratiquer renseianement public. Il y a la (tcsnce es
iittm, et la Itoefie^ es scimcês. On les obtient à la suite
(foo examen passé devant une Faculté. A la licence es
lettres, Texamen consiste en épreuves orales et épreuves
écrites sur le grec, le Istln, et le français. — II y a trois
aortes de licences es sciences : celle des sciences mathé-
matiques, celle des sciences physiques, et celle des
icieoces naturelles. L*examen se compose d^éprenves
écrites, d'épreaves praticfues, et d^épreuves orales. Tout
caoâidat à la licence doit produire un diplôme, obtenu
depuis on an, de bachelier es lettres, ou es sciences, sui-
TSDt la nature de la licence à laquelle il aspire, et avoir
pris quatre inscriptions aux cours de la Faculté devant
laquelle il se pr^nte. Des dispenses d*as8iduité sont
ordioairement accordées aux candidats engagés dans
Feoieignement public, et qui n'ont pu suivre les cours
de la Faculté. Les droits des inscriptions, de Texamen «
du eertiflcat d'aptitude, et' du diplôme, sont de 140 fr.
Chaque Faculté tient annuellement deux sessions d'exa-
meo pour la licence. Le grade de licencié est indispen
sable pour se présenter au doctorat et à Tagri^tion, e
il est exigé dana l'Université nour certaines ronctions ad-
mloistratlves, telles que celles de proviseur d'un lycée,
OQ de principal. — Les avocats, les avoués, les Juges de.^
direrstribunaiix, doivent d*abord être licenciés en Droit.
Les ioscriptiona, les droits d'examen et de diplôme s*élè-
rent à 560 fr., non compris 40 fr. pour inscriptions à la
Faculté des lettres. — Pour la licence en théologie, les
droits des inscriptions, des examens et du diplôme sont
de45fr.
LICENCE, en termes de Poétique, liberté que se donne le
po^ de violer une r^le généralement adoptée, soit pour
sa propre commodité, soit pour prêter à l'expression de
sa peosée un tour plus original , plus harmonieux, plus
éoergique. On diaungue les licences d'orthographe, les
lioeoces de constmcSon, les licences de grammaire, et
les licences de versification. Les premières consistent
daos le retranchement ou l'addition arbitraire d'une ou
de plusieurs lettres dans un mot : ainsi , guères, nor-
dams pour 0iiér«, naguère; Athène, Londrê Versaille,
Chariê , pour AthèMs , Londres , VersaUles, Cfiarles ;
ncor pour muxré; je vai, je croi, je soi, pour je vais, je
erois, je sais. Les licences de construction et de gram-
maire ne sont guère <rae des figures de grammaire, telles
qoe rinversion , rSllipse, le Pléonasme, la Syllepse
(V. ces mots). Les licences de versification sont ti%s-
rares en français; elles consistent surtout dans l'emploi
de l'Enjambement ( F. ce mot)^ et de certaines coupes
2^ os mot) des vers autres que la césure proprement
te, dams des rimes forcément inexactes, telles que
Féstu et 9emês on (sntis, etc. L'emploi tudicienx de
rarchaisme (V. es mot)^ la création de mots conformes à
raoalogie de la langue (comme invaincu, exorable, etcX
sont des licences antorisiées ; l'emploi demi-neutre, demi-
paasif , du partidpe expiré^ dans cet hémistiche de Ra-
cine {Phèdre) : « A ces mots, ce héros eocpiré... >, est une
ûm pins heoreuaes licences de notre langue poétique.
Au resta, e^est pimôt là une hardissss de style quHmt
véritable licence.
La versification des langues anciennes est bien pins
féconde que la nôtre en lismcesy grftce à la plus grande
souplesse du latin et surtout du grec. Toutefois, comme
nous ne connaiisons des langues anciennes que la
langue poétique et oratoire, comme la langue familière
et courante est absolument morte pour nous, bien deé
formes de mots ou de phrases, qui psssent à nos yeux
pour des licences ou des étrangetés, pouvaient panltre
très-naturelles aux Anciens. Ainsi, une des Ucenoes dont
les If odernes ont été le plus frappes dana la versificatioa
latine, la suppression de s dans les terminaisons en us
et en û bref des noms et a4]ectife O^m' malorum, œdihu*
nostris), n'était, au témoignage de Qoéron, que la re-
production exacte de l'ancienne prononciation de œs
finales, où s disparaissait en elTet dans le langage fami-
lier. Nous prêtons aussi maintes licences de versificatkon
à Homère, sur lesquelles l'étude de la prose d'Hérodote
nous éclaire. P.
UCENCIEBIENT, mot Jadis synonyme de congé ab-
solu, et qui s'appliquait aux militaires considérés indlr
viduellement. Maintenant il ne se dît plus que de la
dislocation d'un corps de troupes, mais sans qu'il y ait
toujours libération , car des corps licenciés peuvent être
versés ou amalgamés dans d'autres cadres* Le licencie-
ment peut s'accomplir par punition.
LICES. V. LicB.
UCHAKA, sorte de flûte des Gafres. Cest un roseau
accordé au moyen d'un petit tampon mobile placé à la
partie Inférieure, et ayant au bout supérieur une ouver-
ture coupée transversalement On n'en tire qu'un seul
son, comme du cor russe {V. ce mot)^ et il faut autant
d'instruments qu'il y a de notes dans l'échelle musicale.
LICHAVEN. F. Celtiques (Ifonuments).
LICHFIELD (Cathédrale de), en Angleterre, dans le
3omté de Stafford. Cette église, bâtie pendant le xm* et le
XIV* siècle, restaurée au temps de Charles II, n'est point
une des plus grandes du royaume, et cependant elle
ojfre un â*and intérêt. Cest la seule nui ait trois flèches,
et qui soit parfaitement Isolée. Son plan est en forme de
croix, mais le transept est plus rapproché du portail
occidental que de l'abside : aussi la cnapelle de la S*^
Vierge, qui est derrière le chcsur, se compose-t^elle de 0
travées. La forme polygonale de l'abside se rencontre
rarement en Angleterre, tandis qu'elle est fort commune
en France. Le grand portail a de belles et harmonieuses
proportions, auoique moins développé que dans la plu-
part des cathédrales de France. A la partie inférieure,
trois portes en ogive donnent accès aux trois nefs inté-
rieures ; la porte centrale a une* voussure profonde ; les
deux autres sont trop resserrées. Au-dessus des portes
règne mie galerie composée d'arcs trilobés, avec des sta*
tuettes, et surmontée elle-même d'une laige fenêtre
placée en retraite. La partie supérieure de la façade est
an fronton plein, orné d'un réseau de nervures délicates,
et couronné par une statue de la S^* Vierge. Les tours
carrées qui flan<|uent le portail sont percées d'une fe«
nêtre à deux divisions : à l'endroit où commence la
flèche octogonale , elles ont aux quatre an^es un cloche-
ton élégant ; de distance en distance, le corps de la flèche
est entouré d'un anneau qui le partage en sections, dont
les quatre premières présentent une fenêtre très-ornée.
Xes clochers atteignent une hauteur de 60 met. La tour
qui s'élève à l'entre-croisement des transepts s'élève, avec
sa flèche, à 115 met. A l'intérieur, Tédiflce a les dimen-
sions suivantes : longueur, 120 met.; largeur de la nef,
y compris les collatéraux, 32 met. ; largeur au transept,
dO met. ; hauteur des voûtes, 20 met. Entre autres objets
intéressants, on remarque les vitraux de la chapelle de
la Vierge, provenant de l'abbaye ruinée de Belgium , les
tombcAux de Garrick, de Samuel Johnson, de lady Mon-
tague. B.
LiaTATION (du latin Itcitart, enchérir), acte par le-
quel les copropnétaires par indivis d'une diose qui ne
peut être partagée commodément ou sans dépréciation ,
la font mettre aux enchères pour être adjugée et appar-
tenir au dernier et plus fort enchérisseur, à la charge
par celui-ci de payer à chacun des copropriétaires une
part du prix proportionnelle à la portion indfivise qu'il
avait dans la chose. La licitation a donc ponr objet de
diviser le prix d'une propriété commune , quand le par-
tage direct et en nature de cette propriété est Impossible.
Elle peut être demandée par tout copropriétaire, en vertu
de ce nrlncipe que nul ne peut être contraint à demeurer
dans rindivision. On la dit volontaire ou à VamiaMe, si
LIB
116S
LIE
iouB les oopropriétaîreB sont majeurs, maîtres de leurs
droitSj préîents oa dûment repraentés, et d*accord entre
aux ; jùdkkUrêf lorsqae ces conditions ne sont pas toutes
rfonies. La lidtation Tolontaire peut se faire sans publi-
cité, si c'est l'un des intéressés qui prend la propriété
entière ; mais Tadmission des étrangers est de droit, du
moment qn*nn des colidtants la demande, et alors la
publicité est obUsatoire. Le Juge est tenu d'ordonner la
Udtation, quand 11 y a demande formelle de Tun des co-
propriétaires, et quand Timpossibilité du partage est
bien constatée. Dans la lidtation Judiciaire, les étrangers
sont toqjours admis à enchérir. La lidtation ne se fait
Jamais par acte sous seing privé. F. le Codé de Procé-
àum, 2* partie, liv. II, tit. 1
LICIUM , ceinture à plusieurs tours des Victimaires
romains.
UCOKNE, animal fabuleux, qu'on disait avoir les
formes du sheval, le poil roux ou blanc, et le tront armé
d'une longue corne aiguë. La licorne a été un symbole de
force et de stabilité, parce que sa corne n'était point ca-
duque. Dans le Blason, elle sert tantôt de pièce prind-
pale, tantôt de dmier.
LICTEUR. V» ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
^aphie et d^Histoire.
UÉ , terme de Musique. V. Lbgato et Ijaisor.
LIED , mot allemand qui correspond au mot français
chanson et au mot italien canxone» Les prindpaux au-
teurs de liedsr sont Gœthe, Gleim, Voss, Hoalty, Burger,
Amdt, KoBmer, Hdne, etc.
LIÈGE ( Êfldise S*-Paol, k). Cette église, érigée en ca-
thédrale en 1793, à la place oe celle de S*-Lambert, dont
les derniers vestiges ont disparu en 1828, fut fondée au
X* siècle, et reb&tie dans le xm* ; mais il ne reste de cette
époque que l'arrière-chœur. Chaque siècle suivant est
venu i^outer qudque chose à son srchitecture : la nef,
avec ses fenêtres en style flamboyant, appartient, ainsi
que ses collatéraux, au coounencement du xvi* siècle; les
chapelles de ces collatéraux datent de 1528 ; la tour, de-
meurée inachevée, a été décorée d'une flèche en bois en
1813. L'aspect de la cathédrale de Liège à l'extérieur est
tro\d et mesquin ; elle n'a que deux entrées latérales, où
le gothique se mêle avec peu de bonheur au style de la
Renaissance. Mais l'intérieur produit, par ses vastes nn^
portions, un effet saisissant : la nef a 74 met. de Ion •
gueur, et le chœur 28 met. La voûte est couverte d'ara
£K»ques peintes, qui s'harmonisent mal avec le caractère
de rarchitecture. On remarq[ue, outre plusieurs bons ta-
bleaux, 1® une chaire en bois sculpté, du style ogival le*
plus luxuriant, ornée de statues de marbre, et surmontée
d'un abat-voix en forme de flèche qui s'élève à une hau-
teur de près de 20 met.; c'est un ouvrage de Guillaume
Geefs; 2» dans une chapelle latérale, un Christ au tom-
beau , en marbre blanc, par Delcourt , à qui l'on doit
aussi le Christ en bronze de la grande porte; 3<* la grille
qui sépare le chœur de la nef, beau travail de serrurerie ;
i^ dans le Trésor de l'église, un buste de S* Lambert ,
pièce d'orfèvrerie exécutée en 1M3 par Henri Zutman.
Un cloître du xvi* siècle est adossé à la cathédrale.
uiGB ( Église SMacqovs, à). Ce monument, à l'excep-
tion de la tour, qui est de la fin du xii* slède et le seul
reste d'une église antérieure , est un des types les plus
parfaits qui existent du style ogival tertiaire parvenu à
son apogée, et déployant toute la richesse, peut^^tie
excessive, de son ornementation si nulée. Le portail,
construit au commencement du xvi* siède sur les dessins
d'nn architecte liégeois nonmié Lombard ou Lambert,
est un horsrd'œuvre en style de la Renaissance, appliqué
à un édifice gothique. LMntérieur de l'église est vaste,
majestueux et léger tout à la fois. La voûte semble cachée
sous un réseau de fines arêtes, qui s'entre-croisent avec
symétrie, et encadrent des médaillons ornés de tètes
peintes ; mais ces arêtes enluminées en Jaune, avec des
bracelets bruns, blancs ou rouges, des fonds bleus qui
lemplissent les vides de la voûte, ne satisfont pas un goût
délicat On est émerveillé de l'immensité des fenêtres, de
la légèreté des galeries ogivales, des broderies de pierre
qui festonnent les arcades de la nef. Au-dessus des
piliers, entre les tètes des arcades, on a représenté en
médaillons, et accompagné de versets en caractères go-
thiques, les portraits des principaux personnages de
rÉôriture. Le buffet d'orgues, d'une richesse extraordi-
naire, déploie à ses deux eûtes de vastes panneaux dorés,
chargés d'anges et de saints, et se termine par le bas,
presque à portée de main d'homme, en forme de cul-de-
lampe garni de dnq statues. On remarque aussi l'escalier
double d'une petite tribune d'où l'on a vue sur le chttar,
I et les stalles du chosur, sculptées avee oae déilcrtcMS
merveilleuse. F. Delsaux, J^itst S^-JacqtÊm à Liège,
1 vol. in-fol.
LIEN , en termes de Construction, pièce de charpente
Si relie deux maîtresses pièces ensônble, telles qu'un
tage avec le poinçon, un arbalétrier avec l'entrait, un
poteau avec son chapeau, etc.
uni, en termes de Droit, est synonyme de pa/renU,
Le lien est simple, entre frères et sœurs qui ont un p^
ou une mère différents ; double, entre personnee iiaaes
d'un même père et d'une même mère.
LIERNES , nervures des voûtes ogivales. Elles partent
des tiercerons, et viennent se réunir à la clef; elles for-
ment une croix dont la def est le centre. On ne les voit
paraître que vers le milieu du xv* siède. — Dana l'art
du charpentier, on donne le nom de liemes à des pièces
de bois horizontales qui relient deux poinçons , ou qui,
formant des courbes horizontales et concen^ques, relient
à dilTérentes hauteurs les maîtresses pièces d^n dûmeoa
d'une coupole. B. L»
LIERRE , arbuste consacré à Bacchus. Tot^ours vert,
il symbolisait l'étemelle Jeunesse de ce dieu ; et on se
rappelait, d'ailleurs, que ses baies paraissent en automne
au temps des vendanges. Plusieurs princes de Syrie et
d'Egypte, surtout ceux qui prirent le surnom de Diony-
sos, sont représentés sur les médailles avec une cou-
ronne de lierre comme Bacchus. On couronnait les porter
de lierre, parce que Bacchus est un compagnon de..
Muses. Les Andens aimaient à employer les feuilles de
lierre pour les bordures de vêtements, pour celles des
vases, et pour les ornements des frises d'architecture.
Les vases ornés de feuilles de lierre étaie;»* dits Aede-
rata^ et ceux décorés de ses fruits, corymbÎMêm
LIEUTENANT (du latin locum tenens, temait liea,
suppléant), second ofiider d'une compagnie ou d'un es-
cadron. Il aide, comme son nom l'indique, le capitaine
dans ses fonctions, et le remplace en cas d'absence. H
porte l'épaulette d'or ou d'argent (selon le corps) à can-
che, et la contre-épaulette à droite. V, Ueotbiiaiit, aaos
notre Dictionnaire de Biographie et (TBistoire,
UEomuiiT (sous-), 3* offider d'une compagnie on
d'un escadron. Il porte l'épaulette d'or ou d'argent (seleD
le corps) à droite, et la contre^paulette à gauche. Le
pcrte-Hirapeau et le porte-étendaid sont toijours sons-
lieutenants. Le grade de sous- lieutenant fut créé vers
i585.
uniTBziART-coLOTiBL. i V. ces mots dans notre Diction»
LiBOTBiiAirr-GÉNéRAL. ) naire de BioçT.etd'Histoire^
UEOTBFfAinr DB VAISSEAU, grade de la marine militaire,
assimilé à cdui de capitaine dans l'armée de terre. Il est
au-dessus de celui d'enseigne de vaisseau, et au-dessous
de celui de capitaine de frégate. Il y a des lieutenants de
vaisseau de deux classes. Ils font exécuter les ordres du
capitaine, président aux manœuvres, et commandent les
quarts à bord des vaisseaux ; à terre, ils commandent les
compagnies des équipages de ligne, et sont attachés à
Tétat-mijor ou à la dutiction des ports. Ils portent deux
épaulettes en or mat, à petites torsades et a corps uni,
sur lequel est une ancre en or et couronnée.
UEUX D'AISANCES. V. Fossb d'aisarcbs.
LIEUX COMMUNS, nom que les anciens rhéteurs ont
donné aux divers aspects généraux sous lesquels II est
possible d'envisager un si:det donné, aux idées générales
qui lui sont applicables , à des espèces de réperlolru
où l'on trouve des preuves pour un sujet quelconque. Os
en traitaient dans la partie de la Rhétorique qu'on
nomme l'Invention. Quand les lieux communs appartien-
nent au fond même du sujet, ils sont dits tn^rmséqrties ;
quand ils sont pris hors du sujet, on les appelle extrin-
sèques. Les lieux intrinsèques sont : la définition. Venu-
mération des parties, le genre et Vespèce, la comparai^
son, les contraires, les répugnants, les antécéélents et les
conséquents, les circonstances, la cause et Veffet. Les
lieux extrinsèques sont : la loi, les titres, la renommée,
le serment^ les témoins, la question {V. ces mots), — Les
Andens attachaient une grande importance aux lieux
communs. Aristote et Cicéron composèrent des traités sur
cette matière, sous le nom de topiques. Les rhéteurs
attribuaient à l'étude approfondie des lieux communs tes
succès des plus grands orateurs; c'était faire trop d'hon-
neur à cette méthode banale d'invention. Mais il est vrai
de dire que, si les lieux communs ne font pas trouver
les Idées, ils aident à les mettre en œuvre. C'est une
espèce de mécanisme que l'habitude nous rend funllier,
et que nous mettons en mouvement sans nous en speiv
cevoir. Les exerdces de l'école, les déclamations, arcou*
LIG
1169
UM'
•UBmit Vmptix à laiiir Titement certains aspeets d'un
ijet, et à les exprimer immédiatement sans obscurité et
os embams : plus tard, quand l*écolier est derenn on
plus tard, quand
bomme, il profite de la souplesse qu'il a donnée à son
esprit, mais il oublie les procédés au moyen desquels il
ra acquise. Poète, philosophe, historien, orateur, il dé-
veloppe des lieux communs sans le savoir, pour ainsi
dire, et entraîné par Tinspiration du moment. Cicéron
{De Oraton, u, 30) fait connaître clairement Futilité
des lieux communs. Ce sont, dit^il, des principes géué-
ranx d*où se tirent les raisonnements pour tous les
genres de cause et de discours. Chaque fois que nous
avons un mot à tracer, il n*est pas nécessaire que nous
portions successivement notre pensée sur toutes les let-
tres qaï le composent : de même, à chaque affaire qu*il
nous faudra plaider, nous n'avons pas besoin de passer
en revue tous les aréuments qui peuvent s'y rapporter,
U suffit d'avoir en réserve certains lieux, qui viendront
ao88lt6tse prunier à nous. Mais l'orateur ne peut tirer
parti de ces lieux, s'il ne s'est formé, soit par l'expé-
rience, que l'âge donne à la longue, soit à force d'écouter
et de réfléchir, car le travail et l'étude devancent les
années. F. Hiionyille, De la théorie des lieux eomT-
nmn$ dans les Topiqttes d^Aristote, 1856, in-8". H. D.
UBDX FOBucs, dénomination sous laauelle on com-
prend les endroits que l'autorité est chargée de surveiller,
tels que foires, marchés, spectacles, cafés, cabarets, mai-
sons de Jeux, etc., et où les agents de la police adminis-
tzatlre ont toujours le droit de pénétrer. Par rapport à
la publicité en matière de diffamation et d'injures, sont
r^tés lieux publics : une place, une rue, une auberge,
une école, une salle de spectacle, les bureaux d'une ad-
ministtstion publique, etc.
LIÈVB , en termes de Jurisprudence ancienne, extrait
d*nii terri9r{V, ce motU quo i*on remettait au receveur,
pour ^'11 fit payer le cens, les rentes et les droits sei-
gneunaux.
LIÈVRE , animal qui , dans les hiéroglyphes égyptiens,
était un symbole de franchise, n fut consacré, chez les
Grecs, à la déesse Vénus et à Bacchus.
LIGATORE , terme de Musique, synonyme de LÂauon
(F. cê mo^»
usATons, en termes d'Ecriture et de Typographie, se dit
de ploaiears lettres liées ensemble, comme fl, (T* G'«t une
faventloD des copistes de livres, avant l'impnmerie, afin
d'abréger récriture : la Qrpographie l'adopta dès l'origine,
et Ton s'eo servait encore au xtq* siècle pour les livres
mes. On y a renoncé depuis. Les ligatures, très-multi-
pfîées, surtout en grec, rendaient les livres moms lisibles,
mais Initiaient à la lecture des vieux manuscrits.
UGNAGE , mot qui a vieilli et qui était synonyme de
race, de famUlê. L^a4iectif lignager se distdt des per-
sonnes du même lignage. V. Retrait.
LIGNE, terme d'Art militaire, qui s'emploie avec plu-
lieaxs significations t il veut dire la direction générale
de la position des troupes, soit pour combattre, soit pour
s'exercer aux manosuvres. Se porter sur la ligne, c'est se
diriger vers le point qu'on doit y occuper ; entrer en ligne,
cfest s'y placer: rompre la ligne, c'est s'v tenir trop en
avant (fore&r la ligns) ou trop en arrière {refuser la
iigns). La ligne de direction est celle qu'un corps djit
suivre pour se porter d'un lieu à un autre; la ligne Sf^
rotàan, celle qu'une armée doit rallier sans cesse pour
eoooourir à une grande opération. La lïgnie pietns est
ceDe où la dnrîte d'un corps s'appuie à la gauche d'un
antre corps ; la ligne par intervalles laisse un espace vide
entre la gauche d'un corps et la droite d'un autre, ifor-
tker em Itgnê, c'est conserver en marchant l'alignement
fénéraL Au commandement de par pelotons ou par sec^
ikms em ligne, une troupe en marôhe par le flanc se
#vise et s'échelonne en pelotons ou en sections. La
fertNqw de Ugne, ou dmplement la ligne, se compose des
eorps qui forment la It^ne de bataUle, par opposition à la
kw^eiégère, et c^est en ce sens qu'on dit infanterie, oo-
taUriê, régimenl de ligne. — Dans la Fortification, ligne
^Êt qMmyme de retrandument , et on distingue les
Ugnes etmtmues et les lignes d intervalles , selon qu'il
y a ou non interruption entre les ouvrages qui les oom-
pQssiBt (F. GnooNVALLATiON). — Dsus la Marine, on
iMmme eotitsaiig de ligne les plus forts bâtiments de
gnBi% destinés à combsttre en ligne de bataille.
uem, en termes de Généalogie, chaîne ou série de pa-
icats eoi remontent à un mâne chef. Ou distingue la
Ugne dsreeU, suite de parents qui descendent les uns des
antres, comme le père, le fils, le petit-fils ; et la ligne 001»
iotmie» dont les membres, sans descendre les uns des
autres, ont pourtant un auteur commun , ainsi que *•
firères ou sœurs, cousins ou cousines, oncles, neveux on
nièces. Les degrés de parenté ne se calculent pas.de la
même manière pour les deux lignes. F. PAanni»
UGNB, en termes de Géographie, est synonyme d'équa*
leur. F. Baptême de la ligne.
UGNB de défense. F. DÉFENSE.
UGNB DE DOUANES, suite de postes et de bureaux de
douanes placés le long d'une frontière pour percevoir
les droits et empêcher la contrebande.
UGNE DE FLOTTAISON. F. FLOTTAISON.
UGNE DE PARTAGE DBS EAUX, suito de moutagiies qui sé-
parent les bassins hydrographiques d'un pays, et dont les
pentes déterminent la direction des cours d'eau. On dit
ussi Arête hydrographique et Arête dorsale.
UGNES DE MUSIQUE. F. PORTÉE.
UGUE (du bas latin liga, fait de ligare, lier), union
Âb princes ou d'États pour attat^uer un ennemi commun
on pour s'en défendre. Elle se distingue de Vailiance, en
ce qu'elle suppose moins de durée et que son but est .
prochain.
LIGURIUS , pierre précieuse que S* Jér5me croit être -
la même que l'hyacintue, et dont les Anciens vantent la
nuance d'un violet tendre et brillant. Dans la Symbo-
lique, le ligurius a représenté Aser et l'apôtre Simon.
ULLEBONNE (Antiauités de). Cette viUe, située à
32 kilom. E. du Havre, a peu de «ustance de la Seine, eut
au temps des Romains, sous le nom de Juiiobona, une
grande importance, fille était le point de départ de quatre
voies romaines au moins, dirigées sur Rouen, Pont-Au«
demer, Harfleur, et Fécamp. On a trouvé dans son terri-
toire un grand nombre de médailles, des urnes sépul-
crales, des vases lacrymatoires, des tombeaux. En 1812, on
a découvert à LîIIebonne un amphithéâtre, qui est mainte-
nant presQue entièrement déblayé, ainsi que des bains an-
tiques, OUI furent ornés avec un certain luxe, et où l'on
a recueilli deux belles statues en marbre, divers usten-
siles et des médailles. UUebonne a aussi un ch&teau du
moyen âge, appelé le ch&teau d'Harcourt. Il est flanqué,
à l'E., d'une tour ronde fort élevée, de 17 mètres de dia-
mètre, construite en cailloux, et à laquelle on arrive par
un pont^levis de 11 met.. Jeté sur le fossé profond qui
l'environne. L'intérieur du ch&teau n'ofilrG plus qu'une
vaste cour entourée de plusieurs salles en ruine, tapis-
sées de ronces et de lierre, et les débris d'une tour
hexagonale, dont quelques fenêtres, semblables à celles
des églises gothiques, pourraient faire penser qu'elle con-
tenait une chapelle.
IJMAÇON. F. EscAUBS.
LIMBES. ( F. ces mots dans notre Dtetionnaire
UMÉNARQUE. ) de Biographie et d: Histoire.
LUHMA, signe d'altération dont les andens Grecs se
servaient, dit-on, dans la mélodie, pour faire l'office de
notre dièse ou de notre bécarre.
LIMOGES (Église S^Étiennb, à). Cette église cathé-
drale fut commencée en 1270, continuée durant tout le
XIV* siècle, abandonnée pendant la plus grande partie do
xv% reprise à la ftn de ce même siècle, et laissée, vers
1537, dans l'état où elle se trouve ai^ourd'hui. Le chœur
et l'abside sont des œuvres pures et grandioses du style
ogival primitif et secondaire; le transept et trois travées
de la neT appartiennent au style flamboyant; trois autres
travées , élevées seulement à la hauteur de 3 met., sem-
blent attendre leur achèvement. Toute la construction,
envgranit compact et fin, s'est parlaitement conservée.
L'édifice a la forme d'une croix latine, avec chevet semi-
circulaire, et est divisé en trois nefs. Le chœur, le
transept et les nefs déambulatoires offrent une fErande
richesse de style et une ordonnance pleine de mi^esté.
Les larges fenêtres sont garnies de vitraux assez bien
conservM. Le Jubé, exécuté en 1533, se distingue {>ar h
profusion des ornements, la délicatesse et le fini des
sculptures, et serait comparable à celui de S^*-Bladel eine
de Troyos, si quelques dégradations n'en avalent pas
altéré la beauté : on est étonné de trouver là des bas -re-
liefs représentant les travaux d'Hercule. La partie qu!
sert de tribune, et qui fidt saillie en encorbellement, esr
soutenue par c[uatre colonnes, dont les Intervalles sont
occupés par six niches, ,a^)ourd*hul vides de leurs sta-
tues. Ce Jubé se trouvait autrefois à sa place naturelle,
entre le chœur et la nef i il a été transporté en 1780 an
devant de la porte principale. Trois tombeaux, dignes
d'attention, renferment les restes de deux évêoues Ut
Limoges et d'un doyen du chapitre : celui de révêqut
ReguMiltde LaPorte, en ûice de la sacrMe, construit er
pierre calcaire dans le style du un* et du uv* siècle, tat
74
LIM
1170
LIN
ytrdenliteement lemarqoable. Le portail Mtentrional est
«ae des parties les plus brillantes de l'église t la rosace
■BDible formée d'une dentelle de pierre. Le clocher de la
cathédrale de Limoges forme un massif indépendant ,
placé en dehors de Taie de la nef, et d*un style tout diffé-
lent : il est de forme octogonale, et présente au spectateur
placé en face de la nef, non Tun de ses côtés, mais Tan
4» ses angles ; il penche visiblement du côté de Térèché.
£levé, dit-on , en 1190 ou 1101, frappé de la foudre en
4483, 1484 et 1571, il se compose de quatre étages, dont
chacun est percé de deux ou trois ouTertures assez
étroites et surmontées d*ogiYes très-peu algues : la base
i«>ose sur une voûte en pendentif, soutenue par quatre
piliers ; \h sommet n'indique plus que la naissance de la
pyramide qui le couronnait. B.
uiiOGBS (Émailleurs de). Dès le xii* siècle, Limoges
avait une grande célébrité pour la fabrication des émaux,
que Ton api>elait opus a$ LmogiA, labor Umogiœ,
opus Lemoviticum. Ces émaux étaient incrustés sur des
crosses d'évêmies, des calices, des dholrea, des croix, des
reliquaires, des ch&sses, des tombeaux, des vases de
tonte sorte, des colliers, des candélabres, des coupes, des
fermoirs, des agrafes, des plats, des assiettes, des bahuts,
des casques , des poignées d'épées, des manches de cou-
teaux, etc. Au xnr* siècle, les artistes de Limoges eurent
dès rivaux dans les orfèvres de Ifontpellier. Leur art, in-
terrompu par les malheurs de la guerre de Cent Ans, re-
prit un nouvel éclat au xvi* siècle, et ce fut sans doute
alors seulement qu'on adopta le procédé Italien, consis-
tant à peindre en émail avec des couleurs étendues sur
le métal et non plus encaissées dans des dreux. Léonard
fut nommé directeur de la manufacture rétablie par
François I*'; parmi les morceaux admirables qu'il a
laissés, on peut citer les médaillons du tombeau de Diane
de Poitiers, et les portraits de Philippe de Chabot et de
François de Guise, conservés an Louvre. Au xvi* ilècle
appartiennent les émailleurs Jean Courtois, de Court ou
Corteys, Pierre Courtois, Susanne Courtois, Jean de
Limoges, Pierre Raymond ou Rexmann, et Pénicant.
Pendant le xvii* siècle, les Laudin soutinrent la gloire
de Técole limousine : la cathédrale de Limoges pcwsède
trois magnifiques émaux de Nicolas Laudin, l'alné de
cette famille. A côté de Joseph LaucUn et de Valérie
Laudin , on mentionne Etienne Mersier et Poucet. Au
XVIII* siècle, Tart de rémailleor ne fut plus soutenu que
rar les Nouailhier (Bernard, Jean-Baptiste, Joseph et
Pierre), dont les œuvres marquent une grande décadence
dans le dessin et la couleur. La peinture en émail dis-
parut vers 1766, et fut remplacée par la peinture sur
porcelaine.
LIMON. V, EsGAum.
LIMOSINAGE, maçonnerie grossière, faite de moel-
lons, de blocage ou de libages noyés dans un bain de
mortier, et dont on fait les fondations d'un bâtiment.
LIMOUSINE ou LÉHOSINE (Langue), un des dia-
lectes de la Langue SOc (V. u moOi parlé dans la pro-
vince du Limousin. Il a eu, dans le moyen âge, une cer-
taine importance, et les linguistes lui trouvent une
grande analogie avec le catalan {V, ce moi). On sait,
en effet, qu*en 1212, plus de 400 Limousins, moines,
I prélats et chevaliers, allèrent s'établir dans la Catalogne;
e Code que Jacques I*', roi d'Aragon, donna, en 1238^
aux habitants du royaume de Valence, était , nous dit-on,
.écrit en langue « limousine ou catalane; n Gaspard Esco-
lano intitule un des chapitres de son Histoire de Valence :
De la lengua lemosina y valenciavia. Les critiques ita-
liens, espagnols, portugais, se servent souvent de l'ex-
pression Umosine pour désigner la langue romane du
midi. — Ce qu'on nomme ai^ourd'hui le Patois limousin
est la Langue d'Oc très-corrompue; on y rencontre des
phrases entières de basse latinité. Les verbes auxiliaires
et les articles y sont employés avec des terminaisons mé-
ridionales. L'absence de Ve muet, si commun dans la
langue française, les voyelles qui terminent presque
tous les mots, rendent ce patois sonore et harmonieux.
D a de la grftce, de la naïveté, se prête facilement à un
dialogue caustique et spirituel , et rend avec originalité
'es détails burlesques; mais il manque de noblesse. Il
existe un Dictionnaire du patois limousin par B«x)nie,
augmenté par Vialle, Tulle, in-4«.
LivousiNB, manteau de grosse laine commune. Jau-
nâtre ou grisâtre, froncé dans sa partie supérieure, et
sans autre façon. Il n'y a plus guère que les voituriers
qui le portent.
LIMUS. V. ce mot dam notre i>tc(toimatr0 de Biogrth
^'' et d'iEf ûtoin»
LINGBDL , mot qut signifiait autrefob tonte «ipèee de
linge, et qui ne s'applique plus qu'an drap dont on enve-
loppe les morts avant de les mettre an cercueil.
UNÇOIR, en termes de Construction, forte pièos d»
boia qui, daîns un plancher, recouvre un vide et reçoit
l'extrémité des solives.
LINCOLN (Église Notre- Damb, à), ee Angleterre,
dans le comte de Lincoln. Cette église cathédrale, bâtit
sur une éminence, fut commencée après 1075 par Ton
des compagnona de Guillaume le Conquérant, Rémi,
d'abord abjblé de Fécamp , puis promu à l'épiscopat. Op
la dédia en 1092. Cétait un monument de s^le romano-
l^ysantin. De graves dommages, causés par un incendie
en 1124, furent promptement réparés. En 1186, à la suite
d'un tremblement de terre qui avait renyersé les voûtes
et léiardé tous les murs, on procéda à la reconstruction
totale de l'édifice, sur on plan nouveau, et dans le style
ogival : les travaux, retardés par la chute de la tour cen-
trale en 1235, ne furent achevés qu'au xiv* siècle. Par la
grandeur des dimensions, la beauté de l'ordonnance, la
régularité de l'ensemble et l'élégance des détails, la cap
thédrale de Lincoln est une des plus remarquables, non-
seulement de l'Angleterre, mais de toute l'Europe. Son
plan est en forme de croix archiépiscopale ou à double
traniept : la longueur hors œuvre est de 170 met ; la
largeur de la nef, y compris les collatéraux, de 25 mèt.{
la longueur du gprand transept , de 70 mètres. La ré-
gion sMidale se termine carrément. La façade occiden-
tale, ornée d'une infinité de petites arcatures à oçi-
ves, se distingue plus par la multiplicité des détails
que par la grandeur des lignes : au centre et en retraite
est la porte principale, surmontée d'une vaste fenêtre,
puis d'une rose, et, de chaque c6té, on voit plusieurs
arceaux de style romano-byzantin, ce qui fut supposer
qu'une partie de l'église de l'évèqne Rémi a été conser-
vée dans la construction nouvelle. Les extrémités de
cette façade offrent chacune une tourelle dont le clo-
cheton seul dépasse la hauteur de toute la construction :
mais, au-dessus du portail , de chaeue côté du fronton,
s'élève une tour carrée, haute de 60 met., percée de fe-
nêtres à ogives, avec couronnement formé de moulures
et de feuillages, et dont les angles sont tout à la fois
soutenus et décorés par des contre-forts aurmontés de
clochetons. Plus belle encore est la tour centrale , con-
struite à l'intersection des transepts, et haute de 100 met.;
elle ne le cède qu'à la tour de l'église S^-Ouen de Rouen
Elle porte. les statues de onze rois normands, de gran-
deur naturelle, et renferme une énorme cloche , dite U
gros Thomas. La perspective intérieure de la, cathédrale
de lincoln est très-pittoresque, et l'effet général ne lais-
serait rien à désirer si les voûtes étaient plus hautes.
Les fenêtres manquent aussi un peu d'élévation , psiœ
qu'elles sont comprises entièrement dans la hauteur de
la retombée latérale de la voûte. Il y a une salle capitu-
laire remarquable : c'est un décagone de 20 met. de dia-
mètre et de 14 met. de hauteur, voûté en pierre; au
centre est un pilier en pierre, accoté de 10 colonnettes
en marbre, qiu lui sont attachées par un annelet cireur
laire vers le milieu du fût. Les arceaux de la route s'ap-
puient d'un côté sur ce pilier central, et de l'autre sur
des colonnettes groupées à chaque angle du décagone.
A l'extérieur, des contre-forts et des arcs-boutants sou-
tiennent les angles de cette construction, et les fenêtres
sont surmontées de fh)ntons aigus. T. VHld, An illus-
tration of architecture and sculpture of the cathedrd
church of lAncoln, Londres, 1819, in-4®. B.
LINÉAIRE (Dessin). V. Dessin industriel.
LINGE DE TABLE. V. Nappe, Serviette.
LINGOT, en termes dTmprimerie, nom donné aux
morceaux de fonte qui servent, soit à remplir les blanci
des pages, soit à maintenir le haut et le bÂa d'une page
divisée en colonnes.
LINGUALES , consonnes dont l'articulatioii exige cer-
tains mouvements de la langue. Ce sont les dentales d
et t , les palatales I et r, et la nasale n.
LINGUISTIQUE (du latin linffua, langue), recherche
des prindpes universels du langage, de aon oriigine, de
son caractère, mais surtout de ses matériaux, de ses
procédés, de ses formes, des rapporta qui rattachent les
divers idiomes entre eux malgré lenr oiveTaité ( id eOe
se confond avec la Philologie comparée ) , des méthodes
les plus logiques pour arriver à établir nettement leur
classification et leur filiation , ou leor distribation , soit
chronolo^que, soit ethnographique, soit d*apr^ le sys^
tème grammatical ( V. Langue ). I^ progrès de l'eUmogra*
I phie ont di^à contribué à Jeter une vive lunnîère sur œ
LTO
1171
LIO
genre de recherches , dont les premiers essais importants
neremontent guère au delà de la fin du iviu* siècle. Anté-
rieurement à cette époque, les travaux ne pouvaient abou-
tir. I^s Grecs et les Romains traitaient de barbcures les
peaples et les langues du reste du monde : des idiomes de
rantique Europe, à peine leurs écrivains nous ont^ila fait
coDDutre quelques noms propres plus on moins défigurés,
et on petit nombre de mots techniques aussi infidèlement
traoïcrits; le traité de Varron, ^/tngud latinà^ ne donne
pas une bien haute idée de ses connaissances étymolo-
giques, puisqu'il s*évertue à expliquer par le vieux latin
one foule de mots qui dérivaient du grec. Chez les mo-
dernes, la Linguistique, outre qu'elle manquait de maté-
riaux suffisants , s'engagea dans une voie fausse : elle
voulut découvrir la langue mère de toutes les autres ;
Thébreu rallia le plus grand nombre de partisans , et son
droit de primogéniture fut proclamé et admis presque
comme un article de foi ; cependant, Pezron, Pelloutier,
La Tour d'Auvergne prirent ha parti do bas breton \ plus
d'un savant s'escrima en faveur du basque ; Van der Beken
et Van Scbrieck plaidèrent la cause du flamand, etc. On
aptreroyait confusément quelque ressemblance entre deux
langues, et on en concluait que Tune était la mère et
Tautre la fille ; on ne soupçonnait même pas la descen-
dance collatérale. Au lieu de prendre pour termes de
coniparaison les mots qui expriment les objets naturels ,
les idées simples et les premiers besoins de l'homme, et
qni touchent nécessairement au berceau du langage, on
prenait an hasard des mots d'une civilisation plus avancée,
«s termes d'art ou de science, que les peuples peuvent
•e communiquer par lenrs relations subséquentes. On se
eonteotait le plus souvent d'une ressemblance fortuite
de lettres ou de syllabes, au lien de rechercher la ressem-
blance du sens, ce fut seulement depuis Leibniz que les
travaux devinrent plva sérieux : ce savant avait recom-
atandé l'étude des idiomes avant de bâtir des systèmes,
et on se mit à recueillir des matériaux. On n'avait encore
obtenu que des résultats partiels, et il leur manquait un
lien, lorsque les conquêtes des Anglais dans l'Inde atti-
rùrent l'attention sur le sanscrit. On découvrit qu'il était
la souche des grandes branches du langage européen, et
la descendance collatérale des langues fut désormais une
vérité évidente. On étudia d'après ce principe les autres
langues connues, et l'on est arrivé à réduire à cinq ou
six le nombre des langues mères ou indépendantes. Pré-
exista-t-il une langue unique, type perdu, dont les autres
idiomes reproduisent quelques traits? C'est ce que ne
démontre aucune preuve concluante. Parmi les travaux
Tei plus importants sur la Linguistique, sont : le Voc<k-
bidair* wAyglGtU d'Hervas, 1787; le MUhridate d'Ade-
inog, 1817; VIndex alphabétique des langues de tout
fmûvers par Vater, 1815 ; V Alphabet européen appliqué
«MX langues asiatiques jJ^bt Volney, 1819; VAsiep(Ày'
9^oUe, de Klaproth, 1823; V Atlas ethnographique du
9Me, par Adr. Balbi, 1826; Ib^ Grammaire comparative
des laiçfsês indo-germaniques, par Fr. Bopp, 1833-53;
les ObsmyfaOons d'Eo^ne Bumouf sur cette Grammaire.
1833 ; les Notions de linguistique de Charles Nodier, 1834
(oorrage souvent très-paradoxal); le Parallèle des lan-
gues de r Europe et de l'Inde, par Eichhoff, 1836; l'ex-
oellente Dissertation de Guill. de Humboldt sur le Kawi
VBistaire générale et systèmes comparés des langues sé-
WHiiques, par If. Renan, 1855; le Z)tcttonnatr0 de lin-
gîÊÎstiqne, par M. Jehan {Encyclopédie théologiqiie de
l'abbé MUgne).
UNGULA. T. notre Dictionn. de Biogr. et d'Histoire.
UNOS, nom d'une très-ancienne chanson grecque,
tiré de linos , fils d'Apollon et d'Uranie (T). Homère en
bit mention au 18* chant de V Iliade y dans la description
des vendanges représentées par Vulcain sur le bouclier
ffAcliille; et un fragment d'Hésiode, cité par Eustathe
dans son commentaire sur Homère, nous apprend qu'on
chantait le Linos dans les festins et dans les chœurs de
daoïe. Cétait un chant lugubre. On l'appelait aussi
ifimof . F. YAjax furieux de Sophocle (v. 625) et l'Élégie
de Moscfaus sur la mort de Bion. P.
UDÎTKA1I, pièce de charpente ou de fer placée en tra-
vers et sur les Jambages d'une baie de petite porte ou de
fenêtre pour en former la fermetiiire. Si le linteau doit
mster apparent, on le décore de sculptures.
liOr^ Cet animal a été considéré de tout temps comme
le symbole de la force et de la mijesté. Lm anciens
Fenes, Venise^ la Belgique, plusieurs ordres de cheva-
lerie, l'ont pris pour emblème. Chez les Grecs, il étali
spécialement consacré à Cybèle. En Egypte, il fut le sym-
bole de la vigilance, et ouelquefsis du Nil. Au moyen âge,
le lion fut un animal héraldique : il est dit naissant,'
quand il ne parait qu'à moitié sur le champ de l'écu;
mome, sll n'a ni dents ni langue; affamé^ sans queue ;.-
issant, lorsque étant sur un chef ou une fasce il ne mon-
tre que la tète, le bout de ses pattes de devant et l'extré
mité de sa queue; léopardé, quand il semble marcher;
lampassé, quand sa langue et ses gnifes sont d'un autre
émail que son corps. — La figure du lion a toi^ours été
employée pour orner les trônes et les entrées de sanc-
tuaires et de palais. Quand le sculpteur ne pouvait placer
l'animal entier, il en rappelait l'idée, en ornant de griffes
les appuis de différents meubles. On vit assez fréquem-
ment des effigies de lions décorer les portails des éiglises
du moyen âge : ces lions étaient l'image de la juridiction
ecclésiastique, qui s'exerçait à la i)orte des églises , et,
comme le disent certaines chartes , inter leones. Il y en a
au porche méridional de la cathédrale du Mans , aux
entrées de beaucoup d'églises italieones, notamment à
Reggio, Bologne, Foligno, Plaisance, etc. Quelquefois un
lion soutient la chaire épiscopale et le cierge pascal. Le
lion est un attribut du prophète Daniel,* de S^ Marc, de
S» Venant, de S** Thècle, etc. B.
LION d'or, monnaie. V. notre Dict. de Biogr»
LTON DP. BOURGES. V. lo Supplément.
LIOUBE , terme de Construction ; la même chose que.
la gueule de loupCV. ce mot).
LIPOGRAMMATIQUE (Ouvrage), mot formé du grec
leipô, Je laisse, et gramma^ lettre, et signifiant ou U
n^entre pas certaines lettres. Pindare avait fait, dit-on,
une ode où n'entrait pas la lettre Ç, et Lasos d'Hermione
une ode et une hymne sans ç. On citait , au m" siècle
de notre ère, une Iliade de Nestor de Laranda, dont
le P' livre était sans a, le H* sans 6, etc. Une Odyssée
lipogrammatique fut également composée par IWphio-
dore. Un certain Gordianus Fulgentius composa Sur les
âges du monde et de'l*homme un ouvrage latin en 23 cha-
pitres, où manquait successivement une lettre de l'al-
phabet : il nous en reste 14 chapitres. Dans un reçuei
de pièces espagnoles publié en 1 709 par Isidore de Roblès,
les cinq premières rejettent chacune à leur tour une des
cinq voyelles. Orazio Fidèle a publié à Turin, en 1633,
L' a sbandito sopra la potenza d'amore, poème de
1,600 vers, où la lettre r ne se trouve pas une seule fois.
On peut rapprocher de cette misérable frivolité le soin
minutieux et ridicule qu'on a prêté à Isocrate de ne lais-
ser échapper aucun hiatus dans un de ses plus longs
ouvrages, et la gêne inutile que s'est donnée Coôffeteau
pour éviter l'emploi de car dans toute l'étendue d'un
assez gros volume. Gomberville se vantait puérilement
de n'avoir pas employé une seule fois cette conjonction
dans son roman de Polexandre, où elle s'était néanmoins,
à son insu, glissée en trois endroits. P
LIQUIDATION, en termes de Commerce, apurement
de tous les comptes d'une maison de commerce ou d'une
société quelconque, dépouillement de toutes les dettes
actives et passives, et payement intégral ou proportionnel
des unes et des autres. La liquidation peut se faire dans
quatre circonstances différentes : 1^ par suite de la simple
retraite ffun commerçant, qui cède ses affaires à un
autre; avant de se retirer, il fait un inventaire général
de sa situation, opère le recouvrement de toutes les
sommes qui lui sont dues, et vend à son successeur son
fonds et son actif, déduction faite du passif; rien de plus
simple que ce genre de liauidation . qui se confond pres-
que avec rinventaire {V. ce mot)\ — 2« par stUte du
aécès du commerçant. Si le mort a un successeur, la
liquidation se fait absolument comme dans le cas précè-
dent, et la personne du négociant décédé est représentée
par les héritiers. Si le mort n'a pas de successeur, on
commence par faire l'inventaire, on vend les marchan
dises et effets, on solde les dettes, on recouvre les créances,
et le partase des biens n'a lieu définitivement ({ue quand
la liquidation est terminée et qu'on a pu détermmer exac-
tement le chiffre de la fortune du mort; — 3^ par suite
de dissolution de société. Si c'est une société anonyme, la
liquidation est faite par une personne élue par les action-
naires; si c'est une société en nom collectif, elle a lien
par un ou plusieurs associés ; si c'est une société mixte,
la liquidation a lieu par un ou plusieurs des sociétaires
en nom collectif et solidairement responsables. En tout
cas, le liquidateur est responsable, non-seulement envers
les associés auxonels il est substitué, mais encore envers
les personnes qui ont en des relations avec la Société ; —
LIS
LIT
4* par tuUê ds nutuvaises affaires» La liquidation , dans
ee cas , a pour but de conserver aux créanciers les débris
de la fortune du commerçant, et de leur partager propor-
tionnellement à leurs créances les valeurs actives de la
maison en déconfiture. Ce dernier genre de liquidation
se rapproche de la faillite (F. cê mot). En résumé, voici
les principes de la liquidation s le Ucruidateur monétise
toutes les valeurs de la Société ou de la maison de com-
merce ; dans les bonnes aflaires, il paye toutes les dettes,
remplit tous les engagements, satisfait à toutes les obli-
gations, et, quand la Société ne doit plus rien, il partage
entre les associés ce qui reste au prorata de leurs droits ;
dans les mauvaises. Il réunit en bloc ce qu'il peut réali-
ser, et le distribue au marc le franc par contribution
d'abord entre les créanciers jusqu'à extmction de leurs
créances, et ensuite entre les associés : c'est alors une
fiiillite déguisée, et le liquidateur est plnt6t un syndic
Les successions, les dissolutions de communauté entre
époux, nécessitent aussi des liquidations. V, Michaux ,
Traité pratique des liquidations, 1860, in-8^
En matière Judiciaire, on reconnaît aussi la liquidation
des dommages-intérêts et la liquidation des frais et dé--
pens, faites par le Jugement même qui les adjuge.
En termes de Bourse, la liqtùdation des rentes est le
règlement des négociations pour fin courant, lequel se fait
généralement à la 4* bourse du mois suivant. Les opéra-
tions sur les chemins de fer se liquident deux fois par
mois, le 15 et le 30. L.
LIQUIDE, en termes de Finances, est synonyme de
net, clair, crui ne peut donner lieu à contestation, et se
dit surtout d'une dette, d'une créance.
LIQUIDES (Consonnes). Ce sont les 4 lettres L, M, N,
R, qui, étant employées à la suite d'une autre consomie
dans une même syllabe, sont coulantes et se prononcent
aisément. Ce terme est adopté dans renseignement de la
langue erecque ; mais il n'est guère d'usage dans celui des
antres langues. H nous vient des grammairiens latins,
qui appelaient spécialement ainsi L et R ; chez les Grecs
seulement, le nom de Liquides s'appliquait aussi à M et
N. Certains grammairiens placent le \f. parmi les labiales,
X, V, p parmi les linguales, et cette distribution est adop-
tée aussi par plusieurs grammairiens français pour nos
4 lettres correspondantes. P.
LTRAZZA, ancienne monnaie d'argent de Venise, valant
environ 63 centimes.
LIRE, monnaie. V. notre Dict. de Biogr, et d^Bistoire,
LIS (Fleurs de^ V, Fleors db Lis, dans notre Diction-
naire de Biograprde et d'Histoire,
USBONNINE, monnaie de Portugal, ainsi nommée de
la ville de Lisbonne. On l'appelle aussi moeda d^ouro
f monnaie d'or) ; elle vaut 4,800 reis ou 33 fr. 96 c. Il y a
aes demi-lisbonnines ou meta moeda (16 fr. 98 c.) et des
quarts de lisbonnine ou quartinhos (8 fr. 49 c).
USIEUX (Église S*-PiEaRs-BT-S^PAUL, à). Cette an-
cienne église ciObédrale, fondée vers l'an 1022, a subi tant
de reconscructions et de réparations, que le style roman
primitif a fait place partout aux formes o^vales. La fa-
çade, précédée d'un parvis auquel on accède par une ouin-
zaine de marches, est simple et sévère : la porte principale
est surmontée d'une longue croisée à meneaux fleuris ;
les deux petites portes sont pratiquées sous deux tours,
dont une seule, celle du Midi, est surmontée d'une flèche.
Toute cette construction, moins la flèche érigée en 1579 à
la Blace d'une autre qui s'était abattue en 1553, est du
xsr H du xin* siècle, ainsi que la plus grande partie ds
la Mf. L'édifice est en forme de croix latine : son vais-
seau, qui manque de largeur, a néanmoins de l'élégance
et de la hardiesse. La voûte est soutenue par des colonnes
monocylindriques à bases garnies d'empâtements. Les
collatéraux font tout le tour de l'église, et sont garnis de
chapelles. Le transept est couronné d'une tour, en forme
de lanterne. La chapelle de la S** -Vierge, érigée au
XV* siècle par Pierre Cauchoo, en expiation de sa con-
duite perverse et cruelle envera Jeanne d'Arc, a reçu de
nos Jonra un bel autel gothique, ouvrage de Bleuet. L'église
de lisleux est presque complètement dépourvue d'œuvres
d'art : tout a été saccagé par les calvinistes en 1562 et
par les révolutionnaires ae 1793. C'est à la Révolution
que l'on détruisit un Jubé de menuiserie, qui avait pris,
en 1689, la place d'un Jubé en pierre.
I USSE ou LICE (du latin lictum, trame), nom donné
aux cordelettes tendues sur le métier à tapiss^ie et an
moyen desquelles l'ouvrier ramène la laine d'avant en ar-
rière. Dans le métier à haute lisse , ces cordelettes sont
tendues verticalement, tandis que dans le métier à basse
lisse elles sont tendues horizontalement.
LISSES, en termes de Marine, longues pièces de bols
S'en met sur le bout des membres des cdtés d'un navire.
s lisses de vibord ou de plat-bord sont la ceinture qui
envelopj>e le bfttiment dans sa partie supérieure; les liua
d^appus sont les garde-corps.
LISTE CIVILE. V. ce mot dans notre Dietiomiaire de
Biographie et d'Histoire.
usTB ÉLBCTORALE, listo des élocteurs, dressée par le
maire dans chaque commune. Le tableau des additioDB
et des retranchements est déposé au secrétariat le 15 Jao*
vier au plus tard, et on en est averti par voie d'affiches :
pendant 10 Jours, tout citoyen omis peut présenter sa
réclamation , et tout citoyen inscrit peut réclamer rin-
scription ou la radiation d'nne personne omise on indû-
ment inscrite. Les réclamations sont Jugées par une com-
mission composée, à Paris, du maire et de deux a4ioints,
et, partout ulleun, du maire et de deux conseillers mu-
nicipaux désignés par le Conseil s la décision doit être
renoue dans les 5 leurs, puis communiquée dans le délai
de 3 jours aux intéressés. On peut en appeler, dans les
5 Jours de la notification, devant le Juse de paix du can-
ton, qui statue dans les 10 leurs, bl la demande impli-
quait la solution préalable d^une question d'état ciril on
politique, cette question devrait avoir été vidée par les
juges compétents, avant la décision du juge de paix. Cette
décision peut être enfin déférée à la Gonr de cassation
dans les 10 joun de la notification. Tous les actes Judi-
ciaires en madère électorale sont dispensés da timbre et
enregistrés gratis. Au 31 man, le maire dût définitive-
ment la liste, qui reste déposée an secrétariat, où toute
personne peut en requérir la communication, et elle reste
en cet état jusqu'à l'année suivante.
LISTEL. V. FïLR.
UT, meuble destiné au concher. Les premiers lito du-
rent être des litières de paille ou d'heroe, des amas de
Joncs ou de roseaux jetés sur le sol , puis de simples plan-
ches, exhaussées sur des piliers pour ériter l'humidité du
sol, et recouvertes de peaux de bétes, d'herbes sèches oa
de laine. Peu à peu le luxe embellit la forme des lits, et
la mollesse, arrivant à la suite des richesses et des pro-
grès de la civilisation, insphra l'Idée de les garnir de
coussins ou de matelas souples et moelleux, et de lea
couvrir de somptueuses étoffes. Les Égyptiens donnaient
fréquemment à leura lits la forme d'animaux, dont la tète,
plus élevée, formait le coussin. Les Romains eurent dif-
férentes espèces de lits ( V. Lit, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d*Histoire) . Pendant le moyen Age et
dans les temps modernes, la forme des lits n*a guère
varié que dans les pilien qui les soutiennent et les bal-
daquins qui les couvrent. Longtemps on les a faits très-
hauts , au point qu'il fallait des gradins pour y monter;
on les élevait, d'aiUeun, sur une estrade, et une balus-
trade les entourait, au moins de trois côtés. De la base
de ces grands lits on pouvait souvent faire sortir un tiroir
à roulettes, qui était lui-même un autre Ut, une couchette
pour un serviteur.
UT, en parlant des pierres, surface sur laquelle elles
reposaient dans la camère. On doit, dans la oonstructioa
des édifices, faire attention au lit des pierres, afin de
les placer dans le même sens pour les assises horizon-
tales ; autrement la pierre, dite alon posée en détit, perd
une grande partie de sa force, et résiste moins à l'écra-
sement. Loi^ue la pierre forme les claveaux d'un arc,
d'une voûte ou d'une plate-bande, les lits doivent suivre
les Joints normaux, parce que c'est par là que la pierre
prend charge.
UT DB CAMP, couche en bols placée à demeure dans
les corps de garde. Elle se compose de planches Incli-
nées, sur lesquelles on jette des paillasses ou des ma-
telas, ou quelquefois qui restent nues.
UT DE JUSTICE. { K. cos mots dsns notre Dictionnaire
UTANIES. S àe Biographie et d^Histoire.
UTEV^KA. V. LiTHDANIEll.
LITHOCHROMIE (du grec lithos , pierre, et chrâma.
couleur) , procédé de coloriage des estampes, ainsi appelé
parce qu'on l'appliqua d'abord aux limographiea. On
étend derrière l'estampe, qu'on a rendue transparente eo
l'imprégnant d'un vernis gras, des couleurs à l'huile par
couches égales et épaisses; on n'emploie jamais qu'un
seul ton pour chacune des parties qui sont à peindre.
L'image étant transparente, les lumières et les ombrci
qui s'y trouvent modifient le ton uniforme de la couleur,
et lui donnent les demi-tons nécessaires pour le modelé.
On colle l'estampe sur une toile à peindre an moyen
d'une couche de blanc de céruse, et on passe on vends
sur la surface extérieure. De cette façon on obtient près-
LIT
1J73
LIT
fM mécaniquement des tableaux agréables et Imitant les
tableaux à l'halle.
LITHOGRAPHES. Us sont soumis, au point de Yue de
Ja législation, aux mêmes règlements que les imprimeurs
m ^pograpfaie.
LITHOGRAPHIE (du grec lithos, pierre « et grapM,
J'écris^ , art de tracer des caractères et des dessins sur
ooe pierre calcaire, dite pierre lithographiquef et de les
r^roduire sur le papier par Timpression. Pour qu'une
pierre soit bonne, il faut qu'elle soit sans tache , d'un
nain très-fln, d'un ton uniforme, pesante et spongieuse.
Les deux faces opposées sont parfaitement planes ; l'une
des deux surfaces est brute, l'autre a été bien polie au
moyen de la pierre ponce. On écrit ou on dessine sur
cette surface unie, avec une plume d'acier trempée dans
une encre dite lithographique ou arec un crayon gras :
poison fixe l'écriture ou le dessin en lavant la pierre avec
one eau de gomme à laquelle est mêlé un peu d'acide
oitrique ou chlorhydrique. Ce lavage rend le dessin inso-
luble, pénètre la portion non dessmée de la pierre, et la
^rend incapable de recevoir et de retenir les corps gras ,
mais susceptible de retenir l'eau. Pour imprimer, on place
la pierre dans un chariot, espèce de caisse où elle est
maintenue solidement à l'aide de vis en fer on de coins
en bois : on la mouille avec de l'eau propre , puis on en-
lève les dessins ou les écritures avec de l'essence de téré-
beatliine. On humecte do nouveau et très-légèrement
toute la pierre avec une éponge fine; on étend aussitôt,
avec un rouleau élastique, de l'encre d'.mprimerie, qui se
fixe seulement sur le dessin. On place alors une feuille
de papier blanc un peu humide sur la pierre, on la recou-
rre d'une seconde, dite de macuUUure, et on abat dessus
un cbâasia de fer garni d'un cuir fort et bien tendu. On
soumet le tout à la pression d'un rouleau ou d'un rftteau
en bois, qui agit perpendiculairement sur la surface. —
U lithogiûphie fut découverte en 1706 par un Bavarois
Qommé Senefelder, à qui le célèbre musicien Weber dis-
puta cette invention; introduite en France, dès 1802, par
trédéric André, l'un de ses associés, elle ne commença
d'y prospérer qu'à partir de 1814, grâce aux efforts du
comte de Lasteyrie, à Paris, et d'Engelmann à Mulhouse.
Motte, Bry, Lemercier, Chevalier, Lanzlumé, Jobard, la
perfectionnèrent ensuite, et elle atteignit rapidement son
apogée avec les dessins de Charlet, de Carie et d'Horace
Veraet, d'Ach. Devéria, de Fragonard, de Picot, de Da-
gnerre, d'Isabey, de Villeneuve, de Gosse, de Bourgeois,
deMIchalon, de Léon Noël, de liaurin, de Gavaml, de
Û^ivedon, de Mouilleron, de Nanteuil, de Daumier, etc.
F. Senefelder, VArt d$ la lithoffraplM, Paris, 1819; Gbe-
nlier et Langlumé, Manuel du lUhooraphe, 1838 ; Thénot,
Cours complet de lithographie, 1836; Engelmann, Traité
théorique et pratique de lithographie, 1839; Bré^ut,
Koecht et Desportes, Manuel complet de V Imprimeur
lithographe, 1850.
On donne le oom de chromo4ithographi» à la lithogra-
pbie en conleor. On fait d'abord le trait sur la pierre, puis
OQ fût autant d*épreuves qu'on a besoin d'employer de
cooleors. On transporte chaque épreuve de trait sur une
pierre différente , puis on modèle chaque couleur de ma-
oière à produire les effets désirés, en combinant les cou-
leurs de manière qu'elles tombent les unes sur les autres.
Cest an procédé long et minutieux, surtout quand les
oouleorset les teintes sont nombreuses, et on n'y a bien
zéoisi que depuis EngelmauL En Angleterre, Daty, Ho-
SUth, et Rowney ont publié des fac^imile d'aquûeUes,
<tm ont eu un très-grand succès. En France, la chromo-
lithographie a été employée pour les pUnches d'ouvrages
importants, tels que la Monographie des tfitraux de la
9athédraiê de Bourges, le Moyen âge et la Renaissanee,
fhmtation de J^-C, le lÀore d:Heures tFAnne de Bre-
tejne, etc. Elle permet de reproduire avec une perfection
étonnante non-seulement les miniatures des manuscrits,
mais encore les tableaux des grands maîtres : c'est ainsi
fa'on a publié le Couronnement de la Vierge d'après
Giovanni da Flesole et la Vierge du Pérugin.
UTHO-PBOTOGRAPHIE, photographie sur piene. Les
premiers essais pour transformer les plaques dsnier-
riennes en planches gravées ont été faits par SOI. Fleean
« Lemahre; mais, la morsure à l'acide étant trop faible,
sa na put obtenir qu'une vingtaine d'^renves. Plus tard,
MH^LismevQMr, BareswiU et Lerebours prirent un brevet
Mc>iitt neviMa UMHle d'application de la photographie
I^IsliliiiMnpkiB. Leur prooMé a aervi pour la pubiica-
JHA ^ isrrwàÉi d» Memphis par If. Mariette, pour
Hifiu* d^mAÊf^ éê Paris par M. PenguiUy i'Hari-
UTIIOSTROTOS- V. Mosaïque.
LITHO-TYPOGRAPHIE, procédé à l'aide duquel on (Ut
des fao-^imile d'impressions typoçraphi(jues. On décalque
sur pierre, à l'aide d'une prépairation chimique, les pages
de livres ou les gravures dont on veut obtenir de nou-
velles épreuves, et on en fait le tirage par les moyens
ordinaires de la lithographie. On peut de la sorte renou-
veler des éditions rares et précieuses. Les premiers essais
furent faits par MM. Boyer et Massias, qui donnèrent è
leur procédé le nom d'homoeographie. MM. Aug. et Paul
Dupont, imprimeurs à Paris, ont obtenu des résultats
plus satisfaisants.
LITHUANIEN (Idiome), idiome slave, de la branche
lettiquc, appelé Ittewka par ceux qui le parlent. 11 a été
remplacé, dans les classes élevées de la population par
l'allemand, le polonais ou le russe, selon la domination
que subit l'ancienne Lithuanie; mais les classes infé-
rieures, et principalement les habitants des campagnes,
en font toujours usage. On y reconnaît trois dialectes s
le lithuanien proprement dit, parlé à l'Est, dans les pala-
tinats de Wilna et de Troki ; le samogitien ou potaco»
lithuanien, au Nord; et le prusso^ lithuanien, dans les
pays de Tilsitt, d'Insterburg, de Gumbinnen et de Memel.
Le lithuanien est généralement regardé comme l'ancienne
langue des Hérules et des Wendes, et passe pour être le
plus pur des idiomes slaves, le plus rapproché de la
source indienne. Il Joue vis-à-vis des langues slaves le
même rôle que le gothique vis-à-vis des langues germa-
niques. Les racines y existent plus simples et plus mélo*
dieuses, et les mots y ont des finales douces et sonores.
II a conservé en grande partie les formes grammaticales
et la variété d'intonations qui distinguent le sanscrit t
il en a les sept cas de déclinaison, le nombre duel, et les
désinences. En lithuanien, le substantif ne marque pas
le genre neutre. On ne distingue pas les 3** personnes du
singulier, du duel et du pluriel. Le passif s'exprime à
Taide de l'auxiliaire être. Il existe uim voix moyenne on
réflective, qui se forme par un suffixe et un préfixe. Les
coïncidences que le lithuanien offrw avec le grec et avec
le gothique ne sont probablement fondées oue sur la com-
munauté d'origine. On se sert , pour l'écnre, de l'alpha-
bet allemand ou de l'alphabet polonais. — La littérature
lithuanienne n'est pas riche, une traduction de la Bible
à l'usage des paysans fut commencée en 1580 par Bredke,
mais ne put être achevée que longtemps après par une
réunion de pasteurs, parmi lesquels on cite Schwab,
Schimmel, etc. La plupart des livres lithuaniens appar-
tiennent à la littérature religieuse. La production la plus
importante dans le genre profane est un poème sur les
Saisons, composé au xvui* siècle par Donaleitis. Un re-
cueil de DaUtios (V' ce mot) a été publié par Rhesa à
Kœnigsberg en 1818. On doit à Ostermqrer une Histoire
littéraire, et à Hassenstein une Histoire de la Réforma-
tion. F. Klein, Grammatica lithuanica, Kœnigsberg,
1633, in-8*,et Compendium lithuanico^ermanicum, ou
Courte Introduction à la langue lithuanienne^ 1673, in-8*;
Szyrwid, Dictionnaire polonais, latin et lithuanien,
Wihia, 1677, in-8«; Haack, VocainUaire lUhuanien-ail&'
mand, Halle^ 1730, in-8*; Mielcke, Grammaire lithua-
nienne, et Dictionnaire lithuanien et allemand, 1800, ou-
vrages composés antérieurement par les deux Rufaig;
Pott, De borusso-lithuanico in slavicis letticisque lingws
principatu. Halle, 1837, \n-i^\ Von Bohlen, 5iir iss rop-
porte de la langue indienne avec le lithuanien,^ en allem.,
KœnigsberjB, 1830, in-8<>; Bopp, Grammaire comparée
du sanscrit^ du xend. du grec, aillai, du lithuanien,
du gothique et de VatUmand, en allem., Berlin, 1830-42,
4 parties in-8*.
LmËRE. V. ce mot dans notre Dtetionnaire de BiO"
graphie et d^Bistoùre*
LITIGE (du latin lis, litis, procès). Une chose est se
litige, quand elle est l'objet d'une contestation, d*un pro-
cès. On appelle litigont celui oui conteste en Justice, et
litigieuœ, ce qui peut faire robjet d'un débat.
LmSPENDANCE (du latin lis, litis, procès, et pen--
dere, être pendant), se dit, 1® du temps consacré à
l'instruction d'une cause; S* de la durée d'un procès;
3« d'une instance qui n'a pas encore été terminée par
Jugement ou par an arrêt souverain ; A^ de l'existence si-
multanée de deux actions entre les mêmes parties pour le
même objet, mais portées devant deux tribunaux diffé-
rents.
LITOTE (du grec litotes, petitesse, exiguïté), figure
de Rhétorioue qui consiste à se servir par modestie, par
égard, par ironie, d'une expression qui dit le moins pour
faire entendre le plus sCt m'estpaê un sanmU , poat ^tn
LIV
1174
LOJIl
f€8t wn tgfioroni -» Ils ne s*atment pas. pour Us se
kaUsewt; — Cet enfant n'est pas sot, c-à-d. est inteUi-
O^nt, Fa, je ne te hais point , dit Chimène à Rodrigue :
œ mot est une déclantion d^amour faite avec la délica-
tesse que réclame la situation des deux personnages.
Lorsque Corydon, dans Virgile, dit à Alexis : Nec sum
adeo informu, nuper me in littore vidi Qe ne suis pas
li difforme. Je me suis tu dernièrement dans la mer),
il veut, sous cette forme modeste, donner à son Jeune
ami une haute idée de sa beauté et de ses grftoes. Po!y-
Çhème en dit autant de lui-même dans la 0* idylle de
héocrite (▼. 34) et dans la 11" (v. 70). P.
LITRE, y. CeifETDRB PUIli'.DIlE.
LITTÉRALE (Langue). V, Langub.
UrrERATURE. V. le Supplément.
LITURGIE, en grec leUourgta {deleitos, adjectif ionien
de laos, peuple ; et de ergon, osane), se disait, en géné-
ral , chez les anciens Grecs organisés démocratiquement,
de tout service public, et, &ns un sens restreint, de
certaines prestaftons imposées aux citoyens qui remplis-
saient les conditions de fortune déterminées par la loi.
Ces prestations, distinctes de l'impôt sur les biens, ser-
Taient de supplément aux revenus publics. A Athèn««, il
7 en avait de deux sortes : les liturgies encycliques ou
ordinaires, qui revenaient tous les ans et dans un orortî
déterminé; et les liturgies extraordinaires, qui n'avaient
lien qu'en temps de guerre. On distinguait ouatre litur-
Kjes encycliques principales: 1<^ la Choréiie ( V, CHoaéGE) ;
V la Gymnasiarchie ( V. Gtmn asiasque, dans notre Dict,
de Biographie et d' Histoire) i ZH*HestiasiSf banquet donné
pendant les fêtes des tribus, et dont les fhds étaient sup-
portés par un citoyen choisi dans chaque tribu ; 4<* VAr-
chithioîrie, consistant àconduire les théories oudéputations
sacrées, qui se rendaient à Délos et dans d'autres lieux
sacrés, et qui assistaient aux grands Jeux de la Grèce.
Les liturgies extraordinaires étaient au nombre de deux :
la triérarehiê, consistant dans l'équipement et l'entretien
des navires de guerre, et VAvance de l'imp&t pour le
eompte d'autres contribuables.
UTuanu, formule de prières. F. notre Dietiomtake de
Biographie et d'Histoire,
LTTUUS. ( V. ces mots dans notre Dtctiomuure de
UVAH. ] Biographie et d'Histoire.
UVARDE (Voile). V. Voiu».
UVONIEN (Idiome). F. Lbttoh.
LIVRAISON, en termes de Commerce, remise ou déli-
france que le débiteur d'une marchandise, d'une chose
Selconque, en fait au créancier. Après une vente, si le
u de la livraison n'a pas été indiqué par la convention,
il fiuit examiner si robligation est de livrer un corps
certain ou des choses indéterminées : dans le premier cas,
la livraison doit se faire au lieu même où se trouwdt la
chose au moment du contrat ; dans le second, si llnter-
prétation de la convention , l'usage local ou les circon-
stances laissent subsister l'incertitude, le lieu de la livrai-
son est la demeure du débiteur. Relativement au temps^
la livraison est due au terme convenu, et, si aucun terme
n'a été fixé, aussitôt que le prix a été payé.
LivEAisoN, en termes de Librairie, portion détachée
d'un livre, qui se publie ainsi pour en rendre l'acquisition
plus facile au public. Ce mode de publication , coomiun
aujourd'hui pour les ouvrages de lon^e haleine ou très-
populaires, n'est- pas nouveau : au lieu de livraison, on
diuit autrefois mumr ou fascicule.
LIVRE, monnaie. F. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire. <
uvRB, assemblage de feuilles manuscrites ou impri-
mées que l'on destine à la publicité. Nous avons indiqué,
dans notre Dictionnaire de Biograplne et d'Histoire, ce
Sue (ùt le livre chez les Anciens et Jusqu'à la découverte
u papier et de l'imprimerie. On conçoit que les livres,
écrits à la main, Éar des matières d'un prix élevé, n'aient
point été communs, surtout au moyen âge, et aient été
payés des sommes énormes. Daunou affirme ( Hist, litt. de
MFrance, t. XVI ) qu'an xui* siècle un in-folio valait quatre
à cinq cents firancs d'ai4ourd*hui. En 1279, on copiait, à
Bologpe, une Bible pour 80 livres (435 fr.). Vers 1400,
une copie du Aoimm de la Bose ae vendit, à Paris, à rai-
son de S33 fr. Au xv« siècle môme, le Pogge avait à ven-
dre on TIte-Live pour ISO écus d'or. An reste, ces prix
M sont peut-être pas très-précis, attendu qu'ils devaient
être souvent accrus par la dorure et l'enluminure. L'im-
primerie fit baisser le prix des livres : si Ton voit encore,
en 1470, on évêqoe d'Angers payer 40 écos d'or la Bible
de Blayence, imprimée en 140â, bientôt les catalogues de
Colines et de Robert Bstienne mirèrent les acheteui par
la modération de leurs prix. F. Amett, Bedierches sur ta
nature et la forme des livres, Londres, 1837; Edmond
Werdet, Histoire du livre en France jusqu'en 1789, Paris,
1861, 2 vol. gr. in-i8. F. CaujGaAPiUB, Écarroas. B.
UVRB DB BORD, reçlstro coté et paraphé que doit tenir
tout capitaine de navire marchand, et sur lequel il inscrit
toutes les circonstances qui concernent ses fonctions.
UVRK DOR \
f fv.. «.V* .vi,«« .m»./«n. I V, ces mots dans notre
«vîî îmm. »*""«"• } Dictionnaire de Bio^
UVRÉ^S. ) O^aphia et d'Histoire
UVRES (Tenue des). / y couviabiutL
IJVRBS DB COMMBRCE. J ^' I-OMPTABIUTB.
UVRB8 D'éGUSE. F. ÉCUSB.
LIVRET, petit livre dont devait être muni tout onvrier
(roi avait terminé son temps d'apprentissage et qoi était
libre de tout engagement. Il était délivré, moyennant on
prix fixe de 25 centimes, par le préfet de police à Paris,
par le préfet du Rhône à Lyon, et par le maire dans toute
autre commune. En tête du livret se trouvaient les lois et
les ordonnances concernant la matière. Le livret conte-
nait les nom et prénoms de l'ouvrier, son Age, le lieu de
sa naissance, son signalement, la désignation de sa pro-
fession, et le nom du maître chez lequel il devait travail-
ler quand le livret lui était accordé. Chaque fois qu'il
changeait de maître, il devait faire inscrire sur son livret
sa sortie et son entrée par son ancien et son nouveau maî-
tre; il devait de plus y fitire écrire qu'il était libre de tout
engagement; chaque mut&tion nécessitait un visa qui
était gratuit. Le maître inscrivait sur le livret les avances
dont l'ouvrier pouvait rester débiteur envers lui ; mais il
ne pouvait y faire aocune annotation favorable on déf»?o-
rable. Tout ouvrier qui voyageait devait être muni de son
livret — Les lettres patentes du 12 septembre 1740 avaient
déjà exigé que tout ouvrier, quittant son patron, fût muni
d'un congé d*acquit. La loi du 12 septembre 1781 ordonna
que tout ouvrier eût son livret; elle (Ut confirmée par ia
loi du 29 germinal an xi et par l'arrêté consulaire du 9 fri-
maire an XII (l«'déc 1803). Les lois du 14 mai 1851 et du
22 Juin 1854 ont complété et fixé la législation en cette ma-
tière. Les contraventions aux règlements sur les livrets ne
poursuivaient devant le tribunal de simple police : la pé-
nalité consistait le plus souvent en une amende de 1 à
15 fr., et pouvait, suivant les circonstances, s'aggraver
d'un emprisonnement de 1 à 15 Jours. Le livret est sup-
primé dep. 1869.
Le livret a été Imposé en 1853 aux domestiques (V, ce
mot). Chaque soldat en reçoit un également i ce livret,
qui commence par le Code pénal militaire, contient les
nom, prénoms, Age, profession ancienne, domicile, Ueo
de naissance et signalement du soldat, la désignation du
corps auquel il appartient, la note des effets d'équipe-
ment et d'habillement qu'il a reçus, ainsi que les rete-
nues à lui faites pour la masse, etc.
Les déposants aux caisses d'épargne reçoivent un livret
numéroté, portant leurs nom et prénoms, Age, profession
et demeure, et destiné à l'inscription des sommes qui se-
ront successivement versées ou reti rées pour leur compte.
uvarr , poème d'opéra. F. OpAra.
LLOYD. F. ce mot au Supplément a la fin de l'ou-
vrage. ,
LO (Eglise Notre-Dame, à Saint-). Cette église, qui
s'élève au sommet de la ville, a été commencée dans les
premières années du xiv« siècle. Le portail occidental
préisente trois portes assez exigués, surmontées chacune
dune grande fenêtre à meneaux : des deux tours, celle
du nord est la plus ancienne, celle du midi appartient an
XV* siècle. Ce fut seulement au xvii* siècle qu'on les cou-
ronna de flèches polygonales élancées, percées de distance
en distance par de peUtes roses. Une des particularités
curieuses de l'édifice est une grande chaire en pierre,
adoflsée extérieurement à la muraille de l'un des oêtés.
— Saint-L6 possède une autre église, celle de SeùtUé-
Croix, fondée en 805, et l'une des plos anciennes que
l'on connaisse. On y remarque des sculptures intéres-
santes, deux hommes tenant un animal enchaîné au-
dessos du portail, les chapiteaux bisarres des colonnes
du chœur, les représentations de la vie de S* Êloi et de
S^ Hubert, le Pèsement des âmes, etc.
LOANGO (Idiome). Bien que plusieurs articles et on
grand nombre de racines semblent indiquer qoe cet
idiome ot celui do Goniro ont une même origine, ces
idiomos sont réellement distincts. Presse tons les moti
du loango sont monosyllabiques oo bisyllabiquês. Les
lettres a et o y sont très-firéquemment employées, el ter-
minent beancoop de syllabes. Vh aspirée et Vr n'existent
LOC
1175
LOG
fis, et tont nmplaeés par cfc el <. n ny a ni niirM, ni
ooiiibres, ni cas. Pour exprimer la difffrence des genres
dsi» lea objets animés, on ijoute les mots qoi signifient
mâle et fraieUa. Les cas sont indiqués par des préposi-
tions. On compte sept espèces d'articles, pour le singu-
lier, et six poor le plurieL II existe des pronoms person-
nels du verbe, lorsqa'on parle d'hommes on de femmes ;
Us se rendent par les articles propres des noms, lorsqu'on
parle de bètes ou de choses inanimées. Les Terbes ont
tons les temps de la langue française, et d'autres encore
pour exprimer diflérentes nuances du passé. Les conjonc-
tions nian<|aent presque entièroment.
LOBE « terme d'Arcbéologie qui désigne les fragments
de cercle qoi entrent dans la formation des roses et ro-
saces ogimes ou des divers ornementa taillés dms la
Î lierre, tels que les trèfles, les quatre-feuilles, les quinte-
Miles. On dit d'une rose, d'une feuille, d'un omemeui,
quila aont trUobés, mtUtuobéM, polyMiis, «te. Lorsque
les lobea sont découpés en creux, au lieu d'être sailhmts,
en les nonsme oorUr94obes, E. L.
LOCATAIRE (du latin locare, louer), celui qui prend
à lojer une maison on un appartement. Pour ses obliga-
tioiis, F. Bail.
LOCATIF (Cas),terminaiBon des noms de la langue
sanscrite ponr nuuquer le lieu : elle est en î au singu-
lier, en m an plunef. On suppose que l'ancienne langue
grecque eut nn cas de ce genre, et que les terminaisons
adverbiales Ot, Ot, 8c, as, U, en sont des traces. Il faut v
rattacher les adverbes en oi, qui marquent nn lieu où
Ton est, et Ut terminaison Oo, analogue aux terminaisons
k et Oc. La trace du cas locatif se retrouve encore dans
la langue latine, où il a la désinence t pour caractéri»-
timie, comme en grec et en sanscrit. C'est ainsi que s'ex-
plique Is forme particulière des deux adverbea de lieu
s6i et ii6t, et des composés alibi, intin , utroln ; celle des
mots ru», domu», et des noms de ville à la quntion ii6f .
mn', domt, Lugàunt, Romœ (anciennement Bomai\ ; en-
fin le mot tomport ponr dire sn temp< et ittfu, et l'anverlie
' A la question quo, le locatif est marqué par la dési-
nence o : 90, illo, alto, 9110, altquo, intro, ullro; à la
question 911a, |>ar a : ea, iUa, qua, eadem ; à la question
umU, par de : ind», exmde, deinde, imds. P.
LOCATION, se dit de l'action de donner à loyer, et du
contrat de louage. F. Bail, Looagb.
LOCH , instrument servant à mesurer le tUlagê on la
vitesse des navires, n se compose d'un bateau de loch,
planchette triangulaire, lestée à sa base de manière à
^re presque entièrement immergée et à se tenir verticap-
lement une pointe en haut, et d'une iî^ns de loch, corde
de très-petite grosseur, attachée par une extrémité au
batean de loch, enroulée par l'autre sur nn tour dans le
navire, et divisée en partieB é^des par des norads formés
à des distances de 15 mèL Quand le navire est en mar-
che, on Jette à la mer le batiean de Iqch, et on laisse U
ligne se dévider : si le navire s'écarte, en une minute ,
de 2, 3, 4 nœuds de son bateau éb loch, on dit qu'il
fUe2^5f4 noBuds à la minute. Cette manière de mesurer
la chemin est asses peu exacte. La table de loch est une
srdoise on un tableau noir, sur lequel on marque les
heures où le loch a été Jeté, ainsi que les nœuds qui y
correspondent.
LOCHES (Château de). Construit snr un vaste plateau
dominant la ville, parallèlement au cours de l'Indre et à
SO met. de hauteur à pic au-dessus de cette rivière, il a
une enceinte de mnitdUes, de tours et de fossés, oui a
près de % kilomèt. de développement. Le donjon, qu^on a
fait remonter aux x" et xi* siècles, et même à l'époque ro-
maine, mais one IL éb Caumont ne croit pas antérieur au
xn* siècle, s la forme d'un carré long, dont deux façades
ont iS met. environ, et les deux autres i4 met., et s'élève
encore à une hauteur de 40 met Les façades du nord et
du midi sont garnies de quatre piliers butants 1 la façade
de Test n'a que trois piliers, et celle de l'ouest trois. Les
murs ont 4 met. d'épaisseur à leur base, et S met. seu-
lement vers le sommet; nn escalier en pierre, nratiqné
dans leur intérienr, communiquait à chaque étage, et
conduisait à la plate-forme, ruinée depuia longtemps. Il
n'y avait de fenêtres que dans la partie inférieure de U
Cour, où elles étaient protégées par le mur d'enceinte; on
les a marées : plus hant, on remarque des trous ronds
00 carrés de mlTérentes grandeurs, alignés horisontale-
ment, et dcmt Fosage n'est pas eonnu, et enfin un certain
moahn de petites embrasures. An nord du donjon s'élève
une antre tour qui Inl est contigné, et <mi parait avoir
été bâtie pen de temps après : encore pins ruinée, elle
a Is mOme forme* nuds mr de moinms piQportIoos
fis met sur 7), et est moins élevée; ses mnrs ont S*,OI
d'épaineur, et on remarque encore an second étage quai-
oues peintures à fresque. Les deux tours servent aigour-
a'hui de prison. A l'angle N.-O. de l'enceinte, Louis XI fit
élever une troisième tour, dite tour ronde, tour neuve oa
tour des firisonmers, pour y tenir sous sa main les pri^
sonniers d'État On la voit encore maintenant telle quelle
était, moins un corps de b&timent attribué aux prison-
niers de marque, lequel s'est écroulé en 1815 : les sulles
y sont vastes, les cheminées immenses, les plafonds dé»
mesurément hauts. Dans les fondations se trouve une
salle circulaire voûtée, où l'air et le Jour ne pénètrent que
par des meurtrières insuffisantes, poncées à travers un
soubassement qui n'a guère moins de 4 mètres <f épais-
seur : on y descend par un escalier de 43 marches qu'io«
terrompent plusieurs portes, et c'est là qu'étaient les
fameusea cagiss où furent enfermés La Balue et Comines,
et on'on a détruites à la Révolution. Toutefois, les vrais
cachots de Loches ne sont pas dans la tour neuve, mais
dans la fondation d'une autre tour aujourd'hui détruite,
et dont il ne reste qu'une salle des ganles : il ne faut pas
descendre moins de 08 marches pour arriver au cachot
de Ludovic le More , où l'on aperçoit encore quelques
traces d'inscriptions et de peintures faites par ce prince,
et à une oubliette dont les parois sont encore teintes ds
sang. — L'ancienne église collégiale de Notre-Dame de
Loches, comprise dans le ch&teau, est, depuis le Con-
cordat, consacrée à S^ Ours, patron de la viUe. Elle oflre
deux styles différents : la partie la plus ancienne est ds
la tin du X* siècle, le reste date du xii*. Deux flèches ge*
thiques et deux campaniles moins élevés la surmontent.
Près de la collégiale, un palais construit par Charles VII
et Louis XII sert d'hôtel de la sous - préfecture : on f
montre l'oratoire d'Anne de Bretagne et le tombeau
d'Agnès Sorel.
LOCO, c.-à-d. en Italien d la place, mot qui, mis après
un passage de musique exécuté à l'octave supérieure, in-
dique qu'il faut prendre les notes suivantes telles qu'elles
sont émtes et sans transposition.
LOCUTION, se dit d^une construction de mots, el
d'une manière de s'énoncer. Une locution prépositive est
une préposition qui s'emrime par plusieun mots, comme
auprès ae, au travers as, loin de^ etc.
LOCUTOIRE, endroit des monastères où Ton se réunis-
sait autrefois pour parler pendant les récréationa.
LODS ET VENTE. V. notre Dictionnaire de Biogrth
phis et dHistoire,
LOF (de l'anglaia loof ou. luff)^ en termes de Marine «
bord d'un navire opposé au vent. Pour dire au timonier
de venir au vent, on lui crie : au lof, ou simplement
lof, U^er, c'est venir au vent Virer lof pour lof, c'est
faire tourner le bâtiment, et prendre le vent à l'autn
bord. On appelle étoffée ou auloffée le mouvement poor
entrer dans le vent.
LOGAiEDIQUE (du grec I090S, parole, et aùtdê^ chanâ,
e.-4-d. qui tient de la prose et des vers, du parlé et au
chanté; nom donné par les andens aoteun die Métriques
à certains vers lyriques commençant par un, deux, on
pluaieurs dactyles, suivis de 2 ou de 3 trochées. On le
donnait encore : 1* au vers arohébulique composé de 4
anapestes et d'un bacchius; 2* au trimètre anapestiqne
accru d'un bacchius; 3<* an dlmètre anapeatlqne dont le
4* pied est un pyrrhique ou un Ïambe; 4^ au monomètre
hypercatalectique terminé de même façon. On rettache 4
ce genre certains vere des tragiqnes, sur la nature dee-
quds les érudits ne sont pas d'accord, et qui sont corn*
posés d'un ïambe, d'un anapeste, puis d'un ïambe suivi
d'un bacchius final, ou d'un amphibraqne, équivalent dn
bacchius à la fin d'un vers. P.
LOGE (de l'italien loggui), petite salle, tribune, on
balcon couvert, ouvert par devant, et plus on moins ri-
chement décoré de colonnes et d'arcades. Le pape a sa
loge placée an-deaans du portique de l'église de S^Pierre.
et d'où, le jour de Pâques, il donne la bénédiction Urbi
et Or6t, « a U ville et au monde ». Dana d*antrea égliaai
d'Italie, des loges analogues servent pour des sermoM
adressés à la foule, ou pour des chants exécutés deveat
elle. Lee Italiena donnent aussi le nom de loge à une fi*
lerie, à une snHe de portiques : les loges du Vatican ont
été peintes psr les plus grands maîtres. Certaine cons-
psramenls clos et réservés dans les théâtres, pour un
petit nombre de spectateere, ont reçu le nom de loaes.
On l'a ensuite appuqné anx bontiqnea en phmchea où se
donnent les spectacles fondes, ans œllules d'aliénés, ans
habitations des portiers, etc.
Losi, nom donné, dans le Aino^foçomierie à un
LOG
1176
LOG
groape de JMrm rfonis sous un même vénérable ou
-préndent, ainsi qa*aa local où ils se réunissent.
LOGEBftENT, local destiné à l*habitatioD. U loi do
.13 avril 1850, complétée par les décrets des 22 Jany. 1852
.et 27 mars 1854, a donné anx autorités municipales des
grandes WUes les moyens d^assainir les logements in-
salubres. Le propriétaire peut être mis en demeure d*ezé-
coCer, dans un délai déterminé, les travaux d*assainisse-
1 ment Jugés nécessaires, sous peine d*une amende de
' 10 à 100 fr. ; Tamende peut être portée à une valeur égale
ou môme double de celle des ^travaux à exécuter, s'ils
n ont pas été faits dans Tannée qui a suivi la condamna-
tion, et si le logement insalubre a continué à être occupé.
Si Tassainissement est jugé impossible , l'autorité mu-
nicipale peut interdire provisoirement la location du
.logement; mais Tinterdiction absolue ne peut être pro-
noncée que par le Conseil de préfecture, sauf recours au
Conseil d*ÉtaL Les locataires ainsi expulsés ne peuvent
réclamer aucune indemnité.
LocBiiBNT, en termes d*Art militidre, ouvrage de cam-
pagne à la fois offensif et défensif. Lorsqu'une armée
assiège une ville, elle doit, à mesure qu'elle approche
des murs au moyen des cheminements, ménager, de
place en place, des endroits d'une étendue suffisante,
pour y loger, soit les batteries, soit les troupes protec-
trices des travaux et les colonnes d'attaque. Ces loge-
ments, surtout pour les batteries de brèche, doivent être
•olidement établis à l'abri des feux de l'ennemi, par ^es
blindages et tous les autres movens dont dispose le
génie militaire. De la solidité des logements dépend sou-
Tont la réussite de l'attaque. — Dans l'Administration
militaire, on entend encore par Logement le lieu d'habi-
tation ou de gîte, que ce lieu soit de résidence, de pas -
•âge, ou de route , et la troupe qui part à l'avance pour
le préparer. Dans les armées de Rome et de Byzance, les
fonctionnaires chargés des logements militaires s'appe-
laient mensêurs, tnétatmirs, comtes du logement. Jadis
an France la direction en cette partie dépendit du grand
sénéchal, puis du connétable, du grand maître des arba-
létriers, du grand prévôt, etc. Aujourd'hui, le soin des
logements appartient aux officiers de l'intendance , aux
maréchaux des logis, aux fourriers, et même aux auto-
rités civiles. En Angleterre, ce service est l'objet d'une
aorte de Ministère, dirige par le quartim'-maître général,
LOGEMBiTT TBlllet de), Dillet que reçoivent, dans les
communes ou ils s'arrêtent, les soldats en congé on en
marche, pour être logés chez les bourgeois. L'origine de
.ces logements remonte à Louis XII, comme il panlt par
une ordonnance du 20 février 1514.
LOGEUR. F. AOBBRGISTB.
IX)GIQUE (du grec logos, raison, raisonnement). La
Logique est la science du vrai en général; elle ne s'oc-
cnpe pas de la matière des connaissances, mais seule-
ment des conditions générales sans lesquelles nos con-
naissances ne peuvent être Traies. Elle a donc pour objet
rintelligence, et pour btU de la guider dans la recherche
du vrai. Comme connaissance des lois qui régissent les
opérations de l'intelligence, la Logique est une science;
lorsqu'elle traduit ces lois en règles, et que de la théorie
elle passe à la pratique, elle devient un art» Le&auteura
de la Logique de Port-Royai ont défini la Lo^que VArt
de penser, et l'ont divisée en craatre parties, d'après les
ffnatre opérations principales de la pensée : concevoir,
juger, raisonner, ordonner; ce qui donne lieu à traiter
des idées, du jugement, du raisonnement et de la me-
thode. Cette division est insuffisante, surtout si on consi-
dère la Logique an double point de vue de la théorie et
Je la pratique. Elle comprend alon : 1^ la Méthode, qui
* noua donne le moyen d'arriver au vrai ; 2« la Certitude,
qui nous enseigne les conditions sans lesquelles nons ne
-pouvons t«iir une connaissance pour vraie ; 3® la théorie
au raisonnement, qui nous donne les conditions néces-
aaires pour qu'une conclusion soit vraie; à quoi il faut
Joindre V Analogie et V Induction, an moyen desquelles
BOUS pouvons étendre nos connaissances expérimentales;
4* la critique du témoignage humain, qui nous donne
des règles pour nous assurer de la valeur des moyens
d'arriver à la vérité par autrui ; S^ le Langage, comme
manifestation de lapeiuBée, et la tendance qu'il nous donne
vera la vérité ou ven l'erreur ; 6<» nos Erreurs et leurs
causes, pour nous mettre en garde contre elles, pour
nous empêcher de nous écarter du vrai, ou pour nous y
lamener. Cette énumération suffirait poor montrer l'im-
portance de la Logique. Même à ne voir en elle que la
science de raisonner, aa nécessité serait encore évi-
dHite« pane que seule elle peut comprendre les lois de
la démonstration et en tracer hi théorie nécessaire. Dam
l'enseignement, la Logique fit toujoun partie du conn
de philosophie; sa place est naturellement après la psy-
chologie, parce qu'ayant pour objet de diriger l'exercice
des facultés intellectuelles, elle ne fait que continuer le
travail de la psychologie, qui les a fait connaître. De-
puis 1852, elle a pris, au moins nominalement, plus
d'importance, en donnant son nom au cours de philoso-
phie qui termine les études classiques ; mais elle ne peut
en être qu'une partie.
On a fait remonter la Logique, comme procédé scienti-
fique. Jusqu'à Zenon d'Élée (v« siècle av. J.-G.) ; mais il
ne faut pas la confondre avec la Dialectique, qui était
alon le procédé suivi. On la retrouve non-seulement
chez Zenon, mais chex les sophistes, dans l'école de Hé-
gare, chez Socrate, et chex Platon dans ses Dialogues.
La dialectique s'attache à réfuter,- la logique démontre,
elle procède dogmatiquement et par déduction. Cest ce
qu'on voit chez Aristote, environ 4 siècles av. J.-G., dans
un ensemble d'écrits auquel on a donné le nom d^Orga-
non, et qu'on nonune ordinairement la Logique d'Aris-
tote. Cet ensemble comprend ; 1* le traité des Catégories
2<> celui de V interprétation; 3«les Premiers Analytiques,
ou traité du syllogisme ; 4<* les Derniers Analytiques, ou
traité de la démonstration ; 5* les Topiques; 6<* le traité
des Sophismes, A ces écrits on joint ordinairement l'/i>-
troductùm aux Catégories, de Porphjrre, mort 904 ans
aprèa J.-C. Ainsi, la Logique du Stagyrite va des catégo>
nés à la théorie de la proposition, ae celliHci au syllo-
gisme, et de ce dernier à la forme parfaite du raisonne-
ment, qui est la démonstration ; les deux dernière traités
sont consacrés à l'application. Après Aristote , deux de
ses disciples, Théopbraate et Eudème, continuèrent ses
travaux, sans rien y ajouter, mais non sans quelques
critiques de détail. Cette controverse nous a été trans-
mise par Alexandre d'Aphrodise, dans ses Commentaires,
Du Lycée, la Logique passa à l'éeole du Portique. Les
stoldens lui donnèrent la première place dans leur phi-
losophie; il est à remarquer qu'ila essayèrent d'y com-
prendre nne psychologie et une méthode ; mAlheurenae-
ment leun travaux sur cette partie de leur doctrine ne
sont pas arrivés jusqu'à nous. Épicure, en donnant à sa
Logique le nom de Canonique, ne lui laissa qu'un rôle
tout à fait insuffisant ; il en fit une partie de la phv-
sique, comme Vy contraignait son sensualisme étroit.
Galien (o* siècle) avait fait sur la Logique d'immenses
travaux, qui to,us ont péri ; on lui attribue, mais à tort,
l'invention de la 4* figure du syllogisme. De siècle en
siècle on vit se succéder une foule de commentateurs de
la Logique 4!Aristote. Les études sur VOrganon commen-
cèrent dès le règne des Ptolémées , pour ne plus cesser :
outre Galien et Alexandre d'Aphrodise, on vit Porphyre,
Thémistius, Simplicius, et Jean Philopon. Pendant les
dernière siècles <|u Bas-Empire, on compte un David ,
qui traita des Catégories d'Aristote et des Prédicables de
Porphyre, un Nicéphore Blemmide, un Georges Pachy-
mère, etc. — A Rome, la philosophie ne compta pas un
seul logicien proprement dit, malgré l'écrit de Gicéron
intitulé Topiques, oui a fort peu d'analogie avec celai
d'Aristote. Au v« siècle, Boêoe traduisit ou commenu les
traités qui composent VOrganon; il commenta aussi
Visagoge de Porphvre, et par là il exerça une grande
influence aur les siècles suivants. Le moyen à^B vit ré-
gner la Lo|i:ique despoti<piement , au nom d'Aristote.
Avec Abélard elle avait pns une importance capitale, en
inclinant Quelque peu vere la dialectique de Platon;
mais, vere la fin du xn* siècle, les travaux des Anibes, eD
répandant la connaissance des écrits d'Aristote, assurè-
rent à sa Logique un empire longtemps incontesté. Au
xv« siècle elle fut attaguée par Laurent Valla {De dialeo^
Hca contra Aristotelicos), un siècle plus tard par on
grand nombre et surtout par Ramus {Aristotelicm am-
madversianes),, et enfin par François Bacon. Ce dernier
opposa, en 1020, son Novum Organum à VOrganon
d'Aristote. Cétait une méthode nouvelle, criif ramenait
la philosophie à Tobservation et à l'expérienee. Bacoo
cn^t détruire la Logique d'Aristote ; il ne faisait qae la
compléter, en montrant la nécessité de joindre rinduo»
tion au procédé déducttf. Descartes fit plus encore daoi
son Discours de la Méthode (1637), en proclamant lin-
dépendance absoloe de la raison dans l'ordre des choses
humaines, en rappelant Thomme à l'observation et à
l'analyse des fUts de la vie spirituelle, et en substituant
les quatre règles de sa méthode aux préeeptes si nom-
breux et souvent si obscure de la Logique scolastique.
Cependant la vieille Logique, attaquée de toutes parts eo
LOG
1177 LOI
Wm des abos <|Q*élIe ayait engendrés, fût soutenuo
me imputialitô par Loibnix , notamment dans son
Dimers Umchant ia méthod» dé la certitude et l'art
immUer, et par son disciple Wolff {Phiioeophia ratio-'
Mltt,nvs Logica methodo scienti/ieà pertractata, i7S8).
VM» de L4>cke et de Condillac négligea la Logique, ((ai
tttmiTa réduite anx étroites proportions de V Idéologie;
Nnlo écoasaiBe n*eQ tint pas non plus grand compte ;
miii la Lof^que tronnt en Allemagne, dans la personne
de Kant, un homme qui lui donna dans la philosophie
OM place nouvelle. Kant, dans sa Critique de la raison
fwn, entreprit de dégager de tout élément empirique et
de eonsidérer dans toute leur pureté les principes à
priori gai ae rapportent à la connaissance de certains
olijets. De là deux sortes de lois qui constituent la vérité :
'sue subiective et rationnelle, Tautre ol^ectioe et maté-
rielle. Avec Hegel, la Logique se dénature, et devient
me ontologie qui conduit à Tidéalisme le plus exagéré.
Ai4<Nird*lnii la Logique semble revenir en Allemagne à
on esprit pliia raisonnable, et reprendre en Ecosse et en
Fhmce quelque faveur : en Ecosse ont paru, depuis une
trentidne d'années, des écrits d'une valeur médiocre,
nais qui ont doncé lieu à une polémique de bon augure,
et qui a fait connaître M. W. Hamilton, l'auteur d'une
iVoiNclle AnalytUtue; en France, H. Barthélémy Saint-
Hilaîre a publié une traduction complète de la Logique
d'Aristote.
Dans l'Inde, la Logique, aussi ancienne, comme science,
que dans la Grèce, a son code et ses lois dans le Nyàya,
qui fut suivi par les brahmanes et les bouddhistes , au
nord et au midi de la presqu'île; aujourd'hui toutes les
écoles de l'Inde n'ont pas d'autre Organon que le Nyàya,
qni probablement ne ooit rien à Aristote. — Outre les ou-
viagea originaux déjà dtés, on peut consulter : Gassendi,
De origine et varietate Logicœ, dans le Syntagma phiUh
wpkiemm, Lyon, 1(^58; G.-J. Vossins, De natura et
eomstitutUmê Logicœ; Buhle, Recherches sur VétiU de la
Logique ehoss Us Grecs avant Aristote, dans les Mémoires
de la Société de GcsUinçue, U X; Dugald Stewart, Con-
sidérations sur la Logtque d^Aristote; Fullebom, His-
toire de la Logique ckez les Grecs ; Barthélémy Saint-
Hilaire, De la Logique d^ Aristote, 1838, 2 vol. in-8«;
Franck, Esquisse d^une histoire de la Logique, 1838;
la Loguiuê de Bossuet; celles de Creusas et du P. Buf-
ter; VArt do penser et de raisonner, de Condillac; la
LogtqiM de Destntt de Tracy, partie de son Idéologie;
DamiroD., TVaité de Logique, 1836; Charma, Leçons de
Logique, 1840; Du val* Jouve, Traité de Logique, 1843;
Waddington-Kastus, Essais de Logique, ln>8«; Bénard,
La Logique enseignée par les auteurs, 1858; Goumot,
Estai sur les fondements de nos connaissances, etc. On
cite en Angleterre les Éléments de Logique do Richard
Whalely, Londres, 1829, et un 2Vat^^ de Logique d'après
lea principes SAldrich, par John Huyshe, Oxford, 1833;
maia cea deux écrits ne sont pas à la hauteur de la
ience. R*
ixMUQUB (Anidyse, S^]et). V. Analyse, Sujet.
IX)GOGRAPrîÈS , terme de Littérature grecque. V,
itr^ Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire,
IXKXKSRAPHIB (du grec logos, parole, eXarapM,
J'écris), nom donné en 1790 à un procédé qu'on imagina
pour recueillir, sans signes abrénatifs, les débats de
r Aasemblée constituante. Douze ou quatorze scribes se
langeaient autour d'une table ronde. Gnacnn avait devant
aol une provision de bandes longues et étroites de pa-
pier, divisées par compartiments, et portant chacune un
noniéro d'ordre. Quelques mots de la première phrase du
dhcoura piononcé étaient saisis par l'écrivain n* 1, ((ui,
far un coup de coude ou tout autre signal, avertissait le
■Pi de recueillir les mots suivants; celui-<i faisait de
ntae poor le n* 3, et ainsi de suite. Après le dernier
écrivain, le premier recommençait, et toujours ainsi On
passait les bandes à des copistes, qui les mettaient au net
pour lea livrer à l'impression. La logographie fut aban-
donnée après le 10 août 1792, et Ton ne tarda pas à
adopter la Sténographie (F. es mot).
LOGOGRIPHE (du grec logos, parole, et griphos, piège,
Aiet), sorte d'énigme qui donne à deviner un mot par
raaalyae de cr mot lui-même, en le décomposant en d'an-
tEesmots, en indiquant les différentes significations qu'il
mod sidvant qu'on en retranche une on plusieurs lettres.
Ba void un exemple, tiré du Mercure de France (Jan-
i7ô8) t
Bien n'est plus viens, rien n*eet et been qne mol.
Des lettrée de mon nom eflue le troisième ;
▼leas «a jeuM, je sois ffene leMenr eitrlma»
IcetnDèhe Is seeondo : à eheane instaot èhes toi
J'augmente en dépit de toi-même.
Ton emberrss me ftlt pitié.
Tn ne m*ss j'amsis m, ta ne penz me eonnsltrei
Vais reconnais an moins ma première moitié :
Ta l'as m mourir et renaître.
On trouve chez les Anciens quelques exemples de logo-
griphes. Les Arabes en faisaient, dit-on, un de leurs di-
vertissements, à une époque très-reculée. On fait remon»
ter le logogriphe en France au temps de Charlemagne :
mais il ne fut véritablement en vogue qu'au commen-
cement du xvni* siècle. Cest en 1727 que le Mercure
inséra ses premiers modèles; le succès en fut tel, que le
logogriphe fut dès lors régulièrement admis dans cette
feuille au même titre que Ténigme et la charade. Une
véritable poétique du logogriphe, attribuée à La Con-
damine, y fut insérée en 1758. L'Angleterre nous avait
devance dans ces Jeux d'esprit; la reine Elisabeth s'y
livrait avec passion. — Disons aux personnes qui n'au-
raient pas voulu exercer la sagacité de leur esprit sur le
logogriphe ci-dessus, qu'il est b&ti sur le mot ange, où
l'on trouve An», âge, et on.
LOGOBIACHIE (du grec logos, parole, et makhè, com-
bat), dispute de mots qui provient de ce que les deux ad-
versaires prennent en des sens différents le mot sur
lequel roule la discussion, ou n'envisagent pas la même
face de la question. Le remède aux logomacnies est dans
de bonnes définitions.
LOGOS, mot grec qui signifie la parole, et en même
temps VinleUigence, la raison, que la parole manifeste au
dehors. Dans la philosophie de Platon, le Loaos était Dieu
même, considéré comme la source des idées. & Jean
rÉvangéliste s'est servi du mot Logos pour désigner la
second personne de la Trinité, et, pour le traduire en
latin, S^ Jérôme ne trouva d'autre terme que Verbum,
dont nous avons fait le Verbe.
LOGOTHÈTE. V. noire Dictionnaire de Biographie et
d'ffistoire.
LOHENGRIN, poème allemand de la fin du xm* aiècle,
composé en strophes de 10 vers par deux auteurs de-
meurés inconnus, et qui tire son nom de son principal
héros, n se rattache à la guerre de la Wartburg, et Wol-
fram d'Eschenbach, qui y figure contre Klinsor, est censé
le narrateur du récit On y retrouve la légende des che-
valiers du Cygne, mêlée à celle du S^ Graal et aux exploits
fabuleux du roi Henri I*', et 11 se termine par un aperçu
des événements arrivés depuis ce prince Jusqu'à Henri H.
LOHÉRAIMS (Chanson aes), une des plus vieilles chan-
sons de gestes de notre littérature. Elle comprend Hervis
de Metz, Garin le Lohéraxn, Girbert (V. ces tnot^), et enfin
Ans^. Dans ee dernier roman, Ludie, après le meurtre
de Fromondin, se sépare de son mari Hemaut, et pousse
ses fils Louis et Manessier à venger la mort de leur oncles
Ils assassinent, en effet, Girbert; mais ils tombent entre
les mains de leur père, et sont pendus par son ordre. —
La chanson des Lohérains parut être plus ancienne que
tous les autres romans des douze Pairs. H. D.
LOI (du latin lex, qui vient de légère, parce que, sui*
vant Varron, on avait coutume de lire la loi au peuple).
L'idée la plus simple qu'on puisse se faire d'une loi est
celle de certaines conditions générales et permanentes^
nécessaires pour la production de tous les faits de même
espèce. Dans un sens plus général et plus élevé, les lois
sont, selon Ifontaïquieu , « les rapports nécessaires qai<
dérivent de la nature des choses. » D'où il suit que tout
a ses lois. On distingue: 1® les (ots physiques, fyii ré-
gissent le monde matériel : ainsi , la séné des points où
se trouve successivement un corps à des instants déter-
minés, devient la loi de son mouvement; les sciencea
physiques et naturelles ont pour but de déterminer lea
lois d'après lesquelles se produisent les faits étudiés par
l'observation et l'expérimentation ; 2* les lois psychoUH
giques; en étudiant notre nature, à la fois sensible, intel-
ligente et libre, nous trouvons encore des Ion dans la
succession invariable, dana la nécessité de certaines con-
ditions; Z^ la loi morale ou divine, qui émane de Dieu«.
qui lui est coéternelle, puisqu'elle subsiste en loi. Elle
préexista aux lois humaines, et les Godes ne sont léd-
times que par elle et de par elle : elle s'adresse à des
«très libres, qu'elle oblise sans les contraindre ; elle est
souveraine, universelle, immuable. Dans Tindivida, c'est
la lot naturelle, ou l'ensemble des principes qui doivent
régler la conduite de l'homme, et qiii résultent de sa na-
ture d'être intelligent et libre t l'amour poor ses parentSt
la reconnaissance envers son bienfaiteur, l'obli^aion de
M pas faire à autrui ce que nous ne voolooa pat an*oo
LOM
1178
LOR
nous base, et d'dtre à son égard ce mie dous Tontons
qa*il soit au nôtre, sont des précepte^e la loi naturelle,
qni est ainsi la base du Droit natunl; c'est Tobjet de la
9ciênc9 morale. Dans les sociétés, la loi morale est le
prindpe de toute loi sociale, la condition de tout devoir,
et, dans ses applications, elle donne Tautorité aox Uns
Jbwmoifief on potttitMt. Gellea-d sont variables, parce
i^'elles subissent Tinfluence du temps et de la civilisa-
tion; elles prennent différents noms suivant la nature
des devoirs et des droits qu'elles énoncent : il y a les lois
organiques, civiles, crtÊninelles, pénales, fiscales, reli'
gieuses, politiques, commerciales, militaires, e(e., autant
de cat^ries qu'il y a d'espèces de Droits {V» ce mot).
Le pouvoir législatif appartient an souverain, représenté
par le chef de l'État dans les gouvernements despotiques,
par le chef de l'État et les pouvoirs représentatifs dans
les gouvernements constitutionnels. Pour qu'une loi soit
obligatoire, il faut qu'elle ait été promulguée {V, Pro-
mulgation ), et qu'elle idt une sanction ( V. ce mot)\ elle
n*a Jamais d'effets rétroactif ( V, RérROAcnviri). une loi
promulguée est exécutoire dans toute l'étendue du terri-
toire, après l'expiration d'un délai déterminé (F. Dis-
lAifCB LiGALs). La loi est censée connue de tout le
monde; nul ne peut alléguer, en cas de crime, délit ou
eontravention,au'il l'ignorait. Les lois cessent de produire
leur effet par abrogation ou par désuétude. V. Goguet,
De l'origine des lots, des arts et des sciences^ 6* édit.,
1820, 3 vol. in-8° ; Montesauieu, Esprit des lou; Matter,
De Vinfluence des lois sur les mœurs, in-8* ; l'abbé Bau-
tain. Philosophie des lois, t860, in-S*. R.
LOI (Homme de). V. Homme db loi.
!^! SÎ^IÏt^t l K. ces mots dans notre Oictiotmatre
!2îïoîIl.t I de Biographie et d'Histoire.
LOI d'exception. V. Exception.
LOI DE 6AAGB, DB NATURE, DE RIGUEOa. V. ALLIANCE.
LOIS (Bulletin des). V. Bulletin.
LOIS AGRAIRES, SOMPTUAIRBS. F. AGRAIRES, SOMPTUAIRES,
dans notre Dictionnaire de Biographie et i Histoire.
LOMBARD , nom donné à une maison de prêt ouverte
à Paris vers la fin dû xn* siècle par des banquiers venus
de la Lombardie, et qu'on a appliqué depuis à toutes les
maisons de prêts sur gages. Ces établissements, tolérés
en Angleterre, sont mântenant prohibés en France, en
Belgique et dans d'autres pays, et iiemplacés par les
Monts-de-Piété {V. ce mot).
LOMBARD ou MILANAIS (Dialocto), tttt doB dlaloctes ita-
liens. On V retrouve sans doute les traces des peuples qui
ont tour a tour occupé la haute Italie. Les origines cel-
tiques se manifestent dans la rudesse des sons, et les ori-
E'nes romaines dans le vocabulaire. Les Ostrogoths et les
>mbards ont dû y laisser une empreinte plus profonde.
€e dialecte supprime les voyelles finales et souvent môme
les médianes ; Il a en commun avec le piémontaia et le
génois les sons «u, u, an, in, on, un, ainsi que la con-
Bonne i, toutes valeurs phonétiqueB françaises. Il a une
littérature asses abondante : Maggi , Tansi , Balestriori,
Parîni , Bossi , Carlo Porta, Grossi , etc., l'ont employé
avec succès.
LOMBARD (S^le). F. notre Dictionnaire de Biographie
et d*Histoire.
LOMBARDE (École), une des grandes écoles italiennes
de peinture. Lanzl ne reconnaît pas, dans les peintres
<{u'on y range d'ordinaire, le caractère d'unité qui dis-
tingue les autres écoles : pour cette raison, il établit
plusleors groupes, les écoles milanaise, bolonaise, gé-
noise, piémontaise, et celles de Crémone, de Ferrare et
de Parme {V. ces mots).
LOMBARDE (Écriture), nom donné, en Paléographie, à
l'écriture usitée en Italie du temps dee Lombards. Ses
lettres majuscules s'éloignent peu des minuscules ro
-maines; celles qui sont blstorièBs ofCnent des comparti-
• ments à la façon des mosaïques, et admettent, dans leur
composition, des figures d'hommes et d'animaux de toutes
• sortes. Gomme cursive, l'écriture lombarde ne manque pas
<<l'élégance; elle est à peu près aussi large que haute, et
les contours en sont arrondis : elle fut employée dans les
'Chartes et dans les bulles pontificales, concurremment
avec la française. Jusqu'au un* siècle. Le t avec traverse
recourbée caractérise surtout la minuscule, et l'a en
forme d*» la cursive.
LOMBARDS (Lois des). Elles furent écrites en 643
fÊT le roi Rotharis, et approuvées dans une assemblée
générale à Pavie. Ce n'était point un code complet; Ro-
tharis ne fit que réunir et corrigsr les édite de ses prédé-
cesaewii çii ne t'étaient conBenrés que par traditioiL See
succesBeurs en publièrent plusieurs antres. V, GantA,
Histoire des Italiens, t. IV de la traduction françaiis,
1860.
LOMBARDS ( Mounsies des). K. Itauenne (Numismai
tique).
LONDRES (Monuments de). V. Bourse, Kensuigtob
(Palais de), Guildhall, Paul (Église Sainte), Todr db
LoNDaBS, Westminster, Whitbhall, et, dans notre DiO'
tionnaire de Biographie et d'Histoire, Colonnes moud*
MENTALES, psgc 635, col. 1, et Tunnel.
LONGCHAMPS. V. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire.
LONG COURS. V. Navigation, Caph-ainb.
LONGITUDE. V. ce mot dans notre Dictionnairs de
Biographie et d'Histoire.
LONGITUDES (Bureau des). V. Burbau, dans notre
Dictionnaire de Biographie et a Histoire.
LONGPONT (Abbaye de), abbaye jadis célèbre, fondée
vers 1130 par Raoul, comte de Crespy, à une extrémité de
la forêt de Villers-Cotterets, à 18 kilom. S.-0. de Sois-
sons. L'église, dé(Uée en 1227, ruinée en 1793, et dont il
reste encore des ruines assez imposantes, avait 108 met
de longueur, 39 de largeur, et 38 de hauteur sons voûtes;
la croisée, dont le chœur occupait la plus grande partie,
était longue de 50 met. Au-dessus des arcades de la nef
régnait une galerie faisant tout le tour de l'édifice. Les
roses du grand portail et des transepts étaient renommées
pour leur beauté.
LONGS MURS, épaisses murailles qui s*éteadaient
d'Athènes au Pirée. Le rempart du Nord, construit par
Périclès, avait une longueur de 40 stades ; celui du Sud,
dû aux soins de Thémistode, et composé de larges pierres
carrées, liées entre elles avec du fer et du plomb , avait
35 stades de longueur et 40 coudées de hauteur. Sur tous
deux s'élevaient de nombreuses tours, qui furent conver*
ties en habitations particulières lorsque la ville ne suJBt
plus pour loger les citoyens.
LONGUE (Syllabe), syllabe dont la prononciation est
é^e à deux temps, c.-à-d. à deux brèves {V. ce mot).
Ainsi, en français, lâche exige un temps de plus que
vache, mâle un temps de plus que malle. Le signe coi^
venu pour marquer la longue en latin est un petit trait
horizontal au-dessus de la voyelle : tôtàs. En français,
elle s'annonce assez souvent dans l'usage par Tacoent cir-
conflexe. Sont longues en français : 1<* Tes syllabes finales
masculines des substantifs pluriels : des sacs, des sêU,
des pots; 2* les syllabes finales masculines des substan-
tifs singuliers avant à ce nombre une terminaison plu-
rielle ; un vers, le temps, le nêx, une fais: 3® les syllabes
nasales suivies d'une consonne autre que m ou n ; jâm^f,
rampe, sombre, tendre, feindre, humble; 4* les syllabei
suivies de deux r, dont un seul se prononce: frôrrt,
bizarre, carré, terre, verre, tonnerre. Cependant ârraef
ger et arriver ont la 1'* brève ; 5^ les pénultièmes suivies
de se, %e : vase, diocèse, sottise, fnmchise,* seize, rose,
muse, douze, blouse; 6" les pénultièmes terminées fft
une voyelle suivie d'un e muet : boue, rue, icie, pensée,
armée» — Ces règles subissent de nombreuses exceptions
dans le langage familier, et on s'en écarte quelquefois
dans le débit oratoire et dans la récitation déclamée, sHI
doit en résulter quelque heureux effet. A cet égard, le
goût et le sentiment de l'harmonie sont à peu près les
seuls guides. P.
LONGUE, figure de note qui, dans l'ancienne notation,
était le signe d'une durée double de la brève ou roiub.
Dans la mesure ternaire, elle valait trois brèves. Elle était
de forme carrée, avec une queue sur la droite.
LOQUIFER (Bataille de), 15* branche de la chanson
de Gutllaume au coiurt nez. Les Infidèles ont envahi la
France : leur chef Desramé remet le sort de l'expédltioD
à. un combat singulier entre Rainouart et le géant La-
qoifer. Rainouart est vainqueur; mais son fila Haillefeis
est enlevé par les Sarrasins, et emporté dans la ville
d'Odierae. Il se met à la recherche de son enfant; il est
tran^ porté dans le royaume des fées, et revient enfin dans
sa ville ce i^rtpidllart sans avoir retrouvé Maillefers. —
Cette chanson est conservée dans six manuscrits, dont
un à la bibliothèque de l'Arsenal, à Paris. M. Leroux de
Lincy en a publié une partie dans son LÀvre des Légendst.
Paris, 1836, in-8«. V.' Histoire littéraire de la Firan»
tomeXXIL H. D.
LORD. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d^ Histoire.
LORD-lIAIRE, titre que portent à Londres et à Du-
blin les chefs du corps municipal , élus chaque année par
les hiJiitaBtB, et, à Loadrea» par les bouIb habitants de 11
LOS
1179
LOU
M, Toot candidat à la charge de tord-maire de Lendres
doit être membre libre de l'une des 1^ corporations prin-
dpslea de la Cité, avoir rempli les fonctions de shénf, et,
sa tempe des élections, fait l'office d'alderman dans Tun
d«s quartiers. L'élection a lieu à Gulldhall (F. ce mot).
Le Jour de la S^Biichel, les corporations s'y rassemblent,
sous la présidence des shérift : tous les aldermen qui ont
pmé par le shérifat sont proposés saccessivement à la
csndidatniB par ordre d'andennetô; les deux qui réunis-
sent le plus grand nombre de suffrages sont signalés
dsns an rapport à la Cour des aldermen, laquelle décide
du choix à faire. Ce choix est soumis à l'approbation du
souveralii , qui n'est guère qu'une formalité, lie 8 no-
ranbfe, Téiu prononce à Guildball, en présence des
citoyens, le serment de bonne et fidèle administration, et
est Installé le lendemain à Westminster par les barons
de rÉdiiquier. Le lord-maire est dit très'-himorablê hrd,
A titre de gonvemeur ci?il de Londres, il est le premier
Joge de toutes les cours et commissions de la até, pré-
aîdeat de l'élection des aldermen, conservateur de la Ta-
mise ; sons le rapport militaire, il a les mêmes pouvoirs
que les lords-lieutenants des comtés. Comme insignes
halntnels de sa charge, il porte constamment au cou une
double chaîne d'or ou un nche collier de pierreries; dans
les efrconstaoces solennelles, il est vêtu d'une robe de ve-
lours cramoisi ; son costume ordinaire est, en hiver, une
robe de diap écarlate à capuchon de velours, et, en été,
une robe de soie bleue doublée de fourrure. Dans les
processions où sa présence est officiellement recjuise, on
porte devant lui l'épée et la masse d'armes, soit en or,
soit en argent : s'il est à pied, un page soutient la queue
de sa robe; s'il va en voiture, c'est dans un carrosse
splendide à quatre chevaux. Il réside à Mansion-House,
au bout du pont de Ijondres. Jadis la personne du lord-
maire était sacrée et inviolable, et l'outra^r était un
crime puni de mort; il avait, conmie le roi, son poète
lauréat et son bouffon. B.
LORETTB (Église de), dans les États romains. Cette
église, dite de la lladone, fut commencée en 1404, et
adbevée en 1513, sous la direction de Bramante, à l'ex-
seption de la coupole, ajoutée sous Clément 1^ et Paul III,
et de la façade, construite sous Sixte-Quint, en 1587, dans
le eoût de la décadence. On l'a encore réparée depuis cette
époque. Située sur une place que décorent oeux por^
tiques, une fontaine et la statue de Sixte-Quint , elle office
de belles portes à bas-reliefs en bronze, et un grand
nombre de fresques et de mosaïques. Mais ce qui excite
surtout rintérèt, c'est la Scmta, Casa placée sous la cou-
pole, maisonnette en bols d'ébèoe et en briques, habitée
aotrefols, selon la légende, |Mr la S^ Vierge, et emportée
de Nazaretb en Dalimstie, puis à Lorette, par des anges, à
U fin da xm^ siècle. Elle a 10'",60 de long, 4",96 de
large, et 6™,66 de haut. Dn revêtement en marbre, dont
le dessin est de Bramante, inl a été appliqué, et est cou-
vert de Ins-reliefo splencUdes, exécutés par Sansovino,
Lombardo, Bandinelli , Tribolo, Jean de Bologne et autres
bons maîtres. On y entre par une porte avec grille en ar-
gent. Llntèrieur est dépourvu d'ornements : mais sur
Tantel s*élève une statue de la Vierge en bois de cèdre,
acoiptée, dit-on, par S^ Luc, et couverte de très-riches
ornements; prte de là on montre des vases en terre
qa*on prétend avoir servi à la Sainte Famille, et la fe-
nêtre par laouelle serait entré l'an^ Gabriel lors de l'An-
Qonciation. V. l'abbé Caillau, Histoire critiqw et reli-
ginue ds réglise Notr^ùavM-^i^'Lorétte , Psris, 1843,
in- 12; Bfartorelli, Teairo istorieo délia Santa Casa,
Rome, 2 voL hi-fol. B.
LORICA. F. CoiRASsi.
LORMIERS, ancienne corporation d'ouvriers qui fa-
briquaient des mors pour les chevaux. Leurs statuts se
trouvent dans le Livre des métiers d'Etienne Boilean.
Plus tard, il y eut des lormiers'éperonniêrs, des lormiêrS'
saUtsrr, et des lormiers-bourreliers,
LORRAIN eu AUSTRASIEN (Patois), un des patois qui
dérivent de la Langue d'oïl {V, ce mot)^ et dont le Meuin
est une variété. Au xiu* siècle, il avait ses plus grandes
aoaJogies avec le champenois, et il était, comme lui,
ideotlqoe pour le fond avec le bourguignon : mais il a
emmîité, en plus grand nombre que le champenois,
dinereotes formes du dialecte picard. V, dom J. Fiançois,
Vocabfdaire austrasien. Mets, 1773; Oberiin, Euai sur
U patois Unrmm des emriroiu du Bande la Roche, Strss-
booiB, 1775.
LORRAINE (Croix de). V. Caoïx.
LOSANGES, ornements psrticnlien à Tarchitecture
leÉmiu byiantine, lis sont simplet on endialnéSt en
creux on en sailHe, et disposés sur les moulures plates
des srchitraves et des corniches.
LOTERIE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio*
graphie et d'ffistoire,
LOTERIE, Jeu de cartes. On prend au hasard un certain
nombre de cartes d'un jeu complet, et on les couvre d'en«
Jeux. Des cartes d'un autre Jeu ayant été distribuées aux
Joueurs, celui (}ui a une carte correspondant à l'une de
celles qu'on a tirées d'abord, gagne ce dont celle-ci est
chargée.
LOTO (du mot lot)^ Jeu de hasard, pour lequel on
emploie Si cartons contenant chacun trois rangées tracs-
venales de 10 compartiments, dont 5 colorés et 5 à fond
blanc. Sur ces derniers sont inscrits les numéros 1 à 90,
sans autre ordre que de mettre ceux de 1 à 10 dans la
1^ colonne, ceux de 10 à 20 dans la 2% et ainsi de suite.
Chaque carton présente 15 numéros, et chacun des nom-
bres se reproduit quatre fois sur la totalité. Les joueurs
prennent chacun 2, 3 ou 4 cartons, et , quand Us ont fait
une poule d'un taux convenu, l'un d'eux tire successive-
ment, d'un sac ou d'une boite, des boules portant un
numéro, qu'il appelle. Celui qui trouve le numéro sur
ses cartons le manque avec un Jeton. Un seul numéro sur
la même ligne horizontale fait un extrait , deux font un
om^tf, trois un terne, ouatre un quateme; la poule ap-
partient au premier qui arrive au quine, ou 5* numén>.
— Dans le mode particulier de Jouer le loto qu'on nomme
tombola, chaque Joueur ne prend qu'un carton, et la
poule appartient, non au premier oui a le quine, mais
à celui qui a entendu appeler les 15 numéros de son
carton.
LOTUS. Cette plante était, pour les anciens Égyptiens,
un symbole de la fécondation et de la vie. Le dieu Horus,
personnification du soleil levant, était représenté sur un
lotus dont le bouton s'élance du sein des eaux, et avec un
collier de fleurs et de boutons de lotus. On trouve d'au-
tres divinités encore avec une tige de lotus à la main.
Trois tiges de lotus, s'échappent d'un bassin, étaient le
symbole de la haute Egypte.
LOUAGE (Contrat de), contrat par lequel une des
parties s'oblige à faire Jouir l'autre d'une chose ou du
fruit de son travail pendant un temps déterminé et
moyennant un certain prix. De là la distinction du louage
de choses et du louage d'industrie ou d^ouwage. Le louage
des choses prend différents noms , selon les objets aux-
quels il s'appliaue : bail à loyer, s'il s'açit de maisons
ou de meubles; Oatf à ferme, pour les héritages ruraux;
baU à cheptel , s'il s'agit d'animaux dont le profit se par-
tage entre le propriétaire et le locataire (F. Bail, Chep-
tel). Le louage des services embrasse : 1' le louage des
gens de travail, ouvriers ou domestiques, qui s'engagent
au serrice de quelqu'un ; 2® celui des voituriers par terre
ou par eau , qui se chargent du transport des personnes
ou des marchandises ; 3* celui des entrepreneurs d'ou-
vrag^ par suite de devis ou marchés. V. Duvergier,
Traité au louage, 2 vol. in-8<>; Troplong, Commentaires
des titres du Louage et de l'Echange, 1852. 2 vol. in-8«;
Vanhuffel , Traité du contrtU âe louage et de dépôt appli'
que aux voituriers, etc., 1841, in-8*.
LOUGRE (de l'anglais lugger)^ petit navire très-léger,
souvent armé, employé surtout comme éclaireur dans la
guerre maritiine, et dont les pirates ont souvent fait
usage. Il a un grand mât et un m&t de misaine, porteurs
de deux grandtes voiles trapézoïdales, et, au besoin, de
huniers et de perroquets volants; parfois, il en dresse ul
troisième, dit tape-cul, sur l'arrière; son beaupré est
très-court. Un lougre peut porter Jusqu'à 18 pièces di*
canon.
LOUIS, monnaie. V, notre Dict. de Biogr»
LOUIS (Chant de). V. le Supplantent
LODis (Gode). V. CooB, dam notre Dietionnaire de
Biographie et t Histoire.
LOUIS (Institut,* Ordre de S^). V. notre Dictionncare de
Biographie et d^ Histoire.
LODIS XIV (Le siècle de), qualification que Ton donne
à la plus brillante période de la littérature française, à
celle qui s'étend de la mort de Henri IV à celle de
Louis aIV; non que ce dernier prince ait formé les gé-
nies qui ont illnstié son règne, mais parce ou'il a su gé»
néralement les encourager, les mettre en lumière, W
foire concourir à sa propre grandeur. — Voltaire a donné
le nom de Siècle de Louis XIV à l'un de ses grands oe«
vrages historioues. Il était, pour récrire, an point de vue
le plus favorable : sa première Jeunesse s*etait écoulée
durant les deiiilères années de Lonis XIV, et il avait fré-
({oeoté plnaienrt des personnages qui avalent approché
LOD
llgO
LOU
ee mooarqae ou slégâ dans ses Consellii en pleine nur
tarité de r&ge et du talent, il n*était plus exposé à céder
à renthousiasme qu'avaient excité les prospérités du roi
on au dénigrement produit par ses malheurs, et il Ta Jugé
tout à la fois a?ec admiration et impartialité, vantant ses
belles qualités et ses grandes actions, sans dissimuler ses
fautes. Ce qui fit roriginalité du Sièch de Louis XIV, ce
fut rheureuse idée de ne pas borner l'histoire d'une
époque à celle des batailles et des faits et gestes des
princes, mais de représenter le mécanisme de l'admi-
nistration, les vicissitudes des finances, les relations des
gouvernements et des peuples, les développements du
commerce et de l'industrie, le mouvement des lettres, des
sciences et des arts. Voltaire a su réunir l'exactitude
scrupuleuse à l'art de peindre, la critique éclairée à la
vivacité du sentiment et de l'imagination, môler des ré-
flexions au récit sans le suspendre ni le ralentir. Ce livre
de Voltaire est admis comme classique dans nos écoles.
LOUIS XV (Place), à Paris. K. notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire.
LOUP, animal adoré à Lycopolis, dans l'andenne
Egypte. Il figurait parmi les hiéroglyphes comme ie signe
du voleur. Les Grecs consacrèrent le loup à Apollon ; les
Romains, à Mars, parce qu'une louve avait nourri Ro-
mulus et Rémus, nls de ce dieu. Chez les Scandinaves,
Loki, le Satan du Nord, avait pour fils le loup Fenris.
Les légendes chrétiennes font du loup un emblème du
démon. — Les Anciens donnaient le nom de loup à une
enseigne et à une machine de guerre. F. Enseignb et
Harpagon, dans notre Dictionnaire de Biographie et
d^Histoire,
Loop, sorte de demi-masque en velours noir, que les
dames du xv^ et du xvi" siède, et aussi certains courti-
ïana, portaient presque constamment, de peur de hâler
leur teint. Cet usage s'est perpétué à peu près Jusqu'à
nos Jours chez les déimes Espagnoles.
LÛUQSOR (Temple de). V. Tateas (Ruines de).
LOURE , danse grave dont l'air était assez lent et ordi-
nairement marqué à six-quatre. Cet air commençait en
levant, et se composait de deux reprises de 8, 12 ou
i6 mesures. Quand chaque temps porte trois notes, on
poinie la première, et ron fait brève celle du milieu.
Jjourer, c'est marquer la première note de chaque temps
plus sensiblement que la deuxième, quoique de même
valeur, et en nourrir le son avec douceur t ce mode
d'exécution est particulièrement en usage pour les com-
positions d'un caractère rustique. — On a encore appelé
loure un instrument assez semblable à la musette.
LOUSTIC ( de l'allemand lustigt Joyeux ), nom donné
iadis, dans les régiments suisses que soudoyait la France,
k des bouffons chargés de les égeiyer, et de prévenir ou
dissiper dans les soldats le mal du pays. Il y en avait un
par compagnie.
LOUVAIN (Église de S^-Punas, à). Cette église coUé-
dale, bâtie sur l'emplacement d'un édifice antérieur, qui
fut incendié en 1130 et en 1373, date du xv« siècle, et a
été faite d'un seul jet : de toutes les églises de Belgique,
il n'y a que celle de S^*-Waudru à Hons oui puisse lui
être comparée pour la pureté et l'harmonie cle l'ensemble.
L'extérieur n'annonce pas cependant une construction de
premier ordre x les arcs-boutaots qui soutiennent la
snuide nef et le chœur sont extrêmement lourds; on a
laissé , au xviu* siècle, des maisons et des boutiques
s'implanter entre les contre-forts; le portail devait avoir
trois tours surmontées de flèches à jour, dont on prétend
avoir le modèle à l'hôtel de ville, et l'on ne fit ou'une flèche
en bois, détruite par les flammes en 1604. L'utérieur est
bien autrement satisfaisant: il est en forme de croix latine,
avec trois nefs, et a 100 met. de longueur sur 25 de lar-
Sur. La grande nef étonne par la hardiesse et l'élégance
son architecture. Au-dessus des grands arcs ogiTaux
règne un triforium découpé en quatre-feuilles et à ar-
cades trilobées, et, au-dessus de celui-ci, de grandes fe-
nêtres ogivales éclairent l'édifice. Toutefois, on regrette
l'absence de vitraux de couleur, et le badigeon nuit au
caractère sévère de l'ensemble. Un Jubé, i)eau modèle de
style flamboyant, sculpté et fouillé avec une grande re-
cherche, sépare le chœur de la nef : il est surmonté d'un
mmense crucifix qui s'élève Jusqu'à la voûte ; quelques-
nes des parties de ce Jubé sont dorées, et l'une des deux
> bapelles qui sont au pied contient un Christ noir comme
( e rébène et vètn d'une longue robe rouge. Vis-à^vis est
i n lustre en fer, que l'on, a attribué à Quentin Matsys.
la chaire, sculptée en bois par Berger ponr l'éfldise de
Mnove en 1742, et apportée à Loovala en ISOTTa la
fu.ine d*iin roriier, d'où s'élèvent deux palmiers à one
hauteur d'enrinm 10 mèC ; d'un côté, l'artiste a repré-
senté S^ Pierre, de grandeur naturelle, an moment où 11
renie le Sauveur, et, de l'autre, S^ Paul renversé de che-
val en poursuivant les chrétiens yers Damas. Les orgues
ont été construites par Golphus, en 1634. Les portes de
fer, exécutées en 1811 par Goemans, passent pour an
chef-d'œuvre. A droite du maltre-autel est un tabernacle
doré, dont la flèche, haute de 12 met., est sculptée avec
la l4;èreté d'une dentelle, et qu'on rapporte k l'année
1435. Un lutrin gigantesque, où l'on voit à la base S* Paul
et son cheval renversés, tandis que des anges voltigent
autour des rameaux qui forment le couronnement, est
une des plus belles sculptures en bois qui sment venues
jusqu'à nous. L'église S'-Plerre possède Quelques tablesnx
remarquables de Hemling, de Matsys, de Van der Wey-
den, de Crayer, et de Van Dyck. B.
LouvAm (Hôtel de Ville de), le plus bel édifice dvil
d'architecture ogivale que possède la Belgique. Il toi bAti
de 1448 à 1463 par Hathieu de Layens, et on l'a res-
tauré de nos Jours. C'est un ouadrilatère, isolé sur trois
de ses faces, et dont la façade, un peu plus large que
haute, a 34 met. Il se compose d'un res -de-chaussée
assez élevé et de deux étages. Les archivoltes des fenêtres
ogivales sont ornées de feuillages. Les entre- deux de
fenêtres présentent des saillies qui s'élancent depm's te
rez-de-chaussée Jusqu'au toit, et oui sont décorées de
feuillages, de niches, de dais, de reliefs de toutes sortes.
Une balustrade découpée, surmontée de pinacles, borde
le toit, qui est très-élevé et porte trois rangées de lu-
carnes. Aux quatre angles de l'édifice sont des tourelles
octogones, garnies, à différentes hauteurs, de balcons eo
forme de corbeilles, et terminées en flèches pyramidales.
Aux deux extrémités du toit, deux tourelles semblables,
partant seulement de la balustrade, dominent les quatre
autres flèches. Tout cet ensemble est extrêmement élé-
gant et gpcieux, et l'ornementation est d'une délicatesse
extraordinaire. B.
L0UV£TER1B, institution destinée à fayoriser la des-
truction des loups, renards et autres animaux nuisibles.
Un grand nombre de dispositions de la loi des Bourgui-
gnons et des Capitulaires ont trait à la destruction des
loups, et offrent des récompenses à ceux qui en prendront.
Charlemagne établit deux louvetiers dans chacun des
gouvernements de son empire : il leur était attribué 2 de-
niers par loup et 3 deniers par louve, payables par cha-
que feu de viUage à deux lieues à la ronde de l'endroit où
l'animal avait été pris. Plus tard, le nombre des louve-
tiers fut multiplié. François l"*" les créa en titre d'office,
et plaça au-dessus d'eux, en 1520, le grand louvetier
dont la charge paraît remonter Jusqu'au xv* siècle. Néan-
moins, les loups se multipliaient d'une manière effhiyante.
Henri III, par une ordonnance de Janvier 1583, enjoignit
aux officiers des eaux et forêts de requérir, trois fois Tan,
un homme par feu de chaque paroisse , avec armes et
chiens pour la chasse. Une ordonnance de 1601 imposa
aux seigneurs l'obligation d'exiger de leurs tenanciers ce
même service. Il ne parait pas qu'on soit arrivé à des ré-
sultats bien sérieux; car, au xviii* siècle, les intendants
des provinces payaient Jusqu'à 30 livres [Mtr tête de loup.
Aujourd'hui, d'après le décret du 25 mars 1852, la louve-
tene fait partie des attributions du grand veneur. Les pré-
fets, sur l'avis du conservateur des forêts, nomment tons
les ans des lieutenants de louvêterie, dont la commission
est honorifique, et qui doivent : 1' entretenir à leurs
frais un équipage de chasse, composé au moins d'un pi-
queur, deux vaJets de limiers , un valet de chiens, dix
chiens courants et deux limiers; 2<* de procurer, dans la
proportion des besoins, les pièges nécessaires pour la
destruction des animaux nuisibles. En retour de ces obli
gâtions, les lieutenants de louveterie ont le droit de cbaa*
ser au loup, sans permis ; d'employer, pour la destruction
des bêtes nuisibles, certains pièges interdits par la loi de
1844 sur la chasse; de chasser à courre le sanglier, deux
fois par mois, dans les forêts de l'État, et même de le
tirer, quand il résiste aux chiens. Ils ont un uniforme
permis, mais non obligatoire. Les batUtes ne peuvent
avoir lieu qu'en vertu d'arrêtés des préfets, qui en fixent
les jours et déterminent les lieux et le nombre d'hommes.
Ces battues sont sous la surveillance des agents fores-
tiers, afin que les louvetiers ne profitent pas de l'autori-
sation de faire une battue pour se livrer au plaisir de la
chasse. Les animaux nuisibles qui ont été tués dans unu
battue sont la propriété du concessionnaire de la chasse;
Toute personne est autorisée à tuer les loups et autres
bêtes malfaisantes sur sa propriété. La prime allouée pour
la destruction des loups est de 6 fr. par lou^roiMi^, n fr.
LOIJ
1181
LOU
MT Vm». 15 tnncê ptr lon?e non pleine, et i8 fr. par
WnrepieliM. Ces d^pîenses figurent au budiget des dépar-
tanents. B.
LOUVIERS (Église de). Cet édifice, dont les parUes les
plus sneiMiiiet aont dn un* siècle, a été agrandi an xv*,
nos doate à euae de raccroissement de la population
do pajs. 11 est à dna nefs, qui s'arrêtent carrément an
dicMir, dont on ne fait pas le tour t la nef mi^eore et les
bas côtés qui y sont attenants appartiennent, aToe le
dMBor, à la constmctlon primitiTet les deux autres col*
latéraux sont postérieurs. On remarque, an baut du
deoxièiiie collatéral du sud, la statue et le cénotaphe du
sire d'Estemay, personnsge qui prit psrt à la Ligue du
bien pablie, et qui ftit noyé par orén de Louis XI; dans
un collatéral du nord, une mise au tomliean et un Christ
coormuié dTépines. De grandes statues ont été placées,
dans le xv* siècle, an-dessus des chapiteaux de la nef
principale. Les vitraux sont du x^ et du xvi« siècle, mais
fort délabrés. Extérieurement, Téglise de Louviers forme
une masse lourde et disgracieuse, parce qu'aucune pyra-
mide élancée ne la surmonte : la tonr carrée oui sNâère
à rentrée dn cbcnir est fort basse, décorée seulement de
quelques statues dn temps de la Renaissance, et se ter-
mine en plate-forme, depuis que son aiguille de bols et de
^omb, constmite en 1379, et hante de 50 met., a été ren-
versée par le vent en 1705. Une autre grosse tour, dite
des Qocbes, fat commencée, vers la fin du xnr* diôcle,
tu coin de la façade occidentale et du collatéral septen-
trional, qui, pour ce motif, est plus court que les autres ;
«Ue est inacherée. Mais ce qui recommande l'église de
LooTiers, c*est un porche appliqué, vers hi fin du xv* siè-
de, sur son flanc méridional , et restauré de nos Jours
sous la dSrection de M. Bourguignon : on retrouTe, dans
ses déeoaparea et ses pendentifs, toute hi finesse et toute
Is richesse exubérante qui annonçaient alors la décadence
du style ogival.
LOUVOTS (Théâtre). Ce*théàtre parisien fut bâti de
1101 à 1103, sur l'un des côtés de la rue dont 11 portait
le nom* 11 resta peu de temps ouvert, à cause de hi dé-
coofltme des entrepreneurs. Picard l'occupa, avec la
troupe de rOdéon, de 1801 à 1808, et, sous la Restaura-
tion, on y plaça rOpéra itslien. En 1827, il a été changé
ta maison psiticulière.
LOUVOYER, en termes de Marine, remonter le lit du
vent en eouant des bordées, c.-à-d. en fkisant des routes
ihemativement inclinées à droite et à gauche, d'une cer-
taine quantité sur hi direction du vent.
LOUVRE (Le). F. notre Dictionnaire dé Btographtê $t
loevaa (Musée du). L'origine des collections rassem-
blées an Louvre remonte à François l*', qui fit recueillir
et adwier partout, et mincipatanent en Italie, de nom-
treox ebjett d'art, antiquités, médailles, byoux, tableaux,
itatoea, etc. Ces objets précieux furent pls!oés d'abord au
diàtean de Fontainebleau. Le nombre en fut peu aug-
Bienté Jnaqu'aa règne de Louis XIV, sous lequel Colbcùrt
lit racqniMtion du cabinet de Mazarin, enrichi des dé-
pooilles de celui de Charles I*', roi d'Angleterre ; puis,
«ras la direction de Lebrun, on se procura de nouveaux
cb^Hd'oBovre, empruntés à tous les pays, à toutes les
écoles, à tous les genres, et qui servirent d'ameublement
an palais de Versailles. Au temps de Louis XV, en 1 743,
le gouvernement profita encore de la vente des tableaux
do prince de Cangnan. En 1750, une partie des trésors
que l'on possédait fut transportée au Luiembourg, afin
qoe le public et les artistes pussent en Jouir; mais vers
1785, le Luxembourg ayant été donné par Louis XVI à
" H>n frère le comte de Provence, les tableaux retournèrent
à Versailles. Un décret de l'Assemblée constitoaDte
(M mai 1701) ordonna gue le Louvre recevrait le dépôt
des monuments des sciences et des arts, mais ne fut
exécuté qu'après une nouvelle d<'cision de la Convention,
en date du 87 Juillet 1793. On réunit de tous côtés les
tsbieanx que les rois avaient achetés ou fait exécuter, et
œox qui provenaient soit des couvents, soit des hôtels
sôgnenrianx, et la collection, rendue publique le 8 no-
reubre 1703, sous le nom de Mutée national, Muséum
français, puis Musée cmUral des arts, compta 537 U-
i^ieaax, tant fhmçais qu'étrangers. Les conquêtes de la
République et du premier Empire augmentèrent consi-
déâblement ce premier dépôt; la eollection Borghèse fût
icàetée par Napoléon I*', et, en 1814, le Musée ne conte-
ssît pes moins de 1,S00 tableaux. En 1815, les Bourbons
cédèrent aux alliés une portion de ces richesses. Depuis
cette époque )naqn'à la Révolution de 1848, le Musée,
flacé daae les attributions de la liste dvile, a peu à peu
. réparé ses pertes. Napoléon m le plaça soof la dfro»»
tion dn ministre d'État, et il fût partagé en IS coUectionst
1* Iftués dspftnliiri. Situé an premier étsge dn Lonne,
et composé de plua de 1,800 tableaux, 11 est divisé en
plusieurs parties, dans lesquelles on a, autant que pos*
sible, clsssé les tableaux i>ar écoles. Dans ]*école fran«
çaise, qni compte près de 700 toiles, il n'est pas de maître
qui ne figure au moins pour un ou deux tsbleaux. On y
admire la fomeuse Histoire de S^Bruno par Lesneur
(22 tablesnx); 10 paysages de Claude Lorrsin; ÎO ta-
bleaux de Le Brun, parmi lesquels les 5 grandes toiles
dites Batailles d^Alexandre; 40 tableaux du Poussin; la
Pêche miraculeuse de Jouvenet ; la Vierae à la arappe,
S^ Luc peignant la Vi/erge, et la S^ CécHe de Mignsrd %
27 toilea de Joseph Vemet ; les Sabines, Léonidas aux
Thermopyles, et le portrsit de Pie VII nsr David; Une
scène du Déluge, Èndymûm, la Révolte du Caire, et
Atala au tombeau psr Girodet; Psyché et V Amour, par
Gérard ; Marcus SêoDtut, par Guérin ; le Naufrage de la
Méduse par Géricault, etc. — Les écoles flamande, hollan-
daise et allemande sont représentées psr pins de 000 ta-
bleaux, au nombre desquels on peut citer le portrait de
Thomas Monts par Hoibeln ; la Femme hydropùiue de
Gérsrd Dow ; le portrsit de Charles I" par Van Dyck ; le
Coup de vent de Backuisen ; la Kermesse et la Vierge aux
anges de Rubens; le Rémouleur de Ténlers. — Les di-
verses écoles d'Italie comptent près de 550 tableaux.
Parmi les plus remsrquables figurent la Sainte Famille,
S^Mi<^l terrassant le démouy le SommeU de Jésus, la
Belle Jardinière, par Raphaél; la Joconde de Léonard
de Vind; Circé st la Décollation de S^ Jean par le Guer-
chin; la 5** FamUle dn Dominiquin ; les Noces de Cana
et les Pèterins d^EmmaUs par Paul Véronèse; la Nais»
sance de la Vierge, la Prédication de S*' Jean-Baptiste,
la Madeleine et le ^ Sébcutien d'Annibal Carrache ; le
Mariage mystique de 5** Catherine ^ le Sommeil d^An-
tiope, par le Coiîrége. — L'École d'Espagne est représentée
psr r^dorotton des bergers, de Ribéra; quelques beaux
portrottf de Velssquez; et surtout par 7 toiles de Mo-
rille, parmi lesquelles la Concsptton immaculée de la
Vierge, chef-d'œuvre acheté 015,000 (t. en 1852, à la
vente de la galerie Soult.
2<* Musée des dessins et des pcutels. U contient des
esquisses, au crayon ou à la plume, de la plupart des
maîtres dont le musée principal possède des tableaux, et
aussi des dessins de quelques-uns qui n'y sont point re-
Çrésentés, Michel-Ange entre autres. On compte environ
00 dessins des écoles d'Italie, 200 des écoles fiamande,
allemande, et hollandaise, 400 de l'école flrançsise. La-
tour, Vivien, Chardin sont les auteurs des plus remar-
quables pastels. Dans le même musée sont exposés
50 émaux de Petitot, représentant des personnages cé-
lèbres de la cour de Louis XIV.
3" Musée des gravures. Il renferme les osuvres d'Ede-
linck, des Andran, de Baudet, de Tardieu, de Duchange,
de Rousselet, de Picard le Romain, de D^noyers, etc.
4* Musée de la sculpture antique. Cette collection est
distribuée dans les belles salles du res-de-chaussée du
Louvre, entre autres la célèbre Salle des Caryatides,
ouvrage de Pierre Lescot, de Paul Ponce, et de Jean Gou-
jon. On y rencontre des produits de toutes sortes de l'art
antique, candélsbres, sièges, trépieds, cippes, urnes, sar-
cophages, vases en marbre et en bronze, etc. An nombre
des couvres de la ststuaire, on distingue la Vénus de Milo,
la Vénus d^ Arles, la Diane chassereue, le Gladiateur
tombattantA'Antmoits, deux Hermaphroailes,\eMarsyas
attaché, le raune à Venfant, VBf^ant à Voie, deux Faunes
dansant, une Melpomène colossale, un Centaure anee
V Amour en croupe, nne Polymnie, un Achdle, un Pol-
luât, l'ilpoUon au lézard, des Jfmsfoe, des BaeÎBhus, des
Hercule, plusieurs statues d^empereurs romains, etc.
5* Musée de la sculpture moderne. On y voit des
œuvres de Michel -Ange, Jean de Bologne, Benvenuto
Cellini, Jean Cousin, Jesn Goujon, etc., les Grdcsf de
Germain Pilon, le troupe de l'ilmour et Psyché par Ga-
nova, le MUon de Crotone de Pnget, etc.
0* Jtf iis^ assyrien. Cette collection , oommenoée len-
lement en 1847, renferme des monuments piédeux de
l'antique civilisation de Ninive et de Babylone. Ces mo*
numents sont exposés dans deux salles, et se divisent en
sujets religieux, rq>résentations driles ou historiques,
inscriotions, énianx, petits objets de terre, de bronze, de
sardome et autres pierres. Aux fragments originaux
s'^foutent des empreintes de plâtre. Les murailles de la
première salle sont revêtues d'encadrements en maçon»
nerie dans lesquels on a placé des baa-fetteft. On te»
LUC
118}
LUS
jMrqne dans la leconde ,deox énormes teureani à face
humaine, flanqués de gigantesques statues.
7* JftiMB égyptttn. Placé dans une paierie du rec-de-
cfaauuée, du côté de Téglise SMSermain-rAuxerrois, ce
musée contient de grandes et lourdes pièces de sculpture
tenant au culte et aux monuments publics, statues, bustes,
sarcophages, sphinx, lions, etc. Une autre collection d*an-
tiquités égyptiennes, enrichie par le cabinet do CIot-Bey,
est renfermée dans des ritrines : ce sont de petits objets
se rapportant aux mœurs domestiques, tels que figurines,
amulettes, rases, ustensiles, armes, anneaux, morceaux
d*étefres, boites de momies, ete.
8* Musée de Vart américain. Il se compose de fétiches,
d'ustensiles et de divers ornements enlevés aux temples
du Mexique et aux palais du Pérou.
0* Musée étrusque. On comprend sous ce nom quel-
ques productions de Tart italique, et de beaux vases
étmsques des différentes époques.
iO* Musée algérien. Il ne contient eneore qu'un petit
nombre d'antiauités.
il* Musée de marine. Cette collection, ordonnée en
i827, et ouverte au public depuis 1837, renferme une
série de petits modèles de bâtiments fhmçais et étrangers
de tentes les époques, depuis le tronc d*arbre creusé Jus-
qu'an vaisseau à trois ponts et au bateau à vapeur; les
plans en relief et les vues générales, à l'échelle de 1 1/2
ou S millimètres par mètre, de nos ports militaires; les
armes et engins oe toute espèce affectés au corps de la
marine; les débris provenant du nanfrage de La Pey-
rouse; un pand nombre d'objets provenant des lies de
la mer du Sud, flèches empoisonnées, caase-tète, instru-
ments de musique, piroçies, vêtements, parures, etc.
ii" Musée des Souverams. Ce mosée, qui nefotcomposé
S n'en 1852, fut dissons après Mapoléon III. On y avait
ré de plusieurs éublissements religieux ou civils divers
objets qui ont authentiquement appartenu à des souve-
rains français, tels que le fauteuil de Dagobert, la cuve bap-
tismalede Louis IX, la chapelle de l'ordre du S^Espritsous
Henri 11; diverses armures et panoplies ; la redingote grise,
le petit chapeau, le trône, le lit de campagne et les vête-
ments de cour de Napoléon I*% le berceau du roi de Rome.
LOVELACE. V. Clarisse Harlowb.
lOYER, prix payé par le locataire pour prix de la
chose qui lui est louée. On peut louer toutes sortes de
Uens meubles ou immeubles.
LOYOLA (Monastère de). Ce monastère, élevé en
1683 par Tarchitecte italien Fontana, sur l'ordre de Marie-
Anne d'Autriche, veuve de Philippe IV, roi d'Espagne,
est très-voisin de la ville d'Azpeitia (Gnipuiooa). Il a la
figure d'un aigle prêt à prendre son vol : le corps est
fonné par l'église, la tête par le portail, les ailes par la
sainte maison où namiit è^ Ignace de Lovola et par le
collège des Jésuites, la queue par divers b&timente se-
condaires. Un magnifique perron à trois corps flanqués
de balustrades de pierre et de lions de marbre donne accès
au portail, oui est lourd et peu digne de l'ensemble, bien
qne constant en marbres précieux. L'église est une ro-
tonde de 36 met. de diamètre, au centre de laquelle
s'élèvent 8 grandes colonnes supportant la coupole; celle-
ci, oui est toute en pierre, a 21 met. de diamètre, est
éclairée par 8 fenêtres, et sa lanterne atteint à 56 met.
au-dessus du sol. Dans le collège, l'escalier est une œuvre
remarquable. La sainte maison n'est qu'une tour de
l'ancien manoir de Lovola, construite en pierres brutes
et en briques fonnant aes dessins : cdie est à trois éta^,
et c'est au troisième que se trouve la chambre du saint,
transformée en chapelle.
LUC (Académie de S*-), Académie fondée à Rome, à la
place d'une eonflrérie de même nom qui existait de temps
immémorial, dans le but de relever les beaux-arte. Giro-
lamo Muziano, peintre, graveur et mosaïste, surintendant
des travaux du Vatican, en avait eu idée le premier, et le
papeGrégoireXIlI publia un bref à cet eflist, lei5 sept. 1577.
Toutefois, rentreprise ne fût réalisée oue par le peintre
F. Zuccaro, en i593, en vertu d'une bnlio de Sixten^uint.
L'Académie de S'-Luc existe encore aujourd'hui. Deux
classes la composent : l'une , qui est la véritable Acadé-
mie, compte dans son sein les artistes habiles: l'autre, à
laonelle est resté le nom de confrérie, admet des artistes
médiocres, et même les ouvriers dont la profession relève
des beaux-arto. Puni les peintres français qui en ont
fait partie, on remarque Ponssln, Lebrun, et Joseph Ver-
net. — Une Sodité de S^^Imc existait à Florence dès l'an-
née 1350. Les peintres de Paris formèrent aussi une ilco-
démie de S^'-lMe en 1391. Charles VII, en confirmant
iears stetots en 1430, les exempta de toutes tailles, snb»
sides, guet, gardes, etc. En 1613, la conuncnauté dos
sculpteurs se joignit à eux. On admit plus tard les grs-
veurs et les marbriers. En 1705, l'Académie de S*-Lw
obtint l'autorisation de tenir une école publique de
dessin et de distribuer des prix. B.
LUCARNE (du latin lux, lumière, ou lucema, flam*
beau ), ouverture de 1 met. à 1 met. 30 de large, prati-
quée au toit d'un b&timent pour éclairer et aérer l'espace
qui est sous le comble. On distingue : la lucarne carrée,
la lucarne ronde ou bombée, fermée en haut par an arc
de cercle ; la lucarne flamande, en maçonnerie, couron-
née d'un fronton et portant sur l'entablement ; la lucarne
capucine, couverte en croupe de comble ; la lucarne d^
moisdle, en charpente, portée par des chevrons et cou-
verte en triangle. — Dans les monuments civils de la
seconde moitié du xv* siècle, les fenêtres en lucarne?
sont ordinairement les plus importantes psr leurs di'
mensions et surtout par la richesse de leur ornementa-
tion. Ces fenêtres, placées à la naissance du toit, sont
souvent reliées les unes aux autres par une balustrade
élégante, derrière laquelle est ménagé un espace qui sert
de balcon. Telles sont, à Rouen, celles du Mais de Jus-
tice et de l'hôtel du Bourgtheroulde.
LUCERNAIRE (du latin lucema, flambeau), nom em-
ployé quelquefois dans l'Église latine comme synonyme
de Vêpres, parce que cette partie de l'office ne se chan-
tait jadis que le soir et aux lumières. On l'a aussi appliqué
simplement au répons qui précède l'hvmne des vêpres.
LUETTE ^Jeu de la), jeu en usage dans le bas Poitou.
Ce n'est pomt, comme l'ont pensé certains commeota-
teurs de Rabelais, le palet ou la fossette, mais un jeu de
csrtes. On se sert de cartes venues d'Espagne, et repré-
sentant de tout autres figures que les cartes françaises.
Le jeu comporte une foule de signes et de grimaces.
LUMIÈRE, en Peinture, s'entend de la lumière elle-
même, et de la manière dont on la représente sur un
tableau. La lumière est dite'princtpais ou souveraine,
ouand elle vient du haut et tombe d'aplomb sur la partie
éminente de l'objet; glusante^ si elle ne fait que couler
sur les objets: diminuée ou [perdue, lorsque, s'éloignant
du principe qui la produit, elle diminue d'éclat et finit
par se confondre avec la masse de l'air ; réfléchie , si elle
rejaillit d'un corps qui l'avoisine. L'étude de la décrois-
sance de la lumière suivant les plans qu'elle éclaire, et
des modifications qu'elle éprouve en se reflétant ou en
traversant les corps transparents qui se trouvent sur son
passa^ constitue la science du c(atr-o6scur et de la per^
spectwe aérienne ( V. ces mots).
LUMINAIRE, prestetion usitée au moyen âge, et qui
consistait à abandonner aux églises les cierges allumés
autour du oercueil des morte, ceux qne portaient les
fidèles en assistent anx enterrements, ceux des femmes
qui faisaient leurs relevailles, etc. — En Auver^e, les
marguilliers étaient appelés luminiérs, parce qu'ils pre*
naient soin de l'entretien du luminaire de régliae,c4-d
des cierges, bougies, lampes, etc.
LUNE (DcMi-). V. Dbmi-Liins.
LUNETTE, en termes de Construction, baie cintrée
qui traverse les reins d'une voûte en berceau, et par con-
séouent beaucoup moins profonde à sa partie Inférieure
qu'à sa partie supérieure. Les voûtes (Tarête sont ordi-
nairement formées par quatre lunettes. — On nomme
encore lunette une petite ouverture ménagée dans la flèche
d'un clocher pour donner de l'air à la charpente.
LDNBTTB, OU tenuos de Fortification, ouvrage avan^,
formé de deux fisces présentant en dehors un angle sail-
lant, et construit généralement auprès des glacis, vis-à-
vis les angles rentrante du chemin couvert. Il est armé
de canons et défendu par des fossés. On donne encore
le nom de lunettes à des places d'armes retranchées,
attenantes à un bastion ou à tout autre ouvrage .
LUNETTES. V. an Supplément.
LUNULE , mot qui, outre l'acception qu'il avait chez
les Romains {V. notre Dictionnaire de Biographie A
d^Bistoire)^ désigne l'espèce de boite ronde , en or ou en
vermeil, oui renferme l'hostie, et qu'on place dans le
centre de l'ostensoir.
LUSACIEN (Idiome). V. Wbidb.
LUSIADES (Les), poème épique portugais, dont Luii
de Camoêns est l'auteur. Le sujet est la découverte de
l'Inde par Vaaco de Gama. Le poème s'ouvre par une pein-
ture de la flotte portugaise, naviguant le long des côtes
d'Ethiopie. Les dfieux s'assemblent dans l'Olympe : car
le succès de l'entreprise portugaise va décider du sort du
monde orientel. Jupiter déclare que les Portugais réussi-
ront : les ordres du Destin leur promettent nn nouvw
XUT
im
LUX
empire. Bacchns combat la râsolutipn du maître des
fféux; mai^ il a contre loi Vénus et Mars, qui exhortent
Jupiter à assurer rezécntion des décrets de la destinée.
Mercure est envoyé pour servir de ouide aux Portugais
rers nie de Mozambique, peuplée ae Musulmans. Fte-
ntnt les traits d*un vieillard, Bacchns soulève le fana^
tisnie de ces peuples. Une bataille s*engage t les païens
MDt battus, et la flotte victorieuse continue sa route sous •
Is direction d*un pilote more, qui conseille aux Porto-
ph d'aborder à Quiloa. Tout y est préparé pour leur
mine; mais, par la protection de Vénus, ils évitent le
piège, déjouent de nouveaux complots qo! les attendent
à Honbaza, et arrivent enfin à Mélinde, où ils sont reços
par le roi do p|ays avec toutes les maïques de Thospita-
nté. L'admiration excitée dans Tàme du chef arabe par
le courage audacieux de ses hôtes prépare ingénieuse-
ment le lecteur ao long épisode ^i suit. L^istoire du
Portugal que Gama raconte au roi de Mélinde n*est pas
Molement nécessaire pour donner à ce noovel allié une
haute idée de la valeor des Portugais ; elle se lie nato-
reUement à Tentreprise même de Gama, et en expose le
motif. Dans œ récit, qoi oocope les deox ders do poème,
M troave le célèbre et toochant épisode dînes de Castro.
On rencontre là aossi le morceao regiurdé par quelques-
ans comme le plus beao des Lusiades, rapparition do
léant Adamastor, au moment où Gama s*apprète à doo-
Sler le cap de Bonne-Espérance.
Plein d*admiration pour la nation portugaise, le roi
de Mélinde donne à Gama un pilote fidèle, qui dirige ses
niaseaox à travers rOcéan Indien. Pendant la nuit, pour
donner les loisin du voyage, les Portugais se racontent
les gestes des anciens preux. Un Jeone guerrier, Velloso,
rappelle l'histoire de ces IS Portugais qui allèrent venger
dans Londres l'injure faite à la beauté : par sa teinte
chevaleresque, ce récit est Tun des plus caractéristiques
da temps et de l'ouvrage. Mais de funestes présages font
préfoir une tempête; rorage éclate : il est décrit avec
ose vigueur digne de Virgile. Protégé par VénuA, Gama
échappe aux foreurs des flots, et arrive enfin aox bords
désirés de llnde, dans Tempire de Calicut. Après avoir
bit alliance avec le samorin, qui essaye vainement de le
retenir, Gama met à la voile pour revenir en Europe.
Cest alors que, pour récompenser le courage des héros
portugais , Vénus s'apprête à les recevoir dans une lie
délidease qui s'élève tout à coup du sein des mers. Rien
de plus grscieax que ce charmant épisode. Thétis, pre-
nant Gama par la main, le conduit au sommet d'une
montagne dans un palais d'or et de cristal, où l'avenir
de n patrie lui est révélé. De là, les Portugais rentrent à
Uibonne, et le poème est fini.
Les buiades sont en 10 chants, et en stances de 8 vers
de onze syltabea, dont les 6 premiers sont à rimes croi-
léek Ije poème fut imprimé à Lisbonne, en 1572. Son
titre dgidfle les enfants d$ Lusus, qui passait pour le
père des Lusitaniens, andens habitants du Portugal.
Tout en blâmant Camoèns d'avoir introduit les divinitée
mythologiques dans un s^Jet chrétien, on ne peut nier
quH n'y ait de gnndes beautés dans les Lusiadst. Vol-
taire, qui ne savait pas le portugais, a fait de ce poème
heaocoup de critiques très-mauvaises. Ce qu'on pour-
rait reprocher au poète, c'est qu'il se montre trop sou-
vent historien ; qu'il n'attache pas assez par l'action prin-
cipale, et manque quelquefois de goût ; mais en même
temps, il ne faot pas ooblier qu'il fut le premier épique
moderne. E. B.
LUSTRATION. F. ce mot et Eau lustrale dans notre
Pietiofinatre de Biographie et d^ffistotre.
UISTRE, lominidre à plosleurs branches, destiné à
nœroir des lampes oo des boogies, et qu'on sospend à
on plafond oa à une voûte. H est souvent orné de cris-
taox taillés qui reflètent la lumière. On se sert de lustres
^ les grands salons, les églises et les thé&tres. Cer-
tains lustres d'église portent le nom de couronnes de
(ststérs (V. ce mot ). Aujourd'hui les lustres de théâtre
unt généralement éclairés ao gaz hydrogène, et soovent
par des boogies simolées, dont on petit jet de gaz repré-
lentelaflamme.
LCTH, en latin leuUu, lutana* ancien instroment
de mosiaoe à cordes en bovao, qot fat à la mode Jos-
?D*an miUea do xvm* siècle, et qui vint des Arabes
K. EooD) par l'intermédiaire des Mores d'Espagne. Il
dtait composé de quatre parties : la table^ en sapin on
a cèdre; le corps, arrondi en dessous, formé de neof
9B dh édlaaes qoi avaient l'aspect de eètes de melon, et
appelé aussi le ventre oo la donte; le manche, garni de
iMcbes oo divisions comme oeloi de la goitarei la tête
oo crosse, un pea renversée, et sor laquelle étaient des
chevilles qo'on toomait poor monter les cordes. U y
avait, comme à la guitare, une rose au milieu de la table,
par où sortait le son, et un chevalet, où étaient attachées
les cordes. Les cordes, d'abord ao nombre de 6, furent
portées à 10, 12, et même 34. Pour Jouer du luUi , on
pinçait les cordes de la main droite, en appuyant de la
Saoche sor les touches. Les luths de Bologne et de Pa-
oue étaient les plus estimés pour la qualité du bois, qui
produisait les plus beaux sons. Le plus anden fabricant
de luths dont on ait gardé le souvenir est Jean Ott, de
Nuremberg, qui vivait au milieu du xvi« siècle. Les exé-
cutants étaient dits luthériens, et parmi eux on distingua
Jacques Mauduit, Jacques et Charles Hedington, Bérard,
Julien Perrichon, Hémon, Blancrocher, les deux Gau-
thier. D existe une Méthode de tuth par Basset, insérée
dans le Traité des instruments à cordesy du P. Mersenne,
et un Trcùté théorique , historique et pratique du lu^
par Baron, Nuremberg, 1727. — La pandore^ la man-^
dore , la mandoline , le calascione , le téorbe, Yarchir
luth [V. ces mots)^ étaient des instruments de l'espèce
du luth. De cet instrument on n'a retenu que le nom,
qui figure toi^ours dans la poésie. B.
LUTHÉRANISME. V, Luther, LuTHâmms, Conpes-
sioif d'Adgsbodrg, dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire,
LITTHIERS, fabricants de Inths, et, par extension,
d'instruments à cordes en général. II y eutantrefois deux
écoles célèbres de lotherie : celle de Crémone, qoi a pro-
duit Maggini, Amati, Stradivarios, Goam^us, Gufr-
dagnini, etc.; et l'école allemande, représentée par Stei-
ner, Clotz père et fils, etc. L'école française ne date que
du xvui* siècle, et compte Pic, Lupot, Koliker, Thîbout,
Gand, Feinte, Villaume, Chanot, Boquet. Basset, etc.
LUTRIN, anciennement lectrin (du bas latin lectri-
num, dérivé de légère, lire), meuble de chceur d'une
église, dont la forme la plus générale est celle d'un globe
soutenant on aigle aox ailes déployées (V. Aigle), et qoi
sert à soutenir, soit le livre des Épltres, soit le Graduel
et l'Antiphonaire not^. Le lutrin de l'église de Hal, près
de Bruxelles, date du xv« siècle ; il est formé d'un pied-
droit hexagonal , flanqué de trois contre-forts doubles
soutenus par des lions et surmontés de statuettes d'an-
ges. On cite encore les lutrins des cathédrales d'Albi el
(l'Amiens, de Tirlemont, de Louvain, de Norwich. Le lu-
trin fût quelquefois appelé roue, et en latin plulteus ver»
satilis, parce qu'il tourne sur lui-même.
LCTRm (Le), poème héroï-comique de Boileau, en six
chants, dont les quatre premien parurent de 1671 à
1074, et les deux autres en 1683. L'auteur le composa
poor répondre ao défi d'un grave magistrat, M. de La-
moignon, et sur one querelle qui venait de diviser les
chanoines de ïbl S^'-Chapelle de l^s. A one époqoe où la
poésie burlesque dégradait les héros et avilissait de
grands sujets par des formes triviales, il voulut ennoblir
une action commune, et mettre en Jeu, au milieu des
solennelles fictions de l'épopée, des personnages vulgslres
et ridicoles. Plos poète et plos artiste qoe dans aocone
aotre de ses œovres, il a produit une fantaisie tout à la
fois brillante et correcte, où le mouvement et la couleur
s'unissent to^joun à la rigoureuse perfection du travail.
Gr&ce à une profonde connaissance des modèles antiques,
Boileau a pu faire un heureux emploi dn merveilleux et
des machines de l'épopée ; la Discorde et la Renommée
ne sont pas, dans son spirituel badlnage, de froides allé-
gories, mais des personnages agissants, et la Mollesse,
plus encore la Chicane, sont des créations véritablement
poétiques. Partout les caractères sont tracés et soutenus
de main de maître, et les mosun observées avec une fidé-
lité qui ne se dément Jamais. Toutefois, le 5* chant, tout
en pudsant encore par l'élégance do style, est plein de
détails peu variés et trop épisodiques ; le perroqmer et st
femme, qoi tiennent tant de place dans les commence-
ments do poème, disparaissent toot à eoop ven la fin;
le dénoûment enfin est annoncé soos forme de prétéri-
tlon, et l'on volt paraître ao 6* chant plosieon person-
nsges d'one gravité disparate (la Piété, rnémis, Ariste),
destinés sans doote à montrer les véritables sentiments
do poète, et à réprimer le xèle des gens qoi eussent vo-
lontiera transformé en grossière inconvenance oo en ou-
trage impie un ingénleox délassement de l'esprit.
LUTTE. i F. ce mot dans notre Dictumnaire dé
LUTTEUR. ) Biographie et d^Btstoire.
LUXE , tonte dépense excessive et soperfloe. Où com-
mencent l'excès et hi snperfloité? Évidemment 11 y a au-
tant de degrés dans l'appréciation qu'il y eo a entre les
Lnx
1184
LYC
dUMfBBtM dviHntionB ot entre les oondHioM dlTen^s
det penonnes dans une même sodétô. Un sauTage qai
donne une partie de aa chaïae, destinée à sa noorritare^
poor avoir un petit miroir qu'il inapendra dans aa hutte,
fait une dépense de luxe : un liomme civilisé oui, même
dans une très-modeste fortune, a plusieurs glaoes dans
son appartement, n'est pas aoàisé pour cela de recher-
clier le luxe. Porter un chapeau est pour une paysanne
un luxe, et souvent un luxe prétentieux et ridicule : une
femme de la ville a plusieurs chapeaux sans que per-
sonne trouve sa dépense excessive. Ia plupart des objets
qui font maintenant partie de notre ameublement, ou
qui sont entrés dans les habitudes Journalières de la vie,
ont oonmienoé par être regardés comme un luxe quand
ils ont été inventée ou mis en usage : il fût un temps où
c'était un luxe que de porter une chemise ; l'usage de la
bougie et plus anciennement de la chanddle était un
Inxe. n n'y a donc rien de fixe à cet égard ; et, quand
on se plaint des progrès du luxe, il faut distinguer net-
tement ce qu'on pouirait appeler le luase légitimé du luxe
Le luxe légitime consiste dans les progrès du bien-
être, dans ramélioradon des conditions de la vie maté-
rielle et même de la vie intellectuelle. Ce genre de luxe
est un bien. Si les simples ouvriers vivent ai^ourd'hui,
sous certains rapports, d'une manière plus confortable
que les seigneurs ne vivaient il v a cinq cents ans, s'ils
portent sur le corps des étoffes plus moelleuses et mieux
tissues, sils achètent des vêtements neufs plus souvent
3u'un chevalier du moyen âge, s'ils ont de la porcelaine,
es lampes à double courant d'air, et mille autres pe-
tites commodités qui sont aujourd'hui d'un usaoe ordi-
naire et qui étaient, 11 y a quelques centaines d'wmées,
des merveilles inconnues au luxe le plus raffiné , tant
mieux; c'est une preuve que l'industrie a fait des pro-
grès, et que la société entière en a profité. Tant qu'on
se contente de dépenser son revenu pour se procurer des
louissanoes honnêtes, quelque modeste ou quelque élevé
que soit ce revenu, on fait de son argent un usage lé-
gitime.
Le luxe ruineux est celui qui consomme non-een]»>
ment les revenus, mais les capitaux : un particulier qui^
par ostentation, aliène une partie de son fonds pour sa-
tisfaire à ses ^laiairs ou à sa vanité, a un luxe niinenx ;
nn Jour doit venir, sil continue à mener le même train
de vis, où sa fortune tout entière sen dissipée ; c'est un
grand dommage pour lui, c'en est un aussi pour la so-
ciété. On slmagine que l'argent psssant d'une main à
une autre, il y a simplement déplacement de richesse,
sans perte réelle, et que l'honmie ruiné a seul le droit
de se plaindre I c'est une erreur : s'il possédait un mil-
lion, ce million ftdsait partie du capital social; qu'est-il
devenu? il a été réparti entre une foule de personnes
qui, leoevant cet argent comme un revenu, l'ont con-
sommé en grande partie improductivement, c-à-d. en
dépenses qui ne laissent rien après elles, au lieu de le
conserver à l'état de capital ; et, du million qui enrichis-
sait hi société, il ne reste plus, après )a ruine du pro-
digue, que 200,000 ou 300,000 francs qui, placés d'une
manière reproductive, constituent encore une richesse
applicable a l'industrie et produisant intérêt. Les États
peuvent, aussi bien que les particuliers, se rendre cou-
pables de ce genre de luxe, qui est funeste parce qull
appauvrit la société. V, J. Pinte, Essai sur le luxe, Am-
sterdam, 1703, in^2; Saint-Lambert, Essai sur le luxe,
i704,in-iS; Butel-Dumont, Théorie du luxe, 1771, j
8vol.in-8*; Butini, Traité sur le luxe, Genève, 1774, ;
in-12; l'abbé Pluquet, Traité philosophique et politique
sur le luxe, 1780, 2 vol. in-12. L.
LUXEMBOURG (Palais du). ( V.notx» Dictionnaire de
LuxBMSooao (Petit). ) Biogr, et d'Btstoire,
LDXBMBOuiia (Musée du), situé à Paris, dans le palais
de ce nom. H y occupe une partie des silos du nord et
du sud , et les deux pavillons extrêmes de la façade de
'est, sur la rue de Toumon. Ce musée, originairement
coniposé des tableaux de Rubens représentant l'histoire
de Henri IV et de Marie de Médicis, de la Vie de S* Bruno
par Lesueur, et la suite des ports de France par Joseph
Vemet et Hue, qui ont été réunis au musée du Louvre en
1818, est destiné à recevoir les chefs-d'œuvre des peintres
et des sculpteun vivants. Il contient environ 160 ta-
bleaux, 40 œuvres de sculpture, 9 cartons de dessins,
quelques gravures et lithographies. Ces œuvres doivent
rester au Luxembourg dix ans encore apri^^ la mort de
iBurs auteurs, en attendant qu'on fasse un choix parmi
lies pour en doter le Louvre.
LYCÉE, un des gymnases de l'andenne Athènes, Mr
les bords de l'Ilissus, aussi fréquenté que le Cynoesige
et l'Académie. Il tirait son nom de Lycus, fils de Pan-
dion, et était consacré à Apollon, qui en reçut le surnom
de Lycien. On y trouvait des cours entourées de porti-
ques, des salles o& les philosophes et les rhéteun réu*
ninaient leun disciples, des pièces réservées pour k»
bains, des terrains préparés pour la lutte, un stade pour
la course, des Jardins et de beaux ombnuÉes de platanes.
Cest là qu'Aristote enseigna sa philosophie, appelée poor
cette raison péripat^ieienne (c.-à-d. qu'on expliaue sa
se promenasU). Les murs du I^cée éûdent enrichis ds
peintures.
LTCÉB , nom donné en France aux établissements pn-
blics d'instruction secondaire oui appartiennent à l'État,
par opposition aux Collèges, qui sont entretenus aux frais
des villes. De 1815 à 1848, on les appela Collèges royaux,
pour les distinguer des Collèges communaux. Avant
1848, on distinguait trois classes de Collèges royaux,
dans lesquelles les traitements des membres du person*
nel différaient : ai^ourd'hui les Lycées sont tous do
même ordre, à l'exception des Lycées de Paris (Louis-
le^rend, Charlemagne, S*-Louis, Napoléon, et Bona-
parte) et du Lycée de Versailles; on ne les distiague que
par le prix de la pension et de l'externat, et les ooembres
du personnel, distribués en trois classes pour le trai-
tement, peuvent franchir sur plsce tous les degrés.
L'État entretient dans chaque Lycée un certain nombre
de boursiers, et pourvoit, si cela est nécessaire, à l'in-
sufBsanco du revenu par le moyen d'une subvention :
les départemonu et les villes fournissent aussi quel-
ques nourses. La direction d'un Lycée est confiée à
un proviseur, assisté d'un censeur des études, d'un
aum&nier et d'un économe, logés dans l'établissement;
l'enseignement est donné par des professeurs en titre,
par des chargés de cours, et par des maitres (msltres
élémentaires, maîtres de dessin, d'écriture, etc.); ea
dehore des classes faites par ces fonctionnaires, les
élèves internes sont surveillés et dirigés par des
maîtres répétiteurs et des aspirants répétiteurs (pré-
cédemment sppelés maîtres d'éhtdes)^ au-dessus des-
quels est un surveillant général, tous logés et nourris
au Lvcée. Les divers fonctionnaires sont nommés psr
le ministre de linstmction publique, et révocables
par lui : avant 1848, les professeun titulaires étaient
inamovibles, à moins d'un jugement du Conseil rpysl
de linstmction pubUque. L'enseignement des Ly-
cées comprend : 1" une division élémentaire, formée
des classes de huitième et do septième, ei presque
toqjoun précédée d'une classe préparetoirei 2* une
division ne grammaire, formée des années oa classes
de sixième, de cinquième, de quatrième» après les-
quelles les élèves subissent un examen qui décide s'ils
sont admis à ponreuivre leurs études; 3* une division
supérieure, formée des classes de troisième, de seconde,
de rhétorique, et de philosophie pour les élèves qui
se destinent au baccalauréat es lettres^ et de deux
années de mathématiques pour ceux qui tendent sn
baccalauréat es sdenres on qui se dirigent ven le»
écoles du gouvernement (école navale, école fores-
tière, école centrale des arts et manufactures, école
Saint-Cyr). Les plus importants Lycées ont une sntre
année d'enseignement scientifique, la classe de nur
thématiques spéciales ou supérieures, destinée à la
prépantion aux Écoles Normale, Polytechnique, etc.
k côté de cet Enseignement classique, il existe un
Enseignement spécial, divisé en quatre années, et
dans lequel les élèves , ne fSûsant ni grec ni latin,
étudient le fhtnçais, la littérature, la morale, les él^
ments de l'économie politique et du droit, les sdences
mathématiques, phvsiques et naturelles. L*enaeigne-
ment classique est non né psr les professeun aui ont
subi les épreuves de l'une des agrégations des lycées,
ou par ceux qui ont tout au moins le titre de licencié
es lettres ou de licencié es sciences. L'enseignemen»
spécial a ses professeun agrégés spéciaux; à leur
défaut, il est donné par des maîtres de l'enseigne-
ment classique. Enfin, chaque diridon des Lycées re-
çoit un enseignement reli^eux, dont le programme
est approuvé par l'évêque diocésain; pour cet en-
seignement, les élèves protestants relèvent de leur
pasteur. B.
LYCIENNES (Antiquités). Les vovageure du xix* siècle
ont découvert, dans Tancienne Lycfe (Asie Mineure), un
certain nombre do constructions tumulaires, que les uns
ont rog^rdéfts comiDe des œuvres indigèneiH ki antres
LYD
il 85
LYO
MUDA roa^nge de colons étrangers. Ce sont des mona-
MDts tsillés dans le roc : le style des scalptures et le
caractère des sujets représentés sur les parois rappellent
Péeole des srtisCes de la Perse, légèrement modifiée pent-
tin psr l'influence de l'art grec Ces monuments ont
urtout exdté l'attention à cause des inscriptions qui y
notgnTées. Un anglais, Cockerell, fut le premier qui en
Gopis plusieurs, mais d'une manière imparfaite. Plus
tard, DsTid Ross, Charles Fellows, Daniell, Forbes et
Spnûtt, Toyageurs de la même nation, en relevèrent d'au-
tns à Antiphellus, à Xantbe, à Limyra, à Myra, etc.
()nelqiies inscriptions sont bilingues, et présentent des
cusctères phéniciens, grecs ou latins. Juxtaposés aux
caractères d^une autre langue dont il n'y a de traces nulle
piit ailleors ; mais la comparaison des textes est souvent
IN» utilité, parce qu'ils ne correspondent cas toulours
)m nos aux autres ; les différents peuples qui occupèrent
la Lyde se seront servis, pour la sépulture de leurs
iBorts ou pour d'autres usages, des monuments taillés
par ceux auxquels ils avuent succédé, et auront laissé
soboster les inscriptions primitives, qui ne leur étaient
poit-êlre pas intelli^les, à cMé de cellea qu'ils tra-
çaient eux-mêmes. Outre les monuments funéraires, on
a trouvé des médailles en Lyde : les unes, qui ont pour
emblème ordinaire une Ivre, et dont les l^^ndes sont
grecques, appartiennent à l'époque des Sélenddes; les
lotres, plus anciennes, reproduisent les caractères ly-
oeos dtt inscriptions lapidaires , et portent presque
tontes on emblème appelé par les antiquaires trtquêtra ,
flC diDs lequel on a youlu voir, tantôt un trépied, tantôt
on dochet ou grappbi, ou encore ouelque chose d'ana-
logoeanx trois jambes d'hommes figurées sur certaines
médailles de Selge en PIsidie.
. Quelle est donc cette langue lycienne révélée an monde
sBfam par les inscriptions et les médailles? Dans l'état
actuel des étades, les linguistes la rattachent générale-
ment à la famille des langues indo-européennes (F. ce
mat). Ainsi, Spratt et Forbe» pensent que la Lyde fut
dépoiplée par l'invasion des Perses, et que l'idiome ly-
dà psrvenu jusqu'à nous fut employé, non par les an-
cieiis indigènes, mais par les conquérants t si l'alphabet
employé pour écrire cet idiome ne présente pas le ^ype
penao, c'est qu'aucun des alphabets persans dont nous
vnm connaissance ne remonte à cette époque, et que
lea Perses, Toolant écrire en Lycie les sons de leur
laijpie, recoururent, en le modifiant, an système gra-
phique des hommes avec lesquels ils se trouvaient mis
nooreDement en rapport Grotefend a été amené aussi ,
par la comparaison de plusieurs inscriptions, à Juger que
Il langue dans laquelle elles étaient écrites, devsit, en
labon surtout du nombre et de la nature de ses voyelles,
•ppartenir à la fiunille indo-européenne. Sharpe a re-
marqué que ces v<»yelles correspéndent presque exacte-
ment à celles de Tandon persan ; que la lansue à laquelle
tppartiennent les noms inscrits sur les tonibes lydennes
nimnble plus qu'aucune autre au zend ; qu'elle a même
des mots plus voiains encore du sanscrit que du lend;
^ sa structure, et en particulier la déclinaison des
son» et des pronoms, est essentiellement indo-euro-
péenne; que non-seulement l'alphabet lyden a pour
nie la plupart des lettres de l'alphabet grec primitif,
nuls sossi que la conjugaison ofiîre les particularités de
Tiogment et du redoublement, ainsi que les flexions de
tempe qui caractérisent le grec; ou'enfln il existe une
nmiemblance particulière entre récriture lydenne et
Pétnmqoe. Qjjant aux radnes sémitiques qui se trouvent
dans le lyden , outre qu'elles ont revêtu des flexions
ttraogères à leur nature, et qu'elles sont sans eompa^
ainn beaucoup moins nombreuses que dans le pehlvi
^ eit une langue indo-européenne, leur présence s*ex«
pljqne psr le voisinaipe de la Syrie. F. Saint-Martin,
Omnutiofu itir les rnscripUons lycimnes découoertei
por if. CocKerell (dans le Journal des Savants, avril
Ifôl); Fellows, Excwsions en Asie-Mineure, en anglais,
Lonoéa, 1839; le même. Essais de découvertes en Ly»
cû, 1840, et Voyages et Recherches en Asie-Mineurp ,
iSSS; Texier, Description de V Asie-Mineure, 1838 ; Gro-
tefend, Sur Vécriture et la langue lyciennes , en allem.,
dans le Jotimoi des études orientales, Bonn, 1842, in-8<»;
Spntt et Forbea, Voyages en LyciCy Londres, 1847, 2 voL
ii-8*, en anslais.
LYDIEN (Art). Les débuts des peuples de l'Asie
Mioeore dans l'art de l'architecture, avant l'arrivée des
colooiea grecques, na nous sont c(mnus que par des mo-
numents fonérairest notamment par ceux qui furent
érigea à la mèmoiie des voii lydleDs. Ils consistaient
en Umwli d'une grande hauteur, soutenus à leur
par une maçonnerie grossière de pierres irr^ulières : o«
bien c'étaient des grottes taillées dans le roc, et oflhmt
en façade une porte assez régulière. Des inscriptions en
langue lydienne qu'on y a trouTées ne sont pas asses
nombreuses pour qu'on ait pu essayer avec succès de les
déchiflter. Si les peuples de l'Asie Mineure paraissent
avoir été peu avancés dans l'art architectural, en revan-
che ils semblent avoir eu de l'habileté dans celui de tra-
vailler les métaux, de teindre les étoflies; Aristote, nous dit
Pline, rapportait la découverte de la fonte et de l'alliage de
l'airain à Scythes le Lvdien ; Platon parle d'un cheval de
bronze trouvé par Gy«s dans les entrailles de la terre ; les
Lvdiens, selon Hérodote, furent les premiers qui frap-
pèrent de la monnaie d'or et d'arsent. On connaît le
§oût des Lydiens pour la musique, et les découvertes qu'ils
rent dans cet art. Ils passaient notamment pour les
inventeurs de la magade et de la pectis ( K. ces mots)\
Etienne de Byzance leur attribue aussi la dthare à trois
cordes.
LYDiin (Mode), un des modes de la mudque des andens
Grecs, placé entre l'éolien et l'hypcrdorien. On l'appe-
lait quelquefois mode barbare, parce qu'il portait le nom
d*un peuple asiatique.
LYON (ÉgUse S^hIban, à). Cette église métropolitaine,
située sur la rive droite de la Saône, au pied du coteau de
Fourrières, et sur l'emplacement d'un ancien baptistère^
réunit plusieurs styles architectoniques. La grande nef,
remarquable par la pureté et l'élégance des lignes, appar*
tient à l'architecture ogivale du xiv* et du xv* siècle. Le
chcBur, plus anden, réunit, dans ses arcades et dans les
ouvertures de la psjrtie supérieure, les pleins dntres et
les osives, ce qui est le caractère du xn* siède, &ge de
tranution. Le plan général de l'édifice sindine Ters la
gauche (F. Ax«. La cathédrale de Lyon a 79 met* de lo&«
gueor, 3fi",60 de largeur, et 33™,30 de hauteur sous yo4>
tes. Quatre tours, dont deux à hi façade et deux sur les bras
des transepts, la surmontent : andennes par la base, leur
sommet ne date que de la fin du xv* siède; elles n'en
pas reçu toute l'élévation projetée, et se terminent brus,
quement en plate-forme. L'art du xv* siède a répandu
le luxe de sa décoration savante sur les trois portes de
la façade, que surmontent des frontons aigus, éridés à
Jour : au-dessus de ces portes, dont une galerie la sépare,
se développe une magnifique rose, entre deux fenêtres
simulées, et le tout est dominé par un fronton central.
A l'intârieur, le monument offre un genre de décoration
Sii ne se retrouve qu'à l'andenne cathédrale de S^Man-
ce, à Vienne s ce sont trois frises en marbre incrusté de
dment rouge, qui, à différentes hauteurs, ceignent le
chour. On voit dans le sanctuaire de très-belles boiseries
sculptées, provenant de l'abbaye de Cluny. Parmi les
chapelles latérales, on distingue celle que firent con-
struire le cardinal de Bourbon et son frère Pierre de .
Bourbon, gendre de Louis XI ; elle est en style Renais-
sance, et a une charmante balustrade, où l'on voit le nom
de son fondateur combiné avec des feuillages. Quelques
uns des ritraux peints sont bien conservés. La cathédrals
de Lyon contient une horloge astronomique, construite
en iSl&è psr Nie. Uppius de Bàle, rétablie et augmentée
en 1660 par Guill. Nourrisson, et en 1780 par Ghamy.
LYON (Église S^Martin-d'Ainat, à), monument de style
romsno-byiantin, l'un des plus complets des x* et si* né»
clés, mais souvent remanié et agrandi. Cette église occupe
l'emplacement d'un temple que 60 nations des Gaules
dédièrent à la déesse Rome et à l'empereur Auguste. La
façade a un cordon de losanges incrustés en couleur
rouge. Les deux premiers étages du docher sont percés
de fenêtres en plein dntre, toutes d'un style différent; le
3*, de construction postérieure, se compose d'une py-
ramide que flanquent quatre cornes sépulcrales d'm
asses mauvais goût. Un élégant vestibule, placé au centre
de la façade, et ouvrant sur le parris par une porte
S;ivale du xin* siècle, donne entrée dans l'église. L^exté-
eur de Tabside présente un appareil varié, composé de
pierres taillées en losanoes, en carrés, etc., dont la forme
se desdne au moyen d'incrustations semblables à celles
de la façade. L'intérieur de l'église d'Ainay, que des sr-
chéologues pensent avoir été primitivement en forme da
croix latine, offre a^iourd*hui l'aspect d'une badliqne.
Quatre colonnes de granit, qui supportent la coupole, re-
montent à l'épocnie romaine; elles avaient des chapi-
teaux antiques de bronze, qui ont été remplacés au
moyen âge par de mauvaises copies en pierre calcaire.
Les trois chapelles absidales sont ornées de peintures s«r
Ibnd d'or par M. Flaodrin. On remarque dans la chapelle
75
1
LYR
118«
LTR
4t la Vief^o un confessionnal en style l^zantin , ehef-
d'csnvre de menuiserie et de sculpture. Le |>srris et le
OMfchepied du maître -autel sont formés par de belles
OMsalques, ouvraoB de MM. Morst firères.
LTOR (Église S^-Niznm, à). Cette église, de style ogital,
construite au-dessus d*une crypte où S^ Pothin oélé-
Iwait les mvstères, appartient à la première moitié du
lY* siècle. Un portail en etirle Renaissance fut ajouté, de
1530 à f 540, par Philibert Delorme; de nos Jours on en a
transformé le fronton en pignon aigu, et le milieu a reçu
une statue de la Vierge par M. Bonnassienx, des statues
de S** Anne, de S^ Joachim, et de S* Nizier par M. Fa-
bisch. On a aussi terminé récemment le côté méridional
4e la façade, en élerant une tour surmontée d*une flèche
gothique. L'intérieur de l'église, en forme de croix latine,
mesure 74 met. de longueur, 38 de largeur et 30 de hauteur.
La nef centrale est séparée des collatéraux par six piliers
de chaque cAté, avec chapiteaux à feuillages entremêlés
d'animaux. Une belle galerie règne au-dessus des arcades
et fait le tour de l'édifice. La grande TOûte est remar^
qoable par hi hardiesse de son trait surbaissé et par le
ttpricieux entrelacement de ses nervures : des écussons
coloriés lui donnent une grande richesse. Le maltre-autel,
en marbre blanc de Carrare, et en style gothique, a été
senlpté par Blandin, d'après les dessms de l'architecte
FH^lleL La chapelle de hi Vierge contient une statue par
Antoine Coysevox.
LYON (Hètel de Ville de). Ce monument, construit de
1640 à 1655, par Simon Maupin, architecte lyonnais, dé-
fasté par un incendie en 1074, réparé en 1702 par Blan-
lard, qui le f^ en voulant l'embellir, a été récemment
restauré par M. Desjardins. Isolé de tous côtés, il a une
façade principale sur la place des Terreaux, une seconde
fiiçade sur la place de la Comédie, et deux ailes. La cour
est plus âevée que le sol des mes adljscentes. La façade
principale a 40 mètres de largeur : elle se compose de deux
Cvillons flanquant un bftument en arrière-corps. Ce
timent présente un grand balcon au niveau dii premier
étage ; le milieu, où se trouve l'entrée, est accusé par des
chaînes de pierre en bossages, et présente, à la hauteur
du deuxième étage, un Qrmpan orné d'une statue équestre
d'Henri TV par Legendre-Hérald, et surmonté des armes
de la ville. Au-dessus de ce second étage est une balu»-
trade en pierre, supportant la statue d'Hercule par M. Fa*
Usch, et celle de Pallas par M. Bonnet. Les pavillons
d'angle se terminent par un ftonton et par un dôme à
quatre pans. Derrière la façade s'élève la tour de l'hor-
loge ou oeifroi, hante de plus de 50 met. et finissant en
petite coupole. On monte à la grande porte de l'Hôtel de
Ville par un perron de 14 marches. Dans le vestibule,
dont la voûte en are surbaissé est d'une grande hardiesse,
on foit les groupes en bronze de la Saânê et du RMnê
par les frères Coustou. La façade de la place de la Co-
médie a été totalement reconstruite en 1858 : elle est
formée de plusieurs arcades que surmonte une ^erie
avec balustrade en pierre; on a placé dans le milieu un
petit Jet d'eau Jaillissant d'une coquille. Les adminis-
trations départementale et municipale sont installées à
l'Hôtel de Ville : les salons de réception et les apparte-
ments du préfet du Rhône occupent l'étage d'honneur
dans l'aile méridionale; les appartements de l'Empereur
et de l'Impératrice sont situés au même étage dans l'aile
septentrionale. La salle des Arohives contient, outre les
archives, un musée historique. Dans la salle de la com-
mission administrative on a placé les portnits de Jacquard
et de l'abbé Rorier. Les fresques du plafond du grand
escalier, où Blanchet avait représenté l'incendie de Lug-
dimum an temps de Néron, ont été restaurées de nos Jours
par M. Odier.
LYRE, instrument de musique à cordés, dont les
Écrptiens attribuaient l'invention au dieu Hermès Tris-
iriéisiste, et les Grecs à Apollon, ou à certains mortels
favorisés des dieux, Orphée, Amphion, Linus, etc. La
lyre se composait d'un magas, sorte de boite oblongue
rectangulaire, en bois, plus rarement en métal , en ivoire
ou en écaille, où s'attachaient les cordes par une extré-
mité, et qui était destinée à augmenter leur sonorité ; d'une
table j qui fermait cette caisse résonnante, et qui souvent
ne fut an'nne pean sèche tendue; de deux montants,
adaptés a la cauise vere ses extrémités; d'un joug, tra-
verse placée an sommet des montants, et garnie de che-
villes où s'enroulaient les cordes par l'autre extrémité.
Ges parties essentielles de l'instrument ont pu recevoir
tontes sortes de formes, plus ou moins élégantes. Le
moffos fût sans doute orif^nairement une éadUle de tortue,
et de là vint le nom de chétys (en latin testitdo^, donné
par les Grecs à la Ij^ra. Le monoeonls on lyre à une seule
corde ne fut, selon toute vraisemblance, qu'une échelle
des tons, que le musicien, à l'idde d'un chevalet gliiniit
le long de la corde, ftisait résonner, et qui lui soviit à
prendre le ton. La lyre à trois cordes était la plus dmple;
elle suffisait aux besoins du chant, qui ne fut peedant
longtemps qu'une récitation rhythmée, gu'une dédaauk
tion plus on moins musicale. La lyre fut quaUflée de
titraeordê, pentacorâê, hexacord», selon qu'elle eat4, 5
ou 0 cordes; vint ensuite Vheptacord» de Terpaaihs,
création pour laquelle ce poète-musicien fut, (Ut-on,
banni de Sparte. Simonideiyouta à son tour une 8* corde,
Tbéophraste une i9*, et TImotbée se servit d'une Ijnï
13 cordes. Les cordes étaient presque toujours en wpn;
on en fit cependant avec du laiton et un mélange d'or
et d'argent. On Jouait de la lyre soit avec un pMctnsa
( K. cê mot ) , soit en pinçant les cordes avec les doigts.
C'était un instrument fort borné, puisqu'il n'avait pu de
manche pour que les doigts pussent y modifier les lato- '
nations; une lyre ne rendait qu'un nombre de sods égil
à celui des cordes, et le musicien ne pouvait changer de
mode sans changer de lyre. Ghes les Grecs, on se pee-
sait la Ijrre de main en main dans les fesdns, et chaque
convive chantait à son tour en s'accompagnant La lyn,
en grand honneur dans l'anticniité, se perdit au mayeù
Age ches les Ocddentanz, et fit place à d'antres instra*
menu. V, CiTHàas, Babbitos, PnoaHuix, AMraicaoaoïnL
LYRIQUE (Poésie). On ne pense guère à chercher an-
Jourd'hui dans Bollean les caractères et les règles de la
poésie lyrique, malgré les ven qu'il loi a consacrai
dans son Art poétique, ch. U i
Voie, Bvee pins d'ëdat et non moini d^ënergls,
jélerftnt Juqu'BU ciel son vol unbltieoz.
Entretient dans eet ven oommeroe avec lea dlenz, ete.
n ne faut pas cependant mépriser ce Jugement, parée
qu'il est sage et mesuré, et qu'il exprime avec calme le
nature et les lois du genre le plus hardi et le plus pes*
donné de tous. Biais nous trouverons en effet plus d'&me
et de chaleur dans quelques lignes du Discours sw TAft-
totrs unwertdU. « Il se faisait, dit Bossnet, des an-
tiques que les pères apprenaient à leun enfants, csa-
tiques qui, se chantant dans les fêtes et dans les assem-
blées, y perpétuaient la mémoire des actions les plot
éclatantes dea siècles passés. De là est née la poé8i^
changée dans la suite en plusieun formes , dont la plus
ancienne se conserve encore dans les odes et dans lei
cantiques employés par tous les anciens à louer la Divi-
nité et les grands hommes. Le style de ces cantiguee,
hardi, extraordinaire^ naturel toutefois^ en ce qu'il est
propre à repréeenter la nature dane ses transports, 9W
marché pour cette raison par de frives et impétueuses
saillies, affranchi des liaisons ordmaires <iue rechereks
le discours uni, renfermé d^aUleurs dans des cadeem
nombreuses qui en augmentent la force, surprend l'o-
reille , saisit Vimagination, émeut le ccmr, et s*imprimê
plus aisément dans la mémoire > (H* partie, ch. lÛ). U
poésie l]rrique est là tout entière, enthouaiasme religieai
et guerrier, admiration de la grandeur sous toutes see
formes, éblouissements et retoure de l'imagination , hsr-
monie éclatante et musicale, puissance populaire et pa-
triotique, tout ce qui fait l'incomparable beauté des
Psaumea et des Prophètes, des Odes de Pindare et de
l'éloquence de Bossuet II manque seulement à ce tableia
un trait que le prêtre aurait Jugé « peu sérieux et peo
digne », mais d'où le génie des anciens et des modernei
a tiré ses plus vives et ses plus gracieuses inspirations;
la passion qu'Horace appelle le « soud de la jeunesse •,
l'amour avec ses emportements, ses Joies et ses doulemSi
Ces nuances infinies de la passion, le poète lyrique les ex-
prime en son propre nom. Il n'est plus, comme dans l'épo-
pée, un témoin qui raconte et peint la vie humaine en se
dérobant derrière ses héros ; il ne prend pas, comme dans
le drame, les personnages que l'histoire on l'imagination
hii fournissent pour interprètes de sa pensée. Sa poésie
est toute personnelle ; son àme s'ouvre et s'adresse di-
rectement à ses auditeura, sans intermédiaire ni déguise-
ment; de Uk cette liberté de mouvementé, cette variétâ
poétique, ces contrastes saisissants, ces brusques pss-
sages, où l'art n'est pas étranger, selon la remarque de
Bmleau, mais que l'art réduit à lui-même n'enseigne
Jamais; car ils naissent de la passion, avec ses inconsé-
quences, ses contradictions et sa logique secrète. — U
critique est tombée dans une grave «reur, quand , sons
le nom de « désordre pindarioue » , elle a imputé sa
plus grand dea lyriques grecs les ftoldes exclamatloDS
LTR
1187
LYR
doDt la mdftioo fit longtemps ane règle da genre : « Qae
fii»j6? où Taift-Je? où sois-JeT •
QptSïm doeta et Mlnta irthmm»,
▲qfoaraiml ne bit la loi?
Pbdire n*est pas responsable de ces figures ambl-
daises, non plus que de VOde sur la prise de Namur,
doDt nous venons de citer le début, et la sereine majesté
de sa poésie ne connaît pas ce fracas puéril. Si Tode est
impétueuse, c*est qu'elle est une effuMon de Tàme forte-
oeotéfflue
V<Al watt la strophe, ouvrant tes elles dans lee eleox.
V. Hnao.
Cest fexpressiott la plus éclatante et la plus harmo-
oisosB de la foi , du patriotisme, de Tamour, de Tespé-
nuios, de la crainte, da la douleur; à elle appartiennent
(DOS les sentlmenta, tontes lee passions qui enlèvent
rhomine à lui-même et le transpoitent dans les sublimes
rtgioi» de ridéal ,
Aff* cee miles de feu o^ ravissent une âme
An céleste ^ifynu,
J.-B. ROCSSBAU.
U poésie lyrique est peut-être à la pensée ce que le
dttDt est à la parole; et, par l'ampleur, la yarièté et
Pédat du rliythme et dea sons, elle tient de près à la
■uskpie, cette traduction enivrante et sensuelle de la
pwion et de la rêverie. Les deux arta ne faisaient qu*un
diez les Hébreux et chez les Grecs. La harpe et la lyre
s'étaient pas des emblèmes, comme chez les modernes;
c'était une partie de la poésie elle-même. Quatre mille
dttBteors, appartenant à la tribu de Lévi, attachés au
lenrice du temple et divisés en vingt- quatre classes, fai-
ttieot retentir les cantiques sacrés dans Jérusalem ; et
les poésies de Pindare, comme les choeurs de la tragédie
gneqoe, étaient aïooompagnés par les instrumenta, et
ipwlqaefois même figurées par la danse. La civilisation
Bodonie a clumgé ces conditions, en multipliant à l'in-
ini le nombre et les ressources de ces instruments, qui
n réduisaient dans Torigine aux « notes rares et sA-
fères » dont parle Horace. Elle a fait de la musique un
vt levant et compliqué, qui a ses effets comme ses
limiies, et atteint parfois à un degré de puissance eztra-
«finaire, surtout lorsqu^il emprunte un sens à la parole
faaiDaiBe,et quMil en seconde et développe les intentions
et les idées. Hais la poésie tout entière, et surtout la
poésie lyrique, fidèle à son origine, en a gardé son carac-
tère musical, la richesse et la variété des rhythmes, la
tédnction du nombre et de la mélodie; c'est par là,
comme par la sublimité de ses inspirations, qu'elle a mé-
rité le nom da « langage des dieux ».
La poésie Ijrriciue apparaît aux premiers Jours des so-
détés, et elle a le privilège de convenir à toutes les
époques de leur existence, à leur vieillesse même, lors-
qu'elles ont conservé du génie et du style, parce que la
poésie lyrique est l'homme même. Née au milieu des
dogmes et des croyances de l'Orient, nous l'avons vue, de
001 jours, remuer profondément les générations mo-
dernes que le doute dévore, et puiser des Inspirations
jusque dans ce douloureux état moral , qui semble la né-
pdoa de la poésie, puisqu'il est celle de la crojrance.
— Nous ne pouTons rien dire de la poésie lyrique des
Indiens, ma^T^ Tlmportance qu'ils ont prise aux yeux
de la critique, et peut^^tre de la mode. Il semble seule-
ment que les hymnes des Védas, enfantées dans une
brûlante et sensuelle atmosphère, ne contiennent crue le
coite de la matière, de la puissance et de la fécondité, et
que Factivité de l'àme s'endorme dans leur immobilité
mystique et leur splendeur monotone. C'est dans les
i^saunes de David et dans les Prophètes qu*il faut cher-
dier les magnifiques images de la divinité, la piété ar-
dente, les cris douloureux de la misère humaine, le senti-
ment profond des prospérités et des malheurs de la pa-
trie, et Jusqu'aux douces peintures de la paix et du bon-
Iwor. Au xvn* riède, on n'osait pas parler du sublime
des livres saints à propos de « choses si profanes » que
it HttéFstnre; et Rollin s'excusait d'analjnsier les beautés
de ces cantiques où s'était si souyent Inspiré Bossuet.
Après les méchantes plaisanteries de Voltaire et de son
école, fort Insensibles d'ailleurs à la poésie lyrique,
même profane, la foi est devenue plus hardie, et a cessé
de cralodre que sa pureté ne s'altérfct à louer les sublimes
•Beents de David et disale. — Pendant qu'un petit peuple,
léparé du lesie dn monde par sa religion et ses lois, d^
vait à une Inapliation divine des chanta destinés à de*
venir la langue sacrée de toute civilisation chrétienne*
une autre race, mervellleuaement douée des Muses,
comme elle le disait ell»-mème dans ses riantes fictions*
recevait la poéaie lyrique des mêmes répons d'où elle
avait tiré l'épopée. Entre la lécende Immortelle d'Orphée
et les Odes de Pindare, la Giêce compte bien des poètes
Ivriques dont nous pouvons à peine entrevoir le génie
dans quelques ven mutilés, conservés par haaard ches
les graînmairiens. Mais qu'elle était merveilleuse et puiv
santé, cette imagination oui créait dans le même temps,
et pour la même nature d'inspiration, deux formes égar
lement belles, la poésie m&ique ou Mienne^ et la poésie
chorique ou donenne, inventait, pour servir la wiét^
infinie du sentiment, des rhythmes variés presque à
l'Infini, remplissait l'esprit et roreille charmés d'hymnec
cette poésie, il ne nous reste guère que des ruines, des
parcelles; et cerpendant, telle est la vie attachée à cette
poétique poussière, «reste des ans et des barbares »,
que les noms d'Alcée, de Sapho , d'Anacréon , sont de-
meurés immortels, et que nous pouvons répéter, après
Horace , leur élève glorieux : « L'amour respire encore,
avec les ardeurs confiées à la 1^ de la Jeune éolienne. »
— La grande renommée de Pindare, admiré des anciens
et contesté de quelques modernes, a été dignement ap-
préciée dans l'éloquente et poétique étude que lui a con«
sacrée l'un des msAtres de la critique contemporaine
(M. Yillenudn , Étude sur le génie de Pindare). Quand
on se représente ces mobiles et ingénieuses populations
de la Grèce, et leur paasion pour les palmes de la- lutte
et de la course des chars, on rit des impertinences de
Voltaire contre Pindare, qu'il appelle « un chantre des
combata à coups de poing », et l'on retrouve sans peine
dans les strophes harmonieuses des (Hympùiues, des Né'
méennes, des Pythiques, le profond sentiment de la
Î gloire, de la grandeur et de la vertu. Encore les quatre
ivres oui nous restent de lui ne sont-ils crue la moindre
partie ae ses ouvrages, comme il arrive u souvent avec
ces grands maîtres de l'antiquité. — Le génie lyrique des
Grecs Jette également un éclat incomparable dans les
chœura de la tragédie, qui avait pris son origine dans le
dithyrambe et le culte mystérieux de Bacchus. Horace,
dans son Art poétique , ne présente le choeur oue comme .
un personnage du drame. Pour en donner ridée com-
plète, il aurait dû le montrer tour à tour pathétique,
splendide, efnrajrant dans Eschyle, plein de fraîcheur, de
majesté, de richesae dans Sophocle et dans Euripide,
idéal et brillant même dans Aristophane, quand il laisse
apparaître la beauté pure et sérieuse au milieu des sa-
tkes et des bouffonneries. Toute cette poésie « bouillonne
comme celle de Pindare, et s'échappe à grands flots de
ces bouches profondes, » pour emprunter le magnifique
langage d'Horace. — Et cependant , c'étaient , sur le sol
de la Grèce, les demien accents de la grande inspiration
Ijnrique : au siècle d'Alexandre, l'hymne succède à l'ode,
et la gravité du philosophe à l'enthousiasme du poète,
dans l'hommage sublime que Cléanthe adresse au dieu
souverain. — Il faut se transporter à Rome pour retrou-
ver le génie hellénique dans les ex(|uises imitations
d'Horace. Trop épicurien pour ressentir profondément
la passion et la fol du poète lyrique, le spirituel and
d'Auguste et de Virgile eet, dana la forme et le style, un
artiste merveilleux ; de plus, il est pour nous le miroir
inestimable de la poésie grecque, qui lui a servi de mo-
dèle. Au reste, quoiqu'il se dârobe à l'émotion et ramène
Tolontien l'enthousiasme au ton du badinage. Il est téu-
Joun sincère et sublime, quand il chante la grandeur de
Rome ou la vanité des foies humaines, et iamals le
plaisir et « la liberté du vin » n'ont trouvé un Interprête
plus charmant.
Le christianisme proscrivit les chants profanes de la
Grèce et de Rome ; il avait les cantiques des Hébreux et
les hynmes de TÉglise. S^ Grégoire de Nadanze et Sy-
nésius enseignèrent à la muse dorienne une langue nou-
velle, celle du dogme et des vérités abstraites et méta-
physiques, mêlées aux épanchements d'une foi ardente
et a ces images gracieuses dont la jMésIe grecque ne pou*
vait se priver tout à fait. — La imrbarie marchait plus
vite en Occident ^u'à Constantinople et à Ptolémals. La
langue latine, destinée à devenir lalanguede l'Église, passa
des hymnes de l^rudenoe, et de ses ven si touchants sur
les innocentes yictimes d'Hérode, aux proses rimées dn
moyen âge, naïve et puissante expression d'une fol i»rf^
nt-t"
'""'■'■"T^eST.^^-
'—„».-•—"! w^». vol».» «
, rendirent à Qulnanlt
„ ,m écriraliu, et Uléma
f^ i iM poaus iTTiqaM.
,fl« iiplcation lyrlqno du
,g I : il eût r«llu la cher-
Ufc snet, du)B l'inuimpB'
K" lei fil^vattmw it Dmu
£' i&rw, «ont pleluM da
oads PlciWeistlB
td6D qoo les ehcsnn
'^'^ iblM canliqwi écriu
jf^Â ^ le premier poète
„„r Si lie et m Tocatian n'en
uriip" ^il'^'ri^ ^'> i^i^^l'e- Le malheureoi eual
ariMii Aii^ ^g coDtpU qua pour mémoire, témoigne
Je B#i'«"v'^h^ alora plu» dlmportancs fc la Tonne
ip' 'ïn^ dfltoP»*'^ lyntiae, Non» en »TOns une prenve
^>Mil«D(i ^^rioiretradittonn^ledel.-B. RouMeau,
mu'Il^^J^ daa odes ucrées et des odes plndariiiues
9>^ '^^^^ d'antre lentimaDt que la complaiiauce d'nn
"ïfi. Va^rain pour md talent Une ôltlqiis mieni
I il • npl» l'anteiu' de l'Od* au emita du Lac et
i^ r^ d '" '^'"'t'*" P*"») <=** "iteoTS de rëpntatiDD
^Juine uni n'eidteDt plu» ni sympathie ni colère.
"^ZoB A U a vfeu D^it pas bTOnble k I» poétie
fl^e; la aod«t« i^Uonipliique et littéraire m moquait
ialueun trop rwet échappées fc Gilbert on fc Le mne
A nnip<S*i*'>- ^ " ^'^ '^ enaelpieiiMiita terrible» de*
i^niiiitiona pour ramener Teeprit bancal» au Idée» forte»
0l léHenMa, aux problAmea de U desHnée homalno «t
^ de» locidiéi , matière inépuisable des réflaxiona du
pbiloaophe et de» émotloD» du po«e. Non que la mélan-
coliset la doulaor m «aient pa« des seoUmenu communs
MU écriTBins de tona les temps, aogai Uen que l'enthoa-
■iatme de la patrie «t de la gldre. Haï» le monde mo-
■ - - ■ remué de toaies pan», derenu Inc^iatde de
de Scfalegel, de BQtto'; elle s'enlTrait dei ehanta guer-
ilen d'iundt et de Kmraar, où éclatait llndlgnation et
Tardeur de la liberté. Noua n'arlons encore, en Fnace,
aptes la redoutable cbantoa de Rouget ds l'JsIe, après les
hjmne» patriotique* de Chénier, où la parole était testée
Bu-desaoua de la moBiqoe ou de lloleation du poSte, que
«nelques esMl» inéguii de Le Brun, mâange ainiluuer
dldées forte» et de grande» lm»ge» avec le» formes, les
tour» coDTenuf, et la mythologie consacrée de récole da
J.-B. Rousseau. Ce fut an lendem^n de la grande mlae
da premier Empire que la France entendit avec iTrease
la TOii nouTelle des poètes lyriqne». La premier dan»
l'ordre des temps, Béranger a en te priTll^ d'une popo-
larlté preacpie nnlTeraelle. ÉcilTaln siqiérienr, mais mus
babile qu'inspiré, U a dit sa ^oire de dreonatanoe à la
saiire,»on or^clualité la plus complète et sa glotre la plu»
//tf ^^^tUunte, JoTlale,emntiMiiis,Eiù
j««4* i *?îS^ie" trop souvent la grtca idéile
^f 'iîî^**fffW«f(''»i 11 y a daUB se» ooutrei qod-
* ' i £ P^^Si»> rniment élerées et toachaales, dont
^la^ ''SEntouM'u sur l'homme et ma le poRe. A li
f/ri^SSii^ônéaijtla trop dédsigné de nos Jour,
, iSS^S^v'^ tooehslt viTement les liniei en chin-
l^^lM glolrsl et les malheur» de son pays ■. Hiit
' lïofui' <'" MntininuMM aralt le goût du théiire, plni
L, é6 ïoàa ou de l'éléglei et ta grande poésie lyilinie
%,ât (rouTer ses Imeriwètes les pins compléta, les pla
AJMi, les plus digne», dans HH. de LamartiDe et VIcioT
Fi^. Le charme exquis des JfMitolioM et des Sormo-
wt fùiHqiMt Tirra autant que notre langne ; et, qnel-
jea rfsû'vttB que le goAt issse contre les abus et lei
rangetés où se complut le talent qui a dicté les Oritu-
Isi; et lea ConttmpIdtioM*, il serait puérile de lui déniir
bsrdiease, l'édat, ht Tigueur, l'abondance, la soDorilè,
porléea su plus haut d««rA. Le prestige des belles clioNt
et de la nouraauié, si puiesant »ar lajeaneste, et celui
même desbiiBn«rles,ODt dooné aux doux poètes un gnnd
nombre d'étère» at dimltaleorsi l'érele Ijrlqus modem»
a compté des répntatioDsbrltlantea^ et multiplié molbeu-
reosement le» TOcatloD» avortées et tMomiirtMt. Les ven,
et la composition ellft^nème, ont Une à tout le monde
leuiB secrets et leors procédé», dnenus une sorts de
mécanisme i mal» l'originalité de» maltrM ne doit pu
eooSMr dsa erreor» on dea sottise» qui se sont aatorltéet
de leor nom, et la postérité se chargera de régler le<
part»; — Quel sera maintensnt l'sTenir de la poésie
Irriqne, dans one sadété qa'épulseot tes agitationi po-
lltiqoee, et quo dérore ce qu Horace nommait L Rome • la
romlle dea soucis Sarotntf ■ L'auteur des JfAJttsJKW,
enqtorté dans le tourbillon de la tie publique, h laqnella
ilatantsacrlflé, a cherché > les destinées delapoâie»,
et II a interdit l'avenir à la muse. Il l'a condamnée u
silence et i la mort. Hais il est pennis d'en appeler d'une
sentence il ngonreuse, et de cndre que le poète, inpu
poésie lyrique dtiit durer autant que lui, à moins qse,
deatitué de cunadence et incapable d'émotloi», il ne ta
réduise fc rinlelligente régularité des macbinea dont le
bruit l'assourdit et dont b Aimée l'aTengle. JusquoU,
nous poorrons adresser aux chantrM Inspirés de la pu-
slon, aux hommes que la tradition mytbologiqua aoraii
appelés Butrefoi» les ftls de Galliope, ce» Ter» du plua mé-
lodieux de toua i
LYRIQUES (Vers), nom donné, cbei le» andens Grecs,
aux Ter» employés dans les poèmes qui se chant^ectui
son de la lyre. Peu^^tre tous les ver» forent-ils d'abord
' ''~ ~ la lyre; mais, fc partir dn vn*aiècle av. I.-C
wt lyrvtat
des odes d'Alcée, de S
le nom de twt lyrvtat* ne «'sopllque plus qu'aux tei
des odes d'Alcée, de Supbo, (TÀlcman, d'Anou, d'&ns-
créon, de Corinne, de nodaré, etc., et fc oenx des chtEnn
drsmatiqne» d'Eschyle, de Sophocle, d'Euripide, d'Aris-
tophane. Ils étaient de différeatea langueurs. Les prind-
pMix éûdent le trochôvvtM, VUk^^umi^ui, le erèsitiitt,
le docAnHoqiw, le <JaotvJiiiti«, le ^uriâmbiqm, l'oscU-
ptofts, riomgtM, l'oMKrAiBitgMilegaUtaffiAiqtM, le fit-
niqua, le glveoniqiw, le pUrserotûn, le priapini, l'oiliv
nvtm, le «apMvtM, etc. (Y. et* mot*]. Lés ver» des odei
de Plndare et des cbmnr» de la tragédie et de la comédli
présentent souvent aux Uodemes de laèa^vndes dUE-
cultes : ils psTslMM» avoir été plutèt de» porases cadas-
céea selon certaines mesures (dont le secret naos édi^ipa*
qui ét^enten rapport avec le svitème musical des Grecs,
et auxquelles le cum et la muuqne donnaient anavalsni
Ïi'dles perd^ent k la lecture), que dea vera pni|Heineiii
tsi anasi les poètes romalna, qui ont reprodoit, en le*
modlBant conformément au génie de la langue latine,
tous tes mètres lyriques inventés psr les Grecs, u'oat-ila
Jamids reproduit ce genre de vers, soit dans leur» owTrei
dramatique», soit dans leun pièces lyriiniea propnmeiii
dites I et c'est en partie dans ce sena quit but eoieodie
ce que dit Horace, lorsqu'il compare à la témérité dn fib
de Dédale l'amUtieni qui prétend Imiter lea tons doo-
veaui où Pindare élevait aouvent sa vois, en affranchli-
aant aon r^ythme de toute loi consacrée. Les vers Irriqoa
des Grecs ont été réellement chanté» an ion delaljrti
LYR
1189
LYT
pÊM& que, pendant plusieurs siècles , tout podte était
mosiden; en iMp-U été de même à Rome? Gela est au
moins fort dootenx : les poètes lyriques, comme Catulle
et Horace, sont plutôt écnvains oue musiciens.
Cbes les peuples modernes, ou la lyre n*a jamais été
en nsage^ le nom de vers lyriques a été également appli-
qoé aux Ters adoptés pour les odes et pour toute compo-
adon poétique qoi procède par stances, strophes ou
ooaplets. En Anançais, ils sont généralement courts t ce-
pendant lo yen de iO syllabes se rencontre assez souvent,
même dans toute retendue d'une pièce; plus habituelle-
ment il est entremêlé à d'autres mesures ; et parfois, sur-
toQt de notre temps, le vers de 12 sylUbes est employé
Mit seul, soit concurremment avec des vers plus petits
{Y, les Messéntemnes de C Delarime, les chcsurs de sa
tragédie le Paria^ les poésies de Victor Uu^so et de La-
nsrtine, etc.). Dans le i*' chœur d'AUuUte, le vers de
^2 Bjrlhdies domine avec le vers de 8 syllabes; on y
trouve aussi quelques vers de 10 syllabes, ^ tm seul vert
de 0. Le second chœur offire les mêmes mesures avec un
certain nombre de vers de 7 syllabes; le 3* a deux vers
de 4 syllabes. Le vers de 5 syllabes est fréquent ches
Quinault, et Racine termine par cette mesure une de ses
plus belles strophes (Cteuo;, abaissex-^xnu), J.-B. Rous-
seau a employé le vers de 5 syllabes dans sa cantate de
Circé. Les vers de 8 syllabes sont Hréquemment em-
ployés seuls : on trouve ce système dans les chansons de
geste, les odes, les stances, les chansons. Dans une chan-
son de Malherbe (IV), en 10 couplets, les vers de 9 svl*
labes alternent deux par deux avec des vers de 10. On
trouve des couplets entiers de 0 syllabes dans les opéras-
comiques de Sedaine et dans les chansons de Béranger.
F. Stancb, Strophe, Vers. P.
LYSICRATE (Monument de). V, Choragiqobs (Monu-
ments).
LYTIERSE. F. Chakson.
M
MAB
MAC
H, W lettre et 10* consonne de Talphàbet latin et des
atobabets qui en dérivent. Elle fait partie des liquides
(r. ce moi)y et Tarticulation qu'elle représente est à la
fois labiale et nasale ( V. ces mots). Le son que noas
donnons à la lettre M, quand elle est placée au commen-
cement d'une syllabe, est le même dans la plupart des
bagues européennes : mais, si elle termine la syllabe à
laquelle elle appartient, et si la syllabe suivante com-
mence par une autre laSbiale, elle ne fait qu'indiquer la
Dualité de la voyelle précédente et Jouer le rôle de 1*N,
comme dans lankpe, assembler, emploi, imbu, combler,
combiner, eompagms, tomber, humble, tympan, etc. Il
en est de même quana elle termine certains mots, nom,
renom, faim, jHurfum, thym; mais elle conserve sa va-
leur ordinaire à la fin des noms propres étrangers, Mon
llnàMlem, Jérusalem^ Abraham^ Cham^ Sem, Ibrahim,
StcdMm, Amsterdam, etc. ; il faut en excepter Adam.
Suivie d'une N, elle doit coaserver sa prononciation or-
dinaire (amnistie, indemnité, Agamemnon, Mnémosyne)^
excepté dans dcunner et ses dérivés. Placée à la fin
d'one syllabe et devant une autre Bf, tanttôt elle se pro-
nonce comme N (comme dans emmener)^ tantôt elle a sa
valeur normale de consonne (comme dans immense, com-
wuT, mammifère^. Dans certains mots où elle est suivie
de P, elle est encore un signe de nasalité, et le P ne se
prononce pas : covup, chaanp, exempt, prompt, dompter.
En latin, l'H à la fin des mots était la caractéristique
habituelle de l'accusatif singulier. Dans la poésie, elle
n*empechait pas l'élision de la voyelle qui la précédait,
lorsque le mot suivant commençait par une voyelle ou
par un h; elle rendait alors, au dire des pammairiens
latins, un son sourd {obscurum)^ et donnait sans doute,
comme en français, le caractère de nasalité à la voyelle
précédente. — Comme abréviation dans les inscriptions
lapidaires et sur les médailles, M tient la place du pré-
nom Marcus; des noms de lieu ou de peuple Macedonia,
MassUia, Mediolanum, Mamertini, stc. ; des noms com-
muns mater, magister, mUes, monumentum, munici-
pum, mamibus, memoriœ, etc. ; des épithètes magnus»
isiltlarit, memor, missus; de l'adverbe merito, etc. Avec
■ne apostrophe , M* est pour le prénom Manius. Chez
es Modernes, M. A. a signifié magister artium (maître
h arts) ; en franc-ais, M. veut dire monsisur, MM. mes-
neurs, S. M. Sa Majesté. En écossais. M' Joint à un nom
reut dire Hoc (fils). Sur les ancien ucs monnaies fran-
taises, M était la marque de Toulouse. — Signe numéral,
ie mu (M^) des Grecs valait 40. Chez les Romains, M
valait f ,000; surmontée d'un trait horizontal, elle valait
i,JO0,0OO. B.
MABIKOGI. V. ce mot dans notre Dictionnaire de BU}-
§raphie et d^ Histoire.
HABRIAN, un des romans Garlovingiens {V. ce mot).
On y rappelle les exploits de Renaud de Montauban et de
son cousin Maugis. Ce dernier, voulant rentrer dans la
bonne voie, se retire dans l'hôpital de Rome, v fait des
aermons en style dcéronien, et devient cardmal, puis
Î>ape à la mort de Léon m. Par un mélange singulier des
àblès carlovingiennes avec celles du cycle d'Arthur, Ma-
brian est reprâenté comme petit-fils de Renaud , et sa
naissance est protégée pat la fée Morgane. Aprà une
longue suite d'aventures, il devient roi de Jérusalem,
puis de l'Inde, où il établit le christianisme. F. Biblii^
tfièque des romans, Juillet 1778.
MACABRE. F. Danse des moets.
MACâDAMISAGE, système pour la construction des
routes. Il consiste en un empierrement de cailloux con-
cassés, de la grosseur de 4 à 6 centimètres cubes envi-
ron, entassés en couche de 0",S5, fortement comprimée
par un nrand rouleau de fer fondu, pesant de é,000 à
8,000 kilog. La bonne confection du macadamisage exige
que les cailloux ne contiennent point de parties terreuses
ou argileuses, ce que l'on obtient souvent par un lavage
préalable. Les routes macadamisées n'exigent ni fonda-
tion, ni accotement; elles sont impennéables à l'eau;
leur entretien n'exige qu'un balayagje facile, et le rem-
plissage, par du caillou fin, des parties dégradées. Pour
opérer le nettoyage des routes, les ponts et chaussées ont
fait construire des voitures basses, dont les roues font
tourner un système de r&teaux ou de balais munis de
pelles, qui enlèvent les boues et les déposent dans la voi-
ture. Du reste, les cantonniers avec des balais suffisent à
ce nettoyage. — On a, depuis plus de 30 ans, adopté en
Angleterre, et, depuis 1849, en France, le système du
macadamisage pour les principales rues des villes; mais
la grande circulation des voitures maintient dans ces rues
une poussière ou une boue permanente qui font regretter
aux piétons l'ancien pavage. L'entretien en est en outre
très-dispendieux. — Le macadam est ainsi nommé de
l'ingénieur anglais Bfac-Adam, qui commença de l'appli-
rr avec succès en 1816 aux environs de Bristol; cepen-
t il n'en est pas l'Inventeur, car un ingénieur francs
nommé Trésageur construisit, dans le Limousin, vers
1761, des routes en cailloux concassés. F. C^. Diipin,
Voyages dans la Grande-Bretagne, 3* partie, c. 4. E. L.
MACAIRE, roman du cycle carlovin^en. Macalre s'est
introduit à la cour de Charlemagne, et, n'ayant pu séduire
la reine, s'entend avec le nain favori du roi pour la
déshonorer aux yeux de tous. Sur de trompeuses appa-
rences, on croit la reine coupable d'adultère. Condamnée*
sur l'avis de Bfacaire, à être brûlée vive, elle demande un
confesseur : l'abbé de S^Denis, après l'avoir entendue,
demeure convaincu de son innocence, et fait tant par ses
prières, que la peine du feu est changée en celle de l'exiL
Albaris (Aubry) est chargé d'escorter la reine; Macalre
lui dresse une en]d)ttscade; Albaris est tué, la reine se
cache dans un bois. Macaire revient à la cour; mais, pen->
dant le dtner de Charlemagne, le chien d'Albaris pénètre
dans la salle et saute à la gorge du traître; trois tours
après, cette scène se renouvelle. Les soupçons s'éveillent,
on suit le chien, on trouve le corps d'Albaris. Charle-
magne ordonne un combat singulier entre le chien et
Maodre; celui-d, vaincu, avoue son double crime, et est
MAC
1190
MAC
brOIé vir. Oef>enclaiit, la reine 8*e8t mise «ras la protec-
tion d*iin bûcheron nommé Baroche, qui la conduit à
Gonstantinople, où sont ses parents. En trayersant la
Hongrie, elle donne le Jour à un fils, qui reçoit le nom
de Louis. La guerre éclate entre Tempereur de Gonstan-
tinople et Charlemagne; ce dernier est vaincu, mais il
est lieureux d^apprendris que sa femme vit encore et
qu'elle lui a donné un fils; il les emmène à Paris, où la
réconciliation est célébrée par de grandes réjouissances.
— Ce roman est évidemment la source de la légende po-
pulaire du chien de Montargis, et Macaire est resté le
r) du coquin eflîronté. Le roman existe à la bibliothèque
S*-lfarc, à Venise, dans un manuscrit français du
XIV* siècle, qui figure au Catalogue sous le titre faux de
Doon de Mayencê, et où sont racontées en plus de
i8,000 vers les aventures de Beuve d'Antone, de Pépin
et de Berthe aux grands pieds, et de Charlemagne. 11 a
été publié par M. Guessard, Paris, 18GC. H. D*
MACAO (Jeu de). F. VniGT-ET-i}]i.
BfACARON, en termes de Marine, court morceau de
bols placé debout, de distance en distance, pour soutenir
les fargues d*une embarcation.
MâCARONIQUES (Vers), vers où sont mélangées plu-
sieurs langues, où Ton emploie ce qu*on appelle vulgai-
rement le latin de cuisine, c-à-d. des terminaisons
latines appliquées à des mots d*un idiome moderne,
eomme dans Texemple suivant pris de Michel Morin,
petit poème de ce genre : De hranca in brancam degrin-
golcU, atque facit poufl Le nom de macaroniques vient
d*un certain rapport qu'on a trouvé entre les bouffonne-
ries de haut goût que ces vers expriment et le mets itsr
Uen appelé macaroni, dans lequel entrent divers ingré-
dients. On appelle macaronée un poôme en vers macaro-
niques.Un moine italien du xvi* siècle, Théophile Folengo
de Mantoue, plus connu sous le nom de Merlin Coccaie
{Merlinus coquus, Merlin le cuisinier), quMl adopta pour
publier une sorte d*épopée burlesque {Aventures de BcU'
dus) y est regardé comme Tinventeur ae la poésie maca-
ronique. Il a été imité en France par Antoine de La Sable
(Àntonius de Arena)^ dont on a un récit burlesque de
Texpédition de Charles-Quint en Provence, et par Rémi
Belleau, qui écrivit contre les huguenots. C*est le style
macaronique qui fut employé par Rabelais dans Pantor
gruel, lorsqu'il voulut railler, au mojren des doctes dis-
cours de recoller parisien, le pédantisme universitaire,
et par Molière dans la cérémonie du Malade imaginaire,
où il tourna en ridicule la latinité peu savante des méde-
cins de son temps. V. A. Canningham, Delectus maca"
ronicorum carminum, Edimbourg, 1801; Nodier, Du
langage factice appelé macaronique, Paris, 1834. B.
MACASSAR (Idiome). F. G^ésiens (Idiomes).
MACCHABÉES (Livre des). V. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
MACCHUS, personnage des Atellanes ( F. ce mot). Ce
li*est point notre Polichinelle avec sa double bosse, mais
le pulcinella napolitain, paysan gourmand et sot, qui
charme encore au|ourd*hui les lazzaroni par ses saillies
et sa poltronnerie, et dont la figure, sous le nom de civis
Atellanfis, a été trouvée dans les peintures d^Herculanum.
MACÉDOINE, se dit, en Littérature, d*un ouvrage où
se trouvent réunis des morceaux de tous les genres, en
}>rose ou en vers, sur différents sujets. Nous ignorons
^origine de ce mot — En termes de Jeu, une Macédoine
est une suite de parties dans laquelle chacun des Joueura,
tenant les cartes, prescrit l'espèce de Jeu qu'on va Jouer
gous sa main.
MACÉDONIEN (Dialecte), une des variétés de Tan-
denne langue grecque. Ce dialecte fat d'abord appelé,
suivant Dlcéarque, hellénique, et peut-être fut-il com-
mun, dans Torigine, à la Macédoine méridionale et à la
Thessalie, où habitèrent longtemps les Hellènes propre-
ment dits : peut-être aussi est-ce dans ce dialecte antique
que les po&ies religieuses de Musée et d*Orphée se ré-
pandirent parmi les peuples. Le dialecte macédonien dut
subir dans la suite des modifications importantes, en par-
ticulier vers le vni* siècle av. J.-C, loraque Garanus vint
en Macédoine avec une colonie argienne, et à partir du
V*, grftce à la culture intellectuelle que le roi Archélaûs
s'efforça de propager, mais surtout sous le règne de Phi-
lippe et d'Alexandre, tous deux amis des lettres et des
Iwaux-arts. Ce qui rendit au dialecte macédonien son
Importance et sa célébrité, ce fut la conc|uète de l'Orient
par Alexandre; il exerça aussi quelque influence sur les
urecs eux-mêmes, et finit par modifier Jusqu'au dialecte
athénien : telle fut la source de ce que les critiques ap-
pelèrent langue commune ou hêilénmue. Mais il subit
lui-même en Écrpte et en Asie, particulièrement en
Svrie, des modiflciEiAions considérables, d'où provinrent
ÎJusieura dialectes nouveaux, dont le plus important fut
e dialecte alexandrin. On n'a, sur le dialecte macédo-
nien, que des données assez vagues : comme particulsp
rites, on cite l'emploi de la lettre B à la place de l'aspirée
4> ; ainsi, Bérénice est un mot de forme macédonienne,
au lieu de Phérémce usité dans les autres dialectes. Les
Phrygiens s'appelaient aussi chez eux Brygiens, et la ville
macédonienne de Bércea eût été appelée ailleurs Phénea,
Quant aux reproches de macédonisme adressés par les
grammairiens aux écrivains postérieura au iv* siècle avant
J.-C, ils portent principalement sur des néologismes, on
plutùt sur les modifications que les écrivains de cette
époque faisaient subir au sens de certains mots; ainsi,
ils reprochent à Polybe d'employer le mot (^(iVi (élan,
impétuosité, mouvement accéléré) dans le sans de me,
inconnu aux Attiques, et nopeiiDoX^ dans le sens de
camp, lorsque ce mot avait toujoun signifié jusque-là
intercaUUion, ou, en termes militaires, attaque par 1$
flanc, F. Saumaise, De Linguâ hellenisticâ^ cm sit, an
fuerit, 1643; Sturz, De Diaiecto macedonicA et alexan-
drinâ, 1808. P.
MACELLUM. F. Bodcrerib.
MACÉRATION (du latin macerare, amaigrir), se dit des
austérités de tout genre (Jeûne, discipline, etc.) qu'on
exerce sur son corps par esprit de pénitence.
MACERIA. F. Appârbil.
MACHECOULIS ou MACHICOULIS, ouvertures prati-
quées dans la partie inférieure des galeries saillantes au
sommet d'une tour ou d'un rempart, de telle sorte que,
tout en étant abrité par les pjsrois de la construction en
saillie, on pouvait Jeter des pierres, des traits, de l'huile
bouillante, du plomb fondu, etc., sur la tête des assail-
lants qui attaquaient le pied des murailles. On fait venir
ce mot, soit de masse et de couler, parce que les ouy^-
tures servaient à faire couler des masses sur les assail-
lants, soit du latin mactare collum, briser le cou. Les
mâchicoulis faisaient partie du système des fortificatioDS
au moyen âge; l'emploi n'en devint général qu'au
XIV* siècle. Ils disparurent avec les vieux châteaux. On
en peut voir au palais des papes à Avignon, aux ch&teaai
de Sens, de Mehun, etc. B.
MACHIAVÉLISME, système de Politique développé psi
Machiavel dans son livre du Prince (F. ce mot).
MACHICOTAGE, sorte d'ornement dont on chargeaj
autrefois le plain-chant, surtout dans le rit parisier
C'était une addition de notes qui remplissaient par une
marche diatonique les intervalles de tierce et autres. U
machicotage, dont on ne s'abstenait qu'à l'office des
Morts, était exécuté par les machicots, ecclésiastiques
inférieure aux bénéficiers et supérieure aux chantres à
gages. L'étymologie du mot est incertaine.
MACHINES. Les machines sont, pour l'industrie, des
moyens de tirer un parti plus avantageux des forces de la
nature. La puissance musculaire de l'homme, toujours
proie à fonctionner avec intelligence sans appareil inter-
médiaire, a été pendant longtemps la seule utilisée:
mais elle est la plus coûteuse de toutes les forces mo-
'trices. La force musculaire des animaux est d'un prix
inférieur à celle de l'homme; réservée, quant à présent,
à l'industrie des transports et à faire mouvoir quelques
mécaniques, elle a déjà trouvé une concurrence redou-
table dans les locomotives et les locomobiles. Après les
chutes d'eau naturelles, la vapeur est la puissance mo-
trice la plus répandue aujourd'hui, surtout dans les
localités oh abondent les matières premières et où le
combustible est à bas prix. — Quand la valeur vé-
nale ou prix -courant des produits des machines reste
la même malgré cette plus abondante production, c'est
le producteur qui profite de l'utilité produite ; quand le
prix-courant baisse, c'est le consommateur qui en pro-
fite.— L'introduction d'une nouvelle machine occasionne
une diminution dans la somme des revenus gagnés par
les ouvrière, Jusqu'au moment où ils parviennent i^ occu-
per leure facultés à une autre partie de la même on de
toute autre production. Le revenu des entrepreneurs ou
capitalistes, au contraire, en est augmenté. Cet effet est
momentané; et, pour l'ordinaire, après pen de temps,
les producteure pouvant baisser leure prix sans y perdre.
le revenu du consommateur s'en trouve augmenté, sans
que ce soit aux dépens de personne, et la demande du
travail des manouvriera n'est pas moindre Qu'auparavant.
— L'invention des nutchlnes a exercé l'innuenoe la plus
énergique sur le développement industriel du xix« siècle.
Ce qui distingue surtout les machines parmi les motesrs
MAC
1191
MAC
ifenqa*offire la Batnre, c'est de pooTdr être employées
ptrloat, ea umia aaisonf dans toutea les branches de
nndastrie, et à tous les degrés de force réclamés par les
eiigeoces de la production. C'est arec leurs secours
qu'ont été organisées les plus grandes manufactures ( V, cê
mot). Enfin, appliquées à la navigation, elles permettent
de lésliser des vitesses de 24 kilom. à rheure.
Quelques faits suffiront pour fidre comprendre Timpor-
tiDoe des machines : il fallait, au temps d'Homère, le
travail d'une personne pour moudre le nié nécessaire k
% autres. Le moulin à ean le plus simple peut moudre
eo on four autant de blé que 150 hommes; il dépense
10 fr. par jour, tandis oue les hommes coûteraient 300 fr.,
et rérônomie de 290 rr., répartie sur une quantité de
96 hectolitres de grain, constitue la moitié du prix du
Ué loi-même. Le moulin de Saint-BIaur, près Paris, se
eooiDose de 40 meules surveillées par 20 ouvriers, et qui,
es 24 heures, réduisent en farine 720 hectolitres, suffisant
à alimenter 72,000 personnes : ainsi, 280 ouvriers, ré-
partis dans 14 moulins semblables à celui de Saint-Maur,
pourraient moodre pour un million de personnes. —
Un ouvrier fileur de coton confectionne aujourd'hui
3S0 fois plus de fil qull n'en faisait en 1774. Dans la
filature du Un, qui ne date guère que de 1820, un ou-
vrier suffit à soigner 120 broches, lesquelles produisent
aolant et de plus beaux fils que 240 flleuses. On cheval-
vapeur peut faire msrcher 500 broches de filature avec
les machines accessoires, on 12 métiers à tisser : or,
nn cheval -vapeur correspond à 3 chevaux de trait ou
î\ hommes de peine. Â. L.
■ACHoiis DB coBaRB, Instruments à l'aide desquels les
Andeos lançaient des projectiles ou battaient les mu-
railles des places fortes. Les Latins donnaient aux ma-
efaines de jet le nom commun de tormenta (de tarquere^
tordre), parce que le Jet des projectiles était produit par
la détente de cnns, de cordes oti de fibres végétales tor-
dues et tendues fortement; les principales étuent la &a^
lak, la ccUajmitê, Vhàlépolé, le scorpion ou onagre. Les
machines de brèche peuvent se ramener toutes au bHUr,
Qoand une armée s'avançait en bataille, les machines
étaient placées sur les derrières, et tiraient par-dessus
les rangs. Il y avait encore des machines pour couvrir
les troupes qui s'approchaient des murailles; c'étaient la
krtw, le manUlêt, la vigne, les tours roulantes. Sur
mer, on employait le dauphin, le corbeau, etc. Toutes
les machines des Anciens disparurent après l'invention
deFartillerie. V. Végèce, De re militari; Biton, De con-
ttntetione bdlicarum machinarum, et Héron d'Alexan-
drie, De constructions et msnsurà manubalistœ, dans
les MathemaHci veteres, Paris^ 1693, in-fol. ; Juste-Upse,
Mioroattcdfiy siœ de machints, tormentis, telis librt V;
Bmccio, De mackims bellicis, Venise, 1572, in-4«: fllai-
aeroy, Traité swr Vart des sièges et sur les machines des
Anaens, Paris, 1778, in-8»; Dureau de La Bialle, Polior-
eéîiQue des Anciens, Paris, 1819, in-8% et atlas in-4^
macbuies bb TsiATas, machines à' l'aide desauelles on
opère SUT la scène les changements de décors, les trans-
fonnations à vue, et tout ce qui sert à l'illusion du spec-
tacle. La descente des nuages, le vol des personnages
(pli s'élèvent dans les airs, les mouvements des flots, la
nancBovTB des trappes, l'animation des animaux en car-
ton ou en étofle, le tonnerre, les éclairs, etc., sont do
ressort du machiniste. Les Anciens ont obtenu, par des
mqyeos qui nous sont inconnus, des résultats presque
menreilleux. Ds imitaient la foudre, Tincendie ou Vécrou-
lement des maisons, et faisaient descendre les Dieux dans
des chars ailés, sur des griffons et autres montures fàn-
taatiqoes; il y avait des trappes placées sous la scène
pour l'apparition des Ombres, des Furies et des Divinités
infernales (F. Anapibsma). Dans le Prométhée enchaêné
d^Eachyle, le chœur tout entier arrivait par la voie des
oûeeiix, et le vieil Océan sur un dragon ailé. Les com^
dies d'Aristophane supposent toutes sortes d'inventions
iagénienses, puîsipi'on y voit des personnages déguisés en
Siifpes, en grenouilles, en oiseaux, en nué&L L'art du ma-
chiniste n'exista réellement pas au moven âge : ce fut seu^
lement aux derniers temps de la représentation des Mvs-
ièm qu'on put réaliser quelques efftjts de mise en scène
oéeeiaaires a ces pièces, tels que l'éclipsé, le tremblement
de terre, le brisement des pierres de la Passion, etc. Au
ni* tiède, Léonard de Vinci prépara pour le Paradiso,
{■terale jouée en l'honneur de la duchesse de Milan,
les machmes qui mettaient en mouvement les sept phi-
BAtes aous les yeux des spectateurs. Un prospectus lancé
par les comédiens du Marais, en 1648, pour annoncer
rUlysse dœss Vile de Circé, pièce de l'abbé Boyer, an-
nonce, entre autres prodiges, une mer figurant l'agltatioa
des flots, un char traîné par deux dragons et s'envolant
chargé de trois personnes, un Jupiter porté sur son aklo
et lançant la foudre. Dans VÀndromède de Corneille
(1682), véritable pièce h machines, le Pégase monté par
Persée était un coursier qui agitait ses ailes. Ce fut l'Ita-
lien Toricelli qui machina les spectacles des fêtes de
Mazarin et les ballets de Louis XIV. Au xvni* siècle^ à
l'Opéra de Paris, on imitait le tonnerre au moyen d'une
ou deux roues dentelées qu'on faisait mouvoir sur des
planches derrière la scène, ou à l'aide d'un gros tambour,
que manœuvrait un soldat aux gardes. En 1713, on vit
manœuvrer, dans le ballet des Amours déguisés, un na-
vire équipé et tout chargé de monde. Servandoni porta
l'art à une perfection' qui semble n'avoir point été d^
passée depuis : il représentait des lunes et des soleils,
des incendies, des flots agités, des lacs glacés et couverts
de neige, des forêts enchantées, etc. De nos jours on a
imité en machines l'écroulement et l'incendie d'un palais
(au 5* acte de l'opéra le Prophète, de Scribe et Meyer-
beer); on figure des inondations qui envahissent toute
la scène. — Autrefois l'Opéra de Paris était renommé
pour ses machines ; tous les changements de décorations
d'une même pièce s'y faisaient toujours à vue. Cette ma-
gnificence artistique a été supprimée depuis 1830, par
économie, lorsque l'Opéra fut abandonné à une entre*
prise privée. B.
MACLE (du latin macula, marque), en termes de
Blason, losange formé d'un simple trait sur le fond de
l'écn. — On &nna aussi le nom de macles aux mailles
de haubert, faites en losange, ainsi qu'aux pierres de
croix (lapides crudferi^ cfui se trouvent dans les ardoises
et auxquelles la superstition' attacha une origine et des
propriétés merveilleuses. Ces pierres sont des prismes
triangulaires, présentant sur leur tranche une croix en-
relief de couleur bleue, enfermée dans un losange.
MAÇONNERIE, mot qui exprime à la fois l'ouvrage du
maçon et l'art de maçonner. Il s'applique spécialement
aux constructions faites de matériaux de petites dimen-^
sions (moellon, meulière, brique), ou avec ces matériaux
mélangés avec la pierre de taille, par opposition à la con-
struction toute en pierre de taille, appelée proprement
appareil {V.ce mot). Les Modernes sont restés lon^
temps inférieurs aux Anciens pour les travaux de maçon-
nerie, non qu'ils possèdent des matériaux moins bons,
mais parce qu'ils ont apporté un soin moins minutieux
à les choi^r et à les assembler. Les murs des Anciens
consistent généralement en deux parements de moellons
ou de briques, qui formaient les surfaces, l'intérieur
étant garni en blocage ou béton ; le cube du mortier y
excède souvent celui des [fragments de pierre qu'il enve-
loppe. La bonté d'une construction dépend non-seulement
du choix et de l'assemblage des matériaux, mais encore
et surtout, quand la construction est en petits matériaux,
de la qualité du mortier ( V. ce mot). La maçonnerie de
pierres de taille se fait par assises horizontales, en ob-
servant d'assembler les pierres aussi bien que possible,
d'en garnir avec soin les ioints avec du mortier coulé on
fiché, et d'alterner les joints verticaux. Dans la maçon-
nerie de moellon, on s'attache moins à ce que les assises
aient une horizontalité parfaite : l'essentiel est que les
moellons ne soient pas inégaux, qu'ils soient débarrassés
des parties terreuses, convenablement ajustés les uns
contre les autres, placés autant que possible sur leur face
la plus large, pNariaitement assis sur le mortier, et tassés
par quelques coups de marteau. Quand les pierres d*ap-
pareil ne sont employées que dans les parements, il faut,
f^our qu'elles se lient bien avec la maçonnerie de moel-
on, leur donner une longueur inégale dans le sens de
l'épaisseur du mur, les placer, comme on dit, alternati-
vement en besace et en boutisse. Pour la maçonnerie qui
ne doit pas supporter un poids ou une poussée considé-
rable, on emploie, au lieu de mortier, le pl&tre, qui
sèche plus vite; si les constmcttons sont exposies à être
mouillées, on se sert de ciment romain. On fait ausf^i de
la maçonnerie où la terre remplace le mortier, et même*
de laimaçonnerie en pierres sèches • elles ont beaucoup
moins oe soiidité. Outre la grosse maçonnerie, dite limoth
sinage, et faite par les ouvriers appelés Limousins, parce
que la plupart viennent de la province de ce nom, il y »
la maçonnerie légère, que font les compagnons, et qui
comprend les ouvrages en pl&tre, crépi, enduit, cloisons,
plafonds, corniches, etc.
MACoiiNEiui (Chambre de la). V. Chambre.
MAçoNNBRiB ( Franc-). V. Francs- maçons, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
MAD
1192
HAD
. HAQONS, uideane corporation, cpii se réunit en 147G
à celle des charpentiers, sous rinvocation de S' Biaise.
L'apprentissage darait 0 ans.
L^ HACROCOSME. K. Microcoshb.
m MACUTAS, monnaie d'areent des possessions porta-
^^«lises d*Afrique. Dix valent 2 fr. 85 c.
Î MADAME. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio»
frraphM et S Histoire,
MADÉGASSE ou MALGACHE (Langue), langue des ha-
I bitants de Madagascar, nommée par quelques auteurs
] maléctuse ou malacassa. Malgré Topinion contraire de
Balbi, on s*accorde généralement à penser que cette
kmgue est parlée dans Plie entière, bien que la popula-
tion appartienne à deux races distinctes, Tune africaine,
Pautre malaise, et que des montagnes inaccessibles et
des forêts impénétrables les séparent presque complète-
ment. Entre les diverses parties du littoral, entre le lit-
toral et l'intérieur, il n'existe, pour le lan^^e, que des
différences d'accentuation et quelques permutations de
consonnes : les habitants de toutes les régions de Blada-
nscar se comprennent parfaitement. Le madécasse, que
Balbi appelle matait africain, offre des rapports incon-
testables de signification et de prononciation avec le ma-
lais de rOcéanie. Il v a de part et d'autre un grand
nombre de racines identiques, et même de mots sem-
blables, sauf certains changements de consonnes, comme
ceux du 6 malais en v, du p en f, du k en h, du d en
r, etc. : tels sont les noms des objets naturels les plus
marquants, les noms de nombre, les noms des Jours de
la semaine. Guillaume de Humboldt a signalé dans le
madécasse un certain nombre de mots sanscrits, et Du-
mont-d'Urville beaucoup de mots de la langue polyné-
sienne ; on y trouve aussi quelques racines sémitiques,
dont l'introduction, due à des rapports avec les Arabes,
est relativement récente; enfin Malte- Brun a reconnu
plusieurs mots se rapprochant des idiomes cafres, no-
tamment du betjouana. L'idiome madécasse est remar-
3uable sons le double rapport de l'harmonie et de la
Ichesse : il offre une grande abondance de vovelles so-
nores, de mots compiosés et d'expressions qui rendent
toutes les nuances de la pensée. 11 n'y a dans les noms
ni nombres, ni genres, ni cas ; ce sont des particules qui
lemplissent le rôle des flexions de la déclinaison. Le
nombre des adjectifs qualificatifs est très-restreint; et
cela se comprend dans une langue où la nomenclature est
^ infiniment variée, où Ton a, par exemple, pour exprimer
les cornes d'un bœuf, des mots qui diff&ent selon la
forme, le volume, la direction, etc., de cette putie de
', l'animial. Les dix premien noms de nombre, les nombres
i 100 et 1,000, sont seuls exprimés par des mots simples;
pour il, on dit dix un, pour 20, deux dix, etc. Toute la
coqjugalson se fait au moyen de particules préfixes;
c'est par elles que l'on distingue les temps, les modes, les
voix, et que l'on peut former, avec le verbe simple, des
verbes passifs, réfléchis, réciproques, potentiels, causa-
tifs, etc. Les Madécasses se servent de l'alphabet arabe
assez profondément altéré. Bs possèdent une certaine
littérature, composée surtout de chansons, de proverbes,
de légendes, de traités sur l'astrologie et la médecine.
Un recueil do leun chansons fut publié à Puis par M. de
Pomy en 1787. V, Houtman, Dictionnaire malais et ma*
dàcasse, Amst., 1603; Medser, Description de Vile ifo-
daqascar, en allem., Altenbourg, 1609, in-4«; Arthusius,
CoUoquia latino-^naUyica et madagascarioa, Francfort,
1613; in-4«; De Flacourt, Relation de VUe de Madagascar,
et Dictionnaire de la langue de Madagascar, Paris, 1658;
Drury, Madagascar^ Londres, 17i9, in-8»; Ghalland,
Vocabulaire françau -malgache et malgache -français,
1773, in-8o; Bochon, Voyage à Madagascar, 1791-1802,
3 vol. ; Lesson, Annales maritimes, année 1827 ; Jacquet,
Vocabulaire arabe -malacassa, dans le Journal i»ta-
Hque, 2« série, t XI ; Freeman et Jobns, Dictionnaire
anplais-malgachê et malgache-anglais: W. Ellis, Hts-
Unre de Madagascar, en anglais, Londres, 1838, in-8<>;
Dnmont-d'Urville, Voyage de l'Astrolabe, Paris, 1839,
in-8*; Eug. de Froberville, Aoergu sur la langue mal-
gâche, dans le Bulletin de la Société de géographie,
XI« vol., «• série, 1839. ^--^ r ,
MADELEINE OÊdise de la), à Paris. F. notre Diction-
naire de Biographie et d^ Histoire,
MADEUNIEBS. V. Madeb.
MADEMOISELLE. V. ce mot dans notre Dictionnatre
ie Biographie et d'Histoire,
MADEBIN. V. Madrb.
MADONE (de l'iulien Madonna, contraction de mia
4gnna, ma dame)« nom que les Italiens donnent à la |
S^^ Vierge, et que nous avons traduit par Notre-Dame
MADBAGUE, nom des parcs établis dans la Méditer
nnée pour la pèche du thon. Dn arrêté du 9 thermidor
an IX (28 Juillet 1801) a réglementé la pèche à la ma-
drague.
M\DBE, vase à boire au moyen âge. On riq>pela{t
aussi madelin, maderin, mazelin. Selon les uns, le rnadre
serait un bois d'érable, et, selon les autres, une sorte
d'agate. Les fabricants de madrés étaient dits madelinien
ou nuueliniers.
MADBID (Palais royal de), en Espagne. Situé dans la
partie la plus occidentale de la ville, il occupe remplace-
ment où s'élevèrent successivement un Alcazar ou forte-
resse du moven ftge et un château construit sous Gharles-
Quint et Philippe IL Philippe V avait demandé des plans
à Juvan; mais les conceptions de cet architecte furent
Jugées trop grandioses et d'une exécution trop coûteuse :
on adopta les plans de son élève J.-B. Sachetti, de Turin.
On se mit à l'œuvre en 1737, et le palais, dont la dé-
pense s'éleva, dit-on, à 80 millions, fut inauguré sous
Charles m, en 1764. L'édifice forme un carré de 132 met.
de côté, dont les angles sont flanqués de corps sallUmts
qui forment pavillon et rompent la ligne horizontale. Les
quatre façades, à peu près semblables dans leur arclti-
tecture, diffèrent par l'élévation : celles du S. et de TË*
ont environ 30 met. de hauteur, et les deux autres pres-
3ue le double, par suite de la déclivité du soi. Le res-
e-chaussée, en pierres à bossages, est simple et sévère,
tandis que le corps qu'il supporte est léger et gracieux.
Les parties en retrait sont ornées de pilastres à chapi-
teaux, doriques; celles qui font saillie, de colonnes ioni-
ques. Les espaces compris entre les colonnes ou les
pilastres sont percés, au rei-de^haussée, de fenêtres
surmontées d'auvents; au premier étage, toutes les ou-
vertures sont ornées de riches balcons et de frontons
alternativement triangulaires ou ciroulaires, tandis que
celles des deux étages supérieure sont oblongaes et sans
ornement. Une large corniche cache la toiture de plomb,
et supporte une balustrade en pierre, ornée Jadis des
statues d'une multitude de rois et de princes, garnie seu-
lement aujourd'hui de grandes urnes. La corniche, les
colonnes, les pilastres, les Jambages et les frontons des
fenêtres, en un mot, tout ce qui est en relief et sculpté
est en pierre blanche; le reste des constructions est en
granit rouge&tre. Les portes et les fenêtres sont pour la
plupart en acajou. Les trois portes de la façade princi-
fiale, au S., conduisent à un vestibule ciroulaire, d'où
'on passe, par un large portique où se trouve l'escalier,
dans la cour intérieure. Cette cour est carrée, et entourée
d'un portique que surmontent deux galeries, l'une vi-
trée, au 1" étage, l'autre découverte et garnie d'une ba-
lustrade de pierre : sous les arceaux sont les statues asses
médiocrement exécutées des empereurs romains nés en
Espagne. L'escalier, tout en marbre noir et blanc, est
magnifique : à partir d'un palier orné de deux lions de
marbre blanc, il se divise en deux branches parallèles
qui conduisent à la Salle des Gardes. La cage de cet
escalier est décorée de 12 colonnes d'ordre composite,
dont les chapiteaux sont formés de ch&teaux, de Iiods et
de colliere de la Toison d'or. Sur la voûte, Conrad Gia-
cinto a peint à fresque la Monarchie espagnole rendant
hommage à la religion. Tout l'intérieur du palais de Ma-
drid est décoré avec une magnificence extraordinaire : oo
doit mentionner surtout la Salle des Ambassadeun et li
chapelle; mais partout la matière l'emporte de beanooap
sur l'art, et les distributions ont été faites avec un goût
équivoque. Les tableaux précieux qui se trouvaient dans
les divers appartements ont été transportés au Musée pu-
blic; il n'y a plus de véritablement admirable qu'une
collection de tapisseries flamandes* Un grand bâtiment
renferme de somptueuses voitures de gala, qui servent
au cortège royal dans les cérémonies extraordinures.
En définitive, le palais de Madrid est, à l'extérieur, d'un
aspect imposant; c'est une énorme masse qui ne manqae
pas de mi^esté, mais sans Jardins, sans eaux; une forte-
resse où plane la tristesse.
MADRID (Château de), château de plaisance, situé
vere l'angle N.-O. et Joignant le Bois de Boulogne, près
Paris. Il fut bâti par un architecte inconnu (on a supposé
gratuitement que c'était le Primatice), sur l'ordre de
François I*', qui venait y passer librement quelques-unes
de ses Journées, loin de sa cour et au milieu d'un groupe
intime de savants et d'artistes. On le nommait Château
HAD
1193
MA6
de n prison en Espagne. Le château de Madrid, qui fut
lendD pendant la Hévolution à un entrepreneur, moyen-
nuit 649,205. livres en assignats, et détruit en grande
pirtie, 8*élendt au centre d*un plateau rectangulaire, sur
on aoQbaoaement contenant des offices et des cuisines
voûtées. Cétait un bâtiment entouré de fossés, plus long
qœ large, et à 4 étages, dont les deux premiers avec
portiques en arcades ornés de colonnes engagées. L*en-
tfée principale était au N. ; la façade postérieure au S.
Quatre petits pavillons saillants divisaient chacune des
laçades en trois parties; si*r chacun des pignons on avait
pratiqué des escaliers en vis, dans une tourelle ronde et
saillante. Ce qui faisait du château de Biadrid un type
unique parmi les constructions françaises de la Renais-
sance, (Tétait le syatème de décoration en terre cuite et
ému'Uée qu*on avait adopté pour les façades, et même
pour 1m tuyaux extérieurs des cheminées. Cette orne-
mentation était Tœuvre de Girolamo délia Robbia, que
Fruiçois l*' avait mandé de Florence, et le peuple don-
nait au château de Uadrid le nom de chAtêou de fiOencê.
U décoration intérieure offirait, comme dans les autres
.monuments de la môme époque, un mélange capricieux
de mythologie et de snlets sacrés :l ainsi on avait repré-
leoté dans la salle principale plusieurs scènes de la BibU
et des Métmnorphoses d*Ovide. Les restes du château de
Madrid (nrent démolis sous le règne de Louis XVIIL
■anam (Le Bmoi Retiro, â]. V. Bden Rfinao.
MADRIERS (de reapagnol madeira, bois, planche),
Dièces de bois de 8 à 16 oentimèt. d^épaisseur sur 27 â
M centoèt. de largeur, dont on se sert pour faire des
pilotis, asseoir les fondations des murs dans des terrains
ineottsistants, soutenir les terres dans les tranchées, les
fouilles et les mines, et former les plates -formes des
batteries d'artillerie.
MADRIGAL, petite pièce de poésie, ingénieuse et ga-
linte, qui conaiste seulement en quelques pensées tendres
eiprimées avec délicatesse et précision.
On ne sait d*où nous est venu ce genre de poésie, et
rél^ologie du mot est même incertaine ; d'après le car-
diiûl BeDâ)o, il dériverait de mandra, bergerie, d'où les
halieos auraient tiré mandritUe, berger; madriaiê ou
madrigalê signifierait alors chant à Tusage des bergers,
poérie pastorale. Selon Ferrari , le mot serait d*origi!ie
espagnole, et viendrait de madruifar, se lever matin : ma-
iriçlu voudrait dire chant du matin, comme sérénade,
éioX du soir. Huet pense que le madrigal pourrait bien
DOQS venir des Martegaux, montagnards provençaux,
tnxqaels on attribue une espèce de poésie appelée de
km nom martegcUt comme la danse appela gavotte
Dons est venue des Gavots, montagnards du pays de Gap.
Selon Ménage enfin, il ne serait pas impossible que le
mtdrieal vint d'une ville d'Espagne ainsi nommée, comme
notre VaudevUU a pris le sien du Val de Vire, qui fut
un berceau. Le madrigal n'est soumis à aucune règle
Pttticnlière, quant au rbythme et à l'ordonnance ; ce qui
le distingue, c'est le naturel et la facilité; et le talent
consiste à teaûi^ une seule idée le mieux et le plus
brièvement possible. Marot en offre de nombreux mo-
dales, tr^t-connus; en voici un qui Test moins, adressé
à nne jeune femme :
C» mliseaa bous tes pas cache au sein de la terre
Son eoQrs BUencIeux et ses flots oubliés :
Qu ma Tte ineonnue . obscure et solitaire
Ainsi passe a tes pieds!
Aux portes da ooacbant le del se décolore ,
Le Jour n'éclaire plus notre aimable entretien ;
Kab est-il on sourire aox ft^res de TAarore
Plus charmant qae le tien?
CBATBAUBBXAin>.
Dn reste, notre littérature excelle dans ce genre, et,
ïanni les poètes qui s'y sont le plus distingués, tels que
Mellin de Salnt-Gelals, le marquis de la Sfl3>Iière, Fonte-
neUe, La Mounoye, Dorât, Boufilers, etc., Voltaire est
uoa contredit celui oui tient le premier rang. Il faut
^iter que le madrigal ne tourne a la fadeur et à l'affé-
terie : c'est le défaut qu'on reproche à Domoustier dans
ses Lauree à Emilie sur la mythologie. Dorât et son
^le voulurent imposer au xvm* siècle leurs madrigaux
prétentieux et musqués; mais le goût public en fit
promptement Justice. G.
lunaiGAL, composition musicale fort à la mode en
Italie aux xvi* et xva* siècles, et ainsi nommée parce
<IQ'eIle était faite sur un madrigal poétique. Les madri-
lux, où les compositeurs s'appliquaient k rattacher l'ex-
pvesiion de la musique au sens des paroles, étaient écrits
le plus souvent à 4, 5 ou 6 voix, dans un style fyigné
assez sév&re, dit style fnadrigalesqw, et étaient exécutée
dans les réunions d'amateurs. On en a réclamé l'inven-
tion pour Arcadelt, qui en publia un recueil en 15*79;
mais ils étaient connus antérieurement. Las musiciens
qui ont le mieux réussi dans ce genre de composition
sont Lnca Blarenrio, Palestirina, Pomponio Nenna, Mon-
teverde, Gesualdo, prince de Venouse, Tommaso Pecci,
Mazzochi, et Scarlatti. Le madrigal fut remplacé dans la
musique de chambre par la cantate {V,ce mot) ; ou bien,
comme Lotti, Marcello, Dorante, Steffani, on fit des ma-
dripux accompagnés, qui comportent plus de liberté,
mais qui exigent plus d'expression. On a appelé mo-
drigaux spirttuelt ceux qui étaient composés sur des
paroles pieuses : les Psaumes de Marcello sont de ce
genre. B.
MiENIA (Colonne). V. (Colonnes voiiiniBrrrALBS, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire*
ILENIANUM, nom que les anciens Romains donnaient,
i® à une sorte de bucon ou de portique faisant saillie
d'une maison sur la rue; 2" à une portion de gradins
d'amphithé&tre comprise entre deux précinctions.
MAESTRO, c-èpd. en italien maître, nom que l'on
donne aux compositeurs de musique.
MAFRA (Palais de), immense édifice situé à 26 kilom.
N.-O. de Lisbonne, et qui est à la fois église, palais et
couvent* Un Allemand, Jean-Frédéric Ludovici, en fut
l'architecte, sous le règne de Jean V; on y employa, pen-
dant 13 ans, de 1717 à 1730, de vingt à vingtrcinq mille
ouvriers. Le monument forme un carré régulier, de
245 met. sur chaque face. La façade principale, qui est à
l'O., est divisée en trois corps distincts de bâtiments : la
partie centrale, ou l'église ; la partie méridionale , rési-
dence de la reine, et ut partie septentrionale, résidence
du roi. Du pavé à la plate-bande des terrasses, l'élévation
est de 30 met. Les gros pavillons carrés qui sont aux
angles de la façade ont près de 30 met. de côté, et dé-
passent de 25 met le bord des terrasses ; leur soubasse-
ment en talus plonge dans un fossé profond. Les deux
palais ont trois rangs de fenêtres, distingués par des ar-
chitraves d'un ordre différent. Dans le palais du roi, on
remarque : la salle du baisemain, décorée de belles
fresques; la salle à manger, meublée de dressoirs des
XIV*, XV* et xvi* siècles, provenant de couvents suppri-
més; un salon garni de tableaux de peintres portugais
modernes; la chapelle privée, ornée avec une extrême
richesse. Les appartements de la reine sont de tous points
magnifiques, soit comme ameublement, soit comme or-
nementation. L'entrée de l'église est un portique d'ordre
ionique à fronton, flanqué de deux tours qui s'élèvent à
68 met. ; les cloches que renferment ces tours, y compris
celles du carillon, fabriquées à Liège, sont au nombre de
115. Le dôme qui se dresse au milieu de l'église est
une imitation heureuse de celui de S*-Pierre de Rome ;
l'énorme pierre qui en ferme la voûte au centre est
percée de 8 lucarnes, et supporte une croix de bronze pe-
sant, avec l'appareil qui la consolide, 5,000 kllogr. L'in-
térieur de relise est d'un luxe effiréné; il y a une pro-
fusion incroyable de colonnes, de niches, de statues , de
bas-relifs, de mosaïques et de dorures. La sacristie,
tapissée de marbres précieux, contient des ornements sa-
cerdotaux d'une roa^ificenco sans égale. Quant aux bl^
timents du couvent, on y compte 870 pièces, 300 cellules,
5,200 portes et fenêtres. En 1808, un corps de 1S,000 Fran-
çais put y loger à l'aise, et a^)ourd'hul l'École militaire
ae Portugal y est installée. II faut v signaler : la chapelle
particulière des moines, très-richement décorée; une
autre église, dite des Morts; l'infirmerie, longue salle
voûtée, dont le fond est occupé par un autel, et où chaque
cellule présente deux tableaux en faïence qui représen-
tent le Christ et la Vierge; la bibliothèque, salle d'une
beauté rare, dallée en marbre, couverte d'une voûte à
compartiments et d'une coupole, avec galeries de bois
sculpté et tribunél^ soutenues par des consoles d'une ad-
mirable exécution.
MAGADE , instrument de musique à cordes des An-
ciens, inventé, dit Athénée, par les Lydiens. Cétait nne
sorte de harpe. Euphorion , dans son livre Sur les jeux
Isihmiques, nous apprend que, par la suite, eUe changea
de forme et prit le nom de samlmque (V* ce mot).
MAGADHA (Alphabet), le plus ancien système d'écri-
ture ou'on ait trouvé jusqu'à présent dans l'Inde. Tel que
le présentent les inscriptions qui se rencontrent dans le
Bihar, Il a 36 lettres. H est employé pour le magadhi
qui est un des dialectes du prdtrit (F. ce mot)»
MAGAS. V. GiTHAHi et Lysi.
HAG
119i
MAG
MAGASIN (de Tanbe makhian. trésor), local daos le-
quel on Tenferme des marchandises. Dans un sens plus
restreint, magaàn a remplacé le mot boutique, qui est
Iugé moins élégant, et dont s*offenserait ai:^urd*hui
*amour^propre des marchands.
MAGASIN, mot qui s'est introduit au siècle dernier dans
la littérature, pour désigner diTers recueils, et qui fut
importé d'Angleterre. Toutes les sciences, tous les arts
furent mis en magasins, et beaucoup de ces magasins
■ont vides ou assez mal remplis. M '^* Leprince de Beau-
mont seule a laissé une collection estimable, le Magasin
des Enfants. Un recueil sérieux et estimé parut au com-
mencement de notre riècle sous le nom de Magasin Et^
cyclopédique; nous STons eu, en 1859-00, sous le nom
de Magasin de librairie, une publication périodique, qui
s*est depuis transformée en Revue nationale. L'ouvrage
le plus utile pour les connaissances pratiques qu'il répand
est le Magasin pittoresque, dont le début remonte à
i833. B.
lAAGASINAGE , ce que les marchands, négociants et
commissionnaires passent en compte à leurs correspon-
dants, pour l'occupation momentanée par des marchan-
dises qui leur appartenaient. — Les propriétaires des
marchandises qui ont été déposées dans les magasins
des Douanes payent un drot^ de magasinage de 1 p. 100
de la valeur. Le droit n'est que de ift p. 100 sur les ob-
jets déchargés par suite d'une relâche forcée et rechargés
faute de vente. Le droit de 1 p. 100 est dû, après 3 mois
d'entrepôt, sur les marchandises provenant de confis-
cation.
MAGASINS GÉNÉRAUX, créés par décret du 21 mars
1848, afin de pourvoir aux nécessités d'une crise com-
merciale, et de procurer d'urgence au commerce les res-
sources de crédit dont il avait besoin. Aux termes de la
loi du 28 mai 1858, ils peuvent recevoir les matières pre-
; mières, les marchandises et les objets fBJ>riqué3 que les
^ négociants et les industriels veulent y déposer. A chaque
récépissé est annexé un UHirrant ou bulletin de gage;
l'un et l'autre peuvent être transférés par voie d'endosse-
ment ( V. WARRAirr). La môme loi autorise la vente vo-
lontaire, aux enchères et en gros, de certains produits
par le ministère des courtiers, sans l'intervention du
Tribunal de commerce.
MAGDEBOURG ( Cathédrale de). C'est un monument
du passage de la période byzantine à la période ogivale.
L'église fondée par Otbon le Grand ayant péri en 1208,
on édifia l'église actuelle, qui ne fut consacrée qu'en
1363. Elle a lld",66 de longueur; le toit de la nef at-
teint une hauteur de 37 met. ; la tour du nord, achevée
en 1530, s'élève à 110 met. au-dessus du sol. On trouve
trois &ges successifs de construction dans les arcades
du chœur, dans celles de la nef, et dans les fenêtres de
l'étage supérieur. Les arcades du chœur ont des ogives
très-aigués; celles de la nef, destinées à être cintrées,
et réduites après coup en ogives, présentent des écarte-
ments excessifs; les fenêtres seules sont construites
d'après les règles de l'architecture ogivale, qui semblent
n'avoir pénéu^ qu'assez tard dans la Saxe. Le chœur mé-
rite une attention toute particulière : il présente quatre
étages superposés; les ogives aisués, qui forment le plus
bas, se perdent dans un secondf étage, dont les compar-
timents sont séparés par quatre colonnes corinthiennes
en granit gris, en porphyre rouge, en vert antique, et en
porphvre rose, supportées par des consoles que forment
des faisceaux de colonnettes, et encadrant de petites tri-
bunes carrées; le 3* étage se compose de grandes tri-
bunes, entre lesquelles apparaissent des statues byzan-
tines; le 4* est rempli par de larges fenêtres. Dans le
pourtour du chœur sont pratiquées des chapelles qui,
rondes à leur base, deviennent polygonales en s'élevant.
Le Jubé, construit au commencement du xvi* siècle, offre
les formes les plus complexes du s^le flamboyant. La
chaire, de style Renaissance, a été sculptée par Sébastien
Ertler. On remaroue, à l'extrémité occidentale de l'édi-
fice, un beau tomoeau en bronze, de Peter Vischer.
MAGDBBouRG (Ceuturies de). V, Cntroaus, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d^Histoire.
MAGHOL. V. le Supplément.
MAGISME ou MAZDEISME, religion de Zoroastre.
F. Zbnd-Avbsta.
MAGISTER, mot latin qui veut dire maitre, et dont
on faisait, dans les anciennes Universités, un titre pour
les docteurs en théologie. H ne s'emploie plus que par
ironie, en parlant d'un maître d'école de village.
MAGISÎIIAT, nom qui convient, en un sens général,
à tout officier ou fonctionnaire exerçant quelque portion
de la puissance publique, dans l'ordre adminfetralif ou
dans l'ordre Judiciaire. Dans le langage ordinaire, il a
un sens restreint, et s'applique seulement aux membres
de l'ordre Judiciaire. Ceux-ci , sauf les Juges de paix et
les officiers du ministère public, sont inamovibles : tou-
tefois, un décret du l*' mars 1852 a fixé l'âge où ils sont
mis de plein droit à la retraite (75 ans pour les membres
de la Cour de cassatioo, 70 ans pour ceux des Cours im-
périales et des tribunaux de 1^ instance).
MAGISTRATURE, se dit tantôt de l'ordre des mag^
trats, tantôt de la dignité et des fonctions du magistrat.
Dans l'organisation Judiciaire, on distingue la magistra-
ture assise^ composée des conseillers et Juns, et la mor
gistrature debout, qui forme le Parquet (V. ce mot),
MAGNANERIE (du languedocien magnan, mangeur,
qualification par laquelle on désigne le ver à soie), b&ti-
ment où l'on élève des vers à soie. Il doit être sur un pla-
teau bien aéré, avec fenêtres au levant et au couchant D
se compose d'un rez-de-chaussée et d'un premier étage.
Cet étage, où sont les vers à soie, se nomme Vatelier :
une étendue de 14 met. de long sur 5 de large suffit à
400,000 vers. On pose ces animaux siur des daies espa-
cées à distances égales; il faut une hauteur de 4 met
pour établir 7 étaçes de claies. Au milieu de l'atelier est
ménagée une petite chambre carrée, qui communique
avec le rez-de-chaussée au moyen d'une tn^pe; «'est par
là qu'on monte les feuilles de mûrier destinées à la nour-
riture des vers, et qu'on desosnd celles qui leur ont servi
de litière. Au rez-de-chaussée se trouve une chambre à
air, contenant un calorifère et des caisses en cuivre ou
en zinc où l'on met de l'eau bouillante ou de la glace,
selon que l'on veut donner de l'humidité à l'air de Tate-
lier ou le refroidir : cette chambre communique avec le
premier étage par des tuyaux et par une chenôinée com-
mune, au haut de laquelle est un ventilateur qui renou-
velle l'air de l'atelier. Le thermomètre de l'atelier doit
marauer 20» Réaumur pendant les cinq premiers jours
de l'éducation des vers à soie, et 20° pendant les 19 autres
Jours ; l'hygromètre destiné à régler l'emploi du ventila-
teur doit toujours marquer de 70** à 85**. Au rez-de-chaus-
sée est une étuve où Ton fait éclore les œufs.
MAGNÉTISME ANIMAL. On donne ce nom à un en-
semble de phénomènes produits dans le système ner-
veux, et, par suite, dans la sensibilité, l'intelligence, l'ac-
tivité, l'action musculaire et même toutes les fonctions
de l'économie animale d'un individu, par les gestes, la
volonté exprimée ou secrète d'un autre individu. On a
cru pouvoir attribuer les effets du magnétisme animal à
un uuide particulier, transmis d'un corps à un autre,
sous certaines conditions. L'existence de ce fluide n'est
pas démontrée; cependant, certains effets qui lui sont
attribués ont tant d'analogie avec d'autres dont les causes
sont bien connues, tels que ceux qui résultent du sys-
tème nerveux, de la transmission de certaines maladies,
et même, à quelques égards, de la force vitale, de l'élec-
tricité galvanique, etc., qu'on est porté à croire à l'exis-
tence de ce fluide. D'autres ont attribué les dfets du
magnétisme animal à la crédulité, à l'imagination, i
l'empire oue prennent de prétendus magnétiseurs sur des
espnts faibles ; de là le charlatanisme et le décri souvent
mérité du magnétisme animal.
On trouve quelque idée de ce magnétisme dès le
XVI* siècle, chez le médecin Paracelse, ches J. Roberti ,
et naturellement chez les illuminés Van Helmont, Robert
Flud, chez le Jésuite Kircher et d'autres encore ; mais ce
fut le médecin Mesmer qui vint en France attirer sur cet
agent une attention toute particulière, en 1778. Tous les
èdres, selon Mesmer, sont plongés dans un océan de
fluide au moyen duquel ils agissent les uns sur les
autres. L'homme peut concentrer ce fluide et le diriger
sur ses semblables ; c'est un moyen de guérir immédiar
tement les maux de nerfs et médiatement lea autres
maux. Par analogie avec les attractions de l'aimant ou du
magnétisme minéral, Mesmer qualifia cette influence
de magnétisme animal, L'Académie de médecine voulut
s'opposer à l'emploi d'un moyen d'une efficacité si dou-
teuse, et une commission fut nommée, composée de mé-
decins et de membres de l'Académie des sciences; le
rapport, rédigé par Bailly, l\it contraire au magnétisme.
Scnil, M. de Jussieu déclara, dans un écrit particulier,
qu'il regardait comme réels les effets du magnétisme, et
qu'il pouvait être utilement employé comme moyen de
guérison. En faisant largement la part du charlatanisme,
on ne peut nier certains effets dont la cause est jusqu'à
présent restée inexpliquée, et, si le magnétisme animal
eit encore un mystère, il ne s'ensuit pas qu'il Adlle le
MAH
llfl
MAH
tÊÊt abMhmieBt. On a cherché à txfXkfomt par le m»«
métiame animal certains phénomènes frappants de l'an*
Sqnité et des temps modernes, comme le ainum de So-
oîte, la diYina|ion, la sibylle, la pythie, les prophètes et
les Toyams, les augures dans les antres de Tropnonius et
d^Escnlspe, les conynlsionnaires des Gévennes et de
S*-Médard ; cette explication n'est pas de nature à lerer
tous les doutes. Deux des disciples de Mesmer, les frères
Pay-Ségur, établirent à son exemple un baquet magné»
UqiÊÊ; mais, au lieu d*exciter des crises nerveuses, ce
ipii srrÎTait fréquemment avec Mesmer, ils déterminaient
on Mouieil durant lequel le magnétisé a la Tue inté-
rioore de son corps et de celui de la personne avec la-
quelle il est en rapport ; quelquefois même cette vue dé-
passe la portée des sens. C'est par cette porte, çui tient
de près an mvsticisme, que le magnétisme anmial est
entré dans le domaine du charlatanisme. De nos Jours, il
senible reprendre quelque crédit sous le nom d* Ayimo-
tismê, ou sommeil nerveux, d'i^rès des expériences fiûtes
à rhôpital Necker par MM. Azaur et Broca, expériences
qui furent l'objet d'un rapport du docteur Velpeau à
l'Académie des sciences.
On a écrit de nombreux volumes sur le magnétisme
animal dans presque toutes les langues de rEurope.
F. entre autres : les Mémoires 9t ^ropontions de Mesmer,
ks écrits du fiaarcruis Puy-Ségur, les Atmales du magné-
titm, la Biblwthê(i%tê du mt^nétitme, VBermèg, les An-
noiêt de la Société de Strasbourg et de Metz ; le Dietion^
mr$ de médecine de Nysten, revu par MM. Littré et
Ch. Robin ; /h* magnétisme animal , suivi de Considéra-
lions sur t'exiase, i>ar le docteur Bertrand; Observations
particulières de vision magnétique, rapport à l'Académie
de médecine par le docteur Gerdv, dans sa Physiologie
fhilosophique des sensations et de l'intelligence, R.
MAGNIFICAT, cantique de la S^* Vierge, qui nous a
été conservé dans l'Évangile de S^ Luc, et que l'on chante
aox vêpres. Marie, étant allée visiter sa cousine ÉUsabeth
quelque temps aprto la Conception, répondit à ses féli-
citations par le cantique Magnificat anvnameaDominum
(Mon àme glorifie le Seieneur), dans lequel elle remer-
ciait Dieu de l'avoir choisie pour être la mère du Sauveur.
MAGOT, nom donné à d(es figures grotesques en por-
oelaine ou en talc, qui nous viennent de la Chine.
MAGREBIN (Dialecte), nom qu'on donne à l'arabe des
Etats barbai^eeques, mélangé de mots berbères et eu-
ropéens. •
MAGUELONNE (Église de). Cette église, autrefois ca-
thédrale, est en rume. Elle fut bAtie de 1048 à 1178, en
ionne de croix ladne. La façade occidentale, terminée en
ftooton, présente une fenêtre romane à colonnettes ,
dont rarchivolte est formée de pierres noires et blanches,
et une porte ogivale, dont le linteau est orné de rinceaux
élégants. Les pieds -droits de la porte sont flanqués de
deu bas-reliefe grossiers, représentant S^ Pierre et
S' Paul ; la scalpture du ^mpan représente le Christ sur
on trône, entouré des attributs des Évangélistes. Du côté
Mptentrional, une tour dite du S^ Sépulcre s'élève encore
Ki-deesus du comble de l'édifice. Le toit, auquel on ar-
rive par un escalier appuyé contre le mur de la nef, est
eoovert en larges dalles. L'intérieur de l'église ne pré-
sente qu'une nef, avec deux chapelles dans les transepts,
et une troisième pratiquée dans le mur méridional, et
sous une tour rmnée. Les voûtes, d'une forme ogivale
pea pronoÉcée , sont soutenues par des arcs-doubleaux
qui reposent sur de hautes colonnes engagées. Une large
tribone, destinée autrefois aux chanoines, occupe la plus
gnade partie de la nef. Le chœur, terminé par une
Toute en abside, est orné de trois fenêtres romanes. On
ranarque enfin dans cette église quatre autels quadran-
gnlaires à table de marbre , un sarcophage qu^on croit
être du V* ou du VI* siècle, et deux tombeaux ogivaux du
nv* et du xv*.
MAGYARE (Langue). F. Hongboise.
MAHABHARATA , c-4-d. le Grand bardU (ce mot mo-
derne traduit assez exactement le mot sanscrit , et le nom
de bhârata était donné , dès les temps les plus anciens
da llnde, aux poëtes qui composaient des vers et des re-
dis héroïques, anx bardes)^ poème épique des Indiens,
fé n'est connu dans son entier en Europe que depuis
1839, par l'édition qui en fut alors publiée à (^cutta
(4 vol. in 4*); on en connsissait dé|à le sommaire, et plu-
aieors fragments avaient été imprimés avec leur traauc-
tioD aolt en latin, soit dans quelqu'une des langues mo-
tenes, par exemple, la Bhaguat Geeta (Bhagaioad-GUà)
de WiltiDs (1785), le Nalus {Nala) de Bopp (1819), et
le Muge avec diren épisodes (1839). Ce poème, dans sa
totalité, ne reitfenne pas moins de 850,000 vers, géné-
ralement partagés en distiques ou çlôkas de 32 syllabes
chacun : ces 3x sylhibes forment dieux vers de i6, paiw
tagés eux-mêmes en deux hémistiches de 8. C'est là le
vers épique de la poésie sanscrite ou classique des In-
diens. Mais parfois aussi , quand le mouvement de la
pensée l'exige, le vers s'allonge on se raccourcit, et
prend une allure plus ou moins lyrique; c'est ce que l'on
remaraue surtout dans les parties du poëme que l'on
considère comme relativement modernes. Tout l'ensemble
de l'épopée se partage en 18 chants ou Parvas, et ren-
ferme comme complément le poème appelé Barivansa
(F. ce mot). Si l'on retranche les additions évidentes et
que l'on s'en tienne à l'édition imprimée, le Mahâbkâ^
rata renferme encore 314,778 vers; mais comme die
contient le Barivansa, dont l'étendue est de 32,748 vers,
le grand poème se trouve réduit à 182,030 vers, propop>
tion qui doit être elle-même considérablement amoindrie
par la critique.
Le s^Jet fondamental du poème est la guerre des Cou-
rons et des PAndous en Pantchàlas au scjet de la supré-
matie royale de l'Inde. Les adversaires sont les fils de
deux frères, Pàndou et Dhritaràshtra, descendants du
dieu de la Lune. Dhritarftsthra avait cent fils, dont l'alné*
Duryôdhana, était le plus animé contre ses cousins;
ceux-ci étaient au nombre de cinq, dont les trois idnés
avaient pour mère Prithà ou Kuntf, et étaient des incar-
nations divines, YudhistMra de Dharma ou la Justice,
BMmà de VAyu ou le Vent, Arjuna dlndra, dieu du
Ciel ; les deux derniers, NakiUa et Sahadéva, étaient les
incarnations des deux cavaliers célestes nommés Açwins,
qui sont les Dioscores du panthéon brahmanique, et
avaient pour mère Màdrt , fille du roi de Madra. Dhrita-
rftsthra régnait à Hastinàpura f Delhi ^; quoique son frère
P&ndou (le pftle ) fût Talné, la couleur de son visase
l'avait fait exclure du trône; 11 s'était retiré dans l'Hi-
màlaya, et il y était mort. Demeurés seuls, ses enfants
furent amenés auprès de leur oncle, qui les éleva comme
ses fils.
Le 1" chant raconte l'origine, la naissance, l'éducation
et les premières aventures des fils de Pàndou, l'inimitié
naissante de leurs cousins, et les complots de ceux-ci
contre la vie des cinq frères; l'incendie du palais où Ils
demeuraient avec leur mère ; leur fuite, et le bruit ré-
pandu qu'ils avaient péri; leur vie au désert; leur retour
à l'occasion du mariage de Draupadl , qui devint leur
épouse. — Au 2* chant, Dhritaràshtra partage la souve-
rtkineté entre ses fils et ses neveux qui représentaient les
droits légitimes d'une branche aînée. Yudhisthlra et ses
frères sont établis à Indraprastha, et gouvernent la vallée
de la YamunA (Jumna); Duryôdhana, avec ses frères^
règne à HastinApura sur le Gange. D'après les usages de
l'Inde antique, la suprématie devait appartenir au plus
Agé de tous ces princes, qui était Yudhisthira. Le sacri-
fice solennel où les autres princes doivent lui rendre
hommage et reconnaître sa suzeraineté, est une puissante
cause d envie et de haine pour ses cousins. — Pendant
les fêtes du Bâjasûya, les cousins Jaloux entraînent
Yudhishthira dans une partie de dés , où il perd contre
Duryôdhana son palais, sa fortune, son royivime, sa
femme, ses frères, et lui-même; ainsi dépouillé, il est
réintégré par son vieil oncle; mais, tenté de nouveau, il
convient que, s'il perd, il passera douze ans au désert
avec ses frères, qu'il demeurera inconnu la 13* année, et
que, s'il reparait, il recommencera son exil. Battu, il
part pour la forêt avec sa femme et ses frères. La vie
2u'ils y mènent forme, avec l'épisode de Nàla, le sujet
u 3* chant. — Au 4*, les cinq frères ont fini leur exil ^
et entrent, inconnus, au service du roi VirAta, qui, à la
fin de la 13* année, les reconnaît, et leur promet son
alliance. Préparatifs de la guerre ; énumération des chefs
qui ae rangent à l'un ou à l'autre parti ; alternative pro-
posée par Krishna, en qui est incamé Vishnu, A Duryôd-
hana de choisir entre sa seule alliance ou une grande
armée; imprudence de Duryôdhana, qui prend ce der-
nier parti; départ de Krishna, qui devient l'allié des
fils de Pàndou et l'écuver d'Ariuna. — Les armées des
Courons sont commandées tour A tour par Bhlshma,
grand-oncle de Duryôdhana, par Drôna, son précepteur,
par Kama, roi des Angas, par Salya, roi de Madra ; les
exploits guerrierà de chacun de ces chefs font la matière
d'autant de chants, dans lesquels les dieux Jouent un
rôle important. Chacun des chefs ayant été tné, Duiyôd-
huia lui-même est tué par Bhtma dans un combat sin-
gulier. — Le 10* chant renferme le rédt d'une attaque
nocturne dirigée par les chefs qui survivent contre le
MAH
11 M
MAH
CMBp des fils de Pàndou; cette attaque est raponssée,
nftce à rintervention de Kririina. — Les lamentations
des femmes qui viennent sur le diamp de bataille re-
troaTer les cadavres des leurs, le désespoir du vieux
Dhritarftsbtra, les regrets de Yudhisthira lui-même, for-
ment la matière du 11* chant. I^ 12* est une exposition
br&hmanique des devoiis de la royauté, des avantages
de la générosité, et des moyens de parvenir à la déli-
vrance finale. Le 13* traite des devoirs de société exposés
à Yudhisbthira par Bhishma mourant. Le 14* donne la
description de Tantiaue sacrifice du cheval , célébré par le
vainqueur, en témoignage de sa suzeraineté. Le 15* ra-
conte la retraite de Dbriturftshtra au désert , où il obtient
la délivrance finale; le 16*, la destruction de la race des
Yàdavas, dont Krishna lui-même faisait partie, et la sub-
mersion de la ville de Dwàraka, sa capitale. Le 17* est
le récit du Grand départ, c-à-d. de Tabdication de
Yudhishthira, et de son départ pour THimàlaya et la
montagne sainte, le Mérou. Dans ce voyage, le héros perd
tour à tour sa femme et ses frères ; demeuré seul avec
son chien , il refuse d*entrer sans lui au ciel d*Indra :
Indra cède sur ce point. Au chant 18*, le héros entre au
ciel , où il trouve heureux ses ennemis, et cherche en
vain sa femme, ses amis et ses frères. Un messager
divin les lui fait voir dans les tourments. La grandeur
d*àme do héros éclate à ce dernier moment ; les dieux
arrivent, et le spectacle disparaît. Yudhisthira, transfi-
guré, reprend sa place avec ses frères au milieu des di-
vinités dont la personne s*était incamée en eux pour
combattre le mal personnifié dans leurs ennemis.
Dans ce vaste développement d*idées et de faits, la cri-
tique moderne distingue des parties anciennes et d'autres
Îlus modernes. Parmi ces dernières, on peut compter le
2* et le 13* chant, et probablement aussi le 16*. On a
lieu de penser également que les deux derniers chants
ont été ijoutés au poème primitif à une époque où la
doctrine morale des brahmanes avait atteint une grande
élévation théorique, époque qui ne peut guère avoir été
celle des temps héroïques de Tlnde. On doit retrancher
également, comme intercalés dans le texte, un certain
nombre d'épisodes, qui ne s*y rattachent que fort indi-
rectement, et dont plusieurs témoignent de doctrines
postérieures à rétablissement du bouddhisme : telle est
fa Bhagavadijitâ, dans laquelle les faits de Ul, guerre ne
sont qu'une occasion de discourir, et ne servent qu'à la
mise en scène du dialogue. D'après les Indiens eux-
mêmes, le poôme primitif ne comprenait pas le 5* de
l'étendue qu'il a aujourd'hui. Ce qui fait le fond du
poème, c'est la guerre des Gourous et des Pantch&las ;
c'est là le noyau primitif donné par la légende et déve-
loppé par les poètes, et les trois quarts an moins de
ToBuvre totale n'ont aucun rapport avec ce si^et. On peut
donc admettre, en général , que le Màhàbhdrata, tel que
■ous l'avons, s'est formé peu à peu de pièces njost^,
et que le poème primitif n'a été qu'un centre autour du-
quekles bri^manes ont groupé tout ce qui pouvait se
trouver chez eux de traditions épiques ou d'idées pou-
vant servir à l'instruction des rois. Il est hors de toute
vraisemblance que le poème soit une œuvre moderne,
c-à-d. postérieure à l'expulsion du bouddhisme ou du
moins à sa propagation dans l'Inde ; et c'est ce qu'il fau-
drait admettre, si l'on se refusait à en opérer le démem-
brement , et à reconnaître dans ses diverses parties des
œuvres d'époques et de styles différents, plus ou moins
habilement rattachées à 1 épopée antique. Plusieurs de
ces parties, qui sont de véritables traités, n'ont nullement
le caractère épique, et sont évidemment bien postérieures
à l'Age de l'épopée. On a tout lieu de croire que le Ifoô^d-
bhârata primordial ne dépassait pas le triomphe final des
Pandous, et comprenait tout au plus le sacrifice du cheval
et la réintégration du roi légitime sur son trône; encore,
dans les quatorze premiers chants, doit-on faire un cheix
entre les passages, supprimer beaucoup d'épisodes et
d'Interpolations, pour arriver à la dimension primitive
Indiquée par les brahmanes.
Réduit à ces proportions, le Mahâbhârata présente,
avec lesépopées des autres nations, et surtout avec VHiade,
des rapports de ressemblance évidents. Le récit des ba-
tailles y occupe une place importante et y est traité avec
une vérité frappante, même là où les dieux semblent
substituer leur action à celle des héros. La description
des combats singuliers est tout à fait homérique. On ne
npralt concevoir un tableau rendu avec plus de vérité
pittoresque et de sentiment, que celui du 11* chant, où
l'auteur amène sur le champ de batjûlle de Kuruxètra
les veuves, les mères, les sœurs des guerriers, cherchant
à reconnaître les leurs parmi ces cadavres que se dispu-
tent déjà les bettes sauvages, les insectes et les oiseaux.
L'attaque nocturne du camp, avec les circonstances mvs-
iérieoses qui l'accompagnent ou la précèdent, a un intérêt
poétique saisissant. Les préparatifs de la bataille soDt
plus grandioses que la partie correspondante du poème
grec Le 3* chant oifine cette scène du }eu, trait de moBurs
propre aux Orientaux, et sur lequel les écrivains de l'Inde
reviennent volontiers, pour le rendre dans toute sa viva-
cité et en tirer un enseignement sévère. Nous ne pouvons
citer id toutes les scènes poétiques, grandioses ou gra-
cieuses, terribles ou touchantes, que renferme la grande
épopée. On peut croire que, du Jour où la critique euro-
péenne aura dégasé le mahâbhârata des additions qui le
rendent souvent diffus, des interpolations déplacées, des
épisodes, qu^que intéressants qu'ils soient, qui brisent
sa marche et retardent les événements, ce poème se mon-
trera comme une des épopées les plus parfaitement poé-
tiques que nous connaissions. Du reste, parmi ces ad-
ditions, il en est qui ne s'éloignent point du caractère
assigné par le poète à ses héros i tels sont les deux de-
niers chants, l'une des compositions les plus sublimes
qu'un poète ait Jamais conçues. Or, cette naute pensée
morale, exprimée si magnifiquement à la fin du poème,
domine toute l'épopée indienne. Les héros du Makâbhâ^
rata ne sont pas- seulement des guerriers, comme ches
les Grecs, plus ou moins maîtres d'eux-mêmes; ce sont
des hommes pieux, pratiquant la Justice, fidèles à leur
parole Jusqu'à l'abnégation et au sacrifice de leur per-
sonne, luttant contre les forces de la nature avec une pa-
tience infatigable et une douceur que aoutient le désir de
la Justification et de la délivrance finale
Quant à la date de l'épopée primitive, il est bien diffi-
cile de la fixer même approximativement. On peut penser
qu'elle est antérieure au Râmâyana (F. es mot\ comme
les faits eux-mêmes qui sont la matière de run et de
l'autre poème. Les Aryas ont, selon toute apparence, mis
un temps assez long à s'étendre de la vallée supérieure
du Gange à l'Ile de Cevlan. Or, il n'est guère croyable
que, si la grande expédition du Sud eût été t^minée à
l'époque dn Mahâbhârata, il n'y eût été fait dans celui-d
aucune allusion. On conclurait donc de cette remarque
que le premier poème a été fait dans l'intervalle des deux
expéditions. Cette période de temps est comprise dans le
moyen âge brahmanique, pendant lequel s'est développée
la littérature des commentaires, à. côté du sanscrit, qoi
était la langue littéraire, représentée alors par les chants
épiques. Ces chants étaient nombreux, et plusieurs sont
parvenus Jusqu'à nous sous le nom d^Itihâsas; le premier
mahâbhârata semble n'avoir pas été autre chose; et
lorsqu'il fut fixé par l'écriture et attribué à Vyàsa Pftrà-
çarya, tout porte à croire qu'il existait depuis longtemps
dans les traditions populaires par fragments isolés, comme
cela eut lieu pour les chants des aèdes de la Grèce La
période des Itibàsas, qui concourt avec celle des commen-
taires du Véda, a suivi de près l'entrée des Aryas dans
les vallées du Gange; mais elle a dû se prolonger elle-
même un certain nombre de siècles, si l'on en Juge
d'après l'étendue et la succession encore reconnaisssbie
des ouvrages scolastiques qu'elle a produits. A quel
point de cette période placer l'origine du Mahâbhârata?
Il est croyable que l'épopée, ayant pris naissance à une
certaine distance des événements, n'apparut guère avant
le milieu de l'âge dont les guerres elles-mèoiBs rempli-
rent les commencements. Or, si l'on songe que l'ère du
Bouddha date du milieu du vi* siècle avant J.-G., et que
la prédication de ce sage suppose une civilisation et une
moralité publiques en décadence, on est conduit à placer
plusieurs siècles auparavant la fin du moyen âge nràh-
manique, et à penser que l'épopée primitive des Indiens
n'est pas postérieure à celle d'Homère, et qu'elle loi est
probanlement antérieure de quelque temps. Le témoi-
gnage de navigateurs grecs (chez le rhéteur Ghrysostome),
rapportant que les Indiens avaient traduit Homère, na
aucune valeur, puisque les Grecs et les Romains rame-
naient à leurs idées et à leurs noms tout ce qu'ils trou-
vaient d'analogue chez les peuples étrangers; il prouve
seulement qu'il existait alors dans l'Inde une grande
épopée. Le silence de Mégasthène ne saurait être non
plus une preuve négative, ou bien il faudrait l'appliquer
de même à tous les grands ouvrages qu'il ne nomme pas;
ce qu'il est Impossible d'admettre. Les livres bouddhiques
du nord citent les Pftndous conune une tribu dévastatrice
habitant les montagnes : mais sont-ce les P&ndous du
Mahâbhârata? Et, si c'est la même famille, on en con-
clurait tout au plus que les Pàndous, chsMés du trône
MÀH
1197
MAI
•tfâlbgléft ma les hanteon, âtaientdefeiras telsaa temps
où furent écrite ces Uvres bouddhiques. Le nom de Vyàsa
M le reneontro pas dans ceux des BrâhmanuMS qui ont
M lus Jusqu^à ce Jour; mais les Brâhmamu sont des
itires de scolastique, où le nom d*un chant épique pour»
ndt paraître déplacé s*il s*y rencontrait : ne Toyons-nous
pas un fait semblable pour les chants épiones de notre
moyen ige, composés dans une période a*études sco-
lasoquea î De ces coniddéralions il résulte que la question
de date n'est pas complètement résolue pour le Mahà^
Miârata.
Tontes les parties du poème ont pour nous un intérêt
historique nuueur. Les passages é?idemment les plus an-
ttoues nous offlrent le rédt de grands érénements accom-
plis dans le N.-O. de Tlnde, à une époque oui ne dut
pas Ctre postérieure de beaucoup de siècles à rétablisse-
ment des Aryaa de Flndus sur les rives du Gange et de
ses affluents. Au milieu de cette çrande lutte où trourent
place les Aryas et leurs alliés indigènes, s'agitent des
questions de constitution politioue et sociale d'une haute
lnqwrtance pour l'histoire indienne des temps posté-
xieiors. Les nombreux renseignements que nous donne le
poème à cet égard, rapprochés des faits analogues de
rhiatoire grecque et des plus anciens temps des peuples
do Nord, Jettent sur eux un Jour tout nouyeau. Les chants
f S* et 13% composés certainement longtemps i^rès l'épo-
pée prlmitiTe, n'en sont pas moins une exposition in-
structive, à tous é^^urds : ils nous font connaître, avec plus
de détails que les lois de Blanou, l'idée que, dans la divi-
sion de la société en castes, on se faisait des devoirs des
nris scrit envers leurs scjets, soit envers la caste privi-
l^ée des prêtres. On y voit aussi le but suprême de la
▼ie que la religion Inràhmanique proposait aux hommes
et paracolièrement à ceux des classes les plus élevées.
lies détails dans lesquels sont entrés les auteurs de ces
chante noos font pénétrer dans l'esprit de la société in-
dienne, qoi, dès rorigine du brêhmanisniie, à travers tous
les diangements polhiqnes et les transformations du culte,
est demeuré le même Jusqu'à nos Jours, c-àni. profon-
dément empreint du caractère religieux, et subordonnant
toutes les actions, les pensées et les discours à certains
ptrincipes de philosophie théologique époncés dans la loi
et acceptés pur les mœurs.
Le Mmhâhhârata^ pris dans sa totalité, renferme aussi
une multitude de légendes, les unes d'un caractère his-
torique et se rapportant aux plus anciens temps des Aryas,
les autres évidraiment syninoliques et servant de com-
plément on d'explication à celles qui se trouvaient déjà
mentkmnéea dans le Vida. Ces dernières peuvent sou-
vent être rapprochées des traditions mjrthologiques des
peuples gréco-italiques et des peuples du Nord ; <ÀllesHd,
qui ne noos sont pas parvenues avec le grand et poétique
développement des fsbles de la Grèce, peuvent s'éclairer
▼ivement des récits du Mahàbhârata; il en est souvent
de même des qrmboles helléniques, presque tous origi-
naires de l'Asie, mais transformés par le génie poétique
des Grecs, et localisés par eux dans leur propre pays.
Ces ^mboles, qui souvent ont perdu en Grèce la clarté
de leur aigniflcation, se retrouvent dans le poème indien
avec leur valeur, et, rapportés ensuite au Vida, d'où ils
émanent, peuTont recevoir une interprétetion vraisem-
blable et souvent même évidente. L'étude approfondie
de r^pée indienne est donc d'une grande utilité pour
la symbolique, et en est même devenue l'un des fonde-
ments. Elle a pour complément celle des Puràfuu {V,cê
moQ, des Itihâsas, du RAmàyana, du Harivansa, et
génmlement de tous les ouvrages connus dans l'Inde
sous le nom de Kaoyas, c-àrd. poèmes épiques.
On ensemble ou, pour mieux dire, une succession de
doctrines philosophiques peut être extraite du Mahâbhà'
rata. Les diverses parties du poème en contiennent une
proportion d'autant plus considérable qu'elles semblent
eUes-mêmes plus modernes; leur comparaison, faite à
ce p(^t de vue, aura ce double résultet, d'en fixer les
dates relatlTes, et de donner, pour leur oart, des rensei-
nemente utiles sur le développement de la philosophie
mdienne. Les brahmanes des temps postérieure ont, en
effet, pris l'épopée primitive comme un cadre indéfini,
dans lequel ils pouvaient insérer leun propres idées,
commeils y intercalaient des fragmente poéti<](ues. Or,
ees passages de philosophie théologique, produite à dif-
férentes Craques, et parfois même à des siècles d'inter-
valle, répondent à des étate divers de la science. Rappro-
chés des écrite philosophiques proprement dits, ils peu-
vent beaucoup servir au démemorement du poème actuel,
et aider les critiques à le ramener à ses Justes et vraies
proportions. Cest ainsi que l'on doit retrancher à pre-
mière vue, du grand poème, le chant connu sous le nom
de Bhagaoad-gttà { V, ce moi)^ traité complet, dogmatique
et didactique, du Ydga (V, IimiBimB ^ Philosophie )«
doctrine qiii n'a pu arriver à cet étet de perfection qu'a-
près un long développement de l'esprit philosophique.
K. Fr. Johnson, silêctions from the Mahâbnâratap
Londres, 1842, in-8*; Fragments du Mahàbhârata, tra-
duits par Th. Parie, Paris, 184i, in-8(»: SàffUrL épisode
du Mahàbhârata, traduit par Pauthier, {n-8% 1841; Nala,
épisode du MahâMUirata, traduit par l'auteur de cet
uticle, Nancy, 1856; in-8*; A. Sadous, Fragments du
Mahàbhârata traduite en français, Paris, 1858, in -13;
Holumann, Indravijaya, Garisruhe, 1841 ; la Boagavad"
gitâ. texte en caractères firancais et traduction françaisoi
par l'auteur de cet article, 1801 • En. B.
HAHMOUDI, monnaie -d'argent de Perse, valant en-
riron 70 centimes; — pièce d'argent du sultan Mah-
moud I**, valant 5 piastres (Atr, 14 c).
HAHMOUDIÉ, pièce d'or turque, valant enriron 24 i^.
HAHOITRES ou IIAHEUTRËS , carcasses qu'on pla-
çait an XV* siècle sous les manches du pourpoint, afin
de faire paraître les épaules plus larges et plus hautes.
Les maholtres différaient dea gigots pmtés par les femmes
parisiennes et autres, vers 1830, en ce qu'ils bouffaient
dans la direction verticale, et semblaient faire monter
jusqu'à la hauteur du menton l'articulation de l'hu-
mérus.
liAHOMÉTISME. K. Coran, Chittbs, SmmnBS, dans
notre Dictionnaire de Biograpme et d'Histoire,
BfAHONE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de BUh
graphie et d'Histoire.
BfAHRATTE (Idiome}, un des idiomes de l'Inde, parié
entre les fleuves Nerbuodah et Kriachna, c-à-d. dans le
Goncan, le Gundwana, et une partie des provinces de
Malwah, de iCandeisch, d'Aureng-Abad, de Bed]apour, de
Goudierate et de fiérar. Adelung l'apparentalt aux idiomes
malabare; Balbi et Lassen le rattachent avec plus de
raison au pr&crit. En effet, sous le rapport de la lexico-
graphie et de la grammaire, le mahratte n'est qu'une mu-
tilation du sanscrit, et peut être regardé comme trèn du
bengali IV. ce mot). On y trouve un certein nombre de
substantifs persans, amenés par la conquête musulmane ;
mais les adjectifs et les verbes sont sanscrite. Comme
dans l'hindou! , les flexions grammaticales ont à peu près
disparu, pour faire place au système analytique des par-
ticules et des auxiliaires. La construction ressemble à
celle de Thindoustani ; mais le mahratte est plus logique
que cette langue pour la composition et la dérivation des
mots. U a plusieun dialectes, tels que le basopouri et le
ouadi , qui régnent dans le Malwah ; le desh, parlé au
N.-E. de Pounah; le kokouni, en usage dans le Ko-
kunt, eto. La prononciation est sourde et traînante. Les
Biahrattes emploient deux alphabete différente : pour les
sujete religieux ou d'un caractère relevé, le balhodh ou
balabandi , qui n'est autre que le dêvanagari des livres
sanscrite; pour les relations ordinaires, la correspon-
dance et les affaires, le mod ou modi, qui se compose
de 44 lettres, difficiles à lire sous leur forme cursive. Ils
ont des chroniques, des compositions morales, et des
chante de euerre. La base de la vereification est tantèt
la mesure des syllabes, tantôt la rime. Nous avons des
Grammaires de la langue mahratte, écrites en anglais,
par W. Carey (Serampour, 1808, in-8*}, Drumond
(Bombay, 1808, in-foK), Ballantyne (Edimbourg, 1830,
in-4*), et J. Stevenson (Bombay, V émt., 1843 ) ; des £>to-
tUmnaires mahrattes-<mglais, par Carey (Bombay, 1810,
in-8»), par Molesworth (ibid., 1831, in-8«), et par Ken-
nedy (ibid., 1834, in-fol.).
BIAHRI (Idiome). V. Ëkhkiu.
MAI , nom que 1 on donnslt autrefois au tableau offert
chaque année, au 1*' Jour de mai, par la corporation des
orfèvres de Paris à l'église Notre-Dame. Le s^jet en était
tiré des Actes des Apôtres. Cette coutume dura de 1008
à 1708. Antérieurement à 1608, le don consistait en un
petit morceau d'architecture en forme de tabernacle,
qu'on suspendait à la voûte de l'église.
MAI (Arbre de). V. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire,
BIAIL (Jeu de), Jeu qui consiste à pousser sur une route
ou sur de longues allèBs, en les frappant d'un coup avec
une petite massue appelée motl, des boules de bois, de
manière à parcourir le plus grand espace possible, et à
toucher finalement un Dut manqué.
BIAILLE (en bas latin mallta, pour medallia, mé-
daille), petite monnaie de cuivre qui eut ooura en Franee
MAI
119S
MAI
Mot lès premien toit de U 3* iBoe, et qui valait la
iBoitié d*aii denier. Il j eut des maUUs patigk, des
WMiiUes tournois, et des demi-maUlei de ces deux espèces
de monnaie. La maille de Poitou s*ant)elait pito. En 1303,
raiippe le Bel fit frapper des motUss blanchêt, c-AhL
d'argent. An commencement du xvi* siède^ la mailU de
Lorraine, en or, portant d*an c6té une croix, de Tautre
Teffigie d'un duc de Lorraine, valait 33 sous 0 deniers. —
Le mot moti/s est entré dans plusieurs locutions : La
Fontaine appelle an avare un pincê^maiiUê ; n'avoir ni
sou Ht maâlê, c'est ne posséder rien; oootr mailU à
partir (à partager) avec quelqu'un, c'est être en diffé-
lend avec lui pour peu de chose. B.
MAILLE, en termes de Blason « boucle ronde sans
ariiUon.
MAIULBTAfiE. V. Doublagb.
MAILLOT, vMement collant, en laine tricotée, que re-
vêtent souvent les saidmfaanques. On donne le même
nom à l'espèce de caleçon on oe pantalon que portent les
danseuses sur la scène. Un nommé Maillot l'inventa.
MAIN.BIle figure fréquemment dans les scnlptores chré-
tiennes, comme emblème de la puissance divine. — Une
main droite au sommet d'un bols de lance, éudt Tenseine
du manipule, dans les lédons romaines. Les Anciens dé-
posaient dans leurs temples des mains votioês en bronze,
appelées quelquefois mains panthées , parce qu'elles
étaient couvertes de symboles se rapportant à toutes sortes
de divinités.
MAIN CHAUM, jou d'oufants, oft un, parmi plusieurs, se
courbe sur les genoux d'un autre et les yeux fermés,
reçoit des coups dans une main qu'il tient derrière lui ,
et doit deviner qui l'a touché. Celui qui a été deviné
prend la place du patient.
MAIN COURANTE, livre de commerce sur lequel on
inscrit à leur date les ventes, achats, payements, re-
oettes, en un mot, toutes les affiodres, en même temps
qu'on les conclut. On l'appelle aussi Brouillard et
ÈrouUlon,
MAIN DE JUSTICE. V. Bator a signeb.
MAIN-D'OBUVRE, travail manuel appliqué à la créa-
tion d'un produit. La cherté des vivres, la concurrence,
les crises politiques , l'invention des machines , sont des
causes accidentelles qui influent sur le prix de la main-
d'œuvre.
MAINET, titre d'un roman poétique sur l'enfance et
la jeunesse de Charlemagne, qui s'v trouve désigné sous
le nom de Charles le Btainet, c.-à-d. le Petit. Brouillé
avec son père Pépin, Charlemagne va se mettre, avec un
rnd nombre de guerriers, au service d'un roi sarrasin
Tolède, Galafre, dont la fille, Galiane, lui inspire une
vive passion. Mais 11 lui faut disputer cette princesse à
Bramant, autre roi de l'Espagne musulmane : il le met
en déroute, enlève Galiane, l'emmène en France, la fait
baptiser et l'épouse. — Ce roman, dont la composition
remonte au xii* siècle, a été développé en prose italienne
dans le 6* livre du recueil de fictions chevaleresques in-
titulé Dei Bsali di Prancia. On en trouve un extrait
moins détaillé et nlus libre, en prose castillane, dans la
Chroniquegénérated^Espagns composée sous Alphonse X.
MAIN-FERME. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
MAIN-FORTE. V. Force pdbuqde.
MAIN HARMONIQUE, nom donné par Gui d'Arezzo à
la gamme de son invention , parce qu'il la représentait
au moyen d'une main sur les doigts de laquelle étaient
marqués tous les tons.
MAINLEVÉE, en termes de Droit, acte qui fait cesser
l'empêchement résultant d'une saisie , d'une opposition ,
ou d'une inscription hypothécaire. Elle est volontaire^
quand le saisissant, l'opposant ou le créancier y consent
(ce qui doit se faire néanmoins par acte authentique) ;
iudiciairet quand elle est prononcée par Jugement; ad-
ministralive, quand elle résulte d'un arrêté préfectoral.
La demande en mainlevée Judiciaire doit être portée de-
vant le tribunal du domicile de la partie saisie {Code de
Procéd., art. 567).
MAINMISE, ancien terme de Droit, synonyme de
sauts.
MAINMORTE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
MAINTENON ( Ch&teau de), dans le département
d'Eure-et-LoIr. B&ti à l'extrémité de la ville pour Jean
Cottereau, trésorier des finances sous Charles vn et
Louis XI, il fût acheté, en 1674, par la veuve Scarron,
ooe Louis XIV créa marquise de Maintenon. U forme une
double potence dont les ms sont tournés vers le parc :
l'un des bras est terminé par une jolie tour ronde, l'auiiv
par une tour carrée, dont le dôme domine le reste de
l'édifloe. Les bâtiments sont peu élevés, de style plus
élégant que magnifique, et bien distribués. L'intérieur a
été décoré à la moderne par le duc de Noailles, proprié-
taire actuel du château. Le oorps de logis principal était
l'appartement de la marquise; on voit encore, dans la
chambre à coucher, son portrait par Mignard. L'apparte-
ment du roi y existe aussL La chapelle, où il n'y a d' n-
téressant que les vitraux, est fort simple, et a été soi-
gneusement conservée : on croit généralement , mais è
tort, que le mariage de Louis XIV avec la veuve Scar on
y a été célébré. L'Eure et Ul, Voise baignent les murs da
château, et parcourent le parc et les jardins dans de
nombreux canaux. B.
maintenon (Aqueduc de). Il tôt conçu en 1680 par
Lahire et Vauban pour amener à Versailles les eaux de la
ririère d'Eure, depuis le boui^ de Pont-Gouin Jusqu'à
l'étang de U Tour, à 20 kil. de Versailles, et déjà l'un de
ses réservoirs. Les travaux furent commencées en 1683;
on ouvrit, de Pont-Gonin Jusqu'à Bere&res-l^-Mangot,
un canal de 5 met. de large sur plat-fond, 3 met. de pnn
fondeur, et 48 kilom. de longueur, en partie coupé dans
les collines, supporté dans les vallées par de hautes levées
el par 30 ponts, n devait traverser la vallée de Mainte-
non sur une construction en maçonnerie longue de 45
kilom. environ, et toute en arcades au plus profond de la
vallée. Cette dernière partie dut être à 3 rangs d'srcades
superposées ayant les proportions suivantes : le rang in-
férieur, 47 arcades de 13 met. d'ouverture sur 23", 50 de
hauteur, et d'une longueur totale de 974", 50; le 2* rans,
195 arcades embrassant une longueur de 2,234", 50,
ayant aussi 13 met. d'ouverture, et 22 seulement de hau-
teur ; enfin le 3* rang, 390 arcades, mêaas longueur que
le précédent, et 11 met de hauteur. L'élévation totele
devait mesurer 71 met. Les parements des arcs, les anf^es
de leurs pieds-droits, ceux d*un contre-fort qui les appuie^
sont en pierres de taille d'un grand appareil, et les psrdeii
intermédiaires en forts moellons. Mais après 4 années
de travaux et une dépense de 8,613,000 livres, et quoi-
qu'on eût employé pendant plusieurs années 30,000 nom-
mes de troupes aux travaux de terrassement, l'entre-
prise fut abandonnée. Le rang des arcades inférienree
de l'aqueduc de Maintenon était alors seul exécuté.
L'exécution de ce projet fut une des plus grandes entre-
{>rises du règne de Louis XIV, et aurait ég^é tout oe que
es Romains ont fait de plus grand en ce genre. Sous
Louis XV, on rint prendre à cet aqueduc les matérianx
nécessaires pour rebâtir le château de M"* de Pompa-
dour à Grécy ; néanmoins, en 1780, il restait encore aaseï
de parties de cet immense travail pour que rachèvement
en fût possible; mais depuis, l'ûpieduc de Maintenon
fut encore fortement attaqué, et il n'en reste plus au-
jourd'hui ope 11 arcades entières. G. D— t.
MAIRE. V. ce mot dans notre Dtcttonfiotrs de Biogra»
phie et d^ Histoire,
MAIRE (Lord-). V. Lord-Mairb.
BIAIRIE, mot qui désignait autrefois les fonctions de
maire, et qui ne s'applique plus qu'à l'édifice où siège
l'administration municipale de chaque commune. Cest
dans la mairie que sont conservés les registres de l'état
civil, et qu'aux termes de la loi, doivent être célébrés
les mariages.
MAISON (du latin mansio, demeure). Après s'être abri-
tés dans les grottes et les cavernes naturelles, les hommes
dressèrent des tentes et des cabanes, puis employèrent
divers matériaux pour la construction de leurs habita-
tions. D*aprè8 TÉcriture Sainte, les constructions élevées
après le oéluge étaient en briques séchées au soleil et
cimentées de bitume. Tosorthrus, fils de Menés, premier
roi d'Egypte, inventa, dit-on, l'art de tailler la pierre
pour bâtir. Les maisons ont naturellement varié selon les
temps, les climats, et les progrès de la civilisation. —
Chez les Bébreuafi, elles étaient bâties en argile, en bri-
ques, ou en pierres; pour les palais et les maisons des
grands, on employait les pierres de taille, quelquefois
même le marbre. Comme ciment on Titilisait Taspbalte,
mais plus souvent la chaux et le plâtre, qui servaient
aussi d'enduit. Les murs des grandes maisons ëtaiem
badigeonnés en couleur rouge. Le bois de construction le
ployé que pour les boiseries de luxe. Quant à la disposi-
tion, les grandes maisons formaient ordinairement un
carré, avec une cour an milieu» dans laquelle se trouvait
MAI
iiw:
MAI
itt puits <m aiM citerne, aiosi aa*uo boasin gerfaut quel-
qnefois de bain. Aatonr de réaîfice il y avait ordinaire-
ment une afmat-coar, fermée par un mur d'enceinte.
L'édifice était diTisé en plusieure étages. Les toits étaient
plats, tels qu'on les yoit généralement chez les Orien-
tsax, et seofement un peu élevés vers le milieu, pour que
reso de pluie s'écouUt dans des gouttières : on les cou-
mit de briques, ou, comme dais la Syrie moderne,
é'one composidon de pierres, de chaux, de sable et de
eeodie. On s'y promenait pour prendre le frais, on y
MBcbait même dans la belle saison, on y dressait des
lentes pour la ftte des Tàbemadee. Le toit du pauvre
n'était couvert que d'une couche de terre, sur laquelle
poussait souvent quelque verdure. On n'arrivait aux ap-
partements du rn-de-chau8sée que par la cour inté-
rieure ; à Tun des côtés de l'édifice, un escalier conduisait
directement de l'avant-cour ou oour eitérieureaux étages
mpérieurs et au toit. Les appartements étaient lam-
brissés et parquetés, les murs couverts d'ornements en
ivoire et peut-être de peintures ; on les ch'aufliidt en hi-
ver au moyen d'un réchaud ou brasier placé au milieu.
Les verrous, lee serrures, les clefs étaient ordinairement
en bois, comme on en voit encore maintenant chez les
Orientaux. Au-dessus des portes, il y avait des inscrip-
tiona d'un caractôre religieux. Les fenêtres étaient dis-
tribnées avec symétrie, et garnies de treillis ou de Jalou-
des; contrairement à ce qui se pratique presque toujours
dus l'Orient aiodeme, où les fenêtres ne donnent que
nr la cour intérieure, il y en avait qui ouvraient aussi
mr la rue. — Vitruve nous apprend que les peuples de
la Colchide et du Pont construisaient des habitations en
Ms de mime horizontalement superposés : cette dispo-
sition, adoptée par les Daces, les Sarmatesetles Scythes,
s'est perpétuée jusqu'à nos Jours dans les régions cor-
respondantes, & l'exception de la forme de la toiture, qui
était pyramidale. — Les Phrygiens, qui manquaient de
bois, creusaieat circulairement des tertres naturels , et
pbataient, autour de l'orifice, des perches qu'ils cour-
oaient vers le centre et liaient ensemble de manière à
former une espèce de coupole : ils recouvraient le tout
avec des roseaux et une couche d'argile. On pénétrait
dans ces habitations au moven d'une galerie pratiquée
dans le flanc da tertre. — nous avons parlé, dans notre
Dietûmnairê da Biographie et d'Histoire (p. 1689, col. 2),
des maisons é(fyptiennes, grecques et romaines.
Les habitahons des Ckûdois étaient de forme circu-
laire, et bâties, soit en pierre, soit en bois et en terre,
c-i-4, avec des poteaux soutenant de doubles claies
d'osier, entre lesquelles des couches de paille hachée,
pétrie avec de l'argile, formaient une muraille solide. Le
toit, en branchages légers, était couvert de chaume ou de
ôirdeaux. Lee briques et les tuiles ne furent connues
que sous la domination romaine : on fit alors des mai-
sons sur le modèle de celles des vainqueurs, c.-à-d. des
bâtiments rectangulaires, à un ou plusieurs étages. Les
invasions des Barbares au v* siècle firent disparaître ces
oonstnictions, et il ne reste plus rien ai^ourd'hui des
liabitsdoos I4>partenant aux premiers siècles du moyen
le^* On n'en trouve pas qui soient antérieures au
xn* siècle : celles qu'on voit dans quelques villes du
IGdi, en Champagne et dans l'Orléanais, ont des façades
percées de fenêtres en plein cintre, peu élevées, et d'un
style sévère. Perpignan et Reims possèdent queloues
maisons en pierre du xiii* siècle; celles de Metz, a la
même époque, sont surmontées de créneaux. Aux de-
oieares des familles nobles, des armoiries étaient sculp-
tées an-dessus des rares fenêtres percées sur les façades.
Dana les villes ^i Jouissaient de la liberté politique, les
bourgeois aimaient à garnir de tours leurs maisons :
sinsi, au xm* siècle, Avignon ne comptait pas moins de
30O maisons de ce genre. Le xiv* siècle nous a légué peu
de maisons en pierre : les fenêtres et les portes y sont
ordinairement en ogive, avec des tympans et des corni-
ches plus ou moins ornés; souvent les arcades supé-
rieores portent à faux sur celles du rez-de-chaussée. Les
maisons en bois sont plus nombreuses, et on les trouve
principalement dans nos provinces septentrionales. Elles
se terminent par un pimon aigu, dont la saillie, sup-
portée par deux pièces de bois formant ogive, abrite les
étages inférieurs. Les pièces de bois de la charpente ap-
parente sont l'unique décoration de la maison ; ordinai-
Rment, pour assurer leur conservation, on les recouvrait
d'ardoises, où l'on imagina de sculpter des figures. Le
itt-de-chaossée était occupé par une étroite entrée et par
nne boutique non close pendant le Jour. C'est surtout au
XV* siècle que s'établirent les étages en encorbeUement,
^rptombant lee uns sur lee antres s alors aassl, on voit
ta brique concourir à Ul décoration, en formant les rem-
plissages de la charpente ; qnelouefois elle est remplacée
par des carreaux de faïence colorée. Par sentiment de
défiance, les fenêtres du rez-de-chaussée sont petites,
élevées, garnies de grilles, et plusieurs portes uonnent
sur des rues différentes. Les ouvertures des étages supé-
rieurs sont grandes ou petites, selon les climats, pour
laisser entrer ou pour Arrêter la lumière et la chaleur*
C'était un signe die richesse et de puissance que d'avoir,
aux angles ou sur le milieu du mur extérieur, des tou-
relles saillantes, rondes ou poljrgonales ; d'autres tou-
relles étaient b&ties à l'intérieur des cours pour contenir
les escaliers. La distribution intérieure des maisons était
fort simple et peu commode; pour toute décoration, il
n'y avait que des lambris divisés en compartiments, en-
richis de peintures ou de sculptures, ainsi qu'un carre»
lage de faïence colorée, et encore était-ce un ornement
d'une grande recherche. Au xvi« siècle, la RenaUssancê
introduisit dans les habitations des modifications de toute
espèce : la brique et la pierre fuient simultanément em»
ployées ; les arcs en anse de panier remplacèrent l'ogive t
les arabesques furent mêlées aux détaib gothiques dans
l'ornementation. Cependant on continua, surtout pen-
dant les guerres de religion, de donnv aux maisons ces
tourelles, ces murailles à meurtrières, ces saillies qui les
rendaient propres à la défense. Au goût italien succéda
le goût flamand : du temps de Henri IV et de Louis xm,
les constructions eurent pour caractères les toits aigus ,
les hautes cheminées et les briques rouges. Avec Louis XIV,
rarchitecture revint à Ul copie servile de l'antioue, à l'en-
tablement, à la nudité. Depuis cette époaue, runiformité
la plus monotone s'est peu à peu établie. Autrefois,
chaque habitation avait sa physionomie, et présentait un
pignon diversement orné ; pas une porte, pas un balcon,
pas un toit qui n'eût son style, qui ne portât sa date; la
{>ierre, la brique, le bois peint ou sculpté s'entremè-
aient de maisons en maisons, et offraient une continuelle
variété de tons et de nuances : aujourd'hui, dans les con-
structions qu'on appelle belles, pas une corniche, pas
une cheminée qui dépasse ses voisines; même taille,
même patron, même couleur pour toutes les façades. En
général, les maisons sont construites en maçonnerie de
moellons et de mortier de chaux depuis le fond des fon-
dations Jusqu'à la surface du sol , et en maçonnerie de
moellons et de plAtre depuis le sol Jusqu'au faite ; toute-
fois les angles et le parement de la devanture sont sou-
vent faits en pierre de taille. Les murs diminuent d'épais-
seur en s'élevant, en sorte qu'au dernier étage ils ne
sont guère plus épais que les cloisons int^eures qui sé-
parent les chambres les unes des autres. Ils sont enduits,
après coup , d'une couche de plâtre , qui permet de les
couvrir d'ornements. Les étages diminuent de hauteur
en montant {V, Bathients — Police des^.
En Angleterre , toute famille qui Jomt d'une fortune
même médiocre est seule dans son habitation, tandis
qu'en France plusieurs logements distincts sont presque
toujours ménagés dans une même maison. Dans une
maison anglaise, le rez-de-chaussée est élevé d'environ
t met. au-dessus de la rue, dont il est séparé par un fossé
ou une cour basse de 1 à 2 met. de lai^ur sur 2 met.
de profondeur ; sur son parapet est une grille en fer.
C'est par le moyen de ce fossé au'eet éclairée la cuisine,
qui est souterraine ; la cave lui est contiguê. Un palier
en pierre sert de pont pour traverser le fossé, et, au
moyen de quelques marches, pour arriver à la porte de
la maison. Dans le sol du trottoir qui borde la rue est
une petite grille ouvrante, par laquelle on Jette le charbon
de terre dans un caveau pratiqué au-dessous et qui a une
issue dans la cour basse. Chaque étage de la maison est
composé de deux ou trois pièces au plus. Au rez-de-
chaussée sont un parloir, un cabinet et l'escalier; au
1*' étage, la salle à manger et ses dépendances; au 2%
les chambres à coucher; au 3", les logements des do-
mestiques. Les appartements sont généralement peints
à l'huile. B.
MAISON cABRi&B, uom vulgalro i nuùs impropre, d'un
temple romain de hi ville de Ntmes. On ne sait qui en
fut l'architecte; d'après les indications que laissent les
débris d'une inscription de la frise, il parait avoir été
dédié aux enfants d'Agrippa, petits-flls de rempereur
Auguste. Longtemps enseveli sous les ruines des édifices
voisins, ce temple reparut, mutilé et délabré, pour chan-
ger souvent de maîtres, subir de nouvelles mutilations,
et même des réparations ignobles. Mieux apprécié de nos
jours, il a repris sa forme et presque sa splendeur pr»-
MAI
1SM
MAX
Hlères I il ronfenne un musée de tableaux et d'aatlqaea.
Ceit un temple pseuda-péripUrê, parce qu'il a «ur les
cMés dea colonnes engagées ; prostyle, parce qu*il n'a de
portique que sur une face ; hKeastyUf parce qu'il a 6 co-
lonnes sur la façade. Son ordonnance est corinthienne.
n y a il colonnes sur les c6tés, en y comprenant celles
des. coins. Le plan de l'édifloe est un parallélogramme
rectangle de 25™,13 sur 12%97. La construction pose
sur un stylobate haut de 3*,30. On monte au péristyle
par un escalier de 15 marches. Les colonnes cannelées,
«nées de chapiteaux d'un traTail admirable, supportent
Fentablement. auquel on ne reproche que trop de ri-
ehesse; mais dans tout l'édifice un goût exquis accom-
pagne cette profusion d'ornements. Lm modilions offrent
une particularité qui ne se voit nulle part ailleurs : ils
sont sculptés dans le sens inverse de ceux qui décorent
tous les entablements antiques, c.-à-d. que leur partie la
plus saillante, au lieu de s'appuyer contre la corniche
pour former une console, est Toisine du larmier. Quand
on restaura la Jfatsoii carrée en 1823, on pratiqua des
fouilles qui permirent de Toir de longues murailles pa-
rallèles au monument, une suite de bases de colonnes,
des fûts renyersés et des débris de chapiteaux ; Il en ré-
sulte que le temple était entouré d'une enceinte sacrée :
il a éà démontré même que cette colonnade s'étendait
asses loin, de manière à drconacrire un forum. Barthé-
lémy appelait la Maison carrée le chef-d'œuvre de l'ar-
chitecture antique et le désespoir de l'architecture mo-
demei Golbert aurait voulu l'emporter pierre à pierre
pour embellir les Jardins de Versailles, et le cardinal Al-
beronl âsait qu'il la faudrait envelopper d'or. B.
MAISON JD'àMXÈT. F. AaaÉT.
VAISON DB COlUlBCnON, — DB D^TEUTION, — DB PORCB.
V. Faisons.
MAISON DB JEU. V, JbU.
MAISON BB L'BMpmBUR (Ifinistère de la). Ministère qui,
de i853 à la fin de i860, était réuni au Ministère d'Etat
(F. ce mot). H avait pour attributions les b&timents et la
dotation mobilière de la couronne, l'administration de
ses domaines et forêts, les pensions sur la liste civile, etc.
MAISON BB PRÊT. K. MONT-DB-PléTÊ.
MAISON BB SANT<, établissement privé, destiné à rece-
voir à demeure des malades, qui payent une pension,
plus ou moins Importante suivant le logement qu'ils
occupent, et la nature des soins qu'exige leur état. Une
maison de santé est sous la direction d'un médecin, dont
elle est souvent la propriété qu'il administre et gère à
ses risques et périls. Gotaines de ces maisons sont spé-
ciales pour le traitement des aliénés. V, AuiN^s.
MAISON n'oa on doréb de Néron. Elle était située à
Rome, dans la vallée entre les monts Palatin, Esquilin
et Gélius, el en partie sur ces deux dernières collines,
avec d'immenses Jardins. Le tout occupait une superficie
de i 8,000 met. carrés, ou 120 hectares, le cinquième
du Bois de Boulogne de Paris. On n'a sur cette demeure
que dea données un peu vagues. Devant la maison était
un vaste vestibule flanqué de portiques de mille pas
(i,48i met) à triple rang de colonnes, au milieu du-
quel on voyait une statue colossale de Néron, haute de
120 pieds (35",S5). A l'intérieur, tout resplendissait d'or,
depieireries, de nacre et d'ivoire. Les plafonds des salles
de festin étaient plaqués d'ivoire, et disposés mécani-
quement de manière a s'ouvrir pour laisser tomber une
pluie de fleura ou asperger les convlvea d'eaux de sen-
teur. La principale ne ces salles était ronde, et tournait
Îour et nuit pour imiter le mouvement diurne du monde.
1 y avait des bains d'eau de mer, et d'autres d'eau sul-
fureuse, amenée des environs de Tlbur. Cette maison,
pour l'ornement de laquelle on enleva de Grèce plus de
500 statues, était d'une telle somptuosité, qu'elle reçut de
Néron même le surnom de maison S or ou dorée. Les Jar-
dhu renfermaient des champs labourés, des prés, des vi-
gnobles, des bois peuplés de toutes sortes d'animaux, des
solitudes, des plaines, avec de magnifiques points de vue ;
dîms le fond de la vallée il y avait un lac si grand, qu'on
rappdalt une mer : en outre, il était entouré de bâti-
ments, comme une place publique de ville. Les architectes
de cette maison d'une somptuosité inouïe , furent Sé-
vérus et Geler. — Néron créa sa Maison dorée sur les
ruines d'une partie de Rome, à la suite de l'incendie qui
dévora les deux tiers de la ville, l'an 810 de Rome, 64 de
J.-C. n épuisa l'Empire pour cette création, qu'il laissa
Imparfaite. Vespasien et Titus la démembrèrent pour en
consacrer les diverses parties à des services publics : le
Temple de la Paix, les Thermes de Titus, sortirent de
eette transfonnatioa, et, sor l'emplacement du lac dit ki
mer, Vespasiea éleva le prodigieux amphithéâtre fi»
vien, aqjourd'hui le Golisée. G. D— y.
MAISONS QARNivs. Coux qul tiennent ces maisons sont
obligés, sous peine d'une amende de 0 à 10 fir., d'inscrire
sur un registre spécial l'entrée et la sortie de toute pe^
sonne qui a logé chez eux, ne fût-ce que pour une nuit^
et de présenter ce registre aux autorités de police (F. Ad»
bbroistb). Les personnel qui, sans être aunereistes, h6«
teliers, logeurs de profession, louent habituellement on
appartement garni, doivent en avoir fait \h déclaration à
la préfecture de Police pour Paris, à la mairie pour les
départements, et faire connaître an commissaire de po-
lice du quartier les noms, prénoms, ftge, qualité ou pro-
fession des personnes logé», dans les 24 neures de leur
arrivée, ainsi que leur sortie, le tout à peine d'une
amende de 6 à 10 fr., et, en cas de réddive, d*un empri-
sonnement de 1 à 5 Jours (ordonn. du 2U déc. 1734, du
8 nov. 1780, du 24 août 1700, et du 22 JuiUet 1701 ; Coâ*
pénal, art 475-478).
MAISONS IMPÉRIALES NAPOLéON. F. LEGION B'HOmiBDB,
dans notre Dictionnaire de Bioffraphie et d^ Histoire,
MAISTRANCE, mot par lequel on désigne, dans la Ma-
rine, le corps des m(àtres ae diflérentes spécialités at-
tachés à un port ou embarqués sur un navire de TÊtat.
La maistrance se compose des premiers maUres de ma-
nœîsvre, ou mattres d^ équipage^ de canonnage et de
timonerie^ des maîtres charpentiers, calfats et voUien,
et des seconds maitres ou contre^maitres de ces diffé-
rentes catégories. Il existait à Brest, à Rochefort et à Tou-
lon des Ecoles de maistrance, établies en 1819 pour
l'instruction d'un certain nombre d'ouvriers destinés i
la maistrance : depuis 1868, il y a 5 écdes prépara"
toires de maistrance, à Brest, Gherbourg, Lorient,
Rochefort, Toulon, et 2 écoles seoondairei de mais*
trance, à Brest et Toulon.
MAITRE, en termes de Marine, nom des sous-ofBciers
( V, ÉQDiPAGB — Maître d', Contre -BIaitrs, Qdarties-
MAma). On appelle Maitres entretenus des marins
chargés de surveiller les ouvriers des arsenaux et établis-
sements maritimes : un décret du iO mars 1856 les a
divisés en trois classes, dont le traitement est fixé à
2,000, i,800 et 1,500 fr. Le Maitre de port est un sous-
ofllder chargé, dans les ports de l'État, de faire exécuter
les ordres que lui donne pour les opérations maritimes
le capitaine du port, et qui dirige toua les appareils de
force qu'exigent ces opérations. Il y a aussi, dans les
ports de commerce, des maitres de port chargés de la po-
lice maritime : ils sont de quatre classes ; un décret da
15 Juillet 1854 a pourvu à leur organisation et défini leurs
fonctions.
MAiraS DB CHAPELLE. V, CHAPELLE Ot COMPOSrTSnU
MAITRE D'érOBES. V. RéPéTrTBUR.
MAITRE DE PENSION. V, INSTITUTION (Ghof d').
MArrRE DE POSTE. V, POSTB.
MAITRE DBS COMPTES. V, COMPTBS (GoUT de8)«
MArrRE DES REQUÊTES. V, État (Gouseil d').
MAITRE kS ARTS. V. ARTS.
MAITRISE, terme d'Arts et Métiers. F. notre Dictwnn
naire de Biographie et d'Histoire,
MAmusE, école dans laquelle les enfants do choenr
d'une édise reçoivent leur éducation musicale. Avant la
Révolunon, on comptait en France plus de 400 maîtrises,
réunissant quatre à cinq mille enfants , et d'où sortaient
presque tous les compositeurs, les organistes et les chan-
teurs. Il n'en existe plus aqjouird'hui qu'un petit nombre.
MAJESTÉ. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d Histoire,
MAJEUR (du latin fiN^or), qui a l'ftge de majorité
(K. ce mot),
MAJEUR, terme de musique. V, Intervalle, Mode*
MAJEURE, l'une des prémisses du syllogisme, ainsi
nommée parce qu'elle contient renonciation du rapport
du grand terme {major termin/us) avec le moyen terme
(F. Prémisses, Stllogisme, Terme). La Majeure s'énonce
ordinairement avant la Mineure; mais cela n'a lieu ni
toujours ni nécessairement, et ce serait on moyen peu
sûr de les distinguer que de se fier à leur ordrâ maté-
riel. R— B.
majeure, dans certains Jeux de cartes, ae dit de Is
tierce, de la quarte et de la quinte où se trouve Pas.
MAJOUQuE, nom que les Italiens du xv« siècle don-
nant aux vases de faïence, parce que les premiers qu'ils
virent provenaient de Majorque. On le conser*'e aux
iUences qu'ils fabriquèrent a cette époque. V, Cte «nous.
MAJOR. V, ce mot dans notre Dtctionnatr» de béogror
phiê et d'Histoire»
MAJ
«*ioi (Aid^adant-). 7. Adjodant.
■Aioft iGhirorgien-). V, Chirorgiois.
«AWR (Bonde, SaiEpant, Tambour). V. Rom,
Tahboob.
■Aïoa DB BBiOADB. 1 F. uotre Dictionnaire d$ Biogra^
HAJoa DB MABiNB. ) pMê et SHittotrâ,
VAioa DB PLACB, offidoT Supérieur chargé du détail et
delà sonreillaiioe du aenice d'une place de guerre. Il a
nédilemeot dans ses attributions les çtfdM, les rondes
tt nuit et de jour, la police de la garnison, la rédaction
des rapporta Jounialiers, les écritures de bureau. Son
nog est immédiatement après le commandant de place.
Quand il n'y a pas de mijor titulaire, c*est Ta^judant de
place le plus ancien qui en remplit les fonctions.
BAJoa câiéBAL. 1 Y, notre Dtctionnaire de Biographie
HâJORâT. ) et d'Histoire.
HAJORDOME (du latin maior domue « maître de la
maison > ), le premier de ceux de la maison, le chef des
cuisines et de Toffioe, le grand ordonnateur des festins.
Ce lut le titre, !• des maires du palais sous les rois Mé-
roYin^ens; S* du maître de l'hôtel ou grand maître de
la maison des princes; 3o du premier ministre dans cer-
taines petites cours.
MAJORITÉ, âge auquel on est supposé ayoir atteint la
maturité d'esprit et de Jugement dont on a besoin pour
diriger ses affaires soi-même. A Rome, où la puissance
palànelle était si forte, la majorité était fàxée a 25 ans;
dies les Germains, à 15 ans, âge auauel on pouvait porter
les armes. Dans l'ancienne France, il n'y eut pas de règle
fixe : lA où dominait le Droit romain, la minorité fut gé-
néralement ramenée à 25 ans; ailleurs, ce fut 14, 15 ou
20 ans. D'après le Code Napoléon (art. 488), la majorité
est fixée à 21 ans pour les deux sexes : il n'v a d'excep-
tion qu'en matière de mariage et d'adoption (K. ces
ntouy — Lamajorité politique est la même que hi ma-
jorité civile (K. Élbctbub). En matière d'élections, la ma-
jorité est la pluralité des votants : elle est absolue ou
reiaiioe, suivant qu'elle est formée de la moitié des voix
plus une, ou qu'elle dépend simplement de la supériorité
du nomlire de voix obtenues par un concurrent.
MÂJOBoi DBS souvBaADis. Los régeucos, en matière de
gouvernement, amenant souvent à leur suite des incon-
vénients graves, on s'est accordé, à peu près dans tous
les pays, à fixer l'âge de majorité des souverains beau-
eoap plus t6t que pour les citoyens. Cette mesure put se
justifier, non-seulement par une sorte de nécessité poli-
tique, nuis aussi par la situation tout exceptionnelle des
personnes en fitveur de qui fut proposé le privilège. En
eBet, rhéritier présomptif d'une couronne reçoit une
éducation toute particulière, et vit dans un milieu qui
bâte le développement de son intelligence; il acquiert
une aptitude précoce pour les afEsires, une sorte d'expé-
rience de bon sens et de jugement pour se choisir des
ewiseilleis habiles, dont il se fait, dans son for intérieur,
comme nne espèce de tutelle. Jusqu'au Jour où 11 peut
porter, sans trop de crainte ni de faiblesse, Ul responsa-
oilité qni pèse sur tout chef de nation. — En France, le
désir ^abrégBT les réglées fut peut-être d'abord porté
on pea loin : Philippe le Hardi ua, par une ordonnance
dn 3 octobre 1270, à 14 ans accomplis la majorité de son
héritier présomptif : on regarde cette ordonnance comme
le pranier texte connu sur la matière. Sous la l'* race,
il y eut des rois qui prirent leur majorité à 15 ans.
Charles V enchérit un peu sur Philippe le Hardi, en abais-
sant à 14 ans commencés la majorité de l'héritier de la
couronne (édit de Vincennes, du mois d'août i374).
Charles VI confirma cet édit par une ordonnance de 1302,
qui a régi la mati&re jusqu'à Ul Constitution de 1701, ^i
éleva à 18 ans accomplis l'&ge de majorité du souverain.
La roi était déclaré majeur dans un lit de Justice tenu à
est eifet. — Le 1" Empire français suivit cette règle
(sénatos-consulte organique du 28 floréal an xn, ou
48 mai 1804); — la Royauté de 1830 l'adopta aussi par
sa loi du 30 août 1842 sur la Régence ; — enfin le 2« Em-
pire Ta consacrée de nouveau dans le sénatus-consulte
dal7JuiUeti856.
Voia maintenant, en 1862, quel est l'tae de majorité
des souverains dans les principaux États de l'Europe, et
dus le grand empire du Brésil.
Angleterre, — D'après la loi, le roi est censé n'être
jamais mineur; néanmoins, pur mesura de simple pru-
dsoos, si c'est nn prince qui monte sur le trùne, le Par-
lement nomme nn régent ou un conseil de tuteurs Jusqu'à
ce qn^ ait atteint sa 18* année ; et si c'est une princesse,
jusqu'à ce qu'elle ait 16 ans. Néanmoins, le consente-
OMot du mineur ou de la mineure royale est nécessaire
1301
MAL
pour cela, et même ce conseil ne peut entraver la vis»
ipnté du souverain-enfant, car ce que ferait le souverain
sans lui ou sans 2e régent serait localement valable. Or-
dinairement, en cas de prévision de minorité, une loi en
règle d'avance les dispositions.
Dans les autres États, l'âge de 18 ans a prévald pres-
que partout, peutp^tre à l'exemple de la France, ou platût
par acte de prudence; on le trouve adopté dans les
royaumes ou empires ci-dessous : Autriche, — Bavière,
— Belgique, — Brésil, — Danemark, — Espagne, — >
Hanovre, — Italie, — Pays-Bas, — Portugal, — Prusse»
— Saxe,— Suède et Norvège, — et Wurtemberg.
Dans les États de VEglise, le souveiain étant électif,
il n'y a jamais de mineur. — En Russie, le souverain
est xn^eur à 16 ans; s'il est mineur de 16 ans, il v a un
conseil de régence. — En Turquie et en Êgupte, la suc-
cession au trône a lieu par ordîre de primo^niture parmi
les fils ou les frères du souverain ; le plus âgé succède. Si
le plus âgé, dans l'une des catégories, est enfant, le grand
viar gouverne, mais au nom seul du sultan. G. D— t.
MAJUSCULES (Lettres), du latin majusculus (un peu
plus grand); nom donné à certaines lettres plus grandes
que les autres et qui ont presque toutes une figure diffé-
rente de celles-ci : A, a; B, b, etc. Chez les Grecs et les
Romains, l'écriture parait d'abord avoir été toute en ma-
juscules : plus tard l'usage en est resté dans les inscrip-
tions, comme cela a lieu encore chez nous. Quant à leur
emploi dans l'écriture cursive concurremment airec les
minuscules, il a peut-être été inconnu dans l'antiquité.
Ce n'est guère qu'à l'époque de l'invention de l'impri-
merie que cet usage s'est établi ou du moins a été con-
sacré. Le premier mot d'un discours quelconque, de
toute phrase nouvelle qui commence âpres un point ou
un alinéa, doit être distingué des autres par une lettre
initiale nûduscule. Il en est de même d'un discoure di-
rect que Ton cite, quand même la phrase précédente
n'en serait séparée que par deux points ou une virgule.
Les noms propres de divinités, d'hommes, d'êtres abstraits
personnifiés, de lieux géographiques, les noms appella-
tifs des tribunaux, des compagnies, des corps, les ad-
jectifs servant de surnom caractéristique, prennent une
initiale majuscule. En adressant la parole à une per-
sonne ou à un être quelconque, le nom qui désigne cette
personne ou cet être, fût -il appellatif, doit commencer
Sir une grande lettre : 0 Ciell à Terre! Monseigneur,
esdames. Majesté, Altesse, Les adjectifs qui précèdent
les noms de dignitâs éminentes prennent la majuscule :
« J'ai vu Son Altesse. » Le prinape étant que tout nom
propre s'écrit par une majuscule, tous les substantifs,
quelle que soit leur nature, qui ont, dans une phrase, la
valeur d'un nom propre, doivent s'écrire par une minus-
cule. Depuis l'invention de l'imprimerie il fut d'usage de
donner une majuscule au nominatif de chaque phrase,
et quelquefois même à chaque substantif; cet usage du-
rait encore au xvn* et au xvm* siècle. Par un reste très-
mitigé de cet usage, quand un mot a plusieun sens plus
ou moins différents, on emploie quelouefois la minuscule
pourindiouer le sens le plus considérable; ainsi, « la
Noblesse d'Angleterre, » c.-à-d. le corps des nobles, tan-
dis qu'on écrit : a La vertu est la vraie noblesse. » On
écrit ! « Il se rendit au sénat, » c-èrd. à la salle où se
réunissent les sénateurs; mais « Il fut blâmé par le Sé-
nat, » c-àrd. par le corps des sénateure. Dans la poésie,
il est reçu, pour mieux assurer la distinction des vers, de
mettre une initiale minuscule à chaque vere. P.
MAKAMAT, mot arabe qui veut dire séances, et dé-
signe, par extension, des réunions littéraires où les
auditeun entendent des récits improvisés. Il a été ap-
pliqué par Hamadàni à un recueil de 400 récits en forme
de Nouvdles. Hariri l'a pris aussi pour ses contes.
BfAL. L'idée du mal est essentiellement négstive.
Toutes les créatures étant appelées à aller à leur fin, le
mal, pour elles, consiste à ne pas y aller ; il résulte donc
d'un désaccord entre leur nature et leur fin, c'est une
imperfection. Le mal réel devient physique en raison de
la sensibilité, moral en raison de la liberté, métaphy^
sique en raison de la nature de tout être contingent. Le
miU physique consiste dans les désordres qui se mani-
festent dans le monde matériel et chez les êtres orga-
nisai. Chez l'homme, ce n'est qu'une des formes du mal
sensible, c'est la douleur qui se localise dans les organes;
il est relatif, au point que ce oui est un mal pour les uns
est quelquefois un bien pour les autres. Le mal moral a
sa source dans la liberté humaine, celle-ci étant, entre
autres choses, le pouvoir de mal faire. Biais cette liberté
n'entraîne que hi possibilité du mal moral, et non ss
76
MAL
1202
MAL
fteUntimi néeesflcire; ôter cette poesiUIité, c'est Mer
«elle du bien moral, c'est changer la natare et la fin de
' rhcmme. Le mtU métapkygùiuê résulte de cette nature.
' IMeu seul existant par lui-même, et ayant seul la pléni-
tude de Tetra, est parfait; toute créature est néceuaire-
ment imparfaite, et par suite exposée «a mal et suaoep-
lible dV tomber. On s*est appuyé sur Texiatenoe du mal
|>our nier la Providence; mais la réflexion montre que le
mal physique d'une part, et le mal moral de l'autre, loin
d*etre en contradiction avec la sagesse, la bonté et la
• toute-puissance de Dieu, entrent comme éléments néces-
saires dans le plan de la création. C'est en partant de
cette vérité, et en se rappelant la nécessité du mal méta-
physique, cause des deux autres, qu'on peut expliquer
l'origine du mal. Gomme réponse à cette question d'ori-
gine, on vit naître, dès la plus haute antiauité, la doc-
trine des deux principes : les Égyptiens les adoraient
sous les noms d'Osiris et de TVphon, les Mèdes et les
Perses sous ceux d'Ormuzd et d^ArimÀhn ; au m* siècle
^ de notre ère, on la vit renaître dans le Manichéisme.
Chez les Grecs, les Stoïciens attribuaient le mal à la fota-
Uté, les Épicuriens au hasard, Platon aux Dieux subal-
ternes chvgés de régir le monde; les Gnostiques donnèrent
aussi leur explication (V, Gnosticisiie). Les Prédestina-
tiens attribuaient tout a la puissance arbitraire de Dieu.
C'était méconnaître sa bonté et sa justice, auxquelles il
faut s'en rapporter pour tout ce qui est au-dessus de
rintelligenoe humaine. K. Doulbcb, Duausvb, Opti-
misme. R.
BfALABAR (Idiome], terme générique par leauel cer-
tains linguistes désignent les mvers idiomes inoiena qui
ne se rattachent pas à la souche sanscrite, tels que le
tannoui, le télinga, le kamatique (7. DaATWiBNNBS —
Langues). Les missionnaires andens ne l'appliquent qu'au
tamoul, et plusieurs modernes qu'au fiuiiaydia. Le ma-
labar domine sur la côte de Malabar, à Tïavaneore, à
Gochin, à Cananor, à Calicut, à Mahé, etc. Il a huit cas,
trois genres, et, dans les substantifs, trois nombres. Les
adjectifs sont invariables. La conjugaison n*a que trois
temps ; des affixes suppléent à l'absence des modes autres
Sue l'indicatif. Du reste, la plupart des verbes sont défec-
fs. La prononciation du malabar est douce et harmo-
nieuse. Il s'éorit avec un alphabet particulier, dont quel-
ques caractères lui sont communs avec le tamoul : seloii
Adelung, il manque des valeurs correspondant à nos
lettres f, g, y, x et s. F. Qément Peani, Alphabetium
mrandonico-nudabfurictsm sive satMcradonicum, Rome ,
1772, in-8°; Clément de Jesu, Grammatica malabare,
Rome, 1774, in-8<^; R. Drummond, Malabar grammar,
Bombay, 1709.
MALADRERIE. V, Lfraiox, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
MALâGA (Cathédrale de), en Espagne. Cette église,
dont on attnbue la construction à Diego de Slloé ou à
Juan Bautista, appartient au style de la Renaissance :
commencée en 15S8, elle était déjà fort avancée en 1558,
puisqu'on y trouve en quelques endroits les armes de
Philippe II et de sa femme Marie d'Angleterre. Elle est
vaste et d'une masse imposante. La façade principale a
deux corps d'architecture, présentant chacun huit belles co-
lonnes de marbre : elle est flanquée de deux tours rondes,
dont une seule, celle du Nord, fort élégante, et haute de
52 met, est achevée. L'intérieur est à trois nefs, avec
transept : ces nefs sont dans le style de Bramante Jus-
qu'au sommet des colonnes ; mais, sur les voûtes, les
ornements, sans être de style purement ogival, ont quel-
que chose qui rappelle ce genre d*architecture. La lon-
gueur de l'édiflce est de 115 met., la largeur de 75 met.,
et la hauteur sous voûtes, de 40 met. On remarque : le
mattre-autel ; les deux orgues, pour leur construction,
leur ornementation et la puissance de leurs sons; un re-
table de style gothique, dans la chapelle de Santa Bar-
bara; un retable en pierre et en marbre dessiné par Juan
de Villanueva, dans celle de rincamation ; plusieurs bons
tableaux. La cathédrale de Malaga est pavée en marbres
de couleurs variées, formant des mosaïques. B.
MALAISE ( Langue). Parlée en plusieurs dialectes dans
les divers archipels de U Malaisie et dans la presqu'île
de Malacca , comprise même dans toutes les i^^ons de
'Océanie, cette langue se rattacherait, selon Bopp, au
sanscrit : mais cette opinion est fort sujette à contro-
verse. Tout ce ou'on peut admettre, c'est çuc l'antique
idiome br&hmaniaue a exercé une certaine influence sur
le malais, qoi lui doit, par exemple, la plupart de ses
expressions ayant rapport aux idées morales ou meta-
' physiques. Suivant Crawfurd {Histoire de VArcfUpel tn-
disfi), sur 100 mots nulais, 50 ^>partleDiieBt an fioads
génml océanien, 27 sont particulien à la Malaisie, 16
sont sanscrits, 5 sont arabes, et 2 sont empruntés soit au
télinga ou au persan, soit aux langues des Européeit
(Portugais, Anglais, Hollandais) qui ont fréquenté ces
parages. Adelung pensait que le malais appartint, dans
le principe, à la classe des langues monosyllabiques (les
mots les plus andens peuvent être, en effet, ramena à
la forme monosyllabique), mais au'ensnite il se modifia
par suite des rapports multipliés du peuple qui le parlait
avec les étrangers; selon lui, on devrait le placer, avec le
mongol et le mandchou, comme hmgue de transition, en
tète des langues polysyllabiques. — L'articulation douce
et facile des consonnes, qui sont séparées entre elles par
des vovelles nombreuses et sonores, et l'usage où sont
les Malais de placer, dans les mots de plusieurs syllabes,
l'accent sur la pénultième, donnent à leur langue de la
cadence et de rharmonie. Quant au vocabulaire, il est
riche, en ce sens qu'il oflre une gracde abondance de
mots pour l'expression des nuances dans les idées fami-
lières; mais il est pauvre en termes abstraits et géné-
raux, et on a dû les emprunter aux langues de l'Inde. Le
malais a une grande simplicité de formes grammaticalei
et une grande clarté de syntaxe. La forme des pronoms
personnels varie suivant le rang de la personne qui parte
ou de celle à qui l'on parle. L^ rapports des noms sont
exprimés par des particules prépositives. Le verbe n'a
pas de formes particulières pour les personnes, les nom-
bres, les temps ni les modes : les personnes et les nom-
bres sont indiqués par les pronoms, les temps et les
modes par des particules adverbiales. Une préfixe parti-
culière donne au verbe le sens passif. On distingue en
malais plusieurs styles r le bhoKtrdalam ou style de
cour, employé dans la rédaction des actea officiels et des
lettres des souverains, et caractérisé par une sorte de
recherche éléçinte et de purisme; le bhosa-dagang ,
stvle des relations familières et commerciales, où l'on
admet quelques mots étrangers; et le bhasa^an, langue
dos livres ou malais littéral. Le» Malids ont adopté Tal-
phabet arabe, tout impropre qu'est pour une langue riche
en voyelles un alphabet qui ne transcrit que les articu-
lations : n'ayant ni gutturales ni consonnes emphati-
ques, ils n'ont pris que 14 lettres aux Arabes, et ont
formé 6 caractères nouveaux par une modification parti-
culière des points <Uacritiques. Il est vraisemblable qu'an-
térieurement à l'introduction de l'Islamisme chez eux, ils
possédaient un alphabet particulier. F. Arthusius, CoU
loquia latino^nuilaica , Francfort, 1613, in-fol. ; Lorber,
Grammatica malaica, Weimar, 1688, in-8''; Wemdley,
Grammaire malaise, Amst., 1730, in-8^; James Howi-
son. Grammaire de la langue malaise, en tète de son
Dictionnaire, Londres. 1801, in-4»; W. Marsden, Gram-
maire de la langue malaise^ ibid., 1812, in-4<*; De Hollan-
der. Grammaire malaise, Breda, 1845, iii-8* ; WDdens,
Dictionnaire hollandais et malais, La Haye, 1623, in-4*;
Haex, Dictionnaire malais et latin, Rome. 1631, in-4';
Gueynier, Vocabulaire néerlandais et malais^ fiauria,
1677. ln-4*»; fiowrey. Dictionnaire anglcûs et moloû,
Londres, 1701, in-4*, avec une Grammaire et des Dialo'
aues; Levden, Vocabulaire comparé du birman, du nu»-
Jais et du siamois, Serampour, 1810, in-^<^; Marsden;
Dictionnaire malais et anglais, Londres, 1812, in-4*,
tionnaire français-malais, avec des Dialogues, Paris,
1826, in-16; Elont, ZHcXtomuurs hollandais €t malais,
suivi d'un Dictionnaire fran^is et malais, Harlem. 1826,
2 vol. in-4<* ; Leydekker, Dictionnaire malais^neerlan'
dais. Batavia, 7 vol. in-fol.; Marsden, Sur les traces de
la langue et de la littérature de VInde chez les Malais,
dans le t. IV des Recherches Asiatiques^ publiées à Cal-
cutta; Levden, Sur la langue et la liUéralure des na-
tions de V Indo-Chine, dans le t. X du même recueil;
F. Bopp, Sur les rapports des langues malaises-pclf
nésiennes avec les langues indo-européennes, en àllem.,
Berlin, 1841, in-4*; E. Jacquet, Mélanges malais, java-
nais et polynésiens , dans les t. VUI à XI de la 2* série
du Journal de la Société astatique de Paris: Dulaurier,
Mémoires, Lettres et Rapports relatifs au cours de Ion-
gués malaye et japonaise, Paris, 1843, in-8% et ChresUh
maXhie malaye, 1845, in-8*.
MALAISE (Littérature). Les Malais possèdent une litté»
rature riche et variée. Leurs vers sont rlmés. Parmi les
divera genres de poèmes, on remarque i\^ des romaot
formés d'une suite de sldsas ou stancea de 4 vers te^
MAL
1203
MAN
■bte par mue rime eommwae; 9» les pmUown$, eom-
posés de etanees à rimes croisées^ et servant aoi luttes
poèliqaee des Iminovlsatears; 3* quelques romans d*une
ffiBàe étendue, tels que ceux qui ont pour titres la
Ctmntme dms wultans par Bokarnr de DJohor, BidorSari,
Kmi-Tambouhan^ Smimbari, STÙRâma (K. une étude
ds M. Boson sur ee dernier ouTrage, dans le Journal
oHoNqiM de mal 1846 ). La littérature malaise comprend
des ouTrages hislorioues, entre autres le S^kê^tfant Ma-
layon, chronique rédigée au commencement du xvii* siècle
à Mslaera, et qui s*étend du i** siècle de notre ère jus-
qa'k rairiTée des Portugais en 1511 : VBirakat-Malaika,
où lont racontées les circonstances de rétablissement des
Malais dans la presqu*tle qui porte leur nom; la Crains
iês rois de JoMt, qui comprend une durée de 17 à \%
ilèdes; la Chnmiqw des rois de Pasay (dans nie Su-
matra), publiée en France par M. Dulaurier. Les Malais
ont des recueils de lois, pour lesquels ils ont puisé dans
ks travaux des Hindous et des Arabes. Ils connaissent
par des traductions presque tous les bons ouvrages qui
existent dans les autres littératures de TOrient. Une
riche collection de manuscrits malais, formée par Tho-
mas Raffles, est devenue la propriété de la Société asia-
tique de Londres : le catalogue raisonné en a été publié
pu- M. Dulaurier dans le t. X de la 3* série du Journal
de la Société asiatiqxie de Paris,
MALAYALA (Idiome), idiome parlé sur la côte de Ma-
labar depuis le cap Comorin Jusqu'à Dilli, et appelé aussi
grantham ou grandonicwn. Il appartient à la classe des
laimea dravidiennes {V. ce mot). On en a des Gram-
ma&ea par Spring (Madras, 1839) et par Peet (1841),
ainsi qo^ Dictionnaire par Bailey (ISiVI).
MIALCHUS, nom donné dans le principe aux confes-
aîonoanz qui n'avaient au*une stalle pour les pénitents.
On disait alors qulls n'avaient qu'une oreille, comme
Malchos blessé par S* Pierre.
MALÉDICTION. V.luptLÉamoft,
MALGACHE (Idiome). F. MAoécAssi.
MALINES (Cathédrale de). Cette é^ise métropoli-
taine, dédiée à S' Rombaud, est entl^ment d'un so-
thique très -pur, et doit être rangée au nombre des
monoments les plus remarquables du style ogival , non-
flealement en Belgique, mais dans tout le Nord de l'Eu-
rope. Construite sur l'emplacement d'une autre église
inceodiée en 1342, elle date de la seconde moitié du
uv« siècle. Les nefs, les transepts et les murs latâraux
du chœur appartiennent au style ogival secondaire; l'in-
térieur et le chevet du chœur, les chapelles au collatéral
gauche de hi grande nef, sont de style ogival tertiaire, et
dateat, par oonséouent, du xv* siècle; la voûte du chorar
ftit achevée en 1431 ; plusieurs chapelles ne remontent
pas an delà du xvi* siècle. Les fenêtres de la nef sont
rayonnantes , tandis que celles du choeur sont flam-
boyantes; il y en a même plusieurs an fond du chœur
qm, dans le réseau d'amortissement, présentent la forme
toute française de la fleur de lis. Ces difTérences de swle
B'teqpéefaent pas l'éslise d'avoir un aspect général d'unité.
Le portail principal n'a presque pas d'ornements. H est
■onnonté d'une toor carrée et massive, soutenue sur
chaque face par quatre contre-forts omÀ de clochetons'
en iqyplication, et dont la base forme l'oc^ve de la grande
porte d'entrée. Cette tour, commencée en 1452, était
arrivée en 1M3 à l'état où elle est anfourd'hui ; hante de
97 mtees , sa plate-forme devait servir de base à une
flèche découpée à Jour. Quatre cadrans de 16 met. de
Aamètre sont attachés à ses quatre faces, et elle con-
tient on carillon complet. A l'intérieur, la ci^édrale de
MaHnea a été badigeonnée : les vitraux ayant été brisés
en ISSOpar les protestants, on ne voit plus que des verres
Uaaca ans fenêtres latérales, et des verrières modernes
au cfattor. Des statues des Apôtres sont placées devant
les piliers de la nef. La chaire sculptée en bois repré^
sente la conversion dé S^ Paul. On remarque auesi les
belles et larges fenêtres placées au fond de chaque branche
du transept plusieurs groupes sculptés par Fayd'herbe,
divers monoments fhnérsires, et, entre autres tableaux,
m Cmct/Umsnt par Van Dyck. B.
MALLE (de l'allemand nudl)^ cofOre en bois ou en
eoir, propre à transporter les effets d'un voyageur. — On
a dnmé le même nom à la valise ou caisse diuis laquelle
les courriers de la poste portent les lettres, et, psr exten-
sion, on a appelé malle-poste la voiture même qui trans-
pOTte les dépêches. Depuis l'établissement des chemins
de fer, il n'y a plus guâre de malles-poste.
MALLÉOLUS, projectile de guerre des anciens Ro-
orâis. Cétait une tige de bois, terminée par une cage en
fil de fur, de la forme d'un fhseau et pleine de matlèrei'
inflammables, et qu'on lançait contre les travaux ou lea
navires de l'ennemi , où elle s'enfonçait par une tête de
flèche.
MALLUM. F. notre Dictionnaire de Biographie et
d*ffistoire,
MALTAIS (Idiome). On ne sait si les peuples qui oo>*
copèrent successivement llle de Malte, Phéniciens,
Grecs, Carthaginois, Romains, Vandales, Goths, Arsbes,*
y trouvèrent une population aborigène, perlant une
langue particulière. Le dialecte maltais actuel a une ori*
gine évidemment sémitique. Jusqu'au xix* siècle, on crut
que c'était du punique pur ; de nos jours, Gésénius et de
Slane ont démontré que le génie de ce dialecte, comme
sa grammaire et la plus grande partie de son vocabulaire,
est arabe. Le maltais présente les 28 sons de la langue
arabe, auxquels il ajoute les articulations tch, guetpde
litaiien. Psr rapport à la syntaxe, on remarque un mé*'
lange des règles de l'arabe ancien et de celles de i'an^
moderne : ce sont les mêmes principes de formation des
diminutifs, le même mode de déterminer le genre dans
les noms, la même déclinaison double pour le masculin
et le féminin, les mêmes pronoms possessifs affixes, la
même distinction des verbes en trilittères et quadrilitp*
tères. La plupart des particules, prépositions, adverbes
et conjonctions, sont littéralement arabes ou dérivées de
l'arabe. Les mots qui ne se rattachent point à des racine»
arsbes proviennent du grec, du latin ou de l'italien s
quelques-uns, que ces langues n'expliquent pas, appar-
tiennent pent^^tre à la langue primitive des habitants de
nie ou au phénicien. Les Maltais se servent de l'alphabet'
latin, en (usant subir quelques modifications à la valeor
et à la forme des caractères. Ils possèdent des chaasons
en forme de quatrains rimes, des moralités et des pRK
verbes, une version des Évanffiles et des Actes des Apô^
très, V, J.-H. Mai, Spedmen linguœpunicœ in hodiemâ
Melitensium suiperstite , Marbourg, 1718, in -8*»; Aglua
de Soldanis, Délia linguapunica^ presentamente iMttata
dai Maltesi, Rome, 1750, in-8*; Vassalli, Grommattca-
délia lingua Maltese^ Malte, 1827, in-8*, et Lessicon mal'
tese, 1796; Gésénius, Essai sur la langue maltaise^ en
allem., Leipzig, 1810, in-8*; Pazavecchia, Grammaire de
la langue maltaise, Malte, 1845, in-8<>; de SUme,
Note sur la langue maltaise, dans le Journal asiatique
de mai 1846.
MALTUA, genre de mortier des anciens Romains, qai
servait à enduire l'intérieur des aqueducs. Il était com-
posé de chaux vive, réduite en poudre, trempée dans du
vin, et broyée ensuite avec du saindoux et des figues.
Selon Festus, on employait encore de la poix et de la cire^
Les parties sur lesquelles on voulait étendre le maltha
étaient préidablement frottées d'huile.
MALTOTE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bûh
graphie et d^ Histoire,
MALVERSATION, mot qui, dans son acception géné-
rale, comprend toute faute grave et punisssble commise
par les fonctionnaires publics dans l'exerdoe de leur
charge ou par les officiers ministériels dans l'exercice de
leur emploi. Il s'applique spécialement aux déliu di
corruption^ ^exaction et de conctMSton (F. cas mots)*
Lee magistrats et autres fonctionnaires se rendent cou-
pables de malversation, lorsque, par intérêt, haine ou
vengeance, ils font quelque injustice ou mettent obstacle
à des choses Justes. Il y a malversation pour l'avocat qui
engage ses clients dans des procès injustes, trahit la
cause qui lui est confiée, révèle les secrets dont il est
dépositaire, etc. , cas auxquels il est passible de dom*'
mages-intérêts envers la partie lésée, et même de priva-
tion d'emploi. Il y a malversation de la part d'un huis-
der qui srrête quel((u*un sans une ordonnance du Juge
ou favorise une éntfion, qui s'empare des meubles d'un
saisi , qui commet des excès et violences en procédant
aux saisies et aux exécutions; de la part d*un geôlier qui
maltndte ses prisonniers ou les fait évader, qui aggrave
la peine dont ils ont été frappés, etc.
MANCANZA, monnaie d'or des pays napolitains, va-
lant 4 ducats (envht>n 16 fr. 25 c.)
MANCHE (en hitin montca, dérivé de marna, main),
partie du vêtement qui recouvre le bras. On a porté
pendant plusieurs siècles, des mancMsd Vange, qui traî-
naient presque Jusqu'à terre ou qui voltigeaient coname
des ailes. — Au {eu on appelle manehê chaque division
d'une partie qu'on fsit en deux fractions; celui qui gagne
les deux manches gagne la partie.
MancHB, mot emplové en France, an commencement
du xvm* siècle, dans l'Art militaire « comme «ynonyma
MAN
1201
MAN
de dwaUm. Ainri Ton disait qu*an corps rompait en 8
ou iO manches.
MaNCHB , partie des instruments de musique à cordes,
par laquelle on les saisit, et où l*on pose les doigts de la
main ganche sur les cordes pour former les différents
tons. Cest à rextrémitô du manche que se trouvent les
dieyiiles qui servent à accorder Tinstrument.
MAHCHB, en termes de Marine, tuyau de toile ou de
eolr servant de conduit à Teau ou à tout autre liquide.
n y a des tnanckes à ouverture trés-vaste qa*on tourne
dn côtô du vent; elles servent de ventilateurs à bord des
navires, pour aârer fortement Tintârieur du bà^ment.
MANCHETTES DES LIVRES. On nomme ainsi , en
lypc^prapkie, des notes, et plus souvent de brefo som-
maires imprimés à la marge d'un livre, en petits carac-
tères, et embrassant les matières traitées dans un ou
plusieurs paragraphes. Cette disposition, pour des notes,
rapproche immédiatement de Todl du lecteur ce qu*il
peut avoir besoin de lire en suivant sa lecture princi-
pale ; pour des sommaires, elle montre Tordre de la com-
position, aide à en suivre toutes les parties, et, quand
on veut (aire une recherche dans un certain nombre de
pages, la rend plus facile et plus prompte. Cette mé-
thode date au moins du iv* siècle, car elle fut pratiquée
par Optaden, dans son panégyrioue en vers de Constan-
tin, et, vers Ul fin du m^oie siècle, S^ Jérùme remploya
aussi dans la traduction d'une lettre de S' Épiphane.
Au xvn* et au xvm* siècle, la plupart des ouvrages sé-
rieux s'imprimaient avec des manchettes; mais depuis
le commencement du xix* siècle cette bonne coutume
est devenue une exception , soit pour donner aux livres
un meilleur aspect en laissant toutes leurs marges in-
tactes, soit parce que cela épargne un peu de soin et de
travail de la part de Touvrier, et procure une petite éco-
nomie. Néanmoins Tusage des manchettes n'est pas
abandonné, et ne le sera sans doute Jamais entière-
ment. C. D— T.
MANCHON , fourrure qu'on porte en hiver pour se
garantir les mains des atteintes du fh>id. Au xvi* siècle,
les manchons s'appelèrent des conUnancês^ puis des
konnes grâces. Ce n'est plus aujourd'hui qu'un article
de la toilette des femmes; mais, au xvm* siècle, les
hommes, et, au commencement du xix*, quelques vieil-
Utfds portèrent aussi des manchons.
MANCIPATION. ( F. ce mot dans notre Dictionnaire
MANDARIN. S de Biographie «t â: Histoire.
MANDAT (du latin mandaJbwnt confié), acte par le-
quel une personne, dite mandant ^ donne à une autre ,
i4>pelée mandataire^ pouvoir ou procuration de faire
quelque chose en son nom. Le fondé de pouvoir prend
aussi le nom de mandataire, quelquefois celui de pro-
cureur fondé, ou simplement procureur. Le mandat est
spécial, c-à-d. donné pour une afilaire ou pour certaines
affaires déterminées , ou général , c-à-d. pour tontes les
affaires du mandant. Le mandat cdoiçu en termes géné-
raux n'embrasse que les actes d'administration ; s'il s'agit
d'aliéner, d'hypothéquer, de faire acte de propriété , de
■aisir immobilièrement, d'incarcérer pour dettes, de don-
ner mainlevée d'une inscription, il doit être spécial. Le
mandat se donne, soit par acte public, soit par écrit sous
seing privé , soit verbalement ; mais , dans ce dernier
cas, la preuve testimoniale n'est reçue que lorsqu'il y a
commencement de preuve par écrit, ou que lorsque la
valeur de l'objet pour lequel il a été donné est infé-
rieure à 150 tr. Le mandat est gratuit, s'il n'y a pas con-
vention contraire. Le contrat est formé du moment qu'il
y a acceptation de la part du mandataire, et l'exécution
du mandat est considérée comme une acceptation tacite,
quand il n'y en a pas eu d'autre. Le mandat finit par sa
révocation, par la renonciation dn mandataire au mandat,
nar la mort naturelle ou dvlle, linterdiction, la décon-
fiture du mandant ou dn mandataire. Le mandant est
tenu de remplir les engagements contractés en son nom
par le mandataire conformément aux pouvoirs gu'il lui a
donnés, de lui rembourser les avances et frais faits pour
l'exécution du mandat, ainsi que ses salaires, lors même
que l'affkire n'aurait pas réussi ; il doit l'indemniser des
pertes qu'il a éprouvées, sans qu'une imprudence lui soit
imputable, à l'occasion de sa gestion. S'il y a eu révoca-
tion dn mandat et qu'elle n'ât été notifiée qu'au man-
dataire, le mandant ne peut l'opposer aux tiers qui
auraient traité dans l'ignorance de cette révocation, et il
ne lui reste alors que son recours contre le mandataire
pour les affaires commencées avant la révocation. Le
mandataire est responsable de l'inexécution du mandat,
te dommages-intérêts qui peuvent en résulter, du dol
et des fautes qu'il commet dana sa gestion, et de la pei^
sonne qu'il se serait substituée dans l'exécution du man-
dat, si le mandat lui confère le droit de substituer, n
doit, en cas de mort du mandant, achever la chose com-
mencée, s'il y a péril en la demeure. Il ne peut rien
faire au delà de ce qui est porté dans le mandat : mais
il n'aurait aucune responsabilité envers la partie avec
laquelle il aurait indûment contracté, s'il lui avait donné
connaissance du mandat. S'il renonce au mandat ssns y
être obligé par un pr^udice considérable gue lai cause-
rait la continuation de son office, il doit indemniser le
mandant du préjudice qu'il lui cause par cette renonda»
tion. Les engagements qu'il aurait pns avec des tiers de
bonne foi , dans l'ignorance de la revocation du mandat
ou de la mort du mandant, sont valables et doivent
être remplis. En cas de mort du mandataire, ses héri-
tiers sont tenus d'en avertir le mandant, et de pourvoir,
en attendant, à ce oue les intérêts de celui-ci exigent
Les femmes et les mineurs émancipés peuvent être pris
pour mandataires. Un titre tout entier du Code JVapo-
îéon ( art. 1984-2010) est consacré au mandat : il a été
commenté par M. Troplong, 1841, 2 vol. in-8^
MANDAT, ligne de conduite, obligations que deséleo
teurs imposent à leurs députés. Autrefois, les cahien
des bailliages étaient de véritables mandats pour les dé-
putés aux États Généraux. Depuis 1789, on n'a Jamais
admis en France les mandats de ce genre, dits mandats
impératifs*
MANDAT, acte émané d'un magistrat ayant pouvoir de
le décerner, et dont signification est faite par huissier ou
Sir un agent de la force publique. On distingue : 1*^ a
andat de comparution, assignation donnée, au nom du
magistrat instructeur, à la personne inculpée, lorsque
celle-ci est domiciliée, et que le fait est de nature à ne
donner lieu qu'à une peine correctionnelle; ^ le Mandat
d^amener, décerné, soit contre l'inculpé qui ne peut être
l'objet que d'une poursuite correctionnelle, et qui n'a
point obéi au mandat de comparution, soit contre tout
inculpé d'un délit emportant peine afflictive et Infamante,
soit contre des témoins qm refusent de comparaître;
on doit les interroger dans les 24 heures; 3<* le Mandat
de dépôt, en vertu duquel l'inculpé mis en état de pré-
vention est envoyé proviaoiremènt dans une maison d'ar-
rêt, et dont mainlevée peut enauite être donnée par le
inge d'instruction, sur l'avis conforme du ministère pu-
blic; 4» le Mandat S arrêt, en vertu duquel le prévenu
d'un fait emportant emprisonnement correctionnel, ou
peine afflicdve ou infamante, est mis en état d'arrestar
tion, après avoir été entendu, ainsi que le procureur
impérial. Ces divers mandats sont exécutoires dans tout
l'Empire : ils doivent être signés de celui qui les décerne,
et munis de son sceau. Le mandat d'arrêt doit, de plus,
contenir renonciation du fait pour lequel il eet décerné,
et la dtation de la loi qui déclare que ce fait est un délit
ou un crime. Tout mandat doit être exhibé au prévenu,
et copie lui en être donnée. L'inobservation de ces for-
malités entraîne une amende de 50 fir. contre le greffier.
MANDAT, rescrit apostolique accordé autrefois par les
souverains pontifes, et en vertu duquel lea collateuis
étaient tenus de conférer à la personne qui en était pour-
vue le premier bénéfice vacant.
MANDAT, autorisation ou ordre donné de payer à un
personnes,
un débiteur, et un intermédiaire qui touche sur l'ordre
donné par le créancier la somme due par le débiteur; il
faut de plus que le créancier et le débiteur ne demeoreot
pas dans la même ville. Ces conditions distinga«it nette-
ment le mandat des billets. Voici le modèle d'un mandat:
Paris, le 1» mais ISSS. B. P. F. 1000.
A présentation ie vous prie de payer par le présent
mandat, à l'ordre de M. Paul , la somme de mtlu psanc^
valeur en compte, sans antre avis (ou suivant avis).
k M. Jacques, PisanB.
négociant à Besançon.
Le mandat est un véritable contrat de change, d'un
usage Journalier dans le commerce. Il est transmissible
par endossement, comme l'indique la formule : A l'ordre
de... II diffère cependant de la lettre de change en ce
qu'il n'est pas accepté par le débiteur, et que quelquefois
même on y Joint la formule : Non soumis àVacc^tation.
Cest donc un papier qu'un négociant peut émettre très-
librement dans certains cas où la lettre de change M
MAN
1205
MAiN
es; il ▼ a, pour nommer le choYal, autant de
substantifs qu*il peut prendre d'allures, etc. La nomen-
datore des a^jectifo et des adverbes est d'autant plus
restreinte que celle des substantifs et des verbes est plus
étendue. La seconde catégorie de mots comprend ceux
qui ont été empruntés au mongol^ depuis deux siècles au
pins; ils se rapportent pour la plupart à des objets
d'une importance secondaire. La troisième se compose de
mois tirés du chinois, et se rapportant surtout à des ob-
fels adentiflqnes. Quelques termes sont venus de llnde,
et «xpfiment des objets relatifs au culte de Bouddha. Les
mots étrangers an mandchou forment à peu près la cin-
quième partie du vocabulaire de cette langue. L'empereur
KSoo-Long, Toulant le ramener à sa pureté primitive, fit
eoiDposer, pour remplacer les mots d'origine étrangère,
des mots nouveaux formés de racines mandchoues : on
en créa ainsi 5,000, dont les employés du gouvernement
furent tenos de se servir. — Bien que la dynastie qui
rfigne aujourd'hui sur la Chine soit venue de la Mand-
ebourie, le mandchou n'est nulle part, pas même en
MsndcfaiNirie, la langue dominante; il subsiste seulement
àoMé do chinois dans toutes les parties du Géleste-Em-
plie, n ne connaît ni l'artide défini, ni les genres gram-
maticani; mais il a des signes pour distinguer les nom-
bras, et désigne les cas à T'aide de particules affixes ou
iioiées. Dans lea Terbes, l'impératif est le thème ou ra-
éai à l'état pur x des affixes syllabiques, placés à la
■île de ce tfa&flMf servent à marquer les temps, les
iv^ pas de mise. Un négodant de Paris, par exemple, I
eoToie sa marchandise à Marseille : il a besoin d'argent, •
et ne peut attendre Jusqu'au Jour où l'acheteur de Mar-
leille aura reçu cette marchandise et lui aura écrit qu'il
en accepte livraison : dans ce cas, il tire sur lui un man-
dat Le mandat est par là même d'un usage très-fréquent;
mais une loi de 1834, en rendant le timbre presque né-
cettsire pour les mandats, qui, par suite, sont suscep-
tibles d'acceptation (une traite sur papier libre ne peut
être acceptée), les a presque confondus avec la lettre de
chtoge. L.
VANOATS TBaanoausx, nom donné à un papier-mon-
naie créé sous le Directoire, en vertu de la loi du 28 ven-
tôse an iT (18 mars 1796). On en émit pour 2 milliards
400 millions. Ces mandats, ^ui avaient cours forcé, et
qui devaient être reçus au prix des valeurs métalliques,
étaient destinés, non -seulement au payement des dé-
penses publiques, mais au remboursement des assignats
sur le pied de 30 capitaux pour un. Le jour de leur pre-
mière émission, ils ne furent cotés qu'à 18 fr. pour 100 fr.
Dne loi dédda alors qu'on ne les recevrait qu'au cours
du jour de la part de ceux qui achèteraient des domaines
nationaux, et seulement pour un quart du prix d'acqui-
attdoD. La déprédation fut si rapide, qu'au mois de sep-
tembre le cours des mandats était tombé à 5 fr. pour
100 fr.y et on n'avait échangé que pour 350 millions
d'assignats. Une loi du 16 pluviôse (4 février 1797) dé-
cida que les mandats cesseraient d'avoir cours forcé, et
ne seraient plus admis qu'en payement des contributions
arriérées, et seulement Jusqu'au 1*' germinal suivant.
UANDCHOUE (Langue). L'origine et la composition de
cette langue ont donne lieu à bien des opinions diverses.
De Siebold, dans son Mémoire sur l'origine des Japonais^
trouTo une assez grande analogie entre le Japonais et le
ODandcboo; un écrivain mongol, Abougasi, ne voit dans le
mandchoa qu'un mélange de mongol et de chinois; les
missionnaires, au contraire, en font une lançie mère,
■ans rapports avec aucune autre ; quelques linguistesenfln
y trouyent des analogies avec le grec, le latin, le hon-
grois, l'allemand, etc., lesquelles sont rien moins que prou-
Téea, quand on a fait la part naturelle des cas fortuits et
celle des cas douteux. Ce qui parait hors de contestation,
e*e8t que le mandchou, qui est aujourd'hui une langue
polys^labique, a été originairement, comme le malais
\\\ C9 mot)^ une langue monosyllabique : en effet, les
moca d'une seule syllsbe, qu'il contient encore en grand
nombre, ont chacun plusieurs acceptions différentes, et
appartiennent à la fois à plusieurs parties du discours,
comme cela a Ueu dans les langues qui ont conservé le
raonoayllabisme. D'après Abel Rémusat, il y a trois caté-
gories éQrmolo^ues de mots dans le mancfchou. La pre-
mière comprend les mots qui lui sont communs avec les
autres idiomes toungouses : ils constituent le fond de la
langue. On y trouve beaucoup d'onomatopées, peu de
termes génériques, mids des termes spécifiques expri-
mant une foule de nuances d'idées \ les animaux, par
«lemple, sont désignés par des noms différents, selon leur
eooleor, leur taille, leur âge, leurs qualités bonnes ou
modes et les voix. F; y a des voix active, passive, né^
tive, réciproque, inchoative, fréquentative, etc. Au heu *.'
de prépositions, le mandchou a des postpositions. L'ordre ?.
inverse domine dans la construction : le sujet de la pro- *.
position s'exprime en premier lieu, l'adjectif précède le ^
substantif, le complément direct ne vient qu'après le
complément indirect, et le verbe termine la phrase. Cet ^
ordrêest rigoureusementsuivi. Laprononciation du mand- «
chou est, en général, douce et harmonieuse. Jusqu'au
xvii* siècle de notre ère, les llandchoux ne possédèrent
pas d'écriture, et, par conséquent, pas de livres : un sa-
vant de leur nation, Takhaf, composa, par ordre de l'em-
pereur Tal-Tsoung, une écriture imitée de celle des Mon-
gols, et dont les groupes syllabigues, fort nombreux, ae
réduisent à 24 caractères primitifs, dont 6 voyelles et
18 consonnes. Ceci avec cette écriture çue Ton a traduit
en mandchou la p .upart des livres chinois. F. le P. Amyot,
Gra/mmcure tartare-mandchoue (dans le t. XIII des mé'
moires concernant l'histoire, les sciences et les arts des
Chinois)^ qui n'est qu'une traduction des Elemmta Iti»-
gtUB tartaricœ du P. Gerbillon; le même, Dtctioitnatrs
tartare^mandchoti-français^ publié par Langlès, Paris,
1789, 3 vol. in-8»; Langlès, Alphabet mandchou. 1787,
in-8*^; Larionowitch Leontiew, Lettre sur la littérature
mandchoue^ traduite du russe, Paris, 1815, in-8<*; Kla-
proth, Chrestomathie mandchoue, Paris, 1828, in-8^;
A. Rémusat, Recherches sur les langues tartares^ Paris,
1820, in-4^^ Schott, Essai sur les langues tariares, en
allem., Berlin, 1836, in-4<^; Conon de La Gabelentz, Elé-
ments de la grammaire mandchoue, Altenbourg, 1832,
in-8*; Kaulen, Unguœ mandshuricœ institutioneSy Ra-
tisbonne, 1855, in-8<».
BIANDÉ, nom donné, dès les temps carlovingiens, à
une cérémonie qui consistait à laver, tous les Jours de
carême, les pieds des pauvres.
MANDÉEN , variété d'écriture svriaque, particulière à
la secte des Sabéens. Elle a cela de particulier, qu'on y
fait entrer les voyelles dans le corps de l'écriture, et que
les lettres y sont Jointes les unes aux autres par une
barre qui les traverse. L'alphabet mandéen fût porté au
xn* siècle par quelques prêtres nestoriens chez les Turcs
Olgonrs, et, au siècle suivant, les Mongols en formèrent
un sur le même modèle.
BiANDEMENT (du verbe mander)^ formule exécutoire
qui termine les lois, les actes authentiques, les Juge-
ments, et qui contient ordre aux différents fonctionnsires
d'en procurer l'exécution,
MAïf DEK BNT, écrit sdressé par un évêque à ses diocé-
sains, et qui se termine par quelque prescription ou oi^
donnance, relative, par exemple, à des jeûnes, à des
prières, à des Jubilés, aux mesures de discipline. Les
évêaues écrivent des Mandements en prenant possession
de leur siège, et tous les ans au commencement du Ca-
rême; on les lit au Prône. Bossuet et Fénelon nous en ont
laissé d'admirables.
MANDILLE, manteau de laquais au xvii" siècle. Il
était composé de trois pièces, dont l'une pendait sur le
dos, et les deux autres sur les épaules.
MitJVDINGUE (Idiome), idiome parlé en plusieurs dia-
lectes dans là Nigritie, et qui domine de la Gambie an
Niger. II est rempli de sons gutturaux.
MANDOLINE, instrument de musique, qui n'est suère
répandu qu'en Espagne et en Italie. Il est composé d'une
caisse sonore ovoïde ou en forme de moitié de poire,
comme celle du luth {V. ce tnot), et d'un manche asses
semblable à celui de la guitare, et sur lequel sont tendues
4 cordes de laiton disposées et accordées comme celles du
violon. En Italie, il y a des mandolines à 3 cordes,
d'autres à 5, dont l'accord varie selon le caprice des
maîtres. La mandoline se tient de la main gauche, et on
en tire des sons en attaquant les cordes avec un petit
morceau de plume, d'écaillé, ou d'écorce de cerisier,
taillé en cure-dent plat, qu'on tient avec l'extrémité du
pouce et de l'index. Le son, frêle et nasillard, ne manque
ni de piquant, ni d'originalité. Mozart, dans le second
acte de son Don Juan, a fait un heureux usage de la
mandoline. Denys a composé une Méthode pour cet In-
strument. B.
MANDORE, instrument de musique de l'espèce du
luth, depuis longtemps abandonné. Long de 50 centime!,
environ, il était monté de 4 cordes, accordées de quinte en
quarte, c-à-d. que la 4« était à la quinte de la 3*, la 3* à
la quarte de la 2", et la 2* à la quinte de la chanterelle.
On abaissait quelquefois la chanterelle d'un ton, ailn
qu'elle fit la quarte avec la 3* corde : c'est ce qu'on appe-
lait accorder à corde analée. Souvent auad on abaMsall
MAN
120$
MAN
Ift dumtarelle et la 3* corde d*uiM tierce nu^^^'O ponr
bdre raccord eo tierce. La chanterelle de la roandore à
4 cordes «errait à Jouer le sujet; on la pinçait avec rin-
dex, au bout duquel était fixé un petit morceau de
plume; les trois autres cordes formaient une octave rem-
i^lie de sa quinte, et le pouce lea frappait Tune après
'autre. Le nombre des cordes ftit quelquefois élevé tus-
qa*à 16; les mandores oui avaient plus de 4 cordes s^i^
pelaient mamàorn luthiss, B.
MANDUGUS. V, ce mot dans notre Dictionnain ds
Biographie et d^ Histoire,
IfiANÉCANTERIE ou MANICANTBRIE (du latin mansio
cantorum?)^ nom donné autrefois, dans certains dio-
cèses, à Técole où l'on instruisait les enfants de choBur.
C'est ce qu'on nomme plus communément maitrise{V, ce
moty,
fllANÉGE (du latin manu agere, conduire à la main),
art de dompter, de discipliner, d'instruire les chevaux, et
d'exercer les cavaliers k les conduire. V, Éqoitatioii.
MANtes, espace circulaire ou rectangulaire, entouré
d'une clôture et souvent couvert, destiné aux leçons
d'équitatlon ou au dressage des chevaux. Les manèges
dviis ont en moyenne 40 met. de long sur 13 met. de
laiige; mais on en fait de beaucoup plus grands pour la
cai^erie. Le terrain doit être soigneusement nivelé, et
recouvert d'une couche de sable mêlé de tan ou de sciure
de bois, repiqué dès qu'il tend à se durcir, et arrosé sou-
vent, sans le rendre trop humide. Les manèges complets
doivent contenir des ferles ou tribunes pour les per-
sonnes qui veulent assister aux leçons, des écuries pour
les chevaux, ainsi que diverses pièces accessoires, telles
que vestiaire, sellerie, logement du gardien, salle du di-
recteur, etc. Les cirques servent souvent de manège pour
les leçons d'équitatlon dans les villes de second ordre.
MANGONNEâU. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
MANICANTERIE. V. Manécartbrib.
MANIGHORDION. V. GuvicoaDB.
HANICLB, vieux mot qui signifiait bracelet,
MANIÈRE, se dit, en Peinture, de la méthode suivie
par un artiste ou par une école dans l'exécution de leurs
compositions. Le même mot s'emploie, en Littérature
comme dans les Beaux-Arts, dans le sens d'o/Tsctation,
de recherche exagérée,
MANitsE Roms (Gravure à la). V, Gravurb.
MANIFESTE, sorte de proclamation adressée par une
milssance, non -seulement à une autre puissance avec
laquelle elle est en contestation, mais au monde entier, que
l'on prend en quelque sorte pour juoe. Les manifestes
contiennent d'ordinaire des aéclarations de principes,
l'exposé des griefs dont on se plaint, le but ou'on se pro-
pœe en prenant les armes, et quelquefois auasl les
moyens qu'on veut employer. Le nom de manifeete
vient de ce oue les pièces de ce genre commençaient
)adls par les deux mots latins manifestwn est (il est ma-
nifeste). Un des plus fameux manifestes de l'histoire con-
temporaine est celui que lança le duc de Brunswick,
commandant des armén prussienne et autrichienne coa-
lisées qui allaient envahir la France. Cette déclaration,
datée de Coblentz, le fô juillet 1792, fut l'ouvrage des
émigrés fhmçals. Elle était, d'un bout à l'autre, une me-
nace contre la France révolutionnaire, une injonction à
tout le monde .de revenir à rancienne fidélité au roi,
mie défense aux villes et aux habitants de résister à rav-
inée coalisée, sous peine de toutes les rigueurs do la
Snerre. Ce manifeste, dont on attendait beaucoup, n'eut
'autre effet que de rendre la Révolution plus terrible, et
d'augmenter les dangers de Louis XVI et de sa famille.
MANILLE, Jeu de cartes. On y Joue de S à 5 personnes
avec un Jeu complet, dont les cartes sont distribuées 3
par 3, ou 4 par 4, Jusqu'à la fin. Le premier en cartes
Joue de manière à se débarrasser du plus grand nombre
possible de cartea qui se suivent; quand II y a Interrup-
tion, le Joueur qui peut continuer fait de même, Jusqu'à
ee qu'il sit à son tour une lacune dans son Jeu, et ainsi
4e suite. Quand personne ne peut continaer après celui
qui s'interromnt, tous payent à celui-ci un jeton. Un
Joueur qui arnve à une lacune peut la combler avec le
■touf de carreau, dit numUle, s'il le poesède, et alors 11
reçoit un Je^on de tout lé monde; on peut donner à cette
carte telle valeur qu'on Joce à propos. Tout Joueur qui
place un roi reçoit un Jeton des autres Joueurs. Celui qui
•'est défait le plus tôt de toutes ses cartes gagne les en-
Jenz, et les autres Joueurs lui payent autant de Jetons
qu'il leur reste de cartes dans la main. Si la manille est
m aoiiibra de ces eartas, le Joueur qui ne l'a pas placée
donne un Jeton à chacun i on paye également un Jalon
pour chaque roi.
MANIPULE, en latin mapfwki, sudarium, omemeat
ecclésiastique en Ibrme de petite étole, kuige de 10 oen-
timètres environ, et oui se porte sur l'avant-bras gauche.
On le nomme aussi fanon. Ce n'était dans le priocipe
qu'un mouchoir qu'on tenait à la main ou aur le bras
pendant les offices, parce que l'aube n'avait pas d'autra
ouverture que celle d'en haut pour paaaer la tète : cette
pièce d'étone fut d'abord ornée d'une frange et de brode-
ries; en s'écartant de son but primitif, elle devint de plus
en plus riche, et finit par être exclusivement un orne-
ment. Le clergé romain voulut s'en réserver le privilège,
comme le prouve une lettre de S' Grégoire à Jean, arche-
vêque de Ravenne; mais l'usage du manipule devint
général. Il se p<»ta longtemps à la main, aussi bien que
sur le bras. Les Grecs et lee Biaronites en mettent deux,
un à chaque bras. Le prêtre officiant prend le msnipule
après l'étole, et en disant une prière spéciale. Ad tnani^
pulum. Le diacre et le aona-diacre ont aussi un manipule.
MAifiPCLB, terme d'antiquité militaire. V, notre Dto-
tionnaire de Biographie et â^ Histoire,
MANKS (Dialecte), dialecte gaélique, parlé dans nie
de Man. Il en existe une GraitMnaire par Kelly, Londres,
1803, et un Dictûmnavre par Cregeen, Douglas, 1835.
BIANNAJA (Supplice de la). V, Gdillotinb.
MANNEQUIN (de l'allemand mOnnchen^ petit homme,
ou de ranghûs mankind, en forme d'homme), figure
ayant la fonne du corps humain, dont tous les membres,
à jointures brisées, imitent le Jeu des articulations, et
sur laquelle les peintres et les sculpteurs disposent des
draperies après lui avoir donné l'attitude qu'ils veulent
représenter. Le premier qui en fit usage fut, dit-on,
Bacdo délia Porta.
MANOBUVRE (de main et awvra), tout homme qui tra-
vaille de aea mains, et, dans un sens plus restreint, ap-
prend qui aert les maçons et les couvreurs.
MAROEiivaE, terme d'Art militaire» qui a'applique saw
mouvements tactiquea dea troupea, ainsi qiraux mou-
vements stratégiques des armées. On diatingue les mor
nantoree de détau (école de peloton t école de bataillon
ou d'eecadron), les mancnwres d^ ensemble ou dt {tQtie
(une brigade ou une division), et les mananmres d^ar*
mée ou grandes manasyiores. Les manœuvres de détail
doivent être uniformes et invariables, afin de conserver
dans la totalité de l'armée l'unité d'action ; elles con-
stituent la paràe purement mécanique de la guerre. Les
grandes manoeuvres ne peuvent pM admettre un mode
aexécutlon uniforme et invariable pour toutes les par-
ties de l'armée, parce que l'étendue du terrain qu'elles
embraasent et les dispositions de Vadversaire imposent
nécessairement des modificationa aux mouvements; elles
constituent la partie Intellectuelle de la guerre, où Ton
a besoin de réflexion, de perspicacité, d'inspiration. Les
manoBuvres de ligne sont nécessairement mixtes.
MANCBOVRB, OU tenuos de Marine, partie de la tactioue
navale qui enseigne à gouverner un vaisseau, à régler
tous ses mouvements, et à lui faire faire toutes les évo-
lutions de route et de combat. V, Bréan, TraiU du
gréement et de lamanau'ore. Paria, 1861, 1 voL gr. in-8^
— ManoBUiore est encore synonyme de eorde : les mancn»*
vres courantes f attachéea aux objets mobiles, servent à la
transmission des forces; les mononiorsadonnafitM lient
entre eux les points fixes. Les manœuvres passées de
l'arrière à l'avant sont dites passées à contre; celles pas-
sées de l'avant à l'arrière, passées à tours.
MANOIR (du latin manere, demeurer )« château du
aeigneur au moyen âge. Par extension, ce nom fut appli-
oue à toute habitation de quelque Importance entourée
ue terrea.
MANOU (Lois de), Jlfdfi4MW-dAarma-p<UCr»» ouvrage
en IS livrée, comprenant 5,370 vere dans l'édition pu-
bliée à Paris en 1830, et dans lequel sont exposés, comme
un enseignement révélé, les prebeptes de la Loi. Manoo
est le nom d'un être supérieur fréqueomient «lié dans la
littérature indienne, et dont la première mention se
trouve dans le Véda, où il est donné conune le père
commun des hommes; c'est à lui particulièrement que
les poètes rspportent l'institution du sacrifice. Las Aryas
de rindus le considéraient comme leur prindUf législa-
teur, avant d'être descendus vers le S.-E. dans les ^léas
de la Yamunà et du Gange : ce n'est pas un personnage
escluaivement indien ; les traditions vêdioues le faisaient
remonter an temps où leur race vivait oans son unité
primordiale le long des rives de l'Qxus. On doit doue
considérer le Manon indien comme un penonnaga ^yoh
^HAN
1207
MAN
Mhfiie. liO code dm Lois de Uamra, dans m rédaction
préMte, est attribué à Bbrigou psr les brfthmaiiee : or,
Bfari^oQ « daas le Véda^ est un riM, c-à-d. un saint
penoDMÎge d*iin ordre supérieur et même -surhumain,
dont le rôle tout entier fait partie de la mythologie 8jm«
boHqne de» Afyaa de llndns, et oui, de beaucoup anté-
rieor à tous les hymnes du recueil, remonte aux temps
primilifa de la race. Nous ignorons Tauteur véritable on
livre de la Loi; il y a même lien de croire que ce livre
eit Foravre commune de plusieurs brahmanes, auxquels
leur sdenoe a donné Pantorité nécessaire pour le fidre
prévaloir et rattriboer à Manou et à Bhrlgoo. Quant à
répoqne où il Ait composé, il est impossible de la fixer
aojonrd'bai avec précision. Si Ton considère le fond des
doctrinea et des lois, mêmes, il est certainement fort an-
tique; mais la rédaction qui est entre nos mains peut
remonter k une époque moins reculée. Toutefois, il n*est
Gsit, dans le code de tfanon, aucune allusion à la réforme
boaddhiqoe, ce qui aurait lieu de nous étonner dans un
ime de cette naûire^ ai cette réforme radicale lui eftt été
antérieme. Si Ton compare Vétat des doctrines et des
moBors dans le code de Manon et dans les plus anciennes
prédications bouddhiques, le code brahmanique dénote
une ^loqae besnconp plus ancienne que celle du boud-
dha, mort vera l'année 543 av. J.-C Les Furâ$uu(y, ce
moi) devant être considérés comme postérieurs au Bood-
dfaâaoïe, il en résulte que le code de Manou, dans sa ré-
daction actuelle, semble appartenir à la période des épo-
pées. Cest, dn reste, le même langage, la même manière
de penser, le même état de civilisation politique et re-
l^^eose qiie dans ces grands poèmes. Les lois de Manou
flont aoavent citées dans le MtihâbhânUa, et cela dans les
îm lima mêmes dn code que nous possédons. Il existe dans
lliide an moins 56 codies du même genre : loin qu'ils
poissent rivaliser d'ancienneté avec les lois de Manou,
ceDes^ lenr ont serri de type et de fondement, et pré-
aentent entre lenrs diverses parties une proportion qui
ne parait paa se retrouver au même degré dans les antres.
Selon la tradition indienne, un antique code de Manou
ftu écrit par Ifamou lui-même en 300,000 vers; le sage
divin Nârada l'abréna en 12,000 vers; un fils de Bhri-
gOt Soamati, le réduiût à 4,000 : notre rédaction n*est
ne paa celle de Soumati, et cette traduction inonve
oalqaement que les Indiens ont eu, avant la nôtré^ plu-
aicoie rédactions de leurs lois.
La législation de Blanon est fondée sur le Vida, dont
les docmnes s'y retrouvent, fort développées, maisessen-
^tlellemeot les mêmes : le code passe même aux yeux des
Indlena pour contenir, sous la forme de précepte et de
règles, le Vida dans son entier. C'est asses dire qu'il est
orthodoxe. On ne peut donc le considérer comme Issu
d*niie des écoles de la. philosophie indienne : an con-
traire, las difTérents commentaires sanscrits des lois de
Manoo iqipartiennent à des écoles particulières, et don-
nent souvent de ses préceptes ou de ses énondations
thédogiqaes une interprétation inadmissible. H est donc
néoesnâre, pour bien comprendre ce livre, de se tenir en
debora de tonte doctrine préconçue autre que celle du
Véda, et de se défier des commentaires. Mse en elle-
même, la doctrine de Manou porte non-seulement sur
les loia drilee et poUtiques, mais aussi sur la reli^on, la
morale, la métaphvsique, et la cosmogonie; elle est, en
on mot, à la fois théorique et pratique, et ne nésfîge au-
cune des baaea sur lesquelles repose la société br&hma-
niqne; elle en est l'expression la pins complète qu'aucun
ooviage indien nous présente. — Le polythéisme est la
fcnne extérieure et vûible de la religion dans Manon; il
est qrmboliqae' dans son ensemble comme dans ses
mcîndrea parlieo : mais, tandis que les qrmboles védi-
ques repréaentent, dans les hymnes, presque excluaive-
ment la natore extérieure et matérielle, un caractère
laétaphyiiqne et moral trterévident se remsrqne en eux
Âua Manon. Ces symboles, qui, dans le vida, sont
presque indépendants iea uns des autres, sont Ici coor-
donnés et rappoittéa à un principe commun qui les réunit
et k» anime s lepanthéen védique se trouve sinsi oso-
servé conformément à la tradition des Aryas, mais re-
légué an second rang, le rang supérieur dans la hiérar-
«hie des êtres étant oecupé par le principe absolu et
iadlviaflUa. Nonr-sealement les dieux du ciel, Indra et
les antrea, sont devenus des génies d*un ordbre secon-
daire; maia Brahmft lui-même, dont le nom n'existe pas
dans le Véda, est dépassé par la notion métapt^ysique
ie IVdBoln neutre et indiscernable qui porte le nom de
Brmimm* Le panthéisme est ainai constitué d'une m»-
•tore conplèce et déinitive, développant le Véda sans
le contredire, et demeurant orthodoxe. Le l** livre expose
la formation du monde, laquelle n'est pas une cr^ûoon
aubttantielle, maia une siinple producâon des formes ;
l'origine des Vidas; la création du brahmane, du xatriya,
du vai^ra et du çoùdra, c.-èrd. des quatre castes fonda
mentales de la société brahmanique; la naissance des
Manous, des dieux, des astres, des hommes, des ani-
maux et des plantes; les productions et les destructions
successives des univers; la division dn temps; le Jonr
et la nuit de Brahmft; la tliéorie des âges ; l'origine et les
fondements de la Loi. Ce l*' livre est donc une véritable
Genèse indienne. — Le 2" livre, revenant sur les bases
de la Loi, qui sont la tradition et la révélationii établit le
privilège des br&hmanes, et fixe les limites de la contrée
brahmanique. Le Jeune brahmane, né dans le BrahmA-
varta, reçoit une sorte de baptême et un nom ; ce 2* livre
décrit les cérémonies par leequelles il doit passer pour
arriver au rang de novice, la ceinture, le cordon, le blb-
ton; il expose les devoirs de l'ablution, de la purification
spirituelle, les égards dus par le novice à ses supérieurs,
à ses parents, à son maître spirituel. — Le 3* livre fixe
la durée du noridat, à la suite duquel le Jeune brahmane
se marie; choix de la femme; divers modes de mariage;
manière dont on doit honorer les femmes; cérémonies
imposées au chef de famille; devoirs d'hospitalité; sou-
venir des morts et repas funèbres, composition de ras-
semblée du featin, prière aux morts. — Les règles con-
cernant l'alimentation ont une grande importance dans
la reli^on indienne; le 4* et le 5" livre roulent en grande
partie sur ce si;^et ; les détails où entre le code de Manon
s'expliouent par le besoin qu'éprouvaient les législateurs
àiyaa de ne pas laisser leur race se mêler avec les races
indigènes, noires ou Jaunes, dont l'infériorité morale et
intefiectudle était évidente; beaucoup de préceptes mo-
raux contenus dans ces livres et dans les autres n'ont
pas d'autre but, et s'adressent prindpalement aux castes
supérieures. — Le terme de la ^<à approchant, le chef
de famille, auqud est né un petit-fils, se retire dans le
désert pour s'y livrer à l'austérité et à la méditation ; il
derient f>ànapra$iha ou anachorète. Les devoirs de l'ana-
chorète sont exposés dans le 6* livre. — La seconde
moitié du livre de Manou diffère notablement de la pre-
mière par son contenu : cellend énonce des préceptis
généraux qui s'adressent à tout le monde, mais surioèt
aux bràhmanea. Les livres suivants ont pour objet léés
détails de loi relatifs à l'organisation de la sod^té |(olI-
tiqne, dvile et militaire, et aux devohrs des castes, ba
création d'un roi, son autorité, ses devoirs ; le choix dâi
ministres; le palais, la forteresse; les impôts; le butta
de ffuerre; les questions relatives au droit des gens, axa
droits de la guerre et de la rictoire : tels sont les prind-
panx sujets du 7" livre. — Le 8« et le 0« traitent des lois
driles et criminelles, de la composition des tribunaux,
de la procédure; des dettes et contrats; des témoins et
des témoignages; de la conscience morale, du serment,
de l'épreuve; de l'intérêt, dea cautions, des amende»;
des lois pénales pour crimes et délits; du mariaee ciril,
des enfknts, des successions; de hi subordinauon des
castes par rapport aux brahmanes. — Une importance
considâable est attachée aux devoira dea castes dans les
temps de disette; la division de l'Inde en un grand
nombre de petits États rendait ces fléaux irrésistibles, et
portait dans l'accomplissement des devoira légaux des
désordres que les législateure se sont efforcés de préveidr
en suspencumt l'exerdce même de la loi dans des condi*
tiens déterminées. Ce cas et les règles qui s'y rapportent
forment l'objet principal du livre lO*. — L«i deux der-
nière roulent sur des si:4ets moraux et religieux, qui sont
comme le couronnement de la législation de Manou. La
crime et le délit ne blessent pas seulement la aodéUi
mais ils souillent l'ftme; de sorte que la punition dn cou-
pable n'est efficace que si elle est accompagnée ou suliia
de pénitence et d'expiation; le péché doit donc êtM
effacé, comme la force doit rester à hi loi ; sans cette
double condition, la société ne derient pas meillemé.
Quand le repentir a effacé la faute, même secrète, alOM
on peut aspirer à la béatitude finale, qui est l'objet de
toute la léîcislatlon brfthmanique, et dont les condition
sont renfermées an i2* livre de Manou. La distincllon ds
rame et du corps est le fondement de la loi morale et
des conséquences finales qu'dle entralae t cet osnsA-
quenoes sont diverses suivant l'état de purification oà
rême et le corps de l'homme sont parvenus au Jour de
fai mort. Le oiminel non purifié tombe aux enfers, oè U
souffre, dans son corps et dans son &me, des tourmenH
variés; et^ an renouvellement de l'univers, le principa
MAN
1208
MAN
vivant qui ranimait renaît dans une condition inférieure
et dans une misère proportionnée à son état antérieur.
Le Juste, qui a accompli les actes exigés par la loi ou
indiqués par une raison supérieure, parvient à la béati-
tude finale, qui consiste dans la contemplation de TÊti^
suprême, et dans Tabsorption de Tindividualité dans la
girande ftme du monde; s'il est parfait, il ne renaît pas
au Jour du renouvellement du monde, et échappe de la
sorte aux vicissitudes de la vie et de la mort.
L'esprit général qui anime les lois de M anou peut se
résumer en deux mots, pureté physique et morale, su-
bordination des hommes entre eux. Les éléments qui
composent cette législation sont si compactes, en quelque
sorte, qu'il est difficile de dire si les castes ont été créées
pour conserver l'esprit religieux des Aryas, ou si la doc-
trine religieuse a été conçue en vue de. la conservation
des castes. On ne peut retrancher ni modifier aucune
des parties essentielles de cette législation, sans qu'elle
s'écroule tout entière. La loi de Manou n'a Jamais été
changée que dans quelques détails de pratique d'une va-
leur tout à fait secondaire; elle sert encore aujourd'hui
de base à la société br&hmanique de l'Inde; tout ce qui,
du dehors ou du dedans, a paru lui être hosdle a été re-
poussé par les brahmanes avec une persistance qui
ne s*est point lassée. Les musulmans ont pu conquérir
rinde, mais n'ont pu détruire ni l'institution des castes,
ni la religion des Aryas; la race br&hmanique ne s'est
mêlée à la leur que dans une proportion minime. Long-
temps auparavant, la réforme bouddhique, qui, née dans
l'Inde, prêchait l'égalité et attaquait le principe des
castes, n'a pu se maintenir, mal^^é les progrès qu'elle
avait faits dans le peuple. Plus tard, le christianisme,
prêché dans l'Inde par un ordre célèbre, ne parveoait à
faire quelques progrès qu'en faisant lui-même d» con-
cessions, ue système ayant été désapprouvé, la loi de
Hanou a repris tout son empire, et constitue encore, au-
iourd'hui même, la plus grande force morale contre
laquelle les Européens aient à lutter en Orient.
V. Manavct-Dherma-ScLStra, or thê insiitutes ofMwu,
Eublié par Chamney Hau^hton, Londres, 18S5, 2 vol.
i-i** ; Mmu Sanhtta, unth a commetitary of Kulluka
Bhatta, Calcutta, 1830, 2 vol. in-8<'; 77^ laws ofMmu,
en sanscrit, en bengali, et en anglais, Calcutta, 1832;
Ê4ri$ d» Manou, texte et traduction française, par Loise-
Iflor-Deslongchamps, 1830-1833, 2 vol. in-S"». Em. B.
MANS (Cathédrale du). Cette église, placée sous l'in-
Tocadon de S^ Julien, oflîre deux styles bien distincts : la
grande nef et les bas côtés appartiennent à la période ro-
mano-byzantine; le transept, le chœur et ses chapdles,
ainsi que toute la partie supérieure de l'église, à la pé-
riode ogivale. Blalgré cette absence d'unité, c'est au mo-
nument dont l'ensemble possède de la noblesse el de la
grandeur. H se distingue à l'extérieur plutôt par la sévé-
rité des lignes architecturales que par la richesse de l'or-
nementation; le chevet, soutenu par de grands et légers
contre-forts qui supportent trois rangs d'arcs-boutants
superposés, et entouré de diapelles qui forment de pe-
tites absides rayonnantes autour de l'abside principtde,
donne une perspective très-pittoresque. Rien n'est plus
simple que le grand portail. Trois portes & plein cintre,
surmontées de chevrons brisés , de nillettes et autres or-
nements de style romano - byzantin ; au-dessus, une
grande fenêtre entre deux autres de moindre dimension ,
toutes trois à plein cintre; deux contre-forts, sur lesquels
sont fixées deux énormes bêtes; enfin, au sommet, un
crand pignon en maçonnerie maillée, soutenue par des
pierres de taille de moyen appareil : voiU toute la déco-
ration de ce portail. Le portail latéral du midi, construit
dans le s^le de transition du xn* siècle, a plus de
richesse : l'ogive qui donne entrée dans une espèce de
narthex ou vestibule, est encore indécise, et ornée de
moulures romano-bvsantines; la porte, surmontée d'un
rpan o& l'on voit le Sauveur et les figures symboliques
quatre Évangélistes, a une voussure chargée de pe-
tites statuettes, et des pieds-droits garnis de huit grandes
statues, toutes maltraitées par le temps et par les
hommes. Ce portail est surmonté d'une tour qui a 66 met.
de hauteur, et qui renferme une fort belle horloge. A l'in-
térieur, on est frappé de la beauté de la nef, avec ses
fenêtres et ses galeries à plein cintre, avec ses travées
d'une exécution surprenante et d'une grandeur d'effet
extraordinaire : elle a été bâtie au xi* nècle, ainsi que
les bas côtés, dont les murs sont soutenus par des co-
lonnes engagées, à chapiteaux historiés de figures fan-
mstiquas, harpies, griffons, chim^rw, serpents entre-
leoés» etc. Les arcades qui séparent la nef et les ailes
étaient à plein cintre, soutenues par des colonnes qrllB-
driques ; mais, dans la suite, de deux en deux on leo-
ferma une des colonnes dans un pilastre csrré, et les
arcades, rétrécles par ce grossissement alternatif des
supports, furent transformées en ogives obtuses. La psrtie
ogivale de l'édifice se rapporte an commencement do
xm* siècle, sauf la remarquable rose du côté gauche da
transept, qui est du xv*. Le chœur, avec ses colonnes et
ses arcades d'une élégance parfaite, avec sa galerie dé-
coupée entièrement à Jour, avec ses éblouissants vitraux,
n'a rien à envier aux plus célèbres monuments gathiqnes.
La cathédrale du Mans renrerme quelques monuments
funéraires d'un grand m^ite : le tombeau de la reine
Bérengère, apporté de l'abbaye de l'Épau en 1821 ; dans
la chapelle des fonts baptismaux, le sarcophage et la
statue en marbre blanc de Charles d'Anjou, comte du
Ifaine (mort en 1472), et le mausolée de Guillaume da
Bellay, ouvrage de Geamain Pilon, placé autrefois dans Is
chapelle de Notre-Dam^-du-Chevet. Quant aux dimen-
sions de l'édifice, qui occupe une superficie d'environ
5,000 met., il a 150 met. de longueur dans œuvre; la nef
a 58 met. de longueur, et 24 de largeur y compris les col-
latéraux; la longueur transversale de la croisée est de
50 met., et sa largeur de 10; le chœur, avec ses latéraux
fort habilement divisés, par un rang circulaire de co-
lonnes, en deux allées de hauteur inégale, est large de
32 met., long de 44, et sa hauteur sous voûte, beaucoup
plus considérable que celle de la nef, est de 34 met;
chacune des onze chapelles du pourtour a 11 mèL de pro-
fondeur, celle de l'abside 18 met, sur 5 met. de lar^or.
Cette disposition de chapelles profondes, dont l'une, celle
du centre, a plus de profondeur encore, se trouve égale-
ment à la cathédrale de Séez. V, Richelet, Le Mam oa-
ctsti et moderne. 1830; E. Hucher, Calquss des vitraux
peints de la eathàdrale du Mans, 1855 et soiv. B.
MANS (NoTaB-DAMB-DB-LA-CooToas, su). Gotto égliso,
autrefois abbatiale, faisait partie du couyent dont les bâ-
timents servent aujourd'hui d'hôtel de la préfecture. Elle
appartient aux xi*, xu* et xui* siècles. Sa longueur hors
œuvre est de 05 met., et sa largeur aux transepts, de
43 met La façade occidentale, large de 35 met, est
ornée de statues et de sculptures fort curieuses. Antoor
de l'ouverture extérieure du pordie, on yoit des espèces
de crochets végétaux , terminés par des têtes de moines
et des figures bizarres. La voussure de la porte offre trob
rangs de statuettes : au 1*' rang, au milieu des anges.
Moïse, Aaron et trois autres vieillards; le 2* rang est
formé de martyrs, et le 3* de vierges. Le tympan repréf
sente le Jugement dernier et le Pèsement des âmes;
six grandes statues garnissent les côtés de la porte. A
rintérieur de l'église, on remarque 70 stalles exécutées en
chêne au commencement du xvi* siècle. Il y a une crypte,
longue de 14"',30, et large de 7 met., dans laquelle se
trouvent cinq colonnes monolithes en marbre étranger sa
pays et peut-être antique. B.
MANSARDE, nom donné à une fenêtre droite dans un
comble brisé, parce qu'on en attribue l'invention à Man-
sard, architecte de Louis XIV. On faisait de ces fenêtres
dès le xm* siècle, et tous les b&timents ciTila de la Re-
naissance en sont pourvus. Par extension, on a donné le
nom de mansardes aux chambres à plafond incliné pla-
cées sous les toits et éclairées par des fenêtres à lucsmes.
MANSE. j K. ces mots dans notre Dictionnaire dt
MANSION. S Biographie et d'Histoire.
MANTE (du latin mantetlwn^ nappe, voile), nom
donné d'abord à un grand voile noir, traînant Josoa'i
terre, que les dames de la cour portaient dans les céré-
monies et surtout dans le deuil; puis, à un vêtement de
femme, ample et sans manches, quelquefois à capuchon ,
se portant dans les temps firoids par-dessus les sutres
vêtements. On a encore appelé mante la chape de laine à
capuchon que revêt quelquefois le pape, rfaid>it de oei^
taines religieuses, le balandran ou la cape des Toyageors,
ou enfin une couverture de lit. B.
BfANTEAU, autrefois Mantel (du latin manMum,
voile), vêtement sans manches, long et ample, destiné à
se placer par-dessus les autres et à envelopper le corps. :
Ce n'est pas seulement chez les peuples dont le dimst
est froid qu'il fslt partie du costume; il est aussi en
usage dans les pays chauds, principalement en Espagne.
Les Anciens ont eu bien des espéDes de manteaux : les
philosophes et les soldats romains hors de Rome por-
tèrent Vahclla de toile mise en double, attachée par une
broche sous le cou ou au haut de l'épanle ; les gens de
basse condition eurent Valicula^ manteau plus court,
attaché aussi sur le devant par une agrafe, et qœ le veoi
MAN
1209
MAN
ftlaait flotter comme de petites ailes sur les épaules. La
cManiyda, la cîUène, la paUa, le péplum, le pallwm,
te M0tim, le paludamentwn^ la pcanu^a, la IcBna, etc.
(T. cis tnoto), étaient aussi des formes du manteau. En
France, le manteau n*était guère porté autrefois que par
les ^ns à cheval. Après avoir été adopté par les femmes
aussi bien que par les hommes, il est aujourd'hui presque
onoplétement remplacé par des vêtements de même des-
tination, mais de formes et de noms très-variables. On
a donné & de petits manteaux courts le nom de erispin
(F. ce mot). — Le manteau de cour est une espèce de
Tobe sans corsage, attachée an bas de la taille, ouverte
par devant, et à queue traînante, que les dames d'une
ooor portent les jours de présentation et de cercle. B.
■âHnan (Rôles k\ en langage de Théâtre, rôles des
personnages graves et &gés, des tuteurs, des notaires, etc.
naiiTBAD , en termes de Blason, fourrure herminée sur
laquelle est posé Técu. Il n'appartient qu'aux souverains,
aux princes et aux ducs.
MANTEAU. F. ChEHDI^
MANTELET, petit manteau violet que les évoques
fefetent sur leur rochet quand ils sont en présence du
pape on de son légat, pour témoigner que leur autorité
lui est subordonnée.
MARTsuT,. pièce de cuir qui s'abat sur le devant et sur
les côtés d'une calèche, pour défendre les voyageurs contre
la pluie ou le vent.
l^lfTBLBT, en termes de Blason, espèce de lamoreouin
large et court, dont les anciens chevaliers couvraient leur
casque et leur écu ; — courtine du pavillon des armoi-
ries^ quand elle n'était pas recouverte de son ch^[>eau.
■AMRLBTt engin de guerre des Anciens, destiné à pro-
téger les travailleurs dans l'attaque des places. Cétait
tantôt un grand rideau formé d'un tissu épais de cordes
tressées, suspendu à des espèces de potences, et flottant ,
que les traits et les pierres des aaaiégés ne pouvaient
traverser ; tantôt un parapet portatif et roulant , en bois
recouvert de claies en osier, et revêtu en dehors de cuir
mouillé, pour éviter le feu.
MARTELET, 00 tcrmcs do Blarine, volet qui ferme un
sabord.
MANTES (Église Notre-Dame, à). Cette église était
antrefois une collégiale que Philippe-Auguste donna au
chapitre de S^Denis, et dont le roi était abbé titulaire.
fiUfiS à la fin du xii" siècle, dans le même style ogival et
peut-être par les mêmes architectes que Notre-Dame de
hris, elle est surmontée de deux tours, qui dominent
une partie du cours de la Seine. La porte principale est
séparée en deux baies par un trumeau qui porte une statue
dalal^rge, et accompagnée de 8 grandes statues de rois
et de patriarches ; les funérailles et l'Assomption de la
aère de Dieu sont sculptées dans le tympan ; dans les
foosaures, on quadruple rang de 50 figures représente
David et les rois de Juda. La résurrection du Christ fait
le tnjet du tympan de la porte latérale de gauche. La
porte de droite, refaite au xrv* siècle, ofiîre des médaillons
où sont figurées des scènes de marWrs, une double vous-
sure contenant les 12 apôtres et 12 martyrs, enfin un
tympan divisé en 3 zones, dont l'une représente l'Annon-
ciation, la Visitation, la Nativité, et l'Adoration des
Mages, l'antre la résurrection des morts et leur sépara-
tion en élus et réprouvés, la 3* des groupes de person-
nages qni semblent gloiifler Dieu. L'église de Mantes a
penln ses vitraux et ses mausolées ; le cœur de Philippo-
Angoate repose encore dans un caveau sous le sanc-
to&e. Les six piliers qui entourent le chœur sont d'une
déttcatesse et d'une légèreté admirables. L'édifice n'eut
aucune cliiq[>eUe jusqu'au xiv* siècle : à cette époque, on
en ébnra one fort remarquable contre le bas côté méridio-
nal du chcBor. Ttois autres, dont une au sud et deux au
DOfd, ont été pratiquées plus tard, mais avec beaucoup
Aoina d'habileté. Une particularité de l'église Notre-
Dame de Mantes, c'est sa toiture en tuiles vernissées et
ànailléea. K. A. Moutié, Jfontos, histoire, monuments,
mvtrtmf , ifô2, in-S*. B.
MANTILLE . espèce de {prand flchn à trois pointes, dont
celle de deornëre arrondie, fait en velours ou en drap
écariate rehaussé d'un galon ou d'une broderie d'or, et
foe les femmee adoptèrent vers 1725, pour se garantir le
eoQ el les épaules contre le froid. -— En Espagne, la man-
tille est nne longue et large écharpe noire, qui se porte
erdinairement sur la tète et se croise sous le menton , de
manière à ne laisser voir distinctement que les yeux.
MANTOUE (École de), nne des écoles italiennes de
peiiitara qœ l'on comprend sons la dénomination géné-
rale ^éooU lanUfardê. EUe tôt fondée par André Man*
tegna, et, outre Louis et François, fils de ce peintre, on
y comprend Lorenzo Costa, G.-F. Carotte, et rr. Monsi*
gnori. Une vigoureuse impulsion lui fut donnée par Jules
Romain, que les Gonzague appelèrent à BAantoue. Ce
grand artiste construisit dans cette ville le Palais ducal
et le palais du T, qu'il orna aussi de peintures, et donna
les dessins pour la reconstruction intérieure du Dôme.
Outre le Primatice, qui Ait plutôt son aide que son élève,
on vit se former sous sa direction Benedetto I^ni,
Ferme Guisoni, Rinaldo, Teodoro Ghigi, Ippolita An*
dreasi, etc. Depuis Jules Romain, l'école de Mantoue n'a
{produit aucun maître ; les Gonzague appelèrent plus vo-
ontiers les peintres étrangers, le Titien, le Corrège, le
Tintoret, l'Albane, Domenico Feti, etc.
MANUBAIiSTE. y. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
BÎANUëL (du latin manuale, qui se tient à la main),
livre portatif, présentant sous un petit format la sub-
stance d'ouvrages étendus. Les Anciens ont connu les ma-
nuels ; mais c'étaient chez eux des recueils de maximes
philosophiques, comme le Manuel SÊpictète, Chez les
modernes, que les in-quarto et les in-folio n'ont point
effrayés pendant bien des siècles, il ne parait pas avoir
existé de manuels avant le règne de Louis XIV, où deux
Oratoriens publièrent un Manuel des Pécheurs. Au siècle
suivant , les livres s'étant multipliés et les lecteurs deve-
nant plus occupés ou moins patients, chamie science,
chaque art, chaique métier eut son manuel. Cette multi*
plication des petits livres s'est encore accrue de notre
temps, où le libraire Roret a publié une collection de
Manuels qui portent son nom. B.
MANUFACTURES. Cest l'industrie qui donne, par un
changement de forme, de la valeur à une matière brute,
ou bien afoute de la valeur à une matière déjà manufac-
turée. Les objets d'un usage général présentent seuls des
avantages de perfection et d'économie à être produits par
grandes masses; et, parmi ces objets, au premier rang,
sont les étoffes qui servent à nous vêtir; aussi les pre-
mières manufactures furent celles de draps, de toiles, de
soie, de coton, etc. La protection qu'il convient le mieux
à un gouvernement éclairé de donner aux manufactures
se réduit à écarter les obstacles qui sont de nature à
rendre la production moins économique et moins perfec-
tionnée ; à faciliter l'achat et l'arrivée des matières pre-
mières tirées de l'étrangerj; à les affranchir de droits, ou
ne leur en faire supporter que de très-faibles; à favoriser
les ouvriers en leur faisant supporter peu d'impôts. La
densité de la population est une des causes principales
qui favorisent le développement des manufactures. De
tous les pays d'Europe, l'Angleterre est le plus manufao
tnrier, parce que, eu égard à l'étendue de son territoire^
il est le plus peuplé. Après l'Angleterre, viennent la
France et la Belgique, puis quelques États de l'Alle-
magne et la Suisse; les contrées presque désertes de
la Russie et celles de l'Amérique méridionale sont au
dernier rang. Dans un même pays, on remarque même,
à cet égard , d'une province à l'autre, des diffâences no-
tables, selon que les populations y sont plus ou moins
pressées : le Lancashire, si riche et si peuplé, l'emporte
de beaucoup, sous le rapport du développement manu-
facturier, sur tous les autres comtés de la Grande-Bre-
tagne ; en France, les départements de la Seine, du Nord,
de la Seine-Inférieure et du Haut^Rhin , l'emportent, par
la même raison, sur les autres; dans l'Amérique du
Nord, les États de l'Est, les plus anciennement occupés
et les plus peuplés, sont aussi les seuls où les arts ma-
nuflEurturiers ont acquis quelque puissance, tandis que lea
États de l'Ouest, plus jeunes, y sont encore presmie to-
talement étrangers. D'une autre part, si la densité de la
population influe sur le développement manufacturier,
l'accroissement de cette industrh, favorisé par certaine»
drconstances locales, influe à bon tour sur l'accroisse-
ment de la population.
Linvention des machines et leur mise en action dan»
les manuOsctures ont fait gagner l'ouvrier sous le rapport
de Yintensité du travail , mais l'ont fait perdre sous celui
de la durée : les chefs d'industrie exigèrent des homme»
un labeur moins pénible, mais plus prolongé, et, comme
la douceur du travail s'accommodait assez à la faiblesse
de la femme et des enfants, ils imposèrent bientôt à cea
derniers la présence dans l'atelier pendant le jour et
quelquefois pendant la nuit. Ces excès, déjà nuisibles à
la santé de l'homme mùr, étaient plus funestea encore à
l'existence des adolescents, et des enfants surtout. De là»
la nécessité d'une intervention de la loi (K. Eufaitts a&Nf
LES MANUFACmaBS).
J
MAN
1210
MAP
L*iléfikioa do prix des prodaits dn munanustom fran*
çaltet comparé i celai des produits similaires anglais
ttenl à plusieurs causes; mais ii en est une qui dônvait
de notre système douanier, et ({ui sera certainement albd*
bile par suite de ia concurrence qu'amènera le traité de
eommerce du 33 Janvier i860. EUbenf, par exemple, ne
manulkcture pas en grand; 11 n'entreprend qu'à la ftçon t
U est mal outillé, mal organisé; le trarail est éparpillé,
sans avoir rien de commun avec la division du travaiU
Chaque opération s*y fait chez un entrepreneur distinct,
xdntore, filature, tissage, apprêt, etc. Cependant cette
ville produit pour plus de 70 millions de draperie par an,
à Taide d'un crédit dont touissent la plupart des produc-
teurs, dont le chiffre d'affidres ne dépasse ptt pour
chacun iOO à 450,000 fr.; on compte seuléfbent trente
manufacturiers qui produisent ensemble pour la somme
de 90 à 25 millions. Dans ces conditions de production et
d'outillage industriel très-imparfait , les Trais de main*
d'oBuvre, uuoique le prix de la Journée soit moins élevé
qu'en Angleterre, sont cependant plus considérables. Les
manufacturiers d'Elbeu/, protégés par un sjstème prohi*
bitif, pouvant retirer de très - beaux prents malgré un
matériel incomplet , ne songeaient point à raméliorer ;
ainsi, tandis que l'Angleterre comptait, en 1855, plus de
15,000 ,métien mécaniques à tisser les étoffes de laine,
Elbeuf n'en possédait pas un seul. En 1857, il en avait
dnq. Cependant , avec un métier de ce genre, telle pièce
de drap dont le tissage à bras coûtait 25 à 30 fr., se fait
mécaniquement au pnx de 9 à 10 fr. Avec les anciens pro-
cédés, rouvrier tissait de 6 à 7 met. car Jour; maintenant
il peut en tisser de 18 à 20 met. Quoioue le tissage méca-
nique soit beaucoup plus répandu aans l'industrie du
coton que dans celle de la laine, on cite Amiens, où se
fiibriquent les velours de coton, comme ne connaissant
l»8 encore l'usage du tissage mécanioue : une pièce de
Teloun, qui coûte dans cette ville 2 fir. 50 o., se MX à
Manchester et à BrQnn en Allemagne pour 70 c L'indus-
trie du coton a adopté dès l'orimnep pour sa fabrication ,
la spécialité des tissus fins, lussant le tissu commun à
l'AjoigleteRe, qui a toujours eu pour but principal de pro-
duire le plus économiquement possible, et a pu réaliser
sous ce rapport des résultats remarquables, dus au bas
prix de ses combustibles et à l'emploi presque exclusif
du travail mécanioue. Le prix de nos tissus, par suite de
leur finesse et de leur élégance, est supérieur à celui des
tissus de nos voisins d'outre-Manche ; mais le rapport de
«es prix est resté presque le même, preuve des progrès
de notre part analoguea à ceux des manufacturière an-
glais. On estime que les 34 millions de kilogr. de tissus
fabriqués en 1834 coûtaient à peu près aussi dier que les
^ millions de kilogr. produits en 1853.
Les manufactures françaises durent à Colbert une exis-
tence assurée par un édit de 1664, qui réduisit en un
seul tous les droits de traites intérieures ; par celui de
1667, sur l'entrée et la sortie des matières premièrei et
des marehandises fabriquées, eto. A propos de ces édite,
Roland de La Pl&trière disait que si la multiplicité des
réglemente concourait aux progrès des manufactures,
•ouïes de France devraient être les plus florissantes dn
monde entier. Des manufacturière habiles, attirés de
tous côtés par de grands avantages, fondèrent, sous le
flèene de Louis XIV, de vastes etabliasemente ; des ou-
vriers initiés aux secrète de la fabrication étrangère
-étaient partout recrutés. Cest ainsi que les manufactures
se trouvèrent augmentées et perfectionnées {V, Indos-
TSiB ). Cependant une lutte s'éteblit bientot entre l'indus-
trie et le commerce, qui demandaient la liberté, et Tad-
ninistration, qui prétendait les garder en tutelle; dans
«es combate entre lea règles et la liberté, le commerce et
les manufactures furent constemment inquiétés. Vers la
en du xvn* siècle, l'Angleterre s'empara de laprépondé-
tanoe manufacturière de la France, en s'enricnissant du
personnel et de l'outillage des ateliere français et fla-
mands, en attirant à elle, par la liberté civile et reli-
Êeuae, l'élite des artisans de ces deux pays, qui s'en exi-
lent par suite de la révocation de l'édit de Nantes.
^.'Allemagne protestante a dû à la même cause le dév^
loppement de ses manufactures, et, dans le même
temps, l'Espagne, en laissant dépérir ses fabriques, par
«es persécutions contre les races Juive et arabe, entrait
dans la voie de décadence où eUe a eu tant de peine à
sarrêter de nos Jours*
Les corporations d'arto et de métien {V, Axn n Blé-
nsas), après avoir été la cause des progrès accomplis
d'ans l'industrie, furent pins tard un obstacle à l'applir
•cation des décourertes de la sdenoe. Ainsi, rtrt de i
vernir et d'emboutir la tole fût découvert en 1761 ; maisi
comme il exigeait l'emploi d'ouvrien et d'outils de pro-
fessions diflérentes, l'inventeur, trop pauvre pour payw
les droite de maîtrise de diacune de ces corporatioai, fat
obligé de transporter son industrie à l'étranger, d'où sUe
n'est revenue en France qu'en 1703, après l'abolitioa des
corporations. Quelquefois les obstack» furent levés pu
l'intervention du pouvoir, qui dégageait dea entraves des
réglemente sur les maîtrises les inventeun d'un procéd4
ou d'un art nouveau eu piufectionné, en donnant à leof
fabrique le titre de manufaetun rayaU. D en Ait ainti
pour Leooir, fabricant d'instrumente de mudque; Ami*
Argand, l'inventeur de la lampe à double courant d'air i
Réveillon, célèbre fabricant de papiere peinte, eto. ^ On
donna aussi le nom de manufaehuret rôyaUs, nationaiet
ou impériales à des étahHssemente entretenus et admi-
nistrés par l'État, telles que la manufiKture de porce-
laine de Sèvres, celle dea Gobelins, eto. Privées de bras
pendant les guerres de la République et de l'Empire, les
manufactures françaises se soutinrent cependant, gr&ce
aux énormes besoins qu'elles avaient & satiafaire et aa
privilège dont elles Jouissaient par suhe du fameux
blocus continental (K. PaoRonnoN); elles ne commeo-
Gèrent à reprendre un nouvel essor qu'en 1816, au réu^
blissement de la paix générale. A. L.
vânoFAcrvass (Conseil général des). Conseil institué
près du Ministère de l'agriculture, du commerce et des
travaux publics, en rue d'éclairer le gouvernement sur
les questions d'intérêt IndustrieL D'aims les décrets des
1"' Avrier et 9 avril 1851, il est oonmesé de 8 membres
nommés par le ministre, et d'un Inuustriel nommé par
chaque Chambre conaultetive des arto et manufiulBres
parmi ceux qui exer^nt ou qui ont exercé pendant 5 ans
au moins une industrie. Les fonctions de ces membres
sont gratuites. Le Conseil ne se réunit que quand il est
convoqué ; Il est présidé par le ministre, mais chouit
dans son sein un vice-président; les fonctions de secr6-
taire sont remplies par un employé du ministère, et des
commissaires du Gouvernement exposent les questions.
Le Conseil délibère, soit séparément, soit avec le Gonteil
général du commerce; mais, même dans ce dernier cas,
son vote reste distinct» V. Arts vr MAnoFACTimas.
HANUiaSSION. V, ce mot dans notre Dictionruure ds
Biographi* $1 d^BisUnre.
HANOSCRIT, ouvrage écrit à la main. Les Andem
avaient deux sortes de manuscrite : les uns éuient dis-
posés en rouleaux, et appelés par cette raison wlumiM
(de eolosTf , rouler) ; les antres, plies en feuiliets, et for-
mant des livres reliés ou brocnés, se nommaient co-
âiees. Ils employaient généralement, pour les copier, des
esclaves ou des affranchis {tcribœ, Itbrani) ; au moyen
àtt, les moines se chargèrent de ce travail (F. Consns)»
LNâtude des écritures des manuscrits, dans le but decon-
steter l'authenticité et l'âge de ces ouvrages, fait l'ob*
Jet de la Paléographe (K. es moi) ; l'examen des chartes
et autres titres du moyen ftge est l'objet de U DipUmm-
tùiue (F. es mot). Les manuscrite du moyen Age attirent
l'attention non-seulement par l'écriture, mais par les
lettres ornées et les enluminures dont les artistes cslli-
graphes les ont enrichis (F. Ëcarroaa, CALUOsAras,
MmiATuaa). V. A. Pfeiffer, Sur les momifortlf m géné-
ral, en allem., Erlangen, 1810; Èbert, Sur la connais-
sance des manuscrits, en allem., Leiprig, 18S5.
MANUTENTION (du latin manu tênere, tenir en main),
mot qui a le sens général d'administratùm, de gestwi,
de ooluerwittoii. Dans un sens spécial, on nomme Ma-
nutenHon dês viores l'étabUssemeot oà se fabrique et se
conserve le pain pour les troupes. Cest une question fort
controversée de savoir s'il faut établir des manutentions
pour le service des villes, ou si l'on doit laisser les
troupes s'approvisionner librement. D y a aussi des ma-
nutentions ae la Marine, dont le personnel est placé sous
l'autorité des oflScien du commissiariat chargés du service
des subsistences t on distingue des chefs de manutention
généraux, des chefs et des sons-chefii de nÉanuteatios,
ayant rang de oommIssaires-acQointe, de sous-commis*
saires et d'aides-eommissaires, avec 3,500, 9,500 et 1,8001
de traitement.
MAPPA. F. cemotdansnotreDicttomidtredsiNoffr»
^Ms et d* Histoire,
MAPPEMONDE (de mappa, carte géographioue, el
mundus, monde), carte qui représente tout le glooe ter-
restre. Supposant qu'on a scié le globe en deux suivant
le plan de l'un de ses méridiens, on représente les deux
hémisphères cOte à cOte. F* Gaans etfoesAmionas, Gio-
MAR
1211
MAR
MAQUETTE ou UARQUETTE, modèle en petit d*tm
oomM en ronde-boese, &it en terre molle ou en cîre.
HAQUIGNON^ nom donné Jadis à tons les marchands
de chevam indistiiictenient, et qui, ne se prenant pins
pAn aalourd'hni qa*en mauvaise part^ désigne ceux de
CM maichaiids qoi cherchent à tromper les achetoucs.
MARABOTIN. I F. ces mots dans notre Dietionnain
HARABOVT. i de BiographiB 0td*aistoir9,
MARAIS, amas d'eanz stagnantes, très-peu profondes,
et même sojettes ({nelqnefois à se desséchier. Les marais
sont formés, quoique souvent dans le voisinage de la
awr, par des Infiltrations souterraines d'eau douce, on
par la stagnation, dans des terrains d*un niveau inférieur
anz oellines voisines et au rivage de la mer, de rivières
trop pea oonridérables pour former des bcs ou fhmchir
le littoral. Tels sont les marais répanVius sur les cètes
nérldioiiales de la Baltlipe, ceux de la Hongrie et de la
Roaaie, les Marais Pontms et les Maremmes en Italie.
Dans le bassin des fleuves sujets à des débordements pé-
riodionea et considérables, on rencontre des marais qui,
dans le tempe de la crue, sont des bras du fleuve, et, dans
la saison sèche, des réservoirs isolés ou quelquefois
même se dessèchent et forment de riches pâturages. Tels
sont les Marigots du Sénégal, les Bayous du Mississipi
et les Olboutes des fleuves de hi Sibérie méridionale. Les
plus Tastes mands du ^be sont au S. de rUimalaya et
à PB. des Andes du Chili, dans Tlnde septentrionale et
dana la République Argentine, où les torrents précipités
dos gtaders dans les plaines croupissent longtemps avant
de rencontrer la pente qui les verse dans les affluents
dn Gange et de la Plata, et forment ainsi, sur plus de
1300 kilomètres de longueur et sur une largeur de 900 à
400 Idiomètres, des terrains perfides où Thomme ne pé»
a être qu'en trinnblant. Quelques marais présentent le
carieos ^wctade des Ues flottantes : ce sont des terrains
de natore tooriiease, mais très*légers, qui, minés par les
canx, sa détachent du sol avec les arbres qu'ils portent;
OD volt de ces llea sur le lac de Kolk (province d*Osna-
bnick), et sur celui de Gerdau en Perse.
Dana le Droit féodal, les marais appartenaient ans sei-
gneors, à moins que l'État, les communes ou les parti-
culiers n'eussent des titres à faire valoir. L'ordonnance
de 1670 sur les eaux et forêts leur accordait même, sous
le nom de triage, le droit de revendiquer le tiers des ma-
rais appartenant aux communes, lorsque celles-ci les
tenaient d*etix à titre gratuit, et que les deux autres tiers
suffisaient à Tnsage des habitants. Les lois des 15 mars
1790, 28 août 1793 et 10 Juin 1793, qui aboUreot la
législation antérieure, déclarèrent que les communes
étaient de droit propriétaires de tous les marais, à la con-
dition de les revendiquer dans les cinq ans. F. Dassé-
cminnr. C. P.
MAaais rrhéàtre du). F. notre Dictionnatre de Biogrtp-
pftis et dP Histoire.
BASAIS SALANTS, psrties basses du littoral, analogues
SOI h^puies psr lenr origine et leur constitution phy-
sique, mais qui en diilièrent en ce que Tindustrie les a
ptffectioanés pour sinsi dire et a su en faire une source
de richesses. Les marais salants se rencontrent surtout
dans les terrains Inondés à Tembouchure des fleuves à
dèhaa, oa des rivières peu considérables qui se perdent
sar une cdW basse : telles sont les lagunes de Ck>mscchio,
la S. da deha du PÔ 7 celles de Languedoc et de Provence,
snMiéea improprement étangs de Leucate, de Sigean, de
nâa, de Magaelonne, de Hauguio, de Valcarès, de Beire;
et suftoot les marais salants proprement dits des eûtes
es la ^Intonge, de TAunls, du Poitou, et d'une partie
ée la Bretagne. Toute cette partie du sol est coupée par
des Mert oitf canaux de 4 met de hugeur et de 2 de pro-
floadeor, qui reçoivent les eaux de la mer à la marée
bsBia^ dsa édases permettent de les retenir, et de larges
dignes on tetftt , assez élevées pour être livrées au labon-
nge en servir de chaussées, circonscrivent les aires sa*
fin» où lea eanx déposent le sel qu'elles contiennent.
Ln nMiaia salants de TOcéan fournissent à la eonsom*
■atfan de TOoest et du Nord de la France. C. P.
MARACA, Instrument qui sert pour guider les danses
■BBRlèraa des tribus indigènes dn Brésil. (Test une cala-
MS ovato, ornée da plumes d^sra, garnie d'un mandie,
«I **«'!fl-f"^ dn gndnes oui résonnent qnand on l'agite*
Selon qaeiqiies anteurs. Il rappelle synîboliquement le
fraadenieBt dn tonnerre, que ces tribus adorent.
■ABANISCH, nom de rarabe parié dans l'Espsgne
ansnlniBBa. Il était oaeore en usage à lafln dn &vn* aie-
de dans les montagnes des psovlnces d'Andalousie, de
Vslwce ot d'Aragon; des voyageurs prétendent qn'll
existe tocrfoura dans un patois de la Sierra Moreiia.
MARAUDE ou MARAUDAGE, vol eommis par un on
plusieun soldats écartés de l'armée. Avant 1189, le ma-
raudeur pris en flagrant délit par le prévèt de l'armée
était pendu sur-le-champ. D'après la loi du 18 brumaire
an V, la maraude simple fut punie de la prison et de l'ex-
position; la maraude avec récidive, de 5 ans de fers; la
maraude à main armée, de 8 ans de la même peine. «-
En dehora de l'armée, on appelle marandage l'acte de
dérober, dans les champs, des productions non encore
détachées du sol ; il est puni d'une amende de 5 à iO fr«
Il en est de même du fait de cueillir et manger sur place
les fkvits appartenant à autrui ; la peine est de 1 à 5 fr.
MARAVÉDI, ancienne monnaie espagnole, dont la
plus ancienne mention remonte au commencement dn
xm* siècle. Les premien maravédis furent des monnaies
d'or et d'argent; ce fut en 1474 qu'on frappa pour la pre-
mière fois des maravédis de cuivre, dits ftioravédis de
veUan, Cest la 34* partie du r^,c.-àp-d. moins d'un cen-
time; le maraA)édt de plata ^ double du maravédi de
*feIlon, vaut un centime et demi.
BIARBOURG (Église de S'*-Éusabeib, à), dans la
Hesse électorale. Bâtie de 1235 à 1283, et remaniuablo-
ment bien conservée, elle est du style ogival le plus pu£.
Deux tours carrées flanquent le portail occidental , dont
les sculptures méritent aussi l'attention. Les fenêtres du
chcBur sont garnies de beaux vitraux. Dans un bras dn
transmt, on admire la riche chapelle de S^'-Élisabeth,
fille d^André II, roi de Hon^e, épouse du landgrave
Louis de Thuringe, et patronne de l'église. Le transept
opposé contient les mausolées en pierre de quelques
landgraves de Hesse, avec des bas- reliefs en bronze. On
conserve dans la sacristie la châsse de S^ Elisabeth ; elle
est en chêne, couverte de lames de cuivre doré, et oméa
de bas-reliefo en argent massif et doré.
MARBRE. Le mot latin marmor, dérivé du grec mdr'
maros (blanc), s'appliquait particulièrement, dansl'ori*
gine, su seul marbre statuaire. Le premier marbre, et le
plus célèbre qui ait été employé par les Anciens, étidt Ûré
de rUe de Paros ; la Vénus de Médicis et la Dtons chasse-
resse du musée du Louvra en sont faites. Le marbre dn
PentéUque, en Attique, plus fin et plus serré, mais d'^ne
teinte moins unie, se reconnaît dans plusieun statues
antiques du même musée. Dans la suite, les statuaires
grecs adoptèrent le marbre de Luni (près de Carrare),
dont est fait V Apollon du Belvédère. Ce sont aussi les
marbres de Carrare que préfèrent les Modernes, à cause
de leur finesse et de leur netteté.
Les marbres d'ornement sont nombreux et variés. Les
Anciens ep employaient de plurieura sortes, dont les car-
rières sont perdues pour nous, et qu'on ne trouve plus
que dans les ruines. Ce sont : le notr antique, surnommé
marbre de Lucullus, psrce que ce Romain le fit connaltue
en Italie, et tiré de Milet et d'Alabanda en Carie; le
rotige antique ou d'Egypte, devenu plus rare encore orao
le iK^cédent; le vert antuiue, exploité dans la ThessMie,
et dont on voit quatre belles colonnes dans la salle de
Psllss au Louvre; le bleu antique, d'un blanc rosé avec
taches d'un bleu ardoise, en rigzags interrompus ; le bien
turquin antique, dont les carri&es se trouvaient en Mau-
ritanie; le petit antique, d'un grsin très-fin, veiné de
blanc et de cris d'ardoise, tiré de Staremma en Étrurie*.
le jaune anttque, exploité en Macédoine, et dont est faite
la greoane qui entoure les deux tables de lapis-lazuli de
la galerie d'Apollon au Louvre; le grand antique, com-
{>08é de fragments et de linéaments d'un noir foncé, mé-^
anges de fragments dn plus beau blanc; le cipotin an-
tique, dans lequel le talc forme des veines, et qu'on croit
avoir été tiré de llle d'Elbe; la brèche violetU antique,
appelée on ne sait pourquoi brèd^ d^Alep (elle s'explol*
tait dans les environs de Carrare), offrant des oouleuHK
très-variées, le plus souvent des fragments anauleux de
couleur lllas sur un fond d'un brun violfttre; la brèehê
a(Hcaineantique, aux i^agments rouges^ gris, violets, etc.,
sur un fond noir; la brkhe rose anttque, composée de
petits fhigments ros&tres sur un fond ronge dair; la
orécAs jaune antique, d'un Jaune clair, avec des taches
pins foncées; la brèche ariequine, présentant des taches
rondes de diverses couleun ; la brèche rouge et blanche,
dans laquelle ces deux couleun dominent; la brèche
vierge, composée de fragments anguleux blancs, bruns,
rouges et Jaunâtres; la brèche fleur de pécher, qui offlre
de grandes taches violettes ou Ile de vin sur un fond
blanc, etc.
Les Modernes possèdent aussi beaucoup d'espèces ds
marbres. Parmi les narinres nolrt, nonstiterons : le noir
MAB
1212
MAR
mKÊiqm oa drap mortuaire, dont la ooalear est uniforme,
et qu'on emploie surtout dans les monuments funèbres;
le petit granit, dont le fond noir est parsemé régulière-
ment de parties claires, et dont les ébénistes se serrent
fréquemment pour les dessus de meubles; le marbre
S^*'Anne^ à veines blanches se croisant en tous sens, et
dont sont faits les dessus de tables dans la plupart des
cafés de Paris ; le petit antique, offrant un mélange de
taches noires et blanches, à peu près égales, et angu-
leuses; le portor (porte-or), présentant des veines d^in
Jaune doré. Les marbres rouges les plus connus sont : le
marbre griotte, dont le fond, d*un rouge brun, est régu-
lièrement parsemé de taches d'un rouge plus clair; le
marbre de Sarancolin (Pyrénées), d*un rouge foncé, mêlé
de 1^ et de Jaune, avec des parties transparentes; le
marbre incamat ou du Languedoc, d'un rouge assez
clair, irrégulièrement môle de parties plus claires. Notre
département de l'Aude fournit des marbres rouges et
blancs, dont on peut prendre une idée par les colonnes
de l'arc du Carrousel, à Paris. Il y en a, dans le Pas-de-
Calais, qui ont la couleur café au lait veinée d'un peu de
blanc t on l'appelle marbre Napoléon, parce que la co-
lonne de Boulogne en est faite tout entière. On en voit
plusieurs dessus de tahles dans les deux Trianons; le
{)iéde8tal de la statue de Louis XIY à Caen en est éga-
ement fait. Les marbres jaunes de Sienne et de Vérone
sont d'une belle teinte rouge, sur laquelle se détachent
des ammonites. Florence, Prato, Bergame et Suze ont
leur marbre vert, plus ou moins tacheté de blanc ou de
gris. On trouve aussi à Florence le marbre ruiniforme,
présentant des dessins d'un brun Jaun&tre sur un fond
gris, qui simulent l'apparence de ruines. On appelle lu-
machSUes (de Titalien lumacha, limaçon) les marbres qui
contiennent des coquilles fossiles dans leur intérieur :
les lumachelles les plus estimées sont celles dites dAs-
i rakhan, à reflets Jaunes sur fond brun, et la lumachetle
op aiine, à reflets de couleur rouge ou orangée, rouge de
fe u et^rge de pigeon. Les marbres tirent leurs couleurs
de s dinerents oxydes, surtout des oxydes de fer, qui sont
mè lés au calcaire. Il en est qui se décolorent sous l'ac-
tion alternative de la pluie et des rayons solaires ; ce
sont ceux principalement qui renferment des parties
d'argile, du schiste, de la magnésie ou des matières talc-
queuses : on doit ne les employer que dans les intérieurs.
Tels sont les marbres de Campan (Pyrénées), tantôt
rouges, tantôt verts, ou rose tendre, qui ont servi à la
décoration des châteaux de Versailles et de Trianon.
MARBRE (Table de). 7. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire,
MARBRES D'ARUNDEL ou DE PAROS. V. Paros, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire.
MARBRES CAPnoLms. V. Fastbs, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d^ Histoire,
MARBRES d'blgin. V, Elgdi, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
liARC, monnaie de divers pays. Le marc danois de
1770 vaut 0 fr. 04 c. ; le marc lubs ou de Lubeck, et le
marc courant de Hambourg, 1 fr. 53 c. Le marc banco
n'est qu'une monnaie de compte, de i fr. 88 c.
MARC (Église de Sadit-), à Venise, sur l'un des côtés de la
place du même nom. L'art chrétien n'a rien produit d'aussi
original : c'est un mélange des styles byzantin, roman et
ogival, un musée de dépouilles apportées de la Grtee, de
Constantinople, de Syrie, d'Espagne, de tous les pays où
Venise vit flotter son pavillon, et une magnifique galerie
de peintures nationales. L'édifice fut commencé en 977,
sur l'emplacement d'une première église b&tie en 828 et
détruite par le feu; on n'en fit la consécration solennelle
qu'en ilil. n n'est devenu église cathédrale qu'en 1817,
et fut considéré Jusque-là comme la simple chapelle des
do^, destinée aux cérémonies qui avaient un caractère
national. Le doge nommait le primider et les 26 chanoines
du chapitre. Les architectes de S^-Marc, nourris des prin-
cipes de l'école byzantine, donnèrent à leur plan la forme
d'une croix grecque, longue de 76*>50, en y fjoutant un
portique large de 60 met., qui rappelle aussi le narthex
des églises d'Orient. Ils plurent au centre de la croix
une coupole de 14 met. de diamètre, et, sur les branches,
Suatre antres coupoles un peu plus petites, copies ré-
uites de celle de S*«-Sophie à Constantinople, c-à-d.
que cbacqne est exhaussée sur quatre pUiers et quatre
grands arcs, auxquels elle se rattache par des pendentifs,
et entourée d'une ceinture de fenêtres. Ces coupoles, qui
sont des moitiés de sphère* reçurent au xv* siècle la
forme renflée et bolbouse de l'architecture arabe, par
FAddition dschaipentes revêtues de feuilles de plomb.
Comme elles sont Juxtaposées, deux des piliers et un dei
grands arcs de chaque petite coupole se confondent arec
les piliers et les arcs de la coupole centrale : pour agran-
dir leur plan, les architectes donnèrent aux grands arcs
de coupoles et aux piliers qui les soutiennent un déve-
loppement excessif, tout à fait inutile à leur solidité;
chaque pilier eut près de 7 met. sur chaque face, et
chaque grand arc, devenu une large voûte en beroeaa,
fût, à l'exception de ceux de la coupole centrale, fermé
du côté de l'extérieur par un mur très-mince, que l'on
perça de fenêtres; les piliers, rétrécissant de toute leur
masse l'intérieur, furent évidés et percés d'ouvertores
Les voûtes, dans la construction desquelles les artista
grecs étaient expérimentés, ont été préférées, pour U
reste de l'édifice, aux plafonds de bois des basiliôues la^
tines. L'église a un clocher séparé, tour carrée de 102 met.
de hauteur , surmontée d'un ange d'or servant de gi-
rouette : on monte Jusqu'au sommet par une rampe
douce, sans marches et en forme de limaçon.
Le portique ou vestibule qui sert de façade à l'église
S^-Marc est percé de cinq grands arcs, soutenus par deux
ordres de petites colonnes superposés, et de deux arcs plus
petits : au-dessus de ces arcs, une galerie règne sur trois
côtés de l'église ; elle est ornée d'une colonnade de marbre
à hauteur d'appui. Au milieu de cette galerie, au-dessus
de la principale porte, sont quatre chevaux antiques en
bronze doré qu'on attribue à Lysippe, et qui, apportés, dit-
on, d'Alexandrie à Rome par Auguste, placés successive-
ment sur les arcs de Néron et de Tn^an, -transportés par
Constantin dans l'hippodrome de Constantinople, furent
enlevés de cette ville par les Vénitiens après la 4' croisade,
en 1204. De la ^erie s'élève un second ordre de ciaq
grands arcs, soutenus par des colonnes de porphyre, et
dont les renfoncements sont remplis de mosaïques, de
figures, de guirlandes, etc. Ces arcs sont surmontés de
grandes statues de marbre; celui du milieu, plus élevé
({ue les autres, supporte un S* Marc foulant aux pieds na
lion de bronze doré. Entre les arcs et leurs statues s'élè-
vent de petits clochetons à Jour. Au centre du portique
on aperçoit dans le pavé un losange en marbre rouge&tre,
marquant l'endroit où l'empereur Frédéric I^ Barbe-
rousse s'humilia devant le pape Alexandre m, en 1177.
Les grandes mosaloues des voûtes inférieures représen-
tent l'Enlèvement au corps de S^ Marc, le Jugement der-
nier, les Honneurs rendus à S^ Marc, une Vue de l'an-
cienne église de S^-Marc, et ont pour auteurs Pierre
Vecchia, Pierre Spagna, et Léopold del Pozzo. Celles des
voûtes supérieures, représentant la Descente de croii,
l'Apparition aux limbes, la Résurrection et l'Ascension
de Jésus-Christ, sont de Louis Gafitano. Du portique on
entre dans l'église par trois portes de bronze, marquetées
d'argent : les vantaux de celle de droite ont été enlevés
de S^- Sophie de Constantinople; une autre, ainsi que
l'indique une inscription, fut l'œuvre d'un artiste véni-
tien, nommé Bertuccio, en 1300.
L'effet intérieur de l'ésiise de S^-Maïc est des plot
pittores<][ues : ses voûtes d'or, ses dallaoes des marbres les
plus choisis et les plus variés, ses riches mosuaues, ses
colonnes de bronze, de marbre, de porphyre, d'ali)&tre,de
vert antique, de serpentine, dont le nomm s'élève à plus
de 500, et dont les chapiteaux sont composés d'élé^ts
feuillages, peu saillants, mais taillés avec beaucoup de
finesse, tout cela produit un ensemble merveilleux. Les
colonnes et les arcs en plein cintre qui séparent la nef
des ailes supportent une galerie qui fiîit le tour de l'édi-
fice, et qui est réservée aux femmes, selon les usages de
l'Orient. Le chœur est séparé de la nef par un soubasse-
ment de marbre, surmonté de huit colonnes : sur l'archi-
trave, 14 statues de marbre, sculptées en 1393 par les
frères Dalle Massegne, représentent la S^* Vierge, S^ Marc
et les Apôtres; au milieu est une croix d'argent massif.
Sur les côtés de l'entrée du chœur, il y a deux chaires de
marbre, et deux petits autels dont la sculpture très-déU-
cate est attribuée à P. Lombarde (xv* siècle). Le maltre-
autel, au-dessus duquel règne un baldaquin soutenu par
Suatre colonnes de marbre couvertes de bas-r^efs, a
eux icônes ou tableaux, dont l'un recouvre l'autre : le
premier, dans le goût byzantin, a été peint à l'huile sur
planche, en 14 compartiments, par maître Paul et ses fils
Luc et Jean de Venise, l'an 1^44; le second, appelé la
palla d*oro, est peint en émail sur lame d'argent et d'or
ornée de ciselures, guiUochis, perles, camées, pierres
précieuses, et a été exécuté à Constantinople à la fin du
X* siècle, mais plusieurs fois restauré. Le tabernacle est
formé de lames d'or avec des bas-reliefs, dont les figures
sont dans des espèces de niches entoioées de diamants.
MAR
1213
HAR
de raUi, d'éDMnades, etc. Vaatd oft accompagné de
huit itatues en bronze : les quatre ÉYangéliates, par San*
sovino, et les quatre docteurs, par G. Caliari. Dmière ce
grand autel on en Toit un autre où repose le Saint Sacre-
ment : il est orné de bas-reliefo en marbre et en bronie
doré, par Sansorino, et entouré de colonnes, dont deux,
an alMtrB oriental transparent comme le cristal, pro-
tiennent, dit-on, du temple de Jérusalem; la balustrade
est en porphyre. Le chœur contient encore des sièges
vBéi d'ooTrages très-fins en marmieterie du xti* siècle,
et, lu-dessus de ces siégee, deux tnbunes avec bas-reliefs
en bronze, où SansoTino a représenté la vie de S^ Uarc
Dus Faile gauche de Téglise, on remarque : i® la cha-
pelle de Notre -Dame-des-M&Ies, ainsi appelée parce
^'eUe q>partinl à une confirérie religieuse oui excluait
les fenmies, et où se trouvent un autel en marbre de très-
^le sculpture et des mosaïques de Giambono (fin du
iT* lièd^ représentant Tbistoire de la Vierge; 2" la cha-
pelle de 5* Isidore, où la vie de ce saint est figurée en
mosaïques du xiv* siècle, et dont la porte est surmontée
(fan arbre de Jeasé, exécuté par V. Bianchini, sur les
cartons de Salviati ; 3<* Toratoire de la Croix, où se trouve
one colonne de porphvre noir et blanc, qui passe pour un
échantillon unique; 4** la sacristie, ornée d'admirables
mosaïques et d'ouvrages en marqueterie du xvi* siècle,
et dont Ja porte en bronze, magnifique ouvrage de Sanso-
vino, r^résente la mort et la résurrection de J.-C. — Da
côté droit se trouvent : 1* un bénitier de porphyre, dont la
base est un autel antique; ^ le Baptiatère, contenant des
moealmies très-aadennes, le tombeMi du doge André
Dindolo, et un nand bassin de marbre avec couvercle en
hmoB orné de M^-reliefi^ exécuté par Tizianino de Pa-
dons et Desiderio de Florence; 3<» le Trésor, dépouillé
(fan grand nombre d'objets précieux en 1797, et où l'on
eroserre encore des reliques et quelques curiosités.
F. Meschinello, La cfUesa ducale dt San Marco, 1853-
1851, in-S*. B.
HARC-AURÈLB (Colonne de). V. Coloriibs mondiibn-
làus, dans notre utctUmnain ds Biog, et d^Histoire.
MARCELLUS (Théâtre de), le second thé&tre de pierre
qai rot élevé dans l'ancienne Rome. L'empereur Auçuste
le Ht construire en l'honneur de llarcellus, fils de sa
lœarOctavie. Le style de ce monument était si parfait,
qae tes architectes modernes l'ont adopté pour modèle,
soit des ordres ionique et dorique, soit de la proportion
la plos convenable à observer entre ces deux ordres lors-
qaMIs sont superposés. Le théâtre de Marcellus pouvait
(»oteoir 30,000 spectateurs. Transformé en forteresse au
moyen àge^ le milieu se remplit de décombres : plus
tard, la âunille Massfani y fit construire un palais, sur
les dMns de Balthasar Peruzzi. On voit encore quelques
raines encastrées dans des constructions modernes, du
oMé de la place Montanara. — Près du théâtre était le
saperbe Portique d^Octaviê, destiné à servir de refuge au
prâple surpris par la pluie. Servant d'encadrement à
des temples de Jupiter et de Junon, il avait la forme
d'an vaste parallélogramme à double rang de colonnes
de marbre, an nombre de 270 environ, et était décoré de
statoes et de peintures. 11 n'en reste plus que 4 colonnes
et 3 pilastres devant l'église San Angelo in Peschlera.
Cest parmi ses mines qu'on a découvert la Vénus dite
de Médicis qui se trouve à Florence.
MARCHAGE, société que formaient autrefois les habi-
taots de plusieurs paroisses pour avoir droit de faire
paître leurs troupeaux sur leurs terres respectives.
MARCHAND. V. GoinrERÇANT.
MARCHANDAGE, traité passé avec un adjudicataire de
travaux pour la confection de telle ou telle partie de ces
tnTaox. Ainsi, l'entrepreneur de la menuiserie d'un bfti-
tioieat, lorsqu'il s'arrange avec un ouvrier ou un sous-
oitrepreneur pour la confection des portes ou des croi-
sées, avec un autre pour les boiseries, etc., fait du mar^
cbandage. Cette opération est pour les ouvriers laborieux
ose épreuve de leur capacité personnelle, un achemine-
Beot vers leur propre établissement comme entrepre-
DeofB. Cependant elle a été l'objet de plaintes très-vives
de la part des ouvriers, parce qu'un entrepreneur général
çtpe toujours sur les sous-entrepreneurs, et que les
Rmples travûlleors se trouvent ainsi exploités au profit
de plosieurs dans une seule et même entreprise. Le Gou-
vernement provisoire de 1S48, par décret en date du
!i mars, Interdit le marchandage, et le frappa d'une
amende de 80 & 100 fr. pour la première fois, de 100 à
^ fr. pour la récidive, et enfin, en cas de nouveau délit,
d'an emprisonnement d'un à six mois. Ce décret n'est
pas abrogé.
MARCHANDISE, tout ce qui peut fidie Tobjet drim
commerce, en productions de la nature oo de l'industrie
humaine. Les produits à vendre ae rangent en trois
classes : les denrées, c.-&-d. les objets dâtinés à une
consommation directe, et comprenant essentiellement Umt
ce qui se rapporte & l'alimentation; les maUiree pr^
mièrei, c-àrd. les produits destinés à devenir l'objet
d'un travail manufacturier; enfin les produits manufaO'
turés.
La demande d'une marchandise s'étend avec le boa
marché; et comme il faut la payer avec une autre ma^
chandise, la production de celle-ci s'accroît par la raison
que la première est accrue : son prix courant est déter-
miné par le rapport qui s'établit entre l'offre et la de-
mande. Le tact du négociant est de savoir ae rendra
compte, pour chacun des articles de son eommerce, de
l'importance probable de la production et de celle de la
consonunation ordinaire, afin d'établir la comparaison
entre ces deux termes. En ce qui concerne les articles
essentiels à la vie, il suffit souvent d'un très-faible dé-
ficit dans l'approvisionnement anouel pour occasionner
une hausse rapide sur les prix, tandis que le moindre
excès dans la production, surtout pour les objets d'une
conservation difficile ou dispendieuse, amène l'avilisse-
ment du coura.
L'importance de la production, pour les marchandises
dont le commerce est concentré sur certains points, est
en général établie et discutée publiquement. Ainsi, Ll«
verpool et le Havre, les deux grands marchés d'Europe
pour le coton en laine, publient tous les huit Jours une
feuille commerciale, indiquant quel était, au Jour corres-
pondant de la semaine précédente, le nombre de balles
existant dans les entrepôts; on y i^oute ce qui a été lm«
porté depuis Ion ; on en déduit le nombre de balles ven-
dues, et Ton constate par cette opération, au moment de
la publication, Timportance de l'approvidonnement dé-
signé sous le nom anglais de stock. Il faut enfin y ^Jonter
les renseignements venus des États-Unis du Sud, le grand
pays producteur de cette marchandise, sur l'Importance
présumée de la récolte, ainsi que sur le nonâbre des
lûmes déjà parvenues dans les porta d'embarquement de
la Noiïvelle-Orléans, de Mobile, de Charleston, etc. A
l'aide de ces avis, les oscillations sont moins grandes
dans les prix.
De même que les rentes sur l'État, les marchandiaes
sont aussi une matière d'agiotage {V. ce mo^,
Quel<{uefois on fixe ou taxe le prix des denrées, et
l'adiaiinistration empêche, autant qu'elle peut, qu^elles
ne soient vendues au-dessus ou au-desaous de ce prix. Ce
règlement ne fait pas ({ue le prix de la taxe soit la valeur
réelle de la marchandise : il en arrive seulement que le
consommateur paye cette marchandise un prix au-deaaous
ou au-dessus de sa valeur vraie, et duqucu il résulte une
perte abusive ou un ealn abuuf pour les producteurs.
Cest un déplacement de richease causé par un exoèa d'au-
torité. Depuis le commencement du xix* siècle, la corpo-
ration pnvilégiée des boulangera de Paris, dans des
années où le blé était cher, a été contrainte de donner
pour 70 centimes les % kilogr. un pain qui en coûtait 80,
et pour 80 centimes un qui revenait à 90 : lea boulan-
gera se soumettaient à cette condition, parce qu'ils étaient
indemnisés par l'administration. D'autres lois, l'admi-
nistration leur taxait, par manière de dédommagement,
à 60 centimea un pain qui ne leur revenait qu'à 50 cent.
Les taxes que Ton appelle maximum {V. ce mot)^ et qui
fixent le prix des choses au-dessous de leun fhds de pro-
duction, outre qu'elles attentent à la propriété, nuisent
à la production et à la consommation de l'objet taxé.
On a appelé, à une certaine époque, marchandises de
traite, les objets que nos armateun envoyaient en
Afriçiue pour être échangea avec certains produits des
liabitants de ce pays. A. L.
MARCHANDISES RBUVBS. Une lol du 25 Julu 184i, destinée
à protéeer le commerce sédentaire contre la perturbation
que lui causaient les marchands forains, interdit les
ventes en détail de marchandises neuves, à cri publie,
soit aux enchères, soit au rabais, soit à prix fixe pro-
chmié, avec ou sans assistance d'offlden miniatériels.
La contravention est punie de la confiscation des max^
chandises, et d'une amende de 50 fir. à 3,000 f^< pro-
noncée correctionnellement contre le vendeur et l'officier
2ui l'aura assisté, sans préjudice des dommages^-intérèta.
ette loi n'est pas partout rigoureusement appliquée.
MARCHE, en termes de 'Tactique, mouvement qu'exé-
cute un corps de troupes pour se porter d'un lieu dans
un autre. F. Colonni (Ordre en), Ôaima db MâBcns.
MAR
12U
MAB
■àRaUf pièe6 ds imiil^d ooniposéo povr dM imlru-
menti à veot et de peroaasiooi et destinée à régler la
manh$ ou le pei d'one troape militaire, d*iui cortège,
d*ime proeemon, etc. Les marchés militaires, dont
faaage date .de la «terre de Trente Ans, sont ordinaire*
sent à deox repnses, atec on alternatif ou trio ; quel-
faeibla elles forment an seul raorcean, qui se loue de
ioite, mais ad doit être aases étendu et imppeier plusieurs
fois le motif principal. Elles sont à 4 temps, ce qpA les
dietingue du Pas redoublé, écrit à 2 temps, et d'ailleurs
plus m. n.y a en elles un mouvement modéré, quelque
chose es eérémonienx et de solennel. Ce caractère est
Bortout Ihtppant dans les marchés reUgieuses et dans les
marches funèbres : nous citerons, parmi les premières, la
Marche de la communion, que Cherubini a écrite pour sa
Messe du Saere; la Marche des pèlerins de la symphonie
d*HarM par Berlioz; et, parmi les seconds, fa marche
de la Symphonie hér(Àque de Beethoven. Certains opéras
contiennent des marches : telles sont celles d*Alceste
fOluck), de la Flûte enchantée (Mozart 2, de LodxÂska
(Kreutzer), de la Juive et de la Heine ae Chypre ( Ha-
lévy), de Ùom S^ûwttsn (Donizetti), du Prophète (Heyer-
heer). La marche se réunit souvent aui cboBurs, et beau-
coup de cboBors sont dessinés en marche. B.
■ARCHE, mot employé en Musique comme synonyme de
progression (V.ce mot), et de touche dans l'orgue et la
irielle.
MAROR, en termes de Construction, est synonvme de
degré. Dans les marches d'eecalier, la surface horizontale
sur laquelle le pied pose se nomme giron; la partie qui
forme le devant est la oontre^marche,
MARCHE DE NOiT. V, notTB OicttofiftatTs de Biographie
et d^HisUrire,
MARCHÉ, traité d'achat, de vente ou d'échange. H peut
être fdt« soit verbalement, en donnant des arrhes (K. es
mot)^ ant par écrit, sous seine privé ou par-devant no-
taire. On disttngue encore le iiarché d terme, dont Texé-
catkm est ijoumée à un délai filé; le Marché d liorer,
qui consiste à fixer le prix d'une chose et à la vendre,
mais à ne la livrer qu'ultérieurement et d'après les con-
Tentiona arrêtées d'avance ; le Marché d forfait ou d devis
(F. FoRPAiT. Devis), et le Marché d prime (K. Bourse).
■ARGHé, lieu où l'on se rassemble pour vendre et
acheter, et, par extension, lieu quelconque où il se pré-
sente des acheteurs.
La quantité et la «{ualité aes marchandises offertes
influent sur les conditions du marché; toutefois, ces con-
ditions rentrent dans la volonté des parties, puisque,
avec l'abondance des marchandises, les besoins pouvant
être lîMdlement satisfaits, le consommateur devient plus
exigeant sur la qualité et sur le prix ( F. Prix); si, au
contraire, il y a rareté de marchandises, l'acheteur aug-
mente son ofre. Quant an vendeur, ses prétentions, res-
treintes d'abord par la concurrence, s'élèvent aussitôt
que celle-ci disparaît.
Vétendue du marché résulte, pour chaqne produit :
i* des qualités qui le rendent propre à satisfaire certains
besoins des consommateurs; f* 4le l'intensité de ces be-
soins; Z** de son prix de revient, et des frais nécessaires
pour l'amener sur le marché.
n y a plusieurs causes d'encombrements partiels et de
ftagnations temporaires sur le marché : 1° IHgnorance
des besoins da marché, c-à-d. de l'étendue, de fénergie,
de la durée de ces besoins, et des moyens d'échange que
possèdent ceux qui les éprouvent; 2* un accroissement
Irréfléchi de la population ; 3<* l'introduction soudaine de
machines nouvelles et puissantes, qui prennent la place
des travailleurs et anmnentent la masse des produits;
4® le passage soudain d*nn état politique à on autre, de
la paix à la guerre, et vice versa, changements qui amè-
nent des intevuptions brusques dans les rapports des
peuples commerçants, et qui Jettent violemment les ca-
pitalistes et les travailleurs, les manufacturiers et les
agriculteurs, hors des routes ordinaires. A. L.
■ARCHi (Bris de). V, Bris de marchI
MABCHi, lieu, soit construit, soit en plein air, alfecté à
la Tente des denrées et autres objets nécessaires k la vie.
L'habitude de la vie extérieure, aussi bien que l'absence
de ces boutiques ouvertes en si çrand nombre dans nos
Tilles, devait donner chez les Anciens une grande impor-
tance aux marchés : les Grecs leur donnaient le nom
d'Agora (V, ce mot)^ et les Romains celui de Forum
{V, ce mot dans notre Dictionnaire de Biographie et
i Histoire), Au moyen &ge, il y eut peu de marchés
construits; les ventes se faisaient en plein air sur la place
pi;d>li<XMi et cotte coutume s'est perpétuée Ju8<m*à nos
Jours dans un certain nombre de localités. Dmtds le
XVI* siècle on a construit de fort beaux tnarcho. TiJi
sont, en Italie: le Mercato nuovo (Marché-Neuf) de
Florence, bâti par Gosme I*' de Médids en 1548, vaste
loge de forme rectangulaire, plus élégante mie commode,
ouverte de tous oètâi, divisée par des colonnes corin-
thiennes qui supportent les retombées des voûtes et dei
arcades, et flanôuée aux angles de quatre massifs on
contre-forts; le iâercato vecchio (Vieux Msrché) de la
même ville, bâti aussi par Cosme i*', sur les dessins de
Vasari ; le Portique des Marchands, à Arezzo, oeuvre du
même architecte; le marché de Naples, près de la rue de
Tolède, construit au xix* siècle, vaste cour rectangulaire
de trois côtés et circulaire de l'autre, entourée d'un por-
tique dorique sous lequel sont placés les étaux des bou-
chers , les autres denrées se vendant en plein air dans
l'intérieur de l'enceinte. On peut encore citer les ma>
chés de Bologne, de Bergame, de Turin , de Milan, de
Padoue, de Blantoue, de Rimini, etc. — Londres a de
vastes marchés; il en a trois très-remarquables par leur
construction monumentale, Farington, Covent-Garden et
Hungerford. Le i", construit en 1820 par W. Montagne,
est un rectangle de 78 met. sur 50, bâti en briques et
éclairé par des lunettes ; un double rang de boutiques
existe sur toute la longueur de trois côtés. Le î*, con-
struit en 1830 par Flower, se compose de trois rangs de
galeries s'étendant de l'E. à l'O.; la façade de chacune an
N. et au S. est ornée de colonnes de granit, hautes do
4 met., formant une promenade converte ; la façade à
l'E. offre un triple rang de colonnes surmontées d'une
belle terrasse, large d'environ 9 met. — En Hollande, on
mentionne les marchés de Breda, de Delft et de Rotter-
dam. — En France, Paris offre naturellement les plus
belles constructions de ce genre {V. Halles, Marchés,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire).
Dans les départements, les marchés de Strasbourg, Saint-
Dizier, Troyes, Caen, Napoléon-Vendée, S*-Jean-d*AE-
gély, Montpellier, Ifarseille, etc., méritent une attention
piufticulière.
L'autorité municipale a la surveillance des marchés. Ses
arrêtés fixent les heures d'ouverture et de fermeture, les
vérifications préalables de certaines denrées, TemplMe-
ment des marchands, les mesures d'ordre et de salubrité.
Les contraventions sont constatées par les commissaires
ou les agents de police, et punies d'amende par le tribo-
nal de police. Le défaut ou le refus de payement dec
taxes, et les contestations qui en résultent donnent lieu
à un procès devant les tribunaux civils. B.
VASCHé A TERME. On nommo ainsi la vente à pri^
ferme d'une marchandise dont le vendeur n'est pas en
possession, mais qu'il s'engage à livrer à son acheteur i
un terme plus ou moins éloigné. Le blé, les denrées, les
métaux, etc., les rentes sur l'État, les actions indus-
trielles, de banques, de chemins de fer, etc., peuvent être
objets de marchés à terme. On en fait surtout sur ces
dernières valeurs depuis l'époque de la Régence , et la
plupart ne sont, en réalité, que des paris sur leur hausse
ou leur baisse à une époque à bref délai. L'affaire se ré-
sout psr le simple payement d'une différence en plus ou
en moins entre le prix au moment de la vente et celui
au Jour où l'on est censé devoir faire ou prendre livrai-
son. Ces opérations sans capital conduisirent bien des
spéculateurs nudavisés à de sérieuses catastrophes, qni
amenèrent des contestations sur la légalité de ces sortes
d'affaires; un arrêt du Conseil, du U sept. 1724, déclan
que les effets publics ne pouvsient €tre vendus par mar-
cnés k terme. Néanmoins, le Jeu continua comme par le
passé, et de temps en temps des désastres attirèrent Tat-
tention publique. L'administration, se voyant impuissante
contre les Joueurs, pensa couper le mal dans sa racine en
enlevant aux spéculateurs aléatoires les garanties légales
ordinaires : trois arrêts du Conseil du 7 août, du if oc-
tobre 1785 et du 22 septembre 1786, décidèrent que dé-
sormais la loi ne reconnaîtrait plus les marchés à terme
sur des effets publics, déclarant ainsi au spéculateur
malheureux et peu scrupuleux qu'il pourrait désormais
se dispenser de payer.
Napoléon, parvenu au pouvoir comme!*' consul, porta
aussi son attention sur les Jeux de bo»irse ; son sens mo-
ral, si profond, était révolté des fortunes subites et des ca-
tastrophes qui en résultaient, et il voulut aussi interdire
les marchés à terme. En 1799, consultant sur ce point
Mollien, alors directeur de la Caisse d'amortissement, et
qui fut depuis ministre du Trésor, il le trouva d'un ans
contraire. Mollien prétendait oue, s'il y avait des aboi
dan« les marchés à terme, on devait en accuser surtout
HAR
1216
war
h lwliwnéMic# qui les mettait bon da domaine de la
kil$«aym homim libre ayuH pris dee ongÉeemeiiu té-
néniree défait troufer dni» leor eaécution la peine de
am improdeDoe ou de sa mauTsise foi ; qne refficacité
de la pêliie étant dans Teiemple qu'elle laisse, ce n'était
pn on bon eiëmple donné par la Jurispnidenee^ que Tan-
■olstion du oorpa da délit au profit da plos coupiÂ>Ie;
que les marchés de Boarse ayant ce caractère Particalier,
que Isa deux contractants s^obUgent Tiui envers Tantie
psr la métfisSioii d*aR agent de change, qui est rbomme
de la loi, et cet agent étant responsable devant la loi de
tous ses actes, il n'en devait être aucun au'ene refusât
déjuger; que Tobjection commune contre les marchés à
terme faits & la Bouise, que nul n*a droit de vendre ce
qu'y ne possède pas, et que la loi ne peut reconnaître un
marché mii n'aurait pas dû. être fut, n'était au fond
qu'une pétition de principe; qu'enfin la loi ne devait
pss défendre ee qu'elle ue pouvait pas p nir, et bien
moina encore ee qu'elle était réduite à tolérer, le mal
dont on ae plaignait prouvant par sa persiatanoe l'inuti-
lité des arrêts qui avaient été rendus. — Napoléon fut
frappé de cette dernière considération , qui touchait au
respect dû à l'autorité publique, et ne prononça pas
rinterdlction qu'il méditait; mais il gsrda sa convicnon
sur le reste, car, onse ans apr^ il inscrivit dans le Oodf
pénal (art. 492) des dispositions contre les msrcbés à
terme sur les ellets publics; il abrogea la légialation an*
térieore, d'aprèa laquelle les tribunaux ont toi^ours Jug*
depuis lea questions de ce genre, sans vouloir dUnn-
guer lea marchés conclus par l'entremise d'agenta de
diange de ceux bits hors de la Bourse , ne regardant
ni lea uns ni les autrea comme sérieux ou valahlie.
r. BooasB. C. D— T.
MÂBCsé aÉGifiATBua. V* CéaéALBS.
MARCHEPIED, servitude établie pour l'utilité pu-
Uique. et consistant dans le passage oui doit être laine
le long des rivières navigables ou flottsbles.
MâRDELLES, margelles ou marges, excavations
qu'on trouve dans certaines parties du Beny, en Suisse
et en ÉcMse. Elles sont en forme de cônes tronqués ren-
versés, de ^KmensioDS variables (150 met. de large sur
6 4 8 de profondeur quelquefois), le plus souvent réunies
en asses grand nombre. On les fait remonter Jusqu'au
.temps des Celtes, et l'on y a vu soit des habitations, soit
des siloa. F. De La Yillegille, Notice sur les mordilles,
dans les JIfémoirw de la Société des Antiquaires de France,
nouvelle série, t. IV.
MARÉCHAL. i F* ces mots dans notre Diction'
MARÉCHAUSSÉE. \ naire de Biogr. et d'Histoire.
MARÉCHAUX FERRANTS, ancienne corporation dont
les statuts, rédigés au xm* siècle, furent complétés par
une ordonnance du prévôt de Paris en i473, et homo-
logués an Châtelet en 1651. L'apprentisssge était de
3 ans; le brevet ooûtsit 120 livres, et la maîtrise 600. Le
patron de la corporation était S* Éloi.
MARÉCHINB (La), danse en usage dans le Baa Poitou
parmi les habitants des marécages. Elle est à deux per-
sonnes, guidées par un branle chanté, ou plutôt fre-
donné. Les mouvements de ïambes y sont peu de chose;
ks pas sont courts et sans glissades.
MARÉE, mouvement journalier et régulier d'osdllar
tion par lequel la mssse de l'Océan se soulève et s'abaisse
altematlTement , de sorte que les eaux couvrent et aban-
donnent alternativement une partie du littoral. Ce phé-
nomène est produit par l'action attractive du soleil et de
Is lune. Les eaux montent pendant 6 heures environ, en
inondant les rivages et en se précipitant dans l'intérieur
des fleuTOS Jusqu'à de grandes distanças de leurs embou-
cbnres; c^est le flux ou la marée montante : après s'être
maintenues quelques instants à leur plus grande éléva-
tion (ce qu'on appelle pleine mer ou marée haute ), ellea
descendent aussi pendant 6 heures; c'est le reflux ou la
narée descendante; le temps que 'es eaux restent au
plus bas ae nomme basse mer ou m'^rée basse. La durée
de chaque oscillation est d'un peu plus de 12 heures : la
durée moyenne de deux oscillations est d'un Jour et
50 minutes, temps moyen qui s'écoule entre le passage
de la lune an méridien d'un lieo et son retour à ce
même méridien ; psr conséquent, d'un Jour à l'autre, la
marée retarde de 50 minutes. Ce n'e»* Pas »« moment où
le soleil et la lune exercent leur action que l'effet s'ob-
KTve; les marées, dans nos portai suivent en général
fan Jour et demi Hnstant des phas». Dans chaque mois,
Cest à l'époque des syzywcs, c-è-d- vcts le temps de la
nouvelle et de la pleine lune, que 1 élévation de la mer
est la plus consiaérable' son intu'iiescence est la plus
fldMe à l*ipoque du premier et du dernier quartier. Les
marées syzygiea qui arrivent lors de l'équlnoxe sont gé- '
néralement plus ferles que celles du reste de Tannée. La
marée ne se fait pas senâr an même instant dans tous les
lieux, Men que la distance qui les sépare soit ssseï peu
considérable. L'élévation verticale dea eaux par la marée
montsnte n'est oss non plus la même partout : elle est,
par exemple, oe 7 mm. environ à Ouessant, Brest,
Cherbourg, le Havre, Douvres; de 12 met. à Guemesey^
de 15 met. entre Jersey et Saint-tf Jo, de 15 à 17 met
pr^ de Bristol, de SO a S3 met. dans la baie de Fùndy ;
aux petites lies de l'océan Pacifique, la marée ne monte
qne de 0"',65; aux Iles africaines de l'Atlantique, elle
Yarie de 1 à 3 met.; au N. de l'Europe, elle est de
1"',50; au N. de l'Amérique, elle n'est quelquefois que
de 0»,0, Jamais de plus de 0",55. On a dit une la Médi-
terranée n'était pas sujette au flux et au reflux : cepen-
dant la marée y existe; elle est de moins d'un mètre,
I et a été constatée dans les ports de Toulon , de Venise,
de Naplea et d'Alger. Bien que les marées les plus fortes
se remarquent d'ordinaire dans les goires, il y a aussi de
hautes marées sur des cotes peu découpées : ainsi, on en
a observé de 13 met. dana la Guyane, au mouillagie de la
Callebasse. Les causes des différences dans l'heure et
dana l'élévation des msrées sont : les distances plus on
moins considérables du soleil et de la lune à la terre, la
position respective de ces deux astres et leur déclinaison ,
l'étendue et la profondeur dea mera. le gisement des
cètes et la disposition des anfhictuosités qu'elles pré-
^ntent, la direction dea eouranta, la puissance des
vents, etc. Gertainea mers resserrées eu d'une flsible
étendue, comme la Baltique, la mer Noire et la Cas-
pienne, n'ont pas de msxées, du moins apprédablea :
cela vient de ce que la force attractive dea astrea n*em«
brasse point un espace assez considérable pour que l'élé-
vation des eaux soit sensible. — Le phénonAne des
marées avait été observé par les Anciens. Hérodote et Dio-
dore parlent de l'élévation et de l'abaissement Journalier
dea eaux de la mer Rouge. Aristote ne connut le flux et
le reflux que par oui-dire, et Jes soldats- d'Alexandre
éprouvèrent une admiration mêlée de frayeur, lorsqu'aux
bouches de l'Indus l'océan Indien leur offrit un spec-
tacle dont la^ Méditerranée n'avait pu leur donner une
idée. Les Stoïciens attribuèrent les msrées aux aspira-
tions et expirations de l'Ame du monde. Mais Pythéss de
3farseille, qui visita l'Atlantique, eut une connaissance
plus claire des oscillations de la mer, et remarqua qu^eUea
étaient en rapport avec les révolutions de la lune. On
voit dana Strabon que Posidonins, ami de Gicéron et de
Pompés, était également instruit de cette coïncidence.
Cest dans Pline {Hist, fiot., H , 07 ) que les marées ont
été le moins imparfaitement expliquéea, jusqu'au Joor
où Newton lea rattacha scientifiquement à la loi de la
gravitation universelle. fi.
MARELLE ou MÉRELLE, nom de deux Jeux d'en-
fants. Dans l'un, on se sert d'un carton sur lequel sont
tracés trois carrés rrafermés Tun dans l'autre et unis
entre eux par 8 lignea transversalea, dont quatre anx
quatre coins et quatre aux quatre milieux. Un petit rond
eat tracé à la Jonction de toutes les lignes, ce qui fait que
les quatre côtés des trois carrés portent chacun trois p^
titB ronds. Les deux Joueurs ont chacun 0 pions de cou*
leur différente. L'habileté consiste, d'un côté, à placer
de front une rangée de 3 pions de même couleur, et , de
l'autre, à y faire obstacle en plaçant un pion entre lea
deux ou à la suite des deux de l'adversaire. Celui qui
réussit à faire une rangée de trois de ses pions a le droit
d'enlever à son choix un des pions de l'adversaire. Les
pions ne. marchent qu'en ligne droite. La partie est finie
lorsque Tun des Joueurs n'a plus nue S pions. — Pour
l'autre jeu de Marelle, on trace sur le sol un carré long,
divisé en 6 parties par des lignes transversales, oe qui
forme 6 rectangles, dont les quatre premiers sont dési-
gnés par les n^ 1, 2, 3 et 4, le 5* est appelé enfer^ et le
6' reposoir. Sur le prolongement du grand carré long, on
figure un carré, divisé par deux figues diagonales en
quatre triangles appelés culottes et désignés aussi par
des numéros. Enfin , plus loin encore, on trace un demi-
cercle qui ferme la marelle et se nomme paradu. Le Jeu
consiste à Jeter un palet dans tous les compartiments
successivement, à aller le chercher à cloche-pied, et à le
faire sortir de la marelle sans qu'il s'arrête sur aucune
ligne et sans y toucher soi-même. On se repose, c-4-d.
qu'on peut mettre les deux pieds à terre, dans le reiposoifr
et dans le paradis. Le palet et le sauteur doivent tou-
jours franchir Venfer sans y entrer.
MAR
1216
MAR
MARENNE, espèce de ponton composé de iU navires
oints ensemble, et supportant une tour de bois. Lee
Croisés s*en servirent en 1217 pour attaquer la ville de
Damiette. ^. . . _
HARFORIO. r. ce mot dans notre Déctwmuum os
BèographU et S Histoire,
MARGELLES ou BiARGES. 7. BIardellbs.
MARGEUR , en termes d*Imprimerie , ouvrier chargé
de placer les feuilles de papier pour que des cordons, au
moyen du mouvement de rotation donné à la presse
mécanique, les fissent arriver sous les cylindres passant
sur les formes qui doivent les imprimer.
MARGITÈS, poème satirique grec, ainsi appelé du nom
du personnage qu*on y tournait en ridicule. Il en reste
très-peu de chose. On a attribué ce poème à Homère,
•pinion que rend inadmissible la présence des vers
tambiques mêlés aux hexamètres. Ce n*en était pas
moins une œuvre ancienne ; Aristote pensait que le Mar-
gitès avait été à la comédie ce qu'étaient à la tragédie
Vniade et VOdyssée, c-à-d. le prototype des caractères
comiques.
MARGRAVE. ) 7. ces mots dans notre Oicttotmatre
MARGUILUER. ] ^ Biographie et (T Histoire.
MARIAGE, union légitime de Thomme et de la femme,
ayant pour but la naissance d*une famille. On distingue
le mariage doU, contracté devant Tautorité civile, et le
mariage religieux, contracté devant un ministre du
culte. La faculté de se marier étant un droH naturel et
civil , la loi civile n*a point à proclamer ce droit : elle se
borne à indiquer les restrictions ou empêchements qu'il
Kut recevoir. Ces empêchements sont ou absoltis, comme
xistence d'un premier mariage non dissous, la qualité
de prêtre catholique, l'erreur quant à la personne; ou
conditionnels^ c-À-d. susceptibles d'être levés par des
dispenses, comme le défaut d'&ge. L'âge légal du mariage
est de 18 ans révolus pour l'homme, 15 ans pour la
femme : le chef de TÉtat peut accorder une dispense d'une
année. On peut aussi diviser les empêchements eif em-
pêchements généraux^ qui interdisent le mariage avec
toute peraonno , comme un premier mariage non &80us,
ou un défaut 'i'^sf' dont on. n'aurait pas été relevé; et en
;^m pêchements spéciaux, c-è-d. relatifs au mariage entre
certaines personaes, comme la parenté à un degré déter-
miné par la loi. Le mariage est prohibé, en ligne directe,
entre tous les ascendants ou descendants, naturels ou
adoptifs, et les allite dans la même liane ; en ligne col-
latérale, entre frère et sœur, beau-père et bell^mère,
bean-flls et belle-flUe, gendre et bru. Il ne peut avoir
lieu entre l'oncle et la nièce, la tante et le neveu, les
beaux-frères et belles-sœurs, sans une dispense du chef
de l'État. Le défaut de consentement des père et mère
(en cas de dissentiment, celui du père suffit), ou, à leur
oéfaut, des autres ascendants, est encore un empêche-
iuent au mariage des fils et des filles qui ont atteint l'âge
légal : mais cet empêchement n'est que temporaire, et se
résout en délais et en formalités respectueuses. Après
Page de 25 ans pour le fils et de 21 pour la fille, ils peu-
vent, en cas de refus de consentement, adresser trois
fois à leurs parents, de mois en mois, un acte respec-
tueux ou sommation respectueuse; après 30 ans, un seul
acte suffit. Puis on peut passer outre à la célébration du
mariage. C'est également un empêchement temporaire
qui ne permet pas aux fils et filles privés d'ascendants
de se marier avant l'âge de 21 ans, sans le consentement
du Conseil de famille. Les militaires et les marins doi-
vent, pour se marier, justifier d'une pennission de leurs
chefs ; les officiers, en passant outre, encourraient la des-
titution, et la perte de leurs droits â toute pension ou
récompense. Les officiers doivent Justifier que leur femme
aura une dot de 1,200 fr. au moins en fortune person-
nelle. Tout officier de l'état civil qui célèbre sciemment
le mariage d*nn militaire non autorisé est destitué de ses
fimctions.
Pour assurer l'exécution des prescriptions relatives aux
ipêchements au mariage, la loi fournit trois moyens :
i* l'obliçation de faire précéder le mariage de certaines
publications ( F. Ban db mariagi) ; 2<* la voie d'opposi-
tion, ouverte à ceux qui ont un intérêt ni et actuel à
s*opposeri 3* Vaction en nullité, possible même après la
eéléoration du mariage , si les formalités légales ont été
négligées ou mal remplies, ou si le mariage célébré re-
cèle en lui-même des vices radicaux propres à l'annuler.
S*il y a bigamie ou inceste, la poursuite en nullité n'est
pas seulement accordée à ceux qui ont un intérêt per-
sonnel, mais le ministère public agit d'office. Si la de-
mande en nullité n'est fondée que sur le défaut d'âge
des contractants Ion de la célébration d« mariage, et qm
rage légal ait été atteint avant cette réclamation, on la
repousse par une fin de non-recevoir, parce qu'il est de
règle d'admettre la I^ité du mariage, toutes les fois
qu'il est posais de le faire d'une manière plausible. 11
en est de même si le vice allégué est Tabsenoe de con-
sentement, et oue cette absence ait été couverte depuis
par quelque adhésion, même tacite.
Le mariage lécpal est iàit par l'offider de l'état dvil , en
présence de 4 témoins. Après avoir donné lecture aux
futurs époux des art du Coos Napoléon relatifs aux obli-
gations du mariage et aux droits respectifs des époux, il
reçoit d'eux la déclaration qu'ils veulent se prendre pour
mari et femme; il prononce, au nom de la Loi, qu'ils
sont unis par le mariage, et en dresse acte sur-le-champ.
Certaines obligations naissent du mariage légalement
con Acte. Ainsi , les deux époux ont l'obligation com-
mune de nomrir et d'élever leurs enfants. La femme est
obligée d'habiter avec le mari, et celui-ci est obligé de Is
recevoir. Les époux se doivent mutuellement fidélité,
secours , assistance ; le msri doit protection à sa femme,
la femme obéissance à son mari. Du msriage résultent
aussi certains droits respectifs des époux en ce qui con-
ceiTie leurs biens (V. Feuue, ComiuNAiiTé, Dot, Dotal
— Régime ).
Nul homme ne peut avoir en même temps plusieurs
épouses , ni aucune femme plusieurs maris ( F. Bisavie,
Poltgahib) : cette règle fondamentale et absolue est seule
propre à honorer le mariage. C'est encore un principe
reconnu, que le mariage n est point une union tempo-
raire, mais qu'il ne peut se former que dans des vues de
perpétuité. Certains peuples ont admis le divorce ou la
dissolution de l'union pour des cas plus ou moins graves
( V, DivoncB , dans notre Dictionnai^ de Biographie et
d*Bistoirêi Auioujrd'hui. en France le mariafor oe se dis-
sout que p*u ta muit de l'un des époux; tes peines en
I traînant autrefois mort civile peuvent seulement dotin (
* lieu à demande en séparation de corps. V, te Co
' Napoléon, art 144-228 ; Bemardl^ Commentaire sur l
toi du 24 wntése an xi concernant le mariage ^ 1903.
in-8® ; Nouçffède, Jurisprudence du martaqe, 1817, in-8* ;
Daubenton, Traité complet des droits des époux Vun
envers Vautre et à l'égard de leurs enfants, 1818, in-8*;
Baston, Concordance des lois civiles touchant le mariage]
1824, in-12; Vazeille, Traité du mariage, 1825, 2 vol.
in-8; Peizani, Traité des empêchements du mariage,
1838, in-8o ; Allemand , Traité du mariage et de ses effets,
1847, 2 vol. in-8<> ; Rupert, Les Lois civiles concernant
le mariage des chrétiens, 1853, in-12; Tiercelin, Du ma-
riage ciml et du mariage religieux, 1854, in-8° ; Demo-
lombe. Traité du mariage et de la séparation ie corps,
1800, in-8^. V. aussi Mariage, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
MARUGB (Acte de ) , un des actes de l'État civil {V. ce
mot)^ formant le titre légal des époux , et suffisant pour
faire preuve complète du mariage. Il contient les noms,
prénoms, professions, âges, lieux de naissance et domi-
ciles des époux, s'ils sont majeurs ou mineurs; les pré-
noms, noms, professions et domiciles des pères et mères,
le consentement des pères et mères, aïeuls et aïeules, et
celui de la famille, dans les cas où ils sont requis ; les
actes respectueux ,. s'il en a été fait; les publications
dans les divers domiciles; les oppositions s'il y en a eu,
leur mainlevée, ou la mention qu'il n'y a pas eu op-
position ; la déclaration des contractants de se prendre
pour époux, et le prononcé de leur union par l'officier
public ; les prénoms , noms , âge, professions et domiciles
des témoins , et leur déclaration, s'ils sont parents on
alliés des parties, de quel côté et à quel degré.
UAsuGB (Contrat de), contrat qui régit l'association con-
jugale et fixe les droits des époux quanta leurs biens. Il est
entièrement abandonné au libre arbitre des contractants :
toutefois, ils ne pourraient faire aucune convention déro-
geant soit aux droits que la puissance maritale confère h
l'époux sur la personne de l'épouse ou des enfants, soit
à ceux qui dénient, pour l'un ou l'autre des conjoints,
de la puissance paternelle ou de la tutelle légitime. Ainsi,
pour les biens du mari , une clause qui soumettrait le
mari à demander à sa femme ou à la Justice la permis-
sion de les administrer et d'en disposer, serait nulle; l
en serait de même, pour les biens de la femme non ma-
riée sous le régime de la séparation de biens, si une
clause en réservait l'administration à la femme et la seule
louissance au mari ; serait nulle aussi la clause qui attri-
buerait à la femme le droit d'aliéner ses biens sans auto-
risation. La loi déclare également nulles : les conveotioDi
j
MÀR
1217
MAR
qoi dérosanfant à Tordre légal des saooesdonst les sti-
palationi loterdites par quelque prohibition da Code ;
oeUesmii , aaas être prérues par un texte spécial , seraient
cDotniret au bonnes mosors on à Tordre public. II y a
cmq rentes différents de conventions matrimoniales,
que les futurs époux peavent choisir, et dont ils ont môme
SûcoJté de former un mélanoe : la commtmauté légale,
eommunamU convetUiomMlê , TecBcItiràm êûnple de
ctmmunaitU, la séparation de biens, et le régime dotal
{ Y» cet mots )• Lorsque les époux se marient sans fiUre
de contrat, ils sont soumis an rég;ime de la communauté
légale. Les conventions matrimoniales doivent être arr^
téei avant la célébration du mariage, par acte passé d^
Tint notaire et avec minute; tant que la célébxîition n*a
p« en lieu, on peut y faire des changements, mais
toujours par acte passé devant le notaire en minute, et
avec le concours de tous ceux qui ont été parties au con-
trat (c-è-d. les époux, ceux des signataires qui leur ont
bit des Ubâralités, ceux dont le consentement est néces-
nire à leur marînge, et ceux môme dont ils sont tenus de
requérir conseil). Tout changement apporté au contrat
après la célébration est nul. Bien que le futur époux qui
« encore quelque ascendant ne soit majeur pour le mariage
qa*à r&gede 35 ans révolus, il est majeur aSi ans pour le
' contrat de mariage ooDune pour les autres contrats pécu-
otaires; de plus, la loi dédare valables les conventions
laites par un mineur avec Tassistance de ceux dont le
«ODseotement suffit à son mariage. Le contrat fait par un
mineur ou un prodigue sans Tassistance voulue, ou par
un mineur avant Tâge exigé pour le mariage et sans avoir
obtenu dispense, devient valable par une exécution volon-
tairement faite au moment où Ton serait devenu capable.
Lorsque les époux ou Tun d'eux sont commerçants, leur
tootrat doit être transmis par extrait , da<is le mois de sa
date, aux greffes des tribunaux civil et de commerce du
domicile du mari, pour être exposé pendant un an dans
leur auditoire, et aux chambres des notaires et des avoués;
f*il n'y a pas de tribunal, cette exposition est faite dans
la principale salle de la mairie. La loi a voulu par là que
ceox qui seraient en relations d'affaires commerciales avec
tes époux pussent connaître le plus ou moins de sûreté
que le contrat leur donne. Le notaire oui négligerait de
bire la transmission eerait passible d'une amende de
iOO fr., et môme de destitution et de responsabilité en-
îen les crôancien, s'il était prouvé que l'omission était
volontaire. L'époux séparé de biens ou marié sous le
régime dotal doit, s'il se fidt commerçant après son ma-
riage, faire aussi la remise de son contrat, sous peine,
en cas de Milite, d'être condamné comme banqueroutier.
F. le Code Napoléan. art. 4387^581 ; Bemardi , Com^
i^tntaire sur Us lai du ^ pluviôse an xii, relative au
tvdrat de mariage, i804, in-8*; Carrier, Traité du con'
<nrt de mariage, 1818, in-8*; Biret, Traité du contrat de
muiage, 1825, in-S*; Bellot des Minières, Traité du
«Mtrol de mariage, 1826, 4 vol. in-8», et Le contrat de
uoriage considéré en luinnême , 1860, 1 vol. in-8* ;
Odier, ThUté du eonirat de mariage, 1840, 3 vol. in-8» ;
Pont et Rodière, Traité du contrat de mariage, 1850,
i vol. in-8* ; Troplong, Commefitotrs du contreit de ma-
fisge, 1850, 4 vol. in-8*.
luaucB aBuoiBox. « Je ne vols pas, dit l'abbé Fleory,
que les mariages des Israélites fussent revêtus d'aucune
eéréoionie de religion, si ce n'est des prières du père de
ftunille et des assistants pour attirer la bénédic^on de
Dieo. Nous en avons des exemples dans le mariage de
Bebecca avec Isaac, de Ruth avec Booz, de Sara avec
Tobie. Je ne vois point qu'on offrit de sacrifice à ce sujet,
qo*on allât au temple, ou qu'on fit venir de prêtres. Gela
•a passait entre les parents et les amis. Ausri ce n'était
encore qu'un contrat civil. » Chez les Grecs, le mariage
était accompagné de sacrifices à Jupiter, à Junon, à Diane,
^ Destin. A Rome, il n'y eut de cérémonie religieuse
que dans le mariage jNir con/SafY^ton.
La loi chrétienne a élevé le mariage à la dignité io
Saccffflient ( F. ce mot ). 8^ Cyrille, S' Épiphane, 8^ Au-
fDstîji disent qoe ce fut Jésus-Christ qui, par sa présence
Vix noces de Cana, institua ce Sacrement comme signe
de son union avec l'Église. Cette doctrine ne fut point un
dogme universellement admis, puisoue 8^ Thomas et
S^ Boaaventure élevèrent des doutes à ce s^Jet. Mais le
jncile de Trente a décidé la question. Le caractère du
wemeot de mariage est de sanctifier l'alliance de
nmname et de la femme, en leur donnant la grftce de
livre ensemble chrétiennement Cest le prêtre qui est
le mmistre du Sacrement. L'Église catholique enseigne
^'ui: mariage entre des infidèles ou des hérétiques peut
être valide comme contrat naturel et contrat civil, ma»
qu'il ne peut être élevé à la dignité de Sacrement, quand
même les contractants abjureraient ensuite leurs erreurs,
n y eut, dans les premiers temps du christianisme, des
sectes qui soutinrent que le mariage était un crime;
d'autres prétendirent, contrairement au sentiment des
Apôtres, que la vir^ité n'était pas un état plus parfidt
que le mariage. Beaucoup de Pères de TÉgUse blâmèrent
les secondes noces. Aujourd'hui, la loi canonique déter-
mine un certain nombre d'empêchements au mariage.
Les uns, âits prohibitifs, rendent le mariage illicite, sans
l'annuler; les autres, appelés dirimants, le rendent nul.
Pour les premiers, ce sont : l'omission de la publication
des bans, la célébration du mariage dans le temps pro-
hibé par l'Église f depuis TAvent jusqu'à TÉpiphanie, et
depuis le mercredi des Cendres Jusqu'au mmanche de
l'octave de Piques) , le vœu de chasteté ou d'entrée en
reli^on. Les seconds sont, outre ceux que précise notre
loi civile : la profession religieuse , Tamnité spirituelle,
le meurtre pour arriver au mariais, Tadultère, le rapt,
la violence, la clandestinité, la folie, etc. Quant aux
mariages mixtes , c.-à-d. entre personnes de religions ou
de communions différentes, TÉgUse se refuse générale-
ment à les bénir, à moins que les époux ne s'engagent à
faire élever leurs enfants dans la religion catholique. Les
évêques peuvent donner des dispenses pour marier dans
lea temps prohibés ou sans que tous les bans aient été
publiés ; mais le pape seul lèîre quelques-uns des empê-
chements plus graves. En France, avant la Révolution
de 1780, le ministère du prêtre accomplissait à la fois le
mariage civil et le mariage reli^eux : depuis cette épo<{ue,
le mariage dvll suffit pour valider l'union matrimonialo
aux yeux de la société, et le Code pénal (art. 100, 200}
porte même des peines contre tout ministre du culte qm
procéderait au mariage religieux avant le mariage civil.
Ces principes ont été admis dans le royaume d'Italie.
Mais l'Église n'accorde le caractère de légitimité qu'au
mariage qui a été sanctionné par la reli^on ; en sorte
que les enfants nés avant la bénédiction nuptiale, même
après le mariage civil , sont illégitimes aux yeux des ca-
tholiques, tendus qu'ils le seraient d'après la loi fran-
çaise, si le mariage religieux seul eût été célébré.
L'Élise grecque, comme TÉdise catholique, fait du
mariage un Sacrement. Pour les Protestants, au contraire,
le nuuriage est un contrat purement civil, et la bénédic-
tion nuptiale n'est qu'une simple cérémonie, ne produis
sant pas plus d'effet qu'une pnère ordinaire. Les catho-
liques n'admettent aucune cause qui puisse autoriser le
divorce, les protestants le permettent dans plusieun caa«
MARIAGE (Jeu du) OU do BaiSQim, Jeu de cartes dans
lequel chacun des deux Joueura reçoit S cartes ; la 11* sert
d'atout , et le donneur qui la retourne peut la changer
contre le sept d'atout, s'il le possède en main. Après
chaque levée, on prend une carte au talon. Le roi et la
dame de la même couleur constituent le martage^ et «e
comptent pour SO; le valet y aloute 10; le mariage
d'atout compte double. L'as et le dix, cartes privilégiées
qui l'emportent sur les figures, sont appelées brisques.
on les compte chacune pour 10, lorsque les Joueura
cherchent à la fin celles qu'ils ont dans leure levées.
IfARlÉE (Jeu de la] ou de Godibardb, Jeu de cartes
pour lequel on prend un jeu de piquet s'il n'y a que cinq
joueura, un Jeu complet s'il y en a plus. Jusqu'à 0. Il j a
trois cartes privilégiées, dans Tordre suivant : la fifuim-
barde ou dame de cœur, le roi de cœur, et le fou ou valet
de carreau. Les chances qui viennent ensuite sont le
potfi^ ou 3, 4 et 5 certes de même couleur, et le mch
riage, formé d'un roi et d'une dame de même couleur.
Cinq corbeilles affectées à ces cinq chancea reçoivent de
chaque Joueur un Jeton, pour celui qui aura Tune ou
l'antre dans son Jeu« Les Joueura ayant reçu chacun
5 cartes , on déclare successivement le point, les ma-
riages, le fou, le roi, et la guimbarde. Puis, tous ayant
mis de nouveau un Jeton dans la corbeille du point, on
Joue à faire des levées pour gagner cette mise. Le Jouem
qui renonce, ou qui Joue avant son tour, ou qui, pou-
vant forcer ou couper, ne le ftdt pas, paye un jeton à
tous les autres. T6ut mariage qui se fait en Jouant vaut
à celui qui a mis le roi un Jeton de chaque Joueur; le
mariage du roi et de la dame de cœur en vaut deux ; le
fou qm fait la levée gagne aussi im Jeton « mais il paye
s'il est pris.
HARIE-BUAJEURE (Basih'que de Sanm»-), à Rome,
sinsi nommée psrce qu'elle est la principale des églises
consacrées à la Vierge. Elle est la quatrième des nasi-
Hques patriarcales, et s'élève sur le mont Esquilioi à
77
MAR
121«
MAR
t/mplaornoÊùX d*im tomple de Jwion Lacbie« «t près
ffnne esplanade IrréguUère, où Paul V a ftdt ériger sur
mn piédestal une saperbe coloDoe corinthieiuie, haute de
M met., en marlire blanc, tirée de la basilique de Con-
stantin, et sormontée d*une statue de la Vierge, en brome
doré. S**-llarie-Bf4eore, fondée en 352, sous le pontificat
de S< Libère (d*où lui vint le nom de Banlique Ubé-
risiifié), fut d'abord appelée S^-Mari^-oux-Nêiges^ en
mémoire d*une neige épaisse qui était miraculeusement
tombée du ciel an mou d'août pendant une sécheresse
dévorante. Sixte lU l'agrandit en 432, et elle reçut alors
le plan général qu'elle a conservé Jusqu'à nos Jours, et
que nous allons décrire. La façade se compose de deux
portiques superposés, ornés de colonnes. Celui d'en bas
a cinq ouvertures, dont trois sont surmontées de fron-
tons, triangulaires pour les baies des extrémités, drcu-
laires pour celles du centre. Les colonnes, au nombre de
huit, la porte centrale en ayant deux rentrantes, sont
d'ordre ionique et en granit. Sous ce portique on trouve
dnq portes, dont une, la porte Sainte, reste murée,
excepta dans le temps de Jubilé. Le portioue supérieur
n'est qu'à trois arcades, avec colonnes corintniennes; l'ar-
cade du milieu, plus haute que ses collatérales, forme
one looe d*où le pape donne la bénédiction an peuple les
leurs de grande solennité. L'ensemble est surmonté d'une
balustrade ornée de cinq statues. Deux bâtiments d'une
architecture de palais, et dont les lignes architecturales
•e profilent avec cette façade, l'encadrent, se Joignent au
portique inférieur en demeurant détachés du portique
supérieur, et servent d'habitation aux chanoines de la
basilique. Vers le fond de l'église s'élève un campanile
quadrangulaire, le plus haut de Rome. Cette façade, qui
a de la mî^esté et de la grandeur, est l'osuvre de F. Fuga,
qui réleva par ordre de Benoit XIV, en 4743, et pour
laquelle on démolit l'ancienne façade qui avait été con-
struite par Eugène UI, en 1145. Les bâtiments réservés
aux chanoines datent de Paul V, et le campanile de Gré-
Soire XI. — L'intérieur rappelle tout à fait la disposition
'une basilique de Tandenne Rome. Il est divisé en
3 nefs par deux files de 36 colonnes ioniques, 18 de chaque
Q6té, en marbre blanc veiné, supportant un entablement
continu, interrompu aux deux tiers de la nef par deux
nandea arcades ouvertes sur deux chapelles latérales.
Sur cet entablement s'élève une sorte d'attlque orné de
pilastres composites à l'aplomb de chaoue colonne, de
niches dans leurs intervalles, Qt de granos carrés de mo-
saïque datant, dit-on, du vui* siècle. La nef est couverte
par un plafond à 5 files de caissons dorés, ouvrage de
San-Gallo. Au fond de l'abside brille une grande mo-
saïque d'un bel effet, où le couronnement de la Vierge
est représenté sur fond d'or. On admire aussi les mo-
saïques du pavé, en appareil alexandrin. En entrant, on
voit deux tombeaux : à droite, celui de Clément IX, avec
des statues de ce pape par Guidi, de la Foi par Fanc«lli,
de la Charité par Hercule Ferrata; à gauche, celui de
Nicolas IV, deuiné par Dom. Fontana, avec statues par
Léonard de Sarzane. Le maltre-autel de la basilique,
plaûé au droit des deux grandes arcades, est isolé : formé
par une grande urne de porphyre, que recouvre une
table de marbre blanc et noir soutenue par 4 petits anges
en bronze doré, il a un riche baldaquin composé par Fuga,
porté par quatre grandes colonnes corinthiennes de por-
phyre entourées de palmes dorées; en haut sont 6 anges
de marbre sculptés par P. Bracci. Du c6té droit de l'édi-
floe est la belle chapelle du S^-Sacrement ou de la Crèche,
commandée à Fontana par Sixte-Quint, et qui serait à
elle seule une église complète, puisqu'elle a sa coupole,
ses chapelles latérales et sa sacristie. Elle est en croix
grecque; au milieu s'élève Tautel du S^ -Sacrement,
dont le tabernacle est soutenu par quatre anges de bronie
doré, et, au-dessous, un autre autel consacré à la Nati-
vité de J.-C; à droite, le tombeau de ^xte-Quint, des-
siné par Fontana, avec statue par Valsoldo, s'élevant au
milieu de ouatre colonnes de vert antique, et entre les
statues de S' François par Flaminio Vacca et de S^ An-
toine par P. Olivieri ; a gauche, le tombeau de Pie V,
dont le corps est conservé dans une urne de vert antique
ornée de bas-reliefs, et dont la statue est de Léonard de
Banane. De l'autre c6té de la nef, en parallèle de la cha-
pelle du S^-Sacrement, est celle, plus riche encore, de la
8**-Vierge, dite chapelle Borghise, construite en 1611
aux frais du pape Paul V par Flaminio Ponzio, et en croix
grecque aussi avec une coupole. Les murs en sont re-
vêtus de marbre; une image de la Vierge, attribuée à
8^ Luc, est placée sur un fond de lapis-lazuli et entourée
de pierres prédeuses i l'autel a quatre colonnes canne-
Jées en Jaspe oriental, avec basée et chapiteaus dsbnoie
doré, et l'entablement est en agate; beaucoup d'aitistai
ont couvert de fresques les srcades et la cos^rale, enus
autres le Guide, Lanfranc, Maderno, GigoU, le chevsliei
d'Arpino. A droite de la chapelle s'élève le tombesu de
Clément VŒ, avec quelques bas-reliefs du Bemio ; à
gauche, celui de Paul V, dont les bsa-reliefs sont aoisi
du plus grand mérite. — Le baptistère, comparable pour
la magnificence aux oravres plus andennes, sppartieDt sa
pontificat de liéon XII. V. Paulus de AnjBells, Descriptio
et delinealio basUicœ Sanclm Mariœ Maéoris, Roms,
1621, in-fol. B.
MARIENGROSGHEN , monnaie de compte et monnsie
de billon du Hanovre et du Brunswick, valant on peuplai
de 10 r^mtiiii»f>ft
MARIENGOLDEN, monnaie d'argent dn Brunswick,
valant 2 fr. 16 c.
1IARIE-SAI/)PE, ou gabare à wue, grande barque oà
l'on place la vase, le sable et autres immondices qu'on
recueille en curant les ports, et qui sert à les Jeter sa
laiige. Elle a, de chaque cM du oiAt, une oaverture par
laquelle on la déctuu%e.
MARIGOT, se dit, sur la côte ocddentale de l'Afriqus,
des canaux remplis d'eau presque dormante qui se for^
ment dans les deltas des fleuves.
MARILLAC (Code). V. Cons, dans notre Dictionnain
de Biographie et d'Histoire.
MARIMaA» sorte de luth des habitants du Congo. Ls
table est un parchemin très-mince. Les cordes sont atta-
chées à des anneaux auxquels pendent de petites plaques
de métal. On frappe les cordes avec le poil d'une
queue d'éléphant ou un morceau d'éoorce de palmiert et
les plaques, mises en mouvement, produisent un oertsin
bnut harmonieux. — Les Cafres ont aussi un instrument
appdé Marimba : c'est une petite caisse en bois, garnie,
à une extrémité, d'un chevalet, sur lequel passent sept
ou neuf lamea de fer. L'exécutant met ces tames en ri-
bration avec ses doigts, et en tire des sons d'un grsod
volume. — On connaît enfin sous le nom de Marimba
un instrument des Nègres, formé de 16 calebssses de
différentes grandeurs, rangées entre deux planches, et
dont on tire des sons en frappant avec deux petites bar
guettes les tranches d'un bois sonore qui recouvrent leur
embouchure.
MARINE (du latin mare, mer), mot qui désigne tout
à la fois une sdence et l'ensemole des bâtiments d*an
État. La sdence de la Marine comprend les eonstructiom
naivales et la navigation (V,ces mots). Comme ensemble
des navires qui font le scùnrice maritime, on distingue ls
Marine marchande, dont les bâtiments, construits, équi-
pés, frétés par des particuliers, transportent des passa-
gers ou des marchandises; et la Marine militaire ou ifo-
rtns de VËtat, composée de bâtiments de guerre. Une
Marine militaire sert à orotéger le commerce national, i
défendre les colonies, a lavoriser, selon roccaaion , lei
entreprises de terre ou de mer, et à dsire échouer celles
que les ennemis pourraient tenter. lyr, Garthage,
Athènes dans l'antiquité, ont dû leur pulsaaoce à leur
aituation maritime, et au soin qu'elles avaient mis à pro-
fiter de leurs ressources navales. De même, au moyes
âge. Gènes, Venise et les villes inaritimee de la Ligos
£iiséatique trouvèrent dans la naviption une source de
richesses et d'influence, et c'est aussi à la navi^tion que
de faibles États modernes, le Portugsl et la Hollande,
durent la conquête de vastes empires dans rinde. Pour
le tfdileau des forces maritimes des divers États, nous
renvoyons aux articles consacrés à ces États dans notxs
DUstioimaire de Biographie et d^Histoura, V. aussi
De Montferrier, Dictionnaire umvenel et raùonmi de fsa-
rtiM ; Bonnefoux et Paris, Dictionnaire de mariné. 1850,
2 vol. gr. in-8*i De Boismèlé et de Richebourg, Histoire
générale d» la marine, Paris, 1744-58, 3 voL in-4»;
Bouvet de Cressé, Histoire de la marme de tous le$
peuples, Paris, 1824, 2 vol. in-8«; Chasseriau. Précis àô-
torique de la marine française, 1847, 2 voL in-8<*.
MAaraE (Code de U). La législation maritiaie de la
France est éparse dsns de nombreuses lois et ordoo*
nanoes. Avant 1789, le premier et le plus considérable
des règlements fut l'ordonnance du 15 avril 1689, pré-
psrée par Colbert, et rendue sur le rapport de son lila
Selgnelay. Vinrent ensuite le règlement du l*' août 1731^
les ordonnances du 27 aepu 1776 et du S5 oiars 1785b
Par une loi du 21-22 août 1700, FAsseinblée oonslipj
tuante abrogea toutes les dispodtions antérieures, oomiiil
incompatibles avec les prindpes d'une Constitutiai
libre] un décret, qui reçut le nom de Code des vam
MAR
121»
MAR
MON» OU Codé pénal ds la Marm$, régla, mais d*ane
manière imparfaite, la procédure à suivre pour les fautes
et délits commis dans Tannée naTale et dans les ports,
at ia pénalité qu*oo devrait appliquer. Pour compléter
no aoTTS, l'Assemblée, par une loi du 12 octobre i7Ql,
étendit aox troupes de la marine les lois des 21-23 oo-
ftère 1790 et 20 septembre 1791 sur la discipline mi«
litaireb Vinrent ensuite : la loi du 3 brumaire an iv sur
riBscription maritime; Tarrété du 5 germinal an xn
nr les Conseils de guerre maritimes ; les décrets du
IS juillet 1806 sur Torganisation des Conseils de mar
rine et Texercice de la police et de la Justice à bord des
nuneaox, du 12 novembre 1800 relativement à la créa-
tion et à Torganisation des tribunaui maritimes, du
4 mai 1812 sur la recherche et la punition des déserteurs
de la marine; l'ordonnance du 21 février 1816; les lois des
18 afril et 11 mai 1831 sur les pensions de Tarmée de
mer, des 2(^28 avril 1832 sur Tavancement dans Tannée
oavale; le décret des 12-14 mars 1848, portant abolition
des peines de la bouline, de la cale et des coups de
corde; ceux des 26 mars et 16 avril 1852 sur le régime
delà justice maritime, applicables, sous le point de vue
dûdplinaire et pénal, à la marine marchande comme à
k marine militaire. En 1858. un nouveau Code [jour la
marine militaire a été établi. V. Valin, Commentaire sur
f Ordonnance de la marine, du mois S août i681, Paris,
1834,1 vol. in-4<* ou 2 vol. in-8<»; Blanchard, Répertoire
Armologvjue, par ordre des matières, des principales
lois relatives à la marine, in-8**; Desaint, RecueÛ des
loi» rdatioes à la marine et aux colonies, 1709-1809,
18 Tol. in-8o; Bi^ot et Poirré, Annales maritimes et CO"
hnialts, ou recueil des lois et ordonnances, règlements et
éédsions nUnistérielles , mémoires, observations, etc.,
181647, 104 voL in-8«; Hautefeuille, Législation cnmt-
BfU« maritime, 1830, in-8<*; fieaussant. Code m<iritime
nmposê des lois de la marine marchande, réunies, coor-
^miMs et expliquées ^ 1840, 2 vol. in-8o; Rimbaud,
fludft sur la UgiAatwn et l'administration maritime,
1851, itt-8*; Prugnaud, Législation et administrcUion de
lamarine, Rochefort, 1851^2, 2 vol. in-8»; Gardât, Ma-
nne mardtande, 1854, in-8*; Hautefeuille , GiUde des
iuges marins^ Code de la justice militaire pour Varmée
dt mer, 1860, in-8».
uaniB (Commissaires de), officiers de Tadministration
maritime, chargea des approvisionnements, des revues
desemplovés au service, du payement des soldes, et de
toos les détails de oonu)tabihté. Us se divisent en Com-
fMsaires généraux, Commissaires, Commissatres-ad^
ioûUf , Soui^ommissaires (deux classes de chaque sorte),
et Aides^ommissaires,
viara (CoBieil des travaux de la). Conseil créé en
1831, pour donner son avis sur les mémoires, rapports,
pkns, devis estimatifs, tarifs de main-d'œuvre et autres
félsûîs aox constructions navales, au matériel de l'artil-
lerie, aux travaux des ports et arsenaux maritimes; pour
préparer les règlements nécessaires à l'exécution des tra-
vaux de tout genre, rédiger les programmes des concours,
eninioer les systèmes nouveaux proposés par des inven-
tion, etc. n est présidé par un viœ-amiral, et comprend
trois officiers gén^uux ou supérieurs de la marine, Tin-
•peeteor général du génie maritime, un inspecteur gé-
néral des travaux hydrauliques, le directeur et deux
officiers supérieurs des constructions navales, un inspec-
tev et on officier de TartiUerie de marine, un inspecteur
dirisionnaîre on on ingénieur des travaux hydrauliques.
■AIME (Dépôt de la). V. D^pot de la masinb, dans
notre Dietumnaire de Biographie et d'Histotre.
■Ainre (Êoole de). F. Éoolb navale, dans notre Dio-
^oenaire de Biographie et d'Histoire, page 870, col. 1.
. Kâam (Invalides de la). F. Invaliobs, dans notre Dio-
(MoatTi de Biographie et d'Histoire.
■AaoïB (Mécaniciens de la). F. MécAinaBRS.
■ABOIE (Ministère de la). F. Moiistàrb, dans notre
^Mtmnaxre de Biographe et d^ Histoire^ p. 1804.
■Aius (Musée de la). F. Loovbb (Musée du).
Marines, dessins et peintures qui représentent des
<)biets et des scènes maritimes. Les plus habiles peintres
de marine ont été : en Flandre, Paul Bril et les Willaert ;
a Hollande, les Van den Velde, fiackhuysen. Van der
Hejden, Wlieger, Cuyp, Ruvsdael, Van Everdlngen; en
Italie, Salvator Ross et Ganaletto; en Angleterre, Wilson,
^^UMoas Jones, Andries Both, Tumer, Stanfleld, Callow,
Bonmgton, Harding, Galoott et Newton Fielding; en
Ptance, Claude Lorrain, Joseph Vemet, Gudin , Game-
ny, Isabey, Rogneplan, Morel-Fatio, Mozin, Aug. Dela-
«n}ix, Lepohtenit.
MARIOLE, mot qui signifiait, au moyen âge, une image
de la Vierge Marie.
MARIONNETTES, poupées de bois ou de carton repré-
sentant toutes sortes de personnages, et que Ton fait mon*
voir sur un théâtre à l'aide de flU ou de ressorts. Leur nom
vient, dit^on, d'un Italien nommé Blarion, qui les intro-
duisit en France sous Charles IX. Les anciens Grecs
connurent les marionnettes sous le nom de neurospasta
(objets mis en mouvement ^ des fils), et les Romains
sous ceux d*imagunculœ, simulacra, oscilla. On leur
trouverait peut-être une origine hiératique : car, les
idoles des dieux, après avoir été grossièrement taillées
dans des troncs d'arbres, furent faites de pièces as*
semblées, et articulées pour mieux imiter la vie. Telle
était, au dire de Diodore (liv. XVII), la statue de Jupiter
Ammon, qui indiquait d'un mouvement de la tête a ses
{urètres la route qu'elle voulait suivre; ou celle de TApol-
on d'Héliopolis, qui rendait ses oracles en poussant ses
porteurs, ou qui s'élevait toute seule sous la voûte de
son temple. On sait aussi que, dans les banquets, les
Ég^tiens se passaient de main en main des figurines en
bois peint représentant des momies, et les tombeaux de
leurs enfants contiennent souvent des statuettes à mem«
bres mobiles. Ce que les Grecs appelaient la vie dédO'
lique dans une statue était peut-être une allusion aux
statues de Dédale, qui auraient eu des membres articu*
lés. Aristote (De animât 1, 3) parle, en efTet, d'une Vénus
de bois, attribuée à Dédale, et qui était douée de mou*
vement. On fit aussi des poupées en terre cuite, avec
Jambes et bras articulés; car on en a trouvé un grand
nombre dans les ruines de Camarine. La statuaire mo-
bile, descendue du temple aux amusements de Tenfance,
finit par être admise sur le thé&tre. Nous voyons dans
Athénée (Deipn., xvi) qu'un Joueur de marionnettes Tut
autorisé à faire monter ses acteurs de bois sur le thé&tre
de Bacchus à Athènes. — Les mêmes faits se sont pro-
duits chef les Romains. La statue de la Fortune, à An-
tium, s'agitait avant de rendre ses oracles. Les tombeaux
d'enfants découverts en Italie contenaient des pantins
d'os, d'ivoire, de bois on de terre cuite. Horace, Aulu-
Gelle, Maro-Aurèle, les Pères et les Apologistes de l'Église
font allusion aux marionnettes théâtrales, et Apulée {De
mundo) donne une idée de la perfection avec laouelle
elles étaient construites. Dans le souper de TrimaldoUk
Pétrone fait j^araltre devant les inrités une larve d'ar-
gent pajrfaitement articulée et qui exécute une danse.
Sans parier de la statuaire mobile, qui fut souvent
employée dans les églises, dans les processions et dans
les fêtes, il est certain que les marionnettes théâtrales ne
furent pas oubliées pendant le moyen âge. On en a figuréi
par exemple, dans une miniature du xn* siècle de 1 'flor-
tus deliciarum composé par Herrade de Landsbeig et
conservé à la bibliothèque de Strasbourg. — Parmi les
Modernes, ee sont les Italiens qui ont le plus goûté les
marionnettes : ils les nomment burattint, fantoccini
ptippi, ptippost, et leur font Jouer des pièces de tout
genre, soit dans des loges en plein air, soit-dans des salles
couvertes et plus él^antes. Le héros de la scène est
Cassandnno a Rome, Girolamo k Milan, GiranduSa à
Turin, Puleinello et Scaramuccia à Naples. — L'Espagne
a emprunté les marionnettes (titeres) a l'Italie. Les sta-
tuettes de saints à Jointures mobiles et les madones à
ressorts y étaient depuis longtemps en usage, lorsque
Giov. Torriani, habile mécanicien amené par Charles-
Quint, appliqua son art au perfectionnement des ma-
rionnettes. Tantôt, comme au temps de TEmpire romain,
on donnait, sur le devant du thé&tre, l'explication de
leur pantomime; tantôt, celui qui les faisidt mouvcnr,
caché derrière le fond, parlait pour elles. Le répertoire
des marionnettes espagnoles est profondément empreint
de l'esprit national : les héros sont des Mores, des che-
valiers, des géants, et» magiciens, des conquérants de
llnde, des personnages de l'Ancien Testament, des saints
et des ermites. — En Angleterre, avant le schisme de
Henri VDI, on représenta, aux fêtes de Noël, de P&(^ues
et de TAscension, des espèces de Mystères dans les églises
à l'aide de grandes poupées ou mannequins (mtrocis-
plays); ces engins, emplovés dans les processions popu*
laites, portaient le nom de pageants. l>epuls Tétablisse-
ment ou protestantisme, il n'y eut plus que des ma-
rionnettes théâtrales, auxquelles on donne les noms
divers de puppet, mammet, motwn, drollery. Outre
l'ancien répertoire religieux (Jonas et la Baleine, Sodome
et Gomorrhe, Adam et Ève^ etc.), ces marionnettes re«
présentèrent des chronide-plays {Jules César, le Duc de
Guise^ la Conspiration des Poudres^ etc.). Interdites par
MAR
1220
MAR
le rigorisme puritain au momeat de la Rérolutien d*An-
detcrre, éUea roprirent faveur après la restauration des
Stuarts, et ce fut alors qu*on rit paraître le fameux
PiÊnch, dont le nom est rahrégé de PiUemelto, écrit quel-
quefois PunefUndio, Ce sont les aventures de ce libertin
tapageur, mari pen fidèle et père brutal « souvent tW>n-
deur en politique, qai ont, depuis cette époque, fourni le
fond dee pièces à marionnettes. Toutefois, le répertoire
religieux n*a pas complètement disparu, même de nos
Joors, et Ton Joue encore l'Arche de Noé. l'Enfant pro-
digue, la PassumdeJ.^C.^ à côté d'imitations de pièces de
Shakspeare. — L'Allemagne avait, dès le xn* siècle, ses Jeux
de mûionnettes {tokkmtpil, hampêlmann). Ces acteurs
de bois ne tardèrent {ms à représenter des légendes ro-
manesques et populaires, Genewève de Brabant^ lee
Quatre fUs Aymon, Blanche comme neige, la Dame de
Boitssillon, la Belle Maguelonne, eto., sujets entremêlés
de magie et d'apparitions diaboliques, et qui trouvèrent
comme leur complément et leur dernier écho dans le
Docteur Faust. Parmi les pièces religieuses on distinguait
David et Goliath, Judith et Holopherne, la Naissance de
Jésus, le Massacre des Innocents, Au milieu de ces
drames pieux, et malgré la gravité du sujet, les Alle-
mands ont placé le bouffon obligé de tout théâtre de ma-
rionnettes : ils le nomment ffanswurst ou Jean Boudin,
et en font un personnage moins mauvais st^et que Punch,
mais plus lourd et plus glouton. Hanswurst a été dé-
trôné en Hollande par Bans Pickelhdrmo, puis par Jan
Klaassen, en Autriche par le Joyeux paysan Casperle.
En France, comme dans les autres pays, les marion-
nettes commencèrent par être quelque chose de sérieux.
n se peut même qu'on les ait ainsi appelées de la Vier^
Marie, nom dont Marion et Marionnette sont des dimi-
natifs : car des statues animées de Marie parurent sou-
vent dans les cérémonies religieuses. Après avoir Joué
des Mystères, les marionnettes devinrent des acteurs
profanes. Le xvi* siècle vit naître deux types vraiment
français , Polichinelle et la Mère Gigogne. Polichinelle
dérive du Macchus des Atellanes antiques, en passant
par le Pulcinello napolitain : il rappelle, par son carac-
tère enjoué, railleur et batailleur^ comme par son cos-
tume, la physionomie traditionnelle, sinon du roi Henri IV,
au moins de l'officier béarnais. La mère Gigogne, modèle
de la fécondité maternelle, est une parente des concep-
tions rabelaisiennes de Granàgousier et ae GargamelU;
elle parut sur les grands thé&tres, à l'hôtel de Bourgogne,
dans les ballets du Louvre, avant de tomber dans le do-
maine du théâtre populaire. Sous Louis XIV, Jean Brio-
ché, dont le singe Pagotin est resté classique, établit à
Paris, au bas du Pont-Neuf, près de l'hôtel de Nesle, un
thé&tre de marionnettes, qui eut un grand succès. On
essaya vainement de lui faire concurrence au Marais, où
fut élevé un thé&tre dit des Pygmées ou des Bamboches»
Au XVIII* siècle, les marionnettes eurent leur véritable
patrie à la foire de SMSermaln, sur l'emplacement do
marché actuel, et à la foire SMjaurent, entre les rues ao-
taellee du faubourg S^-Denis et du faubourg S*-Martin.
Les pièces que Ton composa pour elles forment une vo-
lumineuse collection t on y parodia un grand nombre
d'ouvrages, le Médecin maigri lui de Molière, le Romulus
de La Motte {Pierrot-Bomulus ou le Bavisseur poli), la
Mérope (Javotte) et VAlzire de Voltaire (la FUle obéis-
sante)^ VAtys et VAmadis de Quinault, la Didon de Le-
franc de Pompignan {la Descente d'Enée aux Enfers) y etc.,
et plusieurs. écrivains en renom ne dédaignèrent pas
d'enrichir ce répertoire, tels que Piron, Fuzelier, Lesage.
Les princes et les riches particuliers voulurent avoii
leurs théâtres de marionnettes : il y en eut à Sceaux chez
le duc du Maine, à Cirey chez Voltaire. Aux approches de
la Révolution, des entreprises de marionnettes furent
dirigées avec un certain éclat sur le boulevard du Temple
par Nicolet et par Audinot; mais le théâtre fondé en 1784
au Palais-Royal par Séraphin éclipsa tous les autres : il
s'y est maintenu lusqu'en 1861, époque où il a émigré
sur lee boulevards. Il faut convenir que la malice, la
verve et la satire ont considérablement baissé aajour-
dliui dans le répertoire des marionnettes. Sur les
scènes un peu aristocratiques, on compose des spectacles
pour les yeux t les marionnettes du Pré-Catelan, au bois
de Boulogne, déploient la richesse de leurs costumes et
la perfection de leur mécanisme. Mitis la marionnette
populaire est bien près de se perdre : à Paris, elle n'a
d'autre refuge que de petits théâtres en plein vent. Gui-
gnol aux Champs-Elysées, Guignolet au Luxembourg;
i dans les départements, de malheureux industriels pro-
mènent de foire en foire leurs acteurs mal appareillés et
défraîchis, auxquels ils font jouer sans esprit et sans ait
Genetnève de Brabant, le Malade imaginaire, la Tovar âe
Nesle, et surtout, bien que l'auditoire soit médiocrement
croyant et recueilli, Joseph vendu par ses frères, VEn-
fant prodigue, la Passion de f.-C., et la Tentation 4$
S^ Antoine. V. Ma^in, Histoire des Marionnettes en
Europe depuis Vanttgtûà jiuqu'à nosjours^ Paris, 1852,
1 vol. in-8*. B.
MARITIME (Droit, Génie, Inscription). V. Dboit, Gé>
niB, Inscription.
VAsiTiMB (Justice). D'après l'ordonnance de 1689, tous
les délits commis â bord des navires étaient Jugés par les
commandants : pour les crimes, ils étaient jugés à terre
par un Conseil de guerre, composé de l'amiral, du vice-
amiral, des lieutenants généraux, intendants, chefs ^d'es-
cadre, capitaines de marine et autres officiers; toutefois,
en présence de Tennemi ou dans un danger pressant, le
commandant pouvait, après avoir pris l'avis de ses offi-
ciere, punir d'urgence les crimes. Les peines, â terre
comme â bord, étaient la mort, les mlères, les fers, le
pain et l'eau, la barre de Justice, la Bouline, la cale. Le
règlement du l*' août 1131 donna aux intendants de jus-
tice, police et finances des galères la connaissance de tous
les autres crimee et délits étant renvoyés an Jugement
du Conseil de guerre. Cette même ordonnance iostitiiB
un Conseil de marine pour Juger les commandants de
bâtiments oui auraient manqué a leurs devoirs. L'ordoo-
nanœ du i5 mars 1765 envoya devant un Conseil de
guerre les capitaines qui avaient perdu le navire qu'ils
commandaient. L'ordonnance du 35 man 1785 étendit
l'action du Conseil de guerre aux troupes de la marine.
La loi du 2i août 1790 introduisit Intempestivement
dans la Justice maritime le Jugement j^ar Jury, et distin-
gua les peines disciplinaires et les peines amictives : les
premières étaient le retranchement du rin pendant trois
Jours au plus, les fers, la mise â cheval sur une barre du
cabestan, et la peine d'être attaché au prend mât pendant
trois Jours au plus; et, pour les officiers, les arrêts, 1:
prison, la suspension pendant un mois au plus, avec oi;
sans privation de solde; les secondes étaient les coups (i<
corde, la prison ou les fers sur le pont pendant plus de
trois Jours, la réduction de grade ou de solde, la cale, In
bouline, les galères, la mort. Une législation analogui
fut donnée aux arsenaux, le 12 oct. 1791. La loi du 16 ni-
vôse an II supprima Ta^jonction du Juir dans la plu*
part des cas. Le décret du 22 Juillet 1806, qui resta
pendant cinquante ans la loi de la Marine, créa des Con-
seils de Justice et des Conseils de guerre; les premiers,
composés de 5 Juoes, pour connaître des délits commis à
bord, emportant la peine de la cale ou de la bouline; les
seconds , formés de 8 officiers généraux on supérieurs,
pour Juger les autres crimes et délits emportant une
peine plus grevé, n maintint aux commandants des bâti-
ments les pouvoirs d'urgence que leur conférait l'ordon-
nance de 1689 , et confirma l'existence des Conseils de
guerre spéciaux que la loi de 1790 avait institués poor
Juger les déserteurs. Le décret du i% nov. 1806 créa,
pour les arsenaux et les ports, les tribunaux maritimef
( y. plus loin). L'ordonnance du 21 février 1816 supprima
les tribunaux institués pour Juger la désertion, et attri-
bua la connaissance de ce crime aux Conseils de gnerre
ordinaires. Le gouvernement provisoire de 1848 abolit
les châtiments corporels, sauf l'emprisonnement de quatre
Joure â un mois au plus, avec les fers. Un décret da
26 mars 1852 apporta de nouvelles modifications à la ^
nalité. Le nouveau Code, adopté le 4 Juin 1858, est divisé
en quatre livres, comprenant : i^ l'organisation des tri-
bunaux de la marine ; 2" la compétence de ces tribu-
naux; 3® la procédure; 4" les crimes, les délits et ij»
peines. Les Juridictions qu'il conserve sont : les Conseils
de guerre, les Conseils de Justice, et les IVibunaox ma-
ritimes. Un décret du 21 Juin a déterminé le ressort des
Conseils de guerre et des Tribunaux maritimes des 8^
rondissements maritimes; un autre décret du mèmejoor
a étendu aux colonies le nouveau Code de fustloe mari-
time. Les peines prononcées sont : en matière de crime,
la mort, les travaux forcés â perpétuité, la déportation,
les travaux forcés â temps, la détention , la réclusion, le
bannissement, et la dégradation militaire; en matière
de délit, la destitution, les travaux publics, l'emprison-
nement, la privation de commandement, l'inaptitude l
l'avancement, la réduction de grade ou de classe, le ca^
chot ou double boucle, et l'amende.
NAR 1221
■ABimB (L^tlalion). K. Marins (Gode de la).
MARmifES (Tribunaux), tribunaux qu'il ne faut pas
eoofoDdre arec les Conseils de guerre maritimes (K.
GcniB— Conseil de), et qui furent établis en 1806 pour
Ë^ les crimes « délits ou contraventions commis par
marins et autres personnes dans les ports et arse-
naux, contre leur police et leur sûreté, ou contre le ser-
Tke maritime. Ils n*étaient pas originairement perma-
neats, et se dissolvaient après' le Jugement de la cause
MUT laquelle ila avaient été convoqués. Ils étaient dV
Mffd composés de huit juges , dont six pris parmi les
«ffieiers de marine, à la désignation du préfet maritime,
et deux parmi les Juges du tribunal civil, et présidés
pu- rofficier le plus élevé en grade présent dans le port
Depuis le Code de 4858, qui a rendu ces tribunaux pei^
manents, ils se composent d*un capitaine de vaisseau on
de frégate, d'un Juge du tribunal de l'* instance, d*un
Juge suppléant (ou d*un avocat, ou d*un avoué), d*un com-
musaire-a^loint ou d*un soua-eommisaaire de marine, de
S lieutenants de iraisseau, et d'un sous-ingénieur. — 11 y
s eu des tribunaux maritimes spéciaux pour Juger les con-
tnventionB aux règlements de police dans les chiourmes,
les bagnes, et les eolonies pénitentiaires : aujourd'hui les
tribunaux maritimea d*arrondia8ement les remplacent —
Us décrets dea S4 mars et 46 avril 1852 sur la marine
niarchande ont organisé dea tribunaux nuiritimes com-
nerdanx, qui connaissent des délits énumérés dans ces
décrets, et dont les décisions ne peuvent être attaquées
pir aucun recours ni en révision ni en cassation.
MARIVAUDAGE, nom donné par dénigrement au style
et au genre d^esprit de Marivaux. On entend par là ce
mélaDge bixarre de métaphysique subtile et de senti-
ments alambiqués, en même temps que ces formes gra-
deuaement maniérées, ce cliquetis de mou ingénieux ,
œtte finesse étudiée, qui caractérisent Tauteur des
Fauites eonfidmoêt. En voici un nonrt exemple dans U
/eu fU l'amour et du hasard {h 6) :
8ILTIA, ions le nom de LiêêUê,
Vol Je venx que Bonrgalgnoa in*alnie.
DOBAXTB, Bone le nom de Bourguignon.
Tb te ftds toirt de dire Je Teoz, belle LUette, tu n'M pee be-
Nlii d'ordoimer pour être servie.
M A B 1 o , frérê de Silvin.
Hmilciir Bourguignon, roue «Tes pUlé oetta galanterie -1k
VMlqu part
DOBAVTX.
Yent aves raiaon monalenr; e*eet dans Mi yaoz qm Je l'ai
MAR
11 m ra pas 1
■tqi'k prendre.
MABIO.
plat Je te défende d*avolr tant d'esprit
aiLTIA.
dépene, et s'il en tronre dans mee yenz, il
HARLY ( Château de], château de plaisance construit
par Mansanl pour Louis XIV, et que ce prince habita
pendant sa vieillesse. On y arrivait par une magnifique
areDoe : 12 pavillons, distribués à droite et à gauche
d'une vaste pièce d*eau, et communiquant entre eux par
dei berceaux en fer garnie do feuillages, formaient une
belle perspective, terminée par un gros pavillon carré et
iiolé. Ces divers bâtiments étaient extérieurement dé-
corés à fresque, sur les dessins de Lebrun, de manière à
figurer le temple du Soleil (Louis XIV ^ au milieu des
signes du Zodiaque. Le parc, attenant a celui de Ver-
noUes, fut planté par Dunuié, et non, comme on Ta
dit, par Mansard : on y trouvait des fontaines jaillis-
nntes an milieu des baquets, des théâtres de veardure,
de longues perspectives peuplées de statues, dMmmenaes
chutes d'eau, etc. Ce fut une faveur très-enviée que d'être
"de trois iours, de-
château de liarly a
national, et démoli.
On en tira plusieurs des statues qui décorent ai^ourd'hui
le jardin des Tuileries. B.
HASLT (Machine de), machine hydraulique, placée
n bas de Louveciennes, et que Louis XIV fit établir
poor envoyer aa château de Blarlv, et plus tard â celui
deVenailles, des eaux de la Seine. Elle consistait en
U roues â piïettes, de ii mètres de diamètre, installées
SB 3 rangs, les uns devant les autres, sur un barrage en
pilotis fermant tout un bras de la Seine, dans une lon-
punr de 10,i50 met. ; les roues agissaient sur 221 corps
ie pompes, 04 aspirantes et foulantes, sur la ririère, et
i57 foulantes, installées â deux hauteurs différentes sur
■cftte, et poussant l'eau sur un aqueduc de pierre, â
194 mèû aiMloaaus du niveau du fleuve, et â une dis-
tance horizontale de i,23G met. La machine de Marly
fût construite de 1676 à 1683, sur les plans du baron de
Ville secondé par un charpentier liégeois, nommé Ren-
nequin Sualem , et co^ta environ 4 millions de livres.
L'appareil formidable des i4 roues, leurs supports, qui
semblaient une forêt de charpente; la transmission, sur
la montagne, des mouvements par d'immenses tirants de
fer articulés, longs de 670 met. environ , tout cela avait
un air de complication et un aspect gigantesque qui pnn
voqua l'admiration générale : ce n'était cependant, sous
tous les rapports, qu'une conception de l'enfance de l'art»
Son maximum d'effet, lorsque la rivière était très-forte,
produisait 5,760 met. cubes d'eau, et moitié en temps
ordinaire. Elle tomba â 1,iôO met. par l'usure de la ma-
chine, puis, en 1780, à 614 met., enfin, en 1803, â 230
met. — L'année suivante, Brunet, ingénieur charpen-
tier, remplaça l'ancienne machine par une nouvelle, qui,
composée d'une seule roue hydraulique et de 4 corps de
pompe, montait d'un seul Jet l'eau sur l'aqueduc de
Marly, et en donnait une quantité double de ce que l'on
obtenait en dernier lieu. — Cependant cette machine ,
très-peu dispendieuse, ftit remplacée, en 1826, par une
pompe â feu, établie sur la rive gauche de la Seine, et qui,
%rec une force de 62 chevaux, élevait environ 1,700 met.
cubes en 24 heures. Mais elle brûlait pour 300 fr. de
charilK>n par Jour de travail, et dès l'abord on ne Tem-
plojra que comme auxiliaire des roues, lorsqu'elles
étaient noyées, puis on revint tout â fait â la force hy-
draulique : le vieux barrage fut remplacé, de 1855 â 1850,
par une digne en maçonnerie où 3 roues â palettes, de
12 met. de diamètre sur 4"*, 50 de large, en fer forgé, oni
été placées; elles font monter, d'un seul Jet, l'eau sut
l'aoueduc, au moyen de 12 corps de pompes aspirantes et
foulantes, placées horizontalement. Ces roues marchent
Jour et nuit, et élèvent, en 24 heures, de 7,000 â 8,000
met. cubes. Cette machine, très-économique, a été con-
struite par M. l'ingénieur Dufrayer, et fait le service de-
puis 1859. L'emplacement de 3 autres roues a été réservé
dans la digue, pour utiliser, au besoin, toute la force
d'eau, qui, avec une chute de 2*", 50, en moyenne, est
évaluée â 1,200 chevaux-vapeur. C. D— y.
MARMOUSETS. V, ce mot dans notre Dictionnaire d»
Biographie et d'Histoire,
MARONITE, qualification que l'on donne quelquefois
à l'alphabet syriaque.
MARONNETTES. V. Cbotales.
MAROTTE (pour mérotte, petite mère), tète bizarre
placée au bout d'un bâton et accompagnée de grelots.
C'est le sceptre des fous. On représente â tori Momus
avec une marotte; cet attribut ne lui est donné sur aucun
monument ancien, et no date que du moyen ftge.
MAROUFLER, en termes de Peinture, coller la toile
d'un tableau sur une autre toile pour la renforcer, ou
sur un panneau de bois, sur une muraille, pour l'y fixer.
La plupart des plafonds peints â l'huile sont sur toile
marouflée.
MARQUE, tout signe servant â distinguer ou â classer
des objets semblables ou analogues , â rendre chacun
d'eux remarquable parmi les autres. En matière fiscale,
la marque a pour but principal de constater le payement
des taxes imposées, et quelquefois de garantir en même
temps aux acheteurs la qualité de certaines marchan-
dïses. L'estampille du gouvernement donne â la marque
le caractère d'une garantie publique. Un édit du 14 oc-
tobre 1564 punissait â l'égal des faux monnayeurs ceux
qui étaient convaincus d'avoir falsifié ou contrefait les
marquée mises sur les pièces de drap d'or, d'argent et de
soie. L'ordonnance de Juillet 1681 et la déclaration
d'octobre 1720 punissaient des galères et d'une amende
ceux qui auraient contrefait ou faussement apposé des
marques et cacheta. La marque des fers fut établie en
1626, pour arrêter les abus de la fabrication et du com-
merce de cette marchandise; les commissaires établis
par Henri IV pour le rétablissement des manufacturée
avaient représenté, dès 1608, que la fabrication dea fers,
très-négligée pendant les guerres ciriles , continuait à
dépérir ; qu'on ne cessait de se plaindre de la substitu-
tion du fer aiere au fer doux, et que la France, qui four-
nissait précédemment la quincaillerie aux étrangers,
était réduite â celle qu'ils apportaient. Cette marque fut
supprimée par la loi du 17 mars 1701, avec tous les im-
pôts indirects de l'ancien régime.
La marque des objets Sor et d^argent eut d'abord pour
objet de prévenir la dissipation des matières précieuses,
puis de venir en aide aux lois somptuaires. qui limitaient
a un poids déterminé la fabrication et l'usage de la vaia-
MAR
1222
MAR
Mlle d*argoni et de rorféTreiie, en assurant rezécation
de ces lois , et même en augmentant par la percepUon
d*an droit le prix de ces ouvrages. On lui donna le nom
de droit de remède, sous le prétexte que ce droit devait
rendre à Tor et à Targent la valeur que leur Mait TaU
liage ajouté par les orfèvres. Ai:dourd'hui, cette marque,
eonnue sous les noms de contrôle et de garantie {V. ces
mots), a pour effet de certifier au public le titre ou degré
de pureté des objets d'or, d'argent, et de plaqué.
une marque, appelée timbre, est empreinte sur le
parchemin ou le papier destinés aux actes publics ou de
commerce (F. Timbre).
Les marques de vérification ont pour but principal la
lécurité publique , soit au point de vue des transactions,
soit à celiU de la salubrité.
Parmi les marques se rattachant k des intérêts parti-
enliers, les plus importantes sont les marques de for-
hrique, signes emblématiques destinés à faire reconnaître
l'origine ou la nature des marchandises. Elles étaient
obligatoires par la plupart des statuts des corporations ;
i absence de marque ou Tapposition d'une fausse marque
entraînait la confiscation de la marchandise, sa destruc-
tion, des amendes et diverses peines corporelles. Des
droits de maroue et de visite, ainsi qu'une quote-part
dans le produit des amendes, stimulaient le zèle des
agents chargés de la vérification. La marque, qui avait
l'avantage de garantir la matière première et le mode de
son emploi, était d'une autre part une entrave à tout per-
fectionnement, puisqu'elle était refusée à ce qui n'était pas
selon l'usage établi. La loi du 18 germinal an xi (8 avril
1803) reconnut la marque comme un droit pour chaque
manufacturier ou artisan, et punit l'usurpation ou la con«
trefaçon des mêmes peines que le faux en écriture privée.
I^mi les décrets qui avaient attribué des marques spé-
ciales à quelques mdustries, celui du 25 Juillet i8l0,
concernant la coutellerie et la auincaillerie, est le seul
qui soit resté en vigueur Jusqu'à ce Jour. La loi du 28
Juillet 1824 a substitué des peines correctionnelles aux
peines appliquées au faussaire. L'usurpation des marques
de fabrique peut aussi donner ouverture à l'action civile.
-^ Dans les usages du commerce, le signe ou la figure
apposée sur les produits fabriqués, pour en garantir
l'identité, est souvent, au lieu d'une marque arbitraire-
ment choisie, le nom même du fabricant ; on l'appelle
alors marque nominale. Sans doute la législation de 1824
fournissait aux fabricants un moyen de créer et de fonder
la réputation de leur industrie ; mais les noms ne sau-
raient offrir les mêmes résultats que les marques propre-
ment dites : s'ils présentent l'avantage d'exister et de se
conserver indépendamment de toute formalité à remplir,
ils prêtent beaucoup plus aux attaques de la concurrence
déloyale. Avec la marque emblémcUique, au contraire, le
droit exclusif et absolu du premier occupant est reconnu
et consacré : aussi la loi au 23 Juin 1857, qui a pour
objet unique la marque emblématique librement ap-
4MÎ8ée par le fabricant ou le commerçant, pour constater
l'origine de ses produits et leur imprimer aux yeux du
j>ublic le caractère de sa personnalité, deviendra de Jour
en Jour le droit commun en ces matières. Elle a pour
but d'assurer une protection réelle, qui était auparavant
insuffisante, à la marque de fabrique et de commerce ;
d'intérMser, par l'efficacité de la protection qui la cou-
rira désormais, celui qui la possède à lui donner de la
-«leur et à s'en faire une source de fortune par la loyauté
de tes produits, et d'arriver par ce moven indirect à sau-
vegarder les intérêts du consommateur lui-même. D'après
la loi de 1857, la marque de fabrique est facultative :
toutefois des décrets peuvent exceptionnellement la dé-
clarer obligatoire pour les produits qu'ils déterminent.
Sont considérés comme marques de fabrique et de com-
merce : les noms sous une forme distinctive, les dénomi-
nationt, emblèmes, empreintes, timbres, cadiets, vignet-
tes, reliefii, lettres, chiifires, enveloppes et tous autres
signes servant à distinguer les produits d'une fabrique
ou les objets d'un commerce. Un décret du 16 Juillet 1858
. porte règlement d'administration publique touchant l'exé-
. cution de cette loi. Pour acquérir la propriété exclu-
sive d'une marque, il faut déposer deux exemplaires du
modèle au greffe du tribunal de commerce. Sont punis
d'une amende de 300 à 3,000 tr. et d'un emprisonnement
de 3 mois à 3 ans, ou de l'une de ces peines seulement :
ceux qui ont contrefait une marque, ou fait usage d'une
marque contrefaite ; ceux qui ont apposé sur leurs pro-
duits une marque appartenant à autrui ; ceux qui ont
sciemment vendu des produits à marque contrendte ou
frauduleusement apposée. L'amende est de 200 à 2,000 fr..
et l'emprisonnement d*un mois à nn an, si les Indicatloni
d'une marque sont propres à tromper Tacheteur sur la
nature du produit. L^amende est de 100 à 1,000 fr., l'em-
prisonnement de 15 Jours à 6 mois, pour le fait de n'avoir
point apposé sur des produits une marque déclarée obli-
gatoire, ou de les avoir ainsi mis en vente. Il y a confis-
cation des produits qui ont donné lieu à la poursuite,
ainsi que des instruments et* ustensiles ayant servi à
commettre le délit. Les peines peuvent être doublées en
cas de récidive.
11 existe donc législativement deux sortes de marques
de fabrique : les unes sont obligatoires, et prescrites
principalement dans un intérêt public et fiscal ; les autres
sont facuttalives, et instituées dans l'intérêt du fabri-
cant qui veut garantir la qualité et assurer la réputation
de aes produits. Quoique essentiellement protectrices da
travail privé, elles ne sont pas étrangères à l'intérêt na-
tional ; car, d'une part, accordées à certaines villes, elles
conservent la renommée industrieUe de toute une popu-
lation locale; d'autre part, elles maintiennent le droit
des loyaux produits de notre industrie à la confiance des
nations étrangères. Les marques de fabrique, imposées
Jadis comme une garantie forcée ou concédées k titre de
privilège, ont repris dans la législation moderne leur
véritable caractère de propriété libre, et de la plus in-
violable de toutes , celle qui est le résultat du travail. Le
principe de la propriété aes marques est la conséquence
directe du droit de propriété existant sur les objets que
l'on fabrique ou que l'on vend. L*indu8triel a le droit
d'employer un signe quelconque pour faire reconnaître
les marchandises provenant de ses ateliers; si sa fabrica-
tion a quelque supériorité, il doit Joidr exclusivement da
bénéfice de sa réputation ; il a droit d'empêcher qu'an
tiers ne l'en dépouille. La propriété des marques est de
droit perpétuel; elle se transmet par héritage, et ne
tombe dans le domaine public que lorsqu'il résulte des
circonstances qu'elle peut être réputée abandonnée. Pour
produire aes effets léçuix, la marque doit : 1<* être adhé-
rente aux produits ; v* se distinguer nettement de tonte
autre marque précédemment adoptée. S*il importe au
manufacturier de garantir, par sa marque, la bonne con-
fection de ses produits, et de leur assurer ainsi un débit
{proportionné à leur mérite, la marque offre an négociant
ntermédiaire entre le producteur et le consommateur
un moven précieux de çigner et de conserver la confiance
du public. En imprimant un signe distincdf aux ol^eti
qu'il achète pour les revendre, ils'oblige lui-même àea
faire un choix intelligent et consdencfeux, à les livrer
purs de toutes les altérations que le commerce de détail
fait souvent subir aux marchandises anonymea. L'exten-
sion de la marque de commerce sera peut-être le moyeo
le plus efficace de prévenir les falsifications opérées dam
la transmission de certains objets, qui, livrés en bon état
par le fabricant , parviennent dénaturés au consomma-
teur. — La loi de 1857 maintient au profit des étrangers
qui exercent leur industrie en France les garanties râol-
tant du Droit commun; mais elle ne prot^ les marques
étrangères que lorsque des traités diplomatiques ont éta-
bli la récipxÎDcité pour Im marques françaises. Ne peut-oo
dire à cet éçard que l'intérêt de notre propre industrie
et les principes du droit réclament le respect absolu et
universel des marques, même étrangères, parce que c'est
là en même temps une propriété du droit des gens? Ces
usurpations firauduleuses, qui ne profitent qu'à un petit
nombre , trompent le public , déconsidèrent l'industrie
et le commerce, et constituent une concurrence anssi
fâcheuse que dâoyale pour les industriels honnêtes. D
aurait donc mieux valu peut-être que la garantie dei
marques tùi reconnue sans condition de réciprocité, aa
lieu de perpétuer un système de reprtetlles. Les con-
ventions intervenues Jusqu'à ce Jour pour la protectioa
mutuelle des marques de fabrique sont : 1® celle du If
avril 1851, entre la FVance et le Portugal, ^ celle da K
mai 1856, entre la France et le grand -duché de Bade
3« celle du 2 Juillet 1857, entre la France et le ropuni
de Saxe; 4* le traité de commerce et de navigation do
14 Juin 1857 (articles 22 et 24) entre la France et b
Rurâie. V, Calmais, Des noms de marques de fabrùiui,
1858, in-8*; Ambr. Rendu Traité des marques ds tor
brique, 1858, in-8». A. L.
MARQUE, châtiment. V, ce mot dans notre /Hcttonnotn
de Biographie et d*Histoire.
MARQUE, dans le Blason, objet qui sert à la connaissanef
de la personne et de la famille. Les marques sont l'éco
décore d'une ou de plusieurs figures, la cotte d'armeaoe
livrée, le cimier ou timbre du casque, et le gonfianoib
MAR
1223
MAR
vuMUm (liOttre de). V, Leitiib db iiarqdi.
SAttQim, signe qa'xkn artiste met vat aes onvrages pour
IM disdngaer de oeax d'aatmi. Certains maîtres ne sont
ooimas que par leur marque : on dit 2e Maitre à VétoUê,
U Matin à Vécrwisse , le Maitre à l'oiseau, le Maitre à
la Itcome.
UARQUÉSANB (Uingne), langue parlée aux lies Har-
Qoiaet. EUe n^est ni flexiTe, comme nos langues d*Ocd-
oent, ni parement agglutinative, comme les langues de
llndo-Oiine et de VAmérique, mais agglutmative à rela^
HonSfC-èrd, que non-seulement il y a addition successiye
de diven mots ou suffixes, mais que chacun des mots,
n'étant en lui-même ni substantif, ni adjectif, ni verbe,
ni eoi^onctlon, peut devenir Tun ou l'butre selon le mot
dont il est précédé ou suivi, et celui-ci à son tour doit à ce
noiovean rapprochement sa signification particulière. V.
Bacfamann, La langue deê Ues Marquises, en allemand.
MARQUETERIE, ouvrage fait avec différents bois pr^
deux qà, par leurs nuances variées, forment des des-
sins, et auxquels on Joint même des filets et des plaques
d'or, d'argent, d'ivoire ou d'écaillé. Los bois ne sont le
pins souvent crue des feuilles minces appliquées sur de la
menuiserie. Des le xv* siècle, les Italiens excellaient dans
l'art de la marqueterie. V, EBiPiisTERiB.
MARQUETTE. V, MAQcnrB.
MARQUISE, tente on auvent d'une coupe élégante,
servant à garantir de la pluie. Elle est habituellement en
menuiserie p<ûnte et dorée, imitant des toiles et des cor-
dons de tentare.
MARREAU ou MÉREAU. V, ce mot dans notre Dic-
libfMKBrs de Biographie et d'Histoire,
MARRON , pièce de cuivre ou petit morceau de métal
oue les rondes et les patrouilles déposent à chaque poste
dans une boite spéciale, pour constater que le seorvice
s'est ùât avec exiûrtitude.
luaaoïi, qualification donnée dans les colonies euro-
péennes an nègre qui s'est enfui de Thabitation de son
maître. — Par extension , on appelle marron celui qui
exerce une profession sans commission ou sans titre; tels
sont les eouriiers marrons.
MARS , dieu de la guerre. C'était une conception trop
abstraite poar qu'il devint en Grèce l'un des principaux
mjets de Tart ; il n'y avait pas de ville où on l'adorât
comme dieu tutélaire. Alcamène et Scopas firent les sta^
tues les plus remarquables de Mars, et elles servirent dé
modèles à tontes les autres : on donnait à ce dieu un cou
charnu et vigoureux, des muscles fortement accusés, un
front plus bas que celui des antres fils de Jupiter, des
diereux formant de petites boucles en désordre, des yeux
pedts et ouverts. Tantôt il est nu , tantôt il porte une
ehlnmyde. Sur les reliefs d'ancien style, il est revêtu
d'une armure complète; sur ceux qui ont été sculptés
plus tard, il n'a qu'un casque. Le plus ordinairement il se
t^t debout. Scopas sculpta un Mars assis. Sur les mon-
naies romaines, une marche accélérée indique le Mars
Gradknu; l'aigle des légions et autres signes, le tfars
Stator on Ultor; des trophées, des Victoires, une branche
d'olivier, le Mars Victor ou Pacifer. Les Romains repré-
sentèrent encore Mars avec llia ou Rhéa Sylvia.
«AKS (École de). V, École db Maes, dans notre £)(0-
Hofimaire de Biographie et â^ Histoire^ page 878, col. i.
MARSEILLAISE (La). V. notre Dict. de Biogr.
MARSEILLE ^Faïences de). V. au Supplément,
BIARTEAU, heurtoir mobile, fixé sur une porte d'en-
trée de maison, pour frapper et par là prévenir le portier
d'ouvrir la porte. Les marteaux sont en fer fondu ou
dselé, quelq|uefois en cuivre. Depuis les commencements
du xa* siècle, on a commencé de substituer des cor-
dons on des tirages de sonnettes aux marteaux, que l'on
ne voit plus gu&re qu'aux anciennes maisons. Du temps
de Louis XIV, on appelait graisser le marteaUy donner
on pourboire an portier d*un juge que Ton visitait comme
plaidenr.
VAVTBAIIX. F. ChBVBLDRB.
MARTELAGE, en termes d'Administration forestière,
application de l'empreinte du marteaiu sur les arbres que
rfiStat réserve pour son service dans les triages destinés à
être vendus. Le marteau porte une ancre surmontée du
sceau de TÉtat: autrefois, l'offider préposé à la garde de
es marteau était appelé garde-marteau. Les contrefao*
tears on falsificateurs de marteau sont punis des travaux
forcés à temps.
MARTELLOS , nom donné aux tours rondes et voûtées
que Ton construisit, au temps de Charies-Quint, sur les
côtes de la Sardaigne et de la Corse, pour les protéger
contre les i^rates.
MARTIALE (Gour, Loi). V, Cous, Loi, dans nom
Dtctiannafre de Biographie et d'Histotre,
MARTIN (Les) , emploi de théâtre dans l'opérarcomique.
Il exige une voix de baryton étendue et agile, comme
était celle du chanteur Martin, contemporain et rival du
ténor EUeviou. Au répertoire des Martin appartiennent,
gar exemple, les rôles de Frontin dans les opéras de
oleldieu, celui du Mattre de chapelle^ de Pafir, etc.
BIARTINETS, nom qu'on donnait, dans l'ancienne Uni-
versité de France, aux écoliers qui allaient de collège en
collège.
BfARTINGALE, coup de Jeu qui consiste à doubler la
mise qu'on a perdue, afin de rentrer, quand on gagne,
dans tout son argent. — On donne le même nom à di-
verses manières déjouer que certains joueurs ont imagi-
nées et (pi'ils poursuivent avec opini&treié, dans l'i^
que le gain est assuré.
MARTYR (du grec martur, témoin), celui qui a souf-
fert des supplices et môme la mort en témoignage des
croyances qu'il professe. Le mot se dit surtout en par»
lant de la religion chrétienne.
BIARTYRIUM. V. Adtbu
MARTYROLOGE, liste od catalogue des martyrs. Le
pape S^ Clément, qui vécut immédiatement après leê
Apôtres, introduisit, ditH>n, l'usage de recueillir les noms
et les actes des martyrs. Le mar^rologe d'Eusèbe de Ce»
sarée, traduit en latin par S' Jérôme, rat célèbre dans les
premiers siècles de l'Église ; il n'en reste plus que quel-
Saes fragments. Parmi ceux que nous possMons en en-
er, on remarmie ceux de Bède, continué par Florus, de
Raban Maur, d^Adon, de Wandelbert, d'Usuard, de Ne-
velon, de Notker, de Bellin , de liaurolycus, de Molanui
( Van der Meulen). — Les Protestants ont aussi leurs
martyrologes : les plus importants sont ceux de Fox, de
Bray, et de Clarke.
MARTYRS (Actes des). F. Actes des vABiras.
MARTYRS (Les), épooéo en prose française, et en 24 11*
vres, composée par Chateaubriand, et publiée en iSOQv
en vue de prouver que le merveilleux de la religion chré-
tienne peut lutter contre celui du papnisme. Il choiÀ
l'époque de la persécution de Diocl^en, vers la fin du
in* siècle, et imagina la fible suivante t — Cymodocéé,
fllle de Démodocus, prêtre d'Homère, s'est égarée dans
les bois du Tavgète. Elle y rencontre Eudcnre, jeune guer-
rier, neveu de Constantin, et retiré de la cour : il la
ramène auprès de sa demeure, la remet à sa nourrice, et
s'éloigne. i>émodocus part avec Cymodocée pour aller
remercier celui qui lui a rendu sa fille, et les deux £a*
milles se lient par l'hospitalité. Eudore raconte sa vie, et
Cymodocée s'éprend pour lui d'un chaste amour qu'Eu*
dore partage aussitôt. Bien que prêtresse d'Homère, Cy«
modocée veut se faire chrétienne pour épouser Eudore.
Démodocus combat la résolution de sa fille, cède enfiil
à ses vœux, et la fiance à Eudore. Cependant, une perse*
cution vient d'être ordonnée contre les chrétiens par
Hiéroclès, ministre de Galérius. Hiéroclès aimait depida
longtemps Cvmodocée; Airieux d'avoir un rival, il la fait
enlever, conduire à Rome, où elle estploni^ dans les
prisons, en qualité de chrétienne. Eudore, arrêté comme
confesseur du Christ, va être livré aux bêtes dans l'am^
pbithéfttre Flavien. Cymodocée, qu'un ami a sauvée de
sa prison, l'apprend, onitte sa retraite, vde à l'ampM*
théâtre, et, se jetant dans les bras de son fiancé, péiit
martyre avec lui. Au même instant, une croix de liunééce
apparaît dans le ciel, la fondre gronde, et une voix mys»
térieuse fidt retentir ces mots : « Les dieux s'en vont."»
«^ Ce sujet est très-heureusement choisi pour le but que
se proposait Chateaubriand, car il renferme dans un
même cadre le tableau de deux religions, la morale^ les
sacrifices, les pompes de deux cultes. Néanmoins, le livre
tat trèftovivement critiqué, et ce ne fût pas seulement le
lancage de la passion qu'un écrivain du temps fit elK
tendre, en disant s « Lorsqu'au milieu d'un peuple dont
toutes les croyances ont été ébranlées ou renversées, une
imagination plus poétique que religieuse met en ien les
mystères de la foi et fait agfar les puissances. célestes,
duis une œuvre en prose, d'un caractère indécis entre le
roman et l'épopée, u est impossible que ce spectacle ne
ptt^e pas de sa grandeur. Le Ciel et l'Enfer de M. de
Chateaubriand, rEtemel représenté an milieu des croiras
célestes, ne sont que de belles études. » Malgré les cri*
tiques f l'ouvrage obtint un grand succès dû à la madi
d'un langage coloréf souple , harmonieux; à des pen»
tfAS
1224
MAT
tnres fraîches et virantes; à beaucoup de tableaai pleins
de yérité et de poésie, tels que les catacombes de Rome
(Ut. V), les mœurs des Francs Givre VU), Vellôda (Ut. IX
et X}, les retraites de la Thébalde (Ht. XI^, etc. Enfin
In Martyrs eurent un retentissement qui fit presque
époque dans la littérature.
MASCARADE. V» Casnatal et HASQUBt àiaa notre Dtc-
ttonnoirtf d$ Biographie et dT Histoire.
MASCARRT. K. Barre.
MASCARILLE, personnage comique emprunté par
noire théâtre A celui des Italiens. Cest un Talet peureux,
Toleur, gourmand, complice des amoura de son miUtre.
M ASCARON , tête d*homme ou d'animal, souTent ima-
ginaire, grotesque ou fantastique, sculptée en ronde bosse
ou en bas-relief sur une clef d*arc ou de Toûte, sur un
chiq)iteau , sous un entablement ou un balcon, etc. On
emploie aussi ce genre de décoration aux extrémités des
Suttières et aux orifices des fontaines ; alore la figure
it aToir la bouche ouTerte, et on y place le conduit de
Teau. Les sculpteura de la période romane et ceux des
XTii* et xviii* siècles ont fort abusé des mascarons.
MASCHEROLÊ, en langage du moyen â^^, garni de
mâchicoulis.
MASQUE. K. ce mot dans notre Dictûmnatrê d$ Bio-
ffraphiê et d'Histoire,
MASSACMUSETT (Idiome), un des idiomes algonquins.
n est très-riche en formes grammaticales. Il n*a pas de
Tertie substantif, et msnoue de moyens pour distinguer
les genres et les cas; mais il en possède pour marquer
les diflTérents nombres, les degrés de comparaison et une
foule de rapports entre le sujet et l'attribut par des mo-
difications qu*il donne aux yerbes. 11 forme le mode in-
terrogatif par des afflxes ; il intercale la né^ition, et place
les prépositions après leun régimes. Elliot a publié, en
1066, une erammahre du massachuaett, et traduit la Bible
dans cet idiome.
MASSE, en termes d'Administration militaire, somme
formée des retenues faites sur la solde de chaque soldat
à pied et à cheTal, et allouée par abonnement pour une
dejpense spéciale. Il y a la masse d'habillement, de chaus-
sure, d'émiipement, etc.
■ASSB, oàton de cérémonie. V. notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire,
MASSE , ancienne monnaie, la même que la chaise d^or
(Y, ce mot dans notre Dictionnaire de Biographie et
aHistoire),
MASSE D ARMES , on latin clava, arme de fer du moyen
âge, fort pesante d*un bout, longue comme le Inras, et
avec laquelle on assommait. Le gros bout se terminait
quelquefois en boule hérissée de srosses pointes, ou par
quatre ou cinq ailerons dentelés : la masse serTait alon à
nriser les casques et les cuirasses. L'extrémité opposée
portait un gros anneau , où l'on attachait un fort cordon,
pour oue l'arme ne s'échappât point de la main. B.
MASSOLA (La), nom d'un supplice autrefois usité en
Italie. Quand le patient aTait les yeux bandés, les mains,
les pieds et les genoux attachés, le bourreau le frappait
aune massue de Imis entre l'oreille et l'œil ; après l'aToir
ainsi étourdi et Jeté sur le côté, il lui perçait la gorge
âTec un long couteau, et lui ouTndt toute la poitrine.
MASSORA. V, HéBRAlQDB (Littérature).
MASSUE, la plus ancienne des armes oflènsiTes. Ce
Art primitiTement un bâton noueux, beaucoup plus gros
par un bout que par l'autre, et plus tard une masse de
métal. La massue est un attribut d'Heroule. Elle flçire,
dans Homère, entre les mains de plusieura guerrière.
Xénophon mentionne un corps de porteun de massue qui
servaient dans l'armée thébalue A la bataille de Leuctres.
tl y eut aussi, chei les Romains, des combattants dont
les massues étaient garnies de clous. Au moyen ftge, la
massue prit le nom de nuuse d'ormat (K. os mot). Elle
est encore aujourd'hui entre les mains de tous les sau-
vages, sous les noms de casse-tête, de tomahawk^ etc.
MASTIC, en termes d'Architecture, désigne toute es-
pèce de mortier factice, autre que les mortiers de chaux
et de plâtre. La composition de quelques mastics en
usage dans l'antiquité nous a été conservée par les au-
teura; ils étaient formés des divera mélanges suivants:
1* poix, cire blanche, brique pilée, chaux pulvérisée ,
goudron; 2« dissolution d'ammoniac, soufre et poix;
avec ces deux mélanges, on Jointoyait la maçonnerie ex-
posée k la chaleur; 3<* sang de boBuf , chaux de coquille
et poix; 4° suif, cendre fine, pierre ponce, chaux en
Kudre, et huile; ces deux dernien mélanges étaient
ns pour arrêter les Infiltrations de l'ean. — Un des
«eiUean mastics modemesi connu s^ps le nom de DM,
I qui l'inventa en 1869, se fait avec neuf parties de brique
I ou de terre de gaxette, et une de litharge, le tout mis en
pâte avec de l'huile de lin ; il sert à couvrir les terrasses»
souder les briques et les pierres, et peut recevoir des
peintures à l'huile, comme on le voit dans la chapelle ex-
piatoire de l'église de S^Denis. Le mastic de marbrier se
fait avec du plâtre fin, du marbre blanc et de la térében-
thine. — Le mastic de limaille, fait ajec de la limaille
de fer oxydé dans du vinaigre, de l'unne et de l'ail , ou
bien avec de la limaille de fer, un peu d'ammoniac et
de fleur de soufre, s'emploie dans les endroits humides:
mais c'est un mauvais mastic, parce que l'oxyde de fer
s'augmente toujours, et qu'alon ou le Joint ou la pierre
se casse ; on s'en sert avec avantage pour bourrer des
Joints de tuyaux de fonte dans les machines à vapeur. —
La mine orange ou le minium, pétri avec du blanc de
plomb broyé à l'huile, fait un très^bon mastic pour lu-
ter, mais sous une forte compression, les conduites de
vapeur ou de gaz. — Le mastic de mouleur, qui sert
à faire les pièc^ les plus difficiles du moulage, est un
composé de cire, de ciment fin tamisé, et de résine. ^
Le mastic de Corbel pour maçonnerie comprend 16 par-
ties de ciment fin, â de litharge, 2 de cénisej, 3 d'huile
grasse, le tout mis en pâte avec de l'buile de lin. E. L.
MAT, pièce de bois destinée â supporter la voilure
d'un navire. Les mâts sont généralement en pin, swin,
mélèze, cèdre, etc., parce que ces bois réunissent la lon-
gueur, la flexibilité, l'élasticité, et la légèreté. On les fait
ronds, pour qu'ils présentent la même résistance à l'ac-
tion du vent de tous les côtés. Leur partie inférieure est
fixée dans la quille des navires ; ils sont maintenus à
leur partie supérieure par des étais, cordages qui , par-
tant de l'avant, servent à les garantir contre les effets du
tangage, et par des Aoti&ans, qui , psrtant des deux bords,
les aident à résister au roulis, ainsi qu'à l'action du vent
de l'arrière et de côté. Le« mâts des navirea de commerce
et des petits bâtiments de guerre sont ordinairement
faits d'un seul arbre; mais, pour ceux des vaisseaux de
premier rangvon assemble Jusqu'à 16 et 15 pièces â l'aide
de oeroles de fer, qu'on place à chaud pour qu'ils serrent
davantage ; le grand mât d'un vaisseau de 136 canons a
46 met. de longueur, 3 met. de circonférence movenne,
et pèse plus de 46,6()6kilogr. Un mât se compose de 2 on
de 3 parties, selon la grandeur des navires; la l'* partie
en montant est le bas màt, la 2* le mât de hune^ la 3* le
mât de perroquet. Cette manière de composer les mâts
rend plus facile l'opération du monta^, ainal que la ré-
paration des accidents, au moyen de pièces de rechange ;
un mât d'une seule partie serait, d'ailleurs, trop flexible
et trop cassant, et on ne pourrait ni descendre la mâ-
ture haute quand on est an mouillage, ni la sacrifier au
salut du navire dans les tempêtes. Les plus petits bâti-
ments, comme le cutter et le sloop, n'ont qu'un mât ver-
tical ; la goélette, le chasse-marée, le louêre et le brick
en ont deux; les navires de commerce totinés â faire
de longues traversées, les corvettes, les frégates, les vais-
seaux de ligne, en ont trois. Le 1*' mât à partir de
l'avant est le mât de misaine; le 2*, tou^oun le plus
élevé, est le grand mât ou mât de maître; le 3*, qui
est le moins haut, est le mât Sartimon. Quelques bâti-
ments ont encore â l'arrière un autre mât, dit tapecul,
Lea navires à 1, 2 et 3 mâts verticaux ont tous â l'avant
un mât incliné, appelé beaupré,
MAT DE GocAGiiB, mât qu'ou drosse sur une place dans
les fêtes publiques, et au sommet duquel sont placés
diven objets de plus ou moins de valeur. Il faut aller
prendre ces objets en grimpant au mât, dont l'ascensioD
a été rendue plus diffiâle â l'aide de savon on d'autres
corps gras. Ce Jeu existait dès le xv* siècle.
MATADOR (du latin mactator, tueur), nom qn*os
donne en Espagne au plus important des toréadors, à
celui qui , dans l'arène, met â mort le taureau. Riche-
ment vêtu d'or et de soie, il s*élance au signal des tam-
boure, tient de la main gauche la muleta , pièce d'étoffe
écarlate dont la vue irrite l'animal , et de la droite une
longue épée, dont il doit le frapper à l'endroit de la
réunion de la nuque avec le dos. En France, le mot ma^
tador est appliqué quelquefois à des personnages d'ho-
portance, sans doute par réminiscence du rôle que Joua
en Espagne celui qui porte le dernier coup.
MATAMORE, mot espagnol qui veut dire dompteur ds
Mores, et par lequel on a désigné, au théâtre d'abord ,
puis dans le monde , les bravaches et les fanfiut>ns. La
fanfaronnade étant de tous les temps et de tous les pays,
le fanfaron a eu son nom dans chaque langue. La comé-
die de Plante intitulée : Miles glonostis (le Soldat faa*
MAT
122S
MAT
hroQ), nous montre un Pjrii^poUDice {vainqueur dei
tonn et des villes ) , - guerrier invincible et homme A
bonnes fortanes, type emprunté à la Grèce, où des ayen-
torien qui araient servi en Asie racontaient avec em-
phase leurs exploits lointains. Dans VEunwiUê de Té-
reoce figoro un personnage du même genre, Thrason,
empnmtÀ, nous dit Tauteur, à Hénandre, et qui se dis-
tingue des caricatures triviales de la fatuité militaire par
ime certaine prétention au bon goût et au bel esprit. Voilà
les premiers modèles du Sptxvento milanais et de notre
opitsine Frtiecase, oflBciers vantards qui ont été fort à
k mode dans les lettres su xvi* siècle et au commence-
ment du xvii*, et que l'on rencontre dans le Brave de
Balf , dans le Pédant joui de Cyrano de Bergerac, dans
TAoesUan de Colchos de Rotrou, dans le Jodetet duelliste
de Scarron. Mais c*est surtout du Matamore casUllan que
notre vieux théâtre s*est emparé t ce personnage figure
avec soo nom étranger dans l Illusion comique de P. Cor-
neille (1636), et il fut outré encore dans TArtabaze des
Ftttbfifiatrftf de Desmareet de Saint-Sorlin (1639). Le
soldat fanfaron s'est maintenu sur la scène Jusou'à nos
tours : on le retrouve dans le Don Annibal de lAventU'
rière, comédie par M. Emile Augier, Jouée en 1848. II a
passé le Rhin, et a été adopté en Allemagne; là, André
Grfph ou Greif Ta appelé HornbUicribrifaœ, et en a fait
la personnification des officiers rentrés dans la vie civile
après la guerre de Trente Ans. B.
■ATAMoaa , nom qn*on donnait, dans les États Barba-
resques, à im cachot soutemin dans lequel on enfermait
les eadsTes toutes les nuits, et où l'air et la lumière ne
pénétnient quepar une lucarne.
MATASSlnS (Ballet des), sorte de danse, imitée de la
danse année des Anciens, et qui était encore en usage an
xvni* siècle. Elle était ordinairement exécutée par 24 sol-
dats, qui s'escrimaient l'épée à la main. Il en est parlé
dans rentrée de ballet du l*' acte du de Pourceaugnae
ds Minière. La danse et son nom sont espagnols.
MATELOT. V. ce mot dans notre Dictumnaire de Biù"
gn^ieet SBisUÀre,
MATÉRIALISME, système philosophique qui n*admet
pas d'autre substance que la matière. Le matérialisme
complet ne vent pas reconnaître Dieu, cause du monde,
ni rime dans l'homme; ne nier que l'un ou l'autre seu-
lement, c'est être inconséquent. Le matérialisme attaque
donc les deux points les plus essentiels à l'homme, la
cwyauce en Dieu et à une âme spirituelle et immortelle.
Mais, en refusant de reconnaître dans l'univers un être
supérieur à la matière, une cause infiniment puissante et
intelligente, il est forcé d'attribuer au hasard l'ordre ad-
ndrabto qrtd règne dans la nature, la coordinadon har-
monique des êtres organisés. Dans l'homme, il doit rap-
porter an corps, à la matière, toutes les opérations de
llntélligeiice, les vérités premières données par la raison,
et la loi morale qui, dans certains cas, nous ordonne le
lacriflce d«i intérêts matériels, et qui donne naissance à
one lutte entre la passion et le devoir. De là des ob-
jections auxquelles le matérialisme n'a jamais répondu,
tandis que les démentis qu'il donne au sens commun, k
la consdence et à la raison suffiraient pour le réfoter.
Les matitâriaUstes les plus célèbres n'ont produit que des
doctrinea Jpgées depuis longtemps : chez les Anciens,
Leudppe, Démocrite, Épicure, Straton et Diagoras; chez
les Modernes, Hobbes, le baron d'Holbach, Hèlvédus,
Lamettrie, Cabanis, Broussais. Le panthéisme, en absor-
bant Dieu dans le monde, peut être regardé comme un
svrtème matérialiste. Tous les adeptes de cette triste
doctrine se fondent sur l'impossibilité d'expliquer com-
ment deux substances essentiellement différentes agissent
l'une sur l'antre. Ils oublient qu'on n'explique pas mieux
comment les eoips agissent sur les corps, comment deux
molécules de matière s'attirent ou se^repoussent. Faut-fl
nier tout ce qu'on ne peut expliquer? R.
MATERIAUX, nom sous lequel on comprend tout ce
Îoi entre dans la construction d'un bâtiment, pierres,
riques, moellons, tuiles, sable, chaux, bois, fer, etc.
F. an Supplément.
MATEiUtiL, nom sous lequel on comprend tout ce qui
6Bt employé à un service, à une industrie, à une exploi-
tation. Le matériel d'un corps de troupes est l'ensemble
des caissons et fourgons nécenaires au service des vivres,
des hôpitaux et ambulances, des postes militaires, au
tranqïort des papiers, etc. Un matériel d'artillerie se
compose d'un nombre déterminé de bouches à feu avec
leurs munitions, d'obus, de grenades, d'aortifices, de for-
ges, etc. Les caissons et chariots chargés de porter les
solilB aéccMilrfti anx travaux de siège, les nsdnes et
fsabions préparés à Favance, les équipages de pont pour
le passage des rivières, oomposent le matériel du génie.
Sous le nom de matériel de siège, on embrasse à peu près
tous les objets dont il vient d'être parié, avec cette mfTé-
rence qu'on y emploie des bouches à feu d'un plus fort^
calibre.
MATERNITÉ (Uospice de la), à Paris, rue do Port*
Royal (autrefois de la Bourbe), dans les bâtiments de
l'abbaye de Port-Royal. H existe dans cette maison ua
pensionnat et une école d'accouchement pour l'instruc-
tion des élèves sages-femmes qui viennent des départe-
ments. La pension annuelle est de 600 fir.
MATIÈRE, mot qui, dans le sens le plus étendu, dé-
signe la substance universelle, le principe dont toutes
choses sont Haïtes; la matière en ce sens est l'opposé de
la/brms ou de Veeience{V. ces mots). Dans un sens pins
restreint, c'est seulement la substance des choses corpo*
relies, et alors ht matière est l'opposé de VesprU, La
philosophie ancienne a presque toujours entendu la ma*
tière dans la première oe ces acceptions, et les opinions
des philosophes, très-variables en ce qui concerne la
nature propre de la mottérs, se sont en général accordées
sur ce point, ou'elle est un principe indépendant, incréé,
coétemel à Dieu, qui n'a fait que la mettre en ordre»
C'est le christianisme qui a vulj^sé et fait passer dans
la philosophie la notion de Dieu créateur. Grftce à ce
progrès, les questions relatives à la matière ont pu se
circonscrire et se préciser. D'abord le nom de mattère a
cessé d*être donné à la substance spirituelle, et c'est aux
sciences physiques qu'est revenue la description des
propriétés des corps, en tant que ces propriété tom*^?nt
sous les sens. Que reste-t^il à savoir, après cela, de la
matière? Sa nature intime, son existence même, et la va-
leur réelle des idées que nous en avons. Cest de ce que
les sens nous en montrent que nous pouvons Inférer ce
qu'elle est et le fait même de son existence, le tout à la
lumière de ce principe conçu à prtori, que « toute qualité
suppose nécessairement une substance. ■ Cest ainsi que,
percevant la couleur, l'étendue, le chaud, le froid, nous
crovons qu'il y a une substance colorée, étendue, chaude,
froide, et cette substance est ce que nous nommons corps
ou matière. Maintenant, qu'est en elle-même cette ma-
tière? Comme nous n'en percevons que les propriétés,
nous l'ignorons, et nous ne l'ignorerions pas moins, quand
même l'analyse chimique ramènerait à l'unité les élé^
msnts de la physique moderne , en mettant à nu, dans
les corps considérés aujourd'hui comme tels, un principe
unique et universel ; car ce principe, cet absolu, ne nous
serait encore perceptible que par certaines qualités agis-
sant sur les sens. Donc, de Quelque nom qu'on appelle
la matière, substance corporelle, corps en général, «tf6-
siratuim ou sujet d'inhérence des qualités, on n'en a
qu'une idée vague quant à l'essence et à la définition,
quoiqu'on en ait une idée nette quant à l'existence.
Certains systèmes philosophiques s'écartent plus ou
moins de cette manière de voir. Ainsi la doctrine du Car*
téslanisme sur la matière peut se résumer dans les pro^
position^ suivantes : 1* nous ne connaissons les corps
que par leurs qualités, et celles-ci que par les idées que
nous en avons; S* l'existence des corps étant admise, il
faut de toute nécessité admettre l'existence de la matière ;
3*" la matière consiste essentiellement dans l'étendue. Deux
rtpproches peuvent être adressés à cette doctrine. D'abord,
elle subonionne à une hjrpothèse l'existence de la ma-
tière ! elle existe si les corps existent. Mais qui nous ga-
rantit quils existent, si nous n'en percevons pas même
directement les qualités? Dieu, suivant Descartes, Dieu,
qui ne saurait nous tromper, et qui a mis dans notre
esprit un irrésistible pencnant à croire à la réalité des
corps. Mais ce recours à la véracité divine n'est qu'un
des expédients de l'idéalisme pour relever d'une main ce
qu'il oiHruit de l'autre (V. InéAUsm). Encore cela ne
suffit-il pas à ISalebranche, qui, pour affirmer l'existence
des corps, veut qu'à la révélation natorelle du sentiment
intérieur se Joigne la révélation surnaturelle proposée à
la foi religieuse. En second lieu, faire de l'étendue fes-
sence des corps, c'est résoudre la matière dans un de ses
attributs, le plus important, sans doute, et celui que
même par l'imstraction on peut le moins en concevoir
séparé, mais cependant rien de plus qu'un attribut ; et
Descartes prépare ainsi la singulière assertion de Locke
et de Conmllac, que la matière est la collection des an»-
lit^, un assemblage (dont le comment est Inexplicable)
de grandeur, de figure, de solidité, etc. C'est ce que
Ijoioniz a voulu éviter en supposant les coms essentielle-
ment fermés ds subsunces simples (F. Moradbs), tfoi
M AU
1226
MAX
lont en même temps des forces. Sur le temdn comman
de lldéaliame, où l'existence de la matière est si com-
promise, Berkeley et Hume se rencontrent avec Des-
cartes. Tandis oue les Cartésiens cherchent les mojrens
de la raffermir, Berkel^ et Hume la nient résolument, le
preiotder an profit du spiritoalisme, le second au profit
an scepticisme. Cest encore le scepticisme oo! trouve
son compte dans le système de Kant. Selon Kant, nous
ne connaissons la mati^ qu*à titre de phénomène: nous
ignorons ce qu'elle est en soi. liais, cruelle que soit son
eisenoe, comme elle ne nous est donnée que sous la con*
dition de Tesnace, et one l'espace, toujours selon Kant,
n'est qu'une forme swi^etive de la sensibilité, dont rien
aihsolument ne nous garantit la réalité o6i«cttoe (F. en
motf), nous ne savons en définitive rien de certain de la
matière, pas même son existence, ou plutût son existence
moins que tout le reste. C'est au malaise que l'esprit
ressent a se trouver ainsi renfermé en lui-même, qu'il
fant attribuer d'un côté les eSbrts pour ressaisir le réel
et l'extérieur que dénotent les systèmes de Flchte, de
Schelling, de Hegel; et, d'un antre cèté, le retour aux
notions communes préconisé et mis en pratique dans les
écrits de Reid et de Stewart V. PncBPTioii , QoAUTis pbb-
viÈKBS et QuAuris secondes.
Kant a encore entendu dans un sens tout particulier le
mot matière, en opposant la moHère de la connaissance,
e.-à-d. l'ensemble des éléments variables et accidentels
<iu'el1e embrasse, à la forme, qui est l'élément général et
logique. F. Fouhb. B— i.
MATIÈRES D'OR ET D'ARGENT. V. Buooterik, Cow-
ni '.E, Garantib, Marque.
ikATiftass soNHAïass, affaires de peu d'importance on
argentés qui peuvent et doivent être instruites et Jugées
promptement et avec peu de frais. Ce sont : les appels
des Juges de paix; les demandes pores personnelles,
quand il v a titre non contesté; les actions personnelles
et mobilières qui n'excèdent pas 1,500 fr.; les actions im-
mobilières qui n'excèdent pas 60 fir. de revenu; les de-
mandes provisoires ou qui requièrent célérité; les de-
mandes en payement de loyers et arrérages de rentes ;
les demandes en expropriation pour cause d'utilité pu-
blique; les affaires relatives aux domaines et rentes cédées
aux hospices par l'État; les oppositions aux états dressés
par les maires relativement aux recettes municipales ;
les actions civiles relatives aux chemins vicinaux ; les
demandes en nullité de vente d'animaux domestiques
pour vices rédhibitoires.
Matières pREniÊnss. V. an Supplément,
MATINES. V. notre Dictionn. de Bioqr, et d^ Histoire.
MATLAZINGUB (Idiome). F. Mexioue (Langues du).
MATRACA, énorme crécelle en usage en Espagne, et
surtout au Mexique, pour remplacer les cloches pendant
les trois derniers Jours de la semaine sainte. La roue eu
noyau n'a pas moins de S met. de diamètre.
MATRICULE, registre sur lequel on écrit le nom des
personnes qui entrent dans certains corps, dans certaines
sociétés on Compagnies. Chaque soldat qui arrive à son
-corps est immatrtctdé sur nn grand livre, avec son nu-
méro d'ordre, le lieu et la date de sa naissance, et son
signalement ; on y porte ensuite les changements de corps,
les services, les blessures, les actions d'éclat, les puni-
tions, les désertions, etc. Les re^stres matricules de
l'armée sont en double expédition : la 1**, tenue au corps
par le trésorier, sous la surveillance du major; la 2% te-
nue dans les bureaux du ministère de la guerre. Ils ser-
vent à vérifier les services, à constater les droits à l'avan-
cement ou à la retraite. Dans les réslments de cavalerie,
il y a, en outre, nn registre matricule des chevaux.
MATRONEUM, partie des anciennes baidliques réservée
aux femmes.
MATURE. r.MAT.
MATUTINAL, ancien livre d'église, qui contenait l'of-
liee des Matines.
MAUGÈRE, en termes de Marine, conduit de cuir on
^e toile goudronnée par où l'eau s'éooule d'un navire
dans la mer; — morceau de cuir cloué au-dessus des
dalots et destiné à en fermer l'ouverture.
MAUGIS D'AIGREMONT, une des branches de la Geste
des Quatre fUe Aymon, Maugis est le cousin de Renaud
de Montauban. Élevé par la fée Oriande, c'est lui qui fait
la conquête du cheval Bajrard et de l'épée Froberge on
Flambergn, quil céda plus tsrd à Renaud. -— La chanson
de Maugis est une suite insipide d'aventures merveil-
leuses; elle est beaucoup moins ancienne que celle des
quatre fils Aymon. La Bibliothèque nationale de Paris
tt^ea possède qn'nn seul manuscrit, qvd est du xiv* siècle*
Cette chanson a été quelquefois imprimée avec eelle des
quatre fils Aymon. La plus ancienne édition française
est du xvf siècle, Paris, chei Lotrian, in-4* sans date.
V. VHistoire littéraire de la France, U XXII. H. D.
MAURESQUE ou MORESQUE (Architecture). K.Arabb.
MAUSOLEE, magnifique et splendide tombeau, élevé
par Artémise II à Mausole, son mari, roi de Carie. I^
monument était si beau, que les Andens le comptèrent
parmi les sept mervdlles du monde, et one, depuis, les
λlus belles sépultures royales furent appelées Uausoiéee,
1 Alt érigé l'an v de la iOfi* olympiade, 353 av. J.-C.,
en vue de la plus belle place d'Halicamasse et de la mer,
à ml-c6te d'une colline en deml-H^ercle, où l'on fit une
esplanAle carrée de 103 met. de côté. Le Mausolée était
en marbre blanc. Sur un soubassement de 30 met. de
face de l'E. à l'O., et 33 de côté du N. au S.,s'élevait une
sorte de temple quadrangulaire, entouré de 36 colonnes
ioniques, ayant dans leurs entre-colonnements 36 statues
alternativement de héros et de Uons, les premières en
partie colossales, les secondes en partie de grande nature.
Les lions figuraient là comme gardiens du tombeau, sui-
vant une conception bien connue de l'art antique. Sur ce
péristyle, haut de Î5 coudées (ii«,57), s'élevait une py-
ramide de même hauteur, en M gradins, et portant un
quadrige colossal de marbre : le diar contenait les stap
tues de Mausole et d'ArtémIse, debout et de 3 met de
proportion. Les chevaux avalent des hamala d'airain. La
hauteur totale du monument, y compris le quadrige, me-
surait 440 pieds (43"",30) ; mais du côté de la mer il p»-
raissait beaucoup plus grand, pane qu'on arrivait à son
esplanade par une suite de rampes et de terrasses qui
ajoutaient encore à sa mijesté. La sépulture n^e était
mms nn caveau creusé sous l'esplanade du monument.
Les architectes Satyres et Pythis construisirent le Mau-
solée, et les sculpteurs les plus célèbres de la Grèce s'en
partagèrent l'ornementation : Bryaxisfit le nord, Scopas
Test, Timothée le sud, et Léocharès l'ouesL Pythis, qui
était sculpteur en même temps qu'architecte, exécuta le
quadrige. — Ce superbe tombeau subsista, an moins en
grande partie, Jusqu'en 1522 ; alors les chevaliers de Jé-
rusalem achevèrent sa ruine pour en tirer les matâ-ianx
dont Us construisirent, à Boudroum, un chftteau fort ap-
pelé la Tour-S^Pierre. En 1857, M. Ch. Neiwton, vice-
consul anglais à Mytilène, a retrouvé l'emplacement du
Mausolée, et recueilli beaucoup de parties de ses sculp-
tures, qui sont, ainsi que l'architecture, du plus besn
temps ne l'art me II les envoya au British-Museum de
Londres» où elles sont conservées. La forme générale dn
tombeau de Mausole fût empruntée aux grands bûchers
que l'on construisait pour les funérailles des rois on des
personnages illustres; tel fut celui de Denys l'Ancien, ^-
ran de Sjrracuse, ârigé Tan i*' de la 103* olympiade, 3Ô8
av. J.-C, et 15 ans avant le Mausolée. V. Vltruve, II, 8;
VIT, préf.; Pline, XXXVI, 4; ilcod. dee /n«crtpt.,t. XXVI;
Newton, On the sculptures from the Mansoleum of Ha-
licamasse, dans le ClassiciU Musewn, XVI; Papers res-
pecting thê eoocavatùms at Budrm^ etc., Londres, 1S58,
in-fol.; Further papers respecfmg the eseoMitioM et
Budrum and Cnidees, ete», Londres, 1860, In-fol., aves
Slans topographiques, et une restauration du Mausolée;
^uUetino MV InstUuto archeologico^ 1860, p. 39; Momh
menti dtiV Instit. a/rehêcHog., vol. 5. G. D— t.
MADSOLÉB D'AUGUStB. ) V. uotro fKotîoiuiain
HAUSOLéE D'AORiBf. > dé Bîoor» et ^His»
VADSOLAs chez LES HODESIIBS. | tOÎTS.
MAX (Abréviation de Maaoimilien)^ monnaie d'or de
Bavière, valant 17 fr. 24 c. Il y a des doubles max, des
deml-max et des quarts de max.
BfAXlME, r^le de conduite qui dirlae dans leuis ac-
tions les États et les particuliers (du latin maxima, très-
grande, à cause dA son importance^. Montesquieu vante
les maximes du Sénat romain, et Bossuet nous apprend
que la maooime du prince de Gondé était que, dans lea
grandes actions, il »ut uniquement songer à bien faire,
et laisser venir la gloire aprèa la vertu. — Dans un sens
plus littéraire, on a appelé MaoBtmes des réflexions sur h
nature humaine, présentées communément sous ans
formé sentencieuse. Parmi les Maximes célèbres de notre
littérature, brillent au premier rang celles de La Rocbe-
foncauld. Ce recudi, dont la i** édition parat en 1002,
méritait à double titre son succès. D'abord 11 contribuait
poor sa part à fixer la langue française : personne, nsi
même Pascal, dont les Pensées ne furent publiées (preo
1070, n'avait Jusque-là, du moins dans un sujet ana-
loeue, doté notre Idiome de toutes les qualités qui ren-
daient le DOttvean Ujrt si séduisant; c'était la prendêM
MAY
122t
MAZ
Mt qae, pour peindre les faiblesses et les rtees du cœur
hamain, an écriyain unissait tant d'éclat et de relief à
tant de précision, dans un style savant dont les termes
et le» tours ne devuent plus périr. Pour atteindre à cette
beauté, La Rochefoucauld avait poli et repoli sans cesse
son osuvre, appelant à l'aide de son propre esprit et de
son art le goût délicat, Timagination, le savoir et l'esprit
des plus aimables collaboratrices, dans ce salon de H™* de
Sablé qui fût son hôtel de Rambouillet L'ouvrage avait
an autre attrait : Descartes avait porté la philosophie
dans les sphères de la métaphysique; Port-Royal, plus
pratique» nuis inspiré par l'esprit chrétien, se plaçait,
pour étudier l'homme et lui dicter des règles de conduite,
aa point de vue de sa destinée relîs^euse. La Rochefou-
cauld ilrit pour lui le domaine encore inexploré de l'ob-
aenrsDon morale. Psychologue à sa façon, il se donna
pour tâche, après ses déboires politiques et les désen-
chantements de sa liaison avec M"** de Longueville, de
descendre au fond des cœurs, d'y surprendre nos in-
stincts les plus secrets, et de dévoiler sans pitié les mo-
ûfi cachés des actions humaines. Ifalheurftusement fl
observait les hommes dans un moment peu favorable : la
Fivade ayant comme Jeté tous les partis hors de leur
▼rai caractère, les mauvais penchants de la nature hu-
maine, l'esprit de révolte, l'ambition, l'égolsme et la var
nité, refoulaient au fond des &mes les bons instincts.
Prévenu par ses propres mécomptes, La Rochefoucauld,
an Heu de pénétrer jusque-là, eut le tort de s*arrèter à la
surface, qui lui représentât les hommes tels mie son
ressentiment voulait les voir et les peindre; de là ce
triste aphorisme qui résume toute sa doctrine : « Les
▼ertas se perdent oans Tintât, comme les fleuves dans
la mer. • On s'est donné le facile plaisir de réfuter La Ro-
ehefoucaold ; on lui a victorieusement démontré que les
actions humaines ont d'autres mobiles que l'intâét ou
famoar-propre; on a réclamé la part du devoir et des
passions généreuses; en quoi on avait raison ; mais on a
eu tort de Juger de l'homme par le système. On de-
vait se rappeler que La Rochefoucauld , avec la frivolité
d*esprit et l'^Isme qu'on veut bien dire, n'eût pas
inspiré à des femmes telles que M"** de Sablé, M""* de
(tévîgné, surtout M°>* de La Fayette, l'admiration ou
rattachement passionné dont elles l'entourèrent Jusqu'à
la fin. Il fallait songer que, s'il se montra infidèle à
M"** de Longuerille et à la Fronde, il eut peut-être le
droit de se croire dupe lui-même, et qu'un noble cœur
déçu risque de s*aigrir en proportion même de ses illu-
sions détruites. Faut-il le dire enfin, s'il a calomnié les
hommes, il ne s'est trompé guère que du plus an moins.
Qu'on change les adverbes; qu'on lise souvent quand il
écrit UHfjowrs, qu'on entende qudquefois (raand il dit
mmoent, et ses luximes ainsi modifiées oflnront à qui
veut se connaître un miroir assez sincère. Consultez à ce
propos La Fontaine, il vous répondra par sa fable VHomnu
«f son image Œy. I, f. 11). V. Moraustes (Écrivains),
CâSAcrtoiBS, PBfséBS, Proverbes. A. H.
WAXiMS, ancienne note de Musique, en forme de carré
long horizontal, terminé à droite par une queue verti-
cale. Elle valait 8 mesures à % temps, c.-à-d. 2 longues,
et quelquefois 3, selon le mode. Elle n'est plus en usage
depais qa*on sépare les mesures par des barres, et qu'on
marque avec des liaisons les tenues ou continuités des
IfAXIHILIErtNES (Tours). F. Tours.
HAXmOM, limite supérieure de prix imposée par la
loi à la vente d'une marcnandise. Ainsi, H y 'a en France,
pour le pain, un maximum que des tableaux affichés font
connaître aux consommateurs. On a essayé de taxer aussi
la viande de boucherie , mais ce système a été bientôt
aliandonné. La loi mii fixe à 5 ou 0 p. 100 le taux du
prêt de Targent (F. iirr<at;T) est une loi de maximum.
Il en est de même des lois qui règlent les honoraires des
officiers ministériels, des agents de change, des cour-
ders de commerce, les prix de transport sur les chemins
de fer. Une loi qui établirait un minimum des salaires
serait par le fUt une loi de maa^tmum, puisqu'elle fixe-
nit la plus grande somme de travail que l'ouvrier de-
vrait exécuter pour un prix déterminé. Il y eut, pendant
b Révolution, en 1793, une application fameuse du
maximum à la vente des denrées (F. Maximum, dans
notre Dicthnnaire de Biographie et d'Histoire).
MAYA ou YOCATÈQUE (Langue). F. Mexique (Langues
do).
MAYENCE (Cathédrale de). L'église primitive dédiée
à S^ Martin , et dont S^ Boniftce tut archevêque , était
Me prabableiiient en bois « puisque l'histohre annonce
avec une certaine emphase qu'en 07S l'archevêque WIW
ligis entreprit de la rebâtir en nierres. Le Jour même de
sa dédicace, ce nouvel édifice fut incendié : on en repri$
la construction en 1009, et il fut achevé en 1037 par
rarchevêque Bardon. La cathédrale de Mayence eut en«
core à souffrir de deux incendies , en 1081 et en 1191 1
des travaux importants furent nécessaires, et l'on dut
faire une nouvelle consécration en 1239. Les murs de la
nef et l'abside orientale appartiennent éridemment an
XI* siècle, et sont dus sans doute à Bardon, On recon«
naît dans la masse des autres constructions l'ouvrage dn
xn* siècle ; le transept et l'abside de l'ouest, postérieurs
à l'incendie de 1191 , sont de style ogival ; les chapelles
ont été i^outées vers \b, fin du xui* siècle et dans le cours
du XIV* ; autour de l'église sont des cloîtres du xv*. De*
puis cette époque, le monument n'a pas reçu de change-
ments notables ; on a dû seulement te réparer après les
ferres de la République firançaise. Il est du plus haut
intérêt, à cause de ses dispositions architecturales : deux
absides romanes en terminent les extrémités, l'une ser-
vant au chapitre, l'autre à la paroisse, et chacune a son
transept ; il est surmonté de deux belles coupoles et de
quatre tourelles élancées. L'une des portes a des pan*
neaux de bronze provenant d'une ^ise de Notre-Dame^
aujourd'hui détruite. Tout l'édifice, en pierres d'un roues
plus ou moins clair, a 126">,75 de longueur, et 47™ de
largeur en y comprenant les chapelles latérales ; la Dat-
geur de la nef est de 34»,50. A l'Intérieur, U n'y a point de
vitraux, et un badigeon blanc a été étendu partout Mais
on remarque une magnifique cuve baptismale en bronze
fondue en 1325, une chaire de la fin du xv* siècle, et les
tombeaux des archevêques-électeurs, adossés aux piliers
et aux murs, ou formant des autels, n faut y idouter le
monument en grès rouge élevé à S' Boniface» la pierre
tumulaire de Fastrade, l'une des femmes de Charlema-
S ne, et le mausolée du minnesvnger Frauenlob, ouvrage
e Schwanthaler. B.
MA YEUX, un des Urpes les plus cyniques de la cari-
cature française. Aussi inmsu et plus libertin que Poli-
chinelle, laid, méchant, éhonté, U fut créé aussitôt
après la Révolution de 1830 : enfant des barricades, puis
g^e national, il courut ensuite une série d'aventures
qui provoquèrent le rire aux dépens surtout de la bour-
geoisie et au gouvernement de Juillet. Son règne n'a duré
que deux ans environ.
MAYPURE (Idiome), Idiome américain, parlé dans la
vallée supérieure de l'Orénoque. 41 est clair, précis,
riche d'expressions, exempt de sons gutturaux. Les noms
de nombre reçoivent des terminaisons différentes, selon
ou'ils se rapportent à des hommes, des animaux ou
d'autres objets. Les prépositions sont toujours placées
après leurs compléments, et les conjonctions, dont U y
a un très-petit nombre, à la fin de la phrase. Le Cavere,
parlé dans le bas Orénoque, n'est qu'un dialecte du
majrpure.
MAZARINADES, nom donné aux pamphlets, libelles ^
satires, en vers et en prose, que Ton publia, durant U
Fronde, contre le cardinal Mazarin. Ce nom vient de la
pièce la plus célèbre du genre, la Maiarinadê, datée
du 11 mars 1051. On l'a étendu aux écrits publiés aussi
en faveur du cardinal. Le nombre des Mazarinades est
évalué à 4,000 environ. Elles n'ont ni l'originalité, ni
Tàcreté, ni la verve des libelles de la Ligne, parce oue
les intérêts étaient moins sérieux, les passions moins
profondes et moins terribles : le burlesque en est le ca-
ractère général , et il en est un certain nombre qui soat^
pleines de raieté. Les hardiesses politiques que raq f»
trouve s'expliquent par l'absence d'une autorité répres^v
sive; cependant des poursuites furent exercées contre )eé;
imprimeurs, qui datèrent de Bruxelles ou d'Anvers beau-
coup de morceaux sortis de leurs presses. Les amateurs,
recherchent surtout les pièces suivantes : la Pure vérUS.
cachée, la Custode de la reine ^ la Famine, le Gowoer^-
nemeni prisent ou Êloùe de son Emineneef la MUHoA,
au Éloge burlesque de Maxarin, la Mcaanhade, 1$ 2Vs--
tament ampïûlxdogique^ la BouteUle cassée, MaseunUi,
les Barricades, VEnvoi de Maiarin au mont Gibet, F»*',
relay sur les vertus de Sa Faquinance, Lettre de PoU»'
chineîleàJules Mazarint , etc. Parmi les écrivains qui si
firent remarquer dans cette guerre de plume, nous cite*
rons le cardinal de Retz, Joly, Sarrazin, Patru, les deux
Laffemas, Guy Patin, Naudé, Marigny, Loret, Portai, Cau*
martin. Produites avec une srande rapidité, les Mazari-
nades sont, au point de vue de la typographie, extrême*
ment incorrectes; ouelques - unes ont des gravures..^
Gomme on les imprima presque tontes sur une même
HEA
1228
MED
lorte de papier, plié petit in-4*, on a pa, dès leur ^>par
ritioD, en former des Tolumes. La Bibliothèque impé-
riale, la Bibliothèque Mazarine, les bibliothèques du
LouTre, de S^-OenevlèTe et du Corps législatif, a Paris,
possèdent d'abondantes collections. F. Moreau, Biblh"
4fraphîê des Mastarinades, Paris, 1850-55, 3 yoK in-8», et
Choix de Maxarinades, 2 toI. gr. in-8*. B.
MAZARTNE (Bibliothèque). Dès 1644, la Biblioth«xiue
du cardinal Mazarin, dans son palais, rue de Richelieu,
était publique. En 1688, plusieurs années après U mort
de son fondateur, elle fut transférée au Collège Maza-
rin, sur le quai Conti, où elle est encore. Composée,
à Torigine, des 6,000 volumes de la collection acquise
d*un savant chanoine de Limoges, Jean Descordes, elle
s'accrut de livres achetés par Gabriel Naudé, son pre-
mier bibliothécaire, à Paris, en Hollande, en Italie, en
Allemagne et en Angleterre , et de la collection du car-
dinal de Toumon. Elle demeura sous Tadministration
de la maison de Sorbonne depuis le 14 avril 1688 Jus-
qu'au 7 mai 1701, date de la remise des clefs de la Bi-
bliothèque par Luce-Joseph Hooke, oui avait refusé de
prêter serment à la Constitution dvile du clergé. De-
puis, cette bibliothèque fut réunie, ainsi que la Biblio-
thèque royale, la Bibliothèque de TArsenal et la Biblio-
thèque S^*-Geneviève, aux attributions du ministre de
rintérieur. Elle renferme aujourd'hui 200,000 vol. et
4,000 mss. Un des plus curieux objets qu'elle contienne
est le projet d'une caiàpagne de d&ouvertes proposé au
roi par La Pérouse , accompagné de notes écrites de la
main de Louis XYI. On y remarque .aussi le globe ter-
restre de ce malheureux prince. Petit^Radel a donné, à
la suite de ses Recherches sur les bibliothèques anciennes
et modernes, une notice historique sur la Bibliothèque
Hazarine. Cet établissement lui doit 80 modèles exécutés
en relief représentant des monuments pélasdques de
ntalie, de la Grèce et de l'Asie-Mineure. C. de B.
MAZDÉISME (du send maxda, loi suprême), nom
donné à la relinon des anciens Perses, contenue dans le
Zené^Avesta (y. ce mot).
IIAZELIN. V. Hadrb.
MAZOVIEN (Dialecte). F. Poi^naisb (Langue).
UAZOURKA, MAZURKA ou MAZUREK , m de danse
de la Bfazovie (Pologne), dont la première partie est tou-
jours mineure, et la seconde majeure. Cet air s'écrit à 3
temps, comme la polonaise (V. ce mot)^ mais d'un mou-
vement plus vif. Il possède un rhjrthme particulier qui
consiste à marquer a^uvent le S* temps de la mesure; la
période se termine sur le ^ temps. La danse de la ma-
lourka tient à la fois de la valse et de la polka.
MÉANDRE. K. Freitb.
MEAUX (Église S^-ÉnBifiiB, à). Cette église cathédrale.
Su reconnaît aussi la S^* Vieige pour patronne, oflTre pln-
eurs styles, mais appartenant tous à la période ogivale.
Les six arcades Inférieures du chœur, les bases et les
chapiteaux de quelques colonnes de la nef, paraissent
remonter à la fin du xu* siècle ; les parties de la nef voi-
sines du transept offrent, dans les arcades de la galerie
et les grandes verrières, les formes simples du xm* ; les
parties supérieures du chœur, le sanctuaire et les cha-
pelles absidales sont de la fin de ce même siècle; le xiv* et
le XV* ont vu s'élever le transept avec ses deux portails,
et une partie de la fiiçade occidentale ; une partie de la
nef, au moins en ce qui concerne l'ornementation , le
bas côté septentrional, et les parties supérieures de la
tour datent du commencement du xvi*. A l'extérieur, la
cathédrale de Meaux est d'un style sévère, dont l'austé-
rité n*est dissimulée par aucun artifice de décoration, ^
il Ton en excepte les portails, on trouve à peine quel-
ques traces de sculptures sur les murailles. C'est une
nuMse nue et sans vie, dont les matériaux sont, en outre,
de mauvais choix. Le pourtour du chœur et de l'abside
a un aspect moins triste : les contre-forts, qui soutiennent
éeuz rangs superposés d'arcs-boutants, sont tqpiinés
Cir de petites pyramides, ornées, sur leurs angles, de
ailles ou de fleurons. Point de ces saleries découpées ,
£d forment ceinture autour des conibles des autres ca-
édrales; elles sont remplacées par une simple rampe
de fer. La couverture, en tuiles grossières, contribue en-
core à donner de la lourdeur à l'édifice. La grande fa-
çade, commencée sur un plan vaste et imposant, n'a
Jamais été achevée ; les voussures des trois portes , qui
avalent été travaillées avec soin, ont été mutilées par les
calvinistes en 1501 ; la rose centrale, à compartiments
rayonnants, est la plus belle partie de ce irontisplce.
Dm deux tours qui flanquent la façade, celle du nord,
kiute de 68 met., est seule terminée; le sommet de celle
du sud est recouvert d'ardoises. L'intérieur de Péglise a ni)
tout autre mérite que le dehors, et peut rivaliser, pour
l'élégance et la hardiesse, avec les cathédrales plus in»>
portantes : il ne manque à la grande nef q^u'une longueur
plus considérable. Le chœur et le sanctuaire sont surtout
romarquablea pour l'élancement des colonnes qui les
soutiennent : ces colonnes, hautes de IS'^fSO, couronnées
de gracieux ckttpiteaux, sont cantonnées d'une grftle co«
lonnette qui monte d'un seul Jet Jusqu'à la naissance de
la voûte. Les fenêtres, aujourd'hui privées de verrières,
semblent un peu courtes, parce que la ^erie qu'elles
surmontent n'est pas éclairée. Les cinq chapelles absi-
dales forment un rayonnement symétrique d'un eflët
imposant; contre la coutume, celle de la S'*- Vierge n'a pas
de plus grandes dimensions que les autres. L'une d'elles
contient le tombeau en marbre de Bossuet. Les quatre
chapelles b&ties en sous-œuvre entre les massifii des con-
tre-forts de la nef forment une disparate f&cheuae. Le
riche Jubé qui existait autrefois à l'entrée du chœur a
été abattu au xvm* siècle; il fut remplacé par de massifs
autels, qu'on a heureusement fait disparaître de nos Jours.
La nef n'a oue cinq travées, y compris celle gue remplit
la tribune des orgues : les piliers y sont en iaisoean. La
partie inférieure des murailles est ornée d'une fausse
galerie en relief. Les dimensions de la cathédrale de
Meaux à l'intérieur sont : longueur dans œuvre, 84",35 ;
largeur du transept, 35*" ; hauteur de la voftte du chœur,
20"; hauteur de la voûte au milieu du transept, 31".
F. MB* Allou, Notice sur la cathédrale de Meaux, in-8*.
MÉCANIQENS DE LA MARINE. On distingue : les
mécaniciens en chef, assimilés aux capitaines de cor-
'vette, et aiyolnts aux commandants supérieurs des bâti-
ments à vapeur dans les ports dédgnes par le ministre
de la marine; les mécaniciens principaux de 1** classe,
qui ont rang de lieutenants de vaisseau, et qu*on emploie
à terre selon les besoins du service; les mécaniciens
principaux de 2* classe, assimilés aux enseignes de vais-
seau, et employés à la mer et à terre ; enfin, les maî-
tres mécaniciens.
MÉCANIQUE (Philosophie), doctrine qui ne fait ré-
sulter les qualités des corps que du rapprochement d'un
certain nombre d'éléments ou de principes sans qualités
propres, et de leur manière de se grouper. Le système
d'Anaximandre est déjà un commencement de philoso-
phie mécanique ; mais c'est dans Straton de Lampsaque
qu'on la trouve complète et sans mélange. D'après son
système, le monde n'est pas animé; ses principes exis-
tant d'eux-mêmes, le mouvement et les eflfets qui en
résultent sont dus à la nécessité. Ce système différait de
celui de Démocrite et d'Épicure en ce qu'il n'admettait
pas les atomes ni le vide; il expliquait toute chose à
l'aide de certains mouvements ; u est inutile d'i^outer
qu*il repoussait toute croyance à la divinité. La philoso-
pliie m«:anique n'est qu'une forme de la physique chei
les Anciens, et du matérialisme chez les Modernes. Des-
cartes s'est rapproché de cette doctrine, en Toulant ex-
pliquer les phénomènes physiques par la matière et le
mouvement, mais avec cette différence capitale, qull a
recours à Dieu pour imprimer le mouvement. R.
IléCitNlQDBS (Arts). V. ASTS BT MtnBBS.
MÉCHOUAR, nom que les Arabes donnent à la cita-
delle de quelques-unes de leurs villes.
MÉDAILLE. Cest, proprement, une pièce métaUiqoc
et oommémorative, destinée à conserver et à transmettre
le souvenir soit d'un événement, soit d'un homme. Ches
les Anciens, la médaille n'était pas distincte de la mon-
naie, parce que la monnaie portait le plus souvent la
témoignage du temps où elle était frappée, ou mèms
parce qu'elle étût émise à l'occasion d'un fait important,
comme le serait une médaille ai^ourd'hui. Une monnaie
antique a donc généralement eu un double caractère:
moyen d'échange, elle a circulé avec une valeur déter-
minée; monument historique, elle a conservé sa sigoi-
flcation commémorative, nous apportant les noms des
magistrats, la mention des événements, l'image à»
temples, statues, édifices publics ou sacrés <ra*eUe devait
faire connaître. De là sa double dénomination de mon-
naie et de médaille; de là aussi les secours qu'elle ap*
{»orte à l'histoire, les lumières qu'elle lui fournit dans
'absence de tout autre témoignage. Cependant, il parait
impossible de rattacher à un système monétaire quel-
conque quelques-unes des pièces une nous a transmises
l'antiquité : dans ce nombre, nous signalerons les grandes
pièces d'argent de Syracuse à la tète de Cérès ou de Pro-
serpine {V.lafig. ci-dessous ), et les médaillons de brooss
de l'Empire romain. La rareté de ces pièces, qa'on a troa*
hkd
1229
MËD
Téeè quelquefois montées comme des bijocix, porte à
croire qu'elles ont été émises à petit nombre, pour être
dstriboées à des fonctionnaires, et non livrées au com-
merce. Les auteurs anciens ne nous fournissent à cet
égard aucun renseignement.
hkidaàllon de Syraeuu (face).
MéiaUlon de Syracuse (reren).
Au moyen ftge, la monnaie a perdu le caractère easen-
deUement mobile, actuel, oommémoratif, qu'elle avait eu
dans l'antiquité ; les types ont tendu à l'immutabilité; le
Qom du souverain a seul changé. Aussi le retour à l'étude
da Fantiquité a-t-il fait inventer la médaille. En France,
tel plos anciennes médailles sont de très-grandes pièces en
•r, d'une atrême rareté, thippées par le roi Charles VII ;
sUes sont ooQTertes de longues légendes où Ton célèbre
U défaite des Anglais et la délivrance du sol français par
le roi Charles VII. — En Italie, l'art Joue un plus grand
rtle dans la médaille; il s'y manifeste, du premier coup,
STee une puissance et une originalité très-remarquables :
mais, dans les imitations des Anciens, on employa pen-
dant longtemps les moyens matériels que ceui-ci avaient
mis en œuvre, c-è-d. le moule qui donne des épreuves
aonvent iné^es, remplies de soufflures; les artistes
étaient obli^ de les retoucher eux-mêmes, ou de les
ûdre ciseler par leurs élèves. Au commencement du
XVI* siècle, Victor Camelo inventa l'art d'enfoncer les
coins dans l'acier, et on commença à préférer les épreuves
dues à ce procédé aux épreuves fondues. Cependant, tan-
dis <pi*en Italie on abandonnait le moulage, en France, il
continua d'âtre en usage sous Dupré et sous Varin, et
FÂllemagne, qui le conserva, pxx>duisit également de
très-belles pièces. — L'invention du balancier ou du
moulin , an milieu du xvi** siècle, permit d'obtenir des
épreuves parfaitement nettes de médailles d'une grande
dimension , et dispensa l'artiste de les retoucher. Au-
jourd'hui encore, après IMnvention de la machine Thon-
aelier, qui frappe les monnaies sans le secours de la
mahi de l'homme, on se sert du balancier pour frapper
les médailles : c'est le seul engin dont on puisse obtenir
la force nécessaire, en lui faisant donner autant de coups
fallesthooin.
Les graveurs en médailles dont les œuvres sont le plus
recherchées sont : à l'étranger, Victor Pisanello, le grand
irtiste du xv« siècle, fondi^r de l'école de Vérone, qui
lompte Mathieu de Pasti, Jules Terra, Torre et tant
d'autres; en France, Dupré, le plus habile graveur fran-
çais, contempondn de Henri IV et de la r^;ente Marie de
Uéffida; Varin, graveur des principales médailles de
Loais XIV ; Dnvivier, contemporain de Louis XV, etc. —
AQJourd'hià la gravure en médailles est en décadence i il
est vrai que cet art éteit autrefois l'oblet d'une protection
spéciale ; les rois faisaient frapper des médailles à l'oc-
casion de tous les événements de leur lègne. Le nombre
en fut assez considérable pour fournir la matière de
grandes publications, telles que VHistoire du règne de
Louis Al r par les médailles, V Histoire du règne de
Louis XV, etc. Ces pièces forment de belles suites d'un
module uniforme, et dont on peut voir les exemplairea
en or, destinés an roi, dans les collections du Cabinet
de la Bibliothèque imp^ale de Paria. D'autres ouvrages,
faits sur le plan des précédents, ont pris les monuments
monétaires comme témoignages de l'histoire, ainsi VHis*
toire métallique de la Riwlution par M. Hennin , YBis»
toire mitalliqve de Napoléon le Grand par Millingen, etc.
Le plus récent de ces sortes d'ouvrages est VHistoire mé^
taliique de la Révolution de 1848, publiée par M. F. de
Saulçy. Nous dirons au mot Monnaie tout ce que l'on a
rapporté improprement au mot Médaille, en établissant
entre ces dénominations une synonymie qui n*a Jamais
existé; car une médulle n'est pas une monnaie, et les
monnaies, quoique antiques, ne sauraient, sans incon*
vénient, ètro confondue<% avec les médailles. D.
MÉDAILLES CCsbinot des) et antiques de la Biblio-
thèque nationale de Paris. Il est situé à l'extrémité N.
du b&àment de la bibliothèque sur la rue de Richelieu,
au f étage. C'était un salon de l'ancien hôtel de la mar-
quise de Umib^rt , et remarquable parmi les beaux sa-
lons du xvm* siècle. On y voit 4 dessus de porte peints
par Boucher, et , sur les trumeaux , 3 tableaux de Carie
Vanloo, et 3 de Natoire; tous peuvent compter parmi les
bons ouvrages de ces artistes. Dans un des taoleaux de
Vanloo représentant les trois protecteurs des Muses,
Apollon, Mercuro, et Hercule Mussagète, Apollon est re-
présenté sous les traits de Louis XV. — En eifet, c'est à
ce prince que la Bibliothèque doit son cabinet actuel des
médailles, et c'est lui qui en a fait fairo la décoration.
François I^ est le premier roi de France qui collectionna
des médailles et des pierres gravées; il les plaça à Fon-
tainebleau. Henri II y ijouta une collection apportée
en France par Catherine de Médicis. Charles IX déposa
cette collection au Louvro, et créa une place de conser-
vateur des médailles. Le Cabinet fut presque entièrement
perdu pendant les troubles de la ligue; Henri IV com-
mença de le roformer, et Louis XHI abandonna le projet
de son père. Louis XIV eut le goût des médailles; il
réunit au Louvre toutes celles des maisons royales, et en
composa ce qu'on appelait le Cabinet des antiques, qu'il
augmenta, en 1660, de la collection de Gaston d'Or-
léans. En 1666, le conservateur des médailles ayant été
assassiné au Louvre, l'année suivante Colbert transféra
le Cabinet à la Bibliothèque royale, rue Vivienne. Il y
resta Jusou'en 1684 1 alors Louis XIV, qui, depuis deux
ans, faisait sa résidence iiabituéUe au château de Ver-
sailles, y fit installer le Cabinet des Antiques, encore
beaucoup accru, particulièrement par les méaailles de Sé-
guyn, 1669, et les pierres gravées de Lauthier, 1670. En
outre, le roi avait fait voyager en Italie, en Sicile, en
Grèce, en Algérie, en Egypte et en Perse, pour y acheter
des médailles et des camées; tous ces soins rendirent sa
collection la plus importante de l'Europe.
Louis XV, qui n'avait pas les nobles instincts de son
aïeul, abandonna les collections de Louis XIV, et, en
174i, en ordonna la translation à la Bibliothèque royale
de Paris. Dans la décoration de ce superbe Cabinet, on
plaça, aux deux extrémités, les portraits en pied de
Louis XIV, copie faite d'après Rigaud, et de Louis XV. Us
en furent retirés pendant la Révolution. A la Restaura-
tion, on rétablit celui de Louis XIV, et, à la place de
celui de Louis XV, on mit le portrait de Louis XVIII ,
peint par Ary Schefier. — Les richesses du Cabinet des
médailles et antiques sont renfermées dans une suite de
9 corps d'armoires bas, en menuiserie sculptée, posés sur
de grands guéridons, en bois sculpté aussi , à dessus de
marbre chantournés, et que l'on croit avoir été apportés
du cabinet de Louis XIV à Versailles. Chaque armoire
contient une quadruple rangée de tiroirs percés de trous
où sont placées les médailles. Au milieu de la salle, ime
armoire vitrée, posée sur une hirge table à dessus de
marbre de plus de 4 met. de long, expose aux regards
une foule d'objets d'art antiques ou anciens, la plupart
extrêmement curieux. Sur les armoires sont des bustes
antiques, formant une série iconographique du plus
grand intérêt , et , parmi , quelques vases antiques aussi*
— Le Cabinet contient 200,000 médailles environ, et plus
de 3,500 camées et pierres gravées ; nul autre, excepté
peut-être celui de Vienne, n'a, en pierres gravées, autant
de morceaux de premier ordre, tels que : V Apothéose d'Au»
guste, celui de Germanicus, la LuUe d$ pfeptmie et du
HËD
1230
MËD
Minerve pour âoi^mer le nom à la ville de Cécrops, Achille
Citharède, le Cachet de Michel -Ange, le Vase de Vab^
baye de S^-Denis, le Portrait d'Elisabeth d'Angleterre.
Gomme ensemble, c'est le plos riche Cabinet da monde.
Il ne fat ouvert au public qu'en 1737. — Les principaux
objets d'art du Cabinet des médailles et des antiques ont
éti gravés dans Montfaucon, Monuments de la monar^
chie française, et VAnti^té expliquée; dans Millin,
Monuments antiques inédds; dans Caylus, RecueU d'an^
tiquités; et surtout duis le Trésor de numismatique et de
jglyptique. C D— t.
MÉDAILLES (Gravure en). Les graveurs en médailles
eonmiencent par exécuter en relief, comme un camôis
mais à l'extrémité d'un cylindre d*acier, le sujet dont ils
doivent obtenir des empreintes ; ce c^rlindre, durci par la
jtrompe, s'appelle poinçon» On prépare en forme de cône
ft base très-large le morceau d'acier qui doit devenir le
creux de la médaille; on fait correspondre la pointe ou
sommet de ce cône avec le milieu du sujet gravé sur le
poinçon ; et en firappant sur le poinçon , on écrase la
pointe du cône rougie à blanc, et on fait pénétrer dans
les molécules du métal amolli le relief dont on veut
obtenir un creux. Ce procédé permet de reproduire avec
le même poinçon les creux ou coins lorsqu'ils viennent à
se briser. — Parmi les graveurs en médailles, nous
citerons en France, au xyu* siècle, Dupré, Varin , Molard ,
Mauger, Bernard, Roussel, Clerion, Breton, DoUin, Du-
four, Chéron; au xviii*, Duvivier, Roettiers, Leblanc,
Léonard, Dassier, Fontaine, Droz, Aug. Dupré, Gatteaux;
au xix% Andrieu, Dumarest, Galle, Brenet, Gayrard,
Tiolier, Depaulis, Bfichaut , Caqué , Cannois, Bovy, Be-
rnard, Barre, Oudiné, Merley, etc. D.
MSDAiLLB MiuTAiRB, médaille instituée par Napoléon III,
en vertu de décrets du S2 janvier et du 29 février 1852,
en faveur des sous-officiers et soldats des armées de terre
et de mer. Une pension annuelle de 100 fr. est attadiée
à cette décoration. La médaille est d'argent, suspendue
à un ruban Jaune orange, liséré de vert, et est surmontée
d'une aiffle en métal jaune.
MÉDAILLIER, collection de médailles; — meuble à
tiroirs où les médailles sont rangées dans un ordre mé-
thodique; — salle où se trouvent placées les armoires qui
contiennent des médailles. V, Médailles (Cabinet des).
SIÊDAILLON, en termes de Numismatique, pièce mé-
tallique d'un poids supérieur à celui des médailles ordi-
naires. Les médaillons grecs, assez semblables aux mon-
naies contemporaines, paraissent avoir eu le môme usage;
les médaillons romains, beaucoup plus grands, ont sans
doute servi, soit h des présents, soit à la conservation des
■ouvenirs d'un haut intérêt ; ceux qu'on plaçait aux en-
leignes militaires représentaient les effigies des dieux ou
des empereurs, et portaient une bordure formée de plu-
sieurs cercles. D'autres servaient de parure, se portaient
an oou, et étaient montés en filigraine d'or et d'argent,
avec bélières. Quelques-uns sont formés de deux alliages
différents; le milieu est rouge ou or, et le bord en bronze :
les deux allisees ont été soudés avant la frappe. Les
contomiates (v. ce mot) sont des médaillons. Il est des
médaillons byzantins, dits concaves à cause de leur forme,
et où le sujet est gravé en creux. ,
M^AiLLOïc, en termes d'Architecture, ornement en
forme de médaille ronde ou ovale, dans lequel on place
an si^et sculpté ou une rosace. L'art ogival n'employa
guère les médaillons que dans la peinture sur verre, et
ne leur conserva pas toujours la forme circulaire; il en
fit de carrés, de losanges, etc. La Renaissance, au con-
traire, en fit un très-firéquent usage, et les médaillons,
toijours heureusement et habilement employés, sont de-
venus un des caractères dominaats de l'architecture à
cette époque. E. L.
MÈDE ou MÉDIQUE (Langue), hmgue des anciens
Mèdes, l'une de celles qui nous sont connues par les
inscriptions cunéiformes TV. ce mot). On donne le même
nom à ridiome pehlvi ( K. ce mot).
MÉDECIN ( du latin medicus). Chez les plus anciens
peuples, l'art médical fut un aes privilège des corps
sacerdotaux. Comme on crovait que les mâadies étaient
infligées par les dieux irrités, on se borna longtemps à
apaiser ces dieux par des sacrifices ou par des pratiques
superstitieuses. Il ne parait pas que les prêtres de l'Egypte
en aient profondément étudié les secrets : la croyance où
ils étaient que toute incision sur les cadavres était un
sacrilège dut faire obstacle aux développements de l'ana-
tomie et de la chirurgie; divisant, d'ailleurs, le corps
humain en parties isolées, comme le corps social était
divisé 6D castes, ils se partagèrent 09 médecins des
yeux, des bras, des Jambes, etc. Chez les Ghaldéens, ii
renommés pour leur science, U guérison des maladies
n'était pas le Dsit de l'habileté humaine, mais d'une inter-
vention divine ou du hasard : car on expossit les ma>
lades dans les mes, et ceux qui passaient mdiquaient les
remèdes dont ils avaient usé ou entendu parler. Es
Grèce, bien que ne faisant plus partie des prêtres, les
médecins formèrent une sorte de corporation sainte, qui
se donna des lois h elle-même; l'exercice de leur art fot
complètement libre, si ce n'est qu'à Athènes celui qui
voulait s'y consacrer était tenu de déclarer dans un dis-
cours public où et comment il avait étudié. Rome ftst
longtemps exploitée par des médecins étrangers, esclaves
grecs pour U plupart : puis J. César fit accorder le droit de
dté aux étrangers qui seraient en état d'enseigner la mé-
decine, et Auguste exempta les médecins de tout impôt,
de toute charge publique. Au iv* siècle de l'ère chré-
tienne, on institua des médecins de la cour (archtcUrt
sancti palatii) et des médecins des pauvres (arcfùatrt
populaires) : mais du moment où la médecine pouvsit
être une fonction publique, on établit des conditions
d'admission, et on décida que les archlâtres, formés en
collège, se recruteraient par voie d'élection après examen
des candidats. Les médecins qui n'étaient pas fonction-
naires continuèrent d'éclu4>per à toute espèce de con-
trôle.
Après la chute de l'Empire romain, l'art de guérir fat
exercé par le clergé, surtout par les moines; des Juifs et
des Mahométans s*y Uvràrent également. Cest seulement
vers la fin du moyen Age qu'il se forma un corps médical,
composé des mattres es scienees physiques et médicales
reçus par les Universités. La profenion de médecin est
aujourd'hui réde en France psr la loi du 19 ventôse an xi
(11 mars 1803). Nul ne peut exercer la médecine sans
avoir été examiné et reçu dans la forme prescrite. On
distingue les docteurs en médecine ou en chsrurgief reçus
par les Facultés de médecine, et que leur diplôme au-
torise à pratiquer leur art dans toute la France, et les
officiers de saniU , qui ne peuvent s'établir que dans le
département où Us ont été reçus par un Jury médical
(K. DoGTBua, OpnaBR de sant^). Quiconque exerce Is
médecine sans diplôme est passible d'une amende au
profit dM hospices, et, en cas de récidive, peut être
condaomé à un emprisonnement de 6 mois au plus (Loi
du 19 ventôse an xu-29 fév. 1804). Le Code Napoléon
(art. 909) décide que les médecins qui ont traité une
personne pendant la maladie dont eUe menrt ne peu-
vent profitéir des dispositions testamentaires faites en
leur faveur. D'après le Code pénal (art. 160), tout mé-
decin qui , pour favoriser auâqu'un, certifie faussement
des maladies ou infirmités propres à dispenser d'un
service public, est puni d'un emprisonnement de 3 à
5 ans : s'il a éité mû par dons et promesses, il est puni
du bannissement, et les corrupteurs LDnt punis de is
même peine. Les médecins ont un privilé^ sur les
meubles des défunts, pour le payement des soins donnés
à ceux-ci pendant leur dernière maladie. Au bout d'un
an , on peut leur opposer la prescription. Ils sont sounùs
à une patente du 15* de la valeur locative. ,
En Angleterre, la profession médicide, y compris l'en-
seignement, est abandonnée sans réserve à TexploitatioD
des psrticuliers. Il est vrai qu*une charte d'Henri VIII
a reconnu les privilèges d'un collège ou corporation des
médecins de Londres, qui ont seuls Te droit d'exercer leur
art dans cette ville et dans un rayon de sept milles, et
que, pour pratiquer la médecine en Angleterre, il faut^
à moms d*être gradué des Universités d'Oxford et de
Cambridge, avoir été reçu par ce collège, et être muni
de lettres délivrées par le président et par trois de ses
membres. Il existe aussi à Londres un collège de chirur-
giens établi sur des bases analogues par deux statuts
d'Henri VIU et de George H. lAais l'Angleterre n'a pas
d'écoles de médecine. Tout médecin a ses élèves, et leur
donne l'instruction médicale comme il lui plaît. B.
MÉDECINE (Académie de). Cette société savante de
Paris, créée par Louis XVDI le 28 décembre 1820, rem-
plaça la Société royale de Médecine et VAcadénUe royale
de chirurgie qui existaient avant 1 789. Elle fut divisée ori-
ginairement en trois sections, médecine, chirurgie, phar-
macie, et comprit cinq sortes de membres : honoraires,
titulaires, associés, adjoints résidants, et a<iyoints corres-
B[>ndants. Le l"' médecin du roi fut président d'honneur,
ne ordonnance du 27 décembre 1820 nomma pour les
trois sections 80 membres et associés résidants (45 titu-
laires), et 33 associés non résidants; une antre ordon-
nance, du 0 février 1821, ratifia l'élection de 40 tito-
MÊB
1231
M£6
Mini ttile par ooox de la premi^ foodatloat en tout,
15a mepihrea. Une place de secrétaire perpétuel fut
ioatitoée en 183SL Par ordoonance du 18 octobre 1820,
Quuiea X décida que 1 Académie ne ferait désormais
aa'one élection par trois eitinctiona Jusqu'à réduction
de «es membres à 100, qu^elle aérait partage en 11 sec-
tiooa, et supprima lea désignations aaaaodés résidants
et ]^noralraa. Une ordonnance de Louis-Philippe (20 Jan-
iTÎer 1835) aaaimila aux titulaires les a4j oints et les as-
aociéa, en aorte que tous les membres de TAcadémie
furent égaux. Cependant, depuis 1830, le nombre des
membres résidants ou titulaires s*était élevé à 252 : ré-
duit àifi7 en 1830, àl24 en 1848, U n*est plus que de 04,
sans compter 7 associés libres, 8 associés nationaux,
30 aB80ci& étrangers, 100 correspondants nationaux et
50 eonreqiondanta étrangers. L*Académie de médecine,
avec aoa budget et les dons qui lui ont été faits, avec
une aubYention annuelle du ministère de TlnstrucUon
publique, donne des Jetons de présence à ses membres, et
distribae chaque année des pru et des récompenses. Elle
a des archives importantes, une bibliothègue, un labora-
toire de chimie, et publie, outre un Bulletin de quinzaine,
des Mémoires annuels. Le GouvememenI la consulte sur
loot ce qui intéresse la santé publioue, principalement
sur les épidémies, les épizooties, les différents cas de mé-
decine, les remèdes nouveaux et les remèdes secrets, les
eaux minérales naturelles ou factices. B,
MéoBaNs (École de), un des monuments de Paris.
7. notre Dicttonnaire a^ Biographie et d'Histoire.
Mà>iciifB (Écoles de). /. Égolbs db m éDEcras, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d^Bistoire, p. 878.
iiéDECuiB (Facultés de), établissements d'enseignement
supérieur, à Paris, Montpellier, Nancy, Lyon, Bordeaux,
où Ton enseigne i*anatomie, la physiologie, la phar-
macie, la matiVre médicale et tbérapeuti(]ue, l'hygiène,
U pathologie interne et externe, la médeane opératoire^
les accouchements, la chimie, la physique et l'histoire
■atnrelle médicale. Il y a des professeurs titulaires et
des agrégés, ceux-ci nommés au concours. La Faculté de
Paris a S6 professeurs titulaires et 24 agrégés ou sup-
pléants t il y a 17 chaires dans les autres facultés. Les
traitements des professeurs sont de 13,000 fr. àPaiis,
de 6,000 fr. à 11,000 fr. dans les départements.
MBDBCiNE (Ecoles préparatoires ou secondaires de).
On en compte 19 dans les villes d'Amiens, Angers,
Arias. Besançon, Caen, Clermont-Ferrand, Dijon,
Grenoble « Ulle, Limoges, Lyon, Blarseille, Nantes.
mtiers, Reims, Rennes, Rouen, Toulouse et Tours. Ces
écoles ne peuvent conférer de grades : les études qui y
lODt faîtes valent auprès des Facultés, nuds pour un
temps moindre que le temps passé dans une Faculté. Huit
inscriptions ont toute leur valeur; les autres ne comptent
qae pour un tiers. Les otTiciers de santé peuvent exercer
après 4 ans d^études dans une école secondaire. Ces
écoles ont été organisées par ordonnances des 18 mai
18iO, 13 octobre 1840 et 12 mars 1841. Le traitement mi-
Qimum est de 1,500 fr. pour les professeurs, 1,000 fr.
pour les adjoints.
UÈbYCmE ET PHARMAC» MlLirATRES (ÉCOlO do). V. ÉCOLB,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
page 878, col. 2.
KKDECiNR LécALS, brauche des sciences médicales qui
s'occupe des rapports de la médecine avec la Justice.
L'avis du médecin est demandé par les magistrats lors-
qu'il s'agit de prononcer sur Tétat de démence des indi-
vidus, sur les cas do viol, d'avortement, d'infanticide, de
suicide, d'assassinat ou d'empoisonnement, sur la dis-
tinction des cas de mort réelle et de mort apparente, etc.
K. Bayard, Manuel pratique de médecine légale, 1843,
in-18*; Briand et Chaude, Manuel complet de médecine
légale. 6* édit, 1857, in-8o*, Devergie, Médecine légale,
théorique et pratique, 3« édit., 1852,3 vol. in-8«; Orflla,
Traité de médecine légale, i* édit., 1847, 4 vol. in-8».
MÉDECINS DU ROL Y. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d^ Histoire.
«éoccms CAirroNAUx et coiniuNAux, médecins chargés
de soigner gratuitement les pauvres des communes ru-
rales, de vacdner quand il n'y a pas un service spécial
^rg^isé, de surveiller les enfants, les infirmes et les
fiàllards placés au compte du département chez les par-
ticuliers, et d'inspecter l'hygiène publique. Leur senrîce
est réglé par des arrêtés préfectoraux. La dépense est
supportée par les départements avec le concours des
eoTomunes. L'institution des médecins cantonaux n'existe
encore que dans quelques départements.
«tovcms HiuTAiRBS, uu dos corps du service de santé.
Le cadre est ùié ainsi qu'il suit : 7 médecins inspeetêurê,
80 médecins prineipowc^ dont moitié de !■* classe et
moitié de 9« ; 290 médicins mofors, dont 130 de !'• classe
et 260 de 2*; SÛO médecins aides-maiors, dont moitié de
l*"* classe et moitié de 2*. Les aides-midors de 2' classe
sont recrutés pour les 3/4 parmi les élèves qui ont fait
leur stage à l'École de médecine militaire du Val-de-
Gr&ce; les autres emplois sont réservés aux médecins
civils commissionnés par le ministre de la guerre. Pour
devenir aide-major de 1'* classe, puis médecin major de
8* classe, jl faut 2 ans de service au moins dans le grade
inférieur : 2/3 des emplois vacante sont donnés à l'an-
denneté, l'autre tiers au choix. On ne devient médecin
mi^or de 1^ classe ou'après 4 ans de grade inférieur; les
emplois sont donnes moitié à l'ancienneté, moitié an
choix. L'avancement aux grades supérieurs est toujours
au choix.
MÉDIÂIÏOCHE, repas qui se fait au milieu de la nuit.
Le mot et la chose sont d'origine espagnole, et furent
introduits en France au xvii' siècle, par la reine Anne
d'Autriche, femme de Louis XIII.
MËDIANTË (du latin media$u, oui est au milieu), nom
donné en musique à la tierce de la tonique, parce que,^
dans l'accord parfait, elle tient le milieu entre cette to-
nique et sa qumte. C'est par la médiante que l'on recon*
naft si le ton est majeur ou nuneur.
MÉDUTEUR PLASTIQUE. F. Amb, paoe 108, c 2.
MÉDIATION, acte par lequel, lorsc^ue deux États sont
en contestation ou en guerre, un troisième interpose ses
bons offices pour amener un accord ou rétablir la ^siz^
On peut accepter une médiation, et néanmoins refuser la
solution proposée; c'est ce qui distingue la médiation de
Varbitrage, dont les décisions sont obligatoires.
MéniATioïc, nom donné dans le plain-chant à une in-
flexion de la voix ou à une suite de sons qui s'opère
vers le milieu du verset d'un psaume, avant I astérisque
qui le divise en deux parties. Cette médiation est la
môme à tous les versets, à moins qu'il ne se rencontre
un mot hébreu ou un monosyllabe : dans ce cas, on lui
fait subir un léger changement. F. C.
MÉDIATISATION. F. ce mot, et MâoiATisé, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
MÉDINET-ABOU (Temple de). F. ThIuibs.
^^ MÉDIUM, portion moyenne de l'étendue d'une voix ou
I aim instrument.
I MEETING. V. notre Dict. de Biogr. et d'Histoire.
I MÉGALITHIQUES rMonuments). F. au Supplément.
I MËGALOGRAPHIE (du grec megale^ grande, et prapho,
Je peins), nom que les Anciens donnaient à la peinture
noble, représentant les actions des dieux on des héros.
MÉGARE (École de), école de philosophie grecque oui
tire son nom de la patrie de son fondateur, Euclide, dis-
ciple de Socrate. Elle dura environ un siècle ; son dernier
représentant tut Dlodore Cronus; les autres philosophes
de l'école furent Ichthyas, Pasiclès, Thrasymaque, Clino-
maque, Eubulide, Stilpon, Apollonius Cronus, Euphante,
Bryson et Alexinus. L'école mégarique s'occupa surtout
de Logique et de Métaphysique, et, dans la Logique, elle
donna la préférence à la Dialectique, ce qui fit donner
aux Mégariques le surnom d'éristiques (disputeurs), parce
qu'ils faisaient dégénérer en dispute la science du rai-
sonnement. Ils se rattachaient, par suite, aux Sophistes
et aux Ëléates. Ainsi que ceux-ci, ils repoussaient la
certitude des sens, les regardant comme trompeurs, et ne
voulant s'en rapporter qu'à la raison. Ce principe logique
conduisait nécessairement à la négation du mouvement,
du changement, de la pluralité, et à l'affirmation de l'im-
mutabilité. C'est ce que firent les Mégariques. Un prin-
cipe qui leur appartient en propre est ridentification de
Vétre et du bien, principe adopté plus tard par l'école
d'Alexandrie. La morale tint peu de place dans l'école de
Mégare ; cependant les Stoïciens lui empruntèrent quel-
ques maximes, entre autres celle-ci de Stilpon : « Le bien
consiste dans l'impassibilité. » F. Gunther, Dissertatiê
de methodo disputandi megaricâ, léna, 1707, in-4«;
G.-L. Spaldinz, FtndtcÛB philosophorum megaricorum,
Berlin, 1793, in-8«; Deycks, De Megaricorum doctrine,
ejusque apud Platonem et Aristotelem vestigiis, Bonn,
1827, in-8^; Ritter, Romarques sur la philosophie de
4' École de Mégare, Paris, 1843, in-8* ; V Ecole mégarique,
dans le Musée du Rhin, Bonn, 1828; C. Mallet, Henné,
Histoire de V école de Mégare et des écoles d'Elis et d'Êré^
tri», Paris, 1845, iu-8o.
MEGASCOPE. VA^Supplémmt,
MÊGISSIKRS, apprôteurs de peaux. Ils reçurent des
statuts eu 1210. L'apprentissage était de six ans; le brevet
MÉL
1232
MËL
wAtait 90 UiTM, et là maîtrise 600. On les réunit, en
1776, avec les tit/inean, les conroyeurs, les peaussiers et
les pârchemiaiers en une seule et même corporation,
dont S>* Madeleine était la patronne.
MEIL, tunique de dessus du grand prêtre des Hébreux.
Ole était de couleur violette, ferméiB de tous les côtés,
avec des ouvertures pour passer les bras et la tête, et
garnie, par le bas, d*une bordure où Ton voyait des gre-
nades 06 différentes couleurs, et de petites clochettes
d'or.
MEILLANT (Château de), dans le département du
Cher. Un vaste logis flanqué de tours carrées, et biti au
temps de Louis \l par Pierre d*Amboise, constitue la
masse des constructions encore existantes. Il fut en
partie réédiflé par Charles Cfaaumont d*Amboise, gouvei^
neur du Milanais sous Louis XII ; on refit partout les ba-
lustrades, les fenêtres et les lucarnes; une chapelle d*un
travail délicat s*éleva extérieurement, à quelques pas de
Tédiflce. La partie la plus remarquable de Fœuvre nou-
velle est une tour hexagone contenant l'escalier ^i con-
duit aux grands appartements : elle présente trois étages
de fenêtres rampantes qui alternent, sur plusieurs de ses
faces, avec des pans ciselés d'un trè»-riche dessin, et est
couronna d'un campanile élésant qu'environne une bar
lostrade à jour. Les portes qui donnent entrée dans les
appartements sont surmontées de médaillons sculptés
représentant des empereurs romains. Dans la Salle des
Cêrfs^ ainsi appelée parce qu'on y voit trois grands cerfs
sculptés, se trouve une belle galerie à Jour qui forme
eeinture autour du manteau de la cheminée. A l'inté-
rieur de la chapelle on voit une charmante tribune en
boiserie, sur les panneaux de laquelle sont peintes trois
scènes de la Passion.
MEISTERS^ENGERS, c-à-d. en allemand maUres
chanteurs, poètes d'origine bourgeoise, qui, à partir des
premières années du xiv* siècle, continuèrent l'école ly-
rique des Mùmesifiaers (F. ce mot). Leurs associations
furent appelées MeUterorden (ordres de maîtres) et
SingMchuUn (écoles de chant) : il y en eut à Mayenoe,
Strasbourg, Ulm, Memmingen, Heilbronn, Nuremberg.
En 1378, l'empereur Charles IV leur accorda des lettres
de franchise et des armoiries particulières. Henri de
Misnie passe pour le plus ancien des Meistersengers; on
dte encore Henri de Mugeln au xiv' siècle, Muscatblut et
Michel Behaim au xv*, Hans Sachs au xvi«. A partir du
xvu* siècle, l'éclat des associations de maîtres chanteurs
s'évanouit. '
MÉLANGE, terme de Droit. V. Accession.
MÉLANGES, en termes de Littérature, nom donné à
des recueils de petits ouvrages en prose ou en vers sur
différents sujets.
MELGORIENNE (Monnaie), nom que porta au moyen
âge la monnaie des évêques de Maguelonne, parce qu'elle
était frappée au château de Melgueil.
MÉLIADUS DE LÉONNOIS, un des romans de hi
Table ronde. On y trouve d'amples renseignements sur
tout ce qui se rattache à l'histoire fabuleuse de cette
institution. Méliadus est un descendant, en ligne colla-
térale, de Joseph d'Arimathie, et le père du fameux Tris-
tan ( V, ce mot). Le roman auquel on a donné son nom
A eu plusieurs éditions à Paris, en 1528, en 1532 et en
1535. On en trouve un extrait dans la Bibliothèqtte des
romans, de février 1776. Les amours de Méliadus et de
la reine d'Ecosse, qui forment une partie importante de
TouTrage, sont une imitation évidente de celles de Lan-
eelot et de Genièvre.
MÉUSMATIQUE (du grec mélisma, groupe harmo-
nieux), se dit d'un chant orné dans lequel une syllabe
porte plusieurs notes, par opposition au chant sylla-
hiqtie, dans lequel une note unique correspond à chaque
syllabe du texte.
MELLUSINE ou MERLUSINE, en termes de Blason,
figure échevelée, demi-femme et demi-serpent, qui se
mire et se baigne dans une cuve. On ne se sert de ce
terme que pour les cimiers.
MÉLODICA, instrument à clavier, en forme de clave-
cin, avec un Jeu de flûte. La mélodica fut inventée, dans
«a seconde moitié du xvui* siècle, par J.-A. Stein, d'Augs-
bourg.
MELODICON, instrument à clavier dans lequel le son
était produit par le frottement de pointes métalliques sur
un cylindre d*acier. Il fut inventé par Rieffelsen, de Co-
penhague.
BIÉLODlE (du grec mélos, vers, mesure, et ôdè, chaut),
fuccession de sons différents, articulés diatoniquement
et chromattqueaient, par degrés conjoints ou par degrés
disjoints, et formant, à l'aide du rhythÊHS {V. ôs moi^^ xm
sens musical. Une succession de sons, dépourvue des
moyens qui servent A préciser la durée die chacun de
ces sons, serait encore une mélodie; mais elle n'aurait
rien d'açréable ni d'expressif : c'est le rhythme qui per-
met de coordonner les sons par l'emploi varié de leurs
signes représentatifs, de les classer dans les cadres ap-
pelés mesures, de les faire entendre sur les temps divers
de ces mesures, et d'établir un ordre quelconque entre
les membres de phrase, les phrases et les périodes du
discours musical. Une mélodie non rhythmée n'est qu'une
chose inerte, un corps Inanimé, auquel le rhvtbme donne
le mouvement et la vie. La mélodie et le rhythme sont,
avec Vharmonie (F. ce mot)^ les parties constitutives de
l'art musiraJ. Toutefois, il n'est pas nécessaire d'avoir
fait des études d'harmonie pour composer de bonnes mé-
lodies : quelques-unes des mélodies de la Flûte enchantée
ont été foufiiies à Mozart par son poGte, fort mauvais
musicien. La musique est si bien, dans son essence, une
chose de sentiment, que des ignorants ont pu souvent
trouver des chants mélodieux; une foule d'airs ont été
composés instinctivement dans le midi de la France, en
Allemagne, en Italie, même avec les rhythmes les mieux
appropriés aux sentiments que ces airs expriment, et il
n'est pas rare que plusieurs voix les exécutent, non pas
A runisson, mus en harmonie, avec une certaine con-
venance. La mélodie est le produit de l'Imagination; elle
réaulte d'une Inspiration heureuse, et non dfes calculs de
la science : c'est elle seule qui, dans une composition
musicale, frappe le plus grand nombre des auditeurs.
Toutefois, cette faculté de créer ne s'étend pas-au delà de
limites assex étroites ; elle ne s'applique, par exemplt,
qu'à un petit air, à une romance : celui qui ne compose
oue d'instinct est incapable de développer un si^et à
raide de la modulation, et d'ajuster ses motifs sur une
harmonie régulière. V, Doni, Sur la perfection de la mé-
lodie, dans le 2* volume de ses CEuvres musicales ; Riepel,
Éléments de la compQsiUon musicale^ en allem., Ratis-
bonne, 1752 et 1754, in-fol. ; Kpch, Essai d'une introduc-
tion à la composition, en alleml ; Reicha, Draité de mâ-
lodie, 2* édit, 1832, 2 vol. in-4«; Choron et A. de La-
fage. Manuel de musique, Paris, 1838. B.
MÉLODION, instrument en forme de petit piano, in-
venté par Diez en 1811. Il est muni de pédales qoi
servent à faire mouvoir une roue. Les sons se produi-
sent par le frottement de petits b&tons en métal , cpe
les touches font mouvoir sur le cylindre. Le mélodion
imite bien la flûte, la clarinette, le cor de basset et le
basson. Il peut exprimer les diverses nuances d'intensité
des sons.
MÉLODIUM. F. Orgue EXPRESSIF.
MÉLODRAME (du grec mélos, air, chant, et drama,
action, drame). Ce mot, qui, d'après l'étymologie, signifie
drame en musique, servit primitivement, en effet, à dé-
signer l'opéra. Biais, au xviu* siècle, il prit une tout autre
acception : par suite de l'interdiction qui fut faite aux
théâtres secondaires d'exploiter les genres de pièces qu'on
représentait à l'Académie royale de Musique et à la (}o-
médie-Française, lesauteurs imaginèrent un eenre bfttard,
où ils amalgamèrent la tragédie, le drune bourgeois, la
comédie, la danse et la musique : tel fut le mélodrame,
même après que la Révolution eut donné aux entreprises
théâtrales une liberté sans limites. L'action était toujours
à peu près la même, et se passait entre quatre person-
nages principaux : un tyran souillé de vices, animé de
toutes les mauvaises passions, souvent prince, quelque-
fois chef de brigands; une héroïne, bourgeoise ou prin-
cesse, douée de toutes les vertus, et p^sécutée par le
tyran ; un amant de cette victime infortunée, la délivrant
au moment du péril et tirant de son ennemi une ven-
geance exemplaire ; enfin un niais, souvent poltron, quel-
quefois gourmand, ou possédant simultanément ces di-
vers caractères, afin d'égayer un aussi sombre spectacle.
La pièce était généralement en 3 actes, le l*' consacré i
l'amour, le 2* au malheur et à l'efliroi, le 3* à la punitioL
du crime et au triomphe de la vertu. Les intrigues étaien.
toi^ours ténébreuses, les situations inattendues, les émo*
tiens violentes, le style tour à tour emphatique et trivial.
Un ballet ou divertissement était intercalé tant bien qui
mal dans la pièce. C'était d'ordinaire par une scène d'es*
crime, dite combat des quatre coups<, et dans laquelle
plusieurs personnages, quelquefois la princesse elle-
même, échangeaient en mesure des coups d'estoc réglés
d^avance, que le nœud de la pièce était trancbé avec U
vie du traître. Quant à la musique, elle avait pour em-
ploi d'ouvrir et de préparer l'Ame des spectateurs au2
MEL
1233
M£M.
•entiiiieDts qu'on allait développer devant enx^ et d'anç-
menter Teffet dea émotioiu produites : ainsi, une mélo<ne
vive et animée annonçait l'arrivée du comique, une sym-
phonie lugubre précédait rentrée du tyran, et des tons
lamentables accompagnaient les pas de la princesse. Ge
fut le théâtre de la Gaité qui exploita le genre du mé-
lodrame arec le plus de succès, grice surtout aux pièces
de Victor Ducange et de Guilbcrt de Pixérécourt. Depuis
1830 environ, ce genre, tout en conservant une certaine
faveur aur quelques sc&nes, n'a plus d'existence avouée ;
il a fait place au dram$ ( V, ce mot)^ et le mot mélodrame,
toujours pris en mauvaise port, est appliqué comme
qualification méprisante aux œuvres indignes d'nn autre
nom. B.
MÉLOPÉE (du grec milos, chant, et poiém, faire),
nom cpie lea anciens Grecs donnaient à Tart de composer
des chants, des mélodies. Une règle fondamentale de cet
art était de limiter toute mélodie à un certain ton, de la
faire commencer et terminer par ce ton; on pouvait
toutefois commencer par la quinte du ton. On employait
ordinairement le genre diatonique. En ce qui concerne la
progreasion des intervalles, Aristoxène recommande de
oc pas pratiquer plus de deux demi-tons et de deux
qnahs de tous successifs, et de ne point mettre deux
tierces mineures de suite. Encllde distingue quatre suc-
cessions de sons, qu*ii appelle : ag6gè^ par degrés; plokè,
|Mir degrés disjoints et par saut; petleia, fréquente répé-
tition du même son; tonè, prolongation du son. Aristide
Quintilien distingue trois parties dans la mélopée : la
lêpsis (choix), apprenant quelle espèce de voix ou d'in-
strument doit exécuter une mélodie, quel rhythme, quel
genre et qud mode conviennent le mieux au caractère du
nome qn*on veut faire; ]timixts (mélange), contenant In
doctrine de la modulation; la chré^is (usage), qtii ren-
ferme lea trois premières espèces de successions de sons
indiquées par Euclide. Par rapport au style, 11 la divise en
trois modes différenta : le tragique, où le chant régnait
seulement sur les sons graves ; le nomique, sur les sons
moyens; le bachique ou dithyrambique^ sur les sons
aigus. De la distinction de ces trois styles on est peut-
être en droit de conclure que les voix de femme étaient
exclues du mode tragique, et que les voix de basse
n*étaieot pas employées pour Texpression des sentiments
oyeux* B.
MÉLOPHÂRB, fanal à plnsie^irs petites fenêtres qu*oo
passer u mmiorn placée
itrum*»nt «it monfi' sur un^pied, comme un pupitre; on
s*cn sert pour donner des concerts nocturnes.*
HKLOPUONE. V, le Supplément
IIÉLOPLASTE, tableau composé oes cinq lignes de la
portée, avec quelques lignes additionnelles au-dessus et
an-deasous. Ce tableau, sur lequel le professeur de mu-
sique promène une baguette terminée par une petite
boule, sert à représenter, par une notation mobile, des
chants qui sont chantés par les élèves au fur et à mesure
que la baguette leur indiaue de nouveaux sons, ce qui
les dispense d*apprcndre à lire les signes ordinaires de
la musique, de connaître les clefs et tous les accessoires
de la musique écrite. Cette méthode a été inventée, vers
1817, par Pierre Galin, de Bordeaux.
lÔELPOMËNE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ffistoire.
MELROSE (Abbaye de), en Ecosse, dans le comté de
Roxbur^. Cette abbaye, fondée en 1130 par David I*', et
achevée en 1140, fut détruite par les Anglais en i3*i^i, et
bientôt réédifiée. Elle eut encore à souffrir les dévasta-
tions des Aurais en i385, et des protestants au xvi* siècle.
les ruines de T^ise subsistent seules pour attester la
magnificence du monastère. Le chœur, le transept, une
partie de la nef et de Taile septentrionale, presque toute
l'aile méridionale, sont encore debout; le côté occidental
de la tour carrée qui s*élevait au centre de Tédiflce a
également survécu aux ravages des hommes. Ces belles
ruines appartiennent au style gothique fleuri. Le portail
méridional offre une magnifique fenêtre de 7"*,30 de
hauteur et de 5 met. de largeur, surmontée de niches,
rides aujourd'hui de leurs statues, et une riche décor&r-
lioQ où se mêlent les rosaces, les fleurs de lis, les têtes
de Chérubins et de Sirènes, et les figures les plus gro-
tesques. Du même côté, le mur de Téglise est percé de
S/eoètres ornées latéralement de têtes de moines ou de
religieuses, et surmontées de pinacles qui sont de véri-
tables chefa-d*fleuvre de sculpture. Une partie des voûtes
1 disparu. Du côté du nord est une porte admirablement
sculptée, qui conduisait à des cloîtras, Vehbuye de BIel«
rose a été décrite par W. Scott dans son roman du Mo'
nastère, sous le nom de Kennaquhair.
MEMBRE , en termes d^Architecture, se dit de toute
grande partie du système selon lequel un édifice est
construit, par exemple, d'une /rise. d une corniche. Il se
dit aussi des parties plus petites dont les plus grandes
se composent t ainsi, la fnse est un membre de Tent»-
blement, le larmier est un membre de la corniche,
IIBMBRB. V. PiâUODB.
MEMBRURE, en termes de Construction navale, assem-
blage des pièces de boia qui forment lea côtés d'un b&ti-«
ment; — en termes de Charpenterie et de Menuiserie,
grosse pièce de bois servant ae point d'appui, soit à une
charpente, soit à un assembhige de pièces ajustée».
MEMENTO, mot Utin qui veut dire souvienS'4oi , et
par lequel on désigne, tantôt un carnet de poche destiné
a contenir des notes, tantôt un livre présentant l'abrégé
de quelque science. ~ En termes de Liturgie, on désigne
par Mémento la partie du canon de la messe où l'on fait
la commémoration des vivants et des morts; le mémento
des vivants est avant la consécration, celui des morta te
dit après.
MEMNON (Statue vocale d?). J y Tu feRr*
.MEMNONIUM. J ^' i^b^ks.
MÉMOIRE, faculté que nous possédons de conserver
.es notions acquises. Le fait de la Mémoire est le soU"
venir. Le souvenir d'une perception ou d'une sensation,
en présence de cette même perception ou sensation re-
nouvelée, est proprement la reconnaissance. Comme
toutes les autres facultés, la Mémoire se manifeste spon-
tanément; en outre, le plus grand nombre de nos sou-
venirs se présentent d'eux-mêmes, et quelquefois malgré
nous. Il y en a qui semblent exiger un acte de volonté
et même un effort; mais la volonté et l'eff'ort n*ont pour
but que d'éclaircir par l'attention une notion qui revient
obscure et confuse : ee qu'on a appelé souvenir volon-^
Uûre n*est mi'un souvenir instinctif suivi d'un acte d'at-
tention réfléchie. Pour que la Mémoire entre en exercice
et produise le souvenir. Il faut : Videntité du moi, car se
souvenir c'est se retrouver tel qu'on était dana un moment
du paasé; la durée du moi et la succession de ses modes;
enfin, un fait antérieur dont le souvenir n'est que la re-
production. La Mémoire donne pour résultat la certitude
de la durée du moi, et, avec elle, les notions d*identité,
de durée, &avant et d'après, de temps. Il faut jouter
que la Mémoire est pour nous la condition de l'expérience
et du progrès : l'intelligence humaine serait réduite à
rien, s'il ne lui était pas donné de conserver les connais-
sances Qu'elle acquiert; une notion à peine obtenue dis»
paraîtrait A Jamais ; tout le travail qu'elle aurait coûté
serait sans cesse à recommencer, et tout perfectionne-
ment intellectuel serait impossible. Le fait de la Mémoire
se présente sous trois formes diflTérentes : i« le souvenir
complei, quand la notion reparaît dans l'esprit avec
toutes les circonstances de la perception où elle a pris
naissance; 9* la réminiscence, lorsque la notion se pré-
sente encore comme celle d'un objet réel, antérieurement
perçu, mais d'une manière si vague, que nous ne pou-
vons dire ni quand, ni où, ni comment; 3* la conception,
quand it ne reste que la simple notion, sans que nous sa-
chions comment elle est venue dans notre pensée. Dans
ces deux derniers cas, la Volonté peut intervenir pour
aider la Mémoire. Dans ce but on a quelquefois recours
à des moyens artificiels, dont l'ensemble constitue la
Mnàmotechnie, ou l'an d'aider et de fortifier la Mémoire
( V. ce mot), — La Mémoire varie naturellement d'indi-
vidu à individu, et avec le temps dans la même per-
sonne; et la manière dont Texerce et la façonne le pou-
voir personnel accroît ou modifie ses variations. Telle
mémoire est prompte et facile, et semble reproduire de
préférence les Idées acquises par les sens avec lea signes
3ui les expriment; c'eat la ménwtre physique, et celle
es mots : telle autre est plutôt tenace et fidèle, s'atta-
ehant aux idées et aux rapports qui les lient; c'est la
mémoire rationnelle^ mémoire des pensées et des choses.
La première, qui est aussi celle de l'enfance, est, chez
jes poètes et les orateurs, fortifiée par l'exercice t la ae^
conde appartient plutôt à Tftge niûr, au logicien, au
savant. Ces variétés ne s'expliquent pas plus que le fait
de la conservation ou de la durée en nous des notions
qui y reparaissent identiques à elles-mêmes. Que de-
viennent-elles quand elles ne se montrent pas? L'école
d'Aristote prétendait expliquer le phénomène de la Mé-
moire parues impressions, des traces ou des images lais-
«'^os dans le cerveau. Récemment, M. Damiron a émis
78
MËM
1234
MEM
Topinion que les notions restent dans le moi, voilées et
non pas éteintes, latentes et obscures, mais réelles, et
prêtes à se réveiller et à reparaître au premier signal.
Nous ne disons rien de la théorie de la néminiscmce de
I Platon, qui ne s'appliquait qu'aux Idées, Aucune de ces
explications n'est satisfaisante, ce qui n'empôche pas le
fait du souvenir d*ètre incontestable. V. les écrits de Reid
et de Dugald Stewart, et Topuscule d'Aristote, De la
Mémotre et de la Rémtniscence, traduit par M. Barthé-
lémy Saint-Hilaire. R.
MéHoniB , terme de Liturgie. V. Coumi^ioration.
HihioTiiB, en termes de Comptabilité, état de ce qui est
dû, présenté par les fournisseurs à leurs débiteurs. Les
apothicaires ont eu une réputation proverbiale pour l'art
avec lequel ils enflaient leurs Mémoires.
M^oiRB, nom qu'on donne à toute dissertation sur un
sujet littéraire ou scientifique, destinée à être lue devant
un corps savant. Beaucoup d'Académies et de Sociétés
publient des recueils de Mémoires de ce pnre : le style
doit en être simple, concis, nourri de faits, et propre à
convaincre la raison. Les Mémoires de notre Académie
des Inscriptions et belles-lettres offrent beaucoup d'ex-
cellents modèles de ce genre, surtout dans la nouvelle
série.
MéifoiRB, en termes de Pratique, écrit sur une affaire
litigieuse, composé par un avocat, et distribué aux Juges
et même au public. C'est l'exposition et le détail des
faits , avec les principales preuves qu'apporte une partie,
et aussi avec les pièces à l'appui. Par là on sollicite au
tribunal de l'opinion un jugement présomptif, ou on en
appelle devant lui d'une condamnation juridique. La pu-
blicité des Mémoires judiciaires a été surtout importante
dans le temps où il n*y avait que des procédures écrites,
et il est de ces Mémoires qui figurent parmi les monu-
ments de l'éloquence judiciaire, par exemple, ceux de
Pellisson, de Servan, de Lally-Tollendal, de Beaumar-
chais, et de Mirabeau. Les avocats et les officiers ministé-
riels qui auraient signé des Mémoires outrageants peu-
vent être, de la pjirt des Juges, l'objet de mesures disci-
plinaires.
MÉMOIRES, composition du genre historique, qui a pour
marc|ue distinctive de raconter des événements contem-
porains, dont l'auteur a été témoin ou acteur. Les autres
ouvrages d'histoire, composés par des écrivains désinté-
ressés, peuvent offrir un choix plus sévère des faits, plus
de mesure et de gravité dans le récit ; mais les Mémoires
nous saisissent et nous attachent plu*^ fortement , car ils
sont une œuvre plus vivante. On rédige ses Mémoires
pour satisfaire ce désir irrésistible qui sollicite tout écri-
vain à mettre le public dans la confidence de sa pensée.
La vanité n'y est pas étrangère non plus : elle s'appelle
tantôt le droit imprescriptible de protester contre l'in-
justice de l'opinion; tantôt le désir, propre aux grandes
âmes , de se survivro ; souvent aussi l'orgueil très-légi-
time d'éclairer son siècle et les &ges qui suivront, et de
prévenir les erreurs de l'histoire. L'utilité des Mémoires
est manifeste, mais 11 faut mesurer la cré^ce qu'on
leur accorde, et les contrôler par (l'ai.tres Mémoires. — La
France est plus riche que nul [vi\r-: ]>p;iple en ouvrages
de ce genre; aucune des '^ond.i.i :s (]u*ils exigent ne
manque à noti'e pays, ( ariiwus sonuies un peuple d'imn-
gination, communicatif cl conteur par nature.' Ajoutoii»
que, du jour où commença de se former la France, des
événements se sont succédé chez nous dont la grandeur
ou l'importance ne saurait s'exagérer, puisqu'ils sont
l'histoire de la civilisation même : les Croisades, revanche
et réaction de l'Europe chrétienne contre les conquêtes
de llslamisme; la lutte séculaire de l'Angleterre et de la
France ; le règne de Louis XI , qui prépara, par la des-
truction violente de la féodalité apanagée, le despotisme
des rois; les guerres d'Italie, où la France sauva l'indé-
pendance universelle de l'ambition autrichienne: la Ré-
formation, qui embrasa l'Europe; le règne de Henri IV
et l'administration de Richelieu et de Mazarin , dignes
Î)récurseurs de Louis XIV ; le xvin* siècle, où les lettres
françaises firent l'opinion , qui fut alors la reine de l'Eu-
rope; enfin la Révolution, qui travaille encore aujour-
d'hui tous les peuples ; tel est l'ensemble imposant des
faits qui constituent notre histoire. Le haut intérêt dont
Us sont l'objet universel rejaillit sur les particularités
mômes qui servent à en représenter la véritable physio-
nomie. Les auteurs n'ont pas non plus fait défaut aux
sujets, et beaucoup se trouvèrent placés dans une situa-
tion très-favorable pour bien voir, ou du moins voir
beaucoup : qui pouvait savoir et comprendre mieux que
loinvillc la vie do S* Louis, mioux qi;o Coniines celle de
I^uis XIT De même, il appartenait éminemment à Saint-
Simon de pénétrer l'&me de Louis XIV, à M*"* Rolland
d'apprécier les personnages célèbres de la Révolution.
Enfin il s'est rencontré chez nous des plumes féminines,
lésères et délicates, mesurées et discrètes dans la fa-
miliarité de leurs anecdotes touchantes ou malicieuses.
Ainsi donc toutes les circonstances les plus propres k
faire naître et fleurir les Mémoires, Intérêt particulier
des événements, dispositions morales, talent littéraire,
rôle et situation sociale ou politique des écrivains, se
sont heureusement rencontrées aux divers périodes de
notre histoire. Quoi d'étonnant si , en ce genre , notre
Littérature éclipse toutes les autres, même l'antiquité!
Les Anciens, en effet , ont connu les Mémoires : chez
les Grecs, VAnabase de Xénophon, récit de l'expédition
du Jeune Cyrus contre Artaxerxès H, et de la célèbre re-
traite des Dix mille, dont il fut le chef élu, est de ce
genre ; elle en a les qualités et les défauts, des peintures un
peu longues de mœurs asiatiques ou grecques, beaucoup
d'anecdotes, et des épisodes disposés et racontés avec art.
Les Mémoires furent très-communs chez les Romains,
3ui les appelaient Commentaires {V, ce mot) : à dater du
emier siècle de la République , époque où la culture
des lettres devint générale, beaucoup d'entre les zrands
citoyens, appelés a manier de grandes affaires, a con-
duire d'importantes guerres lointaines, rentrés dans la
retraite , consignèrent les souvenirs de leur vie publique
dans des Mémoires. Sylla, Lucullus, César et bien
d'autres, parmi lesc^uels plusieurs membres de la famille
Porcia, avaient écnt des Commentaires; ceux de Sylla
avaient 22 livres, et il les finit la veille de sa mort. Ces
documents précieux sont perdus, à l'exception des Com-
mentaires de César. On pourrait presque dire que nous
avons ceux de Cicéron, dont les nombreuses Lettres
sont si remplies de ses Jugements , de ses expériences,
de ses désespoirs touchant les affaires de son temps et Ir
part qu'il y prit. La lecture de Tacite, de Valère-Maximc,
de Suétone, de Plutarque, de Dion Cassius, d'Appien,
surtout dans ses Gti«rre5 civiles, prouve clairement, par
certains détails, qu'il existait un grand nombre de Hé-
moires sur les événements du dernier siècle de la répu-
blique et de l'ère des empereurs. Auguste, notamment,
avait aussi laissé des Commentaires. Plus tard, {"Histoire
secrète de Justinien, par Procope, a tous les caractères
de Mémoires satiriques inspirés par la vengeance.
Il serait difficile de compter tous les Mémoires que les
lettres françaises ont produits de siècle en siècle. Ville-
hardoin,dè5 le commencement du xiii* siècle, dans une
prose sérieuse et ferme, où le sens des affaires s'allie i
l'expression répétée d'une profonde coi^iance en la pro-
tection de Dieu, raconta sur un ton élevé, épique par-
fois, la 4* Croisade qu'il avait suivie. Joinvitle, moini
d'un siècle après, animé d'une foi déjà moins vive, mais
aussi d'une tendresse touchante pour son roi, peignit,
avec art et naïveté tout ensemble, les incidents tragiques
de la V Croisarlo et les vertus de Louis IX. — Il est per-
mis peut-être d'assimiler à des Mémoires la Chronique
universelle de 7. Froissart, cet Hérodote français, voya-
geur infatigable, qui, dans sa passion de tout voir, de tout
savoir et de tout conter, visita tous les pays, et, chemin
f'\i«;n'^t. n'-'"rnv\n, sans réflexion** rr.-'ime sans confusion,
les avoiiiures bénou&cb et les unci :! ' > 'iMailicrc;», peintre
aussi remarquable par l'énergie des traits que par iné-
puisable variété des couleurs. — Comines a laissé sur
Louis XI des Mémoires précieux. Moraliste et politique
autant que narrateur, comparable à Tacite, s'il en avait
eu les colères et le chsigrin, il enseigne aux princes leurs
devoirs d'un ton qui fait songer à Bossuet, et professe ce'te
croyance que Dieu distribue les succès et les revers ^m
hommes, selon qu'ils se montrent ici-bas, non-seulement
bons ou pervers, mais encore clairvoyants ou aveugles,
circonspects ou téméraires, prudents ou malavisés. — Les
guerres d'Italie eurent aussi leurs Mémoires ; les vertus
chevaleresques de la noblesse française y brillèrent de
leur suprême éclat, personnifiées par Bayard. De là l'in*
térêt historique et moral , sinon littéraire, qui s'attache
à la Chronique du Chevalier sans peur et sans reproche^
par son loyal serviteur»
Les luttes religieuses suivirent ces expéditions, d'où les
Français avaient du moins rapporté le goût des lettres et
des arts. La cour et la noblesse gardèrent en même
temps la tradition de cette galanterie qui prit naissance,
et dégénéra bien vite en corruption, à la cour de Louis XII
et de François I*'. La guerre civile et les aventures amou-
reuses remplirent donc les Mémoiresde lafin du xvi* 5;!èc^c
Va dorni Manjucrite de Valois, par un style qui ivur..»
MËM
1235
MEN
la forre et le naturel, la rapidité et l'émotion ; le farouche
Montluc, par ses Commentaires œuvre d*un soldat insa-
tiable de combats et d^un catholique impitoyable et for-
cené; le vaniteux BrcuUôme, par ses Chroniques trop
casconnes et ses récits trop gaulois sur les dames galantes;
enfin le rude et intraitable Agrippa (TAubignéj par Tàpreté
«rcastique de ses écrits, brillèrent parmi les Tavannes,
ei Lanoue, les Vieilleville et les Coligny.
Au xvii* siècle, après Tapaiscment des guerres reli-
deuses, les nobles tournèrent leur humeur indocile contre
^es premiers ministres, Concini, Richelieu, Mazarin; puis
releva Louis XIV, qui, par Tappàt des ^ces royales*
'*âsoupIît les résistances, transforma en courtisans les
ùen hùTDs de la Fronde, et subordonna leur fortune à
son intérOt et à ses plaisirs. Tel est le spectacle instructif
et varié que nous présentent les Mémoires de ce siècle ;
car tandis que la littérature offîcielle reflétait la gloire et
les pompes du temps, des Mémoires, plus vrais parce
qu'ils vont au delà de Tapparence et déchirent tous les
voiles, en peignaient non-seulement Téclat éblouissant,
maiHauss{ les misères, les scandales, les turpitudes et les
douleurs, et, par leurs détails vifs et nus, donnaient le
moyen de mesurer un jour chacun à sa véritable taille.
Pour retrouver la physionomie de cette époque, avec ses
nolents contrastes de grandeur et de petitesse, de hau-
tiur et de servilité, de mœurs relâchées et de dévotion,
Wi Mémoires s'offrent en foule : le duc de Rohan, Riche-
lieu, Bassompierre, Tallemant des Réaux, le cardinal de
Rel2, La Rochefoucauld, Turenne, Bussy-Rabutin, Dan"
geau, HamUtxm et le duc de Grammont, M"** de Motte-
ville, lf"« de Caylus, M^' de Montpenster, Af"'« de La
Fayette, Louis XI Y lui-même, et, par-dessus tous, Saml"
Simon, dont les critiques célèbrent à l'envi le style fou-
gueux et pittoresque, la verve étincelante, la pénétration,
la profondeur et le coloris, furent, entre beaucoup d'au-
tres, les peintres immortels d'eux-mêmes et de leur temps.
Au xviii* siècle , où les lettres éclipsèrent la politique,
et où l'édition d'un livre émeut autant l'opinion que
rinique partage de la Pologne, le trait commun des Mé-
moires, et leur caractère original , est de peindre au vif
les mœurs et le mouvement intellectuel de cette société,
déréglée dans ses idées comme dans sa conduite. C'est
alors que Rousseau publia ses Confessions {V. ce mot)^
que Dttclos , d^Alembert , Diderot , Marmontel , compo-
sèrent leurs Mémoires, œuvres secondaires et médiocres ;
et que Voltaire répandit les siens dans sa vaste et volu-
mineuse Correspondance, que l'on peut regarder comme
ses Mémoires.
Le goût pour la vérité historique, qui distingue le
XII* siècle, fait lire avec avidité tous les Mémoires, et en
a fait publier beaucoup d'apocryphes. Il en a été donné
an grand nombre d'authentiques sur la Révolution fran-
çaise, sur le 1"* Empire, sur la Restauration, tels aue les
Mémoires de Mirabeau, composés de documents laissés
par lui ; (ie La Fayette, composés de même ; de Chàteai^
briand, du roi Joseph Bonaparte, du duc de Raguse, du
Prince Eugène (I^eauharnais), de Béranger, etc. Parmi
tous ces Hémoires, aucuns n'épient en importance, en
intérêt, même en talent, les Mémoires de Ptapoléon I" :
ils sont l'œuvre non-seulement d'un des plus grands
génies et des plus grands souverains qui aient jamais
existé, mais aussi d'un écrivain précis, exact, nerveux,
plein de chaleur et dMmagination. Ces Mémoires l'em-
portent de beaucoup, à tous les points de vue, sur les
Commentaires de César.
On a eu, de nos jours, Theureuse idée de réunir les
Mémoires de quelque importance, publiés à toutes les
époques de notre histoire , en une sorte de bibliothèque
ou de section de bibliothèque, naturellement un peu vo-
lumineuse. Hais, par là, on a mis ces livres intéressants
à la ponée de plus de monde. Les principaux recueils de
ce genre sont : Collection des Mémoires relatifs à ihis-
toire de France, depuis la fondation de la monarchie
française jusqu'au xiii* siècle, publiée avec des notices
et des notes par M. Guizot, Paris, 1823-27, 29 vol. in-S"" :
ce ne sont que des Chroniques très-peu personnelles en
çénéral , et traduites du latin ; — Collection des cturoni"
iues nationales françaises écrites en langue vulgaire, du
W au xvi« siècle, 1824-29, 47 vol. in-S*', publiée par Bu-
chon, qui en reproduisit la plus grande partie dans le
Panlhwn littéraire; — Collection des Mémoires relatifs à
l'histoire de France, depuis le règne de Philippe-Auguste
itt^tt'd la paix de Paris conclue en 1763, par Petitot et
Monmerqué, Paris, 1819-27, 132 vol. in-8"; — Nouvelle
collection de Mémoires relatifs à Vhistoire de France de-
puis le xui' siècle jusqu'à la fin du ^v^^*•, par ^!:rliaiitî ci
Poujoulat, Paris, 1836etsniv., 32 vol. gp. in-8»; — Choix
de Mémoires du xviii» siècle, par Barrière, Paris, 1846-
1849, 12 vol. in-12;— ifémo/rM relatifs à la Révolution
française, par Berville et Barrière, Paris, 1820-26, 56 voL
in-8o. Les diverses collections reproduisent beaucoup de
Mémoires semblables ; mais aucune d'elles ne dispense
complètement des autres. — M. Guizot a publié une Col-
lection de Mémoires relatifs à la Révolution d'Angle-
terre, 25 vol. in-8<». En Allemagne, Schiller a édité une
collection de Mémoires historiques, du xii* siècle jusqu'à
lui, léna, 4790-1806, 33 vol. in-8«>. A. H. et C. D—y.
MËMORANDUM, mot latin qui signifle dont il faut se
souvenir^ et qu'on emploie en Diplomatie pour désigner
une note signée par laauelle un gouvernement entend
établir le véritable état d'une question et justifier l'atti-
tude ou les mesures qu'il a prises pour maintenir son
droit. C'est une sorte de plaidoirie , de mémoire d'avo-
cat , oui n'a pas le caractère d'une simple communication
de caoinet à cabinet , mais qu'on destine à la publicité
et qui s'adresse à l'opinion.
MÉMORIAL, mot employé, soit comme synonyme de
Mémoires, comme quand on dit le Mémorial de Sainte'
Hél^, titre de l'ouvrage de Las Cases sur la captivité
de Napoléon I*' à l'île S^'-Hélène ; soit pour désigner, à
Rome et en Espagne, un placet, un mémoire servant à
l'instruction d'une affaire. Il désigne encore le livre-
journal où les commerçants et les banquiers inscrivent
leurs affaires quotidiennes, au fur et à mesure qu'elles
sont conclues ; ou bien il sert de titre à certains jour-
naux. Autrefois on donna aussi le nom de Mémoriaux
aux actes notariés, et aux registres des Chambres des
flbmptes.
MEMPHITIQUE (Dialecte). V. Coptb (Ungue).
MENACES. Elles constituent un délit ou un crime,
selon les circonstances dont elles sont accompagnées. La
menace, par écrit anonyme ou signé, d'assassinat , d'em-
poisonnement, d'incendie, est punie des travaux forcés à
temps, si elle a été faite avec ordre de déposer une
somme dans un lieu déterminé ou de remplir toute autre
condition ; s'il n'y a eu ni ordre ni condition , la peine
est un emprisonnement de 2 à 5 ans, et une amende de
100 à 600 fr. La menace verbale, avec ordre ou sous con-
dition, est punie d'un emprisonnement de 6 mois à 2 ans,
et d'une amende de 25 à 300 fr. (Code pénal , art. 305-
307 ). Dans les deux cas , le coupable peut en outre être
mis sous la surveillance de la haute police pour 5 ans au
moins et 10 ans au plus. La menace verbale, sans ordre
ou sans condition , n'est pas punie. Dans certains cas, la
menace est considérée comme outrage (V. ce mot). Le
délit de mendicité (V. ce mot-) est aggrave par la menace.
MÉNAGIER, nom qu'on donnait jadis à tout traité de
morale et d'économie domestique.
MENAI (Pont de). V. Menai et BarrAimiA, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire,
MENDE (Église Notre-Dame, à). Cette église cathé-
drale, monument.de style ogival très-rare dans cette con-
trée de la France, fut commencée en 1368 sous la direc-
tion d'Urbain V, pape d'Avignon, et achevée par ses
successeurs. Les protestants la dévastèrent en 1580, mais
les d^ts furent Dïentôt réparés. Ce qu'elle offre déplus
remarquable, ce sont ses deux flèches, appuyées sur deux
tours carrées : la plus élevée est un chef-d'œuvre d'art et
de délicatesse.
MENDICITÉ, état de l'indigent qui demande l'aumône
habituellement. Depuis bien des siècles, l'autorité pu-
blique est intervenue pour réprimer ou empêcher la
mendicité. En 806, Charlemagne ordonna de secourir les
mendiants dans leurs paroisses, et défendit de leur faire
l'aumône partout ailleurs. Une ordonnance de 1320 pres-
crit a que tout fainéant qui, n'ayant rien et ne gagnant
rien, fréquente les tavernes, soit arrêté, interrogé sur ses
facultés, et banni de la ville, s'il est surpris en mensonge
ou convaincu de mauvaise vie. n En 1351, Jean le Bon
enjoignit aux mendiants, « sains de corps et oiseux, »
de sortir de Paris sous trois jours ou de renoncer au va-
gabondage; ceux qui n'obéiraient pas devaient être mis
en prison an pain et à l'eau pendant quatre jours, punis
du pilori en cas de récidive, et, pour une troisième faute^
marqués au front d'un fer chaud et bannis. Les archers
chargés de les poursuivre portaient le nom d*archers de
Vécuelle, L'ordonnance de police de 1413 voulait qu'on
forçât les mendiants valides à aller labourer. Sous Fran<»
çois I*', une ordonnance de 1545 prescrivit d'ouvrir des
ateliers de travail, où ils devraient se rendre, sous peine
du fouet, des verges, et du bannissement à temps ou à
perpi^'tuité; les invalides seraient enfermés dans les liOpî-
MÊN
1236
MKM
taux 0 1 entretenas par les paroissee. Les mendiants et
les vagabonds s*étant multipliés pendant les guerres de
religion, le Parlement, par arrêt des 29 août et 24 octobre
i5)H5, les chassa de Paris, sous peine d*être pendus sans
forme de procès; disposition qui fut reproduite dans un
arrêt du Parlbment de Normandie, du 16 novembre 1622.
Un édit fut encore rendu contre la mendicité le 27 août
1012. En 1627 on força les mendiants à prendre du ser-
ficc dans les compagnies de commerce ou dans la marine,
et à s'embarquer pour les Indes. En 1638, on expulsa
les mendiants de Paris, avec menace des galères. Citons
aussi les édits d'avril 1656, d*août 1661, de iuin 1662, du
12 octobre 1686, du 21 décembre 1700, du 23 mars 1720,
du 18 juillet 1724, du 5 février 1731, du 20 octobre 1750.
Malgré les mesures les plus sévères, les mendiants ne
cessaient pas de pulluler. En 1764, on conçut un nouveau
système, celui des maisons de correction, appelées de-
puis dépôts de mendicité; des ordonnances de 1 767 et 1 77G
le mirent en application. Le mal fut un peu atténué. Un
décret de l'Assemblée constituante (30 mai 1790), dont la
plupart des dispositions sont encore en vigueur aujour-
d'hui, ordonna l'ouverture d'ateliers pour les mendiants
valides. Le décret du 24 vendémiaire an ii (15 oct. 1703)
supprima les dépôts de mendicité, pour les remplacer par
des mcùsons de répression, où devaient être envoya les
mendiants et les vagabonds, et prononça la peine de la
transportation contre ceux qui seraient en état de réci-
dive. Il fut abrogé par le décret du 5 Juillet 1808, qui
ordonna de créer un dépôt de mendicité dans chaque
département. Les établissements de ce genre n'ont pas
été toujours soutenus par les gouvernements ultérieurs :
il n'en existe plus maintenant que 20, dont 16 départe-
mentaux et 4 communaux ; quelques dépôts départemen-
taux servent pour plusieurs départements. Le salaire du
travail que le mendiant y exécute est partagé par moitié
entre le dépôt et lui. Toute personne trouvée mendiant
dans un lieu oour lequel il existe un dépôt de mendicité
est punie de â à 6 mois d'emprisonnement, et conduite
au dépôt après l'expiration de sa peine {Code pènat,
art. 274) : le séjour au dépôt n'est pas une peine, mais
une mesure de police, que l'administration peut faire
cesser sans le concours des tribunaux. Dans les lieux où
il n'y a point de dépôts de mendicité, les mendiants d*ha-
bitude valides sont punis de 1 mois à 3 mois d'empri-
sonnement s'ils sont arrêtés dans le canton de leur i^i-
dence, et de 6 mois à 2 ans s'ils sont arrêtés hors de ce
canton (art. 275). Cette dernière peine frappe aussi les
mendiants, même invalides, qui usent de menaces, qui
entrent sans permission dans une habitation, qui fei^ent
des plaies ou des infirmités, et qui mendient en réunion,
à moins que ce ne soit le niari et la femme, le père ou
la mère et les Jeunes enfants, Taveugle et son conduc-
teur. Tout mendiant qui voyage muni d'un passe-port
reçoit un secours de 30 centimes par myriamètre, payable
de 5 en 5 myriamètres par les manicipalités placées sur
la route que le passe-port indique. V, Paupérisub.
MENEAUX, montants de pierre, de forme variable, qui
divisent une fenêtre en plusieurs parties. Pendant toute
la période ogivale, ils occupent une place importante
dans le système architectural, et servent à déterminer
les époques des constructions. An temps de la transition,
le meneau est lourd et souvent disgracieux; mais, avec
le xiii* siècle, il s'alléçit , se compose d'un tore élégant ,
divise la fenêtre en deux ou trois parties, monte droit
jusqu'à la naissance de l'arcade, et se courbe ensuite
gracieusement en fer de lance qu'il couronne d'une rose
polylobée; c'est Tépoque du style lancéolé. Au xiv* siècle,
l'architecture devient rayonnante, les fenêtres s'élargis-
sent, les meneaux se multiplient en s'allégissant encore,
et forment des compartiments plus nombreux, mais à
simple courbure. Enfin , à la troisième période ogivale,
les meneaux s*enlacent et se tordent comme les anneaux
d'un serpent, ou flamboient comme une flamme folle et
ardente, suivant le caprice de l'architecte. En Angleterre,
les meneaux montent droits à travers Tamortissement de
la fenêtre, et forment une particularité qu'on nomme
perpendiculaire. — On donne encore le nom de
meneau à la moulure plus ou moins compliquée qui
forme par ses enroulements la décoration à jour d'un
d'une balustrade on d'un fronton. E. L.
MËNBPHTHFXM. F. Thèbks (Ruines de).
MÉNESTRELS ou MÉNÉTRIERS (du bas latin minis-
trotor, homme au service d'un autre), nom qui parait
avoir remplacé celni de Bardes vers le viii* siècle de
notre ère. On a prétendu même le faire dériver d un cer-
tain Ménestrel ou Minstrel, maître de chapelle do Pépin
le Bref. Les ménestrels marchaient, comme les andeni
chantres gaulois, à la tète des armées, et donnaient le
signal en entonnant un chant guerrier. Ainsi faisait en-
core Taillefer au premier rang de l'armée de GuilUume
le Conquérant avant la bataille d'Hastings, en 1066. Ber-
dic, qui hérita de son talent, reçut de Guillaume trois
paroisses dans le comté de Glocester. Plus tard , on ap-
pela Ménestrels les musiciens qui composèrent des chants
pour les poésies des Troubadours et des Trouvères, ou qui
accompagnèrent de quelque instrument tandis aue le
rete chantait. Il y en eut , tels que Rutebeuf , qui turent
la fois poètes et musiciens, et alors on leur donnait
plutôt le nom de chantarres. Parmi les ménestrels, Jean
Bretel et Jean Bodel , tous deux d'Arras, acquirent une
grande célébrité au xm* siècle; Vynot le Bourguignon
composa de gais refrains, qui se chantaient dfans les
rues et sur les places publiques. Les musiciens ambu-
lants se mêlèrent aussi de représenter des miracles (K. ce
mot). En 1330 , il se forma à Paris, sous le nom de Mé-
nestrandie, une corporation qui prit pour patrons S^ Ju-
lien et S* Genest, et dont le chef reçut le titre de rot des
Ménétriert, Cette corporation fonda, dès l'année 1331, un
hôpital pour les musiciens pauvres. Elle comprenait des
chanteurs, des joueurs d'instruments, et même des bala-
dins et des faiseurs de tours. En 1397, les musiciens, se
séparant de ces derniers , se reconstituèrent , et leurs
nouveaux règlements furent approuvés par Charles YI, le
2i avril 1407 : ils répudièrent le nom de ménétriers^ des-
tiné à ne plus désigner dans la suite que les pauvres
joueurs de violon qui font danser les villageois, et prirent
celui de joueurs d'instruments, tant hauts comme bas;
leur chef fut appelé rot des violons. En octobre 1658,
Louis XIV déciaa qu'on ne pourrait être admis à la maî-
trise qu'après quatre années d'apprenttssa|ge ; aue les
élèves qui prétendraient à la maîtrise payeraient 60 livres
au roi des violons, et 10 livres aux maîtres de la confrérie
de S^-Julien ; que les maîtres seraient soumis à une re-
devance annuelle de 30 sous envers la confrérie, et à
roblisation de payer un droit pour chacun de leurs élèves
au roi des violons; que les maîtres seuls auraient le droit
« de Joner aux cabarets , chambres garnies et autres
lieux. » Une sentence de police, du 10 juin 1603, obligea
les organistes et les maîtres de clavecin à payer un droit
au roi des violons : mais Ils en appelèrent, et le Parle-
ment leur donna gain de cause, par arrêt du 7 mai 1695.
La confrérie de S^-Julien paya 22,000 livres, en 1707,
pour obtenir des lettres patentes du roi qui soumettaient
à sa juridiction les maîtres de clavecin, de Tiole, de
théorbe, de luth , de guitare et de flûte ; mais œs lettres
furent révoquées la même année. En 1747, la querelle
avec les organistes se ralluma ; un arrêt définitif du Par-
lement, en date du 30 mai 1750, débouta de ses préten-
tions le roi des violons. Guignon abdiqua cette charge
en 1773 , et elle fut supprimée par édit royal. La con-
frérie subsista encore Jusqu'en 1789. Bernhard, Re-
cherches sur l'histoire de la corporation des Ménétriers,
dans la Biblwthèque de V École des Chartes, 1842 et
1843, in-8». B.
MENEUM , livre d'hymnes et de prières chorales, di-
visé en 12 parties pour les 12 mois de Tannée. II est en
usage dans l'Église grecque.
MENHIR. V. Celtiques (Monuments).
MENIANA. V. Balcon.
MENIN. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra»
phie et d^Histoire.
MÉNIPPÊE (Satire), ouvrage fameux de la fin du
XVI* siècle, ainsi appelé par imitation de l'auteur latin
Varron , qui avait donné le nom de Ménippées à des sa-
tires où il avait entremêlé la prose et les vers ; non que
Ménippe, disciple de Diogène, eût composé ni vers ni sa-
tires, mais parce qu'il s'était fait une réputation par son
humeur moqueuse et par l'indépendance cynique de son
langage. Deux siècles après Varron , Lucien emploj^a en-
core le personnage de Ménippe comme type du railleur.
A l'époque de la Renaissance, les débris des Ménippées
de Varron, épars dans les auteurs anciens, furent re-
cueillis par Robert Estienne, et publiés dans sa collection
des Fragments des vieux poètes laUins (Paris, 1564); il
est probable que cette publication ne fut pas sans in-
fluence sur les auteurs de notre Ménippée. La Ménippèe
est un pamphlet politique dirigé contre la Ligue, et une
œuvre littéraire d'une i^nde ^eur. Au milieu des pas-
sions religieuses et des graves intérêts qui ponasalent les
Sartis aux moyens extrêmes, y compris l'assassinat , elle
t entendre la voix de la raison et du bon sens, et con-
tribua beaucouo à l'apaisement général , en ramenant an
MEN
1237
MER
sentiment du vrai les esprits qu*aveuglaient l'intolérance
nt Vambition. Elle parut à un moment bien choisi , après
les États Généraux de la Ligue, où il avait été impos-
sible de B^entendre sur Télection d'un roi , et ses traits
acérés aidèrent au triomphe des Politiques, partisans
de Henri IV. Ce fut en 1593, et quelques mois avant Ten-
trt>e du rot dans Paris, que fut imprimée à Tours une
brochure de 15 feuillets, intitulée la Vertu du Catholicon
(T Espagne; l'année suivante, après la soumission de
Paris, on sjouta à cette brochure un Abrégé des Eitats
de la Ligtte, et le toQt reçut le nom de Satire Ménippée.
La défense de la religion catholique était le prétexte
sous lequel s'abritait la Ligue pour entretenir la guerre
civile et cnipècher Henri IV de régner. La Vertu (W Ca-
tfiolicon d'Espagne développe cette idée, qu'une fois entré
dans Tassociation à titre de catholique, quelque vicieux
et déshonoré qu'on fût d'ailleurs, on devenait pur et sans
tache. Elle nous montre, pendant qu'on ffdt au Louvre
des préparatifs pour la tenue prochaine des Ëtats, deux
charlatans, l'un Espagnol, l'autre Lorrain, vantant à
Tenvi, dans la cour du palais, la vertu de leur drolgne
qm est le CatKtHteon. Ce morceau, d un ton vigoureux,
sert comme de prologue à VAbrégé des Estais de la
Ligue, qui est beaucoup plus étendu. Cette seconde partie
de la Ménippée débute par la description comique d'une
procession des députés ligueurs avant l'ouverture des
États; puis vient rénumération des sujets que sont cen-
sées représenter les tapisseries dont la salle des États est
tendue : ces sujets imaginaires , les uns contenant des
allégories ironiques, les autres représentant des portraits
chargés ou des faits récents, tels que la bataille d'Ivry,
sont une satire mordante de la conduite de la plupart des
membres de l'assemblée. Le chapitre suivant, qui traite
de VOrdre tenu pour les séances, est assaisonné d'allu-
sions malignes, de plaisanteries parfois peu décentes. Les
orateurs ^ parlent avec une naïveté tantôt bouffonne,
tantôt sérieuse, qui découvre ie secret des sourdes in-
trigues de chacun. On voit clairement que tous n'ont
aucun souci de la religion , et ne tendent qu'à se fidre
une part dans les dépouilles de la France. Mais pour que
leurs espérances se réalisent, il faut à tout prix conti-
nuer la guerre ; le mot même de paix leur est odieux ,
et les maasiers, chargés de la police de l'assemblée, ré-
clament le silenee en ces termes : Qu*on se taise ! n'osant
dire : Paix là! Toutes les harangues sont des chefs-
d'œuvre de parodie; chaque trait y frappe juste, et la
verve comioue ne tarit pas. Le morceau capital, celui qui
couronne rouvragOi cW la harangue prononcée par
d'Aubraj an nom du tiers état : l'histoire de la Ligue
7 est ewjiiissée en traits rapides, énergiques et pitto-
resques, inspirés par un ardent patriousme uni a une
haute raison. L'orateur, avec une loeique puissante et
une indignation sincère, fait Justice des prétentions du
roi d'Espagne et de- la maison de Lorraine, passe en
revue les maux qui désolent le pays et ceux surtout
oue Paris a soufferts, exalte le courage, la clémence
d*Henri IV, et conclut en proposant qu'on aille lui de-
mander la paix.
Les auteurs de la Ménippée étaient des hommes hon-
nêtes et convaincus, des catholiques sincères, et en même
temps des écrivains de premier ordre. Us n'écoutèrent
que la voix de leur conscience et leur amour du bien pu-
blic; le sentiment du devoir leur donna le courage de
dire la vérité. Pierre Le Roy, chanoine de Rouen et au-
mônier du Jeune cardinal de Bourbon , conçut l'idée pre-
mière de la Méntppée, en donna le plan, et écrivit la
Vertu du Catholicon. Ses collaborateurs furent : Jacques
GîUot, conseiller au Parlement; Florent Chrestien, an-
cien précepteur d'Henri IV ; Nicolas Hapin , grand prévôt
de Uoonnétablie; Passerat, professeur de philosopnie au
Coll^ de France ; et Pierre Pithou , Jurisconsulte éml-
nent, qui défendit les libertés de l'Église gallicane. Pas-
serat et Rapin passent pour avoir composé les vers latins
et français qui sont à la suite de l'ouvrage: mais la plus
grande part revient au premier. La Satire Ménippée a eu
d'innombrables éditions; les meilleures sont celles de
Ch. Nodier, 1884, S vol. in-8«, et de Ch. LaUtte, 1843 et
1857, în-iï. P— s.
MÉNISQUE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphiê et d^ Histoire.
MÉNOLOGE (du grec min, mois, et logos, discours)^
c.-4-d. discours pour chaque mois; terme qui répond,
dans l'Église grecque, à ce qu'on entend dans l'Église ro-
maine par martyrologem
MENSAIRES. V. notre DictwmuMre de Biographie et
MENSAO. V, Gelttqcbs (Monuments).
MENSE. F. notre Dictionnaire de Biographie et dUlis»
totre.
MENSOLE (de l'italien mensola), nom donné quelquo-
fois à la clef ae voûte.
BIENUET, ancienne danse que l'on croit originaire du
Poitou , et qui tirait son nom de ce qu'on la dansait à
pas menuets (à petits pas). Le menuet, tout à la fois
grave et éléeant, se dansait à deux , et commençait ordi-
nairement le bal : il se composait essentiellement de
quatre pas exécutés en forme de Z , avec un repos de
quatre en quatre mesures, et deux reprises du même
motif. Il fVit à la mode pendant les règnes de Louis XIV,
de Louis XV et de Louis XVI, à la cour, dans la haute
société, et sur le théâtre. Les airs en étaient à 3 temps,
d'un mouvement modéré : ceux d'Exaudet, de Fischer, et
de Grétry eurent une grande réputation. Mozart a placé
un menuet dans le l*' finale de Don Juan, Meyerbeer
dans le 5* acte des Huguenots, et Verdi au début du
premier acte de RigolettOé — les compositeurs de mu
sique instrumentale introduisirent des menuets dans
leurs symphonies, leurs quatuors, leurs sonates, après
Vandante. et en firent un morceau d'école, d'une harmo-
nie difficile. Ces menuets se composent d'une première
partie, qui comprend trois reprises, et d'une seconde, qui
n'en a le plus souvent que deux, et qu'on nomme trio
dans les quatuors parce que le violoncelle n'y concourt
point; toutes ces reprises se répètent la première fois,
et, au da capo, on va de suite Jusau'à la fin de la i'* par-
tie, que l'on reprend toujours après le trio. Certains me-
nuets ont une queue {coda)>t que l'on exécute pour finir.
Les plus anciens durent avoir le mouvement du menuet
danse, ainsi qu'on le voit dans les oravres de Boccherini ;
mais les Allemands , Haydn, Moxart, Beethoven, ont
donné beaucoup plus de rapidité et de vigueur à ce genre
de composition. Aujourd'hui le schêno (K. es mot) a
remplacé le menuet. B.
MENUIERIE, nom par lequel on désignait autrefois les
petites pièces d'orfèvrerie, tabatières, boites à portraits,
boites de senteur, bonbonnières, cassolettes, etc.
MENUISERIE, art intermédiaire entre la charpenterie
et l'ébénisterie, et auquel appartient le travail du menu
bois pour l'établissement des portes, fenêtres, parquets,
lambris, escaliers, cloisons, alcôves, volets, persIennes,
Jalousies, meubles communs (tables, couchettes, bancs,
armoires, bibliothèques).
MENUISIERS , ancienne corporation , dont les statuts
remontaient à l'année 1396, et dont la fête se célébrait à
la S'^Anne, anniversaire du Jour où ces statuts avaient
été donnés. Un édit du mois d'août 1776 les réunit aux
ébénistes, aux tourneurs en bois, et aux layetiers. L'ap-
prentissage durait 6 ans; le brevet coûtait 24 livres, et la
maîtrise 600.
MENUS PLAISIRS DU ROI, nom donné, avant 1789,
& l'administration des fêtes de la cour, siégeant dans un
hôtel de la rue du faubourg Poissonnière à Paris, et
ai^ourd'bui démoli. De cette administration relevaient
les thé&tres, en ce qui concernait les subventions qu'ils
pouvaient recevoir ou les représentations que leurs ac-
teurs donnaient devant le roi. Le nom de Menus Plaisirs
du roi fût rétabli par la Restauration de 1814; mais cette
administration faisant le service des pompes et cérémo-
nies funèbres pour la famille royale, on plaisanta de
ces singuliers menus plaisirs du roi ; alors la dénominar
nation fut changée en celle de Matértd des fétês et oérét
monies de la couronne.
MENU-VAIR. V. Vair.
MENZILS , nom qu'on donne en Orient aux maisons
de ceux oui reçoivent les voyageurs dans les lieux où il
n'y a ni khans ni earavansérais.
MÉPLAT, pour mi^lat ou à demp-plat, terme de la
langue des beaux-arts. Une succession de lignes droites
ou de psrties plates donne un dessin et des formes
roides; les parties rondes et les lignes drculafa'es font un
dessin mou et des formes lourdes. Les méplats établissent
le passage d'un plan à un autre dans l'objet en relief. En
Gravure, on donne la qualification de méplates à des
tailles tranchées et sans adoucissement , dont l'usage est
de fortifier les ombres et d'arrêter les contours.
MER ou OCÉAN , ensemble des eaux salées répandues
à la surface du globe terrestre, dont elles couvrent plus
des deux tiers, et dont elles entourent la partie solide ou
la terre. C'est dans l'hémisphère austral que se trouve la
masse d'eau la plus grande, et dans l'hémisphère boréal
la plus grande masse de terre. La salure de la mer n'est
pas la même partout : l'océan Atlantique est plus saM
MER
1238
MER
*\ae le Grand Oci^an, et la Méditerranée plus que TAtlan-
tic^ue; la salure diminue en approchant des régions po-
laires, ce qui peut provenir de la fonte d'une panie des
glaces; elle est généralement moindre dans les mers in-
térieures, ainsi que prte des côtes et à Tembouchure des
grands fleuves ; elle peut être modifiée, soit par des sai-
sons plus ou moins pluvieuses, soit par des sources d*eau
douce qui se trouvent dans la mer même. L*eau paraît
fitre moins salée à la surface qu*à une certaine profon-
deur. — La température de la mer s'abaisse de Téqua-
teur aux régions polaires; il en est de môme, sous le
môme parallèle, près des lies et des continents, et au-
dessus des bancs de sable. En pleine mer, la tempéra-
hire s'abaisse en raison des profondeurs, excepté dans les
mers boréales, où le contraire a lieu. Dans le voisinage
des deux pôles, Teau de la mer gèle ; mais les glaces fixes
s'étendent plus loin autour du pôle austral qu autour du
pôle boréal , puisqu'on a pu naviguer au N. Jusqu'à 83^,
et au S. Jusqu'à 74 degrés seulement. — Prise en petite
quantité, l'eau de la mer est incolore, et généralement
transparente : au rapport des plongeurs , la lumière {ié-
nètre à 20 met. au moins au-dessous de la surface; on a
pu quelquefois apercevoir le fond à 60 met., et le capi-
taine Wood raconte qu'en 1670, aux environs de la Nou-
velle-Zemble, il y voyait les coquillages à 160 met. Vue
en masse, l'eau parait d'un bleu azuré, plus ou moins in-
tense. Près des côtes, et dans les mers du Nord , cette
couleur se rapproche de l'aigue-marine. Les nuages peu-
vent changer l'aspect de la mer, qui, dans les gros
temps, devient gris&tre. Quelquefois la présence d'ani-
maux microscopiques ou de certaines algues dans l'eau
lui donnent une teinte rouge&tre ou verdàtre. Là où l'eau
est peu profonde, la couleur peut en être modifiée par
celle du fond, qui se compose de sables ou de vases
jaunes , rouges, etc. Une propriété remarquable de l'eau
de la mer est sa phosphorescence, principalement dans
la zone intertropicale : ce phénomène est dû à la présence
d'animaux microscopiques très-nombreux, qui sécrètent
une matière phosphorescente. — La mer a plusieurs
mouvements : les uns, superficiels et accidentels, comme
les vagues^ les autres r^liers, comme les marées {V, ce
mot ). La masse des eaux subit aussi l'action de puissants
courants ( K. ce mot ). -^ Laplace, démontrant que la
f>rofondeur moyenne de la mer ne pouvait être qu'une
iraction de la différence qui existe entre les deux axes de
la terre, pensait qu'elle ne pouvait excéder 8,000 met.
Dans la baie d'Huason, Ellis toucha le fond à 1,782 met.;
le capitaine Ross, dans la baie de Bafiin, à 2,100 met.;
Scoresby, entre le Spitzberg et le Groenland, à 2,400 met.
James Ross, par 15« 3' de lat. S., et 23« 14* de long. O.,
n'a trouvé le fond qu'à une profondeur de 9,200 met.;
Henri Mangles Denham, par 36* 39' de lat. S., et 36» 7'
de long. O., qu'à 15,412 met.; mais leurs sondes n'étaient-
elles pas entraînée» par des courants sous-marins, au
lieu de tomber verticalement? La profondeur varie beau-
coup le long des côtes : plus celles-ci sont hautes et es-
carpées, plus les eaux qui les baignent sont profondes.
— L'analogie fait présumer que le fond de la mer pré-
sente les mômes inégalités que la surface des continents.
Les lies, rochers, r£ifs et écueils sont les sommets de
montasnes sous-marines, qui forment en plusieurs en-
droits Ta continuation de celles des continents, et entre
lesquelles s'étendent de longues et profondes vallées. Le
fond de la mer, partout où la sonde peut atteindre, parti-
cipe de la nature des côtes voisines : il est ou vaseux, ou
sablonneux, ou pierreux, ou rocailleux, et souvent môle
de coquilles; dans le Grand Océan, il est fréquemment
formé par des coraux. Du reste, il doit éprouver des
changements, soit par les chocs continuels de l'eau, qui
dégrade les points élevés, soit par l'arrivée des matières
que charrient les fleuves ou que les vagues enlèvent aux
rivages et qui remplissent les cavités, soit enfin par les
explosions des volcans sous-marins. — La mer est un
grand réservoir d'où s'élèvent sans cesse des vapeurs hu-
.mides, qui, portées par les vents sur les terres, s'y con-
densent, s'y convertissent en pluies, et alimentent les
sources des rivières et des fleuves. C'est de son niveau
que l'on calcule les hauteurs de la terre. Gb niveau est
{)lus élevé dans quelques parages que dans d'autres; mais
a différence n'est due qu'à des circonstances locales,
puisque la mer, comme tous les liquides, doit prendre à
sa surface une horizontalité parfaite. Cependant , le ni-
veau des mers intérieures est généralement plus élevé
que celui des autres mers : cela tient à ce qu'elles reçoi-
vent une masse d'eau proportionnellement plus grande,
et dont elles ne peuvent se débarrasser promptement.
resserrées qu'elles sont par la terre ferme, et ne commu-
niquant avec le reste de TOcéan que par d'étroits ca-
naux. Des faits nombreux prouvent que la mer s'est reti-
rée de certains lieux qu'elle couvrait et baignait jadis, et,
réciproquement, que des lieux autrefois situés à quelque
distance du littoral sont aujourd'hui recouverts par les
eaux : on ne les expliquerait pas tous en disant que Is
mer se retire d'un côté et avance de l'autre; mais on
peut encore admettre, tantôt un exhaussement ou gonfle
ment partiel des terres, produit par quelque révolution
souterraine ou par des dépôts d'alluvion, tantôt un affais-
sement du sol près de la mer.
La mer fournit aux contrées les plus éloignées les unes
des autres le moyen de communiquer ensemble, et il est
à remarquer que, dans les continents où elle forme le
plus grand nombre d'enfoncements ou golfes, les rela-
tions sont plus faciles et plus fréquentes entropies habi-
tants. La forme compacte de l'Afrique doit figurer parmi
les causes qui ont retardé la civilisation dans ce conti-
nent. — La mer, source et réservoir de toutes les eaux
du globe, est essentiellement destinée à rester commune
à tous les hommes : elle ne peut devenir l'objet d'une
propriété exclusive (V. Daorr iiariiimb). Néanmoins,
suivant les principes du Droit des gens, tout État qui
touche à la mer est considéré comme étendant son em-
{>ire jusqu'à la plus grande portée du canon au delà de
a terre; cet espace, qu'on nomme la mer territoriale de
cet État, est un asile inviolable pour toute puissance
avec laquelle l'État n'est point en guerre. Le littoral de
la mer est une dépendance du domaine public : les limites
de ce domaine sont tixéGi par l'étendue du sol vers le-
quel s'élèvent les plus hautes marées. B.
MBR (Consulat de la). V, Consulat ns la heb, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
MRR d'airain. V, Tbmplb (le), dans notre Dictionnaire
de Biographie et d^Histoire»
MERCANTILE (Système), nom donné au système de
commerce appliqué par Colbert lors de l'établissement
régulier des douanes, et dont les principes, basés sur
l'idée de la balance du commerce (K. Balancb) , étaient
de considérer le numéraire comme la mesure véritable
de la richesse, et d'aider par tous les moyens à ce que le
pays exportât le plus et importât le moins possible.
MERCIERS, le 3* des six corps de marchands de
Paris avant 1789. On y distinguait 20 sections : l*' les
marchands grossiers, vendant en gros sous balle et sous
corde toute espèce de marchandises , sauf les étoffes de
laine; 2^ les marchands de drap d'argent et de soie;
3** les marchands de dorure, qui ne vendaient <iue des
galons et autres tissus d'or et d'argent sur soie, ainsi que
des dentelles; 4° les commerçants en camelot, éta-
mines, etc.; 5» les Joailliers; 6° les marchands de toile
et ling^ de table; 7° les marchands de points en dentelle
de fil , batistes, linons, mousselines, toiles de Hollande ;
8" les marchands de soie en bottes ; 9° les marchands de
peausserie; 10° les marchands de tapis, tapisseries, cour-
tes-pointes; 11^ les marchands de fer, acier, étain, plomb,
cuivre, charbon de terre; 12<* les quincailliers; 13** les
marchands de tableaux, estampes, candélabres, curio-
sités pour les appartements; 14* les margliands de mi-
roirs, glaces, sacs, carreaux, coussins; ib** les rubaniers
et les marchands de gaze et taffetas; 10° les papetiers et
fournisseurs de bureaux; 17° les chaudronniers; 18° los
marchands de parapluies et parasols ; 19° les marchands
de menue ipercerie; 20' les petits merciers, marchands
de peignes, chapelets, etc. Le corps des merciers re<;ut
ses premiers statuts de Charles VI en 1407 et 1412; sta-
tuts confirmés ou augmentés par Henri II en 1&48, 1557
et 1558; par Charles IX en 1567 et 1570; Louis XIII en
1613; et par Louis XIV en 1645. Il était assez nombreux
pour qu'en 1557, dans une revue de la milice parisienne, it
eût 3,000 hommes sous les armes. Pour être reçu dans ce
corps, il fallait avoir fait un apprentissage de 3 ans, et
servi un maître pendant 3 autres années. Les maîtres no
pouvaient avoir plus d'un apprenti , non marié ni étran-
ger; il leur était défendu de prêter leur nom, d'avoir un
associé non marchand, d'être courtiers ni commission-
naires, et de tenir plus d'une boutique. Un noble pouvait
être mercier sans déroger. Jusqu'en 1597^ la mercerie
n'eut qu'un seul chef, dit Boi des merciers^ dont l'auto-
rité s'étendait à toute la France, et qui avait des lieute-
nants dans les principales villes : à lui seul appartenait
le droit de conférer, moyennant finances, les brevets de
maîtrise. Cette charge, qui était une véritable surinten-
dance du commerce, fut supprimée par Henri IV, en 1597.
en punition du 7.èle que les mer^.iers avaient montré pour
MRR
1239
MÉR
\iUgA«^«A ses atiribations passèrent au grand-chancelier,
^maviùi déjà rinspection des arts et des manufactures.
t)epu\s celte époque, le corps des merciers fut administré
par 7 maîtres et gardes électifs, chargés de la police du
corps et de la conserration de ses privilèges ; ces gardes-
m Tcien portèrent la robe consulaire dans les cérémonies
publiques. L*écu8son des merciers était un champ d'ar-
gent, chargé de trois vaisseaux, dont deux en chef et un
en pointe ; ces vaisseaux étaient matés d*or sur une mer
de sinople, le tout surmonté d*un soleil d'or avec cette
devise : Tb toto orbe ssqumnur (Nous te stdvrons par
toute la terre ). Il fallait, pour arriver à la maîtrise, avoir
fait an apprentissage de 3 ans, servi les maîtres pen-
dant un temps égal, et payer 1,000 livres. Le patron de
la corporation était S^ Louis. B.
MERCURE , dieu que les artistes ont représenté sous
différentes formes, selon la manière dont ils comprenaient
son rôle. A Torigine, et particulièrement en Arcadie, Mer-
cure, ou plutôt Hermès, fut rangé parmi les divinités
chthoniennes, qui, du fond de ràjblme, dispensent des
fruits et des bénédictions; dieu de la fécondation, on le
plaça sur les chemins sous la forme d*un poteau pourvu
d'une tète et d*un phallus {V. Hermès). Il n'était pas sans
analogie avec Pluton, qui présidait aussi aux richesses du
sol et régnait sur les morts, et c*est pour ce motif qu'on
le reprâenta armé d*une baguette et introduis nt les
âmes aux Enfers : de là vint plus tard son rôle de psycko-
pompe, de ministre subalterne des dieux. Dès le temps
d'Homère, une transformation s*est opérée ; le poète nous
montre Hermès en messager divin , armé d*une verge
d'or, adoré surtout par les hérauts : avec ce caractère,
l'art le représente sous la forme d'un homme vigoureux,
a?cc une barbe pointue, de longs cheveux bouclés , une
chlamyde rejetée en arrière, un bonnet de voyage, des
ailes aux pieds, et le caducée à la main. Hermès a été
aussi , spécialement en Béotie, le dieu des exercices gym-
nastiques, dont il disputait Tinvention à Hercule : en
cette qualité, les artistes donnèrent à son image les attri-
buts de la jeunesse ; il a les cheveux courts et peu bou-
clés, les formes de la souplesse et de la vigueur, et porte
la chlarayde rejetée en arrière. C'est le dieu latin Mer-
cure, identifié par les Romains avec Hermès, qui est sur-
tout représenté comme dieu du lucre et du commerce;
use bourse figure alors au nombre de ses attributs. Il
n'y a qu'un très-petit nombre d'oeuvres où on Tait re-
présenté comme protecteur des troupeaux ou inventeur
de la Ivre. Parmi les plus célèbres figures de Mercure, il
faut citer celle qu'où nomme improprement rAntinoQs
du Belvédère, et le bronze découvert à Hercalanum. Un
Mercure colossal fut exécuté, sous le règne de Néron ,
par le Grec Zénodore pour la cité des Arvemes dans la
Gaule. B.
VERCOUB DB PBATfCE, MERCIJBB GALANT. F. JODSNAL, dsns
notre Dictionnaire de Biographie et (VHistoire.
MERCURIALE, nom qu'on donna d'abord dans les
écoles aux réunions du mercredi {Mercurii dies^ Jour de
Mercure), dans lesquelles les notes de la semaine étaient
tues aux élères; on l'appliqua aussi aux allocutions où
l'on distribuait à chacun l'éloge ou le bUune. Le mot
passa ensuite au Barreau ( V, Mercdriales, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire). On s'en servit
enfin pour désigner des assemblées de gens de lettres,
tenues le mercredi chez quelque savant: il y avait, par
eiemple, des mercuriales chez Ménage. — Aujourd'hui ,
le nom de Mercuriale n'est plus donné qu'aux prix-cou-
lants des grains et farines, fixés par l'autorité municipale
à l'issue de chaque marché, pour servir de base à la taxe
du pain , ainsi qu'à l'importation et à l'exportation des
Rrains et farines. Cet usage, qui date de 16G7, n'existe
qu'en France.
HÈRE. La loi a déterminé les droits de la mère sur
Ks enfants. Dans l'état de mariage, ces droits se con-
fondent avec ceux du père. Après la mort naturelle ou
civile de celui-ci, et pendant le temps de sa disparition,
la mère a la surveillance des enfants, le soin de leur édu-
cation , l'administration et la jouissance de leurs biens
iusqu'à ce qu'ils aient atteint l'&ge de 18 ans; elle a le
droit de tutelle sur les mineurs et le droit de les éman-
ciper; elle peut s'opposer à leur mariage {Code NapoL,
art. 141, 173, 384, 390, 477 ). B.
MÉREAUX, jetons de présence distribués jadis aux
dianoines pour récompenser leur exactitude à l'office, aux
maires des villes pour honorer leur présence au pouvoir,
et aox ouvriers comme des bons remboursables plus tard.
On les faisait ordinairement en cuivre ; il en existe ce-
pendant quelque»-ans en argent. Les plus anciens datent
de Philippe VI , et Ton s'en servait encore en 17S0. Les
types des méreaux sont très-variables : tantôt ce sont des
copies des espèces courantes, tantôt ils portent des figures
et des légendes particulières. K. Rouyer, Notes pour ser^
vir à Ntude des méreaux, dans la Revue de Numisma»
tique de 1849.
MBRËLLE. V. MAnELLB.
MÉRIDIEN, nom donné à tous les grands cercles verti-
caux de la sphère, c-à-d. qui passent par les de^x pôles,
et qui servent, concurremment avec l'équateur et les pa-
rallèles, à fixer la position des lieux par la détermination
de leur longitude, c-à-d. de leur distance à un premter
méridien. Tous les méridiens étant de grands cercles, la
forme du globe terrestre ne fournit aucun motif pour en
choisir un préférablement à tout autre, comme on fait
pour l'équateur, le seul cercle que l'on puisse tracer à
égale distance des deux pôles : le premier méridien , au-
quel se rapportent tous les autres, est donc arbitraire.
Ptolémée a placé le sien aux lies Fortunées (Canaries),
parce que c'était la limite la plus occidentale des pays
alors connus; les Hollandais, au pic de TénériflTe, l'une
de ces lies; Mercator, géographe du xvi* siècle, à l'Ile
Corvo, l'une des Açores, parce (fue de son temps c'était
la ligne sur laquelle l'aiguille aimantée n'éprouvait au-
cune variation ; les Portugais, à Tercère, une autre des
Açores; les Espagnols, à Tolède. Louis XUl, en 1634, or-
donna que l'on se servirait en France, comme premier
méridien, de celui qui passe par l'Ile de Fer, la plus occi-
dentale des Canaries, et le géographe Guill. Delisle fixa
la longitude de Paris à 20 degrés à "*£. de ce méridien.
Depuis, des observations plus exactes ont fait connaître
que la différence de longitude entre Paris et le bourg
principal de l'Ile de Fer était de 30'*5'50"; il fallut donc avan-
cer le premier méridien de 5'50" à l'orient de ce point ; en
sorte qu'il n'est plus aujourd'hui qu'un cercle de conven-
tion , qui ne passe par aucun lieu remarquable. Depuis
cette époque, des observatoires ayant été établis dans les
capitales des principaux États, les géographes des grandes
nations maritimes ou savantes ont adopté chacun le mé-
ridien qui passe par son observatoire. Aujourd'hui Icj
méridiens les plus employés sont au nombre de cinq :
1* en France, celui de Paris; 2<^ en Angleterre, celui de
Greenwich, près de Londres, à 2<>20'O. de Paris; 3" aux
États-Unis d'Amérique, celui qui passe par le Capitule de
Washington, à 79*22'24"0. de Pans ; 4" en Russie, celui de
l'observatoire de Poulkowa, à St-Pétersbourg, à 27«57'58"
E. de Paris; 5* le méridien rectifié de l'Ile de Fer, em«-
ployé concurremment avec celui de Paris par les Alle-
mands, qui n'ont pu s'entendre, à cause de la division
politique de leur pays, pour placer leur méridien dans
une de leurs 35 capitales. — Les anciens géographes, et
pendant longtemps les modernes, comptèrent les longi-
tudes en commençant par le côté oriental du premier mé-
ridien, et en poursuivant dans le même sens sur toute la
circonférence do l'équateur. Jusqu'à ce qu'ils fussent re-
venus au côté occidental. De cette manière on comptait
i 360 degrés de longitude sur la sphère, et les calculs de
réduction que nécessitait la diversité des méridiens se
bornaient à une opération unique, addition ou soustrac-
tion. Ainsi, S'-Pétersbourg étant à 27» 57' 58" du méri-
dien de Paris, pour savoir à quelle distance il est de celui
de Greenwich, il suffit d'ajouter la différence des deux
méridiens anglais et français, 2» 20', et l'on obtient
30' 17' 58"; ou bien, Paris éUnt à 20» du méridien de
Vile de Fer, pour savoir à quelle distance il est du méri-
dien hollandais de Ténériffe, situé un degré à l'E. du
précédent, ou retranche 1 de la longitude donnée, et l'on
a 19. Les calculs sont devenus plus compliqués, depuis
Îiue les longitudes n'embrassent plus que la demi-circon-
érence de la sphère, c-à-d. 180^ de chaque côté, et que
le globe est partagé en deux hémisphères par rapport au
premier méndien ; dans l'hémisphère situé à l'ouest, sont
les longitudes occidentales; dans l'autre, les longitudes
orientales. Toutes les cartes sont aujourd'hui graduées
d'après ce système. Pour les réductions, il faut bien ob-
server de quel côté le méridien auquel on veut rapporter
les longitudes est placé par rapport à l'autre, pour retran-
cher leur différence de toutes les longitudes de même
nom que ce côté, et l'i^outer à toutes celles de nom con-
traire. Ainsi, le cap de Bonne-Espérance, étant à 18^23'
£. de Greenwich , n'est qu'à 16^3' E. de Paris, parce que
le méridien de Paris est de 2** 20' à l'est de celui de Green-
wich ; au contraire, le cap Hom, placé par les Anglais à
67*^21' O. de leur observatoire, se trouve à 69<>41' O. du
nôtre. Si les points à réduire tombent entre les deux mé-
ridiens, le lieu qui est oriental par rapport à l'un devient
MER
1240
MER
occidental par rapport à l'autre. Par exemple, Douttos est
à i*18' de longitude orientale de Greenwich; en retran-
chant cette longitude de la différence des méridiens, 2<> '20',
il restera i<>2' pour la longitude ocddentaie de Donvres
par rapport au méridien de Paris. — Les degrés de lon-
gitude se comptent et se numérotent à chaque méridien ;
mais, en réalité, ils se mesurent sur retendue de l'équa-
teur et des parallèles, que Ton nomme pour cela cercles
de longitude; et comme ceux-ci deviennent de plus en
plus petits à mesure qu'on s'avance vers les pôles, les
degrés de longitude vont aussi en diminuant vers ces
deux points; à l'équateur, le degré de longitude compte
111,277 mètres; sous le parallèle de Paris (48«50'U'%
73,140 met.; sous celui de S^-Pétershourg ^0*56' 31"),
55,775 met.; il est nul au pôle. G. P.
BiÉRlTE, DÉMÉRITE. L'homme est libre et intelli-
gent; par suite, la loi du devoir l'oblige à faire le bien et
à éviter le mal. Lorsqu'il obéit à cette loi, il conçoit qu'il
a mérité^ et qu'il a démérité dans le cas contraire. A côté
de la preiriière loi , il en conçoit donc une seconde, qui
est celle du mérite et du démerile. Celle-ci a toute l'uni-
versalité de la première. A la vue de l'homme de bien se
résignant, au nom du devoir, à supporter le malheur
pour rester pur, il n'est personne qui ne déclare qu'il est
digne d'une récompense proportionnée à son mérite; on
appelle, au contraire, sur le coupable le châtiment qu'il
a mérité» Cette loi est donnée par la raison, car elle parle
pour l'avenir surtout, et l'expérience n'atteint que le pré-
sent. Il en résulte que la loi du mérite est le complément
nécessaire de celle du devoir, et qu'elle en est insépa-
rable ; mais le devoir et le mérite diffèrent en ce que le
premier n'a pas de degrés et qu'il j en a dans le second,
attendu qu'il est plus ou moins difficile d'accomplir son
devoir. Cette différence nous montre la justice de Dieu,
qui récompense chacun selon son mérite , et qui punit
chacun selon ses fautes. La loi humaine est déjà l'appli-
cation de ce principe de Justice. Aussi la loi du mérite
et du démérite a pour conséquence de donner une sanc-
tion à la Morale. Une fois son devoir accompli, l'homme
a droit au bonheur dâ à la vertu ; Thomme de bien est
un créancier de la Justice divine, de même que le cou-
pable est son débiteur; et, soit en ce monde, soit dans
l'autre, la Morale est satisfaite. De tout temps l'humanité
a rapporté à Dieu la dispensation de la justice. R.
MëRLETTE, terme de Blason. V. Canetti.
MERLIN (Le roman de), 2* partie de la légende du
Saint Graal ou de la Table Ronde {V, Graal). Trois cents
ans se sont écoulés depuis que le graal a été apporté en
Grande-Bretagne; nul ne sait ce qu'il est devenu, et le
sojivenir en est presque effacé parmi les hommes. Alors
naquit l'enchanteur Merlin , fils du démon et d'une re-
cluse abusée. Son père, qui le destinait à ruiner sur la
terre l'œuvre de la rédemption, lui a donné son pouvoir
surnaturel, la connaissance des choses cachées ; mais, sa
mère l'ayant fait baptiser, il a reçu de Dieu, pour com-
penser les dons de Satan , la science des choses futures,
que ce dernier ne possède pas. Merlin est donc un être
mixte, partagé entre deux influences, entre le Ciel et l'En-
fer, et qui, tout en favorisant l'accomplissement des des-
seins providentiels, montrera beaucoup de complaisance
pour les passions des hommes. Le roman de Merlin nous
transporte au royaume des Bretons Logriens, sous les
règnes successif de Wortigern, d'Dter et d'Arthur. Il
nous retrace la naissance de ce dernier (V, Arthub —
Légende d'), les aventures de sa jeunesse, ses courses
errantes, son mariage avec Genièvre, et toujours Merlin
apparaît sous diverses formes dans les moments critiques,
pour veiller sur son protégé et lui aplanir les voies. Puis,
Merlin conseille au roi Uter d'établir la Table Ronde,
figure de l'ordre de la chevalerie : tous ceux qui pren-
dront place à cette table s'engageront à consacrer leur vie
à la recherche, à la conquête du saint graal; ils auront
plus tard un chef suprême, chevalier accompli , élu de
Dieu, plus proche des anges que des hommes, une sorto
de vicaire du Christ, pour lequel on conserve un siège
plus élevé que les autres. Après avoir inspiré l'institution
de la Table Ronde, Merlin se retire au fond des bois, où
il s'éprend d'amour pour la fée Viviane, qu'il instruit
dans les secrets de la magie. Un four qu'ils sont ensemble
dans la forêt de Brocéliande, Viviane veut savoir comment
on peut emprisonner un homme sans murailles, sans l^ois
ni fer, sans liens d'aucune sorte. A peine a-t-elle appris
le moyen de construire cette prison magique, qu'elle s'en
sert contre Merlin lui-même, pendant qu'il se livre au
sommeil. Depuis ce moment, nul n'a plus vu l'enchan-
tenr t an leal dM chevaliers d'Arthur, Gauvain, passant
dans la forêt de Brocéliande, entendit la voix dn captif le
charger d'aller raconter au roi ce qu'il était devenu. —
Le roman de Merlin, écrit en un français iemarquabie
par sa simplicité, est attribué à Robert ae Borron. On
voit dans la forêt de Paimpont (ancieuuu Brocéliande)
un cromlech qui n'est autre chose , selon la tradition
que le cercle magique où Merlin fut retenu prisonnier. '/.
Fréd. de Schlegel, Histoire de Venchanteur Merlin, Leip-
zig, 1804 ; Hersart de La Villemarqué, Contes popidairn
des anciens Bretons, Paris, 1842.
Ml!)RLINE, orgue mécanique qui sert à siffler les merles.
Il est plus fort que la serinette.
MERLON, partie pleine d'une muraille entre deux cré-
neaux, ou d'un épaulement de batterie entre deux em-
brasures.
MËRULA, ancien jeu d'orgue, le môme que VAmci-
nium {V. ce mot).
MERVEILLES DU MONDE (Les sept). l^'S^^2^^i\
MERVEILLEUSES (Les). \ ^/f^ï
MERVEILLEUX, mot qui s'applique, en Littérature,
aux incidents surnaturels dont l'imagination des poètes
entremêle les événements ordinaires de la vie. Dans les
poèmes épiques de l'antiquité, les rapports perpétuels
des dieux avec les hommes ; au moyen ftçe, les scènes
magiques qui remplissent les épopées italiennes; enfin,
dans les épopées modernes, les luttes de l'Enfer avec le
Ciel, sont autant de formes distinctes du merveilleux. La
place du merveilleux, sauf de très-rares exceptions, n'est
ni dans la poésie légère, ni même dans l'ode, où les dieux
ne seraient que des fictions mythologiques, des abstrac-
tions personnifiées et décorées 'd'attributs de convention;
elle est dans la poésie dramatique, et surtout dans Tépo-
pée, où la présence des dieux mêle en quelque sorte 1»
ciel à la terre, et donne à ces deux poèmes une gran-
deur et un éclat parfois incomparables. Nous oublions
volontairement ici la poésie comique, où la fantaisie d'un
Aristophane, dépassant toutes les bornes de la licence, a
bafoué les Immortels, Hercule et Bacchus surtout, dans
des scènes du burlesque le plus délirant.
Mj^térieux et terrible comme les légendes de la vieille
religion grecque, le merveilleux d'Eschyle, plus propre
peut^^tre à étonner l'imagination qu'à émouvoir les âmes,
nous jette dans un monde étranger au nôtre et presque
fantastique. Témoin cette pièce étrange du Prométhée dont
la critique discute encore le sens aujourd'hui, ou encore
la ronde infernale qu'autour d'Oreste parricide dansent
et chantent les Furies, vengeresses de Clytemnestre. - •
Sophocle, rapprochant l'Olympe de la terre, et faisant de
ses dieux des êtres qui ne demeurent plus, comme les
personnages mythologiaues de son devancier, en dehors
de rhumanité, leur a donné un rôle plus moral et plus
humain : tel est le double caractère de l'exposition de
VAiax, où Minerve, après avoir frappé d'une folie lou-
daine le héros, prend plaisir à provoquer ses saillies in-
sensées, ses menaces de mort contre Ulysse qui l'entend,
et qui, sans songer au péril dont l'a sauvé la démence
de son ennemi mortel, ne trouve plus que des paroles de
pitié pour la faiblesse humaine. — Euripide a gâté ce
dont ses prédécesseurs avaient tiré de si dramatiques ef-
fets; son merveilleux, quelquefois plein de grftce et d'ori*
ginalité pathétique, comme le dernier entretien de Diane
avec Hippolyte, n'est plus, en général, qu'un merveiileui
dégénéré ; sorte d'expédient propre à tirer le poète d'em-
barras quand il a tout dit et qu'il ne sait comment quitter
la scène. — Les conditions du théâtre moderne semblent
rendre difficile aux auteurs dramatiques l'emploi du mer-
veilleux. L'esprit du temps expliquerait assurément les
sorcières et les fantômes do Shakspearc; mais n'y aurait-
il pas à faire des réserves sur le Méphistophélès de Gœthe,
quelles que soient d'ailleurs les beautés de son singulier
drame?
Plus essentiel encore à l'épopée, car il la soustrait an
péril de n'être qu'un genre faux d'histoire mensongers
et fastidieuse, le merveilleux a partagé les destinées di
la poésie épique. Chez les Anciens, il est presoue exclu-
sivement mythologique. Depuis Homère jusqu'à Quintus
de Smyme, depuis Virgile jusqu'à Staoe, et même Jus-
qu'à Claudien, la mythologie, transformée selon le ca-
ractère particulier des époques et le caprice du poète,
tantôt seule, tantôt mêlée .de nécromancie, comme dans
Lucain, constitue le merveilleux de toute épopée grecque
et romaine. Seulement, il convient de signaler entre Ho-
mère et ses imitateurs une différence radicale : les as
semblées, les querelles des dieux , leurs apparitions sui
la terre, ne sont, pour ce» derniers et pour leurs leoteurs
MKS
12«1
MBS
qii*o04 machine épique; ils se permettent ces fictions au
nom des droits qu'on est convenu de reconnaître à ce
genre de poésie, et n*ont d'autre prétention que de re-
lever ainsi, par remploi du surnaturel, les différents
épisodes de leur œuvre. Homère ignore quels privilèges
lui donne ou lui refuse l'épopée : ce qu'il chante, il le
rroit; la foi naïve des ftges antiques et la candeur du
poôte convertissent ses fictions en réalité, et c'est le mé-
rite et la profonde originalité du mervdlleux homérique
quo de n'être pas, pour ainsi dire, merveilleux.
I^ moyen âge et la Renaissance, les croyances reli-
irieuseset le culte passionné des lettres païennes, prodni-
sireot un mélange bizarre de la Fable avec les ficiiuns
dont la religion chrétienne était la source. Dante passa
PAchéron pour aborder son Enfer, et le Léthé avant de
monter au Ciel ; le Tasse nomma Pluton dans sa Jérusa-
lem: Gamoëns alla Jusqu'à rendre les Néréides amou-
reuiesdes Portugais, Jusqu'à Jeter Amphitrite dans les
bras de Vasco de Gama; le lendemain, il est vrai, Am-
phitrite explique au héros qu'elle n'existe, elle, les Né-
réides, et tous les dieux de TOlympe, gue dans l'imagi-
nidoii des poètes. Ep même temnt, le renom dont la
superstition populaire honorait alors les astrologues et
les magiciens mspirait au Tasse les célèbres épisodes
des Jardins d'Armide et de la forêt enchantée; oe sorte
que le merveilleux participait à la fois du paganisme, du
christianisme et de la sorcellerie. — Dans les temps mo-
dernes, l'élément chrétien a fait disparaître ou, du moins,
I éclipsé la mythologie. Milton conserve encore aux fleuves
infernaux leurs dénominations grecques; mais la Fable
n'a point obtenu place dans les épopées suivantes, et
Desmarets de Saînt-Sorlin, Chapelain, Voltaire, Klop-
stock et Chateaubriand ne lui ont rien emprunté, sinon
peut-être quelques allégories. Cette transformation pro-
voqua, dès le XVII* siècle, une discussion qui s'est pro-
longée Jusqu'à nos Jours. Bolleau, qui ne connaissait pas
le Satan de Blilton, enseigna que fa religion chrétienne
ne devait ni ne pouvfdt être substituée, dans le pofime
épique, à la mythologie; Marmontel, le cardinal ne Po-
lignac et M. de Fontanes, pour des raisons analogues, em-
pruntées à la nature du christianisme, soutinrent la même
thèse. Desmarets répondit à Boileau ce que Chateaubriand
répliqua plus tard à de Fontanes : que le christianisme
est la religion qui se prête le plus à la poésie, et, pour le
démontrer. Tua composa Clovit, et l'autre les Martyrs.
n est permis de croire, en dépit de l'argumentation spé-
cieuse des deux auteurs et de leurs poèmes, qu'ils avaient
contre eux la vérité : le Paradis perdu est une de ces
rares exceptions par lesquelles le génie semble vouloir
prouver à la critique la plus sage qu'il est au-dessus de
ses règles et de ses lois. Les deux partis ne discutaient
Que du merveilleux qui convient le mieux à la poésie
qiioue; il nous faut craindre, ai^ourd'hui, que 1 esprit
moderne, c.-à-d. l'esprit d^examen, le goût de la critique
historique, et le créait toujours croissant des sciences^
n'ait à jamais tué l'un et l'autre. A. H.
MÉSAIL. V. Mbail.
MESAULON, nom donné par les anciens Grecs à une
cour ménagée entre plusieurs corps de bâtiment , pour
donner des Jours et des dégagements aux intérieurs.
MESCAL, instrument de musique des Turcs, sorte de
flûte de Pan, à 23 tuyaux, qui donnent trois sons difiTé-
lents selon la manière de les insuffler.
MÉSOCHORES. V, ce mot dans notre Dictumnasre de
Biographie et ^Histoire.
UESODUS, terme de l'ancienne Musique, s'appliquant
aux chanteurs des parties intermédiaires entre le dessus
et la basse. Le mesodus actUior était le contralto , et le
mesodus gravior le lénor.
MÉSO-<>OTinQDË, nom donné quelquefois à la langue
des Gotha, parce que ce peuple se fixa au ni* siècle dans
la Mésie. K. Allemande (Langue).
>1ESS, table militaire des officiers. Le mot a été pris
de l'andais, à l'époque de la guerre de Crimée, en 1854,
et du siège de Sébastopol par une armée franco-anglaise.
MESSAGE (du latin missio, envoi), en Politique, toute
'ommunication officielle adressée par le pouvoir exécutif
tu pouvoir législatif, ou par l'une des deux chambres à
faatre. Le terme, en usage particulièrement aux États-
Cnis, a été adopté en ÏVance depuis 1848.
MESSAGERS, MESSAGERIE. Ce furent les Universités
ifui, les premières, firent usage des messagers. A une
époque où il n'y avait aucun commerce réeulier, aucune
correspondance suivie entre la France et les autres na-
tions, ni même entre les provinces de la France, elles
^blU^ent un service de messagers, qui, avec de lourdes
charrettes où l'on plaçait à la fois les hommes et les ha»
gagea, allaient chercher les Jeunes étudiants et les rame-
naient à leurs familles. En considération des services qua
rendaient ces messagers, le gouvernement leur accorda
divers privilèges. Philippe le Bel, par lettres du 27 février
1297, enjoignit à ses officiers de Justice et autres de les
défendre contre toutes injures et violences, et d'autres
lettres de Louis X, en date du 2 Juillet 1315, déclarèrent
qu'ils devaient être libres de vaquer à leurs fonctions
sans aucon empêchement. A cause des droits et des fa-
veurs nui s'y trouvaient attachés, le titre de messager
d'une Ij niversité fut recherché avidement : au xv* siècle,
des bourgeois importants, qui ne firent aucun service de
transports, mais qui se bornèrent à fournir de l'argent
aux écoliers et à remplacer près d'eux leurs familles, ob-
tinrent le titre de grands messagers, ^ui les exemptait
des droits d'entrée sur le vin, du service du guet, de la
garde des J^rtes, et autres servitudes. Les autres bour-
geois d Paris, dont on augmentait les charges, récla-
mèrent, et, en 1478, le nombre des messagers fut sensi-
blement diminué i ceux oue f on conserva formèrent,
dans l'église des Mathurins, une confrérie sous le pa-
tronage de U S^* Vierge et de Charlemagne. En 1488,
Charles VIII décida qu'il n'y aurait plus quuin seul grand
messager pour chaque diocèse de France, et un pour
chaque diocèse étranger dont il se trouverait des éco-
liers étudiant en l'Université. Les grands messagers, qui
n'avaient nul besoin de voyager, se faisaient recevoir à
la Cour des aides; les petits messagers, toujours chargés
des transports, faisaient enregistrer leurs provisions au
Ch&telet et quelquefois au Parlement.
A l'exemple des Universités, la Cour des comptes eut
18 messagers, ayant pour mission de porter et de tran^
mettre les rôles, mandements et commissions qui éma-
naient d'elle : un édit du 12 mars 1514 donna à ces
messagers le droit de faire les exploits, et, vers 1540, ils
prirent le nom d'huissiers. — Les Parlements eurent
également leurs messagers jurés^ pour porter les sacs des
procès.
Les particuliers songèrent naturellement à employer
les messagers des Universités, à leur confier des lettres
et des paquets, au lieu d'attendre comme autrefois le
départ ou le passage de ({uelque marchand. Puis on ima-
gina de créer des services réguliers de transports. Des
lettres patentes de Henri III, en date du 10 octobre 1575,
concédèrent le premier privilège pour la conduite des
coches, dont il y eut deux aortes t les coches d'eau, qui
devaient toqjours conserver ce nom, et les coches de
terre, qu'on désigna ensuite par les noms i^nériques de
carrosses, de voitures, ou par les noms spécîflaues de di-
ligences, de messageries. En novembre 1576, un édit
créa, pour le transport des bagages et des personnes, des
messagers royaux, auxquela furent accordés les mêmes
privilèges qu'aux messagers de l'Université. Les pre-
mières lignes établies mreni celles de Paris à Orléans,
Rouen, Troyes, Amiens et Beauvais ; elfes étaient si mal
clesservies, que, pour exercer une surveillance, Henri IV
créa, en avril 15v4, un commissaire général et surinten^-
dant des coches ^ carrosses publies : le Parlement, en
enregistrant l'édit de cette création, fixa le prix des
places, et exigea que le commissaire fit deux fois par
mois un rapport à la police sur les abus qui auraient été
commis. Un arrêt du Conseil, du 13 avril 1601, établit les
coches de Ch&Ions, de Vitiy et de Ch&teau-Thierry. Le
22 iuillet 1610, la régente Marie de Médicis révoqua
l'édit de 1576, et, en mars 1613, une dame De Fontaine fut
reconnue propriétaire des coches de Firance : mais les
messagers royaux furent rétablis par un édit du mois de
février 1620. En août 1634, Louis xm créa en titre d'of-
fice héréditaire trois conseillers, intendants et contré-
leurs généraux des messagers, voituriers et routiers du
royaume. En 1641, l'Université de Paris afferma ses mes-
sageries particulières, et consacra le produit à l'entretien
de la Faculté des Arta. En 1644, les prêtres de la congré-
gation de la Mission obtinrent le privilège d'établir des
coches et carrosses de Paris à Rennes, en desservant
toutes les villes placées sur la route, et retendirent
ensuite à toutes les parties de )a Bretagne. En 1052,
Louis XIV accorda à sa nourrice Perrette Dufour un pri-
vilège semblable pour Nancy et pour Strasbourg.
Les services de transports se multipliaient, mais sans
améliorations bien sensibles. La lenteur dea coches était
proverbiale : en 1761, la voiture qui faisait le service
public de Paris à Strasbourg n'arrivait que le 7* jour à
Bar<-Ie-Duc, le 8* à Nancy, et le 12* à Strasbourg. Turgot
réunit toutes les entreprises particulières de messageries.
MES
1242
MES
pour former, sont la direction de TÉtat, une entreprise
générale; le nom de turgoUnes fut alors donné aux voi-
tures publiques. La loi du 9 vendémiaire an vi (30 sr.pt.
1 797 ) supprima ce monopole de l'État : des entreprises
privées purent se former, toutefois avec l'autorisation du
gouvernement, et sous condition de payer au Trésor un
dixième du prix des places. La Compagnie dês message^
ries impériales (plus tard royales) se fomia en 1805, et
eut le monopole des transports publics jusgu'en 1826,
époque où furent établies les Messageries natioruUes. Les
entreprises de messagerie ont vu décroître rapidement
leur importance, la plupart même des plus considérables
ont cessé leur service, depuis rétablissement des chemins
de fer, aui leur enlèvent chaque année de nouvelles
lignes. K. Voitures publiques. B.
MESSE, nom donné, dans TÉglise catholique, au sa-
crifice mystique offert à Dieu par le prêtre, sous les ap-
parences du pain et du vin, en mémoire de la derni^
Cène et de la mort de J.-G. Dans les premiers siècles, le
sacrifice de Tautel s'appelait la liturgie, c-à-d. l'œuvre
publique, Toeuvre du culte par excellence, nom que TÉglise
orientale a toujours conservé. Le mot messe^ qu'on voit
employé au iv« siècle, vient du latin missa, forme ancienne
de missio (renvoi), parce qu'avant Toblation du pain et du
vin, on faisait sortir les catéchumènes et les pénitents.
De là l'antique division de la messe en deux parties, dites
messe des catéchumènes et messe des fidèles. La messe
consiste essentiellement dans la consécration des espèces,
et dans la distribution du corps et du sang de J.-C. aux
fidèles : les prières et cérémonies qui les précèdent ont
été établies pour la préparation du sacrifice ; celles qui
les suivent, pour l'action de grinces. Pour dire la messe, le
prêtre est revêtu d'habits spéciaux, aui sont Vamict,
Vaube, la ceinture^ le manipule, Vétole et la chasuble
{V. ces mots). On distingue d'ordinaire six parties dans la
messe : 1<* la Préparation, composée de l'antienne /n-
troibo, du psaume Judica me, Deus, et du Confiteor,
que le prêtre placé au bas de l'autel et les assistants
récitent alternativement, pais de deux courtes prières
récitées à voix basse par le prêtre à l'autel ; 2** l'/nstruo
tion, comprenant Vlntroït, le Kyrie eleison, le Gloria in
excelsis, la Collecte, VÊpitre, le Graduel, V Alléluia ou un
Trait, quelquefois une Prose, puis V Évangile (qui peut
être suivi d'un Prône)^ et le Credo: 3« VObtalion du
pain et du vin, accompagnée de prières, dont une seule,
VOffertoire, peut être chantée ; 4° le Sacrifice^ qu'inau-
gurent la Préface et le Sanctus, et dont les prières sont
dites Canon de la messe; c'est ^e moment de la Consé-
cration et de l'Élévation ; 5<> la Communion, qui com-
mence par une courte Préface, le Pater et VAgnus Dei;
&* V Action de grâces, composée de deux courtes prières,
appelées communion et post-communion, et après les-
quelles le prêtre congédie les fidèles en pronon^nt Vite,
missa est. Il ajoute, depuis quelques siècles seulement,
une bénédiction, et récite le commencement de l'Évangile
de S* Jean sur l'incarnation du Verbe. Le Canon et la
Communion, qui forment la messe proprement dite, ont
des formules invariables, tandis que les autres parties
sont composées de prières qui vanent selon les solenni-
tés. S^ Basile en Orient, S' Ambroise, puis le pape
S* Grégoire en Occident, ont fixé l'ordinaire de la messe.
Une messe dont quelques parties sont chantées est
dite grand'messe ou messe haute; le prêtre qui la cé-
lèbre est ordinairement assisté d'un diacre et d'un sous-
diacre. Une messe non chantée s'appelle petite messe ou
basse messe. Une Messe de liequiem est celle qu'on dit h
l'intention des morts, et dont l'introït commence par les
mots Requiem œlernam. On appelle Messe de minuit,
colle qui se célèbre au milieu de la nuit de Noël; Messe
dtis présanctifiés, celle du Vendredi Saint, dans laquelle
il n'y a pas de consécration; Messe sèche, celle dans la-
qnolle le prêtre, ayant déjà communié, ne consacre pas;
ife^se conventuelle, la grand'messe où tous les membres
d'un chapitre ou d'un monastère assistent et chantent
ensemble. Une Messe du S^-Espritest celle qu'on célèbre
à Touverture annuelle des tribunaux, ou à la rentrée des
classes dans les lycées et les collèges : avant la Révolution
do 17S9, la messe du S'-Ësprit au Parlement de Paris s*ap-
pclait Messe rouge, parce que les conseillers y assistaient
en robe rouge. Une Messe votive est celle d'un Saint ou
d'un mystère dont on ne fait ni l'office ni la fête, comme
celles de la S^* Vierge et du S*-Esprit. — Jadis on nom-
mait Messe du scrutin celle qui se disait pour les caté-
chumènes le mercredi et le samedi de la 4* semaine de
Carême, lorsqu'on examinait s'ils étaient suffisamment
préparés au baptême s Messe du jugement, celle qu^on cé-
lébrait pour un accusé qui voulait se justifier par les
preuves établies.
Les luthériens et les calvinistes n'ont pas de mes^j,
parce qu'ils ne reconnaissent pas, les premiers la trans-
substantiation, les seconds la présence réelle.
En Musique, on appelle Messe une œuvre écrite sur
les paroles de certaines prières de la messe. Elle com-
prend d'ordinaire le Kyrie, le Gloria in excelsis, le Credo,
le Sanctus et VAgnus; les Italiens se bornent quelquefois
au Kyrie et au Gloria, On ajoute aussi parfois un 0 sain-
taris hostia et un Domine salvum fac. Dans une Messe des
morts, les parties sont : Tintrolt Requiem œtemam, s'en-
chalnant avec le Kyrie; la prose Dies irœ; rofTertoire
Djmine, Jesu Christs; le Sanctus, quelquefois suivi d'un
Pie Jesu; VAgnus Dei; l'antienne Lux œterna. Les messes
en musique sont brèves ou solennelles : dans le premier
cas, les paroles ne sont presque point répétées, et chaque
morceau est de peu de durée; dans le second, tout a un
développement considérable. Les messes sont devenues
plus longues à mesure qu'on a voulu rendre plus drama-
tique la musique d'église. F. Église (Musique d'). B.
MESSÉNIENNES, titre que C. Delavigne a donné à un
recueil d'élégies nationales, sur les désastres de la France,
après la guerre ie 1815, par souvenir des élégies que
composa le poète grec T^rtée pendant les guerres de
Sparte contre la Mœsénle. Ce n*était pas une bonne xdùa
d'appliquer un nom étranger à une chose toute française;
aussi l'expression n'a été adoptée par personne pour des
ouvrages de ce genre.
MESSIADE (La), ou plutôt lb messie, poSme allemand
en 20 chants, en vers hexamètres, composé par KIop-
stock, et mis ordinairement au nombre des épopées. Le
sujet en est la vie du Messie, rédempteur du genre Iiu-
main, à partir du moment où ses ennemis demandent sa
mort; le dénoûment est la victoire du Dieu de miséri-
corde, et la réconciliation de l'espèce humaine avec son
créateur. Bien que Klopstock n'ait pas divisé son œuvre
en deux parties, cependant les iO premiers chants forment
un pofime complet qui finit à la mort du divin Sauveur:
les 10 derniers, remplis par des hymnes qui se chantent
dans les cieux, sont une espèce é^Oratorio, consacré à la
résurrection du Christ. Le manque d'action, le défaut de
péripétie, est le vice radical de la Messiade, et ce qui
empêche les bons critiques de la considérer comme une
épopée. Ils reprochent encore au poète d'avoir altéré la
simplicité évangéliquc, et ipême le dogme. Le poème finit
par une ode d'action de grâces au Sauveur. Tout le talent
de Klopstock, essentiellement lyrique et descriptif, brille
dans l'exécution. On y remarque les portraits des douze
apètres et de leurs anges ganiiens (ch. 3), et beaucoup
de très-beaux chants; les épisodes de l'ange rebelle Abdiel-
Abbadona, repentant et cherchant à faire du bien aux
hommes (ch. ^2 et 9) ; de Cidli et Sémida, ressuscites par
Jésus, et qui s'aiment d'une affection pure et céleste
(ch. 4 et 15) ; de Porcia, que Marie implore pour son fils
(ch. 7); la mort de Marie-Madeleine (ch. 1^); la vision
d'Adam, à qui le Messie découvre une partie du jugement
dernier (ch. 18, 19), etc. ~ La Messiade parut en plu-
sieurs fois : Klopstock donna les trois premiers chants cr.
1748, le 4* et le 5« en 1751, les 5 suivants en 1755; puis
après un intervalle de 13 ans, il publia les chants 11 à IT),
en 1768; et, cinq ans plus tard, en 1773, les chants 1t>
à 20. Son poème eut un immense succès : on n'eu vit
que les beautés, et la grande tendance que Klopstock
avouait hautement, celle de créer une poésie nationale
allemande. Ce but il l'atteignit, et le mouvement qu'il
imprima a survécu à son succès; car aujourd'hui le Mes-
sie est un poème que les Allemands admirent beaucoup
et lisent peu, à cause du vice de la composition : on nn
lit volontiers des fragments, et peu à-la fois, tant la mo-
notonie de l'ouvrage dompte l'admiration du lecteur.
Néanmoins, il est toujours compté, avec raison, pann
les monuments de la littérature germanique. CTcst co
poème qui a naturalisé dans la poésie allemande le vr r>
iiexamètre qu'on y connaissait à peine. M"" de Carlowiiz
a donné une traduction française, en prose, de la Mes»
siade, Paris, 1859, gr. in-18.
ÎÎpccÎSd I y- ces mots dans notre Dn"
îîrccÎDS* > iionnaire de Biographie et
MbbbmE. ( d* Histoire
MESTRE-DE-CAMP. ) ^«»««'*^«-
MESURE, en Versification, espace contenant un ou
plusieurs temps. L'étendue du temps est d'une fixation
arbitraire : ainsi ^ '^, ^ "^ ^, ^-, -^, "^ "', " "" ">
" ", v^ w w w ^ g^ç ^ forment autant de mesures, ayant
les unes 2 les autres 3 les autres 4 temos. Ces mesures
MES
1243
MKT
sont très-souvent appelées pieds : c*est d'elles que se for-
ment les vers. Aiosi :
Fliaselai Ille qnem yidetls hospltei
forme un vers de six mesures iambiques ( ^ ~) ;
Nesdaque humanis preclbus mansaeacere corda
forme un vers de 6 mesures, dont la 1>^, la 3* et la 5^
soat dactyliques, la 2* et la 4' constituent un spondée,
et la ti' un trochée. Dans les vers latins et dans les vers
;recs, la mesure repose sur la quantité des syllabes;
(kms les vers français, elle repose sur la quotité des syl-
labes; dans les vers italiens, allemands, anglais, Taccent
joue un grand rôle dans la détermination de la mesure.
V. Mbtbe, Pied, Yebs. P.
UESORB, en Musique, division de la durée en un cer-
taia nombre de parties égales qu*on appelle temps, et
que Ton marque par des mouvements du pied ou de la
inain. Les mesures se séparent sur la portée par des li-
imes verticales, appelé» barres {V. ce mot). On distin-
gue les mesures smiples et les mesures composées. Les
premières sont les mesures à 4 temps, à 5 temps, et à 2
temps. Les temps se divisent en forts et en faibles; les
forts sont frappés , et les faibles levés. La mesure à 4
temps se bat en frappant le !'■' temps, portant la main à
gauche pour le 2*, à droite pour le 3", et en levant pour
le 4% ou, selon la mode italienne, en frappant les deux
premiers t«mps et en marquant les autres par un mou-
Tement de la main en Tair ; elle se marque à la clef par
un 4 ou par un C. La mesure d 2 temps se bat en frap-
pant le \^ temps et en levant la main au 2*; on la maraue
par un 1 ou par un C barré. La mesure d 5 temps se nat
en frappant le i*' temps, portant la main adroite pour le
2% et levant pour le 3*. L'unité de valeur est une ronde
ou quatre nôtres pour la mesure à 4 temps, une blanche
ou deux noires pour la mesure à 2 temps, une blanche
pointée ou trois noires pour la mesure à 3 temps. — Les
mesures composées ne sont que des fractions des mc^
sures simples. On les exprime par deux chiffres. La ronde
étant Tunité comparative à laçiuelle se rapportent toutes
les divisions, le chiffre supérieur désigne le nombre de
notes que doit contenir chaque mesure, ou leur équiva-
^Qt, et le chififre inférieur indique le nombre de ces
notes qui forme la durée d^une ronde; ainsi, Tindication
2/4 signifie que la mesure sera remplie par deux noires ou
quarts de ronde ; G/8, qu'elle le sera par six croches ou
Imitièmes de ronde. Les mesures composées qu'on em-
ploie le plus ordinairement sont : à 4 temps, 12/5 et 12/4 ;
iî temps, 2/4, 6/4 et 6/8; à 3 temps, 3/2, 9/8, 9/4, 3/i
et 3/8. — Toute mesure qui peut se partager en deux temps
égaux est dite 6tfui»re (du latin binus, double) ; toute me-
^re qui se partage en 3 temps égaux est dite ternaire
(de temus, triple). On ignore comment les musiciens ont
été conduits à reconnaître la nécessité de ces deux sortes
démesures. Suivant les vieilles traditions qui faisaient
considérer le nombre 3 comme le plus parfait, la mesure
ternaire était, il y a plusieurs siècles, dite parfaite, et la
mesure binaire imparfaite. Sur 100 morceaux écrits au
i\* ou au xvi* siècle , plus de 80 sont en mesures à
3 temps. — On se sert quelquefois d^une mesure d
5 temps, composée alternativement d'une à 3 et d*une à
2 temps. Elle est difficile à suivre , mais elle peut être
firorable à Mnvention de chants neufs et originaux. —
I> n'y a pas de mesure à un temps ; mais, comme, dans
•c pr»^o à 3 temps , on ne peut en marquer qu'un , la
mesure ne se bat réellement qu'à un temps, quoiqu'elle
en ait 3,
Le degré de vitesse ou de lenteur qu'on donne à la me-
sure dépend : 1^ du caractère du morceau , qui en fait
sentir le véritable mouvement; 2<» de la valeur des notes
qui composent la mesure; 3** du mouvement indiqué
par un mot placé en tête du morceau, comme Andante,
Allegro, etc.
On De comprend pas bien comment les Anciens conci-
liaient la mesure musicale avec le mètre de la poésie. On
trouTc chez quelques auteurs grecs deux mots , arsis et
théiis , qui indiquent l'élévation et l'abaissement de la
rDain pour marquer les I3mps de la mesure : mais ces
mo?j peuvent aussi n'avoir signifié autre chose que des
accents différents de la vMx (7. Ansis). C'était avec le
pied au'on battait la mesure ( V, Crupbzia) ; de là le nom
^^pedarii donné par les Romains à ceux qui en étaient
fharsiHi. On ne voit pas que le plain-chant, qui recueillit
rbéritage de la musique des Anciens , ait jamais été me-
ure jusqu'au XI* siècle , époque où Francon de Cologne
distingue pour la prcmit'n*e fois \amustqu9 plane {mth
sica plana) et la musique mesurée {musica mensura)
V. Aug. Pisa, tiattuta délia musica dichiarata, Rome.
1611, in-4''; Sacchi, Délia divisione del tempo nella Mu-
sica, nel Ballo e nella Poesia, Milan, 1770, in-8°; Bo'
nesi , Traité de la mesure , ou de la division du temps
dans la Musique et dans la Poésie. B.
MESURE (Bâton de). V. Baton de mesure.
MESURES. V. Poids et Mesures.
META. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra^
phie et d'Histoire.
MÉTABASë (en grec métabasis^ action de passer outre,
omission), en termes de Rhétorique, artifice de langage
qui consiste, soit à revenir au sujet après s'en être in-
opinément écarté, soit à passer brusquement à quelque
idée nouvelle. — Dans le langage philosophique, la Mé-
tabase est une digression, ou une introduction inoppor-
tune dMdées contraires ou étrangères à l'objet en dis-
cussion.
MÉTABOLE (d'un mot grec qui veut dire changement)^
en termes de Grammaire, transposition de lettres qui a
liou dans quelques mots pour les besoins de l'euphonie ,
ou à cause des exigences de la mesure dans les vers. —
En termes de Rhétorique, c'est une Figure consistant à
répéter sous des termes différents une même idée, ou un
rapprochement d'antithèses présentées en ordre inverse.
MÉTACHRONISME (du grec méta^ après, et chronos,
temps) , sorte d'anachronisme ( V. ce mot) par lequel on
donne à un fait une date postérieure à celle où il s'est
passé.
MÉTAL, en termes de Blason, se dit de l'or et de l'ar-
gent formant le champ de l'écu. En couleur, on repré-
sente l'or par le Jaune, et rarp:cnt par le blanc ; en gra-
vure, l'or par une foule de petits points, l'argent par une
surface unie. Quand l'écu porte métal sur mêlai, c-à-d.
or sur argent, on dit que les armes sont fausses ou d
enquerre (à enquérir, à vérifier),
MÉTALEPSE (du grec métalépsis, transposition), figure
de Rhétorique par laquelle on explique ce qui suit, pour
faire entendre ce qui précède, comme quand on dit :
Nous le pleurons, pour II est mort ; ou ce qui précède pour
faire entendre ce qui suit, comme dans ce vers de Ray-
nouard au sujet de la mort des Templiers (acte v, se. 4) :
Mais il n'dtait pins temps, les chants aTafent cessé.
C'est l'expression d*une même idée , mais adoucie dans
la forme. La Métalepse est quelquefois encore une ma-
nière indirecte et détournée d'exprimer un sentiment
secret ou caché ; telle est cette exclamation de la Phèdre
de Racine (acte i, se. 3) :
Dieux l Que ne suts-Je assise k l'ombre des Torfits !
Quand ponrral-je , an travers d*ane noble pousaibre
Suirre de l'œil un char fuyant dans la carrière I
La Métalepse a beaucoup de rapport avec la Métonymie
et laSynecdoche {V. ces mots). G.
MÉTALLIQUE (Histoire), nom qu'on donne à l'histoire
d'un règne ou d'une époque constatée par une suite d^
médailles.
MÉTALLIQUES , billets qu'un État rembourse et dont
il paye les intérêts en espèces sonnantes, non en papier-
monnaie.
MÉTAMORPHOSE (du grec métamorphôsis, change-
ment de forme), mot qui ne s'employait guère qu'au
propre, dans l'antiquité païenne, pour exprimer un
genre de prodiges opérés par les dieux, comme Narcisse
changé en fontaine, Progné en hirondelle, Philomèle en
rossignol, Daphné en laurier, lo en génisse, Actéon en
cerf, etc. Les dieux se métamorphosaient eux-mêmes :
ainsi, Jupiter prit la forme d'un cygne pour s'approcher
de Léda. Sous le titre de Métamorphoses^ Ovide nous a
laissé un poème en 15 chants, qui contient 246 fables de
ce genre. Cest par là surtout qu'il s'est placé parmi les
grands poètes. Le nom de Métamorphoses appartient
aussi au roman d'Apulée intitulé VAnê d'or {V. ce mot).
MÉTANÉES, ancien nom des formes ou stalles des
églises.
MÉTAPHORE (en grec métapkora, action de transpor-
ter), le plus beau, le plus riche et le plus fréquemment
employé des tropes (K. ce mot). C'est une figure par la-
quelle on transporte la signification propre d'un mot à
une autre signification qui ne lui convient qu'en vertu
d'une comparaison sous-entendue. La lumière de l'esprit,
la fleur de l'âge, Vivresse du plaisir, le feu des passions,
la tendresse du cœur, les aHes du tempa, le printemps de
^«
MET
nu
MET
la Tfe, le poids des ans, la chaleur du combat, la péné-
tration de Tesprit, la rapidité de la pensée , les mouve-
ments de r&me, bouillant de colère, saisi d*épou vante,
sonder les cœurs, voler à rennemi, riépondre sèchement,
recevoir froidement, énoncer clairement, etc., sont des
métaphores. Les noms, les adjectifs, les participes, les
verbes, les adverbes, peuvent donc s'employer métapho-
riquement. La poésie et Téloquence ne sauraient exister
sans ce langage auxiliidre de l'imagination, qui donne du
corps aux pensées , les embellit et les colore, et dont le
propre est de frapper par des images, comme la peinture.
Les exemples de métaphore abondent dans les grands
écrivains :
Le Dieu qal met nn frein k Ia fureur dei flots
Sait «UBsl des méchants arriter les complou.
llàciHB, Athalie, \, I.
Brillante sur ma tige et Yhonneur du Jardin,
Je n'tti vu luire encor que les feux da matin*
Je veux achever ma journée.
Ahdub Cobsisb, la Jeune Captive.
Au banquet do la vie, Infortuné eomivê.
J'apparus un Jour, et Je meurs !
GiLBBKT» Ode imitée de pliuteurt Psaumes.
Le chagrin monte en eroupe et (^otopf avec lui.
BOILBAUf Ep. A.
Le flot qui rapporta recule êpouvanlf*.
Bagihb, Phidre, V, 4.
La métaphore doit être appropriée au ton, au caractùro
général du discours : on conçoit que telle métaphore,
ien placée dans le stvle poétique, devienne ridicule dans
le style familier, et rôdproauement ; que telle autre, qui
sied à une harangue, produise un mauvais effet dans une
histoire ou dans une dissertation philosophique. Il faut
éviter d'emprunter des métaphores à des objets bas ou à
des circonstances triviales, conune fit Tertullien quand il
appela le déluge la lessive du genre humain. Une méta-
{more est défectueuse, quand elle est forcée, prise de trop
oin, et que le rapport n'est pas assez naturel et assez
sensible. L'excès de hardlense peut être aussi un défaut,
comme dans ces vers de J.-B. Rousseau (III, Ode au comte
de Zinzindorf)t
Et les Jeunes B<$phlr8 do leurs chaudes haleines
Ont foniu Yéeorce des eaux....
n doit y avoir dans les termes métaphoriques une es-
pèce d'unité et de concordance, et la métaphore est vi-
cieuse si elle n'est pas suivie, si les mots qui la consti-
tuent éveillent des idées incohérentes, comme dans ces
vers de Malherbe {Ode au roi Louis XUI) t
Prends ta foudre, Louts^ et va, comme un lion
Porter le dernier cuiip h la dernière tête
De la rébellion.
Voici un bel exemple de métaphore suivie, que nous
empruntons à un grand orateur sacré. Il s'agit de l'eiïel
produit par la nouvelle des désastres de l'armée française
et de son chef à la suite de la fameuse campagne de Mos-
cou, en 181), et du dénoûmont qui termina cette çuerre
en 1814 : « Tout h. coup, au sein même de la patne, un
cri prodigieux s'élève : le descendant de Cyrus et de Cé-
sar, le maiti*e du monde, avait fui devant ses ennemis;
les aigles de l'Empire, ramenées à plein vol des bords
sanglants du Dnieper et de la Vistule , se repliaient sur
leur terre natale pour la défendre, et s'étonnaient de ne
plus ramasser daâs leurs serres puissantes que des vic-
toires blessées à mort. Dieu, mais Dieu seul avait vaincu
la France, commandée Jusou'à la fin par le génie, et triom-
phante encore au quart d^heure même qui signalait sa
chute. » (Le P. LACoaDaiRi, OrtMon funèbre de M, de
Forbin-Janson).
Chaque langue a ses métaphores propres et tellement
consacrées par l'usage, qu'il est souvent impossible d'en
changer les termes, même par des équivalents. Entrailles,
dans sa sigtiiflcation métaphorique, exprime la tendreue
paternelle { Racine a dit {Phèdre^ iv, 3):
Je f aimais, et Je sens que, melgré ton offense,
Hes eiUraillêt pour toi se troublent par avance.
Hais à ce mot on ne pourrait pas substituer un synonjrme ;
et c'est pourquoi, dans les traductions, il est souvent im-
possible de faire passer littéralement une expression
métaphorique d'une langue dans une autre : le latin, par
exemple, dit sinistrum cornu (la corne gauche) en parlant
d'une armée, tandis que nous disons Voile gauche, E
MÉTAPHRASE (du grec métaphrasis, interprétation),
traduction littéralement fidèle. Nous avons sous ce titre
plusieurs versions faites du grec en latin, telles que celles
d'Eutrope par Posanius et de César par Planude, ou des
traductions en prose d'Esope et de Phèdre.
MÉTAPHYSIQDE. Arîstote, après avoir écrit ses traitas
de Physique, s'occupa de Philosophie première^ et les
écrits qu'il lui consacra reçurent de lui ou de l'un de ses
successeurs le titre de ta (uxà ta fuatxà , ce qui doit être
lu après la physique, ou bien ce qui est au-desstu des
choses sensibles. Telle est l'origine du mot Métaphysique,
Quant à la science, Arîstote n'en est pas l'inventeur:
Thaïes et Pythagore, l'école d'Élée, Platon, l'avaient trai-
tée à leur manière ; mais Arîstote y mit plus de méthode
en la constituant régulièrement. Dans son sens le plus
élevé, la Métaphysique a pour objet l'être en tant qu'être,
c.-à-d. l'essence des choses ; elle est le point le plus élevé
de la Philosophie : de là vient que cette dernière « prise
rationnelle {V. ces mots) ; leur ensemble forme ce qu'on
appelle les Sciences métaphysiques. La question essen-
tielle, en M^^taphysique, est de savoir si l'esprit humain
a le droit d'affirmer si ce qu'il conçoit nécessairement
existe, et s'il existe comme il le conçoit, par exemple, la
substance, la cause, le temps, l'infini, etc. De la réponse
faite à cette question capitale sont nés les grands sys-
tèmes et aussi les grandes erreurs en Philosophie; le
Spiritualisme, Tldéalisme, le Panthéisme, etc., ce qui
montre l'extrême importance de la Métaphysique. Lr.-s
réponses souvent si opposées viennent de la différence
des procédés employés à les chercher. La vraie méthode
consiste à substituer la conscience à des abstractions , à
un procédé tout géométrique, conune chez Spinoza, ou à
la prétention de s'identifier a priori avec l'infini, comme
l'ont fait plusieurs philosophes allemands, ou à celle, non
moins aventureuse, de s'élever à la vérité suprême par
l'enthousiasme et l'amour, en dédaignant les secours de
la raison et de la science. La vraie Métaphysique, en s'ap-
puyant sur les croyances universelles et nécessaires don-
nées par la raison, et sur l'union de cette dernière avec
le sentiment, conduit à faire concevoir à l'homme, et à
offrir à son adoration l'Être divin et absolu en qui sont
toutes les perfections.
L'antiquité accorda de tout temps une grande attention
à la Métaphysique. Aristote, dans la iMurtie ontologique,
distingue quatre principes : la qualité, par laquelle une
chose est ce qu'elle est; la matière; le principe du mou-
vement; le principe de la fin ou du bten. Les commenta-
teurs les plus connus de cette iiartie de ses œuvres sont,
chez les Anciens, Alexandre a'Aphrodise, Thémlstius,
J. Philopon ; chez les Arabes , Avicenne, AverroCs. Dans
le moyen âge, S^ Anselme de Cantorbéry se distingue par
son indépendance, en cherchant à asseoir le dogme sur
des arguments métaphysiques. Les maîtres les plus cé-
lèbres qui cherchèrent à établir la Métaphysique d'Aris-
tote dans les écoles en l'interprétant, furent Alexandre
de Haies, Albert le Grand, S* Thomas d'Aquin, Duns
Scot. La philosophie moderne, ayant surtout en vue la
méthode, s'occupa plus du sujet que de l'objet, et, par
suite, sembla accorder moins d'importance à la Métaphy-
sique. Bacon en fait une partie de la Physique, sans ce-
pendant la méconnaître, puisqu'il admet une théologie
naturelle fondée sur la raison seule. Pour Descartes,
« toute la philosophie est comme un arbre dont les ra-
cines sont la Métaphysique, a Malebranche, le plus grand
métaphysicien de l'école française, voit dans la même
science les vérités qui peuvent servir de principes aui
sciences particulières; il est plus près de Platon que
d' Aristote; Leibniz se place entre les deux pour les con-
cilier. Après lui, la Métaphysijjue perd de ses droits et
de son importance dans l'histoire de la philosophie avec
Locke, Condillac,et l'école idéologique; en faisant dériver
de la sensation toute la connaissance, ils méconnaissaient
les conceptions de la raison et les premiers principes. Avec
Kant, la Métaphysique reprend la place qui lui appartient,
mais avec un caractère essentiellement subjectif : le phi-
losophe allemand ne voit en elle que la liste des notions
données par la raison. Avec Schelling et He^l, elle fut
entraînée à dépasser ses limites légitimes. En France,
rÉclectisme prit en Métaphvsique le caractère dualiste et
cartésien du \vn* siècle. Y. Aristote, La Métaphysique,
trad. en français par Piorron et Zévort, 184i; Plotin.
MET
1245
MET
iê$ EnnmdêSi tradnlidsparM. Booillet; le Pidado-Denys^
Dm Noms dwins. De la hiérarchi» célesU; Scot-Erigène,
De la division de la Nature; Avicebron (Salomon ben
Gai)irol), Fons vUm; Malebranche, Entretiens sur la
Métaphysique et la Relijgion; 4687; 'Sgravesande, Intro-
duction à la philosophie, 1730-1756; Para du Phanjas,
Cours de Métaphysique, ou Théorie des Êtres insensibles,
1779; les écrits philosophiques de FéneloD et de Bossuet;
l'analyse delà Métaphysique d^Artstote^ par H. Michelet,
de Berlin; V Essai sur la Métaphysique d^Aristote, par
M. Ravaisson, 1836-46 ; M. Yacherot, De la Métaphysique
et de la Science. R.
MÉTAPLÂSME (en grec métaplasmos, transformation),
terme de Grammaire qui s'applique à toutes les altérations
qae peuvent éprouver les lettres ou les syllabes des mots.
làprosthèse, Vépenthèse, \¶goge, là diérèse, làcrase,
Vaphérèse, la syncope, Vapocope, la synérèse, Yélisùm,
Il métathièse {Y*ces mots)^ sont des métaplasmes-
MÉTATHÊSE, terme de Grammaire et de Rhétorlqae,
dérive du grec, et signifiant trantpontum, spécialement
d'une lettre dans le corps d*un mot. Cest IV qui Joue le
principal rôle dans cette figure, dont il y a des exemples
très-fréquents en grec, en latin et en français. Ainsi, le
latin vervex a formé en français berbis, remplacé défini-
tivement par brebis; formica a formé fourmi, et frémi,
qui ne se dit plus que dans les campagnes; provideo a
formé pourvoir; protrahere, portraire. On disait autre-
fois pourmener, on dit depuis longtemps promener; le
mot propos a passé en anglais sous la forme purpose.
Quelquefois c'est une syllabe entière qui s'est transposée :
ainsi le grec morphè est devenu le latin forma. — On a
donné aussi le nom de Hétathèse à la répétition des
mêmes mots dans deux phrases, lorsque Tordre est in-
verse dans Tune et dans l'autre, comme Eripis ut perdas,
perdis ut eripicu. — Chez les Grecs, la Métathèse pre-
nait encore les noms d'Hyperthèse et d^Enallaxe. P.
MÊTATOME. F. Dbnticijlbs.
MÉTAYAGE. V. FEaitACB.
UÉTEBIPSYCHOSE, et, par altération, M^tbhpstcosk,
(du grec meta, marquant changement, etpsukhè, &me),
transmigration des Aines. La métempsycose est une des
premières formes que prit le dogme de l'immortalité de
l'âme. Les Égyptiens croyaient que T&me, aussitôt après
la mort, entrait successivement dans les corps de tons
les animaux qui vivent sur notre globe, et Qu'elle rêve-
nait au bout de trois mille ans dans le corps d un homme,
et cela éternellement. Cette forme grossière fut remplacée
par la croyance à un empire des morts appelé Amenthès
(qui donne et qui reçoiQ, et sur lec^el régnait Osiris,
sons le nom de Sérapis. Chez les Indiens, la métempsy-
cose prit un caractère plus métaphysique, et qui se rat-
tachait à la doctrine des émanations; le cercle des trans-
migrations embrassait la nature organisée, depuis la
plante Jusqu'à l'homme, et la fin de T&me était d'aller
s'absorbor en Dieu. Chez les Perses, la métempsycose
devint la croyance à la résurrection de T&me dans le corps
qu'elle avait occupé; cette doctrine, enseignée par ^
roastre, annonçait un Jugement dernier. On trouve encore
la métemp^cose enseignée en Grèce, dans les Mystères,
an nom d'Orphée. Aprai lui, Pythagore lui donna une
forme plus précise, en posant comme condition une cer-
taine harmonie entre les facultés de l'&me et l'organisa-
tion du ooipe qu'elle doit habiter. Platon prit de la mé-
tempsycose ce qu'elle avdt de plus spiritualiste , en
cherchant, da^as son Pnidon, à l'élever à la hauteur d'une
doctrine philosophique. Porphyre essaya de la faire en-
trer dans la philosophie alexandr.ne, sans faire descendre
l'àme Jusqu^à l'échelle animale. A cette forme nouvelle
se rattache celle qu'on rencontre dans la Kabbale des
iuifs; des deux côtés, on voit la métempsycose renfermée
dans la vie humaine. — De nos Jours, on a vu cette vieille
doctrine dans un livre de M. Pierre Leroux, De l'Huma^
nité, avec ce caractère nouveau qu'au lieu d'être une
déchéance pour l'homme, c'est un progrès, et dans le
système de Charles Fourier, père de l'école phalansté-
rienne, qui admet une série d'eitistences dans ce monde
ou inlnirmondames et dans des sphères sui)érieures ou
exlra-mondasnes (V, sa Théorie de Vunité universelle,) R.
MÉTHODE (du grec mélhodos, recherche, perquisi-
tion). On nomme communément méthodes les divers
procédés par lesquels l'esprit arrive à découvrir ou à dé-
montrer une vérité, les différentes séries d'opérations qui
y mènent, l'ordre qu'il faut suivre soit dans la recherche
de cette vérité, eoit dans son enseignement. Ces procédés
varient suivant la nature des objets à connaître; mais
leur différence tient à ce f[u'îls sont plus on moins con-
formes a celui qu'il est dans la nature de notre esprit de
suivre, et qui atteint le mieux le but de la méthode, qui
est de substituer une idée claire, exacte et complète, à
une notion confuse, superficielle et incomplète. Cette mé-
thode, dite naturelle, se compose de deux parties : l'ano-
lyseet ItLsynthèse (V. cm mo^s). Dans la première, l'esprit
pierçolt volontairement l'objet, s'y applique, le distingue
de tous ceux qui l'entourent, et le décompose ; dans la se-
conde, il le recomi^se. En examinant ces faits et les rap-
ports qu'ils ont entre eux, on reconnaît oue l'ordre dans
lequel ils se présentent est invariable, qu'aucun d'eux ne
Dourraitètre déplacé. Cette succession constante des faits,
qui amènent la connaissance réfléchie, en constitue la ^ot,
e t cette loi n'est autre chose que la méthode naturelle,
h Vmaiyse ou décomposition, et la synthèse ou recomposi-
tl on, ne sont pas deux méthodes, mais les deux parties
né cessaireset inséparables de toute méthode, et, de plnx^
la synthèse ne vaut que ce que vaut l'analynA, puia-
q'uelle donne une connaissance de l'ensemble dont 1 ana-
lyse ooit lui fournir toutes les parties. — Une méthode
particulière i^'est que la méthode naturelle appliquée à
un objet spécial et dans un but déterminé. Si le but est
Ia découverte d'une vérité, la méthode, tout en se modi-
Q ant suivant la nature des objets que cette vérité con-
cerne, reste méthode de rechetxhe ou d*invention: ainsi,
dans les sciences expérimentales, la méthode part de faits
particulière pour conduire aux faits généraux et aux lois
qui les régissent; cette méthode particulière est dite
expérimentale^ a postenori, et encore méthode d'indue-
tion; au contraire, la méthiyde synthétique ou de déduo-
tion fait sortir de certaines vérités générales les consé-
quences qu'elles renferment, comme cela arrive dans les
sciences de raisonnement. Si le but est simplement d'ex-
poser des vérités connues ou de les communiquer, la
méthode n'est plus cpi'un moyen d'enseignement ou ordre
méUutdique, appelé aussi analytique ou synthétique, se*
Ion que domine la synthèse ou l'analyse, mais sans que
l'une ou l'autre soit exclue. La méthode d'induction, dit
Laplace, quoiaue excellente pour découvrir des vérités
générales, ne dispense pas de les démontrer. Les classi-
fications sont encore des méthodes; elles sont artifl'
cielles, quand elles déterminent des espèces ou des
genres d'après quelques caractères secondaires; nafti-
relles, quand elles ont recours à la constitution entière
et complète des êtres.
La nécessité de la méthode se montre par la marche
des sciences et leun progrès à traven les siècles. Socrate
l'indique, et fait sentir l'utilité de l'induction. Sur ses
traces marehent Platon et Aristote ; ce dernier applique
la méthode à l'histoire naturelle, et lui fait faire un grand
pas. Si le moyen âge reste en arrière sous le rapport des
sciences, c'est que l'analyse lui manque, ainsi que l'ob-
servation et l'expârimentation. Avec Bacon et Descartes,
l'esprit humain entre dans une voie nouvelle. Bacon re-
commande une méthode qu'il donne comme un nouvel
instrument pour former les sciences et la philosophie,
Novum organum scientiarum, comme un mo^en de les
replacer sur leura véritables bases, Instauratw magna,
capable de leur faire prendre de nouveaux accroissements.
De augmentis scientuirum. Cette méthode, c'est l'analyse
suivie de la «lynthèse, car l'observation et l'induction ne
sont pas autre chose. Cest par elle qu'il explique comment
il faut, non pas se contenter d*observer les faits que le
hasard nous offre, mais faire naître les occasions, repro-
duire ces faits avec des circonstances plus favorables à
l'examen, c-ànl. expérimenter, pour s'attacher à l'inva-
riable, aux lois. Pendant ({ue Bacon préconisait en An-
gleterre la méthode expérimentale. Descartes la produi-
sait en France avec plus de précision dans son Discours
de la méthode. Il la réduit a quatre règles, qui recom-
mandent : de ne s'attacher qu'à l'évidence ; de décompo-
ser les objets ou d'analyser; d'épuiser l'analyse par des
subdivisions successives et des dénombrements entiers;
enfin d'opérer une synth^ en allant du simple au com-
posé et en classant an moyen des rapports. C'était près-
crire exactement les procédés de la méthode naturelle.
En l'appliquant aux faits intérieure et à la pensée. Des-
cartes créa en quelque sorte la psychologie, et mérita le
nom de Père de la philosophie moderne. Grâce à lui et
k Bacon, la méthode, appliquée à toutes les parties de la
science, les plaça sur leure bases véritables, les fit mar-
cher et grandir, et montre ce que pouvfdt l'homme muni
le ses secours. R.
if#.TH0DE, nom donné k certains livres élémentaires,
particulièrement à ceux qui concernent l'étude d'une
langue, ou du chant, ou d'un instrument de musique Ea
MET
1246
MET
Musique, on appelle aussi Méthode la manière de chanter
ou d*e|écuter, le style propre de chaque artiste.
MÉTIERS. V, Arts et métiers.
MÉTIS (de Tespagnol mestizOf mélangé), celui qui est
né d'un Européen avec une Américaine, ou d'un Améri-
cain avec une Européenne.
MÉTONOMASIE (du grec meta, préposition qui marque
changement, et onoma, nom), changement de nom propre
par voie de traduction. Ce fut un usage assez répandu
parmi les savants au xvi* siècle. Ainsi , Schwarzerd prit
le nom de Mélanchthon , qui , comme lui , signifie terre
noire; La Ramée se fit appeler Ramus; le médecin Du-
bois prit le nom de Sytvws; le poète italien Trapassi
traduisit son nom en grec, et s'appela Métastase, etc.
MÉTONYMIE (du grec meta, préposition qui marque
changement, et onoma, nom ), figure de mots de la classe
des tropcs (V. ce mot). Elle consiste à employer: !• la
cause pour TefTet. On dit, par exemple. Mars pour la
guerre, Bacchus pour le vin, Cérès pour lepatn, Neptune
pour la mer, Vénus pour la beauté, VtUcain pour le feu;
vivre de son travail , c.-à-d. vivre de ce qu'on gagne en
travaillant; lire Bossuet, c-à-d. lire les ouvrages de
Bossuet; Atkatie, le Cid, c-^mI. les tragédies dont ces
personnages sont le sujet; un Elzevir, un Barbou, pour
un livre édité par EIzevir, par Barbou; j'ai un Rem-
brandt, c.-à-d. un tableau de Rembrandt; avoir une
belle main, c.-à-d. bien écrire; un habile pinceau, pour
un habile peintre; une bonne lame, pour un homme fort
à V escrime; une plume distinguée, pour un écrivain
distingué; je suis reconnaissant de vos bontés, pour des
effets de votre bonté; — 2° TefTet pour la cause, comme
dans ces mots: la triste vieillesse, la pâle mort, Vor^
gueilleuse richesse; boire la mort, pour le poison qui la
donne; Pélion n'a plus d^ombres, c.-à-d. n'a plus d'ar-
bres ; — 3« le contenant pour le contenu : botre une boî^
teille; avaler une coupe empoisonnée; Vunivers, pour les
peuples qui l'habitent; une bonne table, pour le bon
repas dont elle est couverte; — 4<> le signe pour la
chose signifiée : le sceptre ou la couronne pour la royauté,
la robe pour la magistrature, Vépée pour Vétat militaire,
Volivier pour la paix, le laurier pour la victoire, le léo-
pard pour V Angleterre dont il est l'emblème , le crois-
sant pour le mahométisme, le cothurne pour la tragédie,
les brodequins pour la comédie; — h^ le lieu où une
chose se fait, pour la chose elle-même : on dit un sedan,
un elbeuf, pour un drap qui a été fabriqué à Sedan, à
Elbeuf; un panama, pour un chapeau de Panama; un
manille, pour un cigare de Manille ; un damas, un ma-
dras, du bordeaux, du Champagne, un cachemire; Bol-
leau a dit un caudebec, pour un chapeau fabriqué à Cau-
dcbcc ; le Lycée, le Portique, se disent pour la philosophie
qu'on Y enseignait; — 6« le physique pour le moral,
ou le siège d'une faculté ou d'un sentiment pour la fa-
culté ou le sentiment lui-mômc : avoir du cœur, c.-à-d.
du couraj^e ; femme de tête , c.-à-d. qui a de la fermeté ;
une méchante langue, c-à-d. une personne médisante ;
homme sans cervelle, c-à-d. irréfléchi; homme sans en^
trailles, c-à-d. dur ; — ?<> l'abstrait pour le concret : ma
demande, pour la chose que Je demande ; mon espérance,
oour la chose que J'espère :
Les vAlnqaenrs ont parld : Veselavage en aliénée
Obéit à leur rois dans cette vUle immense.
VoLTAiBB. l'Oiphelin de la Chine, acte I, bc. S.
— 8^ le maître ou le patron, pour la chose qui lui appar-
tient : S^-Pierre de Rome, Notre-Dame de Paris, pour
les églises placées sous le patronage de S^ Pierre et de la
S** Vierge; les Pénates, pour la demeure; — 9" le nom
du souverain , pour la monnaie qui porte son effîgie : un
louis, un napoléon; — lO** le possesseur pour la chose
possédée : on dit d'un homme qu'il a été incendiéy pour
signifier que sa maison a été brûlée. B.
MÉTOPE (du grec meta, entre, et opé, trou), intervalle
carré qui , dans la frise dorique, sépare les triglyphes.
Dans l'origine de larchitecture grecque, les métopes
étaient les espaces laissés sur la face entre les extrémités
des poutres formant le plafond ; elles durent même, dans
le principe, rester vides et servir à éclairer l'intérieur
d(?s édifices: elles furent closes, et présentèrent à la
sculpture un champ dont celle-ci sut profiter. Tantôt on
y représentait des têtes de victimes ou des boucliers,
tantôt on y sculptait les scènes des luttes héroïques;
quelquefois même on y plaçait des ornements en métal.
METRE, pied déterminé par la quantité des syllabes:
•Snsi, le spondiîc (— ), le dactyle ("^''), l'anapeste
(-*'"), l'iambe ("^ "1, sont des mètres. Un vers composé
de 6 pieds s'appelle hexamètre; un vers de 5 pieds, pen-
tamètre. Cependant V hexamètre iambique {senarius] re-
cevait souvent le nom de tnmètre; c'est qu'au lieu de
compter par pied, on comptait par système de pieds pour
le scander ; ainsi une dipodie formait un mètre. Le mot
mètre est peu employé et peu convenable pour les lan-
gues modernes, la française surtout : on y donne quel-
quefois ce nom à la réunion de deux syllabes; ainsi
nous disons heoMmètre au lieu d'alexandrin, pentamètre
au lieu de vers de dix syllabes, etc. P.
MÉTRIQUE , mot qui désigne surtout la connaissance
de la quantité et des différents mètres de la versification
ancienne. Diomède et Terentianus Maurus ont laissé di^
Métriques latines qui nous sont très-précieuses. F. I^o-
soDiR, Versification. P.
MÉTROMÈTRE. V. Chronomètre.
MÉTRONOME (du grec métron, mesure, et nomns,
loi, règle), instrument employé pour indiquer les divers
degrés de vitesse du mouvement musical. Il se compose
d'un balancier enfermé dans une petite boite p>Taniidale,
et dont les oscillations, sensibles à l'oreille, marquent les
temps de la mesure. Ces oscillations peuvent être acrélé-
rées ou ralenties, en déplaçant un poids mobile porté sur
une tige adaptée au balancier. Les numéros d'une échelle
placée derrière le balancier indiquent le nombre des os-
cillations au'il exécute dans une minute. Le métronome
donne 28 degrés de mouvement. Beaucoup de morceaux
de musi^e portent aujourd'hui le numéro de cet instru-
ment qui correspond au mouvement que Tauteur a voulu
donner à son œuvre. Le métronome a été inventé ou
plutôt perfectionné en 1815 par Maelzel. B.
MÉTROPOLE. V» ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
METTEUR EN PAGES. V. Iiiposmoif.
METZ (Église S^-Étiennb, à). Cette église cathédrale,
fondée en i014, s'éleva avec une extrême lenteur; elle ne
fut entièrement achevée qu'en 1546. Située sur l'un des
côtés d'une place, en face de l'hôtel de ville, elle domine
toute la cité, et présente de loin un aspect imposant. Les
contre-forts sont couronnés de clochetons aigus en pj'^ra-
mides octogones, et les arcs-boutants décora de festons.
L'une des tours, surmontée d*une flèche à jour, a 85 met.
de hauteur, et renferme une cloche nommée Mutte, qui
pèse 13,000 kilogr.; l'autre n'a point été achevée; au lieu
d'être élevées sur la façade, ces tours sont posées sur les
troisièmes travées des collatéraux de la nef. Le portail
principal, que Ton rebâtit sous Louis XV, en mémoire
de la guérison de ce prince à Metz, est une construction
d'ordre dorique, lourde sous des ornements sans nombre,
triste avec des airs de coquetterie ccmme tout le style
Pompadour, et qui , accolée à un monument gothique,
est singulièrement choquante. Dans cette façade mo-
derne est incrustée l'ancienne rose, dont l'élégance est
encore rehaussée par le contraste des formes qui l'avoi-
siucnt. Il est regrettable que des échoppes et des mai-
sons encombrent l'extérieur de l'édifice. Le plan général
de la cathédrale de Metz est une croix latine, ma» dont
les bras , comme à Reims et à Ch&lons-sur-Mame, sont
plus rapprochés du sanctuaire que dans les autres cathé-
drales; il en résulte que le chcôur empiète de toute
l'étendue de la croisée sur le reste de l'édifice : l'har-
monie souffre de cette modification au plan universelle-
ment adopté. La nef, à sa partie inférieure, appartient
au style ogival primitif, et, à sa partie supérieure, au
style secondaire; le transept, le chœur et l'abside sont
du style tertiaire. Les dimensions générales sont : lon-
gueur totale, l'24'^\35; largeur de la nef, IG mëU; lar-
geur des collatéraux, 14™, G5; hauteur de la nef sous
voûte, 44'", 33; hauteur de la voûte des collatéraux,
13 met. On admire la beauté de la grande nef, qui est
la plus haute de France, l'espacement hardi des piliers,
le développement et la richesse des fenêtres ornées de
précieuses verrières, et dont les meneaux sont diverse-
ment façonnés selon le st^le de la construction. La plu-
part des piliers sont cylindriques, et les chapiteaux à
feuillages sont traités avec grâce et délicatesse; au-dessus
des arcades ogivales règne une autre série d'arcades à
plein cintre s'appuyant sur des modillons à figures bi-
zarres, réminiscence assez surprenante du style roman.
Les piliers de l'entre-croisement de la nef et des tran-
septs sont accompagnés de colonnettes à demi engagées,
qui s'élancent Jusqu'à la naissance de la voûte pour en
supporter les nervures et servir d'appui aux arcs-dou-
blcaux. Les fenêtres ouvertes aux extrémités du transept
se distinguent par la grandeur de leurs proportious ci
MEU
1247
M EX
par leur eiécution large et savante. Les chapelles absi-
(lales et les grandes ouvertures du rond-point oflîrent une
ordonnance symétrique et une perspective pittoresque.
Les vitraux du chœur ont été exécutés de i52i à 1520
par Antoine Bousch, peintre-verrier de Strasbourg. On
doit déplorer que Taire du chœur ait été considérable-
ment exhaussée au siècle dernier, et qu'en établissant
les degrés par lesquels on y monte on leur ait donné une
saillie semi-circulaire sur la nef. Il n*y a pas plus de
goût dans la décoration des chapelles. V. Bégin , His-
toire et description de la catJiedràle de Metz, Metz, 1842,
in-8». B.
METZ (École de). V. École d'aiitillerie, dans notre
Dicticmnaire de Biographie et d^Histoire.
MEUBLE, mot qui s*est appliqué d'abord à tout ce qui
est mobile, facile à remuer, et qui a désigné ensuite tout
objet garnissant un appartement ou servant à divers
usages de la vie, comme les lits, tables, commodes, se-
crétaires, armoires, chaises, fauteuils, canapés, etc. La
fabrication des meubles forme une partie importante de
l'ébénisterie (K. ce mot),
MEUBLES , en termes de J>roit, toutes les choses mo-
bilières. Sont meubles par leur nature : les corps qui
peuvent être transportés d*un lieu à un autre, soit par
Feffet d*une force étrangère, comme les choses Inanimées,
Goit par leur propre mouvement, conmie les animaux ;
les bateaux, bacs et navires, les bains sur bateaux, les
moulina, et généralement toutes usines non fixées par
des piliers; les objets ajoutés à un immeuble comme
décoration par un locataire ; les matériaux destinés à la
construction d'un immeuble, et ceux à retirer ou prove-
nant de démolitions; les coupes ordinaires de bois tûllis
ou de futaies, qu'elles soient faites ou simplement ven-
dues sur pied; les fruits détachés de la terre. Sont
meubles par détermination de la loi ou par fiction : les
obligations et actions qui ont pour objets des sommes
exigibles ou des effets mobiliers; les actions ou intérêts
dans les compagnies de finance, de commerce ou d'in-
dustrie; les rentes perpétuelles ou viagères, soit sur
l'État, soit sur de simples particuliers. On nomme
meubles incorpùrels, par opposition aux meubles corpo-
rels, les droits mobiliers qui ne se rapportent pas à un
corps certain. On entend par meubles meublants ceux
destinés à Pusage et à l'omcment des appartements,
comme tapisseries, lits, sièges, glaces, pendules, tables,
porcelaines et autres objets de cette nature : les tableaux,
les statues, les porcelaines n'en font pas partie, du mo-
ment que ce sont des ^eries ou des collections particu-
lières. Le mot meMe^ employé dans les dispositions de
la loi ou des particuliers, sans addition ou désignation ,
ne comprend pas l'argent comptant, les pierreries, les
livres, les médailles, les instruments des sciences, arts
et métiers, le linge de corps, les armes, les équipages,
les vins, grains, foins et autres denrées, les dettes ac-
tives, enfin tout ce qui fait l'objet d'un commerce, bien
que ces divers objets soient rangés parmi les biens mo-
biliers. Le propriétaire d'une maison a le droit de se faire
payer ses loyers sur les meubles du locataire. Les saisies
qu'un créancier peut pratiquer sur les meubles de son
débiteur varient selon Tobjet auquel elles s'appliquent
(K. Saisis}. Certains créanciers ont un privilège sur les
meubles (V, PriviliSgb). V. Chavot, Traité de la pro-
prièté mobilière suivant le Code civil, 1839, 2 vol. in-8<».
iiEDBLES, en termes de Blason, toutes figures qui entrent
dans Técu , figures humaines, parties du corps humain ,
arbres, fleurs, fruits, etc.
MEURTRE , homicide provenant de coups donnés vo-
lontairement , mais sans préméditation. Il est puni des
travaux forcés à perpétuité, sauf le cas de légitime dé-
fense (V. ce mot), et celui d'adultère (V. ce mot) : en
toute autre circonstance où le fait d'excuse est prouvé, la
peine du meurtre est réduite à un emprisonnement de
1 à 5 ans. Indépendamment de l'action publique, les pa-
rents du défunt ont une action en dommages-intérêts
contre le meurtrier.
MEURTRIÈRES, ouvertures longues et étroites à l'ex-
térieur, larges et évasées à l'intérieur, percées dans les
murs des forteresses, et permettant aux défenseurs de
tirer avec avantage sur les assaillants. Il en existait dès
les temps les plus reculés, et elles sont encore en usage
de nos jours. Elles s'appelaient, au moyen &ge, archières
et arbalétrières, suivant qu'elles servaient aux archers
on aux arbalétriers.
MEURVIN, un des romans carloringiens (K. ce mot)»
Meurvin est le fils d'Ogier le Danois et de la fée Mor-
^ne. T! Ignore <%an baptême; poussé par les circonstances
au milieu des païens, il sort enfin de sa basse condition
à force de courage, et se mesure avec les chevalien
chrétiens, Huon de Bordeaux, Galicn Rhétore, O^cr, etc.
Charlemagne, étant venu en Palestine pour visiter le
tombeau du Christ, est fait prisonnier par Meurvin :
mais celui-ci , au moyen d'un avertissement céleste, est
instruit de sa naissance et de la religion dans laquelle il
est né; il donne une protection respectueuse à son illustre
captif. V. la Bibliothèque des romans, de février 1778.
MEXICAIN (Art). I. Architecture, — Le Mexique ef^t
un des pays où l'on trouve en plus grand nombre les
monuments de l'art primitif américain {V, ce mot) : le
plateau d'Anahuac en ofi're qui sont antérieurs à l'arrivée
des Aztëçiues dans le pays. Ce sont surtout des pyra-
mides, dites téocallis, et qui ont une destination reli-
gieuse. Il y en a deux d'inégale grandeur dans la vallée do
Mexico, à San-Juan de Teotihiuu:an : les indigènes les
nomment encore aujourd'hui les Maisons du Soleil et de
la Lune, à qui elles étaient consacrées. On montait jadis
au sommet de chacune d'elles par un grand escalier de
larges pierres de taille. Elles étaient surmontées de petits
autels, avec des coupoles en bois, et de statues colossales
couvertes de feuilles d'or. On y distinguait quatre étages,
subdivisés en petits gradins d un mètre de haut. Les ra-
vages du temps et la végétation des cactus et des agaves
en ont déçradé l'extérieur. Selon les traditions indiennes,
elles seraient creuses. Autour des deux grandes pyra-
mides, et aboutissant à leurs quatre faces, sont disposées
en allées plusieurs centaines de petits téONcallis, hauts de
9 à 10 met, et dédiés, dit-on, aux étoiles; on croit qu'ils
servirent de sépulture à des chefs de tribu. — Plus à l'E.,
au milieu d'une forêt voisine du golfe du Mexique,
s'élève la pyramide de Papantla, découverte vers la fin
du siècle dernier. De forme plus élancée que les précé-
dentes, et, comme elles, construite en pierres de taille
d'une coupe belle et régulière, elle eut six et peut-être
sept étages : elle est toute couverte de sculptures hiéro*
glyphiques, et présente une suite de petites niches dis-
posées symétriauement, et dont le nombre, selon M. de
Humboldt, serait une allusion aux 318 signes du calen-
drier des Toltèques. Elle a 18 met de hauteur, sur
25 de largeur à la base. Trois escaliers conduisent au
sommet — La pyramide de Cholula, dite Montagne
faite de main d'homme, ressemble de loin à une col-
line naturelle chargée d'une épaisse végétation. Elle est
à quatre étages, et faite de couches de briques alter-
nant avec des couches d'argile; ses côtés sont exacte-
ment orientés d'après les points cardinaux. La base a
450 met de côté ; la hauteur est de 56 met., comme à
la plus cpinde des pyramides de Teotihuacan. A l'inté-
rieur existaient des cavités considérables, servant à la
sépulture. Sur la^late-forme, qui présente une surface
de 4,200 met carrés, s'élevait, au temps des Aztèques,
un petit autel dédié au Dieu de l'air : les Espagnols l'ont
remplacé par une église sous l'invocation de Notre-Dame
de Los Remédies; elle est entourée de cyprès. — Le mo-
numen^« de Xochicalco, oue l'on appelle la Maison des
fleurs, appartient à l'arcnitecture militaire. C'est une
colline isolée, de 117 met. d'élévation, qui a reçu des
hommes une forme conique assez régulière, et qu'entoure
un large fossé. Sa plate-forme, de près de 9,000 mètr.
cxurrés, est défendue par un mur en pierres de taille. On
ne peut trop admirer le poli et la coupe de ces pierres, le
soin avec lequel elles ont été jointes, sans qu'on ait eu
recours au dment, et l'exécution des figures en relief
dont elles sont ornées.
Quant aux Aztèques, on ne peut Juger de leur archi-
tecture que par les récits des conquérants espagnols : la
nature des matériaux qu'ils employèrent expliquerait la
ruine de leurs constructions, lors même que les Espa-
gnols n'auraient pas détruit de fond en comole la plupart
des villes mexicaines. Les maisons des pauvres étaient
faites de roseaux ou de briques non cuites, et couvertes
d'une espèce de gazon sur lequel on fixait des feuilles
d'aloès taillées en forme de tuiles : elles n'avaient ou'un
appartement, où toute la famille vivait pêle-mêle. Dans
les villes, chaque maison avait un petit oratoire et une
salle de bain. Les habitations des grands étaient con-
struites en pierres rouges, poreuses, friables, légères,
réunies par un mortier de chaux ; elles se terminaient
par un toit plat et en forme de terrasse. On se servait
dos mêmes matériaux pour les palais et les temples.
II. Peinture, — Les Mexicains ont employé ia pein-
ture, tantôt pour représenter les dieux, les rois, les
grands hommes, les animaux et les plantes, tantôt dans
nn but purement topotrraphique ou chorographîq'ie, pour
MEI
au
MËI
donnor Timage d'une province, d'un littoral, d'une
ville, d'un fleuve, tantôt enfin comme moyen d'exprimer
symboliquement la pensée. Partout le dessin est d*une
extrême incorrection; les couleurs sont vives, tran-
chantes, posées de manière à établir les contrastes les
plus prononcés: les personnages ont généralement le
corps large, trapu et très-court, la tète d*une grosseur
énonne, les doigts des pieds fort longs. Les tôtes sont
dessinées de profil, mais Tœil est celui d*une figure do
face. C'est Tart dans sa première enfance. S*il y a des
peintures moins informes, elles sont postérieures à la
conquête espagnole. K Léon de Rosny, Collection d'at^
ciennes peintures meodcaines. Paria, 1855, in -4^ et
atlas in-folio.
On doit citer comme monuments de Tindustrieuse pa-
tience des Aztèçiues ces mosaïques en plumes qui exci-
tèrent Tadmiration des Espagnols, et qu'on estimait à un
prix fort élevé. Ces plumes recevaient mille formes di-
iTcrbcs, et s'unissaient si parfaitement au moyen d*un suc
gommeux, que tout le tableau semblait une couche de
pointure, vive, brillante, nuancée, et remarc|uable surtout
par la dégradation des teintes. La perfection de cet art
étonne, quand on sonae que la peinture proprement dite
fit »i peu de progrès, u. fut encore pratiqué sous la domi-
nation espagnole, et il ne s*est perdu qu'au xvui* siècle.
m. Sculpture, — La sculpture mexicaine participa de
la barbarie de la peinture : c'est le même système de
dessin. Les reliefs les moins imparfaits sont ceux qui dé-
corent les pyramides de Papantia et de Xochicalco. Com-
ment se fait-il que l'art soit demeuré si grossier chez un
peuple qui semblait s'en occuper avec intérêt, puisou*i1
multipliait les idoles, les statues, les pierres sculptées?
« Le caractère de la figure humaine, dit M. de Hum-
boldt, disparaissait sous le poids des vêtements, des cas-
ques à têtes d'animaux carnassiers, et des serpents oui
entortillaient le corps. Un respect religieux pour les
signes faisait que chaque idole avait son type individuel,
dont il n'était pas permis de s'écarter. C'est ainsi que le
culte perpétuait rincorrection des formes, et que le
peuple s'accoutumait à ces réunions de parties mons-
trueuses que l'on disposait cependant d'après des Idées
systématiques. L'astrologie, et la manière compliquée
de désigner graphiquement les divisions du temps, étaient
la principale cause de ces écarts d'ima^nation. Chaque
événement paraissait influencé à la fois par les hiéro-
f;lyphes qui présidaient au Jour, à la demi-décade, ou à
'année. De là l'idée d'accoupler des signes, et de créer
CCS êtres purement fantastiques que nous trouvons ré-
pétés tant de fois dans les monuments qui sont parvenus
Jusqu'à nous. » On a rapporté du Mexique un grand
nombre de vases en terre cuite, coloriés et vernis , qui
ont beaucoup d'analogie avec ceux des anciens Étrusques.
IV. Musique, -r Malgré le luxe et la civilisation rela-
lativcment avancée des Mexicains lorsque leur pays fut
conquis par les Espagnols, on ne trouva rien parmi eux
cfui fût digne du nom de musique. Leurs principaux
instruments étaient deux tambours, le huehuetl et le
teponaztli (V, ces mots). Ils avident aussi des trompes,
des conques marines, des flûtes qui rendaient un son
ai^, et un instrument dont se servaient les danseurs,
Vajacastli (V. ce mot),
Y. Numismatique, — Les Mexicains se servaient,
dans leurs échanges, de sacs de cacao, contenant chacun
'ii,000 grains, et de petits ballots de toile de coton. Ils
donnaient aussi, en guise de monnaie, de la poudre d'or
contenue dans des tuyaux de* plumes d'oiseaux aquati-
ques, tuyaux transparents pour qu'on pût reconnaître la
grosseur des grains d'or et leur qualité. Dans ouel-
aues provinces, la monnaie courante consistait en pièces
(le cui\Te auxquelles on avait donné la forme d'un T.
Aux environs de Tasco, on se servait de très-minces
pièces d*étain fondues. V, Alex. Lenoir, Antiquités mexi-
caines. Paris, 183G; Aglio, Antiquities of MeaHco, Lon-
dres, 1830.
MEXICAINE (Religion). Ce que nous savons de cette
religion nous a été transmis par les auteurs espagnols
du \\f siècle, qui écrivaient à une époque où les traces
de l'antique civilisation du Mexique n'étaient pas encore
complètement efIacée8.Les Mexicains croyaient à un Dieu
suprême, créateur et maître de l'univers, et au-dessous
duquel se rangeaient IS^grands dieux et plus de 200 de
moindre importance. Les plus vénérés étaient Huitzilo-
potchli, dieu de la guerre, et QuetzalcoatI, dieu de l'air,
oui avait enseigné aux hommes la culture, le travail
dos métaux et 1 art de gouverner. De nombreuses lé-
gi-ndes MT la vie des dieux rappelaient les métamor-
phoses racontées par les poètes greo» et latins tu si^
des habitants de rOlympe. D'autre» avaient une analogie
frappante avec les traditions bibliques : ainsi, les Meii-
cains connaissaient le dogme d'un péché originel, dont
on se purifiait par le baptême, et regardaient le genre
humain comme Jeté par punition sur U terre; le déluge
universel et l'histoire de la tour de Babel leur étaient
connus avec des circonstances semblables à celles qu'on
trouve dans la Bible. Leurs dogmes et leurs pratiques fe
rapprochaient même en certains points du christianisme:
dans une cérémonie pareille à celle de la Communion, les
prêtres distribuaient aux fidèles les fragments d'une iRia|;'}
de Dieu, que l'on mangeait comme sa chair même : ils
avaient une sorte de Confession et une absolution reli-
gieuse; enfin la croix figurait parmi les objets du culte.
Les Mexicains, considérant le séjour de l'homme sur la
terre comme une expiation, croyaient que tous les Cires
ont besoin d'être rachetéty et que la divii«ité s'apaise
avec le sang : de là l'usage dea acnfices humains, ii*
concevaient dans la vie future trois états qu on puurrrài
comparer au Paradis, au Purgatoire et à l'Enrcr de^
chrétiens : seulement leur Enfer n'avait pas de torturer
physiques, et le châtiment des damnés consistait en
peines morales, en remords. Ils croyaient que le monde
avait prouvé quatre catastrophes, où tout avait péri :
pour conjurer un cinquième catacivsme, ils célébraient,
vers le solstice d'hiver, qui concordait avec la fin de leur
année, une fête commémorative de la fin et du renou-
vellement du monde, et se livraient pendant cinq Jours à
des manifestations de désespoir; alors on brisait les pe-
tites images des dieux qui ornaient les maisons comme
les Lares des Romains, et on laissait mourir le feu sacré
3ui brûlait dans les temples : venaient ensuite i'i jours
e fête pour rendre grâce aux dieux de laisser vivre en-
core l'espèce humaine. — Les prêtres formaient un corps
nombreux, riche et puissant, et qui s'était réservé le
monopole de l'enseignement; ils étaient gouvernés par
deux grands prêtres électifs, qui marchaient immédiate-
ment après le chef de l'État. Il y avait des prétresses
investies de certaines fonctions, mais qui ne participaient
point aux sacrifices. V, Michel Chevalier, De la civilisa-
tion mexicaine avant Femand Cortex, dans la Revwi
de Deux Mondes de 1843.
MEXIQUE f Langues du). Ceux des habitants du Mexique
Siii forment la population blanche descendent des an-
ens conquérants espagnols, et parlent le castillan , mé-
langé toutefois de termes empruntés aux langues indi-
gnes. Les mulâtres et les nèsres se servent du même
idiome, avec certains mots qui, n'étant ni espagnols ni
indigènes, ne peuvent provenir une des langues afri-
caines apportées en Amérique par les premiers esclaves.
Les Mexicains aborigènes, au dire du Jésuite Clavijero,
qui vivait au milieu du xviii* siècle, ne parlaient pas
moins de 35 idiomes différents ; au commencement de
notre siècle, Alex, de Humbold en citait quinze, dont il
existe des Grammaires et des Dictionnaires.
La langue indigène la plus répandue est Vaxtèque ou
mexicain proprement dit. Cette langue, dont le centre
est le plateau d'Anahuac, est répandue non-seulement
dans le Mexique, mais encore au milieu des États de
l'Amérique centrale Jusqu'au lac de Nicaragua : toutefois,
son vaste domaine est coupé et divisé par celui d'autres
langues. Elle est désignée par le simple qualificatif de
namatl (clair, sonore). Pauvre en éléments phonétiques,
elle manque des articulations b, d, U 0* r, s,j^ II, Qn; en
revanche elle en possède qui reviennent à satiété, no-
tamment t, z, ch, tl, tz; l'articulation l ne ^ trouve
Jamais au commencement des mots. La répétition fré-
quente des syllabes tli, itl, tla, atl, donne de la mono-
tonie et de fa rudesse à la prononciation. L*accent pro-
sodique tombe sur la pénultième des polysyllabes. Ces
polysyllabes, noms propres ou autres, fort longs et fort
nombreux, sont formés par la réunion de plusieurs radi-
caux significatifs, qu'accompagnent quelquefois des par-
ticules explétives. Il n'est pas rare d'en trouver de 10 ou
13 syllabes : il parait cependant que de pareils mots ne
se trouvent pas dans la langue parlée, et que ce sont des
espèces de définitions par lesquelles les Mexicains tra-
duisaient, sur la demande des missionnaires chrétiens,
certaines idées pour lesquelles ils n'avalent Jamais eu
d'expressions particulières. En aztèque, il n'y a pas de
genres pour les objets inanimés; le pluriel des noms
d'objets inanimés se forme par l'addition du mot miec
(beaucoup); celui des noms d'êtres animés, ordinai-
rement par la répétition de la syllid)e initiale et la ter-
t minuison tin. Les quatre premiers noms de notiibN
MEX
1249
MEX
ferrent, mur leur combinaison aTOC ceux ({ni eitwtawnt
5, 10 et 15, k former tous les autres. Les augmentatif et
lei diminutifs sont très-nombreux. Le comparatif s'ex-
prime à l'aide de particules; Il nV a pas de termes saper-
iatirs. De tout substantif ou adjectif on peut fUre un
f«rbe; tout verbe peut à son tour se convertir en sub-
itaotif au moyen d*une flexion particulière. Les n^iports
ies noms s*expriment, non par des prépositions, mais par
des postpositiotts ou suffixes. Suivant le rang des per-
Kmnes à qui ou de qui Ton parle, la phrase s'allonge de
particules révârencieuses qu'on ijoute aux verbes, anx
tdrertws et aux noms. — La langue aztèque a subi,
depuis la découverte de rAménque, des modiflcaF-
tioos assex importantes. Dès le xvi* siècle, les Mexicains
ne comprenaient plus les hymnes antiques dont Ils ac-
oompagnaieDt leurs danses sacrées. Leur langue a reçu
de l'espagnol les prépositions de l'usage le plus ordinaiit).
r. Andres de Olmos, Arit et Vocabularium mêODÎeamtm,
Mexico, 1555, «n-l»; Akmso de Molina, Vocaôoîarw
mnekano^ 1555, et Art9 de la Ungua mexioana, 157t
Ant. del RIncon, Arte de la Ungua mexuuma, 1505,
in-^o; Pedro de Arenas, Vocabolario de Uu letiguai
outâ/ana y fiMancona» 1611, in-12; Die^ de Gualda
Oonnan, GramnuUica de la lengtM mexkana, 1643,
in-^; Horaclo Carochl, An copiosiss ma linguœ meoÂ-
cnm, 1645, in-4<* ; Âug. de Vetancourt, Arte de la lengua
mtxicana, 1673, ln-4**; Ant. Vasquez Gastelu, Arte de
\aUikqwime3ncemat Puebla, 1689, iD-4«; Manual Ferez,
krUéBla Ungua mexioana, Mexico, 1713 ; F^. de Avila,
ÂrU de la lengua meoneana, 1717, in-8'*; Carlos de
Turia Zenteno, ArU novUeima de la lengua mexicaina,
1753, in-4*; Aldama y Guevara, ArU de lalenguamexi*
«flao^ 1754, in-13; lanacio Paredes, Arte de la lengua
mtxKona, 1750; Rafaël Sondoval, ArU de la Ungua
flMxîcaiia,i810.
Si nous passons aux idiomes secondaires que Ton parie
au Mexique, nous trouvons d'abord le mcofté^iM, en
osage an N. de Tescuco. Il diffère de Taztèque par les
mots et par la grammaire, et ses racines paraissent le
nttacher aux langues du Yucatan. Le pluriel des noms
ij forme à l'idde de la terminaison cAïc on du préfixa
éam (beaueoup). On peut former des diminutifs en
ajoutani aux substantifs la terminaison «!• Les pronoms
l'emploient eomme aflflxes. n n'y a pas de verbe substan-
tif; les antra verbes ont deux conjuçûsons, différenciées
entre elles par le prétérit. F. Carlos de Tu>ia Zenteno,
Mvâa de la Ungua huasteca, Mexico, 1767, in-4**.
A 1*0. de Mexico, dans le Mechoacan , on parle I»
iasgoe tanuque, une des plus harmonieuses et des plus
aoQons de l'Amérique. Elle manque des articulations
fetl, ne commence Jamais un mot par les lettres b, d,
Hf t, r, et emploie souvent, dans le corps des mots, une
f eophonique. Les noms sont susceptibles d'être déclinés,
ai Ton considère comme désinences les suffixes ou post-
poaitioos qui expriment les rapports des mots. Les voix
dea verbes se forment par l'Intercalation de particules
daotleor radical. F. Angelo Sierra, Dictiùnnaire ta^-
[0<Viie, Mexico, 1607; Mathurin Gilbort, Grammaire de
la langue taraenue; Diego Basalenquc, GrammcUre ta-
naquey publiée par Nicolas de Quixas, Mexico, 1714.
La langue core ou cora est en usage dans la Nouvelle-
Biaca^, dans les prov. de Zacatecas et de Guadalajara.
Certains auteurs no veulent lui reconnaître, ainsi qu'au
tarasque, aucune affinité avec les autres idiomes du
Mexique, tandU que d'autres trouvent, dans ses racines
<t daas ses Aexions, des ressemblances avec l'aztèque.
Oa y remarque quatre formes de pronoms personnels,
KloQ les circonstances différentes dans lesquelles ils sont
^loves. Le r^me et le pronom font corps avec le ra-
I «Kil da verbe. Les articulations d, f, q manquent à cet
Idiome. V. José de Ortega, Vocabolarto en lengua cas-
! W/oao y eora, Mexico, 1732.
I £0 ae rapprochant du golfe de Californie, on rencontre
u lingoe tarahumara. Elle a quelques rapports de ra-
cines avec l'aztèque, auquel elle a emprunté aussi ses
noms de nombre; mais ses désinences lui sont propres*
kOn n'y connaît pour ainsi dire pas d'adjectifs, mais on
t ^t on fréquent emploi des participes. Les conjono*
vou se placent après les propositions secondaires, et les
^'"'^sitbos après leurs compléments. K. Agost de Roa,
*noirf tarahumara; Figueroa, Grammaire et Dic^
noMna tarahumara; Miguel Tellechoa, Grammattca
omara, Mexico, 1826.
Sur la côte mexicaine du çolfe de Californie , dans le
hf> de Sottorm, on se sert de la langue opata, dont il
niiteane Grammaire par Natal Lombarde (Âlexioo, 1702),
et, pins an N. eneore, de la langue pmmu GeHe-d, qol
a de nombreux rapports avec le tarahumara, n*a ni pré*
positions ni conjonctions t dana la coi^ugaison, les pro-'
noms seuls indiquent les personnes.
La langue othomi, parlée dans le Nouveau-Mexique V
est la plus répandue après l'aztèque. Elle manque de»
articulations f, l, r, i, mais possède beaucoup d'asplr»*-
tions gutturales et nasales oui n*ont pas d'analoguec
dans nos langues. Les Othomis ont une manière sèche
et brusque d'articuler les consonnes fc, p et t, qu'on w
comparée au bruit que font les singes en cassant det
noix, et qui a fait appeler ees consonnes détonantei.
Ils prononcent les voyelles avec une variété de tons ou
accents qui servent à distinguer une foule de mots
autrement homophones. Mids ce qui caractérise surtout
Tothomi parmi les langues environnantes, c'est le mono-
•vllabisme de ses mots : le nombre des mots de deux et
principalement de trois syllabes est très-restreint. U n'y
a ni genres grammaticaux ni flexions dans les noms. Un
même mot» suivant le sens général de ceux qui l'acconH
pagnent, est substantif ou verbe ; il peut aussi avoir à la
ois les sens d'adjectif et d'adverbe. Quand cela est né»
oessfiire pour la clarté de la phrase, on fait précéder le
nom de la particule na pour indiouer le substantif, et de
la particule sa pour indiquer l'adiectif \ on peut encore
distinguer le substantif et l'adjectif par la règle qui vent
que le qualificatif précède le terme qualifié. La conjn-
eaison se fait au moyen de particules indiquant les idées
de personne, de temps et de mode. La uistinction des
voix est inconnue. V, Luis de Neve y Molina, Réglât de
orthographia, dkeionario y arU M idioma othomi,
Mexico, 1767, ln-8^; Joaquim Lopez Yepes, Vocabulaire
otitomi, à la suite de son Catéchisme^ ibid., 1826, in-4^;
Naxera, De linguà Olhomitorum, dans les Transactione
de la Société philosophique améneame^ Philadelphie «
1835, in-8<*; Piccolomlni , Orommatica dMla lingua o<a-
mt,184i,in-8*.
Au S. de Mexico, dans la vallée de Toluca, on parle le
matUuingue, essentiellement différent de Taztèque, et
dont nous avons une Grammaire et un Vocabulaire pat
Andréa de Castro. — Le tlapanèqm n*est plus en usage
que dans l'Etat de Puebla.
La langue totonaque domine inr les oètes du golfe du
Mexique, dans l'État de Vera-Cruz. Les consonnes b, d,
f, k e!tv manquent à cette langue. Les cas y sont ex-
primés par une sorte d'article ; fa distinction des genres
Îr est Inconnue, et celle des nombres ne se fait que pour
es noms d'êtres animés. La coqjugaison est trèÂ-riche.
Les nrépositions précèdent leurs compléments. V. Andres
de Olmos, Grammatica et Lexicon linguarum mexi-
canoë, totonacm et huaxtecœ, Mexico, 1560, inr4^; Eug.
Romero, ArU para aprender las Uûgwu mexicana et
totonaca; Zambrano y Bonilla, ArU de la lengua toto*
naca, Puebla. 1752 ; Diaz de Anaya, Grammaire et Dio»
tionnaire de la langue totonaca.
Le mistèque a cours dans les États d'Oaxaca et de
ChiiHI». Il manque des articulations 6, f, p, r. Il a na
grand nombre de pronoms personnels différents, dont
l'emploi dépend de l'âge, du sexe et de la condition des
Interlocuteurs, ou de ce que l'objet d6nt on parle est
animé, inanimé ou mort. La né^Ltion varie aussi selon
les temps du verbe. La conjugaison est riche, mais elle
n*a pas de passif par flexion. Le verbe substantif y -est
tout régulier. 11 y a un grand nombre de verbes fréquen-
tatifs, y. A. de los Reyes, ArU de la lengua mixteca^
Mexico, 1593, in-4*; Francisco de Alvarado, VocabulaHo
mixleco, — A la môme r^on appartiennent : le 2a po-
tèque, dont il existe des Dictionnaires par Juan de Cor>
dova (Mexico , 1578) , par Christoforo Aquaro, et une
Grammsire par Antonio del Pozo ; le mixe, dont Agostino
Quintana a composé la Grammaire et le Dictionnaire;
le popolouque^ dont on a aussi une Grammaire et un
Dictionnaire par Toral, et qu*il ne faut pas confondre
avec un idiome de même nom, parlé au Guatemala dans
l'État de San-Salvador.
Dans la presqu'île du Yucatan domine la langue maya
ou yucatèque, qui fut aussi parlée dans le N. du Guaté-i
mala et dans le Honduras, ainsi qu'à Cuba et à Ilafti.
Cette langue est sans rapporta apparents avec l'aztèque,
mais elle a des analogies avec le nuaStèaue et l'othomi.
Ainsi, elle possède, comme ce dernier idiome, un grand
nombre de monosyllabes , et la faculté de donner à un
même mot différentes significations en variant le ton on
l'accent. On y trouve certaines consonnes gutturales et
très-rudes, que les étrangers prononcent difficilement.
Le mai'a n'a pas de valeurs phonéUqnes gui correspon-
79
MEX
1256
MIC
(fftttt % nw toUnw d, f, gj, q,r,9ei v, Dmb cette: lan-
9M, 1» BtAetantîf et Taiyeotir iont indécUnablet. Les
fMiree ne sont employa que pour exprimer le sexe des
personnes; ils s*ezpnment au moyen d'un préfixe, qui
1^*est Mire chose que le pronom de la 3* personne. Cest
«1 eBphnrant de la même maniàre le pronom du pluriel,
•B' bien la terminaison o6, que Ton mdimie le nombre
Cmiel. Le suffixe U, employé avec les sulstanlifs, Joue
iMe de Tartlcle défini \ employé aTOc les a^iectin, il
«I ferme le comparatif de supériorité. On distingue en
wuM 4 coqjugsisons t Tnne sert pour les verbes neutres
et ne Yeii>e8 passifs, les 3 trois antres se partagent tous
les Yeii>es actifs. U existe, pour certains temps composés,
«n Terbe auxiliaire qui, diaprés certaines règles, tantM
précède et tantM suit le psrtkipe. On Adt un firéquent
niape d'élisions et de syncopes, au milieu desquelles les
racinea des mots sont souvent diflkiles à retrouver.
F. Gabriel de San-Bonaventura, ArU del idioma maya,
1660 1 Beltran, Artê dsl idioma mayo rmUêcido a iuc»
emctas réglât, y LBoneon yucatêco, 1746; Vr. de Wal*
deok, VoyagB piUonsiiUê et arMoihgiquê dans la jnV'
vhice d'Yucatan, Paris, 1838; Normann, Bambles in
Yucakm, New-York, 1848, in-8«.
Les indigènes du Guatemala perlent plusieurs idiomes,
qui ont plus ou moins de rapports avec ceux du Mexique
proprement dit. Tsit sont : le pipU, en usage sur la cote
iu Grand Océan , et qa*on regûrde comme Tastèque cor*
rompu par lintroduction de mots étrangers; le quit^,
Îil s'étendait autrefois dans la province mexicaine
Oaxaea, et limité- ai^nThui à TEtat de Guatemala;
le kacfwjuel, parlé dans le même État, enseigné à TUni-
versité de Guatemala, et dont nous avons une Gram-
maire par José Florès (Guatemala, 1753); le pooomoii
ou poconehi, en usage oepuis la flnontière mexicaine au
N. Jusqu'à l'État de San-Salvador au S., et que Ton re-
carde, ainsi que le quiche et le kaehiquel, comme dérivé
du maya; le mam, répandu dans l'État de Vera-Paz; le
ehorU, parlé à Zacapa et Jusqu'à Tandenne ville de Go-
pan à l'B. ; le iinca, parié le long dn Grand Océan, an S.
du Nouveau-Guatemala.
MixiQDB (Littérature du). De tous les peuples du
Mexique, les Aztèques sont les seuls qui possédèrent une
littérature. Avant la conquête espagnole, et lorsqu'ils
Ignoraient encore l'écriture, ils conservaient et trans-
mettaient graphiquement leurs connaissances ou le sou-
venir des événements à Taide de nœuds fkits à des
cordons de différentes couleurs. Plus tard, vers le vi« on
le vu* siècle de notre ère, ils employèrent des signes
hiéroglyphiques, des représentations peintes ou sculp-
tées. Les premiers voyageurs qui ont visité le Mexique
depuis l'expédition de Fernand Cortez parlent de livres
mexicains très-variés, d'annales historiques, de rituels
ncerdotaux, de calendriers, d'écrits astrologiques et géo-
graphiques, etc. Le fanatisme espagnol fit la guerre à ces
monuments d'une drilisation païenne, qui rarent pres-
que tous détruits par Juan de Zumarrasa, premier ardie-
tèqne de Mexico. On établit, il est vrai, dans cette ville,
en 1.553, une chaire pour l'interprétation des hiérodyphes
mexicains ; mal^ dièa le commencement du siède sui-
vant, cette sdence avait péri, et les indigènes eux-mêmes
étaient hors d'état de comprendre et d'expliquer leurs
anciens caractères d'écriture. De nos Jours, le déchiffre-
ment des hiéroglyphes mexicains a été repris avec ardeur
par Alex, de Humnoldt et par Prescott : ces savants pen-
sent que les Aztèques ont surtout Dût usage de caractères
ilguratifs , mais que cependant leurs hiéroglyphes ,
comme ceux de nmdenne Egypte (K. HiÉaooLVPHBs),
■ont assez souvent miboliques, et même, s'il s'agit de
transcrire des noms de personnes ou de lieux, véritable-
ment phonétiques. Dans ce dernier cas, ils se lisent, en
général, de droite à gMiche et de bas en haut. Quant
aux hiéroglyphea non phonétiques, il n'y a pas de règle
^e; la manière dont sont tournées les figures est le
meilleur guide à suivre pour la lecture, car les lignes
d'écriture font des circuits très-capridenx. Dn des ma-
nuscrits mexicains de la Bibliothèque royale de Dresde
et im antre de la Bibliothèque impériale de Paris pré-
aeoient on type tout différent des antres : les caractères,
placés régulièrement à côté les uns des autres, et inter-
rompus seulement d'espace en espace par des sortes de
fisnettes, sont regardés comme tout à fisit convention-
nels et phonétiques.
Les grands dépdts bibliographiques de l'Europe, tels
ane l'Escurial, le Vatican, les bibliothèques de Bologne,
de Dresde, d'Oxford, de Paris, possèdent un certain
nombre de maaoscrits mexicains. On voit, entre autres,
•à 1» 'Bibliothèque impériale, un rituel, nn Uvre d'astro-
lode, une histoire du Mexique allant de 1197 à 1561, et,
à la Bibliothèque du Corps l^slatif , un calendrier. La
Bibliothèque de l'Université de Blexico est moins riche
qu'on ne pourrait le supposer : elle possède moins d'ori-
ginaux que de copies, et l'authenticité de ces copies ne
saurait même être garantie. Les manuscrits mexicains
sont en peau de cof, en tissus de coton, ou en papier
fabriqué avec les fibres de l'agave; dans ce dernier cas,
ils forment des bandes de 20 a 25 mêL de longueur, sur
une largeur de 25 à 50 centimètrea, lesquelles se re-
plient un œrtain nombre de fois sur elles-mêmes,
conune nos feuilles routières et autres cartes géogra-
phioues.
L'autsur espagnol Claviiero fait un pompeux éloge dea
talents orsloiies et du sinie poétique des Aztèques. On
accoutumait de bonne heure les jeunes gens destinés
aux ambassades à débiter de longues haranguée sur les
matières politiques. Comcie les procès se Jugeaient som-
mairement et sur pièces, l'art de bien parier était inutile
aux plaideurs. Les poêles chantaient lea merveilles des
deux et de la terre, les devoirs des hommes, la gloire
des rois et des vainoueurs. Il existait des représentations
scéniques du genre le plus grossier, où l'on voyait prin-
cipalement des aveugles se heurter contre des sourds,
des boiteux ae traîner sur les mains, des bossus se rendre
encore plus contrefaits, des nains marcher sur la pointe
des pieds ; on bien les acteurs se travestissaient en ani-
maux de toutes sortes. Ce n'étaient que misérables farces,
où le dialogue devait être de la pire espèce.
Le plus ancien livre mexicain dont on fasse mention
a pour titre : Teamoœtli^ et fut rédigé chez les Tdtèqnea,
vers l'an 660, par l'astrologue Huematain : c'est une his-
toire du del et de la terre, et un rédt des premières
migrations des peuples. Mais l'auteur le plus célèbre est
NesahualeoJotl , roi de Tezcuco au xv* siècle, aumoaimé
psr les EqMgnols le Selon de l'Amérique : il rédigea des
lois, dont on connaît encore la teneur, fonda nne aorls
d'Académie sous le titre de Conseil de musioue, et com-
posa des hymnes religieux et des élégies , dont le texte
primitif parait ne plus exister, mais dont nous avons une
traduction espagnole. Au xvi* siède, aprèa la ooncfaête
de Fernand Gortez, on peut mentionner parmi lea écri-
vains mexicains Domingo Ghimalpain , Fernando de Alva-
rado Tezozomoc, Gristoval del Castillo, et Zapaln ; l'his-
toire du pays fut alors partieullèrement étudiée. Puis,
l'actirité littéraire s'affaiblit, et l'on a fini par ne plus
écrire en aztèque que des livres d'instruction religieuse.
MEZAIL, anden masque de fer, qu'on ijoutait au cas-
que, et au milieu duquel faissit saillie un appendice
conique et percé de trous, lequel servait à loger le nei
et à établir le passage de l'air pour la respiradon. En
face de chaque obU étadt pratiquée une wiê ou fente hori-
zontale. Le mezail s'ouvrait soit de cêté, soit de bas en
haut, au moyen de charnières posées sur les faeea la^
raies du casque; on pouvait ausai le déposer, en <Mant la
fiche des charnières sur lesquelles 11 Jousit. B.
MEZZANINE (de l'italien mexio, milieu), en
d'Architecture, petit étage pratiqué entre deux pins gran<
— On nomme fenêtre en meisanin» toute fenêtre carr
ou plus large que haute, pratiquée dans un attiqne
dans un entre-sol.
MEZZO- SOPRANO. V. Soprano.
MEZZO- TINTE. V. GaAvmiB.
MI , note de musique, le 3* degré de notre gamme
turelle d'trf nufo^f « ^ ^^ 5* de^ré ou la dominante
rdatif mineur de cette gamme. Mi est auad le nom
la chanterelle du violon et de la guitare.
MIAfifi ou ILLINOIS (Idiome), un des idiomes algoi
quins. n distingue par inflexion les substantifs plari<
des singuliers. Il n'a pas de verbe substantif, mais pc
aède une conjugaison particulière pour les verbes pessil
On V trouve le son du jota espagnol, du th an^ais, et
Vh fortement aspirée des Arabes.
MICA , Jeu des anciens Romains. F. notre
de Biographie et dBistoire.
MICHAU (Code). F. Maroxac, dans notre Dicti
naire de Biographie et d^ Histoire.
MICHEL (MoNT-S^). V. MoNT-Sanrr-MiCHKL.
MICROCOSME, du grec micrùs, petit, et eosn
monde. Selon la plupart dea andennea écoles de phllf
iophie, ce petit monde était l'homme, ainsi nommé p|
opposition au grand mouds ou mncroco»M ( de nuK
grand) , c-à-d. à la terre, regardée alors comme on
mal composé d'un corps et d'une âme. On trouve
croyance chez Pythagore, chez Platon dans Técole
termes i
niL
1251
MIL
dMoe. EUe lomba ansoite dans une brtncbe du my»-
tidune qui n*était que de la philosophie hermétique «
eouuneon le voit dana les écnts de Jaoob Bœhm, de
Robert Fludd, de Van Helmont, etc. A leurs yeux, rhomme
était no résomi complet de la créatioa, un microcomê;
il 7 iTiit une corrélation parfaite entre les organes du
oorpi baaudn et les métaux, entre les métaux et les prin-
dpileB conslellatioDs« entre la vie humaine et la vie du
monde. Comme conséquence^ on crut voir une influence
réciproque entre le grand et le petit monde, entre la terre
et rhomme. Le premier décidât en quelque sorte de la
tedoés de chacun, et l'homme à son tour avait un pou-
TOff surnaturel sur l'univers. Au fond de cette folle
doctrine se trouraient Tastrologie et le panthéisme mys-
tique. R.
MICROLOGtlE (da grec mtcrof, petit, et hgos, dis-
oout), nom qu'à réfxwue de la Renaissance on donna
aox éradits qui, dans rinterprétation grammaticale des
lodens aatem, attachaient une grande importance à de
minimes détails.
HIDSHIPBIAN (de l'anglais midship, milieu d'un vais-
ieaa,et mon, homme) , nom qu'on donne, dans la marine
anglaise, aux aspirants employés à bord des navires de
ffierre, parce que leur place est au milieu du pont du
Marnent. A bord d'un vaisseau de ligne de 120 canons,
00 compte ordinairement 24 mtdshipmen.
MIGNONNE. V. GASAcrkan n'oipaiiiERiB.
MIGRATION DES AlfES. V. MAtempstcosb.
MILâDY, et plus exactement my/ady, titre au'on donne,
en Angleterre, à la femme d'un lord ou d'un iMtfonnet, en
hd pariant ou en parlant d'elle.
MILAN (D6me de), église cathédrale, située à peu
près an centre de la ville, et l'une des plus vastes et des
plus wmptoensea d'Italie. Cest un composé d'architec-
tue gothique et aarrasine, et de quelques parties d'ar-
chitecture romaine. La façade présente un grand mur,
terminé en ferme triangnlaira, comme les deux rampants
d*on immense toit« A oiaperonné de merlons. Six demi-
tours gothiques qoadrangulaires la divisent perpendicu-
lafaeaient en 5 parties i chaque' tour finit à la hauteur du
iimpaot, et porte une flèche couronnée par une statue
cakMBsle. Tontea oea flèchea sont d'tele hauteur, de sorte
qoe leora sommets suivent eo l'air ut formé tombante de
cbaqae rampant. Une porte d'architecture romaine s'ou-
ne dans l» intervalles des tours. Chacune est surmontée
d'one grande fenêtre avec balcon, et au-dessus de cette
feottre il y a une ou deux niches. Le balcon de la porte
da ndliea a, sur ses angleai 2 statues colossales de l'An-
ciei et do Nouveau Testament. La base des tours est
oraée de 47 bea-reliefs très-beaux, et 250 statues sont
reparties dans toote cette façade. Le monument est flan-
qiié, dans tout ioa pourtour, de pilastres saillants, aev-
TtBtde oontre-lbrtB, et terminés aosai en aiguilles portant
da ttataes : U y a littéralement une forêt d'aiguilles.
L'abside paase pour un modèle d'architecture gouique.
«- Sw le miUea de l'égUae rème nne vaste plate-lionne,
as centre de laquelle eat nne lanterne gothique, dont la
tov eat accotée de 3 petits contre-forts en pilastres oui,
^ la aai^aance du toit, se terminent en aiguilles : 4 de
ces aiguilles sont coonnnées d'une statue d'ange en
braoïe, et les autres, d'une étoile de même métal. Du
nnbie pointa a'élnnce, à 20 mètres de la terrasse et à
106 do soi, une aiguille plus forte, oui domine toutes les
>Btiea, et sujpporte U statue de ta Sainte Vieiige en
; Inue doré. On peut arriver Jusqu'à ses pieds par di-
vers escaliers, qui forment 314 marches à partir au pavé
& régKae.
Llniérieor du Dôme- de Blilan est en croix latine, à 5
)c&i répondant à chacune des 5 portes. Les nefs sont
mies Dsr 82 piliera octogones, hauts de 24",30, de
plus de 7 mètres de drconférenoe, et accotés chacun de
coloo nettes. Le chapiteau se compose de 8 niches en
*^îes, avec statues, à l'aplomb des intervalles des co-
; 1 onn. Ce chapiteau, composé par Pllippino de Hodèoe,
^ unique en son genre ; Il mesure près de 6 met. de
.bauteer, et ses statues sont plus grandes que nature. Tout
.ttU est en harmonie avec les proportions de cetintérieur t
b nef centrale a 148 met. de longueur, sur 40 de hauteur,
du pavé à la voûte, et 04 met. Jusqu'à la lanterne exclosi-
Ivement. La largeur des 5 nefa réunies égale 52 met , et, à
croix, 87 met. De nombreuses nervures peintescouvrent
parois de la vo4le centrale. On volt dans le pourtour
ia lanterne les statues des 4 Docteurs de l'Église, et
I» de 60 Saints. — Le pavé est composé de marbres
<iiflérentes couleurs incrustés en forme d'arabesques.
7 remarque, à quelque distance de la porte centrale,
une méridienne tracée en 1780 par lee astronomes de
Bréra. Au-dessus dé cette porte règne un balcon , repo-
sant sur 2 colonnes colossales de çranit rose; il est orné
de 2 grandes statues , celle de S^ Ambroiee par Monti ,
et celle de S^ Gharlea Borromée par Marchesl. A gauc ho
en entrant dans le Dôme sont les fonts baptismaux , co m*
S osés d'une belle cuve de porphyre, qui provient, dit- on,
es thermes de Haximlen Hercule. Quelques monuments
funéraires méritent aussi d'être remarqua : ceux des
cardinaux Blarino Caraccîolo, Cajétan et Frédéric Borro-
mée, des archevèoues Othon et Jean Visconti, et celui de
Jean-Jacques de Médiris, frère de Pie IV, dont le dessin
a été attribué à Blichel-Ange. Deux chalrea en bronze
doré, couvertes de bas-reliefs, entourent deux des 4 piliers
qui , à l'entrée du chœur, portent la lanterne ou coupole :
elles reposent sur des cariatides colossales , modelées par
Brambilla, coulées en bronze par Busca, et représentant
les quatre Évangélistes et les quatre Docteurs de la foL
On doit signaler encore les bas-reliefs, au nombre de 17,
de la partie supérieure du mur d^enceinte du chœur, et,
au milieu de la chapelle du bras gauche de la croix , un
très-beau candéhibre, dit Arbre de la Vierge, à sept
branches, en bronxe doré, formé de rinceaux gothiques
entremêlés de statuet^ ; fabriqué au xm* siècle, il a été
posé en 1502 sur un piédestal de marbre de Sienne, cou-
vert de fines sculptures. Derrière le chœur est une statue
colossale de S^ Barthélemi écorché, par Marco Agrati;
quel qu'en soit le mérite comme imitation anatomique,
c'est une œuvre qui sied nuil en ce lieu. Il y a deux sar
cristies, une au midi et une au nord : celle du midi ren-
ferme le Trésor, contenant entre autres richesses : un ca-
lice en ivoire, du xiv* siècle; deux diptyques byzantins;
un évanfféliaire du xi* siècle, avec une couverture en métal
ornée d'émaux; deux statues en argent de S^ Ambroise
et de S* Charles, données par la ville en 1098, et pesant,
l'une 2,000 onces, l'autre 1700; une statue du Christ à
la colonne, par Solari, dit le Gobbo; une paix en or,
d'une ciselure exquise; im devant d'autel en argent,
donné en 1835 par le comte Tavema. — En fhce de cha-
que sacristie est une grille de fer, conduisant au Scurclo^
chapelle souterraine éclairée par une ouverture carrée ,
ménagée dans la voûte, en avant du chœur. Là repose,
dans une châsse de vermeil enrichie de pierreries, le
corps de S^ Charles Borromée, revêtu de ses habits pon-
tificaux, et qu'on peut apercevoir à travers de riches
panneaux transparents en cristal. La voûte est ornée de
bas-reliefs d'argent.
Le Dûme de Blilan est tout en marbre, sans une seule
pièoe de bois. C'est un monument qui, malgré toutes ses
magnificences, est néanmoins plus extraordinaire que
beau. Le plan est une masse qui ressemble assez k
S*-Pierre de Rome, bien <pe beaucoup moins grand ; le
mélange de partiea d'architecture romaine avec d'autres
^yles, et surtout le gothioue, n'est pas heureux; le go-
thique manque de naïveté, et est à la fois recherché et
vague. On oompte 1023 statues dans toutes les parties de
l'édifloe, et il en reste encore 550 à ffdre. — La première
Jierre die ce magnifique monument fut posée par le duc
ean-Galéaa Visconti , le 15 mars 1380 : les carrières de
Candoglia, sur la route du Slmplon, au delà du lac Bfa-
leur, fournirent tous les matériaux; c'est un marbre
blanc très-fin, auquel le temps a donné une couleur légè-
rement Jaunâtre. Le duc avait fait venir, dit-on, un ar-
chitecte allemand, Henri Arler, de Gmûnd, appelé par
les Italiens GamoUa, pour élever l'édifice d'après les
Ï principes de l'art ogival , peu connus et peu goûtés en
taUe; quelques auteurs ont attribué, au contraire, les
premiers travaux à Marc de Campiglione, près de Lugane,
a Bonino de Gamnione, à Simon d'Oraenigo, à Guarnerio
de Sirtcnl • à Amnroiae Ponzone. Des artistes français ar-
rivèrent bientôt, Philippe Bonaventure de Paris en 1389,
Jean de Qmmpmousseux et Jean Ifignot, tous deux de
Normandie, en 1300. Beaucoup d'Allemands prirent part
à cette namte œuvre : Jean de Fernach, Jean de Funm-
bourg, Pierre de ntmz, Hanz Marcbestein, Ulric Fusin-
8 en on Elnsingen d'Ulin. En 1480 le due Jean-Galéas
forsa envoya chercher Hammerer, nutUre maçon de la
cathédrale de Strasbourg, pour l'érection de la tour cen-
trale de Milan. Les travaux avancèrent lentement, faute
de ressources. On ne sait si les premiers architectes
avaient dressé un plan pour la façade principale; mais,
en 1560, l'archevêque S^ Charles Borromée chargea Pel-
legrini, dit Ubaldi, de donner les dessins nécessaires
pour ériger cette façade. La composition de PellegrinI ,
conçue £ms le goût de la Renaissance, est en désaccord
avec le reste du monument; d'ailleurs, r&rtlste ayant
MIL
1252
MIL
Hé appelé en Espagne pour pdndrQ TEscarial, Fachère-
ment de la façade fut confié à des mains inhabiles. Ce-
lani et Ricchini, exagérant encore la manière de Pelle-
grini, couvrirent d'ornements superflus tous les membres
d'architecture. La façade de la cathédrale de Milan fut
Tîvement critiquée au xvii* et au xvni* siècle, et Ton
finit par admettre que le style ogival devait remplacer la
décoration moderne : des projets furent présentés par
Gario Buzzi en 1635, puUi par François Castelli, mais en
ne les exécuta point. Enfin, en 1790, il fut décidé que,
tOQt en conservant les ornements de Pellegrini, on don-
nerait à la façade un revêtement gothique. Napoléon I*'
consacra trois millions et demi aux travaux du Dôme, que
Ton ne peut pas encore considérer comme achevés au-
jourd'hui , après 474 ans de travaux, souvent interrom-
pus. — V, FYancbetti , Storia e Descrizione del Dttomo
ai MUano, 1821, in-4o; Rupp et Bramati, Descrizione
êtoricO'CrUica del Dwmo ât MUano, 1823; Gioachino
d'Adda, la Metropolitana di MUano, 1823, in-fol.; E. Ser-
gent, /• Dame de MUan, texte italien et 100 planches. B.
MiLAii (Église S^-Ambroisb, à)* blette église, dont la
fondation remonte à Tannée 387, et où se fit, pendant
un certain temps, le couronnement des rois dltalie, fut
agrandie au ix* siècle et augmentée de l'atrium en brique»
qui la précède. Elle présente trois nefs d'architecture ro-
mane, sur lesquelles des voûtes ogivales furent ajoutées
en 1305. On entre par trois portes en bois de cyprès,
travail du ix* siècle ; c'est de là que S* Ambroise repoussa
l'empereur Théodose après le massacre de Thessalonique.
Les colonnes de l'inténeur sont revêtues de stuc imitant
le marbre blanc. La chaire en marbre, portée par huit
arceaux, et assez longue pour que l'orateur puisse y mar^
cher, est un monument du xn* siècle, composé de frag-
ments plus anciens ; sur la face postérieure on a sculpté
nne sorte de Cène ou un repas des agapes; sous cette
chaire est un tombeau, regardé à tort comme celui de
Sdlicon. Lepoi^tod'oro ou devant du maître-autel, tout en
or, est un merveilieux travail d'orfèvrerie du ix* siècle.
On remarque enfin le trône en marbre des premiers
évèques de Milan, une antlcfue peinture à fresque dans
l'abside, où l'on voit S^ Ambroise assistant en esprit aux
funérailles de S^ Martin de Tours, et, dans la nei du mi-
lieu, une colonne de porphyre portant un serpent do
bronze, celui, selon une tradition populaire, que Moïse
éleva au milieu du désert. B.
MILANAIS (Dialecte). V. Loubard.
MILANAISE (École), une des écoles italiennes de pein-
ture qne l'on range sous le nom commun d* École lom-
barde. Elle dut à l'oridne participer de l'école floren-
tine, puisque l'on voit Giotto travailler à Blilan en 1335,
et que l'on cite parmi les disciples de ce peintre un Jean
de Milan et un Pierre de Novare. Toutefois, Yincenzio
Foppa, qui florissait dans les premières années d»
XV* siècle, est généralement considéré comme le fonda-
teur de la première école milanaise. On cite, après lui,
Jacques Morazzone. La perspective était alors la qualité
distinctive de l'école. Puis, Bramante, l'architecte-peintre,
introduisit à Milan le style de Mantegna. Bramantino,
ion élève, et Ambrogio Borgognone, eurent plus de grftce
et d'expression. — Une nouvelle époque commence avec
Léonard de Vinci, appelé de Florence, vers la fin du
XV* sièclo, pour diriger l'Académie de dessin et de pein-
ture à Milan. Au nombre de ses disciples figurent Bel-
traffio, Gesare da Sesto, Marco d'Oggione, F. Meizi, André
Solari, et peut-être Bemardîno Luini, qui eut un faire
plus facile et un moelleux plus parfait. L'ancienne école,
{profitant des progrès opérés par la nouvelle, ne se con-
bndit pas avec elle, et lui opposa Gaudenzio Ferrari, co-
loriste plus habile que ne le sont d'ordinaire les Milanais.
— Une autre Académie des beaux-arts ayant été fondée
en 1009 par le cardinal Frédéric Borromée, les trois frères
Procaccini en prirent la direction, et professèrent des
{principes évidemment puisés dans les œuvres du Corrége :
'artiste le plus remarquable de cette nouvelle période
fût Daniel Crespl, après lequel, comme dans les autres
aarties de l'Italie, les arts dégénérèrent promptement. Le
lilanais n'a plus produit qu'à la fin du siècle dernier un
artiste de talent, Appiani.
MILÉSIENNES ou MILÊSIAQUES (Fables). V, Conte.
BIILICE. y. ce.mot dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire,
MILITAIRE (Administration). V. Intendance, Advi-
insTRATiON (Conseil, — Officiers d'), et, dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire, le mot Ministères,
p. 1803 et suivantes.
MiuTAULE (Architecture)^ art de fortifier les places de
guerre. V. FoanncATioN, Foax, FcaTUESsa, GAin mu-
TAIRS.
MiLrrAiRB (Art ). Les expressions art mâtfatraet scMnci
mUiUùre sont souvent emplovées l'une pour l'autre, et
c'est à tort : la science est a l'art ce qu'en général 1&
théorie est à la pratique. La science militaire est la con-
naissance approfondie de tout ce qui se rapporte au mé-
tier des armes, histoire militaire des nations anciennes
et modernes, organisation, administration, armement,
comptabilité , police et discipline des armées. Ëbaucbée
dans les écoles militaires, cette connaissance ne peot se
compléter qu'à la guerre, dans l'exercice des grades im-
portants de la hiérarchie. Il ne faut pas, sans doute, sé-
parer de l'art militaire la connaissance du service, celle
des manœuvres de toutes les armes, des lois et règle-
ments militaires : mais cet art est , avant tout, nne mé-
thode habile de faire avec succès la guerre suivant cer*
taines règles, quelquefois même contre toutes les règles,
pourvu que ce ne soit point au hasard. Il implique la
connaissance de la fortification , de la tactiqw et de la
stratégie ( V. ces mots)^ et auss un sénie qui a ses inspi-
rations soudaines, une conception Instantanée des com-
binaisons les plus profondes, la simultanéité de la pensée
et de l'action. — Parmi les écrivains militaires de Tao-
cienne Grèce, on a toujours consulté avec fruit Thucy-
dide, Xénoçhon , Polvbe , Arrien et Êlien. Les Romans
nous ont laissé les Commmtaires de César, le traité de
Modestus De re mUitari, et les Stratagèmes de Frontin.
Végèce fut le premier qui rédigea un traité <fogmatiqu9
tnr la matière; son Epitonu institvtionum rei mUUaris
est un extrait de divers auteurs qui avaient écrit sur Van
militaire. Chez les modernes, les ouvrages fondamentaui
sont ceux de Feuquière, de Vauban, de GOhom, du gran<i
Frédéric, du chevalier de Folard, de Guischardt, de Gai-
bert. V, D'Ecrammerville, Essai historique sur VariJlf
la guerre, 1780-90; Carrion-Nisas, Histoire générale dt
l'art mUitaire, 1823; De La Barre du Parcq, Histoire dd
l'art de la guerre avant l'usage de la poudr», 1860, in-ii^.
MiuTAiRB r Discipline). V. Discipune.
MiLiTAïaE (École), monument de Paris. F. notre /?ic-
tionnaire de Biographie et ^Histoire.
MiuTAiRB (Éloquence^, titre sous lequel on comprend
les harangues et allocutions adressées a des troupes )>ar
leurs chefs. L'usage d'adresser la parole aux armées pour
exciter ou soutenir leur valeur était trèa-fréquent chez
les Anciens. Tous les discours qu'on trouve dans les his-
toriens n'ont sans doute pas été prononcés^ et l'on j re-
connaît le talent particulier de chaque auteur : mais on
a dû s'attacher à les rendre vraisemblables, c.-àr<i. con-
formes au caractère des personnages dans la bouche des-
oraels ils sont placés. Il n'est pas dans les mœurs mo-
(femes de faire avant le combat une harangue ; quelques
mots ardents et vifs sont tout ce que l'histoire a recaeillL
A Coutras, Henri de Navarre dit an prince de Condé et
au comte de Soissons, qui commandaient sous lui : • Je
ne vous dirai rien autre chose, sinon que yous êtes de la
maison de Bourbon, et, vive Dieu! }e voua montreni
que je suis votre aîné. » A Ivij, il adreÎMait à ses troupes
ces paroles mémorables: «Mes compagnons, s! vous
courez aujourd'hui ma fortune, je cours aussi la vôtre.
Je veux vaincre ou mourir avec vous. Gardes bien vos
rangs. Je vous prie; si la chaleur du combat vous'ies
lait quitter, pensez aussitôt au ralliement, c'est le gain
de la bataille. Et si vous perdez vos enseignes, comettei
et guidons, ne perdez point de vue mon panache blanc,
vous le trouverez toujours au chemin de l'honneur et dt
la victoire. » Le grand Condé ne dit que ces mots avant
la bataille de Lens : « Amis, souvenez-vous de Rocroi,
deFribourp et de Nordlineue. » Pendant les guerres de
la Révolution , la plupart des chefs d'armée eurent plu
de courage cpie de littérature, et surent mieux vaincre
que parler : on ne parlait même pas alors, on chantait, et
IskMarsetilaise gagna plus de batailles que les plus beaaij
discours. L'éloquence militaire ne consiste ac^ourd'bai
3u'en proclamations et en ordres du jour, qu'on répand
ans toute l'armée ; mais, sous cette forme, elle a ét^
élevée à une hauteur Jusqu'alors inconnue par le gâoéml
Bonaparte, dont les proclamations, pleines de verve e^
d'élan, respirent la confiance d'un vainqueur et d'an
maître. Le secret de cette éloquence n'est point perdue
on en trouve le reflet dans la proclamation de NspH
(éon III à l'armée dltalie en 1850.y. Ordrb dd joea. B.
MiuTAïas (Exécution). K. Execution.
MiuTAiRB (Génie). V. Gâm.
MiuTAiRB (Justice ). LMnstitatlon d'une Justice spéda)^
' pour l'armée n'est pas une idée propre à notre pajrs et |
MIL
1253
MIL
notre temps; partout et toi^oun on a reconna que l'ar-
■née devait avoir ses tribunaux particuliers, que les crimes
et les délits militaires devaient être soumis à des prin-
cipes exceptionnels de répression, et que les formes ordi-
naires de la procédure ne pouvaient leur être appliquées.
L'armée doit avoir ses tribunaux particuliers, parce
qu'elle vit sous Tempire de devoirs et de règles à part,
•t qu'il est naturel (|[ue ceux-là qui Jugent soient les
bemmes qui les connaissent et sont intéressés à les dé-
fendre, et qu'on appelle à décider des questions de disci-
pline ceux qui font du commandement et de l'obéissance
la science et Tbabitude de leur vie. Les crimes et les dé-
lits militaires doivent être soumis à des principes excep-
tionnels de répression, parce que la criminalité des actes
ne se mesure pas seulement sur l'intention de leur au-
teur, mais aussi sur les dangers qu'ils font courir à la
société, sur l'étendue des devoirs méconnus, sur la gra-
vité des intérêts compromis. Enfin , les formes de la pro-
cMure ordinaire ne sauraient être appliquées en des ma-
tières où il s'agit souvent de prévenir le mal plus encore
que de le réprimer, où l'exemple doit toujours être
E rompt, où la première condidon de la justice doit être
k célérité. VoiÛ pourquoi il y a une législation militaire
^>éciale et des Conseils de guerre (K. ce mot) pour l'ap-
pliquer.
■lUTAiBB (Lédslation). Jusqu'à ces derniers temps, la lé-
gislation militaire de la France, quoique prélérabîe à celle
des antres États, a présenté une grande confusion. Elle
se composait de lois édictées dans diverses circonstances
auxquelles elles n'auraient pas dû survivre, souvent
contradictoires entre elles, partiellement abrogées par des
diqwsttions ultérieures. Tantôt le législateur s'était mon-
tré violent et emporté, comme dans la loi du 12 mai 1793,
où la peine de mort et celle des fers figurent à presque
tons les articles ; tantôt il était plein de sagesse et de mo-
dération, comme dans les lois des 13 et 21 brumaire
an V, des 18 vendémiaire et 17 fructidor an vi. La législa-
tion militaire ne comprenait pas moins de 91 lois, dé-
crels, ordonnances, avis, etc. La confusion et les incerti-
tudes ont enfin disparu par la promulgation d'un Code
de Justice militaire oour Vaxmée de terre (4 août 1857),
lequel n'a pas tardé à être appliqué aussi à la marine. Ce
Gode embrasse tout à la fois l'organisation, la compétence
et la procédure des juridictions militaires, ainsi que les
crimes et les délits qu'il entend plus spécialement ré-
primer. En ajoutant différentes lois antérieurement pu-
bliées sur les pensions militaires, le recrutement , Yavan-
cemênt, la dotation de V armée, etc. (V. ces mots)^ on a
un Droit militaire qui ne se trouve, chez aucune autre
nation, à an aussi haut desré d'unité et de centralisation,
r. Dorat-Lasalle, Droit ettégislation des armées de terre
et de mer. Recueil méthodique complet des lois, dé'
crets, etc.^ 1844-1853, 10 vol. in-S» ; liêerand, Études sur
ta législation militaire et la jurisprudence des Conseils
de guerre et de révision, 1835, in-^"; Broutta, Cours de
Droit militaire, 1842, in-8«; Gh. Duez, Codefénal miZt-
totre, 1847, in-8^ ; Dumesgnil , Dictionnaire de la justice
militaire, 1847, in-8<^; Gonvot, Manuel de légisUUùm
milittUre, 1847, in-8<> ; Ghénier, Guide des tribunaux mi»
litaires. 2* édit., 1853, 3 vol. in-8« ; Gérard, Code de Jus-
tice et de discipline militaires, 1852, in-18 ; Alla, Le Pra-
ticien des tribunaux militaires, 2* édiu, 1853, 2 vol*
in-8<* ; Victor Foucher, Commentaire sur le Code de jus-
tice militaire, 1858, in-8<>; Tripier, Code de la Justice
«ultlatre, 1857, gr. in-4».
MiuTAmB (Musique). De tout temps les armées ont
marcbé ma combat aux sons d'une musique guerrière;
mais U serait impossible de déterminer comment les
corps de musique étaient composés avant l'âge moderne.
Les peuples de l'antiquité avalent des tambours, des
trompettes, des clairons, des buccines, des cors, des cor-
•eta, des flûtes, et les voix se joignaient môme aux in-
Itmments, puisque l'on exécutait des chants en l'hon-
neur de Mars, de Castor et de PoUux. Nous savons que
les tamboors, au lien d'être placés en tète des corps, se
trooTaient par derrière. — La môme incertitude existe
au sujet des musiques militaires du moyen âge. A partir
du XVI* siècle, les généraux en France ont entretenu pour
leurs années un certain nombre de musiciens. Dans la
musique da grand Condé se trouvaient des violons, et
Ton en vit 24 accompagner le régiment de Ghamnasne
pour ouvrir les travaux de tranchée an siège de Lerida t
ns violoos eurent longtemps leur rôle, puisqu'il en exis-
tait en:o!re dans quelques régiments pendant les pre-
mières années de la République. Mais, en génâ«l«
c'ètaieiit les tambours qui marquaient la marche et bat-
taient la charge, avec accompagnemen de fifres et de
hautbois. Le hautbois fut admis dans les régiments fran-^
çais à la fin du règne de I.ouis XIII; les timbales pa-
rurent sous Louis AlV, en 1G92, dans les musiques de
cavalerie; l'introduction du basson, du cor et de la clari-
nette date des premières années du xvm* siècle, et celle
des instruments de cuivre à clefs, de 1770 environ. Puis
vinrent successivement les trombones, les ophicléides,
les cornets à pistons, et enfin, de nos jours, les sax-hom
et les saxophones.
Aujourd'hui , chaque régiment de cavalerie et d'artil-
lerie en France a une fanfare de trompettes (sa mu-
sique a été supprimée en 1867); chaque régiment d'in-
fanterie, ses tambours, sa fanfare, et sa musique; chaque
bataillon de chasseurs à pied, ses clairons et sa fanfare.
L'organisation des corps de musique a été l'objet de
nombreux règlements. Sous Louis aIV, chaque compa-
gnie de gardes du corps avait sept trompettes et un tim-
balier; mais le nombre des musiciens de régiment dé-
pendait des colonels, qui en avaient l'entretien à leur
charge. Au temps de Napoléon I*', une musique régimen-
taire comptait de 22 à 24 musiciens : 8 grandes clari-
nettes, 1 petite, 1 petite flûte, 2 cors, 2 bassons, 3 trom-
bones, 2 serpents, 1 grosse caisse, 1 cliapeau chinois,
1 cymbalier, 1 caisse roulante. Une ordonnance de 1827
décida que les musiciens seraient désormais entretenus
et soldés aux frais de l'État , et en fixa le nombre à 27 par
régiment. Ce règlement ne fut pas longtemps observé, et
l'on en vint dans plusieurs corps à doubler presque le
nombre déterminé. En 1800, un décret, conservant aux
musiques des régiments de gendarmerie et des guides de
la garde impériale, ainsi qu'à celle de la garde de Paris,
leur orsanisation exceptionnelle, régla dnsi qu'il suit la
composition des musiques régimentaires :
MDSIQDB DE TROUPB A PIED.
Flûtes 2
Petites clarinettes 2
Grandes clarinettes 4
Hautbois 2
Saxophones sopranos 2
Saxophones altos 2
Saxophones ténors 2
Saxophones barytons 2
Cornets à pistons 2
Trompettes à cylindres 2
Tromoones 3
Sax-homs si bémol contraltos 2
Saxotrombas altos mi bémol 3
Sax-horns barytons si bémol 2
Sax-homs basses si bémol à quatre cylindres. 3
Sax-hom contre-basse mi bémol i
Sax-hom contre-basse grave sî bémoU ... 1
Caisse claire on roulante • 1
Grosse caisse. 1
Qymbales (paire de). i
40
MUSIQUE DE TROUPB A CHEVAL.
Petit sax-hom aigu si bémol 1
Petit sax-bora soprano mi bémol 1
Sax-homs contraltos si bémol é
Sax-hom alto la bémol i
Saxotrombas altos mi bémol, S
Saxotrombas barytons si bémol 2
Sax-homs basses »t bémol à quatre cylindres. 4
Sax-hom contre-basse mi bémol i
Sax-hom contre-basse grave si bémol 1
Cornets à pistons • 2
Trompettes à cylindres. 4
Th)mlM>nes • 3
muTAmE (Organisation}. V. notre DieHtmnaire deBiO'
graphie et d Histoire, p. 1079, col. 2.
v lUTAiEE (Paye ou Solde), v. Solde.
MiUTAiBE (Sâryice). V, SpvicE.
MILITAIRES (Colonies, Écoles). V. Colouies, Ecoles,
dans notro DietkmtMire de Biographie et d*Histoire.
MniTAiaES (Honneurs), démonstrations extérie-ves de
respect auxquelles tout militaire est tenn à l'égara de ses
supérieurs. EUes se réduisent presque partout ai^our
d'bui an salut, qui consiste à porter la main à la tète.
Un soldat en faction porte l'arme à tout officier jus»
qu'an grade de capitaine induaivementi ainsi qtl tout
MIL
1254
HIM
tMl qui a la chrfx de la Légion d*honneàr (non le simple
roban); il présentie Taroie aux officiers supériears. Un
Kite ne prend les armes qtie pour Tofficier de rondo,
ns les parades et les revues, les offidçrs saluent de
leur saîyre en passant devaht le drapeau. Des honneurs
particuliers sont rendus dans les places fortes aux princes
et aux grands personnages qui viennent les visiter ; le
Bombre des coups de canon gu*on doit tirer en pareilles
Occasions est déterminé par des règlements. En mer, les
vaisseaux se saluent réciproquement ; Ils saluent égale-
llDent,,par un certain nombre de coups de canon, les
forts devant lesquels ils passent ou jettent Pancre.
MiuTAiaBS (Hôpitaux). V. Hôpital muTAiRB» dans
notre Dictionnaire dëi Biographie et d^ Histoire,
MiuTAtaBS ( Chirurgiens , Médecins , Pharmaciens).
V, CmauRGiERS, Médecins, PBAaMAaeFis.
mutÀiABS (Ouvriers, Prisons). V, Ouvaiias, Prisons.
MILLE. ( r. ces mots dans notre Dictionnaire de
ifiLLB D*OR^ / Biographie et (T Histoire.
MILLE ET UNE NUITS (Les), recueil de contes orien-
taux, publié pour la première fois en Europe par Gal-
lànd, qui Tattribualt à un auteur arabe Inconnu. Caussin
de Percerai a enrichi de nouveaux contes Tédition qu*il
en donna en 1900 : comme le style dans lequel ces contes
sont écrits est vulgaire et nécessairement assez mo-
derne, il ne leur donnait paa plus de trois ou quatre
siècles d'antiquité. Langlès et M. de Hammer ont pensé,
au contraire, que les Mille et une Nuits avaient une
haute antiquité, et qu*on pouvait en attribuer la première
rédaction à Tlnde, ou du moins à la Perse, avant la con-
quête de ce pays par les An^es. Pour enlever aux Arabes
1 honneur d^avoir inventé cette espèce de cycle roma-
nesque, on allègue un passage de Thistorien arabe Ma-
souai, qui écrivait vers l'an 947 de J.-G. ; à propos de
récits relatifs à certains personnages antérieurs à Ma-
homet, cet historien les traite de faibles, « semblables, dit-
Il , à celles qu'on nous a traduites des langues persane ,
indienne et grecque, tels que le livre' intitulé les Mille
eontês; » et on remarque, a Tappui de ce passage, que,
■DUS les califes Haroun-al-Raschid, Amin et Al-Mamoun,
la littérature arabe s*enrichit, en effet, de la traduction
d*un grand nombre d'ouvrages étrangers. Sylvestre de
Sacy, dans un Mémoire lu à l'Académie des Inscriptions
et Belles-Lettres , pense gue la seule conclusion à tirer
légitimement de la phrase de Masoudi, c'est qu'il aura
eusté, sous le nom dé MUïe contes, un livre originaire-
ment persan ou indien, puis traduit en arabe, et duquel
Fauteur des Mille et une Nuits aura tiré certains sijets
et peut-être même lés noms de ses personnages. Les rai-
sons qui ne lui semblent pas permettre de donner aux
Mille et une Nuits une origine indienne ou persane sont
les suivantes : ce recueil présente à chaque page le ta-
bleau de là reli^on, des coutumes, des lois, des mœurs,
du luxe, de Tétiquette des cours de Bagdad ou du dure ;
Eresque tous les acteurs des contes sont des musulmans;
k scène des événements est le plus souvent sur les
bords du Tigre, de l'Euphrate ou du Nil; les sciences
réelles ou fantastiques dont il y est question, sont celles
dont les Arabes te font honneur ; les Génies qui y figu-
rent n'indiquent pas, comme on le prétend, une source
indienne, mais sont ceux de la mythologie arabe, modi-
fiés par les préjugés musulmans, et toujours tremblants
au seul nom de Saloinon ; les religions dont il est parlé
ne sont Jamais autres que l*islamisme, le christianisme,
le Judaïsme et le magisme; on y parie de Moïse, de
David et autres personnages inconnus à l'Inde et à la
Perse ayant, l'introduction du naahométisme dans cet
contrées ; les opérations magiques se font au mo^^en de
pratiques et d'instruments .empruntés aux Juifs. Si l'au-
teur a introduit dans ces* contes des personnages et des
noms persans ou tartares, s'il a quelquefois placé la
icèae en Chine, dans les Indes, à ^aschgar ou à Samar-
cand, c'est pour dépayser ses lecteurs en les transpor-
tant loin des r^ons qui leur sont connues, et pour se
donner ain^ plus de liberté de feindre et d'Inventer.
Enfin, il serait étrange qu'un recueil de contes qui, à la
plus brillante époque de la littérature arabe, aurait été
Jugé digne d'être traduit de l'indien ou du persan, soit
devenu, sous la forme actuelle àoA Mille et une Nuits ,
on assembla»» de morceaux appartenant à diverses épo-
ques et de différents styles ; que le fond primitif ne con-
stitua plus qu'une faible partie de ce recueU, par suite
de llntercalatlon et de la substitution de Nouvelles
arabes; que les contes indiens ou persans, éliminés par
les écrivains arabes, ne se retrouvent nulle part ailleurs.
Sylvestre de Saqr résume en ces termes ce qu'il j a de
plus vndsémblable sur l'histoire du recueil des Aft(i# et
un^ Nuits :
« Il me parait qu'il a été écrit originairement en Syrie,
et dans le langage vulgaire; qu'il n*À Jamais été acheTé
par son auteur ; que, dans la smtè, les copistes ont cher-
ché à le compléter, soit en y insérant des nouvelles
déjà connues, mais qui n'appartenaient pas à ce recueil,
comme les Voyages de Sindbiad le nUuin et le Uvre dit
sept vizirst soit en composant eux-mêmes avec plus oq
moins de talent, et que de là naît la variété qu'on a ob-
servée entre les manuscrits du recueil ; que telle est aussi
la raison pour laquelle les manuscrits ne sont point
d'accord sur le dénoûment, dont il existe deux rôdts
très-différents; que les contes «Joutes l'ont été à diffé-
rentes époques et peut-être en diverses contrées, mais
surtout en Egypte; qu'enfin le recueil n'est pas fort
ancien, comme le prouve le langage dans lequel il est
écrit, et qu'on peut en reporter la composition vers le
milieu du ix* siècle de l'hégire, c-4-d. qu'il compterait
' environ 400 ans d'existence. »
La fable des Mille et une Nuits est celle d*un souveialn
qui croit avoir d'excellentes raisons pour faire mourir sa
femme, la sultane Schéhérazade, et qui , durant trois ans,
diffère. Jour par Jour, l'exécution de son dessein, pour
avoir le plaisir d'entendre le lendemain la continuation
ou la fin d'une histoire qu'elle a commencée. Le livre
manque de philosophie, de but vraiment moral ; il con-
tient beaucoup de folies: mais 11 est fécond et varié; il
amuse et intéresse ; par l'emploi du merveilleux, il flatte
le penchant que nous avons à nous laisser abuser, et
nous rapproche de l'enfance et de l'âge des illusions. On
y trouve une peinture fidèle du caractère et des mœurs
des peuples orientaux ; sous les yeux du lecteur se dé-
roulent tour à tour les artifices des femmes corrompues
par la iservitude, rh3'pocrisie des derviches, la corruption
des gens de loi, la friponnerie des esclaves, etc. Les
Mille et une Nuits sont la seule production littéraire de
l'Orient qui soit populaire en Europe. B.
MILLÉSIME (du latin mUlesimus, millième), chiffre
qui, sur les monnaies, médailles. Jetons, etc., indique
Tannée de la fabrication. II n'a commencé d'être en usage
qu'au XV* siècle : dans l'antiquité et au moyen âge, on
avait indiqué l'époque de l'émission des monnaies par
les noms des magistrats, par l'effigie des souverains, par
les consulats ou tribunats des empereurs ou par l'année
de leur règne. La plus ancienne pièce qui porte un mil-
lésime est une monnaie d'argent de Jean de Heinsberg,
évêque de Uége, en 1428 ; en France, la première est un
écu d'Anne de Bretagne, en 1498. On a un écu de Fran-
çois I* avec le millésime de 1532. Les chiffres romains
furent d'abord employés à cette marque : mais, en 1549,
Henri II ordonna qu'on prit les chiffres arabes.
MILLIAIRES (Pierres ou Colonnes). 7. notre Diction^
noire de Biographie et d*Bistoire,
MILVINE, nom que les Anciens donnaient à une sorte
de flûte, soit parce qu'elle était fidte d'un oa de milan (en
latin milimsy, soit parce que le son , qui en était fort
aigu , ressemblait au cri de cet oiseau.
MIMANSA. V. Indibwvb (Philosophie).
MIMB (du grec mtm^omot, imiter, mimer), nom qu'on
donna, chez les Anciens, à une sorte de composition
dramatique, et aux acteurs qui la représentaient. So-
phron et Xénarque étalent cités parmi les Grecs comipe
mimographês ou auteurs de mimes : mais ces écrits
' étaient faits pour U lecture ou la récitation, non pour la
scène. Selon le témoignage des écrivains latins, les mimes
die Sophron, bien qu'appartenant au genre de la farce,
respectaient U décence, et faisaient éprouver aux hon-
nêtes gens les mêmes émotions que les pièces de Plante
et, déférence. Il en fut tout autrement des mimes d'ori-
gine romaine, qui Jouirent d'une grande faveur après les
Atellanes (F. ce mot) : en s'y proposait de diverdr le bas
peuple par de grosses plaisanteries et même psr da
obscénités. Ces compositions grossières étaient en vers,
tandis que celles de Sophron étalent en prose; ellei
eurent beaucoup de vogue à l'époque de J. César : Tea*
time que des écrivains sérieux avalent pour les mimes ds
Labériua, de P. Syrus et de Cn. Matins, permet cepen-
dant de penser que ces auteurs ne descendirent point
aussi bas. Quant aux mimes-adeurs, c'étaient des bouf-
fons à tête rasée, sans chauàsure, aux vêtements fonn^
de diverses couleurs, planipedes, eoxalceati, pannieulij
sannMnescapreœ, V. Calllachus, De ludii soeMCisfi^^
morum et. .pantomimorum synlagfna, Padoue, i'iih
in-4<'; Ziegler, De mifnis Bomanorum, Goattingue, 178S.
MIMÈSE (du grec mintésis, Imitadon), «orte dlrooii
MIN
1255
MÎN
fii, TBDMit de la haine , da méprii eu de la colère, pa-
rodie le toD, les geeloa et lesjperolee d'une personne,
afin ds loi donnei un ridicule. On en tronve un exemple
dant la loèBe dn Misanthrope de Molière, entre Arsinoé
etCéUmène. . -
MQOQDB (da grec mimas^ imitateur), art de parler
aux yeux aana le teooura de la parole et de récriture^
ptr las attitudes, les mouvements des maina et da corps,
las jeux de la physionomie, assc^ettis à certaines lois ou
defBBua signes de convention. C'est un langase à rasage
d» parsonnes qui ne parlent pas la même Tangue, ou
^ MDt privéea de Toiguie de la psrole. La liimique
Mit soan, dans les pièces de théâtre appelées panto-
admas et ballets, à remplacer la parole pour Texpresaion
des idéas et dea sentiments. Enfin, associée à la partie,
aoit ckei Toratenr, soit sur la scène, elle ajoute à sa poia-
nooe. F. Acnoii, DaAiuTiQin (Art), Gbstb.
MIMODRAME, osuvre scsènique dana laquelle les a&>
teuis ne parlent pas, mala se bornent à mimer leur rOle.
Ce ganre prit naissance, lorsque l'autorité, dana le bat
de protéger lea théàtrea royaux contre une concurrence
dsogereuse, interdit tout empiétement sur leur domaine
aux théitraa secondaires. Tantôt le nombre des person-
nages qoi pouvaient occuper simultanément la scène ftit
Bmité, tantôt on ne permit la parole qu'à un seul, tantèt
tous les perM»nagaa durent rester muets et se contenter
dn geste, pendant qu'on déclamait l'ouvrage derrière la
toile de fond ou dana les coulisses. Quelquefois même Us
portèrent dea écrUeaai, indiquant aux spectateurs ce que
la geste seul n'annit pu leur faire comprendre. Le mi-
modrame cberdui des moyens de séduction dans la
besoté des décora, la richesse des costumes, le nombre
ai las manoaavrea des comparses, et l'on eut ce qu'on
appelle encore aiidourd'hui des ptdcet à ipêetades. n a
aa 800 plus beau théâtre au Cirque Olympique de Psris.
HIHOGQAPHE. F. HiMB.
BONARDE (Ordonnance). F. HmAan, dana notre Die-
tmnairB d» Biographie H éPHiMtairê,
MINARET (de rarabe minora, lieu de lumière), tour
hante et svelte annexée aux mosquées. Elle est divisée en
étages et ceint» de balcons en saillie, d'oA le muenln an-
ooDce aux Musulmans lea dnq heures de la prière.
K. AsABB (Architecture), la fig» p. 185, 2* colonne.
HINB, monnaie de compte des anciena Grecs, ^ant
100 drachmes, ou la 60* partie du talent attique. La
mme ptolémalque on alexandrine ne fut que lea 4/5 de la
mine stdque.
MiRB, en termes d'Art militaire, chemin soatenain
pTMiqaé par un assiégeant pour arrmr sous un ouvrage
delà place, et le détruire (F. Mina, dans le Sup-
pUment ). Une mine se compose d'une galerie et d'un
foemcaii (F. ce« MOtf). L'usage de charger les mines
srec de la poudre date de i487 ; l'invention appartient
aox Gèsoia, qui assiégeaient Sarzanella. Hais l'Espagnol
Pedro de Navarre fût Te premier â qui ce moyen réussit,
an attaquant le château de l'OBuf, à Naples, en 1503.
F. Bousmsfd, Estai général de fortiflcaUon , Paris,
an xn ; Gillot , TVoita de (ortilicatwn souterraine, 1805.
Mllie(COIfTRB-). F. CONTSB-lfinB.
MINÉRALES (Eaux). F. Eaox mifiaALBS.
lONERVAL. F. ce mot dans notre DictionnaMre de
Biographie et d^Ristoire.
MINERVE , divinité latine que les Romains assimila
tant à la déeaee grecque Athénê. Celle-ci représenta pri-
mitifemeot l'air pur , l'atmosphère , puis devint une
déeaae dea eaux, dite Tritoeénio ou Tritonie {née des
taux, d'aprèa l'éQrmologie sanscrite), parce qu'on re-
gvda l'atmosphère comme la source de l'humidité et
des eaux. De là Tépithète de glauMpis (aux yeux glan-
qees) qu'elle reçoit dans Homère ; de là aussi les rapports
<tae la Fshle établit entre elle et Poeéldon ou Neptune^
iot pluriours traditions lui donnèrent même pour père.
Fenooniication de • l'air pur , Athènè fut conaidérée
comme vierge, et v^lla sur la chasteté des femmes; par
sQite,élle predda aux travaux des femmes, à l'aigaille, à
la navette, an fuaeaa ; elle devint le type des plus hautea
vertus, de la poretéet de la sagesse suprêmes, et, comme
ces vertus émanent de Jupiter, on la fit naître du oer-
▼ean de ce Dieu, mythe que quelquee*uns rattachent au
taraem de Tritode, dérivé de tritô (tête, en dialecte
béotleo). C'est encore comme divinité de l'air pur qa*A«
tbeoê liit ose déesse médicale, une divinité de la santé,
canfoodue avec Hygle i elle eut, ainsi qu'Esculape, le
serpent pour emblane. I^aroe qu'elle créa l'olivier, lea
Athéniens la prirent pour protectrice t le serpent étant
W Igera eeoa laquelle le» Hellènes repréeentaient le gé-
nie local, on a'explique encore par là qu'il soit devom:
l'un de ses attrlbuta. Protectrice d'une importante cité«
Athénè prit les caractères d'une, divinité guerrière : os
la dit sortie tout armée de la tète de Jupiter ; on lui atn
tribua l'art de dompter et de conduire les chevaux, ainsi
crue l'invention des chars et dea trompettes de guevre
Quand Athènè fut confondue en- Italia avec la déesse
étrusque Mnerlia, devenue la Minerve des Latins, celle-ci
reçut les traits de la divinité athénienne* Athènè fut eiH
eore la patronne dea laboureurs; à ce titre, elle fut ap-
pelée baudeia, ftoormia (qui attelle les bcauft au Joug), et
fut représentée avec dea couronnes et des fruits sur la
tète. — On donnait à Minerve une beauté simple et mo>
deste, un air grave, noble, plein de force et de mijefté,
et on la représentait colflée d'un casque, vêtue d'une tu-
nique lonâue, sans manchea, sans coutures aux cètéa,
avec l'égide sur la poitrine, et armée de la lance, que
parfoia elle brandit : on a expliqué ainsi son nom de
PalU» {ÔBpaUâ, acdter, brandir), qui, selon d'autrea,
sigpaiflerait Jeune fille {paUax), Son temple le plus m»*
gniflque, le Parthénon d'Athènes, était par excellence le
sanctuaire de la divinité vierge. Là se trouvait son image
]b, plua achevée, la sutue chryséléphantlne exécutée par
Phidias : Oilo représentait la déesse debout, et était haute
de il met. environ. Elle était creuae; les lames d'ivoire
et l'or qui servaient pour le casque, l'égide et le péplos de
U. déesse, étaient appliqués sur une carcasse en bois son*
tenue par une armature. Cette Minerve, restituée, dana
de médiocrea proportions, par M. le duc de Luynea, a
été eoiécutée par le sculpteur Simart. Une statuette de
Minerve, vue par Lenormant à Athènes en 1860, et qui,
bien que d'un travail vulgaire, parait être une imitation
de ToBuvre de Phidias, peut servir à rectifier quelquea
erreurs des archéologues qui ont restitué cette osuvre*
Le combat des Géanu figuré sur le bouclier qui est aox
pieda de la déesse, le serpent qui se dresse en levant hi
tête sous la protection de l'égide, les dieux assistant à la
naissance de Pandore sur le piédestal , tous les accès*
soirée de cette statuette, sont conformes aux descriptions
que les Anciens nous ont laissées de la fameuse Minerve;
mais la forme et les ornements du casque difièrent,
ainai que la place et l'attitade du serpent; la représenta»
tion du comnat des (Séants, au lieu d'être le sujet d' une
frise, est ciselée dans le champ du bouclier, dana la
partie convexe, et non dans la concavité ; c'eat de la main
droite, et non de la gauche, que la déesse porte la statue
de la Victoire, la gauche tenant la lance. Indépendant
ment de la Minerve du Parthénon, Phidias fit la Minerve
Poliade de l'Acropole, et la Minerve de Platée, en bole
doré et en marbre pentélique, toutes deux de propoiv
dons colossales. Biinerve eut des temples célébrée à tin^
dos, à Mantinée, à Tégée ; dans cette dernière ville, la
statue de la déesse, toute en ivoire, avait été faite par I9
sculpteur Endnos; Auguste la fit transporter à Rome. Lea
plus anciens sanctuaires de Minerve chez les Romains
s'élevaient sur les monts CapitoUn, Aventin et Gœliua;
l'empereur Domitien en fit élever plusieurs, entre autres
celui d'où est resté à une partie de Rome moderne le
nom de Minerva. Cest là qu'a été découverte la Pallaa
Giustiniani. En 1707, on a trouvé à VoUetri une Pallaa
colossale en marbre de Paros, qui est aujourd'hui au Mu-
sée du Louvre. Cet établissement possède une Minerve
d'un seul morceau d'albàtre oriental : la déesse est re*
présentée tenant dans la main gauche une chouette; sa
poinrine est couverte de l'égide bordée de serpents et où
est figurée la tête de Méduse sur un fond d'écaillés. B.
mNEBVB (Chant de), en latin Canticum ou Nomm
Mtnervœ, chant grec, composé par Olympe, oui vivait
sous le règne de Mldas. H fut conserver avec sa musiquOii
pendant pluaieura siècles.
MINES, masses de substances minérales ou fossilee
renfermées dana le sein de la terre, et qui contienilent
de l'or, de l'argent, du platine, dn mercure, du plomh^
du fer, du cuivre, de l'étain, du sine, de la calamine, dn
bismuth, du cobalt, de l'arsenic, du manganèse, de Tai^
tinioine, dn molybdène, de la plombagine, du soufre, d»
la houille, de l'alun, des sulfates à base métallique, eCe.
On appelle Minières lea minersis de fer dits d'alluvien,
les terres pyrlteuses propres à être converties en sulbla
de fer, les terres alumlneuses et les tourbes. L'exploita-
tion des mines est, dans preeque tous les pays, on dea
obfeta de la solfidtnde du gouvernement, une source de
revenus, de prospérité et de force. L'attribvtion de 1a.
propriété des mines an propriétaire dn sol est favorable
à la recherche des mines, mais non à leur exploitation 1
l'attribution à llnventenr^'eat pas plus Avrerable à \%a-^
MIN
1256
MFN
r
{iloitatiM, mais elle Test beaacoap plos à la déoouTerte.
1 paraîtrait donc utile, au premier abord, d'attribuer la
propriété de la mine à tHsTenteur plutôt qu'au proprié-
taire. Toutefois, ce principe ne saurait être appliqué aux
mines dont l'existence est connue depuis longtemps ; en-
suite, quelles limites assigner à la concession fondée sur
ce principe? S'il est Juste que l'inventeur soit récompensé
proportionnellement à l'importance de sa découverte, il
serait extravagant d'attribuer des richesses minérales
immenses à l'auteur d'une découverte due le plus sou-
vent an hasard. A l'égard du propriétaire du sol, si les
mines étaient id)andonnées au premier occupant, les ma-
tières les plus précieuses seraient bientôt perdues par le
gaspillage. Aussi, sur presque tout notre continent, la
propriété des mines fait partie du domaine public, et ne
peut devenir propriété particulière qu'en vertu d'une
concession de l'État. Ce principe parait plus conforme au
Droit que celui qui est adopté en Angleterre, car le pro-
{iriétaire de la surface n*a fait aucun travail de nature à
ui faire attribuer la valeur de la mine. En outre, l'ex-
ploitation de cette propriété intéresse trop vivement la
prospérité publique pour être abandonnée à l'arbitraire
du concessionnaire, dont l'incurie aurait les résultats les
S lus funestes. Une exploitation mal dirigjée, soit par le
éfaut do connaissances nécessaires, soit par suite de
l'intérêt du moment, qui pousse toujoun à extraire les
parties les plus riches sans s'inquiéter de l'avenir, peut
rendre impossible l'exploitation d'une valeur bien plus
considérable que celle que l'on a déjà retirée.
Chez les Athéniens, l'État était seul propriétaire des
mines ; mais il les affermait moyennant une somme une
fois payée et une redevance perpétuelle du 24* du produit
brut. Les mines d'argent du Laurium et les mines d'or
de l'Ile de Thasos et de Scapte-Hyle étaient seules exploi-
tées directement au compte de l'État. — Chez les Ro-
mains, le droit régalien ne s'appliqua d'abord qu'aux
mines d'or et d'argent. Sous la République, le domaine
oe possédait qu'un petit nombre de mines, et les exploi-
tait en régie ; les autres appartenaient aux particuhera,
2 ni payaient à TÉtat une redevance affermée pour une
poque déterminée. Des officiera spéciaux autorisaient
l'exploitation des mines et en surveillaient les travaux.
Dans les derniera temps de l'Empire, les mines devinrent
presque toutes la propriété du fisc.— Sous le r^me féodal,
le domaine des mines passa dans les mains des seigneura.
Puis, loroque la centralisation eut peu à peu ébranlé ou
éBàcé les souverainetés locales, ce domaine devint rég^
lien. — En Allemagne, Charlemagne, remettant en vi-
gueur dans cette pfurtie de son Empire les principes du
droit régalien, réclama au profit de l'État la propnété de
Umtes les mines, tant découvertes qu'à d&ouvrir. La
BuU$ d^ùr de 1356 attribua aux électeun de l'Empire la
propriété des mines de leun États. Une exploitation ré-
|ulière fut organisée en 1271 par une ordonnance du duc
oe Brunswick relative aux mines du Harz, et par le roi
de Bohème, en 1275, pour celles situées dans ses États.
Le droit réêilien éudt également appliaué en Angleterre,
puisque, dès 1231, la houille y est exploitée pour la pre-
mière foison vertu d'une concession du roi Henri III aux
habitants de Newcastle. Depuis cette époque, ce droit
parait avoir été abandonné. Mais, du reste, en Angleterre,
la grande étendue des propriétés superficielles, l'immen-
aite des fortunes particulières, le bas prix des capitaux
el la disposition générale à créer des compagnies puis-
santes pour ce genre d'entreprise, rendent peut-être l'in-
tervenaon du gouvernement moins nécessaire que dans
les autres pays.
Le premier acte rédementaire des mines en France
date de Charles VI (39) mai 1415). 11 proclame le droit
régalien en ce sens que le 10* du produit des mines ap-
partient au roi. Elles formaient une propriété distincte
de la superilde, et l'État pouvait les exploiter pour son
compte ou les concéder à son gré. Une ordonnance de
Louis XI (27 Juillet 1471 ) consacra le principe de la sur-
veillance de l'État, et même, dans certains cas, de l'expro-
priation des propriétaires. En même temps elle créait une
diarge de maitre général, visiteur et gouverneur det mines
du royaume. Cette charge fut maintenue, en changeant de
vom, Jusqu'au rèene de Louis XV,où lui succéda, en 1748,
tne Gompapie Investie du privilège d'exploiter toutes
ies mines du territoire. L'Aûemblée constituante , sur
:jft proposition de Mirabeau, déclara, par la loi du 12 Juil-
;let 1791, que les mines étaient la propriété de la Nation,
iqu'elles ne pouvaient être exploitées que de son consen-
tement, et à la charge d'indemniser le propriétaire de la
'lurfaco: elle reconnaissait en outre au profit du proprié*
taire le droii absolu et inconditionnel d'exploiter sur son
préférence
paration des dommages résultant de l'exploitation, con-
sistait à payer le double de la valeur intrinsèoae du lol
qui aurait été l'objet des dég&ts, ou dont la jouissance
aurait été paralysée entre les mains du propriétaire. Si
celui-ci voulait exploiter une mine aituée au-dessous de
sa propriété, le gouvernement ne pouvait lui refuser la
concession, à moins que sa terre ne fût pas assez étendue
pour former une exploitation. Dans les dispositions de
cette loi, la limitation dans la durée des concessions était
injuste, en ce que les exploitants n'avaient pas le temps
d'amortir leur capital. En outre, elle laissait l'exploita*
tion sans contrôle, et ne la contraignait pas même à l'ac-
tivité; aussi le dépérissement des mines au milieu do
développement de l'industrie générale démontra, après
Zuelques années, la nécessité d'une législation nouvelle.
a loi du 21 avril 1810 pose en principe que les masses
minérales, considérées comme chose, sont de droit com-
mun, et, qu'étant une dépendance de la surface, elles
appartiennent au propriétaire du sol. Toutefois, comme
leur exploitation met en mouvement de très-grands inté-
rêts publics et économiques, l'utilité générale doit faire
fléchir le droit absolu du propriétaire. Ce dernier ne peut
donc user de sa mine, qui demeure inerte entre ses mains;
mais l'État le dépossède pour cause d'utilité publique, et
moyennant une indemnité. Les droits de la surface étant
purgés, l'État concède la mine à qui bon lui semble;
cette concession crée une propriété nouvelle , qui est à
son tour de droit commun, qu on peut vendre, donner,
hypothéquer comme un immeuble quelconque dont on
est propriétaire incommutable. L'étendue superficielle
d'une concession de mines ne peut dépasser 120 kllom.
carrés; généralement elle est beaucoup moins forte. Les
propriétâres de mines payent à l'État une redevance fixe
de 10 fr. par kilom. cûrré, et une redevance proportion-
nelle aux produits de l'extraction, laquelle ne peut Jamais
s'élever au-dessus de 5 p. 100 du produit net. Cette der-
nière est imposée et perçue dans les mêmes formes que
la contribution foncière : toutefois, les propriétaires des
mines peuvent la convertir en un abonnement, qu'un
décret de 1860 a basé sur le produit net de deux an-
nées. Le droit attribué aux propriétaires de la surface,
lorsqu'ils ne sont pas concessionnaires, est réglé à une
somme déterminée. Les concessionnaires de mines sont
tenus de payer les indemnités dues au propriétaire de
la surface où ils établissent leun travaux; si les travaux
entrepris ne sont que temporaires, et si le sol qui les a
subis peut être mis en culture après un an , comme il
l'était auparavant, l'indemnité se règle au double de ce
qu'aurait produit net le terrain endommagé. Lorsque
roccupation des terrains pour la redierohe ou les travaux
des mines prive les propriétaires du sol de la Jouissance
du revenu au delà d'un an , eu lorsqu'après les travaux
les terrains ne sont plus propres à m culture, on peut
ériger l'acquisition de ces terrains ; si le propriétaire de
la surface le requiert, les pièces de terre trop endommagées
ou dégradées sur une trop grande partie de leur surface
doivent être achetées en totalité. Le terrain à acquérir
est toojoura estimé au double de la valeur qu'il avait
avant l'exploitation de la mine. — Une mine ne peut être
vendue par lots ou partagée sans une autorisation préa-
lable du gouvernement. L^ mines sont immeubles,
ainsi que les b&timents, machines, puits, galeries et autres
travaux établis à demeure. Sont réputés meubles les ac-
tions ou intérêts dans une société ou entreprise pour l'ex-
ploitation des mines, les matières extraites, les approfi-
sionnementa et autres obfets mobiliers, sauf les chevaux,
agrès, outils et instruments servant à l'exploitation même.
L'exploitation des mines n'est pas considérée comme un
commerce, et les sociétés qui sont formées pour cettt
exploitation dépendent de la Juridiction civile.
La loi de 1810 a reçu divera compléments spéciaux et
réglementaires par le décret du 3 Janvier iSlà, les lois
du 27 avril 1838, du 17 Juin 1840, et le décret du 23 oc*
tobre 1852. Une disposition de la loi de 1838 porte que,
lorsque plusieun mines situées dans des concessions dif-
férentes sont atteintes ou menacées d'une inondsUoo
commune, de nature à compromettre leur existence, la
sûreté publique ou les besoins des consommateun, le
gouvernement peut obliger les concessionnaires i exécutei
en commun les travaux nécessaires, soit pour assécher
tout ou partie des mines inondées, soit pour arrêter les
progrès de l'inondation. Le décret dn 3 ocL i85i défend à
Mrif
t25T
MIN
tout concenionnaire de mines de réunir une ou plusieurs
concessions à d*aatre8 de même nature, sans autorisation,
liln d^empècher la concentration entre quelques mains,
et d'arrêter ainsi la formation d*un monopole. — La Bel-
gique a gardé la loi française de 1810, mais eo ia nodi-
liaDt dans rintérôt des propriétaires de la surface, par
ane loi du 2 mai 1837, qui établit que l'indemnité attri-
boée par la loi de 1810 doit être déterminée au moyen
d'une redevance fixe qui n'est jamais moindre de 25 cen-
times par hectare de superficie, et d'une redevance pro-
portionnelle fixée de 1 à 3 p. iOU du produit net de la
mine arbitré annuellement par un comité d'évaluation,
iioit sur les renseignements fournis par les exploitants, soit
pir forme d'imposition ou d'abonnement. — En Prusse,
dont la législation a servi de modèle au reste de l'AlIe-
msgoe, toutes les mines font partie du domaine public,
et ne peuvent être exploitées qu'en vertu d'une concession.
Les exploitants sont soumis à la surveillance des agents
spéciaux de l'autorité, à l'acquittement de certains droits
en ar^nt, et à une redevance annuelle du dixième du
produit brut. L'État se réserve toujours un droit de pré-
emption des produits de l'exploitation des mines d'or et
d'argent. Les carrières, quand l'extraction peut avoir lieu
à dâ ouvert, appartiennent au propriétaire de la surface,
qui peut les exploiter sans autorisation ; si le propriétaire
ne les exploite pas, toute autre personne peut prends sa
place, moyennant une indemnité et une part dans les
produits de la carrière, dès que l'exploitation a été dé-
clarée d'utilité publique. La recherche des gttes métal-
li<|ues ou minéraux doit être autorisée par l'agent des
mioes de la localité, et ne peut avoir lieu qu'à quatre
pieds (l'^fSS^) des habitations et des bâtiments d'exploi-
tation. — En Russie, le droit régalien s'exerce d'aoord
par un prélèyement sur le produit des mines particu-
lières, lequel, depuis 1847, est de 40 p. 100 pour les mines
d'or et d'argent, puis par l'obligation généralement im-
posée aux exploitants de livrer leurs produits au gouver-
nement, à un taux fixé par lui. — En Espagne, la légis-
lation sur les nnines est la même que celle de la France.
y, Blarier, JurisprudsM» des mtnes m Allemagne,tnir
didt de Cancrixi, 1825, 3 vol. in-8^ dont le dernier con-
tient la législation firançaise; Locré, Légitlation sur Us
mmaa, 1828, in-8«; Barrier, Code des mines, 1820, in-8<»;
Beaumont, Coup d*œU sur les mines, Paris. 1834; Héron
de ViUefosse, De la richesse minérale, 1838, 1 vol. et atlas ;
Delebeoque, TraUé sur U» législation des mines et mi-
nières en France et en Belgique, 1836-38, 2 vol. in-S»;
Richard, LAgislcUion française sur les mines, 1838, 2 vol.
iii-8*; Barinet, Code des ponts et chaussées et des mines,
1S2d40, 7 vol. in-8*; Peyret-Lallier, Traité sur la légis-
lation des mines, minières, carrières, tourbières, usines,
1844, 2 vol. in-S<>; Et. Dupont, Traité pratique de lajt^
nsprudence des mines^ minières^ forges et carrières. 1853,
2 vol. iD-8<>; Lamé-Fleury, De la législation minéraie sous
l'ancienne monarchie, 1857, in-8<>, et Recueil méthodique
tt çhronotogique des lois, etc., concernant le service des
tngémeurs au corps des mines, 1857, 2 vol. in-8"; Du-
four. Les lois des mineSy 1857, in-8® ; Rev, De la propriété
des mines, 1857, 2 vol. in-8<*; DeFooz, Points fondamen-
taux de la législation des mines, minières et carrières^
Tournai, 1858, in-8<» ; Bury, Traité de la législation des
nines, des minières, des usines et des carrières en Bel-
gique et en France, Ué^ 1860, 2 vol. in-8o. A. L.
Mins (Conseil général des). V. Conseil g6«<ral dks
■ffiss, dans notre Dictionnaire de Biographie et d* His-
toire,
mtas (École des). V, École des mines, dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire,
■DiBS (Gardes-). V, Gardbs-mimes.
MovEs (Ingénieurs des), corps qui fait partie du Génie
civil, et qui est chargé de surveiller l'exploitation des
mines quand elle est faite pour le compte des particu-
liers, de la diriger quand elle a lieu dans l'intérêt du
domaine pid>lic. Il dépend du Ministère des travaux pu-
blics. Charles VI institua, dans chaque bailliage, des
commissaires royaux, à la fols administrateurs et magis-
trats, pour sorvàller les exploitations et résoudre les dif-
ficultés élevées sur le fait des mines. Plus tard, on créa,
pour cette branche de l'administration publique, un
SraDd-mattre anrintendant des mines, un lieutenant g^
serai et un contrôleur, des lieutenants particuliers, et
plusieurs conseillers du roi. En 1788, l'administration et
te corps des mines se composaient de 1 intendant, de 2
eommissakes du roi, de 5 inmecteurs généraux, de
3 lOQs-inspecteoiB, et de 6 ingénieurs. Il existait des
fMKtkMmairea ds niAme naUire dans tes pays d'États. Le
décret du 18 noT. 1810 réorganisa le corps des minés, et
détermina d'une manière précise les fonctions des ingé-
nieurs. Cette organisation nouvelle a été légèrement
modifiée par «ne ordonnance du 27 avril 1832. Le corps
des mines comprend : 6 inspecteurs généraux de 1 ■^ classe
ei 8 de seconde (12,000 et 10,000 fr. de traitement);
It ingénieurs en chef de l'" classe, et 15 de seconde
(6,000 fr., 5,000 fr. et 4,500 fr.) ; 19 ingénieurs ordinaires
de l** classe (3,000 fr.J, 30 de seconde (2,rH)0 fr.), et
12 de troisième (1,800 ir.). Les ingénieurs reçi'ivent, en
outre, de^ allocations annuelles pour frais et loyer d»
bureau , et une indemnité de frais de tournées.
Pour le service des mines, le territoire français est di-
visé en 5 inspections :
Inspections.
Nord-Ouest.
Departementt
Nord, Pas-de-Calais, Somme, Oise,
Aisne, Seine-etrOise, Seine, Seîne-et-
Mnrnc, Loiret, Eurc-etrLoir, Sarthe,
Mayenne, Ille-et- Vilaine, Finistère y
Morbihan, Côtes-du-Nord, Orne, Man-
che, Calvadus, Eure, Seine-Inférieure.
Nord-Est. — Ardcnncs, Meuse, Marne, Meurthe-et-
Moselle, Vospes, arr. de BeKort, Aube,
Yonne, H»«-Maroe, H*«-Saône, Doubs,
Côte-d'or, Jura, Saône-et^Loire, Ain.
Centre. — Indre-et-Loire, Maine-et-Loire, Loire-
Inférieure, Vendée, Deux-Sèvres, Loir-
et-Cher, Vienne, Indre, Cher, Nièvre,
Allier, Charente, Charente-Inférieure,
Haute-Vienne, Creuse, Corrèze, Cantal ,
Uordognc, Puy-de-Dôme, Loire, Haute-
Loire, Rhône.
8nd-Est. — Isère, Savoie, Haute-Savoie, Lozère,
Ardèche, Drôme, Hautes-Alpes, Basses»
Alpes, Alpes-Mari imes, Gard, Vaucluse,
Bouches-du-Khônc, Var, Hérault, Corse.
Sud-Ouest.» Gironde, Lot-et-Garonne, Lot, Aveyron,
Landes, Gers, Tarn-et-Garonne, Tarn,
Bassos-Pyrénées, H««»-Pyrénées, H»»-Ga-
ronne, Ariége, Aude, Pyrénées-Orient.
MINEUR (du latin mmor, moindre), se dit de tout»
personne qui n'est pas assez &gée, aux yeux de la loi,
pour être présumée capable de gérer ses afihirea. Le
temps où la Minorité finit est celui où la Majorité com-
mence (V, MAJoarré). Le mineur est soumis à l'autorité
paternelle, et, si le père décède ou disparaît, à l'autorité
d'un tuteur. Le Code Napoléon (art. 1124) range les mi*
neurs parmi les personnes incapables de contracter; par
VÊmancipation (V, ce mot)^ ils sont, à certains égards,
releva de cette incapacité. Le domicile d'un mineur non
émancipé est celui de ses père, mère ou tuteur {Cod^
Napoléon, art. 108). D'après ce principe, que le minear
ne peut détériorer sa condition, mais qu'il peut l'amé-
liorer, un contrat avantageux qu'il aurait fait avec une
personne majeure est valable, et celle-ci ne serait pas
admise à opposer l'incapacité du contractant (art. 1125^ ;
si le contrat lèse le mineur, il n'est pas nul de plein
droit, mais simplement sujet à rescision, et le mineur
peut se faire restituer pour cause de lésion (art. 1305).
Il en serait encore ainsi dans l'un et l'autre cas, quand
même le mineur contractant se serait déclaré majeur
(art. 1307). Toutefois, si la loi garantit le mineur de toute
perte, elle n'a pas voulu l'enrichir avec l'argent d'au*
trui : par conséquent, il est tenu au remboursement des
sommes reçues par suite d'une convention, si elles ont
servi à dégrever ses fonds d'une ancienne chaive (art.
1312). D'autre part, il n'y a pas lien à rescision, lorsque-
la lésion n'est résultée que d'un événement casnel et
imprévu, ou lorsque les engagements ont été ratifiés en
majorité (art. 1306, 1311). Il ne peut y avoir non plna
restitution contre des conventions matnmoniales lé^sle-
ment formées, ni contre des ventes d'immeubles ou paiw
tages de successions, consommés avec les formalitéa
prescrites relativement aux biens des mineurs, ni contre
ïee obligations résultant d'un délit ou quasi-délit (art.
1300, 1310, 1314). Le mineur commerçant, banquier on
artisan, n'est pas restituable contre les engagement»
qu'il a pris à raison de son commerce ou de son art (art.
13CHS); nuds, poor ses autres afTairea, et spécialement
pour l'aliénation de ses immeubles , sa situation n'est:
pas modifiée. La loi maintient enfin les actions hypo»
thécaires des mineurs indépendamment de toute inscrip*
tion (art. 2135 et suiv.), et déclare que le cours de Isk
presoription «t interrompu on s'arrête contre eux, tsm
MIN
1258
HIN
q«e dore la minorité (art 3258)* A 10 ans, le mineur
peut tester Joaqu^à concurrence de la moitié de aee biens.
La oontninte par corps ne peut pas être exercée contre
loi. n a one hypothèmie légsle sur les biens de son tu-
tenr, en garantie de la gestion de celui-ci. -^ Uétat de
minorité a aussi des conséquences dans le Droit crim'l-
nel (K. DucBaimiiiiT). F. Desquiron, Traité de la itfî*
fiorttë, de la Tutelle, etc., 1810, in-8«; Bfarchand, Codé
ds la MmoriU et de la TiMU, 1839, in-^«; Magnin,
Traité des MinorUés, 1842. S toI. in-8*; FréminTiUe,
T^wU de la MmoriU et de la TtMU, 1846, S vol. in-»>;
Demolombe, De la Minorité, de la TiMle et de VÊmat^
dpatiio», etc., 2 toI. in-8<*; Arbois de Jubainville, A0-
eherchee sur la Minorité et ses effets en Droit féodal
français, 1852, in-8«.
viNBUR, terme de Musique. V, iNTsavALus, Mode.
MiI<IEDRB, seconde prémisse du syllogisme, ainsi
nommée parce qu'elle contient renonciation du rapport
du petit terme (minor temUnus) avec le moyen terme.
K.Majeukb, Peémissbs, Stllogisiib, Termb.
î!ïïl«î?f*.^i- A^\ l ^- netre Diclimnaire de Bio-
MINIATURE. Ce mot, qui veut dire peinture au nu-
mum (oiyde de plomb), s'appliqua d'abord aux rubri-
ques, c-àrd. aux lettres de couleur rouge que les calli-
graphes du moyen âge exécutaient dans les manuscrits
au commencement des dkapitres, des paragraphes et des
alinéas. On retendit ensuite aux lettres ornées d'arabes-
ques, d'enroulements, de feuilles de vigne (d'où est venu
le nom de wgnettes^ et enfin aux enluminures ou sujets
peints qui prirent la place de ces lettres. Ces dernières
miniatures, où l'on n'a plus employé une couleur unique,
sont faîtes avec plus ou moins de talent, suivant le goût
du siècle et la capacité de l'auteur (F. l'art, suiv. et le
mot GALuaBAPHis). — Depuis la découverte de l'impri-
merie, les miniaturistes cessèrent presque complètement
d'orner des livres; ils exécutèrent, sur papier, sur vélin,
«ur bois , sur émail, sur ivoire, avec des couleurs dé-
layées à l'eau de colle ou à l'ean gommée, principale-
ment avec le minium, tontes sortes de peûts sujets,
fleurs, animaux, portraits, etc., que l'on encadra, ou dont
•on orna des bottes, des bonbonnières, des éventails, des
tabatières. Dans cette nouvelle période de la miniature,
-on doit mentionner : au xvu* siècle , André de Viio,
Isaac Olivier, Jean Cerva, Jacques Ugozio, François et
Michel Gaatello, J.-GuiU. Bauer, Laire, Duguemier,
Fhiitiers, Gerbier, Bisi, Jeanne Garzoni, Jacques Bailly,
Aubriet, Sophie Ghéron; an xvm*, Ferrand, Klingitet,
Félicité Sartori, Leblond, Félicité Tlbaldi, Arlaud, Ismaél
Mengs, RosaUMt Garriera, Joseph Camerata, Baudouin,
liotiurd, Kœnig, ICodowiecky, Cbarlier, Dumont,T[uérin;
au XIX*, Augustin, Isabey, Aubry, Saint, Millet, Man-
sion, M"« Jaquotot, M»« de Miriwl, M'^ E. Gallault, etc.
Dans la miniature, les chairs se font par des teintes
pointillées et superposées t les dn^ieries et les accès-
ioifes s'exécutent à la gouache recouverte de hachures
«errées et croisées. V. Mayoi, Introduction à la nUma-
hure, Amsterdam^ 1771, in-12| Violet, T^ité sur Vart de
veindre en mtmators, Paris. 1788, 2 vol.; Bachelier,
Ecole de la miniature, Paris, 1814, in-12; Ballart, École
de la miniature, ouvrage revu par Gloquet, 1817 ; Man-
aion. Lettres sur la miniature, 1823, in-12. B.
■miATimi DBS uvRBs. Ge genre de peinture ftit, dans
«a splendeur, un art firançais et surtout parisien. Au
XII* siècle, ceux qui s'y livraient, les enlumineuirs, étaient
-diyà si fameux, cpi'on envoyait à Paris pour v faire faire
les plus beaux livres tUiMMn^; les miniaturistes d'Italie
■et de Flandre n'égalaient pas cenx de France, dont la su-
périorité commença dès le vm* siède, an temps de Ghar-
temagne. Il y avait aussi de célèbres écoles ou ateliers
de jointure pour rornementation des manuscrits à
Bourges, à Poitiers, et surtout à Tours. Un livre, et même
«ne miniature on peu importante, était l'œuvre de
Ïlusieurs artistes, parmi lesquels il y avait des femmes,
'art de la peinture ne fleurit que dans les livres ius-
4in*an commeocement du xv* siècle; il s'exerçait dans
les missels et les livres de lutrin, ainsi que dans les
Eeures et les Bibles en usage ches les ISunilles opulentes.
"Cm livrear grands ou petits, offrent toutes les parties con-
stitutives de la peintore, même des plus vastes propor-
tions : art de la composition, ordonnancement habile
«d'un scjet avec peti ou beaucoup de perwnnages, expres-
-sion et gràœ des figures, vigueur ou naïveté de l'exécu-
lion, éclat et Jeu de (a couleur, tout s'y trouve. Ges qua-
Hfeés portées à mt point pins ou moms élevé firent et
font encore le prix de ces beau livres mannseriti,
établis à grands frais, et que lea amateurs payent ai
cher aujourd'hui. Toutes les grandes bibliothèques
publiques, et, en France, notamment la BibUotfaèqoe '
nationale de Paris, ont des collections on des spécimens
de ces splendides manuscrits ornés de miniatures. Le
phis beau peut-être fut à la Bibliothèque de ïa ville
de Paris s c'était un Pontifical dit Missel de Juviiiat
des Ursins, exécuté entre 1440 et 1457, pour Jacques
Ju vénal des Ursins, administrateur de l'évêché de
Poitiers, et fils de Jean Juvénal des Ursins, qui fut
prévêt des marchands de Paris. Il était grand m-fol.,
et d'une ridiesse sans pareille par ses ornements mai^
ginaox, où l'on voyait de délidenses arabesques, par
3,222 lettres historiées, et surtout par 140 grandes
miniatures, vrais tableaux d'histoire, peints largement,
bien qu'avec une grande finesse. L'ensemble des mi-
niatures tormait comme un musée des costumes, des
armés, des instruments de toute espèce, des édifices
et des meubles de l'époque. On y remarquait quelques
vues du vieux Paris, qui ne se trouvent plus guère
que là{ 13tt de ces miniatures avaient pour cadre une
grande lettre initiaie richement peinte. Ge Missel,
acheté 3U,0(M) fr., par Amb. Firmin Didot, dans uns
vente publique fiûte àparis en 1801, avait été cédé par
lui, au même prix, à la ville de Paris. Il périt dans
l'incendie de l'UOtei-de-ViUe (mai 1871). — - Presque
tous les miniaturistes sont demeurés inconuus; Is
plupart vivaient dans les monastères. Mous citerous:
au xiu* siècle. Guide de Sienne, Simon Memmi, et Fran-
çois de Bologne; au xiv*, Cibo; auxv*, D. Lorenzo, Fra
Bemardo dit Buontalenti , Gherardo, Bartolommeo délia
Gatta, Agosto Decio, Stefianeschi, Pletro Gesarei ; au xvi*,
le P. Piiigi, Fouquet, Antoine de Gompaigne, Jules Clo-
vio, Jérôme Flcino, Jacques Argents de Fenrare,ValeBtin
LomeUino, Anne Segbers, Jean Mielich. L'art des minia-
turistes commença de se perdre à la fin du xv* siècle,
lorsque parurent les premiers essais de l'imprimerie.
On fit beaucoup moins de livres manuscrits ; les livres
imprimés les remptacèrent, et la tvpographie les orna
d'images que l'on coloria pour imiter les miniatures.
Il n'y eut plus que les riches qui purent se donner le
luxe des beaux livres chefs-d'œuvre de calligraphie et de
peinture. Alors la miniature disparut peu à peu de Frsnce;
elle se soutint encore en Italie jusqu'au xvi* siècle, mais
au siècle suivant, elle tomba partout en oubli. V, Amb.
Firmin Bidot, Missel de JacqtÊêS JuvémU des Ursins,
Paris, 1861, br. in-8». G. D— t.
MINIHIS ou MENEHIS (du celtique menechrti, maison
de moine, ou manach4U canton de terre affiranchi), nom
qu'on donnait autrefois en Bretagne à des lieux d'ssile
consacrés psr la demeure ou par la pénitence de quelque
saint.
MINIME, ancienne note de musique, appelée ensuite
Planche. Le premier emploi de cette note est dû à Plii-
lippe de Vitry (xiv* siècle). La «emé-mtiitms apparaît à la
fin du même siècle.
BIINISTÈRE. r. ce mot dans notre Dicttonnaire ds
Biographie et SHistoùre,
MIMSTËRE POBUG, magistrature amovible qui a
pour mission de surveiller et de poursuivre devant les
tribunaux la répression des crimes et délits, et d'assurer
l'action de la Justice et des lois. Le mode d'accusation
(K. Agcosation) qui était en usage chez les anciens Ro-
mains, le système de la compensation pécuniaire adopté
psr les Barbares après la chute de l'Empire, l'ussge dn
duel Judiciaire dans les temps féodaux, étaient incompar
tibles avec une institution de ce genre. Le Ministère
public ne prit naissance en France qu'après la constitu-
tion du Parlement : les officiers qui le composèrent
furent appelés gens du roi ; c'était le procureur général
et les aoocats du roi (K. Paocoasua, Avocat GéiiésAL).
Leurs attributions furent très-étendues dès l'origiDe :
outre le <hroit de poursuite qui leur appartenait au cri-
minel, ils apportaient les ordres du prince au Parle-
ment, étaient souvent consultés sur les lois proposées,
en requéraient Tenregistrement , reuuéraient aussi tout
ce qui était utile au maintien de Tordre public et au
bien de l'État, et veillaient à la conservation de Panteriti
royale, des prérogatives de la couronne, des dnnts ds
domaine, des lois fondamentales de la monarchie, dei
libertés de la nation, et surtout des libertés de l'Églisi
de France. Persuadés que, pour bien servir le. roi, il
fallait savoir résister à sa volonté, et que, comme le dispH
l'avocat général Omer Talon au xvn* siècle, a*ils étaient
les gens du roi, ïHm étaient aussi \ips.gens de la
MIN
1259
MIR
M let tH pTotmt«r pluflîeun fois (il Juin 1470, 13 man
i417, 14 JftOT. 1555, etc.) contre les aliénations de di-
vorses parties du domaine de TÉUt. De môme, en 1590,
le procureur général de La Guesle s'opposa à Tenregls-
trement dee lettres patentes de Henri IV, portant déso-
nioD de son domaine puticulier d*avec le domaine de la
conronne. La Révolution de 1780 fit rentrer le Ministère
public dans les limites de Tautorité Judiciaire : il est
efeieé «4<>nni*hui par les procttrvurt généraux près la
Cour de cassation et la Cour des comptes, et par leurs
mfocaU généraux; par les procureurs généraux près les
Cours impériales, et par leurs avocat» généraux et leurs
1 tubitUuis; par les procure%ir$ impériaux près les tribu-
naux de l'* instance et par leurs substitut».
Sn madère civile, le Ministère public a^t, soit par
voie de réqumtion , soit (Foffio» ou par vou d^ action. Il
agit par voie de réquisition et obligatoirement dans les
causes que détermine Tart. 83 du Code d» procédure
ekfUe : 1® c^es qui concernent Tordre public, TÉtat, le
domaine, les communes, les établissements publics, les
dons et legs au profit des pauvres ; 2* celles qui concer-
nent Tétai des personnes et les tutelles; 3» les déelina-
loires sur incompétence; 4" les règlements de Juges, les
récusations et renvois pour parenté et alliance; 5** les
prises à partie; 0» les causes des femmes non autorisées
par leurs maris, ou même autorisées, lorsqu'il s'agit de
leur dot et qu'elles sont mariées sous le régime dotal, et
eénérmiement tontes celles où l'une des parties est dé-
fendue par un curateur; 7** les causes concernant ou
intéressant les personnes présumées absentes. Il peut
prendre communication des autres causes dans lesquelles
il cn^t son action néeeuaire, et le tribunal peut aussi
ordonner cette communication. Le Ministère publie ne
peut agir d'office que dans tes cas suivants : 1* pour
poursiuvre l'annulation d'un mariage non valablement
oontracté; 2* pour faire pron<Hieer l'interdiction d'un in-
dividu frappé d'imbécillité, de démence ou de fureur,
ifil est sans époux ni parents ; 3* pour suppléer à la né-
gligence des maris tuteurs ou subrogés tuteurs, en pre-
nant les inscriptions d'hypotltèques légales; 4* pour ndre
des actes conservatoires dans l'intérêt des personnes ab-
sentes; 5* pour appeler des décisions rendues par le
Conseil de discipline de l'erdre des avocats, dans les cas
. prévus par les art. 14 et 15 de l'ordonnance du 20 no-
vembre 1822.
I En matière criminelle, le Ministère public recherche
. «c poursatt, devant les Cours d'appel, les Cours d'assises
et les tribunaux correctionnels, toutes les infractions à
Tordre public réputées crimes ou délits aux termes des
lois péiiales. Pour les eontraventwns, l'action publique
s'eierce, devant les tribunaux de simple police, par les
commissaires de police, par les maires ou leurs adjoints.
Devant les tribunaux mûitaires, les fonctions du Blinis-
tère publie sont remplies par les capitaines rapporteurs
et les commissaires du gouvernement. Quand le Minis-
tère public fait des réquisitions au nom de la loi , les
Cours et tribunaux sont tenus de lui en donner acte et
d'en délibérer. 11 doit être entendu dans toutes les causes,
et n'est pas récusable. Il ne peut être admonété ni cen-
nvé par la Cour ou le tribunal devant lequel il porte la
parole. 11 liait exécuter le» Jugements et an^Hs, et requiert
à cet effet Tassistanoe de la force publique.
Une antre attribution du Ministère piid>lic est la sur-
veillance et l'action disciplinaire qu'il exerce à Tégard
des officiers ministériels de Tordre Judiciaire, du nota-
riat, du iMrroaa, des Juges de paix, etc. H a encore la
surveillaiiee des registres de Tétat civil. F. Schenck,
Traité sur te Mimstire public, 1813, 2 vol. in-8«; Del-
pon, E»»tti »ur Vhistoire de V Action publique et du Mv'
mstère vublie, 1830, 2 vol. in-8*; Ortolan et Ledeau,
U Mmutère mUdie en France, 1830, 2 vol. in-8«; De
liolèBes, Trotté pratiqué de» fonction» du Mini»tère pu-
bUc, 1843, 2 vol. in-8* ; Mas8al>iau, Manuel du Mimetàre
pMie, 3* édit., 1858, 3 vol. in-8*.
MnàSTERIUM, nom pat lequel les anciens écrivains
eedésînstiqiies désignent d'une manière générale tous les
ornements et autres objets servant à l'autel.
MINISTRE (du latin mtnisttr), haut fonctionnaire
cbarsé, dans un État, de l'une des branches de Tadmi-
■îstntion publique, dite Minietère, Un Minietre à pot'
tefeuUlê est eelni qui a un Ministère; un Minietre »an»
port^emUle, celui qui n'est appelé que pour le conseil.
l«s pouvoirs et attributions des Ministres à portefeuille,
en maee, sont t le contre-^eing des décrets impériaux
nialifs eux sttriboiîons de leurs Ministères respectifs ,
dM leur vient le titre de Secrétaire» d^État,- Tordon*
nancement des dépenses publiques; la mise à exécution
des lois et décrets par des r^lements, des instructions,
des interprétationa ; la nomination d'un grand nombre
de leurs subordonnés et agents ; le contrôle des actes des
autorités inférieures, qu'ils peuvent confirmer ou réfor-
mer ; la direction des services publics qui leur sont con-
fiés, et la préparation des mesures, décisions et r^le-
ments nécessaires. Sous la monarchie constitutionnelle,
ils étalent responsables devant les Chambres : la Consti-
tution de 1852 déclare qu'ils ne peuvent être meniJ)res
du Corps législatif, qu'ils dépendent uniquement de l'Em-
pereur, et que le Sénat seul peut les mettre en accusa-
tion. Des Ministres sans portefeuille ont été institués à la
fin de 1860, pour porter la oarole au nom du Gouverne-
ment dans le Sénat et dans le Corps législatif ( F. le
Supplément), — Les agents diplomatiques qui viennent
après les ambassadeurs (F. eemo^ sont appelés Minietre»
ou Envoyé» plénipotentiaire», quand Us sont chargés
d'une mission spéciale et temporaire, et Mini»tre» r&i^
dent», quand Ils sont à poste fixe. B.
MINNESINGERS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^Histovre,
MINORITÉ. V. MiNBua.
MINUSCULES (du latin minusculu», un peu plus petit),
se dit, par opposiaon kmaiu»euies, des petites lettres em-
ployées dans Técriture cursive ou imprimée.
MINUTE, en termes de Pratique, signifie l'original, la
première rédaction des pièces Judiciaires ou des actes
civils. Les minutes restent déposées chez les notaires, les
Jases de paix, les greffiers des tribunaux. Les notaires
doivent çvder la minute de tous les actes qu'ils reçoivent
(Loi du 25 ventôse an xi); ils ne peuvent s'en dessaisir
que dans les cas prévus psr la loi et en vertu d'un Juge-
ment, et alors ils en dressent une copie figurée, que le
président et le procureur impérial certifient, et qui est
substituée à la minute f asqu'a la réintégration de celle-
ci. Le Code pénal (art. 439) édicté des peines contre celui
qui aurait brûlé ou détruit des minutes.
mnoTB, la 12* partie du module dans les ordres toscan'
et ionique, la 18* dans les ordres ionique et corinthien.
MIR, sorte de trompette faite d'écorcede bouleau, quel-
quefois longue de plus d'un mètre, et qui rend, un son
fort et perçant. Les bergers suédois s'en servent pour
éloigner les bêtes féroces.
MIRACLE, en latin mtraculum (de mtran, admirer,
être surpris), événement contraire aux lois constantes de
la nature. Telle est la transformation de l'eau en vin
par la parole de J.-C, ou la résurrectibn d'un mort.
J.-J. Rousseau a dit ; « Dieu peut-il faire des miracles f
Cette question serait impie, si elle n'était absurde. Ce
servit raire trop d'honneur à celui qui la résoudrait né-
gativement que de le punir, il suflSrait de Tenfermer. «^
MiaACLSs,nom qu'on donna aux premiers essais de l'art
tliéâtral en France, où Ton représentait les merveilles de
la vie des Saints.
MIROIR (de miran, regarder fixement), surface polie
3ui reproduit par réflexion l'image des objets placés au
evant. Les Anciens se servirent de miroirs en métal. On
voit dans V Exode (ch. xxxviu, v. 8) que Moïse fit un
bassin d'airain avec les miroirs des femmes. Générale-
ment on se servit d'un alliage d'étain et de cuivre, puis
d'argent; on voit, au musée de Naples, deux miroirs
d'or provenant des fouilles d*Herculanum. Pline le Nar-
turaliste mentionne aussi des miroirs en pierre obsi-
dienne, comme ceux que les Espagnols trouvèrent chez
les habitants du Pérou. Néron avait, dit-on, un miroir
d'émeraude. Selon Suétone, Domitien fit garnir une ga-
lerie de pierres réfléchissant les objets et qu'il appelle
phmigite»; on ne sait ce qu'il faut entendre par iL Les
miroirs faits à Corinthe et à Brindes étaient les plus es-
timés. On fabriquait à Sidon des miroirs avec des plaques
de verre garnies par derrière d'une feuille de métal ; mais
il ne pwalt pas qu'ils soient devenus d'un usage général,
et ils ne sont Jamais mentionnés parmi les meubles pré-
cieux. Les miroirs en alliage de métaux se ternissent
promptement, et doivent -être constamment nettoyés et
poUs : aussi on y attachait une éponge et une pierre
ponce. Ceux que Ton conserve dans les musées modernes
sont ronds ou ovales, et ont un manche on une poignée.
L'nsage de décorer les appanements avec des miroirs de
granctos dimensions ne fut pas inconnu, ainsi que le
prouve la description de la chambre de Vénns par le
poète Claudien; Sénèque {Ep, 85) parie aussi de ce raf-
finement de luxe. Les Modernes font leurs miroirs en-
glaces de verre très-uni eft étamé. Cette intention était
connue au xm* slèelet car John Peckham, moine fraa«
MIS
12«0
MIS
dteaiii ânslais, en fait mention dans un Traité d'optique
qu'il écrivit en 1272. Les miroirs ont ioué, à certaines
époques, un r6Ie important dans la toilette : un chroni-
queur dit qu'au temps de Chariemagne les religieux de
rordro de S^-Martin-de-la-Tour en portaient sur leurs
souliers ; au xvu* siècle, les dames en avaient d'inscrust^
dans leurs éventails, ou en suspendaient à leur cein-
ture. B.
viROiR, en termes de Marine, cartouche de menuiserie
où se niettent le nom du vaisseau, quelquefois les armes
du pays ou de Tarmateur, le tout entouré fréquemment
de sculptures.
MIROIR DB SAXE, en allemand Sachsen''spiegel, Code
contenant Tancien Droit de la Saxe, et compilé vers Tan
1215 ou 1218. Il se compose de coutumes populaires et
de sentences Juridiques d*échevins, auxquelles le rédac-
teur, Ekkard de Repkow, a ajouté des suppléments Urés
du Droit romain et du Droit canon. Une édition en a paru
à Beriin en 1827.
MraoïR DE sooABE, OU allemand Schwaben-spiegel ,
Gode contenant Tancien Droit de la Souabe ou des Aie-
mans, et compilé en 1268 ou 1282. Il jouissait d'une au-
torité plus grande que le Miroir de Saxe, Le rédacteur
a ajouté des suppléments tirés des Capitulaires, des lois
de rEmpirc, du Droit romain et du Droit canon, quelque-
fois même de la Bible.
mRorR DO SALUT (Le), en latin Spéculum hwnanœ nal-
vaiionis, titre d'un ouvrage populaire qui, comme la
Bible des pauvres {V.ce mot)^ après avoir couru en ma-
nuscrit pendant les derniers siècles du moyen &ge, fut
un des premiers dont l'imprimerie s'empara. Il contenait
un certain nombre d'images ou tableaux, avec de courtes
explications en latin, et servait de texte aux prédications
dû Ordres mendiants. Les artistes en tirèrent beaucoup
> de sujets de sculpture et de peinture.
, MIROITIERS, autrefois airoiriers , ancienne corpora-
" tion dont les statuts dataient de 1581, et c(ui fut bientôt
augmentée par l'adjonction de celles des bimbelotiers et
des doreurs sur cuir. L'apprentissage était de 5 ans; le
brevet coûtait 50 livres, et la maîtrise 500.
lUROLOGUE (du grec moi»'a, destin, mort, et logos,
discours), nom qu'on donne, chez les Grecs modernes, à
un chant funèbre par lequel on déplore U mort d'un pa-
rent. Ce sont les femmes qui composent et chantent les
mirologues. Ce genre d'élégie est une tradition de l'anti-
quité : dans V Iliade d'Homère, la famille de Priam exprime
ses lamentations sur le corps d'Hector; le monologue que
Sophocle prétest Electre, pleurant sur l'urne qu'dle croit
renfermer les cendres d'Oreste, est un véritable mirologue.
IfIRZA (de mir on émir, seigneur, prince, et de sa,
abréviation de sadeh, flis de), nom que portent généra-
lement les ministres en Perse.
MISAINE, de l'italien mezzano, placé au milieu. Le
mât de misaine est celui qui est placé à l'avant d'un
navire, entre le beaupré et le grand màt. La vergue et la
hune de ce màt s'appellent vergue de misaine et hune de
misaine; sa voile, qu'on nomme simplement la misaine,
■ert par tous les temps, et ne se supprime que devant
une tempête irrésistible.
MISANTHROPIE, en grec misanthrôpia, haine contre
les hommes. Ce sentiment est le dernier degré du mécon-
tentement qu'un homme peut ressentir contre le genre
humain; c'est la déclaration de guerre d'un seul contre
tous. Il naît de Tingratitudo des hommes, de grandes in-
fortunes non méritées, de l'inflexibilité d'un caractère in-
capable de transiger avec les faiblesses et les vices de la
société, d'une humeur frondeuse et d'une fierté égoïste,
et parfois de l'amertume d'un amour non partagé. La
misanthropie vraie, morale, philosophique, est oeUe oui
naît au spectacle des vices et des faiblesses du monae,
dans une Ame vivement éprise de l'amour de la vertu.
Lemisantlirope réel est le f Jknenx Timon d'Athènes, que
Plutarque a dépeint dans les Vies d'Antoine et d*Atci-
biade, Lucien lui a consacré un dialogue sous le titre de
Timon ou le Misanthrope; mais il en a singulièrement
altéré le caractère : Timon est devenu sceptique et rail-
leur, en se voyant, au sein de la pauvreté, abandonné de
ceux qui le courtisaient dans l'opulence. Libanius en a
, fait l'objet d'une de ses Déclamations^ expression amère
du découragement de l'homme eu face des maux de la
vie, et de la haine que lui inspirent l'hypocrisie de ses
contemporains et l'amour qu'il ressent pour Aldbiade;
car, par une contradiction familière au cœur humain,
Tannemi de tous le^ hommes est invinciblement attiré
ten l'un d'eux, comm^l'Alceste de Molière l'est vera Cé-
Uinàiie. Pendant le moyen âge, on ne mit point «p «eène
la misanthropie, sentiment propre lox sodélés dMà
vieillies; mais elle revint avec le lUnon d^ Athènes de
Shakspeare : c'est une sorte de grand seigneur généreux
et dupe, auquel la trahison de prétendus amis inspire
bientôt une misanthropie qui s'exhale en imprécations
sanglantes, pour aboutir à des accès de fureur d'une
sauvage énergie. A cèté de Timon, misantlirope d'occa-
sion, se trouve son ami Apémante, qui l'est par principe,
plein de haine et de mépris pour les trahisons et les
faussetés de l'espèce humaine. Cette double étude de la
misanthropie est plus vivante et plus forte que ses de-
vancières, dont elle reproduit d'ailleura les principaux
traits. — Vint ensuite le Misanthrope de Molière. Alceste
est un homme qui se sent mal à l'aise dans un monde
corrompu ; il réagit fortement contre les vices da temps,
mais donne lui-même à sa misanthropie le plus éclatant
démenti par son amour pour une coquette qu'il veut
épouser. Ce philosophe guidé par la notion abstraite du
Juste, ce cœur droit foulant aux pieds les banales et
hypocrites convenances du monde, et cédant à son amour
pour Célimène, plus fort que sa misanthopie, offre la
leçon morale la plus frappante et la plus touchante de
toute la pièce. Satire particulière du siècle de Louis XIV,
ce caractère d' Alceste a encore le mérite d'être une satire
générale de l'humanité.
L'expression de la misanthropie était tellement haute
dans Molière, qu'elle ne pouvait plus que déchoir en chan-
geant de caractère dans les imitations qui en ont été
faites. Le Plain Dealer (l'homme tnne) de Wicherley ne
E résente plus qu'un certain Manlv, capitaine de vaisseau,
rutsl et impoli, qui finit par aojurer sa misanthropie.
Fénelon, dans son XVII* Dialogue des Morts, où il met
en scène Socrate, Alcibiade et Timon, fait consister le ca-
ractère du misanthrope en une sorte de Juste-milieu.
Marmontel a fait un conte moral, le Misantlirope corrigé,
où Alceste, retiré à la campagne, prend l'amour de l'hu-
manité, en devenant témoin des vertus domestiques <iue
lui offire son nouvel entourage ; c'est une anivre inspirée
par cette chimère tant caressée au xvin* siède, le bonheur
aux champs. Dans ce siècle, la misanthropie prit un
autre caractère : au lieu de s'attaquer aux vices des indi-
vidus, le Uié&tre mit en cause la constitution même de la
société, à l'exemple des publicistes et des philosophes.
Un certain F. Delisle donna Tûnon le Misanthrope, co-
médie remplie d'attaques contre l'ordre social, devançant
ainsi les diatribes si gaies des contes et des romans de
Voltaire, les amères récriminations des discours de Rous-
seau, et les épigrammes badines des Lettres persanes de
Montesquieu. J.-J. Rousseau, dans sa Lettre sur les
spectacles, ayant attaqué l'Alceste de Molière, avec le-
quel il avait plus d'un lien de parenté, et prétendu qu' Al-
ceste devait être plein de sensibilité pour les malheurs
publics et d'inditTérence pour tout ce qui le touche per-
sonnellement, Fabre d'Ëglantine donna <« PhUinte de Mo^
lière, où Alceste, type de perfection idéale et surhumaine,
est un modèle accompli de générosité et de philanthropie,
un redresseur de tous les torts. En Allemagne, la misan-
thropie. Jointe à une sorte de sentimentalité mélanco-
lique, donna naissance aux drames du MisanUwope par
Scniller, et de Misanthrope et Repentir par Kotzebfle.
Mais de tous les écrivains qui ont traité de la misan-
thropie ou l'ont produite sur la scène, Molière est le seul
qui l'a saisie dans ce au'elle a de vrai, de profbnd, d'uni-
versel, et en a élevé le caractère au plus haut point où
l'on puisse atteindre. V, A. Widal, Des divers caractères
du Misanthrope chez les écrkHÛns anciens et modernes,
Paris, 1851, in-S«. F. B.
MISCHNA. V, -TàîMVD, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire»
MISE AU POINT, en termes de Sculpture, travail de
copie d'une statue par un ouvrier intslUgent nommé
praticien, La mise au point se lait ordinairement pour
l'exécution en marbre ou en pierre d'une statue modelée
en terre grasse par un sculpteur; c'est une manière de
calque sur relief, exécuté ainsi : on assujettit au-dessus
du modèle à copier un cadre un peu plus grand que la
masse générale de ce modèle, et on y attadie des fils k
plomb en diven endroits. On place un cadre exactement
semblable au-dessus du bloc de marbre ou de pierre dans
lequel on doit tailler la copie à faire. Le praticien, avec
un compas à branches un peu recourbées en dedans,
mesure, sur le modèle, la distance en largeur et en hau-
teur de tel point au fil à plomb qu'il a Jeté devant, la-
reporte pour la hauteur sur le bloc, puis arec un trépan
y perce un petit trou Jusqu'à une profondeur un peu
moindre que la largeur relevée. Il procède ainsi un pmé
MIS
1261
KllT
ttombte de fols, en perçant des points dont il calcula la
place, et qu'il xniittiplie de manière à cerner, poar ainsi
dire, les pâitieB du marbre ou de la pierre destinées à
tomber sons le cisean pour dépoailler le bloc des njasses
inutiles voilant la statue qui doit en sortir. Le prati-
cien se sert aussi, dans le cours de cette opération, d*un
«Qfnpas à trois branches, qui lui permet de relever à la
fois trois distances diiTérentes. Cest après la mise an
point qa*il commence à dégrossir le bloc; et c*est après
« dégrossissement que le statuaire lui-même met la der-
■ière main à son œuvre. C. D— t.
laSB DB VOIX, en termes de Musique, art de poser
le son, d'en coordonner rémission avec les mouvements
de la respiration, de ronfler progressivement autant que
4e comportent le timbre et la puissance de Torgane, et de
le diminuer Jusqu'à l'émission la plus douce. Dans les
Anciennes écoles de chant de l'Italie, la mise de voix était
ooe étude de plusieurs années.
MISB EN DEMEURE. V. Demecre.
MISE EN SCÈNE, en termes d*Art dramatique, travail
par lequel on règle dans tous ses détails et dans son en-
semble la manière dont les acteurs doivent représenter
une pièce. Cest le fruit des répétUUms^ et c'est à force
d'études, d'essais, de calculs. Joints à une grande en-
tente, acquise ou naturelle, que l'on arrive à une bonne
mise en scène. On peut l'appeler le complément de la
pensée de l'auteur, et en beaucoup de points sa traduc-
tion matérielle, son expression extmeure. Elle met l'har-
monie dans l'art de représenter un drame.
MISÈRE, une des formes du mal physique (K. Mal),
celle qui frappe plus particulièrement les classesouvrières.
La Rochefoacauld-Llanoourt disait à la tribune de l'As-
semblée constituante : « La misère publique est un tort
des gouvernements. » Cest là une opinion fausse, qui
contient en germe toutes ces théories socialistes, vides et
infécondes, qui, par les promesses trompeuses qu'elles
prodiguent aux classes souffrantes, sont périlleuses pour
la société. Qu'un gouvernement, par son incurie, sa ra-
pacité, son ignorance, ses prodigalités, contribue à plonger
4ana la détresse une population nombreuse, cela n'est
pas douteux; mais il ne fait qu'ajouter un surcroît à des
manx qui ont des causes plus profondes. L'histoire de la
oiisère est aussi vieille que le monde, parce que la mi-
«ère est une loi constante de la société humaine, nn fait.
primordial, universel, qui s'est produit et se produira
invariablement dans tous les temps et chez tous les
peuples. € II y aura toujours des pauvres parmi vour, »
a dit la Sagesse inspirée; et, en effet, Tinég^ité entre les
individus, inégalité que présente l'être physique comme
l'être moral , existe nécessairement parce que l'homme
est une créature intelligente et libre, qui fait de ses forces
et de ses facultés tel emploi qu'il lui plalL On ne doit
dmc pas faire remonter l'origine de la misère à l'organi-
sation politique et civile, et à l'action des pouvoirs pu-
blics ctiaigés de maintenir cette organisation : la misère
est dne, tantôt aux vices, anx passions, aux désordres de
eeaz qui la subissent, tantôt à des causes qui leur sont
étrangères, telles que l'élévation du prix des objets de
première nécessité, l'abaissement de la valeur du travail,
raocrolssement des charges de la famille, toutes choses
qui diminuent, suspendent ou détruisent les ressources
sur lesquelles repose la vie journalière. Pour supprimer
la misère, il faudrait supprimer les maladies, la baisse
des salaires, les chômages, l'inconduite, l'imprévoyance
et la paresse. Tout ce que peuvent les particuliers et les
nmvemements, sons l'empire de la morale naturelle et
des religions positives, c'est de combattre la misère,
cfeet de loi apporter des adoucissements. V, Assistarcb
rmuQOE, Paupérisme.
MISÉRIGORDE. F. Dague et Stalle.
MISLA^ nom que donnent les Lithuaniens à des poésies
éoigmatiques dans la forme d'interrogation.
MISOLOGIE (du grec misot, haine, et logot, raison),
disposition où sont certaines personnes à répudier fa
raison en certaines matières, notamment dans les ques-
tions religieuses.
BlISSEL, en latin misscAe (de mma^ messe), livre qui
contient le texte des messes propres aux différents Jours
et aux Dfttes de l'année. Le pape Gélase rassembla les
prières dont on se servait avant lui pour le sacrifice et
qui passaient ponr venir directement des Apôtres, les
mit en ordre, et ▼ ajouta sans doute de nouveaux offices
ponr les Saints dont le culte était plus récent. Son re-
cueil, intitolé Sa/cramvntaire, fut plus tard corrigé par
le pqw Grégoire le Grand, qui en retrancha certidnes
prives et en i^outa d'autres, mais sans toucher au Canon*
Autrefois il y avait trois sortes do Missels s dam les uns
on ne trouvait que les Collectes, les Préfaces et le Canon ;
d'autres contenaient en outre tout ce qui se chante dani
le chœur, l'Introït, le Graduel, l'Alleluia, le Trait, l'Of-
fertoire, le Sanctus et la Communion ; les Misselsplémers
renfermaient avec tout cela les Leçons, les Épitres et les
Évangiles. Depuis la Renaissance, plusieurs évènues ont
fait rédi^ des Missels particuliers : là môme où la litur*
gie romaine a été ensuite rétablie, les Missels contiennent
toujours cerddns offices et certaines prières spéciales.
Chaque Ordre religieux a aussi son Missel, avee l'office
de ses Saints. B.
îîîllînMM^Sl^' } y^ °oû^ Dictionnaire de Biogrxh
KONS.^^^''! P^^etd^Histoire. "^
MISSIVE (du latin missio, envoi ), lettre de circon-
stance concernant des affaires particulières, et destinée
à être envoyée sans délai.
MISTÈQUE (Idiome). K Mexique (Langues du).
MISTRAL. V, ce mot dans notre Dictionnain de Duh-
graphie et d* Histoire,
MITHRAS, dieu des anciens Perses. Dans les bas-reliefii
antiques, il est presque toujours représenté sous la figure
d'un Jeune homme, coiffé du- bonnet phrvgien, vêtu de
la candys ou manteau flottant, du saaérè ou tuniqne
courte, et de l'espèce de pantalon appelé par les Grecs
anaxyris. Il presse du genou un taureau abattu, lui tient
le mufle de la main gauche, et lui plonge de la droite un
poignard dans le cou. Cette scène rappelle soit l'homme-
démon frappé par Mithras d'après le Zend'Avesta, soit
le sacrifice offert par Blithras à Ormuzd pour la rédemp-
tion du péché du premier homme, ou bien le soleil tou^
Jours Jeune entrant dans le signe du Taureau. Ailleurs,
Mithras, roi du ciel mobile, est reoonnaissable au sym-
bole solaire de sa tête de lion, à deux ailes descendantes
qui indiquent son origine divine et ses fonctions célestes,
à deux autres ailes qui s'abaissent vers la terre, dont il a
aussi le gouvernement, enfin aux deux clefs qu'il tient à
la main, et oui ouvrent les portes du soleil et de la lune;
quelquefois il ne tient qu'une clef, et l'autre main porte
un sceptre; le serpent enroulé autour de lui est l'image
de la route tortueuse que le soleil, selon Topinion des
Anciens, suivait dans l'écliptique.
MITOYEN, MITOYENNETÉ. En Droit, mitoyen se dit
d'un mur, d'un fossé, d'une haie, d'un puits, etc., placés
sur ]b, linûte commune de deux propriétés. La ligne sé-
parative se trouve au milieu ; mais les deux parties des
objets mitoyens étant inséparables et ne formant qu'un
seul corps, ces objets sont censés communs entre les
deux voisins. Le Code Napoléon (art. 6M-676) a réglé
tout ce qui concerne la mitoyenneté. Tout mur servant
de séparation entre b&timents Jusqu'à Yhéberge (point où
l'un des deux bâtiments de hauteur inégale cesse de pro-
fiter du mur commun), ou entre cours et jardins, et
même entre enclos dans les champs, est présumé mi-
toyen, s'il n'y a titre ou marque du contraire. Il y a mar-
que de non-mitoyenneté, lorsque la sommité du mur est
oroite et à plomb de son parement d'un côté, et présente
de l'autre un plan incliné, ou lorsqu'il n'y a que d'un
côté ou un chaperon ou des filets et corbeaux de pierre
qui y auraient été mis en bâtissant le mur. Dans ces cas,
le mur est censé appartenir exclusivement an proprié-
taire du côté duquel sont l'égout ou les corbeaux et filets
de pierre. La réparation et la reconstruction da mur mi-
toyen sont à la chargé de tous ceux qui y ont droit, et
proportionnellement au droit de chacun : cependant tout
copropriétaire peut se dispenser d'y contribuer en re-
nonçant à la mitoyenneté. Tout copropriétaire peut faire
bâtir contre un mur mitoyen, et faire placer des poutres
on solives dans toute réjMdssenr de ce mur, à 54 ndlli-
mètres près. Tout copropriétaire peut faire exhausser
le mur mitoyen; mids il doit payer seul la dépense de
l'exhaussement, les réparations dVntretien au-oessus de
la hauteur de la clôture commune, et, en outre, lin*
demnité de la charge en raison de l'exhaussement et 8ni«
vaut la valeur i le voisin qui n'a pas contribué à Tex-
haussement peut en acquérir la mitoyenneté, en payant
la moitié de la dépense qu'il a coûté, et la valeur de la
moitié du sol fourni pour l'excédant d'épaisseur, s'il y en
a. Tout propriétaire Joignant un mur a la faculté de le
rendre mitoyen, en remboursant an maître du mur la
moitié de sa valeur. Il est interdit d'étabUr dans un mur
mitoyen aucune ouverture ou fenêtre, même à verre
dormant. — Tous fossés qui séparent les héritages sont
présumés mitoyens, s'il n'y a titre ou marque du contraire t
ils doivent être entretenus à firais commans (F. FosséV
MU
1262
MOB
Toute haie agd eépare des Mrltages. est réputée tnhoyeaDe,
à moins qvil n*f ait <|a*ao seul de ces héritages en état
de cl6tiite« on sil n*y a titre cm possession soffisante an
4»ntraire (F. Haii).
MITRAILLE, balles et autres petiu projectiles lancés
par les bouches à feu. On fait de la mitraille arec des
débris de poterie, des cailloux, des morceaux de ferraille,
qu^on met dans des gargousses en fér-blaoc, pour ne
point endommager Tàme des pièces. Elle ne sert que
contre les masses, parce qu*elle s'écarte comme le petit
plomb, et il ftmt être à une faible distance de Tennemi ,
car elle ne porte guère à plus de 500 met. L'emploi de la
mJtndlle est presque contemporain de l'emploi de l'aitil-
lerie; il en est fait mentïon à propos de la bataille de
Harignan, en i5i&.
MITRE, nom qui s'appliqua, dans le principe, en
iarèce, à une espèce de ruban ou de bandeau tissé qu'on
loulait autour de la tête en façon de diadème. Il désigna
aussi la tian (F. ce mot) des rois assyriens, et, en gé-
néral , toute ooilftira pyramidale en usage chez les Asia^
tiques. La mitre était surtout en usage en Phrvgie, chez
les prêtres de Cybèle, et dans la Syrie, d'où elle fut appor-
tée à Rome par des courtisanes. De là le discrédit dont
elle fut ûnppée au temps de TEmpire romain. Par un
reWrement d'opinion, elle fut, au nr* siècle en Afrique, au
▼m* en Espagne , adoptée par les vierges consacrées à
Dieu. Dans certaines contxîtes d'Asie et d'Afirique, les
femmes Juives portent encore aujourd'hui une sorte de
mitre. — Le nom de mUrs désigne, chez les peuples car
iholiques, un bonnet pointu, fendu par le haut, garni de
fanons pendants sur le dos, et que portent les évêques dans
les cérémonies religieuses. Les fanons ont été empruntés
à la tiare royale des Assyriens. La mitre n'eut d'abord
que 10 oentimèt. environ de hauteur; elle s'éleva à 20
centimèt. an xiv* siècle, à 30 an xv*; c'est au xvu* qu'elle
a pris l'élévation qu'on lui voit encore ai^ourd'hui. La
mitre épiseopale fut adoptée de bonne heure dans l'^se
d'Orient; en Occident, il n'en est pas parlé dans les
anciens Sacramentaires et les premiers livres de litur-
ffle, et elle ne devint d'un usage général pour les hauts
dignitaires qu'à dater du xi* siècle. Une des plus an-
ciennes mitres que l'on conserve est celle de S' Thomas
de Cantorbéry, qui est à la cathédrale de Sens. Une lettre
du pape Galixte II prouve que, pour porter la mitre, les
évêques avaient besoin d'une permission du souverain
ponttfe. A partir du concile de Lyon, en 1245, les cardi-
naux abandonnèrent la mitre pour le chapeau. Certains
abbés obtinrent du Saint-Siège le privilège de la porter :
Hugues, abbé de Cluny, en est le premier exemple, en
i08& Le pape Léon IX accorda, en 1053, aux chanoines
de Bamberg le droit de porter la mitre. Alexandre U le
donna anssi à Wratislaw, duc de Bohême. Las chanoines
de Lvon et de Besançon, le prieur et le chantre de la col-
légiale de Loches le reçurent également. Un règlement
de Clément IV porta que, dans les conciles et les synodies,
les abbés pourraient avoir une mitre garnie d'orfroi, mais
non de lamea d'or ou d'argent, ni de pierres précieuses.
De simples ecclésiastiques reçurent l'autorisation de
porter une mitre en soie. Le pape , comme évêoue de
Rome, prend la mitre dans les consistoires» Sur les ar-
moiries, les évêques portent la mitre de fooe en guise de
heaume; les abbés la placent de profil. — Antrerois une
mitre de papier fut un signe d'infamie imposé à quelques
oondamnéSi On en coUla, par exemple, Jeanne d^Arc
marchant au supplice. B.
MmuL en termes de Constroction, couronnement de
terre cuite qu'on place sur les cheminées pour les em-
pêcher de fumer et de recevoir les eaux pluviales.
MiTMt (Arc en). F. Arc ANeoLAiaB.
MIURUS (Vers), c-à-d. en grec qui a une queue
moindre, espèce d'hexamètre, dont le dernier pied, au
Ueu du qwndée légitime, oiSrait un ïambe ou un pyr-
iliiques
Luctum habeî | œtêm\um ob lUtes fe\cunda iVi|^.
MDŒ (Idiome). V. Mexique (Langues du).
BUXIS. V. MÉLOP^
MIXO-LYDIEN (Mode). V. Htpbr-doaien.
MIXTE ou CONNEXE (Ton). Cest, dans le PUdn-
chant , un ton qui emprunte plusieurs notes à son au-
tkentiitue^ s'il est plaqal (F. ces mots)^ à son plagal, s'H
est authentique. Ainu. l'authentique qui descend de plus
d'un ton au-dessous de sa finale est mixte; et le plagal
qui monte plus d'une rixte au-dessus de sa finale est éga- .
lement mixte. Quand les tons mixtes atteignent au grave
et à l'aigu les limites de la double échelle diatonique de
l'authentique et du plagal qui les eompoeent, on les
nomme communs parfaits, F. G.
MixTB (Le), en latin mxtum, coup à boire qu'on don»
nait, dans les monastères Bénédictins, anx lecteurs de
table, anx serviteurs de cuisine, et à ceux qui, pour une
nUson quelconque, étaient obligés de prévenir l'heure du
repas. On y ajoutait un peu de pain.
MIXTURE (Jeux de), nom dont on se sert quelquefois
pour désigner le Pleit^eu de l'orgue (F. Jeu — Plein).
MNÉMONIQUE ou MNÉMOTEGHNIE (dugrecumAfil.
mémoire, et tekhnê, art), art d'aider et de fortifier b
mémoire , de créer une mémoire artificielle. Toute Mné-
motechnie repose sur VAssoàaJtMn des idées (K. ee mot)
et consiste à rappeler des faits compliqués et d'un sou-
venir difficile, au moyen de combinaisons plus simples
et plus faciles, ou à fier entre eux des noms, des dates,
des faits qui se présentent isolés. Cest sur les rapports de
lieu, de ressemblance ou ^analoffie, qu'on s'appuie prin-
cipalement On emploie aussi le rhythme et U rime, et
l'on exprime en vers techniques les oonnaissanoes diffi-
ciles à retenir, comme a fait Lancelot dans son Jardin
des racines grecques, — Les Anciens connaissaient la
Mnémotechnie, et en attribuaient l'invention au poète
Simonide. Gcéron (De Oraiore, II, 86) décrit lea
de la 7opoio0t6 ou mémoire locale ; Quintilien (XI, 2 ) et
Pline le naturaliste (VII, 24^ mentionnent également cet
art Raymond Lulle en mit à profit les procédés dans son
Ars magna. A partir du xv* siècle, on vit ee produire
de nombreuses théories de Mnémonique, entre autres
celles de Publicius (1482), de Rombercb (1533), de Gra-
taroli (1554), de Jordano Bruno (1558), de Maraforti
(Ars memoruBp 1002), de B. Porta {Ars reminisoend%,
1002), de Lambert Schenckel (Gaxophylacium, 1610),
notre siècle, lea procédés de la Mnémotecimie ont été
étudiés avec une nouvelle ardeur, par Kaestner (JMmo-
nique)^ Kluber (Compendium de iinémonùiue, 1804), le
baron d'Arétin (Art de la mémoire pratique^ 1810), Fe-
naiele (Nouvri Art de la mémoire, Londres. 18iS), Aimé
Paris {Principes et appliccUions diverses ae la ÈÊnémo-
technie, 7* édition, Paris, 1833), les frères Félicien et
Alexandre de Castilho {Traité de Mnémotm^ique, 5* édi-
tion, Bordeaux, 1835).
MNÉMOSYNE, déesse greoqoe, mère des Muses. La
statuaire la représente ordinairement enveloppée d'un
nd manteau, sous lequel elle élève sa main droite vers
lenton dans l'attiûide du recueillement; ou bien
assise, la tête p«ichée, une main cachée dans eon sein,
et un pied sur un escabeau.
MOALLAKATS. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
MOBILE, en termes de Philosophie, principe ou cause
de résolution et d'action. Bien que le langage ordinaire
embrouille et confonde les mots^ on peut dire que, sous
le nom de Prine^es des actions humaines, se rangent
les MotifSi qui sont raisonnes, et les Mobiles, qui ne le
sont pas.
MOBILIER, expression qui, en Droit, a la même
signification cnie Meuble {V. ce mt^).
MOBiusa (Crédit). V. Cafoir.
MOBILIÈRE (Contribution), une des Contributions
directes en France. Elle est répartie par le Conseil géné-
ral de chaque département et par les Conseils d'arron-
dissement entre tous les habitants, français et étrangers
de tout sexe. Jouissant de leurs droits, et non réputés in-
digents, proportionnellement à la valeur locative des ha-
bitations, mais seulement pour les parties de bftttment
servant à l'habitation personnelle : ainsi , la boutique,
les magasins d'un négociant, les classes , réfectoires et
dortoirs d'un maître de pension , en sont exempts. Les
personnes logeant dans des chambres ou dans des appar-
tements ^;arnis sont soumises comme les autres à cette
contribution. La taxe mobilière peut se payer en plu«
sieurs lieux, si le contribuable a plusieurs domieiles. Le
prix du loyer ne détermine pas toi^ours la valeur loca-
tive; cette valeur est estimée par les répartiteurs, mais
le contribuable qui se croit lèse peut réclamer au Conseil
de préfecture, en s'appuyant sur l'exemple de deux per-
sonnes supportant, avec un loyer ésal bu supérieur, une
taxe moinare que hi donne. A Pana, en 1862, lea loge*
ments d'habitiûion de 1,500 fr. et au-dessus sont taxés,
four la contribution mobilière, à 9 pour 100; ceux de
.499 fr. à 1^000 fr., à 7 p. 100; ceux de 099 fr. à500 fir..
MOD
1261
MOD
i S^ p. lOa; ceux d» 409 fr. à 250 fr., à dp. 100; oeaz
dru» itlflor locadve inférieure à SGO fr. sont aflhuichis
de toute contribution, à Tezception de ceux des patentés,
IsKpielft sont passibles, sur tonte la partie affectée à Tha-
Intation, d*une contribution établie à raison de 3 p. 100.
Lorsque, par anito de changement de domicile, un con-
tribuable est imposé dans deux communes, il ne doit la
contribution one dans sa nouvelle résidence. Le mari doit
rtmpôt mobilier de l'habitation particulière de sa femme
séparée de biena, laaiaiMn de eorpa. Las personnes logées
gfâtuitement dans des b&timents nabitea doivent la con-
tribution mobilière sur la valeur des logeniente qui leur
sont accordés. Les locaux destinés à des réunions d*in-
térOt général ne sont pas imposables; il en est autrement
des locaux affectés aux cercles, aux sociétés littéraires et
antres. Lea propriétaires ou principaux locataires sont
responsables de la contribution des personnes logées
ches oox; ils doivent, à déflmt de p^résentation de la
quittance, prévenir le percepteur avant les déménage-
ments. L.
MouuEE na LA couBORifs , partie de la dotation de la
oooronne qui comprend les meubles meublants contenus
dans rhôtel du gaide-meubie et dans les divers palais
et étabiiaaements nationaux. Ce mobilier est inaliénable
et imprescriptible ; il ne peut être donné, vendu, enmgé,
ni grevé d'hypothèques. Les objeta susceptibles de dété-
rioration par l'usage sont inventoriés avec estimation, et
peuvent être aliénai moyennant remplacement.
MOBILISATION, ensemble des mesures prises pour
iSdre passer une année du pied de paix au pied de
MOGOBI (Idiome). 7. PéamnBfNBS (Langues).
MODALES (Propositions). Les logiciens appellent
ainsi , par opposition aux propositions al>solue$ ou caU-
9oriqu€t, dans lesquelles l'attribution est simplement
énoncée, celles dont l'attribut est modifié par une des
quatre conditions suivantes: possibilité, impossibilité,
contingence, nécessité. La théorie des propositions mo-
daies, de leurs oppositions, de leurs conversions, et des
sy Uogiames qui en sont formés, an point de vue de lln-
fliience qa'exerce sur la conclusion la modalité des pré-
misses, a été développée par Aristote dans son traité de
V Interprétation et dans les chapitres 8-i2 du 1** livre des
IVvmssrr Analytiques. V, Rondelet, Théorie logique des
9ropo9iHons modales^ 1861. B—s.
MODALITÉ, terme de Philosophie soolastique, aigni-
flant le mode ou hi manière dont une chose ou un fait
existe. En considérant nos Jugemente par rapport à la
modalité, Kant les divisait en jugements problématiques,
se rapportant au possible; jugements assertoriques, se
rappoilant an réel; et jugements apodictiques, se rap-
portant an nécessaire.
MODB , terme de Loipque, dont on fait le synonyme
^AUrilnÂ. S'il y a <|uelque nuance dans la signification
de cea deux mots, il nous parait que Mode désigne la
((ualité prise dans les choses mêmes, et Attribttt la qua-
lité envisagée au point de vue logique, l'idée de cette
qualité dans un rapport de convenance avec un si^et dé-
terminé. B — E.
MODES DO STLLOoism, disposltions particulières qui ré-
sultent, dans le syllogisme, de remploi et des différentes
combinaisons des quatre espèces de propositions à titre
de prémisses (V. Psémisses). Les combinaisons possibles
sont au nombre de 16 dans chaque figure (F. Figdrb) ;
mais tentes ne donnent pas de conclusions, et, soit en
vertu des règles générales du syllogisme, par exemple,
bnquMl s'agit de deux propositions particulières ou de
deux négatives dont on sait que le rapprochement ne
conduit à aucune conclusion (K. Syllogisme), soit en
verte de convenances propres à chacune des figures, le
sombre total des modes concluants, les seuls dont on
s'occupe, n'est que de 19, savoir : 4 dans la l'* figure,
4 dans la 3*, 0 dans la 3*, et 5 dans la 4*. Ce sont oes
modes qne Ton désigne par les notationa mnémoniques
Bartara, Ceiarenty etc. {V, Babbara). V. la Logique de
Port-iioyai , 3* partie, ch. 4-8, et Euler, Lettres à une
pmeesse d^ Allemagne, 3* partie, lettres 38 et 39. B— b.
M»B, en termes de Grammaire, désigne les inflexions
paiticnlièras du verbe marquant les dfiverses manières
dont le verbe présente l'action ou l'état qu'il exprime. On
diidnsne les mo^ personnels et les modes tmpsn oti-
Mb/Les modes personnels sont ceux dans lesquels la
fonae du verbe vaîie selon les personnes; les modes im-
penonnels, ceux dont l'action n'est pas attribuée à une
personne plutôt qu'à une autre. Le français a quatre
modes pononnels \ Vindicatif, le condiUonnel, Vimpéra-
et le participe; k celui-ci se rattachent les adjectifs ver»
bauan en uo^ (marquant obligation)^ et en t6c (mar-
quant poxn&iliM ou rrfn»/tat occomph). Le conditionnel
est donc propre mi français, le gérondif et le supin au
latin, l'optatif et les adjectifs vâbaux au grec Le latin
' et le grec ont des jou^yena de anppléer à notre condi-
tionnel ( F. ce mot). Le gérondif, qui est pn^rement la
déclinaison de l'Infinitif emplové comme complément
indirect d'un nom, d'un adjectif ou d*un verbe, est re-
présenté en français par rinfinitif précédé des diverses
prépositions; en grec de même, si ce n'est que les pré*
positions doivent toijjours, dans cette langue, être suiviei
de l'article. V. Optatif, Vbrbau P.
MODB (du latin modus) , nom que l'on donne, dans la
Musique moderne, à un certain caractère qui se mani-
feste dans la mélodie et Tharmonie d'un morceau, et qui
résulte de tels ou tels sons, de tels ou teJs accords. Le
mode n'existe pas pw lui-même, il n'est qu'une manière
d'être du ton. Le ton est déterminé par un certain son
pris dans l'échelle musicale, et qui sert de point de dé-
part à la gamme du morceau; il est la base du chant et
le point où il se repose forcément. Le mode du ton se
détermine par la tierce au-dessus de la note tonique; il
est majeur ou mineur, selon que cette tierce est majeure
ou mineure. Le mode majeur est naturellement donné par
les résonnances harmoniques d'une corde grave mise en
vibration ou d'un gros tuyau d'orgue : le mode mineur,
bien qu'il ne soit pas donné par ses résonnances, n'en
est pas moins naturel ; il a éte emplo)ré de toute anti-
quité, comme l'autre, et même la musique primitive et
populaire semble l'affectionner. La quarte et la quinte
sont toujours majeures dans les deux modes; mais la
tierce, la sixte et la septième, mineures dans le mode
mineur, sont mineures dans le mode mineur. Seulement,
comme la septième ou note sensible doit, pour que le
ton soit bien caractérisé, rester à intervalle de demi-ton
vis-à^vis de la tonique, elle est quelquefois majeure dans
le mode mineur, et même, quand la mélodie monte, elle
entraîne souvent la sixte à être mineure aussi. Le mode
majeur et son mode relatif mineur sont indiqués à la
clef par les mêmes signes. V. BéMOL, Dièsb.
Dans la musique des Anciens, le mut Mode avait une
autre acception ( K. Gkecqub — Musique), qui s'est en
partie reproduite dans le plain-chant. Dans le chant ec-
clésiastique, en effet, on appelle mode ou ton Toctove qui
constitue le ton dans lequel une mélodie est composée.
Les sept notes employées dana le plain-chant, et qui sont
désignées par les lettres A, B, C, D, E, F, G, servent de
base chacune à une octeve toî^ours formée de cinq tons
et de deux demi-tons. Cha({ue octeve se divise de deux
manières x la première division se fait en montant de la
note la plua basse de l'octeve à la quinte au-dessus, et de
cette quinte à la quarte au-dessus, qui est la répétition de
la première note de Tocuve ; la seconde division se fait en
montant de la note la plus grave à la quarte au-dessus,
et de cette quarte à la quinte au-dessus, qui est la répéti*
tion à l'aigu de la pviemière note de l'octeve. Une octeve
forme donc deux modes ou tons. L'octeve qui a la quinte
en bas et la quarte au-dessus constitue un ton appelé
authentique {V. ce mot) ou principal; l'octeve qui a la
quarte en bas et la quinte au-dessus constitue un ton
nommé plagal {V, ce mot) ou inférieur. Les modes Ai
tons du plain-chant, qui étaient dans l'origine au nombre
de douze, ont été réduite à huit. Cette réduction a eu
pour cause le bémol accidentel employé dans lea i*^
2*, 5* et 0" tons, et qui rendait dans ce caa ces tons sem-
bkibles au 9*, 19", 11" et 12* tons. L'usage accidentel de
ce bémol est devenu presque continuel dans cea tons,
par suite de la tendance naturelle aux chanteurs à toutes
les époques d'adoucir les intervalles un peu rudes et
d'une intonation difficile. La suppression des anciens
modes et leur réduction à huit a considérablement mul-
tiplié le nombre des bémols dans les 1*', 3*, 5* et 6* tons,
par suite de la nécessité où Ton s'est trouvé de rendre
les échelles de ré, de la, de fa et d'ut semblables à celles
de la, de mi, d'ut et de fa. Le moine Alcuin, précepteur
de Gharlemagne, avait déjà adopté le système des huit
modes ou tons, ainsi qu'il le déclare dana son Traité de
musique. On peut même faire remonter l'adoption des
MÔD
Met
MOD
tiah mod«« on tons h S^ Grégoire le Cnuid, qni ijouta,
d après la tradition, les quatre tons plagauz aux quatre
tons au^entiques construits sur les notes ré, mi, fa, sol,
et qui paraissent avoir servi de base au travail de S^ Am-
broise. Les modes on tons du plain-diant se divisent en
parfaits, imparfaits, surabondants, mixtes, commixtes,
réguliers, irréguliers (F. ces mots). On reconnaît les
modes ou tons d*un morceau de plain-chant 1 1** à sa
iSnale ; 3° à sa dominante; 3*" à la nature de la qninte et
de la quarte de son échelle diatonique.
Le i**" ton, de ré à ré, est le donen«
Le i% de la à la, est Thjrpodorien.
Le 3*, de mi à mi, est le phrygien.
Le 4*, de si à si, est Thypophrygien*
Le 5*, de fa à fa, est le lydien.
Le 6«, d'ut à ut, est rhypolvdien.
Le 7*, de sol à sol, est le mfxolydien.
Le 8*, de ré à ré, est Thypomixolydien.
Ces modes ont reçu des qualifications qui en indiquent
le caractère, et dont on peut juger la Justesse par certains
exemples : le 1" est grave (les proses Victimœ pcuchali
laudes. Vent sancte Spiritus)\ le 2* triste (la Préface de
la messe, les O de Noti, le Dies irœ) ; le 3" mystùjue Oes
hymnes Range lingua, A solis ortu cardine) ; le 4* har^
monique (le Gloria in eoocelsis des fêtes simples, l'hymne
Urbs Jérusalem beata) ; le 5" joyeux (le Regina coAi) ;
le 6" divotieux (y Ave regina); le 7* angélique (la prose
Lauda Sion, Tantienne funèbre In Paradimn)\ le 8*
parfait (les hymnes Verbum supemum prodiense^ Veni
veator),
II y eut encore un autre sens du mot Mode au moyen
iige : il daigna une manière de marquer la mesure,
c.-à-d. la valeur proportionnelle des notes entre elles,
au moyen de barres, ou de cercles et demi-cercles, figurés
en travers de la portée au commencement du morceau,
après la clef.
MODB, partie mobile et capricieuse des moeurs, celle
qui exerce son empire sur les parures, les costumes, les
ameublements, les équipages, etc. Le mot signifie pro-
prement la manière, c-à-d. la manière oui est la bonne
par excellence, et qui ne doit plus se raisonner. Cepen-
dant la mode, usage passager, prend sa source dans les
fiuitaisies d'un goût souvent corrompu , qui cherche à
satisfaire la vanité et varier les iouissances des grands,
des riches et des oisifs; à peu près inconnue aux classes
inférieures, elle alimente cependant une foule d'ouvriers
laborieux. Les Asiatiques ont des passions plutôt que des
Sûts, des volontés et peu de caprices; les institutions,
i idées et les mœurs ont chez eux un caractère de sta-
bilité presque inaltérable. La mode, qu'ils ne connidssent
pas, est, au contraire, toute-puissante dans l'Europe ci-
vilisée, particulièrement en France, où se succèdent les
impressions ranidés et légères. Elle a, dans ce dernier
pays, presque tJoi^ours un cachet de bon goût, d'él^nce
réelle et de grâce, oui fait rechercher ses produits, sur-
tout ceux à rusage des femmes, dans le reste de l'Europe.
F. COSTCIIB.
MODELAGE, opération par laquelle le sculpteur fait
en argile, en plâtre ou en cire, le modèle d'après leguel
il travaillera ensuite la pierre, le marbre om le bronze. Il
pétrit la matière qu'il a choisie, ajuste les formes avec
les doigts, surtout avec le çoace, et avec un ébauchoir,
Sitite spatule de bois ou d'ivoire. — On nomme encore
odelage le travail qui consiste à faire, avec de la cire
blanche ou rose, de petits bas-reliefs, des fleurs, des mé-
daillons, sur fonds d'ardoise ou d'ébène. V. F. Goupil,
Manuel général du modelage, Paris, 1860, in-8^
MODÈLE (du latin modulus, mesure), en termes do
Beaux-Arts, image, objet ou personne que l'artiste veut
représenter. Les sculpteurs appellent aussi Modèle la
figure auMls ont modelée [V. Modelage). En Arohitecture,
un Modèle est une réduction de monument : c'est ainsi
que, pour la basilique de S*-Pierre à Rome, divera mo-
dèles furent faits par Bramante, Raphaël, San-Gallo et
Michel-Ange ; on conserve à Paris, dans les caveaux de
de l'église S'*-Geneviève, le modèle qui fut fait de ce
vaste édifice par Soufflet.
MODELÉ, en termes de Peinture, façon de rendre, au
moyen des lignes et des ombres, le relief des figures, les
méplats et les détails du système musculaire. Le modelé
dépend du dessin et de la couleur.
MODÉNATURE (de l'italien modanatura)^ proportion,
assemblage et galbe des membres d'une corniche. Elle
détermine le caractère des divers ordres d'architecture.
MODÈNE (École de), une des écoles italiennes de pein-
ture que l'on comprend sous le nom commun d'Ecole
lombarde. Elle remonte au xiv" siècle, où elle eut poar
représentants un nommé Thomas, ^nt il existe un ta-
bleau à Vienne et un autre à Trévise, Barnabe, et Serar
fine. Yen 4500 florissait Nicoletto, qui grava lui-mèae
plusieurs de ses compositions. Plus tûrd, l'école produisit
Nicole deir Abbate, Hugo da Garpi, Louis Lana, et Fran»
çois Stringa.
MODfcNB (Monuments de). Le D^me ou cathédrale, placé
sous l'invocation de San-Geminiano, fut commencé en
1099 par la célèbre comtesse Mathilde, et consacré en
1184. On l'a réparé en 4822. On y remarque : un tableau
de Serafino (xiv* siècle), un des plus anciens spécimens
de l'art modénais; la chaire en marbre, faite en 1322
par Tomasone di C^plone; les stalles du chœur, exécu-
tées en 1405; un groupe de la Nativité de J.-C., en terre
cuite, par Bcjgarelli. Le campanile, connu sous le nom de
Ghiriandina, à cause d'une guirlande de bronze qui en-
toure la girouette, est isolé, de forme carrée, tout en
marbre blanc, et l'un des plus élevés de l'Italie : on y
conserve le vieux seau de bois que les Modénais enle-
vèrent aux Bolonais en 1325, après une lutte que Tas-
soni a chantée dans son poème héroi-comique la Secdua
rapita, — Le Palais ducal^ vaste édifice commencé an
xvn* siècle et agrandi de nos Jours, a sa façade au S. sur
une grande place, et encadre de ses deux ailes au N. le
corso del Naviglio, La cour est environnée de colonnades.
L'escalier, le salon principal et les appartements sont
ornte avec une grande magnificence. Ce palais contenait
autrefois une fameuse galène de tableaux, qui fut achetée
en 1746 par l'électeur de Saxe et qui se trouve à Dresde;
il a cependant encore quelques bons tableaux.
MODILLON (de l'italien modiglUme)^ ornement en
forme de console renversée, qui semble soutenir le lar-
mier de la corniche corinthienne. Il figure l'extrémité des
chevrons du comble primitif; son axe doit correspondre
avec celui de la colonne inférieure. Le modillon change
de forme et de nom dans les autres ordres d'architec-
ture : il devient le mutule et même le denticule; dans les
styles roman et ogival, il s'appelle corbeau, E. L.
MODINHAS, nom que les Portugais donnent à des
chansonnettes qui s'exécutent à une on deux roix, avec
accompagnement de guitare ou de piano.
MODIOS, sorte de boisseau qu'on voit sur la tète de
plusieun divinités de l'antiquité, entre autres Diane
d^phèse, Sérapis, Isis, etc. C'est un symbole d'abon-
dance.
MODULATION (du latin modus, mode), mot qui a
deux acceptions en Musicpie. Dans le sens le plus étroit,
il signifie la manière de traiter convenablement le mode
(entendu comme chez les Anciens ou dans le plain-chant),
en faisant entendre souvent les notes essentielles qui lui
sont propres, et en évitant toute altération par dièse, bé-
mol ou bécarre, qui reppellerait un mode étranger. Dans
une acception moins restreinte, et plus usitée aujour-
d'hui, la Modulation est le passage d'un ton à un autre,
conformément à des règles établies, dans le coure d'un
même morceau. Pour opérer un changement de ton, on
fait entendre les altérations qu'il néoàaite dans les sons
du ton que l'on quitte, afin de les rendre propres i celui
dans lequel on veut aller. Pour qu'une modulation soit
agréable et régulière, il suffit qu'elle ait lieu du ton prin-
cipal à l'un de ses analogues, c-à-d. qu'elle introduise
dans la mélodie un dièse ou un bémol de plus, ou qu'elle
en retranche un. Ainsi, quand on est en ton de ré ma-
jeur, dans lequel il y a deux dièses, on peut moduler
soit en si mineur, où il y a le même nombre de dièses,
soit en la majeur ou en fa dièse mineur, où il y a un
dièse de plus, soit en sol majeur, où il y a un dièse de
moins. Rossini a souvent modulé d'un ton majeur à nn
ton mineur avec un dièse de plus, comme de ré majeor
à fa dièse mineur. Il faut revenir, pour finir, au ton où
l'on était en commençant; ce ton est dit principal, et
ceux c{u'on y a entremêlés sont appelés relatifs, La mo-
dulation est aussi nécessaire à la musique que la difié-
rence des teintes l'est à la peinture ; sans elle la musique,
ne sortant pas des cordes d'un ton donné, scndt fatigants
par son uniformité. Cependant il faut se ^srdee d'en
abuser, car la marche de la mélodie serait entravée mal
à propos, et l'oreille, surprise à chaque instant, suivrait
difficilement le ton. B. *
MODULE (du latin modulw)^ mesure conventionnelle,
prise sur le fût de la colonne, pour établir les rapporta
mutuels de toutes les parties d'une ordonnance archi-
tecturale. De même que les peintres et les sculpteurs
rapportèrent les proportions des dilTérentes parties du
corps de l'homme à celle de la tête, de même les iicbi-
HOEU
1255
MOH
IKtBB grecs cherchèrent à établir les rapports des Ordres
ff&pTès une mesure inhérente à eux-mêmes. Ces rapports
sont nécessairement susceptibles d*une l^re variation ;
md eeox qui ont été adoptés : le module est la moitié
da fût de la colonne à sa base; la colonne toscane n*a
ffoe deii à 14 modules, la doriôue de 13 à 14, IMonique
de 15 à 17, la corinthienne de lo à 18. Le module se di-
vise ordinairement en IS parties ou minutes pour le
toscan et le dorique, en 18 pour les autres Ordres; Quel-
ques architectes ont même porté les diyisions Jusou^à 30.
Les stjrles ogivaux du moyen ftge n'ont pas de mo-
dules. E. L.
■ODCLB, en numismatique, diamètre des médailles.
On fistingue, pour les médailles de bronze, trois mo-
dules, déngnés sous les noms de grand bronze, moyen
bronze, et petit bronze. V* Bronze.
MOELCK (Abbaye de), en Autriche. Cette abbaye, bâtie
sur un rocher haut de 60 met., et au pied duquel coule
le DaniÂe, ressemble plus au palais a*un puissant sou-
ferain qu*à un couvent de cénobites. Elle est occupée par
60 Bénédictins environ, dont les uns vont enseigner dans
diirérentes yilles de TEmpire, tandis que les autres se
livrent à l'étude. L'église, consacrée à S* Pierre et à
S' Paul, est surmontée de deux tours et d'une coupole
couvertes en cuivre; devant le portail sont les statues
colossales de S* Léopold et de S^ Coloman ; on remarque,
à rintérieur, le plafond peint à fresque par Scanzoni et
Rottmayr, divers tableaux de G. Bachmann et de Paul
T^oeor, on orgue Justement estimé, plusieurs tombeaux,
et un Trésor qui contient des reliques et des curiosités
de toute sorte. Les bâtiments de l'abbaye renferment
une riche bibliothèque, une galerie de tableaux de l'an-
denne école allemande, une collection de médailles et un
cabinet d'histohre naturelle. Les caves, assez vastes pour
qu*on y circule en voiture, ont fourni à l'armée fran^se,
en 18({9, 200,000 pintes de vin, sans que la provision fût
diminuas de moitié.
MOELLON (du latin mollis, tendre), pierre de petite
dimension et de forme irrégulière, qu'on emploie en Con-
struction, en la recouvrant de moitier ou de plâtre. Les
mo^ons sont des débris de pierres de taille, quelquefois
de ptorres à plâtre et de pierres siliceuses. Us sont dits
wuiUons de plat, quand on les pose horizontalement sur
leur lit; mwHlons d'appareil, quand on les a équarris
pour s'en servir en parement ; moellons de coupe, quand
on les pose sur champ dans la construction des voûtes ;
moefioiwirtgii^, lorsque, après avoir été équarris, ils sont
piqnéft Jusqu'au vif par la pointe du marteau ; tnœllons
oioquéa, quand ils sont de trop mauvaise qualité pour
être égoairis.
MOâRIS (Lac). T. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire.
IftKCRS (du latin mos, morts, habitude, manière de
vivre), qualités et inclinations de l'âme qui se manifestent
âios les habitudes de la vie et produisent des actions
bonnes ou mauvaises. Les mœurs sont privées ou pi«62t-
9iMt. Les moeurs privées consistent dans la praticpie con-
stante des vertus ou dans le dérèglement ordinaire de la
conduite : elles sont uniquement du ressort de la Morale.
Lemot fiMnir», employé sans épithète, se prend en bonne
part : avoir des mosurs, c'est régler sa conduite sur la
JKrtion du devoir. On entend par mœurs publiques les
habitudes, les coutumes, les usages et les pr^ugés oui
tiennent à la manière de penser, de sentir et d'agir des
averses nations. Elles dépendent de l'éducation, de la
religion, du gouvernement, du climat, et rentrent dans
la Politique. Les mœurs des peuples chasseurs sont sau-
viges et cruelles; celles des peuples pasteurs, douces et
ToTuptnenses; celles des peuples laboureurs, pures et
sévères ; celles des peuples commerçants, plus proropte-
ment civilisées, mais avares et perfides ; celles des peuples
navigateurs, indulgentes, faciles, audacieuses et corrom-
pues. Les moeurs, nées de l'habitude, et exerçant leur
emnire sur tout le monde, sont plus puissantes que les
t'utilfté et la stabilité de celles-ci se fondent sur la pureté
4e celles^à. Cest la tyrannie des mœurs qui Jette une
femme Indienne sur le bûcher de son époux ; qui a fait
des églises, dans certains temps, l'asile inviolable des
assassins; qui autorise en Angleterre la vénalité des suf-
frages 4farif les élections ; qui force un homme d'honneur
ta Fhmce à risquer sa vie en duel pour une légère in-
culte. Les moeurs pabliques ne sont pas toujours la con-
^éq^ience imaiédiate des mœurs privées, et sont même
quelquefois en contradiction avec elles : ainsi, les Al^
^ais, qui ont le sentiment très-vif de toutes les libertés,
oppriment les catholiques de l'Irlande. Les mœurs ne sont
pas et ne peuvent pas être immuables; elles se transfor-
ment avec les siècles. Un attachement trop superstitieux
aux anciennes mœurs est aussi contraire à l'ordre public
que la fureur des innovations précoces. On trouve o'inté-
ressantes peintures des mœurs privées et publiques aux •
différents âges de l'histoire dans les écrivains moralistes
(F. MORAUSTBS).
Appliqué aux œuvres littéraires du genre dramatique,
le mot mœurs a pris une signification différente de celle
qu'on lui donne uans le langage commun : on entend par
mœurs dramcUiques Tohaârvation exacte, la peinture
fidèle des caractères et des mœurs selon le temps, le pays
et l'état social auxquels appartiennent les personnages
mis en scène.
En un autre sens encore, les MoBurs sont la partie do
la Rhétorique oui traite des mœurs ou qualités que l'ora-
teur doit posséder, ou du moins qu'il doit produire au
dehors, et des égards qu'il doit témoigner pour ses audi-
teurs, suivant leur âge, leur condition, leur intelligence,
afin de se concilier leur bienveillance. On distingue les
mœurs réelles des mœurs oratoires. Tous les moralistes
s'accordent à dire que l'orateur doit être vertueux, et que
sa conduite doit être conforme aux principes de morale,
de Justice et d'équité. <^'il invoque dans ses discours.
Aussi, les Anciens déflnissaientr-ils l'orateur « un homme
de bien qui sait manier la parole ». Mais, malgré les ef-
forts des moralistes pour démontrer que l'homme de bien
seul est véritablement éloquent, Thistoire prouve que le *
don de la parole peut se trouver dans l'homme le plus
corrompu. Les vertus que l'orateur doit avoir, ou plutôt
qu'il doit respecter, sont : la probité, la modestie, la bien-
veillance, la prudencs. La probité oratoire consiste à faire
voir aux auditeurs ou'on n'a pas l'intention de les trom-
per, qu'on ne cherche pas son propre intérêt, mais la vé-
rité, et qu'on a fait une étude sérieuse de la cause; la
modestie, à éviter les formes de langage y les gestes qui
pourraient faire croire à l'auditeur qu'on le méprise, et à
ne Jamais parler de soi sans y être contraint par une né-
cessité impérieuse; la bienveillance, à faire voir à l'au-
diteur qu'on cherche à lui être utile ; la prudence, à se
tenir toujours loin des opinions extrêmes, de manière à
ne point passer pour un homme de parti. On voit que les
mœurs oratoires ne sont autre chose que l'observation
des bienséances et des convenances.
MOFADDALIAT (El), Anthologie arabe faite par El-
Mofaddal Ibn Mohammed, le Dabbite, lecteur, à Coufk,
vers l'an 776 de notre ère, pour l'usage du khalife abbas-
side Al-Mahdi. Elle comprenait 30 poèmes qui, lus en
présence du philologue Al-Asmal, furent portés par lui à
120. M. de Slane, dans son édition des poèmes d'Imroul-
kais (Paris, 1837, p. 117), établit qu'il y a 128 pièces.
La bibliothèque royale de Berlin possède un très-ancien
manuscrit qui en contient 109. On y troure un nombre
considérable de Caoidas ou odes, et beaucoup de mor-
ceaux de plus petite dimension. Aucun ordre certain ne
semble avoir été observé dans le classement. Marzoukl a
commenté cette anthologie aux points de vue lexicosra-
phique et grammatical, avec étendue dans la prenuère
partie du manuscrit, et avec brièveté pour le reste. Les
poèmes mentionnent rarement des faits historiques : ils
roulent sur des expéditions guerrières dans le désert,
sur la générosité, la bravoure, l'amour; il y aussi des
éloges funèbres, des satires et des louanges. V. la pré-
face de l'ouvrage de M. Kosegarten, The Hudsaiian poems,
Londres, 1854. G. D.
MOGIAIX)UA (Lanffue). F. Abonda.
MOHATBA, nom d'un contrat de vente usuraire en
usage au xvi* siècle, et ^ consistait, dans les cas de
besoin d'argent, à recevoir d'un prêteur, et à crédit, telle
ou telle marchandise dont on s'obligeait à payer le prix
dans un temps déterminé, puis à la lui revendre immé-
^tement argent comptant, mais avec un grand rabais.
C'était un moyen détourné imaginé pour échapper aux
lois sur l'usure.
MOHAWK (Idiome), un des idiomes iroquois, lopins
perfectionné de tous. (Test lui qui possède le vocabulaire
le plus étendu et ]b, grammaire la plus savante. Les arti-
culations labiales p et m lui sont inconnues. On a traduit
en mohawk la Bible, toutes les prières du service divin,
et quelques livres ascétiques.
MOHICAN ou MOHEGAN (Idiome), un des idionies
algonquins. La déclinaison distingue le genre, mais pas
le nombre. On emploie les participes au lieu des adjecnlih
$0
MOL
126«
MON
^i rrmnqaent presque entièremeiit, et les rerbes neutres
BOUT exprimer le verbe substantif, qui fait aussi défaut.
ien que les trois temps présent, passé et futur existent,
on se sert presque toujours du présent. Les prépositions
■oa^ en très-petit nombre. V, Jonathan Edwards, OhMêT"
«i^iofif sur la langue des Mohicans, en anglais, 1788.
MOHTESIB, nom qu*on donne, chez les peuples mu-
•olmans, an Juge des marchés, à IMntendant delà police.
MOBUR, monnaie d*or en usage dans les Indes. Le
mohur de la Compagnie des Indes vaut 36 fr. 84 c, celui
ëe Calcutta 41 fr. 90 c, et celui du Grand-Mogol 43 fr. 20.
MOI, NON-MOI. Vàme et le mot ne font qu'un seul
et même être; cependant il y a entre eux une grande
différence. Le mot , c*est Tàme qui a conscience d'elle-
même, qui se sent, qui se connaît, qui veut, et qui sait
tout cela* C'est donc i'àme à l'état râléchi de développe-
ment, mais ce n'est pas l'&me tout entière. Il y a des
moments dans la vie où l'&me ne se connaît pas, des états
dont elle n*a pas conscience ; l'enfant qui vient de nattre
a une àme, mais en lui le moi n'est pas encore. Celui-ci
n'est réellement ^e par la conscience et la volonté. L'école
allemande, depms Kant, a limité ou élargi l'idée du mot :
Kant ne l'a vu que dans la conscience, en distinguant un
mot pur et un mot empirvtue ; celui-ci est la conscience
appliquée aux faits sensibles ; Fichte fait du mot l'être
absolu ; pour Schelling et Htoel, c'est une des manifes-
tations de l'être absolu. De telles interprétations sont loin
de la vérité. En s'élevant à l'état du mot , i'àme se dis-
tingue de tout ce qui n'est pas elle; de son corps, qui est
à elle sans être elle-même, de toute la nature extérieure,
et de certains modes internes qui changent, tandis que
rame reste identique; toute cette opposition, substance
ou mode, forme le non^noi, R.
MOINEAUX. V. le Supplément.
MOINES. V. notre Dict. de Biogr. et d^Bistoire,
MOIODOR, monnaie d'or portugaise, la même que la
Lisbonnine {V. ce mot).
moïse , assemblage de pièces de charpente plates que
Ton boulonne ensemole.
MOISSAC (Église S^-Purbb, à). Cette église, autrefois
abbatiale, a été construite longtemps après le porche ou
péristyle qui la précède, et ne pr^nte de remarouable
que les restes d'un pavage en mosaïque. L'entrée du
porche est un arc ogive, flanqué de deux colonnes enga-
gées que surmontent les statues de S' Pierre et de S^ Paul.
L'intérieur de ce porche est formé de deux faces latérales
et d'un portail qui donne accès dans l'église : sur la face
droite on a flguro en bas-reliefs de pierre et de marbre
l'Annonciation, l'Adoration des Mages, la Fuite en Egypte,
et, sur la gauche, la Luxure, l'Avarice, le mauvais nâie,
le bon pauvre ou Lazare; les sculptures du portail, dont
en a donné diverses interprétations, paraissent repré-
aenter Dieu, les emblèmes des Évangélistes, et les 24 vieil-
lards de l'Apocalypse. — Un cloître, bâti en 1100, est
attenant à l'église. On y reconnaît des fhigments d'une
construction encore plus ancienne. Les colonnes du pour-
tour sont en marbre du pays ; leurs chapiteaux, repré-
aentant des scènes de la Bible, supportent des arcades
ogives peu prononcées. On remarque, sur les piliers qui
sont disposés aux angles et interrompent l'arcature de
distance en distance , des figures en bas-relief d'assez
grande dimension, sculptées sur des plaques de marbre :
ce sont celles de onze Apôtres ; la Iz* représente l'abbé
Durand, qui fit la dédicace de l'église en 1063, et qui
tient ici la place de l'apôtre Simon. Qq doltre est couvert
en charpente, et non voûté.
MOLDAVE (Langue). V. Roumaiib (Langue).
MOLE (du latin jnoles, masse énorme), sorte de Jetée
en pierre qui s'avance dans la mer à l'entrée d'un port
pour rompre l'impétuosité des vagues et mettre les na-
vires plus en sûreté. Le mot est surtout employé sur les
bords de la Méditerranée, à Gênes, Naples, Alger, Barce-
lone, etc. V. Jetée.
MOLE d' ADRIEN. V. Madsoléb , daus notTO Dictionnaire
de Biographie et d* Histoire.
MOLINISME. V. Grâce.
MOLLAH. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio»
graphie et d'Histoire,
MOLOSSE, pied de la versification grecque et latine,
composé de 3 longues : trÔdëntés. Les uns attribuaient ce
nom k l'usage fréquent que faisaient de cette mesure les
Molosses dans leurs chants gueniers; d'autres préten-
daient que ce pied avait été inventé par on poète du nom
de Molosse. II est admis quelquefois jpar les poètes co-
miques comme substitution du choriambe, dont il est
l'équivalent (-^ » "), Ou le trouve aussi à la fin de cer-
tains doehmiaques hypermètres. Le molosse sert asseï
souvent de rejet dans les vers hârolques, et annonce une
action moins vive ou un sentiment plus calme que le
rejet du dactyle. P.
MOMIES. K . ce mot dans notre Dictionnaire de Bior
graphie ei d^ Histoire.
MOMON, vieux mot qui signifiait mascarade et baUet
MONADE (du grec monas, unité). Dans l'antiquité^
Pythagore, en disant que les nombres étaient les principst
des choses, avait ramené en même temps les nombres
eux-mêmes à leur principe, l'unité. Chez les modernes,
Leibniz, en partant de l'idée de force, créa le mono*
disme ou la théorie des monades. Les monades sont des
substances simples, des atomes incorporels. Elles datent
de la création ; elles peuvent être anéanties, mais elles
ne peuvent subir aucune altération, aucune modification
par un changement interne. Le monde est à leur égard
dépourvu d'action, et, suivant les expressions de Leib-
niz, en elles n'existent ni portes ni fenêtres oui puissent
leur donner accès. Elles nH>ntni étendue ni ngure, et na
peuvent occuper d'espace ou se trouver dans un lieu. Psr
la même raison elles sont privées de mouvement. Elles
diffèrent entre elles par certaines propriétés ou qualités
oui leur sont inhérentes ; ainsi, parmi les monades créées,
il en est dans lesquelles la perception est plus distincte
et révélée par la conscience ; ce sont les âmes proprement
dites. Les Ames humaines se distinguent de celles des
animaux par la connaissance des vérités nécessaires, ooi
constituent la raison. Cette théorie conduit, 1® à VidêOr
lisme, car une agrégation de monades ne peut pas avoir
des qualités qui ne sont pas dans ses éléments ; les mo-
nades n'ayant ni figure, ni étendue, ni mouyement, les
corps ne sont que des phénomènes; ^ k VoptimisrMy
parce que les monades sont disposées les unes k l'égard
des autres de manière à produire le meilleur des mondes
possibles; 3" au fatalisme, par Vharmonie préétablie.
(7. ces mots), R.
MONARCHIE (du grec monos, seul, et arkhéin, com-
mander), gouvernement d'un peuple par un seul homme,
qui porte ordinairement le titre de rot ou d'empereur.
Ce gouvernement est absolu, quand la souveraine pui>
sance appartient au monar<que sans aucune restrictiua
{V. AMS0Lvnsut,)\ constitutionnel, tempéré ou représen-
tatif^ quand le pouvoir est partagé entre le chef de TÉtat
et les représentants de la nation, et réglé dans son exer-
cice par une Constitution {V. ce mot). Une monarchie
peut être ou héréditaire ou élective. Son écueil est le des-
potisme {V. ce mot). On a dit que la monarohie était
sortie de la famille, et que le père avait été le Qrpe du roi;
mais la vie patriarcale conduit bien plutôt à l'oligarchie;
car, après la mort du péro, qui a régné sur toutes les gé-
nérations nées de son vivant, l'unité da pouvoir est bri-
sée, les fils deviennent les chefs de nouvdles familles, et
la puissance tend à se morceler de plus en plus. D'ail-
leurs, il résulte de l'expérience que le pouvoir royal et le
pouvoir paternel sont loin d'être identiques; que Végialité
entre les membres de la famille politique, l'amélioration
de leur bien-être et de leur intelligence, n'ont guère été
le soud des souverains, dont un très-petit nombre ont
mérité d'être appelés les pères des peuples ; que souvent
même ils affecteirent de n'être pas de même race que les
sujets, et affichèrent une origine supérieure, sinon divine
(k. Droit divin). Sans attacher trop d'importance à ce
vers de Voltaire (Mérope, I, 3) :
Le premier qui ftit roi ftit an soldst beureaz,
on peut admettre que la force a été fk'équemment le prin-
cipe du pouvoir. On ne trouverait guère de dynasties qui
n'aient débuté par une usurpation , et c'est seulement i
la suite d'une possession plus ou moins longue de l'au-
torité, ou par l'ascendant de services rendus, qu'elles onl
été définitivement acceptées. Si la monarchie a été cbei
la plupart des peuples une institution primordiale, il est
remarquable qu'elle a été partout en lutte avec les su-
jets, dont les efforts ont tendu k limiter, à amoindrir son
autorité. V. RoYADTé.
MONASTERE. F. Abbate.
MONAULB. V. Flots.
MONCADES. F. Moquette.
MONDE (Ame du). V. Ame du ifom>B.
MONERIS, galère des Anciens, à un rân^ de rames.
MONÉTAIRE. V. ce mot dans notre Dwtionnairt é$
Biographie et d'Histoire.
MONéTAiRB (Musée), collection formée à la Monnaie de
Paris» et comprenant tous les coins et poinçons des mon-
MON
1267
MON
oaiei, médailles, pièces de plaisir et Jetons qui ont été
frappés en France depuis Gmurles Ym Jusqu'à nos Jours.
Oo j voit aussi en dépôt une grande quantité de coins et
poinçons appartenant à divers graveurs et éditeurs.
MONFÉRINB, danse de la Lombardie et du Piémont.
Lamasioue en est gale, d*un mouvement très-vif, et me-
niée à 6/8. Elle se divise en deux reprises composées
cbacane de 8 mesures, et de ces reprises on répète seu-
lement la dernière.
MONGOLE (Langue), une des langues tartares, celle
oui parait le mieux avoir une origine monosyllabique.
Ses radicaux, en effet, sont fort courts, et composés le
plus souvent de trois lettres seulement. H est vrai qu'ils
«ont susceptibles de flexions , tant de déclinaison que de
coDJagaiaon. Abel Rémusat a signalé les analogies qui
existent entre le mongol et le thibétain : c'est des deux
côtés la même pauvreté de termes de rapport et de
connexion , la même marche dans la syntaxe et la con-
struction. Le mongol a encore des coïncidences avec le
tore , dans les mots comme dans les formes grammati-
cales, et son vocabulaire contient aussi un certain nom-
bre de termes sanscrits. On ne trouve en mongol ni dis-
tinction des genres, ni article; les pronoms sont d'un
usage assez rare : au lieu de remplacer par eux le sub-
stantif, on répète celui-ci. Le verbe n'a pas de subjonctif,
et rindicatif tient lieu de ce mode; la conjugaison n'a
ni personnes ni nombres. Il n'y a pas de prépositions ,
mais des postpositions. L'absence de dures associations
de consonnes et une riche distribution de voyelles ren-
ient la prononciation harmonieuse et sonore. L*alphabet
mongol se compose de 6 voyelles et 17 consonnes, qui,
par leurs combinaisons , fournissent une centaine de
signes. On écrit en colonnes verticales de haut en bas, et
de gaache à droite. — Les Mongols ont une littérature
composée de poèmes, de romans, d'ouvrages historiques,
et surtout de livres de théologie bouddhique : beaucoup
de ces livres sont traduits du thibétain. V. Thévenot,
Voyages^ contenant une Grammaire mongole traduite
d^m manuscrit arabe, 1663-72; Bayer, Orthographia
tungolica, dans les Acta eruditorum de 1731 ; le même,
EUmenta lUteraturm mongolicœ; Abel Rémusat, Re-
cherchts tur Us langues tartares, Paris, 1820, in-4°;
W. Scbott, Essai sur les langues tartares, en allemand ;
J.-J. Schmidt, Grammaire de la lamgue mongole, en
allem., S^-Péiôrsbourg, 1831, in-4°, et Dictionnatre mon-
ffûl-aUemandrrtuse, 1835 ; Kowalewski, Grammaire abré' \
géedela langue savante des Mongols , 1835, Chrestoma^
tin» mongole, 1836, et Dictionnaire mongcl-russe-fran^
pois, Kazan, 1844, in-4«.
MONIAL, ancien mot synonyme de moine ou reli-
psex.
MONITEUR. F. Ensugnxmert.
HoiuTEUR umvBRSBL. V, JOURNAL, daus uotTe Dtctîofi-
emrs de Biographie et éP Histoire.
HONITION. i 7. ces mots dans notre Dictionnaire
MONITOIRE. I de Biographie et d* Histoire,
MONNAIE (en latin moneta; de monere, avertir, parce
que le type ou la marque légale dont elle est emprunte
arertit qu'il n'y a pas eu de fraude dans la fabrication),
mot qui s'entend généralement des espèces métalliques
frappées par une autorité souveraine, marquées au coin
d'un prince ou d*nn État, et servant au commerce. I^s
Économistes la définissent, dans une acception plus vaste,
« un instrument d'échange, qui , en même temps qu'il
sert de mesure pour la valeur des objets échangés, est
par lui-même un équivalent ». La monnaie est une partie
très-importante du capital circulant d'une nation , bien
qu'elle soit loin d'être la plus considérable. Une monnaie
n'est pas autre chose qu'une marchandise qui sert d'in-
termédiaire dans l'échange des aunes marchandises. Si
J'ai besoin de pain et que je sois chapelier, donnerai-Je
un chapeau au boulanger? Quel rapport y a-t-il entre
un chapeau et une livre de pain? D'ailleurs, ai-je besoin
d'une quantité de pain exactement égale à la valeur du
chapeau? Et le boulanger a-t-il besoin d'un chapeau, pour
accepter celui que le lui offire en échange de son pain?
n est érident qu'il faut un intermédiaire, qui ait une var
leur aases déterminée pour déterminer lui-même la valeur
des autres marchandises et servir de mesure de compa-
raison, qui soit accepté é^lement par tous et facilement
divisible. Pour qu'une marchandise devienne monnaie, il
£aut : i» qu'elle ait une valeur réelle, c-à-d. une valeur
sérieuse et non de pure convention ; autrement dit, qu'elle
ioit le produit d'un travail ; 2^ qu'elle ait une valeur
stable, c-ànd. qu'elle ne puisse pas s'altérer, se corrom-
pttf le volatiliser^ ni être exposée à des mouvements
trop subits de hausse et de baisse; 3* qu'elle soit divisibk
aisément, de manière que la somme des parties ait
une valeur égale au tout , et qu'une partie à poids égal
n'ait pas plus ou moins de valeur qu'une autre ; 4^ qu'elle
soit facile à transporter, d'un volume peu considérable;
Sp que sa valeur soit facile à constater, c.-à-d. qu'on ne
puisse pas aisément la falsifier ou la confondre avec une
autre. L'or et l'argent réunissent au plus haut decpré cet
diverses qualités, et c*est pour cette raison qu'ils ser-
vent presque universellement de monnaie. On a essayé
en Russie,' de 1828 à 1845, de faire des monnaies de
platine; mais ^ valeur de ce métal n'est pas assez con*
stante. Quelques peuples ont employé ou emploient en*
core pour monnaie dans les menus échanges cortainet
autres marchandises, à Terre-Neuve les morues, aa
Mexique les grains de cacao , en Abyssinie le sel , aux
Maldives certains coouillages, en Russie Jusqu'à Pierre 1%
le cuir. — Combien faut-il de monnaie à un peuple pour
suffire à ses échanges? environ un dixième des valeun
qui sont dans la drculation : mais celte évaluation ne
repose sur aucune donnée certaine. La quantité de mon-
naie n'est pas seulement déterminée par la quantité des
marchandises, mais pÊsc l'état du crédit; s'il est vrai que
plus il y a de marchandises en circulation, plus il y a
oesoin de monnaie, il faut ^jouter que plus il y a de
crédit , moins il faut de monnaie. Le crédit supplée en
grande partie à la monnaie, grâce aux effets de commerce
et aux banques ( V. Gnéorr, Effets db comuercb, BanqdbV*
Le pai>ier-monnaie remplace quelquefois en partie la
monnaie: mais c'est toujours une anomalie cb courte
durée ( V. Papier-monnaib).
On appelle monnaies réelles ou effectives celles qol
circulent avec une valeur déterminée ; monnaies de compte
ou imaginaires, celles auxquelles ne correspond aucune
pièce de monnaie réelle, qui n'ont d'existence que sur le
f papier, et qu'on emploie par habitude, ou pour faciliter
es comptes en les établissant sur une base certaine et
invariable, comme les livres sterling en Angleterre, lea
réaux de vetllon en Espagne, les reis en Portugal, la
livre de banque en Prusse, le rouble de compte en Rua»
sie, et autrefois la pistole en F^rance. Les monnaies réelles
ont une valeur intrinsèque, celle de la matière dont elles
sont formées, et une valeur nominale , celle que l'auto-
rité publique leur attribue : les étrangers ne reconnais-
sent aux monnaies d'un pavs que leur valeur réelle, tan-
dis que les indigènes les donnent et les reçoivent pour
leur valeur nominale. Le tUre d'une monnaie est la quan-
tité pure qu'elle contient du métal dont elle porte le nom t
ainsi, en France, les pièces d'or et la pièce de 5 fr. en
argent sont au titre de 9 dixièmes, c.-à-d. qu'elles con-
tiennent 9 dixièmes d'or ou d'argent fin et un dixième
de cuivre; il y a une tolérance de S millièmes au-dessus
et au-dessous pour l'or, et de 3 millièmes pour Targent;
les pièces d'argent de 2 f^., 1 fr. et 0,50 cent., sont au titre
de 0,835; nos pièces de 1, 2, 5 et 10 centimes sont de
bronze, composé de 05 centièmes de cuivre, 4 d'étain et
1 de âne. On nomme frai la diminution de poids qu'é-
prouvent les monnaies par Teffet de la circulation.
Dans toute pièce de monnaie, on remarque : Vavers ,
droit ou face, le revers, la légende, Vexergw, le cordon,
et le millésime (F. ces mots).
FabriccUion de la monnate. — Quand on songe que
l'art de la gravure en relief et en creux sur les métaux
atteignit de bonne heure la perfection, on est étonné de
la lenteur avec laquelle se sont développés les procédf^s
de la fabrication des monnaies. Autrefois les monnaies
étaient frappées par le marteau , tantôt à froid, tantôt à
chaud, et U en a été ainsi jusqu'à la seconde moitié du
xvi* siècle. Après avoir fait subir aux matières d'or et
d'argent l'alliage légal, on les fondait et on les coulait
en lames, qui étaient ensuite recuites [)our être étendues
sur l'enclume. Quand les lames avaient à peu près
l'épaisseur des espèces à fabriquer, on les coupait en
morceaux à peu près de la grandeur des espèces, ce qu'on
appelait couper quarreaux. Les quarreaux réduits au vo«
lume.des espèces prenaient le nom de fl€U>ns. Pour mar-
quer l'empreinte légale sur les deux côtés du flaon, on se
servait de deux poinçons appelés coins ou quarrés ( F.
Com). L'un était Isipile; c'est celui sur lequel était gravé
l'écusson : l'autre, qui portait la croix ou l'effigie du roi,
s'appelait le trousseau. Le flaon étant posé sur la pile,
on mettait le trousseau sur le flaon : d'une main on pres-
sait la pièce entre la pile et le trousseau, de l'autre on
donnait trois ou quatre coups de maillet de fer sur le
trousseau, et ainsi le flaon se trouvait monnayé des deux
côtés. Ce terme de pile venait de œ que la pile est fhip-
MON
1268
MON
pée, pUéê sons le trousseau, et celui de troui$9au, de oe
qa*on tenait et troussait œ coin de la main. — Les in-
oon?énient8 de ce mode de fabrication étaient nombreux :
il faut compter, parmi les plus graves, Tirrégularité de
Tempreinte en une loule de cas, Tencouragement donné
par là au faux monnayage, et la facilité aue Ton avait de
rogner les espèces. En 1547, Henri II décida que son effi-
gie serait empreinte sur les monnaies à la place de la
croix, qui étut trop facile à falsifier, et défendit de fa-
briquer avec des coins autres que ceux qui auraient été
mvés par le taUlsur, sculptsur et graveur générai de
France. Le graveur qui fit les nouveaux coins fût Bfaïc
Béchot. Bientôt on vint proposer an roi une machine à
forger les monnaies : cette machine, dont Tinvention est
attnbu^ par les uns à un Allemand nommé Antoine
Brucher, et par les autres à un certain Aubin Olivier,
fut appelée oalancier ou moulin, parce qu'elle agissait
par un mouvement circulaire. Elle fut installée en 1553
dans le palais du Louvre, au bout du Jardin des étnves,
à Tendroit où sont aujourd'hui les saleries. Vers le même
temps on eut Tidée de mettre une légende sur la tranche
des espèces, pour empêcher qu'elles fussent rognées. La
fiû>rication par le marteau et celle par le balancier se
firent concurremment. En 1587, Henri III défendit cette
dernière, si ce n*est pour médailles, pièces de plaisir et
Jetons, et il n'y eut plus que le marteau pour la monnaie.
Le monnayage au moulin ne fut cependant pas univer-
sellement abandonné : il avait été installé à Pau, en
1564, par Jeanne d'AIbret, reine de Navarre. En 1617,
Nicolas Briot, tailleur général des monnaies, proposa de
nouvelles machines : on les repoussa, malgré des essais
concluants, et, en 1629, Briot alla porter son invention
en Angleterre, où l'on en tira profit. Enfin, des édits de
décembre 1630, de mars 1640 et 1645, rétablirent' la fa-
brication exclusive par le balancier : ce triomphe définitif
de la machine sur la main d'oeuvre est dû aux conseils
et à l'influence de Varin. Vers 1685, on adopta, pour
marquer les espèces sur la tranche, une machine inventée
par l'ingénieur Castaing. Avec la presse monétaire in-
ventée par Tlionnelier en 1820, on fabriaue en 10 heures
20,000 pièces de 5 tr. L'hôtel des monnaies de Paris pos-
sède 16 de ces presses mues par deux machines à va-
Çeur. Le monnayage comprend les opérations suivantes :
® la fonte des métaux; 2* l'essai de l'alliage, pour véri-
fier s'il est au titre convenable ; Z^ le laminage des lin-
gots obtenus par la fonte; A* le découpage des flans à
l'aide d'un emporte-pièce mécanique; 5* le frappage des
pièces à l'aide des coins et du balancier. Le cordonnage
des flans s'est fait d'abord au moyen d'une machine par-
ticulière; depuis l'invention deThonnelier, le cordon-
nage se fait en même temps que l'impression des sur-
faces, et d'un même coup de balancier. Les médailles
d'or et d'argent sont terminées aprte le frappage; celles
de cuivre reçoivent leur couleur brune dana un mélange
d'acétate de cuivre et de matières organiques.
Le procédé moderne de fabrication donne plus de pu-
reté aux lignes, plus de régularité aux pièces, et une
complète uniformité entre elles; mais celui des Anciens,
qui moulaient leurs monnaies, permettait de faire en
bronze les pièces de faible valeur, qu'on est obligé main-
tenant de faire en cuivre, parce que le bronze est trop
dur pour le procédé actuel. Or, à cause de la dureté du
bronze, les monnaies anciennes s'usaient moins que les
nôtres, et étaient aussi moins sujettes à s'oxyder.
La fabrication des monnaies en France est faite dans des
hôtels appartenant à l'État, mais par des entrepreneurs
portant le titre de directeurs de la fabrication et qui sont
lous la surveillance et le contrôle d'agents nommés par
le ministre des finances. L'État alloue aux entrepre-
neurs, pour frais de confection des monnaies, 1 fr. 50
par kil. d'argent, et 6 fr. 70 c. par kil. d'or. Les directeurs
des monnaies doivent fournir, en pièces fractionnaires de
celles de 5 f^., un vingtième de la fabrication de la mon-
naie d'argent, soit par million 50,000 fr. ainsi divisés :
en pièces de 2 f^., 10,000 fr.; de 1 fr., 25,000 fr.; de
50 centimes, 12,500 fr.; de 20 centimes, 2,500 fr. Pour
la monnaie d*or, ils fournissent, par million : en pièces
de iOO nr., 5,000 fr. ; de 50 fr., 10,000 fr. ; de 20 fr.,
740,000 f^. ; de 10 fir., 190,000 fr. ; de 5 fr., 55,000 tr. Le
prix de fSabrication de la monnaie de cuivre est, par kilo-
gramme, de 92 cent, pour la pièce de 10 c. ; 1 fr. 32 c.
pour celle de 5 :> ; 2 fr. 24 c. pour celle de 2 c. ; 3 fi*, pour
celle de 1 c. Chaque hôtel des monnaies (il n'y en a que s}
& une marque ou point secret, qui fait reconnaître l'ori-
;;ine des pièces, et une lettre, qui les distingue é^loment
; Paris, A; Bordeaux, K J.
Du fauœ monnayage. — Le faux monnayage a eiiité
de tout temps, mais principalement à r^)oque où la fli-
brication publique était imparfaite, n consiste, soit à
couler des pièces de monnaie dans des moules, ce qui ne
donne que des copies défectueuses et faciles à recon-
naître, soit à en fabriquer à l'aide des procédés mêmes
aue l'on emploie dans les hôtels des monnides, en leur
onnant, par excès d'alliage, ou par manaue de poids,
une valeur inférieure. On a fait aussi des monnaies
fausses dont le corps est une matière quelconque recou-
verte d'une pellicule d'or on d'argent. En général, on
distingue beaucoup de monnaies fausses au son qu'ellei
rendent. Aux yeux de la loi, on contrefait encore la mon-
naie, quand on la couvre d'un enduit pour lui donner
une valeur supérieure, quand on la rogne pour la mettre
ensuite en circulation avec son ancienne valeur. Un des
plus anciens édits royaux contre les faux monnayeurs est
celui de Childéric III* en 744, infligeant la perte du poiog
au coupable, une amende de 60 sous à ses complices s'ils
sont libres, et 60 coups s'ils sont esclaves. Louis le D^
bonnaire en 819 et Charles le Chauve en 864 prononcè-
rent les mêmes peines. D'après plusieurs ordonnances de
Louis EX, les faux monnaveurs devaient être pendus; la
peine portée par les Êlaolissements de ce pnnce est la
perte des yeux. Les Coutumes de Bretagne et de Norman-
die portaient qu'ils seraient bouillis vivants, puis pendus.
Philippe le Bel, qui altérait si bien les monnaies, obtint
du pape Clément V, en 1309, une bulle d'excommuni-
cation contre les coupables, sentence renouvelée sous
Charles le Bel en 1320. sous Philippe VI de Valois en 1 319,
et sous Henri III en 1583. Louis XI déclara, par lettres
du 2 nov. 1475, que le crime de fausse monnaie était un
de ceux dont les rois faisaient le serment de ne jamais ac-
corder le pardon. La terreur n'arrêtait pas les faussaires,
et les nobles n'étaient pas moins coutumiers du fait que
les roturiers ; des provinces entières avaient un fort mau-
vais renom sous ce rapport. En 1631, le cardinal de Ri-
chelieu établit une Chambre de justice pour la recherche
et la répression du crime de fausse monnaie , et cette
Chambre prononça de nombreuses et sévères condam-
nations. Dans rOrdonnance de 1670, la fausse monnaie
continua d'être considéra comme crime de lèse-majesté.
Un édit du SO février 1725 sanctionna toutes les disposi-
tions pénales antérieures. Le Code pénal de 1791 maintint
la peine de mort pour ceux qui contreferaient lespiq>iers
nationaux, mais ne punit que de 15 années de fers les
faux commis sur les monnides. A ces peines la loi da
l» brumaire an ii (22 oct 1793) ijouta la confiscation
des biens, et celle du 23 floréal an x (13 mai 1802) la
marque ou flétrissure. Une loi du 2 frimadre an ii (22 no-
vembre 1793) punit de 6 ans de fers la fabrication de
fausse monnaie étrangère, ainsi que celle des effets de
commerce. La loi du 14 germinal an xi (4 mai 1803} ré-
tablit la peine capitale contre les autours et les complices
de la contrefaçon ou altération de la monnaie nationale.
Cette peine fut conservée dans le Code pénal de 1810.
Depuis 1832, le crimei de fausso monnaie est puni des
travaux forcés à perpétuité, quand la contrefaçon oa
l'émission s'est attaquée aux espèces d'or et d'argent, et
seulement des travaux forcés k temps, s'il s'agit de mon-
naies de cuivre ou de billon. La fiusification ou contre-
façon, ainsi que l'emploi, d'effets émis par le Trésor
public avec son timbre, ou des billets des oanques auto-
risées par la loi, entraînent les travaux forcés à perpé-
tuité. En ce qui regarde les monnaies étrangères altérées,
contrefaites, et émises en France, la peine est celle des
travaux forcés à temps. Ceux qui, ayant reçu de fausses
pièces pour bonnes, les remettent saemment en drcola-
tioo, sont punis d'une amende triple au moins et sex-
tuple au plus de la somme qu'elles représentent, sans
que cette amende puisse être en aucun cas inférieure à
16 fr. La révélation du crime de fausse monnaie avant
ou même après poursuites, s'il s'ensuit l'arrestation des
coupables, exempte de la peine celui qui aurait participé
à la fabrication ou à l'émission ; mais il peut être mis, à
temps ou pour sa vie , sous la surveilUmce de la hauts
police. — L'achat et la vente des monnaies au-dessnt
du cours légal , pour en faire commerce et les exporter
à l'étranger, sont punis d'une amende qui peut s'élever
jusqu'à 3,000 fr. Il en est de même de la fonte des mon-
naies qui aurait pour but de profiter d'un excédant de
poids.
K. l'art. Monnaie dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire , et, dans le présent ouvra^, les arti-
cles consacrés à la Numismattquê des prinopaux pavas
les Traités des monnaies par Boizard (1699, 2* édit^
MON
1269
MON
1711), Pounain (1821 ; 2* édit, 1700], Dapré de Saint-
Maar (1746), et Abbot de Bazinghen (1764); Galiani,
Délia moneta, 2* édit., 1780; Rochon, Esiai sur les monF-
naias ancimnes et modernes, 1702; Bonneyille, Traité
des monnaies d^or et émargent chez les différents peuples
(1806) , refonda sous le titre d* Encyclopédie des mon"
naies (1850) ; Juvigny , Traité théoriqtte et pratique sur
les momuues^ 3* édit., 1834; Nelienbrecher, Nouveau
Mamui des monnaies . traduit de Tallemand par Dea-
chamM, 1844; Michel Chevalier, La Monnaie, 1850,
io-S". F. pour les monnaies anciennes, Nomismatiqub. B.
HOiiNAiE DB BiLLON. Le billon ne mérite pas, en réalité,
le nom de monnaie, car il n'aqu*une valeur fictive, c-à-d.
qui n*est ni la mesure, ni Téquivalent de la chose pour
laquelle on le reçoit ou on le donne; néanmoins le nom
a prévalu. En France, la monnaie de billon ne valut
jamais intrinsèquement que la moitié de sa valeur lé-
gale. Un des grands inconvénients de cette surélévation
était de provoquer le faux monnayage; en 1726, il
existait en Angleterre et en Allemagne des ateliers wur-
ticuliers qui fabriquaient d*énormes quantités de oil-
loD, dont ils inondaient la France. Pendant la Révéla-
tion, avec une livre de cuivre rouge qui valait un franc,
00 fabriquait 45 sous, valant, légalement, 2 fr. 25 c. Les
soos de cloche, avec la môme valeur légale, ne conte*
naient que pour 60 centimes de matière, n s'en fabriqua
alors une quantité tellement disproportionnée avec les
besoins du commerce, qu'ils étuent comme une plaie
dans les transactions , parce que Ton faisait des paye-
ments importants tout en sous. En 1706, un arrêté du
Directoire, pour réprimer cet abus, autorisa dans les
payements faits en monnaie réelle, l'emploi d'un 40" seu-
lement en monnaie de cuivre ou de billon, c.-à-d. 25 fr.
sur un paiement de 1000 fr. Ce 40*, qui doublait à peu
près le poids de la somme en argent, était si gênant,
que des spéculateurs imaginèrent d'établir à Paris et à
Rouen deux espèces de banques dites factoreries des soiu,
qui, pour éviter l'embarras du transport de cette lourde
monnaie, émettaient des billets au porteur payables en
ions, lesquels circulaient comme aujourd'hui des billets
de banque : cela fut imité dans d'autres villes, ce qui mul-
tiplia, représentativement, la monnaie de cuivre dans
nne proportion énorme. 'En 1810, l'abus était dans
toute son extension : l'État ne trouvait Jamais à écou-
ler tous les sous qu'il recevait : sur une recette de 850
millions de fîrancs environ, 11 y avait pour 40 millions de
nos! La régie des postes, qui ne recevait alors qu'un
rtn plus de 10 millions de francs, versait au Trésor
millions de sous! Enfin un décret du 13 août 1810 dé-
clara que la monnaie de billon ne sendt plus reçue dans
les payements que pour appoint au-dessous de 5 fr. ; ce
décret est encore en vigueur.
En 1852, le gouvernement s'occupa de remédier radi-
calement au mal, en refondant toute la monnaie de bil-
km, et en la remplaçant par des pièces plus légères, bien
frappées, d'un bronze très-riche en cuivre, mais toi^ours
d*ane valeur lég^e bien supérieure à la valeur intrin-
sèque. On en frappa pour lasomme totale de 48,500,000 fr.,
ainsi repr^ntée, et en partant du dédme, dont le poids
fut filé à 10 grammes :
Pièce de 10 centimes, ou décime. 25,065,830 fir. 70 c.
- 5 — — 20,702,005 15
- 2 — — 1,162,665 64
- i — — 668,589 M
Total. 48,500,000 fr. 00 c.
Cette opération , la plus vaste qu'on ait encore faite
en ce genre , s'accomplit de 1852 à 1858 , et les fhûs
de fabrication furent de 7,762, 077 fr. Toutes les pièces
portèrent l'effigie de Napoléon m. En 1860, les besoins
du commerce exig!èrent une fabrication supplémentaire
de 10 millions, ce qui a porté à 58,500,000 fr. toute la
monnaie de billon actuelle. L'ancienne a été démoné-
tisée, et a produit 0,039,292 kilog. pesant. G. D— y.
voivNAiEs ( Commission des ), Commission chargée :
1* de juger le titre et le poids des espèces fabriquées, et
de surveiller, dans toute l'étendue de la France, l'exécu-
tion des lois monétaires et la fabrication des monnaies ;
^ de délivrer, conformément aux lois, aux essayeurs du
commerce et aux essayeurs des bureaux de garantie, les
certificats de capacité dont ils doivent être pourvus avant
d*etttrer en fonction; ^ de statuer sur les difficultés re-
latives au titre et à la marque des lingots et ouvrages
d'or et d'argent, dans toute l'étendue de la France. Elle
védige les tableaux tervint à déterminer le titre et le
V. AuTOnOHES, CONSULAïaSS,
Famille, OasmiONALES.
poids d*après lesquels les espèces et matières d*or tl
d'argent sont échangées dans les hôtels des monnalea»
Elle fait procéder, toutes les fois qu'elle le Juge conve-
nable, à la vérification du titre oes espèces étrangères
nouvellement fabriquées. Elle fait aussi procéder, lors-
qu'elle en est requise soit par les tribunaux, soit par les
autorités administratives, à, la vérification des espèces
monnayées, légalement fabriquées ou arguées de faux ,
sous le rapport du titre, du poids et des empreintes; a
la vérification du titre des lingots du commerce, et à celle
des poinçons de l'État, apposés sur les ouvrages d'or et
d'argent Elle surveille les opérations de tous les fonc-
tionnaires des ateliers monétaires. Elle doit également
surveiller la fabrication des médailles d'or, d'argent et
de bronze, en faire constater le titre, et n'en autoriser la
délivrance ou mise en vente qu'après avoir observé les
mêmes fonnalités que celles prescrites pour le Jugement
des espèces monnayées. Elle est chargée enfin de con-
trôler la confection des planches et l'impression des tim-
bres-poste, billets de banque, etc.
MONNAIES (Cour des). ) V. notre Dictionnaire de BiO'
MONNAIES (Hôtel des). ) graphie et d^ Histoire,
MONNAIES AUTONOMES.
— CONSULAIEES.
— DE FAMILLE.
— OBSiniONALES.i
MONOCHROME (du grec monos, seul, et khrôma, cou-
leur), qui est d'une seule couleur. Le camaïeu, la gri-
saille, la sépia, sont des peintures monochromes. Ce
genre de travail a été connu des Anciens, et même la
peinture n'eut primitivement qu'une seule* couleur. La
plupart des vases étrusques étaient monochromes. On
voit au musée de Naples une peinture antique en cinabre
rouge de l'Inde, qui représente Thésée tuant le Mino-
taure.
MONOCORDE (du grec monos, seul, et khordé, corde),
instrument dont les Anciens attribuaient l'invention à
Pythagore, et qui servait à déterminer les rapports nu-
mériques des sons. Cet instrument, qu'on nommait aussi
canon harmonique, se composait d'une règle, divisée en
plusieurs parties, et d'une corde de boyau ou de métal ,
tendue sur cette règle entre deux chevalets fixes. En pro-
menant sous la corde un chevalet mobile contre les difiîé-
rents degrés marqués sur la règle, on trouvait les rap-
ports des sons avec les longueurs des cordes qui les
pendaient. Au moyen âge, on employa le monocorde à
renseignement de la musique, pour faciliter aux com-
mençants la Justesse des intonations.
MÔNOCULE, se disait autrefois du collateur qui n'avait
qu'un seul bénéfice à conférer, et de ce bénéfice même.
MONODIE (du grec monos, seul , et ôdè, chant), nom
que les Anciens donnaient au chant à une voix seule.
MONOGRAMME (du grec monos. seul, et gramma^
lettre), caractère d'écriture compose de plusieurs lettres
réunies, de façon que le même Jambage ou la même
panse serve à deux ou trois lettres différentes. C'est en
cela qu'il se distingue du chiffre, formé de lettres entre-
lacées, mais dont on peut suivre distinctement toutes les
parties : cependant on appelle monogramme du Christ le
chiffre composé de lettres grecques par lequel on désigne
le Christ (mS). Il y a des monogrammes sur un grand
nombre de monnaies grecques et romaines ; mais la plu-
part sont indéchiflhibTes pour nous. On en trouve aussi
dans les inscriptions lapidaires, où l'on avait besoin de
ménager l'espace. Le plus ancien monog^mme qui figure
sur un acte public est celui de Théodoric, roi des Ostro-
goths. Eginhard dit que Charlemagne se servait d'un mo-
nogramme pour signature : les successeurs de ce prince
l'imitèrent Jusqu'à Philippe le Hardi , et le droit de si-
gnature en monogramme fut longtemps considéré comme
un privilège des souverains. Les papes n'en ont guère
usé que dans le ix« siècle. Les monogrammes ne sont
tombés en désuétude en Allemagne (^u'au milieu du xv«.
— On a appelé Monogrammes les chiffres ou signes dont
les artistes ont marqué leurs tableaux ou leurs gi-avures.
principalement aux xv" et xvi" siècles; il en est resté
beaucoup d'inexpliqués. V. J.-F. Christius, Dictionnaire
des monogrammes, traduit en français, Paris, 1759,
in-8«; BruUiot, Table générale des monogrammes, Mu-
nich, 2« édit., 1834, 2 vol. in-4». , , B.
MONOGRAMME , mot par lequel les Andens désignaient
un dessin au simple trait.
MONOGRAPHIE (du grec monos, seul, et graphém,
décrire), écrit qui traite spécialement d'un point parti-
culier de la science. Le mot, usité surtout pour les des*
criptions des genres ou des espèces dans l'Histoire nv
MON
1270
MON
tarelle, s'applique également à la description d*an édifice
MONOLITHE (da grec monoi, seul, et lithos, pierre),
eolonne, stèle, ou tout autre ouvraga exécuté d*une seule
pierre. Les obélisques égyptiens sont monolithes; tel est
eiêlui de Louqsor, qu'on a transporté à Paris, et celui
Sie Sixte-Quint fit ériger à Rome sur la place du Vatican,
érodote parle d*un roc placé à Sais et qui , creusé inté-
rieurement, ofihdt une chambre de 18 coudées de long
«ur 12 de large et 5 de haut (8",i0; 5-,40; 2",25). Le
Sphinx (7. ce mot dans notre Dictionnaire de Biographie
êi d'Histoire)^ ainsi que le zodiaque de Dendérah, qui
est à l'aris, sont des monolithes. Les fÙts de colonnes de
marbre ou de granit des monuments romains de Tépoque
impériale étaient souvent monolithes ; la Renaissance en
fit de môme un certain nombre. On Toit sur la principale
place d*Arles un monolithe de granit découvert en 1339,
et ^gé seulement pendant le règne de Charles X; il a
16 met. 26 c. de hauteur sans compter le piédestal, haut
de 4",51«. La colonne d'Alexandre, à S*-Pétersbourg, est
le plus grand monolithe du monde. Au nombre des mo-
nolithes célèbres, on place le dôme du tombeau de Théo-
doric à Ravenne, et les deux gnmdes pierres dont Per-
rault a couvert les côtés du fronton de la colonnade du
Louvre. V, Bloc
MONOLOGUE Tdu grec mono$, seul, et logos^ dis-
cours), scène dans laquelle un personnage, resté seul sur
le théâtre, s'entretient avec lui-même. Dans la vie réelle,
n est très-rare qu'un homme formule ses pensées en pa-
roles, s'il n'a un interlocuteur : U faut qu'il soit livré à
une grande préoccupation, dominé par quelque passion
forte, et encore ses id逻 et ses sentiments ne s'échappe-
ront qu'en inteijections, en mots isolés et sans suite. Le
monologue dramatique est donc essentiellement une faute
contre la vérité. Cependant, les conditions matérielles des
représentations scéniques l'ont rendu nécessaire : d'une
pût, le spectateur ne peut se contenter d'exclamations
qui n'auraient pour lui aucun sens, et veut être initié
aux plus secrètes pensées des personnages, afin de con-
naître les causes intimes des événements qu'on déroule
devant lui ; d'autre part, la scène ne devant Jamais de-
meurer vide, il faut bien admettre conventionnellement
qu'elle est de temps à autre, entre les entrées et les
sorties de divers personnages, occupée par un seul ac-
teur, lequel ne peut rester muet. C'est à l'écrivain drar-
matique de donner aux monologues le plus de vraisem-
blance possible; il ne devra ni les multiplier, ni en trop
prolonger la durée, et il aura soin de les placer dans des
•ituations telles , que le personnage, tiré en divers sens
Sar des sentiments opposés, ou en proie à la violence
'une passion, ait une sorte de prétexte et d'excuse en
Sarlant seul à voix haute. Parmi les beaux monolo^es
e notre thé&tre classique, nous citerons, dans le Ctnna
de Corneille, celui d'Auguste suspendu entre la ven-
^teance et la clémence ; les stances du Cid et celles de
Polyeucte ; le monologue de Phèdre dans la pièce de Ra-
cine; celui d'Harpagon dans V Avare de Molière, quand
on lui a enlevé sa cassette; celui de Y Amphitryon du
même auteur, où Sosie s'exerce devant sa lanterne à
l'entretien qu'il doit avoir avec Alcmène. Mentionnons
encore le monologue d*Hamlet méditant sur le suicide,
celui de la Jeanne d'Arc de Schiller, celui de VHemani
de V. Hugo, où Charles-Quint, élu empereur, interroge
la cendre de Charlemagne. Le mélodrame moderne a fait
du monologue un abus qui n'a pas peu contribué à le
rendre ridicule. Dans le vaudeville de nos Jours, on
trouve souvent des monologues qui servent d'exposition,
et dans lesquels un acteur raconte tout au long ses aven-
tures, entremêlées même de communications et d'inter-
rogations qui prennent la forme d'un dialogue avec les
spectateurs. B.
MONOMÈTRE (du grec monos, seul, et métron, me-
tore). En termes de Versification grecque et latine, ce
mot désigne tantôt un vers qui n'a qu'un pied, tantôt un
▼ers qui n'a qu'une dipodie. Les monomètres dactvliques,
crétiques, péonlques, ioniques (majeurs et mineurs),
chorlambiqnes, antispastiques, dochmiaques, ont un pied :
les monomètres anapestic^ues, trochalques, lambiques, en
ont deux. On ne composait pas de pièces en monomètres;
mais ces petits vers s'entremêlaient à des vers plus
grands, et leur servaient de clausule. P.
MONOPÉDICULÉ , qualification que l'on donne aux
cuves baptismales du moyen ftge qui ne sont soutenues
que par un seul pédicule.
MONOPOLE (du grec monof, seul, et pôlein, vendre),
fente par un seul de marchandises ou de denrées dont
(a vente devrait on pourrait être libre. Il y a deux ca-
tégories de monopoles légaux : ceux qui s'exploitait
pour le compte de l'État, et ceux établis au profit d'in-
dividus ou de classes d'individus. Parmi les mono-
poles de l'État, il en est qui ne sont ou'une forme de
perception des impôts, tel que celui de la fabrication et
de la vente du tabac ; d'autres ont le double but de pro-
curer des ressources au Trésor et la sécurité publique,
tels que ceux de la poste aux lettres, de la fabrication et
de la vente de la poudre de guerre, et de la fabrication
des monnaies ; d'autres enfin, nullement fiscaux, et même
quelquefois onéreux pour l'État, sont motivés sur des
considérations d'intérêt public, tels que le monopole de
l'enseignement et celui des travaux publics. I^s mono-
poles légaux établis au profit d'individus ou de classes
d'individus consistent soit dans la concession, sans adju-
dication, de certaines exploitations dépendant par leur
nature du domaine national, les mines par exemple, que
l'on peut appeler monopole foncier; soit dans l'inter-
diction d'exercer certaines professions sans autorisadon
pi^alable, comme les offices ministériels, et dans la limi-
tation du nombre des individus appelés à les exercer;
soit dans la prohibition ou la restriction de la concur-
rence étrangère sur le marché du pays pour certaines
marchandises. En 1539, François I", ayant besoin d'ar-
gent, déclara par un édit que « le droit de travailler était
un droit royal que le prince pouvait vendre et que les
si:Jets devaient acheter.» L'or^nisation industrielle deve-
nant ainsi une propriété taillable et corvéable à volonté,
fit naître les corporations, qui exploitaient exclusivement
une industrie grevée de charges. Il en était de même pour
le commerce extérieur : la Compagnie des Indes avait
chèrement acheté le privilège d'introduire dans le royaume
les denrées d'outre-mer, et, par conséquent, d'en fixer
arbitrairement les prix. Louis XVI, en 1776, et une loi
du 17 mars 1791 , supprimèrent successivement toutes
les corporations, offices et privilèges industriels, quelle
que fût leur dénomination, « afin, disait l'exposé dee
« motifs, que les pauvres ne fussent plus obligés de su-
« bir la loi des riches. » La Déclarcttion des droits, mise
en tête de la Constitution du 24 Juin 1793, porta^ art 17 :
« Aucun genre de travail , de culture, de commerce, ne
« peut être interdit à l'industrie des citoyens, n On a vu
de nos Jours, vers 1822, Méhémet-Ali, pacha vice-roi
d'Egypte, et son fils Ibrahim-Pacha, possesseurs effectifs
de toutes les terres, les faire cultiver pour leur compte,
s'en attribuer exclusivement tous les produits, et les
vendre à leurs sujets au prix qu'ils avaient eux-mêmes
fixé. En France, où les mines de métaux et de combus-
tibles fossiles ne se rencontrent qu'en petit nombre tout
en ayant à satisfaire à des besoins très-étendue, les con-
cessions de mines abondantes et faciles à exploiter re-
présentent d'immenses valeurs. En Angleterre, l'ex-
ploitation de la mine est attribuée au propriétaire de la
surface : sur tout le continent européen, la propriété des
mines, qui est considérée comme une partie du domûne
public, ne peut devenir propriété particulière qu'en vertu
d'une concession de l'Etat* Le mode le plus légitime
d'appropriation des mines paraît consister dans des con-
cessions de l'État, au moyen d'adjudications publiques,
accessibles à tous. — Pour ce qui concerne les monopoles
légaux résultant des restrictions ^>portéea à la concu>
rence étrangère, F. PaonramoN. A. L.
MONOPTÈRE, nom donné aux temples circulaires de
l'antiquité qui n'avaient qu'un seul rang de colonnes
supportant une coupole.
MONORIME (du grec monos^ seul, et de rime), se dît
d'un poème dont tous les vers finissent par la même
rime. Les Arabes ont les premiers composé des œuvres
de ce genre. Nos anciens romans de chevalerie étaient
écrits en stances monorimes. Les Commandements de
Dieu et de V Église sont monoiimes. Une suite de pareils
vers ne peut avoir que le mérite de la difficulté vaincue;
la monotonie qui en résulte pour l'oreille les a fait con»
plétement abandonner.
MONOSYLLABE (du grec monos, seul), mot composé
d'une seule syllabe, quelquefois d'une seule lettre : a, â,
y, an, jeu, pour, prends, courts, etc. Asseï rares dans
les langues européennes, si l'on excepte les lan$;ues ger-
maniques, ils abondent dans la lansue anglaise, qui n'a
guère de polysyllabes que ceux qui lui ont été fournis
par le latin et le français. Dans la composition des
phrases, le grec, le latin, le français et les autres langues
néo-latines évitent la rencontre trop fréquente des mono-
syllabes, qui donnent au style quelque chose de sautil-
lant. Quelquefois cependant une phrase composée de
monosyllabes ne laisse pas que d'être harmonieuse.
MON
1271
MON
comme on le toH par ce Yen de Racine (Phàdr§, IV, 2) i
Le Jonr ]i*est pts plot pur que le Tond de mon coeur.
n n*en est pas de même de celai-ci de Corneille (le Cid,
10,4):
J*al iUt 68 que J*ai dû, Je fais ce qae Je doit.
Ud Ters girec on Isdn composé de monosyllabes serait
intolérable; il est déjà très-dur lorsque plusieurs s'y ren-
contrent de suite, à moins qu*un ou deux ne soient en-
clitiques, ou qu'ils ne s'enchaînent tellement les uns aux
antrespar le sens, qu'ils semblent n'en plus former qu'un
seul. Oo évitait également de finir par un seul mono-
^llabe, à moins qu'il ne fût enclitique; car la dernière
nrllabe d'un vers (nous ne considérons ici que les vers
mctjrliques, et surtout l'hexamètre) ne doit pas être accen-
tuée; on ne a'écartait de cette r^le que s il résultait de
la yiolation même un effet poétique. La césure d'un vers
08 devait pas non plus porter sur un monosyllabe qui ne
s'appuyât sur le mot précédent et ne fit pour ainu dire
corps avec lui :
Dnc âge, doc ad mot; tu lUi limins dlmm
Tangere.
ViBO., Gtorç., IV, S68.
VjmgiuL mb hoe ego mm Gereri gratinima llgno.
Or., MHam., YIII, 771.
Ces vers ont une cadence parfaite; celui-d d'Horace {Art
poé(., 19) est d^ectueux à cet égard :
fled anno t non erat t hie loci»; I et fortaaee eapTesemn...
P.
MONOSYLLABIQUES (Langues), langues dont tous les
mots se composent exclusivement d'une seule syllabe
et sont restés à l'état de racvM, Cette syllabe est im-
moable, et n'exprime que l'idée absolue et abstraite,
comme ferait ao ou form en latin et en français; aussi
KTt-elle à la fois comme nom et comme verbe. La sens
relatif et concret ne peut être indiqué dans ces langues
que par la manière dent le monosyllabe est mis en rap-
port avec d'autres mots, et par certaines intonations qui
MQt plus ou moins variées, plus ou moins nombreuses
dans les différents dialectes. La langue monosyllabique
par excellence est l'ancien chinois : donnent ensuite les
dialectes nombreux qui s'y rattachent, le chinois mo-
derne, l'annamite, le cambodgien, le siamois, le barman,
le thibétain, etc. Le domaine des idiomes monosyllabiques
comprend donc les pays situés au N. du Gange, et au delà
deI*Himalaya, la Chine proprement dite et la presqu'île
S.-B. de l'Asie. P.
MONOTHÉISUE (du grec monos, seul, et thèos, dieu),
doctrine qui n'admet qu'un seul Dieu. L'opposé du mono-
thétame est le Polythéisme (V. ce moQ. Dans l'antiquité,
les Hébreux connurent et conservèrent toujours le dogme
de ruDîté de Dieu. Même parmi les nations polythéistes,
il ae rencontra des sages dont la doctrine fut monothéiste,
par eicemple Socrate et Platon chez les Grecs.
MONOTRIGLYPHE, entre-colonnement dont lalaroeur
ne permet l'emploi que d'un seul triglyphe entre deux
colonnes doriques, comme l'a pratiqué Mansard au por-
tail de l'église des Invalides, à Paris. Le triglyphe porte
tour à tour sur le plein d'une colonne et sur le vide de
l'entre-colonnennent.
MONREALE (Église et couvent de), en Sicile. L'église,
fondée en 1174 par le roi Guillaume II le Bon, et dédiée
à la S** Vierge, est le chef-d'œuvre de l'architecture sar-
rasine- normande. Extérieurement elle est peu impo-
sante : le portail, orné d'arabesques et de mosaïques, a
des portes en bronze, dont les bas-reliefs sont attribués
à Bonanno de Pise (1186). L'édifice a la forme d'une
croix grecque. A l'intérieiu*, les murailles sont couvertes
d'or et de mosaïques, dont les personnages ont presque
rtoot le costume grec. La grande nef est ornée de
colonnes de sranit oriental, qui s'appuient sur une
base en marbre blanc et sur un socle carré en marbre
iKrir; les chapiteaux sont en marbre blanc, et quelques-
ans de s^le antique. Sur le fronton de l'arc qui sépare la
Def du chœur, on remargue la Sagesse de Dieu, adorée
par les archanges Michel et Gabriel. Au fond, dans la
demi-coupole qui termine la grande nef, est une figure
colossale du Qurist. Les plafonds en bois sculpté, oui
étaient d'une grande magnificence, furent on partie aé-
truits en 1811 par un incendie i on en a placé de nou-
▼eiox. Les tombeaux de Guillaume le Bon et de Guil-
Innie le Haunds, dans le transept de droite* ne sont
plus qne des mines. Le maitre-antel, en argent doré, %
été élevé au siècle dernier. L'église de Monreale renferme
une partie des restes de Louis IX, roi de France. — La
couvent, occupé par des Bénédictins, a été, à cause de sa
magnificence et du goût de ses ornements, quelquefoto
appelé VAlhan^a d$ la Sicile. Pour promenade, les
moines ont un cloître dont le milieu est un Jardin
rempli de fleurs et arrosé par des Jets d'eau, et dont la
colonnade est d'un fini et d'une élégance incomparables :
les 216 colonnes de marbre blanc qui la composent sont
à torsades ou couvertes de mosaïques, Jumellées pour la
plupart, avec des chapiteaux richement décorés de feuil-
lages ou d'animaux bizarres. Dans un escalier grandiose dv
couvent, on admire deux tableaux de Velasquez et de
Pietro Novelli. V. dom Michèle del Giudice, Deecrizione
dei real tempio e monasterio di Santa-Maria^Nuova dK
Monreale, Païenne, 1762; Hittorf et Z&nih^ Architecturw
moderne de la Sicile, Paris, 1835; Serra di Falco, M
dttomo di Monreale, Palerme, 1838, in-fol. B.
MONS (Église de S**-Waodrd, à), un des plus beaux
édifices de style ogival aue possède la Belgique. Goo?
struite à l'emplacement d une autre église, que des ior
cendies dévoieront en 1603, en 1113 et en 1169, elle fol
commencée en 1449, sous la direction d'un architecte
inconnu, bientôt remplacé par Jean de Thuin. Plus d'u9
siècle s'écoula avant 1 achèvement des travaux : elle fut
consacrée en 1582, et finie seulement en 1589. L'élévatioa
de l'édifice, sous clef, est de 24",56; la longueur dm
vaisseau de 108",66, et sa largeur de 35",75, Le chœur,
qui est la partie la plus ancienne, et dont les fenêtres
resplendissent de vitraux magnifiques, a 32",71 de Ion*
gueur sur 16",66 de largeur. Tout le vaisseau est un
chef-d'œuvre de hardiesse, d'élégance et de légèreté <
des faisceaux de nervures, partant du sol, s'élancent
Jusqu'à la voûte sans interruption, et vont y former des
ogives multipliées, ou se perdre dans des culs-de-lampe
et dans la galerie qui règne autour de la nef et du chœur.
La couleur foncée que le temps a donnée à la pierre da
calcaire bleu qui revêt l'intérieur, communique à l'église
un aspect somnre et mystérieux. On remarque un autel
gothique en pierre, sculpté à iour comme de la dentelle,
plusieurs bons tableaux, et divers bas-reliefs. Il y avait
autrefois un beau Jubé en marbre noir et blanc, orné da
statues; il a été détruit, mais les statues ont été conser-
vées. Une tour de 166 met. d'élévation, dont on posséda
le plan, devait surmonter l'église de S**-Waudru : maie
le projet fut abandonné faute d'argent en 1636, et la tour
n'attemt que la hauteur des nefo. Le portail est aussi
resté inachevé : le perron en pierres bleues qu'on y re*
marque a été construit en 1839. B.
MONs (Hôtel de Ville de), monument de style ogival«
mais un peu lourd, construit de 1446 à 1458. Sa faiçade»
percée d'un double rang de fenêtres en accolade, n»
manque pas d'élégance. Les niches existant entre les fe-
nêtres ont été dépouillées de leurs statues à la fin du
xvui* siècle, et les dais qui les surmontaient ont été snp-
E rimes lors de la restauration de l'édifice en 1823. L»
alcon placé au-dessus de la porte a remplacé, en 1777,
une ancienne tribune ogivale. La toiture est surmonté*
d'un campanile dont l'exécution date de 1718. B.
MONSEIGNEUR, è V, ces mots dans notre Dict'
MONSIEUR. j naire de Biog. ei d'Histoire.
MONSTRANCE. V. Ostensois.
MONTAGNES, nom que donnent les Géographes
élévations de terrain considérables, plus importantes qne
les collines et les émmences. Leurs sommets ont reçu,
d'après leur configuration, les noms de plateaux^ anguilles,
pics ou puys, cornes, dents, dames, ou bcUlons, Une soîtA
de montagnes forme une chaine ; plusieurs chaînes réunieai
un groupe; plusieurs groupes, un système. Les pentas
d'une montagne s'appellent flancs: celles d'une chaîne,
versants. Les chaînes secondaires aul se détachent d'une
chaîne principale en sont les ramifications ou les contre^
forts. On traverse les chaînes de montagnes par des pas-
sages que leurs formes et leurs aspects variaJiles ont ûdt
appeler cols, défUés, gorges, etc. En ce qui concerne U
formation des montaj^es, les géologues sont partagés :
les uns, dits Vulcaniens, pensent Qu'elles ont été son»
levées par les feux souterrains, par les forces qui ébran«
lent l'intérieur de la terre; les antres, dits Neptunie^t
les expliquent pas l'afiaisBement des eaux terrestres.
MONTAGNES KDSSBS, plsus Inclinés OU bols d'où on laa*
çait des chars à roulettes, retenus par des rainures; ce»
chars, où deux personnes se plaçaient assises, arrivés aa
bas de la rampe, étaient remontés au moyen d'une chaîne
mue par un manège. Ce Jeu amusant, mais dangeiea^
MON
127i
MON
Alt empniDtd par les Parisiens aux Rosses, qui se lais-
sent glisser en hiver sur des traîneaux du haut de yéri-
tables collines; on le yit, dès 1816, dans un jardin pu-
blic des Ternes : plus tard , on Pinstalla aux Champs-
Elysées, à la Folie-Bea^Jon. Depuis longtemps ces mon-
tagnes ont disparu. B;
MONTANSIER (Thé&tre de la). V. Palais-Rotau
MONT-GASSIN (Monastère du). F. Cassin.
MONT-DE-PIÉTÉ, nom donné à des établissements
Drivilégiés de prâts sur gages, institués dans un but phi-
lanthropique, et que Fadministration firançaise nuage au-
jourd'hui a tort au nombre des établissements de bien-
faisance. L'Église ayant pendant longtemps condamné le
I»^ à intérêt, Tusure oes Juifs et des Lombards avait
Sroduit de grands maux en Europe. Le premier mont-
e-piété date du xii* siècle, et fut établi à Freisingen en
BaWère, sons la direction d*une association charitable
approuvée par le pape Innocent III. Le mont-de-piété
de Pérouse, inauguré en 1450, fut créé à Taide du produit
d'ane quête due à Tinitiative du P. Barnabe de Terni , et
aous la dénomination de Monte di Pieta ou Banque de
Charité f francisée plutôt que traduite par MonP-dthpiété.
Des établissements du môme genre s'ouvrirent à Viterbe
en 1471, Bologne en 1473, Savone en 1479, Mantoueet
Parme en 1488, Gésène en 1489, MiUn en 1490. Ces ban-
ques de prêt n'exigeaient des emprunteurs que le rem-
boursement de leurs frais de service. Bientôt, le pai)e
Léon X ayant, sur Tavis du concile de Latran, permis
aux prêteurs, par une bulle de 1515, de retirer un inté-
rêt de leur argent, Turin en 1519, Rome en 1539, Vicence
en 1534, Naples vers la môme époque, organisèrent de
sen^lables institutions, qui prêtaient à 5 p. 100 ; aujour-
d'hui il en existe 55 en Italie. Le Piémont possède môme
des espèces de monts-de-piété agricoles {Monts gruna^
Himee)^ tels que ceux de Zôme et d'Ottabiano, qui prêtent
diaque année, au mois de mars, des grains pour semences,
et on les leur rend en septembre suivant. ARome, le mont-
de-piété a un capital de 230,000 écus romains ; il prête
gratuitement sur les nantissements d'une valeur infé-
rieure à un écu , et perçoit 5 p. 100 sur les prêts supé-
rieurs à cette somme. — L'introducteur des monts-de-
piété en Hollande fut Wenceslas Cœberger, peintre,
architecte et économiste, au temps de l'archiduc Albert
et d'Isabelle. Il y en a 74 affermés à des entrepreneurs,
et 34 dirigés par l'État, les communes ou les établisse-
ments de bienfaisance; mais la plupart ne sont que des
buiques de produit au profit des villes. La plus considé-
rable est celle d'Amsterdam, fondée en 1578 sous le nom
de lombard par un particulier qui abusa de son privi-
1^, au point que le gouvernement la prit pour son
compte en 1614. Elle possède le droit exclusif de prêter
sur sages; mais elle n'use pas ellop-même de ce droit;
elle le délègue à des banques de petits prêts, au nombre
de 60 à Amsterdam. Les établissements de Hollande sont
surtout remarquables par la modicité des finis d'adminis-
tration, qui ne dépassent pas 3 p. 100 des sommes prê-
tées. L'intérêt est exorbitant, de 50 à 60 p. 100. Une loi
de 1840 a fixé le minimum du prêt à 30 centimes, et
le maximum à 1 florin 40 cents, et toujours par progres-
sion de 10 cents. — La Belglaue possède 22 mont»-de-
piété, qui prêtent aux taux de 6 à 24 p. 100. Le plus
important est celui de Bruxelles, fonde en 1618. Une
loi du 30 avril 1848 a supprimé les commissionnaires au-
près de ces établissements, mais les résultats de cette
mppression restent encore ignorés. — On cite en Alle-
magne les monts-de-piété de Nuremberg (1498), d'Ulm,
d'Augsbourg, de Hambourg, de Weimar, de Dresde, de
Berlin, de Gotha, de Baireuth, deCoIogne, d'Elberfeld, etc.,
2 ai prennent de 8 à 12 p. 100 d'intérêt. — Deux monts-
e-piété ont été fondés en 1791 à S^-Pétersbourg et à
Moscou , qui prêtent à 5 p. 100. A S^Pétersbourg le
nombre annuel des prêts est de 70,000 environ, repré-
•entant une valeur de 10 millions de fr.; à Moscou, il
n'est que de 3,000, équivalant à plus de 3 millions de fr.
— Les deux principaux monts-de-piété de l'Espagne sont
eeux de Madnd et de Barcelone. — L Irlande possède depuis
pen de temps des monts-de-piété. — L'Angleterre seule n'a
point d'étaolissements publies de prêts sur nantissement;
M prêt sur gages y est autorisé. Une loi du 28 Juillet 1800
ÎPaw-broker's act) fixe le tarif de l'intérêt à 1 denier ster-
ing pour b schellings, et proportionnellement Jusqu'à
4 deniers pour une livre, soit 20 p. 100 par an. Au-dessus
de 10 livres, on ajoute 3 deniers par mois pour chaque
livre en sus. — A New-York, le mont-de-piété prête à 7 p.
100 sur les sommes inférieures à 25 dollars (133 fr.), et
à 85 p. 100 sur les sommes qui dépassent cette limite.
Le premier mont-de-piété en France fût fondé à Avi-
gnon en 1577 ; on en établit d'autres à Beaacaire en 1583,
à Carpentras en 1612. Ceux qui s'ouvrirent à Nancy, à
Sedan et à Arras, en 1615, furent confirmés par Louis XÉL
Vinrent ensuite les montSKie-piété d'Apten 1674, de l'Isle
(Vauduse) en 1675, de Tarascon en 1676, de Brignoles
en 1677, d'Aneers et de Montpellier en 1684, de Marseille
en 1606. Celui de Paris fut fondé par lettres patentes du
0 décembre 1777, et ouvert le l*' Janvier 1778, avec l'au-
torisation, en date du 7 août de la même année et du
25 mars 1779, d'emprunter sur l'hypothèque des droite
et revenus de l'hôpital général. Le taux du prêt fut fixe
à 10 p. 100 par an. Renversé par la Révolution en 1792,
il fut réorganisé iNir un décret du 16 Juillet 1804, suivi
d'un règlement du 27 Juillet 1805. Cest à partir de la
même époque que furent institués ou réorganisés les
monts-de-piété de Bordeaux (1806), Marseille (1807),
Nantes et MeU (1813), Toulon (1821), Dijon et Reims
(1822), Besançon et Boulogne-sur-Mer (1823), Brest et
Strasboure (1826), Nîmes (1828), Calais et S*-GermaiD-
en-Laye (1822), SM}uentin (1833), Lunéville et Le Havre
(1835), Lvon (1836), Limoges et Arles (1841), Arras et Ver-
sailles (1845). La réorganisation du mont-de-piété de
Paris eut lieu sur l'ancien pied, qui admettait des action-
naires commanditaires; une ordonnance du 12 Janrier
1831 remplaça les actionnaires par un Conseil d'adminis-
tration présidé par le préfet de la Seine, et soumit la
comptabilité du mont-de-piété à la Cour des comptes. Il
est régi pour le compte des hospices de Paris. Des prêts
faits comme placement, et pris au cours de l'intérêt da
Jour contre un simple mandat remboursable à échéance
fixe; le profit sur les ventes (f objets engagés, dont il va
être parlé plus bas, composent son capital roulant II a
constamment en magasin pour 12 à 13 millions d'effets,
représentés par 600 à 650,000 objets. Le prêt s'y fait sur
l'engagement d'effets mobiliers estimés par des commis-
saires-priseurs attachés à Tinstitution, et dont le droit de
prisée est fixé à 1/2 p. 100. Une reconnaissance de Tobjct
mis en gage est délivrée à l'emprunteur; elle est faite nu
porteur. La durée du prêt est d'un an ; mais l'empruu-
teur peut s'acquitter auparavant par des remboursements
successifs, dont le moindre peut être d'un franc ; s'il ne
renouvelle pas son engagement, le nantissement est vendu
dans le 13* mois. Le 6ont , c-à-d. l'excédant du produit
de la vente sur ce qui est dû au mont-de-piété en capital,
intérêts et frais, reste pendant trois ans à la disposition
de l'emprunteur ; passé ce délai , la propriété en est pres-
crite au profit des hospices, qui bénéficient de cette
manière de 75 à 80,000 fr. environ par an. Les déposants
vendent souvent leurs reconnaissances, pour se procurer
nne partie de la plus-value constatée par leurs titres: la
loi du 24 juin 1851 a eu pour but de prévenir ces ventes,
en autorisant les déposants à requérir, après un délai de
trois mois, la vente de leur nantissement. Le prétest
des 4/5 de la valeur aur la vidsselle et les bijoux d'or et
d'argent, et des 2/3 pour les autres effets. Tous les six
mois, les droits et autres frais, calculés par quinzaine,
sont réglés par l'administration. Le taux do l'intérêt est
de 3/4 p. 100 par mois ou 0 p. 100 par an, dont uoe
partie représente l'intérêt des avances, et le reste est
applicable aux frais d'administration. Une ordonnance
ministérielle du 25 fév. 1854 a fixé à 4 1/2 p. 100 le taux
des emprunts du montHio-piété, avec faculté d'élever ce
taux à 5 p. 100, si la réserve déposée au Trésor venait à
descendre au-dessous de 1,200,000 fr. Il existe à Paris
deux bureaux auxiliaires, et 21 commissionnaires près les
monts-de-piété ; ces derniers prélèvent annuellement
500,000 fr. environ sur les emprunteurs. Leurs droits
sont complexes : 2 p. 100 de la somme prêtée; 2 p. 100
riur le renouvellement ; 1 p. 100 pour les dégagements;
p. 100 des bonis. Les commissionnaires sont nommés
par l'administration sur la présentation de leurs cédants :
opérant à leurs risques et périls, ils reçoivent les çsges,
en donnent un récépissé provisoire, font une appréciation
qui n'est pas obligatoire pour l'administration, et se met-
tent en avance de leurs propres deniers. Ik sont tenns
de porter, le Jour môme, les gages au mont-de-piété, où
l'engagement définitif a Heu. — Le nombre des monts-
de-piété en France est de 44; mais le prêt sur gages
interlope supplée à l'absence ou à l'insuiBsance de ces éta*
blissements. Celui de Paris fait à lui seul plus d'opéra-
tions que tous les autres ensemble. Après lui viennent
ceux de Lille, de Marseille, de Lyon. Ils peuvent disposeï
d'un fonds de roulement de 35,103,648 fr., ainsi composé:
fonds appartenant aux monts-de-piété, 2,859,135 fr*i
aux hospices, 4,460,615 fr.; emprunta à des particulier,
MON
1273
MOR
11,641,350 fr.; cautionnement des coioimisslonnaires,
4,1^,554 fr.; fonds pupillaires, &onw non réclamés,
1,075,987 flr. Quatre mont»-d&-piété prêtent gratuitement;
U capitalisent lenrs bénéfices pour augmenter leurs
foDds de roulement ou leur dotation; 13 versent leurs
bénéfices dans les caisses des hospices ou des bureaux de
bienfaisance; 3 les partagent avec les administrations
cfaaritabk». SI les monts-de-piété qui prêtent sans intérêt
font moins d'affaires que les autres , cela tient à ce
qu'ils accordent moins de facilités que les autres aux
empranteurs. A Grenoble , à Toulouse, à Montpellier, et
à Angers , le prêt est gratuit; à Avignon et à Brignoles,
le taux est de 4 pour iOO ; à Toulon, de 7 pour 100 ; à Bor-
deaux et à Paris, de 0 pour 100; k Besançon, Boulogne,
Brest, Cambrai, Douai, etc., de 12 pour 100. La moitié des
pressent de 1 à 5 fr.; plus des deux tiers n'atteignent
ras 10 fr. Il y a eu à Paris un prêt de 200,000 fr. en
1813, et un de 00,000 fr. postérieurement. La moyenne
générale des prêts est de 16 Ar. 80 c. Dans les villes de
fabrique et de passage, la durée des prêts est très-
coorte; dans celles ou Ton prête gratuitement ou à un
taux faible, la durée est très-longue. L'immense majorité
des engagements servent à soulager des misères ou des
gÊnes réelles. Les monts-do-piété sont placés sous l'auto-
rité du ministre de l'Intérieur et des préfets, et admini-
strés par des commissions gratuites de 5 à 8 membres,
pris généralement parmi les membres des commissions
administratives des hospices^ et auxquels sont adjoints
on ou deux conseillers municipaux ou un notable com-
sierçaot.
K. Gerretti, Histoire des Monts-de-Piéti, Padoue, 1752 ;
Helln, VonMàratUms sur les Monts-de-Piété , Paris,
an m; Â. Beugnot^ Des banques publiques de prêt sur
Toges, et de leurs inconvénients^ Paris, 1829 ; Amould,
Àvaidages et inconvénients dés banques de prêt connues
sous le nom de Monts-de-Piété, Namur, 1831 ; Ballîn,
EssM historique sur les Monls-de-Piété , Rouen , 1843 ;
A.deWatteville, Rapport surVadminislration des Monts-
d»-Piété^ 1850 ; Decker, Études historiques sur les Monts-
de-Piété en Belgique, Bruxelles, 1844;'Blaize , Des Monts-
dê-Piété et des banques de prêts sur gage, en France et
ianslesdivers Etats de l'Europe, 4856,2vol.in-8». A. L.
UONTIER , MONSTIER ou MOUTIER , vieux mot qui
iSgniflait monastère. On donnait quelquefois ce nom par-
ticulièrement à la cellule du moine, et, surtout en A11&-
oagne, aux églises desservies par des moines.
MO^n^OIE. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
MONTPELLIER (Aqueduc de), aqueduc en pierres de
taille, qui amène à Montpellier les eaux des villages de
S* Clément et de Boulidou. Sa longueur est de 1 3,904 met.,
dont 4,252 met. hors du sol ; sur une longueur de 850 met.,
dq>uis le réservoir dit des Arcades jusqu'à la place du
njrm^ il est supporté par 53 arcades de 8 met d'ou-
TVtore, surmontées de 183 arcades plus petites. La con-
atraction de cet aaueduc fut commencée, à la fin du
r^e de Louis XIV, par l'ingénieur Pitot. Les eaux ar-
rirent à la place du Peyrou, où l'architecte Donat a élevé
on cb&teau d'eau : c'est une rotonde hexagonale, dont
chaque face est ouverte en arcades ; l'intérieur, rond et
TOûté en coupole, renferme un bassin, d'où l'eau coule
o nappe et tombe en cascades sur des rochers oui la
TBnent dans un bassin extérieur. B.
MONTRE, ce que les marchands exposent au-devant ou
doriëre les vitres de leurs boutiques ou marins, pour
bire connaître aux passants les objets qu'ils vendent.
Dana les grandes villes, les montres sont une curiosité
<IQi mérite l'attention. Celles des marchands de nouveau-
tés exigent beaucoup d'expérience et de goût, et c'est à
Psris qu'elles sont surtout remarquables.
voimiE, ancien mot du langage militaire, signifiant
noue. Il se disait aussi de la paye.
■oiTBB, nom qu'on donna d'abord au cadran d'une
borioge, puis à une petite horloge de poche. On croit que
les premières montres furent faites k Nuremberg, vers
Tas 1500, par Pierre Hcle, et on les appela, à cause de
leor forme, oeufs de Nuremberg, De bonne heure on en
E^brimia de très-petites : au temps de François P', Mir-
nédoe fit, dit-on, des montres ayant la grosseur d'une
tmaode; il excellait à en faire en forme de croix. En 1542,
une montre à sonnerie, contenue dans une bague, fut
offerte au duc dUrbin. A l'époque de Charles IX, la boite
était souvent en cristal de roche : la collection du prince
Soltykoff, à Paris, contenait deux montres en forme de
t^^, l'une de l'horloger Cl. Jolly, l'autre de RugendL
Moger d*Aach. La prmcesse Anne de Danemark, qui
épousa Jacques I"', portait une bague ornée d'une montra
en guise de pierre ; un marteau indiquait les heures en
frappant de petits coups sur le doigt. On fit pour Louis XIV
une montre qui Jouât à chaque heure un air d'opéra*
Les Anglais Barlow, Tompion, et Quare furent, en lÔ76t
les inventeurs des montres à répétition.
MONTas (Jeux de), jeux plaçai en avant de l'orgue et
qui en garnissent la façade ; tels sont le trente-deux pieds,
le seixe-pieds ouvert et le huit-pieds ouvert. Les jeux de
montre tiennent beaucoup des jeux de flûte, et en ont
rharmonle douce et pénétrante. Les tuyaux de montre for-
mant les tourelles et les plates-faces des buflists d'orgue,
sont alimentés séparément par des porte-vent, et ce moyen
de transmission de l'air s'appelle po<(age. F. G.
MONTRÉAL. V. Monréalb.
MONT-SAINT-lilCUEL (Abbaye du). Cette antique
abbaye bénédictine, devenue, depuis la Révolution, niai-
son centrale de détention et prison d'État, fut fondée en
708 selon les uns, en 006 selon les autres, et reconstruite
à partir de 1022. Elle est aussi curieuse pour son stylo
que pour sa situation au sommet d'un rocher, à 45 met.
au-dessus du niveau de la mer, à 2 kilom. environ de la
côte de Normandie, au milieu d'une g^ve que couvre Is
marée haute. La porte d'entrée, dont l'embrasure de voûte
s'ouvre entre deux tourelles encorbellées en culs- de-
lampe, est d'un aspect sombre et terrible. L'ancien grand
réfectoire des religieux, un des plus beaux vaisseaux go-
thiques qui existent en France, a été transformé d'abord
en atelier de toiles à voiles, puis en caserne; les dortoirs
sont devenus des ateliers, tandis que le réfectoire d'en haut
sert de dortoir aux détenus. La saile des Chevaliers, ad-
mirable morceau d'architecture du xu* siècle, à voûtes
surbaissées, à piliers énormes, est maintenant un atelier
de tisserandene et de filature; ce fut là que Louis XI in-
stitua l'ordre de S^M ichel, en 1469. Le cloître est entouré
d'une galerie ^adrangulalre, soutenue par deux rangs de
colonnettes disposées en herse; la cour de ce cloître,
dont le sol est en plomb, reçoit les eaux pluviales, et les
conduit dans une citerne où elles sont conservééi pour
l'approvisionnement de la maison. Véglise est de style
roman, sauf l'abside, qui appartient au xv' siècle; on
n'en a respecté ^ue le chœur et le transsept, la nef a été
changée en atelier ; la haute flèche, que surmontait une
statue dorée de S*-Micbel, tournant au vent comme une
girouette, a été remplacée par un télégraphe aérien. Dans
le souterrain des gros piliers, on voit un groupe central
d'énormes piliers de granit qui supporte toute la masse
de l'église. De belles écuries sont sous la salle des Che-
valiers; U longue galerie du promenoir conduit au ca-
chot de la cage de fer de Louis XI, laquelle fut remplacée
plus tard par une case de bois. — V. l'abbé des Thuille-
ries. Description du Mont-Saint-Michel, dans le Mercure
de 1727; Blondel, Notice historique du MonlScùnl-Mi-
chel. 1813; Raoul, Histoire pittoresque du Mont-Saint'
Michel, 1833-34, 2 vol. in-8«; BoudentrGodeUnière, Notice
historique sur le Mont-Saint-Michel, 2* édit., 1843, in-8*;
Fulgence Girard, Histoire du Mont^Saint-Michel, 1843,
in-8<*; Le Héricher et Bouet, Histoire et description du
Mont-Saint-Michel, Caen, 1848, in-fol. B.
MONUMENT (Le), à Londres. V. Colonnes monumkn-
TALES, dans notre Dictionnaire de Biographieet d'Histoire,
MONUMENTS HISTORIQUES (Commission des), com-
mission Instituée près le ministère de llnst. pnbl., com-
posée de 18 membres nommés par le chef de l'État, et
chargée de dresser la liste des monum** histor., de répartir
les sommes accordées par l'Eut pour l'entretien on lare-
construction de cesmonunit*, etde proposer les architec-
tes auxquels sont confiés les travaux. Il y a des corres-
pondants dépaitementaux accrédités auprès des préfets,
et un inspecteur général des travaux en cours d'exécution.
MOORS (Dialecte). V. Indiennes (Langues).
MOQUETTE on MOUQUETTE, tapis de pied de laine,
ras, dont la fabrication fut faite à Toumay, pour la pre-
mière fois, vers la fin du xvi* siècle. On appela d'abord ces
tapis Moncades, puis Moucades, et, par altération de la
prononciation, mouquettes et Moquettes, On commença
d'en fabriquer en France, à Abbeville, en 1627.
MORAILLES, en termes de Blason, meuble représen-
tant des tenailles, denchées Intérieurement. Quand il y
en a plusieurs dans l'écn, elles sont superposées.
MORALE. Ce mot exprime deux choses qu'il ne faut
pas confondre : la Morale en dle-même, et la Morale con-
ddérée comme une science. La première peut exister
sans la seconde, parce que tout homme a par nature les
deux conditions de toute moralité : la notion de la loi du
devoir, que nous portons en nootf et la liberté de s'y oon*
HOR
1274
MOR
ttonner Yolontairement. Il a une rtele pour Juger du bien
et du mal dans les actions, c'est fii conscience; en sorte
que la science de la Morale est plus ou moins bonne, se-
lon qu'elle interprète plus ou moins fidèlement la con-
science. Cette science est nécessaire, parce que l'homme
a besoin de règles pour se conduire. La Morale, ainsi con-
Bîdérôe, 6ft la science des devoirs de l'homme ; elle est
toute rationnelle, et ne traite que de ce qui doit être; elle
ne s'occupe pas de la peinture des mœurs, mais des de-
Toirs de l'homme dans toutes les positions que la vie peut
lui créer. Ces devoirs sont nombreux et variés ; de là une
division de la Morale en Morale personnelle, qui traite
des devoirs de l'homme envers lui-même ; Morale sociale,
oui comprend les devoirs de l'homme comme membre
de l'humanité, d'une société civile et d'une famille; et
Morale religieuse, qui a pour oblet les devoir» de l'homme
envers Dieu. Les devoirs de 1 homme envers lui-même
comprennent l'homme tout entier, c.-èMl. le corps et l'&me.
Au sein de l'humanité, il doit obéir à la loi d'équité et
de iustice, qui lui impose des devoirs négatifs, et a la loi
de bienveillance et d'amour , qui lui impose des devoirs
positifs. La famille impose à l'homme des devoirs envers
les enfants et les serviteurs, et réciproquement. La société
civile exige de chacun de ses membres : amour à la patrie,
respect au souverain, obéissance aux lois. Les devoirs en-
vers Dieu consistent à chercher à le connaître, à l'aimer,
et à l'adorer. Quelmies moralistes ont admis une qua-
trième division de la Morale, qui comprend les devoirs
de l'homme envers tous les êtres qui lui sont inférieurs.
Considérée d'une manière plus générale, la Morale se
compose de deux grandes parties : Tune, qui s'occupe des
principes , qui les détermine et les classe , qui pose les
règles de conduite sur les idées de bien et de mal, de
mérite et de démérite, de devoir et de droit, de la loi mo-
rale et de sa sanction ; l'autre, qui considère les principes
dans leur application. La première est la plus importante;
elle prend, dans quelques auteurs, le nom de Métaphy-
nque des moeurs. Elle s'occupe du devoir en général, tan-
dis que l'autre détermine quelles sont les différentes
espèces de devoirs.
La Morale, ayant pour base des conditions qui sont
inhérentes à la nature humaine, se montra dès que
l'homme sentit s'éveiller la conscience en lui , mais ob-
scure et faible. Aussi les premiers préceptes n'ont pour
objet que les premiers besoins de la vie. Elle parla d'abord
dans la Sagesse et les Proverbes de Salomon, dans les
Maximes des sept Sages de la Grèce , dans les vers des
Gnomiques, dans les Vers dorés de Pythagore, dans les
fables et les allégories, dans les Maximes de Confucius.
A ces époques, elle reste mêlée aux autres parties de la
science. Socrate, en séparant la philosophie des autres
branches de la connaissance, prépara la formation de la
science de la Morale ; Aristote en fut le véritable fonda-
teur, comme de la Logique. A partir de ce moment, on
peut étudier l'histoire de la Morale dans les svstèmes
auxquels elle a donné lieu : ces systèmes résultent de
l'idée que leurs auteurs s'étaient faite du bien et du prin-
cipe de nos actions. I^es uns, pensant trouver ce principe
soit dans le motif égoïste, soit dans une des tendances
primitives de notre nature, érigèrent en motif unique ce
Îdi n'est qu'un des motifs ou des mobiles de l'activité,
els furent, d'une part, les Systèmes égdistes, comme la
Morale d'Êpicure chez les Anciens , celle d'Helvétius et
de Lamettne en France, de Hobbcii et de Bentham en
Angleterre ; d'autre part, les Systèmes instinctifs, basés
sur le principe d'expansion : au premier rang se trouve
le Système sentimentcU qu'Adam Smith a développé dans
■a Théorie des sentiments moraux. A ce système se rat-
tachent ceux de Shaftesbury, Butler, Hutcheson, Hume,
J.-J. Rousseau, et Jacobi. Aucun d'eux, pas plus que le
système égoïste, ne pouvait donner le caractère obliga-
toire, indispensable à la Morale; ils n'avaient en vue que
le bien sensible. D'autres systèmes considérèrent le bten
en soi, qui est absolu, et le bien morale qui est relatif :
ces deux idées pouvaient être confondues ; c'est ce qu'ont
fUt, dans leurs Systèmes rcUionnels, les Stoïciens chez
les Grecs, et, chez les modernes, Price, Thomas Reid,
Dugald Stewart, Kant. Les systèmes rationnels qui ne
confondent pas les deux idées, mais qui ne s'accordent
pas toujours dans l'ensemble de leurs théories, sont ceux
de Wollaston, de Clarke et de Montesquieu, de Leibniz,
de Wolff, de Puffendorf, de Malebranche, etc. Quels que
soient les systèmes, il est facile de se faire une idée exacte
de la Morale , en se rappelant sa liaison intime avec la
Religion. La Morale est la science des devoirs, en tant
que devoirs ; la Religion est la connaissance de ces mêmei
devoirs dans leur harmonie nécessaire avee le bonbev
mérité par leur accomplissement ; ce sont deux vues dif«
férentes d'une seule et même chose, la destinée humaine.
Les ouvrages de Morale les plus remarquables sont :
YÊUUque à ^udème, VÊtkique à Nicomaque, la Grands
Éthéti(tue d'Aristote, écrits qui. Joints à son Traité d$s
vertus et des vices, forment un cours complet de Morale;
le Traité des Devoirs de Cicéron; les Traités moraux de
Sénèque; le Manuel d*Epictète, écrit par Arrien ; les Pea-
sées deMarc-Aurèle; les OEuvres morales de Plutarqae;
la Morale de Confucius ; le traité Des Devoirs, par S^ Am-
broise ; la Morale tirée des quatre Évangiles ; — chez les
modernes , Traité de la scigesse^ de Charron ; Essais de
Morale, par Nicole; Essai moral, économique et politiqitê
de Bacon ; Éléments de ta Morale universelle, par d'Hol-
bach ; Draité de Morale de Malebranche ; Institution de la
science morale, par F. Hutcheson ; Éléments de science
morale, par Beattie; Philosophie des facultés morales,
de Du^ld Stewart; Principes de philosophie morale,
de W. Paley; Crttigue de la Raison pratique, de Kant;
Déontologie, de Bentham ; Morale sociale, de M. A. Gar-
nier, in-«° ; Le Devoir, par M. J. Simon, in-8*.
Pour l'histoire de la science, on peut consulter: Gott-
lieb Stolle, Histoire de la morale jpaJienne, en allem.,
léna, 1714, in-4<*; Grundling, Historta philosophiœ mo-
ralisa Halle, 1706, in-4<*; England, Inquiry into th»
moral ofAndent, Londres, 1735, in-8°; Histoire abrégée
des sciences métaphysiques, morales et politiques, depuis
la Renaissance des lettres, par Dugald Stewart (traduite
Sar J.-A. Buchon) ; Histoire de la philosophie morale, de
lackintosh (traduite par M. Poret), Paris, 1834, in-S^":
Histoire critique générale de la Morale chez les Anciens
et les modernes^ deMeiners, Gœttingue, 1800-1801, 2 vol.
in-8<^, en allem.; Revue des principes les plus importants
de la Morale, depuis Aristote jusqu'à nos jours, à»
Garve, en allem., Breslau, 1798, in-8o; Stceudlin, His-
toire de la philosophie morale, en allem., Hanovre, 1818,
in-8®; Histoire des doctrines morales et politiqws des
trois derniers siècles j par Matter, Paris, 1837-38, 3 vol.
in-8®; Cours de droit naturel, de JouflTroy, Paris, 1843,
3* édit., 3 vol. in-8° ; Théories et idées morales dans Toa-
tiquité, par M. J. Denis. R.
MORALISTES, écrivains philosophes dont le mérite
propre est d'être accessibles au vul^re, et de donner à
quiconque recherche leur commerce quelques sensibles
et salutaires enseignements. La Métaphysique, comme
science des premiers principes, est le fondement même de
toutes les autres sciences : mais le caractère abstrait et
spéculatif de ses recherches, l'aridité, au moins appa^
rente, ou la profondeur de ses formules, le retour des
mêmes problèmes toujours résolus et toujours discutés,
la spécialité assez ardue du vocabulaire, déconcertent les
profanes et les éloignent. Les Moralistes ne discutent point
de l'être, ni de l'absolu, ni des rapports du nécessaire
avec le contingent, et autres questions ardues; ils doos
parlent de nous-mêmes, et piquent ainsi à la fois notre
amour^propre et notre curiosité ; ils analysent nos pré-
Jugés , nos erreurs ; ils nous instruisent du vrai prix de
chaque chose, et nous font estimer la vie même à sa Jaste
valeur ; ils nous disent nos habitudes, nous font toucher
du doigt les plaies les plus secrètes de notre &me, comme
ils nous en découvrent les nobles penchants et les instincts
divins ; peintres et précepteurs de l'homme, ils l'éclairent
sur son origine, sur sa nature et sur sa destinée. La vie
et l'infinie multiplicité des soins qui la remplissent, le
cœur et ses inclinations, plus dissemblables que les visa*
ges, selon le mot de Bossuet, et plus nombreuses que les
vagues mêmes de l'Océan quand il est agité par la tem-
{>ête, tel est donc le vaste et inépnisiJ>le s^)et qui occupe
es Moralistes.
Leurs œuvres ne présentent pas moins de variété : IVm
rédise des Sentences, des Pensées^ des Maximes, l'antre
dessine des Caractères et des Portraits ; celui-ci prétend
redire les causeries familières d'un Banquet, celui-là
prête aux morts des Dialogues à l'adresse des vivants;
tel nommera Essais ses épanchements et ses confidences
au lecteur, et tel nous soumettra pour notre bien ses
Considérations sur les Mceurs de son siècle; celui-ci
s'est proposé de composer un Traité dogmatique, celui-
là nous guide par des Lettres qui sont aœeasées à la pos-
térité plus encore qu'à son correspondant; les ans énAn
demandent à la prose sa précision sévère, les autres em-
pruntent à la poésie la parure et les ornements de son
langage. Mais la variété des oeuvres ne détruit pas l'unité
de la matière : ces livres à cent formes diverses ont pour
Sttlet identique l'homme et sa nature, mystérieux nié>
MOR
1275
MOR
tangs de fioe» el de vertus, de petitesse et de mndeor.
n ùaaX chercher Tor^gine de ce genre littéraire, ayant
tout, dans cette curiosité instinctive d'où sortit jadis la
philosophie, et qui porte llionune à s'étudier lui-même
et le monde qui l'entoure. L'antique maxime gravée sur
te frontispice du temple de Delphes , « Connais-toi toi-
m^De », est non-fleulement un conseil, mais aussi Theu-
reuse expression d'un penchant naturel à notre esprit.
C'est à ce penchant d'abord que cèdent les Moralistes,
lorsqu'ils observent l'àme humaine et la peignent. Sup-
posez maintenant soit une philosophie, soit une religion
^' prescrive à ses adeptes de veiller sur eux-mêmes, de
looder leurs cœurs pour en arracher toutes les inclina-
doos mauvaises, de se demander compte chaque jour de
tour arancement dans le bien, de méditer enfin sur leur
destinée, une telle doctrine n'est-elle pas propre à pro-
duire les habitudes d'observation et de réflexion oui font
les Moralistes 7 Telle a été, en effet, l'influence au stoï-
cisme et du christianisme. — Si l'objet des EHoralistes est
il peinture de l'homme et de la vie humaine, un pareil
ipectacle a pour avantage dé chasser un instant de notre
esprit les préoccupations des intérêts et des affaires, de
flous faire rentrer en nous-mêmes pour y voir le tableau
de DOS misères et de nos imperfections, et de nous rendre
indulgents aux défauts d'autrui par la conscience de nos
propres faiblesses ; de provoauer au fond de nos cœurs
des mouvements de honte salutaire, de bonnes et géné-
reuses résolutions, et des aspirations vers le bien ; parfois
même d'éveiller dos instincts les plus élevés, et, en
l'adressant à la partie divine de notre être, de reporter
nos pensées de crainte ou de reconnaissance vers notre
créateur. M*"* de Sévigné avait sans doute éprouvé quel-
ou'un de ces effets, quand elle disait qu'elle voudrait faire
de tel Essai de Nicole « un bouillon pour l'avaler. »
Hésiode fut le père des Moralistes, en donnant, dans
son poëme sévèrement didactique des OEuvres et Jours,
Texemple de ces maximes qui formèrent le genre gno-
mique ou sentencieux. Les sept Sages, puis les poètes
gnomiques Selon, Phocylide de Milet, Théognis de Mé-
dire, sont ses plus célèbres héritiers: Solon, qui sut
être à la fois un grand législateur, le plus bienveillant
lies hommes et le plus aimable des poètes; Phocylide,
véritable créateur du genre, qui composa des maximes
poor elles-mêmes, tandis que Solon faisait servir la
poésie à la politique ; Tbéognis, ^e des troubles civils
chassèrent de son pays, et qui mit parfois dans ses ré-
flexions morales autant d'élévation et de force que d'Àpreté
dans ses invectives politiques. Si l'on syoute k ces sen-
tences, fréquentes d'ailleurs dans toutes les œuvres ly-
riques de ces temps-là, les maximes à demi énigma-
tiqoes des pythagoriciens, on aura la première forme
que revêtit en Grèce l'œuvre si compliquée des mora-
listes. Aristote et Théophraste, par leurs portraits ou ca-
ractères, lui donnèrent la seconde; et une autre enfin lui
Tint de Xénophon, de Plutarque et de Lucien. Aristote,
faisant, à l'exemple de Platon, de la rhétorique une partie
de la science de l'homme, et lui donnant comme prin-
cipe fondamental la connaissance de l'Ame humaine, con-
ncra tout un livre de son ouvrage sur l'art oratoire à
décrire, avec une exactitude et une finesse admirables,
les passions et les mœurs ; de là notamment ce portrait
des jeunes gens, des vieillards et des hommes faits , in-
complètement retracé par Horace et par Boileau, ses imi-
tateurs. Théophraste, qui faisait sans doute pour la
comédie ce que son maître avait fait pour l'éloquence,
0t qui voulait dessiner des modèles à l'usage des poètes
dximatiques, pénétra plus avant dans l'analyse des ridi-
cules et des vices, les décrivit en plus grand nombre,
Mec des détails piquants , jusque dans leurs nuances les
plus fines et les plus délicates. Xénophon, Plutarque et
Laden durent leur nom de Moralistes, non plus à des
nsximes ni à des portraits, mais à des compositions de
pins longue haleine, dont le bat était de servir les hommes
en éclatant leur inexpérience, en persiflant leun tra-
^en, ca guérissant leure faiblesses, en dissipant leur
ignorance. Cette intention d'écrire des choses utiles, qui
Tait d'eux des écrivains éminemment pratiques, est le
fond eonamon de leun œuvres morales et leur seule
Qidté. Les plus renonmiéei de Xénophon sont : l'Jscono-
«19110, charmant dialogue sur l'administration du ménage
et ragriculture; le Bawtuet, dialogue entremêlé de scènes
o& Socrate est le principal acteur, conversation vive et
wiée, mais d'un tour légèrement vulgaire, avec des traits
d'âne couleur parfois trop antique; l'HiVron, dialogue
«lire Hiéron de Syracuse et le poète Sîmonide, parallèle
^ lyran et du simple citoyen, rempli d'observations ju-
dicieuses sur Part de gouverner les hommes. Plutarque»
le plus infatigable causeur de l'antiquité, en fut aussi le
Moraliste le plus fécond et le plus attrayant. Ses écrits
vulgairement appelés Morales atteignent le chiffre de
quatre-vingts; il est vrai que tous les genres y sont re-
présentés, et sous les formes les plus variées : traité dog-
matique sur l'éducation des enfants; préceptes sur la ne
conjugale; conseils aux enfants sur la lecture des poètes;
dissertations sur l'utilité des ennemis, sur la fortune,
sur l'exil, sur le destin; souper des sept Sages; consi-
dérations sur le bavardage, sur la curiosité, sur la mau-
vaise honte; dialogue sur les délais de la justice divine;
propos de banquet en neuf livres; histoires d'amour;
apophthegmes ; questions naturelles; recherches sur la
décadence des oracles; consolation à sa femme sur la
mort de sa fille; tout y est, la religion, la philosophie, la
littérature, les sciences et les arts, autant que la morale»
et partout l'on sent une àme sincèrement amie du bien
et du beau, même au milieu d'étranges erreura, un cœur
simple, un esprit curieux et juste, éloigné de tout excès,
un homme de bonne foi et de bon sens. Lucien fut scep-
tique et moqueur comme Plutarque était croyant et bon,
et il consacra sa vie et son esprit tantôt à bafouer toute
croyance religieuse ou philosophique qui dépasse l'étroit
horizon de nos sens, même le scepticisme spéculatif; tan-
tôt à persiffler, avec une verve intarissable et digne d'Aris-
tophane, les traven, les ridicules , les vices de ses con-
temporains et des hommes de tous les temps. Ses Dialogues
des morts sont immortels. Esprit élégant et distingué, un
jour qu'il voulut être sérieux, il écrivit sur l'amitié, ce
sujet aimé des Moralistes, quelques pages originales, qui
conservent encore leur agrément et leur prix, même après
Cicéron, même après Montaigne.
A Rome, il convient de donner un souvenir au livre
de Cicéron Sur V Amitié, k son traité plus original encore
et plus attrayant Sur la Vieillesse , ainsi qu'à Horace pour
ses Êpttres, Mais les vrais moralistes furent les Stoïciens.
Sénèaue, particulièrement dans ses Lettres à Lucilius,
Épictëte dans le Manuel de ses leçons qu'Arrien nous a
transmises, Juvénal et Perse dans quelques-unes de leurs
brûlantes Satires , Marc-Aurèle dans ses Pensées , por-
tèrent une analyse pénétrante jusaue dans les replis les
plus cachés de l'àme, ou enseignèrent d'exemple cette
humilité, ce renoncement à soi-même, cette tendresse
expansive et cet amour du prochain que la religion chré-
tienne, avec une force d'enthousiasme irrésistible et au
prix du sang des martyra , allait répandre bientôt par
tout l'univers. Tous les Pères de l'Église, en effet, Grecs
ou Latins, apologistes ou dogmatiques, et les évêquea
ou prédicateurs leun héritiera du moyen âge et des temps
modernes, tous les représentants illustres du christia-
nisme, précédés dans cette voie par l'auteur sacré des
Proverbes ( V, ce mot) et du livre de VEcclésiaste, depuis
S^ Paul jusqu'à S^* Thérèse, et depuis S* Bernard jusqu'à
Fénelon, se montrèrent d'admirables moralistes, sans en
avoir le titre, en peignant dans leun œuvres les mala-
dies cachées du cœur humain, comme aussi ses aspira-
tions les plus sublimes.
Il est juste de nommer, dans la littérature française «
Boileau, Voltaire, et Gilbert, l'un pour plusieurs de ses
Épitres et de ses Satires, l'autre pour ses Discours en
vers sur Vkomme , pour ses Épttres sur la calomnie , à
Horace, aux Délices, etc., le 3* pour sa satire le Dix^
Huitième siècle. Mais les vrais moralistes furent tous des
prosateura, qui mêlèrent souvent, nouvelle originalité
dans un genre déjà si complexe, aux pensées morales
des maximes littéraires. Montaigne en ouvre glorieuse-,
ment la liste dès le xvi« siècle par ses Essais, Éclairé,
sinon profondément attristé par les (querelles religieuses^
à l'entêtement, à la présomption opiniâtre qui poussait
ses concitoyens à s'entr'égorger, il opposa le doute sys^
tématique, et fit le procès à la raison humaine, détrui-
sant toutes les affirmations des sages les unes par les
autres. Il avait raison de protester contre les égarements
de la raison de son siècle ; mais pourquoi faut-Il aue de
parti pris il ne conduise l'àme à la paix que par rindif-
férence, à la sérénité que par une peinture quelque peu
épicurienne de la vertu? Aussi ce fut avec une grande
force d'éloquence que Pascal (Diaiogue sur Êpictète et
Montaigne) battit en brèche et renversa cette doctrine
trop diangereusement commode. A côté de Montaigne,
Qiarron, sans avoir autant de verve, d'esprit et de finesse,
se recommande du moins par un grand sens, et par dei
opinions à la fois fermes et modérées, qui ne démentent
pas le titre de son livre, De la sagesse. Le xvii* siècle cite
avec orgueil les Maanmes de La Rochefoucauld; les Pei^
MOR
127S
MOR
tén de Pascal ; les Essais où Nicole, aa liea de troubler
les Ames, leur donne le calme, et doucement les réconforte
eontre les passions ; les Caractères de La Bruyère ; enfin,
à un degré inférieur, les Réflexions de Saint-Évremond
sur Tusage de la vie, ses Discours sur les Belles-Lettres,
et d*autres Réflexions sur la tragédie et la comédie. A ces
noms illustres, le xvm* siècle, sans parler de J.-J. Rous-
seau et de Bernardin de SaintrPierre qui ne se rattachent
quMndirectement à ce groupe d'écrlTains, oppose Vau-
Tenargues avec ses Réflexions et Maximes , Duclos avec
ses CwuûUraltof» sur les Moeurs de ce siècle, observa-
tions fines et Judicieuses, mêlées à des sentiments cmi
sont d*un honnête homme et d*un bon citoyen ; enfin
Montesquieu, avec quelques pensées morales et litté-
raires, où il sut être encore, après ses prédécesseurs,
original et piquant. Joubert (Pensées, Essais et Maximes,
S* édit, Paris, 1849, 2 vol. in-8o^ couronnerait la série, s'il
fallait croire que notre xdl" siècle a dit son dernier mot;
mais on a pubué les œuvres de M*^* Swetchine ( If "^ Swet^
chine, sa vie, ses oeuores, par M. de Falloux, Paris, 1861,
2 vol. gr. in-18), et cette dame aura peut-être des
successeurs. F. CABACitaBS, Uaxihes, Pensées, Ré-
PLEXIONS. A. H.
MORALITÉ, conformité des résolutions et des actions
humaines à la loi du devoir. Elle suppose le discernement
et la liberté. On appelle encore moralité le sens moral
ou la vérité que Ton peut tirer d*une fable, d*une com-
position allégorique, etc.
MORAUTé ^Certificat de) , on ds bonne vie et mœurs,
certificat déhvré par les officiers municipaux , et dont la
production est souvent exigée de ceux qui demandent un
emploi ou qui veulent exercer certaines professions. Il est
nécessaire, par exemple, à quiconque veut entrer dans
les Douanes , à Tétudiant en Droit pour prendre sa pre-
mière inscription, à la personne qui désire diriger un
établissement d'aliénés, aux engagés volontaires, aux
nourrices et autres personnes qui veulent se charger des
enfants trouvés des hospices, à ceux qui aspirent aux
fonctions d'instituteur primaire. Les Chambres de dis-
cipline des notaires, avoués, huissiers, délivrent des cer-
tificats de moralité et de capacité à ceux qui prétendent
devenir officiers ministériels.
MORALITÉS, nom donné, dans l'histoire de la littéra-
ture française, à des poèmes composés généralement par
des prêtres ou des moines pendant le xii* et le xin* siè-
cle, dans un but religieux et moral , pour les opposer aux
Fabliaux {V. ce mot)., trop enclins à l'incrédulité ou au
libertinage. Tels sont les Moralités des j^hilosophes par
Atars de Cambrai , les Enseignements SAristote par Pierre
de Vemon , le Débat du corps et de Vàme ( K. Ancien
Théâtre-Français, Paris, t. III), le Dialogue de Pierre
de la Broche, qui di^nUe à la Fortune par devant Reson
(F. Théâtre^Françau au moyen âge par Monmerqùé et
Francisque Michel, 1839). Dans ces compositions^ le
dialogue se mêla de bonne heure au récit, et, lorsqu'au
xiv* siècle le goût de l'allégorie devint général , on eut
naturellement l'idée de transformer en personnages de
théâtre les passions, les vertus et les vices. Les Moralités
devinrent alors des œuvres scéniaues, conservant ce trait
de leur ancien caractère, qu'elfes étaient fort courtes
(1000 à 1200 vers), et simples par le sujet comme par
le nombre des acteurs. La représentation des Mystères
(V, ce mot) étant le privilège exclusif des Confrères de
la Passion, les clercs de la Basoche (T. ce mot dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire) se mirent à
Jouer les Moralités. Ces pièces exprimèrent d'abord des
idées religieuses à l'aide de personnages abstraits et allé-
goriques, et eurent pour fonds commun le tableau des
épreuves de l'àme et de son acheminement vers le salut
ou vers sa perte; puis, tout en conservant l'usage de la
leçon morale, on alla prendre des personnages réels
dans les paraboles de l'Évangile, et l'on représenta, par
exemple, la parabole de l'Enfant prodigue, ou l'histoire
du Mauvais Riche. En faisant un pas de plus, on emprunta
des noms et des sujets à l'Ancien et au Nouveau Tes-
tament, et la Moralité se rapprocha du Mystère. Enfin,
on prit dans la vie réelle l'action ou'on avait Jusque-là
demandée surtout à la tradition religieuse; la Moralité
fut de plus en plus humaine et familière, et l'élément
comique s'y mêla souvent à la pensée sérieuse. Au mi-
Jeu de ces transformations, les pièces reçurent des dé-
veloppements plus considérables et exigèrent un plus
grand nombre d'acteurs. Les Moralités restèrent en fa-
Teur Jusqu'au temps de François I*' ; alors la censure mit
on Juste frein à leurs hardiesses satiriques, et la Renais-
sance acheva de les faire tomber. B*
MORATOIRES (du latin mora, retard, délai), se dh
des intérêts qui sont dus à raison du retard apporté an
payement d'une créance exigible.
MORBIDESSE, en italien morbidexxa (de l'italien
morbido, délicat, souple au toucher), se dit en. Peinture
et en Sculpture, de l'imitation de cette douceur aoi
caractérise les chairs dans les natures délicates, teUei
que celles des femmes et des enfants.
MORDANT, ancien ornement de chant, qn'U est asses
difficile de définir, et qui semble avoir eu du rapport avec
deux petites notes d'agrément précédant une note qoel*
conque.
MORDANT, pièce de métal qu'on appliquait autrefois
l'extrémité pendsmte des ceintures.
MORDVHŒ (Dialecte), dialecte parié par la tribu fin-
noise des Mordvines, qui habite sur les horûs du Volgs,
dans les gouvernements de Saratow et de Pensa. On ne
le connaît que par la traduction des Évangiles faite par
Van der Gabelentz, et imprimée avec des lettres russes.
MORESQUE (Architecture). V. Axabe.
MORGANATIQUE (Mariage). V. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire, au Supplément.
MORGANTE LE GRAND, poème héroi-comique, com-
poséen italien par Pulci, à lasollicitation de Laurent deMé-
dicis. Quelques critiques, trompés par la fausse ntiveté
de certaines apostrophes pieuses, ont vu dans cet ouvrage
une œuvre sâieuse; mais c'est bien mal connaître le
temps où vivait Pulci, son caractère, et celui de la société
pour laquelle il écrivait : son poème n'est qu'une sorte de
parodie des romans poétiques, ce qu'est le Don Quichotte
pour les romans de chevalerie. Morgante le Grand est un
des géants vaincus par Roland, et qui se fait le compa-
gnon de ses combats. Mais il n'est qu'un personnage
secondaire : au premier rang figurent Renaud , Astolpbe,
les fils A^mon , etc., le tout entremêlé d'enchanteurs et
de magiciens. Pulci abandonne son style burlesque quand
il s'agit de raconter la mort de Roland : malgré la trempe
ironique de son génie, et le dessein qu'il avait d'amuser
Laurent de Médicis, il est souvent pathétique, parce
qu'il est poète, et que son sujet le domine et l'émeut. Le
Morgante le Grand a 28 chants, écrits en rimes octaves.
La l'* édition en fut donnée à Venise en 1481. Cet ou-
vrage est particulièrement estimé des Toscans, qui y re-
trouvent l'idiome primitif florentin. E. B.
MORGENGABB. V, ce mot dans notre Dictionnairs de
Biographie et d'Histoire.
MORGUE (d'un vieux mot qui veut dire visage), second
guichet d'une prison, dans leauel on retient quelque
temps les gens que l'on écroue; les gardiens les y exami-
nent à loisir pour les reconnaître au besoin ; — lieu pu-
blic où l'on expose les corps des personnes trouvées
mortes hors de leur domicile, et que l'on ne connaît pas,
afin qu'on puisse venir les reconnaître.
MORION. l V, ces mots dans notre Dictionnain 6»
MORMONS. S Biographie et d: Histoire.
MORNÊ, en termes de Blason, se dit du lion et antrei
animaux sans dents, bec, langue, griffes ou queue.
MORS ou FREIN, pièce de fer ou de bois qui se place
dans la bouche du cheval pour le gouverner. Pline en
attribue l'invention à un certain Pelethronius, et Virgile
aux Lapithes, qu'il appelle pelethronii, du nom d'une
montagne de Thessalie, le Pelethronius, où l'on com-
mença à dompter les chevaux. — Autrefote on appelait
Mors (de mordre) l'agrafe qui retient sur la poitnoe les
bords de la chape.
MORT (Images de la). Les premiers hommes, ne pou-
vant s'expliquer la cessation de la vie, attribuèrent ce
phénomène à une puissance invisible, à une divinité ca-
chée qui se vengeait d'une offense, et qui frappait osten-
siblement dans les combats et mystérieusement daos tel
maladies; c'était T*yphon chez les Égyptiens, Afariman
chez les Perses. Souvent la Bible nous montre Dieu en-
voyant son Ange exterminateur pour punir les coupables,
et, dans son langage poétique, elle fait de la Mort un
chasseur armé de flèches et de filets, un ravisseur, un
guetteur qui se cache sous le manteau de la nuit et l'ap-
parence d'une contagion. Chez les Grecs, la Mort porta
{>lusieurs noms, comme celuide Jlfotra, lesquels indiquent
'idée de partage; elle était censée apporter à chacun son
lot, sa part. C'était la Parque, à qui ils attribuaient
l'emploi de filer les Jours des mortels. Plus tard on dis-
tingua trois Parques, à cause du passé, du présent et de
l'avenir : tantôt elles enlevaient elles-mêmes ceux dont
elles avaient rendu l'arrêt Hital, tantôt elles confiaient ce
soin à des divinités inférieures appelées Kères, qui étaient
toi\|ours du sexe du mourant^ particularité qu'on retroufi
MOR
1277
MOR
dans les croyances da moyen Age (V. Dansb dss morts).
Ces Kères, d'après les postes et les artistes, étaient noires;
elles STsient des ongles en forme de griffes, des dents
•igoes, et dea ailes aux pieds et an dos : pour donner
ta mort aux liommes et les conduire au Tartare, elles
étaient aidées par Até, Némésis et Dicé (le Malheur, le
Destin fengenr et la Justice), les Pœnœ et les Alastorês
(dïTinités de la punition), les Erynnies, les Harpies et
ksSirêfies (de stiréin, attirer}, qui chantaient à la fois
pour sdoudr les horreurs de la mort et pour attirer les
morts, qu'elles livraient à l'Enfer (Hadès). Les Sirènes
et les Harpies étaient représentées sous la forme de
femmes ailées on d'oiseaux à tête de femme. Avec le
tiède de Périclès, la croyance à toutes ces divinités léthi-
fères disparut peu à peu; alors la Mort, personnifiée, prit
place parmi les divinités infernales, et fut souvent con-
fondue avec Hadès ou Pluton. Les Grecs se la fleurèrent
noire, avec des ailes de la môme couleur, la barbe et les
dieveax hérissés. — Les Étrusques donnaient au dieu de
la Mort Taspect d'un vieillard portant des ailes et une
kmgae barbe, et tenant un marteau pour frapper ceux
qui devaient mourir. Leurs Furies,^ chargées de conduire
les âmes aux Enfers, ont une physionomie plus farouche
qoe les Kères : c'étaient des femmes ailées, aux bras
entourés de serpents, aux doigts crochus, et d'un aspect
tont à fait horrible. Les Étrusques ^pelaient aussi la
Mort Âtkrpa, Muira, altérations évidentes des noms
grecs Atropos et Moira; la forme italique de ce dernier
mot, étant Morta, Morsa, a foit naître le substantif latin
Mon.
Chez les Latins, la Mort était désignée par les mots
^•etssUas, Fors, Fatum^ Fortuna; on lui donnait aussi
le nom d'Orcus comme divinité infernale. La répugnance
({n'avaient les Grecs et les Latins pour toute idée lugubre,
pour tout emblème hideux, nous explicpie pourquoi leurs
sculpteurs ne créèrent, pour la décoration des tombeaux,
que des images dont l'aspect ne pouvait blesser la déli-
catese : ils représentaient la Mort sous les traits Juvé-
niles d'an génie ailé, dormant appuyé sur un flambeau
leoTersé, dont il presse la flamme contre le sol pour
annoncer qu'il éteint la vie ; un masque est placé parfois
à ses pieds ou dans sa main, pour indiquer que le rèle
est achevé. On rencontre aussi sur des tombeaux des
têtes de Méduse, belles et sans contorsions, et pourtant
ingénieuses et parfaites images de l'immobilité, de la
frâdear et de l'exanimation du cadavre. Ailleurs ce sont,
comme emblèmes de destruction, soit des oiseaux dévo-
rant des serpents et des lézards ou becquetant des fruits,
soit des chèvres broutant des vignes, soit des coqs com-
battant, etc. La figure du sphinx était aussi emi)loyée
pou* désigner ce que l'autre vie a pour nous d'énigma-
tique et de mystérieux. Souvent l'immortalité de r&me
et la fuite rapide de la vie étaient exprimées par la figure
d'an papillon sortant de la bouche du défunt ou volti-
EDt au-dessus de sa tombe. Des couronnes ou des guir-
des de cyprès et de pin décoraient aussi les sépul-
tures antiques ; le premier de ces arbres était consacré
à Pluton, le secoua à Proserpine. Parfois ces divinités
elles-mêmes ou les Parques étaient représentées sur les
tombeaux des riches et des grands. On y voyait enfin
des sacrifices, des combats, des chasses, et Jusqu'à des
•cènes domestiques. C'était alors une espèce de mons-
traosité que d'allier à ces images les tètes de morts et les
squelettes, si généralement employés dans le moyen âge.
n en fut de même chez les premiers chrétiens, qui ne
figurèrent sur les murs des catacombes et sur les sarco-
phages que des emblèmes religieux, tels que le labarwn,
la oolonme de l'arche de Noé, l'açneau mystique, etc.,
m certains sujets tir& des livres saints, comme Adam et
tve. Moïse firappant le rocher, Jésus en croix, la résur-
rectioD du fils de la veuve de Nalm ou celle de Lazare,
et Jonas en^outi et vomi par la baleine, témoignages
évidents, quant aux trois derniers si^ets, d'une espé-
fanoe eonaolatrioe, la résurrection de la chair. Dans les
inscriptions tomolaires, on excluait également tout ce
qui pouvait rappeler la putridité du tombeau. Cependant
les Anciens ont dérogé quelquefois à la pureté de goût
^ caractérisait leurs conceptions, en représentant des
iquelettes et des tètes décharnées. Gori, dans son Mu-
"Mm tlortntmum^ décrit une sardoine antique sur la-
quelle un squelette danse devant un vieux pÀtre assis et
jouant de la double flûte, et, dans son MiucBum etruscum,
en mentionne une autre qui représente une tète de mort
et un trépied couvert de mets, avec cette inscription :
• Bois, mange, et couronne-toi de fleurs; c'est ainsi que
BOUS serons bientôt. » Sur l'un des petiu côtés d'un sar-
cophage reproduit dans le tome V de V Antiquité expl^
qtU$ de Montfaucon, on voit un cr&ne placé au-dessus de
la tète d*un vieillard qui représente le fleuve infernal*
En 1800, on a trouvé près de Cumes, dans des chambres
sépulcrales, trois bas-reliefs en stuc, dont l'un représente
trois squelettes (F. le Magasin encyclopédique de Jan-
vier 1813). On peut encore citer l'usage suivi, dès la plus
haute antiquité, de* promener à la ronde, sous les yeux
des convives, des images de squelettes et des squelettes
même : Pétrone parle du petit squelette d'argent dont
un esclave faisait mouvoir les ressorts au festin de Tri-
malcion. La figure du squelette ne représentait alors que
l'état final où la mort réduit l'homme, mais non la Mort
elle-même, et n'avait que le but tout matérialiste d'in-
viter l'homme à Jouir le plus possible des plaisirs de
la vie.
Chez les Anciens, malgré le genre du mot Mors, la
Mort ne paraît pas comme femme : les Scandinaves et
les Slaves lui ont donné le sexe féminin, tandis que les
Finnois et les LiUiuaniens lui attribuent indifféremment
les deux sexes. Les Scandinaves se représentaient la Mort,
sous le nom de Halya ou Hely comme une déesse noire,
ne tuant pas, mais saisissant les morts, à l'exception des
guerriers tombés sur le champ de bataille. Les &mes de
ceux-ci, recueillies par les Walkyries, messagères du dieu
Odin, étaient conduites au Walhalla, séjour de toute fé-
licité, et non dans l'Enfer. D'autres divimtés que celles du
monde souterrain s'emparaient également des âmes :
ainsi, Ràn, déesse de la Mer, attirait à elle avec un filet
les corps de ceux qui s'étaient noyés dans ses eaux.
Chez les Chrétiens, pour frapper l'imagination des
peuples et augmenter l'horreur du péché, dont la mort
est le fruit et la conséquence, on imagina de prendre,
comme représentation de la Mort, l'image réelle d'un
cadavre <ttns le tombeau. Pendant plusieurs siècles, la
Mort fût un cadavre desséché, livide, à l'œil creux, aux
chairs pendantes. C'est seulement aux approches de la
Renaissance qu'elle se présente sons la forme d'un sque-
lette, lorsque, par la perfection des études, les artistes
purent connaître l'anatomie humaine. Les poètes du
moyen Age en font un ennemi toujours vainqueur de
l'homme, tantôt l'attaquant par surprise, tantôt accou-
rant à la voix des malheureux qui l'appellent : elle est
souvent montée à cheval ; ici elle tient un arc et des
flèches, une lance ou une hache; là elle fïappe d'un fouet
à quatre lanières, ou porte un filet pour enlacer les hn-
muns ; ou bien elle tient la faux qui tranche leur exis-
tence, et elle enrôle les morts sous sa bannière pour en
faire les soldats de sa grande armée. On la compare aussi
à un garde forestier, qui doit avoir l'œil sur les arbres
du bois destinés à toniber. Non-seulement elle se l>at les
armes à la main contre l'homme, mais elle le cite devant
un tribunal Juridique; c'est probablement dans ce sens
qu'il faut entendre ce proverbe : « Contre la mort n'a
point d'appel, i» Les artistes traduisirent les idées des
poètes, et se plurent en outre, soit à multiplier, dans la
décoration des tombeaux, les cadavres rongés de vers et
les squelettes ; soit, dans leurs peintures et leurs sculp-
tures, à représenter la Mort avec des attitudes et des
attributs encore plus variés ( V, Danss des mosts). Au
XVI* siècle, le goût s'épura un instant, et se rapprocha
de celui des Anciens ; mais les formes repoussantes ne
tardèrent pas à reparaître et à dominer : la Mort, quand
on ne la confondit pas avec le Temps, fut toujours peinte
sous la forme nue d'un squelette.
K. liossing, Comment les Anciens ont représenté la
Mort, traduit en français par Jansen dans le RecueU d$
pièces intéressantes concernant les antiquités, Paris,
1786; Jacob Grimm, Mythologie allemande, 2« édition,
Gcettingue, 1844, in-8<> ; F. Naumann, la Mort sous tous
les points de vue (en allem.), Dresde, 1844, in-12; Alfred
Maury, Sur le personnage de la Mort, dans la Revue
arcMologiqw , Paris^ 1847-48; E.-H. Langlois, Essai
historique, philosophique et pittoresque sur les Danses
des morts, complété et publié par MM. Pottier et Baudry,
Rouen, 185i, 2 vol. çr. in-8». P— s.
MORT (Peine de). K . Pbinb capitale.
MORT CIVILS, état de l'individu qui, par suite d'une
condamnation Judiciaire, a perdu tous les droits civils et
se trouve comme retranché de la société. La mort civile e
été supprimée par la loi du 3i mai 1854. Ce n'était pas
une peine, mais la suite ou l'eiTet de la condamnation à
la mort naturelle, aux travaux forcés à perpétuité, et à U
déportation. Par la mort cirile, le condamné perdait la
propriété de ses biens, qui étaient dévolus à ses héritière
comme s'il était mort naturellement et sans testament!
MOR
1278
MOR
0 ne pouvait plus ni tranunettre, par donation entre Yifii
on par teatament, oe qu*il aurait acquia depuia aa con-
damnation, ni rien recevoir au même titre, si ee n'est
pour cauae d*alimenta; lea biens acquia après la con-
damnation paaaaient à l*Ëtat par voie de déahérenoe au
moment de la mort naturelle. Le condamné ne pouyait
encore ni exercer une tutelle; ni être témoin dans un
acte authentique, ou en justice; ni demander ou dé-
fendre derant un tribunal, si ce n'est sous le nom et par
le ministère d*un curateur que nonmudt oe tribunal; ni
contracter un mariage produisant des effets civils, et, s*il
était marié antérieurement, ce mariage était dissous
ouant à ses effets civils. La mort civile était encourue à
dater de Fezécotion de la condamnation, B*il y avait
eu débat contradictoire, et seulement au bout de 5 ans,
al la condamnation avait été prononcée par contumace :
dans ce dernier caa, les biens du condanmé étaient admi-
nistrés et ses droits exercés, pendant les 5 années, de la
même manière que ceux d*un abaent. Si le contumace se
présentait ou était saisi après le délai de grâce, et qu'il
lût absous ou condamné a une peine n'emportant pas la
mort dvile, il rentrait dans la plénitude de ses droits
civils pour Tavenlr, maia le prenuer Jugement conservait,
pour rintervalle écoulé entre les dnq ana et la comparu-
tion en Justice, les effets que la mort civile avait pro-
duits. Si le contumace mourait pendant le délai de griu»,
Il était réputé mort dans Tintégrité de ses droits. En
aucun cas la prescription de la peine ne réintégrait le
condamné dans ses droits dvils pour Tavenir. Y, Dea-
quiron, Traité de la mort cwUe en France, 1821, in-8®.
HORTAILLàBLES. V, ce mot dans notre Dictùmnaire
de Biographie et d*Histotre,
MORTAISE, cavité ou entaille pratiquée dans TéiMda-
seur d'une pièce de bois ou de métal pour recevoir le
tenon d'une autre pièce, de manière à former un assem-
blage.
MORTALITÉ, mot désignant, soit la condition inva-
riable des êtres animés , qui est de mourir, soit la mort
d'une quantité plus ou moms considérable d'hommes ou
d'animaux emportés en peu de temps par la même ma-
ladie, soit enfin la quantité d'individus de l'espèce hu-
maine qui, sur un certain nombre de vivants, meurent
dans le cours d'une année. Dans cette demiénre accep-
tion, la mortalité suggère un certain nombre de remar-
ques d'Économie politique. La mortalité s'apprécie géné-
ralement par le rapport des décès à la population , et ,
bien que le nombre dea habitants et celui des morts ne
soit pas constaté dans tous les pays de manière à donner
des résultats certains, on croit que les chiffres suivants,
relatifs à l'Europe, sont assez près de la vérité : dans le
Nord, 1 décès pour 41 habiunts ; dans le centre, 1 pour 40 ;
dans le Midi, 1 pour 34. Toutefois, des climats trop rigou-
reux donnent, aussi bien que les climats très-chauds, une
proportion défavorable : pendant une période de 6 an-
néeÂ, on a conataté en Islande 1 décèa par 30 habitants.
La mortalité est ai^ourd'hni de 1 pour 45 habitants en
France et en Angleterre, de 1 pour 38 en Prusse, de 1
pour 33 en Autriche. Les populations des villes payent à
la mort un tribut plus élevé que lea populations rurales :
Il a été constaté, en Belgique, que le rapport était de
1 mort sur 37 habitante dans les villes, et de 1 sur 47
dans les campagnes. Les chiffres recueillis parles statisti-
ciens tendent à établir qu'il existe un rapport direct entre
la fécondité et la mortalité, c-à-d. que le nombre des
nalasances est réglé par celui des décès; d'où l'on conclut
que la population tend toujours à prendre un certain ni-
veau, déterminé par la quantité des produits. On a éga-
lement remarque que les morts-nés du sexe masculin
•ont notablement plus nombreux que ceux du sexe fémi-
nin; que la mortalité des mâles est aussi plus grande
pendant les premiers mois qui suivent la naissance, et
qu'elle devient à peu près la même pour les deux sexes
après la période de l'allaitement ; que la mortalité des
femmes augmente dans une forte proportion de 14 à
18 ans ; que de 21 à 20 ans la mortaliâ des hommes l'em-
porte de nouveau, et que de 26 à 30 l'égalité tend à se
rétablir. Quoique la vie moyenne dea femmes soit un peu
plus longue que celle dea hommes^ on a cru reconnaître
qu'il y a plus de centenairea chez ceux-ci que chez celles-
là. La durée moyenne de la vie en France a été en aug-
mentant depuis un siècle : elle n'était guère que de 33 ans
au xviu* siècle, elle est aujourd'hui de 40 ans 10 moia
17 Jours, d'après les calculs de Bouvard. Mais elle varie
singulièrement selon les départements, sans qu'on ait
une explication nette de cette différence : unsi, elle
atteint 54 ana 8 moia 20 Joun dana les Haatea-Pyrénéeâi
53 ana 8 mois 16 Jours dans l'Orne, tandla qu'elle n'est
que de 31 ans 1 mois 28 Jours dans les Ek)uchefr-dii-
Rhône, et de 31 ans 8 moia 5 Jours dans la Seine. Lei
Basses-Pyrénées, l'Ariége, la Vienne, les Deux-Sèvres, le
Cantal, les Ardennes, la Moselle et la Haute-Marne sont
des départements placés dans des conditions favorables
à la longévité; le Var, Vauduse, les Basses -Alpes Je
Cher, le Morbihan, le Finistère, lllle-et-Vilaine, sont
dans la plus mauvaise catégorie. En recherchant d'après
le nombre des naissances et la longévité la période né-
cessaire pour le doublement de la population, on a trourë
que ce doublement s^'effectuerait en 70 ans dans la Mo-
selle , tandis qu'il demanderait dans l'Eure 17 siècles
et demi.
On appelle Tables de mortalité, des tableaux qui pré-
sentent une série décroissante de nombres exprimant la
loi en vertu de laquelle un groupe d'individus d'âge égal
arrivent successivement à la mort. La table la plus an-
cienne que l'on connaisse a été dressée par Halley; elle
exprime la loi de la mortalité dans la ville de Breslau,
d'après les observations faites de 16S7 à 16U1. Des tables
de ce genre furent bientôt disposées par Smart poor la
ville de Londrea, par Dupré de Sadnt-Maur pour Paris,
par Sussmilch pour Vienne en Autriche, par Muret pour
les campagnes de la Suisse, etc. En 1746, Deparcieui
publia son Essai sur les probabilités de la vie humaint,
ouvrage qni fit autorité pendant prèa d'un siècle, et qui
Jouit encore d'une grande estime, bien que des recher-
ches nouvelles l'aient rectifié sur quelques point. En 1783,
Price donna une nouvelle table, devenue classique en
Angleterre, bien (Qu'elle assign&t k la vie humaine une
trop grande rapidité ; cette table a été refaite à diverses
époques par Finlayson, par Farr et Milne. En 1806, Du-
villard publia en France une autre table, qui, faite à une
époque où diverses causes abrégeaient la vie humaine,
donne une mortalité trop rapide : on la trouve, ainsi que
celle de Deparoieux, dans V Annuaire du Bureau des
Longitudes. Nous avons enfin des tablea de mortalité
disposées par M. de Montferrand en 1838, et par M. Que-
telet en 1845. Celle de M. de Montferrand, calculée sur
11,793,289 décès, donne, pour 10,000 naissances, le
nombre de survivants depuis 1 an Jusqu'à 104 ans :
«a .
■ .
S •
ce •
1
H O
^S
■
a
i® j
•
8
H
t^
•
S
S
o
>^ '
o
P-
O
>^
e
o
** -
<
et H
<
n
<
S M
•4
Mm
<
X U
0
81
48
ss
68
ss
84
S3
10,000
6,788
5,601
8.825
5S3
1
8,471 '
28
6,678
48
5,548
64
3,688
85
427
S
8,059
28
6,604
44
5,478
65
8.540
86
854
8
7,808
84
6,586
45
5,416
66
8,889
87
280
4
7,643
85
6,451
46
5.886
67
8,836
88
825
5
7,584 .
86
6.885
47
5,878
68
8,0SO
89
119
6
7,488 1
87
6.887
48
5,804
69
8,925
90
189
7
7,858
88
6,853
49
5.151
70
8,770
91
109
8
7,885
89
6,807
50
5,086
71
8,608
98
92
9
7,889
80
6,158
51
5,017
78
8,488
93
64
10
7,188
81
6,106
58
4.943
78
8.884
94
48
11
7,141
88
6,061
53
4,868
74
8,017
95
36
18
7,109
83
6,017
54
4,780
75
1,811
96
Sô
18
7,078
84
5,978
55
4,693
76
1.616
97
18
14
7,048
85
5,9^
56
4.605
77
1,431
98
12
15
7,006
36
5.881
57
4,513
78
1,875
99
16
6,965
87
5,835
58
4,416
79
1,185
100
17
6,985
88
5,788
59
4,817
80
995
101
18
6.881
89
5,748
60
4,815
81
878
108
19
6.888
40
5,698
61
4,104
88
751
108
80
6,785 !
1
41
5,667
68
3,976
88
688
104
' 1
Pour les opérations d'asaurances sur la vie ou de pla-
cement viager, il faut connaître les probabilités de la
vie humaine, c.-à~d. les chances que la personne assurée
ou sur la tète de laquelle on place un capital peut avoir,
eu égard à son &ge, de vivre encore. Mtus les tables de
mortidité sont toutes plus ou moins inexactes, parce que
les recensements de population n'ont pas une exactitade
rigoureuse, et (pie, d'ailleurs, les éléments de la popu-
lation se modifient avec lea circonstances et avec le
temps. Il en résulte que les Compagnies d'assurances
emploient, dit-on, selon leur intérêt, ou les tables à mor-
tahté lente, ou les tables à mortalité rapide. Ainsi, elles
se servent de la table de Duvillard pour les sommes
payables au décès des aasurés ; mais, pour les assurances
payables du vivant dea assurée, elles font usage de la
table de Deparcieux. B»
NOS
1279
MOS
XORTES-PAYES. V. ce mot dani notre Dhhonnairê
i» Biographie et <r Histoire,
MORT-GAGE. F.Antichrèsb.
MORTIER, mélanea de chaux et de sable ou de poux-
lobne, qui sert à lier entre elles les pierres des ma-
Sneries. Le mortier, quand il a résisté à l'action des
aences auxquelles il est surtout sensible dans les
oommencements de son emploi, durcit de plus en plus
in fieilliannt : c'est à cette loi, plutôt qu'à l'excellence
des mortiers, qu'il faut attribuer la consenratipn des con-
tractions monumentales des Romains, faites d'ailleurs
srec tout le soin possible et sans souci de la dépense.
Aujourd'hui on construit, avec les mortiers fabriqués
d'après les procédés de l'ingénieur Vicat, des maçonne^
ries qd ont, après deux ans seulement d'existence, plus
de dureté que celles des Romains : la qualité de la chaux
est le point essentiel. Si l'on ne suit pas rig;oureusement
les règles prescrites à cet égard, c'est que la résistance
ibsolue des maçonneries n'est pas toujours ce qui préoc-
cupe le plus le constructeur, et qu'on donne une plus
grande importance à la célérité du travûl et au prix de
revient Lm proportions des nuOières qui entrent dans la
eomposition des mortiers varient selon l'emploi qu'on en
veut fiûre et selon la nature de ces matières. Le moyen
ie plus ordinaire pour fabriquer, le mortier consiste à
mélanger la chaux avec le sable ou la pouzzolane au
moyen de r€ibats, longues perches terminées par un mot^
oeau de bois méplat et manœuvrées par des hommes :
mais, quand on a besoin d'une très-grande quantité de
mortier, on emploie, pour opérer le mélange, le manège
à rtnie ou le tonneau a mortier, mus par des chevaux, ou
pv de petites machines à vapeur, mobiles; ce sont des
nmes dans l'un, des râteaux tournoyants dans l'autre,
gui écrasent et mélan^nt les matières. V, Hassenfratz,
traité de Vart de coIcvmt la pierre calcaire, et de fabri-
iwr toutes sortes de mortiers, ciments, bétons, etc.,
Paris, 1825, in-i^; Vicat, Résumé des conncùssances ac~
t^Us sur les qtiaiités, le choix et la convenance des
matériaux propres d la fi\brication des mortiers et ci-
ments calcaires, Paris, 1828, io<4^.
MORTiBK, vase à fond hémisphérique, évasé dans sa
partie supérieure, fait de fer ou de bronze fondus, de
marbre, de pierre, de verre, ou de bois, et dont on se sert,
sartoQt en Pharmacie, pour y réduire en poudre avec un
pibn certaines substances.
■oiTiea, bouche à feu, faite à peu près comme un
mortier à piler, et dont on se sert pour lancer des bom-
bes, ou des carcasses pleines de pierres ou de matières
ioiUmmables. L'&me de la pièce a de longueur à peu
près une fois et demie son calibre. Il est parlé de mor-
tiers au sié^B de Naples par Charles VTTT ; les Turcs en
firent usage ao siège de Rhodes en 1522. Les mortiers
tOQt de bronze et quelquefois de fer fondus.
HORTiEK, coiffure. V. notre Dictionnaire de Biographie
tt (T Histoire,
MORTIFIGATION, mot qui désigne les austérités et
les jeOoes qui servent à dompter les appétits déréglés du
corps.
mosaïque , assemblage de petits cubes réguliers de
marbre, de pierre, de matières vitrifiées, qui, réunis à
l'aide de mortier, de stuc, ou d'un mastic formé de chaux
et de poudre de marbre, ou de résine et de pl&tre, forment
des dessins, des ornements, des figures même. Le mot
Tient, dit-on, de Musia ou Musiva, parce qu'on attribuait
aux Muses ce genre de travail, ou parce qu'elles avaient
été représenta en mosaïque. Le» œuvres de cet art
furent appelées en latin opus tessellatum, k cause des
petits cubes dont elles étaient formées, et opus sectUe ,
quand elles étaient faites de feuilles minces de marbre ,
taillées suivant le dessin qu'on voulait exécuter. On ap-
pelait tossi la mosaïque en général opus musivum. La mo-
saïque est une ingénieuse application de la peinture, que
Ton tenta dès les temps anciens. Chez les Perses, on
employa d'abord des cubes ou dés de deux couleurs seule-
ment , disposés de diverses façons ; puis on varia les des-
sins et les nuances an point d'imiter les lignes et les cou-
leurs des étires; enfin les marbres les plus recherchés
furent appelés à remplacer la brique et les autres maté-
riaux communa employés primitivement à la composition
^ces ouvrages. La Bible nous apprend que le pavé du pa-
^ d'Assuérus , composé de porphyre et de marbre
blanc , était embelli de plusieurs figures d'une admi-
rable variété. Chez les Grecs, à la mosaiUque à compar-
tments ( liihostrôios)^ composée de pièces de rapport de
diverses couleurs et d'égales dimensions, et destinée
principalement à paver les édifices, on substitua par la
suite la morgtiétorte en pierre, que Pline appelait o^sniis
paoïmenti grœcanict. Ce genre d'ouvrage, encore en &vear
chez les Italiens de nos Jours sous le nom de lavoro a
composto, diffère du pr&édent en ce que les diversea
pièces dont il se compose n'ont de grandeurs et de formes
déterminées que par les exigences du sujet qu'il s'agit de
représenter. On imagina ensuite une autre mosaïque
appelée opus vermiculatwn, parce qu'elle était formée de
frajgments de marbre irréguliers et extrêmement petits ,
disposés en zones que l'on compara à des vers pressés les
uns contre les autres : on mêlait à ces fragments une
sorte de stuc, et l'on formait ainsi une p&te qu'on impli-
quait sur des dessins en relief ou qu'on disposait sur un
plancher de la même manière que les cubes. Cette mo-
saïque était d'autant plus recherchée, qu'elle permettait
aux artistes d'y représenter des figures géométriques et
des dessins, des animaux et des personnages, et Jusqu'à
des si^ets entiers de la mythologie et de l'histoire. Ces
sortes d'ouvrages avaient acquis une grande importance
cruand la Grèce passa sous la domination romame : car
1 immense navire que fit construire Uiéron II, roi de
Syracuse, contenait un pavage en mosaïque représentant
toute Vlliade,
Ce fut sous Sylla que l'usage des mosaïques s'intro-
duisit à Rome : cet art y atteignit une perfection remar-
quable. Il n'y a pas de maison, k Herculanum et à Pom-
péi , qui n'ait au moins son atrium pavé en mosaïques de
dessins infiniment variés ; à plus forte raison Rome
a-t-elle fourni, dans ses monuments en ruines, une
énorme quantité de ces sortes d'ouvrages : dans tous les
pays où les Romains ont étendu leurs conquêtes, on a
également trouvé beaucoup de mosaïques. Les plus belles
aue l'on conserve à Rome sont : au musée Pio-Glémentin,
dans la salle circulaire, la mosaïque d'OtricoIi , représen-
tant une tète de Méduse, avec une bordure où sont
figurés des combats de Centaures et des groupes de Tri-
tons et de Néréides, de grandeur naturelle; — au musée
Capitolin^ une mosaïque faite au m* siècle avant notre
ère par Sosus pour Attale, roi de Pergame , trouvée à la
villa d'Adrien , près de Tivoli , et qui représente une
coupe dans laquelle boivent des coloinbes ^ k. Asabotum) ;
c'est un des plus parfaits ouvrages de ce genre ; — au
palais Barbenni , une mosaïque provenant de Palestrina
( ancienne Préneste ) , et dont le sujet est l'enlèvement
d'Europe ; — au palais Borghèse , un Orphée entouré
d'animaux. On voit encore à la villa Albani une mosaïque
trouvée dans le pays d'Urbin, et qui représente une éa>le
de philosophes, et à Palestrina, sur l'emplacement qu'oc-
cupait le temple de la Fortune, une superbe mosaïque
représentant des rivages égyptiens, et crue Pline dit avoir
été exécutée au temps de bylla. En 1831, on a trouvé à
Pompéi, dans la maison de Pan ou du Faune, une mo-
saïque de 5 met. de long sur 2 met. et demi de hauteur,
représentant une bataille entre les Grecs et les Perses.
Dès 1762, dans la villa de Cicéron de la même ville, on
avait découvert une mosaïque en verre, œuvre de Dios-
coride de Samoa, représentant une duise. Dans une
autre on voit une répétition théâtrale. En Espagne, la
mosaïque d'Italica représente des jeux du cirque, et,
alentour, les bustes des Muses dans des médaillons cir-
culaires. En France, les fouilles opérées à la Maison
Carrée de Nîmes ont mis au jour des mosaïques fort
intéressantes; on en a également découvert à Orange,
Riez, Fréjus, Aix, Vienne, Lyon, Autun, Bordeaux; le
musée d'antiquités de Rouen en possède une qui était
enfouie dans la forêt de Bretonne. D'autres ont été re-
cueillies en Saxe, dans le Wurtemberg, et Jusqu'en An-
gleterre. C'est au temps de l'Empire romain que fut in-
venté le genre de mosaïque appelé opus alexandrinum
(K. Alexandrin — Appareil).
L»i mosaïstes romains, frappés du défaut de vivacité
des couleurs dans la mosaïque à compartiments des Grecs,
recoururent aux pierres précieuses, aux émeraudes, aux
turquoises, aux onyx , aux agates, aux cornalines, aux
sardoines, etc. Mais bientôt la cherté de ces matériaux
les força à chercher des substances moins coûteuses et
comparativement aussi brillantes. Ce fût ainsi qu'on eut
l'idée d'employer des pâtes de verre. Les ouvrages qu'on
obtint avec cette matière nouvelle se distinguèrent sur- 1
tout par la vivacité du coloris, par la netteté et le fini du
dessin; et dès lors les mosaïques de verre furent adop-
tées non-seulement pour les pavés et les voûtes des édi-
fices, mais encore pour le revêtement des murailles, des
colonnes, et même des meubles. La p&te de verre, dans
les travaux de mosaïque, devint d'un usage général dès le
règne de Constantin. Ce genre de travail , honoré au point
/
MOS
12S0
MOS
Îae Théodose exempta des ser?ices pablics ceux qui B*y
▼raient, finit, sous le Bas-Empire, par remplacer la
peinture. Les mosaïstes byzantins apportèrent à leur art
de grands perfectionnements : ainsi ils imaginèrent de
lecouvrir de petits cubes de marbre avec une couche de
ferre, sous laquelle ils introduisaient des feuilles d*or ou
d*arsent : telle fût l'origine de la peinture en émaU.
L'élise de S'*-Sophie à Gonstantinople, les basiliques
romaines de S**-^nès, de S*-C6me et S*-Damien, de
S^-Pierre et S*-Pauf hors les murs, les églises de S^Vital
et de S^Apollinaire à Ravenne, de S'-Marc à Venise,
fournissent des exemples remarquables de la richesse
avec laquelle ces artistes décoraient les édifices. Aux
xu* et XIII* siècles, il y eut d*habiles mosaïstes en Italie,
Jacopo et Mino de Torrita , Jacopo de Camerioo , André
Tafl , Gaddo Gaddi , etc.
La mosaïque en p&tes de verre se répandit ailleurs
qu'en Orient et en Italie pendant le moyen âge. Il existe
à Fabbaye de S*-I>enis deux fragments de ce genre, pro-
venant des chapelles du rond^point du chœur; on les
rapporte au xn* siècle, au temps de l'abbé Suger.
Ge fut la mosaïque de pavage qui fut surtout en usage.
Au X* siècle d^à, le pavé des églises était formé de
pierres de diverses couleurs représentant des sujets his-
toriques. Au XI* appartiennent le pavé de l'église de
Reims, exécuté par Guyon Widon avec de petites pierres
de Jaspe, de porphyre, de marbre, peintes et émaillées,
représentant dans plusieurs cartouches les Apôtres, les
quatre Saisons, les sept Arts libéraux et les douze Mois ,
et le pavé dé l'église S'-Philippe de Tournus, ^i repré-
sente, entre autres choses, les signes du zodiaque. Un
pavé de l'église d'Ainay, à Lyon, représentant le pape
Pascal n, est aussi du xi* siècle.
Un genre particulier de mo»ûque est celui de la pierre
tombale de Frédégonde, qui était autrefois à réglise
S*-Germain-des-Prés, à Paris, et qu'on a transportée à
l'abbaye de S*-Denis. Les contours des vêtements et des
ornements sont dessinés par des lames de cuivre; les
espaces sont remplis par une matière composée de chaux,
de porphyre et de marbre blanc concassés irréguliè-
rement.
Aux XV* et XVI* siècles, la mosaïque de pavage et la mo-
saïque de tableaux et de revêtement reprit une grande
activité en Italie. De ce temps datent les fabriques de mo-
saïques de Venise pour pavements, dites pavés vénitiens.
Les plus belles mosaïques modernes sont celles dont le
pape Glément VIII fit décorer, au commencement du
xvn* siècle, la coupole de S*-Pierre de Rome; elles sont
l'œuvre de F. Zucchi et de P. Rosetti ; les pendentift de
la coupole sont de J.-B. Calandro. Au commencement du
xvm* siècle, Christophoris fonda à Rome une école qui
fournit un certain nombre de mosaïstes distinguai, Bru-
ghio, Gonti, Goccei, Fattori, Gossone, Ottaviano. Ge fut
dans cette école que l'on exécuta en mosaïque tous les
immenses tableaux d'autel de la basilique de S^Pierre,
copiés d'originaux des meilleurs peintres.
La mosaïque n'a guère été pratiquée jusqu'à nos jours
en dehors de l'Italie. Les matières qu'elle emploie, le
marbre, l'albàtre, la serpentine, le jaspe, le porphyre,
l'agate, l'aventurine, la calcédoine, la malachite, etc., ne
se trouvent point partout, et il en coûte des sommes
considérables aux mosaïstes pour obtenir une variété de
couleurs et de nuances qui permette de représenter toutes
sortes de sujets. Il faut 5,000 petits cubes par mètre carré.
On peut voir au ch&teau de S*-Gloud un dessus de table
qui fut exécuté par des artistes des Gobelins au temps
de Louis XIV. Sous Napoléon I*% en 1808, le gouverne-
ment fonda à Paris une école de mosaïque, dirigée par
Belloni, de Florence. Cest de cet établissement qu'est
sortie la belle mosaïque qui orne le pavé de la salle de
Melpomène au musée de sculpture du Louvre. L'école fut
supprimée en 1823. Une manufacture de mosaïques fut
encore créée en 1829 par Giuli, de Rome; elle a fut qu^-
ques travaux pour l'église de S^Denis en 1834, mais elle
n'existe plus. — On a trouvé récemment près d'Orange
(Vaucluse) une ocre argileuse de couleurs variées, qui, dé-
trempée dans l'eau, puis convenablement séchée, est sus-
ceptible d'acquérir, par la cuisson à un degré déterminé,
les qualités de la pierre la plus dure, et qui peut aussi, au
moyen de certains principes colorants, prendre toutes
les nuances imaginables. Les matériaux économiques une
fois trouvés, une usine a été créée pour les soumettre à
la taille, partie du travail qui était précédemment fort
longue et augmentait considérablement le prix de revient
de la mosaïque : les machines et la vapeur y remplacent
le ciseau manié par l'homme. Pendant que l'ocre argi-
leuse est encore molle et malléable, on la soumet à Tope*
ration du moulage par la presse et au moyen de moules,
et l'on obtient à chaque pression une quantité considé-
rable de cubes, d'une ^lité parfaite de grosseur et de
forme; puis ces cubes subissent l'opération qui leur
donne la dureté de la pierre. Après la cuisson, on fait 1«
triage des cubes, on choisit et on classe les nuances. Li
mètre carré de ces cub^ ne revient qu'à 30 fr, G*est uni
précieuse découverte pour le pavage en mosaïque.
La mosaïque n'a point été inconnue aux indigènes de
l'Amérique : on a trouvé au milieu des ruines de Mitla
dans la province mexicaine d'Oaxaca, des arabesques
des labyrinthes, des méandres formés avec de petites
pierres carrées enfoncéœ dans une masse d'argile.
V. Giampini, Sur les moscOques des édifices sacrés et
profanes^ en latin, Rome, 1600-09, 2 vol. in-fol. ; Furietti,
De musivis vel picturœ mosçiïcœ artis origine, Rome,
1752, in-4<*; Le Vieil, Essai sur la peinture en mosaïque,
Paris, 1768, in-12; Fougeroux, Traité sur la falnrication
des mosaïques, 1769, in-8'; de Gaylus, Essai sur la ma-
nière de peindre en marbre, dans le t XXIX des Mém.
de VAcadém. des Inscriptions; Spreti, Compendio stO"
rico delV arte di comporre i musaïci , Ravenne, 1804,
in-4<* ; Gurlitt, Dissertation sur Vart de la mosaMqw, en
allem., Hambourg, 1806; J.-F. Artaud, Histoire abrégée
de la peinture en mosaïque, Lyon, 1835, in-rS* ; iku-bet
de Jouy , Les mosaïques chrétiennes dss basiliques et des
églises de Rome , Paris, 1857, in-8*. B.
MOSAISME (de M(^e)^ nom donné quelquefois à l'en-
semble des doctrines relideuses et morales des Hébreux.
MOSETTE. V. Camail.
MOSGA (Idiome), idiome parlé, avant la conquête es-
pagnole, sur le plateau de Bogota, en Golombie, par la
tribu des Moscas, et qui est aujourd'hui éteint. Il man-
quait des articulations a , { , x. On y distinguait les genres
et les nombres par l'addiûon de suffixes aux substantifs.
La négation, à certains temps du verbe, s'Incorporait
dans la racine. Vers la fin d^ xvm* siècle, on a découvert
un monument graphique de pette langue : c'est un calen-
drier lunaire, écrit en hiéroglyphes du genre de ceux des
Mexicains. V. Bem. de Luge , GrammcUica en la lengua
del nuevo regno llamada Mosca^ Madrid, 1619, in-8^.
MOSGOU (Le Kreml ou KacMUn , à). Les Russes don-
nent le nom de Kreml à une forteresse, ou encore à un
quartier, le plus souvent situé au milieu d'une ville, et
entouré d'un rempart et d'un mur. Le Kreml de Moscou
s'élève sur un mamelon dont la Moskowa baigne le pied,
et est environné, dans une étendue de 3,900 met., d'un
mur épais en briques vertes et rouges, flanqué d'un grand
nombre de vieilles tours rondes. On y pénètre par une
arcade nommée la Porte sainte , et que l'on ne peut tra-
verser que tête nue. Les édifices qu'enferme l'enceinte
sont surmontés d'une foule de coupoles, de dômes bul-
beux, et de flèches, aussi variés dans leur style que dans
leurs formes et leurs couleurs, et oui forment un en-
semble des plus pittoresques. La cathédrale de VÂssomp'
tion ou du Couronnement, la première éslise en pierre
qui ait été bâtie à Moscou (1475), d'après les plans d'un
architecte bolonais, est celle où les czars sont sacrés; on
y remarque beaucoup de reliques, et une image de la
S^* Vierge, enrichie de pierrenes et attribuée à S^ Luc
L*éçlise S^'Michel ou des Séptdtures, ornée de fresques
cuneuses , renferme les tombeaux de tous les grands
princes et czars Jusqu'à Pierre le Grand, hlwan véliki,
c.-à-d. le grand Iwan, est un clocher isolé près de réglise
S*-Nicolas, haut de 90 met., terminé par une coupole
en cuivre doré et une croix colossale en lames du même
métal, et contenant une énorme cloche enlevée par
Iwan m à la ville de Novpgorod. Près de là se trouTtf
aussi la fameuse cloche fondue par Monterine f V, Glogh x ).
Le Kreml contient également : l'ancien palais des pa-
triarches de Moscou, où s'assemble aujourd'hui la sec-
tion du Saint-Synode qui a son siège dans cette ville,
l'ancien palais des czars, dit Palais anguleux ^ à canse
de son revêtement extérieur qui est à facettes; le nou-
veau château impérial, construit en 1849; Tarsenal,
fondé par Pierre le Grand, reconstruit en 1818, et où se
trouve une collection d'armes précieuses ; le Trésor, où
sont les Joj'aux de la couronne, les portraits de tons les
czars et czarines, plusieurs trônes, les vêtements que
portait Pierre le Grand dans les chantierB de Saar
dam , etc.
MOSQUÉE, temple des peuples Musulmans. Le mot
vient de l'arabe mesdjid, en égyptien mssguid, par Tin-
termédiaire de l'espagnol mezquita, La mesdjîd est la
mosquée simple, le lien où l'on se prosterne; on nomme
Mot
1281
MOU
4iâmi (qai rôanit) celle où lek croyattts s'assemblent
pour la pière pabliqae du vendredi, et xaouia celle où
WDt inhomés les restes de quelque saint personnage, et
où Ton instmit les enfants. Toute mosquée a la forme
carrfe, comme la Càba, type des constructions reli-
gieuses, et pour que le mthrah^ point de direction sur la
Mecque, soit établi au milieu d^une des faces du carré.
Elle est surmontée de tours ou minarets , que domine le
cToiHHmt, et qu'entoure une galerie, où le muezzin peut
ae toomer vers tous les points de Thorlzon en appelant
les fidèles à la prière. LMntérieur rappelle, par la dispo-
sition é» colonnes et des nefs, celui des éslises romanes.
D offre certaines dispositions toujours identiques : la
kiMi, niche pr^quée au mUirabj et vers laquelle on se
tourne en pnant; à droite, le siège du cheikh, et, à
mâche , la tribune des muezzins \ un peu plus en dédains
de la nef, la tMmbwr, chaire à escalier droit, où se tient
debout le lAatib ou prédicateur. Le sol est couvert de
nattes et de tapis, sur lesquels on ne :doit marcher
qa'après avoir quitté sa chaussure. Des derges brûlent
près du mihrab, éoB lampes sont suspendues aux voûtes ;
les mors portent ordinairement des inscriptions tirées du
Koran et encadrées dans des anJDesques. Il n'y a i^ au-
tels, ni tableaux, ni statues, ni sié|^ pour les croyants.
Aa dehors on a gravé des inscriptions cominémore^tives
de fondation ou de restauration. Autour de la mosquée
sont des fontadnes et des piscines pour les ablutions, et
one maksoura ou salle de lecture. Autroibis on y voyait
aosri un asile pour les malades ; ces sortes d'hospices ont
presque tons disparu. Le génie arabe a dfoloyé toute sa
richesse dans rornementanon des mosquées : peinture,
scalptore, métaux précieux, verres colorés, mosaïques,
tout s*y trouve à profusion.
MOT, toute syllabe ou réunion de syllabes qui exprime
aoe idée distincte , se prononce à part et s'écrit à part.
Qa&nd le mot n'a qu'une seule syllabe, il est dit mono-
syliabe: s'il en a deux, dissyllabe; s'il en a trois, irii"
syllabe ;a.}i delà, tous les roots s'appellent po{ysyi/a6s9.
On dislingue les mots variables ou déclinables et les mots
fMcariabUs ou indéclinablts : le terme variable s'ap-
ftliouo généralement aux langues néolatines et à Van-
gia^; et aédinable, an grec, au ^atin . à l'allemand. Les
mots variables sont ceux dont la tenninCson est suscep- ^
tible de s'infléchir, comme lev noms (^ectif et sub-
stantif), les articles, les pronoms, les veines ; les inva-
riables sont ceux qui se présentent toi^ours sous la
même forme, comme les adverbes, les prépositions, les
conjonctions, les interjections. L'article anglais fait partie
des mots hdvuîables. V. Discocrs. < * P.
MOT (Bon), F, Bon mot.
■or d'ohdre, — DE RALUEMBiiT. Daûs lo langage ipili-
tiire, on wpelle mot Sordre un mot donné* pour se i^
connaître ^s les patrouilles, dans les rondes de nuit,
dans une expédition. Il se donne tous les soirs -à l'année
et en garnison. La série des mots d'ordre est faite au
ndidstère do la guerre et envoyée par (quinzaine aux g|é-
nénux qui commandent les divisions militaires. A Paris,
le ehef de l'État donne le mot d'ordre aux Tuileries. Tout
général le donne dans l'armée qu'il commande. Le mot
6M communiqQé aux chefs de poste et aux ofBders de
ronde. À la suite du mot d'ordre on donne chaque Jour
on mal de raUimnent, communiqué à chaque sentinelle,
et qu'elle exige de toute ronde ou patrouille qui passe.
On postemii reconnaît une patrouille en reçoit le mot
d'ordre et lui donne celui de ralliement : au çontraûre,
an doit donner le mot d'ordre aux rondes d'officier sup4-
rieur, et elles rendent le mot de ralliement. En temps
de goerre, la divulgation du mot d'ordre est punie de
iBort Les mots d'orars et de ralliement sont n'importe
qoels mots : Louis XVm mourant en fit un Jour une
■orte de Jeu de mots, en donnant deux noms de villes :
Sakt-Denis, Givet (Ty vais).
MOTET, autrefois mottet ou motes, en latin motteius,
noMttff, motelluM, nom qu'on donna pendant le moyen
^e à des morceaux de chant demi-sacrés et demi- pro-
Aûies, composés sansrègles précises, en prose ou en vers,
en latin on en français, et qui faisaient partie, comme
les Notis, les ÊpUres farcies et certaines Proses, de ces
pièces de fantaisie que le clergé laissa pénétrer dans les
é^aes à côté du plain-chant traditionnel. On les appe-
lait mottets (petits mots), parce qu'ils étaient faits sur
une jpériode trèe-courte, ou, selon d'autres, du latin nHh
^ ^nouvement) , parce que la mélodie en était plus
BKNiTementée que le plain-chant. Le motet fut ensuite
«ne chanson purement profane, du genre des hds, des
^''^' IX et des rondeaux (V. est mots). Dans la parti*
tion chorale, la voix de haute-contre reçut aussi le nom
dé mottetus, parce que, chargée de fleurir le cnant, elle
avait' plus de mouvement que les autres voix. Enfin, chef
les modernes, le motet est une pièce de musique des-
tinée è l'Église et composée sur des paroles latines prises
en dehors de l'office, comme un psaume, une hymne,
une antienne, un n^pons, ou quelque verset de l'Écri-
ture. B.
MOTIF (du latin motivus, propre à mouvoir), en termes
de Philosophie, influence exercée soit sur notre intelli-
gence, soit sur notre volonté. Delà la distinction des mo-
tifs de jugement et des motifs d^action. Tout Jugement
prononcé avec certitude a pour motif Tévidence, mani-
festée par l'un quelconque de nos moyens de connaître;
tout Jugement conjectural n'a pour motif que la proba-
bilité. En ce qui concerne nos résolutions et nos actions,
un motif est un principe raisonné oui les détermine
(K. PamciPE). On s'est armé de l'influence des motifs
sur la volonté, pour nier la liberté humaine : mais la
liberté ne serait contrainte que si nous n'avions pas la
conscience, tout en oédant aux motifs, de pouvoir leur
résister, et il arrive souvent que nous nous déterminons
sciemment dans un sens contraire aux motifs les iheil-
leurs et les' plus puissants.
MOTIF, idée principale et dominante d'une pièce de
musique. C'est , pour ainsi dire , l'àme de la mélodie
( V, ce mot)y le fil qui en détermine le dessin, qui relie
entre eux les sons et en fait autre chose qu'une série
insignifiante. C'est dans les motifs que se révèle le génie
propre du compositeur ; c'est dans la manière de les
amener, de les développer, de les abandonner, de les
reprendre, qu'on reconnaît son habileté.
MOTION , dans le langage parlementaire, proposition
faite de son propre mouvement par un membre d'une
assemblée. Une nwtUm S ordre est celle par laquelle on
demande la parole sur l'ordre qu'on doit suivre dans une
délibération, quand plusieurs propositions se trouvent K
la fois en discussion.
MOTC PROPRIO. V. notre Dictionnaire de Bioora-
vhie et d'Histoire, i
MOCCADES. r. Moquette.
MOUCHARABY, mot dérivé de Tarabe. et par lequel on
désigne une sorte de nalcon fermé, percé de mâchecoulia ;
(> . ce mot ) à sa partie inférieure, et ordinairement niacô
au-dessus d'une porte pour en défendre l'entrée. On le
nommait aussi Assommoirm
MOUCHE, nom donné, dans la Marine, à tout petit
navire de guerre, brick, goélette ou cutter, de marche et
d'évolutions faciles, qui est employé à épier les manoeu-
vres de rennemi et à transmettre des ordres. ■ .
MoncBBf p^t Uiorceau de taflietas noir gommé, de la
grandeur d une aile de mouche, que les dames se met^
talent autrefois sur le visage, pour cacher quelque défaut
ou pour faire ressortir la blancheur de leur teint. Au
xvn* siècle, nulle ne sortait sans sa boite à mouches,
dont le couvercle, doublé d'un miroir à IMntérieur, per-
mettait de rajuster les mouches qui s'étaient dérangées
par accident. Les mouches rondes s'appelaient des as-
sassines; celle placée au milieu du front était la majeS'
tuetêiê; au coin de l'œil, la passionnée: sur le nez^
V effrontée; sur les lèvres, la coquette; celle qui cachait
un bouton , la reoéleuse. Au temps de Louis XV, certains
hommes du beau monde portèrent aussi des mouches.
Aujourd'hui, on n^en fait plus guère usage que dans les
bals costumés. — Le nom de mouche a été donné aussi
au petit bouquet do barbe qu'on laisse croître sous la
lèvre inférieure, et qu'on a également appelé, selon les
temps, impériale et royale,
MODCHs (La), ou la Bête, Jeu de cartes qui se Joue, soit
à deux avec un Jeu de piquet, soit à quatre, cinq ou six
personnes avec un Jeu entier. Les cartes ont le même
rang qu'au piquet, sauf l'as , qui ne vient qu'après le
valet. On en donne cinq à chaque Joueur. Chacun peut
passer, si son Jeu est trop mauvais; celui qui voU le jeu
peut pren(hre au talon autant de cartes qu'il en veut
écarter. Aprè^ quoi, si un Joueur a la mouche, c-àrd.
toutes cartes de même couleur, il gagne ce que tous ont
mis à la corbeille, et ceux qui ont vu le Jeu prennent la
mouche, c-àrd. mettent à la corbeille autant qu'elle con-
tenait. Sll y a plusieurs mouches, celle d'atout, désignée
par la retourne, l'emporte; à son défaut, le gagnant est
le Joueur dont le point est le plus élevé. Si personne n'a
de mouche, on Joue, chaque Joueur devant fournir, for-
cer et même surcouper; chaque levée gagne le 5« de
l'enjeu ; celui qui ne mit pas de levée prend la mouche •
MOUCHERON (Le) {Culeaa, en latin), petit poème
81
MOU
1282
HOU
>
de 413 Tera, qui nous est parvenu tous le nom de Wt-
gile, et dont Toici le sujet : un berger s'endort en gardant
son troupeau ; un serpent va lui donner la mort^ lors-
ou*un moucheron réveille en le piquant au visage; mais
rinsecte est tué par celui même qui lui doit la vie. Le
berger échappe par la fuite au reptile, revient sur lui avec
un fort bUon de chêne, et le frappe à la tête d*un coup
mortel. La nuit suivante, tandis (râril sommeille, Tombre
du moucheron lui appuatt et lui reproche son Ingrati-
tude. Touché de repentir, il lui élève un petit mausolée.
Stace et Suétone ont fait allusion dans leurs écrits au
Moucheron de Virale; mais il est douteux que celui que
nous possédons soit Tœuvre du célèbre poète, car la com-
position et le style en sont d'une grande faiblesse.
MOUCHETTE. V. Larmier.
MOUCHOIR, linge qu'on porte dans sa poche pour se
moucher et s'essuver. Les mouchoirs que les Anciens
Sortaient n'ont gulro servi à cet usage, du moins en pu-
lic; c'étaient le plus souvent des tissus somptueux,
imprégnés d'odeurs. La siccité du nez donnait du prix à
la beauté. Le sudarium et Vorarium des Romains étaient
destinés à essuyer la sueur du visage et la bouche. Quand
on était à la tribune, au thé&tre on dans un temple,
on devait sécher la sueur de son front avec sa robe. Chez
les Modernes, on a généralement abandonné les mou-
choirs de coton, qui excitent des cuissons et des rougeurs
à la peau, pour ne prendre que des tissus de lin et de
chanvre; les mouchoirs de sole appelés foulards sont
même devenus trèsH»>mmuns. Les mouchoirs de tissus
fins et brodés, ornés de dentelles , sont des objets de
parure et de luxe, et non d'utilité. — Les mouchoirs de
cou, nommés fichus, se font en matières très-diverses,
depuis l'indienne et la soie, Jusqu'à la gaxe, la blonde, et
la dentelle.
MOUFLARD. V. Chanfrein.
MOUILLAGE (du latin mullare, lécher, laisser aller,
s. ent. l'ancre), en termes de Marine, endroit de la mer
propre à jeter l'ancre.
MOUKHTACAR , précis de la lé^slation musulmane
selon le rite malékite , qui est celui des Arabes de l'Al-
gérie. 11 a été écrit par Sidi-Khalil, Jurisconsulte du
vm* siècle de l'hégire, et se divise en deux parties : Tune
comprenant la jurisprudence religieuse, et l'autre la Ju-
risprudence civile. Sidi-Khalil ne touche pas au dogme,
quMl suppose connu ; car ce n'est pas un traité de théo-
logie qu'il prétend écrire, c'est un rituel, un formulaire.
Ses prescriptions sont toutes relatives au culte, et con-
tiennent les pratiques légales pour les purifications, la
prière, les cérémonies, l'aumône, le jeûne, et le pèleri-
nage de la Mecque. Après deux chapitres sur l'usage de
la chair des animaux et sur les serments, l'auteur expose
sans beaucoup d'ordre les matières civiles, la çuerre et
le droit de conquête, la constitution de la famille, l'es-
clava^, la propriété, les successions, la législation in-
dustnelle et commerciale, les peines à in/liger aux crimes
et délits, la procédure, etc. Le Moukhtaçar a été traduit
en français par M. Perron, et publié par ordre du gou-
vernement en 1857. R.
MOULAGE , opération qui consiste à prendre la copie
d'une figure, d'un bas-relief, d'un ornement quelconque^
an moyen d'un moule en pl&tre formé sur l'objet lui-
même. Quand le plâtre a été cuit au four, pulvârisé, et
passé au tamis de sole, on le délaye plus ou moins dans
de l'eau, selon la fluidité qu'on veut lui donner. Si on
veut faire seulement le moule d'une médaille ou d'un
ornement de bas-relief, on imbibe d'huile ces objets au
moyen d'un pinceau, afin d'tmpêcher l'adhérenoe, puis
on les couvre de plâtre. S'il s'agit de mouler une figure
de ronde bosse, le moule est formé nécessairement de
plusieurs pièces, qui, étant toutes réunies, donnent un
creux dont les proportions sont exactement les mêmes
oue celles de l'original : pour s'en servir, on imbiba
u'huile ces diverses parties, on coule du pl&tre assez
fluide pour s'introduire dans toutes les sinuosités du
moule, et, quand ce pl&tre est bien sec, on enlève succes-
sivement les parties du revêtement, et on découvre la
figure moulée. On nomme balèvres les coutures qui s'a-
perçoivent sur cette œuvre, et qui ont été produites par
les jointures des parties. Le même moule peut servir à
faire plusieurs copies. M. Stahl a découvert que, pour
obtenir des épreuves d'une grande pureté, il suffit d'en-
duire de chlorure de zinc les objets à mouler. Dans l'in-
due trie de la fonte, on se sert de moules de terre, dee-
tin<:5 à recevoir le cuivre, le bronze et la fonte liquéfiés;
pour empêcher l'adhérence, on saupoudre d'orainaire
l'intérieur des moules avec une poussière très-fine de
chaxlxm de bols. Cette sdbetanoe, nuisible à la santé des
ouvriers, commence à être avantageusement remplacée
par la fécule de pomme de terre x l'idée de cette substi-
tution appartient à IL Rony. Le mouhige à la gélatine,
ou'on doit à M. Hippolyte Vincent , vers 1844, est uoe
découverte précieuse pour l'art plastique : avec la géla-
tine on forme des moules d'une seule pièce, capables ée
reproduire avec une exactitude mathématique les sujets
de haut-relief les plus compliqués, et cela sans balèvres
ni réparage, sans relouche aux épreuves sorties da
moule, et avec une rapidité incomparablement plus
grande que celle des anciens procédés.
On ne saurait nier que les Anciens connnrant le mou-
laoe; il existe des bsMeliefs antiques en terre cuite,
rehaussés de peintures polychromes, qui, par'^eur iden-
tité avec des s^|eiB connus et souvent décrits, montrent
qu'ils ne sont pas des ouvrages modèles et originaux,
mais habilement moulés. Cest au moulage que nous de-
vona un grand nombre de figurines, de vases et d'orne-
ments. André Verrochio, artute italien du xiv* siècle, a
eu la première Idée de façonner des moules en pl&tre
sur le visage des personnes vivantes on mortes; dans
ces moules on fond des masques de cire. Vers le milieu
du xvni* siècle, cette invention fût perfectionnée par le
peintre Benoist; les masçiues de cet artiste étaient ani-
més par des couleurs si naturelles et par des yeux
d'émail imités avec tant d'art, que loaTent on les con-
fondait avec les modèles.
MOULINS (Église Notre-Dame, à). Cette église, an-
cienne chapelle du château des ducs de Bourbon, érigée
en cathédrale en 1817, appartient tout entière au s^le
ogival tertiaire. Très-remarquable comme chapelle sei-
gneuriale, elle n'a pas, comme église épiscopale, la gran-
deur et la dignité nécessaires. L'édifice n*a jamais été
achevé, bien que la façade occidentale soit décorée d'une
rose : composé seulement de 11 travées, il offre une nef
de 23 met. de long sur 7'",50« de large, avec des collaté-
raux larges de 4",25«, et des chapelles d'une profondeur
de 2™,50^. La construction est de granit et dn calcaire le
plus compacte. Les piliers qui soutiennent les voûtes
sont hardiment espaote, et entourés de colonnettes f<n^
tement engagées ; des tores disposés avec goût y tiennent
lieu de ciutpitp lUX. Il n'y a pas de triforium, et les tra-
vées support^^t immédiatement les fenêtres. Le chevet
est terminé de la manière la plus heureuse par des pani
en polygone. En plusieurs endroits on admire des ritranx
peints du commencement du xvi* dècle. Derrière l'autel
est un ensevelissement du Christ, dont les personnage»
portent les costumes du temps de François I*'. Dans ud
des murs de l'église est encastrée une pierre tombale, sur
laquelle on a sculpté en demi-relief, avec une efirayante
vérité, un cadavre rongé par les vers.
MOULURE , ornement d'architecture ou de sculpture
placé sur le nu d'un mur, et exécuté en pierre, en stne,
en pl&tre, en béis, sur les façades et à l'intérieur des
édifices, ou encore en bronze et en métaux précieux sur
les flancs d'un vase et les parois d'un meuble. Parmi lea
moulures, les unes sont en saillie, les autres en retrait
ou en creux, celles-ci plates, celle»-là arrondies. Le fiUt
ou listel , le larmier, la fasce ou plate-bande, la plinth,
sont des moulures plates en saillie ; Vooe ou quofi à»
rond, la baguette, le tare ou boudin, sont des moulures
rondes en saillie; la scatie, la gorge, le trochih, le
glvphe, le cavet, le eomoé, sont des moulures creuses. H
y a des moulures oui ont tout ensemble de la saillie et
du creux, comme le talon et la doueime. Les monlores
sont susceptibles d'une certaine ornementation, comme
des billettes, des denticules, des feuillages, etc.
MOUQUETTE. V. Moquette.
MOURRE, jeu italien. V. Mica, dans notre Dktùm-
naire de Biographie et d^ Histoire,
MOUSQUET. ) V. ces moto dans notre Dictùm-
MOCSQUETATRES. S naire de Biog. et d'Bistoirt.
MOUSQUETON , c-à-d. petit mousquet , nom qu'on
donne à une arme à feu plus courte et plus légère que
le fusil, èk moitié montée sur bois, et dont on se sert
dans la grosse cavalerie , dans les hussards et dans la
gendarmerie.
MOUSSE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d'Histoire,
MOUSTACHE (du grec miustax, forme dorienne pour
fiMUtoop, lèvre supérieure), partie de la barbe qu'on laîaie
croître au-dessus de la lèvre supérieure. Les Grecs et 1»
Romains la portèrent et rabandonnèrent tour à tour.
Beaucoup de peuples de l'Orient, principalement les Chi-
nois, ont toujours eu des moustaches, bien que se rMAfit
MOU
1283
MUA
e reste de U barbe. Les Francs en portèrent Jusqu'au
K* siècle; alors les moustaches disparurent Jusqu'au
tempe des Croifladea. On y renonça encore depuis la fin
da UT* siècle Jusqu'au xvi«. Depuis François P' et
Henri H , les hommes de toute condition sodale repri-
rent la moustache : elle cessa d*ètre de mode sous
Loois XIV, et ne servit plus qu'à distinguer certains
corps d'élite de l'armée, les grenadiers et les hussards.
En 1805, Tusage de la moustache fût concédé à toute la
caialerie , les dragons exceptés ; on l'accorda aux officiers
de toutes armes en 1821 « et à tous les militaires en 1832.
Dans le civil, la moustache a repris faveur après 1890.
HOUSTIJSRS (Faïences de). F. au Stippl^ment.
MOUSTIQUAIRE, rideau de gaze ou de mousseline
:ris-€laire dont on entoure les lits, pour les fermer her-
métiquement, dans certains pays chauds, tels que l'Égsrpte,
où Ton est exposé aux moustiques.
HOnriER. K Mortier.
MOUTON, machine de guerre. T. Bélier.
MOUTON, machine employée dans la ConstructioiL V.
SomiETTB.
MOUTON d'OB. V. AGNBL.
MOUTONNES. V. Peuroqobs, dans notre Dtcttonnatre
âê Biographie et d'Histoire.
MOUVEMENT, changement de situation des corps, dé-
plac^nent de leurs nupports. Nous le percevons par la vue
et par le toucher. Tout mouvement a lieu dans l'es-
pace; il détermine l'espace lui-même, qui est une con-
ception rationnelle, et nous sert à mesurer l'étendue.
Tout mouvement a lien aussi dans le temps, il est lui-
même une succession; c'est par les divisions des mou-
vements que nous marquons les divisions du temps. Non-
seulement le mouvement est le signe et la mesure de
l'espace et du temps, mais encore il est le lien de ces
deux idé^ dans notre esprit. Le problème du mouve-
ment a donné lieu à beaucoup de théories métaphy-
siqaes. Pour Héradite, tout était dans un mouvement
on on changement perpétuel ; ce philosophe refusait aux
choses toute permanence, toute existence perpétuelle.
L'école d'ÉIée, an contraire, nia la réalité et la possibilité
du mouvement, doctrine que reproduisirent les philo-
sophes mégariens : pour toute réponse à leurs sophismes,
Diogène le Cynique se mit à marcher devant Zenon.
Pour Aristote, le mouvement est le fait caractéristique du
la nature ; ses deux éléments constitutifs sont la puis-
sance^ capacité qu'ont les objets de devenir tels ou tels,
et Yacte ou la possession réelle d'une qualité que ces
objets n'avaient qu'en puissance; le mouvement est la
puissance qui devient acte, il est le rapport, le terme
moyen de la puissance et de l'acte. L'ancienne école ato-
mistique faisait du mouvement une propriété inhérente
aux atomes : Deacartes refuse aux éléments de la matière
tonte capacité de produire en eux-mêmes le mouvement ,
et leur fait imprimer le mouvement par un premier mo-
teur qui le leur conserve par une action continue ; selon
Leibniz, les éléments, âpres avoir reçu un premier mou-
vement, retiennent lia capacité de se mouvoir et ont en
eux le principe de leurs modifications.
HODVEiiENT, en termes de Musique, degré de vitesse
3n de lenteur que l'on donne à la mesure, suivant le ca-
nct^ de l'air qu'on exécute. Le mouvement détermine
ia valeur réelle du temps. On l'indiqua d'abord par les
noms de certains airs de danse connns, en appelant, par
exemple, allemande, gigue, sarabande^ les morceaux dont
le mouvement devait être analogue à ceux de ces danses.
Puis, on adopta des mots particuliers, empruntés à l'ita-
lien, pour indiquer les mouvements lents, modérés, ou
«/< , avec leurs diflérentes nuances : pour les mouve-
ments lents, grave y Ui^rgo, larghetto; pour les mouve-
oients modérés, adagio, andante, andantino; pour les
monvements vifa, allegretto, allegro, presto, vivace. En-
fin Ilnvention des divers chronomètres et dn métronome
{V. ces mots) a permis de donner une mesure du temps
mns&cal plus rationnelle et plus positive. — On donne en-
core le nom de mouvement à la marche que suivent les
parties concertantes d'un morceau; il est semblable ou
(tir»e£, oblique, contraire, selon que les parties montent
ou descendent ensemble, ou que l'une reste au même
<iegré tandis que l'autre se meut, ou enfin qu'elles vont
en sens inverse. B.
MOGZON (Église de), ancienne église abbatiale, la
pins importante du département des Ardennes. Œuvre
du xin* ou du xnr* siècle, elle se distingue par la régula-
rité de sa construction , par son ornementation sculptn-
nk et ses vitraux historiés. Autrefois elle avait trois clo-
^Ts; il n'en reste plus que deux, qui flanquent le
portail occidental. Ils se composent de erois étages percés
d'ouvertures géminées, et se terminent en pynmida
élancée. La porte , surmontée d'une large fenêtre à me*
neaux et d'un fronton aigu, est coupée par un trumeaa
auquel est adossée une statue de la Vierge et de l'enfant
Jésus; un cordon de 12 anges remplit la voussure; le
tympan offre, sur trois compartiments superposés, des
scènes empruntées à la vie de la S** Vierge et de S' Victor*
MOXO (Idiome). F. Pércvibnubs (Langues).
MOYEN ou VOIX MOYENNE, forme particuUôre de la
ooi^uçaison srecque, intermédiaire entre la voix active et
la VOIX passive, se rapprochant de la i'* par le sens^
mais prcÂoue identique à la 2« par U forme. En effet, 1%
présent et l'imparfait, aussi bien que le parfait et le plus*
que-parfait, ne diffèrent jamais au mcyen et au passif.
Le futur est ordinairement terminé en 00(141 à la voix
moyenne, l'aoriste 1" est en ot^pL-nv, l'aoriste 2* en épuriVt
tandis que le passif est ordinairement ^o[uti au futur^
Ovjv à l'aoriste i*', Jt* à l'aoriste 2*. Beaucoup d'aoristea
en 6nv et en Tpr s'emploient néuimoins conmie moyens;
et réciproquement, les exemples de aopiai avec le sens
passif sont très-nombreux. L'aoriste l*' en oapinv (4^t^v}Vf
à(iT)v, etc^ est seul vraiment propre à la voix moyenne;
seul aussi il a invariablement la signification particu-
lière au moyen. Cette signification est réfléchie ( F. ce
mot). Très-souvent la coi^ugaison moyenne, par rapport
à la syntaxe, répond à ceux de nos verbes pronommaux
qui, formés de verbes actifs, sont suivis d'un complé-
ment direct et ont pour complément indirect le proniHU
qui les précède immédiatement. De là on employait lo
moyen lorsque l'objet souffrant l'action était quelque
chose appartenant au sujet du verbe. Le moyen rend fort ■
souvent aussi ce qu'exprime le français faure faire. Un
certain nombre de verbes latins, en revêtant la forma
passive, et de verbes français, en revêtant la formeré-
fléchie, se rapprochent en partie de la nuance délicate
exprimée par le moyen grec. Ainsi, acdngor si^ifie,
non pas on m'arme, mais je m'arme ; misceor , je me
mêle; moveor, je me mets en mouvement. P.
MOYENNES (Consonnes). F. Fortes.
MOZARABE (Rit), Liturgie catholique particulière à
TEspagne durant le moyen âge. Elle fut faite par S^
Léandre, archevêque de Séville, et complétée par S^ Isi-
dore, son frère et son successeur; un concile tenu à To-
lède en 633 lui donna sa sanction. Le rit Romain s'étant
établi peu à peu en Espagne, le rit Mozarabe fut confiné
par le cardinal Ximénès dans une chapelle de Tolède,
où il est resté en usage Jusqu'à nos Jours. Les historiens
ecclésiasticrues lui ont oTonné aussi le nom de ritiAel To-
lédan, de bréviaire de S^ Isidore, de rit Gothique»
MOZCA (Idiome). F. Mosca.
MOZETTE. V. Camail.
MOZOUNAH, ancienne monnaie d'Alger, valant un
peu plus de- 6 centimes.
MUANCE ou MUTATION, c-à-d. changement (du latin
mutare, changer), terme de la Musique ancienne, expri-
mant tout passage d'un orcLre ou d'un sujet de chant à un
autre. Les Grecs distinguaient cinq espèces de mutations,
qu'ils appelaient métaboles : 1<* la métaboîe de genre,
lorsque le chant passait, par exemple, du diatonique au
chromatique ou à l'enharmonique, et réciprocpiement;
2? la métaboîe de système, lorsque la modulation unis-
sait deux tétracordes disjoints ou en séparait deux con-
joints, ce qui revient an passage du bécarre au bémol, et
réciproquement; 3* la métaboîe de mode, quand on pas-
sait, par exemple, du dorien au phrygien ou au I^r-
dien, etc. ; A** la métaboîe de rhythme, quand on passait
d'un mouvement à un autre, du lent au vite, etc. ; b^ la
métaboîe de mélopée, quand on interrompait par un chant
gai un chant triste, etc.
Au moyen âge, on appela muances les diverses ma-
nières d'appliquer aux notes les syllabes ut, ré, mt, fa,
sol, la, selon les diverses positions des deux demi-tons
de l'octave et les différentes façons d'y arriver. Gui
d'Ârezzo n'ajrant inventé que six de ces syllabes, comme
il y a sept notes à nommer dans une octave, il fallait né-
cessairement répéter le nom de quelque note. On nomma
toi:^ours mt fa en montant, et fa la en descendant, les
deux notes entre lesquelles se trouvait un demi-ton ; ces
noms déterminèrent en même temps cenx des notes les
plus voisines, soH en montant, soit en descendant. Un tel
système de notation était trèandlfficUe: au xvn* siècle, on
eut l'idée en France d'i^outer la syllabe «t aux six an-
ciennes; la 7* note de l'échelle se trouvant nommée, les
muances derinrent inutiles. Cependant on les conserva
longtemps encore dans les autres pays.
&IUG
1284
HUN
MOCHE, nom Tulgftire de quelques andens sou-
tenrains.
HUE DE LA VOIX. V. Voix.
MCETS. V, ce mot dans notre DictiomnaxrB de BiO"
graphie et d^Bistoire.
MUETTE, nom qu*on donnait autrefois à une petite
maison où Ton gardait les mtêês de cerfs, ou les oiseaux
de iSuiconnerie an temps de la muê, ou les meiUês de
chiens. On l'appliqua ensuite à des pavillons et autres
édifiées lerrant de rendes-yous de chasse. Telles étaient
iesmtfttogde SMsermain-en-Laye, de Fontainebleau, etc.
MUETTES (Consonnes), nom donné par les grammai-
riens grecs aux consonnes p, y, d, ic, x, t, f , x« ®« parce
qu'elles ne pouyaient se prononcer sans le secours des
fOfeliei» Us les divisaient en tinu$i, ic, x, t; en ojpt-
rAs, 9, x« ®l ^ moymnes, p, Ti S* Buis l'enseignement
élémentaire, en F^rance, les moyennes reçoivent le nom
de douces, les ténues celui de fortes. Chez les Anciens,
les aspirées comptaient quelquefois parmi les demi-
▼oyeUes. Ces classifications reposaient sur la prononcia-
tion, restée mystérieuse pour nous, de ces 9 consonnes.
Pour les Latins, les muettes étaient au nombre de 8 : &,
p, d, t, c,k, q, g. Cette division des consonnes n'est pas
d'usage dans les langues modernes. F. Sbmi-Votelles.
MURTES (Lettres), nom donné en français aux lettres,
consonnes ou voyelles, qui s'écrivent sans se prononcer :
tel est le p dans dompter, compter; Vo dans paon, faon,
Laon; (Uverses consonnes doublées, abbé, accueillir, at-
tentif, affaire, innocent, Hippolytef assez ^ arriver; e final,
comme dans libre, esclave, espère; diverses consonnes
finales, tu aimM, les saisoni, poicb, choiiB, venait, vien-
nent, faisaient, etc. E muet final se prononce légèrement
dans les vers lorsqu'il n'est pas éliaé; et eénéralement,
toutes les fois que le sens le permet. Tes consonnes
muettes finales sonnent, en vers et dans le surle soutenu,
devant les mots commençant par une voyelle (V, Liaison).
La conversation familière admet encore certaines muettes
^fû se font sentir davantage dans le débit soutenu, par-
ticulièrement e : ainsi, j^arriverai se prononce vulgure-
ment j'arriverai; nous le fsrons, notM l* frons; je vien-
drai si je peux, j* viendr<U si j* peux; cepeifidant, p'
fendant; setier,demi-setier, s*tter,dmni'S'tier,etcOiez
les Romains, Jusque vers l'an 50 av. J.-C, s finale était
souvent muette devant les mots commençant par une con-
sonne, et on prononçait opiumu* parens, tanto dignu*
munere, ex omnibu* partibus. De là ces fins de vers dans
Ennius : rêbOs gërùndis, lâssiis dXëi, cômmôdûs vèr-
Mtoi; et, chez le même poète, au commencement d'autres
vers : Hœccè Idcùtûs vfkàtj ScitHs, sëcûndà Uftiuefls;
Pànditè sûltïs gênas (Pandtte, si vwtis) ; de là ce vers
de Lucilius : Sublatus pudor ômnïs, lïcentia fènûs rè-
Î'êrtur. Tantôt cette finale muette était retranchée dans
'écriture, tant6t on la laissait subsister. St était souvent
muet devant une consonne; ainsi , Quintilien témoi^e
que les Anciens écrivaient et prononcent po* meridtem
pour poH; et il semble faire entendre qu'on prononçait
or' studiorum, et non pas ars sludiorum, pour éviter le
heurt de deux sifflantes entre deux autres consonnes.
S, ST, ont été de môme muets en français au milieu ou à
la fin d'un grand nombre de mots; ces lettres sont au-
jourd'hui supprimées, excepté dans beaucoup de noms
propres. On écrivait eune, aspre, pasture, pcuque,
ÊStrenne, esponge, espée, monstrer, il est prest^ elle est
preste {prœsto est), protest, etc. RS étaient muets dans
{lars, mot depuis longtemps vieilli. Dans la prononciation
atine, m finale était a peine prononcée et conmie éteinte;
elle ne servait guère que de note entre deux voyelles, dit
Quintilien, pour empocher qu'elles ne se confondissent.
De là son élision dans les vers, surtout depuis le siècle
d'Auguste. Ce môme rhéteur nous apprend que, du temps
de Caton, on écrivait, pour figurer la prononciation, aie
on diee hanc {diem hanc), et il bl&me ceux qui corri-
geaient cette orthographe dans les manuscrits. H en latin,
comme en français, était muette au commencement des
mots et après les lettres c, r, t : la prononciation aspirée
S'en lui donnait souvent ne faisait rien à cet égara. En
mçais, le nom d*aspirée, appliqué à Vh, est véritable-
ment impropre; dans le héros, ma haine, on fait un
hiatus, mais il n'y a point d'aspiration, et h est absolu-
ment muette. P.
MUEZZIN, l F. ces mots dans notre Dictionnaire de
MUrn. S Biographie et d'Histoire.
MUGLIAS, matière employée, au moyen âge, à faire
des patenôtres odoriférants, et qu'on brûlait en fumiga-
tions. On suppose que c'était le musc II y avait un tissu
du môme nom.
MOU (du latin tmUleus), nom qu'on donnait autrefois
à des pantoufles sans quartier, généralement à tsloa
élevé et en cuir rouge. 11 n'est plus usité que loraqu^il
s'a^t de la pantoufle du pape, sur laquelle il y a une
croix qu'on est admis à baiser.
MULLEUS. ) V. ces mots dans notre Bidknnaire àe
MULSUM. I Biographie et d: Histoire,
MUNICH (Églises de). L'église métropolitaine de NiAre-
Dame a été construite de ilfiS à 1494 par lorg Gankoffeo
de Halspach. Gé longueur est de liS met, sa largeur de
42, sa hauteur de 38. La façade est flanquée de deux tours,
hautes de 110 met., et couronnées par une coupole qui
annonce le voisinage de l'architecture byzantine. Cette
cathédrale est le monument religieux le plus intérsHSDt
parmi les anciens qui se trouvent à Munich. — Les
églises modernes sont des pastiches plus ou moins réussis.
La plus belle est Notre-Dam^-da-ÉonTSecours , bfttie de
1831 à 1839, au faubourg d'Au, dans le style ogivsl le
plus pur, par OhlmQller et Ziebland. Construite moitié
en briques, moitié en grès, elle a 70'^,50 de lo&gaeaTf
24™,30 de largeur, et 28"*,50 de hauteur. Le milieu de as
façade eat surmonté d'une grosse tour, d'abord carrée,
puis octogone, et terminée par une pyramide à Jour qai
s'élève à 84 met. au-dessus du sol. Les portails latéraux
sont également surmontés de pyramides plus petites. Le
toit de l'édifice est en tuiles ânaillées, formant des des-
sins. L'intérieur est divisé en trois nefs par 16 colonnes
élancées qui supportent ta voûte; le chœur s'élève de
quelques degrés au-dessus des nefs, et est décoré des
statues des Apôtres; les autels, ainsi que les murs des
collatéraux, sont ornés de sculptures en bois; les 19 fe^
nôtres, hautes de 16 met, larges de 4, ont des vitraux
magnifiques, comparables aux plus beaux de l'art ancien.
— L'église S^Lott», dont Gemert a été l'architecte, psrait
avoir été inspirée par quelques édifices religieux de l'école
florentine. On reconnaît particulièrement l'imitation de
cette école dans la forme des fenêtres, dans la disposition
des voûtes et des colonnes qui les supportent, et dans le
plan môme, où les saillies de la croix sont légères. Oo
retrouve aussi l'influence du style byzantin dans certsins
détails du porche. Enfin toute la partie postérieure du
monument est une combinaison des formes chrétiennes
employées avant le xm* siècle : les arcs -boutants des
flancs et les contre-forts forment un Jeu de lignes qui ne
manque pas de grandeur. L'église S^Louis a été b&tie
pour recevoir le tableau du Jugement dernier dont Cor-
nélius avait fait un carton à Rome. Elle offre d'autres fres-
ques encore par G. Hermann, Stflrmer, Kranzberger, Hell-
weger, Schabet, Heiler,etc. — L'église de Tous les Saints
ou Nouvelle Chapelle de la cour a été élevée de 1826 à
1837 par L. de Klenze, dans le style byzantin du xi* siècle,
mais sans coupole extérieure. Elle a 50 met de lon-
gueur, 30 de largeur, 24 de hauteur. La façade, tournée
vers l'Orient, est divisée, par deux pilastres en saillie, es
trois parties qui correspondent aux trois nefs : 8 coloones
de marbre et 4 forts piliers séparent la grande nef de ses
collatéraux, et cette nef est couverte par deux coupoles
basses, sans Jour et sans percée extérieure. On remarqoe
les frcnques exécutées sur fond d'or par Hess, Schran-
dolph, Kock et MûHer. — La Basilique ou église S^Bo-
niface a été élevée de 1825 à 1850 par Ziebland, d'après
le modèle d'une basilique romaine. La façade se compose
d'un péristyle ouvert, formé de neuf arcades supportées
par des colonnes de calcaire blanc; les trois portes sont
ornées de reliefs en bois. L'intérieur a 78 met de lon-
gueur, 37 de largeur, et est divisé en dnq nefs par quatre
rangs de 16 colonnes chacun : la nef du milieu a 25 met
de hauteur, et les autres 13 seulement; les colonnes sont
des monolithes de marbre gris poli. Les fresques sont
l'ouvrage des mômes artistes qui ont peint l'église de
Tous-les-Saints.
MUNICH (Palais royal de). Ce palais se divise en trois
parties distinctes, l'Ancienne Résidence, la NouvelU
Résidence , et le Palais des fêtes ou des salles. L'An-
cienne Résidence, bâtie de 1600 à 1616, sur les plans
de Pierre Candide , n'ofilre pour façade qu'une grande
muraille grise, longue de 165 met., percée de deux rangs
de grandes fenêtres sans encadrements, ornée des figures
en bronze de la Sagesse, de la Justice, de la Valeur et
de la Modération, de 4 lions de bronze portant les armes
de la Bavière et de la Lorraine, d'une niche de marbre
rouse contenant une statue en bronze de la Vierge, enfin
de deux portails en marbre rou^, entre lesquels est on
corps de garde. Elle renferme 4 cours dites de l'Empe-
reur, de la Ciùsine, de la Chapelle et de la Fontaim, et
contient dans sa masse de bâtiments t V VAntiq^arium^
MUN
1285
MUN
OU collection d'antiqnités; 2<^ la Chambre du Trésùr;
> la Chapirih riche, dont le plafond est en lapis-lainli,
le paTé en mart>re et en vert antique, les marailles en
mosaïque de Florence, l'autel en ai^nt; 4* les Apporte-'
mmti d» Charles VII, où sont entassés les ornements
les plus riches dans le goût du xvm* siècle. — La Nou-
velle Résididace a été bâtie de 1826 à 1835 par L. de
(Ueoze. Sa façade, imitation du palais Pitti de Florence,
a i30 met. de longueur; il y a trois étages au milieu,
deox seulement aux ailes. Trois portes donnent accès
dans un vestibule supporté par io colonnes de marbre.
Outre les appartements du roi et de la reine de Bavière,
fermés au public, cette partie du palais contient cinq
salles dites des Niebelungen, parce que les fresques dont
Schnorr les a décorées ont pour sujets des scènes de
cette épopée allemande. — Le Palais des Fêtes, b&ti de
1832 à 1842 dans le style de Palladio, d'après les dessins
de L de Klenze, a une façade de 240 met. Le milieu
(bmie un triple portail avec un portique, qui supporte
•a balcon dominé par 2 lions assis et les 8 statues co-
ossales des cercles de la Bavière, œuvres de Schwan-
thaler. On voit au rea-de-chaussée six salles ornées de
peintures représentant les principales scènes de VOdyssée
8t qui ont été exécutées par Hiltensperger sur les dessins
de Schwantbaler. Au l*' étage sont les salles dites du
Bd, des Beautés 9 des BataUles ou des Banquets, de Char-
Urnaone, de Frédéric Barberousse, de Rodolphe de Habs-
howQ, et du Tt&ne, toutes ornées, moins la dernière, de
fresques et de tableaux.
¥DiiicH (La Glyptothèque de), monument bâti par L. de
Ilenze, de 1816 à 1830, pour servir de musée ae sculp-
tare. 11 est carré, orné aans tout son pourtour à la ma*
oière antique, et sans autre ouverture duis les murs
eitérieurs que la porte de la façade. Cette façade est en
marbre blanc, et présente six niches, renfermant les
statues de Vulcain, de Phidias, de Prométhée, de Péri-
clès, d'Adrien et de Démosthène : au milieu s'avance un
péristyle de 8 colonnes ioniques, oui supportent un vaste
fronton sculpté. Cest de la cour intérieure, par des fe-
nêtres immenses, que les salles, au nombre de 12, re-
çoi?eDt la lumière. Deux de ces salles, dites des Fêles
ou salle des Dieux et salle Troyenne, et destinées au
repos, ont été entièrement peintes à fresque par Comé-
fios, Hess, Zimmermann et quelques autres artistes. Les
nlles consacrées à la sculpture sont : 1" la salle Êgyp-
tienne; f* la salle des Incunables, où sont réunis les plus
lodens essais de l'art grec, originaux ou copiés, alors
qui] imitait encore le style de l'Egypte ou celui de la
Phénide; 3* la saUe des marbres iÊgine; 4<^ la salle
cf ^poUos, ainsi nommée d'un Apollon Githarède, en
oaÂre pentélique et de proportions colossales; 5** la
lotit de Bacchue, où Ton a placé des statues et des bas-
reliefs se rapportant presque exclusivement au culte de
es dieu; 0° la salle des Niobides, idnsi appelée parce
qu'elle renferme, entre autres œuvres, une i^épétltion du
Nlobide mourant de Florence et un Miobide agenouillé ;
7* la salle des Héros; 8® la salle des Bomains, la plus
TStte de toutes, longue de 40 met. sur 14 de large; 0» la
Mtie des Sculptures coloriées et dorées; i(y* la salle des
Modernes, où les œuvres ne remontent pas plus haut que
Canoya.
■DHiCHifLa Pinacothèque de). Cet édifice, construit de
1826 à 1830, sur les plans de IClenze, est un bâtiment du
«Me des palais romains, long de 156 met, large et haut de
^mèt, terminé à chaque bout par deux ailes. Sa façade
principale est décorée de 25 statues de peintres célèbres,
par Sdivanthaler. Il ne contient pas seulement, comme
■OQ nom le ferait supposer, un musée de peinture, mais
des collections de gravures , de dessins, de vases, etc. La
plerie de tableaux, placée an 1* étage, est une des plus
Mlles de l'Europe : elle compte plus de 1,300 tableaux,
répartis en 0 salles et 23 cabinets. Panni les plus inté-
ressants, on remarque ceux de l'andenne école d'Alle-
niagne, et 05 ouvrages de Rubens. La aaltfie de Munich
ft été formée avec celles de Dusseldori, de Deux-Ponts,
de Mannheim, de Schleissheim, et enrichie encore par
l'acquisition de la collection des frères Boisserée. Le ca-
binet des estampes ^,t)00 pièces), celui des dessins et
teides (12,000), et celui des vases grecs et étrusques,
eccnpent tout le res-de-chaussée. — Au nord et à peu de
distance de la Pinacothèque, on a élevé, de 1846 à 1853,
nr les dessins de Voit, une Nouvelle Pinacothèque, qui
contient, au rez-de-chaussée, une collection de peintures
MT porcelaine, et, à l'étam, 300 tableaux environ.
■tniicH (Théâtre de). Construit par Fischer en 1825,
restauré en 1853,11 a 60 met. de longueur et 45 mèU de
hauteur. Un escalier en marbre conduit à son portique»
formé par 8 colonnes corinthiennes. Il a deux frontons
ornés de fresques par Hiltensperger et Nilson ; les frises»
les chapiteaux, les corniches sont décorés de peintures
polychromes. Trois portes donnent accès dans un vesti-
bttle, offrant en face l'entrée du parterre, à droite et à
gauche deux escaliers de marbre garnis de statues d'au«
teurs dramatiques. La salle, une des plus grandes de l'Al-
lemagne, peut contenir 2,500 spectateurs, sans compter
les 60 places de la loge royale et les 100 places de ror»
chestre. Elle est écliûrée par un lustre de 400 becs de sauk
MUNiaPAL (Conseil). V. Commune, dans notre Dio-
tionnaxre de Biographie et d^ Histoire,
MumaPAL (Droit), ensemble des lois concernant les
municipalités. Il comprend tout ce qui concerne les attri-
butions du corps municipal (mdre, adjoints, conseil mo-
nidpal), les propriétés communales, les contrats et procès
des conrniunes, leurs dépenses et recettes, leur compta-
bilité. On peut consulter, au point de vue historiçiue on
pratique, les auteurs suivants : Delapoix-FreminviUe,
iVatM général du gouvernement des biens et affaires det
communautés d^habitants, de vUles, bourgs, etc., Paris»
1768, in-4<»; Boileau, Recueil des règlements et recherchée
concertumt la municipalité, 1785, 5 vol. in-12; Fabvier»
Recherches historiques sur les municipalités, 1780, in-8*;
6uichard,yurtapni(lefic« communale et munic^le, 1820;
le baron Dupin, Précis historique de l'admintstrcUion et
de la comptabilité des retfenus communauat, 1820, in-8*;
Dupin, Lois des communes, 1823, 2 vol. in-8«; Rondon*
neau, les Lois administratives et municipales de la
France, 1825-32, 6 vol. in-8»; Leber, Histoire critique
du pouvoir municipal, de la condition des cités, det
villes et des bourgs, et de l* administration comparée det
communes, 1828, in-8<^ ; Raynouard, Histoire du droU
municipal en France, 1829, 2 vol. in-8®; le baron Du-
pin, Histoire de V administration locale, ou Revue histo^
rique des divers changements survenus dans l'organisa^
lion administrative dis villes et communes, des prom:%cet
et départements, 1829, in-8^; Ghrardon et Nabon-Devaux»
Questions de Droit municipal, 1833, 4 vol. in-8o; Dn-
quenel. Lois municipales, rurcies, administrcOives et de
police, 2« édit., 1833, 2 vol. in-8« ; Henrion de Pans^»
Du pouvoir municipal et de la police intérieure des corn*
munes^ 3« édit., 1833, in-8«; Gillon et Sturm, Code det
mufiictpalités, 1834, in-12; De Gormenin, Loi sur Vor»
ganisation municipale, 1838, in-8<*; Leber et de Put
busqué, Cocfe municipal annoté, 1839, 1 vol. in -8*; Bost»
JVaité de Vorganisation et des attributions des corps
municipaux,^* édit., 1840, 2 vol. in-8^; Renard, RecuiU
des lois municwales, 1841, in-8"; Boyard, Nouveau ifo-
nuel municipal, 3* édition, 1843, 2 vol. in-8°; Davenne,
Régime administratif et financier des communes, 4' édit.,
1843, 1 vol. in-8^; de Puibusque, Dictionnaire municipal,
3* édit, 1843, in-8*^; Miroir et Jourdan, Formulaire mu-
nidpal, 2* édit., 1844-46, 6 vol. in-8o; De Champagny,
Traité de la police municipale, 1844-47, 3 vol. in-8*t
Fauchet, Code des municipalités, Grenoble, 1846, 2 voU
in-8«; Paul Gère, Code de la mairie, Paris, 1852, in-18|
Dupont, Dictionnaire des formules, 1858, 2 vol. in-8«.
MUNICIPALITÉ, mot oui s'entend du corps des officiers
municipaux, du territoire administré par eux, ou de
l'édifice où ils tiennent leurs séances et ont leurs bureaux.
MUNIOPE. F. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et â! Histoire.
MONITIONNAIRES ou FOURNISSEURS, ceux qui ont
l'entreprise et la fourniture des vivres et fourrages néces-
saires aux troupes. La fourniture des crains est mise
chaque année en adjudication avec pubhcité et concur-
rence. Le service des fourrages est fait au moyen de
mardiés à prix ferme passés en acUudication publique*
Les munitionnaires qui fraudent sor la nature d&e vivres,
ou qui apportent de la négligence à les livrer, sont punis
d'un emprisonnement de 6 mois à 5 ans, et de dom-
mages-intérêts; s'ils abandonnent leurs fonctions, ils
sont condamnés à une amende de 500 fr. au moins, aux
dommaoefr-intérèts et à la réclusion {Code pénal, art. 420-
433). K. MuNiTiONNAiRis, daus notre Dictionnaire de Bio^
graphie et d^ Histoire,
MUNITIONS (du latin mtmtrs, munir, approvisionner)»
mot qui désire tout ce qui constitue l'approvisionne-
ment des armées, doi places fortes et des lieux de gar-
nison. Les munitions de guerre comprennent les poudres»
cartouches, gargousses, projectiles, armes portatives, ou-
tils de rartillene et du génie, et en général tout le maté-
riel d'une armée ou d'une place; les munitions de boudm
sont les vivres de toute nature, pain» biscuit, fourrages»
MUS
1286
«US
La fiuU de munUUm est celui de l*infanterie de ligne.
Le pain de tnunUion est celui qui eet flftbriaué pour les
troupes dans les manutentions de TÉtat. La détention de
munitions de guerre par des particaliers est punie (F. Dé-
Tsmoif ]. — On nomme munitions naoaUe tous les ob-
jets de guerre ou d'approyisionnement embarqués sur les
bâtiments de l*État ou emmagasinés dans les arsenaux.
MtlNLENL K. Roomanb (Langue).
MUPHn. V. Mura, dans notre Dictionnaire de Bio-
(/raphie et d'Histoire.
MUR, partie importante de toute construction archi-
tecturale. Les murs de maison, qui ont une faible épais-
■eur relativement à leor hauteur, exigent un grand soin
gir rapport au choix des matériaux et à la main d'csuTre.
n les fait ordinairement en moellons ou en briques, sou-
vent avec chaînes ou piles en pierres de taille, qu'on place
de préférence aux angles et près des portes et des fe-
nêtres. Les parements, c.*à-d. les deux surfaces des murs
en moellons, doivent être reliés par de longs moellons
appelés parpaings, qui traversent toute Tépaisseur. En
âevation, et hors de l'humidité, le plâtre s*emploie de
préférence au mortier, parce quMl sèche plus vite et qu'il
est plus propre pour les enduits. L'épaisseur des murs
▼a naturellement en diminuant du bas au haut de Tédi-
flce, parce que la charge à supporter est moindre. A Paris,
les murs de maison se font habituellement en pierre de
taille de 0™,50 pour les façades extérieures; en briques
4e 0",35, et plus souvent en pans de bois hourdés en
C3 de (^,46 à (H".i8 pour les murs de refends ou les
es des cours. — Les murs de soutènement des terres
•e construisent aussi en moellons ou en briques, avec ou
Mns chaînes en pierres de taille de distance en distance;
mais on ne se sert que de mortier de chaux, à cause de
rhumidité, aui, à la longue, décompose le plâtre. On
doit donner à ces murs une certaine inclinaison en de-
dans, ou fruit, qui varie du 10* au 20*; s'ils soutiennent
des terres remblayées, leur épaiaaeur à la base est ordi-
nairement du tiers de leur hauteur; elle est moindre, si
las terres sont vierges. -» Les murs de clôture, qui n'ont
point de charge à supporter, se font en moellons, en bri-
qiies, ou en pisé (V, ce mot). Ceux en moellons ou en
j firiaues, maçonnés avec du morder ou du plfttre, ont une
{ épaisseur de 30 à 40 centimèt. pour une hauteur de 2 à
S met. ; on emploie quelquefois la terre comme mortier.
Tout mur de clôture bien construit est surmonté (|^nn
chaperon (F. ce mot).
'MUR DE CHUTE. V. CHUTK.
MURAILLES CÉLÈBRES. F. notre Dtctumnaire de
Biographie et d'Histoire.
MURÈNE. F. CoLUBR.
MUREX. F. Chausse-trapb.
HURGEIS. F. TuMOLUS.
MOS^ras^^"^^' l ^' ^^^^ DicHonnaire de Bio-
MUSCULUS.' ) Oraphie et d'Histoire.
MUSE, nom donné à la musette pendant le moyen ftge.
— La muse de blé était un simple chalumeau.
MUSEAU , accoudoir de stalle, ainsi nommé parce que
lès sculpteurs lui donnaient habituellement la forme d'un
museau ou mufle d'animal.
MUSÉE , en grec motiséion, nom oue les Anciens don-
nèrent à tout temple des Muses , pus à tout endroit qui
leur était consacré et où l'on s'occnfMit de lettres, de
sciences ou d'arts. Tel était le célèbre Musée d'Alexandrie
an Egypte (F. Musût, dans notre Diotionnaire de Biogror
phie et d* Histoire). Le Musée d'Athènes, colline Yoisine
da la citadelle, tira son nom du poète Musée, qui venait
i réciter ses vers. Les modernes ont donné le nom de
usée aux collections publiques d'œavres d'art et d'ob-
jMs rares ou curieux, tels que tableaux, statues, sculp-
tures, mosaïques, dessins, estampes, médailles, pierres
gravées, meubles et ustensiles antiques, etc. Les Anciens
n'avaient pas de collections de ce genre, et c'était exclusi-
Yement dans les temples et autres édifices publics qu'on
pouvait admirer les ouvrages des artistes : on ne s'est
mis à en former qu'à partir du xv* siècle de notre ère. A
Mrt les considérations tirées da l'espace dont on ne peut
disposer, il est certains principes d^rganisation dont on
ne doit pas s'écarter dans la distribution des richesses
d'un musée, particulièrement d'une galerie de tableaux :
c^est, par exemple, de les ranger par écoles, et en sui-
vant, dans chacune d'elles, Tordre chronologique. On
>eut toutefois se proposer, comme dans le grand salon
earré du Ix>uvre, de produire une impression d'ensemble
par le grandiose et la magnificence de l'exposition, et
Héunir les chefs-d'œuvre qui font le plus d'honneur à
l'art humain. Il est important d'obtenir dans les galeriei
un Jour Juste et plein d'effet: autrefois, on faisait venir
le jour du plafond, système auquel nos arehitectes re-
viennent aujourd'hui.
Les plus célèbres musées d'Italie sont ceux de Rome
(F. Vatican), de Naples, de Florence, de Venise, de Turin.
En Allemagne, où ils sont très-nooibreux, on remarque
ceux de Munich (F. ce mot), de Dresde, de Vienne, de
Berlin, de Gotha, de Weimar, de Darmstadt , de Prague,
le Musée cUlemand de Nuremberg , etc. Nous dterons en-
core le Musée de l' Ermitage à S^Pétersbouiig, le Musée
Thorwaldsen à Copenhague, le musée d*Oxford, et le
Musée britannique a Londres (F. plus loin).
La France, sous le rapport des collections artistiques,
ne le cède à aucun pays du monde. Paris possède les mu-
sées du Louvre, du Luxenoibourg, de Cluny, et de l'École
des Beaux-Arts (F. LouvaE, Lcxehboubg). Dans les dé-
partement, les musées les plus importants sont ceux de
Lyon, de Versailles, d'Orléans, de Rouen, de DQon, de
Besançon, de Chrenoble, d'Aix, d'Angers, de Bordeaux, de
Montpellier, de Gaen, du Mans, de Marseille, de Nancy, de
Nantes, de Nîmes, de Reims, de Rennes, d'Alençon, etc.
MUSÉE d'artillerie. F. Artillerie.
vosiB muTAiimQUB, en anglais British Muséum, vaste
édifice de Londres, où sont déposées de très-riches col-
lections, et qui est à lui seul pour les Anglais ce que sont
à Paris la Bibliothèque impériale, le Louvre et le Mu-
séum d'histoire naturelle. Cet immense amas de livr^
d'objets d'art et de sciences, fut créé an 1755, et doit ion
orinne à la réunion de trois colle<^ons de Hans Sloane,
de Robert Cotton et de W. Harley. Ces collections furent
déposées dans les appartements de Montaigu-House. Des
legs considérables et des acquisitions nombreuses les
augmentèrent avec rapidité. Quand l'État eut acheté les
marbres recueillis par lord Hamilton pendant son am-
bassade à Naples, puis la collection Townley en 1805, il
fallut ijouter des constructions nouvelles au corps prin-
cipal de l'hètel. Une autre annexe s'éleva pour les marbres
du temple d'Apollon à Phigalie; une autre encore en
1816, pour recevoir les statues et les bas-reliefs du Par-
thénon, rapportés d'Athènes par lord Elgin. Lorsau'en
1823, la bibliothèque de George HI accrut encore d'une
manière notule le fonds primitif, il fallut renoncer au
système d'extension successive des b&timenta, et le Par-
lement décida la construction de Tédiflce actuel. Cet édi-
flce, achevé seulement en 1851, et construit sur les des-
sins de Robot SmixiLe, devait être sufiisant pour contenir
ce que Ton possédait d^& et ce crue l'avenir devait au-
porter. On a recueilli, en effet , depuis cotte époque, la
bibliothèque de Thomas Grenville, les collections éfirp-
tiennes de Sait, de Halliburton, d'Anastasi, de Bel-
more et d'Andrew, les monuments lyciens rapportés
par FeUows, les antiquités assyriennes découvertes par
Layard, etc. Le British Muséum est divisé en 8 ooUeo-
tions ou départements : au rez-de-chaussée sont les ma-
nuscrits (plus de 30,000), les livres (500,000), et les
collections archéologiques, comprenant des monuments
de la Grèce, de l'Egypte, de l'Asie Mineure, etc.; dans les
étages supérieurs on a placé les collectiona d'histoire na-
turelle. La salie de lecture, de forme circulaire, at éclsiréa
par le centre de la coupole, devrait servir de modèle à
toutes les salles de bibliothèques publiques : plus de
300 lecteurs y trouvent & la fois toutes les ressources
d'une vaste bibliothèaue et toutes les commodités du ca-
binet de travail le oueux pourvu. Dans las salles consa-
crées aux médailles, aux hôronxas, aux vaaas, aux émaui,
aux fidences, aux ivoires, aux terres cuites, aux pein-
tures, aux dessins, anx estampes^ dont les collections sont
très-riches, tout est rangé avec beaucoup de goût, de luxe
même, et de la façon la plus avantageuse pour l'étudd.
Enfin, rétablissement reçoit chaque année du Parlement
une riche subvention. B.
MUSETTE, instrument de musique d'un caractèrs
champêtre, confondu génénlament avec la cornemuse
(F. ce mot)^ mais qui est d'une construction pins déUcste
et plus soignée, et dont les sons ont plus de Justesse et
de douceur. L'outre de la musette reçoit la vent d'un
soufflet placé sous le bras gauche, tandis que la corne-
muse est insufflée avec la bouche : de plus , le bourdoi
de la musette est percé de plusieurs trous, bouchés par
des chevilles de bois aa divoire appelées layettes, el
dont on ouvre un ou deux pour avoir la toniqaa at U do-
minante du ton où l'on yeut jouer. La musette, à pec
près abandonnée a^ourd'hni, eut autrefois une grands
vogue : Lulli s'en servit à l'orchestre de l'Académie
reysle de musique, et elle figura également dans la ma-
HU-S
1287
MUS
ffqae du rai; an xvm* siècle soitoat, une femme du
monde devait joaer de la musette, aussi bien que de la
mandoline, du claTedn et de la ▼iole d*amour, et la mar-
opise de Pompadour en donna l'exemple. Musette est un
diminutif de muse; quelques-uns font yenir le mot d*un
certain Colin Muset, qui aurait mis Tinstrument en vogue
ta xm* siècle. V, Boijon, Traité de la musette, Lyon,
1672, in-4<*. — Par extension, on appela Musettes cer-
tains morceaux d'un caractère agreste et naïf., d'une me-
sore assez lente, à deux ou à trois temps, avec une basse
en pédale soutenue. Celles de la Callirhoé de Destouches
et des Talents luntpaes de Rameau ont été célèbres. L'effet
de la musette est bien imité dans l'orchestre par le haut-
bois tenant la mélodie et accompagné par la flûte, la cla-
rinette, le cor anglais et le basson ; c'est ainsi qu'est
composée la musette de la Nina de Dalayrac, et celle par
laqaelle Nicolo a commencé l'ouverture de son Joconde;
l'introduction du Richard Cœur-de-Lùm de Grétry est une
masette. Pendant longtemps il fut de tradition chez les
organistes, dans les Te Dewn solennels, de jouer une
masette sur le verset Judex crederis esse venturus; ils
sa plaçaient une également à la Blesse, pendant la Corn*
mnnion. B.
HOSETR, jeu d'anche de certaines orgues, en étain fin,
et en forme de cône renversé. On lui donne toute l'étendue
da clavier, aoit du positif, soit du grand orgue. Il sonne
huit pieds, quoiqu^l n*ait que quatre pieds. Le son en
est an peu plus faible que celui du cromome, et imite
assez bien la vraie musette.
MUSÉUM D'HISTOIRE NATURELLE. V. Jardin des
PuiTTBs, dans notre Dictionnaire de Biographie et
iHistoire.
MDSICO. V. Castrat.
HDSIGOCRAPUB. V. le Supplément et Pantophoni.
MUSIQUE , art de combiner, de produire des sons de
manière à flatter ToicWe et à toucher le cœur. Son but
est d'émouvoir. Comme l'émotion est id un phénomène
qoi ne peut se produire que par l'intermédiaire de l'or-
g&oisme, l'action de la musique est nécessairement très-
diverse sur les êtres organisa, en raison des différences
qoi existent dans leur système nerveux : tel homme est
agréablement touché à l'audition d'un morceau, tel autre
demeare indifférent ou n'éprouve que de la fatigue, par-
fois même de la souffirance. Parmi les individus sensibles
aax plaisirs de la musique, les uns aiment telles ou telles
combinaisons de sons, qui déplaisent à d'autres ou les
laissent impassibles; oeux-d recherchent un genre d'exé-
cation qui ne plaît point à ceux-là; une pièce de musique
^tn ne noua a pas émus dans un moment exdte en un
antre temps notre enthousiasme. Si le goût de la musique
est donné à l'homme par la nature, il faut ajouter que
Tâducation le complète, et qu'elle peut même le faire
naître dans celui qui ne l'avait point eu tout d'abord ,
■oit par imperfection native, soit par défaut d'exerdce de
la sensibilité. La musique, surtout avec la puiMance et
la richesse auxquelles elle est parvenue ai^ourd'hui,
n'est donc pas faite pour tout le monde , de même que
toat le monde n'est pas fait pour elle; il faut qu'elle
s'adresse à des hommes intelli^nts et doués d'une orpa-
nisation spéciale ( K. Sens musical ). Ses moyens d'action
sont la méloéUe, formée par les combinaisons successives
des fions, Yharmonie, résultant des combinaisona simul-
tanées, le rhythme, et Vacc«nt ou Yexpression {V, ces
mots).
La vérité est le principe de la musique, comme de tous
les arts. Mais la Yérité en général ne s'adresse pas à
Toreille; l'esprit seul en jouit : par conséquent, toute
vérité n'est pas ansceptible d'être exprimée par des sons
i&Qdcaux, et la musique n*est point une langue analogue
i tonte autre. La Térité pour elle consiste essentiellement
& rendre et à tnmamettre les affections de l'ftme; la mu-
riqoe n'exprime qu'autant qu'elle émeut. Elle a pu imiter
avec plus ou moins de succès certains effîBts de La nature,
tels que la tempête, le balancement des vagues, le ra-
mage des oiseaux : mais elle est impuissante à traduire
des idées sans le secours de la jwrole , et sa foculté
d'imiter et de décrire est, sinon contestable de tous
points, au moins trèa-limitée (K. Dbsgriptivb — Mu»
doue). Il en résulte que, quand on unit aux sons les pa-
rons articolées, ce n^efit pas l'expression minutieuse de
ces paroles qui est l'objet principal de la musique, mais
l'expression du sentiment ou de la passion one les paroles
tt les sons concourent à faire passer dans Vàme des au-
diteurs; et l'on a tort de reprocher quelquefois aux mu-
siciens la répétition fréquente des mêmes paroles dans
VI moroean* car ces répétitions ont pour but de donner
à la musique le temps de passer par tous les degrés de
lajpassion, ce qui est son véritable rôle. Mettre de l'es-
rit dans les sons, les employer k faire ressortir un mot,
produire une inflexion comique, sacrifier la période
musicale à la rapidité du langage, ce n'est pas de la mu-
sique. J. César avait raison de dire k un professeur de
déclamation qui voulait faire servir la musique à seconder
la parole : « Tu parles trop pour un homme qui chante,
tu chantes trop pour un homme qui parle. » Dans les
morceaux du genre dramatique où l'articulation préci-
λitée des paroles produit un bon effet, ce n'est plus
Idée musicale ou la mélodie, mais le rhythme qui est
important, et d'ailleurs l'accent bouffon de l'acteur est
pour beaucoup dans l'effet de ces morceaux. Quand les
paroles dominent la musicpe , ce ne peut être que dans
un but de repos et de variété, parce qu'il est impossible
d'être continuellement ému.
La musique se compose de deux grandes parties, la
composition et Veasécution {V, ces mots). Elle est à la
fois un sentiment et une science : elle exige, en effet, de
la part de celui qui la cultive, exécutant ou compositeur,
une inspiration naturelle, et des connaissances çui ne
s'acc^uièrent que par de longues études. La réunion du
savoir et de l'inspiration constitue l'art. Des hommes
étrangers à la sdence ont pu produire d'instinct des airs
gradenx et même sublimes, témoin Rouget de Lisle et
sa Marseillaise: d'autres, qui ont étudié patiemment la
théorie, écriyent des morceaux conformes aux règles et
qui satisfont l'ordlle, sans rien dire au cœur ni à l'ima-
gination. Mais les uns et les autres ne sont que des ar-
tistes incomplets, si tant est qu'ils méritent le nom d'ar-
tistes.
Eu égard k la nature des sons qu'elle emploie, la mu-
sioue se divise en musUiue vocale et musique instrument
taie. La musique vocale peut être écrite pour une ou
plusieurs voix, et la musique instrumentale pour un ou
plusieurs instruments, ou pour des masses d'instruments.
La première se divise en musique sacrée, religieuse on
d'église, miuique dramatique ou opéra, musique de
chambre, et airs poptUaires {V, Égusb, Opéra, Ghambrb,
Air) ; la 2*, en musique d'orchestre et musique de chambre,
comprenant les ouvertures, les symphonies, quatuors,
quintettes, sextuors, etc., les sonates, les concertos, les
pièces d'orgue, etc.
L'histoire raconte toutes sortes de merveilles sur la
puissance de la musique. Parmi les effets de cet art, les
uns sont purement physiques, et les autres moraux. La
mudque agit sur les oreanes non-seulement de l'homme,
mais des animaux. Le chien, doué d'une excessive sensi-
bilité à cet égard, pousse des cris et des hurlements qui
f paraissent êâ^ une expression de douleur, et, s'il est
ibre, il s'enfuit dès qu'il entend un instrument. Des ex-
périences nombreuses ont prouvé que les oiseaux, les
chevaux, les cerfs, les castors, les rats, les éléphants, les
lézards, les araignées, entendent de la musique avec plai-
sir (F. Fétis, Curiosités historiques de la mustque,
ch. xi). On s'explique dès lors que la musi<]^e ait pu
être employée comme moven curatif dans certaines affec-
tions qui ont pour principe soit une douleur profonde,
soit une aberration de l'esprit : l'émotion de l'àme répond
alors à l'ébranlement des sens. Sans aller aussi loin
qu'Homère, Plutarque, Théophraste et Galien, qui étaient
persuadés que la musique guérissait de la peste, des rhu-
matismes et des pioûres de reptiles, ou que uiemerbroecli.
Bonnet, Baglivl, Kircher, Haffenreffer et Desault, qui lui
attribuaient la guérison de la phthlsie, de la goutte, de
l'hyd^hoble, et de la morsure des animaux yenimeux,
il est certain qu'elle agit sur les maladies dépendantes
du svstème nerveux. La harpe de Darid calma les accès
de démence de SatU; le roi d'Espagne Ferdinand VI fut
guéri de l'aliénation mentale par les chants de Farinelli.
— Les Andens ont louTent parlé de l'influence de la mu-
sique sur la dvilisation et les bonnes mœurs. Homère
place un musicien auprès de Clytemnestre pendant l'ab-
sence d'Agamemnon, pour garaien de sa chasteté, et
Égisûie fût sans puissance sur l'esprit de la reine tant
qu'elle entendit les chants qui lui présentaient les images
ae la vertu. Polybe attribue à la culture de la musique la
pureté de mœurs des Arcadiens. Selon Plutarque, Ter-
pandiê, par le secours de son art, apaisa une sédition à
Lai^émone. Empédode passdt pour avoir prévenu un
meurtre par le son de sa lyre. Antigénlde et TImothée,
après avoir excité jusqu'à la démence l'ardeur belliqueuse
d'Alexandre le Grand, rendaient le calme à son âme en
changeant seulement de mode. Si l'on ne doit Yolr qu'une
inutge dans les tigres et les lions apprivoisés par Orphée,
y
ML»
12S8
MUS
des assassins ont été bien réellement désarmés par les
accents de Stradella*
Histoire, — La musique est un des arts les plus anciens,
parce que son moyen d*expression, le son, a été donné
> % tous les hommes, et que tout sentiment vif cherche à
' se manifester par des sons. Tous les essais que les Hé-
< breux, les Chinois, les Indiens et autres peuples primi-
tifs ont pu faire n*ont rien de commun avec Part actuel.
Chez les Grecs, la musique fut en quelque sorte partie
intégrante de la religion par les hymnes de toute sorte
consacrées à tous les dieux et & toutes les fêtes, par les
airs que les instruments exécutaient pendant les proces-
sions et les sacrifices. Elle fut aussi de toutes les céré-
monies publiques. Les Aigiens allaient au combat au son
des flûtes, les Cretois au son de la cithare, presque tous
en entonnant le Péan ou tout autre chant de guerre.
Quand Êpaminondas fit construire Messène, des musi-
dens, au dire de Pausanias , excitèrent Tardeur des tra-
vailleurs en exécutant des airs de Pronomos. Dans les
jeux publics, il y avait des luttes de chant et d'instru-
ments, et la musique s'associait à la poésie pour célébrer
les vainqueurs. H y avait, pour les œuvres scéniques, une
sorte de déclamation musicale, et la voix de Tacteur était
doublée et soutenue par la ilûte ; ces œuvres étaient en-
tremêlées de chœurs. Les oracles , les lois mêmes furent
primitivement chantées en public. Ne pas savoir chanter
était une honte. La musique avait si bien pénétré dans
Ifrs habitudes et les mœurs, qu*il existait des nomes,
c-à-d. de certains genres consacrés de chansons, pour
toutes les professions et toutes les circonstances de la vie
(F. Chanson). Liée aux mathématiques par les propor-
tions de ses consonnances, à la métrique, k la danse et
à la mimique par le rhytbme, elle était un élément né-
cessaire de réducation , à laquelle elle donnait son nom
même, (Lovfftx^. Ce mot indiquait toutes les attributions
des Muses. Suivant Platon, le nombre et Tharmonie, s*in-
linuant de bonne heure dans l'&me, y font entrer en
même temps la grftce et le beau , et Aristide Quintilien
dit <|ue la musique donne à TilLme les mœurs par Thar-
monie, au corps l'élégance par le rhytbme. Ampbion
élevant les murs de Thèbes aux sons de sa lyre et Orphée
adoucissant les bêtes féroces étaient l'image du pouvoir
de la musique sur la Grèce encore barbare; quand Platon
déclarait que la musique était nécessaire à quiconque
voulait gouverner l'État, il pensait à la puissance de cet
art pour le maintien des mœurs publiques dans la Grèce
civilisée. — Malheureusement nous ne pouvons nous faire
une idée de la musique grecque que par les écrivains théo-
riciens (F. Grecque — Musique) ; et il est assez difficile
de comprendre ces écrivains, si l'on n'oublie pas le sens
attaché par les modernes à un certain nombre de mots,
tels que mode, ton, harmonie, diatonûiue, chromatique,
êtUiarmonique (V. ces mots)^ entendus tout autrement
par les Anciens. Les fragments de chants qui ont été re-
cueillis sont peu nombreux, très-courts, et à peu près
Insignifiants. Ils ont été publiés par Bottrigari et Galilei
en 1581 < puis dans l'édition d'Aratus, qui parut à Oxford
en 1672, enfin par Burette dans les Jdêm, de VAcad. des
Inscript, et Belles-Lettres, V série, t. V. Le christianisme
a pris pour ses chants quelques-unes des mélodies
païennes, qu'il est ai^ou^'^ui impossible de distinguer;
tout le reste a péri avec les sociétés antiques. Le vieux
système musical et la notation ayant été changés au
moyen &ge, les numuscrits de la musique ancienne par
rurent n'avoir plus aucun sens; on les laissa se perc&e,
ou bien les copistes les grattèrent pour employer le même
parchemin à la transcription d'autres œuvres.
La musique instrumentale était moins en faveur que
le chant. Aristote déclarait le Jeu des instruments, et sur-
tout des flûtes, indigne de l'homme libre; il ne voulait
cependant parler que de la profession, et, en effet, presque
tous les instrumentistes furent des esclaves ou des étran-
gers. Les préventions contre la flûte venaient de ce qu'elle
était d'origine barbare ou asiatique, défigurait les traits
de l'exécutant,, et ne pouvait servir à s'accompagner en
chantant. Longtemps le Jeu isolé des instruments fut in-
connu, et on ne les employa que pour prendre le ton et
soutenir la voix. Les airs de danse, qui semblent réservés
aux instruments, étaient souvent chantés, ou bien l'on
te contentait de marquer le rhythme à l'aide du tympanon
•n des crotales.
I^s Romains n'ont point été un peuple artiste. Long-
temps ils ne connurent de la musique que ce qui leur
avait été enseigné par les Étrusques, et l'on ne peut sup-
poser une grande valeur au chant des frères Arvals, ou
a celui des prêtres Saliens qui dansaient en frappant sur
des boucliers. Servins Tullius créa deux centuries ds
Joueurs de cor et de trompette. On employa les flûtes
dans les cérémonies funèbres, puisque les Douse-Tsbles
en fixent le nombre à huit. De bonne heure les musi-
ciens grecs et asiatiques affluèrent à Rome, mais lorsque
déjà la musique grecque était en décadence : ils figurèrent
par bandes considérables dans les spectacles publics.
Ainsi, à la première naumachie, qui eut lieu sur le lac
Fucin, J. César produisit 11,000 chanteurs et instrumen-
tistes. A la suite d'un meurtre commis au théâtre, TibèrE
chassa de Rome tous les musiciens; mais ils furent rap-
pelés par Caligula. Néron eut 5000 musiciens attachés à
sa maison. La pompe des exécutions musicales pouvait
être grandiose et la sonorité puissante, mais il est dou-
teux que l'art y trouvât son compte.
L'enfantement de la musique moderne a été laborieux
et long. Au vi* siècle, le pape S^ Grégoire le Grand forme
de l'ancienne mélopée des Grecs le plain-chant ou chant
ecclésiastique (F. Puuii-Chant). Puis, Tharmonie com-
mence à naître : elle se manifeste d'abord dans de faible
essais appelés Déchant (V, ce mot) y et, s'améliorant pep
à peu, elle arrive au contre-^nt (V. ce mot). Les pre-
mières combinaisons de l'harmonie ne suffirent pas lonf-
temps pour rompre l'uniformité de la musique, qui en
était toujours & l'ordre unitonique. En établissant l'échelle
musicale diatonique. Gui d'Arezzo opéra une nouvelle
révolution, et bientêt,par l'adoption de la mesure, on
distingua la musique plane et la musique mesurée, Aa
XVI* siècle, Monteverde fit l'essai des intervalles disso-
nants, et, àcûté de la tonalité dérivant des Grecs, s'éleva
la tonalité moderne avec ses modes mineur et mineur
(K. ToNÂUTÉ), découverte qui développa si prodigieuse-
ment l'élément passionné dans la musique. En même
temps l'invention de la basse continvLe (V. ce mot)y en
rendant la basse indépendante de la partie chantée, fut
le germe d'un vaste et brillant système d'instrumenta-
tion. Juec[ue-Ui aussi, la musique n'avait eu qu'un but,
l'expression des sentiments religieux ; qu'un temple ,
l'église; qu'un style, qu'une forme, qu'un genre ; de œ
tronc plein de sève vont sortir désormais deux branches |
distinctes et vigoureuses, l'une formée du concours des
voix et des instruments, l'autre purement instrumentale,
Corelli crée la sonate; Carissimi pose dans l'oratorio les
éléments de la cantate, de l'opéra , de toute la musique
dramatique. Le quatuor d'instruments à cordes, tenté jmt
Allegri, se perfectionne constamment Jusqu'à Boccherini
et Haydn, qui lui donnent un caractère fixe ; il en est de
même pour la sjrmphonie, depuis Stamitz Jusqu'à Bee-
thoven. Le drame lyrique marche d'essais en essais, de
P^ Jusqu'à Mozart et Rossini. Mozart opère un nouveau
progrès en imaginant la substitution d'un ton à un autre
par le moyen de Venharm<mie (F. ce mot). Enfin l'inven-
tion de nouveaux instruments ou le perfectionnement des
anciens donnent chaque jour de nouveaux effets de sono-
rité, et les pratiques des maîtres sont réduites en prin-
cipe» par d'illustres théoriciens, qui se succèdent depuis
Zarlino Jusau'à Catel, Reicha et Fétis. Nous renvoyons,
pour une histoire plus complète de la musique dans les
temps modernes, aux articles de ce Dictionnaire qui trai-
tent de la musique en Italie, en Allemagne, en France,
en Angleterre, en Espagne et dans les autres pays.
BibltoQraiphi», — Plusieurs écrits de l'antiquité sur la
musique nous sont parvenus, tels que ceux d'Aristoxène,
d'Eudide, de Nicomaque, d'Al^ius, de Gaudentius, de
Bacchius, et d'Aristide Quintilien. Meibom les a réunis
sous le titre de Antitmœ musicœ auctores septem, grec-
latin, Amsterdam, 1652, avec celui de Martianus Capella
en appendice. Une autre collection, publiée par J. Wlllis,
contient les Harmoniqws de Ptolémée, le Commentaire
de Porphyre sur cet ouvrage, et les Harmoniques de Ma-
nuel Bryenne. Plusieurs chapitres d'Aristote , d'Élien et
d'Athénée, les ouvrages de Plutarque, de S* Augustin, de
Boèce, et de Michel Psellus sur la musique doivent aussi
être consultés. Les principaux théoriciens du moyen âge
ont été recueillis par Gerbert, 1784, 3 vol. in^^ De tout
temps on a publié en Allemagne des DictionwUres de Mvh
sique; nous citerons ceux de Walter (Leipzig, 1733); de
Wolf (Halle, 1787); de J.-H. Knecht (Ulm, 1705); de Bur-
khard (Ulm, 1832) ; de Hasuser (2* édit., Meissen, 1833).
En France, on connaît surtout ceux de Brossard, de J.-J*
Rousseau (1768); de Castil-Blaze (1821 et 1825), et de
MM. Escudier (1853); ou la traduction de celui de Lich-
tenthal (1839). — Parmi les ouvrages théoriques, outre
ceux qui ont été indiqués aux art. CoMPOsmoii , Goii-
Taa-poiNT, Hariion», on peut mentionner le Traité spé»
euiatif, pratiqué et philosophique de musique par Alex*
MUS
1289
MUS
Valeolm (Êdimboorg, 1721, in-8<>), les Prmcipes élémef^
taim de musitrue par les membres da Gonserratoire ; la
Vuitqus misB à la portée de tout le monde^ par Fétis; les
Idées nur Vesthétviue de la musiqw par Schabert (en
sUoOm 1806) ; VEssai d^une esthétique de la musique par
G.-C MOller (en allem., Leipzig, 1830), 2 vol. in-8o. —
Les piindpaox écrivains qui se sont occupés de Thistoire
de la musique sont : Galllei, DiaXogo délia musica antica
e modema, Florence, 1581 et 1602, in-fol.; Bontempi,
Bistoria miaica, Pérouse, 1605, in-foL; Kircher, Musur-
oiauniversalis, 1650, 2 toI. in-fol.; Bonnet, Histoire de
la musique et de ses effets, Paris, 1715, in-8<*, où il n*est
gaère question que du compositeur Lulli ; Marpurg, /n-
troduction critique à VMstotre de la musique, en allem.,
Berlin, 1754; BlainvUle, Histoire générale, critique et
pkUoklgique de la musique, Paris, 1767, in-4<*, ouvrage
pldn de faits erronés et d'une érudition factice ; le P. Blar-
doi, Storia délia musica, Bologne, 1757-81, 3 vol. in-4°,
Uvre très-savant, mais malheureusement inachevé; La-
borde. Essai sur la musique ancienne et moderne, Paris,
1780, 4 vol. in-4', amas indigeste de matériaux recueillis
■ms discernement et sans goût; Hawkins, Histoire gêné-
ralede la musique, en anglais, Londres, 1776, 5 vol. in-4o;
Bomey, Histoire générale di la musique, en anglais,
Londres, 1776-80, 4 vol. in-8^; Forkel, Histoire générale
(b/amtm9iie,en allem., Leipzig, 1788-1801, 2 vol. in-8S
excellent ouvrage, inachevé; Kalkbrenner, Histoire de la
musique, Paris, 1802, 2 vol. in-8% où il n*est guère ques-
tion que de la musique des Hébreux et des Grecs;
Busby, Histoire générale de la musique, en anglais, Lon-
dres, 1819, 2. vol. in-8% extraite de Burney et de Hawkins;
Fétis, Curiosités historiques de la musique^ Paris, 1830,
m-8«; Cooke Stafford, Histoire de la musique, traduite
de ranglais parH"** FéUs, Paris, 1832, in-12; Fink, His-
toire primordiale de Vart musical, en allem., Essen. 1831 ,
iii-12 ; Kleinsmîdt et Buschcndorf , Histoire abrégée de
la musique, en allem., Leipzig, 1832; Kiesewetter, His-
toire de la musique de V Europe occidentale^ en allem.,
Leipzig, 1831, in-4*^; Adrien de Lafage, Histoire de lamih-
siqws, Paris, 1844, 2 vol. in-8® ; Labat, Études philoso-
phiques et morales sur Vhistoire de la musique, Paris,
1852, 2 vol. in-8»; Félix Qément, Histoire générale de la
mifttique religieuse, Paris, 1860, jpr. in-8*; Fétis, Biogra-
phie universelle des musiciens, 2* édlt., 1860 et suiv. B.
MUSIQUE (Académie impériale de). K. Opéra, dans notre
Dietkmnaire de Biographie et S Histoire.
MusiQiiB (Chef de), celui oui dirige un corps de musl-
dens dans Tannée ou dans la garde nationale. Il fait par-
tie de rétat-ma]or, et a le rang de sergent-major.
McsiQUB (Conservatoires de), établissements destinés à
conserver et à propager les connaissances musicales. Ils
OQt pris naissance en Italie : le premier fut fondé à Niq)Ies
es 1537, sous le nom de Santa-Maria di Loreto, et, en
1576, on en institua un second dans la même ville sous
celui de Sant^ Onofrio. Leur succès fit ériger, en 1607,
on 3* établissement , celui délia Pietà ou de' Turchini,
dont le Conservatoire de Sont' Onofrio devint une simple
nccorsale. Un 4% appelé de* Poveri Jesu Christi, qui
datait de 1589, finit par n*étre qu*ane dépendance du
lémixiaire diocésain. Le Conservatoire de Santa-Biaria
a Loreto fut supprimé en 1799, et les deux autres furent
réunis en 1806 sons le nom de Collège royal de musique.
Après les Conservatoires de Naples, entièrement consa-
crés aoux hommes, et où Ton pouvait rester depuis Tâge
de 8 ans Jusqu'à 20, les plus célèlireB furent oeux de
Venise, réservés aux femmes : il y en avait quatre,
fOspedàle deila Pietà, le Mendicantt, le Incurabili, et
fOtpedaUtto di son Giovanni e Pa/cHo. Le 1*' et le 3* sub-
dstèrent Jusqu'aux dernières années du xvni* siècle; le
I* disparut avec la République; celui délia Pietà subsiste
leol «njourd'hui. C'était une chose curieuse que d'y voir
on ofchestre uniquement composé de Jeunes filles. Un
Conservatoire a été fondé à Milan en 1807, sous la direc-
tion d'Asioli, pour 24 élèves seulement, qui étaient en-
tretenus de toutes choses.
En France, les maîtrises des cathédrales et l'école de
rAcadémle royale de musique avaient suffi pour former
les chanteurs dont l'église et le théâtre avaient besoin,
lorsque la révolution opérée par Gltlck rendit nécessaire
SB nouvel enseignement musical. En 1784, une École
royale de chant fut fondée, & laouelle on ijouta, en 1786,
des classes de déclamation qui la firent nommer Éof^
royale de chant et de déclamation. Cet établissement,
dont Goflsec fàt le directeur, disparut en 1780. Mais alors
Sarrette réunit les 45 musiciens des gardes-firançaisss,
^our eo farmer la p<^infère qui dossenrirait les 00 b^
taillons de la garde nationale parisienne; en mai 1700, la
municipalité se chargea de la dépense, porta le nombre
des exécutants à 78, et les chargea du service des fêtes
publiques. La suppression des compagnies soldées de la
garde nationale, en 1792, entraîna celle des musiciens;
mais, peu de temps après, Sarrette obtint de la munici-
palité la création a'une école gratuite, qui fut bientôt en
mesure de fournir des orchestres pour les solennités na-
tionales et des corps de musiciens pour les armées de la
Républiaue. La Convention, par décret du 18 brumairt
an n, érigea cette école en Institut national de musiflue^
et, le 16 thermidor an m, en Conservatoire de musique»
L'étaJbllssement, placé dans le local des Menus Plaisirs,
fut composé de 115 artistes, chargés de donner gratuite*
ment rinstruction à 600 élèves des deux sexes (6 psr dé-
partement) ; un crédit de 240,000 fr. fut ouvert pour les
dépenses, et on vota l'établissement d'une bibliothèque
musicale, composée de livres et de partitions, ainsi que
la création d'une collection d'instruments. Si l'on ne se
nq>pelait que le but principal du Conservatoire était
alors le recrutement des corps de musique militaire, on
trouverait étrange la composition du personnel ensei-
gnant. Il comprenait, en effet : pour le solfège, 14 pro-
fesseurs; dannette, 19; flûte, 6; hautbois, 4; oasson, 12;
cor, 12 ; trompette, 2 ; trombone, 1 ; serpent, 4 ; buccin, 1;
timballes, 1 ; violon, 8; basse, 4; contre-basse, 1 ; clave-
cin, 6 ; oreue, 1 ; vocalisation, 3 ; chant simple, 4 ; chant
déclamé, 2; accompagnement, 3 ; composition. 7. — En
1802, le crédit du Conservatoire fut réduit à 100,000 fr.,
le nombre des élèves à 300 (admis après examens) , et
celui des professeurs à 35, non compris le directeur et
3 inspecteurs de l'enseignement. En 1805, on créa ua
pensionnat pour 12 hommes et 6 femmes. En 1808, l'or-
ganisation du Conservatoire fut encore modifiée; on y
créa des cours de déclamation comique et tragique ; on
porta le nombre des élèves à 400, dont 36 pensionnaires;
outre son ancienne destination, l'établissement dut pré-
psrer des sujets de tous les genres pour les principaux
thé&tres ; de nombreux concerts furent donnés pour for-
mer d'habiles exécutants et des chefs d'orchestre; les
professeurs composèrent des méthodes de toute sorte. La
Restauration, donnant au Conservatoire le nom d'École
royale de musique, la plaça sous la direction de l'inten-
dant des menus plaisirs, diminua son budget, congédia
Sarrette, et supprima les concerts. Tout dépérissait, même
sous l'administration de Peme , lorsque Chérubin! fut
nommé directeur en 1822. Il rendit aux études leur an-
cien éclat. La Soàété des concerts fut formée en 1828,
pour exécuter & grand orchestre, dans plusieurs réunions
annuelles, les productions les plus remarquables des di-
verses écoles. En 1830, le Conservatoire reprit son nom.
M. Auber a remplacé Cherubini en 1842. Sous son admi-
nistration, on a institué une quatrième classe de décla-
mation dramatique, et une classe d'histoire et de littérar-
ture au point de vue de l'art et du théâtre. Aujourd'hui,
le pensionnat n'existe plus que pour 10 hommes, sdmis
par voie de concours, et destinés aux études lyriques.
Plus de 600 élèves viennent recevoir gratuitement l'édu-
cation musicale et dramatique; on les admet depuis
19 ans Jusqu'à 22. L'enseignement est organisé de la ma-
nière suivante i classe des chœurs, 2 professeurs ; sol-
fège, 14; classe d'ensemble, 1 ; chant. 7; étude de rôles,
2 ; opéra sérieux, 2 ; opéra-comique, 1 ; déclamation spé-
ciale, 3 ; maintien théâtral, 1 ; lecture à hante voix, 1 ;
harmonie et accompagnement, 4 ; contre-point et fUçie,
4; composition, 2; orgne, 1 ; piano, 4; étude du clavier,
3; harpe, 1; violon, 4; violoncelle. 2; contre-basse, 1;
flûte, 2 ; hautbois, 1 ; clarinette, 2 ; basson, 1 ; cor, 1 ; cor
à pistons, 1 ; trompette, 1 ; trombone, 1. Le Conserva-
toire est particolimment renommé pour son école in-
strumentale, la première de l'Europe. Sa bibliothèque
contient environ 12,000 partitions, 40,000 parties sép»*
rées d'orchestre, une quantité considérable de chœurs,
messes, motels, oratorios, méthodes, etc., 6,000 pièces de
thé&tre, plus de 100 volumes de plain-chant. Plusieun
écoles de musioue des départements ont été érigées ea
succursales du Conservatoire de Paris: ce sont celles de
LUle en 1826, de Toulouse en 1840, de Marseille et de
MeU en 1841, de Dijon en 1845, de Nantes en 1846.
V. Lassabathie, Histoire du Conservatoire de musique
et de déclamation, Paris, 1850.
D'autres pays ont pris exemple sur la France. Des Con-
servatoires ont été fondés à Prague en 1810. à Vienne et
àVarsovie en 1821, à Madrid en 1830, à Berlin, à Leipzig,
à Cologne, à Munich, à Londres, à Bruxellet, etc. B.
MUSiQDi (Gravure de la). V. Csayssb,
MTR
1290
MYS
MCSIVUH (Opus). F. MosaIqcb.
MUSOLMÀNË (Architecture). V. Arabe.
MusoufATiB (Reli^on). V, Coran, Diotiormaiire de BiO"
graphie et (TBistotre,
MUTATION (du latin mtUare, changer), en termes de
Droit, transmission des biens d*une personne à une autre,
par Tente, échange, donation ou succession. A chaque
mutation par donation ou par succession, le Trésor pu-
blic perçoit sur le nouveau propriétaire un droit quirarie
selon le degré de parenté. Les lois des 28 avril 1816 et
21 avril 1832, qui réglaient le tarif, ont été considérable-
ment modifiées par celle du 18 mai 1850. Pour les trans-
missions entre vifs de meubles à titre onéreux , le droit
tarie de 0 fr. 50 à 10 fr. pour lOO fr.; pour les transmis-
sions entre vifs d*immeubles à titre onéreux, de 1 fr. 50
à 10 fr. pour 100 fr.; pour les transmissions entre vifs à
titre gratuit en ligne directe, de 1 à 4 p. 100; pour les
transmissions entre vifs, à titre gratuit, entre époux, de
0 fr. 75 à 4 fr. 50 p. 100 ; pour les transmissions entre
▼ifs & titre gratuit en ligne collatérale, de 2 à 8 p. 100;
poor les transmissions entre vifs à titre gratuit entre
personnes non parentes, de 4 à 9 p. 100 ; pour les muta-
tions par décès en ligne directe, meubles, 0 fr. 25, im-
meubles, 1 fr. p. 100 ; pour les mutations par décès entre
époux, meubles, 1 fr. 50, Immeubles, 3 fr. p. 100 fr.;
pour les mutaUons par décès en ligne collatérale, de 3 à
0 p. 100; pour les mutations par décès entre personnes
non parentes, meubles, 6, immeubles, 9 p. 100. Les droits
de mutation sont perçus par Tadministration de Tenre-
g'strement et des domaines. Si la déclaration n'a pas été
ite dans les délais prescrits (6 mois pour la France,
8 mois pour les autres pays de TEurope, 1 an pour l'Amé-
rique, z ans pour TAfhque, et autant pour TAsie), on est
tenu de payer droit et demir-droit. Les omissions et les
évaluations insuffisantes donnent lieu à un double droit
sur les objets omis ou non suffisamment estimés.
MOTATiON, terme de Musique. V. Moarce.
MUTATION (Jeux do), nom donné à une série des Jeux à
bouche de Torgue. Ces Jeux , formés de plusieun ran-
gées de tu^ux réunis ensemble et n'ayant qu'un seul et
même registre, sonnent à la quinte ou à fa tierce des
Jeux d'octave ou de fonds. Les Jeux de mutation sont : le
gros nasard, la grosse tierce, le nasard, la qttarte de
nasard, la tierce, le larigot, la fourniture, la cymbale ,
et le cornet. F. C.
MUTE (du bas latin muto), vieux mot qui signifiait
beffroi, tourelle, et cloche,
MUTILATION , peine qui a été fréquemment em-
ployée autrefois. Elle était comprise dans la peine du
talion, en usage chez les Hébreux. Dans l'ancienne
Egypte, on coupait le nez à la femme adultère ; on lui
arrachait les yeux chez les Grecs, qui coupaient encore
la langue aux traîtres et auxfiauz-monnaveura. Au moyen
âge. la perte des yeux fut souvent inflieée. Malo^ les
prohibitions des conciles de Mérida (606), de Tolède
(675), de Francfort-sur^le-Mein (794), la mutilation se
maintint dans les lois. L'ablation du poing a subsisté
dans notre Code pénal jusqu'en 1832. La mutilation
d'un individu par un autre est aujourd'hui punie comme
blessure grave {Code pénal, art. 303-311). La mutilation
pratiquée volontairement pour échapper au service mili-
taire est punie d'emprisonnement (Loi du 21 mars 1832),
et, à l'expiration de la peine, le mutilé fait son temps de
service dms une compagnie de discipline.
MUTULE (du latin mutulus, pierre en sdllie), sorte
de modillon carré, propre à la corniche de l'ordre ionique,
et qui représente au-dessous du larmier l'extrémité des
chevrons. Il répond perpendiculairement au trigljrphe.
Les Romains ont quelquefois employé les mutnles dans
Tordre composite.
MYCÊNES (Ruines de). V, Gregqub (Architecture).
MYCTÉRISME, nom donné par quelques rhéteun &
llronie insultante, parce qu'on lève le nez (en grec myc-
ter) pour regarder de haut en bas et avec dédain ceux
qu'on veut humilier.
MYRIOBIBLON, mot formé de deux mots grecs signi-
fiant dix mille volumes, et qui sert de titre à l'ouvrage
de Photius plus connu sous celui de Bibliothèque. Cet
ouvrage ne passe cependant en revue que 279 écrits de
Tantlquité.
MYRIORAMA (du grec mwrios, dix mille, et orama,
vue) , sorte de tu>leau inventé à Paris par Brès, perfec-
tionné à Londres par Clark, et consistant en pièces mo-
biles au moyen desquelles on peut représenter une foule
de vues, en combinant plusieurs fhigments exécutés sur
des cartons séparés.
MYSTÈRE (du grec mustêrion, chose cachée), nom
Sue l'on donne, dans le christianisme, à tout ce que les
dèles doivent accepter comme articles de foi, à tout ce
que la raison humame ne peut comprendre. La Trinité,
rlncamation, la Rédemption, la Prince réelle de J.-d
dans l'Eucharistie, sont des mystères.
MTSTfeaBS, institution sacrée des Grecs et des Romaiiu,
ayant pour objet Tinitiation à la connaissance de oer*
tsÀnes doctrines religieuses et la célébration de certains
rites. Les Mystères n'étaient pas, comme beaucoup d'an-
teura l'ont pensé, des espèces d'affiliations ou sociétés
secrètes ; car ils avaient, du moins pour la plupart, an
caractère en quelque sorte public , chacun étant libre de
s'y faire admettre, et les prêtres ne constituaient pas
une caste à part, dépositaire d'une science inaccessible
au vulgaire. Seulement, les principes qu'on enseigna dans
les Mystères étaient en progrès sur les croyances com-
munes, et répondaient aux nouveaux besoins intellec-
tuels et moraux que la civilisation développait. Quelques
prêtres ont pu entretenir et propager, chez des hommes
Ignorants ou crédules, certaines supentitions condam-
nables, certaines pratiques ridicules : mais, en général,
les Mystères ont eu quelque chose d'élevé et de saint Ds
consistaient en purifications, expiations, sacrifices, pro-
cessions, chants et danses, comme dans les cultes ordi-
naires; mais les rites prenaient le caractère orgiastiqtte,
c-à-d. le caractère de l'extase, et même de l'agitation
violente et furieuse. Cest par là que les abus se sont in-
troduits; les rites orgiastiques furent la dégénérescence
du sentiment que les Anciens appelaient enthousiasme,
et qu'ils regardaient comme la source des connaissances
les plus pures et des actes les plus nobles. La doctrine
prit encore dans les Mystères un caractère symbolique :
les Dieux ne s'y offrirent plus comme des personnages
humains, aux formes nettes et précises; leur naissance ,
leure passions, leura aventures et leur mort ne furent
plus qu'une suite d'allégories dans lesquelles se dévelop-
pait la doctrine. Les images des Dieux et leurs attributs
devinrent aussi des symboles; les fêtes furent des repré-
sentations mimiques de leur histoire. Le silence qu'on
devait garder sur les Mystères n'avait pas le caractère
qu'on lui prête d'ordinaire : il tenait au respect dont les
choses saintes devaient être environnées; les principes
augustes eussent été profanés en les livrant aux appré-
ciations de la vie commune ; si on ne les divulguait pas,
ce n'était point pour en dérober la connaissance au vul-
gaire, mais afin de leur donner du prestige. V. Ouwsp
roff. Essai sur les Mystères d' Eleusis ^ 3* édit. , Paris,
1816; Sainte-Croix, Recherches historiques et critiques
sur les Mystères du Paganisme, Paris, 1817, 2 vol.
in-8<*; Lobeck, Aglaophâmus, Kœnigsberg, 1829, 2 vo-
lumes in-8*.
MTSTÀRBS, pièces de théâtre représentées pendant le
moyen ftge, et dont les sujets étaient empruntés à FÂn-
cien et au Nouveau Testament, ou à la ne des Saints.
Le christianisme, qui voulait s'emparer complètement
des âmes, devait donner satisfaction à tous leurs be-
soins intellectuels : or, la passion pour les Jeux scéni-
ques avait été jusqu'à la fin l'une des plus rives do
monde païen. Le clergé n'essaya pas de la détruire, mais
lui donna une direction nouvelle. On mit en drames les
actes de Jésus-Christ et des première héros du christiar
nisme; les traditions des tragédies grecques et romaines,
conservées dans les monastères, fournirent des cadres
pour ces première essais. Dès le x* siècle, Hroswitba,
religieuse à Gandersheim, composa six tragédies, qae
jouèrent ses sœun en reli^on. De pareilles oeuvres,
écrites en latin , pour charmer les loisire du cloître,
n'étaient faites que pour les clercs. Les églises servirent
à représenter aux yeux des fidèles les mystères célébréf
dans les principales fêtes : à N06I, la crèche se peupla
des personnages qui avaient figuré à Bethléem, y com-
pris le bœuf et l'≠ & l'Epiphanie, on montra les roit
Mages et les bereere; à Pâques, les trois Maries, etc.
Ce ne furent d'abord que des ^gures muettes, en cbe,
en pl&tre ou en bois; peu à peu la scène s'anima: des
prêtres ou des fidèles, prenant le rôle des personna^
traduisirent leure sentiments et leura pensées à l'aide
des gestes et du langage vulgaire. Mais ces Jeux bc^
ques, saints par l'origine, moraux par le but, dégénoè-
rent assez promptement : la religion ne pouvant se rendre
solidaire de toutes les inventions du siècle, le dnme
dut sortir de l'église. Toutefois il s'Installa tout auprès,
sur le parvis même des cathédrales, et conticnft d'être
un complément des cérémonies. Le lien qnl avait ratta-
ché au culte la représentation des Vystères m tsi ^
MÏS
1291
MYT
rampa : il eiiste, par exemple, à U BibUothèqoe impô-
riale de Paria, un maouacrit des premitees aimées du
iv* dède, contenant nne cinquantaine de drames en
llMmnear de la Vieige; ila sont presone tons précédés
de sermons en proee « qoi leur senrent de prologue. Très-
souvent aussi les M^tèree se terminaient par un Te
Dmm, clianté en chœur par les assistants. Jusqu'à la
Aq du xnr* siôcie, toutes les classes, prêtres, clercs, étu-
diants, ouvriers, avaient concouru aux représentations :
en i^, une troupe régulière d*acteurs se constitua à
Paris, et se mit à exploiter un théfttre au bourg de Saint
Maur; elle sMntitula Confrérie de la Pcution, du nom
du plus important des Mystères, et, après avoir été au<
torisée par Charles VI en 1402, vint 8*établir à l'hôpital
de la Trinité, près de la porte S^-Denis, où elle prospéra
pendant près d'un demi-siècle. Vers 1539, on lui enleva
soD local, et elle dut se transporter à Thôtel de Flandre.
Une société plus civilisée comprenant mieux le ridicule
de représentations grossières et souvent peu décentes,
le Pariement commença par défendre aux Confrères d'ou-
vrir leur théfttre à certaines fètoa de l'année. Puis d'autres
acteurs, d'un caractère profane , les Enfants sanê souci
et les Clercs de la Basoche^ ftrent une rude concurrence
aux Confrères de la Passion, dont le répertoire s'altérait
d'anieurs par l'invasion des détails malins ou burlesques.
Boîleau pouvait dire, avec raison {Art poitiqpey ch. ul),
de ces pièces :
D0 lA fol tf*iiii ehréti«n les myiièrea terribles
D'ornements égi^jéê ne eont pea iosoeptiblei.
Lea Confrères de la Passion existaient encore dans les
premières années du règne de Louis xni; ils vendirent
slors leur privilège aux comédiens de l'hôtel de Bour-
gogne, et bientôt les chefs-d'œuvre de notre théfttre clas-
âque firent oublier les Mystères. Ces représentations
sacrées devaient finir comme elles avaient commencé :
on a vu, en eflët. Jusqu'à nos jours, dans le fond de
quelques prorinces, des comédiens ambulants donner en
spectacle les scènes de la Passion (K. HAaiomcrrrES), et
même, dans un certain nombre d'églises , on figure en-
core, aox fêtes de Noël, la crèche de Bethléem.
Les Mystères ont été fort nombreux. La Bibliothèoue
impériale de Paris possède un Mystère des Vierges folles
et des Vierges sages, du xi* siècle, provenant de l'abbaye
de S^ Martial de Limoges : il est écrit en trois idiomes ;
Jésus parie en latin, les Vierges sages en français, et les
l^eigea folles en provençal. M. de Monmerqué a publié
10 Mystères tirés d'un manuscrit de S^Benolt-sor-Loire,
et dont 4 sont du xi* siècle. Au xu* siècle, on peut citer
deux Mystères sur la Bédemptùm , l'un de Guillaume
Hennann, poète anglo-normand, l'autre d'Etienne Lans-
ton, archevêque de Cantorbéry, et un Mystère sur la
Résurrection, en vers anglo-normands, publié en 1834
ST M. Jubinal. Un Mystère sur la venue de V Antéchrist
l Joué devant l'empereur Frédéric Bariberousse. Parmi
les auteurs de Mystères dont l'histoire a conservé les
n<Mns, on remarque Jean Bodel, d'Arras, dont on a un Jeu
Je S> Nicolas, écrit vers 1260; Rutebeof, auteur pr^
soffié d'un Mùraele de ThéopkUe, qui ftit très-populaire;
André de Langue, Jean du Prier, et Jean Michel, médecin
d'Angers, du xv* siècle; Pierre Gringoire, contemporain
de Louis XII ; Barthélennr Aneau, qui fit Jouer un mystère
de la Nativité en 1539. Le répertoire des Confrères de la
Paaabn comprenait, entre autres ouvrages, le Mystère
de S^ Martin^ le Mystère de S^ Crépin, le Mystère de
^ Barbe, le Mystère des Actes des Apôtres. Mais au-
cun sujet ne fut plus fréquemment traité que celui de la
Passiom, trilogie consacrée à la Natirité, à la Passion, et à
la Résorrection. Celui que possède la Bibliothèque impé-
riale de Paris dans un manuscrit de 1457, et qui fut
composé avant 145S, est d'Amoul Gresban. Il en eriste
on antre à la bibliothèque de Valendennes; il est divisé
en SO Journées, et compte près de 40,000 vers. Un ano-
nyme et Jean Michel l'ont encore amplifié. Jusqu'à faire
07,000 vers. Les Mystères n'étaient oue des verâons dia-
kguées de l'Écriture Sainte ou des légendes; on y suivait
le modèle chapitre par chapitre, avec nne servilité qui
eadot tonte espèce d'invention, de plan et d'arrangement:
de là dee changements de scène continuels , et l'extrême
JoDgnenr de ces drames. L'exactitude de la traduction
D'empéchaH pas mille anachronismes de mœurs, de cos*
tome et de langagOt qui attestent l'ignorance et \& sim-
plicité des auteurs et des acteurs. Les moindres défauts
du style étaient la platitude et la prolixité. On ne peut
doftc guère trouver qu'un intérêt de curiosité à parcourir
ces premiers monuments de notre littérature dramatknie.
V. Onésime Leroy, Êtitdes sur les Mystères, Paris, 1837,
in-8°; Berriat-Saint-Prix, Recherches sur les anciens
Mystères, Paris, 1823, in-8«; Victor Foumel, Curiosités
théâtrales, anciemkes et modernes, Paris, 1859, in-16. B.
MYSnaSME. Le caractère le plus général du mysti-
cisme est la prétention de s'élever Jusqu'à Dieu, et de le
voir en quelque sorte face à face, sans le secours de la
raison. Les causes oui lui donnent naissance sont nom-
breuses; de là différentes sortes de mysticisme; maif
tous, quelle que soit leur ori^e, ont un principe oom-*
mun, la faiblesse et l'impuissance de l'homme. S'ih
peuvent être distingués, c'est uniquement par les consé-
quences qu'ils tirent de leur principe fondamental. Les
uns, admettant l'incapacité de la raison pour saisir Ut vé-
rité, et l'impuissance de la volonté pour aimer et prati-
quer le bien, ont un caractère essentiellement moral on
religieux, et aboutissent à une religion positive ; les au-
tres, plus philosophiques , après avoir épuisé toutes les
forces de la raison pour résoudre le problème de la con-
naissance, se réfugient, comme par désespoir, dans la
doctrine de Tunion avec Dieu par l'extase. Le christia-
nisme fournit les plus frappants exemples de la première
sorte de mysticisme ; on le trouve exposé dans les livres
du Pseudo-Denvs l'Aréopagite, Hiérarchie céleste, les
Noms divins , la Théologie mystiqw , où se montre le
chrétien et le philosophe alexandrin ; dans les écrits de
Hugues de S^Vlctor, et surtout de Richard, son disciple,
principalement dans le Beniamin minor, ae gratta oon^
templationis , occasions accepta ab arca Moysis; dans
quelques ouvrages de S^ Bonaventure : Rediuctio artium
ad theologiam, IHnerarium mentis ad Deum; dans ceux
des mystiques allemands du xiv* dècle; dains ceux de
Joachim , abbé de Flores, au xn" : dans Vlmitatian de
Jésus-Christ; chez Gerson, Thedogia mystica; ches
l'Anglais J. Pordage, Metaphysica vera et aivina, 7%0O-
logia mystica ; chez les mystiques espagnols, à la tète
desquels se placent S'* Thérèse, J. de la Croix, J. de
Jesus-Maria ; chez Jacob Boahme ; dans le QuHtisme de
M"* Guyon, et une foule d'écrits où le nmtidsme est
Iklus ou moins prononcé, tels que chez Fénelon, Ma-
ebranche, etc. La seconde sorte de mvsticisme trouve sa
réalisation la plus complète dans l'école d'Alexandrie. Le
procédé est scientifique, la marche est graduelle , et ce
n'est qu'après avoir passé par Vopinion et la dia^ectiq^e,
que l'àme s'élève à Dieu sur les ailes de l'extase; c'est
ce qu'on voit chez Plotin, Porphyre, Jamblique et leurs
sucœsseun Jusqu'à Proclus, mais à des degrés diffé-
rents. Quelques mystiques mêlèrent la science au senti-
ment religieux ; tels furent Marsile Fidn et les Pic de La
Ilirandole, qui se rattachent à l'école d'Alexandrie;
agrippa, R. Fludd, Jérùme Cardan, Van Helmont et son
fils Mercurius Van Helmont, Svvedenborg, Martine»*
Pasqualis, et Saint-Martin. R.
MYSTIQUE (Sens), en termes de Théologie, expiiez
tion allégorique d'un événement, d'un personnage ou d'ua
texte de l'Écriture sainte.
HTsnQDB (Testament). F. Tbstahknt.
MYTHB (du grec muthos, fable ), nom qu'on applique
anx obscures traditions concernant les dieux et les héroa
du paganisme et provenant d'époques antéhistoriques^
et, par suite, à tous les récits allégoriques et symbo-
liques.
MYTHIAMBES, c-à-d. fables UmUiupkes, titre des far
blés de Babrius, écrites en vers scazons.
MYTHOGRAPHES, écrivains qui ont exposé et expli-
qué les traditions poétiques des anciens âges. On les
nomme aussi Mythologues, Chez les Anciens, le livre de
Comutus Sur Vessence des dieux et les AUégories home'
riques d'Héraclide on Heraclite ramènent aux forces de
la nature l'essence de tous les dieux; l'ouvrage anonyme
intitulé Ubri tncredibilium donne aux mythes une inter-
prétation historique ou pragmatique, tandis que l'oor
vrage De Ulicns errorihus cherche à y trouver un sens
moral. Au nombre des ouvrages de mythographle an-
cienne, on peut dter encore la Bibliothèque d'ApoUo-
dore , les Narrations de Conon , la Nouvelle Histoire de
Ptolémée. dont il n'existe plus que des fragments dans
Photius, les Narrationes amatoria de Parthénius , les
Transformations d'Antoninus Liberalis, l'ouvrage de Psir
léphate De mcredibilibus, celui de Pedesianus De Her»
culis laborihus, celui de Nicétas intitulé Deorum cogno-
mina , les Fables d'Hyrin, les Mythologue de Fulgentins
Lactantius, le traité de Julius Firmicus De erroribus
I profanarum reiigionum, celui d'Albricus De deorum
I tmaormi^iM. Une collection des mythographes grecs a été
MYT
1292
MYT
publiée par Weftermann , Brunswick, i 843; les mytho-
graphes latins ont été publiés par Munck^ (Amst.,
1681. 3 TolA et par Van Slaveren (ibid., 4742 , 2 vol.
in-i2). — dbez les Modernes, Samuel Bochart, Tabbé
Banier, J. Brjrant , Hollmann , Bœttiger, ont donné de
tous les mythes une explication historique ; Bacon (De
Sapiêntià vêterum) et Noél Gonti IMythologiœ)^ des ex-
plications philosopniques, morales ou politiques. 6.-J.
Vossius et Huet ont prétendu en tirer un enseignement
théologique, dérivé du mosalsme ; J. Tollius est allé ]us-
?a*àn^porter à la chimie les fables de l'antiquité. Vttbbé
luche, Dupuis, Volnev, Schweigger, crurent y recon-
naître l'histoire de la Nature et surtout celle des phéno-
mènes astronomigaes. Enfin, Hegme, Voss, Ph. But^
mann, Welcker, Ottfried MOller et Fr. Greozer se sont
eÊTorcés de prouver que, dans toutes les religions, loi
mythes ne sont autre chose que des symboles.
MYTHOLOGIE (du grec muthos, fable, et logos, dis-
cours), mot qui , après avoir signifié simplement Thit-
toire fabuleuse des dieux et des héros de l'antiquité
païenne, a été étendu à la science des traditions reli-
gieuses et poétiques des diflérents peuples sur les dieux
et sur leurs rapports avec les hommes. L'ouvrage le plus
complet sur cette matière est la Biographie mytholo-
gique de V. Parisot, Paris, 1832-33, 3 vol. in-8», faisant
suite à la BiograpfUe universelle de Michaud.
N
N
NAI
N, 14* lettre et 11* consonne de notre alphabet. Ce ca-
ractère, qui existe ou a des équivalents dans presque tous
les alphabets tant anciens que modernes, i>ossède plu-
sieurs valeurs en français. Dans son emploi normal, il
est une consonne linguale et palato-nasale : tel est son
caractère quand on prononce nacelle, nébuletix, novice,
numéro, une, anis, énoncer, onéreux, union, une, etc. De
plus, Vn sert de signe auxiliaire dans la représentation
de certaines valeurs phonétiques nasales qui n'ont pas en
propre de signe graphiaue simple. Ainsi, réuni au g, il
forme une gutturo-nasale, conune dans bagne, baigner,
seigneur, ligne, signal :ceUe articulation existe aussi en
italien (dans ogni, signor), en anglais {ring, bague), en
allemand {lang, long), en espagnol, où elle est indiquée
par un signe particulier nommé tilde, ft (MarettUm,
sefiora), et en portugais, où elle s'exprime par là con-
sonne double nh. Un usage capricieux a fait supprimer
quelquefois le g dans la prononciation : Regnardae pro-
nonce Renard. Notre lettre n est encore un signe de na-
salité des voyelles, dans les syllabes an, en, in, on, un:
c'est un genre d'articulation qu'on trouve éj^ement dans
d'autres langues, mais elle y est souvent traduite par des
caractères différents. Ceux de nos ad|]ectifs dont le mas-
culin se termine par une voyelle nasale, prennent au fé-
minin l'n articulée: mustâman, musulmane; ionien,
ionienne; /In. fine; bon, bonne; aucun, aucune» Dans la
terminaison ae la 3* personne du pluriel des verbes, Vn
est muette, ainsi que le t qui la suit: Us viennent. Us
aimaient, qu'Us rendissent, qu'Us fussent, — Chez les
Grecs, l'articulation n placée dans le corps d'un mot de-
Tant une gutturale parait avoir été représentée par un y
( gamma ) : du grec aggelos et egklinô les Latins ont fait
angeliÂS et incline, d'où viennent nos mots ange et incliner.
Par contre, les Grecs changèrent l'n médiale des Latins
1 en une autre lettre ou la supprimèrent, faisant Mallios
, de Manlius , et Ortèsios d'Èortensius, Les Latins sup-
' primaient souvent l'n dans le corps des mots: ainsi,
. Gicéron a écrit foresia pour forensia, et Plante st<is pour
ftans, n en a été de même dans nos anciens manuscrits
et dans nos vieilles éditions, où l'on substituait à l'n un
> petit trait horizontal placé au-dessus de la voyelle qu'elle
• accompagnait dans la prononciation. L'n de cotalns pri-
mitifs latins a également disparu de leurs dérivés mo-
dernes : ainsi, le latin insula est devenu l'italien isola,
et le français isle, Ue,
La lettre N a été employée comme si^e d'abréviation,
pour Nonius, Numerius, nattu, nobilts, numerus, nu-
men, nonœ, etc. Chez les Romains, NL sur un bulletin de
TOte équivalait à non liquet , et indiquait que la ques-
tion sur laquelle on votait ne semblait pas suffisamment
éclaircie. Sur un acte authentique, NP voulait dire nota-
Hus publicus. Au moyen ftge, Tusage s'établit de nuoquer
d'une N sur les actes la place d^^n nom propre qu'on
ignorait ou ou'on ne voulait pas faire connaître; il âdste
encore dans les livres d'église, là où un nom propre doit
Hre placé dans la lecture : selon les uns, lit est alors
'initiale de nomen, et, selon d'autres, un monogramme
léformé, tenant lien des pronoms ille, Ula. Sur les an-
tennes monnaies françaises, N est la marque de fabrique
le Montpellier. En Géographie, N. se met pour Nord,
f9.*E. pour nori^st, N.-O. pour nord-ouest. Oc emploie
encore N. B. pour nota bene, N* pour numéro, N/C Dour
notre compte, N.-D. pour Notre-Dame, N. S. pour Notre
Seigneur. — Signe numéral, le nu (N, v) des Grecs
valait 50, et ,v, 50,000. Chez les Romains, N signifiait
90 selon les uns, 000 selon les autres, et , surmontée
d'un trait horizontal (n), 90,000 ou 900,000.
NABAB. V. ce mot dans notre Dictiomusire de BiogrO'
phie et d'Histoire.
NABATHÉEN (Idiome). Les Nabathéens, dont les livres
bibliques ne font pas mention, et que Diodore dç Sidle
et Strabon placent dans l'Arabie Pétrée, paraissent être
venus s'établir en ce pays vers le temps où Nabuchodo-
nosor II détruisit le royaume de Juda : ce n'est point,
ainsi que l'ont pensé Léon de Laborde et linant (Voyagt
de V Arabie Pétrée, Paris, 1830, in-fol.) , un mélange des
anciens Amalécites, Iduméens, Moabites et Madianites,
ni, comme le croyait S^ Jérôme, un peuple arabe, issu
d'bmafil, mais un peuple ori^^naire de la Babylonie.
C'est ce qu'affirment Bfasoudi et les autres écrivains
arabes. L'idiome parlé par les Nabathéens n'était autre
chose que le chaldéen ou araméen oriental. Il a eu la
littérature ; mais les monuments en sont perdus, à l'ex-
ception d'un traité connu dans l'Orient sons le nom
d'Agriculture nabathéenne, et composé par un certain
Kouthayi : encore ne le connaissons-nous que par la ver-
sion arabe d'Abou-Bdu^Amin , sumonuné lon-WahS'
ehvah. V. Etienne Quatremère, Mémoire sur les Naba-
théens, dans le JounMl asicUique de 1835.
NABLA, NABLON, NABLUM ou NEBEL, instrument
de musique à cordes des anciens Orientaux. Il avait,
selon Josèphe, 12 cordes (ce nombre a varié), et était
pincé avec les doigts. On n'est pas d'accord sur sa forme:
comme Nebel a le sens d'outre et d'amphore, quelques-
uns ont cru que l'instrument oui portait ce nom avait la
forme du vase où l'on conservut le vin ; selon d'autres, il
ressemblait à un delta renversé, sur un coffre rond en
bois couvert de cuir; d'autres ont voulu y voir soit un
luth , soit une lyre. B.
NACAIRES ou NAQUAIBBS (de l'arabe naqârah, tim-
bale), instrument de musique du moyen lige, qu'on s
pris à tort pour des trompettes. C'étaient noa timbalas.
NACELLE ( du latin naoicella, pour navicula), petit
bateau n'ayant ni mâts ni voiles. — Par extension, on a
donné le même nom au panier suspendu au-dessous d'an
ballon et où se placent les aéronautes.
NACELLE, nom donné quelquefois, en Architecture, soi
moulures creuses. F. Mouldrb.
NAFA, instrument de musioue en usage dans les Hd
Tonga (Océanie). Cest une espèce de tamnoor, fait^d'ui
bloc de bois long d'un mètre environ, et creusé daas les
deux tiers de sa longueur.
NAHUALT. V. Mexique (Langues du).
NAÏADES (du grec naéin, couler), nymphes des rivière •
et des sources. La sculpture antique les représente soai
la forme de Jeunes filles à demi vêtues : toutefbto, sur lei
monuments d'Athènes, elles sont complètement habillées
Souvent elles portent de posses coquilles devant elles,
ou accompagnent le dieu Pan. On en voit aor les mon-
naies de Syracuse*
NAIN JAUNE, Jeu de cartes. On place, au milieu de
la table de Jeu, un carton sur lequel est représenté le
NAI
1293
NAN
sept de carreaa tenu par un nain jaune, et, alentour, la
dame de pique, le roi de cœur, le dix de carreau et le va-
tet de trèfle, (hi se sert d*un Jeu complet , et il peut y
avoir de 3 à 8 Joueurs: à trois, chacun reçoit 15 cartes;
à quatre, 12 ; à dnq, 9; & six, 8 ; à sept , 7 ; à huit, 6.
Chaaae Joueur met 5 Jetons sur le nain Jaune, 4 sur le
roi de cosur, 3 sur la dame de pique, 2 sur le valet de
trèfle; 1 sur le dix de carreau. Le premier à la droite de
celui qui donne les cartes commence à Jouer, en suivant
Tordre ascendant des cartes, Tas, le deux, le trois, et
ainsi de suite, sans distinction des couleurs; il 8*arrète
dès qui! y a une lacune dans son ieu ; le second Joueur
continue, et les autres de même. Si la carte qui manque
à celui qui ioue est restée au talon , il poursuit. Quand un
loueur a placé sa dernière carte, ceux qui restent abat-
tent , et payent un Jeton par carte ou par point, selon les
conventions. A mesure que quelqu'un peut Jouer une
carte semblable à l'une de celles du tableau, il prend les
fêtons que porte celle-d ; si Ton n*a pu Jouer quelque
carte du tableau, on doit doubler la somme dont elle est
chargée.
NAINS. Ce fat une mode, parmi les rois, les princes
et les riches de Fantiquité, d'entretenir, pour leur amu-
sement , des nains plus ou moins diiîormes, et elle a tou-
jours subsisté chez les Orientaux. L'empereur Domitien
fit combattre des nains dans TamphithéAtre contre des
femmes. Au moyen àse, on leur a prêté un rôle impor^
tant duis le domaine du merveilleux : ils étaient les gar-
diens des trésors cachés, et accomplissaient toutes sortes
de prodiges dans les épopées cheviueresques, où des êtres
somaturels prenaient leurs formes monstrueuses. Dans
la vie réelle, les nains servirent de pages aux ch&telaines
et de messagers aux chevaliers. La manie d'avoir des
nains c'est perpétuée dans les cours Jusqu'à des temps
asses rapprocha de nous : il y en eut auprès de Charles-
Qoiot et de François I*'; celui qu'on appelait Grand
Jean , par antiphrase, se faisait porter dans une cage,
comme un perroquet. Ce fut Louis XIV qui supprima la
charge de mitn du rot. Un nain anglais, Jeffery Hudson,
fat présenté dans un p&té, en 1627, par la duchesse de
Buckingham, à la reine Henriette, femme de Charles I*'.
Stanislas Leczinski eut à Nan^ un nain appelé Nicolas
Ferry, mais plus célèbre sous le nom de Bébé. Depuis
Sill n'y a plus de nains royaux, les nains ne sont qu'un
Jet de curiosité : on a vu , de nos Jours, Tom Pouc$^
Tnmp, le prince et la princesse Colibri, B.
NAISSANCE. Les déclarations de naissance, dit le Code
Naipolion (art. 55 et suiv.), doivent être faites dans les
trois Jours par le père, ou, à son défaut , par le médecin
on la sa^femme, et par deux témoins, à l'officier de
l'état civil du lieu, lequel en dresse acte immédiatement.
Si la mère n'accouche pas à son domicile, la personne
chez qui la naissance a eu lieu doit faire la déclaration,
ftaaé le délai légal , la déclaration ne peut plus être reçue
qu'en vertu d'un lugement du tribunal civil. Le défaut de
déclaration dans le délai est puni d'un emprisonnement
de 6 Jours à 6 mois, et d'une amende de 16 fr. à 300 te.
Toute personne qui trouve un nouveau-né est tenue de
le remettre à romcier de l'état civil, ainsi que les vête-
ments et antres effets trouvés avec l'en faut, sous peine
des mêmes condamnations. L'acte de naissance d'un en-
fimt à la mer doit être dressé dans les 24 heures, et à l'ar-
mée dans les 10 Jours. Il est dressé par l'officier d'admi-
nistration de la marine sur les bâtiments de l'État, par
le capitaine, maître ou patron sur les navires de com-
merce, par un quartier-maître ou un capitaine dans les
troupes; plus tard on en fait une expédition à l'état civil
dn domicile des parents. — En France, on tire 101 coups
de canon pour la naissance d'un prince, 21 pour une
princesse.
SAissAKCB , en termes de Construction , point où com-
mence une voûte ou un arc. Lorsque plusieurs voûtes
doivent se contre-bnter, il faut avoir soin de placer leurs
oaissances au même niveau. Les voûtes doivent porter
une plus grande épaisseur à la naissance qu'à la clef.
NAÏVETÉ , qualité du style voisine du naturel , mais
qui en difl^ en ce qu'elle n'admet ni réflexion ni étude.
La naïveté naît du sujet même : c'est l'expression spon-
tanée que le sentiment inspire aux bons esprits, et qui
parait toujours trouvée plutôt que choisie. l naïveté ne
repousse pas les ornements du style, pourvu qu'ils aient
la simplicité et pour ainsi dire la négligence de la nature.
Leduurme de la naïveté est si grand, que nous nous in-
t<'iiniiioiii aox choses les plos communes quand elles sont
dîtes mdvement. Cest par la naïveté que les fables de
La Fontidne plaisent aux lecteurs de tout ftge. On est
naïf, mais on ne le devient pas. « Une des choses qui
nous plaisent le plus, dit Montesquieu, c'est le nalf(
mais c'est aussi le style le plus difficile à attraper : la
raison est qu'il est précisément entre le noble et le bas;
il est si près du bas, qu'il est très-difficile de le côtoyer
toujours sans y tomber. » Aussi ceux qui , comme La-
motte, ont voulu imiter La Fontaine, n*ont réussi qu'à
être ftoiôA et bizarres : ils peuvent avoir de l'esprit, ils
n'ont point de naïveté. Le mérite de la naïveté est de
s'ignorer soi-même, et d'exister en quelque sorte sans
s'en douter. Cest ce qui faisait dire à Diderot : « On est
naïvement héros, naïvement scélérat , nidvement dévot,
naïvement beau , naïvement orateur, naïvement philo-
sophe; sans naïveté, point de beauté; on est un arbre,
une fleur, une plante, un animal naïvement; Je dirais
presque que de l'eau est naïvement de l'eau, sans quoi
elle visera & de l'acier poli et au cristal. La naïveté est
une grande ressemblance de l'imitation avec la chose s
c*est de l'eau prise dans le ruisseau, et Jetée sur la
toile. » H. D«
NAMAZ. r. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogrth
phie et d'Histoire,
NANCY (Église Notre-Damb, à). Cette égUse cathé-
drale est de construction moderne. La façade, large de
50 mètres, est formée d'un avant-corps, de deux arrière-
corps et de deux tours, et décorée de deux ordres, le co-
rinthien dans le soubassement, le composite au-dessus.
L'avant-corps, où est la porte principale, se compose de
colonnes accouplées et de pilastres en arrière,avec un en-
tablement qui règne le long de la façade, et est surmonté
de deux Anges prosternés devant une croix. Les arrière-
corps sont à pilastres, et une porte en occupe la partie
médiane. Les tours, également décorées de colonnes et da
pilastres, ont une fenêtre à plein cintre sur chaque cèté,
et se terminent , à une élévation de 80 met., par un dôme
et une lanterne. L'intérieur de l'église paraît lourd : la n^
a 14 met. de largeur, et les collatéraux 8 met.; près du
sanctuaire, l'édifice est couronné d'un dôme de 16 met.
de diamètre, dont la voûte, peinte par Jacquart, repré-
sente le ciel ouvert. Une galerie avec balustres règne au-
tour de l'église ; les bas côtés sont ornés de pilastres,
entre lesquels se trouvent trois chapelles de chaque côté.
ifANGT (Tapisserie de). F. Tapisserie.
NANKIN (Tour de porcelaine de}. Cette tour octogonale
dépend d'un temple de la Reconnaissance, bâti au
XIV* siècle. Elle est construite en briques et revêtue do
porcelaine. Chacune de ses faces a 13 met. de largeur. Le
mur a 12 met. d'épaisseur au rez-de-chaussée, et 3 met.
au sommet, qui s'élève à 80 met. Chacun des neuf étages
dont la tour se compose est entouré d'une galerie ornée
de statues d'idoles; il a 8 fenêtres qui vont en se rétré-
cissant comme l'édifice, et un toit relevé aux angles, les-
auels se terminent en têtes de dragons où sont suspen-
ues de petites cloches. On entre dans la tour par
24 portes, 3 sur chaque face, et un escalier très-étroit
conduit aux divers étages Jusqu'au sommet, où s'élève un
mftt entouré d'ornements en forme de disques et que
surmonte un énorme globe doré : huit bandes de fer
tournées en volutes s'attachent par une extrémité aux
angles du toit , et par l'autre sous le globe.
NANTES (Cathédrale de). Cette église, qui a S* Pierre
pour patron , n'offre pas un aspect imposant, bien qu'elle
soit placée dans une partie élevée de la ville. U faut l'at-
tribuer aux imperfections de la construction, qui appar-
tient à différents styles et est demeurée inachevée. Quel-
que parties extérieures de l'abside remontent à la
première période romane, c-IhL au x* siècle; l'intérieur
de l'abside et le chœur, avec leurs fenêtres à plein cintre
et leurs nervures toriques, sont en style romano-by-
zantin du xi« et du xn' ; la nef, les bas côtés, le portail
et les tours ne datent que du xv*. Les flancs de l'édiflca
sont nus, et sans perspective pittoresoue. Le portail,
composé de trois entrées, se recommande par un grand
nombre de figurines en pierre, distribuées en petits
groupes, et sculptées en hauts reliefs : ces morceaux ,
aune pureté de dessin remarquable, ont été soit mutilés
par le temps, soit amaigris par des regrattages. Au-dessus
du linteau de la porte principale, une rose à comparti-
ments saillants remplit presque tout le tympan ; la vous-
sure ofilre une magnifique guirlande de statuettes entre-
mêlées de dais. Les deux autres portes sont également
ornées avec goût. Les tours qui les surmontent ont
63 met. de hauteur, et paraissent lourdes et tristes. Las
portes de bronze qui fermaient autrefois les entrées ont
été portées à l'atelier monétaire pendant la Révohitioiu
A rintérieur, la cathédrale de Nantes a 40 met. seulement
NAN
1294
NAP
de longaenr, S6 de largeur, 37"*, 30 de hauteur. L'Im-
pression wodoite par la grande nef , oui est une des plus
belles de lYanœ, et que supportent 10 piliers, est bientôt
détnaite par le défaut d'^umonie et d*unité de Ten-
•emble. Cette nef parait d*autant plus élevée qu'elle a
peu de longueur : au-dessus des arcades oglTsles, la ga-
lerie du triforlum est trè»-rictae et très-élégante, et il ne
loi manque que d*6tre transparente et éclairée par des
titranx peints. Les collatéraux ont des chapelles, dans
deux desquelles se trouvent des autels modernes de style
gothique. Les piliers qui soutiennent la voûte du buffet
d'orgues sont ornés de beaux bas-reliefe. Nulle verrière
peinte ne tempère l'éclat du jour dans toute relise.
Kntre la nef et le chœur, on a élevé, de 1622 à 1650, un
jrandjubé de style grec : remarquable en lui-même, il
ompt d'une façon désagréable l'harmonie monumentide.
le chœur, bas et étroit, sans collatéraux, produit aussi
une disparate choquante avec la nef. Dans le transept à
la droite du chœur, on voit une œuvre admirable oe la
sculpture du xvi* siècle, qui ornait Jadis une église des
Carmes, démolie à la Révolution : c'est le tombeau
qu'Anne de Bretagne, femme de Louis XII, fit élever en
1507 à son père, le duc François II , et qui fut exécuté
par Michel Golumb, artiste de Tours, n est en marbre
blanc, avec des assortiments en marbres de diverses cou-
leurs, et a 3">,3 de longueur, l'*,41 de largeur, et 1"*,62
de hauteur. Il repose sur un socle haut de 4 centimètres,
et orné dT et d'hermines. Sur la table en marbre noir
«ont couchées deux statues en marinne blanc, un peu plus
grandes que nature, celles de François II et de Margue-
nte de Foix, sa seconde femme, ayant une couronne et
le manteau ducal. Des carreaux soutenus par trois anges
supportent leur tète, et, à leurs pieds, un lion et un lé-
vrier, symboles du courage et de la fidélité, tiennent
«ntre leurs pcttes les armes de Bretagne et de Foix. Aux
quatre angles, quatre statues de hauteur naturelle repré-
aentent avec leurs attributs les vertus cardinales, la Jus-
tice, la Siwesse, la Prudence et la Force. Dans U statue
emblématique de la Justice on a figuré Anne de Bretagne,
sous le costume et les attributs de reine et de duchesse,
avec la couronne fleurdelisée et fleuronnée sur la tète. La
tète de la Sagesse est double : d'un côté, c'est la figure
d'une Jeone femme ; de l'autre , celle d'un vieillard à
longue barbe. Aux deux côtés du mausolée sont les douze
Apôtres en marbre blanc, dans des niches de marbre
rouget à la tète, S^ François d'Assise et S^ Blarguerite,
patrons du due et de la duchesse; aux pieds, Charle-
magne et S* Louis. La base est ornée de 16 petites figures
représentant des pleureuses, dont le visage et les midns
sont en marbre blanc, et le reste du corps en marbre
vert — On a entrepris l'achèvement de la cathédrale de
Nantes sur le plan de la grande nef; quand elle sera ter-
minée, elle aura 102 met. de longueur. B.
NANTES (Ch&teau de), monument dont on fait remonter
la fondation au x* et même au ix* siècle, mais qui, dans
sa forme actuelle, date de la fin du xv*. Une partie des
bâtiments fut reconstruite après un incendie en 1670. Le
duc de Bretagne François II avait flanqué de quatre
grosses tours le ch&teau de Nantes : il n'en reste plus que
trois; la Quatrième, où l'on avait établi une poudrière, a
sauté en 1800. L'extérieur du ch&teau of&e peu d'intérêt;
mais, quand on pénètre dans la cour intérieure, on ad-
mire, à droite, un vaste b&timent dit le grand logis, spé-
cimen du style de la Renaissance, récenmient restauré
par M. Ménard. On peut encore visiter les salles d'armes
établies par la direction d*artillerie, et un grand puits
que surmonte une fermeture remarmiable. La chapelle
est à deux étages; l'explosion de 1800 l'a fort endom-
magée.
NANnSSEBIENT (du latin nans, caution), contrat
par leqoel un débiteur remet une chose à son créancier,
pour sûreté du payement. Le nantissement d'une chose
mobilière s'appeue gage; celui d'une chose immobilière,
amtichrèiê (F. ets mots). Le dessaisissement eflectif du
débiteur est une condition essentielle du contrat. Dans
le langage ordinaire, on appelle aussi nantissement la
chose mobilière qui est l'oojet du contrat. Si le créan-
cier n'est pas psjré à l'échéance convenue, il peut s'adres-
ser & la Justice, soit pour faire ordonner que l'objet mo-
bilier lui demeurera en payement après estimation, soit
pour obtenir le <h*oit de le vendre aux enchères, et de
toucher par privll^ ce qui lui est dû ; si l'objet est un
immeuble, il peut en poursuivre l'expropriation dans les
formes lépiles. Pour une somme excédant 150 fr., il n'y
a priviléfle que s'il existe un acte public ou un acte sous
Ming privé enregistré, contenant la déclaration de la
somme due, la nature et l'espèce des choses données en
nantissement. Toutefois, le commissionnaire qui a fait
des avances sur consignation à un négociant pour mar
chandises expédiées tune a^Ure place^ n'a pas besoin
d'un acte rédigé, pour exercer son privil^n. F. Troplons:,
Du nantissement, du gage et de Vantiehriee, 1841, in-8".
NANTOUILLBT (Ch&teau de), ch&teau construit an
temps de IVançois I'', près de Dammartin (Seine-et*
Marne), pour le chancelier Duprat. n était dans le style
des beUes villas de Toscane et de Lombardie, et s'éleyait
au milieu d'une enceinte quadrangulaire, flanquée de toun
tondes en briques. L'enceinte est aujourd'hui en partie
détruite, et 11 ne reste plus qu'un corps de b&timent con-
sacré & une exploitation rurale, et deux ailes à moitié
ruinées. L'entrée du ch&teau, la partie la mieux con-
servée, est de ce style semi-gothique qui fUt à b mode
au commencement du xvi* sièeie. Elle se compose d'une
grande arcade & plein cintre, et d'une plus petite donnant
passage aux gens de pied. Au-dessus de la grande arcade
est une statue mutilée de Jupiter, dans une niche que
surmonte un couronnement sculpté, et que flanquent
d'autres niches vides de statues. A d^ite et à gancoe de
cette entrée on voit les restes des fossés qui entouraient
le ch&teau; on avait accès dans rhabitatlon, non par la
chaussée actuelle, mais par un pont levis, ainsi que l'in-
diquent les longues ouvertures destinées & le manceuTrer.
Le b&timent situé au fond de la cour d'entrée contient au
res-de-chaussée une salle des gardes, avec une grande
cheminée où subsistent quelques vestiges de peintures
mythologiques, et, au premier étage, une chapelle ou
oratoire de style ogival, pratiquée dans une tourelle que
supportent, du côté du Jardin, des colonnes à pans d'une
délicatesse extrême.
NAOS , mot grec avant, pour l'Antiquité, le même sens
oue cdla (F. ce mot). Dans l'archéologie chrétienne, il
aésigne la nef d'une église.
NAPLBS (Églises de). Ces édifices, très-nombreux,
sont généralement peu remarquables par leur architec-
ture, et, si leur partie décorative est riche, souvent
même sarchaivée, le poût en est trop éouivoque. L'église
cathédrale de S^-fanmer, fondée vers la nn du xui« siècle,
sur remplacement, dit-on, de deux temples d'Apollon ei
de Neptune, fut construite sur les dessins de Blasuccio ; un
tremblement de terre la renversa eu 1456, et il n'en reste
plus que les deux hautes tours. Le nouvel édifice, oue fit
élever Alphonse le Magnanime, eut encore sa fa^e re-
nouvelée en 1788, et Tintârieur a été restauré depuis 1837.
Au-dessus de la porte principale on voit les tombeaux de
Charles I* d'Anjou, de Charles Blartel, roi de Hongrie,
et de sa femme Clémence, érigés par le vice-roi Olivar^s
en 1599. A l'intérieur, les voûtes sont supportées par de
nombreuses colonnes antiques de granit , de marbre afri-
cain, et de dpolin, et décorées de peintures, ûnsi que
la partie des murailles située au-dessus des arcs des
nefs. Les fonts baptismaux consistent en un vase antique
de basalte d'Egypte, soutenu par un pied de porphyre
orné des attributs de Bacchus. Parmi les chapelles que
renferme l'édifice, on remarque : 1® la chapelle des Mi-
nutoli , où se trouvent des statues du Christ, de la Vier^'
et de S^ Jean, par Masuccio; 2* la chapelle des Caraccioli.
qui offre un grand crucifix de bois, attribué au mèau-
artiste; 3* la <£apelle de S'-Janvier, dite le Trésor, conte-
nant 7 autels. Ai colonnes de brocatelle, 19 statues colos-
sales en bronse, d'admirables peintures de Ribera, du
Dominiquin. et de Lanfranc, et où s'opère trois fois T^n
({•' samedi de mai , 19 septembre, Ifidécembre) la liquè-
raction du sang de S^ Janvier. Au-dessous du ma!tre-au-
tel , ime crypte, pratiquée de 1498 & 1508, soutenue pai-
8 colonnes ioniques, et incrustée de marbre à arabesques
d'un travail délicat, renferme le corps du même saint
On voit, dans diverses parties de l'église, les tombeam
du roi André de Hongrie, des papes Innocent IV et Inno-
cent Xn, du savant Bfazocchi, et, dans la sacristie, un
crucifix en or du vu* siècle, et un candélabre d'argent
qu'on dit provenir du temple de Jérusalem. — L'ancienne
basilique de S^^-Restitute, réunie à ht cathédrale de
SManvier, en forme comme une grande chapelle. On y
trouve une mosaïque ancienne, représentant la Vierge
dite (M Prmctpto, parce qu'elle fht la première adorée à
Naples.
L'église de S**-Claire (Santa Chiarm), commencée en
1310, avait été décorée de nresaues par Giotto : mais ces '
peintures disparurent en 175x sous le bediseon ou le
stuc, & l'exception d'une Vierge. Le principal intérêt de
l'Oise consiste dans les tombeaux de la famille royale,
entre autres, celui de Robert le Sage.
NAP
1295
NAP
L'<^^Uae S^Dommiquê, construite en 1285 par Masuo-
do, est an bel édifice gothique, malgré les altérations
qa*il a subies. Les chapelles en sont ornées de peintures
par le Calabrais, Lanfranc, le Carayage, Zingaro, etc. La
ncristie est, à elle seule, un des premiers monuments
de Naples, moins par ses stucs dorés , son pavé de mar-
bres précieux, ses armoires en racine, sa longue fresque
de Solimtee, que par i% tombeaux de ^orinces aragonais,
sniiinels on a ijoaté celui du marquis de Pesoure et
quelques autres. Cest dans le superbe monastère atte-
nant à Tégliae que S* Thomas d'Aquin vécut et enseigna.
L'égHae S^'PMipp9 de Néri, dite aussi des GmAo-
mmi, foi fondée en 1592. Sa façade en marbre est de bon
gDÛt. La coupole a été récemment reconstruite. L'inté-
rieur de rédifice, décoré avec masuiflcence, renferme des
tableaux de Lnca Giordano, du Guide, de Solimène. Le
philosophe Vico y est enterré. Dans la sacristie sont de
oomfareoaes pdntnres du Guide, d*Ândré Sabbatini, du
Dominiquin, du Tintoret, de Ribera, de Baroccio, etc.
La chapelle de SanSevero est la propriété des princes
de ce nom. On l'appelait autrefois Santa Maria délia
PisCo. Construite en 1590, elle fut enrichie plus tard de
statues et de sculptures. Outre les tombeaux de la famille
Saoffri, et on bas-relief du maltre-antel où Francesco
Gelmano a représenté le Crudflement , on remarque trois
statues allégoriques de l'école du Bemin, qui témoignent
à la fois d*niie grande perfection technique et d'un goût
d^ravé : rHonune cherchant à sortir du filet des tenta-
tions qui l'enveloppe, par le Guccirolo ; la Pudeur, figure
dont un léger voile de marbre laisse deviner les formes,
par Corradini; un Christ enveloppé de son linceul, œuvre
de Giuseppe Sammartino sur les dessins de Corradini.
RAFLES (Le HcséB Bourbon, ou Mcséb dbs études à],
la plus riche collection d'antiques qui existe en Europe.
Elle est installée dans un b&timent construit en 1587 par
le doc d'Ossuna à l'usage d'écâries, puis livré sncoessive-
inent à lUniversité , aux tribunaux et aux troupes, et
approprié à sa destination actuelle par l'architecte Schian-
tarelli. Ce musée, formé primitivement pour les statues
et autres œuvres que les rois de Naples tirèrent de leur
palais Fàmôse à Rome, de Portici, et de Capo di Monte,
réunit tour à tour les objets trouvés à Herculanum, à
Pompéi, et dans les autres localités desDeux-Siciles, ainsi
t?ae les collections du duc Carafa di Noja, du cardinal
lk>rgia. et de Vivenzio. Il comprend, au res-de-ehaussée :
t* environ 1,600 peintures murales et un grand nombre
de mosalqpes antiques; 2* plus de 1,500 statues, bustes,
et bas-reliefs antiques en marbre, entre autres , le Gla-
diaieur Famète, un Apollon citharède. la Junon Famèse,
la Minerve Fanièse, les deux statues équestres de Balbus
Dère et fils, les bustes de César, d^Adrim , d'Antonin le
Pieux, d^Eschme, une statue d^Agrippme, une Flore co-
lossale, le Torse Famèse, le Torse de Psyché, la Vénus
caUipuQe, etc. ; dans cette partie du musée se trouve aussi
la câebre mosaïque de la maison du Faune à Pompéi -,
3* une collection de près de 1,600 inscriptions sur mar-
bre, avec le Taureau rarnèse et V Hercule Famèse; 4« des
antiquités &yptiennes et osques; 5* une galerie des sta-
tuer et des bustes en bronze; 6* environ 1,200 monu-
ments de l'art au moyen âge, çlus de 4,000 verreries
anticiues et plus de 5,000 terres cuites. Â l'étage supérieur,
on a placé : une collection de petits bronzes antiques, au
nombre de 13,000; une collection de 3,300 vases italo-
grecs; la salle des papyrus, contenant près de 3,000 rou-
leaux; un cabinet de plus de 2,000 gemmes et objets d'or
et d'areent; un cabinet de médailles, comptant 70,000
pièces envfaîon ; une çtlerie de 900 tableaux appartenant
aux dîTerses écoles italiennes; un cabinet réservé ou
miuiée secret, renfermant les œuvres d'un art licencieux ;
une bibliothèque de 200,000 volumes et 3,000 manuscrits.
HAPLES (Palais de). Le Palais Royal, que le vice-roi
comte de Lemos fit construire en 1600 par Dominique
Fontana, ne conserve plus de sa forme première que la
façade, décorée de trois rangs superposés de pilastres
d'ordres différents, et couronnée d'une corniche garnie
alternativement de pynunides et de vases; le reste a été
modifié à diverses reprises, surtout après un incendie
eo 1837. Ce palais, enveloppé de constructions militaires,
contient, outre les salles d'apparat et les appartements
privés, on certain nombre de bons tableaux, une biblio-
thèque et une collection d'estampes. — Le Palais de Capo
di Monte, commencé en 1738 par le roi Charles III, plu-
sieurs fois interrompu, repris en 1834, et embelli d'un
parc en 1S39, contenait anù^efois une galerie de tableaux,
qui oot été transportés au Musée Bourbon. — Parmi les
palais des parliculiers, tous ornés d'œuvres d'art, on
remarque les palais d*Angri, construit par VanvitelHi
Baguara ou San iinitmo, piar Carlo Fontana (1600))
Caramanica, par Fuga; Avalos, où sont de précieuses
tapisseries ; Gramna, un des bons ouvrages d'srôhitectuiB
du XV* siècle; San Anatio, riche en tableaux, vases,
bronzes, camées, médailles, etc.
NAPOLÉON, pièce d'or française à l'effide de l'empe-
reur. Sous Napoléon I*', il y en eut de 20 fr. et de 40 fr.
Napoléon m en a fait frapper de 5, de 10, de 20, de 50
etdelOOfir.
lUPOLioN (Code), ou Codb civil. Le nom de Code civU
était donné, avant la Révolution de 1789, à l'ordon-
nance de 1667 sur la Procédure civile, ordonnance exa-
minée par les plus célèbres avocats du temps, revisée
par le parlement, et due en grande partie à Punort, oui
lut chargé avec Auzanet d'en dresser définitivement les
articles. Aujourd'hui il s'applique uniquement à la réu-
nion de nos lois civiles en un seul corps, décrétée par la
toi du 30 ventftse an xil Une seconde édition du Code
civil fut décrétée par \a, loi du 3 septembre 1807 , ^
substitua le titre de Code Napoléon à celui de Code cwU
des Françau, par le motif crue ce dernier titre ne pou-
vait convenir à un code déjà regardé comme le droit
commun de l'Europe. Elle remplaça les dénominations
républicaines par des dénominations plus en harmonie
avec le gouvernement impérial. Une 3* édition, préparée
par la Restauration en 1816, restitua à ce recueil le titre
de Code civil, et fit dans le sens de la royauté les change-
ments antérieurement faits dans le sens de l'Empire.
Sous la République de 1848, aucun changement n'eut
lieu. Le décret des 29-30 mars 1852 fit revivre la déno-
mination de Code Napoléon.
Le projet de Code civU fut préi>aré en moins de sept
mois per quatre Jurisconsultes éminents, Tronchet, Por-
tails, Bigot de Préameneu, et Ifaleville, puis soumis à
l'examen des divers tribunaux, et enfin discuté dans le
Conseil d'État, le Tribunat et le Corps législatif. Ce Code
se compose d'un titre préliminaire «tir le Droit et les
lois en générai^ et de trois livres qui traitent Des per^
sonnes. Des btens et des différentes modifications de la
propriété ^ et Des différentes manières dont on acquiert
la propriété.
Le 1^ livre embrasse la jouissance et Ut privation
des droits civUs, les actes de Vétat civU , le domiçUe ,
Vabsence, le mariage, le dft>orcs, la paternité et la jfUio-
contient la distinction des biens, la propriété, Vusufruit,
Viisage et Vhabitation, les servitudes ou services fotir
fiers. — Le 3* statue sur les successions, les donations
entre vifs et les testaments, les contrats ou obligations
conventuelles en général ^ les engagements sans conven^
tion, le contrat de manage et les droits respectifs des
époux, la vente, Véchange, le contrat de louage, le con^
trot de société, le prêt, le dépôt et le séquestre, les cofi-
trats aléatoires, le mandat, le cautionnement, les trans-
actions, la contrainte par corps en matière civile , to
nantissement, les privilèges et hypothèques, Vexpro^
priation forcée et les ordres entre créanciers , la prM-
cription.
Un certain nombre de lois rendues à diverses époques
ont rompu l'unité législative établie par le Code citnf.
Telles sont celles du 24 mars 1806 sur le transfert des
inscriptions de rentes appartenant à des mineurs et à
des interdits; du 3 sept. 1807, qui rtela le taux de l'in-
térêt de l'argent ; du 14 novembre 1808, sur la saisie
immobilière; du 28 mai 1816, oui abolit le divorce; du
14 Juillet 1819, qui supprima le droit d'aubaine; des
17 mai 1826 et lï mai 1835, qui autorisèrent les substi-
tutions dans certaines limites, et modifièrent l'existence
des mijo^^t du 17 avril 1832, sur la contrainte par
corps; du 20 mai 1838, sur les vices rédhlbitoires dans
les ventes et échanges d'animaux domestiques; dn 30 juin
1838, sur les aliéna», etc.
Les principaux ouvrages à consulter sur le Code civil
sont : Cussaire, Analyse des observations des tribunaux
d^appel et du tribunal de cassation sur le projet de Code
civtt, 180S, in-4<*; Jooanneau et Selon, Discussion du
CodecivU dans le Conseil d'État, 1803, 3 vol. in-4';
Locré, Procès-verbaux du Conseil d'État, contenant la
Discussion du projet du Code. Paris, 1803-1804, 5 voL
in-4«; Fenet, Recueil complet des travaux préparatoires
ou motifs du Code dvU, 1836, 15 vol. in-8* ; Duranton,
Cours de Droit français, 4« édiu, 1844, 22 vol. in-8*{
Touiller, DroU civil, 1846-1848, 15 vol. in-8*; Teulet
NAP
12M
NAP
d*AnvlUefB et Sulpicy, Code» françaii «moMt. 3 fol.
ln-4^; Dftubenton, Dictionnaire du Code cwiî, 1806,
In-S^*; Dufoar, Code cioil des Français m)$c les sources,
suivi de la différence et des rapports des lois romaines
avec les lois françaises^ 1800, 4 vol. ia-8^; Bousquet,
Eacplication du Code civU, 1804-1806, 5 vol. in-4«; Co-
telle. Cours de Droit français, ou le Code Napoléon ap-
profondi, 1813, 2 vol. iii-8<^; Pigeau, Cours élémentatre
sur le Code chnl, 1818. 2 vol. in-8<>; De Maleville, Ana-
IvM raisonnée de la discussion du Code ctvtt, 3* édit.,
1821, 4 vol. iii-8®; Favard de Langlade, Conférence du
Code doU, avec la discussion du Conseil d'État et du
Tribunal, 1805, 8 vol. ia-8* ; Dard, Conférence du Code
civil avec les lois anciennes, 3* édit, 1827, in-8<>; Del-
vincourt. Cours de Code civU, 5" édiU, 1834, 3 vol. in-4<^;
Portalia, Discours, rapports et travaux inédits sur le
Code civU^ 1844. in-8°; Lahaye et Waldeck-Rousaeau,
Code civil annoté, 2* éd., 1844, iD-4^ ; Gousset, Code civil
commenté dans ses rapports avec la Théologie morale^
5^ édit., 1834, iii-8* ; Du Caurrov, Bonnier et Roustain,
Commentaire du Code dvil, 1851, 3 vol. iii-8^ ; Zacharis,
Cours de Droit civU français, trad. de Tallemand par
Aubry et Rau, 3< édit., 1858 et suiv., 6 vol. in-8«; Mar-
cadé et Paul Pont, Explication théorique et pratique du
Code Napoléon, 5< édit., 1859,11 vol. in-8«; Duvergier,
Continuation de Toullier, 1830-30, 8 vol. in-8* ; Oudot,
Conscience et science du devoir^ introduction à une nou-
velle explication du Code Napoléon, 1856, 2 vol. in-8«;
Anthoine de Saint^oseph, Concordance entre les Codes
civils étrangers et le Code Napoléon , 2* édit., 185G,
4 vol. gr. in-8" ; Berriat Saint-Prix, Notes théoriques sur
le Code civil, 1856, 3 vol. in-8<*; Demante, Cours analy-
Uque de Code civil, 1849 et suiv., 4 vol. in-8<'; Delsol, le
Code Napoléon expliqué, 1854, 3 vol. in-8<^; Dcmolombe,
Cours de Code iVopoi^on, 1845-59, 15 vol. in-8^ ; Rogron,
Code civil expliqué, 18o3, 2 vol. in-8*; Tapions, le
Droit civil expliqué suivant Vordre des articles du Code,
27 vol. in-8<'; Mourlon, Répétitions écrites sur le Code
Napoléon, 5' édit., 1859, 3 vol. in-8«; Proudhon, TrcUté
sur Vétat des personnes et sur le titre préliminaire dut
Code cwû , édit. de Valette, 3 vol. in-8*' ; Boileux, Com-
mentaire sur le Code Napoléon, 6" édit., 1857 et suiv.,
7 vol. in-8° ; Vuillaume, Commentaire cutalytique du
Code Napoléon, 1856, in-8'*, etc.
iiAPOL&)N (Maisons impériales). V, Légion d^honreob ,
dans notre Dictionnaire de Biographie et ^Histoire,
!iÀP0LtoN (Tombeau de). V. Mausol^, dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire,
NAPOLITAIN (Dialecte), un des dialectes italiens. Il
tronque les syllidbes, et elide Vi au commencement des
mots : nziemme^ pour insieme, nzoleto pour insolite. II
aime à redoubler les consonnes au milieu des mots :
ammore, femmena, L*élision de Vin se combinant avec
une contraction euphonique rend quelquefois les mots
méconnaissables : mmano pour in vano , mmest^e pour
investire. On redouble même Vn au commencement des
mots, ou on l'emploie comme une sorte d'esprit : Nne^
fole, Naples , e mbè pour e bene. Ve final s'élide généra-
lement, on se prononce à peine, comme Ve muet en fran-
çais. Cet e s'ajoute parfois à des mots terminés par i :
maie pour mat, gua^e pour guai. Il y a permutation fré-
quente du 6 et du t; ; on dît également, par exemple,
viene et biene. La lettre l, suivie d'un d, d'un t ou d'un
g, se change souvent en u {auto pour alto, caudara pour
eaidaja) ou en r {concnuiere pour concludere). Le p se
change aussi en ch ': chiù pour piU, chiojgnere pourptan-
gere, Vs remplace Vf, et s'emploie aussi comme préfixe :
tctoto pour fiato, sgobbo pour gobbo, La double II ou Is
se change en z : voze pour voile, sceuze pour scelse,
VI de 1 article s'élide souvent : o pour lo, a pour la.
V, l'abbé Galiani, Del dialeit-o napoletano^ 1779. — Le
dialecte napolitain a une littérature, dont le Cortese est
le principal représentant. Les auteurs qui s'en sont servis
après lui ont affectionné presque tous le genre burlesque;
nous citerons : J.-B. B&sile, dont on a un Pentaméron ,
inspiré par le Décameron de Boccace ; Valentino, qui a
raillé, dans son poôme de la Mezza Canna, le Inxe, la
vanité et la sottise de ses compatriotes ; Balzano di Sca-
fati , qui se cacha sous le pseudonyme de Sgruttendio
r>ur adresser des sonnets pétrarquistes, mais dérisoires,
toutes sortes de femmes ae basse condition et affligées
de défauts corporeb, ou pour célébrer le mets national,
le macaroni; on autre Valentino, auteur d'an poème de
15,000 vers environ, intitulé les Ciseaux, divisé en deux
lames et une paire de manches, et tout farci de grec, de
latin«et même d'hébreu Parmi les écrivains sérieux.
Nunziante Pagano a retracé dans un poème, La Mor»
tdla SOrzoloni, une histoire touchante et pathétique;
Pemccio a célébré la catastrophe de la ville d'AgnanCf
dont un lac prit la place; Fusano a traduit la Jérusakm
délivrée. Nie. Valletta les Odes d'Horace, le baron Zezza
le Malade imaginaire de Molière. Deux coUecdons de
poésies en dialecte napolitain ont été publiées, l'une de
1783 à 1788 en 38 vol. in-12 par PorcelU, l'autre en 1826,
en 3 voL in-8<^.
NAPOLITAINE (École), une des écoles italiennes de
peinture. Quelques auteurs la considèrent comme la plus
ancienne, et pensent même qu'elle a existé sans inter-
ruptidn depuis l'âge byzantin : ils parlent de madones
faites dans le xi* siècle, tandis que, dans les autres par-
ties de l'Italie, les arts étaient presque entièrement ou-
bliés. Ce qui est plus certain, c'est que l'école de Naples,
à toutes les époques, n'a eu qu'un éclat d'emprunt : on
n'y trouve pas un style original, un ensemble de prin-
cipes imposés par un homme de génie et suivis par des
duciples, mais toutes sortes d'influences exercées par des
étrangers et souvent opposées les unes aux autres. Dès
le commencement du xnr* siècle, Giotto, appelée Naples,
y exécuta des firesqnes à la Santa-Chiara et à l'Incoro-
nata : Simone est le plus connu des peintres qui imitè-
rent ses exemples. Il ne paraît pas que l'art ait beaucoup
progressé dans l'espace d'un siècle , puisqu'on a pu atr
tribuer à Simone quelques ouvrages de Golantonio del
Flore, mort en 1444. Une impulsion plus marquée fnt
donnée à la pûnture par le gendre de Golantomo, An-
toine Solario, plus connu sous le nom de Zingaro, et les
œuvres faites après lui furent qualifiées de zingaresqusi.
Au nombre de ses disciples, on remarque les frères Don-
zelli , puis Bernard Tesauro, qui montra plus d'invention
et de natureU Notons aussi Antonello de Messine, ad
apprit du peintre flamand Vpn Eyck la manière de peindre
à rhuile, et qui la propagea en Italie.
Au XVI* siècle , lorsque la peinture prit tant de déve-
loppement à Rome, à Florence, à Venise, à Parme, à
Mantoue, etc., l'école de Naples ne fit que reproduire les
principales qualités des autres écoles; si elle eut le feo
de l'invention, la fougue du pinceau et la rapidité de
l'exécution, elle pécha toujours par le dessin, et, attachée
à l'imitation directe de la nature , ne poursuivit pas le
beau idéal. André Sabbatini, de Saleme, le premier
peintre de cette nouvelle période, étudia sons Raphaël,
dont il rapporta les principes. Le sac de Rome par les
Allemands, en 1527, en contraignant les artistes de fuir
à Naples , fortifia dans cette ville l'influence de l'école
romaine : Polydore de Caravage, Penni , dit U Fattore,
et Perino del Yaga, y laissèrent quelques modèles. En
même temps, les principes de Michel-Ange eurent pour
représentants dans l'école napolitaine Vasari et Marco de
Sienne, tandis que d'autres artistes s'attachaient au Ti-
tien, au Tintoret et aux autres maîtres de Venise.
La première moitié du xvii* siècle fut l'&se brillant de
la peinture napolitaine, et elle dut cet éclat à la pré-
sence de maîtres étrangers. Ce fut aussi on temps dla-
trigues, de haines, de persécutions, de crimes même
parmi les artistes. Michel-Ange de Caravage, chassé de
Rome pour homicide, apporta aux artistes napolitains,
avec son style éner^que et rude, la violence de ses
mœors. L'espagnol Rioera, son élève, le grec Corenzio,
qui avait étudié sons le Tintoret, et le napolitain Carao-
aolo, imitateur d'Annibal Carrache, formèrent un triam-
virat redoutable aux étrangers : Annlbal Carrache , le
chevalier d'Arpino, Guido Renl et son élève Gessi, le
Dominiauin, Lanfranc, furent calomniés , menacés de
mort, obligés de fuir, et la condanmation à mort de
Francanzani, l'un des élèves et agents de Ribera, n'ar-
rêta point ses ignobles cabales. Rioera alla Jusqu'à mêler
des substances corrosives à l'eau qu'employait Maasimo
Stanzioni, pour faûre périr ses œuvres. A cette période
appartiennent encore Preti , dit U Calabrese, imitateur
du Cuerohin, Aniello Falcone, peintre de batailles, et
son élève Salvator Rosa, l'un des maîtres les plus origi-
naux de l'Italie.
L'école napolitaine a fini avec deux peintres distin-
gués , Luca Giordano , dont le surnom de Fa presto a
été justifié par une prodigieuse rapidité d'exécution, et
François SoUmène, qui peignit Jusqu'à 90 ans et remplit
de sa réputation toute l'Europe. B.
NAPPE. L^usage des nappes sur les tables ne remonte
pas au delà du x* siècle. Alain Chartier attribue à Bu
Guesclin l'introduction de la coutume de faire trancher
la nappe devant ceux qui avaient forfait à l'honneur. —
A l'église, où elle est plus ancienne, la nappe est la
NAR
1297
NAT
linge dont on couvre Tautel {V. Couverture d*autel);
on appelle nappe de communion le linge placé devant
les communiants.
KAQUAIRES. F. Nacaires.
NAQUET, nom donné autrefois aux valets qui mar-
quaient les points au Jeu de paume.
NARBONNE (Église S'^Just, à). Cette église, autrefois
cathédrale, fut fondée en 4272. Le chœur, les 13 cha-
pelles absidales et les deux tours étaient achevés en
1J32; mais l*édifice ne fut point continué, et Ton flt au
lYm* siècle quelques essais infructueux pour reprendre
les travaux. On 8*est remis à l'œuvre en 1840, sans faire
encore autre chose qu'une partie du transept. La portion
aDdenne de l'œuvre est donc un vaste chœur de style
ogival f presque aussi élevé que ceux de Beauvais et de
Cologne (40 met.), et remarquable par la hardiesse des
contre-forts et des arcs-boutants, la légèreté et la grftce
des piliers. Une double ceinture de créneaux remplace les
balostrades sur les chapelles, et réunit les culées des
arcs-boutants terminées en forme de tourelles. La con-
straction est d'une simplicité grandiose, et l'on y re-
marque l'absence de ces moulures dont les cathédrales
da nord de la France sont si riches. Les fenêtres n'ont
pour vitraux que des grisailles avec entre-lacs de couleur
etécussons armoriés. Le mattre-autel, à colonnes et à
baldaquin, n'est point en rapport avec le style du monu-
ment. La boiserie des stalles et celle de l'orgue ne sont
pas sans mérite. Le sanctuaire a conservé sa clôture for-
mée de tombeaux d'évèques. Au flanc méridional du
chœur est un cloître du xv* siècle, et une stalle capitu-
Ldre d'un bon style.
NARRAGANSETT (Idiome), un des idiomes algonquins
(V. 00 mot). On en trouve une Grammaire dans l'ouvrage
de Roger Williams intitulé A Key to th» language of
America, 1643, in-4o.
NARRATIF (Cas), cas particulier à la déclinaison ar-
ménienne, et qui exprime la qualité de l'être ou de la
diose sur laquelle on discourt.
NARRATION (du latin narrare, raconter) , récit d'un
fait. II y a trots espèces de narrations. La Narration
htstorique est le récit exact, fidèle et complet. « La pen-
sée de l'historien, dit Lucien, est semblable à un miroir
brillant, sans tache, et d'un centre parfait. Qu'il repro-
duise les formes des objets telles qu'il les a reçues, sans
les renverser, sans leur prêter des couleurs ou des figures
étrangère», b Cependant cette fidélité rigoureuse n'exclut
pas les agpréments du style, les réflexions intéressantes,
qui donnent de la vie et du mouvement au récit. Tadte
et Tite-Live sont des modèles de narration pariidte dajas
le genre historique. — La Narration poétique est laissée
praque tout entièa^ à l'imagination du poète; il peut
iorenter, embellir, changer les événements à sa guise;
on ne lui demande que d'être intéressant et vraisem-
blable. Fénelon dans le Télémaque^ Corneille, Racine et
Molière dans leurs pièces, oflErent une multitude de nar«
^^tions poétiques, aussi parfaites ou'attravantes. — Il y
a enfin la Narration oratoire, fin Rhétorique, la Narra-
tion est la troisième partie du discours. C'est le récit du
fait qui conatitue la cause. L'orateur ne peut, comme le
poète, créer les faits ; mais il n'est pas obligé, comme
i'iiistorien, de les présenter avec une scrupuleuse fidélité.
Sins tes altérer, il loi est permis de les adoucir, d'atté-
rier ce qu'ils renferment d'odieux ou de blessant, et de
r.iire valoir, au contraire, les circonstances favorables à
i^i cause. La narration oratoire doit avoir trois qualités :
> > brièveîé, la clarté, la vraisemblance. La brièveté con-
^iste à prendre le récit an point Juste, sans remonter
: as haut; à ne point donner de détails, ouand il suffit
'i indiquer sommairement le fait ; à ne faire ni digres-
sions ni redites. La clarté consiste à observer l'ordre des
temps et des faits, en racontant les choses comme elles
^ sont passées, ou comme il est vraisemblable qu'elles
nt pu se passer, et à n'employer que des expressions
impies et à la portée de tout le monde. Enfin, pour don-
wr à la narntion de la vraisemblance, il faut la revêtir
(ie tous les caractères de la vérité, observer les conve-
nances de personnes, montrer la cause de chaque fait,
et mettre le récit en rapport parfait avec le caractère des
I vties, les habitudes du public et les sentiments de l'an-
ditnre. Tontes ces qualités se trouvent réunies dans la
Narration de Cicéron Pro MUone, Nous avons dit que la
narration est la 3<^ partie du discours ; cependant il ar-
rive souvent, sartont au barreau, qu'elle devient la l** :
supprimant l'exorde, l'orateur raconte le fait en ques-
tion, puis fait connaître la division de son discours. La
Proposition vient alors après la Narration. H, D.
NARTHEX , nom donné , dans les basiliques chré-
tiennes, au prottoo^, c-à-d. à la partie précédant la nef;
mais comme les anciennes basiliques étaient précédées
de cours, d'atrium, et de portiques, on ne sait à laquelle
de ces divisions le mot narlhix s'appliquait particuliè-
rement. Au]ourd*hui les archéologues désignent par ce
mot le porche ou la galerie voûtée qui précédait la nef
et qui y communiquait par une ou plusieurs portes ,
semblables à celles de la façade extérieure ; c'est Ik que
se tenaient les catéchumènes et les pénitents pendant le
saint sacrifice de la messe. Il existe un narthex remar-
quable à l'église de Vézelay. Lorsque le narthex est divisé
en deux parties dans le sens de la largeur, comme à
S^*-Sophie de Constantinople, on nomme exonarlhex la
partie située vers l'extérieur, et esonarthex la partie
placée vers l'intérieur. E. L.
NASAL. V, CHANFBEm.
NASALES (Consonnes), consonnes dont Tarticulation
produit un son nasal. Ce sont m et n.
NASALES (Voyelles), nom donné à la combinaison des
voyelles avec les consonnes m et n finales, comme an,
am, en, em, m, im, ain, aim, «tn, on, cm, un, um, dans
paysan, ambassade, entrer, empereur, coquin, imbécile,
étain, essaim, sein, passion, Riom, alun, parfum. Dans
ces exemples, la nasale forme une syllabe ou finale ou
suivie d'une autre syllabe commençant par une consonne.
Si la syllabe qui la suit commence par une voyelle, la
nasalité disparaît: wattaquable ^ bonheur, nonobstant,
vinaiare, aimable, unique, etc. On excepte enivrer, enor^
gueillir. Lorsque la nasale finale rencontre un mot com-
mençant par une voyelle, elle ne doit sonner, ou, comme
l'on dit vulgairement, on ne doit faire la liaison uue
lorsque le sens ne permet pas une légère pause entre les
deux mots; ainsi, on fera sonner n finale dans un ancien
ami, mais non pas dans cet ancien a dit, etc. — Pour
les mots hymen, Êden, le plus grand nombre prétendent
qu'il faut prononcer hymene, Edène, les autres comme
on prononce ancien^ païen, etc. Tout le monde est d'ac-
cord sur les mots Amen et abdomen. Examen, mot en-
tièrement latin, a été longtemps prononcé exarràne; mais
ce mot, étant devenu d'un usage tout à fait vulgaire et
s'étant francisé^ doit se prononcer comme chemin, main-
tien, etc. P.
NASARD (Jeux de), nom donné à trois des Jeux abouche
de l'orgue. Ce sont des Jeux de mutation, de grosse
taille, ouverts, faits en étofiè, et ayant toute l'étendue
du clavier. Le nasard proprement dit sonne à la quinte
du prestant, et peut être placé à tous les claviers ; le gros
nasard parle à la quinte de la flûte de huit pieds, et
s'emploie au grand orgue; la ^tiarfe de nasard est à
Tunissou de la doublette, et peut être placée aux trois
claviers. On met quelquefois à la pédale un nasard de
douze pieds, accordé à la quinte au-dessus du seize*
pieds. On appelle petit nasard ou larigot le jeu accorda
à la quinte au-dessus de la doublette : c'est le plus aigu
de l'orgue, et il est toujours placé dans le positif. F. C.
NASSE (du latin nassa), engin de pèche qu'on place
au fond de l'eau, en le chargeant de pierres. C'est une
espèce de panier d'osier très-conique, ou un assemblage
de cônes d'osier emboîtés les uns dans les autres, de
manière à ce que le poisson, attiré Jusqu'au fond par
l'app&t, ne puisse plus sortir. D'après l'ordonnance du
45 nov. i830, l'écartement des brins d'osier doit être de
30 millimèt. ponr la pêche des poissons ordinaires, et de
15 pour les petits poissons. L'ordonnance du 28 fév. 1842
permet de réduire l'écartement à 8 millimèt. pour la
pêche des ablettes.
NATAL (du latin natalis, et en sous-entendant dies,
Jour), désignait autrefois, dans l'Église, le Jour de Noôl
ou de la Nativité de J.-C, et, par extension, une fête
quelconque. Les fêtes de Noël, de Pâques, de la Pente-
côte et«de la Toussaint étaient appelées spécialement
les quatre Nataux,
NATCBEZ (Idiome des), un des idiomes indigènes de
l'Amérique du Nord. Il parait qu'il se parlait en deux
dialectes, l'un à Tusage des familles puissantes, l'autre à
Tusage du reste de la tribu ; dans le premier dialecte, la
déclinaison se faisait comme en latin, sans le secours de
l'article. Les femmes donnaient une terminaison et une
prononciation différentes aux mots, lorsqu'elles pariaient
aux hommes.
NATION, agrégation considérable d'hommes vivant en-
semble sous Tes mêmes lois, en communauté de mœurs
et de langage, dans une certaine circonscription territo-
riale. Le mot nation implique, mieux que peuple^ une
' origine commune. Ghaoue nation a un caractère particu-
82
NAT
1298
NAT
lier qui la distingue : I* Athénien dans l'Antiquité et le
Français parmi les modernes ont eu la réputation d*esprit
et de légèreté; on attribue la gravité à TEspagnol, la
fourberie au Grec, une nature Jalouse et vindicative à
ritalien, etc. Les droits qui appartiennent à une nation
sont : le droit de se gouverner comme il lui plaît; le droit
de conservation, en vertu duquel elle repousse par la
force toute agression injuste ; le droit de développer et
de perfectionner librement toutes ses facultés, sans
autre restriction que le devoir de ne pas nuire aux
autres nations.
NATION, mot qui désignait autrefois, dans rQniversité
de Paris, une société de maîtres et d'étudiants du même
ftays, vivant sous les mêmes règles et les mêmes chefs,
l y avait quatre nations, celles de France, de Picardie,
de Normandie, et d'Allemagne.
NATIONS (Collège des quatre-). V. notre Dictionnaire
de Biographie et d' Histoire.
NATIONALITÉ. Lorsqu'il existe, au milieu d'une nom-
breuse agrégation d'hommes vivant sous les mêmes lois,
certaines tendances générales dans les idées, un but d'ac-
tivité commun nettement défini , des intérêts matériels
et moraux presque identiques, la nationalité est consti-
tuée. Lorsque la communauté des idées a cessé , que les
intérêts divergent et se fractionnent, et qu'on ne s'en-
tend plus sur le but à poursuivre, la nationalité s'afiîaisse,
languit et meurt. Le commencement de presque toutes
les nationalités a été marqué par une tendance prononcée
à l'envahissement des territoires voisins et à l'oppression
des peuples qui les occupent; et même, depuis le temps
où une sorte d'équilibre s'est établie entre les puissances,
l'antagonisme est loin d'avoir cessé , parce que l'esprit
de nationalité engendre l'égolsme, et tend à sacrifier à
un intérêt privé les intérêts généraux de l'humanité.
L'effet extérieur de la nationalité est Vinfluence, c.-à-d.
une certaine action sur les autres agrégations d'hommes.
Néanmoins, il n'appartient pas à toutes les nationalités
d'agir nécessairement au dehors : il en est, telle que la
nationalité suisse , qui se concentrent en elles-mêmes ,
se contentent d'elles-mêmes, vivent sur des souvenirs
communs d'origine et de race ; il en est d'autres, telles
que les nationalités hongroise et polonaise, qui, sans
cesse entravées par les vices de leur Constitution, ne
peuvent devenir influentes, par la raison qu'il existe, au
sein même de la nation, une anomalie complète, une
division profonde entre les classes. Pour (qu'une nation
soit puissante au dehors , il faut qu'elle soit une au de-
dans, qu'elle s'entoure d'un certain prestige qui flatte
l'amour-propre et la vanité commune, et qu'elle n'exclue
ni lieux ni personnes. La nationalité française, qui réunit
le mieux ces conditions diverses, possède le droit le plus
certain à servir d'exemple aux autres, à exercer une in-
fluence réelle et légitime. En France, l'esprit national
n'est point en opposition avec l'esprit libérai , parce que
la base do la nationalité est le sentiment du droit de
tous à une même loi, à une même liberté, et la recon-
naissanco du principe de l'égalité^ qui a pénétré dans les
mœurs.
NATTES, ornement architectural de certaines églises
romano-byzantines. On en voit à la cathédrale de Bayeux.
NATURALISATION, acte par le({uel un étranger est
admis dans un corps politique dont il n*était pas membre
par sa naissance, et qui lui confère les mêmes droits et
les mêmes privilèges qu'aux naturels du pays. Dans l'an-
cienne monarchie française, on vit souvent des étrangers
exercer des emplois civils ou pNoUtiques, et posséder des
bénéfices ecclésiastiques : le roi leur conférait à cet effet
des lettres de naturalisation. Charles Y, Charles VI,
Charles VU et Louis XII rendirent, pour écarter les
étrangers, plusieurs ordonnances, que réclamait l'opinion
publique ; mais on ne les observa guère, et une nouvelle
ordonnance, publiée en 1570 à la suite des plaintes for-
mulées par les états généraux de Blois , exclut des di-
gnités ecclésiastiques quiconque ne serait pas d'origine
française. On voyait alors certains princes étrangers
prendre à ferme les impôts de la France, abus que Sully
s'empressa de faire disparaître. En 1617, à propos de
l'administration de Concini, le parlement de Paris, en
Srésence de plusieurs pairs du royaume, rendit un arrêt
e règlement pour qu'à l'avenir aucun étranger ne devint
ministre. Une ordonnance royale de 1629 déclara les
étrangers incapables de commander une place française.
L'élévation du cardinal Mazarin au poste de premier mi-
nistre excita le plus vif mécontentement, et une décla-
ation du 18 avril 1651 porta qu'à l'avenir aucun étranger,
quoique naturalisé, n'aurait entrée aux conseils du roi et
ne serait admis à la participation de ses affaires. La Con-
stitution de 1791 reconnut la qualité de citoyen français
à ceux qui, nés en France d'un père étranger, y auraient
fixé leur résidence. Elle raccorda également à ceux qui,
nés hors du royaume et de parents étrangers, auraient
5 ans de domicile continu en France, mais à la condition
soit d'y posséder des immeubles, soit d'avoir épousé une
Française, soit d'avoir formé un établissement d'agricul-
ture ou de commerce, et à celle de prêter le serment ci*
Tique. Elle autorisa enfin le Corps législatif à accorder à
un étranger, pour motifs importants, un acte de natura-
lisation, sans autres conditions que de fixer son domi-
cile en France et de prêter le serment civique. La Con-
stitution de 1793 simplifia encore les conditions de la
naturalisation : elle admit à l'exercice des droits de ci-
toyen tout étranger ({ui, &gé de 21 ans accomplis, domi-
cilié en France depuis une année, y vivait de son travail,
ou avait soit acquis une propriété, soit épousé une Fran-
çaise, soit adopté un enfant, ou nourrissait un vieillard •
et tout étranger que le Corps législatif Jugeait avoir bien
mérité de l'humanité. La Constitution de 1795, moina
libérale, exigea comme conditions de la naturalisation
r&ge de 21 ans, une résidence de 7 années consécutives
en France, le payement d'une contribution directe, et.
en outre, soit la possession d'une propriété foncière, soit
un établissement d'agriculture ou de commerce, soit le
mariage avec une Française. La Constitution de Tan vin,
plus restrictive encore, exigea de l'étranger qu'après avoir
atteint T&ge de 21 ans accomplis et déclaré Vintentlonde
se fixer en France, il y eût résidé pendant 10 années con-
sécutives. Une ordonnance du 4 juin 1814 exige en outre
des lettres de grande naturalisation vérifiées par les
Chambres législatives, pour habiliter les étrangers à faire
partie de ces Chambres. Un avis du Conseil d'État, do
17 mai 1823, établit une distinction entre les lettres de
naturalisation , constitutives d'un droit nouveau , et les
letires de naturalité, constatant un droit précédemment
acquis. Un décret du Gouvernement provisoire de 1848,
en date du 28 mars, autorisa provisoirement le ministre
de la justice à accorder la naturalisation aux étrangers
3ui la demanderaient, qui justifieraient d'une résidence
e 5 ans en France, et qui produiraient l'attestation de
l'autorité départementale qu'ils sont dignes d'exercer les
droits de citoyen. La loi du 21 nov. 1849 a rétabli la légis-
lation antérieure , mais en réduisant à 1 an le délai de
10 ans pour les étrangers ayant rendu des serrices im-
portants à l'État. La naturalisation d'une étrangère s'opère
de plein droit par son mariage avec un Français [Code
Napol.^ art. 12) ; le Français naturalisé à l'étranger perd
sa qualité de Français (art. 17), et, de plus, la propriété
de ses biens et ses droits à succéder, à moins que sa na-
turalisation à l'étranger n'ait été autorisée par le chef de
l'État (Décret du 26 août 1811). Une loi de 1851 dédire
Français le fils de l'étranger né et domicilié en France,
à moins que, dans l'année qui suit sa majorité, il ne se
soit prévalu de son extranâté. V. le Supplément.
NATURALISME, religion de la Nature; cest une de^
formes du Polythéisme. II peut consister dans le féti-
chisme, ou dans le culte des éléments. On appelle encore
Naturalisme une opinion philosophique d'après laquelle
l'homme arriverait à la connaissance de la vérité, et sur-
tout de la vérité religieuse, par le développement naturel
des forces de son esprit, et ne devrait admettre comme
fondes que les principes acceptai par sa raison. Par
conséquent, le Naturalisme nie toute révélation, à la
différence du Rationalisme ( K. ce mot)^ qui se réserve
l'examen des doctrines révâées. En un autre sens, le
Naturalisme est un système qui méconnatt une intelli-
gence régulatrice dans le monde ou la Nature, dont il
attribue les mouvements à une force intime ou au ha-
sard : il ^outit au panthéisme ou à l'athéisme (K. ces
mots), — Dans la langue des Beaux-Arts, le Naturalisme
est la reproduction aussi exacte que possible des objets
naturels, sans préoccupation de la beauté idéale, ce que
l'on nomme de nos jours le Réalisme (V. c« mot),
NATURE, ensemble de l'Univers ou des êtres créés. On
a aussi donné le même nom à l'ensemble des forces ei
des lois établies pour l'ordre perpétuel et les révoIutioDs
successives des choses, par exemple, pour le mouvement
de la terre et des astres, pour le cours des saisons, pour
la reproduction des êtres vivants. Des philosophes ont
fait de la Nature la puissance créatrice de l'umvers; ca
n'est alors qu'un synonyme plus ou moins vague de Dieu.
D'autres ont appelé Nature une force néce^aîre, mais
aveugle, qui produit tout ce qui existe : cette doctrine,
exposée dans le Système de la Nature du baron d'Hot-
NAT
1299
NAV
fiach, et dans la Philosophie de la Nature de Delîsle de
Saies, n*est au fond que la négation d*an Dieu créateur
et de la Providence, qu'elle remplace par le hasard
(F. cê mot) ; ou bien elle attribue aux éléments de la ma-
tière une force propre dejmouyement, comme le pen-
sait l'école atomistique ( K. ce moi). De nos Jours, en
Allemagne, on nomme Philosophie de la Nature toute
recherche qui a pour but de tout expli(;uer par un prin-
cipe unique, d*où Ton déduirait à priori les lois et les
phénomènes du monde; on a même imaginé un être pro-
totype qui, en se développant, en se multipliant, obtient
saccessivement, par ses innombrables variétés et espèces,
toutes les créations du globe. Jusqu'à l'homme lui-même,
fleur dernière du grand arbre de U vie, et cet être, c'est
b Nature. Évidemment, il y a là un Panthéisme déguisé.
— On entend encore par Nature d'un être l'ensemble
des propriétés qu'il tient de sa naissance et de son orjga-
oisation, par opposition à celles qu'il peut devoir, soit à
â£s causes accidentelles, soit à l'art En ce sens on dira,
ta Médecine par exemple, que la nature vient en aide à
la science pour la guérison des maladies, et, en Morale,
qu'il faut vivre conformément à la nature ou selon la loi
delà nature. Cette loi, qui n'est autre chose pour l'homme
que la conformité de ses actes à ses besoins et à ses
instincts bons ou mauvais, est souvent en contradiction
avec les lois de la religion , de la vraie morale, et de la
société. — Dans les Beaux-Arts, le mot Nature désigne
tout modèle donné immédiatement par la nature, un être
Tirant ou un objet, d'après lequel on peut peindre, des-
âner ou modeler, au lieu de prendre un dessin , un ta-
bleau, une statue,
NATcsE (Le Poôme de la), poème didactique laitn,
dans lequel Lucrèce a embelli des grâces et des magnifi-
cences de la poésie la plus ingrate et la plus triste des
doctrines, l'Epicuréisme. Le poème /)« ta Nature {De
Satura rerum) est en six livres. Au i*', Lucrèce établit
le principe fondamental de l'Epicuréisme, que rien ne
sait de rien, et que les vrais éléments des êtres sont les
atomes, éternellement agités dans Tinfini du vide, sans
que Tunivers ait un centre commun. Au 2*, il explique
la formation des corps par le mouvement et l'union des
molécules invisibles, et professe l'opinion que les atomes
roulant sans fin dans un infini sans limite, s'agrégeant et
se désagrégeant sans interruption, les mondes sont à la
fois innombrables et destructibles; il annonce même la
fin du nôtre. Au 3* chant, le poète étudie d'abord l'àme
humaine, qu'il partage, pour ainsi dire, en deux moitiés :
l'àme sensitive, éparse dans toute l'étendue du corps, et
t'àme intellectuelle, qui réside dans le cœur; toutes deux
par leur union forment le principe vital. Cette distinction
établie, Lucrèce s'épuise en efforts stériles pour démon-
trer que l'àme, matérielle comme le corps, meurt avec
hii, ou plutôt retourne se perdre, à leur séparation, parmi
les atomes; il n*y a donc pas de vie future, selon lui, et
les mortels ont tort de craindre un Enfer qui n'existe que
dans le cœur des méchants. Le 4* livre est une étude sur
les sens et sur la pensée, à laquelle se rattachent, assez
uaturellement dans ce système, la théorie des songes et
celle de l'amour. L'auteur n'a traité que de l'amour des
corps, et en médecin autant qu'en poète. Le 5* livre, le
plus beau de l'ouvrage, malgré les erreurs qu'il renferme,
présente, dans un magnifique langage, d'abord l'origine
du monde, puis la marche de l'univers, la naissance des
êtres anima produits par la terre, enfin l'histoire primi-
tive de Thomme et de la civilisation. Jamais poète n'a
rendu plus éclatant hommage à l'esprit humain; on
s'étonne qu'un philosophe matérialiste ait pu ressentir
uo pareil enthousiasme, en affirmant que l'intelligence de
Thomme n'est qu'un mouvement de molécules aveugles
et brutales. Au 6* livre, Lucrèce expose la physique épi-
curienne, la théorie des phénomènes météorologiques et
terrestres. Ce sujet l'amène à rappeler la peste d'Attiènes,
doot la peinture termine l'ouvrage. — Ce qui manque
dans l'ensemble de ce poème, c'est l'élégance, le respect
et l'observation scrupuleuse des règles de l'art, et l'bar-
nionie; mais les descriptions, notamment celles du 5*
livre, où le poète peint dans un style enchanteur la ru-
desse et la grossièreté des premiers hommes, ofi^ent une
vriu» sauvage qui plaît infiniment. Ses raisonnements
didactiques fatiguent et rebutent par leur sécheresse ;
néanmoins on y rencontre fréquemment des expressions
pleines de vie, qui couvrent l'argumentation de fleurs
inattendues, dit M. Villemain , des images fortes et gra-
cieuses, une sensibilité touchante et expressive. N'ou-
btions pas que Lucrèce avait à créer sa langue, et qu'il
n'est pas moins glorieux pour lui d'avoir triomphé de la
pénurie de son idiome que de la stérilité d'une doctrine
qui n'eût pas manqué de dessécher une imagination moHM
féconde et une sensibilité moins riche que la sienne :
un art plus délicat, une langue plus souple dans ses
formes, et plus harmonieuse dans ses tours, leussent
rendu l'égal do Virgile. A. H.
NATURE MOSTE (Tabloaux do), uom ({u'on donne en
Peinture aux tableaux dont la partie principale se com«
pose d'animaux tués ou morts, tels qu'oiseaux, gibier^
poissons, etc., ou de végétaux cueillis ou arrachés.
NATUREL, qualité du style <{ui consiste à rendre les
pensées et les sentiments avec aisance, sans effort et sans
apprêt. Le naturel est le rapport parfait des sentiments
et des mots avec la réalité. L'expression la plus belle
perd tout son mérite , dès que le travail s'y laisse voir ;
car elle nous fait penser à l'auteur plus qu'au sujet dont
il nous entretient, et la prétention qu'il semble avoir de
se faire admirer nous fâche et nous porte à le Juger plus
sévèrement. « Au contraire, dit Pascal, nous sommes
étonnés, ravis, enchantés, lorsque nous voyons un style
naturel ; c'est que nous nous attendions de voir un au-
teur, et nous trouvons un homme. » Comme le naturel
n'est autre chose que la vérité, il est le caractère propre
des grands génies. Les Jeux de mots, les antithèses, les or-
nements travaillés, les inventions bizarres, sont la marque
d'un esprit médiocre , faible ou faux. « On gagne beau-
coup, dit Fénelon, en perdant tous les ornements super-
flus, pour se borner aux beautés simples, faciles, claires,
et négligées en apparence. Pour l'élc^iuence et la po^ie,
comme pour l'architecture, il faut que tous les morceaux
nécessaires se tournent en ornements naturels; mais
tout ornement qui n'est qu'ornement, est de trop : retran«
chez-le, il ne manque rien ; il n'y a que la vanité qui en
souffre. Je veux un sublime si familier et si simple , que
chacun soit d'abord tenté de croire qu'il l'aurait trouvé
sans peine, quoique peu d'hommes soient capables de le
trouver. Je préfère l'aimable au surprenant et au mer-
veilleux. Je veux un homme qui me fasse oublier qu'il
est auteur; je veux qu'il me mette devant les yeux un
laboureur qui craint pour ses moissons, un berger qui
ne connaît que son village et son troupeau, une nourrlcl
attendrie pour son petit enfant. Je veux qu'il me fass
penser, non à lui et à son bel esprit, mais à ceux au'i
fait parler. » Le naturel cependant n'est pas ennemi d^i
l'art, c-ànd. de la méditation qui règle les inspirations
de la nature. Les plus grands poètes, Virgile, Racine, tra-
vaillaient lentement, et corrigeaient souvent leurs écrits
pour arriver à l'expression naturelle des sentiments qu'ils
voulaient rendre. Le naturel peut s'acquérir par l'étude;
c'est lui qui produit la facilité du style : mais il faut que
le travail reste caché. Enfin celui qui veut être naturel ne
saurait trop méditer cette maxime de Fénelon : « Que
nos expressions soient les images de nos pensées, et nos
pensées les images de la vérité. » H. D.
NATUREL, en Music[ue, se dit d'un ton ou mode qui
n'emploie ni diète ni bémol.
NATUREL (Droit). V, Droit naturbu
NATUREL (Enfant). V. Enfant.
NAUFRAGE (du latin navis fracta, navire brisé), perte
d'un navire à la mer. Le capitaine d'un bâtiment mar-
chand qui a fait naufrage est tenu de se présenter devant
le Juge du lieu où il a été jeté, d'y faire son rapport, de
le faire vérifier par ceux de son équipage qui se seraient
sauvés avec lui, et d'en lever expédition {Code de Comm,^
art. 202). Tout capitaine de la marine de l'État qui a fait
naufrage est appelé à rendre compte de sa conduite de-
vant un Conseil de guerre. Il est passible de la peine de
mort, si, quand il y a eu lieu d'abandonner le navire, il
n'en est pas sorti le dernier. V. Lebeau, Code des bris,
naufrages^ etc., 1844, in-8*.
NAULAGE, mot de même sens que Nolis.
NAUMACHIE. V. ce mot dans * notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
NAUTILE. V. Bateau plongeur.
NAUTIQUE (Art), science théorique et [>ratique de la
navigation, conE4>renant la manœuvre et le pilotage ( V. ces
mots).
NAUTIQUE (Légion), corps qui fut formé, dans la cam-
pagne française d'Egypte, avec les matelots de la flotte.
NAUTIQUE (Théâtre), théâtre parisien installé à la salle
Ventadour, et oui eut une très-courte existence. Il tirait
son nom d'un nassin rempli d'eau qui occupait le des-
sous de la scène, et sur lequel, les planches ayant été en«
levées, on vovait flotter une gondole.
NAVALE (École). V. École navale, dans notre Diction^
naire de Biographie et d'Histoire*
NAV
1300
NAV
NAVALES (Constructions). L*histoire de rarchitecture
navale commence aux temps très-reculâi où Thomme,
ayant tu un tronc d*arbre flotter sur les eaux sans être
submergé, imagina d*en réunir plusieurs ensemble et
d'en faire un radeau pour traverser ou descendre une
riviâre; mais il n'a pas fallu moins de quatre mille ans
pour aller de la pirogue grossière du sauvage au magni-
fique vaisseau à trois ponts des Modernes. La nécessité
de diriger sur les eaux les premiers assemblages de bois
où l'homme osa monter, a fait inventer les rames, les
voiles, le gouvernail ; celle de s'abriter contre les intem-
péries vie Tair fit ensuite ponter les navires. lies origines
et les pfemiera développements des constructions navales
sont assez peu connus. On ne peut rien tirer de certain
d«i traditions relatives, soit à l*Arche de Noé (V. Arche),
soit au navire Argo des Grecs. Les premières traces de
l'art des constructions se trouvent chez les Phéniciens :
les ingénieurs de Tyr firent école; ce sont eux qui ap-
prirent aux Assyriens à faire des navires, et qui construi-
sirent les flottes de Salomon sur la mer Rouge. Selon les
Egyptiens, le dieu Osiris osa le premier construire des
navires. Sésostris en fit faire un de bois de cèdre, long de
140 met., et qui avait pour doublage à l'extérieur, au
lieu de cuivre comme aujourd'hui, des feuilles d'argent;
ce navire avait trois m&ts, et des hunes où l'on plaçait
des hommes armés d'arcs et de flèches pour tirer sur
l'ennemi.
I^s Grecs enreat des b&timents de transport et des na-
vires de guerre. Les Modernes ont donné à ces derniers le
nom de galères, à peu près inconnu des Anciens, et qui,
dérivé, suivant Ovide, du casque (galea) qui servait quel-
quefois d*ornement à la proue, Ait fréquemment employé
par les Grecs du Bas-Empire et par les historiens latins
des Croisades. lies premières galères furent de simples bar
teaux découverts, portant, à la proue et à la poupe, des
planchers où se plaçaient les soldats pour conuMtttre; les
pins petites avaient de chaque côté 10 ramea, et les plus
grandes 50. Leur fond était plat, leur carène peu ren-
flée, leurs cùtés en ligne droite, effilés et élancés à l'avant
et à l'arrière. La longueur était de 7 ou 8 fois la largeur.
La m&ture, élevée, portait de longues voiles à antennes,
ou'on surmontait d'une voile légère quand la brise souf-
flait doucement. On ne combattait Jamais sous voiles,
mais seulement à l'aviron, et, pour que les galères fus-
sent plus légères, plus maniables, on les construisait en
pin et en sapin. La force de ces navires consistait dans
un éperon ou bec boitu en bois ferré qui armait la proue,
et qu'on appuyait de deux épotides ou avant-becs en
grosses poutres. Quelques-uns avaient deux gouvernails,
l'un à l'avant, l'autre à l'arrière. Les rides qui se trou-
vaient entre chaque bordage étaient remplis d'une espèce
de Jonc marin, et l'on y fsdsait couler de la cire fondue
avec quelques matières résineuses. Les hauts étaient
garnis de claies d'osier entrelacées les unes dans les
autres et recouvertes de peaux. Une ceinture renforçant
la muraille du navire servait de point d'appui aux bancs
des rameun; ces bancs étaient leur lit pour la nuit, et
les rames leur abri. — Telle fut la galère primitive. Les
habitants de Thasos, les premiers, la couvrirent d'un
pont ou plancher, qui mit les rameurs à couvert, et où
l'on put combattre de pied ferme. Sur ce pont on disposa
un nouveau rang de rames, et l'on eut la birème; puis
on phiça sur ce môme poni, sur des bancs un peu
plus hauts, un 3* rang de rames, ce qui donna la trù'
rème ou tnàre, le Taissean de guerre par excellence
chez les Grecs et les Romains. Les ^ères de ce dernier
peuple eurent les extrémités pointues, dans la partie
extérieure comme dans la partie plongée : elles se ter-
minaient par une pièce de bois arquée où venaient
aboutir les bordages, et cette pièce portait, comme de
nos Jours, une flgure, un symbole. C'était ordinairement
une tète d'oie (qu'ils mettaient à la proue, peut-être en
souvenir du Capitole sauvé. Sur le gaillard d'avant était
nne petite guérite, où se plaçait le second maître de
l'équipage.
La trirème peut être considérée comme le type le plus
parfait des constructions navales dans l'antiquité, et l'em-
pereur Napoléon m en a fait exécuter à Paris, en 1860,
un grand modèle, qui a navigué et fait voir, en pratique,
la solution du problème : il a 40 mètres de longueur à la
ligne de flottaison, 5",50 de largeur, et porte 130 rames
mues chacune par un seul homme. Dans la trirème an-
tique, immédiatement au-dessus de la plate-forme qui
servait de base à toute la construction, était la sentine ou
cale, dans laquelle s'entassaient les vivres, les munitions,
les cordages et les voiles de rechange : toute cette partie
plongeant dans la mer, l'eau qui s'y infiltrait était chassée
avec des pompes. Le 1*'' étage de rameurs était à quel-
ques pieds au-dessus de la ligne de flottaison : comme W
était fort bas, les matelots étaient contraints de ne s'y
tenir qu'assis, et, lorsqu'ils se levaient, dans une poûtioD
inclinée, d'où lui vint le nom de thalamos (lit), et aui
rameurs qui l'occupaient celui de thcdamistes; on les ap-
f>elait aussi colobùi (rames tronquées), parce qu'ils avaient
es rames les plus courtes. Afin d'empêcher l'eau de pé-
nétrer par les dalots ou ouvertures pratiquées dans la
muraille pour le passage de ces basses rames, un man-
chon en cuir était cloué autour de chaque rame et contre
le bord. Le second étage, appelé xygos, était occupé par
les xygiteSf armés de rames plus longues, qui ne pou-
vaient gêner la chiourme inférieure : quand on naviguait
à la voile, ces rameurs allaient aider à la manœuvre des
antennes et des cordases sur le pont supérieur ou thror
nos. Ici étaient les tturanites, marins d'élite, à la fois
matelots , rameurs et soldats : s'il fallait faire voguer
la trirème, ils nuiniaient les plus longs avirons ; si l'on
déployait les voiles, ils grimpaient le long des antennes;
dès oue le combat s'engageait, ils prenaient le casque, le
bouclier et la pique pour repousser les assaillants, ou
abordaient le navire ennemi, la hache à la main. Les trois
rangs de rames de chaque côté du navire étaient disposés
obli(piement l'un au-dessus de l'autre. Sur le pont, vers
l'amère, il y avait une espèce de dunette {c(Uastrômma\
où logeaient les officiers, et, par-dessus, on trône pour le
capitaine et le pilote; sur la proue s'élevait une guérite
pour protéger le contre-maître chargé de la manœuvre
de l'avant, et où se tenait aussi le matelot en vigie. La
proue était armée de l'éperon ferré et d'un bec d'airain à
trois pointes : presque dans le prolongement de l'étrave,
les Romains placèrent un m&t perpendiculaire, portant
le corbeau, espèce de pont-levis dont une extrémité tour-
nait au pied du m&t comme sur on axe, tandis çue
l'autre, attachée à la tête par une corde qu'on l&chait à
volonté, pouvait s'abattre sur le navire ennemi et le
clouer d'une énorme broche de fer dont elle était garnie.
Au bout des antennes pendaient des grappins destinés
aussi à accrocher l'ennenod, et des masses de plomb pour
défoncer ses ponts; au sommet des m&ts étaient des
{>lates-formes d'où l'on faisait pleuvoir des pierres. Sur
e pont de la trirème on installait des toun mobiles pour
les arehers, des catapultes, des balistes et autres engins
de guerre. Afin qu'un seul coup d'éperon ne l'exposât pas
à couler, la carène était partagée en plusieurs cases pres-
aue hermétiquement fermées; de cette manière, l'irrup-
on de l'eau dans la cale ne pouvait être que locale. La
manœuvre exigeait au moins 50 rameun par étage ; il
fallait un long exercice pour obtenir un mouvement si-
multané des rameurs : une voix, un cri donnait la me-
sure, et souvent les notes d'une flûte marquaient la
cadence.
Les écrivains de l'antiquité parlent de navires plus
considénd)les que la trirème : la qiuuiririme, à 4 rangs
de rames de chaque côté; la quinquêrème ou pentère, à
5 rangs; la sexttrimu ou kexeris, à 6 rangs. Il y eut
même l'octér^ de Memnon, la galère à 10 rangs de Dé-
roétrius Poliorcète, celle d'Hiéron à 20 rangs, et le palais
flottant de Ptolémée Philopator, à 40 rangs de rames. Re-
lativement aux rangs de rames, plusieurs représentations
antiques qui sont parvenues jusqu'à nous ne permettent
pas de douter qu'il y en eut Jusqu'à dnq superposés :
mais, au delà de ce chiffre, on ne peut plus croire que la
disposition ait été la même. En effet, une rame maniée à
une plus grande hauteur au-dessus de la surface de
l'eau devrait être tellement inclinée pour toucher l'eau,
que le manche ne serait plus à portée du rameur; ou
bien, si elle était faite d'une longueur suffisante pour
obvier à cet inconvénient, comme il faut de toute né-
cessité qu'elle soit fixée sur le touret & un tiers de sa
longueur, la partie qui serait à bord irait fort avant et
rendrait tout mouvement impossible. 11 est donc naturel
de penser que, quand les navires avaient plus de 5 rani^s
de rames, ces rangs étaient comptés, non dans une a-
rection ascendante de la surface de l'eau au plat-bord,
mais en long, par le nombre d'ouvertures à rames de
l'avant à l'arrière.
Pour le moyen âge, les renseignements relatifs ans
constructions navales ne sont ni nombreux ni suivis. Oit
sait que Charlemagne avait des flottes pour s'opposer aui;
descentes des Rarbares sur les côtes de son Empire; mais
elles ne se composaient guère que de barquea. Les hom-
mes du Nord qui vinrent aprà lui se servaient de ba-
teaux recouverts de peaux de bètes. Le drakar (dra*
NAV
1301
NAV
ffm) Scandinave offrait au sommet de sa proue une figure
sculptée en dragon, et avait dans sa forme quelque chose
qui rappelait le serpent ; il était à fond plat, et tirait peu
d'eau; ses flancs étaient larges, et sa croupe vaste, de
fiiçon à. prendre sur l*eau une assiette solide. Le sekkar
différait peu du drakar; il était seulement moins long,
moins haut et moins large. Les navires Scandinaves
n'avaient cni*un mât , avec girouette et quatre ou cinq
haubans; les plus grands étaient pontés, et portaient
sur la poupe un château {V. ce mot). Quand Alfred le
Grand, roi des Anglo-Saxons, repoussa Tinvasion des
Danois, la construction navale prit plus de force et de
grandeur : ses navires, très -longs, étroits et peu pro-
fonds, avaient le fond plat, peu de tirant, un seul màt,
qu'on plaçait ou enlevait à volonté, 38 bancs de 4 ra-
meurs à chaque bord , et un pont très-élevé, d*où l'on
pouvait accabler Tennemi. Sur la Méditerranée, la trirème
romaine fit place à la çcUère (F. ce mot dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d^Histoire\ qui devint, entre
les mains des Vénitiens, le navire de guerre py excel-
lence. La gcUiole, la gcUéacef le galion, le dromon, la
chélande (V. ces mots)^ furent des variétés de la galère,
et Ton 86 servit encore pour le commerce, quelquefois
aussi pour la guerre, des caravelles et des carraques
{V. ces mots). Pendant les Croisades, on eut dos carra-
ques capables de porter Jusqu'à i,500 hommes d'armes
avec leurs bagases. Mais l'emménagementétait fort impar-
fait : sur le navire oui porta Louis IX en Egypte, les deux
tiers des hommes étaient entassés dans les entre-ponts,
et l'on coachait à deux dans l'emplacement destiné à un
seul, l'an à la tète, l'autre aux pieds. Les chevaux étaient
suspendus avec des sangles, et on les fouettait de temps
en temps pour dégourdir leurs membres.
Même après l'invention de rartillerie, les galères furent
encore longtemps en usage dans la Méditerranée. Mais,
depuis la découverte de l'Amérique, les navires propres
à longer les c6tes ne suffirent plus, et l'on se mit à con-
struire des bâtiments qui pussent affronter et traverser
rOcéan. Cette construction eut aussi son enfance et ses
progrès. Primitivement, les navires de guerre n'eurent
qn'un pont, sur lequel on plaçait des canons ani tiraient
par-dessus le bord. Au xvi* siècle, on donna des embra-
sures aux canons en créant les sabords. On eut ensuite
ridée de recouvrir les batteries d'un plancher, pour mettre
les canonnière à l'abri de la mousqueterie. Les navires
grandirent peu à peu : une seconde batterie s'éleva sur
h première, et enfin on arriva, sous Louis XIV, à faire
des vaisseaux à trois ponts. Le premier fut construit en
1657 près de la Roche-Bernara en Bretagne, par un
Diq>pois, nommé Morin, et fut appelé la Couronne, Alors
l'esprit humain s'arrêta, et, jusqu'au xix* siècle, les dé-
couvertes se bornèrent à quelques améliorations : les
vaioeanx prirent des formes plus élégantes, la carène
s'amincit pour fendre l'eau avec plus de vitesse, le grée-
ment s*alfégea, la m&ture s'éleva plus haut, les voiles
présentèrent aux vents une surface mieux disposée. Vers
ia fin du xvm* siècle, le doublage en cuivre augmenta
la promptitude et la sûreté de la navigation. Quand on
eut la sécurité, on songea au confortable : on fit aux em-
ménagements tout ce qui pouvait rendre le séjour des
bâtiments plus agréable et plus sain.
Aujoard'hui, pour construire un navire, on commence
par la qwlle, sur laquelle repose tout l'édifice, et qui est
au b&timent ce que l'épine dorsale est dans la charpente
du corps humain. Puis, suivant des directions plus ou
moins Inclinées au gré du constructeur, on établit
Vétrave et VarccLsse, c-à-d. les nièces extrêmes de
l'avant et de l'arrière. Ensuite on élève, dans des plans
verticaux et perpendiculaires à la quille, les couples in-
termédiaires, qui sont comme les côtes, et l'on a la car-
casse du navire. On la recouvre avec des planches plus
on moins épaisses, dites bordages; on lie les couples
entre eux par de fortes pièces de bois nommées baus;
on di^ose les ponts en étages, on calfate les bordages
avec de Tétoupe et du brai sec, on cloue des plaques de
cuivre sur la partie qui reste immergée. Quand on
lance le navire, on n*a plus qu'à lui donner ses m&ts et
ses agrès. — Les Modernes construisent leurs bâtiments
tout en bois de chêne, à l'exception des ponts. Mais une
des découvertes du xix* siècle a été la substitution du
fer au bois pour U coque : on remplace ainsi une matière
Tégétale, dont U croissance demande de nombreuses
annésSy dont La détérioration est rapide, et qu'il est de
plus en plus difficile de se procurer, par une autre ma-
tière qnV>n peut produire promptement et en masses
considérables. V. le Supplément,
Le XIX* sïècle a encore ouvert à la construction navale
une voie nouvelle par l'application de la force élastique
de la vapeur à la navigation ( V, Bateau a vapeur).
L'énorme quantité de combustible consommée par la
machine à vapeur s'opposant aux longs voyages, on a eu
l'idée des vaisseaux nuxtes, qui marchent ou tour à tour,
ou simultanément à la voile et à la vapeur. La vapeur ,
employée d'a'bord à faire mouvoir des roues, puis des
{»alettes, a été ensuite appliquée à un autre propulseur,
'hélice. Employée dès 1009 et 1743 par Duguetet Dubort
pour mettre en mouvement des moulins, puis recom-
mandée pour la navigation par le mathématicien Paneton
en 1768, l'hélice n'a reçu ce dernier emploi que depuis
1823, époque où Delisle, capitaine du génie, proposa la
vis évidée qui porte son nom. En 1832, Sauvage inventa
l'hélice pleine, qui, modifiée en certains détails, est adop-
tée aujourd'hui. L'Anglais Smith en 1835 et le Suédois
Ericsson en 1836 firent des essais heureux de navigation
par l'hélice. Le premier vaisseau de guerre à hélice, le
Napoléon, fut lancé au Havre en 1842. Ce propulseur a
de grands avantages : la machine peut être entièrement
placée au-dessous de la ligne de flottaison, et la vis est
a l'abri soit des boulets, soit des avaries d'abordage; des
batteries peuvent être établies dans toute la longueur du
b&timent; les navires à hélice, moins larges tpxe les na-
vires à roues, peuvent entrer dans des bassins qui ne
recevraient point ces derniers; la vis, toujours immer-
gée, fonctionne avec régularité, tandis que les roues, au
milieu des mouvements de roulis et de tangage, s'agitent
souvent dans le vide. V. stmoAcs, au Supplément.
L'Antiquité avait fait des essais de constructions gigan-
tesques, puisque le navire de Ptolémée Philopator, qui
toutefois ne navigua jamais, avait 280 coudées de Ion*
tueur, 480 de hauteur, 38 de lar^r, et portait, dJt-on,
,000 rameurs, 4,000 matelots et 3,000 soldats. Les Mo-
dernes ont opâré des prodiges plus réels. De 1854 à 1857,
les Anglais ont construit un immense b&timent, appelé
d'abord Great Eastem^ puis Léviathan, et qui n'a pu
effectuer le voyage d'Amérique qu'en 1860; au retour, il
a subi d'effroyables avaries, qui dégoûteront peut-être
d'une nouvelle tentative. Le Léviathan^ long de 207 met.,
large de 25, a 18 met. de creux; il est divisé, par de
fortes cloisons de tôle, en compartiments étanches de
18 met. de long. La cooue, pour laquelle on a employé
7,110 tonnes de fer, est formée de deux bordages en tôle,
l'un intérieur et l'autre extérieur aux membres, et sé-
parés par un petit intervalle : c'est comme une coque
plus petite, loçiée dans une coque plus grande d'un mètre,
avec une infinité de cloisons transveisales installées entre
deux. Les roues à aubes et l'hélice constituent des mo-
teurs d'une puissance collective de 2,800 chevaux. Le
diamètre des roues est de 17 met., celui de l'hélice de
6",22. Six chaudières à vapeur sont destintes & la ma-
chine motrice de l'hélice, et quatre autres pour les roues
& aubes. L'hélice pèse plus de 40 tonnes. Il y a 0 m&ts,
qui permettent de développer 5,184 met. carrés de toile.
Le ÙvieUhan a été emménagé pour recevoir 4,500 pas-
sagers, et pour porter 3,000 tonneaux de marchandises.
Son poids, avec les machines, la provision de charbon,
l'équipement et la cargaison, dépasse 26,000 tonnes mé-
triques. Les plans du navire ont été donnés par Bru-
nel fils, et la construction a été faite dans les chantiers
de M. Scott-Itussell à lilillwal, sur la rive gauche de la
Tamise, à la porte de Londres. V. David Le Boy, La Ma-
rine des anciens peuples expliquée, Paris, 1777, in-S*^ ;
Jtà^ Archéologie navale, Paris, 1839,2 vol. gr. in-8^; Glos-
saire naïUique, Paris, 1850, 2 vol. gr. in-8®; la Flotte
de César, Paris, 1861, gr. in-18; P&ris, Essai sur la
construction navale des peuples eostr a- européens, collec-
tion de navires et pirogues, etc. Paris, 1841 et suiv., in-
fol.; et Traité de l'hélice propulsive, 1855, or. in-8o. B.
NAVARRE (Ch&teau de), à '1 kilomèt. d'Evreux. Con-
struit en 1332 pour Jeanne de France, reine de Navarre
et comtesse d'Évreux, remplacé en 1686 par un ch&teau
moderne, oue Mansard dessfûa pour le duc de Bouillon,
habité pendant deux ans par l'impératrice Joséphine, il
a été détruit en 1836. C'était un b&timent carré & faces
symétriques, décoré de perrons et de vestibules & co-
lonnes, couronné d'un vaste dôme, et entouré d'un cannl
d'eau vive. Un parc superbe, des jardins charmants l'en-
vironnaient, et offraient avec profusion de belles eaux,
des masses de verdure, des fleurs de toute espèce : 17/0
iT Amour et le Jardin iSibé étaient surtout agréables.
NAVARRE r Collège de). V* notre Dictionnaire de Bio»
graphie et d^ Histoire.
NAVETTE Cdiminntif du latin navis)^ en latin ecclé-
NAV
13')2
NÉC
liastîque Incensanum ou Acerraf petit vase de métal,
ordinairement en forme de nacelle, où Ton met l'encens
broyé pour le service de Tencensoir.
NAVIGATION (du latin navis, vaisseau), action de na-
Yîguer, de conduire an b&timent. La science de la navi-
ga&on se nomme Art nautique ( K. Cê mot). Eu égard
aux moteurs qui font marcher le navire, on distingue la
Nav^iatUm à la rame, la Navigation à la voile, et la
Navigation àvapeur^ c'est par abus de mots qu'on donne
le nom de Navigation aérienne à l'art de diriger les
aérostats. La navigation est an puissant moyen de trans-
port, an a«nt actif et considérable des râations com-
dierciales. Selon les parages où elle s'exerce, elle se divise
en Navigation intérieure, sur les fleuves, les rivières, les
lacs et les canaux, et Navigation maritime * celle-ci com-
prend la Navigation eôtiàre ou cabotage {V, ce mofj et la
Navigation hauturière ou de long coure, qui se fait en
pleine mer (V. GAPrrAniB ao long cours). Pendant bien
des siècles, les progrès dans la navigation furent lents.
Les Grecs n*avaient pour se diriger que l'étoile polaire;
peuvent ils embarquaient avec eux des oiseaux, puis les
l&chaient, poor servir de guides vers des lies ou un con-
tinent; c'est ainsi que les Argonautes avaient emmené
dans leur expédition une colombe. On côtoyait les ri-
vages; chaque baie, chaque crique était un port contre
la tempête. Les voyages des Phéniciens dans l'Océan n'é»
taient que des circumnavigations de plusieurs années.
L'invention et les perfectionnements de la boussole à la
fin du moven ftge permirent aux marins de s'éloigner des
côtes, et il devint facile alors de diriger les navires à tra-
vers l'Océan. V. Bouguer, Traité du navire, 1746, in-4® ;
— de la navigation, 1753, in-4''; — de la manceuvre^
1757, in-4*; Bezoat, Traité de navigation., dans son
Cours de mathématiguee, 1781-82, 0. vol. in-8*; Homme,
V Art de la marine^ 1787, in-4<^; Bonnefoux, Séances nau-
tiques^ 1824, in-4'' ; Bourde de Villehuet, le Manœuvrier^
3* édit., 1814, in-8<>; Poterat, TTi^orie du navire, 1820,
fn-4<*; Gilbert, VArt de la navigation par la vapeur,
1820, in-4<» ; Ravinet, Dictionnaire de la navigation, 1824,
5 vol. in-8®; Dutens, Histoire de la navigation intérieure
de la France, 1829, 2 vol. in-i**; Maiseau, Répertoireuni-
versel du commerce et de la navigation^ 1837, in-8°;
Dit^tionnaire universel du commerce et de la navigation,
publié par Guillaumin, 1861-62, 2 vol. gr. in-8«.
NAVIGATION (Acto de). V, Acte dc navigation, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
NAVIGATION f Droît de) , droit perçu par TÉtat sur la
partie navigable et flottable des fleuves et rivières, pour
subvenir aux frais de leur entretien. Chaque bateau,
préalablement Jaugé, est imposé par chaque myriamètre
parcouru, en raison de sa charge réelle en tonneaux de
mer (1,000 kilogr.). Tout batelier ne peut naviguer, s'U
n'est muni de la copie du procès-verbal de jaugeage, et
d'un laisser-passer si le droit est acquitté au départ, ou
d'un acquit-a-caution td la taxe n'est perçue qu'au mo-
ment de l'arrivée. On peut souscrire des abonnements
pour le droit de navigation. Chaque grand bassin de la
France est divisé en arrondissements de naivigation, dans
chacun desquels il existe des bureaux de perception. Les
contestations relativement au payement des droits sont
Jugés par les Conseils de préfecture. — Les droits perçus
sur la navigation maritime sont, outre ceux de francisa^
tion et de tonnage {V, ces mots) : le droit d*expédition ,
dû par le seul fait de l'entrée dans un port de France
(pour les navires français, 2 fr. Jusqu'à 150 tonneaux,
6 fr. iusqu'à 300, 15 fr. au-dessus; étrangers, 18 fr. Jus-
mi'à 200 tonneaux, 36 fr. au-dessus) ; le droit d'acquit
(0 fr. 50 c. pour les navires français, 1 fr. pour les étran-
gers) ; le droit de congé (1 fr. pour les navires non pontés
de 30 tonneaux au plus, 3 flr. pour les navires pontés de
même tonnage, 6 fr. pour les navires oui ont plus de 30
tonneaux); le droit de passe-port (1 fr.); le droit de
permis, à chaque embarquement et débarquement de
marchandises (0 fr. 50 c. pour les b&timents français,
1 fr. pour les étrangers); le droit de certificat (même
taux), poar tout certiflcat destiné à être produit en Jus-
tice. — Les bateaux qui transportent des vovageurs sont
soumis au droit de dixième. V, l^lou. Manuel régie-
mentaire et pratique de la navigation intérieure, 1858,
in-8o; Grangez, Traité de la perception des droUs de
navigation, 2* édit., 1854, in-8<>.
NAVIRE (du latin navis), tout b&timent propre à navi-
guer, quels qu'en soient le volume, la forme et les usages.
Les navires de la marine militaire, à voiles ou à vapeur,
se divisent, suivant leur force, en diverses classes : vais-
seaux de ligne, frégates, .corvettes, avisos, bricks, flûtes.
goélettes , bombardes , canonnières ^ cutters , lougres ,
sloops, batteries flottantes, etc. (l^. tes mots). Dans U
marine marchande, quelques navires portent les mèmei
noms qae dans la marine de l'État, comme les 6rtcfcs, les
goélettes, etc. ; on y emploie, en outre, les dénominationi
de paquebots, steamers, steamboats {V. ces mots). Les
navires servant à la navimtion fluviale n'ont pas de quille,
mais on fond plat, afin de ne pas avoir an trop fort tirait
d'eau ; il leur faut un gouvernail très-large, car, en raison
de leur faible tirant d'eau, an gouvernail ordinaire serait
impuissant à les gouverner; lorsqu'ils sont pontés, ils
portent an mât dont la voile ne sert qu'avec le vent ar-
rière. Les navires destinés à la mer sont pourvus d*one
Suille fine et solide qui leur permet de fendre Tonde,
'un gouvernail étroit, mais long, et doué d'une actioa
sûre, enfin de plusieure mâts, dont la voilure constitue
leur appellation générique. V. Navales (Constructions}.
Le Code de commerce (art 190) range les navires dans
la classe des meubles, et cependant les aflécte au paye-
ment de certaines créances privilégiées (art 191). Les
navires *sont soumis à une inscription spéciale : qui-
conque en fait construire doit faire sa aéclaration au
bureau de la douane du port où sont les chantiers, puis
la renouveler à la fin des travaux, non-seulement an
même bureau, mais au commissariat de la marine , et
indiquer le port auquel il désire attacher sa nouvelle
propriété. On peut plus tard changer le port d'attache,
mais en faisant une nouvelle soumission. Le propriétaire
doit déclarer le nom qu'il donne à son b&timent, et ce
nom ne peut être changé à l'avenir (Loi du 5 Juillet 1836).
Au-dessous de 30 tonneaux, les navires doivent porter à
la poupe, sur fond noir et en caractères blancs, un nu-
méro et les marques du port auquel ils appartiennent :
au-dessus de 30 tonneaux, ils portent leur nom et celui
de leur porten lettres de 10 centimèt. dehanteur, et un dé-
cret de vendémiaire an xii (sept. 1803) porte une amende
de 3,000 fr., si le nom est effacé, couvert ou changé. Le
jaugeage du bftUment est gravé sur les faces arrière et
avant du maltre-bau, pour servir de base à la perception
des droits. On ne peut naviguer sans avoir pris un acte
de francisation (V. ce mot). Un navire perd sa nationa-
lité, quand il devient )a propriété d'un étranger pour
plus de la moitié de sa valeur. Tout navire, chaque foi»
3u'il prend charge, est soumis à une visite d'experts,
ont le procès-verbal est déposé au tribunal de corn*
merce, ou, à son défaut, au (greffe de la Justice de paix,,
et le capitaine doit avoir une expédition de ce procès-
verbal
NAYADES. V.NaTades.
NEBEL, instrument de musique. V. Nabla.
NÉBULES, ornement architectural de l'époqne romane
et de transition, formé par des festons pendants, ondulés
et arrondis. II décore les larmiere des corniches, et quel-
quefois des moulures d'archivoltes.
NÉCESSITÉ (La), déesse allégorique. V, notre Diction-
naire de Biographie et d* Histoire.
N^CBSsrré, terme de Philosophie qui s'applique aui
idées et aux faits. Dans les idées, le nécessaire est te
contraire du contingent {V. ce mot). Dans les faits, la
nécessité est le contraire de la liberté; elle consiste dans
l'impossibilité , pour ce qui arrive, de ne pas arriver, ou
d'arriver d'une manière différente.
NécESSiTÉ (Pièces de), nom donné, en Numismatique,
aux monnaies frappées lorsqu'il y a manque de métaux
précieux, et faites, soit en objets sans valeur, soit en un
métal auquel on donne une valeur nominale bien au-
dessus de sa valeur réelle. Leur émission repose unique-
ment sur le crédit de celui qui les met en circulation.
— Parmi les pièces de nécessité il faut ranger en pre-
mière ligne la Monnaie obsidionale : c'est une monnaie
de cuivre ou de nickel, que le commandant d'une place
soutenant un long siège fait fabriquer pour le besoin de
la garnison , et à laquelle il donne un cours forcé. Elle
ne se compose que de billon, et la valeur, tout arbitraire,
que le commandant lui assigne, est très-«upérieure à sa
valeur intrinsèque. Cette monnaie n'a qu'un cours jtTO-
visoire, dont la durée est celle du siège; alon elle doit
être retirée de la circulation, et remboursée en monnaie
légale courante du pays. V. Duby, Recueil général dej
pièces obsidionaies et de nécessité, Paris, 1786; Reider,
Essai de description des pièces de nécessité frappées depuis
pltuieurs siècles. Halle, 1806.
NÉCROLOGE {dii grec nékros, mort, et logos, discours),
livre-registre sur lequel on inscrit les noms des moils.
Dès les premiers temps du christianisme, chaque éjeilise
inscrivit dans son Nécrologe ou Obituaire (du latin o&t/u^
NEF
1303
NÉG
décès) le nom, la date de naissance et de décès des évè-
ques, des chanoines, des prêtres, des bienfaiteurs da
clergé; les couvents d'hommes et de femmes adoptèrent
à leur tour cette coutume pour les abbés, les prieurs, les
religieux, etc. Primitivement on donnait lecture du Né-
crologe pendant la messe, pour rappeler les personnages
en faveur desquels des prières étaient adressées à Dieu :
il en est encore ainsi maintenant dans quelques églises
coptes et syriaaues. Mais, en Occident, la longueur des
énumérations fit cpe le diacre ou le sous-diacre les lut
rapidement et à voix basse, et, finalement, qu*ou les rem-
plaça par le simple Mémento des vivants et des morts.
Dans les monastères, la lecture du Nécrologe fut ren-
fo^ée à l'office de Prime. — Chez les Modernes, les pu-
blications destinées à faire connaître, au moment de leur
mort, les personnages dont le nom médte d'être con-
servé, ont reçu le nom de iVi^cro/oflfM. Tels furent : le
Wécrologe des hommes céUbres de France, de 1764 à 1789,
n vol., pablié par Palissot, Lalande, François de Neuf-
château, etc.; V Annuaire nécrologique^ de Mahul; le
riécrologe allemand de SchlichtegroU , commencé en
1790; le Nécrologe, entrepris en 1853 par Breton, Ac-
qoin et Combes. Dans les derniers Jours de décembre,
certains Journaux donnent, sous le titre de Nécrologie,
la lista des personnes notables qui sont mortes dans
Tannée. B.
NÉCROPOLE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire^
NÉERLANDAIS (Idiome). Cet idiome, parlé au moyen
âge en Flandre, en Hollande et dans le Brabant, n'est,
>t;ion Grimm, que le bas allemand, mais cultivé de bonne
lieure, et enrichi par l'influence du commerce. Il a donné
naissance au flamand et au hollandais, qui n'étaient pas
d'abord distincts, et auxquels on donnait le nom com-
mun de duilsch (teuton); c'est encore le nom que les
Brabançons donnent à leur langue, et par lequel les An-
glais désignent le hollandais.
NEF (du latin navis)^ mot usuel au moyen &ge pour
désigner un navire. — On l'a aussi appliqué , dans le
même temps, à un surtout d'orfèvrerie qu'on plaçait sur
la table des rois et des grands seigneurs, et qui contenait
h^ épices, certains vases à boire, les cuillers , les cou-
teaux à découper.
NEP, partie des églises qui s'étend depuis le chœur Jus-
qu'à la porte principale, et (jui offre assez d'analogie avec
la coque renversée d*un navire. On distingue la nef ma-
jeure ou grande nef, qui est celle du milieu , et les nefs
mineures, qui sont de chaque côté, et qu'on nomme aussi
collatéraux ou bas côtés. La division primitive et natu-
relle des églises est en trois nefs : quand les chrétiens
adoptèrent les basiliques antiques pour les consacrer au
coite divin, ils les trouvèrent généralement partagées en
trois longues galeries, dont ils conservèrent la disposi-
tion. D'autres galeries régnaient au-dessus de celles-là :
quelques églises, comme les cathédrales de Paris et de
Tournai, les églises de Noyon, de Laon, de S*-Remi à
Reims, de S*-ÊtienneàCaen, en offrent de semblables. Les
lioaunes, primitivement séparés d'avec les femmes, occu-
paieni la grande nef et le collatéral de droite du rez-de-
chaussée, qui, pour cette cause, fut souvent, à l'époque du
Bas-Empire, construit plus large que celui de gauche, ré-
servé anx femmes. Les galeries du premier étage étaient
destinées aux vierges et aux veuves. Au xiii' siècle on les
supprima pour donner plus d'élévation aux collatéraux. Les
oels communiquent entre elles par de larges arcades, que
soutiennent des piliers ou des colonnes de formes variées,
n les voûtes que ceux-ci supportent sont souvent d'une
liardiesse étonnante. Lorsque l'édifice se termine absida-
lement par un mur plat, des autels font souvent face aux
nets latérales; mais souvent aussi celles-ci se terminent
en déoinbulatoire tournant autour du chœur et donnant
entrée dans de nombreuses chapelles absidales. Les mu-
railles sont, à l'époque romane, percées de fenêtres
étroites qui laissent de larges parois à la peinture mu-
rale. Vers le xiii' siècle, les fenêtres s'allongent, sans
é'élargir encore beaucoup. La nef centrale , toujours plus
élevée que les collatéraux, porte un ran^ supérieur de
hantes fenêtres, que viennent garnir les vitraux à grands
perscnnages, tandis que les vitres légendaires sont ré-
servées pour les nefs mineures. Au xiv* siècle, on com-
mence à péh^er les murs latéraux des basses nefs pour y
loger des chapelles, et, aux xv* et xvi", ces chapelles for-
ment un cordon continu tout autour de l'église. Bien plus,
tandis que, dans les premiers temps, le nombre des nefs
était fixé à trois, et que souvent même, pour des églises
d assez grande importance, comme la cathédrale d'Angers,
on se contentait d*une seule nef, on porta le nombre des
nefs à cinq, comme aux cathédrales de Paris et de Boor*
ges; on alla même Jusqu'à sept, notamment à la cathé-
drale d'Anvers. — Les basses nefs n'étaient pas nécessai
rement ouvertes par des porches ; le nombre de ces
entrées était laissé au gré de l'architecte, qui les propor
tionnait soit au nombre des fidèles, soit aux dispositions
intérieures de l'église. En l'absence de porches, on ter-
minait les collatéraux en façade par des fenêtres qui pré-
sentaient une gracieuse perspective. — Les églises des
Ordres mendiants offraient cette particularité qu'elles
n'avaient qu'une nef majeure et une nef mineure, pour
montrer leur pauvreté ressortant môme de leur église in-
complète. Quelaues paroisses réellement pauvres avaient
la même disposition. — Les nefs latérales ont reçu quel-
quefois une ou plusieurs entrées sur leurs flancs ; mais
il n'y eut pas de règles à ce sujet. Une pareille disposition
dut dépendre des exigences du service. Les grandes nefs
restèrent longtemps sans être voûtées, laissant apercevoir
U charpente de la couverture ; ou bien elles reçurent une
voûte en bois; vers le xin* siècle, on commença à leur
donner une voûte de pierre. E. L.
NEF (avant-), partie des anciennes églises chez les Grecs,
située à l'entree, avant la nef, et appelée dans les auteurs
priorpoHictM (premier portique), pronaos, et narihex.
Sans parler de Tantique abbatiale de Gluny, il existe une
disposition semblable dans les églises de Yézelay, de
S^-Père, de Notre-Dame de D\jon.
NËFYR, sorte de trompette des Arabes. On en tire des
sons, aigus et criards.
NÉGATION, en Grammaire, mot qui sert à nier. Tels
sont, en français, non, ne, ni. Non s'emploie dans les
réponses : « Est-il venu? — Non; » ou bien au commen-
cement des phrases renfermant une négation sur laquelle
on veut insister avec force: « Non, l'homme n'est pas
aussi pervers que vous le Bui>posez. » Il s'emploie encore
devant un adjectif, un participe, un adverbe, un sub-
stantif, auxquels on veut donner une valeur négative :
a Livres non réédités, non loin d'ici, etc. » Il entre comme
particule négative dans la composition d'un petit nombre
de mots, comme nonchalant, non pareil , non-activité,
nonobstant. — Ne s'emploie seulement avec les verbes :
u Je n'ose. Je ne puis, il n'y a... », et iq)rès beaucoup de
verbes ou de locutions qui expriment une idée négative,
ou obstacle , empêchement , crainte , restriction , etc. :
« La pluie empêchait qu'on ne se promenât. — Je crains
qu'il ne pleuve. — Prenez garde qu'il ne sorte. — Peu
s'en fallut qu'il n'interrompit Mentor. — Mais il s'en faut
bien au'il ne le fasse. » *
La locution française ne... que est le résultat d'une el-
lipse facile à suppléer : « Je n'ai trouvé que ces deux
livres, • c-à-d. « Je n'ai trouvé autre chose ou d'autres
livres que ces deux livres. » Il équivaut donc à l'adverbe
seulement. Dans l'ancienne langue, on ajoutait quelque-
fois pas ou point; les exemples en sont nombreux oans
Amyot, et l'on en trouve encore dans Corneille :
Ht ne rauront point vue obtflr qu% son prlnee,
c.-à-d. « Ils ne l'auront point vue obéira d'autres qu'à son
prince. » Cette locution, qui n'est plus usitée depuis deux
siècles, est fort logique. Aujourd'hui on dit et même on
imprime des phrases telles que celle-ci : a II n'y a pas
que lui qui pense ainsi ; » cela veut dire : « Il n'y a pas
d*autre nomme que lui qui pense ainsi ; » mais on prend
cette locution dans un sen^ tout contraire , pour dire :
a II n'y a pas seulement lui, il n'est pas le seul qui pense
ainsi. « C'est faire une double faute; car le mot que tout
seul ne peut s\g,mû&r swUement , sans qu'il réside dans
les deux mots réunis ne que; et le mot pas ne saurait
faire une double négation avec ne; ne pas équivaut abso-
lument k ne : n Je ne puis le faire , Je ne peux pas le
faire. » P.
NÉGOCIANT, celui qui fait le commerce en gros, qui
traite les grandes affaires, sans avoir ni boutique ouverte,
ni étalage, ni enseigne., et généralement celui qui a des
relations étendues avec les pays lointains. V. Commbr-
ÇANT, Commerce.
NÉGOCIATION , en termes de Banque, commerce des
billets et lettres de change. La loi du 20 vendémiaire
an IV (il oct. 1795) défend toutes négociations en blanc
de lettres de change et autres effets de commerce à ordre;
mais elle est tombée en désuétude. Les agents de change
ont seuls le droit de négocier les effets publics et autres
susceptibles d'être cotés à la Bourse.
NÈGBES (Traite des). V, Esci^vagb, dans notre Z>ec-
iionnaire de Biographie et d'Histotre* — Dans les États
NÉO
1304
NËO
noirs, libres, tels que Haïti, par exemple, nègre est une
injure; il faut dire d'un citoyen : il est noir.
NÉGRIER, b&timent qui fait la traite des nègres sur la
côte d'Afrique. L'entre-pont est dégagé, pour qu'on puisse
y entasser beaucoup d'esclaves ^ et percé de meurtrières
dans sa partie supérieure, pour étirer sur eux en cas de
révolte.
NEI, flûte faite de roseau, en usage chez les Turcs.
DiËIGES. V, Glaces et neiges.
NEITU, divinité de Tancienne Ég^te. On la repré-
sentait coiffée du klaft, partie inférieure du pschent ou
tiare royale et emblème de la basse Egypte. Elle tenait
an sceptre à fleur de lotus.
NÉMÉËNNES (Les), recueil d'odes composées par le
poète grec Pindare en l'honneur de ceux qui avaient rem-
porté des prix dans les Jeux Néméens ( V, ce mot dans
notre Dictionnaire de Biographie et (Vffistoiré).
NÉMÉSIS, déesse du ch&timent chez les anciens Grecs.
Elle était l'expression du système de rémunération établi
pour les actes humains : de là l'air grave et sérieux de
ses simulacres; de là aussi la mesure (la coudée) placée
entre ses mains, ainsi que le frein et le Joug qui lui
servent d'attributs. Certaines médailles de Smyrne la
montrent avec les attributs de la vertu , ayant quelque-
fois le bras gauche levé et un doigt sur sa bouche. L*épée
et le fouet placés dans ses mains font allusion aux ven-
geances dont elle était l'instrument. On l'a aussi repré-
sentée avec des ailes et sur une roue, comme la Fortune.
NÉu Ésis, titre donné par le poète Barthélémy à un recueil
des satires politiques on vers, et très-violentes, qu'il pu-
blia hebdomadairement à Paiis en 1831 et 1832. On en
fiti vol. in-8% Paris, 1833.
NÉNIëS, poëmo funèbre à la louange d*an mort, chanté
dans l'atrium de sa maison au son des flûtes et de la
Ivre, par une chanteuse et pleureuse à gages appelée prcB-
fica. Ce mot s'est appliqué aussi à des chants tristes quel-
conques; ainsi, Horace désigne les élégies de Simonide
de Cféos par les mots Cea nenia. L*ode du poète latin sur
la mort de Quintilius,
Qais desiderio ait pndor aut modus.
HOB., Od. 1 , 24.
est une très-belle nénie. Comme les nénies étaient pres-
'^ue toujours médiocres, on en donna le nom aux canti-
lènes populaires, et même aux rondes d'enfants. P.
NÉOGRiVPHE (du grec néos, nouveau, et graphéin,
écrire) , partisan ou promoteur d'une nouvelle manière
d'écrire les mots, ou de nouveaux signes pour mar-
quer avec précision les nuances de prononciation com-
munes à une même lettre. Le premier qui songea en
France à établir un système orthographique fut Geoffroy
Tory, en 1529, dans son Art et science de la due et vraie
prononciation des lettres proportionnées selon le visage
et le corps humain. En 1530, Palsgrave inventa l'accent
aigu. Vers le môme temps, Florimond introduisit l'usage
de Tapostrophe. Jacques Dubois, dit Sylvius, se fit le ré-
formateur de l'alphabet , imagina des marques de lettres,
des accents, des tirets, le tout pour rendre l'écriture con-
forme à la prononciation. Maigret, de Lyon, imagina la
cédille, et publia en 1545 son Tretté de la Grammere
françoëse, premier essai systématique d'une réforme de
l'orthographe : parmi bon nombre de bizarreries, quel-
qaea détails sont Judicieux. La voie était ouverte, et de
siècle en siècle on vit se succéder une foule de née
graphes proposant des systègies tout aussi bizarres, et à
peu près tout aussi puénls et stériles que ceux de Geof-
froy Tory, Palsgrave, etc., et poursuivant la chimère de
faire de l'orthographe l'image de la prononciation ; nous
sommerons Jacques Pelletier, en 1550, qui donna un
Dialogue de Vortografe e prononciacion françoëse: Ra-
mas, Gramere fransoese, 1562; Expilly, Uorthographe
fhtnçoise selon la prononciation de notre langue, Lyon,
1018; Lesclache, Véritables règles de Vortografe franr
ce»», ou Vart d'aprandre an peu de tems à écrire côrec-
tement: c'était un Auvergnat, on le voit de reste. En
1675, un certain Bérain proposa d'écrire ai au lieu de ot ,
partout où cotte syllabe devait sonner comme ai : il
échoua, et cette réforme ne commença de se répandre
qu'au xvm* siècle, quand Voltaire l'eut adoptée. L'Aca-
démie française continua de la repousser, et ne l'a ad-
mise Qu'on 1835, dans la 6* édition de son Dictionnaire.
L'abbe de Saint-Pierre, l'abbé Dangeau, Du Mas, auraient
voulu qu'il y eût dans l'écriture autant de figures que de
sons et d'articulations; que les lettres, employées à
d'autres fonctions que celles qu'elles ont ordinurement,
reçussent une marque distinctive, etc.; c'était proposer
de ravaler la langue française jusqu'à la langue chinoise.
Enfin presque tous les réformateurs de l'orthographe
furent plus ou moins atteints d'extravagance, et parmi
eux on a le regret de compter Beauzée et Duclos. V. le
mot suivant. P.
NÉOGRAPHIE et NÉOGRÀPHISME, innovation dans
la manière d'écrire les mots. Il n'y a pas de langue dont
l'orthographe n'éprouve des révolutions, souvent amenées
par le changement de la prononciation, d'autres fois né-
cessitées par le besoin de mettre l'orthographe en har-
monie soit avec l'étymologie, soit avec la physionomie gé-
nérale de la langue à certaines époques de son dévelop-
pement. Au xu* siècle, alors que le français commence â
prendre une physionomie bien déterminée et assez diffO'
rente de celle qu'avait eue la langue dite romane { vir«
XI* siècle), la manière d'orthographier les mots, quelle
qu'ait pu être leur prononciation , doit avoir eu de grands
rapports avec l'orthographe latine, comme on le voit par
les mots paor,paourjpavor), t (t6t^,u (udt), com {cum
ou quomodo), etc. U se prononçait sans doute encon.*
comme dans le latin et dans les langues méridionales :
de là le mot tut, aujourd'hui tout, u aujourd'hui ou. On
trouve au singulier, dès cette époque reculée, des con-
sonnes , caractéristiques de l'étymologie, supprimées à
titre de muettes : H cors, set noms (les corps, corpus,
sept hommes, septem^ etc.). Jusqu'au xv* siècle, il n'y eut
pas plus d'unité dans l'orthog^phe qu'il n'y en avait
dans la prononciation et dans l'organisation politique.
L'invention de l'imprimerie sembla devoir amener plus
d'ordre et de fixité; mais l'étude à peu près exclusive des
auteurs anciens introduisit en môme temps une confu-
sion d'un autre genre ; les érudits et les grammairiens
prétendirent qu'il fiUlait calquer l'orthographe des mots
d'origine latine ou grecque sur celle que l'on trouvait
observée dans les manuscrits. C'est à eux que Ton doit
ces formes bizarres : paulpierre (palpebra)^ paulme
(palma)^ etc.; ils faisaient un pléonasme de lettres, u re-
présentant l , et paume équivalant à palme, etc. Quant à
sçavoir, on lui donnait plus maladroitement encore un c,
qui ne se trouve pas dans l'original sapere : on songeait à
scire, qui n'a fait qtieescient et science. Les écrivains pro-
prement dits et le public voulaient s'en tenir à la tradition
de l'usage tel qu'on l'avait reçu du xiv« siècle, où Tortlio-
graphe fut en général assez raisonnable, et se rapprochait
beaucoup de celle qui est adoptée aujourd'hui. Malheu-
reusement cet usaçe variait de province à province, et
suivait plus ou moms l'analogie des prononciations dia-
lectiques ; et cette divergence donnait gain de cause à l'or-
thographe surchargée des érudits, qui avaient pour eux les
imprimeurs, presaue tous érudits eux-mêmes. Entro ces
deux partis se placèrent de prétendus novateurs qui propo-
sèrent, pour concilier tous les avis, d'introduire une ortho-
graphe conforme à la prononciation réelle, toutes les fois
Sue les lettres étymologiques étaient muettes. Leur sys-
^me, repris en partie au xvn* siècle par les Précieuses,
qui s'inquiétaient peu des étymologies, finit par triom-
pher dans les mots trésor au lieu de tkrésor, écrire au lieu
de escrire, écriture au lieu de escripture, etc. Quant aux
lettres doubles, le désordre qui avait toujours existé de-
puis l'origine de la langue continua, et l'on écrit encore,
avec une bizarrerie inexplicable, honneur et honnête ca
même temps que honorer, honorable {honor, honestus,
honorare), etc.
La néographie, renfermée dans de Jostes bornes et in-
troduite avec circonspection, peut donner à notre langue
une orthogpraphe plus généralement logique et naturelle,
et faire disparaître d'Inutiles difficultés souvent rebu-
tantes. Il ne s'agit que d'écarter les réformes absolues et,
à ce titre, presque toujours déraisonnables. U est bon, en
général, de tenir compte de l'étymologie, mais mieux en-
core de la dérivation ; ainsi , il est très-légitime de main*
tenir ps dans corps, non pas tant à cause du latin cor^
pus, qu'à cause des dériva corporel, corporation, d'une
part, et corsage, corset, corsdet d'autre part, etc. Ce qui
a fait échouer les réformateurs excessifs qui ont préten-
du mettre l'écriture dans une harmonie absolue avec la
prononciation, c'est qu'ils ne tenaient compte ni de rét>--
mologie, ni de la dérivation , ni par conséquent du sens
des mots. Enfin, pour une réforme, même raisonnable,
quelle est l'autonté reconnue assez infaillible pour la
proposer, et assez puissante pour la faire adopter? P.
NÉOLATINES (Langues), c-à-d. langues latines nou^
velles, nom donné aux idiomes nés de la déformation
du latin dans les siècles qui suivirent la chute de l'Em-
pire romain jusque vers le xii* siècle. Ce sont l'italiea ,
le provençal, le français, l'espagnol, le portupis, le va-
NEO
1305
NER
Jaque, et le rou manche ou roman-helvétique. Ce qui
frappe surtout lorsque Ton compare philologiquemcnt
€68 langues sœurs à leur mère commune, c*est le grand
nombre de syncopes et de contractions suhies par les
mots, la suppression ou Taltération plus ou moins pro-
fonde des désinences de déclinaison et de conjugaison. Ce
resserrement de syllabes s'obserrait déjà dans la lançue
populaire des anciens Ronuiins et dans la prononciation
des provinciaux. Après la dissolution de TEmpire d*Occi-
dent, la violation des règles, soit d*accord, soit de régime,
devint habituelle; et lorscpie toute étude littéraire sé-
rieuse eut peu à peu disparu, la langue populaire, sous
toutes ses formes dialectiques et locales, fut la seule qui
eut cours, et le petit nombre d'écrivains que Ton compte
à partir du milieu du vi* siècle se virent obligés de
l'adopter pour être compris du public , comme Grégoire
de Tours en fait Taveu explicite; encore le style de cet
écrivain doit-il être relativement élégant. Or, c'est de
cette langue de plus en plus irrégulière, confuse et défi-
gurée, qui s*appelait le romain ou roman , quelquefois
hngvê rtutiqiiê , que sont nées insensiblement les lan-
gues néolatines, et non pas de Tancien latin litténûre,
qui ne devait exercer d'influence sur ces langues et sur
leur littérature qu*à Fépoque de la Renaissance, à la fin
du XV* siècle et au xvi*. Les caractères distinctifs des
laofpes néolatines, comparées à l'ancien latin, sont:
l'existence de Tarticle, inconnu à celui-ci ; l'emploi fré-
quent des verbes auxiliaires pour marquer les temps
passés de l'actif autres que l'imparfait et le parfait dé-
fini; l'absence de toute conjugaison passive; la construc-
tion plus directe, plus uniforme , moins périodique et
moins savante, des phrases; l'emploi à çeu près con-
stant, surtout en français, des pronoms sujets devant les
verbes; la multiplicité des prépositions; l'emploi bien
moins fréquent des particules de liaison entre les phrases
et les membres de phrase ; un souci moins grand du
rfaythme proprement dit que de la netteté des idées, du
style, et de l'expression. P.
NÉOIjOGIE ( Ju grec néos, nouveau, et logos, parole],
invention et usage de termes nouveaux , ou emploi des
termes anciens dans un sens inusité Jusque-là. La néo-
logie n'est légitime que lorsqu'un terme nouveau est
exigé par le développement et le renouvellement des
idées, et qu'il épargne une périphrase. L'histoire litté-
raire de tous les peuples nous montre la tendance à la
néologie d'autant plus marquée que la décadence du goût
fait plus de progrès; aux époques où il règne encore,
cette stérile abondance trahit un génie médiocre, une
ima^ nation déréglée, une connaissance imparfaite du
génie de la langue. La néologie du xu* siècle a un ca-
ractère particulier qui s'est maintenu depuis : les mots
empruntés au latin conservent la physionomie qu'ils ont
dins cette langue à la lecture, au lieu que les mots du
moyen ftge, formés primitivement du latin parlé, s'écap-
tent davantage des formes latines littéraires. Amyot, par
sa traduction de Plutarque, introduisit dans l'usage un
grand nombre de mots et de locutions qu'il dut créer,
pour exprimer des usages de l'antiquité, ou reproduire
plus fldèlemeat une image brillante, une phrase expres-
«TO de son original. On dut aussi à Rabelais et à Mon-
taiçQe quantité de locutions heureuses ^ui sont restées.
Mais une bonne partie de ces acquisitions se trouva*
perdue dès le commencement du xvii* siècle, et Vau-
gelas en exprime son regret Toutefois un assez grand
àombre d'expressions et de locutions nouvelles s'intro-
duisirent alors ; tels sont les mots féliciter, doué^ ttuul-
t«r, insidieux, sécurité, transfuge , pudeur, bravoure,
prosateur, souveraineté^ vénération, ronflement, inao^
^, effervescence, impolitesse, exactitude, plaisan-
terie, connaisseur, désintéressement, intrépide, férocité,
dûof/per, insotUenable , insurmontable , esprit juste ,
raUlerie d^icate, tourner en ridicule, embarquer une
o/Tatre, prendre un parti, sacrifier et sacrifice (dans le
sens figuré), en user, contre-temps^ bénéficier (verbe),
luxuriant. Bienfaisance fut créé par l'abbé de Saint-
Pierre, verbeux par Fénelon , démagogue par Bossuet.
Au siècle suivant, Voltaire consacra par son patronage
vagissement et tragédien: J.-J. Rousseau, investigation,
regrettable , endolori , exubérance. Tous ces mots ont
«ne physionomie naturelle, un sens précis, et sont con-
fcrmes à l'analogie de notre langue. P.
NÉOLOGISME , abus de la néologie, manie d'intro-
duire des mots inutiles, c-à-d. destinés à exprimer des
idées clairement rendues déjà par d'autres mots ()ue
l'nsage a consacrés. De ce genre sont les mots omnipo-
tent et surgir, vûnement empruntés au latin , lorsque
tout-putssant et s'élever ou paraître disent la même
chose depuis tant de siècles; baser, lorsque la langue
possède depuis longtemps fonder, établir, appuyer; se
suicider, qui dit fort mal ce qu'expriment fort bien se
tuer, se détruire, se donner la mort. Il n'en est pas de
même du substantif suicide , très-bien formé, qui long-
temps manqua à la langue, et qu'on ne peut remplacer
que par des périphrases. Démoraliser est encore un mot
mal fait ; car il est tout à fait contraire à l'analogie et
n'a aucun rapport avec le positif moraliser, qui signifie
faire le moraliste, tandis que démoraliser est pris par
les néologues dans le sens de déconcerter les facultés
de Vàme, porter le découragement, V abattement dans
Vàme. Quant au sens de rendre moral, amener à la
pratique du devoir et de la vertu, que l'on donne au*
Jourd'hui au verbe moraliser, c'est également un néolo-
gisme
aussi
de . .
1er l'équivoque souvent produite par le mot égaler. A
auoi sert le mot distancer? Et que dit-il de plus que
dépasser, surpasser? On fait aussi abus du mot incom-
mensurable, improprement employé pour immense; car
ce mot, emprunté à la géométrie, a dans cette science
un sens tout différent et conforme à son étymologie.
Motion, dans le sens politique, quoique adopté par l'Aca-
démie , est un mot obscur. Confortable est barbare :
l'analogie ne sauxtdt en autoriser l'emploi que dans le
sens de susceptible d^étre fortifié ou consolé ; le radical
seul de cet adjectif est francs. Le tour affecté des
phrases, les alliances de mots téméraires, la bizarrerie
des figures, doivent être comptés aussi parmi les abus
de la néologie. Cest surtout parmi les talents de se-
cond et de troisième ordre que. l'on a à signaler ces
défauts littéraires, vrais fléaux des langues, et qui finis-
sent par corrompre le goût public et par influer sur les
grands talents eux-mêmes. P.
NÉOPHYTE. V, ce mot dans notre DictUmncùre de
Biographie et d^ Histoire,
NÉO-PLATONISME. V, Alexandrie (École d*}.
NÉORAMA, par corruption de Naorama (du grec
naos, temple , habitation, et orama , vue), représenta-
tion de l'intérieur d'un édifice animé par des pei)3on«
nages, et que le spectateur, placé dans un point central
du tableau même , aperçoit avec des effets de lumière
changeants. Le Néorama est un spectacle de Jour. L'in-
vention en est due à J.-P. Alaux, qui exposa à Paris,
en 1827, dans un local construit à cet effet, une vue de
l'intérieur de ]a bcuiliqtte de S^Pierre de Rome, et,
plus tard, celle de VAbbaye de Westminster, Ces pein-
tures furent assez médiocrement réussies, et le succès
n'en fut pas durable.
NÉO-ZÉLANDAIS ( Idiome}, idiome parlé par les ha-
bitants de la Nouvelle-Zélanae. Il appaitient au groupe
des langues malaises polynésiennes. On y trouve nos
cinq voyelles, et seulement neuf consonnes, g, h, k, m,
n, p, r, t, V. Point de déclinaisons, ni conjugaisons, ni
adjectifs, ni yerbes, ni adverbes. Les genres sont mar-
2 liée par l'addition de mots signifiant mâle et femelle.
'article et le pronom prennent seuls la marque des
nombres. Les Néo-Zélanoais ont des chants d'amour, do
guerre, de mort, et des chants satiriques; ils recueillent
aussi les tradiûons des aïeux, et possèdent des espèces
de généalogies en vers.
NÉPOTISME (du latin nepos, neyeu, petit-fils), mot
créé au &v* siècle en Italie pour exprimer la faveur qnu
certains papes accordèrent à leurs neveux, l'autorité
qu'ils leur abandonnèrent dans l'administration publique.
Par extension, on l'appUaue aux actes des hommes haut
placés qui distribuent à leurs parents les emplois et les
honneurs,
NEPTUNE, Dieu italique de la mer et de la naviga-
tion, analogue au Nérée et au Poséidon des Grecs. Il eu:
un temple à Rome dans le Qrque Flamînius; plus tard ,
Cn. Domitius en fit bâtir un second, où l'on plaça un
groupe de Poséidon, de Thétis et d'Achille, dû au ciseau
de Scopas. Nous possédons fort peu de simulacres anti-
ques de Neptune. Les poètes lui donnent un air farouche,
des traits exprimant la force et la virilité, une chevelure
ruisselante d'eau de mer, et l'arment d'un trident, in-
strument de pêche, dont il firappait aussi les flots pour
les soulever. Neptune avait poor attributs le dauphin, le
cheval, qu'il avait fait naître, selon la Fable, dans sa
lutte contre Minerve, et on lui consacrait le pin, qui
croit sur les rivages. B.
NÉRÉE, dieu des eaux chez les Pélasges, absorbé plus
NKU
1306
NEU
tard par le Poséidon des Hellènes, et réduit alors à la
conditfoi; de hdros. Il était surtout la personnification
des flots écumeux, et, poiir ce motif, on le représentait
comme un vieillard à cheveux blancs. Sa chevelure et sa
barbe formées de plantes marines prouvent qu*il n'était
pas un dieu des eaux en général, mais le dieu des vagues
de la mer. B.
NÉRÉIDES, filles de Nérée. L'Antiquité les a dé-
peintes fol&trant à la surface des mers; leurs cheveux
blonds symbolisent les reflets du soleil sur les flots. Sur
un sarcophage en marbre pentéligue provenant du Ca-
pitole et que possède le Musée du Louvre, elles sont cou-
ronnées de lierre et portées sur des Tritons. Des médailles
et des pierres gravées romaines les montrent parfois
avec un corps terminé en queue de poisson. Quelquefois
elles tiennent une branche de corail, ont des perles dans
les cheveux, et une draperie voltigeant sur les épaules.
NÉRET, diminutif denotr, au moyen &ge, désignait,
non une monnaie particulière, mais toute monnaie de
billon.
NERVURES , côtes ou arêtes saillantes des voûtes ogi-
vales, dont elles tracent les contours et les comparti-
ments. Les nervures sont comme la carcasse ou la char-
pente des voûtes; elles en forment les rudiments, en
divisent et en répartissent la charge sur les points d'ap-
pui ; elles simplifient en outre les moyens de construc-
tion, car lorsqu'elles sont taillées et mises en place, le
reste de la voûte n'est plus qu'un remplissage. Les ner-
vures ne commencent à paraître qu'au temps de la
transition. Elles affectent d'abord la forme simple d'un
gros tore, puis elles se profilent aux différentes époques
suivant le goût changeant des styles. Vers le xv* siècle,
les tores se changent en guirlandes de feuillages. Puis ,
les nervures, après avoir été un élément gracieux de
construction, deviennent on ornement aux formes les
plus diverses, forment des dessins et des réseaux com-
pliqués, et se combinent en outre avec les clefs pen-
dantes. Cest dans les églises du Nord, notamment en
Belgique, qu*on remarque les plus belles voûtes ornées
de nervures croisées. — On donne encore le nom de
Nervures aux moulures placées sur des parties lisses ou
des angles, aux côtés des cannelures, et aux côtes éle-
vées qui, dans les feuilles d'ornement, représentent les
tiges des plantes naturelles. E. L«
NESKHI (Alphabet), c.-à-d. écriture des copies, al-
λhabet dont les Arabes se servent aujourd'hui pour écrire
cur langue, et qui, avec l'addition de quelques signes,
est devenu commun aux Turcs et à presque toutes les
populations musulmanes de l'Asie. C'est une écriture
plus cur^ve à la fois et plus complète que le coufique ,
dont elle dérive, sans lui être cependant postérieure de
beaucoup. Les Persans ont une manière élégante de la
tracer, à laquelle ils donnent le nom de talik (sus-
pendue). L'invention du neskhi est g(^néralement attri-
buée au vizir Ibn-Moklah, dans la première moitié du
X* siècle; mais il est employé sur des médailles plus an-
ciennes.
NESLB (Toor de). F. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire.
NESLB , monnaie de billon qui eut cours en France au
xvn* siècle, et qui tira son nom de la tour de Nesle où
elle avait été fabriquée. Elle valait 15 deniers.
NESTORIEN (Alphabet). V. Syriaque.
NEUF3IB ou NEDME , droit du neuvième que les curés
prenaient autrefois sur les biens meubles des personnes
décédées.
NEUMES, signes que Ton substitua aux caractères
grecs et aux lettres de l'alphabet latin servant à indiquer
la durée relative des notes de musique. Les neumes, dont
le dessin représentait la succession, l'élévation et l'abais-
sement des notes, et formait même des groupes de notes,
étaient souvent accompagnées des lettres elles-mêmes.
Cette notation se composait de signes représentant des sons
isolés, sous la forme dépeints, de virgules, de traits
horizontaux ou penchés, et des groupes de sons, sous la
forme de crochets et de traits contournés et liés de di-
verses manières. Les caractères neumatiques, quoique
représentant des sons, ne constituaient pas un système
complet de notation ; car, sans les lettres, ils n'offraient
{>a8 au lecteur les indications sufiisantes pour acquérir
'intelligence positive et claire de chacun d'eux. Chaque
signe neumatique avait un nom particulier indiofuant sa
videur et son emploi. Voici les noms des principaux
neumes que Ton rencontre dans les anciens manuscrits :
viîjfule, point , clivus, podatus, scandicus, climacus,
priscus, gnomo, porrectus, franciUus, quilisma, etc.
On a[>pelle aussi Neume la suite de sons qui forme la
terminaison d'un verset de psaume^ probablement parce
que, dans certains tons, on chante plusieurs sons sur la
même syllabe. Cette qualification est impropre; car le
neume, du mot gfecpneuma (soufile) , est une vocalisa-
tion assez développée, qui a un sens symbolique et ex-
{irime, selon S' Augustin, le transport de l'&me, dont
'enthousiasme, ne trouvant pas d'expressions suffisantes,
se manifeste par des sons inarticulés (les Latins l'ont
aussi appelé Jubilum ). Les neumes n'ont guère lieu que
sur les lettres e et a, comme dans Kyrie et dans AUf-
luia. Le moyen A^ qui aimait à donner un sens sym-
bolique à tous les actes de l'art religieux, attribuait
cette coutume à la Joie apportée au monde par les mou
de la Salutation angélique : Ave, Maria. Le mot neume
est masculin ou féminin à volonté , selon qu'on le rap-
porte au mot grec, ou à son dérivé latin neuma^ œ
(suite de sons). V. Tardif, Essai sur les neumes^ 1853,
in-8°. ^ F. C
NEUTRALITE, situation d'un État qui reste en paix
relativement à plusieurs puissances belligérantes et ne
prend aucune part à Jours hostilités. La neutralité est
dite armée, quand l'État qui reste neutre tient sur pied
des forces suffisantes pour faire respecter son territoire
ou ses droits. La manière d'agir des puissances belligé-
rantes à l'égard des neutres a varié selon le degré d'achsr-
nement qu'elles portaient dans la ^erre, et selon les
progrès de la moralité. Une convention conclue à Paris,
le lo avril 1856, entre la France, l'Autriche, l'Angleterre,
la Prusse, la Russie, le Piémont, l'Espagne et la Turquie^
a reconnu la neutralité des mers, aboli les lettres de
marque et les armements en course, et n'a admis de
blocus que le blocus effectif; elle a proclamé que le pa-
villon couvre la marchandise ennemie, à l'exception de
la contrebande de guerre, et que la marchandise neatre,
à l'exception de cette même contrebande, n'est pas sai-
sissable sous pavillon ennemi. Par conséquent, la liberté
du commerce maritime existe pendant la guerre, et la
navigation peut se faire d'un port neutre à an port en-
nemi ; tout ce qui n'est pas l'instrument direct et armé
des gouvernements en état de guerre est neutralisé.
Les Etats-Unis d'Amérique, dans la guerre des États du
Nord contre ceux du Sud, ont aussi reconnu ce principe
en 1861. — Certains États sont, d'un consentement^
néral, neutres en toutes circonstances : les puissances
belligérantes ne peuvent traverser leur territoire, y lever
des recrues, des subsides, etc. On peut encore neutra-
liser, c-àrd. mettre en dehors des opérations militaires^
un canton, une ville, un territoire quelconque, pour
qu'ils puissent, par exemple, servir de rendez-vous à
des négociateurs. V. Hautefeuille, Des droits etdes dO'
voirs des nations neutres en temps de guerre maritime ,
2« édit., 1858, 3 vol. in-S». B.
NEUTRE, mot d'origine latine, qui signifie : ni Tua
ni l'autre; il s'applique en Grammaire aux déclinaisons
et aux conjugaisons. Dans les noms substantifs et adjec-
tifs, les Grecs, les Latins, les Allemands, les Anglais,
ont un genre neutre. Quelle que soit la terminaison du
nominatif, il y a toujours, tant au singulier qu'au plu-
riel, trois cas semblables, le nominatif, le vocatif, l'accu-
satif; au pluriel , ces trois cas sont terminés en a dan»
les langues grecque et latine. En angliûs sont neutres
tous les noms d'animaux et de choses. — Dans la conju-
^son, on appelle Neutre un verbe qui exprime uu
simple état absolu, comme languir; ou une action qui
reste tout entière dans le sujet sans avoir besoin d'ea
sortir, comme demeurer^ marcher, courir, naître, mou-
rir, etc. Ces deux classes de verbes neutres sont appe-
lées verbes neutres intransitifs ; ceux qui ont besoin
d'un complément indirect ou circonstanciel , comme
aller, venir, nuire, sont des verbes neutres transitifs
( V. TnANsrriF, Intransitip). Dans la pratique, on recon-
naît mécaniquement un verbe neutre en ce qu'il ne peut
prendre la forme passive, ou en ce qu'il ne peut être
suivi d'un complément direct en français, en italien, en
espagnol, en anglais ; de l'accusatif en grec, en latin, ea
allemand. Néanmoins, certains verbes neutres devien-
nent actifs dans quelques cas ; tels sont en français wi-
loir, coûter^ passer, parler, employés flgurément pour
procurer, occasionner, nécessiter, franchir, omettre,
employer (en parlant). Réciproquement, beaucoup de
verbes actifs deviennent neutres en vertu d'une ellipse :
ainsi, changer, tourner, retourner, repousser, tenw, etc»
Il y a encore des verbes neutres qui se construiseni
comme des verbes passifs en vertu d'une syllepse, comme
1 périr. Une particularité des verbes neutres latins et alto»
NEV
1307
NIE
mands est de pouvoir s'employer passivement et fmpor-
sonoellement à la troisième personne du singulier, par
oiemple saltatur, P.
NEUTRES. V, Neutralité.
NEUVAINE, espace de neuf jours consécutifs pendant
lesquels on fait, en Thonneur de Dieu, de la S*« Vierge,
ou de quelque Saint dont on implore le secours, certains
actes de dévotion , tels que prières particulières , obla<
tiens , aumônes, assistance à des messes, stations, pèle-
rinages, etc. Il y a tous les ans à Paris, du 3 au 12 jan-
vier, dans réglise S^-Étienne-du-Mont , une neuvaine
rélèbre en Thonneur de S^'-Geneviève , patronne de la
ville. Cest pendant la neuvaine qui suit Tanniversaire
de la fête de S*-Janvier que doit s'accomplir, à Naples ,
la liquéfaction du sang de ce Ssdnt. — Les Anciens attri-
buaient aussi à certaines cérémonies répétées pendant
neuf jours consécutifs une vertu particulière : ils croyaient
pouvoir détourner, par des sacrifices offerts durant ce
nombre de jours {tiovendiales feriœ)^ les malheurs dont
les menaçaient les prodiges. C'était au 9" jour après la
mort d'une personne, qu'on déposait ses cendres dans
une urne, et on offrait on sacrifice appelé novendicUe sa-
crifichun. B.
NEUVIÈME, en termes de Musique, intervalle disso-
nant de 0 degrés. La neuvième est la réplique de l'inter-
valle de seconde. On appelle accord de neuvième celui
où la neuvième est unie a la tierce et à la quinte, comme
sol si ré la. La neuvième de cet accord peut être mi-
neure, majeure, ou augmentée, la tierce majeure ou mi-
neure, et la quinte juste, diminuée, ou augmentée. Cette
neuvième est aussi toujours prépairée, et se résout en
descendant d'un degré. La neuvième augmentée, qui ne
se présente que sur le 6* degré du mode mineur, se
résout, au contraire, en montant d'un degré. L'accord de
neuvième se marque, dans la basse chiffrée, par un 0.
— Vaccord de neuvième et septième diffère du précédent
en ce que la septième y tient la place de la quinte, quel-
fois même de la tierce. La septième doit y être préparée
et résolue, mais la résolution ne se fait pas tou)ours en
même temps que celle de la neuvième. B.
NEVERS (Église S^-Ctr, à). Cette cathédrale s'élève
sur remplacement d'une autre construite au ix* siècle,
et qui avait elle-même succédé à une basilique consa-
crée à S^ Gervais et à S' Protais. On a soutenu , sans
beaucoup de vraisemblance, que deux piliers ronds si-
tués au bas de la nef, et quelques pans de muraille
de la chapelle S*'-Julitte, mère de S' Cyr, de Tarse,
sont des vestiges de l'ancienne construction. La grande
nef appartient au style ogival primitif, le chœur et trois
chapelles absidales au style secondaire, les chapelles
latérales et la tour, au style tertiaire. La cathédrale de
Nevers est b&tie sur un plan qui n'a guère d'analogue
en France : elle présente à ses deux extrémités deux
erandes al)sides,dont Tune, celle de l'O., forme le chœur,
«t Tautre, celle de TE., est consacrée à S^* Julitte; par
suite, les portes d'entrée sont rejetées sur les flancs do
l'édifice. Le transept, qui est de la période romano-by-
zantine, n'est pas, comme dans nos autres monuments,
eorre le chœur et la nef, mais au bas de celle-ci, ainsi
qa*on le voit encore à l'église des SS.-Apôtres, à Co-
logne. A l'extérieur, le monument présente un aspect
grave et sévère. De deux tours qui avaient été élevées
d'abord à l'occident, l'une a été brûlée; l'autre, con-
struite de 1509 à 1528, et restaurée de nos Jours, a une
élévation de 52 met., depuis le sol jusqu'à l'appui de la
iKilustrade découpée à jour. Elle est divisée sur sa hau-
teur en trois parties par des galeries à jour portant sur
des cornichea en encorbellement ; les quatre angles en
sont flanqués de tourelles, octogones en commençant et
hexagonales à leur sommet. La partie la plus rapprochée
du sol est simplement recreusée de nervures; les faces
de la partie intermédiaire offrent de grandes figures en
demi-ronde bosse, recouvertes de riches dais ; la partie
supérieure est décorée de statues et de sculptures délica-
tement travaillées. L'intérieur de Téglise, long de 110
met., se divise en 9 travées, dont 5 pour le chœur et
4 pour la nef. La perspective en est imposante ; mais une
partie des vitraux a péri, et une lumière trop abondante
fatigue la vue. On remarque, entre les ogives du trifo-
rium, des Anges figurés en relief. Les chapiteaux des
<!olonnes montrent une étonnante variété de détails, em-
prantés au r^;ne végétal. La comtesse Marie d'AIbret et
^ dames de sa cour avalent fait, pour Tornement du
diœur, des tapisseries de haute lisse représentant le mar-
^Te de S' Cyr; elles sont dans l'état le plus déplorable. B.
këvers (Kaiencos de). V. au Supplément,
NEVEU, NIÈCE, fils ou fille du frère ou de la sœur,
qui par contre sont dits oncle et tante. On appelle petite
neveu le fils d'un neveu ; neveu à la mode de Bretagne ,
le fils du cousin germain ou de la cousine germaine ( la
Coutume de ce pays regardait les cousins germains et les
cousines germaines comme frères et sœurs). Les neveux
et nièces sont parents au 3* degré avec leurs oncles et
tantes. Il ne leur est permis de se marier avec eux qu'au-
tant qu'ils ont obtenu , pour motifs graves , mainlevée
de la prohibition prononcée par la loi {Code Napol.^
art. 163, 164). La représentation est admise en leur
faveur dans les successions. 11 est permis aux oncles et
tantes de faire substituer leurs biens en faveur de leurs
neveux et nièces.
NIBELUNGEN. V. Nibbelcngen.
NICHE (de l'italien nichio, coquille}, enfoncement de
forme variable, pratiqué dans rintérieur d'un mur, et
destiné à recevoir une statue, un groupe, un buste, un
vase |>u tout autre objet d'ornement. La niche antique,,
réglée dans ses dimensions, a ordinairement en hauteur
deux fois sa largeur. Les grandes niches formées par des
murailles entières s'appellent culs-de-four : les Romains
en ont fait un fréquent usage, et les ont couvertes de
voûtes élégantes et gracieuses. Le sanctusdre absidal des
basiliques fut ainsi une niche en cul-de-four, et cette
forme se conserva longtemps dans les édifices chrétiens.
Le style romano-byzantin adopta des séries de niches
serrées les unes contre les autres, dans lesquelles on
plaçait les statues des Saints; souvent ces niches n'étaient
que des arcades à Jour. Le style ogival préféra aux niches,
pour les statues, des culs-de-lampe sidllants couronnés
de dais : cependant, vers la 3* période ogivale, on vit
les pinacles et les clochetons se couronner de niches à
jour. La Renaissance reprit les niches antiques, mais
les encadra de la manière la plus heureuse : on peut
citer comme exemple les charmantes niches qui déco-
rent la façade de l'hôtel de ville de Paris. Au xviii^» siècle,,
on trouva, pour des niches d'église, une nouvelle dispo-
sition, blâmée par les puristes, mais qui donne un effefe
heureux de lumière : une niche, placée derrière l'autel
absidal, est pratiquée en dehors du mur, et reçoit direc-
tement la lumière par sa coupole à jour; elle form»
comme une espèce de petit thé&tre représentant le çlobe
terrestre, sur lequel rampe le serpent que la Viergo
écrase de son talon ; la chapelle, peu éclairée, sert de
repoussoir à la niche et au si^et religieux qu'elle con-
tient, et qui sont vivement éclairés par la lumière tombant
de la coupole. On voit de ces niches modernes à Paris ,
dans les églises S^-Roch et S^-Sulpice. — On nomme
niches à cru celles qui prennent naissance immédiate-
ment au rez-de-chaussée, ne s'élèvent sur aucun corps
ou massif, et reposent sans plinthe sur l'appui continu,
d'une façade (telles sont les deux grandes niches du.
portique de l'église Saint-Snlplce, à Paris) : ces niches
reçoivent ordinairement un piédestal ; niches rustiques^
celles dont les bandeaux sont décorés de refends et de
bossages; niches en tour ronde, celles creusées dans le pa-
rement extérieur d'un mur circulaire, et niches en tour
creuse, celles creusées dans le parement intérieur; niches
feintes, celles qui n'ont que très-peu de profondeur^ et
dont les figures sont peintes ou en bas-relief. — La niche
d'exposition est une espèce de petit trône ou de taber-
nacle fait en bois doré et sculpté, ou orné d'une riche
étoffe, avec un dais surmonté de panaches: on la place
sur l'autel pour y exposer le S*-Sacrement pendant ser*
tains offices. E. L.
NICOLO, ancien instrument de musique. V. Bou-
HARDE
NIEBELUNGEN (Les), poôme épique allemand du
moyen ftge. Il se divise en deux parties : la première est
consacrée au récit des aventures et de la mort de Sieg-
fried. Ce héros, fils de Siegmond, roi des Pays-Bas, se
rend à Worms, où réside Gunther, roi des Bourguignons.
Gr&ce à la force et au don d'invisibilité que lui donne
un manteau magique, il idde ce prince à vaincre la belle
Brunhilde, reine guerrière d'Islande, qui avait juré de
n'épouser que son vainqueur. Gunther accorde sa sœur
Chrimhilde à Siegfried, Brunhilde, devenue la femme
du roi des Bourguignons, apprend, dans une «querelle
avec Chrimhilde, nue ce n'est pas Gunther, mais Siegfried
qui l'a vaincue : elle charge de ees vengeances Hagen de
Troneck, qui assassine Siegfried au milieu d'une partie
de chasse et jette dans le Rhin le trésor que ce héros a
enlevé jadis aux Niebelungen , princes résidant au loin
dans le Nord. Dans la seconde partie du poème, Chrim*
hilde épouse Etzel (Attila), roi des Uuns, et venge crueU
NIE
1308
NIO
tanent la mort de son premier mari : elle invite les Bour-
guignons, que le poëte appelle ici Niebeiungen, à une fête
où elle les fait massacrer, et avec lesquels périssent ses
frères Gunthcr, Gernot et Giselberr; elle tue de sa pro-
pre main Uagen, qui emporte en mourant le secret du tré-
sor, mais est frappée elle-même par Hildebrand, vassal
de Dietrich de Berne, qui a succombé dans la lutte.
Cette épopée, que des critiques allemands n*ont pas
craint de placer à côté et même au-dessus de Vlliads,
est un assemblage de chants nationaux, d*une antiquité
reculée, auxquels un auteur inconnu a donné, vers Tan
1210, la forme sous laquelle on les trouve dans un ma-
nuscrit de la bibliothèque de Munich. Deux manuscrits
de Saint-Gall et de Hohenems nous donnent le même
poème remanié. On a attribué les Niebelungen à Conrad
de Wurzbourg, à Klingsœr, à Wolfram d'Ëschenbach, à
Henri d*Ofterdingen. Il y a, dans ces chants épiques, un
mélange de faits historiques, tels que la ruine de la mai-
son de Bourgogne et les exploits d'Attila, avec des tradi-
tions de VEdda islandaise. Le nom môme des Niebelun-
gen ou Niflwigen rappelle le Nifiheim, ce lieu froid et
sombre dont la mythologie Scandinave faisait un Enfer.
On le fait venir généralement de Kebel jung, enfant du
nuage. Chaque vers du poème des Niebelungen compte six
longues; au milieu est une césure^ de sorte que chaque
moitié de vers a trois longues. Le nombre des orèves qui
se Joignent aux six longues est indéterminé, et varie de
quatre à dix. Il en résulte que les vers sont tantôt lam-
bi(][ues, tantôt trochaîques, ou bien anapestiques et dac-
tyliques. Quatre vers forment une strophe. Les rimes
sont tantôt masculines, tantôt féminines. A la suite des
Niebelungen se trouve un poème qui parait avoir été
composé vers la fin du xii" siècle : il est intitulé Klage
(la Plainte) ; la rime y arrive toujours après trois longues,
au lieu de ne venir qu'après la sixième. On y voit les
funérailles des héros morts du côté d'Attila, le message
«nvoyé dans leur pays pour y porter la nouvelle de leur
mort, et les honneurs accordés à Dietrich de Berne. —
La meilleure édition des Niebelungen a été donnée en
1826 par Lachmann, d'après le manuscrit de Munich;
le baron de Lassberg a publié le manuscrit d' Hohenems;
il existe encore d'autres éditions par Christophe MQller
(1782), Von der Hagen (1810), Zeune (1815), Vollmer,
Schœnhuth, et Leyser. La meilleure traduction en alle-
mand moderne est celle de Simrock, bien préférable à
celles de Von der Hagen, de Bûsching, de Rebenstoclc, et
de Hinsberg. Nous avons aussi une traduction française
par M"** Moreau de La Mellière, publiée par Fr. Riaux,
1839, 2 vol. in-8<>. V. Gôttling, Sur ce quHl y a d'histo-
rique dans les Niebelungen, enallem., Rudolstadt, 1814;
Mohne, Introduction aux Niebelungen, en allem., Hei-
delberg, 1818 ; Von der Hagen , Sur les Niebelungen et
leur composition, en allem., Breslau, 1819, et Examen
des Niebelungen, Francf., 1824; Grimm, Légendes hé-
rdques allemandes, en allem., 1829; Lachmann, Cri-
tujue des Niebelungeny dans le Musée du Rhin de 1830;
le même. Sur la composition priinitive des Niebelungen,
Berlin, 1816; le même. Examen des Niebelungen et de
la Plainte, ibid., 1836. — Les principales scènes des
Niebelungen ont fourni des sujets de fresques au peintre
Cornélius ; elles ont été aussi peintes par Schnorr dans le
palais du roi de Bavière à Munich. B.
NIELLB. en italien niello^ en vieux français nœlle,
noele, noïele, noms dérivés du latin nigellus, noir. On a
appelé ainsi l'émail noir dont les orfèvres du xv* siècle
couvraient les tailles d'une planche d'argent gravée à la
pointe ou au burin, et la planche elle-même ainsi émaillée.
On obtient l'émail noir en faisant fondre ensemble 38 par-
ties d'arsent, 72 de cuivre, 50 de plomb, 384 de soufre,
et 36 de borax, qu'on fait chauffer Jusqu'à vitrification :
cette composition, une fois refroidie, est pilée, broyée et
tamisée en poudre très-fine, qu'on répand avec précau-
tion sur les parties gravées de la planche d'argent. On
place la planche près d'un feu clair, dont un sotSSet ren-
voie sur elle la flamme; le nielle, mis de nouveau en
fusion, adhère au métal, et, après avoir laissé refroidir,
on use la superficie de la planche avec une pierre ponce,
puis avec des matières plus douces. — On a trouvé à
Rome, en 1793, des chandeliers et des bracelets niellés
que l'antiquaire Visconti croit pouvoir faire remonter au
t* siècle. La niellure fut pratiauée en France dès le
▼n* siècle, surtout par les Marseillais; elle servit à orner
des calices, des reliquaires, des poignées d'épée, des
manches de couteau, des couvertures de livres, etc. La
bibliothèque de l'Arsenal, à Paris, possède un Christ bé-
«iisant, ench&ssé dans une reliure du xui* siècle. A par-
tir du XV', les nielles furent fabriquées presque exclusi-
vement en Italie. Le Musée de Florence possède une Paix
niellée en 1452 par Maso Finiguerra, pour l'église SWean
de cette ville. Les autres orfèvres nielleurs dont les noms
sont parvenus jusqu'à nous sont: à Florence, Amerighi,
Michel-Ange Bandinelli , Phil. Brunelleschi ; à Boloi^ne,
François Furnio, Bartolomco Gesso, Geminiano Rossi, ot
le Francia; à Milan, Daniel Arcioni et Caradosso; Ain-
broise Froppa de Pavie, Forzone Spinelli d'Arezzo, Tagli;-
came de Gènes, Tencro etTurino de Sienne; enfin, Ani.
Danti, Pierre Dini, Gavardino, Léon-J,-B. Alberti, Per(^
grini de Césène, etc. De nos Jours, les Russes ont fau
revivre la niellure en l'appliquant à la décoration dii
tabatières d'argent, improprement appelées tabatières ch
plcUine. En 1830, un atelier de niellure a été ouvert?
Paris par Wagner et Mention. V. Ducbesne, Essai sut
les nielles, Paris, 182G, in-8o. B.
NIGAUD (Le), Jeu de cartes, appelé aussi la Patienci
russe» Il se joue, à un nombre indéterminé de joueurs,
avec un jeu complet ou même deux. On fait trois lots de«
enjeux, un gros, un moyen, et un petit, pour les premiers
qui gagneront. Toutes les cartes ayant été distribuées
une à une, chaque Joueur fait un tas de celles qu'il a re-
çues, et les retourne. Le premier à Jouer prend sa carte
de dessus, et s'en débarrasse sur celui dont le tas montre
une carte immédiatement inférieure; il continue Jusqu'à
ce qu'il ne trouve plus à placer de carte de cette manière.
Les autres Joueurs font de même à leur tour. II peut se
faire qu'un Joueur se trouve chargé peu à peu d'une
grande quantité de cartes; il ftiit le nigaud on la pO"
tience : s'il a occasion de Jouer, comme ses cartes se
suivent, il se débarrasse promptement, ce qui s'appelle
la débâcle. Les trois premiers Joueurs qui ont écoulé
leurs cartes gagnent les enjeux.
NIHILISME (du latin nthil, rien), nom par lequel on
désigne la doctrine sceptique de Hume. Partant de ce
principe admis par Locke, que nous ne connaissons rien
que par Vintermédiaire des idées , Hume démontrait ri-
goureusement que nous ne connaissons rien autre chose
qus nos idées, et qu'ainsi tout dans le monde se réduit à
une suite d'iaées et de sensations purement subjectives,
sans qu'il soit besoin de concevoir nors de nous quelque
réalité que ce soit. B-— b.
NILOMËTRK. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
NIMBE (du latin nimbus, nuage), nom que les Anciens
donnaient, tantôt au nuage dans lequel un Dieu s'enve-
loppait pour descendre sur la terre, tantôt à la couronne
lumineuse d'une divinité, d'Apollon ou le Soleil par exem-
ple. Le nimbe est aussi un attribut de la sainteté dans
l'Iconographie chrétienne : comme la gloire et Yauréole,
il entoure la tête des personnes divines, des anges et des
saints; on en a mis même quelquefois aux empereurs et
aux rois comme marque de leur puissance. Le nimbe est
variable de forme. Lorsqu'il est triangulaire, il ne con-
vient qu'à Dieu; il indique la S^* Trinité, sans désigner
particulièrement une des trois personnes ; si , de plus, il
est Inscrit dans un cercle, il indique en outre l'éternité.
Le nimbe circulaire uni convient aux personnes divines,
aux anges et aux saints; quand il se place sur la tête
d'une dfes trois personnes divines, on le marque d'une
croix, et il est dit nimbe -crucifère. Le nimbe est aussi
souvent rayonnant ^ c.-à-d. accompagné de rayons : lors-
que ceux-ci forment une croix, le nimbe est encore cru-
cifère. Les nimbes portent quelquefois le nom des per-
sonnes qu'elles couronnent. Enfin ils prennent différentes
désignations suivant leurs ornements; c'est ainsi qu'on
dit qu'un nimbe est polylobé, festonné, orÛ^ etc. La
couleur donnée aux nimbes dans les anciennes pein-
tures a été quelc^uefois symbolique, comme le prouve le
nimbe noir, ou nimbe en deuil, attribué au traître Judas;
plus souvent elle est purement hlérarchiaue. Un manu-
scrit de la bibliothèque de Strasbouiv, pemt, dit-on, par
Herrade, abbesse du monastère de S'*-Odile en Alsace,
représente tout le Paradis : le Christ, les Vierges, les
Apôtres, les Martyrs et les Confesseurs portent le nimbe
doré ; les Prophètes et les Patriarches, qui n*ont connu
la vérité qu'imparfaitement et à travers des métaphores,
ont le nimbe en argent; les continents sont ninu)és en
rouge, les mariés en vert, les pénitents en couleur Jau-
nâtre légèrement nuancée.
NIMES (Arènes, — Maison carrée de). V, AaioiES,
Maison carrée.
NINIVE (Ruines de). V. Asstmbn (Art).
NIOLË (par corruption de yole)^ nom donné, dans les
marais du bas Poitou, à une nacelle en planches de chêao.
NOE
1309
NCEU
dont les deux extrémités, légèrement relevées au-dessus
de l'eau, sont coupées carrément. Le nioleau (ou petite
Dîole) est carré à Tarant, et se termine en pointe k l'ar-
rière. Dans les résates, on se sert de nioleaux appelés
périssoires. Le nioïeur, qui conduit l'esquif, est placé à
l'arrière, et manœuvre une ningle, hampe de 2 à 5 met.
de long, terminée car une dent de fer à double pointe.
NIQUET, monnaie française de peu de valeur, frappée
nti temps de Charles YI. On pense que NiqtÂet est une
abréviation de NicolaSy nom du monnayeur qui aura été
chargé de fabriquer ces espèces.
NIZÂM. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogror
phie et d'Histoire,
NOBILIAIRE, livre contenant le catalogue généalogique
(t's familles nobles d'un pays, avec leurs titres et armoi-
ries. V, Arhorial.
NOBLE, monnaie. \ V. notre Dictionnaire de Btogra-
NOBLESSE.
phie et ^Histoire.
ROBLESSB (Quartiers de^. V. Ocartier.
MOBLBssB (Titres de). V, Noms bt rrrass.
HOBLESSK DU 8TTLB, qualité conslstaut en une certaine
élévation de sentiments et de pensées qui fait éviter les
objets vils, les expressions basses et triviales. La noblesse
De convient pas seulement à quelques compositions ; les
sujets les plus simples, les détails les plus humbles ont
une noblesse qui leur est propre et que le goût sait dis-
œroer. C'est la pensée de Boileau (Art poét»y ch. x) :
Quoi que vous écrlvlei, tfvites la basseue ;
Le style le moins noble a pourtant sa noblesse.
Les grands écrivains n*ont pu s'interdire toujours les
mots communs et vulgaires, mais ils ont su les relever
par d'heureuses alliances.
N(XIES, autrefois nopces (du latin nuptiœ)^ mot qui
désigne moins le mariage que les réjouissances aui l'ac-
compagnent. On l'emploie avec son sens naturel quand
on {Mirle de secondes noces. Les dangers de ce second
mariage, quand il y a des enfants du premier, ont été
signalés de tout temps, et Athénagore allait jusqu'à l'ap-
peler on honnôte adultère. Nos lois anciennes prohibaient
les secondes noces, lorsqu'il existait des enfants du pre-
mier mariage. La législation actuelle décide que l'époux
qui le remarie ne peut attribuer à l'autre, par donation
contractuelle, qu'une part d'enfant '«3 moms prenant,
pourvu encore qu'elle ne dépasse nas le quart de ses
biens. L'opinion publique a ansbi vu longtemps les se-
condes noces avec défaveur, et ceux qui y convolaient
étaient exposés à un charivari (F. ce mot), — En Hol-
lande, on nomme noces d^argenf ?9. fête que des époux
donnent à leurs connaissances api^s 25 -^os de mariage,
et noces d'or celle qu'ils donnent après 50 ans. B.
KOCES ALDOBBAWDni BS. V. AlDOBRANDINES.
NOCTURNE, terme de Liturgie. V. notre Dictionnaire
de BiograptUe et ^Histoire,
NOCTURNE, en termes de Musique, morceau à deux, trois
ou quatre voix, d'un caractère généralement tendre et
langoureux, propre à être exécuté le soir, en guise de sé-
réi»de. Les albums de chant, publiés chaque année, con-
tiennent d'ordinaire un Nocturne. On a étendu ce nom
à des pièces de musique écrites dans une expression
mélancolique pour deux instruments concertants. B.
N0EL5, cantiques spirituels en langue vulgaire, com-
posés en l'honneur de la Nativité de Notre Seigneur, et
qu'on chantait au temps de Noél dans les églises, ordinai-
rement sur des airs populaires et rustiques, pour mieux
rappeler sans doute que des pasteurs de Bethléem avaient
les premiers célébré la venue du Sauveur. C'est de là
qae leur vint, en Italie, le nom de Pastourelles ou can-
tiques des Pasteurs, et, en Angleterre, celui de Ckristmas
cârots ou rondes champêtres de Noél. On dit même que,
la Teille de Noôl , ces cantiques se chantaient au milieu
(les danses, dans le cimetière des ^Uses. — Les premiers
NoéU manuscrits sont du xi* siècle. Guillaume de Vilit>-
aeuve. Trouvère de la fin du un*, cite des collections de
Koëls dans un fabliau recueilli par Babazan et Méon.
La bibliothèque La Vallière possédait dH^ genre un pré-
cieux recueil du xiv* siècle. Le siècle smvant en a laissé
un plus grand nombre ; mais les canti<{ues, prenant une
antre forme, ont été mis en action, distribués par per-
sonnages, et sont devenus de véritables Mystères de la
Nativité. Au xvi* et surtout au xvn* siècle, les Noëls se
multiplient et forment des recueils considérables. Parmi
les collections de Noêls écrits en patois, et qui ne sortent
pas du fcenre primitif, nous citerons : Les Noëls nouveaux
enpatois de Besançon, par F. Gauthier, 2 vol. in-i2 (1751),
réédités en 1804, chefs-d'œuvre de naïveté au Jugemeat
de Charles Nodier ; Grande Bible de Noëls anciens et itoti-
veauXt Toul, 1823; le recueil des 62 Noëls provençauM
de Saboly (1669), réédités à Avignon en 1730 et 1820; les
Noëls de Pierre Goudelin (xvii* siècle), écrits dans ie dia-
lecte toulousain ; les Noëls en patois we Montpellier AZ'ïlSx
les Noëls dauphinois; les Noëls limousins, Tulle ; Grande
Bible de Noëls poitevins vimtx et nouveaux, Poitiers et
Niort, 1824 ; les Noëls d^ Auvergne, recueillis par l'abbé
Paturel, Clermont-Ferrand, 1733 et 1739; les dix Noëls
en patois du Fores , qui se trouvent dans les œuvres de
Chapelon, S^-Étienne, 1779; les Noëls bressans, qui
datent du règne de Louis XIV (ceux de Bourg sont dus k
Brassard de Montaney, ceux de Pont-de-Vaux, de Gone-
vod, de Boz, de Reyssouse, de S'-Bénigne, à Boijoa),
Chambéry, 1787 et 1845.
Les Noëls ne conservèrent pas toujours leur caractèfe
religieux ; le mot fut détourné de son acception primitive,
et servit à désigner des chants destinés à glorifier autre
chose aue la Nativité de Jésus-Christ. C'est ainsi qu'outre
le Noëtreligietàx, on eut le Noël roycU^ chanté en l'hon-
neur du souverain ; le Noël politique, composé dans le
but d'honorer un personnage distingué, soit dans l'État,
soit dans l'Église; enfin le Noël badin, qui traitait d'un
sujet vulgaire et s'adressait k de simples particuliers. Il
y a loin, en effet, des Noëls pieux et édifiants des xv*,
XVI" et xvu* siècles aux Noëls bourguignons. Ces Noëls
remplirent l'office de gazette pendant tout le xviii* siècle:
il ny avait pas d'événement dans la cité de Dijon , pas
de ridicule Dourgeois, pas d'aventure qui ne leur servit
d'aliment. Le succès de ces petites pièces était dû sui^
tout au talent d'Aimé Piron et de Bernard de La Mon-
noye : les Noëls du premier sont disséminés dans plu-
sieurs recueils, où ils ont paru la plupart sans nom
d'auteur; ceux du second ont été publiés à part, et ont
obtenu jusqu'à 21 éditions depuis 1700 jusqu'à 1842. Ils
ont vécu par le mérite du fond et de la forme. Les airs
sur lesquels Ils étaient chantés, et qui sont notés à la
suite des paroles, leur donnent un autre genre d'origina-
lité : ces airs, pour la plupart connus de père en fils , et
dont il est difficile d'indiquer la source, ont le csractère
du plain-chant par leur extrême simplicité et par le peu
de modulations qu'on y rencontre ; la cadence plagale s'y
reproduit fréquemment, et ils se terminent aussi bien
sur la quinte que sur la tonique. Quelques-uns sont em-
pruntés à Lulli ; le plus grand nombre sont des airs de
menuets et de gavottes composés, au xvi* siècle, par
Pierre Certon, maître des enfants de chœur de la S**-
Chapelle de Paris, par Maillard, Arcadelt, Clément Jan-
nequin, Mornable, les deux Vermont, Fevim, Dubuisson,
et Eustache Du Caurroy. Il est assez remarquable que
plusieurs de ces airs ont une ressemblance frappante, et
qui ne peut être attribuée au hasard, avec des mélodies
écossaises que l'on croit, mais à tort, avoir été composées
par David Rizzio, favori de Marie Stuart. Le musicien Le-
sueur a enchâssé dans son Oratorio de Noël quelques-
uns des drs de Noëls dont la mélodie est la plus franche
et la plus populaire.
NOEUD , partie du poëme épique, dramatique, roma-
nesque, etc., où se manifestent, soit des obstacles qui
s'opposent à l'accomplissement d'un dessein, soit des
difficultés qui jettent un ou plusieun personnages dans
une perplexité qui fait le principal intérêt du poëme.
Ainsi, dans V Iliade, le nœud de l'action est formé par
l'inflexibilité d'Achille qui, irrité contre Agamemnon, et
s'étant retiré des combats, résiste aux supplications et
aux oflres brillantes que l'offenseur, humilié de la défaite
des Grecs en l'absence du héros thessalien, lui adresse,
par l'intermédiaire d'Ulysse, de Phénix et d'Ajax, pour
qu'il reparaisse à la tété de ses soldats et sauve l'armée
entière d'un désastre imminent. Le refus d'Achille pro-
longe les vicissitudes de tous les acteun du poëme. Dans
VOdyssée, le nœud est l'arrivée d'Ulysse à Ithaque après
une absence de 20 années, pendant lesquelles U a été
éprouvé par les plus cruelles traverses : il trouve ses
biens ravagés par ses voisins tout-puissants ; personne
ne le reconnaît dans la détresse où il est tombé. Com-
ment, dénué comme il est, fera-t-il reconnaître sa per-
sonne et ses droits? Comment vengera-t-il les outrâj^
faits à sa famille et à son autorité 7 Le nœud de VÊnéuie
est la ligue excitée et soutenue par la haine de Junon , et
qui met Euée, à peine arrivé en Italie, dans le plus
grand danger que lui ait encore fait courir la colère de
cette déesse. L'action de la Jérusalem délivrée se noue au
moment où la Croisade est sur le point d'échouer par
l'absence de Tancrède, et par celle de Renaud, qui a cédé
NOM
1310
NOM
<iui séductions d^Arinide, protectrice des ennemis du
nom chrétien, renforcés alors même par des secours
puissants. — L*arriTée imprévue de Thést^e et son en-
trevue avec Phèdre forment le nœud de la Phèdre de
Racine ; car elles mettent dans le plus grand péril la reine
d*abord, et ensuite Hippolyte. Celui d'Athalie se resserre
plus que jamais lorsque Joas est réclamé par cette reine
à Josabeth. — Dans la comédie d'intrigue, le nœud est
formé au moment où la complication est la plus forte.
Dans la comédie de caractère , c'est lorsque les princi-
paux personnages vont être mis dans la situation qui fera
le mieux ressortir les travers, les faiblesses, les bizarre-
ries, les ridicules qui les caractérisent : telle est la fin du
3* acte du Misanthrope de Molière. P.
NOEUD, en termes de Marine. V, Loch.
NOIR (Code), nom donné à un édit du mois de mars
1^85 ayant pour objet principal de régler la condition des
nègres dans les colonies françaises de l'Amérique. Il se
compose de 60 articles. L'esclave y est qualifié chose ou
metAle, et non personne civile ; à ce titre, il ne peut rien
posséder par lui-même, et fait partie de la communauté
entre époux; son témoignaige nW pas admis en justice
contre son maître. Celui qui a frappé son maître ou quel-
qu'un des siens au visage, avec contusion ou effusion de
sang, est puni de mort. Celui qui a été en fuite pendant
un mois a les oreilles coupées et est marqué d'une fleur
de lis sur l'épaule ; pour la récidive, on lui coupe un
Jarret , et on le marque sur l'autre épaule ; pour la 3* fois,
il est mis à mort. Il est loisible au maître de faire en-
chaîner et battre de verges ou de cordes son esclave;
mais il ne peut, sous peine de confiscation par TÉtat,
lui faire subir des tortures ou des mutilations ; s'il Ta tué
de ses propres mains, il peut être poursuivi criminelle-
ment. Le Code noir recommande de traiter les esclaves
«n bon père de famille, de donner des soins à ceux qui
sont tombés malades ou devenus infirmes ; il détermine
la quantité de \ivres et l'espèce de vêtements qui doivent
leur être distribués ; il interdit le concubinage avec une
esclave, et , s'il a lieu néanmoins, l'esclave devient libre,
ainsi que les enfants qu'elle aurait eus du maître. Tout
blanc &gé de 33 ans peut afifîranchir ses esclaves. Les
maîtres sont tenus de faire baptiser et instruire leurs
esclaves^ de leur permettre d'assister aux exercices reli-
gieux, de favoriser les mariages entre eux, mais il ne leur
est pas permis de les marier contre leur gré. Les nègres
qui décèdent chrétiens doivent être déposés en terre
sainte. Le travail est suspendu pendant 24 heures,
le samedi à partir de minuit. — Une ordonnance de
Louis XVI, en 1784, compléta la législation en matière
d'esclavage. Après avoir spécifié les heures de repos ac-
cordées aux esclaves les jours de fête et les dimanches,
elle alloue à chacun d'eux un petit terrain qu'ils cultive-
ront dans leurs loisirs, et dont les produits tourneront
entièrement à leur aisance personnelle; elle établit des
infirmeries convenablement meublées pour les esclaves,
défend de laisser ceux-ci coucher par terre, exige qu'on
n'assujettisse les femmes enceintes et les nourrices qu'à
un travail modéré, limite à 50 le nombre des coups de
fouet infligés comme ch&timent, et décide que les pro-
cureurs ou économes des habitations pourront être, sui-
vant les cas, pour sévices envers les esclaves, révoqués de
leurs fonctions, ou condamnés à l'amende, ou même mis
à mort.
Le Code noir fut aboli par la loi du 16 pluviôse an ii
(9 février 1794), qui proscrivait l'esclavage; mais il fut
rétabli, sous le Consulat, par la loi du 30 floréal an x.
Divers adoucissements avident été apportés depuis 1815
a la législation, lorsque la Révolution de 1818 entraîna
définitivement la suppression de l'esclavage.
NOIRE, note de musique qui vaut le quart d'une
ronde ou la moitié d'une blanche : 2 croches, 4 doubles
croches, 8 triples croches, 16 quadruples croches, sont des
équivalents d'une noire. On (Ustinguait autrefois la noire
à queue, la noire carrée, et la noire en losange: le plain-
cliant a conservé ces deux dernières espèces, mais en Mu-
sique on ne se sert plus que de la première.
NOIRS (Traite des). V. Esct.AVAGE, dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire.
NOIX, en termes de Marine, partie d'un m&t de hune
ou de perroquet qui est plus forte que le m&t lui-même,
et qu'on laisse en renfort , au-dessous du capelage, pour
soutenir les barres ; — partie d'un cabestan qui reçoit les
baiTes ou leviers au moyen desquels on le fait tourner.
NOLIS. V. Fret.
NOM, en termes de Grammaire, signifie l'objet de la
^nsée. C'est la chose^ la substance (comiue terrCi §o-
m
leil, eau, 6o»), ou îa manière détre, Vaccident de la
chose, de la substance (comme rond<t chaud, liquide^
dur). Les noms qui signifient les substances ont été ap-
pelés noms substantifs ou simplement substantifs; les
noms signifiant les accidents ont été nommés noms ad^
jectifs ou simplement adjectifs ( V, Adjectif). Très-sou-
vent on se sert seulement du mot nom pour désigner le
nom substantif. 11 y a deux sortes de noms substantifs : le
nom propre et le nom commun, général ou appellatif.
Le nom propre est le nom particulier soit d'une personne*
d'un animal ou d'une ^hose, comme Louis, Bucéphale^
Paris, Loire, soit accidentellement de plusieurs per-
sonnes, de plusieurs animaux ou de plusieurs choses;
car plusieurs personnes peuvent s'appeler Louis ou Pierre,
plusieurs chevaux ou plusieurs chiens peuvent porter le
même nom , plusieurs villes peuvent s'appeler Clermoni
ou Vienne. Le nom commun est celui qui convient , non
pas à plusieurs personnes, à plusieurs animaux, à plu-
sieurs choses, mais à toutes les personnes, à tous les ani-
maux, à toutes les choses semblables de la même espèce :
homme, cheval, maison, ville. 11 est dit aussi appellatif,
parce qu'il exprime Vappellation commune à tous les
individus d'une même espèce. Les noms communs se
divisent en noms collectifs et en noms abstraits (F. Cox^
LBCTiFS, Abstraits). Quant aux noms patronymiques,
V. ce mot. — Les noms sont généralement susceptibles
de prendre diverses formes suivant le genre des êtres
dont on parle et suivant leur nombre {V. Genre, Nombre).
C'est ce qui arrive dans toutes les langues ; mais le grec,
le latin, l'allemand, font subir aux noms, suivant le rôle
qu'ils remplissent dans la phrase, certaines inflexions
qu'on appelle cas (V. ce mot)^ et dont la récitation dans
un certain ordre convenu constitue ce qu'on appelle la
déclinaison ( V. ce mot). Lorsqu'un nom manque de cer-
tains cas, ou bien lorsqu'il ne s'emploie qu'à l'un des
deux nombres, il est dit défectif ou défectueux ( K. ce
mot); lorsque la formation des cas ou celle du pluriel
n*ont pas lieu en vertu des règles ordinaires, il est dit
i}Tégulier {V. ce mot). Dans les langues pourvues de cas,
on appelle hétéroclite (V. ce mot) le nom qui présente
une déclinaison à certains cas, une autre à d'autres;
surabondants (V. ce mot)^ ceux qui suivent complète-
ment deux déclinaisons différentes. — Sur le rôle d'ocf-
jectif]oué souvent par le nom substantif, V. Adjectif,
NOM COLLECTIF (Société eu). V. SoaÉTé.
NOM DE BAPTÊME. V. PR^NOM.
NOM DE GUERRE, uom OU sobriquet que prenaient au-
trefois les soldats, quand ils s'enrôlaient. Par extension ,
on qualifie de même les sobriquets qu'on donne à une
personne, soit en badinant, soit pour désigner quelque
qualité, plutôt mauvaise que bonne. Les comédiens
prennent souvent des noms de guerre, qu'il serait plus
logique d'appeler noms de théâtre.
NOM DE NOMBRE. V. NUMÉRAOX (AdjOCUfs).
NOM DE RELIGION, Dom que prennent les religieux et les
religieuses de certains Ordres en embrassant la vie mo-
nastique, et qui remplace leur nom propre ou de famille.
Tels sont, par exemple, frère Philippe, sœur S^^ M<i-
rie, etc. Les Frères de la Doctrine chrétienne prennent
aussi des noms de religion.
NOM PROPRE ou DE FAMILLE. V, notTO Dictionnoire 4ê
Biographie et d'Histoire, p. 1027, col. 2.
NOM SOCIAL. V. Raison sociale.
NOMS et titres. Avaut la Révolution de 1789, les pos-
sesseurs de terres féodales ajoutaient à leur nom de
famille celui de la terre dont ils étaient propriétaires ou
seigneurs, et souvent même ne portaient que ce dernier;
ils prenaient aussi la qualification nobiliaire attachée au
domaine, s'il avait titre de duché, de comté, etc. D'autres
avaient fait précéder leur nom de la particule de, à la-
2uelle on attachait l'idée de noblesse. Les usurpations
e titres nobiliaires ont existé de tout temps ; elles ont
été frappées de diverses peines par l'ordonnance d'Or-
léans en 1560, l'ordonnance de Blois en 1579, l'édit de
1600, le Code Michau en 1629, l'édit de janvier 1634, les
déclarations du marier 1 661 , du 30 mai 1 702, du 30 mai
1703, etc. L'Ass^^Rée constituante, jugeant les noms et
les titres féodauxcontraires à l'égalité, les abolit par dé-
cret du 19 juin 1790, et décida qu'un citoyen ne pourrait
porter que le vrai nom de sa famille. Une sanction pénale
fut donnée à ce décret, le 27 septembre 1791 : tout ci-
toyen qui, dans un acte quelconque, aurait pris une qua-
lification ou un titre supprimé, devait payer une amende
éj^ale à six fois la valeur de sa contribution, était rayé du
tableau civique, et déclaré incapable d'occuper aucun
emploi civil ou militaire. Par décret du 24 brumaire
NOM
1311
NOM
tnn (14 norembre 1793), la Convention conféra à tous
ta citoyens la faculté de changer de nom propre, et de
prendre celui qui leur conviendrût, en se conformant aux
formalitét prescrites par les déclarations de naissance.
Après la chute de Robespierre, quelques hommes oui
STaient porté des titres de noblesse ou des noms précédés
de la poticule ayant cru pouvoir les reprendre dans les
actes publics, la loi du 6 fructidor an n (23 août 1794)
interdit à tout citoyen de porter d*autres noms et pré-
noms que ceux exprimés dans son acte de naissance, et
d*i\Iouter aucun surnom à un nom propre, à moins quMl
ficAt servi Jusque-là à distinguer les membres d*une
même famille, sans rappeler les qualifications féodales
iQ nobiliaires : les contrevenants, que tout citoyen avait
le droit de dénoncer, étaient punis correctionnellement
d'un emprisonnement de 6 mois, et d*une amende égale
su quart de leurs revenus; la récidive entraînait la dé-
gradation civiaue, prononcée par le tribunal criminel.
Les fonctionnaires coupables de n^avoir pas observé sur
les actes les prescriptions de la loi étaient frappés de des-
titution, déclarés incapables d*exercer aucun emploi pu-
blic, et condamnés aussi à une amende égale au quart
de leurs revenus. Un arrêté du Directoire, en date du
19 venttee an vi (9 mars 1798), eut pour but de rappeler
à Tobservation de la loi du 6 fructidor an n. — Une réac-
tion contre les idées de la Révolution eut lieu sous le
premier Empire. Malgré la Constitution de Tan xu, qui
interdisait le rétablissement du régime féodal, un décret
du 30 mars et un sénatus- consulte du 14 août 1806
créèrent de nouveaux titres, que Napoléon I*' distribua
i ses généraux et à ses ministres. Le 1*' nuirs 1808 pa-
rurent les statuts qui organisèrent la nouvelle noblesse;
celle-d put devenir hérâiitaire par la constitution des
majorats et à certaines autres conditions. Toutefois, Na-
poléon n'entendait pas rétablir Tancienne noblesse : dé-
fense était faite de porter des titres qu'il n*eût pas confé-
rés, et leCodepéncU de 1810 infligea un emprisonnement
de G mois à 2 ans à quiconque en aurait pris indûment.
La Restauration rendit à la noblesse ancienne ses titres,
et conserva les siens à la nouvelle, mais en spécifiant
qu*il ne s'asissait que de rang et d'honneurs, nullement
de Texemption des charges sociales. Une ordonnance du
il juillet 1816 étendit aux titres de la noblesse monar-
chique la protection que le Codé pénal avait accordée
aux titres impériaux. Après la Révolution de 1830, les
distinctions nobiliaires furent dédaigneusement aban-
données au caprice et à la merci de tous ; on les reléguait
dans la fantaisie, et on en livrait Tusurpation au ridi-
cule. Néanmoins, le roi Louis-Philippe conféra quelques
titres, UL plus grand nombre furent usurpés par la
vanité, et Ton se para surtout de la particule. Le Gou-
vernement provisoire de 1848 proscrivit les titres et qua-
lifications de noblesse; mais son décret fut aboli après le
coup d*État de 1851. Il y eut depuis lors une recrudes-
cence de faux nobles, produite par la mauvaise foi, Tin-
térét et des calculs coupables, plutôt encore que par la
sottise. Aussi une loi du 28 mai 1858 est-elle intervenue :
elle frappe d'une amende de 500 fr. à 10,000 fr. qui-
conque, sans droit et en vue de s'attribuer une distinction
honorifique, aura publiquement pris un titre, ou aura
changé, altéré, modifié le nom que lui assignent les actes
de rétat ciril. Une circulaire du ministre de la Justice, en
date du 19 juin de la môme année, explique le sens de
cette loi : on n'a point voulu inquiéter les familles qui
ont pour elles la bonne foi, rautorité d*une longue pos-
session, et, en général, ces preuves morales qui tiennent
Heu de titres en forme, mais seulement atteindre les
charlatans qui ont eu en vue d'abuser le public. Napo-
léon m a conféré au maréchal Pélissier en 1856 le titre
de doc deMalaJcoff, au maréchal Mac-Mahon en 1859 celui
de duc de Magenta, et au général Cousin-Montauban en
1862 celui de comte de PiUikao. Ceux qui obtiennent des
titres de noblesse doivent payer certains droits : d'après
une ordonnance des 8-14 oct. 1814 et une loi du 28 avril
iS16, il y a, pour lettres patentes portant collation du titre
<le duc, un enregistrement de 3,000 fr. Pour titre hé-
réditaiié de marquis et de comte, on paye : au sceau,
0,000 fr.; au référendaire, 150 fr.; à l'enregistrement,
1,200 fr. JPour titre de vicomte : au sceau, 4,000 fr.; au ré-
férendaire, 150 fr.; à l'enregistrement, 800 fr. Pour titre
de baron : au sceau, 3,000 fr.; au référendaire, 150 fr.; à
l'enregistrement, 600 fr. Pour titre de chevalier : au sceau,
<K)lr.; au référendaire, 50 fr.; à l'enregistrement, 12 fr.
PcNir lettres de noblesse : au sceau, 600 fr.; au référen-
daire, 50 fr.; à l'enregistrement, 120 fr. — La loi du 1 1 ger-
minal an XI (f avril 1803) décide que toute personne
qui a quelque raison de changer de nom doit en adraner
la demande motivée au ministre de la justice, après
avoir fait insérer au Moniteur et dans deux journaux
de son département l'avis du changement qu'elle ré-
clame; le ministre ne répond qu'au bout de trois mois :
d'après une ordonnance au 3 juin 1818, l'arrêté d'autori-
sation ne doit recevoir son exécution qu'au bout d'un^'
année à dater du jour de son insertion au BiUUtin des
Lois, délai pendant lequel des oppositions peuvent ètro
présentées. Toute erreur de nom dans un acte de l'état
dvil ne peut être rectifiée que par un jugement du tri-
bunal civil; ce tribunal sancuonne aussi les autorisations
accordées pour changement de nom. B.
NOMADE, qui n'a pas d'habitation fixe. C'est une
qualification donnée aux tribus peu civilisées qui font
paître des troupeaux.
NOMBRE, en Grammaire, manière de signifier les
noms communs, selon qu'on les applique à une des per-
sonnes, à un des animaux, à une des choses, auxquels
ils conviennent, ou à deux, ou à plusieurs. Dans le
1^ cas, llnflexion particulière que reçoit le nom s'ap-
pelle nombre singulier: dans le 2*, nombre duel; dans
le 3*, nombre pluriel. On dit par abrévation singulier,
duel, pluriel (V. ces mots). Les noms propres ne sont par
eux-mêmes susceptibles que du singulier; si on les met
quelmiefois au pluriel, comme quand on dit les Césars,
les Àlexandres, les Platons, c'est par figure, en compre-
nant dans le nom propre toutes les personnes oui leur
ressemblent. — Le duel est propre au grec et à l'hébreu.
— Les adjectifs anglais ne sont point susceptibles de
prendre Tinflexion du nombre. — Par extension, le nombre
a passé du nom au verbe. Cette inflexion , sensible dans
les langues néolatines, l'est surtout dans les langues an-
ciennes. P.
NOMBRE (Noms de). V, NovâiAux (Substantifs).
NOMBRE, en termes de Poétique, succession régulière
de temps et par conséquent de mesures, qui, lorsqu'elle
arrive à son terme, se résume pour ainsi dire en un nombre
total. Les mesures ou pieds sont les éléments du nombre;
aussi les anciens Latins confondaient souvent, dans le
langage littéraire, le nombre et le vers. Levers hexamètre
est un nombre résultant de la succession de 6 mesures
qui comprennent chacune 4 temps, c'est-à-dire en tout
24 temps, etc. Si, dans le vers, on considère, non plus
la succession totale des temps, mais Vespace même, au-
trement le nombre des syllabes dont il se compose, sans
éf^d à leur valeur prosodique; alors ce n'est plus un
nombre, c'est un rhythme. Tels sont les hendécasyl-
labes italiens, et, généralement parlant, les vers modernes
(K. Rbythmb). — Le nombre pouvait entrer aussi dans la
prose des Anciens; et ils disaient que le style était nom-
hreux, lorsque certains pieds, certaines mesures s'y ren-
contraient habilement disposés, ou lorsqu'on savait y
combiner savamment et à propos les brèves et les lon-
gues, enfin, et surtout, lorsque la chute de la période se
faisait d'une manière harmonieuse. Le plus parfait mo-
dèle de la prose nombreuse fut chez les Grecs Isocrate,
chez les Romains Cicéron. Ce dernier a exposé la théorie
des nombres oratoires dans le traité intitulé Orator, S ^9
et suiv., et dans le 1II« livre des dialogues De Oratore, 5^8
et suiv. V. aussi Quintilien, IX, 4; Benoit Varchi, Erco-
lano, quest. 9. — h^ nombre est bien moins marqué dans
les langues modernes, et on particulier dans la nôtre.
Cependant on dit quelquefois un style nombreux, une
phrase, une prose nombreuse; ce qui signifie qu'on y
trouve un heureux assemblage de mots à syllabes pleine»
et sonores. P«
NOMBRE d'or. I F. ces mots dans notre DiC"
NOMBRES (Livre des). ) tionnaire de Biographie et
NOMBRES sACRés. ) d^Histoirs.
NOME. Dans la littérature grecque, ce mot désigne un
chant ou un air assujetti à une certaine harmonie, à une
certaine cadence, comme à une sorte de loi {nomos) qu'il
n'était pas permis d'enfreindre en changeant à discrétion
le ton de la voix ou celui de l'instrument. Les nomes
étalent accompagnés par la lyre ou la flûte, et consacrés
à des sujeu religieux. Depuis Terpandre, on les divisait
généralement en 7 parties ou couplets, dont le 1*' s'ap-
pelait pr^/tMie léparkhéia), et le dernier épilogue {épUo-
gos). Le musicien Hmothée en avait composé un nombre
considérable; mais il n'en est rien resté. Les nomes em-
pruntaient leur dénomination : 1* de certains peuples;
ainsi, il y avait le nome édien, le nome béotien; — 2* de
la nature du rhythme, comme le nome orthien, air de
flûte, à modulation élevée, à rhythme vif; il était surtout
consacré à Pallas; à l'approche des batailles, il servait a
NON
ni2
NOR
exciter les courages; le nome trochaM(iu0 était approprié
aux marches et aux charges militaires, ou aux danses
courantes et légères; — 3* de leurs inventeurs : nomes
Terpandrien, EtiéracUn^ Cépionign; on manque de ren-
seignements sur ceux de cette catégorie; — 4* de leurs
sujets : le nome pythique (consacré aux fêtes d'Apollon) ,
avait cinq parties, représentant les cinq circonstances du
combat d^ApoIlon contre le serpent Python : dans la i**,
qui n*était qu'un prélude (jptfira), le Dieu reconnaissait
le terrain ; la 2* exprimait la provocation {kat<ikel9tÂsmos);
la 3* {ïambicon^^ où Ton imitait d'abord le son delà trom-
pette, se terminait sur un ton aigu, pour exprimer le
grincement de dents du monstre percé par le dieu ; la
4* Upondeion)^ d'un ton plus grave, exprimait la victoire;
(a 5« (catachoreusis) figurait la danse du dieuen réjouis-
sance de son triomphe. Le nome harmcUique fut inventé
sans doute à une époque où on combattut encore sur des
cliars {harmata); on désignait aussi sous ce nom un
chant relatif à Hector traîné autour du tombeau de Pa-
trocle, les pieds liés au char d'Achille; le nome pc4y~
mnestien roulait sur des demandes en mariage {mnéstéià) :
il y en avait un pour chaque sexe; ces nomes parussent
avoir été i)eu décents et mal famés; le nome Cradias
était un air de flûte Joué dans les fêtes appelées Cradé-
phoriês, parce au'on y portait des branches de figuier
(cradé)^ — 5* ae leur mode : nome aigu, nome grave ;
— 6* de leur composition: nome trimèle, Utraède (à
3 mélodies, à 4 chants), etc. V. le commentaire de Bu-
rette sur le Traité de ta musique de Plutarque, dans le
tome X des Mémoires de VAcadémie des Inscriptions et
BelleS'LsUres , et les Observations de Clavier, à la fin
du tome XXII de son édition du Plutaraue d'Amyot, Paris,
1820, 25 vol. in-8^ où il a reproduit ce commentaire
avec quelques additions. P.
N0MENCLATE13R. V. ce mot dans notre Dictifmnaire
de Biographie et d'Histoire.
NOMENCLATURE (du latin nomen, nom, et de clams,
clef), liste de noms, et, par extension, ensemble des mots
qui composent le dictionnaire d'une langue, ou de ceux
qui désignent les divers objets dont s'occupe une science
ou un art.
NOMINALISME. F. ScoLâSTiQUE.
NOBilNATIF, le premier des cas dans les langues dont
les noms et les pronoms se déclinent. Ce n'est pas pro<
prement un cas, mais la matière d'où se forment les cas
par les diverses inflexions que subit cette première ter-
minaison du nom. Son principal usage est d'entrer dans
le discours avant tous les verbes, pour être le sujet de
la proposition. En grec, on rencontre quelquefois un
nominatif sans qu'il soit suivi d'un verbe : c'est un
nominatif cAsolu ; le latin aussi en ofiDre quelques exem-
ples. V. AiiACOLOTBB. p.
NOMOGANON (du grec nomos, loi, et condn, règle),
recueil de canons apostoUçpes, de canons des conciles,
et de lois impériales relatives aux matières ecclésiasti-
ques. Le plus ancien de ces recueils est celui de F*ui-
gentius Ferrandus , diacre de l'église de Carthaee au
VI* siècle; le plus complet, oui va jusqu'à Tan 787, est
celui de Photius, auquel Balsamon, gûde des archives
canoniques de Constantlnople au xiii* siècle, fit des addi-
tions, et que Justel a publié dans sa Bibliotlteca juris ca-
ftonici, Paris, 1661. En Russie, le plus ancien nomocanon
est attribué à S« Vladimir (096).
NOHOTHÈTES (du grec nomos, loi, et tithémi, Je
pose , J'établis), nom donné chez les anciens Grecs aux
l^^gisUteurs. Les Athéniens l'appliquèrent aussi aux
membres d'un comité de législation nommés chaque
rinnée pour examiner les changements qu'on proposait
Je faire aux lois de Selon.
KON-ACnVITÉ. V. Activité de servicb.
NONCE i
kXivi? / F. ces mots dans notre Dictionnaire de
NONES. \ Biographie et d: Histoire.
NON-INTERVENTION (Système de). V. Intervention,
2« alinéa.
NON-UEU (Déclaration de), déclaration par laauelle
]:i Chambre du conseil d'un tribunal prononce qu'il n'y
a pas de motif suffisant pour poursuivre.
NON-MOL V. Moi.
NONNE , mot dérivé du latin barbare nonna ou ftofi-
nana , employé dans le sens de pénitente, puis de i^t-
gieuse. L'étymologie de non nupia^ a non mariée, » est
lausse.
NONOBSTANCES, clauses par lesquelles les actes éma-
nés de la chancellerie romaine dérogent aux règles éta-
blies par les papes ou par les conciles. Leur nom vient
de C'a qu'elles commencent par les mots latins fum cl*
stantibus,
NONPAREILLE. V. Caractèbes D'jVPniVERiE.
NOOLOGIQUES (Sciences), nom par lequel on a quel •
quefois désigné les sciences qui traitent de l'esprit hu-
main (du grec noos, esprit, et logos, discours).
NOQUET, lame de plomb de la dimension d'une ar-
doise, qui se place, pliée en deux, le long des Joints des
lucarnes et des cheminées, et sous les crochets de service.
NORAGHES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
NORBIALE (École). V. École normalb, dans notre Oic-
tionnaire de BiograpJUe et d^Histoire.
NORMAND (Idiome). Lorsque les Normands se fixèrent
dans la partie de la Neustrie qui a gardé leur nom, la
Langue d'oU (V. ce mot) était née, et, quoique informe
encore, possédait déjà ses éléments constitutifs. Elle ne
tarda pas à absorber, dans la haute Normandie, l'idiome
Scandinave ou normannique importé par les pirates et
devenu bientôt insuffisant pour leurs besoins : sous le
successeur de Rollon, elle était presque seule usitée à
Rouen. Mais à Baveux se maintint plus longtemps une
langue qui avait beaucoup de conformité avec le nor-
mannique ; c'était le saxon, apporté par q[uelques aven-
turiers dans le Bessin vers la fin du ui* siècle. Ces deux
langues, si voisines, et parlées par des peuples qu'unissait
une législation commune, finirent par se corrompre l'une
Tautre, et par se fondre en un nouvel idiome où les
formes et l'esprit du latin prévalurent, le franco-iior-
mand ou romano-normand. Cet idiome fut en usage par*
tout où les Normands imposèrent leurs lois, en Angle-
terre et en Sicile, comme dans les provinces de France
2ui relevaient de leurs ducs (Normandie, Maine, Perche) ;
u côté du Nord, il subit l'influence du dialecte picard,
avec lequel il se mélangeait dans les environs d'Abbe-
ville; dans le commencement du xiii* siècle, il s'avança
vers l'Est jusqu'au cœur de l'Ile-de-France; il s'étendit
aussi au Sud dans la Bretagne (la basse Bretagne ex-
ceptée), dans une partie de 1 Anjou, et Jusqu'au delà de
la Loire, dans la Vendée.
H est impossible aujourd'hui de déterminer la part
d'influence du Scandinave dans la formation du Aranco--
normand : cette influence n'a laissé de traces certaines
que dans les noms d'iiommes et de lieux. Les noms ter-
minés en ville (du latin vUla)^ très-communs dans Is
Seine-Inférieure, renferment pour la plupart un mot
étranger, qui parait avoir été le nom propre ou le sur-
nom d'un Normand qui habitait la terre ou possédait le
village; iQh sont : BeuzevUle , BiervUle, ifouppevUle,
Sierville, BacquevUle, TancarvUle, ValliquervUle. D'au-
tres noms sont terminés en tôt, comme Yvetot, Cri-
quetot, Houdetot, Sassetot, etc., terminaison qui, en
saxon, signifie cour, masure, enclos. La terminaison bec
vient également du Scandinave et du saxon beke, qui
veut dire ruisseau : Bolbec^ le Bec , Caudebec^ Brique-
bec, Robec, etc. Les noms en ati et en eur, tels que Eu,
Canteleu, Harfleur, Barfieur, Vittefleur, etc., fréquents
dans la Normandie, maritime, dérivent, soit d'un mot
islandais qui désigne un lieu baiené par l'eau, soit du
Scandinave (liot ou du saxon flod (rivière, courant). Les
mots en beuf {Paimbeuf. Marbeuf, Belbeuf, Criquebeuf,
QitUlebeuf, Elbeuf, etc. ) contiennent la même terminai-
son que les mots danois en bœ (demeure); on n'aura
ajouté Vf final qu'à cause de la ressemblance avec le mot
français bœuf. Enfin, on peut signaler, parmi les mots
importés par les Normands, et qui ont survécu, le mot
acre, qui désigne une mesure de superficie usitée en
Normandie, en Angleterre et dans ses colonies d'Amé-
rique, et généralement inconnue ailleurs.
Porté en Angleterre par Guillaume le Conquérant, le
franco-normand y devint la langue dominante, la langue
oflicielle et aristocratique; mais il ne put étoufiier l'an-
glo-saxon, qui avait une constitution régulière et de
nombreux monuments littéraires. Il prit le nom d'angîo-
normand, qui fut aussi appliqué à la langue parlée au
XII* siècle dans la Normandie même, et l'on qualifie
ordinairement (S^anglo^ormands les Trouvères qui ont
rimé des deux côtés de la Manche Jusqu'à la conquéts
de la Normandie par Philippe-Auguste, en 1204. A partir
de. cette époque, l'anglo-normand est encore la langue
des poètes en An^^eterre, mais déjà dans leurs chants ils
se plaignent de le voir dépérir; l'anglo-saxon perd aussi
du terrain, son système de déclinaisons et de conjugai-
sons s'écroule peu à peu avec sa syntaxe, et les radicaux
saxons prennent souvent la place des mots d'importadoc
romane, tandis que les désinences romanes revctcai les
NOR
1313
NOR
mots saxons. Bans ce travail de fusion qui s*opère aux
un* et XIV* siècles, ridiome normand triomphe du côté
des constructions et de la grammaire, et, à ce point de
vue, c^est lui qui régit encore TAngleterre; sa prononcia-
don même survit en beaucoup de points. C*est du saxon
ainsi mutilé qu*est sortie lentement la langue anglaise.
Toatefola Tanglo-normand ne disparut pas sans laisser
de nombreux vestiges, encore faciles à reconnaître au-
jourd'hui dans le matériel de la langue, dans les devises
des «lablee familles , dans celle qui entoure les armes
royUes (Dieu bt mon droyt)^ dans la devise de Tordre de
la Jarretière {Bony, soyL qu mal. y. petua), et surtout
dans la langue judiciaire et dans les livres de jurispru-
dence. Quand la reine d'Angleterre accorde sa sanction
aux bills des deux Chambres du Parlement, la formule
aoi retentit en son nom est en dialecte anglo-normand :
la reyne mercye ses loyavix subjects de Igur betimO"
lencê, et ainsi h veult; et quand die refuse, la déclara-
tion est celle-ci : La rêyne advisera.
Tandis que le franco-normand se transformait en An-
gleterre, sur le continent il était cultivé en même temps
que la langue latine, et, jusqu'à la fin du moyen &ge, il
conserva la prééminence littéraire. Il fit tant de progrès
et se modifia tellement depuis son origine, que la popu-
lation qui s'en servait ne put reconnaître au xv* siècle,
dans les Anglais qui envahirent la Normandie, les héri-
tiers des compagnons de Guillaume. L'occupîation an-
glaise dura assez longtemps pour affecter le langage :
rianovation la plus importante fut l'importation de T'y,
que l'anglo-normand avait emprunté à l'anglo-saxon.
Cette lettre, qu'on ne rejnarquait guère au xin* siècle
que dans les mots grecs où l'étymologie demandait sa
présence, semble avoir pris au xv* siècle presaue entiè-
rement la place de l't; on eut alors : le roy, la royne.
Je siêys, mylieu , la nuyct, parmy , Hmry, Loys, etc.
Cest à l'influence de l'alphiûbet anglais qu'il faut attri-
buer l'usage d'employer l'y en Normandie dans les noms
de villes et de paroisses rurales, tels que Bemay, Bayetix,
Isigny, PavUly, Andêly, etc. — Au xvi* siècle, lorsque
toQs les dialectes tendent à se fondre en un seul pour
constituer la langue française, le normand, outre son ap-
port considérable dans le vocabulaire général, fait pi^
valoir sa prononciation, qui consistait, entre autres par-
ticularités, à prononcer é ou ot la diphthongue ot. C'est
on Normand, Nicolas fiérain, avocat au parlement de
Normandie , ^ui proposa le premier de faire disparaître
ranomaliequi existai! ><ire la prononciation etl'ortho-
^phe : dans ses A(n:»^a«s remarqués sur la langue
(rançatse (Rouen, 1675], il voulait que Ton écrivit les
imparfaits de l'indicatif en ai ou ei; c est donc à tort que
Voltaire passe pour l'inventeur de ce système orthogra-
phique. Biais ce qui contribua plus que tout à fixer irré-
Tocablement dans la langue française l'articulation ai^
ce fat la pléiade des gens de lettres normands , Duper-
ron, Desportes, Vauquelin des Yveteaux, Malherbe, Bois-
Robert, Corneille, qui, sous les règnes d'Henri IV et de
Uhûs XIII, devinrent les arbitres du langage. Corneille ,
en plein xvii* siècle, introduisait encore dans le langage
de la cour certaines manières de prononcer qu'il avait
rapportées de Rouen; c'est depuis lui que in et im, en
tant que Syllabes initiales, se prononcent semblable-
ment. Mais à mesure que la Uogue littéraire marcha vers
runité, les formes nouvelles qu'elle empruntait, soit aux
dialectes provinciaux, soit au grec et au latin, la rendi-
reat inintelli^ble aux populations des campagnes x une
séparation s'opéra entre la manière de parler des hautes
classes et celle du peuple ; le hmgage local se corrompit,
et tomba à l'état de patois.
Le patois normand peut se diviser en trois variétés
principales, qui dérivent des habitudes de ceux qui le
parlent : le langage des faubourgs, celui des côtes , et
celui des populations rurales. Le type du premier est le
pwrin ou gros normand, dont la terre classique est à
Rouen dans les quartiers S^Vivien et Martainville, mais
qui se retrouve également dans les bas quartiers de la
plupart des villes manufacturières, notamment à lî-
sieux. On appelait purinSy avant Tinvention de la filature
à la mécanique, les Aleurs de laine à la main. Le langage
purin, tout cynique et grossier qu'il est, possède une lit-
térature : bon nombre de pamphlets ont été écrits dans
ce patois aux xvu* et xvni* siècles. Nous citerons la Muse
normoiui^, recueil satirique que David Ferrand fit pa-
nitrede 1621 à 1655; V Inventaire de la Muse normande,
ou Beeueil de plusieurs ouvrages facétieux en langue
intrinique, du même auteur; la Muse normande de Louis
Petit qui fut l'ami intime de P. Corneille et le collabo-
rateur de Ferrand ; la Mazarinade publiée en 1640 sous
le titre des Maltôtiers ou les Pesquieux en eau trouble;
le Coup ^œil purin, ou Conversation entre quatre per^
sonnes du bas peuple de la ville de Bouen, par Ser-
vais, 1773, satire violente contre les membres du Conseil
du Roi qui avaient remplacé les membres du parlement
de Normandie chassés par le chancelier Maupeou. Le
patois purin est en partie celui du pays de Caux et du
Roumois; les campagnes de Louviers ont conservé uu
grand nombre de mots et de locutions oui lui sont pro-
pres. La basse classe de Caen et de Falaise parle un pa-
tois très-voisin du purin ; c'est aussi du gros normand ,
où l'on trouve, ajoutée au fond du patois ordinaire, une
forte dose d'expressions triviales et d'intonations pois-
sardes. — Le langage des côtes offre d'autres transfor-
mations, et se ressent du voisinage de la Picardie. Les
pécheurs du faubourc| du Pollet, k Dieppe, ont la pro-
nonciation molle; les j et les g deviennent des x dans
leur bouche. Leur accent singulier se reproduit chei les
pêcheurs et les pilotes de Quillebeuf. Les terre-neuvieiis
des côtes de TAvranchin ont aussi une langue spéciale
pour leur industrie. — Le patois des campagnes est infi-
niment supérieur comme langage à celui des faubourgs
et des gens de mer. Il est plus primitif, plus naïf; c'est
lui qui est l'héritier de l'ancien dialecte normand. Mais
il n'a conservé son originalité que dans les contrées où
la population est restée fidèle aux anciennes mœurs, et
surtout là où subsistent encore les grandes haies, ces clô*
turea-fortifications si chères aux Normands. Toutefois ce
n'est pas chez les paysans du Bessin et du Cotentin que
l'on trouverait la véritable clef de Tanden dialecte, en
ce qui concerne les questions de prononciation ; c'est
dans les lies de la lianche, notamment à Jersey, où l'on
suit encore la Coutume de Normandie, non réformée, et
où le dialecte normand du xn* siècle s'est perpétué dans
la population rurale.
V. Kelham, Dictionnary of the norman or old frencn
language, Londres, 1779; Essai sur le dialecte normand,
par M. Ravmond Bordeaux, ouvrage manuscrit couronné
par l'Académie de Rouen ; Dictionnaire du patois nor»
mand, par MM. Édélestand et Alfred Duïnéril , Caen,
1849, 1 vol. in-8®; Histoire des expéditions maritimes
des Normands, par Depping, Paris, 1826, 2 vol. in-8<>;
Dictionnaire du patois du pays de Bray, par l'abbé De-
corde, Rouen, 1852, in-8" ; Patois de l'arrondissement
de Bayeuxy par Pluquet, Bayeux, 1834, 2* édition ; (?/o5-
saire du patois normand^ par Louis Dubois, Caen, 1856,
1 vol. in-8% P— s.
NOHiiAiiD (Style), style roman ou ogival particulier
aux édifices de la Normandie et à ceux que les Normands
ont bâtis en Angleterre. Il ne diffère du s^le général que
par quelques formes et quelques dispositions de mou-
lures , qu'une connaissance approfondie des styles d'ar-
chitecture peut seule faire apprécier.
NORMANDE, genre de caractères d*imprimerie Inven-'
tés de notre temps, et qui ne sont autre chose que dn
romain ou de Vitalique excessivement gras.
NORMANNIQUE ou NORR^NA fLangue), nom donné
à la langue parlée dans tout le Nora Scandinave jusqu'au
XIV* siècle, et dont sont sortis l'islandais, le norvégien, le
suédois, et le danois.
NORVÉGIEN (Idiome), un des idiomes issus du lan-
gage appelé norsh ou norrœna, lequel a été parlé dans
tout le monde Scandinave jusqu'au xiv* siècle et se rat-
tache à la souche germanique. Il n'a de caractères par-
ticuliers que comme idiome parlé et populaire; car la
langue littéraire de la Norvège est la même que cello du
Danemark, soit à cause de l'identité d'origine, soit par
l'effet de la longue si^étlon des Norvégiens aux Danois.
On évalue à plus de 18,000 les mots employés journelle-
ment en Norvège et qui ne sont pas dans les Diction-
naires danois : bon nombre de ces mots existent, an con-
traire, dans la langue islandaise, et les livres écrits en
islandais sont souvent compris par les habitants de la
Norvège. Holmboe a prouvé que neaucoup de mots nor-
végiens se retrouvent presque sans altération dans le
sanscrit. V. N.-M. Petersen ^ Histoire des langues da-
noise, norvégienne et suédoise, Copenhague, 1829-30,
2 vol. in-12 ; Holmboe, Du sanscrit et de la vieille langue
du Nord, Christiania, 1846, ln-4«; le même. Des rap-
ports de la vieille langue du Nord avec le sanscrit, ibid.,
1848, in-4».
NORVÉGIENNE (Littérature). Soumise pendant plu-
sieurs siècles au Danemark , la Norvège n'a pu posséder
une littérature distincte. Au nombre des écrive ins
qu'elle produisit sous la domination étrangère, nous ci
NOT
1314
NOT
torons, an xvn* siècle, un érèque de Dronth^m, André
Arreboe, autear d'un pofime sur la création, intitulé
Hêxameron ou VOEuvre de la première semaine, et,
au XVIII*, les poètes Tullln et Wessel, le célèbre auteur
dramaticpie Holberg , rbistorien Strom , Tantiquaire
Schœning, le naturaliste Gunnerus. Une Université fut
établie à Christiania en 1811 , et, bientôt après, se forma
une Société pour la prospérité de la Norvège, divisée
en 7 dasses ayant pour attributions spéciales la philo-
végc, séparée du Danemark et réunie à la Suède, a vu
commencer enfin pour elle une littérature nationale. On
cite déjà quelques noms, Biergaard, Schwach, Hansen ;
leurs principales productions sont des chansons à boire
ou des chants patriotiques. La musique qui accompagne
la plupart des ballades populaires est empreinte d*une
singulière tristesse , qui est le véritable caractère des
hommes du Nord, le fond même de leur &me.
NORWIGII (Cathédrale de), en Angleterre, dans le
comté de Norfolk. Cette église fut commencée en i096,
et, dans l'espace de 25 ans, on éleva le chœur, le tran-
sept, et la tour qui le surmonte ; la plus grande partie
du ui' siècle fut employée à la construction de la grande
nef et des collatéraux. La chapelle Notre-Dame date du
milieu du xin* siècle. Depuis, on n*a fait à Tédifice que
des modifications et additions peu importantes. La fa-
çade occidentale présente deux styles distincts : la partie
centrale, c^ui est la plus moderne, offre une immense
fenêtre ovisale, remplie de meneaux perpendiculaires;
aux parties latérales, qui appartiennent à l'architecture
romano-byzantine , les portes, la galerie simulée et les
fenêtres qui les surmontent, sont en plein cintre. C*est
également le plein cintre qi^i se montre avec toute sa
gravité dans la nef principale. Plusieurs gros piliers sont
ornés de cannelures torses qui s'y enroulent; les chapi-
teaux ne sont que des masses cubiques, lourdes et dis-
gracieuses. Les archivoltes des arcades offrent des tores
rompus et des chevrons brisés. Le chœur est très-re-
marquable : les deux premiers étages sont formés par
des arcs en plein cintre appuyés sur des faisceaux de
colonnettes ; les fenêtres de l'étage supérieur et les voûtes
sont de style ogival. Le plan de la cathédrale de Norwich
est en forme de croix latine : la longueur est de 125 met,
dont 70 pour la nef; la largeur de la nef et des collaté-
raux, de 23 met. ; la longueur du transept, de 58 met. ;
la hauteur des voûtes, de 23 met. Sur le centre du tran-
sept s'élève une tour caxrée, flanquée, aux angles, de
contre-forts couronnés de clochetons, et entourée, au
sommet, d'une balustrade crénelée, disposition com-
mune en Angleterre : cette tour supporte une aiguille
octogone, merveilleusement effilée, et dont les nervures
d'angles sont ornées de crochets et de feuilles grim-
f an tes. Cette pyramide , qui atteint une hauteur de
00 met. au-dessus du sol , est moins riche d'ornemen-
tation , mais d'une construction aussi hardie que celle de
Lichfield. Au flanc méridional de la cathédrale de Nor-
wich on voit de beaux cloîtres, formant un carré d'envi-
ron 50 met. de côté. B.
NOTABLES, nom qu'on donnait, avant 1789 : 1° aux
bourgeois appelés avec le maire et les échevins à former
le conseil de ville ; 2* aux membres des trois ordres de la
nation , que les rois choisissaient pour composer les As-
semblées des notables (F. Asseublee, dans notre Diction-
naire de Biographie et d'Histoire). Il s'applique aujour-
d'hui aux principaux et plus considérables citoyens
d'une ville, d'une province, d'un État Les notables
commerçants sont ceux dont les préfets dressent annuel-
lement la liste pour chaque arrondissement, et qui éli-
sent les membres des tribunaux de commerce : ils ne
peuvent être moins de 25 dans les villes dont la popula-
tion n'excède pas 15,000 âmes; au-dessus de ce chiffre,
le nombre en est augmenté à raison de 1 pour 1000 &mes
de population. Un décret du 30 août 1852 a chargé les
notables commerçants d'élire aussi les membres des
Chambres de commerce, et ceux des Chambres consulta-
tives des arts et des manufactures.
NOTABLES (AiTêts), nom que l'on donnait autrefois aux
arrêts fixant un point de Jurisprudence nouveau ou con-
troversé.
NOTAIRES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
(graphie et d* Histoire,
NOTATION MUSICALE , art de représenter aux yeux
et à l'intelligence les sons et leurs modifications diverses,
à l'aide de signes ou caractères particuliers. Ces signes
sont de 4eux sortes, les signes d^intonatimi et les s}ones
de durée, et on les place les uns et les autres sur hpor»
tée , assemblage de cinq lignes tracées horizontalement
Les signes d'intonation sont les clefs et les notes. Les
clefs., placées au commencement des portées, indiquent
que ce qui s'y trouve écrit appartient à telle ou telle
voix, à tel ou tel instrument; et comme il y a plusieurs
nuances d'élévation ou de gravité parmi les voix et les
instruments, on exprime ces nuances en donnant aux
clefs différentes positions sur les lignes (K. Clep^. Les
notes sont les signes particuliers de chaque son. Il n'est
pas nécessaire d'avoir un signe d'une forme spéciale pour
chacun des sons ; une pareille multiplicité jetterait la
confusion dans l'esprit, et fatiguerait la mémoire : ce
n'est point la forme de la note, mais sa place sur la por-
tée, qui détermine l'intonation. La note placée sur la
même ligne que la clef prend le nom de cette clef , et
sert de point de comparaison pour nommer toutes les
autres notes de l'échelle : par conséquent, le nom des
notes est éventuel, et ne peut se déterminer d'une msp
nière invariable. L'intonation des notes, telle qu'elle
résulte de leur position sur la portée et par rapport à la
clef, peut être modifiée par une nouvelle espèce de signes
2u*on nomme cKcidents et à l'aide desquels on indique
es sons intermédiaires : ce sont le dièse, le bémol et le
bécarre {V, ces mots).
Les notes servent de signes de durée, en m^me temps
que de signes d'intonation : destinées, en effet, à repré-
senter les sons, elles ont dû recevoir des modifications
de forme, afin de pouvoir exprimer la longueur variable
de ces sons. Ce sont ces formes diveraes çui indiquent
les valeurs respectives des notes. On a pris pour unité
de durée la note appelée ronde : la moitié de cette durée
a reçu le nom de blanche; le <^uart, celui de noire; le
huitième, celui de croche ; le seizième, celui de double
croche; le trente-deuxième, celui de triple croche; le
soixante-quatrième, celui de quadruple croche [V, Cro-
che). — Le pot'n^ est un autre signe de durée. Placé à
la suite d'une note, il augmente de moitié la durée de
cette note : ainsi, la ronde pointée a la même durée que
3 blanches, ou 6 noires, ou 12 croches, etc. — Le sUence
est un élément de la musique, aussi bien que le son, et»
comme lui, il a des variations de durée : on a donc ima-
giné des signes de silence, correspondant aux notes ou
signes de sons, et susceptibles des mêmes divisions. Le
silence d'une durée égale à celle de la ronde s'appelle
pause; la moitié de cette durée, demi-pause; le quart,
soupir; le huitième, demi-soupir; le seizième, quart
de soupir. La ronde pointée se représente par une pause
suivie d'une demi-pause; la blanche pointée, par une
demi-pause suivie d'un soupir, etc. — Pour que la mul-
titude des signes placés sur la portée ne trouble pas les
yeux, on les sépare de distance en distance par des bants
qui traversent perpendiculairement la portée (F. Bames
DE mesure) : l'espace compris entre deux de ces barres
de séparation s'appelle mesure; la somme des durées
qui y sont exprimées doit être la même dans toutes les
mesures du morceau de musique. On rend encore plus
facile la lecture des signes contenus dans la mesure, eD
divisant celle-ci en parties égales appelées temps. Les
manières différentes dont cette division peut se fûre
déterminent les différentes espèces de mesures, qu'indi-
quent aussi des signes particuliers (F. Mesure, Tevps).
— Les signes de la durée des sons et des silences ne
donnent que des quantités relatives, et n'indiquent pas
la durée positive qui est dévolue à chaque signe. On fait
connaître cette durée positive, en écrivant, en tête des
morceaux, certains mots italiens ou français déterminant
le degré de lenteur ou de vitesse qu'il faut prendre; tels
sont : largo, andante^ allegro, presto, etc. Mais la va-
riété de durée positive produite par ces mots ne change
rien à la valeur relative des signes entre eux ( V. Moc-
veiient).
Quant à Vexpression dans l'exécution de la musique,
elle est aussi indiquée dans la notation par un certain
nombre de signes spéciaux {V. Expression, Accom,
Liaison, Détaché, Agréhents).
La notation musicale emploie encore les chiffres, soit
pour mar(juer la proportion des sons entre eux, comme
dans le tnolet ( V. ce mot), soit pour indiquer le doigté
de certains passages qu'exécutent les instruments, soit
enfin pour représenter les accords (K. Basse CHiFniéE}.
La notation musicale, avant d'en nrriver au point où
elle se trouve aujourd'hui, a traversé bien des phases.
Les Grecs, et, après eux, les Romains, ont possédé o''
système de signes fort compliqué : ils se servirent dcs
NOT
1315
NOT
lettres de ]eui alphabet, en leur donnant toutes aortes
de formes et de positions. Burette, d'après Meibom,
qa*il interprétait mal, portait à 1620 les signes ainsi ob-
leQQS, l'abbé Barthélémy à 990. Perne (Revue musicale,
u m) les réduit à 90, dont une moitié était consacrée a
la TOix, et Tantre aux instruments, et il essaye même de
démontrer que 44 caractères suffisaient, dont 22 pour la
Toix et 22 pour les instruments. M. Vincent, à son tour,
ramène toute la double notation des Grecs à 70 paires de
signes, et pense que la notation vocale consistait dans les
lettres, tandis que la notation instrumentale était em-
praotée aux signes planétaires, ce que les chimères des
Anciens sur Tbarmonie céleste rendent assez vraisem-
blable. Les signes s'écrivaient au-dessus des syllabes à
chanter , formant une seule ligne horizontale , et les
di?ers de^s d'acuité et de gravité des sons étaient
indioués par la forme spéciale des signes : si la musique
devait être à la fois chantée et jouée sur les instruments,
la ligne des signes pour instruments était superposée à
la ligne vocale (F. Solmisation). — Quand une partie
des modes musicaux des Anciens fut tombée en désué-
tude, le nombre des lettres emi)loyées à la notation fut
considérablement restreint. Puis, le pape Grégoire le
Grand, ayant remarqué que les rapports des sons sont
exactement les mômes dans chaque octave , réduisit le
nombre des signes aux sept premières lettres de l'alpha-
bet, qui furent placées sur des lignes parallèles de di-
renés couleurs pour indiquer l'élévation ou l'abaisse-
ment de la voix. Si une pièce de chant dépassait les
limites de Toctave, on employait, pour la l'* octave, les
lettres majuscules, pour la 2* les minuscules, et on les
doublait pour la 3*. Puis, on substitua aux lettres sur la
portée, à une époque qu'on ne saurait déterminer, cer-
tains points de différentes formes, qui ont été l'origine
des notes modernes {V, Nboubs). Au xi* siècle, le moine
Gui d'Arezzo imagina une mnémonique des sons qui
consistait à apprendre par, cœur une mélodie connue,
pour s'en servir comme d'un point de comparaison, en
donnant pour* nom aux notes de cette mélodie les syl-
Ui^ placées sous chacune d'elles, afin de conserver ces
mêmes sons à toutes les notes semblables. A cet effet, il
le servit, dans l'école qu'il dirigeait, du chant de l'hymne
de S* Jean-Baptiste :
Ui qneuit Iaxis Reaonarv fibrlt
Mirz geatornm Faroull tuonim,
S<dTt polluti labll reatum,
Sancta Joannea.
Les élèves chantaient cette strophe, dans laquelle l'into-
nation de la note , s'élevant d'un degré sur chacune des
syllabes ut, ré, mi, fa, sol, la, correspondait à une des
lettres de l'échelle diatonique. Gui d'Arezzo ne désignait
point les notes par ces syllabes ; il n'avait voulu que créer
une méthode d'enseignement par analogie et ayant uni-
quement pour but de graver l'intonation des sons dans
la mémoire de ses élèves. Toutefois, les noms ut, ré, mi,
fa, sol, la, furent bientôt adoptés pour indiquer six notes
de la gamme. La septième, B (le n), ne se trouvait pas
nommée dans ce système; on imagina, pour y suppléer,
le système barbare des muances ( K. ce moi), et ce ne
fut que beaucoup plus tard que le nom de si fut appliqué
à la septième note. Longtemps les notes furent toutes
d'une ég^e valeur sous le rapport de la durée, et ne
marquèrent que les différents aegrés de la gamme et les
modifications de l'intonation; selon une opinion généra-
lement répandue, ce serait au xiv" siècle que le chanoine
Jean de Mûris aurait imaginé d'indiquer les rapports de
durée que les notes devaient avoir entre elles par des
cfaanffements dans leur figure, et distingué les rondes,
les blanches, les noires, etc.; du même temps daterait
la distinction de la notation blanche, c-à-d. en notes
blanches ou vides, et de la notation colorée, c-à-d. en
notes noires ou rouges; mais la notation mesurée re-
monte au moins au u* siècle. Dans les ouvrages où Ga-
forio, vers la fin du xv* siècle, a expliqué le système de
la notation de son temps, on voit que les signes princi<
MOI étaient la maxime, la longue, la brève, la semi-
brève et la minime : cependant, dans les compositions du
commencement du xvi" siècle, la noire, la croche et la
double croche se trouvent employées.
J.-J. Rousseau exposa, en 1743, un système de nota-
tion par des chiflîres. Ce sjrstème a été repris par Pierre
<^Iia, et vigoureusement soutenu de nos Jours par
MM. Chevé et Aimé Paris. On ne saurait nier qu'il a de
U valeur comme moyen tachygraphique, qu'il simplifie
renseignement de la musique vocale, et que les élèves en
tirent profit pour sidsir les rapports de rliythme et d'in-
tonation. Les maîtres qui le préconisent soutiennent que
la multiplicité des signes de la notation ordinaire est un
grave embarras ; cela est vrai : mais, une fois ces signes
classés dans la mémoire, toute difficulté disparaît, car
ils donnent par eux-mêmes, et sans aucune complication
d'idées, la notion nette et positive de l'intonation et de
la durée. Il n'en est pas de même de la notation par
chiffres : la similitude des signes pour toutes les octaves
et la suppression des clefs en sont les bases ; or, la simi-
litude est un mal , et les clefs sont nécessaires. Cest ce
que les partisans dé la notation par chiffres ont reconnu
mal^ eux, puisqu'ils ont été obligés de créer des signes
auxiliaires pour distinguer les octaves, et de remplacer
les signes usuels, qui sont une figuration des sons, per-
ceptible aux yeux, par des points de reconnaissance qui
exigent une opération d'esprit. La notation par chiffres
est inapplicable dans la musique instrumentale , dont le
diapason est incomparablement plus étendu que celui de
la voix. Elle est impuissante à traduire avec clarté les
transpositions si souvent nécessaires pour certaines par-
ties d'instruments, et «à représenter les groupes de sons
simultanés. A plus forte raison ne pourrait-elle donner
au piano, comme le fait la notation usuelle, les principaux
effets d'une partition écrite sur une vingtaine de portées
et où sont employées cinq ou six clefs différentes. K. Dan-
jou. Sur les notations musicales du moyen âge^ dans la
Revue de musique religieuse et classique, Juillet 1845,
août 1847; Fétis, articles de la Gazette musicale des 16
et 23 Juin 1844, et, dans la Revue de Danjou (1846), Des
origines du Plain-Chant; Théodore Nisard, Etudes sur
les anciennes notations musicales de l'Europe, dans la
fiemie arcMologique, U V, et De la notation proportion-
nelle du moyen âge, 1847. B.
NOTE (du latin nota, marque), en termes de Musique,
nom donné aux signes figuratifs des sons. F. Notation.
NOTE PERLEE. V, ApPOGIATUSB.
NOTE DE PASSAGE, uoto qul , daus uue mélodie, ne porte
pas d'harmonie, mais sert à lier entre elles les notes har-
moniques.
NOTE , en termes de Pratique, signifiait autrefois la mi-
nute des actes passés chez tes notaires. De là le nom de
gardes-^otes donné quelquefois à ces officiers publics.
NOTE , remarque ou explication imprimée à la marge
d'un livre, au bas d'une page, ou à la fin d'un volume,
pour en faciliter l'intelligence. Les notes, destinées à ex-
pliquer un mot, un passage, une allusion, doivent être
courtes et précises ; autrement, elles dégénéreraient en
Commentaires (F. ce mot), — Quelques auteurs of^ in-
titulé Note ou Notes un opuscule séparé.
NOTE, dans le style des affaires, extrait socjnairs, ex-
posé succinct.
NOTE, en Diplomatie, communication confidentielle
entre des agents diplomatiques. Cest par un échange de
Notes qu'on arrive à la conclusion d'une négociation. On
appelle Notes verbales les notes au moyen desquelles
ceux qui siègent dans une Conférence ou un Congrès
communiquent entre eux, lorsqu'elles sont seulement
destinées à fixer un point de discussion et ne portent pas
de signature.
NOTES SURABONDANTES, nom donné en Musique
aux triolets, aux notes marquées 5 pour 4, etc.
NOTES TIRONIENNES. V. ABRÉVIATIONS.
NOTICE , traité succinct donnant la connaissance d'une
certaine classe d'objets; — extrait raisonné mis en tête
d'un livre pour faire connaître l'auteur, l'époque à la-
quelle il a écrit , etc.; — écrit de peu d'étendue conte-
nant les principales circonstances de la vie d'un per-
sonnage. . ,
NOTIFICATION, acte fait par ministère d'huissier, et
jar lequel on donne connaissance de quelque chose dans
a forme officielle ou Juridique. Le nouveau propriétaire
d'un immeuble hypothéqué est tenu de faire notifier son
contrat aux créanâers lorsou'il veut se mettre à l'abri
de leurs poursuites {Code Napol, art. 2185). Le minis-
tère public doit faire notifier k chaque accusé la liste du
Jury, pour le mettre k même d'exercer son droit de récu-
sation; il en est de même de la liste des témoins, sur les-
quels l'accusé peut avoir des renseignements à prendre
(Code d:instr. crim., art. 395). — En Politique, on
nomme Notification l'acte par leauel une puissance fait
connaître officiellement, et de manière qu'on doive y avoir
égard, une résolution prise par elle, par exemple uû
blocus de port ennemi ou une déclaration de guerre.
NOTION, en termes de Philosophie, s'emploie comme
synonyme à peu prte d'td^ et de connaissance. Dans le
r.
NOU
1316
NOV
laogage ordinaire, il désigne plutôt une connaissance
élémentaire et souvent imparfaite.
NOTOIRE (Art). V, Art notoiiuu
NOTORIÉTÉ (Acte de), acte déliyré par un notaire ou
un Juge de paix, et par lequel des témoins attestent un
fait comme notoire et constant. Il dispense la partie qui
a intérêt à établir ce fait des frais et des lenteurs d*une
enquête judiciaire. Ainsi, un acte de notoriété est admis
pour établir la qualité d'héritier d*une personne, quand
il n*y a pas eu d'inventaire; pour faire connaître les
ayants droit à une succession ; pour prouver Tidentitô
d'une personne avec celle dont le nom figure dans un
acte ou dans une inscription de rente, quoiqu'il existe
quelque différence dans les noms ou prénoms. Lies té-
moins doivent être au nombre de quatre; ils peuvent être
du sexe féminin, et môme étrangers. S'il s'agit de sup-
pléer au défaut de représentation de l'acte de naissance
d'un futur époux, l'acte exige la déclaration de 7 témoins,
et doit être présenté à l'homologation du tribunal civil,
2ui peut l'accorder ou la refuser {Code NapoL, art. 71-72).
n cas d'absence de l'ascendant auquel devrait être no-
*iflé un acte respectueux avant 4^ passer outre au ma-
riage, quatre témoins suffisent, et la formalité de l'homo-
logation n'est pas prescrite (art. 155). Une loi du 8 Juillet
1846 a décrété le visa pour timbre et l'enregistrement
gratuit des actes de notoriété nécessaires au mariage des
pauvres. Un acte de notoriété est nécessaire à l'enfant
naturel reconnu, qui , à défaut de parents au degré suc-
cessible, réclame la totalité d'une succession. Quand un
militaire a disparu de son corps, un acte de notoriété
peut être utile pour constater sa disparition. Celui qui
veut adopter peut aussi avoir besoin de faire constater
qu*il a donné pendant un certain temps des soins à
radopté. En un mot, les actes de notoriété sont destinés
à constater des faits sur lesquels il n'existe pas de
preuves écrites. — Dans notre ancien Droit , les actes de
notoriété ne se délivraient pas seulement sur des points
do faii , mais aussi sur des points de droit. Par exemple,
des officiers de justice, ou plusieurs avocats réunis, don-
naient une attestation sur la coutume ou l'usage d'un
lieu.
NOTORiérâ PUBLIQUE , opiuion formée par une réunion
de circonstances ou d'actes connus du public. La faillite
d'un commerçant est souvent dénoncée à la connaissance
des tribunaux par la notoriété publique. Des Juges peu-
vent décider, par la notoriété publique, que des marchan-
dises placées dans des mag^ins loués ne sont pas la
propriété du locataire. Cest aussi sur la notoriété des
actes répréhensibles d*un fonctionnaire que les tribu-
naux de l'* instance, ayant droit d'en connaître, exercent
leur pouvoir censorial.
NOUGHE, vieux mot signifiant un nœud, un fermaiL
NOUE. V. Comble.
NOUETS. V. CooLEUR.
NOUMÈNES ( du grec nouménos, conçu par la raison ),
nom que Kant donne aux faits tels qu'ils sont absolument
et en eux-mêmes, inaccessibles à notre intelligence, in-
connus de nous, par opposition aux phénomènes, qui
sont les choses telles qu'elles nous apparaissent.
NOURRICES (Bureau des), administration établie à
Paris pour fournir aux familles qui s'adressent à lui des
nourrices dignes de confiance, et garantir à ces dernières
le payement de leur salaire. Le Bureau des nourrices
fut créé en 1330, en faveur de quatre filles de la nour-
rice du roi Jean. On les appelait recommanderesseSt
et elles procuraient aussi des servantes. Une ordonnance
du roi Jean, en 1350, fixa le salaire d'une nourrice à
100 sous par an, le droit des demanderesses à 2 sous,
perçus des deux parties, et condamna la nourrice qui
prendrait plus d'un nourrisson la même année à une
amende de 60 sous, sans compter l'exposition au pilori;
une amende de 10 sous était encourue pour tout com-
plice de ce délit. Louis XIII et Louis XIV, en 1615 et
1655, accordèrent aux recommanderesses le monopole du
placement des nourrices, mais avec interdiction de s'oc-
cuper à l'avenir du placement des servantes. En 1715,
on les plaça sous les ordres du lieutenant général de po-
lice; bientôt on en éleva le nombre de deux à quatre. En
1769, il n'y eut plus qu'un bureau de placement, confié à
deux demanderesses et k deux directeurs, tous à la nomi-
nation du lieutenant de police. La Révolution, en abolis-
sant tous les privilèges de profession, ouvrit la porte à
l'industrie des placeurs particuliers. Néanmoins, le bu-
reau général a été conservé par le gouvernement consu-
laire, et , depun ce temps, il est dans les attributions de
l'administration des Hospices : elle a des sous-inspecteurs
à chaque chef-iieu d'arrondissement, dans un rayon de
120 à 160 kiL de Paris, et dans chaque canton un mé-
decin qui visite les enfants, les soigne en cas de maladie,
et donne de leurs nouvelles une fois par mois.
NOUTKA (Langue). F. Wakash.
NOUVELLE, compositioa littéraire qui tient à la fois
du conte et du roman; récit d'aventures intéressantes ou
amusantes, qui peut être historique ou entièrement ima-
f inaire. Le nom de Nouvelle remonte aux premiers Trou-
adours provençaux : il a été ensuite adopté en Italie, en
Espagne et en France. Chez les Italiens, la Nouvelle a
reçu sa forme la plus parfaite de Boccace, et chez les Es-
pagnols, de Cervantes. Boccace a su donner à ce genre,
où l'on a trop souvent recherché un badinaee licencieux,
un caractère touchant et élevé dans Griselidis et dans
Titus et Gisippe, Les Nouvelles morales de Cervantes
sont pleines d'agrément : l'une des meilleures, le Curieux
impertinent , a été insérée dians le Don Quichotte, Les
premiers récits français qui aient porté le titre de Nou-
velles sont du xiu* siècle; MM. Moland et d'Héricault les
ont recueillis en un volume, ainsi que les Nouvelles du
xiv« et du XV". Les Cent Nouvelles nouvelles {V.ce mot)
sont de la fin du xv* siècle; les Nouvelles de la reine
de Navarre, du milieu du xvi* (7. H£PTAiiâLO!i). Au
xvu* siècle, Scarron publia huit Nouvelles tragi- co-
miques, dans le coût espagnol. A la fin du xvui*, Florian
donna aussi des Nouvelles qui obtinrent du succès, grâce
k une certaine naiveté, et bien qu'elles fussent assez mé-
diocres. M"'* de Genlis publia, en 1802 , des Nouvelles
lùstoriques^ souvent intéressantes. Plus tard, Alûed et
Paul de Musset ont n^jeuni ce genre littéraire par l'ori-
ginalité avec laquelle ils l'ont traité; Alfred surtout y a
montré une grande sensibilité d'&me. Les Nouvelles (en
vers) de H. Kleist sont célèbres duis l'Allemagne con-
temporaine par le talent avec lequel l'auteur a tracé les
caractères et dessiné les portraits de ses personnages.
V. CoNTB, Fabliau, Roman. P. .
NOUVELLES, annonces verbales, écrites ou impri-
mées, d'événements publics ou privés, vrais ou faux. Aux
termes du décret sur la presse en date du 17-23 février
1852, la publication ou la reproduction de nouvelles
fausses est punie d'une amende de 50 fr. à 1,000 fr.; si
elle a été faite de mauvaise foi, si elle est de nature à
troubler la paix publique, la peine est d'un mois à un an
d'emprisonnement, et d'une amende de 500 à 1,000 fr.,
et le maximum est appliqué quand les deux circonstances
aggravantes sont réunies.
NOUVELLES A LA MAIN, uom donué sux gazcttcs manu-
scrites, ou clandestinement imprimées, qui précédèrent
les journaux, et qu'on a conservées plus tard comnio
moyen de faire circuler les nouvelles dont la censure ou
l'autorité supérieure n'aurait pas permis la publicaiiot).
Elles ont toujours eu un caractère satirique. Au temps de
Louis XIV, on en poursuivit sévèrement les auteurs*
Pierre Gizilard, dit La Viguerie, Jérémie Brossard, Srla-
thurin Esnault, furent mis à la Bastille en 1660; Itfar-
celin de l'Ange fut condamné, en 1661, à la fustigation et
au baunissement, etc. Au xvui* siècle, le salon de
M*"" Doublet fut une officine de Nouvelles à la main ,
dont on composa la chronique connue sous le nom de
Mémoires de Bachaumont. Vers la fin du règne de
Louis XV, un certain Métra commença une Correspw-
dance secrète, qui dura jusqu'à la Révolution. Dans le
même temps, une Gazette ecclésiastique se joua aussi des
poursuites de la police. A la fin du règne de Louis-Phi-
lippe, des Nouvelles à la main furent publiées en con-
currence avec les Guipes d'Alphonse Karr; elles ne
purent vivre longtemps, parce qu'elles n'avaient pas Tat^
trait de la clandestinité, qui est souvent l'unique cause
de succès pour ce genre d'écrits.
NOVALES, qualification donnée, dans l'ancien Droit,
aux terres nouvellement défrichées (du latin not>a{tf, dé-
rivé de novus, nouveau^. On l'applique, dans quelquei
pays, aux terres en jachère.
NOVATION (du latin novare, renouveler), en termes
de Droit , substitution d'une nouvelle obligation à une
ancienne. La novation est parfaite, si elle détruit telk-
ment la première obligation , qu'elle est regardée comnie
non avenue; imparfaite, si, sans anéantir la première
obligation , elle la modifie de diverses manières. On dis^
tingue encore la novation nécessaire , qui se fait par une
condamnation en justice et ne décharge pas les fidéjus-
seurs, et la novation volontaire, qui les décharge (Codf
Napol.^ art. 1271-1281}. La novation s'opère de trois
manières : par substituaon d'une autre dette à l'ancienne
(par exemple, une rente de 25 fr. à une somme df
NOY
1317
NOT
500 fr.), par sabstitution d'un nouveau débiteur, et par
substitution d'un nouveau créancier. V. DéL^GATiON.
NOVELLES. l V. ces mots dans notre Dictionnaire de
NOVICE. J Biographie et d'Histotre,
NOVUM ORGANUM, «Nouvel organe», célèbre ou-
Tnçe de François Bacon, formant la 2* partie de Vlnstan^
rniio magna scientiarwn, « la grande Restauration des
aliénées » {V, Restauration). Cest proprement une mé-
t iode pour étudier les sciences, en aidant à leur progrès
ei à leur utilité. L'ouvrage a deux livres; dans le i*'.
Cocon démontre que les Anciens et les Modernes n'ont
point eu, jusqu'à lui, de métiiode pour étudier les
sciences, et qu'il est arrivé de là qu'elles n'ont point
progressé. Dans le 2* livre, il entreprend de tracer cette
méthode nécessaire : il veut que l'on commence par re-
cueillir les faits, les digérer, les ordonner, pour en faire
fappm d'une lente et successive généralisation. La re-
cherche doit s'étendre et s'enrichir par l'examen des
choses comparables; les expériences doivent être instruc-
Ures plutM mi'utiles; avant d'oser interpréter la nature,
il faut rexpérience scientifique. Une méthode d'expéri-
mentation est donc un indice soit d'expériences nou-
Telles, soit de vérités générales, et devient ainsi le
Motnd organe de la nature, ou l'art d'interpréter. A me-
ure qae l'induction donne naissance à des propositions
g(^QâraIes, dit-il , vérifiez si ces propositions dépassent la
sphère des faits qui leur servent de base; si elles le dé-
passent, assurez-vous qu'elles indiquent avec certitude
àt'% vérités nouvelles. Souvenez-vous toujours de la règle :
li*" rien imaginer, ne rien supposer, mais découvrir ou
trouver ce que la nature fiEdt ou éprouve. Puis le rôle de
la raison commence ; c'est proprement le rôle de Tin-
doction. Bacon entre dans des détails très-circonstanciés
pour Papplication de sa méthode ; mais le 2* livre n'ayant
pas été terminé^ il n'a point donné de méthode sûre pour
les procédés d'investigation qu'il indique, et le peu
d'osage qu'on a fait de son Nouvel Organe en rend l'uti-
lité fort suspecte. L'ouvrage est écrit en latin, et plu-
neurs parties ne sont pas exemptes d'obscurité. Malgré
ces imperfections, le Novum Organum est l'ouvrage le
plus important de Bacon, celui où: il a montré le plus de
génie, celui aussi qu'il préférait à ses autres livres et
qn'îl a le plus soigné, car il Ta récrit douze fois. Il parut
pour la première fois en i620, et fut réimprimé en Hol-
lande sous le titre de Novum Organum scientiarum,
Uyde, 1745 et 1750, petit in-12. On le trouve dans les
(Eavres de Bacon, Londres, 1825-35, 17 vol. in-8% et
dans la tiaduction française, revue et corrigée, donnée
par M. Riaux, des OEuvres de Bacon, Paris, 1843, 2 vol.
zr. in-18. Laplace, dans son Essai sur les probcAHités,
^:mb]e avoir résumé en termes très-simples le Nouoel
Organe, en disant : « La méthode la plus sûre qui puisse
nous guider dans la recherche de la vârité consiste à
l'élever par induction des phénomènes aux lois, et des
lois aux forces. Les lois sont les rapports qui lient entre
eux les phénomènes particuliers : quand elles ont fait
connaître le principe général des forces dont elles d6-
nvent, on le vérifie soit par des expériences directes,
lorsque cela est possible, soit en examinant s'il satisfait
aux phénomènes connus; et si , par une rigoureuse ana-
lyse, on les voit tous découler de ce principe. Jusque
dans leurs moindres détails, si , d'ailleurs, ils sont très-
rariés et très-nombreux, la science flflors acquiert le plus
haiit degré de certitude et de perfection qu'elle puisse
atteindre. » F. Ch. de Rémusat, Bacon ^ sa vie, son.
iffnps, sa phUosophie et son influence jusqu'à nos jours,
S* édit., Paris, 1858, gr. in-18. C. D—v.
. NOYADE, genre de supplice qui a été longtemps en
"Uge. Chez les Romains, le parricide était cousu dans
nn tac avec un chien, un coq, une ripère et une gue-
non, et jeté dans un fleuve ou à la mer. Les Burgondes
noyaient dans la boue la femme adultère. Autrefois en
Angleterre on noyait les voleuses dans un fossé plein
d'eao. La noyade a été Infligée en France surtout pen-
dant les xiv«, XV", et xvi" siècles.
NOYAU, pièce de bois qui , posée à plomb, reçoit dans
des mortaises le tenon des marches d'un escalier de bois,
et dans laquelle sont assemblés les limons. V. Esgauer.
ROTAc. V, Ame.
NOYÉS (Secours aux). V. Segocss.
NOYON (Cathédrale de), dans la ville de ce nom,
département de l'Oise. Quoiqu'il soit d'une grandeur
moyenne, ce monument est un des plus beaux et des
pins curieux de l'époque de transition entre le style
roman et le style ogival. B&ti à de longs intervalles de-
puis le commencement du xi* siècle jusqu'au milieu
du xn«, dévasté en 1131 et en 1293 par des incendies qui
exigèrent des reconstructions partielles, il dut nécessai-
rement réunir les caractères distinctifs de diverses épo-
ques. L'extérieur n'a rien de grandiose, mais offre néan-
moins nn aspect gracieux et plein d'harmonie. Le grand
portail , imposant et sévère, présente deux énormes tours
carrées, de 50 met. de hauteur, presque aussi larges au
sommet qu'à la base, flanquées de contre-forts épiSs qui
s'élèvent en retraite d*étage en étage, et surmontées d'une
toiture en ardoise, haute de 16 à 17 met. L'étage infé-
rieur est percé de grandes fenêtres à plein cintre : le 2*
étage présente, à la tour méridionale, six arcades soute-
nues par d*élégantes colonnettes, et, à la tour du nord,
quatre ogives géminées; le 3* est formé de grandes ou*
vertures ogivales. Un porche de 30 met. de largeur et de
10 met. de profondeur, qui nuit à l'unité de la façade en
la coupant et en la masquant en partie , abrite sons son
triple berceau de voûtes ogivales trois portes de même
style donnant entrée dans l'église : une balustrade en
pierre le couronne. Les portes, dont les voussures étaient
chargées d'anges et de saints, et le tympan de scènes re-
ligieuses, ont été afireusement mutilées en 1703. Au-
dessus de la principale, une vaste fenêtre très-simple
éclaire la nef, et remplace la rose qu'on voit d'ordinaire
en cet endroit. A gauche du porche, un rieux bâtiment ,
éclairé par cinq grandes ogives richement encadrées et
divisées par des moulures d'un profil très-pur, servait de
salle capitulaire. En arrière de cette salle, sur le flanc
septentrional de la nef, est un cloître en partie ruiné : la
galerie oui reste debout est formée d'arcades en ogives
surbaissées, dont chacune en renferme deux autres gé-
minées et surmontées d'une rose à six lobes. Au sortir
du cloître, on aperçoit la sacristie, percée de quatre
grandes ogives. Le corps de l'église a des proportions
élancées, un toit aigu avec une crête richement dentelée,
et se termine par un chevet composé de deux rangs de
terrasses se reliant à l'abside par deux séries d'arcs-lsou-
tants superposés, dont quelques-uns ont été remplacés,
au xviii* siècle, par des contre-forts concaves et chan-
tournés, surmontés de vases à parfums. Les transepts,
au lieu de finir carrément , s'arrondissent en hémicycle
comme l'abside du chœur, disposition byzantine qu'on
trouve également à la cathédrale de Tournai. Toutes les
ouvertures de la nef sont à plein cintre, et, sauf dans les
deux étages des transepts, dans quelques parties de l'ab-
side, dans les tours et dans la (açade, l'ogive n'apparaît
pas sur l'extérieur du monument. Les pleins cintres sont
sveltes et élancés; ceux de la partie supérieure de la net
et des transepts sont divisés par nne longue colonnette,
et un ride assez profond les sépare du corps même de la
muraille, combinaison aussi rare qu'ingénieuse et d'un
bel effet. Deux portes existent près des transepts : celle
du nord, dite de S'-Pierre, est précédée d'un porche, et
ornée de sculptures qui annoncent un temps de déca-
dence; celle du sud ou de S*-£utrope conserve les traces
d'un goût plus sobre.
La cathédrale de Noyon a 02 met. de longueur dans
œuvre (102 en ajoutant le porche), 20 de largeur, dont
10 pour la nef majeure , et 23 de hauteur. La croisée a
47 met. de longueur, sur 10 de largeur. Le sol en est,
ainsi que celui du chœur, plus élevé de 0<",06 que le sol
de la nef. Le chevet a une légère inclinaison vers la droite
(K. Axe). Toutes les dimensions sont combinées dans
des rapports de parfaite concordance. Quand on pénètre
dans l'intérieur de l'édifice, on se croirait , au premier
aspect, au milieu d'une construction ogivale: tel est, en
efiet, le caractère des arcades, des voûtes, des nervures
et de l'ensemble de la décoration. Mais ensuite on voit
régner le plein cintre aux grandes fenêtres qui éclairent
le sommet du vaisseau, à la petite galerie placée sous
ces fenêtres, aux trois premières travées du chœur, aux
chapelles groupées autour de l'alraide. De plus, les arcades
de la nef reposent alternativement sur un pilier carré ,
flanqué de colonnes engagées, et sur une colonne cylin-
drique isolée ; cet emploi alternatif de deux genres de
supports se rencontre fréquemment dans les monuments
à plein dntre. L'union du roman et du gothique s'est
opérée ici d'un seul jet, et sans doute intentionnelle-
ment ; car l'ogive apparaît près du sol, et le plein cintre
couronne l'édifice, ce qui est le contraire dans les autres
monuments de styles mélangés. Au-dessus des collaté-
raux , et sur toute leur largeur, s'étend un magnifique
triforium, percé, dans la nef, d'arcades ogivales ^min^,
couronnées d'un trilobé, et, au chœur, d'ogives et de
pleins cintres alternatifs, tantôt simples, tantôt jumelés.
Les chapiteaux dans la nef ne sont ornés que de feuil-
NUI
1318
NUM
lages; dans le chœur, ils portent des animaux fantas-
tiques. Une chose remarquable, c*est que les colonnes
isolées ont ce renflement du fût qui caractérise rarchitec-
ture gréco-romaine, et qu'entre le fût et la base, entre le
chapiteau et le fût, se trouvent des bourrelets de plomb,
indice d'une haute antiquité. Au-dessus de chaque co-
lonne du chœur, trois colonnettes sept fois annelées s'é-
lancent Jusqu'à la voûte. Les chapelles absidales sont
au nombre de neuf : les quatre premières sont carrées,
et éclairées par une seule fenêtre à plein cintre; les cinq
autres, qui rayonnent autour du rond-point, sont circu-
laires, avec une entrée à plein dntre et deux fenêtres
ogivales. Les chapelles de la nef sont postérieures an mo-
nument : les six du côté du nord ont été construites au
XIII* siècle entre les contre-forts. Il y en a trois au midi,
%n -dehors des contre-forts, et beaucoup plus grandes : la
cliape!<e de S**-Luce et de S^'-Marguerite contient un
sépulcre construit en 1497, à l'imitation du S*-Sépulcre
de Jérusalem; celle de Notre-Dame-de-Bon-Secours est
un charmant spécimen du style de la Renaissance; celle
de S*-Nico1as, bien que bâtie en style ogival, est de la
première moitié du xvii* siècle. Le chœur de la cathé-
drale de Noyon renferme un caveau acoustique, aujour-
d'hui fermé, et qui était destiné à renforcer et à réper-
cuter la voix des chanteurs. Les murs en sont tapissés de
vases en terre cuite superposés horizontalement étranges
avec symétrie ; l'orifice de ces vases est placé extérieure-
ment, et une maçonnerie les lie ensemble, de manière à
ne laisser voir que leur bouche; une large ouverture
placée au centre de la voûte, et couverte autrefois d'une
grille à Jour, établissait une communication entre le ca^
veau et le chœur. V, Levasseur, Annales de Véglise ca-
thédrale de Noyon, 1633, in-i**; Ramée et Vitet, Église
de Noyon, plan, coupes et détails, 1842, in-fol.; Dantier,
Description monumentale et histonque de Véglise Notre-
Dame de Noyon, 1845, in-8^ B.
NU (Le), en termes de Sculpture et de Peinture, n'ex-
prime que l'idée du beau et l'étude des formes humaines.
En Grèce, la plupart des statues étaient nues; chez les
Romains, elles étaient plus ordinairement vêtues. Les
Grecs pensaient que le nu avait une expression plus
noble et plus vraie, car sons ce climat chaud, on était à
peine vêtu; les enfants ou les esclaves étaient souvent
sans vêtements.
NUANCES , modifications de la voix ou du souffle au
moyen desquelles on enfle les sons, on les modifie, on
les profiVre avec force ou douceur, selon l'expression
propre au sentiment que l'on veut rendre. Le plain-
chant, qu'on exécute aujourd'hui d'un ton uniforme, a
comporté autrefois des nuances : sans parler des orne-
ments que les anciens auteurs appellent voces secabiles,
tremulœ, vinnulœ^ etc., on sait qu'on employait sur les
morceaux notés les lettres G, M, F. etc., pour indiquer
qu'il fallait chanter ctto (vite), moderato (d'un mouve-
ment modéré), ctim fragore (avec force), etc. — En
Peinture, les nuances sont les i^radations des couleurs,
ce qu'on appelle aussi tons et temtes,
NUE-PROPRIÉTÉ, propriété dont l'acte constitutif en
a séparé l'usufruit. Elle est susceptible de transmission
comme toute autre propriété : seulement, celui qui l'ac-
quiert fait un contrat aléatoire, basé sur les chances de
survie que présente l'ftge de l'usufhiitier.
NUIT (La), divinité allégorique. F. notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
NUITS (Les), titre d'une série de Méditations en vers,
publiées à partir de 1740 par le poète anglais Young,
irappé de divers malheurs de famille. Blinistre d'une re-
ligion sévère, dans une secte qui en augmente encore
l'austérité, Younç développe à 24 reprises ce seul et
même thème, qu'il nous faut tous mourir un Jour : il fait
de la mort, non le terme, mais le but de la vie, et ce but,
il veut que nous l'envisagions sans cesse. Les Nuits, tra-
duites en prose française par Letourneur, eurent un mo-
ment de grande vogue; Colardeau mit en vers les deux
premières, sans beaucoup de succès, et Baour-Lormian,
dans ses Veillées, en imita un certain nombre. Cette lit-
térature mélancolique, qui s'explique en Angleterre par
cette espèce d'hjrpocondrie qu'on nomme spleen, ne pou-
vait guère réussir en France.
Norrs ATTiQOBS (Les), ouvrage latin d'AuIu-GcIle, qui
eût été mieux intitulé Veillées altiques. C'est, sous forme
d'entretiens, une compilation précieuse a«ix Modernes
par beaucoup de faits et de détails qu'on ne trouve plus
que là et qui aident à faire connaître l'antiquité. Aulu-
Gelle avait des livres et du loisir, et il passa bien du
temps à réunir des anecdotes et des extraits de toute
espèce, sans autre souci que celui de se distraire. Soi»
livre, au'il intitula Nuits attiques, en souvenir d'Athènes,
son séjour favori, est une bizarre mosalaue où l'histoire
et la médecine, la grammaire et la morale, les vers et la
prose se heurtent à chaque page.
NULLES. V. Cryptographie.
NULLITÉ, vice qui empêche un acte ou un Jugement
de produire son effet. Il n'y a de nullités que celles éta-
blies par la loi, et elles sont absolues ou relatives. Les
nullités absolues sont celles que peuvent invoauer toutes
les personnes ayant un intérêt né et actuel a les faire
valoir : ainsi, quand la loi déclare un acte nul pour vire
de forme, c'est une nullité absolue. Les nullités relatives
ne sont établies que dans l'intérêt des parties, et ne
peuvent être invoquées que par elles : telle est la nullité
qui résulte du dé&ut d'autorisation de la femme mariée,
car la femme seule, son mari ou leurs héritiers peuvent
s'en prévaloir. Parmi les nullités absolues, les unes sont
radicales et perpétuelles, par exemple la convention qui
n'a pas d'objet, qui a une cause illicite, ou qui est con-
traire soit aux bonnes mœon, soit à l'ordre public; les
autres, temporaires, ne peuvent pas être invoquées par
les parties après cotains délais : ainsi, un Jugement dé-
finitif rendu en premier ressort, fût-il nul de plein droit,
acquiert l'autonté de la chose Jugée, si l'on n^en a point
appelé dans le délai utile. Les nullités relatives qui con-
cernent la forme extérieure des actes se nomment fins
de non-'procéder ; celles qui concernent la capacité des
parties ou le fond du droit, fins de non-recevoir (F. ce
mot) V. Perrin, TroÀté des Nullités en fnatière civile,
1816, in-8«; Biret, Traité des Nullités de tous genres de
droit et de forme admises en matière cioile, 1821, 2 vol.
in-8°; Selon, Théorie sur la Nullité des actes et des
commentions de tout genre, en matière cimle, 1840,
S vol. iD-8«.
NUMERAIRE, masse des espèces monnayées qui sont
en circulation. On y comprend quelquefois le papier-
monnaie et les billets de banque. Le numéraire doit être
dans une certaine proportion avec la richesse, l'industrie
et le commerce d'un pays, pour ne pas entraver la cir-
culation ou l'échange m produits. La somme du numé-
raire d'une nation est toujoure bien inférieure à celle des
valeurs en émission chez elle, valeurs qui ont pour bat
de suppléer à l'insuffisance du numéraire. Le numéraire
n'est point le capital {V. ce mot), avec lequel on l'a
souvent confondu : le capital est un ensemble de valeurs
(fui rapportent un intérêt; le numéraire ne produit rien,
il ne sert qu'à estimer ce que vaut le capital. Chez les
peuples peu avancés dans la civilisation, la fortune pour
les mdividus est un numéraire accumulé, qui, toujours
égal à lui-même en valeur, doit le mieux les préserver
de périls inconnus, et qu'il est toujours facile de cacher
et de sauver. Mais, dans les sociétés mieux organisées,
où la propriété est bien garantie, le numéraire accumulé
ne peut être qu'une richesse improductive, et on ne le
recherche plus que dans les temps de crise. — Suivant les
difl'érents auteura qui se sont occupés des monnaies des
principaux pays de la terre, c'jst la France qui possède
le plus de numéraire : elle en avait pour 600 millions su
commencement du ministère de Colberten 1601 ; 999 mil-
lions en 1093; 1 milliard 600 millions selon Lawen 1716;
1 milliard 600 millions en 1754: 2 milliards 600 millions
suivant ^ecker, 1789; 2 milliards 300 millions à la fin du
1*' Empire français, en 1814; 2 milliards 715 millions en
1828; 3 milliards 583 millions en 1832; 4 milliards 600
millions en 1841; etatijourd'hui (1875) le numéraire paraît
dépasser 6 milliards. Après la France vient l'Angleterre :
depuis le règne de Charles II jusqu'en 1838, on a émis
dans ce pays pour 3 milliards 835 millions de monnaie;
depuis 1838, le numéraire anglais a dû s'accroître dans
une proportion bien plus forte. Relativement aux au^
États de l'Europe, nous ne possédons que les rensei
gnements suivants : les Pay^Bas en 1823 av^ent 6i
millions de numéraire; l'Espagne en 1782, 450 millions
le Portugal en 1788, 150 millions; le royaume de Naple
en 1780, 175 millions; toute l'Italie en 1788, 250 mil
lions; l'Autriche en 1807, S75 millions; la Suisse et le
États de la Confédération germanique en 1820, 75 mil
lions; la Prusse en 1805, 218 millions; la Suède,
Norvège, et le Danemark en 1800, ensemble 225 millions
la Russie en 1815, 181 millions (alon elle n'exploiuit pa
ou exploitait mal les mines de TOural et de l'Altaf).
V. Monnaie, Or, Abgbnt.
NUMÉRALES (Lettres), lettres employées souvent au-
trefois pour exprimer les nombres. Tels sont les chiffroi
romains.
NU M
1319
NUM
NUMÉfVAUX (Adjectifs), adjectifs serrant à exprimer
U qoanii'té ou le rang et l'ordre des personnes et des
choses. Il y en a deux sortes : les adjectifs numéraux
cardinattx et les adjectifs numéraux ordinatix. Les pre-
miers marquent la quantité des personnes et des choses,
comme un, deux, trois, dix, vingt, trente^ cent, mille, etc.;
les seconds, Tordre et le rang que les personnes et les
choses occupent entre elles, comme premier, second ou
deuxième, troisième, dixième, vingtième, trentième, cm-
tièmey miilième, etc. Après vingt, trente^ quarante, cin-
quante , soixante , quatre-vingts, cent et mille, on dit
unième au lieu de premier. Lorsque Tadjectif numéral
se compose de deux éléments numéraux ou plus, le der-
nier seul prend la désinence ordinale : dix-septième, etc.
On usage bizarre a voulu qu*on emploie les nombres
cardinaux au lieu des nombres ordinaux en parlant des
heures, des mois et des années courantes : Il est six
heures, aa lieu de II est la sixième heure; Le deux
mars y pour le deuxième de mars: L'an mil huit cent
soixante, pour Lan mil huit cent soixantième, etc.
On dit toujours le premier janvier. Jamais le un jan-
vier. Il en est de même lorsqu'on désigne le numéro
d'ordre des souverains, princes, duc^, etc., de même
nom: Louis deux, Charles huit; mais il faut dire:
NapoléoH premier. Vingt et cent, précédés d'un nombre
par lequel ils sont multipliés, prennent la marque du
pioriel : qiuUre-vingts hommes, neuf cents hommes» Mais
si un autre adjectif numéral suit, la marque du pluriel
(Uspiiralt : quatre-^ngt-un^ trois cent quatre. Si vingt et
ceat sont employés abusivement pour vingtième et cen-
tième, ils ne doivent et ne peuvent Jamais prendre la
marque du pluriel : l*anmilseptcentqiAatre-vingt, Vannée
sixcent. L'usage a consacré vingt et un, trente et un, etc.;
mais il faut dire vingt-deux, trente-trois, etc. On peut
dire soixante-dix et soixante et dix; mais on ne peut
dire que quatre-vingirdix, cent dix^ etc. On dit soixante
et onze mieux que soiocante-ome. Quatre-vingt-un,
quatre-vingt-onze, cent un, mille un, s'emploient tou-
jours sans la conjonction ; on dit cependant les Mille et
une nuits, les Cent et un, — Nos adjectifs numéraux
•oDt tirés directement de ceux de la langue latine. P.
lumÉBADx (Adverbes), adverbes qui expriment, soit le
nombre de fois, soit une idée de rang et d*ordonnance.
La langue française ne possède guère parmi les premiers
que les deux niots doublement et triplement, Isa langues
anciennes sont plus riches à cet égard. Mi en français
est one particule numérale inséparable, (^ui, préposée
devant un nom substantif ou adjectif, expnme l'idée de
moitié : mi-parti. Les adverbes numéraux ordinaux se
forment en français par l'addition du suffixe ment à Tad-
jectif numéral ordinal : premièrement, secondement ou
dewâèmement, troisièmement, etc. En latin, on emploie
avec le sens adverbial le neutre singulier des adjectifs
ordinaux ^nmum,terttum,Quarttf m), I - Vablatif (primo, .
tertio, quarto) y cas qui est seul usité pour dire deuxiè-
mement {secundo). En grec, on emploie le neutre singu-
lier ou pluriel, avec ou sans article. P.
nciiéRADX (Substantifs) ou nous de nombre, mots qui
expriment des quantités, soit simples, soit multiples, soit
collectives, soit partielles. Tels sont unité, huitaine,
^^ine^ douxaine, millier, million, milliard , trillion,
le doMe, le tiers, le quart, la moitié, le triple, etc.;
enfin le mot fois, uni à un adjectif numéral cardinal ou
ordinal. Les mots semaine et neuvaine, qui signifient
proprement durée de sept, de neuf jours, ont perdu, par
Tusage, leur caractère primitif de substantifs numéraux,
et ne sont considérés que comme des substantifs com-
muns ordinaires. Les langues anciennes comptent aussi
an assez grand nombre de substantifs i^uméraux, surtout
pour exprimer une idée collective. P*
HOMÉBAox (Vers), vers dont les lettres numérales mar-
quent le millésime de quelque événement. V, Chrono-
GRAMME.
NUMÉROTAGE DES MAISONS. Autrefois les maisons
de Paris n'étaient point numérotées; on désignait leur
roter les maisons ; mais les hôtels se trouvèrent humiliés
de se voir ainsi confondus dans la foule -et comme enca-
naillés dans la bourgeoisie , et la chose commencée ne
fut pas poursuivie. Un M. Kremfeld, attaché à la diplo-
matie pour rélecteur de Cologne, et qui publia en 1776
et années suivantes, sous le nom d'Almanach de Paris,
le premier almanach d'adreases des principaux habitants
de la capitale, le fit le champion du numérotage, qui
devait être si commode pour son almanach ; néanmoins
il obtint si peu de succès, qu'en 1782 on réclamait en-
core pour l'adoption générale de cette mesure. Ce ne fut
que 24 ans plus tard, en 1806, après que la Révolution
eut tout nivelé, que l'administration municipale put effi-
cacement ordonner cette mesure, qui fut appliquée avec
une méthode, et rendit les recherches plus promptes et
plus faciles : toutes les rues furent classées en rues pa-
rallèles et en rues perpendiculaires à la Seine, comme
elles le sont ou à peu près , le fleuve coupant la ville en
deux. Dans les rues parallèles, la série des numéros
commence à l'E. et se suit à 1*0.; dans les rues perpen-
diculaires, la série part de l'extrémité la plus rapprochée
ou la moins éloignée du fleuve, et va en s'avançant vers
l'extrémité de la ville. Enfin, cette marche adoptée , tous
les nombres pairs sont à droite et les impairs à gauche.
Originairement on peignait les numéros sur les maisons,
du côté de la porte d'entrée ; la pluie et le soleil les
altéraient souvent ; vers 1850, on a commencé de les
faire peindre sur une plaque de grosse porcelaine de
0"*4^ carrés, à fond bleu, avec le numéro en blanc.
Cette peinture étant cuite au four est inaltérable. — Le
système de numérotage des maisons, tel qu'il se pra-
tique à Paris, est adopté dans toutes les communes de
France. C. D— t.
NUMISMATIQUE (du grec numisma, monnaie). La nu-
mismatique a pour objet la science des monuments mé-
talliques, médailles et monnaies. Jetons et méreaux, etc.
Son utilité pour l'étude de l'histoire a été comprise depuis
longtemps, mais surtout depuis l'époque où le grand ou-
vrage d'Eckel {Doctrina nummorum, etc.) a posé les
bases, établi les règles de la science. Les portraits des
princes, la chronologie de leur règne, les principaux évé-
nements de la vie des peuples, sont fournis par les mé-
dailles et les monnaies. La valeur du travail artistique
de ces pièces indique la mesure de la civilisation des pays
où elles ont été fxappées, et l'abondance de la monnaie
est une indication utile pour l'économiste, qui juge par
elle la richesse relative des peuples et le développement
de lewr commerce extérieur.
Division, — Il y a la numismatique ancienne et la nu-
mismatique moderne. La première, portant sur des temps
reculés, offre beaucoup plus d'intérêt que la seconde, à
laquelle elle est fort supérieure sous le rapport de l'art.
C'est d'elle que nous nous occupons ici.
Noms divers portés par les médailles. — Les médailles
ou monnaies antiques {V. Médailles) ont porté chez les
Anciens divers noms, les uns relatifs au sujet représenté,
les autres à leur forme. On appelait Tortues les monnaies
d'Éçine, frappées au type de la tortue ; PotUains, celles de
Connthe, comme celle ci-dessous, ayant au droit une tète
Médaille poulain.
de Minerve, et au revers un Pégase aîlé; Gentati Philtppt,
les monnaies de la Galatiequi portent des génies avec des
ailes; Sagittaires, les Darîquesoù figure l'archer royal,
monnaie de Darius, dont nous donnons un type ci-contre ;
Dorique.
Chouettes, les tétradrachmes d'Athènes, etc. Il y a\^t
aussi les Victoriati, les Biges, les Philippes^ les Cyzi-
cènes, les Phocéennes, les Homères de Smyme, les Vul-
cains de Liparî, etc. — Les modernes distinguent parmi
les pièces antiques les Incuses (umôiruw), gravées en
creux; les Serrati, crénelées sur les bords; les Fourrées,
pièces fausses couvertes d'une lame d'argent; les Saucées,
NUM i:
ptècea de cuirre trempées dans l'or ou l'argent en rusion ;
les Fnisles, pièces usées par le rrottement. IndépeD^ain-
meot de cet diverses pitrticularilés, il y ■ encore la pa-
tint, espèce de remis que le temps met sur le bronze
antique, et qui aide à reconnaître son authenticité. — Les
monnaies ont eu! frappées en cniTre, en argent, en or,
en électnim (alliage d'or et d'ai^nt), en potîn (alliage de
cuim et d'argent). Elles portent an nombre Infini de
lypM , sujets caractéristiques du pays et du temps où
elles ont élé émises; on y trouic quelqnerol? des tétea
affrontéa, opposée» l'une à Pautre, front contre ftvnt.
t. .VéJallIt affrvKtii S. ilèiailU eonSngvét.
comme celles de la 1" pièce cl-dessos, représentant les
deux fils de Pompée; ou cori;uj;u^, dont la 2* pièce
offre un exemple ikns les tâte* de Ptolémée Phtladel-
plie. It faut ; distinguer le tignt monitiûrt, particulier
à l'atelier et primitu, de la contrs-tnargM. empreinte
postérieure, par laquelle on a modiflé ta râleur et la si-
gnification de la monnaie. Les Inscriptions mises tantAt
ea iégeitdtt aatour du sujet , tantdt exprimées k Ytxtr-
gue en monogramm4t ou en initiatts , sont à étudier
avec le plus grand Min. En effet, on trouve sur les
ntonnaies antiques owtononMi, frappées à l'époque où
les villes Jouissaient de l'indépendance, les noms des
mogtstrati non titrés, les noms des maguUrats avec leur
titre d' Archonte, de Préteur, d'Épliore, de Prytane, etc.j
sur tes monnaies imptrit^et, les noms des magistrats
litres et non titrés, les noms des villes avec l'Iadicaticn,
dans le titre qu'elles se donnent, de leur situation po-'
litique. Ces inscrinlions sont généralement régulières,
mais quelquefois les lettres sont placées dans l'ordre
Inverse ; c est cet ordre où elles se présentent à re-
bours qu'on a appelé Bouitrophidon. Il j a ï distinguer
aussi parmi les médailles celles qu'on désigne sous te
corn Je médailles pariantes, parce qae le sujet qui y est
représenté se rapporte k la siguiHcatlDn de leur nom :
telles sont celles de Sélinonte, où figure le persil (en grec
Selini); celles de Cardia, un cœur; de Rhodes, une rose
de grenade, etc.
Type* (t tymboUi. — Les renseignements que four-
nissent les médaille! sur les mœurs, les luàges, les
croyances dee Anciens, sont en quelque sorte lnnom~
branles. Il y a les symboles des provinces et des villes ;
I^l/Wgu« e«t déslgDM par une tête d'éléphant; VÊgi/pt*
par un sistre, un ibis, un crocodile; la Judit par une
robe et un palmier; t'Èipagne par an lapin ou un soldat
urmé dé deux Javtûots; VArabic par un chameau, etc.;
les symboles des divinités : Prottrpine est représentée
Car une grenade; Canop» par un pot de terre qui porte
i Qeur <f Isls : les DioKtiTes par des étoiles, comme on
le voit au revers de la médaille ci-dessous de Scyros, où
Castor et Pollux ont une étoile sur la tète, etc. Les attri-
bul3 n'ont pas moins d'Importance : la haitt, sans fer, ou
plutôt l'ancien sceptre, est la marque du commandement
suprême; la path-e, entre les mains des divinités,
marque les sacrifices qu'on leur fait; le caducét marque
le pouvoir; les Mi^wnli sont le signe de la prudence, les
itin celui de la diligence, etc. On voit sur les méd^lles
10 NUÎÎ
romaines rfnscignxntlitutreplacéi. __.
diquer une colonie nouvelle; les boviclitrt vçlif) eiprl-
meni les vœui publics rendus aux dieux; le bonnet eut-
monlâ d'une pointe croisée sur le pied ave^ des pendants
(op^xetlliiniintna) marque la dignité poatiflcale,laisqu'il
est accompagné dés instrumenta de sacrifices; te ckar
traîné par des clieraux ou des lions et des éléphants
marque le triomphe ou l'apothéose des princes ; le cliar
traîné par des mules, k l'usage des princesses, marqua
la consécration, ou indique qu'on porte leurs images aux
jeut do Cirque. Les bonntta, les couronnti qui ceigaeni
la tête ont des formes très-diverses. Cest Se diadème-
bandeau dont on s'est servi depuis ronstantin : Jnsiinien
est le premier qui s pris une espèce de couronne Iérm>!4'
leamtlacftiium). Ce sont les counmnei radiaiei, qu'on
place, comme le nimbe, cercle de lumière, autour de la
tète du prince devenu Dieu; les couronnai roilrofei.
muralts: les cii^tus, faites de chêne; les athlétiqats,
formées d'ache, etc. Parmi les bonnets, il y a la niilrs,
sur le front des rois d'Arménie et d'Assyrie; la liare,
sur celui des rois Perses et Parthes; lo bonnet Phrvgien,
le Pélase de Mercure, barratle avec deux ailes ; te bonnet
iarts bords de Vulcain , des Cabires et des Cyclopes: le
bonnet du Dieu Lunus, recourbé en pointe en forme de
croissanl, etc. — Très-souvent dans l'antiquité, en Grèce
comme en Asie, comme en Gaule, les peuples ou les
villes, au lieu d'inscrire leurs noms sur ut monnaie, ta
contentent d'y placer une production particulière au sot
du pays; ainsi, Cyrène, dont toutes tes pièces sont frap-
pées au type du silphium ; ou un animal qui est le lym-
iMle de la divinité protectrice. Un nombre conaidérabls
d'animaux figurent sur les médaille* : le eh«i>al est le
hrpe ordinaire de Carthage ; le cAi'sn, consacré i Mercure,
de Tyr; te coq est le symbole de Lunus ou da Mercure;
la com<ilJ«, d'Apollon ; Vhippopolamt est le symbole du
Ml ou de l'Egypte ; Pégase ailé, celui de Corinthe, de Sy-
racuse et d'autre; villes de Sidie; le phénix, celui de
l'éternité de l'Empire romain ; te paon ou Vaigle marque
ta consécration des princesses; le pigeon, le culte de Vé-
nus; le poisson caractérise les villes maritimes ; U vigm,
les pays de vignobles; la tirant, Cumes; l'epi de blé,
Mélaponte, etc.
Nous n'en finirions pas si nous voulions déterminer la
signiflcatian de toutes !ei repré^ntatloQS symboliques
qui abondent sur tes monades antiques.
Beprésenlation sur Its médailles des auvras iTart les
plus célibres dâ VantujuiU. — lin des meilleurs piriis
qu'on tire de la numismatique ancienne, c'est pour l'in-
terprétation et la restauration des monuments, surtout
dot statues antiques. Entre les ouvrages d'art de premier
ordre, par le sujet ou par le talent de leurs auteurs.
qui se trouvent sur les médailles, citons : la lanon de
Samos, ouvrage de Smilis, type monétaire de cette ville;
la Vénus de Paphos; la Dion* d'Épdèse; Avotlon Ptûii-
siiu, réduction d'une statue célèbre de Csnachus, l'andeo
chef de l'école de Si cy on e, sur les monnaies de Slilet, etc.
Sans ces méd^llea, nous n'aurions aucune idée de ces
chefs-d'œuvre fameux dans l'andqulté, et dont II n'existe
pas d'autre reproduction. — H faut encore recourir i la
numismatique ancienne pour trouver une image de cet
chefs-d'œuvre de maîtres célèbres qui ont disparu:
à'Agéladas, le maître de Phidias, nous trouvons la re-
présentation du Jupiter Ithomate sur un médaillon de
Hes-sénie, que nous donnons d-dcsMUS, oii l'on voit
I Jupller tthomnr
JapICer nu et debout, a»i>e l'aigle sur le bras gauclie
'wo^u. et la foudre qu'il brandit de la main dnille:
■— i« Phidias, trois de ses principaux ouvrages, te
Juptlvr d'OtympIe, la Minent du Partbénon. It Mi-
nerve de l'Acropole, ont fourni le ^pe de plusieurs mé-
dailles grecques. On a, en outre, la léte de Minerve sur
les tétradrachmes d'Athènes, st la tète de Jupiter sur lu
médaillons des Arcadiens ; — de Praxitile, la Viaus de
Cnida au revers des têtes de Caracaila et de Plautille.
le groupe de Utone et de Chlori* sur nm médalll»
firfin, le Fkane «or une médiJIle de Ciesarea de Pa-
atet de la Trachonitide ; — de Lysipp», l'Hercule h table,
lur Ua médailles de Crotone. — Les médailles çrecques
reofertneDl en outre la réminiscence ou la copie d une
roule de graupes et de «latues dea msltret des premières
IVuniumaiKTU* grteiiu». — Elle comprend plusieurs
^ques.détorminéss chacune par lafomie des médailles,
cells des lettres, et le style du dessin. — Frmiièra ipo-
<]w. Rite commence «Tec l'art lui-même. Hais où fa mon-
tre a-t-elle été InTentéeT Si l'on en croit Hérodote, c'est
tu lanie. Void une monnaie ftappée en Asie Mineure,
JTannaJt yrtmMre.
« ipi'ï ss Tarme globuleuse, h la Krosaièreté du dessin,
on peut placer aux premiers temps du macDayage.
Stnban et la plupart des écrivains grecs foDt Don-
veur de l'iarention de ta monnaie i, Pbédon , loi d'Ar-
Uimnali fÉçInt.
EM. qui mourut daos le »• sièclft av. notre ère. Laplus
iDcieiiDe fut frappée à Ëgine au type de la iorlu». Quoi
ip'il en soit de l'origine de la fabricaUoo monétaire, il
est certain qu'elle Tut bientût portâe chez les Grecs k une
sorte de perfection. Dans cette première p^odo, les
pièce* sont rondes, épaisses j il n'y a de représentation
liçurée <iuB d'un c6té. — La ttconde êpoitat commence k
Aleiandre T." et finit an commencement du règne de
Philippe n [*50 k 354 av. J.-C.) ; c'est ['époque de Phi-
iliu. In pièce est moins épaisse, la fabricalion meilleure,
lin plus parMu Voici, n° 1 ci-dessous, comme spéci-
men de l'art monétaire h cette époqne, une superbe
monnaie d'Aleiandre J", en argent, et n* 3 une mÉdaille
de Gela de Sicile, ooi font partie des collections de la
Bibliothèque impéride de Paria.
1. Konaaitd'ttTgitiHAlamidnl".
S. Uonnali de Gela.
Li tfotnènu périoth de la numismatique ftrecque com-
mence k Philippe II et Snit arec l'indépendance de la
drict, ou plutôt ne finit qu'avec ses conquérants, car
,1 NUM
Home, l'Asie, les provinces dont la civilisation l'est for^
mée ou déreioppée au contact de la Grèce, conttnneni
k frapper des ihonnaies erecques. Un Empire qui parte la
langue grecQue survit il l'Empire romain, et la monnde
grecque ne disparaîtra entièrement qu'avec lui au milieu
du IV* siècle. L'époque qui commence avec Philippe II,
et se prolonge pendant trois siècles, est la pins brillante
de l'histoire de l'art monét^re. Pour donner une idée de
sa perfection, on n'a que l'embarras du choix. Les mé-
daillons de Syracuse sont d'incomparables chefsHl'mavre.
Voici deux revers de monnaies grecques, une tète de Ju-
piter de Dodone (n* 1 ), une tète de Méduse (n* 3), qui
permettront d'apprécier l'eicellence du détail et l'éléva-
tion du stylo.
l'oWa,
1. /upUrr dt Z>Ddi»M. t. Ufdfot.
D»i monnatis grecquu. — C'étaient le (ofwii et la
de compte; le ttatàn, la irachm* et
effectives. Le talent attique valait 60 mi-
100 drachmes, le etatére d or 8 drachmes,
le itatère d'argent 4 drachmes. On évalue la drachme à
environ 80 centimes de notre monnaie; l'obole, sixième
partie de la drachme attique,ft 15 centimes. Il y avait des
multiples de tantes les monnaies : des didracbmts, des
IridrachmetyA^tHradraehjnta, ieadcmbla italères.àe»
diobole) , des Iriobolai, des t^froboJsi. Les divisions de
l'obole, les temi-oboita, tas quarti d^obolei, les cAoIcom
(8* de l'obole) étaient, comme l'obole, des motmaies de
Numitmatigut romaint. — Elle se divise en deux pé-
riodes, embrassant, comme l'histoire même de Rome, la
République et l'Empire. A la première se rapportent le*
monnotss consulaires ou de Camille; h la seconde les tnon-
naUs frappées â l'effigie dtt empereurs, soit à Rome, soit
dans les provinces. Les plus anciennes monnaies furent
d'airain. On voit dans les cabinets des ta, at liberalit
( parce qu'ils pesaient effectivement 1! onces de l'ai,
poids dont on fait remonter l'origine aux rois). Co sont
de lourds et massifs carrés d'airain marqués à l'em-
preinte du bceuf ou du trident, et d'une ex^ution qui ne
manque ni de lai^ur ni de style. Le poids de l'a) fut
successivement réduit, i. partir de l'époqoe où on com~
menfaàmonnByerrargent,c.-h-d. de l'année 3119 av. J.-C.
11 y eut trois monnaies d'argent : le denier, valant 10 as,
ain^ nommé à cause de sa valeur même, de dents assi-
bus ou dena ani,- le guînairs, valantcinq as; le sesUrei,
valant deux os et demi. BientûCon ne compta plus par
as, mata par sesterces, et te sesterce devint l'imité moné-
laire. L'or fut d'abord rare i les conquêtes l'ayant rendu
plus commun k Rome, on flrappa des deniers d'or valant
25 deniers d'argent, et des guinoirss valant la moitié du
denier d'or, A cette époque O'in 207 av. J.-C), le rap-
port de l'or à l'argent était comme 1 est à 17 ; en Grèce,
romaines portent ordinairement le signe de leur
valeur : le denier, un X, ou V, ou XV], indiquant qu'il a
valu X, et plus tard XVI asi le quinaire, Q (Initiale de
4titnair«)ouVile setterce, DS ou HS, indiquant sa valeut
primitive, deux as, plus un sem] ou demi-as. Rome ne
donna Jamais le droit de battre monnaie k un particulier;
etjusqu'i César.Jamala on n'osa mettre sur la monnaie
l'emgje d'm homme vivant. Les souvenirs historiques,
auxquels les médailles font fréquemment allusion, sodi
invoqués par les triumvirs mooëtalrea, lU, VIR. A. A. A.
FF.,(mimiiiHauro,ar0nfo,(Brs,/I(i«do.f«>HKn[JD, c.-i-d.
triumvirs, magistrats cliargés de faire mouler, frap-
per l'or, l'argent, l'airain. Ces fonctions étalent dévolues a
des familles consulaires idelklenomdenionnaMf contti-
lairts donné par les numismatistes aux monnaies de la
République. Le droit de frapper monnaie est un des at-
Iributa do l'autonomie ; cependant II arriva souvent que
Home, après a'étre rendue maltresse d'un pays, laissa
NÏÏM 13
YmeràK de ce droit aui peuples BoumU; aussi voyons-
oDus l'Image des empereurs sur les monnaies d'une infi-
nité de villes. Quant aux colonies, elles jie purent en
frapper qu'à la condition de stipuler qu'elies j âtûent
Butijrisâos ! PERM. PROC. (permuii procontui], « par la
permission da proconsul, ■ et plus tord : PERH. AVG.
[ptnnisit Aaoaslus), « parla permission de l'empereur».
— Les monnaies consulaires ont un vérilable intérêt
comme teavres d'art, et un plus grand encore sous le rap-
port historique. Les Taita qui y sont relatés présentent un
caractère de véracité qui manqu — '—
impériales, oâ l'ailulatian prodiguait les mensonger pour
' 're BUi maîtres du monde. Tantût ce sont des par-
ia traditionnels, comme caui de Romulus et de Numa,
m trouve sur les monnaies des famille» Mimmia et
inirnia (voir ct-dessous n°' 1 et S); tantôt des Cait<;
pnrenient légendaires, comme sur an denier de la famille
Pampais, la Ioqts et le> Jumeaux Romulus et Rémus
(Toir n'3ct-dessousj! ou l'apparilion des jumeaux divins,
CBBtoretPoliux, t labatolltedulac Régille,sur un denier
de la jwi.t Postumia fvoif n' 4). l* plus souvent la mon-
naie donne le portrait authentique d'an homme illustre,
celui de Brutus (gens Jimia), d'Ahala Iqena Servilia), de
Msrcellus, n" S {gtnt Ctaudia); de Scipion l'Africain,
D* 6 (g«nt Comtlia) ; ceux de Pompée (n" 7) et de César
(n° S), dans les monnaies frap^iées par des triumvirs
monétaires, appartenant aux (kiuilles Pompeia et Julia ;
2 NUM
ment leur effigje et leur nom sur la monnaie. En vold
une émise par Brutus, qui rappelle les Ides de Mars, lig
meurtre de César, et qui donne l'image du libérateur delà
République [n°91.— Les triumvirs Marc- Antoine et Octava
en font autant. Sur une belle pièce d'Antoine, frappée en
Asie, ngure d'un c6té le triumvir, et de l'autre, au-dcMOi
d'uD eiitophort, sa femma OclAiie (?Dir d-dessoua).
Namiimalii)ue impérialt. — Les médiùllea Impé-
riatei, depuis Auguste Jusqu'à l'époque des Sévère, re-
[irésentent la plus belle période de l'art. C'est surtout
dans tes médaillons, qu'on rencontre souvent encastrés
dans une bordure et qui ne paraissent point avoir été mis
en circulation avec une valeur lé^le, qu'on admire la
finesse du travail, la perfection de la composition et de
l'eiécaUan. On peut en Jugerpar la médaillon ci-dessous
d'Antonin. Le reven représente ta fahle légendaire de
rarrivéed'Ënée et d'Ascagneenltitie. Les grands bronjt».
KfdaiUm d'Aiitmiii.
Rcrm du ntiaill^n if'Jnriniliu
moins rares, sont d'une exécution aussi soignée. Ils
relatant Tbistoire olDcielle dos empereurs, le* ciiton-
Cnnij tnnut ir GalM.
NUM
1323
NUR
ci-dessus, dont le revers nous naoutre cet empereur ha-
ranguant les soldats après son ôlccilon au trône;
Jiâvera du grand bronze de Galha.
el cet autre de Vitellius, dont le revcM fait voir une
luamachie dans le Cirque donnée à l'occaslun do sou
Grand bronze de Vitellius.
Rectrt du grand bronte de Vitellius,
aénement. Mais le plus souvent la monnaie célèbre les
victoires remportées, les pars conquis, TEmpire fortifié,
ou embelli par des monuments, édifices publics et reli-
(rieax, ponts, temples, statues, palais. Cest une mine
inépuisable de documents et de renseignements.
II existe des monnaies impériales en argent, en or et en
bronze. Ls titre de la monnaie d'argent fut altéré depuis
le règne de Septime Sévère Jusqu'à Dioclétien, qui réta-
blit la monnaie d'argent fin. La monnaie d*or antique est
(Généralement d^nne grande pureté. A Rome seulement on
émettait des espèces dans ces deux métaux ; la province
ne pouvait faire que de la monnaie de bronze. Depuis
Gallien, il n*y a plus de médailles d'empereurs frappées
dans les villes grecques et dans les colonies, et le droit
iconétaire avait été enlevé bien plus tôt à certaines pro-
vinces : par exemple à l'Espagne par Caligula. La suite
complète des grands bronzes ne va pas au delà de Pos-
tome. Celle des petits bronzes est la plus aisée à former :
elle conduit jusqu'aux Paléologues. La suite du petit
bronze, facile à réunir dans le Bas-Empire depuis Pos-
tome jusqu'à Théodose, difficile depuis Jules-César ius-
qu'à Postume, est impossible depuis Théodose Jusqu aux
Idéologues. La décadence de l'art commence à Postume;
elle produit, de Constantin à Théodose, des médailles
sans relief; après Théodose elle est absolue. Dans le Haut-
timpire, le nom des villes est souvent en légendes et en
inscriptions; dans le Bas-Empire, principalement depuis
Constantin, il se trouve toujours dan« l'exergue : ainsi,
CONGE {Constantinopoli obsignata)^ S. M. A. {Signata
'noneta Antiochœ), P. T. {Percussa Treveris). Ce n'est
'itie dans le Bas-Empire qu'on a marqué les années du
ligne sur le revers des médailles. Mats on s'est servi de
^ langue latine, même sur les médailles frappées à Con-
stantinople, Jusqu'à Michel Rhangabé. Michel est le pre-
mier qui a repris la légende grecque, et oui s'est donn«
le nom de BAIIAEYI [Basileus)^ équivalant à Auguste,
comme despotes (en grec) équivalait à César. A partir de
cet empereur, la langue s^altère, et n'est plus qu'un
mélange de grec et de latin.
F. Spanheim, De prœstantiâ et usu Numismatutn,
Londres, 1706, '2 vol. in-fol.; Vaillant, Nummi antiqui
familiarum romanarum, Amst., 1703, 3 vol. in-fol.; le
même, NumismcUa imperatorum romanorum à J. Cœ^
saread Posthumum, édit. de Baldini, Rome, 1743,3 vol.
in-4°; le même, Numismata imperatorum.». in coloniis,
municipiis et urbibus jure latino donatis, Paris, 2' édit.,
1697, in-fol. ; le même, Numismata tmperatorum àpo*
pnlis grœcè loquentibus percussa, 2* édit., Amst., 1701,
in-fol. ; Banduri, Numismata imperatorum romanorujn
à Trajano ad Palœologos, Paris, 1718, 2 vol. in-fol., avec
Supplément par Tannini, Rome, 1791, in-fol.; Eckhel,
Doctrina nummorum veterum. Vienne, 1702-96 et 1830,
9 vol. in-i**; Rasche, Leodcon universœ rei nummariœ
veterum, et prœcipuè Grœcorum ac Romanorum, cum
observationibus antiquariis, geographiciSy chronologicis,
historicis, criticis, etc., Leipzig, 1785-94, 6 tomes en
12 vol. in-8<*; Morel, Thésaurus morellianus, sive fOf
miliarum romanarum numismata omnia, Amsterdam,
1734, 2 vol. in-fol., dont le 2* contient un commentaire
par Havercamp ; le P. Jobert, la Science des médailles,
Paris, 1739, 2 vol. in-12, nouvelle édition revue par Bi-
mard de La Bastie, 2 vol. in-lS; Mionnet, Description des
médailles antiques grecques et romaines, avec leur degré
de rareté, Paris, 1806-13, 6 vol. in-S*; édit. avec Suppléa
ment, Paris, 1819-37, 9 vol. in-8''; Visconti et Mongez,
Iconographie romame, 1811-29, 2 vol. in-fol.; Millingen,
Rectuil de médailles grecques inédites, Rome, 1812,
in-4°; Jacob, Traité élémentaire de Numismatique, 1825,
2 Yol. in-8o; Cadalvene, Recueil de médailles grecques
inédites, Paris, 1839, in-4'*; De Luynes, Choix de mé-
dailles grecques, Paris, 1840, in-fol.; Lenormant, Trésor
de Numismatique et de Glyptique, 1834-50, in-fol.; Hen-
nin, Manuel de Numismatique ancienne , contenant les
éléments de cette science et les nomenclatures, Paris,
1830, 2 vol. in-8o; J.-B. Barthélémy, Manuel de nuniiS"
matique ancienne, Paris, 1851, in-18; H. Cohen, Des*
cription générale des monnaies de la République romaine,
Paris, lfô7, in-4^; le même. Description des monnaies
impériales, Paris, 1802, 5 vol. în-4°. D.
NUMMUS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
NUNCOPATION. V, Testament.
NUNDINES. V. ce mot dans notre Dicftonnatre de Bio-
graphie et d Histoire,
NUNNATIONS, nom que les Arabisants donnent à
certains signes de l'écriture arabe, tracés sous une forme
analogue à celle des voyelles, et renfermant, outre une
voyelle, un son articulé, celui de l'N. Silvestre de Sacy le
traduit par w>yélles nasales^ en avertissant que cette
expression n'est pas rigoureusement exacte.
NUNNIE. V. Chanson.
NURAGHES. V. Noraghes, dans notre Dictumnaire de
Biographie et S Histoire.
NUREMBERG (Église S^-LAURENT,à). Cette église fut
commencée en 1140 sur l'emplacement d'une chapelle du
S'-Sépulcre. Son grand portail est flanqué de deux tours
carrées à 7 étages, percées d'une seule fenêtre sur chaque
face à chaque étage, décorées à leur sommet d'une sorte de
treillage de pierre, et achevées, par une pyramide, l'une
en 1403, l'autre en 1498. 1! n'y a qu'une porte, large de
8 met., haute de 13°',30, et coupée par un pilier accolé
d'une statue de la Vierge et de l'enfant Jésus; on a en-
tassé sous la grande og^ye qui la domine une foule de
sculptures représentant la naissance du Christ, Tadora-
tion des Mages , la Présentation au Temple, la Fuite en
Egypte, la Passion, la Résurrection, le Jugement der-
nier, etc. La rose qui est au-dessus de la porte a 10 met.
de diamètre. A l'int^eur de l'édifice, les deux ailes sont
moitié moins hautes et moitié moins larges que la grande
nef; le chœur, construit de 1459 à 1477, sur les plans de
Conrad Roritzer, est un peu plus élevé que la nef. Dans
la nef principale, comme aux arcs à plein cintre des
portes latérales, on reconnaît les traces du style byzantin.
L'église S^-Laurent forme un carré oblong, qui a 105 met
sur 35. On remarque les deux magnifiques roses de la
croisée, ouvrage du vitrier- Wolkamer, les vitraux dei
onze fenêtres du chœur restaurées par Kellner, et sur-
tout, adossé à un pilier du chœur, un tabernacle sculpté
par Adam Kraft de 1496 à 1500 : c'est une véritable bijou-
terie de pierre, qui représente l'histoire de la Passion.
NUR
132^
NTM
Le crucifix da maître-autel , en bois doré, a été exécuté,
ainsi que la chaire, par Rotermundt , d*après les dessins
de Heideloff. — Au centre de la place qui précède le
grand portail de Téglise S*-Laurent, se trouve la Fon-
taine des Vierges y construite en 1589 par Bénédict Wur-
zelbauer : du milieu d*un bassin en pierre s'élève une co-
lonne, autour de laquelle sont groupées en deux séries
12 figures de fonte, dont 6 enfants nus supportant les
armes de la ville, et 6 vierges qui sont des emblèmes de
vertus ; au sommet est la Justice, avec sa balance, et ,
près d'elle, une grue, symbole de la vigilance.
NUREMBERG ( Église Notre-Davb, à), monument plus
élégant que grandiose, élevé de 1355 à 1361, à Tépoque
la plus brillante de Tarchitecture ogivale, par les archi-
tectes Georges et Frédéric Ruprecht, et le sculpteur Se-
bald Schonhofer. Il a la forme carrée des premières
églises que les Grecs construisirent sur le modèle des
temples païens. A la fin du xv* siècle, on y adapta Togive;
c'est aussi à cette époque que fut élevée la gracieuse pe-
tite tour qui surmonte son portail occidental. Ce portail
est précédé d'un porche où la sculpture a prodigué toutes
ses richesses, et au-dessus duquel Adam Kraft a ajouté
une chapelle : là se trouve une horloge mécanique, fabri-
quée en 1509 par Georges Heuss, mais ne fonctionnant
plus aujourd'hui , et dans laquelle, quand les heures son-
naient, on voyait les électeurs d'Allemagne passer devant
l'empereur. L'église Notre-Dame a été rendue au culte
catholique en 1816, mais dépouillée des chefs-d'œuvre de
peinture et de sculpture qui l'ornaient autrefois : on fit
alors subir & Tinténeur une restauration trop complète,
on le surchargea de nouvelles peintures et de dorures.
— Près de l'église, et comme elle sur la place du Marché,
s'élève la Belle Fontaine, œuvre des mêmes artistes. C'est
une élégante construction k trois étages, oui vont en se
rétrécissant, et que surmonte une pyramide couverte de
boutons de fleurs et couronnée par deux lis. L'étage in-
férieur est de forme octogone; ses 8 piliers sont accotés
de 16 figures de l'",30 de hauteur, qui représentent les
sept pnnces électeurs, Godefroy de Bouillon, Clovis,
Charlemagne, Machabée, Josué, David, J. César, Alexandre
et Hector. L'étage du milieu est orné des statues de Moïse
et des sept Prophètes. Cette fontaine, qui était autrefois
peinte et dorée, a nécessairement souffert des outrages
du temps; de 1447 à 1586. on la restaura 5 fois; elle a
été remise à neuf, de 182x à 1824, sous la direction de
Reindel ; la grille de fer qui l'entoure, exécutée par Paul
Kœhn, date de 1586.
ndrembbro (Église S^-Sêkald, à). On peut suivre sur
ce monument les progrès de l'architecture allemande de-
puis son origine byzantine Jusqu'au xiv" siècle, où elle
acquit son plus grand développement. La partie anté-
rieure, qui se trouve comprise entre les deux tours, et
qu'on appelle Lôffelsholz ou la chapelle de S^-Pierre, est
la plus ancienne, et date du x* siècle. La tour méridio-
nale fut commencée en 1300, celle du nord en 1345. La
population de la ville s'étant considérablement accrue,
on démolit le chœur de l'église, et, de 1361 à 1377, on
en construisit un autre plus vaste, qui offre l'él^nce et
la délicatesse des œuvres de la fin du xiv* siècle. Mal-
heureusement les arcs-boutants qui soutenaient les murs
de ce chœur durent être démolis comme menaçant ruine,
en 1561 ; on les remplaça par une toiture d'un aspect
lourd et disgracieux , qui a fait disparaître aussi les fron-
tons dont les fenêtres étaient surmontées. C'est en 1482
et 1483 que les deux tours, d'une forme simple et élan-
cée, reçurent leurs aiguilles, et atteignirent ainsi une élé-
vation de 88 met. Entre ces deux tours et de la fenêtre
centrale de la chapelle de S*-Pierre, on voit pendre un
crucifix colossal en bronze, coulé en 1482 par les frerpx
Stark. An portail latéral du nord, dit Porte des Fiancés^
on a sculpté les Vierges sages et les Vierges folles ; à celui
du sud, se trouve un beau Jugement dernier, sculpté en
1485 par Adam Kraft. L'intérieur de Téglise présente un
bel aspect : il est éclairé par 95 fenêtres, garnies pouir Is
plupart de vitraux de couleur. La chapelle de S*-Pierro
contient trois beaux tableaux peints sur or, plusieurs
bas-reliefs de Kraft, et d'admirables fonts baptismaui
en cuivre. lAais la merveille de cette église est le tombeau
de S*-Sébald, exécuté en bronze par Pierre Vischer, de
1506 à 1519, et qui est resté au milieu du chœur, bien
que l'édifice soit consacré au culte protestant. Ce tom-
beau a 5 met. de haut, 2'»,85 de lon^ et l'",55-de large.
Cest une sorte de cage, dont les- minces et brunes co-
lonnes font valoir la châsse du saint , toute couverte da
lames d'or et d'argent; sa base repose sur d'énormes es-
cargots; les colonnes qui la joignent au faite forment
trois arcades ogivales sur chacune des faces latérales^ et
une à chaque extrémité; des figures ornent la base de
ces colonnes, et d'autres se dressent sur le sommet; les
statues des Apôtres sont adossées encore aux colonnes,
vers les deux tiers de leur hauteur; enfin, aux quatre
angles, des sirènes soutiennent des candélabres. Le Catte
du tombeau est formé de constructions arcbitectoniques
et de clochetons byzantins. Ce travail de Vischer n'a ^
d'égal dans la sculpture allemande : la pureté du dessin,
la variété des poses, l'expression des têtes, la largeur des
draperies, le mettent sur le même rang que les bronzes
les plus célèbres des maîtres italiens.
NDREMBER6 ( Hôtel do Ville de), monument construit de
1332 à 1340, agrandi iusqu'en 1522, et reb&ti presque en-
tièrement de 1616 à 1619 par Holzschuher, dans le style
des grands palais italiens. Sa façade a 92°>,66 de dévelop-
pement, 36 fenêtres de firent, et 2 étages d'élévation. La
grande salle du Conseil, au premier étage, a 27 met. de
long sur 10 de large, et appartient au bâtiment primitif;
les vitraux des fenOtres sont de Veit Hirschvogef (1521),
et le plafund en bois de Vehaim (1613 ) ; tout le mur sep-
tentrional de cette salle est orné de peintures d'Albert
Durer, représentant le triomphe de l'empereur Maximi-
lien 1*', mais endommagées par le temps et mal restau-
rées; en face, les fresques sont de G. Weyer, et ont éga-
lement subi une restauration. Les corridors du 1*' étage
ont un plafond où Abraham Grass a représenté en 1G19,
avec figures en stuc de grandeur naturelle, un tournoi de
l'an 1446. Au 2" étage est une petite salle du Conseil,
dont le plafond a été richement peint par Paul Juvenel.
Sous l'hôtel de ville sont creusés des souterrains im-
menses, dont quelques-uns ont servi de prisons.
NYAYA (Philosophie). V, Indienne philosophie).
NYMPHES, nom donné par les Anciens à des berceanx
de feuillage, à de simples grottes, à des édicules élevés
dans les bois ou sur les montagnes, et consacrés aux
Nymphes. On y faisait des cérémonies nuptiales et des
festins. Quelques auteurs pensent qu'on appelait ATi/a»-
phées, soit des bains, dont le nom aurait été corrompu
de celui de lymphée, soit des lieux d'agrément où l'on
amenait des eaux vives et fraîches. On a découvert en
Attique un Nympticeum orné intérieurement de bas-re-
liefs, de statues, de médaillons et d'inscriptions. Il existe
encore près de Rome une grotte qu'on dit être celle de la
nymphe Égérie, et où l'on voit certains ouvrages ruinés
et des fragments de sculpture. Deux petits monuments
situés sur le bord du lac Albano portent le même carac-
tère et les mêmes traces. Les premiers chrétiens appe-
lèrent Nymphée la fontaine placée sur le parvis des ba-
siliques, et où les fidèles se lavaient avant d'entrer.
0
0
0
0, la 15* lettre de notre alphabet et la 4* des voyelles.
Cest un caractère qui répond à deux voyelles distinctes,
l'une se prononçant fort ouverte, comme dans botte,
l'autre peu ouverte, comme dans côte. Cette distinction
de l'o bref et de l'o long existait aussi chez les Grecs, qui
les appelaient omicron et oméga, et leur donnaient des
figures différentes (0, o; Û, co). Notre o long est le plus
souvent surmonté de l'accent circonflexe; il a la même
valeur phonétique sans accent, s'il termine un mot (nv-
méro, séro)^ ou s'il n'est suivi que de lettres qui ne se
prononcent pas [lot, broc). En général, l'accent tient la
place d'une s qui a été supprima dans l'orthographe mo-
1325
OBJ
derne : hôte, hâtelf hâpittUf côte, rôtt, s'écrivaient hoste,
luatèi, hospUal, coste, rosti. Il rappelle alors Tétymo-
logie : toutefois, malgré une étymologie commune, la
prononciation diffère pour notre et le nôtre, votre et le
vôtre. Suivi de m ou de n, selon les cas, Vo est la trans-
:ription d'une voyelle nasale {onde, ombre). Suivi d'un t,
U forme une diphthongua, oi, qui se prononce ouà (moif
toi, toi, loi, poiré) ; par conséquent, les éléments écrits
4e cette diplithongue ne reprâentcnt pas ses éléments
prononcés. Le groupe oé se prononce également ouà
ipoUe), Depuis le temps de Voltaire, le groupe oi a été
remplacé par ai dans un assez grand nombre de ter-
aiinaisons : Français^ il aimait^ je ferais^ ils disaient, etc.,
sa lieu de : François, il atmoitje T^roM, ils disoient, etc.
Dans la diphtbongue nasale oin, Vo a le son de ou (loin,
>u<», soin). Le groupe ou est l'expression complexe d'une
foyelle simple, qui est identique avec Tu des Italiens,
àth Espagnols et des Allemands, et que les Anglais i^e-
présentcnt généralement par oo. Dans un monosyllabe
frsDçais, où il est précédé de a et suivi de n, Vo ne se
prononce pas : faon, paon, Laon se prononcent fan, pan,
Lan. La lettre composée <b représente éiymologiquement
la diphthongue grecque oi, et a le son de 1'^ (OEdipe,
asophageji mais elle n'a que la valeur de Ve dans œil,
valeur qui est aussi celle du groupe œu dans boeuf, œuf,
tœur, mœurs^ etc, — La variété des valeurs phonétiques
de l'o explique certaines permutations qui s'opèrent d'une
langue a l'autre ou dans le sein d'une même langue.
Ainsi, la terminaison 05 des noms grecs est devenue us
eo latin (prononcé ous) ; le latin offre colo (ie cultive) et
cultus (cultivé), lavo (Je lave) et lotus (I^vé), hâmo
(booune) et humanus (humain). Dans le passage du latin
au français, mola est devenu meule; populus, peuple;
cor, cœur; soror, sœur; corium, cuir; coctus, cuit; no-
vetn, neuf; tumulus, tombeau; numerus, nombre; cul^
men, comble; movere, mouvoir; mori, mourir. L'italien
a fait molto du latin mullum, f€KoUà de facultas, popolo
à» populus, etc. En espagnol, Vo latin s'est transformé en
ne (oué) : bueno vient de bonus, muerte de mors, prueba
de pro6a^to. En allemand, les voyelles a,o,0 (eu) per-
mutent souvent dans les dialectes : rath se transforme
en roih, strcuse en stross, etc.; vogel (oiseau) fait au
pluriel vOgeli le comparatif de gross (grand) est grôsser,
— Dans les langues slaves, o est souvent prononcé a. En
suédois et dans quelques autres idiomes du Nord, il rem-
plit le rôle de l'a privatif des Grecs : trogen (fidèle),
otrogen infidèle).
Dans les inscriptions latines, O est employé par abré-
viation pour oUa, ossa, omnis, optimus, officium, optio,
ordo, etc. O. M. veut dire optimus maximus, et O. P. op-
timus princeps. Dans l'écriture commerciale, Vo signifie
Mnpte ouvert. Dans l'ancienne musique, O fut la maraue
de la mesure à 3 temps; quelquefois on mettait un point
SQ milieu, ou on le barrait verticalement; une moitié d'O
ou un C marque la mesure à 2 temps. Signe d'abrévia-
tion géographique, O. signifie ouest; pour les Allemands
il représente Vest, parce que, dans leur langue, ce point
cardinal s'appelle ost. Chez les Irlandais, O' précédant
on nom propre signifie fUs de, comme le Mctc des Écos-
sais et le Ben des Arabes; ce n'est pas, comme on l'a dit,
une contraction de la préposition anglaise of (de), ayant
le même r51e que notre particule nobiliaire de, ou que
les particules analogues t?Ofi en allemand et van en hol-
landais. — Autrefois* là lettre O était la marque moné-
taire de la ville de Riom (Auvergne). — Comme lettre
oamérale, Vamicron des Grecs valait, selon la position
deraccent, 70 (o ^ ou 70,000 (,o), et leur oméga, 800. L'O
des Latins valait il, et, surmonté d'une barre horizontale
(û), 11,000.
0 (Le cb&teau d*^, près de Séez (Orne). Il est composé
d'aoe façade et de deux ailes, et occupe trois côtés d'un
carré que baigne une petite rivière. Irrégulier dans son
ensemble, c'est un monument remarquable dans quel-
ques-unes de ses parties. L'aile septentrionale, la plus
ancienne aujourd'hui, appartient aux dernières années
du XV* siècle et aux prenuères du xvi* s elle se compose
de deux tourelles inégales en largeur et en hauteur, en-
cadrant une porte; d'un corps principal, et d'une cbar-
oiaiite tourelle en encorbellement, où l'on voit, unis aux
formes du style ogival flamboyant, les ornements qui ca-
nctériseot la transition du gothique à la pure Renais-
■aoce. La porte est encadrée par une arcade ogivale
festonnée, et surmontée de deux riches baldaquins. L'aile
méridionale est d'une construction bien postérieure, à
l'exception d'une petite tour crénelée qui en forme l'ex-
trémité. La façade, unie et surmontée d'une balustrade.
est une construction de 1770; mais, à l'intérieur, on ad-
mire un promenoir de la Renaissance, soutenu par des
piliers octogones, aux fûts chargés d'enroulements ot
d'arabesques, aux chapiteaux délicatement sculptés.
0 DB NOËL, nom donné, dans la Liturgie catholique, 1
9 antiennes qui commencent par l'interjection O, et qui
se chantent avant le Magnificat des neuf Jours de l'Aveu t
oui précèdent la fête de la Nativité. Dans le rit romain,
il n'y en a aue sept. L'usage des 0 de Noël est venu d'Es-
pagne, où il fut établi par le concile de Tolède en 656.
OBBA, nom que les Romains donnaient à une coupe
se terminant en pointe à sa partie inférieure. L'épithète
d^obbatus s'appliquait aux bonnets de Castor et de Pol-
lux, dont le haut était en pointe.
OBÉDIENCE (Pays, — Lettre d'). F. notre Dtcftofi-
naire de Biographie et d'Histoire»
OBÉISSANCE, soumission aux volontés d'autrui. L'o-
béissance aux lois est un devoir et une vertu. La femme,
d'après notre Code, doit obéissance à son mari. L'armée
doit obéissance absolue, obéissance passive^ à ses chefs,
pour tout ce qui concerne le service militaire; cette
obéissance est ta base de la discipline. L'obéissance est
un des vœux solennels que font les membres des ordres
religieux.
OBÈLE (du grec obélos, broche), signe imaginé par les
éditeurs criti^es d'Alexandrie, pour indiquer soit une
répétition, soit une surabondance de mots (-); soit un
doute sur l'authenticité d'un passage (•*-); soit une
transposition de mots ou de phrases (-^j ; soit un dépla-
cement, surtout de vers (-*). P.
OBÉUSQUE. V. notre Dtct. de Biogr. et d'Histoire,
OBÉRON , épopée romantique de Wieland, en douze
chants et en ottave rime, La fable est tirée d'un vieux
roman de chevalerie, intitulé Huon de Bordeaux {V, ce
mot), dont Tressan a donné un abrégé, en 1778, dans
sa Bibliothèque universelle des romans. Mais l'Obéron
qui dans ce dernier ouvrage Joue un rôle surnaturel, et
rObéron de Wieland, sont deux personnages bien dis-
tincts : celui du roman est fils de Jules César et d'une
fée, être fantastique tenant le milieu entre l'homme et le
farfadet; celui de l'épopée est identique avec l'Obéron de
Shakspeare dans le Songe d'une nutt d'été, — VOb^ron
de Wieland renferme trois actions principales : 1^ les
aventures du chevalier Huon, chargé par Charlemagne de
lui rapporter une touffe do la barbe et deux dents m&che-
lières du calife de Bagdad ; 2<> les amours de Huon et de
Rézia, fille de ce sultan ; 3^ la brouille et la réconciliation
de Titania avec son époux Obéron, roi des Elfes. Cepen-
dant ces trois actions sont si habilement combinées et
conduites, qu'elles ne forment qu'un seul tout. En effet,
sans le secours d'Obéron, Huon n'aurait pu réussir dans
sa mission auprès du calife; sans son amour pour Rézia,
et sans l'espoir d'une réconciliation qu'Obéron fondait
sur la fidéhté et la constance des deux amants, le roi
des Elfes ne se serait pas intéressé à leurs amours. Cet
enchaînement d'intérêts divers, ce besoin indispensable
que les différents personnages de l'épopée ont les uns des
autres pour réussir dans leur entreprise, donnent au
poème une sorte d'unité assez originale et nouvelle. Obé*
ron fut publié en 1780, et il fait encore aujourd'hui les
délices des Allemands. « Tant orue l'on gardera le senti-
ment de la poésie, dit Goethe, Obéron sera aimé et ad-
miré comme un chef-d'œuvre d'art poétique. »
OBIT (du latin obitus, décès), en termes de Liturgie
catholique, service fondé pour le repos de l'âme d'un
mort, et qui doit être célébré chaque année à l'anniver-
saire du décès.
OBrrUAIRE, terme synonyme do Nécrologe (V. ce
mot), et qui désigne aussi le registre des obits tenu dans
une église. — A la cour de Rome, en termes de Daterie,
un Obituaire est l'homme pourvu d'un bénéfice vacant
par mort (per obitum).
OBJECTIF, SUBJECTIF. Toute pensée, toute connais-
sance implique nécessairement deux termes, et ces deux
termes, d'une part, l'esprit avec les facultés dont il est
doué, de l'autre, les phénomènes et les vérités qui lui sont
présentes, s'appellent, dans le langage de la philosophie
moderne, le premier, sujet, le second, objet {objectum,
quod objicitur) de la connaissance. Ainsi, quand Je pense
à un triangle, ou quand Je Juge que tous les angles droits
sont égaux entre eux, le triangle, l'égalité réelle et effec-
tive de deux quantités sont les objets de ma pensée.
D'objet et de sujet on a tiré objectif et subjectif, et même
objectivité et subjectivité, qui s'emploient dans un sens
analogue. Ainsi on dit: élément subjectif, élément objectif
de la connaissance, et plus généralement phénomène sub-
OBL
1326
OBL
jeetif» réalité, vérité objective, pour désigner, dans le
premier cas, tout ce qui, dans le développement si corn-
fUexe et si varié de Tentendement, se rapporte au sujet, à
*esprit; et, dans le second, à Tobjet, aux choses mêmes.
La sensation, l'idée elle-même (en tant qu*acte deTesprit
qui pense), sont des phénomènes subjectifs; les corps,
les propriétés des corps que Ton perçoit, les vérités ma-
thématiques, métaphysiques (Dieu, l'espace, le temps)
tont'des réalités objectives. — Faire sûrement et équita-
blement la part de l'Objeaif et du Subjectif dans la for-
mation de nos connaissances est un des problèmes les
plus délicats de la haute psychologie ; et si Ton avait à
faire ici Thistoire des solutions philosophiques de ce
problème, i! faudrait exposer et critiquer les systèmes
idéalistes qui, en attribuant à l'idée une existence
propre et indépendante de Tesprit (F. Idi^.ausiib), ne font
pour ainsi dire qu'objectiver le subjectif, et par cela
même s'interdire la perception de Tobjet véritable; et
ceux qui, comme le Kantisme, sans se méprendre au
caractère subjectif des phénomènes psychologiques, s'en
tiennent de propos délibéré au doute, en ce qui concerne
la réalité des objets qui correspondent à ces phénomènes,
affirmant, par exemple, la sensation, mais non l'objet
senti, les concepts du temps et de l'espace, ou tel autre
concept, comme formes de la sensibilité ou de l'entende-
ment, mais non le temps ni l'espace eux-mêmes. V, ces
mots, et Allemande — Philosophie. B — e.
OBJECTION, ce qu'on oppose à une allégation, à une
opinion quelconque.
OBJETS PERDUS, TROUVÉS. Les paquets abandonnés
dans les bureaux d'une entreprise de transports, et qui
n'ont pas été réclamés après un intervdle de deux ans,
appartiennent à l'Ëtat. Les effets non réclamés dans les
greffes criminels sont vendus, et le produit de la vente
est attribué au domaine, s'il n'a pas été réclamé dàiïs le
délai d'un an. L'argent déposé à la poste et non réclamé
appartient à l'État au bout de 8 ans. Les objets trouvés
doivent être déclarés soit à un bureau de police, soit au
greffe du tribunal ou de la Justice de paix ; s'ils ne sont
pas réclamés dans les 3 ans, ils appartiennent à celui qui
les a trouvés. Le propriétaire d'une chose perdue peut,
dans ce même délai, la revendiquer contre celui dans les
mains duquel il la trouve; mais si la chose a été achetée,
il ne peut se la faire rendre qu'en remboursant au pos-
sesseur le prix qu'elle Itii a coûté (Code Napol.^ art. 2279,
2280J.
OBLÂT. V. ce mot dans notre DictionncUre de Biogra-
phie et d'Histoire»
OBLATION (du latin oblatio, offrande), terme con-
sacré en religion pour désigner toute offrande faite à
Dieu. Dans un sens liturgique, il a été appliuué ancienne-
ment au sacrifice même de la Messe; aujourd'hui on
n'entend plus par Oblation que la partie de la Messe qui
suit l'Évangile et le Credo, celle dans laquelle le prêtre
offre à Dieu le pain destiné au sacrifice, et le vin qu'il a
mêlé d'un peu d'eau dans le calice.
OBLATIONARIUM. F. PaoTHàsB.
OBLIGATION, lien de droit dont résulte la nécessité
de faire ou donner quelque chose, et, par extension, acte
qui contient la preuve du fait obligatoire. Les obligations
sont légaies ou conventionnelles : les premières résultent
de l'autorité seule de la loi ; de ce genre sont les engage-
ments involontaires entre propriétaires voisins (F. Ser-
vitude), et ceux des tuteurs et autres administrateurs qui
ne peuvent refuser la fonction qui leur est déférée; les
secondes naissent d'un contrat {V. ce mot). Tout ce qui
concerne les obligations conventionnelles a été réglé par
le Code Napoléon (art. 1101-1369). Eu é^d à leurs effets,
il y a une grande différence entre Vobligalion de donner
et Vobligatton de faire ou de ne pas faire. L'obligation
de donner emporte celle de livrer la chose et de la con-
server Jusqu'à livraison, à peine de dommages-intérêts;
elle rend le créancier propriétaire, avec cette particularité
toutefois, que, s'il s'agit d'effets mobiliers à d livrer suc-
cessivement à deux personnes, celle qui a été mise en
possession réelle, son titre fût-il même postérieur en date,
demeure propriétaire, pourvu que la possession soit de
bonne foi. L'obligation de faire ou de ne pas faire produit
toujours, en cas d'inexécution, une action en dommag(>s-
Intérêts : cependant le créancier a le droit de demander
que ce qui aurait été fait par contravention à l'engage-
ment soit détruit; il peut même se faire autoriser à le
détruire aux dépens du débiteur, sans préjudice des
dommages-intérêts. Il peut aussi, en cas d'inexécution,
être autorisé à faire exécuter l'obligation aux dépens du
débiteur. Les dommages-intérêts ne sont dus, quand U
s'agit d'une obligation de faire, que si lé débiteur a été
mis en demeure d'accomplir son obligation. — L'obliga-
tion, soit de donner, soit de faire ou de ne pas faire,
n'est pas toujours pure et simple; elle est quelquefois
conditionnelle. Si la condition est suspensive, l'obligation
n'est pas encore formée, il y a seulement espérance
qu'elle se formera ; mais comme cette espérance est fon-
dée sur un contrat, elle constitue un droit acquis, en ce
sens que le créancier conditionnel ne peut en être privé
maigre lui, et voilà pourquoi il est autorisé à exercer,
avant l'accomplissement de la condition, tous les actes
conservatoires de son droit. Si la condition est résolu-
toire, elle ne suspend point l'exécution de l'obligation,
mais elle oblige le créancier à restituer ce qu'il a reçu,
dans le cas où arrive l'événement prévu par la condition.
— Vobligation à terme diffère de l'obli^tion condition-
nelle, en ce que le terme qui y est apposé ne la suspend
pas, et de l'obligation pure et simple, en ce que l'exécu-
tion n'en peut être demandée qu'à l'expiration du terme.
Ce qui prouve qu'elle existe avant l'expiration du terme
tout aussi bien que l'obligation pure et simple, c'est que
ce qui a été payé d'avance ne peut être répété. — On
appelle obligations réelles celles qui n'engagent pas seu-
lement les personnes qui les ont contractées, mais dont
les effets s'étendent aux héritiers et successeurs de toutes
les parties contractantes; elles sont choses figurant à
l'actif et au passif des successions, et ont d'ordinaire pour
garantie un immeuble, sur lequel elles doivent être
exécutées. — Vobligation alternative et facultative est
celle par laquelle le débiteur s'engage à fournir l'une de
deux ou plusieurs choses ; le choix appartient au débi«
teur, à moins que le contraire n'ait été formeUemer.
stipulé. — Vobligation est divisible, quand elle a poiir
objet une chose qui dans sa livraison, ou un fait qui dans
l'exécution est suscei)tible de division ; dans le cas con-
traûre, elle est indivisible, — Vobligation est solidaire,
quand il y a solidarité soit entre les créanciers, soit entre
les débiteurs.
L'existence des obligations s'établit par actes authen-
tiques on privés, par témoignage, présomption, aveu de
la partie, ou serment. Toute obligation s'éteint par le
pavement, la cession de biens, la novation, la remise
volontaire de la dette, la compensation, la confusion des
qualités de débiteur et de créancier, la perte fortuite de
la chose due (quand cette chose consiste en un corps cer-
tain et déterminé), la nullité on la rescision, par l'effet
de la condition résolutoire, enfin par la prescription.
V, Pothier, Traité des obligcUions, Paris, 1768, S vol.
in-12; Carrier, Traité des obligations, 1818, in-8«;
H. Blondeau, Esquisse d'un traité sur les Obligations
iolidaires, 1819, in-8*; Duranton, Traité des contr€Us et
obligations, 1819, 4 vol. in-8«; J. Bousquet, Dictionnaire
des contrats et obligations en matières civile et commer-
cicUe^ 1840, 2 vol. in-8*'; Bourbon de Layre, Traité sur
les obligations divisibles et indivisibles, 1845, in-8<*;
Poujol, Traité des obligations, 184C, 3 vol. in-8«; Moli-
tor. Traité des obligations en Droit romain, 1850, 3 vol.
in -8^; La Rombière, Théorie et pratique des obligations,
1857-58, 5 vol. in-8'>; Maynz, Traité des obligations
d'après le Droit romain, Bruxelles, 1800, in-8»,
OBUGATiON, phénomène spécial impliqué dans tous nos
Jugements moraux, soit aue ceux-ci aient pour objet
la distinction générale et tnéorio[ue du bien et du mal,
soit qu'il s'y agisse de l'appréciation d'un acte, et de l'in-
fluence (^e cette appréciation peut exercer sur nos dé-
terminations particulières et individuelles. L'obligation
consiste «n ce que, concevant le bien, nous croyons que
nous sommes tenus en conscience de conformer notre
conduite à l'idée que nous en avons. Rien de plus oppose
que l'obligation et la contrainte; rien de plus diffâ^nt
aussi que l'obligation attachée aux conceptions morales
et l'attrait qui nous porte vers le plaisir, ou la disposition
réfléchie que nous éprouvons à faire ce que nous jugeons
utile à nos intérêts. L'obligation/ qui suppose la liberté
est, avec l'universalité, un des caractères essentiels de la
loi morale. Les devoirs ne sont autre chose qie l'obli-
gation répartie sur les diverses applications de la loi
momie, et subsistant tout entière dans chacune d'elles
( V. Devoir). Il n'est guère de moraliste qui n'ait traité
de l'obligation; V, surtout à ce sujet : Kant, Critique de
la raison pratique, in-8'*, et Jules Simon, le Devoir,
1857, gr. in-18. B— k.
OBLIGATIONS, en termes de Finances, valeurs émises
par les États, les villes, les départements, les compagnies
de chemins de fer, les sociétés de crédit, pour couvrir
des emprunts dont l'intérêt ne dépasse pas 4 p. 100, ei
OBS
1327
OCC
qui lont remboursables par des tirages successifa, avec
primes attachées à certains numéros que désigne un Û»
ng& au sort.
OBLIQUE, en termes de Tactique, se dit d*une ma-
nœuvre, d*une marche, d*un ahgnement, exécutés à
droite ou à gauche d*une ligne de bataille.
OBLIQUES (Cas). V. Cas.
OBNOXIATION. i K. ces mots dans notre Z>/cttonnaire
OBOLE. ( de Biographie et d'Histoire.
OBREPnON (du latin obripere^ obtenir par surprise),
fraude qa*on a commise dans l'obtention d*une gr&ce,
cr un titre, d'une concession, en cachant quelque chose.
La subreption est la firaude par allégation d'un Mi faux.
OBROGÂTION. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
OBROK, impôt foncier annuel que payent, depuis 1765,
les paysans des domaines de la couronne de Russie. Il
vane de 1/2 rouble à 2 roubles d'argent (2 fr. à 8 trX
OBSCURANTISME (du latin obscurare, obscurcir),
nom créé au temps de la Restauration, et appliqué par
les libéraux à tout système politique on religieux qui
combattait l'esprit de progrès et de liberté.
OBSCURITÉ, défaut du st^le., contraire à la clarté
(F. ce mot)^ et provenant, soit des pensées qui ne pré-
sentent pas un sens raisonnable ou un ordre régulier,
soit d'une affectation de finesse et de profondeur. L'im-
propriété des termes, leur ambiguïté, les mauvaises
coDstructioos, les inversions forcées, les incorrections
grammaUcales, Texoessive longueur des périodes, sont
autant de causes d'obscurité. K. Clarté.
OBSÉCRATION. V. DépaécATion.
OBSÈQUES (du latin ohsêquium, devoir), mot qui si-
gnifia autrefois l'office ecclésiastique, le service qu'on dit
pour les morts. 11 est aujourd'hui synonyme de funé-
railles.
OBSERVANCE, mot qui désigne : i"* l'action d'obser-
Ter une règle, une loi, une cérémonie; 2** la règle même,
la loi, le statut, l'ordonnance qu'on observe; 3^ le corps
ou la communauté religieuse qui observe certaines règles.
Quelques conciles ont donné le nom d'Observants aux
clercs qui desservent une église.
OBSERVATION. Des objets de nos connaissances, les
ans sont des phénomènes individuels, des vérités parti-
coliëres et contingentes; les autres, des réalités absolues,
des vérités universelles et nécessaires. Celles-ci sont
conçues par la raison ; ceux-là sont du ressort de la con-
Ecience et des sens. L'observation, c'est l'application
d'abord spontanée, puis réfléchie et méthodique de ces
dernières facultés aux objets auxquels elles sont natu-
rellement propres. N'oublions pas qu'il s'agit de faits; il
n'y a pas d'autre manière de les connaître que de les ob-
server; il s'agît de faits différents : il faut les observer
avec des facultés différentes, chacun d'eux avec la faculté
que la nature nous a donnée pour cela : les couleurs avec
la vue, les grandeurs et les formes avec le toucher, les
idées et les passions avec la conscience. Ce sont là des
principes évidents, que plus ou moins exactement, mais
partout et toujours, on a instinctivement mis en pratique.
Aussi toutes les sciences de faits ont-elles leur origine
dans l'observation, et leurs progrès ont été d'autant plus
rapides, leurs conquêtes d'autant plus étendues, qu'elles
y sont restées plus fidèles, et que l'observation a été et
pins scrupuleuse et plus exacte. Pourquoi, en histoire
oaturelle, l'autorité d'Aristote, au témoignage des maîtres
les plus compétents, est- elle restée presque intacte?
Parce' qu'il a été un observateur exact de la nature, de la
conformation et des mœurs des animaux qu'il a décrits.
Pourquoi, au contraire, sa Physique a-t-elle fini par
tomber dans le mépris? Pourquoi, plus prèft de nous, en
est-il de même de celle de Descartes l Parce qu'Aristote
et Desautes ont traité par d'autres méthodes des ques-
tions qui ne pouvaient être résolues que par l'observation
dfrs faits. Aussi la méthode des sciences n'a-t-elle été
assurée que du jour où Bacon, sans rien inventer cepen-
ûanti a constaté de la manière la plus explicite, dans le
Sovum Organum, la nécessité d'observer les faits, et
racé en termes peut-être trop pédantesques et trop
poétiques, mais au fond avec beaucoup de sûreté et
l'exactitude^ les règles de l'observation , et celles de
'expérimentation et de l'induction qui en sont le com-
plément (F. NovuM Obganuic}. Après avoir répété que
l'observation doit être appropnée à la nature de l'objet
vL'servé, nous nous bornerons à ajouter qu'elle doit être
attentive, prolongée, réitérée à plusieurs reprises, tant
en raison de l'inégale aptitude que l'esprit peut présenter
d'un moment, d'un Jour à un autre, pour bien saisir la
nature des choses, qu'en raison des modifications que
celles-ci peuvent subir; enfin impartiale, c-à-d. tenue
en garde contre les différentes causes d'erreur que l'ex-
périence nous signale comme capables de fausser non-
seulement nos Jueements et nos appréciations, mais Jus-
qu'à nos observatlojns elles-mêmes. V. aussi ExpéiuEiiCB
MÉTHODE. B— B.
OBSERVATION (Gorps d'), corps d'armée chargé d'ob*
server l'ennemi tandis qu'on attaque une de ses places,
et de s'opposer aux efforts qu'il tenterait pour la dégager.
On donne le même nom aux troupes placées près d'une
frontière pour surveiller les mouvements d'une puis-
sance voisine qu'on suspecte.
. OBSERVATOIRE DE PARIS. V. ce mot dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
OBSESSION. V. Possession.
OBSIDIENNE (Pierre). ( V. notre Dictionnaire de
OBSIDIONALE (Couronne). ) Biogr. et d^Histoire.
OBSIDIONALES (Monnaies}. V. NécESsrré (Pièces dé).
OBUS, projectile creux, qui diffère de la bombe en ca
qu'il a un diamètre plus petit, et en ce qu'il est sans anse
et sans culot. Il est plus épais dans le fond, et l'épaisseur
diminue insensiblement Jusqu'à Voeil, par lequel on in-
troduit la poudre, et où l'on enfonce la fusée destinée à
le faire éclater. La fusée pouvant s'éteindre facilement,
Simienowicz avait proposé, dès i649, un appareil pour
la remplacer. De nos jours on a inventé les obus per-
cutants, dont l'œil est muni d'un mécanisme à percus-
sion qui enflamme la charge aussitôt qu'ils touchent le
but. L'obus a moins de portée qu'un ooulet de m^me
calibre. Un obus de 10 centimètres donne 17 éclats,
dont 14 pèsent plus de 100 grammes; un obus de 16 cen-
timètres donne 21 éclats. Le matériel d'artillerie en
France admettait, il y a quelques années, trois dimen-
sions d'obus : celui de 6 pouces (16 à 17 centimètres de
diamètre), celui de 4 pouces et demi, dit de 24 (12 à
13 centimètres), et celui des batteries de montagne, dit
de 12. Aujourd'hui, le canon-obusier de 12, qui a rem-
placé à la fois la pièce de 8 et l'ancien obusier, lance
indistinctement le boulet et l'obus. Outre l'obus ordi-
naire, on se sert d'obiu d balles, ou obus d la spartelle,
remplis de balles en fer qui ajoutent leur effet à celui des '
éclats, et à*obus tête de mort, percés de plusieurs trous
par où ils vomissent des matières d'artifice enflammées.
— L'obus date du xvu* siècle. On en connaît un floren-
tin, coulé en 1643, et qui pesait 881 kilogr. ; huitobusiers
anglo-hollandais furent pris par le maréchal de Luxem-
bourg à la bataille de Nerwinde en 1693. Le premier
emploi de l'obus par les Français fut à U bataille de
Fontenoy, en 1745. Depuis 1754, l'obus a été appliqué
avec avantage aux fusées à la Congrève.
OBUSIER, bouche à feu qui sert à lancer l'obus. Cest
une pièce placée sur un affût à roues comme les canons,
et qui a un tir analogue ; sa semelle mobile permet tou-
tefois de la pointer à 60 degrés. On peut aussi lancer
avec l'obusier des cartouches à balles, vulgairement ap-
pelées mitrailles. L'àme de l'obusier, cylindrique comme
celle des canons, a de 3 à 10 calibres de longueur, non
compris la chambre. Les batteries de campagne comptent
2 obusiers pour 4 canons. Aujourd'hui l'artillerie fran-
çaise ne fait usage que du nouveau canon-obusier de 12.
L'obusier a dans la guerre maritime une efficacité par-
ticulière : un seul de ces projectiles creux, logé, arrêté
dans la muraille d'un bâtiment, peut, par son explosion,
produire un déchirement suffisant pour le faire couler
à fond.
OC (Langue d'). V. Langue d'oc.
OCCABUS, sorte de collier des Anciens.
OCCASIONNELLES (Causes). K. Causes occasion-
nelles.
OCCENTORES, ancien terme de Musique qui désignait
les ténors
OCGITANIEN (Patoi8),nom donné quelquefois au pa-
tois agénais ou toulousain, parce que le Languedoc fut
appelé Occitanie au moyen âge.
OCCUPATION (du latin oc'Upartf, s'emparer de), acte
par lequel on s'empare d*une chose dans le dessein de
se l'approprier. C'est un des moyens d'acquérir la pro-
priété. Dans l'état de nature et avant l'établissement dos
sociétés, l'occupation a été le signe et letitre unique de la
propriété ; mais il ne pouvait plus en être ainsi dans l'état
social, et la légi^lation n'a reconnu le droit du premier
occupant que dans certains cas. Ainsi, il faut que U
chose soit sans maître, sans propriétaire. De plus, l'occu-
pation ne peut porter que sur certai nés choses mobilières,
es animaux sauvages et les poissons, les trésors, les
OCT
1328
ocr
épaves, les plantes et les herbages qui croissent sur les
rivages de la mer, les objets peràus et dont le maître ne
se représente pas, les objets abandonnés volontairement.
On peut acquérir aussi par Toccupation le droit de jouir
des choses qui n'appartiennent à personne, et dont Tusage
est commun à tous. Enfin les découvertes industrielles,
les procédés nouveaux, deviennent des propriétés par
Toccupation. — D'après le Droit des gens, toute nation
fui prend possession d'une terre vacante, et y envoie des
eolons, acquiert la propriété de cette terre.
OCCUPATION (Armée d'), ensemble des troupes mises en
garnison dans les places fortes d'un pays conquis, jusqu'à
conclusion de la paix, et même jusqu'à exécution des
conditions. On donne le même nom à l'armée qui , agis-
sant dans rintérét d'un État ami ou allié, occupe son ter-
ritoire pour le garantir d'une attaque.
OCÉAN. V. Meb.
OCëANA, titre d'un ouvrage publié en Angleterre en
1056 par James Harrington, et dont Olivier Cromwell
accepta la dédicace. C'est une des utopies célèbres, un
plan de république idéale. Selon Harrington, le gouver-
nement le plus parfait est celui où la liberté existe dans
une telle mesure qu'aucun homme ne puisse' espérer en
obtenir (i^avantage par suite d'une révolution, et où ce-
pendant, s'il se trouvait par hasard un tel homme, les
lois soient assez puissantes pour s'opposera la réalisation
de ses projets. 11 réfute la doctrine de Uobbes sur la mo-
narchie absolue, et, pensant que l'aristocratie héréditaire
et rinégalité de fortune sont la cause de toutes les ré-
volutions, il établit dans sa république un maximum de
propriété immobilière (équivalent de 200 à 500 fr. de re-
venu), la souveraineté du peuple, le suflrage universel,
un Sénat de 300 membres, une Chambre de 1,000 dé-
putés, un Conseil exécutif de 7 membres, tous électifs
et temporaires; il supprime toute hérédité, et donne à
tous une éducation commune. Une telle république ne
devait pas périr, disait-il, puisque la dissension ne pou-
vait éclater dans son sein, et que l'histoire n'offre aucun
«xemple d'une république conquise par les armes, sans
que des fractions intestines aient aidé l'ennemi.
OCÉANIENNES (Langues). Les langues de l'Océanie
forment deux groupes : l** les langues polynésiennes
{V,cê mot); 2o les langues malaises, comprenant le
malais proprement dit, le javanais, les idiomes célé-
biens, la langue tagale, le madécasse ou malgache
( V, ces mots).
OCUAVO , monnaie de compte espagnole, valant à peu
près un centime et demi.
OCHLOCRATIE (du grec okhlos, populace, et cratos,
pouvoir), gouvernement du bas peuple. C'est une corrup-
tion du gouvernement démocratique : une vile multitude
substitue ses caprices et ses fureurs au règne des lois, et
ce n'est plus là population intelligente et morale qui
exerce le pouvoir. L'ochlocratie perdit la république
d'Athènes, et rendit possible en France le règne de la
Terreur.
OCRE , monnaie de Suède, qui est la 8* partie du marc
d'argent et la 24" du marc de cuivre.
OCREA. V, ce mot dans notre Dictionnmre de Biogra-
phie et d* Histoire,
OCTACORDË , en termes de Musique, système com-
posé de huit sons ou de sept degrés ; — Instrument à
s cordes.
OCTAVA, nom donné dans quelques pays aux jeux de
l'orgue appelés en France flûte de seize, flûte de huit,
flûte de quatre. Les Allemands nomment octava le prin-
cipal de huit pieds, et superoctava ou disdiapason le
principal de quatre pieds, c-à-d. le jeu à la double oc-
tave du seize pieds. Le mot octava, qui est appliqué le
plus ordinairement au principal ouvert, est quelquefois
employé pour désigner les jeux ouverts qui sonnent l'oc-
tave au-dessus d'une autre Jeu bouché. F. C.
OCTAVE (du latin octavus^ huitième), en termes de
Musique, intervalle de sept degrés avec réplique au grave
ou à l'aigu de celui qu'on a pris pour point de départ. En
parcourant diatoniquement la distance comprise entre les
deux notes extrêmes de cet intervalle, on fait entendre
huit sons difi'érents, et l'on trouve 5 tons et 2 demi-tons.
L'octave est la plus parfaite des consonnances. On la
confond souvent dans la pratique avec Vunisson; elle en
diffère cependant : l'unisson est formé do deux sons
identiques réunis sur le même degré, tandis que l'octave,
composée de deux sons distincts et distants l'un de
Pautre, est réellement un intervalle; de plus, l'octave,
en raison de l'éloignement de ses deux notes, produit
<|uelque harmonie, tandis que l'unisson en est dépourvu.
quelle que soit même la différence du timbre des sens
qui le composent. Toutes les cordes de notre système
musical sont renfermées dans l'octave : pour établir une
suite de sons dont l'étendue dépasse les limites de l'oc-
tave, on répète nécessairement, au grave ou à l'aiga,
quelques-unes des notes au'on a déjà entendues dans cet
intervalle, et l'ensemble des sons appréciables à l'oreille
n*est qu'une série d'octaves qui se reproduisent avec les
mêmes dispositions relatives. L'octave est l'intervalle gé-
nérateur de tous les autres, qui n'en sont que des divi-
sions: unsi, la moitié de l'octave donne d'une part la
quarte, et de l'autre la quinte qui en est le renverse-
ment; le tiers donne la tierce mineure, et son renverse-
ment la sixte majeure, etc. Une propriété remarquable
de l'octave, c'est de pouvoir être i^outée à elle-même au-
tant de fois qu'on voudra, sans cesser d'être octave et
consonnance; il n'en est pas de même des autres inter-
valles. C'est au xvi« siècle qu'on imagina la division har-
monique et la divtstùn arithmétique de l'octave ( K. Aarra-
uériQDB). — En Harmonie, on évite de faire deux octaves
de suite entre plusieurs parties qui marchent par mouve-
ment semblable. B.
ociAVB (Jeux d'I. V. Fonds (Jeux de).
OCTAVB (Règle de 1*), nom improprement donné à une
ancienne formule d'accompagnement qui consistait à
prendre des sixtes sur chaque degré de la gamme, à l'ex-
ception du i*' et du 5% auxquels on faisait porter l'accord
parfait. C'était un moyen d'un assez faible secours : car,
pour s'en servir, il fallait que la basse marchât diatoni-
quement par gamme ascendante ou descendante, et que
la mélodie ne sortit pas des cordes essentielles du ton.
Là règle de l'octave fut publiée en 4700 par un certain
Delaire ; l'invention lui en a été disputée par deux mem-
bres de l'Académie royale de musique de Paris, Mal tôt et
Campion. B.
ocTAyE, en termes de Liturgie catholique, intervalle de
8 jours consacré au service et à la commémoration d'un
saint ou de quelque fête solennelle. Durant cet inter-
valle, on répète certaines parties du premier office, telles
qu'antiennes, hymnes, versets, leçons, etc. Le 8* jour,
spécialement nommé Octave, est plus solennel que les
jours précédents.
OCTAVB , nom qu'on donnait autrefois à une collection
de 8 sermons prêches dans la semaine du S* Sacrement.
OCTAVB, stance de 8 vers, en usage dans les poésies ita-
lienne, espagnole et portugaise. Les verasont nendécasyl-
labes, c.-à-d. de 11 syllabes, dont la dernière est muette;
ils répondent par conséquent à nos vers de 10 syllabes.
La Jérusalem délivrée du Tasse est tout entière écrite en
octaves. — Un étranger, le capitaine prussien Boaton, a
essayé, au xviu* siècle, d'introduire l'octave dans la poé-
sie française, en lui donnant 3 rimes masculines, 3 fé-
minines, et un distique en rimes alternativement mas-
culines et féminines. Sa tentative est assez heureuse. En
voici un exemple, pris d'une traduction de VObéron de
Wieland :
L*ob8carité rëgna dant la nature,
' Et le hiboa , s'âerant dant les alra,
PouBse des cria de fort mauTalu aafirurc.
Mourant de faim , mille monstres dlrers
Hurlent an loin , cherchant leur nourriture.
Quel cheTaller, errant dam oee déserts.
Mouillé, recru , ne trouvant nul passage.
M'aurait frémi , n'aurait perdu courage?
Dans cette nuit , le héros étranger
S'étonne . tremble (avouons-le «ans feinte ),
Quoique jamais, à 1 aspect du danger.
De la frayeur il n'eût senti Tattelnte ;
Mais le projet qui le tait voyager
S'offre à ses yeux et dissipe sa crainte ;
La bride haute et Tépée à la main.
Le long du roe il poursuit son chemin.
Du reste, on trouve déjà l'octave dans les poésies de Thi-
baut, comte de Champagne, et aussi chez les Arates.
C'est donc à tort que les Italiens en ont attribué l'inven-
tion à Boccace.
OCTAVIER , en termes de Musique, donner un son à
l'octave. Cest ce qui arrive quand on force le vent dan"
un instrument. Un tuyau d'orgue octavie, quand il prend
trop de vent. Il en est de même d'une corde de violon-
celle, si le coup d'archet est trop brusque ou trop voisin
du chevalet.
OCTAVIN. V. Flotb (Petite).
ocTAviN, nom donné par quelques facteurs à un jeu de
Torgue. C'est une petite flûte à l'intonation de deux
OCT
132»
OCT
ds, qu'on emploie généralement dans la partie de
'orgue appelée Hécit, afin de donner plus de mordant
NI Jeux (pii la composent. Placé sur les autres claviers,
Poctarin peut tenir lien de doublette. F. C.
OCTAVINE, ancien petit clavecin qui n'avait qu'une
octave d'étendue.
OCTAVO (In-). V. Tormat.
OCTO-BASSE, instrument à archet, de dimensions co-
lossales, récemment inventé par M. Yuillaume. C'est l'oc-
tare grave du violoncelle, il n'a que trois cordes, ac-
cordées en quinte et quarte, ut, sol , ut. Les doigts n'étant
ni assez longs ni assez forts pour agir convenablement
sur les cordes, l'instrument est muni de touches mobiles,
mues par des leviers que la main et le pied gauches de
l'eiécutant tirent de haut en bas derrière le manche;
•'t>s touches pressent énergiquement les cordes sur des
^il'ets placés sur le manche pour produire les tons et les
uumi-tons. C'est dire assez que l'octo-basse ne peut exé-
cuter aucune succession rapide. Son étendue est d'une
ortare et d'une quinte. Il a des sons d*une puissance et
d'une beauté remarquables. B.
OCTOÈQUE ( du grec octôèkhos, les huit tons) , nom
donné, dans l'Église grecque, à un livre qui contient
tout ce qu'on chante pendant les offices, selon les huit
tons du Plain-Ghant.
OCTONAIRE, lambique tétramëtre acatalectique, trèsr.
usité dans le théâtre latin. Chez les poètes grecs, il avait
unecésure brève au 4* pied, lequel était un ïambe ; chez les
Latins, l'ïambe est souvent remplacé par un spondée, un
dactyle, un anapeste, et même un procéleusmatique, et
le vers, à cet endroit , est asynartëte, comme dans cet
exemple de Plante :
Die narem aalTani niin|t!at — aat| irat! adTentnm aenls.
On trouvequelques octonaires hypermètres. P.
OCTOSTYLE, en termes d'AI^bhitecture , ordonnance
composée de huit colonnes.
OCTROI, taxe de consommation que les communes,
toos l'ancienne monarchie française, s'imposaient, avec
^'autorisation du roi , en cas dMnsuffisance des revenus
iirdlDaires, pour subvenir aux dépenses locales. Il y avait
sur les octrois un prélèvement, qui fut d'abord d'une
moitié, puis d'un dixième, au profit du trésor royal. L*As-
iemblée constituante de 1789 supprima les octrois par
une loi des 19-25 février 1701. Le Directoire, par des fois
da il frimaire an vn, du S7 frimaire et du 5 ventôse
in xm {{^ décembre 1798, 18 décembre et S6 février
1^99), les rétablit sous le nom de Contributions tndt-
^ectes et loctUes, et autorisa en même teihps le rempla-
cement facultatif de tout ou partie du montant de la cote
iiiobilière par des droits additionnels à l'octroi : encore
ujourd'bui , Granville rejette sur cet impôt la totalité,
et Cherbourg, Bordeaux, Lyon, Marseille, Paris, etc.,
use partie de leur contingent mobilier.
L'administration directe des octrois appartient aux
miires. Tout décret d'établissement d'une taxe est déli-
i)éré et demandé par le Conseil municipal , puis discuté
"D assemblée générale du Conseil. L'initiative appartient
'ooc à l'autorité locale; le gouvernement a seulement le.
droit de restreindre ou de rejeter tout article d'un tarif
d'octroi proposé par un Conseil municipal. Les délibéra-
tions de ce demier corps sont adressées par le maire au
v>us-préfet, qui y ajoute ses observations et les envoie
lu préfet Celui-ci les transmet, également avec son avis,
'u ministre de l'intérieur, qui autorise , s'il y a lieu , le
'Ooseil municipal à délibérer sur les tarifs et règlements
Je la taxe projetée. Les arrêtés du Conseil passent ensuite
par les mains du préfet et du directeur général des coo-
ributions indirectes, et arrivent au ministre des finances.
!1 est d'usage de n'autoriser la création d'un octroi que
«» les communes ayant au moins 4,000 habitants, une
ommone veut-elle remplacer son octroi par un autre
mode de perception, le maire avertit lo préfet qui sol-
licite du ministre de Tintérieur l'autorisation de faire dé-
libérer le Conseil municipal à ce sujet. Les mesures con-
venables d'exécution sont prescrites, en dernier lieu, par
le ministre des finances.
ToQs les objets de consommation locale sont suscep-
tibles d'être imposés : boissons et liquides, comestibles,
combustibles, fourrages, matériaux, etc. Sont exempts
des droits d'octroi : les bois destinés aux constructions
mobiles de l'artillerie ; les matières servant à la fabrica-
tion des poudres ; les consommations faites à bord des
bàiimeots de l'État ; les papiers imprimés du gouver-
nement ; les médicaments ; les morues. Le sel ne paye ,'
qu'à rentrée de Paris ; le papier est taxé & Bordeaux f
le papier peint, à Alais et à Uzès. Les matières sou-
mises à des droits de douane, comme les sucres et les
cafés, ne sont çuère atteints c|[u*exceptionnellement par
les tarifs d'octroi : cependant, il y a aeux cents localités
au moins, dans le centre, l'ouest, et surtout le midi de la
France, où les sucres sont taxés. Les bestiaux payent on
droit au poids, ou par tête pour les octrois où la taxe sur
les bœufs n'excède pas 8 fr. Si une ville s'annexe sa ban-
lieue, les marchandises qui se trouvent à ce moment
dans le périmètre nouveau , et qui étaient destinées à la
consommation dans l'ancien rayon de l'octroi , ne peuvent
profiter des avantages commerciaux résultant de l'an-
nexion, qu'à la condition de payer l'impôt municipal dont
elles eussent été redevables avant le décret qui a reculé
l'octroi primitif. — Les objets assujettis à l'octroi doi-
vent entrer par certaines barrières où se trouvent des
bureaux d*octroi. Tout portetir ou conducteur des sus-
dits objets est tenu, sous peine de saisie de ces objets,
d'en faire une déclaration , dont les préposés à l'octroi
vérifient l'exactitude par des perquisitions. Tout voyageur
à pied ou à cheval est soumis aux mêmes visites. — De-
puis l'établissement des chemins de fer, dont le point
d'arrivée se trouve le plus souvent dans Tintérieur des
villes, un poste d'employés de l'octroi procède aux per-
quisitions dans le débarcadère même du chemin de fer.
— Certains objets soumis à l'octroi ne font souvent que
traverser un lieu, en y séjournant moins de 2i heures :
en ce cas, le conducteur de ces objets doit prendre un
p€us»^ebout, sorte de permis délivi^ sur la consignation
des droits versés en cautionnement et dont le montant
lui est restitué au bureau de sortie.
La loi de Tan vn frappait le fraudeur d'une amende
double de la taxe; un décret de l'année suivante le con-
damna à verser une somme égale à la valeur de l'objet
soumis au droit. Pour les voitures particulières suspeln-
dues, l'amende, d'abord de 1,000 fr., a été réduite à 100
ou 200 fr. Pour l'escalade, l'introduction par souterrain
ou à main armée, il y a, outre l'amende et la confiscation,
une peine correctionnelle de six mois de prison. — Les
contraventions en matière d'octroi sont de la compétence
exclusive des tribunaux de pdlice correctionnelle; les
contestations civiles qui peuvent s'élever pour l'applica-
tion du tarif ou la quotité des droits exigés sont portées
devant le |uge de paix.
L'administration des octrois est aujourd'hui réglée par
la loi du 28 avril 1816, qui laisse aux Conseils munici-
paux la liberté de choisir entre trois modes de percep-
tion : la régie simple, la régie intéressée, le baU à ferme,
ou Vabonnement avec l'administration des Contributions
indirectes. — La régie simple est l'octroi perçu sous l'ad-
ministration immédiate des maires. — La régte intéressée
est la perception par un régisseur, qui doit rendre un
prix fixe, et abandonner une part déterminée dans les
produits excédant le prix principal et la somme yersée
pour les frais, laquelle ne doit pas, autant que possible,
dépasser 12 p. 100 du prix fixe du bail : il y a partage
des bénéfices à la fin de chaque année, et, à l'expiration
du bail, répartition définitive suivant l'année moyenne.
— La ferme est l'adjudication pure et simple des pro-
duits d'un octroi, moyennant un prix invariable, tous
les frais de perception restant à la charge du fermier. —
Quel que soit le mode de perception, on n'admet comme
adjudicataires que les personnes reconnues solvables,
d'une moralité et d'une capacité constatées par le maire.
Aucun fermier de l'octroi ne doit être attaché à l'admi-
nistration des contributions indirectes, ni aux adminis-
trations civiles ou aux tribunaux ayant une surveillance
ou juridiction quelconque sur l'octroi. Le prix du bail
doit être payé de mois en mois, et d'avance; l'adjudica-
taire choisit lui-même ses préposés. Si le Conseil muni-
cipal a décidé que le mode de perception sera Vabonnê-
ment avec la régie des Contnbutions indirectes, cette
perception est remise entre les mains des employés ordi-
naires de ces Contributions, et les receveurs versent le
montant de leurs recettes, pour le compte de l'octroi,
dans la caisse municipale, sous la déduction des frais de
perception convenus par le traité. — Tout préposé de
l'octroi doit être âgé de 21 ans au moins, fournir un cau-
tionnement, être toujours porteur de sa commission, et
la présenter toutes les fois qu'il en est requis ; nul ne
peut faire le commerce des objets compris au tarif. -^
La régie des Contributions indirectes a, sous l'autorité du
ministre des finances, la haute surveillance sur la per-
ception et l'administration des octrois.
En 1830, le produit total des octrois, établis alors dans
84
ODE
1330
ODJ
0OS communes ayant ensemble une population de \
6,bOû,000 &me8, était de 67 millions; la taxe par tète
ressortait de i fr. 50 Jusqu'à 30 fr. En 1841, 1420 com-
munes perçurent 75 millions; en 1847, 88,612,209 fr.,
dont 36 millions pour les boissons, et 24 pour la viande.
En 1850, 1436 octrois perçurent 95,176,602 fr. 43, dont
42 millions à peu près pour les boissons. Avant Tannexion
à Paris de sa banlieue, en 18G0, Toctroi de cette ville
était pour les 4/5 du revenu local , et les octrois consti-
tuaient le tiers environ des recettes ordinaires des com-
munes de France. Les frais de perception absorbent, en
général^ un dixième du produit brut. — Dans le Finistère
et quelques autres départements, on trouve un certain
nombre d*octrois dits ruraux^ dont les produits, frappant
seulement les liauides, sont perçus par les agents des
Contributions inoirectes dans leurs tournées.
Est-îi Juste que des citoyens réunis en agglomérations
urbaines, dans leur intérêt commercial, agricole et indus-
triel f payent les objets de consommation plus cher que
ceux qui sont rassemblés en un moindre nombre ? Oui,
parce que cette agglomération est la cause d^avantages
sociaux très-réels, qui peuvent motiver des charges cor-
respondantes ; elle produit des besoins spéciaux, communs
à tous les habitants d*une même ?ille prise à part. C*est
donc à cette ville, et non à la nation, à en porter le far-
deau. D'ailleurs, IMmpôt indirect, impôt de consomma-
tion, n*étant payé que par celui qui peut consommer, ne
doit pas paraître plus onéreux que toute autre taxe. La
Révolution de 1830 et celle de 1848 ont attaqué en vain
les octrois. Si Ton supprimait ces taxes, qui satisfont aux
dépenses considérables que les villes supportent pour leur
entretien, leur embellissement, leur assainissement, l'État
en serait réduit à céder aux communes, pour les soute-
nir, une certaine portion de ses revenus, qa*il lui fau-
drait récupérer d*une autre façon. Cest ce qui vient
d'avoir lieu en Belgique : il y avait dans ce pays 78 com-
munes à octrois; un décret de Juin 1860 a aboli ce sys-
tème d'impôts ; mais, pour suppléer aux fonds dont cette
suppression a privé les villes, 1 État leur alloue annuelle-
ment 12 millions portés au budget, et résultant de la
poste et de l'accise augmentées.
L*impôt municipal de consommation existe dans la
inoitié des communes de Hollande ; dans quelques loca-
lités môme, les droits d'octroi excèdent les sommes levées
Îar l'État sur les mêmes matières. La loi communale de
851 a cependant restreint la tolérance à cet égard. —
L'Allemagne est, après la Hollande, un des pays qui
comptent le plus d'accises municipales. On y remarque
néanmoins une tendance assez générale à remplacer les
droits de consommation par les Impôts directs sur le re-
venu; c*est ce qui existe dans certaines villes de Prusse,
et Ton sait que Frédéric U avait organisé le premier sur
cette base (contribution de nature directe) le système
financier de la Silésie. — En Autriche, les octrois consti-
tuent la plus grande partie des revenus municipaux. —
Parmi les villes libres, Hambourg perçoit des accises qui
montent à environ un million sept cent mille francs Qa
douane non comprise;. Enfin les villes importantes de la
Grande-Bretagne supportent de même des taxes de con-
sommation : le charbon, par exemple, paye à Londres un
droit considérable; mais, en général « en Angleterre, les
taxes locales affectent plutôt dans leur ensemble le carac-
tère d*impôt direct. — V. Biret, Manuel des octrois et au-
tres contributions directes, 1837, in-18; Allouard, Traité
général des droits d'entrée et d^octroi de la ville de Pans,
2« édit, 1834, in-8<>; Dareste, Code des octrois munici-
paux, 1840, in-8<*; Girard, Tableaux des contraventions
et des peines en matière de contributions indirectes, die
tabacs, d*octrois^ etc,^ revus par Froma^^, 6* édit.,
1841 , in-8% et Manuel des Contributions inidirectes et
des Octrois^ refondu par Dareste, 1857, in-S»; Manud
de remployé de VOctroi, 1853, 2 vol. in-8o; Annales des
Octrois, complément du Manuel de l'employé de l*Octroi,
1853, 3 vol. in-8°; Gharpillet, De l'administration des
octrois municipaux^ 1855, in-8°; Braff, Des Octrois mu-
nicipaïuœ, résumé des lois, décrets, ordonnances, etc.,
1857, in-8«. V. PaopyLéBS db Paris. J. G.
OCULAIRE (Clavecin). V. Clavecin.
OCULI, nom qu'on donne, dans la Liturgie catholique,
•n 3* dimanche du Carême. C'est le premier mot de l'in-
troit de la messe de ce Jour.
ODAUSQUE. V. notre Dtc^ de Biogr. et S Histoire.
ODE (du grec ôdè,^ chant), nom que les anciens Grecs
donnaient à toute pièce de vers qu'on chantait en s*ao-
compagnant de la lyre, et en y Joignant même la danse.
Le mot était donc synonyme de poésie lyrique, L'Ode
était généralement composée de trois parties, la slroph*^
Vanttstrophe, et Vépode CV. ces mots). — Pour les Mo-
dernes, comme pour les Romains, l'Ode n'a plus rien de
commun avec la musiq[ue : c'est une forme lyrique, une
pièce partagée d'ordinaire en strophes ou stances égales,
et à laquelle on donne, suivant le caractère que le poëte
lui a imprimé, les qualifications de sacrée ou religieuse,
héroïque ou pindarique, badine ou anacréontique , phi-
losophiaue ou morale^ etc. Ronsard a le premier employé
le mot Ode en français. V, Gbccqob (Littérature), Lyrique
(Poésie).
ODÉON (du grecddtfion, dérivé de ôdè, chant), édifice
où les poètes et les musiciens , chez les anciens Grecs,
soumettaient leurs ouvrages au Jugement du public.
L'Odéon çue Péridès fit construire à Athènes était dans
le Céramique; il fut élevé, ditron, sur le modèle de la
tente de Xerxès, et on présume qu'il était d'ordre dorique.
D'abord ^ ciel ouvert, on le couvrit ensuite d'un toit fait
avec les m&ts et les vergues des navires pris aux Perses.
Au temps de Pausanias, on y voyait les statues de la
plupart des rois d'Egypte de la famille des Lagides. Il y
avait encore deux autres Odéons dans la même ville.
Pausanias mentionne ceux de Corinthe et de Patras. Ce-
lui de Smyrne, en Asie Mineure, contenait un tableau
d'Apelle. Les voyageurs Pococke et Chandler ont cru re-
connaître à Éphèse et à Laodicée les débris de monu-
ments de ce genre. Rome eut aussi ses Odéons : l'un fut
construit par Domiton, l'autre par ApoUodore. On en a
trouvé un également à Pompéi. B.
ODéoN, l'un des théâtres de Paris, construit pour la
Comédie-Française, 'sur les plans de De Wailly et de
Peyrc, près du palais du Luxembourg, et ouvert en 1782,
sous le nom de Théâtre-Français, Les comédiens fran-
çais y Jouèrent Jusqu'au 4 sept. 1793, et c'est là aue
furent donnés le Clujrles IX de M.-J. Chénier, les Vic-
times cloîtrées de Monvel, VAmi des lois de Laya, et
Paméla de François de Neufch&teau. Fermé à cause de
cette dernière pièce, l'Odéon rouvrit après le 9 thermi-
dor, sous la direction de la D''^* Montansier, et avec le
nom de Théâtre de l'Égalité; mais les artistes de la Co-
médie-Française se dispersèrent bientôt, et l'entreprise
échoua. La salle servit, en 1796, à des bals, qu'on appela
thiases (d'un nom grec signifiant chœur de danses), et
reçut elle-même le nom grec d'Odéon. On y donna en-
suite des banquets et l'on y tint des réunions politi-
ques. Le Conseil des Cinq-Cents y siégeait, lorsqu'il fit
le coup d'État du 18 fructidor. Reconstitué en thé&tre
à la fin de 1798, il fut, quelques mois iq>rès, ruiné
par un incendie. Quand il rouvrit en 1868 sous la dé-
nomination de théâtre de l'Impératrice, on y Joua prin-
cipalement les pièces d'Alexandre Duval et de Picard ;
les acteurs fhinçais Jouaient quatre fois la semaine, et
une troupe italienne les autres Jours. En 1816, l'Odéon,
qui avait pris le nom de Second Théâtre Français,
était tombé en une telle décadence, qu'on n'y donnait
plus que des ballets; une petite subvention l'aidait à
renaître, lorsqu'il fut encore incendié en 1818. Dès l'an-
née suivante on put en reprendre possession , et C. De-
lavigne y remporta ses premiers succès dramatiques.
En 1825, permission fut accordée de Joindre l'opén au
répertoire ordinaire, et l'Odéon eut une fortune passa-
gm avec le FreyschiUz de Weber, arrangé par Castil-
Blaze pour la scène fhmçaise sous le nom de Robin des
bois. Fermé en 1828, rouvert en 1829, il servit à diverses
exploitations, puis la Comédie-Française et l'Opéra-Co-
nuque y donnèrent alternativement des représentations
Jusqu'en 1834. La première Joua encore deux fois par
semaine, de 1836 à 1838, et enfin il n'v eut plus que de
loin en loin des représentations à bénéfice. Les Ittliens
se réfugièrent quelque temps à l'Odéon après l'incendie
de la sidle FavarU Depuis 1841, l'Odéon a sa compagnie
dramatique particulière, et, à part quelques déconfitures
momentanée, il n'a cessé dêtre ouvert. Il figure au
nombre des théâtres nationaux, et reçoit une subvention
annuelle de 100,600 tr. C'est à l'Odéon que l'on fit les
{iremiers essais de l'éclairage à l'huile en 1784, et de
'éclairage au gaz en 1822. B.
ODÉOPHONE, instrument de musique inventé à Lon-
drw par Vanderburg, de Vienne en Autriche. Ce n'était
qu'une modification du davi-cylindre de Chladni : le son
se tirait de petits morceaux de métal, au moyen d'un
davier et d'un cylindre.
ODJAK. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire,
ODJl (Idiome), un des idiomes de la Guinée. Presaue
tous les changements destinés à marquer les modes, lec
ODY
1331
ODY
temps, les liombres, les voix, les déclinaisons, s'opèrent
à l'iiide de préfixes. Les voix des verbes sont nombreuses.
L^cinploi dos mots répétés avec un sens fréquentatif est
assez ordinaire. Une Grammaire de cet idiome a été pu-
bliée par Riis.
ODYSSÉE, Tun des deux grands poémés attribués à
Homère {V. Iliade). Cest le récit, en 24 chants, des aven-
tares d'Ulysse (en grec OdyssetAs) après la ruine de Troie.
Tous les chefs grecs étaient rentrés dans leurs États;
01ysse,en butte à la colère de Neptune, emdt depuis
iO ans sur les mers, sans pouvoir atteindre son royaume
d'Ithaque. Cependant d'injustes ravisseurs dissipaient ses
biens, et, affirmant qu'il était mort, voulaient contraindre
Pénélope, sa femme, à se choisir un nouvel époux parmi
eux. Cest à ce moment que commence le poème. Sur
l'avis de Uinerve, Télémaque, fils d'Ulysse, part à la re-
cherche de son père, chez les princes qui avaient pris
part au siège de Troie (ch. 2, 3, 4). Pendant ce voya^
bij'SBe, retenu dans l'Ile de Calypso, obtient d'en partir,
se rembarque sur un radeau qu'il construit lui-même,
et, poursuivi par la colère de Neptune, essuie une tem-
pête qui le Jette sur le rivage de Skhérie , lie des Phéa-
dens (ch. 5, 6, 7, 8). Ceux-ci lui donnent un navire qui le
transporte à Ithaque (ch. 13), où il débarque chez le vieil
Eumée, le gardien de ses troupeaux (ch. 44). Là survient
Télémaque, de retour de son voyage; Ulysse se fait re-
connaître de lui, et ils se concertent pour chasser les pré-
tendants (ch. 17, 18). Ceux-ci célèbrent un grand festin
dans le palais d'Ulysse, qui vient se placer à la porte
comme un mendiant. Un des convives lui Jette un esca-
beau au visage. Pénélope fait appeler le mendiant, qu'elle
ne reconnaît pas, et qui lui dit que son époux est encore
virant Le lendemain, les prétendants étant réunis dans
la salle du festin, Pénélope, inspirée par Minerve, promet
sa main à celui qui pourra tendre l'arc d'Ulysse. Tous y
échouent. Alors, Télémaque ordonne de présenter l'arc à
son père, toujours déguisé en mendiant. Ulysse tend l'arc
sans effort, montre son adresse à lancer une flèche, puis,
se dépouillant de ses haillons, se tourne vers les pré-
tendants, et les tue l'un après l'autre (ch. 21, 22).
Alors il se fait reconnaître à Pénélope, à son vieux père
Laôrte; il s'apprêtait à résister aux parents des préten-
dants, accourus pour les venger, loi^ue Minerve, sous
les traits de Mentor, intervient et rétablit la concorde. —
VOdyssée ne dure que 40 jours, car l'action du poème
ne remplit que les derniers chants; les autres se com-
posent d'épisodes où le poète a fait entrer le récit des
aventures du héros depuis le départ de Troie. C'est Ulysse
lui-même qui fait ce récit aux Phéaciens, lorsqu'il est
jeté dans leur lie, où il fut accueilli par Nausicaa ou Nau-
sicaé, fille du roi AlcinoOs (ch. 6) : il leur raconte son
aventure dangereuse chez lesCyclopes (ch. 0), son arrivée
chez les Lestrygons anthropophages et chez la magicienne
Circé (ch. 10) , son voyage dans les pays ténébreux où il
va consulter les morts (ch. 11), le chant des Sirènes, le
naufiraçe entre Charybde et Scylla (ch. 12), etc.
Le heu où VOdyssée fut composée n'est indiqué d'une
manièie certaine par aucun témoignage de l'antiquité ;
on ne peut le connaître que d'après le poème lui-même.
La langue employée i>ar le poète est un idiome mêlé, in-
diquant une population voyageuse et commerçante, en
contaa avec les difiTérentes tribus helléniques; cependant
la prédominance évidente des formes ioniennes nous porte
à penser que VOdyssée est une épopée des Ioniens, race
éminemment mobile, et qui, fixée principalement sur
les côtes d'Asie, couvrait de ses marins la Méditerranée.
La nature des événements racontés dans le poème s'ac-
corde avec cette opinion, puisque VOdyssée pourrait être
définie l'épopée de la mer. Lorsque l'on compare à ces
deux points de vue VOdyssée avec VHiade, où sont prin-
cipalement retracés les faits de la guerre de Troie, et où
le dialecte éollen domine constamment, on est conduit à
admettre que les deux ouvrages sont de deux pays et
de deux époques difiérentes. Cette opinion se confirme
quand on étudie, dans l'un et dans l'autre, Tétat des
esprits, les croyances religieuses, les idées métaphy-
siques, les institutions sociales et les mœurs, toutes
choses qui marquent dans VOdyssée une civilisation qui
t marché pendant un ou deux siècles peut-être.
Le sujet de VOdyssée parait n'être qu'on fragment d'un
poème immense, car le 23* chant annonce une suite de
-longue haleine. Ce poème a-t-il existé? Non sans doute,
au moins avec une unité poétique comparable à celle
de VOdyssée ou de Vlliade ; mais la période des aèdes
"ayant duré plasieura siècles, et ces chantres prenant leurs
sujets dans ce cycle troyen, il est très-vraisemblable que
ce cycle tout entier avait été chanté dans ces fragmen*
séparés, «t qu'une main a manqué pour en constituer le
récit dans son ensemble. Quoi qu'il en soit, il n'est guère
douteux aujourd'hui que VOdyssée n'ait été compoc^ de
cette manière, à une époque où l'écriture n'existait pas
encore, et où la mémoire d'un seul homme i)ouvait dififi-
cilement retenir tout un grand poème. Quelle fut l'œuvre
de l'Homère qui composa Tépopée d'Ulysse ? On peut
croire qu'elle consista principalement à rassembler les
fragments épars du cycle héroïque, reUtifs au retour de
ce héros dans son lie. Nous ferons observer à ce sujet
que l'unité des épopées antiques n'a rien de rigoureux;
que VOdyssée, telle que nous la possédons, c-à-d. re-
maniée et épurée à diverses reprises par les Anciens ,
oflTre encore un tissu si élastique, qu'elle pourrait rece-
voir un grand nombre d'épisodes sans paraître rien perdre
de son ensemble, de même qu'on en pourrait retrancher
beaucoup de récits, sans nuire à la clarté ou à la marche
du poème. Homère est- 11 l'auteur de ces épisodes,
par exemple, de celui de Nausicaé, de l'évocation des
morts, etc.? Ou bien y a-t-il eu une Odyssée primitive
plus courte que la nôtre, et (jui aurait été le cadre pr^
mier dans lequel des récits vanés sont venus tour à tour se
ranger? Cette question a été résolue par l'école allemande
de Wolf, de manière à ôter à Homère, pièce à pièce,
VOdyssée tout entière, et à présenter ce poème comme
l'œuvre commune d'une génération. D'autres critiques et
presque toute l'antiquité ont adopté une solution entière-
ment opposée. Nous pensons aue la vérité est entre ces
deux excès. Qu'un premier aèoe ^'alt pas composé une
Odyssée , c'est ce que prouvent les exemples xités par
VOdyssée même, où paraissent plusieurs aèdes donnant
des preuves de ce qu'ils savaient faire. Que, d'autre part,
apré» l'époque où l'on place généralement la composi-
tion de VOdyssée, il y ait eu de nouveaux chants épiques
sur des sujets analogues et pouvant la grossir, c'est ce
que prouve l'état actuel de cette épopée, où, de l'aveu de
tous les critiques, il y a plusieurs interpolations : tel est
le 24« chant et la moitié du 23«; tel est le 11«, où est
renfermée l'évocation des morts ; tel est peut-être l'épi-
sode des Phéaciens tout entier. Les Homérides (F. ce
mot dans notre Dictionnaire de Biographie et d'His»
toire) ne se faisaient donc point scrupule de ranger
leurs propres poésies sous le nom du maître. Ces résul-
tats de la critique, généralement admis il v a trente
ans, ont été fortement confirmés par U connaissance des •
épopées indiennes, composées dans des conditions ana-
logues à celles des Grecs, et dont l'histoire générale est
aujourd'hui bien éclaircie (V. Mahabhabata). Lorsque
Selon recueillit VOdyssée avec Vlliade, il ne fit vraisem-
blablement qu'éditer par écrit ces épopées qui n'exis-
taient encore que dans la mémoire des rapsodes de
rionie et du peuple. Les diascévastes de Pisistrate com-
plétèrent l'œuvre de Selon. Des éditions diverses es
furent faites dans la suite, et lorsqu'elles vinrent entre
les mains des savants d'Alexandrie, VOdyssée et Vlliadt
étaient encore surchargées d'interpolations que ces der»
niera s'appliquèrent à faire disparaître, au 2* siècle avant
notre ère. Leur édition, revue et modifiée dans quelques
détails, constitua une Vulgate, arrêtée au y* siècle après
J.-C, et qui n'est autre que VOdyssée classique de nos
jours.
C'est dans Homère que Ton doit chercher la vraie
figure d'Ulysse; et ici elle est d'autant plus vraie, que,
tout en conservant la dignité de son caractère, le fils de
Laèrte n'en est pas moins accessible aux sentiments de
la nature et siget à ses faiblesses. — Après Ulysse, la
plus grande figure de VOdyssée est celle de Pénélope : en
elle se personnifie l'épouse et la mère, telle que les Hel-
lènes de ces temps se la figuraient. Fidélité ooi^uçale,
amour constant et prudent, modestie, pudeur, vie retirée,
soumission à la volonté de son fils, devenu, en l'absence
de son père, le maître de la maison, telles sont les grandes
qualités qui ont fait de Pénélope un type encore vivant
aujourd'hui. Télémaque, Nausicaé et les antres person-
nages secondaires de VOdyssée, composent une sorte de
galerie de portraits, pleins de variété et de vie.
VOdyssée repoie-trelle sur un fond réel et historique?
Quelle que aoit la part du poète et du merveilleux tradi-
tionnel dans les épopées antiques, on ne saurait raison-
nablement contester que les Grecs aient fait une grande
et longue expédition sur les rivages de l'Asie, ni pré-
tendre que la parfaite coïncidence des récits de VHtade
avec l'aspect des lieux tel qu'il peut être constate aulour*
d'hui même no soit qu'un effet du hasard. Mais il est
plus difficile de prouver qu'un guerrier nommé Ulysse aiâ
CEUV
1332
OFF
eu rôellemeot même une seule des aventures racontéer.
dans VOdyssée. Toutefois, qu'il y ait eu jadis un établis-
sement princier, une yieille cité héroïque dans Tile
dltba^ue, c'est ce que prouvent d'une manière évidente
les ruines encore existantes, et dont ni le caractère, ni
Tépoque, ni Torigine ne sauraient être méconnues. On doit
observer en outre que Thistoire d'Ulysse s'est toujours
présentée aux yeux des anciens Grecs comme une tradi-
tion^ et non comme une pure invention poétique; or, une
tradition repose toi^ours sur un fondement réel ; elle est
d'autant moins transformée qu'elle est plus voisine de sa
source. Ou peut donc admettre qu'un ensemble de faits
réels a donné lieu primitivement à la légende d'Ulysse,
comme à celles des autres héros troyens.
F. VOdyssée, de Nitzsch, dans la Bibliotheca grœca de
Jacobs et Rost; HistoriaHomeri, de Nitzsch, Gotha, in-4'*;
Histoire de la littérature grecque, de Schœll, Paris, 2 vol.,
1813; Ulysse-Homére, de Constantin Koliades (Lecheva-
lier), Paris, 1829; Schreiber, Ithaca, Leipzig, 1829; Gan-
dar. De Ulyssis Ithaca, Paris, 1854; Dugas-Montbel a
donné une traduction estimable, en prose, de VOdyssée,
Paris, nouv. édit., 1861, in-12. Em. B.
OECUMÉNIQUE. F. Concile, { dans notre Diction, de
OECUS. F. Maison romaine, ( Biogr. et d'Histoire.
OEIL, terme de Typographie. F. Caractères d'iupri-
HERIB.
OEIL, en d'Architecture, ouverture ronde ou ovale, pra-
tiquée dans un comble, un dôme, un attique, un entre-
GOionnement, un dessus de porte, un tympan de fronton ,
ou dans les reins d'une voûte. Les Anciens n'ont employé
les baies de ce genre qu'avec discernement et bon goût;
un certain noaàbre de leurs édifices recevaient le Jour
par des œils placés à leur sommet, comme on le voit en-
core au Panthéon de Rome, et les Modernes les ont sou-
vent imités en ce point. On peut citer, par exemple, la
Halle aux blés de Paris, U grande salle du palais du
Corps législatif, beaucoup de chapelles, etc. A l'époque
de la Renaissance, on prodigua les œils dans les attiques
et même dans les parties inférieures des façades, comme
motifs à ornements, et on en fit un plus grand abus en-
core au xvin* siècle. On appelle œû-de^on^ ordinaire-
ment ce genre de fenêtre, très-souvent ovale. — L'œil
placé au centre des dômes, et qui a quelquefois de
mndes dimensions, est recouvert le plus souvent d'une
. lanterne. Des œils sont pratiqués au-dessus des piles de
certains ponts (par exemple, aux ponts Fabricius et
Gestius à Rome, à celui de Bordeaux, au Pont- Neuf
de Toulouse), pour faciliter l'écoulement des eaux pen-
dant les gnindes crues. On donne aussi le nom d'œi/s
aux petites lucarnes d'un dôme, comme on en voit à
l'Institut, à la Sorbonne, aux Invalides, au Val-de-Gr&ce,
ou encore au dôme de S^Pierre de Rome, qui en compte
48 disposées en 3 étages. — On appelle ceu de volute le
petit cercle décrit au milieu de la volute du chapiteau
ionique, servant à déterminer les centres par le moyen
desquels on trace ses circonvolutions. L'œtf de tailloir
est la petite rose sculptée sur chaque côté de l'abaque. B.
OBIL-DE-BOEUF. F. Œil.
OEUFS DE PAQUES. F. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
OEUVRE, terme d'Architecture , se prend, dans cer-
taines expressions, pour construction, bâtiment. Ainsi,
mettre en ceuvre, c'est employer une matière quelconque,
lui donner la forme et U place qu'elle doit avoir. Les
mots dans oeuvre et hors csuiore s'appliquent aux me-
sures prises de l'intérieur ou de l'extérieur d'un édifice.
Reprendre en sous-^swvre, c'est bâtir, sous la partie su-
périeure d'une construction, une construction nouvelle,
opération qui se fait au moyen de forts étais placés de
manière à supporter la construction supérieure sans
qu'elle éprouve ni tassement ni dérangement. Amener
des matériaux d pied Sœuvre, c'est les placer à proximité
du b&timent que l'on construit. Au moyen ftge, un maître
de Vceuvre était un architecte, et il y avait toujours, à
côté des grands édifices religieux, une maison de tcBuvre,
où logeaient l'architecte et Tes maîtres ouvriers, chargés,
de père en fils, de la continuation des travaux. Par suite,
œuvre a signifié la fabrique d'une église, le revenu affecté
à l'entretien des bâtiments et aux nrais du service divin.
OEUVRE, en termes de Joaillerie, chaton sur lequel une
pierre est ench&ssée.
OBOVRB, au masculin, se dit des ouvrages d'un compo-
siteur de musique : le premier^ le second OBUvre, etc. n
signifie aussi le recueil des estampes d'un graveur.
OEUVRE (Banc d*). F. Banc d'oeuvre.
OBi'VRE (Chef d'). F. Chef-d'geuvre.
OEUVRE (Hors d'). F. Hors d'oeuvre.
OEUVRE (Main d*). F. Main d'oeuvre.
OEUVRES, terme de Marine. On nomme fBuvres vvœSf
toute la partie de la carène d'un bâtiment qui est su^
mergée ; oduvtes mortes, celle qui est hora de l'eau ; grossn
osuvres, les cabestans, les roues de gouvernail, etc.;
OBuvres de marée, le travail de radoub ou de carénage
auquel on se livre quand la mer est basse.
OEUVRES ET LES JOURS (Les), titre d'un anUqao
poëme grec, unanimement reconnu comme l'œuvre d'Hé-
siode. Il se compose de 826 vers, partagés en quatre par-
ties, qui n'ont presque pas de lien entre elles et ont été
ranj^ dans un ordre arbitraire dès les temps les plus
anciens. Après une courte invocation, dont rauthenticité
est douteuse, et sans doute ajoutée par quelque rapsode
en l'honneur d'un dieu dans la fête duquel il devait
chanter, le poète trace le parallèle des deux Discordes
l'une est la Jalousie, ({ui soufifle partout la guerre, et
l'autre VÉmulation, qui excite l'homme indolent au tra-
vail. Il remonte ensuite à l'origine du mal sur la terre ,
et l'explique d'une façon dramatique par les fables de
Prométhée et de Pandore. Comme développement à ces
mythes, il trace le tableau de la dégradation successive
de la race humaine : ce qu'il dit de VAge d*or, de Yàge
d'argent et de VAge d'airain est conforme aux descrip-
tions des autres poètes; mais il imagine un Age fiéroique,
dans lequel Jupiter, essayant de régénérer le monde,
crée les néros ou demi-dieux, qui ont péri devant Thèbes
ou sous les mura de Troie. Cette sève nouvelle fut bien-
tôt épuisée, et l'on est arrivé dans VAge de fer, dans
lequel Hésiode se plaint d'avoir reçu la vie. Quoique ce
tableau des diverses générations de l'humanité ne soit
qu'une ébauche poétique, on ne peut v méconnaître une
tentative hardie, inspirée par le génie de l'histoire, et
qui en présage déjà le développement chez les Grecs. —
La corruption de l'Age de fer amène, de la part d'Hésiode,
une série de conseils ou de reproches , qui semblent
inspirés quelquefois par les circonstances de sa vie. Le
souvenir d'un procès dans lequel son frère Perses l'a
emporté sur lui contre toute justice , lui dicte ses pré-
ceptes sur les devoira des juges, et c'est peut-être aussi
le ressentiment qu'il en a conservé qui lui suggère la
fable de l'Épervier et du Rossignol. En général, on sent
partout dans le poème les impressions personnelles qui
se mêlent aux p];^eptes généraux. — Dana une 3* partie,
Hésiode donne une sorte de manuel des travaux des
champs, et descend aux plus minutieux détails de l'agri-
culture. Il y a un charme infini dans ces tid>leaux qui
répondent au titre du poème, dans la peinture de ce que
Fénelon a si bien appelé l'aimable simplicité du monde
naissant La vie de famille de ces temps reculés nous est
décrite dans ses secrets les plus intimes; les préceptes
sur le mariage et sur toutes les convenances domestiques
semblent être le fruit d'une expérience consommée. —
La dernière partie de l'ouvrage d'Hésiode est une sorte
de calendrier rustique, un almanach des supentitioDs
champêtres. B.
OFFENSE , mot employé dans le langage vulgure
comme synonyme ^injure et &outrage (F. ces mots}^ et
qui s'applique en un sens spécial à l'injure publique
enven la personne de l'Empereur. Cette injure est punie
d'un emprisonifement de 6 mois à 5 ans, et d'une amende
de 500 fr. à 10,000 fr. ; le coupable peut en outre être
interdit de certains droits civiques, civils et de famille,
pendant un temps égal à celui de l'emprisonnement au-
quel il a été condamné. L'injure envera un membre de
la famille impériale est punie d'un emprisonnement d'an
mois à 5 ans, et d'une amende de 100 fr. à 5,000 fr.
OFFERTOIRE, partie de la Messe. F. notre l>ic(ioi»-
naire de Biographie et d'Histoire.
oppERTOiRB , nom qu'on donnait autrefois au linge ou
autre morceau d'étofié dans lequel les diacres reoevaicat
les off^randes des fidèles.
OFFICE (du latin offlcium), terme qui implique l'idée
de service à rendre, et qui est synonsnme de devoir (F. ce
mot). C'est en ce sens que l'on doit entendre le Traité
des Offices de Cicéron.
opncE , charge ou fonction. F. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
opncE, terme de Palais. Un juge d'office est celui qai
informe sans en être requis et par le seul devoir de sa
charge. Uavocat d'office est celui qu'une Cour ou un tri-
bunal désigne pour la défense d'un accusé qui n'a pas
fait choix d'un défenseur. Autrefois on appelait procu',
reur d'office le magistrat qui remplissait les fonctions du
ministère public
OFF
1333
OGI
omcB , mot par lequel on désigne , dans les palais et
!es grands hôtels, Tensemble des pièces qui forment le
département de la bouche^ telles que les cuisines, le
^arde-manger, les salles du commun. Chez les particu-
liers, Tofficc est une pièce voisine de la salle à manger
et où Ton renferme tout ce qui dépend du service de
la table.
OFncE , en termes de Droit canonique, bénéfice sans
Juridiction. Il était dit claustral , sMl était donné à un
religieux pour avoir soin de rinârmerie, de la sacristie ,
do la panneterie, du cellier, des aumônes, etc.
OFFicB DIVIN, nom qu*on donne aux prières publiques
de rÊglise, à celles que les fidèles font en commun. Le
mode de célébration est déterminé par la Liturgie (V. ce
tnot). La distribution de TOffice en Heures a été partout
à peu près la môme. Selon le degré de solennité du di>
manche, de la fête, du mystère ou du saint, les Offices se
distinguent en solennels nwjeurSf solennels mineurs,
doubles, semi-doubles, et simples. Il y a des Offices pro-
pres à une fête on à un saint, et des Offices communs à
plusieurs.
OFncB (Saint-). F. iNQoisrnoN dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
OFFICES EN FRANCE (Vénalité des). Jusqu'à Louis XII,
tous les emplois avaient été accordés gratuitement et à
vie; dans un moment de détresse, en 1512, ce prince les
fit vendre : mais son projet était de les racheter plus tard.
François I** trafiqua de tous les emplois, et cet abus ne
fit qu'augmenter sous ses successeurs. Bientôt les em-
plois de finances furent confiés à deux et même trois
agents , dits : V ordinaire, Valtematif, et le triennal. Ils
étaient tour à tour en charge, et, sous Henri II, tous trois
payés à la fois ; ainsi, le trésorier de l'épargne en fonc-
tions recevait 20,000 livres par an ; et son substitut en
expectative, Valternatif, 10,000 livres. En 1574, le^ gou-
vernement déclara, pour la deuxième fois, que tous les
officiers publics qui auraient payé le tiers de la valeur de
leurs charges (dont le prix total avait déjà été acquitté)
auraient droit de désigner leur successeur. Sur la récla-
mation de rassemblée des notables de 1596, se plaignant
vivement du désordre causé par l'hérédité des charges ,
Henri IV ordonna, le 30 Juin 1598, que toutes les survi-
vances seraient révoquées successivement. Mais en 1604,
Sully fit rendre un édit, dont il borna la durée à 9 ans ,
et en vertu duquel les titulaires des offices pourraient les
assurer à leurs veuves ou héritiers en payant un droit
annuel du 60* denier de la finance à laquelle ces offices
avaient été évalués. Comme il est impossible de borner
un abus, celui-ci traversa tout le règne de Louis XIII, et
il florissait encore si bien à l'époque de la minorité de
Louis XIV, que le surintendant Émery ayant manifesté'
l'intention de l'abolir, comme il en avait le droit, puisque
sa durée légale était expirée depuis longtemps, les récla-
mations violentes des officiers publics auprès de la ré-
gente Anne d'Autriche le firent renvoyer. Bien longtemps
encore après, sous la Régence, Law ayant fait rendre un
édit pour rembourser la valeur de toutes les charges de
présidents et de conseillers des parlements, il y eut une
telle explosion de mécontentement, que le fameux finan-
cier vit ses jours menacés. De tels abus, et bien d'autres
eocore^ sont de nature à excuser les plus violentes tem-
pêtes de la Révolution ; seules elles ont pu préparer la
régénération sociale et administrative dont la France avait
tant besoin : la force des rois et celle des ministres y
eassent été toujours impuissantes. C. D — y.
OFFICIAUTÉ. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire.
OFFICIANT, prêtre qui préside à une cérémonie reli-
gieuse. Il ne faut pas le confondre avec le célébrant, qui
dit la messe : tout célébrant officie, mais tout officiant
ne célèbre pas. — Dans les couvents de femmes, on nomme
1)/?tctante la religieuse qvd est de semaine au chœur.
OFFICIEL, se dit de tout ce c[ui est déclaré expressé-
ment par une autorité reconnue, de tout ce qui émane
d'un souverain ou du chef d'une administration publique.
OFFICIER , celui qui possède un office, une charge, ou
exerce une fonction. On distingue les Officiers civils et
les Officiers militaires. Font partie des officiers civils :
1" les officiers de VéUU civil; ce sont les maires et les
adjoints ; 2o les officiers municipaux, c-à-d. les mem-
bres des municipalités; ^^ les officiers de police judi-
ciaire, comprenant les Juges d'instruction, les Juges de
paix, les procureurs impériaux et leurs substituts, les
maires et les adjoints, les officiers de gendarmerie , les
commissaires de police, les gardes champêtres, les gardes
forestiers, etc.; 4* les officiers ministériels, notaires,
avoués, greffiers, huissiers, commissaires-priseurs, agents
de change, courtiers. — Dans l'Administration militaire,
on donne le nom générique d'Officiers aux militaires qui
sont commissionnés par le souverain, depuis le grade de
sous-lieutenant Jusqu'à celui de maréchal de France, et
celui de sous^fflders aux militaires qui tiennent leur
titre du chef de corps. Les premiers se divisent en offi-
ciers généraux (général de division , général de brigade),
officiers supérieurs (colonel, lieutenant-colonel , chef ae
bataillon ou d'escadron, major), et officiers proprement
dits (capitaine, lieutenant, sous-lieutenant). Les seconds
comprennent les adjudants-sous-officiers, les sergents-
majors, les sergents, les maréchaux des logis, les four-
riers, les tambours -majors et les trompettes -mt^ors.
Dans la Marine, on nomme officiers mariniers les maî-
tres, les contre-mattres et les quartiers-maîtres ; officiers
de port , les capitaines et les lieutenants qui font la po-
lice des ports et des rades. Sous le nom d'Officiers d'adr
ministration on comprend les membres de l'Intendance
militaire, du commissariat de marine, de Tadministration
des subsistances militaires.
ornciER DE roHTUNE, nom que l'on donnait avant 1789,
quand les gentilshommes avaient seuls les emplois d'offi-
ciers, à un petit nombre de sous-officiers sans naissance
qu'on élevait Jusqu'au grade de capitaine.
^ OFFICIER DE PAIX , nom de certains employés de la po-
lice parisienne subordonnés aux commissaires. Leur sur-
veillance s'étend sur toutes les branches de la police
administrative, mais ils ne sont pas officiers de police
Judiciaire. Leurs procès -verbaux ne valent que comme
rapport, et ne font pas foi Jusqu'à inscription de faux.
opnciER DB SANTE, nom que l'on donne, dans l'Armée,
aux médecins, chirurgiens et pharmaciens ( V. Médecins
MiuTAiREs). Au civil, ce sont ceux qui peuvent, après
avoir rempli certaines conditions d'étude, exercer la mé-
decine et la chirurgie, quoique n'étant pas pourvus du
diplôme de docteur: l'exercice de leur ministère est
limité au département où lis ont reçu leur grade univer-
sitaire ; il est certaines opérations qu'ils ne peuvent pra-
tiquer hors la présence d'un docteur en médecine ou en
chirurgie.
opnciER d'ordonnance. V. Ordonnance.
OFFRANDE (du latin ' offerenda), présent offert à la
Divinité. L'usage des offrandes est aussi ancien que la
relision; elles ont consisté, chez la plupart des peuples,
en fruits de la terre, pain, vin, huile, sel, etc. Dans
l'Église chrétienne, la partie de l'office divin qui porte le
nom d'Offrande ou Offertoire a été consacrée pour rece-
voir les dons. L'o&^a^ton ( V. ce mot ), qui est un sacri-
fice et se fait à Dieu seul, ne doit pas être confondue
avec l'offrande, qui n'est point un sacrifice, et qui se fait
aux saints, aux ministres du culte, aussi bien qu'à Dieu.
Les prêtres ont primitivement vécu des offrandes. C'est
à l'Offrande qu'on présente le pain bénit {V. ce mot).
OFFRE et demande, mots par lesquels on désigne
le rapport qui existe sur le marché entre les marchan-
dises offertes, c-à-d. celles que les producteurs ofl^nt
de vendre, et la demande de ces marchandises, c-à-d.
celles que les consommateurs d^irent acheter. L'offre et
la demande exercent une action déterminante sur le prix
des produits, la demande étant l'expression de l'utilité
qu'v attache l'acheteur, l'offre celle de l'utilité qu'y at-
tache le vendeur ou de l'abondance des produits sur le
marché. Par suite, la valeur est en raison directe de la
demande et en raison inverse de l'offre, c-à-d. qu'un
produit se vend d'autant plus cher qu'il est plus demandé,
d'autant moins cher qu'il est plus offert. L'offre est la loi
du travail et la règle du salaire.
OFFRE RÉELLE, en termes de Pratique, offre faite de
la somme ou de la chose due par le débiteur à son créan-
cier. Elle met le créancier en demeure de recevoir, et
libère le débiteur si elle est suivie de consignation. S'il
s'agit d'une somme d'argent, l'offre n'est valable que si
elle comporte la totalité de la dette. Toute offre réelle
doit être faite par ministère d'huissier. V. le Code Napo-
léon, art. 12i6-47, 1257-63, et le Code de Procédure ci-
vile, art. 812-828.
OGIF.R LE DANOIS , pofime en douze chants composé
par Raimbert de Paris, et qui fait partie du cycle carlo-
vingien. Beaudouin, fils d'Oser, est tué après une partie
d'échecs par Chariot, fils de l'empereur. Ogier jure de
tuer lui-même le meurtrier. Il se retire chez Didier, roi
des Lombards; trahi par ce prince, il s'enferme dans le
château de Castelfort sur le Rhône, où 11 soutient un siège
de sept ans. Enfin, seul, sans nourriture, il s'échappe de
la place, et traverse le camp de l'empereur; mais il est
061
1334
OGI
fait prisonnier par Turpin pendant son sommeil. Bientôt
Charles, attaqué par les païens, est réduit à implorer
l'aide d'Ogier. Celui-ci exige qu'on lui livre d'abord Cliar-
lot. Le flis de l'empereur est sauvé par Tintervention de
S^ Ifichel, au moment où Ogier va lui trancher la tète.
Le Danois bat tous les ennemis de Charles; ensuite il
épouse la fille d'Angart (Edgard), roi d'Angleterre, et
reçoit de l'empereur le comté de Hainaut et le duché de
Brabant. Ogier fut enterré dans l'église de S^-Faron à
Meauz, où l'on a conservé longtemps une grande ^ée et
on lourd épieu qui, suivant la tradition, auraient été les
armes d'Ogier. La chevalerie Ogier de Danmarche , par
Raimbert de Paris, a été publiée par M. J. Barrois,
Paris, 1812; l'éditeur pense qu'il faut direOçier d'Arden-
marche ou de l'Ardennois. Les Enfances Ogier en ont été
tirées par Adenès. K. HisUnrs littéraire de la France ,
U XXIL H. D.
OGIVALE (Architecture), style d'architecture carac-
térisé principalement par l'emploi systématique de l'ogive
{V, eemot), non-seulement comme procédé de construc-
tion, mais encore comme ornementation, et qui , succé-
dant au style romano-byzantin, fut en usage depuis la fin
du xn* siècle Jusqu'au milieu du xvi*. Palladio et quel-
ques autres architectes italiens de la Renaissance don-
nèrent à cette architecture, dont ils n'avaient pas l'intel-
ligence complète et le sentiment, les qualifications de
tidesque et de gothique : ce n'était pas qu'ils l'attribuas-
sent aux Allemands on aux Goths, mais les deux expres-
sions étaient, dans leur pensée, synonymes de barbare ,
et ils regardaient les monuments du style ogival comme
le produit de la barbarie dans les arts. Plus tard, le mot
gothique fut pris à la lettre, et on supposa, par erreur ou
Ûpnorance, que l'architecture du moven &ge venait des
Goths, sans songer qu'un peuple qui disparut de l'Italie
au VI* siècle, de l'Espagne et de la Gaule au vin*, ne pou-
vait avoir exercé d'influence sur une forme architecturale
qui a pris naissance seulement au xii*. Néanmoins, les
mots architecture gothique, bien que parfaitement im-
propres, ont reçu de l'usage une espèce de consécration.
On a supposé quelquefois que, les Goths ayant été habiles
dans l'architecture, le nom de gotfûque avait été appliqué
à toute belle construction , et qu'on l'aurait ainsi donné
aux monuments de style ogival. Quelques auteurs ont
distingué le vieux gothique et le gothique mod^ne, en-
tendant par le premier l'architecture postérieure à l'inva-
sion des Barbares et plus convenablement appelée archi-
tecture de style latin ou roman, et par le second l'archi-
tecture ogiviâe : mais ce sont là des qualifications vagues
et qui ne précisent rien pour l'esprit. On doit également
éviter d'appeler sarrasins l'architecture ogivale, parce que
c'est un mot qui implique l'origine arabe de l'ogive, la-
quelle est trè»-contrâtable.
Les monuments du style gothique, tant ancien que
moderne, ont été quel([uefois clarâés par rapport aux
races ou aux nations q^ui les élevèrent. A ce point de vue,
on a distineué le gothique du Nord, comprenant le bre^
ton ou anglais t le flamand et le normand; le gothique
germam, subdivisé en saxon, ti*desque et lonAard; le
gothique du midi, avec des espèces fort variées; le go-
thique asiatique, où l'on distingue le s'^rien, Varabe,
le sarrasin et le moresque. Outre qu'elle n'a rien de
scientifique, outre au'elle ne repose pas sur les carac-
tères intrinsèques aes monuments, cette classification
confond des styles trôs-divers. — Par rapport à l'exécu-
tion artistique ^ on a imaginé encore les divisions sui-
vantes : le gothique à trèfle, qui aurait fleuri du ix* au
XI* siècle; le gothique rosé et fuselé, dans lequel les vi-
traux sont disposés en roses ou corolles aplaties, et les
piliers composés d'un gros fût principal et de nombreuses
colonnettes en fuseaux ; le gothique ondulé et panaché,
char^ de galbes, d'ondulations, de clefs pendantes; le
gothique flamboyant et le gothique fleuri, développement
ou exagération du précédent. C'est là encore une classifi-
cation peu précise, et qui s'appuie trop souvent sur des
détails accessoires.
L'architecture ogivale ne resta pas stationnaire : elle
subit différentes modifications, formant autant de carac-
tères qui servent à faire reconnaître les monuments et à
les classer chronologiG[uement. La première période de
son développement, qui embrasse le xii* et le xni* siècle,
offre le style ogival primitif ou à lancette ; la deuxième,
comprenant le xiv* siècle, le style ogival secondaire ou
rayonnant; la troisième, embrassant le xv* siècle et la
première moitié du xvi*, le style ogival tertiaire ou
Hamboyant, Ces styles se distinguent par des diflié-
repces dans la disposition générale de Tédifice, dans
quel<raes dispositions partielles, et dans l'ornementation»
L Style d lancette. — Le plan général adopté pour l»
construction des grandes églises de style romano-byzantin
reçoit seulement nuelques changements dans la premit^re^
période de l'architecture ogivale : le chœur et les nefs
s'agrandissent; les collatéraux, formant déambulatoire,
tournent autour du sanctuaire; les chapelles absidales,
se multipliant , atteipent quelquefois le nombre do
quinze (à Tours), et si l'on trouve d'autres chapelles sur
les flancs des nefo mineures (Reims, Chartres, Amiens},
on peut affirmer qu'elles ont été ajoutées postérieurement
au xni* siècle ; dans quelques cathédrales (Paris, Bourges),
les bas côtés ont été doublés, disposition qui a été aussi
pratiquée quelquefois plus tard; plusieurs églises, dé-
pourvues d'absides et de chapelles absidales (I^n, Dol),
se terminent par une muraille plane, percée d'une ou de
plusieurs fenêtres ogivales; la chapelle de la S^-Vierge,
au fond de l'abside, reçoit parfois de très-grandes dimen-
sions (Coutances, Le Bfans, Rouen). — Dans la construc«
tion, le petit appareil régulier, ou à losange, ou en arêtes
de poisson, a disparu. Le moyen appareil, assez rare, ne
peut fournhr d'indications chronolc^ques. On se sert de
pierres de gnmd appareil, communraient plus longue»
Sue hautes, bien posées sur d'épaisses couches de mor-
er. — Les colonnes se groupent autour des piliers qui
soutiennent les voûtes, de manière que les trois quarts
de leur fût restent apparents ; il en est (à Laon, à Can-
torbéry) qui sont complètement détachées du pilier
?u'elle8 accompagnent, et quelquefois garnies d'annelet»
V. ce mot). Les proportions en hauteur et en diamètre
varient suivant les édifices, et aussi selon les intention»
particulières de chaque architecte. V. Basb, Chapitbad^
Abaqob. — L'ogive règpne à peu près exclusivement dans
les arcades. Si l'on rencontre encore le plein cintre ei>
quelques endroits, c'est par exception, et il apparaît en-
touré des moulures et des ornements du style ogival. —
Les entablements présentent des dents de sicie, comme- à
la fin de la période romano-byzantine, et aussi des feuil-
lages à crochets. — Des galeries, avec ou sans balus-
trades, sont pratiquées au-dessus des collatéraux : tantôt
elles en ont toute la largeur , tantôt ce ne sont que de
simples couloirs de passage (7. Galerie ). — Les fenêtres
sont très-allongées, assez étroites, à ébrasements forte-
ment prononcés, avec ou sans ornements : elles ressem-
blent à un fer de lance, d'où est venue l'expression de
fenêtres à lancette. Dans les églises d'une grande impor-
tance, les lancettes sont souvent géminées, c.-à-d. réu-
nies deux à deux et encadrées dans une ogive principale,
et une rose habilement découpée les surmonte : le me-
neau central est taillé en biseau sur ses angles, on soo-
tient une colon nette placée en application, et une mou-
lure toriaue suit toutes les circonvolutions des têtes
d'ogive. Vers le milieu du xiii* siècle, les fenêtres pren-
nent de plus grandes proportions , et sont divisées par
deux ou trois meneaux; le réseau supérieur est formé
de plusieurs trèfles ou quatre-feuilles superposés. Aux
façades, on place assez communément un triplet (V. ce
mot). Les compartiments des grandes roses sont en
forme d'ogives trilobées, ou bien ce sont des trèfles, de»
ouatre-feuilles et des rosaces entremêlés avec beaucoup
d'art. — Les vitraux peints sont d'abord composés de
médaillons de difl'érentes formes, disposés symétrique-
ment sur un fond de mosaïque, avec bordures de feuil-
lages; le bleu, le rouge et le vert y dominent. Puis, à
partir du milieu du xiii* siècle, on commence à voir pa-
raître les grands personnages. On se servit également de
vitraux en grisaille. — Le pavage des églises fat le plus
souvent très-simple : quelques églises, surtout dans 1»
partie du chœur et du sanctuaire, furent pavées en car-
reaux émaillés, dont on formait des dessins, et l'on y rit
ensuite employer les pierres tombales et les dalles hi»-^
toriées. — liOs voûtes, traversées par des nervures saiW
làntes qui les soutiennent et les affermissent, n'ont que
15 à 20 centimèt. d'épaisseur; elles sont construites en'
petites pierres mêlées avec beaucoup de mortier. Comme
leurs arceaux se réunissent et reposent sur les massifs
qui séparent les fenêtres, des arcs-boutanU soutenu»
par des contre-forts (V. ces mots^ appuient à l'extérieur
ces mêmes massifs, sur lesquels s'exerce la poussé»
entière des voûtes. Ces contre-forts, ainsi que ceux quf
sont appliqués contre les murs quand il n'y a pas de col-
latéraux, présentent des pilastres de forme carrée, di-
risés en étages par des corniches, et diminuant progres-
sivement de la oase au sommet. — Dans les portails oi>
façades, il faut toujours distinguer l'œuvre de l'archi-
tecte , qui établit un ensemble de lignes avec la sévérité
ÙGI
133S
OGI
qui conrient à la yéritable science de la construction, et
rœavre des sculpteurs et des statuaires, qui font souvent
disparaître les lignes sous la richesse des ornements.
Quelques portails sont précédés d*un porche plus ou
moins saillant ( K Porchb). Dans les églises qui ne sont
pas trës-ornées, les voussures des portes sont garnies
teulement de tores, et les parois latémles, de colonnes :
ailleurs, on y voit des statues et des bas-reliefs. C*est à
l»rtir du xiii* siècle que Touverture de la porte prin-
cipale fut partagée en deux par un pilier qui soutient le
tympan ( K. ce mot). — (Test surtout au xm* siècle que
les architectes réussirent à élever des clochers gigantes-
ques : mais comme ces constructions lassaient la patience
et épuisaient les ressources des générations, il n*est pas
rare de voir ces tours imparfaites et dépourvues de leurs
flèches. On ne s*est pas toujours contenté de deux tours
établies sur les flancs du portail principal ; on en a placé
aux portails latéraux et au-dessus de l'entre-croisement
des transepts {V. Clocher). — Parmi les ornements
usités durant la première période du style ogival , nous
mentionnerons les trèfles, les quatr^-feuilles, les fleu-
rons, les rosaces, les guirlandes de feuillages. Les sta-
tues, moins allongées, moins roides, mieux drapées que
dans le style romano-byzantin, ont aussi plus d'expres-
sion et de vie; elles sont souvent rehaussées de couleurs
et de dorures, et accompagnées de dais et de pinacles.
Quelques ornements de l'fige précédent sont encore en
usage, tels que zigzags, étoiles, billettes, etc. La peinture
à fresque fut habituellement employée à la décoration
intérieure, et Ton en a retrouvé des traces sous le badi-
geon des siècles suivants.
II. Style rayonnant, — La limite qui sépare le style à
lancette du style rayonnant est difficile à déterminer, et
la transition s*est opérée de Tun à l'autre d'une manière
j)eu sensible. Toutefois, dans un grand nombre d'édifices,
le style rayonnant présente des caractères qui lui sont
propres et qu'il a acquis par un développement particu-
lier. Dès le commencement du xiv* siècle, le plan des
^ndes églises reçoit une modification grave, par l'addi-
tion de chapelles le long des collatéraux depuis les tran-
septs jusqu'au portail occidental. Dans les piliers , le fût
des colonnes s^amincit, et les feuilles des chapiteaux
sont plus petites et plus nombreuses. Les fenêtres de-
riennent de plus en plus grandes, avec des meneaux
plus nombreux, et leur amortissement est formé de figures
rayonnantes, de quatre- feuilles, de quintefeuilles et de
rosaces ; extérieurement elles sont souvent , comme les
portes, surmontées de fh>ntons aigus. Les roses des por-
tails augmentent leur diamètre et la richesse de leurs
compartiments. Les clochetons qui s'élèvent au-dessus
des contre-forts extérieurs s'allégissent et s'évident, ou'
sont remplacés par des aiguilles garnies de crochets. Les
clochers sont placés assez arbitrairement dans diverses
parties de l'édifice. Les balustrades des galeries aban-
donnent les arcades trilobées pour les trèfles, les quatre-
feuilles et les quintefeuilles encadrés. Quant à l'orne-
mentation, si les sujets ont beaucoup d'analogie avec ceux
de Tàge précédent, on remarque des différences notables
dans l'exécution et dans les détails : les moulures toriques
sont moins prononcées et les profils plus maigres; la star-
tuaire a plus de finesse et de régularité; les supports en
encorbellement commencent à s'orner de figures bizarres,
quadrupèdes, reptiles, etc.
m. Style flamboyant. — n a été ainsi appelé , parce
que les meneaux qui forment des compartiments dans
les ^ndes fenêtres se contournent en sens divers , de
inanière à former des espèces de flammes ( V. les flg. au
mot Arc, p. 195). C'est à ce style qu'on a aussi donné le
nom de (Uthiqiie fleuri. Il n'y a pas de changements à
noter dans le plan des édifices : le stvie flamboyant se
caractérise par les modifications apportées aux piliers, aux
fenêtres, et à l'ornementation. Les anciennes colonnes
cylindriques, isolées ou cantonnées, passent à l'état de
colonnettes, de tores, de baguettes, de minces nervures
prismatiques : les piliers les plus massifs sont couverts
de ces nervures sur toutes leurs faces ; mais si le travail
en est compliqué et délicat, l'œil ne peut le percevoir à
distance, et reflet général de la perspective a perdu quelque
chose de sa beaul>S. Souvent les nervures des piliers sui-
Tent le contour des arcades, ou s'élèvent le long des mu-
nulles jusqu'aux voûtes, qu'elles traversent pour se réunir
^ la clef. Les chapiteaux ont disparu, et font place à des
bouquets de feuilles frisées, à une ou deux guirlandes de
feuillages. L'ogive équi latérale est encore en usage au
commencement du xv* siècle : mais bientôt parait Togive
iurbaissée, puis, surtout aux portes, l'arcade en accolade
ou en doucine ; au xvi* siècle, cette arcade règne partout,
aux baies des clochers, aux fenêtres, aux arcatures, etc.
Souvent l'arcade des portes est encadrée dans un vaste
fironton, dont la surface est ornée de panneaux ou d^
coupée à jour. Les sommets des ogives et des pignons
sont couronnés par un bouquet épanoui , et leurs cOtés
garnis de feuilles et de crochets. Les dais des niches sont
surmontés de pinacles dentelés, découpés à jour et ornés
de feuillages. Les nervures des voûtes se croisent suivant
des dessins très-variés, et à chaque point d'intersection
sont appliquées des figures en relier, des emblèmes ou
des armoiries ; quelquefois la clef s'allonge en volumi^
neux pendentif. Lorsque les tours du xv* siècle sont sur-
montées de flèches, celles-ci sont bâties avec la plus
grande élégance ; mais le plus souvent elles sont carrées,
soutenues aux angles par des éperons garnis de niches,
et décorés à leur sommet d'une balustrade finement dé-
coupée. A la même époque appartiennent la plupart des
clochers pyramidaux en charpente, couverts d'ardoise,
comme on en trouve un grand nombre dans les églises
rurales. Quant à l'ornementation, elle devient de plus en
plus riche : ce ne sont que bouquets fleuris, guirlandes
de feuillages, dentelures à jour, festons, niches, statues,
dais, pinacles, petits sujets assez ordinairement satiriques
et grotesques; en un mot, la science a fait des progrès
dans les procédés de l'exécution matérielle, mais on ob-
serve partout Tafféterie et l'exubérance, indicés d'un art
en décadence.
Telles ont été les grandes phases du développement
de l'architecture ogivale dans les diverses contrées où
elle fut en vig[ueur. D'où est venu ce style particulier à
la seconde moitié du moyen âge ? Quelques-uns pensent
qu'il fut importé d'Orient en Europe à l'époque des Ôroi-
sades : mais les églises gothiques de la Palestine ont été
construites au plus tôt par les derniers croisés, c.-à-d«
au XIII* siècle, et, quant aux monuments de la Perse où
l'on a trouvé des o^pves, rien ne prouve qu'ils soient an-
térieurs au XV*. D'autres donnent à l'architecture ogivale
une origine arabe, sarrasine ou moresque, en s'appuyant
sur la présence de quelques ogives au palais de la Ziza
près de Palerme , et dans plusieurs monuments élevée
par les Musulmans en Espagne : d'après cette opinion, et
style ogival aurait été apporté de Sicile par les Normands
au XI* ou au xii* siècle, ou serait venu d'Espagne en
France. C'est ce que les faits sont loin de confirmer. Le
palais de la Ziza , qu'on dit avoir été bàU du ix*au xi*siècle
par les Sarrasins, ne daterait, d'après les recherohes des
archéologues, c(ue de l'an 1279, et l'emploi de l'ogive se-
rait, au contraire, une importation des Normands en Si-
cile. D'un autre côté, les Arabes ont élevé leurs monu-
ments dans le goût byzantin ; il n'y a aucun air de famille
entre Tare en fer à cheval et l'are ogive, entre la coupole
à minarets et la flèche gothique ; les ogives de la mos-
quée de Gordoue n'appartiennent pas à la construction
primitive, mais à des remaniements ultérieurs, et l'Al-
hambra de Grenade, qui est bien en ogives, a été hkû à
la fin du xiii* siècle, longtemps après que l'ogive eut été
adoptée dans toute l'Europe. Si l'ogive était venue d'Es-
pagne en France, on ne comprendrait pas au'elle n'eût
point été employée tout d'abord dans le Sud de ce der-
nier pavs, où, au contraire, elle a paru plus tard que dans
le Nord.
Il faut donc admettre que le style ogival est européen.
Certains écrivains l'ont fait naître d'abord en Italie, où il
est constant, au contraire, qu'il fut assez mal accueilli, et
aue les monuments qui s'y rapportent ont été bâtis par
es Allemands ou des Français. D'autres attribuent à
l'Angleterre le développement primitif de l'architecture
ogivale: mais l'étude comparative des monuments prouve
que les églises gothiques de France sont plus anciennes
que celles de l'Angleterre. L'Allemagne ne peut pas non
plus prétendre à la priorité. L'emploi de l'ogive n'y
apparaît qu'au milieu du xu* siècle, tandis qu'on la
trouve dès le commencement de ce siècle à SWacques de
Compiègne, à S^-Jean-des-Vignes et à la cathédrale de
Soissons, à S*-J^n de Lyon, à S*-Gatien de Tours, etc.
D'ailleurs, le baron allemand de Roisin, dans un travail
sur la cathédrale de Trêves (1861), reconnaît que les
moines de Ctteaux ont été les missionnaires de l'art go-
thique sur le Rhin et au delà, et que l'église ogivale de
Trêves , qui a fait école en Allemagne, a eu pour proto-
type l'église de S*-Yved, à Braisae (Soissonnais). La
France est, à n'en pas douter, le berceau du style ogival,
et c'est au nord de la Loire que ce style a donné ses pre-
miers et ses plus beaux monuments. Le style de transi-
tion, c-à-d. l'architecture de fusion entre le style ro-
OGI
1336
OGI
mano-byzantin aui finit et le style ogival qui commence,
n^apparalt dans le Midi et sur les bords du Rhin qu'au
xin* siècle , et, en Allemagne principalement, quand les
architectes se décidèrent à adopter le système ogival, ils
le prirent dans Tétat où il était déjà parvenu, à sa période
rayonnante.
L'architecture ogivale a puisé ses inspirations dans la
foi chrétienne ; elle convient essentiellement à Texpres-
ftion de la pensée religieuse. De tous côtés, dans le plan
et dans les détails, ce ne sont que pieux symboles ( V» Stm>
bolismb). Le prodigieux élancement des colonnes, Téléva-
tion vertigineuse des voûtes, l'immensité et la mystérieuse
obscurité du sanctuaire, ces forêts de clochetons et de
pinacles, ces tours colossales et ces flèches aériennes, tout
élève les idées et exalte les sentiments, a II n'est &me si
revêche, dit Montaigne, qui ne se sente touchée de quelque
révérence. » V. Essais sur Varchitecture gothique . par
Warton, Bentam, Grose et Milner, en anglais, 1808,
in-8°; Uawkins, Histoire de l'origine et de l établisse-
ment de Varctïitecture gothique, en anglais, 1813, in-8*>;
UsX\^ Essai sur Vorigine^ Vhistoireet les principes de Car-
chitecture gothique, en anglais, Edimbourg, 1813, in-S**;
Gunn, Recherches sur Vorigine et l'influence de l'archi-
tecture gothique, en anglais, 1817, in-8<*; A. Lenoir, Obser-
vations sur Vongineet l'emploi de l'ogive dans l'architec-
ture, Paris, 1819 ; deCaumont, Hist» sommaire de l'archi-
tecture religieuse, Paris, 1841, in-8°; Rickman, Essai sur
Varchitecture gothique, en anglais, 1835, in-8°. B.
OGIVE, on laUn du moyen âge augiva, nom qu'on a
donné, Jusqu'au xix* siècle, aux nervures saillantes qui,
allant d'un angle de travée à l'autre, se croisent diago-
nalement dans les voûtes, et y produisent des comparti-
ments angulaires. Cette disposition s'appelait croisée
d'ogives, parce qu'elle présentait la forme d'une croix.
De notre temps, certains littérateurs, prenant ce mot
croisée pour synonyme de fenêtre , ont omployé le mot
ogive comme déterminatif, et, à leur suite, les archéo-
logues et les architectes ont dit une porte, une arcade^
une fenêtre en ogive. En ce sens, qui est maintenant ac-
cepté généralement, l'ogive est une arcade formée par
deux arcs de cercle d'un rayon égal, qui se croisent à leur
sommet et forment un angle curviligne; c'est pour cela
que les Anglais désignent Te style ogival sous le nom de
style aigu (pointed style). On a fait venir le mot ogive du
latin ovum (œuf), parce que la voûte en ogive ressemble
à peu près à la moitié d'un œuf coupé dans sa largeur;
ou de l'allemand aug (œil), parce que les arcs de la voûte
en ogive forment des angles curvilignes semblables à
ceux du coin de l'œil , quoique dans une position diffé-
rente ; ou enfin du latin augere (augmenter), parce que,
dans la croisée d'ogive, les voûtes sont augmentées, ren-
forcées par ces nervures saillantes.
On distingue quatre sortes principales d'ogives : 1° le
plein cintre brisé, ou ogive obtuse ou mousse, arcade
presque circulaire, dont le sommet présente un angle
très-ouvert et à peine sensible ; c'est l'espèce la plus an-
ciennement usitée, et on la rencontre dans les monuments
de lafi n du xii* siècle; — ^^ Vogive en lancette ou pointue^
formée par deux arcs qui ont leur centre au delà des points
de retombée ; le rayon est plus grand que l'ouverture de
l'arcade, dans laquelle on peut inscrire, par conséquent, un
triangle isocèle. Cette ogive domina à la fin du xii« siècle
et au XIII*, et on l'employa encore aux âges suivants dans
les espaces resserrés, par exemple aux arcades en hémi-
cycle des sanctuaires et aux portes des forteresses; —
3® V arcade en tiers-point ou ogive équilatérale , formée
par deux arcs qui ont leur centre chacun à la naissance
de l'arc de cercle qui lui est opposé, et qui sont décrits
avec un rayon égal en longueur à l'ouverture que doit
avoir l'arcade; celle-ci peut servir de base à un triangle
équilatéral, dont l'angle supérieur aboutit au point d'm-
tersection des deux arcs. Cette ogive, la plus élégante de
toutes, a été surtout en usage au xiv' siècle ; — 4*^ Vogive
surbaissée^ formée par deux arcs 'décrits avec un rayon
plus court que l'ouverture de l'arcade, et qui a été prin-
cipalement usitée au xv* siècle. — Ces diverses sortes
d'ogives peuvent être surhaussées, c-à-d. que les deux
arcs qui les forment peuvent se prolonger inférieurement
au-dessous de la ligne de leur centre, suivant deux lignes
droites qui deviennent parallèles. — On appelle ogive
lancéolée celle qui est formée de deux arcs dont la cour-
bure se prolonge au delà de la ligne des centres. Vogive
arabe ou moresque n'est autre chose que l'arc en fer à
cheval brisé.
On a beaucoup discuté sur l'origine de l'ogive, parce
qu'on a attaché trop d'importance à des faits isolés. Autre
chose est l'emploi accidentel de Togive dans quelques
vieux monuments, autre chose le système ogival. On a
pu signaler la présence de l'ogive à l'ouverture de l'aque-
duc de Tusculum, à la porte de Segni, dans les tombeaux
helléniques de la Sicile, au Trésor d'Atrée à Mycènes,
aux murs de Tirynthe, au Trésor de Mlnyens près d'Or-
chomène, au tombeau de Tantale à Smyrne , dans cer-
taines constructions de l'Egypte, dans les ruines de Ninive,
et jusqu'au Mexique : mais ce n'est là qu'un hasard, un
accident, une sorte d'irrégularité. L'ogive n'est point une
forme qu'on ait inventée à un moment donné ; pour la
connaître , il suffisait d'avoir tracé deux cercles qui se
coupent, d'avoir vu se briser une baguette ployée circu-
lairement; elle était une figure géométric^ue, aussi bien
que le cercle, le triangle et le carré. Milizia et Chateau-
briand ont remarqué que l'entr^-croisement des sapins
dans les forêts du Nord ou des palmiers en Orient donne
des ogives naturelles; toutefois ce n'est pas une raison
de croire avec eux que la contemplation des bois ait sus;-
géré si tardivement aux hommes l'idée de construire dus
édifices où l'ogive tint la principale place. De la connai*;-
sance de ces faits à celle des propriétés de résistance de
l'arc en ogive et à l'emploi raisonné de cet arc, il y a un
abime. Noua croyons que cet emploi n'a pas été un fait
instantané , mais le résultat de longs tâtonnements. Au
moyen âge, en beaucoup de pays de l'Europe, on man-
quait de matériaux de ^nde dimension, on avait perdu
le secret de la fabrication des mortiers romains, et l'on
ne disposait plus d'une grande quantité d'argent et de
bras. 11 fallut s'ingénier pour tirer parti du peu que l'on
possédait. La construction des voûtes fut le problème
principal sur lequel s'exercèrent les architectes, et elle
engendra une foule d'essais malheureux, de conceptions
avortées. On commença par faire des voûtes en berceau,
suivant la tradition antique; mais comme on n'avait plus
ces masses inébranlables sur lesquelles les Romains ap-
pujraient leurs arcs, on ne pouvait donner aux voûtes la
résistance nécessaire; delà la nécessité de perfectionner
le système même de la construction des arcs. Or^ un arc
en plein cintre exerce sa poussée sur les murs qui le
poitent, en raison de son diamètre et de son poids. Le
résultat de cette poussée est d'écarter les murs de leur
aplomb, de les repousser au dehors, ce qui entraine la
rupture de l'arc. Cette rupture s'opère invariablement en
trois points : la clef, c-à-d. le claveau du sommet de
l'arc, s'abaisse plus ou moins, et les reins de l'arc,
c-à-d. le sommet de chaque quart de cercle à droite et à
gauche de la clef, se disjoignent, en sorte que la rupture
est plus ouverte à l'extrados qu'à l'intrados. Il était na-
turel qu'on portât des palliatifs sur ces trois points évi-
demment trop faibles. Pour empêcher la clef de s'abais-
ser, les architectes imaginèrent de la surélever ; pour
que les deux quarts de cercle ne se brisassent pas aux
reins, on redressa la courbe, afin de rendre l'arc plus
rigide et de contrarier le mouvement toujours observé à
la même place. Qu'arrive-t-il si l'on surélève la clef d'un
arc à plein cintre, et si l'on diminue la flèche de ses deux
3uarts de cercle? On trace une ogive. Telle a été l'origine
e l'emploi systématique de l'ogive comme moyen de
construction. En tout pays, on peut observer ces t&ton*
nements : les plus anciennes ogives ont une forme incer-
taine, et ressemblent à des pleins cintres redressés; elles
n'ont point été tracées régulièrement au moyen de deux
centres, comme on le pratiqua plus tard après de nou-
veaux progrès. Il est évident, d'ailleurs, que l'ogive n out
pas tout d'abord une Influence très-sensible sur l'archi-
tecture : dans les idées des architectes du xji* siècle, le
plein cintre fut encore la forme noble, la seule qui eut
place dans la décoration. On n'employa l'ogive que par
nécessité , pour les arcs à grande portée : certains édi-
fices, comme l'ancienne cathédrale de Vaison (Vaucluse),
offrent des arcs en ogive, sans cesser d'appartenir à Tar-
chitecture romane, et d'autres, qui sont de style ogival ,
présentent des arcs en plein cintre à côté d'arcs en ogive;
dans ceux où les deux formes se montrent simultané-
ment, l'ogive est réservée pour les portées considérables,
tandis que le plein cintre ne paraît que dans les arca-
tures de médiocre diamètre. Ainsi , l'ogive fut l'expres-
sion d'un besoin. Un autre perfectionnement fut ensuite
ajouté aux voûtes : les constructeurs du moyen ftge, qui
connaissaient déjà l'arc doubleau, et qui s'en servaient
pour consolider leurs voûtes en berceau, imaginèrent de
renforcer ces voûtes avec d'autres arcs se croisant entre
les arcs doubleaux ; la voûte se déploya sur les arcs dia-
gonaux, formant des supports permanents, comme la
toile d'une tente sur les piquets qui en sont l'armature.
OLI
1337
OME
Oo fut amené de cette façon à la croisée d*ogives , et on
€ut la solution d'un grand problème, couvrir à peu de
frais le plus vaste espace possible. A Taide du système
de nervures qui retombaient sur les piliers, à Taide des
étais fort minces que l'emploi des arcs en ogive permet-
tait de substituer aux lourdes colonnes romanes, on
obtint les mêmes effets de solidité que quand on recou-
rait à des corps épais de maçonnerie. Ces innovations
étaient indispensables pour des édifices dont l'élévation
était exagéra relativement à leur largeur, et elles ont
entraîné comme conséquence l'emploi des conir^-forts et
des arcS'bouiants {V, ces mots).
En résumé, l'ogive, ayant été une nécessité de con-
struction, a pu naître en quelque sorte simultanément
dans les divers pays de l'Europe occidentale et septen-
trionale, où elle avait une convenance parfaite avec la
nature des matériaux et la pauvreté des ressources.
D'&illeurs, les premiers constructeurs furent des moines:
dès au'un perfectionnement ét^t trouvé, il était connu
et adopté aussitôt à de grandes distances , grâce aux
communications que les chefs-lieux d'ordres monasti-
ques avaient avec les maisons de leur obédience. C'est
ce qui explique comment on rencontre si souvent en
France des monastères étrangers par leur architecture à
la province où ils ont été b&tis : ce sont des copies exé-
cutées d'après un modèle transmis par un abbé à son
prieur. B.
OIE (Jeu de T), jeu qui se joue avec deux dés sur un
tableau représentant 63 cases et figures, parmi lesquelles
des oies sont disposées de 9 en 9. On gagne la partie,
lorsqu'on arrive, par le chiffre des points, au n° 63, qui
est rote royale; mais il n'est pas si facile qu'on le pense
d'atteindre le but, parce que divers accidents hâtent ou
retardent la marche. Ainsi, quand en jetant les dés on
amène 9 par 4 et 5, il faut aller se placer à la case 54;
ai c'est par 6 et 3, à la case 26 ; (^uand le point amené
fait arriver le joueur à Tune des oies placées de 9 en 9 ,
il avance encore d*une quantité égale à ce point ; si l'on
amène G, dont la case représente un pont, on paye une
amende, et l'on se place à 12 ; si l'on arrive pai' les points
à 12, qui est une hôtellerie, on paye, et l'on se repose
jusqu'à ce que chacun des autres joueurs ait joué deux
fols; si l'on arrive à 32, qui est un puits, ou à 52, qui
est une prison, on paye, et Ton attend, pour pouvoir re-
jouer, qu'un autre joueur y soit tombé à son tour ; on
paye encore à la case 40, qui est un labyrinthe, et on
retourne à 30 ; si l'on tombe dans la case où est figurée
une tête de mort, il faut recommencer tout le jeu ; enfin,
^i, par le point amené, on dépasse G3, on rétrograde du
nombre de points que l'on a en trop. — Le jeu de l'oie
remonte, dit-on, aux anciens Grecs; il a été fort & la
mode au xviu*' siècle.
OIL (Langue d'). V. Langue d'oïl.
OIRON (Faïences d'). V, le Supplément.
OKAZH. V, nou-e Dict. de Biogr, et d'Histoire.
OKEL, nom qu'on donne en Orient à une espèce de
portique où les marchands de passage exposent leurs
marchandises.
OKYGRAPHÎE (du grec ôkhus, rapide, et graphéin,
écnTe)y sorte de sténographie, où l'on n'emploie que trois
caractères dont la valeur change suivant leur position
sur trois lignes parallèles.
OLÉRON (Rôles d*). > V. ces mots dans notre Z)ic£ton-
OLIFANT. S naire de Biogr. et d'Histoire.
OLIGARCHIE Mu grec oligos, qui est en petit nombre,
axarUiè, pouvoir), gouvernement dans lequel le pouvoir
est entre les mains de quelques individus ou de quel-
ques familles. C'est une aristocratie limitée. Le gouver-
nement des douze Égyptiens que renversa Psammétichus,
celui des Trente tyrans à Athènes et des Décemvirs à
Rome, celui du Conseil des Dix à Venise, ont été des
gOQTemements oligarchiques.
OUK ou OULIK , monnaie d'argent de Turquie, va-
lant 10 aspres, ou environ 25 centimes.
OLUtl {L^). V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire, ,
OUYE , en termes d'Architecture, ornement en forme
^ grain oblong, qu'on taille sur les baguettes et les as-
tragales.
OLIVIER, arbre que les anciens Grecs avaient con-
^>cré à la déesse Minerve, et dont ils avaient fait le sym-
bole de la sagesse et de la paix. Pendant un temps on
n'employa que des vierges et des hommes purs pour le
cultiver, et, dans quelques contrées,. on exigea un ser-
ment de chasteté de ceux qui récoltaient les olives.
L'Aréopage nommait des inspecteurs chargés de surveiller
les plantations, et jugeait les délits commis contre Tarbre
sacré. Chez les Romains, les possesseurs d'oliviers ne
pouvaient en disposer pour des usages profanes ; celui
qui en altérait un pied dans un bois consacré à Minerve
était puni d'exiU B.
OLOGRAPHE. V. Testament.
OLYMPIADES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
OLYMPION , temple élevé à Athènes en Thonncur de
Jupiter Olympien. C'était, au rapport de Pline, le plus
bel édifice de la ville ; il avait quatre stades de tour. Sa
construction , commencée par Pisistrate, interrompue et
reprise à différentes époques, ne fut entièrement terminée
que sept siècles après, sous Tempereur Adrien. Rien de
plus beau que les ruines de ce temple. Les colonnes, en
marbre blanc , ont plus de 2 met. de diamètre : la façade
en avait 10, et chaque côté 21 ; sur les côtés elles étaient
à double rang. La longueur de l'édifice était de près de
130 met.
OLYMPIQUES, titre d*un livre d'odes triomphales
écrites par le poète grec Pindare en l'honneur de ceux
qui avaient remporté des prix aux Jeux Olympiques.
OLYNTHIENNES, titre sous lequel on comprend trois
harangues prononcées par Démosthène pour exhorter les
Athéniens à ne pas laisser tomber la ville d'OIynthe au
pouvoir de Philippe, roi de Macédoine. Les critiques ne
sont pas d'accord relativement à Tordre dans lequel on
doit les ranger.
OMAGUAS f Langue des), une des langues indigènes
du Brésil, parlée en plusieurs dialectes. La plupart des
mots simples sont monosyllabiques, et le même mot, ac-
centué difl'ércmment, a plusieurs significations difi'é-
rentes. La déclinaison manque de genres, mais elle
distingue les nombres et les cas. La conjugaison est très-
simple. On peut, en ajoutant aux substantifs la particule
ta, les changer en autant de verbes qui expriment une
action ou un mode d'existence analogue à la signification
de ces substantifs. Les verbes réciprojques se forment en
ajoutant la syllabe ca aux verbes ordinaires.
OMBRELLE (du latin umbella, diminutif d'umbra^
ombre), petit parasol en soie ou en taffetas, que portent
les dames pour se mettre à l'abri des rayons du soleil.
OMBRES, en termes de Peinture, les endroits les moins
éclairés, les plus obscurs d'un tableau , servant à relever
l'éclat des autres. V. Clair-obscur.
OMBRES CHINOISES, spectaclo de fantasmagorie dans le-
quel on fait agir des figures découpées en carton noir der-
rière une surface transparente, qui n'est le plus souvent
que du papier huilé. Ce spectacle, qui a été de tout temps
un plaisir favori des Orientaux, fut imité d'abord en Al-
lemagne sous le nom de SchcUtenspiel ; on l'introduisit
en France en 1767, mais il ne prit faveur qu'à partir de
1784, époque où Séraphin s'établit à Pcris, dans les ga-
leries .nouvellement construites du Palais-Royal.
OMBRIENNE (Langue), une des langues italiques an-
térieures à la formation du peuple romain. Tout ce qui
nous en reste se borne aux inscriptions des Tables Eugu-
bines {V. ce mot)^ qui ne suffisent pas pour établir avec
certitude un grand nombre de faits. Les Ombriens écri-
vaient de droite à gauche, co'nme les Étrusques. Gro*
tefend pense que les valeurs phonétiques représentées
par leur système graphique étaient au nombre de 20,
tandis qu'Aufrecht et Kirchhoff n'en comptent que 19,
dont 4 voyelles. Niebubr a cru reconnaître dans les textes
ombriens quelques expressions latines, et Micali a signalé
une grande conformité apparente entre l'étrusque et
l'ombrien. De son côté, Lanzi remarqua moins de régu-
larité dans l'ombrien que dans l'étrusque; Grotefend
partage cette opinion, et l'appuie sur ce que les Ombriens
auraient eu toute liberté d'admettre ou de rejeter cer-
taines lettres finales, tant dans la conjugaison que dans
la déclinaison. Outre les six cas du latin, il croit en re-
trouver deux qui répondent à 1 Instrumental sanscrit et
au narratif arménien. V. Lepsius, De Tabulis Eugt^inis,
Berlin, 1833, in-8°, et Inscriptiones linguœ umbricœ et
oscœ^ Leipzig, 1841 ; Ch. Lassen, Supplément à Vexplica^'
tion des Tables Eugubines, en allem., Bonn, 1833, in-S»;
Grotefend, Budimenta lingtUB umbricœ ex inscriptionibus
anliquis enodata^ Hanovre, 1835-39, in-4o; Aufrecht et
Kirchhoff, Sur les monuments de la langue ombrienne,
en allem., Berlin, 1849-51, 2 vol. in-4».
OMER (Église Notre-Dame, à Saint-). Cette église,
autrefois cathédrale, est située à l'extrémité occidentale
de la ville, sur le plateau de la colline Sithiu, du côté
opposé aux ruines de l'abbaye de S^-Bertin. De la lenteur
de la construction, qui s'est prolongée du xi* au xvi* aie*
OMN
1338
OMN
de, il est résulté un mélange de difTérents styles d*ar-
chitecture. A Tintersection des transepts s'élevait une
flèche, qu'un ouragan a renversée en 1606; il ne reste
plus que la tourelle qui la supportait. La grosse tour
carrée que Ton voit au portail occidental a été bâtie vers
la fin du XV* siècle; elle a 50 nnèt. de hauteur : aux
angles du sommet il y avait des tourelles, dont une seule
subsiste aujourd'hui. Le portail le plus digne d'attention
est celui du midi. Élevé sur sept degrés, il est surmonté
d'une voûte en ogive, et décoxîs de colonnes qui reçoi-
vent à leur retombée les nervures de cette voûte, enri-
chies de fleurons légèrement évidés. Entre les colonnes
se trouvent six statues d'Anges tenant des phylactères et
couronnés de larges dais d'un travail délicat. Au-dessus,
entre les nervures, 50 petites figures, avec leurs dais par-
ticuliers, sont malheureusement mutilées. La porte,
élevée sur 4 degrés, est divisée par un trumeau en
pierre, orné d'une statue de la Vierge : un Jugement
dernier est sculpté en grand relief dans le tympan. La
galerie massive qui pèse sur ce portail ogival est toute
moderne; elle a remplacé une galerie à jour que surmon-
taient des clochetons dentelés. Au-dessus de la rose est
un cadran solaire, aui date de 1610. Le pignon qui ter-
mine la façade est décoré de trois niches accolées, dont
deux abritent encore des statues mutilées. A l'intérieur
de l'église, sous la tour, on voit un groupe de trois figures
colossales qui proviennent de l'ancienne église de Thé-
rouanne : la plus grande, près de laquelle les deux autres
sont agenouillées, et qui est devenue populaire sous le
nom du grand Dteu de Thérouanne, a été regardée, soit
comme un Jupiter, soit comme une divinité gauloise;
mais sa tête couronnée d'épines et ses mains levées en
signe de bénédiction montrent évidemment que c'est une
image du Christ ; les autres statues représentent la Vierge
et S^ Jean ; le travail parait se rapporter au xii* siècle. A
l'entrée de la chapelle de SWean-I'Évangéliste, contre un
{ailier, on remarque un ex-voto du doyen Syderack de Lal-
ainç, élevé en 1534 : c'est un monument partie d'alb&tre,
partie de pierre blanche comme le marbre, composé d'un
bas-relief dont le sujet est la scène des trois jeunes
hommes dans la fournaise, et d'un encadrement un peu
lourd dans le style de la Renaissance. V. Walict, Descrip^
tion de l'ancienne cathédrale de Sainl-Omer, 1840, in-4*.
OMERTI. V. Indien (Art). «
O.MNIBUS DE PARIS, grandes voitures à 4 roues et
à S chevaux, pour le transport en commun du public
dans l'intérieur de la ville. Les voyageurs y sont face à
Ace sur 2 banquettes longitudinales, munies de coussins,
et ayant 7 places, dont les 4 du fond sont divisées en ma-
nière de stalles par de petits bras de fauteuils. La voi-
ture a 5 vasistas de chaque côté, 3 vitrés, et 2 en panneaux
d'ëbénisterie. On monte dans l'omnibus par derrière, au
moyen d'un grand marchepied fixe; la baie de la por-
tière n'a point de porte, afin de ne pas gêner la circula-
tion des voyageurs enti^nt ou sortant. Outre les 14 places
d'intérieur, la voiture en a encore 10 en plein air, sur
l'impériale, et réservées seulement aux hommes. Un
double banc de bois, sans coussin, règne dans toute la
longueur de la voiture, et au milieu , pour ne pas nuire
à son centre de gravité. Les voyageurs y sont assis dos &
dos. Un marchepied, échelonné sur le côté de celui des
voyageurs d'intérieur, conduit à ces places aériennes,
qu'entoure une légère rampe de fer. — Chaque omnibus
est affecté au service d'un parcours, toi^ours le même, et
qu'on appelle sa ligne. L'indication des deux points
extrêmes de son service est écrite en grosses lettres sur
un tableau long attaché à la rampe de l'impériale. En
outre, sur la ceinture de sa caisse, les principaux points
du parcours sont indiqués en lettres très-lisibles. Enfin ,
pour la nuit, la voiture a 3 lanternes, 2 en tète, et une
derrière, munies de verres de couleur servant de fanaux
indicateurs, car chaque ligne a sa couleur ou son agen-
cement particulier de couleurs.
Le service de la voiture en circulation est fait par
2 hommes qui ont un costume d'ordonnance : un co-
cher, dont le siège est juché sur l'impériale, et un con-
ducteur, constamment debout sur le marchepied de la
portière, nour recevoir les voyageurs, recueillir le prix
de leurs places, les marquer par un compteur à timbre
et à cadran, fixé à l'entrée de la voiture, et , quand quel-
qu'un veut monter ou descendre, avertir le cocher d'ar-
rêter, en tirant un cordon, et le prévenir de même pour
repartir. Au point de départ, à celui d'arrivée, et de
place en place sur toute la longueur de la ligne, il y a de
petits bureaux où le public peut venir attendre le départ
ou le passage de la voiture. Us sont tenus par un, et
quelquefois deux contrôleurs, qui, à chaque omnibus non
complet s'arrêtant à leur bureau , regardent le nombre
de voyageurs indiqué par le compteur, et le pointent sut
une feuille de route imprimée, que le conducteur a pour
toute sa journée. — Dans les faubourg du Temple,
S*-Martin, S^-Denis, Montmartre, et Poissonnière, au
nord; puis, vers le milieu du boulevard de Sébastopol,
rive gauche, et vers le haut de la rue S*-Jacques, au sud,
les voies publiques étant montueuses, parce que là com-
mence le relief de la vallée de la Seine, un 3* cheval est
attelé en arbalète à la flèche de la voiture pour franchir
ces passages. Le cheval , en station perpétuelle au point
manqué, est désigné, de son service, par le nom de mon-
tagnard, ainsi que son conducteur.
31 lignes d*omnibus desservent Paris dans tous les
sens, beaucoup allant d'une barrière à l'autre. La lon-
gueur moyenne de chaque ligne est de 5 à 7 kilomètres.
Quel que soit le parcours, le prix de la place est toujours
le même : 30 cent, pour l'mtérieur, et 15 cent, pour
l'impériale. En outre, les voyageurs de l'intérieur peuvent
demander au conducteur un petit bulletin impnmé, dit
correspondance, qui donne droit de monter gratis dans
Tomnibus d'une autre ligne, de sorte que pour 30 cent
on peut foire une course de 13 à 14 kilomètres environ.
liB service est arrangé de manière qu'une voiture,
sur chaque ligne, part des bureaux de stationnement
toutes les 6 ou 8 minutes. Sur la ligne des boulerards in-
térieurs du Nord, la plus fréquentée de toutes, les départs
ont lieu toutes les 3 minutes.
L'omnibus est une invention françûse : on l'attribue
à Pascal , qui Imagina aussi le nom , mot latin signifiant
« à tous, » ou « pour tous » ; cependant ce ne fut que
dix ans après sa mort que l'on tenta l'application de son
idée : en 1672, un certain nombre de carrosses de trans-
port en commun roulèrent dans I^is; le prix de la
place était de 6 sous. L'entreprise ne dura que peu d'an-
nées, et l'idée, sans doute prématurée, ne fut reprise
qu'un siècle et demi après : en 1819, un M. Godot de-
manda au préfet de police l'autorisation d'établir un ser-
vice d'omnibus sur les boulevards et sur les quais; on Is
lui refusa : c'eût été , dit-on , pour la voie publique un
embarras, que ces voitures s'y arrêtant continuellement.
La même autorisation , sollicitée par d'autres entrepre-
neurs en 1824 et 1826, fut également refusée; enfin eg
1828, un nouveau solliciteur, plus heureux, obtint une
concession pour les boulevards intérieurs du Nord seule-
ment. Il les divisa en deux parcours : le carrefour de la
rue de Lancry ei du boulevard, près la Porte S^-Martin,
fut le point de départ commun ; un service allait i la
Bastille et l'autre à la Bfadeleine. Les départs avaient lieu
à peu près tous les quarts d'heure; une orgue, placée
sous les pieds du cocher, qui la mettait en action par une
pédale, donnait le signal en jouant une petite fanfare de
trompettes pour appeler les voyageurs. Le prix de la
course fut d'abord de 25 centimes, puis, peu après, de
30 cent. Cette entreprise démocratisait l'équipage ; aussi
une prévention défavorable l'accueillit d'abord. Cepen-
dant, la jeune duchesse de Berry ayant fait la gageure de
s'y montrer, incognito, il est vnu, et ne s'étaut à demi
révélée qu'en donnant au conducteur un billet de banque
de 500 fr. pour sa place, alors que les places étaient en-
core à 5 sous, cette petite anecdote, qrui fut bien vite sue,
rendit une foule de gens moins dédaigneux, et le procès
des omnibus fut gagné près du public. Bientôt d'autress
lignes furent sollicitées, concédées, et desservies.
Chaque ligne était tenue par une compagnie, et prenait
un nom pour se faire reconnaître, ainsi qu'une couleur
spéciale pour ses voitures. La ligne- des boulevards prit
et conserva le nom û'Omnibus; il y eut ensuite les Dames
blcmches, les Béarnaises, les Tricycles (de ce que les voi-
tures étaient à 3 roues), les Constantines, les Batignol-
laises, etc. En 1855, toutes les compagnies se réunirent
en une seule; l'administration municipale, qui favorisa
cette fusion, accorda à la compagnie générale un privilège
de 24 ans, mais en même temps lui imposa diverses
charges, entre autres : la prolongation de plusieurs lignes
jusqu'à l'enceinte bastionnée de Paris agrandi ; l'établis-
sement de places d'impériale sur toutes les voitures, afin
de rendre l'omnibus accessible aux plus petites bourses;
un tarif exceptionnel de 15 cent., pour toutes places, en
faveur des sous-oflSciers ou soldats en uniforme; enfin ,
une contribution annuelle de 640,000 fr. à verser dans la
caisse municipale. En 1860, ce privilège fut augmenté de
26 ans, pour finir au 31 mai 1910, mais à la charge'par
la compagnie de porter à un million de francs la contri-
bution annuelle payée à la ville de Paris*
ONO
in9
ONT
Depuis le i" Janvier 1861, le nombre des lignes d'om-
nibus a été porté à 31, rayonnant à tous* les orients de
Paris, et le service Journalier ordinaire est fait par
M5 voitures, qui commencent leurs courses à 8 heures
du matin, et les finissent à 11 heures et demie du soir,
n y a 03 bureaux de station, et 120 d*attente ou de cor-
respondance espacés sur les diverses lignes. Un registre
est tenu dans ces bureaux pour recevoir les plaintes des
voyigeurs, et chaque jour le coDimissaire de |>oIice du
quartier et Tadministration centrale de Tentreprise pren-
nent connaissance des plaintes. Les omnibus de Pans ont
transporté 67 millions 76(^96 voyageurs, en 1860, et
la recette brute a été de 12 milHêns 983,000 fr., ou, par
joomée de voiture, 82 fr. 19 cent. L'ensemble du par-
cours général quotidien équivaut à 59,740 kilomètres.
L'effectif des chevaux, pour un service aussi considérable,
dépasse 6,000. — Les omnibus sont maintenant un be-
soin pour toutes les classes de la société, et on ne pour-
rait plus s*en passer. On a appliqué le service de rom-
nibas aux chemins de fer : à Paris, chaque chemin a ses
omnibus stationnant dans divers lieux, recevant les
voyageurs et les bagages pour les transporter à la gare
de départ, où les prenant à la gare d*amvée, et les con-
duisant à leur porte, en desservant une circonscription
dans la ville. C. D— t.
OMNIUM, terme de Finances. Quand un gouvernement
fait un emprunt , il traite pour la totalité avec un petit
nombre de banquiers , qui s'engagent à verser le mon-
tant, par portions, dans un espace de temps déterminé,
eontre une certaine quantité d'effets publics, de diffé-
rentes natures. L'ensemble de ces effets, négocié indivi-
sément, s'appelle omntum,
ONAGRE. > V, ces mots dans notre Dictionnaire de
ONCE. I Biographie et d^ Histoire,
ONCHETS. V. Jonchets.
ONCIALE (Écriture). V. ÉcarroRE.
ONCLE, frère du père ou de la mère par rapport à leur
enfant; la tante est la sœur du père ou de la mère. L'oncle
et la tante sont les plus proches parents, en ligne colla-
térale, après les frères et sœurs; ils sont, avec leurs
nereux et nièces , au 3« degré (Code Napol., art. 738 );
le Droit canon, différant en cela du Droit civil , les place
même au second degré. L'oncle ne peut épouser sa nièce,
ni la tante son neveu, sans une dispense du souverain
ilbid., 163-164) et de l'autorité religieuse. A défaut
d'héritiers directs ou de frères et de sœurs, les oncles et
les tantes sont appelés en première ligne à la succession
de leurs neveux et nièces (art. 753). — On nomme oncle
ou Umte à la mode de Bretagne le cousin germain ou la
cousine germaine du père ou de la mère.
ONCTION, en termes de Théologie, action d'oindre,
c-à-d. d'étendre sur certains endroits de la peau une
huile sainte. Le mot onction est devenu synonyme de
comécration : l'iiuîle imprime un caractère sacré aux
hommes, aux lieux et aux objets consacrés au culte.
Chez les Hébreux, les grands prêtres et les rois rece-
vaient par l'onction sainte la dignité que Dieu leur con-
férait; on oignait les vases employés au service divin.
L'Eglise chrétienne a conservé, comme symbole, l'usage
des onctions dans ses cérémonies, par exemple, au Bap-
tême, à la Confirmation , à l'Ordination , à l'Extrème-
Onction (K ces mots); elle les emploie également pour
le sacre des rois.
ONDOIEMENT, baptême sans les cérémonies de l'Église.
Lorsqu'un enfant nouveau-né ne peut être porté à l'église,
on le fait ondoyer par le prêtre ; mais pour que le bap-
tême ainsi administré soit valide, il faut que la matière
et la forme soient exactement gardées (V. B.vptémb). Hors
le cas de nécessité, on ne doit pas ondoyer sans une per-
mission expresse de l'évêque.
ONÉOS. V. Chevelure.
ONGLET, bande de papier ou de parchemin, ou repli
d'en feuillet, sur lequel les relieurs collent dans un livre
les estampes , les cartes et les cartons. — Feuillet simple
i]outé à un livre, pour remplacer un feuillet que l'on en-
lève et qui contient soit quelque faute, soit quelque
rédaction à changer. On l'appelle onglet, parce que l'ou-
îrier l'appuie avec l'ongle, en le collant dans le livre.
ONGLËTTE , petit burin plat dont se servent les gra-
îeors.
ONOBIASTICON, titre d'un recueil de noms (communs)
ou de mots chez les anciens Grecs. Ce genre de compila-
tion a dû être l'objet de bon nombre d'ouvrages depuis
Tépoqae alexandrine, c.-à-d. depuis la diffusion do la
hngue et de la littérature grecque en Asie, en Afrique, et
dans les parties de l'Empire romain qui n'étaient pas
d'origine hellénique. Le seul recueil qui nous soit par
venu porte le nom de Julius Pollux, contemporain des
empereurs Marc-Aurèle et Commode. La disposition do
ce travail est bizarre, capricieuse, souvent confuse: lo
1*' livre traite des dieux , de leurs différentes qualifica-
tions, des termes relatifs au culte et aux édifices religieux,
puis des mots qui se rapportent à la royauté. Le 2% con-
sacré à l'homme, énumère les termes qui se rapportent
a!'.x parties visibles et invisibles du corps humain ^ sujet
qui se poursuit dans le 3«, où sont compilés tous les mots
relatifs à la naissance , à la parenté de tous les degrâs ,
au mariage, au célibat, aux relations entre citoyens ou
étrangers, entre amis et ennemis, entre maîtres et es-
claves, au patriotisme, etc. Le 4* livre expose tous les
termes usités pour exprimer les connaissances matérielles,
intellectuelles et morales auxquelles on était alors par-
venu. Le 5* est relatif à la chasse, le 6* aux repas, le 7«
aux métiers, le 8* aux termes de Justice; le 9' énumère
les noms donnés aux villes , les termes relatifs à leur fon-
dation, à leur organisation, et ceux par lesquels on dési-
gnait les environs des villes, les bourgades, les villages,
les champs, les prairies, les maisons de campagne, etc.
Enfin le 10* nous offre une longue liste de tous les usten-
siles'en usage à l'époque de Pollux, et de tous ceux dont
on trouvait le nom ou la description dans les anciens
écrivains à partir d'Homère. Une disposition claire ferait
de VOnomasticon un excellent manuel pour ceux qui s'oc-
cupent de l'antiquité ; car il renferme des renseignements
extrêmement précieux. 11 s'en faut beaucoup que l'auteur
manque de critique ; il n'admet aucun terme au hasard ;
il s'en rapporte d'abord à l'usage, et cite un nombre con-
sidérable d'auteurs et de passages à l'appui. — Plusieurs
écrivains modernes ont donné à leurs ouvrages le titre
d*Onomasticon. Ainsi l'on a VOnomasticon historiœ ro~
manœ de Glandorp (Francfort, 1589)s catalogue des noms
et des familles de l'ancienne Rome; VOnomasticon litte^
rarium de Saxe (1775-1803, 8 vol.), précieux pour l'his-
toire de la littérature; VOnomasticon Tullianum d'Orelli
et de Baiter (Zurich, 1836-38 ) , contenant les noms géo-
graphiques et historiques cités par Cicéron , la liste des
lois qu'il invoque, celle des expressions ginecques qu'il
emploie , etc. P.
ONOMATOPÉE (du grec onoma, nom, eipoiéin, faire) ^
formation d'un mot dont le son est imitatif de la chose
qu'il signifie. Ces sortes de mots ai>ondent dans toutes Tes
langues, surtout à leur origine : l'instinct du peuple les
a formés pour la plupart. Tels sont en français trictrac,
tic'tac, glouglou, coucou, cliquetis, coq, gronder ^ cror-
cher, briser, applaudir, claquer, siffler, glousser, tinta--
marre, brouhiAa, etc. Il existe un Dictionnaire des ono^
matopées par Ch. Nodier, 1808, in-8°. P.
ONTOLOGIE. Ce nom, d'invention toute moderne,
malgré sa physionomie et son étymologie grecques, dé-
signe , d'une part , la science de l'être par opposition k
la science des phénomènes , et de l'autre la science de
la pensée. Philosophie et Logique ; c'est surtout à ce der-
nier point de vue que TOntologie mérite d'attirer l'atten-
tion. Tandis que la Psychologie et la Logique s'attachent
exclusivement à l'élément subjectif de la connaissance,
l'Ontologie considère les objets mêmes de nos idées, et
se donne pour but d'en approfondir la nature et d'en
mesurer la réalité. Entreprise facile à mener à bien lors-
Su'on laisse en dehors de toute contestation le principe
e la légitimité de l'entendement; toute chimérique ai»
contraire lorsque l'on part de cette donnée sceptique et
négative, que l'idée que nous avons d'une chose n'est
Jamais une sûre garantie de la réalité objective do cette
chose. Si l'idée que J'ai des corps n'entraîne d'abord
avec elle la conviction que les corps existent réellement,
si les concepts du temps et de l'espace ne sont c[ue des
formes subjectives de la sensibilité, aucun artifice de
raisonnement ne pourra me rendre la croyance au monde
ext^eur, au temps, à l'espace, et il en sera de même de
la loi morale, de Dieu, etc. Tel est l'écueil auquel sont
venues se heurter deux écoles célèbres, celle de Descartes
et celle de Kant; l'une et l'autre, pour avoir non-seule-
ment distingué (ce qui est Juste), mais absolument séparé
Vidée de Vétre, la Psychologie et l'Ontologie, ont été con-
damnées ensuite à faire en vain d'incroyables efforts pour
revenir de l'une à l'autre par différents artifices de lo-
gique, que ce n'est point ici le lieu d'expliquer. Ajoutons
que l'Ontologie, entendue dans le sens le plus raison-
nable, n'étant qu'une partie de la Métaphysique (F. c&
mot)y et la limite qui sépare les questions ontologique»
proprement dites des autres questions métaphysiques
étant assez arbitraire et flottante, ni le nom, ni la chose
OPE
1340
opn
ne nous paraissent appelées à laisser des traces dorables
dans la philosophie. B — e.
ONYX, variété d*agate dont on se sert pour les camées.
On taille les onvx de manière c[ue la figure soit dessinée
dans la partie de la pierre qui est de couleur brillante ;
celle dont la teinte est obscure forme le fond. Dans la
Symbolique chrétienne, l'onyx figure Tinnocence, la can-
deur; on Tassigne au patriarche Manassé et à Tapôtre
S* Philiope.
ONZIÈME, intervalle musical, ainsi appelé parce qu*il
faut former onze sons diatoniques pour le parcourir. C'est
la réplique ou l'octave de la quarte.
OPATA (lAngue). V. Mexique (Langues du).
OPÉRA, genre de composition dramatique, qui serait,
comme Tindique son nom, Vœuvre suprême, Touvrage
beautés de la poésie, émouvoir le cœur par le charme et
la puissance de la musique, éblouir les yeux par le prestige
de la décoration ; et la danse peut encore y ajouter ses
séductions. Il est de toute évidence que la musique est la
partie essentielle d'un opéra, et que les autres éléments
sont plus ou moins secondaires. Toutefois , il ne faut pas
aller Jusqu'à prétendre que le poëvM qui sert de matière
au musicien, et que nous appelons livret (en italien {(-
bretto)^ satisfait à toutes ses conditions quand la structure
générale en est bonne et qu'il fournit des situations va-
riées et intéressantes : Apostolo Zeno et Métastase ont
fourni de bons poômes aux compositeurs itafiens ; les vers
de YArmide de Quinault, qui n'ont Jamais passé pour
mauvais , n'ont point empêché Giack d'écrire une admi-
rable musique, et Ton a vu d'heureuses inspirations mu-
sicales périr par Tinsuffisance des poèmes auxquels elles
étaient appliquée^. Certains compositeurs ont partap^é
l'opinion qu'on ne peut écrire de bonne musique sur de
beaux vers : s'ils n'ont pas produit des œuvres de génie,
ce n'est pas qu'ils aient manqué de mauvais poètes.
Les Italiens distinguent deux aortes d'opéra, le sérieux
(opéra séria) et le gai {opéra buffa). De cette dernière
qualification est venu le nom de Bouffes donné aux
chanteurs du théâtre italien de Paris. Nous avons aussi
deux genres , le grand opérât chanté d'un bout à l'autre,
et Vopéra comique, où le chant se mêle au dialogue parlé :
c'est une désignation peu rigoureuse, car le caractère
d'une pièce, et non la manière dont ses parties sont coor-
données, devrait la placer dans l'une ou l'autre catégorie ;
et l'on voit des pièces courtes, rien moins qu'héroïques
par le sujet , décorées du nom fastueux de grand opéra ,
tandis que d'autres, avec un caractère sérieux, sont ran-
gées dans l'opéra-comique.
Les premiers essais d'opéra remontent au xvi* siècle
(V. Italie — Musique en). Pendant longtemps la mu-
sique ne fut qu'une mélopée languissante, au moyen de
laquelle les auteurs prétendaient reproduire le chant des
anciens Grecs : on ne songeait guère qu'à combijier des
sons, et la mélodie, à laquelle l'harmonie devait s'appli-
quer, était laissée dans l'oubli ; dans ces premières œu-
vres, on ne voit pas trace d'idées élevées, d'expression
et de passion. On se bornait à des récits, quelquefois
mesurés, quelquefois libres de toute mesure, et qui pri-
rent le nom de récitatifs ( V. ce mot). Dans VEuridice de
Péri et Caccini ( 1600 ) , un personnage chante des stances,
qu'on peut considérer comme l'origine de l'air : une petite
ritournelle les précède, et les mouvements de la basse
suivent note pour note ceux de la voix, tandis que dans
le récitatif la basse faisait souvent des tenues. Le» airs se
perfectionnèrent peu à peu : dans un drame musical
d'Etienne Landi, H Santo Alessio (1634), on en trouve
un qui a du rhytlime, et qui contient même un trait de
vocalisation. Du reste, les airs d'opéra, coupés en cou-
plets comme ceux de nos vaudevilles ou comme nos ro-
mances , avaient alors une grande monotonie, et ils con-
tenaient de fréquents changements de mesure et de temps.
On voit encore par les œuvres de Cavalli que les airs
étaient placés au commencement des scènes, et non,
comme dans les opéras modernes, vers la fin. Les formes
de l'air ont été bien souvent modifiées Jusqu'à nos Jours
{V, Ain, Rondeau, Cavatinb). Le duo dramatique, le
tno , le finale ( V. ces mots) ^ ont , comme l'air, une ori-
gine italienne; mais c'est en France que le chceur ( V. ce
moi) a produit ses premiers modèles. Dans ce pays,
l'opéra, précédé par des ballets où les danses étaient en-
tremêlées de dialogues ( V, Ballet) , ne fit son apparition
ouç pendant la minorité de Louis aIV, grâce au cardinal
Mazariu ( K. France — Musique en) ; accucill avec fa-
veur par la cour, sifflé par les bourgeois, qui n'y trouvaient
Sue de l'ennui , il se releva ouand Lulli eut pris la direc-
on de l'Académie royale de Musique en 1672. Toute-
fois, les œuvres de ce compositeur sont encore très-mo-
notones , moins peut-être à cause de l'insuffisance de son
génie que pour les difficultés qu'opi)osait l'incapacité des
exécutants. Beaucoup de gens aussi étaient de l'avis du
maître à chanter de M. Jourdain , « que de tout temps la
musique a été affectée pour la vraisemblance aux ber-
gers, par cette raison qu'il n'est pas naturel que des
princes et des bourgeois chantent leurs passions. » Cétiit
donc une opinion générale, que la musique, impropre à
exprimer les grands mouvements de Time, n'était de
proportion qu'avec les paisibles et tendres bergeries dont
on avait le goût à cette époque. Des esprits sérieux con-
testaient les conditions mêmes de la musique dramatique,
et repoussaient la convention, aujourd'hui acceptée, sur
laquelle elle repose. Ce qui choque Saint-Évremond, par
exemple, c'est que a l'on chante toute la ^ièce, depuis le
commencuoient jusqu'à la fin, comme si les personnes
qu'on représente s'étaient ridiculement ajustées pour
traiter en musique et les plus communes et les plus im-
portantes affaires de leur vie. Peut-on s'imaginer, ajoute-
t-il, qu'un maître appelle son vale^^ ou qu'il lui donne
une commission en chantant; qu'un ami fasse, en chan-
tant, une confidence à son ami; qu'on délibère, en chan-
tant, dans un conseil; qu'on exprime avec des chants les
ordres qu'on donne, et que mélodieusement on tue les
hommes à coups d'épée et de javelot dans un combat
{Au duc de Buckingham^ Sur les Qpércu)? x Qu'eût dit
cet adversaire du langage musical, s'il eût connu les pre-
miers opéras de l'Allemagne? Ils étaient écrits en deux
langues : les airs, les duos, tout ce qui exprimait les
sentiments se chantait en italien , et l'on employait l'ul-
lemand pour les récitatifs, pour tout ce qui devait aider
à débrouiller l'intrigue du drame. L'esprit français ne se
Çassionna pour l'opéra qu'au xviii* siècle, à partir de
733, lorsque Rameau fit u.^ révolution nouvelle. Rameau
poursuivait le beau naturel, comme on disait alors; muis
il n'entendait point par là le chant ou la mélodie : à ^es
yeux, tout le charme et toute l'énergie de la musique
étaient dans l'harmonie. Il n'en fit pas moins faire un
grand pas à l'opéra, par l'emploi d'un grand nombre de
moyens nouveaux , dont l'art devait profiter. C*est prin-
cipalement depuis GlQck que la variété d'accents et de
mouvements, aussi nécessaire à la musique que la va-
riété des couleurs et des nuances Test à la peinture,
devint une loi du drame musical en France ; cette loi
avait été déjà observée en Italie par un grand nombre de
compositeurs, entre autres Carissimi, Scarlatti et Per-
golèse. — V, Ménétrier, Des représentations en musiqui,
Paris, 1681, in-12 ; Riccoboni, Lettres à Af^^* la marquise
de P... sur Vopéra, Paris, 1741, in-12; De Chassiroo,
Réflexions sur les tragédies-opéra, Paris, 1751, io-lS;
De Chastellux, Essai sur l'union de la musique et de la
poésie, 1705; Algarotti, Saggio sopra V Opéra, Livourne,
1763; Planelli, DelV opéra in musica, Naples, 177^;
Sutherland, Histoire de VOpéra^ en anglais, 1861, 3 vol.
in-8°, et les articles de ce Dictionnaire consacrés à lliis-
K notre Dictionnaire de BiO'
toire de la musique dans chaque pays.
op^RA DE PARIS. i V. notre Dict
OPÉRA-COMIQUE. S graphie et d'Histoire.
OPÉRATION (du latin opus, œuvre), se dit, en Philo-
sophie, de tout travail de l'esprit dirigé par la volent/'
vers un but. — En termes de Stratégie, le mot opération
désigne les mouvements généraux des arm^. Le plan
d'opérations est l'ordre général des entreprises, arrêté
avant l'ouverture de la campagne. On nomme ligne d'opé-
rations la ligne que suit une armée pour se porter de n
base vers son objectif ou point décisif qu'elle veut at-
teindre; base d'opérations, le territoire avec lequel Tar-
mée doit rester en communication pour en tirer ses
ressources et ses renforts, ou B*y réfugier en cas de revers.
OPÉRETTE, c-à-d. petit opéra^ nom que les Alle-
mands donnèrent au xviu* siècle à des espèces de drames
à couplets, avec quelques duos et trios, mais plus humbles
dans leurs prétentions que les plus légers opérss-comi-
ques. Il est passé en France de nos Jours, et a été spé-
cialement appliqué aux pièces du répertoire des Folies-
Nouvelles et des Bouffes-Parisiens^ à Paris.
OPHICLÉIDE, c-à-d. serpent à clefs (du grec ophis.
serpent, et kléis, clef)i instrument de musique, à vent et
en cuivre, qui se joue avec un bocal ou embouchure
ouverte. 11 est d'invention hanovrienne, et on ne le coq*
naît guère en France ^ue depuis 1815. Introduit en 18:^
dans la musique militaire, il y a remplacé le serpent
OPI
13Ji
OPT
(F. 00 mot], comme il devait aussi le faire plus tard à
l'église. Les facteurs Labbaye, Halary, et Sax l'ont pro-
pagé et perfectionné. On distingue Vophicléide'têÎMr,
ïophidéide-€Uto, et Vophicléide-basse, qui forment une
famille avec le cor à clefs; leur étendue est à peu près
celle des voix auxquelles ils correspondent. La longueur
totale d'an ophicléide-ténor, non compris Tembouchure,
est de 3°*,48; le corps de Tinstrument a 2"\i4; le tube
qui reçoit et modifie le son a il millimèt. à son embou-
chure, et 2 décimèt. quand il arrive au pavillon. Cet ophi>
cléide, dont la partie s'écrit sur la clef de fa, peut jouer
k partie de basse , puisque son étendue est du si bémol
au-dessous de la portée de la clef de fa Jusqu'au la et
même Vut au-dessus des 2* et 3* lignes de la def de soi.
Les opliicléides en si bémol, dont on se sert dans la mu-
oque militaire, sont d'un ton plus bas que le précédent,
et ont toujours par conséquent dans l'exécution deux bé-
mols de moins à la clef. L'ophicléide-alto a la même
étenSue que l'ophicléide- ténor, mais transportée une
quarte plus haut ; on écrit sa partie sur la clef a*ut 3* ligne
ou sur la clef de sol. L'ophicléid&-basse est à la quinte
inférieure de Tophicléide-ténor, et par consécpient une
octave au-dessous de l'ophicléide-alto. L'ophicléide est
farni de neuf clefs, dont la première se ferme à volonté
au moyen d'une bascule; les autres sont bouchées. Dans
rophlcléide-basse, les clefs sont remplacées par trois pis-
tons, qui en rendent le maniement plus facile. Il existe
des méthodes d'ophicléide par Cornette et par Schiltz. B.
OPINION, lugement que porte l'esprit en matière con-
tingente, probable ou douteuse. On oppose Vopinion à la
«iencê.
OPINION PUBLIQUE, puissance invisible, mystérieuse,
incertaine, capricieuse, que nul pouvoir lie saurait arrêter
ni comprimer ; tout au plus un gouvernement peut-il,
pendant un temps, en suspendre les effets qu'il redoute.
Cest comme une conscience de tous, d'autant plus ab-
solue qu'elle croit toujours bien juger, suivant les prin-
cipes de la saine morale et de la saine politique. Un sage
gouremement ne méprisera Jamais l'opinion, lui résistera
quelquefois, cherchera toujours h l'éclairer quand elle
s'égare, et même ira au-devant de ses égarements en la
dirigeant, autant que possible. Bien que l'opinion soit
l'expression du sentiment du grand nombre, cependant
elle n'est, d'ordinaire, que l'œuvre d'une minorité plus
ou moins grande. Les témoignages de l'histoire, et no-
tamment ceux de nos Révolutions, prouvent cpie ce n'est
presque toujours que la minorité de la population qui se
laisse emporter d'abord par les passions sous lesquelles
les gouvernements succombent. Les esprits les plus ar-
dents, ceux qui se croient, ou qui ont l'art de se faire
passer pour les plus éclairés, se font écouter de la foule,
et comme on a toujours raison quand on parle seul,
comme il y a toujours plus d'esprits faux ou de pauvres
d'esprit que d'esprits Justes, ils persuadent avec des
raisonnements captieux ou spécieux, et forment ainsi ce
qu'on pourrait appeler une fausse opinion publique. Voilà
pourquoi il est du devohr des gouvernements de diriger
Topinion; s'ils restent impassibles, la majorité prend leur
inertie pour rembarras d'une mauvaise conscience, et de-
vient pour les séditieux un auxiliaire qui, même inerte,
leur (ait la partie belle et prive le pouvoir de tout appui.
— Cependant, il y a certaines conditions que doit rem-
plir un gouvernement qui veut diriger l'opinion, c'est de
^ montrer honnête, moral, préoccupé des intérêts et de
!â gloire de la nation, ferme et habile ; « mais lorsqu'une
'lêplorable faiblesse et une versatilité sans fin se mani-
rei>tent dans les conseils du pouvoir ; lorsque, cédant tour
à tour à l'influence des partis contraires , et vivant au
jour le Jour, sans plan fixe, sans marche assurée, il a
donné la mesure de son insuffisance, et que les citoyens
les plus modérés sont forcés de convenir c^ne l'État n'est
plus gouverné; lorsque enfin à sa nullité au dedans
Padministration joint le tort le plus grave qu'elle puisse
vroïT aux yeux d'un peuple fier, Je veux dire l'avilisse-
ment au dehors, alors une inquiétude vague se répand
dans la société, le besoin de sa conservation l'agite, et,
promenant sur elle-même ses regards, elle semble cher-
cher un homme qui puisse la sauver. » Ce tableau, tracé
P&r Napoléon l*', est celui du gouvernement Directorial
de la France vers la fin de 1709, et montre admirablement
ce que nous voulons prouver, que l'abandon de l'opinion
publique, même inerte, est encore un immense danger pour
iiQ gouvernement. Celui qui vient de Juçer le Directoire,
^ grand moraliste comme en grand pohtique, vit,15 ans
plus tard, l'abandon de l'opinion publique devenir une
<l«s causes puissamtes de la chute du 1*' Empire français.
Là encore ce fut la miT^crit^ qui fit la loi ; la majorité
resta passive, parce que son opinion s'était retirée du
gouvernement, et l'homme le plus fait pour être souve-
rain put être mis au ban des souverains par des haines
et des Jalousies royales, parce que l'opinion publique ne
le soutenait plus. V. Popolarité. C. D— t.
OPISTHODOME, OPISTHION ou OPISTHGNAOS,
nom donné par les anciens Grecs à la partie postérieure
d'un temple, opposée au Pronaos, et où n'entrait pas le
public. Les Romains l'appelaient Posticum.
OPISTflOGRAPHE (du grec opisthen, par derrière, V
graphéin, écrire), nom qu'on donne en Diplomatiqur
à une charte écrite des deux côtés. En général, jusqu'au
xrv* siècle, les actes n'ont été écrits que sur le recto, et,
s'il y a quelque chose au verso, ce sont des notes ajoutées
après coup. Les opisthographes sont d'ailleurs très-rares.
— Dans le Bas- Empire, on appela Opisthographe tout
livre où l'on écrivait sur-le-champ, pour revoir et amen-
der plus tard; les corrections et additions se faisaient au
verso de chaque feuillet.
OPLITES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d'Histoire.
OPPOSÉES (Têtes), têtes qui, sur des pierres gravées
ou des médailles, ont la face tournée à l'opposé l'une de
l'autre.
• OPPOSITION, en termes de Droit, obstacle mis par
qiielau'un à quelque chose. On forme opposition aux
scellés, à une vente, à un payement, à un mariage. L'op-
position ne peut être levée que par le consentement de
l'opposant, ou par jugement. — On se sert de l'opposi-
tion pour se pourvoir contre les jugements rendus par
défaut; elle doit être formée dans la huitaine qui suit la
signification faite à l'avoué de la partie condiamnée; à
défaut d'avoué, elle est recevable jusqu'à l'exécution du
jugement {Code de Procéd.y art. 155-165). — La tierce
opposition est celle que forme une personne à un Juge-
ment préjudiciable à ses droits, et lors duquel ni elle, ni
ceux qu'elle représente, n'ont été appelés. Si l'opposant
succombe, il y a amende de 50 fr. au moins, sans préju-
dice des dommages-intérêts {Ibid.^ 474-479).
OPPOSITION, en matière de gouvernement, nom que l'on
donne, dans les assemblées législatives, aux membres
qui désapprouvent systématiquement la marche, les
actes, les tendances du gouvernement et ^e l'administra-
tion. Dans les gouvernements parlementaires bien assis,
l'opposition est, en réalité, une guerre de personnes ou de
partis pour s'arracher le pouvoir; dans ce cas, ceux qui
succombent, et qrui représentaient le parti gouvernemen-
tal, deviennent, le lendemain de leur chute, le parti de
l'opposition. — Dans les gouvernements nouveaux, que
le temps n'a pas encore consolidés, l'opposition se com-
pose d'ennemis du gouvernement, poursuivant, non pas
seulement un changement de ministère, mais une révo-
lution. Si les opposants se voient en minorité, ils se
coalisent dans un Dut commun de renversement, (quittes
ensuite pour recommencer la lutte entre eux lorsqu'ils au-
ront abattu le gouvernement qui fait obstacle à leur am-
bition ou à leurs sympathies. Il parait de principe, dans
toutes les oppositions, de ne Jamais rien approuver, même
les meilleures lois et les plus sages mesures prises par
l'administration ou le gouvernement que l'on combiEit:
dans ces cas, la plus grande marque de mansuétude est
le silence absolu, quand il n'y a pas moyen de formuler
un blâme sans s'exposer à soulever contre soi la con-
science publique. Le parti doit aussi se discipliner pour
voter toujours avec ses chefs, sans qu'aucun membre se
dirige, à l'occasion, suivant ses impressions personnelles.
Quoi qu'il en soit, l'opposition, quand elle se tient dans
des limites légales, peut éclairer le gouvernement, le
stimuler au besoin, bien servir la cause de l'intérêt pu-
blic en signalant les abus, et même en jugeant les af-
faires sous leurs côtés les plus défavorables, car il sort
toujours quelque chose d'utile des discussions contradic^
toires. C. D— y.
OPTATIF (du latin optare, yuhaiter), mode de la con
jugaison grecque, ainsi appelé parce que très-souvent il
caractéristiques
au moyen aiumv, etuiYiv, oiiJLr,v. La terminaison of/;v ca*
OPT
1342
OR
nctérise assez souvent, suru^^t dans les verbes contractes,
le présent de Toptatif, et, dans toutes les conjugaisons, la
terminaison aiu.i de Taoriste l*' actif est souvent rem-
placée par eta (eia;, eie, etc.).
L'optatif, employé isolément, est représenté en fran-
çais quelquefois par le subjonctif du verbe pouvoir con-
jugué interrogativement et suivi de Tinfinitif, et ordi-
nairement par les circonlocutions plaise au ciel, pliU au
uel que, suivies du subjonctif. — Outre cette significa-
tion qui lui a valu son nom, Toptatif exprime en général
ridée de possibilité, de vraisemblance, et, par consé-
quent, celle dincertitude. Dans ce cas, il est très-souvent
accompagné de la particule ôv (ou xi en poésie), et ré-
pond à notre conditionnel ou à nos diverses formes du-
bitatives. Il exprime aussi, joint à la même particule,
une assertion, mais en la pr&entant sous forme de con-
jecture, et par conséquent avec modestie et politesse; ou
une conclusion, à laquelle on donne ainsi un ton moins
tranchant; une affirmation ayant rapport à Tavenir, mais
qui se trouve ainsi adoucie; un impératif, sous forme
d'invitation polie. — Un des rôles les plus importants de
Voptatif est celui qu'il Joue dans les propositions subor-
données, lorsque celles-ci expriment une action apparte-
nant au passé, qaoi que soit d'ailleurs le temps du verbe
principal : « Il lui ordonna de se retirer, et de ne point
l'irriter, afin qu'il s*en retournât sain et sauf chez lui. »
Aussi l'optatif s'emploie-t-il souvent après une proposi-
tion dont le verbe est au présont historique ou de narra-
tion mis pour le passé. Lorsque l'on rapporte ou allègue
qu'une personne a dit quelque chose, ou que l'on veut
donner à entendre qu*elle a eu telle ou telle jpensée, l'op-
tatif est encore employé. On s'en sert ennn après les
conjonctifs, lorsque ces mots se trouvent dans une pro-
position exprimant une action réitérée.
En résumé, l'optatif est une véritable variante du sub-
jonctif; il exprime l'idée de subordination, mais avec
une nuance dubitative un peu plus marquée. Ses temps
-sont secondaires du subjonctif; car tous, même le pré-
sent, le futur et le parfait, ont les signes des temps se-
condaires, tandis qu'au subjonctif l'aoriste même a les
formes des temps principaux. Ainsi , dans leurs rapports
les plus généraux avec le français, les temps de l'optatif
correspondent à rimparfait et au plus-que-parfait du
«ubjonctif de cette langue. P.
OPTATION (du latin optatio, vœu), figure de Rhé-
torique par laquelle on énonce un vœu, un vif désir,
mais toujours en bonne part (ce en quoi elle se distingue
de rimprécation ). Elle commence ha[oituellement par ces
mots : Fasse le ciel ! Plût à Dieu quel.,, Puissiez-vous I
OPTIMISME, mot c^ui, dans le sens vulgaire, désigne
vaguement une certaine disposition à prendre toutes
choses par le meilleur côté, à voir tout en beau. L'opti-
misme philosophique garde sans doute quelque chose de
•cette disposition, mais il précise et transforme par la
réflexion ce qui n'était d'abord que sentiment et intuition
confuse. — L'optimisme, tliéorie métaphysique et morale
■à la fois, est une des solutions, et, lorsqu'il est bien com-
pris, la meilleure des difficultés que suscite le fait incon-
testable de l'existence du mal, mis en présence de la
croyance si naturelle et si puissante à l'existence d'un
être parfait. « Si Dieu existe, d'où vient le mal ? s'il
n'existe pas, d'où vient le bien? » Ce n'est pas résoudre
la question ; c'est la supprimer arbitrairement que de nier
soit l'existence de Dieu, soit celle du mal. Nous n'avons
point à parler ici des systèmes qui font du mal l'expia-
tion des fautes d'une vie antérieure ( V, MéTEMPSYCoss,
Platonisme, Préexistence dks âmes), ni de ceux qui font
de l'univers le théâtre d'une lutte éternelle entre deux
principes également puissants : le principe du bien et le
principe du mal ( F. notre article Ddausmb) ; Topti-
misme, dont nous acceptons volontiers la formule, si sou-
vent tournée en ridicule, que « tout est pour 'le mieux
dans le meilleur des mondes possible , » doit être en-
tendu dans ce sens : non pas que tout y est bien , au
regard des individus et des espèces , même au regard de
la portion limitée de la cré&tion qu'il nous est donné de
connaître; mais que l'univers, pris dans son ensemble,
présente la plus grande somme de bien possible et la
plus petite somme de mal. A priori ^ comment en serait^ii
autrement? L'univers n'est^il pas l'œuvre d'un être par-
fait? Mais cet être ne pouvait, sans se reproduire lui-
même dans son œuvre, communiquer au monde sa per-
fection absolue. L'imperfection est une condition de toute
oature créée. Dès lors, il ne s'agit plus que d'examiner
les principales formes du mal physique et du mal moral,
tous !esquelles se manifeste cette imperfection de nature.
ou mal métaphysique, et de trouver, si l'on peut, ]|
secrète harmonie qui fait de chacune d'elles un élémeol
de l'ordre de choses le meilleur possible dans son ensemi
ble. On reconnaîtra le plus souvent que ce qui parait m
mal, ce qui , pris en soi-même et isolément, en est an
en effet, ne laisse pas de faire partie d'un système d'où
il ne pourrait disparaître sans entraîner la perte d'uo
l)ien beaucoup plus grand. Tel est notamment le carac-
tère des fautes et des vices des hommes, lesquelles sup-
posent la liberté de se résoudre, condition de toute vertu.
Or, un monde où régnerait de toute nécessité une inno<
cence forcée, ne serait-il pas de beaucoup inférieur au
monde tel qu'il est? Ajoutons bien vite que quand notre
vue bornée ne parviendrait pas à découvrir la raison
cachée de tel ou tel mal, ce ne serait pas un motif de
renonœr à notre conviction. Ajoutons encore qu'il vaut
mieux, en ceci , comme dans la question des causes finales,
qui présente avec celle-ci tant de rapports, s'abstenir de
toute explication, que de risquer des explications dou-
teuses et peu satisfaisantes que les adversaiies de l'opti-
misme peuvent facilement retourner contre ses partisans.
On trouve un certain nombre de ces explications dans
Leibniz à côté des idées profondes et ingénieuses qu'il
a accumulées sur ce sujet. Eu effet, si quelques vues
optimistes n'ont pas fait défaut aux philosophes anté-
rieurs, on sait que c'est Leibniz qui, dans sa Théodicèe,
c-à-d. dans ses Essais sur la bonté de Dieu, la liberté
de Vhomme et Vorigine du mal , a formulé et développé
l'optimisme en un véritable système philosophique. C'est
là qu'il doit être étudié. A côté de ces longues et savantes
études, il ne nous paraît pas hors de propos de rappeler
une des plus charmantes fables de notre incomparable
La FonUine, le Gland et la Citrouille, petit traité d'op-
timisme en action i
« DlcD ta\t bien ce qa*ll Hit. n Sans en chercber la preaTe,
Eu tout cet uniTers , et l'aller parcourant ,
Dans les citrouilles Je la treure.
Dieu ne Ta pas roulu : sans douta 11 eut raison,
OPnON (du latin optio), en termes de Droit, faculté
de choisir entre deux choses, entre deux partis. Le droit
d'option se rattache à une foule de contrats^ et forme
même la condition essentielle des obligations alternatives
{V, Obugation). En vertu du droit d'option, la femme
peut renoncer à la communauté !q>rès la dissolution du
mariage.
OR, un des métaux précieux, employé comme instro-
ment d'échange sous forme de monnaie, et qui sert aussi
de matière aux travaux d'orfèvrerie et de bijouterie. L'or
a été connu de tout temps : les peuples les plus anciens
et les plus sauvages en faisaient usage. Abraham payait
avec do l'or le tombeau de sa femme ; les héros d'Ho-
mère, comme les indiens avant la découverte de l'Amé-
rique, portaient des ornements d'or. Dans l'antiquité,
l'Asie produisait et possédait une grande quantité d'or :
on évalue le trésor amassé par les rois de Perse en lin-
gots d'or à S milliards environ de notre monnaie. En Asie,
le mont Tmolus et le Pactole, le pays des Ghalybes et
celui des Soanes, dans le voisinage du Caucase, les monts
Émodes dans le voisinage de Caspatyre, l'Inde, la Cber-
sonèse d'or, l'Arabie, principalement dans l'Yémen, et,
au delà de ces régions connues des Anciens, le pays des
Massagètes et des Scythes, produisaient de l'or. En Grèce
et en Macédoine, on trouvait des mines ou des lavages
aurifères sur les bords de l'Uèbre, à Crénides, à Daton ,
à Scaptô-Hylè, à Thasos, près du lac Prasias, dans Hle
de Siphnos, au mont DamasUus en niyrie, dans li ré-
gion des Alpes , chez les Dal mates, chez les Taurisques,
chez les Salasses et près de VerceiL En Gaule, les Pyré-
nées et le pays des Tarbelliens en renfermaient ; en Es-
pagne, qui depuis les Phéniciens Jusque vers les der-
niers temps de rr<inpire romain, resta la source la plus
{)roductive de métaux précieux, l'or se rencontrait dans
es rivières de l'Asturie, de la Gallécie, du canton des
Artabres et de la Lusitanie ; on exploitait de riches filons
dans les montagnes qui forment U vallée supérieure du
Bétis, chez les Orétans, les Bastitans, à Cotines. Les
mines de Scapté-Hylè produisaient annuellement 80 ta-
lents (444,800 fr.), et celles de Thasos 200 à 300 talents
(1,112,000 fr. à 1,668,000 fr.). Les Asturies et la Galice
rendirent à certaines époques plus de 3,000 kilogr. d'or
par an (environ 6,000,000 de fr.). Néaiimoins, la pro-
duction totale du monde ancien était assez peu considé-
rable relativement à la production actuelle.
OR
J343
OU A
A répoque de l'invasion des Barbares, beaacoap de
miiies furent abandonnées; la production diminua, et
lesta assez faible jasau'au temps de la découverte de
rAfflériqae. Des calculs, d*ailleurs très-hypotbétiques ,
fixent à 4,106 kilogr. (de 12 à 13 millions de fr.) la produc-
tion annuelle de Tor en Europe, en Asie et en Afnaue au
iT* siècle. Les principales mines alors exploitées étaient
celles de Siderocapso (Macédoine), de Cbemnits, de
Kremnitz et de Facebajer (Hongrie), de Joacbimsthal
'Bohème), du Hartz et de Schneeberg (Saxe). La pro-
doctioD était loin d'être régulière; par exemple, les mines
du Hartz, découvertes dans le cours du x* siéM:le , furent
Abandonnées à la suite d'une famine en 4006; reprises
en 1116, abandonnées de nouveau de 1186 à 1209, puis
en 1353, elles restèrent inactives pendant un siècle.
La découverte de rAmérioue augmenta considérable-
ment la quantité de Tor. Le pillage des trésors du Mexique
et du Pérou produisit plus de 7,000 kilogr. (environ
23 millions de fr.). L'exploitation des mines de Parco,
d'Qraro, de Pachuca, et la découverte des mines du Po-
tosi, de Zacatecas, de Huaneavelina, portèrent la produc-
tion annuelle à 12,590 kilogr. (environ 36 millions de fr.)
pendant le xvii* et le xvm* siècle. D'après les recher-
ches de Tooke, corroborées par Alex, de Humboldt, de
Jacobs, de Michel Chevalier, l'ancien monde ne possé-
dait, lors de la découverte du nouveau, que 300 millions
d'or: en 1800, l'Europe disposait de 8 milliards 850
militons. — Malgré le ralentissement du travail en Amé-
rique au commencement du xn* siècle, la production
annuelle s'éleva à 18,000 kilogr. (59,400,000 fr.) de 1810
i 1825; à 37,500 (79,750,000 fr.) de 1825 à 1828. Les
mines de Russie ont contribué en grande partie à cette
augmentation; elles ne sodt exploitées que depuis 1704.
De 1810 à 1825 elles n'avaient rendu que 16,435 kilogr.
(51,215,000 fr.); de 1825 à 1818 elles en ont rendu
231,548 kilogr. ( 764,000,000 fr.). Vers 1848 les mines
d'Amérique produisaient , en moyenne :
États-Unis, 1,800 kilogr. valant 5,040,000 fr.
Mexique, 3,606
N.-Orenade, 4,954
Pérou, 750
BoUvie, 444
Brésil, 2,500
ChiU, 1,071
12,197,000
15,160,(K)0
4,475,000
1,465,000
8,250,000
3,534,000
15,215 kilogr. valant 51,021,000 fr. environ.
La Sibérie rendait à elle seule 27,000 kilogr., ou en-
viron 89 millions de francs. En y Joignant les 3,000 kilogr.
des mines de Hongrie, de Transylvanie, des lavages du
Piémont, et des exploitations espagnoles, une quantité
d'environ 2,000 à 3,000 kilogr. auxquels on peut approxi-
mativement évaluer ce que l'Afrique et les lies de la
Sonde fournissent au commerce européen , on a un total
d'environ 150 millions de francs. La circulation américo-
«uropéenne de l'or en 1848 a été évaluée à 14 milliards.
Depuis 1848,11 s'est accompli dans la production de l'or
nne révolution plus grande que celle qu'avait produite la
découverte de l'Amérique. Deux nouvelles contrées sont.
Tenues alimenter le marché de l'or, la Californie et'l'Aus-
analie. L'or fut découvert en Californie vers la fin de fé-
vrier 1848, sur les bords de l'American-Fork, affluent du
Sacnunento. Un an après, il y avait déjà 21,000 hommes
travaillant dans les placers ou gîtes aurifères. Voici les
chiffres de la production annuelle :
1848
1S49
1850
1851
1852
1853
8,100
53,400
74,700
75,600
90,900
95,400
1854 107,100
1855 120,600
1856 120,600
1857 118,000
1858 129,000
kilogr. valant 26,730,000 fr.
— 176,200,000
— 246,510,000
— 249,480,000
— 299,970,000
— 314,820,000
— 353,430,000
— 397,980,000
— 397,980,000
— 389,400,000
— 455,700,000
989,400 kilog. valant 3,308,200,000 fr. environ.
L'or fut découvert en Australie, en 1851, par un cer-
(un Hargraves, qui, ayant travaillé quelque temps en
Californie, avait remarqué une srande ressemblance
entre la nature des roches dans les deux pays. L'exploita-
tion commença le 3 avril dans le district de Bathurst, et
ft'éteodit le long des rivières Abercrombie et Macquarie.
En août 1851, de nouveaux gîtes étaient découverts au
sud, près de Melbourne, dans le lit de la rivière d'An-
derson, et en octobre commençait l'exploitation du mont
Alexandre. Au commencement de 1852, il y avait déj.\
40,000 travailleurs dans les environs de cette montagne.
Voici les chiffres de la production annuelle de l'Australie t
1851
1852
1853
1851
1855
1856
1857
1858
18,000 kHogr.
118,000 —
90,000 —
«8,200 —
90,000 —
103,500 —
90,090 —
89,000 —
ou 59,400,000 fr.
389,400,000
297,000,000
291,060,000
297,000,000
341,550,000
237,000,000
293,700,000
680,700 kilogr. ou 2,266,110,000 fr.
L.
OR (Évaluation monétaire de 1'). Les économistes év^
luent le kilog. d'or converti en notre monnaie à 3,300 fr.
oa (Statues en ). Il y en eut chez les divers peuples de
l'antiquité. Le temple de Bélus à Babylone en contenait
plusieurs; les auteurs anciens mentionnent des statues
d'or chez les Phéniciens, en Egypte, en Sicile. Les Hé-
breux dans le désert adorèrent un veau d'or, et ce furent
deux veaux d'or que Jéroboam érigea, quand il eut aban-
donné le culte du vrai Dieu. Les Grecs employèrent sou-
vent l'or avec l'ivoire {V. CmJstiAPRKKTmE — Sta-
tuaire). Luculius avait à son triomphe une statue d^
Mithridate, en or, de 2 met. de hauteur, et des lits d'ot.
Au triomphe de Pompée, on vit également des statues, un
lit, un trône et des sceptres d'or. Une statue d'or fut
élevée en l'honneur d'Agnppine ; Néron en consacra deux,
& l'occasion de l'accouchement de Poppée.
OR, monnaie de compte de Perse, valant environ 8 fr.
OR , un des deux métaux de l'écu , dans le Blason. Il
est figuré par la couleur laune. On le représente en gra-
vure par une foule de petits points.
OR CORONAIRE. F. uotro DicL de Btogr, et dTHistoire,
ORACLES. V, Oracles et Sibyluns, dans notre 010»
tionnaire de Biographie et d'Histoire.
ORAISON (du latin oratio, discours). Ce mot a été em-
ployé en Grammaire pour désigner l'expression vocale do
la pensée, le système des sons articulés, et l'on a donné
aux différentes espèces de mots le nom de parties dorai'
son ou parties du discours (V. ce mot)» Par extension ,
Oraison a signifié Discours prononcé en public, comme
quand on dit les Oraisons de Démosthène, de Cicéron, etc.
ORAISON, en termes de Liturgie, est synonyme de Prière.
L'oraison est vocale, quand elle est faite à haute voix;
mentale, quand on la dit intérieurement ;iacujato)r6 (du
latin jacmari, darder, lancer), quand c'est une sorte
d'élan , une demande adressée avec ferveur. — Dans un
sens spécial, l'Oraison est la prière propre à l'office du
Jour ou aux commémorations des fêtes et fériés; elle est
précédée d'une antienne ou d'un verset , et termine les
Laudes, Prime, Tierce, Sezte, None et les Vêpres.
ORAisoif DOMDiiCALB. V, DoMUfiGALB, dsns notro DiC"
tionnaire de Biographie et éP Histoire,
ORAisoif FONtesB , dlscours solennel prononcé pour ho-
norer la mémoire de quelque défunt illustre, soit au mi-
lieu de ses obsèques, soit dans une cérémonie funéraire
qui suit de près sa mort. Les oraisons funèbres sont l'ex-
pression la plus riche et la plus élevée de l'éloquence dé-
monstrative. Elles participent de l'histohne, par l'exposi-
tion des faits; de la politique, . par l'appréciation des
événements ; de la morale, par la peinture des caractères
et les leçons qu'elles donnent aux vivants; de la religion
enfin , au nom de laquelle elles proclament à la fois le
néant de l'homme et sa dignité, une telle grandeur, que
la doctrine chrétienne surtout communique à ces œuvres,
a naturellement, dans les temps modernes, mis l'élo-
quence démonstrative, le genre le moins goûté des An-
ciens, au-dessus du genre délibératif et du genre Judi-
ciaire. Bossuet n'est peut-être pas on plus grand orateur
que Cicéron ni que Démosthènes; mais les matières qu'il
a traita sont d'un ordre autrement élevé : son éloquence
a sa source au ciel, tandis que celle de ses rivaux de l'An-
tiquité n'a d'autre aliment que les intérêu et les pas-
sions terrestres.
On voit apparaître l'oraison funèbre dès les temps les
plus anciens : dans la vieille Egypte, selon Diodore, les
{irêtres, en présence du peuple assemblé, prononçaient
'éloge des monarques défunts. On la retrouve plus tard
dans les cités grecques ; mais là une démocratie orgueii-
leuse et jalouse la contraignait d'adresser ses louanges
ORÀ
I3ii
ORA
moins à la mémoire d*un grand homme en particulier
Ma*à l*État. L*oraison funèbre des Anciens demeura étran-
gère à la pensée d*une autre vie, à la perspective conso-
knte d'un bonheur éternel. Sans compter le Ménéxènêàe
Platon, qui ne se rapporte à aucune arconstance précise,
Périclès loua les premiers Athéniens qui moururent dans
la guerre du Péloponèse ; Lysias, ceux qui succombèrent
pour affranchir la Grèce de la tyrannie Spartiate; Dé-
mosthène, les glorieux vaincus de Chéron^; Hypéride,
les victimes de la guerre Lamiaque. La patrie et la liberté
remplissaient ces discours, et suffisaient , à défaut de la
religion , pour inspirer encore çà et là aux orateurs les
accents de la grande éloquence. Mais il n'en fut pas de
même & Rome : si Ton excepte la xiv* Philippiquef où
Cicéron a célébré la fameuse légion de Mars, décimée,
dans la lutte contre Antoine , pour la cause de la liberté
expirante, Toraison funèbre fut exclusivement réservée
aux particuliers, à des hommes illustres, & des femmes
de grande naissance : on la prononçait sur le Forum, du
haut des Rostres. La première oraison funèbre fut celle
de Brutus par Yalérius Publicola ; plus tard, Appius Clau-
dius Cœcus prononça Tâoge de son père, César celui de
sa tante Juhe et celui de sa femme Cornélie; Antoine fit
Toraison de César, Tibère celle d'Auguste, Caligula celle
de Tibère, Néron celle de Claude; Anton in fut loué par
BIan>-Aurèle. Rien n*a survécu de ces œuvres, dont Tor-
gueil de famille faisait souvent tous les frais.
Il appartenait au christianisme de donner à cette élo-
quence son véritable caractère : Toraison funèbre, telle
Sue le goût et Timagination aiment à la concevoir, ne
ate, en effet , que du jour où Torateur, au nom de la re-
ligion, donne à son auditoire la double leçon de Fautel et
du tombeau , ces deux symboles de notre vanité présente
ei de notre glorieux avenir; elle n*est vraiment digne de
son nom qu'à la condition de promettre aux vertus du
mort un autre salaire que le souvenir des hommes et
cette gloire que les Anciens se proposaient comme la ré-
munération suprême d'une vie bien remplie. Quel ensei-
Snement est plus conforme, mieux assorti au caractère
'un semblable discours, que celui qui, devant cette ter-
rible puissance de la mort, détourne la pensée de la terre
et la reporte vers le ciel? En cela consiste, dans le genre
démonstratif, la supériorité des Modernes sur les Andens.
a Rappelez dans votre Éloge, disait Cicéron, la noble
naissance de votre héros, sa beauté, sa force, ses richesses ;
si de tels avantages sont par eux-mêmes peu dignes de
louange, c'est un mérite d'en avoir bien usé ; vantez ses
vertus, et celles qui furent surtout utiles à lui-même,
et celles qui tournèrent au profit des autres hommes,
les unes parce qu'elles produisent l'admiration , les
autres parce qu'elles excitent la reconnaissance; célé-
brez surtout les belles actions accomplies par le courage
sans espoir de récompense; louez même le bonheur
comme un don des immortels. » Quelle différence avec le
langage de Bossuet ou de Massillon I « Dieu seul est
grand, s'écriera Massillon devant la tombe à demi fermée
de Louis XIV. — La piété, dira Bossuet , voilà le tout de
l'homme; sans elle, toutes les autres qualités de l'esprit
et du cœur, toutes les grâces de la personne, tous les
avantages de la naissance et de la fortune ne sont rien ,
ou même tournent en ruine à ceux qui en sont ornés,
puisque enfin il faut mourir. » Ceux4à ont bien raison
qui disent que la plus belle oraison funèbre est 1 oraison
la plus religieuse. 8^ Grégoire de Nazianze, S^ Grégoire
de Nysse et S^ Ambroise composèrent, dès le iv* siècle
de notre ère, pour des particuliers ou des princes, des
('lo^ funèbres que Bossuet lui-même n'a pas dédaigné
d'imiter. Mais c'est le xvu* siècle qui conservera l'hon-
neur d'avoir porté le genre à son plus haut degré de per-
fection. Alors les chefs-d'œuvre se pressent et se multi-
plient : Bossuet compose ses oraisons funèbres d'Henriette
de France, d'Henriette d'Angleterre, de Marie-Thérèse,
d'Anne de Gonzague, de Le Tellier et du grand Condé;
Bourdaloue, celle du même prince ; Mascaron , celle de
Turenne; Fléchier, celles de Tnrenne, de M"** de Mon-
tausier, de M. de Lamoignon , de Marie-Thérèse, de Le
Tellier, et plusieurs autres encore; Massillon, celles du
Dauphin et de Louis XIV. Au-dessous d'eux , mais à un
rang très-honorable, brillèrent le P. de La Rue et M. de
Beauvais. Un siècle où U voix de l'orateur était assurée
de trouver un écho dans l'àme de son auditeur, où l'un
et l'autre étaient volontiers d'accord , dans la commu-
vnuté de leurs croyances, pour appeler sur le mort la ré-
compense précise et déterminée qne la foi assigne à la
vertu, où les assistants tournaient assez docilement en
exemple pour eux-mêmes le modèle de piété qu'on pro-
posait autant à leur imitation qu'à leur admiration, un
tel siècle devait être Tàgo d'or de ce genre d'éloqnence. »
Depuis le temps de Louis XIV, l'oraison funèbre n'a
fait que déchoir : on ne trouve plus à mentionner, au
xvw* siècle, que M. de Boismont et l'évêque de Senez;
dans notre siècle, le P. Lacordaire a prononcé les élogec
funèbres d'O'Connell , du général Drouot, de M. de For*
bin-Janson, et l'abbé Cœur, évêque de Troyes, celui de
Jérôme Bonaparte. Cette décadence est toute naturelle.
D'abord la matière était épuisée; comment revenir sur d«
semblables sujets, avec une originalité vigoureuse et de
bon aloi, aprà des Massillon, des Bourdaloue, des Mas-
caron , des Fléchier, des Bossuet 1 Et quel changement
dans les dispositions d'esprit et de cœur de l'audJtoire !
Le scepticisme a chassé la foi , et Torateur sacré monte
dans la chaire avec cette pensée bien faite pour refroidir
et glacer l'éloquence, que ses auditeurs viennent chercher
dans son discours, non pas une leçon de piété, mais
quelques traces do talent oratoire, et crue, si les oreilles
et les yeux apprécieront diversement la beauté du débit et
de l'expression, les cœurs resteront fermés aux émotions
et aux enseignements de la foi. Le doute seul eût suffi
pour dessécher la source où l'oraison funèbre puisait ses
plus sublimes inspirations ; deux causes étrangères à la
religion achevèrent ce que le doute avait commencé.
Bossuet, dit-on, n'avait point abordé sans répugnance ni
scrupule un genre dont les conditions essentielles for-
çaient l'orateur à s'écarter de la vérité, soit en atténuant
les fautes, soit en exagérant les mérites du héros. Toute-
fois les lumières et les dispositions favorables d'un audi-
toire, qui, dans un éloge écouté avec bienveillance et
plaisir, savait faire la part des nécessités du genre et
celle du vrai, avaient eu pour effet, au xvii* siècle, de
rejeter dans l'ombre ce défaut inhérent à l'oraison funèbre.
II n'en a plus été ainsi depuis : l'esprit philosophique,
portant une investigation plus libre et plus hardie dans
la vie publique et privée des hommes illustres, a fait
succéder aux entraînements d'une admiration complai-
sante les jugements froids et sévères de la raison, et la
mode du dénigrement à celle de l'éloge. Au xvii* siècle,
les panégyristes de Turenne avaient célébré sa conver-
sion comme un acte de bonne foi généreuse; au xviti*.
Voltaire l'attribuait à l'ambition, et n'y voyait que le désir
de porter le bâton de maréchal. De telles dispositions
sont antipathiques à l'oraison funèbre, qui requiert,
presque autant que la poésie lyrique, l'enthousiasme, et,
de plus, la foi au désintéressement de la vertu et à l'élé-
vation naturelle de certaines âmes d'élite. Ajoutons que
l'esçrit de parti, qui, depuis 1789, a divisé la France en
factions ennemies, a rendu plus difficile encore et peut-
être impossible l'accord des opinions sur le mérite de
quelques srands hommes que le siècle a produits. Les
droits de l'imprévu réserva, on peut dire que l'oraison
funèbre est morte avec Louis XIV. F. Yillemain , Essa»
sur VOraison funèbre, A. H.
ORANGE (Arc d'), le plus remarquable des arcs hono-
raires romains qui existent en France. B&ti en dehors de
la ville, il a 21 met. de longueur à sa base, 19 met. de
hauteur, et est percé de trois portes, dont l'arc est à plein
cintre : celle du milieu a 9 met. sous clef et 5 met. d'ou-
verture, les deux autres ont 7 met. sur 3. Tout le monu-
ment est en pierre de taille. Quatre colonnes corinthiennes
cannelées décoraient chaque face; les deux colonnes qui
flanquent l'arc ou la porte sur chacune des faces princi-
pales soutiennent un fronton triangulaire, au-dessus du-
quel règne un attique couronné par une belle corniche,
lia face septentrionale est la mieux conservée : au-dessus
(le chacune des portes latérales sont groupées des armes
offensives et défensives; des deux côtés du fronton se
trouvent des trophées composés d'attributs maritimes; le
bas-relief de l'attique représente un combat de fantassins
et de cavaliers; les arcnivoltes, les pieds-droits et les
voûtes des trois portes offrent de précieux modèles d'or-
nementation. La façade méridionale de l'arc a beaucoup
souffert : deux des anciennes colonnes ont disparu ; il ne
reste presque rien des bas-reliefs de l'un des côtés do
fronton, ni des trophées militaires dont l'une des petites
portes était surmontée. Le bas-relief de l'attique repré-
sente aussi un combat. La face orientale de l'arc est
décorée de A colonnes corinthiennes, supportant une cor-
niche et une frise qui régnaient autrefois autour do m(^
nument ; au-dessus est un fronton triangulaire, dans le
tympan duquel on voit, sous une arcade, le buste nvon-
nant du Soleil, et, en dehors de l'arcade, deux cornes
d'abondance; au-dessus de la corniche du fh)nton,et des
deux côtés, sont des Néréides; dans les trois entroTTo-
ORA
134»
ORC
tenemenu il y a trois trophées, et, au pied de chacun
de ceux-ci , deux captifs. Ces sculptures sont très-muti-
lées. U face occidentale de Tare avait sans doute la
même décoration, mais on n'y voit plus que les restes de
deux colonnes et de deux trophées. — Des antioualres
ont pensé que l'Arc d'Orange était un souvenir de la vic-
toire de Cn. Domitius Ahenobarbus sur les Allobroges
(Fan 122 av. J.-C), ou de la défaite des Teutons par
Marins (Fan 102); d'autres ont cru y reconnaître un
monument commémoratif, soit des victoires des Romains
dans tonte la Gaule Narbonnaise, soit de la conquête de
J. César; il en est qui l'attribuent à l'empereur Auguste.
Des études faites sur ce monument, en 1861, par M. Her-
6sule cbevelue rendues tributaires par ce prince; les
bas-reliefs sont des trophées de la défaite des Gaulois,
et des vaincus d'Actium. Les princes d'Orange avaient
enfermé l'arc dans un édifice, et bâti une tour sur
sommet; ces constructions ont été démolies en
^on
1721. V. U' Beuf, L'Arc (TOrange, dans les Mém. de
l'Acad. des Inscriptions, t. xxv; Raban, Us Antiquités
de la ville et cité d^Orange, 1656 ; de Gasparin , Hist, de
la ville dVrange, 1815, in-12; Artaud^ VArc d'Oranae:
\m, in-S»; J. Boustet, Notice historvmB et archéolo-
gkueiur Orange, 1841, in-8° ; Caristie, Mmuments an^
tiques d'Orange, 1856, in-fol.; Herbert, l'inscrtptton de
l'Arc d'Orange, Paris, 1862, in-8". ,^ ;
ORANGE ^rtieatre a ), monument improprement appelé
le Cirque, et par corruption le Grand Qiré, 11 est «tué |
sur le penchant d'une montaene. La partie demi-circu-
laire dans laquelle se trouvaient les sièges des specta-
teurs est taillée dans l'escarpement. Les deux extrémités
da demi-cercle se liaient à la scène par des constructions
nécessaires au service du théâtre. Le mur qui termine la
scène ou en fait le fond est assez bien conservé; il a
35 met. de hauteur, et plus du triple de longueur ; il est
décoré de deux rangées d'arcades et d'un attique. On a
fait disparaître de nos Jours les hai>itations dont les princes
d'Orange avaient laissé remplir ce théâtre.
oiANGB (La Prise d'), 7* branche de la chanson de
Gmlkmme au etmrt JVex. Guillaume s'ennuie dans sa ville
de Nismes. Un chevalier échappé des prisons d'Orange
Tient lui vanter la beauté de cette ville et les charmes
de la belle Orable. Guillaume se rappelle qu'il a eu autre-
fois l'intention d'épouser la princesse. Il part donc sous
un déguisement avec le prisonnier, et pénètre dans
Orange; il est reconnu et va périr, quand il est sauvé
par Orable, qui livre la ville aux chrétiens. U fait bap-
tiser sa libératrice et l'épouse. — Ce roman existe à la
Bibliothèque nationale de Paris dans cinq manuscrits du
un* siècle. V, Hist: Utt. die la France, t. xxii. H. D.
ORANIENBADM (Château d*}, à 12 kilom. O. de S^Pé-
tersbourg, sur le golfe de Finlande, en face de la forte-
resse de Cronstadt. Ce ch&teau, construit par le prince
Menschikoif, favori de Pierre le Grand, sur le penchant
d'une colline longeant le rivage, se compose de trois corps
de b&timent reliés entre eux par des galeries ornées de
soloonades. U est de tous côtés entouré de Jardins, à tra-
rers lesquels on a creusé un canal allant Jusqu'au golfe.
Dans un bois de sapins qui est près de là se trouve le
petit château de Solitude, qu'on nomme aussi Ha, à cause
du cri de surprise qu'il arrache à ceux qui le voient pour
la première fois.
ORANTES (do latin orare, prier), figures symboliques
de la prière chrétienne, peintes ou sculptées dans les
Catacombes.
ORARIUM. V. ÉtOLE.
ORATEUR , nom qu'on a donné d'abord à quiconque
parlait en public, mais que l'on réserve maintenant à
ceux dont la parole éloquente sait convaincre, toucher et
passionner leurs auditeurs. — En Angleterre, on appelle
Orateur {speaker) le président de la Chambre des com-
.*nunes; élu à la pluralité des voix, c'est lui qui expose
s aftaires. Dans les cérémonies publiques, on porte de-
vint lui une masse d'or couronnée.
ORATOIRE (du latin orare, prier), petite pièce, endroit
retiré dans un appartement, où peuvent se faire dans le
i^cueillement les prières particulières. L'oratoire n'a point
l'&uiel, mais on simple prie-Dieu, un Christ, un béni-
Uer, etc. Les canons de l'Église défendeot d y célébrer
la liturgie et d'y baptiser. Les chantreries ( V, cê fnof«
ont été quelquefois nommées oratoires, ainsi que les pe^'
tites chapelles des cimetières et des propriétés privées*
V, Gattico, De Oratoriis domestUns, Rome, 1746.
ORATOIRE (Accent). V, Accent.
ORATOIRE (Art), art d'employer les ressources de l'élo-
quence. U résulte de l'observation et de l'expérience, mais
il ne saurait se réduire en formules. L'art oratoire, c.-i-d.
une certaine manière d'être éloquent, ne doit pas être
confondu avec la Rhétorique, qui donne une sorte d'élo-
quence aitificielle à ceux oui n'en ont pas, et qui com-
munique quelaue chose de lactice & l'éloquence naturelle:
dans Démosthène et Bossuet il y a un grand art, il n'y
a pas de rhétorique.
ORATOIRE (Genre). V, Éloqoence.
ORATORIO, pièce de musique religieuse, ainsi ap«
pelée parce que les premières œuvres de ce genre furent
exécutées au xvi« siècle à Rome dans l'église de l'Oro-
toire, sur la demande de S^ Philippe de Néri. Ce fonda-
teur de l'ordre des Oratoriens, voyant les fidèles déserter
l'église pour les spectacles mondains, imagina de faire
composer, non pas des drames pieux dans le genre des
anciens Mystères, pour les Jouer sur un tiié&tre avec
costumes et décors, mais des espèces d'intermèdes ou de
cantates à plusieurs personnages, dont le sujet était puisé
dans l'Écriture sainte, et qui s'exécutaient comme mu-
sique de concert, soit à l'éÂlise, soit au thé&tre. Les Ora-
torios, qu'on appela aussi arames fleuris, prirent dans la
suite plus de développement, et acquirent les proportions
d'un vrai drame, sauf la pompe thé&trale. On n'en exé-
cute plus aujourd'hui que dans les grandes solennités
musiôdes, ou, par fragments, dans les concerts spirituels.
Sans parler des anciens compositeurs italiens, Carissimi,
Léo, Jommelli, Caldara, Colon na, Alex. Scarlattl, qui se
sont plus ou moins distingués d ms l'Oratorio, les plus
célèbres compositeurs qui ont illustré ce genre sont Haen«
del {le Messie^ Judas Machabée, Athaliej Samson)^
J.-S. Bach {la Passion)y Gimarosa {le Sacrifice d'Abror
kam)^ Haydn (la Création, les Saisons)^ Mozart {David
pénitent), Beethoven {Jésus au mont des Oliviers) ^ Men-
delssohn (Êlie, Paulus)^ etc. B.
ORBEVOIE, vieux mot signifiant une fausse arcade ou
fenêtre.
ORCHESTIQUE (do grec orkheisthai, danserj, une des
formes de la danse ches les anciens Grecs. C'était la danse
noble et régulière, sans gestes exagéra.
ORCHESTRATION, art d'employer les instruments
d'orchestre dans on but déterminé. V. Instruventation.
ORCHESTRE, partie la plus basse des thé&tres dans
l'Antiquité, espace vide autour duouel se courbaient les
gradins , et qui s'étendait Jusqu'à ravant-scène. Chez les
Grecs, l'orchestre devait avoir le demi-diamètre de tout
l'édifice; sa largeur était double de sa longueur. Il se
divisait en trois parties : la première, où des mimes et
danseurs venaient, dans les entr'actes et à la fin des re-
présentations, exécuter leurs exercices, avec des masques
orchestriques, plus naturels et plus agréables que ceux
des acteurs de la scène, portait particulièrement le nom
d'orchestre {d'orkheisthai, danser); la deuxième, où se
plaçaient les chœurs, s'appelait thymélè (autel, estrade) ;
la troisième, dite hyposcénion (soos-scène), était la place
des musiciens. Le plancher de tout l'oTcnestre était de
bois, afin de donner de l'élasticité aux pieda des dan-
seurs, et d'ajouter à la sonorité des voix et des instru^
ments. Chez les Romains, l'orchestre n'eut pas la même
destination : légèrement Incliné vers la scène, pavé de
carreaux ou de marbre, 11 fut garni de sièges pour les sé-
nateurs, les édiles et les Vestales. B.
ORCHESTRE , partie des thé&tres modernes où se tien-
nent les musiciens. On l'établit sur une voûte; la caisse
sur laquelle les exécutants sont placés doit être d'an bois
léger et résonnant, comme le sapin, de manière à pro-
duire des vibrations ainsi que la table d'harmonie des
instruments. — L'espace qui s'étend entre l'orchestre et
le parterre, eti qu'on remplit de sièges où l'on paye un
prix assez élevé, s'appelle également orchestre. En cer-
taines localités, on le nomme parquet, B.
ORCHESTRE, ensemble des musiciens Instrumentistes
qui exécutent des morceaux symphoniques ou qui accom-
pagnent la voix des chanteurs. L'histoire des révolutions
de l'orchestre n'est rien moins que celle de la musique
Instrumentale elle-même. Au xvi« siècle, lora de la créa-
tion du drame musical, les instruments en usage ne pou-
vaient former que des orchestres très-doux : c'étaient les
différentes espèces de violes (V. ce mot)^ le concert de
dûtes {V. Cê wioOt et accidentellement le clavecin, la
8^
ORC
1316
ORD
guitare, le téorbe et la harpe; le tIoIoii était encore
pea répandu, et l'orgue tenait lieu d'instruments à vent ;
certains instruments de cuirre (trompette, bombarde,
cor ou cornet à bouquin, saqaebute on trombone} ne
servaient que pour exprimer des mouvements guemers.
Le plus ancien monument de la composition d'un or-
chestre se trouve en tête de la partition de VOrfêo de
Monteyerde, en 1607 :
IhKn gravi cembali (2 clavecins) ;
Duoi contrabassi da viola (2 contre-basses de viole) ;
Dieci violé da braxzo (10 dessus de viole) ;
Un' arpa doppia (une liarpe double) ;
Duoi violini piccoli alla Fronces» (2 petits violons
français);
Duoi chitaroni (2 guitares) ;
Duoi organi di legno (2 orgues de bois, c.-àrd. un
bourdon);
Tre bas$i da gamba (3 basses de viole) ;
Qualro tromboni (4 trombones) ;
Un régale (un jeu de régale, petit orgue) ;
Duoi cometti (2 cornets) ;
Un flautino alla vigesima teœnda (un flageolet, à la
triple octave aigufi du tuyau d'orgue de quatre pieds) ;
Un clarino con tre trombe sordine (un clairon avec
3 trompettes à sourdine).
Ces mstruments ne jouaient pas tous à la fois, mais
étaient en auelque sorte affectés à tel ou tel personnage,
k l'expression de tel ou tel sentiment. Ainsi, dans ce
drame d'Orfeo. les clavecins jouent les ritournelles; les
contre-basses de viole accompagnent Orphée, et les des-
sus de viole Eurydice; la harpe double sert à l'accom-
pagnement d'un chœur de Nymphes, les guitares à celui
du chant de Caron ; l'Espérance est annoncée par les vio-
Ions ; le chcaur des Esprits infernaux est accompagné par
les orgues de bois, Proserpine par les basses de viole,
Pluton par les trombones, Apollon par la régale, et le
chœur final des bergers par le flageolet, les cornets, le
clairon et les trompettes a sourdine. L'orchestre de Mon-
teverde osait à peine s'écarter de la voix, et la soutenait
humblement par des accords plaqués. Plus tard on réunit
les instruments en masses plus imposantes, mais on
écarta presque tous les instruments à vent. Le drame
d'Etienne Landi, // santo Alessio (1634), offre 3 parties
distinctes de violons, de harpes, de luths, de téorbes,
de basses de viole, et de clavecins pour la basse continue.
L'orchestre de Cavalli, de Carissimi, de LuUi, se compose
principalement de violons, de violes de différentes gran-
deurs, de basses de viole, et de violoni ou doubles basses
de viole. Lulli ajouta quelques parties de flûtes, de
hautbois , de bassons , de fagots et de trombes ; on
lui doit aussi Tintroduction des timbales. L'orchestre
était déjà plus varié qu'au temps de Monteverde, mais
ne faisait toujours que suivre la voix ; les ritournelles
Boules offraient de plus libres allures. 11 en fut ainsi jus-
qu'au temps de Rameau en France et de Pergolèse en
Italie. Léo et Durante, sans augmenter le nombre des
instruments, surent les premiers mettre dans l'orchestre
un intérêt particulier, et ils furent bientôt surpassés par
Alajo et Jommelli. L'invention de la clarinette, l'admis-
sion de la flûte traversière dans les orchestres , les per-
fectionnements du cor, fournirent de nouveaux effets aux
compositeurs, et l'habileté plus grande des exécutants
permit de varier les formes mélodiques des parties in-
strumentales. Les progrès de Vopera buffa en Italie don-
nèrent naissance aux morceaux dans lesquels le principal
intérêt est jeté dans l'orchestre, tandis que sur la scène
les acteurs se bornent à une sorte de conversation rhyth-
mée; Paisiello, Gimarosa, Gugllelmi, trouvèrent des
effets charmants en ce genre. Mozart a mis dans son in-
strumentation an degré d'intérêt dont il n'y avait point
eu d'exemple avant lui, et le point où il s'est arrêté
semble ne pouvoir être dépassé sans que le chant en
souffre et sans qu'il en résulte de la fatigue pour l'audi-
teur. Méhul et Cherubini ont ajouté aux ressources créées
par Mozart les perfectionnements de l'instrumentation
de cuivre; Rossini a encore augmenté le nombre des par-
ties d'orchestre, et fait un usage à peu près constant de
la grosse caisse, aes cymbales et du triangle. Mais la
multiplication des instruments bruyants a rompu les
proportions de l'orchestre.
II est nécessaire, en effet, que le nombre des instru-
ments à cordes, à vent, et de percussion , soit en rap-
port convenable avec leur sononté. Or, deux parties de
violon, tme ou deux parties d'alto , le violoncelle et la
contre-basse, forment aujourd'hui la base de toute mu-
sique à grand orchestre; le système général des instru-
ments à vent, dans une ouverture ou dans on autre
fand morceau symphonique ou dramatique , comprend
flûtes , 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 ou 4 cors, 2 trom»
pettes, 3 trombones, 2 bassons, 2 timbales, et on ajoute
quelquefois le bugle ou trompette à clefs, le cornet à
pistons, l'ophicléide, la grosse caisse, la caisse roulante,
les cymbales , le triangle. Pour tenir tête à cette masse
d'instruments à vent, les instruments à archet sont
presque partout en nombre InsuflBsant , et cependant ,
quoi qu'on fasse, ce sont eux qui peuvent donner les
effets les plus vigoureux, les plus brillants et les plus
variés : 24 violons , 8 altos, 10 violoncelles et 8 contre-
basses sont nécessaires pour faire équilibre aux autres*
instruments. Les orchestres du Conservatoire de mu-
sique et de l'Opéra de Paris sont maintenant les premiers
du monde. B.
ORCHESTRINO. V, Orph^n.
ORCHESTRION, nom de deux instruments k clavier :
l'un, construit à Amsterdam en 1780 sur les plans de l'abbé
Vogler, était un orgue portatif composé de 4 claviers,
chacun de 63 touches, et d'un clavier de pédales de
30 touches, avec un mécanisme d'expression; l'autre,
inventé à Prague en 1706 par Thomas-Ant. Kunz, était
un piano uni à quelques registres d'orgue.
ORCEIESTRIQUE, nom sous lequel les Anciens com-
prenaient la Choristique, l^Cybisttque, et la Sphéristique
( V. ces mots),
ORDINAIRE (L'), en Droit canon, supérieur ecclésias-
tique qui a juridiction dans une certaine circonscription
de territoire. C'est, par exemple^ un évêque diocésain.
ORDINAIRE ou ORDO , OU tormos de Liturgie , livre qui
indique pour chaque Jour la manière de dire l'office divin
{V. Bref). — On appelle Ordinaire de la messe la partie
de la messe qui ne change jamais, quelle que soit la fête
qu'on célèbre.
ordinaire, mot qui, dans le langage de l'armée, s'ap-
plique à Talimentation des caporaux et des soldats,
chargés de choisir, d'acheter, de préparer eux-mêmes
leurs mets, à l'exception du pain de munition, qui leur
est fourni par l'État à raison de 750 grammes par homme
et par jour. Le pain de soupe, qui est du pain blanc,
s'achète des deniers de l'ordinaire : il en est attribué en-
viron 125 grammes par repas k chaque homme, avec des
légumes, un litre de bouillon, et de 140 à 160 grammes
de bœuf ou d'autre viande. Une décision ministérielle du
26 avril 1821 autorise le capitaine k fournir aux grands
mangeurs le supplément de pain nécessaire, aoit en les
faisant travailler, soit en leur faisant faire un service
extraordinaire qui puisse ajouter k leur solde, soit en
imputant la dépense sur les fonds de l'ordinaire, et même
en y affectant une partie de l'excédant de masse qui re-
viendrait, chaque trimestre, à ces soldats. Chaque caporal
ou soldat verse à l'ordinaire 18 centimes par jour avec
les vivres de campagne ; 33 avec le pain en garnison ;
43 avec le pain en marche. Le capitaine charge le ser-
gent-migor de donner chaque jour l'argent nécessaire
pour les dépenses du lendemain, désigne alternativement
l'un des caporaux pour être chef de l'ordinaire, acheter
les denrées et surveiller la distribution, provoque la con-
currence entre les bouchers, boulan^rs, épiciers et autres
fournisseurs, et empêche toute remise, tout arrangement
iHicite entre ces fournisseurs et le chef d'ordinaire. Lors-
que la compagnie ne forme qu'un ordinaire, le lieutenant
en a la direction ; en son absence, ou quand il commande
la compagnie, c'est le sous-lieutenant; si la compagnie
forme plusieurs ordinaires, chaque officier dirige les or-
dinaires de sa section. Il contrôle le Hvret d'ordinaire que
tient le caporal, et exige que les fournisseurs soient pavés
tous les jours. Aucun caporal ou soldat ne peut être dis-
pensé de manger habituellement à l'ordinaire, qu'en
vertu d'une permission du capitaine : cette permisùon
ne peut être refusée à l'homme marié, dont la femme a
été autorisée à rester au régiment.
ORDINAL, nom que les Anglais donnent à un livre
composé sous le règne d'Edouard VI, et qu'ils ont sub-
stitué au Pontifical romain. Il contient le détail des céré-
monies du service divin.
0RDINAI4D, en latin ordinandfis, celui qui doit rece-
voir les ordres sacrés. Il subit un examen concernant la
foi et la doctrine.
ORDINANT, évêque qui confère les ordres sacrés.
ORDINATION , cérémonie par laquelle on confère les
ordres sacrés. Chez les catholiques , pour ordonner un
prêtre, l'évêque impose les mains sur la tête de l'ordi-
nand {V, iMPOsmoN ), avec des prières propres k la cir-
constance ; nuis il le revêt des ornemaats du sacerdoce*
ORD
1347-
ORD
tni consacre les mains avec l'huile des catéchumènes, et \
.ui confère le droit d'offrir le saint sacrifice en lui faisant
(oacher le calice plein de yin et la patène avec le pain.
U nouveau prêtre célèbre après Tévêque ; et, après la
communion, Vévèque lui impose de nouveau les mains
0t lai donne le pouvoir de remettre les péchés. L'ordina-
don des ordres inférieurs se fait sous des formes analo-
^és ; seulement il n'y a d*imposition des mains que sur
(es diacres. Les Grecs, les Arméniens, les Nestoriens, les
lacobites, pratiquent l'ordination comme les catholiques.
L'ordination des évèques s'appelle sacre ou consécration.
Le concile de Rome tenu en 744 a prescrit de ne faire les
ordinations qu'au 1"', au 4*, au 7* et au 10* mois, c.-&-d.
lux Qnatre-Temps. Le pape Alexandre II (ÉpU. 32) a
condamné les ordinations per saltum, c-à-d. qu'on ne
doit pas conférer un ordre à celui qui n'aurait pas reçu
tes ordres inférieurs. Le concile de Meaux en 845 interdit
tonte ordincUion absolue , c-àrd. celle d'un clerc qui
o'avait point de titre ou bénéfice ; il fallut autrefois avoir
ane église pour être ordonné prêtre. — Pour les Protes-
tants, l'ordination n'est pas nécessaire; c'est une simple
cérémonie d'installation, rendant la vocation du pasteur
plus authentique. Ils la nomment consécration, B.
ORDINATION (Ban d'). V, Ban.
ORDO. V. Ordinaire.
ORDONNANCE. Sans parler du sens que Ton donnait
à ce mot dans l'ancienne monarchie française {V. On-
DO?n«AivcES, dans notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire)^ il désigne : 1® toute décision du Conseil
d'État, quand elle est revêtue de l'approbation du souve-
rain; 2^ toute décision rendue en matière criminelle par
les tribunaux de 1*^ instance réunis en la Chambre du
conseil et sur le rapport du juge d'instruction ; 3** l'ordre
ou autorisation que donne un Juge au bas d'une requête,
à la suite d'un procès-verbal, comme pour assigner à
bref délai, commettre un rapporteur, autoriser une saisie,
homologuer une sentence arbitrale; 4° l'ordre de mise en
liberté d'un accusé déclaré non coupable par le Jury.
ORDONNANCE, cavalier placé pendant la durée d'une
garde chez un officier général, pour porter ses dépèches.
En campagne, les généraux ont à leur quartier plusieurs
ordonnances, qui leur servent en même temps d'escorte,
et qu'on ne relève qu'après un nombre de Jours indéter-
miné. On nomme of/iciers d^ordonnance les officiers pris
dans l'infanterie et dans la cavalerie pour remplir sous
les ordres des généraux les fonctions d'aides de camp, à
défaut d'officiers du corps d'état-major. Le roi Louis-
Philippe avait attaché à sa personne il officiers d'ordon-
nance; Napoléon III en eut 14, comme Napoléon I"«
ORIX)NNANC£MENT, formalité d'AdministraUon qui
consiste & vérifier l'accomplissement des services ou
Texécation des marchés, et à en ordonner le payement.
Les ordonnances de payement des divers départements
ministériels sont adressées au Ministre des finances, qui
fait acquitter toutes les dépenses de l'État.
ORDONNATEURS , fonctionnaires des divers départe-
ments ministériels qui font, par délégation des Ministres,
les ordonnancements de dépenses. Leur signature est,
an moment de leur entrée en fonctions, accréditée auprès
des payeurs. Ils inscrivent par ordre de date toutes leurs
opérations, puis les reportent sur un sommier ou grand-
li^Te de comptes ouverts par ordre de matières et sui-
vant les divisions du budget ; ils envoient les comptes
mensuels à leur Ministère , et , au terme fixé pour la
clôtore de chaque exercice, un relevé général et aéfinitif.
Om)RE , une des divisions admises dans les classifi-
cations. Ainsi, dans l'Histoire naturelle, les classes sont
divisées en ordres, qui eux-mêmes se subdivisent en
familles,
ORDRE, intelligente distribution de toutes les parties
d'ane œuvre, harmonie entre la fin de chaque être et les
moyens qu'il possède d'y atteindre. La conception de
Tordre est une conception rationnelle, nécessaire, qui se
manifeste dans le monde physique et dans le monde mo-
ral à mesure que nous y pénétrons par l'observation ; le
principe des causes finales ( V. ce mot) trouve dans l'ordre
sa satisfaction ; la croyance à l'ordre du monde est le
fondement de toute généralisation dans les sciences phy-
siques et naturelles et dans les sciences morales. La
réalisation de l'ordre pour un être, c'est l'accomplisse-
ment de sa fin.
ORDRE, le sixième des Sacrements de l'Église catho-
lique, celui qui confère le caractère, le pouvoir, le mi-
nistère ecclésiastique. L'Église en voit l'institution divine
uns ces paroles de Jésus-Christ à ses Apôtres : « Comme
BOD Père m'a envoyé , Je vous envoie, — Recevez le
S'-Esprit ; les péchés seront remis à ceux auxquels voue
les remettrez, et seront retenus à ceux auxquels vous les
retiendrez. » Les Ap6tres communiquèrent à leur tour
les dons du S^-Esprit, la mission et le ponvohr qu'ils
avaient reçus. Les évêqnes peuvent seuls administrer le
Sacrement de l'Ordre : l'imposition des mains est la ma-
tière de ce Sacrement, la prière qui l'accompagne en est
la forme (K.*ORDmATiONl. Le caractère cpe l'Ordre im-
prime à ceux mii le reçoivent est indélébile.
ORDRE, association de religieux qui, bien que dispersés
souvent dans divers monastères, sont soumis à une même
règle. On appelle chef d^ordre le monastère principal ,
celui où réside le supérieur général de l'ordre.
ORDRE, mot souvent employé pour désigner les classes
d'une nation. Chez les anciens Romains, on disait TOrdrtf
des patriciens , VOrdre équestre ou des Chevaliers ,
VOrdre des plébéiens. Dans l'ancienne monarchie fran-
çaise, on distinguait aux États généraux trois Ordres, la
noblesse, le clergé, et le tiers état. Nous disons encore
VOrdre judiciaire , VOrdre des avocats.
ORDRE, en termes de Jurisprudence , déterminaUon du
rang suivant lequel chaque créancier hypothécaire ou
privilégié doit être payé sur le prix provenant de la vente
dea biens immobiliera du débiteur commun. Cest une
dérogation an principe général qui veut que les biens
d'un débiteur soient le gage commun de ses créancien ,
et qu'en cas d'insufiîsanceTeprix s'en distribue entre eux
par contribution , au marc le franc de leura créances.
V, le Code Napoléon, art. 2,0d2, 2,093; et le Code de
Procédure civile , art. 749 et suiv. ; Grosse et Rameau ,
Commentaire ou application au point de vue pratiquf!
de la loi du 8f mai 48Ô8 sur la procédure d^ordre, Paris,
4858, 2 vol. in-8*».
ORDRE (Billet &)• y. Billet.
ORDRE (Conseil de 1'). V. Discipune (Conseil de), dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
ORDRE (Mot d'). V, Mot d'ordre.
ORDRE DE BATAILLE , disposition qu'uu général donne à
ses troupes sur un champ de bataille. Il convient d'y
distinguer trois choses : \^ l'ordre dans lequel sont ran-
gées les troupes de chaque arme, en raison du service
auquel elles sont destinées ; 2° l'ordre relatif dans lequel
les différentes armes doivent être placées, c.-&-d. la place
que chacune doit occuper dans l'ordre général ; 3° la
figure et la direction du front de bataille. L'ordre dans
lequel ont été rangé» les troupes légères, l'infanterie et
la cavalerie, a varié selon les révolutions de l'art mili-
taire; mais le même principe proportionnel a toujours
existé entre elles, c-à-d. que la cavalerie a toujours été
rangée dans un ordre moins profond que l'infanterie, et
les troupes légères dans l'ordre le moins profond. Vordre
profond était celui des Égyptiens et de tous les anciens
peuples de l'Asie; on formait de grandes masses desti-
nées à se heurter de front : ainsi, les Peraes combattaient
en carrés de 100 de profondeur sur 100 de front L'ordre
profond fut aussi adopté par les Grecs, chez lesquels le
mot phalange désigna cet ordre en général, bien qu'il
y eût quelque différence dans la formation. Ainsi, les
Spartiates combattaient sur 8 et sur 12 de hauteur, les
Athéniens quelquefois sur 30, les Macédoniens au temps
de Philippe et d'Alexandre sur 16. La cavalerie et les
troupes légères n'eurent Jamais plus de 8 rangs de pro-
fondeur. — Chez les Romains, la légion s'établit primi*
tivement sur 3 lignes, de 10 manipules chacune : dans
les deux premières lignes, les manipules avaient 12
hommes de front et 10 de profondeur ; dans la troisième,
il n'y avait que 6 hommes de front sur 10 aussi de pro-
fondeur. La distance entre les lignes était égale à la pro-
fondeur d'un manipule, et dans chaque ligne l'intervalle
d'un nuinipule à l'autre était égal au front de ces der-
niers. La seconde ligne était placée de manière que ses
pleins correspondaient aux vides des deux autres, et
qu'en front elle les dépassait de tout le firent d'un mani-
pule. La cavalerie était divisée en turmes de 8 cavaliers
de front sur A de profondeur. Sous l'Empire, cet ordre
fut modifié : l'ordre de bataille fut établi sur deux lignes
de cinq cohortes chacune, et leur profondeur varia de 6
à 10 hommes. — L'invasion des Barbares de la Germanie
rejeu l'art militaire dans l'enfance. Les Francs, les Goths,
les Vandales combattaient en grandes masses. Pendant
les temns féodaux, les batailles se livrèrent encore par
masses de chevaux portant des hommes couverts de fer,
auxquels les fantassins ne pouvaient ni résister, ni ser-
vir d'auxiliaires. L'invention de la poudre rendit & l'in-
fanterie son importance; mais, tant que l'usage des
armes & feu fut restreint et mêlé à celui des armes de
ORD
134S
ORD
encore adopté aujourd'hui.
Quant au placement relatif des différents corps dans la
ligne de bataille , 11 a subi, comme Torfonnance de
chaque arme, direrses modifications. Tant que dura
remploi exclusif des armes de main , les batailles ayant
lieu par le choc direct des corps et la lutte individuelle
des hommes qui les composaient, la cavalerie ne put
trouver place entre les masses, et fut placée sur les ailes.
Cependant cette disposition théorique pouvait n*6tre pas
constamment observée : Alexandre à Arbelles et Césûr à
Pharsale s*écartèrent du principe général. — Dans les
temps où la stratégie dirige les opérations, que la tac-
tique se borne à exécuter, et où la victoire n'est plus
uniquement le résultat d'un carnage de pied ferme, mais
souvent celui de l'occupation de certains points, le mé-
lange des armes est devenu une nécessité. La cavalerie
peut avoir à couvrir plusieurs fronts; l'infanterie, l'ar-
tillerie peuvent préparer des résultats que complétera la
cavalerie, et réciproquement. Tout dépend de l'expérience
et des combinaisons du général.
La figure et la direction du front de bataille n'ont pas
moins varié. Les Grecs avaient plusieurs combinaisons :
dans l'ordre antistomê^ la phalange offrait un double
front; dans Vhétérostome , elle s'avançait en colonne;
dans le plinthe, elle formait un carré. Ou bien elle pre-
nait, pour attaquer, la forme d'un coin ou tête de porc ,
et, pour se défendre, elle se formait en rond, en triangle,
en demi-lune. On trouve dans Végèce (III, 19) sept ordres
différents, qui étaient en usage chez les Romains. L'em-
{»ereur Léon les réduisit à quatre, appelés le scythiqtu,
'aUanique, Vafricain et VUalique, Par le premier, on
forme une ligne pleine dont les ailes s'inclinent en avant
pour cerner l'ennemi ; dans le second, des parties de
tonte la ligne s'avancent pour attaquer, Jaissant des in-
précédente na lieu qu
l'armée se forme sur deux lignes, ayant des corps séparés
pour couvrir ses flancs, et des réserves pour garder ses
derrières. — Qiez les modernes, les Suisses ont imaginé
des ordres en croix, à dents de scie, octogone, en héris-
son, etc. ; ce sont des ordres de parade plutôt que de
guerre. Au xvm* siècle, Chevert excellait à dessiner sur
le tonrain une fleur de lis, ou à y écrire Vive le roù
Toutes ces merveilles n'avaient rien de sérieux. L'ordre
sur deux lignes, appuyé d'une réserve, et entrecoupé d'in-
lervalles à canons, est seul efficacement employé de nos
jours. La direction de la ligne de bataille, son parallé-
lisme ou son obliquité par rapport à Tennemi, dépendent
de la nature des opérations à exécuter et de la configura-
tion du sol. Ce qu'il y a d'important en tout cas, c'est que
la ligne de bataille soit parallèle à la base d'opérations et
perpendiculaire aux Ugnes de communication avec cette
Dans la Marine militaire , la formation des ordres est
tout l'art des évolutions. La ligne qui s'approche le plus
du point d'où souffle le vent, et au'on nomme pour
cette raison ligne du plus près, est la plus favorable à
l'attaque et à la défense : les vaisseaux s'y maintiennent
facilement à la suite les uns des autres; l'ennemi ne peut
l'aborder qu'avec pdne et en s'exposant à tout le feu de
ses canons. Cette ligne sert principalement lorsqu'on se
bat en courant. Quand les armées navales s'arrêtent pour
se combattre à outrance, on se range en bataille suivant
la perpendiculaire du vent B.
ORDRE DU MARCHE, OU tonues de Marine, position assi-
gnée aux b&timents d'une flotte qui navigue. On reconnaît
plusieurs ordres de marche : 1*^ l'armée sur une ligne du
S lus près : tous les vaisseaux se maintenant sur cette
gne les uns par rapport aux autres font des lignes pa-
Rillèles ; 2» l'armée sur la perpendiculaire du vent : les
vaisseaux sont tous face au veut; 3° l'armée perpendicu-
laire à la route ordonnée ; 4<* les b&timents sur les deux
lignes du plus près, le général au centre et sous le veut;
5* l'armée sur six colonnes parallèles ; 6<* Tannée sur
trois colonnes.
ORDRE DU JOUR, injonction transmise par écrit à une
rmée nu A un corps de troupes a^ la part d'une autorité
upérleure. Il contient ou une communication d'actes
égaux, ou une intimation des devoirs à remplir, ou une
explication du genre de service à accomp'.ir, ou un récit
succinct d'événements qui intéressent les militaires. Le»
ordres du jour sont transcrits sur des registres spéciaux.
— Quelquefois des généraux en chef font de l'ordre du
jour une sorte de proclamation à leur armée, pour ce qui
tient à l'honneur militaire ou à la gloire du drapeau.
En 179S, le général Beau vais, connu depuis comme
écrivain militaire, étant employé à l'armée d'Egypte,
donna sa démission à la suite d'une altercation très-vive
avec le général en chef Bonaparte. Ce dernier l'accepta,
et la mit à l'ordre du Jour en l'accompagnant de la
réflexion suivante : « Un officier qui, se portant bien,
offre sa démission au milieu d'une campaf^ie, ne peut
être dans l'intention d'acquérir de la gloire et de con-
courir au grand but de la paix générale. Il n'est pas
digne des soldats que Je commande. » — Kléber chargé
du commandement de l'armée d'Egypte, se croyant aban-
donné de son pays, conclut, le 24 janvier 1800, la con-
vention d'El-Arisch, par laquelle il devait ramener son
armée en France. Déjà il avait remis aux Turcs plu-
sieurs postes importants , et il s'acheminait pour s'em-
barquer, quand il reçoit de l'amiral anglais Keith une
lettre qui lui déclare que le roi d'Angleterre, allié des
Turcs, s'oppose à la convention, et exige que l'année
française se rende prisonnière de guerre. Kléber s'in-
dÎKne; il met à l'ordre du jour la lettre entière de l'ami-
ral anglais, et la fait suivre de ces simples mots : « Sol-
dats, on ne répond à de telles insolences que par des
victoires ; préparez-vous à combattre. » Le lendemûn il
ç;agna la bataille d'Héliopolis, où, avec 20,000 hommes,
il anéantit l'armée du grand vizir, forte de 80,000 hommes.
Dans les Assemblées délibérantes, l'Ordre du jour est
l'indication des objets de la délibération de chaaue jour,
dans l'ordre où l'on doit s'en occuper. Passer a l*ordr&
du jour, c'est cesser de s'occuper d'une question pour
passer à celle qui vient après dans le programme de la
séance. G. D — i.
« ORDRE BN COLONNE. V. COLONNE,
ORDRES D'ARCHITECTURE , terme par lequel on dé-
signe certaines dispositions données anx parties essen-
tielles d'un édifice, de manière à composer un ensemble
harmonieux et régulier. Ainsi , l'ordre d'un monument ,
en fixant les formes et les proportions qu'il doit recevoir,
détermine non-seulement la hauteur et l'ornementation
des colonnes, mais encore celles de leur piédestal, et de
l'entablement qui les surmonte. On reconnaît cinq ordres
classiques en Architecture, dont trois d'origine grecque,
te Dorique, V Ionique, le Corinthien, et deux autres nés
en Italie, le Toscan et le Composite (V. ces mots). On
a encore distingué l'ordre Atttque, employé aa couron-
nement des édifices ; l'ordre Caryatide, dans lequel des
caryatides servent de colonnes; l'ordre composé, qui
désigne toute création architecturale faite en dehors des
règles ordinaires. C'est par la forme du chapiteau des
colonnes que l'on fait le plus aisément et à première vue
la différence des ordres. Le chapiteau dorique est le plus
simple : il consiste en un abaque épais et saillant, trois,
quatre ou cinq filets, une échine qu'on tailla d'abord en
biseau, puis en quart de rond et presque en tore, et un
congé ou gorgerin ; la hauteur du chapiteau est ordinai-
rement la moitié du diamètre pris en bas du fût de la
colonne. Le chapiteau ionique est orné de volutes dispo-
sées de façon qu'aux faces antérieure et postérieure on
voit leun circonvolutions, tandis que les deux côtés pré-
sentent seulement un rouleau sur lecjuel sont souvent
sculptés quelques feuillages. Le chapiteau corinthien,
qui a en hauteur le diamètre entier du pied de la co-
lonne, a la forme d'une cloche renversée ; deux volutes
soutiennent chaque angle de l'abacpie ; deux autres plus
petites s'accolent dans chaque miheu ; l'intervalle entre
l'abaque et l'astragale est garni de deux rangs de fenilles
d'acanthe. Le chapiteau toscan diffère peu du dorique t
sa hauteur est divisée en trois parties, l'abaque, l'échin^,
et le gorgerin surmonté d'un astragale. Le chapiteau com-
f>osite se distingue du corinthien par l'addition de la v(»»
ute ionique. — Plusieurs ordres sont souvent assembles,
c-à-d. placés l'un sur l'autre, pour orner, par exemple,
un portail ou une façade. En ce cas, deux règles sont
prescrites ; la première veut que Tordre le plus fort sup»
porte celui dont les formes sont plus délicates; ainsi,
l'ionique s'élève sur le dorique, le corinthien sur l'io-
nique, et Vitruve exige que les axes des colonnes des
quart que
constinc^de localité et de destination, les lois de h
perspectiVti-le goût de l'architecte, peuvent modifier ce»
ORF
1349
ORG
règles, qui n*ont rien d*absola. F. Golonhb, Base, Enta-
wmnuT, B.
ORDRES DB CREVALBIHB. V, D£C01IATI0flS.
ORDRES SACRés. V, Dotre Dictionnaire de Biographie 9t
iB'utoirë.
OREILLER, coussin de forme et de matière variables,
SOT lequel on pose la tète pour dormir. Dans les pays
très-chauds, on Mi des oreillers de bois ou de pierre,
baats de iO à 15 centimèt., et creusés de façon & recevoir
Il tôte. On en voit en ivoire dans le Musée égyptien du
LooTre.
OREMUS, mot latin qui signifie prions , et par lequel
le prêtre commence une oraison. Par extension , on lui
donne le sens d'oraison, de prière : Dire des Oremus.
ORESTTE, titre collectif donné, dès l'Antiauité, à trois
tragédies d'Eschyle, Agamemnon, les ChoépnoreSt et l$s
Eménides, où sont exposées les destinées d'Oreste.
V, Psdn, Etudes sur les tragiques grecs. 3 vol. in-8®.
ORFEVRERIE , art de I*orfévre ou fabricant d'objets en
or et en argent, et, par extension, produit de cet art.
L'orférraie comprend plusieurs spécialités : la bijoute-
rit, la joaUlerie ( V. ces mots ) , et Yorfévrerie propre-
ment dite ou grosserie. Celle-ci consiste dans la fabri-
catioQ de la vaisselle, des couverts, des coupes, des
ornements d'église, et, en général , de tous les ouvrages
d'un certain volume qui servent à la décoration ou à
rameoblement des habitations particulières et des édifices
pablics. — L'origine de l'orfèvrerie remonte à des temps
trèi-recalés. Les Hébreux, lors de la sortie d*Égypte,
emprantèrent aux Égyptiens une grande quantité de vases
d'or et d'argent, et les bijoux Qu'ils offrirent à Moïse dans
le désert furent convertis en objets nécessaires au service
dîTio. Dans VOdyssée d'Homère, Hélène reçoit en pré-
sent une quenouille d'or et une corbeille d'argent aux
bords artistement travaillés. La description du bouclier
d'Achille dans le môme poète montre qu'on savait déjà
mélanger sur les métaux la couleur des différents objets.
L'épée d'Agamemnon avait une poignée d'or, le sceptre
d*AchilIe des cloos d'or. Les femmes d'Athènes portaient
dans leurs cheveux des cigales d'or, pour indiquer
qu'elles étaient indigènes en Grèce. L'arçenterie de Délos
fut célèbre à Rome. Sous l'Empire romain, les vases d'or
et d'argent ciselé, les patères, les coupes, devinrent assez
communs. Il reste encore, entre autres choses, pour Juger
le mérite des oeuvres antiques, les vases du cardinal Âl-
l^i représentant l'expiation d'Oreste et les travaux
d'IIercule, le plateau connu sous le nom de bouclier de
Scipion {V. BooglierV la patère d'or trouvée à Rennes
et représentant un défi entre Hercule et Bacchus, etc.
Lesœayres de l'orfèvrerie ont pris, dans tous les temps,
les caractères des arts contemporains. Ainsi , dans les
pièces grecques et romaines qui nous sont parvenues, se
retroQTent fa simplicité de composition, les lignes nettes
et pares de Tart antique. L'orfèvrerie byzantine, comme
l'trchitectnre, a des formes moins sévères, mais plus de
spontanéité, de liberté et d'abandon. Au vii« siècle, en
France, S^ Éloi se fit un nom par son habileté dans l'or-
rârrerie. Pendant le moyen âge, on a surtout fabriqué des
cbâsses, des reliquaires, des tabernacles, des ostensoirs,
descradflx, des retables, des chandeliers, etc. ; les artistes
y ont reproduit les formes architecturales x ainsi. Jus-
qn'aa milieu du xii* siècle, les arcatures et les baies dé-
coratives sont en plein cintre, les figures allongée, les
<intperies roides et verticales, les costumes couverts de
l»]oux, tandis que plus tard l'ogive domine, les person-
nages se raccourcissent , les plis deviennent plus amples,
le laire plus large et plus vrai. C'est au xiv* siècle qu'on
a repris la fabrication de l'orfèvrerie de table. Parmi les
œuvres d'orfèvrerie du moyen âge qui sont arrivées Jus-
<TQ'à nous, on peut citer : les couronnes de Guarrazar
(V. c$ mot)^ la couronne de Charlemagne; le magnifique
antel d'or éd la basilique S'-Ambroise à Milan ; la cou-
rertoTB du livre d'Heures de Charles le Chauve; le re-
table d'or de la cathédrale de Bàle, qui est actuellement
au musée de Clany, à Paris; le calice de l'abbaye de
Wdngarten en Souabe; la ch&sse d'Aix- la- Chapelle «
donnée par Frédéric Barberousse; l'autel d'or de la cha-
pelle rmle à Munich ; la ch&sse des Rois Mages à Co-
logne; les chasses de S^ Héribert à Deutz, de S^ Taurin à
tvreax., de S^ Romain à Rouen, de S^ Calmine à Mau-
tae, etc.; une Vierge avec l'enfant Jésus, en or, donnée
par Jeanne d'Évreux à Pabbaye deS^-Denis en 1830, et
jni est an musée du Louvre; le b&ton cantoral, daté de
1394, qui a longtemps passé pour le sceptre de Charle-
magne. Un des plus fameux orfèvres fut Raoul, que
Philippe ni anoblit — A l'époque de la Renaissance,
l'orfèvrerie, de religiense qu'elle avait été, se fit profane t
tout en cherchant à reproduire les formes du style an-
tique, elle y i^outa les rameaux de feuillage, de fruits et
de fleurs, et modela le corps humain avec une ^^e ha-
bileté. Dans le même temps, l'art de l'orfèvre se partage
en plusieurs branches : les procédés de fabrication de-
venant plus savants, il est nécessaire qu'on s'y consacre
exclusivement, et désormais la composition des modèles
est le plus souvent l'œuvre d'artistes particuliers. Beau-
coup dwistes italiens s'illustrèrent par des travaux d'or-
fèvrerie, entre autres Donatello, Brunelleschi, Ghiberti,
Ant. del Pollaiuolo, Maso Finiguerra, Amerighi, Verro-
chio, Piero Giovanni, Michelagdolo da Pinzidimonte,
Romolo del Tavolacdno, Stefano Saltaregli, Zanobi del
Lavacchio, Bastiano Cennini, Piero di Nino, Antonio di
Salvi, Salvadore Pilli, Lorenzo délia Golp^ja, etc. Biais
ce fut surtout Benvenuto CelUni qui eut la plus grande
influence sur l'orfèvrerie du xvi* siècle. On doit citer,
après lui, Caradosso de Milan et Lautizîo de Pérouse.
Etienne de Laulne, Jean Cousin (différent du peintre),
et François Briot, furent aussi des orfèvres distingua
de cette époque en France. Au xvu* siècle, la variété des
ornements et la délicatesse de la main-d'œuvre font place à
un art qui vise à la majesté : sous l'influence du cavalier
Bernin et de Lebrun, l'orfèvrerie devient fastueuse; il y a
cependant d'heureuses exceptions, entre autres De Lau-
nay et les Ballin. Pendant le xviii* siècle, reparaissent
les libertés et les caprices : les œuvres de l'orfèvrerie,
quelquefois ravissantes de fantaisie, n'ont plus rien do
i^^ulier; ce sont toutes fom^ antigéométriques, toutes
surfaces ondulées, contournées, indescriptibles. Les Ger-
main produisent des ouvrages délicats, très-étudiés, et
d'un grand mérite d'ajustement; ils r^ent le goût de
l'époque, tout en y cédant. Après la période de la Révo-
lution, l'orfèvrerie, un instant arrêtée, reprend sa marche t
Auguste, Odiot pèie, Thomire, Biennais, la représentent
sous le règne de Napoléon I*'; pendant la Restauration,
Odiot fils (dont on voit de beiaux spécimens au musée
du Luxembourg) et Cahier restent fidèles aux formes sé-
rieuses, tandis que Fauconnier, Fossin, les ft-ëres Marrel,
Lenglet, et plus tard Froment-Meurice se composent une
sorte d'originalité par des emprunts faits au moyen âge,
à la Renaissance et au xviii* siècle. C'est cet éclectisme
qui caractérise l'orfèvrerie actuelle, repr^ntée par Vet-
che, Rudolphi, Wiese, Bapst, Bftaurice Mayer, les frères
Fannière, Rouvenat, Hayet, Mention, Wagner, Morel,
Bachelet, Duponchel, Christofle, etc. On pourrait encore
citer aujourd'hui Garrard et Hancock en Angleterre; de
Meyer et Salm en Hollande, Friedebere en Prusse, etc.
V. Séré et Paul Lacroix, Histoire de VOrfévrerie-JoaU'
lerie, Paris, 1850, in-8°. B.
ORFÈVRES (du latin auri faber, ouvrier qui travaille
l'or), ancienne corporation, déjà importante au milieu du
XIII" siècle, et formant à Paris le 6* corps des marchands.
Le fameux Etienne Marcel , prévôt des marchands sous le
régne de Jean le Bon, en était sorti. L'apprentissage était
de 8 années, et on ne pouvait le commencer avant l'âge de
9 ans ni après 16. Le compagnonnage durait 3 ans. Pour
obtenir la maîtrise, il fallait avoir 20 ans accomplis, savoir
lire et écrire, subir un examen, et présenter un chef-
d'œuvre; chaque nouveau maître était tenu de faire rece-
voir à la Coar des monnaies un poinçon à son nom et
devise, pour marquer ses ouvrages. Le brevet coûtait
186 livres, et la maîtrise 1 ,350 livres. La corporation nom-
mait tous les deux ans trois maitres et gardes. Elle était
honorée d'armoiries, consistant en une croix d'or dentelée
en champ de gueules, accompagnée de deux couronnes
et de coupes d'or à la bannière de France en chef. Elle
fonda, en 1390, une chapelle et un hôpital pour les ou-
vriers malades. C'était l'usage qu^ le 1^ mai, elle ofiTrlt
un tableau & l'église Notre-Dame. K. Mai. B.
ORFROI, en italien orifrigio, en latin du moyen &ge
aurifrisium, aurifrigia, aurifrisia, aurifrisa, aurifrasus,
aurifriams^ broderie d'or, d'argent ou de soie, dont on
orne les vêtements, et particulièrement les ornements
d'église. On croit que le mot vient d'aurunn phrygium,
parce que les Phrygiens auraient été les inventeurs de
cette broderie, ou a^aurum fractum, or brisé.
ORGANISER, terme de l'ancienne Musique. C'était
marier, comme dans l'orgue, des voix différentes. On fai-
sait une organisation simple, quand on se bornait à in-
troduire la tierce sur la note sensible, à la terminaison
du chant; une organiscUion double, quand on accompa*
gnait le chant en quarte ou en quinte. Le triplum et le
quadruplum furent d'autres façons d'organiser. Autre-
fois, dans quelques églises, on appelait organistes dr
ORG
1350
ORG
VAU9Îuta qaatre chantres qui orgaoisaSent, c-à-d. chan-
taient en parties V Alléluia, V, Organum.
ORGANISTE , celui qui toache Torgue. Il doit réunir
une science musicale étendue, l'habitude de la composi-
tion, une imagination riche, et du goût. Le premier orga-
niste célèbre dont le nom se soit conservé est Francesco
Landino, surnommé Ci>co (rAveugle), qui vivait à Venise
au XIV* siècle ; la Bibliothèque impénale de Paris possède
quelques-unes de ses pièces, remarquables pour répoque
où elles furent écrites. On cite ensuite Squarcialupi, or-
ganiste à Florence en 1430 ; Francisco Corteccia, Ales-
sandro Striggio, Paul Hofhaimer ou HoAThaimer, Michel-
Ange Tonti, Antonio degli Organi ; le Français Milleville,
qui suivit à Ferrare la fille de Louis XII; Claude Mé-
rulo; les deux Gabrielli; Arauxo, organiste de Séville;
Bernard Schmitt, organiste à Venise; John Bull, orga-
niste de la reine Elisabeth d'Angleterre. Au commence-
ment du XVII* siècle, Frescobaldi, organiste de S^Pierre
de Rome, excita un enthousiasme général ; ses compo-
sitions sont des chefs-d*œuvre de science. Répandues et
goûtées en France, elles y suscitèrent des organistes de
talent, les Champion, les Couperin , Roberday, d'Angle-
b6rt,^Lebègue, Ni vers, Titelouze, Gigault, Raison. A la
même époque, Samuel Scheidt illustrait à Hambourg
l'école allemande, qui devait, pendant le xvm" siècle, pro-
duire des organistes de premier ordre, Froberger, de Kerl,
Buxtehude, Reinken, Pachelbel, la famille des Bach, Han-
del, Kittel, etc« A ces maîtres, la France ne put opposer
que des hommes secondaires, Daquin, Calvière, Balbàtre,
Blarchand, tous fort au-dessous de la réputation dont ils
ont Joui. Depuis Rameau Jusqu'à Beethoven, presque tous
les compositeurs ont étudué l|orgue : Mozart, Havdn, Ni-
cole, Méhul, Grétry, Bofeldieu, ont été organistes, et
l'on pourrait encore mentionner de nos Jours Adolphe
Adam, Hipp. Monpou, Niedermayer, Fétis, etc. L'orgue a
été spécialement cultivé au xix* siècle, en Allemaigne,
Kar l'abbé Vogler, Rberlin, Albrechtsberger , Schneider,
ink, Knecht, Neukomm, Hess; en France, par Beau-
varlet-Charpentier, Séjan, Danjou, Miné, Simon , Fessy,
Boeiy, Benoist , I^fébure-Wély ; en Belgique, par Lem-
mens. B.
ORGANISTRUM, instrument de musique du moyen
âge, dont on voit la figure parmi les sculptures de l'église
S*-Georges de Bocherville (Seine -Inférieure). C'était
une énorme guitare, percée de deux ouïes, et montée de
trois cordes mises en vibration par une roue à manivelle :
hnit filets mobiles, se relevant et s'abaissant à volonté
le long du manche, formaient comme autant de touches
destinées à varier les sons. Il est vraisemblable qu'on
pouvait produire des sons simultanés. L'oreanistrum se
plaçait sur les genoux de deux musiciens, dont l'un fai-
sait mouvoir les touches ou filets, et l'autre la manivelle.
— Organistrum s'est dit aussi du lieu de l'église où sont
placées les orgues. B.
ORGANO, mot dont les Italiens se servent pour dési-
Sier la basse continue chiffrée, parce qu'ils la Jouent or-
nairement sur l'orgue.
ORGANO-LYRICON, sorte de piano qui faisait en-
tendre distinctement la flûte, le fiflre, le hautbois, le
basson, le cor, la trompette et la contre-basse. Il fut in-
venté à Paris, en 1810, par Saint-Pem.
meni
logiques
mmeuma ou Traité de VlfUerprétatUm, /et Premiers Ana-
lytiques, les Derniers Analytiques, les Topiques, et la
Réfutation des Sophismes. On ne sait au Juste ni quand,
ni par qui, ce mot d'On^anon a été employé précisément
dans ce sens; Aristote s'en sert bien dans quelques pas-
sages, mais sans y attacher d'autre sens que le sens
flffuré qu'il comporte habituellement : « La science est
rlnstrument de l'intelligence; » — « Les moyens {organa)
de nous procurer des syllo^smes sont au nombre de
quatre, etc. » Plus tard, on voit ses interprètes discuter la
question de savoir si la logique est une partie réelle de
la philosophie, ou si elle en est seulement l'instrument.
Mus il résulterait des recherches érudites auxquelles
s'est livré M. Barthélémy Saint^Hilaire, dans son livre
De la Logique d'Aristote, que c'est du v* au vi* siècle
qpie s'est introduit l'usage d'appeler la Logique péripaté-
ticienne VOrganicon, et On;anofi la réunion aes écrits
oui la contiennent. Sans entrer dans les détails et dans
ri^ipréciation de la doctrine, nous ferons remarguer
que tel est Tenchalnement des différentes parties dé rOr-
ganon , que la pensée de les réunir a dû se présenter
tout naturellement aux successeurs d'Aristote, rOrganon,
tel que nous le possédons, embrassant la théorie com«
{>lète du raisonnement démonstratif, depuis ses éléments,
es formes générales de la pensée (Catégories)^ et les
mots dans leurs rapports avec la pensée (Traité de l'In-
terprétation)^ Jusqu'à la formation définitive des argo*
ments par l'invention du moyen terme (Topiques)^ et
Jusqu'à la réfutation des arguments sophistiques. Sur
l'authenticité de VOrganon, son histoire, etc., V. le Uvre
cité plus haut de M. Barthélémy Saint-Hilaire. B — e.
ORGANUM, mot dont on s^est servi, à partir des
n* et X* siècles, pour désigner une harmonie d'une na*
ture particulière, qui consistait en des successions de
quartes, de quintes et d'octaves. Elle fut principalement
répandue par Hucbald. H y avait deux sortes &organum .
1® accompagner un chant par une, deux ou trois parties
qui le suivaient par mouvement direct à l'octave, à la
(Quinte ou à la quarte ; 2* accompagner par plusieurs par-
ties suivant toute espèce de mouvement, direct, oblique
ou contraire, et ofljrant d'autres intervalles que ceux de
quinte, de quarte et d'octave. Suivant Jean Cotton, écri-
vain du XI* siècle, l'exécution simultanée d'intervalles
différents aurait été nommée organum, parce qae la voix,
exprimant d'une manière convenable des sons dissem-
blables, ressemble à l'instrument de ce nom* F. C.
ORGANUlf (NoVUm). F. NOVOM ORGANUM.
0RG13E, le plus considérable des instruments de mu-
sique, le plus puissant en sonorité, le plus complet par
l'étendue de son diapason, puisqu'il embrasse nuit oc-
taves et demie. Il est à lui seul un concert d'instruments
variés, et résume dans son unité tout un orchestre ; c'est
l'instrument par excellence, organon. Il se compose :
1* d'un grand nombre de tuyaux de différentes grandeurs,
dont les uns sont faits en étain fin, d'autres avec un mé-
lange d'étain et de plomb, d'autres en bois, et qui for-
ment un certain nombre iejeux (V. te fnot); le plus
grand tuyau peut avoir 32 pieds d'élévation , le plus petit
n'a que quelques centimètres; on dénomme un orgue par
son plus grand tuyau : on dit un trente-deua^pieds^ un
seije-pieds [V, Tuyaox d'obgdb) ; — 2* de ideux, trois ou
quatre claviers à main superposés ; — 3<> d'un clavier d$
pédales, dont les touches sont en bois, et que l'organiste
fait mouvoir avec les pieds l V. Clavibb ) ; — 4** d'une
soufflerie, qui fournit le vent (V, Sodpflbrib); — 5® d'une
chambre d'air appelée sommier, et dans laquelle le vent
est contenu ( V, Sommier) ; — 6* d'un mécanisme nommé
abrégé, qui met en communication le mouvement des
claviers avec les soupapes des sommiers. L'orgue est en-
fermé dans un grand corps de menuiserie appelé buffet
( V, ce mot) , qui est souvent divisé en deux parties,
dont l'une, placée en avant, et de plus petite dimension,
a reçu le nom de positif ( r . ce mot). Pour donner une
idée de la composition d'un grand orgue, voici le tableau
des Jeux que contient celui de la cathédrale de Rouen,
construit récemment par Merklin, Schultze et O* :
Au premier clavier, positifs 54 notes de Vut au fa
1. Flûte de 8 pieds. 9. Fourniture de cinq rangs
2. Flûte de 8 pieds, 42 de tuyaux.
notes. 10. Cymbale.
3. Bourdon de 16 pieds. il. Cornet.
4. Bourdon de 8 pieds. 12. Première trompette»
5. Prestant de 4 pieds. 13. Deuxième trompette
6. Nasard. 14. Cromorne.
7. Doublette. 15. Euphone de 8 pieds.
8. Kéraulophone. 10. Qairon de 4 pieds.
Au deuxième clavier, grand orgue, 54 notes de l'ut
au fa *
1. Montre de 8 pieds. 11. Dessus de flûte, 29
2. Montre de 10 pieds. tuyaux.
3. Flûte de 8 pieds. 12. Grosse fourniture.
4. Dessus de flûte, 37 13. Petite fournitore.
tuyaux. 14. Cymbale.
5. Bourdon de 16 pieds. 15. Première trompette.
6. Bourdon de 8 pieds. 16. Deuxième trompette»
7. Prestant de 42 notes. 17. Premier clairon. .
8. Gambe de 8 pieds. 18. Deuxième clairon.
9. Nasard. 19. Cornet.
10. Doublette.
Au troisième davier, dit clavier de bombarde, 54 notes
de l'ut au fa :
1. Trompette de 8 pieds. 3. Clairon de 4 pieds.
2. Bombarde de 10 pieds, i. Cornet.
ORG
1351
ORG
An qo&trième clavier, récit expressif, 54 notes de VtU
lu fa :
i. Flûte harmonique de 8 6. Trompette harmonique.
pieds. 7. Trompette de 16 pieds.
1 Flûte de 4 pieds. 8. Cor anglais de 16 pieds.
3. Gambe de 8 pieds. 9. Hautbois, avec suite de
4. Bourdon de 8 pieds. basson.
5. Prestant de 4 pieds. 10. Voix humaine.
Clamer de pédales; Jeux de fonds et d'anches ; 27 no-
tes de Vut au ré :
1. Sous-bosse de 32 pieds. 6. Bombarde de 16 pieds.
2. Flûte de 16 pieds. 7. Première trompette.
3. Flûte de 8 pieds. 8. Deuxième trompette.
4. Flûte de 4 pieds. 9. Clairon.
5. Bombarde de 3S pieds.
Pédales â^ accouplement si de combinaison
1'* pédale : Accouplement du 1** clavier.
2* — Appel des Jeux du 2* davier.
3* — Accouplement du 3* clavier.
4* — Accouplement du 4* clavier.
5* Levier pneumatiqtte sur le 3* davier.
6* Appel des Jeux d'anches et de mutation sur le 2* clavier.
7« Id, — sur le 3« clavier.
8* /d. — sur le 4* clavier.
9* Pour les fonctions de la boite expressive.
10* Disposant le clavier de pédales en tirasse sur la basse
du 2* clavier.
Cet orgue se compose de 58 Jeux formant ensemble
3,823 tuvaux. H v en a de plus considérables i celui de
l'église S^-Eustache, à Paris, compte 90 jeux; celui de
S^Michel^ à Hambourg, 88; celui de S^*-Marie, à Franc-
fort-eui^le-Mein, 84; celui de S'-Denis,près de Paris, 71.
On dte encore les orgues de S^*- Elisabeth à Breslau, de
Sculptée à Paris, de S^Paul à Londres, de S^-Étienne à
Caen, des cathédrales de Beauvais et de Fribourg, du
temple protestant de Strasbourg, de Harlem en Hollande,
de Birmingham, etc. Depuis le xvi« siècle, les principaux
facteurs d'orgues ont été : en Italie, Antegnau, Azzolino
délia Ciaja, Gristoforo Valvasora, Nanchini, Callido, Jo-
seph Senssi, les Trond, Biroldi, J.-B. Ramai; en Alle-
magne, Erard Schmidt, Fréd. Krebs, Nicolas MuUner,
Rodolphe Agricola, Scheibe, Siibermann, J.-J. et Michel
Wasner, Seuifert, Gabier, Schroeter, Bfarx, Tauscher,
Hildebrand, Aloys Mooser, et Sommer; en Fhtnce, Mou-
cherel. Soyeuse, Bliculs, Isnard, Cochu, Thieny, Lénine,
Dalleiy, et Glicauot; en Angleterre, Dallans, Bndge,
Schnetzier, B^field, Green, Harris, Flight, Russel, Lin-
cohi, Graj, Rishop, Bevington, Robson, Schmidt. De nos
jours, la facture d'orgues est dignement représentée par
Cavaillé-CoU, Daublaine-CalUnet,Dallery fils, Ducroquet,
Stein, Merklin, Schulue et Barker; par Hill à Londjres et
Kalker à Louidx>nrg.
Les Méthodes d'orgue les plus estimées sont celles
d'Amerbach, de TQrk (Ldpzig, 1787), de Knecht, de
Vogler, de Kittel, de Martini, de Wermer, de MQlIer, de
Schneider, et de Rink, dont Choron a publié une édition
française. On doit au bénédictin Dom Bedos de Celles
l*Art du facteur d'orgues (1766-78), et à M. Hamel
un Massuel du facteur S orgues ( Paris, 1849).
Suivant une tradition généralement adoptée, l'inven-
tion de l'orgue ne daterait que du viii« siècle, et le pre-
mier instrument de ce genre aurait été envoyé en 757 à
Pépin le Bref par l'empereur grec Constantin Copronyme,
et placé dans l'église de S*-Corneille à Compiègne. Mais
l'orgue existait bien longtemps avant de porter le nom
^crganum, mot oui fut d'abord employé pour signifier
un instrument quelconque. On a pensé que la cornemuse,
appelée tibia uiricularis^ avait pu donner l'idée de
l'orgue. D'autres trouvent plutôt le germe de cette idée
dans la flûte de Pan ou synnx : il ne s'agissait, en effet,
que de recueillir l'air dans un récipient, et de l'y conser-
ver avant son introduction dans les tubiss; du jour où il
fut reconnu qu'on pouvait remplacer le souffle humain
par l'air arUfidel d'un soufflet, l'orgue fût constitué, et
l'on n'eut plus qu'à chercher les moyens d'obtenir des
tuyaux produisant des sons différents, non plus seule-
ment an point de vue de la tonalité, mais aussi quant au
timbre. Dans la 12* Pytkique de Findare (vi* siècle av.
J.-C) , il est question d'un instrument grossier dont les
perfeddonnements successifs ont formé l'orgue : « Pallas,
dit le poete^ inventa une flûte qui produisait une multi-
tude de sons... Elle nomma cette flûte V instrument à plU'
sieurs têtes;,., ses sons s'échappent à travers un mince
airain et des roseaux. » 11 s'agit évidemment ici de plu-
sieurs tuyaux, dont quelques-uns étaient en métal. Nonnus
{Dionys., xxni) attribue également à Minerve l'invention
d'un instrument composé de plusieurs flûtes assemblées
avec ordre. Le scolîaste de Pindare dit qu'un acddent
survenu pendant que Midas d'Agrigente jouait de cet
instrument l'obligea à le renverser, et à jouer avec les
seuls tuyaux, à la manière de la syrinx; ce qui nous
montre que la flûte de Pan avait été placée sur une es-
pèce de coffre, où s'adaptait quelque soufflet.
Au temps des Ptolémées, l'orgue. Jusque-là appelé flûte,
prit le nom d*hydraule (du grec udAr, eau, et- aulos,
flûte, tuyau), parce qu'on proiduisit les sons au moyen
de l'eau, procédé attribué à Ctésibius d'Alexandrie. Vi-
truve (X, 13) en a essayé une description très-détaillée,
qu'il ne nous est pas aisé de comprendre : on ne sait si
l'eau produisait directement le son dans les tubes, ou si
elle servait uniquement d'agent pour un mouvement mé-
canique. Quoi qu'il en soit, Pétrone, Tertullien, Claudien,
parlent de l'ox^e hydraulique de manière à ne laisser
aucun doute sur la multitude des tuyaux et la force des
sons. On se servait encore de cet instrument en Angle-
terre au XII* siècle. Quel avait été l'emploi de l'hydraule
chez les Andens? C'est ce qu'il serait diffidle de déter-
miner. On sait seulement qu'elle était placée dans les
grandes enceintes , au Cirque, dans les théâtres; an rap-
port de Pétrone, les gladiateurs et les athlètes combat-
taient au son de l'hydraule; Sidoine Apollinaire loue
Théodoric , rei des Wisigoths , de n'en avoir pas admis
dans son palais.
L'orgue pneumatique, destiné à détrôner l'orgue hy-
draulique, parait avoir eu déjà, au iv« siède de notre ère,
une certaine importance. On lit dans une épigramme de
l'empereur Julien t « Je vois id une tout autre espèce
de tuyaux; ils ont pria radne dans un sol de bronze;
leurs sons bruyants ne sont pas produits par notre souf-
fle, mais le vent, s'élançant d'un antre formé de peaux
de taureau, pénètre dans tous les conduits , tandis qu'un
artiste promène ses doigts sur les touches qui y corres-
pondent, et produit aussitôt des sons mélodieux. » Une
lettre attribuée à S* Jérôme dit qu'il y avait à Jérusalem
un orgue à 12 soufflets oui s'entendait à mille pas de
distance. On reconnaît aeux Instruments de ce genre
parmi les sculptures de l'obélisque érigé àConstantinople
sous Théodose le Grand. Théodoret, Cassiodore, S^ Au-
gustin, Isidore, ont connu l'orgue pneumatique dans des
pays différents. L'usage profane de l'orgue empêcha long-
temps les chrétiens de l'admettre dans leurs églises.
L'évèque de Poitiers, Fortunat, dans une lettre adressée
vers la fin du vi* siède au clergé de Paris, met cet instru-
ment au nombre de ceux dont on se servait pour accom-
pagner les voix; mais son emploi dans les cérémonies
du culte ne fut solennellement consacré qu'en 660, par
un décret du pape Vitalien. L'orgue envoyé à Pépin le
Bref était très-petit et portatif, comme cdui qui fut con-
struit par un Arabe nommé Giafar et qui fût envoyé à
Charlemagne par le calife de Bagdad. Un prêtre vénitien,
nommé George, construisit l'orgue qu'on plaça à Aix-la-
Chapelle par les ordres de Louis le Débonnaire. Au
X* siècle, la cathédrale de Winchester possédait un orgue
de 400 tuyaux, et les 26 soufflets qui les remplissaient
d'air exigeaient les efforts de 70 hommes, tant la struc-
ture et la disposition de l'Instrument étaient encore im-
parfaites. Le savant Gerbert, qui devint pape sous le nom
de Sylvestre II , imagina des orgues à vapeur s c'est un
fait qui semble difiicile à croire pour un temps si reculé,
et cependant les témoignages de Guillaume de Bialmes-
bury et de Vincent de Beauvais sont positifs. Le premier,
qui avait vu un de ces orgues dans l'éslise de Reims, dit
que « le souffle produit par la force de l'eau bouillante
remplissait les cavités de l'instrument. » Le second donne,
à propos de l'orgue de l'abbaye de S^-Bertin en Artois ,
une description analogue. Le fond de ces témoignages est
parfaitement Intelligible, si la clarté manque dans le dé-
tail : on peut supposer qu'un courant de vapeur était
substitué au courant d'air ordinaire, ou bien que Gerbert
faisait de la vapeur un moteur de soufflerie. Les orgues
du moyen âge furent informes et grossières : les touches
avaient 5 ou 6 pouces de largeur, et c'était avec les mains
garnies de moufles ou gros gants qu'on les frappait pour
les faire parler, tant les soupapes en étaient dures. Ce ne
fut guère qu'à partir du xtii* siècle qu'elles rendirent les
denu-tons. Le premier jeu d'orgues de Paris fut dresse
dans l'église S*-Sôverin, sous le règne de Jean le Bon.
ORG
1352
ORl
L'orgue ne fut composé, pendant bien longtemps, que du
•eul jeu d'anches appelé régale, et l'instrument s'ap-
pelait, pour ce motif, regabellum ou rigabdlum. Quand
on se mit à organiser {V, ce mot)^ l'addition de plu-
sieurs Jeux devint nécessaire, et on vit paraître successi-
▼ement des Jeux accordés à l'octave, à la quinte, à la
tierce, etc., de sorte que chaque touche fit entendre un
accord complet : telle fut l'origine des jeux de mulatton
IV, ce mot), A la fin du xiv* siècle etpendant le xv*, l'orgue
fit encore de nouveaux progrès. Il existe dans l'église
Notre-Dame d'Anvers un orgue construit par Philippe de
Lannoy en 1394 pour un couvent d'AugusÛns de la môme
ville : bien qu'on l'ait plusieurs fois réparé et complété,
il fait encore aujourd'hui la base du clavier de récit.
Dans cet or^e, on ne trouve pas d'abrésés ( V, ce mot)^
2ue, du reste, le petit nombre de Jeux et le peu d'étendue
e l'instrument ne rendaient pas nécessaires; les Jeux
étaient : Vopenfluit (flûte ouverte de 4 pieds), le dtUcian
(bourdon de 4 sonnant le huit pieds), Voctaœ (doublette
de 2 pieds ) , le rerefluit (flûte de 6 pieds, commençant à
<ol), le qtUntadun (flûte sonnant la quinte), lèses-
qvialter (Jeu composé de l'octave aigué du cornet et d'une
petite tierce), [a mixture (plein-Jeu de 3 tuyaux) , et la
régale (jeu d'anches avec de courts tuyaux de quelques
pouces). En 1470, un Allemand nommé Bernhani, orga-
niste à Venise, inventa, dit-on, le clavier des pédales,
mais en réalité ne fit que retendre. Ce fut aussi dans le
XV* siècle qu'on ajouta à l'orgue les Jeux de cromome,
de voix humaine, de hautbois, de basson, de trompette,
et qu'on établit la mesure des 32, des 16, des 8, des 4
pieds, pour les tuyaux. Les registres (F. ce mot) furent
rendus indépendants les uns des autres, et distingués
par des noms particuliers. L'orgue le plus ancien ^ui
existe aujourd'hui en France est celui de Solliès-Vule
(Var) ; il remonte au xv* siècle. Celui de Gonesse, près
de Paris, porte la date de 1508 ; mais il ne reste plus que
quelques tuyaux de la construction primitive. En 1570,
un Allemand , Jean Lobsînger, imagina les soufflets à
éclisses. C'est au xvn* siècle qu'on a commencé à
donner aux orgues une grande puissance de son , et à
y introduire, non-seulement ces personnages de la dé-
coration extérieure du buffet qui Jouaient de divers in-
struments, mais des jeux imitant la voix des animaux ,
le chant des oiseaux, le bruit de la grêle, le tonnerre, etc.
En 1684, un facteur allemand, Christian Ferner, in-
tenta la balance pnêumatiqus pour régler la force du
vent nécessaire à chaque tujrau et donner aux difTérents
registres leur véritable harmonie. L'architecte Claude
Perrault songea le premier à rendre l'orgue expressif,
et exprima son idée dans une note de sa traduction de
Vitruve. Eà 1736, un Tacteur d'orgues français, Jean Mo-
reau, construisit à Gouda un orgue où l'on pouvait enfler
et diminuer le son au moven de la pression des doigts.
Gerber dit que Schrœter k Nordhausen en 1740, et les
frères Buron à Angers, en 1769, trouvèrent des procédés
pour rendre l'orgue expressif, mais ils ne les ont pas fait
connaître. On doit de nouveaux essais à Stein, en 1772.
A son tour Sébastien Érard construisit, pour la reine
Marie-Antoinette, un piano organisé ^ dans lequel les
tons étaient expressifs par la pression du doigt sur la
touche. En 1810, Grenié fit un petit orfpie de chan^iure,
où l'expression résidait dans la disposition et l'action
des soufflets subissant des pressions variables , sys-
tème perfectionné depuis par Muller, son élève. Érard
adopta un autre système d'expression , dans lequel une
pédale agissait sur deux daviers, et les doigts sur un
troisième ; l'orgue auquel il l'appliqua, et qui fut construit
Sar John Abbey pour la chapelle royale de France, fut
risé à la Révolution de 1830. Bien que le goût des or-
gues expressives ( V, Boites D'BXPaBssioN) se soit répandu
depuis, cette innovation est médiocrement heureuse:
elle fait perdre à l'orgue le calme, la majesté qui convien-
nent au style religieux, pour lui communiquer quelque
Aose de passionné et de mondain; et d'ailleurs VexpreS'
tion ne produit pas l'effet qu'on en attend dans les vastes
édifices. V, Schott, De organis hydraulicis , dans sa M^
chanica hydraulica, 1657, in-4®; Meister, De veterum
hydraulo, dans le t. Il des Mém, de la Société scientifique
de GoBttingue; Buttmann, Essai sur Vorgue hydraulique,
en allem., dans les Mém, de l*Acad. de Berlin; Ante-
gnati, Arte organica, Brescia, 1608; Musica practica y
theoretica di Organo, par Arauxo, Alcala, 1616, in-fol. ;
Michel Pnotorius, Organographia, 1619, in-4o; Kirdier,
Musurgia, 1650; Mersenne, Traité des instruments^
1670; Mûller, Mémoires historiques et pMlosophujues
sur les orgues, letur origvne et leur usage dans V Église,
Dresde, 1748; Mittag, Traité historique de VortgtneH
du perfectionnement des orgues, Lunebourg, 1756, in-4'^;
Sponsel, Histoire de TorigiM, Nuremberg, 1771, in-S*';
Martini, École (Forgue, Paris, 1805, in-fol.; De Cous-
seroaker. Essai sur les instruments de musique au
moyen âge; Antony, Exposition historique de V origine
et des perfectionnements de Vorgue, en allem.. Munster,
1832, in-8». F. C. et B.
ORGUE, sorte de herse avec laquelle on ferme une porte
de forteresse. Elle diffère de la herse ordinaire, en ce
Qu'elle est composée de plusieurs grosses pièces de bois
étachées l'une de l'autre, et qui tombent d'en haut sépa-
rément.
ORGOB ( Buffet d'). V. BornsT.
ORGUE ( Point d'). F. Point d'orgue.
ORGUE A CYUNDRB, instrument de musi(^e composé de
tuyaux d'étain ou de bois, d'une soufflerie, et d'un cy-
lindre. On adapte à ce cylindre des pointes disposées
dans un certain ordre : en le faisant tourner an moyen
d'une manivelle, les pointes lèvent des bascules qui ser-
vent de touches et font parler les tuyaux. Le cylindre
fait également mouvoir le soufflet. Lorsque les orgues à
cylindre sont de petite dimension, on les appelle seri-
nettes et merlines. Vorgue de Barbarie (ainsi nommé par
dérision) est une serinette perfectionnée qui se compose de
plusieurs Jeux. Il renferme un bourdon, un prestant, une
quinte, une doublette, et quelquefois une tierce. Dans les
orgues d'Allemagne, on trouve souvent un ou deux Jeux
d'anches. On fabrique une grande quantité de ces instru-
ments portatifs dans les Vosges. Le facteur Davrainville
a construit des orgues à cylindre qui, au moyen d'un mé-
canisme très-ingénieux, exécutent seuls des morceaux de
musique longs et compliqués. Deux abbés, MM. Cabias et
Larroque, ont imaginé d'adapter des cylindres aux orgues
d'église. F. C.
ORGUE DE BOIS , uom qu'on donnait autrefois à un Jeu
de flûte bouché, ou bourdon, tel qu'on ie fait dans nos
grandes orgues.
ORGUE DE MORT, ancienne arme employée à la défense
des brèches d'une place assiégée, et qui consistait en un
assemblage de canons de mousquet Joints ensemble et
dont les lumières se communiquaient. La machine infer^
nale de Fieschi était une orgue.
ORGUE DES SAVEURS. V, GlAVECIN DBS SAVEURS.
ORGUB EXPRESSIF, orguo saus tuyaux, à clavier et &
anches libres, dont les sons peuvent varier dlnteosité
selon la pression de l'air. 11 tire son origine da Jeu de
Régale ( K. ce mot). Ses dimensions se réduisent, en lar-
geur, à l'étendue du cUvier, et, en liauteur, à ceUes
d'une table ordinaire. 11 se compose de lames ou lan-
guettes métalliques mises en vibration par une soufflerie
qu'on fait agir avec les pieds. Le petit instrument appelé
giùmbarde donne une idée exacte de l'action du vent sur
l'anche libre. Ce fut vers 1810 oue Grenié imagina des
Jeux d'orgues à anches libres. On en fabriqua aussi en
Allemagne sous les noms de Physhisrmonica , Molo»
dium , etc. Cavaillé-Coll y ajouta quelques perfectionne-
ments et en fit le PoikUorgue. D'une autre forme donnée
à cet instrument résultèrent V Harmonica et V Accordéon,
qui , perfectionnés, devinrent le Concertina, YOrganino,
et enfin l'Orgue expressif. On applique à l'orgue expres-
sif le système des registres employé dans les orgues à
tuyaux. Ces registres font parler des Jeux de timbres dif-
férents. Les timbres principaux de l'orgue expressif sont:
le bourdon , la clarinette, le basson , le hautbois, le clai-
ron, le fifre, le violoncelle, la flûte, la musette. Ces Jeux
peuvent être réunis au moyen d'un mécanisme, et for-
ment alors une sorte d'orchestre : le vent, faisant vibrer
la lame métallique trop lentement pour pouvoir exécuter
des morceaux de musique dans un mouvement rapide,
M. Martin de Provins introduisit dans cet orgue des
marteaux qui , frappant sur les languettes, les font parler
instantanément; ce système porte Te nom de percussion.
Harmonium, Uélodium, sont différents noms sous les-
quels on désigne l'orgue expressif. Les facteurs qui ont
le plus contribué aux développements de l'orgue à anches
libres ou expressif sont Grenié , Fourneaux, Màrthi de
Provins, Alexandre père et fils, Merklin, et Deâbaîn. F. C.
ORGUEIL, l'un des sept péchés capitaux. C'est un
amour déréglé de soi-même, une aveugle persnasioii de
sa propre excellence, oui engendre le dàir des louanges,
Tambition, la manie de se louer soSnaième, Tobstination
en son propre sens.
ORIEL, vieux mot désignant un petit oratoire pratiqué
dans l'épaisseur d'un mur.
ORIENTAUSTE, celui qui se livre à l'étode de« !3i>
ORL
1353
ORP
fiies orientales, telles que -le sanscrit, le chinois, le per-
san , Tarabe, Tarménien , le turc, etc.
ORIENTATION , disposition du plan des églises de mar
nière que le sanctuaire soit tourné du c6té de TOrient.
Les temples païens étaient généralement tournés vers
rodent : Û faut excepter ceux des Dorions. Le chris-
tianisme naissant, voulant rompre avec tons les usages
da Anciens, disposa les églises à contre-sens, c-à-d. que
Ton plaça le sanctuaire à l'Occident; mais alors le prêtre
officiant , au lieu de tourner comme aujourd'hui le dos
sox fidèles, se plaçait de l'autre cAté de Tautcl , et faisait
ftce aux assistants ainsi qu'à TOrient Plus tard , cepen-
dant, on reprit Torientadon des églises, à laquelle le
moyen âge fut fidèle, et, quoique ce ne soit pas une règle
iriTariable, c'est un usage qu'il est bon de respecter. Dans
les temps modernes, on en a peu tenu compte. Le sys-
tème des absides circulaires est préférable à celui des
mors plats, afin que les premiers rayons du soleil vien-
nent toujours éclairer l'autel. Les musulmans ont aussi
une orientation (V. MosQuis). E. L.
ORIFLAMME. V, ce mot dans notre Dki\onnair9 de
Biographie et d'Histoire.
ORIGINAL , tout ouvrage oui n*a point eu de modèle,
et qui n'est pas une copie (V. ce mot). L'original d'un
acte est la minute qui reste en dépôt , et dont on délivre
des copies à qui de droit. En Littérature, on dit d*un au-
teur qu'il est original, lorsque ses écrits ne ressemblent,
par les pensées ou la forme, à aucun de ceux d'autrui ,
lorsqu'ils ont un cachet tout particulier, qu'on ne saurait
iiniter.
ORIGINE (Certificats d'), nom qu'on donne à deux
sortes de certificats, qui ont pour objet : l'un, de constater
l'origine de la propriété d'une inscription de rente sur
rètat; l'autre, de constater la provenance^ de marchan-
dises importées en France. Le l*', délivré par le Trésor
sur demande, est nécessaire lorsqu'il s'agit, par exemple,
de reconnaître, dans le cas de dissolution de commu-
nauté, si une rente est un conquèt ou un bien propre.
Le 2*, exigé en matière de commerce maritime et de
douanes, émane d'un consul; il constate que les mar-
chandises ne sont pas prohibées.
ORIGINFX ( Péché). V. Picai.
ORILLON , partie de la face d'un bastion, ordinaire-
ment arrondie, s'avançant au delà de l'épaule, et destinée
à protéger le reste des flancs contre les coups de ricochet.
Les oriUons, d'invention espagnole, fréquemment em-
ployés par Vauban, Cohom et les ingénieurs militaires du
même temps, sont peu usités aujourd'hui.
ORISSA (Dialecte), un des dialectes de l'Inde moderne
issus du sanscrit. Sutton en a donné une Grammaire et
on Dictionnaire, Kattak, 1841-43, 3 vol.
ORLB (de l'italien orlo, ourlet), listel ou filet placé
lous l'ove d'un chapiteau. Lorsau'un orle est dans le haut
OQ dans le bas du fût de la colonne, on le nomme cetn-
ture; dans le premier cas, il s'appelle aussi coiarin.
L'orie de parement de la volute ionique est dit également
œintwe, — Dans le Blason, orle est synonyme de filière
(F. ce mot).
ORLÉANS (Cathédrale d*). Cette église, placée sous
l'invocation de la S^" Croix, est de construction moderne,
bien qo'^e présente généralement les caractères de l'ar-
chitecture ogivaJe. Elle occupe l'emplacement d'un mo-
nument antérieur, commencé en 1281, ruiné par les cal-
vinistes en 1567, et dont il ne reste que quelques parties
du chevet. La première pierre en fut posée par Henri IV
en 1601 ; mais les constructions, lentement exécutées,
n'ont été finies que de nos jours. Les architectes Barbet,
Mansart, Decoste, Gabriel, Trouard, Legrand, et Paris ,
qui dirigèrent successivement les travaux, ont adopté
le style ogival tertiaire. Sans qu'on doive partager l'en-
thoQsiasme de quelques historiens d'Orléans et placer
leur cathédrale au nombre des plus belles œuvres de l'ar-
chitecture religieuse, elle occupe une place distinguée
parmi les monuments français. Vue de l'extérieur et à
distance, elle a de la noblesse et de la grandeur : l'éten-
due des proportions, la légèreté de la flèche centrale,
l'originalité des tours du portail, l'élégance et la multi-
plicité des galeries, des arca-boutants, des contre-forts et
des clochetons, tout concourt à composer une ordon-
naoce pittoresque. La façade principale est remarquable
ET son étendue et par la richesse de son ornementation,
le a 51 mètres de largeur, et est percée de 5 portes
donnant accès dans un triple vestibule. Les tours pré-
sentent, aa-dessus de la grande et belle galerie à claire-
voie qui forme toute la partie supérieure du portail, trois
étages à quatre faces semblables, superposés pyrami-
dalement. Le premier, décoré de statues et d'une fe-
nêtre, est flanqué aux angles de quatre charmants esca-
liers en spirale surmontés de campaniles d'une surprenante
légèreté. Les deux autres sont ornés d'arcades gracieuses,
et couronnés par une galerie découpée en trèfles. Tout
au sommet, à une hauteur de 80 met., se dressent onatre
statues colossales d'Anges. Ce portail occidental , oàti à
une époque où l'art était entièrement païen , est une
imitation fidèle de l'art du moyen âge : mais, ailleurs,
les architectes ont parfois oublié cette tradition salutaire,
pour placer des ornements en style de la Renaissance, et
même des parties de style grec. Ainsi , le portail méri-
dional offre des colonnes , des chapiteaux et un entable-
ment corinthiens. Celui du Nord, au contraire, est d'une
grande pureté de style. — A l'intérieur, la cathédrale
d'Orléans a 130 met. de longueur, 2Ô'",66 de lareeur,
32'",50 de hauteur ; le transept est long de 54<",60. Le
plan général est à cinq nefs. B.
ORNEMANISTE, artiste sculpteur qui fait les orne-
ments destinés à l'arcîittecture, spécialement ceux qui
peuvent se fabriquer à part et s'appliquer après coup.
y. Goldmann, Traité sur les ornements d^architecture ^
en allem., Aug&bourg, 1720, in-fol. ; iCrubsach, Héflexwns
sur V origine, les progrès et la décadence des ornements
dans les BeauiD-Arts, en allem., Leipzig, 1750 et 1773,
iu-8<^; Voch, Sur les ornements d'architecture^ Augs-
bourg, 1783, ln-8<*; Moritz, Prolégomènes d'une tfiéorie
des ornements, Berlin, 1793, in-8<*; Antonini, ManucUe
di vart omamentt. Rome, 1777-81, 4 vol. in-4*; Desflo-
rennes, ReciieU itomements ^ Paris, 1840-43, in-fol.;
HeideloflT, Ornements du moyen âge, Nuremberg, 1843,
in-4<^; Plantard et Peyre, RecueU d'ornements^ Paris,
1844, in-fol. Il existe un Guide de VOmemaniste^ par
Gh. Normand, 1826.
ORNEMF.NTS, tout ce qui , sans faire partie intégrante
d'un objet, peut y être adapté pour le rendre plus
agréable ou plus riche. Ce sont, en Architecture, les
feuilles, les oves, les grains, les enroulements, les vo-
lutes, les rinceaux, les fleurons et festons, les ruden-
tures, les guirlandes, les rosaces, les palmettes, les con-
soles, les denticules, les caissons, les cartouches, les
bas-reliefs, etc. Des statues et des vases sont des orne-
ments cour un Jardin , comme des glaces, des tableaux,
des tapis pour les intérieurs. — On nomme Ornements
les vêtements qui servent à la célébration du serrice
divin, tels que chasubles, tuniques, étoles, manipules,
chapes, etc. Les omemenis pontificaux sont la mitre, la
crosse, l'anneau , la croix pectorale. — Les ornements
royaux sont le manteau, la couronne, le sceptre, l'épée,
la main de Justice, le globe. — Dans le Blason , les Orne»
nwnts sont tout ce qui ne fait pas partie intégnmte d'une
armoirie et se trouve en dehors de l'écn, comme les
timbres, les cimiers, les lambrequins, les supports, les
colliers, les manteaux.
OROGRAPHIE (du grec oros, montagne, et çraphéin,
décrire), partie de la Géographie physique am s'occupe
de l'étude des montagnes, et , en générâil , de toutes les
parties solides du globe. C'est une étude iàiportante; car
la considération de la hauteur et de la direction des mon-
tagnes, l'examen comparé de Pétendue des phiteaux et
des plaines, expliquent le climat d'un pays, la distribu-
tion des eaux sur la surface du sol, sa fertilité, et, par
suite, sa richesse. C. P.
ORPHELIN (du grec orp^ft05, orphelin), enfant oui,
avant d'avoir atteint l'âge de minorité fixé par la loi, a
perdu son père et sa mère. Il était ordonné aux Hébreux
de laisser aux orphelins une partie des fruits de la terre,
de les admettre aux repas des fêtes et des sacrifices, et le
trésor des aumônes, ff^rdé dans le Temple, était princi-
palement destiné à leur entretien. A Athènes, les enfants
dont les pères avaient péri en combattant pour la patrie
étaient élevés dans le Pr^tanée aux frais de l'État. Sous
l'influence du christianisme, de nombreux établissements
ont été fondés dans tous les pays pour recueillir les oi-
phelins. En France, la plupart des nospices en reçoivent.
Certaines classes d'orphelins ont été l'objet de fondation.^
spéciales: ainsi, sous Louis XIV, la maison de S^yr
reçut les Jeunes filles nobles; la République établit, pour
les fils de militaires, le Prytanée de La Flèche; sous Na-
poléon I^, des bourses furent créées, en faveur des orphe*
lins, dans les lycées et autres établissements, et dans les
maisons de la Légion d'honneur pour des orphelines
dont les pères avuent été légionnaires; enfin, en 185U,
les fonds d'une souscription offerte à l'Impératrice Eu*
génie et au prince imptiial, son fils, accrus d'une forre
dotation , et augmentés par des dons particuliers, ont été
ORT
1354
OSU
^lestiDÔs par Napoléon in àrentretien d*on certain nombre
d'orphelins placés dans des familles d'ouvriers. B.
ORPHÉON (d'Orphée)^ instrument demusiaue en forme
de petit piano, dont on fait résonner les cordes à boyau,
soit par le moyen d'une roue, soit à l'aide d'un clavier.
Poulleau , qui fabriqua un de ces instruments à Paris
au commencement de notre xn* siècle, lui donna le nom
d'Orchestrino.
ORPHéoif , nom qui fut appliqué en 1833 par le musi-
cien Wilhem à la réunion générale des enfants qu'il in-
struisait par groupes séparés dans les écoles primaires de
Paris. Cette réunion avait pour but l'exécution de chants
sans accompagnement par des masses considérables. Une
méUiode et des recueils de morceaux furent composés
pour les membres de l'Orphéon, auxquels s'adjoignirent
peu à peu des ouvriers et des amateurs. Les Orphéonistes
ont été dirigés, après Wilhem , par Hubert et Gounod. —
Des orphéons se sont formés plus tard dans divers dépar-
tements.
ORPHÉORÉON, ancien instrument de la fiunille des
luths, armé de 8 cordes en métal.
ORPHICÂ, instrument à clavier, inventé par Rœllig.
Les touches en sont si étroites, qu'il ne peut être Joué
que par des enfants.
ORPHIQUES , titre sous lequel les Anciens compre-
naient une quarantaine de poèmes plus ou moins éten-
dus, dont la composition était attribuée à l'aèd^prophète
Orphée. Parmi ceux qui nous sont parvenus, les plus
importants sont des hymnes, un traité sur les vertus ma-
giques des pierres, une relation des aventures des Argo-
nautes : aucun de ces ouvrages ne porte le caractère
d'une haute antiquité, mais on y trouve des traces soit
de la langue, soit des idées de 1 époque alexandrine. La
versification offre des analogies frappantes avec celle de
Nonnus et de Quintus de Smyrne. une preuve plus cer-
taine du peu d'antiquité de ces prétendues poésies or-
phiques, c'est le ton déclamatoire qui y règne, la profu-
sion des ornements poétiques, un Yrequent emploi de
l'archaïsme et du néologisme, et même des hébraismes.
Toutefois, il est certain qu'avant l'époque alexandrine on
connaissait en Grèce des poèmes mis sous le nom d'Or-
phée, dont la composition ne remontait pas Jusqu'au
siècle éloi|;né où l'on suppose que vécut cet aède, mais
3ui pouvaient bien être 1 œuvre de poètes contemporains
e Solon et de Pisistrate. Platon, Aristote, Diodore, Pline,
Plutarque, plusieurs Pères de l'Eglise font allusion à ces
poèmes; trois fragments surtout, relatifs à Jupiter con-
sidéré comme principe et maître universel, cités l'un
par Aristote, les deux autres par Justin le Martyr, ont un
caractère manifeste d'antiquité; cependant encore, les
poèmes d'où ces morceaux ont peutr^tre été détachés
étaient de beaucoup postérieurs à Orphée. Brontinus,
Gercops, Onomacrite, sont les trois principaux poètes du
VI* siècle av. J.-C. auxquels on rapportait un certain
nombre de poèmes orphiques, qui plus tard furent modi-
fiés, dénaturés, multipliés, surtout à l'époque de la lutte
ardente du Christianwme et de la philosophie néoplato-
nicienne. * P.
ORT, monnaie d'argent de Norvège, valant 1 fr. 12 c«
ORTHIEN (Nome). V. Nome.
ORTHODOXIE (du grec orthos , droit, et doxa,
croyance), conformité de la croyance à la règle de la foi,
à la doctrine et à l'enseignement de l'Église. On l'op-
pose à V Hétérodoxie et à V Hérésie (V. cês mots). Les
conciles et le souverain pontife, prenant l'avis de la Con-
grégation de l'Index, prononcent sur l'orthodoxie des
écrits et des opinions. — L'Église gréco-russe et l'Église
anglicane prétendent, aussi bien que l'Église catholique,
être orthodoxes.
ORTHOGRAPHE, partie de la Grammaire qui donne
des règles pour peindr0 (en grec grapftéin) ou Mrire car"
rectêtnent (orthâs"^ les mots d'une langue, c-à-d. pour en
représenter régulièrement les sons par des caractères. II
suit de là que l'orthographe n'est rigoureusement exacte
que si les mots s'écrivent comme ils se prononcent, que
s'il y a entre la parole et l'écriture une concordance par-
faite, comme dans curé, amitié, cataracte^ caractère, 6i-
jouteriê, etc. Or, cette concordance absolue n'existe peut-
être dans aucune langue : elle ne parait pas avoir existé
dans les langues anciennes, puisque Quintilien, pour ne
parler que du latin , blâme les prétentions de certains
puristes de son temps , qui voulaient que tous les mots
s'écrivissent comme ils se prononçaient Toutefois les
Italiens sont parvenus à mettre dans leur lansue l'écri-
ture à peu près en rapport avec la prononciation. Un
principe de la langue allemande, c'est que toute lettre
écrite doit se prononcer. Aussi, la prononciation âeTits-
lien et celle de l'allemand s'apprennent-elles asaex vite.
et l'orthographe des mots de ces deux langues n'offre*
tpelle point de difficultés sérieuses, soit aux nationaux,
soit aux étrangers. Il n'en est pas de même du srec mo-
derne, de l'anglais et du français; ces deux dernières
langues offrent, dans leur orthographe comparée avec la
prononciation, de nombreuses et étranges anomalies. Le
principe de la dérivation et de l'étymologie Joue et doit
Jouer, du moins en français, un très-grand rêle dans la
représentation des mots par l'écriture; c'est lui qui a
maintenu dans notre langue tant de lettres qui , depuis
longtemps, ont cessé de se prononcer. L'orthographe ne
doit donc pas être définie la peinture exacte delà parole,
mais plutôt l'art d'écrire les mots d'une langue correcte-
ment, c.-à-d. d'une manière conforme aux règles de
l'étymologie, et de plus aux règles établies par l'usage
des personnes qui ont le mieux écrit, et consacrées par
la Gramm^re ( V, NéooaAPHs). P.
ORTHOGRAPHIE (du grec orthos, droit, et graphéin,
décrire), dessin ou représentation d'un édifice sur un
plan d'une véritable proportion. Les largeurs et les hau-
teurs y sont proportionnelles aux largeurs et aux hau-
teurs réelles. C'est ce qu'on nomme aussi une Élévation
géométrcUe» — Orthographié sionifle encore le profil ou
la coupe perpendiculaire d'un édifice.
ORTHOSTADE, ample tunique des Anciens, à manches
longues, et descendant Jusqu'aux pieds. Elle était ainsi
appelée à cause de ses plis droits.
ORVIETO (Le Dôme d'), dans les Étato de l'Église.
Cette église cathédrale est une des œuvres les plus inté-
ressantes de l'architecture ogivale en Italie. Commencée
en 1290 par Lorenzo Maitani, de Sienne, elle ne fut ache-
vée que troif siècles après : 33 architectes, 152 sculp-
teurs, 68 peintres, 90 mosaïstes se succédèrent dans les
travaux, en sorte que l'édifice offre un résumé des pro-
grès de l'art moderne. La façade est ornée des statues
des Apôtres, de sculptures dont les sujets ont été em-
pruntés à l'Ancien Testament, et qui paraissent être de
Giovanni de Pise et de ses élèves, enfin de mosaïques
qui représentent l'histoire de la Vierge. A l'intérieur de
l'église, on remarque : les statues colossales en marbre
blanc des Apôtres, dont l'une, S* Matthieu, a été faite
par Jean de Bologne; près du maltre-autel, un groupe
de l'Annonciation, sculpté par Mocchi; les stalles en
marqueterie du chcsur, ouvrage de Pietro di Minella; les
vitraux, peints au xiv* siècle par Andréa Vanni et Fr. di
Antonio; les deux autels des transepts, dont l'un, repré-
sentant l'Adoration des Mages, a été sculpté par Simone
Mosca, et l'autre, qui a pour sujet la Visitation, par son
fils Moschino, sur les dessins de San-Micheli; la chaire,
œuvre de Scalza ; la chapelle de la Madone de S^ Brice,
peinte à firesque par Fra Angelioo, Beifoszo Gosioll, Lnca
Signorelli, et où l'on voit un singulier mélange d'idées
chrétiennes et de souvenirs païens; un reliquaire en
argent massif, qui renferme le saint corporal de Bolsena,
et qu'un orfèvre siennols du xnr* siècle, Ugolin Vieri, a
décoré d'ornements et de peintures en émail. F. Della
Valle, Storia del duomo dOrvieto, Rome, 1791, ln-4*;
Les bas-reliefs du dame d^Orviêto, gravés, sur les des-
sins de Pontani, par Ascani, Baitocdni, et Gruner, Leip-
zig, 1858, in-fol.
OSCILLA, espèces de masques consacrés à Bacchus
ou à d'autres dieux, et que les Anciens suspendaient aux
arbres pour se rendre ces dieux favorables. Leur nom
vient sans doute de ce qu'ils étaient agités par le vent.
OSELLA, monnaie de Venise; en or, elle vaut 47 tti
60 c; en argent, 2 fir.
OSQUE (Langue), une des langues italiques, parlée
dans la péninsule avant la fondation de Rome. Le sabio,.
le vieux latin et le samnite en étaient des dialectes. Malte-
Brun donnait à l'osoue une origine ibérienne. Selon
Niebuhr, 11 avait avec l'ombrien une grande affinité, et ce
dernier était comme le chaînon intermédiaire qui ratta-
chait l'osque à l'étrusque. L'osaue se maintint comme
langue littéraire dans le Samnium et la Campanie, au
temps même des Romains; les AteilaneslF. ee mot)
étaient écrites en osque. Les modernes n'ont pu étudier
cette langue que sur un petit nombre de monuments,
par exemple sur le Cippus abollanus, découvert à la fin
du xvn* siècle dans les ruines d'Abolla, et sur la TaMa
bantina, qu'on a trouvée en 1793 près de l'emplacement
de Bantia (Apulle). Les murs de Pompé! ont aussi foumr
quelques Inaicriptions. 7. Passeri, Linguœ oseœ spécimen'
singulare, Rome, 1774, In-foL; Dœderlein , Cbmm«fi<o»
tio de vocum àliquot latinarum, sabinarum, mmbriak-
oss
dS5ô
OTI
mm, tuscarum eognatione grmcà, Erlangen, 1837; He-
iioch, De linguâ tabinà, Âltona, 1837: Janelli, Veterum
Ckcorum inscriptiones, Naples, 1841; Avellino, Iscri'
xtoni sannite, Naples, 1841; Lepsius, RudifMnta <tn-
guœ oscm, 1841 , et Inscriptiones urnbricœ et oscœ,
Leipzig, 1846; Mommsen, Études osques, en allem., Ber-
lin, 1845| in-8^; le même, Inscriptions messapiennes^
en allem., Rome, 1848, et Dialectes de la basse Italie,
Leipzig, 1850; Effuschke, Monumenti di lingua oscae
sabellu:a, 1856.
OSSATURE (de l'italien ossatura, squelette^ carcasse),
charpente d'une voûte ou d'un vitrail. Dans une voûte,
rossatuie est l'ensemble des nervures, arcs-doubleaux,
formerets, croisées d'ogive. Dans les vitraux, c'est la char-
pente en fer qui se modifie à chaque siècle. Aux xi* et
xu* siècles, les compartiments et médaillons de la fenêtre
sont dessinés par l'armature en fer, et les plombs ne
Tiennent que dans les détails. Au 1II1^ l'ossature en fer
80 simplifie; elle indique bien encore dans la plupart des
cas toutes les grandes divisions de la vitre, mais elle
laisse un plus large champ aux plombs , et de grandes
barres de fer Indépendantes du sjrstème de décoration
commencent & paraître pour soutenir la fenêtre. Au xiv*,
Possature du vitrail présente un assemblage de forts bar-
reau de fer croisés, mais très-écartés, destinés à soutenir
la fenêtre indépendamment de sa construction, et un
grand cadre en fer plus mince, traçant encore quelques
grandes divisions, mais laissant aux plombs tout le soin
da dessin. Aux xv* et xvi*, même distribution, si ce n'est
qne la séparation est complète entre le treillis de fer et
les plombs; la vitre, entièrement formée par les plombs,
s'applique et se soude sur le treillis de fer, qui , à son
tour, se fixe sur les forts croisillons de fer. Au xvu*, chan-
gement complet, abandon presque général des plombs;
les carreaux de la fenêtre s'assemblent carrément dans
an léger treillis en fer, et on peint sur les vitres ainsi
unies, comme on le ferait sur une toile ou sur un mur.
De nos Jours on a compris Tlmportance des plombs, et
on a repris les procédés habiles du moyen âge. E. L.
OSSEG ou OUSSAS, lieu de la cale d'un navire où
les eaux s'assemblent, au bas de la pompe, et d'où on les
extrait avec un seau à main.
OSSELETS (Jeu d*). 7. notre Dictionnatre de BioQra-
pkie ei d'Histoire.
OSSÈTE ou IRON (Idiome), idiome parlé par les Os-
sètes, petite tribu du Caucase. 11 est de la famille iranienne,
et offre trois dialectes, Vossète, le digoriên, et le iagaoure.
On n'y trouve ni genres ni article. La déclinaison se fait
par flexion. La conjugaison, assez riche en temps, em-
ploie les verbes auxiliaires; elle a 4 modes dlflérents de
négation, et exprime les rapports des noms à l'aide de
pr^ositions qui les suivent ou les précèdent. En général,
la construction suit l'ordre naturel. La pronondimon est
gutturale et sifflante. V, SJOgren, Grammaire et Die-
iiùnnaire ossète, en allemand, S^-Pétersbourg , 1844;
Rosen, De la langue ossète^ en allemand, Lemgo et Det-
mold, 1846.
OSSIAN (Poésies d*). Il a existé et 11 existe encore dans
la bouche des montagnards de l'Ecosse certains chants
gaéliques qui remontent à des temps anciens, et qu'on
attribue à un barde du nom d'Ossian. On n'a pas de rai-
son sérieuse de révoquer en doute l'existence de ce pei^
Bonnage, et l'opinion la plus générale le place au m* siècle
de notre ère. Mais les poésies ossianlques ont soulevé en
Angleterre les plus vives controverses. Celles que liac-
pherson publia en 1760 ne sont qu'un pastiche; on com-
prend difficilement aujourd'hui au'elles aient excité tant
de passion : proclamées authentiques par le D' Smith,
Blair, Gray, et lordKalmes, elles furent attaquées avec vio-
lence par Shaw, et surtout par Samuel Johnson; Lalng,
dans son Histoire d'Êcoue, en combattit aussi l'authen-
ticité. Une commission, spécialement nommée en 1797
pour élucider le débat, conclut, par l'organe d'Henri Mac-
kensie, qu'one partie des poèmes d'Ossian était authen-
tique, mais que la forme sous laquelle Macpherson les
avait présentés était son propre ouvrage; qu'on devait
les attribuer, non à un seul barde, mais à plusieurs; et
que Jamais ces poèmes n'avaient composé un seul tout,
un poênfë épique entier. En 1807, la Société écossaise de
Londres fit Imprimer tous les textes gaéliques que l'on
avait pu recueillir; on y trouve une vigueur native et
fruste, dont Macpherson n*a pas respecté le caractère. Les
chants ossianlques sont originaires d'Irlande, et l'on y
voit figurer des Saints irlandais, notamment S^ Patrick ;
la forme en est embarrassée et difiicile, et l'on y trouve
Deaocoup d'allitérations et d'assonances. Il est impossible
de les faire remonter plus haut que le vi« siècle, et il se
peut qu'ils ne datent même que de quelques siècles plus
tard. Ce sont les pastiches de Macpherson que Letoumeur
a traduits en français, et dont Raour-Lormian a tiré ses
imitations en vers. K . M"* Robinson , La Fausseté des
poésies dVssian, et de VOssian de Macpherson en parti-'
culier, Leipzig, 1840.
OSSUAIRE, lieu où l'on range les ossements des morts.
On a souvent donné ce nom aux reliquaires, aux char*
niers et aux cimetières {V, ces mots). Il existe dans un
couvent de Franciscains, à Madère, une curieuse chapelle
dont on a fait un ossuaire. V, Morat, dans notre Diction^
naire de Biographie et d^Ristoire,
OSTEAU , vieux mot désignant le grand cercle placé
dans la partie supérieure d'une fenêtre à meneaux. Il a
signifié aussi rosace et médaillon.
OSTENSOIR ou MONSTRANCE (du latin ostendere„
monstrare^ montrer), pièce d'orfèvrerie en or, en argent,
en vermeil, ou simplement en plaqué^ représentant d'or-
dinaire un soleil rayonnant élevé sur un pied, et au centre
duquel est une lunule^ boite de cristal qui renferme une
hostie consacrée. L'usage de cet ornement d'église ne
remonte qu'au xii* siècle. Au xiv*, on en fit en forme de
croix creuse, ou de statuette portant la sainte hostie. Sou*
vent il est enrichi d'émaux et de pierres fines. L'osten-
soir se place à certaines fêtes au-dessus du tabernacle,,
et on le porte aussi dans des processions. Parmi les
œuvres de ce genre, on remarque l'ostensoir en vermeil
de la cathédrale de Barctione. On a fait autrefois des
ostensoirs en forme de tours et de oroix; il y en a un^ du
xm* siècle, dans le Trésor de la cathédrale de Reims. B.
OSTIAKS (Idiome des), idiome sibérien. Castrèn l'a
fait connaître dans un Essat sur la langue ostiake^ publié
en allemand à S^Pétersbourg, 1850, in-8*.
OSTRACiryNDA, Jeu des anciens Grecs, le même que
notre Jeu de barres (F. ce mot),
OSTRACISME. K. ce mot dans notre Dicttonnaire de
Biographie et d'Histoire.
OSYMANDIAS (Colosse, Tombeau d*). 7. Thèse»
(Ruines de).
OTAGE (du latin barbare hospUagtum, dérivé d'hospes,
hôte), penonne livrée comme garantie de l'exécution
d'une promesse ou d'un traité. Chez les Anciens, un dé-
biteur livra souvent ainsi à son créancier l'un de ses en-
fants ou de ses proches Jusqu'à libération de la dette.
Puis on ne donna plus d'otages que dans les relations
politiques. De nos Jours encore, 11 arrive quelouefoia
qu'après la signature d'un traité, un ou plusieurs officiers
restent chez l'ennemi Jusqu'à complète exécution de ce
qui a été stipulé : en cas d*inexécuuon des engagements^
les otages peuvent être considérés comme prisonniers de
guerre. Dans les temps barbares, on les mettait à mort.
— Sous le gouvernement du Directoire, on appela Loi des
otages une Toi rendue le 24 messidor an vu (12 Juill. 1709),.
et en vertu de laquelle les parents des éimigrés étaient
responsables de la fuite, des complots et des actes d'a^es-
sion de cenx-d t on pouvait les arrêter, les détenir en
prison, et même, en certains cas, les déporter. Cette loi
odieuse fut abolie le 23 brumaire (13 nov.) de la même
année. B.
OTELLE, nom d'une espèce de lance au moyen fige.
— Dans le Blason, c'était un des meubles de l'écu, con-
sistant en une petite figure ovale et pointue, aue quel-
ques-uns croient être une amande, et non une lance.
OnNEL, chanson de eeste qui appartient au cycle des
romans carlovingiens (K. ce mot), et l'une des dernières
productions de notre poésie héroïque du moyen âge. Elle
parait avoir été écrite dans la seconde moitié du xm* siècle.
L'auteur, qui nous est inconnu, suppose que Charlemagne>
de retour en France après la prise de Pampelune, se dis-
posait à retourner en Espagne, quand arriva à sa cour un
neveu de Ferragus, Otinel, chargé par le Sarrasin Garsile
ou Marslle, conquérant de Rome et de la Lombardie, de
le sommer de rendre hommage et d'abjurer la foi chré-
tienne. Par un miracle soudain, c'est Otinel qui renie la
loi de Mahomet; filleul de Cbarlemagne, qui le fiance à
sa fille Relisent, et rangé parmi les douze Pairs, il marche
avec eux contre Garsile, et, après avoir contribué à sa
défaite, reçoit la couronne de Lombardie. — Otinel ne
figure nulle part ailleurs dans le cycle carlovlngien, tandis
que les autres personnages de la Chanson sont parfaite-
ment connus. Cette Chanson n'a guère plus de 2,100 vers..
Il en existe deux traductions libres ou Imitations en vers
anglais, sous le titre de Sir Otuel; elles sont analysées
par EUis dans ses Spedmens of early english metrical
roinaficM(édit. de Halllwel, Londres, 1848), et l'une d'elles-
OITR
135C
ouv
a été publiée par Nicholson à Edimbourg, en 1830. La
Chanson d*Otinel est entrée, sous la même forme Otuêl^^
dans le recueil islandais qui a pour titre Saga Karla
Magnusar og Kappa Hans, Un petit poème populaire
italien, Istaria di Ottinello e Giutia, n*a aucun rapport
«?ec le nôtre. On ne connaît que deux manuscrits de la
Chanson d*Otinel, en dialectes différents, conservés, Tun
à Rome, dans la bibliothèque du Vatican (il provient de
notre abbaye bénédictine de Fleury), Tautre à Middlehill,
dans la bibliothèque de sir Thomas Phillips ; ils ont servi
à la publication qu*en ont faite MM. Guessard et Miche-
lant dans la collection des Anciens poètes de la France,
Paris, 1859, in-16. B.
OTOMT (Lan{^e). V, Mexique (Langues du).
OTTAVA RIMA. V. Italienne CVersiflcation).
OTTOBIANE, sorte de divan ou de sofa, ainsi nommé
des Ottomans ou Turcs qui en font grand usa^.
OUBLIES. i V, ces mots dans notre Dictionnaire
OUBLIETTES. S de Biographie et d^Histoire.
OUDËNARDE ou AUDENARDE (Hôtel de Ville d*}. Ce
monument, de petites dimensions, est un des plus cé^
lèbres de la Belgique. Bâti, de 1527 à 1530, par Henri van
Peede, il oflïre certains points de ressemblance avec les
hôtels de ville de Bruxelles, de Louvain, et de Courtrai. Il
a la forme d'un trapèze, isolé sur trois de ses côtés : la
façade a 25 met. de développement, le côté gauche
21 met., le côté droit 12 met.; la partie postérieure est
adossée à une ancienne halle, transformée en salle de
spectacle. L'intérieur est d'une simplicité qui contraste
avec la riche décoration du dehors : on y remarque ce-
pendant rentrée de la salle des échevins, chef-d^œuvre
de sculpture en bois exécuté en 1531 par Paul Van der
Schelden, et la cheminée de cette salle, sculptée par le
même artiste.
OUGAB, instrument de musique à vent des anciens
Hébreux. La forme en est inconnue. Les uns y ont vu une
«q>èoe de cornemuse, composée d'une peau enflée et de
deux flûtes; les autres, une flûte de Pan, formée de 7
tuyaux de longueur différente et proportionnée.
OUGRO-JAPONAISES, OUGRO-TARTARES (Langues).
V, OORALO-ALTAlQlJBS.
ouïes, nom donné quelquefois aux grandes baies à
abat-vent ou abat-son des tours d'églises.
OUKASE « OULÉMAS. V. Ukase, Ulémas , dans notre
Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire,
OULIK, monnaie. V. Ouk.
OUOLOF (Idiome). V. Wolof.
OUPANISHADS. V. Upanishads.
OURALO-ALTAIQUES (Langues), dites aussi Cfugro-
iaponaises, Ougro-tar tares, Ftnno^artares , ou simple-
ment Tartares , grande famille de langues, composée de
quatre groupes : 1» le groupe ougrien, comprenant Vos-
ttake, le samoyéde^ le vogoul, etc.; 2? le groupe tartare,
dont font partie le mongol, le mandchou, le turc; 3* le
groupe japonais , comprenant le japonais et le con^;
éfi le groupe finnois ou tchoude, auquel appartiennent le
suomt ou finlandais, le lapon, Vesthimien; 5^ le magyare
ou hongrois. Il est aisé, dit Kellgrèn, de découvrir entre
tous ces idiomes comme une affinité primitive dans une
multitude de racines communes ; peut-être même serait-
il possible de ramener à un seul et même thème primitif
la plupart des suffixes grammaticaux d*an emploi ana-
logue. Dans toutes ces langues, consonnes et voyelles res-
tant en regard Tune de l'autre dans la syllabe avec une
même importance, et les voyelles ne pouvant être absor-
bées par les consonnes, la rencontre de plusieurs con-
sonnes dans une syllabe est un fait anormal. Dans toutes,
la racine est invariable et immuable, et. dans la fusion
d'un suffixe avec la racine, c'est le premier qui s'harmo-
nise et au besoin se modifie ; le radical, toujours placé
devant, gouverne les autres parties composantes du mot.
Aucune de ces langues n'admet de préfixes, et, dans la
plupart d'entre elles, Taccent déterminant du mot repose
invariablement sur la première syllabe, c-àrd. sur le
radical ; les syllabes qui viennent ensuite perdent leur
propre accent, et se soumettent au radical qui domine le
mot. Dans toutes aussi, règne la loi de Vharmonie voceUe,
€.-à-d. que le mot devient un tout , un ensemble dont
toutes les parties se fondent dans un seul ton, et que les
voyelles rudes et les douces ne doivent Jamais se trouver
réunies dans le même mot. Toute signification détournée
du radical , tout rapport nouveau du mot constitutif est
indiqué par l'adjonction d'un nouveau suffixe ; ces suffixes
se rangent régulièrement l'un après l'autre, chacun à sa
place déterminée, et se fondent selon les lois des sons.
Jamais le sens du mot n'est mo<tiflé d'une façon emblé-
matique par un changement dans le radical. Les sub-
stantifs n'y ont pas de genre. Ces langues n'ont toutes
qu*un très-petit nombre de psrticules, défaut compensa
par une grande richesse de formes dérivatives du verbe,
de participes, de gérondifs et de formes infinitives. Mèmer
lois dans la formation des périodes : les propositions ne
s'y enchevêtrent pas les unes dans les autres, comme cela
a lieu dans les langues indo-européennes ; mais cliaque
proposition se Joint, en quelque sorte à la manière d'un
suffixe, à celle dont elle forme le complément immédiat,
ce qui produit une chaîne continue de membres de
phraôes s'engrenant les uns dans les autres et se succé-
dant dans l'ordre naturel de la pensée. Enfin , Gaatrèa
comparant les vieux chants de peuples si distants les unf
des autres, y trouve une inspiration identique. V, Abe
Rémusat, aecherches sur les langues tartares; Schott
Essai sur les langiies tartares, en alleoL, Berlin, 1836,
et Mémoire sur les langues alteOques ou finno-tartares,
analysé dans les Nouvelles Annales des Voyages, 5* série,
t. XVI ; Castrèn, De affixis personalUbus linguarum altak-
carum, Hetsingfors,1831 ; Kellgrèn, Les Finnois et la race
ouraloHiltiUqiie, ouvrage traduit dans les Nouvelles An^
nales des Voyages, 5* série, t. xv.
OURANIA (du grec ouranos, ciel). Jeu de l)alle des an*
ciens Grecs. Un des loueurs jetait une balle vers le ciel,
et les autres cherchaient à la saisir avant qu'elle eût tou-
ché la terre. C'est à peu près la soûle de Bretagne.
OURCEL, ORCEL ou ORCEAU, vieux mot signifiant
bénitier,
OURDOU (Dialecte). V, IvDicNfiBs (Langues).
OURM ou URNI. V. Indien (Art).
OUSSAS. V. OssEC.
OUTRAGE (du latin agere ultra, passer outre, dépasser
le droit), injure de fait ou de parole contre les grands corps
de l'État, les officiers ministériels, les fonctionnaires pu-
blics, dans l'exercice ou à l'occasion de leurs fonctions.
11 est puni plus ou moins sévèrement, selon la gravité
des circonstances. — L'outrage à la morale publique et
religieuse, par discours, cris et menaces proférés dans des
lieux publics, par des écrits, des imprimés, des dessins,
des peintures et emblèmes vendus ou distribua, par des
placards ou affiches, est puni d'un emprisonnement d'un
mois à un an, et d'une amende de 16 fir. à 500 fr. {Code
pénal, art. 222-225; loi du 17 mai 1819). L'outrage pu-
blic à la pudeur est puni d'un emprisonnement de trois
mois à un an, et d'une amende de 16 fk*. à 200 f^.
OUVERTURE, symphonie qui sert de début à un opér^
ou à un ballet. Elle n'est pas destinée à réunir tous les
caractères exprimés dans la pièce, et à présenter, comme
on le croit souvent, l'assemblage des principaux motifs
au'on entendra plus tard : son but est de disposer le cœur
es spectateurs au genre d'intérêt etd'émotion qui domine
dans l'œuvre entière. C'est donc par la couleur générale
ou'elle doit se conformer an drame. Ainsi, l'ouverture
au Démophon de Vogel exprime le délire impétueux des
passions; il règne une muesté patriarcale dans celle du
Joseph de Méhul ; le Don Juan de Mozart s'ouvre par une
svmphonie qui a quelque chose de bizarre et de fantas-
tique, bien approprié au drame qu'elle précède; l'ouvei^
ture de la Chasse du jeune Henri, par Méhul, représente
toutes les circonstances d'une chasse au cerf; celle de
Jean de Paris, par Boleldieu, a une couleur chevale-
resque ; dans l'ouverture de Guillaume Tell , Rossini a
peint le calme de la vie champêtre, troublé par une fan-
fare de trompettes oui appelle les paysans suisses à la
conquête de la liberté. Parmi les ouvertures célèbres, on
peut encore citer celles de VIphigéniê en Aulide et d(
ilphigénie en Tauride par Gluck; de la Caravane etd6
Panurge par Grétry; du Mariage secret par Qmarosa;
de la Clémence de Titus , des Noces de Figaro et de la
FliUe enchantée par Mozart; de Montano et Stéphanie
par Berton ; de Joconde par Nicole ; de VHôt^lerie portu-
gaue et d*Anacréon par Cherubini ; dé la Dame manche
par Boleldieu \ du Pré aux clercs et de Zampa par Hé-
rold ; de Fidelto, de Promélhée, de Coriolan, et d'Egmont
Car Beethoven ; du Barbier de SévUle. de Sémiramis, de
'ancréde, d*Otello, et de la (kuxa laara par Rossini; da
Chalet par Adam, etc. Les compositeurs n'ont que rare*
ment réussi à faire de belles ouvertures par une sorte
de récapitulation des meilleurs motifs de leurs opéits :
il faut pourtant excepter celles du Preysc^iUx, d^Ewriante
et dVberon par Weoer; de la Muette de Pcrtici par Au-
ber, et en général toutes les ouvertures de ce composi-
teur : le Maçon, la Sirène, les Diamants de la couronne,
le Domino noir, Fra Diaiolo, etc. La disposition la plus
ordinaire d'une ouverture d'opéra sérieux présente d'abord
OVA
1357
OXF
QDe courte introdaction d*un mouvement grare, puis an
oilêgro brillant ou passionné : dans l'opéra comique, on
débute souvent par Vo/^Tfo, sans préparation. BÛiucoup
d'ouvertures sont écrites dans le ton de ré^ qui est écla-
tant et propre aux grands effets d'orchestre. De nos Jours,
il n'est pas rare qu'un opéra soit privé d'ouverture, et
débute par une simple Introduction {V, es mot), fi.
OUVRAGE, en termes de Fortification, travail avancé
en dehors d'une place. Vouvrage à corne, ou simple-
ment corne, placé ordinairement devant une courtine et
gaelquefois devant un bastion, se compose d'un front de
lortiflcation, c-à-d. d'une courtine et de deux demi-bas-
tions Joints à la place par deux longs côtés, dits ailes on
branches. Il y a des cornes à double flanc , c-à-d. qu'à
partir du demi-bastion les ailes sont à retour, au lieu
d'être parallèles entre elles ; elles se dirigent vers le mi-
lieu d'une des courtines de la place, et s'y brisent à peu
de distance du chemin couvert. Il y a eu des cornes trian*
gnlaires qui étaient à bastion entier, au lieu d'être à de^
mi-bastîon. Au xvn* siècle, on appelait cornes couronnées
celles qui avaient leur front couvert par une défense en
forme ae bastion, accompagné de deux petites courtines;
quelquefois aussi elles étaient couvertes par une demi-
lune. — Vouvrage à couronne a on front composé d'un
bastion auquel s'adjoignent deux courtines, terminées
chacune par un demi-bastion ; ses ailes se dirigent Jus-
qu'à leur demi-gorge vers la place dont il dépend. H v
a des ouvrages à couronne double qui se construisent à
trois fironts. — Le» ouvrages de campagne, ordinaire-
ment en terre, quelquefois palissades, sont les redoutes
ou blockhaus, les fortins, les flèches, les redans, etc.
OUVRIER (du latin operartus), celui qui se livre à un
travail manuel pour le compte d'autrui et en vue de ga-
gner an salaire. Il travaille à façon, quand on lui fournit
les matériaux et qu'il les met en œuvre, soit chez lui,
soit daÂs l'atelier du maître; à ses pièces, s'il est payé
en raison du travail qu'il exécute; a la journée, quand
il reçoit chaque Jour un prix déterminé. Il existe certaines
lois spéciales qui régissent les ouvriers (V, Apprentis-
sage, Enfants dans les vANDPAcnmBS, Atbubr, Livkbt,
CoAunoN, Prud'hommes). F. aussi Arts et métiers, Sa-
laire, AssocuTiON, Compagnonnage, Soqalisme, Tra-
vail.
ouvriers d'administration. F. Administration.
ouvriers maritimes, nom sous lequel on comprend les
charpentiers de navires, les perceurs, les calfata, les
voiliers, les poulieurs, les tonneliers, les cordiers, et les
scieurs de long, h» individus exerçant une de ces pro-
fessions dans les ports de mer ou autres lieux maritimes,
sont portés au rôle de l'Inscription maritime, et, en cas
de guerre ou préparatifs de guerre, peuvent être appe-
lés dans les arsenaux de la marine impériale. lia sont
eiempts de toute autre réquisition, et notamment du
service militaire. La loi du i brumaire an iv (25 octobre
170!^ el une ordonnance du 3 mai 1839 ont réglé leur
situation.
oormiERS MiLiTAiRBS, ouvriers chargés, dans les armées,
de l'exécution matérielle des détails relatifs aux services
des subsistances et de l'habillement et campement.
OUVROIR, salle où, pendant le moyen âge, quelques
ouvrières se réunissaient pour travailler. Les couvents
de femmes avaient tous une salle de ce genre pour les
travaux de couture ou de broderie. Plusieurs commu-
nautés établirent des ouvroirs publics pour les ouvrières
sans travail. De nos Jours, les ouvroirs créés par des so-
ciétés charitables n'ont pas réussi pour les femmes, mais
ont été utiles aux Jeunes filles. Ils ont l'inconvénient de
faire une concurrence ruineuse aux ouvrières de pro-
fession.
OVATION, r. ce mot dans notre Z>tc(tomiatr9 de Bio-
graphie et ^Histoire.
OVATIOM DBS AUTEURS DRAMATIQUES , droIt quO lO publlC
^arroge d'appeler sur la scène, à la suite d'un grand suc-
cès, on poète dramatique dont il vient d'applaudir l'ou-
vrage. En 1718, Voltaire, après la l*"* représentation de
ion OEdipe^ appelé à grands cris par les spectateurs, avait
été obligé de se montrer dans une loge. Trente ans plus
tard, en 1748, la Mérope, du même poète, excita tant
d'enthousiasme à la 1** représentation, quil fut encore
obligé de se montrer au public, et parut dans la loge du
tu « pleioe de personnes de sa connaissance. Plus tard
cet appel dégénéra en coutume, et ce Ait sur la scèn»
même que l'auteur dut venir recevoir les applaudîâao-
ments du public Vers le milieu du xvui* siècle, la coutunM
était en pleine vigueur; Laharpe, Ducis, et quelques
autres, reçurent cette ovation, même plusieurs fois : La-
harpe,pour ses tragédies de Warwick, en 1763, et de Co-
rtofon^en 1784. A cette dernière occasion, il a fait, dans sa
Correspondance littéraire, la réflexion suivante, pleine de
Justesse x « J'ai cédé aux instances des comédiens [pour
répondre à l'appel du public,] quoique J'aie toujours
pcôisé qu'il n'éûut pas convenable ôu'un auteur parût sut
le théâtre, si ce n'est à un premier ouvrage, quand le
public semble adopter sa Jeunesse, et lui donner pour
ainsi dire la robe virile. » Aujourd'hui, la coutume des
ovations de ce genre subsiste encore, mais elles sont
rares, le public ayant le bon goût de ne les pas prodiguer
aux poètes dramatiques. C» D— t.
OVE (du latin ovum, œuf), nom donn<!, <m Architec-
ture : 1* à la moulure convexe formée d'un quart de
cercle, et qu'on appelle aussi quart de rond; 2« à l'échiné
du chapiteau dorique; 3<* à un ornement en forme d'œul«
sculpté sur une moulure ronde, et entouré de nervures
gracieuses.
OVIEDO (Cathédrale d'). Cette église, construite de
1380 à 152S, est une des plus belles de l'Espagne, Le
portail se compose de trois grandes arcades, qui corres-
pondent aux nefs de Tinténeur; elles sont richement
ornées de fleurons et de guirlandes, mais on n'y voit pas
une statue : seulement, au-dessus de la porte prindpate,
on a placé les 6 personnages de la Transfiguration, et les
bustes des rois FroUa et Alphonse le Chaste. Une tour,
assise sur les quatre piliers de l'arcade de droite, s'élève
à une hauteur de 80 met, et se détache de l'édifice dès
son 2* corps : ce corps et le 3*, que couronne un riclie
balcon à ornements gothiques, sont percés d*nne fenêtre
ogivale sur chaque face; un 4* corps laisse apercevoir le
style de la Renaissance dans ses fenêtres, et au 5* repa-
raît l'art gothique; le tout se termine par une pyramide
octogone, creuse, hérissée de feuillages sur ses arêtes.
Des faisceaux de sculptures enveloppent de bas en haut
les angles de cette magnifique construction. L'intérieur de
l'église n'a que 67 met. de longueur et 22 met. de lar-
geur ; mais les proportions en sont parfaites. Au-dessus
des arcades règne une galerie, dont les croisées en ogive
sont placées deux à deux entre chaque pilier; puis, d'im-
menses fenêtres, divisées en six compartiments par des
meneaux, s'élèvent Jusqu'à la voûte. Dans le bras sep-
tentrional du transept, la Chapelle dite d^Alphonse le
Chaste contient neuf urnes où sont les cendres de neuf
rois des Asturies; dans le bras méridional, la Chapelle
siànte renferme un grand nombre de reliques. On voit
dans le chœur des stalles habilement sculptées, où des
sujets très-profanes se mêlent aux scènes de l'Ancien
Testament. La Grande chapelle occupe l'abside : elle a un
très-beau retable doré, dont les figures en relief repré-
sentent la Vie et la Passion de J.-C. Sur le flanc méridio-
nal de l'église se trouve un cloître de petites dimensions,
mais d'une riche architecture : chaque côté est percé de
cpiatre grandes fenêtres ogivales; les chapiteaux des pi-
liers ont une curieuse ornementation de feuillages, d'ara-
besques, et de* scènes historiques.
OXFORD (Cathédrale d'). Ce monument, oui date du
xn" siècle, mais dont plusieurs parties Indiquent des
additions ou des restaurations postérieures, est construit
sur un plan très-irrégulier. La nef, composée seulement
de quatre travées, est accompagnée de collatéraux; le
chœur a une nef collatérale d'un côté, il en a deux de
l'autre, ayant à leur suite une autre nef assez lai^ge, qu'on
appelle la Chapelle latine. Ce qu'il y a de plus remar-
quable, ce sont les voûtes en bois, d'um» ''x>nstruction
hardie et élégante, et dont les nombreuses nervures re-
tombent sur de gracieux pendentifs. La longueur de
l'édifice est de 50 met., qui se partagent presone égale-
ment entre la nef et le chœur; le transept a 3â met de
longueur, et la nef 17 met de largeur, y compris les
collatéraux. La vue extérieure ofl^ peu d'intérêt; la tour
centrale, surmontée d'une flèche, n'est ni riche ni élevée.
La cathédrale d'Oiford a une belle salle capltulaire, de
style ogival primitif, voûtée en pierre, et soutenue sur
des faisceaux de colonnettes dont les chapiteaux sont d4>
Ucatement ouvragés. 3.
F AD
13S8
PAG
P
P, la 10' lettre de notre alphabet, et la 12* de noa
consonnes. C*est une labiale, dont l'articulation manque
dans certains idiomes, par exemple en arabe, en Japo-
nais, en suédois; les mots commençant par un P dans
cette demi^ langue sont d'origine étrangère. Beaucoup
d'Allemands ont quelque peine à employer le P, et le
mots où on ne le prononce pas , comme baptême, coup,
beaucoup, drap, camp, champ, exempt, loup, sept, temps,
dompter, etc. 11 existe quelque affinité entre le p et le v :
ainsi, loup fait au féminin louve; rat?e dérive du latin
râpa; père se dit en latin pater et en allemand vater.
Notre groupe PH n^est une lettre composée que par rap-
port à sa forme, car il représente rarticulation simple
F. — Dans les inscriptions latines, P est une abréviation
pour Publius, Paulus, proconsul, pontifex, plebs, pa-
tronus, pius, perpetuus, posuit, pondus, ponendum,
post, etc. PP signifie pater patriœ , proprœtor, prœposi-
tus, primipilus; P. C, patres conscripti; P, K., pridiè
kalendas; S. P. Q. R., senatus populiuque romanus.
Aujourd'hui , P devant les noms propres signifie Pierre
ou Paul; Ph., Philippe, Devant un nom de religieux, P.
signifie Père. Au bas d'une lettre, P. S. veut dire post-
scriptum. Dans le commerce, P est pour protesté; p. Vo
«ignifie pour cent. Sur une partie de musique, p est pour
ptano (doux), et pp pour pianissimo. Sur les sceaux du
pape, S. P. S. P. sont les initiales des noms de S^ Pierre
et S^ Paul. — Autrefois, P était la marque monétaire de
la ville do Dijon. — Chez les Grecs , le pt (II) , employé
comme lettre numéfale, valut d'abord 5, parce qu'il était
l'initiale de pente (cinq); plus tard, tr' représenta 80, et
.ic 80,000. Chez les Latins, P valut 7 selon les uns, 100
selon les autres; quelques-uns lui ont donné la valeur
de 400, et. en le surmontant d'un trait horizontal (ô),
celle de 4,000, de 40,000 ou de 400,000.
PACAGE (Droit de). K. Parcours.
PACHA. V, ce mot dans notre Dictionnaire de D'iogra^
pfûe et d^ Histoire.
PAC0T1LX.E, autrefois Paquotille {de paquet), cer-
taine quantité de marchandises assorties, qu'on emporte
dans un pays lointain, afin d'en faire le commerce. Par
déni^ement, le mot s'applique aux marchandises de
qualité inférieure.
PACTA CONVENTA. V. ce mpt dans notre Z)ic(tofi-
wUre de Biographie et d*Histoire.
PACTE (du latin pactum^ convenu), terme aujourd'hui
synonyme de contrat , de convention.
PACTE COMMISSOIRB. V. COUMISSOIAB.
PACTE DE RACHAT. V, RACHAT.
PADICHAH. V. ce mot dans notre Dictionnatre de
Biographie et d^Histoire.
PADOGGS. V. Baguettes.
PADOUAN (Dialecte), un des dialectes italiens, inter-
médiaire entre le vénitien et le lombard. Il supprime
nombre de voyelles, et change fréquemment les consonnes.
C'est peut-être des dialectes de l'Italie le plus difilclle à
comprendre.
PADOUANES, nom donné à certaines médailles qui
ont été parfaitement contrefaites d'après l'antique par
Louis Léon, Jean Cavino et Alexandre Baniano, graveurs
de Padoue. Leurs coins, que possédaient autrefois les
chanoines de S^'-Geneviève, sont aujourd'hui au Cabinet
des médailles de la Bibliothèque impériale de Paris. Des
padouans ont été faits aussi par Michel Dervieu, de Flo-
rence, dit le Parmesan , par Carteron , de Hollande, et
par Gogonnier, de Lyon.
PADOUE (Église S^-Antorie, à). Cette église, une des
plus belles de l'Italie, a été construite sous l'influence
des idées byzantines. Commencée en 1255 par Nicolas
de Plse, elle fut achevée en 1307 ; toutefois, ses huit cou-
5 oies et clochers furent ajoutés dans le xv* siècle. Au-
essus de la grande porte d'entrée sont deux célèbres
figures de S^ Bernardin et de S^ Antoine, peintes par
Mantegna, mais g&tées par des retouches. L'intérieur de
l'édifice, dont beaucoup de parties ont été refaites à Is
suite de divers incendies, est riche en œuvres d'art; du
côté gauche, on remarque : une Madone peinte sur uc
pilier, et attribuée à Stefano de Ferrare (xiv* siècle) ; le
monument d'Alexandre Contarini, exécuté sur les dessini
de San-Micheli ; la chapelle de S^-Antoine, dont l'archi-
tecture est de Sansovino, et qui est entièrement revêtue
de bas-reliefs en marbre blanc, représentant la vie du
saint. Du côté droit se trouve la chapelle de S^-Félix,
couverte de fresques du xiv* siècle, et la chapelle du
S^-Sacrement, dont l'autel a été sculpté par Donatello.
Le chœur, entouré de 12 bas-reliefs de bronze, où Dona-
tello a représenté des faits de l'Ancien Testament, con-
tient un magnifique crucifix de bronze par le même
artiste, et un grand candélabre pour le cierge pascal,
admirablement travaillé par André Riccio. Dans une
vaste chapelle située derrière le chœur, on conserve de
nombreuses reliques : les armoires qui les contiennent
sont surmontées d'une statue de S' Antoine dans une
gloire, groupe énorme taillé dans tm seul morceau de
marbre.
PADOciB {Église S^MosTiNE, à). Cette église fut élevée,
dit-on, sur l'emplacement d'un temple de la Concorde, et
plusieurs fois détruite : on prétend que les deux çriffons
du porche actuel proviennent de l'édifice primitif. Le
monument actuel fut commencé en 1521 par André Ric-
cio, et achevé en 1549 par Morone. Il est remarquable
par la grandeur de la nef, la simplicité et la hardiesse
des proportions; l'aspect en est malheureusement g&té
par le nadigeon : les murs sont blancs, les chapiteaux
des colonnes sont gris, les arcs-doubleaux et les caissons
des voûtes Jaunes. Le tableau du maître-autel, représen-
tant le martyre de S** Justine, est un des chefs-d'œuvre
de Paul Véronèse. Dans une chapelle, on conserve un
cercueil de bois, qu'on dit avoir renfermé les restes de
S* Luc.
PADOUE (Palais de Justice de). Ce monument fut com-
mencé en 1172 par Pierre Cozzo. Quand les fondations
furent sorties de terre, on abandonna le travail jusqu'en
1209. Il fut voûté en 1219; on le recouvrit en plomb en
1306. Un incendie consuma la voûte en 1420; le Sénat
de Venise la fit reconstruire. Alors on démolit deux murs
intérieurs, et on l'on obtint cette immense salle d'au-
dience dite Salone, oui est la plus vaste de l'Europe :
elle a 100 met. de longueur, sur une largeur et une
hauteur de 33 met., sans autre soutien que les morailles.
Colles-ci sont couvertes de peintures* On conserve dans
U salle le prétendu monument de Tite-Live.
PiEAN. V, P^Aiif dans notre Dictionnaire de Biogror
phie et d'Histoire.
Pi£NULA, manteau romain. V, notre Dictionnaire dé
Biogra/phie et d^Histoire.
P^ESTUM (Monuments antiques de), à 40 kilom. S.-E.
de Naples. Ces monuments en ruines, c[ue l'on considère
comme les plus parfaits que les Grecs aient laissés en Ita-
lie, sont au nombre de trois, et construits tout en pierre :
celui du milieu, ancien temple périptère de Neptune,
forme un carré long et présente 6 colonnes doriques can-
nelées sur chacune de ses façades, 14 de chaque côté. Les
colonnes qui formaient le portique supportent encore le
fronton ; celles de l'enceinte sont seulement réunies par
une corniche. Les deux autres édifices sont : un temple
de Gérés, hexastyle et périptère, avec 13 colonnes de
côté ; et une basilique, dont il reste 9 colonnes de face et
18 sur chacun des flancs. On voit encore à Psestum de;:
restes d'une enceinte carrée, faite de gros blocs tailléf
et posés sans ciment, et coupée à distances égales par
8 tours, plus récentes que les murs : des quatre portes
dont elle était per^e, il n'y a plus de traces que de celle
de l'Est. On a retrouvé enfin quelques vestiges d'un aque-
duc, d'une fontaine, d'un théâtre, d'un amphithéâtre
d'un logement de soldats, etc.
PAGAIE (de l'indien pagaM), petit aviron court, avec
lequel les sauvages font marcher leurs pirogues.
PA!
1359
PAI
PAGANIGA. K. Balle ( Jeaz de) , dans notre IHctum-
naire de Biographie et d'Histoire.
PAGE (du latin pagina)^ en termes de Typographie,
l'un des côtés d*un feuillet, et rimpression qui y est
contenue.
PAGES (Mise en). F. GoMPOsmoif.
PAGINATION, série des nombres ou numéros qui le
trouTont en tête des pages d*un livre, pour marquer Tor-
dre relatif de celles-ci. Paginer, c'est numéroter les feuil-
lets. Les préfaces, les introductions se paginent ordi-
nairement en chiflTres romains, parce que ces parties
furmeni une espèce de hors-d'œuvre, et ne s'impriment
que quand l'ouyrage est fini et paginé en chiffres arabes;
on prend alors alors des chiffres romains pour éviter la
confusion. Dans les premiers temps de l'imprimerie, on
paginait à la main après l'impression ; le Tacite de Jean de
Spire, publié à Venise en 1469, est le premier livre dans
lequel les chiffres des pages aient été imprimés. V. Magné
de Marolles, Hecherches sur Voriginê et le premter usage
des registres, des signatures, des réclames et des chiffres
de pages dans Us livres imprimés, Paris, 1782, in-S».
PAGNE (du latin pannus)^ morceau d'étoffe dont les
nègres et les Indiens qui vont nus s'enveloppent le corps
depuis la ceinture Jusqu'aux genoux.
PAGODE (du persan pout , idole, et gheda, maison?
ou de l'hindou bnagavati, maison sainte )t nom donné
par les Européens aux temples construits en plein air par
les Hindous et autres peuples de l'Asie méridionale. Ces
monuments sont en brique ou en pierre, avec des in-
crustations de marbre, de porcelaine, etc., et quelquefois
en bois peint Ils sont généralement surmontés d'une
construction pyramidale, dont la forme est très -tour-
mentée. Les idoles du sanctuaire, auxquelles on donne
aussi le nom de pagodes, sont pour la plupart en terre
brunie, de formes grossières et bizarres, mais richement
ornées. Cest par comparaison avec ces idoles qu'on a
appelé pagodes , au siècle dernier, les magots ou figures
çrotesques dont on ornait les cheminées et les consoles.
V. iHoiEif (Art).
PAGOOB , monnaie d*or des Indes. La pagode au crois-
sant vaut 9 fr. 46 c. ; la pagode à Vétotle, 9 fr. 35 c. ; la
pagode de Pondiehéry, 8 fr. 32 c.
PAIE, PAIEMENT, V. Pâte. Payement.
PAILE, vieux mot q^ui signifiait manteau^ dais, po-
otl/ofi, et qui désignait aussi une étoffe de soie rayée
provenant d'Alexandrie en Egypte.
PAILLASSE (de l'italien pagliaccto, homme de paille),
bouffon populaire, ainsi appelé parce qu'il est habillé ae
cette toile à carreaux dont on recouvre les paillasses de
lit. C'est l'acteur principal des parades Jouées sur des
tréteaux en plein vent, le comique des spectacles d'acro-
bates, dont il parodie grotesquement les sauts et les
gambades.
PAILLETTES , petits disques d'or, d'argent ou d'acier,
percés au centre, et que l'on coud sur une étoffe pour
Tomer. On en voit sur certains vêtements sacerdotaux
et sur des costumes d'acteurs.
PAILLON , petite feuille de cuivre battu, trte-mince
et colorée d'un côté, que les joailliers mettent au fond
des chatons des pierres précieuses pour en augmenter
l'éclat.
PAIN. Le pain étant un aliment de première nécessité,
les gouvernements en ont souvent surveillé la fabrication
et le prix. Au moyen âge, le pain de première qualité
s'appelait patfi de Chaillg, et le pain commun, pain de
brode* Les règlements ne prescrivaient rien sur le poids
du pain, que l'usage seul déterminait; mais ils fixaient
les prix , et défendaient de vendre des pains de plus de
deux deniers ou de moins d'une obole. Les puns mal
faits on rongés par les rats ne pouvaient être ni mis en
étalage dans la boutioue ni portés le samedi à la halle ;
ils devaient être vendus au rabais sur un marché parti-
culier, qui, à Paris, se tenait le dimanche entre le parvis
Notre-DÎume et l'église S^-Christophe. Les prud'hommes
faisaient la visite chez les boulangers pour s'assurer si
les pains étaient bons t les mauvais étaient saisis, et le
grand-panelier condamnait le délinquant à une amende
(6 deniers an xm* siècle). Au mois de Juillet 1372, on
décida, après plusieurs cuissons d'essai, que le patn de
Chailly d'un denier pèserait tout cuit neuf onces un quart
{à quinze onces la livre) , le pain bourgeois ou de secocde
qualité douze onces, le pain de brode ou pain bis vinat-
quatre onces. Les pains de deux deniers pesaient le double.
Le froment de première qualité valait alors douze sous à
Paris; à chaque augmentation de trois sous sur le marché,
pains dévident diminuer de poids, celui de Chaillir
d'une demi-once, les deux autres d'une once ; à chaque
diminution de trois sous, ils devaient augmenter d'un
poids équivalent. L'échelle de proportion fut modifiée la
même année après la moisson ; mais le principe resta le
même. Ce système pouvait produire de dangereuses illu-
sions pour la foule, qui ne s'apercevait pas tout d'abord
des changements qui survenaient dans les conditions de
son existence parce que le prix du pain ne changeait pas* ,
Au XV* siècle (U39), on changea de système, et le poids
du pain resta invariable. C'est ce qui a lieu de nos Jours.
Jusqu'en 1817, on n'a fixé que le prix du pain de première
qualité; jusqu'en 1823, la taxe était faite à des époques
indéterminées; jusqu'en 1840 (16 nov.), on taxait le pain
de 2 kilogrammes, et on était obligé dWorder une tolé-
rance de poids à la fabrication. Aujourd'hui la taxe donne
régulièrement toutes les quinzaines le prix du kilogramme
de première et de seconde qualité : on part de ce principe,
que le sac de farine pesant net 157 kilogr. doit produire
294 kil. de pain, et que la fabrication coûte 11 francs. L.
pAm a chantes, PAm d'aotel, ou paui sacramentel,
pain azyme ou sans levain, réduit en feuille mince, coupé
en grands ronds sur lesquels se trouve empreinte la figure
de J.-C. , et dont on fait des hosties pour la consécration.
Le nom de pain à chanter vient de ce que ce pain sert à
chanter la messe.
PAm-AssiETTE, pslu d'uuo pàto épalsso et solide, fabri-
qué aux xni* et xiv« siècles, et dont on faisait des
assiettes. On en servait une à chaque convive, qui y dé-
coupait ses morceaux, et qui la mangeait quand elle était
imprégnée de sauce et du Jus des viandes. Le pain-
assiette se nommait aussi tranchoir.
PAIN. BéNrr. Le jour du Sabbat, les Hébreux offraient
à Dieu dans le Temple 12 pains sans levain, dits pains
de proposition ou d'offrande, et que les prêtres seuls pou-
vaient manger. Ces pains étaient une allusion aux 12 tri-
bus d'Israël. Chez les premiers chrétiens, du pain bénit
était offert aux catéchumènes avant leur baptême, à la
place du pain de l'Eucharistie, auquel ils n^étaient pas
encore Jugés dignes de participer. Plus tard , un pain du
même genre fut distribué à tous les fidèles, comme un
gage de leur mutuelle affection. On dit que l'usage de
cette distribution fut établi par un concile de Nantes,
en 655. Ai:^ourd'hui, le pain oénit est offert tour à tour
par les fidèles de chaoue paroisse, le dimanche, à la
grand'messe, pendant l'Offertoire; celui qui va à l'offrande
porte un cierge allumé, au'il donne à l'officiant, sans
doute pour indiquer oue les fidèles doivent pourvoir à
l'entretien du luminaire, et le prêtre lui fait baiser la
patène. B.
PAIR, en termes de Commerce, égalité de change qui
résulte de la comparaison du prix d'une monnaie dans un
pays avec celui qu'elle a dans un autre. Le change est au
pair, quand pour une somme qu'on donne en un lieu on
reçoit la même somme en un autre lieu sans aucune re-
mise. — A la Bourse, une valeur est au pair, quand elle
se vend et s'achète au prix de sa création.
PAIR ET iMPAia, Jeu qui se Joue avec trois dés comme
le passe-dix ( V, ce mot ).
PAIR ou NON , Jeu dans lequel on donne à deviner si un
nombre d'objets qu'on tient dans la main est pair ou im-
pair.
PAIRLE, en termes de Blason , une des pièces hono-
rables de reçu. Sa forme est celle de l'Y; c'est un com-
posé du chevron renversé et du pal abaissé. Le mot vient
du latin parilis, parce que le pairie est formé de trois
branches de longueur égale.
PAIRS, PAIRIE. V. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire,
PAIRS ET IMPAIRS (Modos), qualifications données, dans
le Plain- Chant, aux modes plagaux et authentiques
{V. ces mots).
PAISSON, mot synonyme de Panage {V. ce mot),
PAIX (du latin pax), se dit de l'état d'une nation qui
n'a pas d'ennemis à combattre, et du traité qui met fin à
une guerre {V, TaArri). L'idée de faire régner à Jamais
la paix entre les hommes a germé plusieurs fois dans
Suelques têtes : au commencement du xvm* siècle, l'abbé
e Saint-Pierre rêva la Patx perpétuelle : une société s'est
formée à New- York, en 1815, dans le but d'établir cette
paix, et une autre en 1816; des Congrès de la paix se
sent tenus k Londres en 1843, à Bruxelles en 1848, à
Paris en 1849, à Londres encore en 1851.
PAIX, déesse allé^rique. V. notre Dictionnaire de Bto^
graphie et d*Histo%re,
PAIX, en latin osculaiorium, petite plaque de métal cise-
lée, éinaiilée ou niellée, sur laquelle on a représenta a
PAL
13««
PAL
craciOxion» U uiote face, la Vierge avec renfimi Jésus, ou
f Agneau, et dont on fait usage dans TÉglise catholique à
la grand*me88e. Le célébrant rayant baisée à VAgnus Dei,
an acolyte Ta la présenter à tous ceux qui assistent dans
le chœur à l'office divin, et, en la leur faisant baiser,
prononce ces mots : Pax tecum (La paix soit avec yous).
Cet usage remonte au pontificat d'Innocent I"', dans le
V* siècle : il rappelle le bauer de paix que les fidèles des
temps précédents se donnaient mutuellement avant d'aller
receyoïr la communion.
PAIX ( Ju^ de ). V. Jdgb db pas, dans notre Diction-
naire ao Biographie et â^ Histoire.
PAIX (Pierre de la], nom qu'on donnait autrefois, dans
les églises, à un siège de pierre, placé ordinairement près
de l'autel, et ^kA servait de lieu d'asile.
PAL ( du latin palum ), pieu aiguisé par un bout. L'em-
palement ou supplice du pal , usité chez presque tous les
peuples de l'antiquité, et encore en usage chez les Turcs,
les Persans et les Siamois, consiste à enfoncer le pieu
dans le corps du condamné, qu'on laisse mourir dans cet
état. L*empalement a exista en Russie ; ce fut la tzarine
Elisabeth qui le supprima au siècle dernier.
PAL, en termes de Blason , une des pièces honorables
de l'écu. Il en occupe perpendiculairement le milieu.
Quand il y a plus de trois pals, ils prennent le nom de
verpetiês* Le pal , effilé à sa partie supérieure, est dit ai-
Quisi; à sa partie inférieure, 11 est fiché ; si Teffilement
est onduleux en haut, le pal est flamboyant; ti c'est en
bas , il est comété. On rencontre, mais rarement , des
pAlfl-bandes, des pals-barres, des pals-fasces et des pals-
chevrons.
PALADIN. K. notre Dictionnaire de Biographie et
^Histoire.
PALAIKA. r. BalaIka.
PALAIS , du latin palatium , signifiant maison sur le
mont Palatin, à Rome, et, par suite, demeure des empe-
reurs romains. On a plus tard appelé Palais la demeure
vaste et somptueuse des souverains; tels sont, à Paris,
les palais des Tuileries et du Louvre. Le même nom a été
appliqué à des édifices où s'exercent les grandes fonctions
de Tadministration publique, comme le Palais du Sénat ,
le Palais du Corps Législatif, etc. A Tétranger, et parti-
culièrement en Italie, le nom de Palais est donné aux mai-
sons des grands personnages ; en France, par un senti-
ment de convenance délicate, on nomme Hotels les palais
des grands personnages.
PALAIS DE JUSTICE , lieux où siègent les tribunaux.
On appelle jours de Palais les Jours d^audience, ceux où
l'on plaide au Palais. Les Juges, avocats, avoués, huis-
siers, etc., se nomment gens de Palais. Les formules et
les termes dont on se sert dans les actes Judiciaires ou
dans les plaidoiries constituent le style du Palais,
PAïAis DE JUSTICE DB PARIS. / V. cos mots dsus uotro Die-
PALAIS-ROYAL. S tion. de Biog. et d^ Histoire.
PALAIS-ROYAL f Théâtre du), théâtre qui fut occupé Jus-
qu'en 1789 par aes enfants qu'on appelidt les petits co-
médiens de H. le comte de Beaujolais. Une actrice, la
llontansier, s'v établit à la Révolution avec une troupe
dramatiaue , dont faisaient partie Brunet et Tiercelin.
Quand elle alla occuper une autre salle sur la place Lou-
vois en 1703, le thé&tre du Palais-Royal, qu*on avait
ippelé Théâtre de la Montagne, fut abandonne aux acro-
bates Furioso et Ravel, puis, sous le nom de Théâtre des
ieux forains , à des marionnettes, et enfin à des chiens
savants. On le transforma encore en Café de la Paix,
ivec autorisation de faire chanter des ariettes et Jouer de
petites scènes de/ant les consommateurs. En 1831, le
rhé&tre du Palais-Royal fut rétabli , et il s'est consacré
depuis cette époque au genre comique et grivois. Il a
:ompté dans sa troupe Samson, Régnier, Philippe, Le-
jeintre aîné, Achard, Levassor, Alclde Tousez, Sain vil le,
Leménil, Grasset, Ravel, Hyacinthe, Amal, M"*« Dé-
azet, Fargueil, etc. De 18m à 1852, on lui donna le
jom de Théâtre Montansier. B.
PALAN , en termes de Marine, assemblage de poulies,
io moufles et de cordages, dont on se sert sur les b&ti-
cnents pour enlever des fardeaux ou exécuter des ma-
aœuvres. Un petit palan se nomme palanqmn.
PALANCHE ou PALAGHE , ancienne arme tenant de
la lance et de l'épée, que les hussards portaient à leur
selle.
PALAN ÇONS, en termes de Maçonnerie, morceaux de
Dois qui retiennent les torchis.
PALANQUIN (en hindou palky)^ sorte de chaise ou de
dtiâre, ordinairement découverte et surmontée d'un dais,
dont on s^Mrt en Chine, dans l'Inde, dans les parties les
plus chaudes de l'Amérique, etc. Quatre porteurs son-
uennent le palanquin sur leurs épaules.
PALATALES (du latin palcUum, palais), consonnes
produites par les mouvements de la langue, qui va tou-
cher le palais. Ce sont d, t,l,n, r.
PALATIN. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio*
graphie et d^Histoire.
PALATINE, fourrure. V. notre Dictionnaire de Bio*
graphie et d'Histoire, au Supplément.
PALATHiE (École). V. ÉcoLB DD PALAIS, daus iiotre
Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire.
PALE (du latin pala, pelle), carton carré, garni en
dessous de toile blanche, en dessus de divers onuementa,
et qui sert à couvrir le calice pendant la messe.
PALE, petite vanne qui sert à ouvrir et à fermer la
chaussée d'un étang, le biez d'un moulin, ou à faire
arriver l'eau sur la roue du moulin ou à la retenir.
PALE , en termes de Blason, se dit d'un écu divisé et»
six pals égaux par cinq lignes perpendiculaires, dont trois
pals d'un émail, trois d'un autre; un de métal, l'autre
de couleur alternativement. Il y a aussi des écua paies de
huit pièces. Un écu est contrepalé, lorsqu'il est coupé, et
que les demi-pals du chef, quoique d'émaux semblables
à ceux de la pointe, sont nànmoins différents à leur ren-
contre, de sorte que si le premier du chef est de métal ,
celui oui luH répond au-dessous est de cooleur. Un écu
est palissé, quand il y a des pals aiguisés.
PALÉE (de pal, pieu), rang de pieux boulonnés de
chevilles de fer et enfoncés avec le mouton pour former
une digue, soutenir des terres, porter quelle fardeau de
maçonnerie ou les travées d*nn pont de bois.
PALEFROI. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio*
graphie et d'Histoire.
PALENCA (Dialecte). V. CaraIbb (Langue).
PALENQUÉ (Ruines de). V. AiiihticAui (Art).
PALÉOGRAPHIE ( du grec palaios, ancien , et gn^è,
écriture), science des écntures andennes. Tandis que la
Diplomatique (F. ce mot ^étudie les caractères intrin-
sèques des manuscrits et des chartes, elle en envisage les
caractères extrinsèques, qui sont : la substance ou la ma-
tière sur laquelle on a écrit (pierre, brique, métaux,
ivoire, bois, peaux, feuilles et écoroe des arbres, papyrus,
étoffes, cire, parchemin, papier, etc.); la composition , la
forme et la reliure des livres ; les instruments dont on
s^est servi pour écrire (pinceaux, styles, calâmes ou ro-
seaux, plumes, encres, etc.); les différents genres d'écri-
ture, avec les signes de ponctuation et de correction , les
abréviations, les monogrammes, les lettres conjointes, etc.
V. CALUGRAPHIB, ÉCRITDRB, ABRiVIATIOlfS , DlPLÙMB,
Chartb, Inscriptions.
PALERME (Cathédrale de). Cette église, commencée en
1166 sur les ruines d'une ancienne cathé(hra]e dont les
Sarrasins avaient fait une mosquée, fut consacrée en
1185. Depuis, elle a subi des changements considérables,
et il ne reste plus que de faibles portions de l'édifice
du xn* siècle. La façade, établie sur le flanc méridional,
a été construit de 1426 à 1450; elle offre un mélange de
style normand et d'ornementation moresque, et un long
feston qui lui sert de couronnement découpe ses dente-
lures sur le ciel. Des coupoles s'élèvent au-dessus de la
nef et des bas côtés. L'intérieur, restauré à la moderne
par Fernando Fuga, n*est remarquable que par l'orne-
mentation. Un grand nombre de colonnes de granit sup-
portent les voûtes. Le chœur, pavé de mosaïques de
porphyre et de vert antique, est décoré de statues en
marbre blanc d'Antonio Gagini, et de fresques par Ua-
riano Rossi. Le transept ^e gauche contient des peintures
de Velasquez et de Pietro Novelli, et une table de marbre
sur laquelle est gravée en caractères romains une lettrs
que, suivant la tradition populaire, la S^* Vierge aoiait
adressée aux habitants de Messine. Dans la dbapelle de
S^*-Rosalie est un autel d'argent massif, ainsi que le sar-
cophage de la sainte, également en argent. La catbéMe
de Palerme renferme enfin les tombeaux du roi Roger II,
des empereurs Henri VI et Frédéric H, du roi d'i^on
Pierre II, etc. — Le beffroi est joint à la cathédrale par
une arcade colossale. Le palais archiépiscopai, situé près
de la porte occidentale, appartient au milieu du xv^aiéde.
V. Fr. Daniele, / regali sepolcri del duomo di PaierwOt
Naples, 1784, in-fol.
PALERME (Eglise de Santa-Maria di Martorara, à),
église fondée en 1143 par Geoi^ges d*Antioche, amind db
roi Roger. Le plan en est grec. Une ancienne tour s'élève
en avant de la grande nef, au-dessus d'une galerie aotr^
fois détachée de ('église, et qu*on a reliée à celle-ci pour
l'sKrandir. Les arceaux des trois nefs de la Blaitonna
PâL
1361
PAL
reposent sur des colonnes de (granit oriental à chapiteaux
dorés. Les murs et les plarondi sont couverts de pein-
tures et de mosaïques très-curieuses, panni lesquelles
00 trouve la représentation du roi Roger couronné par le
Christ Un monastère a été ijouté à Fégiise en 1604 par
GeolEroy Martorana.
PALBaME (Le Palais-Royal, à). Ce monument passe i>our
avoir été élevé sur les ruines d*nne forteresse sarrasine.
C'est une réunion d*édifices de difiTérents styles; la partie
centrale, qui est la plus régulière, date de 1610. A Hn-
térienr, é» galeries, disposées à chaque étage, donnent
tor ane grande cour carrée. La chapelle, bfttie en 1129
dans le style ogival, est toute revêtue de marbre blanc,
de porphyre, de mosaïques; les arceaux retombent sur
des dDloones de granit a chapiteaux dorés. Dans les ap-
partements du palais, on remarque les portraits des vice-
rois, one salle décorée de mosalqiies, un observatoire
construit en 1701 par Joseph Piazzi, et deux béliers an-
tiques en bronze d un très-beau travail.
PALESTINE. V, Caractèses d'imprimehie.
PALESTRE. 7. Gymnasb, dans notre DictUmnain d$
Biographie et éTilisiovre.
PALET (Jeu du )• On le nommait, chez les Anciens,
le jeu du disque (k. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biçraphie et (TÛistoire). Nos enfants s*y livrent encore,
mais avec des palets de pierre de bien moindre dimen-
sion. Une variété de ce Jeu est le Jeu du bouchon, dans
leqael on place sur un bouchon de liège les mises des
Joueurs, qui cherchent tour à tour à l'abattre en lançant
on décime ou une pièce de 5 fr., et qui recueillent l'argent
tombé le plus près de leur pièce.
PALET, terme de Blason. V. Besart.
PALETOT (du latin palla, manteau, et du breton toc,
chapeau?), nom donné Jadis à une espèce de casaque à
capuchon, qui fut tour à tour un surtout militaire, un
habillement de laquais, un costume de marin ou de pé-
cheur. On en a fait le mot paietoquet, appliqué en signe
de mépris. Aujourd'hui le paletot est un vêtement à la
mode, sans capuchon, et moins flottant qu'autrefois.
PALETTE, planchette en bois, en ivoire ou en porce-
laine, de forme ovale et fort mince, percée, vers le bord,
d*un trou qui sert à y passer le pouce de la main gauche
pour la tenir, et sur kîquelle les peintres placent et mé-
langent leurs couleurs. On dit qu'un tableau est fait
d'one seule palette, quand on n'y aperçoit pas les reprises
do travail ; qu*il sent la palette, quand les couleurs en
«ont crues et sans accord. Un peintre a une palette bril-
lante, une riche palette, quana il est bon coloriste.
PàLETTE. V. Bougeoir.
PALI on BALI (Idiome), ancien idiome de l'Inde,
tombé à l'état de langue morte, mais qui subsiste à
Ceyian et dans rindo-Qiine comme langue de la religion
et de la science, et qui sert de lien entre des peuples
bouddhistes dont les idiomes vulgaires sont souvent très-
différents les uns des autres. Bumouf et Lassen pensent
qu'il prit naissance dans i'Hindoustan, d'où il fut chassé
avec les doctrines bouddhiques dont il était Tinterprète;
quissu du sanscrit, il offre le degré de déformation que
ceue langue avait atteint an v* siècle de notre ère; que
ses altérations à lui-même donnèrent naissance au prft-
crit (F. ce mot); et que les modifications successives du
sanscrit antique ont été le résultat d'un travail intérieur,
non de l'influence d'aucun idiome étranger. Le pâli abrège
les voyelles longues du sanscrit, et tend, par une sorte
de compensation, à redoubler les consonnes. Il opère
aussi de fréquentes contractions. Il conserve les cas du
aaoacrit, et n'altère les terminaisons de la déclinaison et
do la conjugaison que ouand elles ofTrent des alliances de
lettres qu'une prononoation affaiblie ne peut plus arti-
culer. Il a rejeté le nombre duel, mais gardé les trois
genres, ainsi que le système à peu près complet àee pro-
noms. L'emploi de la voix passive est devenu rare, la voix
mienne a dispam , et aiûsi les modes précatif et con-
ditionnel, n existe, pour écrire le pâli, plusieurs alpha-
Itets; les Birmans se servent d'un caractère carré; les
Siamois ont le caractère khohmen, formé de petites lignes
disposées entre elles angulairement , et un autre alpha-
bet plus cursif. Ces diverses écritures paraissent dériver
d'un ancien alpha^t bouddhique, formé sur le modèle
du dévanâgan brahmanique, et dont quelques éléments
ont disparu , tandis que d autres lettres ont été chargées
d'accents pour reorésenter les nuances de la prononcia-
^on usitée dans Vlndo-Qiine. — Il existe beaucoup de
libres bouddhiques en paii. Les Européens ont lu et
^ipliqué plus on moins complètement divers poèmes
dèûgnés ious le nom de Tchdritas; le Rasavahini, re-
cueil de légendes; une Chronique intitulée âtahâuanxa,
composée par Mahanama et continuée par Dhamniakitti ;
le Boromat, traité de théologie et de philosophie; le
Divapansa et le Dhatadhatufxmsaf ouvrages historiques
en vers; le Kamtnouva^ code des cérémonies à observer
pour élever un prêtre de Bouddlia aux ordres supérieurs ;
le Kammawakya, rituel du culte bouddhique, publié par
Spiegel, Bonn, 1841 ; le Phatimvkkha, corps des règles h
suivre pour arriver an salut V. Clougb, Poli grammar,
with a copious vocàfnUary, Colombo, 1824, in-8<*; Eug.
Bumouf et Lassen, Effat sur le Poli, Paris, 1826, in-8<>;
E. Bumouf, Observations grammaticales sur qu^ques
passages de V Essai sur le Poli, 1826, in-8*; Spiegel, iln«o-
dota Paiica. Uipzig, 1845.
PAUCARES. K. ce mot dans notre Dictionnaùre de
Biographie et d* Histoire.
PALIER. F. EsCAUER.
PAUMBACCHIUS. V. Antiiuccbids.
PALIMPSESTE. K. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
PALINDROME ( du grec palin, de nouveau, à rebours,
et dromos, course, parcours ), nom donné à des vers cpii
présentent toi^ours le même sens, qu*on les lise de
droite à sauche ou de gauche à droite. Tel est cet hexa-
mètre qu'on a mis dans la bouche du Diable:
Signa te, signa, temerb me tangis et angSs,
c^i signifie, de quelaue côté qu'on le Use : « Signe-toi,
signe-toi, c'est en vain que tu me touches et que tu me
tourmentes. » Le vers palindrome est une variété de
ranacyclique (F. ce mot).
PALINGÉNÉSIB (du grecjKsiMi, de nouveau, et gM-
siSf naissance), régénération où renaissance des êtres.
D'après les livres sacrés des Indiens, les mondes se for«
ment, se détruisent, et se reforment; leur commencement
et leur fin se succèdent sans interruption. La métempsy-
cose (V. ce mot ) est une palingénésie d*une espèce par-
ticulière. Les Stoïciens admettaient une nalingéntefe uni-
verselle. Les Gaulois croyaient que l'univers devait périr
par le feu, puis renaître de ses cendres. Cest sans doute
une opinion de ce genre qui était allégoriquement figurée
par la fable du phénix. La résurrection, qui est un dogme
dans un grand nombre de religions, peut être appelée
une palingénésie. — Au xvui* siècle. Ch. Bonnet, de Ge-
nève, a formulé un nouveau système palingénésique.
Suivant lui , le germe d'une espèce, une fois créé, con-
tient les germes de tous les individus qui forment le dé-
veloppement successif de l'espèce; notre globe a déjà
subi des révolutions successives, à mesure que les es-
pèces qui y sont placées ont en elles-mêmes leur déve-
loppement, qui consiste dans an plus grand nombre de
sens et de facultés; l'homme, transporté plus tard dans
un séjjour mieux approprié à ses facultés nouvelles, lais-
sera cette terre au singe et à Téléphant arrivés à une autre
période de leur développement , et les autres êtres s'élè-
veront à leur tour, par une suite de révolutions, dans la
hiérarchie générale de la nature organisée. — Sous le
nom de Palingénésie sociale , Ballanche a imaginé un
système d'après lequel les mêmes formes sociales doivent
se reproduire indéfiniment dans un ordre donné. B.
PALINOD. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio^
graphie et (THistoire.
PALINODIE (du grec ôdè palin , chant en arrière, en
sens contraire). Selon la Fable, Stésichore, ayant dit du
mal d'Hélène au début d'un poème, l'eut à peine achevé,
quMl fut frappé de cécité par les Dioscures, frères de cette
princesse; xnais il n'eut pas plutôt compris la cause de
son malheur, qu*il remplaça les vers imurieux par drs
paroles élogieuses, et Hélène, satisfaite, lui fit rendre la
vue. Ce chant fut depuis célèbre sous le nom de PaUnu-
dUe. L'ode d'Horace à Tyodaris [Odes, I, 16) est une
charmante palinodie. Chanter ta palinodie est devenu
une expression proverbiale pour exprimer l'action de dire
le contraire de ce qu'on avait dit d^abord, de se rétracter
complètement. P.
PALISSADE (du latin palum, pieu), en termes de
Fortification , assemblage de pièces de bois triangulaires,
enfoncées en terre, terminées en pointe par le haut, et
saraissant certains ouvrages de défense. La fraise et l'c^-
bâtis ( V. ces mois) sont des espèces particulières de palis-
sades, — Dans le Jardinage, on nomme palissades, des
arbres touffus et feuillus par le pied, taillés en forme de
mur le long des allées encontre les murailles d'un Jardin •
PALLA, — PALLADIUM, — PALLIUM. F. notre
Dict, de Biographie et d'Histoire.
PAUSSY (Faïences de). V. au Supplément.
86
PAM
1362
PAN
PÂLMA (La Bourse de), dans IMle Majorque. Cet édi-
iicet qu'on nomme en espsNgnol la Lonja, serrait autrefois
aux réunions de marchands; on y donne aujourd'hui des
fêtes. A part ses créneaux, qui sont arabes, il offre un des
modèles les plus purs du style ogiyal appliqué k Tarchi-
tecture civile. Bàtl de 1420 à 1448, il a la forme d'un
^arré long. Sa disposition intérieure consiste en une salle
unique d une grande étendue, dont la Yoûte surbaissée
est soutenue par 6 légères colonnes cannelées en spirale*
PALMA ( Cathédrale de), belle église de style ogival ,
commencée sous Jaime le Coaquérant, et terminée en
1601. Sa façade principale est k VO. ; mais rentrée méri-
dionale, bien qu'inachevée, est beaucoup plus remar-
quable. Le clocher placé à gauche de la façade est appelé
la Torre del Angel, L'intérieur de la cathédrale est divisé
en 3 nefs, dont les voûtes sont soutenues par deux rangs
de 7 colonnes extrêmement légères. Demère le maltre-
autel, la Chapelle roycUe, longue de 24 met., fut destinée
a la sépulture des rois de Majorque : on y remarque sur-
tout le sarcophage de Jaime II. Du maltre-autel au grand
portail il y a une distance de 75 met. ; la largeur de
l'église, y compris les chapelles, est de 40 met.
PALME , branche du palmier. Chez les Égyptiens, elle
désignait la fécondité, parce que le palmier vit longtemps
et fructifie jusqu'à la mort. Symbole de victoire, elle
orne ordinairement la main des triomphateurs et des
martyrs. Dans les pays où Ton n'a pas de buis, ce sont
des palmes qu'on lait bénir au dimanche des Rameaux,
qui prend de là le nom de Dimanche des Palmes, La
sculpture s'est emparée de la palme comme ornement; on
fait aussi des palmes en vignettes, en broderies, et l'on
en trouve sur des mécfaiilles.
PALMIER (Colonne du). V, Colonnes monomentalbs,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d^Bistoire.
PALMYRE (Ruines de ]. V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire»
PALMYRIEN , un des dialectes du syriaque, parlé au-
trefois à Palmyre.
PALONNIER, pièce du train d'un carrosse qui est
Jointe au train de devant ou à la volée, et sur laquelle
les traits des chevaux sont attachés. Il est fait ordinaire-
ment en bois de frêne; depuis quelques années, on en
fait aussi en fer forgé.
PALUDAMElNTUM. I V. ces mots dans notre Diction-
PAMPAS. i naire de Biogr, et d'Histoire,
PAMPELUNB (Cathédrale de). Cette église, dédiée à la
S^* Vierge sous le nom de Notre-Dame du Sanctuaire,
fut bâtie au xv* siècle, sur les ruines d'un édifice du xu* ^
2ui s'était écroulé. La façade actuelle ne date que de la
n du xvui*, et son style grec contraste péniblement avec
le style ogival qui règne partout ailleurs. Un portique co-
rinthien, surmonté d'un fronton, occupe le centre de
cette façade ; le tympan a pour ornement un écu d'armes,
et aux extrémités se dressent quatre statues de saints.
Deux tours, de 50 met. d'élévation, flanquent le portique:
d'abord canrées, elles deviennent octogones au 3* étage ;
elles se terminent par 8 colonnes corinthiennes qui sou-
tiennent une coupole, et que surmonte une corniche
supportant 8 urnes. La cathédrale de Pampelune est en
forme de croix latine et à 5 nefs. Le chœur est fermé par
ane grille, chef-d'œuvre de serrurerie exécuté en 1507,
par Guill. Crœnat, et, à l'entrée, on voit le tombeau de
Charles III de Navarre et de sa femme Léonore de Cas-
tille. Cent stalles, sur deux rangs, ont été sculptées en
chêne d'Angleterre, par Michel Anchetea, en 1530. Le
maître-autel, eu bols doré, est de style gréco-romain. On
conserve, dans la sacristie, une motte de terre sur la-
quelle la tradition dit que la S** Vierge a posé le pied,
et, dans la salle capitulaire, une image de la Vierge, dont
on fait remonter l'existence aux temps apostoliques. Par
le croisillon méridional, une très-belle porte donne accès
dans un cloître magnifique. Là se trouvent : une Adora-
tion des Mages, due au ciseau de Jacques Pérut; les tom-
beaux du général Mina et du comte de Gages; la chapelle
Barbazana (du nom de l'évêque Barbazano) , contenant
de précieuses reliques; la Salle précieuse, ainsi nommée
de ce que les chanoines, en s'y rendant pour tenir cha-
pitre, chantaient le cantique Pretiosa in coiispectu ttu),
et qui servait autrefois à la réunion des Certes du royaume
de Navarre ; la chapelle de la S**-Ooix, où l'on voit une
grille formée de fragments des chaînes de fer par les-
quelles les Arabes s'étaient liés les uns aux autres à la
bataille de Las Navas de Tolosa (1212).
PAMPUILE , Jeu de cartes qui a beaucoup de rapport
aTec celui de la Mouche {V. ce mot) ; le valet de trèflot
feiius le nom de PamphUe, est le principal atout.
PAMPHLET, mot d'origine assez moderne, dérivé sof^
du grec pamphlectos (qui brûle tout), soit du hollandais
pamphier (papier^, et qui désigne une brochure sati-
rique plus ou moins violente. L'esprit de parti qu'on y
trouve presaue toujours a fadt attacher au mot pamphlè-
tmre une idée défavorable. Les auerelles religieuses et
politiques du xvi* siècle firent écjore un grand nombre
de pamphlets : il n'en est pas de plus célèbre que la Sa-
tire Ménippée (F. ce mot). Au xvu* siècle, le Jansénisme
et la Fronde, au xvm* les différends des Parlements et
des Encyclopédistes, puis les luttes de la Révolution firan-
çaise, ne furent pas des sources moins fécondes, et, dans
des temps plus rapprochés de nous, sous le gouverne-
ment de la Restauration, on remarqua encore les pam-
phlets de P.-L. Courier et de M. de Cormenin. Un des
Journaux démagogiques de 1848 s'était intitulé le Pam-
phlet. V. Libelle.
PAN, face d'un ouvrage de maçonnerie. Ainsi l'on dit :
une tour à 6 ou 8 paps. On nomme pan coupé la surface
qui remplace l'angle à la rencontre de deux pans de mur :
on fait des salons à pans coupés; un pan coupé à l'encoi-
gnure d'une rue facilite le tournant des voitures. Lps
côtés de la couverture d'un comble s'appellent pans d»
comble.
FAN (Flûte de). F. Flutb de Pan.
PANABAT, monnaie. V, Banabat.
PANACHE, touffe de plumes flottantes qu'on portait
autrefois sur les casques et les chapeaux. Le panache a
été généralement remplacé dans les troupes par le plu-
met, l'aigrette, ou le pompon. On le voit encore sur la
coiffure des tambours-majors. Sur les chapeaux de fem-
mes, ce sont les plumes d'autruche qui servent à faire les
panaches. Enfin il y a des panaches d'ornement sur les
dais, sur certaines voitures de gala, sur les chars mor-
tuaires, et sur la tète des chevaux qui les traînent.
panache, partie inférieure d'une lampe d'église.
PANACHE, terme d'Architecture. V. Pbxdentif.
PAN AGE (Droit de), du latin panagium; droit de
mener des porcs dans les bois et forêts de l'État, pour
s'y nourrir de glands et de faînes. Il est mis en adjudi-
cation, pour un nombre déterminé d'animaux; les adju-
dicataires ne peuvent abattre ou emporter des glands et
des faînes, sous peine d'amende {Coaeforest., art. 54-57).
PANAULON, flûte traversière qui descend Jusqu'au sol
grave du violon. Elle a été inventée à Vienne, par Trex-
1er, vers 1820. Une partie du tube est recourbée, et elle
a 17 clefs, ce qui en rend le maniement difficile; les sons
les plus bas, sourds et même rauques, ont peu de rap-
port avec les sons plus élevés.
PANCIÈRE, nom donné, dans le moyen ftge, au pcc^
tond ou partie antérieure de la cuirasse.
PANCRACE. ( V. ces mots dans notre Dictionnaire
PANDECTES. ( de Biographie et d Histoire.
PANDÉMONIUM (du grec pan, tout, et daimân^ démon)»
mot créé par Milton dans son Paradis perdu pour dési-
gner le palais où Satan appelle en conseil toutes les puis-
sances infernales. On l'emploie pour désigner un lieu où
régnent les mauvaises passions et le désordre.
PANDORE ou PANDCRE (du latin pandura)^ instru-
ment de musique à cordes, de la famille du luth, mais
dont les cordes étaient de laiton, les touches en cuivre,
le chevalet oblique, et le dos plat.
PANDORION, ancien instrument de musique à rent»
dont la nature n'est pas bien connue. Les uns croient que
c'était une trompette, les autres une flûte.
PANDOURS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
PANDROSION. V. Acropole.
PANDURE. V. Pandore.
PANÉGYRIQUE, mot qui signifia, chez les Grecs, une
assemblée du peuple entier, et aussi tout discours pro-
noncé devant elle dans le but d'exalter la gloire nationale
ou de faire ressortir les avantages de quelque entreprise.
Ainsi, dans son Panégyrique d'Athènes, prononcé vers
l'an 386 avant notre ère, Isocrate s'est proposé de per-
suader aux différents peuples de la Grèce de se réconcilier
pour tourner contre les Perses, leur ennemi commun,
leurs forces réunies : seulement, comme Lacédémone
prétendait conserver le droit exclusif de commander les
Grecs, il entreprend de prouver qu'Athènes, par toute
son histoire, est mieux fbndée à réclamer l'hégémonie.
Le sujet avait de la 'grandeur; malheureusement Isocrste
se préoccupa beaucoup plus du style que des pensées, et
passa dix ou quinze années à ajuster ses périodes; c^était
neaucoup plus de temps qu*il n'en eût fallu à la Porse
n^tir asservir les Crocs, si elle-même n'eût pas été (4us>
PAN
1363
PAN
malade encore que ses adversaires. — En Grèce, on louait
la Uépublique : à Rome, le Panégyrique, réservé d*abord
pour les morts illustres, devint bientôt Télosedu prince
vivant. Les premiers Césars se virent et s^entendirent
presque tous décerner l'apothéose, soit dans des Panégy-
riques proprement dits, soit par incident, an milieu
d'ouvrages où leur personnage et leur nom n'avaient
que faire; louanges odieuses et révoltantes, quand elles
s'adressent à un Tibère, à un Néron, à un Domitien. Le
Panégyrique de Trajan Tut du moins composé par on
écrivain honnête homme pour an prince honnête homme,
r MoD premier dessein, dit Pline le Jeune {lett.; lU,. |8)»
a été de faire aimer à l'empereur ses propres vertus par
tes cbarmes d'une louange naïve. J'ai ^oulu en môme
temps tracer à ses successeurs, par son exemple mieux
que par aucun précepte, la route qu'ils devaient suivre
pour arriver à la même gloire. • II était sincère quand il
tenait ce langage, et son héros n'en était pas indigne. Ce
n'est pas que la déclamation, les subtilités et le ridicule
ne tiennent leur place dans cette œurre d'un élégant,
rhéteur, souvent plus occupé des mots que des choses ;
3uand on lit les puérilités incroyables qu'un 3* consulat
'abord refusé, puis accepté par Trajan, inspire à l'ora-
teur, on comprend que Corneille ait dit un Jour qu'il
n'avait Jamais pu lire plus de guatre pages de suite d'un
Éloge, pas même du Panégyrique du Trajan; que Vol-
taire, dans une Lettre sur les Panégyriques (1767), ait
plaisanté Pline d'avoir eu la patience de louer Trajan
pendant trois heures, et Trajan d'avoir eu celle de l'écou-
ter. Mais le caractère magnanime et modéré et les actes
de lïajan, qui fut, après tout, le plus grand des empe-
reurs romains, méritaient et soutenaient à la fois les
louanges que lui prodiguiût son panégvriste. — Les imi-
tateurs ne manquèrent pas à Pline. De quatre discours
que Dion Chrysostome composa sur les devoirs des rois,
l'un peut passer pour un vâritable Panégyrique de Tra-
jan. Puis un Grec de Mœsie, Aristide, loua Marc-Aurèle,
qui eut (teut^être à subir aussi le même honneur de la
part de son précepteur Fronton. Sous Dioclétien, ce
furent des rhéteurs gaulois qui eurent le triste privilège
de se distinguer dans ce genre oratoire : parmi eux bril-
lèrent Eumône d'Autun, qui composa le Panégyrique de
Constance Chlore, Nazaire de Bordeaux, un premier Ma-
mertin, qui eut l'effronterie de louer le vieux Maximien.
Constantin le Grand fut accablé de Panégyriques, dont le
principal est celui d'Eusèbe, évêque de Césarée. Julien
i'Apo^at, qui se piquait d'éloquence , loua l'impératrice
fiuiébie, sa bienfaitrice, et Constance, son persécuteur,
qu'il compare à Achille pour la vaillance, à Ulysse pour
la sagesse, à Nestor pour le talent oratoire. A son tour il
fut loué par Libanius d'Antioche, par un second Ma-
mertin, enfin par Thémiste de Constantinople : oelui-d,
parmi ses émules, mérite une place à part ; Thomaa, dans
aon Essai sur les Éloges, lui rend la Justice de n'avoir
adressé la parole aux princes que pour leur rappeler de
nobles yérités. Il a consacré vingt Panégyriques à la
louange de Constance, de Julien, de Valens, de Valenti-
nien, di Gratien et de Théodose. Loués en gprec par Thé-
miste, Gratien et Théodose le furent encore en latin, le
premier par Ausone de Bordeaux, le second par Pacatus
DrepaniuB, autre rhéteur bordelais, par S^ I^ûlin, évêque
de Noie, et par Svmmaque, l'illustre préfet de Rome.
L'invasion des Barbares ne put fermer la bouche aux
panégyristes. Claudien, le spirituel et raffiné poète
d'Alexandrie, et Sidoine Apollinaire, de Lyon, compo-
sèrent dea Éloges en vers, parmi lesçiuels on cite de pré-
férence celui de Stilicon, par Qaudien. Enfin Ennodius,
évêque de PaWe, mais originaire des Gaules, prononça,
en 510, le Pan^rique de Théodoric, roi des Ostrogoths,
comme si les dermers mots du latin, avant de tomber
dans la barbarie du moyen Age, devaient être une flatterie
en l'honneur des destructeurs de l'Empire romain, de ses
institutions et de sa langue.
On voit le Panégyrique renaître au xv* siècle avec les
lettres latinea et grecques, et fleurir, presque sans inter-
ruption. Jusqu'à notre temps. François I*', Henri II,
Charles IX, Henri III, furent loués de leur vivant, et,
suivant Thomas, on compterait plus de 500 Panégyriques
en l'honneur d'Henri IV, en vers comme en prose, pen-
dant sa vie et après sa mort. Ils ne manquèrent pas non
plus à Louis XIU, à Richelieu, à Mazarin, et on les pro-
digua à Louis XIY durant tout son règne : tandis que les
crands écrivains saisissaient ou faisaient naître l'occasion
de Texalter dans leurs œuvres, le clergé célébra en chaire,
dans des Panégyriques proprement dits, la gloire ot les
vertus du grand roi. Pellisson lai-mème,4'anden ami de
fouquet, mêla sa voix au concert de louanges dont on
saluait de toutes parts la grandeur de Louis, et écrivit
son Panémicrae. Voltaire enfin, tandis qu'il écrivait
l'Oraison TunèDre des officiers français morts dans la
Suerre de la succession d'Autriche, y joignit, à propos
es mêmes événements, le Panégyrique de Louis XV.
Il appartenait à la religion chrétienne de transformer
et de sanctifier, en quelque sorte, le Panégyrique comme
rOraîson funèbre, par les hauts enseignements que l'ora-
teur en fait sortir. De bonne heure, les Pères de l'Église
mêlèrent un genre à l'autre. C'est ainsi que S^ Jean
Chrysostome insén dans la plupart de ses œuvres le
Panégyrimie de S^ Pierre et de S^ Paul. On loua les
Saints le jour anniversaire de leur fête; mais ce fut moins
pour les louer eux-mêmes que pour inviter to^é les chré-
tiens à imiter leurs vertus, et pour célébrer les heureux
effets de la religion sur les âmes. Les grands prédica-
teurs du xvu* et du xviii* siècle se distinguèrent dans le
Panégyrique presque autant que dans l'Oraison funèbre,
et y déployèrent les qualités respectives de leur génie.
On compte 16 Panégyriques deBourdaloue; Bossuet com-
posa ceux de S^ François de Sales, de S^ François de
Paule, de S^ iternard, de S^ Paul, de S^* Thérèse, etc. ;
Fénelon, ceux de S* Charles Borromée, de S^* Catherine
de Bologne, et, sous le nom de Sermons, ceux de S^*
Thérèse et de S* Bernard; Fléchier et Massillon, ceux de
S< Bernard et de S^ Louis; l'abbé Maury, ceux de S< Au-
gustin, de S^ Vincent de Paul, de Fénelon et de S^ Louis,
que louèrent aussi l'abbé Couturier, MC de Beauvais,
Cambacérès, l'abbé Poulie, etc. A. H.
PANETIER (du latin panis, pain), mot nui fut autrefois
synonyme de boulanger. Il n'est plus appliqué au*à cekd
qui, dans les communautés, les hospices, les collées, etc.,
est chargé de la garde et de la distribution du pain.
PANETIER vGrand-). F. uotre Dictionnaire de Biographie
et d^ Histoire,
PANGUAYS, grandes embarcations des naturels des
lies Comores. Eues sont relevées des deux cêtés avec des
roseaux et des branches d'arbres fortement liés ensemble
et enduits de bitume pour empêcher l'eau de pénétrer.
Le màt est muni d'une voile ou de deux, en feuilles de
cocotier.
PANHARMONICON (du grec pan, tout, et harmonicos,
harmonique), c-i^. qui produit l*harmonie universelle;
espèce d'orgue à cylindre qui imite divers instruments,
la flûte, la clarinette, la trompette, le cor, le basson, le
serpent, et même la voix humaine. Il fut inventé par
Maelzel.
PANIER (Anse de). V. Arc.
PANIERS, Jupons aamis d'osier, de bal^e ou de fer,
que les femmes portaient an xtiu* siècle pour relever et
étendre démesurément leurs robes. On les nommait aussi
vertugadins fde l'espagnol verHiMdo^ gardien de vertu).
Il y en eut ne toutes sortes de formes, qu'on appela la
gouraandinê, le boute-en-train, la culbuté, etc. Rien
n'était plus incommode pour tout le monde, particulière-
ment à table, en voiture, au théâtre, dans la fouleb
M^* Qairon fit tomber cette mode en osant la première
paraître sur la scène sans paniers. On vit plus tard re-
paraître les paniers sous le nom de bêtises, mais pour
peu de temps. De nos Jours, en 1856, on a imagine les
crinolines, ridicule du même genre.
PANIONIUM. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
PANMÉLODICON, instrument inventé à Vienne, en
1810, par Leppich. Il consiste en un cylindre conique mû
par une roue, oui met en vibration de petits morceaux
de métal courbés à angle droit, lesquels sont touchée lé-
gèrement au moyen d'un clavier.
PANNE, terme de Charpenterie. V. Comblb.
PANNE, en termes de Marine, temps d'arrêt produit sur
un navire en marche par une disposition particulière
donnée à ses yoiles, les unes tendant h le faire avancer,
les autres à le faire reculer. On met en panne, soit pour
attendre un canot ou un bâtiment, soit pour sauver un
homme tombé à la mer, soit pour sonder, soit pour com-
battre.
PANNE, nom donné anciennement, dans les églises, à
une poutre qui traversait, d'une colonne à l'autre, l'en-
trée du sanctuaire, et où l'on plantait des cierges dans les
fêtes solennelles.
PANNEAU, partie d'un ouvrage d'arohitecture, de me-
nuiserie, d'orievrerie, etc., gui offire un champ, c-à-d.
une surface enfermée dans une bordure ou ornée de
moulures. — On donne le même nom à chacune des facei
d'une pierre taillée, ainsi qu'à de grands polygones irré-
PAN
1364
PAN
gulicnde pierre meulière destinés à composer des meules
de moulins à blé.
PANNBAo, piège ou filet à prendre les lièvres, les lapins
et autres animaux de petite taille.
Panneton, partie saillante sur le corps d*une espa«
gnolette, et qui sert à fermer ou à ounîr les volets d'une
fenêtre; — partie d'une cler qui entre dans la serrure.
PÂNNIGULUS, personnage des Atellanes (K. e$ mo{)^
habillé de pièces et de morceaux comme notre Arlequin.
PANONCEAU (du latin panntu, drap, étoffé), enseigne
des seigneurs qui n'avaient pas droit de * porter pennon
ou bannière; — girouette armoriée dont les seigneurs
ornaient le faite de leurs tours; — écusson d'armoiries
qu*on mettait sur une affiche pour lui donner plus d'au-
torité, ou sur un poteau comme marque de Juridiction.
On nomme aujourd'hui panonceaux les écussons dorés
aux armes de France placés comme insignes à la porte
des notaires, et les plaques dorées mises aussi & la porte
ou aux fenêtres des huissiers, etc.
PANOPLIE (du grec pan, tout, et oplon, arme), nom
donné ]adîs à l'armure complète d'un chevalier, et au-
jourd'hui à un trophée d'armes qu'on suspend aux murs
d'un arsenal ou d'un musée. — L'empereur Alexis a fait
composer, sous le nom de Panoplie dogmatique, une ex-
position et une réfutation de toutes les hérésies.
PANORAMA (du grec pan, tout, et orama, vue, spec-
tacle), vaste tableau circulaire, développé sur la pÎEiroi
intérieure d'une rotonde couverte d*un comble en cou-
pole ou en cône; il imite tout à fait l'aspect général
d'une ville ou d'un site, vu à tous les orients, et Jus-
qu'aux profondeurs des lointains où l'œil cesse de rien
distinguer. Les Panoramas sont des spectacles de Jour,
éclairto par en haut, au moyen d*une grande zone de
vitres dépolies, ménagée dans la partie inférieure du
comble, et versant sa lumière spécialement sur le tableau.
Le spectateur est placé au centre de la rotonde, sur une
tribune ou galerie circulaire, qui est censée une tour,
jne colline ou une éminence, et dont la hauteur est cal-
culée de manière que l'œil du spectateur debout se
trouve de niveau avec l'horizon du tableau. On vaste pa-
rasol, suspendu au comble, à 3 mètres environ au-dessus
de la tribune, la couvre entièrement et la déborde de
son demi- diamètre, de façon à ne point laisser voir
d'où vient la lumière, et k tenir le spectateur un peu
dans une pénombre. On arrive à cette tribune par des
corridors peu éclairés, afin de faire trouver plus brillante
la lumière répandue sur la peinture. Dans le même but, le
Fiarasol est d'un ton gris foncé, qui contraste avec les tons
umineux du ciel. Le parasol cache la lisière supérieure
du tableau, et le diamètre de la tribune cache la lisière
inférieure, ce qui laisse dans l'imagination du spectateur
l'idée d'une profondeur immense. Divers avant-corps en
iclief ou demi-relief relient, par l'eiTet de la perspective,
le plateau de la tribune aux premiers plans de la compo-
sition. Les Panoramas sont peints à l'huile, sur une toile
à tableau, préparée à trois couches. Un fort cercle de
bois retient cette toile par en haut; elle s'enroule par en
bas sur une immense bague de fer, d'où pendent des
poids qui rendent sa tension constante. Un panneau de
cette volée prenant toujours vers son milieu une cour-
bure convexe prononcée, la bague a un peu moins de
diamètre que le cercle; cela ramène un peu en avant la
partie inférieure de la toile , et diminue l'effet d'ombre
qui s'y produit, le jour tombant d'en haut.
Le Panorama est une invention étrangère ; mais les
principaux perfectionnements qui l'ont élevé au ran^ de
prande peinture d'art sont d'origine française. Robert
Parker, peintre de portraits à Edimbourg, inventa la
chose et le nom, et s'en assura la propriété par un brevet
pris à Londres en 1 796. Néanmoins ce ne fut que 3 ou
4jans après qu'il exposa son premier panorama , gui re-
présentait la Ville de Londres, Depuis il donna la Vue de
ia ville et du port de Portsmouth, celles de plusieurs
autres villes d'Angleterre, des marines, des actions na-
vales, etc. — L'Américain Fulton, depuis si célèbre comme
-ngénieuT^mécanicien, et qui était peintre , importa en
France le panorama, et prit, à cette occasion , un brevet
d'invention et de perfectionnement, daté du 6 floréal an vu
^26 avril 1799). On lui construisit une rotonde de 14 met.
le diamètre, sur le boulevard Montmartre, à côté du
passage qui garde encore le nom des Panoramas, parce
que, peu après, une 2* rotonde fut élevée en parallèle,
puis une 3*. Là, Fulton exposa son 1** panorama, qui
était xmeVue de Paris, prise de la plate-forme supérieure
du pavillon central desTu.leries. Cette exposition obti.it
un très-grand succès. Fulton dirigea l'cxécutiou, qui fut
l'œuvre des peintres Fontaine, Prévost, et Constant Boui-
geois. Le 3* Panorama fut la Vue d» Toulon , prise du
haut du fort Lamalgue, en 1793, au moment où les An-
glais étaient obligés d'abandonner cette place, en incen-
diant la flotte et le port. Prévost et Bourgeois peignirent
ce Panorama, qui fut Jugé supérieur à celui de Paria.
Prévost peignit ensuite les Panoramas du Camp â$ Bovh
logne, de lilsiU, de la bataUle de Wagram, de Home,
d^ Amsterdam, de Naples; ces derniers et le Camp de
Boulogne demeurèrent exposés à la fois jusqu*en 1814,
dans les rotondes du bonlevaitl Montmartre, et les Pano-
ramas de Roms et de Naples, Jusqu^en 1831 , époque où
on les dtoiolit. Vers 1810, Prévost, pour augmenter l'effet
du Panorama, fit bâtir une rotonde de 31 mètres de dia-
mètre et 16 d'élévation, sur le boulevard des Capucines,
{>rè8 la rue de la Paix, et y exposa, au mois de mai ISii,
a vilUf le port^ et les ckantters d'Anvers ; ensuite il y
montra, en 1821, Jérusalem; en 1824, Athènes, etc. Ces
deux derniers surtout obtinrent un immense succès.
L'année même où disparaissaient les petits Panoramas
du boulevard Montmartre, le colonel Langlois, pehitrc
de batailles, en entreprit un plus grand même que le
dernier de Prévost, et choisit le sujet de la Bataûle de
Navarin, Il l'exécuta dans une rotonde de 38 mètres de
diamètre et 15 de hauteur, b&tie à Paris, rue des Bfaraisf
S^-Martin. L'exposition eut lieu en 1831 , et il eut l'idée
tr^neuve, trè»-heureuse et très-hardie, de placer les
spectateurs dans l'action même du tableau : la tribune
fut la dunette d*un vaisseau de haut bord, et l'on pou-
vait s'avancer Jusqu'au mât d'artimon; de là, divers ob»
jets en relief, demi-relief, ou peints en trompe-l'œil,
reliaient, de degré en degré, l'extrémité du navire au
tableau développé tout autour. BL Langlois a continué
de pratiouer ce système dans toutes ses autres vues pa-
noramatiaues. Il exposa, dans la même rotonde, les Pa-
noramas i* Alger, en 1833, et de la Bataille de la Mos-
kowa, en 1835; puis, dans une nouvelle rotonde élevée
près du ci-devant grand carré des Champs-Elysées, et un
peu plus grande encore que la précédente (40 met. sur 15),
il flt voh:, en 1839, Y Incendie de Moscou pendant l'occu-
pation (hmçaise en 1812, tableau d'un effet saisissant;
en 1843; la Bataille d*Eylau, et, en 1853, la BataiOe dei
Pyramides, où l'on admirait la vérité de l'action et celli
du site. Cette rotonde ayant été prise pour l'exposition
universelle de l'industrie, en 1855, et démolie ensuiti*,
M. Langlois en a fait élever une 3* de mêmes dimensions
en 18G0, près et à l'Ouest du Palais de l'Industrie, am
Champs-Elysées, dans lequel il a peint, avec sa vérité
habituelle, la Bataille et la Prise de Sébaslopol, en 1855,
par une armée anglo-française.
Les premiers Panaromas étaient exécutés d'une ma-
nière un peu mécanique, et plusieurs de leurs effets les
plus surprenants s'obtenaient, en parUe, par des moyens
étrangers à l'art du peintre. On peut croire avec tooiit
vraisemblance, bien qu'on ne puisse pas l'affirmer, que
les procédés employés pour le primitif Panorama de
Paris, et probfd>Iement pour celui de Londres, fureut les
mêmes que Fulton dut indiquer à Prévost , et qui sont
ceux-ci : sur une toile de canevas, on collait du papier
qui, après un léger ponçage, recevait la peinture. Ia-s
tons du tableau se faisaient par une soixantaine (te
gammes de couleur, appliquées par bandes horizontales
& la manière des impressions du papier de tenture, pui>
la brosse fondait les deux nuances posées bord à bord. Lrs
effets de jour, les accidents de lumière, les veloutés ou
les tons chauds d'atmosphère s'obtenaient en couvrant la
zone vitrée, alors en verres non dépolis, de couches plus
ou moins transparentes de blanc, sur les points où cela
semblait nécessaire. Mais afin que le contraste de cette
lumière factice ne pût être remarqué du spectateur, il
n'arrivait dans le Panorama que par de longs couloirs
entièrement privés de jour, où la lueur crépusculaire do
quelques petites lampes éclairait un peu les ténèbres.
Aussi, pour voir ces Panoramas, il fallait un ciel très-
clair; et lorsque le temps devenait sonore ou qu'il y avait
du brouillard, on fermait ou on n'ouvrait pas l'ex position.
— Ensuite les Panoramas Fuhon-Prévost étaient toujours
des vues prises à vol d'oiseau, ce qui dispensait des pre-
miers plans, grande difficulté des Panoramas perfec-
tionnés par M. Langlois, qui sont éclairés par la lumière
naturelle uniformément tamisée à travers une vitredépo-
lie. — Enfin, la convexité de la toilOi que le Panorama ac-
tuel dissimule avec les seules ressources du pinceau, état
un avantage dans les anciens Panoramas, parce qu»' U
courbure leur donnait des fuyants naturels, et des tons
dégradés qui aidaient à la peVspeclive, prise de si haut.
PAN
13C5
PAN
Le tableau en Panorama est la plus grande peinture,
et , par sa facilité à être comprise, la plus populaire que
Ton ait Jamais imaginée. Napoléon 1*' étant yenu voir
le Panorama de Tilsitt, rers 1810 ou 1811, jugea aussitôt
que de pareils tableaux pourraient servir à populariser
sa gloire : il commanda qu'un projet lui fût présenté
pour éle\'er, dans le grand carré des Cbamps-Elysées ,
sept Panoramas, dont les sujets auraient représenté les
grands faits de son règne. Le gouvernement devait se
réserver le droit d'accjuérir chaque tableau au prii de
45,000 fr., pour en faire répéter Texposition dans les
principales villes de TEmpire. L'architecte Célérier dressa
le projet demandé par l'empereur ; mids vinrent les dés-
astres de 1812 et anné» suivantes, et rien ne fut exé-
cuté. — L'invention des Panoramas surpasse de beau-
coup tout ce que les Anciens ont rapporté de leur grande
peinture murale. Un tableau de 120 met. de développe-
ment, sur 14 ou 15 de hauteur, comme ceux du colonel
Unglois, exigerait 36 ans de la vie d'un artiste, s'il vou-
lait l'exécuter seul ; lorsqu'il a fait son étude et ses es-
quisses, il lui faut environ 14 mois, avec des auxiliaires,
pour peindre le tableau à sa grandeur d'exécution. Quant
à l'effet général , dA à une profonde entente de la per-
spective linéaire et aérienne, à un sentiment parfait de la
couleur dans ses milliers de tons, il est d'une telle puis-
sance, que plus on regarde un Panorama, plus 1 illu-
sion augmente, plus on s'imagine avoir la réalité devant
80i. C. I>— T.
MxoRAïf A , nom donné à l'édifice même dans lequel on
expose un tableau en panorama. C'est une rotonde, avec
une tribune au centre pour les spectateurs, ainsi qu'il
rient d'être dit dans l'article précédent. Les plus grandes
et les plus belles rotondes de Panoramas ont été faites à
Paris, aux Champs-Elysées, par UM. Hittorff, membre de
Ilnstitut, et Daviout, architecte de la ville de Paris.
M. Hittorff, dans le Panorama de 1828, démoli en 1855,
et qui avait 40 met. de diamètre, introduisit, à la de-
mande de M. Langlois, pour qui il construisait ce Pano-
rama, une grande innovation : il supprima un pilier de
rond, que l'on mettait toujours au centre de la tribune
pour soutenir la charpente du comble, et supporta cette
cliarpente sur des c&bies de fil de fer retenus à 12 contre-
forts, sortant d'une galerie extérieure, large de 5 met,
qui enveloppait son Panorama. Ce procédé très-ingé-
nieux, imité des ponts de chaînes, fut appliqué avec une
idence si sûre, et une expérience si habile, qu'il en ré-
sulta pour l'ouvrage une solidité à toute épreuve. — Le
Panorama actuel , œuvre de M. Daviout , fut construit en
1^. Il n'a qu'une rotonde, sans galerie extérieure ; ses
dimensions sont celles du Panorama de M. Hittorff : il est
couvert par une coupole en charpente, posant tout d'une
volée siir les murs extérieurs, et sans point d'appui cen-
tral Cette charpente a été exécutée par M. Bellu. C. D— y.
PANOROGRAPHE, instrument inventé en 1824 par
Puissant, ingénieur-géographe, pour obtenir immédiate-
ment, sur une surface plane, le développement de la vue
perspective des objets qui entourent l'horizon du spec-
tateur, et qui seraient représentés à la manière des pano-
ramas. V. le BtUl9tw dé la SociiU de Géographie, t. IV.
PANSLAVISME, mot d'origine récente et qui s'est in-
troduit dans le langage de la Politiçiue pour désigner
l'asphntion qu'on remarque dans les diverses populations
slaves à former un seul corps de nation. La Russie favo-
rise, dit-on, cette tendance, dans l'espoir de réunir un
jour sous son sceptre tous les Slaves.
PANTALÉON, instrument auquel Louis XIV a donné
le nom de l'artiste qui le fit entendre à sa cour en 1705,
Pantaléon HebenstrelL II parait qu'un certain Freislich
en jouait encore à Dresde vers le milieu du xvni* siècle.
C'était un instrument à cordes du genre du tympanon ,
ayant l'étendue du clavecin, et monté de deux rangs de
cordes, les unes en métal, les autres en boyau.
PANTALON, personnage de la comédie italienne , qui
partageait avec le Docteur l'emploi des pères. Tandis que
celui-ci était toujours immolé A la risée publique. Panta-
lon, vieillard amoureux et dupé, avare, père fantasque,
était parfois un bon père de famille, un honnête com-
merçant, un homme de sens et de raison. Le Docteur
était Bolonais , et Pantalon Vénitien , et ils parlaient le
dialecte de leur pays. Pantalon portait une longue culotte
tenant avec les oek, un habit à larges boutons, oui avait
été primitivement rouge, mais noir en signe de deuil
depuis la perte de Négrepont, et une longue robe de des-
•us appelée xùnare. Quand des acteurs italiens vinrent
jouer la comédie à Paris, Pantalon parla français comme
les autre» personnages, mais conserva son costume na-
tional. Alborchetti, Véronèse et Colalto se distinguèrent
dans ce rôle. B.
PANTALON, partie de l'habillement masculin, dérivée du
costume de l'acteur Pantalon, et qui, depuis la Révolu-
tion, a remplacé la culotte courte.
PANTALONNADE, mot appliqué d'abord aux farces
dans lesouelles figurait l'acteur Pantalon, et qui a dési-
gné ensuite toute chose burlesque.
PANTCHA-TANTRA. V. Indienne (Uttérature) et Hi«
TÔPADEÇA.
PANTÈNE, sorte de filet dont on se sert pour pécher
l'anguille.
PANTENNE (Être en), se dit, en termes de Blarine,
d'un bftUment où toutes les parties' du gréement sont
en désordre, mal orientées, brisées par le vent ou par un
combat. Quand un capitaine meurt, on met, en signe de
deuil, les vergues de son navire en pantenne.
PANTHÉES, nom donné en Archéologie à des statues
ou des figures qui portent des signes, des symboles de
plusieurs divinités x^unies.
PANTHÉISME (du grec pan, tout, et théos, dieu), sys-
tème métaphysioue, qui, au point de vue le plus général,
peut se résumer dans les termes suivants : « Dieu est tout, u
Précisons le sens de cette formule, en remontant aux ori-
gines du Panthéisme. L'idée de l'infini est si naturelle à
l'esprit humain, que, dès la plus haute antiquité, elle se
fit jour, non-seulement dans les religions positives, mais
aussi dans les systèmes philosophiques dès qu'ils appa-
rurent. Cette idée une fois conçue, de quelque nom qu'on
l'appelât, l'Infini, Dieu, Être ou Substance, une question
devait se présenter, et se présenta en effet, assez claire-
ment et assez impérieusement pour provoquer les efforts
les plus marqués de l'esprit philosophique : c'était celle
des rapports de l'Infini et du Fini. Comment le Fini
coexiste-t-il avec l'Infini? Réponse : Le Fini dépendant de
l'Infini, en d'autres termes, les phénomènes dépendant
de l'Être , les Substances contingentes de la Substance
absolue; le Monde et la Nature dépendant de Dieu,
comme l'effet dépend de sa cause, en vertu de la toute-
pulssànee qui les a créés, et qui les conserve, on s'ex-
plique parfaitement que le Fini coexiste avec l'Infini, et
en reste distinct sans le limiter en quoi que ce soit. Mais
cette solution restait cachée dans les livres sacrés du
petit peuple auquel il avait été dit : « Au commence-
ment. Dieu créa le Ciel et la Terre, a Nulle part ailleurs,
ni dans les systèmes théologîques, ni dans les systèmes
philosophiques, l'esprit de l'antiquité ne s'éleva jusqu'à
l'idée de la Création proprement dite. De là tant de sys-
tèmes où les rapports du Fini et de l'Infini sont pré-
sentés de la manière la plus étrange; ici la matière coé-
temelle avec Dieu; ici la nature divinisée; là enfin
l'existence du Fini ou niée absolument, ou absorbée dans
l'Infini. C'est en cela que consiste proprement le Pan-
théisme. Nous ne croyons pas que ce nom convienne aux
doctrines qui , pour céder à une nécessité de la raison ,
et accorder une place quelconque à l'idée religieuse, con-
sentent, en s'enfermant dans la contemplation de la na-
ture, à la considérer comme divine, et ne reconnaissent
d'autre Dieu que le Grand Tout; au contraire le véritable
Panthéisme part exclusivement de l'idée de l'Infini , de
l'Être absolu, de Dieu, et rencontrant à peu près inévita-
blement sur son chemin l'idée du Fini, des phénomènes,
du monde, il absorbe et engloutit pour ainsi dire celle-
ci dans celle-là, soit au'il trute le Fini de simples appa-
rences sans réalité (Panthéisme éléatique); soit qu'il
fasse du monde le développement fatal du principe qui
l'anime, ràme,réther primitif (Panthéisme stoïcien); soit
qu'il le considère comme le résultat d'une émanation ou
d'une suite d'émanations successives (Panthéisme alexan-
drin), ou comme la forme nécessaire sous laquelle se
manifestent les modes infinis de l'Étendue et de la Pen-
sée, prises elles-mêmes pour deux des attributs infinis
de Dieu : la nature naturée, identique au fond à la nature
naturante (Spinozisme) ; soit enfin qu'en vertu d'un
principe, qui demanderait à lui seul de longues explica-
tions, il pose l'identité absolue de l'Être et de l'Idée
comprenant à la fois Dieu, la nature et l'homme ( sys-
tème de l'identité absolue de Hegel). Dans une étude ap-
profondie du Panthéisme et de son histoire, il ne serait
pas difficile de le montrer se glissant là où on le soup-
çonnerait le moins. Cest qu'en effet il a un air de gran-
deur et de simplicité, bien fait pour séduire au premier
abord les âmes élevées, nous dirions presque les âmes
religieuses. Mais examiné de plus près, il ne soutient cet
examen ni dans ses principes, ni dans sa méthode, ni
dans ses déductions, ni dans ses conséquences, surtout
PAP
136C
PAP
d»ns les conséqueiicei morales, qui sont l*abdlcat1on la
pïu8 complète de la personnalité et le fatalisme le plus
kbeola. B — E.
PANTHÉON. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie &t d^ Histoire,
PANTHÈRE. Cet animal était an attribut de Bacchus,
et indiquait Torigine indienne de ce Dieu. On en fit aussi
un symbole de I^n.
PANTIÈRE (du grec panihérion, qui prend toutes sortes
de bâtes), filet qu*on tend yenicalement pour prendre les
oiseaux qui volent par troupes; — sac à mailles où les
cnasseors mettent leurs provisions de bouche et leur
cibler.
PANTIN {d^nfantin: on de Titallen fantocewo, pou-
Dée), petite fi^re en carton, découpée et coloriée, dont
tin fait mouvoir les membres à Taide d*un fil. Les pantins
eurent une grande vogue dans la haute société en 1725
et en 1746 ; le peintre Boucheron peignit qui se vendirent
fort cher. Chacun avait son pantin dans sa poche, et Ton
s*en amusait dans les salons, dans les spectacles, dans
les promenades.
PANTOGRAPHE (du grec pan, tout, et graphéin,
écrire), instrument qui sert à copier mécaniquement les
dessins, et même à en faire des réductions ou des am-
plifications. On fixe sur une table le modèle, avec la
feuille de papier qui doit recevoir la copie ; puis on place
le pantographe dessus, et on suit avec un calquoir ou
pointe mobile les traits du dessin qu*on veut reproduire.
Par la disposition des pièces de Tinstrument, les mouve-
ments imprimés au calquoir se transmettent à un crayon,
soit en les laissant teis qu'ils sont, soit en les diminuant
ou en les accroissant dans un rapport donné. Le crayon
laisse sur le papier des traces qui forment une figure
exactement srâiblable au modèle. Le pantographe était
connu dès le xvii* siècle ; on en trouve la description dans
un livre intitulé : PantograpfUa^ seu ars delineandi res
quas libet, Rome, 1631. En 1743, l'Académie des Sciences
de Paris approuva un nouveau pantographe présenté par
le mécanicien Canivet. L'instrument fut encore peri'ec^
tienne par Langlois, puis par Lafond en 1816. Le Dia-
graphe (K. ce mot) de Gavard est une forme du panto-
graphe.
PANTOMÈTRE, instrument à Talde duquel on grave
d*après nat^ire des portraits de profil. Il fut présenté à
TAcadémie des Sciences de Paris, en 1752, par un abbé
Louvrier. Le Mémorial de l'Europe parle d*un autre pan-
tomètre imaginé en 1787 par un musicien de Versailles.
PANTOMIME. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^Histoire,
PANTOPHONE (du grec pan, tout, et phônè, voix),
instrument inventé en Italie par Joseph Masera, et à
Taide duquel on rend exactement toute la musique qu'on
peut exécuter sur un piano, à la difTérence des instru-
ments qui ne Jouent qu'un certain nombre d'airs dépen-
dant des dimensions de leur cylindre. Le même artiste
a imaginé le Musicographef qui sert à écrire la musique
tandis qu'on l'exécute, et qui conserve les mesures, la
valeur aes notes, les accidents, les silences, avec tant de
précision qu'en appliquant l'instrument au Pantophone,
celui-ci reproduit parfaitement le morceau.
PANTOUFLE (de l'italien pantufola, ou de l'allemand
pantoffel)^ chaussure de chambre, dont la forme et la
matière ont varié selon les temps et les lieux. On en fidt
en cuir, en bois, en liège, en feuilles de palmier ou de
papyrus, en écorce de tilleul, en paille d'Italie, en paille
de riz , en cordes de chanvre, en tapisserie, etc. En Tur-
ciuie, on laisse ses pantoufles à la porte des mosquén, à
rentrée des appartements où l'on a étendu une natte ou
un tapis ; une femme mande son mari en lui envoyant
sa pantoufle. La plus grande injure qu'on puisse faire à
un Musulman est de lever sur lui une pantoufle.
PAOLO , monnaie d'argent des États de l'Église et de
Toscane, équivalant à 10 baïoques ou à un dixième de
scudo. Le paolo avarié de valeur, entre 54 et 60 centimes
de notre monnaie. Son nom dérive de celui de plusieurs
papes, qui s'appelèrent Paul. Il y a des pièces de 2, 3, 6
et lOjpaoli.
PAON , oiseau consacré par les Anciens à Junon. En
grande estime au moyen âge, il était 1^ nourriture des
preux, et l'on faisait sur lui des vœux et des serments
tolennels. *> Sur les monuments romains, le paon est
l'emblème de l'apotliéose des impératrices.
PAPA. )
pape! ^ ^' ^^ ™^^ ^^"^ notre Dictionnaire de
PAPEGAI. S Biographie et d'Histoire,
PAPËLONNE, en terme de Blason, se dit de l'écu où
Ton a représenté des écailles ou des demi-cercles oomrae
plusieurs rangées de tuiles sur un toit,
PAPETIERS, corporation dont les statuts remontent
au mois d'avril 1509, et furent revisés >en 1659 el en
1723. Leur patron était SUean Porte-Latine.
PAPETTO, c.-à-d. petit pape, monnaie d'argent des
États de l'Église, le 5« de l'écu ou 20 baioques (1 fr. 8 e.).
PAPIER. Les Anciens, qui ont écrit sur toutes sortes
de substances (pierre, brique, marbre, métaux, écorccs
d'arbres, bois, feuilles, intestins et peaux d'animaux,
étoffes, etc.), ne connurent que le papier de papyrus ou
papier d'Egypte, On en fabriqua dès la plus haute anti-
quité : le musée de Turin en possède un fragment trouvé
par Champollion et qui a 3600 ans d'existence. On par-
tageait la tige du papyrus {cyperus esctUentus) eh rubans
très-minces, mais aussi larges que possible {philura) ; on
couvrait une table humectée d'eau de bandes de papyrus,
disposées longttudinalement, et mises les unes à côté des
autres alternativement par les bases et par les sommets;
sur ces bandes longitudinales {philurœ adlitœ ), dont la
réunion s'appelait scheda, on en superposait d'autres
transversalement, ce qui formait une seconde scheda ; la
réunion de ces deux schedœ composait une feuille, pla^
gula; 20 plagulm, assemblées et roulées, formaient une
main de papier, sceeptis. On les mettait alors en presse,
on les faisait sécher au soleil, et, après avoir collé ce pa*
pier, on l'amincissait avec le maillet, on le collait de
nouveau, on en déridait les parties crispées, et on le po-
lissait avec la pierre ponce. Après ces diverses opérations,
le papier était aussi fin que la batiste. Les Anciens distin-
guaient plusieurs espèces de papier : 1° le papier Auguste
ou royal {charta Augusta ou regia)^ tellement fin qu'on
ne pouvait écrire que d'un côté ; 2** le papier Limen ou
de Livie {charta Lwiana ou Liviœ\ ainsi nommé de Li-
vie, femme d'Auguste, et qui avait, comme le précédent,
une lareeur de treize doigts (0'",251) ; 3** le papier hiéra-
tique {charta hieratica)^ réservé pour la composition des
livres sacrés, et large de onze doigts (0", 212) ; l'adulation,
nous dit Pline, lui a donné le nom d'Auguste, et sa dé-
nomination ne s'applique plhs qu'au papier de troisième
2ualité ; 4** le papier Claudien {charta Claudiana)^ qui
épassa à son tour le papier Auguste ; 5<* le papier Fannten
(charta Fanni\ large de dix doigts (0"\193), et ainsi
nommé d'un Fannius qui en fabriqua ; 6* le papier am-
phithéàtrique {charta amphitheatrica)^ large de Aeuf doigts
(0'',174K et qu'on fabriquait à Alexandrie dans le quar-
tier de l'amphithéâtre ; 1^ le papier de SaXs (charta Sai-
tica) ; S*' le papier ténéotique ou de Tanis {charta teneo-
ticau ainsi nommé d'un quartier d'Alexandrie où on le
fabriquait; 9^ le papier Cornélien {charta Comeliana);
\0^ le papier emporétique ou marchand (^charta empore-
tica)^ large de six doigts (0*, 116), et qui était le papier
du commerce. Il résulte d'un travail de M. Egger Skir le
prix du papier dans l'antiquité, qu'une feuille coûtait
alors aussi cher qu'un beau volume de nos jours, 'c-àrd.
de 4 fr. 50 à 5 fr. 11 en existait pourtant de grandes
fi^riques. Le papier de papyrus devint rare à partir du
IV* siècle, ainsi que l'attestent S^ Augustin et Grégoire de
Tours ; au vu*, il n'était pour ainsi dire plus en usage, et,
après le x*, on n'en trouve plus de trace.
11 parait que, dès la fin du i*' siècle de notre ère ou le
commencement du ii*, les Chinois connaissaient l'art de
/éduire des écorces d'arbres, de vieux chiffons de soie, de
chanvre ou de coton, en une sorte de bouillie ou de pàto
liquide, pour en former des feuilles de papier. La Biblio-
thèque impériale de Paris possède un manuscrit eo
5 feuillets, provenant de l'anbaye de S*-Germain-des-
Prés, et que l'on dit être en papier d'écorce; mais ces
feuillets pourraient bien être, comme plusieurs vieux di-
plômes des Archives impériales, formés de débris de pa-
pyrus collés ensemble. Le papier de coton, connu sous les
noms de charta bombycina ou bambacina, cuttunea, do-
mascena , fut connu des Arabes après la conquête de la
Boukharie, au commencement du viii* siècle, et l'usage
en devint bientôt général parmi eux : vers la fin du i%
ils l'importèrent en Espagne, et établirent des manufac-
tures à Septa (Ceuta), à Xativa (San-Felipe) et à Tolède.
Les Grecs, que le commerce mettait en relation avec les
Arabes, puisèrent chez eux la connaissance de la flibrica-
tien du papier ; les Vénitiens l'apportèrent à leur tour en
Italie. Les princes normands de Naplcs et de Sicile firent
un fréquent usage du papier de coton pour leurs di-
plômes; on a employé la même substance en France pour
certains manuscrits du xi* siècle, et pour des registres de
minutes notariées. Vers la même époque, on trouva les
moyens de fabriquer du papier de lin. En 1189, Raymond-
PAP
1367
PAR
Guillaume, éwèqne de Lodève, permit, moyennant un cens
annuel , de construire sur l'Hérault plusieurs moulins à
papier. Des papeteries de chiffons furent établies en Alle-
magne en 1312, à Padoue en 1360, à Darsford en Angle-
terre (Kent) en 1388, à Ni:remberg en 1300, àBMe en
1470. Le document le plus ancien que nous possédions
sur le nouveau papier, c'est une lettre de Joinville à
Louis X en 1315; on cite ensuite le testament d'Othon,
comte de Boulogne, en 1402. las papeteries de Troyes et
d'Essonne étaient déjà célèbres au xiv< siècle. Charles IX,
par lettres patentes du 14 août 1565, exempta le papier
de tous droits et impôts, libéralité que Henri IV devait
renouveler le 15 nov. 1595. L'exemption ne fut sans doute
rs maintenue, puisqu'un arrêt du Conseil , en date du
mars 1630, la renouvela. On revint encore sur cette
décision, car la Correspondance administrative sous le
règne de Louis XIV contient une requête dés proprié-
taires de moulins à papier de la Normandie, qui deman-
dent, en 1670, une diminution des droits dont leur in-
dustrie est frappée. Sur la demande de Colbert, un arrêt
du Conseil, en date du 3 août 1671, modéra les droits de
marque et de contrôle des papiers qui seraient façonnés
dans l'Angoumois. En 1654, on avait, à l'imitation de TEs-
pagne et de la Hollande, établi un droit de marque sur le
papier et le parchemin employés pour les actes de Jus-
tice et de commerce : en 1074, des nécessités de finances
poussèrent le gouvernement à imposer tout le papier et
tout le parchemin sortant des fabriques; mais, sur les
réclamations de la librairie et de l'imprimerie, on révo-
qua l'édit quelques mois après. En 1725, de nouveaux
droits furent établis sur le papier. Vers le milieu du
xviii* siècle, on ne se contenta plus du papier de linge et
de coton, on fit des essais pour employer le chanvre,
l'ortie, les feuilles d'arbres et la paille. Les premiers par
pi ers vélins ont été fabriqués en Angleterre par Basker-
ville vers 1750, et en France par Montgolfier, à Annonay,
en 1785. En 1799, un employé de la papeterie d'Essonne,
Louis Robert, imagina la machine à papier continu, qui
ne fut cependant rendue tout à fait pratique que depuis
1816 : trois hommes, travaillant à la main, pouvaient à
peine fabriquer par Jour 4,000 petites feuilles de paçier;
maintenant ils peuvent en produire 60,000. V. Guilan-
dini, Papyrus, hoc est Commentarius in tria C. Plinii
majoris depapyro capita, Venise, 1572, in-4°; Undner,
DissertcUio de charta, Leipzig, 1647; Kirchmayer, Dis-
strtatio philologica ae papyro veterum^ Wittemberg,
1666, in-4<'; Montfaucon, Dissertation sur la plante ap-
pelée papyrus, sur le papier d' Egypte, sur le papier de
coton, et sur celui dont on se sert aujourd'hui, dans le
t. VI des Mém. de lAcad. des Inscript, et Belles-Lettres;
Ciylns, Mémoire sur le papyrus et sur sa fabrication,
dans le tome XXIII de la même collection. B.
PAPIER-MONNATE, papier créé par un gouvernement
pour faire office de monnaie. Il ne faut pas le confondre
avec la monnaie de papier : celle-ci naît des contrats,
elle est librement acceptée ou refusée dans les paye-
ments, et échangeable contre espèces à la demande du
porteur ; le papier-monnaie émane du pouvoir poIitic[ue,
a cours forcé, et ne représente pas des valeurs équiva-
lentes qu'on puisse réaliser à volonté. Un papier-mon-
naie prendrait peut-être, dans l'intérieur d'un État, la
place de la monnaie métallique, ai le gouvernement in-
spirait assez de confiance, et si la contrefaçon des billets
n'était pas trop facile : mais, au dehors, il perd son cours
forcé. Les gouvernements , qui emploient ce papier
comme expédient dans les circonstances critiques, sont
enclins à en exagérer l'émission : dans ce cas, l'inquié-
tude se produit , le papier se déprécie d'une manière
eftrayante. —- Connu en Chine dès la fin du x* siècle ,
le papier-monnaie n'a guère été usité en Europe que
depuis Louis XIV. On y a eu recours en France au temps
de Law et pendant la Révolution {V, Assignats , Man-
dats TERRiToaiAux). L'Angleterre en 1797, et, dans des
temps plus rapprochés de nous, la Russie et l'Autriche,
ont suivi cet exemple. Les effets toujours désastreux de
semblables expériences paraissent en avoir dégoûté les
États, au point même que la fabrication et la mise en
circulation de la monnaie de papier ont été réservées
plus on moins exclusivement dans chaque pays, si ce
n'est en Allemagne, à un seul et même établissement, à
une Banque privilégiée.
PAPIERS DE BORD, actes écrits qui constatent la na-
tionalité d'un navire et l'exécution des conditions impo-
sées aux armateurs et aux capitaines pour Jouir des
avantages attachés à cette nationalité. En France, les pa-
piers de bord sont : l'acte de propriété, l'acte de fran-
cisation, le rôle d*é|quipage, et le congé de navigations
On y Joint d'ordinaire le certificat de visite du navire et
la patente de santé.
PAPIER PEINT ou DE TENTURE. Il parait que, dès
un temps très-reculé, les Chinois ont fabriqué des pa-
piers imitant les indiennes. Mais l'idée de les substituer
aux étoffes ou aux tapisseries pour recouvrir les murs in-
térieurs des appartements ne date pour les Européens que
du xvn* siècle. Les Anglais, qui revendiquent la priorité
de la fabrication des papiers peints, allèguent une patente
délivrée en 1634 par Charles l^ pour rexercice de cette
industrie à Londres. Mais des essais avaient été déjà faits
à Rouen en 1620 par un certain François. Une manufac-
ture fut établie à Paris par Jean Papillon, en 1688. Tou-
tefois, l'industrie du papier peint ne s'y constitua que vers
1780, époque où une maison fut fondée par Arthur et
Robert. L'établissement de Réveillon, dans le faubourg
S'-Antoine, porta cette industrie à une grande perfection.
La fabrication commença en 1790 en Alsace, où les mai-
sons Zuber et Mader acquirent beaucoup de célébrité.
PAPILLON , la voile la plus élevée de la tête des mâts
dans un bâtiment de haut bord.
PAPILLON , animal qui était, pour les Anciens, le sym-
bole de r&me. Posé sur une tête de mort, il exprimait
l'immortalité.
PAPILLOTAGE, en termes d*Imprimerie, s*emploie
pour indiquer que le caractère a marqué double, ou laissé
des taches noires aux extrémités des pages et des lignes.
PAPIIXOTES, nom qu'on donnait autrefois aux pail-
lettes d'or et d'ar^nt dont on relevait les habits en bro-
derie, et qui désigne aujourd'hui, soit les morceaux de
papier dont les femmes enveloppent leurs cheveux mis
en boucles pour les faire friser, soit les boucles elles-
mêmes qui tombent sur le front ou le long des Joues.
PAPIRIEN (Code). V. Code, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire.
PAPPOSILÈNES, c-à-d. vieux Silènes, personnages
narbus et entièrement velus qui Jouaient un rôle dans le
drame satyrique des Anciens.
PAPPUS, personnage des Atellanes (V. ce mot). Cest
un vieillard ambitieux, trompé par tout le monde, le
type du Cassandre moderne.
PAPYRUS. V. Papier.
PAQUE (La). V. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire.
PAQUEBOT (de l'anglais pociS^e^ paquet, et ho(U, ba-
teau), b&timent léger et fin voilier, destiné au service de
la poste et au transport des voyageurs. Ce fut en 1836
qu'un paquebot anglais, h". Great Western, fit pour la
première fois la traversée de l'Atlantique, de Liverpool à
New-York, en employant U» vapeur, ce qui réduisit nota-
blement la durée du paroofrs.
PARA, monnaie de cti vre de Turquie et d*Ëgypte, va-
lant 4 centimes.
PARABASE, intermë'lo de la Vieille Comédie grecque,
dans lequel le chœu^, resté seul sur la scène, se tournait
vers les spectateurs, et, s'adressant à eux, faisait l'apolo-
gie du poôte, attaquait ou même livrait au ridicule ses
rivaux, proposait, sous forme badine ou sérieuse, des
mesures politiques, prenait la défense d'une classe de la
société, etc. La parabase, comme l'indique son nom, était
une digression, qui contenait des observations étran-
gères, il est vrai, au sujet de la comédie, mais non aux
circonstances qui avaient pu en inspirer l'idée au poète.
Elle était souvent pleine de hardiesses : aussi était-elle
considérée comme le morceau capital de la pièce par le
public, dont elle était attendue avec impatience (V. un
Mémoire de Lebeau, dans les Mém. de VAcad. des Inscrip-
tions et Belles-Lettres), Elle comprenait 7 parties : 1° le
Kommation {parcelle; de koptô, couper), petit fragment
qui annonce la Parabase ; 2* la Parabase proprement dite ;
3° le Makron (long), composé de di mètres anapestiques
qui se débitaient d'une seule haleine; 4" la Strophe,
morceau lyrique chanté par un demi-chœur; 5** rÊpir-
'Antépirrhème. Ces 7 parties ne se trouvent pas
Jours intégralement. D'autres fois, au contraire, les Pa*
rabases sont doubles, par exemple dans la Paix et dans
les Nuées d'Aristophane. Deux comédies du même poëte,
les Oiseaux et Lysistrate, présentent ce qu'on peut ap-
peler de fausses parabases, c.-à-d. des Parabases dont la
disposition est toute différente, et qui de plus sont mêlées
au dialogue et à l'action. — De même que le nom de Pa-
rabase s'étendait à l'intermède entier, de même on le dé-
signait souvent par le nom d^ Anapestes , parce que ce
PAR
136S
PAR
mètre y dominait. Le nom d'AnapesUs lui était donné
lors même qu'il n'aurait renfermé aucun Ters de cette
espèce. Deux pièces d'Aristophane n'offrent aucune trace
de Parabase : ce sont Y Assemblée publique des femmes et
Plutus; ce qui prouve que ces deux pièces, telles du
moins qu'elles nous sont parvenues, sont postérieures au
décret qui supprima cet intermède, c-à-d. à Tannée 404
av. J.- C. La Comédie Nouvelle n'offre rien qui rappelle
les Parabases de la Vieille Comédie, P.
PARABATES. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
PARABOLE (en grec parabole, comparaison], allégorie
qui renferme quelque vérité importante. Le mot ne s'em-
ploie guère qu'en parlant de l'Écriture sainte, où l'on
trouve bttiucoup de ces instructions détournées, de ces
sentences morales sous fonne de comparaison, c'est-
à-dire enveloppées de figures et d'emblèmes. Les para-
boles, n'étant pour l'ordinaire que la traduction symbo-
le qoe de vérités déjà promulguées, servaient à les graver
I lus profondément dans la mémoire, à les communiquer
< L à les répandre plus aisément. Les ignorants n'enteu-
• ont rien à une doctrine abstraite, tandis qu'il n'est per-
-^onne qui ne comprenne la parabole du Bon Pasteur et
<-o!le de V Enfant prodigue. Le génie des Hébreux, comme
< le tons les peuples de l'Orient, se prêtait d'ailleurs à
i •.tte expression figurée de la pensée morale. — Parmi les
inodemes, les Allemands ont seuls réussi à écrire des
paraboles, particulièrement Andréas, Leasing, Herder,
Krummacher. G.
PARACHRONISME. V. Arachroiiismb.
PARADE, scène burlesque Qu'on Joue en plein air
sur les tréteaux des spectacles forains, pour attirer les
b:idauds et leur annoncer ensuite les détails de la repré-
sentation. Les parades eurent leurs sièges principaux, &
Paris, sur le Pont-Neuf, aux foires S*-Germain et S*-Lau-
font, puis aux théâtres de Nicolet et de l'Ambigu-Co-
Diique. Le père Rousseau, Bobèche et Galimafré ont été
'les paradistes fameux. Certains écrivains ont composé
des Parades, qu'on a réunies en 3 vol. sous le titre de
Théâtre des parades y avec un 4* vol. i^outé plus tard :
vn y remarque la Vérité dans le vin par Collé , Isabelle
par Fagan, la Petite saillie de gaieté par La Chaussée, et
u/Z/e^, garçon pointu, par PoinsineL
p<\aAPB, dans le Langage militaire, réunion des troupes
qui deivent monter la garde du Jour et relever celles de
lu veiti*. Les officiers et les soldats doivent y être en
grande tenue.
PARADIASTOLE (du grec para, entre, et diastole, dis-
tinction), nom que donnent certains rhéteurs à une
Figure de pensée oui consiste à distinguer l'une do
l'autre des idées analogues et voisines, afin de les déter-
miner d'une manière précise, et de prévenir la confusion
que pourrait occasionner leur ressemblance.
PARADIGME (du grec paradéigma, modèle], terme
de Grammaire qui désigne les modèles de déclinaison et
de conjugaison pour toute une classe de noms et de verbes.
Ce mot s'applique surtout aux langues anciennes. Ainsi,
Dominus est le paradigme des noms masc. et fém. de la
2* déclinaison latine; amare, des verbes actifs de la
1'* conjugaison. Aimer, finir, recevoir, rendre, sont en
français les paradigmes des verbes réguliers dont la termi-
naison à l'infinitif est semblable à celle de ces verbes. P.
PARADIS (du grec paradéisos. Jardin, lieu de délices),
nom que l'on donne, chez les peuples chrétiens , au sé-
jour où les âmes des Justes Jouissent de la béatitude
éternelle. Selon l'Église catholique, ce séjour leur est ou-
vert aussitôt après la mort; Luther, Calvin, et plusieurs
schismatiques grecs et arméniens, prétendent qu'elles
n'y entreront qu'après le Jugement dernier. L'idée du
Paradis est fondée sur la croyance à l'immortalité de
l'&me et à la Justice divine : elle se retrouve dans toutes
les religions. Les Indiens comptent Jusqu'à 27 lieux de
d(Hioe8, placés les uns au-dessus des autres, et où les
âmes sont unies à Dieu. Les Hébreux, peuple à tète dure
{(Utrœ cervicis)^ comme l'appelle Moïse, étaient surtout
frappés par la promesse des biens terrestres, par la me-
nace des malheurs de ce monde, et, si l'Ancien Testament
leur parle de la vie future, il n'en décrit pas la nature :
c'est seulement dans le Talmud qu'on trouve la peinture
du Paradis, plutôt encore que celle des félicités que l'on
▼ goûte. Les tribus aborigènes de l'Amérique, les popula-
10 ns celtiques, les anciens Germains, se faisaient du Para-
dis une idée subordonnée au degré de développement de
leur intelligence : c'était une région délicieuse où l'homme
retrouvait tout ce qui avait fait sa Joie ici-bas ( K. Wal-
iiALLA, dans notre Dictionnaire de Biogr, et d'tlistoirt).
Les peintures de la vieille Egypte nous offrent les Ames
des Justes errant en société avec les Dieux. La niytholode
grecque a aussi ses séjours enchantés, les lies Fortunées
et les diamps Élysées, où sont transportés après la mort
les hommes vertueux. Mahomet, <{ui s'adressait à des
hommes de sensualité, leur a promis un Paradis où les
sens reçoivent des plaisirs infinis. Dans le chrisûanisnie
même, la vie future a été longtemps tonçue avec tout un
cortège d'idées et d'images terrestres : le Paradis était
comme une forteresse située à l'Orient, avec trois portes
que défendaient les Anges et dont S* Pierre gardait l'en-
trée; les élus, placés sur des trOnes d'or et de pierreries,
revêtus de rones d'une éclatante blancheur, mêlaient
leur voix à celle des Chérubins et des Séraphins pour
chanter les louanges de Dieu, s'accompagnaient de divers
instruments , étaient admis à la table divine, etc. Toutes
ces figures de langage prenaient un corps dans les bas-
reliefs et dans les peintures des églises. V. Cul, et,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire, l'art
Paradis tbbbbstrb. B.
PARADIS PERDD (Le), poGme épique anglais, en douze
chants et en vers blancs, composé par Milton. Le sujet
est la déchéance du premier homme. 'Satan , chassé du
ciel , précipité dans les enfers avec les Anges compagnons
de sa révolte, se réveille au milieu du lac de feu. Dans
un conseil des légions rebelles, il rappelle qu'un ancien
oracle annonçait la naissance d'un monde nouveau et la
création d'une race nouvelle. Un Pandémonium ou palais
de Satan est construit, où l'on délibère : il y a partage
sur la question d'une autre bataille contre le Ciel ; mais
la proposition de Satan d'aller à la recherche de ce monde
annoncé, de le détruire ou de le corrompre, est acceptée.
Il part, rencontre la Mort et le Péché, se fait ouvrir les
portes de r{J)lme, et traverse le Chaos, qui lui indique
la route vers le lieu qu'il cherche. Dieu voit Satan, et
prédit la faute et la rédemption de l'homme à' son Fils
qui s'offre comme victime expiatoire. Satan découvre la
création, et passe dans l'orbe du soleil, où Uriel lui dé-
signe l'endroit habité par l'homme. Arrivé sur la terre,
il voit nos premiers parents dans l'Éden, et est touché de
leur beauté et de leur innocence ; en épiant leurs discours,
il connaît la défense concernant le fruit de l'arbre de la
science. Cependant Uriel avertit Gabriel, chargé de la
garde de l'Éden, que Satan y a pénétré; deux Anges sont
envoyés,*qui surprennent Satan occupé à tenter Eve dans
un songe; ils veulent l'amener à Gaoriel , mais il dispa-
raît. Dieu envoie Raphaël pour maintenir nos premiers
parents dans l'obéissance; le messager raconte à Adam la
révolte des mauvais Anges, fruit de la jalousie qu'ils ont
conçue de l'annonce faite par le Père qu'il avait engendré
son Fils et lui remettait tout pouvoir ; il décrit les com-
bats livrés dans le ciel entre Satan et les anges Gabriel
et Michel, jusqu'à ce crue Dieu envoie son Fils, qui pré-
cipite ses adversaires oans l'abîme. A la prière d'Adam ,
Raphaël lui retrace l'œuvTe de la Création , lui en indique
le Dut , et lui annonce l'envoi du Fils pour l'accomplir.
Adam lui fait à son tour l'histoire de sa propre création et
de celle de sa compagne. Raphaël retourne au ciel. Eve se
laisse séduire par le serpent, et goûte au fruit défendu;
Adam lui en adresse des reproches, puis imite sa faute
afin de mourir avec elle. Les Anges chai^gés de la garde
du Paradis remontent au ciel pour Justifier leur vigilance.
Le Fils de Dieu prononce le Jugement des coupaSles; le
Péché et la Mort se rendent sur la terre. Satan raconte à
ses compagnons, dans le Pandémonium, le succès de sa
ruse. Adam pleure amèrement, Eve le console, et tous
les deux forment le projet d'apaiser la divinité. Le Fils
intercède pour eux ; Dieu se laisse fléchir, mais à la con-
dition qu'ils seront chassés du Paradis, sentence que
l'archange Michel leur si^ifie ; dans une vision , Adam
découvre tout ce qui doit arriver Jusqu'au déluge. Ud>
récit du même An^ expose les suites de la faute d'Adam
et les événements qui s'accompliront Jusqu'à l'incama-
tion du Fils, dont la mort doit racheter tous les hommes.
Adam et Eve sont expulsés du Paradis, dont des légions
de Chérubins gardent les avenues.
Milton conçut ce sujet en 1665; il eut d'abord l'idée de
le traiter dans une tragédie : ses manuscrits, déposés au
collège de la Trinité, donnent le nom des personnages
et la distribution de la pièce, en cinq actes, avec un
chœur, et une foule de personnages muets et allégoriques.
Disgracié comme républicain lors de la Restauration des
Stuarts en 1660, il se retira à Bunhill-Row, où, quoiaue
aveugle, il s'occupa activement de son Paradis perdu,
sa femme et ses filles écrivaient sous sa dictée. Le poème,
qui lui fut payé 10 liv. stcrl., parut en 1667, et n'eut
PAR
1369
PAR
point d^&bord de succès : le patronage du comte de Dorset,
une édition in-folio que lord Sommera tit paraître en
1688, des articles d*Aadison dans le SpecttUeur au corn-
meDoement du ivm« siècle, assurèrent enfin la fortune
de l'cBuvre. — Ici le merveilleux est le sujet, et non la
macbine du poème; Milton a donné un démenti à Boi-
ledii, qui trouvait que les mystères du christianisme
étaient impropres au merveilleux épique. Pour la pre-
mière fois aussi, une épopée finit par le malheur du
priocipal personnage, sans que Toeuvre soit moins belle,
i cause des beauté supérieures qu*elle emprunte à la
religion. Parmi les plus beaux passages, on peut citer
ccQX où Satan apostrophe le Soleil (en. nr), où Adam
l'éveille à la vie, où Eve lui est donnée pour compagne
[ch. viii), où ils mangent le fruit détendu (ch. ix), où
ils 8*endonnent après leur faute (ch. xi}, où ils sont
Tisités par le Fils et implorent la miséricorde de Dieu
(ch. x). Les caractères sont admirables : Adam est sim-
ple et sublime ; rien de plus auguste que cette étude du
CŒor de Thomme à sa naissance , dont le premier senti-
ment est de chanter TÊtre suprême, et le premier besoin
de s'adresser à lui. Eve a une séduction inexprimable;
eile respire à la fois Tinnocence et le plaisir. Dieu le
Père est obscurément tracé : il semble que le poète ait
craint de lui prêter une parole mortelle, tant il a soin
de ne mettre dans sa bouche que des discours consacrés
par le texte des livres saints. Le caractère du Fils est une
tsavre parfaite : il y a en lui un mélange de Thomme et
de Dieu; sa tendresse ineffable ne se dément Januds;
quand il prononce l'arrêt rendu par son père, c*est sans
reproches et avec douceur; il sert d'intercesseur cour
présenter à son Père les prières des coupables. Parmi les
Anges, Raphaël est Tange ami de Thomme; Michel, chef
des milices du ciel, a la forme humaine et rhabillement
d'un guerrier, comme il est représenté dans les tableaux
des grands peintres. Satan est une création incompa-
Ràble; ses monologues le peignent en traits ineffaçables.
Les personnages allégoriques, la Mort et le Péché, sont
ierenus deux êtres réels et formidables. — Outre les
oeaatés du fond, il y a dans le Paradis perdu une foule
de beautés de détail , qui tiennent au mérite de Texpres-
obscurités grammaticales sans nombre; il traite sa lan-
gue en tyran, sans respect pour les règles. Il abuse de
l'ellipse et des changements de construction ; il forge une
foule de mots ; il est rempli dliébraîsmes, d'héllénismes
et de latinismes; il affecte remploi des vieux mots, et
prolonge les périodes outre mesure. Les Anglais eux-
mêmes ne sont pas toujours d'accord sur le texte et sur
le sens, comme le prouvent leurs commentaires. La cécité
du poète a dû nuire à la correction de son œuvre : le pre-
mier jet de ses vers, transcrits la nuit par sa famille,
quand parlait Tinspiration, est resté à peu près tel qu*il
est sorti de son esprit; delà ces phrases inachevées, ces
sens incomplets, ces verbes sans régime, ces noms et ces
pronoms relatifs multipliés, qu*on trouve dans tout Tou-
rrage.
Le sujet adopté par Milton n'était pas nouveau : dès les
premiers temps du christianisme, la création du inonde,
le Paradis terrestre, la chute d'Adam et d'Eve, furent
célébrés par les poètes. Au v" siècle, l'Espagnol Dracon-
tias écrivit un Éexaméron, ou GEuvre des six Jours, en
vers latins. Au vl^ S' Avit, évêque de Vienne en Dau-
phiné, composa en latin des petits poèmes détachés sur
lo Création , le Péché originel , le Jugement de Dieu ou
l'Ej^lsion du Paradis; Csedmon, moine saxon, donna
dans sa langue nationale un grand poëme sur la création,
resté dans l'oubli Jusqu'en 1655, où Junius le fit impri-
mer à Amsterdam. Un Mystère français, la Conception,
>frre des situations analogues à celles du Paradis perdu,
*ïltalien Folengo (Merlin Cocoûe) publia en 1533 un
poème sur V Humanité du Christ, En 1590, Erasme de
Valvasone fit paraître à Venise VAngéléide, épopée en
frois chants sur le combat des bons et des mauvais Anges,
u où figure la malheureuse idée, reproduite par Milton,
le l'emploi de l'artillerie dans la bataille céleste. Le poème
latin de Zarotti, le Combat des Anges (Venise, 1642), et
le^ drames de Lucifer et ù^Adam par le Hollandais Vondel
(^>->i), ont encore traité des sujets voisins de celui de
Hilton, qui a pa y puiser des idées, sans les copier ser-
i^ilement. Lui-même enfin, dans un voyage en Italie en
1638, assista à une représentation de VAdam d'Andréini,
mystère en cinq actes et en vers libres, mêlé de chœurs et
de chants, où les principaux interlocuteurs sont à peu
près tous ceux du Paradis perdu, et où se trouTe un
monologue de Lucifer à la vue du jour, qui rappelle
l'apostrophe de Satan au Soleil. On pourrait encore ajou-
ter à cette liste V Enfer du Dante, la Jérusalem délivrée
du Tasse, la Semaine de Dubartas, paraphrase des récita
de la création, la Christiade de Vida en vers latins. Mais
la gloire de Milton ne doit point en souffirlik
Le Paradis perdu a été traduit en vers français par
Leroy, curé de S*-Herbland, de Rouen, au xvm* siècle ,
et par Delille, en 1805; en prose, par Dupré de Saint-
Maur en 1720, Louis Racine en 1755, Salgues, Chateau-
briand en 1837. V. dans le Spectateur, dix-huit articles
d^Addison ; ObservaJtions sur la Sarcothée. en tète de la
réimpression de la Sarcotis, poème latin de Jacques Ma-
sen, que le critiaue G. Lauder prétendait avoir été pillé
par luilton. Pans, 1771; Voltaire, Essai sur la poésie
épique, article Milton; Blair, Cours de Rhétorique et de
Belles-Lettres, t. III; Villemain, Essai historique sur
Milton; Chateaubriand, Génie du christianisme, 2* partie,
chap. III, Paradis perdu^ et Essai sur la littérature
anglaise, en tête de sa traduction; Delille, Remarques,
à la suite de sa traduction ; Sainte-Beuve, Points de con-
tact entre Milton ti Jansénius, dans son Port-Royal,
t. m. F. B.
PARADIS , mot employé au moyen âge dans le sens de
chambre de parade,
PARADIS , nom donné dans nos théâtres aux loges des
combles, en raison de leur hauteur. C'était un nom iro-
nique ; on les a appelées avec plus de Justesse le pou-
lanler,
PARADOXE (du grec para, contra, etcio^sa, opinion},
proposition contraire à l'opinion commune, qu'elle soit
ou ne soit pas vraie. C'est, par exemple, un paradoxe
do dire que la pauvreté est préférable aux richesses. Cer-
taines idées aujourd'hui admises, à savoir : que la terre
tourne, qu'elle est ronde, qu'il y a des antipodes, ont
été longtemps regardées comme paradoxales. QuancT les
Éléates niaient la diversité des êtres et le mouvement «
({uand Pyrrhon prétendait qu'on devait douter de tout,
ils soutenaient des paradoxes. Clcéron a dévelpppé dans
ses Paradoa^ certaines opinions des Stoïciens , comme :
« Le sage est seul libre, seul riche, seul beau, etc. »
J.- J. Rousseau a été un esprit souvent paradoxal. Laro-
mignière nous a laissé un écrit sur les Paradoxes dp
CondUlac. Il y a eu même des paradoxes en géométrie :
on les trouve réunis dans VApianum de Mario Bettino.
PARADOXISME, figure de pensée qui consiste à réu-
nir, sur le même sujet, des attributs qui, au premier
coup d'œil, semblent inconciliables et contradictoires.
C'est une imitation du paradoxe. Ainsi, Thomas a dit de
Sully : « n se vengea de ses ennemis, car il ne perdit
aucune occasion de leur faire du bien, a Boileau a dit
d'un noble ruiné, qui se mésallie pour redevenir riche ,
qu'il rétablit son honneur à force d'm/amie.
PARAFE ou PARAPHE ( du çrec paragraphe^ suscrip-
tion ou signature), marque faite d'un ou de plusieurs
traits de plume et qui accompagne la signature, dont elle
peut aussi tenir lieu. Au Palais, quand on dépose aa
greflÎB une pièce arguée de faux, le déposant, le magistrat
et le grefiier y mettent leurs parafes , pour constater
l'identité de cette pièce, ne varietur (pour Qu'elle ne
puisse être changée). Les lustres de l'état civil et les
actes notariés doivent être parafés sur chaque feuillet,
pour qu'on ne puisse substituer une feuille à une autre
et supposer des actes qui n'auraient pas été écrits à leur
date. C'est à l'aide de parafes qu'on approuve les ratures,
les renvois et les intercalations dans tous ]es contrats et
les actes judiciaires sur papier timbré. Dans les inven-
taires, on parafe par première ou dernière. Les fonction-
naires dont la signature est sujette à légalisation remet-
tent, avant d'entrer en fonction , leur signature et leur
parafe aux magistrats supérieurs chargés de les légaliser.
PARAGE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bi'j^
graphie et d* Histoire,
PARAGOGE (du grec paragôgè , allongement), méta-
plasme ou figure de Grammaire consistant à aHonger un
radical ou un mot déjà formé. Ainsi, en latin, ey-met pour
ego, memet pour me, ipsemet pour ipse, hicce pour hic,
amarier, invertier, pour amari, inverti, pofestur pour
potest. En français, et, là, da, dans cWui-ct, ceiut-là,
oui-da, sont des paragoges. II en est de même de Vs dan.<'
guères, jusques, Le> grammairiens grecs se servaient
aussi du mot Prosparaiepse, qui avait le même sens que
Paragoge. P.
PARAGRAP'^E (du grec para, proche, et graphe.
' j'écris], nom que ies anc>ns Grecs donnaient aux burins
PAU
1370
PAR
marginales par lesquelles ils distinguaient certaines par-
ties de paraoase ou de chœur qui correspondaient entre
elles. II désigne aujourd*hul une petite division , une
section de chapitre. En Typographie, on le figure par ce
signe : S-
PâHALIENNE (Galère). ( K. notre Dictionnaire de
PÂRALIPOMÈNES. ) Biographie et (THistoire.
PARALIPSE. V. Paériiirnoif.
PARALLÈLE, rapprochement qu'établit un écrivain
entre deux personnages importants, pour faire ressortir
leurs qualités semblables ou opposées. L*écaeil de ces
sortes de comparaisons est Tabus de Tantithèse. On peut
citer comme modèles 'de parallèles ceux de Turonne et de
Condé par Bossuet {(h-aison funèbre du prince de Condé,
3* partie), de Corneille et de Racine par La Bruyère
{Caractères, ch. i^des Ouvrages de Vesprit)^ de Riche-
lieu et de Mazarin par Voltaire (dans la Benriade^
ch. vu), de Sully et de Colbert par Thomas {Éloge de
Sully, 3* part.), de Bossuet et de Fénelon par La Harpe
{Éloge de ^Fénelon, 2« part. ), de Linné et de Buffon par
Cuvier (Éloge de Buffon). Le nom de Parallèles a été
aussi appliqué à des notices biographiques comparées :
telles sont les Vies parallèles de Plutan^ue et celles de
Cornélius Népos.
PARALLÈLES, en termes de Fortification, lignes de
fossés creusées par des assiégeants, et presque putdlèles
aux ouvrages auHls atta<^uent. Un siège en forme de-
mande généralement trois parallèles. Ce moyen d*at-
taque fut employé par les Turcs à Candie en 1068; mais
Vauban est le premier qui en ait fait un bon emploi au
siège de Maastricht en 1073. V, Demi-Parallèles.
PARALLÈLES, en tCTmes de Géographie, petits cercles
de la sphère terrestre parallèles à Téquateur.
PARALLÉLISME. T. HébraIque (Versification).
PARALOGISME (du grec para, contre, mal, et logi-
s^m, raisonner), raisonnement faux, argument vicieux ,
conclusion mal tirée ou contraire aux règles. Le paralo-
t^isme, aussi bien que le sophisme, induit en erreur;
mais ils diffèrent Tun de Tautre par leur oriçinc; le so-
phisme suppose la mauvaise foi chez celui qui remploie,
e*est un irtiflce destiné à tromper ; le paralogisme naît
de la faiblesse naturelle de l'esprit. L'homme qui fait un
paralogisme trompe les autres ; mais il le fait de bonne
foi, car en même temps il se trompe lui-même. Les prin-
cipaux paralogismes sont : l'erreur sur la cause, Terreur
de Vaccident, le dénombrement imparfait, Vignorance du
sujet, la pétition de principe, le cercle vicieux, H. D.
PARAMOS , mot qui veut dire campagnes incultes, et
par lequel on désigne, dans l'Amérique méridionale, cer-
tains districts montagneux, couverts d'arbres rabougris,
exposés aux vents, presque toujours enveloppés de
brouillards, et où règne sans cesse un froid humide.
PARANGON. V, Caractères d'impriuerie.
PARANGONNER, en termes d'Imprimerie, faire qu'un
caractère différant d'épaisseur de corps s'aligne bien avec
celui dont on se sert, en y ajoutant des espaces, des ca-
drats, des interlignes.
PARtVNOMASIE , nom que les rhéteurs latins don-
naient à la consonnance résultant du Jeu des mots par la
différence de quelques lettres. Il y en a une dans cette
phrase de VAndrienne de Térence : Inceptio est amen-
tium , haud amantium,
PARANYMPHE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et i* Histoire,
PARAPEGMA, mot grec qui signifie affiche, tableau.
On l'appliquait spécialement aux tables sur lesquelles on
inscrivait les lois, les ordonnances, et tout ce qui inté-
ressait le public.
PARAPET (de l'italien parapetto , pare-poitrine) , en
termes de Fortification, partie supérieure d'un rempart,
destinée à protéger ceux qui le défendent. C'est une élé-
vation en terre, en forme de glacis, haute de 2 met. du
côté de la place, et de 1"* et i/2 seulement du côté de la
campagne ; elle permet, par conséquent, de tirer de haut
en bas dans le fossé ou sur la contrescarpe. Pour cela, la
hauteur du parapet est divisée en deux par un degré
nommé banquette, sur lequel monte le soldat. Il a aussi
des embrasures, pour qu'on puisse tirer le canon. — On
donne encore le nom de Parapet à toute muraille ou
balustrade élevée à hauteur d'appui le long d'une ter-
rasse, d'un quai« d'un pont, etc., pour servir de garde-
corps ou garde-fou. B.
PARAPHE. V. Parafe,
P.iRAPHERNAUX (du grec para, au delà, et phemè,
dot ), en termes de Droit, se dit des biens de la femme
mariée KouA le régime dotal qui ne font point partie do
sa dot, soit qu'elle les ait réservés en se mariant, soit
qu'ils lui arrivent durant le mariage, par succession,
donation ou autres voies. Ces biens appartiennent exclu-
sivement à la femme. Le mari ne peut les aliéner, sans
son concours ou son consentement, même pour lui pro-
curer la libération de ses dettes ; mais elle ne peut non
plus les aliéner, ou paraître en Justice à raison d'eux,
sans avoir obtenu l'autorisation de son mari ou celle de
la Justice. Dans le cas oti tous les biens de la femme
seraient paraphernaux, elle serait tenue, mftme en l\ib-
sence de clause à cet effet dans le contrat, de contribuer
aux charges du mariage Jusqu'à concurrence du tiers de
ses revenus. Le mari peut administrer les biens para-
phernaux avec procuraUon de sa femme, mais à la charge
de rendre compte des fruits ; et, s'il y a stipulation ex-
presse, il est tenu vis-à-vis d'elle comme un mandataire
à l'égard de son mandant, et responsable des fautes qu'il
a pu commettre. S'il Jouit des biens paraphernaux, sans
mandat exprès, mais simplement parce que la femme
n'y fait pas opposition (droit qu'elle peut toujours exer-
cer), il n'est tenu, lors de la dissolution du mariage ou
à la première demande de sa femme, qu'à la représenta-
tion des fruits existants; ceux qui ont été consommés
sont censés avoir été employés dans les dépenses du
ménage. Le mari est responsable du défaut d emploi du
prix de l'immeuble parapheroal qu'il a autorisé sa femme
à aliéner. Pour sûreté des reprises qu'elle peut avoir
à exercer relativement à ses oiens paraphernaux, la
femme a sur tous les biens de son mari une hj'pothèqoe
légale, indépendante de toute inscription. K. Benoit,
Traité des biens paraphernaux, 1846, in-8®.
PARAPHONIE, nom que les Anciens donnaient aux
consonnances musicales ae quinte et de quarte, par op-
position à Vantiphonie, qui était la réplique des mème«
sons, et à Vhomophonie^ qui était l'unisson.
PARAPHRASE ( du grec paraphrasis, interprétation^,
explication plus ou moins étendue d'un texte qui a besoin
d'être éclairci. Elle s'attache à rendre le sens de l'auteur,
et non ses paroles; ce qui la distingue de la glose, qui
explique mot à mot, et du commentaire, qui donne des
renseignements et des détails complémentaires sur l'in-
tention de l'écrivain, plutôt qu'il ne cherche à la repro-
duire. — On a donné spécialement le ,nom de Para-
phrases à certaines interprétations de l'Écriture sainte :
nous citerons, par exemple, le Targum, ancienne version
de la Bible en langue chaldéenne, la Paraphrase d*Énsme
sur le Nouveau Testament, les Paraphrases de MassilloD
sur les Psaumes,
PARAPLUIE (de parer à, et de pluie). Les premiers
parapluies furent faits de cuir, de taffetas, de bouracsn ,
de toile cirée. Les Chinois en ont , depuis bien des
siècles, en papier huilé et verni ; ils en font même de
feuilles d'arbres. Le parapluie n'a été employé que fort
tard en Europe ; il en est fait mention pour U première
fois en France dans les Œuvres de Tabarin, en 16:22.
Longteoips les femmes seules s'en servirent.
PARASANGE. { F. ces mots dans notre Dictionnairt
PARASITE. ( de Biographie et d'Histoire.
PARASOL (de parer à, et de sole^). Chez les Orien-
taux, le parasol a toujours été une marque de dignité, i
laquelle on reconnaît la puissance humaine ou divine.
Sur plusieurs bas-reliefs de Persépolis, le roi et qudques
grands personnages sont représentés sous des parasols
tenus par des Jeunes filles. Dans l'ancienne Grèce, aui
fêtes de Bacchus, de Cérès, et de Minerve, on portait des
parasols comme insignes de ces divinités, et on célébrait
au commencement du printemps, sous le nom de ScirO'
phorion , une fête des parasols. Chez les peuples chré-
tiens, le dais a remplacé le parasol comme marque dlion-
neur. De nos Jours encore , l'empereur du Maroc a seul
le droit dans ses Ititats de se servir d'un parasol ; on
retend sur sa tête quand il donne des audiences et dans
tous les actes solennels. Chez nous, le parasol n'est plus
qu'un instrument d'utilité commune, dont les femmes
font usage sous le nom d^ombrelle, B.
PARASTATE, terme d'Architecture. V, km,
PARATIQUE. V. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire.
PARATITLES (du grec para, à côté, et du latin titvr
lus, titre), nom qu'on a donné à certains abrégés ou
sommaires de Jurisprudence, indiquant avec pr^sioo
les titres et les décisions. On met souvent des paratitle3
dans les volumineux recueils de droit ancien ; il y en s.
par exemple, dans le Code Théodosien édité par Jacquet
Godpfroi.
PARATORIUM. V. Prothèse.
PAR
1371
PAR
PARAVENT (de parer à, et de vent)^ meuble composé !
He plasieurs châssis en bois léger, recouverts de papier,
d0 tapisserie ou d^étofle, assemblés par des charoiëres,
poQTsot se replier les uns sur les autres ou se déployer,
et dont on se sert dans les appartements p^ur se g^ntir
du yent. On fkit des paravents dont les cuassis sont gar-
nis de glaces sans tain, pour ne pas priver de Jour Tes-
pace quils enveloppent. Les paravents paraissent être
origipaires de la Chine, où on les fait ordinairement en
laque.
PARAY-LE-MONIAL (Église de), dans le département
de Saône-ct-Loire. Cette église, autrefois abbatiale, et
dédiée à la S^* Vierge et à S^ Jean-Baptiste, fut con-
struite au commencement du xi* siècle, mais rebâtie
au xn* dans de plus vastes proportions et sur le modèle
de celle de Cluny. Elle est en forme de croix latine ;
mais les bras du transept sont si développés, que Tédiflce
ressemble presque à une croix grecque. Comme les au-
tres églises des Bénédictins en Bourgogne, celle de Paray-
le-Moaial est précédée d*un narthex ou porche fermé, à
deux étages, où Ton entre par une petite porte bâtarde,
et qu^accompagnent deux tours carrées, dont la partie
supérieure est décorée d^arcatures et de fenêtres cintrées.
Le milieu du transept est surmonté d*une autre tour à
huit pans, dont l'étage supérieur est percé d*arcades ogi-
vales. La porte qui ourre du narthex dans la nef princi-
pale est rehaoasée de sculptures byzantines d*un beau
traTsiL La longueur de Téglise à Tintérieur est de 49",30,
et la hauteur sous voûte de 27™; la largeur de la grande
nef est de 7'",33. Plusieurs parties sont du style de tran-
sition, et présentent, comme la cathédrale d'Autun, des
piliers ornés de pilastres cannelés. La voûte du sanc-
tuaire s*appuie sur des colonnes rondes très-élancées, ce
qui donne k cette partie du monument une grande légè-
reté. Le collatéral qui entoure le sanctuaire renferme
trois chapelles rayonnantes. On remarque, dans la cha-
pelle de la S**-Vierge, le tombeau des barons de Digoine,
bienfaiteurs de Tabbaye.
PARAZONIUM, arme. V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d*Histoire.
PARC, vaste étendue de terrain entourée de murs ou
de palissades , plantée de bois en totalité ou en grande
partie, et qui sert à la promenade ou aux plaisirs de la
chasse. Ccst Taccompagnement ordinaire des demeures
royales, des ch&teaux, des grandes propriétés. On peut
loene (oepuia qu'on eh à changé l'ancien caractère), ete.;
eu Angleterre, HydePark et St-Jamee-Park à Londres,
les parcs de Greenwicb et de Windsor; en Allemagne,
ceux de Wœrlitz et de Schweixingen ; en Belgique, le
parc de Bruxelles» entre le palais du roi et celui des
Eiats-Gônéiaux.
PABc terme d'Art miliUîre. Un parc d'artiUerie eei la
réunion des bouches & feu, des fourgons ou caissons
cliargés de projectiles, des voilures, des chevaux, et de
toutes les munitions présumées nécessaires pendant une
campagne à une armée ou & un corps d'armée. 11 y a
aussi des parce de siège, des parcs de ponts ou f>ontons,
àes parce de vivres et fourrages, des parcs du génie* Un
^nrc de réserve, placé à proxinfîté des mouvements stra-
tégiques, est destiné à alimenter les autres parcs.
PARC\G£ (Droit de), redevance que le seigneur féodal
prélevait sur les vassaux qui clôturaient des bestiaux
dans un pare.
PARGUEMIN, corruption de Pergamin en latin charta
Pergamena, papier de Pergame C'est de la peau de mou-
toQ ou de chèvre convenablement préparée, polie avec la
pierre ponce, et destinée à recevoir l'écriture. Les rois
d'Egypte ayant interdit l'exporUtion du papyrus, Eu-
méoe IL roi de Pergame, imagina, dit-on, le parchemin,
vers Tan 160 av. J.-G. Les anciens distinguaient deux
sortes de parchemin : l'un, desUné aux rouleaux (volu*
mtna), et sur lequel on n'écrivait que d'un cAté; l'autre,
destiné aux livres carrés (codices), sur lequel on écri-
vait des deux côtés, et qu'on appelait pour cette raison
opisihographe. Le parchemin de Pergame était jauoAtre,
ei on le recherchait & cause de cette teinte favorable à la
^ua; celui des Homains eut une blancheur éclatante.
Lors de l'invasion des Barbares, le parcbemin devint fort
rare, et, pour remédier à celte disette, on gratta les an-
ciennes écritures, afin de transcrire sur lea manuscrits
des légendes ou des prières. C'est à ce funeste usage qu'il
fcui attribuer la perle de tant d'ouvrages de l'antiquité.
Au vp siècle^ le parchemin, réserve jusque-là pour les
livres, commença à être employé pour les chartes et les
diplômes. Après Pinvention du papier de chiffon, il seryft
encore pour les expéditions des actes et pour les manu-
scrits de quelque importance. B.
PARCHEMINIERS, ancienne corporation qui fabri-
quait le parchemin. Elle avait pour patron S* Jean PÉvan-
géliste. un statut de l'Université, en 1201, exi^it de»
parcheminîers le serment d'agir sont fraude m maltce.
Des lettres patentes de Charles V, en date du 5 nov. 1368,
nous apprennent qu'il y avait alors 18 parcheminîers
jurés, chargés de visiter, d'admettre ou de rebuter le
parchemin qui arrivait à Paris, et qu'ils étaient exempts
du guet et de la garde des portes. En 4488, on les rédui-
sit à huit. L'Université avait un droit rectoral sur le par-
chemin, dont on se pourvoyait surtout aux foires du Len-
dit et de S'-Lazare. B.
PARCIVAL. V. Pkrceval.
PARCLOSE, V. STAL1.B.
PARCOURS ET ENTRECOURS (Droit de), nom donné
dans les temps féodaux à un droit résultant de traités
faits entre seigneurs voisins, et en vertu duquel leurs
vassaux libres pouvaient passer d'une seigneurie dans
une autre sans craindre d'être asservis. En vertu du
même droit, les serfs de seigneuries différentes pouvaient
contracter entre eux des mariages valables.
PARCOURS ET VAJNE PATURE. On appelle parcoure
la .faculté que possèdent deux ou plusieurs communes
voisines d'envoyer réciproquement leurs troupeaux sur
leurs territoires respectifs; et vaine pâture, la faculté
appartenant à tous les habitants d'une même commune
d'envoyer ^eurs troupeaux en p&turage sur les terres
vaines et vagues, et, après l'enlèvement des récoltes, sur
les champs cultivés. On dit aussi, pour l'un et l'autre
cas, droit de pacage. Le droit de parcours, qui avait son
origine dans les âges féodaux, était, bien avant 1789,
condamné comme contraire au droit commun. Mais le
droit de vaine p&ture semblait tellement respectable,
que personne ne pouvait clore ses héritages, et que cette
faculté ne fut accordée que par un édit de 1669. Le Code
rural de 1701 maintint le parcours, lorsque cette servi-
tude se fondait sur un titre ou sur une possession auto-
risée par les coutumes et usages locaux ; il conserva éga-
lement le droit de vaine p&ture. L'un et l'autre droit
subsistent encore aujourd'hui dans un certain nombre do
localités. Dans aucun cas et dans aucun temps ils ne po»-
vent s'exercer sur les prairies artificielles oo sur une ,
terre ensemencée.
. PARDAO monnaie d'argent en usage dam la Barbarie,
et valant 1 flr. 55 c. environ.. , . , .^ ^,
PARDO (Château ,du), résidence royale, située & 12 kl-
lomôires de Madrid, sur lo Maazanarès. Pardo signitie
pré en espagnol. (!e ch&teau, anciec rendez-vous de
chasse hâii par Henri III, réôdiflé par Charles-Quint, et
embelli sous &es successeurs, est un grand b&timent carré,
flanqué de quatre tours, et composé de quatre corps de
logis qui communiquent par des galeries extérieures. L'in-
térieur offre beaucoup de fresques exécutées par Gaspard
Becerra, et des tapisseries fabriquées & Madrid d'après
des dessins originaux de Goya ou des copies de David
Teniers. La chapelle contient quelques belles peintures
de Moialès et de Lucas Giordano. Le chàleau est précédé
d'un Jardin planié d'arbres fruitiers, et au delà s'élendent
des bois entourés d'un mur en mAçonnerie qui a près
de 80 kilomèt. de développement. Dans celte vaste en-
ceinte, à 4 kilomèt. du château, s'élève la Zarzuela^
Jolie habitation à un seul éUge, où l'on a Joué les pre-
miers opéras-comiques espagnols, appelés pour celto
raison zarztielas.
PARDON. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
PARÉCHÈSB, nom que les rhéteurs de l'ancienne
Grèce donnaient à une Figure de diction consistant dans
la répétition fréquente d'une môme syllabe ou d'une
même articulation.
PAREMENT, nom donné autrefois à des morceaux
d'étoffe riches et voyants, qui servaient à parer les man-
ches des habiU d*homme et le devant des robes de
femme. Aujourd'hui ce n'est plus que le retroussis du
bout des manches, lequel est souvent, chez les militaires,
d'une couleur différente de celle de l'habit, et sert & dis-
tinguer les corps.— On nomme Parement d'autel ce que
les auteurs liturgiques appellent Devant ou Couverture
d^auteL
PAREMEifT, côté d'une pierre ou d'un mur qui parait
au dehors. En Fortidcation, le mot s'emploie comme
synonyme de rempart et de parapet*
PAR
1372
PAR
PARÉHIAQCE (Vers), vers des Grecs et des Latins,
tfnsi nommé du grec parùfmia (proverbe] , parce qu'ap-
paremment beaucoup de proverbes avaient reçu cette
forme chez les Grecs. C*est un anapestique dimètre ca-
talectique. Il sert habituellement de clausule aux sys-
tèmes anapestiques dimètres, purs ou mêlés. Lorsqu'il
sert de clausule à une série de procéleusmatiques, c'est
un signe que ceux-ci ne sont que des solutions d'ana-
pestes, les longues étant changées en deux brèves. Quel-
quefois le parémiaque commence la série d'anapestes,
surtout lorsqu'ils sont mêlés à d'autres mètres; on en
trouve aussi deux, ou même plusieurs de suite.
Le vers parémiaque ne se trouve nulle part employé
en systhne dans ce qui nous reste de la poésie grecque;
mais nous savons par le grammairien Héphestion que
Cratinus, contemporain d'Aristophane, l'avait employé
ainsi. Le grammairien latin Diomède cite deux vers que
l'on regarde comme un fragment d'un poète du temps
de la République. Ansone et Boéce, poètes de la déca-
dence, ont laissé des pièces composées de parémiaques;
mais les anciens tragiques latins en avaient fait le même
usage que leurs modèles grecs. Plaute a usé plusieurs
fois du parémiaque ; mais fi ne le manie pas avec beau-
coup de délicatesse; les spondées y sont trop multi-
pliés. P.
PAAÉMIOGRAPHIE ou PARÉMIOLOGIE (du grée par-
roimia, proverbe), étude ou explication des proverbes
(K. ce mot),
PARÊNÉTIQUE (du grec paraïnésis, exhortation),
partie de l'éloquence de la chaire qui touche à la mo-
rale. Elle comprend les sermons, les homélies et les
prônes.
PARENTÉ (du latin parère, engendrer J, rapport qui
existe entre les personnes unies par les liens du sang.
Outre la parenté naturelle, on distingue : la parenté lé-
gale, produite par l'adoption; la parenté civile ou affi-
nité^ contractée par mariage; la parenté spiritimlle^ qui
résulte du parrainage. Les parents sont ou ascendants
(le père et la mère, et tous les auteurs plus éloignés), ou
descendants (les enfants, les petits-enfants, etc.), ou
collatéraux (frères et sœurs, oncles et tantes, neveux et
nièces, cousins et cousines] ; ces derniers sont divisés en
agnats, collatéraux du côté paternel, et cognats, collaté-
raux du côté maternel. La proximité de parenté s'établit
par le nombre des générations ; chaque génération s'ap-
pelle un degré; la suite des degrés forme la ligne de pa-
renté, La ligne est directe, quand elle est la suite des
degrés entre des personnes qui descendent l'une de
l'autre; elle est collatérale, quand elle est la suite des
degrés entre des personnes qui ne descendent pas l'une
de l'autre, mais qui ont une souche commune. En ligne
directe, on compte autant de degrés qu'il y a de généra-
tions entre les personnes : ainsi, le fils est à l'é^d du
père au i»' de^, le petit-flis au 2^, l'arrière-petit-fils
au 3*. En ligne collatérale, les degrés se comptent aussi
par générations, depuis l'un des parents Jusques et non
compris l'auteur commun, et depuis celui-ci Jusqu'à
l'autre parent ; ainsi, deux frères sont au S" degré,
l'oncle et le neveu au 3% les cousins germains au 4*. Il
n'y a donc point de f degré dans la ligne collatérale.
En Droit canon, au lieu de compter en ligne collatérale
les générations des deux parents, on compte seule-
ment les degrés do l'un des parents Jusqu'à la souche
commune : d'après ce système, deux frères sont au
^er degré, parce qu'il n'y a qu*une génération depuis
l'un des frères Jusqu'au père, qui est la souche com-
mune. — Dans notre législation, et suivant nos codes, la
parenté produit tantôt des droits, tantôt des oblifi;ations,
tantôt des prohibitions. V. Sdccession, Famille (Conseil
de), Alivents, Mariage.
PARENTHi^SE, c.-à-d. en grec interposition, mot qui
signifie tout à la fois une proposition ou pensée isolée
qu'on insère dans une phrase aont elle suspend la mar-
che, et les signes ( ) par lesquels on indique cette inter-
calation. On ne doit produire en forme de parenthèse que
des idées dignes de fixer l'attention, et qu'on ne saurait
différer d'exprimer. Toute parenthèse doit être courte et
vive, autrement le style devient embarrassé et traînant.
PARÈRE ^d'un mot italien signifiant opinion^ ce qui
f)araU)^ certificat donné par des négociants notables et
nstruits pour des questions de commerce débattues en
Justice, afin d'établir l'usage quand la loi est muette, obs-
cure ou insuffisante.
PARÉS (Actes), actes qui contiennent le même préam-
bule que les lois, et qui sont terminés par un mande-
ment du souverain aux ofiiciers de Justice. Le terme
vient de oe qu'autrefois les actes de cette nature por-
taient le mot \eX\npareatis (obéissez).
PARESSE, l'un des sept péchés capitaux, qui a pour
origines le plaisir et l'oisiveté, pour conséquences te
dégoût du travail, la mendicité, le vol, etc.
PARFAIT, inflexion particulière des verbes pour expri-
mer une des nuances du temps passé. Ce temps, dans
les langues modernes, a une forme composée : lai lu, etc.*
en latin également, mais seulement à la voix passive :
lectus sum, et par conséquent dans les verbes déponents
et semi-déponents : imitatus sum^ ausus sum. A la voix
active, il est terminé en avi, evi, ivi,ovi, ud, ui, $i, i, etc. :
amam, fievi, audivi, cognovi, adjuvi, monui, repsi,
legi, etc. Le parfait latin correspond au parfait des lan-
gues modernes, souvent aussi au passé défini français, et
à l'imparfait des langues germaniques employé comme
temps historique ; et il exprime simplement une action
accomplie ou un état entièrement passé. Il n'en est pas
de même du parfait grec. Ce temps, caractérisé à la
i'* personne de l'indicatif par les terminaisons a, xa,
9a, x« à l'actif, (lai au passif et au moyen, exprime bien
une action accomplie, mais dont le résultat se prolonge
dans le temps présent. Il sert souvent, par suite, à
exprimer vivement une action future, dont le résultat,
subordonné à une autre action future, est regardé comme
infaillible, si celle-ci s'accomplit. P«
PARFArr (Accord). V. Accoan.
PARFAITE (Cadence, Consonnance). V» Cadetice, Coh-
SOIfNANCE.
PARFAITS CTons ou Modes), tons ou modes du Plain-
Chant qui atteignent, dans le morceau de chant qui les
constitue, les deux notes extrêmes de leur échelle diato-
nique. Ainsi, une pièce du i" ton sera dite parfaite, si
elle ofl^ un ré grave et un ré aigu, ou, en d'autres
termes, si elle monte jusqu'à l'octave de sa note finale.
Une pièce du 2* ton sera parfaite, si elle a une octave
d'étendue à partir de la quarte au-dessous de sa finale.
Chaque ton peut monter d'un degré au-dessus des limites
de son échelle diatonique et descendre d'un degré au-
dessous, sans cesser d'être parfait; mais, dans oe cas, il
est à la fois parfait et surahondant ( V, ce moi), F. C
PARFUM (du latin per, par, et (umus, fumée, émana-
tion), odeur aromatique, agréable, plus ou moins forte,
qui se détache d'une substance naturelle ou artificielle.
L'usage des parfums remonte à la plus haute antiquité.
Moïse donne la composition de celui qu'on ofl'rait à Dieu,
et de celui qui servait à oindre le grand prêtre et ses fils,
le tabernacle et les vases sacrés. Êzéchias conservait des
parfums exquis dans ses trésors. Judith en employa pour
captiver Holopheme. Les Êgjrptiens se servaient de par-
fums, surtout pour embaumer les morts. Les Arabes, les
Babyloniens, et, en général, tous les Orientaux, aimèrent
à en porter. Les Grecs et les Romains regardèrent les
parfums non-seulement comme un hommage dû aux
dieux, mais encore comme un signe de leur présence :
chez les poètes, les divinités annoncent leur apparition
en répandant autour d'elles une odeur d'ambroisie. A
Lacédémone, le luxe des parfums ne parvint pas à s'éta-
blir : les parfumeurs furent chassés, comme gàcheon
d'huile. Il en fut autrement à Athènes, bien que Solon
eût interdit les parfums, ^ pour les contenir, on fabri-
qua toutes sortes de boites, ae flacons et de vases pré-
cieux. Chaque partie du corps avait une essence ou une
huile qui lui était propre : la menthe était recommandée
pour les bras, l'huile de palmier pour la bouche et la
poitrine; on gpraissait les sourcils et les cheveux avec an
onguent extrait de la marjolaine, les ^noux avec l'es-
sence du lierre terrestre, etc. On attribuait, d'ailleurs,
aux parfums des propriétés singulières : l'odeur de ceux
que les convives se faisaient verser sur la tête combat-
tait victorieusement, croyait-on, celle des vins et des
mets, et permettait de boire sans redouter l'ivresse; le
p^um des feuilles de vigne donnait de la lucidité à
l'esprit; celui des violettes blanches favorisait la diges-
tion, etc. Les riches ne furent pas les seuls à se serrir
de parfums, puisque Socrate, bl&mant ceux qui se psr-
fumaient, disait : « Un esclave et un citoyen parfumés
ont la même odeur. » L'abus engendra des conséquences
funestes; Aristote prétend que la quantité de chevelures
grises qu'on voyait de son temps provenait de l'influença
brûlante des épices contenues dans les onguents. A Rome,
la vente des parfums fut d'abord défendue sévèrement;
puis on en fit un usage extravagant. Avant et après les
combats, on parfumait les aigles; on brûlait des parfums
sur les tombeaux; l'Arabie ne produisit pas en une
année autant d'encens que Néron voulut en mettre au
PAR 13
tkher fiiaéraira de Poppte. La principale me ds C^ioub i
n'tuit occupa que par dei iiurnimeun. Cependant, les |
ïomaies qui n narTamafaDt flnireac par tin jugùs avec
léiinti; ondltâlt : IIaUoi*t<iuibtn* oltt, béni oiit qui
nAil d1<I. — Chei les Hiiderne*, U pasilon des parrums
( beincoup diminué. Elle ■ été néanmoins fort vive an
ivi> siècle, et les Italiens eicell6rent I la satis Paire. Au-
jourd'hui, il n'y a plus guère que les feoiméa qui se
pirlnmetit. "-
PARI ou GAGEURE, promeise réciproque par laquelle
deui aa plusieurs peraonnas soutenant des avis con-
traires s'engageât i payer une certaine Bomme k celle
qui u trouïera «voir raison. Les andeos jariBconaullas
r«ginlaient tee gageures comme permises ou détendues,
uIdd qae leur objet était boa ou mauTSis, leur cause
honnéle ou illicite; de plus, en Franco, on eKlgealt
qu'elles fussent suivies de con si g calions. Notre Loda aç-
loel n'accorde aucune action pour le payomeol d"uo psri.
Toolo action est aussi refusée pour un mardié i lerma
ï la Itourse. V. MàbCR£ a tesiiB.
fAKlAGOTO (Dialecte). V. CauIbr.
PARIS CLOACAl- C'est le Paris soutarraln, aussi mei^
veilleni dâu son genre que le Paris épanoui au soleil,
qui lui doit son assainissement, sa propreté constante,
ime partie île aa splendeur. Dès les premiers siècles, tes
Paiiuens eutreienaleot des rigoles Jt ciel ouvert, pour
tconjer lea eaux usagères dt pluviales vers la Seine, vers
au ruisseau dit de ilëait.lloi)taDt, au N. de la ville, et
^'im a , longtemps wrii, appela Grtmd égoùt da etin-
tara,- enfla, dani la Bièvre, peUla rivière qui traverse
in ccdn de 1», partie S, Au ii* siècle, lorsque Isa Parisiens
fortiaèrent leur ville, les fossé* eilérieun, creusés au
pied des murailles, servirent aussi de réceptacles aux
aoi de toutes sortes. Des rigoles, des ruisseaux, des
fouëi sont partout les égouti rudimeottures , mais en
même temps des causes d'infection sous l'action de l'air
on do soleil. Au ivi* siècle, la demeure des rois de
France, l'hatel des Tournelles, situé sur uns partie de
l'emplacBQieDl actuel de la Placé-Royate, était :
., ___ ^_._. -jtides " - '
nnoants. ~
commode par les eittalalsons
it io-
des éginiu envi-
La premier égout veAtâ tut construit ven 1371, dans
1« quikitiar Hontmartre. On avait trouvé le remède au
mal; mais on l'appliqua arec une telle lenleur, qu'en
1963 Paria n'avait encore que I.SOT toises (S,352 met.)
d'igoats couverta. Cependant on cheminait, car au com-
mencement du m* siècle la ville en compta 33,531) met.,
et, t la fin de tS3fl. euviron Sl.DOO met., non comprit
\a égouta découverts K rives et h radier maçonnés ou
non t le dernier ds ces fossés Infects n'a disparu qu'en
IU3. La longneor totale dea égouia équivalait alors ï
IGSUlomètrea.
I l'frnmvpHtanmfnl général des égouta était un très-
ïnndréaultat; mais, depuis le iiv* siècle, tant d'admi-
nistrations différentes mirent la main ï la vaste entreprise
ia cloaques, od la conduisit avec tant de lenteur, qu'il
as fnl guère posalble de concevoir un plan d'ensemble.
Ks 1S5!, l'administration municipale reconnut que la
cualiiation aouterraine de Paris avait besoin d'èlre sys-
tématisée et conaldérablement améliorée. Las ingénieurs
proposèrent un plan général-pour écouler rapidement,
al tans Inondation posaibU dai rues, comme cela arrivait
»Ki souvent dans nlasieura quartiers, toutes les eaux
néDigèrea, iDdusIrielles ou pluviales de Paria. Le grand
Eïoul dt etintur» était alors la principale cloaque : il
siait été ToQié vers 1740, passait au pied des coteaux qui
•e développent dans les faubourgs au N.-E., au F4. et an
N.-O., en partant de la rue de* Coutures S'-Gervais, et
tbooiissait à la Seine, en léte du qua! de Bllly. Son par-
cours était de 6,800 met. environ, et il recueillait toutes
let eaui des quartiers supérieurs et une partie de relies
iks quartien M*. Quoique mal appliquée i cause de la
Inp faible section de cette galerie, l'idée était heureuse.
Le sol de Paria fut dirisé, suivant les iné^Iités de son
Rlief, en cinq bassina, à l'instar des bassins géograplii-
tpKa; ta rive droite en eut trois : l'un, bassin de Cha-
ninné,de Bellerille, de Montmartre, embrassa le N.-E.
« la N.j — )e second, tout (t fait central, comprit les
qnsrtien S'-Anloine, du Temple, S'-Hartin et S'-Denis,
1 l'E. et aa N., et ceux du Palala-Royal et des Tuile-
ries, à l'O. ; — le troisième sa composa des coteaux de
Cbaillot, ireitrème Ouest; — te quatrième et te cin-
quième, sur la rive gauche, surent, au S.-E., le bassin
M la Bièvre, et, an S.-O., celui du Luxembourg, de S*-
l>enHain-<tos'PréB et du Gras-Caillou.
Ui divisions adoptée*, le projet de canalisation, au-
3 !■*"
qnel on aa mit avec activité, conaidCra le sol de
Paris comme un ctiump qu'il FiUluit di'sscclier par in
drainage, dont les druns seraient des galeries cloacalm.
Un décret du 20 mars 1853 arrèu qu'aucunes eaux mt^
nagères, usagères ou d'égout des maison* ne devaient gc
répandra sur la voix publique, et que chsque rue aurait
son égout souterrain où les maison* riveraines condut-
ralent leur* eaux, quelle qu'eu fût l'ori^^na. L'adminl*-
tratlon voulut, en outre, poursuivre l'insalubrité ]osque
dans la Seine même, où tous les égouts se dL^vorsaienti
elle imagina de les faire aboutir dans six gnindrs galeries
principales, coupant la ville h peu pré* en quatre parties,
et ayant pour afDueots 13 ou 15 autres galeries secon-
daiiês, recevant elles-mêmes les eaux d'une foule d'anires
^eriea moins grandes, creusées dans toute* les direc-
tions. Trois des maltresses galeries furent construites
pour les quartiers de la rive droite : la ('■pandeTeiiré-
mité S. du bassin de la Baatille, et suit les quais Jusqu'à
ta place de la Concorde : longueur, 4,000 met.; — la i*
descend le boulevard de Sébaslopol, depuis sa nninirnnru.
et rdoint le précédant au pont au Change : longueur,
t ,K!M) mât; — la 3* vient de U place de la Bastille, suit la
rue S^Antoine, puis la rue de HiroU Jusqn'k la place de
la Concorde: longueur, 3,800 met.
Des iTois maîtresse* galerie* de la rive eanche. la
1" prend la ligna de* qu^s, depul* le poat d'AoslerliU
jusqu'au pont d'iéna : longueur, 6,Û0 mèL; — la 2*
descend le boulevard de Sébastopol, k partir de sa ren-
contre avec le boulevard du Uont-Pamaase, et r^oint la
précédente au pont S'-Michel : longueur, 1,'IHI met.; —
— enBn la 3', sous la boulevard 3<-Gennain, commence
& l'extréuité E. de ce boulevard, près l'Entrepèt des
vins, et se jetia dans l' égout de Si^bastopol, au point d'in-
tersection de ces doux boulevards : longueur, 1,100 mi>t.|
puis, se prolonge au delli,]usqu'i Urue des Saints-Pères,
dana une longueur de plus de 1,000 met
Un point très-important consistait à donner aux égouu
des proportions en rapport arec l'élandue des quartiers
auxquels lis devaient snrrlr d'exutoice* : on paitit de c*
principe, [bndé sur l'observation, que pour 100 hectares
de saperflcie il faut un égout de 2 i 3 met carrés de sec-
tion mouillée, c.-à-d. pouvant recevoir une petite rivière
pasaant dans une ouverture de 2 ii 3 met carré*. Dam
cette vue, on choisit 13 types d'égouts, dont le plus petit
a S^.IS de hauteur sur l'élis de largeur; et te plus
grand, {".U de hauteur sur 5*° ,COda largeur. — La petit
égout est de forme ovoïde, avec sa grande section pair en
haut, ce qui permet à un ouvrier de s'y mouvoir san'4
peina pour procL^er au curage, ainsi que la fut voir la
flg. ci- dessous.
POU «oui timple.
Le* maîtresses branches de ce vaste sjatème ont reçu
de leur destination spéciale, le nom d'EflOult collKlmr*
tel est te nom adminisiratif des trois grands égouts di'i
Ïiartiers de la rive droite ds la Seine, el des trois de la
ra gauche, décrits plus haut, 1" et S» alinéa. Cen
égouta ont un caractère de magnificence qui nous a inspiré
le nom de Paris cloacai, parce qu'ils rappellent la célèbre
Ctoagtu Maxime de Rome ancienne, en pensée néan-
moins plus qu'en réalité; car par leur importance, leurs
proportions, leur étendue, leur aménagement deserrice
PAR
1374
PAR
et de neltoTige, Ils li surpuient loBnlment. «t rien
n'empêche de conjecturer qua leur durée égalera celle du
Célèbre ouvrage de» Tarquins. — Nous «lion» entrer
msintensnl dans quelques descripiloni pin» précises sur
leun proportions et leur construction.
Le Colleeteur da boulevard dt Sibattopot (rive droile)
est à plein cinire; il mesure *"",27 de hauteur, 5",!0 de
largeur; s« eunette, large de 1",20, profonde de 0",e2,
cjt bordée de deui banquettes de 0",80 chacune. La flp.
ci-dessous le représenta en coupe et en perspeclite tout à
la fols. Au-dessus de ses banquette», et portées par des
colonnes de fonie terminée» en croissant, courent deu»
conduites d'eau de foniaine. Tune k droite, de 1"',10 de
dlamâtre, l'autre ^ gauche, de O^.SO. Ce collecteur peut
absorbée en 'emris d'averse la pli
de la moitié de» quartier* de la rire droite, et, en m
d'engorgement, dérerser son trop-plein dans ta Seine,
sans JamuB laisser refluer le torrent cloacal mtma dans
les rues où sont lea boocbei d'absorption.
Le CoUielear dtt fluaw, tantût t pldn dntie, taniat
ellipsoïde, suivant l'état et le* aiigences de ni* esa de is
voie publique, forme nne galerie de 3",15 ou 3",Î0 ■}«
hsuteur, sur un diamètre da 4 mètres. S* eunette s f.-li
de largeur, 1 mèlre da profondeur, entre deui banquette.*
de O^.TO chacune, La Bgure d-deesoua le représerit
avec un petit wagon de curage roulant sur des rail»
scellé» dan» le fond mSme de la eunette : noua parlerons
nlu» bas de ce curage. A droite, on voit, sur des en-
,_ _.._. iorbellements de fer, une conduits d'eau de foni«ne,de
abondante, les éaiu | 0°'.G0 de diamètre.
■ CelltiUm- (hi bmlna>
[fl(w divi
j|«cl«ur da boulevard i
.ecMons: l'une du Sud, .
Sud, qui flnic au boulevard S'-Germain, est de forma
oTOldale, haute de 3™, 15, large da 2'",5II, arec une eu-
nette large de 0'",79. profonde de 0'",40, Oaûquée de ban-
quettes de 0"',M d'un cûté, et de 0'",!M) de l'autre : cette
dernière supporte, sur de petites colonnes de fonte, une
conduite d'eau de Cantaine de I^.IO de diamètre. — Ia
section du Nord commence h la renrontre du boulevard
S '-Germain, et aboutit au pont S '-HicheU ici, la galerie
est également ovoldale, et mesure 3", 70 en hauteur et en
lar^ur. Sa eunette, de l",?!) de largeur, 0'",S0 de pro-
fondeur, est canionnée de "i banquettes de 1 met., dont
celle de droile porte une conduite d'eau de fontaine da
l'.lO de diamètre.
'Tous lea quartiers au bas de* cotesui de la rive droite,
uiureles faubourg» S'-DenI* et S*-Aot4ilns, sont desservi*
par on Collecteur semblable b celui de la partie Sud, dé-
crite ci-dessus.
L'Êgoul dt ta nu d» Bn<oli, de forme légèr«ment
ovoldale, a 3",^ de hauteur, 2™ ,40 de largeur, ft la nais-
sance de la TOùte, avec nne eunette ou canal d'eau de
i'",30 de largeur, sur 0',SO de profondeur, entre deux
banquettes, larges da 0",40 chacune. Il doit Être ausil
compté parmi lea grands collecteur», en raison de la forte
section de ta cunelle; en effet, il reçoit dan» son long
parcours une multitude d'embranchements, plu» ou
moin* contidérahlei, qui lut versent une notable partie
de» eaui fournies par le* quartiera de la rive droite de
la Seine.
Les égouls Intèrleun de piâmier ordre, et la plupart
de* égonts secondaires, renferment une ou daui conduites
d'eau de fontune, dont les moindres diamètres sont de
0^,30. En outre, toute ^erle flanquée de deux ban-
pnettea a les arêtes aupéneures de sa eunette munie* de
rails pour la circulation d'un wagon de curage.
Tous les égouts, grandi ou petits, sont construits en
pierre meulière et ebaui hydraulique, avec enduits inté-
rieurs en ciment romain. Lea loQtes.à la fols solides et
légères, u'ont que 30 Ou iO centim. d'épaisseur pour les
petites ou les moyennes galeries, et ii ou iO pour les
Collteltiff da fuoii Ji Ja Srinr.
pluH grandes. La plupart des anciens égouls, mat établis.
Les égouls collecteurs aboutissc^L i la place de la
Concorde, où Us se déversent dans un CoUictcur général.
dont nous parlerons tout à l'bcurc. Une grande dilhcultii
se présentait pour leCoUecteurdesqusisdelarivegauclie,
celui qui, peut-être , reçoit le plus d'eaui sales, infectes,
corrompues, et le plus constamment; car depuis ISO'2 oo
; a fait entrer la rivière de Bièvre, qui, auparavant,
tombait dan» la Seine, au pied et en amont du poni
d'Austertiti. Or ce petit cours d'eau dessert toutes les
mégisseries, teinturerie», tannerie», etc., du fauboun:
S'-Marcel, de sorte qu'il n'est plus, en réalité, tpi'un vé-
ritable égout des plu» immondes. SI l'on avait fait dé-
gorger dans la Seine le Collecteur des quais de ce cAté d«
r» ville, on n'aurait débarrassé le deuve de tant d'impu-
retés SOT un point que pour les reverser un peu plu» bai
*ar an autre. Il fallait éviter ce grave inconvénient , et
pour cela faire déboucher ce Collecteur au même point
que le» autres. Alora on conçut l'Idée hardie de la lancer
t travers la Seine, dan* un aqueduc passant sous le lit
mïma du fleuve. Cet aqueduc est un immense tuyau-
alphon, en fer battu, ayant I mèl. de diamètre à l'inté-
rieur, et près de 200 met. de longueur. 11 est immergé k
3 met. au-dessous des basses eaui, un peu en amont do
pont da la Concorde.
Hai» la plus belle, la plus mW»trale de ns grandes
cloaques est te CoII«cesur général, qui, partant de la
6 lace de la Concorde, chemine dans la direction du N.-
.-O., et vient tomber dans la Seine à une centaine da
mètres en aval du pont d' A sni ères. On a été chercher aussi
loin le dégorgement de cette cloaque, alla da pouvoir lui
donner plus de profondeur, et, par suite, k tous les autre»
égout»! parce que, dan» l'anden système, l'inondation de
certains quartien venait du manque de profondeur de»
égoula, dont U niveau le plu* bas *e trouvidt au débouché
du grand égout de ceinture dans la Seine, k Î30 met. tn
ivaldu pont de l'Aima. Parce changement, on a pu ga-
gner BOcentim.de profondeur de plus ; cardelMusqu'iD
peut d'Asnières, le Oeuie, en fuyant, se replie en nn
vaste ruban long de 20 lùlomètres.
Le CoOeeleuT général ast une loris de tuanel, voAti
«aatc (urbtieaé dit en atiBe de paolsr; il a 5 mètres da i
htutaur sur i^.SÛ de largeur 6 ion aie; ta cuoette me- |
■lire 3'i50 de largeur, sur {•',3b de prorondeur. eatre
detu banquette! de Ô'fiO ebacune. La longueur da ce
canal est de b kilométrée et demi eniiron, ea une linne .
presque droite, aaut nn coude près du départ, i
PAR
.. . _ . _... _ I. prise i plusieurs centaina« de
mètres aTant Bon emboncharedans lu Seine.
Tous les grands égouls sont construits en pierre msu-
lière, soigneuseoieDl équarrle; par-daasua la voûte cat
une ma^Querle de blocage, puis, entlit, une cliape en
:lmeot romain qui la recouvre tout entière et la prouSge
I Ik '■ contre les inBltratioi
e de l'église de la Haiileleine. Ia Ogure ci-dessous ègouts ont leur voûta si
e petili
ir giaéral da fyanii di Paru.
Lfî Collecteur gi^nérsl se cura de la manièro suivante :
«jr SCS eaui noires, vaseuses et grasses, que les Anciens
auraient com pariées & l'Achéron, est un bateau, maintenu
a Ilot en tout temps au moyen do vannes mobiles, hermé-
lïqucs, espacées dans toute sa longueur, el pouvant
f<'rmer écluses. L'avant du bateau pone une vanne, ma-
HŒUvrëe par un engrenage, et qui, abaissée, remplit
bute la Kciton mouillée de la cunette ; on descend cette
vanne jusqu'h 0'',15 du fond; le flot s'accumule, et, dès
qu'il atteint 0°',&0 de surélËvation en amont, le poids de
l'eau SUT la ranne produit une chasse si puissante, que
la vase, les sables, les pierres mSme, sont roulés et
lancés i. 100 met. de distance, où le bateau va les ro-
prendre jusqu'h ce qu'il les ait conduits à l'embouchure
de l'émusaire. Il faut 10 Jours pour curer ainsi le canal
d'un bout i l'autre. Quatre baieaoi font ce aervice.
L'émissaire est renlité de place en place par des regards,
dont les mura sont munia d'échelles de Ter, par où leaou-
trieis pouveot toulouis remonter. Des lampes k buile.
appliquées sur un cflté, éclairent la cloaquaa Trempa
ordinaire, le Collecteur cénéral débite 3.0W mût. cubes
d'eau i l'heure, soit 86,000 en 24 heures i e, temps dV
ra^ie, il peut en écouler cinq ou sii fois autanî^
Dans les Collecteura secondaires, le wagOEL ir^ls tient
lieu du bateau, qui ne pourrait flotter sur la cnn-tl», or-
dinairement trop peu fournie d'eau ; k cet efTel, l'»»ant
du wagon porte une vanne qui s'abaiase Jusque dans la
cunetle, dont elle remplit toute la section mouillée; li'
hommes, aidés un peu par le courant de l'égout, pui-
sent le wagon en aval , et la vanne chasse alnit touCa la
vase detant elle.
Que l'on compara maintenant ia Tameuse Cloaque
Maa^m* de Rome ancienne, dont il existe eocore un
quart environ , avec ce CotltcUur général , et l'on recou-
n^tra combien l'ouvrage moderne surpasse l'ancien. La
Cloaque romaine esl construite en pierres de tsillei elle
a 10 met. environ de hauteur, k partir du lond, mais sa
largeur n'est que de 4"',47, et l'on conjecture iiue ■• plu-
^i
(^Dde langueur i
t-i-d. T à 8 roi« ,— -,—. -- .--- - , , .
Ae la Cloaque Muime est complètement btitné par
reau : nulle banquette pour y pÉnétrer, nulle unuoniiité
dan* la voûte, tantôt haute, lantOt très-basse : nulle dis-
position pour y faire passer des conduites d'eau de fon-
iiUne : aucan moyen de curwe ^ile ; [uisti la laissaitHja
■évaser, et, quand e^e était eDUiremeot olstruëe, on
m radier, ni pour les services qu'elle de-
obstruée, sans beaucoup d'ineonvénieot , lusqo h la nais-
sance de la TOÛle. — Les flg- d-desaous représentent Is
tue extérieure de la bouche de la Cloaqut Maxim* dans
le Tibre, ei celle du CallecUur générai dnn» la Seine.
l'uDD et l'autre des^nécs k la mCme échelle.
«S
Coucht du Collfclf II
DoudH lit la Cloa^t J/oxfou A
Les Cloaques de Paris, depuis le tyslàme d'ensemble
appliqué A leur consiructioa , todt calculées pour ab-
sorber toujours les plus abondantes pluies d'orage qui
peuvent tomber sur la ville, et la quantité en est quel-
querois très-considt^rable i ainsi , le 8 Juin 1840, un orage
qui n'a duré qu'une heure a leti, sur les quartiers où il
aéièle plus fort, 450 met. cultes d'eaa par aectare. Dans
les égouts antérieurs à notre temps, on n'aralt considéré
que les moyennes, et encore empiriquement; de Ik des
inondations, l'absorplion ne se Taisant pas toujoun aa»ei
rite ; tandis que les ingénieurs de nos Jours ont calculé
les maasima, constaté» par l'obseniOion tdeoUQque.
En rétumù, Paris cluacul uiTrit, dé* l'année 1»62, un
parcours du ISi) kiloiiiaiius; duits |iou d'unoéus, il sa
composera d'autant de amaui que la ville compte de
rues. Alors ces deui Paris superposés offriront chacun un
parcours deiJtiO kilom., et, suivant les probabilités tou-
chant l^dffViaBement ds la viabilité de la ville, cette
prepntidWlra un Jour h 540 kilomèt., qui auront coûté
SvrfSR^ millions de francs! Tout le système actuel de
^ cloacol a été étudié, tracé et exécuté par U. Bel-
smod , ingénieur en chef du service municipal de la ville
P^aiParis, ou sous sa direction, et pendant l'administ ration
4^^i^ U. Hauiamann, préfet de la Seine.
:'§! nien n'approche d'une pareille encrepriae, ni dans l'an-
V. liquiié, ni [±ei aucune des )dus puissante! nations mo-
7 derues; on n'a jamais vu, et on ne voit encore aucune
'i4 construction de ce genre qui toit aussi bien entendue
*' dans son ensemble, aussi sagement et savanmient ordon-
née dans ses détails, aussi monumentale dans son eiécn-
tion , aussi grandiose dans son aspect. Et ce ^li^ntesque
trariiil am-u été exécuté et complflé en moins d'un dcmi-
aiècle! V. Prnnter et stcniid mémoire sur It* «aMX d»
Paru, prci«ntef par U préfet dt la Seini au Coninl mu-
nicipal, Paris, 'ig&8-59, 3 vol. in-4°, dont un de plan-
ches. An. H. et C. D— r.
FAais (Uanuments public* de) au point de vue admi-
nistratif. — L'antiquité, si souvent prise pour modèle
dans nos monuments public*, ne nous a nen appris de
aa propre histoire touchant le point analogue a celui
dont nous allons poiler. On trouve dans Vitruve quelque*
brefs détails sur les réglementa relatifs aux édifices pri-
vés, mais rien sur les monument* publics, pris aa seni
moderne! nous faisons cette diatincdon parce que tous
. . , - . étaient des
idividudles, et gardaient toujours ce caractère;
leur appellation le disait; par exemple, It Rome, la Bas! -
lique de Paulus, le Théâtre de Potnp^, le Cirque Flami-
nius, le Portique d'Octavie, l'AmphitbéAtre de StaUlius
Taurui, l'Ampbi théâtre Flavien, etc., granlet construc-
tions qui, chei les Uodernes, «e seraient appelées dr^
monumenti publics. A Rome, elles n'avalent de publie
que le terrain où elles s'élevaient, et leur destination,
consacrée au tervice ou aux plaisirs do peuple. L,es
Temples mâmes étaient presque anssi connus par le nom
des édiHcateurs que par celui de leur divinité, tels que :
le Cspiiole d'Horaiius Pulvillus, puis de Sylla, puis de
Vespasien, puis de Domitien , le temple de la Concorde,
Gb Camille, pois de Tibère; le Panthéon d'Agrlppa, le«
Sepla Julia, les Septa Agrjpplana, etc. Ces monuments
étalent si bien considères comme des édifices priréa, ton-
jours la propriété de eettx qui les avaient élevé* on de
leur* descendants, que si ces dernier* ne les enïre t«naien'i
PAR
1377
PAR
pus, on 168 laissait se dégrader ]usqu*à deyenir raines
tout à fait , à moins qu'une main généreuse ne les re»-
taurftt.
Dans nos États modernes, et particulièrement en
France, la science de l'administration, très^imparfaite-
ment connue des Anciens, a établi , au profit de Tait et
iQ profit de tous, une tradition tout à fait différente;
d'abord les monuments publics sont distincts des monu-
ments prÎT^ : on qualifie monuments publics les édifices
élevés pour la gloire de la nation, le service, la jouissance
oa l'agrément de tous les citoyens en général , en un mot
da public^ qui est littéralement chez nous ce que le peuple
était dans les sociétés antiques, et notamment dans la
Bodété romaine, à toutes ses époques. Ce qui distingue
encore les monuments publics, c'est qu'ils sont érigés
aux dépens du public, c-à-d. sur des fonds provenant
des impôts généraux ou spéciaux payés par tous les
citoyens.
Au point de vue de l'édification, de la dépense, de la con-
Ber^-ation, de l'entretien, de la perpétuité des monuments,
l'organisation moderne dépasse de beaucoup l'espèce de
\ibre arbitre, l'initiative isolée et toute personnelle des An-
ciens. Nous avons déjà parlé, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire, du Conseil des b&timents civils,
siéent à Paris, et chargé d'examiner les projets et les
devi*^ concernant les constructions de tous les bâtiments
cirils de l'Empire : un corps d'architectes les exécute, et
l'administration attache toujours un et souvent deux de
ces artistes à chaque édifice en construction, ou même an-
cien. Paris, petit État dans l'État, peut servir de modèle
en ce point : il a, pour ses monuments publics, un Ser-
vice des travaux d'architecture du département de la
Seine et de la ville de PariSy réorganisé par arrêté pré-
fectoral du 31 mars 1860, et ainsi composé : un archi-
tecte directeur, centralisant toutes les parties; quatre ar-
chitectes en chef, de 1" et de 2" classe, pour les édifices
communaux ou départementaux; un contrôleur en chef;
deux architectes ordinaires, chargés, sous les ordres
immédiats de l'architecte directeur, l'un des travaux de
l'Hôtel de Ville de Paris, l'autre de tout ce qui se rap-
porte aux beaux-arts; dix architectes ordinaires attachés
à des sections territoriales déterminées, et chargés, sous
l'autorité des architectes en chef, de tout ce qui concerne
les édifices eommunaux ou départementaux situés dans
leurs sections respectives; enfin des inspecteurs, des
contrôleurs, des sons-inspecteurs, des contrôleurs-ad-
joints, des conducteurs, etc.; l'ensemble du service
forme un efTcctif de 40 personnes, non compris un ser-
vice extraordinaire à peu près aussi considéxâble.
Tout ce service reçoit des appointements fixes. Les ar-
chitectes ne peuvent faire ou faire faire aucun travail en
dehors de leurs attributions sans une autorisation spé-
ciale et par écrit du Préfet de la Seine. Leurs honoraires,
augmentés quelquefois d'allocations éventuelles, sont
ainsi fixés : l'architecte directeur, de 12,000 à 15,000 fr.;
l€s architcotes de i'* et de 2« classe, de 10,000 à 12,000 fr.,
et dft 8,000 à 10,000 fr. ; le contrôleur en chef, de 8.000 à
10,000 fr. ; les architectes ordinaires, de 5,000 à 7,000 fr. ;
les in<;pecteurs, de 3,000 à 4,500 fr., etc. En outre, des
frais de bureaux sont alloués : à l'architecte directeur
6,000 fr. ; h chacun des architectes en chef et au contrô-
l'ur en chef, 3,000 fr. ; à chacun des architectes ordi-
na rp^, 2,000 fr.
Les monuments de la France sont placés sous deux
sorte» d'au ion tés : celle du gouvernement et celle de la
couiinune. Le gouvernement a daus ses attributions
direcies les palais nationaux, les musées, les hôteU des
miui:»tted, dus grandes admiiiistratious, les églises et les
«diiices diocésains , les arcs de triomphe , les colonnes
monumentales, les statues, etc.; la seconde catégorie
enibraa&e les monuments qui n'intéressent que les
villes. A Paris, les édifices diocésains, parmi lesquels
sont rangés l'église métropolitaine de ^otre-Dame, la
bau>iliqu<; S**-Geaeviève, laS^-Chapelîedu Palais, l'arche-
vteiié ei les séminaires, font partie du domaine de TEtat.
Le Conseil dos bâtiments civils exerce son contrôle
s>tr tous les cUiiices de Paris, et sur ceux du reste de la
Iriauce, mais seulement lorsque ce contrôle est demandé
r^r le préfet. Certains monuments, remarquables par
les souvenirs qui s'y rattachent, ou qui sont des œuvres
d'art, sont placés sous la surveillance d'une Commission
ies monuments historiques, créée vers 1830, et chargée
de rechercher les antiquités et de veiller à la conserva-:
ion des monuments qui, après examen, sont déclarés
wtoriques; alors, en principe, leur restauration, et tous
^ travaux qu'on y fait, sont k la charge de l'État, er
quelque lieu de la France que soient situés ces monu-
ments; mais ce principe soutfre bien des exceptions,, par
exemple, quand les villes et les communes peuvent sup-
porter les frais à faire, et Paris est toujours rangé dam
. cette catégorie. Un inspecteur général seconde et dirige
les travaux de la commission, composée d'architectes,
d'antiquaires, d'administrateurs, et présidée par le Mi-
nistre des Beaux-Arts*
L'administration, si bien entendue, si bien organisée
pour l'édification, l'entretien ou la restauration des mo-
numents de Paris en particulier, et de la France en gé-
néral, doit en prolonger la durée pendant bien des siècles;
c'est comme une lutte incessamment victorieuse contre un
climat naturellement peu conservateur, et par suite un vé-
ritable service rendu à l'art et à la civilisation. G. D — t.
UONDUENTS DB PARIS.
V. Clotildb (S'«-). \
Notae-Dahb.
Notre-Dahe-de-
I/>RBTTB.
Madeleit«b (La).
Panthéon,
sorbonne.
SoLPiCE (Saint-).
Vincent- DE -Paol
(Saint-).
L Églises»
«.«» F. AOGCSTIN (S*-)
^-^ Chapelle HLa S**-).
EUSTACHB (S*-).
Étibnne-du-Mont (S'-'
GERUAiN-DBS-Pnés ;S*-)
Germain - l'Auxerrois,
(S*-).
Gervais (S»-).
.2 6, .
e ^ ^
ai
■S
RocH (S»-)
(La).
Trinité (]
n. Paiais.
I
s-s.
F. Éltsi^
Inoustrie (Pa-
lais del').
lNSTrrDT(P£uais|
de 1').
LOOVRB.
Luxembourg.
Palais du Con-
seil d'État.
F. Beaux-ârts (Palais des).
Bourse (Palais de la).
F.
fi K s»?
Q
Palais DU CoRPs^
Législatif.
Palais de Jus-
tice.
Palais DE LA LÉ-} o'§ ^«^
GION D'HoN
NECR.
Palais-Royal.
Toileries.
Q
I Dans le présent oumrage.
m. Monuments civils.
F. Abattoirs.
Carnavalet (Hôtel).
Catacombes.
Colonnes monumen-
tales.
Greniers de ré-1
serve.
Grenelle (Puits de) . |
Halles.
HÔTEL-DE-ViLLX.
Invaudes.
Jacqubs-la-Booche-I
RiB (Tour de s»-).
La-Chaisb (Cime-|
tière du P.-).
BlARCUÉS.
MÉDECINE (École de). .
MiuxAULE (École). /
F. Monnaies (Hôt^ des). 1^3
Nesle (Tour de).
Observatoire.
Opéra.
Opéra-Cohiqub.
Thermes.
Vins (Entrepôt des).
Val-de-Gracb.
si
Bastillb.
Carrousel (Arc du).
Étoile (Arc de 1').
Fontaines.
Porte S^-Antoimb.
Porte S*-Bernard.
Porte S^Denis.
Porte S^-Martoi.
Propylées.
1 5»
-si
IV. Musées.
F. Artillerie, Louvre, Luxembourg.
V. Promenades.
F. Boulogne (Bois de), dans le présent Dictumnatrê,
et, Champs-Elysées, Jardin des Plantes, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
VI. Places.
F. Louis XV, Royale, Vendôme. Victoires, dans notre
Dictionnaire de Biographie et S Histoire.
PARISE LA DUCHESSE, chanson de geste qui s'an-
nonce dans les premiers vers comme un poème carloviu-
gien (F. ce mot ), mais où il n'est question ni de Charle-
magne, ni de ses pairs, ni de ses conquêtes. La donnée
est la même que celle des romans de Berte aux grans
pies et de la Violette : c'est une femme innocente et per-
sécutée, dont la vertu finit par triompher. Raymond, duc
de Saint-Gilles, a épousé Parise, fille de Gamier de Nan<-
teuil, qui a été assassiné par des chevaliers félons.
Ceux-ci, craignant la vengeance de Parise, cherchent h
PAR
1378
PAR
Tempoisonner, et, par on sort fatal, BeuTe, frère de Ray-
mona, ayant été leur victinie, ils accusent la duchesse de
ce crime. Chassée par son époux, Parise s'éloigne avec
dix chevaliers qui se dévouent à son service, et, arrivée
dans une forêt de la Hongrie, met au monde un enfant
que des brigands lui enlèvent et portent au roi du pays.
Elle est réduite à devenir nourrice dans la maison dn
comte de Cologne, où elle demeure pendant 15 ans. Son
fils Hugues, élevé h la cour du roi de Hongrie, tue quatre
barons jaloux de sa fortune et qui voulaient le faire périr :
Teffroi que lui cause sa victoire et le désir de retrouver
ses parents le poussent à partir furtivement. Après avoir
rencontré sa mère k Cologne, il lui rend son époux et
son duché, puis accepte lui-même la fille et le royaume
du roi de Hongrie. — Ce roman , dont Tauteur est in-
connu, parait remonter aux dernières années du xu' siècle.
Il est un de ceux qui marquent la transition entre le pre-
mier et le second ftge de notre littérature romanesque :
par le choix des personnages, et surtout par la forme, qui
est la tirade monorime et le vers alexandrin , il tient à la
catégorie des Chansons de geste, des récits épiques puisés
à la source nationale; par Te fond et par les moeurs, par
une foule d'épisodes et d'incidents variés, il se rapproche
des poômes d'aventures. Le style en est inculte et rude ;
mais la simplicité, qui ne lui manaue jamais, le rend
néanmoins agréable. Il y a peu d'art dans la composition,
mais les sentiments sont nobles, élevés, délicats. On re-
marque certains emprunts faits aux romans d^Ogier le
Danois et de Gaydon. U n'existe qu'un seul manuscrit de
Parise la duchesse ; il est à la Bibliothèque nationale de
Paris (fonds Colbert), et contient 3,107 vers. Il a été pu-
blié par De Martonne, Paris, 1836, in-8°, et par Guessard
et Larcl^y dans la collection des Anciens po9Us de la
France» Paris, 1860, in-16. H. D.
PARISIENNE (La), chant populaire, presque impro-
visé par C. Delavigne, immédiatement après la Révolution
de Juillet 1830. La pièce est en sept strophes avec un re-
fram, et, sans être d'un ordre bien élevé, a une sorte de
chaleur qui , répondant à la passion du jour, lui donna
une petite vogue éphémère. Elle fut écrite sur un chant
musical qui existait dans l'œuvre du compositeur Auber,
et qui devint dès lors comme la Marseillaise officielle et
habituelle des fanfares de la royauté de Juillet.
PARISIENNE. K. Caragtèubs d'imprimerie.
PâRISIS. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bto~
graphte et â^Histoire.
PARISYLLABIQUE , se dit, en grec et en latin, des
noms qui n*ont pas plus de syllabes au génitif et aux cas
qui s'en forment au'au nominatif. K. Imparisyllabique.
PARJURE, se dit du faux serment et de l'homme qui
le commet. Chez les Hébreux, l'homme parjure devait
offrir en expiation de son crime une brebis, ou une
chèvre, ou deux tourterelles, ou une certaine mesure de
farine. Les lois romaines édictaient diverses peines contre
le pariure, telles que le fouet, le bannissement, l'infa-
mie. D'après les Capitulaires de Charlemagne et de Louis
le Débonnaire, la peine devait être la perte de la main
droite. Plus tard, la jurisprudence fut très-variab}e, et la
peine du parjure dépendit des circonstances : on trouve
des condamnations au bannissement, à l'amende hono-
rable, au payement d'une aumône déterminée, etc.; le
coupable ne pouvait plus être admis en témoignage ; une
ordonnance rendue par Louis IX en 1254 lui refusait, en
matière civile, le bénéfice de l'appel. Toutefois, on ne
{>ouvait, bien qu'on prétext&t le parjure, faire rétracter
e jugement rendu sur le serment déféré aux parties.
Notre Code pénal dispose que celui qui aura fait un faux
serment en matière civile sera puni de la dégradation
civique; que, si la dégradation est prononcée comme
peine principale, elle peut être accompagnée d'un em-
prisonnement dont la durée n'excédera pas cinq ans;
que, si le coupable est un étranger ou un Français ayant
perdu la qualité de citoyen, la peine de l'emprisonne-
ment doit to^jours être prononcée (arL 35, 366, 466). Ces
dispositions ne sont applicables qu'aux parties qui sont
en contestation entre elles. Quant aux tiers qui seraient
appelés à déposer dans un procès civil ou criminel, ils
sont passibles des peines du faux témoignage (V. ce mot),
PARLANTES (Armes). V. Blason, dans notre Diction'
noire de Biographie et d'Histoire,
PARLANTES (Mounaies), monnaies qui ont pour iyjpe un
' ijet dont le nom a du rapport avec celui de la ville où
(' 'es sont frappées. Ainsi, une rose est sur les médailles
(i>.* Rhodes, un cœur sur celles de Cardia, etc.
PARLEMENT. V, ce mot dans notre Dictionniare de
iHographie et d!' Histoire.
PARLEfifENTAIRE, individu qu'un général charge de
dépêches ou de missions verbales auprès d'un général
ennemi. Il part avec un tambour ou un trompette;
arrivé aux avant-postes ou sur les glacis d'une place, il
fait battre ou sonner pour qu'on le reconnaisse; après
quoi on lui bande les yeux, et il est conduit auprès de
l'ennemi. Il est ramené de la même manière. La per-
sonne d'un parlementaire est inviolable doit être sacrée, à
moins qu'il n'abuse de sa mission pour faire l'office d'es-
pion.
PARLEMERTAiRB (Langage), type de l'urbanité politique. Il
nous vient de l'Angleterre avec le parlementarisme, et re-
pose sur un sous-entendu éminemment social, que tout
homme bien élevé doit admettre en venant siéger dans un
parlement : c'est qu'il n'y peut rencontrer que d'honnêtes
gens, pleins de conscience, sans parti pris d'avance pour oa
contre telle opinion ou telle affaire, sans autre ambition
que de bien servir le pays, enfin plein d*honoràbUitéf beau
barbarisme créé pour rusage spécial des parlements. Le
langage parlementaire n'admet ni la franchise trop fran-
che, ni les vérités trop crues, ni les antipathies trop pro-
noncées. Si, dans la chaleur des discussions, quelque
membre oublie ces prescriptions tacites, son langi^ n'est
pas parlementaire ; et s'il y manque trop ouvertement, et
ne retire pas immédiatement ses paroles, comme on dît,
bien qu'il ne soit guère possible de rattraper des paroles
envolées, alors le président de l'assemblée le rappelle à
l'ordre. Enfin le langage parlementaire est à la politique
ce que le langage académique est à la littérature, un
euphémisme uti4e, et peut-être plus nécessaire, dans une
société très-civilisée, que ne le croient certains 'esprits
misanthropiques. C. D — y.
PARLOIR AUX BOURGEOIS, nom qu'on donna d'abord
aux hôtels de ville, parce qu'ils se réduisaient à une
grande pièce avec quelques dépendances où les bourgeois
venaient causer de leurs affaires et de celles de la com-
mune.
PARMA. V. BoucuER.
PARME (École de), une des écoles italiennes de pein-
ture que l'on comprend sous la dénomination générale
d'École lombarde. Elle ne remonte guère plus haut que
l'année 14C2, où l'on trouve deux tableaux attribués à
Barthélémy et à Jacques Loschi, son gpndre. C'est le
Corrége qui lui a donné toute sa célébrité au xm* siècle:
il forma son fils Pomponio Allegri, F. Capelli, Ant. Ber-
nieri, Rondani, Anselmi, Bernardo Gatti, Gandini, Maz-
zuoli dit le Parmesan, etc. Dans le siècle suivant, l'école
tomba en décadence, et l'on ne trouve alors k mentionner
que Lan franc et Badalocchi.
PARODIE (c.-à-d. contre-chant; du grec para, contre,
et ôdè, chant), imitation burlesque d'un ouvraçe sérieux.
La parodie nous vient des Grecs; des érudits en ont
attribué l'invention au poète Archiloque, ou à Hipponax;
mais la Batrachomyomachie attribuée à Homâre était
déjà une parodie de Ylliadê. Le Cyclope d'Euripide pa-
rodiait le 9* chant de VOdyssée. Les Silles (K. ce mot)
appartiennent au même genre de plaisanterie. Chez les
Modernes, Berthelot parodia quelques belles strophes de
Malherbe ; Scarron travestit V Enéide. — La parodie des
ouvrages dramatiques remonte, dit-on, à Hégéaion de
Thasos, et celle-là surtout a prospéré : les comédies
d'Aristophane sont remplies de traits où il parodie Eschyle
et surtout Euripide. Mais les Anciens n'eurent pas de
pièces parodiant d'autres pièces d'un bout à Tautre; ce
genre de composition appartient aux Modernes. Si l'in-
tention de la parodie peut être innocente, et même servir
les intérêts de l'art en éclairant le public sur les défauts
d'un ouvrage, elle a aussi des résultats regrettables : tra-
vestir, par exemple, une œuvre dramatique, c'est lui en-
lever presque infailliblement le prestige qui tient aux
illusions de la scène; on n'entend plus avec la même dis-
position d'esprit un langage dégradé par la parodie, on ne
s'abandonne plus aux effets de situations dénaturées par
le burlesaue. Si la parodie n'est qu'une forme adopta
par la méaiocrité envieuse pour avilir les productions du
génie ou du talent, ou si elle s'attaque aux personnes,
elle ne mérite que le mépris. Dans tous les cas, si elle a
quelque esprit, on lui fait généralement accueil, parce
qu'il est dans la nature ou dans le rôle de beaucoup de
gens de ne rien admirer, et de n'être pas f&chés qu'on
livre à leur risée tout ce qui leur est supérieur. Au
xvu* sièNcle, Subligny donna, sous le nom de la Folle
querelle, une parodie de VÂndromaque de Racine. An
xvm«, le Théâtre de la Foire et la Comédie-Italienne pa-
rodièrent la tragédie et l'opéra; Fuzelier, Domeval, Ft^
vart, Lesage, Dominique, Romagnesi, se sont particu
PAR
1379
PAR
lièrement distingués dans ce genre. On citera toujours
comme modèles V Agnès de Chaillotf parodie de Vlnès dé
Castro de Lamotte; le Mauvais ménage, parodie de la
Marianne de Voltaire ; la Petite Iphigénie ou les Rêveries
renouvelées des Grecs, parodie d'Iphwénie en Tauride de
Guimond de La Touche; les Petites uanaides de Désau-
giers, parodie de Topera des Danaïdes; le Roi Là de
Parisot, parodie du Roi Lear de Ducis. On peut ridicu-
liser, au lieu d'un ouvrage spécial, un genre tout entier;
c'est ainsi qu'on a parodié le mélodrame dans le Retour
iu Croisé, ou la Femme innocente, malheureuse et per-
iécutée,
La parodie n'a pas toujours l'importance d'un ouvrage
complet : elle se borne souvent à employer dans un
cadre différent les mêmes moyens dont on s'est servi
pour arracher des larmes, à changer en bouffonnerie une
pensée, un sentiment, une expression sérieuse. Ainsi,
Racine, jouant sur un mot, a parodié un vers de Cor-
neille, quand il appliquait à un huissier dans ses Plai-
deurs (], 5) ce qu'on dit, dans le Cid (I, 1), du vieux
père de Rodrigue :
Ses rides sur son front ont grarë sei exploUt,
Racine et Boileau ont parodié quelques scènes du Cid
dans leur Chapelain décoiffé. V. Burlesque, HéROî-Co-
HIQUE.
La parodie s'est aussi exprimée en chansons, sur le
ton burlesque et môme grivois; Désaugiers a presque
créé ce genre dans sa parodie de l'opéra la Vestale, La
parodie est un genre assez facile. A la renaissance de
l'esprit de société en France, au commencement du
XIX* siècle, on usa et l'on abusa de la parodie : au
xviii* siècle, on ne parodiait que les ouvrages sérieux,
telles que les tragédies; sous le l*' Empire français, les
parodistes s'en prirent même aux comédies; ainsi la
comédie les Deux Gendres, par Etienne, fut parodiée
dans un vaudeville intitulé Cadet Roussel beau-père. De
notre temps, la liberté de l'esprit critique a fait tort à la
parodie : elle parait moins piquante, et l'on en use plus
sobrement ; elle ne se montre plus guère que dans cer-
taines pièces en vaudevilles, jouées sur les théâtres se-
condaires au renouvellement de l'année, et dites Revues,
parce qu'on y passe en revue certains événements, les
modes, et surtout les principaux ouvrages dramatiques
représentés sur les théâtres de Paris pendant le cours de
l'an écoulé. Chacun a sa petite part dans cette parodie en
bloc : c'est une espèce de carnaval littéraire, qui amuse
quand il est spirituel, mais sans tirer à conséquence, car
ses meilleures critiques et ses gaietés les mieux venues
n'ont jamais fait tort à un ouvTage de quelque valeur.
PARODIE, en Musique, air de chant sur lequel on a fait
de nouvelles paroles. Au xviii* siècle on appelait Paro-
dies les vaudevilles faits sur les airs d'opéra de LuUi et
de Rameau. Parodier, c'est encore adapter des paroles à
une musique instrumentale, ou transcrire pour instru-
ment un air de chant.
PAROISSE (du grec paroïkia, réunion d'habitations
voisines), mot qui désigna, jusqu'au v* siècle de notre
ère, l'ensemble des communautés chrétiennes placées
sous l'autorité d'un évèq[ue. Il était, par conséquent, sy-
nonyme de diocèse. Puis il fut restreint au territoire
desservi par un prêtre particulier. Aujourd'hui les pa-
roisses sont cures ou succursales. V. ces mots.
PAROISSE (La), nom que prit la société littéraire formée
au xviii' siècle par M"^* Doublet, et dont faisaient partie
Piron, les frères Lacume de S^^'-Palaye, Mirabaud, Mai-
'an, d'Argental, Falconet, Voisenon, etc.
PAROLE, langage des sons articulés, particulièrement
('eaidné à l'expression de la pensée, comme les gestes
(Ont l'expression particulière de la volonté, et les sons
naturels celle de la sensibilité. Ce n'est pas que la parole
ne puisse exprimer aussi un acte de volonté ou un fait
de sensibilité; mais, pour cela, elle les revêt d'une forme
intellectuelle, elle les convertit en jugements, qui peu-
vent être traduits par des propositions. Tous les éléments
de la pensée doivent se réfléchir dans la parole, qui est
son instrument spécial. Or, la forme la plus générale de
la pensée étant le jugement, et le Jugement se compo-
lant de trois idées, celles d'une substance, d'une qualité
ou d'un phénomène, et d'un rapport qui lie entre elles
la qualité et la substance, il est facile de reconnaître la
même composition dans la parole : le jugement est tra-
duit par la proposition, dans laquelle le substantif
exprime Tidée de substance, Vad^ecttf celle de qualité, et
le verbe celle du rapport qui les lie. Le rapport que l'es-
prit établit entre une substance et une autre substance,
efatre une qualité et une autre qualité, est représenté
dans le langage par la préposition; le rapport d'un juge-
ment avec un autre jugement, par la conjonction. D'autres
éléments de la pensée s'expriment par les nombres, les
genres, les temps, les modes, etc. La const9*u(iion natur
relie de la phrase représente la marche ordinaire des
idées, le développement régulier de l'intelligence; la con-
struction inverstve est accommodée au mouvement varié
des passions. V. Langage.
PAROLI, terme de jeu qui s'employa d'abord au Pha-
raon, pour indiquer une manière de jouer sur parole :
après le gain du premier coup, le joueur faisait à sa carte
une, deux, trois ou quatre cornes, pour annoncer qu'il
risquait le double, le triple, le quadruple ou le quin-
tuple de l'enjeu. Aux jeux du Trente et Quarante et de la
Roulette, le paroli consiste à doubler son gain jusqu'à ce
qu'on juge à propos de s'arrêter; c'est le contraire de la
martingale, où l'on double la perte jusqu'à ce qu'on ren-
contre une chance heureuse.
PAROMOLOGIE (du grec para et omo/o(7^m , avouer),
nom donné par certains rhéteurs à la Concession. V. ce
mot.
PARONOMASE (du grec para, près, et onoma, nom),
c.-à-d. proximité ou ressemblance de nom, figure de dic-
tion qu'on appelle aussi Annomination ( V. ce mot)^ et
par laquelle on se sert à dessein de mots dont le son est
a peu près le même, mais dont le sens est différent. On
en trouve des exemples dans certains nroverbos : Qui
vivra verra: Qui se ressemble s'assemble. Dans le vers
suivant du Cid de Corneille (II, 2 ), la paronomase con-
tient une figure de pensées :
Ton bras est invaincu, mais non pas iwHncibU.
PARONOMASIE, ressemblance entre les mots de diffé-
rentes langues qui peut marquer une origine commune.
Telle est celle qui existe entre le français balle, ballon, et
lô grec balléin jlancer).
PARONYMES (du grec para, près, et onoma, nom),
mots qui ont une commune étymologie : ainsi, anonyme,
homonyme, pseudonyme et synonyme; diorama et pa-
norama.
PAROS (Marbres de). T. notre DictionncUre de Biogror
phie et d* Histoire.
PAROXYTONS (Verbes), verbes grecs qui portaient un
accent aigu (oa:;t«tonta) sur l'avant-derniere syllid)e. On
les appelait aussi Barytons ( V. ce mot). Les verbes con-
tractes ou périspomènes n'étaient autres que des verbes
paroxytons dont la pénultième s'était fondue avec l'ul-
tième. Les futurs seconds, périspomènes chez les Atti-
ques, étaient paroxytons chez les Ioniens. P.
PARPAING. V.MuR.
PARQUET (de parc^ enclos, clôture), espace compris
entre les sièges des juges et le banc des avocats, et dans
lequel les témoins font leurs déi)ositions. Autrefois les
membres du Ministère public y siégeaient; de là le nom
d'officiers du parquet ou simplement de parquet^ em-
ployé pour désigner ce corps. Par extension, on a appelé
parquet le lieu où se tiennent, hors des audiences, les
membres du Ministère public pour recevoir les commu-
nications et vaquer aux soins de l'administration qui leur
est confiée {parquet du procureur général, parquet du
procureur impérial). — L'enceinte où se réunissent les
agents de change pour constater le cours de la Bourse se
nomme aussi parquet.
PAnQDET, partie d'une salle de spectacle qui est com-
prise entre l'orchestre des musiciens et le parterre, et
où se place un certain nombre de spectateurs. Le nom
d'orchestre est plus usité aujourd'hui.
PARQDET, assemblage à compartiments de feuilles de
bois minces, clouées sur des lambourdes, et formant
un plancher. La parqueterie était encore inconnue au
xvi* siècle. Parquet se dit anssi de l'assemblage de bois
sur lequel les glaces sont appliquées ou fixées au moyen
d'une Dordure d'çncadrement Ce nom vient de ce que
les assemblages de cette menuiseiîe sont croisés, à la
manière de la clôture d'un parc
PARQUET, en termes de Marine, compartiment pratiqué
dans la cale ou sur les côtés d'un navire pour contenir
les grains, le lest, etc.
PARQUET (Jeu du), petite table garnie d'un rebord et
contenant o4 ou 100 petits carrés mi-partis , avec les-
quels on forme toutes sortes de combinaisons. On peut
consulter sur ces combinaisons un Mémoire du P. Truchet
(dans les Mémoires de l' Académie des Sctences, 1704), et
PAR
1380
PAU
la Méthode pour faire une infinité de dessins différents
avec des carreaux mi-partis, par le P. Douât, 1722.
PARRAIN (du latin pararius, cautioD, répondant),
celui oui tient un enfant ou un nouveau converti sur les
fonts ae baptême, et qui répond pour lui devant Dieu à
ce moment solennel. Dans les premiers temps du chris-
tianisme, les néophytes ayant T&ge de raison et compre-
nant l'engagement quMIs allaient prendre, les parrains
n'étaient que les témoins du baptême; ils s'engageaient
à servir de guides et de soutiens au nouvel élu. Plus
tard, dans le but de soustraire les enfants au danger de
mourir sans être entrés dans la communion chrétienne,
on leur conféra le baptême après leur naissance : le
parrain ne fut plus que le père spirituel de l'enfant
Daptisé, et, pour que cette parenté fictive eût plus d'ana-
logie avec la parenté naturelle, on exigea une Marraine,
qui servit de seconde mère à l'enfant. Les deux pater-
nités ne durent pas se confondre : il ne fut pas permis
au père d'être le parrain de son enfant, ni à la mère
d'être sa marraine. L'alliance spirituelle que la tenue
d'un enfant sur les fonts baptismaux établit entre le
parrain et la marraine fut longtemps un empêchement
au mariage. Le parrain et la marraine s'appellent vul-
gairement, l'un par rapport à l'autre, compère et com-
mère. Les religieux ou religieuses, les excommuniés, les
hérétiques, ne peuvent servir de parrains ou de mar-
raines. Il ne convient pas que l'évêque dans son diocèse
et le curé dans sa paroisse fassent les fonctions de par-
rain. L'assistance du parrain et de la marraine n'est point
nécessaire; il suffit rigoureusement de l'un d'eux. Ils
doivent avoir l'âge de raison, et même, en général, avoir
fait leur première communion et reçu la confirmation :
le frère ou la sœur de l'enfant baptisé peuvent être
admis plus jeunes. Autrefois, en France, on prenait com-
munément deux parrains et une marraine pour les gar-
çons, deux marraines et un parrain pour les filles. Dans
l'Église d'Orient, il y a un parrain et une marraine pour
les garçons, mais on prend seulement une marraine pour
les filles. — Autrefois la présence d'un parrain et d'une
marraine était requise pour le sacrement de Confirma-
tion. Cette condition subsiste encore pour la bénédiction
des cloches. Les prélats qui assistent un évêque au mo-
ment de sa consécration sont appelés ses parrains* B.
PARRAINS D'ARMES, ceux qui, dans les ordres mi-
litaires, assistent un chevalier pour la cérémonie de sa
réception.
PARRAINS DU DUEL, coux qui, daus les anciens combats
singuliers, réglaient les conditions de la lutte et en res-
taient les témoins, pour que tout se passât loyalement
PARRHÉSIE, terme de l'ancienne musique qui dési-
gnait l'art d'éviter les relations non harmoniques.
PARRICIDE, meurtre des père ou mère légitimes, na-
turels ou adoptifs, ou de tout autre ascendant légitime.
On appelle paiement parricide celui qui commet ce
crime. Notre Code met sur la même hgne l'attentat
contre la vie ou la personne du souverain. Le coupable
est puni de mort : on le conduit sur le lieu de l'exécution
pieds nus, en chemise, et un voile noir sur la tête, et,
du haut de Téchafaud, un huissier fait lecture de l'arrêt
au peuple ; Jusqu'en 1832, l'ablation du poignet droit
précéda l'exécution. — Les anciens Égyptiens enfonçaient
des roseaux pointus dans toutes les parties du corps du
parricide, puis le jetaient sur un monceau d'épines, au-
quel on mettait le feu. A Athènes, Selon ne fit pas de loi
contre le parricide, parce qu'il croyait ce crime impos-
sible. A Rome, où l'on donnait également le nom de
parricide au meurtre commis par les père et mère sur
leurs enfants, par le mari sur sa femme, par le frère sur
son frère, le coupable était fouetté jusqu'au sang, puis
enfermé dans un sac de cuir avec un chien, un singe,
on coq, et une vipère, et jeté à l'eau. Plus tard, on le
brûla vif, ou on l'exposa aux bêtes. Dans l'anciesne
France, le parricide était, après une amende honorable,
rompu vif sur la roue; puis on brûlait son corps, et l'on
en jetait les cendres au vent. B.
PARSI (Idiome). V, Farsi.
PARSISME , culte des sectateurs de Zoroastre, pra-
tiqué par les Parais de l'Inde.
PART (du latin par tus )^ en termes de Droit, signifie
enfant nouveau-né. V. SoBSTmiTioN, SopposmoN, Sup-
pression.
PARTAGE, division ou distribution d'une chose, d'un
bien, entre plusieurs cohéritiers ou copropriétaires. Nul
ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision
{V. ce mot). On peut convenir de suspendre un partage
pendant 5 ans. Lopsque les parties sont majeures, le par-
tage peut se faire à l'amiable; pour être valide, Tacte
doit être notarié. S'il y a des mineurs, le partage doit
avoir lieu en Justice. L'action en partage k l'é^^urd des
mineurs ou des interdits peut être exercée par leurs tu-
teurs, avec l'autorisation du Conseil de famille. Un mari
peut, sans le concours de sa fenune, provoquer le psr-
tage des biens à elle échus qui tombent dans la commu-
nauté; pour ceux qui ne tombent pas en communauté,
le concours est nécessaire. L'action en partage, et les
contestations qui s'élèvent dans le cours des opérafions,
sont portées devant le tribunal du lieu où la succession
est ouverte. Si la chose commune ne peut être partagé!
commodément et sans perte, la vente s'en fait aux en-
chères, et le prix est partagé (K. Licitation). Toute per-
sonne, même parente du défunt, qui n'est pas son suc-
cessible, et à laquelle un cohéritier aurait cédé son droit,
peut être écartée du partage, en lui remboursant le prix
de la cession. Les copartageants sont garants, les uns
envers les autres, des troubles et évictions qui provien-
draient d'une cause antérieure au partage. La rescision
du partage peut être demandée pour cause de dol, d'er-
reur de droit, ou de lésion de plus d'un quart. — Les
mêmes règles s'appliquent aux partages entre associés.
V. Partage d'ascendants, Succession.
PARTAGE DES EAUX. V. LiGNB.
PARTANCE, en termes de Marine, est synonyme de
départ, et exprime le moment où un navire prêt à partir
cesse toute communication avec la terre. Le coup de par-
tance est le coup de canon qu'on tire pour appeler les
retardataires; le pavillon de partance est celui qu'on
met à la poupe pour avertir l'équipage qui est à terre.
PARTENOPEUS ou PARTENOPEX DE BLOIS, roman
de chevalerie du xui* siècle. Partenopeus est neveu de
Clovls, roi des Francs. Mélior, reine de Constantinople,
s'éprend de lui sur le simple récit de sa merveilleuse
beauté. Comme elle est magicienne, elle l'attire facile*
ment de la forêt des Ardennes à Constantinople, se fait
connaître à lui sans permettre qu'il la voie, et lui dit
qu'elle le choisira pour époux, si pendant deux ans il ne
cède pas k la curiosité. Cependant Partenopeus revient
dans sa patrie ; pressé de questions par sa mère, il lui
apprend tout, et, armé d'une lanterne enchantée qu'elle
lui donne, retourne à Constantinople, où il peut con-
templer l'incomparable beauté de Mélior. Mais cette im-
prudence a détruit le pouvoir magique de la reine;
Partenopeus, chassé» se retire dans la forêt des Ardennes.
Un jour qu'il exhalait sa douleur au bord de la mer, ses
plaintes sont entendues d'un navire qui longeait le ri-
vage ; une femme en descend ; c'est Urraque, sœur de
Mélior, qui l'emmène à Constantinople; et là, sans se
faire connaître, il triomphe dans un tournoi dont Mélior
est le prix. Alors son bonheur est complet. — Ce roman,
2ui est une heureuse imitation de la fable de Psyché, se
istingue des ouvrages du même si^le par la déjjcatesse
du sentiment et de l'expression : c'est l'œuvre de Denys
Piram, qui vivait à la cour de Henri III, roi d'Angle-
terre. Il fut traduit dès le xiii* siècle en espagnol, en ca-
talan, en allemand et en danois. M. Stewart-Rose en a
rublié une version abrégée en vers anglais, Londres,
810. La Bibliothèque nationale de Paris possède plu-
sieurs manuscrits du roman de Partenopeus; la biblio-
thèque de l'Arsenal n'en possède qu'un, mais c'est le
plus exact, bien qu'il soit incomplet. Aucun de ces ma-
nuscrits ne porte le nom de l'auteur; c'est dans une
bibliothèque de Londres que M. Francisque Michel a
trouvé le nom de Denys Piram en tête d'une légende en
vers sur la vie de S* Edmond par le même auteur. Par^
tenopeus a été publié par Crapelet, Paris, 1824, 2 vol.
in-8«. V. V Histoire littéraire de la France, X. XIX ; Ro-
quefort, Notice historique et critique du roman de Par*
tenopeus de Blois, Paris, 1811. H. D.
PARTERRE, partie d'un jardin spécialement consacrée
k la culture des fleurs et des plantes d'agrément. Son
dessin varie selon l'étendue et la disposition du sol, et
selon le goût du possesseur : tantôt ce sont des figures
taillées dans des Luis nains, des rinceaux, des fleurons
entourés de plates-bandes; tantôt des parterres à bro-
derie, dont la mode est passée; tantôt des pièces coupéex
ou compartiments plus ou moins symétricjues, garnies
d'arbustes, de plantes, de vases, de bassins, etc. Ou
bien, et ce sont des parterres à l'anglaise, tapis de
gazon peu découpés, entourés d'une plate-bande de
fleurs.
PARTERRE, partie d'une salle de spectacle située en face
et au-dessous du niveau de la scène, entre les places
d'orchestre ou de parquet et le pourtour dea baignoires
PAR
1381
PAR
3« loges du rez-de-cbaussée. Les places y sont d*un prix
oeu élevé. Longtemps les spectateurs du parterre furent
debout ; cet usage, aboli à Paris avant la fin du xvm* siè-
cle, puis dans la plupart des villes de province, s'est
maintenu dans quelques villes, notamment k Rouen. G*est
au parterre qu'on place la claque.
PÂRTHÉNON. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire, et, dans le présent ouvrage, le
mot Acropole.
PARTI (du latin partitus^ divisé), en termes de Bla-
son, se dit de Técu, divisé perpendiculairement en deux
parties é^les : parti d'or et d^argent. Un écu parti en
sautoir est un écu trancbé et tdllé; parti et coupé de six
pièces, il a trois pièces en cbef et trois en pointe; parti
de Vun en Vautre, il offre un meuble qui, à moitié,
change réciproquement d'émail avec le champ.
PARTiaPATION (Sociétés en). V. Sociérés coMiiBa-
aALBS.
PARTICIPE , un des modes impersonnels des verbes,
qui tire son nom de ce qu'il participe à la fois du verbe^
comme étant susceptible d'inflexions temporelles et gou-
vernant le même r^me aue le verbe auquel il appartient,
et de Vadjectif, en ce qu'il s'accorde en genre et en nom-
bre, et dans certaines langues en cas, avec le nom ou
pronom auquel il se rapporte. Plusieurs grammairiens en
ont fait une partie spéciale du discours, ce qui nous paraît
une superfétation. Le participHea deux temps en français :
le présent, terminé en ant {aimant, tombant)^ et lepa^5^
{ayant aimé, étant tombé). Quant au passif , ait?»^, étant
aimé, ayant été aimé, la signification de ces formes, sauf
la dernière, qui se rapporte toujours au passé, est par
elle-m6me si peu précise, qu'il est difficile d'en détermi-
ner le temps. Les autres langues modernes ont également
un participe présent et un participe passé. Dans toutes, le
futur se forme par circonlocution ; en français on a recours
au verbe devoir : devant aimer, devant tomber. — Les
langues anciennes sont beaucoup plus riches et beaucoup
{>lus précises , surtout la grecque, qui possède à toutes
es Yoix un participe présent , un participe futur, un par-
ticipe aoriste, et un participe parfait. En latin, le participe
a le présent et le futur à Taaif ; au passif, il n^a que le
passe, car la forme verbale en andus ou endus, qu'on
appelle ordinairement futur de l'infinitif, exprime moins
îe futur que l'idée d'obligation, de devoir, de nécessité.
Les Terb^ déponents ont cela de remarquable, qu'ils ont
à la fois le participe présent, le participe futur et le par-
ticipe passé, et que, dans un certain nombre, le participe
passé a tout à la fois le sens actif et le sens passif.
Le participe présent français employé comme épithète,
c-à-d. comme adjectif verbal, suit la règle d'accord de
tous les adjectifs : « Un homme charmant , des femmes
charmantes ;» mais, employé comme verbe, il est toujours
invariable. Il n'en était pas encore ainsi il y a deux siè-
cles ; car La Fontaine a écrit : a Les petits, voletants, se
culbutants. » Employé seul, ou avec le verbe être à la
ooDJagaison passive, ou avec le même auxiliaire dans les
temps composés de certains verbes neutres , le participe
pasaé est considéré comme adjectif, et suit toutes les
règles de l'adjectif. Mais lorsqu'il est accompagné du verbe
avoér dans les verbes actifs, et dans ceux des verbes neu-
tres qui prennent cet auxiliaire, ou du verbe être dans
;e3 Terbes pronominaux, voici les principes qu'il faut
suivre : i* le sujet n'influe en rien sur le genre ou le
nombre que doit prendre le participe ; 2* le participe ne
peut s'accorder en nombre et en genre qu'avec son com-
plément direct, pourvu que celui-ci le précède; 3* dans
les verbes pronominaux, il faut reconnaître soigneuse-
ment si le pronom complément (me, te, se, nous, voiis,
se) est complément direct ou indirect, et considérer le
verbe être comme équivalant au verbe avoir. Ainsi : « Nous
vivons acheta «n« maison, des livres; la maison que nous
avons achetée n'est pas chère; les livres que nous at;one
9dbetés sont bien imprima; les livres que vous vous êtes
procura*; vous êtes-vous procura des livres? Nous nous
sommes laisse' prendre. Ils les ont laissés fuir, etc. » P.
PARTICULE , petite partie du discours qui est invar
riable et ordinairement d'une seule syllabe : telles sont
la plupart des prépositions, conjonctions et interjections.
A, de, pour, par, sans^ sur, et, ou, ni, mais, Jonc, si,
quand, que, ah/ 6! fil etc., sont des particules. La langue
grecque a plus au'aucune autre langue un grand nombre
de particules adverbiales et conjonctives exprimant des
nuances fines et délicates « qui ne peuvent se rendre dans
les autres langues que par des périphrases traînantes, et
qu'il faut, pour cette raison, la plupart du temps sacri-
flcr dans la traduction. Les plus remarquables et les plus
caractéristiqnes sont (Uv et dé, ys, 8i^, Tt, ^, |x^, toi,
âpa, dcv.
Le nom de Parttcute s'applique plus exactement à des
petits mots qui ne peuvent point être employés seuls, et
qui s'unissent à un radical pour le modifier et former un
seul mot avec lui, comme en français très {très-bon) ;
dé^ dés {défaire, désobéira mé, mes {méprise, mésintel^
ligence, médire, fnestiser); in, dont la finale se modifie
suivant la lettre initiale du mot auquel on la prépose
[immobile, impossible, illisible, inintelligible, irrationnel ,
incomprétiensible, inconsolable, insupportable, intoléra-
ble, indicible, ineffable, inattaqtuûile, infortuné, etc.) ; et,
là {ceci, cela, cetut-ct. celui-là, vbici^ voUày ces hommes^
là, ce temps-ci); ex (ex-député); extra (extralégal, ex-
traordinaire, etc.); — en latin : am, an{amplector, an-
quiro);dis, di {disjungo, dilatus, differo); ri {repellOj^
redeo, reddo); se {sepono, seduco); sus {sustineo); ve
(vecors, vesanus ) ; tn et ne négatifs {injustus, improbus,
tgnarus, nescio, nequeo, nef as, nullus pour ne-ullus,
nemo pour ne-homo, nolo pour ne-tH7lo); — en grec, a ou
av privatif, 8uç, vs ou vy) négatifs, api, spi/ pou, ppi, Sa
ou ta, qui augmentent la force du simple. P.
PARTICULE NOBiUAiRB, Syllabe que les nobles placent
devant leur nom comme marque distinctive. C'est de en
français, von en allemand, van en hollandais et en fla-
mand, mac en écossais, 0' en irlandais, don en espagnol.
— Originiirement, la particule cte indiquait un seigneur
terrien, un maître de place ùa de province. Sous Louis XIV
on voit la particule nobiliaire toujours appliquée ainsi :
Le marquis de Seignelay, M. de Malesherbes, etc. ; on
disait : M. Colbert, M. Fouquet, etc.
PARTIDAS (Les Sietb). K. notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d'Histoire.
PARTIE, en termes de Palais, celui qui plaide contre
quelqu'un, soit en demandant, soit en défendant. On
nomme Partie publique, le magistrat chargé du ministère
public, et oui seul a le pouvoir de prendre des conclu-
sions pour la punition des crimes; Partie civile, l'indi-
vidu qui agit en son propre nom contre l'accusé pour
obtenir une réparation pécuniaire. La partie civile est
toujours tenue du payement des frais, sauf son recours
contre les condamnés.
PARTIE (Prise à). V. Prise a partie.
PARTIE, en termes de Musique, chacune des mélodies
dont la réunion forme l'harmonie ou le concert. On
nomme partie récitante, celle qui exécute le sujet prin-
cipal, dont les autres sont l'accompagnement; parties
concertantes, celles qui s'exécutent chacune par plusieurs
musiciens. — Partie se dit aussi du cahier ou du papier
sur lequel est écrit ou gravé ce que l'on exécute.
PARTIE, en termes de Jeu, totalité de ce qu'il faut faire
f»our qu'un des joueurs ait gagné. On joue en parties
t^es^quand on est obligé de gagner deux parties de suite,
ou au moins deux parties sur trois; lorsque chacun des
joueurs a gagné une partie et qu'on joue la 3% celle-ci se
nomme la dette.
PARTIES DU discours. V. DlSCOURS.
PARTIMEN. V. Tensow.
PARTIMENTI , nom que donnent les Italiens aux exer-
cices de la basse chiffrée ( V. ce mot), Fenaroli et Sala
en ont écrit qui sont célèbres.
PARTISANS, nom que l'on donna sons Henri III aux
gens de finance, parce qu'ils avançaient une partie de
l'impôt pour avoir la ferme du tout, ou qu'ils soumis-
sionnaient la perception de telle ou telle partie des im-
pôts. Sous le r^gne de Louis XIV, La Bruyère les a dési-
gnés mystérieusement par les lettres P. T. S.
PARTITIF , nom donné aux substantifs collectifs qui
n'expriment qu'une partie des individus compris dans
une réunion. Ils expriment souvent une quantité vague
et indéterminée, et sont ordinairement précédés de un
ou ^ une en français, comme dans ces phrases : « Une foule
de soldats, une quantité de volumes. » La plupart, la mino-
rité, la maiorité, la pluralité, tf moitié, le tiers, le quart,
assez de, peu de, trop de, etc., sont encore des partitifs.
Lorsqu'un substantif collectif partitif est suivi d'un com-
plément pluriel , l'adjectif, le pronom, le participe et le
verbe qui peuvent suivre s'accordent avec ce complément,
excepté lopoue le partitif est le mot le plus important et
renferme l'idée dominante : a Une nuée de traits obscurcit
l'air; une nuée de critiques s'est élevée contre cet écri-
vain ; «ne partie du camp était d4jà prise. » V. Coi/-
LECTIF. P.
PARTITION, réunion synoptique de toutes les parties
.concertantes d'un morceau de musique, notées, sur autant
de portées distinctes, avec la clef qui convi<>nt à chacnne,
PAS
1382
PAS
et disposées les unes au-dessus des autres de façon que
Toeil en puisse saisir Tensemble d*un seul coup. Dans ces
parties diverses les mesures se correspondent, au moyen
de lignes qui les séparent du haut en bas des pages.
Lorsqu'il s*agît de voix ou d'instruments de même nature,
la manière la plus naturelle de disposer les parties est de
placer les voix ou les instruments les plus aigus en haut
de la page, et de descendre, portée par portée, jusqu'à la
basse, qui doit être toujours au-dessous de tout. Mais,
quand la partition comprend des instruments de diverses
espèces, et surtout un orchestre complot, on fait trois
masses séparées , dans chacune desquelles on commence
toujours par les partiâ les plus aiguôs pour finir par les
plus graves : Vkarmonie ou la masse des instruments à
vent occupe le haut; on place au milieu le chant ou la
masse des voix ; le bas est occupé par le quatuor ou la
masse des instruments à cordes. Quelquefois on a divisé
les instruments à cordes, en plaçant les violons au-des-
sus de l'harmonie, les altos au-dessus du chant, et les
basses au-dessous, ce qui n'est ni clair ni rationnel. Cer-
taines partitions portent au bas une réduction au piano.
— Le mot Partition se prend aussi pour l'œuvre môme
du compositeur. B.
PARTITION , règle pour accorder l'orgue et le piano par
tempéramenu Elle consiste à ajuster tous les tuyaux ou
toutes les cordes comprises dans l'étendue d'une octave
ou d'une douzième, qu on prend vers le milieu du clavier,
et sur laquelle on accorde les autres notes de l'instru-
ment. La partition est bien faite lorsque la douzième, sol
dièse ou la bémol, fait une quinte à peu près juste avec
le mi bémol résultant de l'accord par quintes d'une autre
douzième prise au grave de la première. Il existe des
partitions toutes faites, composées de diapasons ajustés
d'après le système tempéré, et au moyen desquelles il
est facile d'accorder soi-même.
PARTITIONS, en termes de Blason, manières dont l'écu
est coupé en deux parties égales, n y en a quatre : le
parti, le cotti>^, le tranché, et le taille (V. ces mots),
PARTITIONS ORATOIRES, titre d'uu ouvrago de Cicéron
qui traite de la Rhétorique. 11 est écrit par demandes et
par réponses; ces fréquentes coupures lui ont valu son
nom. Îa Rhétorique à Hérennius, le traité de V Invention
et les Topiques , ouvrages du même orateur, s'y résument.
PARTURE. V, Jbo-Parti.
PARVIS (du latin pervius, ouvert aux passants), place
devant la grande porte d'une église, principalement d'une
catliédrale. Le mot Parvis vient, sielon c^uelques-uns, du
latin paradisus, parce que le parvis était une image du
Paradis terrestre, par lequel il faut passer pour arriver
au Paradis céleste, figuré par l'église. V. Aitre.
PAS, en termes de Danse, diverses manières de mar-
cher, de sauter, de pirouetter. On distingue : le Pas droit,
qui se fait en ligne droite; le Pas grave ou ouvert, qui
se fait en écartant un pied de l'autre en demi-cercle ; le
Peu battu, qui se fait en tournant une des jambes par-
dessus l'autre ou par-dessous avant de poser le pied à
terre, et qu'on nomme jeté-battu s'il est accompagné de
jetés ;\e Pas tourné, qu'on fait en décrivant un cercle avec
le pied; le Pas omc mouvement, qu'on fait avec plis des
genoux; le Pas relevé, qui se fait lorsque, après avoir plié
les genoux au milieu du pas, on se relève en le finissant; le
Pas coupée qu'on fait après un pas de mouvement et qui
est plus lent; le Pas balancé, qui se fait lorsqu'on se
jette à droite sur la pointe du pied pour faire ensuite un
coupé; le Pas dérobé, où les deux pieds se meuvent en
même temps dans un sens opposé ; le Pas ch€usé, où l'on
plie avant de mouvoir le pied; le Ptis tombé, où l'on ne
plie qu'après avoir posé le pied qu'on a fait mouvoir. —
Le nom de Pas se donne aussi à certaines danses parti-
culières : Pas de bourrée, P<u de basque, Pas de menuet,
Pas de gavotte, etc.
PAS, dans l'Art militaire, diverses manières de mar-
cher qui ont été réglées pour les troupes. On distnigue
le Peu ordinaire, le Pas accéléré, le Pas de route, le
Pas de charge, le Pas gunnastique. Marquer le pas ,
c'est le simuler, c'est observer la cadence, mais sans
avancer. Le tambour, le clairon, ou la musique, accom-
Eagnent souvent le pas. Avec l'accompagnement du tam-
our, on part du pied gauche.
PAS d'armes. F. notre Dictionnaire de Biographie et
d^Ristoire,
PAS DB sooRis, en termes de Fortification, désigne les
degrés qui descendent au fond des fossés secs.
PAS RBDODBLé, moTceau de musique dont la mesure
â 2/4 ou à C/8 est appropriée au pas des troupes. Le
mouvement en est rapide. Oc peut citer comme exemple
le Pas redoublé qui est dans l'opérarcomique les Deux
Journées , de Cherubini.
PASIGRAPHIE (du grec pas, tout, et grcephéin, dé-
crire), écriture universelle. Le mot peut s'entendre soit
d'un alphabet possédant assez de signes pour exprimbr
tous les sons possibles , soit d'un art d'écrire de façon à
être lu et compris par tous les peuples. En ce dernier
sens, la Pasigraphie est une chimère aussi bien que la
langue universelle ( V, Langage). Parmi ceux cnii s'en
sont occupés, nous citerons: ^sA/sr^ Pasigraphie, Weissen-
fels, 1705; le major de Maimieux, Pasigraphie, ou Élé-
ments d*un nouvel arU-science, Paris, 1707; Wolke, Pos-
sibilité de la Pasigraphie, Leipzig, 1707 ; Schmidt , Essai
de Pasigraphie, Vienne, 1815.
PASQUIN. V, ce mot dans notre Dictionnaire de liio'
graphie et d'Histoire.
PASQUINADES, nom donné d'abord aux placards sa-
tiriques qu'on trouvait attachés à la statue de Pasquin ,
et qui s'est étendu à toute raillerie lancée contre le pu-
blic ou contre les puissances.
PASSACAILLE, espèce de chaconne d'un caractère un
peu mélancolique et d'un mouvement modéré à 3 temps,
commençant d'ordinaire en levant. Elle était en vogue au
xvu* siècle. Sa mélodie, composée de 8 mesures sans re-
f irises, était variée dans ses répétitions. I^ mot vient de
'espagnol passacaile ( passe-rue) , parce que cet air, de-
venu fort commun, courait les rues.
PASSADOUX. V. Flèche.-
PASSAGE , galerie couverte unissant deux rues Tune
à l'autre et où ne circulent que des piétons.
passage (Droit de). Le droit de passage sur une pro-
priété voisine est une servitude qui ne peut exister que
par un titre {Code Napol.^ art. 601); il s'éteint par le
non-usage pendant un laps de 30 ans.
passage (Note de). V, Note.
PASSAVANT ou PASSE-AVANT, passage établi sur le
pont de chaque cùté d'un grand navire de guerre, pour
servir de communication entre les deux gaillards.
PASSAVANT, en termes de Douanes, acte qui autorise à
transporter d'un lieu dans un autre une denrée qui a
déjà payé le droit ou qui en est exempte. Il doit être visé
k tous les bureaux de passage et être présenté à toute
réquisition. Le passavant est timbré à 5 centimes.
PASSE, en termes de Finances, appoint en petite mon-
naie qui complète une somme payée en billets de banque,
ou en or, ou en pièces de 5 fr. Autrefois on entendait
également par Passe l'appoint avec lequel on ramenait à
sa valeur nominale une pièce de monnaie que le gouver-
nement avait réduite à sa valeur intrinsèque : ainsi, quand
l'écu de 6 livres ne valut que 5 fr. 80 c, on ajoutait
20 centimes pour la passe. On appelle Passe du sac ce
qu'on paye pour le prix du sac où est renfermée une
somme qu'on reçoit : cette passe fut longtemps de 15 cen-
times; elle n'est plus que de 10 depuis 185^.
PASSE, terme employé dans plusieurs jeux. Au billard
et au mail , la passe est une petite arcade en fer sous
laquelle doit passer la bille dans des conditions détermi-
nées; dans les jeux de cartes, c'est la mise courante ou
l'enjeu de chaque joueur. A certains jeux, tirer sa passe,
c'est faire la vole. A la bouillotte, voler la passe, c'est
faire gros jeu pour intimider les adversaires et les faire
passer, tout en ayant de mauvaises cartes. A la roulette,
pcuse est l'opposé de manque; on désigne par manque
tous les numéros jusqu'à 18, et pu passe tous les autres
à partir de 10.
PASSE (Mains de), mains de papier qu'on délivre à
l'ouvrier imprimeur en sus de chaque rame, pour servir
à la mise en train, et pour suppléer aux feuilles qui se^
raient gâtées ou qui manqueraient dans la rame. On
compte ordinairement 2 mains de passe par rame. Les
éditeurs n'en pavent pas le tirage, et bénéficient ainsi de
quelques exemplaires de plus.
PASSÉ, un des trois temps de la conjugaison des
verbes. Dans la langue française, il offre à l'indicatif
6 modifications, qui prennent les noms d'Imparfait, de
Passé défini, de Pcusé indéfini, de Passé antérieur, de
Plus-que^arfait, et de Futur passé ou Futur antérieur.
Le conditionnel , l'infinitif et le participe ont aussi un
temps passé ; le subjonctif en a trois, imparfait, parfait
ou prétérit, et plus-que-parfait. L'allemand, l'anglais, le
latin ont l'imparfait, le parfait, le plus-que-parfait, le fu-
tur antérieur de l'indicatif: pour les autres modes, il y a
peu de différence avec le français. La langue grecque est
la plus riche en inflexions exprimant le passé : elle a
l'imparfait, l'aoriste, le parfait, le plus-<^ue-parfait « le
futur antérieur, à l'indicaiif de ses trois voix ; l'aoriste et
PAS
1383
PAS
le parfait à Timpémlif, au subjonctif; Taoriste, le parfait
et le futur antérieur, k Toptatif, à Tinfinitif et au participe.
V. PRÉTÉRrr. P,
PASSE-AVANT. V. Passavant.
PASSE-DEBOUT, en termes de Contributions indi-
Tectes, permis de passage délivré aux marchands et aux
roituriers pour les boissons et autres objets de consom-
mation qui, ne faisant que traverser un territoire si^'et
aax droits d*entrée, n*y doivent pas payer de droits.
PASSE-DIX, jeu de dés. Le ban(^ier agite 3 dés dans
un cornet, puis les lance : si le point amené dépasse 10,
il ramasse les enjeux, et continue à tenir les dés; si le
point est 10 ou au-dessous, il double Penjeu de chacun ,
et passe les dés à son voisin de droite.
PASSEMENTIERS, ancienne corporation qui embras-
sait aussi celles du boutonnier, du plumassier, du fleu-
riste, de Téventailliste, du fabricant de masques, etc.
S' Louis en était le patron.
PASSE-PARTOUT, planche de bois ou de cuivre sur
taquelle on a gravé quelque ornement en forme de bor-
dure, et dont Te milieu est vide, pour recevoir une autre
planche à laquelle elle sert de cadre ; — cadre avec glace,
dont le fond s*ouvre & volonté, pour recevoir tel dessin
qu'on veut y placer.
PASSE-PIED, ancien air de danse k 3 temps, d'un
mouvement fort vif, à deux reprises de 8 mesures cha-
cune, jadis employé dans les ballets et les opéras.
PASSE-PORT, mandement délivré par Tautorité pour
recommander aux autorités de laisser circuler librement
la personne qui en est munie. Dans les temps féodaux,
les seigneurs empêchaient les habitants de leur domaine
d'aller demeurer ailleurs, et pouvaient les réclamer en
quelque lieu qu'ils fussent : ce droit n'était plus exercé
longtfémps avant la Révolution de 1789 ; cependant c*est
dans la Constitution de 1701 qu'on trouve pour la pre-
mière fois consacrée pour tout homme la liberté d'aller
et de venir, sauf certaines conditions en vue de l'ordre et
de la sûreté sociale. Les passe-ports sont détachés de
registres k souche, auxqpiels ils sont conformes; ce sont
des feuilles timbrées, que fournit l'administration de l*En-
registrement. Ils ne sont valables que pour un an, à par-
tir de leur délivrance. On distingue les passe-ports à
VirUérintry les pctsse-ports pour les colonies^ et les pctssê-
ports à V étranger, La loi du 28 mars 1702, dont la plu-
part des dispositions sont aujourd'hui tombées en désué-
tude, mais qui n'est pas abrogée, décide que tout citoyen
qui vent voyager en France hors du canton de son domi-
cile est tenu de se munir d'un passe-port, dont le coût
est de 2 fr. ; que les passe-ports sont donnés exclusive-
ment par les officiers municipaux , et doivent contenir le
nom des voyageurs , leur âge, leur profession , le lieu de
leur domicile, et leur si^nsdëment; que ceux auxquels on
les délivre doivent les signer, et que, dans le cas où ils
ne sauraient le faire, mention en est faite sur le passe-
port et sur le registre ; que, s'ils ne sont pas connus per-
sonnellement de l'officier municipal, ils doivent être ac-
compagnés de deux personnes connues ; que, s'ils veulent
changer en route le but de leur voyage, consigné sur le
passe-port, il leur faut se présenter à l'administration
municipale du lieu où ils se trouvent, pour faire donner
à leur feuille un nouveau visa, qui est gratuit. Le passe-
port est individuel ; toutefois, un même passe-port peut
servir au mari, à la femme, et aux enfants au-dessous
de 15 ans. Un mineur au-dessus de cet &ge et une femme
mariée ne peuvent obtenir un passe-port sans le consen-
tement, l'un de ses parents ou de son tuteur, l'autre
de son mari. Un soldat de la réserve a besoin d'une au-
torisation de Tautorité militaire. Les étrangers ne sont
admis à voyager et séjourner en France qu'en vertu d'une
autorisation du ministre de l'Intérieur (Instruction du
^ août 1816), délivrée après dépôt de leur passe -port à
la municipalité de la première commune où ils se sont
présentés. Si rien n'a fait obstacle k cette autorisation,
ie maire délivre xm^ passe provisoire, qui est échangée
contre un passe-port au lieu d'arrivée. Sont exceptés de
ces mesures les courriers extraordinaires et les chargés
de misaion auprès du gouvernement. La loi du 23 mes-
sidor an m (11 juillet 4795] permet de donner des au-
torisations provisoires aux négociants des pays alliés ou
neutres, à charge d'en informer immédiatement le mi-
nistre. Nul ne peut obtenir des chevaux de poste au pre-
mier relais par lequel il commence sa route, s'il n'a pas
on paaae-port délivré ou visé depuis huit jours au plus
par l'autorité du lieu. Si, k l'entrée des viUes de guerre
ou des villes de la frontière, on exige que les voyageurs
remettent leurs passe-ports, il leur est délivré une carte de
dépôt, indiquant l'autorité auprès de laquelle ils devront
les réclamer : partout ailleurs, on ne peut les obliger de
s'en dessaisir. — Les pass&-ports délivrés pour passer
dans les colonies n'ont d^effet qu'après avoir été viséi
par le ministre de la Marine (Arrêté du 19 vendémiaire
an vni — 11 oct. 1799). — Les passe-ports à l'étranger
sont délivrés par les préfets, sur 1 avis motivé des maires ;
l'instruction de 1810 exigeait une autorisation préalable
du ministre de l'Intérieur, mais cette formalité n'est plus
en usage. En 1858, les sous-préfets de certains départe-
ments frontières ou maritimes ont été autorisés à déli-
vrer des passe -ports pour l'étranger. Le prix de ces
passe-ports est de 10 fr. (Décret du 18 sept. 1809). Ceux
qui en sont porteurs sont autorisés à réclamer en pays
étranger la protection de l'agent qui représente la nation
à lamielle ils appartiennent. Un avis du Conseil d'État,
du 12 déc. 1811, permet de délivrer des passe-ports gra-
tuits aux indigents ; mais, sUl y a des secours de route,
cette délivrance appartient exclusivement aux préfets
(Circulaires du 22 nov. 1825 et du 24 oct. 1833). Les faux
commis dans les passe-ports sont punis d'un emprison-
nement de 1 à 5 ans {Code pénal, art. 153). Celui qui
prend un passe-port sous un nom supposé est puni d'un
emprisonnement de 3 mois à 1 an, ainsi que les témoins
qui s'y sont prêtés. L'officier public qui délivre un passe-
port a un inconnu et sans la présence de témoins est
passible d*un emprisonnement de 1 à 6 mois. S'il le dé-
livre sciemment sous un nom supposé , il encourt le
bannissement. — Les passe-ports ont été supprimés, en
1860, entre la France et la Belgique, et, en 1861, entre
la France et l'Angleterre. En Allemagne, le visa qu'il faut
obtenir presque à chaque ville donne lieu à une foule
d'exactions. B.
PASSE-VOLANT, nom qu*on donnait autrefois à celui
qui, sans être enrôlé, venait se présenter dans une revue
pour grossir une compagnie, et toucher la p^ye au profit
du capitaine. Ce nom s*applique encore dans la Bfarine
à quiconqpie est porté en fraude sur le rôle d'un ^uipage.
PASSIF, nom donné au verbe qui a l'inflexion par
laquelle on marque la passion, c-à-d, Vaction soufferte.
Cette inflexion, qui est \uli en grec, or en latin, n'existe
pas dans les langues modernes de l'Europe : elles se
servent d'un participe, fait du verbe actif qui se prend
en sens passif, avec le verbe auxiliaire je suis : comme
je suis aimé, etc. Souvent un verbe a le sens passif et
n'en a pas la forme : ainsi , périr, succomber, changer,
tourner; de même en latin, perire, succumbere, mutare,
vertere. Cesi encore ainsi que nous disons : « une cou-
leur voyante, une rue passante, n Réciproquement, beau-
coup de verbes, dans les langues anciennes, avec la forme
passive, ont le sens actif (K. Déponent, Pronominaux).
La syntaxe des verbes passifs est très-simple en fran-
çais et dans les autres langues modernes : leur complé-
ment se marque par la préposition par ou la préposition
de, — En latin, le régime se met k l'ablatif, lorsqu'il est
maraué par un nom de chose inanimée; à l'ablatif avec
a, ao, abs, lorsque c'est un nom d'être animé. On trouve
aussi quelquefois le datif. En grec, on emploie pour ré-
gime du verbe passif soit le datif sans préposition, soit le
génitif avec l'une des prépositions ôic6, icapà, npoç, èx,
quelquefois 8id, imô. Cette svntaxe s'étend aux verbes
qui, sans être passifs par la forme, le sont par le sens.
Ainsi, Casimir Delavigne a dit : « Ceux ;>ar gui vous sou/'-
frez. » De même en latin chez Ovide : Perire ab hoste,
Perire a discipulo suo»
Les noms et les adjectifs sont, comme les verbes, sus-
ceptibles d'une signification passive. Ainsi, en grec, tous
les noms neutres en \ut, sont des noms passifs; car ils
expriment toujours un résultat obtenu, et semblent
d'ailleurs se rattacher par leur forme à la l'* personne
du parfait passif. En français, bénéfice, maladie, résultat,
sont des noms passifs; inutue, stérile ^ inerte, épineux,
sont des adjectifs passifs. Quelquefois le même mot est
susceptible des deux sens. Ainsi, dans : V amour de Dieu
est nécessaire au salut, amour de Dieu a un sens passif <
mais si l'on dit : L'amour de Dieu n'a pas de bornes et
s'étend sur toute créature, amour de Dieu est actif. Ce
double sens de certains mots se retrouve dans toutes le^
langues. Quant à l'expression la crainte de Dieu, elle est
toiijours passive, puisqu'il ne peut être question que de
la crainte éprouvée par les hommes. P.
PASsir, en termes de Commerce, ensemble des fraisi
des charges et des dettes d'un négociant, d'une société,
d'une succession, d'une faillite. On l'oppose à VAcUj
{V, Cêmot).
PASSION (du ^cpaskein, souffrir; en latin pati). Danv
PAS
1384
PAS
quelque force extérieure. Mais on entend plus ordinaire-
ment, par Passion, une autre disposition complexe, et
fort mêlée d'activité, dont les phénomènes de la sensi-
bilité sont le point de départ, et restent Télément prin-
cipal. Le plaisir et la souffrance éveillent en nous natu-
rellement des sympathies et des répugnances si fortes ,
que rintelligence est portée d'abord à se mettre en quête
des causes qui les provoquent, et des objets dont l'action
a produit sur nous de tels effets. Ces objets une fois
connus, nous ressentons & leur égard des affections, des
goûts positifs ou négatifs, qui, de leur nom le plus gé-
néral, peuvent être appelés Amour ou Haine. L'Amour et
la Haine , c.-&-d. la connaissance, Jointe à l'expérience
de la sensation, des objets propres à nous apporter un
{>laisir et une souffrance, tels sont les premiers degrés de
a passion. L'Amour et la Haine sont suivis du Désir
« qui nous pousse à rechercher ce que nous aimons, » et
de l'Aversion qui nous pousse « à empêcher ce que nous
haïssons de nous approcher » (Bossuet, De la Connais-
sance de Dieu et de soi-même, i, 6), et ces passions
fondamentales, opposées et parallèles, compliquées de
circonstances accessoires, engendrent à leur tour la Fran-
chise, l'Espérance, la Colère, etc.. Il serait superflu
d'essayer de donner la liste exacte des Passions; mais il
faut s'attacher à -cette remarque, que toutes ont pour
principe la sensibilité. Bossuet montre fort bien {loc, cit.)
que toutes les Passions se rapportent à l'amour : « Otez
ramour, il n'y a plus de Passions, et posez l'amour, vous
les faites naître toutes. » Hais comme l'amour lui-même
A pour origine le Plaisir (nous aimons les choses parce
qu'elles nous plaisent, nous les haïssons parce qu'elles
nous déplaisent), c'est bien effectivement la sensibilité,
c.-èk-d. la faculté d'éprouver le plaisir et la souffrance,
Îui donne naissance aux Passions. Une loi générale des
assions, c'est qu'elles s'affaiblissent à mesure qu'on
s'éloigne du moment où l'on a ressenti le plaisir ou la
souffrance qui en ont été l'origine. Certains moralistes,
les Stoïciens entre autres, ont prétendu que nous devons
nous efforcer d'anéantir en nous les Passions, à cause
de leurs dangers : c'est une erreur ; nous devons faire en
sorte d'eu rester toujours maîtres, et de les subordonner
h la Raison pour les tourner vers le bien ; ainsi dirigées,
loin d'entraver le développement de la vie morale, elles
lui donnent plus d'activité, et forment une des parties de
cette belle harmonie de toutes les facultés humaines que
Platon {République, liv. IV) représente avec raison comme
l'idéal de la perfection humaine. L'étude des Passions
est une mine inépuisable, qu'ont exploitée, chacun à
leur manière, les écrivains les plus différents : mora-
listes, poètes, et romanciers. Parmi les écrits où ce sujet
est traité, au point de vue purement spéculatif et philo-
sophique, Qous citerons seulement : Aristote, Traité de
l'âme; Descartes, Des Passions; Bossuet, De la Connais-
sance de Dieu et de soi-même. V. aussi, ne fùtrce qu'à
titre de curiosité, la Théorie des passions, dans les écrits
de Cil. Fourrier. B — e.
PASSION DE N.-s. J.-G. (La). V. uotro Dictionnaire de
BiograpMe et d'Histoire,
PASSION (Confrères de la). V, Mystères.
PASSIONS, en termes de nhétorique, émotions diverses
que l'orateur reçoit de son sujet et qu'il communique
aux autres par le discours. Il les emploie pour toucher
ses auditeurs. L'art d'exciter les passions se nomme le
PatJiétique (du grec pathos, passion). Aristote blâme
l'usage des passions dans l'éloquence; il voudrait que
l'orateur du barreau , par exemple, laissât les Juges se
prononcer avec une entière liberté d'esprit, et ne fit pas
en quelque sorte violence à leur suffrage en s'adressant
à leur cœur. C'est là une sévérité exagérée : il ne peut
être interdit à l'orateur, convaincu d'une vérité, épris de
l'amour du bien, d'inspirer à ceux qui l'écoutent les
sentiments qu'il éprouve lui-même, quand bien même
il arriverait à d'autres d'abuser de la parole pour exciter
des passions mauvaises. Toutes les passions oratoires
Î)euvent se ramènera deux, l'amour et la haine : on excite
'amour, en donnant à l'objet des couleurs agréables; la
\iaine, en le représentant sous des traits repoussants.
Hais pour faire naître ces sentiments dans l'âme de l'au-
diteur, il faut en être ému soi-même; c'est dans son
propre cœur que l'orateur doit étudier les passions et les
moyens de les éveiller. Il a besoin, pour cette étude, de
rimagination, de la sensibilité, et du discernement. Par
l'imagination, il se met à la place de ceux qu'il fait par-
ler; par la sensibilité, il retrouve en lui-même les sen*
timents dont ils ont été agités; par le discernement, il
apprend dans quelle mesure et de quelle manière il doit
user des passions, et quelles convenances il doit observer.
L'orateur dénué de sensibilité ne saurait être éloquent;
tout son rôle se borne à convaincre. Sans discernement,
il est exposé à faire un emploi ridicule ou malséant du
Pathétique. On distingue le Pathétique direct et le Po-
thétique indirect ou réfléchi : le pathétique direct est celui
par lequel l'orateur communique aux autres les passions
dont il est animé; le pathétique est indirect, quand l'ora-
teur présente des tableaux ou des objets propres à exciter
les passions, de sorte que l'auditeur s'émeuve de lui-
même. Lorsqu'on est parvenu à exciter les passions, il
faut prendre garde de fatiguer en insistant trop long-
temps; Cicéron l'a dit: Niliit lacryma citius arescit. Rien
ne sèche plus vite que les larmes. H. D.
PASSIONNEL, nom que l'on donnait, dans les pre-
miers siècles de l'Église, à un livre contenant les passions
des martyrs.
PASSIVITÉ, en termes de Philosophie, état de l'âme
subissant les phénomènes de la sensibilité et de l'enten-
dement. Quand l'âme soufl're, jouit ou connaît sa peine,
son plaisir, sa connaissance résulte d'une cause qui n'est
pas elle ; en ce sens elle est passive, V. Activité.
PASSOIRE, instrument concave, percé de petits trous
au fond, et à l'aide duquel, dans le saint sacrifice de la
messe, on versait autrefois le vin et l'eau des burettes
dans le calice, afin que rien d'impur n'y fût mélangé. On
en trouve l'existence en France dès le commencement du
VII" siècle, et il en est question encore au xv*. Quelques
monastères, entre autres celui de S*-Denis, conservèrent
l'usage de la passoire jusqu'au xviii* siècle.
PAST (Droit de). V. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire,
PASTEL (de paste, pour pâte) , crayon fait avec de la
terre de pipe réduite en poudre extrêmement fine , mé-
langée intimement avec des substances colorantes, et
mise en pâte avec une eau de gomme. On nomme Pein^
ture au- pastel un genre de dessin exécuté au moyen de
crayons en pastel. Ces crayons remplissent en partie l'of-
fice de pinceaux ou d'estompé ; mais c'est avec le bout
des doigts principalement que l'on étend les couleurs :
après les frottis, on donne les dernières touches, les
finesses, les rehauts, en se servant du pastel comme du
crayon ordinaire. La peinture au pastel a cela de com-
mode qu'on peut la quitter, la reprendre et la retoucher
à volonté, puisque la couleur est sèche ; elle donne aussi
un coloris plein de vivacité , de fraîcheur et d'éclat, qui
ne Jaunit ni ne noircit comme la peinture à l'huile, et
son velouté rend parfaitement la nature. Mais la pous-
sière colorante du pastel se détache facilement du fond
de papier, de vélin, de parchemin ou de taffetas, sur
lequel les couleurs ont été étendues. Si , pour les fixer,
on applique derrière le dessin une eau gommée ou col-
lée, la légèreté et le velouté de l'œuvre disparaissent. Un
moyen de conserver le pastel , c'est de le recouvrir d'un
verre. — Le dessin au pastel ne parait pas remonter au
delà de 168.5; on en attribue l'invention à Thiele, d'Er-
furt, ou à M^* Heid , de Dantzig. Ce genre a été fort à la
mode au xviii* siècle, surtout pour les portraits de fem-
mes. On a de très-beaux pastels par La Tour, IJotard
dit le Peintre turc, Russel, Rosalba Carriera, Naticr,
Vigée, Tocqué, Mengs, Benedetto Luti. De nos jours, on
a fait application du pastel au paysage, aux oiseaux, aux
fruits, etc.; parmi les artistes qui se sont livrés à ce
genre, on remarque Fiers, Michel Bouquet, Eug. Giraud,
Eug. Tourneux , Antonin Moine, Cordouan , Vidal , Ma-
réchal ( de Metz), Ricsener, Lrochard, etc. B.
PASTEUR, en latin Pastor (de po^ct, faire paître ;.,
se dit, au figuré, de celui qui exerce une autorité pater-
nelle sur une réunion d'hommes. Homère appelait les
rois les pasteurs des peuples. Chez les peuples chrétiens,
Po^^eur veut dire gardien des âmes; en ce sens, Jésus-
Christ est appelé le Bon Pasteur, — Les Protestants
nomment Pasteur le ministre qui a charge d'âmes. II
faut, dans l'Église calviniste, trois degrés pour arriver à
cette charge. L'étudiant en théologie ayant atteint la
3* année de ses études se nomme proposant, et peut
occuper la chaire, avec l'agrément du consistoire. Quand
il a terminé ses études, subi ses examens et soutenu sa
thèse de bachelier en théologie, il reçoit de la Faculté
protestante dont il a suivi les cours un certificat d'ap-
titude ; il peut alors se présenter devant une réunion do
pasteurs pour recevoir la consécration qui lui donne le
droit d'administrer les sacrements ; il devient ainsi my-
PAS
138S
PAS
ntstre. Le synode de Paris en 1559 avait décidé que )a
présence de deux ou trois pasteurs était nécessaire pour
une consécration; celui de Saint-Maixent, en 1609, en
exigeait sept : aujourd'hui il est reçu que le concours de
trois pasteurs valide la consécration. Autrefois il était
obligatoire de signer la Confession de foi calviniste ; cet
usage a été abandonné comme dérogatoire à la liberté
d'examen, et Ton se contente maintenant du serment de
prêcher la parole de Dieu telle qu'elle est contenue dans
les livres révélés de TAncien et du Nouveau Testament.
Un ministre n*est dénonmié pasteur que quand il a une
église à desservir. B.
PA5TF.DR (Le Bon). V. Bon Pasteur.
PASTICHE (de Htalien pasticcio, p&té), se dit, en
Littérature, de limitation affectée du style d'un écri-
rain, moulé, pour ainsi dire, comme une p&te sur un
modèle. 11 y a des pastiches sérieux, qui sont les mau-
vais, et des pastiches faits par jeu d'esprit, qui sont les
bons dans ce dernier genre. On peut citer deux Lettres
de Boileau, parmi ses Œuvres diverses, où il a imité le
style de Balzac et celui de Voiture. — En Peinture, le
mot Pastiche s'applique à un tableau peint dans la ma-
nière d'un grand maître ; soit qu'on s'attache à faire une
copie exacte, en contrefaisant l'ordonnance, le coloris et
l'expression du maître. Jusqu'à tromper les connaisseurs;
soit qu'on veuille, dans un tableau de composition nou-
velle, rappeler la manière de tel ou tel maître dont les
oorrages sont devenus classiques. Jordaens, Boullonpe,
Bourdon, ont été habiles dans le pastiche. Teniers imi-
tait, à s'y tromper, les tableaux des Bassan. — En Mu-
sique, un Pastiche est un opéra, un oratorio ou tout
autre ouvrage composé de morceaux de différents maîtres,
ou empruntés k plusieurs œuvres du même auteur.
F. Cbxtox. g.
PASTILLARIA, nom donné, dans l'ancienne Université
de Paris, à la thèse qu'un licencié soutenait pour être
reçu docteur en médecine, parce qu'il donnait primitive-
ment aux anciens docteurs un déjeuner consistant en
petits pâtés.
PASTOPUORIA, nom latin des deux petites absides
qui flanquaient souvent l'abside principale des basiliques,
et où l'on renfermait les restes du pain consacré.
PASTORALE (Poésie), poésie qui peint les moeurs pas-
torales. On lui a donné aussi le nom de Poésie biwolique,
parce que les personnages qu'elle a mis en scène , au
moins dans ses origines, étaient des bouviers (en grec
boukolos)^ des b^ers, des chevriers. Elle retrace les
douceurs de la vie champêtre, telle surtout que se la
représentent les habitants des grandes cités, qui aiment
à transporter au sein des paisibles campagnes, des prai-
ries émaillées, et sous l'ombre des bois touffus et frais,
l'idéal de la tranquillité incompatible avec le tourbillon
du monde, le tumulte des affaires et les embarras de la
ville. Quelle que soit la forme qu'on adopte, idylle,
iglogiêe ou drame, ce qui sied avant tout aux composi-
tions de cette espèce, c est la simplicité et la gr&ce. Les
Kotiments des personnages doivent être naïfs, et leur
langa^ aussi éloigné du ton fastueux que de la trivialité,
ce qui ne l'empêche pas, si la nature du sentiment le
permet, de s'élever Jusqu'à la noblesse.
II ne faat pas confondre la poésie pastorale, genre
distinct de Littérature, où l'on peint la vie des champs
sous sa forme la plus attrayante et. dans son heureuse
simplicité, avec toute description dé la Nature, dont le
sentiment peut se trouver, à des degrés divers, dans les
auties [genres littéraires. La Nature occupe trop de place
dans l'histoire de l'homme, pour être, k aucune époc[ue,
oubliée par les poètes. Ainsi, l'Inde a son Gita^ovinda
(V, cemot)^ la Judée son livre de Ruth et son Cantique
des canCiques, l'Arabie ses Moallakats; VOdyssée d'Ho-
mère et les OEuvres et Jours d'Hésiode abondent en
descriptions champêtres ; le drame satvrique des Grecs,
avec ses Faunes, ses Satyres, ses Silènes, offrait fré-
quemment la peinture de la vie des champs, et il en fut
rraîsemblablenient de même d'un grand nombre de co-
médies dont nous n'avons plus que les titres, les Bouyiers
de Cratînus, le Paysan de Ménandre, etc.; la Paix
d'Aristophane est écrite avec un sentiment bien vif du
calme de la campagne ; Platon lui-même cherche sou-
vent à encadrer les plus belles de ses discussions philo-
sophiques dans les plus splendides scènes de la Nature.
Le sentiment de la Nature est de tous les temps ; mais il
n'en est point ainsi de la poésie pastorale proprement
dite, née du contraste de la vie des champs avec les raf-
finements de la civilisation, et du besoin que les âmes
éprouvent de se retremper dans quoique vallée solitaire.
loin du bruit et de l'agitation, sous un beau ciel, devant
la belle et simple Nature.
Il n'est peut-être pas, en effet, de genre littéraire qui
suive une loi plus constante : en parcourant l'histoire de
ce genre, depuis Théocrite, qui en est généralement re-
gardé comme l'inventeur, jusc^u'à nos Jours, on voit la
{)oésie pastorale s'épanouir uniformément dans la vieil-
esse des civilisations. Quand elle se montre, tout a été
moissonné dans le champ de l'imagination. L^ esprits
conservent cependant de la vigueur; les besoins littéraires
subsistent. Pour distraire ces civilisations ennuyées, appa-
raît la poésie pastorale. Afin de détourner l'homme de la
contemplation de lui-même, elle lui offre le spectacle de
la nature. A des âmes blasées par l'expérience, saturées
d'analyse et de réflexion, elle présente avec industrie le
tableau de mœurs innocentes et primitives ; elle rafraî-
chit, en quelque sorte, les imaginations fatiguées au par-
fum des bois et des champs.
Lamotte, Fonteneile, Marmontel , Heyne, croient devoir
rapporter la naissance du çenre pastoral à un &ge d'or
fabuleux, qui n'a jamais existé que dans leur imagina-
tion. Si l'on veut parler d'une sorte de poésie simple et
grossière, qu'on appellerait la Pastoreue naturelle, on
peut admettre, sur la foi d'antiques traditions, que les
vallées heureuses de l'Arcadie ou de la Sicile ont produit
ce genre de poésie, et croire à la oréation spontanée de
ces rudiments de poésie pastorale, que traduisit sans
doute Théocrite, en les ornant, sans les altérer, de toutes
les grâces de son esprit et de son goût. Il y eut peutrêtre
un Daphnis, sorte d'Homère pastoral, entouré, comme ce
dernier, de grandeur et de mystère. La Pastorale titté'
raire serait donc sortie de thèmes grossiers et primitifs,
comme la satire romaine du dialogue fescennin, comme
la tragédie et la comédie grecque des chants improvisés
aux fêtes de Bacchus et de Cérès. Mais, l'histoire et la
critique littéraire le prouvent, la poésie n'arrive à la
pastorale que par un long détour, et après avoir succes-
sivement passé par les genres héroïques, par l'ode, le
drame et l'épopée. C'est au milieu de la cour savante
d'Alexandrie, au sein d'une société qui a tout connu, tout
usé, que Théocrite a eu l'heureuse idée d'introduire les
chants populaires de sa patrie, les rustiques chansons
recueillies dans les campagnes d'Enna, non loin des bords
de l'Aréthuse. Ainsi l'on vit, au milieu des disputes du
xvm* siècle, l'Anglais Macpherson donner, sous le nom
d'un barde d'Ecosse, les vieux chants gaéliques des mon-
tagnes de Morven. Le succès fut le même, préparé qu'il
était par les mêmes causes. Il rendait, pour ainsi dire,
un échantillon de la nature à des hommes qui depuis
longtemps ne la regardaient plus. Bion et Moschus, con-
temporains et successeurs de Théocrite, répondirent au
même besoin, tout en s'éloignant un peu de la simplicité
de leur maître. — Quand parurent à Rome les Bucoliques
de Virgile, une vieillesse prématurée avait atteint la so-
ciété romaine. On conçoit avec quel bonheur elle dut se
reposer sur ces peintures de la vie champêtre, qui l'arra-
chaient au sentiment de ses douleurs par la poétique
image d'une ignorance heureuse et d'un repos dont elle
avait tant besoin. Virgile fit subir k la poésie pastorale
une grave altération : par lui l'églogue commença à deve-
nir ce qu'elle n'a cessé d'être depuis, un èadre convenu ,
une forme allégorique, destinée k recevoir et k exprimer
des choses souvent étrangères aux champs , aux mœurs
et à la vie des bergers. Cest le commencement de la
décadence d'un genre par lui-même assez borné. Virgile
s'y met presque toujours en scène avec ses sentiments
particuliers , ses amours et ses répugnances ; il y intro-
duit ses rivaux et ses amis « et, à propos d'églogue, nous
entretient des gi'ands intérêts qui s'agitent dans Rome,
de l'astre des Jules , et des présages de la grandeur de
celui qui doit bientêt tout gouverner.
Peu de genres ont eu plus de fortune que la Pastorale ;
sous prétexte que les bergers sont agréables, disait Fon-
teneile, on en a quelquefois abusé. Lui-même aurait pu
commencer par s'appliquer cette observation. Nous ne
rappellerons que pour mémoire les églogues de Calpur-
nius et de Némésien, et les idylles d*Ausone; nous ne
nommerons Pontanus, le Mantouan, Sannazar, Vida, que
pour montrer jusqu'où peut être porté l'abus de ce genre,
dans ce qu'on a appelé le second &ge de la Pastorale latine*
Au XIV* et au xv* siècle, la Pastorale n'est plus qu'un dé-
guisement de fantaiiîe pour habiller toute espèce d'idées,
pour donner un air et un tour villageois à des traits sati-
riques, littéraires, politiques, et même religieux. Fonte-
neile a rappelé cette pi6rr oi'i le Bfantouan imapine de
faire soutenir à des Lcrgurs, qui sont aussi des moi net
PAS
1386
PAT
«oKUBdns, ane dispute théologique devant un cardinal,
qui , par précaution, les eng^ige a déposer préalablement
leurs houlettes , de peur quMls ne se battent.
A répoque où la Pastorale tomba dans les langues mo-
dernes , ce genre subit une nouvelle transformation :
dans Virgile, dans Théocrite même, mais plus sobrement,
des limites resserrées Tavaient contraint à s*allier sou-
vent à d'autres formes; à Télégie, dans V Alexis, la Phar-
mac9utria, Gallus; à l'épopée et au genre didactique,
dans Silène et Pollion; presque partout, au drame. Il
devient maintenant le drame pur, et ensuite le roman ,
ce dont Longus avait toutefois donné un exemple dans
Daphnis et Chloé (F. ce mot). Les troubles religieux et
politiques qui remplirent le xv* et le xvi* siècle expli-
quent d^ailleurs le succès prodigieux qu'obtinrent, parmi
bien d'autres productions du même genre, VAminte ( V. ce
mot) du Tasse, le Pastor /ido (V, ce mot) de Guarini ,
lesquels, avec VAstrée { V. ce mot) d'Honoré d'Urfé, ser-
virent de modèle aux pastorales de Segrais, aux poésies
de Bacan et de M*"' Deshoulières. Sous prétexte de ber-
geries, nos Français expriment des sentiments quelque-
fois délicats et vrais ; mais le faux règne dans les mœurs
et dans tout le reste. Les bergers héroïques de d'Urfé, de
Segrais, de Bacan, de Fontenelle, de Florian, n'ont jamais
existé dans aucun pays, et sont particulièrement incon-
nus à l'Antiquité. C'est pour la forme qu'ils possèdent un
chien et des moutons , et ils ne portent guère la houlette
que par contenance. André Chénier a pu donner seul à
ses idylles un coloris et un parfum empruntés aux poètes
de l'ancienne Grèce.
S'il était possible de concevoir la Pastorale indépen-
damment de la versification, il semble que le roman de
PatU et Virginie, de Bernardin de S*-Pierre, devrait seul
mériter ce nom parmi nous. Aux deux extrémités de
l'histoire de ce genre se reproduisent des circonstances
tellement analogues, qu'il est impossible de n'en être
point frappé : en 1788, la France, comme la Grèce des
Ptolémées, n*a-t-elle pas épuisé tous les genres de gloire
littéraire? Dogmes religieux et croyances politiques sont
également affaiblis. Une analyse ardente, audacieuse, a
montré le côté vulnérable des institutions humaines; un
siècle s'est écoulé tout rempli par le raisonnement : c'est
dans cette lassitude générale qu'apparaît l'histoire simple,
pathétique, de Paul et Virginie, si propre à distraire de
leur ennui des esprits fatigués de tragédies héroïques,
rassasiés des Jouissances de la civilisation. — De nos Jours,
on a vu renaître, avec M'"* Sand et d'autres ^ri vains
beaucoup moins célèbres , sinon la poésie pastorale, au
moins le goût des tableaux champêtres. Ce ne sont que
scènes bretonnes ou provençales, scènes* du Languedoc
ou du Jura, de la Normandie ou du Bocage, formant un
contraste piquant avec les idées positives du siècle. Ne
serait-ce pas aussi qu'après les ouragans de passions dé-
chaînés depuis si longtemps dans la littérature, surtout
dans le roman , on a besoin de paysages tranquilles et
d'émotions honnêtes?
Les autres pays,. comme la France, ont eu des écrivains
du genre pastoral. Sans parler des ouvrages d^à cités
plus haut, l'Italie peut mentionner la Favoladi Orfeo de
Politien, drame pastoral Joué dès 1484, l'égloffue de
Tirsis par Castiglione, divers ouvrages de Tansfllo , de
Beccari , de LoUio , la Filli di Sciro de Bonarelli , VAlceo
d'Ongaro , et, au xix* siècle, les églogues de Meli, écrites
dans le dialecte sicilien. — En Espagne, Boscan et Bia-
nuel <ie Villega naturalisèrent l'idylle ; Montemayor pu-
blia une Diane,^ et Cervantes une Galatée, Au commence-
ment de notre siècle, Melendez Valdez a laissé des églogues
et des romances pastorales qui le placent au-dessus de
ses devanciers. — Le Portu^l compte parmi les poètes
bucoliques Saa de Miranda, Berniurdino Bibeira, Cbristo-
val Falçam, Antonio Ferreira, Bodriguez Lobo, Diego Ber-
nardez, Andrade Caminha, Alvar& do Oriente. — En
général , l'Angleterre n'a point brillé dans le genre pas-
toral. Le Calendrier de Spencer contient des églogues
pour tous les mois; Milton fit une pastorale, Lycidas ; on
a une Arcadie de Philippe Sidnev, quelques morceaux
bucoliques de Pope, de Collins, de Gregory, etc. — En
Allemagne, Gessner a voulu étendre les limites naturelles
du genre, en lui donnant un intérêt plus moral ; il a écrit
en prose. On place après lui Voss et Kleist. — Les Hol-
landais parlent avec éloge des idylles de Tollens.
PASTORALE, en termes de Musique, air qui rappelle la
nature champêtre. On a de délicieuses pastorales dans
le Don Juan de Mozart et le Joconde de Nicolo. Certains
morceaux d'orgue et de musique d'église, exécutés par-
ticulièrement a la fête de Noël, portent le nom de Pas-
torales. Beethoven a composé une célèbre et très-belle
Symphonie pastorale, \
PASTOB FIDO (II), c.-à-d. le Berger lidèle, œuvre dn
genre pastoral, composée par Guarini à l'imitation de
VAminte du Tasse. Ls poète voulut fondre divers genres
en un seul, et donna à son poème le nom de Tragi-co-
médie pastorale. Il devait résulter de cet assemblage une
grande irrégularité dans le plan, et de l'invraisemblance
dans les détails. L'ouvrage est divisé en 5 actes, qui se
passent dans l'Arcadie. Une peste désole le pays, et
l'oracle consulté répond que les maux de l'Arcadie fini-
ront par le dévouement d'un bercer fidèle. Pour obéir à
cet oracle, le poète a imaginé une intrigue trop complexe
pour être expliquée ici. Le péril de mort où se trouve
l'innocente Amaryllis; le généreux dévouement de Mirtil,
qui s'offre à mourir à sa place, quoique les apparences la
lui fassent croire infidèle; les préparatifs de ce sacrifice;
les éclaircissements imprévus qui font reconnaître dans
la victime le fils du sacrificateur; les interprétations pro-
phétiques qui rétablissent le vrai sens de l'oracle et déli-
vrent Mirtil ; l'insensible chasseur Silvio qui blesse sans
le vouloir d'un de ses traits la tendre Donne, et est
amené par la pitié à lui accorder un amour qu'il n'avait
pu Jusqu'alors sentir pour elle, tous ces ressorts appar-
tiennent h la tragédie. Le sujet n'appartient à la comédie
que par quelques accessoires qui pourraient en être re-
tranchés, et à la pastorale que par la qualité des person-
nages, dont il serait d'autant plus facile de relever la
condition qu'elle se trouve le plus souvent au-dessous
de leurs sentiments et de leur langage. — Outre les imi-
tations de VAminte, on trouve dans le Pastor fido de
nombreux souvenirs du thé&tre grec : Guarini a introduit
dans son ouvrage le chœur antique, chanté avec accom-
pagnement d'instruments. Le Pastor fido fut composé
vers 158Î, et imprimé en 1590, in-4^ Il obtint un pro-
digieux succès. Malgré le manque de naturel de quelques-
uns des incidents et la recherche du style, il renferme
plusieura morceaux d'une rare beauté : on y remarque
une grande richesse d'imagination, surtout dans les des-
criptions. On lui reproche la subtilité, les sentiments
alambiqués, de l'affectation dans le style, et la licence de
beaucoup de passages. Le Pastor fido a été traduit dans
toutes les langues de l'Europe; il en existe, entre autres
traductions françaises, une de Pecquet, avec le texte ita-
lien, Paris, 1733-1759, 2 vol. in-12. E. B.
PASTOUBAUX, nom donné quelquefois aux pierres
cubiques qui forment le petit appareil dans les monu-
ments antérieurs au xi* siècle.
PASTOU BELLES , espèces de poésies pastorales, d'églo-
gues dialoguées entre un troubadour et un berger ou une
bergère. On les nommait aussi Vaqueyras (Vachères].
Les plus remarquables sont celles de Giraud Biquier, de
Jean Estève de Béziera, et de Paulet de Marseille. Plu-
sieura pastourelles du moyen fiLge roulent sur Robin et
Marion, type des amoure de village.
PAT (de l'italien pattare, faire quitte), terme du Jeu
d'échecs, se dit loraqu'un des deux joueura, n'ayant pas
son roi en échec, ne peut plus Jouer sans se mettre en
prise. Quand on est pat, la partie devient nulle.
PATACHE (de l'italien patascia)^ sorte de voiture pu-
blique à deux roues et non suspendue, qui est encore en
usage dans quelques localités. Certaines patacbes sont
appelées patachons, nom qu'on donne également au con-
ducteur. On en voit où les voyageurs, au nombre de 4
ou de 6, sont assis dos à dos, la voiture se trouvant ou-
verte des deux côtés, et ils ont les Jambes placées dans des
espèces de panien ballants.
PATACHE, b&timent léger, autrefois employé au service
des grands navires pour aller à la découverte ou porter
des nouvelles. Le mot est resté pour désigner, soit un
vieux navire approprié pour la police d'un arsenal , soit
ces bâtiments de la douane ou de l'octroi ancrés dans les
ports ou dans les rivières pour percevoir les droits de
sortie ou d'entrée sur les marehandises et empêcher la
fraude.
PATAGIATA, nom qu'on donnait chez les Bomainsà
une tunique parsemée de fleura d'or et de pourpre , et
ornée de riches franges.
PATAGON (Idiome). 11 est guUural , difficile à pronon-
cer, et plein de sons que nos lettres ne sauraient exprimer.
Il est pius riche en noms de nombre que beaucoup d'au-
tres langues de l'Amérique.
PATAGON, PATAQUE, PATAB, monnaies. F. notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
PATANI (Dialecte). K. Afghans (Langue des).
PATAVINITÉ (de Patavium, nom laUn de Padouej,
PAT
1387
PAT
défaat dont les Romains faisaient reproche à Tite-Live,
mais sur la nature duquel on n'est pas d*accord : selon
lés uns, c'était une orthographe vicieuse; selon les au-
tres, ane prononciation, un accent de province; ou bien,
certaines tournures de phrases particulières aux Padouans.
On a même imaginé que le mot Pataviniié était une allu-
sion aux opinions politiques de Tite-Live, qui, comme
Padouan, aurait été partisan de Pompée. V. Morhof,
De Patavinitate Livianà, Leyde, 1G85.
PATE, ensemble des couleurs d'un tableau. Peindre
dans la pâte, c'est charger la toile de masses épaisses de
couleurs, qu'on fond ensuite les unes dans les autres, au
lieu de couvrir le trait d'une ébauche légère, puis de
touches successives. Cette pratique est celle de beaucoup
de coloristes; mais, elle ne convient pas aux peintres des-
sinateurs, parce qu'elle empêche de suivre les lignes du
trait et d'arrêter les contours.
PATELIN ou PATHELIN (Maître Pierre), farce célè-
bre, le meilleur et l'un des plus anciens monuments du
gàiie comique de la France. Ni l'auteur, ni la date de cette
pièce ne sont connus. On l'a attribuée à Pierre Blanchet
et à Antoine de I^ Sale, l'auteur de la Chroniqw du
petit hhan de Saintré. La 1'* édition imprimée date de
1474. Un avocat décrié et mis au pilori s'entretenant
avec Guillemette, sa digne épouse, des moyens de mettre
à neuf leurs habits us& ; l'avocat leurrant de belles pa-
roles le drapier, son Toisin, pour se faire donner du drap
à crédit , puis employant un grossier artifice pour ne pas
le payer ; le drapier se félicitant d'avoir trompé Patelin
en lui vendant 24 sous ce qui n'en vaut que 20 ; le berger
Thibaud Agnelet volant le drapier, son patron, et trou-
vant Patelin prêt à plaider pour lui ; le berger enfin trom-
pant l'avocat qui lui a fait gagner une mauvaise cause,
tournant contre lui la ruse qu'il lui a enseignée contre sa
partie, et ne répondant à sa demande d'honoraires que
par le cri de ses bétes à laine ; tel est l'ensemble de la
pi^ce. Sans compter beaucoup d'expressions qui sont de-
meurées proverbiales, le nom de Patelin est devenu dans
notre langue le synonyme de flatteur et de fourbe. La
farce de l'avocat Patelin a été mise en vers latins par
Alexandre Connibert en 1543, et rajeunie par Brueys et
Palaprat, qui en firent une comédie en 3 actes en prose,
jouée, en 1706, au Thé&tre-Français, où elle obtint en-
core un succès nouveau. On l'a mise de nos Jours en
opéra-comique (musique de Bazin). La meilleure édition
de l'œuvre originale est celle qu'a donnée Génin, sous ce
titre : Maître P. Patelin, avec une introduction et des
notps, Paris, 1854, in-8». B.
PATELLE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d* Histoire.
PATÈNE, vase sacré en or ou en argent, en forme de
petit plat rond, et qui sert, pendant la messe, à recouvrir
le calice et à recevoir les parcelles de l'hostie. Tout unie
à lïntérieur, pour que rien ne s'oppose à la purification
que le prêtre doit en faire en certames circonstances, la
patène porte le monogramme de J.-C. gravé à l'extérieur.
Cependant, on en connaît une marquée par un artiste alle-
mand des initiales gothiques E. S., avec la date de 1466 :
eUe représente au milieu S^ Jean-Baptiste assis ; le tour
est orné d'enroulements dans lesquels se trouvent 8 mé-
daillons renfennant quatre Pères de l'Église et les ani-
maui symboliques des quatre Évangélistes. L'officiant fait
baiser la patène aux personnes qui vont à l'offrande. Pri-
mitiveoicnt, la patène était plus grande qu'ai:^ourd*hui,
parce qu'on s'en servait pour donner la communion aux
fidèles; le ciboire ne fut employé à cet usa^e que vers le
X* siècle. V, Barraud, Noivce sur les calices et les par
tàes. Caen, 1842.
PATENOTRES (du latin Pater noster)^ nom que l'on
donna d'abord à l'Oraison dominicale, et qui s'est ensuite
étendu à toutes sortes de prières , puis au chapelet et aux
grains qui le composent. — En termes de Blason , on
Appelle Patenôtres une dizaine de chapelet ou le chape-
let tout entier, dont on entoure les écus. En Architec-
ture, ce sont des ornements en forme de grains ronds ou
orales, qui se mettent au-dessus des oves.
PATENTES (Contribution des), droit que l'on paye
pour exercer une industrie ou un commerce : tout habi-
tant de la France, citoyen ou étranger, y est assujetti.
Par cette contribution, on a voulu faire participer l'État
&u bénéfice que le commerce retire des capitaux mobiliers.
La patente se compose d'un droit fixe et d'un droit pro-
portionnel. D'après la loi du 25 avril 1844, le droit fixe
tsi établi , pour la plupart des professions, eu égard à la
population et d'après un tarif général qui comprend huit
clasae8;eQ égard à la population pour certaines autres
professions, mais d'après un tarif exceptionnel; sans avoir
égard à la population pour certaines grandes manufac-
tures, telles que les filatures, dont la patente est fixée en
raison composée du nombre d'ouvriers, de broches, de
machines, etc. Le droit proportionnel est ét&bli d'après
la valeur locative de l'établissement et d'après sa nature.
La nature de l'établissement détermine six catégories :
la 1^* paye le quinzième de la valeur locative de la mai*
son d'habitation seulement; la 2*, le vingtième sur la
maison d'habitation ; la 3«, la 4* et la 5*, le vingtième sur
la maison d'habitation et sur diverses parties de la mai-
son de commerce; la 6% le quarantième. Plusieurs pro-
fessions sont exemptes de tout droit proportionnel.
Les patentables ^ui exercent plusieurs commerces , in-
dustries ou professions, même dans des communes diffé-
rentes , doivent seulement la patente pour l'industrie, le
commerce, la profession qui donne lieu au plus fort droit
fixe. Sont exempts de tout droit de patente : les fonction-
naires publics, les professeurs et les instituteurs, les écri-
vains publics, les employés salariés, les artistes, les édi-
teurs de feuilles périodiques, les laboureurs et cultivateurs,
les concessionnaires de mines ou de marais salants, les pê-
cheurs, les sociétés en commandite, les caisses d'épargne,
les assurances mutuelles, certains marchands ambulants.
Aucune demande ne doit être faite en justice, aucun acte
extra-judiciaire ne doit être signifié, aucune obligation
notariée ne doit être souscrite, sans que l'officier public
qui en est chargé fasse mention de la patente du com-
merçant pour lequel il agit, ou sans mentionner qu'il
n'en a pas, & peine de 500 fr. d'amende.
La patente, qui a remplacé ce qu'on appelait sous Tan-
cienne monarchie les Aiaes ( V, ce mot dans notre Diction-
naire de Biographie et d'Histoire)^ fut instituée par la
loi des 2-17 mars 1791. Cette loi n'imposait qu'une con-
tribution proportionnelle au loyer des habitations, bou-
tiques , magasins et ateliers ; il n'y avait aucune distinction
de classes eu égard à la population des localités; aucune
demande ou défense en justice, aucun acte, traité ou
transaction en la forme auUientique, aucun enregistrement
d'acte sous seing privé, ne pouvaient avoir lieu sans pro-
duction de la patente; les contrevenants à la loi étaient
frappés d'une amende quadruple du prix de la patente,
et de la confiscation des marchandises; toute personne
patentée pouvait faire saisir les marchandises fabriquées
ou vendues par des non-patentés, et la moitié des confis-
cations ou amendes lui appartenait. Un timbre fut ajouté
à la patente par décret des 10-17 juin 1791. Le décret
des 17-20 septembre de la même année interdit l'énon-
ciation d'aucune profession sur la patente, dans la crainte
que cette mention ne ressemblât à une délimitation indi-
recte de la liberté d'industrie : il distingua seulement .
d'après l'élévation du droit, les patentes supérieures, qui
donnaient le droit d'exercer tous les états , les patentes
simples, et les demi-patentes , ces dernières appartenant
aux boulangers seulement. Un décret de la Convention,
des 20-21 mars 1793, supprima les droits de patente; ils
furent rétablis, pour le négoce ou commerce seulement ,
par décret du 4 thermidor an m (22 juillet 1795) , et tout
marchand ou négociant fut tenu, sous peine de confisca-
tion, d'afficher au devant de sa maison la nature de son
commerce; en même temps le droit proportionnel au
loyer fut transformé en un droit fixe, variable suivant
l'importance de la population. La loi du 6 fructidor an v
(23 août 1706) divisa les droits de patente en droit fixe et
droit proportionnel ; elle embrassa dans ses dispositions
non-seulement ceux qui exerçaient le commerce et l'in-
dustrie, mais encore diverses professions désignées dans
un tableau annexé, tels que les notaires, les architectes,
les officiers de santé, les dentistes, etc. ; elle exempta du
droit proportionnel le patenté dont le droit fixe ne s'éle-
vait pas à 40 fr. La loi du 9 frimaire an v (30 nov. 1705)
dispensa de la patente les citoyens travaillant chez eux^
pour le compte d'autrui , n'employant pas d'ouvriers , et'
n'exposant point en vente les produits de leur industrie.
Les lois du 11 germinal an v et du 7 brumaire an vi
(31 mars et 28 oct. 1797) eurent pour objet d'écarter ou
de prévenir les difficultés d'exécution des lois précédentes.
Ces lois furent coordonnées par une autre loi du 1*'' bru-
maire an vn (22 ocL 1798). L'arrêté du 26 brumaire
an X (19 nov. 1801) remit aux percepteurs le recc<i-
yrement de l'impôt des patentes, Jusoue-là confié aux
receveurs de l'enregistrement, et accoroa aux patentés la
faculté de se libérer par douzièmes, de mois en mois. La
loi du 13 floréal de la même année (4 mai 1802) ajouta
5 centimes par franc h l'impôt précédemment fixé, pour
former un fonds de dégrèvement et de non-valeurs. La lof
PAT
1388
PAT
éu 25 mars 1817 attribua aaz Conseils de préfecture le
iugement des réclamations des contribuables, et organisa
e droit fixe des fabriques et manufactures, sans égard k
la population. Une loi du 20 juillet 1837 ayant afiTranchi
les commerçants de Timpôt du timbre des livres de com-
merce, on ajouta 3 centimes par franc au principal de Ta
contribution de la patente. La loi des 25 ayril et 7 mai
1844 est notre règle aujourd'hui en matière de patentes.
Toutefois, la loi du 18 mai 1850 a soumis à la patente
eertaines professions que la loi de 1844 en avait affhm-
chies : telles sont celles des médecins, des chirurgiens, des
Tétérinaires, des notaires, avocats, agréés, avoués, huis-
siers, greffiers, commissaires-priseurs, maîtres de pen-
sion, lesquels payent un droit proportionnel, fixé au 15*
du loyer. F. Balmelle, Code des patentes, 1844 ; Lanier,
Tarif général des patentes, 1844; Laine, Manuel des pa-
tentés, Paris, 1845, inS\ L. et B.
PATENTE DE SANTÉ, passo-port et Certificat de santé qui
se délivre dans les ports de mer aux navires en partance.
La patente est nette, quand elle atteste que le b&timent
est parti d'un pays non infecté; brute, quand elle atteste
le contraire ; suspecte, lorsque le navire a rel&ché dans
un port ou communiqué avec des b&timents dont Tétat
sanitaire est douteux. Cest d'après les termes de la pa-
tente qu^on motive la libre admission du navire, ou qu'on
le met en quarantaine.
PATÈQUES, nom que les Anciens donnaient à des
figures de petits nains au corps trapu et au ventre proé-
minent, images des dieux Cabires. V, Morin, Sur les
Dieux patèques, dans le t. I*' des Mémoires de VAca-
demie des Inscriptions.
PATÈRE , coupe. K. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
PATÈRE, ornement en cuivre doré ou en bois, qui est
originairement à peu près de la forme d'une patère an-
tique, et sur lequel on tient écartés et drapés les rideaux
d*un lit ou d'une fenêtre.
PATERNELLE (Puissance). V. Père.
PATERNITÉ , état ou qualité de père. On distingue : la
paternité légitime, qui est la conséquence du mariage ; la
paternité naturelle, résultant de la reconnaissance d'un
enfant né d'une femme à laquelle on n'est attaché par
aucun lien légal ; la paternité civile, créée par l'adoption.
La paternité adultérine ou incestueuse existe de fait;
mais la loi ne la reconnaît ni ne la nomme. L'Église
admet une paternité spirituelle, espèce d'alliance qui se
contracte entre le parrain et le filleul ou la filleule. Le
Droit romain avait dit : Is pater est quemjustœ nuptiœ de-
monstrant, « Celui-là est le père, qui est désigné par des
noces légales. » Le Code Napoléon (art. 312] accepte cette
maxime, et lui donne plus de rigueur encore : « L'enfant
conçu pendant le mariage a pour père le mari. » Toute-
fois, la loi admet le Désaveu de paternité, si le mari
prouve une absence ou une impossibilité pendant un
temps suffisant, ou encore lorsqu'à la circonstance d'adul-
tère se joindrait le mystère qu'on lui aurait fait de la
naissance de l'enfant, ou enfin si l'enfant naît prématu-
rément dans le mariage, c-à-d. moins de 180 jours après
la célébration. Dans ce dernier cas, l'action en désaveu
ne serait pas admise, si le mari avait été averti avant le
mariage, ou s'il avait assisté à l'acte de naissance, ou si
l'enfant n'est pas déclaré viable. L'exercice du droit de
désaveu est circonscrit dans un délai très-court : si le
mari est sur le lieu de la naissance de l'enfant , le dés-
aveu doit avoir lieu dans le mois; s'il est absent, le délai
est de deux mois après son retour. Si on lui a fait mys-
tère de la naissance de l'enfant, le délai est aussi de deux
mois. Dans le cas où le mari mourrait pendant le délai
légal, les héritiers ont, pour exercer l'action en désaveu,
un dâai de deux mois, à partir du jour où l'enfant aurait
été mis en possession de l'héritage, ou do celui où il les
aurait troublés dans cette possession. Hors du mariage, la
recherche de la paternité, permise par notre ancienne
législation et par les lois de quelques peuples modernes,
est absolument interdite (Code NapoL^ art. 340). \\ De-
molombe. De la Paternité et de la FilicOion, in-8^
PATHELIN. V, Patelin.
PATHÉTIQUE. V. Passions,
PATHOS ( du grec pathos, passion), fut employé pri*
mitivement par les rhéteurs, en opposition avec ithos,
qui veut dire moeurs, pour désigner les mouvements et
les passions qu'on s'efforce d'exciter dans l'àme des audi-
teurs. L'abus de ce moyen oratoire finit par ridiculiser le
mot et le faire prendre en mauvaise part : il n'exprime
plus qu'une chaleur affectée, un enthousiasme factice et
ridiciue. En 1672, quand Molière donna sa comédie les
Femmes savantes, il fit dire, en forme d'éloge, par le p6
dant Vadius au pédant Trissotin (HI, 5) :
On voit partout chez tous VWtos et le pathos,
ce qui prouve que le mot avait perdu sa signification sé-
rieuse.
PATIENCE (du latin pati, souffrir), vertu qui consiste
à supporter sans murmure les incommodités de la vie,
la douleur, l'injustice, les adversités de toute sorte. Les
Stoïciens ramenident toute la morale à ce seul précepte :
Sustine (supporte), et le Manuel d'Épictète n'est qu'une
lon^e leçon de patience. Le christianisme a donné à la
patience, sous le nom de résignation , un caractère plus
élevé, en présentant les maux de cette vie comme une
épreuve salutaire, comme un mérite auprès de Dieu.
patience. V. Stalle.
patience (Jeu de). V. Gasse-téte.
PATIENCE , combinaison quelconque d'un Jeu de csrtes,
au moyen de laquelle une personne seule arrive à un ré-
sultat qu'elle s'esi proposé.
PATIENCE RUSSE. V, NiGADD.
PATIENT, terme de l'ancienne musique. V, Agett.
PATIN (du grec patéin, marcher?), nom d'une sorte
de soulier dont la semelle était fort épaisse , et que les
femmes prenaient pour se grandir : cette mode était da
temps de Louis XIV, et c'est sans doute pour cela que
Dancourt , dans sa comédie le Chevalier à la mode, jouée
en 1687, a nommé une bourgeoise ridicule et coquette
3/nie Patin; — chaussure supportée par un cercle de fer
et par deux petits montants , et destinée à préserver les
pieds de toute humidité; — forte semelle de bois, avec ou
sans charnière, et sur laquelle était cloué jusqu'à la
moitié un chausson de laine. — On appelle plus partico-
lièrement Patins une chaussure dont on se sert pour
glisser sur la glace : elle est formée d'une semelle de bois,
au milieu et dans toute la longueur de laquelle est fixée
une lame d'acier droite au talon et recourbée à la pointe;
elle se fixe sous chaque pied à l'aide de courroies et de
boucles. C'est par préjugé qu'on a dit que le patin est
l'exercice des gens du Nord ; dans les régions septentrio-
nales, le sol , encombré de neiges, n'est accessible qu'aux
traîneaux : on y patine peu et mal , et le patinage ep
quelque sorte commercial , (jui a pour but de pourvoir
aux nécessités de la vie, n'a nen de commun avec l'exer-
cice auquel se livrent les patineurs aux États-Unis, en
Angleterre, en Hollande, en Russie, en France, etc. Il en
est de même des évolutions auxquelles certains soldats
norvégiens se livrent sur la glace, à l'aide de deux plan-
chettes de sapin fixées à leurs pieds, et en s'appuyant sur
un long pieu armé de fer. L'art du patin , comme on le
pratique par plaisir, a des adeptes fort habiles : on les
voit simuler les figures de la danse, tourner avec adresse
et rapidité, écrire sur la glace toutes les lettres de l'al-
phabet , dessiner des oiseaux, des portraits, etc. En 1819,
on inventa des patins où la lame d'acier était remplacée
par trois roulettes de cuivre ; malgré des essais heureux
sur les boulevards et dans différents jardins de Paris, ce
genre d'amusement n'a pas eu une longue faveur. Plus
tard, deux artistes chorégraphes, les époux Dumas, se
servirent de patins à roulettes sur la scène du théâtre de
la Porte-S*-Martin. Cette épreuve a été renouvelée en
grand à l'Opéra de Paris, dans le ballet des patineurs du
Prophète, opéra de Meyerbeer. B.
PATIN , en termes de Charpenterie, pièce de bois posée
de niveau sur une assise de pierre et servant de base à
^ charpente d'un escalier. — Dans l'Architecture hydrao*
lique, on nomme patins les pièces de bois que l'on couche
sur des pieux dans les fondations où le terrain n'est pas
solide, et sur lesquelles on assure des plates-formes pour
bâtir dans l'eau.
PATINE. V. Bronze.
PATISSIERS. Les cabaretiers, traiteurs, et rôtisseurs,
qui donnaient à manger chez eux, vendirent d'abord b
Î&tisserie, et X/)uis IX leur donna des règlements en
270. Mais, en 1567, les pâtissiers furent mis en commu-
nauté particulière, dans laquelle on distin^a les ou-
blayeurs ou fabricants d'oubliés, et les pâtissiers de pain
d'épice. L'apprentissage fut de 5 ans pour les premiers,
de 4 ans pour les seconds. La corporation avait pour pa-
tron S^ Michel. Jusqu'à la fin du xvni^ siècle, les pâtis-
siers eurent à leur porte des lanternes vives, sortes de
falots fermés et transparents, ornés de figures grotesques.
PATOIS, mot d'étymologie inconnue, ({ui désigne le lan-
gage du peuple et des paysans particulier à chaque prtr-
vince de France ou à chaque sous-division des diverses pro-
PAT
1389
PAT
vir.cGs.Les patois principaux' dont on retrouve aujourd'hui
des traces importantes sont : au nord, le wallon, le lorrain^
le champenois, le picard, le normand ; à Test , le franc-
comtois et le bourguignon ; ils sont des rameaux de la
\ang\ke d^oU ( V, ce mot). Au centre, le poitevin, Vauver-
qnai, le limousin, le périgourdin; au midi, le dauphi-
nois, le provençal, le languedocien, le gascon, le béar-
nais, sont les principaux débris de Tancienne langue d'oc
[V, ce mot). Les patois tendent à disparaître, gr&ce à la
facilité toujours croissante des communications entre
Paris et les départements. Les progrès lents, mais conti-
nuels, de la centralisation sous l'ancienne royauté, Tin-
fluence des gouverneurs envoyés dans les provinces,
avaient refoulé peu à peu dans le tiers-état les langages
locaux, tandis que Taristocratie et même la partie éclairée
de la bourgeoisie adoptaient le langage parisien : Torga-
DÎsation de la France depuis la Révolution , la suppres-
sion des provinces féodales, renvoi de fonctionnaires
essentiellement temporaires dans les nouvelles circon-
scriptions administratives, pour Tordre politique, mili-
taire, judiciaire, industriel , ou pour renseignement pu-
blic; la concentration à Paris des principales écoles
couvernementales et des examens dans les diverses
branches du haut enseignement, enfin rétablissement
des chemins de fer, tout cela a porté aux patois des coups
décisifs. Ils s^effaceront partout devant l'inévitable domi-
oation de la langue française, qui dès aujourd'hui est au
moins comprise sur presque tous les points du territoire.
11 n'y a plus que dans les campagnes écartées des grands
centres de population que les patois se maintiennent
encore.
La connaissance des patois est précieuse et souvent in-
dispensable pour l'intelligence complète de la langue
française, et surtout de ses irrégularités : elle est d'un
secours très-puissant pour comprendre les écrivains du
moyen âge et ceux du xvi* siècle. Les patois nous donnent
aussi la clef d'une foule d'étymologies, qui souvent sans
cela demeurent fort obscures. Ainsi , le nom bourguignon
ba\s nous explique comment baisser existe à côté de l'ad-
jectif bas; gremde (du latin grandis)^ en picard, nous
explique le comparatif greindre ou greinior, greignor, de
nos écrivains du moyen âge. Le mot ramon du même
dialecte (un balai 1 nous révèle Tétymologie du nom ra-
moneur et du verne ramoner, La préposition dins rap-
pelle mieux que dans l'étymologie latine de-in. Elle feime
(la femme) est une trace de l'origine de l'article français
IV. Articlb^, et le second mot nous explique comment
femme rimait au moyen &ge avec aime.
V, Champollion-Figeac , Nouvelles recherches sur les
patois ou idiomes vulgaires de la France, Grenoble, 1809,
in-12; Mélanges sur les langues^ dialectes et patois, ex-
traits des Mémoires de la Soctété des Antiquaires de
France, \ voL in-S" ; Bottin , Recherches sur les patois^
1^3; Peignot, Essai sur V origine de la langtie fran-
çaise, 183a ; Schnackenburç, Tableau synoptique et com-
paratif des idiomes vulgaires ou patois de la France,
Berlin, 1840; Pierquin de Gembloux, Histoire littéraire
ft philologique , et bibliographie des patois français,
Paris, 184i, in-8®; Escallier, Remarques sur le patois,
1857, Douai, i voL gr. in-8». P.
PATOLA , instrument de musique des Birmans. C'est
une sorte de guitare, qui a la forme bizarre d'un alligator.
PATOUILUS , instrument de musique, le même que le
daque-bois ( F. ce mût),
PATRAT. )
PATRIARCHES. ( V. ces mots dans notre Dictionnaire
PATRICKS. i de Biographie et d'Histoire.
PATRICIENS. J
PATRIE, pays où Ton a vu le jour, où sont les proprié-
tés, les traditions, les affections et les espérances de la
famille, où se groupent des familles alliées par la com-
munauté d'origine, de mœurs, de religion, et des com-
munautés unies par les mêmes droits, les mêmes de-
voirs, la même législation.
PATRIMES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et ^Histoire.
PATRIMOINE (du latin palrimonium)^ ensemble des
biens qui viennent de la famille, et spécialement du
père ou de la mère. Dans notre ancien Droit, les biens
provenant de succession de famille portaient le nom de
rropres (et l'on disait le Propre paternel, le Propre ma~
ternel)x ceux qu'on acquérait par son industrie person-
nelle s'appelaient Acqiiéts, On nomme aujourd'hui Sépa-
ration des patrimoines l'opération judiciaire qui a pour
objet d'empêcher que les biens composant une succession
œ se confondent avec ceux de Phéntier qui l'a recueillie
et que les créanciers personnels de cet héritier ne soient
payés sur les biens de la succession au préjucûce des
créanciers et des légataires du défunt. Cette opération est
réglée par le Code Napoléon (art. 878-881 ). V, Blondeau,
Traité de la séparation des patrimoines, considérée à
Végarddes immeubles, 1840, in-8<^; Dufresne, Traité de
la séparation des patrimoines, suivant les principes du
Droit romain et du Code civil, 1842, in-8**.
PATRIOTISME, sentiment qui consiste non-seulement
dans l'amour de la patrie, du pays et de la nation aux-
quels on appartient par sa naissance, mais dans la subor-
dination et le sacrifice de l'intérêt particulier à l'intérêt
général. Ce sentiment peut être poussé jusmi'à la super-
stition, jusqu'au fanatisme. Plus les individus possèdent
d'occasions de prendre part aux affaires publiques, plus
le patriotisme a d'éléments de développement : mais il
n'est pas vrai qu'il soit exclusivement inhérent à telle ou
telle forme de constitution politique.
PATRISTIQ13E ou PATROLOGIE, nom donné en Alle-
magne, et quelquefois en France, à la connaissance des
ouvrages et des doctrines des Pères de l'Église.
PATRON, mot qui , sans parler des acceptions qu'il eut
dans l'ancienne Rome et au moyen ftge (V. Patron,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire)^
s'appli^e : 1** au saint dont on porte le nom , ou sous la
protection duquel on s'est placé; ^^ à tout homme qui
remplit envers quelqu'un le rôle de protecteur; 2^ au
maître, par rapport a ses ouvriers; A^ au commandant
d'un canot, d'une chaloupe ou d'un très-petit bâtiment;
5® au modèle d'après lequel travaillent certains artisans,
et qui figure les différentes parties de leurs ouvrages.
PATRONAGE (Sociétés de), sociétés de bienfaisance
qui enveloppent en quelque façon l'individu pauvre et
souffrant, l'accompagnent et le soutiennent parmi les si-
tuations les plus diverses, et lui constituent comme une
nouvelle famille. Le patronage ne saurait être exercé par
l'administration publique, laquelle ne peut remplacer le
zèle de la charité privée. 11 s'est formé des sociétés de
patronage pour les apprentis, les jeunes ouvrières, les
orphelins, les jeunes détenus, etc.
PATRONYMIQUES (Noms), (du ^cecpatér, père, et
onoma, nom); substantifs propres à la langue grecque,
qui désignent, à l'aide d'un suffixe particulier, un fils ou
une fille, et qui sont dérivés des noms propres du père et
quelquefois de la mère. Ils sont terminés en C2tic, (ci>v,
iâ2Y)ç, eCfiYic, àdYi(;, b>v8aCf pour le masculin ; en uic, {;,
CvY), covY], pour le féminin (quelquefois en âç et en Ixi;).
Les noms patronymiques, surtout les masculins, ne s'ap-
pliquent pas seulement au fils, mais à toute la descen-
dance: ainsi, le nom d'Êaoide a été souvent donné à
Achille, petit-fils d'Éaque, et à Néoptolème ou Pyrrhus,
son arrière-petit-fils. Certains noms propres ont la forme
patronymique, sans en avoir, du moins en apparence, la
valeur réelle : tels sont Miltiade, Caméade, Aristide, Eu-
ripide, Simonide, Léonidas, Brasidas, Plulippide, etc.; il
est toutefois vraisemblable que ces noms ont été patro-
nymiques dans l'ori^ne, car il y avait des personnages
du nom d*Aristée, Simon, Léon, Philippe, etc. La termi-
naison ifieuç, qui s'appliquait aux petits des animaux dont
le nom est masculin, et la terminaison iç aux petits de
ceux dont le nom est féminin, peuvent être considérées
comme patronymiques; il y en a d'ailleurs fort peu
d'exemples. On peut également rattacher ces mots à la
classe des diminutifs, comme l'indiquent les suflSxes iSiov
et lov , qui ont généralement une valeur diminutive. —
La langue latine n'a point de noms patronymiques qui
lui soient propres : elle s'est approprié presque tous ceux
qui sont employés dans les poèmes grecs, et en a formé
par imitation quelques-uns qui ne sont que des syno-
nymes du nom de famille (Memmiadès et Scipiadès,
pour Memmius et Scipio), ou même d'un nom de peuple,
tels que ^neadœ pour Trojani, Romulidœ pour Romani
(proprement fUs d'Énée, de Romulus)^ à peu près comme
les Hébreux disaient les fUs d'Israël ou de Jacob pour
se désigner eux-mêmes, et comme nous disons les fus de
Danaiîs pour traduire le mot AovooC des poèmes homé-
riques. — La langue française est tout à fait impropre à
former des noms patronymiques à l'aide d'un suffixe
particulier. Nous avons emprunté quelcpies-uns des noms
grecs, comme les Atrides, les Héracltdes, les DanaJides,
les Pélopides, les Séleucides, les Lagides, les Sassa-
nides. Les seules traces de noms patronymiques que l'on
trouve chez nous sont les noms de dynasties, comme Mé»
rovinaiens (descendants de Mérovée), Carlovingiens ou
Carolingiens (descendants de Cari ou Charles)^ Capé^
tiens (descendants de Capet). Au reste, si les noms pa-
PAU
1390
PAU
tronymiques sobt rares en latin , et impossibles en fran- |
çais, on peut dire qu'ils y sont en môme temps inutiles,
puisqu'en France, comme autrefois à Rome, le père
transmet son nom de famille à tous ses enfants, ce qui
n'avait pas lieu en Grèce, où il était fort naturel qu*Atrée
fût surnommé Pélopide ou flls de Pélops, Agamemnon et ,
Bld'nélas Atrides ou enfants d*Atrée, etc. P.
PATROUILLE (de patrouiller, agiter Teau, marcher
dans la boue], marche nocturne exécutée par des hommes
de garde, suivant un itinéraire déterminé, dans le but
d'obserrer ce qui se passe, de prévenir ou de réprimer
tout désordre. Le nom de Patrouille s'applique égale-
ment audétachement qui fait cette ronde.
PATTÉE, nom donné jadis à la portée do quatre lignes
du Plain-Chant, parce qu'avant rimprimerie on la traçait
avec une plume à quatre pieds faite en forme de patte.
PATURE (Vaine). V. Parcours.
PAU (Ch&teau de). Ce château, dont la phjrsionomie
féodale a été profondément altérée par des restaurations,
e&t situé à l'extrémité occidentale de la ville, sur un rocher
ILaillé à pic, et présente une réunion de tours liées par des
bâtiments plus modernes. Il fut entièrement reconstruit
par Gaston Phœbus en 1350. On y arrive par un pont
étroit; après avoir passé sous une longue voûte, on entre
d-ms une cour de forme irrégulière, autour de laquelle
sont groupées les différentes parties de l'édifice : à gauche
est une tour massive et carrée en briques, dont l'inté-
rieur ne reçoit de Jour que par de longues et étroites
meurtrières ; à droite est un beau puits, de 50 met. de
profondeur. Au Nord s'élève la tour Alontauzet. de forme
carrée, haute de 30 met., et où il n'a existé, durant des
siècles, qu'une ouverture sur l'une des faces, à 13 met.
du sol : on présume que cette tour, dont la partie sou-
terraine renfermait de petites cellules pratiauées dans
l'épaisseur des murailles, a dû servir d*ouoliettes, et
qu'on y descendait les malheureux destinés à périr, à
l'aide a*ane corde et d'une poulie dont on croit voir le
f^oint d'attache sur une poutre transversale. C'est dans
'aile méridionale que naquit Henri IV : cette partie du
ch&teau est ornée avec tout le luxe de la Renaissance; on
admire surtout plusieurs tapisseries des Gobelins, la salle
à manger, la chapelle ornée de vitraux, et le grand esca-
lier, dont la voûte, les parois et la rampe sont sculptées
eu rosaces, losanges, chiffres, entrelacs et médaillons.
On montre la carapace de tortue qui servit de berceau à
Henri IV.
PAUL (Église de Saint-) , à Londres. Deux églises pré-
cédèrent le monument actuel. L'une, élevée par l'ordre
d'Éthelbert, roi de Kent, fut incendit^e en 1083; l'autre,
dont la construction dura de 1086 à 1312, perdit en 1561
par un coup de tonnerre la flèche de iOO met. qui la
surmontait, et périt tout entière dans l'incendie de 1666.
L'église moderne, que les Anglais ont trop ambitieuse-
ment comparée à S^Pierre de Rome, à S^*- Marie de Flo-
rence, et à S^*-Geneviève de Paris, a été b&tie de 1675
à 1710 par Christophe Wren. Elle est entourée d'un mur
à hauteur d'appui, sur lequel est scellée une très-belle
grille de fer ; l'espace qui existe entre ce mur et l'église,
et où l'on voit une statue de la reine Anne par Bird, est
appelé le Cimetière. Le plan de la cathédrale de S^-Paul
est en forme de croix latine, dont le grand bras est long
de 152 met., et le petit de 68. La nef centrale a 33'",50 de
hauteur. La grande façade occidentale a un développement
de 54",85. Le portique, auquel on monte par 22 marches
de marbre noir, est composé de 12 colonnes corinthiennes
accouplées; un second portique, de 8 colonnes compo-
sites, s'élève sur le premier. Le fronton contient un bas-
relief de Bird, représentant la conversion de S^ Paul ; au
sommet se dresse une statue colossale de ce saint, et, sur
les côtés, les statues de S* Pierre, de S^ Jacques et des
quatre Évangélistes. Deux tours s'élèvent à droite et à
gauche du portique ; elles sont terminées par de petits
dûmes surmontés d'une pomme de pin dorée : celle du
Sud renferme l'horloge, celle du Nord le beffroi. Â cha-
cune des extrémités du transept est un portiG[ue demi-
circulaire, éclairé par une voûte que soutiennent 6
colonnes d'ordre corinthien, et surmonté de statues
représentant les Apôtres. Le fronton latéral du Nord re-
présente les armes d'Angleterre soutenues par des Anges.
Les murs latéraux de rédiflce sont ornés de deux ran-
gées de pilastres ; ceux du bas sont d'ordre corinthien,
et ceux du haut, d'ordre composite : l'intervalle entre les
1)ilastres est occupé par des lenètres. On bl&me génén^
ement l'assemblage des deux ordres corinthien et com-
posite, parce Qu'ils ont une égale importance. Il on est
de même de U multiplicité des vides, qui rompt les
lignes architecturales, détruit l'effet du la perspective, et
altère l'unité de l'ordonnance. A l'inu^r^ection de la nef
et du transept, s'élève jusqu'à une hauteur de 110 met.
un dôme assez majestueux. Il repose sur un soubasse-
ment de 6"*,50 de hauteur, et est entouré de'32 colonnes
corinthiennes : les entre-colonnes, de quatre en quatre,
sont remplis de maçonnerie, pour caclier les arcs-bou-
tants et les pieds-droits de la coupole, et servir de niches
d'ornement. L'entablement de la colonnade soutient une
galerie entourée d'une balustrade, et sur cette galerie
s'appuie un attique orné de pilastres et de fenêtres.
Enfin, l'entablement de cet attique donne naissance à U
coupole, près du sommet de laquelle règne une autre
galerie; du milieu de celle-ci s'élève la lanterne, en-
tourée de colonnes corinthiennes, et surmontée d'une
boule de 2 met. de diamètre sur laquelle est plantée une
croix dorée.
Toute la nef de la cathédrale de S'-Paul est pavée de
pierres blanches et noires, lesquelles, aux abords du
maltre-autel, sont entremêlées de porphyre. Autour de
cette nef sont suspendus des drapeaux conquis par les
armées de terre et de mer. Les peintures de la coupole,
représentant des scènes de la vie de S^ Paul, sont de
James Thornhill. Le jubé, en fer ciselé, supporte l'orsue.
Dans le chœur on remarque 30 stalles, sculptées par Gib-
bons. La chaire et le pupitre du clerc sont aussi d'une
grande beauté. Un assez grand nombre de statues déco-
rent l'intérieur de S^-Paul ; les plus dignes d'attention
sont celles de John Howard et du D' Johnson par Bacon,
de l'évëque Hebcr par Chantrey, de Reynolds par Flax-
man, qui est aussi l'auteur du monument élevé à la mé-
moire de Nelson. V, Aikin, Plans, élévations.., of the
cathedrai church of S^-Paul^ Londres, 1813, in-4'. B.
PAULBTTE. y. ce mot dans notre Dictionnaire dt
Biographie et d'Histoire.
PAUME, Jeu de balle dans lequel , en un lieu préparé
exprès, les joueurs se renvoient une balle avec la paum;
de la main ou un gantelet, avec une raquette ou un bat-
toir. La longue paume est celle à laquelle on joue dans
un long espace de terrain ouvert de tous côtés; la courte
paume ou trinquet est celle à laquelle on joue dans un
carré long, fermé de murailles, et souvent couvert —
Le jeu de paume remonte à la plus haute antiquité : les
Grecs l'appelaient Sphéristique, et les Romains Pila. Hé-
rodote en attribuait l'invention aux Lydiens. Il est fait
mention de ce Jeu dans V Odyssée (ch. vi et viii]. Cn
France, on s'v adonna depuis le xv* siècle, et il n y eut
presque pas de quartier à Paris qui n'eût son Jeu de
courte paume. On avait joué d'abord avec la main nue,
puis avec des gantelets ; la raquette parut sous Henri lY.
La paume perdit une partie de sa vogue à partir de
Louis XIII, tout en se maintenant à la cour et chez les
grands ; elle est à peu près abandonnée aujourd'hui.
Néanmoins, l'Empereur Napoléon III a fait construire
pour lui, en 1861, un Jeu de paume dans le Jardin des
Tuileries, à l'extrémité occidentale de la Terrasse des
Feuillants. B.
PAUMIERS, ancienne corporation d'artisans qui fabri-
quaient et vendaient les balles, raquettes et autres instru-
ments servant au jeu de paume. L'apprcntissa^ était de
3 ans; le brevet coûtait 30 livres, et la maîtrise COO.
S^* Barbe servait de patronne aux Paumiers.
PAUPÉRISME, mal social qui consiste en ce qu'un
certain nombre d'hommes ne peuvent pourvoir à leur
nourriture et à leur entretien sans recourir à l'assistance
publique. Le mot est d'origine récente, mais la chose est
fort ancienne, et ce serait une erreur de croire que le
paupérisme est un vice inhérent à l'organisation écono-
mique et industrielle des temps modernes. Si l'on en
cherche les origines dans l'antiquité, il ne faut pas trop
se préoccuper de l'esclavage : car l'esclave, qui était une
valeur que le maître avait intérêt à conserver, n'était gé-
néralement pas voué à une misère complète. Mais le tn-
vail servile faisait une concurrence terrible au travail
des hommes libres : ce fut aux besoins de ces derniers
que l'État dut pourvoir. A Athènes, où l'on professait ce
principe, qu'aucun citoyen ne devait être nécessiteux, le
trésor public, alimenté en grande partie par les alliés et
les vaincus, fut employé non-seulement pour les besoins
collectifs de la population, mais encore pour les dépenses
de chaque particulier : la libéralité dont les citoyens
usaient envers eux-mêmes multiplia le nombre des im-
prévoyants et des oisifs, et , depuis le temps de Périrlès,
tous ces hommes devinrent autant de rentiers de TÉtat,
que l'épuisement des revenus publics après la guerre da
Péloponèse réduisit à la plus profonde misère. H fallut
P\U
1391
PAU
éublir ane véritable taxê aes patwres, — Le paupérisme
Êrit une extension effrayante dans le monde romain,
l'une part^ une aristocratie implacable exploitait par
l'usure ces pauvres plébéiens, désignés par le nom de
prolétaires, comme s'ils ne devaient avoir d'autre desti-
née que de donnei des enfants à la patrie, et les mettait
dans la nécessité de lui tendre la main ; de Tautre, l'ha-
bitude de vivre aux dépens des nations vaincues détour-
nait les citoyens des voies régulières du travail. Le sys-
tème des distributions gratuites de blé, et quelquefois de
rin et d'huile, devint permanent, et toute une population
le trouva ainsi, pour ses besoins journaliers, à la merci
d'un petit nombre de familles opulentes. Un tel système
ne pouvait qu'aboutir à un appauvrissement universel :
eu effet, dans les derniers temps de l'Empire, la misère
était devenue eff'royable; les pauvres augmentaient à pro-
portion des affranchissements provoqua par renseigne-
ment chrétien ; ils accouraient vers Rome dans les mo-
ments de disette, et, repoussés avec dureté, mouraient
par milliers alentour. Les sociétés antiques ont donc
connu le paupérisme, et l'on peut dire que ce mal y fut
plus grave que chez les modernes, parce (}ue la pauvreté
n'était pas le fait de circonstances exceptionnelles, mais
le résultat de l'organisation sociale elle-même. Ce qui
caractérise le paupérisme moderne, c'est la concentration
de la misère dans certaines localités et chez certaines ca-
tégories sociales ; d'où résulte la formation de foyers où
la d^énération physique et morale de l'espèce humaine
a fait des progrès effrayants. Mais les mesures prises
contre la mendicité (K. ce mot)^ concertées avec les pra-
tiques de l'assistance {V. ce mot)^ ont été un frein
presque toujours suffisant pour arrêter le débordement
du paupérisme. Certaines révolutions économiques, cer-
taines crises industrielles, amènent des perturbations;
mais elles sont passagères. Si le paupérisme s'est déve-
loppé en Angleterre plus que dans les autres pays
{Y. Taxe des pauvres, dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire)^ il faut l'attribuer aux institutions
politiques, qui ont concentré la puissance et les capitaux
dans les mains d'une aristocratie; au climat, dont les
rigueurs augmentent les besoins des populations; aux
habitudes que crée une grande prospénté industrielle, et
aux privations qui peuvent résulter pour les travailleurs,
soit d'une concurrence nouvelle, soit d'un temps d'arrêt
dans la production ; mais ces causes sont susceptibles
de se modifier avec le progrès des institutions et des
mœurs.
Il est très-difficile de déterminer dans une société la
limite où commence l'indigence, et, par conséquent,
retendue du paupérisme : l'indigent de nos villes, avec
une dose de bien-être plus grande que l'habitant des
campagnes, est en réalité plus misérable, et on peut le
regarder comme riche en comparaison du sauvage; la
pauvreté de l'ouvrier anglais serait, pour beaucoup d'Ir-
landais, presque de l'opulence, tandis que l'aisance de
l'ouvrier français serait pour beaucoup d'Anglais presque
an dénùment. Necker, le premier qui ait donné des ren-
seignements statistiques sur la misère en France, évaluait
& 7,000 le nombre des mendiants enfermés dans les dé-
pit$, à 110,000 celui des malheureux recueillis dans les
iiôpitaux publics et dans les établissements de la charité
privée, à 6,000 celui des malades admis dans les hôpi-
taux militaires; il comptait, en outre, 40,000 enfants
trouvés, 40,000 infirmes ou vieillards présumés hors d'état
de gagner leur vie, 25,000 malades secourus à domicile.
La Rochefoocauld-Liancourt, rapporteur d'un comité que
l'Assemblée constituante avait chargé de proposer des
mesures pour l'abolition de la mendicité, estima la po-
pulation souffrante à 3,248,691 individus, ainsi décom-
posés: infirmes et vieillards, 804,775; pauvres valides,
515,362; enfants de pauvres au-dessous de quatre ans,
1,886,035; malades, 42,519. D'après Barrère, en 1794, la
proportion des indigents était de 5 pour 100. Fourcroy la
portait, en 1809, à 7 pour 100. En 1819, elle était, selon
Laborde, de 2 1/2 p. 100, tandis que De Morogues l'éva-
luait à 6, De Gérando à 20 dans les villes et à 2 dans les
campagnes, Balbi seulement à 3. En 1829, Villeneuve-Bar-
gemont adoptait le chiffre de 5 pour 100, et Schoen celui
de 14. Toutes ces divergences attestent les incertitudes de
la question. — En 1847, M. de Watteville, dans un Rap-
port sur V administration des bureaux de bienfaisance et
sur la sitiMtion du paupérisme en France, a constaté
les faite suivante : 1,329,659 individus, formant 483,681
familles, étaient inscrite sur les contrôles des bureaux de
bienfaisance, ce qui donnait la proportion de 1 indigent
âur 12 habitante, c-àni. 8 pour 100. Les départemente
du nord comptaient 1 indigent sur 9 habitants; ceuxide
l'est, 1 sur i4; ceux de l'ouest, 1 sur 11; ceux du sud,
1 sur 18; les départemente de la frontière de terre, 1 sur
8; ceux des frontières maritimes, 1 sur 10; les départe-
mente manufacturiers, 1 sur 8 ; les départemente agri-
coles, 1 sur 14. Certains départements étaient favorisés:
le Var, par exemple, n'avait que 1 indigent sur 42 habi-
tante ; les Landes, 1 sur 38 ; Seine-et-Marne, 1 sur 37 ;
Tarn-et-Garonne, 1 sur 32 ; l'Yonne, 1 sur 30, etc. Mais
il en était d'autres d'une situation plus sombre : le Nord,
1 sur 5; les Côtes-du-Nord, 1 sur 6; le Pas-de-Calais et
rille-ct-Yilaine, 1 sur 7 ; l'Aisne, 1 sur 8 ; la Somme,
l'Orne, la Sarthe, 1 sur 9, etc. Plusieurs communes,
telles que Vitré (llle-et-Viiaine) et Ârmentières (Nord),
avaient 1 indigent sur 2 habitante.
A Paris, on comptait 1 indigent sur 12 habitante, à
Lyon 1 sur 10, à Marseille et à Bordeaux 1 sur 7, à Rouen
1 sur 3i, à Toulouse 1 sur 33, à Nantes et à Strasbourg
1 sur 8 , à Lille 1 sur 3. En prenant pour base les listes
des bureaux de bienfaisance, M. de Watteville n'a fait ses
calculs que pour la population à laquelle ces institutions
s'appliquent ; mais le chiffre des indigents doit être moins
élevé dans les localités où l'on n'a pas Jugé utile de créer
des éteblissemente charitables. M. de Watteville porte le
nombre des mendiante à 337,838, dont 242,907 domici-
liés, et 94,871 livrés au vagabondage : la moyenne est de
1 mendiant sur 104 habitante pour 63 départemente;
23 départemente sont au-dessus. Dans le nord de la
France, on compte 11 mendiante sur 62 habitants; dans
l'est, 1 sur 181 ; dans l'ouest, 1 sur lOi) ; dans le centre,
1 sur 122 ; dans le sud, 1 sur 130. Il n'y a pas de men-
diante dans le Doubs et le Loiret; tandis que la Charente
en compte 1 sur 1,214 habiUnts, Indre-et-Loire 1 sur
1,069, les Bouches-du-Rhône 1 sur 917, Seine-et-Oise
1 sur 663; il n'y en a que 1 sur 49 dans la Manche, 1 sur
38 dans le Nord, 1 sur 26 dans la Somme, 1 sur 22 dans
le Pas-de-Calais, etc. Dans les départements manufactu-
riers, il y en a 1 sur 71 habitante; dans les départements
agricoles, 1 sur 111. — Paris en compte 1 sur 397, Lyon
1 sur 542, Marseille 1 sur 1,429, Toulouse 1 sur 810, Liile
1 sur 307.
Gerteins philanthropes ont donné au paupérisme des
proportions alarmantes : il semblerait, à les entendre,
que la prospérité sociale, le repos du monde et la civili-
sation elle-même seront en péril dans un avenir plus ou
moins prochain. Ils allèguent l'exemple de l'Angleterre,
où la taxe des pauvres s'est toujours accrue : mais cet
accroissement a été la suite, non pas d'une augmentation
dans le nombre réel des nécessiteux, mais la conséquence
des erreurs commises dans l'application des lois sur les
pauvres; la taxe était devenue, pour ceux qui en profi-
taient , un supplément au salaire , au lieu d'être un se-
cours dans les besoins urgente. Après la réforme des lois
sur les pauvres en 1834, le nombre des indigente prenant
part à la taxe diminua de plus de moitié, et l'on obtient
toujours de semblables effete en maintenant des restric-
tions fermes aux secours publics. Le paupérisme ne fait
pas d'autres progrès que celui qui résulte naturellement
d'une augmentetion de la population générale. Le nombre
des indigente inscrite aux secours publics a diminué, à
Paris, de près de moitié en 50 ans, quoique la population
de cette cité ait presque doublé. La mendicité a disparu
dans plusieurs Étate, et elle est fort diminuée dans quel-
ques autres. Les pauvres eux-mêmes sont , en général ,
mieux vêtus et mieux nourris. Enfin, ce qui établit d'une
manière frappante une réduction progressive de la masse
de la misère, c'est l'abaissement progressif et général de
la mortalité, la prolongation de la vie moyenne.
Divers remèdes ont été proposés contre le paupérisme t
les utopies socialistes, qui préconisent une or^nisaticn
fondée sur la négation de la propriété ou de la famille, ou
de la liberté du travail , conduiraient à une misère uni-
verselle et à la dissolution de la société (F. Sociaushe).
L'intervention de l'Étet est insuffisante et souvent dange-
reuse {V, CoARiré LÉGALE ). L'idée de faire refluer vers
l'agriculture les travailleurs et les capitaux que l'industrie
manufacturière en a détournés, séduit beaucoup d'esprite^
mais les moyens de la réaliser sont encore à découvrir.
Le problème du paupérisme n'est pas résolu : il faudrait
peut-être en chercher la solution dans une certaine action
a exercer, par la loi ou autrement, sur les dispositions
morales et sur les habitudes de la classe ouvrière, et dans
une certaine manière de pratiquer la charité envers les
indigente. V. De Morogues, Du Paupérisme et de la
merâicitéy Paris, 1834; P. Schmidt, Essais sur lapopu^
lotion, les salaires et le paupérisme, en allem., Leipzig,
PAV
13ft2
PAV
1836; Eug. Buret, De la misère des classes laborieuses en
Angleterre et en France, Paris, 1840, 2 vol. in-8®; Mo-
reau-Gliristophe, Du problème de la misère et de sa solU'
tion chez les peuples anciens et modernes, 3 vol. in-8®;
Bécbard, Le Paupérisme en France, 1853; Gberbulliez,
Études sur les causes de la misère et sur les moyens d'y
porter remède, 1853; E. Laurent, Le Paupérisme et les
associations de prévoyance, 1860, in-8**.
PAUSE (du grec pausis^ venant de pauô, faire cesser),
en termes de Musique, signe de silence pendant une
mesure. 11 est figuré par un trait épais placé horizonta-
lement sous la 4* ligne de la portée. Daiis une mesure à
quatre temps, la pause est le silence d*une ronde; la
demi-pause, figurée par un gros trait au-dessus de la
3* ligne de la portée, est le silence d'une blanche, mais
ne s'emploie que dans cette mesure. Si le silence doit se
{)rolonger pendant un certain nombre de mesures , on
'indique par un chiffre au-dessus de la pause, ou Ton se
sert de grosses barres verticales qui signifient 3 ou 4
pauses et que Ton répète autant de fois qu'il est néces-
saire (7. Baton). B,
PAUVRES (Avocat des). V. AvockT,
PAUVRES (Droit des), droit prélevé en France en faveur
des hôpitaux sur les recettes des spectacles, concerts,
bals et autces amusements publics. On n'imposa primi-
tivement aux directeurs et enti'epreneurs qu'une aumône
volontaire; ce fut Louis XIV qui, en 1699, rendit la con-
tribution obligatoire, et la fixa au 6*^ des recettes. Le
droit des pauvres, abandonné pendant les premières an-
nées de la Révolution, fut rétabli à titre provisoire et
pour 6 mois par la loi du 7 frimaire an v ,28 nov. 1796),
et fixé à un décime par franc du prix de chaque billet, ou
au quart de la recette, selon la nature de l'établissement;
il subsista par prorogations successives jusqu'au 5 dé-
cembre 1809, époque où la perception en fut déchirée
indéfinie. L'administration des hospices perçoit son droit
sur la recette brute, même quand elle ne couvre pas les
frais.
PAUVRES (Taxe des). V, Taxe des pauvhes, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire,
PAVAGE , revêtement placé sur le sol aux endroits où
passent fréquemment les hommes ou les animaux. Pour
être bon, il doit : 1® s'opposer aux infiltrations d'eau qui
affouilleraient le sol ; z° être formé de matériaux .issez
durs et assez solides pour résister au poids, aux chocs,
et à l'usé; 3<* présenter une surface unie quand les
hommes seuls doivent y marcher, et, si les chevaux doi-
vent le parcourir, certaines aspérités qui facilitent la
traction des voitures. Il y a plusieurs espèces de pa-
vages ; le pavage ordinaire, fait de cubes de pierre, par-
ticulièrement de grès, qui ont de 15 à 25 centimètres de
côté, et qu'on pose sur une couche de sable de 15 à 20
centimèt. d'épaisseur ; c'est celui des rues dans les villes,
des cours d'habitation , et de certaines chaussées ; — le
cailloutis ou empierrement ( V. ce mot)^ employé généra-
lement pour les grandes routes; — le pavage en briques,
fait avec des briques placées de champ, (]ui se touchent,
et dont les Joints sont garnis de mortier; on en voit
dans certaines localités où la pierre manque ; à Venise
et en Hollande, les rues sont pavées ep briques ; — le
pavage en asphalte ou bitume, reposant sur une fondation
de béton : on en a un exemple à Paris dans la rue S^-
Honoré, devant le Palais-Royal ; — le pavage en bois, pra-
tiqué depuis ({uelques années seulement, aux endroits où
il est nécessaire d'éviter le bruit des w>itures, comme aux
abords des églises, des tribunaux, des théâtres, sous les
portes cochères de quelques hôtels. Ce pavage a été em-
ployé pour la première fois dans les rues à S^-Pétersbourg,
vers 1834, puis en Angleterre, et on en a fait des essais à
Paris en 1842, dans les rues Croix-des-Petits-Champs et de
Richelieu, au quai de l'Horloge, etc. Il est en bois de bout,
et l'on y pratique des rainures pour empêcher les che-
vaux de glisser. Son avantage est d'amortir le bruit, de
ne pas permettre l'accumulation de la boue ni de la
poussière , et de diminuer considérablement le Urage ;
mais il ne dure pas aussi longtemps que le pavage en
grès, et, quand il a besoin d'être relevé, les bois ne peu-
vent plus servir, tandis qu'on peut retailler les pavés.
L'ingénieur Polonceau a proposé d'employer des pavés
en terre cuite, au lieu de grès. Les Anglais ont essayé
des pièces de fonte, et même du caoutchouc, dans les écu-
ries, les allées et les jardins. On a trouvé en France le
moyen d'utiliser les grès de nature tendre et friable, en
les saturant, au préalable, de bitume.
Les Carthaginois sont regardés comme les premiers
qui pavèrent les rues de leurs villes. Celles de Rome
commencèrent à être pavées sous le consulat d'an Af^
plus Claudius, l'an 32 1 avant J.-G. La première route
fiavée fut construite sous le consulat d'Aurélins Cotta,
'an 241 av. J.-C. Cordoue fut la première ville moderue
3ui reçut un pavage régulier, en 850. On ne commença
e paver Paris que sous le règne de Philippe-Auguste,
en 1185; deux rues seulement furent pavées alors, et,
comme elles se croisaient au centre de la ville, on les
appela la croisée de Paris. En 1832, en creusant l'égout
de la rue S^-Denis, on a retrouvé des restes de ce pavage,
qui consistait en larges dalles de pierre calcaire dure.
PAVANE, ancienne danse, dont le nom vient, selon les
uns, de l'italien padovana (padouane), parce qu'on l'au-
rait empruntée à la ville de Padoue, et, selon les autres,
du latin pavo (paon), parce que les danseurs étendaient
les bras et les mantes en faisant la roue comme les
paons. La pavane était une danse grave et sérieuse, ré-
servée aux gens de qualité ; les darnes y figuraient en
robes longues et traînantes, les hommes avec la cape et
l'épée. Elle cessa d'être à la mode au milieu du xvii* siècle.
PAVESADE (de l'italien pavese, pavois), étoffé qu'on
tendait en dehors et autour des bords d'une galère , le
jour du combat, pour cacher à l'ennemi les dispositions
que l'on prenait. — Pavesade s'employait aussi dans le
sens de notre mot Bastingage {V. ce mot).
PAVEURS, ancienne corporation qui reçut ses pre-
miers statuts en 1501. L'apprentissage était de 3 ans; le
brevet coûtait 24 livres, et la maîtrise 500. S* Roch était
le patron des Paveurs.
PAVIE (La Chartreuse de), le monastère peut-être le
plus somptueux du monde, à 6 Idlomèt. de Pavie. Jean-
Galéas Visconti en fut le fondateur en 1390. Après avoir
franchi la porte extérieure et un vestibule orné de deux
fresques de B. Luini, on entre dans une cour de 100 met.
de long, sur laquelle est l'église. On dit que Parchitecte do
cette église fut Henri de Gmfind, le même qui commença
la cathédrale de Milan : mais la façade fut dessinée en
1472 par Ambrogio da Fossano, dit Borgognonc, et termi-
née seulement en 1542; elle ne le cède en richesse qu'à
celle de l'église S'-Marc à Venise. La partie inférieure de
cette façade offre des sculptures d'une merveilleuse déli-
catesse; la partie supérieure est plus particulièrement un
travail de mai'queterie en marbre. L'église de la Char-
treuse est en forme de croix latine, d'une longueur de
76 met. sur 53 met. de large; elle est divisée en trois nefs
à arcades ogivales, et surmontée d'une coupole. De chaque
cut^ de l'édifice sont sept chapelles fermées par des
grilles, mais communiquant entre elles par une porte
percée dans chaque mur de séparation : elles sont ornées
de sculptures en marbre et en pierre dure, exécutées
pendant trois siècles par la famille Sacchi, et de pein-
tures dont quelques-unes appaitiennent au Borgognono.
au Guerchin, et au Pérugin. Une très^belle grille siëpare
la nef du transept : on voit, dans le croisillon de gauche,
une chapelle peinte par Daniel Crespi, et, dans celui de
droite, le tombeau de Jean-Gai éas par Pellegrini, lequel
rappelle pour le style le mausolée de François I" à S*-
Denis. Les stalles du chœur sont un travail remarquable
de sculpture et de marqueterie, exécuté en 1485 par Bar-
tolomeo da Pola. Le maître -autel, en albâtre, se dis-
tingue par la profusion de ses ornements. La vieille s:^
cristie, qui s'ouvto sur le transept septentrional par
une porte de marbre sculptée et garnie de médaillons des
ducs et des duchesses de Milan, contient un ti'iptyque en
dent d'hippopotame; dans la nouvelle, attenante au tran*
sept méridional, se trouvent plusieurs peintures d'Andr»
Solari. Du même côté sont situés : le Lavoir des moines,
orné d'une charmante fresque de Luini ; le petit cloître
dit de la Fontaine, couvert de bas-reliefs en stuc, et où
sont des fresques de Crespi, g&tées par l'humidité; le
grand cloître (1 25 met. sur 101), avec portiques à colonnes
de marbre surmontées d'ornements en terre cuite.
PAVILLON (du latin papUio, qui signifie à la fois tenté
et papillon)^ s'est dit primitivement de tout logement
portatif, rond ou carré, terminé en pointe par le haut, et
qui servait au campement des gens de guerre. Le mot a
été ensuite appliqué aux tourelles des châteaux, aux-
quelles un comble élevé donne de la ressemblance avec
des tentes. Il s'est dit enfin des petits b&timents isolés ,
couverts d'un seul comble, ainsi que des corps de bâti-
ment liés à d'autres constructions en retraite.
PAVILLON , tour de lit, plissé par en haut et suspendu
au plancher. On le nomme aussi CotÂTonne»
PAVILLON, étoffe dont on recouvre le tabernacle et le
ciboire dans une église.
PAVILLON , en termes de Blason, ce qui enveloppe les
PAY
1393
PAY
armoiries des sourerains. Là pavillon de France était
d'azuTf semé de fleurs de lis d'or, fourré d^hermine , et
surmoDté de la couronne royale.
PAVILLON , en termes de Marine, drapeau qui fait con-
naître la nation à laquelle appartient un b&timent. Dans
ce cas, il s'arbore à la corne, au m&t de Tarrière. Sur les
navires de TÉtat, il reste déployé tant que le soleil est
sur l'horizon. Le pavillon sert encore à indiquer le rang
de l'officier qui est à bord : il est placé au beaupré pour
un capitaine, au m&t d'artimon pour un contre-amiral ,
au m&l de misaine pour un vice-amiral ; les canots por-
tent jgavillon sur poupe, déployé pour le capit^ne de
vaisseau, relevé à la queue pour le capitaine de frégate ,
roulé sur le m&t pour les grades au-dessous. Des pavil-
lons servent aussi de signaux ; dans ce cas, ils sont de
fantaisie, et à couleurs variées. Hisser ou arborer pa-
villon, c'est défier l'ennemi au combat; assurer son par
Villon^ c'est tirer un coup de canon en le hissant. Baisser
ou amener pavillon, c'est se rendre. Mettre le pavillon
en berne, c'est le plier dans sa liauteur de manière qu'il
ne fasse qu'un faisceau, pour rappeler ceux de l'équipage
qui sont à terre, ou pour demander un pilote ; c'est aussi
un signe de deuil : appuyé d'un coup de canon, le pa-
villon en berne est un signal de détresse. — Les bâti-
ments marchands ne peuvent arborer le pavillon national
qu'à la poupe. Ils ont, en outre, depuis 1817, des pavil-
lons qui indiquent les arrondissements maritimes aux-
quels ils appartiennent : de Dunkerque \ Honfleur, cor-
nette à 4 bandes horizontales bleues et blanches ; de
Uonfleur à Granville, pavillon triangulaire à 3 bandes
verticales, deux bleues, une rouge au milieu; de Gran-
ville à Morlaix, cornette à 4 bandes verticales bleues et
jaunes; de Morlaix à Quimper, pavillon triangulaire
jaune et bleu ; de Quimper à Lorient, cornette à 3 bandes
iiorizon taies, deux bleues, une rouge au milieu ; de Lo-
rient à Paimbeuf, pavillon triangulaire divisé horizonta-
lement en deux pai'ties, bleue et rouge; de Paimbeuf ^
Royan, cornette à 3 bandes horizontales, deux bleues,
une blanche au milieu ; de Royan' à la frontière d'Es-
pagne, pavillon triangulaire blanc, avec un losange bleu
horizontal ; de la frontière d'Espagne à Marseille, cor
Dette k 4 bandes horizontales blanches et rouges ; de
Marseille à la frontière d'Italie, pavillon triangulaire
blanc, avec losange horizontal rouge; colonies occiden-
tales , pavillon quadrangulaire à 4 bandes bleues et
jaunes; colonies africaines, asiatiques et océaniennes,
pavillon quadrangulaire coupé verticalement en 2 parties,
rouge et jaune.
PAVILLON, partie évasée en forme d'entonnoir qui ter-
mine une trompette, un cor, une trompe de chasse, un
hautbois, une clarinette, un trombone, un porte-voix etc.
PAVILLON CHINOIS. V ChAPEAU CHINOIS.
PAVILLON d'or, monnaie émise par Philippe VI de Va-
lois en 1330, et ainsi appelée parce que le roi y était
représenté assis sous un pavillon. Elle était d'or tin à la
taille de 18, et valait 30 sous.
PAVOIS, bouclier. V. notre Dictionnaire de Biographie
et ^Histoire.
PAVOIS, en termes de Marine, décorations que prend
un bâtiment en signe de fête, et particulièrement les pa-
villons et flammes de toutes sortes qu'on hisse à la tète
des mâts et au bout des vergues.
PAYE. V. Solde et Salaire.
PAYEMENT, acquittement d'une dette ou d'une obli-
gation. Pour être valable en Droit et pleinement libéra-
toire, il exige la capacité dans la partie qui paye et dans
la partie qui reçoit ; la loi admet toutefois des excep^
lions. Le créancier ne peut être contraint de recevoir ni
une autre chose que celle qui lui est due, la valeur de la
chose offerte fût-elle même plus grande, ni une partie
seulement de la dette. Le payement doit être effectué
dans le lieu désigné par la convention : si cette désigna-
tion n'existe pas, il a lieu, en général, au domicile du
débiteur. Toutefois, si l'obligation est d'un corps certain
et déterminé, le payement doit être fait dans le lieu où
était, au temps de l'obligation, la chose qui en est l'omet.
I^ frais du payement (par exemple, dans le cas ù' offres
réelles) et les frais de quittance notariée sont à la charge
du débiteur. Un payement n'est pas valable, s'il est fait
au mépris d*une opposition régulière; le débiteur qui
reut se libérer en prince d'une opposition peut se
faire autoriser par Justice à verser ses fonds dans la
caisse des Dépôts et consignations, ou à remettre la
those qu'il doit livrer dans les mains d^n séquestre
judiciaire. S'il existe plusieurs dettes, il y a lieu à im-
putatton de payement (F. Imputation). En matière ci-
vile, le défaut de payement au temps convenu ne donnp
ouverture aux intérêts de la somme due qu'à partir du
|our de la demande, à moins de stipulation contraire
[Code Napol,^ art. 1153 et suiv.); en mati^ commer-
ciale, auand il s'agit de lettres de change ou de billets à
ordre, les intérêts courent à partir du protêt. La cessa-
tion de payements d'un simple particulier s'appelle dé-
confiture, et celle d'un commerçant, /ai7/ife( F. ces motsu
II est arrivé, à la suite de certaines commotions politi-
ques, que le gouvernement, dans un intérêt public, A
accordé un sursis aux commerçants contre les poursuite *«
de leurs créanciers. La novatton, la compensation et la
confusion {V. ces mots) sont des pavements dans les-
2uel3 il n'y a pas numération d'espèces ou délivrance
'objets déterminés. La preuve du payement se fait, soit
par titre ou quittance, soit par témoins.
PAYEMENT (Certificat de), pièce délivrée à un entrepre-
neur de travaux publics par l'ingénieur en chef, dans le
but d'attester qu'il y a lieu de lui payer une certaine
somme pour des travaux accomplis. Le mode à suivre
pour la délivrance de ces certificats a été réglé par une
instruction du directeur général des ponts et chaussées
du 30 juillet 1811, et par un règlement annexé à una
circulaire ministérielle du 27 août 1833.
PAYEUR, fonctionnaire établi dans chaque départe-
ment pour y acquitter, en vertu des autorisations légales,
les dépenses des services de l'État et les dépenses dépar-
tementales. Les payeurs, institués par décret du 12 oc-
tobre 1791 , relevaient du ministre des finances. Ils n'é-
taient pas des agents purement passifs, appelés à solder
les mandats qui leur étaient remis, ou à les viser pour
qu'ils fussent soldés par les percepteurs; ils vérifiaient si
ces mandats se renfermaient dans les limites des ordon-
nances de délégation qui autorisaient leur délivrance, et
constataient la réalité des services et l'identité des por-
teurs de mandats. Par conséquent, ils pouvaient refuser
de payer, lorsqu'ils reconnaissaient une omission ou une
irrégularité matérielle dans les pièces Justificatives; dans
ce cas, ils remettaient au porteur de l'ordonnance ou du
mandat la déclaration écrite et motivée de leur refus.
Si, néanmoins, l'ordonnateur requérait, par écrit et soua
sa responsabilité, qu'il fût passé outre au payement, lo
payeur y procédait sans délai, mais eu informant immé-
diatement le ministre des finances. Les fonds nécessaires
aux payeurs leur étaient remis , au fur et à mesure du
service , par les receveurs généraux et par le caissier
central du Trésor. Les ordonnances et mandats de paye-
ment ne pouvaient plus être acquittés par les payeurs
,après laclôture de l'exercice. Il y avait quatre classes de
payeurs départementaux, au traitement de 10,000, 8,000,
7,000 et 6,000 fr. Leurs fonctions ont passé, en 1864.
auxreceveurs généraux.
PAYSAGE, genre de peinture ou d« dessin qui repré-
sente quelque aspect de la campagne ou He la nature
muette. On distingue le Paysage historique, héroïque ou
académique, qui vise au noble et au grand, emprunte ses
sujets à la plus riche nature, préfère les sites ornés^ de
temples, de fontaines, de statues, etc., et les anime
mêiLO par quelque scène tirée de la Fable ou de Tliis-
toire; le Paysage x>.oétique ou idéal, où tout est de la
composition de l'artiste, qui tend moins à reproduire
qu'à interpréter la nature ; le Paysage réaliste, qui ne
cherche que l'aspect vrai et l'accent particulier, qui
prend la campagne comme elle s'offre le plus souvent à
nous, dans la pauvreté de sa ligne générale, dans la cou-
leur monotone de sa végétation, avec les accidents vul-
gaires de ses terrains. — Les Anciens n*ont réellement
pas pratiqué le paysage : s'ils voulaient représenter une
montagne ou une source, ils la personnifiaient dans la
figure de quelque Dieu. Les fresques d'Herculanum et de
Pompéi ne donnent que des vues d'édifices, où la cam-
pagne tient une place tout à fait accessoire. La personni-
fication de la nature au moyen de formes humaines sq
retrouve encore pendant les premiers siècles du moyen
âge : par exemple, au baptême de J.-C, on représentait
le Jourdain sous la figure d'un homme tenant une urne.
Plus tard, les sujets sacrés eurent un arrière-plan sans
perspective, où les maisons, les villes, les torrents, les
montagnes s'étageaient comme dans une épaisse tapis-
serie. Les frères Van Eyck, en Flandre, exécutèrent les
premiers le paysage en observant la perspective aérienne :
toutefois. Jusqu'à la fin du xv« siècle, le paysage ne forma
pas un genre à part; il resta subordonné et accidentel
dans les compositions. Ce furent encore deux Flamands»
Joachim Patenier et Henri de Bless, qui osèrent faire des
tableaux où le paysage fut le si^et principal. Depuis ce
88
PÉA
1394
PÈC
rridment une nombreuse école se forma dans les Pays-
Bas, à la tète de laquelle figurèrent Pierre Breughef et
ses Ûls, Roland Savn, David Vinckebooms, Hondekœter,
Josse de Momper, etc. Elle se partagea au xvn* siècle en
^ux camps : d*un côté, Paul Bril, Adam Elzbeimer,
Swaoevelt, Both, Pynacker, Zacbtleven, Asselyn, Poelen-
Durg, Pierre do Laar, se préoccupèrent surtout de la
composition et du style, de la science des lignes et des
masses ; de l'autre. Van der Neer, Van Goyen, Waterloo,
Bergbem, Karel Dujardin, Ruysdaei, Hobbema, Paul
Potter, Van Everdingen, Van der Heyden, Wouwermans,
Van der Velde, Moucheron, Van Artois, A, Cuyp, Wy-
nants, Huysmans, peignirent avec un sentiment plus
juste et dans le sens du naturalisme. Au xvm* siècle, il
y eut décadence : on ne peut plus guère citer que Die-
trich. Van Os, et Schweichardt. De nos Jours, le réalisme
domine en Hollande avec Kœkkœk et Schoter. — Parmi
les paysagistes allemands, on remarque, au xvm* siècle,
Wertsch, Hackert et Kobell, qui suivirent une direction
réaliste, Tischbein et J. Kock, qui opérèrent une réaction
idéaliste. Aujourd'hui l'école allemande est revenue pres-
que au génie du moyen ftge pour la simplicité de l'ex-
position; elle recherche dans l'ensemble l'expression
d'une pensée poétique ou môme fantastique : tel est le
caractère de Lessing, d'Aschenbach , de Scheuren, de
Rottmann. On en peut dire autant des artistes norvé-
giens Gude , Leu et DohI. A Genève, Diday et Calame
cherchent à rendre les impressions terribles, les scènes
désolées et sauvages des régions alpestres. — En Angle-
terre, Turner, Fielding, Stanfleld, Martin, etc., sont des
paysagistes très-distingués. — L'Espagne n'a guère fourni
que Velasquez de Silva et Francesco Collantes. — En
Italie, le paysage commença, comme fond des tableaux,
dans les écoles de Florence et de Venise, vers la fin du
xv*^ siècle; il apparut plus libre dans les oeuvres des Bel-
lini et de Léonard de Vinci. Le Titien et Dossi furent les
premiers qui traitèrent le paysage indépendamment de
toute action. Mais, en général, ce fut un élément secon-
daire dans la peinture italienne ; les seuls noms impor-
tants que l'on puisse mentionner sont : Annibal Carrache,
Salvator Rosa, le Dominiquin, le Guaspre, Canaletti,
Guardi, Panini et Servandoni. — En France, l'école de
faysa^ s'ouvre au xvn* siècle par deux grands noms : le
oussm, maître incomparable du style héroïque, et Claude
Lorrain, qui, par le charme suprême de la lumière et de
la couleur, est resté le modèle achevé du style poétique.
Le paysage de style fut ensuite cultivé par Laurent de
I^ Hire, Sébastien Bourdon, Allegrain, Patel père et fils,
Jacques Courtois et Joseph Parrocel. Au xvni* siècle,
VVatteau, Lancret, Fïvgonard, représentent le goût faux
et maniéré de leur temps, dont Lantara, Hubert Robert,
Boissieu, Le Barbier et Joseph Vernet surent mieux -se
préserver. Dans notre siècle, l'école historique a eu pour
représentants Bertin, Valenciennes, Taunay, Le Pnnce,
Michallon, Bidault, Flandrin, Aligny, Desgofe, Bénou-
ville; une école nouvelle, que l'on pouvait prévoir dans
les œuvres de Watelet, s'est fait connaître par un senti-
ment plus naïf, plus original de la nature, et elle a pro-
duit Théodore Rousseau, Jules Dupré, Fiers, Paul Huet,
Français, Diaz, Coignet, Troyon, Hostein, Lapito, Daid)i-
gny, Achard,Loubon, Léon Fleury, Blanchard, Gh. Leroux,
etc. Quelques artistes sont allés demander à l'Orient un
soleil plus éclatant, et, parmi eux, Decamps, Marilhat,
Fromentin, Dauzats, Théodore Frère, de Fontenay, Bor-
get, Karl Girardet, etc. On pourrait trouver chez Corot et
Cabat une tendance éclectique. V. Lecarpentier , Essai
sur le paysage, AMI y in-S"»; Deperthes, Théorie du
paysage, 1818, et Histoire de Vart du paysage, 1822.
PAYSANS. V. Agricoles (Classes).
PAZEND, nom qu'emploient les auteurs persans dans
la désignation des anciennes langues de leurs ancêtres.
On ne sait s'il désigne une forme corrompue ou popu-
laire du zend (F. ce mot).
PÉAGE {éepayage, pour payement) ^ droit qu'on per-
çoit pour le passage sur un chemin, une chaussée, un
pont, etc. Les péages étaient très-multipliés autrefois, et
faisaient partie des droits seigneuriaux. Les rois durent
prendre des précautions pour remédier aux abus : la dé-
claration de Louis XIV du 31 Janvier 1663 et l'Ordon-
nance des eaux et forêts de 1660 déterminèrent les droits
à percevoir et le mode de perception ; tout prétendant à
la Jouissance de ces droits dut produire ses titres, et un
tribunal Ait institué pour en Juger la validité. Un arrêt
du Conseil, en date du 15 août 1779, réduisit le nombre
et la quotité des droits, et ordonna une nouvelle véri-
fication des titres. L'Assemblée constituante, par une loi
du 15 mars 1790, essaya de réprimer les abus qui exis-
taient encore. Le 17 Juillet 1793, la Convention lup-
Erima sans indemnité-tous les droits. Comme on manqua
ientôt de ressources pour entretenir les ponts et les
routes, on imagina d'établir partout des barrières, qa*on
ne pouvait franchir sans payer. Ce système, beaucoup
plus intolérable que le précédent, fut aboli par Napon-
léon l*', et la création des droits d'octroi pourvut aux
dépenses des communes. Aujourd'hui les péages ne sont
plus guère que des impôts limités au temps néc^sairs
pour le recouvrement des sommes employées aux coo-
structions ou aux réparations. Les militaires passant pour
cause de service ou avec feuille de route sont exempts
des droits de péage, ainsi que les fonctionnaires publics
dans l'exercice de leurs fonctions. Les contestations sur
l'application des tarifs sont Jugées par les Conseils de
préfecture, sauf pourvoi devant le Conseil d'État. Le refus
de payer le droit est Justiciable du tribunal de police,
qui peut, outre la condamnation au payement, infliger
une amende de la valeur d'une à trois Journées de tra-
vail, et, en cas de récidive, un emprisonnement d'un à
trois Jours. S'il y a eu injures, menaces ou voies de fait
envers les agents de la perception, le tribunal correc-
tionnel prononce une amende de 1 à 100 fr. et un em-
prisonnement de 3 mois au plus, sans préjudice des
dommages-intérêts. Les préposés qui auraient exigé un
droit trop élevé subissent les peines infligées au refus de
payement (Lois du 6 frimaire an vu, du 2 vendémiaire,
du 27 frimaire et du 28 pluviôse an viii. — 36 nov. 1798,
24 sept., 18 nov. 1799, et 17 fév. 1800).
PÉAN, hymne. V. notre Dictionnaire de Biographie et
d*Histoire.
PEAUSSIERS, corporation dont les statuts dataient de
1357, et qui fut réunie en 1776 aux tanneurs-hongproyeurs,
corroyeurs, mégissiers et parcheminiers. L'apprentissage
était de 5 ans, et le compagnonnage de 2. La maîtrise
coûtait 600 livres. Les peaussiers recevaient des chamoi-
seurs et des mégissiers les peaux préparées, et leur don-
naient diverses couleurs. Leur patron était S^ Jean-Bap-
tiste.
PÊCHE, amusement et industrie qui ont existé de
temps immémorial. Par rapport aux instruments qu'on y
emploie, on distingue la Pèche à la ligne ou à l'hameçon
et la Pêche au filet; pour quelques espèces de poissons,
on se sert du harpon, de la flèche, et même de projec-
tiles. Eu é^ard aux lieux où l'on pêche, on distingue la
Pèche fluviale et la Pécfie maritime. Celle-ci se subdivise
en Grande pêche, oui est celle de la baleine, de la mo-
rue, etc., exigeant de grandes expéditions maritimes; et
Petite pêche, qui comprend la Pêcfte côtière, et la Pêche à
pied le long du littoral. Le droit de pêche, que les lois ro-
maines abandonnaient à tout le monde, passa au moyen Age
entre les mains des seigneurs féodaux. II fut réglementé
pour la première fois dans des ordonnances royales de
1407, 1515, 1554, 1572 et 1507. En 1669, l'État se réserva
le droit de pêche dans les fleuves et les rivières navigables^
et le laissa aux seigneurs dans les rivières non navi-
gables. Un décret du 8 frimaire an ii (28 nov. 1793) pro-
clama la liberté absolue de la pêche; mais cette liberté
entraîna de si graves abus, qu'un arrêté du 6 messidor
an VI (16 Juillet 1798) remit en vigueur quelques articles-
de l'ordonnance de 1669. La loi du 14 floréal an x (4 mai
1802) a restitué à l'État le droit exclusif de pêche dans
les cours d'eau navigables et flottables, sauf la pêche à la
ligne, qui est restée libre; dans tous les autres cours
d'eau, ainsi que dans les étangs, la pêche appartient aux
propriétaires riverains. La loi du 15 avril 1829, qui est le
Code de la pêche, détermine la forme et la dimension
des instruments à employer, les lieux et les temps où
la pêche est prohibée dans l'intérêt de la conservation et
de la reproduction du poisson, la pénalité attachée aui
contraventions, etc. La police de la pêche fluviale, qui
était dans les attributions de l'administration des Eaux et
Forêts, a été donnée aux Ponts et Chaussées par décret
du 29 avril 1862. — Les principes généraux en matière
de pêche maritime ont été posés par le titre 5 de l'or-
donnance de la marine du mois d'aodt 1681, qui déclare
la pêche libre, tant en pleine mer que sur les grèves, et
qui trace certaines règles relatives aux filets qu'il est
permis d'employer, aux temps, saisons et heures pendant
lesquels la pêche est prohibée. Depuis cette époque, les
principales lois qui concernent la pêche maritime sont
celles du 22 avril 1832, du 25 juin 1841, du 23 juin 18 i6.
du 7 août 1850, du 22 août 1851, du 9 janvier 18ôi
(complétée par le règlement du 4 Juillet 1853), et du
31 mal 1865. K. Duhamel du Monceau > Traité des
J
PÉC
1395
PÊD
pénhêSt Paris, 1769, 4 vol. in-fol. ; No€] de La Morinière,
Histoire générale des pêches anciennes et modernes, 1815,
iD-4«; Baudriliart, Dictionnaire des pèches fluviales et
maritimes, 1827, in-4o et atlas, et Code de la pêche /lu-
viole ^ 1829, 2 vol. iD-12; Brousse, Code de la pèche
fluviale, 1829, in-8<>; Hautefeuille, Code de la pêche ma'
ritime. 1844, in-8<^; Rogron, Codes forestier, de la Pêche
(luviaie et de la Chasse, expliqués^ 2« édit., 1856.
PÉCHÉ (de l'hébreu peschab^ ou du latin peccatum)^
transgression de la loi de Dieu. Les théologiens distin-
guent le péché actuel, qui est une action ou une omission
contraire à la loi divine {péché de commission et péché
d'omission)^ et le péché habituel ou état de péché, qui est
la privation de la gr&ce sanctifiante par TelTet d'une faute
grave. On péché est véniel (du latin venia, pardon), quand
il affaiblit seulement la grt^e sanctifiante ; il ne mérite
pas une peine éternelle, et est susceptible d'être par-
donné. Un péché est mortel, lorsqu'il donne en quelque
sorte la mort à T&me, en la privant de la gr&ce sancti-
fiante. Sept péchés mortels ont reçu le nom de péchés
capitaux, parce qu'ils sont la source de tous les autres ;
ce sont Vorgueil, la eolère^ Venvie, la luocure, la gour-
mandise, Vavarice et la paresse. Les péchés s'effacent par
le Sacrement de la Pénitence {V. ce mot).
vicEi ORIGINEL, nom que les théologiens donnent à la
tache que tout homme apporte dans le monde en nais-
sant, par suite de la désobéissance d'Adam et d'Eve, et
qui est effacée par le Baptême (F. ce mot), La nature du
péché originel ne consiste ni dans une substance mau-
vaise créée par le démon, comme le prétendaient les
Manichéens, ni dans la concupiscence, comme le pensent
généralement les Protestants, ni dans une certaine con-
dition vicieuse du corps et de T&me; c'est la communi-
cation du péché du premier homme et la privation de la
Justice originelle. Le péché originel a introduit dans le
monde une multitude de peines : pour le corps, les ma-
ladies, les misères de toute sorte, la mort; pour l'&me,
l'ignorance, la malice, la concupiscence. Les enfants qui
meurent avec le péché originel, parce qu'ils n'ont pas
reçu le baptême, sont privés de la vision béatiflque de
Dieu ; mais il n'est pas certain qu'ils souffrent la peine
do sens, et les théologiens, ainsi que les Pères, sont par-
tagés sur ce point.
PÊCHEUR (Anneau du). V. Auneau.
PÉCILE ou POECILE (du grec poikilos, varié), célèbre
portique d'Athènes, situé vers le milieu de l'Agora (V. ce
mot), 11 se composait de 4 murs parallèles, entourés
d'une colonnade, probablement d'ordre dorique, comme
toos les grands monuments d'Athènes, et formant des
portiques, où se tenaient les philosophes, que la foule
entourait pour les écouter, et où se rendaient les poètes
pour y réciter leurs poésies au public. Ce fut là que Zenon
ouvrit la fameuse école qui prit le nom de Stoïcienne ou
du Portique (du groc stoa, portique). La paroi des murs
était couverte de peintures représentant des sujets natio-
naux, tels que la guerre de Th^ée contre les Amazones,
les secours fournis par les Athéniens aux Héraclides, leurs
victoires sur les Lacédémoniens à QBnoé, sur les Perses à
Marathon, etc. La plupart de ces tableaux furent exécutés
par Polygnote, M^con, Pamphile, et Panœnus, frère de
Phidias. On voyait aussi suspendus dans le Pécile les
boucliers des Scioniens de la Thrace, et ceux qu'on avait
enlevés aux Spartiates dans l'Ile de Sphactérie. A l'entrée
on remarquait une statue de Selon. Les vieilles murailles
qui se trouvent près de l'église de Panagia Fanaromeni
paraissent être les restes du Pécile. V, dans la Revue ar^
chéologûjue, août 1854, un Mémoire de M. Hanriot sur
Athènes. H.
PEGTIS, instrument de musique à cordes des Andens.
On en attribuait l'invention aux Lvdiens.
PECTORAL. V. Cancbl et Cuibasse.
PECTORAL, partie du costume du grand prêtre des Juifs,
qn'on appelait aussi Rational, V, ce mot dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d*Histoire,
PECULAT, en termes de Jurisprudence criminelle des
Romains, yol de deniers publics par ceux oui en avaient
la perception, le maniement ou l'administration. Les
crimes de péculat devinrent très-nombreux dans les deux
derniers siècles de la République, et on vit se succéder
plusieurs lois destinées à les réprimer {De pecuniis repe-
l^tfidis), La peine, qui consistait d'abord en une simple
i^titution, dont la honte avait paru être un ch&timent
suffisant, fut portée ensuite au double, au quadruple ; on
y attacha aussi l'interdiction de certains droits civiques,
comme celui d'être témoin ou Juge; l'exil fut même pro-
noncé. V, CONCDSSMm.
PÉCULE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
PÉDAGOGIE (du grec paXs, paidos, enfant, et agôgè,
conduite), art d'élever les enfants. Le mot n'a été em-
ployé en ce sens que par les Modernes, surtout en AIle«
magne, et il s'applique h la fois à l'éducation physique,
à l'éducation intellectuelle, et à l'éducation morale. Les
Grecs donnaient le nom de Pédagogues, pris seulement
dans son sens propre, aux esclaves chargés de conduire
les enfants de leurs maîtres aux écoles et de les ramener;
et ils prenaient d'ordinaire pour cet office, ainsi que nous
l'apprend Plutarque dans son traité De VÊducation, les
esclaves qu'on avait achetés le moins cher et qu'on ne
pouvait employer plus utilement à autre chose. Le hasard
seul amenait de bons choix. Chez les Romains, le rôle de
l'esclave pédagogue se modifia : cet esclave accompagnait
l'enfant, veillait sur ses mœurs, dirigent sa conduite, se
plaçait près de lui dans les thé&tres, entremêlait de ses
réflexions les pièces qu'on y jouait; mais, dans tous les
cas, son influence ne laissait pas d'être dangereuse. Vers
la fin du paganisme, le mot pédadogue était devenu sy-
nonyme dHnstituteur et de sophiste. Au moyen âge, les
Pédagogues furent les directeurs des établissements d'in-
struction; par suite, le nom désigna tout homme qui
enseignait, et il a fini par ne plus être pris qu'en déri-
sion, en l'appliquant à un pédant plein de morgue. Mais
le mot Pédagogie a été créé et s'est conservé pour dési-
gner la science de l'éducation.
On trouverait déjà les éléments de cette science épars
dans les législateurs et les philosophes de l'antiquité :
Moïse, Manou, Lycurgue, Solon, Pythagore, Platon, en
ont posé les principes, nécessairement variables selon les
moeurs et les institutions sociales de leur temps. Les
écrits de Quintilien et de Plutarque fourniraient aussi de
précieux renseignements sur la pédagogie de l'antiquité.
Mnéas Sylvius au xv* siècle, Érasme et Sadolet au xvi*,
Fénelon et Locke au xvu*, Rollin, J.-J. Rousseau, Ba-
sedow et Pestalozzi au xvin% et enfin, de nos Jours,
Niemeyer en Allemagne, le P. Girard en Suisse, ont été
les plus illustres théoriciens en matière d'éducation. D
faut avouer que, malgré leurs efforts, la pédagogie est
une science encore peu avancée.
Son but est de donner, par les méthodes les plus avan-
tageuses, Vinstruction et Véducation {V. ces mots). Ces
deux parties qui composent son domaine, elle doit en
traiter selon qu'elles sont publiques ou privées. Il lui faut
montrer le de^ qui convient a chacune d'elles pour les
diverses conditions et catégories de la société, c-à-d.
l'instruction et l'éducation nécessaires anx garçons et aux
filles, aux professions libérales et aux professions ma-
nuelles, etc. Les mœurs et les institutions d'un peuple
étant données, la Pédagogie déterminera le caractère qui
convient à l'éducation nationale, et spécialement à l'édu-
cation populaire. Il y a donc là une science vaste et se*
rieuse, qui n'a Jusqu'à présent fait l'objet d'aucun ensei-
gnement public. Après la Révolution de 1848, un cours
de Pédagogie fut institué à Paris, à l'École normale su-
périeure; mais il n'a pas été conservé. F. Schwartz,
Pédagogie, Leipzig, 1820; Fritz, Essai d^un système com^
plet d'éducation^ et Histoire de la Pédagogie, Strasbourg
et Paris, 1840-43; le P. Girard, de l'Enseignement ré-
gulier de la langue maternelle, dans les écoles et dans les
famUles, Paris, 1844, in-S» et in-12 ; 3«édit. 1853, in-i2.
PÉDALE (du latin pes, pedis^ pied), en termes de Mu-
sique, tenue prolongée à la basse pendant un certain
nombre de mesures, et sur laquelle on fait plusieurs ac-
cords successifs, étrangers pour la plupart à la note sou-
tenue. Les meilleures pédales sont celles dont la tenue
devient alternativement note réelle et note accidentelle
des accords sous lesquels elles se prolongent. Ce ({u'on
nomme improprement pédale supérieure et pédcUe inter-
médiaire n est autre chose qu'une tenue qui entre dans
la combinaison des accords, soit comme note réelle ou
note de passage, soit comme suspension. La pédale a lieu
sur la tonique ou sur la dominante. Son nom vient de ce
que, dans rorigine, elle n'était emplo]^ée aue dans la
musique d'église par les organistes, qui la laisaient en-
tendre dans le clavier de pédale. B.
PÉDALE, touche de bois ou de métal qu'on fait mouvoir
avec les pieds, soit pour modifier l'intensité du son,
comme dans le piano, soit pour hausser ou baisser le ton,
comme dans la harpe, soit pour faire parler les grands
tuyaux de l'orgue, qui rendent les sons les plus graves.
FÉDALB (Jeux de). Jeux d'orgue correspondant au clavier
de pédale, et qu'on Joue avec les pieds ; tels sont : parmi
les Jeux à bouche, les bourdons^ les flûtes, le prestant, la
l'EI
1396
PEI
grosse tierce^ le nasard^ très-rarement la quarte de na-
sard, et la tierce; parmi les jeux d*anche : la bombarde,
ia trompette et le clairon, F. G.
PÉDANT (de l'italien pédante)^ celui qui fait parade de
science, qui entasse à tort et à travers les citations, les
critiques et les observations, qui affecte en toute chose
Texactitude et la rigidité.
PÉDAUQUE (La reine). V, Bbrtb aux. grans pi£s.
PÉDICULE, petit pilier qui supporte un objet, comme
un bénitier ou des fonts baptismaux; — partie par la-
quelle se terminent les arcs à talon, et que surmonte un
bouquet ou un cul-de-larape.
PÉDUM, b&ton pastoral recourbé par le haut. On le
voit entre les mains de Pan, des Faunes, des Satyres, de
P&ris, etc. Les acteurs comiques de l'antiquité le por-
taient, parce que Thalie, muse de la comédie, était aussi
la muse de Talgriculture.
PEGMA. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d* Histoire.
PEHLVI (Idiome), idiome qui fut longtemps parlé dans
une grande partie de TEmpire persan, après que le zend
{V, ce mot) eut été réduit à l'état de langue sacrée. Aban-
donné de la cour et des hautes classes sous le règne
d'Artaxerxès Longue-Main, il perdit à son tour son im-
portance, et, au v« siècle de notre ère, il avait cessé d'être
une langue vulgaire : on l'employa encore dans les livres
jusqu'à la conquête arabe. Les Guèbres ou Parsis, secta-
teurs de Zoroastre, l'ont conservé plus longtemps. Le mot
pefUvi, selon Anquetil-Duperron, signifie côté, force; il
désignerait en auelque sorte la langue des forts ou des
héros. D'autres le font dériver du nom des Pahlvans, qui
habitent le Pahlu, un des cantons de la Perse. Quoi qu'il
en soit, E. Quatremère regardait le pehlvi comme la
langue nationale des Parthes. D'autres ont pensé que
c'était Pidiome des Mèdes, employé dans le second des
trois systèmes d'écriture cunéiforme ( F. ce mot). Là pehlvi
se rapproche du zend par son vocabulaire, et des langues
sémitiques par sa grammaire. Il est à la fois moins riche
en voyelles et plus poli que le zend. Il s'écrit de droite
à çauche i»vec un alphabet de 26 lettres, qui dérivent
évidemment de celles du zend ; cet alphabet, malgré son
analogie avec le syriaque, permet d'écrire les voyelles
aussi bien que les consonnes, mais il est défectueux en
ce qu'on y fait souvent usage d'un môme signe pour re-
présenter plusieurs sons différents. — Le Boundehech
(F. ce mot) est écrit en pehlvi. Cette langue est employée
sur les médailles et dans les inscriptions des monuments
des Sassanides : Silvestre de Sacy et M. de Longpérier
en France, Olshausen à Copenhague, Dorn à S^-Péters-
bourg, se sont occupés de les déchiffrer. Les manuscrits
d'Anquetil-Duperron, conservés à la Bibliothèque impé-
riale de Paris, contiennent des fragments d'une Gram-
maire et d'un Vocabulaire du pehlvi. V. Maller, Essai
sur la langue peklifi, dans le Journal Asiatique d'avril
1839; Euçéne Bore, Considérations sur les inscriptioiis
pehlvies, ibid., juin 1841.
PEIGNE (du latin pecten). Les Anciens avaient des
peignes d'ivoire ou de buis comme les nôtres, pour se
nettoyer la tête. Les peignes d'ivoire faisaient partie du
mobilier de la primitive Église, parce les prêtres étaient
dans l'usage de peigner leurs cheveux avant de s'appro-
cher de l'autel : plusieurs de ces peignes ont été con-
servés dans les Trésors des églises; ainsi, on possède à
Sens le peigne de S* Loup, orné de pierres précieuses et
d'animaux symboliques. — Le peigne est aussi un orne-
ment de la toilette des femmes, servant à retenir et à
fixer les cheveux : la forme et la matière en ont beaucoup
varié ; on en a fait un riche objet d'orfèvrerie.
PEIGNOIR, vêtement de toile, de calicot, d'indienne
ou de mousseline, dont les femmes se couvrent les
épaules lorsqu'elles sont à leur toilette du matin. On en
a fait un objet de parure, garni de dentelles. — Le pei-
gnoir est encore une sorte de robe à manches dont on
s'enveloppe après le bain.
PEINE, châtiment apposé à l'infraction d'une loi. Juri-
diquement, c'est le mal moral ou physique infligé comme
sanction des prescriptions de la loi à celui qui n'a pas
fait ce que la loi ordonnait, ou qui a fait ce qu'elle dé-
fendait. Tantôt elle consiste dans une souffrance corpo-
relle qui peut quelquefois aller jusqu'à la privation de la
vie, tantôt dans la privation perpétuelle ou temporaire
des facultés naturelles, des droits civils, etc., ou même
dans le pavement d'une amende ou le dessaisissement de
certains biens par la confiscation. Suivant Rossi, le prin-
cipe sur lequel est fondé le droit de punir implique une
idée de supériorité; suivant Beccaria, une convention
primitive. Bentham l'a voulu chercher dans l'utilité so-
ciale, dans la nécessité, principe arbitraire et faux dont
les conséquences seraient effrayantes. On a invoqué le
droit de légitime défense, qui, lui aussi, suppose un
pacte social, ce qui n'est pas vrai : d'ailleurs, au moment
'exagération des pénalités,
semble plus naturel de chercher avec Rossi, dans la jus-
tice elle-même, dans la loi morale, le fondement du droit
de punir. La société est la loi de l'homme : les lois qui
maintiennent cet ordre doivent être respectées ; elles ne
peuvent l'être qu'à l'aide des punitions qui frappent les
infractions. Aussi la peine est-elle acceptée comme une
nécessité sociale, parce qu'elle satisfait la conscience pu-
blique, et sa justice est reconnue par celui-là même
qu'elle atteint. Le but de la peine n'est pas seulement
d'intimider et de punir, ou de réformer le condamné,
mais encore de maintenir l'ordre social , et d'affermir
l'idée de justice par le spectacle de l'expiation.
La peine doit remplir certaines conditions : il faut
qu'elle soit proportionnée , exemplaire, réformatrice,
instructive, morale, personnelle, divisible, égale, répa-
rable. De ces qualités, l'une des plus difKciles à atteindre,
c'est la proportionnalité. A cet égard, chaque criminaliste
propose son principe; Bentham estime que le mal infligé
doit surpasser le profit tiré du délit ou des délits pr^u-
més. Il admet une exception au cas où un délit est très-
nuisible, comme moyen de le prévenir. Ne semble-t-il
pas plus rationnel et plus juste de dire, avec Rossi, que
la proportionnalité de la peine se trouve établie par
l'étude du sentiment intime? Le législateur n'a plus alors
qu'à fixer le maximum et le minimum entre lesquels se
meut la répression; ce sera à la conscience du juge de
chercher dans un examen sérieux ce qu'exigent les né-
cessités de la répression.
Notre Code pénal divise les peines en criminelles, correC'
tionnelles ou de police. Les peines criminelles sont dites
afflictives et infamantes, ou simplement infamantes. Les
peines af&ictives et infamantes sont : la mort, les travaux
forcés à perpétuité, la déportation, les travaux forcés à
temps, la détention, la réclusion. Les peines infamantes
sont le bannissement et la dégradation civique. Les peines
correctionnelles sont : l'emprisonnement à temps dans
une maison de correction, l'interdiction à temps de cer-
tains droits civils, civiques et de famille, l'amende. —
Sont communs aux crimes et aux délits, le renvoi sous la
surveillance de la haute police, la confiscation du corps
du délit, appartenant au condamné, ou des choses pro-
duites par le délit ou destinées à le commettre. — Les
peines de simple police sont l'emprisonnement de i à 5
Jours, l'amende, et la confiscation de certains objets saisis.
L'ancien Droit était à cet égard bien autrement fécond :
il avait cinq peines capitales appliquées suivant la gra-
vité des cas : l'écartèlement, le feu vif, la roue, la po-
tence ou gibet, la décollation; dix- sept peines corpo-
relles, la question ou torture, les galères perpétuelles, les
galères à temps, le fouet sous la custode (dans la pri-
son) appliqué aux enfants, le fouet ordinaire donné pu-
bliquement, la langue coupée ou percée, le poing coupé,
l'assistance à la potence, le tralnement sur la claie (du
corps des suicidés), la suspension sous les aisselles, la
promenade par les rues, le carcan, le pilori, l'amende ho-
norable publique, l'amende honorable sèche (en chambre
du Conseil). Quant aux peines purement aflUctires, il y
avait le bannissement à vie ou à temps, l'authentique
pour les femmes adultères, la réclusion dans une maison
de force remplaçant pour les femmes les galères et le
bannissement, enfin la prison perpétuelle. — Les peines
infamantes de droit étaient alors la mort civile, la con-
damnation de la mémoire, le blâme, la dégradation de
noblesse, l'interdiction perpétuelle d'office, le plus am-
plement informé indéfini. Les peines infamantes de fait
étaient l'admonition, l'abstention des lieux, l'interdiction
à temps, le plus amplement informé à temps, le hors
de cour. — On comptait aussi quatre peines pécu-
niaires : la confiscation, l'amende, l'aumône, et la répam -
tion civile. Le Droit actuel, en simplifiant les peines <*:
laissant moins de liberté à l'appréciation du juge, a rC.i-
lisé un progrès vers l'application plus rigoureuse de ré<;a-
lité pénale. V. Beccaria, Traité des délits et des peines.
1764, 1 vol. in-12; J. Bentham, Théorie des peines et des
récompenses^ Paris, 1818, 2 vol. in-8**, trad. par Dûment;
Saint-Edme, Dictionnaire de la pénalité dans toutes fet
parties du monde connu^ 1818, 5 vol. in-8"; Rossi, Trattf
de Droit pénal, 1829, 3 vol. in-8°i De Molènes, De l'hu^
PEI
1397
PEI
manilé dans les lois criminelles, 1830, in-8<*; Alauzet,
Essai sur les peines, 1842. R. d*E.
PBINB CAPITALE OU PEINE DE UORT. Sa légitimité a été
f)ias d'une fois mise en doute : suivant les uns, parce que
'homme, n'avant aucun droit sur sa vie, n'avait pu le
céder; suivant les autres, parce que le droit ii Texistence
étant inviolable, la société ne peut l'ôter. Ces généralités
Bont sans valeur; tous les jours elles reçoivent un écla-
tant démenti. La légitime défense de soi-même ou d*au-
trui, de Thonneur de sa femme, la gueire, prouvent que
lo droit d'ôter la vie à son semblable est parfois justifié.
On peut donc admettre qu'il existe en principe, et que
son exercice est seulement subordonné à la justice de la
cause. La cause est juste quand elle a pour but de pro-
téger Tordre social, de sauvegarder les droits des inno-
cents. La peine de mort est usitée chez tous les peuples,
à tous les degrés de civilisation ; elle ne soulève donc pas
la conscience humaine. Le droit à la vie est-il d'ailleurs
plus sacré que le droit à la liberté, et ne voit-on pas ce-
pendant de combien de restrictions celui-ci est justement
passible lorsqu'il s'agit de protéger et de défendre l'ordre
social? Sans doute la peine de mort ne prévient pas tous
les crimes; mais est-ce à dire que ce soit un frein im-
paissant, et l'expérience ne montre-t^elle pas tous^ les
Jours que c'est le seul frein capable d'arrêter certaines
natures perverties? Elle a d'ailleurs au plus haut point
plusieurs des mérites d'une bonne pénalité : exemplaire
au premier chef; réformatrice, au moins quant à la con-
science du coupable, que l'approche du dernier jour
appelle au repentir; instructive, morale, personnelle.
Ses graves inconvénients sont d'être indivisible, inégale,
et surtout irréparable. Montesquieu, Mably, Kant, J.-J.
Rousseau, de Maistre, Filangieri, Rossi, Merlin, ont sou-
tenu sa parfaite légalité.
Disons quelques mots des vicissitudes qu'a subies
à cet égare! la législation. L'article 1*' de la loi du
4 brumaire an iv (2G octobre 1795) proclamait l'aboli-
tion de la peine de mort « h dater du jour de la pu-
blication de la paix générale. » Lo Code pénal de 1810
l'appliqua avec plus de rigueur que jamais; de là une
réaction que l'institution du jury rendit plus sensible.
Après 1830, la Chambre des députés tout entière votait
l'abolition de la peine de mort, sur la proposition d'un de
ses membres; vote sans suite, mais qui, lors de la révi-
sion du Code pénal en 1832, la fit retrancher dans un
bon nombre de cas, et qui, par l'admission des circon-
stances atténuantes abandonnée au jury, lui permit
d'abaisser la peine à un degré inférieur. Dans tous les
cas, elle fut restreinte aux crimes qui compromettent la
▼ie des personnes, et n'est plus applicable aux crimes de
fausse monnaie, de contrefaçon du sceau de l'État, ou des
billets de banque, aux vols commis avec la réunion des
don circonstances aggravantes. — La Constitution de
1818 proclama son abolition en matière politique, où la
déportation la remplaça (Loi du 8 juin 1850) ; elle ne fut
rétablie, plus tard, que pour réprimer les attentats di-
rigés contre la vie ou la personne de l'Empereur, et
contre la vie des personnes de la famille impériale. Au-
jourd'hui la peine de mort ne s'exécute que par un seul
mode, la décapitation au moyen de la guillotine, et n'est
accompagnée d'aucune aggravation de souffrances. La
mutilation du poing, infligée aujparricïde par le Code de
1810, a été supprimée en 1832. K. Bossange, Des crimes
et dis peines capitales, 1822, in-8°; Lucas, Du système
pmal et du système répressif en général, et de la peine de
mort en partictUier, 1827, in-8<* ; Ducpétiaux, De la peine
de mort, Bruxelles, 1827; Guizot, De la peine de mort en
matière politique, 18S8, in-8'^; Urtis, Nécessité du matn-
ficn de la peine de mort, 1831 ; Si 1 vêla, Du maintien de
la peine de mort, 1832; Roumieu, Plus d'échafaudi
Abolition de la peine de mort, 1833. R. d'E.
PEINTRE DU ROI (Premier), titre donné sous l'an-
cienne monarchie française, et jusqu'à Tépoque de la
Hévolution, à un peintre ordinairement distingué. Des
fonctions étaient attachées à ce titre : c'étaient celles d'or-
donnateur de tous les ouvrages de peinture et de sculp-
ture ^e le roi commandait; le premier peintre se trou-
vait ainsi en position d'être le protecteur des artistes, et
d'influer sur la direction du goût. Les peintres du roi de-
puis Louis XIV ont été : Lebrun, nommé en 1662; Mi-
gnard pierre), en 1690; Carie Vanloo, en 1695; Boucher,
en 1765; Pierre, en 1770. Sous le 1*' Empire français,
David fut peintre de l'empereur. A la Restauration ,
Louis XYIII donna le titre de son premier peintre à Gé-
rard. Ce titre n'a plus été accordé a aucun artiste depuis
la révolution de {830. C. D— t.
PEINTURE, art qui, à l'aide de lignes et de couleurs,
reproduit l'infinie variété des objets de la nature, et qui,
franchissant même les limites du monde matériel pour
s'élever aux plus hautes régions de la pensée et de l'ima-
gination, exprime le beau par des formes visibles. Les
connaissances nécessaires au peintre sont le dessin, Vana-
tomie, ItL perspective linéaire, la perspective aérienne, et
le clair-obscur. Pour réaliser les efiets qu'il ambitionne,
il lui faut le génie de Vinvention, la science de la compo-
sition, et une grande pratique, c.-à-d. tout ce qui tient
à l'exécution, au travail de la main. On doit encore ap-
porter un grand soin au broiement et k la composition
des couleurs, à la préparation de la matière sur laquelle
ces couleurs seront appliquées. O^dqu^ peintres pré-
parent sur la palette, avant de peindre, les teintes qui
leur sont nécessaires : d'autres les font avec le pinceau
au fur et à mesure de leurs besoins, ce qui produit plus
de variété dans le coloris. — Au point de vue des pro-
cédés matériels, on distingue la Peinture à Vhuile , à
fresque, à Vencat^tique, en détrempe, en miniature, à
V aquarelle, au lavis, à la gouache, au pastel, en camaïeu,
en mosaSque (V. ces mots). Par rapport aux matières sur
lesc[uelles on peint, on distingue la Peinture murale, sur
bois, sur toile, sur ivoire, sur émail, sur porcelaine, sur
verre f etc. Eu égard aux sujets représentés, on distingue
la Peinture d*histoire, de batailles, de portraits, de genre,
de paysages, de marines, d'animaux, de fleurs, de na*
ture morte, d'arabesques, de grotesques (F. ces mots).
— Le peintre Dufresnoy a composé un poôme latin sur
la peinture {De arte graphicà). V. Théophile, Schedula
diversarum artium, Paris, 1843, in-8<»; L.-B. Alberti,
Z)e ptcturd, Bâle, 1540, in-S»; Robert Fludd, Tractatus
de arte picturœ, Francfort, 1624, in-fol.; J* Schefl'er,
Graphice, ûl est de arte pingendi, Nuremberg, 1669;
A.-F. Doni, // Disegno, Venise, 1549, in-8<^; Lomazzo,
Trattato delV arte délia pittura^ Milan, 1585, in-4<>;
Léonard de Vinci, Trattato délia pittura, trad. en fran-
çais par Fréart de Chambray, 1051, 1716 et 1724; Alga-
rottiy Saggio sopra la pittura, traduct. en français paf
Pingeron, Paris, 1769, in-12; Roger de Piles, Cours de
peinture par principes, Paris, 1708 et 1720, in-12; War
tclet, VArt de peindre, 1760, in-4'>; Liotard, Traité des
principes et des règles de la peinture, Genève, 1 781, in-8°;
Gérard de Lairesse, Le Grand Livre des peintres, Paris,
1787, 2 vol. in-8®; Richardson, Traité de la peinture,
traduct. de l'anglais par Rutgers, Amsterdam, 1728,
3 vol. in-8°; Reynolds, Discours sur la peinture, traduct.
de l'anglais par Janssen, 1788 et 1806, 2 vol. in-8o; Ha-
gedom. Réflexions sur la peinture, traduct. de l'allemand
par Huber, Leipzig, 1775, in-8°; l'abbé de Marsy, Dic-
tionnaire abrmé de peinture et d'architecture, Paris,
1746, 2 vol. in-5<'; Pernetty, Dictionnaire de peinture, de
sculpture et de gravure, Paris, 1757, in-8<*; Watelet et
Lévesque, Dictionnaire de peinture, de sculpture et de
Çravure, Paris, 1792, 5 vol. ln-8o; Paillot de Montabert,
Yaité complet de la Peinture, 1828-1851, 9 vol. in-8'
et atlas.
Pour l'histoire de la Peinture, nous renvoyons aux ar-
ticles qui lui ont été consacrés pour chaque pays dans le
présent Dictionnaire , et en outre des ouvrages indiqués
dans ces articles, aux suivants : Bulenger, De Pictura,
plastice et st€Uuaria veterum, L^de, 1627, in-8<> ; Bellori,
Délia Pittura antica, Venise, 1697 ; Junius, De Picturà
Veterum, traité publié par Gnevius, Rotterdam, 1694 1
Durand, Histoire de la Peinture ancienne, Londres, 1 725 ;
Turnbull, Traité sur Vancienne Peinture, en anglais,
Londres, 1740: Requeno, Saggi stU ristabilimento deW
antica arte de Grecie de' Romani pittori, Parme, 1787,
in-4<*; Letronne, Lettres d^un antiquaire à un artiste
sur remploi de la peinture historique murcUe dans la
décoration des temples chez les Grecs et les Romains,
Paris, 1836, in-8«; Raoul-Rochette , Peintures antiques
inédites, Paris, 1836 , in-4<' ; Vasari, Vite de piii eœcel-
lenti pittori, Florence, 1550, traduit en français par Jean-
ron et Léclanché, Paris, 1840, 10 vol. in-80î Dati, Vite
de* pittori antichi, Florence, 1667, in-4®; Dezallier d*Ar-
genville. Abrégé de la vie des plus fameux peintres,
Paris, 1762, 4 vol. in-8°; Séroux d'Agincourt, Histoire de
Vartpar les monuments, 1809-23, 6 vol. in-fol.; Denon,
Monuments des arts du dessin chex les peuples anciens
et modernes, 1809, 4 vol. in-fol. ; Ch. Blanc, Histoire des
peintres de toutes les écoles, depuis la Renaissance jus-
qu'à nos jours, Paris, 1849-62, gr. in-4«.
PEniTURB (Académies de). Sans parler des confréries
d'artistes qui se placèrent sous le patronage de S* Luc
(F. ce moQ, la première Académie de peinture fut fondée
PËL
1398
PÊN
à Milan Ten 1484 par Ludovic le Maure, et placée sous
la direction de Léonard de Vinci. Des institutions du
même genre furent créées à Florence vers 1561, à Padoue
en 1710, à Bologne en 1712, à Panne en 1716, à Man-
toue en 1769, à Turin en 1777. — En France, VAcctdémie
de peinture et de sculptutw, dont Tidée appartient à I^e-
bnin, fut autorisée en 1648, et constituée définitivement
en 1655. Le chancelier Séguier et Mazarin en furent les
premiers protecteurs; parmi les membres primitifs, on
distingue Lebrun, Lesueur, Sébastien Bourdon, LaHyre;
Louis Boullongne, Sarrasin, etc. L*Académie avait déjà
occupé plusieurs maisons, lorsque Louis XIV lui alloua
une pension et un logement au Collège de France. Une
organisation nouvelle lui fut donnée par Colbert en 1663,
et des modifications y furent encore apportées en 1777;
à cette même époque on rétablit au Louvre. Elle avait un
corps de dignitaires comprenant un directeur, un chan-
celier, 4 recteurs, 2 adjoints à recteur, 16 honoraires
(dont 8 amateurs et 6 associés libres), 12 professeurs de
peinture et de sculpture, 6 adjoints à professeur, un pro-
fesseur de géométrie pour donner des leçons d'architec-
ture et de perspective, un professeur d'anatomie, 8 con-
seillers, un trésorier, et un secrétaire perpétuel. Ces titres
étaient conférés par l'élection, excepté ceux de professeur
de géométrie et d'anatomie, que donnait le directeur gé-
néral des bâtiments du roi. Quant au nombre des mem-
bres, d*où les femmes n'étaient pas exclues, il était illi-
mité, mais il ne s'éleva pas au-dessus de 120 à 130:
pour y être admis, il fallait présenter un morceau de
réception^ et obtenir le tiers des suffrages. La direction
des Gobelins, celle de la manufacture de Sèvres, la garde
des tableaux du roi à Versailles, la . conservation des
sculptures des maisons royales, étaient confiées à des
Académiciens. En 1701, les statuts de l'Académie furent
refondus; mais le décret du 8 août 1793 la supprima
avec toutes les autres Académies. La collection complète
de ses procès-verbaux depuis 1648 est conservée dans les
archives de l'École des Beaux-Arts (7. Beacx-Arts —
^Académie des). V. Vitet, VAccuiémie royale de peinture
et de sculpture. Étude historique^ Paris, 1861, in-8°. —
Plusieurs provinces curent des Académies de peinture
aussi bien que Paris : nous citerons celles de Nancy (171 1),
de Toulouse (1751), de Marseille (1753), de Bordeaux
( 1763), de Reims, de Dijon (1767), de Pau, de Metz, de
Clermont-Ferrand, d'Amiens, etc. — L'Espagne possède
une Académie de j^einture fondée à Madrid en 1752. On
en a créé à Ëd t)ourg en 1754, à Londres en 1768, à
Copenhague en 1738, à S*-Pétersbourg en 1757. L'Alle-
magne possède les Académies de Nuremberg (1662), de.
Berlin (1694), de Dresde (1697), d'Augsbourg (1712), de
Vienne (1726), de Mayence et de Manheim (1757), de
Stuttgard (1761), de Munich (1770), de Cassel (1775), de
Weimar (1777), de Francfort (1781), etc. B.
PÉJORATIF. V. DiHiNUTiF.
PÉLASGIQUE (Religion). V, Grecque (Religion), et,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire^ le
mot P&ASGES.
PéLASGIQDES (Laugues). V, iNDO-EUROPéEmiES.
péLASGiQUES (Monuments). F. Cyclopéens (Murs) et
Grecque (Architecture).
PÈLERIN (Le Voyage du). V. Voyage do Pèlerin.
PÈLERINAGE (du latin pêregrinatio)^ voyage de dévo-
tion que l'on fait à des lieux saints pour obtenir une
gr&ce ou s'acquitter d'un vœu. Au moyen &ge, les signes
distinctifs du pèlerin étaient le bourdon, l'escarcelle, le
cliapeau à larges bords, et le froc de laine souvent orné
de quelques coquillages plats, attachés sur la poitrine.
Les lieux de pèlerinage les plus célèbres pour les chré-
tiens sont le Saint Sépulcre à Jérusalem, les tombeaux de
S^ Pierre et de S^ Paul à Rome, l'église Notre-Dame de
Lorette dans les États de l'Église, le tombeau de S^ Benoit
au mont Cassin, S' Jacques de Compostelle en Espagne,
le tombeau de S^ Thomas Becket à Cantorbéry, ceux de
S' Martin de Tours, de S^* Radegonde à Poitiers, et de
S*« Geneviève à Paris, le Mont S*-Michel, Notre-Dame-
de-Bon-Secours près de Rouen, Notre-Dame-de-Liesse
(Aisne), S'«-Anne-d'Auray (Morbihan), etc. Les Mahomé-
tans ont aussi leur pèlerinage à La Mecque ; ils doivent le
faire au moins une fois.
PELERINE, sorte de grand collet rabattu qui tombe
par-dessus la robe des femmes, et couvre la poitrine et
les épaules comme le collet des pèlerins. Elle est tantôt
en étolTe de laine, tantôt en linge, suivant la saison. A
la fin du xviii* siècle, les hommes avaient des pèlerines
attachées à leurs redingotes, et l'on finit par bp mettre
aussi aux manteau Xo
PÉUGAN. L'image de cet oiseau représente symboli-
quement la charité, le dévouement de soi-même à l'in-
térêt des autres, et la rédemption de l'homme par le sang
de J.-C. On ne sait d'où vient, chez les Anciens, la fable
que le pélican s'ouvrait la poitrine avec son bec pour
nourrir ses petits de son sang. Le pélican a été employé
Suelquefois à la place de l'aigle-pupitre dans le chœuT
es églises d'Angleterre.
PELISSE (du latin pellis, p^u, enveloppe), manteau
ou mantelet de femme, ordinairement doublé ou garni
de fourrures. On donne le même nom à la veste galonnéo
et bordée de fourrures, que les hussards en grande tenue
laissent pendre sur leurs épaules par-dessus la veste or-
dinaire d'uniforme. Chez les Turcs, la pelisse s'appellt
cafetan {V, ce mot).
PELLETERIES ou FOURRURES. Les peaux de bêtes
ont été les premiers vêtements de l'homme ; la Genèse
nous apprend qu'Adam et Eve s'en couvrirent. Les poètes
grecs représentent leurs demi-dieux ou leurs héros en-
veloppés de peaux de lions, de tigres et de loups; c'était
aussi le costume des Amazones. Les peuples du lÛdi, ha-
bitant sous un climat chaud, adoptèrent de préférence
les éto£res légères; mais ceux du Nord portèrent de tout
temps des vêtements fourrés. Les Barbares qui envahirent
l'Empire romain étaient pour la plupart couverts de peaux
d'ours. Pendant le moyen ftge, la mode des fourrures fut
très-répandue; on en garnissait les manteaux, les cottes,
les capes, les chaperons et les robes ; les seigneurs por-
taient des vêtements fourrés, et l'hermine resta long-
temps en Occident ce qu'elle est encore dans quelques
pays de l'Orient, un signe de supériorité ou de comman-
dement. Il y eut une telle fureur de porter des pelleteries,
que des édits de Philippe le Bel en France et de Henri II
en Angleterre eurent pour but de la réprimer ; au
xiv* siècle, l'usage des fourrures fut interdit aux Anglais
qui n'avaient pas 100 liv. sterl. de revenu. Par un ana-
chronisme commun dans ces temps-là, les auteurs des
vignettes des manuscrits et les peintres verriers ont re-
présenté avec des fourrures les anciens chefs des Franks
et même les personnages de l'antiquité. Les fourrures
variaient suivant les conditions sociales : aux nobles ap-
{>artenaient l'hermine et le vair ; aux bourgeois, la martre,
a loutre, l'écureuil et l'agneau; aux gens de la campagne
et aux moines, le lapin, le chat, le blaireau, etc. On
faisait même en fourrures les couvertures de lit. Dès le
xii* siècle l'art de les teindre était connu. L'abstinence
de pelleteries semblait être une grande mortification :
Philippe-Auguste et Richard Cœur-de-Lion, à leur départ
pour la Croisade, Jurèrent de n'en plus porter; Louis IX
fit de même, par motif de piété. Plusieurs termes du Bla-
son, fxiir, gueules, hermine, sable, sinople, pourpre^
furent empruntés aux fourrures.
PELLETIERS ou FOURREURS, un des six grands corps
de métiers de Paris. Aux entrées des rois et des reines,
ils portaient le dais royal. Leurs statuts remontaient au
XIII* siècle.
PELOTE (Jeu de la), Jeu de paume auquel se livraient,
le jour de P&ques, dans la cathédrale d'Auxerre, les cha-
noines et les magistrats, soutane et robe retroussées. Ce
singulier usage fut aboli en 1531.
PELOTON, terme d'Art militaire qui a eu diverses ac-
ceptions : au XVI* siècle, quand on mélangeait les armes
de pied et de cheval , le peloton était un groupe d'une
3uarantaine d'arquebusiers, répartis entre les escadrons
'hommes d'armes. Au xvii*, on appela demi-quart de
manche, demi-quart de rang, une fraction d'infanterie à
feu près comparable au peloton actuel. L'ordonnance de
766 emploie le mot peloton pour signifier, tantôt double
division, tantôt demi-division. Depuis 1774, il a une si-
gnification précise : le peloton est au point de vue de la
tactique ce qu'est la compagnie au point de vue de l'ad-
ministration. Un bataillon sur le champ de bataille ou
en marche est divisé en pelotons, égaux en force autant
que possible, ce qui n'a presque Jamais lieu dans la divi-
sion par compagnies. Peloton est un terme de comman-
dement, compagnie n'en est jamais un. Le capitaine
d'une compagnie commande toujours les mêmes hommes;
celui d'un peloton peut ne pas les avoir tous ou en avoir
un plus grand nombre sous ses ordres, si l'équilibre
tactique exige que des soldats soient admis ou retranchés
momentanément. Dans Vécole de peloton, on s'exerce à
la manœuvre du peloton.
PELTASTES. i V, ces mots dans notre Dictionnaire
PELTE. ) de Biographie et d'Histoire,
PÉNAL (Code\ celui de nos Codes où sont contenues
les dispositions répressives des crimes, des délits et des
PEN
1399
PEN
coQtraTentions. Il a dissipé Tobscuritë de Tancienne lé- \
gislation, dont les dispositions compliquées et confuses
laissaient trop de place à Parbitraire du Juge. L* Assem-
blée constituante avait posé un principe fécond en décr6-
tant régalité de la peine pour tous. Un premier essai de
codification fut tenté en 1701, par la Loi des 25 sept, et
6 oct., dont le tort était de n*édicter que des peines fixes,
que le juge ne pouvait abaisser. Puis vint le Gode du
3 brumaire an iv (25 oct. 1795), sous le titre de Code des
délits et des peines : une part trop large y était faite à
(instruction criminelle. Sous le Consulat, une commis-
sion fut nommée pour jeter les bases d*une codification
nouvelle ; mais la discussion des articles fut interrompue
en Tan xiii (1805) pour ne reprendre qu'en 1808. Le 8 Jan-
vier fut présenté au Conseil d*État le nouveau projet,
divisé en deux codes distincts, le Code d'Instruction
crimineile et le Code pénal. Ce dernier commença à être
discuté le i octobre 1808, et Texamen continua Jusqu'au
18 janvier 1810. Il fut mis en vigueur à partir du l'^* Jan-
vier 1811, et comprend IV livres et 484 articles. Le pre-
mier livre traite des peines en matière criminelle et
correctionnelle, et de leurs effets; le second, des per-
sonnes punissables, excusables ou responsables pour
crimes et délits; le troisième, des crimes et des délits,
et de leur punition ; le quatrième, des contraventions de
police, et de leur répression. Le Code pénal subit quel-
ques modifications pendant la Restauration; mais les
Ci us importantes sont le résultat de la loi du 28 avril
832, qui en remania, pour les adoucir, près de 80 ar-
ticles. V. Bavoux, Ijeçons préliminaires sur le Code pé"
naly 1821, in-8<*; Legraverend, Traité de la législation
criminelle en France, revu par Duvergier, 1832, 2 vol.
in-4*; Carnot, Commentatre sur le Code pénal, 2* édit.,
1836, 2 vol. in-4»; Brissot-Warville, Théorie des lois
erimmelles, 1836, 2 vol. io-8«; Rauter, Traité théorique
et pratique du Droit criminel français^ 1836, 2 vol. in-8<>;
Ro^n, Codes d^instruction criminelle et pénal expli-
ques, 4* édit, 1849, 2 vol. in-8<*; Bonnin, Commentaire
du Code pénal, 1845, in-8«; Chauveau et Faustin Hélie,
Théorie du Code pénal, 3« édit., 1853, 6 vol. in-8*; Tré-
butien. Cours élémentaire de Droit criminel, 1854, 2 vol.
in-8*; F. Berriat Saint-Prix, Analyse du Code pénal,
1855, gr. in-8*; Bertauld, Cours de Code pénal et Leçons
de législation criminelle, 2* édit., 1850, in-^«; A. Blanche,
Études pratiques sur le Code pénal, 1861, in-8\ R. d'E.
p^AL (Droit). V. DnoiT cruiinel.
PÉNALE (Clause). V. Clause.
PÉNALES (Colonies). V. Colonies, dans notre Diction-
naire de Biographie et d'Histoire.
PÉNALITÉ , système de peines établies par les lois.
V, Peike.
PENCE. V» Penny.
PENCHANTS, inclinations du caractère à telles ou telles
actions. Ils sont distincts des appétits, en ce qu'ils vien-
nent, non du corps, mais du cœur, et appartiennent à la
vie morale, non à la vie des sens ; puis des passions, en ce
quMIs sont primitifs et ne s'allument ni ne s'éteignent au
courant de la vie, mais nous font descendre une pente
douce et facile. Ils sont inhérents à notre nature, mais ne
dépendent pas des organes corporels {V. Phr6«ologib).
Les penchants nous poussent vers un but, mais sans nous
déterminer fatalement à des actes nécessaires, comme le
fait l'instinct chez les brutes. Pour y r^ister, nous avons
la volonté, Téducation , quelquefois la crainte d'un mal
ou d'un châtiment.
PENDAISON, genre de supplice capital qui était usité
en France avant 1789, pour les condamnés à mort, et qui
existe encore en Angleterre, aux États-Unis, et en Es-
pagne.
PENDENTIF, terme d'Architecture. On l'applique :
1* dans une voûte sphérique percée de baies cmtrées,
aux parties qui se trouvent entre ces baies ; 2** dans
une voûte d'arête, aux espaces compris dans les angles
qu'elle forme à ses points de naissance; 3* dans une tour
carrée que couronne une coupole, aux encorbellements
placés dans les angles, et qui sont destinés à soutenir
jne partie de la coupole. Dans ce dernier cas , le pen-
lentif est formé par un petit arc, ou disposé en trompe;
quelquefois c'est un simple plan incliné : on lui donne
lussi les noms de panache et de fourche. On peut citer
:omme modèles de pendentifs ceux des Invalides de
l^aris, dont les surfaces sont taillée» de sculptures repré-
lentant les Évangélistes, et ceux du Panthéon (S^*^-Genc-
Tîève), peints par Gérard. — Les pendentifs de moderne
«ont les portions triangulaires de voûtes ogivales com-
prises entre les arcs-doubleaux, les formerets, et les ner-
vures.— las pendentifs de Valence sont ceux en manière
de cul-de-four qui couvrent, par exemple, les croisées des
églises S'-Sulpice et S*-Roch à Paris ; leur nom vient ,
dit-on, d'un monument funéraire de Valence en Dauphiné,
où l'on en prit le modèle. — Le mot pendentif s'emploie
aussi comme synonyme de cul-de-lampe et de clef pen-
dante {V. ces mots),
PENDJABI, dialectp Indien dérivé du sanscrit, et parlé
dans le PendlJàb. Cest celui dans lequel sont écrits les
livres saints des Seykhs. On en a des Grammaires par
Carey (Serampour, 1812), et par Leach (Bombay, 1838),
et un Dictionnaire par Starkey (Calcutta, 1850).
PENDULE, horloge de chambre ou de salon, qu'on
place d'ordinaire sur la cheminée. Son nom lui vient de
ce que la marche en est réglée par un pendule. Le mou-
vement est enveloppé d'une caisse en alb&tre, en marbre,
en bronze, en cuivre doré, ou en ébénisterie, surmontée
de sujets variés. Au xvn* siècle, et même au xviii«, on
plaçait souvent les pendules sur un pied ou console fixé
au mur de l'appartement.
PÉNICHE (de l'anglais pinnace, second canot d'un
vaisseau), nom donné à toute embarcation de b&timent de
guerre, généralement fine et légère, plus propre à aller à
la voile qu'à la rame. On emploie comme garde-côtes des
péniches bordant beaucoup d'avirons, gréées comme un
lougre, et munies de pierriers, parfois d'un canon en
coursive.
PÉNITENCE (du latin poenitentia, repentir), l'un des
Sacrements de l'Église catholique, celui par lequel le
prêtre remet les péchés à ceux qui se confessent à lui. Il
embrasse la contrition^ la confession, Vabsolution, et la
satisfaction (V. ces mots). Le tribunal de la pénitence
est le lieu ou le prêtre reçoit la confession du pénitent
On nomme Psaumes de la pénitence sept psaumes de
David que l'Église a choisis pour servir de prières à ceux
qui demandent à Dieu pardon de leurs péchés. — La Pé-
nitence est encore la peine expiatoire que le prêtre im-
pose an pénitent pour la satisfaction des fautes dont il
l'absout , par exemple, une prière, un jeûne, une aumône,
un pèlerinage, etc. Les Juifs faisaient pénitence avec le
sac, la cendre et le dlice. L'interdiction , VexcommuniF-
cation, Vamende honorable {V. ces mots)^ peuvent être
rangées au nombre des pénitences.
pàirTENCB (Canons de la). F. Canons.
PÉNITENCERIE , tribunal ecclésiastique de la cour de
Rome, dans lequel s'examinent les c€U réservés au souve-
rain pontife, et se délivrent les bulles, gr&ces et dispenses
concernant la conscience, comme les dispenses- de vie re-
ligieuse, de certains empêchements au mariage, les aJ^so-
lutions de censures, etc. Il est composé d'un cardinal pré-
sident, appelé grand pénitencier, d'un auditeur de la
Rote appelé régent, d'un dataire, de 3 procureurs ou se-
crétaires, de 2 consulteurs,d'un officier c|[ui signe et scelle,
d'un correcteur qui revise, et de 3 écrivains. Les pièces
qu'il délivre sont gratuites, et portent les mots pro Deo
(pour Dieu); elles ne sont pas remises à l'impétrant, mais
à un prêtre que celui-ci a choisi , et qui les brûle, aprè»
l'avoir confessé et absous.
PÉNITENCIER , prêtre auquel l'évêque donne le pou-
vohr d'absoudre des cas réservés dans tout le diocèse.
pÉNrTENCiER, prisou OÙ sout appliqués les différents sys-
tèmes de l'emprisonnement individuel. Le mot n'est ap-
pliqué en France qu'aux prisons militaires de cette espèce,
créées par ordonnance du 3 déc. 1832, telles que celles
de Lyon, de Metz, de Besançon, d'Alger, et autrefois de
S^-Germain-en-Laye, où Ton envoie les condamnés à
plus d'un an de prison. V. au Supplément.
PÉNITENT, celui oui a recours au sacrement de la Pé-
nitence, ou qui a quelque exercice de pénitence à accom-
plir. On donne le même nom aux membres des confré-
ries qui font profession de certaines pénitences, et qui ,
surtout dans les pays du Midi, vont en procession couverts
d'une espèce de sac et d'un capuchon ne laissant voir que
les yeux.
PÉNITENTIAIRE (Système }, système qui a pour but de
prévenir les inconvénients de l'emprisonnement commun
et de réformer les coupables. Autrefois l'incarcération des
prisonniers n'était qu'un acte de vindicte publique, avec
divers degrés de ch&timent: aujourd'hui, on veut que
l'expiation infligée par la société ait le double but de punir
et de moraliser. Le système d^Aubum , appliqué en 1816
dans la ville de ce nom aux États-Unis, consiste & isoler
les détenus dans des cellules pendant la nuit, à les faire
travailler, manger et se promener en commun pendant le
jour, en observant le silence le plus rigoureux ; toute dis-
traction, toute communication des prisonniers par pa*
-■'■—'■
PEN
1400
PEk
rôles, par gestes, par regards, sont instantanément pu-
nies d*an certain nombre de coups de nerf de bœuf. Ce
système a le tort d*exposer le condamné à une tentation
continuelle. Il a été appliqué en France aux pénitenciers
militaires. Le système pensylvanien ou de Pliiladelphie,
diaprés lequel on enfermait nuit et jour le prisonnier
dans une cellule où n'arrivait aucun bruit du dehors, et
cela sans travail, sans promenade, sans échange de pa-
role ou de regard avec qui que ce fût, a dû être aban-
donné : au lieu de punir et de moraliser, il abrutissait,
il rendait fou , il tuait. Un système mixte fut introduit
dans les maisons centrales de France par arrêté ministé-
riel du 10 mai 1830 : les détenus couchaient séparément
dans des dortoirs communs, éclairés et surveillés; pour
tout le reste, la discipline était la même que dans les
prisons américaines : ce système ne produisit pas les
fruits qu*on en attendait La loi sur la réforme des pri-
sons, votée en 184i, établit le système celtulaire, consis-
tant à renfermer les prisonniers dans des cellules isolées ,
mais à leur donner la distraction du travail , des prome-
nades individuelles, et d'un contact journalier avec les
employés de la maison et avec les personnes honnêtes du
dehors admises à les visiter, ainsi qu'une instruction
scolaire, morale et religieuse. On n'a appliqué ce système
qu'à un petit nombre de prisons, entre autres, celles de
la Roquette et de iMazas à Paris. En Angleterre, le système
pénitentiaire, après avoir traversé bien des vicissitudes,
embrasse ai^ourd'hui trois périodes distinctes : 1<* Yem-
prisonnement celltUcUref qm est d'un an au plus, dans
les prisons de Pen ton ville et de Milbank; le calme de
cette vie nouvelle, le travail, les lectures choisies, les
consolations et les encouragements du chapelain, la ré-
fularité des exercices, doivent transformer le condamné;
° la vie en commun dans des ateliers de travatuc pu-
blics, pendant un temps proportionné à la durée de la
peine entière; ces ateliers sont dans la presqu'île de
Portland (Dorset); les travaux exigeant une grande dé-
pense de force, les condamnés reçoivent une nourriture
substantielle, sont bien vêtus et confortablement couchés;
on développe leur instruction morale et religieuse par un
enseignement élémentaire, des lectures, des chants en
chœur; la nuit, ils sont en cellule; 3<* la transportation
dans une colonie. Les femmes ne sont pas soumises aux
travaux publics, et on ne transporte que celles auxquelles
leur constitution physique permet de supporter ce genre
do peine. Les enfants condamnés à la transportation su-
bissent l'emprisonnement cellulaire et le travail public à
Parkhurst, dans l'Ile de Wight. V. Lucas, Du système
pénitentiaire en Europe et aux États-Unis, 1828-31,
3 vol. in-8« ; Blosseville, Histoire des colonies pénales de
V Angleterre en Australie, 1831 , in-8o; Aylies, Du sys-
tème pénitentiaire et de ses conditions fondamentales ,
1836, in-8<>; Marquet-Vasselot. Examen historique et cri-
tique des diverses théories pénitentiaires, 1836, 3 vol.
in-8<^; Bérenger, Des moyens propres à généraiiser en
France le système pénitentiaire, 4* édit., 1837, in-8'*, et
De la répression pénale, de ses formes, de ses effets, 1855,
2 vol. in-8<*; Julius, Du système pénitentiaire américain ,
1837, in-8<^; Ducpétiaux, Du progrès et de Vétat actuel
de la réforme pénitentiaire et des institutions préventives
aux États-Unis, en France, en Suisse, 1838, 3 vol. in-18;
Léon Faucher, De la réforme des prisons, 1838, in-8*»;
Grillet-Wammy, Manuel des prisons, ou Exposé histo-
rique, théorique et pratique du système pénitentiaire,
1838, in-8^; Alauzet, Essai sur les peines et le système
pénitentiaire, 1842, in-8<^ ; Allier, Études sur le système
pénitentiaire et les sociétés de patronage, 1842, in-8<^;
fi^umont et Tocqueville, Du système pénitentiaire aux
États-Unis, et de son application en France, 1832, in-8'^;
Lafarelle, Coup d'œil sur le régime répressif et péniten"
tiaire de Vancien et du nouveau monde, 1846, iaS^ ; Le-
pelletier (de la Sarthe), Système pénitentiaire, 1854,
gr. in-8*'. V. aussi Prisons.
PÉNITENTIEL, livre qui renferme les canons de la pé-
PENNE ou PENNAGE , en termes de Blason, se dit des
plumes (en latin pennœ) adaptées à un chapeau sur
un écu.
PENNE, se disait, au moyen &ge, des créneaux d'une
muraille de ch&teau , et du château même.
PBNNB, en termes de Marine, extrémité supérieure
d'une vergue à antenne. Faire la penne, c'est apiquer
Tantenne de manière que la partie inférieure soit appli-
quée au m&t.
PENNILUONS, pièces de chant des Gallois, improvi-
iées par le chanteur sur les modulations d'un harpiste.
PENNING, monnaie de compte de Hollande, valant le
6* du sou ou un denier.
PENiNON. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d* Histoire,
PENNY, au pluriel pence (de l'allemand pfennig )n
monnaie anglaise, jadis d'argent, aujourd'hui de cuivre,
et qui vaut 12 centimes 1/2. Il en entre 12 au schelling,
et 240 à la livre sterling. Le haXf-penny est un demi-
penny, et le farthing un quart de penny.
PÉNOMBRE, en termes de Peinture, point où l'ombre,
s'associant à la lumière, établit le passage du clair à
l'obscur.
PENON (pour pennon)^ sorte de girouette composée
d'un b&ton, garni, à sa partie supérieure, de petites
tranches de liège, sur lesquelles sont plantées des plumes
qui indiquent la direction du vent.
PENORCON, espèce de pandore ( V. ce mot) qui était
en usage au xvu* siècle. Il avait un large manche garni
de 9 cordes.
PENSÉE. C'est tantôt le principe intelligent lui-même
(F. Intelligence), tantôt et plus souvent l'acte dans le-
quel il se manifeste, pris dans le sens le plus général , et
sans acception d'objet ni de degré. On veut dire par là
que le nom de pensée désignera aussi bien un souvenir
qu'une perception présente , un jugement qu'une simple
conception. Descartes va plus loin : en donnant pour
point de départ à sa philosophie, et pour base à toute
certitude, le fait de l'existence personnelle, je suis, attesté
par la conscience, je pense, il est tout disposé à enve-
lopper sous cette désignation commune toutes les formes
de l'activité morale, et même k faire de la pensée le fond
même de notre être : « Qu'est-ce que je suis? dit-il
(2« Médit.) ; une chose qui pense. Qu'est-ce qu'une chose
qui pense? C'est une chose qui doute, qui entend, qui
conçoit, qui affirme, qui nie, qui veut, qui ne reut pas,
qui imagine aussi , et qui sent. » Qu'on dise que c'est le
même principe qui sent, pense et veut, à la bonne
heure ; mais c'est confondre mal à propos les différentes
fonctions de ce principe que de les ramener ainsi à un
type unique. Toute science vit de distinctions, et les dis-
tmctions les meilleures sont celles qui correspondent le
plus exactement aux difT^nces que présentent dans la
nature les phénomènes ou groupes principaux de phéno-
mènes. Or, quoi de plus différent qu'une sensation, une
pensée, une résolution volontaire? La même nécessité
d'analyse doit faire distinguer dans la Pensée, suivant
la nature des objets auxquels elle s'applique et les con-
ditions dans lesquelles elle s'exerce, les modes secondaires
de la Conscience, de la Perception extérieure, de la
Mémoire , de la Raison , et les différentes fonctions du
Raisonnement; à un autre point de vue, les opérations
de plus en plus compliquées de la simple Conception, du
Jugement et du Raisonnement (F. ces mots). — Attribut
essentiel de l'&me humaine, la pensée a été, à juste titre,
considérée par les métaphysiciens les plus exacts, comme
un de ceux que l'on doit concevoir portés & la perfection
dans la nature divine. C'est par une exagération de ce
principe, que, dans la théodicée péripatéticienne, on
suppose qu'en Dieu la pensée parfaite ne peut penser
qu'un objet parfait , c-à-d. elle-même ; et c'est ainsi qu'il
faut expliquer cette fameuse et bizarre formule : « La
pensée est la pensée de la pensée. » Bornons-nous à
croire avec Fénelon que a Dieu, qui nous a faits et qui
nous a donné l'être pensant , n'aurait pu nous le donner
s'il ne l'avait pas. Il pense donc, et il pense infiniment;
puisqu'il a la plénitude de l'être, il faut qu'il ait la pléni-
tude de l'intelligence, qui est une sorte d'être. » {De
Vexistençe de Dieu, u* part. art. 5). B — ^e.
PENSÉES, nom donné à certains ouvrages composé»
de réflexions philosophiques ou morales sur des sujets
détachés. Outre les recueils qu'on a formés d'extraits d&
différoDta auteurs, il existe quatre principaux recueila
qui ont le titre de Pensées, et que nous ont laissés Marc-
Aurèle, Pascal , Montesquieu, et Joubert.
Les Pensées de Marc-Aurèle sont des réflexions écrites
en grec au jour le jour, par un prince qui , toute sa vie^
même au milieu des préoccupations dp pouvoir, trouva de
la douceur à cultiver la philosophie. Le recueil qu'il inti-
tula : Pour lui-même comprend 12 livres : le l*' est une
énumération touchante, dictée par la reconnaissance, des
leçons que Marc-Aurèle devait aux différents membres de
sa famille ou à ses maîtres, et des biens que lui avaient
accordés les Dieux ; les onze autres ressemblent à nu
journal où cet empereur, dans ses moments de loisir. s<%
plut à déposer, sans beaucoup d'ordre, les pensées n'\e
lui suggéraient les événements de son règne et se^ lat^
PEN
1401
PEN
ditations assidues. On est saisi de surprise et comme de
vénération, lorsqu'on parcourt ces entretiens d'une &me
d'élite avec elle-même, et Ton ne sait qui le plus ad-
mirer, de l'homme, du philosophe, ou du prince. L'homme
se tient en garde contre la haine, la colère, l'impatience
même, et se rappelle à la mansuétude envers tous ses
semblables, qu'il nomme des amis naturels. Le philo-
sophe parle tour k tour en stoïcien et en chrétien : stoï-
cien, il se promet de ressembler au promontoire contre
lequel se brisent les vagues impuissantes, ou , quand les
objets extérieurs l'ont un instant troublé malgré qu'il en
eût, de revenir promptement à lui-même et de rétablir
rharmonie dans son tme\ en présence des ténèbres, du
néant , du flux étemel de la matière et du temps, il se
soutient par sa propre vertu, et attend sans impatience
le terme marqué à sa vie, car il sait que rien n'arrive
qui ne soit dans les convenances de la nature univer-
selle; il se défend du découragement et de la plainte
dans les épreuves; il les accueille avec complaisance,
parce qu'elles servent au bien général , et que ce qui sert
à l'essaim sert aussi à l'abeille. Chrétien à son insu , il
veut que l'accomplissement du bien soit désintéressé;
pour lui, tout ce qui tient du corps est un fleuve qui
s'écoule, tout ce qui tient de l'&me n'est que songe et
fumée, la vie est un combat et un exil, et la gloire
posthume un oubli; la Justice, les actions utiles au genre
humain, voilà ce qui a du prix; Tinjustice, le mensonge,
la recherche des voluptés, la crainte des épreuv&s, autant
d'impiétés. Empereur, il se recommande la modération
et la clémence, la persévérance dans les desseins mûre-
ment étudiés, le mépris de la fausse gloire et l'amour du
travail , la simplicité de cœur avec ses amis, la haine de
la flatterie et des délations, l'équité, le respect du mé-
rite, la modestie et la docilité de quelque part que vien-
nent les bons avis, la pratique des mœurs anciennes sans
ostentation ni apparat , l'épargne des deniers publics, le
iévouement infatigable à la prospérité de tout l'État.
Les Pensées de Pascal sont les fragments ou |)Iutôt les
matériaux d'un ^nd ouvrage que le pieux solitaire de
Port-Royal méditait en l'honneur et pour la défense de
la religion. J] se proposait de confondre les ennemis
:ommuns des Jansénistes et des Jésuites, les esprits forts,
les sceptiques et les impies. L'ouvrage eût été didac-
tique; mais, pour ne perdre aucun moyen d'agir sur ses
lecteurs,.pour prévenir la monotonie inhérente aux écrits
de cette sorte, Pascal eût sans doute mis en usage tous
les artifices du style : en effet, on trouve çà et là, parmi
les PenséeSj des traits d'histoire ancienne et moaeme,
des dialogues d'un tour singulièrement vif et original ,
une prosopopée dont l'accent inspiré rappelle celle de
Lucrèce ou la Nature gourmande l'homme qui s'effraye et
s'indipe de mourir (art. xn, p. 175); en un mot, toute
une nche et saine rhétorique. Quant à l'ordonnance du
livre, Pascal l'avait fait connaître lui-même dans un En-
tretien dont nous possédons l'abrégé ; le plan renfermait
deux parties : 1^ peindre l'homme en présence du monde
extérieur, en lui-même, et dans la société, et, par le
tableau des contradictions de sa nature, lui inspirer le
désir de connaître enfin qui il est, d'où il vient, et où il
va; ^ montrer que ni les philosophies ni les religions
anciennes ne lui donnent le mot de l'énigme, mais que
la religion chrétienne, prouvée par les destinées extraor-
dinaires du peuple Juif , par les saintes Écritures, les mi-
racles et les prophéties, par la doctrine et la vie de J.-G.,
par les apôtres, les martyrs et les saints, peut seule dis-
siper l'incertitude de son esprit et calmer les angoisses
de son &me. — Nous connaissons , ]>ar V Entretien avec
M. de Sacy sur Êpictite et Montaigne, la doctrine de
Pascal. Là, aprto avoir exposé ce qu'il considère comme
le côté solide ou ie côté faible de l'une et l'autre école, il
conclut, en vrai Janséniste, que la source de leurs erreurs
est « de n'avoir pas su que l'état de l'homme à présent
diffère de celtii de sa création ; de sorte que l'une, remar-
quant quelques traces de sa première grandeur et igno-
rant sa corruption, a traité la nature comme saine et sans
besoin de réparateur, au lieu que l'autre, éprouvant la
misère présente et ignorant la première dignité, traite la
nature comme nécessairement infirme et irréparable...
La doctrine de l'Évangile accorde seule ces contrariétés :
car, tandis que les sages du monde placent les contraires
dans un même sujet , la foi apprend à les mettre en des
sujets diflérents, ce qu'il y a d'infirme appartenant à la
nature, ce qu'il y a de puissant appartenant à la grâce. »
L'argumentation de Pascsd tend à prouver que l'homme,
•^ndamné à l'erreur par sa nature décnue, ce que
B'aralent pas vu les Stoïciens, mais capable aussi de la
vérité par la gr&ce, ce que n'a pas remarqué Montaigne,
doit s'humilier pour obtenir l'assistance divine, et qu'ainsi
la foi est l'unique refuge où il puisse trouver une lumière
pour son espnt et une règle pour sa conduite. Les Pen^
sées ne sont que le développement de ce système. Pas-
cal, mettant l'homme en présence de la nature, entre
l'infini et le néant, comme entre deux abîmes, le réduit
à n'apercevoir que quelque apparence du milieu des
choses, dans un désespoir éternel de connaître ni leur
Ï principe ni leur fin. Il est vrai qu'après avoir ainsi jeté
'homme comme un atome dans l'immensité de la na-
ture, il le proclame supérieur à l'univers par la pensée ;
mais c'est pour aboutir à cette triste conclusion : s'il se
vante. Je l'abaisse; s'il s'abaisse, Je le vante, et le con-
tredis toujours, jusqu'à ce qu'il comprenne ({u'il est
un monstre incompréhensible. Considérez maintenant
l'homme en lui-même, avec ses dispositions à l'orgueil
et à la vanité ; étudiez la puissance de l'imagination sur
sa conduite, sur ses jugements et ses opinions ; observez
ses occupations et ses divertissements ; examinez les di-
verses facultés de son intelligence ; enfin , jetez les re-
gards sur la société, et méditez sur les spectacles que
vous offrent l'inégalité des conditions, les lois, la justice,
la force et le gouvernement; tout, selon Pascal, vous
attestera la corruption présente de la nature humaine, et
la nécessité de chercher en Dieu, en Dieu seul , la vérité
et le bonheur. En vain rend-il hommage à la raison ; en
vain dit-il quelque part qu'elle nous commande plus
impérieusement qu'un maître, parce qu'en désobéissant
à l'un on est malheureux, et qu'en désobéissant à l'autre
on est un sot; il semble qu'il n'établisse la puissance de
la raison que pour lui assurer le droit de se démontrer à
elle-même son insuffisance. Et telle est sur ce point la
hardiesse de conviction de Pascal , telle est en cela sa res-
semblance Uvec Montaigne, qu'il a pu émre certaines
pensées qui vont jusqu'à blesser le sens commun et la
notion naturelle de la justice par une apparence singu-
lière d'audace sophistique, de déraison, et même d'ini-
quité. Qu'on lise ce qu'il dit des médecins et de leurs
bonnets carrés (art. m, p. 34), de l'égalité des biens <^'il
proclame Juste (art. vi, p. 74), de la Justice que fait et
défait la mode (art. m, p. 37; v, 73); qu'on le voie
mettre sur la même ligne, pour les poursuivre de son
persiflage, les soldats de Mahomet , les voleurs, les héré-
tiques, etc. (art. vi, p. 93), et approuver les erreurs com-
munes qui fixent l'esprit des hommes, sous prétexte qu'il
ne leur est pas si mauvais d'être dans l'erreur que dans
une curiosité inquiète des choses qui leur échappent
( art. VII , p. 107 ) ; qu'on l'entende enfin s*écrier que se
moquer de la philosophie, c'est vraiment philosopher
(t&., p. 115) : et l'on conviendra qu'il est difficile de con-
tredire plus ouvertement les inspirations du bon sens,
au moins en écrit , ou de toucher de plus près au scep-
ticisme universel. Seulement , tandis que Montaigne s'ar-
rête à ce point, et proclame que le doute, ou, comme
il dit lui-même, l'ignorance et l'incuriosité sont deux
doux oreillers pour une tête bien faite, Pascal suit son
chemin pour aller chercher ailleurs le repos et la félicité.
La conclusion de Montaigne n'est plus ^ue la prémisse
de Pascal : « Que sais-Je? » Voilà le dernier mot des con-
naissances humaines; tenons-nous-y, dit l'un; deman-
dons à Dieu la vérité, dit l'autre. Pascal était profondé-
ment convaincu de la vérité de sa religion, et si sa
confiance en la raison fut quelque peu ébranlée par lus
arguments de Montaigne, sa foi ne le fut pas. Mais comme
il composait son ouvrage pour les incrédules, c'est par la
raison, dont il avait battu en brèche l'autorité (art. ni,
p. 50; VII, p. 104; x, p. 152), ju'il prétendit les con-
fondre, et il crut possible son triomphe. On ne peut le
nier, il y a, dans ses preuves, de quoi surprendre et
forcer à la méditation, sinon convaincre le sceptique. Et
pourtant, chose étrange dans Pascal qui veut faire aimer
la religion avant d'en établir le caractère divin, la sienne
est plus propre à troubler l'àme et à la terrifier qu'à
l'encourager et l'affermir. Y a-t-il donc une grande dou-
ceur à penser que la justice envers les réprouvés est
moins énorme que la miséricorde envers les élus (art. x,
p. 144), et qu'ainsi l'éternité des récompenses est plus
incompréhensible que celle des châtiments? la cœur et
la raison ne répugnent-ils pas à croire qu'il faille définir
la religion chrétienne « une religion contre nature, contre
le sens commun, contre nos plaisirs » (art. xi, p. 170);
qu'il faille, pour son salut , fuir la société de ses sem-
blables, et répéter avec le janséniste : « On mourra seul ,
il faut donc faire comme si on était seul » ( art. xiv,
p. 188)? Peutron admettre sans effroi que la grâce, con-
PEN
1402
PEN
dition nécessaire du salut, est toute gratuite, qu*elle
souffle où il lui plaît, et que les impies peuvent être ainsi
en peu de temps plus remplis de foi que les croyants, et
ceux-ci au contraire tomber dans Taveuglement où sont
les autres? (art. ix, p. 141 ; cf. 492-03).
Tel est le système de Pascal. Contrairement à Des-
cartes qui sépara nettement la religion de la philosophie,
et qui fit bien, Pascal subordonne la philosophie à la re-
ligion, ou plutôt à sa religion, au Jansénisme: hors de là
point de salut, ni de vérité inébranlable. Ce fut sa con-
viction, mais aussi son tourment. Tandis que Descartes,
pour avoir distingué les vérités de la raison des dogmes
de la foi , pour s'être enfermé de parti pris dans le do-
maine de l'intelligence pure, y gagna de pouvoir se livrer,
au sein d'une inaltérable quiétude, à ses méditations sur
l'àme et sur Dieu, Pascal, pour avoir entrepris de prouver
la révélation comme une vérité de raisonnement, vécut
au milieu des angoisses : comme si ce n'était pas assez,
pour agiter sa vie» de l'incertitude cruelle où le tenaient
les doctrines jansénistes sur son propre sort, il prit en
quelque façon charge d'&mes ; il osa former le dessein de
rendre désormais le doute impossible en matière reli-
gieuse, et d'assurer à jamais, par la rigueur de sa dé-
monstration, à tous les hommes de bonne volonté la paix
et la sécurité dans la foi. De son argumentation allait dé-
pendre peutrètre le bonheur ou le malheur éternel de
quiconque se fierait à ses lumières. De là les efforts opi-
niâtres de sa pensée, toujours active et Jamais satisfaite.
Quoi d'étonnant , si sa vie fut un long martyre, et si son
style, qui reflète tous les mouvements de son &me, attei-
gnit une désespérante perfection? Descartes avait intro-
•duit dans notre idiome la Justesse, la netteté, la lumière;
Pascal , outre la force et la rigueur géométrique, lui donna
l'éclat et la passion. — Quoique toutes les pensées de
Pascal aient rapport à la religion, cependant le plan quMl
8*était tracé n'était pas tellement étroit auMl n'ait su y
Jeter des aperçus, souvent d'une originalité ou d'une har-
diesse extraordinaire, sur tous les sujets qui intéressent
les hommes. Précurseur de Bossuet en histoire, dans
trois lignes il résumait d'avance le Discours sur l'histoire
universelle (art xix, p. 250^. Précurseur de Fénelon en
critique, il a donné l'exemple de juger avec une liberté
respectueuse les Anciens (Fragm. aun traité du vide,
p. 436), et il n'a pas craint de relever les fausses beautés
de Cicéron (art. vu, p. 115). A demi précurseur de Racine
<en ce qui touche les effets de l'amour (car Racine a peint
l'amour surtout chez les femmes), il a écrit sur ce sujet
des observations dont la grâce égale la finesse ou parfois
la profondeur (Discours sur les pcusions de l'amour,
p. 505). Précurseur du xviii" siècle en politique, tandis
que ses contemporains ont généralement pour règle de
s'accommoder à ce qui est établi, il semble prévoir déjfi
les principes nouveaux que les publicistes de l'&ge suivant
feront prévaloir (art. vi, p. 95^. Dans les incrédules de
son temps, sa pénétrante sagacité avait deviné la philo-
sophie sceptique de la génération prochaine, et senti la
nécessité de tourner d'avance contre elle tous ses coups
(art. XXIV, p. 354).
Entre les Pensées diverses de Montesquieu et celles de
Pascal , tout diffère : l'intention qui les dicte et l'impor-
tance que leur assigne le dessein de l'auteur, l'esprit qui
les conçoit et le cœur qui les inspire, la plume qui les
ôcrit, les matières mêmes qui les fournissent. Plaçai mé-
ditait un grand ouvrage dont ses Pensées sont les maté-
riaux ; Montesquieu se distrait de ses grands ouvrages en
rédigeant chaque soir, par délassement , ses observations
de la journée. Pascal veut déterminer le chrétien à laisser
là toute affaire pour songer unic^ement à son salut;
Montesquieu, en dédiant ses Pensées à son fils, lui pré-
sente plusieurs carrières à parcourir, et lui permet l'am-
bition , parce que l'ambition , bien dirigée, est un senti-
ment mis en nous par Dieu , utile à la société, et que la
sagesse consiste à régler les sentiments, non à les détruire.
Le recueil des Pensées de Montesquieu, assez court d'ail-
leurs, se divise en huit chapitres. Dans le 1'', l'auteur se
feint lui-même, et l'on voit que Jamais homme n'a vécu
dans un pareil contentement de son sort et de soi-même,
mais que personne aussi n'a reçu de la nature une hu-
meur mieux faite pour Jouir de la paix de l'esprit et du
cœur. Chaque matin, il revoit la lumière avec une sorte
de ravissement qui lui dure tout le jour; il dort dès qu'il
Mt au lit , et il passe la nuit sans s'éveiller. Assez sen-
sible pour éprouver de la Joie, trop peu pour s'affliger,
aucun attachement ne lui a coûté à rompre. Une heure
de lecture dissipe ses plus forts chagrins ; amoureux de
ramitié, il a conservé tous ses amis, sauf un seul , et il a
I vécu avec ses enfants comme avec des amis. Il n'a ni
I haine ni rancune; cela détruirait son contentement:
d'ailleurs, à la conscience légitime de sa supériorité so
mêle un certain dédain pour les hommes, et l'on ne hait
guère qui l'on méprise. Telle est cependant son imper-
turbable modération de sentiment , que nulle part il ne
se fait prendre en flagrant délit de vanité; il avait, aa
reste, l'Ame naturellement grande, et il était sincère
quand il se flattait d'avoir de Tamour pour le bien et
l'honneur de sa patrie, et de sentir une joie secrète lors-
qu'on faisait quelque ré^ement qui allait au bien com-
mun. — Le 2* chapitre traite des Anciens, et le 3' des
Modernes. Grand admirateur de l'antiquité, Montesquieu
la goûte en critique et la comprend en publiciste. 11 ap-
partenait à l'auteur de V Esprit des lois de dire que, pour
avoir une Juste idée des mosurs et des lois des Grecs, il
faut la chercher, non dans leurs histoires, mais dans la
Rhétorique d'Aristote et la République de Platon. Il a dé-
passé, dans ses Jugements sur les Modernes, ce juste-mi-
lieu qu'il tient partout ailleurs : indulgent à Texcès pour
Crébillon et La Motte, rivaux de Voltaire en tragédie, il
cède aux suggestions de la Jalousie ou se montre singu-
lièrement aveugle quand il apprécie Voltaire lui-m^me.
En revanche, il a été enchanté et attendri en lisant Roi-
lin , et il l'appelle l'abeille de la France. Vient ensuite un
chapitre sur les grands hommes de France; on y recon-
naît la plume qui a écrit le livre De la grandeur et de la
décadence des nomains. De même on retrouve le philo-
sophe du xvui* siècle, mais sans les intempérances de
ses successeurs, dans les réflexions sur la religion, sur la
dévotion, sur le pape et sur les Jésuites, etc. Diderot
niera Dieu : Montesquieu, avant Rousseau, proclame
Dieu et l'immortalité de l'âme. Une comparaison des
Français et des Anglais, équitable d'ailleurs, rappelle en-
suite l'observstear bienveillant et favorablement prévenu
de l'Angleterre. Enfin, dans un dernier chapitre, intitulé
Variétés, parce que les Pensées s'y succèdent sans aucun
rapport entre elles, il semble qu'on voie revivre à la fois
l'homme avec son caractère, et l'écrivain avec les parties
diverses de son riche et beau génie. — Les deux qualités
principales de Montesquieu , la profondeur et Tesprit,
brillent autant dans ses Pensées que dans ses grands
ouvrages; malheureusement aussi le raffinement s'y est
glissé : il dit quelquefois trop et au delà.
En lisant les Pensées de Joubert, on doit s^ rappeler
qu'il ne fut que moraliste ; mais il le fut toute sa vie :
toujours il s'appliqua et prit plaisir à exprimer en de
beaux mots ses réflexions sur les arts et les lettres, sur
la politique, la religion , les mœurs des hommes de son
siècle et de tous les temps. Un besoin extraordinaire
d*exquise perfection l'empêcha de rien achever; mais,
quel moyen de construire un monument , lorsqu'on re-
(carde comme le plus beau triomphe de Part de mettre un
livre dans une page, une page dans une phrase, une
phrase dans un mot? Joubert a été au xix* siècle un type
original de ce qu'on appelle les délicats ; lui-même an-
nonçait à de Fontanes qu'il expirerait quelque jour au
milieu d'une belle phrase et d'une belle pensée. Voyez-le
décrire son cerveau, et se peindre par ce petit mot ei-
pressif : « Mon &me chasse aux papillons, et cette chasse
me tuera, n II porte la même délicatesse 'dans l'apprécia-
tion des beaux-arts. Élève de Diderot, qui lui conimo-
niqua sa hardiesse, il corrigea ce qu'il y avait d'intem-
pérant dans le goût de son maître par un vif sentiment
de la beauté antique. 11 aime et comprend la Grèce au-
tant qu'André Chénier, mais il est bien autrement pla-
tonicien et idéaliste. Chateaubriand l'avait surnommé
« un Platon à cœur de La Fontaine. » Quoi d'étonnant
qu'il ait fait consister la poésie surtout dans la spiri-
tualité des idées; qu'il appelât la lyre un instrument
ailé; qu'il voulût que la philosophie ne fût ni qua-
drupède, ni bipède, mais portée sur des ailes, et chan-
tante? Bialbeureusement, un homme de tant de goût
pèche souvent par affectation : à force de vouloir rendra
exquis le sens commun , et conunun le sens exquis, Jou-
bert est tombé parfois dans la prétention et la bizarrerie.
En sait-on bien long sur Bernardin de Saint-Pierre et
Chateaubriand, quand il a dit que « l'un écrit au clair de
lune, et l'autre au soleil? » Au reste, la délicatesse mo-
rale égale chez lui la délicatesse de l'esprit : la pudeur,
la chasteté, la sainteté sont choses dont il est épris, et.
lorsqu'il veut en parler, les mots ne lui paraissent Jamat«
assez lumineux, ou , si l'on peut s'exprimer ainsi , asseï
spiritualistes. Les sarcasmes impies de Voltaire le bles-
saient, autant qiie le charmaient ses saillies et ses
grâces. De là ces deux. mots qui rappellent le hideux stm-
l' EN
1403
PÉO
rire dont a parlé Airrrd de Musset : « Voltaire a, comme
le singe, les mouvements charmants et les traits hideux. »
-« Voltaire avait T&me d*un singe et Tesprit d*un ange. »
Joubert était, en effet, chrétien sincère ; après avoir res-
senti, comme toute sa génération, les atteintes du scep*
licisme, il en était sorti comme d'un état dont souffraient
ion intélli^nce et son cœur. En politique, les excès de
la Révolution ayant donné un douloureux démenti à ses
espérances et à ses rêves, il réclamait avec les sages
Punité dans le pouvoir, et laissait la multitude aimer la
multitude et la pluralité dans le gouvernement des
hommes. V, Maxim b5ï.
Les meilleures éditions des ouvi a^^s ci-dessus analjrsés,
sont, pour les Pensées de Marc-Aurèle, celles de Gataker,
Londres, 1707, in-8"; et de Schnli, Slesvvig, 1802, in-8o;
il y en a des traductions françaises par Dacier, Paris, 1 601 ,
i vol. in-12 ; par de Joly, Paris, 1 778, in-S*" ; par M. A. Pier-
ron, qui a fait mieux que ses devanciers , en profitant de
leurs travaux, Paris, 1843, gr. in-18 ; — Pensées de Pas^
cal, publiées dans leur texte atUhentiquef précédées d'une
ét\td$ littéraire et accompagnées d'une étude suivie, par
M. E. Havet, Paris, 185*2, in-S»; — Pensées diverses de
Montesquieu; elles font partie de ses OEuvres diverses, où
elles occupent de 35 à 40 pages seulement; — Pensées de
Joubert, dans le t. I" de ses Pensées, Essais, Maxi-
mes, etc., Paris, 1850, S" édit, 2 vol. in-8o. A. H.
Ltt Recueils de Pensées sont les macédoines de Tes-
prit; ils n'exigent aucun travail , aucune réflexion : tout,
on presque tout, est le résultat d*une improvisation, d'une
inspiration instantanée. Le désordre où naissent les pen-
sées, le pèle-méle où elles sont enregistrées , excluent
toute idée de composition littéraire; des essais de classi-
fication tentés par quelques éditeurs le prouvent de reste,
car ils sont toujours bien imparfaits et indécis» excepté
pour quelques grandes idées générales. C'est que des
i^nsées ne sont point un livre, mais seulement des ma-
lu^riaux, indiqués, et pas même ébauchés, d'où l'on pour^
mit tirer une foule de livres ou de traités. Or, là gît la
grande difficulté : on extrait sans trop de peine des pierres
<i'une carrière, mais en ffdre ensuite un palais comme le
Imvn de Pierre Lescot , une statue comme la Vénus de
Médicis, c'est tout autre chose. Les écrivains de Pen-
nies, s'ils montrent la sagacité, l'ingéniosité de leur
esprit, prouvent en même temps leur impuissance à faire
un ouvrage : des aperçus, ils en ont sur tout; mais le
cénie qui généralise ou qui applique, qui compose ou
qui écrit; cette suite dans les idées; cette vue de l'esprit
fjui découvre tous les horizons d'un sujet, quelle que soit
<a grandeur; cette force du talent qui permet de les em-
iirasser, de les déduire l'un après Tautre dans un ordre
logique pour en faire sortir un grand enseignement utile,
t'élit cela manque aux faiseurs de Pensées. Ils sont les
ibeilles de leur propre esprit; ils le butinent de droite
et de gauche, mais ils ne savent pas, comme l'abeille, faire
un gâteau de miel de leur butin. Ces réflexions s'appli-
quent directement, mais avec quelQ[ues restrictions néan-
moins, aux recueils de Pensées ci -dessus analysés. —
Pifical n'est pas responsable de son recueil de Pensées :
c'était un commencement de matériaux pour un grand
oavnge qu*il méditait, et que Chateaubriand a tenté
d'exécuter en partie dans son Génie du christianisme.
Les amis de Pascal, recueillant l'informe amas de notes,
sans suite et sans ordre, entassées pour le grand ouvrage
dont il les avait entretenus, y trouvèrent des choses si
sublimes, qu'ils finirent, en 1670, huit ans après la mort
de Pascal, par en extraire les fragments les plus termi-
nés, et les publièrent sous le titre de Pensées. Si Pascal
avait vécu, nous n'aurions pas ce recueil, mais, à la place,
un livre digne de toute la vipueur de son génie.
Les Pensées de Montesquieu sont plutôt des espèces
de confidences autopsychologiques, si l'on peut employer
(0 terme, et il ne faudrait pas attacher plus d'importance
qu'il n'a voulu en mettre lui-même à ce mince recueil.
Nous appliquons aux Pensées de Joubert, quel que soit
leur mérite d'ailleurs, en tant que pensées, ce que nous
disions tout à l'heure : elles dénotent complètement l'im-
puissance de faire un livre; cela est ici d'autant plus
clair, que ni l'instruction, ni le talent de l'écrivain, ne
manquèrent & Joubert : mais il n'était pas de ces esprits
fermes et courageux qui savent édifier ; son tempérament
et son caractère se contentaient d'aperçus, et il n'a Jamais
été au delà. Ses pensées sont des fleurs charmantes, qui
n'ont Jamais abouti à un fruit. — En somme, il ne faut
user des recueils de Pensées que pour de courtes lec-
tures : comme elles sont tout essence et toute substance,
l'esprit le Catigue vite dessus; elles font l'effet du miroi-
tage sur la vue: elles éblouissent sans éclairer. CD — t.
PENSION (du latin pendere, payer), somme qu'on
paye, à des intervalles périodiques, pour être logé e!t
nourri chez autrui. On donne le nom de Pensions Bout'
geoises à des maisons où l'on ne donne même que des
repas communs à heure fixe. — Par extension, le mot
Pension désigne le prix payé pour la nourriture, le loge-
ment et l'instruction d'un enfant dans une maison d'édu-
cation ; cette maison, quand elle n'est ni lycée ni collège,
reçoit aussi le nom de Pension ou Pensionnat, et la per-
sonne qui la dirige est dite maître ou maîtresse de pen»
sion ( V. Institution ). L'élève qui y reste à demeure est
un pensionnaire; l'élève qui y reste la Journée seulement
et prend au moins un re^as est un dimi -pensionnaire.
— Une Pension alimentaire est la somme qu'on paye à
une personne pour assurer son existence ( V. Aliments ),
ou au'un créancier est tenu de payer pour la nourriture
du débiteur qu'il a fait incarcérer.
PENSION , somme annuelle que TÉtat paye à certaines
personnes, soit à titre de don gratuit ou d'encouragement
(écrivains ou artistes), soit à titre de récompense natio-
nale (membres de la Légion d'honneur, grands inventeurs,
veuves de maréchaux, etc.), soit à titre de retraite.
V. Retratte (Pensions de). Toute administration qui a
une caisse de retraite sert aussi des pensions à ses em-
ployés et à leurs veuves. Les pensions à la charge de
l'État sont incessibles et insaisissables, sauf les cas
déterminés par la loi (Arrêté du 7 thermidor an x , —
26 juillet 1802 ; Ordonnances des 27 août 1817 et 30 avril
PENSIONNAIRE. ) ^ ^ , * n- *
PENSUM } ^* ^^ ^^^ ^°^ notre Dict,
PENTACÔNTARQUE. ) ^ ^^^' «* d^Histoire.
PENTACORDE (du grec pente, cinq, et khordè, corde),
lyre à cinq cordes. On a donné le même nom à un ordre
ou système de cinq sons ; c'est en ce sens que la quinte
a été quelquefois appelée pentacorde.
PENTACOSIARQUE. ( V. ces moUdans notre
PENTACOSIOMEDIMNES. i Dict. de Biogr. et d'Hist.
PENTACROSTICHE. V. Acrostiche.
PENTADRACHME, monnaie d'argent de Grèce, valant
5 drachmes, ou 4 fr. 47 c.
PENTAMETRE (Vers) , vers de 5 pieds, ou de 5 me-
sures (du grec pente, cinq, etmétron, mesure). Ce nom
s'applique, chez les Anciens : 1<* au vers ^giaque; 2° à
certain vers dactylique dit éolique; 3° au grand asclé-
piade; ¥ à certains vers p^onieiu (F. Ascl^piade, Été-
GIAQDB, ÉOUQOE, PÉON). P.
PENTARCHIE (du grecjMfito', cinq, ziarkhè, gouver-
nement), forme de gouvernement dans laquelle Te pou-
voir executif est confié à cinq individus. Tel a été, en
France, le Directoire. — On désigne quelquefois par le
nom de Pentarchi» la prépondérance qu'exercent en Eu-
rope les cinq grandes puissances, Angleterre, Autriche,
France, Prusse et Russie.
SiSÎ^TO??^*^' \ y* CCS mots dans notre Dictionn.
PENTECOm ) ^ Biographie et d'Histoire.
PENTERIS, navire à cinq rangs de rames chez les Aà*
ciens.
PENTHÉMIMÈRE, nom d^une césure des anciens Grecs
(F. C^sorb), appelée par les Latins semiquinaire. Les
grammairiens donnent fréquemment au vers élégiaque
(F. ce mot) le nom de double penthémimère, d'où est
venue la manière dont on le scande dans nos écoles. Ils
appellent aussi penthémimère le vers archiloquien, qui
ressemble à une seconde partie du vers élégiaque. P.
PENTURES , bandes de fer forgé assu)etties aux vantaux
d*une porte pour les consolider, et terminées par un œil
dans lequel entre le gond autour duquel tourne la porte.
Les pentures furent un gracieux ornement dans les époques
romano-byzantine et ogivale, où on les couvrit de feuil-
lages, de fleurs et de fruits. Les plus anciennes que l'on
connaisse remontent au x* siècle : on en voit de très-
remarquables aux portes de l'abbaye de S'-Denis, de
Notre-Dame de Paris, dans le Musée de Cluny à Paris,
à l'hôpital S^-Joan d'Angers, aux cathédrales de Rouen,
de Beauvais, de Chartres, de Laon, à la chapelle de
Windsor, etc. Vers le xv* siècle, on se mit à orner les
portes de sculptures en relief, et les pentures furent aban-
données. On en a repris l'usage de nos Jours. E. L.
PÉNULE. V. PyENULA, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
PÉON ou PÊAN, pied de 4 syllabes, composé d*une
longue et de trois brèves , la longue pouvant occuper une
place quelconque. On en attribuait Tinvention à un poète
PER
U04
PER
du nom de Péon. Lorsque la longue est la l** syllabe du
pied, il est dit Péon i»'; Péon 2% si elle est la 2«, etc.
Le péon 1*'' et le péon A* sont les plus usités. Le péon 1*'
est l'équivalent du crétique (-www=-w-);les péons 2«
et 4% dubacchius C^^^Z^ ^- -); lepéon 3% del'an-
tibacchius (w«j— =s — w). Les tragiques grecs ont com*
posé des vers péoniens formés de péons 4«" ; les comiques
employaient de préférence le péon i*'. Les anciens rhé-
teurs enseignaient les effets d*harmonie que remploi
Judicieux du péon !•'' et du péon 4" pouvait produire dans
le style, surtout dans le style oratoire. K. VOrator de
Cicéron, lxiv, 215-219; son De oratore^ liv. 3, xlvii, 183;
Quintilien, n, 4. P.
PÉOTTE, chaloupe vénitienne très-légère.
PEPLOS, PEPLUM ou PEPLUS, espèce de surtout
sans manches, d*un tissi^fin et léger, que les femmes de
Tancienne Grèce portaient par-dessus leur tunique, et
qui, retenu sur les épaules par des agrafes, descendait
jusqu'à la ceinture en formant deux pointes par-devant.
Il enveloppait l'épaule gauche, et laissait à découvert les
mains et Tépaule droite. — On donnait le même nom au
voile broché d'or dont on ornait les statues des déesses.
Sur celui de Minerve, à Athènes, on avait figuré les actes
de cette déesse, de Jupiter, et de plusieurs héros en re-
nom. Les matrones romaines offraient tous les cinq ans
un péplos à Minerve. Ce nom a été appliqué par Sophocle
à la tunique fatale que Déjanire envoya à Hercule, et par
Synésius à la robe triomphale des Romains. B.
PERCEFORÊT, un des romans de la Table Ronde.
Après avoir passé en revue les rois de la Grande-Bre-
tagne depuis Brut, prétendu petit-fils d'Énée, Jusqu'à un
certain Pyr, contemporain d'Alexandre le Grand, l'au-
teur nous transporte dans l'Inde, où le conquérant macé-
donien fait une promenade sur mer. Une tempête étant
survenue , Alexandre est Jeté sur la côte de la Grande-
Bretagne s il donne les trônes d'Angleterre et d'Ecosse à
deux de ses chevaliers^ Bétis et Gadifer. Bétis veut b&tir
un palais et un temple au vrai Dieu, avec le bois d'une
forêt enchantée qi^'habite le magicien Damant: pour
accomplir son dessein, il combat et met à mort Damant;
les Bretons lui donnent le nom de Perceforét. Cependant
Alexandre, inquiet du sort de Bétis, se met à sa recherche :
à la suite de plusieurs rencontres où il montre sa valeur;
il est blessé, et recueilli dans le ch&teau de la belle Sé-
bile, dite la Damé du Lac, à laquelle il inspire et pour
laquelle il éprouve une vive passion. En eux se mêle le
sang macédonien à celui des rois bretons, d'où doit naître
un Jour Arthur. Alexandre rejoint ensuite Perceforêt, et
alors commence une longue série de guerres contre la
famille de Damant, et ceux des Bretons qui n'avaient pas
^ encore fait leur soumission. Quand la pacification de llle
est complète, et avant qu'Alexandre se rende à Babylone,
Perceforêt fonde un ordre du Franc Palais, et donne un
ma|;nifique tournoi. Ici le roman est véritablement achevé;
mais il a reçu un appendice mal ajusté. Douze chevaJiers
de l'ordre nouveau offrent leurs hommages aux douze
nièces du vieil ermite Pergamon, qui était venu en
Grande-Bretagne avec Brut et les Troyens. Pergamon a
encore douze neveux, tous chevaliers, dont les aventures
se combinent d'une façon assez bizarre. Dans cette se-
conde partie du roman , il est question de la conquête
de l'Angleterre par J. César. On y voit aussi Gadifer et
Perceforêt achever paisiblement leur règne : le dernier
arrive à une longue vieillesse (400 ans environ), car il
est instruit selon la loi chrétienne, et meurt entre les
bras d'un évêque issu de Joseph d'Arimathie.
PERCEPTEUR , agent de l'administration des Finances,
3ui exige directement du contribuable les sommes par lui
ues, et les verse entre les mains du receveur particu-
lier. Il fait parvenir aux contribuables les avertissements
de payement. Pour compléter le recouvrement des contri-
butions de chaque exercice, il lui est accordé un délai
fixé au 30 novembre de l'année qui suit celle de cet exer-
cice. Il peut être tenu de faire ses versements chez le re-
ceveur tous les dix jours. Les percepteurs sont nommés
par le Ministre , et fournissent un cautionnement égal
au 12* du montant des contributions qu'ils recouvrent;
ils ont une remise de 2 centimes par franc. Les com-
munes importantes ont an ou plusieurs percepteurs ; dans
beaucoup de cas, il n'y a qu'un percepteur pour plusieurs
communes. F. Durieu, Formulaire de la comptabilité
des percepteurs et des receveurs, 1842, in-8% et Manud
des-percevteurs et des receveurs des communes, in-i2.
PERCEPTION, mode et fonction de l'intelligence; fa-
culté de connaître appliquée aux phénomènes. La Per-
ception, dans le sens le plus étendu de ce mot, embrasse
la Perception des faits intellectuels et moraux. Percep-
tion intérieure , Conscience ou Sens intime ( V. Cox-
scienge), et la Perception des phénomènes physiques ou
Perception ea>térieure, dont nous nous occupons ici exclu-
sivement.
La Perception extérieure est un fait complexe dans
lequel l'homme physique et l'homme moral sont égale-
ment intéressés ; mais comme nous n'en voulons faire ici
que l'histoire philosophique, nous ne parlerons des phé-
nomènes organiques que pour fixer exactement la limite
où ils s'arrêtent et font place aux phénomènes intellec-
tuels. La Conscience marque cette hmite. Tous les anté-
cédents de la Perception que la science est parvenue à
connaître par d'autres moyens, impression faite par les
objets sur les i^parells organiques qui correspondent soi
différents sens, transmission de cette impression par les
nerfs au cerveau, sont aatant de faits que la Conscience
ignore, dans lesquels elle n*a rien à voir, qui sont les
conditions de la Perception, mais qui n'en font pas partie
intégrante, si , par Perception, l'on entend le phénomène
intellectuel. Mais, en vertu des mystérieuses lois de l'union
du physique et du moral, une fois que l'impression or-
ganique a été portée jusqu'au centre nerveux, cette im-
pression venant à changer de nature, ou, pour mieui
dire, donnant lieu à une impression d'une autre nature,
l'intelligence se trouve avertie de la présence des objets,
et informée d'une manière plus ou moins complète de
leur existence et de leurs propriétés. En effet, toutes les
qualités des objets ( Vr QuAurés paeinëRES et QuAun^
secondes) non-seulement ne produisent, ni sur les orga-
nes, ni sur l'esprit, des impressions semblables ( V, Seks ),
mais encore elles ne nous instruisent, ni au même titre,
ni au môme degré, de leur existence. Tantôt nous sommes
simplement affectés d'une modification interne, et cette
disposition subjective, perçue par la Conscience, porte le
nom de Sensation ( K. ce mot). Tantôt à la sensation se
joint la Perception proprement dite, par laquelle noos
sommes directement informés de l'existence et de la pré-
sence d'un corps différent de nous-mêmes. Il y a Sensa-
tion et Perception tout à la fois, et, par suite, connais-
sance immédiate de l'extérieur et du corporel , lorsque
nous touchons; car alors, en même temps que nous
éprouvons, au contact du corps, une sensation de ré-
sistance plus ou moins forte, de chaleur ou de froid, etc.,
c'est bien réellement hors de nous que nous percevons
son étendue et sa solidité. La Perception proprement dite
fait défaut, lorsque nous sentons une odeur ou que noos
entendons un son; seulement, la nécessité d'assigner
une cause à la modification que nous éprouvons , l'habi-
tude d'exercer à la fois plusieurs sens et d'en associer le5
données respectives, les relations observées entre les im-
pressions et la prépence de certains objets, nous appren-
nent bien vite à localiser dans les corps en général et dans
certains corps en particulier les causes inconnues de nos
sensations, et à conclure de ces dernières, par une induc-
tion si rapide qu'elle en devient insaisissable, la présence
de tel ou tel corps, alors môme que nous ne le perce-
vrions pas autrement. Grâce à cette espèce d'éducation
mutuelle, les sens peuvent jusqu'à un certain point se
substituer les uns aux autres : par le bruit, nous jugeons
de la distance, du mouvement, du volume des corps; par
l'odeur et la saveur, de leur nature intime; par la vue, de
leur solidité, de leur température, etc., et cela nous
épargne bien du temps et bien des expériences. On ap-
pelle Perceptions acquises, par opposition aux Percep-
tions naturelles et directes, ces jugements indirects,
opérations complexes, mais rapides et rendues faciles par
la pratique. Les perceptions naturelles de la vue ont pour
objet l'étendue plane, la grandeur apparente, la figure
perspective, la couleur; ses perceptions acquises ont pour
objet leur volume et leur distance, leur grandeur et leur
figure réelle, toutes choses qui, directement, relèvent
du sens du toucher.
Les perceptions proprement dites noua faisant seules
connaître le dehors, confondre la Perception avec la Sen-
sation, réduire à celle-ci la Perception tout entière, et,
à plus forte raison, toutes les opérations de l'Intelligence,
comme l'a fait expressément Condillac, c'est rompre, par
un procédé analogue à celui de l'Idéalisme {V.ce mot)^
toute communication entre l'esprit et les objets exté-
rieurs. Le rôle que les uns font jouer à l'idée, les autres
le font Jouer à la sensation ; voilà toute la différence.
La sensation est fort différente de Tidée, de nature et d'ori-
gine ; mais l'une et l'autre s'interposent également entre
l'esprit et les objets, et le sensualisme de Condillac, poussé
à ses conséquences logiques, nous laisse tout aussi igno-
PER
1405
PÈR
rants da monde physique que Tidéalisme cartésien.
On peut analyser la Perception, en décrire les diffé-
rentes phases, en signaler les éléments variés ; mais on
ne Texplique pas, en ce sens qu*on ne montre pas com-
ment les corps ou les propriétés des corps agissent sur
Tesprit, comment un phénomène physique détermine un
phénomène intellectuel. Des systèmes qui ont pris à tâche
d'apporter cette explication, impossible dans l'état actuel
(le nos connaissances, les uns, fondés sur des considéra-
tions toutes physiques, n'ont pas pénétré jusqu'à la partie
itiieJiectuelle du phénomène ; les autres, qui se rattachent
à la grande famille de l'idéalisme, en créant sous le nom
à'Idm différents intermédiaires entre Tesprit et les corps,
ont déplacé la difficulté sans la résoudre, et, parfois,
Tont doublée. La Perception , comme la Conscience , la
Mémoire et la Raison, est une fonction primitive de Tin-
telligence, dont nous recueillons le bénéfice sans en pouvoir
connaître les plus intimes ressorts. « L*esprit de l'homme,
< dit Fénelon, porte en lui de quoi s'étonner et se sur-
■ passer infiniment lui-même. »
Le nom de Perception, comme celui de la plupart des
modes de l'intelligence, s'applique, suivant les circon-
stances, tantôt à la faculté de percevoir, tantôt à l'opéra-
tion de cette faculté, tantôt enfin au résultat de cette
opération. V. Malebranche, Recherche de la vérité, 1. I,
des Sens; Locke, Essais sur l'Entendement ,1. II; Leib-
niz, iVot^t^eaua^Es^aû^urrj^nfffmfem^ntyL II; Condillac,
Traité des Sensations ; Reid, Recherches sur V Entende-
ment humain, et Essais sur les Facultés de l'Esprit hu-
main, Essai il; Dugald Stewart, Éléments de la Philo-
sophie de l'Esprit humain, ch. I, et Essais philosophiques,
letll. B — E.
pERCEPTiozi, terme qui, dans la philosophie de Leibniz ,
désigne « l'état passager qui enveloppe et représente une
multitude dans l'unité ou dans la substance simple, »
c-à-d. tout changement produit dans les monades par
leur activité interne, et en rapport avec le milieu dans
lequel elles sont placées. La Perception est le fait de
toutes les substances simples, corporelles ou spirituelles,
et diffère en cela de VAperception^ réservée aux âmes rai-
sonnables, et qui est la conscience qu'elles ont de leurs
Perceptions. B — e.
pEiicEPTiOFf, recette ou recouvrement de deniers, de
fruits, de revenus, d'impositions ; — emploi de percep-
teur (r.c« mot)»
PERCEVAL ou PARDYAL LE GALLOIS , roman du
XII* siècle. Perceval, fils d'un illustre seigneur du pays
de Galles, n'avait que deux ans quand il perdit son père
et ses frères, tués dans des tournois; sa mère se retira
avec lui dans une forêt , avec le dessein de l'élever dans
rignorance de la cheviderie. Mais bientôt le Jeune Per-
cerai rencontre deux chevaliers, les interroge sur leur
manière de vivre , et déclare à sa mère qu'il veut suivre
Aussi le métier des armes. Il part , et , après quelques
exploits, il obtient l'ordre de chevalerie. Il arrive chez le
iDi Peschéor ou Pécheur, qui était malade des suites de
plusieurs blessures, et qui ne pouvait être guéri que
lorsqu'on jeune chevalier lui aurait fait diverses ques-
tions au sujet d'une lance, d'un plat et d'un tailloir qu'il
possédait POTceval voit ces objets, mais s'éloigne sans
faire aucune question & son hôte. Dans la suite, ayant
appris que le roi Pêcheur est son oncle, il entreprend de
reut)uver son ch&teau; il n'y arrive qu'après de nom-
breuses aventures. Le roi Pêcheur est guéri ; mais il était
vieux. Perceval lui succède bientôt, règne sagement du-
rant quelques années, et se retire enfin dans un ermi-
^1 emportant le tailloir, la lance et le plat merveilleux
qui n'était autre que le saint GraaJ (F. ce mot). Le jour
de sa mort, tous ces objets furent enlevés au ciel. — Il
existe trois manuscrits de ce poëme, deux à la Biblio-
thèque nationale de Paris, et le 3* à la bibliothèque de
I^Arsenal. Il n'est pas tout entier de Chrestien de Troyes :
Sautiers de Denet, et, après lui , Manessier, le complé-
lèrent ou y ajoutèrent de nouveaux épisodes. On en a
(ait au XV* siècle une traduction en prose, imprimée à
(^aris en 1530. Nous avons un poëme épique allemand de
?arcival, composé de 1205 à 1215 par Wolfram d'Ës-
tiienbach Cet auteur parle du Parceval de Chrestien de
Troyes comme non terminé; il dit ne s'en être point
icrvi , parce qu'il en connaissait un autre dont Chrestien
ivait fait usage librement , et qui avait été composé par
Kyot ou Guyot , romancier provençal. V, V Histoire litté-
raire de la France, U xv ; G.-A. Heinrîch , Le Parcival
de Wolfram d'Eschenbach et la légende du S^ Graal,
Paris, 1855, in-8*. H. D.
PERCHES, ancien nom des colonnettes adossées aux
piliers des nefs, et qui, partant du sol, filent jusqu'à ta
naissance des maltresses voûtes, et reçoivent, souvent sur
un petit chapiteau, la retombée de leurs arcs-doubleaux
et de leurs croisées d'ogives.
PERDUELLION. F. notre Dict, de Biogr. et d'Histoire.
PÈRE , nom que porte l'homme par rapport à l'enfant
qu'il a engendre. Celui-ci a pour grand-pere le père do
son père, lequel se nomme aussi aïeul paternel , et qui
est son parent au 2* degré dans la ligne ascendante. Dans
TAnticTuité, le père possédait sur toute la famille une au-
torité oien autrement étendue que chez les Modernes. Il
eut , en beaucoup de pays, un droit de vie et de mort sur
sa femme et ses enfants. La loi de Moïse apporta quel-
ques restrictions à cette puissance paternelle : le père ne
devait voir dans sa femme qu'une égale et une com-
pagne ; il lui était interdit de mettre à mort ses enfants,
mais il pouvait les vendre, les garçons jusqu'à Tàge de
14 ans, les filles jusqu'à 12 : seulement il fallait <}u'il y
fût contraint par l'inexorable nécessité de vivre, et il était
tenu de consacrer à leur rachat les premiers biens dont
il pouvait disposer. A Rome, la puissance du père fut
illimitée : il était le maître absolu de sa femme et de ses
enfants, tout aussi bien que de ses esclaves; originaire-
ment, et avant les tempéraments que le progrès des
mœurs apporta aux antiques usages, il lui était loisible,
sans aucune forme légale, sans exprimer ses motifs, de
se séparer de sa femme, et d'en épouser une autre ; il
pouvait la tuer, si elle avait dérobé les clefs de la mai-
son, ou bu du vin. S'il lui naît un fils, on le dépose
à ses pieds : le relever de terre, c'est l'accepter et lui
donner la vie; le laisser à terre, c'est le condamner, et
l'enfant, déposé à quelque carrefour, y mourra si la pitié
ne le recueille. L'autorité du père ne finissait qu'avec sa
vie , ou par la perte du titre de citoyen ; et il l'exerçait ,
non-seulement sur ses propres enfants, mais sur toute
leur descendance. Ni l'<^e, ni le mariage, ni les plus
hautes fonctions dans l'Etat, ne pouvaient soustraire le
fils à l'autorité paternelle. Le père avait droit de pro-
priété et, par conséquent, de vente sur tous les membres
de la famille, sur leur personne comme sur leurs biens.
— Tout le titre ix du Code Napoléon est relatif à la puis-
sance paternelle. L'enfant doit , à tout âge, honneur et
respect à ses père et mère; mais les droits que confère la
puissance paternelle sont plus ou moins étendus, suivant
que les enfants sont mineurs, majeurs, ou mineurs
émancipés. Sur l'enfant majeur ou mineur émancipé , la
puissance paternelle ne s'exerce que par des conseils ; sur
l'enfant mineur, elle se manifeste par un droit relatif à
la personne ou droit de correction (V. cemot)^ et par un
droit relatif aux biens, c-à-d. le droit de jouissance ou
usufruit , sous certaines conditions d'entretien et d'édu-
cation. Les enfants ne peuvent quitter la maison pater-
nelle sans la permission de leur père, si ce n'est à 20 ans,
pour enrôlement volontaire. Le consentement des père
et mère est nécessaire aux enfants pour contracter ma-
riage (V. Mariage). La tutelle des enfants mineurs, après
la dissolution du mariage, appartient de plein droit au
survivant des père et mère; le père peut nommer à la
mère survivante un Conseil, sans l'avis duquel elle ne
peut faire aucun acte de tutelle (V. Tutelle). Dans notre
ancien Droit, les père et mère avaient le droit de déshé-
riter les enfants : aujourd'hui , les libéralités par actes
entre-vifs ou par testament ne sont permises que sous
certaines restrictions et réserves, et le père peut seule-
ment avantager tel de ses enfants ou le priver d'une part
de sa succession. Le père a droit à des aliments de la part
de ses enfants, s'il est dans le besoin ( V, Aliments ). De
son côté, il leur doit l'éducation ; mais sous ce mot on ne
comprend point l'établissement par mariage ou autre-
ment, et l'enfant ne peut exercer d'action à cet égard
contre ses père et mère. F. Chardon, Traité des trois
puissances, paternelle, maritale et tutélaire, 3 vol. in-8<* ;
Chrestien de Poly, Essai sur la puissance paternelle,
1820, 2 vol. in-i^; Viaud, De la puissance maritale,
1855, in-8«.
PÈRE (Abbaye de saint-), à 2 kilom. de Vézelay (Yonne).
Cette église est précédée d'un vestibule ou narthex, bâti
au xm* siècle, et reconstruit en partie au xiv" et au xv*.
Trois arcades ogivales occupent la partie inférieure de ce
porche: celle du milieu, qui sert d'entrée, a des pieds-
droits formés de colonnettes, avec stylobates délicate-
ment sculptés, chapiteaux historiés, voussure et tympan
remplis de figurines abritées sous des dais; les deux
autres, moins élevées, sont de fausses portes, en partie
murées. Des pilastres surmontés d'aiguilles ou pinacles
à crochets séparent ces arcades et se réunissent, à la
fÈR
1406
PÉR
naissance da toit, i>ar une galerie évidée à jour. Des
Biches pratiquées dans ces pilastres sont vides de leurs
statues. Le porche est éclairé sur chaaue flanc par deui
(Oiuides fenêtres ogivales. A rextréoiité de son toit , se
développe une rose circonscrite dans une vaste arcade
gothique, aujourd'hui bouchée, et correspondant à la nef
de réglise : elle est surmontée d*un fronton triangulaire,
décoré par iO statues disposées en groupe pyramidal. Au
fond et sur la gauche du porche, est un beau clocher, de
forme carrée pour les deux premiers étages, octogone au
troisième, et terminé par une flèche en ardoise; il est
orné, sur chaque face, de colonnettes annelées et accou-
plées deux à deux, et percé, dans les entre-colonnements,
de longues ogives trilobées, partagées en deux segments
par un meneau vertical. L*abbaye de Sûnt-Père a la
forme d'une croix latine: sa longueur dans œuvre, y
compris le narihex, est de 46">,30; sa largeur, de i2'",76.
On descend par deux marches des collatéraux dans les
transepts; les collatéraux se prolongent autour du chœur,
et le séparent des cinq chapelles ansidales. Les arcades
de la nef reposent sur des piliers de deux grosseurs dif-
férentes alternativement. Le chœur a une voûte plus éle-
vée que celle de la nef, et des arcades plus algues.
pèns ÉTERNEL (Imsges du). V, Dieo le Père.
PÈRE NOBLE, omploî do théâtre, celui des pères dans
la tragédie et la haute comédie. Le rôle de Don Di^^ne
dans le Cid de Corneille et celui d'Harpagon dans i' Avare
de Molière appartiennent à cet emploi.
PÈRES DE L'ÉGLISE, docteurs de la primitive Église,
qui fleurirent du ii* au vi« siècle, et dont les écrits font
règle en matière de foi. Leur histoire est celle de la con-
quête de l'Empire romain par la doctrine chrétienne. De-
puis l'origine du christianisme jusqu'au règne de Con-
stantin, les Pères apologistes luttent contre le paganisme :
de Constantin à l'invasion des Barbares , l'Église, victo-
rieuse des croyances païennes, tourne ses efforts contre
les sectes dissidentes, et poursuit sa constitution défini-
tive; c'est l'ouvrage des Pères dogmatiques.
Primitivement, comme pour mieux faire éclater la
vertu propre de la doctrine chrétienne, l'œuvre de la
propa^nde avait été confiée à des hommes presque tous
illettrés : l'enthousiasme et le martyre avaient suppléé à
l'éloquence. Mais le christianisme prétendait établir aussi
sa domination sur les classes éclairées, et contraindre
même les intelligences d'élite à s'humilier devant le mys-
tère de Jésus crucifié ; aussi , dès le n* siècle, la prédica-
tion chrétienne eut ses docteurs et ses philosophes. Héri-
tiers de S^ Luc et de S^ Paul , les Méliton, les Aristide,
les Athénagoras, les Théophile, les Justin et leurs pre-
miers successeurs défendirent la religion, non-seulement
contre les superstitions, les calomnies, les instincts de
cruauté d'une vile multitude, et les persécutions poli-
tiques des empereurs, mais encore contre la doctrine
rivale d'une école philosophique qui se faisait religieuse
pour combattre plus avantageusement avec le nouveau
culte. Tel fut le rôle des Pères apologistes. A la plèbe ils
disaient : « Non , nous n'immolons point d'enfants dans
d'abominables sacrifices; venez et voyez; compat'ez nos
mœurs avec les vôtres, et jugez. » Aux empereurs et à
leurs représentants ils disaient : « Non, nous ne sommes
pas de mauvais citoyens; nous payons l'impôt, nous bat-
tons avec vous les ennemis de l'Empire ; nos avis dans
vos Sénats sont ceux de la sagesse. Que vous importe en-
suite que nous n'attachions aucun prix aux biens do la
terre, et que nous aspirions à la féliciu'; du ciel?» Et,
comme S^ Cyprien, quand un consul leur lisait leur arrêt
de mort, ils répondaient : « Dieu soit béni ! » et mou-
raient sans récrimination ; l'admiration de leurs vertus
couronnées par le martyre multipliait leurs sectateurs.
Mais la lutte contre les philosophes alexandrins était plus
difficile : ceux-ci, unissant dans un imposant éclectisme
les doctrines orientales avec les systèmes de la philoso-
phie grecque, présentaient le christianisme comme un
rameau, détaché par l'imposture, de la souche primitive
rù venaient se confondre toutes les religions humaines.
Is opposaient au Christ Orphée, et prétendaient démon-
trer que le Nazaréen n'était que le plagiaire du prêtre
'hrace. Enfin, ils cherchaient à convaincre le christia-
nisme de ne rien enseigfier, soit en métaphysique, soit
m morale, qui ne se trouv&t dans le Stoïcisme et dans
J^laton. C'est contre ces redoutables adversaires que les
Pères apologistes, S^ Justin, Arnobe, S^ Clément, Lac-
t&nce, épuisèrent tous les traits de leur dialecti(jue et de
leur éloquence. Et ce fut à leurs risques et pénis, puis-
qu'on voit Origène retranché de la communion catho-
lique pour s'être laissé eatralner involontairement, au
milieu des péripéties de la lutte, en dehors de TorthiK
doxic, et S^ Cyprien ne racheter qu'au prix du martyrs
une hérésie sincèrement professée sur le baptême.
Quand toutes les résistances furent vaincues, l'œuvre
des Pères de l'Église prit un autre caractère : les ennemis
du dehors réduits à l'impuissance, il restait à triompher
des ennemis du dedans, à détruire les hérésies du pré-
sent, à prévenir les divisions pour l'avenir, à réaliser
enfin l'unité catholique ; ce fut la tftche des Pères dog-
matiques et du IV* siècle. Non pas que les hérésies aient
attendu, pour éclater, la défaite de l'ennemi commun;
TertuUien, notamment, avait passé avec éclat dans la
secte des Montanistes, puis quitté leur camp pour de-
venir lui-même chef de secte. Mais les plus redoutables
sectaires, ceux qui firent courir à la religion nouvelle les
périls les plus retentissants et les plus graves, les Ariens,
les Donatistes, datent du iv* siècle. Au commencement
du V*, le pélagianisme allait nier la pàce divine au profit
de la liberté humaine , comme l'ananisme avait nié la
divinité du Christ. Tels furent les objets des discussiont
de cette époque ; âge d'or de la littérature chrétienne, où
l'éloquence des Pères brilla d'une splendeur plus écla-
tante en raison même de la décadence de tout le reste;
« moment extraordinaire, où les questions les plus abs-
traites se personnifiaient par la chaleur de la discussion
et la vérité du langage, où le merveilleux et l'incompré-
hensible étaient devenus l'ordre naturel et la r^Iité. »
(Villemain.) — A lire les Pères dogmatiques, et surtout
S^ Augustin , on sent que l'Église est sur le point d'at-
teindre enfin son unité; en elle s'absorberont bientôt
toutes les dissidences, les hérésies comme la philosophie
païenne, et dans son organisation entrera la société tout
entière. Deux moyens opposés établirent enfin cette
unité, la parole et le glaive, les innombrables écrits des
docteurs de l'Église et l'appui du pouvoir temporel.
L'Orient et l'Occident eurent chacun leur part du tra-
vail et du succès. Ce n'est pas un des moins remar-
3uables triomphes du christianisme, à cette époque de
écadence profonde pour les lettres païennes, aue d'avoir
produit à la fois, de toutes parts, parmi ses défenseurs et
ses interprètes, tant de génies divers. En Orient, Césaréc,
Nazianze, Nysse, Édesse, Antioche, Salaraine de Chypre,
Bethléem, Alexandrie et Ptolémals; en Occident, Car-
thage, Madauro, Rome, Milan , Noie, Poitiers, furent au-
tant de foyers puissants d'où rayonnait sur tous les
points de l'Empire la nouvelle doctrine. En Orient, où
les Pères, épris de la beauté des écrivains profanes, ap-
pellent à leur secours jusqu'aux artifices du talent ora-
toire, et cherchent à reproduire la langue de Platon, on
croit voir luire de nouveau le génie grec avec ses grice^
et ses délicatesses, altéré toutefois, sinon gâté, par la re-
cherche et le luxe affecté d'une exubérance asiatique. En
Occident, les imaginations, naturellement plus sobres,
semblent se tenir généralement en garde contre les sub-
tilités, les allégories et la métaphysi(jue raffinée que les
Orientaux mêlent volontiers à l'exposition et à la discus-
sion des dogmes. Du reste, la décadence de Rome et de
l'Italie, la civilisation récente et toute latine de la Gaule
et de l'Espagne, enfin l'éloignement de la cour impériale,
dont Constantin avait transféré les pompes et les splen-
deurs à Byzance, étaient peu faits pour encourager l'essor
du génie occidental , et le privaient bien plutôt des se-
cours que le mélange des lettres ^ecques avec les livres
saints offrait aux docteurs de l'Onent. Les Pères les plui
célèbres en Orient sont , parmi les apologistes : S' Justin,
S^ Clément d'Alexandrie et Origène; et, parmi les Pères
dogmatiques : S^ Athanase , S^ Grégoire de Nazianze,
S' Basile, S^ Grégoire de Nysse, S' Jean Chrysostome,
S^ Éphralm , S^ Épiphane et Synésius. En Occident , les
Pères apologistes les plus renommés furent : TertuUien ,
Arnobe, Lactance et S' Cyprien; et les Pères dogma-
tiques: S^ Hilaire de Poitiers, S^ Ambroise de Milan,
S^ Paulin de Noie, S^ Jérôme et S^ Augustin. V. Fénelon,
Dialogties sur l'éloquence, 3* dialogue ; Villemain, TMeau
de l'éloquence chrétienne au iv* siècle, gr. in-i8. A. H.
PÉREMPTION (du latin perimere, anéantir, détruire),
perte ou anéantissement d'une procédure, d'un jugement
ou de certains actes judiciaires, par suite d'une inaclioo
prolongée pendant un temps défini. Dans le premier cas,
c'est de la péremption d instance qu'il s'agît : elle est
prévue et régie par les art. 397-401 du Code de proc^un
civile; elle s'acquiert par la discontinuation de poursuites
pendant trois ans, qu'il y ait ou non constitution d'avoué.
Dans le second, on a la péremption^ i^ des jugements par
défaut, lorsqu'ils ne sont pas exécutés dans les six moii
de leur obtention; 2^ des commandements ^ dans ccr-
PÊR
1407
PER
taines matières prévues par la loi, telles que la contrainte
par corps, les ventes judiciaires d*imineuble3; 3» des in-
scriptions hypothécaires, si elles ne sont pas renouvelées
dans les dix ans. V. Reynaud et Dalloz, Traité de la pé-
remption d'instance en matière ctvi/c, 1837, in-8<». R. d*E.
PÉREMPTOIRE (Exception). V. Exception.
PERFECTIBILITÉ. V. Progrès.
PERFECTIONNEMENT (Brevets de). V. Brevets d'in-
VK?ITI0I«.
PERGOLA, nom oue les anciens Romains donnaient :
!** à toute construction ajoutée en appentis sur une face
d'édifice ; 2* à un balcon superposé aux colonnades d'un
Forum; 3° à toute salle où les peintres exposaient leurs
œayres, et qui servait à un enseignement quelconque ;
4' à une galerie placée au srmmet d*une maison.
PÉRI, terme de Blason. F. Bâton.
PÉRIâCTOS, machine de théâtre des Anciens. C'éUit
un assemblage de trois châssis joints en forme de prisme
et portant chacun une décoration différente ; il tournait
à volonté sur un pivot, quand on 'voulait changer le lieu
de l'action. Il y avait un périactos de chaque côté de la
scène. L'emploi de pes machines permet de penser que
los poètes dramatiques n'observaient pas dans leurs
pièces l'unité de lieu avec autant d'exactitude qu'on le
sunprt^p. ordinairement.
PERIBOLE, nom que les Anciens donnu:cnt â Ten-
tnnte de leurs temples, séparés par un mur des terrains
eoTironnants. Le péribole, où Ton plaçait des statues et
des autels, était quelquefois assez vaste pour contenir un
bois sacré ou de petits édifices.
PÉRICOPES (du grec périkopè, division), passages des
lÎYTes saints qui sont prescrits pour la lecture à l'autel et
comme textes de sermons. Le choix de ces passages, qui
était originairement laissé au prêtre, fut, dans le iv* siècle,
limité aux livres canoniques de l'Ancien et du Nouveau
Testament. Puis, le pape Grégoire le Grand composa un
Lectionnaire, contenant les évangiles et les épltres pour
chacun des dimanches et des jours fériés de Tannée. Lu-
ther a maintenu les péricopes de ce pontife, mais les pré-
dicateurs calvinistes sont libres de prendre leurs textes
3ù ils veulent. Dans l'Église catholique, les péricopes lus
^ l'autel sont restés invariables ; la liberté laissée aux
âennonnaires dépend des évêques.
PÉRIDROME (du grec péri, autour, et dromos, course),
galerie ou espace couvert, servant de promenade autour
d'un édifice.
PÉRIÉGÈSE (du grec périégèsts, action de conduire au-
tour), nom que les anciens Grecs donnaient & toute des-
cription de pays présentée sous forme de voyage. On
l'appliquait aux ouvrages d'Hécatée, de Denys le Périé-
gète, de Pausanias, etc.
PÉRIÉLÈSE (du grec périeilèsis, action de rouler au-
tour), terme de Plain-Chant qui désiçne une sorte de
cadence presque inséparable des intonations. La périélèse
se fait de trois manières : par circonvolution, par inter-
cidence ou diaptose, et par d\»plication, La circonvolu-
tion se fait en ajoutant, avant la note qui termine Tinto-
ostion, une note au-dessus et deux notes au-dessous, qui
se lient à cette dernière note du mot, ce qui donne un
contour formé d*une tierce avant de toucher la finale. \a
diaptose, qui est beaucoup plus rare, s'emploie quand la
dernière syllabe de Tintonation est chargée d'une tierce,
d'une quarte ou d'une quinte , intervalle qui exige un
élancement de la voix : elle consiste à ajouter, après la
Dote finale ainsi atteinte, une note en dessous, et à répé-
ter la finale. La simple duplication consiste à doubler la
oote pénultième de Fintonation, et s'emploie lorsque la
dernière syllabe est chargée de plusieurs notes par de-
grés conjoints.
PÉRIGUEUX (Église S*-Front, à), ancienne abbatiale,
?u a remplacé comme église cathédrale celle de S^-
tienne. C'est un des monuments les plus anciens et les
plus curieux de notre architecture religieuse. Quelques
écrivains l'ont reg^u^é comme antérieur au x* siècle;
mais la ressemblance qu'il présente avec l'église S^-Marc
de Venise, dont il est une imitation quant au plan et à la
construction générale, ne permet pas de le faire remonter
au delà de la première moitié du xi* siècle; et encore ne
'^'explique-t-on pas à cette époque la présence de l'o-
rive dans les grands arcs. La ressemblance de l'église
S'-Front avec celle de S*-Marc ne saisit pas au premier
coup d'œil ; elle est intime, et ne devient évidente que
par Tanalyse : la différence d'aspect résulte des adjonc-
tions ou des restaurations successives qui ont altéré le
^ractère primitif des deux édifices, et de l'abandon que
i'irchitecte de S*-Front a fait de l'ornementation byian-
tine. On retrouve à S^-Front les dispositions essentiolîet
de S'-Marc, le plan en forme de croix grecque, la toiture
en terrasses dallées, les cinq coupoles au centre et aux
branches de la croix, le développement excessif des piliers
qui supportent les grands arcs des coupoles, et leur évi-
dement intérieur. Mais la hardiesse et l'élégance de la
construction vénitienne ont fait place à la lourdeur et â
la nudité : les murailles sont planes, et percées de rares
fenêtres ; tout autour de l'église règne un entablement
continu, sur lequel s'appuient 12 frontons couronnant
les 12 pans du mur qui forment le développement exté^
rieur de la croix grecque ; les 8 piliers qui marquent les
extrémités de cette croix se terminent par des pyramides
qui encadrent les frontons et accompagnent les coupoles.
Les fenêtres de S^-Front ont beaucoup plus de dévelop-
pement que celles des monuments byzantins, modifica-
tion motivée sans doute par la différence des climats, le
ciel de l'Occident n'ayant pas l'éclat de celui de l'Orient.
Les grandes coupoles byzantines sont éclairées à leur
base par une couronne de fenêtres ; ici , ces fenêtres sont
réduites à quatre. La coupole du centre s'élève à 66°",60.
Le système d'ornementation de S^-Front n'est point en
rapport avec l'idée principale du monument : c'est une dé-
coration antique, analogue â celle des autres édifices con-
tempondoc en France. Les églises byzantines n'ont pas de
cryptes : léglise S^-Front en possède une, mais depuis
longtemps obstruée. Cette église a les dimensions sui-
vantes : longueur de la croix, 60 met.; hauteur des piliers,
13"*,30; hauteur des coupoles, 28°*,66; hauteur des grands
arcs 19"* 60. B
pÊRIL en la DEMEURE, terme de Droit indiquant
que le moindre retard peut occasionner une perte, un
dommage. Quand on pense qu'il y a péril en la demeure,
il faut recourir à l'intervention de la justice, pour qu'elle
décide, tout au moins à titre provisoire, des mesures qui
doivent être prises pour prévenir le danger. En pareil
cas, un tribunal peut , par exemple, permettre d'assigner
aux jours et heures interdits en général pour les signifi-
cations, ordonner soit un séquestre, soit un dépôt on
toute autre mesure conservatoire, autoriser l'exécution
d'un jugement par défaut, nonobstant opposition, etc.
PÉRIMÉ. V. PéREMPTIOll.
période , en termes de Gtironolog^e, espace de temps
déterminé par le retour d'un phénomène qui revient à
époque fixe ( V, Calendrier , dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire] ; — tempe compris entre deux
époques {V. ce mot),
PERIODE (du grec périodos, route autour, chemin de
ronde, circuit), suite de phrases qui, sans être parties in-
tégrantes les unes des autres, sont tellement liées en-
semble, que les unes supposent nécessairement les autres
pour la plénitude du sens ; et comme , à la fin du sens,
l'esprit se reporte vers la première phrase de toute cette
série, on a parcouru véritablement un cercle, on a fait un
circuit, et c'est pourquoi les rhéteurs çrecs se sont servis
du mot de période^ qui se traduirait bien en français par
celui de contour. Les phrases partielles que contient la
période s'appellent membres. Voici une période à deux
membres : « Chrétiens, que la mémoire d'une grande
reine, fille, femme, mère de rois si puissants, et souve-'
raine de trois royaumes, appelle de tous côtés à cette
triste cérémonie, | ce discours vous fera paraître un de
ces exemples redoutables qui étalent aux yeux du monde
sa vanité tout entière. » (Bossuet, Oraison funèbre de
Henriette de France, Exorde.) .-- La suivante en a trois:
« Quand Dieu laisse sortir du puits de l'abîme la fumée
qui obscurcit le soleil , selon l'expression de l'Apocal^se,
c.-à-d. l'erreur et l'hérésie; | quand, pour punir les
scandales, ou pour réveiller les peuples et les pasteurs
il permet à l'esprit de séduction de tromper les &mes
hautaines et de répandre partout un chagrin superbe,
une indocile curiosité et un esprit de révolte; | il dé«
termine dans sa sagesse profonde les limites qu'il veut
donner aux mnlheureux progrès de l'erreur et aux souf-
frances de son Église. » (Bossuet, /ôûf., !■* part.) — Selon
les rhéteurs, la période doit contenir de deux à quatre
membres : mais il ne faut pas attacher à cette règle une
importance excessive et pour ainsi dire superstitieuse.
Le nombre des membres n'.est pas ce qui constitue la
la vraie régularité ni la vraie beauté d'une période; il
faut y chercher surtout l'art avec lequel l'écnvain a en-
chaîné les phrases qui la composent, et l'harmonie qu'il
a su mettre entre la pensée ou le sentiment et le tour
donné à l'ensemble des expressions. Convenons, au reste,
que le précepte de ne pas donner plus de quatre mem-
bres à une période est plein de sagesse : il est, en effet;
PER
H08
PÉR
dangereux, excepté pour les hommes supérieurs, de dé-
passer cette limite, au delà de laquelle rembarras de
i*écrivain ou do Torateur, et la fatigue du lecteur ou de
Tauditeur ne manquent pas de se faire sentir bientôt.
La période proprement dite n'appartient qu*au genre
oratoire et à la poésie héroïque ; encore celle-ci rem-
ploie-t-elle plus fréquemment dans les discours que dans
les récits, à moins que l'élévation des pensées ou la gran-
deur des événements racontés par le poëte n^exige ou
n*autorise une certaine pompe de style et Tampleur de
la forme oratoire. Tel est le début du 3* livre de VÊtiéidef
qui commence par une période de 3 membres renfer-
mant 7 vers. La période ne convient pas également à
toutes les parties d'un discours ni même à tous les genres
de discours : elle est surtout bien placée dans les exordes
des grandes causes, où il faut éveiller la sollicitude, Tin-
térôt, la pitié ; dans les lieux communs et dans tous les
genres d'amplifications, surtout dans l'Éloge et le Pané-
gyrique. Elle est aussi très-appropriée aux péroraisons;
enfin , selon l'observation de Quintilien , dans les causes
judiciaires, lorsque le juge, instruit et persuadé, se livre
à l'orateur et ne se souvient plus que du plaisir de l'en-
tendre , c*est alors plus que jamais qu'elle doit étaler
toute sa pompe et sa magnificence. P.
PÉRIODE, en termes de Musique, union de plusieurs
phrases mélodiques qui forment ensemble un sens com-
plet. A la fin de ce sens il faut une cadence parfaite.
PÉRIODIQUE (Style), genre de style où l'on recherche
avant tout le nombre, l'harmonie, et qui offre une suite
de périodes travaillées avec art et destini^es à captiver
l'attention par le charme de l'oreille. C'est l'opposé du
style coupe. Le style de Buffon est ordinairement pé-
riodique.
PÉRIOECIENS (du grec péri, autour, et oikos, habita-
tion ), en termes de Géographie, peuples qui ont la même
latitude, mais des longitudes opposées. Placés sous le
même parallèle, à même distance de Téquateur et du
pôle, ils ont les mêmes saisons, la même longueur des
jours et des nuits; mais les uns ont midi quand les
autres ont minuit, parce qu'il y a toujours entre eux une
différence de 12 heures à l'E. ou à TO. En ce sens, ce
qui est au couchant pour les uns est au levant pour les
autres. Aux équinoxes, le soleil se lève pour les uns
quand il se couche pour les autres. B«
PÉRIPATÉTiaENNE (Doctrine) (du grec PeripaUin,
se promener), nom donné à la doctrine d'Aristote, parce
que ce philosophe avait l'habitude d'enseigner en se pro-
menant dans les galeries du Lycée. Pour résumer la phi-
losophie d'Aristote, et la saishr dans ses traits généraux,
il faut d'abord bien entendre la théorie qui la domine
It qu'il a exposée dans le traité connu sous le nom
de Métaphysique. Il est nécessaire à qui veut avoir, de
quelque chose que ce soit, une science accomplie, d'en
connaître : 1° la substance ou matière première, c-à-d.
ce dont la chose est faite; 2® la forme ou essence, qui
détermine la matière ; 3° la cause par laquelle la chose
dont il s'agit a été produite, la cause du mouvement que
nous appelons maintenant cause efficiente ; ^^ la cause
pour laquelle elle a été produite, son but ou sa cause
finale. Ainsi, d'une statue, nous savons tout ce que nous
en pouvons savoir lorsque nous en connaissons la ma-
tière, la forme, l'auteur, la destination. Comme cela est
également vrai des plus grands et des plus vastes objets,
et du monde entier, toute science en définitive se 'résout
dans la science des principes, et tel est en effet le carac-
tère, telle est la nature de la philosophie première. Elle
est la science des premières causes et des premiers prin-
cipes. Les principes sont au nombre de quatre : la Ma-
tière, la Forme, la Cause motrice ou efficiente, la Cause
finale. Mais en y regardant de plus près, on voit qu'ils
sont susceptibles de simplification; effectivement, si la
matière existe indépendamment delà forme ; si le marbre,
avant de devenir, sous la main du sculpteur, Dieu, table
ou cuvette (La Fontaine), existait à l'état de bloc informe,
la forme que celui-ci lui communique n'est indépendante
ni de son travail, ni de la pensée dans laquelle il l'a exé-
cuté. Donc, en réalité, le nombre des principes doit être
réduit de quatre à deux : 1<* la Matière par elle-même
indéterminée; 2° la Cause, dont l'opération la détermine
à devenir ceci ou cela. En raison de cette aptitude à de-
venir indifféremment tel ou tel objet, Arlstote nomme la
matière, considérée dans son universalité, la Puissance
des contraires , ou simplement la Puissance; la cause
qui lui donne l'être actuel , il la nomme VActe. Tout ce
qui existe réellement (et, disons-le en pas<%ant, ce qui
existe réellement, suivant Aristote, et contrairement à
l'opinion de Platon, ce sont les êtres individuels) existe
par l'union de l'Acte et de la Puissance. C'est en cela que
Cionsiste VEntéléchie péripatéticienne (V. ce mot). — Ces
principes posés, il s'agit d'en saisir les rapports, et d'en
suivre les développements dans la nature, dans les ani-
maux, dans l'homme, dans son àme, dans les différente!
fonctions de celle-ci. De là une physique, une histoire
naturelle, une psychologie, une logique, une morale, une
politique, toutes en relation plus ou moins étroite avec la
métaphysique : c'est la métaphysique qui fait le lien et
l'unité de toute la doctrine péripatéticienne. La physique
d'Aristote, trop systématique, trop en dehors de l'obser-
vation , a fini par perdre tout crédit. (K. l'art. Aristote
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,) Il
n'en est pas de même de la philosophie proprement dite ;
le Traité de Vdme et les petits écrits qui s'y rattachent,
les écrits logiques réunis sous le nom d'Organon ( V. ce
mot.)^ les deux traités de morale dédiés à Eudème et à
Nicomaque, la Métaphysique surtout, contiennent des
parties acquises à tout jamais à la science philosophique.
Telle a été d'ailleurs, en durée et en puissance, l'autorité
du Péripatétisme, que ses erreurs mômes sont de celles
dont il faut tenir compte. Nous indiquerons ici un petit
nombre de résultats positifs, les solutions données par
ce système aux questions fondamentales de la philoso-
phie : sur Id ^^ature de l'âme, elleest,non-seulement dans
l'homme, mais dans tout être vivant, le principe intérieur
du mouvement et de la vie, a l'acte d'un corps naturel
qui a la vie en puissance ». C'est à elle surtout qu' Aris-
tote applique le nom d'Entéléchie. Distincte du corps
sans pouvoir en être séparée, elle préside aux fonctions
de la nutrition et de la génération, de la sensibilité, de
l'intelligence, sans qu'on puisse affirmer bien décidément
(c'est up. des côtés les plus faibles de la philosophie
d'Aristote) si Ton doit entendre qu'il y a, dans l'homme
par exemple, trois &mes différentes : une âme nutritive,
une &me sensible, une àme raisonnable; ou seulement
trois fonctions du même principe. Môme incertitude eu
ce qui concerne rimmortaIité,qui, en tout cas, ne serait
le partage que de l'àme raisonnable. Les parties vraiment
expérimentales de la Psychologie péripatéticienne, la
description de la sensibilité, des appétits, des passions^,
de la raison, etc., sont plus satisfaisantes, u Aristote, dit
M. H. Martin, a signalé l'entendement et le libre arbitre
comme conditions de la Morale. Mais, au lieu de s'adres-
ser à l'entendement et à la conscience, qui lui auraient
donné le devoir comme principe de la moi*ale , il a de-
mandé le principe à l'empirisme, et il a cru le trouver
dans le désir du bonheur. Suivant lui, le bonheur, et
par conséquent le devoir de l'être intelligent, c'est de
faire passer autant que possible toutes les facultés de I:i
puissance à l'acte; c'est de les développer complètement
et simultanément. Ce développement des facultés doit
résulter, non d'efforts isolés, mais d'une habitude du-
rable, qui est la vertu. Aristote distingue des vertus in-
tellectuelles et des vertus morales. Il fait consister tout4^
ces dernières dans un juste milieu, entre deux excès cou*
traires , ce qui exclut du nombre des vertus morales \c
désintéressement absolu et le dévouement sans bornes.
Pourtaiit :ta. n:orale se recommande par d'excellentes ob-
^rvations et de profondes analyses. — Sa Politique est
fondée de môme empiriquement sur le principe de l'utile.
Elle est la conclusion de sa morale, où il s'est proposé
moins de donner des règles de conduite que de montrer
quelles sont les qualités qu'il faut développer dans
l'homme. Dans sa Politique , il enseigne , d'une part,
comment l'ordre social sert à ce développement; d'autre
part, comment l'homme politique doit se conduire sous
diverses formes de gouvernement, pour en tii*er le meil-
leur parti possible, et non pour le réformer. Il approuve
l'esclavage comme un fait utile et consacré par l'usage ;
il semble même le considérer comme un fait fondé sur
la nature. Aristote érige ainsi en lois des faits condam-
nables. » — Comme doctrine philosophique, c'est incon-
testablement dans la Théodicée qu'Aristote a été le plus
loin et le plus haut; non pas que sa science soit parfaite
et irréprochable de tout point; nous allons en signaler
les principales erreurs : la matière y est indépendante
de Dieu pour son existence; elle est éternelle comme
Dieu. Dieu, quoique moteur universel, reste enfermé dans
sa pensée solitaire, parce qu'il meut, c.-à-d. gouverne le
monde, non comme cause efficiente, par un acte exprès
de volonté,. mais comme cause finale et comme objet de
désir, toutes choses gravitant vers lui comme vers leur
fin et leur bien suprême. Mais en réduisant la matière
1 à n'ûtro ([uo la puissance des contraires, c.-à-d. en U
PÉR
1409
PER
rapprochant autant que possible du non-être , en répé-
tant sans cesse que Dieu est le premier moteur, malgré
la fausse interprétation que Ton vient de signaler, en
affirmant enfin de la manière la plus explicite Tidcntité
de Dieu, du bien et de la cause finale, Aristote a propagé
dans la philosophie des idées qui ne devaient plus être
dépassées que par la Métaphysique chrétienne qu*elles
préparaient sur quelques points ; de là son immense et
durable influence; de là cette tradition qui, après avoir
exercé son action sur les autres écoles anciennes, modifié
le Platonisme, pénétré chez les Épicuriens, les Stoïciens,
les Alexandrins, s'étendit avec tant de force à la scolas-
tique et à la philosophie arabe ( V, dans notre Dictiori'
noire de Biographie et (T Histoire les articles Arabes,
AvERRofes, elc.)« et provoqua, au moment de la Renais-
sance, des luttes furieuses; qui, enfin, malgré la réaction
dont elle devint alors Tobjet , loin de s'eiTacer dans la
philosophie moderne, a fait naître encore une foule de
savantes et excellentes recherches qui résument, con-
densent, rectifient, tant au point de vue historique qu'au
point de vue dogmatique, tout ce que les générations
précédentes ont entassé sur Aristote d'interprétations, de
commentaires et de polémiques. V.^ pour les indications
biblioçaphiques, Tart. Aristotb, de M. H. Martin, dans
notre uictionnatre de Biographie et d* Histoire, B - e.
PÉRIPÉTIE, du çrec péripéteia , accident inopiné,
changement subit, imprévu, d'une fortune bonne ou
mauyaise en une autre contraire, éprouvé par un ou plu-
sieurs personnages d'un poème dramatique, d'une épo-
pée, ou d'un roman. Dans les pièces de théâtre, la pé"
ripétie est presque toujours voisine de l'action , et c est
d'elle que doit résulter le dénoûment. Ainsi, dans VAthalie
de Racine, la proclamation solennelle du jeune Joas, ius-
que-Ià pauvre et méconnu, amène la catastrophe; dans
les Femmes savantes de Molière, les deux lettres ap-
portées par Ariste , et dont la lecture change tout à
coup les sentiments de Trissotin , forment la péripétie,
et amènent le triomphe du bon sens sur la sottise des
pédantes. Dans VHiade d'Homère, la péripétie est au
19* chant : la mort de Patrocle semblait mettre le combla
aux malheurs des assiégeants ] mais elle a pour effet de
déterminer le retour d'Achille sor le champ de bataille; sa
colère, en se reportant d'Agameronon sur Hector, fait re-
tomber sur les Troyens les périls auxquels étaient exposés
les Grecs depuis la prise du camp, et prépare la cata-
strophe du poème, qui est la mort d'Hector. Toute péri-
pétie, quelque soudaine qu'elle »>it, doit ^tre la consé-
quence naturelle, logique, vraisemblable, des événements
antérieurs on des passions qui animent les personnages.
A cet égard, Il n'en est pas do plus parfaite que celle de
Vlliade. Les péripéties des comédies et des romans sont
amenées sonvent par une reconnaissance de personnes,
de signes ou d'objets; ce moyen est employé quelque-
fois aussi avec succès par la tragédie et par l'épopée
(K. REcomvAissAfiCB). Chez les Modernes, le mot Pm-
pétie, consacré surtout pour les ouvrages de Tantiquité
grecque, est souvent remplacé par le mot Révolution, P.
PÉRIPHÈRES, ornements en relief autour des vases.
V. Gbdstjs.
PÉRIPHRASE (du grec péri, autour, et phrazô, Je
parle ), figure de Rhétorique par laquelle à une expres-
sion simple on substitue une définition ou une descrip-
tion qui donne au style plus de noblesse et d'élé^mce.
Telle est cette magnifique périphrase que Bossuct {Oraison
funèbre de Henriette de France, exorde) emploie au lieu
du mot Dieu : « Celui qui règne dans les deux , et de
qui relèvent tous les empires, à qui seul appartient la
gloire, la mi^esté et l'indépendance, etc. » La périphrase
est souyent nécessaire pour remplacer un terme trivial
oo bas; ainsi. Racine nous montre Junie (Britanni-
Dans le simple appareil
D*aiie betnté qu'on vient d'arracher au sommeil.
L'abus de la périphrase rend le style lourd, préten-
tieux, bizarre, et même inintelligible. C'est ce qui a fait
dire à Pascal {Pensées) : « Il y en a qui masquent toute
la nature. II n'jr a point de roi parmi eux, mais un auguste
monarque; point de Paris, mats une capitale du royaume.
Il y a des endroits où il faut appeler Paris Paris, et d'au-
tres où il faut rappeler capitale du royaume, n Les poètes
descriptifs ont fait souvent abus de la périphrase, qui de-
vient alors une sorte de logogriphe à deviner par le lec-
teur. Blair cite les paroles d'un gentilhomme qui , pour
ordonner à son laquais de lui ûter ses bottes, lui disait :
tkiïou!» viens Ici oonr me servir^ délivre les colonnes mo-
biles qui soutiennent mon individu de cette dépouille
d'un bœuf mort »• F. Circonlocution. H. D.
PÉRIPLE (du grec péri, autour, et pléô, je navigue),
nom que les anciens Grecs donnaient aux voyages do
circumnavigation, comme celui que des PhéAiciens exé-
cutèrent ^ dOit-on , autour de l'Afrique par ordre de Né-
chao, roi d'Egypte. On appela également Périples les
relations de voyages maritimes. Nous possédons celui du
Carthaginois Uannon sur les côtes d'Afrique; celui de
Scylax, Grec de Carie , sur les côtes de l'Europe et do
l'Asie ; et les Périples du Pont-Euxin et de la mer Ery-
thrée par Arrien. V. les Geographice vêler is scriplores
Grœci deDodwelI, Oxford, 1703-1712.
PÉRIPTÈRE (du grec péri, autour, et ptéron, aile),
édifice dont le pourtour extérieur présente sur toutes ses
faces un rang isolé de colonnes, éloignées du mur d'en-
ceinte à distance d'un entre-colonnement. Le pseudo-pé-
riptère n'a que des colonnes engagées dans son mur
d'enceinte. Le monoptère et le aiptère (K. ces mots)
sont, en réalité, des périptères; mais les Anciens ne
leur donnaient pas ce nom.* B.
PÉRISCÉUS , sorte do bracelet que les femmes de
l'anc. Grèce portaient au-dessus de la cheville du pied.
PERISQENS. V, Amphisciens.
PÉRISPOMÈNE, nom grec de l'accent circonflexe. Il
8'appli({ue à l'accent et aussi aux mots qui le portent sur
la dernière syllabe. Si l'accent circonflexe est sur l'avant-
dernière, le mot s'appelle propérispomène, P.
PÉRISSOLOGIE (du grec périsses, superflu, et logos,
discours), nom que quelques rhéteurs donnent à la répé-
tition inutile d'une même idée.
PÉRISTËRIUM, sorte de baldaquin placé au-dessus
des tabernacles et des vases servant à conserver l'hostie.
PÉRISTYLE (du grec péri, autour, et sttUos, colonne^,
mot désignant, chez les anciens Grecs, un édifice envi-
ronné en son pourtour intérieur d'un rang de colonnes
isolées et parallèles aux murs. Les Romains rappliquèrent
à toute galerie en colonnades construite autour d'une
cour. Les Modernes ont appelé péristyle, tantôt l*édifice
qui a un entourage extérieur de colonnes (alors il est sy-
nonyme de périptère)y tantôt l'ensemble de colonnes qui
forme le frontispice d'un monument. E
PERIYALIOM, mot latin par lequel on désignait au-
trefois le chœur des chantres, ou les stalles de ce chœur.
PERLES , une des parures les plus recherchée» dans
tous les temps. On employait les perles dans l'Inde bien
longtemps avant que le commerce les eût fait connaître
aux Grecs st aux Romains. Ces peuples en ornèrent les
agrafes, les chaussures, les colliers, les boucles d'o-
reilles, et y consacrèrent des sommes considérables.
J. César donna h Servilia, sœur de Caton d'Utique, une
Çerle qu'il avait payée 0,000 grands sesterces (environ
2,000 fr.); celle que la reine Cléopàtre avala, dit-on,
après l'avoir fait londro dans du vinaigre, avait coûté
10,000 grands sesterces (20,000 fr.); Lollia Pauline,
femme de l'empereur Caligula, portait dans sa parure
pour plus de 40 millions de sesterces (8 millions de fr.)
en perles et en pierres précieuses. Néron chargea de
perles les sceptres, les masques et les lits do ses his-
trions. La mode des perles a commencé en France sous
le règne de Henri IIJ. Il y a parmi les joyaux de la cou-
ronne de France une collection de 408 perles, toutes très-
belles, et pesant chacune iO grammes; elle est évaluée
500,0(K) fr. Les principaux endroits où l'on pèche les
huîtres à perles sont la mer Rouge, le golfe Persique, le
détroit de Manaar, près de IMle de Ceylan, le golfe du
Bengale, celui du Mexique, et la mer Vermeille. Les belles
perles sont parfaitement sphériques, blanches, opaques,
ou d'une transparence opaline, avec un éclat changeant
et diapré que les joailliers appellent Varient, Il y a aussi
des perles allongeiBS en forme de poire: elles sont égale-
'ment recherchées quand cette forme est parfaite. Les
féeries sont sujettes à mourir; on reconnaît cet état quand
eur émail est détruit ou endommagé. B.
PERLES, en Architecture, petits grains ronds taillés
dans les moulures.
PERMIS DE CHASSE. V, Chasse.
PERMIS DE sÉroDR. Aux tormos d'un arrêté du 12 messi-
dor an viii (l"^juill. 1800), une permission était nécessaire
à tout voyageur qui voulait séjourner plus de trois jours
à Paris. Une ordonnance de police du 8 sept. 1851 porte
que tout étranger qui arrive dans le département de la
Seine avec l'intention d'y résider ou d'y exercer une indus-
trie, doit se présenter, dans les trois jours de son arrivée*
à la préfecture de police, pour y obtenir, s'il y a lieu, un
permis de séjour, a peine d'expulsion du territoire.
89
PER
UIO
PER
PERMISSION, figure de Rhétorique par laquelle on
feint de pennettre, on demande même avec instance, ce
qu*on ne ?eut pas, ce qu'on sait bien qu'on n'obtiendra
pas. Quinte-Curce fait ainsi i>arler Alexandre à ses sol-
dats (X, 2) : « Que les chemins soient libres pour ceux
qui veulent me quitter; faites-leur place; moi-même,
avec les Perses, je protégerai leur retraite. Je ne retiens
personne; éloignez-vous de mes yeux, citoyens ingrats;
vos pères, vos enfants vous accueilleront avec joie, quand
vous reviendrez sans votre roi ; ils iront au-devant des
déserteurs et des transfuges. » Cette figure tient de
Tironie ; mais elle est toujours adaptée à des pensées sé-
rieuses. B.
PERMUTATION, en termes de Grammaire, change-
ment d*une lettre en une autre qui appartient au même
organe. — Dans l'armée, on nomme permutation le chan-
gement d'emploi entre deux officiers de môme grade. La
permutation doit être autorisée ; elle est considérée
comme une faveur, et fait généralement retarder la pro-
motion à un grade supérieur.
PÉRORAISON fdu latin jnerorafto), dernière partie,
conclusion d'un aiscours. Elle a pour but de rappeler
brièvement à l'auditeur la substance du discours, et de l'en-
traîner par un dernier effort du sentiment. La récapitula-
tion consiste à réunir ensemble toutes les raisons dissé-
minées dans le corps du discours, de manière à les faire
embrasser d'un seul regard. Tantôt il faut reprendre les
parties de la Division, et rappeler les points qu'on a pro-
mis de traiter ; tantôt & ses propres raisons on joint celles
de l'adversaire et leur réfutation. On rappelle ainsi en
quelques mots à l'auditeur la Confirmation et la Réfuta-
tion. Une grande variété de st^le est ici nécessaire pour
éviter la sécheresse et l'ennui. La seconde partie de la
Péroraison consiste dans l'emploi du pathétique pour
achever de produire la persuasion chez l'auditeur. Les
Anciens la divisaient en deux parties : Vindignation et la
plainte. L'indignation a pour objet d'amasser beaucoup
de haine sur un individu, ou de défaveur sur un fait ;
Cicéron ( De Inventions , 1 ) expose les règles particulières
de ce moyen oratoire, qui se tire, dit-il , de quinze lieux.
La plainte consiste à émouvoir la compassion du juge ; elle
doit être amenée par des réflexions graves et tristes sur
l'inconstance de la fortune, la faiblesse de l'homme, etc.;
elle se tire de seize lieux. La rhétorique moderne n'a
pas maintenu toute la doctrine de Cicéron sur l'emploi
des lieux dans la Péroraison ; mais elle a conservé les
règles qui s'appliquent à tous les temps, c'est gue la Pé-
roraison doit être brève et animée. La Péroraison n'est
pas nécessaire dans tous les discours ; elle se rencontre
ordinairement dans les plaidoyers étendus, dans l'oraison
funèbre, dans le sermon, et dans les discours politiques.
Nous en avons de beaux modèles dans les discours de
Cicéron pour Milon et pour Ligarius, dans l'oraison fu-
nèbre du prince de Condé par Bossuet, dans le 3* dis-
cours 4e Mirabeau sur la banqueroute. H. D.
PÉROU (Arts au). V, Péruvien (Art).
PÉROU (Langues du). V, Péruviennes (Langues).
PERPENDICULAIRE (Style). V. Angleterre (Archi-
tecture en ).
PERPIGNAN (Église S'-Jeaii, à). Cette église cathé-
drale, dont on posa la première pierre en 1324, demeura
plus de deux siècles en construction ; elle fut élevée uni-
quement avec le produit des aumônes des fidèles, et,
lorsque le concile de Trente eut jugé nécessaire de pro-
voquer de nouvelles libéralités, on ne put encore b&tir
la façade qu'avec une extrême simplicité. Le corps de
l'édifice est de style ogival secondaire ; les voûtes et les
détails appartiennent au style tertiaire; le portail est
moderne. Iji tour qui accompagne ce portail est lourde
et sans grâce : on a placé au-dessus, en 1744, une cage
en fer, haute de 15 met. environ, d'une disposition har-
die , et qui contient les cloches de l'horloge. L'édifice a
78 met. de longueur, 19'",50 de largeur, et 27 met. de
hauteur sous voûte. Il n'offre qu'une seule nef, de pro-
portions nobles et imposantes ; la voûte, d'une belle exé-
cution, n'a pour suppoit que des arceaux de pierre
appuyés sur les murs de séparation des chapelles. Le
transept offre une particularité remarquable : au lieu de
se terminer carrément, 11 a une abside percée d'un écran,
et, à la partie supérieure de chacun de ses croisillons,
une seconde abside pentagonale qui forme chapelle. La
chapelle de droite, consacrée à la S** Vierge, contient un
retable décoré de peintures de la fin du xv* siècle. A la
clef de voûte du sanctuaire sont sculptées les armes de
France. Le maltre-autel a un célèbre retable en marbre
blimc, dont Iw bas-relief» wu% séparé» les uns de»
autres par des pilastres chargés de figures. En sortant de
l'église par la porte latérale, on trouve une chapelle dite
du Crucifix, bâtie au xvi* siècle pour recevoir un cru-
cifix sculpté en 1525. — A la gauche de l'église SWean
se trouve une église plus ancienne, appela le Vieux
S^-Jean, construction romano-byzantine. B.
PERQUISITION (du latin perquirere^ rechercher), ac-
tion de rechercher et de saisir au domicile d'un individu
prévenu d'un crime ou d'un délit les objets qui peuvent
servir à la manifestation de la vérité. Le droit de perqui-
sition appartient, en cas de flagrant délit, au procureur
impérial et à ses auxiliaires (juges de paix, officiers de
gendarmerie, maires, commissaires de police), et, dans
tous les cas, au juge d'instruction, qui peut le délé^er
par une ordonnance dite mandat de perquisition {Code
dinstruction criminelle, art. 36-62). Les perquisitions
doivent être faites en présence du prévenu ou de son
fondé de pouvoir. Chaque autorité ne peut faire de per-
quisition que dans son ressort; néanmoins, la loi auto-
rise les présidents de Cour d'assises, les procureurs géné-
raux ou leurs substituts, les juges d'instruction et les
juges de paix, à continuer hors de leur ressort les visites
n£essaires chez les personnes soupçonnées d'avoir fabri-
qué, introduit, distribué de faux papiers de l'État, de
faux billets de la Banque de France, ou de la fausse mon-
naie. — Les gardes forestiers et les préposés dos douanes
peuvent faire des perquisitions pour trouver les objets
qui ont été soustraits aux droits dus à l'État. Les em-
ployés des Contributions indirectes peuvent faire des
perquisitions chez les débitants de liquides. Les voitures
de messageries et toutes personnes qui font habituelle-
ment des transports sont soumises à des perquisitions
dans l'intérêt de l'administration des postes.
PERRON ( pour pierron, construction en pierre), esca-
lier extérieur et découvert, composé d'un peUt nombre
de marches, construit sur un massif au devant de l'en-
trée d'un étage peu élevé au-dessus du rez-de-chaussée,
ou pour arriver à quelque terrasse dans un jardin. Un
perron peut être carré, ou cintré, ou à pans ; il est simple,
s'il n'a qu'une rampe, et double, s'il en a deux.
PERROQUET, en termes de Marine, voile carrée d«i
toile légère (^ui surmonte les huniers. La vergue qui
porte cette voile s'appelle vergue de perroquet. Il y a un
grand perroquet, qui surmonte le grand hunier; un
petit perroquet , sur le petit hunier; et un 3* perroquet,
dit perruche. Ces voiles servent dans les beaux temps.
On nomme Perroquets d'hiver des perroquets plus pe-
tits que ceux qu'on porte dans la belle saison. — Le mât
de perroquet est le 3* m&t en élévation ; porté par le mât
de hune , il supporte lui-même le m&t de cacatois.
PERRUQUES. l V. ces mots dans notre Dictioï^
PERRUQUIERS. \ naire de Biogr. et d: Histoire.
PERSE (Arts de la). Les monuments d'architecture des
anciens Perses n'avaient point d'analogie, comme le pen-
sait le comte de Caylus, avec ceux de l'Egypte ; ils foi^
maient , ainsi que ceux de la Médie, une branche de l'art
assyrien (V. ce mot). La cause en est ({ue l'Empire as-
syrien s'étendit sur la plus grande çarbe de l'Iran. Les
constructions antérieures à Cyrus doivent être cherchées
dans la Médie : le ch&teau d'Ecbatane, b&tî sur une hau-
teur en forme de terrasse, et dont les sept enceintes cré»
nelées, s'élevant les unes au-dessus des autres, étaient
revêtues d'un enduit de sept couleurs différentes ( pro-
bablement de briques coloriées), contenait un palais et
un temple dont le toit était formé de tuiles d'argent
massif, et dont les colonnes, les poutres, les caissons en
bois de cèdre et de cyprès, étaient revêtus de lames d'or
et d'argent. Le palais de Suse, que les Grecs nommaient
Memuonia, était d'architecture babylonienne, ce que
prouvent non-seulement les témoignages de l'Antiquité,
mais encore les amas de briques, quelquefois coloriées,
qu'on trouve aujourd'hui à Schus. Dans la Perse propre-
ment dite, on pourrait citer, à Pasargade, un palais des
Achéménides et le tombeau de Cyrus; mais le seul mo-
nument qui subsiste est le palais de Persépolis (F. ce
mot dans notre Dictionnaire ae Biographie et d'Histoire),
A Persépolis se trouvaient également les monuments fu-
néraires des Achéménides; on suppose qu'un de ceux qui
ont été trouvés au mont Rachmed est le tombeau de Da-
rius. Le palais de Persépolis et les bas-reliefs de Bisou-
toun ( V. ce mot dans notre Dtc^tonnatr^ de Biographie et
d'Histoire) peuvent aussi donner une idée de la sculp-
ture des Perses. Ce peuple fabriquait des tapis orués de
personnages; mais rien ue prouve que ces fibres aient
été bien exécutées, et Ton ignore sUl y eut véritablement
en Perse un talent quelconque de peintoro. Les Penu»
PER
un
PER
n'aimaient pas la musique; ils la considéraient comme
dangereuse pour l'&me, et l'on n'entendait que rarement
des hymnes en Thonneur des dieux ou des rois. La danse
leur paraissait ^^ement nuisible aux bonnes mœurs.
Mais le contact des Mèdcs fit disparaître cette barbarie
primitive, et la musique devint chez les Perses, non-scu-
Icmcnt ono auxiliaire de la poésie et de la mimir^ue,
mais un art indépendant. K. Silvestre de Sacy, Mémoires
sur diverses antiquités de la Perse, Paris, 1793; lloeck,
Veteris Mediœ et Persiœ monumenta, Gœttingue, 1818,
in-4*; Maurice, Observations on the ruins of Dabylon
and Persepolis, Londres, 1816-18, 2 vol. in-4° ; Bucking-
ham, Travels in Assyria, Media and Persia, Londres,
1830, 2 vol. in-8«; Texier, Description de V Arménie, de
la Perse et de la Mésopotamie, Paris, 1842, in-fol.;
Flandin et Coste, Voyage en Perse, Paris, 1850, 2 vol.
in-S" et 6 vol. d'atlas in-fol. ; Fergusson , The palaces of
^'ineveh and Persepolis restored, Londres, 1851, in-S**.
PEKSB ^Langues de la), groupe de langues indo-euro-
péennes (K ce mot) parlées entre le Tigre et l'Iudus. Ce
groupe comprend le send, le peMvi, le déri, le far si ou
parsi (V. ces fnots)^ qui ont été en usage à diverses
époques de l'Antiquité dans TEmpire des Perses, et le
persan moderne, formé par le mélange d'éléments indi-
gènes avec un élément arabe apporté par la conquête mu-
sulmane. Adelung regardait le persan -primitif ^zend,
pehlvi, farsi) comme aussi ancien que le sanscnt, et,
selon Othmar Franck, il lui aurait m^me donné nais-
sance; mais ces opinions n'ont pas été admises par les
linguistes, et l'on s'accorde, avec W. Jones et Fréd. de
Schlegel, pour voir dans le persan un dérivé du sans-'
crit. Le persan moderne a fait subir au zend et au pehlvi
des altérations notables : par exemple, il en a contracté
les voyelles médiales et supprimé les finales, rejetant
ainsi la plupart des longues terminaisons de ces deux
langues. Sa constitution grammaticale présente des rap-
ports nombreux avec celle du sanscrit , malgré certaines
simplifications de formes« Les termes arabes qui s'y sont
introduits ont fait perdre une partie de la nomenclature
primitive, mais sans modifier notablement les règles de
la grammaire et de la syntaxe. Ces termes sont d'autant
plus nombreux dans les écrivains qu'on se rapproche da-
vantage de notre époque. Les savants de l'Allemagne ont
remarqué que le persan ressemble plus qu'aucune autre
langue orientale aux langues germaniques : c'est une
preuve nouvelle qu'il n'a point été fondamentalement
transformé par l'invasion des locutions arabes et de celles
qu'il a encore empruntées aux Turcomans. Le persan ne
distingue pas de genres dans les substantifs et dans les
adjectifs ; il manque d'article défini. Comme le turc et les
langues sémitiques, il peut remplacer par de simples
aifixes les adjectifs possessifs. La terminaison an est la
terminaison ordinaire du pluriel et de l'infinitif, comme
m en allemand. Un seul temps, le prétérit , est suscep-
tible de prendre des flexions différentes dans des verbes
différents; les autres suivent tous une môme conjugaison.
Dans les temps secondaires de la voix active et dans tous
les temps de la voix passive, on emploie un système
d'auxiliaires analogue à celui des Allemands et des An-
glais. Les modes conditionnel ou optatif et subjonctif
manquent; on ^ supplée par l'indicatif accompagné de
particules. Ainsi que le sanscrit, le grec et l'allemand,
le persan peut former des composés de toute espèce par
la simple juxtaposition des radicaux. Il a aussi un nomnre
considérable d'idiotismes qui se traduisent littéralement
en autant d'idiotismes germaniques. Des 21 à 23,000 mots
qu'on trouve dans les meilleura dictionnaires persans, il
y en a 1,500 dans le zend, et environ 4,000, avec plus ou
moins de changement, dans le vocabulaire allemand. La
prononciation du persan est douce et harmonieuse : l'ac-
cent, placé d'ordinaire sur la dernière syllabe des mots,
peut être suffisamment varié pour ne point engendrer la
monotonie. C'est une langue euphonique, pleine de figures
et d'images, éminemment propre à la poésie : bien qu'elle
ne soit guère en usage aujourd'hui à la cour, où règne
une dynastie turcomane, elle conserve le rang de langue
officielle dans les audiences solennelles des princes, dans
les cours de Justice, dans les actes émanant de l'autorité,
et on la parle même dans l'Inde entière parmi les mu-
sulmans de qualité. Les règles de la versification persane
ont été empruntées à l'arabe. -L'écriture, qu'on appelle
taalik ( suspendue ), est une variété légère et hardie de
l'écriture arabe : seulement , il est 8 lettres arabes qui
ne trouvent pas leur place dans les mots de pure origine
persane, et les Persans en ont créé 4 nouvelles, pour n>*
présenter de» sons particalierB de leur prononciation.
K. Louis de Dieu , Rudimenta linguœ perstcœ , Leyde,
1629 ; Gravius, Elementa linguœ persicœ^ Londîres, 1641,
in-8^; Burton, H istoria veteris linguœ perstcœ, Londres,
1657; CastelU, I^exicon persicum, ibid.^1660, in-fol.;
Meninski, Lexicon arabico-persico-turcicum. Vienne,
1680, in-8^; Ange de La Brosse de SaintKloseph , Gazo-
phylacium linguœ persicœ, Amst., 1684, in-fol.; Ignatius
à Jesu, Grammatica linauœ perstcœ, Rome, 1601, in-4<';
Anauetil-Duperroo, Rechercnes sur les anciennes lançues
de la Perse, dans les Mém, de l*Acad, des Inscriptions,
t. XXXI; Reland, De reliquiis veteris linguœ persicœ,
dans ses Dissertationes miscellaneœ, t. Il; W. Jones,
Grammar of the Persian language, Oxford, 1*771, trad.
en français par Garcin de Tassy, 1845; J. Richardson,
Dictionary persian, arabùs and english^ Oxford, 1777,
2 vol. in-fol., et, avec augmentations de Johnson, Lon-
dres, 1829; Gladwîn, Persian Vocabulary, 1780; Fr. de
Dombay, Grammatica lingtiœ persicœ, Vienne, 1804,
in-4®; Wilken, Institutiones ad fundamenla linguœ per-*
sicœ, Leipzig, 1805, in-8<^ ; O. Franck, De Persidis lingua et
ingenio, Nuremberg, 1800; Lumsden, A Grammar ofthe
persian langtuige, Calcutta, 1810, 2 vol.; Beft Kulsum,
ou les Sept mers, dictionnaire imprimé par ordre du
sultan d'Oude, Lacknau, 1822, 7 vol.; Handjeri, Diction*
naire français, arabe, persan et turc, Moscou, 1840-42,
3 vol. in-4<' ; Wullera. institutiones linguœ persicœ cum
sanscrUa etxendica lingua comparatœ, Gies&en, 1840;
Rosen, Elementa persica, Berlin, 1843, in* -8°; Duncau
Forbes, A Grammar of the persian language, Londres,
1844; Geitlin, Principia grammatices neo-persicœ, Hel-
slngfora, 1845 , in-8<*; Mirza-Ibrahim , Grammaire de la
langue persane, traduite en allemand par Flcischer, Leip-
zig, 1847, in-8<*; WuMerSy Lexicon persico-latinum, Bonn,
1853; Bérésine, Recherches sur les dialectes persans,
Kazan, 1853, in-8».
PERSE (Littérature de la). Quand les Arabes firent la
conquête de la Perse au vu' siècle de notre ère, ils dé-
truisirent par l'eau et le feu les livres historiques et It
plupart des livres religieux du pays. Tout ce qui nous est
resté de ^l'antique littérature consiste dans les livres
zends. Les lettres se ranimèrent au ix* et au x* siècle,
sous la dynastie des Samanides. La poésie fut alora inau-
gurée par Roudégui, traducteur du livre de Calila et
Dimna (7. ce mot)^ et par Balami, qui écrit une version
persane de la Chronique arabe de Tabari, publiée en
français par Dubeux (18351. Pendant la domination des
Gaznévides, parut Ferdousi, l'auteur du Schah-Nâmeh
( V, ce mot). Vinrent ensuite : Anwari, qui vivait vers
1150, et composa des odes ; Nis&mi, auteur d'une Chamssé
ou collection de cinq grands poèmes romantiques ;
Chak&ni, poète lyrique, qui fleurit vera l'an 1200 ; Ferid-
ed-din Att&r, auteur du Pend-Nàméh (Livre du bon
conseil), publié avec traduction française par Sacy en
1819, et du Mantik Utlaïr (le Langage des oiseaux), pu-
blié par Garcin de Tassy en 1857 ; Djel&l-ed-din-Rûmi,
considéré comme le plus grand des poètes mystiques ;
Saadi, Hafiz, Djàmi, placés au premier rang parmi les
poètes de la Perse; Feisi, qui prit, au xvi* siècle, dans le
Mahâbharata, l'épisode de Nala pour en faire le sujet
d'une épopée. On a fait, dans des temps très-rapprochés
de nous, de vastes poèmes historiques, tels que le Livre
des Rois, cnii raconte l'histoire moderne de la Perse, et
le George-Ndmeh, consacré à la conquête de l'Inde par
les Anglais. Il existe enfin une poésie populaire, dont on
peut se faire une idée par l'ouvrage d'A. Chodxko, Spe-
cimens of the popvdar poetry of Persia, Londres, 1822.
Les Persans sont le seul peuple mahométan oui ait
cultivé la poésie dramatique. Les pièces de leur tjié&tre
ne sont pas sans analogie avec nos anciens Mystères.
V, Chodzko, Sur la littérature dramatique des Per*
sans, Paris, 1841, in-8<*. Parmi les nouvelles, romans,
contes, etc., fort nombreux dans la littérature persane,
nous citerons : Anwari Soheili, imitation des fables in-
diennes de Bidpal; Bfihàri-Danisch (Printemps de la Sa-
gesse), par Inajet-Allah, que Scott a traduit en anglais
sous le titre de Garden of Knowledge (1700, 3 vol.); le
Tûti-Nâmeh (Livre du Perroquet), publié en anglais par
Hadley, en persan par Iken et Kosegarten (Stuttgard,
\%22); Bakiijdr'Nàmeh (Histoire du prince Baktijar),
publié en anglais par Ousely ( Paris, 1830 ).
La littérature historique persane est très-riche; mais
on n'en connaît encore en Europe qu'une très -faible
partie. Parmi les livres imprimés, on remarque : ïHiS"
toire des Mongols, écrite vera l'an 1320 par Ruchid-
Eddin, et traduite en français nar Quatremère ( Paris,
1836]; VHisloin de Tmour (Tamerlan), par Scherif*
PER
1412
PER
Eddin-Jesdi, traduite par Pétis de La Croix^ Parig, 1734.
D*une grande Histoire universelle de Mirkhond, on a
extrait lei ouvrages suivants : Histoire des Samanides,
publiée par Defrémeiy, Paris, 1845; Histoire des Gainé-
vides et Histoire des BotUdeSj par Wilken, Berlin, 1832
et 1835; Histoire des Sassantdes, que Sacy a traduite en
français, Paris, 1793 ; Histoire des Ismaélites^ publiée
par Jourdain, Paris, 1812; Histoire des Sel^oucides,
par Wullers, Giessen, 1837; Histoire de Gengis-Khan,
par Jaubert, Paris, 1841 ; Histoire des sultans du Khor
risnif par Defirémery, Paris, 1842. Nous clouterons V His-
toire de VInde de Ferischta, traduite en anglais par
Briggs, Londres, 1820, 4 vol. ; les Institutions de Timour,
publiées en anglais par White, Oxford, 1783; les Wà-
kiâti Babûri, ou la vie de Babour racontée par lui-même,
traduct anglaise d'Ëi-skine, Edimbourg, 1826; la Des-
cription de VEmpire du Mogol dans l'Inde sous Akbar,
publiée en anglais par Gladwin, Calcutta, 1783, 2 vol.;
V Histoire de Nadir-Schah, publiée en français par Jones,
I.ondres, 1770; V Histoire des Afghans de Neamet-
tlllah, trad. en anglais par Dorn, Londres, 1829, 2 vol. ;
VHistoire de VInde de 1705 à 1782, par Gholam-Husafn-
Khan, trad. anglaise, Calcutta, 1780, 3 vol.; le Measiri
SuUanijje, bistoire deja dynastie actuellement régnante,
trad.
hlâm^
renseignements
bistân, exposition de toutes les religions de l'Asie, trad.
en anglais par Troyer, Londres, 1843, 3 vol.
PERSE (Faïences de la). V. au Supplément.
PERSE (Religion de la). V. Zbnd-Avesta.
PERSES (Monnaies). Les Perses paraissent s'être servis
de la monnaie principalement dans leurs relations avec
des mercenaires et
les peuples mari-
times de l'Empire
dont on prenait les
navires a louage ,
car il ne parait
point que les Per-
ses aient Jamais eu
une marine à eux. Ils employaient les métaux précieux
pour réchange à l'intérieur, mais au poids. Dans le tré-
sor de Darius, Tor monnayé était en très-petite quantité.
Darius, fils d'Hystaspes, fit (hipper les premières monnaies
perses qui , de son nom, furent appelées Dariques, En
voici une dont le droit montre le roi traîné dans un char,
et le revers la ^lère phénicienne portée sur les flots.
D'antres Dariques frappées par Xerxès représentent le
roi, tantôt en sagittaire avec la tiare sur la tête, le genou
3n terre, et l'arc, emblème du rang souverain , comme
ci-contre ; tantôt sur le char. Hé-
rodote nous montre le grand roi
porté en litière, mais montant
sur un chariot pour traverser les
villes et les endroits populeux.
Sur certaines Dariques figure, à
la proue des navires, le Patèque,
divinité phénicienne, mais dif-
forme : elles portent souvent des
légendes phéniciennes. On a
frappé des Dariques en or et en
argent, de simples et de doubles Dariques.
Les Cyzicènes, monnaies de Cyzique, le plus grand
centre oriental de fabrication monétaire, parafesent s'être
substituées peu à peu aux Dariques, qui avaient une
grande réputation de pureté. Les plus anciennes Cyzi-
cènes peuvent être attribuées à Crésus : on a cru lire sur
plusieurs le nom de Cyrus , qui aurait été substitué à
celui de Crésus après la conquête de la Lydie. D.
PERSÉPOUS (Ruines de). V, notre Dictionnaire de
Biographie et d*Bistotre,
PERSIENNE, sorte de Jalousie fixe, dont les lames in-
clinées sont assemblées dans un cb&ssis. Les persiennes,
dont le nom vient sans doute de ce qu'on les suppose
originaires de la Perse, sont placées en dehors des fe-
nêtres pour garantir du soleil l'intérieur des apparte-
ments; elles s'ouvrent à un ou deux vantaux, se repliant
encore quelquefois sur eux-mêmes, au moyen de char-
nières. Les persiennes se font en bois de chêne ou de
sapin. Any Halles centrales de Paris, les baies des parties
hautes de chaque pavillon sont garnies de persiennes
fixes en lames de cristal dépoli, pour laisser passer le
jour en abritant des rayons solaires. B.
PËR8IQUES (Colonnes), nom donné par les anciens
Grecs à des colonnes doriques dans lesquelles le fût était
remplacé par des figures d'esclaves perses, qui suppcff^i
talent un entablement.
PI^RSONNAUTÉ, caractère en vertu duquel un être
mérite le nom de personne. Le sentiment de la person-
nalité entraîne la responsabilité» L'exagération de ce sen-
timent est VégOUsme. — Dans un autre sens, une per-
sonnalité est un trait piquant, injurieux et personnel
contre quelqu'un.
PËRSONNAT, en termes de Droit canonicpe, bénéfice
qui donnait quelque prérogative ou prééminence dans
une église, dans un chapitre, mais sans juridiction.
PERSONNE, être qui a conscience de son existence et
de son individualité. Le minéral, le végétal, l'animal
même sont des choses; l'homme est une personne, — En
Droit, la dénomination de personne civile s'applique :
1^ à l'État; 2<' aux départements, aux communes et à
leurs sections, aux lycées, évêchés, cures, teoaples, éta-
blissements publics , en ce sens qu'ils jouissent de cer-
tains droits civils, tels que ceux d'acquérir, de posséder,
de vendre, etc. ; 3*' aux sociétés scientifiques ou de bien-
faisance déclarées établissements d'utilité publique;
4° aux sociétés en nom collectif ou en commandite; 5® aux
sociétés anonymes.
PERSONNE (du \9,i\n persona, personnage, rôle), per-
sonnage, rôle que joue dans le discours le nom ou le
pronom. Il y a trois personnes : la 1^ est celle qui parle,
la 2* celle à qui l'on parle, et la 3* celle de qui l'on
parle. La 1'* personne se désigne en français par le pro-
nom je, nous; la 2* par le pronom tu^ votis; la 3*, soit
par le nom même, soit par le pronom il, ils au masculin,
elle, elles au féminin. Les langues anciennes suppriment
habituellement les pronoms personnels employas comme
sujets, l'inflexion du verbe déterminant avec une préci-
sion su£Qsante le rôle du sujet; elles ne les expriment
3ue pour donner du relief à l'expression de la pensée, ou
ans les situations animées, ou lorsqu'il y a une opposi-
tion, un contraste à faire ressortir. V, Pronom. P.
PERSONNELLE (Contribution), une des contributions
directes. Elle se compose de la weur de trois Journées
de travail. Le Conseil génâral, dans chaque département,
doit, sur la proposition du Préfet, déterminer le prix
moyen de la journée de travail pour chaque ^mmune^
sans pouvoir le fixer au-dessous de 50 centimes, ni au-
dessus de 1 fr. 50 c. La taxe personnelle »t due dans la
commune du domicile réel partout habitant. Français ou
étranger, de '^out sexe. Jouissant de ses droits et non ré-
puté indigent. Sont considérés comme jouissant de leurs
droits : les veuves, et les femmes séparées de leurs maris;
les garçons et les filles, majeurs ou mineurs, ayant des
moyens particuliers et sufiisants d'existence, lors même
qu'ils habitent avec leur père, mère, tuteur ou curateur.
Les domestiques logés et nourris chez leurs maîtres ne
sont pas imposables; mais les précepteurs, les dames ie
compagnie, les hommes d'affaires, les concierges, les
gardes particuliers, les personnes logées comme pension-
naires, supportent la taxe.
PERSONNIFICATION, figure de Rhétorique qui con-
siste à faire, d'un être inanimé ou d'une pure abstraction,
un personnage réel, doué de vie et de sentiment. Ainsi,
La Fontaine a dit (vi, fab. Si) :
Sar les ailes da Terni» la Triitesae t*enTole.
L'Allégorie et la Prosopopée supposent le plus souvent
une personnification.
PERSPECTIVE (du latin perspicere, voir clairement),
art de représenter sur une surface plane ou courbe les .
corps ou les objets, tels qu'ils paraissent vus à une di-
stance et dans une position données. Elle comprend le
dessin, c.-à-d. l'ensemble des lignes qui déterminent le
contour du tout et des parties, le clair-obscur, qui en
fait sentir le relief, et le coloris, qui en montre la vé-
ritable apparence. Bornée au dessin, la perspective est
dite linéaire, et c'est la géométrie descriptive qui ea
fournit les règles; quand les ombres ou les couleurs sont
jointes au dessin , on la dit aérienne, parce qu'elle a
pour objet la modification de la lumière et de l'ombre
en raison de la masse d'air qui se trouve entre le des-
sinateur et l'objet qu'il représente. Dans une longue
guérie, les lignes de bSilJments, au lieu de demeurer
pour l'œil telles qu'elles sont réellement, et d'être pa-
rallèles, semblent se rapprocher l'une de l'autre à pro-
portion de la distance où elles sont du spectateur. Ces
phénomènes sont ceux que la perspective enseigne à re-
produire. Elle donne aussi les règles de la reproduction
des ombres portées par les objets, des figures réfléchici,
des raccourcis, des plafonds et des voûtes» etc. Les ta*
PÊR
1413
PÉR
bleauz peints en panorama sont la plus saisissante ap- I
pUeadon de la perspective linéaire et aérienne. !
La perspectiVe était connue des Anciens. Le poète
Eschyle, au rapport de Vitruve, enseignait an peintre
Âgatharque à mettre en perspective les décorations des-
tinées à ses tragédies : Agatharque fit même sur ce sujet
an traité, que Démocrite et Anaxagore complétèrent;
leurs écrits ne nous sont pas parvenus. Les peintures
d'Herculanum et de Pompéi, les bas-reliefs, les médailles,
prouvent que la perspective était pratiquée chez les Ro-
mains. Biais cette science n*a été poussée Jusqu^à la per-
fection que par les Modernes. Pietro del Bozzo, Albert
DQrer, Balthazar Peruzzi , Guido Ubaldi , en ont donné
les règles. K. D. Barbaro, Praitica délia prospettiva,
Venise, 4559, în-fol.; J. Cousin, Livre de perspective,
Paris, 1560, in-fol.; André Du Cerceau, Leçons de per^
spective, 1576, in -fol.; André Alberti, Traité de Perspec-
tivcy eu allemand et en latin, Nuremberg, 1623 et 1670,
in-fol.; le P. Nicéron, Perspective cwrieusey Paris, 1652;
Abraham Bosse, Manière universelle de M, Desargues
pour pratiquer laperspecHve, 1648, 2 vol. ; Ozanam,P0r5-
pective théorique etpratique, 1711, in-8<*; Amato, Nuova
pratica dt Prospettiva, Palerme, 1736, in-fol.; Monge,
Théorie des ombres et ie laperspective (dans sa Géométrie
descriptive) ; Yalenciennes, Êlemetits de perspective pra-
tique, 2« écUt, Paris, 1820, in-4<>; Thibault, Aj^lication
de la Perspective linéaire aux arts du dessin, Paris,
1827, in-4®; Ch. Normand, Parallèle des diverses mé-
thodes de Perspective, diaprés les auteurs anciens et
modernes, Paris, 1833, in-4°; les Traités de Perspective
por Lant et par J.-B. Cloquet ; les Principes de permec-
tive linéaire par Bouillon ; la Nouvelle Théorie simplifiée
de la Perspective par Sutter, in-4o.
PERSUASION, adhésion de Tesprit à ce qui lui a été
pn^nté comme vrai. Déterminée le plus souvent par des
raisons qui s'adressent au cœur et gui peuvent tromper,
elle se distingue en cela de la Conviction, fondée sur des
preuves d*nne évidence irrésistible. La Persuasion peut
être plus ou moins forte : la Conviction n*est pas suscep-
tible de degrés ; elle est, ou elle n*est ^s.
PERTIGÂ, nom latin qu'on donnait autrefois à des
poutres placées derrière Tautel ou sur les côtés, et qui
servaient à suspendre des reliques les jours de grande fête.
PERTUIS (du latin pertusus, percé, ouvert), nom
donné, en Géographie, l» à certaines passes de TOcéan
sur les côtes occidentales de la France, comme le Per-
tuis d'Antioche, entre les lies de Ré et d'OIéron, et le
Pertuis Breton , entre l'île de Ré et le continent ; %^ à
un passage étroit entre des montagnes, comme le Pertuis
Boston dans les Alpes, près de Bnançon. — On nomme
encore Pertuis un passage étroit pratiqué dans une ri-
vière, au moyen de deux batardeaux, pour élerer le
niveau de l'eau et faciliter ainsi la navigation.
PËRTUISANE, arme. V, ce mot dans notre Diction-
naire de Biographie et d'Histoire.
PÉRUVIEN (Art). Les Péruviens, avant Tarrivée des
Espagnols, possédaient des monuments d'Architecture.
Au milieu des plaines, sous un ciel doux et pur, les habi-
tations pouvaient être légères et mal closes; elles consis-
taient en buttes rondes, couvertes de branchages et de
terre, comme sont maintenant celles des Indiens du pavs.
Mais, dans la région montagneuse, où les pluies sont fré-
quentes et le froid assez vif, il fallait des demeures plus
solides, et un assez grand nombre de ces maisons se sont
conservées jusqu'aux temps modernes. Elles sont ordi-
Durement de forme carrée, hautes de 2 à 3 met., faites
de briques durcies au soleil, et dépourvues de fenêtres;
la porte d'entrée est étroite et basse. — Le talent des ar-
chitectes péruviens s'est surtout révélé dans la construc-
tion des temples et des palais. Les descriptions pom-
peuses que les écrivains espagnols ont faites de ces
édifices pourraient passer pour mensongères ou exagérées,
si des ruines parfaitement conservées n'attestaient leur
véracité. Les Péruviens, ignorant l'usage de la poulie et
des autres moyens mécaniques inventés dans l'ancien
monde, et ne pouvant, par conséquent, élever à une
grande hauteur les pierres énormes dont ils se servaient,
ne donnèrent à aucune muraille plus de 4 met de hau-
teur, ei l'on ne sait même pas comment ils pouvaient
élever les pierres jusque-là; car Acosta en a mesuré qui
avaient 10 met. de lonp, 6 met. de large et 2 met. d'épais-
seur. Les pierres destinées aux grands b&timents ne re-
cevaient généralement point de l'ouvrier une forme qui
les rendit plus faciles à placer et à consolider; on les
employait telles qu'elles tombaient des montagnes ou
sortaient des carrières, et il fallait un grand art pour ap-
pareiller des masses carrées, triangulaires, sphériques oa
polygonales, de manière à former un ensemble homogène.
Cette idée de ne point égaliser les surfaces des blocs
s'explique aisément : n'ayant ni ciment ni mortier, les
Péruviens pensaient avec raison qu'ils obtiendraient plus
de solidité en construisant leurs murs de pierres iné-
gales, mais parfaitement jointes et s'équilibrant les unes
avec les autres. Du reste, on ne s'en tint pas toujours à
ce mode de construction ; car, dans plusieurs monuments
de Cuzco, ainsi qu'au palais de Caf^ar, décrit par La Con-
damine {Mém* de l'Âcad. de Berlin, 1746), il y a des
assises exactement parallèles et de hauteur égale, si bien
unies qu'on en distingue difficilement les joints. On a
pensé que les Péruviens s'étaient servis d*argile pour
joindre ainsi leurs blocs de pierre. Les grands édifices,
pas plus que les maisons particulières, ne paraissent
avoir eu de fenêtres; les pièces, ne recevant de jour que
par la porte, devaient être fort obscures, à moins qu'eAes
ne fussent éclairées par le haut, ce dont il n'est pas
possible de s'assurer aujourd'hui. Les outils grossiers et
tout à fait insuffisants des Péruviens ne permettent pas
de croire qu'ils aient été habiles dans la charpenterie ; et,
comme ils ne connaissaient pas la voûte, comme ils
ignoraient l'usage des cintres, on ne saurait dire de
quelle façon ils couvraient leurs monuments. — Parmi
les restes de l'antique architecture péruvienne, on re-
marque le temple de Pachacamac, le palais de l'Incaet la
forteresse de Cuzco, qui occupaient ensemble une super-
ficie de 3 kilomèt. de circuit; Is temple de Cayambo ; les
ruines d'une très-grande ville, près de Caxamarca; le
portique monolithe d'un temple, à Tiguanaco ; un tom-
beau de chef dans la province de Carangas, et les ruines
d'un temple des Incas dans une tle du lac Titicaca (Bo-
livie) ; le palais ou forteresse de Cahar, muraille en ovale
régulier dont le grand axe a 35 met. de longueur, et au
centre duquel se trouvent les ruines d'une petite maison;
enfin, près de Latacunga, sur le versant du Cotopaxi, le
Paneculo (Pain de sucre), tumulus conique qui a dû servir
de sépulture à un grand personnage, et la Maison de
l'Inca, vaste b&timent carré où Ton voit encore 4 grandes
portes extérieures, 8 chambres, 18 niches distribuées
avec symétrie. Les écrivains espagnols ont fait un grand
éloge dès deux routes que les Incas avaient construites
de Cuzco à Quito, sur une longueur de 2,000 kilomèt.,
Tune à travers les parties intérieures et montagneuses du
Pérou, l'autre dans les plaines qui s'étendent le long de
l'Océan. Il est vrai que, dans les autres parties de l'Amé-
rique, même au Mexique, les indigènes n'ont point établi
de semblables voies de communication, et, à cet égard,
les Péruviens étaient plus civilisés : mais l'exécution
même des routes des Incas était imparfaite ; elles n'avaient
que 5 met. de largeur, et étaient si peu solides, qu'on
ne peut en beaucoup d'endroits retrouver leur direction ;
quelques vestiges se retrouvent dans les parties mon-
tueuses du pa^s. Les Péruviens n'ont point eu, pour
traverser les rivières, de ponts en bois ou en pierre : ils
jetaient d'une rive à l'autre 6 gros c&bles, faits d'osier
et de lianes, et les fixaient solidement à chaque extré-
mité; puis ils les réunissaient au moyen de cordes plus
petites, assez rapprochées pour former une espèce de
filet; ils recouvraient le tout de branches d'arbres et
ensuite de terre, que l'on battait pour en faire une sur-
face dure et unie. On obtenait ainsi des ponts solides, •
quoique oscillants, et sur lesquels les mules pouvaient '
passer toutes chargées.
Les Péruviens n'avaient pas fait de grands progrès
dans la sculpture, si l'on en juge par leurs statues, qui
toutes ont les membres attacha au corps. Mais ceux de
leurs vases qu'on a trouvés dans les ruines ou dans les
tombeaux feraient penser le contraire : on y voit des
figures qui annoncent l'entente du dessin. Les Péruviens
avaient poussé assez loin l'art de fondre, de ciseler les .
métaux, et de leur donner des formes; car on sait que«
dans le butin qui fut partagé entre les premiers conque*
rants espagnols, se trouvait une splendide image du.
soleil, arrachée au temple de Cuzco.
La musique avait sa place dans les réjouissances pu-
bliques ou privées des Péruviens; mais elle dut être
d'une grande monotonie. L'instrument le plus usité était «
une sorte de flûte de Pan, formée de 4 ou 5 tuyaux de.
roseau, rendant un son chacun. Il y arait des airs de
chanson très-variés, mais qui ne nous sont point par- 1
venus. La danse s'associait à la musique dans les céré* >
monies ; chaque province avait sa danse particulière, avec
des pas et un rhythme traditionnels. B.
PÉRUVIENNES (Langues). Il pwslt que les Incas, qui >
PÉR
14U
PÊT
régnaient sar le Pérou avant la conquête espagnole, et
3ui représentaient, non pas une famille en possession
u pouvoir, mais une race originairement distincte de
celle sur laquelle ils exerçaient Tautorité, ont eu une
langue particulière, inintelligible pour leurs sujets. Au-
cun Européen n*en a obtenu connaissance. On distingue
aujourd'hui dans la population péruvienne indigène
quatre races principales, les Quichuas, les Aymaras, les
Moxos et les Ghi^uitoSfet par conséquent quatre langues.
Le quickua, lien commun de toutes les populations ,
présente cinq dialectes principaux : le cuzci*cano ou lan-
gage de Cuzco, qui est le plus pur, et que les classes
élevées se piquent de parler avec élégance ; le quitegna^
parlé à Quito, remarquable par sa dureté, par l'altéra-
tion de ses flexions, et par l'abondance des mots étran-
gers gui s'^ sont introduits; le lamanOf usité à Truxillo ;
le chinchaisuyo, à Lima; le calchaqui, à Tucuman. Le
quichua manque de nos articulations 6, d, f, g, L v;
mais il en a d'autres qui nous sont inconnues, et dont
quelques-unes , saccadée , dures , tirées du fond de la
gorge, ressemblent à des croassements. La déclinaison a
trois cas ; les rapports autres que ceux exprimés par ces
flexions se rendent à l'aide de prépositions. La conju-
vaison est riche en temps, en modes et en voix; aucun
gerbe n'est irrégulier, pas même le verbe substantif,
qui est, comme dans la plupart des langues européennes,
l auxiliaire de la voix passive. La construction est fixe et
très-simple : le verbe se place uniformément à la fin de
la proposition. — Les Péruviens ont eu une littérature :
ils composaient des poèmes en l'honneur des grands
hommes, des apologues moraux, des chroniques en vers,
des œuvres dramatiques, etc. Ces productions se perpé-
tuaient par la tradition orale; car l'écriture était ignorée,
et l'on n'y suppléait que très-imparfaitement par les qui-
pos {V. ce mot dans notre DictionruUre de BwgrapMe et
d'Histoire), V, Domingo de Saint-Thomas, Grammatica
0 arte de la lengua genertUe de los Indios de los reynos
del Peru Uamada Quichua, Valladolid, 1560, in-S», et
Arte y VocabtUario, Lima, 1586 ; Diego de Terres Rubio,
Grammatica y Vocabulario en la lengua générale del
Peru Uamada Quichua, Séville, 1603 ; Diego Gonzalez
Holguin, GrammtUica y arte nueva de la lengua Qui-
chua 0 del Inca, Lima, 1607, et Vocabulario, 1608 ;
Alonzo Huerta, Arle de la lengua Quichua, Lima, 1616;
Diego de Olmos, Grammatica de la lengua gênerai del
Peru, Lima, 1633, in-4°; Mexio y Ocon, Arte de la len-
gua quichua, Lima, 1648 ; Estevan Malgar, Arte quichua,
Lima, 1691.
La langue aymara, parlée dans le pays de La Paz, a en
commun avec le quichua un vingtième de ses mots, quel-
ques formes grammaticales, la richesse des verbes, et la
dureté de la prononciation. Les rapports des noms s'y in-
diquent par des postpositions. V. Bertonio, Arte y Gram-
matica de la lengua aymara, Rome, 1613, in-8<* ; Diego
de Terres Rubio, Arte de la lengua aymara, Lima, 1616.
Le mooDO^ en usage dans une portion de la Bolivie, ne
parait pas se rattacher aux deux langues précédentes,
mais plutôt au maypure (F. ce mot)^ parlé dans la vallée
de rOrénoque. Il est doux et harmonieux, ne double
jamais les consonnes, et manque des articulations d, f, L
On y remarque une grande variété de formes dans la voix
passive, qui emploie comme auxiliaires une foule de
verbes exprimant des nuances de souffrance ou de con-
trainte. F. Pedro Marban, Arte, catecismo y vocabulario
mojo, Lima, 1701.
I^ langue chiquito, parlée en Bolivie, a un certain
nombre d'articulations nasales et gutturales, et cependant
moins de rudesse que le quichua et l'aymara. Elle manque
du verbe substantif; faute de noms de nombre, elle em-
prunte ceux de l'espagnol. On lui reconnaît une grande
richesse d'expressions destinées à rendre les nuances des
rapports physiques. Le langage des femmes diffère de
celui des nommes par un certain nombre de mots et de
formes ; comme les hommes en font usage pour s'adresser
à la divinité et à ceux envers qui ils -marquent du res-
pect, on peut en conclure que ces mots et ces formes ont
simplement un caractère révérencieux, et ne s'expliquent
point , comme danâ d'autres parties de l'Amérique, par
la supposition que les femmes seraient les débris d'une
population dont les mâles auraient été exterminés.
Indépendamment des quatre langues précédentes, on
trouve encore, dans la région du Chaco, celles des Abipons
et des Mocobis. L'abipon possède Vô des Allemands et l'fl
des Espagnols ; il est harmonieux, et pauvre en monosyl-
labes; plusieurs mots identiques signifient des choses
différentes, à l'aide d'accents différents. Dans U construc-
tion, les prépositions précèdent leurs réagîmes. — Le mo-
cobi manque des articulations f, ke, ki, H, r, s, v. Des
particules servent à distinguer les nombres, à former des
diminutifs et des augmentatifs. Dans les verbes, le pré-
sent seul est fait par flexion; les autres temps se forment
à l'aide de particules.
PESCHITO. V. Bible.
PESÉE DES AMES. V. Pstchostasie.
PESETA. V. Piécette.
PESO , c.-&-d. poids, monnaie de compte de l'Espagne,
la même que la piastre forte.
PESSIMISME (du latin pessimu^, le plus mauvais),
opinion de ceux qui croient que le mal domine dans le
monde : c'est le contraire de l'optimisme (F. ce mot). Les
Eessimistes, à la vue des phénomènes qui semblent trou-
1er l'ordre général , à l'aspect des misères, des vices et
des crimes de ce monde, pensent que tout est livré à une
puissance aveugle, à la fatalité, au hasard ; ou, du moins,
que l'ordonnateur suprême circonscrit sa providence au
maintien des lois générales, sans se soucier de la multi-
tude des êtres créés. Dans la société, ils exagèrent les
maux dont ils ont été les témoins ou les victimes, ne
croient à aucune vertu , ne prévoient que des malheurs;
ce sont des esprits chagrins et mélancoliques. V, Misan-
thropie.
PÉTALISME. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d*Histoire.
PÉTARD, machine dont on se servit , après l'invention
de la poudre, pour crever et renverser la porte d'une en-
ceinte fortifiée. C'était une sorte de petit canon en bois,
on fer ou en bronze, de 30 à 40 centimètres de long et
de 20 centimètres d'ouverture, qu'on remplissait de
poudre et de terre bourrées et tamponnées, et qu'on
fermait solidement par un madrier. On allait clouer ce
madrier contre la porte, et on mettait le feu au pétard
comme à un canon, mais de plus loin , à cause de l'ex-
plosion. Les pétardiers se garantissaient, au moyen de
pavois, contre les projectiles des assiégés. Quand ceux-ci
eurent creusé des fossés extérieurs pour défendre l'ap-
proche des portes, on se servit du pétard à -escale {V. ce
mot). On employa le pétard à l'attaque de Dieppe en
1444.
PÉTASE , coiffure. V. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
PÉTAUDS fdu latin pes, pied), nom donné au moyen
ftge à une espèce de fantassins, puis, sans doute par suiu
de leurs désordres, à des troupes de brigands.
PÉTERHOF, ch&teau impérial de Russie, sur les bords
du golfe de Kronstadt, à 28 kilom. S.-O. de S^Péters-
bourg. Il fut b&ti sous Pierre le Grand, vers 1720, sur les
dessins de l'architecte Lcblond. La façade principale re-
garde les jardins : elle se compose d'un frontispice à trois
étages, dominant un terrassement à gradins, de 2 ailes à
un étage et un peu en arrière de l'alignement, et, à
chaque extrémité, d'un grand' pavillon en forme de dôme.
Devant le château règne une vaste terrasse soutenue par
des voûtes d'où s'échappent deux masses d'eau considé-
rables : celles-ci forment plusieurs cascades, et vont se
réunir dans un bassin de marbre, pour aller, après avoir
alimenté une foule de Jets d'eau, se perdre dans la mer.
L'édifice est riche en souvenirs de toutes les Coques : on
y voit, dans son état primitif, la chambre à coucher
de Pierre le Grand et les vêtements de ce souverain ;
une tapisserie des Gobelins, donnée par Louis XVITI à
Alexandre P', et représentant Pierre le Grand assailli
Ear Ib tempête au milieu du lac Ladoga; plusieurs ta-
leaux de Hackert représentant la victoire navale des
Russes sur les Turcs à Tschesmé. Si Péterhof le cède h
Versailles pour la grandeur du style, il l'emporte par
l'abondance des eaux. Dans l'enceinte des Jardins, on re-
marque plusieurs dépendances dont le nom rappelle des
construcUons célèbres, telles que Marly et Monplaisir,
dans ce dernier b&timent se trouve une belle collection
de tableaux. B.
PÉTERSBOURG (Église S^-ISAïc, à Saint-), église ca-
thédrale, située sur la place de ce nom , et bâtie en gra-
nit , en marbre, en bronze et en fer ; son plan est en
forme d« croix grecque; un dôme s'élève au centre, et
quatre chapelles carrées, surmontées de campaniles, sont
établies aux angles. La longueur totale est de 94 met., et
la largeur de 31. Les quatre portiques qui s'élèvent aux
quatre bras de la croix offrent chacun 12 colonnes mono-
lithes en granit rouge de Finlande, hautes de plus de
18 met., et du plus de 2 met de diamètre. Chaque por-
tique est couronné d'un fronton, dont les bas-reliefs ont
été exécutés par Lemaire et Vitali. Chaque fronton est
PÉT
1415
PHA
sarmonié de trois âgures en bronze : au sommet, an des
Éyangélistes, et, à chaque coin, un Apôtre. Des Anges
aeenouillés, également en bronze, sont placés sur des
pikstres cannelés, à chaque angle du toit , dont ils ter-
minent la décoration. Le dôme, avec ses fenêtres en ar-
cade, rappelle beaucoup celui de S^-Pierrc de Romtf ; sa
base, en marbre gris comme les murs, porte 24 colonnes
corinthiennes de granit, au-dessus desquelles règne une
galerie ornée d*une balustrade en bronze que décorent
h figures d'Anges du même métal; la coupole et la lan-
terne sont couTertes en cuivre doré, et on y a employé
217 livres d*or pur. La hauteur du dôme au-dessus du sol
est de 118 met.; son diamètre, de 23 met. Les portes de
réglise de S^-Isaac, tout en bronze, ont une riche orne-
mentation ; celle qui forme la grande entrée, sous le por-
tique occidental, ne mesure pas moins de 16 met. de
haut sur l'",30 de large. A Tintérieur de Tédifice, les
murs, recouverts de marbre blanc, portent des incrusta-
tions de toute espèce et de toute couleur; le sol est en
marbre gris, arrangé comme un parquet, et qui se déve-
loppe sur 4,500 met. carrés, pour se réunir au milieu en
une magnifique rosace de diverses couleurs. On estime
à plus de 3.50 millions de francs la dépense des construc-
tions et de Tomementation de SMsaac. — Pierre le
Grand avait conçu le projet d'ériger une église en T hon-
neur de S^ Isaac le Dalmate, parce qu'il était né le Jour
que les Grecs consacrent k la lète de ce saint. Mais ce fut
seulement Catherine II ^ui Jeta les fondements de Tédi-
flce, en 1768. Souvent interrompus, les travaux furent
repris en 1820, sous la direction de l'architecte français
Montferrand, et , dix ans après, la croix fut inaugurée au
sommet du dôme. Il fallut ensuite 20 ans pour achever
les œuvres d'ornementation. B.
p^ERSBODRo (La Bourse de Saint-). V, Bourse.
PETITE-OIE, nom que l'on donna, pendant le.xvn® siè-
cle, en France, à tout ornement accessoire de l'habit, sur-
tout aux coques de rubans.
PÉTITION (du latin petitio, demande), demande par
écrit formée près d'une autorité. Avant 1789, toute de-
mande de ce genre s'appelait placet ou supplique. Aux
termes de la loi du 13 brumaire an vu, rigoureusement
remise à exécution depuis 18iO, les pétitions doivent èti'o
rédigées sur papier timbré, excepté celles qui sont adres-
sées à l'Emporeur, au Sénat, ou qui ont pour objet des
demandes de congés ou de secours, des réclamations sur
les contributions personnelle et mobilière pour une taxe
au-dessous de 30 fr. Une loi de 1807 exemptait aussi les
pétitions au sujet des résultats de l'expertise cadastrale.
— Ld Droit de pétition aux assemblées législatives tut re-
connu par TAssemblée constituante de 1789; mais comme
chaque citoyen pouvait, soit prendre pour intermédiaire
quelque représentant du peuple, soit se présenter lui-
môme à la barre, il y eut bientôt de graves abus; car
l'émeute, soua prétexte de pétition, exerça plusieurs fois
une grande pression sur les diîlibérations. La loi dut dé-
fendre la présentation des pétitions à la barre. La Con-
stitution de l'an viii accoroa à toute personne le droit
d'adresser des pétitions par écrit aux autorités constituées,
et notamment aux Chambres. Ce droit fut consacré par
les Chartes de 1814 et de 1830 : une commission nommée
par les bureaux, et renouvelée tous les mois, était chargée
de leur examen, et on en faisait le rapport à une séance
publiauede chaque semaine. La Constitution de 1852^ a
enlevé au Corps législatif le droit de recevoir et d'exami-
ner des pétitions, pour le réserver au Sénat, et la presse
ne peut en rendre d'autre compte que celui qui est con-
signé dans les procès- verbaux de cette assemblée. En
Angleterre, le droit de pétition au Parlement est un des
plus anciens et des plus respectés ; toutes poursuites et
toutes accusations à raison de l'exercice de ce droit sont
illégales : la première pétition adressée à la Chambre des
communes date du règne de Henri VII.
PÉTITION D'HéR^DITé. V. HéRéDlTé.
PéTmO?! DB PRINCIPE. V. PRINCIPE.
PÉTITOIRE (Action), demande faite en justice à l'effet
de ressaisir la propriété d'une chose. C'est une action ac-
cordée au propriétaire dont le droit a été ignoré, mé-
connu ou usurpé. V, POSSESSOIRE.
PETORRITUM. ( V, ces mots dans notre Dictwnnatre
PETRINAL. S de Biographie et d'Histoire,
PÉTROVSKOI (Château de), près de Moscou.Co château
Impérial, bâti en 1770 par ordre de Catherine IL se com-
pose de deux parties distinctes, un massif principal sur-
monté d'un large dôme peu élevé dont le pourtour est
percé de fenêtres, et un autre massif en fer â cheval qui
le développe autour du premier. C'est dans la partie
circulaire que se trouve l'entrée du château, décorée de
deux tours couvertes de petits dômes. Deux autres tours
s'élèvent à l'endroit où finit le fer â cheval : polygonales
par la base, circulaires dans la partie supérieure, elles se
terminent en terrasses crénelées. Tout l'édifice est bâti
en briques, et afi'ecte les formes arabes et byzantines. Les
Jardins, qui s'étendent en arrière du château, sont fort
simplement disposés, et ne contiennent que de grands
massifs
PETTÉU. K. MéLOPÉB.
PEULS (Langue des). 7. Foolah (Langue).
PEULVANS. K. CsLTiQOES (Monuments).
PEUPLE, mot employé aujourd'hui comme synonyme
de Nation ( V» ce mot). Chez les Anciens il avait la même
valeur. La formule : Le Sénat et le Peuple romain signi-
fiait le corps dirigeant et toute la nation ; ce n'est que par
une mauvaise intelligence de ce mot , que les modernes
ne l'ont attribué qu'aux classes inférieures, et l'ont fait
synonjrme de plébéien chez les Romains. Cette dénomi-
nation admise, peuple, par rapport â la fortune et â l'in-
struction, a désigné la partie la moins notable de la
population, les classes inférieures, la multitude, et, au-
jourd'hui encore, c'est l'acception assez générale.
PEOTINGKR (Carte ou Table de). K. notre Diction-
naire de Biographie et d'Histoire.
PEZZA, monnaie de compte de Toscane, valant 4 fr.
82 c; — monnaie effective d'or, valant 5 fr. 17 c.
PFENNIG, monnaie de compte d'Allemagne, le quart
du kreuzer, c.-àr-d. un centime. V. Albds.
PFUND, monnaie de compte d'Allemagne, valant
14 fr. 14 c.
PHAÉTON, voiture très-légère, découverte, â deux
roues, ainsi nommée par allusion au char que Phaéton ,
fils du Soleil, conduisit si mal, et aux dangers que cou-
rent ceux qui vont si rapidement dans de telles voitures.
PHALiE. l V, ces mots dans notre Dictionnaire
PHALANGE. | de Biographie et d'Histoire.
PHALANSTÈRE, nom donné, dans le Fourriérîsme
(F. ce mot)^ â l'édifice qu'habite une phalange ou com-
mune sociétaire. Cet édifice, destiné à contenir de 1,500
à 1,800 individus, contient des logements pour toutes les
conditions et tous les goûts ; les ménages habitent sépa-
rément, quoique réunis dans l'ensemble. 11 y a, en outre,
des quartiers pour l'enfance et pour les études, des salles
de bains, de banquets, de réceptions, de bals et de con-
certs, un théâtre, un temple, une Bourse, un Jardin , des
serres, des promenades couvertes, etc. Les Fourriéristes
n'ont pas nu élever un seul phalanstère en Europe ; celui
qui a été établi aux États-Unis, dans le New-Jersey, a été
bientôt abandonné.
PUALARIQUE. V, Falariqub, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
PHALÉCIEN ou PHALEUCE (Vers), vers grec ou latin,
ain&i appelé d'un poète nommé Phalœcius. Il est composé
d'un trochée ou d'un spondée, d'un choriambe, d'un
dilambe et d'une syllabe supplémentaire, qui forment
un dochmius. L'ïambe et le tribraque au premier pied
sont rares. Si on rattache ce vers au système choriam-
bique, il n*a que trois pieds ; si on le rattache au système
dactylique, il en a cinq. V. Hendécastllabb , et Lo-
GAJSblQVE. P.
PHALÈRES, collier. V. notre Dictionnaire de Biogror
phie et d'Histoire.
PHAUSQUE ou FALISQUE (Vers), vers tétramètre
dont les 3 premiers pieds sont dactyles, et le 4* un
ïambe ou un pyrrhique :
Fâlcè rû\bôs stlï\cêmquè rè\sècèt.
BoàcB.
Il est ainsi nommé du poète Phaliscus. Quelquefois le
1er dactyle est remplacé par un spondée» P.
PHARAON, jeu de cartes qui se Joue avec un jeu com-
plet, et qui admet un nombre indéterminé de pontes ou
de joueurs, plus un banquier. Chacun ponte (pointe) une
carte, c.-â-d. qu'il y met un enjeu. D'un autre jeu le
banquier tire 2 cartes, qu'il met l'une â sa droite, l'autre
â sa gauche : la i^^ lui fait gagner les enjeux des cartes
pareilles, tandis qu'il double les sommes aventurées sur
la 2*. S'il amène un doublet, c-â-d. 2 cartes de même
rang (2 as, 2 neuf, 2 rois, etc.), il ramasse tout l'argent
de la carte de droite, et la moitié des sommes couvrant
la carte de gauche. Arrivé à fond de taille, c.-â-d. au
26® coup, il ne double point les enjeux de la dernière
carte, les pontes retirent seulement la mise. — Les jeux
de Bassette, de Barbacole, de Hoca, sont des variétés da
Pharaon.
PHA
U16
PHA
PHARE, toar élevée sur un littoral, ot portant à son
lommet un feu qui sert à guider pendant la nuit la
marche des navires, aui approches des côtes, et à les
avertir de leur position.
L^usage des feux pour aider à la navigation remonte aux
temps les plus reculés : les tours de Sestos et d'Abydos,
sur le Bosphore, et celle de Tile de Pharos, dans Tan-
eienne Egypte, près d*Alexandrie, et dont le nom est resté
à toutes les constructions de ce genre (V. Phare, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire)^ étaient
de vérital)les phares. Il y avait, au rapport de Denys de
Byzance, un phare célèbre à Tembouchure du Chry-
sorrhoas, qui débouchait dans le Bosphore de Thrace.
lies Romains ont élevé un grand nombre de phares, quel-
ques-uns à l'imitation de celui d'Alexandrie : tel était
celui d'Ostie, b&ti sous Tempereur Claude. Il y en avait
un autre à TUe de Caprée, qu'un tremblement de terre fit
écrouler peu de temps avant la mort de Tibère. Pline
l'Ancien parle des phares de Ravenne et de Pouzzoles. Ils
en avaient aussi construit sur les côtes de la Gaule;
par exemple, un à Icius Portus (BouIogne-sur-Mer), qui
subsistait encore en 1G43 : il se composait d'une tour oc-
togone à 12 étages, avec autant de galeries supportées par
des entablements ; chaque entablement, porté sur l'épais-
seur du mur de dessous, formait un petit promenoir large
d'un demi-mètre, et le tout allait se rétrécissant de ma-
nière à donner à la tour la forme d'une pyramide. Ce
pliare s'appelait Turris ordens ou ordensis, d'où les Bou-
lonnais avaient fait Tour d'ordre ou d'odre : on croit que
ce mot vient du celtique odr ou odre (limite, rivage]
Vis-à-vis de Calais, à Douvres, il y avait un phare,
attribué à César, et dont on voit encore les ruines. — A
Capio, en Espagne, à l'embouchure du Guadalquivir, il
y eut aussi un fort beau phare.
Phares chei les Modernes, — A l'époque de Is Renais-
sance on construisit des phares remarquables, la Tour de
Cordouan, à l'embouchure de la Gironde (V. notre Dic-
tionnaire de Biographie et d^ Histoire) ^ et la Tour de
Gênes, à l'entrée du port de cette ville. Mais les plus
beaux travaux de ce genre ont été faits de nos Jours par
le corps des ingénieurs des ponts et chaussées. Nous
citerons le phare de Barfleur, sur la pointe de Gat-
teville (Manche). Bâti de 1829 à 1835 par l'ingénieur
Delarue, il est tout en granit, et s'élève en forme de co-
lonne au-dessus d'un soubassement rectangulaire et jus-
qu'à une hauteur de 70 met. Celui du cap La Hague, sur
un llotde rochers presque à (leur d'eau, au N.-E. de Cher-
bourg, est une tour du môme genre, construite de 1835
à 1837 par le môme ingénieur. Le phare de Bréhat^ près
de Tréguier ( Côtes-du-Nord ), fait de 1836 à 1839 par
Reynaud; il n'a d'égal en aucun lieu du monde : il se
compose d'une tour en maçonnerie pleine, enchâssée dans
la roche de porphyre sur laquelle repose l'édifice; cette
tour a 13'",70 de diamètre à sa base, 8"%60 à son som-
met, et son pied est à 1 met. au-dessus du niveau des
plus hautes mers; elle supporte une autre tour plus lé-
gère, dont l'intérieur est divisé en plusieurs étages, et
dont le mur a 1"',30 d'épaisseur dans le bas, 0"',85 dans
le haut; la lanterne est à une hauteur de 50 met. Il n'a
été employé aucun bloc de granit pesant moins de
1,000 kilogr., sauf dans le centre du massif inférieur, et
plusieurs sont du poids de 3,500 k. — En Angleterre, le
phare d^Eddystone, dans la Manche, vis-à-vis de Ply-
mouth, sur des rochers à fleur d'eau, élevé en 1696, ren-
versé 3 ans après par une tempête, remplacé par une
tour en charpente, puis réconstruit de 1757 à 1759, par
Smeaton, fut cité longtemps comme une merveille : nos
constructions modernes Font bien surpassé. Néanmoins,
c'est encore un beau travail : il t 30 met. d'élévation, et
est divisé en quatre étages, tu-dessus desquels règne une
galerie où le (anal se trouve placé.
On a imaginé, de nos Jours, de construire des phares
en fonte de fer, plus économiques que ceux en maçonne-
rie, et en môme temps beaucoup plus légers, ce qui per-
met de les installer partout, môme sur de mauvais ter-
rains. Autrefois, on ne plaçait de phares qu'à l'entrée
des ports ; aujourd'hui, on les élève aux lieux les plus
utiles pour la navigation. Il y a des phares en fonte dans
l'Amérique et dans les Indes anglaises, à Bahama, à
Cuba, aux Bermudes, aux États-Unis, en Turquie dans
le Bosphore, etc. Celui des Bermudes, dressé à Gordon,
a 35 met. de hauteur et revient à 92,000 fr. ; celui de
Bahama, haut de 41 met. et à 7 étages, coûte 200,000 fr.
Jusqu'au xvm* siècle, les phares furent éclairés avec
des feux de bois ou de charbon : Borda eut le premier
l'UMe d'employer les lampes à réflecteur; et, pour donner
aux navigateurs un moyen de ne pas confondre la lumière
d'un phare avec celle d'une étoile de première ^ndeur«
ou môme d'un autre phare, il proposa de faire disparaître
la lumière après des intervalles égaux, ^n employant des
feux tournants et à éclipses. En 1784, le Dieppois Le-
moyne imagina de faire tourner, non le feu, mais des
écrans qui, au moyen d'un mouvement d*iiorlogerie, s*in«
terposeraient devant lui, et produiraient une suite régu-
lière d'éclipsés; et, afin d'obtenir plus de lumière, il em-
ploya les lampes d'Argant à double courant d'air. D'autres
progrès ont été encore obtenus depuis cette époque t des
réflecteurs paraboliques ont été substitués aux miroirs.
Mais c'est de 1822 que datent les grands progrès: alors
Augustin Fresnel calcula que la réfraction devait être
bien plus puissante à travers des lentilles de cristal que
la réflexion sur des surfaces polies et métalliques; il
imagina la lenUlle à échelons, qui, faite par l'assemblage
d'anneaux concentriques, peut atteindre à toutes les
grandeurs de rayons. Pour obtenir un fo^er lumineux en
rapport avec la puissance des lentilles, il fit de la lampe
Carcel un appareil à 3 et 4 mèches concentriques, qui,
dans les phares les plus importants, donne un éclat équi-
valant à celui de 600, et jusçju'à 4,050 becs de lampes
Carcel. Désormais ces appareils furent adoptés partout,
môme à l'étranger, et ce n'est pas un des moin(bres ser-
vices que la France ait rendus à l'humanité.
Les phares sont divisés en six catégories i i^ d /eu
fixe, lumière constaLte; 2° à éclats^ lumière qui montre
alternativement 5 éclats et 5 éclipses ou plus, dans Tin-
tervalle d'une minute; 3^^ fixe à éclats, lumière fixe qui
montre un éclat blanc ou rouge, précédé oii suivi de
courtes éclipses et à des intervalles qui varient de 10,
30 ou 60 secondes ; 4° tournant, feu dont la Icmière aug-
mente d'une manière graduelle. Jusqu'à ce qu'elle jette
sa plus grande clarté, et qui décroit ensuite graduelle-
ment Jusqu'à s'éclipser à des intervalles égaux de 1, 2,
3 minutes, et quelquefois trois fois dans une minute;
5^ intermittent, c-à-d. dont la lumière, qui parait tout à
coup, reste visible pendant un certain lape de temps et
s'éclipse pendant un court intervalle; 6* alterr^alif, lu-
mière qui parait rouge et blanche alternativement sans
éclipse intermédiaire. — Quant au mode de leur éclai-
rage, les phares et fanaux des côtes de France se divisent
en deux catégories essentiellement distinctes : la pre-
mière comprenant les nouveaux établissements éclairés
par des appareils lenticulaires ou dioptriques, et la se-
conde, les phares et fanaux à réflecteurs ou caiolptriq^es,
Dans l'un et l'autre système, la condition principale à
remplir est de diriger vers l'horizon les nurons émanés
d'un ou de plusieurs foyers de lumière. Les appareils
lenticulaires sont classés en quatre ordres principaux :
les trois premiers comprennent les phares de 35 à 50
milles marins de portée (65 à 93 kil., environ), et le qua-
trième ordre, les simples fanaux, dont la portée n'excède
pas 9 à 12 milles (17 à 22 kil. environ). Quant aux i^pa-
reils à réverbères, on ne les divise conununément ou'en
deux ordres, selon qu'ils sont disposés pour l'édairage
des phares proprement dits, ou des simples Ouianz d'en-
trée de port.
Les phares dépendent du ministère de l'agriculture, du
commerce et des travaux publics, i>rès duquel est un di-
recteur, secrétaire d'une Commission des phares. Dans
les départements, les ingénieurs des ponts et chaussées
surveillent les ]&hares de leur ressort. L*éclairage et le
soin sont confiés à des gardiens allumeurs, qui habitent
dans les phares mômes, et dont le nombre est ^nérale-
ment fixé ainsi : 3 ou 4 gardiens pour les phares de
1*' ordre ; 2 pour ceux de 2* et de 3* ordre; 1 pour ceux
de 4*, 5* et 6* ordre. Ils sont soumis à des règlements et
des instructions que presque tous les pays étrangers ont
adoptés. En France, on ne paye pas de droit de phare. Ce
service coûte à l'État environ 500,000 fr. Il y a aujourd'hui
(1862) 250 phares, y compris ceux d'Algérie; on n'en
comptait que 15 en 1825. Ce service est si bien conçu et
si bien organisé, que les marins aiment mieux atterrir les
côtes de France de nuit que de Jour. — Il existe à Psris
un Atelter central des phares, placé sous la direction d'un
ingénieur de l'administration, et où l'on monte et vârifie
les appareils avant de les expédier à destination ; on v en
fabrique môme quelques-uns, surtout lorsqu'il s agit
de mettre à exécution quelque amélioration nouvelle.
V, Annales des ponts et chaussées, année 1836, mai et
Juin ; Fresnel, Mémoire sur le nouveau système d'éclat
rage des phares, Paris, 1822 ; Goulier, Description gêné'
raie des phares et fanaux, à Vusage dês namgateun,
i2e édit., Paris, 1855, in-12. F.au SuppUmnt.
PHÀ
1417
PHÊ
niAHB, nom par lequel les mariDS désignent quelque-
fois un màt et tout ce qu'il porte ou qui y tient : le phare
ffavant, le phare d*arrière^ c.-à-d. les voiles, m&ts, ver-
gues, cordi^es, du màt de misaine ou grand m&t.
PHARE, nom donné, pendant le moyen &ge, aux chan-
deliers d*église qui portaient drculairement plusieurs
cierges, et appelés aussi couronnes de lumière,
PHARB DB CIMETièRE. V. FaNAL.
PHARMACIE (Écoles de). V, Écoles, dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d* Histoire,
PHARMACIENS, ceux qui préparent et vendent les
médicaments. Ils ont succédé aux apothicaires (F. ce
mot). Aux termes d*un décret du 21 août 1854, il y a des
pharmaciens de l'* et de 2* classe. Les pharmaciens de
l'* classe sont ceux qui ont été reçus par rune des écoles
supérieures de pharmacie de Paris, de Strasbourg ou de
Montpellier; ils peuvent exercer leur profession dans
toate rétendue du territoire français. Pour s^irer au
titre, il faut avoir fait 3 ans d'études dans une Ecole su-
périeure et 3 ans de stage dans une pharmacie ; une seule
année d'études est exigée des candidats c|[ui auraient pris
1 0 inscriptions dans une École préparatoire de médecine
et de pharmacie. En 1844, on exigea de quiconque vou-
lait prendre sa 1^ inscription le diplôme de bachelier
es lettres; depuis 1852, on ne demande que le baccalau-
réat es sciences. Les droits à payer s'élèvent à 1,390 fr.
Les pharmaciens de 2* classe sont ceux qui ont été reçus,
jusqu'en 1855, par un Jury médical, et depuis cette
époque par une école préparatoire de médecine et de
pharmacie sous la présidence d'un professeur de l'une
des écoles supérieures de pharmacie. Ils ne peuvent
exercer que dans le département pour lequel ils ont été
reçus. Pour aspirer au titre, il faut justifier de 6 années
de stSjge en pharmacie, de 4 inscriptions dans une école
supérieure ou de 6 dans une école préparatoire; 2 ans de
stage peuvent être compensés par 4 inscriptions dans une
école supérieure ou £ dans une école préparatoire, mais
sans que le stage puisse être réduit à moins de 4 années.
Les droits à payer s'élèvent à 460 fr. D'après U loi du
21 germinal an xi et l'ordonnance du 29 octobre 1846,
les pharmaciens sont responsables des méprises qui peu-
vent avoir lieu dans leurs officines ; Ils ne peuvent vendre
certaines drogues que sur ordonnance de médecin, et
doivent copier cette ordonnance sur un livre spécial.
Chaque pharmacie doit être visitée une fois l'an. V, Gui-
bourt, Manuel légal des Pharmaciens, 1852; Pellault,
Code des Pharmaciens, 1858.
PHARMAUENS iiiUTAiRES, uno dos troîs soctious du ser-
vice de santé dans l'armée française. Il existe des phar-
maciens militaires dans les hôpitaux et aux arméâi de-
puis 1591. Leroy et Bayen portèrent les premiers le titre
de pharmaciens en chef des camps et armées du roi. Le
service de santé comprend : / pharmacien inspecteur,
5 pharmaciens principaux de l'* classe et 5 de 2'^,
48 pharmaciens majors de l'* classe et 34 de 2«, 50 phar-
nutciens aides-majors de l'* classe et 50 de S^ Pour le
service de la marine, il y a 5 premiers pharmaciens en
chef, 3 seconds pharmaciens en chef, 5 pharmaciens pro-
fessewrs, et 43 pharmaciens {9 de\^ classe, 14 de 2*, et
20de3«). •
PHARMACOPÉE. V. Codex.
PHAKSALE (La), poème latin de Lucain, dont le sujet
est la guerre civile entre César et Pompée, et dont le
titre est emprunté de Pharsale, ville de Thessalie, où
César triompha de Pompée. II s'ouvre par une trop cé-
lèbre apothéose de Néron ; puis, après l'énumération des
causes particulières et générales de la guerre civile, le
poète entre dans le rédt des faits, qu'il poursuit pendant
dix chants; il s'arrête, d'une façon assez inexplicable, au
moment où les É^^àens se soulèvent contre Cléop&tre
et C^ar, et sans qu'on sache qui des deux partis l'em-
portera. Ou range d'ordinaire la Pharsale parmi les
poômes épiques; mais ce n'est qu'une histoire mise en
▼ers. Quelques fictions épiques y sont bien mêlées au
récit âis faits ; cependant, à côté du merveilleux homé-
rique, qu'est-ce que la transformation d'une matrone
romaine en Pythonisse (ch. I), la description mystérieuse
et sombre de la forêt de Marseille (ch. III), et la résur-
rection magique d'un cadavre par une sorcière thessa-
fienne (ch. VI)? Si le merveilleux est l'essence même de
l'épopée, la Pharsale, avec toute sa nécromancie, n'est
plus ou'une épopée dégénérée. Quoi qu'il en soit, l'œuvre,
coosiaérée en elle-même, a de grandes beautés mêlées à
de graves défauts. Le récit, généralement froid, est, de
plus, souvent plein de recherche, d'enflure et de décla-
mation ; on rencontre çà et là de beaux traits d'élo-
quence, des tableaux énergiques, des sentiments élevés,
enfin l'émotion sincère et communicative d'une &me
qu*exaltaient à la fois la doctrine stoïcienne, la haine du
despotisme, et l'enthousiasme républicain. Aussi Lucain
a-t-il eu ses admirateurs et ses panégyristes : Montaigne
le goûtait vivement; Malherbe lui enviait sa force; Cor-
neille le préférait à Virgile, et, pour le plaisir de lïmiter,
composa la Mort de Pompée; Voltaire prétendait que le
Discours de Caton à Labiénus, devant le temple d'Am-
mon (ch. IX), valait mieux que toute la philosophie de
l'antiquité. Aujourd'hui, on est généralement d'accord
pour reconnaître que Lucain a de la grandeur, mais sans
naturel, sans vérité, et qu'il n'est au premier rang que
parmi les auteurs de second ordre et les écrivains de la
décadence. a. H.
PHASÈLE, navire des Anciens, ainsi nommé de la ville
de Phasélis, où on l'inventa. C'était un bâtiment léjo^r,
marchant à voiles et à rames, et tenant le milieu entre
les navires marchands {rotundœ naves) et les navires de
guerre {longœ naves).
PHÉAQUES. F. AoRiGENTB (Ruines d').
PHÉBUS, défaut du style qui consiste dans la préten-
tion et l'obscurité. On y tombe par le néologisme, par
l'emploi d'épithètes chatoyantes ou de comparaisons ri-
diculement poétiques, par ces fourrés de mots et de
phrases où ne perce point la pensée. Le mot phébus
vient, dit-on, d'un ouvrage sur la chasse écrit par Gaston
Phébus, comte de Foix, dans un style empnatique et
embrouillé.
PHELLOPLASTIQUE (du grec phellos, liège, etplassô,
je forme), art inventé à Rome, vers 1780, par Agostino
Rosa, et qui consiste à reproduire en liège, sur une
échelle réduite, les monuments de l'architecture. Cet art
a été perfectionné par Mey d'Aschaffenbourg et par Sta-
maty de Marseille. Il y en a quelques beaux spécimens
au palais des Beaux-Arts à Pans.
PHÉLONION, vêtement. V, Archimandrite.
PHÉNIGEN (Art). Les temples phéniciens paraissent
avoir été bÀtis sur de petites dimensions : c'est ce qu'on
peut du moins conjecturer d'après celui d'Astarté à Pa-
phos, dans l'Ile de Chypre, connu par les ruines actuelles
et par les figures de pierres précieuses et de monnaies.
Quant à l'ordonnance et au plan de ces édifices, ils du-
rent être les mêmes qu'au Temple de Jéruudem , sur
la construction duquel l'art phénicien a certainement
exercé une çrando influence. L'usage de revèàr de lames
d'or les cloisons ou les lambris des murs était très-ré-
pandu chez les peuples sémitiques. Dans la statuaire, les
Phéniciens employèrent, de préférence à la pierre, le
bois revêtu de lames de métal battues au marteau : l'ab-
sence de monuments de ce genre ne permet pas de juger
aujourd'hui quel en était le goût artistique ; mais les
écrivains de l'antiquité nous apprennent que la figure
humaine y était souvent associée avec les animaux, et
que souvent on symbolisait l'essence merveilleuse de la
divinité par des formes monstrueuses. Les Phéniciens
exécutèrent des vases élégants et souvent de grandeur
colossale.
PHÉNICIENNE (Langue). Peu de monuments de cette
langue nous sont parvenus; ce sont des inscriptions et
des médailles. Les opinions relatives à la nature et à
l'origine du phénicien sont très-variées : S* JMme, dans
son Commentaire sur Isaîe, dit que la langue de Canaan,
qu'il assimilait à l'hébreu, tenait le milieu entre l'hébreu
et l'égvptien; Bochart donne comme appartenant aux
Phéniciens tous les mots hébreux qu'il cite dans sa
Géographie sacrée; Adelung pense que la langue des Ca-
nanéens des bords de la Méditerranée, c-i-d. celle des
Phéniciens, se partageait en deux diiUectes, celui de Pa-
lestine et celui de Syrie; selon Heeren, les Phéniciens et
les Arabes parlaient des dialectes dérivés d'un même
idiome, et pouvaient se comprendre mutuellement. Au-
jourd'hui il est généralement admis qu'en substance le
phénicien était de l'hébreu ; que les deux idiomes, selon
toute vraisemblance, n'en formaient qu'un seul dans
l'origine, mais qu'ils s'écartèrent ensuite l'un de l'autre,
par l'efiet des circonstances diverses dans lesquelles les
Phéniciens et les Juifs furent placés; que les trois quarts
des mots phéniciens des inscriptions se retrouvent dans
l'hébreu; que, si l'on voit dans ces inscriptions une
partie seulement des pronoms et des conjugaisons des
Hébreux, l'unique cause en est peut-être dans l'insuffi-
sance des monuments phéniciens arrivés jusqu'à nous;
que les relations commerciales ont introduit dans le phé-
nicien certains mots syriaques, arabes, coptes, etc., qui
ne se trouvent pas dans l? Bible, ou qui n'y ont pas le
PHË
1418
PHI
même sens ; qu^o'ti y rencontre enfin, non-sealement des
mots dérivés, mais encore des racines, qui n^existent
plus ou n*ont jamais existé dans l*hébreu, à moins que
les livres saints, par lesquels nous connaissons cette der-
nière langue, ne contiennent pas tous les vocables du
peuple qui la parlait. Les navigateurs phéniciens por-
tèrent leur langue dans les divers pays qu'ils visitèrent :
en Afrique elle devint la langue carthaginoise (K. ce
mot)^ et Ton en a retrouvé aussi les traces à Malte (V. Mal-
tais — Idiome) et en Espagne {V, Espagne — Langues
de r). — Les traditions de TAntiquité attribuaient aux
Phéniciens l'invention de récriture ( F. Alphabet). Les
seize lettres que Cadmus avait portées, disait-on, de
Phénicie en Grèce, sont identiques pour le nombre et
analogues pour la forme avec celles de l'alphabet hé-
braïque connu sous le nom de samaritain* L'analyse des
monuments phéniciens fournit plusieurs alphabets; car
chaque lettre offre, selon l'époque et l'emplacement des
monuments, des variantes assez notables. V. Guill. Pos-
tel, De PhoBniciMh litteris, 1552, in-1'2; May, Spécimen
linguœ punicœ, Marbourg, 1718, in-8°; Barthélémy, Ré-
flexions sur quelques monuments phéni9iens, et sur les
alphabets qui en résultent, Paris, 1730, in-8°, et Sur les
rapports des langues égyptienne, phénicienne et grecque,
dans le t. XXXIl des Mém, de VAcad. des Inscriptions;
Perez Bayer, Dissertation sur la langue et Valphabet des
Phéniciens, Madrid, 1772 ; Fortia d'Urban, Sur la langue
phénicienne, dans le Journal asiatique de luin 1828; Ma-
•maker, Miscellanea Phœnicia, Leyde, 1828; Gésénius,
Sur les langues phénicienne et punique, en allemand,
Leipzig, 1815, et Études paléographiques sur Vécriture
phénicienne et punique, ibid., 1835; le même, Scripturœ
linguœque Phœniciœ monumenta quotquot supersunt,
1837; Judas. Étude démonstrative de la langue phéni-
cienne et de la langue Ubt/que^Pans^ 1847, in-4<'; l'abbé
Bourgade, Toison d'or de la langue phénicienne, 2* édlt.,
Paris, in-fol.
phÂiiciennb (Littérature). Les Phéniciens ont eu de
bonne heure une littérature. Sanchoniathon écrivit sur
la théogonie et les antiquités de sa nation un ouvrage qui
fut traduit en grec par Philon de Byblos, et dont Eusèoe
et Porphyre nous ont conservé en cette langue quelques
fragments; il fut, selon quelques auteurs, le contempo-
rain de Sémiramis; d'autres le placent seulement au
XII* siècle avant notre ère. Moschus de Sidon fut le pre-
mier philosophe qui écrivit sur la formation du monde
par les atomes.
PHÉNiaENNES (Monnaies). On trouve des légendes
en langue phénicienne, non-seulement sur des monnaies
d'argent et de bronze qui proviennent de Tyr, de Sidon,
de Béryte, de Laodicée, mais sur les monnaies de Cilicie,
de Carthaige et des villes de Sicile, de Numidîe, et d'Es-
pagne, avec lesquelles les Phéniciens étaient en relations
habituelles de négoce. Le développement de l'usage do la
monnaie, sa généralisation, est surtout due aux nations
maritimes ; et il parait que les rois perse» ne frappaient
guère de monnaies que pour payer leurs mercenaires, et
particulièrement les Phéniciens qui leur fournissaient
une marine. Avant que M. Renan rapport&t de sa mission
en Asie des monuments phéniciens, il n'existait dans nos
musées d'autre vestige de cette civilisation qui a joué un
si grand rôle dans l'antiquité, que les monnaies phéni-
ciennes. Encore les légendes qu'elles portent sont-elles si
imparfaitement déchiffres, qu'on peut dire que l'écriture
des iavcnteurs de l'écriture est restée une énigme dont
les savants cherchent encore le dernier mot au milieu de
divers systèmes d'interprét&tion. D.
PHÉNOMÈNE (du grêc phainoménon, ce oui apparaît
clairement), mot qui, dans le langage vulgaire, désigne
tout ce qui est insolito et extraordinaire, mais qu'on ap-
plique, en Philosophie, à tout fait observable, c.-àr-d.
perceptible par les sens ou par la conscience. Les phéno-
mènes sont les qualités de la substance (K. ce mot).
PHÉRÉCRATIEN (Vers), vers lyrique des Grecs et des
Latins. C'est un glyconiauecatalectique(-w». w ^ - ^) :
il sert de clausule dans les systèmes glyconiques. Souvent
le trochée initial est remplacé par un spondée. Quelque-
fois le phérécratien commence par un choriambe et finit
par un amphibraque. Il a été surnommé heptasyllabe;
le nombre de 7 syllabes est cependant dépassé, lorsque
l'on résout la première du trochée et celle du choriambe
en deux brèves. Le vers phérécratien ajouté au glyco-
nique produit le vers priapéen (F. ce mot). Lq vers phé-
récratien forme le 3* vers des Odes d'Horace 14, 21
(I*' liv.) et 13 (m« liv.), où il est précédé de deux asclé-
piadcs et suivi d'un glyconique, P
PHILANTHROPIE (du groc philanthr^ia^ amour des
hommes), La philanthropie est une vertu moderne, qui
a son point de départ dans la fraternité prèchéo par le
christianisme. La fameuse phrase do Téreuce : « Je suis
homme, et rien de ce qui touche l'homme ne m'est
étranger, » était l'expression d'une pensée tout indi-
viduelle; pour les Anciens, le cercle des affections hu-
maines s'arrêtait à l'étroite enceinte de la cité, et le
nom d'étranger était synonyme d'ennemi. Au fond, la
ciiarité et la philanthropie sont une môme chose, elles
reposent sur un même sentiment : mais la charité est un
amour pour les hommes avivé par la foi religieuse, un
amour qui s'enflamme à proportion de l'ardeur avec la-
quelle on se prépare à la vie future, tandis que la phi-
lanthropie est une conséquence naturelle de l'instinct de
sociabilité, une affection indépendante de tout retour
vers le Ciel, puissante néanmoins sur certains hommes,
et en quelque sorte raisonnée. A cet égard, il a fallu
dix-huit siècles pour faire prévaloir, non pas la pratique,
mais la théorie de la philanthropie. Car les philanthropes
font de l'amour du prochain une véritable science, une
partie de TÉconomie politique ; ils s'appliquent à l'étude
des misères sociales, et en recherchent les remèdes les
plus efficaces; ils prétendent échapper aux entraînements
d'une charité aveugle, sans bornes et sans discernement.
La philanthropie n'est pas un mot inventé pour débap-
tiser la charité et pour dépouiller de son caractère reli-
gieux une vertu essentiellement chrétienne; elle est
quelque chose de réel. On a pu abuser de la philanthro-
pie , et patronner des œuvres de bienfaisance pour en
retirer un lucre personnel; ce sont les torts de Quelques
hommes, mais les œuvres subsistent. Ainsi, on doit aux
philanthropes l'abolition de la traite des nègres, la pro-
pagation de l'instruction primaire, les salles d'asile, les
crèches, l'amélioration du sort des aliénés et des prison-
niers. Une Société philanthropiqiie, fondée à Paris en
1780, et réorganisée en 1799, livre des aliments au plus
bas prix aux indigents, donne des consultations gratuites
et des médicaments aux malades, encourage certaines
sociétés de prévoyance et de secours mutuels, etc.
PHILIPPE, monnaie. / V, notre Dictionnaire de Bio*
PHILIPPIQUES. S oraphie et d'Histoire.
PHILOLOGIE (du grec philos, ami, et logos, discours,
savoir), science qui embrasse diverses parties des belles-
lettres, et qui en traite principalement pour ce qui re-
garde l'érudition, la critique des textes, et la grammaire.
Le but général de ces études est d'acquérir la connais-
sance exacte et précise de la signification des termes,
pour arriver à celle des faits et des choses. Dans l'étude de
l'Antiquité, dont les ouvrages ne nous sont parvenus qu'à
travera une foule de transcriptions, causes d'erreun de
toutes sortes, et môme de mutilations, la philologie com-
mence par l'épuration et la restitution des textes; dans
les langues vivantes, son but est l'étude de la formation
et des variations du langage, de sa signification propre à
des &ges différents, et de son application aux faits, aux
événements, aux choses. Tout cela est si changeant, dans
une société en pleine existence , que, ai la philologie
interrompait son travail, on aurait, en moins d'un siècle,
autant de peine & comprendre une foule d'expressions,
d^allusions ou d'énonciations, qu'on en a pour interpréter
bien des endroits des plus anciens écrivains de 1 Anti-
quité, poètes ou prosateurs. Au commencement du
xvtii* siècle, Fénelon constatait qu'on était obligé d'ex-
pliquer le langage de Villehardouin et de Joinville, et
demandait que ce travail fût étendu à nos écrivains pins
modernes, par l'Académie elle-même. Son conseil a été
peu suivi, du moins d'une manière sérieuse; aussi
n'avons-nous que quelques rares travaux de ce genre sur
un petit nombre de nos grands auteura du xvn* et du
xviu* siècle; par exemple, sur Corneille, on ne cite guère
que le Commentaire, bien imparfait, de Voltaire, et, tout
récemment, le Lexique comparé de la langue de Corneille,
par M. Godefroy, Paris, 1862, 2 vol. ln-8<*, travail vraiment
sérieux ; sur Racine, on a des Commentaires de Laharpe
et de Geoffroy ; sur Molière, un Lexique comparé de Gé-
nin, et un travail analogue, couronné par l'Acaidémie fran-
çaise, mais encore inédit, de M. Guessard ; sur Pascal, des
travaux de M. Cousin, de M. Faugère, et surtout de H. Na-
vet, qui a donné une édition des Pensées, avec un com-
mentaire suivi. La plupart des travaux Bér^.eux, mais par-
tiels, ont été faits, en ce genre, par de Jeunes professeon
de notre Univeraité : sur les Oraisons funèbres de Bo«-
suet, par M. A. Didier; sur les Dialogues surVÊlo^iience,
la Lettre à V Académie, et le Télémaque de Fénelon, par
M. Despoîs pour les premiers ouvrages, et M. GoUncamp
PHI
1419
PHI
poar le 3*; sur La Bruyère {Caractères) par M. Hémardin-
quer; sur/.-i?. Rousseau, par M. Manuel; surle Charles XII
de Voltaire, par M. Geffroy, etc. Il est certaia qu*à moins
d'études spéciales, ou sans le secours de travaux philo-
logiques de ce genre, bien peu de personnes peuvent se
vanter de n'ôtre Jamais arrêtées dans la lecture des écri-
vains moralistes ou peintres de mœurs, y compris les
orateurs sacrés. De même que dans l'antiquité, par
exemple, Horace est souvent obscur pour nous sans un
commentaire spécial, de même, parmi nous, il faut un
guide savant pour lire avec fruit nos auteurs des deux
derniers siècles. Nous n'étonnerons personne en disant
qu'il n'existe pas une seule histoire de notre Révolution
qui n'ait déjà nesoin d'un commentaire de ce genre ; bien
plus, Béranger même, si populaire, ne peut guère être com-
pris de la génération actuelle, pour tout ce qui se rapporte
aux temps de la Restauration, c-à-d. un espace de moins
de 50 ans. Enfin, indépendamment des variations de la
langue et des choses, il se rencontre quelquefois dans les
livres des expressions d'un autre langage ; ainsi, tout le
monde sait qu'il y a le langage des sciences, celui des
arts (peinture, architecture, sculpture, etc.), celui du
droit, des usages, des modes, etc. lit encore l'intervention
du philologue est nécessaire. Sans pousser plus loin ces
exemples, on voit l'utilité bien réelle de la philologie;
cette utilité fut de tous les temps; aussi comptaitron beau-
coup de philologues dans l'Antiquité, qui les confondait
assez volontiers avec les grammairiens. La liste de leurs
noms serait fastidieusement stérile, sans l'indication de
leurs travaux, impossible ici, car iû formeraient une bi-
bliothèque considérable; cependant, pour en donner une
idée, nous allons en nommer plusieurs, parmi ceux dont
les ouvrages sont parvenus jusqu'à nous en totalité ou en
partie : dans la langue grecque, Aristarque a laissé des
Scholies sur V Iliade; Eustathe, des Commentaires sur
Homère; Suidas, un Lexique historique, biographique et
géographique; PoUux, un Onomasticon, vocabulaire des
mois par séries d'idées anaJogues, etc. — En latin, nous
avons de Verrius Flaccus un Traité de la signification
des mots; d'Asconius, un Commentaire sur quelques
Discours ae Cicéron ; d'Aulu>Gelle, sous le titre de Nuits
attiques^ de petites dissertations de grammaire, de cri-
tique, d'histoire, de biographie, d'antiquités; de Macrobe,
un recueil de même genre, qu'il a intitulé Saturnales ;
de Donat, un Commentaire sur Térence; d'Acron, un
Commentaire sur Horace; de Nonius Marcellus, un re-
cueil De la propriété des termes; de Servius, un Com-
mé'itaire sur Virgile, etc. Les philologues modernes des
œuvres de l'Antiquité sont presque innombrables : ils
n'ont pu guère que répéter ce qu'avaient dit leurs de-
vanciers anciens, quant au fond des choses; mais ils se
sont beaucoup exercés sur la langue, et plusieurs avec
une témérité tout à fait blâmable et très-peu utile. Leur
race commence au xv* siècle, et elle est si considérable,
que nous ne pouvons en nommer que quelques som-
mités : Gasparino, de Bergame, éditeur des Institutions
de Quintilien et des traités de Rhétorique de Cicéron ;
Le Pogge, qui découvrit plusieurs Discours de Cicéron,
Columelle, Vitruve, Ammien Marcellm, Végèce, etc.;
Laurent Vall a, qui écrivit un traité De l'Élégance latine;
Ange Politien, qui fit un Commentaire sur les Pan-
dectes, etc. — Au xvi" siècle, les Aide, Érasme, Budé,
Scaliger, les Estienne, Lambin, Turnèbe, Muret, Jf . Lipse,
Putsch, Pitbou, Casaubon, etc., marchèrent dans la voie
tracée par leurs devanciers ; au xvit* siècle, on trouve
Voss, Saumaise, Heinsius, Goesius, Gronovius, Jacques
Godefroy, Du Caiige, Hardouin, Dacier, etc.; au xvm* siè-
cle, cette race, quelquefois plus patiente que sagace, se
continue dans Bentley, Toup, Tyrwhitt, Wesseling, Hems-
terhuys, Facciolati, Ernesti, Reiske, Heyne, Schutz,
Schneider, Larcher, etc. Au xix* siècle, la philologie a
poursuivi sa marche sans beaucoup se préoccuper du
mouvement d'idées qui se faisait autour d'elle; l'Alle-
magne, qui semblait son pays de prédilection, a fourni
Brunck, Matthiie, Jacobs, Bekker, Bœckh, Buttmann, Pas-
sow, Bopp, Griihm, Grotcfend, MQller, Lindemann, etc.;
la Suisse, Orelli ; la France, Schweighsuser, Villoison,
Coray, Vauvilliers, et, de nos jours, avec plus d'esprit et
d'intérêt, par l'art d'écrire et de composer, que le genre
ne semblait comporter, Boissonade, Letronne, Raoul
Rochette, Nodier, sans parler de ({uelques vivants. On
voit que la philologie est une science réelle, et une
grande science, puisqu'elle se lie à l'histoire et à la vie
des nations, contribue à les faire connaître, et peut assez
souvent en éclairer les parties obscures. C. D— t.
PHILOSOPHIE (du ffec philos ^ smi^sophia, sagesse}.
Chez les Grecs, ce fut d'abord la science universelle, ou
du moins le tronc auquel se rattachait l'ensemble des
connaissances humaines. Plus tard, elles s'en détachèrent
quand on eut reconnu que chaque connaissance avait un
objet assez spécial pour former une branche distincte do
la science universelle. La Philosophie, bien que restreinte
par ces ébranchements successifs , n'a péri ni de nom ni
de fait. Ce serait même une erreur de croire qu'elle n'a
gardé dans ses attributions que ce (^ue les autres sciences
ont bien voulu' lui laisser. En ceci comme en tout le reste,
la marche de l'esprit humain a été déterminée par cer-
taines convenances naturelles, dont il faut se rendre
compte, et qui feront comprendre ce (]ue c'est au juste,
que cette science, sur l'objet et sur les limites de laquelle
les philosophes eux-mêmes semblent si peu d'accord. —
Le monde physique d'une part, les êtres dont il se com-
pose, les phénomènes développés dans ces êtres, les lois
et les forces q^i les régissent, sont l'objet d'un certain
nombre de sciences, celles que nous appelons sciences
physiques et Milurelles; les propriétés et les rapports des
divers ordres de quantités, telles que la raison les conçoit,
nombre, étendue, force, etc., donnent naissance aux
mathématiques; Vhistoire raconte le développement exté-
rieur des sociétés humaines. L'homme, être éminemment
complexe, appartient déjà par certains côtés à la physique,
à l'histoire naturelle, à l'histoire proprement dite. Mais,
à quelque opinion qu'on s'arrête sur le principe des phé-
nomènes dont nous allons maintenant parler, on ne peut
méconnaître que la vie animale et les actes extérieurs
sont loin d'être l'homme tout entier. Respirer, digérer,
se reproduire, aller, venir, ne sont que les conditions ou
les conséquences d'autres actes que tout le tnonde connaît,
et crue tout le monde nomme sentir^ penser, entendre ,
vomoir, etc.... Ne préjugeons donc rien sur les principes
de ces phénomènes , dont l'ensemble constitue , à côté
de la vie animale, une autre vie que nous avons bien
le droit de nommer vie morale , et dont la conscience
du moi, la libre disposition de nous-même^, la concep-
tion des vérités éternelles , la notion de Dieu , sont les
éléments les plus saillants et les plus considérables :
le moi , centre et sujet commun de toutos les con-
naissances; Dieu, cause suprême de tout ce qui est;
deux termes bien différents , et cependant en relation in-
time : l'un, principe de toute connaissance, l'autre, prin-
cipe de toute existence. Or, le connaître ne fait que tra-
duire l'être, et ce dont nous n'aurions aucune idée serait
pour nous absolument comme s'il n'était pas. Nous insis-
tons sur ces considérations , parce qu'il ne serait pas
possible, sans cela, de comprendre comment une même
science peut être à la fois (sans que son unité s'en trouve
compromise) la science ue l'homme moral, la science
de Dieu, et, par cela même, celle des vérités générales
ou des principes par lesquels tout le reste s'explique. Or,
tel est effectivement le caractère de la Philosophie. « Elle
consiste, dit avec raison Bossuet, à rappeler l'esprit à
soi-même, pour s'élever ensuite comme par un de^ sûi
jusqu'à Dieu, n Et encore : « La sagesse consiste à con-
naître Dieu, et à se connaître soi-même. La connais-
sance de nous-mêmes nous doit élever à la connaissance
de Dieu. » Entre ces deux éléments extrêmes, il y a place,
on le comprend sans peine, pour plusieurs grandes ques-
tions; disons plus, pour des divisions de la science,
qu'on pourrait à la rigueur considérer elles-mêmes comme
autant de sciences distinctes : l'analyse de l'esprit humain
et de ses différentes fonctions (Psychologie), — la dé-
termination des lois spéciales de l'entendement , et leur
application à la recherche de la vérité (Logique), — celle
des principes C[ui doivent déterminer la volonté (Morale),
— celle des principes encore plus généraux dont la notion
tend de plus en plus à se confondre dans la notion uni-
que de Dieu (Métaphysique ou Théodicée), etc. Il est
souvent arrivé que les philosophes, suivant leurs incli-
nations et la tournure particulière de leur esprit, se sont
inégalement préoccupés des divers points de vue sous
lesquels la philosophie peut être considérée, et qu'ainsi,
les uns en ont fait presque exclusivement une métaphy-
sique, tandis que d'autres l'ont réduite à n'être <ju'une
sorte d'histoire naturelle expérimentale de l'espnt hu-
main. Mais la Philosophie doit réunir et concilier ces
différents caractères : spéciale dans son point de départ,
universelle dans ses tendances et dans ses rapports; c'est
à ce titre qu'elle conserve une sorte de suprématie sur
les autres sciences , et que, sans se confondre avec elles,
elles les domine et les éclaire toutes, comme fattestent
ces expressions Philosophie de Vhistoire^ Philosophie des
sciences , qui s'appliquent non plus aux recherches spé-
PHI
1420
pni
eialas de èhacane d'elles, mais à Texposition des prin-
cipes généraax qai en coordonnent les différentes parties,
et qui les coordonnent elles-mômes, les unes par rapport
aux antres.
En renvoyant, pour les développements, aux nombreux
articles que contient ce Dictionnaire sur les différentes
parties de la Philosophie ( K. surtout Psychologie, Lo-
gique, MORALB, MÉTAPHYSIQUE, Tut^ODICéB , ÂME, IdI^.ES,
PÊfséÉ, Raison, MrirqpDB, Dieu, Libre ARarrRE, etc.),
nous tenons à bien faire entendre, en quelaues lignes ,
rintérét qui s'attache aux études philosophiques. Nous
ne le chercherons pas, comme on le fait quelquefois, dans
les parties les plus pratic[ues de la Philosophie , quoique
assurément nous ne deyions pas rester indifférents aux
perfectionnements très-réels que Tétude bien faite de la
Logique et de la Morale peut porter dans Texercice habi-
tuel des facultés ; mais nous croyons que si le perfection-
nement de l'intelligence et du cœur est en effet le but
qu'il s'agit d'atteindre, c'est moins par les méthodes et
par les règles pratiques que la Philosophie nous y con-
duit, que par les lumières qu'elle projette sur toutes
choses , par les horizons étendus c][u'elle ouvre à l'esprit,
par l'amour de la vérité qu'elle lui inspire, par les habi-
tudes de réflexion qu'elle lui communique, par la culture
désintéressée de la Raison. Aristote a supérieurement
exprimé ceci : « Parmi les sciences, dit-il , celle à laauelle
on s'applique pour elle-même, et dans le seul but de sa-
fxnr, est plus philosophie que celle qu'on étudie à cause
de ses résultats... Connaître et savoir, dans le but unique
de savoir et de connaître, tel est par son excellence le
caractère de la science de ce qu'il y a de plus scienti-
fique » {Métaphysique, I, i, 2). — Ajoutons encore que
la Philosophie est et doit rester l'œuvre de la libre ré-
flexion, la science la plus haute à laquelle l'homme puisse
s*élever par ses propres forces, mais après tout une science
humaine comme 'les autres; science faillible, discutable
dans les solutions qu*e]le oppose aux problèmes qu'elle
agite. C'est de là que lui viennent le mouvement, la
vie et le progrès, et si elle se rencontre sur quelques
points avec la Théologie, dont les voies sont toutes dif-
férentes, il n*en est pas moins vrai qu'elle doit en rester
profondément distincte; car elle ne saurait, sans cesser
d'être, lui emprunter sa méthode ou s*engager à sa suite
dans la recherche des vérités inaccessibles h la seule
Raison. B— i.
PHILOSOPHIE. V, CARACrfcRBS d'iMPRIMERIB.
PHILOSOPHIE DE l'histoire, idée générale ou ensemble
de principes sous l'influence desquels un historien con-
çoit, dispose et exécute son œuvre. Pour qu'une philoso-
phie de l'histoire soit possible, il faut que l'historien
{misse embrasser un g^nd nombre de faits, qu'une
ongue expérience permette de les Juger, et que l'esprit
critique ait pris de larges développements.
Longtemps on se contenta de raconter : ainsi, chez les
Grecs, Hérodote décrit ce qu'il a vu, observé et appris
dans ses voyages, sans beaucoup se préoccuper des causes
des événements. Thucvdide,doué d'un esprit plus philo-
sophicnie, s'est attache à peindre les personnages, à ca-
ractériser les gouvernements et les peuples oui prirent
part à la guerre du Péloponèse; il a expliqué les causes
et les suites des faits par les vertus ou par les vices de
ces personnages, de ces gouvernements et de ces peuples.
Xénophon est plus remarquable par son style que par sa
méthode historique. Polybe crée l'histoire raisonnée; il
explique les origines, les circonstances et les résultats
des faits, il sème de réflexions son ouvrage, et force ses
lecteurs à penser. Toutefois, la philosophie de l'histoire
n'existe pas encore : car "Thucydide n'ordonne pas les
faits sous les idées, et d'ailleurs son livre ne comprend
que 2i ans de guerre entre deux peuples ; Polybe explique
bien la conquête du monde par la faiblesse et les fautes
des vaincus, par la force et la sagesse des vainqueurs,
mais son histoire ne comprend qu'un siècle et ne con-
tient que des événements politiques. Nul des historiens
grecs n'a vu l'humanité derrière la petite république qui
l'intéresse.
Les Romains, formés à l'école des Grecs, ne sont pas
allés plus loin qu'eux. Les Commentaires de César n'of-
frent que dea matériaux pour l'histoire; l'auteur expose
les faits. Il ne ressent ni n'exprime des émotions. Sal-
luste, plein de l'esprit de parti, faisant des portraits d'ap-
parat, arrangeant les discours, ne saurait avoir rencontré
la vraie méthode historique. Tite-Live, doué avant tout
du génie de l'éloquence, transforme l'histoire en discours
qui résument et expliquent les faits, les révolutions, le
fouvernement et les guerres, et où la corruption des
moBurs est présentée comme la loi dominante de This-
toire romaine : mais il n'y a pas là de science régulière,
obligé qu'il est, pour les besoins de sa thèse, d'omettre
un grand nombre de lois et de cacher les autres sous la
forme de motifs oratoires. D'ailleurs, la disposition des
faits année par année est un ordre que la science n'ad-
met pas. Tacite fait revivre ses personnages, dont il trace
d'admirables portraits en mettant leur cœur à nu, en
scrutant leurs motifs les plus secrets : mais cette résur-
rection du passé, toute saisissante qu'elle est, ne saurait
offrir une saine théorie de l'histoire. Chez tous ces histo-
riens, la. philosophie consiste à croire que Rome, par sa
vertu et par sa destinée divine, a dû conquérir le monde,
et que les autres peuples ne sont par rapport à elle que
des esclaves ou des barbares. — Remarquons encore que
la grande affaire des temps anciens étant la Rhétorique ou
l'art de parler, et non pas l'art de composer, l'art d'écrire
sur un sujet quelconque, on ne trouve pas davantage une
philosophie de l'histoire chez les écrivains qui ont traité
incidemment ou spécialement du genre historique : ils
se bornent à donner des préceptes sur les qualités mo-
rales et littéraires ((ui conviennent à l'historien; ainsi fait
Cicéron dans son dialogue De VOrateur (liv. II, 13), sous
la forme d'une digression, par la bouche d'Antoine. Pline
le Jeune ne va pas au delà dans sa lettre à Capiton
(liv. V, 8), n'attachant que très-peu d'importance au style
historiaue. Denys d'Halicamasse, dans son Jugement sur
Thucydide, se préoccupe surtout du style et de ses orne-
ments, et fait de la critique littéraire sur Thucydide
plutôt qu'un traité en forme. L'opuscule de Lucien, De
la manière décrire V Histoire, est plutôt une critique des
historiens antérieurs, un exposé des défauts à éviter et
des qualités littéraires à rechercher, qu'un traité philo-
sophique sur la matière, apportant des vues et des idées
autres que celles de ses devanciers. Ainsi, les écrivains
didactiques, pas plus que les historiens de l'Antiquité,
n'avaient rien donné ae sérieux sur les principes de la
science historique.
La première idée d'une philosophie de l'histeire est
contemporaine des grandes invasions des Barbares dans
l'Empire romain. La nouvelle de la prise de Rome par
Alaric, en 410, vînt trouver S' Augustin pendant qu'il
prêchait à Carthaçe; il entreprit alors de répondre aux
plaintes du paganisme imputant aux chrétiens les mal-
heurs de l'Empire. Il le fit dans sa Cité de Dieu, livre où
l'ancienne société est condamnée an nom de la société
naissante, à laquelle la Providence avait depuis long-
temps préparé les voies; ce ne sont plus les vices ni les
vertus des gouvernements et des hommes, ce n'est plus
la faveur de la Fortune ou de Jupiter qui donne l'empire,
c'est la Providence universelle qui gouverne les États et
les peuples du monde romain, comme elle gouverne le
ciel et la terre. La Cité de Dieu est le premier monu-
ment de la philosophie de l'histoire, c'est-à-dire la pre-
mière explication sérieuse des événements dont le monde
a été le théâtre (K. Cité db Dirl). — Pendant le moyen
âge, elle resta ensevelie dans l'oubli : les moines, qui
compilaient sans choix les traditions populaires, nos pre-
miers chroniqueurs et historiens, pâles copistes de l'An-
tiquité, ne songeaient nullement à rechercher, pour
l'histoire, des lois qu'ils ne trouvaient pas chez leurs de-
vanciers et qu'ils ne soupçonnaient pas eux-mêmes. Il
faut traverser même la Renaissance et arriver Jusqu'à la
fin du XVI* siècle pour que François Beaudoin, dans ses
Prolégomènes historiques^ impose aux historiens la né-
cessité d'être Jurisconsulte, à cause de l'importance do
Droit dans la vie des nations; pour que Jean Bodin, dans
la Méthode facile pour la connaissance de V Histoire, leur
recommande d'observer les mœurs et les habitude des
{peuples, les constitutions des empires et le caractère des
ois, et de tenir compte des révolutions qui les ont mo-
difiées. Mais ce ne sont là que quelques idées Jetées en
passant, sans développement suivi et sans action immé-
diate. Il en fut de même des principes posés par Bacon
au commencement du xvu* siècle : le second livre de sa
Grande Restauratton des sciences proclamait la nécessité
de comprendre l'histoire littéraire d'un peuple dans le
tableau de ses destinées; sans cela, disait-il, l'histoire
ressemblait à Polyphème privé de son œil. Ses idées ne
furent pas acceptées par les historiens contemporains.
• Chez nous, Bossuet est le premier qui, en théorie et en
pratique, ait demandé aux faits ce qu'ils signifient, l'idée
Su'ils expriment, le rapport qu'ils soutiennent avec l'esprit
e l'époque au sein de laquelle ils se sont accomplis. Son
Discours sur V Histoire universelle (1681) développe la
chatue immense des événements deptds l'origine du numde
PHI
1421
PHt
Jusqu'à Charlemagne, et montre les desseins de la Provi-
dence sur l^Êglise, dont les Empires ne servent qu'à assurer
le triomphe. G*est la doctrine de S' Augustin ; seulement
roriginalité de fiossuet est d*avoir insisté sur la recherche
des causes qui ont amené le progrès ou la décadence des
Empires, et d'avoir généralise le point de vue de Tévèque
d'Hippone en le transportant du monde romain à tous
les États de la terre, faisant de la religion le commence-
ment et la fin d*une véritable histoire de Thumanité.
A côté de la religion, ritalien Vico vint placer TÉtat,
qui, par les lois, les institutions politiques, le gouverne-
ment, a une influence profonde sur la vie des peuples.
Les Principes d*un9 science nouvelle relative à la nature
commune des nations (1725) rattachent le mouvement
des sociétés humaines a un plan supérieur et invariable,
qui fait parcourir à chaque peuple Vâge divin ou du
prêtre, Vâge hérùiique ou des guerriers, et Vàge humain
ou de la civilisation. C'est Pintroduction d*un point de
vue humain dans l'histoire, pour rapporter ensuite les
destinées de l'humanité à la Ffrovidence. Mais Vico eut le
tort d'emprisonner chaque peuple dans son cercle, ne
tenant pas compte des progrès incessants de l'humanité
que Pascal avait si bien constatés dans son Traité sur le
fndê.
Montesquieu, par son Esprit des lois (4748), eut aussi
sa part d*influeuce dans la manière de concevoir l'his-
toire, en attribuant une grande action au climat sur les
hommes, et sur toutes les institutions, toutes les lois qui
les régissent, politiques, civiles, religieuses, militaires.
Il v a, selon lui, une certaine harmonie entre la terre et
celui qui l'habite, entre l'homme et la nature (V. Cli-
mat). — Voltaire, dans son Siècle de Louts XIV (1751 ),
eut aussi le mérite d'une pensée philosophique : il peint
plutôt l'histoire de l'esprit humain que la vie d'un prince,
que l'histoire d'un règne. Son principe, c'est qu'il faut
s'occuper de nos mœurs, de nos lois, de nos coutumes,
de notre esprit; c'est qu'il faut faire entrer dans le cadre
de l'histoire l'état de la religion, du commerce, de l'in-
dustrie, le Jeu de l'administration et des finances, le mou-
vement des lettres et des arts, en un mot, la vie entière
de la société ou du peuple qui fait la matière de l'histoire.
Cest un principe tout nouveau qu'il appliqua en grand
dans V Essai sur lesmceurset Vesprit des nations (1757 ).
Si l'exécution de cet ouvrage n'en vaut pas toulours la
méthode, il n'en est pas moins le premier modèle de la
critique historique s'appuyant sur les deux sources d'in-
formation les plus sûres, la mérité par le témoignage des
contemporains éclairés, et, à défaut de la vérité, la vrai-
semblance.
Enfin, la philosophie de l'histoire se compléta par
l'œuvre de l'Allemand Herder : Idées sur la philosophie
de Vhumanité (1784). Son principe est de rendre compte
de tous les éléments de l'humanité, ainsi que de tous les
temps et de toutes les époques de l'histoire. On y trouve
la religion et l'État, comme chez Bossuet et Vico ; les
arts, la poésie, l'industrie, le commerce, la philosophie,
comme le demandaient Bacon et Voltaire. Les races, les
langues, les gouvernements n'y sont pas oubliés. Herder
a tenu compte du progrès perpétuel de l'humanité en
tous sens et dans toutes les directions. Le théâtre de
l'histoire a aussi attiré son attention, non moins que l'in-
fluence des climats et des lieux, comme chez Montes-
quieu. Son ouvrage est le plus grand monument élevé à
l'histoire de l'humanité depuis les temps les plus anciens
jusqu'à nous; on peut dire qu'avec Herder la philosophie
de l'histoire est faite, et qu'on ne fera plus qu'appliquer
ses principes, décomposer son œuvre, en approfondissant
certaines parties, mais en suivant toujours la route qu'il
avait frayée, sans arriver à des découvertes nouvelles.
A côté de ces grands noms, la France vit une foule
d'écrivains s'occuper péniblement à tracer les qualités
intellectuelles et morales imposées à l'historien;, tels
furent La Mothe-Jjsvayer, dans un Discours, à propos de
la Vie de Charles-Quint par Sandoval (1636) ; Cordemoy,
Observations sur Hérodote; Saint-Réal, De l'Usage de
VHistoire (1671 ). Le P. Lemoyne {Traité de V Histoire,
1670) veut quei'historien soit poète, et que la vérité soit
sa religion; le P. Rapin {Réflexions sur VHistoire, 1675)
copie les prescriptions des Anciens. Saint- Évremond ,
dans son Discours sur les Historiens français, est nova-
teur éclairé, en demandant d'abord l'exposé des lois, des
mœurs, des coutumes d'un pays, et en y répandant quel-
ques idées saines, qui ne font pas corps de doctrine.
Fénelon, dans sa Lettre à V Académie française (1716), a
donné, aa § Vm, un projet de Traité sur l'Histoire, qui
renferme une excellente méthcte de composition, et
quelques principes destinés à faire partie de la philoso-
phie de l'histoire, et dont Fréret, Voltaire et notre siècl'^
ont pu profiter. Rollin parla à peu près de même, en
exposant les Règles et principes pour Vétude de l His-
toire profane {Traité des études, III' partie, liv. VI). Dans
ses Héfteosions sur VHistoire (1761), d'Alembert imposa
aux historiens des lois philosophiques qui n'avaient rien
de bien nouveau. Le long traité de Blably, De la manière
d* écrire l'histoire (1782), donne des recettes littéraires
qui se réduisent à l'imitation des Anciens, insistant lon-
guement sur les études et les qualités nécessaires à l'his-
torien, sans jamais s'élever a des principes généraux.
Au commencement de notre siècle. Chateaubriand en
comprit quelques-uns dans celui des livres du Génie du
Christianisme qu'il consacre à l'histoire (III* partie,
liv. 5), mais surtout dans la Préface de ses OEuvres his-
toriques, où il Ju^ les écoles historiques qui se sont
élevées sous l'inspiration de la philosophie de l'histoire,
dont il critique les maîtres, Vico et Herder, pour assurer
la suprématie à Bossuet. — Pendant que Daunou, de
1819 à 1830, professait au Collège de France son Cours
d'études historiqtAes, traité complet de la manière d'écrire
l'histoire, au point de vue de l'étude des sources, de leur
classification, de leur critique, et de leur mise en œuvre
par l'exposition des faits, déclarant nettement qu'il n'y
avait qu'à choisir dans les méthodes des devanciers pour
trouver la vraie méthode historique, Aug. Thierry contri-
buait à l'établissement de la philosophie de l'histoire par
ses Lettres sur l'Histoire de France (1820), où il mon-
trait la futilité et le ridicule de nos prétendus historiens.
De son côté, M. Guizot, par son enseignement à la Sor-
bonne, opéra sur les esprits la révolution historique que
les promoteurs de la philosophie de l'histoire avaient
signalée comme une nécessité, et la consacra dans ses
Essais sur VHistoire de France et dans son Histoire de
la civilisation en Europe, Plus tard, M. Taine, dans un
Essai sur Tit&-Live, couronné par l'Académie française
(1855), envisageant l'histoire comme une science et
comme un art, a tracé tous les devoirs de l'historien, au
point de vue de la critique, de la philosophie, des carac-
tères et du style, en écnvain doué du sens philosophique
et s'inspirant à la grande école historique moderne. Enfin
M. Thiers, en tête du XII« vol. de son Histoire du Con-
sulat et de V Empire (1855), a mis un Avertissement au
lecteur, où il donne une théorie de l'art d'écrire l'his-
toire. Comme qualité de l'esprit, il ne veut que le don de
l'intelligence, qui suffira à tout ce (|u'on est en droit
d'attendfre de l'historien ; comme devoir, il lui impose le
seul amour de la vérité ; de ces deux sources découleront
tous les mérites. F. B.
PHILOSOPHIQUE (Poésie) , poésie qui se propose de
prêter aux matières de la philosophie, fût-ce les plus
abstraites et les plus rebelles , le charme des vers. Ces
sortes de tentatives provoquent d'abord l'étonnement, et
l'on se demande Jusqu'à quel point le langage poétique
peut sufiire et convenir aux exigences de la v&ité philo-
sophique. La poésie, en effet, est toute dans les images,
les sentiments et les mouvements passionnés ; elle recher-
che la variété, la souplesse des formes et la vivacité des
couleurs ; elle sait s'accommoder même d'un stjrle vasue
et nuageux, s'il est musical; c'est un art : la philosophie
exige la précision rigoureuse qui convient à l'analyse, à
l'abstraction , à la généralisation, et semble requérir plu-
tôt la prose exacte, aride même, du géomètre ; c'est une
science. Et pourtant, à l'origine, l'art et la science ont
parlé la même langue. Les premiers philosophes de la
Grèce ont bégayé leurs systèmes dans l'idiome des poètes :
Xénophane,Parménide, Empédocle, empruntèrent le vers
homâique pour exposer leurs idées sur la nature; Pytha-
i;ore, ou plutôt quelqu'un de ses disciples, composa lus
Vers dores, où la morale religieuse domine déjà la mé-
taphysique. Il y a, en effet, dans la philosophie, certaines
matières qui semblent appeler d'elles-mêmes toutes les
richesses et les magnificences du langage poétique. Com-
ment mieux parler qu'en vers de l'Etre qui préside à
l'ordre du monde, des mystères. de notre destmée, des
aspirations, des craintes et des espérances que le senti-
ment religieux excite dans l'ftme humaine? Aussi loin
qu'on remonte dans l'histoire de la littérature grecque,
même avant Homère, on retrouve des chants de philo-
sophie religieuse, des hymnes que les légendes attribuent
aux personnages mystiques et sacrés d'Orphée, de Musée,
des Eumolpides. Ces premiers interprètes des dieux,
comme Horace les appelle, ont pour successeurs les Gno-
miques ( V, ce mot). Au m* siècle avant notre ère, l'hymne
de Cléanthe à Jupiter est une des sublimes inq;>iratioiis
PHO
1122
PHO
du Stoïcisme ; Jamais runitô de Diea D^avait étô proclamée
chez les païens dans un langage à la fois plus précis et
plus élevé. A leur tour, les Alexandrins, notamment Pro-
dus, et un chrétien qui ne sépara jamais des doctrines
du christianisme les idées platoniciennes , Synésius, évo-
que de Ptolémaîs, composèrent des chants où la philoso-
phie se confond avec la religion. Ce genre de poésie n'existe
pas chez les Latins, où Lucrèce ( V. Natorb — Poëme de
la ) représente seul la poésie philosophique. Mais , dans
les temps modernes , on peut citer le poCme de la Ueli-
gion, de Louis Racine, et surtout les Méditations et les
Harmonies poétiqiMs de M. de Lamartine, tant admiré de
Jfouffroy, pour avoir su, le premier peut-être, dans des
vers dont le mouvement et l'éclat sont parfois incompa-
rables, discuter les problèmes les plus ardus do la méta-
physique. — On peut rattacher élément à la poésie
philosophique les Êpttres, les Satires, les Contes mêmes
où l'auteur se complaît à développer quelque pensée mo-
rale. V, DmACTiQUE (Poésie), Moralistes. A. H.
PHOCAS ( Colonne de). K. Colonniss monumentales ,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
PHOEBUS. F. PHéBOS.
PHQENIX, monnaie d'argent en usage en Grèce dans
les premiers temps de l'indépendance. Elle valait environ
0 fr. 83 c.
PHQNAGOGUE , mot d'origine grecque signifiant con-
ducteur du son, et par lequel on désignait autrefois le
thème de la fugue (V. ce mot),
PHONASQUE (du gtecphonè, voix, son), professeur
qui, chez les Anciens, développait le volume de la voix,
et apprenait à bien prononcer. 11 y avait aussi ancienne-
ment, dans rÉglise, un pkonasque chargé de régler les
intonations des chantres : on ne sait s'il s'aidait d'un in-
strument pour donner le on.
PHONÉTIQUE. V. ÉcarreRE.
PHONOGRAPHIE (du grec phônè, son, et graphô,
J'écris) , mot qui a été employé comme synonyme de no-
tation musicale, F. Notation.
PHONOMINE , instrument de musique , inventé vers
4834 par un mécanicien de Vienne en Dauphiné. U a
l'apparence d'un piano-orgue : le clavier n'a guère plus
d'étendue qu'à l'ancien clavicorde (F. ce mot)^ et Ton
obtient les sons à l'aide de tuyaux; mais, par l'effet d'un
mécanisme particulier, ces sons ont une analogie frap-
pante avec la voix de l'homme. Le phonomine a 4 regis-
tres, la basse, le baryton, le ténor et le fausset, en sorte
qu'on croit entendre un chœur d'hommes.
PHORBÉION , nom que les Grecs donnaient au capis-
trum (F. ce mot dans notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire),
PHORMINX, instrument de musique des Anciens, qui
ne parait pas avoir différé de la cithare; cor Homère dit
cithariser avec laphorminx eiphormiser avec la cithare.
PHOTINX. F. Flctk.
PHOTOGRAPHIE ou HÉLIOGRAPHIE (du a^ecphôs,
photos, lumière, ou hélios^ soleil, et de graphe, j'écris) ,
art de produire et de fixer les images des objets par l'ac-
tion de la lumière sur certaines substances. Dans la
Daguerréotypie, l'image se forme sur une planche mince
de cuivre plaqué d'argent, exposée d'abord à la vapeur
d'iode et rendue plus sensible à l'aide d'une solution de
brome; après sa sortie de la chambre noire, cette image
est rendue apparente par les vapeurs mercurielles, et fixée
par un lavage dans une solution d'hyposulfite de soude,
ou plutôt de chlorure d'or, comme l'a indiqué M. Fizeau.
L'appareil d'optique à l'aide duquel on fixe les images
dans la chambre noire se nomme Daguerréotype. — Les
anciens alchimistes savaient que toute image produite
au moyen d'une lentille sur une couche de chlorure d'ar-
gent , qu'ils appelaient argent corné , s'y fixait en noir
pour les parties éclairées , en gris pour les demi-teintes,
et en blanc pour les parties que ne frappait aucune lu-
mière. C'est un fait constaté par le livre de Fabricius ,
De rébus metallicis, 1566. Selon Johard {Les Nouvelles
inventions aux Expositions universelles, 1857, in-S»),
on a récemment trouvé en Russie un livre , traduit de
l'allemand depuis 300 ans, et qui contient très-claire-
ment l'explication de la photographie. Dans un livre pu-
blié en 1760 sous le titre de Giphantie, par un certain
Tiphaigne de La Roche, on trouve la description de cet
art, reproduisant non-seulement les images, mais même
les couleurs. Vers la fin du xvm* siècle, le physicien
Charles se servait d'un papier recouvert d'un certain en-
duit, qu'il ne fit pas connaître, pour engendrer des sil-
houettes à l'aide de l'action de la lumière. En 1802 ,
Wedgwood employa un papier enduit de cbloruiA an de
nitrate d'arçent, pour la reproduction des vitraux des
églises , mais n'obtint que des images qui noircissaient
presque aussitôt. Depuis 1813, Niepce, propriétaire aux
environs de Chàlon-sur-Saône , se livra à de nouvelles
recherches; un Mémoire qu'il présenta en 1827 à la So-
ciété «royale de Londres prouve qu'avant tout le monde
il obtint sur métal des reproductions de gravures que
n'altérait plus la lumière. En 1829, il s'associa, à Paris,
avec Daguerre, qui s'occupait aussi de fixer les images de
la chambre noire, et, après dix ans de recherches, le
procédé qui sert encore aujourd'hui fut trouvé; on put
reproduire sur plaaue, non-seulement les gravures, mais
les monuments et les tableaux, et exécuter des portraits.
Depuis 1839, tous les perfectionnements ont eu pour but
d'opérer avec plus de rapidité, et de donner aux images
plus de netteté et de vigueur; résultats que l'on a ob-
tenus par divers procédés, dus à Claudet de Lyon , Gan-
din, Fizeau, Lerebours, Martens, Foucault, etc.
Les images da^erriennes ont l'inconvénient de miroi-
ter. On y a obvié, en remplaçant la plaque métallique
par une plaque de verre ou par du papier convenablement
préparés. C'est là proprement la photographie. L'image
qu'on obtient est négative; les teintes y sont renversées,
les ombres de l'objet étant représentées par des clairs et
réciproquement. Un Anglais, Talbot, a eu l'idée de s'en
servir comme d'un type pour obtenir des images positi-
ves, où les teintes sont ramenées à leur ordre naturel.
Les divers procédés de la photographie sur papier ont
été successivement trouvés par Bayard, Talbot, et Blan-
quart-Évrard, de Lille ; ceux de la photographie sur verre,
par Niepce de Saint- Victor, neveu du premier inventeur.
Chaaue jour apporte des perfectionnements à la photo-
graphie : ainsi , les frères Moyer et Pierson ont découvert
le moyen de fixer les traits d'un tableau ou d'un portrait
sur une toile préparée pour la peinture à l'huile, de sorte
qu'un artiste n'a que le coloris à donner. E. Becquerel
a trouvé une substance impressionnable t^ui reproduit les
couleurs aussi bien que les ombres des objets , mais on
n'est pas encore parvenu à les fixer. Beaucoup d'épreuves
photographiques s'altèrent sous l'action prolongée des
rayons lumineux ; on est arrivé à en révivifier les tons ,
mais non encore à empêcher la décoloration dans un
temps plus ou moins long.
En considérant l'inimitable perfection de détails que
présentent les dessins photographiques, on serait tent('>
de placer ces œuvres au rang des plus belles productions
des arts : mais l'art ne réside pas dans la stricte imita-
tion de la nature; l'impression provoquée en nous par la
peinture ne résulte pas de la vérité avec laquelle les
objets sont reproduits sur la toile; les œuvres des maîtres
vivent, non par l'exactitude de la reproduction maté-
rielle, mais par la pensée qu'elles expriment, par les sen-
timents qu'elles éveillent. L'art n'imite pas, dans toute
la rigueur du mot, il transforme ; pour traduire la na-
ture, il s'en écarte; pour copier, il invente; pour repro-
duire, il crée. Quand un artiste, par exemple , exécute
un portrait, ce qu'il cherche, avant tout, c'est la physio-
nomie, ce je ne sais quoi composé de mille nuances
mobiles , changeantes , fuyantes , que ne donnent pas
quelques secondes, qu'il ne saisit et ne devine souvent
qu'après plusieurs séances où il aura fait poser son mo-
dèle moralement, pour ainsi dire , autant que physique-
ment : or, il faut une &me pour sentir et rendre cela. Et
puis, au point de vue de l'effet général, il n'a garde de
reproduire avec un soin minutieux tous les plis des vête-
ments, tous les dessins de la draperie, tous les enjolive-
ments du fond ; il éteint les détails inutiles , pour con-
centrer l'intérêt sur les traits du visage. La photographie
n'a aucun de ces artifices salutaires qui sont l'indispen-
sable condition de l'art ; elle est inexorable et brutale
dans sa vérité; elle accorde une importance égale aux
grandes masses et aux plus imperceptibles accidents. Son
vice principal est donc un défaut absolu de composition:
elle ne compose pas, elle donne une copie, un fac-similé
de la nature ; or, une œuvre d'art vit tout entière par la
composition. De là résulte qu'au fond la photographie ne
donne même pas de la nature une représentation aussi
exacte qu'on se l'imagine. En effet, lorsque nous recevons
l'impression d'un paysage, par exemple, tous les détails
de la vue extérieure viennent sans doute s'imprimer au
fond de notre œil ; cependant ces mille sensations parti-
culières ne sont aucunement perçues, et elles sont pour
notre àme comme si elles n'existiiient pas ; nous ressen-
tons, non pas l'impression isolée des divers aspects du
f>aysage, mais seulement l'effet général qui résulte de
eur ensemble. Or, la photographie reproduit impitoya-
PHR
1123
PHR
blement les plus inutiles détails de la scène extérieure :
elle donne donc une traduction inexacte des sensations
qu'excite en nous Taspect de la nature. Une autre im-
])errection des images photographiques, c'est que les tons
de la nature y sont souvent altérés : tel ton vigoureux
sur le modèle est peu sensible sur Tépreuve daguer-
rienne, et, au contraire, une nuance lumineuse a*une
faible valeur dans la nature se trouve accusée sur la
plaque avec un éclat exagéré ; aussi la plupart des demi-
teintes sont-elles forcées, et répreuve est habituellement
dure. Les épreuves où les rapports naturels des teintes
sont conservés avec harmonie se rencontrent rarement ;
c'est le fait de quelques circonstances fortuites qu'il est
impossible de provoquer et de reproduire à volonté. A
3uoi tient ce regrettable efTet de la photographie? Sans
oute à ce que les différentes couleurs des oojets exté-
rieurs ont une action propre et variable sur les sub-
stances chimiques qui recouvrent la plaque, action qu'il
est aossi impossible de prévoir que de diriger. Il est re-
connu, par exemple, que les couleurs verte. Jaune,
lilas, etc., présentent de grandes difficultés à la repro-
duction photographique. Une autre remarque à faire,
c'est que, si l'on reproduit par le daguerréotype des ta-
bleaux à l'huile, les copies n'ont de valeur et de vérité
que lorsque les tons du modèle sont peu nombreux et très-
voisins les uns des autres : une peinture de tons uni-
formes et sobres donne sur la plaque une image d'une
ressemblance parfaite dans les tons; mais si elle est
riche de couleurs variées et papillotantes, l'épreuve pho-
tographique est d'une fausseté criante. Nous ajouterons
qu'avec la photographie la perspective linéaire et la per-
spective aérienne sont sensiblement faussées. L'altération
de la perspective linéaire est la conséquence presque
inévitaole de l'appareil optique qui forme les images : les
objets placés à des distances inégales ont, en effet, des
foyers lumineux distincts les uns des autres, et, quelle
que soit la perfection de l'objectif, il est impossible qu'il
fasse converger en un même point les rayons lumineux
émanant d'onjets fort éloignés entre eux ; par exemple ,
dans un portrait photographique, si les mains se trou-
vent placées dans un plan sensiblement antérieur au
plan du visage, elles viennent toujours d'une dimension
exagérée. L'altération de la perspective aérienne est aussi
la conséquence presque forcée du procédé photogra-
phique : la substance qui reçoit l'impression de la lu-
mière étant relativement plus sensible c[ue notre œil
même, il en résulte que les aspects lointams, les objets
situés à l'extrémité de l'tiorizon, sont reproduits avec
plus de netteté qu'ils n'en présentent à nos yeux, con-
trairement aux effets habituels de la perspective aérienne.
Conchions que, dans son état actuel, la photographie'
donne des copies admirables, dont la perfection dépasse
assurément tout ce que la main de l'homme exécutera ja-
mais; et pourtant Tunique sentiment que ces calques mer-
veilleux puissent exciter en nous est la curiosité : ils par-
lent aux sens, ils charment l'œil armé de la loupe; mais
r&me reste froide. Le daguerréotype a été une conquête
presque inutile pour l'étude et le perfectionnement des
beaux-arts ; les artistes n'en ont rien appris, rien recueilli.
Du reste, l'invention d'un instrument capable d'accomplir
avec perfection toutes les opérations manuelles de la
peinture, d'exécuter tout ce que comporte l'imitation ab-
solue de la réalité, aura été une démonstration sans ré-
plique du spiritualisme de l'art : car ce n'est pas h un tel
résultat que s'emploie le génie des maîtres, et la foule
elle-même ne peut confondre leurs sublimes créations
avec ces produits mécaniques. Il est, toutefois, certaines
études auxquelles la photographie apporte de précieuses
ressources; telle est celle de la nature morte et des monu-
ments de l'architecture. La photographie a aussi enfanté
plusieurs arts nouveaux, tels que la gravure héliogra-
phique et la litluhphotographie ( F. ces mots), — V. Da-
guerre. Historique des procédés du daguerréotype, 1839;
Ch. Chevalier, Nouvelles instructions sur Vusage du da-
guerréotype, 4841; Gaudin et Lerebours, Derniers per-
fectionnements apportés au daguerréotype, 4842; les
TrcUtés de photographie par Valicourt, L^ray, Gouçpier,
Legros, ABelloc,Blanquartr-Évrard; Aubrée, Traité pra-
tique de pîiotographie sur papier, sur plaque et sur verre,
1851; Barreswill et Davanne, Chimie photographique,
ie<54, in-8«; Disdéri, VArt de la Photographie, 1802.
PHOTOSCULPTURE. V. au Supplément.
PHRASE (da geecphrasis, action de s'exprimer), en-
semble de mots concourant à exprimer un ensemble
d'idées, un sens suivi et complet. Toute phrase est bor-
née par le sens, c.«2i-d« qa^ollo commence et finit avec '
lui ; et, selon qu'il est plus ou moins composé, elle a plus
ou moins de parties. La phrase qui ne renferme que les
trois termes nécessaires pour l'expression d'un jugement
s'appelle proposition; mais il ne laut pas confondre une
phrase avec une proposition : la proposition est essen-
tiellement philosophique, et n'a rapport qu'au fond même
de la pensée et aux trois termes de tout Jugement; la
phrase a surtout rapport à la forme, elle est purement
grammaticale et littéraire. Considérée grammaticalement,
elle se compose du sujet et de ses dépendances, du verbe
et de ses compléments directs, indirects, circonstanciels,
et peut renfermer des mots appartenant à toutes les par-
ties du discours; ces mots sont soumis à certaines réigles
de construction et de syntaxe. Considérée littérairement,
la phrase doit être claire, nette, élégante, harmonieuse;
elle pourra prendre dans l'occasion un tour oratoire, une
couleur poétique, être lente ou vive , pesante ou légère.
La phrase française, et en général la phrase moderne,
diffèrent des phrases grecques et latines quant à l'ordre
des mots : elles ont moins de liberté (V. Construction,
Inversion). — On appelle phrase faite une façon de par-
ler particulière qui est consacrée par l'usage et à laquelle
il n'est pas permis de rien changer. Hors de ces locu-
tions, il est permis à tout écrivain de créer des phrases;
mais ces phrases nouvelles doivent être composées avec
les mots déjà connus, dont il ne faut point altérer le sens
établi. Telles sont les phrases : Éclater en reprocnes.
Haïr à cceur ouvert, créées par Racine. — Le moi phrase
se prend souvent dans un sens défavorable; on dit, en
parlant d'une phrase sonore et vide : c^est une phrase; en
paralnt d'un homme habitué à se payer de mots vagues
sans s'inquiéter du fond des choses : c*est un faiseur de
phrases. Le mot phrase s'emploie aussi dans un sens défa-
vorable pour désigner une phrase embarrassée, chargée de
mots et boursouflée. P.
PHRASE, en Musique, suite de sons dont l'ensemble
forme un sens mélodique. Toute phrase est renfermée
dans un certain nombre de mesures. Les phrases de deux
mesures sont très-rares, et deux mesures ne font ordi-
nairement qu'un membre de phrase. Les phrases com-
plètes de trois mesures sont peu usitées dans les mesures
à 2 ou à 4 temps; on n'en fait habituellement usage que
dans les mesures à trois temps et pour les romances : le
mieux est que la phrase se compose de deux membres
formés chacun de trois mesures, parce qu'on arrive au
chiffre de six mesures et qu'une phrase doit finir sur un
nombre pair. La phrase la plus commune est celle de
quatre mesures. La phrase de cinq mesures s'emploie
rarement, et toujours une phrase de trois ou de cinq lui
répond, ce qui donne une phrase complète de huit ou de
dix mesures. Les phrases de six mesures sont ou complètes
par elles-mêmes, ou formées, dans un morceau à 3 temps,
de deux membres de trois phrases chacun. On ne fait point
de phrases de sept mesures. V. Carrure des phrases.
PHRASÉOLOGIE (du grecphrasis, expression, locu-
tion, et logos, traité), terme qui désignait, chez les An-
ciens, un recueil de mots, de locutions. Les Modernes
en ont modifié le sens, et il signifie : manière de s'expri-
mer et de construire les mots et les phrases particulière
à une langue , ou même à un écrivain. Ainsi, la langue
grecque, considérée en elle-même et dans son ensemble,
offre des constructions qu'on ne trouve dans aucune
autre langue; et, de plus, elle présente à cet égard des
phrases diverses suivant les époques : la phraséologie
d'Homère est différente de celle do Sophocle, et toutes
deux de celle de Théocrite ; Hérodote et Plutarque sem-
blent écrire chacun dans une langue différente, tant leurs
expressions et leurs tours de phrase se ressemblent peu.
De même chez nous , Pascal procède dans ses construc-
tions d'une manière toute différente de Montesquieu ; la
phraséologie de VEssai sur les mœurs ne ressemble
point à celle du Discours sur VHistoire universelle. Le
x\i*, le xvu*, le xviii» et le xix* siècle nous montrent la
langue sous quatre aspects différents, qui se reconnais-
sent de la manière la plus tranchée dans les œuvres de
Montaigne, de Fénelon, de Voltaire, de Chateaubriand. ~
Appliqué à un écrivain en particulier, le mot phraséo-
logie se confond quelquefois avec le mot style, mais ce-
lui-ci a toujours un sens plus étendu. — Enfin ce terme
emporte souvent une idée de dénigrement, et désigne
l'enflure, les mots vides de sens, la sonorité des phrases
sous lesquelles l'esprit ne découvre aucune idée sérieuse
ou originale. P.
PHRATRIE. V. ce mot dans notre Dusttomaurê de
Biographie et d^Histoire,
PHRÉNOLOGIE (du grec phrèn, àme, cœur, eiprit, ei
pna
1424
PHR
logos, science ), nom sous lequel on connaît la doctrine
2ue le médecin Gall commença de préconiser en France
es 1807. Cette prétendue science de Thomme qu'il a
voulu fonder, lui et ses disciples, pour remplacer la psy-
chologie et la métaphysique , a fait beaucoup de bruit,
surtout dans le monde des salons et même des Acadé-
mies; sa vogue est passée; Tappui de quelques noms
célèbres, comme Broussais, ne lui a pas manqué; mais
elle n*a Jamais pu trouver crédit auprès des vrais sa-
vants ni des vrais philosophes. Aujourd'hui, sauf quel-
qu(â rares adeptes qui Paltérent en la modifiant, elle est
généralement abandonnée. Les derniers travaux sur Tana-
tomie du cerveau et le système nerveux Tont ruinée.
Mais à cause de la célébrité qui Tentourc encore, il est
bon de Texaminer dans ses hases, dans sa méthode^ et
dans ses résiUtats*
I. Bases de la Phrénologte. — 1<* La phrénologie, se
proposant pour but de déterminer la fonction des or-
ganes affectés à la vie intellectuelle et morale, part de ce
principe qu'il existe en effet une corrélation intime entre
les facultés et les organes. Ce principe est incontestable
tant qu*il ne dépasse pas ses limites ; mais entre le phy-
sique et le moral la dépendance est réciproque; si la dé-
pendance du moral est absolue, c*est le matérialisme. Les
phrénologistes, et Gall en particulier, n*ont pas su garder
cette mesure. — 2® Les facultés intellectuelles et morales
ont pour siéj^ particulier et exclusif le cerveau. Ce prin-
cipe, fort antérieur à la doctrine de Gall, est encore vrai.
Gall a eu le mérite de le préciser et de le démontrer;
mais ce qu^il n*a pas vu, et ce qui déjà contredit son sys-
tème, c'est que le cerveau tout entier n'est pas le siège des
facultés morales, et de l'intelligence en particulier, mais
seulement la partie antérieure (les hémisphères céré-
braux) : le cervelet et les tubercules quadrijumeaux pré-
sident à d'autres fonctions (à la locomotion et aux mou-
vements de la respiration^. C'est ce que M. Flourens a
établi d'une manière certaine dans ses Recherches expé-
rimentales sur les propriétés et les fonctions d» système
nerveux, — 3** Mais tout cela n'est ni la doctrib'e propre
de Gall, ni le principe sur lequel elle se Tonde. Ce prin-
cipe, le voici : le cerveau n'est pas un organe unique,
mais multiple; il est un assemblage d'organes particuliers
et distincts, auxquels correspondent autant de facultés,
de penchants, d'instincts, ou de forces morales également
distinctes les unes des autres. Or, voilà justement ce
qu'il n'a pu établir : l'anatomie, la physiolo^e, la ps]^-
chologie conspirent pour renverser ce principe. Jamais
Gall n'a pu, anatomiquement, rendre visible aucun de
ces prétendus organes qui viendraient tous, selon lui, se
distribuer à la surface du cerveau. L'anatomie sur ce
point est restée muette ou stérile. La méthode de dépiis-
sement du cerveau inventée par Gall tend plutôt à dé-
poser contre son hypothèse. Il est aujourd'hui prouvé
( V, Flourens) que la partie la moins importante du cer-
veau est la portion superficielle où devraient r^ider les
organes, car on peut enlever une portion notable de la
matière blanche et de la matière grise qui la composent
sans enlever ni altérer les fonctions intellectuelles. —
4^ Le cerveau n'étant pas immédiatement observable,
Gall et les phrénologistes sont obligés de substituer à
l'observation directe l'inspection du crâne, qui en est
l'enveloppe, et de ses formes ou protubérances. De là la
crànioscopie. Or, elle suppose : 1^ que les organes sont
logés à la surface du cerveau, sous la lame interne du
crâne; 2** que la lame externe correspond parfaitement à
la lame interne; ^° que le tissu spongieux c(ui sépare les
deux lames est le même chez tous les individus; 4^ que,
nulle part, le parallélisme des lames interne et externe
n'est faussé; 5° que le tissu vasculaire d'artères et de
veines, et les enveloppes du cerveau, n'altèrent pas les
empreintes que celui-ci a déposées sur la surface inté-
rieure du crâne. Aucune de ces conditions n'existe, au
moins avec l'exactitude que réclament le système et sa
méthode.
La physiologie n'est pas plus favorable que l'anatomie
à la doctrine de Gall; pour ne citer qu'un exemple, est-
il vrai que le volume de l'organe partout et toujours dé-
termine et mesure l'énergie et le développement de la
faculté correspondante? Ce principe, tout matérialiste,
fût-il d'accord avec une saine psychologie, la physiologie
elle-même le repousse comme absolu : sans cela il fau-
drait qu'elle admit que la perfection d'un organe ne dé-
pend que de son volume et nullement de sa structure,
de la finesse et de la délicatesse de ses fibres, de l'énergie
de la force vitale qui l'anime , de sa juste proportion et
de son rapport avec d'autrw organes. Un* système peut
nier ou négliger tout cela, mais la science ne te peut pas.
Gall et ses disciples sont obligés d'omettre ou d'atténuer
ces conditions au point de les rendre nulles dans la pra-
tique.
Voilà ce que disent l'anatomie et la physiologie des
bases de ce système. Si l'on consulte la psychologie ou la
métaphysique, les objections ne sont m moins fortes nî
moins graves.
Pour Gall et son école, le cerveau est un assemblage
d'organes distincts et séparés ; les facultés Jouissent de la
même existence réelle, mdividuelle. Mais comment con-
cilier toutes ces entités avec Vunité du moi ? Gomment
même les concilier avec l'unité des grandes facultés,
telles que l'intelligence, la volonté, la sensibilité, dont
les autres facultés sont de simples modes? Cette objec-
tion capitale renverse tout le système de Gall. Aussi
s'estril acharné à soutenir que l'intelligence, la mémoire,
la volonté ne sont pas de vraies facultés, mais seulement
les modes des facultés réelles, qui seraient alors les ca-
pacités, les instincts, les penchants, appelés par lui
forces fondamentales; thèse absurde, car il en n^ul te-
nd t que la mémoire, le jugement, etc., étant les modes
de ces facultés ou de ces forces, il y a autant d'êtres qui
se souviennent. Jugent, raisonnent, veulent, ou de per-
sonnes, qu'il y a d'organes dans le cerveau ; ce qui a fait
dire spirituellement que le cerveau était une république
démocratique. Or, ce n'est pas un détail, une pièce dé-
tachée de l'édifice, c'est l'édifice même ou sa clef de voûte.
Comment encore concilier, dans cette doctrine, la liberté
morale avec la dépendance absolue où le moi est des or •
gaues, et avec la proportion exacte entre la faculté et le
volume? Passons à la méthode.
U. Méthode Phrénologique, — C'est, d'une part, la
crànioscopie, de l'autre une psychologie faite d'avance
ou purement hypothétique, et qui se crée en même temps
qu'on observe le crâne des individus dans les divers états,
professions, etc. Rien n'est moins précis ni moins scien-
tifique. Pour qu'une telle méthode fût exacte, il faudrait
d'abord que les conditions précédentes fussent remplies.
Les protubérances du crâne n'ont de valeur et ne signi-
fient quelque chose qu'autant qu'elles représentent fidèle-
ment les organes cérébraux; mais leur existence même
est problématique. Il faudrait, s'ils existent, qu'ils fussent
distribués tous à la surface du cerveau, et non enfoncés
dans la masse encéphalique; Cfie ces signes, expression
exacte des organes cachés à l'intérieur, fussent clairs et
distincts; que les facultés attachées aux organes, et que
ces signes annoncent, fussent observées avec soin, analy-
sées, distinguées avec précision. Rien de tout cela n'axiste
ou n'est établi nettement. Pour s'en tenir aux signes crà-
nioscopiques, rien de plus vague, de plus arbitraire, de
plus mal délimité. Cette topographie du crâne est artifi-
cielle, obscure et problématique. 11 en résulte qu'on peut
li^ tout ce qu'on veut sur le crâne, et quand un fait
semble contredire la doctrine, il y a toujours moyen de
se tirer d'affaire; rien qui favorise plus l'illusion, l'en-
gouement, la crédulité, et aussi le charlatanisme. Cest
ce qui explique la vogue dont a joui la phrénologie, son
succès auprès des gens du monde, mais en même temps
son peu de crédit auprès des savants, des esprits judi-
cieux et sévères. — Au premier abord, cette méthode a
quelque chose d'imposant : elle s'environne d'une foule
d'expériences, procède par l'expérimentation sur la plus
vaste échelle; elle examine une infinité de sujets pris à
tous les degrés de l'espèce humaine et même animale ;
elle observe dans toutes les classes de la société, compare
les individus de tous âges, de tout sexe, de toute condi-
tion, etc. Mais qu'on examine de près ses procédés, on
verra combien la manière d'observer et d'expérimenter
est superficielle et fausse.
La matière de l'expérimentation consiste dans deux
ordres de faits qu'il s agit de comparer pour en saisir le
rapport, savoir : d'une part, les formes extérieures de la
tête humaine, les protubérances du crâne, qui sont cen-
sées représenter les organes du cerveau ; d'autre part, les
faits moraux correspondants, qu'il s'agit de reconnaître
et de définir avec précision.
Or, on a vu combien le signe crânioscopique est vague,
incertain, mal délimité dans sa forme; de plus, par lui-
même il est muet. Pour savoir ce qu'il signifie, il faut
saisir la faculté correspondante, et cela non vaguement,
mais d'une façon précise. Comment s'étudie et se dé-
couvre ce second terme, qui est plutôt le premier, l'autre
n'étant que son signe? C'est là surtout qu'apparaît le vice
de la méthode phrénologique sur ce point capital. Le
plirénologistc observe l'hommo, ou nlutôt les hommes.
PHY
1425
PIÂ
dans le langnge, les actions, les situations diverses de la
Tie. n note ce qui est caractéristique dans chaque indi-
Tida. Kn observant ainsi les hommes on acquiert une
certaine sagacité et du talent pour ce genre d'observar
tioo; 09 obtient quelques renseignements précieux sur le
caractère et le genre d*esprit des individus; mais qu*on
puisse Jamais arriver à connaître ainsi les facultés fon-
damentales de l'homme, les tendances primitives de sa
nature, à déterminer exactement leur caractère, leur
nombre, leurs fonctions, il faut être naïf pour le croire.
Aussi les résultats de cette méthode sont parfaitement
d'accord avec ce qu*on doit en attendre. Lm voici dans
leur généralité.
m. RésultaU. — Gall dresse nne liste de 37 organes
et de 21 facultés qui leur correspondent 1 1* instmet dé
la propagation; S* amour de la progéniture; 3* nutinct
d$ la iifmtê de $oi^mém$; 4<» hutinct camauiâr; 5* tsti-
(ifiMia de la propriéU; 0" amitié; 1^ rusê; 99 oroueil;
9* vanité; 10* ctrcompectton; il* m^otr» dês choses;
13* msmotr» dês mots; 13* f«tu des, localités; 14* sens
des personnes; 15^ sens du langage: 10* sens du rapport
des couleurs; 17* sens du rapport des sons; .18* sens du
rapport des nombres; 19* sens de la mécanique: SO* sa-
gactté comparative; 21* esprit métaphysique; 22* esprit
caustique; 23* talent poétique; 24* bienveÛlance; 25* mi-
mûiue; 26* sens de la religion; 27* fermeté. — Spur-
zheim, le collaborateur de Gail et son continuateur, donne
une autre liste, où il cherche à ranger les facultés dans un
ordre plus méthodique, et en i^oute de nouvelles qui en
portent le nombre à 35. D'autres phrénologistes en ajou-
tent encore, et l'on voit pulluler les facultés et les or-
ganes. M. Vimont, un des phrénologistes postérieure, en
compte Jusqu'à 52 sur le crâne d'une oie ; cela promet-
tait pour la tête humaine. Aussi la science ne s'arrête
plus. Elle s'enrichit tous les Joun de nouvelles facultés.
Quand on vient à comparer toutes ces listes, on voit gue
la confusion est partout, ainsi que l'arbitraire. La variété
des mots recouvre une bien plus grande divergence
d'idées et d'opinions. N'importe, dans sa phase ascen-
dante la Phrénologie se propage avec rapidité dans le
Vieux et le Nouveau Monde. Les adeptes se multiplient;
des chaires s'élèvent, des sociétés se fondent, des Jour-
naux la propagent. L'Angleterre, la France, FAllemagne,
les États-Unis se couvrent de sociétés phrénoIogic[ues.
Elle pénètre dans les Académies, comme elle envahit les
salons. L'École, arrivée à son apogée, décline ensuite peu
à peu; les savants l'abandonnent, d'autres lui portent
des coups mortels ; elle tombe enfin pour ne plus se rele-
ver. C'est l'histoire de toutes ces erreura qui, par leur
nouveauté et leur côté spécieux, trompent et séduisent
un instant le public, puis passent comme des météores.
— Presque tout ce qu'il y a de vrai dans la phrénolode
était connu avant elle et lui survit. Le seul servioe qu'elle
ait rendu, c'est, comme pour l'alchimie et l'astrologie,
d'avoir provoqué des travaux sérieux sur l'anatomie et la
pli}:tiologie du cerveau, sur les races et les variétés de
Tcspèce humaine. Quant à la doctrine phrénologique
proprement dite, voici, comme dernière conclusion, le
jugement qu'en porte un des plus grands phrénologistes
du siècle, idûller : « On ne peut s'empêcher, dit-il, de
repousser du sanctuaire de la science ce tissu d'assertions
arbitraires qui ne reposent sur aucun fondement réel. »
— V, Flourens, Examen de la Phrénologie, 2* édit. ,
Paris, 1845, in-12, écrit trèsHM>urt, mais capital; Lélut,
QWest'Ce que la Phrénologie? Paris, 1830, in-8«; Du
poids du cerveau dans ses rapports avec le développe-
ment de l'intelligence, 1837, in-8*; Examen comparatif
de la lofigueur et de la largeur du crâne chez les voleurs
homicides, dans le Journal unwersel de médecine, 1831 ;
De l*Organe phrénologique de la destruction chez les
animaux, 1836, in-8*; De la Phrénologie : son histoire,
tes systèmes et sa condamnation, 1858, in-8*, etc. B~d.
PHRYGIEN (Mode), un des modes de la musique des
anciens Grecs , intermédiaire entre le mode lydien et le
mode dorien. Le caractère en était fier et impétueux, et
il convenait aux combats. Le satyre Marsyas en fut, dit-
on, l'inventeur.
PHYLACTÈRE (du grec phulassô, le garde, je con-
serve) , nom donné : 1* aux espèces d'amulettes ou de
préservatifs que portaient les Anciens pour se garantir
des accidents; 2* aux bandes de peau ou de parchemin
sur lesquelles les Hébreux écrivaient des passages du
pécalogue, et mi'ils enroulaient à leure bras ou sur leur
tiens; 3* aux cn&sses dans lesquelles les premien chré-
froDt conservaient des reliques ; 4* aux nanderoles ac-
compagnéos d'une inscription Que tiennent divers per-
sonnages dans certaines peintures ou sculptures do
moyen âge.
PHYSHARMONICA, Instrument de musique à touches,
inventé en 1821 par Ant. Hasckel , de Vienne, et dans le-
quel les sons sont produits par des languettes de métal
que fait vibrer le vent ama^ au moyen d'une pédale.
Un brevet de perfectionnement et d'importation en France
fut prison 1829 par Grucker et Schott, de Strasbourg.
PHYSICO- THÉOLOGIE. V. Éthico-théologii.
PHYSIOCRATES. V. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d^ Histoire.
PHYSIOGNOMONIE (du grec phusis^ nature, carac-
tère, et gn&mân, indicateur), art de connaître ht nature
d'un homme d'après sa physionomie, c-à-d. d'après les
traits du visage, l'attitude du corps, la démarche, etc«
Aristote est le premier qui ait exprimé quelques vues
systématiques sur l'interprétation des traits de la figure : il
supposait que les hommes dont la physionomie offrait quel-
que rapport avec les traits de certains animaux avaient
des inchnations et des habitudes analogues à celles de
ces animaux. De là est sorti le système physiognomonique
de J.-B. Porta, De humanà physiognomicâ, Naples, 1586.
Le peintre Lebrun a laissé une série d'esquisses qui mon-
trent aussi le rapport de la figure humaine avec celle de
divera animaux. D'autres ont mesuré le degré de l'intelli-
gence par l'ouverture de l'angle facial : c'est , en parti-
culier, le système de Camper. La physiognomonie, trou-
vant un complément ou un auxiliaire dans la phrénologie,
eut une vogue nouvelle à la fin du xvw* siècle, lorsque
Lavater eut publié ses Essais physiognomoniques, 1775-
1778. L'expression de la figure, les mouvements corporels,
le ton de la voix, la texture de la fibre, la coloration du
teint, la nature des cheveux, telles sont les bases des
jugements physiognomoniques. V. CAMACitaB, PHaéno-
Loon.
PHYSIONOTRACE, instrument à l'aide duquel on des-
sinait mécaniquement des portraits sur nature. 11 fut
inventé à Paris en 1788 par Chrétien et Quenedey-
PHYSIONOTYPE , instrument inventé à Paris par Sau-
vage, en 1835, et à l'aide duquel on prend une empreinte.
C'est une plaque métallique peroée de petits trous trës-
rapprochés, dans lesquels passent des tiges mobiles et à
pointe mousse : quand on l'applique sur un objet, les
tiges cèdent à la pression des diverses parties de cet objet,
de manière à en offrir le moule en creux. Les tiges ayant
été fixées, ce moule transmet l'empreinte au plfttre, au
stuc, au carton, à la porcelaine ou au bronze. On essaya
de se servir de cet instrument pour faire des portraits sur
les personnes vivantes; mais les tiges, pressées par le
visage, y produisaient une sorte de petit chatouillement
qui le faisait contracter plus ou moins légèrement, et
les portraits sortis de ce type n'avaient pas la physio-
nomie naturelle du modèle.
PI, instrument de musique des Siamois. Cest une
espèce de chalumeau dont le son est fort aigu.
PIANO , instrument de musique à cordes et à clavier,
qui a succédé au clavecin ( V. ce mot). Ce n'est pas, comme
on l'a dit, un clavecin perfectionné; car, dans le davedn,
les cordes étaient pincées par un appareil mécanique,
tandis que dans le piano elles sont tnppées. Cet instru-
ment est donc plutôt un tympanon perfectionné ( V. Ttm-
panon). Le clavier se compK)se de touches blanches en
ivoire pour les tons naturels de l'échelle musicale, et de
touches noires en ébène pour les notes diésées ou bémo-
lisées. L'extrémité de chaque touche met en Jeu un mar-
teau de bois garni de peau, qui frappe sur une corde
métallique, ou mieux sur deux et trois cordes mises à
l'unisson. Les cordes sont fixées à l'aide de chevilles sur
un sommier, pièce de bois sur laquelle passent les cordes,
et qui lui-même supporte une table pour augmenter le
volume du son. Afin que les vibrations des cordes ne
produisent pas, en se prolongeant, la confusion dnns les
sons, des etouffoûrs ou pièces de bois garnies de drap
retombent sur les cordes quand les doi^ de l'exécutant
abandonnent les touches. A l'aide de pédales^ on peut à
volonté augmenter ou diminuer le volume du son. C'est
cette facilité de Jouer doucement ou fort (en italien piano
ou forte) qui, dans l'origine, fit donner à l'instrument le
nom de piano-forte ou forte-piano. Tout le mécanisme
de l'instrument est enfermé dans une caisse, de forme
et de dimensions variables. On nomme Piano carré, celui
dont la caisse est rectangulaire, portée sur quatre pieds,
et la table horizontale; Piano à queue, celui dont la
caisse est en forme de harpe couchée horizontalement;, et
portée sur trois pieds; Piano droite celui dont les cordes
ont ]f> position dugonaJe. Le piano carré n*a d'autre avan-
PIA
1426
PIA
tage qa* sa disposition symétriqae, qui lui permet de
figurer avantageusemeDt dans un salon. Le piano à queue
est celui que Ton doit préférer : les dimensions de la
eaisse, le volume, la longueur et l'écartement des cordes,
permettent d'obtenir des vibrations plus fortes et plus
prolongées; les basses acquièrent une puissance excep-
tionnelle; il est possible d'exécuter des mélodies lar^
et d*un beau style, tandis que de petits pianos on) moms
de son à cause du peu d'étendue de leurs cordes. On est
arrivé cependant à fabriquer des pianos droits, qui sem-
blent ne le céder guère aux pianos à queue. L'étendue
da piano, qui avait été d'abord de 4 octaves, a été portée
jusqu'à 7, et leur clavier a, par conséquent, 86 touches.
On accorde les pianos par tempérament (F. ce mot) ; di-
vers mécanismes ont clé inventés pour faciliter cette
opération (F. Accordeur, CHROVAiitTnB). — Le piano a
obtenu de bonne heure un très-grand succès, car il don-
nait des moyens d'expression de la pensée Jusqu'alors in-
connus dans les instruments à clavier. Cette vogue s'est
maintenue, et l'on ne vend pas moins de 25,000 pianos
chaque année en France seulement. Le piano a pénétré
{>artout, et chez les personnes de toute condition; dans
es salons il a l'immense avantage de former à lui seul
une harmonie complète; il est pour le compositeur une
ressource précieuse, pour le chanteur un incomparable
soutien. Enfin le piano est de tous les instruments celui
qui a le plus contribué à répandre le goût de la musique
et à en faciliter l'étude.
On a longtemps attribué l'invention du piano h Gode-
froi Silbermann, facteur d'orgues à Freyberg (Saxe), qui
fabriqua son premier modèle vers 1740. Hais, dès 1716,
Marius, facteur à Paris, avait inventé un clavecin à mail-
lets; on cite également le clavecin à marteaux (cemhaio
martelato) fabriqué en 1718 par Gristofori de Padoue.
Amédée Sclirœter, organiste de Nordhausen, fit un instru-
ment du même genre, en 1721 ; ce fut lui qui imagina de
le désigner par le nom de piano-forte. Ces divers essais
ne paraissent pas avoir été très-heureux, pas plus que
ceux de Verbes et de L'Épine, car les clavecinistes n'aban-
donnèrent pas leur instrument. Un facteur d'Augsbourg,
Jean-André Stein, fabriqua les premiers pianos à queue.
Sébastien Érard et son frère vinrent de Strasbourg s'éta-
blir à Paris, vers 1775, et livrèrent au commerce des pia-
nos carrés à deux cordes et à 5 octaves ; ils substituèrent
des pédales aux registres dont les facteurs précédents
s'étaient servis pour modifier la force et la qualité du son.
Le mécanisme du piano était alors fort simple : un pilote
attaché verticalement à la touche poussait a la corde un
marteau court et léger, suspendu par une charnière en
peau, et guidé par une tige mince qui passait par son
centre. Ce système avait l'inconvénient de tenir le mar-
teau près de la corde quand on appuyait trop fort. Aussi,
après que les facteurs anglais et allemands eurent fa-
briqué, vers 1700, les premiers pianos à trois cordes,
Érard, qui adopta cette innovation, s'empressa-t-îl de
chercher un nouveau mécanisme, au moyen duquel on
pût obtenir une plus frrunde intensité de son. Le pilote,
au lieu de pousser directement le marteau à la corde,
rencontra un faux marteau suspendu par une charnière
en peau, et portant un double pilote qui agissait sur le
marteau véritable à la manière du pilote simple; l'incli-
naison du faux marteau était calculée pour que, sous
l'action du pilote de la touche, il pût retomber d'une ligne
et demie, laisser le même Jeu au marteau véritable , et
conséquemment donner plus de liberté aux vibrations de
la corde. Mais ce résultat, tout avantageux qu'il fût, n'était
obtenu qu'au prix de frottements et de ballottements mul-
tipliés des marteaux vrais et faux. Stein les évita en ima-
ginant le système d'échappement simple, qui a conservé
le nom de mécanisme allemand^ et dont on se sert encore
beaucoup en Allemagne. Ce système se propagea en An-
gleterre, où les facteurs Stumpfz et Tomkinson donnèrent
aux marteaux une course plus longue, afin d'obtenir plus
de force dans la production du son. Désormais les pia-
nistes purent se faire une manière plus chantante; Cle-
menti. Cramer et Dussek se mirent à la tète de cette
révolution.
De son côté, Érard trouvait un mécanisme à échappe-
ment plus compliqué, mais plus précis que celui de Stein,
et obtenait encore plus de son. Mais, dans l'un comme
dans l'autre, l'enfoncement de la touche avait grandi pro-
portionnellement à la longueur du levier, ce qui exigeait
plus d'énergie dans l'attaaue du clavier, par suite plus
de lourdeur et de lenteur oans le Jeu. La France préféra
le mécanisme à pilote sans échappement, à cause de la
ftMsilité du clavier; l'Angleterre, comme l'Allemagne, adopta
le mécanisme à échappement, et le système d'Érard,
appliqué par Broadwood et les autres facteurs, reçut même
le nom de mécanisme anglais» En 1808, Énurd fit le pre-
mier piano avec clavier en saillie, qui laissait voir les
mains de l'exécutant, au lieu de les enfermer dans une
caisse selon l'ancien modèle; tous les facteurs s'appro-
prièrent aussitôt cette forme. Dans le même instrument,
Érard était parvenu, au moyen d'un levier intermédiaire
placé entre la touche et la bascule qui faisait agir le
marteau, à éviter un trop grand enfoncement de la touche
sans rien perdre de la force du mécanisme à échappe-
ment : mais on s'aperçut qu'après avoir servi quelque
temps, le mécanisme, par suite d'un certain ballottement,
mêlait au son des cordes un bruit désagréable.
Vers 1800, deux facteurs de Paris, Petzold et Pfeiflîer,
en prolongeant la table d'harmonie sur toute la longueur
du piano et en se servant de cordes plus grosses, obtin-
rent des sons plus intenses. Cette innovation augmenta
le tirage des cordée, et l'on s'aperçut que la caisse du
piano fléchissait : ^rard y remédia par un double barrage
en fer en dessus et en dessous. Ce fut encore Erard qui
inventa, en 1823, le système d'échappement dotible, une
des merv^lles de la facture du piano. Dans les anciens
systèmes, aussitôt que l'échappement a fait son eff^et, le
marteau retombe, et le doigt ne peut le relei'er qu'après
avoir quitté la touche pour la frapper de nouveau : par
le nouveau mécanisme d'Erard, l'abaissement du mar-
teau, après qu'il a frappé la corde, est proportionnel au
degré d'enfoncement où le doigt maintient la touche, et,
quel que soit cet enfoncement, il est toujours possible de
faire frapper de nouveau le marteau sans relever absolu-
ment le doigt; de sorte que le pianif.te peut donner au
son tel degré d'intensité qu'il Juge convenable, et répéter
la note sans quitter la touche.
De nouveaux progrès dans la fabrication du piano furent
encore obtenus par Henri Pape. Jfusquc-là, dans les pia-
nos carrés et les pianos à queue , les cordes étaient frap-
pées en dessous par les marteaux, et, pour laisser un
passage aux marteaux , les facteurs étaient contraints à
séparer la table d'harmonie du sommier des chevilles par
un intervalle plus ou moins considérable. On ne pouvait
douter qu'en frappant les cordes dans le plan de la table
au lieu de les soulever de leurs points d'appui par la
percussion, on obtiendrait des sons plus purs. Cette idée
donna d'abord naissance aux pianos verticaux; puis,
Streicher, facteur à Vienne en Autriche, fit profiter de
l'avantage qu'on obtenait les pianos à queue, on établis-
sant le méôinisme des marteaux au-dessus des cordes, ce
qui permit d'appuyer la table sur le sommier. Seulement
son moyen rendit le clavier plus lourd, plus difficile à
manier. Pape trouva, pour l'application du même prin-
cipe, un procédé meilleur, un mécanisme aussi prompt
à articuler que l'ancien svstème d'échappement. Le pro-
blème du mécanisme en dessus fut complètement résolu,
et les pianos à queue, plus tard les pianos carrés, don-
nèrent des sons aussi purs et aussi moelleux que ceux des
pianos verticaux, sans rien perdre de la force qui manque
a ceux-d. — Un premier succès conduisit Pape à un se-
cond : la fatigue occasionnée à l'instrument par le tirage
des cordes , et à laquelle on avait obvié ptf des barrages
en fer, résultait de ce que le tirage agissait sur la partie
supérieure de la caisse et loin de son point de résistance,
2U1 est auprès du fond : la place nécessaire au mécanisme
es marteaux en dessous empêche d'établir ailleurs ce
tirage. Avec le mécanisme en dessus, la table d'harmonie
put être descendue dans l'intérieur de la caisse autant
2u'il fut nécessaire pour assurer la solidité; le tirage,
tant très-près du fond, fut diminué; on put alors suppri'
mer les barrages qui rendaient les instruments fort pe-
sants, et même percer à Jour le fond, afin de faciliter la
propagation des vibrations au dehors.
Nous avons dit que le mécanisme anglais avait été
d'abord repoussé en France, parce qu'il exigeait chez le
pianiste une trop grande éneiîgie des aoigts; Oamille Pleyel
entreprit de le mettre en vogue. Il a su, en effet, par le
perfectionnement dans l'exécution du mécanisme, donner
au clavier toute la sensibilité désirable. 11 introduisit aussi
le sommier prolongé en fer, qu'il substitua à l'ancienne
disposition du sommier ordinaire, comme Clementi l'avait
déjà fait à Londres ; à l'exemple de Broadwood, 11 plaça,
dans les pianos carrés, les chevilles sur le sommier des
étoufToirs; enfin, il imagina de faire en placage les tables
d'harmonie. 11 a été moins heilreux en portant l'étendue
du piano à 7 octaves ; on n'obtient ainsi à l'aigu que des
sons maigres, à peine appréciables à l'oreille, et d'iio antre
timbre que celui de l'instrument.
PIA
1427
PIC
Le piano droit ajrant, par sa forme, le plus contribué
k {Mpulariser l'instrament et à le rendre pour ainsi dire
oniverself nous allons en donner rhistorique. Lorsque le
piano à qtutte, qui est le véritable piano, parce qu*il a
la forme naturelle de ce genre dMnstrument, et le piano
carré eurent complètement réussi, on reconnut qu'ils
étaient toujours plus ou moins encombrants pour une
foule de personnes, qui se trouvaient forcées de s*en pri-
ver. On eut alors Tidée, en Allemagne et en Angleterre,
de fabriquer ce qu*on appela des pianos verticaux ou de
cabinet. C'était le piano carré mis debout, avec un chan-
gement dans la position du clavier. Ces hauts pianos ne
pouvaient être placés que contre un mur, comme des
armoires, de sorte que rexécutant tournait le dos à son
auditoire. Les facteurs cherchèrent à diminuer cet in-
convénient un peu maussade en diminuant la hauteur du
piano, de manière que celui qui le Jouait pût voir par-
dessus, et alors, tournant son instrument, se trouver
face à face avec les auditeurs et les auditrices qu'il char-
mait de ses mélodies. Mais cette réforme, inspirée par la
flus civile dos politesses, ne se fit qu'aux dépens de
harmonie, car en s'abaissant le piano perdit beaucoup
de sa sonorité et de son agrément, ses cordes ayant été
raccourcies de toute la hauteur retranchée à Tinstru-
ment. Néanmoins, les pianos verticaux parurent si com-
modes, que Ton continua d'en faire, et Ton passait sur
leur imperfection obligée.
Cependant un facteur fran^is, M. Roller, pensa que
cette imperfection n'était pas incorrigible; il imagina de
tendre les cordes diagonalement dans une caisse verti-
cale, et par cette simple combinaison il obtint 21 là où
l'on n'avait que 15; en outre, il espaça les cordes beau-
coup plus que dans les pianos carrés ; au fond plein il sub-
stitua un fond en barrage, placé dans la direction des cor-
des, de sorte que le son trouvut une facile issue; enfin il
perfectionna l'ancien mécanisme, et l'exécutant obtint sans
peine les effets les plus variés, depuis les tons les plus
énergiques Jusqu'aux nuances les plus délicates. Ce fut
en 1820 que Roller livra au public son premier piano
droit (nom qu'U lui donna). Cet instrument ne mesurait
guère plus de 1 mètre de hauteur, 1"*,50 de longueur et
0™,45 d'épaisseur, y compris la saillie du clavier. Par la
puissance et la qualité des sons, il égalait les meilleurs
pianos carrés. Présenté à l'Exposition de l'industrie fran-
çaise de 1827, on l'accueillit froidement; mais admis à
l'Exposition de 1834, il y remporta une médaille d'or.
Dès ce momenv tous les facteurs fabriquèrent des pianos
droits, et peu d'années après le piano carré avait disparu
non-seulement eH France, mais encore à l'étranger. —
Le piano Roller a fait aussi une révolution commerciale :
approprié à l'exi^Ité de la plupart des appartements du
Paris^ moderne» il put trouver sa place partout, ce qui
n'avait pas lieu avec le piano carré. V. Piano « dans le
Supplément.
Outre les facteurs déjà cités, on peut mentionner : en
France, Freudenthaler, Lemme, Dietz, Klepfer, Boisselot,
Herz, Kriegelstein ; en Angleterre, Stoddart, Collard; en
Allemagne, Schatz, Brodmann, Zeitter, Womum, Ma-
thias Muller, Graf, etc.
Les plus célèbres pianistes ont été, dans notre siècle :
Ifoschelès, Ries, Pixis, Czerny, Hummel, DOhler, Listz,
Thalberg, Chopin, Pradher, Kialkbrenner, Zimmermann,
Prudent, Dreyschock, Goria, Ravina, Herz, M"»» Pleyel,
H"«Tardieu (de Malleville}, Ritter, Diéiner,Huhin8tein.
n existe un nombre considérable de méthodes de piano.
Les plus importantes sont celles de Ch.-Ph.-Em. Bach
(1753), Marpurg, Dussek, Clementi, Steibelt, Cramer,
Hummel , Czerny, Adam, Lemoine, Zimmermann, Rie-
ger, Kalkbrenner. Montai a publié VArt d'cKCorder son
piano soinnéme, 1836, in-8*.
Des inventions plus ou moins ingénieuses ont eu leur
principe dans le succès du piano : dès 1780, un Allemand
nommé Beyer fit un piano à cordes de verre, d'une exces-
sive fragilité; en 1781, Gœrmans construisit un piano oui
avait 21 touches par octave (7 pour les sons naturels,
7 pour les dièses et 7 pour les bémols ) , système qui ren-
dait l'accord et le doigté d'une difficulté excessive. On at-
tribue à Philippe de Girard un piano trémolophone, où
le trémolo peut être obtenu sans oue le doigt fasse autre
chose que d'appuyer sur la toucne, et un piano octc^
vùmt, donnant, au moyen d'un mécanisme mû par une
pédale, Toctavo de la note que l'on touche. Des instru-
ments de ce dernier genre ont été aussi exécutés par
Boisselot en 1834, puis par Blondel. Lenz et Houdard ont
produit, vers 1856, un piano scandé, qui donne simul-
tanément, dus les diverses parties du clavier, les
nuances les plus diverses. Roller a imaginé un piano
transpositeur, dans lequel chaque tour d'une clef de pen-
dule fait avancer ou reculer d'un demi-ton le mécanisme
entier du clavier sous les cordes. A plusieurs reprises ,
mais sans arriver à un résultat satisfaisant, des pianos
mélographes ont été tentés, dans lesauels les notes se se-
raient imprimées par l'action même des touches. Un An-
glais, nommé Creed, passe pour avoir fait le premier, en
1747, un essai de ce genre; cette priorité lui a été dis-
putée par Ungher, conseiller de Justice à Brunswick. Un
moine appelé Engramelle exécuta,' dit-on, «vers 1770, une
machine à écrire la musique; la description qu'on en a
faite est fort obscure. Un piano mcUographe a été présenté
en 1827 à l'Institut de France par Carreyre. B.
PIANO éoLiQDB, instrument de musique Inventé par
Kieselstein et Schwartz, de Nuremberg, et qui ne se dis-
tingue du Physharmonica ( V. ce mot) que parce qu'il a
6 octaves et des sons plus forts.
PIANOTYPE, machine do composition typographique,
inventée par Delcambre et Young. Elle se compose d'un
clavier et d'autant de réservoirs qu'il y a de caractères
dans une casse d'imprimerie ordinaire. l!es touches du cla-
vier sont marquées de la lettre ou du signe auquel elles cor-
respondent : quand on les touche, les caractères s'échap-
pent des réservoirs, et glissent sur un plan incliné pour
venir se ranger dans un long composteur. Celuin^i aboutit
à l'appareil de Justification , où la composition produite
est arrangée en lignes , puis en pages. A cette machine
est annexée une machine à distribuer, dans laquelle les
caractères vont se ranger par sortes dans des réservoirs
qui, une fois remplis, sont détachés et superposés à ceux
du pianotype. Le pîanotvpe fut admis aux Expositions de
l'industrie à Paris, en 1844 et 1849. Il abrège le temps,
et réduit le prix de la main-cl'œuvre; mais la machine
est d'un prix élevé» et les frais de correction sont consi-
dérablement augmentés.
PIASTRE, monnaie. V. notre Dictionnaire (Z0 Biogror
phie et d'Histoire.
PIATTI, nom italien des cymbales.
PIBLË, en termes de Marine, mât d'un seul morceau,
dans lequel il n'y a, par conséquent, ni hune, ni barre
de perroquet, mais seulement des noix carrées, pour ar-
rêter le capelage des haubans.
PIC , terme du Jeu de piquet. V, Piqdet.
PICADOR, c.-à-d. en espagnol piqueur, cavalier qui
attaque avec la pique le taureau après le toréador et avant
le matador.
PICAILLON. F. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire.
PICARD (Idiome). La langue celtique en usage, avant
la conquête romaine, dans la contrée qu'on appela Picar-
die vers le xii« ou le xiti* siècle, y reçut l'empreinte de
la langue des vainqueurs moins profondément qu'au midi
de la Gaule, soit par l'influence du climat, qui rendait
l'oreille des habitants moins sensible et leurs organes
vocaux moins souples, soit à cause de la permanence des
relations commerciales avec les peuples de la Grande-
Bretagne. Du mélange des idiomes celtique et latin sortit
une langue dite rusitque {rustica, ruralts) , où l'élément
celtique fut toujours dominant, et où le latin subissait de
profondes altérations. Le tudesque , apporté par les Francs
au V* siècle, et parlé auprès de leurs rois de la première
race qui avaient fait de Soissons une de leurs capitales,
ne put la détrôner : elle lui survécut, non toutefois sans
avoir gardé de son contact des traces sensibles. Les in-
cursions des Normands l'obligèrent aussi de s'assimiler
beaucoup de mots des langues septentrionales , mais dans
une moindre proportion. La langue rustique, modifiée
par le temps non moins oue par les influences étrac^ères,
donna naissance au wallon ( V. ce mot) et au picard.
La marque de ces influences se retrouve plus particuliè-
rement dans les noms de lieux ; ainsi, les noms suivants
sont celtiques : Barly^ de har-ly, bois clos ; Brouchy, de
bmch, marécage; Calais, de caleh, h&vre; Isques, de
isc, lieu bas; Upen, de upen, tertre, etc. D'autres sont
tudesques, comme : Bourg, de burg, lieu fortifié; Hem
ou Ham, de hem, habitation, hameau, village; Hailu, de
hail, buisson; aamy de hem, terre inculte; Wingles,
de toinkel, lieu écarté, etc. Les origines latines sont fort
nombf^uses : Abbeville {abbatis vitla) y Avesne {avesna)^
Castelet {casteUum)^ Estrées {strata)^ Locdieu (locus
Dei)y Vk-sur-Aisne (vtctu), etc. Quelques noîhs tels
que Agrona, Leuconaus, Maya, ont, dit-oa, une origine
grecque, «ouvenir d'une colonie masâilienne établie près
de l'embouchure de la Somme pour le trafic de l'étain.
Le picard, un des grands dialectes de la langue d*iXl
PIC
1428
PIE
(F. ce mot)^ fut parlé dans TAmiénois, le Ponthiea, le
Boulonais, le Vimea, le Santerre, le VermandoiSf la Thié-
rache, le Pays-reconquis, le Toarnaisis, l'Artois, le Var-
lois, le Laonnais, le pays de Senlis et de Soissons. Dès
le TLU* siècle, il se distingue par sa tendance à syncoper
les mots , par la permutation du c doux en cA, et du ch
français en k (chés keminSf ces chemins), et par une
prononciation pleine, lourde et sonore. S^ formes do-
minantes sont les diphthongues eu et oi (prononcé oèy
ouait comme actuelleinent) ; son voisin le normand avait,
au contraire, un caractère de sécheresse et de maigreur,
parce qu*aux formes mouillées picardes il substituait des
voyelles simples, usage qui prévalut définitivement au
XVII* siècle (V. Normand). Le picard ancien est riche en
écrits de tous genres, tels que pofimes, romans, lais,
fabliaux, contes, chants guerriers, chansons, coutumiers,
cartulaires, etc. On a prétendu que le célèbre roman
d*Amadis ( V. ce moi ) primitivement publié en espagnol
n'était que la traduction libre d'un manuscrit en dialecte
picard, que LAcurne de Sainte-Palaye dit exister au Vati-
can. La Bibliothèque impériale de Paris possède un autre
manuscrit intitulé le Renart futur, dont Tauteur est Go-
belin d'Amiens; c'est une suite du fameux roman du
Benart ( V. ce mot). Outre ces productions utiles pour
l'étude des mœurs et l'histoire de notre langue, la Picardie
a fourni , plus qu'aucune autre province, des proverbes,
des dictons historiques, héraldiques et commerciaux, re-
latifs à chaque localité. Les Picards ont aussi excellé dans
les rébus ( K. ce mot) . au point qu'on a baptisé de leur
nom ce bizsrre Jeu a'esprit, et qu'on a dit les rébus de
Picardie : il existe à la Bibliothèque impériale de Paris
deux recueils qui portent ce titre, et qui datent de la fin
du XV* siècle.
Le picard moderne, c-îmI. le patois qui représente les
débris du l'ancienne langue picarde avec les modifications
apportées par le temps, est parlé dans les départements
de la Somme et du Pas-de-Calais, et dans une grande
{)artie de TOise et de l'Aisne. La prononciation, l'accent,
'emploi des mots, varient souvent d'un village à l'autre,
quelquefois, dans une môme ville, d'un faubourg à l'au-
tre, comme à Amiens. Ces variétés de langage se dessi-
nent plus fortement en raison de Téloi^nemeat des lieux :
ainsi , le vocabulaire du Boulonais n'est pas le même que
celui de l'Amiénois; le langage du Ponthieu s'éloigne
beaucoup de celui du Ycrmandois. Les dégradations du
picard sont surtout sensibles vers les limites de la pro-
vince, où il se mêle avec les idiomes voisins : ainsi, l'ar-
tésien se combine avec le rouchi et le wallon ; la partie
orientale du Valois subit l'influence du champenois; le
patois de Beauvais et de Senlis transige avec le français
de rile-de-France. Souvent, dans un même village, on
emploie plusieurs synonymes pour rendre la même idée :
dans le département de la Somme, l'action de « battre, »
de « donner des coups, » est exprimée par une quaran-
taine de mots différents, dont q[uelque8-un8, exterminer,
gif fier, donner une giroflée à ctnq feuilles, une pile , une
roulée, ont cours partout depuis longtemps dans le lan-
gage populaire. On remarque pour certains mots la même
analogie de composition que dans le grec et l'allemarid :
ainsi le verbe flfier (ficher, mettre) compte un grand
nombre de composés, entre autres lafflker (asséner),
comifUiêr ( donner un coup de cornej, inflker ^ficher dans),
surfiker (ficher sur) , etc. Le picara est prodigue de com-
paraisons . qui pour la plupart ont été adoptées dans le
français familier, telles que : alerte comme ein cat (alerte
comme un chat) , amer comme d*el suie (amer comme
de la suie), rouche comme ein co (rouge comme un
coq J , etc. il admet aussi un grand nombre de mots en-
fantins, qui sont fournis par la répétition d'un mono-
syllabe, tels que : mamache (fromage), mimine (chat),
nounou (genou), pipique ^épingle), tutures (confi-
tures), etc. Il est pauvre, et il a cela de commun avec
d'autres patois, quand il s'agit d'exprimer des idées qui
sortent de Tordre matériel : ainsi , il n'a aucun mot spé-
cial pour traduire » fantaisie, fécondité, perfection, ten-
dresse, » etc. Il a du nombre, de l'harmonie, de l'éner-
gie, mais les mots poétiques lui font défaut. Les sujets
badins, enjoués, et où la raillerie domine, sont, par con-
séquent, les seuls qu'il soit propre à traiter; ce sont
aussi à peu près les seuls qui composent sa littérature.
^ Les écrits en pur patois picard depuis la déchéance des
dialectes provinciaux sont moins nombreux et moins im-
{ sortants que ceux qui ont contribué à former et à enrichir
a langue française pendant le moyen âge : ils consistent
en chansons et autres pièces de circonstance, soit impri-
mées, soit manuscrites, et dont les plus anciennes ne
remontent pas au delà de 1649. Les plus remarquables
ont été réunies dans un ouvrage intitulé : Recueil de
poésiesy sermons et discours picards, Abbeville, an vi,
ln-12 ; c'est là que se trouve l'édition la moins rare de la
Satyre d'un curé picard sur les vérités du temps, par le
R. P***, Jésuite, publiée pour la première fois en 1750.
Un autre recueil : Pièces récréatives, ou le Patois picard,
1823, in- 18, souvent réimprimé à Amiens et à Beauvais,
contient : 1* Dialogue curieux et intéressant entre deux
Picards concernant la cathédrale d'Amiens; 2<* Sermon de
messire Grégoire sur ce texte : Reddite quœ sunt Ccesaris
Cœsari; 3® Dialogue entre deux petites paysannes et un
médecin. Le sermon doit être du xvni* siècle, car mea-
sire Grégoire se plaint de ce qu'on ne lui paye pas la
dlme, et de ce que les femmes vont à l'église avec dea
masques de velours; mais le texte primitif a dû être
altéré^ et on y a fait des additions dans les éditions mo-
dernes, où figurent les noms de Mirabeau et de La
Fayette. A partir de 1830, les éditeurs picards ne se sont
plus bornés à des réimpressions ; ils mettent au Jour des
productions nouvelles , inspirées par les événements con-
temporains ; ainsi , les Anciennes et nouvelles Lettres pi-
caraes, par Pierre-Louis Gosseu, paysan de Vermand
(S*-Quentin, 1847, in-8<*), dictées par un esprit incisif
et mordant, ont pour sujets principaux la réforme élec-
torale, les lois de dotation , la prison de Ham , les fêtes
de Juillet, l'opéra de la Juive^ la loi sur la chasse, le
droit de visite, l'indemnité Pritchard, les élections, etc.
fje Journal VAbbevillois a publié, après la révolution de
Février 1848, une série de Lettres picardes, par Jacques
Croedur et Jean Pronieux, qui roulent principalement
sur les faits politiques accomplis depuis rétablissement
de la République : elles se distinguent , comme les pré-
cédentes, par leur verve malicieuse. On trouve enfin
chaque année, dans les almanachs édités en Picardie,
des dialogues et des chansons en patois picard. — V, Mé^
moire sur Vorigine des patois picards, par Grég. d'Essi-
gny, Pérou ne, 1811 ; Glossaire étymologique et comparatif
du patois picard ancien et moderne, par l'abbé Jules
Corblet, Amiens, 1851, in-8<^; Des Variations du langage
français depuis le xii* siècle, par F. Génin, Paris, 1845,
in-8o; Histoire littéraire et philologique, et bibliographie
des patois, par Pierquin de Gembloux, Paris, 1841, in-8*;
Ancien coutumier inédit de Picardie^ en dialecte picard
du XIV* siècle, publié par Marnier, Paris, 1840, in-8<>;
Recherches sur les formes grammaticales de la langue
française et de ses dialectes au xni* siècle, par G. Fallot,
in-8°, Paris, 1849. P— s.
PICARESQUE (Genre). F. page 83S, col. 2.
PICCOLO. V. Flotb (Petite).
piccoLO, terme du jeu de boston (F. ce n^ot),
PICHIER, vieux mot désignant un pot à eau et à via.
PICK-POCKET, c.-à-d. en anglais pique^oche, nom
qu'on donne en Angleterre aux voleurs à la tire.
PICOTEUX , bateau long de 5 met. environ , et qui ne
peut porter que deux ou trois personnes.
PICTE. F. PiTE.
PIÈCES , en Procédure , différentes grosses ou actes
originaux qui sont les éléments d'un procès. Dans un
procès criminel ou correctionnel, on nomme Pièces de
conviction les objets déposés au greffe et qui sont produits
à la charge do l'accusé. La destruction volontaire de pi^es
est punie de la réclusion s'il s'agit d'actes de l'autorité
publique, d'effets de commerce ou de banque, et, pour
toute autre pièce, d'un emprisonnement de 2 à 5 ans et
d'une amende de 100 à 300 fr. {Code pénal, art. 439).
pifecEs, terme de Blason. F. Blason, dans notre DiC'
tionnaire de Biographie et d'Histoire.
PIÈCES JDSTincATivES, documcuts publiés à la fin d*an
ouvrage pour appuyer un fait ou une opinion.
PIÉCETTE (diminutif de pièce) ^ en espagnol peseta,
monnaie d'argent d'Espagne, valant 1 fr. 30 c. ; c*cst le
quart de la piastre. On l'appelle aussi recU de deux. —
A Alger, la piécette est ane monnaie de compte valant
0 fr. 47 c.
PIED, dans la versification grecque et latine, désigne
la combinaison d'un certain nombre de syllabes de même
quantité ou de quantité différente, de manière à former
une mesure ; ainsi sûb èôs , sûb nos, haie n6vik, pèrïtt,
forment autant de pieds. Les pieds les plus usités sont
le dactyle, le spondée, Vïambe,ie trochée, Vanapeste, le
tribraque^ lepyrrhique, leprocélettsmatique, etc. (F. ces
mots). — Dans la versification française, on appelle Pied
la réunion de deux syllabes ; ainsi l'on dit qne ralexandrin
a 6 pieds, le décasyllabe 5 pieds, etc. P.
PIED-DROIT, partie du trumeau, ou du lambagc d'une
PIE U
Cl on d'une fenêtre, qui comprcDd le bftndeaa ou cbam-
le, Is tableau, la feuillarci l'embraaure et l'écoinçoD.
PIEDESTAL, base qui supporta une colonne, une sta-
tue, un buste, un vase, un candélabre, ou tout autre objet
d'ui et d'ornement. Un piédestal te compose géoéraïs'
ment d'une partis ioTérieure ou socU, ornée de quelques
mouluroa; d'uo corps ma«sir qui repose sur le socle et se
Domme di; et d'une partie supérieure ou corniche, enri-
chie de moulure* sailkotes. Le plus souvent on lui donne
en bautaur le double de sou épusseur. Le piédestal tos-
can a pour base uae plinttie et un Blet, un dé dont la
partie inférieure se termine en adoucissement, et pour
coraicbeun taloneiun réglet. — Le piédestal dorique a sa
bue composée d'une plinthe, d'un tore, et d'un met sur-
monta d'kin caveti son dé est couronné d'une cornicbe
composée d'un cavet avec son fltet au-dessus, d'un lar-
mier surmonté d'un Blet, et d'un quart de rond. — Le
piédestal ionique a sa base composée d'une plinthe, d'un
Blet surmonté d'une doucine, au-dessus de laquelle ost
un autre fliet avec son congé; son dé se Joint à la cor-
nicbe par un congé, et un petit flIet surmonté d'un
astragale, au-dessus duquel est une frise, qui, par un
congé, se réunit au fllett celui-ci porte un quart de rond,
ensuite un iarniiercouronnéd'un tolonavecsonBlet.— Le
piàiescai corinthien a une base composée d'une plinthe,
d'un tore, d'un fllet, d'une gorge et d'un astragale ; le dé
Bnit 001" un adoucissement et un Jlleli dans la corniche
on distingue uu astragale, une (Hse, un Blet, puis un
autre astragale, un ove, un larmier taillé en demi-creui,
el un talon couronné d'un fllot. — Le composite est lem-
blable, en proportion, au' piédestal corinthien; mais sa
corniche est formée d'uu Blet avec son congé, d'un gras
astragale, d'une doucine avec son lilet, d'un larmier, et
d'un talon avec son HIct. — L'architecture chrétienne a
donné, comme l'architecture gréco-romaine, des piédes-
taux aux colonocs; mais ils n'ont pas les mêmes pro-
(tonions que ceui des ordres classiques. Ils sont souvent
formés d'un simple socle à plusieurs pans, et quelquefois
de plusieurs dés superposes, réunis les uns aux autres
par des glacis. — Ou nomme, chez les Hodcmes, piidei-
lof cotnpof^, celui qui est indifféremment en carré long,
en orale, à pans («upés ou arrondis; piidaital conJmu,
celui qui porte une rangée de colonnes sans faire saillie
ni retraite; piidsttat doubU, celui qui porte deux co-
loonea accouplées; piédeilat en adtnicisiemint, celai dont
la dé a la forme d'une gorge ou d'une scotie; piédeslal
irrë/julier, celui dont les faces ne sont pas d'équerro ou
parallèlei, et dont les angles ne sont pas droits ; piédestal
lianqui, celui dont les encoignures sont contournées ou
ornées de pilastres, de consoles, de ligures; piédaslal
orné, celui qui a des moulures taillées d'ornements, et
des faces fouillées ou revêtues d'ornements Baillants. On
distingue aussi les piédestaux ronds , carrés, Iriangu-
lairei, ea batuitr», en JoJtu, etc. V, Soubassement, Stt-
Lostm B.
PIËDOQCHB (de l'italien piduccio, petit pied}, pié-
destal de très-petite dimension, qui sert de support k do
petits objets. I^ forme qu'on lui donne le plus ordinaire-
ment est celle d'un grand cavet, avec des moulures en
baut et en bas; sur une face est un cartel destiné 1 re-
cevoir une inscription,
PIEDS (Bai sèment des). V. Baisement.
PIEDS (Lavement desj. V. Lwturtn des pieds, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Ilistoirt.
PIÉPOItT, étalon monétaire d'un poids quadruple des
pièces qu'on doit fabriquer.
PIËUOMTAIS (Dialecte), dialecte mélangé do français
et d'italien, avec une prononciation particulière ^ui con-
tribue k le rendre peu intelligible à quiconque ne connaît
que l'italien classique. Dans le vocabulaire, il a de nom-
breui rapports avec te provençal. Il possède les voyelles
«it et u, les sons an, in, on, un, et la consonne j, valeurs
phonétiques appartenant au français. Il Tait un fréquent
ns^e des constractions {btogn pour bisogno, etc.).
PIÉHONTAISË (ËcolB], école italienne de peinture, qui
tient de très-pris à celle de Hilan. Le plus ancien maître
qui la représente est Georges Solarl, né i. Alexandrie
ilans le iTi* dicle. On cite ensuite jscques ftosignoli,
ludore Caracca, Guillaama Caccia, dit le Moacatvo,
Agnelli, et Terio.
l-lt^RHE ou PIERRE CALCAIRE, nom sous lequel on
comprend toutes les variétés de pierres k Mlir, les mar-
bres, le pifttre, etc., qu'on eiploile dans des carrières à
ciel ouvert ou souterraines. En termes de Construction,
on disdnguB les pitrres de bat ou de haut appareil, sui-
vant qu'ellua ont moins ou plus de 0°',3D d'épaiueur. l.a
!9 PIE
pierre dure est celle qui résiste le mieux aux fardeaux si
aux injures du temps; il y a cependant de la pierre
tendre qui, dégagée de son eau de carrière, devient excel-
lente. La pierre poreuse et coquilleuse ne gèle pas aussi
facilement que la pierre pleine, parce qu'elle rejr'tle plus
aisément l'humidité dont elle est imprégnée. Les pierres
dont la couleur tire sur le noir ou le bleu sont plus dures
qun les grises, et celles-ci que les blanches ou les rousses.
Ctlles qui ont les couleurs les plus claires sont ordinai-
rement moins fortes et moine pesantes. Les pierres dont le
grain est homogène et la texture uniforme sont plus fortes
que celtes dont le grain est mélangé, quoique ces der-
nières soient quelquefois plus dures et plus pessntea.
Dans les charniers, on nomma pierre de taille toute
pierre dure ou tendre qui peut être équorrle ou taillée
avec parement, ou même avec architecture, pour la soli-
dité ou la décoration des bâtiments; pierre fiére, une
pierre dure, sèche, difficile à travailler; pterrs /Vonc/ie,
une pierre parfaite en son espèce, qui ne lient ni de la
dureté de la roche, ni du tendre du moellon; pierre
gelise vtrte, uno pierre nouvellement tirée de la carrière
et qui n'a pas encore Jeté son eau; pierrs pleine, une
pierre dure, qui n'a ni cailloux, ni coquillages, ni troua;
pierre débitée, celle qui est sciée; pierre d'échantillon,
un bloc commandé d'une grandeur déterminée aux car-
rières; pierr» en chantier, une pierre calée et disposée
pour la taille; pierre estuyée, une pierre grossièrement
équarrie pour être employée dans le garni des gros murs;
pierre faile, une pierre entièrement taillée et qu'on peut
mettre en place. Un ouvrage à pierre perdue est celui
qu'on élève dans l'eau, en y Jetant de gros quartiers de
pierre, comme dans les fondations de la plupart dJss di-
gues. On appelle pierres sèches celles qui sont posées
l'une sur l'autre, sans être liées par aucun ciment.
TIEHaK DE ^0HS£CnjtT[On. V. AUTEL.
PIEESE DS LA PAIX. V. pAIX.
PIERRE DE nOHB (Église de Saint-). Sous le pontlBcat
de Sylvestre, en 321, une premitVe basilique de SoJnt-
Pierre fut fondée au Vatican par l'empereur Constaatlo.
C'était un vaisseau à S nefs, et dont la fa;ade regu^it
Ancirmt Église ifc Salal-Pierrt dt Rom.
l'Orient. Il était précédé d'un cloître appelé quadnpor-
Ivam, des 4 portiques qui l'entouraient, et sous lesauels
les pénitents et les relaps s'agenouillaient pour implorer
les prières des passants. Au milieu de la cour s'élevait un
petit temple ï Jour, sur lequel le pape Symmaque avait
fait mettre une pomme de pin colossale, en brome, pro-
venant du mausolée d'Adrien. En deçà du clottre régnait
un grand corps de b&tlment, destiné à l'habitation du
chapitre, et surmonté d'un Cocher. On arrivait au c«,ps
du Dfiliment par un vaste perron, coupé en deux par un
repos. Sur la place qui te précédait se dressait un grand
obélisque antique monolithe (voir la figure d-dessus).
A l'intérieur, l'église était resplendissante de marbres, df
?IE tl
•nosalques et do peintures; AnasUse la Bibtiotliécalre
•'est compta k âauinérer les lichewes de toutes aortes
qu'on j avait accumutéea. L'édiflce s'éterait k i'enilroit
où S' Anaclet, 3* pape, avait iStabli on modeste oratoire.
Il éttdt on forme de croix latine; ses S nefs étaient «épa-
réea par 06 colonnes de marbre, et II «fait 110 met. de
longueur, 75 de largeur; li fenêtres y répandaient la
lumière. La porte, au-deasus de laquelle était une statue
du Sauveur en ar^t doré, avait des battants couverta
do lames d'ai^nt du poids de 975 livres; un agneau
d'argent formait la fontaine des fonts baptismaux; l'un
des pupitres du chœur était d'argent massir; la poutre
3ui coupait transverEalemeot l'arc triomphal était revêtue
e lames d'argent du poids de 1,352 livres. Le maître-
autel, précédé de IS colonnes torses en marbre blanc qui
Provenaient, disait-on, du temple de Salomon, était de
irnie carrée, étincelant d'or, d'argent et de pierreries, et
surmonté d'an baldaquin de vermeil, que supportaient
♦ colonnes de porphyre. Plus tard, l'empereur Valenti-
nien III y plaça un édicale d'or i il portes, rehaussé de
bas-rcliefa, et S' Zachario un upis de drap d'or, brodé en
Eerles et en pierreries, et sur lequel on avait représenté
i Nailriié de Notre- Seigneur. Au-
deesous de l'autel était creusée la con-
/Miion, crypte où l'on descendait par
an escalier de marbre, et dont de
fortes grilles fermaient l'entrée. Elle
était éclairée par une ouverture prad-
qué«dans !e pavé du sanctuairei un
outel recouvrait la cbUsse d'argent de
S' Pierre, enveloppée elle-mÈme d'une
autre chAsse en bronze doré, et sur-
montée d'une croix d'or fin. pesant
150 livres; le pape Léon III l'entoura
de grilles d'argent, gardées par des
Anges de même métal. Ht revêtir de
lames d'or tout le paré, et orna les
paroiï d'une mostdque représentant
Jésus-Christ, S' Pierre et S' Paul. Ces
richeases furent pillées par les Sarra-
sins sous le pontificat de Ser^us II.
La basilique de S*-Pierre, entretenue
at restaurée durant tout le moyen Ige, ■^^-.-- ^.^-^-ja
comblée des dons des papes, des sou-
Tersins et des Sdèles, ruiît par me-
nacer ruina au iv' siècle. La con-
struction d'un nouveau monument fut
résolue en IISO par Nicolas V, et Bernard Rossellini
commença les travaui i mais, cinq ans après, tout fut
abandonné. Malgré les regrets qu'inspirait la destruction
de l'ancien temple, Jnlea II voulut qu'on se remit à
l'œuvre, et, eu 1500, on posa la première pierre de la
basilique acioelle. Bramante avait conçu la pensée de
réunir en un tout rimilation des grandes voùles du
tcmpledelaPaii(au mieux Basilique de Conatanlin] pour
les nefs, et du Panthéon d' Agrippa avec sa coupole de-
vant servir de point de centre aux quatre nefs. Les quatfo
pillera des^nés i soutenir la coupole c'élerèrent, et les
quatre grands arcs furent cintrés; le plan général était
celui d'une croix grecque. Quand Bramante mourut, des
tassements et des lézardes se manifestaient. Raphaél, que
Léon X chargea de continuer l'œuvre, conçut un plan en
croix latine, que Serlio noua a conservé, et qui est bien
supétleur h celui que l'on s adopté depuis. Sous la direc-
tion de Raphaél, les architectes GiuDano da San-Gallo
et Fra Giocondo fordflèrent les piliers, et leur donnèrent
une solidité Inébranlable. La mort de Haphaél en 1530,
les agitations de la Réformation de Luther, les dévasta-
tions commises dans Rome par les bandes du connétable de
Bourbon, entravèrent les travaux. Puis Balthazar Peruzii
ramena le plan de l'édiBce à celui d'une croix grecque.
Dq ses mains, la direction passa dans celles d'Antonio da
Sao-Galto jusqu'en 1546 1 cet architecte reprit le plan de
la croix latine, et eiécuta un modèle en relief, qui existe
encore, complication extrême de clochera, de pyramides, de
dispositions architecturales diverses. Vint ensuite Michel-
Ange, qui conçut ridée gigantesque d'élever la coupole à
40U pieds dans les sirs. Il ne construisit que le tambour
dn dame, et, en mourant (1561), il laissa des plans pour
l'achèvement complet de l'édifice en croix grecque.
ï>Irro Ligorio et Vtgnole lui succédèrent ; le pape Pie V
dut éloigner le premier, qui roulait changer les plaus de
Michel-ànee; le second Bl les deux coupoles latérales.
10 PIB
gligé oart^nes distributions intérieures réclamées pu le
service religieux : Moa te pontificat de Paul V, on aban-
donna définitivement la forme de la croix grecque et la
façade à colonnes isolées qui devait orner l'entrée de
l'édifice, et Carlo Maderno appliqua la façade actuelle k
ia nef prolongée. Ainsi fut terminé, en IGll, après plus
d'un siècle, ce temple immense, que chaque année dei»it
ensuite contribuer k embellir. Suivant le compte fait en
1093 par Charles Fontan a, on avait déjï dépensé pour I*
grosse construction plus de £50 millions de franca. San*
parler des réparations qu'ciigèrent hientût les parties de
l'œuvre exécutées par Michel-Ange et Maderno, VanviielU
dut faire cercler de fer le tambour de la coupole, qu'on »v«t
eu rimprudence de construire moitié en briques, et moitié
en pierre de tsjlle pour la partie extérieure; da Ifc ao
tassement inégal qui fit craindre un instant que le dAnie
ne s'Écroutït, dont on ne devina pas d'abord la eauae, et
et qui cessa quand il eut été complet, vers le milieu du
ivin' siècle. Enfin, en 17Si,Pie VIflt bAtir par Uarchioni
une vaste sacristie, ([ui masque une partie du cbxé sud de
l'édifice. Voici les dimenûona de la basilique : longueur
extérieure, S19 met.; longueur Intérieure, 1S8'",50; lon-
iï-'^s:
u H Ptaa Saial-Pbrre de Rome.
du transept, 151'",00; lartceur Intérieure de la nef,
:7'",33( hauteur sous voûte, 48 met.
La façade de TégliaeS'-Pierre s'ouvre à l'Orient sur une
très-spacieuso place ovale, toute en colonnades, au mi-
lieu de laquelle s'élève un obélisque entre deux belles
fontaines en Jets d'eau, et qu'enveloppe la colonnade
construite en ItiOâ par le Demln (K. Colonnade, et la
figure ci-dessus). De cette place, par suite du prolonge-
ment considérable de la nef d'entrée, le dûme ne produit
pas l'effet qu'on en eût reçu ai le plan de Michel-Ange
avait été respecté, et cet effet devient nul quand on se
rapproche de la façade. Le dûme a cependant des pro-
portions colossales; il s'élève à une hauteur de 136 met.
Imitation hémisphérique de celui de S"-Marie-de»-Fleura
de Florence, qui est octogone, il affecte une forme nu peu
surhaussée. La division des parties qui le composent est
la même : c'est d'abord un saubaasement h pans, puia un
soubassement circulaire ou tambour avec une corniche
d'où s'élève une tour, ornée de 10 «intre-forts en forme
de pilastres, et de 33 colonnes accouplées par 2 et légère-
ment engagéea; ta tour est percée de 10 fenétrei qua-
dranauloires k frontons alternativement triangulaires et
circul^res. Sa circonférence mesure 190 mèu Celte of-
donnance corinthienne est surmontée d'un attimie sur le-
quel porte la partie convexe du dCime, revêtue de plomb,
et offrant la saillis bien prononcée de 16 arêtes. Pais vient
une lanterne de 18 met de hauteur, un stylobatedelO met.
supportant une boule creuse de 3'°,50 de diamètre, et
enfin une croit haute de 5 met. — Un escalier en limaçon
de m degrés en salite {V. et mot) permet de monter
sur la plate-forme do l'église par une pente trôs-donce,
que des chevaux peuvent gravir. Là vivent des San Pt-
trini, ouvriers organisés en corporation, et chargés de
tous les travaux qu'exige la conservation de l'édilice;
une fontaine coule perpétuellement an pied du dOmr
dons an bassin de plomb ponr la commodité de ce>
On s'accorde généralement II faire à la façade etécnlée
par Maderno quelques graves critiques i elle n'a pas Is
PIE
1431
PIE
eunctère de grandeur qui eonyiendrait à un tel édifice :
par la vulgarité de son ordonnance et la lourdeur de ses
{iroportions , par ses fenêtres multipliées Jusque dans
'attique, elle éveille Tidée d*un palais, d'une Dourse, plu-
tôt que d'un temple; elle a aussi le défaut de s'étendre
bien au delà de la largeur réelle de Tédifice. On accède à
l'entrée par un vaste perron à trois repos, aux angles du-
3ttel Pie IX a fait placer doux statues colossales modernes
e S^ Pierre et de S^ Paul, en remplacement de celles que
Hino da Fiesole avait exécutées en 1460, et qu'on a trans-
portées dans la sacristie. La façade a 123 met de largeur
et 50 met. de hauteur; elle est formée d'un grand ordre
corinthien, dont les colonnes unies ont près de 30 met.
d'élévation sur 3 met. de diamètre, percée de fenêtres, et
ornée de statues placées dans des niches; l'attique est
couronné des 13 statues colossales de J.-G. et des Apôtres.
Aux extrémités sont deux horloges dessinées jpar Valadier,
et placées sous le pontificat de Pie VI. — On entre par
cinq portes dans un magnifique vestibule, régnant dans
toute la largeur de la façade; là sont, à chaque extrémité,
les statues équestres de Constantin le Grand par le fier-
nin, et de Gharlemagne par Cornacchini. Au-dessus de la
porte da milieu, vis-à-vis de l'entrée principale de hi nef,
est la Navicella (la nacelle de S' Pierre), célèbre mosaïque
exécutée en 1208 par Giotto et Cavallini pour l'ancienne
basilique, et qui a été refaite en grande partie. Cinq
portes communiquent du portique dans l'intérieur de
réglise : celle du milieu, en bronze, exécutée sous Eu-
gène IV, en 1440, appartenait à l'ancien édifice; elle est
couverte de bas -reliefs empruntés à l'histoire sainte,
avec bordure de sujets mythologiques, et surmontée d'un
bas-relief du Bermn. La première porte à droite, dite
PorU sainUy ne s'ouvre oue dans l'année du Jubilé :
hors ce temps, elle est murée. Les bénitiers à l'entrée de
l'édifice sont deux coquilles de marbre Jaune antique,
ajustées devant une draperie de marbre bleu turquin, et
supportées par des Anges de 2 met. de proportion.
Malgré sa penpective grandiose, l'intérieur de S*-
Piem de Rome paraît, au premier coup d'œil, moins
vaste qu'il ne l'est en réalité : Michel-Ange, ayant afl'ecté
partout les proportions les plus colossales, a rempli toute
la longueur de la nef, du portiaue au transept, c-à-d. plus
de 100 met., par 3 arcades seulement ; ces ô arcades, sans
contrastes qui saisissent d'abord la vue, rapetissent les
espaces. L'effet est encore affaibli par une lumière trop
vive pour 6tre rellçieuae. Il faut un çen de temps pour
apprécier l'immensité du vaisseau, qui, dès que l'atten-
tion a commencé de le saisir, vous apparaît dans toutes ses
énormes proportions, qui n'ont d'égales dans aucun autre
temple. La grande nef est séparée des collatéraux par les
pieds-droits dea arcades; celles-d répondent à autant de
chapelles. Chaque pied-droit est orné de deux pilastres
cannelés d'ordre corinthien, qui ont 2*,6tf de largeur et
26 met. de hauteur, y compris la base et le chapiteau;
ils soutiennent un entablement de 6 met. de hauteur,
3ui règne tout autour de l'église. Entre les pilastres sont
eux rangs de niches, qui renferment les statues de
marbre des saints fondateura d'Ordres, hautes de 5 met.
Sur l'archivolte des arcades sont deux figures en stuc, de
5 met. de haut, représentant des Vertus. Les contre-
pilastres qui correspondent sous les arcs sont ornés de
deux médaillons, soutenus séparément par deux Anges
de marbre blanc, et renfermant les portraits de différents
papes; entre ces médaillons, deux enfants portent les
attributs pontificaux : le tout a été sculpté en baa-relief
BOUS la direction du Bernin. En général, les statues co-
lossales des pilien ne sont pas d'un goût pur. — ^La grande
Toute est à plein cintre, et décorée de caissons et de ro-
saces en Stac doré. Le pavé a été formé de beaux mar-
bres, assemblés sous la direction de Jacques délia Porta
et du Bisrnin. Entre ce pavé et celui de l'ancienne basi-
lique conservé, il y a un intervalle de 4 met. qui forme
souterrain : le Bernin y a dessiné quatre petites cha-
pelles, dont les autels sont ornés de tableaux en mo-
siJque d'après André Secchi; on y voit aussi le sarco-
phage de Junius Bassus, préfet de Rome au iv* siècle, et
diven tombeaux, entre autres ceux des papes Adrien IV,
Booiface Vm, Nicolas V, Urbain VI, et Pie II, de l'empe-
reur Othon n, du prétendant Charles-Edouard, etc.
La coupole qui s'élève à l'intersection des transepts a
42'>>,22 de diamètre. Sur les quatre pillera et les grands
arcs oui la soutiennent, règne un très-bel entablement,
dans & frise duquel sontpeintes, en mosaïque, les paroles
suivantes du Christ au fondateur de son Église : Tu es
Pêtrtu, et tup9r hanc petram œdificabo EccUsiam
meam; $t tibi dabo elavêt rêoni cjidorum. Dans les pen-
dentifs des arcs, les quatre Évangélistes sont représentés
en mosaïque. Le maltre-autel, isolé au-dessous de la
coupole, est placé sous un énorme baldaquin, exécuté
d'après les dessins du Bernin ( K. Baldaqoim), et qui a le
défaut de n'être pas en proportion avec le monument, et
d'altérer l'unité de la penpectivo en s'interposant entre
la nef et le chœur. Il recouvre rancienné Confession de
S' Pierre, où l'on descend par un double escalier, et qui,
décorée par Bladerno, entourée d'une balustrade d^
marbre, constamment éclairée par 121 lampes d'argent
renferme, outre le tombeau du premier des Apôtres, cela,
de Pie VI, avec la statue de ce pontife par Canova. — Au
dernier pilier de la grande nef, à droite, on voit une
statue en bronze de S^ Pierre assis, ouvrage du v* siècle,
mais qui n'est pas, comme on l'a dit souvent, une an-
cienne statue de Jupiter. Au fond de la nef, à 55 met.
en arrière du maltre-autel, se trouve la Tribune : là, sur
un autel, est la Chaire de 5* Pierre, monument de
bronze doré soutenu par les statues colossales de S' Au-
gustin, 8' Ambroise, S^ Athanase, et S' Jean Chrysostome,
et qui renferme la chaire en bois dont se servirent
S' Pierre et ses première successeura; c'est une œuvre
du Bernin. Sur les côtés de la Tribune s'élèvent les su-
perbes tombeaux de Paul III et d'Urbain VIII : le pre-
mier, exécuté par Guillaume délia Porta, offre la statue
en bronze du pontife, et les statues en marbre de la Pru-
dence et de la Justice; le second, œuvre du Bernin,
présente, avec l'image du pape, les statues de la Justice
et de la Charité.
Dans le transept du Sud sont trois autels, avec tableaux
en mosaïque, de 8"* ,50 de haut, sur S" ,25 de large en-
viron, d'après le Guide, Camuccini, et Roncalll. Le tran-
sept du Nord contient aussi trois autels, avec tableaux,
en mosaïque, d'après Valentin, le Poussin, et Caroselli ;
on y voit le tombeau de Clément Xill, magnifique ou*
vrage de Canova. Les bas côtés ressemblent à des galeries,
relativement étroites, séparant la grande nef des cha-
pelles latérales, qui sont, au Sud : 1*^ la chapelle Clémen-
tine, construite sous Clément Vlil, et où se trouve le
tombeau de Pie VII par Thorwaldsen ; 2* la chapelle du
chœur, où le chapitre célèbre l'office quotidien, et près de
laquelle est le tombeau en bronze d'Innocent VllI par
An t. PollaJuolo ; S** la chapelle de la Présentation, ainsi
nommée de son tableau d'autel en mosai([ue d'après
Fr. Romanelli, et qui contient lia tombeaux des Stuarts ;
4<* la chapelle des Fonts Baptismaux. Au Nord on voit :
1<^ la chapelle du Crucifix ou de la Pitié, avec un célèbre
groupe en marbre de la Vierge tenant le Christ mort sur
ses genoux, par Michel-Ange; 2<* la chapelle de S*-Sébas^
tien, où sont les tombeaux de Léon XII, de la reine
Christine de Suède, d'Innocent XII, et de la grande com-
tesse Biathilde; 3^ la chapelle du S^-Sacrement, contenant
un riche tabernacle dessiné par le Bernin, une Trinité
peinte à fresque par Pierre de Cortone, une copie en mo-
saïque de la Descente de croix de Michel-Ange de Cara-
vage, et le tombeau en bronze de Sixte IV par PollaJuolo ;
4<^ la chapelle de la Vierge ou Grégorienne, bâtie sous
Grégoire XIII, et contenant les tombeaux de Benoit XIV
et de Grégoire XVI.
En somme, l'église de S*-Pierre, malgré ses propor-
tions colossales et sa magnificence , malgré sa riche or-
nementation, où il entre 748 colonnes, dont 239 de
marbres fins, et 389 statues, ne satisfait pas complète-
ment : à sa physionofnie vague et indéterminée, à son
manque d'unité dans le plan, au mélange de l'art an-
tique et des traditions chrétiennes, on reconnaît qu'elle
n'est pas le produit d'une seule pensée directrice. On y
sent du désordre et de la contradiction, parce qu'il n'y a
pas eu de principe fixe et soutenu dans la construction,
pas d'espnt de suite dans les travaux. V. Costaguti, Ar-
chitettura ddla bctsilica di San Petro in ^aticano, Rome,
1674, in-foU ; Maderni , dit Lazzari , Architettura délia
basilica di San Petro in Vaticano, Rome, 1(584, in-fol. ;
Rossi, Descrixione di Roma antica e modema, Rome,
1G97, 2 vol. in-8*; Fontana, Recueil des plus belles églises
de Rome, 1833, 4 vol. in-fol. ; Valentini, Les quatre prin*
cipales basiliques de Rome, 1836, in-fol.; Piranesi, An-
tiquités romaines, in-fol., etc. B.
PIERREFONDS (Château de), à 16 kilomèt. S.-E. de
Compiègne, à l'extréadté orientale de la forôt de ce nom.
Construit en 1390 pour Louis d'Orléans, frère de Char-
les VI, il était à la fois une somptueuse résidence et une
forteresse redoutable; sons Louis XIII, le cardinal de
Richelieu le fit démanteler. Les ruines, vendues en 1798
comme propriété nationale pour la somme de 8,000 fr. ,
furent rachetées en 1812« au prix de 5,000 fr., par Naoo-
PIG
1132
PIL
léon I*'; depuis ce temps, le château appartient à la cou-
ronne. Une restauration, commandée par l'empereur Na-
K)lôon in,a été entreprise de nos Jours par M. VioUet-Le-
uc. Le ch&teau de I^errefonds, d*un plan irrégulier, et
d*une superfleTle 3,276 met. carrés, avait 4 faces : la face
méridionale était plus étendue que celle du Nord; les
trois côtés du Nora, de TOuest et de TEst dominent des
escarpements au bas desquels s'étend le bourg de Pierre-
fonds. Huit tours de 35 met. de hauteur le flanquaient,
dont une à chaque coin, et une au milieu de chaque côté.
L'entrée était au Sud, près de la tour du milieu, dont les
murs n'ont pas moins de 4™,60 d'épaisseur. Cette tour se
relie au donjon proprement dit, de forme carrée, composé
d'un étage de caves, d'un rez-deH:haussée voûté qui devait
servir de magasins ou de dépôt de provisions, et de trois
étages de salles munies de cheminées. Le donjon lui-
môme, où habitait le seigneur, avait au N.-R. une tour
carrée, qui communiquait par l'un de ses angles avec la
tour centrale de l'enceinte orientale, où se trouvait la
chapelle. La tour du S.-O. contient des oubliettes. Le
corps de b&timent occidental contenait les salles où se
rendait la Justice, et sous lesquelles sont pratiquées de
vastes caves. Celui du Nord servait au logement de la
inmison. F. Viollet-Le-Duc, Description du château de
Pierrefonds, 2* édit., Paris, 1861, in-8°. B.
PIEBAES (Assemblage, — Coupe des). F. Assemblage,
COOPB.
PIERRES ALIGNÉES, — BRANLANTES, — COUVERTES, — DE-
BOUT OU DROITES, — nCHADES, HCHES, FITTES, FlXiSS OU
rRITTBS, — LATTES, LEVÉES. F. CELTIQUES ^OnumeUts).
PIERRES GRAVÉES. F. GLYPTIQUE.
PIERRIER, mot qui désigna d'abord les canons de fonte
à l'aide descruels on lançait des boulets de pierre. On
l'applique aujourd'hui : 1<^ à une espèce de mortier dont
on se sert pour la défense des places, et avec lequel on
lance des pierres; 'i? à un petit canon de bronze, monté
sur un pivot à l'avant des navires, et destiné à tirer à
mitraille ou à balles.
PIERROT. F. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d^Histoire.
PIÉTAGE, en termes de Ifarine, chiffres placés sur
l'étambot et sur l'étrave pour connaître le tirant d'eau
du navire.
PIÉTÉ, vertu religieuse comprenant tout à la fois le
sentiment de respect, de reconnaissance et d'amour qui
est dû à la Divinité, les œuvres de repentanoe et de cha-
rité, l'accomplissement des devoirs, et les pratiques exté-
rieures du culte. Les Anciens donnaient aussi le nom de
Piété à la tendresse des parents pour leurs enfants, aux
soins respectueux des enfants envers leurs parents, à
l'affection des hommes pour leurs semblables ; les Mo-
dernes n'ont conservé que rexpression de piété filiale.
PIÉTR AILLE, nom de mépris qu'on donnait h l'infan-
terie pendant le moyen âge.
PIFFERARI , musiciens ambulants d'Italie, ordinaire-
ment couverts d'amples manteaux de drap brun, et
coiffés d'un chapeau pointu. Ils ont pour instruments des
musettes et des pifferi Tespèces de hautbois). Dans les
concerts qu'ils donnent devant les images de la Madone,
la musette, secondée d'un grand piffero soufflant la basse,
fait une harmonie de deux ou trois notes, sur laquelle un
double piffero de moyenne longueur exécute la mélodie ;
et, au-dessus de tout cela, deux petits pifferi très-courts
tremblotent des cadences et brodent des ornements sou-
vent grotesques. Les Pifferari se donnent le nom de Zam-
pognari (de xampognare, chBliimeaxi), B.
PIFFERO, Jeu d'orgue. Ses tuyaux ont le diapason du
prestant ; ils sont bouchés au pied, et l'on n'y fait qu'un
très-petit trou ; siu* la môme touche , on en place deux
2ui sont accordés de manière à produire un nettement,
e Jeu, qui sevt de tremblant et demande à être Joué
lentement, n'existe que dans les deux octaves supé-
rieures; on le continue plus bas par une flûte douce
quand il n'y a qu'un clavier dans l'orgue.
PIGACES, chaussuret à pointe recourbée, en usage
au moyen âge.
PIGEONNIER. F. Colombier.
PIGEONS. Ces oiseaux doivent être tenus renfermés
dans les colombiers aux époques fixées par les coutumes
locales; s'ils en sortent, chacun peut les tuer comme
gibier, et ceux qui les ont laissés vaguer encourent une
amende (Codé pénal, art. 475, 479). Les pigeons qui,
sans avoir été attirés par fraude ou artifice, passent dans
un autre colombier, appartiennent au propriétaire de ce
dernier.
PIGNÈRE , vieux mot qui désignait un étui renfer-
mant les peignes^ rasoln, ciseaux, miroirs et antres ol4^
de toilette.
PIGNON ( du latin pinna, sommet), partie supérieure
d'un mur qui se termine en pointe, et dont le sommet
porte le bout du faîtage d'un comble à deux égouts. Dans
certaines villes d'Allemagne et du nord de l'Europe, le
pignon des édifices est à redents, c-à-d. découné en
forme de degrés d'escalier. Le fronton et le gable (K. ces
mots) sont des sortes de pignons. Dans beaucoup de
eranas édifices du moyen âge, et môme quelques-uns de
la Renaissance, il y a de beaux pignons sculptés.
PIGNON, en termes de Blason, fragment de muraille
fait en forme de degrés. C'est une figure assez commune
en Allemagne.
PIGNORATIF (du latin pignus, gage), se disait autre-
fois d'un contrat qui avait pour objet de cacher la mise
en gage d'un immeuble sous la forme d'une vente, et qui
transportait du débiteur au créancier la propriété de
l'immeuble. Relocation était faite au débiteur par le
même acte pour une somme équivalente aux intérêts
qu'il avait à paver h son créancier, et on stipulait un délai
pendant lequel il pouvait racheter sa propriété en rem-
boursant le capital prêté. C'est à peu près ce que nous
appelons une vente a réméré.
PIGOU, en termes de Marine, chandelier qu'on fixe,
au moyen d'une pointe aiguô et recourbée qui le supporte,
sur la muraille d'un navire, sur un montant, etc.
PIGODLIÈRE, bateau maçonné intérieurement, garni
de fourneaux pour faire chauffer le brai et le goudron,
et ({u'on envoie sur rade aux navires qui font des répa-
rations et ne veulent pas entrer dans le port.
PILASTRE (du latin pt7a, pile), en termes d'Architec^
ture, désigne en général tout coips élevé sur une base
carrée, et spécialement des colonnes quadrangulaires
adossées à un mur, et se rapportant aux divers Ordres
par leurs proportions, leurs piédestaux, leurs chapiteaux
et leurs ornements. Les constructions d'une haute anti-
quité et les monuments grecs offrent peu d'exemples de
remploi des pilastres; ils sont, au contraire, prodigués
dans les constructions romaines et dans celles de la Re-
naissance. Les pilastres, par cela même qu'ils font corps
avec le mur d'un édifice, en dégagent peu la masse, et
font beaucoup moins d'effet sur une façade qu'une ordon-
nance de colonnes ; ils réussissent siieux dans un inté-
rieur de petite dimension, où ils occupent moins d'espace
que les colonnes , et où ils peuvent servir de décora-
tion. On est convenu de leur donner autant de largeur
en haut qu'en bas ; il y a cependant des architectes qui ,
quand ils en placent derrière des colonnes, les diminuent
comme celles-ci par le haut. Appliqués sur les pieds-
droits des grandes portes dans les hôtels du xviii* siècle,
les pilastres reçoivent, au lieu de chapiteaux, des con-
soles destinées à soutenir un balcon. Il v a aussi , dans
quelques édifices, des colonnes carrées qu^on peut appeler
Silastres. F. Propylées de Paris , — Barrière Saint-
farlin, B.
PILATE (Actes de). F. Actes.
PILE , massif de maçonnerie qui soutient les arches
d'un pont (F. ce mot).
pile, côté d'une monnaie opposé à la face. Selon les an-
tiquaires, pile serait un mot gaulois signifiant navire,
et l'on aurait figuré anciennement un navire sur les
monnaies.
PILE (du latin pUum, dard ou trait ), en termes de Bla-
son, pal aiguisé en forme d'obélisque renversé.
PILE DE CINQ-MARS. F. CiNQ-MARS.
PILENTUM , char romain. ( F. notre Dictionnaire de
PILEUM, coiffure. { Biogr. et d* Histoire.
PILIER (du latin pila), cçrps isolé et massif qui sert
de support, dans l'ensemJsle d'un édifice, à une charge
de cmu^ente ou de maçonnerie. Les arcades, les voûtes,
les plafonds, sont soutenus par des piliers, auxquels le
goût et le caprice des architectes peuvent donner des
figures diverses. Les piliers ronds reçoivent le nom de
colonnes. Ceux des constructions ogivales ont des formes
très-variées, et se composent de colonnettes groupées au-
tour d'un massif central. On nomme pUim'outtanl tout
corps de maçonnerie qui soutient la poussée d'un arc ou
d'une voûte. B.
PILLAGE (de l'italien pigliare^ prendre), un des
crimes tendant à troubler l'État Quiconque, soit pour
envahir des domaines ou des deniers publics, 4ie& maga-
sins, arsenaux, bâtiments et autres propriétés de l'État,
soit pour piller ou partager des biens appartenant à une
généralité de citoyens, se met à la tête de bandes armées,
oit être ppni de mort. U en est de même do ceux qui
PIL
1433
PIO
Auraient dirigd rassociation, levé ou organisé les bandes,
OQ qui leur auraient sciemment et volontairement fourni
des armes, des munitions, des vivres, etc. (Cod» piruU,
art. 96 ). Les immeubles des particuliers sont protégés
contrç rincendie par les art. 43i et suiv. du môme Code,
et contre la deatruction ou le renversement par Tart. 437.
Tout pillage et dég&t de propriétés mobilières, commis en
bande et à force ouverte, est puni des travaux forcés à
temps (art. 440), et d*une amende de 200 à 1,000 fr. pour
cbacun des coupables ; ceux qui auraient été entraînés
par des provocations ou sollicitations peuvent n^ètre punis
que de la réclusion. Si ce sont des denrées alimentaires
qu*on a pillées ou détruites, les chefs, instigateurs ou
5>rovocateur8, sont condamnés au maximum des travaux
brcés à temps et de Tamende. Le citoyen qui aurait re-
fusé ou négligé de prêter le secours dont il aurait été re-
quis en cas de brigandage ou de pillage, encourt certaines
pdnes de police (art. 475, 478). Aux termes de la loi du
10 vendémiaire an iv (2 oct. 1795), la commune entière
est responsable envers ceux qui ont souffert le pillage,
s'il est prouvé qu'elle aurait pu s'y opposer.
Dans les armées, le mot pillage ne fut pas toujours pris
en mauvaise part, parce que vivre de la guerre et de ce
que l'on prenait était chose reçue. Chez les Romains, le
pillage était licite, quand le général en avait fait donner
le signal, consistant dans Texhibition d'une lance san-
e;lante {hasta cruentatay Au moyen &go, les villes pou-
vaient se racheter du pillage à pnx d'argent. Par ordon-
nance du 3 nov. 1500, Henri IV défendit que le pillage
des villes prises d'assaut durât plus de 2i heures. En
1701 parurent les premières dispositions légales pour em-
pêcher et punir le pillage. La loi du 21 brumaire an v
punit de mort tout militaire convaincu de pillage à main
armée. V, Butin.
piLi^GE (Droit de), droit qui , dans la Coutume de Bre-
tagne, appartenait au fils aîné roturier de prendre sur le
lot d'un de ses puînés la principale maison en chacune
des successions de ses père et mère.
PILORL V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
PILOTA, nom latin du Jeu de la Pelote {V, ce mot),
PILOTAGE (du vieux mot pt79, navire), science du
pilote. Cette science embrasse aujourd'hui toutes les con-
naissances nécessaires pour conduire et diriger un na-
vire, déterminer la latitude et la longitude , mesurer le
sillage, faire des relèvements et des sondages, etc.
PILOT-BOAT, embarcation de l'Amérique du Nord , à
m&ts très-longs et flexibles, gréée à peu près comme la
goélette, mais plus chargée de voiles.
PILOTE, celui qui exerce le pilotage. On distingue en
France trois classes de pilotes : 1° les pilotes des vais-
seaux, officiellement appelés premiers maîtres de timon-
nerie, qui doivent posséder à un assez haut degré les con-
naissances générales du pilotage; 2^ les pilotes câtiers,
marins qui ont une connaissance spéciale de certaines
côtes et de certaines parties de la mer; 3" les pilotes la-
maneurs, qui possèdent à fond la connaissance pratique
d'une portion de côte, et qui se chargent de diriger les
navires dans les limites de cette localité. Pour être reçu
pilote-lamaneur, il faut avoir 24 ans, compter 6 ans de
navigation, dont deux campagnes au service de l'État, et
avoir subi un examen, tant sur la manœuvre que sur la
connaissance des marées, courants, bancs, écueils et
autres empêchements uni peuvent rendre difficiles l'en-
trée et la sortie des rivières, ports et havres de la localité
où Ton veut exercer. L'insigne du pilote-lamaneur est
une petite ancre d'argent à la boutonnière. Son salaire
a été réglé par décret du 12 novembre 1806. Il y avait,
avant 1701, sur les b&timents du rot , des pUotes hautu-
riers, chargés de diriger la navigation en haute mer, et
qui ne pouvaient devenir officiers, parce qu'ils n'étaient
pas de race noble; leurs fonctions sont aujourd'hui ré-
parties entre les officiers selon leur grade. — Par exten-
sion, on a donné le nom de PUotes aux atlas contenant
des cartes et plans de côtes, avec des instructions pour
servir à diriger les navigateurs.
PILOTES, petites tringles qui, dans l'orgue, trans-
mettent le mouvement des touches du clavier du positif
aux soupapes de son sommier. On les emploie aussi dans
le mécanisme des pianos.
PILOTIN, nom donné, dans la Marine marchande, aux
Jeunes gens qui se destinent au grade de capitaine, et qui
sont attachés à. la timonnerie. Dans la Marine militaire,
on les appelle Novices, Ils veillent l'horloge , aident à
faire des signaux, à Jeter le loch, à sonder, etc.
PILOTIS, réunion de pUots ou gros pieux enfoncés en
terre pour solidifier un sol inconsistant, et destinés à as-
seoir les fondements d'une conf^truction. Les pilots ont la
pointe armée d'un sabot en fer ou en fonte, et la tête
garnie d'une frette ou cercle de fer qui les ^mipêche
d'éclater sous les coups du mouton (F. SoNNEtra). Les
ponts, Jes quais, les digues, sont toujours construits sur
pilotis. Des villes entières, comme Amsterdam et Venise,
reposent sur pilotis.
PILUM, arme. V. notre Dictionnaire de Biographie et
â^Histoire,
PIMA (Langue). V, Mexiqub (Langues du).
PIN, arbre consacré à Cybèle chez les Anciens. Les
extrémités des thyrses des Corybantes étaient des pommes
de pin. La pomme de pin figurait également dans les sa-
crifices de Bacchus. Le dieu Sylvain tient quelquefois une
branche de pin à la main.
PINACLE (du latin pinnaculum, faite), nom que les
Anciens donnaient au comble terminé en pointe dont ils
surmontaient leurs temples, pour les distinguer des édi-
fices profanes et des maisons particulières, qui avaient un
toit plat. On le donna aussi à la galerie qui régnait au-
tour du toit plat du temple de Jérusalem , et à la tourelle
bâtie au-dessus du vestibule. Les Modernes appellent
pinacle tout amortissement ou couronnement ouvragé, &u
sommet des toits coniques, des frontons, des cloche-
tons, etc»
PINACOTHÈQUE. F. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d* Histoire.
PINASSE (de pin), nom donné autrefois à de grands
bâtiments à poupe carrée, fort en usage dans les ports
de Hollande surtout, et aujourd'hui à une embarcation
de forme allongée et étroite, marchant à voiles et à
rames. Chez les Anglais, c'est le canot d'état^major bor-
dant 8 avirons à pointe, et souvent gréé en goélette.
PINCEAU ( du latin penicillum ), faisceau de poils dont
se servent les peintres pour étendre les couleurs. Pour le
lavis et la miniature, on emploie des pinceaux de poils
fins et doux, comme ceux du petit-gris ; dans la peinture
à l'huile, les pinceaux sont faits en poils de porc ou de
blaireau.
PINDARIQUE (Dialecte), nom donné au dialecte que
Pindare se forma par le mélange du dorisme, de l'éo-
lisme et de la langue épique. La langue épiaue domine, à
cause des sujets traités par le poète ; du dialecte dorien
il empruntait ce qui pouvait contribuer â la gravité, à
l'éclat, à la commodité des nombres, et du dialecte tolien
les mesures vives et rapides. Le dialecte pindarique est
aussi appelé éolo-dorien; il serait peutr-être plus Juste de
le nommer épico-lyriqtje, P.
PINGRE, vieux mot signifiant longue épingle. Au moven
âge, on accusait les Jfuifs de crucifier les enfants pendant
la nuit du vendredi saint, et de leur enfoncer des pingres
dans la chair. De là le nom de pingres fut donné aux
Juifs, et par suite à tous les usuriers.
piNGRB, navire portant une petite poupe en cul-de-
poule, et gréé à trait carré. Il n'a pas de guibre.
PINNOSA, nom que l'on donnait, dans l'ancienne Mu-
sique, au signe représentant le crescendo et le decres-
cendo ' — «=^ T::^'^ . Ce signe parait avoir été à la fois
un signe de nuance comme pour nous, et un signe de
notation tenant la place de deux notes ascendantes.
PINQUE , petit navire à trois antennes et â varangues
plates. Il tient du chebec, et ne se voit que dans la Mé-
diterranée.
PIO-CLÉMENTIN (Musée). V. Vatican.
PION (pour piéton y homme de pied), la plus petite
pièce du jeu d'échecs (F. ce mot). On donne le même
nom aux petits disques dont on se sert au Jeu de Dames
(F. ce mot).
PIONNIER, mot qui , Jusqu'à l'époque de François l^y
fut à peu près synonyme de fantassin. On l'appliqua
aussi â tout mercenaire non combattant, employé â aplanir
les chemins, à creuser les tranchées, à remuer et â trans-
porter la terre. Les pionniers, dans cette dernière accep-
tion, s'appelaient encore fosseurs, fessiers, picteurs,
terrailleurs , iranchéours; ils dépendirent d'abord du
grand maître des arbalétriers, puis du grand maître de
rartillerie. Les grenadiers à cheval de la Maison mili-
taire de Louis XiV, et les dragons armés de pelles, et de
haches, étaient de véritables pionniers, comme aujour-
d'hui nos sapeurs. Les Russes ont des régiments de pion-
niers à cheval, liais la dénomination de pionniers n'a pu
durer en France, à cause de l'idée défavorable qui s'y
attachait ; on l'a même appliquée aux soldats des com-
pagnies de discipline. Cest l'arme du génie qui fait ao-
tndlement les travaux des pionnier». B.
PIQ
UU
PIS
PIONNIERS., nom donné en Amérique à oeax qui
s'avancent dans des pays nouveaux pour y défricher le
terrain. On les appelle aussi Badavooasmen (hommes des
bois de derrière), et Sqtuittêrs (de Tanglais to squat,
B*accroupir, se blottir). Leurs mœurs ont été décrites par
le romancier Fenimore Cooper.
PIPEAU (du latin pipa), se disait autrefois du chalu-
meau ou flûte champêtre, mais ne s'emploie plus avec ce
sens qu'en poésie.
PIPÉE, chasse dans laquelle, à l'aide d'un pipeau ou
avec la voix, on imite le cri d'un oiseau pour attirer les
autres oiseaux dans un piège.
PIPIL' (Idiome). F. BIsxique (Langues du).
PIPPE, vieux mot aui désigne, non pas, comme on l'a
dit, le bouton fixé sur le plat d'un livre et auquel s'adapte
le fermoir, mais une tige de métal à laquelle s'attachaient
les sinets ou signaux.
PIQUE , nom générique de toute lance maniée par une
in&nterie.
PIQUE, l'une des deux couleurs noires du Jeu de cartes.
Sa forme rappelle celle d'un fer de pique.
PIQUÉES (Notes), en termes de Musique, notes sur-
montées de points allongés, et qu'on doit attaquer légè-
rement et en les détachant avec l'archet.
PIQUET, en termes d'Art militaire, jalon fiché en terre
pour prendre un alignement, pour tendre ou retenir les
cordages d'une tente. De là sont venues les expressions
ph \ter le piquet pour camper, lever le piquet pour dé-
camper, — Le Piquet a été aussi une punition usitée
dans la cavalerie : le patient était attaché par un poignet
à un pi^et , et posait à nu le pied du côté opposé sur un
pieu pomtu ; il lui fallait rester dans cet équilibre pen-
dant deux heures. — On appelle enfin Piquet , dans le
service de garnison, une troupe qui se tient prête à mar-
cher au premier ordre, et, dws te service de campagne,
un service expectant.
PIQUET (Jeu de), jeu qui se joue le plus ordinairement
à deux, avec un jeu de 32 cartes. L'as est la plus forte
carte et vaut 11 points; les figures valent 10, et les autres
cartes' le nombre de points qu'elles portent. La partie so
joue en un nombre convenu de points. Chaque joueur
reçoit 12 cartes, distribuées par deux ou par trois : sur
les 8 qui restent , le premier en cartes peut en prendre 5,
et le second 3, en Change de celles qu'il veut écarter; on
est tenu d'en prendre au moins une ; le second en cartes
doit prendre d'abord celles que le premier a laissées.
S'il en laisse et les regarde , le premier peut aussi les
voir après avoir joué sa première carte. L'écart fait , on
annonce le paint, qui se compose de cartes de la même
couleur, et le joueur qui l'emporte compte autant de
points qu'il a de ces cartes : si les deux joueurs ont le
même point, personne ne le compte. On annonce ensuite
les séquences * la tierce vaut 3 points, la quarte 4, la
quinte 15, la seizième 16, etc.; si des séquences sem-
blables sont chez les deux joueurs, elles sont payées, et
ne se comptent pas ; si elles ne se composent pas des
mômes cartes, celle qui commence par la carte la plus
forte est seule comptée. Viennent enfin les quatorze (4 as,
4 rois, 4 dames, 4 valets, ou 4 dix), qui comptent chacun
pour 14 points ; si chacun des adversaires a un quatorze,
celui qui l'a en cartes supérieures l'emporte. Quand on
a ainsi tout compté, on joue pour faire des levées ; chac^ue
levée compte 1 point, la dernière en vaut 2. Celui qui a
fait plus de six levées compte 10 points, celui qui fait
capot en compte 40. Si le premier en cartes arrive en
jouant à 30 points, sans aue le second ait rien compté,
il compte 60 au lieu de âO; c'est ce qui s'appelle faire
pic. S'il arrive à 30 sans jouer, rien qu'en comptant ce
3u'il a dans la main , il fait repic, et compte 90 au lieu
e 30 ; ce que peut faire également le dernier en cartes.
Si Ton arrive à 120 en jouant, sans que l'adversaire ait
fait une levée, on compte 160. Tout joueur qui a 12 cartes
sans figures avant son écart, les montre et compte 10 ; il
empêche en outre les coups de 60 et de 90. Le joueur qui
a gardé plus de IS cartes compte à la muette, c.-Ji-<l. qu'il
ne marque rien pendant le coup, tandis que l'adversaire
compte tout ce qu'U a.
Dans le Piquet à trois ou Piquet normand, chaque
joueur reçoit 10 cartes : celui qui a donné peut écaiter
deux oertes et prendre celles qui restent; il est tenu d'en
prendre au moins une. Tout se passe comme au piquet à
deux : seulement, si l'un des Joueurs est capot, chacun
de ses deux adversaires compte 20; si deux sont capots,
celui qui fait toutes les levées compte 40. Celui qui arrive
à 20 points en Jouant, compte 00; celui qui a 20 points
dans la main compte 00 : le second ou le troiaiàme Joueur
peut arriver aussi à 60 , si les premiers n'ont pas Joué ds
cartes marquantes. Quand le joueur qui a le point n'est
pas le premier à jouer, celui-d , après avoir fait les le-
vées qu'il peut ou veut faire, est tenu de jouer dans le
point. Si le jeu annoncé permet d'espérer un capot , il
est de règle de jouer de façon à le faire*
Dans le Piquet à quatre ou Piquet voleur, on Joue
deux contre deux, et chaque joueur a huit cartes. Les
points des associés se cumulent. On arrive à 60 et à IH)
comme dans le Piquet à trois. Il est de règle que le par-
tenaire qui ne peut pas fournir sur une couleur s'en aille
de la couleur opposée à celle qu'il désire.
PIQUEUR, valet à cheval dont la fonction est de suivre
et de diriger une meute de chiens; — domestique à che-
val qui précède la voiture d'un souverain ou d'un prince.
PIQUEUR , en latin punctator, celui qui , dans les an-
ciens chapitres, était chargé de pointer les chantres qui
s'absentaient du chœur.
PIQUEUR, nom d'agents subalternes des ponts et chaus-
sées, chargés de seconder les conducteurs. Il y en a de
4 classes, dont le traitement est de 1000, 800, 600 et
400 fr. Ils sont nommés par le préfet, sur la proposition
de l'ingénieur en chef. Pour être nommé, il faut avoir
plus de 18 ans et moins de 28 (les militahres libérés ont
jusqu'à 32 ans), et avoir satisfait à on examen.
PIQUIERS. i V. ces mots dans notre Dictûmnaure ds
PIQUINIS. ) Biographie et d'Histoire.
PIRATERIE (du grec peiraô, attaquer), déprédation
commise sur mer, et qu'il ne faut pas confondre avec b
course {V. Corsaire). On consid^ comme pirates les
individus qui composent l'équipage d'un b&timent armé
et naviguant sans passe-port ni rôle d'équipage ou com-
mission. Ils sont punis de mort ou des travaux forcés,
suivant les cas (Loi du 10 avril 1825).
PIROGUE , embarcation longue et plate des peuplades
sauvages d'Afrique , d'Amérique et d'Océanie. Elle est
faite le plus souvent d'un tronc d'arbre creusé, ou d'écorces
cousues, quelquefois recouvertes d'une peau d'animaL
PIROUETTE , en termes de Danse, tour qu'on fait de
tout le corps sur la pointe d'un pied. — Autrefois il y
avait en Angleterre un genre de ch&timent appelé la
Pirouette, et infligé surtout aux Juifs, aux querelleurs,
aux vivandières. On enfermait le patient dans une cage
de fer plantée verticalement sur un pivot, et que les pas-
sants faisaient tourner à leur gré ; ce mouvement causait
des vertiges, des maux d'estomac, et même la mort.
PISCINE (du latin piscis, poisson), réservoir où Ton
nourrit et conserve du poisson {V. Vivier). On donnait
le même nom, dans l'Antiquité, atout bassin placé au
milieu d'une salle de bain. Chez les Hébreux, la Piscine
probatique était un réservoir d'eau voisin du parvis du
Temple à Jérusalem , et où on lavait les animaux (pro*
bâta) destinés aux sacrifices. Depuis le christianisme, la
Pisctne a été la cuve dans laquelle on immergeait les
néophytes, pour leur administrer le baptême, aux pre-
nûers siècles de l'Église. On appela encore Piscine,
dans certains monastères , la fontaine du réfectoire où
les religieux se lavaient les mains avant on après le
repas. Le nom en est resté, 1* à l'endroit des sacristies
où l'on Jette l'eau qui a servi à nettoyer les vases sa-
crés et les linges servant à l'autel ; 2^ à un petit vase
plein d'eau, placé d'ordinaire sur l'autel auprès du taber-
nacle, et dans lequel le prêtre, après avoir donné la com-
munion, trempe les doigts qui ont touché l'hostie consa-
crée. Primitivement, la piscine était une colonne, un pé-
dicule isolé, placé priés de l'autel, et portant une cuvette
dont le fond se continuait en un canal conduisant l'eau
sous le pavé de l'église; plus tard elle fut adhérente à une
muraille, ou même creusée dans son épaisseur. On voit
des piscines du xn* siècle dans l'église de Surg^-es (dio-
cèse de Poitiers) et à la cathédrale de Lausanne ; il y en
a une du xiu* siècle à Semur, et une du xiv* à l'église
S^- Urbain de Troyes, toutes deux remarquablement
sculptées. B»
PISE (Baptistère de). V. BAPnsrtRB.
PISE (Campanile de). V, Tours PENCHéBS.
pisB (Le Campo-Santo de). V. Campo-Sarto.
PiSE (Le Dôme de). Commencée en 1064 par l'archi-
tecte Buschetto, continuée par Rainaldo, cette église ca-
thédrale fut consacrée en 1118 par le pape Gélase II. Un
incendie en dévasta plusieurs parties en 1506. C'est un
monument unique pour son époque, et qui resta long-
temps sans rival : Il remit en honneur les Ordres de
l'arcnitecture grecque, et fut le précurseur de la Renais-
sance ; les bases, les chapiteaux des colonnes, les cor-
niches, etc., sont des fragments antiques employés par
PIS
1435
PLA
rarchhecte avec une rare habileté. Le plan de Tédifioe
est en forme de croix latine et à cinq nefs. Il a 05 met.
de longueur, 33 met. de largeur (72 met. au transept), et
38 met. de hauteur. Les assises altematlYes de marbre
blanc et noir à Textérieur produisent un eflet plutôt
étrange qu*agréable : c*est une marqueterie xpii éblouit le
regard, et qui a l'inconvénient de rompre les lignes ar-
chitectiirales. La façade, disposée en cinq ordres super-
posés, oflBre 58 colonnes et 4 galeries ouvertes; les portes
de bronze ont été exécutées en 1602 par divers artistes
sur les dessins de Jean de Bologne, et les mosaïques qui
les surmontent sont de Paladini. Sur le faite de ut façaide
8*élève une statue en marbre de la Vierge avec Tenfant
Jésus, ouvrage de Jean de Pise. A Tinténeur de Téglise,
24 colonnes corinthiennes en granit rouge et monolithes
soutiennent la srande nef; des arcs en plein cintre re-
posent sur les chapiteaux de ces colonnes, et au-dessus,
séparé par une architrave, règne un second rang de co-
lonnes plus nombreuses et plus petites, qui forment une
galerie ou triforium. Les bas côtés sont voûtés; mais
Ut grande nef a un plafond en bois, avec de grands
caîssona dorés. La coupole sur pendentifs b&tie au
centre du transept est portée sur quatre piliers massifs
et sur quatre arceaux ti%s-ouverts; elle a été restaurée et
peinte par Riminaldi, au commencement du xvii* siècle.
Les objeta d'art qui remplissent la cathédrale de Pise font
de ce monument un véritable musée chrétien. Une cé-
lèbre chaire, que Jean de Pise avait sculptée, fut ruinée
par la chute du toit lors de Tincendie de 1596 : quelques
statuettes que Ton sauva ornent la chaire actuelle. La tra-
dition veut que les 12 autels aient été dessinés par
Michel-Ange; mds la composition n'en est pas assez sa-
tisfaisante ()our qu'on admette cette opinion, et ce qu'ils
offrent particulièrement de remarquanle, ce sont les or-
nements exécutés par Staggi de Pietra-Santa. La marqu&-
terie des stalles du chœur est un admirable travail ; les
vitraux, dont quelques sujets ont été empruntés aux pein-
tures du Campo-^to, sont du xiv* et du xv* siècle ; on
voit encore dans le chœur plusieurs fresques de Becca-
fumi, de Ghirlandajo, et d'André del Sarto. Le maltre-
autel , derrière lequel est un Sacrifice d* Abraham par le
Sodoma, est incrusté de pierres précieuses, ainsi que la
balustrade en marbre qui le sépare du chœur ; les deux
statues et le crucifix en bronze sont de Jean de Bologne.
En avant du chœur, sur le pilier de droite, est la célèbre
S^* Agnès d'André del Sarto. Au-dessus des portes des sa-
cristies et au-dessous des orgues, on voit des bas-reliefs
de F.-G. Agnelli, qui appartenaient autrefois à la façade
et à une chaire de S^-Michel-in-Borgo. Une grande lampe
de bronze est suspendue dans la nef: on prétend que ses
oscillations mirent Galilée sur la voie de la théorie du
pendule. Les bras du transept contiennent deux cha-
pelles : l'une renferme le sarcophage de S' Renier par
Foggini , et une statue antique de Mars; dans l'autre est
un ciboire d'argent d'un travail précieux. B.
PISÊ (du latin pinsere, piler}, construction en terre qui
consiste, soit à fabriquer sur place, avec de la terre ar-
gileuse foulée dans un moule en bois, des espèces de
grosses briques qu'on pose par assises et qu'on relie
entre elles avec de la même terre délayée en forme de
ciment ; soit à jeter, dans un encaissement de bois ap-
pelé banche, de la terre ou de l'argile naturellement hu-
mide, à l'étendbre et à la fouler par assises pour lui don-
ner la consistance nécessaire. Quand la construction est
sèche, on la recouvre d'un enduit en mortier ou d'un ba-
digeon en lait de chaux. Dans les pays pauvres, le pisé
est fréquemment employé pour les murs de clôture, les
granges, les étables, et même pour les maisons d'habita-
tion dans les localités où la pierre manque : il est solide
et peu coûteux, n'offre aucun danger d'incendie, et ne
laisse pénétrer ni l'humidité, ni les animaux nuisibles ;
s'il se lézarde par suite de vétusté, il ne faut pas songer
à le réparer, mais Tabattre et reconstruire. B.
PISTEUR. ) V. ces mots dans notre Dictionnaire de
PISTOLE. S Biographie et S Histoire.
PISTOLET, arme ^, suivant Henri Estienne, tira son
nom de la ville de Plstoia, en Italie, où on la fabriquait.
C'était d'abord un petit poignard ; puis on en transporta
le nom à une petite arme à feu. Les argoulets furent
armés de pistolets dès le temps de Louis XI; dans la se-
conde moitié du xvi* siècle, le pistolet commença de pré-
valoir sur la lance dans la cavalerie légère; en 1610, il
fut donné à la grosse cavalerie; qui l'a toujours conservé
depuis. En 1867, en France, on l'a enlevé aux corps ar-
més du fu-il.
PISTRINE. V. notre Dict. de Biogr. et d'Histoire,
PITANCE, portion distribuée à chaque membre d'uni
communauté pour son repas. Autrefois,' dans les cou-
vents, la Pitancêris était un service dirigé par le Pitan»
cier. Ces mots viennent du latin pittacium, désignant le
bon de vivres que le soldat romain présentait à l'étapi^
PITE ou PICTE, en latin Pictavina, petite monnaie de
cuivre des anciens comtes de Poitou, vahint une demi-
maille ou un quart de denier.
PITON, terme de Géographie, emplojré principalement
dans les Antilles pour désigner la pointe élevée d'une
montagne.
PITRE, farceur des foires, qui ne diffère j^ du Pail-
lasse (F. ce mot). Son nom est celui d'ime hqueur forte
qui ne convient qu'aux palais émoussés.
PITTORESQUE (de l'italien pittx)re, peintre), se dit de
ce oui fait ou peut faire de l'effet en peinture, et, par
analogie, de tout ce qui forme une image, de tout ce qui
peint pour l'esprit. De nos Jours, on a qualifié de pitto*
resques certains ouvrages ornés de gravures.
PIZZICATO, c-^d. pincéy mot italien qu'on emploie
en Musique, afin d'indiquer, dans certains passages écrits
pour instruments à cordes, que les notes doivent ôtre
pincées avec les doigts, et non attaquées avec l'archet.
PLACAGE, recouvrement des ouvrages d'ébénistcrie,
fait avec des lames minces de bois durs et précieux.
C'est particulièrement l'acijou ou'on emploie à cet usage.
Quand le placage est composé ne pièces formant des or-
nements ou des dessins quelconques, on le nomme Mar^
queterie, V» Ébénistebib, Marqueterie.
PLACARD, écrit ou imprimé qu'on affiche dans un lieu
public (K Affiches); — épreuve de typographie impri-
mée en colonnes et d'un seul côté de la feuille, et des-
tinée à recevoir les corrections; — ensemble des pièces
qui composent le chambranle et l'ornement d'une baie
de porte ; — boiserie qui forme le devant d'une armoire
pratiquée dans l'épaisseur d'un mur.
PLACE (Commandant, — Major de)-. V. Cohvahdant,
Major.
PLACE d'armes, nom donné : 1^ dan; les villes de guerre
ou de garnison, à un emplacement central où leA troupes
se'réunissent les jours de grande parade et de revue, ou en
cas d'alerte, pour y recevoir des ordres; 2° dans les lieux
fortifiés, à tout espace ménagé près des points d'action,
pour recevoir les troupes qui doivent défendre ces points.
PLAGE FORTE. V. FORTERESSE.
PLACEMENT f Bureaux de), bureaux établis dans cer-
taines grandes villes pour s'occuper, moyennant rétribu-
tion, du placement des employés et des domestiques. Un
décret du 25 mars 1852 interdit d'ouvrir un bureau de
placement sans une permission du préfet ; un registre,
visé par le maire ou par le commissaire de police, doit
être tenu dans chaque bureau, pour y recevoir les noms,
prénoms, &ge, lieu de naissance, domicile et profession
des personnes à placer, et le prix de l'inscription ne doit
pas dépasser 50 centimes.
PLACET, supplique qu'on adresse au souverain, à un
ministre ou à des juges, pour leur demander une gr&c ,
une faveur, ou Justice. Autrefois les demandes de ce
genre commençaient par le mot latin placeat, qu'il plaise
a. •.
PLACET, meuble du xvii* siècle. C'étiut une sorte de
tabouret, un petit siège de femme ou d'enfant, sans bras
ni dossier.
PLAFFERT. V. Blaffert.
PLAFOND (de fond plat)^ corps de matériaux, droit ou
cintré, qui forme le cid d'un appartement ou de tout lieu
couvert. Pour la forme cintrée, usitée seulement dans les
grands édifices, on emploie la brique ou la pierre. Les
{)lafonds droits sont, en général, faits d'un lambris do
attes attachées sur la charpente, et de trois couches de
pl&tre qui les recouvrent : la dernière est toujours faiie
en plâtre tamisé. Dans les planchers à solives de fer, da
petit carillon de fer, posé en entretoise d'une solive à
l'autre, reçoit la couche de plâtre qui forme le noyau du
plafond. Il existe des plafonds de pierre dans un très-
grand nombre d'édifices antiques; la plupart sont des
dalles de pierre, portées par des épistyles, poutres de
pierre tenant lieu de poutres de bois, mais de petite
portée. On voit, à Pans, des plafonds de ce genre an
portique de l'église S^Sulpice, à la colonnade du Louvre,
aux galeries du Palais- Royal : mais les épistyles sont
en plates- bandes, et, au Palais- Royal, en charpenio
enduite de pUtre. Quand on veut décorer un plafomî,
on le divise presque tOH|ours en compartiments symé-
triques, qu'on appelle caissons, tympans ou voussures
(V.ces mots). Les Anciens paraissent n'avoir peint sur
PLA
1436
PLA
les plafonds que des arabesqnes, des figures chimé-
riques, des fleurs et des fruits, tandis que les Modernes
ir ont souvent représenté de vastes sujets historiciues :
es compositions de ce genre exigent une connaissance
approfondie de la perspective et du raccourci, car il s'agit
de faire paralu« debout et sur des lignes perpendiculaires
des personnages qui sont physiquement couchés sur un
plan horizontal ou sur une courbe plus ou moins irrégu-
lière. On voit au Louvre de très -beaux plafonds de ce
genre. ~- On nomme plafond dé corniche la surface de
dessous du larmier d'une corniche. B.
PLAGAL, nom d'un mode ou ton du Plain-Ghant, dont
le pape S^ Grégoire le Grand admit l'usage dans la com-
position des chants sacrés. Tiré du grec plagias (oblique,
transversal), il a été appliqué aux tons pairs, probable-
ment à cause de la quarte grave qui les distingue et qui
est le produit du renversement de ia quinte de V Authen-
tique (V, ce mot). Le plagal, appelé aussi inférieur ou.
collatéral, a pour note finale la note la plus grave de la
quinte; il a, par conséquent, la quinte au-dessus de la
finale et la quarte au-dessous. Les tons plagaux, ancienne-
ment au nombre de six, ont été réduits à quatre, qui sont
le 2*, le 4*, le 6' et le 8«. Le !«'' ton plagal était nommé
hypodorien, le 2« hypophrygien, le 3« hypolydien, le ï«
hypomixolydien, ou bien subjugaiis proti, subjugàlis
deuteri, sitbjiigalis triti, et subjugaiis tetrardi, — Lors-
que le ton plagal atteint, dans le morceau do chant au!
le constitue, les deux notes extrêmes de son échelle dia-
tonique, il est parfait; lorsqu'il ne descend pas à la
quarte au-dessous de sa finale, il est imparfait; lorsqu'il
descend de plus d'une quarte au-dessous de sa finale,
il est surtibondant ; lorsqu'il emprunte plusieurs notes à
son authentique, par exemple lorsqu'il monte plus d'une
sixte au-dessus de sa finale, il est mixte; lorsqu'il se
termine par sa note finale régulière, il est régulier; dans
le cas contraire, il est irrégulier. F. G.
PLAGALI£ (Cadence). K. Cadencb.
PLAGE (du latin pla>ga, dérivé du grec plax, chose
plate et unie), rivage de la mer plat et découvert, formé
de galets ou cailloux, de sable ou de vase. On dit aussi
estrade.
PLAGIAIRE, nom par lequel les anciens Romains dé-
signaient celui qui était condamné au fouet (ad plagas)
{)our avoir vendu des hommes libres comme esclaves. On
'applique, chez les Modernes, à l'écrivain qui s'approprie
les pensées d'autrui. S'approprier un ouvrage entier
n'est pas un plagiat, mais une contrefaçon {V. ce mot).
Les compilateurs ne sont pas des plagiaires, parce qu'ils
ne s'attribuent pas le mérite de l'mvention de ce qu'ils
ont recueilli. Toute rencontre de pensée ne peut pas non
plus être qualifiée de plagiat : cette rencontre est inévi-
table, et, lorsqu'un écrivain fait quelque application
neuve d'une pensée déjà exprimée, lorsqu'il lui donne
une empreinte plus nette, plus forte, plus durable, il ne
fait, comme Molière, que prendre son bien où il le trouve;
c'est de l'imitation féconde, et non du plagiat. Le vrai
plagiat, c'est composer aux dépens d'autrui, reproduire
sans aucune marque personnelle un travail antérieur,
quoi qu'il vaille; c'est, selon les expressions de Bayle,
enlever les meubles de la maison et les balayures aussi,
prendre le grain, la paille, la balle, la poussière en
même temps. Il y a eu des plagiats célèbres : Porphyre,
cité par Eusèbe, nous apprend qu'on trouvait dans l'his-
torien Éphore des passages de 3,000 lignes copiées mot
pour mot ; le poète Bathylle se déclara l'auteur du dis-
tique Nocte pluit totà^ etc., composé par Virgile, qui se
vengea par son fameux Sic vos non vobis... A l'époque
de la Renaissance, Leonardo Bruni d'Arezzo publia sous
son nom une Histoire des Goths, qu'on reconnut plus
tard être une simple traduction de Procope. Le P. Barre,
dans son Histoire S Allemagne, s'est approprié, en chan-
geant les personnages, une partie de V Histoire de Char-
les XII par Voltaire. K. Ch. Nodier, Du plagiat; de la
supposition d'auteur; des Supercheries qui ont rapport
aux lit^res, 2« édit., Paris, 1828, in-8o.
PLAGUL/E, bandes d'étoffe richement travaillées et
servant d'ornement à la dalmatique dans les premiers
siècles.
PLAID, terme Judiciaire. V. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
PLAID, grande écharpe de laine à carreaux de diverses
couleurs, particulièrement rouges, gris, et verts, dont les
Écossais se couvrent, et qu'ils croisent sur la poitrine.
PLAIDOIRIE, PLAIDOYER. Ces deux mots, auxquels
on donne aujourd'hui dans le langage habituel un sens à
peu près identique, ont eu autrcfuis des significations
différentes. La Plaidoirie était l'art de plaider, et par
suite, l'exercice de cet art, la profession; le Plaidoyer
était le discours prononcé à l'audience. C'est ce discours
que nous nommons Plaidoirie, tandis que le Plaidoyer
est spécialement la défense écrite, lue devant les juges.
PLAIN-CHANT (du latin planus cantus), chant simple,
uni, majesteux, qui est en usage dans toutes les églises
d'Occident depuis S^ Grégoire le Grand {V. Ambrosien,
GRéGORiEif). Les notes employées dans le Plain- Chant,
appelé aussi chant romain et chant grégorien^ sont au
nombre de sept, que l'on désigne par les lettres A, B, G,
D, E, F, G; elles servent de base chacune à une octave
formée de cinq tons et de deux demi-tons. Chaque oc-
tave s'y divise en harmonique et en arithmétique, et y
constitue deux modes ou tons, Vauthentique ou prin-
cipal^ et le plagal ou inférieur (V. ces mots). Les modes
ou tons du chant ecclésiastique, qui étaient autrefois au
nombre de douze, ont été réduits à huit, parce que le
bémol accidentel employé dans les 1*', 2«, 5* et 6' tons
les rendait semblables aux 9", 10*, 11* et 12*. Le moine
Alcuin, précepteur de Charlemagne, avait déjà adopté le
système des huit tons, ainsi qu'il le déclare dans son
Traité de musique. On peut même en faire remonter
l'adoption à S^ Grégoire le Grand, qui, d'après la tradi-
tion, i^outa les quatre tons plagaux aux quatre tons au-
thentiques. La notation du Plain-Chant est actuellement
composée de gros points carrés et de points ayant la
forme d'un losange. On se sert des clefs d^ut et cie fa, et
d'une portée de quatre lignes.
On a donné le nom dfe Plain^hant musical à des
compositions sans goût qui ont été introduites depuis le
XVII* siècle au milieu des chants grégoriens, et où la tona-
lité moderne, avec ses tons majeurs et mineurs, ses mo-
dulations, sa phraséologie, ses cadences, a été sub'
stituée à ia tonalité grave et unitonique des modes du
Plain-Chant. « On peut dire, remarque J.-J. Rousseau,
qu'il n'y a rien de plus ridicule et de plus plat que ces
plains^hants accommodés à la moderne, prétintaillés
des ornements de notre musique, et modulés sur les
cordes de nos modes ; comme si Von pouvait jamais ma-
rier notre système harmonique avec celui des modes an-
ciens, qui est établi sur des principes tout différents, a Le
plain-chant musical a eu pour premiers propagateurs, en
France, Lulli, dont on chante dans le Midi une messe
appelée la Baptiste^ du prénom de son auteur; Dumont,
l'auteur de la fameuse if esse royale; et surtout l'orga-
niste Nivers. Vint ensuite La Feillée, dont la Méthode de
plain-chant musical a donné une vogue déplorable à des
monstruosités. Le Plain-Chant musical a toujours du
succès en Italie, et il a commencé plus tôt qu'en France;
on l'y nomme canto fratto (chant brisé), pour le distin-
guer du canto fermo ou Plain-Chant proprement dit. Les
livres de chœur des ordres religieux contiennent un
grand nombre de ces conceptions bâtardes.
Le Plain-Chant est la seule musique que l'Église ait
adoptée par la voix de ses papes, de ses conciles et de
ses évèques. II a une allure grave, comme il convient aux
pensées qu'il exprime, et un peu lente, afin que tous
puissent suivre et réunir leurs voix; toujours calme, il ne
réveille pas les sens, quoiqu'il se serve de leur concours.
11 a des accents doux, suaves, onctueux, tristes, humbles,
énergioiies, pour exprimer tour à tour la prière, l'espé-
rance, l'amour, la compassion, la crainte et l'admiration.
V. Jean Bona, De divine Psalmodia, Rome, 1653,
in-8<*; Cionacci, Dell* origine e progressi del canto eccle-
siastico, 1655, in-8°; Dom Jumilhac, la Science et la
Pratique du Plain-Chant, Paris, 1672, în-4o; Scheibel,
Histoire de la musique d*église dans les temps anciens et
modernes^ en allemand, Breslau, 1738, in-8<*; l'abbé Le-
bœuf^ Traité historique et pratUrue sur le chant ecclé-
siastique, Paris, 1741, in-8°; Poisson, Traité théorique
et pratique du Plain-Chant^ Paris, 1750, in-8«; Gerbert,
De cantu et musicâ sacra à prima Ecclesiœ œtate usque
ad prœsens tempus, 1774, 2 vol. ln-4*, et Seriptores ec-
clesiastici de musicâ sacra, 1784, 3 vol. in -4*; Lam-
billotte. De Vunité dans le chant liturgique, 1851 ; Jouve,
Du chant liturgique, Avignon, 1854, in-8<»; Félix Clé-
ment, Méthode complète de Plain-Chant, Paris, 1854,
in-18; D'Orti|ue, Dictionnaire du Plain-Chant et de la
musique d* église, 1854, 1 vol. gr. in-8^ F. C
PLAIN-CHANT (Accompagnemeut du). F. AGGOMPAGim-
MENT.
PLAINE, terme de Blason. V. Champagne.
PLAINTE (du latin planctus^ lamentation, doléance),
déclaration par laquelle on défère à la Justice quelque
injure ou dommage qu'on a souffert de la part dVuitmi.
PLA
1437
PLA
Elle doit être reçue par le jage d'instruction, on par le
procureur impérial, ou par Tun des officiers de police
qui sont ses auxiliaires. On peut être plaignant sans être
partie cwile^ mais on ne peut être partie civile sans être
plaignant. Le plaignant n'est pas réputé partie civile, sMl
ne le déclare formellement, soit par la plainte, soit par
acte subséquent. La qualité de plaignant n*entraine pas le
payementr des frais envers TÉtat, tandis que la partie ci-
eile est toujours tenue au remboursement de ces frais,
sauf son recours contre les condamnés. On peut se dé-
sister de la quali^.é de partie civile, et néanmoins persister
dans la plainte. V, Désistement.
PLAISANTERIE. « Le Plaisant est TelTet de la sur-
prise réjouissante que nous cause un contraste frappant,
singulier et nouveau, aperçu entre deux objets, ou entre
un objet et Tidée hétéroclite qu'il fait naître. Cest une
rencontre imprévue qui, par des rapports inexplicables,
excite en nous la douce convulsion du rire. » Cette défi-
nition, assez juste, est de Ifarmontel, et l'on . peut en
tirer la conclusion, déjà connue, qu'il n'y a pas de pré-
cepte à donner pour la plaisanterie. En Firance, la bonne
plaisanterie, et la seule digne de ce nom, puisque c'est
la seule qui plaise généralement, est toujours spirituelle.
Juste, décente, et marquée au coin du bon sens. En 1796,
un chevidier de Pannat, voyant à Londres la cour des
princes français émigrés, où l'on ne rêvait que le pur
rétablissement de tout ce que la Révolution venait de
détruire, écrivait à un ami : « Personne n'est corrigé,
personne n'a su rien oublier, rien apprendre. » Lors de
la Restauration de 1814, le mot revécut de lui-même, et
fut, dès le commencement, le iugement et la condamna-
tion des restaurés. — Gromwell ayant rappelé un débris
du Long-Parlement, débris qu'il composa seulement de 70
membres, les royalistes api^l^nt cette chambre Rump-
farliament, c-ènd. « Parlement croupion, » plaisanterie
assez grossière, comme on voit. — Après la Journée du
9 thermidor, le public appela les anciens terroristes, re-
grettant leur chef, « la queue de Robespierre. » L'expres-
sion n'était pas bien spirituelle, mais du moins elle était
vraie sans être grossière. — Sous la Restauration, pen-
dant le ministère de Villèle, en 1824, un député du
centre s'étant écrié» dans une séance de la Chambre,
qu'ils étaient 300 dévoués au ministère, on les surnomma
aussitôt « les trois cents Spartiates. » — Il y a dans la
plaisanterie française un sentiment si naturel de décence
en même temps que d'esprit, qu'on en retrouve des
traces Jusque dans l'argot, cette langue de tout ce qu'il
y a de plus bas dans la société ; le juge qui interroge, et
qui dans ce langage est le curieux; la pince, destinée à
forcer toutes les portes, et qui est un monseigneur, de-
vant lequel les portes s'ouvrent d'elles-mêmes, sont
certainement des termes aussi plaisants que justes et
décents ( V. Aroot]. Nous en dirons autant des expres-
sions ; chevaliers a*industrie, chevcUiers du lustre, qui,
à force de servir, à cause de leur Justesse plaisante, ont
passé presque dans le langage sérieux. Patrouille et par
trouUter, mots aujourd'hui de la langue militaire sé-
rieuse, furent dans l'origine une plaisanterie, car faire
patrouille signifie proprement : « agiter l'eau, marcher
dans la boue. »
La plaisanterie est comme une monnaie qui s'use vite;
elle commence à se démonétiser lorsqu'elle devient trop
répandue, et il faut en frapper d'autre : mais il y a tou-
jours en France des monétaires disposés à faire ce tra-
vail, qui n'en est pas un pour ces esprits fins, délicats et
gais avec urbanité.
Quand on parle de l'esprit français, il serait difficile
d'oublier celui du soldat, car il n'en a pas moins que les
classes les plus cultivées; cet esprit a un caractère tout
particulier de franchise, de naturel, et surtout de philo-
sophie résiçnée, gaiement frondeuse, qui est un des fruits
de la discipline, à laquelle le militaire se soumet sans
peine, en grognant un peu, sans peine aussi. Il puise
cette philosophie dans son caractère toujours porté à la
gaieté. Pendant la célèbre campagne du général Bonaparte
en Egypte, après le désastre naval d'Aboukir, qui blo-
qua pour ainsi l'armée française dans le pays qu'elle
venait conquérir, et v causa un grand découragement
moral, la mauvaise humeur des soldats s'exhalait en
plaisanteries; ils en voulaient au général Cafifarelli, qui
passait pour avoir conseillé l'expédition ; or, comme ce
général avait perdu une jambe en faisant la guerre sur ie
Rhin, ils s'amusaient à dire tout haut quand il passait :
« Celui-là se moque de ce qui arrivera, il est toujours
bien sûr d'avoir un pied en France. » — Dans des scènes
militaires, si bien observées et rendues par le crayon
de Gharlet, on trouve une foule de mots qu'il a reeaeHIifl
et Jamais inventés; en voici quelqne»-uns. La nuit, par
un temps de neige, et en rase campagne, un lancier,
posté en vedette, et gelé par la bise, se dit, pour prendre
patience : « Chauffé et éclairé par son gouvernement
c'est une grande douceur. » — Un fantassin, de cuisiné
au bivouac, regarde dans sa marmite suspendue sur le
feu, et sans doute plus fournie de légumes que de viande,
et fait cette réflexion : « Faudrait un crâne maître d'ar-
mes pour crever un œil à mon bouillon. » — Le vieux
sous-officier est naturellement goguenard lorsqu'il s'agit
de répondre à une observation de son subordonné; en voici
un exemple : deux Jeunes fantassins ont été commandés
pour la corvée du quartier; Tun d'eux, son bonnet de
police à la main , et debout devant un sergent à che-
vrons assis sur un banc, lui adresse respectueusement
une réclamation; voici la réponse qu'il reçoit du gro-
gnard : « Au commandement de pas d'observation ! tu
renfonces simultanément ton discours, en partant vive-
ment du pied gauche, la pointe du pied basse, le Jarret
tendu, et les genoux d'aplomb sur les hanches. » C. D— t.
PLAISIR. Le Plaisir est un de ces phénomènes que
tout le monde connaît, et qu'en raison de leur simplicité
même on ne saurait définir. Opposé à la douleur, il est,
conune elle, le résultat le plus immédiat du développe-
ment de notre sensibilité ( F. ce mofu et sert, dans l'ordre
naturel, de signe à la satisfaction des tendances primi-
tives (K. Instuvcts). Les différents plaisirs sont, comme
les penchants auxquels ils se rattachent, ou physiques
ou moraux ; ce sont ou des sensations ou des sentiments
aj^réables ; mais, quelle que soit à cet égard leur diver-
sité, quelle que soit, par exemple, la diflférence que nous
remanjuons entre le plaisir d'avoir fait une bonne action
et celui de goûter un vin exquis, il n'en est pas moins
vrai qu'entre ces deux phénomènes il existe un trait de
ressemblance essentielle qui nous porte invinciblement
à les réunir sous une désignation commune. Le plaisir
est un phénomène éminemmemt relatif; on veut dire par
là que ce qui agrée à l'un peut déplaire à l'autre, et que,
suivant la disposition du moment, un même objet peut
devenir pour une même personne l'occasion d'un vif
plaisir, d'un plaisir moindre, ou même d'une peine. A cet
égard, mobilité extrême, et nulle règle possible. Chacun
prend son plaisir où il le trouve. C'est une des princi-
pales raisons qu'on doit invoquer contre les systèmes de
morale qui font du plaisir le but suprême de notre vie,
et de la recherche du plaisir la loi de nos déterminations.
En effet, outre que ce principe est, à d'autres égards,
tout à fait insuffisant, il n'a ni la fixité, ni l'autorité
nécessaire pour constituer une loi. Épicure veut que
l'homme cherche le plaisir, et il le trouve pour son
compte dans la pratique de la vertu, non parce que la
vertu est bonne en elle-même, mais parce qu'elle nous
préserve des troubles et des agitations qui s'opposent au
plaisir paisible et durable de l'àme. C'est là, sans doute,
une morale bien étroite, mais dans laquelle cependant
l'application prévient Jusqu'à un certain point les fu-
nestes conséquences du principe. Mais que tel disciple
d'Épicure, s'emparant de quelques paroles échappées
au maître, fasse consister le plaisir non plus même
dans cette vertu intéressée que recommandait Épicure,
mais dans la satisfaction des appétits les plus grossiers,
des penchants les plus déréglés, que dans une école voi-
sine (V. École CYRéNAiQUB} Aristippe professe ouverte-
ment la supériorité des plaisirs du corps sur les plaisirs
de l'esprit, de quel droit contestera-t-on la légitimité de
cette doctrine, si l'on n'a posé comme loi morale, bien
au-dessus du plaisir, chose mobile, relative, individuelle,
ridée du bien absolu qu'il n'appartient à personne d'in-
terpréter à son gré? Il faut en dire autant des moralistes
modernes, tels que Smith et Hutcheson, qui ont fait du
sentiment moral (V. ce mot)y c-à-d. des plaisirs qui dé-
rivent de l'exercice de la bienveillance et de la sympa-
thie, la base de leur doctrine. Bien qu'inspirées par mi
esprit généreux, et moins éloignées, en fait, de la véri-
table morale que ne le sont les précédentes, ces doctrines
manouent cependant d'autorité et de sanction. En un
mot, te plaisir, de quelque source ^u'il vienne, n'est pas
bon par cela seul qu'il est le plaisir; et si les plaisirs
moraux se recommandent plutôt que les plaisirs phy-
siques aux aspirations de l'homme de bien, ce n'est
pas parce qu'ils sont plus nobles ou plus délicats, c'est
parce qu'ils sont la suite et le signe des devoiiB accom-
plis. B— E.
PLAN, en termes d'Architecture, représentation, sur
un plan horizontal , d'un objet qui y serait placé dans sa
PLA
1438
PLA
position naturelle. On y con^enre h toutes les parties de
robjet les rapports de gprandeur qu'elles ont réellement.
En Peinture, le mot plan est employé pour signifier le
plus ou moins d'éloignement où sont , par rapport au
spectateur, les objets ou les figures d*un tableau, éloigne-
ment qui est un eflet de la perspective. Dans les décora-
tions de théâtre, les plans sont les espaces marqués par
les séries de coulisses parallèles au rideau de fond.
PLAN, en termes de Littérature, distribution arrêtée
d'avance des parties d'un sujet que Ton veut traiter.
On trouverait assez d'hommes capables de composer
des morceaux satisfaisants et de réussir dans les dé-
tails; mais donner à un tout une belle ordonnance, con-
sidérer un vaste sujet dans son ensemble, en combi-
ner les parties , c*est le propre d'un esprit élevé et étenda.
Un plan est juste, s'il embrasse tout le sujet \ net, si
toutes les parties en sont bien distinctes et n'offrent au-
cune confusion ; il a de la proportion , quand les parties
sont en harmonie et reçoivent les développements que
réclame leur importance; il a de Vunilé, quand toutes
los parties concourent au même but. Le Plan est la base
indispensable de la composition. V. Buflbn, Discours sur
Is style,
PLANCHER , assemblage horizontal de planches ou de
barres de fer séparant les étages d'une maison. On le
recouvre d'un parquet ou d*un carrelage.
PLANÈTE. K. Chasuble.
PLANISPHÈRE (du latin planus, plan, et du grec
sphaïra^ sphère) , projection d'une sphère sur un plan.
Dans la mappemonde ou planisphère terrestre, on suppose
la terre partagée par le méridien en deux hémisphères
qu'on projette l'un à côté de l'autre ; dans le planisphère
céleste, on fait la section de la sphère céleste par le plan
de l'équateur.
PLANTON , sous-oflicier ou soldat de service auprès
d'un officier général ou d'un officier supérieur, pour trans-
mettre ses ordres et porter ses dépèches. On met quel-
quefois des plantons à la porte des casernes, pour en
surveiller la police extérieure, et empêcher que personne
n'y entre ou n*en sorte sans en avoir la permission ou
le droit. Le planton à cheval s'appelle ordonnance (V. ce
mot).
PLAQUE, ancienne monnaie d'argent de Flandre et de
France. Louis XTV en fit battre à Tournai qui contenaient
68 grains d'argent fin.
PLAQUÉ, produit d'une branche de l'orfèvrerie qui
s'occupe de fabriquer des objets de luxe avec du cuivre
rouge revêtu d'une plaque mince d'un métal précieux.
Dans la dorure et Vargenture, les métaux précieux sont
en feuilles excessivement minces, et ne sont placés à la
surface des objets qu'après l'entière confection de ceux-ci ;
dans le plaqué, ces métaux sont en plaques d'une épais-
seur appréciable, placées sur le cuivre avant toute autre
mise en œuvre. Dans le doublé, l'or et l'argent sont fixés
sur le cuivre au moyen d'une soudure avec un métal fu-
sible ; le plaqué s'exécute sans aucune fusion, en forçant
les métaux à adhérer en les passant au laminoir. On se
sert de plaqué de platine pour faire certains vases em-
ployés dans les laboratoires de chimie. L'invention du
plaquaçe ne remonte guère plus haut que le milieu du
xviu* siècle; la première fabrique de plaqué fut fondée à
Slieffleld en 1742 par Thomas Bolsover, qui fit des bou-
tons et des tabatières; quelques années après, un cou-
telier de la même ville, Joseph Hancok, fabriqua de la
vaisselle plate, des théières et des flambeaux. L'industrie
du plaqué fut ensuite transportée à Birmingham, où elle
prit des développements considérables; elle s*est intro-
duite en France vers i785. Aujourd'hui elle est concen-
trée ti Paris.. Les fabricants sont tenus de marquer sur
leurs articles le titre du plaqué.
PLAQUETTE, ancienne monnaie de Belzique, faite
d'un alliage d'argent et de cuivre, et valant 0 fr. 29 c.
PLASTIQUE (du grec plastikos, de plassô, former),
en termes de Philosophie scolastique, ce qui a la puis-
sance de former.
PLASTIQUE (Médiateur). V, Amb, pag. 108, col. 2.
PLASTIQUES (Arts) , arts qui s'occupent de reproduire
la forme; ce sont la sculpture, l& statuaire, l'art de faire
des figures avec des matières molles, telles que l'argile,
la cire le Dl&tre etc
PLASTRON (de l'italien piastrone)^ partie de la cui-
rasse qui couvre la poitrine; — pièce de cuir rembour-
rée et matelassée dont les maîtres d'armes se couvrent la
poitrine pour amortir les coups de fleuret.
PLATA, monnaie d'anrent du Mexique, valant 5 fr. 38 c.
PLAT- BORD. V. Bohd,
PLATE (de l'espagnol plata, argent), s'emploie dans
le Blason pour besant ( V. ce mot),
PLATE, en termes de Marine, embarcation de pêche à
fond plat , dont on se sert dans la Méditerranée.
PLATEAU, en termes de Géographie, terrain plus ou
moins plat et fort étendu, au sommet de la partie monta-
gneuse d'un pays.
PLATE -BANDE, en termes de Jardinage, "espace de
terre uni et étroit qui borde les compartiments d'un par-
terre, et qui est ordinairement garni de fleurs ou d'ar-
bustes. — En termes d'Architecture, une plate-bande est
une moulure plate et unie, qui a plus de liurgeur que' de
saillie; — ou un assemblage horizontal de claveaux for-
mant l'épistyle d'une colonne; cela se pratique ainsi dans
tous les monuments modernes. La plate-bande est ren-
forcée à l'intérieur, par une armature en fer, qui retient
récartement des claveaux.
PLATÉE, crépi de maçonnerie qu'on fait sur toute
l'étendue des fondations d'un b&timent arrasé à fleur du
sol. Sur ce crépi on trace la position très-exacte des murs
à construire en élévation, afin que les ouvriers maçons
ne puissent pas se tromper.
PLATE -FORME, toit plat qui couvre les b&timents
sans comble. — Dans l'Art militaire, c'est un ouvrage en
forme de terrasse, destiné à recevoir une batterie. — En
termes de Marine, c'est un plancher volant. Dans un
vaisseau, on distingue la plate -forme du chirurgien,
dressée dans la cale hors de l'atteinte des boulets, et où
l'on place les blessés, et les plates-formes de la soute
aux poudres, de la cambuse, du magasin général, etc.
PLATES, nom qu'on donna, pendant le xiv* siècle, à
de petites plaques de métal qu'on clouait l'une h côté de
l'autre sur des carcasses en baleine, assujetties elles-
mêmes après diverses pièces de rhtd)illement , telles que
gants, chausses. Justaucorps, etc.
PLATES (Rimes). V. Rime.
PLATINE, mot employé autrefois dans le sens de pa-
tène et de palette,
PLATONiaENNE (Philosophie) ou PLATONISME.
Platon, disciple de Cratyle, puis de Socrate, initié par le
premier à la doctrine d'Heraclite, dont le fond est que
tout s'écoule perpétuellement, qu'il n'y a rien de fixe,
partant point de science possible, chercha, dans la mé-
thode du second, un correctif à ce scepticisme où la phi-
losophie de l'école ionienne avait fini par se résoudre.
Or, en quoi consistait la méthode de Socrate? En ceci
principalement, qu'il laissait de côté la contemplation du
monde physique, pour s'attacher de préférence à l'étude
de l'homme intérieur ; et que, dans tout sujet, il s'effor-
çait de dégager, sous forme de définitions, les idées géné-
rales. Du compromis et de la fusion de ces doctrines
naquit une philosophie très-détachée des faits et de l'ex-
périence sensible, très-spiritualiste, très-élevée dans ses
aspirations souvent chimériques, et ayant pour principal
défaut de prendre pour des réalités, bien plus, pour la
seule réalité, des conceptions abstraites de l'esprit, les
idées, base du système, dont il faut , avant tout , t&cher
de bien comprendre la nature et le rôle, au sens où Platon
les a entendues. — Tout s'écoule, tout change perpétuel-
lement, avait dit Heraclite. Cela est vrai , u l'on consi-
dère les êtres et les phénomènes dans leur individualité ;
mais comparez les individus, vous trouverez dans chacun
d'eux des caractères qui lui sont propres, caractères mo-
biles et transitoires; et puis, à côté de cela, vous trou-
verez dans tous un certain nombre de caractères com-
muns et immuables : chez les hommes, par exemple, tel
est grand, tel autre petit; l'un est en santé, l'autre est
malade, Socrate est philosoplie, Périclès homme d'État;
mais tous ont certains caractères communs qui les font
hommes malgré leura différences individuelles et malgré
les transformations que chacun d'eux peut subir. Qu'estrce
que cela suppose? Une essence, une forme commune.
Forme se dit en grec Eidos ou Idea. Vidée est la forme
ou l'essence commune des êtres et des phénomènes de
même espèce. Il faut bien remarquer ici au'il ne s'agit
point de la forme en tant qu'elle est dans les individus.
Les caractères généraux oui sont dans l'objet ne sont pas
encore l'Idée. L'Idée est le principe de ces caractères : si
tous les cercles se ressemblent, si tous les hommes se
ressemblent, c'est qu'il y a le cercle en soi , l'homme en
soi , autrement dit l'Idée du cercle, l'Idée de l'homme,
oue tous les cercles, que tous les hommes imitent, ou
oont ils participent, pour reproduire les expressions de
Platon qui , d'ailleurs, s'en tient h cette indication vaçœ
sans expliquer nulle part en quoi consiste la participatioo
ou imitation des objets relativomcnt h leun Idées respe^
PLA
1439
PLA
tf yes. Lldée n*est donc pas ce qui est dans les objets ;
r*est ce qui est en soi et d*une manière absolue; c'est
Tcsscnce des objets individuels. Ce n'est pas une abstrac-
tion de notre esprit, une forme de notre entendement
que nous appliquons aux choses ou que nous en tirons
par voie d'abstraction : c'est on être, et mtme c'est l'être
par excellence; tout le reste n'a mie l'apparence de Tètre.
Si l'on pouvait douter, après avoir lu les principaux dia-
logues dans lesquels Platon s*est expliqué sur le compte
des Idéea, Phèdre, Théélète, Parménide, quelques parties
de la République, que tel est le sens qu'il leur donne,
le néoplatonisme se chargerait d'en donner la preuve. On
y verrait S^rianus et Proclus montrer que les Idées pos-
sèdent l'existence substantielle, qu'elles ne sont pas des
mots, comme Chrysippe, Ârchédème et la plupart des
Stoïciens l'avaient dit; ni des univcrsaux {V. ce mot)
tirés, par l'abstraction, des choses particulières, selon
l'opinion de Boéthus le péripatéticien et du stoïcien Cor-
nutus; ni de simples conceptions de l'&me humaine,
comme l'avaient pensé Cléanthe et même Longin, disciple
des néoplatoniciens; ni enfin des notions résidant éter-
nellement dans r&me universelle. Les Idées ne sont pas
seulement les objets étemels de rintelligence divine, ni
les conceptions qu'elle en a; elles en forment la sub-
stance, elles en constituent l'être {V. V Essai sur la mé^
taphysique d'Aristote par M. F. Ravaisson ). Telles sont
les Idées; ce sont elles qui sont l'objet de la science, car
elles réunissent les conditions que l'objet de la science
doit réunir : elles échappent à l'ihstabilité des faits sen-
sibles et individuels; et, en même temps, elles sont dis-
tinctes les unes des autres, et à ce titre susceptibles de
définitions.
A ce dernier point de vue, cependant , il ne faudrait
pas trop presser la doctrine de Platon pour en faire sor-
tir le svsteme de l'unité, de l'être absoln, tel que l'avaient
compris avant lui les Éléates, et que le reproduisirent
les néoplatoniciens do l'école d'Alexandrie ( V. École
ÉL^ATiQUB et NâoPLATONisuB). La Dialectique^ c.-à-d. la
méthode qui consiste à parcourir la série des objets in-
telligibles, en en recueillant les caractères de plus en
plus généraux, aboutit, de généralisation, en généralisa-
tion , à l'idée de l'être ou de l'un , qui est le véritable
Dieu et le Tout de la philosophie platonicienne. Si l'on
B*enferme dans ce point de vue, on peut donc adresser à
Platon le reproche d'avoir déplacé arbitrairement les
conditions de l'existence pour les attribuer à des abstrac-
tions, et pour aboutir, en dernière analyse, au pan-
théisme. Mais Platon , par bonheur, n'est pas un de ces
esprits tout d*une pièce, qui se soucient moins de la vé-
rité que de l'enchaînement logique de toutes les parties
de leur système. A cêté de la métaphysique plus que
contestable que nous venons d'esquisser, on trouve çà et
lâchez lui les éléments d'une théodicée plus en harmonie
avec les faits, d'une psychologie souvent fort pénétrante et
fort exacte, d*une morale toujours fort pure et fort élevée.
Ainsi Dieu n*est pas seulement l'Idée suprême dans la-
quielle toute existence vient s'absorber et se confondre,
(l'est encore le Bien , le soleil du monde moral ( népU"
l)lique, liv. ^ii ). Le Timée et le x* livre des Lois nous le
montrent comme le premier moteur, comme l'artisan
(Démiurge) qui arrange et dispose la matière sur le mo-
dèle des Idées. La matière est coéternelle à Dieu. On sait
que nulle philosophie, au sein du paganisme, n'a pu
s'élever Jusqu'au dogme complet de la création ; c'est un
point sur lequel il faut passer condamnation, et l'insuf-
fisance, h cet égard, de la tliéodicée de Platon ne doit pas
en faire oublier les grandes et belles parties.
En psychologie, Platon a fait deux choses très-impor-
tantes : il a établi par des considérations très-diverses
et d'une inégale valeur, les unes très-solides, les autres
subtiles et tant soit peu sophistiques ( V. le Pliédon)^ la
distinction de l'àme et du corps et rimmortalité de T&me.
11 en a énoméré et caractérisé les diverses facultés; sur
la question de l'immortalité, à ne considérer que les
résultats, il est bien plus netqu'Aristote (V. notre art Pé-
aiPATénsus). Sa théorie des Facultés, quoique confuse
encore en certains points, ne laisse jtas d'offrir dans ses
grands traits et dans la distinction de l'Intelligence (not»),
ae la Force {thumos) et de la Passion {spilkumèttcon)^
les éléments principaux et faciles à mieux coordonner de
la sensibilité, de l'intelligence, et de la volonté. Mention-
nons encore, à propos de psychologie, la théorie toute pla-
tonicienne de la réminiscence ( V, ce mot) par laquelle Pla-
ton prétend cxpli()uer toutes les conceptions supérieures
à l'eipérience aui se présentent à notre esprit. Ces con-
osptions no seraient, suivant lui , quo des réminiscences
d'une vie antérieure où nous aurions eu une vue complète
et plus distincte de la vérité ( F. Phéexistencb). Ceci n'est
qu'une hypothèse; mais ce qui présente un caractère tout
autrement sérieux, et ce qu'il y a de plus durable dans
la Philosophie de Platon, ce sont ses vues sur la morale.
Ici la théorie des Idées se réduit presque à un symbole.
L'âme tend à s'élever vers les Idées, vers la région cé-
leste où elle peut contempler le Beau, le Vrai, le Bien en
soi. Telle est la fonction de la Raison. Mais elle est dé-
tournée de cette contemplation sereine par les mouve-
ments turbulents des passions. Apaiser ces mouvements,
se détacher des objets sensibles , se dégager des ténèbres
où la foule des hommes reste plongée, tel est le but des
efforts du sage. Plus il s'éclaire, plus il devient vertueux.
Ce n'est d'ailleurs que par degrés que l'on s'élève à la
science véritable. L'esprit part de la sensatioif , traverse
l'opinion , et ne parvient qu'en dernier lieu à la science
ou connaissance rationnelle. C'est alors qu'en présence
des Idées du Vrai, de l'Ordre, et du Beau, triple manifes-
tation de l'Essence suprême, de Dieu ou du Bien qui
ne sont qu'un , T&me dédaignant le plaisir prend pour
modèles ces Idées et les reproduit en elle au moyen des
trois facultés dont elle est douée. Chacune de ces facul-
tés, bien dirigées, peut en efiet engendrer une vertu. Sa-
gesse, Courage, et Tempérance. Ou plutôt l'Intelligence
est, de sa nature, sagesse, et par conséquent vertu. Mais
il n'en est pas de même de la force, qui peut, selon
qu'elle est bien ou mal dirigée, devenir Courage ou Féro-
cité ; ni de la Passion, qui est vice de sa nature, et qui ne
devient vertu qu'autant qu'elle est domptée par le cou-
rage mis au service de la Raison. Il y a là une lutte dans
laquelle les instincts bas et grossiers l'emportent souvent
sur les efforts réunis des autres facultés. Cest, dans le
langage figuré de Platon, le cheval noir qui entraîne le
char, emblème de l'àme, en dépit du cheval blanc son
compagnon et en dépit du cocher, et qu'on ne peut
dompter qu'à force de coups et de châtiments.
Outre la Sagesse, le Courage et la Tempérance, Pla-
ton parle d'une quatrième vertu qu'il appelle la Jus-
tice. La Justice est l'harmonie des autres vertus; et cela
dans l'ordre politique aussi bien que dans l'ordre pure-
ment moral. Car, aux veux de Platon, la morale et la
politique ne sont pas deux choses difi'érentes. La poli-
tique n'est autre cnose que la morale étendue à un sujet
plus vaste, c'est à savoir l'État, au lieu de l'individu. C'est,
pour nous servir de l'ingénieuse comparaison de Platon ,
la même inscription en plus gros caractères, par consé-
quent plus facile à lire. Cela posé, il établit que, dans un
État bien constitué, l'on doit trouver la vertu et les di-
verses parties de la vertu. La sagesse sera l'attribution
des magistrats chargés du gouvernement de l'État; le
courage, celle des guerriers. Quant à la tempérance, c'est
une manière d'être bien ordonnée, l'empire qu'on exerce
sur ses passions; dans l'État elle sera représentée par le
pouvoir que ses gardiens, magistrats et guerriers, exer-
cent sur la multitude. Enfin, comme la Justice individuelle
consiste dans l'harmonie des autres vertus et de toutes
les facultés de l'àme, la Justice dans l'État consiste à ce
que chaque citoyen n'accomplisse que les fonctions aux-
quelles il est propre, sans que les rôles soient intervertis,
et en vue de l'unité la plus complète possible. Le meilleur
gouvernement pour Platon , c'est une aristocratie fondée
sur la vertu d'abord , et ensuite sur la naissance, autant
qu'elle sert à transmettre les vertus et les talents. Nous
ne saurions entrer ici dans l'examen des institutions plus
ou moins idéales à l'aide desquelles Platon a cru que cet
ordre pouvait être réalisé. C'est l'objet principal des deux
grands dialogues de la République et des Lois,
Nous avons dit que Platon professait très-nettement le
dogme de l'immortalité de l'àme ; ajoutons due ce dogme
paraît avoir été inséparable, pour lui , de celui d'une ré-
munération équitable des bonnes et des mauvaises actions.
Ce dernier point n'est nulle part précisément l'objet d'une
discussion scientifique, mais se trouve très-clairement
indiqué dans les récits allégoriques qui terminent le
Gorguu et la République, La vérité y côtoie différentes
opinions superstitieuses empruntées, à ce qu'il semble,
au Pythagorisme et aux mvthologiei; orientales, sur la
préexistence, sur la transmigration des âmes, etc. Ce qui
domine néanmoins, c'est un sentiment élevé de la Justice
divine et de la responsabilité des agents moraux.
La doctrine philosophique de Platon, telle qu'on vient
de Pesquisser, bien que fixée dans des écrits dont (sauf
quelques dialogues peu importants) on ne conteste pas
l'authenticité, ne laissa pas de subir, immédiatement après
la mort de son auteur, diverses transformations qui eurent
PLI
1440
PLD
pour résultat de ramoindrîr.L*éco1e platonicienne se par-
tage ( V, Acadùiie) : Speusippe, neveu et successeur im-
médiat de Platon, lui resto encore assez fidèle ; mais la
tradition platonicienne s'affaiblit rapidement avec Xéno-
crato, Polémon, Cratés, Crantor. Dans la Nouvelle Aca-
démie ( V, ce mot) il n^en resto presque plus rien. Elle
ne se ravive que dans le néoplatonisme alexandrin où
elle se complique d'éléments nouveaux ( V. comme com-
Elément de cet article et surtout pour les indications bi-
iioçraphiques relatives à la Philosophie platonicienne
l'article Platon du Dictionnaire de Biographie et d^His-
toire,) B— -I.
PLATONIQUE (Amour). V. Amodb.
PLATRES, en tormes oe Beaux -Arts, ouvrages mou-
lés en pl&tre, particulièrement d*après Tantique; — légers
ouvrages «n plâtre d'un bâtiment, tols qu'enduits, lam-
bris, corniches, plinthes, frises, rosaces de plafond,
festons, eto.
PLAUSTRUM. l F. ces mots dans notre Diction, de
PLÉBICISTE. S Biographie et d'Histoire.
PLECTRO-EUPHONE, instrument de musique in-
venté en 1838 par MM. Gama, de Nantes. C'était un
instrument à clavier, dans lequel les cordes étaient atta-
quées par des archets.
PLECTRUM. l V. ces mots dans notre Dictionnaire de
PLÉIADE. S Biographie et d'Histoire.
PLEIGE ou PLÉJURE (du latin barbare plegium, dont
les Anglais ont (ail pledge)^ ancien terme de Pratique,
qui signifiait caution.
PLEIN, en tormes de Blason, se dit de l'écu rempli
d'un seul émail. On nomme armes pleines les armoiries
sans écartolure ni brisure; ce sont gén^iUement celles
de la branche aînée de chaque maison.
PLEIN CINTRE. V. Aac , page 194, col. 2.
PLEIN JEU. V. Jeu.
PLEIN RELIEF. V. Bas-reuef.
PLÉJURE. V. Pleige.
PLÉNIÈRE (Cour). V. Cour, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d^nistoire,
PLÉNIPOTENTIAIRE, c-à-d. ayant plein pouvoir.
V. Ministre.
PLENUM, mot latin eqiployé en Allemagne pour dési-
gner une assemblée plénière ou générale.
PLÉONASME (du grec pleonasmos^ abondance), figure
de langage qui consiste à employer, pour donner plus de
force à la phrase, des mots inutiles au sens et que la
Grammaire rejetterait comme superflus. Tel est ce pas-
sage de Molière ( Tartufe, v, 3) :
Je l'ai vu, dis-Jo, tm, do mes propres yeux vu.
Ce qu'on appelle vu
Le pléonasme peut n'être qu'une redondance de mots,
comme montw en haut, descendre en bas, car en effet,
PLÉORAMA (du grec pléô^ Je navigue, et orama, vue),
spectacle inventé en 1831 par Langhaus, de Breslau. Ce
sont des paysages en mouvement; les points de vue
changent a chaque instant, et se montrent fuyant à peu
près comme lorsqu'on s'éloigne dans une barque.
PLEUREUSE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
PLEXI-CHRONOMÈTRE. V. Chronomètre.
PLINTHE (du grec plinthosy brique), membre d'ar-
chitecture plus large que haut, qui se met sous les pié-
destaux des colonnes , des statues ou des vases. Il leur
sert comme de chaussure, d'où lui est venu aussi le
nom de socle (du latin socculus, diminutif de soccus^
brodequin). Une plinthe est dite ravalée ^ quand elle a
une petite table refoulée, quelquefois avec des ornements.
On nomme plinthe de mur, une moulure plate et haute
qui, dans les murs de face, indique la ligne des planchers.
PLIQUE, signe de notation musicale ancienne. C'était
une aueue montante ou descendante accolée à la gauche
ou à la droite d'une note, et qui semblait faire à cette
note un pii (en latin pHca). Il ne faut point y voir, comme
on l'a dit, un signe de trille, ou une ligature indiquant
quelque retard, mais une sorte d'appogiature qui s'exé-
cutait toujours après la note et un peu aux dépens de sa
durée. La note pliquée se divisait donc en deux sons : si
elle était à l'unisson de la note suivante, l'appogiature se
faisait à une seconde supérieure ou inférieure, suivant
que la plique était ascendante ou descendante , si les
deux notes réelles étaient à la distance d'une seconde,
d'une tierce, d'une quarte, d'une quinte, la petite note
de la pliaue se faisait à l'unisson de la 2* note; si l'on
montait d'une note à l'autre, et que la plique fût descen-
diàDte, l'appogiature se faisait à la seconde au-dessous de
la 1" note; si la plique était descendante, tandis que Kl
deux notes réelles descendaient, la petite note se fusait
à une seconde au-dessus de la l** note réelle.
PLOMBAGE , apposition de sceaux en plomb faite par
les employés des Douanes aux frontières sur les marchan-
dises admises en transit ou qui ne doivent être visitas
qu'à leur arrivée à destination. On évite ainsi qu'elles:
soient soustraites ou échangera. Il est payé un droit à la
Douane pour cette opération.
PLOTT, monnaie d'argent de Suède, valant 1 fr. 89 c.
PLOUSTRË, vieux mot signifiant cadenas et peut-être
serrure.
PLUMASSIERS, ancienne corporation dont les statuts^
octroyés par Henri IV en Juillet 1599, furent confirmés
par Louis XIII en 1612 et par Louis XIV en 1644. Les
charges des Jurés de cette corporation furent érigées en
titres d'office en 1691. Le patron des plumaasiers était
S^ Georges.
PLUMATILE, vêtement des anciens Romains, dont
l'étoffe noire était peinte de manière qu'en la regardant
sous un certain Jour, on croyait voir des plumes d'oiseaux.
PLUME (Avoir la). C'était, sous Louis XIV, savoir
contrefaire, à s'y méprendre, l'écriture du roi, et être
employé aux écritures que celui-ci ne prenait pas la
peine de faire. V. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire au mot : Secrétaires de la MAriv.
PLUMES A ÉCRIRE. V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
PLUMET, bouquet dé plumes qu'on porte au chapeau,
soit pour ornement, comme dans la coiffure des femmes,
soit pour signe dlstinctif , comme les plumets militaires.
V. Panache.
PLUMITIF, en termes de Palais, feuille d'audience sur
laquelle on écrit, aussitôt qu'ils sont rendus, la minute
des arrêts et des jugements. Le greffier au plumitif est
celui qui tient la plume aux audiences. Le plumitif doit
porter en marge les noms des conseillers, des Juges, et
des membres du ministère public qui ont été présente; le
magistrat qui a présidé, ou, en cas d'impossibilité par
accident, le plus ancien des Juges, doit vérifier et signer
le plumitif à l'issue de l'audience on dans les 24 heures;
le greffier signe également.
PLURIEL, terme de Grammaire, nombre qui indique
la pluralité. Le pluriel des noms français, ordinairement
semblable au singulier pour l'oreille, s'en distingue la
plupart du temps pour l'œil en ce qu'on ajoute s à la ter-
minaison du singulier; Quelquefois l's est remplacé par
X. Ces deux règles s'étendent naturellement aux adjectifs.
Dans un grand nombre de noms et d'a^lectifs en al , VI
se change en u au pluriel , et c'est toujours Vx qu'on
emploie (V, Girault-Duvivier, Grammaire des gram-
maires, pages 135-170, 171-205, et 236-24Ô de l'édiUon
revue par Lemaire). Dans les verbes , le pluriel est plus
distinct : on le reconnaît à la terminaison ons pour la
l'* personne, ez pour la 2\ent (muet devant les consonnes)
pour la 3'. Le passé défini a pour caractéristiques àm^s,
(mes, ûmes, inmes; Ates, (tes, ûtes, intes; èrent, trente
urent, inrent. Le pluriel est souvent employé pour le
singulier. Par exemple, le nom des hommes célèbres prend
la marque de ce nombre : les Hercules, les Thésées, les
ScipUms, les Césars. On dit fréquemment nous pour je.
L'usage du pluriel vous en s'adressant à une seule pei^
sonne est particulier aux peuples modernes, chez les-
quels il exprime habituellement une déférence respec-
tueuse. Entre personnes habitua à se tutoyer, il est,
au contraire un signe de mépris ou de mécontentement
passager : dans ce cas, les adjectifs ni les participes ne
doivent prendre la marque du pluriel , quoique les verbes
la prennent; il en est de même avec le pronom de la
1'* personne en français. Sur l'emploi du pluriel avec
les collectifs, V. Collectif, Parthip, Syllepse. P.
PLUS-QUE-PARFAIT, une des variétés du temps pass
dans la conjugaison. Dans les langues modernes, il se
forme à l'aide d'auxiliaires {être ou avoir) mis à l'impiir-
fait et Joints au participe passé des différents verbes que
l'on veut conjuguer. U en est de même en latin dans les
verbes passifs, déponents et semi-déponents. Biais, dans
les verbes de forme active, ce temps a pour caractéris-
tique eram à l'indicatif, issem au subjonctif, isse à Hn-
finitif. En grec, sa terminaison active est etv, passive et
moyenne i&tiv; il a de plus pour caractéristique le redou^
hlement précédé et suivi de Vaugment (V. ces mots). —
Le plus-que-parfait tire son nom de ce qu'i^ exinîme
doublement le passé : en effet, par lui-même il a rapport
à un fait accompli maintenant, mais qui de plus i'étîdt
déjà par rapport à un autre fait également passé. Ccst C€
POË
U4I
POË
«l'eiprime très-bien la forme de ce temps en grec :
ridée du fait accompli est exprimée par le redoublement,
et celle de Tantériorité de ce fait par rapport à un autre
fait passé Test par Taugment initial. Au point de vue de
la syntaxe, ce temps ne s^emploie en grec et générale-
ment en latin que dans le sens rigoureux de sa définition,
au lieu qu'en français nous remployons souvent abusive-
ment pour le passé défini. Aussi notre plus-que-parfait se
trouve-t-il correspondre maintes fois à Taoriste. Le plus-
que-parfait grec est une des formes verbales qui, Jointes
à la particule dcv, expriment le conditionnel passé. P.
PLUS-VALUE, somme que vaut une chose au delà de
ce qu*on Ta prisée ou achetée. Dans le cas d'éviction, si
la chose vendue a augmenté de valeur, le vendeur est
tenu de payer à l'acheteur ce qu'elle vaut au-dessus du
prix de la vente {Codé Napol,., art. 1633). Dans les expro-
priations, lorsque, par suite de l'exécution des travaux
d'utilité publique, le restant d'une propriété partielle-
ment expropriée doit augmenter de valeur, cette augmen-
tation est prise en considération par le jury dans l'éva-
luation de l'indemnité (Loi du 6 mai iS41).
PLUTRUM. / V, ces mots dans notre Dictionnaire de
PLUTEUS. S Biographie «t S Histoire.
PLUTOGRAHE (du grec ploutos^ richesse, et cratéia,
domination), gouvernement ou état social dans lequel
l'influence et le pouvoir appartiennent aux riches.
PLUVIAL. V. Chape.
PNEUMA, mot grec qui veut dire souffle, et par exten-
sion esprit. Il désigne, dans hi cosmologie des Gnostiques,
le germe vital intellectuel dans le monde, provenant du
Dieu sui>rôme, éternel et bon, par opposition à H Psyché,
germe vital physique, œuvre du Démiurge, et à YHylè,
qui est la matière, siège du mal. Selon les Gnostiques,
les païens étaient sous la domination de VHylè, et les
Juifs sous celle du Démiurge; les chrétiens seuls avaient
le souffle divin, ils étaient pneumatiques,
PNEUMATOLOGIE, c-t-d. science des esprits, nom
donné : 1" à la partie do la Métaphysique qui traite de l'àme
humaine et de Dieu, et qui, à raison de ce double objet,
le divise en Psychologie et Théologie naturelle ; on y
traite aussi quelquefois des Anges et de l'àme des hôtes ;
2*> à la science chimériaue des Esprits ou des Génies,
êtres imaginaires qui, dans certaines religions, forment
la liaison entre l'homme et la divinité.
PNYX. I K. ces mots dans notre Dicttofitiatré
POBLAaONES. < Biographie et d^Histoire.
POCHADE peinture faite vivement, pour représenter,
par exemple, un sujet qui a plu, une tète d'un certain
caractère, etc. C'est comme une saillie ou un impromptu
en Peinture, sans recherche ni étude, sans préoccupation
de la correction du dessin ou de l'élégance de la touche;
mais il faut quo la vérité et l'esprit y soient,
POCHETTE, petit violon de poche dont se sei rent les
maîtres de danse pour donner leurs leçons. Il souie l'oc-
tave aigué du violon ordinaire.
POCHLINA^ genre de timbre employé en Russie pour
les papiers sur lesquels on écrit les requêtes, les sen-
tences Juridiques, les demandes d'appel, les actes de vente
d'immeubles , les passe-ports, etc.
POCHON ou POÇON, vieux mot signifiant écuelle et
cuiller à pot,
POCILLATOR. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d*Histoire,
POCOaiAN ou POCOiNCUI (Idiome). F. Mexique (Lan-
gues du).
PODATUS, signe de notation neumatique par lequel
on exprimait des groupes de sons liés par progression
ascendante. C'était un trait calligraphique dont Te déve-
loppement plus ou moins grand indiquait si la ligature
était de seconde, de tierce, de quarte, ou de quinte.
PODBRA, riche vêtement en lin des femmes de l'an-
denne Grèce, découpé en forme de dents de scie.
dRS^Ï^^* ) V. ce» mots dans notre Dictionnaire de
PO^HJB* ' S ^^oorapf^ie et d'Histoire.
POÊLE (corruption du latin palltum, manteau? ), voile
qu'on tend sur la tète des mariés pendant la bénédEiction
nuptiale, et dont les bouts sont ordinairement tenus par
des jeunes gens, parents du marié et de la mariée. Le
mot Poêle s'emploie aussi comme svnonyme de dais do
procession, et de drap mortuaire (y. ces mots),
poÉLs, appareil de chaufliage. C'est un fourneau de
terre cuite, de fidence, de tôle ou de fonte, dont la forme
^ très-vaôriable. Loi poêles en métal procurent une cha^
leor prompte et vive; mais, quand ils arrivent à un cer-
^^ degré de température, ils dépouillent l'air de la
pièce où ils sont placés d'une grande partie de son
oxygène. Cest ce qui fait préférer les poêles de briques
ou de faïence, dont la chaleur est d'ailleurs plus douce
et plus égale. Autrefois on appelait Poêle la chambre
chauffée par un appareil de ce genre.
POEME, nom générique de tout ouvrage de Poésie.
POÉSIE, mot difficile à définir, parce qu'on le prend
en différents sens, qui se substituent souvent l'un à
l'autre dans l'analyse ou dans la discussion. Tantôt il
désigne un certain genre d'ouvrages, que l'on distinguo
des autres productions de l'esprit humain ; on dit, en ce
sens, que la Poésie est plus ancienne que l'Histoire et
que l'Éloquence. Tantôt on entend par poésie un certain
talent d'une espèce particulière, qui se manifeste dans
les conceptions et dans le style, comme quand on dit que
la Poésie diffère de la Versification, qu'il peut y avoir des
vers sans poésie, et de la poésie sans vers. Si l'on parle
enfin de la poésie qui se trouve dans les spectacles de la
nature, dans les tableaux de Raphaël, dans la musique
de Mozart, le mot Poésie éveille l'idée d'une sorte de
vertu ((u'ont certains objets qui frappent nos sens, pour
produire dans notre àme une impression particulière.
La poésie est née de la sensibilité et de l'imagination.
Les émotions vives et fortes, les conceptions hardies et
originales, c^uand, pour la première fois, elles trouvèrent
leur expression dans le langage, furent des ouvrages de
poésie. Le mot grec pOiêsis, adopté par les Latins, signifie
simplement travail, et poïêtês (le poète) ne veut dire
qu'autsur ; le poète était donc l'auteur par excellence, et
la poésie l'ouvrage par excellence. De même le mot épos,
que nous traduisons par vers, signifiait parole : le vers
était la parole par excellence. Les premiers hommes, do-
minés par les sens et l'imagination, heureux de sentir,
de penser et de tout dire, trouvaient tout intéressant,
tout précieux : mais, plus tard, on s'aperçut qu'il y avait
des objets et des idées propres à la Poésie, lorsqu'à côté
d'elle se formèrent d'autres genres. Ainsi, la recherche
des vérités abstraites et générales donna naissance à la
Philosophie; le récit véridique des faits accomplis forma
l'Histoire; la discussion passionnée des intérêts publics
et privés derint l'Éloquence; la représentation des ob-
jets, des idées et des sentir*; >nts trouva des moyens nou-
veaux, et la Musique, U Sculpture, la Peinture, tous les
^tts qui s'adresseut aux yeux et aux oreilles, restrei-
Snirent le domaine de la Poésie, dont il devint nécessaire
e fixer les limites. Mais ces limites ne sont pas aussi
nettes qu'on pourrait le croire : la philosophie, quand
elle cherche à concevoir l'Être suprême, emprunte le
secours de l'imagination, et arrive à se confondre avec la
poésie; c'est ainsi que les premiers philosophes de la
Grèce, en traitant de la Nature, ont pris le style et la
forme des poètes. L'histoire, devenue un récit animé des
temps passai, ressemble fort à la poésie ; et lorsque la
poésie expose des événements vrais dans leur ensemble,
elle se rapproche beaucoup de l'histoire : Homère était
pour les Grecs un historien, prcsç[ue autant qu'un poète ;
Hérodote, dans sa véracité historique, a le charme de la
poésie. Considère-t-on l'éloquence : ce même Homère
était regardé par les rhéteun de l'Antiquité comme le
premier, au moins en date, des orateurs grecs. Parmi
nous, on pourrait dire que Corneille est par moments
le plus éloquent de nos orateur*. — Du côté des arts
proprement dits, la limite peut quelquefois aussi paraître
indécise, car Lessing a écrit un important traité sur les
limites de la poésie et de la peinture, son Laocoon; c'est
que la poésie a un but commun avec les arts, à savoir,
rexpression, ou plutôt la production du beau : mais ce
qui marque en quoi la poésie diffère des arts, ce sont les
moyens. La musique s^adr^»e à l'àme par l'ouie et par
les sens ; la peinture et la sculpture, par la vue, au moyen
des couleurs et du relief; la poésie s'adresse à Tàme par
le langage, qui est l'expression la plus directe de la
pensée, et le plus sûr moyen de communiquer entre deux
esprits. Elle est de la nature des arts par la fin qu'elle se
propose; cependant on conteste qu'elle soit un art, parce
que, dit-on, le propre d'un art est de présenter un en-
semble de préceptes pour arriver à une fin, et que la
poésie n'a pas de théorie et ne peut en avoir, puisque
tout y dépend de l'inspiration du génie. Dans cette opi-
nion, on prend le mot poésie dans le sens du talent na-
turel et tout personnel que le poète déploie; mais alors
on pourrait dire aussi qu'il n'y a pas d'art de la musique,
de la peinture, ni de la sculpture, attendu qu'il nj a
pas de préceptes qui puissent donner du génie au musi-
cien, an peintre ou au sculpteur. D'autre part, si les
règles trop strictes sont gênantes pour le génie des ai»^
94
POÉ
un
poff
tean, il ne s^ensuit pas qu*il n*y ait pas an ensemble de
préceptes que le poète doit nécessairement pratiquer, et
qui l^Lident à gouverner son génie. On ne saurait, en
effet, citer en aucun pays aucun grand poOte dont les
chefs-d*œuYre n*aient été ou le résultat d*une théorie de
la poésie, ou le résumé de tentatives faites avant lui par
d'autres poètes qui sont depuis tombés dans Tobscunté.
Les préceptes, pour être mis en exemples, n'en sont pas
moins des leçons; et les essais infructueux sont aussi une
théorie pour le génie qui sait en tirer des enseignements.
La Poésie est donc un art ; et quant à son but et ses'
moyens, on peut la définir : « L'art d*émouvoir et de
charmer Tesprit au moyen du langage et des vers. »
Quelques tentatives heureuses dans nos littératures
modernes nous ont fait voir que les vers ne sont pas ab-
solument essentiels à la poésie; néanmoins ils lui sont
propres, et forment un de ses caractères distinctifs. A
rorigine il n*y eut pas de poteie sans vers : les prêtres,
les initiateurs, parlant comme inspirés, et donnant leurs
pensées comme des révélations divines, les ont entourées
d*un appareil en quelque sorte surnaturel, c.-à-d. le chant
et. les vers, étroitement unis entre eux ; adroit calcul, car
\(L singularité même d*une phrase rhythmée communique
flu langage un caractère solennel, annonçant qu'il ne
s'agit point de pensées ordinaires. Pendant bien des
siècles, les pofltes ont considéré les vers comme une
partie essentielle de la poésie, si bien que la poésie s'est
appelée VArt des vers. Les poèmes en prose ne vinrent
3ue très-tard, et peut-être y fut-on préparé par les tra-
uctions en prose d'Homère et de Virgile. Le Télémaqtte
est le premier ouvrage fameux que la France ait eu en
ce genre ; il a servi à autoriser la prose poétique. Aupara-
vant, on pouvait bien rencontrer de temps en temps,
dans l'éloquence et dans l'histoire, quelques inspirations
dignes des poètes ; dans les Oraisons funèbres de Bos-
suet, on trouve plus d'un passage que la poésie ne sau-
rait surpasser : mais ce n'étaient que dos exceptions, et
l'on ne se serait pas avisé d'écrire tout un ouvrage de
ce style. L'exemple une fois donné, la prose poétique a
obtenu drbit de cité dans ta littérature. Toutefois, on ne
saurait nier que la versification n'ait sur la prose d'incon-
testables avanta^ : elle communioue au style un charme
analogue k celui de la musique; elle distribue avec art
les accents et les silences, et s'efforce de peindre les
idées par le son et le mouvement des vers. Elle double
l'énergie et la vivacité du style, en obligeant l'auteur à
resserrer les tours languissants ; elle proscrit toute ex-
pression faible, et invite l'écrivain à nien faire, en ré-
compensant son travail, car elle grave ses pensées dans
la mémoire bien mieux que la plus belle prose.
Le style de la poésie, fût^il même privé de la versifi-
cation, a encore des caractères particuliers qui en font
comme une seconde langue dans la langue d'un pays;
souvent même, le principal mérite d'un ouvrage poé-
tique réside dans le style, si bien que l'on prend quel-
quefois le mot de poésie dans le sens restreint de style
poétique. Cette poàie du style se compose de trois élé-
ments : les termes poétiques , l'usage poétique des
termes, et les tours poétiques. Il n'y a pas de langue qui
n'ait des termes réservés à la poésie, et d'autres qui en
sont bannis. Ces derniers sont ordinairement ceux qui
expriment des objets ou des idées désagréables ou indif-
férants pour l'imagination : tels sont les termes scientifi-
ques ou techniques, et ceux dont on se sert pour les usages
vulgaires de la vie. Au x\ii* siècle, on attribuait volon-
tiers aux mots une noblesse ou une bassesse intrinsècpie :
il faut cependant reconnaître que ces qualités ne sont pas
dans les termes, mais dans les choses qu'ils désignent,
et qu'ordinairement, quand le mot ne peut être souffert,
c'est que la chose elle-même répugne. Il arrive néan-
moins quelquefois que c'est le mot que l'on proscrit de
la poésie, et non la chose : alors, s'il devient nécessaire
de désigner l'objet dans un ouvrage poétique, on l'ex-
prime par un terme différent de celui du langage vul-
gaire, et qu'on appelle synonyme poétique. Ia langue
grecque, l'anglais, l'allemand, sont riches en termes
poétiques; la langue française en est pauvre : notre poésie
fait sa langue par élimination, et rejette la plupart de
ceux de la langue commune; elle est à la fois pauvre et
dédaigneuse. — A défaut de mots qui lui soient propres,
et même lorsqu'elle a un vocabulaire particulier, la poésie
s'approprie les mots de la langue ordinaire, en leur don-
nant une valeur qu'ils n'ont pas par eux-mêmes. Elle les
associe entre eux de manière h leur donner des signiflcar
tions nouvelles, à les relever les uns par les autres, à leor
prêver une grScè et une énergie accidentelles qui font îl«
lusion sur leur valeur accoutumée. Cest ce qn'ensdgne
la théorie des figures ( V. ce mot)^ qu'on rattacha ordi-
nairement à la Rhétorique, quoiqu'elle soit d'un plus
grand usage dans la poésie que dans l'éloquence. En gé-
néral, la poésie cherche les expresdoos qni représen-
tent la pensée à l'imagination sous une forme sensible :
car, pour s'emparer de l'esprit, il faut lui faire voir et
sentir les choses dont on lui parle. — Enfin, la poésie
se donne une allure particulière par la hardiesse et la
liberté avec laquelle elfe s'affiranchit de certaines entraves
de la ^mmaire. Cette hardiesse, quoique encore très-
restremte, est plus remarquable en français que dans les
autres langues, précisément parce que notre construction
ordinaire est assujettie à un ordre pr^èsque invariable.
La suppression des liaisons et des répétitions, les ellipses
hardies, quelques inversions réglées, msAi dont on peut
tirer un heureux parti avec beaucoup d'art, telles sont
les libertés autorisées de notre poésie. De nos Jours,
3uelques écrivains audacieux ont essayé d'en introduire
e nouvelles, et le défaut de discrétion a compromis leurs
réformes.
On dit souvent que la poésie est une création. Qu'est-
ce que créer? Cest faire de toutes pièces ; c'est produire
aussi bien le fond que la forme. En ce sens, l'homme ne
crée rien, pas même ses idées : il ne fiut qu'arranger et
composer différents matériaux d'après des idées ^que
lui suggère l'observation, et qu'il combine de manière
à en former de nouvelles. On dit qu'il crée, quand ses
combinaisons sont assez neuves pour qu'on n'en puisse
renébntrer le modèle ni dans la nature, ni dans les
œuvres de l'art. Il est vrai que la plupart des oarrages
poétiques exigent cette espèce de eréatum; mais le mot a
le défaut d'être vague et équivoque. Si la poésie était
d'autant plus haute que la création est plus complètement
originale, il s'ensuivrait que la poésie fontastique serait
le plus haut degré de la poésie : de sorte que les plus
grands de tous les poètes ne seraient pas les Homère,
les Sophocle, les Virgile, les Corneille, mais les Apulée,
les Perrault et les Hoffmann. La poésie ne crée qu'en
imitant la nature; voilà pourquoi Aristote dit que tous
les genres de poésie sont des imitations. Ce grand esprit
n'a pas été lui-même assez explicite : car, en poussant
l'imitation h ses dernières limites, on arrive au réalisme,
qui est le contraire de la poésie. Le véritable objet de
la poésie est l'idéal des sentiments , des actions, des ca-
ractères, c-à-d. la nature dégagée, par l'imagination, de
cette complexité des circonstances, de ce mélange d'élé-
ments divers qui nuit à l'unité de l'impression. Ainsi,
quand on veut admirer dans un homme une verra, on la
trouve déparée par une faiblesse; quand on est frappé
d'un grand vice, on le voit corrigé par une bonne qualité;
un beau visage a des imperfections; une action généreuse
en apparence peut avoir des motifs intéressés; et, ainsi,
il est rare qu'un esprit attentif n'aperçoive pas à la fois,
dans un même objet, des traits qui se nuisent récipro-
quement. Lu poésie sépare les traits disparates, de ma*
nière à rendre l'impression plus forte en la simplifiant
Voilà comme elle imite, comme elle doit imiter. En même
temps elle rassemble dans ses types les traits de diffé-
rents modèles, de manière adonner à un objet particulier
un caractère général, et par cela même idéal. On peut
donc dire que la poésie crée en idéalisant la nature, ou
que la poésie est la représentation de la nature idéalisée;
c'est Apelles empruntant à vingt modèles di^'ers les per-
fections qu'il devait donner à une image de Vénus.
Les différents genres de poésie correspondent aux dif-
férents objets d'imitation ou aux différentes manière»
d'imiter. La poésie lyrique exprime la situation de l'âme
d'un homme en qui débordent des sentiments passion-
nés, qu'il manifeste avec toute l'énergie, la hardiesse et
le désordre d'une imagination qui ne se possède plus ;
l'enthousiasme en est l'essence. — La poésie épique o
Vépopée peint les actions et les mœurs héroïques, au
moyen du récit, auquel se mêlent des discours et des
descriptions. — La poésie dramatique imite les passions,
les mœurs et les aventures des hommes, en faisant pa-
raître des personnages sur un théâtre où leur histoire
s'accomplit devant nos yeux, et où ils nous font eux-
mêmes confidence de leurs sentiments les plus secrets.
— Ce sont là les trois genres principaux de la poésie ; ils
peuvent se diviser en plusieurs espèces, et l'on y ajoute
encore des genres accessoires ou formés du mélanse
des principaux. Ainsi^ à la poésie lyriqae se rattache la
poésie élégiaque , qui en est une variété ; la poésie dra-
matique se divise en tragédie, comédie, et drame, com-
positidDs qui ont elles-mêmes lenrs subdiviaiofis et leois
POÉ
1443
POÉ
lariétés. — Lft poésie didactique, qui ne vaut guèro que
par la Tersiflcation et le style^ est un enseignement orné
des formes de la poésie. — La poésie légère, avec la
grande variété de ses formes, peut quelquefois, suivant
la nature des sujets ou la manière de les traiter, rap-
peler en petit les différents genres de la poésie ; mais, le
plus souvent, ce n'est au'un amusement, un caprice,
soumis seulement aux règles les plus générales et les
plus libres du style et de Ta versification {V. les articles
consacrés à ces genres, ) G.
POÉTIQUE, méthode pour conduire les poètes à la
perfection de leur art. Elle ne fait pas de poètes, mais
elle vient en aide à la nature, en réglant remploi des dons
naturels qui font le poète, ti faut distinguer la Poétique
générale, qui pose certains principes universels, immua*
bies, des Poétiques particulières , applicables à telle ou
telle Littérature, et même à tel ou tel genre littéraire.
Tous les grands siècles littéraires ont eu leur Poétique :
ainsi, Âristote a écrit la Poétique du siècle de Périclès ,
Horace celle du siècle d'Auguste, Vida celle du siècle de
Léon X, Boileau celle du siècle de Louis XIY. Ce n*est
pas que les poètes expliquent Jamais d'après quelles idées
ils ont créé; mais des esprits plus calmes recueillent ces
idées , et les formulent.
L Poétique d^ Aristote, — Aristote traite la poésie comme
un objet de science, parce qu'elle naît d'une faculté de
notre &me, soumise, ainsi que les autres, à des lois na-
turelles. Suivant son maître Platon, on n'est pas poëte
sans être possédé d'un Dieu et en délire : Aristote soumet
le délire poétique à une métbode; il observe les œuvres
qu'a produites la pofeie, et cherche par quels caractères
distinctifs elles appartiennent à la poésie plutôt qu'à
tout autre genre. La poésie une fois définie, il en compte
les espèces, divise chacune en ses éléments, qu'il subdi-
vise encore, et, prenant ensuite ces parties une à une, il
règle la conduite que doit tenir le poète. Cette méthode
serait excellente, si la nature de l'imagination admettait
des catégories aussi limitées que celles de la Logique, et
si les études de l'observateur avaient pu s'étendre sur
tous les essais des différents pays et des différents temps.
Mais Aristote ne connaît que la littérature grecque, et il
ne lui vient pas à l'esprit qu'un autre peuple puisse
avoir un génie différent du génie grec, ni que, chez la
race hellénique elle-même, des circonstances nouvelles
puissent faire naître des genres nouveaux.^ Heureusement
le modèle au'il étudie peut suppléer à beaucoup d'autres :
l'esprit philosophique que les Grecs ont porté en toutes
choses a communiqué a leur poésie môme un caractère
de généralité par lequel elle s'accommode aux génies des
peuples les plus divers, quoique par le détail elle soit
trop grecque pour convenir en tout à d'autres nations.
Tous les principaux genres poétiques ont été inventés par
le peuple grec , et c'est lui qui leur a imposé les noms
qu'ils portent encore aujourd'hui, même après s'être mo-
difia. Ils sont nés comme spontanément de la religion
et des mœurs de la nation ; mais c'est la réflexion philo-
sophique qui les a perfectionnés peu k peu, en démêlant
leur essence des conditions accidentelles do leur déve-
loppement, et en excitant les poètes à se rapprocher tou-
jours d'un idéal de beauté qu'enseigne la métaphysique
de l'art. Et comme aucune race du genre humain n'a été
mieux douée pour la métaphvsique et la pratique à la
fois que la race hellénique, elle a pu atteindre et par la
pensée et par l'exécution Jusqu'à un idéal au-dessus du-
quel rien n'a été ni produit ni conçu depuis.
Aristote admet, au moins implicitement, qu'on peut
être poète par la seule puissance de la nature, puisqu'il
dit que les hommes qui font ce qui est le propre de la
poésie le font les uns par art et les autres par /ia6i-
tude (ch. i) ; et encore, que « le talent poétique exige un
heureux naturel ou un esprit en délire » (ch. xvu). Mais
de savoir si la métliode est un bien ou un mal pour la
poésie, c'est une question qu'il ne pose même pas. Les
Grecs sentaient si bien l'avantage qu'il y a pour le génie à
marcher dans une voie tracée, où les forces ne se perdent
pas en vaines explorations, qu'ils ont cherché dans tous
les arts bien plus à travailler d'après un idéal une fois
trouvé, qu'à revendiquer l'indépendance absolue du génie
personnel t c'est à cette sagesse que nous devons les
œuvres si parfaites qu'ils nous ont laissées. Aristote dé-
finit la poésie une imitation (dont le modèle est évidem-
Sires que ceux qui se voient dans la réalité » (ch. m).
1 ijoate que, « puisque la tragédie est l'imitation de
f personnages meilleurs que la réalité, il nous faut imiter
es bons peintres de portraits ; car, en rendant les traits
propres du modèle, et en donnant la ressemblance. Ils
peignent plus beau que nature » (ch. xv); et encore, que
« le poète, en imitant des hommes de tel ou tel carac-
tère, doit en faire comme des modèles de ce caractère »
{ibid.). On peut affirmer qu* Aristote appliquait, dans
sa pensée , ces principes à tous les genres de poésie, et
que l'imitation, en prenant la nature pour modèle, doit
l'embellir sans l'altérer; ce qu'elle fait en représentant
non les singularités d'une personne, mais les traits géné-
raux des passions, qui sont comme Tidéal des passions
particulières. Aristote préfère le faux qui est vraisembla-
ble au vrai qui ne l'est pas (ch. ix, xxv), ce qui com-
plète la théorie de la poésie classique relativement à
la manière d'imiter la nature. Par la recherche de l'idéal ,
elle s'éloigne du réalisme ; par la recherche du général
et du vraisemblable, elle est l'opposé du romantisme.
Aristote distingue les différents genres de poésie, c.-à-d.
d'imitation, par la nature des moyens, de la matière, et
de la manûre. Les movens d'imitation sont : le langaige,
les vers, la musique ; la matière de l'imitation , ce sont
les actions et les caractères des hommes; la différence de
la manière consiste à imiter ou par le récit, ou par la
représentation des personnages en action. Ces éléments,
combinés de différentes façons, constituent les genres
poétiques. Les moyens d'imitation ne suffisent pas pour
déterminer le genre de poésie. L'usage s'était établi, chez
les Grecs, de désigner certains genres de poésie et de
poètes par le nom du genre de vers dont ceux-ci se ser-
vaient : de là ces noms d^épopée, d'élégie, etc., qui ne dé-
signent rien qu'une certaine espèce de vers, laquelle peut
s'applicpier à plus d'un genre de poème. C'est ce qu* Aris-
tote blâme avec raison, tant son esprit s'appliquait à
distinguer l'essence des choses de leurs circonstances
accidentelles. Malgré cette hauteur de vues, il lui est
arrivé de poser en lois des usages qui n'avaient d'autre
fondement que la tradition; par exemple, il décrit le rôle
du chœur, ses parties, etc., avec la même assurance que
si le chœur était un élément essentiel de la tragédie
(ch. XII ), quoiqu'on ait pu faire depuis des tragédies où
l'absence de chœurs ne se fait nullement sentir, et que
les chœurs soient devenus une partie d'un genre tout
différent, l'opéra. Il insiste de même sur les reconnais-
sances (ch. XVI ), comme si l'on ne pouvait faire, sans ca
moyen, de tragédie parfaite. — Quelquefois aussi, des
observations Justes le conduisent à des conséquences trop
exclusives ; ainsi , ayant observé que la tragédie agit le
plus souvent sur nos âmes par la pitié et par la terreur,
il place ces deux sentiments dans la définition de la tra-
gédie (ch. vil ), comme si elle ne pouvait trouver d'autres
moyens de nous intéresser. Cependant déjà les Perses
d'Eschyle devaient exciter dans rame des AUiéniens l'en-
thousiasme patriotique beaucoup plus que la terreur et
la compassion; chez rous, Corneille a fait de l'admira-
tion le ressort principal de plusieurs tragédies, telles que
Cinna^ Pompée, Ntcomèae. —Aristote prétend encore
qu'un petit nombre de familles sont seules propres à
fournir des sujets de tnu;édies (ch. xm); d'où il est ré-
sulté que les tragiques mmçais sont alite trop souvent
chercher leurs sujets dans les familles des Atrides et des
Labdacides, qui nous sont étrangères, au lieu de les
prendre dans notre histoire. — - On a souvent exagéré,
surtout en France, la rigueur des principes d'Aristote, et
on lui a prêté des docânes qu'il n'a Jamais énoncées;
ainsi, dans la théorie de la tragédie, nos auteurs ont éta-
bli , comme une règle absolue, ce qu'on appelle les trois
unUés : cependant Aristote n'a rien dit de l'unité de lieu,
n'a dit qu'un mot assez obscur de l'unité de temps, sans
l'imposer, et n'a prescrit que l'unité d'action (ch. viu,
XXIV, v), qui est en effet une loi d'art et de bon sens.
Il y aurait donc beaucoup de restrictions à faire sur
l'autorité absolue des préceptes d'Aristote; mais un grand
nombre de ses prescriptions n'ont pas vieilli et ne peuvent
vieillir, parce qu'elles sont la philosophie même de la poé«
sie. Malheureusement, l'ouvrage que nous possédons sous
le titre de Poétique n'est qu'une ébauche de la pensée d'Aris-
tote, un recueil de notes écrit vraisemblablement vers la
fin de la vie de l'auteur, ou peutrêtre pour servir de pro-
gramme à un traité qui est perdu. £e génie d'Aristote s'y
montK} tout entier dems la profondeur des vues; mais le
talent de l'écrivain ne s'y montre qu'en germe : l'expres-
sion est souvent obscure, comme celle d'un homme qui
n'écrit ouepour lui-même ; l'ordre, Indiqué seulement pour
l'ensemole, manque souvent dans le détail; les questions
principales ne sont résolues qu'en abrégé; dee questions
POÉ
un
FOÉ
accessoires, au contraire, reçoivent immédiatement tout
le développement dont elles ont besoin. Enfin , de tous
les genres poétiques, deux seulement sont traités avec
quelque détail , la tragédie et Tépopée : il est vrai qu'Aris-
tote, voyant dans la tragédie comme le résumé et Tessence
de tous les genres, a pu*, en s*étcndant sur celui-là, in-
diquer ses principales idées sur la poésie en général.
Toutefois, il serait injuste de juger un pareil livre comme
Tcxpression complète et définitive de la critique d*Âristote,
et de lui reprocher certaines lacunes, comme on le
pourrait faire pour un ouvrage auquel Tauteur aurait
mis la dernière main. V. Eggcr^ Essai sur Vhistoire de
la crUi(itte chez les Grecs, suivi de la Poétique d'Ans-
toic, Paris, 1849, in-go.
II. Art poétique d'Horace. — - Entre Aristote et Horace
se placeraient un grand nombre de travaux sur les poètes
et sur la poésie dans les écoles philosophiques de la
Grèce et les écoles littéraires d'Alexandrie et de Pergame :
mois ces travaux ont été perdus; nous citerons seule-
ment Néoptolème de Parium , en Troade, auteur d'une
Poétique, où Horace a puisé, au dire d'un de ses com-
mentateurs. Cet auteur n'a donc pas le mérite de l'in-
vention originale. Il n'a pas davantage le mérite de la
méthode : elle répugnait à son génie, le plus savant et
le plus réfléchi des génies capricieux. N'attendez donc de
lui ni définitions, ni déductions, ni divisions philoso-
phiques; il substitue aux théories abstraites des exem-
ples, et, au lieu de doctrines générales, énonce des pré-
ceptes particuliers. Sa Poétique est éminemment pratique;
ses conseils sont ceux d'un pointe de grande expérience,
d'une raison infaillible, d'un goût exquis, d'une autorité
discrète et tolérante. « Pour moi, dit-il, je ne vois ni ce
que peut faire l'étude sans une riche veine poétique, ni
ce que peut faire le naturel sans culture. » Il voue au ri-
dicule ces prétendus hommes de génie, qui croient qu'on
ne peut être poète sans avoir l'esprit un peu dérangé, et
sans affecter des manières étranges. Quant aux études
qu'il recommande aux poëtes, il veut qu'ils s'instruisent
à fond dans la philosophie morale. Ses préceptes géné-
raux sont les lois mômes du bon sens appliqué à la
poésie : « La poésie n'admet pas la médiocrité ; — Les
petites se proposent ou l'utilité ou le plaisir des lecteurs;
on n'obtient tous les suffages qu'en mêlant l'utile à
l'agréable; — Il faut travailler d'après nature; — Pour
bien écrire, il faut avoir l'esprit nourri de pensées so-
lides ; — L'imagination du poôte a toute liberté, mais à
condition de mettre de l'harmonie dans ses conceptions ;
— Avant d'entreprendre un ouvrage, il faut bien con-
naître ses forces; — Si l'on ne force pas son talent, on
ne trouvera pas de difficulté à écrire; — Le mérite de
détail n'est nen, sans l'à-propos, la convenance des par-
ties, et la beauté de l'ensemble ; — A chaque genre de
poésie convient un certain genre de vers et un certain ton
de style, etc. » On pourrait multiplier ces excellents pré-
ceptes, dont il existe un admirable commentaire dans le
Projet de Poétique de Fénelon {Lettre sur les occupations
de l'Académie française). Quant aux moyens de relever
la poésie romaine, ils se bornent à imiter savamment la
poésie grecque : Horace ne tient nul compte des traditions
romaines; quelque faible que fût l'art original de ses com-
patriotes, il méritait une mention ; mais au siècle d'Au-
guste on l'avait oublié pour suivre l'exemple des Grecs.
Les genres auxquels Horace s'attache de préférence, à
l'exemple d* Aristote, sont la tragédie et l'épopée : tous ses
exemples sont tirés des tragiques grecs, ou d'Homère, et
des poètes cycliques de la Grèce. Il n'imagine rien hors
de ces modèles. Quand il fait l'histoire de la poésie en
général, ce n'est que l'histoire de la poésie grecque qu'il
raconte : il semble qu'il ne puisse pas y en avoir d'autre.
On croirait même qu'on n'y peut rien changer, ni rien
en retrancher : le cliœur, avec son accompagnement mu-
sical, lui parait si bien de l'essence de la tragédie, qu'il
ne lui vient pas à l'esprit de remarquer que, chez les
Grecs mêmes, l'importance du chœur a toujours été en
diminuant, et que la tragédie, en s'éloignant de son ori-
gine, devait finir par se débarrasser entièrement des
langes de son enfance. On est plus surpris encore de la
longueur de ses développements sur le drame satyrique,
genre exclusivement atuque, et qui ne pouvait en aucune
façon convenir au génie romain; mais il faut que toute
la littérature grecque passe à Rome. Pour l'invention des
■ujets, c'est encore à la Grèce qu'il faut emprunter. II vaut
mieux mettre en actes quelque partie de ïIHade que de
hasarder sur la scène un sujet nouveau et inconnu ; em-
pruntez à la tragédie grecque qûelau'une de ses fables ;
donnez aux personnages le caractère que la tradition
poétique a consacré. Les préceptes sur l'épopée ne soat
guère autre chose que l'analyse des mérites d'Homère, et
des défauts des poètes cycliques : Horace enseigne à faire
des poèmes sur le modèle de VIliade et de VOdyssée,
Ainsi, non-seulement le sujet, mais le plan même doit
être emprunté des Grecs. Il faut leur prendre encore
leurs différentes espèces de vers et leur sévérité de ver-
sification. Si la langjue romaine est trop pauvre, pour
l'enrichir on ira puiser à la source de la langue grec-
que. Ce qui donne seulement un caractère romain à la
Poétique d'Horace, ce sont les reproches qu'il adresse à
ses concitoyens : il réprimande la négligence des poètes
et l'indulgence ignorante du public; la grossièreté de
certains écrits, notamment des comédies de Plaute, qu'il
traite avec une rigueur souverainement injuste; les pré-
tentions des riches, que leurs flatteurs érigeaient en
poëtes; l'amour du lucre, C[ui avait toujours été la pas-
sion dominante et antipoétique du caractère romain, etc.
En un mot, l'œuvre d'Horace est en maint passage une
satire. Il n'avait écrit qu'une simple Êpttre aux Pisons,
avec cette liberté de plan, cette variété de ton, cette vi-
gueur, cette concision, et ce bonheur d'expression qui
lui sont propres. C'était une conversation sur la poésie.
Comme elle renfermait une Poétique, on lui en a donné
le nom ; mais il n'y faut pas chercher ce qu'il n'a pas
voulu y mettre, une forme méthodique et didactique :
c'est un modèle de l'urbanité mordante des Romains, et
non de la parole grave et compassée d'un maître. V. Feys,
LArt poétique d'Horace considéré dans son ordonnance,
1850, in-8».
III. Art poétique de Vida. — Le savant versificateur de
Crémone enseigne l'art d'emprunter aux Anciens, et sur-
tout à Virgile, leurs pensées et jusqu'à leurs expressions :
il a fait une excellente Poétique de collège, et rien de
plus. Il montre aux écoliers de grande espiérance à faire
passer Virgile et Horace dans leurs vers, non en pla-
giaires, mais en disciples ingénieux. Les trois livres de son
poème prêchent d'exemple ; ce sont de très -habiles pas-
tiches des maîtres de la poésie latine. Mais de théories
nouvelles, il ne lui en faut pas demander. Vida voudrait
que la poésie italienne de son temps ne fût autre chose
que la poésie du siècle d'Auguste ressuscitée. Poète du
XVI* siècle, prélat chrétien, il ne semble pas se douter de
la chute de Jupiter et de l'Olympe antique, tant il in-
voque de bonne foi les dieux Indigètes de Rome et Apol-
lon père de Tnote, tant il se persuade aisément que le
pape Léon X est le prêtre des dieux et même leur reje-
ton. Au moins a-t-il écrit, ou plutôt compilé, en très-bon
latin moderne, un traité d'éducation qui pourrait être
utile, bien que tout ce qu'il contient de meilleur se re-
trouve ailleurs, chez des écrivains plus originaux.
Un contemporain de Vida, Jules Scaliger, a composé
aussi un Art poétique en huit chants, qui n'intéresse que
les érudits. Le Tasse a écrit des Discours et des Lettres
sur la Poétique. En France, plusieurs Poétiques parurent
au XVI* siècle, entre autres celles de Thomas Sébilet ,
de Claude Boissière, de Jacques Pelletier, et de Pierre
de Loudun; Vauquelin de La Fresnaye publia son Art
poétique en 1G04. Citons encore la Poétique de Jules
de La Mesnardière (4640) , et VArt poétique de Golletet
(1658).
IV. Art poétuiue de Boileau. — Lorsque Boileau entre-
prit do donner. des lois au Parnasse français, le désordre
y régnait. Deux hommes de génie avaient, il est vrai,
créé la tragédie et la comédie, mais le goût public n'était
nullement formé. La littérature d'une nation ne s'alTermit
dans sa véritable voie que lorsque la théorie se joint aux
exemples. On savait encore si peu, dans le second tiers
du XVII* siècle, ce qrue devait être la poésie française,
qu'on applaudissait les imitations italiennes et espa-
gnoles. Boileau marqua la voie du génie français avec
une énergie et une précision merveilleuses. L'esprit fran-
çais aime la méthode et la règle; il prise plus le bon
sens que la fantaisie, et la passion vraie que l'audace de
l'imagination : c'est ce que Boileau a vu et enseigné
mieux que personne, et nul, plus que lui, n'a contribué
à faire de la poésie française une poésie classique, c-à-d.
un type de perfection dans un cèrtdn genre. — H com-
mence par écarter du Parnasse une foule de malheureux
écrivains oui prennent « pour génie un amour de rimer •#
A l'exemple d'Horace, il trouve (ch. I*') qu'
Il faut
genre
n n'est point de degrés du médiocre an pire
que l*hoinme né pour être poète sache pour quel
la nature l'a fait, et mesure son ambition à em
POÉ
1145
POl
forces. — Il se montre dès Vahord (ch. i) le poSte de la
nddOD, 6t (lit :
Aimez donc la nlion : que toq}oiir* ^oa écrits
Empruntent d'elle seule ec leur luttre et leur prix.
à prendre ces vers à la lettre, on pourrait dire qu'il ban«
nit de la po^ie la poésie eUo-mème, dont la nature est
autre que celle de la raison; mais Boileau s'adresse
aux poètes qui sacrifient la raison à la rime, et c'est par
antithèse qu'il leur parle ainsi. Il sous-entend Timaginar
tion, et s'arr6te sur ce qui avait besoin d'être fortement
enseigné, le bon sens et le bon goût. Il bl&me les faux
brillants de l'Italie, la pompe vaine du gongorisme, les
pointes des Précieuses, et même les agréments de détail
qui nuisent à l'ensemble; en un mot, tous les abus du
bel esprit, symptômes de décadence, et qui venaient chez
nous d'un défaut de maturité.
Ce qui ne lui parait pas moins précieux que le bon
sens, c^est la passion vraie. Son poème est tout rempli
de préceptes sur ce sujet; il ne craint rien tant que la
froideur. Il veut (ch. m) que partout
La passion émue
Aille chcrcber le cœur, l'échauffé et le remue.
Très-sévère sur les qualités morales du poète, il ne le
met pas au-dessus de la société ; il ne lui attribue pas
une sorte de royauté de droit divin ; mais, avec plus de
modestie, il exige qu'il soit honnête homme, dans tous
les sens qu'on donnait alors à ce mot (ch. iv) :
Que votre ftme etroe mœurB, peintea dans tm ouvraget,
N*oltrent Jamais de vous que de nobles Images...
Cultlrex Toa amis, soyes bomme de foi :
C'est pen d*etre agréable et charmant dans an llrre;
Il faat ssTOir encore et couTerser et vivre.
Boileau impose au poète les mêmes études prélimi-
naires qu'Horace, mais il insiste plus que l'auteur ro-
main sur la correction de la langue : c'est crue la langue
poétique de la .France, même après Corneille, n'était pas
formée; elle avait dit d'admirables choses, elle ne savait
pas tout dire; elle travaillait à se fixer, et était encore
un peu flottante.
Quant aux genres poétiques, personne, avant Boileau,
n'en avait fait une revue aussi complète, ne les avait
aussi bien caractérisés, n'avait donné sur chacun des pré-
ceptes aussi étendus ni aussi pratiques.- Il ne se contente
pas de transporter en France des genres et des préceptes
étrangers : il analyse les genres qui existent dans la na-
ture, sans dédaigner les inventions des modernes, et il
en donne les lois, moins d'après l'autorité des Anciens mie
d'aprte celle de la raison, qui est de tous les temps. Ce-
pendant, il y a plus d'une erreur à regretter dans cette
belle théorie des genres poétiques. On remarque d'abord
l'absence de l'apologue, qui méritait bien, au moins de-
puis La Fontaine, de trouver une place dans une énumé-
ration où l'épigramme et le madrigal en tiennent une
aussi considérable, et où le sonnet prend une importance
démesurée. On trouve un Jugement plus que discutable
sur Molière (ch. m), qui
Peut^tre de son art eût remporté le prix,
apparemment s'il se fût enfermé dans la noble discrétion
de Térence. Le Tasse est traité avec une sévérité qui
n'est pas de la justice. Corneille ne reçoit pas tout l'hon-
neur qu'il mente; on sent que Boileau est trop l'ami de
Racine. La théorie même de l'art dramatique est faite en
partie pour ce dernier, car il dit de l'amour (ch. m) :
De cette passion la sensible peinture
Est pour aller an oœnr la ronte la plus sûre.
Et le patriotisme fanatique du vieil Horace, et la clé-
mence d'Auguste, et le pieux resi>ect de César pour son
ennemi vaincu, et toutes les passions viriles en un mot,
n'onv-elles rien qui puisse émouvoir le cœur? Boileau
écrit pour une cour plante, et ne voit pas au delà du
goût de son temps. Or, les héros amoureux de Racine
ont bien plus pâJi que les fiers caractères de Corneille.
— Dans sa «béorie dn pofime épique, Boileau proscrit le
merveilleux chrétien, et veut qu'on lui substitue le mer-
veilleux païen, qui ne peut être chez nous cpi'un orne-
ment d'emprunt : mais là encore il a suivi le goût de
son temps, qui voulait que dans tous les arts les fictions
inythologiques se mêlassent aux scènes de la vie réelle.—
Il n'est pa* non plus seul responsable de la rigueur avec
laquelle il a imposé aux poètes tragiques la règle des
trois unités; il a suivi Corneille, qui s'était tourmenté
toute sa vie pour établir sur lui-même ce ioug plus gê-
nant qu'utile. Personne alors ne songeait a contester ni
l'autonté d'Aristote, ni l'utilité de la r^le. Si les auteurs
se trouvaient à la torture, ils n'en accusaient que leur peu
de génie ; heureux temps pour les auteurs de Poétiques !
— On trouve aussi dans VArt poétique des passages dont
la faiblesse étonne; ce sont ceux où l'auteur raconte
l'histoire de la poésie française : les erreurs et les faux
jugements y fourmillent. Quant à l'histoire de la poésie
antique, il l'a presque entièrement traduite d'Horace,
dont il a répété les erreurs avec une docilité un peu trop
crédule. — On a reproché enfin à Boileau d'avoir omis
l'invention poétique : mais art-on bien établi qu'il y ait
quelque chose à enseigner sur ce sujet? Le poète pensait
sans doute qu'il n'y a pas de préceptes qui puissent tenir
lieu du génie créateur, et que le rôle de la Poétique n'est
pas d'apprendre à trouver, mais d'apprendre à faire
usage de ce qu'on a trouvé.
Quant à la forme de VArt poétique, on s'accorde géné-
ralement à la reconnaître pour excellente. Le plan est
large et bien conçu. Dans le V chant, Tauteur expose ses
idées d'ensemble sur les qualités intellectuelles qu'exige
la poésie, et sur les grands principes de composition, de
style et de versification qui s'appliquent à tous les genres.
Dans les chants II et III, il donne les règles particulières
à diaque genre, en commençant par les plus humbles et
finissant par les plus élevés. Enfin, dans le IV" chant, il
fait en quelque sorte l'éducation morale du poète. La sé-
vérité des leçons est souvent adoucie par des épisodes ou
de narration, ou de description, ou de discussion, qui don-
nent du mouvemenjt et ae l'intérêt à l'ouvrage. Le style
est, eh général, le modèle du style didactique : justesse
profonde des pensées, naturel et brièveté de l'expression ;
on ne trouverait nulle part, pas même dans Horace, un plur
grand nombre de ces expressions de génie auxquelles oa
ne pourrait rien changer. On objecte le nombre dci
imitations; mais on ne songe pas que l'imitation , d'une
langue à une autre, est création quant au st^le. Horace a
eu beaucoup de traducteurs en vers depuis Boileau; il n'en
est pas un dont les vers , comme ceux de notre auteur,
soient devenus proverbes. Ce que l'on conteste le plus à
l'auteur de VArt poétique, c'est la poésie de l'expression :
on veut bien reconnaître que son style est pur, ferme,
plein de sens, mais on déclare aue c'est de la prose
rimée. Si l'on se fait de la poésie dans le style une idée
invariable, d'après tel ou tel poète, Boileau peut n'être
pas poète : la hardiesse chez lui est toi^ours mesurée;
l'éclat de l'expression est tempéré; l'harmonie de l'en-
semble ne soufi're pas les beautés ambitieuses. Mais de
quelque façon que l'on qualifie le st^ie de Boileau, il faut
bien reconnaître qu'il n\ pas de pair dans notre langue.
Son grand malheur, c'est qu'on le sait par cœur dès l'en-
fance : combien citerait-on d'écrivains qui pussent résis-
ter à cette épreuve? — En résumé, quelles que soient
les imperfections de notre Art poétique, c'est un livre
dont l'autorité, en certaines parties, durera autant (|ue
la langue française. On ne peut tenter aucune révolution
dans la poésie sans commencer par s'en prendre à lui.
Dans le grand débat littéraire de l'époque de 1830, il s'est
trouvé, au bout de quelque temps, que les cl€ttstques et
les romantiques auraient pu être définis, avec une cer-
taine justesse, les défenseurs et les adversaires de Boi-
leau.
Marmontel a écrit en prose une Poétique française,
qui est un ouvrage de bon sens, mais pâle et de peu
d'autorité. — K Tabbé Battcux, les Quatre Poétiques,
Paris, 1771 ; A. Nisard, Examen des Poétiques éCAristote,
(THorace et de Boileau, S*-Cloud, 1845. C.
POIDS ET MESURES. La France conserva jusqu'à la
Révolution les poids et mesures qu'avaient autrefois les
différents États dont elle s'est formée par voie d'adjonc-
tion ou de conquête; souvent même des termes sem-
blables désignaient des mesures diverses. Un pareil état
de choses entravait le commerce, gênait la circulatioc
favorisait la fraude, et jetait de la confusion dans toutes
les relations de vente et d'échange. Il a pourtant fallu
dix siècles de préparation, de tâtonnement, pour arrivcf
à l'uniformité desjMids et mesures. En 8!^5 déjà, an
4« concile de Paris, on la demandait comme chose ur-
gente ; en 1322, Charles IV le Bel rendit une ordonnance
dont le but était de préparer cette unité, rêvée aussi par
son prédécesseur Philippe V le Long. Louis XI fit vaine-
ment un nouvel effort pour l'établir. L'uniformité des
poids et mesures fut encore nmvœu des États Généraux
POI
lUi
PO!
de 1560. On en reprit !*idôe boqb Louis XVI, et elle fut
enfin décrétée par la Convention, le 18 germinal an ni
(7 anil 1795). Toutefois, on toléra encore la traduction.
BuiTant Tancien système, des mesure décimales; remploi
exclusif de ces mesures est dcvenn obligatoire par la loi
du 4 Juillet 1837. — L*ancien Droit fhmçais punissait gé-
néralement comme faussaire Quiconque employait ou
fabriouait de faux poids et de fausses mesures. Depuis
rétablissement du système décimal, on % de môme dé-
crété une pénalité contre les possesseurs de poids et de
mesures non conformes à la nouvelle fixation. Quiconque,
par usage de faux poids, a trompé sur la quantité des
choses vendues, est puni d*un emprisonnement de 3 mois
ai an, et d*une amende de 50 fr. au moins; les détenteurs
de faux poids sont punis d'une amende de 11 à 15 fr., et
d*un emprisonnement de 5 jours an plus {Codé pénal,
arL 423 et 470). Les objets du délit sont confisqués
et brisés. La loi du 27 mars-l"' avril 1851 punit égale-
ment ceux qui emploient des manœuvres ou procédés
tendant à fausser l'opération du pesage et du mesurage. Si
le vendeur et l'acheteur ont employé, dans leur marché,
d'autres poids et mesures que ceux établis par la loi,
l'acheteur est privé de toute action contre le vendeur qui
l*a trompé, mais sans préjudice de l'action publique pour
la punition de cette fraude et de l'inobservance de la
loi. — Bien crue tout officier de police ait le droit de
constater et ae faire punir les contraventions en cette
matière, il existe dans chague arrondissement un fonc-
tionnaire spécial, appelé vérificaUur des poids $t me-
sures (de 1,200 à 1,500 fr. de traitement), et chargé
de faire exécuter la loi d'uniformité et d'exactitude.
Quand le service est confié à plusieurs vérificateurs, le
préfet leur assigne des résidences, et fixe les circonscrip-
tions où ils exercent leurs fonctions. Le décret de décen-
tralisation de mars 1852 a donné aux préfets la nomina-
tion des vérificateurs; mais leur traitement est déterminé
par le ministre de l'agriculture, du commerce et de^
travaux publics. Ces fonctionnaires doivent être âgés de
25 ans au moins et de 40 ans au plus, prêter serment, et
subir des examens spéciaux ; il leur est défendu d'exercer
aucune autre fonction publique ou asst^ettie à la vérifi-
cation; agents du gouvernement^ ils ne peuvent être
poursuivis devant les tribunaux sans Tautorisation du
Conseil d*État. Le ministère de l'agriculture donne en
dépôt à chaque bureau de vérification un assortiment
complet de prototypes préalablement poinçonnés. Une
circulaire de 1839 dit encore qu'il doit v avoir dans
chaque commune une collection des principaux étalons
des poids et mesures décimaux : les maires et autres
officiers de police ont ainsi perpétuellement sous la main
des instruments de comparuson qui facilitent la surveil-
lance, et, d'autre part, les instituteurs primaires peuvent
mettre sous les veux des élèves auxquels Ils enseignent
le système métrique l'ensemble des pièces qui le consti-
tuent légalement. Chaque vériAcation nouvelle est con-
statée pur l'apposition d'un poinçon nouveau. Cette loi
s'étend aux poids et mesures employés dans les halles,
les foires et les marchés, dans les étalages mobiles, les
bureaux d'octroi, les bureaux de poids publics, les hos-
pices et hèpitaux, les prisons, les établissements de bien-
faisance, et tous les autres établissements publics. Les
fabricants et marchands de poids et mesures ne sont assu-
jettis à la vérification périodique oue pour ceux dont ils
font usage dans leur commerce; les poids, mesures et
instruments de pesage et mesurage neufs doivent seule-
ment être marqués du poinçon de la vérification pri-
mitive. J. G.
POIGNARD, arme courte, pointue et tranchante, dont
il a existé un grand nombre de variétés. Ce fut une arme
de guerre avant l'invention des armes à feu, et on la
conserva même en Espagne jusqu'au xvii* i^ècle. Les
soldats romains, principalement depuis l'Empire, por-
tèrent un poignard qu'on appelait parcuone, parce qu'il
s'attachait à la ceinture (ad zonam). Les chevaliers du
moyen âge en eurent un aussi à la ceinture, pour égorger
les vaincus, et l'appelèrent par antiphrase miséricorde
ou mercL Les armes tranchantes avec lesquelles les cou-
tiliers et les archers achevaient les blessés, étaient des
espèces de poignards, aussi bien aue la dague des sei-
gneurs. On s'est servi de poignaras empoisonnés, non-
seulement chei les Asiatiques, mais encore en Italie, où
on les perçait à jour de mille trous pour loger de l'arsenic
amalgamé dans de la graisse. Au xvi* siècle, les seigneurs
de France, en habits de cour, portaient des poignards
éléfisunment engainée. Les femmes italiennes et espa-
gnolei en passaient autr^ois dans leur Jarretière. B.
poiGNASD (Sabhb-). V, Sabbb-Poignaiii.
POIKTLORGOE, instrument à clavier et à %ncYms li-
bres, du genre de Vorgue expressif (V. ce mot)^ inventé
par CavaiUé-ColI.
POINÇON, instrument servant à marquer les objeti
d'or et d'argent. On distingue le poinçon du fabricant,
et celui du titre et du bureau de garantie. U existe aussi
un poinçon pour les ouvrages provenant de Pétranger.
un poinçon d'exportation, un poinçon dit de remarqué
pour les chaînes, et un autre, dit de recense, que l'auto-
rité publique fait appliquer quand elle craint quelque
infidélité relative au titre et aux poinçons. Les lingots
affinés sont marqués d'un poinçon particulier. Il y avait
enfin autrefois le poinçon des ouvrages de hasard. — Ce
fut une ordonnance de Philippe le Bel, en Juin 1313, qui
astreignit les orfèvres à poinçonner leurs ouvrages. En
1470, Louis XI les autorisa à employer, seulement pour
les reliquaires^ de l'or et de l'argent à bas titre, en in-
scrivant dessus : Non venundetur, afin de certifier que
ces objets n'étaient pas destinés au commerce. Une or-
donnance rendue par Louis XII à Blois (novembre 1506)
leur enjoignit de faire contre-marquer leurs ouvrages par
les maltres-jurés, gardiens du contre-poinçon de Ta Mai-
son commune, et ce contre-poinçon devait être changé
tous les ans^ enregistré k la Cour des monnaies, et em-
preint sur la table de cuivre où l'on gravait les noms des
maîtres en charge. La contrefaçon des poinçons est punie
par notre Code pénal (art. 140). B.
POINÇON, terme de Monnayage. V, Com.
POINÇON, terme de Charpenterie. V, Combli.
POINT, signe de ponctuation qui marque la fin d'une
phrase ou d'une proposition. Il y a le point final (.), le
point d'êxclamatton (1), le point d'interrogation (?). On
emploie le point et virgule (;) pour indiquer la fin d*une
proposition accessoire annexée à la proposition princi-
pale, et les deux points (:) pour marquer la liaison entre
une phrase et celle qui la suit. Le point ae place aussi
sur l't et le j minuscules. V, Ponctdation.
poniT (Faire le), en termes de Marine, c'est calculer
la route déjà faite par un bâtiment, et marquer sa posi-
tion sur la carte par un point. Les déterminations plus
ou moins rigoureuses de cette position 'expliquent 1^
expressions de point §stimé, point observé, point corrigé,
pomt vrai, etc.
POINT (Mise au). V, Miss au point.
POINT, en Musique, indi<{ue, quand il est placé après
une note, que cette note doit être augmentée de la moitié
de sa valeur normale. Une note surmontée d'un point
doit être détachée dans l'exécution. — Le point d'orgue
placé sur une note indiquf un point d'arrêt plus on
moins long, pendant lequel, la mesure étant suspendue,
un exécutant brode des ornements que lui suggère son
goût ou que le compositeur a écrits. Les points d'orgue
sont placés à la terminaison d'une cadence. Leur nom
vient de ce qu'à l'origine l'orgue soutenait la note sur
laquelle avait lieu le repos. — Le point d'arrêt est le
signe du point d'orgue placé sur un silence qu'on doit
prolonger au delà de sa durée régulière.
POINT, terme de Typographie. F. CARAcrfeRBS d'ivpbi-
yBRlB.
POINT, dans les Jeux de cartes, se dit du nombre qu'on
attribue à chaque carte. L'as vaut, selon les jeux, un ou
onze pointa; les figures valent dix, et les autres cartes
le nombre qu'elles marquent. Au Piquet, on nomme
Point l'ensemble des points que composent plusieurs
cartes de même couleur. On appelle enfin Points les
nombres qu'on marque après chaque coup de Jeu ou
chaque partie.
POINT, en termes de Rhétorique, s'entend des divisions
d'un sermon.
POINT, en termes de Jurisprudence, est synonyme de
qwstion, comme quand on dit un potnl de Droit, un
pomi de fait,
POINT d'honrbub, ce qu'on regarde comme intéressant
l'honneur. Louis XIV institua un Tribunal du point
d*honneur, composé des maréchaux de France, pour dé-
cider si telle offense valait ou non la peine de se battre.
Un édit du 13 janvier 1771 établit près de chaoue séné-
chaussée un ConseU du point d'honnêw, dont les mem-
bres s'appelaient Officiers dupoinl Shonneur, et Jugeaient
les différends survenus entre gentilshommes. Ces institu-
tions disparurent à la Révolution.
ponvT DB vob, se dit, en Perspective, du point <iue le
peintre ou le dessinateur choisit pour mettre les objets
en perspective.
POINTS, en termes de Blason • divisions carrées de
POI
1447
POI
reçu, dont tes unes sont dVn émail, et les autres d*uQ
autre émaiU
pomrs-voYBLLES. F. HûiraIque (Écriture).
POINTAGE, action de diriger une bouche à fen de
manière que le projectile atteigne un but déterminé.
II. Page a publié une Théorie du pointage.
POINTE, Instrument d*acier à Tusage des graYeurs.
Pour graver à Teau-forte, on dessine avec la pointe sur le
remis dont la planche est enduite, et on découvre ainsi
les parties où Tacide doit mordre. On grave à la pointe
tâche, lorsqu'on forme des traits ou des hachures sans
recourir à l'eau -forte : dans ce cas, la pointe ouvre le
cuivre sans en rien détacher.
POINTE DB DIAMANT. V. DlAMANT.
POINTILLÉ, manière de peindre qui consiste à poser
les couleurs par petits points, au moyen d*un pinceau
bien appointé. On emploie le pointillé surtout dans la mi-
niature, et pour les chairs. On dessine aussi au pointillé,
avec la pierre noire ou Tencre de Chine. Enfin il y a une
gravure au pointillé. V. Gravure.
POINTURES, en termes de Typographie, petites
pointes de fer attachées au tympan, lesquelles, perçant,
dans les blancs du milieu, la feuille de papier qu'on im-
prime d'un côté, servent à la poser parfaitement en re-
gistre quand on imprime l'autre côté.
POIRE D'ANGOISSE. V. Angoisse.
POISSON. Il est, dans ITconographie, l'emblème de
la qualité de chrétien, parce que le mot grec IX6TS
(uMthue)^ qui veut dire poisson, renferme les initiales
des mots Jésus Christus Dei fUius salvator. Le pois-
son, parce qu'il vit dans l'eau, est aussi l'emblème du
baptême.
POISSY (Caisse de), caisse qui servait autrefois à payer
comptant les achats faits par les bouchers de Paris sur
les marchés aux bestiaux de Sceaux et de Poissy. Elle
fut instituée par édit du 10 novembre 1733, confirmée en
1743, 1744 et 1755, supprimée en 1776, rétablie en 1779,
abolie encore avec toutes les corporations en 1701 , et
reconstituée par décret du 6 février 1811. Le fonds de la
caisse était formé avec les cautionnements des bouchers,
s'élevant à 1,50:),(M)U fr. Elle percevait d'abord sur le
montant des ventes un droit dfe 3 1/2 p. 100, mis à la
charge des producteurs ; plus tard ce fut un droit fixe
par tôte de bétail, 10 fr. pour un bœuf, 6 f^. pour une
vache, 2 fr. 40 c. pour un veau, 0 fr. 70 c. pour un mou-
ton, droit acquitté par les bouchOiS. Les prêts de la caisse
étaient faits à l'intérêt de 5 p. 100 l'an; les bouchers
souscrivaient des engagements emportant contrainte par
corps. La caisse de Poissy a été supprimée en 1858.
FoissY (Église de). Cette église, autrefois collégiale, et
qu'il ne faut pas confondre avec une abbaye démolie en
1802, pi-ésente un assemblage de constructions de diffé-
rentes époques, mais qui n'en sont pas moins intéres-
santes. La nef, le chœur, les chapelles des deux côtés du
chœur, une partie du bas côté méridional, la tour cen-
trale et la tour occidentale, sont en style roman du xi* et
du xu* siècle; le collatéral du nord est en style ogival
du XIV*; les chapelles des collatéraux i^partiennent au
xv«, et le porche méridional au commencement du xvi*.
De nombreuses réparations ont été faites plus tard à tout
l'édifice, mais en conservant les anciennes formes : ainsi,
au xvu" siècle, on rebâtit la tour occidentale et les pre-
mières travées de la nef, et on refit le grand comble.
D'importantes restaurations ont été aussi exécutées de
nos Jours. L'église de Poissy a 68 met. de longueur, et
33 met. de la^ur, et est dépourvue de transept. On y
remarque quelques débris des fonts baptismaux sur les-
quels Louis XI a été baptisé, et, dans la chapelle de
S^-Barthélemy, de belles boiseries du xvii* siècle. La
tour oui s'élève au-dessus de la dernière travée de la
nef, à rentrée du chœur, est une des plus belles et des
plus pures du style roman : aux angles de sa base carrée
se dressent quatre pinacles massifs; le beffroi est un oc-
togone irrégulier, percé d'arcades Jumelles sur les grands
cdtés et d'arcades simples sur les petits; la flèche est en
charpente.
POITEVIN (Dialecte), un des dialectes de la Langue
^oc {V, ce mot). On y distingue deux variétés, le lan-
gage du haut Poitou , qui est plus doux , et celui du bas
Poitou, qui se ressent du voisinage de la Bretagne. La
prononciation du poitevin est lente, monotone, très-ac-
centuée. Parmi les œuvres écrites dans ce dialecte, on
remar({ue le recueil intitulé La gente poitevine, dont il
existait déjà plusieurs éditions k la fin du xvi' siècle, et
l^ MijaiUe d Tauny (La Gageure d'Antoine), comédie
Mr Jean Drouet, apothicaire à Saint-Maixent, 1651. Le
langage de la Saintonge, de l'Âunis et de l'Angoumois est
une variété du poitevin. Dans la Gavacherie (enclave des
arrondissements de Liboume, de la Réole et de Mar-
mande), on parle le saintongeois; c'est que des colons de
la Saintonge y furent appelés aux xV et xvi« siècles.
V, De La Fontenelle de Vaudoré, Recherches sur la langi*
poitevine. B.
POITIERS (Église S^-Pieriie, à), église cathédrale
commencée en 1162 par Henri II, roi d'Angleterre, sur
les instances de sa femme Éléonore d'Aquitaine, à l'em-
placement de plusieurs édifices antérieurs, et consacrée
seulement en 1370. Dans cet intervalle, l'architecture
religieuse modifia plusieurs fois ses principes, et l'on en
trouve la preuve dans les diverses parties de l'édifice,
qui, entrepris en style romano-byzantin, est arrivé au
style o^val secondaire. L'extérieur de la cathédrale de
Poitiers est assez lourd : on n'y voit ni ces combles aigus,
ni ces frontons pyramidaux qui donnent de l'élancement
à l'ensemble, ni ces tours et ces flèches qui dominent les
constructions environnantes avec tant d'élégance ou de
majesté ; tout parait écrasé. Le portail, large de 38 met.,
fut construit de 1307 à 1312 : il est percé de trois portes
surmontées de frontons peu développés, et dont les
voussures sont garnies de statuettes d'Anges et de Saints
abritées de dais; mais les niches latérales n'ont plus
leurs statues de princes et d'évêques, qui ont été dé-
truites à la Révolution. Les sculptures des tympans
sont bien conservées : au-dessus de la porte centrale on
a représenté, en trois compartiments superposés, la Ré-
surrection des morts, la Séparation des Justes et des mé-
chants, et Jésus-Christ, entouré d'Anges, prononçant le
dernier jugement; les deux autres tympans sont chargés
de sculptures relatives à la S^' Vierge et à S' Pierre. Une
grande rose centrale, endommagée par un incendie en
1681, et deux fenêtres surmontent les portes. La façade
est flanquée de deux tours peu décorées, et dont la partie
supérieure porte les caractères de l'art du xv^* siècle;
celle de droite a 34 met. de hauteur, et celle de gauche
32 met. Sur le flanc gauche de l'édifice, près du transept,
et abritée sous un auvent disgracieux, est la porte S^-
Michel, que décorent de belles sculptures. Au-dessus du
chœur s'élevait Jadis une flèche de plus de 100 met.; en-
dommagée par la foudre en 1713, on la démolit en 1769.
— A l'intérieur, où l'on descend par un escalier de
4 marches, la cathédrale de Poitiers a 04"*,50 de lon-
gueur, 30*" ,30 de largeur dans la nef, et 56™,50 à la
croisée, 20"*,50 de hauteur sous la voûte principale , et
24",20 dans les bas côtés. Pour ajouter à la fuite des
lignes et à la profondeur de la perspective, l'architecte a
diminué la largeur des nefs et abaissé les voûtes vers le
chevet. Les arâdes de la grande nef sont en ogive, avec
des moulures toriques; mais les arcatures décoratives
des nefs latérales sont à. plein cintre. Les piliers qui sou-
tiennent les voûtes sont très-espaces, et l'on n'en compte
que six de chaque côté; ce sont des massifs entourés de
colon nettes groupées en faisceaux. Les voûtes, établies
sur de belles nervures rondes, sont légèrement surélevées
en coupoles, et partagées en compartiments nombreux.
Parmi les fenêtres, les unes sont romanes, les autres
ogivales ; une grande partie des vitraux peints a été dé-
truite par les calvinistes. L'abside est terminée carré-
ment par une muraille droite, percés de trois fenêtres
romano-byzantines. L'autel, au lieu d'être au fond de
l'église^ est placé, depuis 1623, sous la grande voûte du
transept. La cathédnUe de Poitiers a subi plusieurs fois
des restaurations inintelligentes ; on remtutiue surtout
le mauvais goût qui présida^ pendant le xvui* siècle, à
l'én^ction d'une ^erie à balustres autour de l'édifice.
Les fonts baptismaux, la chaire, le chemin de la croix,
un certain nombre de statues, de peintures et d'orne-
ments modernes, choquent Clément la vue. V. l'abbé
Auber, Histoire de la cathédrale de Poitiers , 2 vol.
in-8'>. B.
POITIERS (Église Notrb-Damb, à^, monument très-inté-
ressant de l'architecture romano-oyzantine du xti* siècle,
surtout à cause de son grand portail, dont la décoration
couvre tout le mur de face. Le sommet de ce portail se
termine en pignon interrompu^ et est accompagné de
deux tourelles a toit conique et appareillé en écailles de
poisson : au milieu du piffâon, un cadre creux, en forme
d'amande, contient le Chnst bénissant, et près de lui les
attributs des Évangélistes. Au-dessous est une grande
fenêtre, formée d'une ancienne rose, et flanquée de denx
rangs de niches. Plus bas se trouve la grande porte en
plein cintre, et, à ses côtés, deux fausses portes en ogive
obtuse. Les scènes sculptées dans les archivoltes em-
POL
un
POL
brassent toate rhistolre sacrée : on y rencontre Adam et
Eve, Nabuchodonosor et les quatre grands prophètes, la
Visitation, la Nativité, etc. La nef de l'église Notre-Damo
est voûtée en bercean, et Tabside en cul-de-four; les
piliers sont lourds et trapus; les collatéraux, étroits et à
voûte d'arête se prolongent autour du sanctuaire. Pon-
dant le XVI' siècle, on a ajouté des chaçelles au bas côté
(çauche, et un portail au midi. L'église a une petite
Grypte.
raiTiERS (Tenfple de S*-Jban, èi], Tun dos plus anciens
monuments roligieux qui existent en France. Après avoir
été considéré comme un temple élevé sous l'empereur
Auguste, ou au m' siècle, et même comme un simple
tombeau romain, il pisse aujourd'hui pour une construc-
tion chrétienne, pour un baptistère du vi« siècle. Cest
un corps de b&timent en forme de carré long (13 met.
sur 8), auquel une addition a été faite pendant le xi* ou
le xu' siècle, parallèlement au grand côté du carré qui
est au S.-O. Les petits côtés du carré sont terminés par
un pipnon ou gable à double égout, dont le centre est
rempli par trois grandes pierres sculptées. La pierre du
milieu, qui est la plus haute, présente un carré enca-
drant une rosace, et surmonté d'un petit fronton trian-
gulaire dont le centre est orné d'un fleuron ; les deux
autres pierres sont en forme de tiiangle, comprenant un
fleuron à 6 feuilles formées de briques incrustées. Une
corniche supportée par des modillons règne au-dessous
du gable, et plus bas se trouvent plusieurs rangs alternés
de briques et de pierres de taille : on a placé dans cette
partie du mur, entre deux frontons triangulaires dans le
môme goût que ceux du gable, une arcade cintrée, re-
couvrant une croix grecque. Ces divers ornements repo-
sent sur une autre corniche, soutenue par quatre pilastres
courts et peu saillants, et, au pied de ces pilastres, s'ou-
vrent deux fenêtres. Le Jjas de la construction est un
mur droit pour l'un des petits côtés, et une espèce
d'avant-corps semi-circulaire pour l'autre. — A l'inté-
rieur de l'édifice, plusieurs arcades reposent sur des co-
lonnes en marbre, de grosseur et de hauteur inégale,
et qui paraissent avoir été arrachées & des monuments
plus anciens. Les chapiteaux, très-endommagés, diffèrent
presaue tous les uns des autres, et s'adaptent assez mal
avec tes fûts. Sous le centre de l'édifice existe un caveau,
qu'on croit avoir servi de piscine.
POITIERS (Les Arènes de), amphithéâtre romain, con-
struit sons les empereurs Adrien et Antonin, et qui était
déjà détruit au vi* siècle. Il n'en reste aujourd'hui que
des ruines. Plus considérable auc celui de Nîmes, il
avait i55"*,80 sur son grand axe, 130"\50 sur le petit, et
27™,G4 d'élévation; les constructions avaient 41 '",73
d'épaisseur. On a calculé que, sur les 60 gradins, on
fouvait placer au moins 50,000 personnes. Il y avait
24 vomttoires pour les sorties.
POITRINAL, arme. F. notre Diclionnaire de Biogra-
phie et d* Histoire.
POLA (Amphithéâtre de), en Istrie. Ce monument
romain est bMi près de la mer, sur le penchant d'une
colline, et la moitié des gradins de l'étage inférieur a été
aillée dans le roc. L'élévation de l'amphithéâtre se com-
pose d'un soubassement, percé de baies carrées dans les
parties où l'inclinaison du sol l'a permis : au-dessus sont
deux étages de galeries, de 72 arcades chacun, entre les-
quelles sont des contre-forts ou espèces de pilastres dont
les chapiteaux n'appartiennent à aucun ordre; le tout
est appareillé en bossages. Un 3" étage, formant attiquc,
est percé de croisées; il y a, dans la partie haute de cet
attique, des ouvertures beaucoup plus larges que longues,
qui semblent avoir été pratiquées pour éclairer une divi-
sion de plancher dont on voit encore les scdllements. On
pense que le 2* étage était couvert d'un portique inté-
rieur, et que tous les gradins étaient en charpente. Le
grand diamètre de l'amphithéâtre est de 138 met., et le
petit, de 108 met.; la masse des constructions comprises
entre la face extérieure et le podium est de 34 mèL Une
particularité qu'on ne trouve pas dans les autres édifices
de ce genre, ce^i que le périmètre extérieur est flanqué
lie 4 avant-corps, percés de deux arcades chacun, et dans
lesquels étaient pratiqués les escaliers. V, Stancovichy
Dello anfUeatro di Pola, Venise, 1822, in-8<>.
POLACCA (Alla). V. Polonaise.
POLACRË (de l'italien polacra), bâtiment en usage
dans la Méditerranée. Il a un éperon comme celui des
chebecs, deux m&ts à pible, c-à-d. d'un seul morceau,
et un ar^mon portant une hune et un hunier, avec un
IlOttt de beaupré. Il porte ordinairement des voiles car-
nJMf et quelquefoii une voile eo pointe qu'on nomme
aussi polacre* Une petite polacre 8*appeUe an poiaeron
POLAIRES (Cercles). > V, notn Dictionnaire de Bîo»
POLDERS. ) graphie et d'Histoire.
POLÉMIQUE (du grecpo/^mo«, guerre, combat), s'em-
ploie, comme adjectif, pour qualifier an écrit, un ou-
vrage de discussion, et, substantivement, pour désigner
l'art de discuter, surtout les questions politiqiies, scien-
tifiques ou littéraires. Les pamphlets, les journaux, etc.,
sont des écrits polémiques.
POLES. ) V. ces mots dans notre Cnettonnaire d$
POLÈTES. ) Biographie et d'Histoire.
POLICE (du çrec polis, ville). C'est le gouvernement,
la bonne administration de la cité, la mission de proté-
ger, do défendre et de rassurer, la conséquence de la réu-
nion des hommes. Définie par la loi du 3 brumaire an iv
(25 oct. 1795), la Police est instituée pour maintenir
l'ordre public, la liberté, la propriété, la sûreté indivi-
duelle. Elle pourvoit à l'abondance et à la propreté dans
l'enceinte des villes, à la poursuite des fraudes sous quel-
que forme qu'elles se présentent. Son caractère principal
est la vigilance ; aussi a-t-elle un œil pour écusson. De-
vant s'exercer par la conciliation, la bienveillance, la
persuasion, et au besoin par l'emploi de la force, les per-
quisitions et les arrestations, efle ne peut porter om-
brage aux gens honnêtes. Elle doit se trouver partout
sans rester toujours ostensible, protéger les individu?
dans l'intérêt général , empêcher ce qui peut troubler la
paix intérieure, prescrire des mesures pour l'exécution
des lois, pour prévenir les crimes et délits, ou pour saisir
les coupables. La Police se divise en police administra'
tive et police judiciaire.
La Police administrative, démembrement du pouvoir
législatif, se subdivise en police générale et police muni-
cipale. Elle est exercée dans la France par le ministre de
l'intérieur pour les mesures générales, et dans chaque
dépaitement par les préfets, sous-préfets et maires, qui
peuvent faire des règlements sur les matières dévolues à
l'autorité municipale, en rappelant et interprétant les
lois organiques; ils ont, dans les commissaires et agents,
des auxiliaires d'exécution. La Police administrative est
réglementée par les lois et ordonnances concernant : la
viabilité pour les voies de communication ; la police ru-
rale pour les campagnes ; la police de la presse pour la
politique; celle des manufactures, des ateliers insa-
lubres, des poids et mesures, de la garantie des métaux
pour l'industrie; la police médicale et la police des
mœurs pour les personnes. C'est une institution protec-
trice, destinée à empêcher, par des règles et des précau-
tions locales, la perpétration des mauvaises actions, h
surveiller ceux dont la conduite peut devenir préjudi-
ciable aux autres, à rendre à tous les citoyens une bonne
et prompte justice, à contenir certains abus dans les
bornes de la nécessité, à cacher ce qu'il vaut mieux
ignorer que punir, enfin à éclairer le pouvoir sur l'opi-
nion, les désirs , les craintes et les espérances de la po-
pulation. La Police générale a pour base rarrêté du
5 brumaire an ix (27 oct. 1800) et le décret du 25 mars
1811 ; cllcj comprend notamment les passe-ports, et les
ports d'armes, la mendicité et le va^ondage, les pri-
sons, la recherche des déserteurs, les cultes, la librairie
et l'imprimerie. Les lois des 16-24 août 1790 et 10-2â
juillet 1791 ont déterminé ainsi les attributions de la Po-
lice municipale : la petite voirie, la liberté de la voie
publique, les voitures, la salubrité, les incendies, inon-
dations et déb(icles, les accidents et suicides, la Morgue,
les exhumations; la police de la bourse, de la chasse;
la sûreté du commerce, les patentes et taxes, les livrets
d'ouvriers; les abattoirs; les hôteliers; la surveillance
des condamnés libérés, et des établissements ou lieux pu-
blics, tels que thé&tres, bals, billards, etc.; les approvi-
sionnements; la navigation; la conservation des monu-
ments; les aliénés, les nourrices, et les enfants trouvés;
les extraditions; l'affichage et le colportage; les postes
militaires, les armes, les poudres, etc. Le service de la
Eolice dans les villes dont la population excède 40,000 ha-
itants, a été organisé par la loi du 5 mars 1855 et les
décrets des 26 sept 1855 et 27 nov. 1859.
La Police judiaaire, ayant pour objet l'exécution des
lois et l'application des peines légales, s'exerce sous l'au-
torité des Cours d'appel suivant les dispositions du
Code d'Instruction criminelle pour la recherche des
crimes, délits et contraventions, pour en rassembler les
preuves et en livrer les auteurs aux tribunaux. .Lçs offi-
ciers de Police judiciaire sont : les procureurs delà Rép.,
les juges d'instruction, les juges de paix, les commis-
saires de police, les maires et les adjoints, les offidait
POL
144»
POL
ie gendarmerie, les gardes champêtres ou forestiers.
V. Delamtrre, TraUé de la police, Paris, 1707-1719, 4 vol.
!n-roI. : le 4* fut publié en 1738 par Lcclerc du Briliet;
Do La Poix de Fréminvllle, Dictionnaire ou Traité de la
police des villee, bourgs, paroisses et seigneuries de la
campagne, Paris, 1758, ia-4»; Guichard, Code de police,
1791 et 1794; Peuchct, Collection des lois, ordonnances
et règlements de police depuis le xiii* siècle jusqu'à l'an-
née 1818, Paris. 1819, 8 vol. iii-8<»; Léopold, Dictionnaire
général de police administrative et judiciaire de la
l-rance, 3" édit., 1822, in-8«; Allctz, Dictionnaire de po-
lice moderne pour toute la France, 2» ôdit, 1823, 4 vol.
in-8«; Boucher d'Argis, Code de simple police, 1831,
in*8*; Trébuchot, El ou in et Labat, Nouveau Diction-
naire de police, 1835, 2 vol. in-8»; De Molènes, Des
fonctions d'officier de police judiciaire, 1834, in-8o;
C. Berriat Saint-Prix , Manuel de police jiédiciaire et
municipale, 3« édit., 1850, in-18; Allain, Code formulaire
des officiers de police judiciaire, 1853, 2 vol. in -12;
Truy, Manuel de police de la France, 1853, in-18; Jocglé
et Mauny, Manuel de police, 1853, in-18; Paul Gère,
àlanuel du fonctionnaire chargé de la police judiciaire,
administrative et municipale, 1853, in-18; Miroir et
Brissot-Warvillc, Traité de police municipale et rurale,
184i, 2 vol. in-8<»; De Champagny, Traité de la police
municipale, 1844-47, 3 vol. in-8o; Frégier, Histoire de
l'administration de la police de Paris depuis Philippe-
Auguste, 1850, 2 vol. in-8<>; Bacqua, Code annoté de la
police administrative, judiciaire et municipale, 1850-57,
in-8o; Collet-Meigrct, Code de la police administrative,
judiciaire et municipale, 1850, in-8®; Pionin, Diction-
naire de police, 1850, in-8». T— y.
POLICE (Agents de), nom sous lequel on comprend les
sergents de ville, appariteurs, inspecteurs de police,
officiers de paix, gardes de ville, etc.
poLicB f Bonnet de). K. Bonnet.
POUCE (Commissaires do>, fonctionnaires chargés de
veiller à la tranquillité puolique, de faire observer les
lois urbaines et de sûreté. Leur origine est fort ancienne.
Au Gli&telet de Paris, leur oITlce était devenu héréditaire;
ils étaient alors les premiers juges des contraventions,
dont actuellement ils ont seulement la constatation et la
poursuite ; ilp s'occupaient de la police relativement aux
mœurs, à la santé, aux vivres, à la voirie, à la sûreté
publique, an commerce, aux sciences et arts libéraux,
aux domestiques et aux pauvres , recevaient les plaintes,
faisaient les informations et interrogatoires. La loi dos
21-29 sept. 1791 a prescrit Tinstitution de commissaires
do police dans toutes les villes où on le Jugerait néces-
saire. De nos Jours, la plus grande partie des attributions
judiciaires quMls ont eues longtemps à titre de Com-
misscûres-enquéteurs, est dévolue aux Juges dMnstruc-
tion; mais ils ont conservé, à Paris surtout, Finitiativo
des informations, en agissant immédiatement comme
sentinelles avancées de la JusUco pour empêcher ou
constater les écarts contraires aux bonnes mœurs, à
Tordre et & la probité. Ils procèdent la nuit et le jour,
donnant des soins non interrompus aux intérêts sociaux,
à la sûreté des personnes et des propriétés, intervenant
lors des incendies, des épidémies, des inondations, des
suicides et des accidents. Ainsi, dans ces attributions
variées, leur caractère est complexe; car, d'une part,
d'après la loi du 22 Juillet 1791, ils ont, indépendamment
de la qualité de fonctionnaires de l'ordre Judiciaire, celle
do fonctionnaires de l'ordre administratif, comme les
préfets et les maires qu'ils représentent, étant les dcMé-
Rués permanents du pouvoir; et, d'autre part, d'après
le Code d^ Instruction criminelle, ils sont magistrats lors-
qu'ils procèdentjudiciairement, principalement en cas do
flagrant délit, comme auxiliaires du procureur de la
le nettoiement des rues; 2* de la solidité des bâtiments;
3o de la salubrité des comestibles, et de la régularité
des poids et mesures ; 4» de l'usage des passe-ports par
les voyageurs, et de leur inscription sur les registres
des hôteliers. Ils participent à la saisie des contrefa-
çons; ils ont une surveillance dans les théâtres et au-
tres lieux publics de réunion ; ils assistent les huissiers
pour les séquestres quand les portes on les meubles
sont fermés, les gardes champêtres et les employés de
la réçie ou de la douane quana il s*agit de pénétrer ju-
diciairement dans le domicile des habitants; ils peu-
vent enfin arrêter les délinquants, décerner des man-
dats d*am#Der, et faire des perquisitions.
D'abord élus au scrutin populaire pour deux années
aux termes d'une loi du 8 juin 1792 qui leur donnait pour
marque distinctivo un chaperon aux trois couleurs , ils
furent ensuite soumis à la désignation de diverses autorités;
aujourd'hui , conformément à la Gonstitution et au décret
du 25 mars 1852, ils sont nommés pour Paris et les villes
au-dessus de 0,090 &mes par le chef do l'État sur la pré-
sentation du ministre de l'intérieur et la proposition du
préfet , et pour les autres localités par le préfet directe-
ment. Les commissaires prêtent serment entre les mains
des préfets; ils sont onSciellemcnt installés, et portent
exceptionnellement un costume désigné au décret du
31 août 1852; la ceinture tricolore reste leur signe dis^
tinctif dans le service habituel. Leur compétence s'étend
dans la commune où ils sont établis, quel que soit leur
arrondissement particulier, et comprend souvent un ou
plusieurs cantons. Un commissaire central, établi dans
certaines grandes villes, et subordonné direct du préfet,
a une autorité sur les autres commissaires et sur leurs
agents. Les commissaires reçoivent les plaintes, recher-
chent les infractions aux lois pénales, en rassemblent les
preuves, et en livrent les auteurs aux tribunaux ; leurs pro-
cès-verbaux font foi Jusqu'à preuve contraire. Le traite-
ment et les frais de bureau des commissaires do police
ont été réglés : par le décret du 20 oct. 1859 pour ceux
de province, divisés en 5 classes (de 1,500 à 4,800 fr., y
compris les frais de bureau) ; par le décret du 8 déc. 1859
pour ceux de Paris, divisés en 3 classes (0,000, 5,500 et
5,000 fr., et de 1 ,200 à 1 ,500 fr. do frais de bureau); et par
le décret du 17 déc. 1859 pour ceux des autres communes
du département de la Seine, divisés en deux classes. I<cs
commissaires sont les subordonnés des procureurs ^né-
raux et des procureurs de la Uép. pour leurs fonctions
I judiciaires ; us sont, pour leurs fonctions administratives,
I les subordonnés du préfet de police à Paris, des préfets,
sons-préfets, et maires dans les départements, selon
\ l'importance de chaque localité ; ils peuvent être suspen*
dus disdplinairement par les préfets, et révoqués par
le chef de l'Etat ou le p^fet qui les a nommé». L outrajre
par paroles, par écrit ou par gestes, la rébellion , les vio-
lences envers un commissaire de police, sont punis par
les art. 222 et suiv. du Code pénal, d'un emprisonnement
plus au moins long selon que ce roagistra(> exerçait ses
fonctions judiciaires ou administratives. — V, Ancest,
Code des commissaires de police, 1829, in-8°; Rabassc,
. Manuel des commissaires de police^ 1837, in-12; Sorbet,
Dictionnaire-Formulaire du commissaire de police, 1855,
in-8°; Durand de Valley, Mémento du commissaire de
police, 1857, in -8®; Bellanger, Manuel anatytiqtie à
l'usage des commissaires de police, 1858, in-8°. T— y.
POLICE (Lieutenant général de). V, Lieutenant, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
POLICE (Ministère de la). V, MimsTÈnE, dans'notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire.
POUCE (Préfet de]. V, Préfet, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
POLICE ( Salle de ) , local affecté dans une caserne aux
hommes punis pour des fautes ordinaires contre la dis-
cipline. Ils ne sont dispensés d'aucun service, reprennent
leur punition au retour, assistent aux classes ordinaires
d'instruction, et sont en outre exercés deux fois par jour,
et pendant deux heures, au peloton de punition. Les sim-
ples soldats sont employés à toutes les corvées du quar-
tier. Les salles de police des sous-officiers sont distinctes
(le celles des soldats. L'absence à un appel , la désobéis-
sance, quelques mauvais propos, une querelle, l'état
d'ivresse, etc., sont des motifs d'envoi h la salle de police.
POUCE (Tribunaux de). Dans tous les cantons de France,
un Juge de paix présidant, un commissaire de police
remplissant les fonctions du ministère public, et un gref-
fier, composent le tribunal de police institué par les Codes
pour connaître de toutes les contraventions. Dans les
communes non cantonales, les maires connaissent, con-
curremment avec les Juges de paix, de certaines contra-
ventions seulement. Les contraventions sont des manque-
ments aux prescriptions qui ont pour but de prévenir les
malheurs, les accidents ou les crimes, de prêter l'intérêt
général, la sûreté publique, l'ordre, les convenances
même, les personnes et les propriétés, d'entretenir la
propreté, la salubrité, la liberté de circulation dans la
cité. Ce sont des faits de négligence, d'omission , d'oubli
ou d'erreur, punissables par cela même qu'ils ont existé,
et les tribunaux do police ne peuvent admettre aucune
excuse, pas même Tignorance et la bonne foi. Le livre IV
du Code pénal a séparé en trois classes les principales
contraventions du ressort des tribunaux de pouce. La pre-
POL
i450
mière claMe, dont la pénalité est de i à 5 fr., comprend
les négligences pour Tentretien des cheminées, réchenil-
lage, le tir de pièces d*artiâce, Téclairage, le nettoiement,
rembarras des rues, la réparation des édifices, le Jet
d'immondices, l'abandon d'objets dont puissent abuser
les malfaiteurs, le maraudage des fruits, les glanages,
r&telages ou çtippillages prohibés, les injures proférées
sans proYOcatioD, le passÎEige illicite sur le terrain d'au-
trui , enfin l'inexécution des prescriptions imposées par
les règlements publiés ou notifiés. La seconde classe, ayant
pour pénalité 6 à 10 fr. d'amende, atteint ceux qui contre-
viennent aux bans des vendanges; les hôteliers n'inscri-
vant pas régulièrement leurs locataires; les conducteurs
de voitures qui violent les ordonnances les concernant;
les individus qui ont établi publiquement des jeux de
hasard ; ceux qui laissent divaguer des fous ou des ani-
maux malfaisants, qui jettent des corps durs ou des im-
mondices, qui passent sur les terrains chargés de récoltes,
qui refusent de recevoir la monnaie légale, ou de prêter
secours lors des accidents, incendies, inondations ou
tumultes; enfin ceux qui dérobent les récoltes encore sur
pied. La troisième classe punit de 11 à 15 fr. d'amende
ceux qui ont causé un dommase aux propriétés mobi-
lières, ou causé la mort ou la blessure d^knimaux ; les
commerçants détenteurs de poids et mesures illégaux ;
les boulangers et les bouchers qui vendent au delà de la
taxe ; les auteur» et complices de bruits injurieux ou de
tapages nocturnes ; ceux qui ont méchamment enlevé les
affiches de l'administration ; ceux qui mènent des bes-
tiaux sur les terrains garnis de récoltes ; enfin ceux qui
ont dégradé ou usurpé les chemins. La condamnation t^ux
frais et la confiscation des objets saisis sont la cons<^
3uence forcée de la pénalité d'amende ; mais l'adjonction
e l'emprisonnement pour certaines contraventions (il ne
peut d^asser 5 jours) reste facultative, comme celle des
dommages-intérêts, dont le chifi're est illimité. Indépen-
damment des contraventions punies par le Code pwud ,
les tribunaux de police répriment celles prévues par di-
verses lois spéciales, notamment sur le travail des enfants
dans les manufactures, sur les contrats d'apprentissage
et les livrets, sur les mauvais traitements envers les
animaux, sur le roulage, l'affichage, etc. Les Jugements
rendus par les tribunaux de police sont en dernier res-
sort, quand ils prononcent seulement une amende n'excé-
dant pas 5 fr., et ne peuvent dès lors être attaqués que
par un recours en cassation. L'appel des Jugements ren-
dus en premier ressort est porté devant les tribunaux cor-
rectionnels. La prescription des contraventions s'acquiert
après une année de leur date s'il n'est pas intervenu de
condamnation définitive, et après deux années lorsqu'il
y a eu jugement irrévocable mais non exécuté. — V. Bost
et Daussy, Législation et jurisprudence des tribunaux de
simple police, 1841, in-8*; Vuatiné, Code annoté et Guide
spécial des tribunaux de simple police, 1858, in-12. T— y.
poucB CORRECTIONNELLE (Tribunal de). Chambre du
tribunal civil qui est chargée de la répression des délite
entraînant plus de 5 jours d'emprisonnement. Cette Cham-
bre connaît en outre des délits forestiers qui sont pour-
suivis à U requête de l'administration, et dos contraven-
tions en matière de contributions directes et de douanes.
Elle juge aussi les appels des tribunaux de simple police.
Trois juges suffisent pour prononcer. Pour des délits qui
n'entraînent pas la peine de l'emprisonnement , le pré-
venu peut se faire représenter par un avoué; néajimoins,
le trinunal peut ordonner sa comparution en personne.
L'instruction est publique, à peine de nullité. Le juge-
ment est prononcé immédiatement, ou au plus tard à
l'audience qui suit celle où l'instruction a été terminée.
Une loi de 1856 a conféré aux Cours impériales la con-
naissance des appels des Jugements rendus par tous les
tribunaux de police correctionnelle de leur ressort.
POLICE D'ARwés , poUco faîto au milieu des troupes. En
campagne, elle appartient à la gendarmerie. Ce corps est
BOUS les ordres d'un grand prwôl dans une armée, et
d'un prévôt dans une division. Il est chargé de la sur-
veillance des délits , de la poursuite et de l'arrestation
des coupables, du maintien de l'ordre; il écarte des
troupes les femmes de mauvaise vie, surveille l'exécution
des règlements relatifs aux prohibitions de chasse et aux
Jeux de hasard, protège les habitants des pays que l'on
traverse, arrête les pillards, fait rejoindre les traînards, etc.
La police des places de guerre est sous la responsabilité
des commandants de place. La police des corps s'exerce
sous la surveillance des colonels.
POLICE, en termes de Droit, est sjrnonyme de contrat, 1
Le mot vient alors du latin pollicitatio (promesse). C'est !
ainsi qu'on dit une poltce d*affrétemênt , une police d^oM^
surance ( V, ces mots)^ une police de chargement {V. Cou-
NAISSEMEFET).
POLICE SANrrAIRB. V. PATENTE DE SANTIÎ, QOAaANTAniE
POLICEMAN. i V. ces mots dans notre Diction-
POLICHINELLE. S natre de Biographie et d'Histotr t.
POLITIQUE (do grec polis , cité), science du gouver*
nement. Elle comprend le Droit politique, le Droit ad
ministratif et le Droit international. Sa règle est la j us-
tice, et son but l'intérêt des peuples. Mais il n'en a pa.*
toujours été ainsi dans la pratique; certains théoriciens
même, comme Hobbes, ont donné pour base à la Poli-
tique l'utile ou l'intérêt, et Machiavel a été Jusqu'à auto-
riser chez les gouvernants l'emploi de tous les moyens
pour arriver à leur but {V, Prince). La Politique a eu
trop souvent en vue des intérêts qui ne sont pas ceux des
gouvernés. Les Traités de Politique les plus célèbres sont
la République et les Lois de Platon , la Politique d'Aris-
tote, la République et les Lois de Ctcéron, la République
de Bodin , la Politique tirée de VÉcriture sainte de Bos-
suet, V Esprit des Lois de Montesquieu, le Contrat 50-
ctoi de J.-J. Rousseau, le Cours de Politique constitution^
nelle de Benjamin Constant.
POLITIQUE (Droit, — Économie). V. Droit, Économie.
pouTiQOE (Éloquence), genre d'éloquence qui a pour
objet les grands at^bats financiers, les discussions sur les
obligations réciproques de l'État et des citoyens, la dé*
fense ou l'attaque, par les partis contraires, des lois en
vigueur, les délibérations sur la paix et la guerre, en un
mot, toutes les questions intéressant un pays, soit dans
sa constitution intérieure, soit dans ses rapports avec les
nations étrangères. Elle forme ce que la Rhétorique a
nommé le genre délibératif. A ne considérer que les res-
sources Qu'elle offre à l'art oratoire, on comprend que les
Anciens lui aient généralement préféré le genre judi«
claire, et que la critique moderne, en présence des ser-
mons et des oraisons funèbres du xvn* siècle, l'ait mise
après le genre démonstratif. En effet, dans l'Antiquité,
et surtout à Rome, l'éloquence Judiciaire se développa
dans de tout autres conditions que chez les Modernes.
L'importance des causes, souvent compliquées d'élé-
ments politiques : témoin les VerHnes, où se débattait,
avec la question de droit, celle de savoir si les chevaliers
raviraient aux sénateurs le privilège de Juger les gouver-
neurs accusés, et de partager avec eux, une fois absous,
le fruit de leurs rapines; — l'importance des personnages
qui figuraient au procès comme accusés : il n'était pas
rare de voir un intrigant audacieux citer devant le tri-
bunal les chevaliers ou les sénateurs les plus considéra-
bles, que venaient défendre, au moins par leur prteence,
soit les membres de leur ordre, soit les députations des
villes et des provinces que des liens de patronage et de
clientèle intéressaient à leur fortune ; — la libcsrté sans
limites que les lois laissaient, en l'absence d'un prési-
dent et d'un ministère public, aux violences et aux em-
portements de l'accusateur ou du défenseur ; — enfin le
lieu des audiences, qui était la place publique même,
le Forum (du moins jusqu'au principat d'Auguste), de
sorte que c'était au peuple, autant qu'aux juges, que
l'orateur s'adressait : toutes ces circonstances réunies
donnaient aux luttes Judiciaires, bieii plus qu'aux dé-
bats politiques, une pompe et un éclat extraordinaires.
D'autre part , peut-on concevoir une éloquence plus su-
blime que celle d'un Massillon faisant descendre JésuF-
Christ pour juger ses auditeurs et le prêtre qui lei r
parle; ou d'un Bossuet nous introduisant aux Cieuz
pour y admirer, dans son éblouissante beauté, l'unité
divine, image et modèle de l'unité de l'Église? £n re-
vanche, si, dans la comparaison des trois genres , on
envisage moins la richesse et la beauté littéraire des
œuvres que leur utilité immédiate et pratique pour un
État, ou si l'on aime mieux considérer les avantages et
la dignité de la vie présente que l'intérêt beaucoup plus
élevé, mais plus lointain, des destinées que la mort nous
réserve, on cesse d'être d'accord sur le véritable prix de
l'éloquence politique. Elle a eu ses détracteurs, parce,
que les passions l'ont jetée dans les excès. Le sage et
libéral Tacite lui-même, au souvenir du dernier siècle de
la République romaine, avouait que la grande éloquence
est pareille à la flamme, quo cest en brûlant qu'elle
jette de l'éclat; qu'elle est fille de la licence, compagne
de la sédition, et l'aiguillon des fureurs populaires ; in-
capable de condescendance , impatiente de tout frein ,
rebelle, téméraire, arrogante, incompatible enfin avec les
constitutions bien ordonnées; que Lacédémone et la
Crète, si vantées pour la sagesse de leurs lois «I la léfé-
POL
1451
POL
rite de lears institations, n'avaient point connu les ora-
teurs ; que Téloquence des Gracques ne Talait pas d*ôtre
achetée par leors lois, et que celle de Cicéron n*avait
point été an dédommagement de sa mort. D'autres ont
accusé cette même éloquence de dégénérer souvent en un
verbiage stérile, sinon nuisible & la marche des aflCûres
pobiiqaes. Ses défenseurs répondent que le même feu
qai cause les incendies est Tun des plus indispensables
^axiliaires de IMndustrie humaine, et que la parole, par
«es vertus contraires, ressemble à toutes les forces de la
nature ; que partout où se résoudra le grand problème
des sociétés modernes, la conciliation de Tordre avec la
liberté, l'éloquence politique, interprète de l'opinion,
sera lans aucun doute le plus utile instrument et le
guide le plus sûr des hommes d'État; que la cause de
la vérité et du bons sens finit par triompher tôt ou tard
de l'erreur et du mensonge; que si les peuples ont le
droit de discuter la conduite de leurs afiTaires, les luttes
de la parole, dans une assemblée politique, sont le mode
le plus retentissant de cette discussion, et le contrôle le
plus efficace d'un bon gouvernement; qu'il ne s'agit là,
comme en toutes choses, que d'empêcher que l'usage oe
dégénère en abus, usage qui doit se régler suivant le
tempérament de chaque peuple.
L'Éloquence politique a eu, dans tous les âges, de glo-
rieux représentants. Dans Athènes, depuis la constitu-
tion de la République jusqu'à la guerre du Péloponèse ,
c-à-d. à l'époque la plus brillante de la démocratie, on
voit les premiers citoyens unir le talent oratoire au génie
de la guerre et de la politique. C*est le temps où Solon
guérissait, par son éloquence autant que par sa poésie et
ses lois, les plaies des divisions intestines; où Pisistrate
Taisait accepter sa tyrannie ; où Miltiade déterminait ses
concitoyens à repousser les injonctions insolentes du
Grand Roi, et à livrer la bataille de Marathon ; où Thé-
mistode leur persuadait d'abandonner leurs biens et
leurs foyers, pour construire cette flotte qui, à Salamine,
sauva la civilisation ; où Aristide rivalisait avec Thémis-
tocle d'influence à la tribune, comme de valeur au com-
bat. Au-dessus d'eux s'élève bientôt Périclès, que les
poètes comiones, ses contemporains, comparèrent à Ju-
piter Olympien lançant des éclairs, roulant son tonnerre,
bouleversant la Grèce, et dont l'impartial Thucydide a dit
« qu'il contenait la multitude par le simple ascendant, de
sa pensée... S'il voyait les Athéniens se livrer hors de
•aison à une audace arrogante, il rabattait leur fougue
par ses discours, et les frappait de terreur; tombaient-ils
mal à propos dans la crainte, il relevait leur abattement
et ranimait leur audace. » Malheureusement, il ne nous
reste à peu près rien de ces premiers orateurs politiques.
— Aprra eux, vinrent les Sophistes, qui tinrent école et
furent professeurs d'éloquence. Il y eut un art propre-
ment dit; et dès lors on mêla aux inspirations de la na-
ture les artifices des Rhéteurs ; on cultiva en même temps
le genre Judiciaire et le genre politique; on parla pour
soi-même, on prononça ou l'on écrivit des plaidoyers
pour les autres, quelquefois pour les deux parties ad-
verses. Ainsi naquirent les avocats. Antipbon, Andocide,
Lysias, inaugurèrent cette période, et en furent les prin-
cipaux reprâentants. L'éloquence conserva désormais ce
caractère complexe. Enfin, au iv* siècle avant notre ère,
il semble crue la profession d'orateur reçut une oiganisa-
tioQ nouvelle ; il y eut , pour ainsi dire , les conseillers
attitrés du peuple, à peu près seuls en possession de mon-
ter à la tribune; et cela fut le sujet fréquent de plaintes
et de récriminations rives de la part de Démosthone. De
même que les citoyens avaient cessé de faire campagne
et confiaient à des mercenaires l'exécution de leurs dé-
crets, les orateurs avaient cessé d'être des hommes d'État,
et, au grand dommage de la République, on distinguait
alors les hommes de parole des hommes d'action. Pho-
cioo seul unit encore les deux mérites, et fit souvent, et
avec succès, les expéditions qu'il avait blâmées sur la
place publique. Au reste. Jamais les Athéniens n'avaient
vil tant de rivaux se disputer leurs suflîrages : c'étaient
IsiKrxte, qui écrivit, avec tous les raMnements de l'art,
les Discours qu'une inrincible timidité l'empêchait de dé-
biter en public; Isée, le maître de Démosthène; le ver-
tueux Lycnrgue ; Hypéride, C[ui paya d'un supplice bar-
bare sa haine de la Macédoine; Dinarque, Alddamas,
Hégésippe, Démade, Eschine, et, par-dessus tous, l'au-
teur des (Hj/nthimnes » des PhUippiques, du Discours
pour la CourofÊM, l'adversaire, opiniâtre Jusqu'à la
nort, de Philippe, d'Alexandre, et d'Antipater, rbomme
Avec qui moururent l'éloquence et la liberté de la Grèce,
DémosUiène, enfin, sur le génie duquel les critiques de
tous les temps ont épuisé les formules de la plus vive
admiration.
Des causes non moins puissantes et Técondes dvori-
sèrent, à Rome, le développement de Téloquenoe poli-
tique. On peut en assigner trois principales, qui corres-
pondent aux trois âges de la République : d^ibord , la
conquête, par les Pl&éiens sur les Patriciens, de la triple
égalité civile, politique, et religieuse; puis, la succession
des guerres qui valurent au peuple romain la domina-
tion du monde, et la nécessité de régler, pour le plus
grand avantage et la sécurité entière des vainqueurs, le
sort des nations vaincues; enfin la lutte de la liberté
contre le despotisme militaire, de la République contre
l'Empire. 11 ne nous est rien parvenu des luttes oratoires
où un Voléro, un Térentillus Arsa, un Canuléius, un
licinius Stolon, arrachaient à leurs orgueilleux adver-
saires leurs privilèges; rien de ces séances du Sénat où,
en présence de Cinéas, après deux défaites, Appius Clau-
dius Giecus rappelait les Pères Conscrits à la fermeté, au
respect des anciennes maximes et de la majesté ro-
maine : mais on peut s'en donner le spectacle dans les
belles narrations de Tite-Uve, où la perfection du lan-
gage et les raffinements de l'éloquen/^e, bien qu'étant un
anachronisme, n'en font pas moins revivre sous nos yeux
ces antiques générations avec leurs passions et leurs co-
lères. L'historien ne reproduit pas avec une moindre
vraisemblance ces solennelles dâibérations de la Curie
où Fabius Maximus et Scipion, devant l'assemblée indé-
cise, délibéraient sur le péril ou la nécessité de passer
en Afrique, quand AnniLal occupait encore l'Italie. De
cette époque, il reste du moins quelques discours mutilés
de Caton l'Ancien. A la rigueur, ils suffiraient pour ex-
pliquer les éloges que Tite-Uve et Cicéron prodiguèrent
à son éloquence rude, incisive, attique par le bon sens
et la simplicité. Avec les Gracques, dont nous possédons
aussi quelques fragments, commence la période des trou-
bles civils, illustreÎB par le génie des Galba, des Catulus,
des Sulpicius, des Crassus, des Antoine, des Hortensius,
prédécesseurs ou contemporains *de Cicéron, qui, dans
son BrtUus et son De Oratare^ a tracé leurs portraits ,
en homme qui se sent supérieur à ceux-là même dont il
vante le plus complaisamment le talent oratoire. Il les
surpassa en efibt; car il réunit toutes les perfections que
la nature avait distribuées entre seë devanciers, et eut
en quelque sorte le droit de se peindre lui-même pour
peindre l'orateur accompli. Toutefois, telle était alors la
situation de la République, qu'en dépit de son éloquence
il ne Joua généralement qu'un rùle secondaire, et fut
éclipsé par les hommes dWion. Les Gracques avaient
comoattu pour leur propre cause; Cicéron agit et parla
tour à tour pour Pompée et pour César, et ne fut Jamais
chef de parti. Même dans les CatUinair$s. il fut plutôt
encore rloterprète de ropinion, qu*il ne détermina, par
son ascendant et sa volonté, l'action du Sénat. A la fin
Kurtant, lorsqu'il fallut lutter contre Antoine, il derint
me de cette crande assemblée, et les quatorze discours
que sa verte vieillesse écrivit ou prononça contre l'en-
nemi de la liberté romaine méritaient de porter le nom
de PhUippique$, comme les harangues de Démosthène
contre l'ennemi de la liberté grecque. La liberté mourut
avec son courageux défenseur, et Téloquence avec la li-
berté. Sous les premiers Césars, il est mi, un Marcellus
se fit une triste célébrité par la violence passionnée de
ses accusations contre Tbrûéas ; sous les Antonins, Pline
et Tacite parurent avoir retrouYé , dans des discours Ju-
diciaires, quelques accents de l'ancienne éloquence poli-
tique; enfin la politique fut anssi quelquefois intéressée
dans les œuvres des Pères de l'Église : mais ces excep-
tions, sur lesquelles encore il faudrait fidre des réserves,
ne sauraient détruire cette allégation.' Gomme Démos-
thène en Grèce, Cicéron fut à Rome le dernier orateur
politique {V. JonictAiBB. — Éloquence). — Sur les Frag-
ments des orateurs latins, K. H. Meyer, Oratorum ro-
manorum fragmenta, ab Àppio inds Cvbco usque ad Q,
Aurelwm ^ytnmacfttim , édition DObner, Parb, 1837,
in-8*; Egger, Laiim urmonk rAvmuB uiâUœ, Paris,
1843, in^o.
Il était réservé k TAngleterre de voir reoittre, dans les
temps modernes, l'éloquence délibérative » parfois avec
son éclat des anciens Jours, mais sans les proscriptions
et les meurtres qui avaient ensanglanté la pfsce publique
et la tribune de Rome ou d*Athènes. Une fois les pas-
sions religieuses et politiques calmées, et la race des pré-
tendants éteinte, le tenûkéranient de la n^tàsm et son
gouvernement la préseryirent généralement des excès «
et loi assurèrent la bonne fortmie de recueillir les avan*
POL
1452
POL
lages des institutions parlementaires sans en ressentir
ffresque les inconTénients. L'éloquence 8*y dô?eloppa
d*abord sous Tinfluence théologique : Prm , Hampden ,
Falkland, Gromwell, Sidnev, StraiTord, représentent
cette premier» période. Puis vint répoque de Guil-
laume m , de la reine Anne, et de Georges I**, où bril-
lèrent Swift, Steele, Bolingbroke, Pulteney, lord Carteret,
Windbam, et Walpole. A cet âge, Téloquence anglaise,
quoique déjà toute politique, se renferme encore dans
des débats intérieurs , et se montre plus puissante par
Tbabileté que par le talent Enfin Fâge d'or arrive avec
ta fin du xviii* siècle. Deux ordres de questions vont
alors passionner et ennoblir les diseussions du Parle-
ment : les questions de conquête, de domination, et les
questions d*humanité, de Justice, auxquelles la politique
était Jusoue-là demeurée étrangère. Les écrits philoso-
phiques au xvrn* siècle, la guerre de Sept Ans et celle
des colonies, toutes ces circonstances communiquent aux
orateurs anglais une srandeur et une élévation encore
inconnues. Alors rivalisent au Parlement les deux Pitt ,
Wilkes, Burke, Fox, Shéridan, Grattan, et, dans des procès
qui touchaient à la politique, Erskine et Hackintosh.
L'héritage de ces grands hommes a été recueilli par des
élèves et des imitateurs dont quelques-uns vivent encore
et se glorifient de perpétuer leurs traditions à la Chambre
des Lords et dans celle des Communes : nous mention-
nerons Ganning, lord Brougham, Robert Peel, lord Rus-
scll. Citons à part « le grand agitateur » irlandais, Da-
niel O'Connell, « le libérateur », qu'un critique français,
dans son enthousiasme, représente « debout sur le sol
de sa patrie, ayant les cieux pour dôme, la vaste plaine
pour tribune, un peuple Immense pour auditoire, et pour
sujet ce peuple, toujours ce peuple, et pour écho les ac-
clamations universelles de la multitude, pareilles aux
frémissements de la tempête et au roulement des vagues
sur les sables et les rivaj^ de TOcéan. »
1.IM scéues tumultueuses et tra^ques, les proscriptions
des partis par les partis contraires, les massacres en
masse, reparurent autour de la tribune fhmçaise, et
imprimèrent à l'éloquence des mauvais Jours de notre
Révolution un caractère violent et sanguinaire, que n'a
point connu l'éloquence anglaise. Hais aussi, d'un autre
côté, les délibérations de l'Assemblée* Constituante, et
môme de l'Assemblée Législative et de la Convention ,
sous l'influence des théories politiques et sociales des
philosophes du xvm* siècle, dans la hardiesse de tant de
spéculations môme êhimériques pour le bonheur de l'hu-
manité, atteignirent & une hauteur oCl ne s'était Jamais
élevée l'Antiquité, où ne s'élevèrent Jamais les Chambres
anglaises. *0n discuta des principes d'où devait sortir
tout un monde nouveau; au lieu que chex nos voisins,
môme à cette Révolution qui mit Guillaume d'Orange &
la place des Stuarts, les débats du Parlement n'eurent
d'autre objet (pie l'établissement d'une dynastie protes-
tante, les privilèges respectifs des deux pouvoirs, et la
confirmation de certaines libertés depuis longtemps éta-
blies dans le droit commun de l'Angleterre. La person-
nification la plus complète et la plus extraordinaire de
cette éloquence firançaise. Jusque-là inconnue, fut Iflra-
beau, au-dessous de qui brillèrent, à des distances iné-
gales et dans des camps différents, Bamave, Meunier,
Tabbé Hauiy, Cazalès, en attendant Vergniaud, Isnard,
et tous les Girondins, et Danton, à la parole triviale,
hyperbolique, farouche, mais singulièrement énergique,
et non moins audacieuse que ses actes et ses motions.
— Sous le Directoire, le Consulat et rEmpire, l'élo-
quence délibérative fût remplacée par l'éloquence mili-
taire dans la personne de Napoléon I*' ; mais, sous la
Restauration, quand il s'agit de fonder le gouvernement
constitutionnel, elle reprit son éclat avec Manuel, Ben-
jamin Constant, de Scûrre, Camille Jordan, de Villèle,
Royer-Collard, Casimir Périer, le général Foy, et de Mar-
tignac Pendant la monarchie de 1830, elle ne brilla pas
d'une moins vive lumière dans la parole puissante et
animée des BeRyer, des Thiers, des Guixot, des Dopin,
des Ôdilon Barfot« des Lamartine, des MontalemberL
Cet orateurs ont eu^ depuis 185S, au Sénat et an Corps
Législatif, des successeurs qui honorent également la
tribune firançaise, MM* Billault, Baroche, Rooher, Jules
Pa^re. «tn- ^ ^ A. H.
pouTiQua (Langue), terme qui signifiait, chez les an-
ciens Grecs, la langue civile, usuelle, courante {àepoliSf
cité), par opposition à la langue oratoire,poétique, litté-
raire. Saétone emploie dans le môme sens l'axpressioft
latine imfno dvUts, « discours civil ». P.
pouixQOB (Vers). On appelait ainsi primitivement,
chei les Grecs, un vers héroïque qui n'avait rien de poé-
tionie, et ne formait qu'une ligne mesurée; tel est le vers
d'Homère, qui signifie : Et cent cmquanU caoàUs blondn.
— Au moyen âge, on appela du môme nom des vers com-
posés à l'usage du vulgure ignorant qui ne comprenait
plus l'ancienne versification, et où l'on tenait plus de
compte des accents que de la quantité métricfue des svl-
labes. Les pieds du vers politique sont ordinairement des
ïambes ou des trochées, et le vers n'a jamais plus de
15 syllabes, dont la dernière est toujours grave et l'avant-
dernière toujours accentuée. Il y avait aussi des vers po-
litiques de 13 syllabes, soumis aux mômes règles de
Taccent, et qui sont une altération de l'ancien lambique
scazon , surtout tel qu'on le trouve dans les fables éso-
piques de Babrius. Enfin le roman de Nicétas Eugénianus
[Cnark'Us bI DrosUla) est écrit en trimètres îambiques
pontiqii.es de 12 syllabes, dont les deux premières sont
toujours longues, et hi il* constamment accentuée. P.
POLICA, danse qui tire son nom, selon les uns, de
polacca (polonaise), et, selon les autres, du bohème
fnUka (moitié), parce que c'est une danse à deux temps.
Elle se produisit à Prague vers 1835, à Vienne en 1839,
et fit sii première apparition à Paris sur le théâtre de
rOdéoik en 1840. Les salons l'adoptèrent avec fureur. Sa
forme i.'est beaucoup modifiée ; on en a fait une espèce
de vala4 & 4 temps, et elle s'est rapprochée de la mo-
xurka «st de la ichoUisck. On voit par le poème que John
Davis fHiblia sur la danse, en io96, qu'une danse du
nom de volte avait beaucoup d'analogie avec la polka de
nos Jours. B.
POUé. V. ce mot dans notre Dictionnaire de BiogrO'
phiê et d'Histoire,
POUJCITATION (du latin pollicitaiio, promesse), en
termes de Droit, promesse non encore acceptée par celui
à qui eille a été faite. D'après le Droit romain, elle opé-
rait un lien Juridique; dans notre Droit actuel, elle ne
produit pas d'obligation.
POLI JNCTEURS. V. ce mot dans notre Dictionnaire
de Bioçiraphie €t d Histoire,
POLOGNE (Arts en). Les arts se sont éveillés en Po-
logne aa XVI* siècle, époque où l'on fit venir d'Italie une
foule d'artistes distingués. Les édifices religiei:hL et civils
furent ulors restaurés, embellis par des élèves de Michel-
Ange ei de Rapbaôl , tels que Carralius et Bartholo, dont
les œuvres ont été malheureusement détruites en partie
par le lemps et les guerres. Dans le môme temps, le roi
Sigismond I*' faisait exécuter en Flandre de superbes
tapisseries d'après les dessins de Raphaël. Le xvu* siècle
fut à peu près stérile ; mais, au xviii*, on remarque les
peintres Simon Cxechowicz, François Smuglewicz, Bac*
ciarelli , le sculpteur Jean Lebrun, et l'architecte Albert
Gncewid. — Les monuments de la musique sont plus
anciens que ceux des autres arts. On a conservé des
chants religieux ou nationaux, tels que l'hymne de
S* Adalbert à la Vierge (x* siècle), le Betowr du rot Ca-
simir !•' (1041 ), la Sfort de la reine Luitgarde (1^3).
Au XVI* siècle, Nicolas Gomolka mit en musique les
psaumes de Kochanowski. Alors les grands seigneurs en-
tretenaient des troupes de chanteurs et d'instrumen-
tistes. Dès 1533, la musique devint l'auxiliaire de l'art
dramatique dans les pièces Jouées à Cracovie ches les
Dominicains et les Jésuites; mais, môme dans les repré-
sentations profanes, on s'en tint longtemf» aux opéras
français. Kaminski donna, en 1778, le premier opéra avec
une musiaue nationale, et, deux ans après, un profes-
seur parisien, nommé Ledoux, vint former un corps de
ballet. Malgré les elTorts de L^sel et de Jean Stefani ,
l'opéra national ne put rivaliser encore avec le répertoire
italien. En 1810, une école de chant et de déclamation
fut créée à Varsovie, et se transforma, en 1820, en Con-
servatoire de musique et de déclamation sous la direc-
tion d'Elsner. Avec ce compositeur, Charles Kurpinski s
relevé l'opéra national. Parmi les artistes <^i depuis cette
époque se sont fait connaître dans TOcadent, on dis-
tingue les pianistes compositeurs Albert Sowinski et Cho-
pin. D«« airs caractéristiques nous sont venus de la
Pologne, tels que les polonaises, les maswreks, les kra»
ktwiah; etc.
POLiONAISE
de Pokjgne,
celui ë'4 menuet 1
10 meiiares. La 2* note du 1** temps est toujours synco-
pée, el la cadenoe finale du motiûr tombe aor le temps
POL
WS3
POL
faible. Un morceau de musique instrumentale c-<t écrit
ëlla polacca (à la polonaise), quand il est cans le
rliythme et le mouvement des polonaises. On n aussi
donné le nom de Polonaises à certains morcemx de
chant; il en existe dans le Faust de Spohr et dann la Jé-
rusalem de Verdi : mais ces morceaux n*ont pas le vrai
caractère de la danse, ils sont plus sémillants •f.t plus
cliargés d*ornements. B.
POLONAISE, sorte de redingote courte, ornée dit bran-
debourgs.
POLONAISE (Langue) ou lekhiqce, une des langues
slaves, par!ée par dix millions d'hommes environ, depuis
rOder Jusqu'à la Duna et au Dnieper, et depuis la mer
Raltique Jusqu'aux Karpathes, c.-à-d. dans la Pologne
russe, le duché de Posen, la Galicie, une partit ) de la
Silésie, de la Prusse occidentale et de la Poméranie. De
iiombreu<ics colonies Tont encore portée dans diverses
parties des Empires autrichien et russe, notamment dans
la Bessarabie. Le polonais se distingue des autres langues
slaves par l'emploi très-fréquent des chuintante?- et des
si niantes, qui s'adoucissent pourtant un peu dans la pro-
nonciation. Assez semblable originairement au bohème,
qu'il a toujours surpassé en consonnes composées, il s'en
est ensuite éloigné pour prendre un dévelop;!>ement
propre. Riche de mots et de formes, il est essentiel iement
flexible, il crée à volonté des augmentatifs et des di-
minutifs, il tire de son propre fonds certaines nomen-
clatures que d'autres idiomes empruntent aux langues
classiques, par exemple celles de l'histoire naturelle et
de la chimie. Ce n'est pas qu'on n'y trouve point de vo-
cables étrangers, latins , allemands et russes ; mais ils y
ont été introduits, les premiers par le clergé depuis la
prédication du christianisme en Pologne au x" siècle, les
autres par l'effet du voisinage et des rapports pol .tiques.
~ L'étude du polonais est difficile, même pour l&i autres
Slaves, à c^use de la multiplicité et de la complication
de ses flexions. Sa grammaire, toute slave quVdle est
dans son ensemble, a beaucoup de rapports avec ]n gram-
maire latine. Il possède trois genres; on a cru recon-
naître quelques traces du nombre duel dans les rerbes.
Les sutetantifs et les adjectifs se déclinent : oa distingue
sept cas, parce que l'ablatif latin a été partagé ea deux,
l'instrumental et le locatif; de plus, à certains ca?, la dé-
clinaison varie suivant que le nom exprime un ètrts animé
ou une chose inanimée. La déclinaison des substantifs
change encore selon que le thème du nom finit par une
voyelle ou par une consonne, par une consonne dure ou
une consonne molle. A plusieurs cas des adjer;tifs, il
existe, outre les flexions qui distinguent les genres, cer-
taines variantes selon la déclinaison particulière des sub-
stantifs auxcjuels ils se rappohent. Les pronoms cmt éga-
lement plusieurs formes pour chaque cas. Le polonais a
trois conjugaisons, qui admettent toutes l'emploi des
auxiliaires ; en outre, on classe les verbes en pairfaits et
imparfaits, selon qu'ils expriment un fait actuel ou un
fait iiabitucl. Ce qui augmente encore les difficultés de la
langue polonaise, c'est le grand nombre d'exceptions que
comportent les déclinaisons et les conjugaisons. La con-
struction est inversive, comme en latin. — Certains au-
teurs nient au'il existe des dialectes en polonais ; d'autres
distinguent le langage de la Grande-Pologne , le craco-
vien ou idiome de la Petite-Pologne, le polonais de la
Prusse orientale, et celui de la Silésie. Il n'y a là guère
autre chose que des difi^érences de prononciation : ainsi ,
dans la Grande-Pologne, on traîne les voyelles. Toute-
fois, on peut citer comme caractère du dialecte de la Pe-
tite-Pologne la suppression de la distinction des genres.
Le cassowe, parlé en Poméranie, est un mélange inculte
de polonais et d'allemand. Le mazovien, en usage dans
la Mazovie et la Podlachie, n*est pas moins corrompu :
il adoucit les consonnes sifflantes, et change sch en s, isch
en ts, etc.
Le polonais s'écrit avec l'alphabet latin , auquel on a
ajouté deux voyelles figurées par les caractères a et e
avec une cédille pour représenter les sons on et in, le w
allemand qui a le son de notre v, et une l barrée pour
rendre une articulation particulière aux Polonais. Les
règles de l'orthographe sont basées sur la prononciation.
Celle-ci est momfiée par des accents, qui affectent les
consonnes aussi bien que les voyelles. L'accent sur une
consonne la rend mouillée^ c-k-i, qu'il la fait suivre d'un
y faiblement prononcé. Les vers polonais sont rimes. La
f^e générale de la prosodie est de placer une longue sur
b pénultième des polysyllabes.
V. Roter, CUf de$ languet polofMtse et allemande,
Bmlau, 1016, in-8*; Cnapius (Knapgki), Theiourus po-
lono-latino-grœcus, Cracovie, 1643; Hesgnien (Meninski),
Institutio polonicœ, italicat et gallicœ linguœ, Dantzig^
1649, in-8<>; Malczewski, Nova et mrtkodica institutio
in linguam polontcam, 1690; le même. Idée générale
de la langue polonaisef en allem., Riga, 168/; Kop-
czynski. Essai de grammaire polonaise, pour les Fran*
çais^ 1807, in-8°; Bucki, Méthode pour apprendre la
langue polonaise, Berlin, 1797, '2 vol. in-8<*; Trabczynski,
Grammaire raisonnée ou Principes de la langue polo-
naise, Varsovie, 1798, in-12; Trotz, Dictionnaire fran-
çais-allemand et polonais, Leipzig, 1799-1803, 4 vol.
in-8<^, et Nouveau Dictionnaire polonais- allemand et
français, 4« édit. revue par Moszczenski , Breslau , 1832,
3 vol. in-4<*; Uautepierre, Grammaire française et polo-
naise, Varsovie et Breslau, 1800, in-8*; Linde, Diction-
naire du polonais et des treize dialectes de la langue sla-
vone, Varsovie, 1807-1814, 6 vol. in-4*»; Litwinski,
Vocabulaire polonais-latin- français^ Varsovie, 1815, 2
vol. in-8<'; Kaulfuss, Tableau de l'esprit de la langue
polonaise. Halle, 1804; Mrongovius, Grammaire polo-
naise, Kœnigsberg, 1805, in-8<* ; le même. Dictionnaire
polonais-allemand y ibid. , 1835, et Dictionnaire alle-
mand-^lonais, 1847; Bandtkie, Dictionnaire polonais^
allemand, Breslau, 1800, in-8*», et Grammaire polonaise,
1824 ; Vater, Grammaire abrégée de la langue polonaise.
Halle, 1807, in-8°; Mrozinski, Grammaire polonaise, Var-
sovie, 1822; PopJinski, Grammaire polonaise. Lissa,
1820; Schmidt, Dictionnaire polonais-ru^se-allemand,
Breslau , 1834-36, 2 vol. in-8°, et Nouveau Dictionnaire
portatif français-polonais et polonais- français, Leipzig,
in-16; Polil, Grammaire théorique et pratique de la
langue polonaise, 3" édit., Breslau, 1839; Bronikowski,
Grammaire polonaise pour les Français, Paris, 1848;
Srzcniavva, Traité des étymologies de la langue polonaise,
en allem., Lcml)erg, 1848, 2 vol. in-8^
POLONAISE (Littérature). De tous les peuples slaves, les
Polonais sont ceux qui possèdent la littérature la plus
riche. Antérieurement à l'introduction du christianisme,
il existait des chants et des légendes populaires, dont les
fragments ont été recueillis de nos jours avec soin. Le
plus ancien monument qui soit arrivé complet jusqu'à
nous, c'est l'hymne en vers, Ooga Bodzica^ qu'on attribue
à l'évèque S' Adalbert f fin du x* siècle), et qui est, sous
forme d'invocation à la Vierge, un véritable chant de
guerre. — Ces premiers germes de la littérature polo-
naise furent étouffés par la civilisation latine, qui avait
pénétré dans le pays avec l'Évangile. Pendant cinq siècles,
ce fut en latin qu'on écrivit tous les ouvrages destinés à
l'Europe savante. Au xii* siècle, les lettrés de la Pologne
connaissaient à fond la littérature romaine, et lui fai-
saient de nombreux emprunts; les écoles et les biblio-
thèques pouvaient rivaliser avec celles des peuples de
l'Occident ; la jeunesse allait compléter ses études dans
les Universités de France et d'Italie, où l'on vit même
plusieurs Polonais professer : Nicolas de Cracovie, Jean
Grot do Slupcé, Przeclaw, etc. De nombreuses Chro-
niques latines furent rédigées durant cette période, entre
autres, celles de Martin Gallus (en polonais Kurek, coq)^
de Mathieu Cholewa, de Vincent Kadiubek, de Boguphal,
et de Martin Strzepski , dit Polonus, Vitelio (Ciolek) de-
vint célèbre comme physicien et mathématicien.
Une ère meilleure pour la littérature nationale com-
mença avec la seconde moitié du xiv*' siècle. En 1347, le
roi Casimir III donna un Code de lois connu sous le nom
do Statut de Wislica, et rédigé en polonais, et fonda en
1364 l'Université de Cracovie, qui toutefois ne fut com-
plètement organisée c^u'en 1400 par Ladislas Jagellon,
dont la femme, Hedwige, avait naguère obtenu du pape
Boni face X l'autorisation d'y adjoindre une Faculté do
Théologie. Cette Université, constituée sur le modèle do
celle de Paris, soutenue par Jaroslas Skotniçki, arche-
vêque de Gnesne, devint le foyer des sciences et des
lettres en Pologne : ses docteurs figurèrent avec éclat au
concile de BAle en 1431 ; féconde aussi en illustres ma-
thématiciens, elle eut la gloire de former Copernic. Mat-
thieu do Cracovie devint recteur des Universités de
Prague et de Paris. Grégoire de Sanok se distingua comme
philosophe et comme naturaliste. La première impri-
merie qu'il y ait eu en Pologne fut établie, en 148d, à
Cracovie, par un certain Haller. Parmi ceux qui contri-
buèrent à l'élan que prit alors la culture des sciences, il
faut surtout mentionner Jean DIupsz, dont on a une
flistoire de Pologne, en latin , précieuse pour l'histoire
de son temps.
Le xvi" siècle a été appelé l'âge d'or de la littératurt
poionnifio. La tolérance dont on Jouissait dans le royauinf
POL
1454
POL
y attirait des milliers d^étrangcre, poursuivis pour leurs
doctrines en Allemagne, en Italie, en Espagne, en Angle-
terre et en Suède; une égale tolérance était laissée au
catholicisme, au protestantisme, au schisme grec et au
{udaîsme. Le talent pouvait prétendre à tous les emplois :
^historien Kromer, fils d*un paysan, et le poôte Dan-
tiscus, fils d*un brasseur, se succédèrent dans révéché
de Warmie ; Érasme Ciolek, fiU naturel d*un musicien
ambulant et d*une cabareti^, fut évèque de Ploçk ; Ja-
niçki , fils d*an voiturier, reçut du pape la couronne de
poète; un cardinal d*origine très-obscure, Stanislas Ho-
sius, fut Tun des présidents du concile de Trente. Il était
rare alors de rencontrer un Polonais qui ne parl&t pas
plusieurs langues. Des imprimeurs célèbres, tels que
Scharfenberger, Viétor, Piotrkowczyk, etc., rivalisaient
de goût pour se rendre dignes d'un tel siècle : 80 villes
polonaises possédaient des imprimeries, et on en comp-
tait 50 à Cracovie seulement. Enfin les luttes de la Réfor-
mation religieuse imprimèrent aux esprits une activité
salutaire. — Sous Tinfluence de ces causes diverses, la
littérature prit un grand essor. Nicolas Rey, de Naglowiç,
peut être considéré comme le père de la poésie polo-
naise ; on lui doit une traduction en vers des Psaumes,
des poésies satiriques écrites dans une langue énergique,
mais souvent grossière, et un Miroir de tous les Etats,
précieux pour l'histoire des mœurs. Jean Kochanowski
composa des odes et des élégies touchantes, des épi-
grammes, des satires, un drame conçu dans le système
des anciens Grecs, et une magnifique traduction des
Psaumes; son frère, André, traduisit V Enéide, et son
neveu, Pierre, la Jérusalem délivrée et le Roland furieux,
Rybinski, Szarzynski et Grochowski se distinguèrent
comme poètes lyriques. André Krzycki écrivit en latin des
satires, des élégies, et divers traites en prose. Szymono-
wicz, dit Sim^mideSt mérita par ses odes latines le sur-
nom de Pindare latin, et composa de charmantes idylles
polonaises sur le modèle de celles de Théocrite. Zimoro-
wicz suivit ses traces dans la poésie pastorale, tandis que
Dambrowski et Miaskowski composaient des hymnes re-
ligieux. L'éloquence politique fut cultivée avec succès par
Orzechowski , lanuszowski et Gornicki, l'éloquence sacrée
par Skarga et Vuieck. Des Annales furent , comme pré-
cédemment, écrites en latin par Miechow, Kromer,
Hodrzewski, etc.; mais la langue polonaise fut aussi
appliquée à Thistoire par Martin Bielski et son fils Joa •
chim , par Gornicki ( Histoire de la couronne de Pologne),
Stryikowski (Chronique de Lithuanie, Kœnigsberg, 1852),
Paprocki, auteur d'ouvrages chronologiques et héral-
diques, pour la plupart en vers. Ajoutons aux noms qui
précèdent ceux de Jean Flachsbinaer, Jean Turzo, poètes
et prosateurs Versés dans la langue latine; Stanislas Za-
borowski , grammairien et légiste ; Bernard Wapowski ,
historien et mathématicien ; uroicki , Herburt , Warsze-
wicki Grzebski, Spiczynski Siennik, Sendziwoy, célèbres
à divers titres scientifiques. Siémionowicz fit paraître sur
Tartillerie un ouvrage qu'on traduisit en français et en
allemand. Arciszewski alla construire en Amérique les
forteresses de Rio-Janeiro, de Pernambouc et de Bahia.
Les œuvres de Bernard de Lublin et de Jean de Pilzno
sur la Jurisprudence offrent une étonnante analogie d'idées
avec celles que publièrent au xvui* siècle en Italie Bec-
caria et Filangieri.
A cette période de gloire succède un siècle de déca-
dence, qui coïncide avec la domination des Jésuites.
Avec cet ordre religieux, un latin incorrect prévaut dans
la littérature et les sciences sur l'idiome national; la
langue polonaise perd elle-même sa pureté par l'invasion
du mauvais goût , et les mots se chargent de désinences
latines, italiennes ou françaises. Les dissertations théo-
logiques et le genre affecté du panégyrique prennent la
place des œuvres de Tinvention originale. Quatre impri-
meries seulement se maintiennent dans toute la Pologne,
et la plupart des écoles se ferment. II faut ajouter à ces
calamités les invasions des Suédois, des Russes et des
Turcs, qui achèvent de disperser et de détruire les mo-
numents des lettres et des arts. Toutefois, on peut en-
core mentionner quelques hommes distingués : le Jésuite
Casimir Sarbiewski , auteur de remarquables poésies la-
tines; Twardovroki, poète héroïque; Kochowski, à qui
l'on doit des odes estimées; Opallnski, auteur de pi-
quantes satires, écrites malheureusement avec trop de
négligence ; Chroscynski , traducteur de Lucain ; le jésuite
Nasurczewski, traducteur de V Iliade d'Homère et des
Égîogues de Virgile ; Niesiecki , laborieux biographe.
Vers le milieu du xvui* siècle, la littérature prit un
touvel essor, grâce à l'influence exercée par la Fninoe et I
ses mœurs, et aux encouragements que les lettres, aooi
le. règne de Stanislas-Auguste, reçurent des Czartoryiskf,
des Jablonowski et autres seigneurs polonais. Un prêtre
piariste, Stanislas Konarski, eut la plus grande part à
cette rénovation , par la fondation d'une foule d'écoles,
et par la publication d'excellents ouvrages pédagogiques
ou littéraires. Il traduisit en polonais diverses pièces dra-
matiques françaises, et fit établir à Varsovie, en 1765,
un tné&tre permanent. Il fut secondé dans cette noble
t&che par les deux évoques Zaluski , qui parcoururent la
Pologne, l'Allemagne et l'Italie, pour rochercher les livres
et les manuscrits polonais que les invasions avaient dis-
persés, et qui parvinrent & former une bibliothèque de
300,000 vol., dont ils firent don à l'État. Une Commission
^éducation ncUionale fut formée en 1775, pour diriger
et perfectionner l'instruction publique. Parmi les écri-
vains de cette époque, on distingue : Rzewuski, renommé
pour son talent poétique ; le Jésuite Bohomolic, qui tra-
duisit un grand nombre de pièces du théâtre français; le
prince Adam Czartoryiski , a qui l'on doit les premiers
drames vraiment nationaux; Szymanowski etTrembecki,
chantres gracieux d'idylles et d'éléfdes ; Naruszewirz, quo
ses poésies lyriques, sa traduction de Tacite, etson Histoire
de la nation polonaise placent au premier rang; Krasicki,
remarquable par sa verve et sa finesse, auteur de la
Guerre de Cfioczim, de plusieurs satires spirituelles, et
d'une bonne traduction d'Ossian ; Wegierski , poète épi-
grammatique, qui a imité le Lt^^nn de Boileau ; Kniaznin,
célèbre par ses chansons anacréontiques; Ludwik Omski,
traducteur de Corneille; Boguslawski, auteur du drame
les Cracoviens et les Gorales, Lachowski, prédicateur de
la cour, relQva l'éloquence de la chaire. La diète de 1788
vit se produire des talents oratoires, entre autres, Ignace
Potocki', promoteur de l'affranchissement des serfs, et
son frère Stanislas Potocki , Judicieux critique, dont on
a un Traité sur le style.
Malheureusement la Pologne, déjà morcelée par les
partages de 1772 et de 1793, devint en 1705 la proie de
ses voisins ; les lettres furent la consolation des bons
esprits sous la domination étrangère. Dés 1801, l'historien
Thadeusz Czacki , Franciszek Dmochowski et l'évêque Al-
bertrandy fondèrent à Varsovie une Société des Amis des
sciences; l'Université de Wilna, restaurée en 1803> et le
lycée de Krzeminiecz, fondé en 1805, firent tout ce qui
était en leur pouvoir pour maintenir la langue nationale
et propager l'instruction. Un habile ministre, Stasziç,
seconda ce mouvement. L'érudition classique fut repré-
sentée avec éclat par Przybylski et Felinski, auteurs
d'excellentes traductions en vers. Karpinski écrivit des
pastorales renommées et une brillante imitation des
Psaumes ; Kozmian et Tomaszewski , des poèmes didac-
tiques; Ozinski et Brodzinski, des poésies lyriques;
Gurski, des poésies légères; Woronicz, sa Sibylle et sa
Lechiade; Venzyk, sa tragédie de Glinski, Niemcewicz,
génie universel , se distingua par ses chants historiques
et ses drames nationaux , par ses odes et ses élégies , par
ses traités d'histoire et de littérature. Kollontay se mon-
tra savant publiciste; l'évêque Karpowicz releva l'élo-
quence de la chaire; Bantkie, Linde, Ossolinski, don-
nèrent d'utiles travaux sur la philologie et sur l'histoire;
Bentkowski composa un Cours de littérature. Puis, une
nouvelle école littéraire se forma, nourrie des poètes an-
glais et allemands, et hostile au classicisme français.
A côté de Mickiewicz, qui en fut le chef, se placent
des poètes que la Révolution de 1831 contraignit pour
la plupart de fuir à l'étranger : Malczeski, Zaleski, Pa-
dura , Ostrowski ; Odysnec , 'traducteur de la Fiancée
d*Abydos, de lord Byron, et de la Dame du lac, de Walter
Scott; Korsak, poète lyrique et élégiaque; Chodzko,
traducteur d'un grand nombre de poèmes orientaux;
Garczynski , auteur d'un poème épique ; Siowacki , le
plus fécond des poètes [Polonais modernes. En même
temps , une direction nouvelle a été imprimée à l'his-
toire par Lelewel, et sur ses traces ont marché Bandski,
Maciejowski , le comte Raczynski , le comte Piater, Moc>
kacki , Karl Hoffmann, Wrotnowski. On a de Narbutt une
excellente histoire de la Lithuanie; de Lucaszewicz, le
récit de la dernière guerre de l'indépendance, et des
matériaux pour l'histoire de la Réformation en Pologne.
Michel Czajkowski ( Michel- Zadik- Pacha) est l'un des
mellleura romanciers de sa nation ; dans le même oenre
s'est distin{;uée la princesse Czartoryiska de Wurtenc&erg,
auteur de Malvina.
POLTIN, monnaie d'argent de Russie, valant un demi
rouble ou 2 fr.
POLYAMATYPIE (du grec po/uf, multiple, orna, eo*
POL
1455
POL
lenible, et tupot, caractère), procédé oa! consiste à fondre
ensemble plusieurs caractères d'impnoierie à la fois, au
lieu de les fondre un à un, comme cela se pratique géné-
ralement. Henri Didot en est l'inventeur.
PQLYANDRION , nom que les anciens Grecs donnaient
au tombeau commun d*un certain nomrbre de guerriers.
POLYCHROMIE (du grec polus, multiple, et khrâma,
couleur ), procédé consistant à enluminer de oouleun va-
riées les ouvrages de sculpture et les monuments d*ar-
chitecture. L*usage de colorier les statues est aussi ancien
que la statuaire : les Éthiopiens peignaient leurs divi-
nités avec du minium ; les Assyriens les revêtaient d'un
vernis coloré ; les Phéniciens, les Babyloniens et les Perses
les ornaient en outre d'or, d'argent, d'ivoire, de pierre-
ries, déchaînes précieuses, etc. Il en fut de même chez
les Grecs, non. que l'art fût dans l'enfancet mais pour
donner satisfaction k un goût encore peu épuré. Les sta-
tues et les bas-reliefs en marbre blanc du célèbre tom-
beau de Mausolo étaient peints : le fond des bas-reliefs
en azur, et le reste, ainsi que la figure de Mausolo, en
rouge, ainsi qu'on peut le voir aux ruines qui en ont été
apportées au British Muséum de Londres. On voit au mu-
sée des études à Naples un Apollon en marbre dont les
cheveux portent la trace d'une peinture blonde, et dont
le bas de la draperie est orné de bandes rouges avec de
petites fleurs blanches. Il existe à Munich une statue de
Leucothée, où l'on remarque des traces de la dorure des
cheveux^ et de dessins routes et verts qui ornaient les
draperies. Un buste d'AntinoOs, au Louvre, était enduit
d'une légère cooche de peinture, et les yeux étaient figu-
rés par des diamants que l'artiste y avait enchftssés. Ce
fut seulement depuis le siècle de Périclès que les ar-
tistes cessèrent d'employer la couleur pour ràhausser la
valeur de leurs œuvres. Mais Jamais les Grecs ne renon-
cèrent à peindre les édifices publics ou privés : ils ap-
pliquaient les coulcun aux frises et aux moulures en
fierai. Dans l'ordre dorique, on faisait souvent usage
des dorures : l'architrave du Parthénon était ornée de
boucliers d'or. — La polychromie passa des Grecs aux
Romains : à Herculanum et à Pompéi, les colonnes et les
murailles extérieures des édifices sont enduites d'une
couche de peinture; la colonne Trajane à Rome était re-
nommée pour les brillantes couleurs dont elle était revê-
tue. Sous les empereurs, ce fut une mode de peindre les
façades des édifices de manière à imiter les ornements
architectooiques. Les Byzantins et les Arabes ont aussi
adopté la polychromie. On l'adopta pour les églises de
l'Occident, surtout aux xu* et xrii* siècles, mais on y re-
nonça complètement au xvi*. Elle est aujourd'hui fort à
la mode pour la décoration des édifices religieux , même
de ceux qui ne la comportent guère. V, Hittorff, V Ar-
chitecture polifchrâme chez les Grecs, Paris, 1830, in-8*.
POLYCORDE, instrument de musique à archet, in-
venté en 1799 par Hilmer, à Leipzig. Il ressemble à la
contre-basse, mais est monté de 10 cordes.
POLYGAMIE (du grec polus, multiple, eigamos, ma-
riage), état d'un homme qui a plusieun femmes. La
polygamie, fondée sur l'inégalité sociale et l'esclavage des
femmes, a été en usage parmi tous les peuples sauvages.
Chez les Hébreux , où l'exemple des patriarches Tautori-
sait, elle ne fut point détruite par la loi de Moïse. En
Grèce, la loi athénienne permettait d'avoir deux femmes,
et Socrate lui-même en profita. Chez les Romains, le
polygame fut noté d'infkmie. Les Barbares de la Germa-
oie, au moment de leura invasions, étaient monogames ;
mais lenn chefs pouvaient prendire plusieurs femmes
comme marque d'honneur. La polygamie a été interdite
par la loi chrétienne : néanmoins les Protestants ont cru
devoir la tolérer chez les nouveaux chrétiens de l'Inde.
Mahomet, cherchant, non à faire disparaître la polyga-
mie, mais à la régler, reconnut à ses sectateun le droit
de prendre quatre femmes légitimes. Les Mormons de nos
Jours ont adopté la polygamie. Dans notre ancienne Juris-
prudence, le polygame était puni de mort; aujourd'hui la
pluralité des manages légalement contractés entraîne la
peine des travaux forcés. V. Bioamib. B.
POLYGLOn*E (du giec polus, multiple, et glôtta,
langue ), se dit de toute personne qui sait plusieurs lan-
K es, et de tout ouvrage écrit ou imprimé en plusieun
ignes. H existe diverses Bibles polyglottes : les Hexa-
pies (F. ce mot) d'Origène; la Bibh de Ximinès, dite
aussi Bible d'Aleala ou Bible Complute (CompltUwn est
le nom latin d'Aleala) , imprimée de 1514 à 1517 à Alcala,
par ordra du cardinal Ximénès, en hébreu, en chaldéen ,
en grec et en latin ; la Bible de Justmiant, 1518, dans
les mêmes langues que la. précédente, plus l'arabe ; la
Bible royale, copie de celle de Ximénès, augmentée do
syriaque, imprimée à Anven en 1572, aux frais de Phi-
lippe II, sous la direction d'Arias Montanus; la Bible de
Butter f imprimée à Hambourg (1500) en 12 langues,
hébreu, chaldéen, grec, latin, allemand, saxon ou bohème,
italien, espagnol , anglais, français, danois, polonais ou
slavon ; la Bible de Le Jay, publiée à Paris (lo45) en sept
langues, hébreu, chaldéen, samaritain, syriaque, arabe,
grec et latin ; la Bible de Wallon, imprimée à Londres
en 1057, où se trouvent quelques parties en éthiopien et
en persan. VOraison dominicale a été imprimée à Paris,
en 1805, dans 90 langues. Calepin est auteur d'un Dic-
tionnaire (1551 et 1081) en sept langues, latin, hébreu,
grec, français, italien, allemand, espagnol et anglais. Les
traductions polyglottes des auteun anciena sont assez
nombreuses.
POLYGONE (du grec polus, multiple, et gânia, angle),
en termes de Fortification, figure qui détermine la forme
^nérale d'une place de ^erre. — On nomme encore
Polygone le lieu où les artilleura s'exercent, en temps de
paix, au tracé et à la construction des batteries, au tir da
canon, au Jet des bombes et des obus, etc. Une butte en
terre, à plusieura côtés, sert de point de mire aux pro-
jectiles. Il y a un polygone à chaque école d'artillerie.
POLYGRAPHE (du mcpolus, multiple, et graphéin^
écrire), auteur qui a écrit sur plusieura matières. Tels sont,
chez les Grecs, Aristote, Platon, Xénophon, Plutarque et
Lucien ; chez les Romains, Cicéron, Varron, Sénèque; en
France, Fontenelie, Voltaire, Montesquieu, J.-J. Rous-
seau, Diderot, Chateaubriand, etc.; en Allemagne, Leibniz,
VVieland, Gœthe.
POLTGSAPHB , machine qui fait mouvoir simultanément
plusieurs plumes à écrire. C'est une invention anglaise,
transportée en France par Rochette en 1805.
POLYGRAPHIE, art d'écrire de plusieun manières
secrètes, qui, pour être lues, supposent une clef ou la
connaissance d'un chiffre convenu. V. CaYFrocRAPniB,
Chiffres.
POLYMNIE (du grec polus, multiple, et de umnos,
hymne, ou de mnéia, mémoire), une des Muses. Sur des
monuments antiques, elle est représentée debout, la main
droite élevée, enveloppée dans sa draperie et son menton
reposant dessus, dans l'attitude de la méditation. Parfois
elle a une simple couronne dans les cheveux, parfois des
perles. Elle tient aussi un sceptre de la main gauche.
Chez les Latins , on lui donna un volume ou rouleau, sur
lequel étaient écrits les noms de Démosthènes et de Cicé-
ron, ou le mot suadêre (penuader). Quand elle a un
maaque à ses pieds, elle est la Muse de la pantomime. Le
nmsée du Louvre possède une gracieuse statue de Po-
lymnie, haute de 1™,86.
POLYNÉSIENNES (Langues), groupe de lanffues de
rOcéanie, dont les plus importantes sont le néozélan"
dais, le tonga, le taitten, le marquésan, le sandwich
{V. ces mots). Ces langues, qui paraissent être nées de
l'altération graduelle du malais, sont pauvres de formes ;
l'onomatopée y est fréquente; les catégories gramma-
ticales sont faiDlement accusées, et le même mot appar-
tient souvent & difiTérentes parties du discours. Il arrive
que le genre et le nombre ne sont môme pas indiqués.
La structure des mots est fort simple : la syllabe ne peut
être terminée par une consonne, ni en renfermer deux;
elle se compose toujoura d'une consonne suivie d'une
voyelle, ou n'est formée que d'une seule voyelle. Les
langues polynésiennes ont fréquemment recoure à la ré-
pétition d'une même svllabe pour former des mots nou-
veaux. Elles sont privéas de siflQantes, et tendent à faire
disparaître les consonnes qui ont une individualité trop
prononcée. On y remarque une double forme du pluriel,
indiquant si la personne & laquelle on s'adresse est com-
prise dans le nous, ou en est exclue, n y a de même un
double duel.
POLYPLECTRON, instrument à clavier, en forme de
piano, dont les sons imitent ceux de plusieura instru-
ments à archet. Il ftit Inventé par Dietz, à Paris, en 1828.
POLYPTOtE (du grec polus, multiple, eiptôsis, chute,
désinence), figure de diction qui consiste à employer un
même mot, dans la même période, sous plusieura des
formes grammaticales dont il est susceptible. Ex. : « Tout
ce que vous avez pu et dû faire |>our prévenir ou pour pa-
cifier les troubles, vous l'avez fait dès le commencement,
vous le faites encore tous les Joun, et l'on ne doute pas
que vous ne le fassiez Jusqu'à la fin. »
POLYPTYQUE. V. ce mot dans notre Dictumnaire dé
Biographie et d'Histoire,
POLYSYLLABE (du grec jK><iM, nombreux, et suUabè,
POM
145C
POM
^llabe) , mot renfermant plus de deux on trois syllabes,
eomme proportion, constitutionnel, etc. On appelle aussi
de ce nom un pied métrique composé de plus de trois
syllabes, comme sont les chorlambes, les péons, les épi-
tritcs, les ioniques, les procéleusmatiques. Considérés
par rapport à l'accent toniaue, les polysyllabes ne peu-
vent le recevoir au delà de la "i* avant-dernière dans les
langues anciennes, et ils n*en peuvent porter deux que
dans certains cas où suit un enclitique. Dans les vers
dactyliques grecs , tout polysyllabe peut se placer à la fin ;
ainsi certains vers d*Homere se terminent par des mots
de 7 syllabes; la versification latine ne s*accommodait pas
de CCS longs mots, et no tolérait généralement, à cette
place, que des dissyllabes et des trisyllabes. On ne sui-
vait le système grec que pour les noms propres tirés de
cette langue {Alpheswœus, Tyndaridarum , Alcimedon-
Us) , et dfans les vers spondalques. P.
POLYSYNDÊTON (du grec polus, nombreux, et sun-
detos, lié ensemble, conjoint), terme de Rbétorique
ancienne ; figure de mots consistant dans la répétition de
la même conjonction au commencement de plusieurs in-
cises , ou lorsqu'on veut marquer arec plus de force une
énumération. P.
POLYSYNTHÉTIQUES ( Langues ), c.-à-d. composées
d^éléments multiples, variété des langues qui procèdent
par agglutination ( k. ce mot). Elles se rencontrent cbez
la plupart des anciennes peuplades américaines. Ce qui
les caractérise, c'est qu'un seul mot , souvent d'une in-
croyable longueur, y exprime des idées très-complexes.
Ainsi, un heptasyllabe, comprenant 18 lettres, rend les
1 1 mots français suivants : Ùeu où les hommes pleurent
parce qite l'eau est rouge; et c'est le nom d'une ancienne
ville mexicaine chez les Acolhues : AchichillMhocan (pro-
prement Eau-rouge-homme-^leurer). D'autres fois, un
mot très-simple dans nos langues européennes est exprimé
par plus do 20 lettres : tel est celui qui, sur les bords de
i'Orégon, correspond à langue, et celui qui en mexicain
signifie fagot» Les dialectes mexicains offrent des mots
qui ont Jusqu'à 14 syllabes, et, par conséquent, une
trentaine de lettres au moins. Notre locution port de lettre
s'y exprime par un mot de 12 syllabes contenant 33 lettres.
On en trouve dans le groenfandais qui ont 38 lettres;
on de CCS mots é<|uivaut à ces 4 propK)sitions : H dit
aussi I que tu veux également \ aller là bien vite \ acheter
un beau couteau. Une autre différence bien profonde entre
nos idiomes et ceux de la plupart des peuplades améri-
caines, c'est l'influence exercée sur la forme des verbes,
non pas par la personne qui parle, à qui on parle, ou
dont on parle, c.-à-d. par le sujet, mais par la nature
du régime. Si celui-ci est une personne ou un animal de
tel ou tel sexe, ou une chose inanimée de telle ou telle
couleur, dans ces différents cas, le verbe prendra une
forme particulière : ainsi , je vois un grand rocher, je
vois un homme , je vois une petite fille , s'expriment par
trois formes verbales différentes, quoique le sujet, le
temps, le mode, soient les mêmes dans chacune de ces
propositions. Le verbe manger varie autant de fois qu'il
y a de choses comestibles différentes énoncées dans la
phrase, c-à-d. dans le mot. Il y a également trois verbes
spéciaux pour exprimer Tidée se servir de, selon que la
chose dont on se sert est à soi , ou à celui à qui Ton parle
ou de qui l'on parle. V. AMéniCAiNES ( Langues ). P.
POLYTECHNIQUE (École). V, École poLYTecHiiiQDE,
dans notre Dictionnaire de biographie et d'Histoire,
POLYTHÉISME. V. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire,
POLYTYPAGE (du grec polus, multiplie, ^Xiupos,
type, caractère), nom que l'on donna aux premiers essais
de la stéréotypie (V. ce mot),
POMÉRANIEN (Idiome). Cest du polonais trè»-oor-
rompu.
POMME DE PIN, ornement fréquemment employé
dans les arts. Sur beaucoup de bas-reliefs antiques, une
pomme de pin termine les thyrses qui décorent les frises.
On la voit seule dans les angles des plafonds, des cor-
niches doriques et ioniques. Elle couronne les couvercles j
des vases; elle forme l'amortissement des édifices circu-
laires terminés par une couverture voûtée. Une pomme
de pin colossale, en bronze, surmontait le mausolée de
l'empereur Adrien, à Rome; on la voit* aujourd'hui à [
Textrémité d'une cour du Vatican.
POMOBRIUM. \ V, ces mots dans notre Dictionnaire
POMONE. S de Biographie et d'Histoire.
POMPE, nom donné, dans le cor et la trompette, à un
fragment de tujrau en forme de fer à cheval, qui s'emboUe
ptf 88t extrémités sur les bouts formés par une section
faiteversle-milieudn corps de Tin strument; en enfon-
çant plus ou moins cette pompe, on élève ou on baisse le
ton. La pompe du trombone aies branches très-longues
et c'est par la manière dont on la tire ou l'enfonce
qu'on obtient les différents degrés de réchelle. Dans
la flûte, la clarinette, et le basson, la pompe est une
embolture en métal placée entre les principales
Pièces pour les réunir, et qui sert aussi à allonger
instrument, ce qui baisse son intonation.
POMPEE (Colonne de). K. Coijopinbs mondhentales,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
page 634. col. 1.
POMPEIA ou POMPÉI (Ruines de). Cette ville, située
à 24 kil. S.-E. de Naples, et l'une do celles quo réruptios
du Vésuve engloutit, en l'an 70 de J.-C., fous une coucha
de cendres de plus de 5 à 0 mètres d'épaisseur, fut
complètement oubliée Jusqu'au milieu du xvni* siècle.
Cependant, en 4592, l'architecte Dominique Fontana,
chargé d'amener les eaux du Samo à Torre dcU* Annun-
ziata, fit creuser un canal à tntvers l'emplacement de
Pompéi ; mais l'incurie de Tadministration espagnole em-
pêcha toute recherche d'antiquités si précieuses. Un siècle
après, Joseph Macrini reconnaissait quelques restes de
murs et des maisons entières, sans éveiller davantage la
curiosité publique. En 1748, des paysans, creusant un
fossé dans le sol garni de vignes qui recouvre encore
maintenant une partie do la ville, découvrirent des ob-
jets d'art ; en 1755, le roi Charles III fit entreprendre
des fouilles, que l'on poursuivit avec plus d'activité sous
le gouvernement de Joseph Bonaparte, puis de MuraL
Les travaux, continués Jusqu'à nos Jours avec de fré-
quentes interruptions, ont mis à découvert à peu près le
tiers de la cité romaine. On a ici la vue de l'antiquité
dans sa réalité matérielle, bien que tout le faite des édi-
fices soit détroit ; les objets mobiliers ont tous été trans-
portés au musée de Naples. — Pompéi était défondue par
un double mur de 8 à 10 met. de hauteur, en assises
horizontales de blocs de marbre sans ciment, avec terre-
plein assez large pour être parcouru par trois chars de
front. De distance en distance sont des restes de tours
carrées, à plusieurs étages, et qui paraissent être de
sonstruction plus récente. L'entrée principale àiie Porte
c/7/erct</anum, con siste en trois arcades bâties en briq ues
et e^n lave; les deux latérales, pour les piétons, sont pe-
tites et étroites: il y avait une double porte en bois; ccUo
jproxiôricur se fermaitèfldescendantdansdes rainures
profondes , encore visibles. Les rues sont généralement
droites, irrégulièrement pavées eu lave, bordées de trot-
toirs élevés, et fort étroites, ce qui les rendait moins ac-
cessibles au soleil ; on y voit des ornières, traces de la
roue des chars, des degrés en pierre pour aider à monter
à cheval , et des fontaines d'où l'eau était distribuée par
des conduits de plomb dans les maisons particulières et
dans les édifices publics. Les habitations privées, encore
debout quelquefois Jusqu'au premier étage « en avalent
deux pour la plupart; construites toutes sur le même
plan, elles ne comprennent aue de petites pièces. On y
a trouvé du charbon, mais pomt de traces de cheminées,
excepté devant le four d'une boulangerie. Nulle part on
n'a reconnu d'écuries ni d'étables; des squelettes de che-
vaux gisaient dans les cours. Les maisons portent, au
lieu de numéros, les noms des propriétaires; sur quel-
ques-unes, des inscriptions pointes à la grosse brosse
remplacent nos écriteaux de location , ou des peintures
servent d'enseigne. Une des plus vastes habitations est la
Villa de Diomêde, exemple rare d'une maison à trois
étages, où Ton a recueilli quelques restes de verre des
fenêtres, des amphores avec du vin desséché par le temps,
des monnaies , des bijoux , un certain nombre de sque-
lettes, etc. Nous citerons encore : la Villa de Cicèron, plus
belle que la précédente, et qui a été recouverte après
qu'on en eut retiré les peintures et les mosaïques ; la
maison des Vestales, qui contenait des peintures peu
conformes à l'idée que cette dénomination éveille; la
^maison des Dansettëes, ainsi nommée des charmantes*
peintures qui en décoraient l'atrium; hi maison de ATar-
cisse, d'où provient la fameuse statue d'Apollon en bronze
du musée de Naples ; la maison de Sallustius ou é* Action
l'une des plus élégantes, entourée de boutiques et de ta-
vernes; la maison de Polybe, qu*on croit avoir été um
hôtellerie ; la vaste maison de Pansa, qui forme une iU
{insula) à elle seule; la maMon du Poète tragique, dont
les belles peintures et les mosaïques sont au musée df
Naples; la maison de Méléagre^ dont le Jardin conser»
vait encore quelles arbustes au moment do la décoavertf
en 1830 1 la matson des Néréides, qui a uo pâria^le di
POM
1457
PON
14 colonnes, et où Ton • troaTé 14 ytam d'argent, dont
plusieurs d*an poids considérable; la maison de Castor
9t Mlux on d$8 Dioicures, dont I*omementatioQ est aussi
riche nna variée; la maison du Faune, d*où Ton a tiré la
célèbre bataille en mosaïque qui est au musée de Naples;
la maisok du Labyrinthe, ainsi appelée d'une mosaïque
qui représente Thésée tuant le Minotaure; la maison de
Lucretius ou des Suonatrici (musiciennes), ouest un
petit théâtre de marionnettes, dont les acteurs sont figu-
rés par de petites statuettes, etc. Sur plusieurs routes,
aux portes même de la ville, on remarque des tombeaux,
entre autres, ceux de Neyoléia Tyché, d'Aricius Scaurus,
de CaWentius Quietus, enrichis de bas -reliefs moulés
en stuc.
L*archltectore des édifices publics est une corruption
de Tarchitecture grecque. Le Temple de la Fortune, d*ordre
corinthien , situé pré» du Forum , contenait une statue
peinte avec un mélange de pouipre et de violet, et qu'on
croit être celle de Gcàron. Le Forum, pavé de marbre,
était d^roré de statues, dont plusieurs piédestaux subsis-
tent, et entouré, sur trois côtés, de portiques & colonnes
doriques de marbre blanc. Alentour sont rangés les édi-
fices suivants : — Sur un soubassement s'élève le Temple
de Jupiter, avec portique de 12 colonnes corinthiennes ,
soutenu à Tintérteur par un double rang de colonnes io-
niques. Le Temple de Vénus, le plus vaste de tous, était
entouré de porûques soutenus par 48 colonnes doriques,
changées en corinthiennes au moyen d'un stuc, La Basi-
lique était entourée de péristyles formés de 28 colonnes
ioniques : celles-ci offrent cette singularité, qu'elles sont
composées d'un noyau de briques rondes, entourées de
briques pentagonales dont les angles extérieurs forment
les arêtes d'autant de cannelures. V Édifice d^Eumachia,
consacré à la Concorde et k la Piété, était en forme de
basilique, avec péristyle à 4 portiques formé de 48 co-
lonnes en marbre de Paros, et avec galerie intérieure de
trois côtés. Le Temple de Mercure ou de Quirinus , con-
struit sur un plan très-irrégulier, sert aujourd'hui de
dépôt pour les objets provenant des fouilles. Le Panthéon
ou Temple d* Auguste offrait au milieu d'une cour ouverte
un autel entouré de IS piédestaux qui supportaient sans
doute des statues; un des côtés de cette cour est occupé
par 12 chambres qu'on suppose être celles des Augustals
ou prêtres d'Auguste. Plusieurs Arcs de triompne sont
bàtis en briques et en lave, recouvertes de marbre. — Le
Grand Théâtre^ assis sur le tuf même d'une colline qui
dominait la ville, avait à l'intérieur 68 met. de diamètre :
on y accédait par 0 escaliers , divisant les gradins en
cinq parties {cunei ) ; ces gradins, au nombre de 20, étaient
partagés en trois étages par deux précinctions, et pou-
vaient recevoir 5,000 spectateurs. Sur deux des côtés d'un
Forum qui précède ce théAtre, il v avait des portiques
fermés, de 00 colonnes doriques, ou les spectateurs pou-
vaient se réfugier pendant la pluie. Tout près de. là, le
QiuiWt0r des soldats est formé d'un carré long, avec por-
tique à colonnes revêtues de stuc peint en rouge et en
jaune; il y a un double étage de chambres, où l'on a
trouvé beaucoup d'armes. Un Petit Théâtre ou Odéon
pouvait contenir 1,500 spectateurs. Au milieu d'un atrium
entouré de portiques à colonnes, s'élève un petit Temple
(Tlsis , au-dessus d'un soubassement de 7 degrés : on y
trouva le squelette d'un prêtre à table, avec des restes
de poisson, de poulet et d'œufs. Citons encore V Amphi-
théâtre, situé assez loin des autres constructions : il est
de forme elliptique, et pouvait contenir de 15 à 20,000
spectateurs ; au-dessus des 35 ranss de gradins partagés
en trois étages , on voit un rang de loges pour les femmes.
Enfin on a reconnu dans les débris de Pompéi un srenier
pnblic, des thermes, des prisons, une école, etc. K. Ha-
milton et de Murr, Descrixione délie nuove scoperte in
PompQa, 1770, in-4*; E. Hamilton, Essai sur les décou-
vertes de Pompéi, en anglais, Londres, 1777, in-4<>; Mil-
lin, Description des tombeaux découverts à Pompéi,
Naples, 1813, in-8^; Hazois, Ruines de Pompéi, Paris,
1^^-38, 4 vol. gr. in-fol., fig.; Geldicutt, Spécimens of
ancierU décorations from Pompeii, Londres, 1825^ in-8®;
Cockburns et Donaldson , Pompeij illustrated unth pic-
turesque views^ Londres, 1827, 9 vol. in-fol.; Bonucci,
Pompât décrite, Naples, 1828, in-8°; W. Gell et Gandy,
Pompeiana, or ObserwUions on the topography, édifices
and omaments of Pompeii, Londres, 1817-32, gr. in-8«i
Wilkîpg, Views of Pompeia, Londres, 1832; W. Qarke,
Pompéi , Londres , 1833, in-^<*; Raoul Rochette, Pompéi,
Choix ^édifices inédits, Paris, 1828-30, in-fol., et Choix
des peintures de Pompéi, 1844-48, in-fol.; Fausto et
Féhee Nkeolini, Le easeimonwmenti di Pompéi disegnëU
e deseritti: Gamicd , Inscriptions gravées on irait sur
les murs ae Pompéi, Paris, 1856, in-4" ; E. Breton, Pom-
péia, Paris, 1854, gr. in-8*; Fiorelli , Monumenta epigror
phica Pompejana ad fidem archetyporum expressa,
Naples, 1854. B.
POMPÉION, vaste monument de l'ancienne Athènes,
où l'on conservait les objets sacrés, et où se préparait la
pompe des Panéçrries. Il était à l'entrée de la vieille
ville, du côté de Phalère.
POMPES FUNÈBRES (Administration des], adminis-
tration privée qui, à Paris et dans les erandes villes, se
charge, à l'entreprise et d'après des tanfs approuvés par
l'autorité, du service des inhumations et pompes funèbres.
Avant 1780, le soin de régler les funérailles appartenait à
des officiers appelés crieurs de corpsy qui avaient en outre
la fonction de crier les vins, les légumes et les viandes
dans les marchés, les enfants et les chiens perdus dans
les rues. Tout se faisait, d'ailleurs, très-simplement : les
corps, recueillis à domicile, étaient transportés à bras, ou
bien cinq ou six ensemble, dans des voitures communes;
les indigents , placés dans des cercueils banaux , étaient
jetés nus dans une fosse commune. Il n'était pas rare de
voir les porteurs abandonner leur fardeau dans la rue,
pour entrer au cabaret. Dans quelques localités , les hos-
pices avaient reçu le droit de placer les tentures aux fu-
nérailles. Un décret du 23 prairial an xn (1*' Juin 1803)
transféra aux fabriques des ^lises et des consistoires le pri-
vilège de faire les fournitures funéraires, interdit les trans-
Krts à bras (sauf pour les corps d'enfants), et imposa
mploi de chars à deux chevaux , accompagnés d'un ordon-
nateur et de trois porteurs en costume. Les entrepreneurs
de pompes funèbres , qui n'avaient perçu d'abord , pour
l'exécution du service commun, que le produit d'une taxe
d'inhumation payée par les riches, obtinrent l'autorisa*
tion de traiter de gré à gré avec les familles à l'égard de»
accessoires qu'elles voudraient idouter pour l'éclat des
funérailles, un arrêté du 11 vendémiaire an xm (3 oct
1804) leur assura le droit exclusif de faire les transports
et les fournitures, à la charge de faire aux fabriques une
remise réglée amiàblement; un arrêté du 25 pluviôse
de la même année (4 fév. 1805) dressa le tarif des droits
à percevoir sur les familles. Un décret du 18 mai 1806,
confirmé par un 2* du 18 août 1811, distingua 6 classes
de services, ayant chacune leur tarif. Une ordonnance dn
25 luin 1832 établit 0 classes pour Paris. Les sept pre-
mières ont été divisées en deux sections , l'une à tarif
invariable, qu'il faut prendre sans y rien igouter ni rien
retrancher, l'autre à tarif variable. Les indigents sont
inhumés ^tuitement. B.
POMPIERS (Sapeurs-). V, Sapbcss, dans notre Dto-
tionnaire de Biographie et d^Histdre,
PONCHO, c.-à-d. en espagnol paresseux, nom d'un
vêtement du Chili. C'est un morceau d'étoffé quadrilatère,
percé d'une ouverture au centre pour y passer la tête,
et sans manches ni boutonnières. Il sert de manteau pen-
dant le Jour et de couverture pendant la nuit.
PONCIS , et par corruption Poncif, dessin dont tous les
traits ont été piqués de trous d'épingles très-rapprocbés,
et sur lequel on passe, soit un petit sachet appelé ponce,
rempli de charbon pilé, si l'on opère sur une surface blan-
che, de craie en poudre ou de plâtre fin si c'est une
surface noire, soit une poncette formée de morceaux de
feutre imprégna d'une poudre de résine mêlée avec du
noir de fumée ou du blanc de céruse. On se sert de pon-
cis pour les décors, pour marquer les dessins sur la
faïence, sur les abat^our de lampes, sur les étoffes qu'on
doit broder, etc. — Par extension , on appelle Ponça les
dessins dans lesquels on remarque un type convenu ei
routinier, un calque ou une copie trop apparente. B.
PONCTUATION (Signes de), signes accessoires d'écri-
ture, faisant partie de l'orthographe, et destinés k mar-
âuer les divisions essentielles d'une phrase et les repos
e la voix dans la prononciation. Cet utile auxiliaire de
la lecture n'a été ima^né que longtemps après l'inven-
tion de récriture. Primitivement, les mots n'avaient même
aucune séparation ; ce qui était une source de nombreuses
confusions pour le copiste et pour le lecteur. Enfin, au
n* siècle av. J.-C, comme la langue grecque se répandait
de plus en plus dans l'Orient , et pénétrait même à Rome,
Aristophane de Byzance imagina trois signes pour mai^
quer la division du discours ; c'étaient . le point parfait ,
qui se pli^çait à la pointe droite de la dernière lettre d'un
mot pour désigner l'entier achèvement du sens; le point
moyen, à mi-hauteur de la dernière lettre, pour indiquer
un sens très-légèrement suspendu ; le âous-point, en bas de
la demièrt lettre (comme notre point), pour indiquer la
99
PON
1458
PON
iuspcnsion d*une phrase non encore complète. Ces signes '
n^eurcnt pas toujours cette valeur, et le nombre en varia;
ainsi quelques grammairiens en établirent huit. Le signe
d'interrogation ( ; ) semble être du ix" siècle après J.-C. La '
virgule se trouve aussi au lieu du point en bas, et de plus
elle serrait à distinguer des mots qui, sans ponctuation,
auraient pa Ctre divisés autrement, aux dépens du sens;
ainsi, 6, tt et 6Tt. Les règles de ponctuation paraissent
avoir été peu mises en pratique dans TAntiquité, malgré
le soin avec lequel on les enseignait dans les écoles ; on
croit que les points n'étaient mis que dans les éditions
de luxe et dans les livres destinés aux écoliei's. Dans les
inscriptions, la ponctuation est ou nulle ou marquée
entre chaque mot; ou bien les mots étaient séparés par
des signes de forme très-variée, tels qu'un triangle , un
c^rré, un losange, un cercle, un demi-cercle, une rosace,
«lie croisctte, un cœur, un feuillage, etc. Souvent les
points n'étaient mis qu'après les signes ou mots abrégés;
quelquefois on les introduisait dans les mots composés,
entre une préposition et un radical. Dans les premiers
temps du christianisme, on imagina de revenir à un
système qui avait été déjà pratiqué, et, au lieu de ponc-
tuer les manuscrits , d'isoler chaque sens par un alinéa^
c-à-d. de faire dos versets , usage aujourd'hui conservé,
même dans les imprimés, pour les Livres saints. D'autres
fois on se contentait d'isoler les mots par des blancs. Los
Romains n'apportèrent aucune amélioration au système
de ponctuation imaginé par les Grecs; ils l'adoptèrent
ainsi que le s^'stèmc des versets.
Dans la plus grande partie du Moyen ftge, on volt sur
ce sujet beaucoup de désordre et d'incertitude : les plus
anciens manuscrits en lettres capitales ou onciales sont
dépourvus de signes de ponctuation, ainsi que lei chartes
et les diplômes; Ters le temps de Charlemagne, on en-
treprit n'y en ajouter : on reconnaît ces additions à la
difTéronce des encres. Depuis cette époque on ne trouve
plus guère de manuscrits qui ne soient ponctués. Enfin,
peut-être faut-il attribuer à l'imprimerie une grande in-
fluence dans la fixation de notre système moderne, qui
a définitivement admis la séparation nette des mots, ainsi
que les alinéas, et réglé les signes de ponctuation, qui
sont au nombre d« dix : le point (en bas}, la virgule, le
point virgule, les deux points, le point d'intetTogation, le
point d'exclamation, la parent nèse^ le tiret, les points
suspensifs, et les guillemets. L'usage de ces signes est à
peu près uniforme dans les langues néo-latines et germa-
niques. Pour le grec, on a conservé les signes usités dans
les manuscrits du xv* siècle : le point en bas, ayant le
môme usage que le nôtre; le point en haut, répondant à
nos deux points et souvent à notre point et virgule; la
les autres le rejettent.
11 semblerait que la ponctuation, étant une inspiraUon
ae la logique naturelle, devrait être partout la même chez
les peuples lettrés, surtout en Europe : cependant il
existe encore des difl'érences de nation à nation. Chez
-nous, dans notre propre langue, beaucoup d'écrivains,
môme parmi ceux qui écrivent le plus correctement, se
préoccupent peu de la ponctuation, et font un fréquent
usage du point final, là où il faudrait deux points ou
{»oint et virgule. 11 semble que cela ète de l'ampleur à
eur style, et ce point, en coupant les périodes, cff'ace
presque les nuances de la pensée ; en effet, pour les bien
marquer, la ponctuation soignée, c.-à-d. scrupuleuse-
ment raisonnée, est toujours un utile auxiliaire. Les
grands écrivains des xvii" et xviii* siècles la regardaient
comme le complément d'un bon style; nous citerons,
entre autres, Bossuet, et surtout Dufl'on, dont les ou-
vrages, en ce genre aussi, pounnient servir de modèles.
Mais on dirait que beaucoup de nos écrivains contempo-
rains aiTectent de ne pas mettre la ponctuation, comme,
avant la Révolution, les grands soigneurs afiectaient de
ne point écrire l'orthographe P.
PONDÉRATION DES POUVOIRS. V. Balance des
POUVOIRS.
PONT, ouvrage élevé d'un bord à l'autre d'une rivière
ou d'un canal, pour en faciliter le passage. Les ponts,
placés au premier rang parmi les travaux d'utilité pu-
blique, ne peuvent être établis et conservés que par
beaucoup de soins et d'habileté , à cause de leur situa-
tion au milieu des eaux , et de l'efl'ort produit sur eux
par le courant. On distingue les ponts fixes et les ponts
iMbiles, Les ponts fixes comprennent ; les ponts propre-
UQDt ditr, ncccsdbles aux pi(îtoDs et aux voitures ; les paS"
serelles, qui ne servent qu'aux piétons ; les ponte-aque-
ducs, destinés à amener les eaux d'un Heu à un autre;
les ponts-canaux , qui font franchir à un canal soit une
rivière, soit une vallée, soit une route quelconque. Sous
le nom de ponts mobiles, on range les ponts de oateaux,
les ponts-levis , les ponts roulants, et les ponts tour-
nants. — Autant que possible, un pont doit être con-
struit perpendiculairement à la rivière; les piles s'af-
fouillent moins que celles d'un pont biais, qui sont
d'ailleurs plus coûteuses à cause des difficultés de l'ap-
pareil des pierres. La largeur d'un pont est ordinaire-
ment la même que celle de la route ou de la rue à la-
quelle il fait suite ; elle dépend également de la population
plus ou moins grande des localités qu'il s'agit de des-
servir. Elle doit permettre aux voitures de se croiser, et
comprendre, outre la voie, des trottoirs pour garantir les
piétons. Le débouché, c.-à-d. le vide qui existe evtre les
piles, se détermine d'après la vitesse et le volun^o des
grandes eaux. Si le cours d'eau n'est pa> navigable , ni
sujet à de fortes crues , on préfère les petites arches ,
parce que la dépense est moins considérable que celle
des grandes; daiis le cas contraire, il faut de grandes
arches, afin que rien ne gène soit l'écoulement des eaux,
soit le passage des corps flottants, soit la navigation, ei
l'on restreint aussi de cette manière le nombre des piles,
dont les fondations sont toujours difiiciles et coûteuses.
I. Ponts en maçonnene, — C'est l'espèce de ponts la
plus ordinaire, et celle qu'on adopte quand la circulation
doit y être importante. Si le pont n'a qu'une seule arclic,
il se compose d'une voûte, et de deux culées, qui résis-
tent à la poussée latérale de cette voûte ( V, Culée) ; si le
pont est à plusieurs arches, Ù. se compose, en plus, de
piles élevées dans le lit de la rivière, entre les arches,
pour les porter. On commence par opérer, sur l'empla-
cement des massifs, un sondage à une assex grande pro-
fondeur, afin de reconnaître la nature du sol sur lequel
les fondations seront assises. Si le terrain est formé de
roches et de tufs assez solides pour supporter immédia-
tement le poids de l'ouvrage, et si la profondeur de l'eau
ne dépasse pas 2 met., on drague jusqu'à ce que l'em-
placement du massif à élever ait été mis à nu, on l'en-
vironne d'un biUardeau {V. ce mot)^ qu'on épuise au
moyen de pompes ou de la vis d'Archimède, et, après
avoir arasé ou aplani le sol, on construit comme sur uii
terrain ordinaire. Lorsque la profondeur de l'eau dépasse
2 met., on emploie, au lieu de batardeaux« des caisses
étanches que l'on fait descendre avec précaution jusqu'au
fond, et dans lesqu(;lles on commence la maçonnerie, ou
des caisses non étanches qu'on emplit de béton jusqu'à
la surface de l'eau. Si le terrain est incompressible, mais
aflbuillable, comme celui qui est formé de sable, de gra-
vier et de certaines argiles, on emploie indifféremment
la fondation sur pilotis ou la fondation par encaissement
{V, ces mots). Avec un terrain compressible et afibuiU
lable , comme la vase et la tourbe, on a recours à deux
artifices qui ont pour objet de répartir la pression sur
une plus grande surface : on établit un radier (K. ce
mot }, ou un grillage en fortes pièces de bois, dans les
vides desquels on enfonce des pieux aussi profondément
que possible, et sur lequel on pose la première assise. —
Les culées et les piles se font indistinctement en pierres
de taille, en moellons ou en meulières. Les piles ont
d'ordinaire à leur base un peu plus de largeur que le
pont, afin de former en amont un avant-bec et en aval
un arrière-bec, qui leur donnent plus de solidité et les
protègent contre le choc des eaux ou des corps flottants.
La forme des arrière-becs est à peu près indifférente.
Autrefois on donnait aux avant-becs la forme d'un angle
aigu, ce qui produisait un remous et était dangereux
pour la navigation : aujourd'hui ils reçoivent la forme
circulaire, qui résiste mieux aux glaces et cause peu de
perturbation dans le cours de l'eau. Jadis les piles, par
leur excessive épaisseur, rétrécissaient trop le débouché
de l'eau et gênaient la navigation; on ne leur donne
maintenant que l'épaisseur nécessaire pour qu'elles puis-
sent supporter les voûtes ou arches. Les voûtes furent
d'abord à plein cintre, celle du milieu, dite arche mari-
nière, étant plus haute que les autres : il en résultait des
f>entes roides, comme jadis au Pont-Neuf et au Pont dr
a Toumelle, de Paris. Ensuite, on adopta l'arc en an^
de panier (V. ce mot), qui présente des difficultés d'ap-
pareil, et souvent produit un mauvais effet à la vue. On
s'est arrêté enfin à l'arc de cercle, dont on met la re-
tombée beaucoup au-dessus de la corde de son diamètre ;
cela permet de donner aux ponts les bauteors les plus
petites pouible, mais oblige à aroir des cnlôot «l'une
PON
1459
PON
crës-grande force; les ponts ae la Concorde et d*Iéna, à
Paris, et le magnifique pout de Neuilly, sont en arcs de
cercle. On nomme Léiss de la voûte les deux faces laté^
raies qui regardent Tamont et Taval ; tympans, les par-
ties de maçonnerie qui se trouvent au-dessus des piles
entre les arches. Les tympans sont surmoutés d*un oaii-
(Uau oc d*une comiclie qui règne dans toute la longueur
du pont, et qui sert de base au garde-corps ou parapet.
Quand ces constructions sont achevées, on pose la chape,
couche de mortier de chaux hydraulique, de 10 à 15 cen-
timètres d*épaisseur, qu*on étend sur toute la partie su-
périeure des voûtes, et qu*on recouvre quelquefois d'une
couche mince de bitume. £nûn on exécute la cluiiusée
pavée.
U. Ponts 9ff tnaçonneriâ et en charpente. — Ce système
mixte convient pour le passage d'une route ordinaire qui
n'est pas très-fréquentée, parce que les reparutions sont
assez rares et par conséquent peu coûteuses ; avec une
grande circulation, le plancher ou tablier en bois s'use-
rait rapidement. L'inconvénient des ponts do charpente
est qu'ils peuvent être détruits par le feu, et que les bois
peuvent s'échauiTer et se détruire. Les piles et les culées
sont toujours en maçonnerie, les arches seulement sont
en bois. Ces arches, toujours eu arcs de cercle, sont
faites en pièces épaisses de charpente, et mieux en ma-
driers de 5 à 6 centimèt. d'épaisseur, fortement assem-
blés. Le tablier se compose de poutres longitudinales ,
supportées par le sommet de l'arc, par des moïses pen-
dantes, et par des consoles fixées dans les piles; de pou-
tres transversales, qui reposent sur les poutres longitu-
dinales; et, par-dessus tout, de madriers cloués. On peut
citer comme modèle de ce genre de construction le pont
d'ivry, près de Paris.
IIL Ponts en pierre et en fer. — Dans les ponts de ce
système, qui sont plus solides et d'un entretien moins
coûteux que ceux du système précédent, mais dont les
frais d'établissement sont un peu plus grands, les piles
■ont en maçonnerie et les arches en métal. Le plus an-
cien pont de fer fut construit en 1793 k Sunderland, sur
le Wear ; mais des projets avaient été présentés en France
en 1719 par Garin, et eu 1755 par Goissons et Vincent de
Montpetit. Le fer fondu a été employé à Paris pour le
pont des Arts, et, en 18G2, pour le pont de l'Archevêché;
le pont d'ArcoIe, vis-à-vis la place de l'Hôtel de Ville, à
Paris, et d'une seule arche sur le grand bras de la Seine,
est en fer forgé. On peut encore citer, en Angleterre,
comme emploi de fer fondu, les ponts du Vauxhull et de
Southwark à Londres, et ceux de Bristol et de Wear-
mouth. V. Molinos et Pronier, Traité tliéorique et pra-
tique de la constriKtion des ponts métalliques, Paris,
1857, in-4*> et atlas.
IV. Ponts en charpente. — Ce sont ceux (^ui ont le
moins de solidité et de durée. On n'en construit c^ue dans
les pays où le bois est à bas prix, et sur les rivières où
l'on n*a point k craindre les grandes crues et les débâcles
de glaces. Le plancher s'établit sur des poutres portées
par les poteaux qui ont été enfoncés dans l'eau; on y
met quelquefois des bandes de fer pour recevoir les roues
des voitures. Le pont Morand à Lyon et le pont de Bon-
pas sur la Durance appartiennent à cette catégorie. On
en voit un aussi sur le Rhin, à SchafiThouse, qui a deux
travées de 50 met. chacune ; un autre sur la Kandel, près
de Berne, d'une portée de 50"*,70; celui de Vettingen,
sur laLimmat, n'a pas moins de 118"* d'ouverture, d'une
seule portée.
V. Ponts suspendus. — Ces ponts, plus avantageux
que tous les autres sous le rapport de l'économie et de la
facilité de l'établissement, se composent de chaînes ou de
câbles en fer, qu'on tend d'une rive à l'autre, et suppor-
tant, au moyen de tiges de suspension, un tablier qui
donne passage aux piétons et aux voitures. Les cables
sont formés de fils de fer enroulés en échevaux autour
d'une croupière, et reliés de distance en distance par des
ligatures ; les fils ont été préalablement trempés dans de
l'huile.' de lin pour empêcher l'oxydation , et , après la
pose , on leur applique plusieurs couches de peinture.
L'inconvénient du système des c&bles est l'impossibilité
de tendre Clément tous les fils, de sorte que tout l'effort
peut être supporté par quelques-uns, ce qui amène leur
rupture et peut-être la chute du pont. Les chaînes se
composent de barres de fer forgé, reliées entre elles par
des boulons : il suffit d'un défaut dans l'une d'elles pour
occasionner la chute du pont. Afin d'obvier au danger, on
fait soutenir le pont par 2, 3 ou 4 câbles ou chaînes de
chaque côté, de sorte que, si l'un vient à manquer, il en
nsio pour supporter le tablier. Les tisos do suspension
sont en tigçs de fer ou en chaînes, selon le système qu'on
a adopté. Des traverses, dites pièces de pont, soutenues
aux deux bouts par les tiges de suspension, et espacées
de 1"*,25 k 1"',50, supportent deux planchers, Ànt l'uu
pour la chaussée et l'autre pour les trottoirs, qui sont
iX)rdés extérieurement d'un garde-corps. L'effo**^ ^ue les
chaînes ont à supporter est d'autant moins considérable
qu'elles décrivent une courbure plus grande : abssi
donne-t-on à leurs points d'appui beaucoup d'élévation.
Ces points d'appui sont disposés de deux manières :
tantôt il y en a trois, dont deux sur les rives, et le troi-
sième, appelé pile, plus élevé que les autres, au milieu
de la rivière ; tantôt il n'y a que ceux des rives, ils con-
sistent en massifs de maçonnerie ou en colonnes de
fonte. Les chaînes s'infléchissent au delà de» points d'ap-
pui des rives, et se prolongent jusque dans le sol, où
elles sont solidement fixées dans des culées. On éprouve
la solidité des ponts suspendus au moyen d'une sur-
charge de 200 kilogr. par mètre carré de superficie pen-
dant trois jours. Les ponts suspendus les plus remar-
quables sont : celui de Fribourg en Suisse, qui n'a qu'une
seule travée, de 205 met. de longueur, et dont les cnaines
sont amarrées dans le roc au-dessus d'une profonde
vallée; celui de Cubzac en France {V. Cobzac); celui de
Genève, qui présente cette particularité que le tablier est
placé au-dessus des chaînes; ceux de Beaucaire sur le
Rhône (450 met. de longueur), de La Roche-Bernard sur la
Vilaine, de Jarnac sur la Charente; celui de l'Ile Barbe,
près de Lyon ; celui de Tnel, sur la Seine ; celui de Rouen,
offrant au milieu une arche, où le tEd)lier peut se lever
pour laisser passer les navires. — Outre les ponts de
chaînes, on comprend dans la catégorie des ponts sus-
pendus les ponts tubulaires, formés dUmmenses tubes
en fer battu, solidement rivés les uns dans les autres, et
âui servent notamment au passage des chemins de fer.
»n cite dans ce genre le Pont Britannia, sur le détroit
de Menai; le Pont Victoria, au Canada, sur le fleuve
Si-Laurent; le Pont de la Quarantaine, k Lyon, réunis-
sant les deux gares des chemins de fer.
VI. Ponts de bateaux. — Ces ponts consistent en une
suite de bateaux amarrés à une certaine distance l'un de
l'autre et liés entre eux par des poutrelles, sur lesquelles
sont établis un plancher et des ^de-corps. Pour donner
fiassage à la uavigLition, on fait dériver sur le côté, à
'aide du gouvernail, un ou deux bateaux, qu'on replace
ensuite, il y a là un travail fréquent de manœuvre , in-
commode pour la circulation. Le tablier montant et des-
cendant avec le niveau de la rivière, le plan incliné qui y
donne accès doit être mobile. Le système des ponts de
bateaux est abandonné de jour en jour; Rouen possédait
un grand pont de ce çenre il y a une trentaine d'années,
bel ouvrage d'un morne augustin nommé Nicolas ; il en
existe encore sur le Rhin, à Mayence, et à Coloçne.
VII. PontS'levis. — Ils consistent en un tablier, d'une
seule volée ou de deux, mobile autour d'un axe horizon-
tal, et qu'on lève, soit avec un contre-poids à l'extrémité
d'une chaîne qui passe sur une poulie, soit avec un quart
de cercle denté, fixé à la volée, et un cric à engrenage
multiple qui le commande. Une volée ne peut avoir plus
de 4 à 5 mètres.
VIII. Ponts roulants. — Dans ces ponts, qui convien-
nent principalement sur les canaux, le tablier est retiré
en arrière par un mouvement de translation horizontale.
Ils ont l'avantage de ne pas gêner les manœuvres de ha-
lage, mais l'inconvénient d'occuper beaucoup de place ;
les rouleaux sur lesquels ils se meuvent exigent aussi un
grand entretien.
IX. Ponts tournants. — Us conviennent, comme les
précédents , aux canaux, et sont les plus employés des
ponts mobiles. Us pivotent horizontalement sur un axe ,
de manière à ouvrir le passage en décrivant un quart de
cercle. On en voyait un grand nombre sur le caiial S^-
Martin, à Paris, avant qu'il fût voûté, en 1862.
Histoire. — Les premiers ponts dont il soit fait men-
tion dans les auteurs de l'Antiquité sont attribués à Me-
nés, roi d'Egypte, qui, selon Hérodote, en fit b&tir un sur
un des bras du Nil, et à Sémiramis, auteur d'un poin
magnifique sur l'Euphrate à Babylone. Ceux que Darius
et Xerxès construisirent lors de leurs expéditions contre
les Scythes et les Grecs, destinés à un service temporaire,
étaient sans doute en bois. Les Grecs parajbseut avoir con-
struit des ponts en pierre; mais les Romains donnèrent à
ces constructions uu caractère monumental, et y employè-
rent les matériaux les plus solides , les soins les mieux
entendus; ils portèrent une telle perfection dans la taillt
des pierre», que trè9-»ouveut luurs pouls sont coustrulu
PON
1460
PON
sans ciment. II existe encore un certain nombre de ponts
romains; ce sont, à Rome : 1^ le Pont JantcuU, sur le
Tibre, relevé en 1478 par Sixte IV, dont il porte mainte-
nant le nom ; il a 3 arches de 25 met. d'ouverture, et a
23"*,40 de largeur; 2* le Pont des Sénateurs, aujourd'hui
Ponte RoitOf construit l'an 127 av. J.-C, reconstruit par
Grégoire XII/ l'an 1575 de notre ère, en grande partie
renversé par une crue du Tibre en 1598, et dont il ne
reste plus que 3 arches sur 5, parce qu'il n'est point
perpendiculaire au cours du fleuve; 3<* le Pont jElius,
aujourd'hui Pont S^-Ange , construit par l'empereur
Adrien, long de IGO met., large de 15'",50; les piles
étaient surmontées de colonnes, qui furent détruites pen-
dant les guerres du moven àse ; le pape Clément IX fit
rétablir les parapets, en 1 668, d'après les dessins du Ber-
nin, qui les orna de piédestaux de marbre blanc suppor-
tant 10 statues demi-colossales d'Anges. Il y a encore les
ponts de l'Ile du Tibre, d'autres aux environs de Rome,
et dans diverses parties de l'Italie; tous ont des arches
en plein cintre. Les Romains en bàUrent aussi un grand
nombre dans les provinces : celui que Trajan fit Jeter sur
le Danube, par Apollodore de Damas, et que détruisit
Adrien, était le plus beau de l'Empire; il avait 20 arches
de 55 met. d'ouverture, et une largeur de 26 met.;
l'épaisseur des piles était de 19"*,50, et leur hauteur de
50 met. On voit encore les restes de deux de ces piles
près de Gerneti (Czernetz). En Espagne, le pont de Sala-
manque, dont il ne reste plus que des ruines, est aussi
attribué à Trajan; il avait 26 arches de 23 met. de dia-
mètre; l'épaisseur des plies était de 8 met, et la largeur
du pont de 21 met. Il y avait aussi en Portugal, à Alcan-
tara (Norba Cassarea^, un pont construit sous le môme
prince (V. Alcantara). Le pont de Mérida (Emerita Au-
§usta), sur la Guadiana, tout en pierres de taille, avait
58 met. de longueur, et se développait sur 64 arches.
Parmi les ponts romains qui subsistent encore en France,
on peut citer le pont de S'-Chamas et le pont du Gard
{V, ces mots).
Les invasions des Barbares ayant renversé la plupart
des constructions romaines, on ne franchit plus les
rivières qu'à l'aide de bateaux ou de bacs. Les ponts
3ue Charlemagne fit construire sur le Rhin et sur
'autres fleuves étaient en bois. Un pont de pierre, de
22 arches, établi sur la Seiue à Pont- de- l'Arche, au
temps de Charles le Chauve, a été partiellement emporté
par les eaux en 185G, et tout à fait abattu depuis. On
voit encore, dans les basses eaux, les fondations de quel-
ques piles d'un pont construit à Rouen par l'impératrice
Blathilde, fille de Henri 1", roi d'Angleterre et duc de
Normandie. C'était l'usage alors de fortifier les extré-
mités des ponts par des constructions militaires; le pont
Valendré, à Cahors, en est encore un modèle existant :
plus tard on b&tit aussi des maisons sur les ponts eux-
mêmes, quelquefois des chapelles. Au xii* siècle, on vit
se former en France et en Allemagne une association dite
des Frères Pontifices, dans le but de rétablir les ponts les
plus importants. Le premier au'ils construisirent fut
celui de la Durance, au-dessous ae l'ancienne Chartreuse
de Bonpas. Ils firent ensuite le pont d'Avignon (1177),
celui de Pont^Saint-Esprit (1265), le pont de la Guillo-
tiôre à Lyon, et celui du Saut du Rhène, sur le chemin
de Vienne à Genève, remarquables, sinon par leur style,
au moins par leur étendue. Les ponts d'une seule arche
furent très-nombreux ; on distingue ceux de Céret, de
VilIeneuvo-d'Agen, de Castellane, de Nyons, etc., qui ont
de 30 à 35 met. d'ouverture : celui de Brioude (1454) a
5i mèL d'ouverture. En 1545, le cardinal de Tournon fit
construire le pont du Doubs, près de Tournon. Il n'y a
rien de monumental dans ces divers travaux, exécutés
avec une grande économie et en vue de communications
peu actives. En Allemagne , un des plus curieux monu-
ments du moyen âge est le pont de Ratisbonne sur le
Danube, bâti en pierre, de 1135 à 1146, probablement
par la Confrérie des ponts (BrUckenbrUder),
Au commencement du xv* siècle, Paris n'avait encore
que des ponts en bois, fréquemment emportés par les
inondations et les débâcles : le premier pont en pierre,
élevé en 1412, et bientôt emporté aussi, fut remplacé
en 1507 par le pont dit de Isotre-Dame, œuvre de Fra
Giocondo, et «démoli en 1848. Le Pont A^euf/ entrepris
en 1578, fut achevé en 1606; puis, dans l'espace d'un
demi-siècle, on éleva le pont S*-Blichel, celui de l'Hôtel-
Dieu, le Pont Marie, celui de la Tournelle, et le Pont
Royal. — Les provinces suivirent l'impulsion donnée par
la capitale» Aux ponts de Chàtellerault et de Toulouse,
l'anse de panier remplaça pour la première fols le plein
cintre. En 1666, on bâtit le pont de Saintes. En 1720, on
éleva le pont de Blois, où Ton fit usage de cintres re-
troussés, et où l'on commença d'employer la méthode de
fonder par caissons, due à l'ingénieur La Bélie. Du môme
temps a peu près datent les ponts d'Orléans, de Tours,
de Moulins et de Saumur. Le pont de Pesmes est le pre-
mier où l'on ait donné aux voûtes la forme d'un arc de
cercle moindre ({ue la demi-circonférence. Sur la route
de Calais à Saint- Omer, l'ingénieur Beffora a exécuté
en 1750, d'après l'idée de l'ingénieur Barbier, un pont
à quatre branches, qui réunit quatre canaux et le pas-
sage d'une grande route. De 1770 à 1700, l'ingénieur
Perronet éleva 'les ponts de Pont-Sainte-Maxence et de
Neuilly, et celui dit de la Concorde, à Paris, qui comptent
parmi les plus belles et les plus hardies constructions
de ce genre. Un pont très-remarquable encore est celui
de la Basse-Terre (Guadeloupe), construit en 1773, d'wie
seule arche, sur la rivière du Galion. Depuis 1800, on a
élevé les ponts d'Iéna à Paris, de Sèvres, de Rouen, de
Bordeaux {V. ce mot)^ en maçonnerie; ceux de Bonpas
(sur la Durance), d'Agen, d'Avignon, en charpente; ceux
dits des Saints -Pères, des Arts, à Paris, en fer fondu.
L'invention des ponts suspendus appartient aux Améri-
cains ; un des premiers qui furent construits en Europe
est celui de la Tess, en Angleterre (1741). L'essai en fut
fait pour la première fois en France, en 1826, par les
frères Séguin, sur le Rhône, entre Tain et Tournon. Les
ponts de chaînes se propagèrent rapidement; mais un
accident survenu à celui d'Angers, en 1850, qui se rompit
pendant le passage du 11* régiment d'infanterie légère,
jeta des doutes sur leur solidité, et, depuis, on a presque
partout renoncé à en construire.
La science de la construction des ponts a fait de grands
progrès de nos Jours, même sous le rapport de l'écono-
mie. D'abord, on les fonde généralement sans pilotis, sur
une masse de béton, qui ne forme plus que comme un
seul banc de pierre; si Ton ne rencontre pas le bon ter-
rain à une profondeur ordinaire, on descend des caisses
hermétiques, vraies cloches de plongeur, au fond de
Teau, et, avec une machine à vapeur placée sur le rivage,
on refoule l'air dans ces caisses, de manière à en chasser
toujours l'eau; les ouvriers peuvent ainsi travailler et
creuser le sol sans Jamais être incommodés. A quelque
profondeur que soit le bon terrain, on va le chercher en
descendant au-dessous du lit du fleuve, où l'on peut tou-
jours enfoncer de gros tubes de fonte, que l'on remplit
de béton quand ils sont sur le bon sol ; de cette façon le
pont est fondé sur des colonnes de pierre revêtues d'une
enveloppe de fer. C'est ainsi que l'ingénieur Fleur-Saint-
Denis a procédé au pont du Rhin, à Strasbourg, où les
piles de béton sont à 20 met. en contre-bas du fond du
fleuve. Le système des fondations tubulaires, employé de
temps immémorial dans l'Inde, a été introduit en Europe
par les Anglais : Brunel s'en servit en 1825 pour la con-
struction du puits de Rothertithe ({ui donne accès au
tunnel de la Tamise; mais l'ingénieur français Triger
l'a perfectionné en 1841. — Comme économie, nos ingé-
nieurs actuels ont diminué de moitié au moins l'épais-
seur des arcs, et ils prétendent que ces arcs ont la
même force que dans les anciens ponts. Ensuite, ils ont
employé la meulière équarrie pour des arcs de très-
grande dimension, se contentant d'une simple tête de
pierre de taille en aval et en amont, et quelquefois
même n'employant que de la meulière nue ou couverte
d'un enduit de ciment romain. — Le point où ils sont
très-inférieurs à leurs devanciers, c'est celui de l'orne-
mentation. Rien de plus pauvre, sous ce point de vue,
que les ponts actuels , et notamment tous les ponts de
Paris construits depuis 1850. Les ingénieurs semblent
avoir voulu négliger, de parti pris, tout ce qui pouvait
ajouter à l'agrément et à l'élégance de leur travail : les
corniches sont d'une maigreur, d'une sécheresse, d'unt
nudité sans exemple; pas la moindre idée de varier Tor-
nementation ; ainsi, partout les parapets sont en gros ba-
lustres quadrangulaires ; partout les piles sont découpées
en refends, ainsi que tous les claveaux de tête; ce qui,
pour les unes et les autres, parait un contre-sens : aux
piles, les refends offrent à l'eau des moyens d'affouille-
ment pour détruire les Joints ; aux cintres, ils Dlessent
la vue, et semblent une désagr^tion là où l'œil a besoin
d'être rassuré par un plein aspect de force. Enfin il n'y
a pas Jusqu'au chiffre de l'Empereur, taillé au-dessus des
piles, qui ne soit dans ce système, car il est en relief, ce
qui l'expose à une prompte destruetion, tandis qu*eo
creux il aurait duré autant que la mur^Ue même qui le
porte. On peut dire de notre école de ponts d'aajourd'bal
PON
1461
PON
qne, malgré les mérites incontestables, il lui manque 'une
qualité très-io^nde et très-estimée en France, celle du
sentiment de Tart. B. et C. D— t.
PONT, en termes de Marine, plancher d*un b&timent,
fait en fortes planches de chêne et de sapin. Les petits
b&timents n^ont qa'un pont; les corvettes et les frégates
en ont deux, les vaisseaux de ligne en ont trois, séparés
entre eux par un espace dit entre-pont ( V, ce mot). Le
premier pont, ou franc-tillac^ est celui qui est le plus
près de Feau. Le pont le plus élevé, tout à découvert et
de plain-pied, est appelé pont sur gueule ou pont cou-
rant. C'est sur les ponts que s'établissent les batteries de
canons. On nomme ponf coupé celui oui n*a que Tacas-
tillage de Tavant et de Tarrière, sans régner entièrement
de la proue à la poupe. Un faux pont est un espace pra-
tiaué entre la cale et le 1«' pont, et où sont logés, dans des
cabines , les derniers officiers, Tagent comptable, Taumô-
nier, les chirurgiens et les maîtres; les élèves occupent
le milieu, depuis le grand m&t Jusqu'au màt d*artimon.
PONT ( Équipage de). V. Ponton.
PONT A BASCULE, machine dont on s*est servi pour peser
les voitures publiques et s'assurer si leur cnargement
n'excédait pas le poids déterminé par les règlements. C'est
un tablier qui pèse sur des ressorts disposés dans un
caveau inférieur, et auxquels correspond un indicateur
précisant la force de pression supérieure, et conséauem-
ment le poids. Les ponts à bascule, établis à l'entrée des
villes par une loi du 29 floréal an x, ont été supprimés
par la loi du 30 mai 1851.
PONT-AUDBMER (Église S'-Odbn, à), édifice incom-
plet et inachevé, dont les parties appartiennent à diffé-
rentes époques, et qui présente, malgré l'absence d'unité,
un certain intérêt. Le chœur, vestige d'une église plus
ancienne, a les caractères de l'architecture du xi* siècle :
il est bas et étroit, les colonnes de ses arcades sont tra-
Îues et grossièrement exécutées. La nef, commencée vers
470, est un morceau très-remarquable; les colonnes
étaient autrefois ornées de statues, dont il ne reste plus
que les consoles; la décoration des arcades et de la ga-
lerie qui les surmonte est riche et élégante : mais tout
ce travail fut entrepris dans des proportions bien au-
dessus des ressources de la localité, et, au lieu des belles
et larges fenêtres :.qui devaient garnir la partie supé-
rieure des travée, on ne voit que d'étroites ouvertures à
la naissance d'une voûte en bois. Les collatéraux et leurs
chapelles sont voûtés en pierre : ces chapelles ont de
superbes verrières du xvi* siècle. A la même époque ap-
partiennent les fonts baptismaux, près desquels on con-
serve l'ancien maltre-autel, œuvre du temps de Henri IV.
L'église avait un Jubé en bois, que l'on a détruit à la
Révolution. Son portail et les deux tours qui l'accompa-
gnent ont été interrompus avant le xvi* siècle.
PONT-DE-L'ARCHE (Église de), Joli spécimen du style
ae transition qui appartient encore à l'architecture ogi-
vale tertiaire, et qui se ressent déjà des influences de la
Renaissance. L'église, massive du côté des anciennes
fortifications de la ville, offre, vers le midi, la richesse
des constructions du xv* siècle. Elle est inachevée; les
collatéraux, qui devaient faire le tour du chœur, s'ar-
rêtent à la hauteur du maltre-autel. On remarque les clefs
pendantes des voûtes et quelques vitraux du xvi* siècle,
la menuiserie, du buffet d'orgues et le retable en bois
sculpté, qui datent du xvii*.
PONTE , nom donné, dans les ]eux de cartes où il y a
un banquier, à tout Joueur qui Joue contre lui.
PONTENAGE. ) K. ces mots dans notre Dictionnaire
PONTIFES. I de Biographie et d'Histoire.
PONTIFICAL, livre contenant toutes les règles que
doivent suivre les papes et les évêquos dans les cérémo-
nies. Il est attribué aux papes Gélase et S' Grégoire.
PONTIGNY (Église de), dans le département de
l'Ydnne, le type le plus pur des constructions de l'ordre
de Citeanx. C'est une ancienne abbatiale, fondée en 1114,
et remarquable par l'unité du plan et la sévérité de
l'ornementation. Elle a 108 met. ae longueur, 22 met. de
largeur y compris les collatéraux, 50 met. au transept, et
21 met. de hauteur sous voûte. La nef est précédée d'un
narthex bas et lourd, dont la porte est encore garnie de
ses ferrures <fu xn* siècle. Les collatéraux n'ont point de
chapelles, mais il y en a onze autour de l'abside, dont
les huit colonnes sont monolithes, et quatre dans le tran-
sept. Les fenêtres, simples, étroites, sans meneaux, sont
dépourvues de vitraux peints. Des anciens bâtiments de
Tabbave, il ne reste plus qu'un vaste corps de logis du
un* siècle, renfermant de grandes salles voûtées, et les
esIJiers dea moines.
PONTIQUES, épltres qa'Ovide écrivit pendant son
exil sur les bords du Pont-Euxin. Elles forment A livres,
contenant 46 élégies dont le fond roule toi^ours sur les
malheurs de son exil.
PONT-LEVIS. V. Pont.
PONT-NEUF, nom donné aux airs de chansons vul-
gaires et de vaudevilles , parce qu'au xvu« siècle les mar-
chands de ces chansons se plaçaient sur le Pont-Neuf, à
Paris.
PONTOISE (Église S'-Maclod, à). Cette église présenu
l'assemblage de plusieurs styles : le chœur et les cha-
pelles environnantes, de style roman, paraissent remon-
ter & la fin du XI* siècle ou au commencement du xu* ,
le transept est de la fin du xii* ; la grande nef, le grand
portail et la tour appartiennent au xv*, les collatéraux et
ta chapelle de la Passion au xvi*. Les sculptures du por-
tail ont beaucoup souffert des injures du temps et des
hommes. L'intérieur de l'édifice manque de symétrie :
non-seulement il n'y a qu'un bas côté au midi, tandis
qu'il y en a deuT^ au nord, mais ces bas côtés ne sont pas
parallèles à la nef, ils s'élar^ssent en s'approchant du
chœur. La chapelle de la Passion, ornée de beaux vitraux,
- contient des boiseries remarquables, un Christ au tom-
beau et une Résurrection, monuments de sculpture de
la Renaissance.
PONTON, nom qu'on donne, dans l'Art militaire, à
des bateaux qui , placés sur des rivières à des distances
déterminées, et Joints ensemble par des poutrelles et
des madriers, composent un pont pouvant donner passage
à des troupes et à leur matériel. On en faisait autrefois
en osier poissé recouvert de toile cirée, en cuir bouilli,
en fer-blanc, en cuivre. Les pontons se transportent sur
des voitures appelées hoquets; mais, quand on peut les
faire arriver par eau, on les assemble par ouatre ou par
huit* afin d'employer moins d'hommes & les conduire.
Un Équipage de pont se compose de 35 baquets, 35 cha-
riots de parc, 4 forges de campagne; en tout, 74 voitures
à six chevaux de trait chacune. Les corps d'armée ne sont
pas toi^ours pourvus d'un équipage de pont : dans ce
cas, on utilise, pour traverser les rivières, les ressources
locales, bateaux, tonneaux, etc. Les ponts de chevalets
sont ceux qu'on établit sur des cours d'eau tranquilles et
peu profonds, à l'aide de corps do support. On désigne
sous le nom de pont volant une portion de pont con-
struite le plus ordinairement sur deux grands bateaux :
elle est fixée & un long cordage ou à une chaîne qui a son
point d'attache dans le lit même de la rivière, et la force
seule du courant fait passer le pont volant d'une rive à
l'autre.
PONTON, en termes de Harine, grand b&timént à fond
plat et à quatre faces droites, un peu plus long que large,
portant un m&t au milieu, un cabestan à clûtque extré-
mité, et dont on se sert dans les ports militaires pour
toutes les opérations de l'intérieur. Les pontons pour le
carénage sont de vieux vaisseaux rasés Jusqu'au premier
pont, munis de cabestans, m&ts de redresse, palans, etc.,
et qui servent à coucher sur le côté les navires dont on
veut découvrir les parties submergées. On appelle cure-
mole ou ponton à cuillers une espèce de ponton garni de
roues, de grandes cuillers et de chaînes , qu'on emploie
à curer les ports. On a enfin donné le nom de pontons à
de vieux jvaisseaux de ligne désarmés, grillés à tous les
sabords, où les Anglais, pendant leurs guerres contre
Napoléon I*', entassaient les prisonniers français.
PONTONNIERS , corps affecté au service des pontons,
et à l'établissement des ponts militaires. Ce service fut
fait d'abord par l'artillerie. En 1795, les pontonniers
furent organisés en un bataillon composé de 8 compa-
gnies à 72 hommes chacune ; quoique réduit à 6 compa-
gnies sous le roi Louis- Philippe, ce bataillon reçut le
nom de régiment. Il fait aujourd'hui partie de l'arme de
l'artillerie, et se compose de 16 compagnies.
PONTS ET CHAUSSÉES, nom qu'on donne en France
à l'ensemble des travaux d'utilité publique se rapportant
aux voies de communication. Le corps des ingénieurs
chargés de la direction et de la surveillance de ces tra-
vaux ne date que du siècle dernier. Auparavant, on choi-
sissait dans chaque Généralité les hommes qui avaient
fait preuve de talent dans la pratique des constructions ^
ils n'avaient eu d'autre préparation & leur emploi que
des études isolées , souvent incomplètes , ne possédaient
même parfois aucune connaissance théorique, et sortaient
rarement de leur province. En 1739, il se forma, sous U
érection de TVudaine, intendant des finances, et de Tin-
génieur Perronnet, une administration régulière des
Ponts et chaussées , dont l'existence fiit sancnonnée par
POP
UG2
POP
nn arrêté da Conseil du 0 Juillet et par lettres patentes
du 17 août 1750 : on établissait i arcliitccte premier in-
génieur, 4 Inspecteurs généraux , 1 directeur du bureau
os géograpbes et dessinateurs, 25 ingénieurs en commis-
Bion pour les pays d'élection , et un certain nombre de
sous-inspecteurs pour suivre les ouvrages ; les pays d'États
avaient leurs ingénieurs ou agents particuliers. Un arrêté
du Conseil de 1770 créa trois nouveaux ingénieurs pour
la Généralité de Paris, érigea les sous-inspecteurs en in-
specteurs, en fixa le nombre à 50, et institua 3 ingénieurs
pour les turcics et levées, 1 inspecteur et 1 ingénieur
pour le pavé. La loi du iO janvier 1791 fit passer l'admi-
nistration des Ponts et chaussées do la direction du
ministre des Finances sous celle du ministre do l'Inté-
rieur; elle créa, 1** uT)(i Administration centrale, compo-
sée d*un premier ingénieur et de 8 inspecteurs généraux ;
2« une Assemblée aes Ponts et chaussées, formée du
i*'' ingénieur, des 8 inspecteurs généraux, des ingénieurs
en clicf inspecteurs de département, et des ingénieurs
présents à Paris; 3<*une École des Ponts et chaussées,
pour former les ingénieurs nécessaires au recrutement
du corps. Des modifications de détail furent apportées k
cette or^nisation par une autre loi du 18 août 179). Le
décret impérial du 7 fructidor an xii (25 août 180i)
constitua le corps des Ponts et chaussées à peu près comme
il est aujourd'hui, et régla tout ce qui concerne le ser-
vice, les nominations et les avancements. L'ordonnance
royale du 19 oct. 1830 en modifia quelques dispositions;
mais elle fut abrogée par celle du 8 juin 1832. C'est donc
toujours le décret de 1804 qui fait loi, sauf les cbange-
monts ou additions que contiennent les décrets du 13 oct.
1851 et du 17 juin 1854.
Cliaquc département possède un Ingénieur en chef de
l'* ou de 2« classe (5 à 0,000 fr. et 4,500 fr. de traite-
ment), ayant sous ses ordres un nombre variable d'Ingé-
nieurs ordinaires, de 1", 2« ou 3* classe (3,000, 2,500 et
1,800 fr.). Ceux-ci ont sous eux des agents appelés Con-
ducteurs ( V, ce mot) et Piqueurs, Les ingénieurs ont, en
outre, des frais de bureau, et perçoivent des honoraires
pour les travaux dont ils sont chargés par les départe-
ments et les communes. Ils ne peuvent devenir entre-
preneurs ni concessionnaires de travaux publics. D'après
une loi du 30 novembre 1 850, le corps des ingénieurs se
recrute partie parmi les élèves sortant de l'École des Ponts
et chaussées, partie parmi los conducteurs. Des Inspec-
teurs divisionnaires parcourent tous les deux ans une
des 10 circonscriptions dans lesquelles la France est di-
visée pour eux. Un certain nombre de ces Inspecteurs et
les Inspecteurs généraux (12,000 et 10,030 fr. de traite-
ment) forment le Conseil général des Ponts et chaussées.
En 1836, l'administration des Ponts et chaussées avait
été distraite du ministère de l'Intérieur et annexée à
celui du Commerce; elle passa au ministère des Travaux
publics en 1839, et dépend aujourd'hui du ministère
de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics.
V. Ravinet, Code des Ponts et cJiaussées et des Mines ,
2^ édit., 1847, 4 vol. in-8<^; Couderc, Essai sur Vadminis-
tration et le corps royal des Ponts et chaussées, 1829.
PONTS ET CHAusséKS (Écolo dos). Cette école, placée &
Paris, a pour mission de former des ingénieurs destinés
au recrutement du corps des Ponts et chaussées. Elle a
un inspecteur général directeur, un ingénieur en chef
inspecteur des études, et un Conseil de direction. Les
conditions d'admission ont été réglées par un arrêté mi-
nistériel du 18 février 1852 : l'École ne reçoit en qualité
d'élèves ingénieurs que des élèves de l'École polytechni-
que ayant terminé leur cours d'études et satisfait à cer-
taines conditions, mais elle admet des élèves internes,
français ou An^ngers, à participer aux travaux intérieurs ;
elle en admet d'autres à suivre les leçons orales. Les
études durent 3 ans : pendant quelques mois de Tannée,
les élèves sont envoyés dans les départements auprès des
ingénieurs pour s'exercer à la pratique. Au sortir de l'École,
ils ont le grade d'aspirant ingénieur. — L'École fut insti-
tuée en 1747, supprimée de fait à la Révolution, et rétablie
Car décret de l'Assemblée nationale en date du 17 janv.
791. La loi du 30 vendémiaire an iv r22 oct. 1795) et le
décret du 7 fhictidor an xn (24 août 1804) Torganisèrent
sur des bases plus étendues. Elle a reçu encore de nou-
veaux développements par le décret du 13 oct. 1851.
POPE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d^ffistoire,
POPOLOUQOE (Idiome). V. Mexique (Langues du).
POPULARITÉ, crédit dont on Jouit aupres du peuple.
C*e8t le résultat d'un entraînement irréfléchi ou d'un
■mitiment sya^pathique de ce peuple pour son souve-
rain, ou plus souvent ponr un citoyen éminent par ses
talents, son innuence,ou sa position,et auquel il s'attache
parce qu'il en attend, qu'il en reçoit, ou qu'il en a reçu
des services. La popularité ou vient spontanément, ou se
se gagne honnêtement, et c'est la bonne, la vraie ; ou elle
se capte par des moyens détournés, ou se poursuit par
une basse flatterie qui s'asservit à tous les désir , à toutes
les passions de la multitude : c'est la mauvaise, la fausse
popularité, dont il ne saurait sortir de bons fruits. La
première peut exister dans les monarchies, quand le
souverain s'occupe du sort des masses, par le sentiment
de son devoir et des intérêts publics, au point de vue de
la grandeur et de la gloire de la patrie. Henri IV, dans
l'ancienne monarchie française, fut populaire sous ce
double rapport. Napoléon I'' le fut aussi : ses services
et^ sa gloire militaire commencèrent sa popularité, et
lui valurent d'être porté au pouvoir par l'opinion des
masses, oui ne cessèrent de voir en lui le représentant
de cette Révolution dont elles tenaient leur affranchis-
sement et l'égalité politique. Jamais Napoléon -ne flatta
le peuple; cependant sa popularité fut si réelle, si pro-
fonde, que ses plus grands revers ne purent la lui faire
perdre; elle survécut même à sa mort, et s'attacha à
son nom par un instinctif sentiment de gratitude pour
l'immense gloire dont il avait rempli les annales du
pays, et qui formait comme une auréole à sa mémoire.
Après la Révolution , où l'on avait voulu tout faire par le
peuple. Napoléon avait mis en pratique la maxime con-
traire : « Tout pour le peuple, rien par le peuple, s c.-à-d«
rien par les masses ignorantes et aveugles, que des so-
phismes ou de perfides suggestions peuvent entraîner si
facilement. Pendant sa captivité à S^*-Hélène, faisant un
retour sur ce passé d'hier, où il avait tenu une si grande
place, à partir du siège de Toulon et de la Journée du
1 3 vendémiaire, il disait : « Rien n'est plus dangereux
que de flatter le peuple; s'il n'a pas ensuite tout ce quMl
veut, il s'irrite, et pense qu'on lui a manqué de parole;
si alors on lui résiste, il naît d'autant plus qu'il se dit
trompé. » — L'histoire de toutes les Révolutions abonde
en exemples de ce fait ; nous en citerons deui seulement
pris dans la nôtre : le général La Fayette fut l'idole du
peuple en 1789; deux ans après il en était l'exécration, et
tomba devant sa tentative de révolte contre une déma-
gogie avide de tout bouleverser. Mirabeau Jouit d*une po-
pularité plus immense encore, et, lorsqu'il mourut, elle
lui échappait déjà, parce qu'on le soupçonnait de vouloir
arrêter la chute de la monarchie. La Fayette et Mirabeau
avaient été des courtisans de popularité, et ils finirent
comme tous les courtisans de ce terrible souverain qu'on
appelle le peuple, d'autant plus despote qu'il a son trùne
dans la rue. Jamais rien de grand, ni de noble, ni de
stable, n'est sorti des coureurs de popularité. Tout gou-
vernant , ou aspirant à gouverner, qui a le sentiment de
sa propre dignité ou de sa force, et qui aime vraiment le
peuple, doit attendre que la popularité vienne le cher-
cher, et savoir, en même temps, la sacrifier à ce que lui
dictent son devoir et ses propres lumières. Cela est du
principe pour les honnêtes gens, même dans les ^uver-
nements démocratiques, où la popularité joue un si grand
rôle. Un des fondateurs de la liberté américaine, Alexandre
Hamilton, a très-bien dit le compte que Ton doit faire de
la fausse popularité ; il l'a dit au peuple lui-même, dans
le journal le Fédéraliste, où il s'exprimait ainsi :
« Il y a des gens près desquels le pouvoir exécutif ne
saurait mieux se recommander qu'en se pliant avec ser-
vilité aux désirs du peuple ou dp la l^slature; mais
ceux-là me paraissent posséder des notions bien gros-
sières sur l'objet de tout gouvernement , ainsi que sur les
vrais moyens de produire la prospérité publique.
« Que les opinions du peuple, quand elles sont raison-
nées et mûries, dirigent la conduite de ceux auxqpiels il
confie ses affaires, c'est ce (fui résulte de l'établissement
d'une constitution républicaine ; mais les principes répu-
blicains n'exigent point qu'on se laisse emporter au
moindre vent des passions populaires, ni qu*on se hâte
d'obéir à toutes les impulsions momentanées que la mul-
titude peut recevoir par la main artificieuse des hommes
qui flattent ses préjugés pour trahir ses intérêts.
« Le peuple ne veut, le plus ordinairement, qu'arriver
au bien public, ceci est vrai ; mais il se trompe souvent
en le cherchant. Si on venait lui dire qu'il juge toujours
sainement les moyens à employer pour produire la pro-
spérité nationale, son bon sens lui ferait mépriser de pa-
reilles flatteries ; car il a appris par expérience quHl lui
est arrivé quelquefois de se tromper ; et ce dont on doit
s'étonner, c'est qu'il ne se trompe pas plus souvent.
POP
1463
POP
poorsBivt «omme il Fest toc^oura par les rases des para-
sites et des sycophantes, environ aé par les pièges que
lui tendent sans cesse tant d*hommes avides et sans res-
sources, déçu chaque Jour par tes artifices de ceux qui
possèdent sa confiance sans la mériter, ou qui cherchent
plutôt à la pos$?éder qu'à s*en rendre dignes.
a Lorsque les vrais intérêts du peuple sont contraires
h ses désirs, le devoir de tous ceux qu'il a préposés à la
•^de de ces intérêts est de combattre Terreur dont il est
momentanément la victime, afin de lui donner le temps
de se reconnaître et d'envisager les choses de sang-froid.
Et il est arrivé plus d'une fois qu'un peuple, sauvé ainsi
des fatales conséquences de ses propres erreurs, s'est
plu à élever des monuments de sa reconnaissance aux
hommes qui ont eu le magnanime courage de s'exposer
à lai déplaire pour le servir. »
Voilà, certes, de nobles et fières paroles, inspirées par
un grand caractère, une profonde sagesse, et le vrai seii-
dment d'un homme d'État. C. D— t.
POPULATION , universalité des individus qui habitent
la terre, une contrée, un pays, une ville, sans distinction
de sexe ni d'âge.- On nomme population absolue le
nombre d'habitants d'un pays quelconque, abstraction
Taite de l'étendue du terrain qu'ils occupent; et populO"
tion relcUive ou spécifique, la quantité moyenne d'indi-
vidus qui sont censés vivre sur une étendue donnée, par
exemple sur un kilomètre carré. Par mouvement de la po*
jnUatian on entend les phénomènes relatifs à l'accroisse-
ment ou à la diminution de la population, et les rapports
qui existent entre les divers éléments dont elle se com-
pose, comme le nombre des naissances et des décès, celui
des mariages, celui des naissances masculines et fémi-
nines, légitimes et naturelles, etc.
Si l'on connaît généralement la population d*un pays
civilisé, comme la France et l'Angleterre, il est très-diffi-
cile d'éraluer celle de la plupart des régions du globe.
Aussi les estimations de la population totale de la terre
ne peuvent-elles être qu'approximatives, et, par consé-
quent, très-variables. Volney comptait moins de 450 mil-
lions d'habitants sur la surface de notre globe; Malte-
nrun en supposait 650 millions, Balbi 737, Letronne
000, Hassel 9i0. H. de Reden estimait de la manière sui-
vante rétendue et la population de la terre ferme :
Asie, 43,832,152 kilom. carrés, 763,000,000 hab.
Europe, 10,064,951 — 206,543,000
Amérique, 41,414,401 — 56,000,000
Afrique, 30,019,393 — 46,000,000
AustraUe, 9,042,731 — 3,945,000
n y aurait donc 1,135,488,000 hab. sur la terre. Un
autre statisticien, Dieterici , membre de l'Académie des
sciences de Berlin, croit pouvoir porter à 1,283 millions
d'habitants le chiffre total de la population de la terre,
dont 272 millions pour l'Europe, 750 pour l'Asie, 59 pour
l'Amérique, 200 pour l'Afrique, 2 pour l'Australie. Ce
dernier chiffre, si par Australie l'auteur a entendu l'Océa-
uie, est évidemment fort au-dessous de la vérité. C'est la
population de l'Europe qui a le plus augmenté : elle était,
en 1787, d'après un travail ordonné par Louis XVI, de
150 millions d'habitants, et, en 1805, elle atteignait à
peine 200 millions. Il est remarquable aussi que l'hémi-
sphère boréal de la terre est beaucoup plus peuplé que
l'hémisphère austral , et que la masse de la population
de l'ancien monde se trouve réunie à ses deux extrémités,
c-ànd. dans les pays occidentaux de l'Europe et dans les
régions orientales de l'Asie.
11 y a des différences notables entre les divers pays par
rapport à raccroissement de la population, il parait qu'en
1066 l*Angleterre proprement dite ne comptait c|ue 2 mil-
lions d'habitants; elle en a aujourd'hui 18 millions. La
Gaule en avait 4 millions au temps de J. César, 9 mil-
lions à la fin de l'Empire romain; la population de la
France était de 20 millions en 1700, de 25 en 1790, de
29 en 1806, de 32 en 1831, de 37 en 1861. D'après l'examen
des tables dressées depuis un certain nombre d'années,
les statisticiens ont observé que l'augmentation moyenne
annuelle de la population française est de la 213" partie
de cette population, et que, si l'accroissement reste le
même, il (aadra 148 ans pour qu'elle devienne double de
ce qu'elle est niaintenant. La France est , par conséquent,
le pays de l'Europe où la population croit avec le plus
de lenteur' ar, d'après Moreau de Jonnès, la période
moyenne de doublement de la population est établie
comme il suit : Suisse et Portugal , 97 ans; Russie, 95;
Wurtemberg, 91 ; Hanovre, 84 ; Danemark, 83 ; Bohême,
Bavière, Angleterre proprement dite, 77; Prusse, 70;
Autriche, 68; Italie, 65; Turquie, 6i; Stiède« 50: Ecosse
et Espagne, 57; Saxe, 54; Grèce, 51 ; Irlande, 50; Bel-
gique, 42 ; Bade, 34, etc. La population a augmeuté dans
les Etats-Unis de l'Amérique du Nord bien plus rapi-
dement que partout ailleurs, soit en vertu de sa propre
force expansive, soit à cause de l'arrivée des émigrants
européens : depuis 1790 Jusqu'à ce Jour, elle a presque
doublé dans chaque période de 20 années.
C'est une loi constatée, qu'à parité de circonstances, la
population s'accroît en raison inverse de sa densité. Dans
les pays qui ont encore peu d'habitants, comme la plus
grande partie du Nouveau Monde, cet accroissement est
très-rapide; il est lent, en général, dans les contiées de
l'Ancien Monde, où le nombre des habitants est fort
grand par rapport à la place qu'ils occupent. On trouve
en Belgique 158 habitants par kilom. carré, 68 en France,
3 seulement dans certaines parties de la Russie.
En France, on compte 100 naissances pour 85 décès, ou
100 décès pour 117 naissances. Le nombre des naissances
annuelles des garçons surpasse d'un seizième le nombre
des naissances des fllles; mais les décès annuels mascu-
lins dépassent les décès féminins. Sur 10,000 naissances,
il y a en France 719 enfants naturels, tandis que la pro-
portion est 729 en Prusse, 745 en Belgique, 81 2 en Da-
nemark, 939 dans le Hanovre, 1,070 en Autriche, 1,102
dans le Wurtemberg, 1,3G9 en Saxe, 2,083 en Bavière.
Un fait incontestable, c'est que la fécondité générale
des populations diminue en raison directe de leur pro-
spérité matérielle : ainsi , en Prusse, c'est la Silésie. la
province la plus affligée par le paupérisme, qui produit
le plus de naissances; en Belgique, ce sont les deui
Flandres, placées dans une situation économique ana-
logue; en France, les départements formés de l'ancienne
Bretagne, où le niveau de l'aisance générale s'élève si
lentement; en Angleterre, quelques-uns des comtés du
pays de Galles. C'est au sein des grandes villes que l'in-
fluence du bien-être sur la diminution de la fécondité se
fait surtout sentir ; dans les Quartiers habités par les
classes ouvrières et peu aisées, le rapport des naissances
à la population est très-élevé ; il l'est sensiblement moins
dans les quartiers où domine la classe moyenne ( négo-
ciants, marchands, rentiers, etc.), et iJ est extrêmement
faible dans les quartiers riches. Cela est facile à expli-
quer : dans l'état do misère, l'homme perd promptement
le sentiment de l'ordre, de l'économie, do la prévoyance,
celui de sa dignité morale et de sa responsabilité, tandis
au'au milieu des classes plus élevées les Jouissances de
resprit prennent une plus grande part dans les plai-
sirs de l'homme, et les préoccupations de l'avenir sont
plus vives.
Jusqu'à la fin du xvui* siècle, ce fut une opinion uni-
versellement admise que tout accroissement de popula-
tion est un bien , que la puissance et la prospérité des
États se mesurent par le nombre de leurs habitants, et
que les gouvernements doivent encourager les nom-
bi*euses familles. Mais alors une théorie nouvelle, qui eut
un grand retentissement, et dont on compte encore au-
jourd'hui beaucoup de partisans, fut émise par Maltlius ;
cet économiste posa, au sujet de la population, la loi sui-
vante : « Lorsque la population n'est arrêtée par aucun
obstacle, elle va doublant tous les 25 ans, et croit de pé-
riode en période suivant une progression géométrique. »
Se demandant ensuite s'il existait entre l'accroissement
de la population et celui des moyens de subsistance une
correspondance parfaite, il crut* qu'en raison de l'étendue
limitée des terres et du haut degré de culture qu'elles
ont déjà atteint, il était impossible d'en tirer un produit
qui augmentât suivant une progression géométrique, et
que « les moyens de subsistance, dans les circonstances
les plus favorables, ne peuvent Jamais augmenter que
selon une progression arithmétique. » La population ten-
dant de plus en plus à dépasser la limite des subsis-
tances, il faut , suivant Malthus, attribuer à la reproduc-
tion excessive de l'espèce humaine la gêne, la misère et
tous les maux contre lesquels luttent les individus et les
soci(3tés. Par quel moyen faut-il j remédier? Comment
conjurera-t-on les périls de l'avenir? Ifalthus résume ses
conseils par les mots morai restraint^ qu'on a traduits
en français par contrainte morale : il veut d'abord que
l'homme ne contracte mariai^e que lorsau'il a les moyens
actuels de nourrir une famille et des chances suffisantes
de l'élever convenablement ; et ensuite crue, dans le ma-
riage, la raison domine l'instinct, que l'iaée de la respon-
sabilité modère les entraînements des sens, et que la popu-
lanoD reçoive par la continence une limitation voiontairei
POP
1464
POR
La th^forie de Malthus, dégagée de§ ralionnementsai^é-
cieux et des faits intéressants dont il Tavait entourée, est
inexacte. Sa loi du développement continu et général de
la population est loin d*être incontestable : pour raison-
ner sur la population avec quelque certitude, il faut
d'autres prémisses que les faits relatifs à un coin du globe
placé dans des circonstances exceptionnelles. Malthus a
fris le tableau de la population anglaise depuis Tannée
688, époque où ''Angleterre n'était guère qu'une puis-
sance de second -ordre; ce pays a grandi Jusqu'à nos
Jours, mais il parait être arrivé à son apogée politique et
commercial, et il est désormais impossible que sa popu-
lation croisse aussi rapidement que par le passé. D'un
autre côté, les causes qui modifient la population sont
nombreuses et complexes ; elles agissent de telle sorte
qu'en téalité la population ne se développe qu'avec beau-
coup de lenteur comparativement à la puissance tliéo-
rique de reproduction dont l'espèce est douée. A certains
moments le genre humain procrée en abondance, en
d'autres instants il semble frappé de stérilité; ici la po-
pulation gonfle, là elle se contracte ; dans le même pays
telle classe s'éteint, telle autre est restreinte par une
force invisible; si l'on voit des peuples nouveaux surgir
de temps en temps dans la suite des siècles, il en est
d'autres qui périssent. — La lot d'accroissement des sub-
sistances, telle que Maithus l'a formulée, n'est pas mieux
fondée que celle de l'accroissement de la population.
D'abord, l'économiste anglais n'a pas tenu compte des
avantages réels qui résultent d'une certaine densité de
la population, au point de vue de l'augmentation de la
production elle-même. Ensuite, tous les perfectionna
ments des machines, des procédés et des arts nouveaux,
les sciences qui les éclairent et les dirigent, la surabon-
dance des produits , viennent infailliblement à la suite
du développement de la population : dans la Grande-
Bretagne, la population n'a été que doublée depuis un
siècle, tandis que dans le même espace de temps le pro-
duit des manufactures est devenu mille fois plus grand ;
les moyens de subsistance ont donc progressé plus vite
encore que la population. Si la loi de Blalthus était Juste,
la quantité moyenne de subsistances dont un homme dis-
pose serait moindre aujourd'hui qu'il y a un siècle : il
est notoire, ^m contraire, que le genre humain est plus
sainement et plus abondamment nourri, mieux logé,
mieux vêtu, et que le confort, l'aisance, et môme le luxe,
vont toujours croissant au lieu de se restreindre. D'âpre
Moreau de Jonnès, la production de la France en cérâiles
fournissait, en 1700, 354 litres par habitant, et, en 18i4,
457 litres, bien qu'entre les deux époques la population
eût presque doublé. Sans doute, la surface du globe ne
Eeut produire qu'une quantité limitée d*ali ments, et, k
i rigueur, si la population augmentait simultanément
sur tous les points avec rapidité, si la guerre, la peste,
le désordre des idées et la corruption des mœurs, les ré-
volutions et les mauvais gouvernements, ne venaient pas
défaire dans certaines contrées et k certaines époques ce
que font en d'autres lieux et en d'autres temps les habi-
tudes d'ordre et de travail, la sainteté du mariage , le
sentiment religieux, et les bons gouvernements, les pré-
visions de Malthus seraient réalisées un Jour. Mais ce
Jour luira-t-il Jamais? La surface du globe, ou seulement
celle de l'Europe, n'approche pas de son maximum de
culture et de produit. On s'accorde k reconnaître qu'en
France il serait possible d'élever les subsistances au ni-
veau d'une population double et même triple; or, la
superficie de ce pays étant de 54 à 55 millions d'hectares,
et celle des terres de notre globe de 13 milliards d'hec-
tares, on trouve qu'en réduisant même ce dernier chiffre
à 9 milliards k cause des terres polaires et des déserts, il
reste une superficie habitable 170 fois plus grande que
la France; si celle-ci peut nourrir 75 millions d'habi-
tants seulement, c-à-d. le double de sa population ac-
tuelle, la terre en nourrirait 12 milliards, c-à-d. dix fois
plus qu'aujourd'hui. Si donc l'état de l'Europe a inspiré
des alarmes à certains économistes, ils ont eu tort de s'en
prendre à la surabondance de la population ; l'Espagne ,
Soi est relativement dépeuplée, se trouve dans une posi-
on cent fois pire que l'Angleterre, la Belgique, et U
Hollande , où la population est serrée et se condense
chaque jour davantage. La population parait excessive
seulement parce qu'à certains moments, à cause de l'im-
prévoyance des individus et des sodétés, à cause de l'im-
perfection de l'organisation industrielle et des règles qui
président aux relations internationales, le silence succède
dans les ateliers à une activité démesurée, et que les bras
se tnKiv<8iil sans emploi, sans que rien ait été ^paré
pour subvenir aux besoins de l'ouvrier pendant les inlsîw
ruptions du travail.
y. FranlLlin, Obsmvatwns iur VaccrotssimaU du
hommes, sur lé peuplement dês pays, etc., Philadelphie,
1751, in-8«; le marquis de Mirabeau, VAmides h/ommes,
ou Traité sur la population , Avienon, 1756-00, 3 vol.
in-4<>$ SQssmilch , VOrdre divin des mouvements de la
population prouvé par la comparaison des naissances et
des décès, en allem., 4* édit., Berlin, 1775-76, 3 vol.;
Herrenschwand, De l'Économie politique moderne. Dis-
cours fondament€U sur la population, Londres, 1786,
in-8°; Ortes, Réflxtions sur la population dans ses rap-
ports avec l* Économie nationcUe, en ital., Venise, 1700 ;
Malthus, Essai sur le principe dépopulation, Londres,
1798; Gray, Becherches sur le principe depopulatum et
sur la productionj 1800 ; Sumner, Essai pour démontrer
Vac-cord du principe de population avec la sagesse et la
bonté de Dieu, Londres, 1815, 2 voL; W. Godwin, Re-
cherches sur la population et sur la faculté d'accroisse-
ment de l'espèce humaine, trad. de l'anglais par Con-
stancio, Paris, 1821, 2 vol. in-S""; A. Everett, Nouvelles
idées sur la popuUUion, trad. de l'anglais par Ferry,
1826; Weinhold, De la population et de ^industrie, Leip-
zig, 1828; Horel-Vindé, Sur la population, ou Observa-
tions sur le système professé par Malthus et ses disciples,
Paris, 1829; Saddler, La loi de la population, en an-
glais, Londres, 1830, 2 toL in-8«; Schmidt, Recherches
sur la population, les salaires et le paupérisme, en
allem., Leipzig , 1836 ; Archibald Alison , U principe de
population dans ses rapports avec le bonheur humain,
en anglais, Londres, 1840, 2 vol. in-8* ; Prichard, Recher-
ches sur Vhistoire physuiue des populations , en anglais,
4* édit., Londres, 1841-44, 4 vol. in-8«; Thornton, VEx-
cès de population et remèdes à y apporter, en anglais ,
Londres, 1846, in-8«; Doubleday, La vraie loi de popu-
lation, en anglais, 2* édlL, Londres, 1847, in-8«; Her-
bert Spencer, Théorie de la popiUation, en anglais, Lon-
dres, 1852 ; Guillard, Éléments de statistique humaine,
ou Démographie comparée, Paris, 1855, in-8«; Joseph
Gamier, Du principe de la poptUation, Paris, 1857.
PORC. Cet animal impur, frappé de réprobation par
les Hébreux et les Égyptiens, est devenu, dans les lé-
gendes chrétiennes, l'image du démon. PUcé aux pieds
d'un saint, il signifie les voluptés vaincues, asservies.
PORCELAINE, poterie fine à pâte grenue, translucide,
ne se laissant pas entamer par l'acier, et susceptible de
recevoir une couverte, un vernis ou émail brillant et dur.
La porcelaine dure a pour base le kaolin, terre argileuse
blanche, et le pétunsé ou feldspath pur, remplacé quel-
quefois par un mélange de craie, de sable et de feldspath.
On peut appliquer des couleurs ou de la dorure, soit sur
la p&te, soit sur la couverte, en les fondant avec ceUe-d
à la même température, su en les faisant adhérer par
une température plus douce à l'aide d'oxydes ou fondants
métalliques. La porcelaine tendre est un mélange d'ar-
gile marneuse et de minium : elle ne va point au feu, se
raye facilement, et ne supporte guère la orusque tnmsi-
tion du chaud an froid; mais les peintures, la dorure et
les ornements de toute espèce v.font plus bel efTet, les
couleurs s'y fondent mieux, s'y imbibent, et conservent
plus de vivacité. La peinture sur porcelaine a été prati-
quée avec suçote à la manufacture de Sèvres; parmi ceux
3ui s'y distinguèrent pendant les règnes de Louis XV et
e Louis XVI, sous la direction de Genest, on remarque :
les peintres de fleurs Bouillat, Parpette, Micaud, et Pi-
thou; les peintres d'oiseaux Armand, et Castel; les
peintres d'arabesques Chulot, et Laroche; les peintres de
paysages Rosset, et Évans; les peintres de figures Dodin,
et Caton. Sous le premier Empire, Isabey, Swebach, Pa-
rent, Chenavard, Fragonard, portèrent à une grande
perfection l'art du peintre en porcelaine. Depuis la Rea-
t.iuration, nous citerons, pour la peinture d'histoire :
I^guay, Constantin, Béranger, Georget, M"** Ducluzeau
et Jaquotot; pour le paysage : Robert, Langhicé, Lebel,
Poupart; pour les fleurs et les fruits : Drouet, Scliilt,
Van Os, Jacobber; pour les camées : Degault; pour les
coquillages : Philippine; pour la peinture de çenre : De-
velly. Le mot porcelaine n'est pas chinois , il vient du
IH>rtugais porçolana, signifiant vaisselle ou poterie de
terre. V. les articles Céramique; Cnn» — porcelaine; et
A. Jacquemart et E. Le Blant, Histoire artistique,, in-
dustrielle et commerciale de la porcelaine, Parii^ , 1861-
1862, in-4».
PORCHE, mot dont on a fait un qrnonyme de péri-
style et de portique en l'appliquant à tout vestibule ou
lieu ooavert placé en avant-oorpi d*iiaê fiiçadt, nuia qai
POR
1465
POR
défigne proprement cette construction au devant d'une
entrée dVglise. Les églises seules ont eu primitivement
des porches ( K. Nartbbx), et c'est par imitation qu'on en
fit aux palais, aux hôtels, et même aux maisons particu-
lières. L'église S'-Germain-l'Auxerrois, k Paris, a un por-
che. On voit à l'église Délia Race, à Rome, un porche cir-
culaire, construit sur les dessins de Pietro di Cortone.
Les porches ne furent pas élevés seulement dans un but
de décoration, mais aussi dans un but d'utilité : ils dé-
fendaient l'entrée de l'église contre les injures de l'air;
on y rendit la Justice, on s'y rassembla pour causer d'af-
faires; couronnés de m&chicoulis et de créneaux, ils
offraient ane défense militaire; quand ils étaient sur-
montés d'un étage, on y plaçait une sacristie, une
école, etc. Il y avait quelquefois une fontaine, où les
fidèles se lavaient les mains avant d'entrer dans l'église.
On y faisait encore l'exorcisme avant d'admettre les en-
fants au baptême. V, Thiers, Dissertation sur les porches
des églises, Orléans, 1679, in-12. B.
PORBECTION, en latin Porrectio {de porrigere, pré-
senter), cérémonie en usage dans l'Église cathohque
quand on confère les ordres mineurs, et qui consiste k
présenter, à faire toucher aux ordinands les objets qu'ils
auront à employer dans leur ministère.
PORT (du latin portiu), lieu où la mer, s'enfoncent
dans les terres, offre aux b&timents un abri contre les
vents et les tempêtes. Il est naturel , quand la nature a
tout fait; artificiel, quand il est formé par des môles ou
Jetées en mer. Un port de toute marée est celui où les
navires peuvent entrer en tout temps, parce qu'il y a
toujours assez d'eau; un port de barre est celui dont
l'entrée est fermée par un banc de sable ou de roche, et
où l'on ne peut entrer qu*avec la marée. Tout port à
marées, où la mer, en se retirant, laisse à sec les na-
vires, est dît port d^échouage. Dans les ports dotés de
bassins, la partie servant d'entrée, et dans laquelle se
font sentir les effets 4é la marée, reçoit le nom d*avant-
port. — Par extension, on appelle port tout lieu où les
navires abordent, chargent et déchargent des marchan-
dises. On distingue les ports militaires ou de guerre, et
les ports marchands ou de commerce. Un port franc ou
libre est celui où les marchandises ne payent point de
droits, tant qu'elles n'entrent pas dans l'intérieur du pays.
Le mouvement d'un port est le nombre de navires qui y
pntrent et en sortent chargés de marchandises, et dont
on évalue le tonnage ou la capacité en tonneaux au moyen
d'un jaugeage basé sur le poids et le volume de ces mar-
chandises.
POST (Capitaine, — Maître, ~ Officiers de). V, Capi-
tahib, HarraB, Orncisa.
posT, prix qu'on paye pour les transports de colis par
voitures, messageries, chemins de fer, bateaux, etc., et
pour les lettres mises à la poste.
PORT d'armes. Le droit de porter des armes, pouvant
entraîner des dangers pour la vie des citoyens, a été de
tout temps réglementé. Le port d'armes était interdit
dans les rues à Athènes et à Rome. Après l'invention des
armes à feu, la prohibition devint plus sévère : Fran-
çois I*' fit défense, même aux gentilshommes, d'en por-
ter, sous peine de la corde. La défense fut renouvelée
par ordonnances de Juillet 1607, de septembre 1609, du
ïo mars 1728, du 25 août 1737. Aujourd'hui , à moins
d'être vagabond ou ancien condamné, chacun peut porter
des armes pour sa sûreté, sauf les exceptions déterminées
par la loi ÇV, Armes PROHuéES ). Il y a aussi des disposi-
tions spéciales quant au port d'armes dans un attroupe-
ment ( V. Attroopehbnt). — 'On donne quelquefois le
nom de port d'armes au permis de chasse, V, Êhassb.
PORT des lettres. V. Taxe.
PORT DB VOIX, manière d'articuler deux sons ea mon-
tant; elle consiste à les unir par une liaison du gosier.
PORTAGE , nom donné en Amérique à l'espace com-
pris entre deui cours d'eau navigables, parce qu'en voya-
geant on y porte son canot d'une rivière à l'autre pour
abr^r le chemin. On appelle aussi portage tout endroit
d'un fleuve où se trouve une chute, qui oblige à porter les
canots sur le bord pour la franchir.
portage, droit féodal. F. notre Dictionnaire de BiO"
graphie et d^Bistoire,
PORTAIL, désignation qu'on applique à tout frontia*
pice d'architecture, à toute élévation servant de façade on
d'entrée principale à un grand édifice, quels que soient
le caractère de son style ou la nature de ses ornements.
Mais elle oonrient spécialement à l'entrée monumentale
d'une église f car il n'existe pas, dans les monuments de
riBtfapStA» éè fiçadM qui poiaseat recevoir le nom de
portails, et ce sont les constructions de rarchitectore
chrétienne oui en ont donné les premiers exemples. Les
rangs de colonnes espacées que présentent les faces des
temples gréco-romains ne forment pas des portaUs, mais
des péristyles ou des portiques. Une église peut avoir
trois portails, l'un k l'entrée des nefs, les autres aux
extrémités du transept. Ceux-ci n'ont jamais qu'une
porte, celui-là en a presque toujours trots. Un portail
comprend tout ce qui encadre et surmonte les portes,
voussures, tympans, galeries, roses, tours, etc il ne
doit pas être confondu avec un porche ( V, ce mot), avant-
corps ou appentis se détachant tout k fait des princinales
lignes d'une façade. — On appelle Avant-Portail un
avant-corps isolé, placé k distance d'un portail dans cer-
taines églises : tel est celui qu'on voit en avant du Por»
tail des libraires de la cathédrale de Rouen. B.
PORTE, mot qui désigne k la fois l'ouverture ou la
baie pratiquée de plain-pied dans une muraille pour
servir de dégagement et d'is'^ue, et l'ouvrage mobile de
bois ou de métal destiné à la clore. Celui-ci emprunte sa
forme à celle-là. Certains peuples, comme les Chinois et
les Arabes, ont donné à leurs portés des configurations
singulières, telles que le trèfle ouvert, l'arc surbaissé ou
chargé de dentelures : ce sont là des fantaisies contraires
au bon goût et à la solidité. Les formes adoptées en ar-
chitecture, selon les styles, sont le quadrangle, le cintre
et Vogive. La forme quadrangulaire a été employée la pre-
mière, en raison de sa simplicité logique, et de l'usage
facile des matériaux les plus grossiers : une porte de ce
genre se compose de deux jambages ou pieds^droits, sur
lesquels repose un linteau. Vitruve a distingué trois es-
pèces de portes quadrangulaires dans les temples : l'io-
nique, la dorique, et la corinthienne. L'emploi des cintres
en maçonnerie marque dans l'art de construire une pé-
riode nouvelle, dont la date chez les Anciens ne saurait
être déterminée d'une manière précise. Vitruve n'a point
parlé des portes cintrées, mais les architectes modernes
ont cherché à en fixer les proportions : dans l'ordre tos-
can, une porte doit avoir en hauteur deux fois sa lar-
geur ; dans le dorique, deux fois et un sixième ; dans l'io-
nique, deux fois et un quart ; dans le corinthien, deux
fois et demie. Au moyen âge, la forme ogivale des ar-
cades, l'élancement des voûtes, l'usaj^e des frontispices
en pignon triangulaire, la difficulté de trouver d'asseï
grands linteaux d'un seul bloc de pierre, firent aban-
donner les portes quadrangulaires pour les portes en
ogive, qu'on peut construire avec de petits matériaux.
Les portes des grandes façades d'église sont souvent cou-
pées en deux par un pilier vertical , sur lequel porte un
tympan (V. ce mot). Au temps de la Renaissance, on re-
vint à l'arc en plein cintre ou à l'arc surbaissé, en anse
de panier, mais en lui donnant une ornementation beau-
coup plus riche que dans l'Antiquité. Au xviii* siècle, on
employa, dans la composition des portes de palais, les
colonnes, les plates-bandes sculptées, les frontons; on
orna de trophées les pieds-droits, de bas-reliefs les enta-
blements : de pareilles entrées ressemblent plutôt à des
Krtiques qu'à des portes. Telles sont, à Pans, celles du
lais-Royal , du palais de la Légion d'honneur, du palais
du Corps Législatif. Dans les maisons particulières, les
portes se distinguent en' portes cochères et portes bâ-
tardes^ selon c|u'elle8 peuvent ou non laisser passer une
voiture. — A l'intérieur des édifices, les portes qui servent
d'entrée et de communication aux difi'érentes pièces pré-
sentent, sauf quelques accessoires, les mêmes formes et la
même décoration que celles du dehors. Elles sont souvent
encadrées de chambranles^ avec des moulures en plâtre ou
en bois ; quelquefois elles sont surmontées de panneaux
ou de tableaux appelés dessus de porte. Dans les palais,
la hauteur des plafonds permet l'emploi des colonnes ou
des pilastres, des frontons, des plates-bandes supportées
par des consoles, des couronnements en sculpture, etc.
L'ouvrage servant de clôture dans une porte se compose
d'un ou de deux battants ou vantaux. Les plus simples
portes en bois sont arasées, et présentent une surface
lisse. Quand les portes sont à compartiments, elles com-
portent des ornements de tout genre, figures, mascarons,
moulures en ove, en perle, en feuille d'eau, etc. Dans les
ridies intérieurs, on les fait en placages de bois précieux.
Ltt portes des maisons de l'ancienne Grèce s'ouvraient
en dehors, et ceux qui voulaient sortir de Uiez eux frap-
paient un coup du dedans, pour avertit les passants
qu'ils eussent à se mettre à distance. Les portée des Ro-
mains s'ouvraient comme les nôtres; on les ornait d'in-
■criptions, de dépouilles d'ennemis vaincos ou d'animaux
toéa à la chassa; auxjoun de fêta* «n Im oooronnaii
POR
}466
POR
de guirlandes de fleun et de feuillages; aux Jours de
deuil, on y suspendait des cyprès. Les Anciens ne met-
taient des portes qu'aux baies extérieures; les baies in-
térieures étaient fermées par des voiles ou des tapis. Au
moyen âge et à la Renaissance surtout, les portes en bois
ont servi de champ aux sculpteurs, qui les ont couvertes
de Agures en bas-relief. On peut citer, parmi les monu-
ments de ce genre : plusieurs portes des I^ges du Vatican,
sculptées par Jean Barile diaprés les dessins de Raphaël ou
de quelqu'un de ses élèves ; les portes de Téglise S^-Maclou,
à Rouen, qu'on attribue à Jean Goujon ; dans les galeries
du Louvre, plusieurs battants sculptés sur les dessins de
Lebrun; la porte principale de Notre-Dame de Paris, faite
BOUS la direction de Soufflet. La peinture a servi égale-
ment k décorer les compartiments des portes. Des bat-
tants en bois ont été aussi recouverts de métal plaqué,
comme ceux de la porte antique du Panthéon d'Agrippa,
à Rome. Quant aux portes de bronze, elles ne remontent
pas au delà du xi* siècle, époque où furent fondues à
Constantinople, par Staurachios Tuchitos de Chio, celles
qui ornèrent la basilique de S*-Paul. Cest de Constanti-
nople que furent apportées, au xiii* siècle, les portes de
réglise S*-Marc à Venise. Mais déjà, en 1180, Bonanno,
artiste de Pise, avait fondu les portes de la cathédrale de
cette ville. Celles de la cathédrale de Novogorod en Russie
sont de la même époque et de fabrication byzantine. Le
chef-d'œuvre en ce genre, ce sont les portes du baptis-
tère de Florence. Parmi les ouvrages modernes, on peut
mentionner, k Paris, la porte qui sert d'entrée à la cour
du Louvre par le côté de la Colonnade, celles de la galerie
d'Apollon dans le même palais, et la porte de l'église de
la Madeleine.
Les portes pratiquées dans les enceintes des grandes
villes ont été généralement des constructions monumen-
tales, surmontées de bâtiments ou garnies de tours. On en
voit des restes grandioses en Egypte. Comme modèle ro-
main en France, on peut citer la porte d'Arroux, à Autun
{V. ce mot). Il ne faut pas, pour les constructions de ce
genre, employer indifféremment les noms de Porte et
d'i4rc de Tiiomphe : dans les portes^ il y a deux ouver-
tures ou arcades égales; dans les monuments triom-
phaux, il n'y a qu'une arcade, ou bien une grande arcade
accompagnée de deux plus petites. Cependant l'usage a
souvent confondu les deux termes, et de véritables portes
ont été bâties par les Modernes dans le style consacré
aux arcs de triomphe : telles sont, à Berlin, la porte dite
de Brandebourg (V. Berlin) ; telles étaient, à Paris, les
portes S*-Antoine et S^-Bernard (7. plus bas). Récipro-
quement, on a donné le nom de portes aux arcs élevés
en l'honneur de Louis XIV à l'entrée des rues S^-Denis et
S»-Martin {V. plus bas).
Dans les villes de guerre, au temps de la fortification
dominante et avant l'emploi des ouvrages extérieurs, les
portes étaient flanquées de deux tours, et on en défendait
les approches à coups de flèches. Lorsque l'assiégeant se
fut préservé des traits au moyen de la tortue, et qu'il
put, soit battre les portes avec le bélier, soit les attaquer
par le feu , on les fortifia par des garnitures de métal , on
les recouvrit de cuirs saignants, on établit des ouvertures
pour pouvoir inonder les foyers incendiaires. Puis, au
lieu de placer les portes entre 'deux tours rondes, on les
mit au milieu d'une tour carrée , surmontée de mâchi-
coulis ; la baie fut garnie de doubles portes et de herses.
Quand l'artillerie permit d'attaquer de loin et avec succès
ces défenses, les portes furent protégées par de larges
fossés, des ponts-levis et des barbacanes, par des palis-
sades, des braies et des bretèches. L'attaque, perfection-
nant aussi ses moyens, se semt de pétards (k. ce mot),
contre lesquels on a su se défendre encore, en cachant
les portes k la vue du dehors, en les perça tt dans un
ravelin ou une demi-lune, en en couvrant les abords par
des éperons, etc. B.
l'ORTB (La Sublime). V, notre Dictionnaire de Biogror
phie et d'Histoire.
PORTE SAiNT-ANTOiNB , sorte d'arc de triomphe qui fut
élevé à Paris, sous Henri III, en 1585. Il était percé d'une
seule arcade. Au temps de Louis XIV, l'architecte Blon-
del y ajouta deux autres arcades, à peu près de même
dimension et du caractère de celui qu'il conservait au
centre. Deux Fleuves qui décoraient les impostes de l'arc
avaient été exécutés par Jean Goujon ; il y avait dans des
niches d^ statues par Anguier, et trois sur le couronne-
ment, par Van Onstal. La porte S*- Antoine ayant été
démolie en 1778, les figures de Fleuves furent placées sur
)a place du jardin de Beaumarchais. B.
fPnTB saint-bernardy arc triomphal élevé à Louis XIV,
sur le qusi du môme nom, par la ville de Paris. Constnût
en 1674 par Blondel, il était percé de deux arcades sem-
blables, et décoré de bas-reliefs par Tuby.
PORTE SAnn^DEifis, monument triomphal élevé en 1G73
par la ville de Paris k Louis XIV. La composition est de
François Blondel , et présente beaucoup d'imperfections.
Il y a une disproportion évidente de la face latérale de
ce monument avec la grandeur imposante de son éléva-
tion. Il est percé d'un grand arc, et do deux petites portes
pratiquées dans des piédestaux accolés aux pieds-droits.
Du côté de la ville, au-dessus de ces piédestaux qui
ne semblent pas appartenir au sujet principal, s'élè-
vent des obélisques chargés de trophées d'armes, et qui
sont engagés sur la surface des pieds-droits Jusqu'à
la hauteur de l'entablement de l'édifice; les obélisques
étaient alors appropriés plutôt à la décoration des tom-
beaux qu'à celle des arcs de triomphe. A leur pied, deux
figures assises , sculptées sur les dessins de Lebrun, re-
présentent les Provinces-Unies sous la forme d'une femme
consternée, et le Rhin sous celle d'un homme vigoureux
appuyé sur un gouvernail. Entre l'archivolte et l'enta^
blement, un bas-relief, placé dans une table rentrante
qui coupe l'imposte , représente Louis XIV, vêtu à l'an-
tique, commandant le passage du Rhin. Du côté du fau-
bourg, un bas-relief représente l'entrée du même prince
dans Maestricht. Dans la frise de l'entablement , on lit
l'inscription suivante en lettres de bronze doré : Luno-
vico Magno. Ce qu'on peut admirer sans réserve dans la
porte S^Denis, ce sont les sculptures, commencées par
Girardon, achevées par Michel Anguier. Le monument a
24'",G5 de hauteur, 25 met. de largeur, 5 met. d'épaisseur;
l'arcade a 15'",35 sous clef, et 8 met. d'ouverture; les pe-
tites portes ont 3'",30 sur 1™,70. Il a été restauré en 1807
par Célérler, et gratté il y a peu d'années. B.
PORTE SAINT -UARTiii, monumout triomphal élevé à
Louis XIV par la ville de Paris, en 1674, sur les dessins
de Pierre Bullet, et en mémoire de la conquête de la
Franche-Comté. Conçu dans les plus heureuses propor-
tions, il est percé d'une grande arcade et de deux petites.
Sa hauteur et sa largeur sont chacune de 17'*,55, son
épaisseur de 4'",50; l'arcade du milieu a 9"*,70 sous
clef, et 4'",85 d'ouverture; les petites arcades ont 5"»,75
sur 3",50. Les pieds-droits sont travaillés en bossages
vermiculés. Entre le bandeau de l'imposte de la grande
arcade et l'entablement, se trouvent des bas-reliefs d'une
exécution assez faible, œuvre de Desjardins, de Marsy,
de Lehongre et de Legros : du côté de la ville, une
femme à genoux présente le traité de la Triple Alliance
à Louis XIV assis sur son trône, et le même prince, sous
la figure d'Hercule, est couronné par la Victoire; du côté
du faubourg, on a représenté aussi sous des formes allé-
goriques la prise de Limbourg et la défaite des Alle-
mands. La frise est ornée de consoles, placées sous
chacun des modillons de l'entablement qui la divisent
par métopes, dans lesquels sont des armes de guerre. Sur
l'attique on lit ces mots : Ludovico Magno, Vesontione
Sequanisque bis captis, et fractis Germanorum, His-
panorum et Batavorum exercilibus, Prœfec, et œdil,
poni, C. C. Les parties d'angle et les archivoltes des trois
portes sont en bossages vermiculés. Ia Porto-Saint-
Martin a été réparée sous la Restauration. B.
PORTE SAINT-MARTIN (Tliéàtre de la). Construit d'ur-
gence, comme salle provisoire pour remplacer celle de
l'Opéra qui venait d'être brûlée, il fut élevé en 8G jours
par Alexandre Lenoir, et inauguré le 27 oct. 1781. Toute
la construction était en pans de bois. Ce théâtre servit aux
représentations de l'Opéra jusqu'au 8 tbenuiaor nu n.
Fermé pendant 8 ans, il rouvrit en 1802 sous le nom de
Jetujc Gymniques, et l'on y donna des pièces à grand
spectacle, des comédies et des ballets. Après le décret de
1807, il, fut interdit d'avoir plus de deux acteurs par-
lant sur la scène, les autres devant se borner à la pan-
tomime. Un pareil spectacle ne tarda pas à être aban-
donné. Le théâtre rouvrit en 1814, sous le nom qu'il
porte aujourd'hui, et obtint de grands succès avec le
mélodrame et le ballet, avec des acteurs tels que Fre-
derick Lemaltre, Bocage, Potier, Mazurier et M"* Georges.
De cette période datent le Solitaire, le '^ampire, le
Moine, Mandrin, Trente ans ou la Vie d'un joueur, les
Petites Danatdes, les ballets du Meunier et de Jocko, etc.
Puis la tragédie y fit une apparition heureuse avec K)
Marino Fatiero de C. Delavigne. Mais le drame moderne
conquit bientôt le premier rang : aux anciens artistes
s'ajoutèrent ou succédèrent Ligier, Prévost, Mélingue,
Chilly, Laferrière, M"* Dorval. Parmi les pièces à succès
de cette nouvelle période, on remarque Richard d'Ar-
POR
1467
POR
(ttiatofi, la Tour â$ NesU, Angèle, Marte Tudor, Lucrèce
Borgia, la Nonne sanglante, les Sept enfants de Lara,
la Duchesse de La Vaubalière, etc. Fermé momentané-
ment en 1840, et rouvert à la fin de la même année, ce
thé&tre attira de nouveau le public avec les Deux serru-
riers de Félix Pyat et la féerie de la Biche au Bois, Il y
eut encore un moment de graves embarras en 1851. De-
puis cette époque^ il eutquelgues brillants succès. La
salie^ brûlée en 1871, a été reédifiée près delà*
PORTE SAINTE. V. BASILIQUE.
PORTE-BALLE. V.- Colporteur.
PORTE-DRAPEAU dans un régiment. Cest un sous-
lieutenant, qui fait partie de Tétat^major. Avant Napo-
léon I*"', c*était un sergent.
PORTÉE, en termes d'Architecture, étendue libre
d*une pierre ou d*une pièce de bois qui est placée hori-
zontalement dans une construction et soutenue par des
points d'appui. Quand la portée est trop grande, la pierre
peut se briser et la poutre plier.
poRTés, distance où peut atteindre une arme de Jet.
Dans les armes à feu, elle dépend de la nature de ces
armes, de la charge, de la qualité de la poudre, de la na-
ture du projectile, et de Tangle de projection.
PORTÉE, en termes de Musique, assemblage de 5 lignes
horizontales et parallèles, sur lesquelles ou entre les-
quelles on place les notes. On les compte à commencer
par la plus basse. Comme ces lignes ne suffisent pas à
toutes les notes qu'on peut avoir besoin de placer, on
ajoute, au-dossus ou au-dessous de la portée, des lignes
supplémentaires dites lignes accidentelles ou fausses
lignes, mais en ne leur donnant que la longueur néces-
saire à chaque note. A la fi r du xvii* siècle et au com-
mencement du XVIII*, la portée était composée de 8 lignes
pour la musique d'orgue et de clavecin. — La portée du
plain-chant avait, dit-on, primitivement 8 lignes, une
pour chaque degré de la gamme : elle n'en a plus que 4,
généralement suffisantes pour des mélodies qui n'em-
brassent guère que retendue d'une octave. Ce n'est point
parce que la portée porte les notes qu'on lui a donné ce
nom, mais parce qu'elle est la portés et l'étendue d'une
voix ordinaire. B.
PORTEFAIX, ouvrier qui fait métier de transporter
des fardeaux. Les portefaix des halles se nomment forts
de la halle ( V, ce mot). L'expression de crocfieteur, dé-
rivée des crochets dont se servent certains portefaix pour
porter à dos leurs fardeaux, n'est employée que comme
injure. Il existe à Marseille une nombreuse, riche et
très-honorable corporation de portefaix, qui remonte à
une haute antiquité; ils ont le monopole du chargement
et du déchargement des navires. F. A. Rondelet, les
Portefaix de Marseille, dans la Revue contemporaine du
30 avril 1862.
PORTEROOLLE, nom qu'on donnait à une espèce de
régisseur dans les représentations des Mystères {V. ce
mot). Il avait pour mission de parler au public, et faisait
aussi l'office du souffleur. On l'appelait encore protocole^
mattre ou meneur du jeu.
PORTES ET FENÊTRES (Contribution des}, une des
quatre principales Contributions directes, établie sur les
portes et fenêtres qui donnent sur les rues, cours ou Jar-
dins des b&timents et des usines. Elle a été créée par la
loi du 4 frimaire an vii (24 nov. 1798). On en exempte les
portes et fenêtres servant à aérer les granges, bergeries,
étables, greniers, caves, et autres locaux non destinés à
Thabitation des hommes ou employés à des services pu-
blics. Elle est exigible contre les propriétaires, fermiers
ou locataires principaux, sauf leur recours contre les
sous-locataires. La quotité de l'impôt varie suivant le
nombre des ouvertures de la maison, suivant la popula-
tion de la commune, et suivant l'étage auquel sont situées
les fenêtres. La moindre taxe est celle d'une maison à
une ouverture dans une commune de 5,000 &mes au plus :
elle est de 0 fr. 30 c. La plus forte est celle d'une ouver-
ture (porte ou fenêtre ordinaire) située au rez-de-chaus-
sée, à l'entre-sol, au premier ou au second étage, dans une
▼ille de plus de 100,000 âmes : elle est de 1 fr. 80 c. Les
portes cochères, charretières, et de magasin, payent une
taxe qui varie, suivant la population, de 1 fr. 60 c. à
18 fr. 80 c« L.
PORTE-VOIX, ino^jument de cuivre ou de fer-blanc,
en forme de trompette, largement évasé par sa partie in-
férieure, et dans lequel on parle en portant à la bouche
la petite extrémité. Les Anciens s'en servaient dans les
batailles, pour faire entendre au loin le commandement,
et les Arabes en trouvèrent en Chine au ix* siècle, ce qui
o'empâchs pa» l'Anglais Samuel Morland et le P. Kircher
de s'en disputer l'invention. Il y a plusieurs espèces de
porte-voix de marine : le braillard, employé à la main
pour le commandement des manœuvres sur les bâtiments
de moyenne dimension ; le giieulard, qui s'allonge à vo-
lonté comme une lunette, se pose ordinairement sur un
support, et k l'aide duquel on se fait entendre d'un bâ-
timent à un autre; le porte-voix de combat, qui est a
demeure sur le pont et descend verticalement dans les
batteries. C'est aussi un porte-voix vertical qu'on em-
ploie sur les navires k vapeur pour donner des ordres au
mécanicien. On fait, avec des tuyaux en caoutchouc, des
espèces de port&-voix dans les habitations et les ateliers,
pour porter la parole d'une pièce ou d'un étage à un
autre. B.
PORTIER, celui qui a soin d'ouvrir, de fermer et de
garder la principale porte d'une maison. Aujourd'hui
presque tous les portiers ont pris le nom de Concierges,
oui n'appartenait autrefois qu'à ceux qui avalent la garde
d'une maison royale ou seigneuriale, d'un hôtel de ville,
d'une prison. Le propriétaire est responsable des 'consé-
quences pécuniaires des délits et contraventions do son
portier, <pour les actes auxquels il l'a préposé ou qui font
partie de ses fonctions ordinaires. Les locataires sont en
dxoit de faire condamner le portier (et par suite le pro-
priétaire) à des dommages-intérêts, s'il refuse d'ouvrir à
toute heure du Jour ou de la nuit, de recevoir les lettres
et paquets, etc. V, Poetibr, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire,
PORTIER-CONSIGNE. V. Consignb.
PORTIÈRE, panneau mobile fermant l'entrée d'une
voiture. C'est aussi une pièce d'étofl'e fermant une baie do
porte intérieure; ornement en usage de tout temps en
Orient, chez les anciens Romains, et aussi en France
pendant le xvni* siècle. Aujourd'hui on met souvent des
pottières en tapisserie, ou en étoffes plus ou moins ri-
ches, par -dessus les portes, comme supplément de
clôture, surtout pour l'hiver,
PORTION CONGRUE. V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d^ Histoire,
portion disponible. V. Quotité disponible.
PORTIQUE (du latin porticus)^ galerie couverte, sou-
tenue par des colonnes, des piliers ou des arcades. On
donne aussi le nom de Portique à toute disposition do
colonnes dégagées en forme de prostyle ou de péristyle.
Chez les Anciens, les Portiques furent fort en usage : il y
en avait autour des grands temples, des théâtres, des
stades, des gymnases, des marchés. A Athènes, V Acadé-
mie, le LycéS, le Cynosarge avaient des portiques; c'était
sous le Pœcile que se rassemblaient les disciples de Ze-
non, d'où leur est venu le nom de Stoïciens (du grec stoa,
portique). Dans l'ancienne Rome,' on remarqua les Por-
tiques de Livie, d'Octavie, de Philippe, de Pompée, les
Septa Julia de Lépide, les Septa Agrippiana d'Agrippa,
VHécatonstylon, etc. On voyait aussi des portiques au-
tour des cours intérieures des riches habitations. Les
cloîtres {V, ce mot) du moyen &ge étaient de véritables
portiques. Au nombre des constructions modernes on
peut citer les portiques de la place S^-Marc à Venise, la
vaste enceinte de la cour du Vatican à deux rangs de por-
tiques par Bramante, la cour des Loges du même palais
construite sur les dessins de Raphaël, le Bazar du com-
merce à S^-Pétersbourg, et enfin, à Paris, les galeries de
la place Royale, de la cour des Invalides, du Palais-Royal,
des rues Castiglione, de Rivoli, des Colonnes, etc. B.
PORTLAND (Vase de), ou vase Barber in, fameuse urne
cinéraire, trouvée dans un caveau souterrain à Rome,
pendant le pontificat d'Urbain Vm (de la famille Barbe-
rini), et une l'on croit avoir contenu les cendres de l'em-
pereur Alexandre Sévère et de sa mère Julia Mammsa.
Le sarcophage, en marbre pentélique, où était renfermé
ce précieux monument, se trouve au Musée du Capitole;
le vase, après avoir servi d'ornement à la bibliothèque
Barberini, fut acheté, au siècle dernier, par W. Hamilton;
il passa ensuite au duc de Portland, et il est aujourd'hui
au Musée britannique de Londres. C'est un vase de
30 centimètres de hauteur sur 16 de diamètre, en verre
bleu foncé, qui parait noir quand on ne le présenta pas
à la lumière, et offrant un relief de figures d'un fini
parfait, en verre blanc et opaque. Ces figures, exécutées
au touret, sont du travail le plus exquis, et sont, au
Jugement des antiquaires, d'une époque antérieure k
Alexandre le Grand. Winckelmann crut aue le sujet re-
présentait la fable de Thétls, qui prit ai verses formes
pour échapper aux poursuites de Pelée. Veltheim voulidt
y voir l'histoire d'Alceste, qu'Hercule ramena des Enfers k
Admète. Wedgwood pensa que c'était la représentation
POR
1468
POR
âllégoriqae de la mort d*un personnage, appui de sa fa-
mille, au moment où II passe de la vie à rimmortalité.
En iK45, le vase de lN>rtIand fut renversé de son piédestal
et brisé par un sot ou un fou, qui voulait par là sMm-
mortaliser h la manière d*Érostrate : on a remédié aux
suites de cet accident avec tant d'habileté, qu'on peut à
grand*peine s*en apercevoir. B.
PORTO RIO M. r. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et fVfflstoire,
PORTRAIT (du vieux français pour-traict)^ imitation
trait pour trait, image ressemblante d'une personne re-
produite par les arts du dessin. Un portrait sculpté s^ap-
pelle buste (K. ce mot)^ sMl est en ronde-bosse; médatl-
Ion, s'il est en bas -relief. On fait des portraits à la
plume, au crayon, au pastel, à Thuile, à Taquarelle, en
miniature, sur émail, sur porcelaine, en ^vure, en
lithographie, au daguerréotype, etc. Chez les Anciens, si
Ton excepte une femme, Lala de Cyzique, qui vivait au
dernier siècle avant Tère chrétienne, il n*y avait pas d'ar-
tistes adonnés exclusivement au portrait; cette partie de
Tart était exercée par les peintres d'histoire, et Apelles
fut celui qui y obtint la plus grande célébrité. Jusau'au
XVII* siècle, ce furent également les grands peintres ahis-
toire qui excellèrent dans le portrait, Raphaël, le Titien,
Holbein, Léonard de Vinci, Paul Véronèse, Van Dyck,
Rubens, Rembrandt, Velasquez, etc. A partir du siècle
de Louis XIV, il y eut des portraitistes proprement dits,
qui étudièrent avec un soin tout particulier l'expression
de la phjrsionomie, mais qui se perdirent aussi trop sou-
vent dans les accessoires; tels furent Rigaud, Mignard,
lATgillière et Latour en France, Gainsborough et Rey-
nolds on Angleterre. C'est à peine si, au temps de
Louis XV, on se soucia de la ressemblance : les hommes
aimaient à se faire peindre en Mars ou en Apollon, les
femmes en Diane, en Flore, en Vénus, avec de grands
yeux, de petites bouches, des Joues roses et rondes.
M"*" Vigée-Lebrun et David ramenèrent la pureté, l'exac-
titude et le bon goût dans cette partie de l'art. Depuis
cette heureuse révolution, certains peintres d'histoire ont
encore traité le portrait de main de maître : nous cite-
rons Gros, Gérard, Ingres, Scheffer, Paul Delaroche«
L. Cogniet, Horace Vcrnet, Court, Flandrin, etc. Les plus
célèbres portraitistes du xix* siècle sont M*"" de Blirbel ,
Pérignon, Dubufle, Winterhalter, etc. B.
ponTRAiT, terme de Littérature. V, CARAcrfeiiE.
PORT-ROYAL. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
PORTUGAISE (Langue), une des langues néolatines
(V. ce mot)^ celle peut-être qui a conservé pour le fond,
sinon pour l'apparence, le plus de ressemblance a^ ec la
mère commune. Elle sort presque int^ralement du latin,
au point que des érudits ont pu faire de l'Hugues pièces
de vers latins avec des mots exclusivement portugais :
mais c'est un latin très-gravement altéré par fa pronon-
ciation des antiques Lusitaniens. Cette altération consiste
principalement dans un système de contraction qui tient
sans doute à la dureté de l'idiome antérieurement em-
ployé; ainsi, les Portugais font mor pour mai^or, ma
pour mala, ceo pour cielo, te pour tiene, na pour en /a,
somente pour solamente, etc. Ils remplacent Vr par l, et
disent regra pour régla, branda pour blanda, branca
pour blanca^ etc. — Un second caractère spécial de la
langue portugaise est le son nasal contracté par lequel
est rendue avec une seule émission de voix-la finale ion,
dérivée de Vio latin. Ainsi, pour mmcion, ils disent
mençâp; pour resolwion, resoluçâo; pour Camoens,
Camoés^ etc. Cette contraction est indiquée dans l'ortho-
graphe (d'ailleurs conforme à la prononciation) par un
trait porté sur les deux dernières lettres, et qui s'appelle
tu, — Bien que conquis par les And)es avec le reste de la
péninsule, les Lusitaniens n'ont conservé aucune des
consonnes gutturales que l'arabe a imposées au castillan.
Le g guttural castillan se remplace en portugais par Ih
mouillé : ainsi , pour escoger (choisir), ils disent escolhêr.
Le II mouillé des Castillans est rendu dans certains cas
par Ih, dans d'autres par ch : au lieu de llegar (arriver),
ils disent chegar; au lieu de haliar ( trouver), ils disent
achar, etc. Cette absence de sons gutturaux rend le por-
tugsds plui doux à l'oreille que le castillan ; plus concis
d'ailleurs et moins efféminé oue l'italien , il tient , sous
le rapport de l'harmonie, le milieu entre les deux
idiomes. Il a gardé la concision énergique du latin , et
demeure une langue à la fois riche, noble et gracieuse,
qui possède la familiarité aimable du castillan, sans en
admettre les tons quelquefois trop libres. La richesse du
Vortii(aii eit tdk» qo'un auteur fécond, Ytes Lois de
Souza, n'use pas d'an seul mot emprunté à une langni
étran^re. — Les Portugais se vantent de posséder un
certain nombre de mots qui leur sont propres. Ils doi-
vent aussi aux conquérants germains qnelques Tocables
d'origine teutonique, comme hosque, jaraim, eanusa,
alvergar, esgrimir, etc. André de Resende {De Antiqut-
tatibus Lwitaniœ) a recueilli 500 mots d'origine grecque.
On calcule que le portugais renferme environ un tiers
de moins de mots arabes ({ue le castillan.
La grammaire portugaise, comme celle des autres
lanp;ues néolatines, possède les auxiliaires et l'articlo;
mais, par un phénomène qui lui est particulier, elle
supplée, dans certains cas, l'auxiliaire du passif par les
pronoms personnels me, ù, te, etc. : en latin appdlor,
appellaris, en portugais chamo me, chamas te; moveor,
movo mê; vestior, visto me^ etc. Le portugais a des su-
perlatifs : bonissimo, christianissimo. II a aussi de nom-
breux dérivés : on en compte 15 formés da seul mot
pedra, là où le latin n'en a nue 6. La conjugaison portu-
^ise a cela de particulier qu'elle applique la flexion à son
infinitif même, pour distinguer la personne grammati-
cale à laquelle appartient l'auteur de l'acte qu'exprime le
verbe. — Un autre remarquable phénomène, c'est que
le portugais offre plus d'analogie avec le roman actuel
du midi et l'ancien provençal qu'avec le castillan ; ainsi ,
les Portugais disent pai, mai, au lieu de padre, madré;
eu, pour yo. Ils emploient abrandar, (Arasar, ouvir,
hums, outros, qui sont du roman pur. Faut^-il expliquer
cette identité par le lien qu'établissait la mer entre la
Lusitanie, la ôalice et le S.-O. de la Gaule? Il est re-
connu que le galicien et le portugais ne différaient pas à
l'origine. Le second n*a dû sa politesse et ses développe-
nt imIs ultérieurs qu'à l'établissement d'une cour et à la
formation d'une nationalité.
L'âge de la plus grande pureté de la langne portugaise
B'étend de 1540 à Iti'iO, c-à-d. de l'épooue où fut recon-
stituée par Jean III l'Université de Colmnre jusqu'au mo-
ment où parut la l'* partie de V Histoire de S* Dominique
par Frey Luis de Souza. Plus tard, elle eut à souffrir de
deux événements funestes : la conquête espagnole, qui en-
traîna l'oppression de la pensée; puis, l'influence des idées
et de la uttérature françaises. i langue dégénéra d'un
côté par l'introduction du gongorisme, de l'autre par
l'imitation du français. L'effacement de la langue portu-
gaise suivit l'affaiblissement de la nationalité.
V, J. de Barres, Grammatica da lingua poriuguesa,
Lisbonne, 15 iO, ixk-A^ ; Nunez de Liao, Ortographia da lin-
gua portugueza, Lisbonne, 1576, in-4\ et Origem da
lingua portugueza, 1606, in-4° ; Pereira, Àrs grammatica
pro lingua liuitanà, lfî72, in-S**; De La Rue, GreÊmmaire
française et portugaise, Lisbonne, 1766, in-8°; Jean de
Souza, Vestigios da lingua arabica em portugueza. Lis*
bonne, 1789, in-4°; José de Figueira, Artê da gramma-
tica portiÂgueza, Lisbonne, 1700; Siret, Grammaire
française et portugaise, Paris, 1800, in-8<*; Ant. de Mo-
raes Silva, Epitome da granda lingua portugueza, Lis-
bonne, 1806, in-8° ; Lobado, Arte da grammatica da Im-
gua portugueza, Lisbonne, 1814, in-4<^; Hamonièrc,
Grammaire portugaise, Paris, 1820, in-12; Soares Bar-
boza, Grammatica phUosophÛM da lingua portugueza,
2* édit., Usbonne, 1830; Constancio, Grammatica ana-
lytica da lingua portugueza, Paris, 1831, in-i2; Fon-
seca. Éléments de la grammaire portugcûse, 1838, in-12;
Pereira, Thesauroda lingua portugueza, Lisbonne, 1G70,
in-fol.; le P. Bluteau, Vocabulario portuguez e latino,
1712-28, 10 vol. in-fol.; Marquez^ Nouveau dictionnaire
des langues portugaise et française, Lisbonne, 1756,
2 vol. in-fol.; José da Fonseca, Diccionario portugitez e
latino, Lisbonne, 1772, in-4°; Moraes Silva, Dictionnaire
portugais et latin, Lisbonne, 1789, 2 vol. in-4°; Da Costa
et Sa, Dictionnaire portugais, français et latin, Lisbonne,
1794, in-fol.; Santa-Rosa de Viterbeo, Elucidar'u> dos par
lavras^ termes e frases, que em PortugcU antiguamente
se usarào, Lisbonne, 1798-00, 2 vol. ; Da Cnnha, Dic-
tionnaire français-'portugais , Lisbonne, 1811, in-4";
Francisco de Santo-Luiz, Glosario das pcUavras e frases
da lingua francesa que se tem introduzida na locuçao
portugueza modema, Lisbonne, 1827; le même, Ensato
sobre alguns synonjfmos da lingua portugueza, 1828,
2 vol. ; Constancio, Dictionnaire des langues portugaise
et française, Paris, 1830, 2 vol. in-i6; Fonseca et Ro-
quette, Nouveau Dictionnaire français'portugais et por-
tugais-français^ 1841, 2 vol. in-8^ - E. B.
poaTDGAisE (Littérature). — Preiméiv période, — L*an*
tipathie des Portugais et des Espagnols semble accuser
entre eux une différence de race; néanmoins Isconfor-
POR
1469
POR
mit6 des conditionB, des influences sous lesquelles se sont
développés la langue et le génie des nations néo-latines,
n*a pas permis à la littérature portugaise d*aToir une
physionomie très-distincte de la littérature espagnole,
Italienne o« provençale, surtout k Torigine. Jusqu'à Tavé-
nement du roi Diniz (1279), et même encore à cette
époque, la langlie portugaise est confondue avec le gali-
cien, <jui lui-môme n*est pas fort distinct du provençal
littéraire. Les mômes causes qui arrêtèrent si longtemps
le développement du castillan agirent avec plus de forcé
encore dans Tàncienne Lusitanie, où probablement la
civilisation romaine agit moins qu*en Espagne. Dans les
troubles de Tinvasion arabe, le portugais se dégage pé-
niblement du latin décomposé, pour former, on prose
des chroniques, en vers des chants de troubadours, où
la Provence lui sert de modèle. Bernard de Yentadour,
Raîmbaud d'Orange, sont attirés dans ce pays avec le
môme empressement qu*à la cour de Castille ; les rois et
les grands seigneurs donnent l'exemple de Timitation
des chants limousins et provençaux. Les plus anciennes
de ces compositions sont celles d'Egaz Moniz Coelho,
gouverneur d'Alphonse Henriquez (1125), et celles de
Gonzalo Hermiguez. Les poésies du roi Diniz, que l'on
savait exister sous le titre de CantigcUt ont été recueillies
en 1847 par le vicomte de Carreira sous celui de CanciO"
neiro. Ce recueil contient aussi les poésies d'un fils illé-
gitime de Diniz, don Pedro, comte de Barceilos; elles
traitent en général de sujets moraux. Un autre don Pèdre,
l'amant d'Inez de Castro, voulut éterniser en vers son
amour malheureux : on lui attribue une ou deux pièces
qui roulent sur la mort d'Inez. — Ainsi, durant cette pé-
riode, les Portugais furont simplement imitateurs en
poésie. — La prose ne produisît que de simples chro-
niques; dans les études théologiques, scientifiques et mé-
dicales, cultivées, comme en Espagne, sous les auspices
des Arabes, on ne se servait que du latin. Les rois insti-
tuèrent de bonne heuro des chroniqueurs d'office. Fernâo
Lopes (1380-1449) fut l'un des premiers gardiens 4i pré-
cieux dépôt d'archives réunies à la Torre do Tombe.
Écrivain remarquable par l'exactitude, par les qualités
du style, il a laissé la Chronique de ce don Pedro sur-
nommé le Cruel pour les vengeances terribles qu'il tira
des meurtriers d'Inez, et celle du roi Ferdinand IX. Nous
avens de Gomez Eannès de Azurara^ qui hérita de l'em-
ploi de Lopes, une Chronique du rot fean /*', une Chro-
nique du comte don Pedro de Menesès, une Chronique
de la découverte et conquête de Guinée, Ruy de Pina fut
chargé, avec Duarte Galvam, d'une rédaction nouvelle
des chroniques nationales, parmi lesquelles il faut noter
celle du comte don Henrique; on a aussi de lui un Mé-
moire du plus haut intérêt sur l'arrivée de Christophe
Colomb à son pramier retour du Nouveau-Monde. Le
comte de Barceilos ne se borna pas à la culture de la
poésie : il devint un des créateurs de l'histoire en Por-
tugal, par un Nobiliaire, où les historiens ont trouvé les
origines les plus précises, comme les renseignements les
plus curieux. Enfin les rois eux-mômes cultivèrent la
prose avec succès. Tel fut don Duarte, qui écrivit sur la
morale et sur VArt du cavcUier : le premier de ces ou-
vrages, où le prince a déposé d'une manière touchante ses
pensées les plus intimes, montre une grande instruction
pour le temps, et le style en est souvent remarquable; il
est intitulé El lecU Conselheiro, et n'a été publié qu'en
1843, par M. Roquette. Alphonse Y non-seulement en-
couragea l'étude de l'histoire, mais écrivit lui-môme sur
la tactique et sur l'astronomie. Son Traité de la milice
fait connaître la manière de combattre des anciens Por-
tugiiis. C'est encore à lui qu'est dû le premier Corps de
Droit qu'ait possédé le royaume. Le roi Diniz fonda, en
1290, la célèbre Université de Coîmbre; il est permis de
croire qu'un Français, précepteur de ce prince, Aymeric
d'Ébraid, né à Cahors, n'y fut pas étranger. De cette Uni-
versité, réformée par Jean III, qui sut y attirer des
hommes comme Diego de Teive, les frères Gouvea, et Bu-
chanan, sortiront Ferreira, Sa de Miranda, Barros et
Camoens.
Deuxième pénode* — Le grand siècle de la littérature
portugaise commence avec le règne de don Manoel , et
s*étend Jusqu'à la conquête du pays par les Espagnols. La
poésie pastorale, alors cultivée avec éclat , nous offre de
gracieux modèles. Sous le beau ciel de la Lusitanie, les
bergers, plus nombreux que les laboureurs, ressem-
blaient aux bergers de la Sicile; leurs loisirs, leurs
richesses, les noms qu'ils portaient, leur donnaient quel-
que chose de plus poétique que dans le Nord. Les égloçies
portagalses présentent d'ailleurs une heureuse variété
I dans les scènes et dans les personnages^ les productions
du bord de la mer y sont décrites comme celles du rivaxe
des fleuves; le pêcheur conte ses périls au berger, et le
berger vante à son tour les moissons du laboureur. C'est
à l'éslogue que lé Tage doit sa renommée poétique. Un
gentilhomme de la chambre d'Emmanueî, Bernardin
Ribeiro, a donné cinq églogues, et il a placé ses bergers
sur les bords du Tage et du Mondego. Il se complaît à re-
tracer sans cesse le lent désespoir d'un amour malheu-
reux ; mais le poôte sait varier ses tableaux et charmer
par les grâces de sa poésie. Un habitant de Madère, Chris-
toval Falcam , remarquable par la naûveté touchante de
ses œuvres, dont la plupart ont péri, a, dans une longue
églogue, rappelé, sous un nom supposé, les malheurs
d'une captivité de cinq années, qu'il subit pour s'être
marié contre le gré de ses parents. Sa de Bliranda, An-
tonio Ferreira, Camoens, cultivèrent aussi avec bonheur
la poésie pastorale : Sa de Miranda y fait paraître une
admirable naïveté. — D'autres se distinguèrent encore
au xvi* siècle dans la poésie bucolique ou le roman pas-
toral ; on ne trouve pas chez eux la naïveté du siècle pré-
cédent, mais ils ont plus d'harmonie, plus d'élégance, et
plus d'idées. Diogo Bemardes a été surnommé le prince
de la poésie pastorale : son principal ouvrage est intitulé
O Lyma; ce sont 20 églogues où l'amour des concetti dé-
pare trop souvent ses vers; mais, par l'inimitable har-
monie du style, il s'est placé sur la même ligne que les
plus grands poètes de son pays. Diogo Bemardes, qu'on
a accusé de s'être approprié quelques-uns des sonnets de
Camoens, a laissé aussi des poésies religieuses. Les vers
d'Andrade Caminha se distinguent surtott par le charme
de la diction, l'harmonie et l'élégance, mais ils sont
froids; ses ouvrages demeurèrent inédits Jusqu'en 1791.
Andrade Caminha a donné un grand nombre d'épitaphes,
et c'est là peut-être qu'il déploie le plus de talent. Fer-
nand Alvares do Oriente a composé un ouvrage célèbre
sous le nom de Lusitania transformada, pastorale mêlée
de prose et de vers, où la beauté des tableaux s'unit au
charme de la versification. Rodriguez Lobo a été sur-
nommé le Tliéocrite portugais. Ses principales pastorales,
mêlées de prose et de vers, sont le Printemps, le Désa-
busement, et le Berger voyageur, La prose de Rodriguez
Lobo a souvent la recherche qui commençait à s'intro-
duire de son temps dans la littérature portugaise : on le
voit dans son petit ouvrage de morale intitulé : La Cour
au village ou les Nuits d*hiver. Manuel de Veiga ferme
la liste des poètes bucoliques : l'ouvrage , aujourd'hui
très- rare, qu'il donna au public, parut sous le titre de
Laura de Enfrydo; on lui reproche son peu de correction.
L'impulsion donnée aux lettres par Jean III parut
dans les genres élevés de la poésie. Sa de Miranda et
Antonio Ferreira sont moins célèbres encore comme
poètes lyriques que comme législateurs du Parnasse por-
tugais; par une étude approfondie des Anciens, ils par-
vinrent à épurer le langage et à le rendre harmonieux ;
cela explique l'espèce de culte que les littérateurs por-
tugais ont voué à ces deux auteurs, qui ne brillent
peut-être pas autant que leurs successeurs. Sa de Mi-
randa a donné des sonnets, des épltres, des hymnes à
la Vierge, des Cançaôes, Il déplora par une touchante
élégie la mort de son fils. On lui doit une infinité de
combinaisons métriques, de nouvel los lois pour la cé-
sure : c'est lui qui fit de l'hendécasyllabe, jusqu'alors à
peu près inconnu, l'instrument principal de la poésie
portugaise. — Ferreira, surnommé l'Horace du Portu«
gai , en est plutôt le Malherbe ; car, si dans ses odes on
retrouve trop les pensées d'Horace, on remarque sans
cesse de nouvelles formes introduites dans le langage, à
l'exclusion de ces locutions orientales qui avaient de
bonne heure envahi le portugais et l'espagnol. Les Poemas
lusUanos de Ferreira, publiés en 1598, sont bien des poé-
sies nationales, écrites exclusivement pour le pays au-
3uel elles s'adressent; on y trouve des épltres, des odes,
es sonnets, des élégies, où l'imagination n'est pas toujours
la qualité la plus saillante ; on en fait cependant grande
estime chez un peuple que cette imagination a quelque-
fois égaré, et qui la voit soumise alors par un homme d'un
vrai talent, chez lequel la sagesse n'était point de l'im-
puissance. Dans les ÔEuvres diverses de Camoens se trou*
vent un grand nombre de poésies lyriques, odes, cao*
çàôes, sextines, élégies, sonnets ; à part les concetti , qu!
se montrent trop souvent quand le cœur cesse de parler
(défauts dus au siècle), on y retrouve le poète tout entier,
l'homme aux nobles impressions, aux fortes pensées.
Dans la poésie épique, Camoens s'éleva au «dessus
des autres poètes du Portugal , par son poème des £«-
POR
1470
POR
stades (V. 09 mot). Il fut un de ces hommes de génie qui
fixent une langue par le charme de leur style, et qui ont
le privilège d'animer tout un peuple par une grande pen-
sée. Si Ton considère la poésie du côté de son heureuse
influence sur le moral des nations, aucun poète ne doit
être loué à Tégal de Camoens ; car son œuvre respire
cet ardent amour de la patrie qui élève les cœurs et
leur donne un noble enthousiasme. — Un autre poète,
Cortereal , entreprit de célébrer en vers épiques la gloire
du Portugied. Son premier ouvrage, le Siège de Diu, n*eut
pas grand succès, bien quMl contienne des beautés ; on y
retrouve toujours le guerrier observateur, le grand peintre
de la nature. Il fut plus heureusement inspiré dans le
Naufrage de Sepulveda, histoire de deux époux, qui,
après s*ètre unis dans les Indes, voulurent retourner en
Europe, firent naufrage sur les côtes d'Afrique, et errèrent
longtemps parmi des hordes barbares, avant que la mort
vint terminer leur existence. Cet ouvrage, traduit en fran-
çais par 0. Fournier (Paris, 1844), nous choque par un
mélange incohérent de la m^hologie avec les pensées du
christianisme ; mais il contient bien des détails heureux
et des développements pathétiques. Cortereal a donné en-
core, mais en espagnol, une Austriadaf en Thonneur de
don Juan d'Autnche. — Les poètes épiques du Portugal
sont éminemment nationaux; quand la patrie est asservie,
lis cherchent à faire revivre son antique gloire. Mouzinho
Quebedo de Castello-Branco a choisi pour sujet de ses
chants Alphonse l'Africain, conquérant d'Arzila et de
Tanger. Parmi bien des récits de batailles et des descrip-
tions de paysages qui remplissent ce poème en 12 chants,
nous signalerons la manière touchante dont le poète rap-
pelle rhéroïsme de Tinfant don Femand, qui, tombé au
pouvoir des Mores dans une campagne malheureuse, ne
voulut point Qu'on le rachetât par une énorme rançon ,
et préféra subir une longue captivité; la catastrophe
d'Alcazar-Kébir a inspiré aussi à Quebedo un morceau
digne des plus grands maîtres. Le poème a les défauts
communs à tous les épiques portugais : incohérence,
absence d'unité, merveilleux pauvre et bizarre ; mais le
style est plein de grandeur et d'énergie. — Dans une
ulyssea, Gabriel Pereira de Castro a chanté la fondation
de Lisbonne, qu'une tradition fabuleuse fait remonter au
siège de Troie, en l'attribuant k Ulysse. Un autre monu-
ment élevé à la gloire nationale, c'est la Conquête de
Malacca, par Francisco de Sa e Menezès. Le héros du
poème est Albuquerque, conquérant des Indes et d'une
partie de la Perse. Il a appris la trahison ourdie contre
les Portugais par les Andjes de Malacca; le complot a
reçu un commencement d'exécution : Albuquerque part
de Goa pour punir les Arabes de l'injure q[u*ils ont faite
à la nation portugaise. Une imagination brillante, singu-
lièrement excitée par les succès, les découvertes, l'esprit
d'aventure de l'époque, la lecture des fictions chevale-
resques du temps, et l'imitation de l'Italie, ont permis à
Sa e Menezès de tirer tout un poème épique d'une simple
expédition militaire. L'auteur a eu le goût de mettre le
merveilleux chrétien à la place du merveilleux mytholo-
gigue. Le style manque un peu de correction ; les des-
criptions de batailles sont trop multipliées; mais il y
a une heureuse opposition des mœurs portugaises et des
mœurs orientales, beaucoup de couleur locale et de vé-
rité dans les tableaux. — Braz Mascarenhas est auteur
d'un poème épique dont Viriate est le héros. Cet ou-
vrage, assez défectueux, fait connaître parfois d'une ma-
nière intéressant n cet épisode des guerres romaines dans
la Péninsule. — Luiz Pereira Brandam a célébré la bataille
d'Alcazar-Kébir dans un poème héroïque en 18 chants,
intitulé : Elegiada; il avait assisté comme combattant k
cette grande catastrophe.
La littérature du Portugal , surtout à ses débuts , pré-
sente tant d'analogie avec celle de l'Espagne, qu'il est
permis d'attribuer une origine commune à l'art drama-
tique dans les deux pays. Les premiers divertissements
publics sont des jeux guerriers ou chevaleresques : ces
jeux sont le behourdis, des exercices équestres, un peu
plus tSLrd les tournois, les danses, et en particulier celles
que le» Portugais nommaient judarias, mourarias, em-
pruntées aux populations moresques et juives. L'art dra-
matique est né moins de ces jeux que des débris du
paganisme, de ses pompes, de ses fêtes, conservés par
les habitudes populaires au milieu des sociétés chré-
tiennes. Le clergé, voyant l'inutilité des efforts qu'il
dirigea contre ces souvenirs païens, imagina de les sanc-
tifier en les appliquant aux fêtes du christianisme : les
représentations scéniques firent partie des cérémoniet
rairiieases, et soaveot elles eurmit li«u diu» le§ églises,
après la célébration du culte divin. D'abord toat se borna
à des dialogues rusticjues, où des bergers s'entretenaient
des fêtes qu'on devait célébrer, ordinairement de celle
de Noèl. Plus tard, on appliqua ces dialogues k Ues sujets
tirés de la vie commune ; en sorte que, dès le commen-
cement , le thé&tre se divisa en drame religieux et drame
profane. Mais ces deux branches ne furent pas cultivées
tout à fait parallèlement comme en Espagne; le théâtre
profane finit par prendre le dessus. Les Portugais regar-
dent iGil Vicente comme le père de leur théâtre; mais
il fut un disciple de l'Espagnol Jean de la Encina , lui-
même élève de l'Italie. Il cultiva à la fois le genre reli-
gieux et le genre profane ; il fit des autos, des drames et
des comédies. Dans un de ses autos, intitulé a Feyra (la
Foire), on retrouve l'idée du Voyage du pèlerin de Bu-
nyan. Sa de Miranda, enthousiasmé des Anciens, leur sa-
crifia son originalité. Il n'a laissé que deux comédies , les
Etrangers {os Estrangeiros)^ et os Vilhalpandos ; celle-ci
offre de fréquentes intentions comiques, et le style en est
encore admiré des Portugais. Antonio Ferreira donna en
Europe la première comédie de caractère dans le Jaloitœ
(Cioso)y imitation assez naïve des Anciens : il n'y a pas
de plan régulier, mais le style en est varié, souvent co-
mique, et empreint d'une forte couleur locale. Ferreira
avait déjà composé, à riniitation des Italiens, une comé-
die intitulée le Dristo, bien inférieure au Jaloux pour la
marche. S'il est au-dessous de Sa de Miranda dans le style
comique, il le surpassa dans la tragédie à!Inès de Castro,
od Ton retrouve quelque chose de la gravité et de l'élé-
vation morales , de l'élégance passionnée, de l'expression
langage d'AIfieri. Vlnès est la seconde tragédie, .wp.
qui ait paru en Europe; la première, la Sophontsbe du
Trissin, ne lui est antérieure que de bien peu d'années.
Il faut lire la scène pathétique où la malheureuse Inès
comparait devant Alphonse, et observer comment un au-
teur du milieu du xvi" siècle a traité cette situation qui
fit , chez nous , la fortune de la tragédie de La Motbe.
hiès de Castro a été traduite en français par Nicolas de
Grouchy, et, en 1835, par M.. Ferd. Denis, dans la collec-
tion des tlié&tres étrangers. — Camoens écrivit trois pièces
de thé&tre, qui n'ont pas ajouté beaucoup à sa gloire : ce
sont les Amphitryons, Séleucus, et Filodème. Vers le
même temps, Jorge Ferreira composa YUfrosina, VUly^
sippo, VAtuografiai trois comédies d'une longueur inter-
minable, mais qui purent concourir aux progrès du lan-
gage dans le style comique. — Malgré les efforts de ces
différents auteurs, les autos et les farças, où le sacré
s'alliait au profane, l'extravagance à une naïveté quelque-
fois heureuse, continuèrent à avoir le plus grand succès
pendant tout le xvi« siècle. Les comédies-féeries ( corne-
dias magicas) eurent aussi alors une vogue extrême; elles
enchantèrent par la multitude de tableaux qu'elles of-
fraient aux regards, mais on y observait encore moins
de vraisemblance que dans les autos, Simon Blachado fut
le chef de cette nouvelle école, qui eut de l'influence jus-
que dans le xviii* siècle, et qm fit repousser l'excellent
comique des auteurs français , que les gens instruits pro-
posaient pour modèle.
Les historiens portugais racontent avec un véritable
talent les exploits, les conquêtes, les découvertes de leurs
compatriotes ; on est surpris de leur verve, de leur tact
à saisir les usages, et de l'instruction qu'ils déploient à
une époque où il y en avait si peu. Hieronymo Osorio,
évêque de Sylves, a écrit en latin une Vie d'Emmanuel,
très-remarquable par la haute raison , l'indépendance, la
tolérance et les lumières qu'elle suppose chez son auteur,
qui n'hésite pas à condamner la persécution que ce roi
dirigea contre les Juifs. Quand Don Sébastien préparait
la malheureuse expédition qui amena la ruine de la pa-
trie, il lui adressa les plus vives remontrances , tout en
gardant ses paroles les plus sévères pour le confesseur
du roi , Luiz Gonzalvès, fatal conseiller de cette déplora-
ble entreprise. Ces Discours, publiés avec quelques autres
pièces sous le titre de Lettres , resteront comme des mo-
dèles d'une noble éloquence et les preuves du plus beau
caractère. — Jean de Barres , qui devait mériter le sur-
nom de Tite-Live portugais, commença sa carrière litté-
raire par un roman de chevalerie, l'Empereur Clarimond,
plus remarquable par le style que par l'imagination.
Toutefois, on pouvait prévoir que Vautour étal* destiné à
écrire l'histoire d'une manière brillante plutôt que sage,
chevaleresque plutôt que philosophique, mais en même
temps singulièrement utile, parce qu'elle se ferait lirt
ftvec ardeur et développerait l'esprit oatiooâL Barros vou«
POR
im
POR
lait racontar les découvertes et les conquMes des Portu-
gais ; mais 11 dut se borner à rhistoire de la conquête
des Indes, et sa vie ne suffit même point à cet ouvrage,
qui est demeuré inachevé. L'Histoire de Barros n*est pas
Tœuvre d'un simple chroniqueur : une certaine critique
a présidé an choix des documents. Ce fut lui qui , le pre-
mier, A% b)^ connaître Tlnde aux Européens. Comme
écrivain , il Justifie Tenthousiasme que les Portugais ont
pour lui : il réunit l'élégance à Ténergie, et, pour la pureté,
il fait toujours autorité. — Diogo de Couto continua l'œu-
vre de Barros, et sut néanmoins garder son originalité.
On a de lui aussi des Obsârvations sur les causes de la
décadence des Portugais en Asie. — Un fils naturel du
conquérant des Indes, Alphonse Braz de Albuquer(|ue,
publia les Commentaires d Alphonse d'Albuquerque, livre
très-rare, où il a mis en œuvre les Lettres de ce capitaine
au roi Don Manoel. — Damian de Goes, ambassadeur
de Jean III en Flandre et en Pologne, visita la Suède,
le Danemark, la France, et a laissé sur ces pays de nom-
breux ouvrages en latin. Nommé intendant de la Torre
do Tombe et historioeraphe du royaume, il écrivit la
Chronique du roi Don Manœl , et la Chronique du prince
Don Juan ( depuis Jean 11 ). Son style est remarquable par
une certaine hardiesse philosophique, dont il avait sans
doute puisé les principes dans ses relations avec les
hommes éminents du Nord, Érasme, OlaQs Wormius,etc.
C'est lui qui donna k Nicot les premiers plants de tabac,
oui , envoyés à Catherine de Hédicis, fructifièrent si bien
dans Paris et dans toute la France. — Fernknd Lopes de
Castanheda, garde des archives de l'Université de Coim-
bre, est auteur d'une Histoire de la découverte et de la
conquête des Indes par les Portugais, et Diogo Bemardo
Cruz , d'une Chronique du roi Don Sébastien,
L'archéologie étant une branche de l'histoire, nous
placerons ici André de Resende, le plus grand antiquaire
du xvi« siècle; il s'appliqua à l'étude des monuments
romains et de ceux des anciens peuples do la Lusitanie.
Ses ouvrages sont intitulés : De antiquitatWus Lusitaniœ,
et Delicim Lusitanorum.
Ijbs voyageurs fournissent une autre espèce de maté-
riaux à rhistoire : ils étendent ou rectifient les limites de
la science géographique. Aucune nation n'en posséda plus
que les Portugais. On ne connaît cependant qu'un petit
«nombre de relations remarquables, mais beaucoup de
manuscrits sont enfouis dans les archives. Nous nomme-
rons Vas de Caminha, compagnon de Cabrai , auteur d'une
Lettre au roi de Portugal sur la découverte du Bré-
sil ; Magellan , et surtout Mendez Pinto, qui parcourut
rÉthiopie, l'Arabie heureuse, la Chine, la Tartane, et la
plus grande partie de l'Archipel oriental. La relation de
ses voyages ne parut qu'en 1614 ; sous le rapport du style,
il est mis au nombre des classiques, et son expression a
une originalité que l'étude ne saurait donner.
Le Portugal, dans cette période de gloire, eut ausei
des moralistes : Frey Hector Pinto écrivit des Dialogues,
célèbres encore par le charme du style et les principes
enjoués d'une morale pure. Il est classique, et fait auto-
rité parmi les meilleurs auteurs portugais. — Amador
Arraiz, évoque de Portalègre, donna aussi des Dialogues
remplis des meilleures idées, et remarquables par l'élé-
gance des expressions.
L'exubérance d'imagination que l'on remarque dans les
relations de voyages , et Jusque dans les ouvi'ages histo-
riques des Portugais, doit faire penser qu'ils étaient
éminemment propres au genre romanesque : en effet,
Ïiandant quelque temps, plusieurs des romans de cheva-
erie les plus célèbres ont été attribués à des écrivains
de cette nation. De ce nombre est VAmadis de Gaule ,
dont les historiens de la littératui-e font honneur à Vasco
de Lobeira ( V. Auadis ). — Francisco Moraès a p<ssé
aussi pdur l'auteur original du Palmerin d^ Angleterre,
dout la l*^* édition, selon les Portugais, serait antérieure
à 1547; mais ils n'ont pu la produire. Moraès lui-même
ne donna son ouvrage que comme une traduction du
français de Jacques Vincent du Crest. Il ebt démontré
que ce célèbre roman appartient à l'Espagnol Luis Uur-
tado, du moins pour la l'* et la 2* partie, et qu'il faut
laisser aux Portugais les quatre dernières ( V. Opusctdo
acerca do Palmerin Je Ingleterra e do su autor, par
Manuel Odorico Mendès, Lisb., i860,in-8<*). — Palmerin
d'Olive, ce roman ci estimé de Cervantes, est également
regardé comme d'origine portugaise; cependant on ne
connaît que la Yorsion espagnole. M. Ferdinand Wolf
l'attribue à une dame de Burgos, oui en aurait écrit
la première oontiQuation, le Primaléon. — Bernardin
Rjbolro, entre ses églogucs, laissa un roman iutltuié
Menina e Moça, production fort remarquable pour le
style, et justement célèbre. — Femand Lopes de Cae-
tanheda écrivit aussi une sorte de roman de chevalerie,
désigné sous le titre vague de lÀvro de cavcdlena : une
des aventures qui y sont rapportées a été transcrite dans
la 3* partie du Palmerin ^Angleterre.
Troisième période, ^Vtxpéditioa de Don Sébastien en
Afrique et le désastre d'Alcazar-Kébir anéantirent les res-
sources du Portugal , et préparèrent son asservissement à
l'Espagne (1580-1640). La décadence des lettres ne fut pas
aussi prompte que celle des armes; mais telle fut l'in-
fluence des circonstances, que les éoivains préférèrent
souvent adopter le langage des vainqueura, et qu'on ne
sait maintenant dans quelle littérature les classer.
Un homme dont la pensée était plus vaste que le génie
n'était lumineux, Bernardo Brito, entreprit d'écrire l'Iiis-
toire du Portugal depuis l'origine du monde Jusqu'à
l'époque où il vivait : mais il mourut avant d'avoir pu
traiter les temps modernes. Son ouvrage nous a conservé
des documents précieux ; cependant il manque de critique,
principalement en ce qui concerne les débuts de la mo-
narchie. Sa Monarchia Lusitana parut de 1597 k 1690.
On a du même historien un autre ouvrage, plus consulté
que le précédent, bien que moins important : Éloges des
rots de Porti^fol (Lisbonne, 1603, in-4°). Les travaux
de Bernardo Brito lui ont valu une réputation beaucoup
trop grande au xvu* siècle, et on l'a peut-être trop ra-
baissé depuis j il compte parmi l^s classiques, et a laissé
quelques poésies. — Fray Duarte Nunez de Laio est au-
teur de plusieun ouvrages, parmi lesquels on distingue
sa Description du royaume de Portugal , et la l'* partie
des Chroniques de ses rois : son style est pur, simple, et
quelquefois très-noble. Il a puisé à de bonnes sources, et
mérite beaucoup de confiance. Freyre d'Andrade n'écrivit
qu'une Biographie^ celle de Jean de Castro; c'était, pour
un patriote, une belle histoire à retracer que celle de ce
vice-roi des Indes. — Fray Luis de Souza est au nombre
des classiques à cause de l'élégance et de la pureté de son
style. Il écrivit la Vie de S^ Dominique et celle de Frey
Bartholomeu dos Martyres, archevêque de Braga. — Faria
de Souza a laissé une immense ouantité d'ouvrages; mais
il écrivit surtout en castillan. Ses «ouvres historiques ,
imprimées longtemps après sa mort, sont : Europa por*
tugueza, Lisb., 1667 ; Asiaportugueza, 1666, 1674, 1675;
Afnca portugueza, 1681. V America portugueza fut,
dit-on, achevée par l'historien, mais ne put pas être im-
primée. On a de lui encore un vaste commentaire sur les
poésies de Camoens, 500 ou 600 sonnets, et une multi-
tude û*églogues. Pour avoir écrit ordinairement en espa-
gnol , il manque parfois de Justesse quand il ose de sa
propre langue. — Jean de Lucena a été l'auteur élégant
d'une Vie de S* François-Xavier. — Antonio Boccaro donna
une suite aux ouvrages de Diogo de Couto sous le titro
de Décades^ et conduisit l'histoire de l'Asie jusqu'à l'an-
née 1617 : il est classé parmi les bons écrivains. Enfin,
Brito trouva un habile continuateur dans Antonio Bran-
dam. — Lu Bibliothèque impériale de Paris possède un
grand nombre de manuscrits portugais roulant sur l'his-
toire, et dont la liste a été donnée dans les Annales des
sciences, par le vicomte de Santarem.
On vit paraître à cette époque un homme d'un génie
bizarre, connu par sa prodigieuse fécondité, et qui a sou-
vent montré un véritable talent, le P. Maceao. Après
une vie fort agitée, il s'établit à Venise, disputa avec les
savants de omni re scibili, et proclama pendant huit
jours ses fameuses conclusions connues sous le nom de
Rugissements littéraires du lion de S^-âfarc. Elles rou-
laient sur une multitude de matières, et surprirent les
hommes les plus accoutumés à ces sortes de discussions,
où l'on mêlait le sacré au profane et les sciences à la
goésie. II doit y avoir des erreurs dans la liste €[ue Bar-
osa donne des ouvrages du P. Macedo ; on y voit figurer
48 poëmes épiques, 110 odes, et 2,600 poèmes héroïques.
Ce prodigieux polygraphe rendit peu de services à la lit-
térature de son pays, car il a presque toujours écrit en
latin , en espagnol ou en italien.
La littérature portugaise avait déjà beaucoup produit;
la critique se forma, mais sans aucun goût. MÛioel Faria
Severim Jouit dans ce genre d'une grande célébrité au
xvu* siècle; on peut le regarder comme supérieur à son
temps, bien qu'il en eût les défauts, c-à-d. une érudition
pédantesque qui , au lieu de s'attachei aux faits Traiment
importants, ne roule que sur des mots. — Parmi les <f cri-
vains illustres de ce temps, il faut nommer encore Fran-
cisco Bfanoel de Mello, auteur de VBistoire des troubles
êtdêkk séparation de la Catalogne» dont il fut témoio eo
POR
1472
POR
bien det ooeailont, et qu*n écrivit en espagnol. Il a Udssé
d*autre8 ouvrages, la plupart inédits, parmi lesquels on
cite des poëmes, un grand nombre de tragi-comédies, de
comédies 4e farces, d*au/05, écrits presque tous en por-
tugais, la Scienria cabcUa, la Carta de qtfia de Casados,
excellent livre de morale enjouée. Il était ami de Que-
vedo, qu'il semble avoir pris pour modèle dans ses Apo*
loguês et Dialogues, Au point de vue historique, on
recherche encore de lui la relation de la campagne faite en
1649 dans le Brésil. — Le prosateur le plus extraordinaire
du xvii* siècle, dont il fut le plus grand prédicateur, est
sans contredit le Jésuite Antonio Vieira, auteur de six ca-
téchismes en diverses langues pour les catéchumènes du
Nouveau-Monde. On peut le comparer à Bossuet : il en
a souvent la hardiesse et Ténergie. Raynal a traduit en
français un des plus remanjuables monuments de sa m&le
éloquence. — Le dominicain Fra Antonio Veto fut aussi
un grand prédicateur; une partie de ses œuvres ont été
traduites en français par Hezecques, sous le titre de :
Doctes et rares sermons pour tous les jours de Carême.
Les écrivains en prose de ce temps, vivant k l'abri du
cloître, se dérobèrent assez bien à Tinfluenoe désastreuse
qu'exerçait sur les lettres l'état politique du Portugal. Il
n'en fut pas de même des poètes : la poésie vit d'inspira-
tion ; or, quelle était la poésie possible, là où tous les
sentiments vraiment nobles étaient comprimés? Le des-
potisme religieux et politique eut en Portugal les mêmes
résultats funestes qu'en Espagne. Un peuple peut être
réduit k perdre l'enthousiasme; mais, comme il ne sau-
rait perdre son imagination , ne pouvant l'appliauer à des
conceptions généreuses, il la répand sur des choses in-
différentes ou futiles. On vit donc en Portugal toutes les
erreurs d'imagination , toutes les extravagances de lan-
gage dont l'Espagnol Gongora avait donné l'exemple, et
3ue Balthazar Gracian réduisit en système. Le seul titre
es ouvrages annonçait la décadence du goAt; c'étaient :
le Phénix ressusdti^ les Échos rendus par la trompette
de la Renommée, postillon d^Apollon, etc. Une femme.
Violante de Geo, et Francisco Vasconcellos se distinguèrent
dans ce genre d'extravagances. On vit paraître cependant
un genre nouveau de poésie, qui tient de l'élégie, et est
appelé saudades, Antonio Barbosa Bacellar le mit en
vogue le premier: il l'a traité heureusement, malgré la
recherche et la prétention qui étaient à la mode. Comme
historien, les services qu'il a rendus sont plus réels; il
publia le Journal du siège et de la prise de Recife, par
Francisco Barreto (Lisbonne, 1654). — Le seul ouvrage de
ce temps où il y ait quelque émanation du cœur, quelque
poésie, ce sont les Lettres portugaises, qu'une religieuse
de l'AlentéJo , jtfarianne d'Alcofarrada , adressa k un
officier français, et que l'on peut comparer à celles
d'HéloIse.
Quatrième période, — La révolution produite en Es-
pagne par l'avènement de la maison de Bourbon fut
opérée en Portugal par la re«tauration de la maison de
Bragance. Rendu à l'indépendance, ce pays sembla vou-
loir renaître par l'esprit. Une Académie d^ histoire fut
créée sous Jean V, mais ses travaux restèrent à peu près
sans utilité. Par une analogie de plus avec l'Espagne, le
Portugal apcepta l'ascendant littéraire de la France. Le
comte d'Ericevra était l'ami de Boileau ; son esprit élé-
gant comprit les avantages de la pureté du langage, mais
il n'alla pas plus loin. Il donna VHenriqudiaa, poème
épique, dont Henii de Bourgogne est le héros, et l'expul-
sion 4^ Maures l<> sujet ; il manqua d'invention et d'ori-
ginalité, bien qu'il s'agit d'une gloire nationale. Son
talent le rendait plus propre à écrire l'histoire, et son
ouvrage De la restauration du Portugal est encore fort
estimé.
Pendant que le Portugal s'essayait à renaître à la vie
littéraire, un nouveau désastre vint encore arrêter pour
quelque temps le progrès des esprits : dans l'effrojn&ble
tremblement de terre de 1755, un grand nombre de
oibliothèques furent brûlées, une foule d'ouvrages pré-
cieux périrent. On eut encore recours, pour relever la
littérature, au remède d'une Académie, celle des Arcades^
en 1756. Un homme remarquable par la force de sa pen-
sée. Luis Antonio Viruez, eut peut-être plus d'influence ;
mais en rappelant l'attention vers les auteurs contempo-
rains de Camoens, l'Académie des Arcades exerça une
certaine action sur l'esprit de la nation. On vit paraître
des poètes lyriques de sens rassis, des imitateurs d'Ho-
race et de Pétrarque; ce sont: Gar^, Diniz da Gruz,
Domingo dob Reis. II règne une plaisanterie assez heu-
reuse dans le Goupillon de Diniz da Cruz , qui , prenant
pour guide le Lutrin de Boileau et la Boucle de cheveux
enlevée de Pope, a sa tirer beaucoup de sa propre I
nation. — Il n'y avait plus de poésie : mais Jamais on ne
fut plus capable de dire en quoi elle consistait. Francisco
Diaz Gomé est considéré par quelques écrivains com me
le seul critique digne de ce nom qu'ait eu le Portugal. Ses
poésies sont accompagnées de notes et de courtes disser-
tations, petits chef»-d*œuvre de philolojgie. Il existe en-
core de lui une dissertation étendue qui est un vrai mo-
dèle de critique littéraire.
La restauration des lettres fut pins heureuse dans le
genre dramatique. Il y avait eu à peine un thé&tre à Lis-
onne sous la domination étrangère : on donnait de
temps k autre des drames espagnols, auxquels on préféra
bient6t des pièces du théâtre français. Enfin parut un au-
teur original , Antonio José, talent irrégulier, mais point
ennuyeux. Il ne tirait que de lui-même sa gaieté, sou-
vent triviale, et sa vivacité fait absoudre ses extrava-
rinces. Ses pièces étaient des espèces d'opéras-comiques
grand spectacle. — Les imitateurs d'Antonio José, paj'mî
lesquels on distingue S. Sylveiro, eurent ses défauts
plutôt que ses qualités. Garçao et Diniz da Cnu es-
sayèrent en vain de combattre le goût exclusif que sem-
blait montrer la nation pour le genre de spectacle dont
A. José offrait le modèle ; mais leurs pièces n'étaient que
médiocres. On goûtait aussi les comédies de Molière :
Manoel de Souza donna en 1769, avec quelques modifica-
tions, la traduction de Tartufe et celle du Bourgeoit
gentilhomme; U Malade imaginMre fut imprimé en
1741.
La décadence des littératures est l'ère des faiseurs de
classifications, des compilateurs biographes et lexico-
graphes. Un ouvrage des plus estimables en ce genre est
la Bibliotheca lusitana par Diego Barbosa : l'auteur est
exact; il a en à sa disposition des documents nombreux,
mais il n'est purement que bibliographe. Un autre ou-
vrage devenu fort rare, et qui a beaucoup servi à Bar-
bosa, c'est le Theatrwn Lusitania litterarum, etc., œuvre
de critique, où l'on trouve, en général , des Jugements
exacts et concis. Citons encore VAgiologio lusitano de
Jorge Cardoso, ouvrage plein de renseignements intéres-
sants. — Les conquêtes des Portugais dans les Indes et
en Afrique développèrent chez eux le besoin de connaître
les langues orientales, et k cet é^rd peu de nations ont
rendu plus de services, notamment en ce qui concerne \e ,
chinois et le Japonais. Les orientalistes trouveront de?
indications précieuses dans la Bibliotheca de Barbosa. It
en est de même pour les divers idiomes africains, ceux
d^ lies Canaries et du Brésil. On estime les travaux de
Joîo de Souza sur l'arabe.
Les ouvrages en prose indiquent seuls le moovemen*
des esprits dans une nation. Pour mesurer dans quel éw
le régime espagnol avait mis le Portugal , il suffit de dire
que le xvni* siècle ne produisit pas un seul livre remar-
2uable en prose. A défaut d'ouvrages originaux, l'Aca-
émie des Sciences, fondée sous Joseph V, fit rassembler
dans les couvents un grand nombre de chronicjues et de
documents, dont quelques-uns ont été publiés. Cette
compagnie fit écrire aussi les Éloges des grands hommes
de la nation, et l'on admire les parallèles ingénieux que
Mcllo de Castro fit du roi Alphonse avec Yasco de Garoa,
et du roi Sanche I"*" avec Edouard Pacheco. L'Académie
entreprit aussi un grand Dictionnaire de la langue, dont
il parut un volume en 1793, et qui n'a pas été continué.
Cette Académie a publié une collection de Mémoires
dignes d'estime.
Le XIX* siècle a produit en Portugal des poètes, dont
les plus connus sont Francisco Manoel do Nascimento,
le docteur Da Cunha, Maximiano Torrès Azevedo, Souza
da Camara, élégant et fidèle traducteur des meilleures
tragédies de Voltaire ; tous poètes estimables, sans avoir
rien de bien original. Il faut tjouter à ces noms Manoel
Barbosa Du Bocage, plutôt improvisateur que poète, che£
d'une école dite elmanisme, du nom d'Elmano qu'il prit
4ans ses œuvres. La langue portugaise était pour Du Bo-
cage l'objet d'un véritable culte : persuadé (qu'elle convient
à tous les genres de poésie, il ne voulut nen emprunter
k l'Antiquité , et se renferma dans la connaissance des
chers-d'œuvre nationaux. Il a laissé des poésies très-po-
pulaires, et trois tragédies à peine ébauchées, Viriatus,
Alphonse Henriquei , et Vtuco de Gama.
Les Portugais considèrent VOrient d'AgostInho de Hia*
cedo comme la première épopée moderne, Jugement fort
contestable; le sujet est le même que celui des Lusiades.
Il y a encore d'autres épopées, comme la BragancMa de
M. Roque Carvalho Moreira. Almeida Garrett a composé
an poème à la gloire de Camoens, et un roman poétique
POR
1473
POR
intitulé Adozinda. Mouzinho de Albuqnerque s^est fait
an nom par ses Géorgiqties portugaises, et J.-^. de Ma-
galhaens par ses Soupirs^ poétiqties, — Dans le genre dra-
matique, nous ne pouvons signaler que la Nova Castro,
tragédie de J.-B. Gomez, considérée maintenant comme le
chef-d'œuvre du théâtre portugais, et le Triomphe de la
nature, drame de M. Pedro Nolaseo. Avant que Gomez
eut donné son Inès de Castro, on regardait Osmia comme
la première tragédie moderne : cette pièce , conçue
d'après l'école française, est de la comtesse de Vimieiro.
Enfin, par des tentatives plus nombreuses que distin-
guées, M. Pimenta de Agusà a essayé d'être national
dans deux ouvrages : la Conquête du Pérou, et Viriatus,
qui ont été traduits en français par H. Ferdinand Denis,
dans la Collection des théâtres étrangers.
Si Ton veut avoir une idée exacte de la situation où se
trouvent maintenant et les sciences et la littérature en
Portugal, on consultera les Mémoires de l'Académie; on
y verra qu'une nation, que l'on a cru arrêtée dans ses
progrès, continue les plus importants travaux avec un
zèle que l'Europe n'apprécie peut-être pas assez. A la
tèto des hommes de talent qui contribuent à la rédaction
de ces Mémoires, doit être placé l'éminent administrateur
de la Bibliothèque nationale de Lisbonne, M. Herculano,
auteur d'une très-remarquable Histoire du Portugal,
V, Blachado Barbosa, Bibliotheca lusitanica, Lisbonne,
1741-52, 4 vol. in-fol.; Andrès, De l'origine, des progrès
et de Vétat CKtuel de la littérature, en ital., Parme, 1782,
7 vol. in-4<* : le Catalogtêê des auteurs portugais qui est
en tête du Dictionnaire de r Académie de Lisbonne, 1793;
Bouterweck, Histoire de la poésie et de l'éloquenee chez
les peuples modernes, en allem., 1801-1819, 12 vol. in-S'^ ;
Robert Southey, Notice sur la poésie portugaise; Costa
e Sylva, Essais biographiques et critiques sur les meil-
leurs poëtes portugais^ en portugais ; Sismondi , Histoire
des littératures du mtdi de V Europe, 1813, 4 vol. in-8*>;
Ferdinand Denis, Résumé de V histoire littéraire du Por-
tugal, Paris, 1826, in-18; Adrien Balbi, Statistique du
Portugal , Paris, 1834, 2 vol. in-S» ; J.-F. da Sylva, Dic-
tionnaire bibliographique^ Lisbonne, 1801, 5 «oî. Ë. B.
PORTUGAISE (Numismatiaue). Les monnaio» des pre-
miers temps de la monarchie portugaise sont rares. Il y
en avait deux principales : la livre d'ai^geni , qui étal;;
d'origine française, et que le prince Henri de Bourgogne
introduisit dans les États à lui concédés par le roi de C^
tilie ; et le maravédis d'or, dont l'usage était passé des
Arabes chez les chrétiens, et qui parait avoir valu 2 livres
et demie. La livre se divisait en 20 soldos ou sous, pièces
de billon dont on distinguait deux sortes : les soldos
brancos ( sous blancs ), dans lesc|uels entrait de l'étain ,
et qui contenaient chacun 12 deniers; et les soldos pretos
(sous noirs), tout en cuivre. Il est également question
de maravédis d'argent, valant 15 deniers. Ces diverses
monnaies eurent cours Jusqu'au règne d'Alphonse V. Ce
prince fit fabriquer des pièces nouvelles d'argent, qu'on
désigne par le nom d*alfonsim , et auxquelles fut donnée
la valeur nominale des monnaies anciennes, bien que
leur poids métallique fût moindre. Sous le roi Diniz, les
monnaies d'or furent appelées dobras cruzadas (dou-
blons à la croix ). Il en fallait 60 pour faire un marc ;
cell^ qu*on fabriqua sous Pierre 1*' représentèrent le
50* du marc. Le même prince émit, à l'imitation des
monnaies de France, des tomeze ( tournois ) et des meio
tomese (demi-tournois), dont il y avait 65 au marc d'ar-
gent, et d'autres tomeze plus petits, dont il fallait 130
pour former le marc. A son tour, dans la seconde moitié
du xrv* siècle, le roi Ferdinand frappa plusieurs mon-
naies : le gentil , dont il y eut plusieurs types représen-
tant 4 livres 1/8, 3 livres 1/2, et 3 livres 5 sous ; la bar-
buda, monnaie d'argent avec beaucoup d'alliage, à laquelle
on donnait la valeur d'une livre, et qui empruntait son
nom k une sorte de casque qu'on y avait gravé; le grave
(lance) et le pilarte, également d'argent, mais à très-bas
titre, et qui recevaient aussi une valeur nominale exces-
sive. Le désordre continua sous Jean P'^, où l'on émit des
réaux d'argent valant 9 deniers, et dont 72 faisaient un
mar&i puis d'autres réaux qui ne furent plus qu'au titre
de 5 et de 4 deniers, tout en conservant la même valeur,
et enfin des sextiis, qui valaient la 0* partie d'un réal. —
Une révolution monétaire dut être opérée par le roi
Duarte (Edouard). Ce prince fit frapper des reaes bran-
cos (réaux blancs), monnaie de cuivre avec un alliage
d'un autre métal, ayant la valeur d'un sou ancien, et des
reaes pretos (réaux noirs), qui n'en représentaient que
la 10* partie. Ses écus d'or furent de bas aloi. Du r^gne
d'Alphonse V datent la cruzade, dont l'or est si fin qwoa
le rechercha longtemps pour dorer ; le rodtsto, réal on
était figurée une roue de moulin ; et Vespadim , monnaie
de cuivre et d'argent, destinée à perpétuer le souvenir de
l'ordre de la Tour et de l'Épée.
Avec les découvertes en Afrique et en Orient, les va^
leurs monétaires changèrent nécessairement. En 1490,
Emmanuel le Fortuné fit frapper des portugaises, au titre
de 24 carats, et valant 10 cruzades, puis une monnaie
d'argent portant le nom d'indios, et dont il fallait 70 pour
le marc; dans les dernières années de ce règne, la croix
de l'ordre du Christ, qui figurait sur les pièces d'or et
d'argent , fit place à une sphère, d'où vint à ces pièces le
nom d'espheras. Au règne de Jean III se rapportent des
monnaies d'or portant l'image de S^ Vincent ou celle de
S^ Thomas, apôtre des Indes, ainsi (|ue les calvarios,
pièces d'or de 2 cruzades, où l'on avait gravé une croix
sur un calvaire. Par ordonnances du 27 juin 1558 et du
22 ami 1570, Don Sébastien ordonna que l'on battrait en
argent des testons (il en fallait 24 pour un marc), de^
d^i-iestons, des vtnteiis et des demi-vintens, et que la
monnaie de cuivre appelée patacâo, qui valait 10 reis,
n'en vaudrait plus que 3. — Pendant la domination espa-
gnole, des monnaies d'or valant 4 cruzades circulèrent
en Portugal. Après le triomphe de la maison de Bra-
gance, Jean IV fit fabriquer des cruzades d'argent valant
100 reis, des demi-cnizades, des testons et des demi-tcs*
tons, puis une monnaie d'or qui valut Jusqu'à 12,000 reis.
Sous Alphonse VI, il y eut émission de pièces d'or de
2,000 et de 4,000 reis ; les monnaies d'argent valurent
2 testons, 1 teston, et 4 vintens. On a quelques pièces de
billon frappées au temps où Pierre II n'était que régent
du royaume : devenu roi , il émit des moedas, monnaies
d'or de 4,400, 4,000, 2,000 et 1,000 reis, et des cruzades
d'argent de MO et 480 reis. En 1688, une loi, qui devait
rester longtemps en vigueur, fixa le titre légal de l'or à
22 carats. En 1700, on commença de frapper des mon-
naies particulières pour le Brésil; elles eurent, d'ailleurs,
la même valeur que celles de la métropole. A partir du
xvni* siècle, les monnaies du Portugal ont été fixées.
PORTUGAISE, monnaie d'or en usage dans le PortugaL
Elle vaut un demi-dobrao ou 6,400 reis.
PORTUGAL (Architecture en). Les pjus anciennes
construcfivns que l'on trouve en Portugal offrent une
grande ressemblance avec les monuments celtiques de la
France ( V, Celtiqdes). Ce sont : les Antas, espèces de
cromlechs qu'on trouve, par exemple, entre Pegôes et
Vendas-Novas et près d'Arrayolos; les Castros ou CrcLS'
tos, enceintes circulaires de pierres dont il y a un grand
nombre dans le pays de Tras-os-Montes, et qu'on a re-
gardées à tort comme des restes de châteaux b&tis par les
chrétiens pour se défendre contre l'invasion des Maures;
les Mamoas ou Modorras, élévations circulaires de terre,
indiquant les tombes de quelques chefs. La domination
romaine a laissé des traces durables en Portugal : nous
citerons les restes d'amphithé&tre trouvés à lisbonn^
les bains de Cintra, que les habitants appellent la citerne
des Maures, et, à Évora, non pas raq[ueduCo qui a été
rebâti complètement sous Jean III, mais un temple co-
rinthien qu'on croit avoir été dédié à Diane, et une tour
carrée dite de Sertorius. Il existe aussi des constructions
chrétiennes d'une grande antiquité : la cathédrale de
Coimbre remonte au temps des Goths; ses murailles,
qui ressemblent extérieurement à celles d'un vieux chft>-
teau, paraissent être tout ce qui reste de cette époque. A
la période gothique appartiennent également la cathé-
drale de Braga, dont on ne peut cependant déterminer la
date précise, et l'église de Cedofeita (la bientôt faite), à
Porto, fondée en 5d6. Parmi les monuments d'architec-
ture sarrasine ou moresque, on cite le château de Feira,
celui de Pombal, où l'on remarque aussi une chapelle
dite des Templiers, les châteaux d'Alcoba^ et de Cbam.
— Quand le Portugal forma une monarchie particulière,
les arts prirent un grand essor. Sous le prince Henri
furent fondées les cathédrales de Viseu et de Porto, et
l'on voit encore à Guimaraens les vestiges d'un palais
du même prince. Pendant le xii* siècle, on éleva le cé-
lèbre monastère d'Alcobaça {V, ce mot)^ et le couvent de
Santa-Cruz à Coimbre. Vinrent ensuite le couvent du
Christ, à Thomar (V. ce mot)^ la catliédrale de Lisbonne,
les couvents de Batalha et de Belem {V, ces mots)y le
palais royal de Cintra, celui de Mafra (V. ce mot)^ etc.,
qui représentent les divers âges de I architecture du
moyen &ge et des temps modernes.
PORTUGAL (Musique en), La musioue des Portugais pré-
sente une grande analogie avec celle des Espagnols. Ui
ont un grand nombre d'airs nationaux d'une assez haute
■■h' — .-
POS
1474
POS
antiquité, et quils appellent ladunes et modinhas : mais
lia ont éLbandonnô de bonne heure leur style national,
pour adopter la manière italienne. Un opéra italien fut
établi à Lisbonne au xviii* siècle par Jommelli. Les com-
positeurs les plus connus de Tépoque actuelle sont Bon-
tempo, Portogallo, José Mauncio (mulâtre brésilien),
Da Costa, Franchi et Schiopetta.
PORTULAN. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
POSAUNE, nom que les Allemands donnaient autre-
fois au trombone. Ils l'appliquent encore, dans Torgue,
à la bombarde de 16 pieds et de 32 pieds, et k la trom-
pette de pédale.
POSITIF, en Grammaire, se dit des mots qui énoncent
la réalité, par opposition aux mots négatifs : ainsi, égal est
un positif, et son contraire inégal un négatif. Il se dit éga-
lement des phrases; ainsi. Faites le bien, voilà une phrase
positive; Ne faites pas le mal est une phrase négative.
C'est par analogie qu*on dit, en parlant de quelqu'un
qui n'a pas de défauts, qu'il a des qualités négatives;
tandis que les qualités positives consistent en vertus
réelles. — Dans les adjectifs et dans les adverbes, on ap-
pelle absolument le positif la forme que prennent ces
mots lorsqu'ils ne renferment aucune idée de comparai-
son, d'augmentation, de diminution actuelle, lorsqu'ils
gardent leur signification primitive et fondamentale sans
aucun rapport au plus ou au moins dont ils sont suscep-
tibles, soit absolument, soit relativement. Ainsi, un bon
livre, les bons livres; il lit bien, il marche lentement, etc.
V. Comparaison (Degrés de). P.
POSITIF, buffet d'orgue plus petit (jue le grand buffet,
et qui a son clavier particulier, ainsi que son abrégé. II
est ordinairement placé sur le devant du grand orgue;
mais quelquefois il n'a pas de buffet particulier, et il est
mis dans le soubassement du grand buffet. Les jeux que
l'on peut employer au positif sont : le cornet, le près-
tant, les bourdons, la flûte de quatre pieds, le huit-pieds
ouvert, le nasard, la quarte de nasard, la dou blette, la
tierce, le larigot, la fourniture, la cymbale, la trompette,
le clairon, le cromorne, et la voix humaine. Ces jeux,
dont le diapason et le nombre sont moindres que ceux
du grand orgue, servent spécialement à accompagner le
chœur. F. C.
POSITION, nom que l'on donne, dans le jeu des in-
struments à manche, au lieu où la main se pose, selon le
ton dans lequel on veut jouer. Quand la main est tout
au haut du manche contre le sillet, en sorte que l'index
pose à un ton de la corde à vide, c'est la position natu-
relle. Quand on démanche, on compte les positions par
les degrés diatoniques dont la main s'éloigne du sillet.
POSITIVISME, opinion qui n'admet de vrai et de cer-
tain que ce qui est mathématiquement démontré ou ce
qui tombe sous l'observation sensible. Avouée ou non,
cette manière de voir est aujourd'hui celle du grand
nombre des savants. Au fond, c'est le matérialisme et le
scepticisme moral. Elle a été réduite en système, ré-
gulièrement exposée et formulée par Auguste Comte.
L'école dont il est le chef s'appelle école positiviste; sa
philosophie, philosophie positiviste. Elle a un assez grand
nombre d'adhérents, et s'accorde très-bien avec les habi-
tudes d'un siècle matérialiste et sceptique. Peu d'hommes
cependant ont assez de hardiesse pour en professer les
principes et en adopter toutes les conséquences. A côté
de ce système, on trouve un autre positivisme moins net,
moins précis, qui offre différentes formes; il se caracté-
rise lui-môme en proscrivant tout ce qui, selon lui, est
absolu : c'est une sorte de scepticisme déguisé. Quelque-
fois il professe le prubabilismc, ou il fait appel au sen-
timent. Plein d'inconséquences et d'équivoques, il est
insaisissable, à cause du va^ue dont il s'enveloppe et des
nuances dont se pare sa subtilité. Il y a ainsi un positi-
visme issu de toutes les écoles, du sensualisme, de l'idéa-
lisme, du panthéisme, et du mysticisme, qui est ce qu'il
y a de moins positif. — Un trait commun rapproche
toutes ces sectes, c'est le rejet de la métaphysique comme
n'appaitenant pas au domaine de la science et agitant des
problèmes insolubles à Tcsprit humain. Mais encore ici
1rs cspriis ne s'entendent pas : les uns rejettent les faits
de l'ordre intellectuel et les font rentrer dans les faits
physiques; les autres les accueillent et leur font une
place à part; seulement ils se divisent encore, ren-
voyant les uns à l'histoire ou à la philologie comparée,
ou à l'étude des langues, les autres à l'observation de la
conscience. — Quoi qu'il en soit de ces dissidences au
iQin du positivisme, voici les faits principaux de la phi-
losophie positive Uilie que Texposout Comlo, cl son
principal disciple, M. Littré, qui a consacré à cet aposto
lat son érudition et sa plume.
L'histoire de l'esprit humain offre trois époques dis*
tinctes et principales : 1° le règne de la Théologie ou dei
croyances religieuses ; 2" le rè^e de la Métaphysique oc
des systèmes ; 3* le règne de la Science, L'humanité en
est à ce dernier degré, son âge mûr. Ainsi les croyances
religieuses, comme les systèmes, ont fait leur temps; la
science, qui a pour objet les faits positifs et les lois qui
les régissent ou les coordonnent, doit désormais guider
riiumanité, régler les mœurs et les institutions, comme
elle préside aux arts utiles et à l'industrie. Elle doit
fonder même une religion et un art nouveaux. Seulement
il faut que la science embrasse tous les ordres de faits,
les faits moraux et sociaux comme les faits physiques ;
aux sciences mathématiques et physiques s'sgoutent la
biologie et la sociologie.
Tout en excluant la métaphysique, cette école n'en
donne pas moins une solution à tous les problèmes phi-
losophiques : i** elle a même sa métaphysique, toute né-
gative, il est vrai, qui rejette comme insolubles toutes
les questions agitées par les philosophes sur la matière et
l'esprit, la substance des êtres, sur Dieu, le t«mps«
l'espace, les causes, l'&me, le libre arbitre ou la liberté
morale, etc. Les faits seuls que l'observation sensible
atteste, les lois qui les généralisent ou les coordonnent,
voilà l'unique domaine de la science. Le reste est en de-
hors de la portée de l'esprit humain. Ce résultat nette-
ment formulé, c'est le scepticisme et l'athéisme, et, si la
négation formelle de l'esprit n'est énoncée, la confusion
de la matière et de l'esprit équivaut au matérialisme ;
c'est aussi le fatalisme, car les lois qui régissent la libertâ
humaine sont semblables à celles de la Nature. Voilà
pour la métaphysique. — 2" La cosmologie ou la phy-
sique se compose des principaux résultats des sciences
mathématiques et physiques coordonnés par certaines hy-
pothèses ou lois générales. — 3** La biologie aboutit à une
science de l'homme (ou anthropologie), où les facultés, k
peine observées, sont confondues avec les organes, en
sont les fonctions. L'&me est un mot; elle n'est, comme
la vie, qu'une fonction du cortjs, un résultat de forgani-
sation ; elle périt avec le corps. — 4* La logique positi-
viste, n'admettant d'autre instrument de connaissance
certaine que l'observation sensible et ce que le raisonne-
ment en infère ou en déduit, se borne à constater les
opérations de l'esprit qui offrent les procédés de cette
méthode : l'abstraction ou l'analyse, la généralisation on
la synthèse, l'induction empirique ou comparative, et la
déduction. — 5» La morale est celle de Vintérét, qui est
censé engendrer tous nos devoirs. Seulement, à l'intérêt
particulier s'ajoute l'intérêt général, et aux passions
éifoïstes les passions désintéressées, altruistes, pour
parler comme cette école. La sociologie ou science sociale
complète la morale, et représente ici la politique et la
législation. Elle donne la solution de tous les problèmes
sociaux conforme à la destinée de l'humanité, qui est la
plus grande somme de bien-être matériel et moral des
individus, cette destinée étant toute renfermée dans le
cercle de la vie actuelle. — 6" Ce système, où l'on professe
l'athéisme, a cependant aussi sa religion et son culte : le
culte de V humanité. Mais l'humanité étant un être abs-
trait, la collection de tous les individus de l'espèce hu-
maine, dans le passé, le présent et l'avenir, au culte de
l'humanité on substitue celui des grands hommes qui la
représentent. La religion et ses cérémonies ont aussi
pour but de conserver le souvenir des morts dans la mé-
moire des vivants. — 7* La vraie théorie de Vart, dans
ce système, devrait être la reproduction ou Vimitaiion
servile du réel, le réalisme, on lui donne pour but plus
élevé un certain idéal qui est l'humanité, et pour
mission d'exciter, d'exalter l'amour de l'humanité. Ce
système se réfute déjà sufHsamment par ses consé-
quences. B — D.
POSPOLITE. V, ce mot dans notre Dictionnaire d9
Biographie et d'Histoire.
POSSESSIF, terme de Grammaire, appliqué aux pro-
noms et aux adjectifs qui servent à marquer la posses-
sion des personnes ou des choses qu'ils représentent.
Ainsi : « Voilà ma part, et voici la vôtre: » ma est ad»
jectif, et la vôtre pronom : en effet, ma détermine part,
comme forait tout autre adjectif; mais la vôtre rappelle
ce même substantif, et, à ce tiu^, il est pronom. Los
adjectifs possessifs sont, en français, mon, ma, mes.
POS
1475
POS
défini ou indéfini: aujourdUiui, ces adjectifs ne sont plus
employés que comme pronoms possessifs avec l'article
défini : le mien, la mienne, les tiens, les siennes, etc.
Toutefois, on dit encore familièrement un mien ami, un
sien oncle. Les autres pronoms possessifs sont : le nôtre,
la nôtre, les nôtres; le vôtre, la vôtre, les vôtres; le leur,
la leur, les leurs. Comme les adjectifs possessifs dé-
rivent, par le sens aussi bien que par la forme, des
pronoms personnels, on les appelle souvent adjectifs
pronominatix possessifs. — En latin et en grec, il n'y a
aucune distinction de forme entre les adjectifs possessifs
et les pronoms possessifs. Ce qui caractérise le grec,
c^cst que l*adjectif ou le pronom possessif est très-sou-
vent remplacé par le génitif du pronom personnel; et
Tadjectif ou pronom de la 3* personne est même fort peu
Dsité en prose. En latin, il n'y a point de pronom ni
d'adjectif possessif à la 3* personne, si ce n'est dans le
sens réfléchi; autrement, on emploie le génitif de l'un
des pronoms de la 3* personne, jnotamment ejus, eorum,
earum. En grec, lorsque le nom est déterminé, le pos-
sessif est toujours, du moins en prose, accompagné de
rarticle. Dans l'une et l'autre langue, un démonstratif
peut même accompagner le possessif. — En français, on
met l'article, et non p&s l'adjectif pronominal possessif,
avant un nom en régime, quand un des pronoms per-
sonnels sujet ou régime y supplée suffisamment, ou que
Ijs circonstances ôtent toute équivoque : « J'ai mal à la
Xvie; — Il a reçu un coup au bras. » — Dans la plupart
des langues, c'est un adjectif possessif qui exprime ce qui
est rendu en français par le pronom personnel accom-
pagné de d; ainsi : « Cette maison est à moi, à toi, à lui,
à nous, à vous, à eux, à elles. » au lieu de : « est mienne,
tienne, sinme, nôtre, vôtre, leur. » — 11 y a des adjec-
tifs composés qui ne prennent pas le nom de possessifs,
mais qui cependant expriment la possession : ainsi, en
latin, tgntcomtt^, qui a une chevelure rayonnante; ce/e-
rtpes, qui a des pieds rapides; multicolor, qui a beau-
coup de couleurs; mulliforis, qui a beaucoup d'ouver-
tures ; tricolor, qui a trois couleurs. Quelquefois c'est
un sufiîxe qui indique lidée de possession; tel est tg en
allemand. P.
POSSESSION, en Théologie, état d'une personne dé-
moniaqtie ou possédée par le démon. Dans la possession,
le démon agit en dedans, tandis que dans Vobsession il
agit du dehors. V. le cardinal de Bérulle, Traité des
énergumènes, Paris, 1631, in-12 ; Thyroeus, Dœmoniaci,
hoc est de obsessis à spiritibus dœmoniorum hominibus,
Lyon, 17SG, in -12; Semler, Commentatio de dœmo-
macis quorum in Novo Testamento fit mentio, Halœ,
1770, in-12; Farmer. An Essay on the demoniaci ofthe
New Testament^ Londres, 1775, in-8*; Gruner, Commen-
taiio de dœmontacis à Christo, léna, 1775, in-4*.
POSSESSION, en termes de Droit civil, détention on pos-
session d'une chose ou d'un droit que nous tenons ou
exerçons par nous-mème, ou par un autre qui l'exerce
en notre nom {Code Napol.^ art. 2228). La plupart du
temps, la possession se confond avec le droit de pro-
priété; mais comme ce dernier peut être contesté, il était
nécessaire que, jusqu'à la solution de la contestation, la
première ne fût ni vacante ni incertaine. La possession
est juste ou vicieuse, elle est aussi de bonne ou de mau-
vaise foi., suivant que le possesseur a reçu la chose en
vertu d'un titre légal, vente, donation ou legs, et dans
riçnorance qu'elle n'appartenait pas à son auteur, ou
suivant qu'il avait cette connaissance. Dans le premier
cas, le possesseur fait les fruits siens, et la loi respecte
ses actes d'administration ou de disposition. La posses-
sion prolongée pendant un certain temps produit des
effets importants : au bout d'un an , le possesseur de
bonne ou de mauvaise foi peut se faire maintenir dans sa
possession Jusqu'à la fin du liti^; prolongée pendant
dix ans avec juste titre, elle devient une présomption
léçile de propriété, et même sans juste titre, lorsqu'elle
a auré plus de trente ans (V, Prescriphon). La posses-
sion 8*acauiert par l'appréhension de la chose. Jointe à
la volonté de posséder; cette volonté se maintient tant
ou*une volonté contraire n'est pas manifestée. Le Code
Napoléon pose ce double principe : 1* qu'en fait de meu-
bles possession vaut titre, sauf le droit qui appartient an
propriétaire d'un objet perdu ou volé de le revendiquer
pendant trois ans contre celui dans les mains duquel il
le trouve, et dans ce cas le détenteur a recours contre
celui qui lui a transmis l'objet; 2* que si l'objet a été
acheté dans ane foire, un marché, une vente publique,
ou d'un marchand vendant choses semblables, le pro-
priétaire ne peut se le faire restituer qu'en remboursant
au possesseur le prix d'acquisition, hors le cas oft celui-ci
est de mauvaise foi (art. 2279 et 2280). Les dépenses faites
par le possesseur de bonne foi pour la conservation de la
chose doivent lui être remboursées avec les frais et autres
loyaux coûts. V. Savigny, Traité de la possession en Droit
romain, trad. de l'allemand par Faivre d'Audelange, 1841,
in-8<' ; Bélime, Traité du droit de possession et des ao
tions possessoires, 1842, in-8*>; Alauzet, Histoire de /&
possession et des actions possessoires en Droit français,
1840, in-8«; Molitor, Traité de la possession, 1851, in-8<>i
Gamier, Traité de la possession et des actions posses*
soires, 1847-52, 2 vol. in-8». R. d'E.
POSSESSION. Y. Envoi.
POSSESSION D*éTAT. C'cst la possessiou, par un individu,
des qualités qui constituent son état politique ou civil,
dans la société ou dans la famille; ainsi, sa nationalité, sa
filiation légitime ou naturelle, sa position d'homme marié
ou non marié. A défaut d'actes de l'état civil ou de re-
connaissance authentique, la possession d'état suffit lé-
galement pour justifier la filiation légitime. R. d'E.
POSSESSOmE (Action), action personnelle qui a pour
objet la revendication de la possession d'an héritage ou
d'un droit réel immobilier, soit qu'on en ait été privé,
soit qu'on n'en Jouisse pas paisiblement et sans trouble.
Dans le premier cas, l'action prend le nom spécial de
réintégrande ; dans le second, celui de complainte. Elle
s'appelle dénonciation de nouvel œuvre, si elle est dirigée
contre un propriétaire qui fait sur son fonds, contre l'an*
cienne disposition des lieux, un ouvrage préjudiciant à
l'héritage voisin, et si ce voisin demande la cessation du
trouble ainsi fait à sa propriété ou à l'exercice de son
droit réel. Les actions possessoires ne sont recevables
qu'autant qu'elles ont été formées dans l'année du trouble
par ceux qui, depuis une année au moins, étaient en
possession paisible {Code de Procéd.y art. 23). Le posses-
soire et le pétitoire (V. ce mot) ne peuvent être cumulés
(art.25),c.-4t-d. que le demandeur au possessoire ne peut,
une fois l'instance engagée, et avant le jugement de ce
premier procès, réclamer pair l'action pétitoire le droit de
propriété : réciproquement, le défenseur au possessoire
ne pourrait Justifier le trouble ou la violence dont il
aurait usé pour s'emparer de la possession, en offrant la
preuve de sa qualité de propriétaire, parce qu'avant toute
décision sur le fond du droit, le respect dû à la posses-
sion exige qu'elle soit rétablie ou maintenue telle qu'elle
existait antérieurement à la violence ou au trouble. Les
mêmes principes veulent que le demandeur au pétitoire,
s'i* ^Jioue dans sa demande, c.-à^d. s'il est jugé n'être
pas propriétaire, ne puisse revenir par la voie possessoire
contester la possession du défendeur; il ne saurait pré-
tendre à se faire investir de la possession, qui n'est par
elle-même que la manifestation du droit de propriété.
V. Possession, et les ouvrages suivants : Aulanier, rrat(^
des actions possessoires, 1829, in-8°; Curasson, Traité
des actions possessoires, 1842, in-8<'; Crémieu, Des ac*
tions possessoires en Droit romain et en Droit français^
1846, in-8°; De Parieu, Études historiques et critiques
sur les actions possessoires, 1850, in-S^'; Bliroy, Théorie
des actions possessoires, 1852, in-8^'; Carou, Principes
ou Traité théorique et pratique des actions possessoires,
3* édit., 1857, in-8».
POSTAGE , ensemble des pièces gravées et des porte-'
vents qui, dans un orgue, font parler les tuyaux placés
ailleurs que sur les sommiers. On emploie le postage lors-
que les tuyaux sont trop grands ou tiennent trop de place
pour être mis sur les trous des chapes; tels sont les
tuyaux de la montre, tant au positif qu'au grand orgue,
les tuyaux en bois comme les flûtes et les bourdons, au
moins dans leur partie grave, le cornet à cinq rangs, et
plusieurs autres Jeux. L^ porte-vents sont en plomb, et
sont fixés par une de leurs extrémités au trou de la chape
et par l'autre à la pièce cravée qui porte le tuyau. F. C.
POSTCOMMUNION (du latin post , après, et commu-
nio, communion), antienne que le prêtre dit, à la Messe,
immédiatement après la prière appelée Communion. Elle
renferme une action de grâces, et rappelle l'objet de la
fête du Jour.
POSTDAM. V. POTSDAM.
POSTDATE (du latin post, après, et du ftunçais date)^
date fausse et postérieure à la vraie date d'an acte, d'une
lettre, etc.
POSTE, lieu occupé par un corps de troupe, qui en't
la défense ou la garde. Dans les villes, chaque poste a des
consignes particulières ; il existe une consigne générale
commune peur les cas d'alerte, d'incendie, etc. Le chef
de poste est responsable de l'exécution des condgnet, àinii
POS
1476
POT
9[om des objets contenus dans les corps de garde. A Tar-
mée, on distingue les postes fortes et les postes d'obser-
twUton. Les postes avancés sont généndement occupés par
les voltigeurs. On appelle postes d'honneur ceux qi^l sont
^ fournis par les compagnies d'élite aux princes et aux
officiers généraux , et ceux où le péril est Jugé le plus
grand. kT Atant-postes.
) poste (Maître de), celui qui tient une Poste aux che-
vaux, c.-&-d. un de ces relais de chevaux établis de dis-
tance en distance pour le service des voitures publiques
ou des particuliers qui veulent voyager avec célérité.
Une poste est de 2 lieues anciennes ou 8 kilomètres.
1 POSTË-AUX>CHODX, petit canot affecté à la provision
V Journalière pendant le séjour en rade d'un naviio.
POSTES (Administration des), grande administration
qui dépend en France du Ministère des Finances, et qui
est chargée, par privilège, du transport des lettres. Jour-
naux et imprimés. Elle accepte aussi les sommes d'argent
déposées à découvert, et en échange desquelles elle dé-
livre des mandats pour un bureau quelconque, ainsi que
les papiers de commerce et d'affaires, les échantillons, et
les valeurs cotées. Les Postes ont un directeur général
(20,000 fr. de traitement), aidé de deux administrateurs
(12,000 fr.). Le service se fait par des directeurs, assistés
de commis, et par des facteurs, chargés de la levée des
boites^ et de la distribution des lettres à domicile. Des
inspecteurs (de 3,000 à 8,000 fr. de traitement) ont mis-
sion de surveiller le service. Le transport se fait sur
routes ordinaires par des malles-poste, et sur les chemins
de fer par des bureaux-wagons. Dans le budget de 1862,
le produit des postes est évalué à 62,076,000 fr., et les
frais d'exploitation à 45,449,589 fr. On transporte an-
nuellement environ 265 millions de lettres. V, Poste,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d* Histoire , et,
dans le présent ouvrage, les articles Appranchissement,
AviSt Cartes de visite. Échantillons, iMPiuués, Let-
tre, Taxe, Timbre-poste^ Valeurs cotées.
postes, nom qu'on donne, en Architecture, à un dessin
d'enroulements placés à la suite les uns des autres et qui
semblent se poursuivre.
POSTHUME (du latin post^ après, et humus, terre),
se dit de l'enfant né après la mort de son père. Il n'est
reconnu légitime par la loi qu'autant que 300 jours ne se
sont pas écoulés entre sa naissance et la mort du père.
Un enfant posthume rompt par sa naissance le testament
de son père dans lequel il est passé sous silence.
POSTICUM. V. Anticom.
POSTILLON, homme attaché au service de tai poste
aux chevaux pour conduire les voyageurs.
POSTIiBilNIE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
POSTLUDE, nom donné quelquefois au morceau Joué
par les organistes à la fin de l'office, et qu'on appelle
aussi une sortie,
POSTSCENIUM, partie d*un thé&tre romain qui était
derrière la scène, celle où se retiraient les acteurs pour
changer de costumes, et où se plaçaient les décors et les
machines.
POST-SCWPTUM, c-àrd. en latin écrit après coup,
ee qu'on i^oute à une lettre après la signature. On le
marque par Tabrévlation P. S.
POSTSIGNAM, soldats romains de la 2*et de la 3* ligne
de bataille, derrière (post ) la première où étaient les
enseignes {signa),
POSTULANTS (du latin postulare, demander) , nom
donné, dans l'Enregistrement et les Domaines, à ceux
que, dans d'autres administrations, on appelle Aspirants
ou Surnuméraires.
POSTULAT, en latin Postulatum, terme de Philoso-
phie, qui désigne ce que l'on demande à son adversaire,
au commencement d'une discussion, comme fait reconnu
ou axiome. Il y a dans la philosophie de Kant trois pos^
tulats : ceux de la liberté, de l'immortalité de l'àme, et
de l'existence de Dieu.
POSTULATION, en termes de Droit, action d'occuper
pour une partie devant un tribunal. Le droit de postula-
tion est exclusivement attribué aux avoués. L'usurpation
de ce droit est punie d'une amende, de la confiscation
du produit de l'instruction au profit de la Chambre des
avoués, et dé dommages-intérêts au profit des parties
lésées. On nomme délit de postulation le concert frau-
duleux entre plusieurs personnes pour exploiter les béné-
fices d'une étude d'avoué. — Dans le Droit canonique, la
Postulation est une demande adressée k un supérieur
qui a droit de confirmation, pour qu'il veuille bien pour-
voir d'une dignité élective telle personne qui, pour dé-
faut d'âge, d'ordre ou de naissance, ne peut être élue.
POT A AUMONES. F. Aumoke.
POT A FEU , pièce d'artifice en forme de pot ou de
vase, dont on se sert dans les sièges de villes.
POT-DE-VIN, ce qui est donné en manière de présent,
après un marché, un bail , une transaction quelconque,
en sus du prix convenu, par l'une des parties intéressées
à l'autre partie. Le même nom s'appliqua m la gratificap
tion ofierte à un tiers par qui une afi'aire 8*est conclue ;
dans les transactions privées, ce pot-de-vin, offert ouver-
tement, est licite; mais, s'il est donné clandestinement
et dans le but de corrompre un mandataire ou un fonc-
tionnaire public, il constitue le crime de corruption ( K. ce
mot),
POTENCE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d Histoire.
POT-EN-TÊTE, ancien casque d'infanterie, qui ne
couvrait que le haut de la tête.
POTENTIEL, en termes de Philosophie scolastique,
s'oppose k actuel, et désigne ce qui n'existe qu'en puis-
sance et non réellement. — Dans la Grammaire grecque,
la particule àv est dite potentielle, parce qu'elle indique
d'ordinaire que l'action du verbe auquel on la Joint est
considérée comme possible, douteuse ou hypothétique.
POTEQUIN ou POTKIN, vieux mot qui signifiait petit
pot.
POTERIE, mot qui désigne à la fois l'industrie du
potier et tout vase fait d'argile ou autre matière inférieure
(V. Céramique, Vases). — Les anciens Romains, pour
économiser le temps et la matière, la charge et la dépense,
plaçaient de distance en distance, dans les voûtes épaisses
et dans les masses de maçonnerie, des pots de terre qui
formaient naturellement comme de petits arcs de dé-
charge. On voit de ces pots à Rome, au cirque de Cara-
calla. — Aujourd'hui on fait des plafonds entiers en po-
terie; on l'emploie surtout dans les planchers à solives
de fer, où les entrevous sont considérables.
POTERNE ( du bas latin postema, s.-ent. porta, porte
de derrière), fausse porte placée dans le milieu ou dans
l'angle d'une courtine et sur le terre-plein du rempart,
pour donner issue dans les fossés et faciliter les sorties
sans être vu des assiégeants. Des fossés on arrive par les
pas-de-souris au chemin couvert et aux glacis.
POTICHE, nom donné aux vases en porcelaine de Chine
et du Japon. Il y a quelques années, vers i858,on appela
Potichomanie l'engouement avec le(^uel on imitait cette
porcelaine en collant des papiers peints à l'intérieur de
vases en verre.
POTIERS , nom de deux anciennes corporations, for-
mées vers 1260. Il y avait les Potiers détain, sous le pa-
tronage de S^ Fiacre : Tapprentissa^ était de 6 ans, et le
compagnonnage de 3 ans; la maîtrise coûtait 500 livres;
les derniers statuts de cette corporation dataient de 1631 ;
et les Potiers de terre, ayant pour patron S^ Bon, et qui
firent renouveler leurs statuts par Charles VII, en 1456,
et Henri IV, en 1607. Cette corporation fut réunie, en
1776, à celle des faïenciers et des vitriers.
POTKIN. V. PoTEQom.
POT -POURRI, production littéraire composée de mor-
ceaux rassemblés sans ordre, sans liaison, et le plus sou-
vent sans choix ; — morceau de musique formé d'une
suite d'airs difi'érents et connus. Le nom est celui d'un
ragoût composé de plusieurs sortes de viandes et de lé-
gumes, et servi dans le pot même où il avait cuit.
POTSDAM (Château royal de), en Prusse. Ce château,
situé sur la rive droite de laHavel, fut commencé en IfiGO
par Philippe de Chiese, continué par Menhard et Nehring,
et achevé en 1701 par De Bodt. Il a trois étages, et forme
un carré long. On y montre les appartements du grand
Frédéric, tels qu'ils étaient de son temps. En avant du
ch&teau se trouve le Lustgarten, composé de deux parties :
la place de la Parade, entourée de colonnades construites
en 1745 par Boumann ; et le Jardin, où l'on remarque un
bassin, long de 113 met., large de 47, au milieu duquel
se dresse un groupe colossal de Vénus et de Neptune en«
tourés de Tritons.
POTSDAM (Le château de Sans-Sooci, à), ch&teaa con-
struit de 1745 k 1747, sur les plans que donna Frédéric II
lui-môme, avec le secours de l'architecte Knobelsdorf.
C'est un bâtiment à un étage, long de 97 met., profond
de 16™,33, et haut de 0«*,33; ses deux ailes, à deui
étages, ont été reconstruites par Persius en 1841-42, et
servent, l'une aux cuisines, l'autre aux hôtes étrangers et
aux dames de la cour. Dans les appartements royaux on
visite la bibliothèque de Frédéric H, sa chimbre à cou-
cher, le fauteuil où il est mort, diverses pièces ornées de
POU
1477
POU
tableaux de prix, et une salle circulaire soutenue par
16 colonnes monolithes de marbre blanc. Dans la ter-
rasse qui est en avant de la façade du ch&teau, Frédéric II
a?ait fait creuser un caveau, où il voulait être enseveli,
et il disait, en le montrant au marquis d'Argens : « Quand
je serai là, Je serai sans souci. » Telle est Torigine du
nom de cette résidence. Au bas de cette terrasse est un
grand bassin de marbre, de 43 met. de diamètre, en-
touré de statues et de groupes mythologiques en marbre,
et du milieu duquel jaillit un jet d*eau à une hauteur de
39 met. A la droite du ch&teau se trouve un édifice qui
contient une galerie de tableaux, et, plus loin, le moulin
à vent qui est devenu historique; à gauche, le Cavct^
lierhaus, qui a servi tour à tour de théâtre et d^orangerie.
Une colonnade de 88 colonnes corinthiennes se déve-
loppe en demi-cercle par derrière le ch&teau. Jjd vaste
parc de Sans-Souci contient un autre château, dit N<n^
veau Palais, b&ti de 1763 à 1769 d'après les dessins de
Brûning, et dont la façade, longue de 227 met. et percée
de 322 fenêtres, se compose d*un corps de b&timent prin-
cipal et de quatre ailes. On remarque dans ce palais la
Salle de marbre, longue de 33 met., large de 20, haute
de 13, et dont le plafond a été peint par Vanloo. Dans le
parc se trouvent également : le Mausoleum ou Temple
des antiques, pastiche de la Rotonde ou Panthéon de
de Rome, et qui renferme une belle statue de la reine
Louise, en marbre, par Rauch; le Temple de V Amitié,
bâti en marbre, et contenant la statue de la margrave de
Bayreuth, sœur de Frédéric II; une Maison japonaise;
un Bain romain; Iq petit ch&teau de Charlottenhof, bâti
en 1826 sur le modèle d'une villa italienne, et environné
d'un jardin de roses; une Faisanderie; une Tour chi-
noise; le Ruinenberg (montagne des ruines), hauteur au
sommet de laquelle on a construit des ruines artificielles,
pour cacher le réservoir de 50 met. de diamètre et de
4 met. de profondeur, dont les eaux alimentent tous les
Jets d'eau et les bassins.
POUCETTES, corde ou chaînette à cadenas, avec la-
quelle on attache ensemble les deux pouces d'un pri-
sonnier.
POUCHTOD (Langue). V, Afghans.
POUDRE A CANON. ) y . ^ ^ . .
POuFlLÉ.^ P^^^^E^j ^rCr.tM'SiW^^
POULAILLERS, ancienne corporation qui existait déjà
au temps de Louis IX, pour vendre la volaille, le gibier,
les agneaux, et les cochons de lait. On distinguât les
fioulaUlers de la vUle et les poulaillers forains.
POULAINE (de l'italien pulena)^ en termes de Marine,
assemblage de pièces de bois formant une portion de
cercle terminée en pointe et faisant partie de l'avant d'un
vaisseau.
poDuuNB (Souliers à la). V. noire Dictionnaire de BiO'
graphie et d* Histoire.
POtJLE , terme de jeu ; réunion des mises de tous les
Joueurs , laquelle appartient à celui qui gagne la partie.
POUPE (du latin puppis)^ extrémité de l'arrière d'un
navire, la partie opposée â \^ proue ( F. Arrière). Dans
les anciens bâtiments, elle était fort élevée ( V. Dunette,
Château ) ; dans les vaisseaux de ligne, elle est décorée
d'une ou de deux galeries. C'est â la poupe qu'est inscrit
le nom du navire.
POUPÉE (du latin pupa, petite fille), petite figure
humaine de bois, de carton, de porcelaine ou de cire,
que les petites filles s'amusent â habiller. Les jouets de ce
genre étaient connus des Perses et des Romains; on en a
trouvé dans des tombeaux. A Rome, (juand les jeunes filles
étaient devenues nubiles, elles> allaient suspendre leurs
poupées aux autels de Vénus. — Les modistes et les tailleurs
d'habits se servent de grandes poupées pour essayer les
chapeaux et les vêtements ; les modistes surtout en font qui
sont des merveilles d'élégance; elles les expédient â
rétranger, tout habillées, dans des caisses contenant les
toilettas commandées, afin de faire voir comment chaque
pièce de vêtement doit être sjustée et portée. Cette ingé-
nieuse coutume date du xiv* siècle : la reine Isabeau de
Bavière envoyait déjà, en 1391, à la reine d'Angleterre,
Isabelle, sa fille, femme de Richard II, des poupées habil-
lées â la- dernière mode de France; en 1496, Anne de
Bretagne, «emme de Charles VIII, fit un semblable cadeau
k la célèbre Isabelle de Castille. Au xvu" siècle et au xviii*,
les envols de poupéra de ce genre continuèrent; c'était
un b^oin si réel pour les grandes dames étrangères qui
les recevaient, que, pendant la fameuse guerre de la suc-
cession d'Espagne (1701-1713), il y eut entre l'Angleterre
et la France, parties belligérantes, une convention toute
spéciale pour laisser passer des poupées d'albâtre qui, de
temps en temps, portaient à Londres les modes de la
cour de France. On voit aussi de nos jours, dans la montre
des coiffeurs, des poupées en buste ou à mi-corps, dont
le visage est de cire.
POURANAS. y. PuRANAS.
POURPOINT (du bas latin perpunctum, fait â points do
couture), nom donné à un vêtement de g^uerre qui cou-
vrait la poitrine et le dos, et se mettait sous la cuirasse :
il était fait de laine ou de coton piqué entre deux étoffes
( V, Gambison). Plus tard, on appela pourpoint un vêle-
ment de ville ayant un collet, des manches, et même des
basques, et en usa^e surtout aux xvi' et xvii* siècles. Les
pourpoints taillades vinrent d'Espagne. — Une corpora-
tion de Pourpointiers fut fondée à Paris en 1323.
POURPRE. 7. ce mot dans notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d'Histoire,
POURSUITE, en termes de Jurisprudence, mise en
action d'un droit, ensemble des actes d'exécution qui se
font contre quelqu'un pour le contraindre à respecter une
obligation ou le punir de l'avoir enfreinte. Tout fait qui
blesse un intérêt protégé par un contrat ou par une loi
peut donner lieu â une poursuite. La poursuite d'un dé-
lit est distincte de Vinstruction, car elle se prolonge après
le jugement pour arriver à l'exécution ( V. Action , Pro-
céDURB^. On nomme poursuivant celui qui exerce des
poursuites, particulièrement en matière de saisie, d'ex-
propriation forcée et de vente.
POURVOI, en termes de Droit, se dit de la voie de
recours contre une décision judiciaire rendue en dernier
ressort : ainsi, on dit pourvoi en cassation, pourvoi au
Conseil d'Etat; cependant, dans ce dernier cas, le mot le
plus usité est recours.
D'après la loi du 6 juin 1862, le délai du pourvoi en
matière civile est de deux mois à compter du jour où la
signification de la décision objet du pourvoi a été faite à
personne ou â domicile. Ce délai est augmenté de huit
mois pour les demandeurs absents du territoire français
de l'Europe ou de l'Algérie pour cause de service et de
navigation. Il est augmenté d'un mois lorsque le deman-
deur est domicilié en Corse, en Algéae, dans les lies Bri-
tanniques, en Italie, dans le royaume des Pays-Bas, dans
les États ou Confédérations limitrophes de la France; de
deux mois lorsqu'il est domicilié dans les autres États de
l'Europe, ou du littoral de la Méditerranée et de la mer
Noire; de cinc[ mois s'il est domicilié hors d'Europe en
deçà des détroits de Malacca et de la Sonde, ou en deçà
du cap Hom ; de huit mois s'il demeure au delà. Ces
délais sont doublés pour les pays d'outr&-mer en cas de
guerre maritime. Les délais sont francs, et compta» sui-
vant le calendrier grégorien. — En matière d'expropria-
tion, le délai du pourvoi contre le jugement qui prononce
l'expropriation est de trois jours à partir de la notifica-
tion; il est de quinze jours contre la décision du jury à
partir de la décision. — En matière criminelle, il est de
trois jours francs contre les arrêts de la Cour d'assises à
partir de la prononciation; de cinq jours contre les arrêts
de la Chambre des mises en accusation ; et de trois jours,
par application du principe général, contre les jugements
de police correctionnelle et de simple police. — Quant
aux colonies, il existe des règlements d'administration
spéciale. F. Cassation. R. d'E.
POURVOI EN GKACE. V. RECOURS.
POURVOIRIE. ) V. ces mots dans notre Dictionnatr^
POU -SA. t de Biographie et d: Histoire,
^POUSSÉE, en termes d'Architecture, effort que font
les terres d'un rempart,' d'un auai ou d'une terrasse
contre le revêtement de maçonnerie qui les soutient. C'est
aussi l'effort que fait un arc ou une voûte pour écarter
les pieds-droits de l'aplomb où on les a élevés. On y ré-
siste par des éperons, des contre-forts, des arcs-boutants,
et des culées.
POUSSE -PIED. F. AccoN.
POUTRE (jadis poullre, du bas latin pulpetrtm)^
grosse pièce de bois équarri, placée en travers sur des
murs pour supporter les solives d'un plancher. On s'en
sert aussi dans la construction des ponts de navire. Depuis
quelques années, des poutres de fer laminé sont substi-
tuées avec succès au bois. F. Charpente en fer.
POUVOIR, faculté de faire et d'agir. En DroH, le mot
pouvoir signifie la capacité de faire une chose, ou encore
il est synonyme de mandat et de procuration ( F. ces
mots). C'est aussi en ce dernier sens que, dans une Cham-
bre législative, on procède à la véri^ation des pouvoirs
des députés nouvellement élus. En Politique, Pouvoir
signifie autorité, droit de commander : le Pouvoir est dit
POU
1478
PRA
absolu, qaand il n*a ni limitos ni contrôle. On distingue
lo Pouvoir législatifs le Pouvoir eocécutifet le Pouvoir
iudicicùrê. Le Pouvoir législatif est celui de qui émanent
ifes lois : dans les États despotiques, il réside dans la per-
sonne du monarque seul ; dans les monarchies tempérées
qu représentatives, il est partagé entre le prince et un ou
plusieurs corps délibérants , car le prince donne aux actes
de ces corps la sanction qui consomme la loi ; dans les
républiques, il est dans le peuple ou dans ses représen-
tants. Le Pouvoir exécutif est celui qui est chargé de faire
exécuter les lois , de gouverner, de veiller au maintien de
l'ordre et de la tranquillité publique, de commander les
forces de terre et de mer, de nommer aux fonctions pu-
bliques, d'entretenir des relations avec les puissances
étrangères : il peut être confié à un seul homme (empe-
reur, roi , pr^ident, etc. ), ou à plusieurs ( le Conseil exé-
cutif de i793, le Directoire de 1795-99, les Consuls de
1799-1802, la Commission executive de 1848, etc.)- Le
Pouvoir législatif ne doit pas être dans les mêmes mains
que le pouvoir exécutif : il serait à craindre que la puis-
sance législative , chargée des difficultés de Texécution ,
ne nt dès lois pour chaque circonstance, ou que la puis-
sance executive, préoccupée des prévoyances de la légis-
lation, n*appliqu&t la loi future au lieu de la loi présente.
Le Pouvoir judiciaire est celui qui rend la justice et pour-
suit les infractions à la loi. 11 émane du souverain, prince
ou nation; tantôt il a sa source dans Télection, tantôt
il possède IMnamovibilité comme garantie d'indépendance.
— Eu égard à la nature de Tautorité exercée, on distingue
encore le Pouvoir temporel et le Pouvoir spirituel. Le
premier s*applique aux intérêts purement terrestres; c'est
le gouvernement civil et politique. Le second s'exerce sur
les consciences au nom de la religion ; sa mission est
d'enseigner les vérités de la foi et de les défendre. B.
POUVOIR DlSCRÉriONIIAlRB. V. DlSCRéTIONNAIRE.
POUVOIRS GRAQBUX, en termes de Droit canonique, pou-
voirs qui ne sont pas, comme ceux de célébrer la messe,
de prêclier et de confesser, inhérents au sacerdoce, mais
qu'on a reçus par octroi spécial, tels que ceux d'absoudre
des cas réservés, d'indulgencier les croix et les chape-
lets, de bénir les ornements et les linges sacrés, etc.
POUZZOLES (Antiquités de). Cette ville des anciens
États napolitains contient beaucoup de débris intéres-
sants de l'art romain. Sans parler do nombreux tombeaux
qui ont été découverts aux environs sur les routes de
Naples et de Rome, et de deux temples de Neptune et
des Nymphes, aue la mer recouvre aujourd'hui presque
complètement de ses eaux, la cathédrale, consacrée à
S^ Procule, a été faite d'un temple que L. Caipurnius
avait consacré à l'empereur Auguste. Pour abriter le port
contre les vents du Sud, les Romains construisirent un
môle, formé de piliers massifs liés par des arches, et
supportant un portique pour les marchands : il en reste
iC piliers, qu'on a eu tort de confondre avec le Pont de
Ccdigula, formé de bateaux réunis ensemble et couverts
d'un terre-plein. On a découvert, en 1838, les beaux
restes d'un temple qu'on croit avoir été élevé à AntinoQs.
Près de la ville est un amphithéâtre qu'on appelle Co-
lisée^ par imitation de celui de Rome, auquel il est peut-
être antérieur : il a 4 entrées, et on estime qu'il pouvait
contenir 30,000 spectateurs; les gradins sont soutenus
par trois rangs d'arcades. Mais la principale curiosité de
Pouzzoles est le temple de Jupiter-Sérapis, qui fut long-
temps enfoui sous des terres et des broussailles, et qu'on
a dégagé en 1750; depuis ce temps on en a enlevé ce qui
était transportable, colonnes, statues, vases, etc. C'est
aujourd'hui une enceinte carrée de 45 met. sur 38, qui
était intérieurement garnie d'un portique à colonnes co-
rinthiennes, ayant chacune une statue en avant. Autour
de cette espèce d'atrium étaient distribuées des chambres
Servant de bains, alimentés par des eaux minérales dont
Iks sources existent encore; au centre, sur une élévation
de quatre gradins, était un temple rond de 16 colonnes,
dont il ne reste plas que trois, et, au milieu de ce temple,
une cuve octogone, qui servait sans doute aux grandes
ablutions. Les colonnes, de 13 met. d'élévation, sont
d'un seul bloc. A une hauteur de plus de 3 met., leur
fût a été rongé par les pholades; comme ces animaux,
dont on trouve encore les coquillages dans les trous qu'ils
ont pratiqués, se tiennent à la surface de la mer, et ne
demeurent ni dans le fond, ni dans les pierres au-dessus
au niveau do l'eau, il est certain que la mer baignait à
hnc certaine époque les parties corrodées. Or, comme la
bermanence de son niveau depuis 2000 ans est un fait
Irabli, il faut admettre que le sol du temple a été
foliaussé par quelque révolution souterraine, probable-
ment lors du tremblement de 1538, qui donna naissance
au Monte-Nuovo. Le même sol paraît être entré dans une
période d'abaissement ; car le pavé du temple, qui était
à sec en 1807, est actuellement sous les eaux.
PRACRIT. V, Prakrit.
PRyEFÉRICULE. )
PRiEMUMRE. ( V, ces mots dans notre Diciûmnaire
PRiETENTURA. i de Biographie et d'Histoire.
PRAGBIATIQOE. }
PRAGCE (Le ch&teau royal de). Ce château est situé
sur le Hradschin, montagne qui domine au N.-O. la
ville de Prague, et qu'on en regarde comme l'Acropole ou
le Capitole. Commencé par le roi de Bohême Charles IV,
en 1333, sur le modèle de notre vieux Louvre, modifié
et agrandi par Wladislas II, il fut incendié en 1541 . Fer-
dinand P' l'ayant reconstruit, il eut à subir les dévasta-
tions des Bavarois en 1C20, des Saxons en 1631, des
Suédois en 1048, et des Prussiens en 1757 : Marie-Thé-
rèse et Joseph II le firent réparer par l'architecte Loragho,
de 1758 à 1775. L'ex-roi de France Charles X y habita
en 1831-32, et l'empereur d'Autriche Ferdinand après
son abdication en 1849. Un incendie l'a encore fort en-
dommagé en 1855. Le ch&teau de Prague enveloppe trois
cours, dont l'une est ornée d'une statue équestre de
S^ Georges, fondue en 1373; il contient 440 chambres,
trois grandes salles, et plusieurs galeries. On remarque
la Cluimbre de l'hommagef où les nobles de la Bohême
prêtaient serment d'obéissance à leur souverain après
son couronnement, et la Chambre des États, où se passa
en 1618 la fameuse défenestration qui fut le signal de la
guerre de Trente ans. Dans le jardin se trouve un belvé-
dère, où l'astronome Tycho-Brahé observait les astres
avec l'empereur Rodolphe II. B.
PRAGUE (Église métropolitaine de S*-VErr, à). Cette
église, commencée en 134i, et qui rappelle dans quel-
ques parties la cathédrale de Cologne, n'a pas été ache-
vée; Peter Arler de GmOnd l'amena, en 1385, au point
où elle est encore actuellement. Beau modèle d'art ogi-
val , étonnante par sa solidité, son élégance et sa har-
diesse , elle s'arrête un peu au-dessous du transept. Sa
tour a 128 met. d'élévation. L'intérieur de l'édifice est
éclairé par 47 fenêtres ; alentour sont 12 chapelles, dé-
signées chacune par un nom de roi ou de seigneur bo-
hème. Dans celle de S' Wenceslas, située près de l'en-
trée, et que décorent quelques tableaux byzantins et des
fresques sur fond d'or peintes par Thomas de Mutina et
Nicolas Wurmser, on montre une colonne faite avec le
cuivre de canons pris sur les Hussites, ainsi que le casque
et la cuirasse de Charles IY;'la chapelle communique ,
par une porte de fer à sept serrures dont les clefs sont
confiées à la garde des sept personnages les plus consi-
dérables de la Bohême , avec une salle où sont conservés
le sceptre d'or et la couronne des anciens rois. Au milieu
de la nef de l'église, et entouré d'une grille d'un beau
travail, s'élevait un mausolée en alb&tre, construit en
1580 par Alexandre Colin de Nuremberg, sur l'ordre de
Rodolphe II; on l'a transporté dans une chapelle. Un
autre monument a été consacré à S^ Jean Népomucène,
patron du pays : la châsse qui renferme les reliques du
saint est en argent; le baldaquin qui la surmonte est
supporté par quatre anges, aussi d'argent, et qui pèsent
910 marcs ; alentour sont suspendues 23 lampes d'ar-
gent et une lampe d'or. Le chœur, long de 48 met. ,
large de 44 met. avec les bas côtés, n'a pas moins de
44 met. de hauteur ; le tombeau de S' Veit est derrière
le mattrc-autel. La sacristie, ornée de portraits d'arche-
vêques, conduit au Trésor, où l'on conserve diverses reli-
ques de la Passion de J.-C, la langue de S^ Jean Népo*
mucèue, les statues d'or de S^ Adalbert, de S^ Wenceslas,
de S^ Veit et de S' Ludmilla, un grand nombre de mitres
et de chasubles précieuses, etc. B.
PRAKRIT, mot indien qui signifie dérivé, inférieur,
imparfait , et par lequel on désigna la langue vulgaire-
ment parlée dans l'Inde depuis le m* siècle environ
avant l'ère chrétienne. Quelques linguistes ont pcjisé que
cette langue était un reste des idiomes antérieurs & l'in*
troduction du sanscrit {V. ce mot) par les Br&hmanes;
mais on s'accorde généralement à la regarder comme un
sanscrit altéré et corrompu dans la boudie des castes
inférieures. Dans les drames indiens, les personnages
distingués, les princes et les br&hmanes, ne parlent que
le sanscrit, tandis que les personnages du peuple et les
femmes emploient le pr&krit. Le pr&krit a cessé à son
tour d'être langue vulgaire ; mais il est resté langue reli-
gieuse chez les Djainas, et il est sorti de lui plusieurs
dialectes modernes, tels que le paxçachif le maghadi, lo
PRE
H79
PRÉ
mahratle, etc. Certaines compositions littéraires de l'Inde
offrent la réunion de plasicurs idiomes : les dieux y par-
lent le sanscrit, les génies bienfaisants le pràkrit , les
démons le paîçachi , les gens des plus basses classes le
magadhi. Il existe aussi des poëmes composés unique-
ment en prùkrit, tels que le Selu Bandha ; la mesure des
vers et dos stances y varie plus que dans la poésie san-
scrite. F. Colebrooke, On the Sanscrit and Pracrit lan-
guages, Jins le t. VII des Hecherches Asiatiques; le
même , Oti Sanscrit and Pracrit pœtry, dans le t. X ;
Bopp , Analyse comparée du sanscrit et des langues qui
s'y rapportent, en allem. , 1824, in-4°; Hœfer, Depra-
krita dialecto lib. 11, Berlin, 1836, in-8°; Lassen, /f?s/t-
tutiones linguœ prakriticœ, Bonn, 1837, in-8<^; Delius,
Radices pracriticœ, Bonn, 1839, in-8*».
PRAMË , grand et fort bateau à fond plat , tirant peu
d'eau, allant à la voile et à la rame, et pouvant trans-
porter de Tartillerie ou tous objets très-pesants.
PRATICIEN, mot dérivé du latin pragmaticus (homme
d*actioD ) , et qui s'applique à quiconque possède une
grande expérience dans un art. Il désigne spécialement
Touvrier qui dégrossit les blocs du sculpteur et met au
point ses statues.
PRATIQUE (du latin pragmatica)^ exécution des prin-
cipes et des règles d'un art ou d'une science. On l'oppose
à la théorie (V. ce mot)^ avec laquelle elle doit avoir un
rapport plus ou moins direct, sans quoi ce ne serait que
routine. Ce qui est exact dans la pratique ne peut pas
être faux dans la théorie ; mais ce c[ui est vrai en théorie
peut être inexécutable dans la pratique. — En termes de
Palais, la Pratique est la connaissance des formalités de
la Procédure, et du style des actes faits par les officiers
ministériels. — Dans l'ordre moral et religieux. Pra-
tique signifie l'exercice d'une vertu, l'accomplissement
d'un devoir.
PRATIQUE, terme de Marine signifiant accès. Un navire
est admis à la libre pratique, quand il lui est permis
d'aborder, de communiquer avec la terre.
PRATIQUE, petit instrument de métal qu'on se met dans
la bouche pour déguiser la voix. Ceux qui montrent les
marionnettes s'en servent pour faire parler Polichinelle.
PRATISAKHYAS, nom donné, dans la Littérature in-
dienne, aux traités spéciaux sur la grammaire védique.
PRÉALABLE (Question). V. Question.
PRÉAMBULE (du latin prœ, devant, et ambulo, je
▼ais), espèce d'cxorde qui précède certains écrits, et où
l'on donne au lecteur quelques explications destinées à
lui faire mieux comprendre ce qui va suivre, à le faire
entrer dans l'esprit qui a présidé à la composition de
Touvrage, à rendre compte des difficultés du sujet, ou à
exciter d'avance l'intérêt et l'attention. Le Préambule
diffère de la Préface proprement dite en ce que, d'ordi-
naire, il ne se détache pas du récit même, et qu'il doit
être, avant tout, court et précis. Il y a des préambules
purement littéraires : dans les ouvrages de longue ha-
leine, divisés en livres ou en grandes sections, ils sont un
moyen de jeter un peu de variété dans la composition, à
laquelle on les rattache toujours; ils exigent un grand
art et beaucoup de tact. Dans les poèmes didactiques,
par exemple, les préambules bien choisis, adroitement
rattachés à chaque sujet que l'on va traiter, aident à dis-
simuler la monotonie de la matière. Le Roland furieux
de l'Arioste a, pour chaque chant, des préambules qui
comptent parmi les parties les plus charmantes de ce
poème. — Chez les Anciens, la plupart des Dialogues de
Platon sont précédés de préambules gracieux, animés,
pittoresques ; Cicéron les a imités avec beaucoup de bon-
heur, dans plusieurs de ses ouvrages didactic|ues ou phi-
losophiques, et surtout au début de son traité Des Lois,
— Chez les historiens, le préambule forme souvent une
courte introduction où l'on présente, soit le résumé de
certains événements nécessaires à l'intellisence du récit,
comme dans les livres I et V de V Histoire ae Charles XII
par Voltaire, et au I*' livre de VHistoire du Consulat et
de V Empire de M. Thiers; soit le tableau général des
événements qui vont être développés, comme au début
des Histoires, chez Tacite; soit l'impression qu'ils ont
faite sur l'esprit de l'historien, par exemple , dans VHis'
toire romaine de Tite-Live (liv. I et XXI), et chez Tacite,
au début de la Vie d^Agricola, VHistoire naturelle de
Pline renferme un grand nombre de préambules écrits
avec vigueur et non sans éloquence. Buffon les a multi-
pliés dans les nombreuses sections de son Histoire des
animaux, et là brille son art profond de la composition
litténûre. Les préambules qui forment l'entrée en ma-
tière d'un assez grand nombre des Vies des hommes
illustres de Plutarque semblent au premier abord des
hors-d'œuvre ; mais, presque tous roulant sur un point
de philosophie morale, ils sont bien placés dans un ou-
vrage où l'auteur se propose non-seulement de raconter
la vie d'un grand homme, mais encore de donner des
leçons de morale et de conduite.
La partie préliminaire des lois, édits, ordonnances ,
dans laquelle le législateur expose son intention, ses
vues, la nécessité ou l'utilité du nouveau règlement, s'ap-
pelle aussi Préambule. Deux sont particulièrement célè-
bres : 1^ celui des lois de Zaleucus, législateur de Locres
(vu* siècle av. J.-C), composé de maximes élevées sur la
nécessité de la piété, sur la pratique de toutes les vertus
morales, sur l'oubli des injures, sur l'humanité envers
les ennemis, sur la modération nécessaire au magis-
trat, etc. ; 2* celui de la loi Salique de Dagobert, remar-
quable par un accent poétique tout germain : c'est un
éloge animé des vertus militaires et religieuses de la na-
tion franke; il se termine par un Vivat en l'honneur du
Christ et par une invocation où le législateur prie Dieu
d'inspirer et de protéger les rois. La Constitution de 1 701
et celle de 1793 avaient pour préambule une Déclaration
des droits de Vhomme et du citoyen, imitée de celle qui
précède la Constitution américaine. La Charte de 1814
et la Constitution de 1848 ont aussi des préambules.
V, Avant-Propos, Inthoddgtion, PRéPACs, ProjEub, Pro-
logue. P.
PRKAMBULB, terme de Diplomatique. F. Diplôue.
PRÉAU , c-à-d. petit pré, espace découvert au milieu
d'un cloître; — cour d'une prison, où les détenus peu-
vent prendre l'air.
PRÉBENDE. > V. ces mots dans notre Dictionnaire de
PRÉCAIRE. S Biographie et d'Histoire.
PRÉCAUTIONS ORATOIRES, ménagements que l'ora-
teur doit prendre pour ne pas blesser son auditoire ;
tours étudiés, adroits, insinuants, dont il se sert pour
dire certaines choses qui, autrement, paraîtraient dures
et choquantes. S'agit-il, par exemple , de faire passer un
mot, une réflexion qu'on pourrait prendre en mauvaise
part, il les adoucira en les faisant précéder d'une sorte
d'excuse, comme pour ainsi dire, si j'ose ainsi parler,
passez-moi cette expression, etc. Doit-il parler de ma-
tières délicates, dont la pudeur pourrait être blessée, il
se servira de termes généraux et indirects, et couvrira
sa pensée d'un voile que ceux-là seuls qui ont conscience
du mal peuvent pénétrer. Quelquefois il préviendra ou
apaisera un mécontentement, en protestant de la droiture
de ses intentions, en alléguant la pénible nécessité où le
place un indispensable devoir. Si c'est un fils qui plaide
contre son père, un inférieur contre son supérieur, ils
s'efforceront de concilier la défense de leurs droits avec
les égards que demande la personne de l'adversaire. Ci-
céron, dans son discours pour Marcellus, faisant l'éloge
de la clémence et de la générosité de César, le mettait
dans l'impossibilité d'abuser de sa victoire et de com-
mettre un acte de vengeance. Bossuet, pour ne pas pro-
duire une impression f&cheuse en rappelant de tristes
souvenirs, se contentait, en faisant l'oraison funèbre de
la reine d'Angleterre, d'une simple allusion à la mort de
Charles l*'. Bourdaloue, par l'histoire du roi David et du
prophète Nathan, fit sentir à Louis XIV le scandale qu'il
donnait à sa cour. Les grands orateurs ont eu souvent
recours aux précautions oratoires, et ils ont porté jus-
qu'au scrupule la crainte de déplaire à leurs auditeura :
Périclès, à ce que rapporte Quintilien, priait les Dieux,
toutes les fois qu'il allait monter à la tribune, de ne
pas lui laisser dire un mot qui pût offenser le peuple
athénien. B.
PRÉCEINTE (du latin prœcingere, entourer), ceinture
de bordages épais placée dans un navire au-dessous de
chaque rangée de sabords. La grande préceinte corres-
pond à la hauteur du premier pont; la 2« préceinte ré-
pond au deuxième pont ; la 3*, dite tribord ou lisse de
jf>lat-bord, répond au pont des gaillards; la 4*, ou lisse
de rabattue , répond au pont de la dunette.
PRÉCEPTE , règle, leçon ou maxime à laquelle il faut
se conformer pour réussir dans un art. En matière reli-
gieuse, un précepte est ce qu'il faut pratiquer.
PRÉCEPTEUR, celui qui est chargé de l'instruction e>
de l'éducation d'un jeune homme.
PRÉCEPTION. I V. ces mots dans notre Diction*
PRÉCEPTORIALE. ) naire de Biographie et d'Hist.
PRÉCHANTRE ^du latin prœcantor)^ chanoine qui,
dans certaines églises cathédrales ou collégiales, remplit
les fonctions de grand chantre. On le nomme aussi pa-
raphoniste, archiparaphoniste. F. Chantre, et, dans
PRÉ
1480
PRÉ
notre Dicttonnaire de Biographie et d^Histoure, les art.
Capiscol, Éoolatrk, Primicier.
PRÊCHE, se dit da fiermon prononcé par un ministre
protestant, et, par extension, du lieu où les Protestants
s'assemblent pouf célébrer leur culte. Hs n'emploient
Eas ce mot, qu'ils regardent comme injurieux dans la
oucbe des catholiques, si ce n'est quand il s'agit du
prêche dans le désert au temps des persécutions.
PRÉCIEUSES (Les), nom donné, dans la première
moitié du xvn* siècle, aux dames qui fréquentèrent l'hô-
tel de Rambouillet. II n'eut, dans l'origine, rien que
d'honorable, puisqu'il indiquait, chez celles qui le por-
taient, l'amour des entretiens polis, des nobles études, et
des sentiments délicats et distingués. La marquise de
Rambouillet, femme qui Joignait à l'élération du cœur la
distinction de l'intelligence, blessée par la dépravation
et le ton goguenard qui régnaient à la cour de Henri IV,
ouvrit, vers 1608, sa chambre bleue aux nobles &mes et
aux beaux-esprits faits pour aimer encore, en dépit des
habitudes générales, la pureté des mœurs, le culte de la
décence et de la vertu, les conversations sérieuses de lit-
térature et de morale, et le beau langage. Là se rencon-
trèrent, avec quelques grands seigneurs et les gens de
lettres les plus en renom, des dames spirituelles et gra-
cieuses, qui formèrent autour de la marquise et de sa
fille, Julie d'Angennes, comme une brillante couronne.
La princesse de Condé et sa fille, qui devint plus tard la
célèbre M"»« de Longueville, M»« de Sablé, M"« Paulet,
la lionne de l'hôtel et l'une des correspondantes de Voi-
ture, Madeleine de Scudéry, etc. , telles furent les pre-
mières Précieuses. Ce petit cercle d'élite n'a pas seule-
ment Jeté comme un vernis d'élégance sur la corruption
que les habitudes soldatesques du xvi* siècle avaient lé-
guée à la société du temps de Louis XIII; il prit une part
notable à la formation de notre langue classique. On a
pu dire que Malherbe et Corneille avaient créé la poésie,
Descartes et Pascal la prose : cette vérité n'ôte pas aux
Précieuses le mérite d'avoir recommandé et répandu le
goût du langage choisi, et enrichi notre idiome d'expres-
sions qui leur ont survécu. Â leur insu, elles recommen-
cèrent l'œuvre avortée de la Pléiade ; comme l'école de
Ronsard, elles résolurent de déwdgariser la langue : seu-
lement elles eurent le bonheur d'ignorer assez le grec et
le latin pour ne pouvoir point appeler k leur aide ces
langues mortes, et elles eurent le tact de faire sortir leur
dictionnaire d'objets connus et d'images ordinaires. Elles
trouvèrent qu'on pouvait dire : laisser mourir la con-
verscUùm; le mot me manque; revêtir ses pensées d'ex-
pressions nobles; elles donnèrent cours au mot urbanité,
que leur avait fourni Balzac; de l'avis de Voiture, elles
préférèrent le mot car à la locution pour ce que; elles
appelèrent les cheveux roux des cheveux d'un blond
hardi , pour adoucir une vérité désagréable particulière-
ment à leur sexe; avant Molière, elles appelèrent l'hypo-
crisie le masque de la vertu. En môme temps , elles
s'appliquaient à l'orthographe, et retranchaient de cer-
tains mots les lettres parasites , écrivant tête au lieu de
teste, éclat au lieu d*esclat. Enfin, elles éclairèrent de
leurs critiques les écrivains qui leur soumettaient leurs
œuvres avant d'affronter l'écueil de l'impression ; si elles
se trompèrent sur Polyeucte, elles avaient applaudi aux
autres chefs-d'œuvre de Corneille, commenté le Discours
de la Méthode, et l'on pourrait sans injustice attribuer
quelques-unes des Maximes de La Rochefoucauld à M™* de
Sable et à ses amies. — Malheureusement les choses ne
tardèrent pas à se g&ter. Dès l'origine, les concetti ita-
liens, le gongorisme espagnol , et Veuphuisme anglais
avaient mêlé l'afféterie à lagr&ce, et le raffinement au
naturel. Pour n'avoir pas voulu s'encanailler, pour avoir
trop évité de contrôler leurs propres Jugements par des
comparaisons salutaires avec le goût du grand public, les
Précieuses ne s'aperçurent pas qu'elles suostituaient
l'empire de la mode et de l'esprit de camaraderie à celui
du sens commun. Bientôt, selon l'expression de La
Bruyère, « elles laissèrent au vulgaire l'art de parler
d'une manière intelligible; une chose dite entre elles peu
clairement en entraîna une autre encore plus obscure,
sur laquelle on enchérissait par de vraies énigmes, tou-
jours suivies de lon^ applaudissements. » Il eût fallu,
pour prévenir ce pénl, accepter l'épreuve de la publicité,
courir la risque des moqueries même brutales du vul-
gaire, et les Précieuses n'eurent garde de s'y exposer. Le
mal fût bientôt à son comble, lorsque se furent formées,
%UT le modèle de l'hôtel de Rambouillet , les ruelles de
Clievreuse, de Scudéry, etc., et ces alcôves de province
où l'on n'était admis qu'à la condition de connaître le fin
des choses, le grand fln^ le /in du fin. Alors on appela an
miroir le conseiller dies grâces, et un fauteuil les commO'
dites de la conversation : en supposant que Molière ait
prêté gratuitement aux Précieuses ces termes ridicules,
elles furent capables d'en créer d'équivalents. Attaquées
par Desmarets dans sa comédie des Visionnaires dès
l'année 1637, puis par l'abbé de Pure, les Précieuses suc-
combèrent sous les coups que leur porta Molière dans
ses Précieuses ridicules, en 1659, et dans ses Femmes
savantes, en 1672. Sous l'influence du grand comique ,
on sembla dès lors reconnaître généralement qu'une
femme en sait toujours assez,
Quand la capacitë de son esprit ae hauaae
A oonnattre un ponrpolnt d'arec an haat-de-chansae.
Us Femmes tarantes, III, T.
Mais est-ce bien là le dernier mot de notre civilisation sur
l'éducation des femmes , et faut-il entièrement y sous-
crire? Au reste, les Précieuses ont péri; mais la mode
des salons, des ruelles et de la conversation, dont l'hôtel
de Rambouillet a le premier donné le modèle, leur a sur-
vécu. Causer n'est-il pas un besoin et comme un privilège
du Français? V, Rambouillet (Hôtel de), dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et dnistoire; Rœderer, Histoire
de la société polie en France, Paris, 1835 ; Somaize, Grand
Dictionnaire des Précieuses, 1661, 2 vol. in-8% redite
par Livet, 1856, 2 vol. in-18; Livet, Précieux et Pré'
cieuses, Paris, 1859, in-8*». A. H.
PRÉaNCTlON. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d' Histoire,
PRÉGIPUT fdu latin prœ, avant, et capere, prendre) ,
en termes de Droit, prélèvement d'une certaine portion
sur un tout. Ainsi, l'un des héritiers d'un défunt peut,
par disposition testamentaire faite en sa faveur, prélever
une part sur la succession, indépen^mment de celle que
la loi lui défère : ce préciput ne peut excéder la quotité
disponible (V, Quotité); il peut être retenu même par
l'héritier qui renonce à la succession ^Code Napolwm^
art. 910). On nomme préciput conventionnel l'avantage
que le contrat de mariage reconnaît sur les biens de la
communauté à celui des époux qui survivra ( Ibid, ,
1515-20).
pRéciPOT, traitement supplémentaire accordé à certains
fonctionnaires, par exemple, aux doyens des Facultés.
PRÉCISION , qualité de la pensée et du style, qui con-
siste à séparer les idées qui ne doivent pas être réunies,
à écarter celles qui sont étrangères ou inutiles au sujet,
et à exprimer celles qui sont nécessaires, dans leur tota-
lité, sans longueur comme sans Insuffisance. La Précision
est un élément de la clarté ; elle a en outre le mérite de
donner à la phrase de la rapidité et du mouvement.
PRÉCONISATION (du latin prœcontum^ proclama-
tion), acte par lequel un cardinal, et (quelquefois le pape
lui-même, déclare en plein consistoire que tel sujet,
choisi pour un évêché par son souverain, et dont la no-
mination est soumise à l'agrément du Saint-Siège, pos-
sède les qualités requises. A la suite de la préconisation,
le souverain pontife décerne les bulles d'institution ca-
nonique,
PRÉDESTINATION, en termes de Théologie, dessein
que Dieu, selon quelques docteurs, aurait formé de toute
éternité de conduire par sa grâce certains hommes au
salut éternel. Les Thomistes, prétendant s'appuyer de
l'autorité de S^ Augustin, admettaient la prédestination
absolue et antécédente, c-à^d. purement gratuite et non
subordonnée à la i)révision des mérites de l'ftme prédes-
tinée. Les Congruistes étaient pour la prédestination
conditionnelle et conséquente, c-à-d. fondée sur la pré-
vision des mérites. Calvin soutint la prédestination ab-
solue, qui fut décrétée aussi par le synode de Dordrecht;
mais beaucoup de Protestants l'ont abandonnée depuis.
La question fut vivement débattue au concile de Trente
par les Dominicains et les Franciscains. — Les Musul-
mans entendent la prédestination dans le sens le plus
large, comme un arrangement nécessaire et immuable
des événements de ce monde : Ce qui est écrit, disent-
ils, est écrit, La prédestination n'est alors autre chose
que le fatalisme. v\ Grâce, Congruisme, Fatausme, Dé-
terminisme.
PRÉDÉTERMINATION ot PRÉMOTiON , nom que
donnaient les Thomistes à l'action de Dieu qui, suivant
eux, meut et prévient la volonté de l'homme, en la déter'
minant à agir.
PRÉDICAMENT ou PRÉDICAT , terme de Pbiloeophit
scolastique. V. Athubdt*
PRÉ
1481
PRÉ
PRÉDICANT, dénomination Jetée par dénigrement au
ministre protestant dont la fonction est de prêcher.
PRÉDICATION (du latin prœdieare, publier, proclamer,
parler en public), action de prêcher, c-à-d. d*annoncer
en chaire la parole de Dieu et les vérités de la religion.
Jésus-Christ confia à ses Apôtres le ministère de la pré-
dication ; ceux-ci le transmirent aux évêques, qui, dans
les premiers siècles de TÉglise, en furent exclusivement
chargés. Les premiers exemples que Ton connaisse de
prêtres autorisés à prêcher sont ceux d'Origène et de
S^ Jean Chrysostome en Orient, de S^ Félix de Noie et de
S^ Augustin en Occident. Aujourd'hui, dans l'Église ro-
maine, il faut être au moins diacre pour avoir le pouvoir
de prêcher. Le droit d'autoriser les prédicateurs dans un
diocèse n'appartient qu'à l'évêque; les curés exercent ce
droit dans leur paroisse. Certains ordres religieux se
sont particulièrement consacrés à la prédication : tels
sont les Dominicains, surnommés Frères prêcheurs, les
Franciscains, les Carmes, les Augustins, les Jésuites, etc.
La prédication suppose, non-seulement le talent de la
parole, mais une étude approfondie de l'Écriture sainte
et des Pères de l'Église, une connaissance suffisante du
cœur humain et des mœurs do la société {V, Chaire —
Éloquence de la). B.
PRÉDICTION, divination et déclaration nette d'événe-
ments futurs, qui sont au-dessus de la pénétration ordi-
naire de l'esprit humain , ou hors du cours de la nature.
Elle se distingue de la prévision, qui a sa raison dans
des connaissances acquises; du pressentiment, dont le
principe est une sensation , une aperception plus ou '
moins vague ; de la prophétie, (jui est inspirée par Dieu ;
et du pronostic, fondé sur certaines observations qui font
présager d'ordinaire tel ou tel résultat.
PREEMPTION. V. Douanes.
PRÉEXISTENCE, existence antérieure à la vie pré-
sente, et dont l'idée, impliquée dans toutes les théologies
et les mythologies qui admettent la métempsycose, est
devenue pour Platon, qui l'avait empruntée aux Pythago-
riciens, l'objet d'un dogme philosophique. La préexistence
des &mes se rattache, dans Platon, à la théorie de la Ré-
miniscence (F. ce mot)^ et à l'explication du mal. L'&me,
en concevant les vérités éternelles que Platon appelle
Idées (K. ce mot\ ne ferait que se ressouvenir de ce
qu'elle aurait appris dans cette vie antérieure ; en même
temps, le mal que l'homme subit en ce monde ne serait
que la punition du mal commis précédemment. Sur le
premier point, le reproche le plus grave qu'on puisse
faire à la doctrine de Platon, c'est qu'elle est absolument
hypothétique ; sur le second, d'autres considérations non
moins graves viennent s'ajouter à cette' objection fonda-
mentale. Elle ne fait que reculer la difficulté; car si le
mal, en ce monde, est la punition de fautes commises
antérieurement, ces fautes qui sont elles-mêmes un mal,
il reste à savoir quelle en est l'origine et la cause. En
outre, il nous parait que la punition qu'on suppose man-
querait son but de Juste et utile expiation, en nous frap-
pant pour des fautes dont nous aurions complètement
perdu le souvenir. V. surtout dans Platon les Dialogues
mtitulés Ménon et Phèdre. B—b.
PRÉFACE (du latin prœ, avant, et fan, parler), dis-
cours qu'un auteur met ordinairement en tête d'un livre
qu'il publie, pour donner au lecteur quelques indications
nécessaires sur le contenu ou le plan de ce livre, ou
pour le prévenir favond)lement Une préface est sou-
vent un peu apologétique; elle doit répondre à certaines
préoccupations de l'esprit public, combattre des préjugés,
repousser ou discuter la critique envieuse, enfin s'im-
poser d'elle-même au lecteur par son ii-propos. Les Pré-
faces de Racine pour les tragédies de Britannicus et
d*Iphigénie, de Molière pour le Tartufe, de Voltaire pour
la Henriade, OEdipe, Mérope, VHistoire de Charles XII,
sont, à divers titres, des modèles du genre; ces grands
écrivains ont su les rendre très-intéressantes, et ils y ont
laissé l'empreinte de leur génie. Notre littérature compte
encore deux chefs-d'œuvre dans la Préface de Dalembert
en tête de Y Encyclopédie, et dans celle dont M. Villemain
a fait précéder, en 1835, la 6* édition du Dictionnaire de
VAcaaémte française^ De nos Jours encore on peut citer
les Préfaces de Chateaubriand, dans diverses parties de
ses OEuvres complètes j celles de C. Delavigne, pour sa
tragédie de Marino Faiiero; de V. Hugo, pour son drame
de Cromwell, etc. P.
PRÉFACB, partie de la Messe qui précède le Canon, au-
quel elle sert de préambule. Elle commence par ces mots :
Sursùm corda. On la trouve dans les plus vieux sacra-
mcntaires, dans les plus anciennes liturgies, et l'usage
en parait remonter au temps des Apôtres. H y a, dans I^
sacramentaire de S^ Grégoire, des préfaces propres pour
presque toutes les messes : le missel romain n'en a gardé
que neuf. A la grand'messe, la préface est chantée par
le célébrant : le chant est uniformément le même pour
toutes les circonstances. Les Grecs n'ont qu'une Préface.
PRÉFECTURE, mot dont l'acception était différente
chez les Anciens de celles qu'on lui donne aujourd'hui
(V. Préfecture, dans notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire)^ et qui désigne pour nous, soit la charge de
préfet, soit le lieu où il réside, soit le. département
soumis à sa Juridiction. Par décret du 28 mars 1852, les
préfectures ont été divisées en trois classes, dont les titu-
laires ont des traitements de 40,000, 30,000 et 20,000 fr.
Le préfet de la Seine reçoit 50,000 fr. Les préfets peu-
vent être mis à la retraite à i'àge de 65 ans; ceux qui
cessent d'être en activité, et qui n'offrent pas les condi-
tions voulues pour obtenir une pension de retraite, peu-
vent recevoir, pendant 6 ans, un traitement de disponi-
bilité, qui est de 8,000 fr. pour les préfets de l'* classe,
de 6,000 fr. pour les autres. Les Conseillers de préfec"
ture sont aussi de trois classes, aux traitements de 3,000,
2,000 et 1,600 fr.; ceux du département de la Seine ont
8,0(J0 fr. Un secrétaire général de préfecture a rempli
pendant quelque temps, avant 1854, les fonctions do
sous -préfet dans l'arrondissement chef-lieu des plus
grands départements ; il peut toujours être chargé par
délégation d'une partie de l'administration départemen-
tale. — Chaque arrondissement forme une Sous -Pré"
fecture; le traitement des sous -préfets est de 8,000,
6,000, et 4,500 fr. Ces fonctionnaires sont admis à la re-
traite à r&ge de 62 ans : s'ils n'ont pas, en cessant leur
service, les conditions requises pour l'obtention d'une
pension, ils ont droit pendant 6 ans, pourvu qu'ils aient
au moins 6 ans de service, à un traitement de non-
activité, fixé pour ceux de l^^ classe à 3,000 fr., pour les
autres à 2,400 fr.
PRÉFECTUiiE (Conseil de). V. Préfet de nipARTEVENT,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
PRÉFÉRICULE. V, Prjef^ricule, dans notre Diction-
naire de Biographie et d^Histoire.
PRÉFET. ) y uQ^jj^ Dictionnaire de Biogra-
PRÉFET MARITIME. î phie et d'Histoire.
préfet de POUCE. ) *^
PRÉFETS DO PALAIS, foUctionnalres de la maison de l'Em-
{>ereur des Français. Ils étaient au nombre de quatre:
eurs fonctions consistaient dans un service d'honneur,
la surveillance d'une partie de l'administration sous
les ordres du grand maréchal du palais. Ils suivaient
TEmpereurdans ses voyages. Cette charge existait sous
le !<' Empire français ; elle disparut lors de la Res-
tauration, et le 2« Lmpire l'a réiastituée.
PRÊFIX, en termes de Palais, ce qui est fixé à l'avance.
On dit un jour pré/lx, un terme préfix, un douaire
pré/ix, une somme préfixe,
PRÉFIXE, partie accessoire d'un mot, qui en précède
la racine ou du moins le radical. Le préfixe consiste en
une préposition ou en une particule inséparable qui mo-
difie habituellement le sens originel et fondamental du
mot : in-utûe, inrcommode, dissemblable, dé-faveur,
mé-connattre , mé-créant, re-tenir. On peut compter
parmi les préfixes l'augment des verbes grecs et du par-
ticipe passé allemand, le redoublement des parfaits grecs
et de quelques parfaits latins. La connaissance des pré-
fixes est très-utile pour l'intelligence du grec, de l'alle-
mand, et aussi du latin. Quant aux langues néolatines,
elles emploient généralement les mêmes préfixes que la
langue latine, et n'en ont qu'un très-petit nombre qui
leur soient particuliers. V, Afftxe. P.
PREGADT. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Htstoire,
PRÉJUDiaELLE (Question). V. Question.
PRÉJUGÉ (du latin prœ-judicata)^ opinion conçue à
l'avance sur des questions que l'observation et l'expé-
rience devraient seules résoudre. Les préjugés sont une
des causes les plus fréquentes de nos erreurs : ils agis-
sent sur nous de la même manière que les passions, avec
lesquelles ils font souvent alliance; et telle est leur puis-
sance, qu'ils faussent non- seulement nos jugements et
nos appréciations, mais aussi nos observations elles-
mêmes, en nous faisant voir dans les choses, non ce qui
y est effectivement, mais ce que nous désirons y voir. Ils
ont pour causes et pour origine un assez grand nombre
de circonstances, dont les principales sont l'amour-propre,
l'esprit de parti, de secte, de système, les habitudes ac-
quises par l'éducation, le milieu dam lequel on a véctu
PRE
U82
PRÉ
Il est peu de Logiciens et de Moralistes qui niaient plus
ou moins insisté sur les préjugés et sur leur influence
pernicieuse. On lira avec un intérêt et un profit tout par-
ticulier, sur ce sujet, nn des meilleurs chapitres de la
Logique de Port-Royal : Des mauvais raisonnements que
Von commet dans la vie civile et dans les discours ordi-
naires {Logiqtie^ IIP partie, ch. 19). B~e.
PRÉLART, toile goudronnée qui sert dans les ports à
couvrir les objets et à les mettre à Tabri de la pluie. On
remploie aussi pour fermer les écoutilles des navires.
PRÉLAT. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
PRÉLATION (du latin prœlattOt préférence), terme de
notre ancienne Jurisprudence, désignant : 1° le droit
qu*avait le roi de prendre une terre seigneuriale en rem-
boursant Tacquéreur, avant que celui-ci eût fait serment
de foi et d*hommage; 2® le droit qu'avait le bailleur em-
phytéotique d*Ôtre préféré à tout autre dans Tacquisition
de ce que le preneur voulait aliéner; 3° le droit pour
Tenfant d^avoir par préférence les charges que son père
avaient possédées.
PRÉLIMINAIRES (du latin prœ, avant, et limen, seuil,
entrée), ce qui précède, ce (|ui doit être examiné avant
d*aborder une matière principale. Ainsi, en Diplomatie,
les préliminaires sont des points généraux qui doivent
être réglés avant d*entrer dans la discussion des intérêts
particuliers. On nomme préliminaires de paix un traité
provisoire conclu par un général d'armée ou par un di-
plomate, dans lequel est insérée la clause qu'il sera, dans
un délai déterminé, remplacé par un traité définitif entre
les souverains : si cette condition n'est pas remplie, les
préliminaires n'ont d'autre effet que ceux d'une simple
suspension d'armes. En Jurisprudence, le préliminaire
de conciliation est la tentative que la loi prescrit de faire
devant le Juge de paix pour mettre d'accord les parties
qui sont sur le point d'engager un procès.
PRÉLUDE (du latin prœ, avant, et ludere, Jouer), mot
qui désigna d'abord, soit ce que nous appelons en Mu-
' si<jue Introduction, et même Ouverture {V. ces mots)^
soit une improvisation sur l'orgue, et qui ne s'applique
plus guère qu'aux pièces écrites dans un style de fan-
taisie pour servir d'exercices sur un instrument quel-
conque, ou aux traits qu'un exécutant fait entendre pour
essayer un instrument, ou pour annoncer le ton du mor-
ceau qu'il va Jouer. Bach, Handel, Albrechtsberger ,
Vanhall, Steibeit ont publié des recueils de préludes.
Les Italiens donnent aux morceaux de ce genre le nom
de ricercari, c.-à-d. pièces recherchées dans leurs com-
binaisons. B.
PRÉMÉDITATION, en termes de Droit criminel, des-
sein réfléchi d'ex^uter un attentat contre les personnes.
C'est une circonstance aggravante, qui entraîne une aug-
mentation de peine : ainsi, le meurtre prémédité devient
assassinat,
PRÉMICES (du latin primiliœ)^ premier produit de la
terre ou du bétail. Les Hébreux les offraient à Dieu
chaque année, et elles se prenaient depuis la 30* jusqu'à
la 5U* partie : ces prémices appartenaient à la tribu de
Lévi. Les Grecs offraient aussi des prémices à Cérès et à
Diane, les Romains aux Dieux Lares. Dans les premiers
siècles de l'Église, les prêtres vécurent d'oblations, mais
sans qu'il y eût à cet égard de disposition légale. Le pape
Alexandre II fit du don des prémices un précepte reli-
gieux. Un concile de Bordeaux (1255) en fixa la quotité
depuis la 30* Jusqu^à la 40* partie du tout; un concile de
Tours (1282), à la 60* partie.
PRÉMISSES, en latin Prœmissœ {à^prasmittere^mçXiTt
en avant), propositions que l'on met en avant dans un rai-
sonnement pour en tirer une conséquence ou conclusion.
On emploie ce mot pour toute espèce de principes, mais
plus spécialement, et dans un sens rigoureusement tech-
nique, pour les principes du raisonnement déductif. 11
désigne alors la majeure et la mineure des syllogismes,
c.-à-d. les propositions dans lesquelles on compare suc-
cessivement le grand terme, ou attribut de la conclusion,
et le petit terme, sujet de la conclusion, au moyen terme,
pour en opérer indii*cctement le rapprochement. V. Ma-
jeure, Mineure, Syllogisme. B— e.
PRÉMOTION. V. PRÉDéTERMmATION.
PRÉNOM (du latin prœnomen, formé de prœ, avant,
et nomen, non;), nom qui se met avant le nom de la fa-
mille, pour distinguer l'individu qui le porte. Chez les
anciens Romains, les gens de condition libre avaient seuls
le droit d'avoir un prénom : dans les premiers temps, on
le leur donnait à l'âge de puberté, 14 ans selon les uns,
17 ans sftkiD les autres, c.-à-d. au moment où ils pre-
naient la robe virile; plus tard la coutume s'établit de
le donner le neuvième Jour après la naissance, et cet
acte était précédé d'une cérémonie lustrale. Selon Vai-
ron, il y avait environ 30 prénoms. Le fils aine rece-
vait ordinairement le prénom du père, le second fils ce-
lui du grand-père, et les suivants ceux des ancêtres. Les
femmes n'en portèrent pas dans le principe; puis elles
prirent en se mariant celui de leur époux, en lui donnant
une terminaison féminine; enfin elles en reçurent un le
8* Jour après leur naissance. — Chez les peuples chrétiens,
les prénoms, empruntés au calendrier des Saints, se con-
fondent avec les noms de baptême. Sous la l'* Répu-
blique française, on les remplaça par des noms de plantes,
de légumes, et d'instruments aratoires. La loi du 11 ger-
minal an XI (1*^ avril 1803) et le décret du 20 juillet 1808
défendent de donner aux enfants d'autres prénoms que
ceux qui sont pris dans les calendriers reconnus, ou qui
sont einpmntés aux personnages connus de l'histoire an-
cienne; les officiers de l'état civil ne peuvent en admettre
aucun autre dans leurs actes. B.
PRÉPARATION, en termes de Musique, une des règles
de l'emploi des dissonances (V. ce mot). Elle consiste
à faire entendre comme consonnant dans l'accord précé-
dent le son qui va devenir dissonant. La préparation
doit au moins égaler en valeur la durée de la disso-
nance ; d'après ce principe, elle s'opère toujours par une
syncope. B.
PREPOSITIF, terme employé quelquefois comme sy-
nonyme de Préfixe {V. ce mot).
PRÉPOSITION (du latin prœ, devant, et positus,
placé), particule ainsi appelée de la place qu'elle occupe
ordinairement devant les noms, pronoms ou verbes. Les
prépositions servent à exprimer les rapports indirects qui
unissent deux mots entre eux : « Le livre de Pierre ; j'ai
donné un habit à ce pauvre; je ferai cela pour vous; il
est arrivé avant moi ; posez ce livre sur la table, etc. »
D'après Port-Royal, les principaux rapports exprimés
par les prépositioiiS sont ceux de lieu {à, auprès, autour,
chez, jusque, près, par, proche, ver«, etc.) ; de temps
{durant, pendant); de lieu et de temps à la fois {dans,
dès, en, depvis, sous, vers); d'ordre {avant, après, devant,
derrière, entre, etc.) ; de la cause efficiente (maison bâtie
par un architecte), matérielle (maison de brique), finale
(maison bàtle pour y loger des pauvres) ; d'union et de
conformité {avec, selon, suivant) ; de séparation, d*excep-
tion, d'opposition {excepté, hors, hormis, sans, sauf,
contre, malgré, nonobstant)^ etc. Il s'en faut beaucoup
que chacun de ces rapports soit exprimé par une prépo-
sition spéciale; un même rapport peut être exprimé par
plusieurs prépositions (il est dans Paris, en Italie, à
Rome) ; et une même préposition peut marquer divers
rapports (il est en France, il va en Italie, il viendra en
trois jours, il est tombé en courant). — L'emploi des pré-
positions est d'autant plus fréquent qu'il y a moins de
cas ou absence totale de cas dans une langue, puisque les
cas sont destinés à signifier les rapports des noms, ad-
jectifs et pronoms avec les mots qui les accompagnent. Il
semble d'abord que les langues pourvues de cas devraient
se passer de prépositions; mais les cas étant infiniment
moins nombreux que les prépositions, les rapports qu'ils
marquent sont encore plus étendus et plus vagues. Aussi
le grec, le latin, l'allemand surtout, font un fréquent
usage des prépositions, afin de donner aux cas plus de
précision, et de rendre le langage plus net et plus clair.
Le mot qui suit la préposition s'appelle son complément,
parce qu'il en complète le sens; ou son régime, terme
qui convient surtout aux langues anciennes et à l'alle-
mand, parce qu'elle semble imposer tel ou tel cas au
mot complémentaire. — Les prépositions servent encore à
former avec les autres mots, surtout avec les verbes, des
mots composés qui contribuent beaucoup à la brièveté
et quelquefois à l'énergie du langage : conréisciple. dé-
tourner, par-achever, par-faire. — Outre les prépositions
simples, les diverses langues emploient des prepositiont
composées ou locutions prépositives, formées de la réu-
nion de plusieurs mots; telles sont, en français, à tra*
vers, à cause de, etc. — Les mots excepté^ nonobstant,
concernant, touchant, que l'on cl&sse parmi lea préposi-
tions, ne sont que de fausses prépositions : ce sont des
participes auxquels la force de l'usage et une apparence
trompeuse ont fait donner ce nom : cependant, comme
on peut les remplacer exactement par des prépositions
synonymes, il est plus commode, dans la pratique, de
les considérer comme telles.
Aux prépositions il convient de rattacher certaines par-
ticules qui ne s'emploient Jamais seules, mais s'attachent
PRE
1483
PRE
à la 1** syllabe du mot où elles entrent comme modifica-
tirs, et qu*on appelle pour cette raison particules insépa-
rables. Les Anciens leur donnaient le nom de préposi-
tions, à cause de la place qu'elles occupent constamment;
les Modernes les appellent souvent préfixes» Les princi-
pales sont» en grec : a, Suc; en latin, in, dis; en français,
w, dé, diif mé, etc. V. PaérixE. P.
PRÉROGATIVE, mot qui exprime un avantage parti-
CQlier, un privilé^ quelconaue attaché à certaines fonc-
tions, à certaines dignités, sous la monarchie constitu-
tionnelle, on appelle Prérogative royale, Prérogative
wrlementaire, les droits et les pouvoirs que la Consti-
tution accorde au roi, aux Qiambres législatives. Les
ambassadeurs Jouissent, dans les pays ou ils sont en-
vovés, de trois préi-ogatives principales, Texterritorialité
(K. ce mot) ^ rinviolabilité, et Timmunité ou exemption
de la Juridiction ordinaire.
PRESAGE, signe d'après lequel on juge de Tavenir.
Les Anciens tiraient des présages, soit des paroles for-
tuites (les présages s'appelaient alors omtna), soit du
chant et du vol des oiseaux (c'était roifono«cop/«), soit des
volatiles (auspices, augures)^ soit des entrailles des vic-
times {aruspices). Ils interprétaient encore les tintements
d*oreilIcs, les étemuments, les chutes imprévues, la ren-
contre de certains hommes ou de certains animaux, les
noms, les éclairs, la foudre, etc.
PRÉSANCTIFIÉE (Messe), messe sans consécration,
mais dans laquelle on communie avec des hosties pré-
sanctifiées, c.-à-d. consacrées la veille ou quelques jours
auparavant. Dans TÉglise latine, il n*y a de messe de ce
genre que le Vendredi Saint; dans TÉglise grecque, on
en dit pendant tout le Carême, excepté le samedi et le
dimanche.
PRESBYTÈRE (du grec presbuteros, prêtre], maison
servant à Thabitation d*un curé ou d'un desservant. Dès
les premiers temps du christianisme, les paroissiens don-
nèrent un logement à leur curé : plusieurs conciles en
firent une obligation, et leur décision a été confirmée par
le concile de Trente. Un décret de 1809 oblige les com-
munes à fournir à leur curé ou desservant un pres-
bytère, un logement, ou une indemnité pécuniaire. Les
contestations à ce sujet rcssortissent, non aux tribunaux,
mais à Tautorité administrative. — S^ Paul donnait le
nom de Presbytère à l'assemblée des prêtres. On appliqua
aussi ce nom au chceur des églises, parce qu'ancienne-
ment les prêtres seuls avaient droit d'y prendre place.
PRESBYTÉRIENS. V, ce mot dans notre ûictumnaire
de Biographie et d*Histoire,
PRESCIENCE, connaissance certaine et infaillible de
l'avenir, comprise dans l'attribut divin de sagesse su-
prême. Incapables que nous sommes de faire sur les
futurs événements autre chose que de simples conjec-
tures, nous ne pouvons avoir de cette prescience infail-
lible qu'une idée bien incomplète; mais si nous ne
comprenons pas clairement comment elle s'opère, du
moins concevons -nous clairement qu'elle est un élé-
ment nécessaire de la perfection divine. Nous croyons
donc, et nous i^rmons de la manière la plus positive,
que Dieu connaît certainement, de toute éternité, les
événements futurs jusque dans leurs plus petits détails.
On a dit souvent que « l'Intelligence infinie connaissant
l'infinie et universelle vérité par un seul re£pd, où il n'y
a ni progrès, ni succession, ni distinction, ni divisibilité»
(Fénelon, De l'Existence de Dieu)^ il n'y a pour Dieu à
proprement parler ni passé, ni futur. Cela nous parait plus
subtil que véritablement satisfaisant. On tombe d'ac-
cord que tous les êtres et tous les événements qui sont,
qui ont été, ou qui doivent être, bien qu'embrassés si-
multanément par Dieu dans un acte unique, permanent
et étemel, d'intelligence, ne laissent pas de lui app»-
raltre comme étant les uns présents, « les autres devant,
les autres après, par le rapport qu'ils ont entre eux » ; dès
lors, et malgré la supériorité infinie de cet acte unique
sur nos conceptions successives, il n'en reste pas moins
que Dieu voit et sait les choses comme futures, et nous
ne sommes pas plus avancés qu'auparavant. Cest qu'en
pflTet la prescience divine est une des vérités qu'une loi
de notre intelligence nous fait concevoir et croire sans
les comprendre — En tant qu'elle a pour objet les ac-
tions humaines, on l'oppose au Libre Arbitre, et l'on dit :
« Comment peut-il se faire que l'homme garde la libre
disposition d'actes que Dieu a prévus de toute éternité?
Ou, si l'homme est libre jusqu'au moment de sa décision
et jusque dans sa décision même, comment Dieu peut-il
avoir prévu certainement de toute éternité les détermi-
nationr quil prendrait? » A prendre les choses dans ces !
termes, et toutes réserves faites sur la ouestion du gou-
vernement exercé par Dieu sur le monac, ceci n'est, ni
dans un sens, ni dans l'autre, une difficulté véritable, et
l'on peut dire que si la Prescience divine et te Libre Ar-
bitre de l'homme sont considérés comme se faisant
obstacle l'un à l'autre, cela tient à la confusion de cer-
tains mots, de certaines formes de langage, qui expriment
deux choses bien différentes, tantôt la simple futurition,
et tantôt la nécessité. Ainsi : « cette chose doit être »
peut signifier, ou : « telle chose sera , » ou : « il est né-
cessaire que telle chose soit. » Dieu, comme intelligence
parfaite, sait bien que telle chose sera, bien qu'il n'y ait,
à ce qu'elle soit, aucune nécessité. Il en est de même des
mots certain et déterminé. Il est certain, absolument
parlant, qu'entre différents partis il en est un que je
choisirai ; mais cette espèce de certitude n'est pas ce qui
détermine mon choix, lequel reste jusqu'au dernier mo-
ment à ma disposition. Une intelligence imparfaite ignore
ce qu'il en sera. Moi-même j'ignore longtemps quel parti
je prendrai. Dieu, au contraire, a prévu comment je choi-
sirais. Mais sa prévision, bien qu'antérieure, en fait, à
naa décision, ne laisse pas de lui être logiquement posté-
rieure, puisqu'on réalité ce n'est pas ma décision qui se
règle sur sa prévision, mais au contraire sa prévision qui
a été, de toute éternité, formée sur mon choix futur. En
un mot, la certitude avec laquelle Dieu prévoit les ac-
tions libres des hommes no leur ôtc pas plus leur carac*
tère que ne le fait aux actions passées la certitude de nos
souvenirs. Voilà, en résumé, ce qu'on peut répondre aux
objections contre le Libre Arbitre, tirées exclusivement
do la Prescience divine. Quant à celles qui font interve-
nir la Providence, elles exigent une autre réponse, et
seront examinées dans un article subséquent (V. Provi-
dence). Sur l'un et l'autre sujet, V. Bossuet, Traité du
Libre Arbitre, et Leibniz, Essais de Théodicée. B— e.
PRESCRIPTION CIVILE. Le Code Napoléon (art. 2219)
définit la prescription « un moyen d'acquérir ou de se
libérer par un certain laps de temps et sous les condi-
tions déterminées par la loi. » Elle est donc rangée par
lui dans les moyens d'acquérir la propriété, parce que,
aux yeux du législateur, elle repose sur la présomption
d'une acquisition ou d'une libération antérieures. La
prescription ne peut être suppléée d'office par le juge;
elle doit être opposée par la partie qui l'invoque. Elle
peut l'être en tout état de cause. La prescription ne
peut atteindre les choses qui ne sont pas dans le com-
merce, l'état civil des citoyens, les droits contraires à
l'ordre public, ni même les droits facultatifs ; de même
le domune public et ses dépendances.
Il y a deux obstacles à la prescription, une possession
précaire ou contraire au titre, La possession précaire est
la possession de ceux qui détiennent pour autrui ; ainsi
le fermier, le dépositaire, l'usufruitier, l'emphytéote,
l'usager, l'engagiste. Ces détenteurs ne peuvent prescrire
que si leur titre se trouve interverti soit par une cause
venant d'un tiers, soit par la contradiction qu'ils ont
opposée au droit du propriétaire. Quant au titre contre
lequel on ne peut prescrire, c'est celui en vertu duquel
on exerce des droits sur une chose.
La prescription est interrompue, soit naturellement,
lorsque le détenteur est privé pendant plus d'un an de la
jouissance de la chose, soit civilement, en vertu d'une
citation en justice, d'un commandement ou d'une saisie
signifiés à celui qu'on veut empêcher de prescrire. Il en
est de même de la citation en conciliation, lorsqu'elle est
suivie d'une assignation en justice dans les délais de
droit, c-ii-d. dans le mois de la non-comparution ou non-
conciliation. L'interruption est regardée comme non ave-
nue, si l'assignation est nulle pour vice de forme, ou s'il
La désistement du demandeur ou péremption d'instance,
i prescription est également interrompue par la recon-
naissance que fait le détenteur ou débiteur du droit du
propriétaire ou du créancier.
La prescription est suspendue, quand le créancier ne
peut agir, soit pour des causes personnelles^ soit pour
des causes extrinsèques. Ainsi, sauf certaines exceptions,
elle ne court pas contre les mineurs et les interdits. Elle
ne court pas contre les femmes mariées sous le répime
dotal, à l'égard de l'aliénation d'un fonds constitué selon
ce régime. Elle ne court pas non plus contre les femmes
mariées dans les cas où l'action ne pourrait être exercée
qu'après une option à faire sur l'acceptation ou la renon-
ciation à la communauté, et dans celui où l'action ne
pourrait être exercée sans réfléchir contre le mari. Ella
est suspendue au profit des militaires ou défenseurs de
la patrie. Les causes extrinsèques de suspension sont te
PRÉ
1484
PRÈ
jondition apposée à l'existence d'une créance, Jusqu'à ce {
qu'elle se réalise; à l'égard d*une action en garantie,
l'événement de Tévictiou ; à l'égard d'une créance à Jour
fixe, l'arrivée du terme.
La prescription se compte par jours, et non par heures;
elle est acquise lorsque le dernier jour du terme est
arrivé.
Le temps de la prescription est de trente ans pour
toutes les affaires tant réelles que personnelles, sans
qu'il y ait obligation de rapporter un titre, ou que l'ex-
ception de mauvaise foi puisse être opposée. Il est de dix
ans en faveur de celui qui acquiert un immeuble de
bonne foi et par Juste titre, si le véritable propriétaire
demeure dans le ressort de la Cour où est situé l'im-
meuble ; de vingt ans dans le cas contraire. On entend
par juste titre un titre habile à transférer la propriété. Le
même délai de dix ans exonère les architectes et entre-
preneurs de la responsabilité pour constructions et gros
ouvrages qu'ils ont dirigés.
Il existe en outre d'autres prescriptions particulières
qui ont pour caractère spécial de courir contre les mineurs
et les interdits, sauf leur recours contre leurs tuteurs :
la prescription de six mois, contre les maîtres et institu-
teurs, les hôteliers, traiteurs, ouvriers et gens de travail ;
la prescription d'un an, contre les médecins, pharmaciens,
huissiers, marchands, maîtres de pension, domestiques;
la prescription de deux ans, contre les avoués, pour le
payement de leurs frais; la prescription de trois ans,
pour assurer la possession des meubles, pour décharger
du payement de l'impôt foncier, pour les arrérages des
pensions dues par l'État Les juges, avoués, huissiers,
sont déchargés des pièces cinq ans après le Jugement des
procès. La prescription de cinq ans s'applique aux arré-
rages des rentes perpétuelles ou viagères, pensions ali-
mentaires, loyers des maisons, prix de ferme de biens
ruraux, intérêts des sommes prêtées, et à tout ce qui est
payable par année ou à des termes périodiques plus
courts. La prescription est de huit ans pour les lettres et
objets non réclamés à l'administration des postes (Loi
du 5 mai 1855).
PRESCRIPTION CRIMINELLE, droit accordé par la loi à l'au-
teur d'un fait délictueux de ne pas être poursuivi, et,
s'il a été condamné, de ne pas subir sa peine après un
certain laps de temps écoulé. De là deux prescriptions,
la proscription du droit d'action, et la prescription de la
peine. En cette matière, le moyen de prescription est
d'ordre public, il doit être suppléé par le Juge. Le dies
à Qito est compris dans la computation du temps. Le
délai se suppute date par date. Quand il s'agit de crimes,
les peines se prescrivent par vingt ans; par cinq ans,
quand il s'agit de délits; par deux ans, quand il s'agit de
contraventions. Le point de départ est toi^ours la déci-
sion qui a prononcé. L'action publique, au contraire, se
prescrit par dix ans dans le premier cas, par trois ans
dans le second, à partir du jour où le crime et le délit
ont été commis ; elle se prescrit par un an en matière de
contraventions de police. L'action civile se prescrit par
les mêmes délais; c'est aux juges civils qu'il appartient
alors de statuer sur la qualification à donner au fait dé-
lictueux. La prescription est interrompue par les actes
d'instruction et de poursuite, c-à-d. ayant pour objet,
Boit de rechercher les preuves de la culpabilité du pré-
venu, soit de s'assurer de sa personne. Il y a en outre
un certain nombre de prescriptions spéciales qui se trou-
vent indiquées aux matières qu'elles concernent. V. De-
laporte, traité des Prescriptions, 4810, in-8°; Vazeille,
Traité des Prescriptions, 2« édit., 1832, 2 vol. in-8°;
Bousquet, Dictionnaire des Prescriptions en matières
ctvile, commerciale, criminelle, etc., 1838, in-S»; Trop-
long, Commentaire du titre XVIII du livre II! du Code
civil. De la Prescription, 3« édit,, 1841, 2 vol. in-8°;
Bernât Saint-Prix, Mémoire sur la durée et sur la sus-
^ pension de la Prescription, 1841, in -8®; Royer, De la
' Prescription considérée comme moyen d^acquérir la pro^
priété, 1853, in-8o. ' IL ©'E.
PRÉSÉANCE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
PRÉSENCE (Droit de ), rétribution accordée aux mem-
bres de certaines compagnies ou associations , lorsqu'ils
assistent aux assemblées. Les jetons de présence sont les
médailles qui représentent cette rétribution.
pRÉSBifCE RÉELLE, dogmo do l'Église catholique qui en-
seigne que Jésus-Christ est réellement présent dans le
sacrement de l'Eucharistie, et oue c'est ion corps et son
sang que le fidèle consomme dans l'acte de la commu-
nion sous les espèces du pain et du vio consacrés. Les
Calvinistes nient la présence réelle; les Luthériens, qui
l'admettent, repoussent la Transsubstantiation (F. ce
mot)^ et croient à la coexistence de Jésus-Christ et des
espèces dans le sacrement , ce qu'ils appellent consub-
stantiation et impanation, V. Cohhcnion, Eocharistie.
PRÉSENT, temps de la conjugaison marquant qu'une
chose est ou se fait dans le moment de la parole : « f écris
une lettre. » Il marque aussi l'état habituel du sujet, ou
bien les choses qui sont et seront toujours vraies : a hs
lion est fier et généreux. » Le présent s'emploie abusive-
ment pour le futur, surtout pour un futur prochain, afin
de donner plus de vivacité au discours .: n Je suis de
retour dans un moment, » De même pour le futur passé :
a S'il bouge, il est mort (c.-à-d., s'il bougera, il sera
mort). » Avec la conjonction si, le présent s'emploie con-
stamment en français au lieu du futur : « Si vous venez,
vous me ferez plaisir. » On met aussi le présent de l'in-
finitif après certains verbes qui, impliquant une idée
d'avenir, demanderaient logiquement le futur : « J'espère
venir, » c.-à-d. que je viendrai. Un usage fréquent fait
employer le présent à la place du passé dans le style de
la narration, afin de réveiller l'attention, et de frapper
l'imagination en lui présentant les faits comme dans un
tableau : a Gourville se moqua de lui ; Vatel monte à sa
chambre, met son épée contre la porte, et se la passe au
travers du cœur. » Dans les propositions subordonnées
à des temps passés, mais exprimant elles-mêmes quelque
chose de durable ou d'éternellement vrai, le verbe se met
au présent : « Je vous disais bien, je vous ai toujours
dit. Je vous avais averti qyie les flatteurs sont à craindre.»
Au subjonctif, ce mode n'ayant pas de forme spéciale
pour le futur, le présent en tient lieu : a Faites en sorte
que cela se fasse demain. » — Les différents emplois du
présent, que nous venons de mentionner, ont donné lieu
à certains grammairiens, particulièrement à Beauzée,
d'imaginei des dénominations métaphysiques, plus ingé-
nieuses qu'utiles; ainsi, ils ont distingué : le. présent
actuel ou proprement dit (je vous vois, J'écris ) ; le pré-
sent antérieur, c.-à-d. employé pour le passé; le présent
postérieur, c-à-d. employé pour le futur; le présent
général ou indéfini, c.-à-d. exprimant des propositions
d'éternelle vérité ; le présent simultané (je suis heureux
quand je vous vois) ; le présent d'habitude (Je passe l'étô
à la campagne et l'hiver à la ville), etc.. P.
PRÉSENTATION, ancien terme de Droit, désignant
l'acte par lequel un procureur déclarait se présenter pour
telle partie. On dit aujourd'hui constitutiofi d'avoué.
PBÉSENïOIRE, sorte d'ancien vase pour le service de
table.
PRÉSIDENT, titre que prend le chef du pouvoir exé-
cutif aux États-Unis de l'Amérique du Nord et dans quel-
ques républiques de l'Amérique du Sud. Il y eut aussi en
France un Président de république, de 1848 à lSo2;
le même titre a été rétabli en 1671. Celui qui dirige
les débats d'une Assemblée législative porte aussi le nom
de Président. Les Cours et les tribunaux ont des Pré-
sidents: celui d'une Cour a le li Ire de premier prési-
dent; chaque Chambre d'une Cour a un président pa--
liculier, iïl président de chambre ;\eB présidents des
assises sont des conseillers de Cour d^appel chsrgûs
temporairement de diriger les assises. Les attributions
de ces divers magistrats ont été déterminées parle Code
de Procédure civile (art. 138, 239, 325, 751), parla ioi
du 20 avril 1810, par les décrets des 6 juillet et 18 août
1810. — Tout membre d'une Académie, Société ou
Compagnie quelconque, qui a été élu pour diriger les
discussions et veillera l'observation des statuts et rè-
glements, porte aussi le nom de Président.
PRÉSIDES. \ V. ces mots dans notre Dictionnaire de
' PRÉSIDIAL. } Biographie et d'Histoire,
PRÉSOMPTION (en" latin prœsumptio; de prœsumere,
prendre d'avance, présumer, conjecturer), en termes de
Droit, conséquence (jue la loi ou le magistrat tire d'un
fait connu à un fait inconnu. On distingue la Présomp-
tion légale et la Présomption simple. La Présomption
légale est celle nui est attachée par une loi spéciale à
certains actes et à certains faits, qui dès lors sont pré-
sumés vrais; tels sont: 1° les actes que la loi déclare
nuls, comme présumés faits en fraude de ses dispositions,
par exemple ceux qui sont faits à des personnes présu-
mées interposées ; 2^ les cas dans lesquels la loi déclare
la propriété ou la libération résulter de certaines circon-
stances déterminées , telles que la présomption de mi-
toyenneté ; 3° l'autorité que la loi attribue à la chose
jugée ; 4® la force que la loi attache à l'aveu de la partie
ou à son serment. La Présomption légale dispense de
PRE
1485
PRE
jouie preuve celui aa profit daquel elle existe, à moins
quo la loi elle-même D*ait réservé la preuve contraire.
Le législateur ne pouvant ni tout prévoir, ni appliquer
des principes absolus à des intérêts' très-divers et à des
circonstances variables, les Présomptions simples sont
celles qu*il a abandonnées aux lumières et à la prudence
du raag;istrat : elles doivent être graves, précises et con-
cordantes; elles ne sont d'ailleurs autorisées que dans
les cas où la loi admet la preuve testimoniale, ou bien
lorsqu'un acte est attaqué pour fraude ou dol.
PSésOUPTION d'absence. V, ABSENCE.
PRESQU'ILE, étendue déterre entourée d'eau, à l'ex-
ception d'un seul côté par lequel elle tient au continent.
lÀa Grecs disaient chersonèse, et les Romains péninsule;
ce dernier mot est encore employé aujourd'hui, mais
pour désigner une presqu'île considérable, l'Italie, l'Eft-
Datme, par exemple.
~ Presse , mot qui s*entend de tous les produits de la
presse à imprimer, c.-à-d. de tous les ouvrages impri-
més. Les Journaux et les Revues constituent la Presse
périodiqtAe, Par Liberté de la pi-esse, on entend la liberté
de mettre au jour, par la voie de l'impression, ses idées
et ses opinions sur toutes sortes de matières, sans être
obligé de les soumettre à la censure et sans être inquiété.
C'est un droit aujourd'hui reconnu par la plupart des
l^uvernements, mais qui a passé par bien des alterna-
tives de compression et de faveur. Toute liberté a des
bornes : attaquer l'ordre social, les lois établies, les pou-
voirs légitimes, les principes de toute morale, l'honneur
individuel, n'est pas liberté, mais licence, sédition ou
folie. Ni la société ni le pouvoir ne peuvent être désar-
més. Seulement, quand il s'agit de déterminer la limite
qui sépare la liberté et la licence, le droit et l'abus , on
cesse d'être d'accord : ce qui est liberté aux États-Unis
ou en Angleterre est licence à Paris, et la liberté des
Français est licence en Autriche ou en Russie. Pour ré-
gulariser l'exercice de la liberté de la presse, les gouver-
nements ont admis deux moyens de répression : l'un ,
in-éventif, est la censure ; l'autre, pénal, suit la perpétra-
tion du délit. La censure a été plus particulièrement em-
ployée sous l'ancienne monarchie française (V. Censeur
aOYAL, Cl^:NSEUnS DRAMATIQUES, CENSEURS DES JOURNAUX).
Aujourd'hui, elle n'existe pas; cependant on retrouve
véritablement le système préventif dans les conditions de
l'inipripierie et de la liorairie concédées par brevet,
Imisque les imprimeurs peuvent refuser d'imprimer, et
es libraires refuser de vendre les ouvrages dont la pu-
blication entraînerait peut-être pour eux le retrait de
leur privilège ou des condamnations. K. Imprdiebib, Li-
brairie.
Aucun livre ne pouvait être publié autrefois en France
sans une approbation spéciale (F. Approbation des li-
vres ), donnée dans le principe par l'Université, plus tard
par le roi, en vertu d'un édit d'Henri II ^11 déc. 1547 h
et cette approbation constituait un pnvilége pour le
libraire qui l'avait obtenue. Une ordonnance du iO sept.
1553 défendit, sous peine de la corde, de publier aucun
suvrage sans la permission du roi. Un édit de 1557 pu-
nit de mort les « auteurs, imprimeurs et colporteurs de
livres tendant à attaquer la religion , à émouvoir les es-
prits, et à troubler la tranquillité de l'État » L'ordon-
nance de Moulins (1566) diminua les rigueurs contre la
presse ; mais on les vit reparaître sous le ministère du
cardinal de Richelieu, et, depuis cette époque jusqu'à la
Révolution française, la liberté d'écrire fut tres-limitée
et très-précaire. L'Assemblée Constituante de 1789 inau-
gura un régime nouveau : la liberté de la presse fut pro-
clamée par les Constitutions de 1791, de 1793 et de
l'an m (1795). Mais les excès des journaux rendirent une
réaction nécessaire, et elle devait à son tour dépasser le
but. Les lois des 19 fructidor an v et 9 fructidor an vi
(5 sept. 1797 et 26 août 1798) placèrent les journaux et
les feuilles périodiques sous l'inspection de la police. La
Constitution de Tan vui (1799) ne fit plus mention de la
liberté de la presse ; un arrêté du 8 pluviôse de cette
année (28 janvier 1800) fixa le nombre des journaux, et
autorisa les Consuls à supprimer ceux qui énonceraient
des doctrines contraires aux principes du gouvernement ;
un autre arrêté, du 4 vendémiaire (26 septembre), décida
au'aucun libraire ne pourrait vendre un ouvrage avant
Qo l'avoir présenté à une commission de révision. La
ctnsure fut rétablie par décret du 5 fév. 1810, et un autre
d(!cret, du 3 août suivant, réduisit la presse périodique à
un seul Jonmal par département à l'exception <Ib Paris,
?ui en compta quatre. La Charte de 1814 reconnut aux
rançais « le droit de publier et de faire imprimer leurs
opinions, en se conformant aux lois qui devaient répri-
mer les abus de cette liberté.» Néanmoins, l'ordonnance
du 10 juin 1814 maintient provisoirement la législation
ant^Srieure, et une loi du 21 octobre rétablit la censure.
Quiconque publiait un journal dut soumettre chaque soir
l'épreuve de la feuille qui devait paraître le lendemain
matin, et la censure y efi'açait tout ce qui lui déplaisait.
Puis on vit se succéder la loi du 17 mai 1819 sur la ré-
pression des crimes et délits commis par la voie de la
presse, la loi du 26 mai 1819 relative à la poursuite de
cea crimes et délits, la loi du 9 juin 1819 sur la publi-
cation des journaux. Aux rigueurs qu'elles contenaient «
la loi du 25 mars 1822 ajouta que l'autorisation préa-
lable du gouvernement serait nécessaire pour fonder
toute espèce de journal ou de recueil périodique s'occu-
pant de matières politiques et paraissant plvls d'une fols
par mois. Après l'arrivée de M. de Martignac aux affîaires,
en 1827, la censure fut supprimée, et une loi du 18 juillet
1828 fixa à nouveau, et dans un sens plus libéral, les con-
ditions de la publication des journaux. Les ordonnances
de juillet 1830 rétablissaient la censure, mais la Révolu-
tion qui suivit en empêcha l'exécution. La Charte de
1830 rendit à la pres^ toute sa liberté, et, d'après la loi
du 8 oct. de la même année, les délits commis par la voie
de la presse, rentrant dans le droit commun, furent sou-
mis au jugement du Jury : seulement, des dispositions
pénales particulières furent prises pour la répression des
attaques contre le roi ou contre les Chambres législa-
tives. Mais, à la suite de l'attentat de Ficschl (1835), les
lois dites de Septembre frappèrent de peines très-sé-
vères les crimes et les délits de presse, lesquels, dans
certains cas graves , furent soustraits à la connaissance
du Jury et soumis au Jugement de la Cour des Pairs.
Après la Révolution du 24 fév. 1848, la presse eut un
nouvel instant de liberté et même de licence : un décret
du 6 mars abrogea les lois précédentes. Les sanglantes
journées de Juin suivant firent comprendre aux gouver-
nants la nécessité de mettre un terme au débordement
des mauvaises passions. Le général Cavaignac, investi de
la dictature, suspendit un grand nombre de journaux po-
litiques ; le rétablissement du cautionnement et du timoré
eii fit disparaître une foule d'autres; des mesures contre
les excès de la presse furent édictées par les lois du
27 Juillet 1849 et du 16 Juillet 1850; cette dernière pres-
crivit de signer les articles politiques. Au coup d'État
du 2 décembre 1851, d'autres Journaux cessèrent encore
de paraître. Le décret du 17 février 1852 soumit les
journaux à l'obligation d'une autorisation préalable, du
ministre de l'Intérieur^ au cautionnement et au timbre^
à la formalité du dépôt avant publication, les rendit
justiciables des tribunaux de police correctionnelle,
permit de les suspendre après deux avertissements,
et les supprima après une condamnation pour crime
commis par la voie de la presse, ou deux condamna-
tions pour contraventions et délits dans l'espace de
deux années. Après une seule condamnation, le gou-
vernement avait la faculté de prononcer la suspension
ou la suppression du journal. Le journal pouvait
encore être supprimé, sans condamnation préalable^
par mesure de sûreté générale, en vertu d'un dé-
cret de l'Empereur. L'autorisation ne pouvait être
accordée qu'à un Français majeur, jouissant de set
droiis civils et politiques; elle était nécessaire aussi
pour tous changement dans le personnel des gérants,
rédacteurs en chef^ propriétaires ou administrateurs
du journaL Toute publication sans autorisation était
punie d'une amende de 100 fr. à 2»D00 fr. pour chaque
numéro^ et d'un emprisonnement d'un mois à 2 ans :
celui qui avait publié le journal et l'imprimeur étaient
solidairement responsables, et le journal cessait de
paraître. Une feuille politique ou d'économie sociale
publiée à l'étranger ne pouvait circuler en France
qu'en vertu d'une autonsation du gouvernement:
tout introducteur ou distributeur d'un journal non au-
torisé était puni d'un emprisonnement d'un mois à
un an et d'une amende de 100 à 5,000 fr. Il était in-
terdit aux journaux, sous peine d'une amende de 50
h 1^000 fr.^ de rendre compte des procès pour délits
pouvaient interdire le compte rendu du procès ; mais
cette interdiction ne pouvait s'appliquer au jugement.
On ne pouvait, sous peine d'une amende de 100 à
2,000 fr., publier les actes d'accusation et aucun aoted»
procédure criminelle, avant qu'ils eussent été lut en au«
PUE
1486
PRE
diencc publique: en cas de récidive dans l'année, l'a-
mende pouvait être doublée, et le coupable condamné
ÎÎP- ®"^P''*isonnemenl de 10 jours à 6 mois. Il était in-
terdit de reodre compte des procès pour outrages ou
injures, et dee procès de diffamation où la preuve des
faits diffamatoires n'est pas admise par la loi : on pou-
vait seulement annoncer la plainte^ sur la demande du
plaignant; on pouvait publier le jugement. Il était in-
terdit, sous peine d'une amende de 200 à 3,000 fr. fie
double pour la récidive), de publier les noms des jurés,
excepté dans le compte renau de l'audience où le jury
avait été oonstitué, et de rendre compte des délibéra-
tions intérieures, soit des jurés, soit des Cours et tri-
bunaux. Left journaux ne pouvaient d'abord, sous peine
d'une amende de 1,000 à 5,000 fr.. donner d'autre
compte rendu des séances du Corps législatif que lare-
production du procès-verbal officiel; depuis 186i, ils
furent autorisés à publier les débals complets, sous
condition de donner intégralement une discussion tout
entière. Ils reproduisaient éfçalement les comptes r«n-
du9 officiels des séances du Sénat. Les gérants étaient
tenus d'insérer, en tête du journal et gratuitement, les
documents, relations, renseignements, réponses et rcc-
tiflcations que leur adressait un dépositaire de l'autorité
publique, à peine d'une amende de 60 à 1,000 fr., et le
journal pouvait en outre, à raison des faits qui avaient
nécessite cette intervention, être suspendu pendant 15
jours au plus. Si la publication d'un journal supprimé
ou suspendu était continuée sous le même titre ou sous
un titre supposé, les auteurs gérants ou imprimeurs
étaient punis d'un emprisonnement d'un mois à 2 ans, et
solidairement d'une amende de 500 h 3,000 fr. par chaque
numéro. La publication d'un articte politique ou d'é-
conomie sociale émanant d'un individu condamné à
une peine nfOictive ou inTamante était passible d'une
amende de 1,000 à 5,000 fr. Les éditeurs d'un journal
étaient tenus d'y insérer la réponse de toute per-
sonne nommée et désignée dan? le journal : l'inser-
tion était gratuite lorsque la réponse ne dépassait pas
le double de la longueur de l'article qui l'avait provo-
quée; dans le cas contraire, le prix d'insertion était dû
pour le surplus. Dans les trois jours de tout juge-
ment ou arrêt déflnitif de contravention de presse, le
gérant devait acquitter le montant des condamnations
encourues. V. au Supplément,
En Angleterre, la presse jouissait de fort peu de liberté
au xvit« siècle : elle était alors placée dans les attribu-
tions de la Chambre étoilée, qui fixait le nombre des
imprimeurs et des presses qu'ils pouvaient avoir, et nom-
mait un commissaire surveillant sans l'autorisation du-
quel ils ne devaient rien imprimer ; les peines appliquées
aux délits de presse étaient arbitraires et cruelles. En
1641 , la Chambre étoilée ayant été supprimée, la con-
naissance des délits de presse Tut attribuée au Parlement.
Celui-ci remit le droit de censure aux autorités locales,
qui finirent par en abuser. — L'Angleterre étant le pays
modèle et toi^ours cité pour la liberté de la presse, c'est
surtout à dater de 1689 qu'il faut examiner à quel régime
elle fut soumise ; nous aJlons donc pr^nter un résumé
de l'histoire de cette presse, et dire ce qu'elle est aujour-
d'hui légalement' et de fait. Nous emprunterons ce ré-
sumé à une célèbre circulaire que M. le comte de Persigny
adressa aux préfets, lorsqu'il rentra au ministère de lln-
térieur, en décembre 18ti0, après son ambassade de
Londres.
« Jusqu'à l'anéantissement complet du parti des
Stuarts, la législation anglaise sur la presse ne paraît
avoir eu qu'un seul objet : défendre la nouvelle dynastie
contre ses ennemis politiques ou religieux, et interdire,
au nom de la liberté, en quelque sorte, les armes et les
instruments de la liberté aux adversaires des nouvelles
institutions du pays. De 1602, déjà sous Guillaume
il'Orange, jusqu'à la chute du parti des Stuarts, à la
place de la censure qui avait eu Heu quelque temps sous
Guillaume, mais qui n'était qu'une douce mesure auprès
de ce qui suivit, le régime de la presse, des livres, des
journaux, des publications de tout genre, fut soumis à la
luridiction du Common Lato,
« Pour comprendre le caractère de cette juridiction, il
faut savoir qu'à la différence du Statute-Law, qui est la
loi écrite et votée par le Parlement, le Common Lcuo est
la loi non écrite, lex non scripta, qui demeure dans la
mémoire et la conscience des juges Interprétant les tra-
ditions du passé ; que cette loi donne pouvoir discrétion-
naire aux juges de la couronne pour les peines à pro-
IpoDoer après la déclaration du fait par lejuiy t et qu'atnid,
f rendant tout le temps que la maison de Hanovre eut à
'intérieur des ennemis politiques ou religieux, c.-à-d.
pendant toute cette période de passions et de violence,
les luges de la couronne ont exercé le droit rigoureux de
condamner toute personne coupable d'avoir écrit, publié
ou imprimé des attaques contre la couronne et contre
l'État, non-seulement à l'amende, à la prison, an fouet
et au pilori, mais même à la peine de mort, et cela non
pas comme aujourd'hui sur une déclaration du jury por-
tant sur l'offense même, mais sur la simple déclaration
du fait : Un tel est-il l'auteur, on l'éditeur, ou l'impri-
meur de tel écrit?
« Or, si l'on son^e que les juges nommés par la cou-
ronne étaient choisis parmi lc> plus zélés partisans de la
maison de Hanovre et même révocables par la couronne
iusqu'en 1760, on peut s'imaginer ce qu'a dû être la
liberté de la presse pour les partisans des Stuarts, pour
les jacobites, pour les catholiques ou papistes, comme on
disait alors, et autres ennemis de l'État. Ce n^est qu'à
la fin du xviii* siècle, quand déjà depuis longtemps la
maison de Hanovre était consolidée, le parti des Stuarts
anéanti et celui des catholiques soumis, que, l'opiniou
réclamant un adoucissement à cette rigoureuse législa-
tion. Fox obtint un bill du Parlement pour appliquer le
verdict du jury, non plus au fait seul, mais au caractère
de l'écrit séditieux ou du libelle, ce qui introduisit na-
turellement un tempérament considérable dans cette lé-
gislation.
a Ici je ne veux pas m'appesantir sur les détails en
fouillant dans l'arsenal ^c la législation anglaise tient à
la disposition du pouvoir; mais je citerai deux circon-
stances caractéristiques qui serviront à mettre dans tout
son jour l'esprit de nos voisins en matière de presse.
« Vingt-cinq ans après le bill de Fox, quand l'Angle-
terre se voyait parvenue au plus haut d^gré de puissance
et croyait pouvoir désormais jouir en paix de ses libertés,
il arriva qu'à la suite d'une grave crise économique,
causée par la cherté des subsistances et l'énormité des
taxes après la guerre, et favorisée d'ailleurs par l'impo-
pularité du prince régent, il arriva, dis-je, qu'une sorte
de doctrine républicaine, se répandant dans le pays,
donna de graves inquiétudes à l'ordre établi, et que le
jury, intimidé ou gi^né par la doctrine nouvelle, usant
largement des dispositions du bill de Fox, enlevait sou-
vent aux juges de la couronne la faculté d'appliquer aux
délinquants la législation du Common Law.
« Dans ces circonstances nouvelles, le Parlement an-
glais n'hésita pas à donner au gouvernement les moyens
de forcer le jury à la défense de l'État ; et, en consé-
2uence, on fit une loi en 1819 qui frappa d'amende,
'emprisonnement et , en cas de récidive, de bannisse-
ment, l'auteur, l'éditeur et l'imprimeur de tout écrit ou
libelle séditieux contre le roi, la famille royale, le régent,
le gouvernement, la Constitution et l'une ou l'autre des
deux Chambres, et à l'aide de dispositions tellement dé-
taillées, tellement précises, qu'il n'était presque plus pos-
sible à la conscience du jury de se dérober aux nécessités
de l'État.
« Mais lorsque arriva la crise de 1848, et avec elle de
nouvelles émotions, de nouveaux partis hostiles à Tordre
établi , on éprouva encore des difficultés de la part du
jury. On sentit alors la nécessité de préciser encore plus
clairement, plus minutieusement, les attaques dont l'État
pouvait être l'objet, et une nouvelle loi intitulée : Acte
pour mieux assurer la sécttritè de la couronne et du
gouvernement, enrichit encore le terrible arsenal de la
législation anglaise. Cette fois, le succès est complet;
l'arme a été si finement aiguisée qu'elle triomphe du jury
irlandais lui-même, et, sur son verdict, deux journa-
listes coupables d'écrits séditieux, John Mitchell et John
Iftachin, sont condamnés par les juges de la couronne à
quatorze années de déportation avec travaux forcés.
« Et maintenant, croit-on que si ces expédients judi-
ciaires, conformes au génie de la race anglo-normande ,
ne réussissaient pas, l'Angleterre s'arrêterait devant des
théories? Non certainement. Toujours fidèle à son grand
principe, (fu'avant d'être un peuple libre il faut être un
peuple uni, qu'avant d'être un État libre il faut être un
État fort, l'Angleterre, qui n'a reculé devant rien quand
il s'agissait de défendre dans le dernier siècle la dynastie
de son choix, ne reculerait pas davantage ai^oard'bui é
un nouveau péril menaçait l'État.
« En résumé, l'esprit delà législation anglaise, en ma
tière de presse, peut se formuler ainsi : liberté com*
plète pour tout oe qui est un avantage et n'est pas un
danger pour l'Etat, et négation de toute liberté dôe qu'il
PRE
1487
PRE
h'i^i d*aitaquer TÉtai < cîé sorte que la liberté anglaise,
dont la presse Joait si complètement, n*est en réalité que
I expression de la situation politique et sociale du pays.
Comme il n*y a aujourd'hui aucun parti , aucun homme
sérieux qui songe un instant à renverser ou la reine, ou
le gouvernement, ou le Parlement, ou la Constitution,
personne n*a à se préoccuper en quoi que ce soit de la
liberté de la presse, qui n*est alors qu'un avantage pour
Dus. Mais qu'un parti quelconque vienne à se proposer
le renversement de TÉtat au profit d'une autre dynastie
ou de toute autre doctrine, alors, à l'instant même, la li-
berté de la presse n'existe plus pour ce parti »
On voit d'après ce lucide exposé que la liberté de la
presse repose sur un principe politique, pratiqué de tout
temps par les peuples les plus sages, Salus popvui suprema
lex esto, c.-à-d. : « la Nation avant tout. » Aujourd'hui
tout Anglais peut avoir des presses et faire un Journal :
nul cautionnement à fournir, nulle autorisation à de-
mander, nulle formalité dilatoire à subir. 11 suPit de faire
devant les commissaires du timbre une déclaration qui
énonce les matières qu'on veut traiter, les noms et de-
meures de rimprimeur, de l'éditeur et de 2 propriétaires
du journal. La liberté de la presse n'implique pas licence
de tout dire : on applique aux journaux les lois de libelle.
En Belgique, la Constitution garantit aux citoyens la
liberté de la presse, sous l'observation des lois spéciales
qui la régissent. — En Suède, cette liberté est garantie
aussi par la Constitution, et mise sous la sauvegarde des
Étais. Le Jury, inconnu pour les causes ordinaires , est
appliqué au jugement des délits de presse. — En Alle-
magne, la diète de Spire (1520^ soumit à la censure préa-
lable tout ce qui devait s'imprimer. Au xvin* siècle, il se
forma une législation particulière de la presse dans cer-
tains États; la censure la plus rigoureuse exista en
Prusse après Frédéric 11 , et en Autriche sous Bilarie-Thé-
rèse. Le congrès de Vienne, en 1815, régla la situation
de la presse d'une manière à peu près uniforme pour
tous les États de la Confédération germanique. En 1810,
au lieu de consacrer la liberté proclamée en 1813, la
Diète soumit à la censure préalable tous les écrits au-
dessous de 20 feuilles d'impression. Le contre-coun de la
Révolution de France en 1830 donna un peu plus de vie
à la presse allemande, qui s'affranchit complètement en
18i8. Mais, depuis cette époque, le triomphe de la réac-
tion a replacé presque partout les journaux sous un ré-
gime qui leur impose de nombreuses entraves.
V, Peignot, Essai historique sur la liberté d^écrtre
chez les Anciens et au moyen âge, sur la liberté de la
presse depuis le xv* siècle, 1832, in-8°; Leber, De Vital
de la presse et des pamphlets, depuis François /*' jusqu'à
Louis XIV ^ 1834, in-8°; Ludovic Lalanne, Curiosités
bibliographiques, 1845, in-18; Eug. Hatin, Ristoire po-
litique et littéraire de la Presse en France, 1859-<60,
8 vol. in-8^ et in-12 ; — H. Colliez, Code annoté de la
presse, 1835, in-8*; Parant, Jjns de ta presse, 1838,
in-8°; Pégat, Code de la presse annoté^ 1837,in-4<*;
Grattier , Commentaire des lois de la presse et de totis
les autres moyens de publicité, 1839-45, 2 vol. in-8^;
Bonnin, Commentaire des lois de la presse, 1845, in-8o;
Rories et Bonassies, Dictionnaire pratique et complet
de la presse, 1852, 3 yol. in-8«; Chassan, Traité des dé-
lits et contraventions de la parole, de Vécriture et de
la presse, 3" édit., 1846-51, 3 vol. in-S*'; Hipp. Dubois,
Code manuel de la presse, 1851, in-12; Gustave Rousset,
Nouveau Code annoté de la presse, 1856, in-4<^. B.
PRESSE DES MATELOTS. F, notro Dictionnaire de Bio-
graphie et d^Histoire.
PRESTANT, un des jeux à bouche de Torgue. C'est un
quatre-pieds ouvert, de moyenne taille, et en étain fin.
Le prestant , auquel on donne toute l'étendue du clavier,
parle une octave plus haut que le huit-pieds et une oc-
tave plus bas que la doublette ; il est ordinairement placé
dans le positif. Ce jeu est ainsi nommé du latin prœstare,
non pas à cause de la supériorité de son harmonie, mais
parce que, tenant le milieu dans son étendue entre les
BOUS les plus graves et les sons les plus aigus des autres
jeux, il sert à les accorder. Lorsqu'il est employé à la pé-
dale, le prestant prend le nom de pédale de flûte de
vuatre^teds; il doit alors être fait en étoffe, et être de
plus crosse taille. ' F. C.
PRESTATiON ^du latin prMstare, fournir), redevance
anno3lle en grains, denrées, volailles, etc. La prestation
ennature,d un usage très fréquent dans les contrats féo-
daux, est encore employée aujourd'hui dans les baux à
ferme. De pi us, elle est consacré dans la langue du Droit
administrptifen matière de réparations dos cnemins vid*
naux. Les prestations de ce genre sont perçues en cen-
times additionnels au principal des quatre ooatribtttioiii
directes, ou en Journées de travail, dont le nombre ne
peut excéder trois par an, et qui sont touiours racho*
tables. Aux termes de la loi du 21 mai 1838, tout habi«>
tant, chef de famille ou d'établissement, à titre de pro-
priétaire, de régisseur, de fermier ou de colon partiaire,
porté au rôle des contributions directes, pourra être
appelé à fournir chaque année une prestation de trois
Jours, 1® pour sa personne et pour cliaque individu màlo,
valide, âgé de 18 ans au moins et de 60 ans au plus,
membre ou serviteur de la famille, et résidant dans la
commune; 2^ pour chacune des charrette^ ou voitures
attelées, et en outre pour chacune des bètes de somme,
de trait, de selle, au service de la famille ou de l'établis-
sement dans la commune. L.
PRESTIDIGITATEUR (de l'italien presto, preste, et du
latin digitus, doigt), celui qui fait des tours subtils avec
les doigts. C est un nom plus relevé que celui d'escamo-
teur (d'escamoté^ petite balle de liège). L'abus que quel-
ques-uns ont fait de leur adresse a valu au mot esca*
moter le sens de tromper, de voler, La prestidigitation
est un talent qui tient jusqu'à un certain point aux con-
naissances physiques et chimiques. Parmi ceux qui s'y
sont livrés avec succès, on cite Pinetti, Bienvenu, Oli-
vier, Ledru dit Comus, Bosco, Comte, Robert Houdin, etc.
PRESTIAIONIË , en termes de Droit canonique, revenu
affecté par un fondateur à l'entretien d'un prêtre, sans
qu'il y ait érection en titre de bénéRce.
PRÊT, acte par lequel on cède la jouissance temporaire
d'une chose que l'on possède. Le contrat de prêt peut
être unHatéral et de bienfaisance, ou synallagmatique et
commutatif. U doit être fait par une personne capable ;
toutefois, le prêt fait par un incapable astreint l'emprun-
teur à restitution, non pas en vertu du contrat , qui n'est
pas valable, mais en vertu de l'obligation naturelle à la-
3uelle il a donné lieu. Il y a trois sortes de prêts : le Prêt
usage ou Commodat (du latin commodare, prêter), le
Prêt de consommation, et le Prêt à intérêt.
Par le Prêt à usage, une des parties livre gratuitement
à l'autre une chose non fongible, mobilière ou immobi-
lière, à charge de la rendre après s'en être servi. L'em-
prunteur, qui a reçu l'usage, et non la propriété de la
chose prêtée, doit : l" veillei, en bon père de famille, à
la garde et à la conservation de cette c^ose; 2» ne s'en
servir que pour l'usage déterminé par la convention ou
la nature de la chose ; 3^ rendre la chose prêtée au terme
convenu, ou, à défaut de convention, après qu'elle a servi
à l'usage pour lequel elle avait été empruntée. Faute du
soin nécessaire, il répond de toute perte et de tout dom-
mage arrivés à la chose prêtée. Le prêteur est tenu de res*
tituer à l'emprunteur les dépenses que ce dernier aurait
faites pour la conservation de la chose, pourvu qu'elles
aient été extraordinaires, nécessaires, et assez urgentes
pour que le prêteur n'ait p;i être prévenu. L'emprunteur
ne peut retenir la chose prêtée en compensation de ce
que le prêteur lui doit. Ce qm concerne ce genre de prêt
est r^é par le Code Napoléon, art. 1874 et suiv.
Dans le Prêt de consommation ou simple prêt, une
partie livre à l'autre une certaine quantité de choses
qui se consomment par l'usage. Les Romains appelaient
ce prêt mutuum (parce que l'objet devient ex meo tuum,
de mien tien). Ici l'emprunteur devient propriétaire de
la chose prêtée; elle périt pour son compte, de quelque
manière que la perte arrive, et même avant qu'il ait pu
en user. Il est tenu de rendre au terme convenu la quan-
tité de choses prêtées, dans la même espèce et qualité, ou
bien leur valeur. Le prêteur garantit contre l'éviction , et
est responsable du préjudice que les défauts de la chose
prêtée auraient causé a l'emprunteur.
Le Prêt de consommation n'est pas essentiellement gra-
tuit : s'il perd son caractère de oienfaisance et devient
intéressé, il se nomme Prêt d intérêt. Il se rapproche
alors du lowige, sous le rapport du profit revenant au
prêteur; mais il en diffère en ce que la propriété de la
chose passe à l'emprunteur du moment de la livraison,
et que le profit du prêteur reste le même, quoi que de-
vienne la chose prêtée. Le prêt à intérêt doit être stipulé
expressément et par écrit : la dette des intérêts ne pour*
rait être prouvée autrement, ni par témoins, ni par les
livres et registres du créancier. L'argent est l'objet le
plus fréquent du prêt à intérêt. F. iNnteta.
Un prêt peut être fait sur immeubles ; il donne lieu à
hypothèque ( V, ce moty II peut aussi avoir lieu avec ga*
rantie sur choses mobilières ; alors il s'appelle, 8alva(4
les droonstances, Prêt sur dépôt ou consignation de
PRE
148S
PRE
chandises (V, Consignation^ Prêt sur gaqe, FrH à la 1
grosse. Le Prêt sur gage est un prêt garanti par un nan-
tissement, par un objet d'une valeur le plus souvent su-
périeure à la somme prêtée. Autrefois il était loisible à
tout particulier d'ouvrir des maisons de prêt sur gage :
aujourd'hui, aucun établissement de ce genre ne peut
exister sans l'autorisation du gouvernement, sous peine
d'emprisonnement et d'amende {Code pénal, art. 411).
Les maisons de prêt ont été remplacées par les Monts-d&-
piété {V, ce mot). — Le Prêt à la grosse (sou»-ent.
aventure) est fait sur des objets exposés à la fortune de
mer, avec cette condition que, s'ils arrivent heureuse-
ment , le prêteur obtiendra, outre le remboursement de
ses avances, une somme à titre de profit , et qu'en cas de
sinistre il ne pourra rien réclamer, sinon la valeur que
ces objets auront conservée. Dans une convention de ce
genre, Tintérêt doit être plus élevé que dans le prêt or-
dinaire, puisqu'il y a des chances particulières de perte.
Le prêteur à la grosse a un privilège sur les onjets,
pourvu que son contrat soit prouvé par écrit, et enre-
gistré dans les six jours de sa date au greffe du tribunal
de commerce. Tout emprunt à la grosse, fait pour une
somme excédant la valeur des objets sur lesquels il est
affecté, est déclaré nul à la demande du prêteur, s'il est
prouvé qu*il y a fraude de la part de l'emprunteur; s'il
n'y a pas fraude, il est valable jusqu'à concurrence seu-
lement des objets affecta Ce qui concerne ce genre de
prêt est réglé par le Code de commerce, art. 311-331.
V. Troplong, Commentaire des titres X, XI et XII du
Code cml, du Prêt, du Dépôt et du Séquestre, 1831,
2 vol. in-S».
pRftr, terme d'administration militaire. V. Solde.
PRÊTS d'honneur (Bauques de), institutions recom-
mandées aux préfets par une circulaire du ministre de
l'intérieur, en date du 20 février 1850. Elles ont pour
but de venir en aide, par des prêts d'argent dont le
maximum est ordinairement fixé à 200 fr., aux besoins
légitimes des claies laborieuses, et de combattre les
abus de l'usure qui ruine les campagnes et les petites
industries. On écrit sur deux registres distincts les noms
des emprunteurs qui ont remboursé et ceux des débi-
teurs de mauvaise foi : c'est là toute la sanction. Quel-
ques banques de prêts d'honneur ont été formées par des
particuliers; «lies ont eu peu de succès.
pR^s DB l'enfangb (Sooiété des). V, au Supplém,
PRÊTE-NOM, celui qui prête son nom à autrui, et
qui, agissant pour le compte d'un tiers, se présente
comme 'intéressé apparent dans une affaire. Un prête-
nom couvre une interposition de personnes, et réalise
une stipulation défendue par la loi. Toutefois, il est
licite d'y recourir dans une déclaration de command
{V, ce mot),
PRÉTÉRIT, du lann prœteritum {tempus)^ temps
passé. C'est le nom que Varron et Quintilien donnent
au temps passé de la conjugaison latine, celui que nous
appelons parfait {V. ce mot). Le terme de prétérit est
plus généralement employé dans notre langue. On a
donné le nom de prétérit imparfait à la forme verbale
qui sert à marquer le passé avec rapport au présent
(V. Imparfait); celui de prétérit parfait défini, ou sim-
plement prvWt't défini^ à l'inflexion verbale qui indique
une action ou un état passés absolument et ayant eu lieu
dans un temps déterminé : « La bataille d'Aupterlitz se
livra à la fin de 1805; n celui ù^prétérit {parfait) indé-
fini, à la forme particulière de conjugaison indiquant
une chose entièrement accomplie, mais dont l'époque
peut être ou ne pas être déterminée : a L'Empire romain
a été renversé par les Barbares du Nord ; » celui de pré-
térit antérieur, à la forme qui signifie une chose passée,
mais considérée p>ar rapport à une autre qu'elle a nré-
cédée : « Lorsque feus terminé mon discours, l'assemblée
se retira. » Enfin on appelle prétérit plus-que^arfait la
forme verbale qui exprime doublement le passé (V. Plus-
qub-parfait). Au lieu de dire futur prétérit ^ on ait fiUur
passé ou antérieur; on dit également coTiditionnel passé,
passé de Vinflnitif, Au subjonctif, on dit passa ou prétérit
et plus-que-parfait. — Le prétérit défini correspond à
l'aoriste des Grecs ; le prétérit indéfini , tantôt à ce temps,
tantôt au parfait. Le parfait latin équivaut à ces deux
formes de la conjugaison française. P.
PRÉTÉRITION ou PRÉTERMISSION (du latin prœter-
ttus, passé, ou prœtermissus, omis), ou PARALIPSE (du
grec paraléïpéin, laisser de côté), flpre de Rhétorique
par laquelle on feint de passer sous silence ou de ne tou-
cher que légèrement des choses sur lesquelles néanmoins
on insiste avec force. Ainsi, dans VÀthalie do Racine
(acte m, se. 3 ) , le grand-prêtre Mathan dit à Nabalt
Qu*est-ll besoin , Nabal , qa% tes yeux Je rappelle
De Joftd et de moi U ûunease querelle ?...
C'est un moyen adroit de faire valoir, en les groupant, en
les rapprochant, des preuves ou des circonstances secon-
daires qui, isolées, ne produiraient que peu d'effet;
moyen puissant surtout lorsque, par une progression
habilement ménagée, on les fait suivre de raisons fortes
et concluantes. G.
paérÉRiTioN, en termes de Droit romain et dans nos
anciens pays de Droit écrit, omission d'instituer héritiers
ceux à qui le testateur devait au moins une portion légi-
timaire. Elle entraînait la nullité du testament.
DRii'TK^Y'rî? f r. ces mots dans notre Dictionnaire de
PRÉTOIRE.' ) ^«Vrap/ite et d^Histoire.
PRÊTRE , en latin presbyter (du grec presbytéros, plus
ancien, vieillard), se dit, en général, de tout ministre
du culte, et spécialement, dans l'Église catholique, de
l'ecclésiastique revêtu de la prêtrise { V. ce mot). Toute
religion a eu ses prêtres. Ceux de l'ancienne Egypte for-
maient la classe la plus élevée dans l'État : après avoir
gouverné au nom des Dieux, ils furent encore, depuis
l'institution de la royauté, les interprètes de leur volonté
dans la loi, les modérateurs des souverains; ils eurent
l'administration de la Justice, l'exercice des fonctions pu-
bliques les plus importantes, et à la puissance que leur
donnait une instruction refusée aux autres classes ils
ajoutaient, comme possesseurs du tiers du pays, la force
qui appartient d'ordinaire aux maîtres de la propriété.
Chez les Hébreux , au-dessous du Grand-Prêtre ( V, ce
mot dans notre Dictionnaire de Biogr. et d'Histoire ) , les
autres membres de la famille d'Aaron constituaient les
prêtres, chargés des divers sacrifices, et les lévites avaient
dans leurs attributions l'entretien du Temple, l'explica-
tion de la loi, l'administration de la Justice et l'instruc-
tion du peuple. En Grèce, les rois firent primitivement
l'office de sacrificateurs; les prêtres chargés spécialement
des fonctions du sacerdoce étaient appelés néchores ; d'au-
tres croient que les néocores étaient seulement gardiens
des temples. Quelquefois des familles entières étaient
vouées à un sacerdoce particulier ; chaque divinité avait
ses prêtres. A Rome, les fonctions sacerdotales ne furent
confiées d'abord qu'à des patriciens; puis, les plébéiens y
furent admis. Les Anciens attribuèrent aussi une part dn
sacerdoce à des prêtresses, tantôt vierges, comme celles
de Diane, de Minerve, et de Vesta, tantôt mariées, comme
celles de Junon. Les prêtres des Gaulois se nommaient
Druides, et ceux des peuples du Nord, DroJ/es; là aussi il y
avait des prêtresses. — Dans les premiers temps du chris-
tianisme, on donna le nom de Prêtres aux anciens qui
expliquaient aux fidèles les saintes Écritures, aussi bien
qu'à ceux qui avaient reçu le pouvoir de célébrer la messe
et d'administrer les sacrements. Aucune exclusion n'existe
dans l'Église pour le sacerdoce : il est accessible aux
hommes de toute condition. Les prêtres de l'Église d'Orient
portent le nom de papcu ou popes (pères). Chez les Pro-
testants, les ministres du culte sont dits ministres ou
pasteurs. Les prêtres des Indiens s'appellent brâhmines
ou brahmanes; ceux de la religion de Bouddha, bonxes •
Les Musulmans distinguent les muphtis, les imans, les
mollahs, les derviches. B.
PRÊTRISE , le plus élevé des trois ordres mineurs dans
le sacerdoce catholique, celui que confère le sacrement
de l'Ordre ( V. Ordre, Ordination). F^ur être ordonné
prêtre, il faut être &gé de 25 ans au moins, et avoir passé
un an dans le diaconat.
PREUILLY (Église S'-Pierre, à), dans le département
d'Indre-et-Loire. Cette ancienne abbatiale bénédictine^
b&tie de 1001 à 1009, a servi de type pour un grand nom<*
bre d'églises de la Touraine. Elle est en forme de croix la*
tine, avec collatéraux, et déambulatoires autour de rab«
side : sa longueur est de 57"*,50, sa largeur de 18" (^°* an.
transept), et sa hauteur, de lO^^ôO à la nef principale.
15™ aux bas côtés. A la naissance de chacun des croisil-
lons était bâti un clocher; un seul, de 22"',50 d'élévation,
est aujourd'hui apparent. Les toitures actuelles n'offrent
pas la disposition des couvertures qu'elles ont remplacées :
il y a lieu de croire que le comble primitif était presque
plat et couvert en dalles. La nef et l'abside ont chivcune
cinq travées; il faut ajouter une travée pour le chœur, et
une autre pour l'intertransept; trois chapelles sont pra-
tiquées dans l'abside* Les paliers de la nef, carrés dans
la masse,sont cantonnés de quatre colonnettes arrondies;
les bases se rsDorocheat beaucoup du genre atàque,et les
PRE
1489
PRI
chtptteaax présentent beaucoup de richesse et de variété.
U voûte est à plein berceau dans la grande nef, et en
arc-boutant dans les nefs latérales; la grande trayée du
cbœur est seule voûtée avec nervures. Une crypte, main-
tenant remplie de décombres, existe sous le sanctuaire.
La façade occidentale est remarquable par la science de
l'appareil : à la partie inférieure s*ouvre la porte d*entrée,
ornée avec sobriété; au l*' étage, une large fenêtre est
flanquée de deux plus petites; au 2* s*étend une série de
petits arcs cintrés, surmontée d*une fenêtre géminée
donnant du Jour sous la voûte de la nef; le tout est cou-
ronné par un pignon aigu. B.
PREUVE, démonstration directe ou indirecte de la vé-
rité (F. DiMONCTRATioN , Argcment). — En Jurispru-
dence, le Juge n'est pas tenu d*aller lui-même à la re-
cherche des preuves; c'est aux parties en cause à les
produire, et, en règle générale, la charge de la preuve
tombe entière sur le demandeur; s'il ne la fournit pas,
il est déclaré non recevable. Nulle preuve n'est admise
contre les présomptions légales ni le serment décisoire.
La loi admet, selon la nature des actions, diverses sortes
de preuves : en matière civile , les preuves se font par
titres ou par témoins; en matière criminelle, elles se
font surtout par témoins. La Preuve par titres ou Preuve
littérale résulte d'un acte écrit qui constate que tel
fait a eu lieu, que telle convention a été arrêtée et con-
clue : quand cet acte a été dressé par un officier pu-
blic, la preuve est dite authentique, et ne peut être
attaquée que par l'inscription de faux ou autres voies
extraordinaires; si l'acte est sous seing privé, la preuve a
la même force, du moment que les parties ont déclaré ne
pas méconnaître leur signature. En Tabsence de titres
formels, il n'y a plus que des demi-preuves, pouvant
donner lieu à un commencement de preuve par écrit : tels
sont les écrits soussignés des parties, les lettres missives,
les papiers domestiques, les copies de titres, etc. — La
Preuve testimoniale n'est point admise en matière civile
pour choses qui ont pu faire l'objet d'un contrat et dont la
somme ou valeur excède 150 fr., à moins qu'il n'existe déjà
un commencement de preuve par écrit, ou qu'il ait été
impossible de se procurer la preuve littérale ou de conser-
ver celle qu'on avait obtenue. Ainsi, la preuve par témoins
est admise pour les obligations qui naissent des quasi-
contrats, des délits ou des quasi-délits ; pour les aép6ts
faits en cas d'incendie, ruine, tumulte, naufrage, ou par
les voyageurs dans les hôtelleries ; pour le cas où le créan-
cier a perdu son titre par force majeure. En Droit com-
mercial , les juges admettent , quand ils le croient néces-
saire, la preuve testimoniale pour les achats et les ventes.
En matière de contraventions et de délits, la preuve se
fait par procès-verbaux ou rapports et par témoins. V. Des-
quiron, Traité de la preuve par témoins en matière civile
et en mcUière criminelle , 1811, 2 vol. in-8<*; Bentham,
Traité des preuves judiciaires, 1830,2 vol. ln-8<*; Gabriel,
Essai sur la nature des preuves, revu par Selon, 1845,
in-S** \ Hittermaîer, De la Preuve en matière criminelle,
trad. de l'allemand par Alexandre, 1848, in-8®; Bonnier,
Traité tfiéorique et pratique des Preuves en Droit civil
et en Droit criminel, 2« édit., 1852, in-8o.
Dans les premiers siècles de la monarchie française,
on admit en Justice ces preuves étranges qu'on appelait
Jugements de Dieu ( V. Épreuves jddiciairbs, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire). C'est ce c^u'on
appelait la Purgation vulgaire, opérée de six manières
différentes : par l'eau froide, par l'eau bouillante, par le
feu, par le fer rouge, par le combat en champ clos, par
la croix et par l'Eucharistie ; ajoutons aussi la cruen^
talion, c.-à-d. lorsqu'il découlait du sang de la plaie de
rhomme homicide, en présence de celui qui était accusé
du meurtre. La Purgation canonique se faisait par le
serment, et consistait à produire un certain nombre de
témoins (V. Coiudratedrs, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire), On employa encore trois
preuves aussi vagues que les précédentes, celles qui ré-
sultaient de la probabilité du fait {evidentia facti)^ du
bruit commun (fama publica)^ et de la fuite {fuga), A
mesure que la civilisation fit des progrès, ces usages se
perdirent. Dans l'état du Droit criminel en 1789, on ad-
mettait quatre sortes de preuves : la preuve testimoniale,
gui se rormaii de la déposition des témoins; la preuve
instrumentale, qui se tirait des écrits; la preuve vocale,
résultant de l'aveu des accusés ; et la preuve conjectU'
raie, qui résultait des indices et présomptions.
PREUVES, raisons sur lesquelles l'orateur s'appuie pour
convaincre. Elles seules peuvent donner du corps et du
nerf au discours; ell^ font l'office, dit Cicéron, de chair.
de muscles et d'os. Il n'est pas toujours nécessaire de
plaire et de toucher, il l'est toujours d'instruire et de
convaincre ; il y a même des circonstances où la preuve
suffit pour amener les juges au sentiment de l'orateur.
Les Preuves prennent différents noms suivant leur na-
ture, leur origine et leur valeur. La preuve de fait s'ap-
pelle cause; la preuve de droit, question, £lle est in^rtn-
sèque, quand elle est tirée du fond même «m sujet , ou
des circonstances qui en dépendent; extrinsèque, q^uand
elle est prise hors du suiet ou de ses accessoires. Aristote
appelle celle-ci artificielle, et celle-là na^urella. La preuve
est péremptoire, ouand elle produit l'évidence; probante,
lorsque, tout en démontrant la vérité, elle peut encore
être contestée; prob<ible ou approchante, quand, au lieu
de la certitude, elle amène la plus grande probabilité;
hypothétique, quand elle repose sur une hypothèse; per-
sonnelle {ad Aotntnem), quand elle ne convient qu'à une
seule personne; spécieuse, quand elle n'a que l'apparence
de la vérité; sophistique, quand, étant fausse, elle est
employée avec intention de tromper. L'orateur ne saurait
donner trop de soin au choix et à la disposition des
preuves ; de l'ordre qu'il suit dépend souvent le succès de
son discours ( V, CoNnaiiATioN). Les rhéteurs distinguent
les preuves elles-mêmes et la manière de les trouver,
c-à-d. le^ arguments et les lieux des arguments ou lieux
communs ( V. ces mots), H. D.
PRÉVARICATION (du latin prœvarican, s'écarter de
la ligne droite), action de trahir la cause qu'on doit
soutenir, de manquer par mauvaise foi aux devoirs de sa
charge, aux obligations de son ministère. Dans notre
ancien Droit, ce mot désignait principalement l'infraction
des officiers de justice à leurs devoirs. La prévarication
comprend les crimes et délits connus aujourd'hui sous
les noms de forfaiture ^ déni de justice, concussion, cor»
ruption, abus iautortté (F. ces mots),
PRÉVENTION, préoccupation d'esprit qui ne permet
pas d'apprécier les choses à leur véntable point de vue,
de les juger avec impartialité.
pETONTiON, en termes de Droit, état de l'individu que
la Chambre du conseil a renvoyé devant le tribunal de
police correctionnelle à raison d'un délit, ou devant la
Chambre des mises en accusation à raison d'un crime.
«Cet individu prend alors le nom de prévenu, — Prévenu
tion signifie aussi l'action de devancer l'exercice du droit
d'un autre : ainsf, pour la recherche des contraventions,
les commissaires de police ont prévention à l'égard des
^des champêtres. — En Droit canonique, la Préven»
tion en cour de Rome était le droit qu'avait le pape de
prévenir les coUateurs dans la nomination aux bénéfices,
en nommant par lui-même.
œ^ÂLES (COU»). l'^ToSS^aA^^df^ii
PRIAMELN (du latin preambulus, préambule), nom
qu'on donne en Allemagne à des recueils de sentences
morales des xiv*, xv" et xvi* siècles, curieuses à étudier
comme expression des mœurs et du caractère de l'époque*
C'étaient comme les préambules de la sagesse populaire.
PRIAPÉE, en latin Priaipeia, nom donné à toute collée
tion de poèmes épigrammatiques, à tout ouvrage peint o«
sculpté, dont Priape est le sujet.
PRIAPÉEN (Vers} , espèce de vers grec et latin consa*
cré aux chants en rhonneur de Priape : c'est la réunion
du glyconique et du phérécratien , c.-à-d. nue le l**" pied
est trochée ou spondée f plus rarement ïambe, tribraque,
dactyle), le 2* un chonambe ou un ditrochée, le 3* un
Sambe, le 4* un trochée ou un spondée, le 5* un cho<
riambe suivi d'une syllabe indifférente :
Talis I Sate mena | stnpor Hnil vl|det, nihll an j dit (Catvllb).
Quelquefois le choriambe prend la 3* place; alors le
2* pied est ou un spondée ou un trochée. Le vers pria-
péen était asynartète, comme on le voit par l'exemple
suivant de Catulle, où la dernière syllabe du glyconique
doit compter comme longue malgré la voyelle qui suit :
Nutrivl : magia et magia [) ut beata quotannla.
P.
PRIE -DIEU, meuble d'église, d^oratoire, ou de cham-
bre à coucher. C'est une chaise basse sur laquelle on
s'agenouille, et qui est garnie d'un support ou pupitre à
hauteur d'appui. Au xvi* siècle on a fut en menuiserie
des prie-Dieu fort élégants, délicatement sculptés, et,
quand ils étaient destinés à s'appliquer contre un mur,
on les surmonta d*un retable à volets, formant ce qu'oa
appelait un autel domestique,
94
PRI
1490
PRI
PRIÈRE, acto do culte par lequel on adore ou invoque
Dieu. La prière peut ôtre mentale ou orale. Chez les
Hébreux , il n'y eut d'abord aucune prière accompagnant
les sacrificea , et ^ pour la prière particulière, Mofae l'aban-
donnait au sentiment individuel et à l'inspiration du
moment. Le Pentatcuque ne renferme que trois formules
de prière : la bénédiction, que les prêtres prononçaient
sur le peuple {Nombres, vi, 24-20) ; les actions de grâce,
qu'on devait réciter en offrant les prémices ( Deutéro-
nome, xxvi, 5-10); et la prière, qùMl fallait prononcer en
présentant la seconde dime (/6{(i., 13-15). Esdras ordonna
deux prières pour les jours ordinaires (le matin et le soir),
trois pour le jour du sabbat, et composa 18 bénédictions
que chaque Israélite devait dire chaque jour. Les Grecs
personnifièrent les Prières, et en firent des filles de Jupi-
ter : ils les représentaient boiteuses, timides, et marchant
après riDjure, pour guérir les maux qu'elle a faits. Les
Romains priaient généralement debout, la tête voilée, en
touchant de la main l'autel, ou en la portant à la bouche;
ou bien ils embras.s:uent les genoux des dieux. Chez
les Chrétiens, Tensenible des formules de prières appro-
{)riées aux diverses cérémonies s'appelle la Liturgie. Ma-
lomet avait d'abord imposé k ses sectateurs la prière
cinquante fois par jour; puis, en raison de la faiblesse
humaine, il réauisit les prières à cinq , et elles se font
avant le lever du soleil , à midi , avant et après le coucher
du soleil, enfin à la première veille de la nuit : pour
qu'elles soient elTicaces, la loi musulmane exige l'état de
propreté, la décence dans le vêtement, la direction du
corps vers le temple de la Mecque, et la volonté ou l'in-
tention. Les prières peuvent être faites en particu-
lier chez soi, ou en plein air, ou en commun dans une
mosquée sous la direction d'un iman ; l'heure en est in-
diquée chaque fois par les muezzins. Tout musulman doit
parler sa prière, parce que la prière mentale est de nulle
valeur. B.
PRIEUR. \
PRIEURÉ. ( F. ces mots dans notre Dict. de
PRIMAIRES (Écoles). ( Biographie et d'Histoire,
PRIMAT. /
PRIME (du latin prima pars, part prélevée), somme
accordée par l'État à titre d'encouragement pour quelque
opération hasardeuse nu onéreuse de commerce, d'indus-
trie, d'agriculture. Tclies sont les primes pour la pèche
de la baleine et de la morue, pour l'exportation de cer-
taines marchandises. Le drawback {V. ce mot) est une
espèce de prime. On donne aussi des primes pour la des-
truction des animaux malfaisants.
PRIME, terme de Liturgie. V, notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
PRIMB (Marché à). F. Bodrsb.
PRiHB, somme convenue entre un assuré et un assu-
reur pour le prix des risques garantis par ce dernier.
PRIMICIER. ) V. ces mots dans notre Dictionnaire
PRIMIPILAIRE. i de Biographie et d'Histoire.
PRIMITIF, mot d'où d'autres sont formés. Il s'oppose
à dérivé. Tel est le mot cfiar, par rapport à chariot, char-
retier, etc. On ne saurait toujours remonter à la source
primitive d'un mot, car la plupart des mots s'altèrent par
le Ions usage, ou perdent leur véritable signification par
suite d'une foule de circonstances diverses; aussi donne-
t-on généralement le nom de primitifs, dans les langues
déjà vieillies, aux mots qui ne paraissent dériver d'aucun
autre. Il est vraisemblable que la plupart des mots ont été,
à l'origine, purement monosyllabiques, ou formés, par
onomatopés, de la répétition plus ou nftoins exacte du
même son dans deux ou trois syllabes : tels sont les mots
imit&tifs coucou, murmure, tictac, cascade^ etc. F. Ra-
cine, Radical. P.
PRINCE , titre de dignité. F. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
PRINCE (Le Traité du), ouvrage de peu d'étendue, écrit
en 1514, par Machiavel, pour l'adresser à Julien de Médi-
cis, l'un des fils de Laurent le Magnifique, et frère de
Pierre II. L'auteur discute ce que c'est que la principauté,
combien il y en a d'espèces, comment elles s'acquièrent,
comment elles se maintiennent, et pourquoi elles se
perdent. Le but du gouvernement, selon Machiavel, est
de durer, et cela n'est p(M»ible qu'à l'aide de rigueurs,
« attendu que les hommes sont généralement ingrats,
faux, turbulents; d'où il suit qu'il faut les contenir par
la peur du châtiment. » Les cruautés sont nécessaires
dans un gouvernement nouveau ; et il faut plutôt se faire
craindre que se faire aimer, quand on ne peut obtenir
Ton et l'autre. Le prince doit avoir sans cesse à la bouche
l9iâ szctB de justice, de loyauté, de clémence, de religion,
mais ne pas s'inquiéter de leur donner un démoDii tr»tm
les fois que son intérêt l'exige. Quant à savoir si ce qui
est bien doit être préféré à ce qui est mal , c'est une
question qu'il faut lûsser débattre à des moines. — Cet
aflTreuses maximes, et une foule d'autres du môme senre,
qui composent ce qu'on a appelé la politique machiavé-
lique, sont exposées sans passion , comme choses natu-
relles; en calculant froidement les moyens él le but, en
présentant comme idéal César Borgia, Machiavel ne donne
pas le mal comme bien, mais comme utile. La tranquillité
avec laquelle il pose ses principes prouve qu'il n'y avait
rien là qui répugnât à ropinion courante, et <{u'il a re-
tracé simplement ce qui était alors d'une pratique com-
mune, au lieu d'avoir été l'inventeur de l'art qui a reçu
de lui son nom : le livre parut avec une autorisation et
un privilège du pape Clément VII. On a cru à tort que
Machiavel avait écrit ironiquement, pour faire haïr aux
peuples l'autorité d'un seul, ou pour que les Médlcis en
vinssent par leurs excès à convertir la patience des Flo-
rentins en fureur : une lettre adressée en 1513 à l'un de
ses amis, François Vettori , prouve au contndre que l'in-
digence le poussait à se charger de l'emploi de pervertir
les princes pour arriver à leur plaire. D'ailleurs, il est
impossible d'apercevoir l'intention satirique dans le traité
du Prince; le sang-froid de la leçon en redouble l'atrocité.
F. V Anti-Machiavel de Frédéric II, et le livre de H. de
Bouille, Commentaires politiques et historiques sur le
Traité du prince de Machiavel, et sur VAnti-Machiavd
de Frédéric II, Paris, 1827, in-8«. B.
PRINCIPAL, terme universitaire. F. notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
PRINCIPAL, nom qu'on donne, surtout en Allemagne, au
jeu le plus important de l'orgue. On en fait les tuyaux
en étain le plus pur, et on en place les plus grands en
montre. Cest une flûte ouverte, dont le timbre varie
selon la place qu'elle occupe. Chaque clavier a son Prin-
cipal, auquel on donne, ainsi ^'aux jeux qui lui sont
annexés, une qualité de son difl'érente des autres jeux
de môme espèce. La grandeur de l'orgue se détermine
ordinairement d'aprte celle du Principal : ainsi, un orgue
de 32 pieds est celui qui a un Principal de 32 pieds.
Quand on désigne un Principal comme ayant 24 pieds,
cela signifie ou que le jeu ne descend que jusqu'au fa,
ou que les tuyaux au-dessous de ce fa sont plaicés dans
l'intérieur.
PRINCIPE (du latin principium, commencement),
vérité générale et fondamentale qui sert de point de de-
part et d'explication à d'autres vérités. Les principes
peuvent être considérés, soit séparément, soit simulta-
nément, sous un double point de vue : ou en eux-mômes,
ou dans l'intelligence qui les conçoit. Ainsi, c'est un prin-
cipe que tout phénomène a une cause (principe de cau-
salité); et cela doit s'entendre, et du fait lui-même, et
de la connaissance que nous en avons. Autre exemple en-
core plus concluant : Dieu est le principe de tout ce qui
est , et rid6s que nous avons de Dieu est le principe d'un
grand nombre de nos connaissances. Ce sont ces deux
points de vue que l'on désignait dans l'École sons les
noms de Principium essen£ et de Principium cognos-
cendi. Absolument, et en lui-môme, le principe est tou-
jours antérieur à ses conséquences. D n'en est pas de
môme de la connaissance des principes ; tantôt elle est
antérieure, et tantôt postérieure : antérieure , quand il
s'agit des vérités prenuères et évidentes par elles-mêmes,
des axiomes méti4)hyBiques, logiques, moraux, mathé-
matiques, que l'entendement conçoit d'abord et néces-
sairement dans toute leur universalité; postérieure, lors-
qu'il s'agit des lois de la nature, qu'il ne peut découvrir
qu'à travers les faits particuliers dans les({ueb elles
trouvent leur application et auxquels elles impriment
une forme commune. — Dans un sens un peu différent.
Principe se dit des vérités sur lesquelles s'appuie la dé-
monstration {V. DâlONSTRATlON , RAISONNEMENT, SYLLO-
GISME ), et désigne parfois encore, il est vrai , des vérités
évidentes par elles-mêmes, mais parfois aussi des vérités
qui , démontrées par un raisonnement antérieur, servent
à leur tour de point de départ à une démonstration nou-
velle. B— B.
panvciPB (Pétition de), sophisme qui consiste à sup-
poser prouvé ce qui est en question , ou à définir un
objet par le mot qui a besoin d'être défini. Par exemple :
« Pourquoi l'opium fait^-il dormir T — Parce qu'il a une
vertu dormitive; » ou cet autre pris également dans Mo-
lière : « Je touche au but du premier coup, et je vous
apprbods que votre fille est muette. — Oui ; mais je vou-
' drais bien que vous puissiex me di/% d'où cela vient. —
PRI
1491
PRI
n n*est rien de plus aisé ; cela vient de cê qu'elle a perdu
ia parole. — Fort bien; mais la cause, s'il tous plaît,
qui fait qu'elle a perdu la parole? — Tous dos meilleurs
auteurs tous diront que c'est l'empêchement de l'action
de sm langue. » Le remède à ce sophisme est la définition
claire et précise de tous les termes. H. D.
PRISE A PARTIE, action civile dirigée contre un juge
ou un greffier, pour le faire déclarer responsable des torts
qu*il a causés dans Texercice de ses fonctions, dans les
cas de déni de Justice, dol, fraude, concussion, etc. La
prise à partie contre les juges de paix, les juges des tri-
bunaux de commerce ou de l'* instance, les conseillers
de Cour impériale, est portée à la Cour du ressort; la
prise à partie contre une Goilr d'assises ou une Cour
d'appel est portée à la Haute Cour. Aucun juge ne peut
être pris à partie sans la permission préalable du tribunal
devant lequel la cause sera portée; une autre section ou
une autre Cour d'appel que celle qui aura autorisé la
partie juge sur le fond. Si le demandeur est débouté, il
est condamné à une amende de 300 fr. , au moins, sans
préjudice des dommages-intérêts , s'il y a lieu.
PRiSB d'bad , action de détourner d'un cours d'eau gé-
néral une certaine quantité d'eau pour les besoins de
l'agriculture ou de l'industrie. Les prises d'eau se règlent
par titres , par la jouissance, et aussi par des considéra-
tions d'utilité publique.
pusB DE CORPS, action de saisir un homme au corps
pour quelque affaire criminelle, en vertu d'un mandat du
juge ; — action de mettre la main au nom de la loi sur un
débiteur, pour le forcer à payer. V. Contrainte par
CORPS.
prise o'HABrr, acte de revêtir l'habit religieux, et céré-
monie dans laquelle s'accomplit cette consécration.
PRISÉE,^ action d'apprécier, de mettre à prix. C'est,
en particulier, le nom qu'on donne à un état de lieux
d'usine, et au ptii que les conunissaires-priseurs mettent
aux choses inventoriées. V, Estimation.
PRISES (Conseil des). V. Conseil des prises, dans
notre Dictionnaire de Bwgraphie et d'Histoire.
PRISMATIQUES (Moulures), moulures affectant la
forme d'un prisme. (Test un ornement de l'architecture
romano-byzantine, qu'on rencontre assez fréquenunent
dans les archivoltes des portails,
PRISONS (du bas latin prisio, corruption deprehensio,
action d'arrêter), lieux où l'on enferme les accusés et les
condamnés. On en distingue aujourd'hui cinq espèces
différentes. Les Maisons de police municipale, établies
dans chaque arrondissement de juge de paix, et dans
les villes où il y a une maison d'arrêt, sont desti-
nées à recevoir les individus condamnés à l'emprisonne-
ment par les tribunaux de simple police; dans l'usage, les
gardes nationaux y subissent aussi les peines dont lisant
été frappés. — Lss Maisons dairét , établies dans chaque
arrondissement , revivent : 1® les inculpés, contre les-
quels une information est dirigée; 2o les prévenus, jus-
qu'à ce que le tribunal correctionnel ou la Chambre des
mises en accusation ait statué sur leur sort ; 3<* les con-
damnés à un emprisonnement oui ne dépasse point un
an. — Les Maisons de justice, placées au chef-lieu judi-
ciaire de chaque département, reçoivent : 1** les individus
qui se pourvoient en appel devant les tribunaux de chef-
lieu ou devant les Cours impériales; 2® les individus con-
damnés par le tribunal ou la Cour à un emprisonnement
de très-courte durée ; 3° les individus sous le poids d'une
ordonnance de prise de corps et renvoyés devant la Cour
d'assises en attendant leur jugement. — Les Maisons de
correction reçoivent les enfants enfermés en vertu de la
puissance paternelle, et ceux condamnés d'après les
art 66 et 67 du Code pénal. Elles sont peu nombreuses
en France, et ordinairement les maisons d'arrêt en tien-
nent lieu. — Les Maisons de détention ou de force, dites
aussi MeUsons centrales, reçoivent les individus con-
damnas correctionnellement à plus d'un an de prison,
ceux qui ont été condamnés par les Cours d'assises à la
réclusion, les femmes condamnées aux travaux forcés, les
condamnés aux travaux forcés &gés de plus de 60 ans. Il
y en a 20 en France : 12 de ces maisons ne renferment
que des hommes, 6 sont occupées par des femmes, et 2
( Clairvaux et Limoges) sont mixtes. — Quant aux Baignes,
leur suppression a été décrétée, et cette mesure a reçu en
grande partie son exécution. V. Bagne.
Les différentes espèces de prisons répondent aux diffé-
rents genres de peines établies par les lois : mais, en ce
^^ concerne les Maisons d'arrêt et les Maisons de jus-
tice, la spécialité de leur destination n'est pas toujours
observée, l'Administration pouvant avoir des motifs pour
transférer les prisonniers d'une maison dans une autre.
En beaucoup de chefs-lieux de département, une seule
prison sert à la fois de« Maison d'arrêt et de Maison de
justice. C'est l'Administration qui est chargée de l'entre-
tien des bâtiments, de la police intérieure, de la nomi-
nation des employés, et de l'exécution des peines pronon-
cées. Les magistrats veillent sur la liberté individuelle,
et s'assurent que les prisonniers ne sont pas détenus
illégalement ; mais ils ne peuvent s'immiscer dans l'éco-
nomie réglementaire des prisons. Les permissions de
communiquer avec les prisonniers sont accordées : pour
un inculpé, par le ju^ chargé de l'information ; pour an
prévenu, par le ministère public; pour un condamné,
par l'Administration.
La prison , a': $eu d'agir avec efficacité sur l'esprit de
ceux qui la subissent, ne fait le plus souvent que les per-
vertir davantage. Dans les Maisons d'arrêt et de justice,
les prévenus et les condamnés, les innocents et les cou-
pables, ont des communications et des conversations fré-
quentes. Le travail n'y est pas et ne peut pas être orga-
nisé d'une manière suivie : les prévenus ne sauraient
être assujettis aux labeurs assidus et réguliers auxquels
les condaînnés doivent se soumettre. Le régime des Mai-
sons de détention est plus régulier; la discipline y est
mieux entendue. Les détenus sont occupés à divers tra-
vaux, dont le salaire, proportionné à la nature de la con-
damnation , diminue à mesure qu'elle s'accroît en gra-
vité. La moitié du salaire est pour les détenus; une partie
leur est délivrée, dans l'intârieur de la prison, sous le
nom de deniers de poehe^ et peut être dépensée ; le reste
forme une masse de réserve qu'ils retrouvent à l'époque
de leur libération. Le port d'un costume pénal est obli-
gatoire pour eux, aussi bien que le travail. On les punit
en les mettant au pain et h ruau , en leur infligeant la
cellule ou le cachot, et, en cas de violences, les fers.
Pour les détenues, la surveillance est exercée par des
femmes, laïques ou religieuses. Un aumônier est attaché
à chaque pnson : il dit la messe les dimanches et fêtes,
fait une instruction religieuse une fois par semaine au
moins, et enseigne le catéchisme aux jeunes détenus. Il y
a des instituteurs dans toutes les maisons où la popula-
tion est assez considérable pour appeler cette mesure.
Le régime des prisons a fréquemment varié. Dans
l'Antiquité, et bien longtemps encore dans les temps mo-
dernes, la prison a été considérée, non comme un moyen
de correction, mais comme un lieu de supplice et une
vengeance : les prisonniers étaient enfermés dans un es-
pace étroit, privés d'air et d'exercice, et livrés à la bru-
talité des geôliers. Avec le christianisme, on commença
de s'occuper d'améliorer leur condition. Le concile de
Nicée, en 325, chargea les procureurs des pauvres da
visiter les détenus, et de travailler à leur délivrance. Ec
1557, Henri II, considérant qup les prisons, « qui ont été
faites pour la garde des prisonniers, leur apportaient plus
grande peine qu'ils n'avaient mérité, » autorisa les ma-
gistrats (la loi leur en fait aujourd'hui un devoir) à veiller
par eux-mêmes à ce qu'ils y dissent traités humaine-
ment ; mesure aui. n'eut pas grande efficacité. Une or-
donnance de 1560 proscrivit les cachots souterrains, en
défendant de loger les détenus au-dessous du rez-de-
chaussée. La nourriture des prisonniers était générale-
ment compilée de pain et d'eau. Un arrêt du 18 juillet
1717 déci(hfe « qu'on fournirait tous les quinze jours de la
paille fraîche à ceux qui étaient enfermés dans des car
chots noirs, et tous les mois à ceux qui se trouvaient
dans des cachots clairs. » H y avut alors différentes
espèces de prisons : les prisons ordinaires, servant aux
individus qui n'appartenaient à aucune juridiction spé-
ciale; les prisons d'Etat, où l'on renfermait ceux qui
avaient conspiré contre la sûreté de l'État, et plus sou-
vent les malheureux sacrifiés à la haine ou à l'intérêt de
personnages puissants; les ^snns des officialités (V. ce
mot dans notre Dictionnaire de Biographie et ffEiS"
totra), les prisons militaires, et les prisons pour dettes. Au
xvn" siècle. S* Charles Borromée et S' Vincent de Paul ,
inspirés par la religion , se consacrèrent au soulagement
des captifs, et, au xvui«, J. Howard, Beccaria, Bentham,
au nom de la philanthropie, poursuivirent la réforme des
prisons. Notre siècle est entré avec ardeur dans la même
voie, et a tenté, pour l'amélioration du sort des prison-
niers, toutes sortes de moyens, dont le plus célèbre, le
système cellulaire, organisé en France en 1847, est au-
jourd'hui presque complètement abandonné dans tous
les pays ( K. PéNBZNBuiRB — Système). Après la Révolu-
tion française de 1848, le gouvernement provisoire sup-
prima, par décret du 4 mars, le travail dans les prisena*
PRI
1492
PRO
qui était QD« loi depuis 1819; cette mesure, inspirée par
nne préoccupation trop lire du préjudice causé au tra-
▼ail libre par le travail forcé, portait atteinte aux textes
du Gode pénal qui avaient imposé le travail comme une
des conséquences de la peine; la cessation du travail
exerça les plus funestes effets sur la santé des condam-
nés. II fallut le rétablir par une loi du 9 Janvier 1849,
modifiée en certains points dé détail par décret du 25 fé-
vrier 185^. Un arrêté du ministre de Tlntérieur, du
25 mars 1854, a organisé un système de récompenses et
de panitions qui a pour base Taugmentation ou la réduc-
tion des profits du travail. V, Howard, Dm prisons et des
maisons de force (en anglais), 1777, in-4o, trad. en fran-
çais par H"* de Keralio, 1788, S vol. in-8« ; Villermé, Des
prisons telles qu'elles sont et telles (lu'elUs deurcùent être,
18^, in-8*; Danjou, Des prisons et de leur régime, 1821,
in-8®; Julius, Leçons sur les prisons, trad. dePallemand,
1831, 2 vol. in-8o; Appert, Bagnes, prisons et criminels,
1836, 4 vol. in-8o; Horeau (Christophe), De Vétat actuel
des prisons en France, 1837, in-8«, et Code des prisons,
ou HttcueH des lois et ordonnances concernant leur ré^
gime intérieur, économique et disciplinaire, de 1670 à
1856, S vol. in-8<^; Léon Faucher, De la réforme des pri-
sons, 1838, in-8o; Watteville, Du travail dans les prn
sons et les établissements de bienfaisance^ 1850,br. in-12 ;
Perrot, Statistique des prisons et établissements péniten-
tiaires, 1855-56, 2 vol. in-4o. B.
PRIVATIF ou PARTIGCLE PRIVATIVE, nom que l'on
donne, en Grammaire, à certains préfixes qui indiquent
que le mot où ils entrent comme partie composante perd
tout ou partie de la signification du radical. Telle est la
particule a en grec (boulé, conseil; abotilos, irréfléchi 1;
m en latin (munia, ch&rges; tm-mufiM, exempt ne
charges) ; mé en français (prendre, se méprendre; con-
naître, méconnaître); fin en anglais (aole, capable;
unable, incapable). Certaines prépositions Jouent le rôle
de particules inséparables : ainsi , apo en grec {phémi ,
Je dis, J*aflfirme; apophémi. Je nie. Je me dédis); de en
latin [color, couleur; decolor, privé de sa couleur); dé
en français (d^uvrir, cféfaire, déposséder). F.
PRIVILÈGE (du latin privata lex, loi privée), nom
que les anciens Romains donnaient à une loi qui n'était
pas d'un intérêt général , mais qui ne concernait que des
individus. On l'applique maintenant : 1** à la faculté con-
cédée à un individu ou à une corporation de faire une
chose ou de jouir d'un avantage qui n'est pas de droit
commun ; 2^ à l'acte qui contient cette concession ; 3® à
tout avantage, droit on prérogative de certains emplois ou
états.
pRiviLiGB , autorisation crue donnait autrefois le roi de
publier un livre, et garantie de propriété donnée à l'au-
teur ou à l'éditeur.
PRiviLéGB, en termes de Jurisprudence, droit que donne
la qualité de la créance à un créancier qui en est investi
d*ètre préféré aux autres créanciers, même hypothécaires
(art. 2095, Code NapolX II dérive donc, non de la con-
vention, mais du fait ^ où est née la créance. Entre les
créanciers privilégiés, le rang est déterminé, non par la
date, mais par la cause de la créance. On distingue d'abord :
I. Les privilèges généraux sur les meitbles. — Voici dans
?[uel ordre ils se présentent : 1* frais de justice; 2» frais
unéraires; 3* frais quelconques de dernière maladie;
4^ salaires des gens de service pour Tannée échue et ce
qui est dû pour l'année courante; 5* fournitures de sub-
sistances faites pendant les six derniers mois par les
marchands en détail, boulangers, bouchers et autres, et
pendant la dernière année par les maîtres de pension et
marchands en gros.
n. Les privilèges spéciaux sur certaws meubles. —
Ce sont : 1<* les levers et fermages des immeubles, sur les
fruits de la récolte de l'année, le prix de tout ce qui
garnit la maison louée ou la ferme, et tout ce qui sert à
l'exploitation de la ferme ; 2« les sommes dues pour se-
mences, frais de récolte et ustensiles; 3® la créance sur
le gage dont le créancier est saisi ; 4<^ les frais faits pour
la conservation de la chose; 5^ le prix d'effets mobiliers
non payés, sur les objets vendus, tant qu'ils sont en la
{>ossesâon du débiteur, et suivant diverses conditions que
a loi spécifie; 6* les fournitures des aubergistes sur les
^ets des vovageurs transportés dans l'auberge; 7* en
fkveur du voiturier, les frais de voiture et les dépenses
accessoires sur la chose voiturée; 8<* les créances résul-
tant d'abus et de prévarications commis par les fonction-
D^res publics dans l'exerdce de leurs fonctions, sur les
fonds de leur cautionnement.
IQ. Les privilèges spéciaux sur certains immeubles.
— Ainsi : 1* le privilège accordé an vendeur sor rim-
meuble vendu pour le pavement du prix ; 2® celui des
cohéritiers, sur les immeubles de la succession, pour la
g^ffantie des partages faits entre eux et des soultes ou re-
tours de lots; 3* le privilège des architectes, entrepre-
neurs, maçons et autres ouvriers, sur let b&timents,
canaux ou ouvrages quelconques qu'ils ont édifiés, re-
construits ou réparés; ce qui ne s'entend que des ouvrages
d'art, et non pas en général des travaux d^agricnlturet
cependant la foi du 17 juillet 1856 a fait une exception à
cet égard pour le drainage : ce privilège des entrepre-
neurs est soumis à des conditions spéciales. — De ces
trois privilèges en découlent subsidiairement deux autres
nui n*en sont à vrai dire que la conséquence : 1* celai
des prêteurs de deniers ayant servi soit à payer Tacqui*
sition d'un immeuble, soit à rembourser des ouvriers; Il
vient alors au lieu du privilège appartenant aux créan-
ciers désintéressés; la loi en subordonne l'existence à la
constatation autiientiqne de la réalité; 2<^ le privilège des
cessionnaires de créances privilégiées qui viennent au lieu
et place de leurs cédants.
IV. Les privUéges qui s'étmdent sur les meubles et sur
les immeubles, — Ge sont tous ceux du S ^"^ ^ cause de
leur faveur spéciale. Il existe encore d'autres privilèges
établis soit par le Code de Commerce dans l'intérêt des
commissionnaires, pour la sûreté des contrats mari-
times, etc., soit par des lois spéciales en matière de
mines, marais, travaux publics, marchés de fournitures.
Le Trésor public jouit aussi de certains privilèges,
pour le recouvrement des contributions directes, sur les
fruits et revenus des immeubles, et sur la généridité des
meubles ; le premier assure le recouvrement de Timpùt
foncier, le second celui de la contribution personnelle et
mobilière. Il en est d'autres pour assurer le payement
des droits de timbre, des mutations par décès, des droits
de douane et des contributions indirectes, les frais de
justice criminelle et les adjudications administratives.
Quant à la classification de ces divers privilèges, c'est-
à-dire au rang qu'il faut leur attribuer respectivement,
elle a soulevé tant de difficultés dans la tiiéorie et dans
l'application, qu'elle ne peut être indiquée que dans les
tnutés spéciaux.
Les privilèges sur les meubles n'existent qu*aiitant que
les meubles sont en la possession du débiteur. Les pri-
vilèges sur les immeubles ne se conservent que par leur
inscription. V, Battur, Traité des Privilèges et Bvpo-
thàques, 2* édit.. 1823, 4 vol. in-8-; Favard de Langlade,
Traité des Primlèges et Hypothèques, 1812, !n-8*{ Heiw
vieu. Résumé de jurisprudence sur les Privilèges et By-
pothiques,^ édit., 1846, in-4«; Valette. De l'effet ordinaire
de VInscription en matière de Privilèges sur les immeu-
blés, 2« édit., 1843, in-8«; Troplong, Commentaire du
titre XVIII du livre ïll du Code civil. Des Privilèges et
Hypothèques, 5« édit., 4 vol. in-8*; Mourlon, Examen
critique et pratique du CommentcUre de M. T^roplong sur
les Privilèges, 1855, 2 vol. in-8"; Taillefer, Des PrivUéges
sur les meubles, 1852, in-8*. B. d'E.
PRIVILÉGIÉES (Ghisses), chisses d'une nation dont la
supériorité sociale et politique est consacrée par les lois,
et qui , pourvues de prérogatives exceptionnelles, sont
encore exonérées de charges ou de prohibitions qui pèsent
sur les autres citoyens. Telles étaient en I^rance, avant
1789, la noblesse et le clergé.
PRIVILÉGIÉS ( Gas ]. Y. Gas roiviLfoi^s.
PRIX, en termes d'Économie politique,, valeur d'une
chose qui est dans le commerce. On nomme prix eow-
rant le prix auquel en chaque lieu une chose trouve des
acquéreurs. Par rapport à la monnaie, le prix est la me-
sure de la valeur. Si l'on achète un produit avec la mon-
naie que l'on tire de la vente d'un autre produit , ce qu'il
coûte est son prix relatif; si on l'achète avec ce que l'on
paye pour ses frais de production , c'est son prix réel ou
originaire. Les variations dans le prix relatif changent la
richesse réciproque des possesseurs des différents pro-
duits : ainsi , quand le sucre renchérit par rapport an
prix des autres produits, les propriétaires de sucre sont
plus riches, mais les propriétaires des autres produits
sont plus pauvres d'autant. Les variations dans le prix
réel ou originaire diminuent les richesses des nations
quand le prix hausse, et les accroissent quand 11 baisse.
PRIX D&BNNAUX. V* notTo Dictionnmre de Biogra^iàe
et d'Histoire,
PROAUUON, mot qui désignait, ches les anciens Grecs,
le vestibule d'un éduce quelconque, et auni un pré-
lude de flûte.
PROBABILISME , en termes de Théologie, système de
PRO
1493
PRO
érection moralot fondée sur ce principe qu*entre deux
opinions probables, même à des defprés différents, il est
permis de choisir en se dirigeant soit par la raison, soit
par Tautorité. La conscience et la loi religieuse fixent les
grandes vérités, les principes fondamentaux de la mo-
rale ; mais il est des circonstances particulières que la
loi ne peut prévoir, et dont la complication est pour la
conscience, môme la plus droite, une source d'embarras
et d'hésitations ; c'est alors que le Probabilisme trouve
ion application. « Sans doute, à côté de l'usage légitime, il
y a Tabus ; à force de disputer sur les règles de la morale
et sur les actes humains, on peut obscurcir ce qui était
clair, absoudre des actions coupables, incriminer des
choses indifférentes, substituer aux autorités les plus
graves l'opinion d'un docteur. » — C'est là le Probabi-
lisme auquel Pascal s'est attaqué dans les Provinciales.
— « Mais si l'on se renferme dans de Justes limites, si
l'on exige d'abord qu'une opinion vraiment probable ne
soit contraire ni à l'Écriture Sainte, ni aux décisions de
l'Église, ni à une raison évidente, ni au sentiment
commun des Écoles; si l'on se tient prudemment dans
une ligne moyenne, également éloigné d'un rigorisme
qui désespère et d'un relâchement qui corrompt, on
n'est pas i^préhensible, et le Probabilisme, entendu dans
ce sens, n'a pas été et ne sera jamais condamné par
l'Église. L'Église s'est contentée d'en réprimer les abus,
et n'en a interdit l'usage que pour certains cas réservés,
où il y a obligation de n'agir qu'avec des moyens sûrs ;
notamment pour les Juges dans leurs sentences, pour^es
médecins dans leurs remèdes, pour les prêtres dans l'ad-
ministration des sacrements, ou bien encore quand il
s'agit d'empêcher le dommage du prochain. » ( Essai sur
la Méthode dans les sciences théologiques, par M. l'abbé
fiourquard.)
PROBABILITÉ (du latin proba, preuve, et habilitas,
disposition), apparence de vérité. La probabilité a des
degrés, la certitude n'en a pas.
, PROBATION (du latin probare, prouver), temps d'é-
preuve qui précède le noviciat des religieux, et quelque-
fois le noviciat lui-même.
PROBATIQUE (Piscine). V. Pisqne.
PROBLÉMATIQUE (Jugement). V. Apodictiqub.
PROBLÈME (du grec proballein , Jeter en avant, pro-
poser), question à résoudre, ou bien, question sur la-
quelle on n*a que des données contradictoires, ou qui est
entourée d'obscurité.
PROCÉDURE (du latin procedere, marcher), ensemble
des règles h. suivre, des actes à faire pour obtenir une
décision Judiciaire, ou, dans certains cas, le moyen de
parvenir amiablement au règlement de certains droits.
On distingue la Procédure judiciaire et la Procédure
extrajudiciairê, selon que la question en litige est ou
n'est pas soumise au jugement des tribunaux. La Procé-
dure judiciaire se divise en Procédure civile^ quand elle
tend à obtenir une décision de la Juridiction civile; Pro"
cédure commerciale, auand elle procède devant les tri-
bunaux de commercé (les règles de ces deux Juridictions
sont réunies dans le Code de Procédure civile); Procédure
criminelle, réglementée par le Code d^lnstruction crimi-
nelle^ et Procédure ofiministrative, qui se trouve fixée
par des lois différentes non codifia.
PROciouRB aviLB (Codo de). L'instruction des affaires
civiles était réglementée, avant 1789, par l'Ordonnance
de 1667, qui avait réalisé d'énormes progrès sur la lé-
gislation antérieure. Quelques obscurités de termes,
l'absence de netteté dans ses classifications, faisaient dé-
sirer sa réforme. L'Assemblée constituante l'avait dé-
crétée par la loi du 24 août 1790, art. 2. Le Décret du
3 brumaire an ii (24 octobre 4793), promulgué par la
Convention, vint, sous prétexte de simplification, jeter
le plus grand désordre dans cette matière, et hâta la
nomination d'une commission chargée de l'élaboration
d'un Code. La discussion, ouverte le 30 germinal an xii
(19 avril 1803), fut terminée, après 23 séances^ le 29 mars
4806. Notre Code de Procédure civile se compose de
1,042 articles. La première partie, intitulée Procédure
devant les tribunaux, comprend l'instruction des affaires
devant les Justices de paix, les tribunaux inférieurs et les
Cours d'appel, ainsi que les voies extraordinaires pour
attaquer les Jugements, et les moyens de les exécuter. La
secende est consacrée à la réglementation de procédures
diverses, tant celles relatives à l'ouverture d'une succes-
sion que celles relatives aux autorisations, séparations,
interdictions, etc.
Le Code de Procédure civile n'a subi que fort peu de
Bodiflcatiooa : les plus importantes résultent des lois des
25 mai 1838, 11 avril 1838, 3 mars 1840 et 2 luin 184i.
Sa dernière révision officielle est du 8 octobre 1842.
F. Boucher, Traité de la Procédure çivUe et des tribu-
naux de commerce, 1808, in-4*; Lepage, Nouveau traité
et style de la Procédure cinUe, 1811, in-4°; Locré, Esprit
du Code de Procédure civile, 1816, 5 vol. in-8'; Auger,
Traité élémentaire de Procédure civile, 1828,2 vol. in-S**:
Demiau, Explication du Code de Procédure civile, 1828,
in-8<^; Thomines-Desmazures, Commentaire sur le Code
de Procédure civile, 1832, 2 vol. in-4^; Rauter, Cours de
Procédure civile, 1834, in-8o ; Chardon, Béformes dési-
rables sur la Procédure, 1837, in-8'*; Chauveau, Dtc-
tionnaire général et complet de Procédure, 1837, in-8°;
Boncenne et Bourbeau, Théorie de la Procédure civile,
2«édit., 1837-1844, 6 vol. in-8«»; J. Berriat Saint-Prix,
Cours de Procédure civile et criminelle, 1835-56, 3 vol.
in -8^; Pigeau, la Procédure civile des tribunaux de
France, édit. de Crivelli, 1838, 2 vol. in-4**, et Introduc-
tion d la Procédure civile, édit. de Poncclet, 1841, in-i8;
Cardon et Péchard, Formulatre général, ou Modèles
d'actes duCode de Procédure civile, 5« édit, 1842, 2 vol.
în-8**; P. Bonnin, Commentaire de la Procédure civile,
1845, in-8**; Delzers, Cours de Procédure civile et crimi-
nelle, 1844-61, 2 vol. in-8®; Rodière, Cours de Procédure
civile, 1850, 3 vol. in-8°; Rogron, Code de Procédure civile
eocpliquéj 9* édit., 1853, 2 vol. in-8° ; Bonnier, Éléments
de Procédure civile, 1853, in-8o; Chauveau et Glandaz,
Formulaire général et complet, Traité pratique de Pro-
cédure civile et commerciale, 1853, 2 vol. in-8o; Jeannin,
Formulaire complet de Procédure civile et commerciale,
1854, in-8''; Carré et Chauveau, les Lois de la Procédure
civile, 1854-55, 7 tomes en 8 vol. in-8<*, et la Procédure
administrative, 1 vol. in-8°; Seligman, Quelles sont les
réformes dont notre Procédure civUe est susceptible?
1855, in-8<' ; Gilbert, Code de Procédure annoté de Sirey,
1857, in-8^; Mourlon, Répétitions écrites sur le Code de
Procédure civile, 1857-58, in-8<*; Bordeaux, Philosophie de
la Procédure civUe. 1857, in-8^; Boitard et Colmet-Daage,
Leçons sur toutes tes parties du Code de Procédure ci-'
vt7e, 1858, 2 vol. in-8<*; Biocbe, Dictionnaire de Procé-
dure civile et commerciale, 1858, 6 vol. in-8'*; le même.
Formulaire de Procédure civile et commerciale, 1858,
in-8<^, et Journal de Procédure civile et commerciale, qui
se publie depuis 1835. R. d'E.
PROCÉLEUSMATIQOE (du grec prokéleuéin, exciter
d'avance), pied de la versification grecque et latine, ainsi
appelé peut-être parce qu on l'employait dans les chan-
sons piur lesquelles les rameurs s'excitaient au travail. U
est composé de 4 brèves, et, par conséquent, équivaut
soit au spondée, soit au dactyle, soit à l'anapeste, soit à
Tamphibraque. On le trouve par licence dans les vers
îambiques de la comédie latine et dans ceux de Sénèque :
Plante et Térence l'emploient aussi dans les tétramétres
Iambiques. Chez les Grecs, on le rencontre quelquefois
dans les systèmes dochmiaques, où deux procéleusmati-
3ues équivalent alors à un dochmius. On en trouve aussi
es exemples dans les systèmes anapestiques, surtout di-
mètres. Dans les systèmes dactyliques , il n'était guère
admis que pour les noms propres; Pindare en offre quel-
ques exemples. — Il y eut, chez les Anciens, des vers
procéleusmatiques de différentes mesures. P.
PROCÈS (du latin processus, marche), instance de-
vant un juge ou un tribunal sur un différend élevé entre
deux ou plusieurs parties. Tout procès commence par
une demande, se continue et s'explique par une instruc-
tion, et finit par un jugement. Dans un Procès civil , le
demandeur poursuit une réparation purement civile ; un
Procès criminel a pour but de faire prononcer une peine
contre l'auteur d'un fait quaKfié crime par la loi. ^
PROCESSION, cérémonie reli^euse. V. notre Dic-
tionnaire de Biographie et d* Histoire.
PAOCESsiON DU S* ESPRIT, productiou étemelle du S^ Es-
prit, qui procède du Père et du Fils selon l'Église ro-
maine, du Père seulement selon l'Église grecque.
PROCESSIONNAL, livre d'église, contenant les chants
des Processions
PROCÈS-VERBAL, acte par le({uel un magistrat, un
officier public, un agent de l'autonté, un arbitre, un ex-
pert, rend compte de ce qu'il a fait dans l'exercice de ses
fonctions, de ce qu'il a vu, de ce qui s'est fait ou dit en
sa présence. En matière civile, les procès-verbaux sont
destinés à constater d'une manière authentique les faits
qui doivent servir de base aux discussions d'intérêt
privé : ils sont dressés par les notaires, les huissiers, les
greffiers, les Juges de paix, ou par des Juges qu'un tri-
bunal a commis à cet effet, et font foi de ce qu'ils coH"
PRO
1494
PRO
tiennent Jusqu'à inscriptioD de faux. En matière de
police, en matière correctionnelle et criminelle , les pro-
cès-verbaaz ont pour but d'assurer l'exécution des lois
répressives : ils sont dressés par les officiers de police
judiciaire, les gendarmes, les gardes champêtres, les
préposés des Douanes, Je la régie des Contributions in-
directes, de la direction des Domaines, du timbre et de
l'enregistrement, etc. La preuve contraire par témoins
ou par écrit est admise contre les procès-verbaux de ceux
des agents de l'autorité auxquels la loi n'accorde pas le
droit d'être crus jusqu'à inscription de faux. Les procès-
verbaux judiciaires doivent être affirmés (V. Apfiiima-
TioN^ ; l'absence de cette formalité les vicie. F. Mangin ,
Traité des procès-verbatix en matière de délits et de con--
travmitions , 1840, in-8° ; Gotelle, Traité des procès-ver-
baux de contravention en matière administrative, 1848,
in-8«.
PBOcks-vBRBAL DB coMPARUTioif , acte dressé soit par un
notaire, soit par un juge commis pour recevoir les décla-
rations des parties. Il a pour but de préciser leurs pré-
tentions réciproques et les points de contestation.
PROCHRONISMË. V. ÀNACHROinsHB.
PROCLAMATION, allocution adressée dans des cir-
constances solennelles, soit par un chef d'armée à ses
soldats ou aux populations chez lesquelles il porte la
guerre, soit par un gouvernement à ses administrés ou à
ceux d'un gouvernement ennemi. On nomme encore
Proclamation l'acte par lequel on porte à la connaissance
du public un fait nouveau, comme l'installation d'un
gouvernement, la nomination d'un haut fonctionnaire,
un traité de paix, une amnistie, une fête nationale, etc.
, Autrefois les Proclamations se faisaient par la voix des
hérauts ; aujourd'hui on emploie les affiches.
PROCLITIQUE , c-à-d. en grec qui a la propriété de
se pencher en avant (de pro et de klinô)^ se dit des par-
ticules qui, n'ayant pas d'accent propre, s'appuient sur
le mot suivant. Telles sont la conjonction ei, la préposi-
tion ix, les articles é, Vj, cl, «t, en grec; la plupart des
prépositions monosyllabiques en latin et en français,
l'article français, les pronoms personnels précédant le
verbe, l'adverbe n^tif ne. Dans ce vers de Racine
(Phèdre, IV, 2) :
Ig Jour n'eit pas plia pur que le fond de mon eorar,
les mots en italiques sont proclitiques. En grec , les
proclitiques peuvent s'accentuer dans certains cas, par
exemple lorsqu'ils sont suivis immédiatement d'un mot
susceptible de per^ son accent. K. Encutiqub. P.
PROCONSUL. i V. ces mots dans notre Diction-
PROCURATEUR. ( notre de Biogr. et d'Histoire.
PROCURATION (du latin curare pro, prendre soin
pour un autre), acte par lequel une personne donne à
une autre le pouvoir d'agir en son nom comme elle pour-
rait le faire elle-même. La procuration peut être donnée
sous seing privé; mais elle doit l'être par acte public,
quand il s'a^t de représenter une partie dans un acte de
rétat civil, de récuser un juge, d'accepter une donation ,
de répudier une succession, de toucher les arrérages de
rentes sur l'État. V. Mandat.
PROCUREUR, mot par lequel on désignait surtout,
avant 1789, les officiers ministériels qui s'appellent au-
jourd'hui Avoués {V. PaocDREuas, dans notre Dictionr
naire de Biographie et d* Histoire)^ et qui ne s'applique
plus qu'à certains membres du Parquet exerçant les fonc-
tions de îdinistère public {V. ce mot) près les Cours et
tribunaux, n y a un Procureur général près la Cour de
cassation {V. ce mot), et un, près de chaque Lour
d'appel. Celui-ci a sous sa direction des avocats gé'
nérauœ. chargés le plus souvent du service des audien-
ces, et «es substituts, chargés du service du Parquet.
Il porte la parole aux chambres assemblées, aux aumen-
ces solennelles, et aux audiences des chambres quand il
le juge convenable. Il exerce l'action de la justice crimi-
nelle dans toute l'étendue du ressort, veille au maintien
de l'ordre dans tous les tribunaux, et a la surveillance
de tous les officiers de police judiciaire et des officiers
ministériels. Sous la dépendance hiérarchique du Procu-
reur général sont les Procureurs de la République (au-
tteioieProcureurs du roi etProcureurs impériaux),
2ui exercent les mêmes fonctions près les tribunaux de
'• instance, et qui ont aussi des substituts. Nul ne peut
être nommé Procureur de la Rép. s'il n'a 25 ans, Procu-
reur général s'il n'a 30 ans. Ces magistrats, institués par
la loi du 28 floréal in xii (18 mai 1804) pour remplacer
i«s Accusateurs publics et les Commissaires du
gouvernement, sont nommte par le chef de l'Eut, «t
amovibles. F. Massabiau, Manuel du Procureur
impérial et du substitut, 1857, 3 vol. in-8«.
PRODICTATEUR. V. ce mot dans notre DictUmnatre
de Biographie et d^ Histoire.
PRODIGUE (du latin agerepro, chasser devant soi),
celui qui manque de mesure dans ses dépenses. La pro-
di^lité était, oans notre ancienne législation, une cause
dHnterdiction ; ai^ourd'hui elle donne seulement lieu à
la nomination d'un Conseil judiciaire (K. ce mot).
PRODOHOS, nom donné quelquefois à la façaae anté-
rieure d'un temple, et au porche d'une église.
PRODROME (du grec pro, devant, et dromos, course),
nom donné à certains ouvra^ qui sont comme les avants
coureurs d'autres ('écrits destines à paraître plus tard et
dont ils donnent une idée.
PRODUCTION, dans le langage de l'économie politique,
création des valeurs considér&s indépendamment de leur
distribution et de leur consommation. L'homme ne crée
pas un atome de matière; mais il transforme la matière
de mille manières , pour l'approprier à tous les besoins
de sa vie. La Nature lui fournit tous les élémente; mais
ces éléments, avant d'être combinés, élaborés par son in-
telligence et son activité, ne lui sont aue d'une bien
faible utilité. Mille sauvages vivent misérables et meu-
rent quelquefois de faim au milieu d'une nature riche ei
belle, dans un canton de plusieurs lieues de superfide ;
un désert de la même étendue, transformé par l'activité
hutnaine, nourrit plusieurs millions d'hommes au sein
de l'abondance et dans toutes les jouissances de la civi-
lisation. Ce qui accomplit ces merveilles, c'est la pro-
duction de la richesse, c-à-d. la transformation de la
matière première en un produit, en une valeur propre à
satisfaire nos besoins. Cette transformation est un chan-
gement, un mouvement, et, par conséquent, ne peut se
faire que par l'application d'une force quelconque à la
matière inerte. Or, l'application de cette force ne peut
être faite que par un être ayant intelligence et rolonté ,
que par l'homme. L'homme est donc l'agent de la pro-
duction, dont il est, par conséquent, le principe, comme
il en est la fin ; l'homme est le seul producteur véritable,
et il intervient sans cesse dans le phénomène de la pro-
duction, à trois titres gui se trouvent le plus souvent
réunis à des degrés divers par une même personne :
1° comme savant; 2° comme entrepreneur; 3^ comme
ouvrier.
L'homme seul en fhce de la matière brute, c'est le sau-
vage grossier, se faisant à grande peine un arc et des
flèches pour diasser, et couvrant sa nudité de plumes ou
de peaux. Mais cette matière brute, il ne tarde pas, par
ses premi^^s tentatives de production, à la transformer,
à se faire des haches, des couteaux, à amasser des pro-
visions, à les échanger avec ses voisins ; et, avant même
qu'il ne soit parvenu à un degré de civilisation bien
avancé, il a déjà de nombreux instruments pour l'aider
à produire. La matière brute apparaît moins, et se
confond dans la classe des instruments de production.
On distingue ces instruments en instruments directs ,
?ui sont : les agents naturels , le capital et le travail
V. ces mots ) ; et instruments indirects , qui sont : 1'^
change t la circulation, la monnaie (V. ces mots), aux-
quels il faut ajouter le gow)emement, qui, par de bonnes
lois, peut faciliter la production et les échanges, et l'iii-
strwtion, qui crée le capital moral, l'instrument le plus
puissant et le plus fécond de la production.
Trois instruments servent directement à la production :
les agents naturels, le capital, et le travail. Cest entre
eux aussi que se partagent les profits de la production.
L'homme , le producteur universel , n'intervient pas en
personne dans le compte du partage; mais il est en r^-
lité tout entier sous le second et sous le troisième chef,
puisque le capital n'est que du travail accumulé, et que
le travail n'est rien autre chose que l'homme agissant :
sous ces trois chefs, il n'y a donc comme toujours que
l'homme et la matière ; à la matière le premier chef et
une partie du second, à l'homme la meilleure partie du
second et le troisième tout entier. Void à quel titre se
répartissent les profits de la production : les agents na-
turds, dont le principal est la terre, prélèvent leur part
à titre de rente IV. ce mot). Le capital prélève la sienne,
1* à titre dHntérét (V, ce mot)-, 2^ à titre de profU,
quand le capital a fait des avances dont il doit être rem-
boursé, ou quand il doit être amorti dans un temps
donné. Cest ce (pie fait un négociant, lorsque, établissant
son inventaire, il compte, pour une machine qui lui a
coûté 100,000 fr., 5,000 tr, comme intérêt de son capHal,
PRO
1495
PRO
plus 10,000 fr. comme dépréciation de son capital, parce
qu*il calcale qu'au bout de dix ans la machine sera usée,
et que, s'il ne prélevait pas tous les ans 10 p. 0/0 de dé-
préciation, son capital serait consommé et perdu. Le
travail prélève aa part des profits : 1° à titre de salaires,
quand il s'agit d*un ouvrier, d'un employé, qui ne met
dans Tentreprise que ses bras, et qui, assuré de sa rétri-
bution, ne court pas de chances de pertes ; 2® à titre de
profits, quand il s'agit A'un entrepreneur qui hasarde
son capital, qui met à la fois dans l'entreprise son temps,
son intelligence et ses espérances, ou d'une personne
qui, sans éâ« l'entrepreneur même, court cependant avec
lui les chances de perte et de gain de l'entreprise ( V, Sa-
laire )•
L'industrie est la grande source des produits. Voici les
différentes branches dans lesquelles on l'a divisée :
' Extractive (mines, pêcheries, etc.)*
Yoiturièro; c.-&-d. le commerce qui trans-
porte les produits.
Industrie ( Manufacturière; c.-à-d. l'industrie pro-
prement dite.
Apicole.
Libérale (beaux-arts, sciences, etc.).
Un produit nouveau n'est pas toujours une augmenta-
tion nouvelle de richesses. Voici les phénomènes écono-
miques qui peuvent résulter de la création d'un produit:
1^ si le proauit brut n'a cas une valeur suffisante pour
rembourser les avances faites par les agents naturels, le
capital et le travail, il y a perte pour la société et dimi-
nution de richesse; 2^ si le produit brut sufiSt juste pour
rembourser ces avances, il n'v a ni perte ni profit, et la
richesse reste la même ; 3^ si le produit brut, après avoir
remboursé toutes les avances, laisse un excédant, il y a
profit, et cet excédant, qui constitue le produit net, est
une augmentation de richesse. L.
PROÈME. F. Prooeuiou.
PROFANATION ( du latin pro, devant, et fanwn, tem-
ple), irrévérence commise, soit volontairement, soit par
oubli ou ignorance, envers les choses consacrées par la
religion. Elle se distingue du sacrilège, crime commis
avec intention envers la Divinité même : toutefois, dans
la religion catholique, la profanation des saints mystères
est un sacrilège, parce que la présence de Dieu en fait un
attentat contre lui.
PROFANE, qualification donnée par les Anciens à qui-
conque n'était pas initié aux Mystères, et restait pour
ainsi dire en dehors du temple. — En Littérature, on
oppose les auteurs profanes ou piUens aux auteurs sor-
crès ou chrétiens. — Par extension et au figuré, le nom
de profane s'applique à celui qui ne possède pas une
science ou un art quelconque.
PROFECTICES ^iens). V. Biens.
PROFÈS. V. ce mot dans notre Dicttonnatre de Bio-
graphie et d^ Histoire.
PROFESSEUR (du latin pro^f en , déclarer publique-
ment, enseigner), celui qui fait profession d'enseigner
une science ou un art. Le titre de professeur n'apparte-
nait autrefois qu'à ceux qui donnaient leurs leçons dans
certains établissements publics, tandis que les maîtres de
toute sorte le prennent aujourd'hui. Dans l'ancienne Uni-
versité, il n'y avait de professeurs que ceux qui occu-
paient des chaires en Théologie, en Droit, et au Collège
de France; les professeurs en Droit joignaient à ce titre
celui é^assesseurs , et les professeurs royaux celui de
lecteurs. Les professeurs de la Faculté de médecine
étaient dits docteurs régents. Les professeurs des collèges
s'appelaient régents, et ce n'était qu'après 20 ans de ser-
vice qu'ils s'intitulaient officiellement professeurs émé-
rites. — Dans les lycées actuels, \e^ professeurs sont
ceux qui, pourvus du titre d'agrégé, sont titulaires
d'une chaire : ils étaient divisés en trois classes, au
traitement de 2,400 fr., 2,200 fr. et 2^000 fr. dans les
départements, de 4,500 fr., 4,000 fr. et 3,500 fr. à
Paris et à Versailles, non compris un éventuel ( V. ce
mot) dont le minimum était alors fixé à 800 fr. ; au-
jourd'hui, l'éventuel est supprimé, et. par compensa-
tion, le traitement a été augmenté. Si le nombre des
élèves exige que les classes soient divisées, les maî-
tres chargés de ces divisions prennent, s'ils sont agré-
gés, le nom de professeurs divisionnaires, et, s'ils ne le
sont pas, celui de chargés de cours; le traitement de ces
deux sortes de fonctionnaires est le même (K. Chargés
DB cours). Le costume des professeurs des lycées est
U robe d'étamine noire, la toque noire bordée de ve-
lours, le rabat blanc à petits plis, la chausse ou épitoge
(K. ce mot), et une palme en or pour les officiers de
l'Instruction publiçiue, en argent pour les officiers
d'Académie, en soie violette pot^r les autres. Ils sont
tous nommés par le ministre de l'instruction publique.
PROFESSION. Ce mot, qui désigne tout état ou emploi
de la vie, s'entend aussi d'une déclaration publique pnr
laquelle on se lie ; et, dans ce cas, s'il s'agit de religion
ou de principes politiques , c'est une profession de foi.
Dans le langage ecclésiastique, on nomme spécialement
profession l'acte solennel par lequel on fait des vœux de
religion (V. V<xu ).
PROFESSIONNEL (Enseignement). 11 existe deux
sortes d'enseignements professionnels : l'un , presque ex-
clusivement pratique, et qui consiste à apprendre aux
enfants un métier, en même temps qu'on leur dispense
l'instruction élémentaire ; cet enseignement , donné dans
des établissements tels que l'asile Fénelon à Vautours et
l'école S*-Nicolas à Paris, est essentiellement du domaine
primaire ; — l'autre, c^ui ne forme pas des artisans pour
tel ou tel métier, mais des hommes instruits pour les
carrières agricole , industrielle , commerciale , et qui est
donné, par exemple, dans l'école Turgot à Paris; il fait
partie de l'enseignement secondaire.
PROFIL, autrefois Porfil, se dit, en Architecture, d'un
dessin offrant la coupe ou section perpendiculaire d'une
construction, qui en laisse voir l'intérieur, c.-à-d. la hau-
teur, la largeur, la profondeur, l'épaisseur des mu-
railles, etc. C'est encore le contour d un membre, cor-
niche, base, chapiteau. On fait aussi des profils pour les
travaux de fortification et de terrassement. — En Pein-
ture, le Profil est le contour des objets. Le mot s'emploie
presque exclusivement en parlant d'une tète vue de côté,
comme sur une médaille.
PROFITS ET PERTES, nom donné, dans la tenue des
livres en partie double, à l'un des comptes généraux qui'
représentent le négociant sur les livres duquel ils figu-
rent. Le nom de ce compte indique les écritures qui doi-
vent y figurer : tels sont les escomptes , les bonifica-
tions, etc. C'est à l'aide du compta de profits et pertes
que se solde le compte de capital. K. Balance des
UVRES.
PROGRAMME , c.-à-d. ce qui est écrit auparavant (du
fec pro, avant, et gramma, écrit), nom donné autrefois
tout avis afiiché ou répandu à la main, dans le but-
d*adresser un appel au public. Aujourd'hui, c'est l'indi-
cation brève des pièces jouées dans un spectacle , des
morceaux exécutés dans un concert, des lectures qui se-
ront faites au milieu .d'une société savante. Programme
est aussi employé comme synonyme de Sommaire. C'est
encore un écrit où l'on indique le sujet et les principales
conditions d'un ouvrage qu'il s'agit de composer et
d'exécuter, par exemple d'un ouvrage mis au concours.
PROGRES (du latin progressa) ^ avancement vers le
mieux. La propriété qu'ont les individus et les sociétés
de se rapprocher de la perfection se nomme Perfectibw
lité. L'avancement dans le bien-être est un progrès mO'
tériel; l'avancement dans la science, un progrès intellect
tuel; l'avancement dans le bien, un progrès moral. Les
progrès de l'individu sont nécessairement bornés par la
faiblesse de ses organes et par la durée de sa vie ; mais
la société, qui dure toujours, peut faire des progrès in-
définis. Le progrès ne peut être le même en toutes choses :
il est clair que l'homme est impuissant à changer les con-
ditions naturelles de sa vie physique ; les périodes d'en-
fance, de jeunesse, de maturité et de vieillesse, que cette
vie peut contenir, sont au-dessus de sa volonté, et il ne
dépend pas plus de lui de grandir que d'atteindre à un
âge avancé. Tout ce qu'il peut faire, c'est de donner par
l'exercice à ses membres la souplesse et la force, et de
concourir à sa santé par une hygiène bien entendue.
Dans le domaine des lettres et des beaux-arts, qui dé-
pendent de l'inspiration individuelle, le travail d'un
homme ne peut aussi ajouter ({ue fort peu de chose à
celui de ses devanciers : il serait difficile, par exemple ,
de soutenir qu'il y a de plus grands postes qu'Homère,
de plus grands philosopnes que Platon, de plus grands
orateurs que Démosthènes, de plus grands sculpteurs
que Phidias. Lorsqu'il s'agit de progrès littéraire et ar-
tistique, on ne doit pas songer aux individus, sous peine
d'engager d'insolubles querelles, comme celle qu'on sou-
tint autrefois sur les Anciens et les Modernes (K. Anciens
ET Modernes). Il en est autrement des sciences et des
arts industriels : il y a là des principes reconnus , des
faits acquis, des procédés éprouvés , dont la tradition se
transmet d'âge en âge, et qm, dispensant d'entreprendre
les mêmes recherches et les mêmes expériences, permet-
tent de marcher toi^ours à des conquêtes nouvelles.
PRO
U96
PRO
Quant aa progrès non-seulement d'une société pendant
le cours de son existence, mais encore des sociétés suc-
cessives les unes sur les autres, il est de toute évidence :
le progrés de la Grèce sur Tanàque Orient et des temps
modernes sur la société gréco-romaine est manifeste dans
la religion, dans les institutions politiques, dans les con-
ditions de la vie sociale, dans la moralité publiq^ue et
privée, dans l'industrie, dans les sciences. Ceux qui con-
testent ce progrès objectent que les génies des temps mo-
dernes ne surpassent point ceux de l'Antiquité : il en
peut être ainsi ; mais c'est dans la société en général
3u'il faut chercher la trace d'un perfectionnement con-
nu, et l'on ne saurait nier que la diffusion des lumières
est plus grande, le niveau commun des intelligences plus
élevé chez les peuples chrétiens que chez les païens ,
au XIX* siècle que pendant le moyen ftge. On dira, pour
combattre la doctrine du progrès, que la civilisation était
plus avancée dans les derniers temps de rEm|)ire ro-
main que durant les siècles qui suivirent sa ruine ; ce
fait est incontestable : nuis on ne peut rien conclure d'un
tel rapprochement; de même que Ton ne comparerait
pas un enfant avec un homme parvenu à l'âge mûr, il
n'y a pas lieu d'opposer une société qui commence à une
société qui finit. L'hunumité peut bien, d'ailleurs, re-
culer à certains égards ; car, selon la remarque ingé-
nieuse de M™* de Stafil, elle n'avance pas en ligne droite,
mais en spirale. Le moyen &ge, inférieur à l'Antiquité
sur beaucoup de points, la surpasse par la religion et par
le sentiment moral. On nie enfin le progrès, en allé-
guant certains pays, comme l'Asie Mineure et le Nord de
l'Afirique, qui sont loin d'être aussi florissants que dans
les temps anciens : mais ces pertes ont été très-large-
ment réparées; le domaine de la civilisation n'est plus
restreint aux contours de la Méditerranée ; la Russie, la
Scandinavie, la plus grande partie de l'Allemagne, l'Amé-
rique, l'Océiuiie, sont des conquêtes de la civilisation
moderne.
Un des personnages d'Homère disait : « Nous valons
mieux que nos pères, et nos enfants vaudront mieux que
nous. » Cette pensée n'avait pas la valeur d'une doctrine,
car l'Antiquité n'a jamais possédé l'idée du progrès et de
la perfectibilité humaine. Peutrètre n'existait-il pas der-
rière elle une assez grande quantité de faits dont l'ob-
servation pût lui révéler le lien qui les unissait et les
faisait concorder tous vers un même but. D'ailleurs, les
Anciens avaient une préoccupation trop vive de l'in-
fluence qu'exerçaient les individus dans la vie sociiJe,
pour n'être point détournés de chercher la loi des évé-
nements; ils étaient anim^ d'un égolsme de cité, qui ne
tenait aucun compte des nations étrangères dans le
tableau des destinées humaines. Or, l'idée du progrès
exclut tout développement isolé et indépendant; elle sup-
pose l'humanité, c-à-d. la communauté d'or^nisation,
d'affections et de but de tous les hommes entre eux. C'est
au christianisme que le monde doit cette sympatiiie qui
a confondu dans une même affection tous les membres
de l'espèce humainej, et qui a pu les fidre considérer
comme un seul être vivant à travers les siècles {V. S^ Au-
gustin, Cité de Dieu, X, 141. L'idée du progrès est une
idée chrétienne et toute moderne. François Bacon est un
des premiers qui l'aient hautement exprimée (De Augm.
scient,^ liv. II et YIII), mais il l'appliqua uniquement à
l'histoire des lettres et des sciences. Pascal a formulé
avec une admirable précision la loi de la perfectibilité,
lorsciu'il a traité De l'atUarité en matière de philosophie :
il s'indigne ^e l'on puisse croire que les Anciens ne nous
ont plus laissé de vérités à connaître, et, distinguant
nettement les vérités qui dépendent de la religion et
celles qui dépendent des sens et du raisonnement, il dé-
clare que les premières ne peuvent être changées et
augmentées par l'homme. La loi de la perfectibilité lui
sert, non pas à nier le christianisme révélé et immuable,
mais à établir les limites respectives de la religion et de
la science. Il déplore l'aveuglement dos gens qui repous-
sent les découvertes physiques au nom de l'autorité, et
innovent au nom de la raison dans les vérités religieuses.
L'idée du progrès ne se présente pas chez Malebranche
avec l'étendue et l'originalité qu'elle possède dans Pascal :
elle n^t du sentiment de supériorité que donnait aux
hommes du xvii* siècle un magnifique mouvement des
lettres, des arts et des sciences; elle est plutôt l'expres-
sion de l'orgueil des Modernes qui se révolte contre l'An-
tiquité, que la conscience d'une loi. C'était une des
vérités dont Leibniz était le plus convaincu, que, dans
la nature, tout est nécessairement enchaîné, progressive-
ment gradaé. H est le premier qui ait formulé l'idée du
progrès par la loi ds continuité (V, ce mot)^ cette for-
mule, généralisée depuis, a Joué un grand rôle dans les
systèmes panthéistes modernes; elle a enfanté VwUté
continue de Geoffroy Saint-Hilaire et le progrèe continu
des rédacteurs de la Revue encyclopédique, Charles Per-
rault est, après Pascal, celui qui a eu la conscience la
plus claire et la plus large de la loi de nerfectibilité : il
développa ses idées à l'occasion de la querelle sur les
Anciens et les Modernes; mais, à la différence de Pascal,
qui se gardait de conclure du monde physique au monde
moral, et d'i^pliauer à la religion sa loi de la marche
des sciences, il généralisa, et confondit sous une même
loi la vie terrestre et animale, la vie de l'humanité, aux-
quelles il reconnaissait des ^es successifs d'enfance, de
Jeunesse, de virilité et de vieillesse. Vico imagina trois
&ges de développement dans la vie de chaque peuple;
mais il parut méconnaître le progrès des peuples les uns
sur les autres ( F. Philosophie de l'histoire). Cest h
Turgot qu'appartient la gloire d'avoir donné à l'idée du
progrès toute son Importance : il l'a présentée avec la
puissance absolue d'un axiome, et en a fait l'applicatipc
la plus nette à l'histoire, à la politique, à la morale, aux
rehgions, à l'industrie, aux lettres, aux sciences, aux arts,
en un mot à toutes les manifestations de l'activité hu-
maine. Désormais la philosophie possède une formule
claire et précise, féconde en applications. L'Allemagne
l'emprunte à la France : Kant proclame à son tour que
les phénomènes sociaux, comme tous les autres phéno-
mènes de la nature, peuvent être ramenés à des lois;
Herder, avec la magie de sa magnifique imagination et
l'enthousiasme de sa belle &me, embrasse l'histoire uni-
verselle au point de vue de la perfectibilité, mais il se
laisse aller, avec Bonnet, à un système de transfor-
mation progressive des êtres (K. PALmcéNésœ) qui fait
que son histoire de la création entière est un panthéisme
confus, où l'humanité n'a que la vie fatale d'un des
règnes de la nature; Leasing, partant de cette idée que
les religions doivent se modifier à mesure que l'humanité
se transforme, n'accorde aux révélations de l'Ancien
Testament et de l'Évangile qu'un caractère transitoire, et
prophétise, au nom de la perfectibilité, une révélation
nouvelle. Par un autre genre d'erreur, Condorcet a sou-
tenu qu'il n'existe pas de terme assignid)le au prog^
humain : pour lui , les facultés de l'homme doivent se
perrectionner indéfiniment, les maladies disparaître, la
vie se prolonger, l'égalité parfaite s'établir entre les na-
tions, entre les classes, et même entre les sexes, une
langue universelle servir de lien à tous les peuples, et
fin^ement l'homme atteindre à l'immortalité sur une
terre immortelle. Telle est la marche qu'a suivie l'idée
du progrès dans les temps modernes. B.
PROHIBITION (du latin prohibere, empêcher, dé-
fendre), défense faite par une loi ou un décret. Ainsi,
dans les temps de disette, on prohibe à la sortie, cnà-d.
on défend d'exporter les denrées alimentaires; en cas de
gjuerre, on prohibe aussi à la sortie les armes, les muni-
tions de guerre, les chevaux, etc. D'autres prohibi-
tions sont fondées sur des considérations d'ordre public
(F. Armes prohibées, DéiENnoN d'armes], ou sur la né-
cessité de protéger les intérêts fiscaux (tabac, cartes à
Jouer, etc.). Les prohibitions à l'entrée, c-àrd. la défense
d'importer les marchandises étrangères, ont pour objet
de protéger le travail national : elles peuvent être abso-
lues, ou résulter de l'élévation des droits qui frappent ces
marchandises et rendent impossible leur écoulement sur
le marché. C'est un des moyens du système protecteur
(F. ce mot).
PROJECTION. F. Cartes géographiqobs.
PROLATION, en termes de Musique ancienne, manière
de déterminer, après la clef, là valeur des notes semi-
brèves sur celle de la brève, ou la valeur des minimes
sur celle de la semi-brève. Lorsque, dans la composition,
la semi-brève valait trois minimes, la prolation, dite
parfaite, se marquait par un point dans un cercle pour
le mode ma)eur, par un point 'dans un demi-cercle pour
le mode mineur; si la semi-brève ne i^ait que deux
minimes, la prolation, dite imparfaite, se «naztmait par
un cercle ou un demi-cercle sans poidC — Dans le
Plain-Chant, la Prolation est un groupe de plusieurs
notes de suite sur une même syllabe et une même corde,
pour indiquer que le son doit être tenu plus longtemps.
Prolation a signifié aussi le rapport des syllabes brèves
avec les longues, comme quand on disait : « Chanter
avec une bonne prolation et mesure, » B.
PROLÉGOMÈNES (du grec pro, avant, et légâ, ]e dis),
sorte d'Introduction placée au commencement d'un livrai
PRO
U97
PRO
et contenant les notions nécessaires à Tintelligence des
matières qui y sont contenues.
PROLEPSE. V. Antéoccupation et Akticipatioti.
PROLÉTAIRES, ceux qui, dans l'ancienne Rome<, com-
posaient la dernière des 6 classes instituées par Servius
Tullius, c-à-d. le« pauvres, ceux qui ne contribuaient à
la force de TÉtat que par leur progéniture (•groUt en
latin), et qu'on exemptait de la plupart des charges pu-
bliques. Lee Modernes ont applique le même nom aux
hommes qui ne possèdent rien en propre et vivent au
|our le Jour du travail de leurs mains.
PROLIXITÉ, défaut du style, opposé à la brièveté, et
3ui consiste à charger le récit de détails superflus, et à
élayer le discours en vaines circonlocutions. Au lieu de
dire : a Je m'embarquai, » on peut décomposer la pensée
ainsi : « J'arrivai sur le port. J'aperçus un navire. Je de-
mandai le prix du passage, je fis marché, je montid, on
leva l'ancre, on mit à la voile, nous partîmes. » La pre-
mière manière est brève et concise; la seconde est pro-
lixe, car elle rapporte des détails inutiles et fastidieux,
que l'auditeur ne peut manquer de supposer. Ia prolixité
rend le stvle lâche et languissant. Scudéry, dans son
poôme d'i4(arfc, donne un exemple curieux de prolixité;
il ne lui faut pas moins de cinquante vers pour la des-
cription d'tin palais. H. D.
PROLOGUE ( du grec "pro^ avant, et Xoqo^.^ discours ;
avant-discours, avant-propos ). Ce terme désignait, chez
les Anciens, ce que nous appelons préface, préambule,
avant-propos, introduction. Il s'appliquait spécialement
ï la littérature dramatique, et désignait la scène où se
fait l'ouverture du sujet, et où l'on instruit le spectateur
de tout ce qui s'est passé avant le commencement de
l'action, de tout ce qu'il faut qu'il sache pour comprendre
ce qu'il va voir. C'est, autant que possible, un person-
nage important qui explique, en s'entretenant avec le
chœur ou avec un autre personnage, le sujet de la pièce.
Eschyle et Sophocle excellaient dans cette partie du
drame, qui n'est autre chose que ce que la critique mo-
derne appelle Exposition, Dans les tragédies d'Euripide,
le prologue est souvent dans la bouche d'un personnage
isolé, quelquefois d'un personnage fantastique ou d'un
Dieu amené sur la scène à l'aide d'une machine. — Dans
la comédie latine, on trouve fréquemment aussi un Pro-
logue détaché du reste de la pièce; il est même quelque-
fois récité par un personnage étranger à l'action, et qui
ne parait que dans la protase on scène d'exposition
( V. Protasb). Ce personnage s'appelait lui-même Pro-
logue, comme on le voit par VHécyre et VHéautontinhô-
roumenos de Térence. Les comètes de ce poète sont
parfois précédées d'un prologue apologétique, qui n'est
pas sans analogie avec la Parabase de la Vieille Comédie.
Chez les Modernes, le prologue reparaît dès l'enfance
de l'art thé&tral : on le trouve au début des Mystères^
sous forme d'exhortation pieuse ou de prière adressée à
Dieu en faveur de l'auditoire. Dans les Moralités, Sotties
et Farces, tantôt il forme l'exposé du sujet, tantôt c'est
une harangue aux spectateurs, dont on cherche à captiver
l'attention et la bienveillance; plus souvent encore c'est
one facétie détachée, où l'on faisait rire les spectateurs à
leurs propres dépens, et qui était débitée par un person-
nage appelé Gros-Guillaume, Gauthier-Garguille, Guillot-
Gorjn, Bruscambille, Turlupin. Elle recevait alors les
noms de prologue drôlatif ou d'avant-jeu, pouvait être
dialoguée, et fermer une petite action à part. Le prologue
de VAmphitryon de Molière rappelle ceux des anciennes
farces ; mais il a une perfection de style <pn l'élève in-
finiment aa-dessus de ces grossiers essais du thé&tre
naissant, et il a de plus le mérite de se rattacher étroite-
ment au sujet même de la pièce. A l'époque de Molière,
l'usage des Prologues était à peu près consacré dans les
opéras : on remarque celui de YAmadis de Quinault.
Dans la tragédie classique, il n'y a d'autre exemple de
Prologue que celui qui précède VEsther de Racine : il
n'a aucun rapport à l'action, mais il prépare et fait
naître en quelque sorte avec beaucoup d'art les senti-
ments au'éprouvera le spectateur en voyant se dérouler
devant lui les événements de la fable ; le poète a su y
faire entrer délicatement de magnifiques éloges du roi,
de M°** de Maintenon, et de la communauté de S*-Cyr.
Au xvm* siècle, on fit des prologues dialogues entre l'au-
teur et un ami , le comédien et un ennemi de l'auteur, le
directeur de thé&tre et un spectateur qui cherche à se
placer dans la salle, etc. : ce fut le prologue des pièces de
Regnard pour le Théâtre-Italien , le prologue de Lesage,
de D'Allainval, etc. Les dramaturges de nos Jours ont
recouru fréquemment au Prologue séparé^ dont ils font
comme une pièce préliminaire où sont rapportés tous
les faits antérieurs à l'action même qui fait le sujet; mais
ce sj^stème est peu conforme à l'art : un pareil prologue
ne dispense pas l'auteur de faire l'exposition du caractère
et de la situation actuelle des personnages au moment
où l'action commence, en sorte que la pièce a réellement
une double exposition. On peut rattacher au genre des
Prologues certaines épltres adressées au public; telles
sont celles que C. Delavigne écrivit en 1810 pour l'inaui
guration du second Thé&tre-Français, en 1825 pour celle
du thé&tre du Havre, et celle aussi qu'il a mise en tête
de sa comédie le ConseUler rapporteur.
En dehors de l'art dramatique, le terme Prologue s'ap-
plique particulièrement à certains travaux de S^ Jérôme
sur les livres sacrés, au préambule de la loi Salique, à
plusieurs préfaces des livres du Gargantua et du Panta"
gruel de Rabelais. La Fontaine fit également précéder la
plupart de ses recueils de fables d'avant- propos auxquels
on peut donner le nom de Prologues, puisqu'il a terminé
son sixième livre par un petit morceau qu'il appelle
Épilogue : quelques-uns sont des prologues apologéti-
ques, notamment celui par lequel il commence son livre
second, et qui est le plus piquant de tous; d'autres sont
des espèces de dédicaces en vers. P.
PROLONGATION DE CONSONNANCES. V. Accoan.
PROLONGE, chariot servant au transport des muni-
tions, des agrès, ou des effets militaires. On donne en*
core le nom de prolonges aux cordages dont les artilleurs
se servent dans la manœuvre des pièces de campagne,
pour les traîner à bras d'une batterie à l'autre.
PROLDSIONS, en termes de Littérature, composi-
tions que fait un auteur pour exercer ses forces et essayer
son génie. Le grammairien Diomède donnait ce nom au
Moucheron de Virgile et à ses autres opuscules.
PROMENOIR, vaste local couvert et bien aéré, ménagé
sur le pourtour extérieur ou dans l'intérieur même d'un
monument, pour servir de refuge contre la pluie, de salle
d'attente ou de dégagement.
PROMESSE, assurance donnée de vive voix ou par
écrit de faire ou de livrer une chose. Une promesse
prouvée ou reconnue forme un engagement. La promesse
écrite peut ètfe faite par acte authentique ou sous seing
privé. Dans ce dernier cas, elle doit être tout entière de
la main de celui qui la souscrit, ou du moins porter,
outre la signature, un bon ou approuvé portant en toutes
lettres la chose promise : il y a exception pour les mar-
chands, artisans, laboureurs, vignerons, gens de journée
et de service. Une promesse de vente vaut vente lorsqu'il
y à consentement des deux parties sur la chose et le prix.
Une promesse n'oblige pas quand elle porte sur des choses
qui ne peuvent faire l'objet d'un contrat. L'inexécution
d'une promesse entraîne des dommages-intérêts.
PROMÉTHÉE. Le mythe de Prométhée ( F. ce mot dans
notre Dictionn. de Biogr, et d'Histoire) j formé de tradi-
tions confuses, contradictoires et de diverses époques ,
remonte aux temps fabuleux de la Grèce. La Théogonie
d'Hésiode est le livre le plus ancien qui nous le fasse
connaître. Cinq siècles après, Eschyle composa trois tra-
gédies dont Piôméthée était !e sujet : Prométhée ravis*
seiMT du feu, Prométhée enchainé, Prométhée délivré,
La seconde seule nous est parvenue; Prométhée y parait
comme le père de toute civilisation : il a donne aux
hommes le feu qui leur fera trouver beaucoup d'arts ; il
leur a enseigné a se construire des habitations , à obser-
ver les astres, à distinguer les saisons, à accoupler les
animaux sous le Joug , à atteler les coursiers , à exploi-
ter les mines; il a inventé l'éariture, la science des nom-
bres, la médecine, l'art nautique, la divination. Des lé-
gendes postérieures nous le représentent ouvrant de son
marteau le cr&ne de Jupiter pour en faire sortir Minerve,
l'emblème de la civilisation , ou créant les hommes avec
le concours de cette déesse; sur quelques monuments
antiques, on voit Minerve donner la vie aux statues d'ar-
gile façonnées par le Titan, en posant sur leur tête un pa-
gillon, symbole de l'àme. C'est encore le créateur des
ommes que le Protagoras de Platon et un apologue
attribué à Ésope nous montrent dans Prométhée; Ménan*
dre et Lucien en font le créateur de la femme, de Pandore,
ouvrage de Vulcain selon Hésiode. Il appartenait surtout
à Athènes, la ville de Minerve et des arts, d'honorer la
mémoire de Prométhée: il avait, selon Pausaniaa, un
autel duis l'Académie; une fête annuelle lui était consa-
crée (V, Lampadopborus, dans notre Dictionn. de Biogr.
et d'Histoire) ; de nombreux tableaux rappelaient le sup-
plice qu'il avait enduré sur le Caucase; les Athéniens
donnaient le nom de Prométhées aux sculpteurs , aux
PRO
1498
PRO
potiers, à tous les gens qui pétrissaient Targile. Le mythe
de Prométhée a Jeté des racines yastes et profondes :
les habitants de la région du Caucase prétendirent long-
temps qu*on voyait dans leurs montûnes les os d*un
géant brisé par la colère divine, et on lit dans Pbilostrate
qu'ils faisaient une rude guerre aux aigles, pour venger
Prométhée (c'était l'aigle, et non le vautour, qui, dans
les traditions primitives, dévorait le foie du Titan). Il y
a une sorte de Prométhée dans la poésie de l'Orient ; ce
nom se trouve dans les Védas {PramcUhi, épithète
d^Agni). Il y en a un aussi dans la poésie du Nord : ce
héros des Sagas, qui va, sur la montagne de feu, déro-
ber au Dragon le secret de la métallurgie, n'est^il pas le
Prométhée Scandinave?
Il n'est pas de mythe qui ait donné lieu à plus d'inter-
prétations : selon Diodore de Sicile, Prométhée est un roi
ou un gouverneur éj^ptien qui , en lutte contre les inon-
dations du Nil , alors appelé Aigle à cause de la violence
de ses eaux , fut délivré du fléau par Tintervention d'Her-
cule. Théophraste considère Prométhée comme un sage
oui a fait part aux hommes de la philosophie. La tra^
die d'Eschyle a principdement exercé la sagacité des m-
terprétateurs; amsi, les quatre fils de Japet sont les
quatre grands types moraux de l'humanité : Atlas , la
force patiente, mais dépourvue d'initiative; Ménctius,
l'homme dont Prométhée et Épiméthée figurent la dou-
ble nature : le premier, c'est l'intelligence, dans son prin-
cipe le plus pur et le plus élevé, aux prises avec la matière
et les obstacles extérieurs ; le second, qui épouse Pandore,
c'est aussi l'intelligence, mais dans un degré inférieur,
et troublée par la passion, les faiblesses de l'&me et les
misères de la vie. Ou bien, les aventures de Prométhée
sont une image des luttes, des épreuves, des progrès de
l'humanité; Prométhée enchaîné sur son rocher, c'est
l'esprit se consumant dans les liens indestructibles qui
retiennent son essor; le vautour qui déchire les flancs du
Titan représente le travail de la pensée qui dévore sans
cesse le cerveau du poëte, de l'artiste, du philosophe, du
savant, et lui fait acheter cher ses triomphes et ses jouis-
sances ; la victoire de Jupiter sur Prométhée , c'est celle
de la révélation religieuse sur les penchants matériels de
l'homme, celle aussi des lois de la nature, de l'ordre
éternel de l'univers, de la puissance infinie, sur la force
libre et insoumise, mais finie, du génie humain. Quoique
ce mythe soit profondément paien, on a voulu encore y
voir des analogies avec la révolte de Satan, la chute
d*Adam, et la rédemption du Christ. Pour ce dernier
rapprochement, Lactance et TertuUien s'appuient sur
cette ressemblance qui existe entre le Christ et Promé-
thée, aue tous deux se sont dévoués pour le bonheur du
genre humain. Depuis le xvi* siècle, divers commenta-
teurs d'Eschyle et des fables antiques ont présenté Pro-
méthée comme le précurseur et l'image du Christ; ce
sont Garbitius, Stanlev, l'abbé Banier, etc. Joseph de
Maistre {Soirées de S^-Pétersbourg) a suivi la même voie
et expliqué le mythe de Prométhée en faveur des croyances
catholiques. — Parmi les interprétations scientifiques, il
en est une qui fait d'Atlas portant le ciel , et de Promé-
thée enchaîné sur le Caucase, des observateurs attentifs
au spectacle des phénomènes célestes. Une autre plus
récente veut que les alchimistes aient retrouvé dans la
fable de Prométhée les mystères de leur science. — Enfin,
dans une dissertation sur le Prométhée d'Eschyle (18*20),
Andrieux essaye de prouver que l'intention du poète a été
de cacher, sous le voile transparent d'une fable intéres-
sante, de grandes leçons de morale et de politique : Jupi-
ter serait Te type du tyran qui redoute les lumières, et
persécute dans la personne de Prométhée ceux qui les
répandent. Eschyle aurait songé à ^oppression des Pisis-
tratides, et aurait eu pour but , en rendant Jupiter odieux
et en donnant à sa victime une &me fière, libre, inflexi-
ble, d'entretenir dans l'&me des Athéniens la haine de la
tyrannie et la ferme volonté d'en empêcher le retour.
Cette interprétation se trouve aussi dans le commentaire
de Schûtz.
Le mythe de Prométhée oAhiit, par son obscurité môme,
trop d'éléments d'inspiration , pour que les poètes mo-
dernes ne fussent pas tentés de l'interpréter à leur tour;
l'Espagnol Calderon a composé une comédie intitulée la
EstcUua de Prometeo : ce n'est pas le Prométhée impie
et révolté qui est ici mis en sôàne, c'est le Prométhée
bienfaiteur des hommes. Il a élevé un autel à Minerve, et
fait une statue, qui n'est autre que Pandore. La déesse
reconnaissante lui fournit le moyen de dérober un rayon
du soleil pour animer sa création. Épiméthée s'éprend de
U statue vivante, et la dispute à bon ficru Qui Tempor^
tera de l'esprit ou de 'la matière? L'esprit triomphe à la
fln^ et Prométhée épouse Pandore, qui est l'image même
de l'humanité. Tel est le sens élevé et chrétien de cette
comédie allégorique, qui est très-remarquable, malgré la
bizarrerie de sa conception. Gœthe avait projeté une
grande composition mythologique sur la colère qu'inspire
à Jupiter la création de l'homme par Prométhée ; il ne
reste de cette ébauche qu'un prologue en trois petits actes
(1773). Ce poème date presque de la même -époque que
les premières scènes du Faust , et c'est peut-être à cetit
coïncidence qu'il faut attribuer l'analogie qui existe entre
Faust et le Prométhée de la tradition , en tant qu'ils re-
présentent l'un et Vautre la science humaine. Le charme
que les poésies de Gœthe exerçaient sur Beethoven a pu
lui inspirer l'idée de composer son ouverture de Promé-
thée, Un autre Allemand, Falk, poète satirique, a écrit
sur Prométhée un drame (1803) où il a développé, non
sans talent, les idées philosophiques de son temps et les
siennes propres. Nul sujet ne pouvait être plus sym-
pathique à lord Byron que celui de Prométhée ; il avoue
dans ses Mémoiresi'influence que l'œuvre d'Eschyle exerça
sur lui, et reconnaît la ressemblance qui existe entre son
Manfred et le héros du poète grec. Une Ode d Prométhée
(1816) , qu'on trouve dans ses Mélanges^ prouve encore
combien le symbole grec le préoccupait : il compare le
supplice de Prométhée à celui d'une &me fière et blessée
3ui aime mieux souffrir dans le silence et l'isolement que
'exciter la pitié; il glorifie le Titan d'avoir diminué la
misère humaine par ses enseignements, et appris à
l'homme aux prises avec la destinée à ne puiser sa force
que dans son esprit. On doit à Shelley, l'ami de Byron,
un drame en quatre actes qui a pour sujet le supplice et
la délivrance de Prométhée : c'est moins une œuvre dra-
matique qu'un traité de métaphysique d'après les idées
panthéistes et mystiques de l'auteur; les personnages sont
des abstractions et n'ont aucune vie qui leur soit propre.
En France, on ne peut citer au xvm* siècle que trois œu-
vres qui soient tirées du mythe grec : une tragédie lyrique
de Voltaire, connue sous le nom de Pandîorê, et qu'il
appelle aussi Prométhée; un opéra de LeCranc ie Pom-
pignan , portant le même titre, et où Voltaire, comme
représentant la philosophie du xviii* siècle, est mis en
scène sous le nom de Prométhée, pour avoir enseigné les
arts aux hommes et leur avoir appris à mépriser les dieux;
les Hommes de Prométhée (1774) , petit poôme de Colar-
leau , dans le genre descriptif, et donV tout l'intérêt re-
pose sur l'union du premier homme avec Pandore, la
première femme, l'un et l'autre sortant des mains créa-
trices de Prométhée qui a ravi le feu céleste pour animer
leur argile. De nos jours le côté sérieux et philosophique
de la fiS>!e antique a été mieux compris et a donné nais-
sance à des œuvres d'une plus haute portée. La plus consi-
dérable est le Pr^améthée de M. Edgar Quinet (1838, in-8°),
poème sous forme dramatique, divisé en trois par ties qui
répondent, comme dans la trilogie d'Eschyle, aux trois
époques de la vie du Titan : la 1** nous montre Promé-
thée apportant aux hommes le feu céleste, c.-à-d. les arts,
la civilisation , l'industrie ; le supplice du Caucase est le
sujet de la 2* ; dans la 3*, le Dieu nouveau qui délivre
Prométhée en renversant Jupiter, c'est le Christ , c'est la
religion chrétienne s'établissant sur les ruines du paga-
nisme. L'œuvro ne manque, dans son ensemble, ni d'ori-
ginalité, ni de grandeur, mais la forme ne répond pas à
la hauteur de l'idée; le vers est correct, mais froid et
monotone ; le rhythme semble être une lourde entrave
pour l'imagination de l'auteur qui, en effet, a plus de
chaleur et d'élan dans la prose. Nous citerons encore un
poème sur Prométhée qui fait partie d'un recueil de poé-
sies intitulé les Victimes , par M. Lodin de Lalaire (Paris,
1838); un Prométhée délivré de M. L. de Senneville
(Paris, 1844); un autre Prométhée délivré, drame en
trois actes, par H. Edouard Grenier {Revue nationale,
avril 1859 ). Ce dernier a adopté le dénoûment chrétien
de M. Quinet; son vers plus souple et plus coloré fait lire
son œuvre avec intérêt.
La grande figure de Prométhée n'a pas moins occupé
les arUstes que les poètes : il nous reste de précieux mo-
numents de l'art ancien qui reproduisent les faits les plus
importants de son histoire fabuleuse; Prométhée est re-
présenté soit seul, soit entouré de personnages symbo-
liques, sur des vases peints, des bas-reliefs, des pierres
gravéeûs, des médailles, etc. Les artistes modernes que oe
sujet a inspirés sont, entre autres, Flaxman, à qui Ton
doit une suite de dessins d'après les tragédies d'Eschyle,
et Pradicr, dont on a, dans le jardin des Tuileries, une
statue de Protnéthée délivré, V. V Antiquité expliquée par
PIIO
1499
PRO
MontfaacoQ, 1. 1"'; Religions de Vantiquité, par Creuzer,
t. IV ; Musée de sculpture par de Clarac, 1826-52, 6 toI.
iD-8''; Études sur tes tragiques grecs, par H. PatÎD,
Paris, 1858, 3 vol. in-S*; OBuvres choisies d'Andrieux ,
Paris, 1862, îii-8*. P— s.
PROMONTOIRE. V. Cap.
PROMOTEUR. V, ce mot d^s notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
PROMOTION, nomioation à un rang, à ane dignité
plus haute que celle qifon possédait déjà. On nomme pro-
nwtion per scUtum (par saat) celle qui est faite d*un
ordre ou d*Qn degré supérieur, sans avoir passé par le
degré on Tordre inférieur.
PROMPTUAIRE (du latin promptuarium, dérivé de
proimre, extraire), titre qu*on donna autrefois à des re-
cueils ou abrégés, principalement d*ouvrages de Droit.
PROMULGATION, acte par lequel les lois sont pu-
bliées avec les formalités requises, et qui les rend im-
médiatement exécutoires, sauf les délais exigés par les
distances (K. Distance légale). La promul^tion des lois
résulte de leur Insertion au Bulletin des Lots, — Chez les
Hébreux, les lois étaient publiées devant le peuple assem-
blé, et déposées entre les mains des Lévites, qui en fai-
saient tous les sept ans une nouvelle publication. En
Grèce et à Rome, on grava les lois sur des tables de bois,
de pierre ou d*airain , qui furent exposées sur la place
publique : c'était comme une promulgation permanente.
Dans rancienne France, les lois furent promulguées dans
les assemblées générales, puis dans les assemblées de
provinces; après la création des parlements, les ordon-
nances royales furent enregistrées jiar ces compagnies,
et cette formalité les rendit exécutoires. Ce fut la Con-
vention qui ordonna la publication des lois dans un Bul-
letin officiel : à cette insertion elle ajouta la publication
i son de trompe et de tambour, qui a été supprimée
depuis. B.
PRONAOS. V. Narthex.
PRONE. F. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et ^Histoire.
PRONOM, Tune des parties du discours, à laquelle on
a donné ce nom parce que les mots dont elle se compose,
ia, fiM, mot, nous, vous, les, leur, etc., tiennent la place
ou d'un nom précédemment exprimé et dont on évite la
répétition, ou d'un nom propre qu'il n'est point d'usage
d'exprimer comme sujet lorsau'il appartient à la per-
sonne qui parle on à celle à qui l'on s'adresse : « Je vous
ai écrit : quand répondrez-txms ? » Défini d'une manière
!)lus philosophique, le pronom est un mot qui désigne
es êtres animés ou inanimés comme jouant dans le dis-
cours un des trois rôles marqués par les trois personnes
(V, ce mot)^ ou, en d'autres termes, comme étant une
des trois personnes du discours. Tels sont, en fhui-
çais, je et nous pour la 1** personne, tu et vous pour
la 2% U, Us, elle, elles pour la 3". En latin, en alle-
mand, les pronoms se déclinent; dans d'autres langues, la
déclinaison est «uppléée par l'emploi de diverses prépo-
sitions. Les pronoms de la l'* et de la 2" personne n'ont
aucane variation de genres, ceux de la 3* ont des genres
distincts. — Outre les pronoms personnels proprement
dits, il y a des pronoms personnes réfléchis, qui servent
i exprimer le retour de l'action exprimée peir un verbe
attributif sur le sujet même qui la fait, comme quand on
^t: m Je me vois, tu te vois, il se voit. » Le pronom per-
sonnel réfléchi se distingue des trois autres en ce que,
dans les langues à déclinaison, il n'a que les cas indi-
rects, c-à-d. ceux qui marquent un complément, cette
espèce de pronom étant toujours l'objet d'une action et
par conséquent toujours complément. Il ne varie pas selon
le genre.
Outre les Pronoms personnels, il y a encore : 1® des
Pronoms démonstratifs, au moyen desquels on désigne
les personnes ou les choses en les montrant (F. Dé-
MONSTRATiv}; 2*» dos Pronoms possessifs ^F. Possessif) ;
3<> des Prtmoms relatifs ou conjonctifs (F. ce mot);
4" des Pronoms interrogatifs (F. ce mot); 5** des Pro^
noms indéfinis {plusieurs, certains, nul, aucun, td,
tous, etc., lorsqu'ils sont employés sans être Joints à un
nom; Vun, Vautre, répétés, lorsqu'ils ne rappellent aucun
nom déterminé). On Joint souvent à cette dernière caté-
gorie les mots français on, personne (n«), rien (ne\ au-
trui, chacun^ quelqu*un; mais ce sont plutôt, surtout
les quatre p'remiers, des substantifs indéfinis que des
pfononM, car ils ne tiennent réellement la place d'aucun
nom. P.
PRONOMINAUX (Verbes), verbes qui se conjuguent
toujours avec an pronom complément « L'orgueilleux
se loue; le coupable se repent. » D'où il suit qu'à la
!*• et à la 2* personne il y a toujours deux pronoms dans
la conjugaison de ces verbes : ^Je me repens , tu te
vantes, nous nous retirons, vous vous moquez, etc. »
Lorsque le verbe pronominal est formé d*un verbe actif «
le 2* pronom est complément direct; s'il vient d'un
verbe neutre, ce 2* complément est indirect; ainsi:
« Vous vous vantez (c.-à-d. rous vantez vous) ; nous
nous succédons (c-à-a. nous succédons à nous), » Il y a
des verbes pronominaux accidentels, comme les deux qui
viennent d'être cités, et des verbes pronominaux essen-
tiels, c.-à-d. qui n'existent que sous cette forme : ainsi
les verbes repentir, abstenir, emparer, ne sont d'aucun
usage en dehors de la forme pronominale se repentir,
s^abstênir, s'emparer. Dans les verbes pronominaux es-
sentiels, le pronom complément est toujours considéra
comme complément indirect, si ce n'est dans le verbe
s*arroger, qui est pour arroger à soi. — Certains verbes
devenus accidentellement pronominaux doivent être con-
sidérés comme des verbes pronominaux essentiels, lors-
que la forme pronominale a modifié leur signification et
leur syntaxe : ainsi apercevoir une chose et s'apercevoir
d'une chose expriment deux nuances de sens; féliciter
quelqu'un, se féliciter de quelque chose semblent égale»
ment deux verbes différents ; comporter et se comporter,
attendre et s'attendre, etc., donnent lieu à des observa-
tions analogues. — Tous les verbes pronominaux con-
juguent les temps composés à l'aide du verbe être. P.
PRONONCIATION, manière d'articuler les mots. La
prononciation doit être pure ou corrects, distincte, me-
surée ou rhythmique. Elle est pure, quand on n'y recon-
naît aucun accent vicieux ou étranger, aucun cachet pro-
vincial, mais l'accent des hommes instruits et de la
bonne compagnie, quand elle est conforme aux règles de
la grammaire et de l'usage. On prononce distinctement,
lorsqu'arrivent successivement à l'oreille, non-seulement
tous les mots, mais toutes les syllabes, sans précipitation
ni lenteur. La prononciation est mesurée, si l'on donne
aux syllabes la durée relative qui leur convient, si l'on
ne fait pas longues les syllabes brèves, et brèves les syl-
labes longues. Pour être bien entendu, une voix forte et
élevée est beaucoup moins utile qu'une bonne prononcia-
tion. Il y a une prononciation conventionnelle pour
chaque langue, et qui dépend du climat, de la conforma-
tion des organes vocaux, et des habitudes nationales.
F. Mathieu, Traité de la parole, 1847, in-H*"; Morin (de
Clagny), Traité de prononciation, 2« édit., 1852, in-8°.
PRÔNUNCIAMENTO. F. ce mot dans notre Diction-
naire de Biographie et d'Histoire.
PROODE. F. Strophe.
PROOEMIUM (du grec proùtmion, composé de pro,
avant, et aHmè, chant), espèce de prélude par lequel cer-
tains Aèdes ou Rapsodes commençaient la récitation de
leurs compositions épiques, pour se concilier la faveur et
attirer l'attention des auditeurs, avant d'en venir à leur
sujet môme. C'est à peu près ce qu'on appelle en français
un préambule, en latin exordium. F. Exordb, PriUm-
BULB. P.
PROPAGANDE (Congrégation de la). F. notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire.
PROPAGATION DE LA FOI (Association pour la),
société religieuse établie en France pour l'extension des
Missions catholiques. Elle publie des AnncUes tous les
deux mois.
PROPERTY-TAX, c-à-d. en anglais taxe de la pro-
priété, contribution établie en 1708 en Angleterre pen-
dant le ministère de William Pitt, supprimée en 1815,
et rétablie en 1843. Elle frappe non-seulement la terre et
les immeubles, mais toutes les valeurs quelconques, telles
que l'intérêt des capitaux, etc.
PROPHÈTES. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
PROPHÉTIE (du grec pro, avant, et phémi, je parle),
prédiction des choses futures par inspiration divine.
PROPITIATION. l V.ccà mots dans notre Diction"
PROPITIATOIRE. ( naire de Biogr. et d'Histoire.
PROPORTIONS, en termes de Beaux-Arts, rapport
qu'ont entre elles les dimensions des diverses parties d'un
tout. La Justesse des proportions est une des conditions de
la beauté. Qiaque Ordre d'Architecture a ses proportions
particulières (F. Module). Les peintres et les sculpteurs
mesurent toutes les dimensions de la figure humaine par
longueurs de tête ou par longueurs de face; ainsi , les ar-
tistes anciens donnaient à leurs sujets 7 ou 8 longueurs
de tète; les Modernes comptent de préférence par lon-
gueurs de face, et en donnent 10, ainsi réparties : du
PRO
1500
PRO
•ommet de la tête à la naissance des cheye^, un tien de
face; de la naissance des cheveux au bas du menton,
une face; du menton à la fossette entre les clavicules,
2 tiers de face; de cette fossette au-dessous du sein, une
face; le ventre, 2 faces; des jambes au haut du genou,
S faces; du haut du genou au coude-pied, 2 faces 1/2;
du coude-pied au-dessous de la plante du pied, une
demi-face.
PROPOSANT. V. Pasteur.
PROPOSITION , expression d'un iugement. Elle a trois
termes : le sujet, le verbe et rattribut, mais ils ne sont
pas nécessairement exprimés par trois mots distincts.
Quelquefois le verbe et l'attribut sont renfermés en un
seul et même mot ; ainsi : « Je dors, » D'autres fois les
trois termes sont contenus dans un seul mot, ce qui est
presque constant en grec et en latin, et se voit quelque-
fois en italien , surtout en poésie : dans le latin dormio,
on trouve ego siun dormiens^ je suis dormant. Quelque-
fois le sujet seul ou l'attribut seul se trouve exprimé :
alors il V a ellipse des deux autres termes; mais il faut
pour cela que 1 on puisse les suppléer facilement d'après
ce qui précède. Ainsi , dans Corneille, la confidente de
Médée (I, 5) demande à cette reine :
Dam un si grand rcTers qne voaa reste- t-il? — Uoi,
répond Médée. Ailleurs, le même poète fait dire par Pru-
sias à Nicomède (lY, 3) :
Et que doia«Je être? — Roi ,
* répond Nicomède. Dans le premier cas, le verbe et Tat-
tribut reste doit être suppléé; dans le second, c'est le
sujet et le verbe : Vow êtes ( devant être roi)» — Chacun
des termes de la Proposition peut avoir dans sa dépen-
dance des mots qui le déterminent ou l'expliquent , et
qui font en quelque sorte paitie du mot par lequel le
terme est exprimé. La bonté de Dieu est grande est une
proposition dont les termes essentiels sont exprimés car
les mots bonté est grande; le mot la, les mots de Dieu
sont des dépendances du sujet, et ces quatre mots réunis,
la bonté de Dieu^ ne constituent qu'un terme, le siiget.
Les mots accessoires qui allongent ainsi l'expression de
la pensée en la précisant s'appellent compléments. Quand
le sujet ou l'attribut n'ont pas de complément, ils sont
dits incompteoces ; s'ils en ont, ils sont dits compleoces, —
Deux ou plusieurs propositions unies entre elles à l'aide
de conjonctions ou d'adjectifs conjonctifs sont dites coor-
données. Si les propositions sont tellement enchaînées,
que l'une, sans le secours de l'autre, n'exprime pas une
pensée complète, l'une est principale et l'autre subor-
donnée. Loroqu'une proposition subordonnée, annoncée
par un adjectif conjonctif ou par une conjonction, ou par
un participe, est insérée dans la proposition principale ou
dans l'une des pro]>ositions subordonnées dont elle fait
partie, elle est dite incidente. V, Incidente. P.
pROPosmoN, 'eu termes de Rhétorique, deuxième
partie du discours. C'est l'exposé clair, net et précis du
sujet. La Proposition se place après l'Exorde ; quand on
a éveillé et captivé l'attention de l'auditeur, il faut lui
faire comprendre le sujet dont on veut l'occuper. La Pro-
position est simple, quand elle ne renferme qu'un point
à prouver; composée, quand elle en renferme plusieurs,
et alors elle amène naturellement la Division, c-à-d. la
séparation du sujet en ses diverses parties. La Proposi-
tion et la Division ( V, ce mot) forment le plan du dis-
cours. H. D.
PROPOSITION (Pains de), V, Pain, dans notre Dictton-
naire de Biographie et d Histoire.
PROPOSITIONS (Les cinq). V. Jansénisme, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
PROPRE, l'un des cinq Universaux de l'École; attri-
but nécessairement lié avec l'attribut essentiel qui forme
la Différence. Par exemple, avoir le carré de l'hypoténuse
égal à la somme des carrés des deux autres cètés, est le
propre du triangle rectangle, comme suite de ce dernier
caractère, avoir un angle droit qui est la différence spé-
cifique. V. Dniversadx, Genre, Espèce, DiFFiRENcs,
AcaoENT. B — E.
PROPRE, en termes de Liturgie, office particulier de
certains jours, de certaines fêtes. Il y a le Propre du
temps et le Propre des saints. On nomme Propre d'une
église l'office particulier à cette église.
PROPRES (Biens), en termes de Droit, biens immeu-
bles qui proviennent de succession. On a donné le même
nom aux biens du mari et de la femme qui n'entrent pas
ians la communauté conjugale.
PROPRÉTEUR. V. ce mot dauii notre Dictionnaire d*
Biographie et d* Histoire.
PROPRIÉTAIRE , celui qui possède en propre un objet
quelconque, et à qui la loi reconnaît le droit de propriété.
Dans l'usage, le mot s'entend principalement de ceux qai
possèdent le sol et les constructions qu'il supporte. La loi
accorde au propriétaire un privilège sur les meubles de son
fermier ou locataire, sur tout ce qui sert à l'exploitation de
la ferme, et sur les fruits de la récolte de l'année, pour les
loyers et fermages des immeubles, pour les réparations lo-
catives , et pour tout ce qui concerne l'exécution du bail
(Code NapoL, art. 2102; Code de Procéd,, 819 et suiv.).
En France, il y a 1 propriétaire foncier sur 9 habitants ;
en Angleterre, 1 sur 40. V. Toussaint, Code de la Pro-
priété, 1833, 2 vol. in-8^;Agnel, Code-Manuel despro-
priétaires, 1848, in-12.
PROPRIÉTÉ, chose que l'on possède en propre, et
droit d*en jouir et d'en disposer. La propriété se trans-
met et s'acquiert par succession, par aoncUion entre vifs
ou testamentaire, et par l'effet des obligations; elle peut
s'acquérir encore par accession ^ par occupation, par
port à la nature de Tobjet possédé, la propriété est mo'
hilière ou immobilière, foncière, wdustrielle, lUtéraire,
et artistique.
L'homme a été jeté sur la terre avec une propriété
qu'on ne saurait méconnaître, la propriété de ses bras,
de ses forces et de ses facultés ; car son &me et son corps,
c'est lui-même, c'est son individualité distincte. Dire
qu'il peut vouloir et agir pour son compte, c'est admetr
tre que ce qu'il produira ne sera qu'une dépendance de
son individualité, et devra lui appartenir : il j a quelque
chose de lui dans l'œuvre que sa main fabrique sous la
direction de son esprit, dans le champ qu'il ensemence,
et qu'il féconde de ses sueurs. Ses facultés et ses organes
sont bien à lui ; l'emploi qu'il en fait lui assure la pro-
priété de leurs créations. Le travail est l'origine de toute
propriété. La propriété est donc de droit naturel; elle
résulte, non d'une convention ou d'une loi, mais de la
constitution même de notre être, et de nos différentes
relations avec les objets qui nous environnent. Aussi la
trouve-tron établie comme un fait chez tous les peuples,
quelque grossiers qu'ils soient, et le droit existe, sinon
sous une forme rationnelle dans l'esprit, au moins à
l'état d'instinct. Le sauvage chasseur se regarde comme
propriétaire de son arc, de ses flèches, du gibier qu'il a
tué; le nomade qui a élevé de nombreux troupeaux en
échange les produits contre ceux qu'un agriculteur a fait
naître du sol , et tous deux entendent bien avoir la pro-
priété de ce qu'ils donnent ou reçoivent. Toutefois, en ce
qui concerne la terre, il y a plutôt possession que pro-
priété pour les ftges primitifs : l'homme ne fait que pas-
ser sur le sol ; il ne le conserve qu'autant quïl le tient
et qu'il a la force de le défendre ; c'est alors surtout que
la possession vaut titre.
Le droit de propriété n*existe avec des garanties que
dans les sodétés régulièrement organisées; c'est la so-
ciété qui assure la jouissance de la propriété, et la consti-
tue ce qu'elle est dans les différents pays^et dans les
différents âges. L'homme peut alors s'éloigner de sa chose
sans perdre ses droits sur elle ; sa propriété a été mar-
quée d'un signe propre qui sert à la reconnaitre et à la
i^éclamer sur la preuve de l'identité. En ce sens, la pro-
priété est de droit social. Mais on ne peut accepter l'opi-
nion que J.-J. Rousseau, Montesquieu, T^ochet et
Mirabeau soutenaient d'une manière absolue, à savoir :
que la propriété est une émanation du Droit civii , et que
la volonté politique donne seule à la jouissance d*un petit
nombre un titre qui appartient à tous. La propriété a pu,
dans certains temps et dans certaines contrées , sous la
domination de pouvoirs despotiques, être attribuée au
chef de l'État comme représentant de la Divinité, de telle
sorte que la Jouissance d'une partie de la terre ou de la
I richesse par les sujets était réputée une pure tolérance;
elle a pu, ailleurs, procéder de la conquête et de Tusur-
1 pation. Mais ces faits n'infirment point le droit naturel
que possédaient sur la terre à l'origine des choses les
premiers occupants, et que possèdent encore aujourd'hui
tons les hommes sur les fruits de leur travail.
La société donne une garantie à la propriété indiri-
duelle : en retour elle impose à ceux oui la possèdent
certaines obligations, qui varient selon les conditions de
l'organisation sociale : tel est, par exemple, l'impôt pro-
portionné à l'étendue et à la qualité des bieaa« aorte dt
PRO
1501
PRO
trihat mwé à la société toat entière ; telles sont les limites
que la loi apporte an droit d*user et d'abaser, qaand elle
interdit le prodigue pour sauvegarder les intérêts de ceux
qui pourraient souflnr de ses folies, quand elle prescrit
à la Jouissance de la richesse certains modes qui ne met-
tent pas la masse des citoyens en dausger de disette ou de
raine; tels sont encore les droits de mutation et de suc-
cession perçus au profit de TÉtat. La société se réserve
lovJouTs, si l'intérêt public Texige, la faculté d*expro-
priation (K. es mot)^ moyennant une indemnité raison-
nable.
L'homme a la propriété des fruits de son travail ; comme
conséquence, il en possède la libre disposition. Il peut
consommer sa propriété, raffermer, l'échanger, la donner.
Les lois positives ont consacré ce nouveau droit, et, quant
à la transmission des biens après décès, elles ont pris
encore un sage parti, en établissant l'hérédité directe,
qui est conforme à l'instinct de la nature. Ces conditions
de la propriété sont indispensables au développement de
l'individu, de la famille, et de la civilisation. Par la pro-
priété, l'individu est en pleine possession de sa person-
nalité et de sa liberté; en elle il trouve un puissant
stimulant à son activité. Ce n'est pas pour lui seul qu'il
L aspire, mais pour la famille dont il est le chef, et, en
poursuivant , il n'a pas seulement en vue la stricte
•satisfaction des besoins, mais le bien-être et l'aisance.
Les peuples à leur tour grandissent par l'élévation gra-
duelle des familles, par l'accroissement de leur fortune et
de leurs lumières. Sans la propriété, le travail n'a pas
plus de but que de résultat
La propriété, atuquée aux différentes époques de l'his-
toire pu* les doctrines communistes ( V. Gommonisme ) , a
trouve de nos Jours un adversaire original par la nar-
dlesse et la crudité de ses aphorismes. Sa fameuse for-
mule: La propriété, <fest le voi, A on la prenait au
sérieux, serait un brutal défi à toutes les opinions reçues,
à toutes les idées de Justice, au sens commun lui-même.
L'auteur en a pins tard donné la valeur véritable ; c'était
■ une machine de guerre, bonne pour l'insurrection, »
et qui ne peut plus servir « qu'à contrister les pauvres
gens, » un de ces coups bruyants par lesquels on attire
l'attention du vulgaire. Au fond, M. Proudhon n'a rien nié,
ni la propriété des fruits par le travail, ni le droit de
vente et d'échange, ni l'hérédité : tout se borne à une
chicane subtile sur une définition, à une substitution de
mots qui ne peut pas changer la nature des choses ; ce
qu'on nomme propriété, il l'appelle possession, et lepro-
priéUUre n'est plus qu*un usttfruitier.
Histoire, — La propriété a subi bien des vicissitudes.
En Orient, et particnlièrement dans l'Inde, il n'y a qu'un
propriétaire, parce qu'il n'y a qu'un être libre, à savoir,
l'État ou le Prince. Cette identification de la propriété
avec le Prince est dans l'ordre civil ce oue le panthéisme
est en religion. La propriété individuelle est l'exception,
et U propriété domaniale la règle. Les fonds ruraux
dans rinde sont annuellement distribués entre les habi-
tants de chaque village, en proportion des moyens de
travail que chacun d'eux possède : un fonctionnaire, gé-
néralement héréditaire, a la haute main dans toutes les
afiiûres de la communauté, répartit les charges, touche
les revenus communs, et en fait la distribution. Il v a
donc communauté de la propriété foncière, et indivi-
dualité de la propriété mobilière; la propriété foncière
repose entre les mains du chef qui régit l'ensemble du
territoire. Le régime de la communauté est dans les
mœurs de l'Inde, et on ne le trouve dans l'État que parce
qu'il existe dans l'intérieur de la famille. La primogé-
niture, en effet, constitue un droit et un privilège : le
droit à l'héritage paternel est indivis, et c'est le premier
né qui régit la communauté. Seul il est apte à contracter
et à passer tous les actes qui ont rapport à la propriété
collective; dispensé de rendre aucun compte de sa ges-
tion, il peut, de sa pleine autorité, hypothéquer les im-
meubles de la succession, et vendre même les valeun
mobilières; seul il a le droit de rompre le lien social, et
de restituer à ses frères la libre Jouissance de la part
qui leur ravient. Une telle organisation de la propriété
explique û mine des États asiatiques. Pourquoi tra-
vailler, pourquoi améliorer et bien entretenir la terre,
quand on peut être dépossédé par le maître?
La loi de Moïse, en partageant les terres éhtre les Hé-
breux, voulut piiâvenir les grandes inégalités que le
temps amène. La possession fut limitée à un demi-siècle.
A chaque terme ainsi fixé, une répartition nouvelle de-
vait rétablir, autant que possible, l'égalité primitive des
panages. Mais, comme l'inégalité des facultés et la vio-
I lence des passions poussent les uns à leur ruine, les
autres à l'envahissement, l'équiMbre était bientôt dé-
rangé, et le Jubilé avait tous les inconvénients de l'insta-
biliti§, sans aucun avantage bien réel. La loi mosaïque
proclamait la légitimité des héritages : « Vous ne re-
muerez point les bornes posées pour séparer les héri-
tages... Maudit soit celui qui déplace les bornes de l'hé-
ritage de son prochain ! » (DetUéron.^ iO et 27.)
En Grèce, la liberté politique fut grande, excessive
même; mais la liberté civile subit bien des entraves, et,
sous prétexte c^ue le citoyen est comptable de soi-même
envers la patrie, l'État pénétra dans la famille pour sur-
veiller les personnes et régler les actes ou les mœurs. Il
eut la prétention d'être l'origine de la propriété, le sur-
veillant de ses évolutions, et se crut maître de restreindre
le droit du possesseur du sol. Platon proclame ce prin-
cipe, dont toute la législation grecque ne fut qu'une
application : u Que nos citoyens partagent entre eux la
terre et les habitations, et <|u'ils ne lalraurent point en
commun, puisque ce serait en demander trop à des
hommes nés, nourris et élevés comme ils le sont aujour-
d'hui ; mais que chacun se perauade que la portion qui
lui est échue n'est pas moins à l'État qu'à lui. » {Lots,
liv. V.) Et ailleun : « Je vous déclare, en ma qualité de
législateur, que je ne vous regarde pas, ni vous, ni vos
biens, comme étant à vous-mêmes, mais comme apparte-
nant à votre fiunille, et toute votre famille, avec ses biens,
comme appartenant encore plus à l'État. » (/6., liv. XL)
De cette philosophie de la propriété découlait naturelle-
ment un préjuffé dangereux, à savoir, que l'État est chargé
de présider à la répulition des richesses entre les ci-
toyens : par conséquent, on le rendait responsable de
l'inégalité des fortunes, et on exigeait du législateur
qu'il arrivât par ses règlements à l'égalité des biens,
a Pour les législateurs, dit Aristote (Politique) ^ le point
capital est l'organisation de la propriété, source unique
des révolutions; » et ce philosophe nous montre com-
ment les États grecs se sont consumés en efforts per-
pétuels pour maintenir des proportions égales dans la
possession du sol et des biens. Les révolutions naissaient
tour à tour de l'envie des pauvres d'avoir autant que les
riches, et de l'irritation des hommes supérieura en acti-
vité, en industrie, en talents, de n'avoir que la part
commune. De là toutes ces lois qui avaient pour but de
bannir le luxe, de faire régner la frugalité, la simplicité
et une égalité chimérique. L'humanité s'est Jouée de ces
vaines entraves : en fait, l'inégalité des fortunes régna
dans toute la Grèce, à Sparte plus qu'ailleura, malgré
les précautions de Lycurgue.
Le monde romain nous offre de nouveau l'immixtion
de l'État dans la propriété, mais avec de tout autres ca-
ractères : Rome reconnut, dans le territoire qu'elle con-
quit {ager romanus)^ deux sortes de propriété : la pro-
priété privée (ager prtwUt»), provenant d'une première
occupation, ou de partages eiSectués entre les citoyens
après les conqruêtes, ou de conventions et contrats; et la
propriété publique {ager ptU)lieus)<t domaine propre de
l'État, ou'il affermait par lots et temporairement à des
particuliera moyennant redevance, laquelle servait à ses
besoins d'administration et de guerre. Par ce système
d'une double propriété, l'État ne dépendait pas de la
propriété particulière, à laquelle il ne demandait rien ;
il était assez riche par lui-même, et rien ne le gênait
dans ses opérations; il pouvait prévenir la misère des
citoyens dépourvus de propriété privée, en leur donnant
du travail et des aliments. La propriété privée, qu'on
appelait le domaine quiritaùre, était souveraine; elle
conférait le droit politique, la domination dans la cité
{dominium)^ la quiùité de quirite ou de citoyen romain.
Elle ressentit peu les prescriptions arbitraires de l'État et
sa propension à la réglementer : sans doute il y eut, à cer-
taines époques, des impôts ruineux ou des confiscations
terribles, mais on ne vit en aucun temps proclamer un
droit de l'État à déposséder les particuliers. Lei contrats
par lesquels la propriété se meut et se déplace furent
suffisamment libres; la succession régla son coun sur
des raisons de parenté ; le testament fut un acte de sou-
veraineté individuelle. Dans les lois autant que dans les
mœun, le droit de l'État sur la propriété alla peu à peu
se perdre dans l'oubli, et Cicéron déclarait déjà que la
propriété avait son origine dans la loi même de la so-
ciété humaine. La propriété publique agitait en même
temps rapprochée des conditions de la propriété privée t
malgré les lois agraires qui en avaient réclamé le par-
tage entre les pauvres, elle resta entre les mains d'uns
aristocratie puissante, et, sans toutefois que le droit de
PRO
1502
PRO
l'État fût prescrit, elle devint susceptible de veum,
d'échange, de donation, d'hypothèque, de transmission
Héréditaire, c.-à-d. qu'elle réunit par le fait tons les ca-
ractères de la propriété privée. Le christianisme con-
tribua , comme les Jurisconsultes romains , à établir la
véritable nature de fa propriété : car, d'après lui, la pro-
{)riété émane de Dieu, c-à-d., pour parler la langue des
ois, du droit naturel ; elle est le fruit d'une occupation
première et du travail, et non pas une concession de
i'homme à l'homme; elle est inhérente à la nature hu-
maine, et le droit de l'individu n'est tempéré que par le
devoir d'être largement charitable.
Autant qu'on on peut Juger par les Commentaires de
César (VI, 13-i7), toute propriété était considérée, dans
l'ancienne Gaule, comme dérivant des dieux, et se dis-
tinguait par sa destination en sacrée et profane. La pro-
priété sacrée était réservée aux Druides; ceux-ci Jugeaient
seuls toute question de revendication et de bornage, et
c'était dans un sacrifice que le vol était puni de mort.
L'État pourvoyait à ses besoins par des impôts ou des
prélèvements sur la fortune privée. Les Romains appor-
teront en Gaule leur système de propriété : tout en lais-
sant aux individus l'usage immédiat et la Jouissance des
biens, l'État se réserva la propriété, c.-à-d. un droit de
domination, en vertu duquel tout lui était permis, sur-
veillance, direction économique, imposition indéfinie. Les
invasions des Barbares au v* siècle modifièrent de nou-
veau la situation de la propriété. Quelques terres, laissées
aux vaincus et grevées de charges, portèrent le nom de
terreft tributaires ou censives. Celles que s'arrogèrent les
vairit|ueurs furent de deux sortes, les alleux et les béné-
fices ( V. ces mots dans notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire) ; ces terres finirent par se confondre sous
le nom de /lefs, et cette transformation fut complète
après Cbarlemagne. Le système féodal eut sa base dans
la propriété foncière, a Point de seigneur sans terre, n
disait-on à cette époque ; c-à-d. que la souveraineté était
intimement unie avec la propriété, et que quiconque
n'avait point de terre ne pouvait posséder ni titre, ni
pouvoir. Un autre caractère de cette organisation sociale,
c'est que le seigneur était propriétaire originaire de tous
les biens situés dans le ressort de sa souverainté : de là
ces contributions qu'il prélevait, non-seulement sur les
prodoits, mais sur les mutations de la propriété dépen-
*dante, par exemple, le relief, la mainmorte, etc. Les plus
grandes précautions furent prises pour immobiliser la
propriété dans le^ familles sei^euriales : ainsi, le droit
d'aînesse en assura la transmission intégrale ; le retrait
féodal permit au suzerain de racheter la terre aliénée par
son vassal. Quant aux anciennes terres censives et aux
constructions élevées par les roturiers, elles furent expo-
sées à toutes sortes de ravages ou d'usurpations pour
l'avantage ou le plaisir des nobles.
Cependant, les progrès de l'industrie au moyen &ge
créèrent une nouvelle propriété, la propriété mobilière,
que devaient augmenter plus tard les métaux précieux de
l'Amérique, et qui ne tarda pas à lutter contre la pro-
priété foncière ou territoriale. Elle avait sur sa rivale
l'avantage d'ôtre mobile, divisible, accessible à tous; elle
permit encore plus tard d'acheter la propriété du sol. La
propriété mobilière n'eut point, dès ses premiers Jours,
rindépendance qui appartient à toute propriété : elle ne
se produisait que dans le milieu des corporations indus-
trielles, et elle dut se plier aux règles de ces corpora-
tions; comme les conditions de l'apprentissage et de la
maîtrise, la cjualité des produits et les prix de vente
étaient déterminés, la richesse mobilière ne put se livrer
à une exploitation égoïste, asservir les travailleurs, acca-
arer par la concurrence le monopole de la production.
D'un autre cèté, l'Église, par ses anathèmes contre le
prêt à intérêt, gêna pour longtemps l'emploi de la pro-
priété mobilière.
Quand !es rois eurent abaissé la féodalité, ils affichèrent
les mêmes prétentions que les seigneurs en matière de
propriété. Parmi les griefs du Parlement anglais contre
Richard II, à la fin du xiv« siècle, était celui de s'être dé-
claré le maître des propriétés de ses sujets. En France,
toute une école de Jurisconsultes soutenait <me le roi est
présumé avoir le domaine direct de toutes les terres de
son royaume. Ce principe fut posé dans le Code Marillac
(art. 383), en 1629. Louis XIV le formula avec plus
d'énergie dans un édit du mois d'août 4692. La Sorbonne,
consultée sur un impôt, lui répondait que les biens de
ses sujets étaient les siens. On lit dans le Testament po-
Utique de Louvois : « Tous vos sujets, quels qu'ils soient,
vous doivent leur personne, leurs biens, leur sang, mi»
avoir droit de rien prétendre. En vous sacrifiant toat es
qu'ils ont, ils font leur devoir, et ne vous donnent rien,
puisque tout est à vous. » Dans un Mémoire anonyme
publié à Amsterdam en 1689, et qui fait partie d'an re-
cueil intitulé les Soupirs de la France eselaw, il est dit
que, sous le ministère de Colbert, on délibéra si le roi
ne se mettrait pas en possession de toutes les terres, si
on ne les réunirait point toutes au domaine royal, pour
en Jouir et les a0éraier à qui la cour Jugerait à propos.
Ce qui est hors de doute, c'est la conviction personnelle
de Louis XIV, exprimée dans ses instructions au Dau-
phin : a Tout ce qui se trouve dans l'étendue de nos
États, de quelque nature qu'il soit, nous appartient au
même titre. Vous devez êlre bien persuadé que les rois
sont seigneurs absolus, et ont naturellemeot la disposi-
tion pleine et libre de tous les biens qui sont possédés,
aussi bien par les gens d'église que par les sëenUers,
pour en user en tout comme de sages économes. » Oetta
théorie monstrueuse a été renvenée par la Révolution
française, avec les privilèges attachés aux propriétés no-
bles ou ecclésiastiques, et le principe de l'égalité de tous
, devant la loi, proclamé par l'Assemblée constituante, a
servi de base au Code Napoléon, Désormais en France la
propriété est inviolable, accessible à tous, et lea cbarges
qu'elle supporte sont les mêmes pour tons.
Chez les peuples musulmans, le droit de propriété est
aussi incontestable que chez les chrétiens. Le Koran a
dit : a La terre appartient à Dieu; il la donne à l'iman,
et l'iman la répartit ensuite suivant son bon plaisir. »
Mais c'était seulement chez l'infidèle qcd le muaulman
regardait la terre comme un don passager ipn pouvait
être pris par les ministres de Dieu. Chez lui, chez ses
frères, dans sa cité, la propriété a un caractère invio-
lable. Les Arabes ont une grande répugnance à se dé-
{ mouiller de leurs terres, même par des transactions. Chez
es Turcs, la confiscation n'a Jamais été l'exercice ni d'un
droit politique, ni d'une loi religieuse, mais une mesure
pénale, destinée à ch&tier une révolte ou une trahison.
V. G. Garnier, De la Propriété dans ses rapports avec
le Droit politique, 1792, in-12; De Savigny, Du droit de
propriété, 1803, in-8<>; Comte, Traité de la Propriété,
1834, 2 vol. in-8«; Troplong, De la Propriété diaprés le
Codecivtlj 1830, in-S»; Proudhon, Traité du domaine
de Propriété, 1839, 3 vol. in-8<>; Agnès, De la Propriété
considérée comme principe de conservation^ 1840, 3 vol.
in-8<*; Ghavot, Traité de la Propriété mobtlière suivant
le Code civil, 1839, 2 vol. in-8*; Du Puynode, EsseU sur la
Propriété territoriale ^ 1843, in-8°; LeWstier, De la pro-
priété et de son principe, 1844, in-8°; Fréd. Baatiat, Pro-
priété et Loi, 1848, br. in-16; G. deMolinari, les Soirées
de la rue S^Lazare, Entretiens sur les lois économiques
et Défense de la Propriété, Paris, 1849, gr. in-8«; Tbiers,
De la Propriété, Paris, 1849, gr. in-18; Burdet, Considà-
rations sur la nature du droit de Propriété, 1851 , in-8° ;
Rivière, Examen de la Propriété mobilière en France,
1854, in-8^; Demolombe, Distinction des biens, Propriété,
1856. 2 vol. in-8°; Lesenne, De la Propriété avec ses dé-
membrements, 1858, in-8°; Pellat, Exposé des principes
du Droit romain sur la Propriété, 2* édit., 1853. in-8«;
Giraud, Recherches sur le droit de Propriété diez Us
Romains, Aix, 1838, in-8®; Lescaret, De la Propriété pei^
dant Vépoque féodale, 1851, in -8»; Laboulave, Ëistoire du
droit de Propriété foncière en Occident, 1839, in-8<>.
PROPRiéré ( Certificat de ) , acte par lequel un officier
public atteste le droit de propriété ou de jouissance d*une
ou de plusieurs personnes sur le capital et les arrérages
d'une rente, d'une pension viagère de l'État, sur un
cautionnement, sur des actions de Ta Banque de France, etc.
Pour les rentes et les pensions viagères, il doit être pro-
duit dans les six mois du décès du titulaire ou du pen-
sionnaire, à peine de déchéance. Le certificat est déuvré
par un notaire, lorsqu'il y a un inventaire ou partage par
acte public, ou donation entre-vifs, ou transmission tes-
tamentaire ; par le Juge de paix du domicile du décédé,
sur l'attestation de deux témoins, s'il n'existe aucun des-
dits actes authentiques ; par le greffier du tribunal , lors-
que la mutation résulte d'un Jugement. Il doit être timbré,
enregistré et légalisé.
PROPRiiTÉ DU STTLB, rapport parfait du mot et de la
pensée. « Parmi toutes les dilTérentes expressions qui
peuvent rendre une seule de nos pensées, dit La Bruyère,
il n'y en a qu'une qui soit la bonne : on ne la rencontre
pas toi;^ours en panant ou en écrivant. Il est vrai néaa-
moins qu'elle existe, <][ue tout ce qui ne l'est point eM
faible et ne satisfait point un homme d'esprit qui veot ae
faire entendre. » Le terme propre rend l'idée tout entière |
PRO
1503
PRO
nn terme pou propre ne la rend qu*à demi ; an terme
impropre la défigure. On pèche souvent contre la pro-
priété par l'emploi de mots qui paraissent synonymes :
chaque idée ayant son signe propre, il ne peut y avoir
des termes entièrement synonymes. On doit toujours
chercher 16 mot propre : cependant la bienséance veut
4u*oD révite quand il est obscène, dégoûtant ou bas. II
faut encore Téviter quand il est technique, ou du moins
l'expliquer, lorsque Ton s'adresse à des hommes peu versés
dans rétttde des sciences. H. D.
PROPRléTÉ INDUSTRIELLE. V. BREVETS D'iNVERTION, BIAR-
QCES DE FABRIQUE, CONTREFAÇON.
PROPRliré LITTÉRAIRE ET ARTISTIQUE, droit quO lOS écrl-
vains et les artistes possèdent sur leurs œuvres. La loi,
qui garanti! à tous la propriété perpétuelle des biens
meubles et immeubles, s*est montrée moins libérale pour
les productions littéraires et artistinues. Dans l'ancienne
monarchie française, la propriété était reconnue à per-
pétuité ou k temps, selon le bon plaisir du souverain, qui
pouvait d'ailleurs s'y refuser absolument, ou subordonner
sa garantie à diverses conditions. Ordinairement aucune
limitation n'était fixée. L'ordonnance de Moulins de 1566,
une déclaration de Charles IX en 1571, et des lettres pa-
tentes de Henri ITI, constituent toute la vieille législation
en cette matière. Un auteur n'était investi à perpétuité de
la propriété de son œuvre qu'à condition de ne la point
céder à un libraire : en cas de cession, son droit finissait à
sa mort, et l'œuvre tombait dans le domine public. Une
loi du 24 Juillet 1793 donna à la propriété une durée de
M) ans apr(^s la mort des auteurs. Un décret du 5 février
1810 étendit cette durée à toute la vie de la veuve, et en
outre, après elle, à 20 ans pour tous les descendants de
l'auteur. Cest la loi du 8 mars 1854 qui régit aujourd'hui
la propriété littéraire et artistique. Elle décide que les
auteurs d'écrits en tous genres, les compositeurs ae mu-
sique, les artistes, et leurs veuves. Jouissent, durant leur
vie entière, du droit exclusif de vendre ou de faire
vendre leurs ouvrages, et d'en céder la propriété en tout
ou en partie ; après eux, les enfants en Jouissent pendant
30 ans; si l'auteur ne laisse pour héritiers que des ascen-
dants ou des collatéraux, la jouissance est réduite pour
ceux-ci à 10 ans. Le cession naire des droits de l'auteur
ou de S08 héritiers en jouit pendant tout le temps con-
cédé par la loi à ceux-ci, à moins que l'acte de cession
n'ait fixé un temps plus court. Les propriétaires d'ou-
vrages posthumes sont assimilés en droit aux auteurs.
Des lois et règlements ont déterminé la quotité des droits
que perçoivent les auteurs sur les pièces de thé&tre re-
présentées {V, AUTEUR — Droits d'). Leurs intérêts sont
également protégés contre la contrefaçon (F. ce mot). En
érigeant en délit l'introduction en France d'ouvrages
contrefaits à l'étranger, le législateur ne donnait pas aux
intéressés une arme suffisante contre les coupables; il
fallait fermer aux contrefacteurs, à l'aide de traités inter-
nationaux, les débouchés qu'ils trouvaient dans les di-
vers pays. Le gouvernement français n'est entré que tard
dans cette voie : le premier traité de garantie réciproque
{>our la propriété littéraire et artistique a été conclu avec
a Sardaigne en 1843. Depuis cette époque, des conven-
tions semblables ont été faites avec un (prand nombre
d'États.
La Belgique, qui a été longtemps le centre des contre-
façons, suit aujourd'hui la loi française, ainsi cpe la
Hollande. En Angleterre, la propriété est garantie aux
auteurs pendant 42 ans à dater de la publication des
ouvrages, et s'éteint 7 ans après leur mort. En Prusse,
en Autriche, en Bavière, en Saxe, dans le Wurtemberg,
ei, en général, par toute la Confédération germanique,
enfin en Italie et en Portugal, le droit s'éteint 30 ans
après le décès ; le terme est de 25 ans en Russie, avec
10 ans de plus si une nouvelle édition a été publiée dans
les cinq dernières années du premier délai; il est de
15 ans en Grèce, et de 50 en Espagne. En Danemark, il
est de 30 ans, pourvu que les rééditions soient au moins
quinquennales, sinon l'ouvrage tombe dans le domaine
public Aux États-Unis d'Amérique, le droit est de 14 ans;
il se prolonge de 14 autres années en faveur de l'auteur
vivant ou de sa veuve, de ses enfanta ou de ses petita-
enfants.
V. Beuchot, Méflextons sur les lois concernant la pro'
priété littéraire^ 1817, in-8*; Auger, Observations sur la
nature de la propriété littéraire, 1826, in-4°; Lemercier,
Principes et développements sur la nature de la prO'
priété littéraire, 1826, in-4»; Pinard et Lévesoue, Traité
de la propriété littéraire et inditstrielle, 1835, in-8«;
Reaouard, Traité des droits d'auteur dans la littéro"
ture, les saenees et les beaux-arts, 1838, 2 vol. In-8»t
Nion, Droits civils des atUeurs, artistes et inventeurs,
1846, in-8o; Villefort, De la Propriété littéraire et ar-
tistique au point de vue international, 1851, in-8*'; Jobard,
la Propriété intellectuelle, Bruxelles, 1851 ; Muquardt,
la Propriété littéraire internationale, 1851; Blanc et
Beaume, Code de la Propriété industrielle, littéraire et
artistique, 1854, in-8**; Breulier, Du droit de perpétuité
de la Propriété intellectuelle, 1854, in-8**; Calmels, De la
Propriété et de la Contrefaçon des oeuvres de Vintelli'
gence, 1856, in-8**; Cappellemans, De la Propriété litté"
raire et artistique en Belgique et en France, in-12; G. de
Champagnac, Étude sur la Propriété littéraire et artis^
tique, in-12; Pataille et Huguet, Code international de
la Propriété indwtrielle, artistique et littéraire, 1858,
in-8*; Delalain, Législation française et belge de la PrO'
priété littéraire et artistique, 1858, in-8*; Laboulaye,
Etudes sur la Propriété littéraire en France et en Angle-'
terre, 1858, in-8**; Laboulaye et Guiffrey, la Propriété
littéraire au xvni* siècle, 1860, in-8*>; Gastambide, HiS"
torique et théorie de la Propriété des auteurs, Paris,
1862; Oscar Comettant, la Propriété intellectuelle au
point de vue de la morale et du progrès, 3* édition,
Paris, 1862. B.
PROPYLÉES D'ATHÈNES. V. ce mot dans notre Oto-
tionnaire de Biographie et d*Histoire,
PROPTLéES DE PARIS (Los), uom douué par de Calonne,
contrôleur général des finances, aux anciennes Barrières
de Paris. Voici quelle fut leur origine : le grand chimiste
Lavoisier, qui était en même temps fermier général,
avait calculé que le nombre habituel des habitants de
Paris requérait, proportionnellement, en objets consom-
mables, un cinquième de plus que la quantité atteinte
par l'impôt de l'octroi, ce qui faisait dans les taxes un
déficit de près de six millions de francs. Il communi-^
qua son observation et ses calculs au gouvernement, par
un rapport qui resta enfoui plus de deux ans dans les
cartons du Contrôle général des finances. Un premier
commis, Mollien (qui fut ministre du Trésor sous Napo-
léon I^), l'en tira, et Joly de Fleury, alors contrôleur
général, ordonna d'en suivre Texécnuon. Les prépara^
tiens préliminaires conduisirent Jusqu'en 1784, et de
Calonne, successeur de Joly de Fleury, fit mettre la main
à l'œuvre. Il voulut que l'on profit&t de l'occasion pour
donner aux portes de la capitale de la France un carac*
tère monumental, qui rappel&t les célèbres Propylées
d'Athènes. Mollien imagina, comme complément du mur
de clôture, le boulevard extérieur, en vue de faciliter les
communications, d'éclairer la surveillance des commis de
l'octroi, et de diminuer la circulation des grosses voi-
tures affluant dans la ville, en les obligeant à suivre cette
voie le plus longtemps possible avant de franchir les
Barrières pour arriver à leur destination. Ces boulevards
devaient sjouter à l'effet des modernes Propylées, qui
reçurent ce nom parce qu'elles devaient être élevées, et
le furent en effet, en dehors du mur d'enceinte destiné
à déjouer la flraude sur les octrois.
11 y eut soixante Propylées ou b&timents de Barrières,
dont la moitié au moins ne se composait que d'un seul bà^
timent, élevé sur le côté de la route, qui était barrée par
une grille de fer avec doubles portes, et tenant d'un côté
au b&timent, de l'autre à une grosse guérite de pierre. Les
Barrières les plus importantes avaient un bâtiment en
parallèle de chaque côté de la route. Ces constructions,
ainsi que le mur d'enceinte, coûtèrent 25 millions de
francs. Commencées en 1784, sur les plans et sous la
direction de l'architecte Ledoux, la plupart étaient ache>
vées vers la fin de 1787 ; mais alors un avis du Conseil
royal des finances, provoqué par Loménie de Brienne,
qui succédait à de Calonne, fit arrêter les travaux,
comme ruineux dans un temps où le Trésor était déjà
obéré. Le contraste des nouvelles constructions avec ce
qui existait ressortait d'autant plus, qu'un mur de moel-
lons, chaperonné d'une épaisse dalle de pierre, rempla-
çait une misérable clôture de planches de sapin, ébré-
chées par le temps, et que les Propylées succédaient à de
pauvres cabanes de bois, montées sur des galets de bois,
qui même avaient valu pendant longtemps aux Barrières
ae Paris le nom de nmettes. Les travaux furent donc
abandonnés, et, quatre ans après, l'Assemblée consti-
tuante ayant supprimé les octrois, tout devint inutile,
b&timents et mur d'enceinte. On ne les acheva qu'en
l'an vn (1798) et années suivantes, après le rétablisse-
ment de l'octroi par le gouvernement directorial.
Les Propylées de Ledoux occupèrent beaucoup, dans
le tempiu l'attention du public et des artistes; elles
PRO 1!
Mimnlel coDseiTèreiittoDjMin une certaine célébrité pir
le caraclAre moaumnital des plus gnndM, par l'ond-
Dtlilé, la biivrerte, ou l'tléganM de lODtee. Eltee D'eili-
lentplua depui»l86D, époque où Paria leçut pour limita
M munllle Mstioanéieiilendonc InléraMant, an poiat
de rue de l'art, de eonierver le ■oatenir de ne cooitni^
tiona, car, dt qaeiquo manière qu'on tel }nge, «!!«•
marquent un elîort, plue d'une fêla heureni, pour lortir
dei aentien battas. Peu de bïtlrnsnts ont été autant crl-
liquét et blkmés dans leur conception : lis aTaient ce-
KQdant certaine* qualité* ifenieinDle, qui auraient, au
MJD, prouTé que Ledoui n'était paa un arcliilecte
nlgaire.Au piui Tort du déchaînement contre cet artiate
Dotataur, Qoatremèra de Quincr. qui ne préconisait que
tea ordre* greea et le pur claadque grec, écriTit néan-
motni dana aon Dûtùmnoùv tarehiteeture \t Jugement
aolvant : ■ Lor* de 1* (In-madon de* nouTelle* Bairlère*
de Paria, rauteor ine^iena de ce* monumanti Tanta*-
H pno
tique* ae plut à j reproduire l'ordre dorique uns but,
qu'il emt propre à *enir l'Idée qu'il a'était faite eu
caractère coDTeuable k dea barrière*... Cependant le ca-
ractère Imposant «t grandiose que l'auteur de cet nono-
ntenta sut tirer de remploi de cet ordre, la fierté de la
modteature, la hardiesse de* profils, et l'aspect ntaje*-
taeai de qnelquea-unes de cea compoiitiona, parmi le>-
qaalle* on retrouve quelques rediteset de* imiiatioos de*
pie* 1- -- - •
« de* andena temple* doriques, l'étrangetd n
uD u> Style, contribuèrent k familiariser lea yeux m» m
goût et le* proportion* du dorique grec sans liaaa. ■
Haintenuit nous allons entrer dan* quelques détail*,
et montrer des spédmens.
Les Irais Propylées ci-dessous sont de midlocrei, ci
même de petites proponioi>s, san* néanmoins perdre le
caractère monumental dont Ledoui se préoccuiMit balu'
tuellement, ei qu'il affecta souvent même pour se* cen^
poaitions les motna importantes.
Barrlirt âi fïcjmt
Danièrt ia Camhat.
Tiarriètt dtt Uiterwtlrt
On trouTsra ■ le caractère imposant et grandiose et
l'aspect majestueux • dans la vue ci-dessous. Remarquez
la Bévéritè du soubassement, dont les mura sont taillés en
refend* profondément fouillés et arrondis en bossages;
observei ces frontons si larges portés sur de gros pi-
lastres carrés, qui leur donnent un aspect de lourdeur
d'Allemagne fc gaucne : voïlt pourquoi il y a quatre gué>
rites, deux & l'eilrémité de chaque grille. Ce* guéritea ont
un cvactère de force remarquable, qui fait presque re^
sembler teura arcs k des portes de forteresse. Hais le
petit pavillon qui les coiCTe fait, par sa l^reté. une sin-
gulière dis{Mira(e arec le reste. Le grand bUiment du
centre subsiste encore, et sert comme de penpeetiTe as
long baaain de La Villette.
Barriirt Salnl-SattlM.
On reconnaîtra encore le même caractère de grandiose
et de m^eaté dans la vue ci-après de la Barrière du
Trân* ou ds Vincmnvt; les colonnes triomphales qui oc-
cupent le cenDv de la composition portent les statues de
ChariemagrM et de S' Louis, et reposent sur un piédestal
qui serrait de guérite. Elles subsistent encore, et don-
Mient un cachet d'élégance L la cemposition, dont cepen-
dant 1*1 bâtiments latéraux sont pteini de lourdeur.
Nens appliquerons & cette Bani^ et k !* précédenie
le 9HI Qnatremère dit eoeore de ooa Propylâ* t ■ Ces
édifices olTrent de loin des masses pyramidales asset
belles, et quelquefois imposantes, dont les dimensions
générale* paraissent annoncer dans t'éloiimemcnt ua
style large et grandiou. • — Obtenir cet effet pour de&
édiflces tous destinés k Atie ?us de loin, k frapper la Tue
de plu de pos.'uinls que de regardaiiia, dénotait d^'k une
très-Iiablle intelligence du but que l'on avait dQ se pro-
poser. L'architecture est toujours faite pour être vue de
loin, et l'artiste qui n'a pas llnlnition de l'effet dus
masses, plus encora que de celui de* ligne* (inluitiou
ad elles de«deni tlor» se t
qucï-uDBi oDt l'aspect de peliu châteaux de pliiunce, I Blanche et du Route, que
([Uiuid elles élaient tnut à Tut en vae de t> campaigae; j ilan le IrouTuent en pleine campagne.
Barrlin di CUetf.
ha trote ■p&lmeni BsfaTét ci-aprè^ témoignent en-
cors de la récondité d'imagiiiadon de I^oui, qui noa-
Mulemeal puisait dune ton propre fonds, mais, à l'oc-
caiioa, s'inspirait aussi des éditlccs de l'antiquité. Ia
première de ces deux vues, celle de b barrière de
Ikuillji. parait évidemment une aorta de rémlnlueiica
du temple de ClauJu, i Rome. — La seconde, la barritra
Barriirt dt BtlItTttlt.
de la Confértnci, a uu caractère plus original i jiTbi;é«
sur le bord de la Seine, où il y avait, en plein fleuve,
une sorte de Douane, l'arcliitacte a donna k son édiflae
un peu ce caractère. Une guérite, rormant piédesUl à
une statue colossale assise de l'Abondance, est lri»-heu'
reutement placée sur le mur du quai. Ce motif produit
un LeureuK effet daag l'uscuccmcnt fÉotraL tt prouve
PRO 1!
nowe que Ledoui enteadait bien Is dîUributlon et la
pondëraiioQ des muiei, chose ti ininorunle en arclil-
lectura. — Quant k la trciiième barrière, ce'le du Monl-
Pamati», ehoUle afln que l'on ne noua accut&t pas de
partialild pour l'aniste, elle ne parait guère, matgrf boii
nom, kvoir été Inspirde par le dieu des boaui-arts ; c'c&l
Jne decsUei qui, par leur exi«wive liUaireriaiOnt dû pro-
certaln point, sans ntanmoins le justifier,
d'anatbâme que les délicau en arclij lecture, et pent-^a
au^ un peu les envieui, >e plurent ï jeter sur les Vre-
pylAcs de Paris. Nous reviendrons tout Jk l'Ijenre, eo
parlant de la barrière de t'EloiU, sur co petit et cn»-
majencontrcui édince.
Barrlèn dr Heuaiy. l
If barrière Satot-Dmii rentre daiisle camctèi'e de cli&-
teau; «on portique en colonnes, avec bossages supportant
un fronton, est d'un effet asaei mile. Ce fronton, ré-
pété sur de petits avant-corps engai^ sur les troisautrcs
cûtâs. leur donne peut-Ëtre trop d'importance, bien que
couronnant un simple mur percé de renËCres, et nuit &
la valeur du portique de la façade. Ou remarquera la
Euérite massive, placée comme un avant'poste d'obiervo-
'o Confin
Darriirt du Uonl-Panuuie.
tion aur le boulevard, indépendAmment des deux guérites
plus simples au milieu de sa grille. — La burière de
Charenton représente deux temples doriques grecs, trop
Qdèlement inapii-és du Parthénon, du temple de Tliésée,
h. Athènes, du temple de Minerve au cap Sunium, etc. On
croit que cette barriùre a été faite, ou tout su moins ler-
miuée, par Uolinos, architecte de la ville de Paris du
temps du 1" Empire ^nçais.
tairiéit de CliartHlBa.
Loi défauts des Propylées de Paris sont l'exagération
des contrastes, où la bizarrerie est quelquefois poussée
Jusqu'au clL0i|aant; l'abus de l'innovation dans les pro-
III9. bouleversant l'agoucement des membres, met-
tant, par eiemple, des quarts de rond 1 la place des
doucines, et réciproquement; plaçant sur dos colonnes
d'un aspect robuste des tailloirs trèi-minccs, que les ar-
chitraves semblent devoir dcrascr ; en un mot, afTeclant
couvent un mélange de force et do faiblesse, de sévérité
et de caprice, qui n'ont ni gr&ce, ni grandeur. Ledoui
remit les bossages en honneur, msis il en fit abus, soit
dans les arcs, dont il liaclia l'arcliivolls par des claveaux
saillants en nombre égal sui claveaux lisses, comme à la
barrière du Trâa», par exemple; soit dans les cliam-
liranles de portes et de fenétros, où il procéda de mémo,
et, pour les fenêtres, comprit Jusqu'k leurs appuis dans
Mt impitoyables bossages, ainsi qu'h la barrière Sainl-
Ôinit; soit enfin sur des colonnes, où, aui bosssgea peu
laillants et k bords arrondis, & la manière florentine, il
Alla jusqu'k substituer des dés carrés, alternant avec les
tambours circulaires, et coupant des fûts, tes liérissant
du haut en bas, de manijre k leur faire perdre deux fois
leur forme, de sorte qu'elles ne ressemblaient ui k des
colonnes, ni k des pilastres {V. la figura ci-aprisii
mit, enfin, en tes accouplant par des assises boriiODtalcs,
allant de l'une li l'autre, ainsi qu'on l'a vu plus haut à la
tarrièreilit Mont-Pai-aauê ; ceci es< vraiment de l'ox-
narTtin Saint-Dtna.
travagonce. Quant aux colonnes de la barrière de l'Eloite.
peut-être pourrait-oii dire que Ledoux les a coupées pm
dos dés carnés, parce qu'elles devaient fltres'ues de ceiti
immense avenue de MeuiDy, et qu'k distance celte bi-
larreiio était peu sensible, 01 donnait un as|)BCt de forte
cl do Eolidité h des fûts qui auraient pu pû^tr? grêles.
C'est là une cxplica^on que nous ne donnons pas pour
excellente, mais que uous ne croyons pas dénuée do
vraisemblance. En effet, ai l'on veut bien examiner uotn
dessin, surtout |iaur les faces vues de proBl, parallèle'
ment à la roule, lu bizarrerie est bien moins choquante,
et produit un effet de lignes qui n'est pas sons quelque
agrément. N'oublions pas non plus que, quand Lcdoui
éleva CCS deux Propylées, l'énorme Arc de l'Ëtoile n'exis-
tait pas pour faire contraste et les écraser.
Aucun travail du genre, et aussi considérable que celui
des Propylées de Paris, n'avait encore été exécuté en
aussi peu de temps et par un seul artiste. Les qualités et
les défauts que montra Ledoux dans cette raste entrepris*
influèrent sur le goût du temps; on le vit dans plusieun
hùiels construits alors, puis sous le Consulat et le f Em-
pire, et dont II subsiste encore quelques-uns k Pari^
Nous éprouvons un regret tnste en réHéchissant que
cet article est une espèce d'oraison funèbre. Quelques
mois après le 1*' Janvier ISGO, jour néfaste pour nos
l*ropylées, qui, malgré de graves défauts, particuli^«-
miiut dïiu let détitili, avaient cependant un nai mérita
]'origiiKiIité,ell«oiitdliparaduMt,fcpeapn«enTi)uic; 1 en rolonde, bw Intfon de S'-IH.>iTe-1ii-lïoirtnH'>, ^
|] n'en reste plus qua tes rare» spécimens que nous avons numc; elle doit son stliitfcitpodtiOP d>ni le lardiapa'
sommas, et auxquels il Faut aioulcr ua Jcs moins mi- blic dâ UoncFidi, dont elle forma la hlriqua '* P'°* '°V
riiants, It, d-àwant barrUrt a» Ckartrei, petit temple | portanlc et la seule qui porte avec elle un vraiMunauiT
l^iU, j) tpFaadtde, ai ijiuidiuac, si bi'îlliini, le iiui>
piillque Psrla âe Tlapoljon 111, n'a plus nujourd'ijui |>iiur
Propylées qiie des cahutes de S k 3 mèl. de liauteur, en
pierre meulière, couvertes en dalles, et accotées au re-
Tïlement intérieur d'un bastion, derrière lequel elles se
cachent. Tout cela est k peine décent pour une capitale
qui prétend être à 1& télé de la civilisation et des beaux*
arts. 11 faudra bien refaire un Jour des Propylées monu-
mentales, si l'on veut donner à Paris l'harmonie de la
majMté et de la splendeur, depuis ses eitrémités Jusqu'à
son centre. C. D— t.
PHOQUBSTEOR. V. ce Utft dans notre Dictionnaire
i» Biographie si d'Hittoiri.
PROHATA (AoJ, du lutin pro, pour, et râla, réglée,
sous-ent. parti, part ; synonyme de d proportion. Dans
une société commerciale, dans une liquidation, 3n refoit
au frorata de sa mise sociale, de sa créance,
PROROGATION ( du latin prorogari, étendre), exten-
lion de temps. En Droit, la Prorogation di délai est aC'
tardée en orocédure k raison de la distance, ta Proroga-
tion d» délai est aussi le délai da gr&ce qu'un créancier
accorde k son débiteur qui ne s'est pas libéré lors de
l'écbéance; elle ne décharge pas la caution, qui peut
tonJouTB poursuivre te débiteur {Codt Napol., art. 903Q).
On nomme Prorogation d'tnquête l'autorisation donnée
par le Juge de continuer, dans certaines circonstances,
l'enqueia au deli di terme prescrit par ta loi [ Codt dt
ProcM.,art.Wetï19).li j a Prorogation d» juridiction
quand une partie reconnaît la Juridiction d'un Juge qui
n'a pas droit de connaître de I affaire; elle ne peut avoir
lieu qu'4 raison d'exceptions portant sur ta quolilé des
persotines, puisqu'il faut que la tribunal saisi soit com-
I>éleni ï raison de ht matière. — [>ans le langage poli-
tique, on appclla P^ogation l'acte par lequel un sou-
verain déclare les travaux des assemblées législatlvM
suspendus pendant un délai déterminé.
PROSAIRP., livre d'église contenant les Protts. On a
dH aussi Protier.
PROSAlSHt:, défaut do poésie dans les vers. C'est le
tsractére de la majoriliS des rimeurs. Pour éviter le pro-
saïsme, il ne suflit pas d'être bien maître de la rime et de
la mesure, It fuut encore que les vers renferment des
pensées nobles et belles, exprimées en termes beureuse-
PllOSATEUII, écriviûn qui n'emploie que la prose
(ont me ei pression de sa pensée.
PROSCENIOM. V. ce mot dans notre Dielionnair» dt
Biographie et d'Hittoirt.
PROSCRIPTION (du latiit scribtre pro, écrire devant
tout le monde, afficher, publier), condamnation au ban-
nissement ou à la mort, ordinairement prononcée sans
aucune forme judiciaire, et que tout homme pouvait
mettre à exécution. Elle était sénéralenient accompagnéa
deUeoaSsntiondeibiïiu, Ln&BcIeiUM&reut un frA-
quciit usage. A .Uiièncs, quand la proscrlpilnn avait ei
prononcée par le peuple, un héraut annonçait dajis tout
les lieux publics la somme promise It iiulionquc appor-
terait la tétc liu proscrit, et cette somme était di'-fosée
sur l'Agora ou sur l'autel de quelque divinité. Les Ro-
mains distinguèrent la pi'OicripIion eiuila et ta proscrip-
tion politique. La première était faite, à la requête dés
créanciers d'un débiteur qui se cachait pour n'être point
traduit en Justice, par un édit du préleur affiché quatre
fois il la porte de ce débiteur i puis, ï défaut da compa-
rution, les biens étalent partagés entre tes créanciers ou
vendus i, leur profit. Dans la proscription politique, oa
affichait au Forum les noms des proscrits, sans même
Antoine, Octave et Lépide. Chei les Hodernee, te
acre des Armagnacs en France sous Charles VI, Irs
édits du roi d'I^spagne Philippe II contre Guillaume de
Nassau et ses adhérents, en France la S'-Bsnbélemj, I*
révocation de l'édit de Nantes, les massacres d«s Joan
néfastes de la Révolution française, les exceptions aui
lois d'amnistie rendues par Louis XVIII au début de Ij
Restauration , les transportallons de Juin IStS , ont été
de véritables proscriptions. B.
PROSE (du latin prorta ou proia oratio, langage di-
rect), se dit par opposition k vttt. C'est le 'japge ordi-
naire des hommes, non gêné par la mesure, la cadence,
la rime poétloues; aussi les Latins t'appelaient-ils • îau-
gage libre et aég£gé d'entraves • (oraljo KÀiUa ae libtra\
Les Grecs l'appelaient < langage pédestre • (en latin
eermo psdsifrii), parce qu'ils comparaient sa marche k
celle dos gens de pied , dont le pas est plus tranquille et
moins bruyant que celui des cavalier», La prose n'est
astreinte qu'aux r^tes gramraaticalea, à l'assMtimeot
agréable des voyelles et des consOBnes, k l'accord 1ml-
tatif des mol» avec les idées et des périodes avec les
alTeclIons de i'kme. TouteTots, elle est susceptible d'une
certaine harmonie qui n'est pas sans aaalogle avec celle
de la tangue des vers. Elle admet les mêmes ligures, l«a
mêmes im^es ; mais ses toura sont moins hardis, et ils
doivent loujoura se rapprocher plus ou moins de ceux
qu'emploie la conversation familière. Certaines proses,
pour avoir parfois un air poétique, ne laissent [M que
d'avoir an casactère de graiide simplicité : telle est enei
les Grecs la prose de Platoa, chei les Romalos eelle de
Cicéron et de Titc-Lire, cbei nous celle de Bossuet et de
Fénelon. Celle teinte poétique se remarque surtout dans
les discours oratoiies dont le sujet est élevé, dans les
descriptions, dons les tableaux que les onteura et In
historiens ont souvent occasion de mettre sous nos jeux i
tel est, entre tant d'autres, le tatdeaa de ta déroute de
Thraslmène,cheiTite-IJve,et celui de la tempête estujée
par la reine d'Angleterre Henriette de France, dan*
roralson fuiièl>rt de cette Driaceuc par Poumu CntiiH
PRO
150g
PRO
i^^tt de Qcéron offrent une vivicfté de peintore toute
poétique : par exemple, W Verrtnes, la âaiwieHne, le
triaitô des Devoirg, etc., en contiennent plusieurs de ce
genre. Mais aucun prosateur peut-être n*a Jamais réuni à
uo plus haut degré la aimplicité noble et familière et la
richesse des couleurs poétiques, que Platon, dans les
mythes si ingénieux à la fois et si élevés par lesquels il a
voulu rendre pi us saisissantes pour Tesprit quelques-unes
de ses théories philosophiques les plus neuves et les plus
abstraites. Gicéron semble s*ètre inspiré de ces beaux mo-
dèles dans le célèbre épisode de sa -publique, connu
sous le nom de Songe de Scipion,
Dans rhistoire littéraire, la prose ,«ralt avoir été par-
tout précédée par le lanrâge poétique; unsi, chez les
Grecs, VIliade, V0dy8sée,\GS chants lyriques sous toutes
leurs formes, les traités moraux et philosophiaues eh
vers, ont enchanté les imaginations, enrichi les mé-
moires, avant qu*il eût encore paru un bon ouvrage en
prose, et cet ouvrage est celui d'Hérodote, postérieur de
quatre sièdes au premier chef-d*œuvre poétique dans
1 ordre des temps, aussi bien que du mérite. Gliez les
Latins, Ennius et Lucrèce sont antérieurs & Gésar, à
Gicéron, à Salluste; et lorsque parut notre Villehardouin,
la littérature française n*avait d*autros monuments que
les chants des Troubadours et des Trouvères. P.
PROSE, terme de Liturgie. ) V, notre Dictionnaire de
PROSÉLYTES. \ BioQr. et d'Histoire.
PROSÉLYTISME , mot qui ne s'est appliqué d'abord
qu*aux efforts des diverses communions cbnHiennes pour
conquérir des àmea, et qu*on a étendu ensuite à l'esprit
de propagande des partis politiques.
PROSKUQUE. V, Synagogue, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
PROSIER. V. Prosairb.
PROSODIE, mot grec qui signifiait proprement la pro-
nonciation d'un mot selon la quantité et selon l'accent.
Les grammairiens grecs nommaient prosodies les ûgnes
de la quantité et de l'accentuation, ainsi que ceux qui
représentaient les esprits, et même l'apostrophe, l'hy-
phen et la diastole. Les Latins ont fait de ce mot à peu
près le même usage que les Grecs. Mais, chez les Mo>
dernes, il ne s^appllque généralement qu'à la quantité
des syllabes, surtout lorsqu'il s'agit de l'Antiquité; car
les langues modernes, et la n6ti-e en particulier, ont une
prosodie bien moins nettement marquée que les langues
anciennes. En allemand, la quantité longue se rencontre
{presque toujours avec l'accent tonique sur la même s^I-
abe, ou plutôt c*est cet accent qui détermine la quantité
longue. L'abbé d'Olivet a composé un TYailé de la Pro-
sodie française, où il établit les principes qui règlent la
prononciation d'un grand nombre de mots. Nous avons
toutefois c(Aservé en partie le sens ancien du mot pro-
sodie, lorsque nous l'avons appliqué à l'art, non-seule-
ment de donner à chaque son ou syllabe le ton qui lui
est propre, mais de marquer les mesures par les diffé-
rents repos de la voix , et d'établir une juste harmonie
entre la pensée et le débit on la lecture (V. Accent, Dé-
CLAMATioN^. — Enfin on appelle Prosodie un traité sur la
quantité des syllabes grecques et latines. Uermann ,
Spltzner, Matthis, J. Hubert, Gonod, ont traité de la
prosodie grecque. Pour la poésie latine, le traité élémen-
taire le plus commode est celui de Lechevalier, revu par
Dumas. V* l Essai philosophique sur le principe et les
formes de la versification par Ed. Duméril , et la Théoi*ie
de la quantité prosodique par Bergmann. P.
PROSODIE, sorte de nome pour les flûtes^ propre aux
chants par lesquels les anciens Grecs commençaient les
sacrifices.
PROSÔDIUM, ancien nom du Motet (F. ce mot),
PROSOPOGRAPUIE (du grec prosôpon, face exté-
rieure, visage, physionomie, et graphéin, décrire), en
termes de Ilhétorique, description des traits, de l'air, du
maintien d'un homme ou d'un animal. La prosopographie
du cheval, par exemple, a été donnée dans le livre de
Job, dans les Géorgiques de Virgile, dans Buffon, etc. —
De nos Jours, on a employé abusivement le mot Prosopo^
graphie pour désigner la peinture de la vie et des carac-
tères des personnages mentionnés ou mis en scène dans
un auteur : ainsi Groen van Prinsterer a publié la ProsO"
pographie de P/aton (Leyde, 1823), et D'Estré la Proso-
pographie d'Horace (Amst., 1844).
PROSOPOPÉE (dQ grec prosôpon, personne, et poiéô.
Je fais. Je suppose), figure de lUiétorique, <{ui consiste à
prêter le mouvement et la vie aux choses insensibles, à
faire apparaître et parler les êtres invisibles, .abstraits,
imaginaires, et tusau'aux morts ou*elle évoque de leurs
tombeaux. La Bible, et surtout les livres daa Prophètes,
sont remplis d'admirables prosopopées. Dans la Pharsalt
de Lucain , l'image éplorée de la Patrie apparaît à César
an bord du Rubicon , et le conjure de ne pas aller plus
loin. On peut citer encore la prosopopée où Socrate, dans
le Criton , fait parler les Lois, qui commandent au con-
damné de ne pas se soustraire au supplice, même quand
il est injuste, fiossuet, dans ses Oraisons funèbres, a sou-
vent recours à cette figure, et l'on peut se représenter
l'effet que ce grand onteur devait produire sur son
illustre auditoire, lorsque, ranimant la cendre des morts,
il les faisait tout à coup apparaître au milieu de ce monde
qui les avait connus, et donnait ainsi par leur bouche
aux grands et aux rois d'effrayantes et sublimes leçons.
J.-J. Rousseau a fait une belle prosopopée, lorsque, dans
son Discours sur les Lettres, il évoque l'ombre de Fabri-
cius pour opposer aux désordres dos Romains la pureté
des mœurs de leurs ancêtres. La Prosopopée, du reste,
est une figure qu*il ne faut employer qu'avec réserve, et
surtout à sa place, c-à-d. dont on ne doit faire usage
qu'autant que l'importance et la mijesté du sujet le
comportent^ et qu'il y a un certain degré d'exaltation
chez l'orateur et dans l'auditoire. Les écrivains qui font
de l'entliousiasme à froid n'aiTÎvent qu'au ridicule, et
rappellent l'emphatique plaidoirie de Tlntimé, évoquant
la famille désolée de son client , le chien Gitron. G.
PROSPARALEPSE. V. Paeagogb.
PROSPECTUS (du latin prospicere, voir, considérer),
sorte de programme qui se publie avant qu'un ouvrage
paraisse, et dans lequel on en annonce le sujet , le ca-
ractère, l'étendue, le format, le prix, etc. On a étendu
le mot aux avis distribués au sujet d'entreprises quel-
conques.
PROSPHERA, pains des oblations dans la liturgie
grecque.
PROSTAS. V. AimcHAMBRB.
PROSTHÈSE (du grec prosf^xif , addition), addition
d'une lettre ou d'une syllabe au début d'un mot. G'est
une espèce de Métaplasme (V. ce mot). Ainsi, en latin ,
on a dit gnatus pour natus. Vaugment syllanique était
une prosthèse. On pourrait donner ce même nom au re-
doublement de certains parfaits latins {pepuli, t^endi,
cucurri)^ au préfixe ge des Vs^cip<» passifs allemands,
aux lettres ajoutée pour l'euphonie par le peuple en
avant des mots qui en laUn commencent par se, sp
(scala, écMle, species, espèce), 11 y a une prosthâ
OBnn grenouille , dérivé deranuncula; dans nombril,
dérivé de umbilicus; dans loisir, venant de oHari (la
véritable origine de ce mot est l'oisir). P.
PROSTYLE ( du grec pro^ en avant , et siulos , co-
lonne), se dit, en Arehitecture, d'un édifice qui n'a de
colonnes qu'à sa pai'tie antérieure, & sa prinapale faoê.
Notre-Dame de Lorette, à Paris, est une église prostyle.
PROSYLLOGlSBiE, ou Syllogisme continué, argument
composé de cina propositions, formant deux syllogismes
endialnés de telle sorte que la conclusion du premier sert
de majeure au second. Ex. : « Ge qui nous rond heureux
est aimable; or, la vertu nous rend heureux; donc la
vertu est aimable. Or, la Justice est une vertu ; donc la
Justice est aimable. » Le prosyllogisme n'est guère em-
ployé : il a quelque chose d'embarrs^sé et de lourd.
PROTAGONISTE, le principal acteur dans une pièce
grecque, celui sur qui toute la puissance du drame est
concentrée. Quand une tragédie porte le nom d'un de
ses personnages, c'est ce rOle que remplit le prota-
goniste.
PROTASE (du grec protosw, proposition), terme qui
désigne généralement en grec ce que nous appelons Pro-
position. Il se prend soit dans le sens de question à
démontrer, soit dans celui de prémisse d'tm argument.
Par extension, il désignait, en Littérature, la partie du
drame où le su^et s'annonce et commence à se développer
( à peu ppès notre i*' acte) ; et^ en Grammaire, la 1'* par-
tie d'une période : en ce dernier sens il s'oppose à Apo-
dose (K. ce mot). P.
PROTATIQUE (Personnage), nom que les Anciens don-
naient au personnage oui ne paraissait que dans la pro^
tase du drame, comme Dave dans le Phormion, Philotide
et Syra dans VHécyre de Térence, et qui fiûsait en mnde
partie l'exposition des événements. P.
PROTE (du ^rec prôtos, premier), celui qui, dans une
imprimerie, dinge et surveille l'exécution des cravanx.
Il distribue l'ouvrage aux compositeurs, lève les difficul-
tés qui s'y rencontrent, s'assure que les fautes marquées
sur les épreuves ont été corrigées, veille à la bonne dia»
tribution des blancs et à l'exactitude du registre, «te
PRO
1509
PRO
Dans les grands établissements, il supijlée le maître, soit
pour entreprendre des impressions, soit pour en établir
le prix aTcc les éditeurs i il distribue la paye aux ou-
vriers, inscrit les feuilles qui ont été composées ou im-
primées depuis la dernière paye, et met le prix à la fin
de chatte article. Ses fonctions exigent de rinstruction,
de TactiTité, du soin et de Tordre*
PROTECTEUR, titre politique. V^ notre Dietumnatrs
de BiogrtÊfiklê et d'Bittoin.
pRorBCTBom (Systèm^^ en termes d'Économie noiitique,
sTstdme qui consiste a écarter d'un pays, par des droits
élevéson même par une prohibition absolue, les mar-
chandises étrangères qui pourraient faire concurrence à
rinduatrie nationale, et à donner des primes à ceux qui
cultiTent certaines industries. Jusqu'à la fin du moyen
Age, les gouYemements s'inquiétèrent peu des importa-
tions et des exportations commerciales i les impôts qu'ils
prélèvent à rentrée et à la sortie des marchandises
avaient un but exclusiToment fiscal ; la noblesse avait le
même mépris pour le commerce que pour l'Industrie, et
ceux qui se livraient à ces deux professions étaient éga-
lement accablés de charges de toute sorte. D'ailleurs , il
y a un sentiment naturel aux Ages d'ignorance et de gros-
sièreté, c'est que la vente dans un pays ne doit apparte-
nir qu'aux habitants de ce pays, et que l'étranger doit
acheter ce droit au prix d'une forte taxe, ^joutons que le
régime des corporations, en vigueur au moyen Age, de-
vait entraîner comme conséquence l'institution des Doua-
nes : ces corporations, créées d'abord pour faire obstacle
à la concurrence du dedans, se liguèrent ensuite contre
la concurrence étrangère, et érigèrent en principe le mo-
.%>pole. Enfin , partant de cette fausse idée, que, pour
enrichir un pays, il faut autant que possible y attirer les
métaux précieux, on prohiba, non-seulement l'exporta-
tion de l'or et de l'argent, maïs encore l'importation des
marchandises qu'on pouvait fabriquer dans le pays même,
et l'on crut que, si rexportation dépassait l'importation ,
la différence devrait se solder en métaux précieux : telle
fut l'origine du système mercantile et de la baiance du
commercé (V. cet mot»). Ces diverses raisons expliquent
comment Colbert fut amené à établir un ensemble de pro-
hibitiont et de tarifs de douanes, qui peuvent se Justifier
comme mesures temporaires, nécessaires pour permettre
à une industrie naissante de se développer, mais qui ne
sont pas le régime normal et indéfini du commerce. Les
autres États imitèrent la France Mais on s'aperçut bien-
tôt que le système protecteur se détruisait en se génâra^-
lisant, qu'il isolait les peuplei et resserrait les relations
commerciales. De là vinrent des traitét de commerce,
c-à-d. des transactions sur les douanes, et beaucoup de
guerres dans les temps modernes eurent pour causes des
publications de tarifs contraires à ces traités. Les guenes
de la Révolution et le Blocus continental (F. notre Dto-
tionnaire de Biographie et dPBistoire) de Napoléon I**
donnèrent une nouvelle énergie au système protecteur en
France ( F. Douanes 1 : il faut leur attribuer cette orga-
nisation de l'industrie, ce goût du monopole et des pro-
hibitions, ces habitudes de routine . qui ont opposé de
nos Jours tant d'obstacles à la liberté des échanges.
Le système de la protection force les consommateurs à
payer plus cher les objets, et, par conséquent, il diminue
leurs revenus; l'importation oies marchandises leur est,
au contraire, fiivorable, et leur intérêt passe avant celui
d'un petit nombre de producteurs. Ah lien d'aider le tra-
vail national, la protection tend à le restreindre : plus il
faut paver pour se procurer un objet, moins on dépense
pour s'en procurer d'autres. Si l'importation des mar-
chandises étrangères dans un pays était un mal, il s'en-
suivrait que, quand un État veut écouler au dehors ses
prodoits, il veut nuire à ses voisins; et il fSsudrait ad-
mettre encore, comme conséquence du même principe,
que l'Angleterre, en ouvrant ses ports aux produits étran-
gers sur de vastes proportions , a dû travailler à sa pro-
pre ruine. Un fait constaté par l'expérience, c'est qu'en
général l'importation des marchandises étrangères chez
un peuple industrieux a une contre-partie naturelle,
l'exportation d'une quantité corresponoante de produits
nationaux, si bien que c'est un échange qui profite an
travail chez les deux parties contractantes. L'expérience
montre également que l'importation n'arrête pas la fa-
brication des produits similaires : dans les États du ZoU-
verein, où la filature est protégée par des droits très-mo-
dérés, elle s'est açtmdie, pendant un délai de 12 ans,
de i30 p. 0/0, tandis qu'en France, sous le régime de la
prohibition, elle ne s*est accrue que dans une proportion
dnq Ibis moindre. La liberté des échanges n^a pas nul
aux États qui l'ont pratiquée : ainsi, la Saxe, qui n'a
Jamais connu le système restrictif, a fait son éducation
industrielle sans tarifs de douanes, et s'est mise au prer
mier rang des contrées manufacturières; la Suisse, sans
ports, sans canaux, sans voies de navigation importantes,
et pourtant sans tarifs, sans prohibitions, a développé
prodigieusement son industrie; à Cuba, l'entière liberté
du commerce a produit une étonnante prospérité; les
progrès des États-Unis de l'Amérique du Nord se mesu-*
rent chronologiquement à l'abaissement de leurs tarifs def
douanes et à la décadence de l'esprit de prohibition*
L'aiguillon de la concurrence étrangère provoque le bon
marché par le pi'ogrès aumiel. il oblige les chefs d'indus-
trie, et, sous l'influence de ce bon marché, la consom-
mation s'accroît si bien, que le marché national offre un
débouché à une production nationale toujours croissante,
en même temqs qu'à une certaine masse de produits
étrangers. Une enquête commerciale ordonnée en France
en 1833 aboutit au plus étrange résultat, et fit voir tout
ce qui se cache, d'égoisme sous la question de la prohibi-'
tion et du libre échange : chaque industrie ayant été
appelée à faire valoir, à proposer ses moyens, les inté-
ressés prouvèrent à l'envi ^u'il fallait supprimer toute»
prohibitions et toutes restrictions, excepté celles qui les
favorisaient eux-mêmes ; ce ne furent que réclamations
et griefs des maîtres de forges contre les propriétaires de
forêts, des producteurs de machines, des açriculteurs ,
des armateurs contrôles maîtres de forges, des fabricants
de draps contre les producteurs de laine, des fabricants
de tulle contre les filateurs de coton, etc. En un mot, lea
producteurs comptaient, pour s'enrichir» sur autre chose
que leurs talents, leur persévérance, leur économie; ils
bâtissaient leur fortune sur un autre terrain que celui
du travail, et constituaient le gouvernement, non pas le.
protecteur de tous les intérêts sociaux, mais le gardien'
de leurs privilé^s. Il fut évident que 'l'on considérait,
dans cette question, le sort de quelques intérêts, nés de
la gjuerre, du monopote et de la faveur, mais nullement
la richesse et la prospérité générales. Ce ne fût pourtant-
que 20 ans après, à la suite de l'Exposition universelle
de 1855, où l'industrie française avait elle-même affirmé.
ses progrès, qu'une loi fut présentée au Corps LédsUitif
pour la levée des prohibitions. Un nouveau délai fut en*
core, après enquête, accordé Jusqu'en 1801, pour qu'on*
eût tout le temps de se préparer à un nouveau r^me
commercial. Depuis le l*' Juillet 1801, les prohibluons
inscrites dans les lois douanières ont été remplacées par
des droits modérés, suffisants pour ménager certaines
positions acquises, et pour ne pas enlever complètement
au Trésor les ressources qu'il était accoutumé de trouver-
dans le régime des douanes. Le jour où les demièros
traces du système protecteur pourront dlspualtre, cer«
tains intérêts privés seront encore prohibitlonnistes.
PROTECTORAT, appui qu'une gronde puissance donne*
publiquement à un petit État. Ainsi, les traités de 1815
ont donné à l'Angleterre le protectorat des lies Ioniennes..
La France a étabu son protectorat sur les lies Talti, Wal-
lis et Gambier, dans la Polynésie.
PROTESTANTS. K. ce mot dans notre Dictionnaire dei
Biographie et d* Histoire,
PROTESTATION (du latin testari pro, être en témoi-^
gnage de...), action de déclarer qu'on ne laisse faire une
âiose que parce qu'on ne peut pas l'empêcher, qu'on
tient un acte pour nul, qu'on entend se pourvoir contre..
En Droit, les protestations fUtes contre un acte ou un-
Jugement par celui à qui il est signifié, sont conserva-'
toires de ses droits. Celui qui a perdu une lettre de*
change conserve ses droits, en notifiant une protestation*
aux tireurs et endosseurs. — En Politique, on a recours;
aux Protestations pour prévenir l'établissement d'un prin-
cipe avancé par un État ou l'adoption d'une mesure nui>-'-
sible, ou du moins pour qu'on n'interprète pas le silence*
comme un acquiescement.
PROTÊT (de protester)^ acte par lequel le porteur
d'une lettre de change, d'un billet à ordre, fait constater'
le refus d'accsptotiofi ou de payement de la part de celui
sur qui la lettre a été tirée ou par qui le billet a été sous-
crit. Il doit être fait par deux notaires, ou par un notaire
et deux témoins, ou par un huissier et deux témoins, le
lendemain de l'échéance, et, si c'est un Jour férié légal ,
le Jour suivant. Cette disposition du Code de Commerce
(art 173) a été modifiée par un décret du 23 mars 1848,
qui a supprimé les témoins. A Paris et dans les ville>« des
départements les huissiers seuls font les protêts.
PROTHÈSE (du grec prothésis, admtion), en vdu
Oblationartum, Paratorium , petite table qu'on plaçait
PRO
1910
PRO
aitrafolB toH à Tan des côtés de l'aatél« soit dans une
nef latânlSf et oA Ton posait les vases sacrés et les of-
Ikmndes da pain et du Tin nécessaires au sacrifice de la
messe. Elle a été remplacée par la crédence (F. a mot).
Dans rÉglise grecque, on pr^are sar une prothèse tout
oe qui est nécessaire pour la messe, pain, vin, vases, etc.,
et on la porte en procession à Tautel où Ton doit célé-
brer. •» uans certaines basiliques, on appelait Proihès»
une petite abside placée du côté droit, et où Ton rangeait
les offrandes faites par les fidèles, les vases précieux et
les vêtements des prêtres.
PROTHYRUH. \
PROTOCOLE. I F. ces moto dans notre Dtcfion-
PROTONOTAIRE. S notre de Biographie et cPHis-
PROTOPAPA. \ taire.
PROTOSYNCELLE. /
PROTUTEUR, celui qui tient lieu de tuteur. On peut
donner un protuteur au mineur qui possède des biens
dans un lieu éloigné du siège de la tutelle; il doit rendre
compte au tuteur {Code JVopot., art. 417 ).
PROUE (du latin prwra), Tavant d*un navire. Chez les
Anciens, la proue des bàtimente de guerre était armée
d*un éperon en airain ou en fer, en forme de bec d'oi-
seau; de là son nom de rostrvm.
PROVÉDITEUR. F. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire,
PROVENÇALE (Langae), dénomination souvent em-
ployée comme synonyme de Langue d'oc {V.ce mot). Le
dialecte provençal, ^ui s*est perpétué dans notre pays de
Provence après la disparition de la langue littéraire, en
a conservé la plupart des caracttees; cependant il est
plus défiguré, plus rapproché du français que les dia-
lectes parlés en Languedoc et en Gascogne. V. Pellas,
Dictionnaire provençal et français, Avignon, 1723, in-4°;
Achard, Focoôii/atr» provençal et français, Marseille,
1785, in-4«; Avril, Dictionnaire provençal-^rançaii, A|)t,
1840, ln-8®; Honnorat, Dictionncùre provençal'fhmçais,
IMgno, 1846-47, 3 vol. io-4«; Guessard, Grammaires ro-
manes inédites du xiii« siècUt^ Paris, 1840, in-8^
PROVBRÇALB (Littérature), nom sous lequel on comprend
les productions littéraires, non pas seulement de Tan-
clenne Provence, mais aussi du Languedoc, du Limousin,
de TAuvcrgne, de TAquitaine, et, en ^néral, de tous les
pays qui parlaient le roman du mtdi ou langue d'oc
(K. ce mot). Ce n'est même pas la Provence qui fournit
les meilleures de ces productions : Arnaud Daniel, Gi-
raud de Bomeilb, Bertrand de Bom, Bernard de Venta-
dour, reconnus de leur temps comme les plus célèJvres
Troubadours, eurent pour patrie le Limousin, et les Ita-
liens, les Espagnols, les Portuoaîs désignent la littérature
provençale sous le nom de lemosina. Il est facile de
comprendre pourquoi Texpresslon de lAttérature pro-
vençale a prévalu. Au commencement du xm* siècle, les
centres littéraires ou écoles de Troubadours qui s'étalent
fomvtes auprès des comtes de Rodez, d*Auvergne, de
Poitiers, n'existaient plus; la croisade contre les Albi-
geois fit aussi disparaître la cour des comtes de Toulouse.
La poésie romane du Midi, bien gue profondément alté-
rée dans son esprit, trouva un dernier refuge en Pro-
vence. C'est pour avoir recueilli l'héritage littéraire de
tout le Midi, et pour avoir représenté, seule en-deçà des
Pyrénées, la littérature méridionale pendant deux siècles
et demi, qne la Provence, dans l'esprit des hommes du
Nord, a laissé son nom à cette littérature, cultivée mi-
mitivement entre la Loire, la Sèvre-Niortaise, TAthin-
tlque, les Pyrénées, la Méditerranée et les Alpes. e.-à-d.
dans des contrées même qui, comme le Poitou, la Sain-
tonge et une partie de l'Anjou, adoptèrent plus tard le
roman du Nord,
Les poésies des Troubadours (F. ce mot) représentent
en grande ijartle tout ce qui reste de la littérature pro-
vençale. Suivant une opinion assez générale, ces poésies
ne seraient que de faaes redites dVunour. Sans doute
l'élégie amoureuse tient une grande place dans la poésie
provençale; mais il s'en faut de beaucoup qu'à ce genre
se réduisent les œuvres lyriques des Troubaaours, c-à-d.
les pièces composées en strophes de mètres très-artiste-
ment combinés, toujours chantées avec accompagnement
de rebec, et dont plusieurs sont encore notées en mu-
sique. En effet, il y a les sirventes ou pièces satiriques,
du caractère des tamÔM grecs; les plaintes (planhs)^
laonsacrés à la mémoire des braves; les chanto de guerre
(cants)^ destinés à célébrer la poésie des combats; les
présies (prédicansas)on appels, ordinairement consacrés
à lelever le zèle des barons pour la défense de la foi :
Seares lyriques fort distincts de la poésie amoureuse, et
qui renferment les meilleurs titres des Troubadours à
restime de la postérité. Certaines de ces pièces sont re-
marquables par une force et un éclat que Ton cherche-
rait vainement alors dans le reste de l'Europe. Un des
genres favoris des Troubadours, toujours dans le lyrioue,
était encore le Tenson {contentio)^ appelé Jeu^parti oans
le roman du Nord, parce que deux interlocuteurs y sont
toujours en présence, comme dans certaines églogues de
Virgile : c'était pour eux une manière de déployer leur
esprit, en agitant une question ou an cas douteux. Toutes
ces compositions poétiques étaient néanmoins considé-
rées comme secondaires par rapport à la cansô ou élégie
amoureuse. La suprématie de la coiud (V. Carzqre)
était liée, dans l'esprit des poètes provençaux , à cer-
taines idées plus raffinées sur la nature de ramonr
vertueux, et sur ses effets : ils attribuaient à ce senti-
ment l'influence la plus haute et la plus heureuse sur
les faits et gestes du chevalier, Jusqu'à en faire la source
certaine de tout mérite et de toute vertu. Cette théorie
provençale de l'amour étant devenue l'un des éléments
du système de sentiments et de monirs connu sous le
nom de chevalerie, on a pu dire que la chevalerie a eu
sa plus complète expression dans la poésie provençale»
Une des formes les plus gracieuses de cette poésie dans
le genre amoureox est celle des chants d^aube (o/èos),
pentes pièces destinées à être chantées sous les fenêtres
des dames au lever du Jour {V, Adsadb )•
Les Provençaux eurent encore un certain noeobre de
formes poétiques distinctes des oenres lyriques en ce
qu'elles étalent composées en tirades monorimes, décla-
mées en façon de récitatif, et non pas diantées. A cette
classe de poésies, appelées proses, appartiennent les
poèmes chevaleresques, les nouvelles, les pastourelles
(Pastorrias vaquetras)^ certains poëmes religieux du
genre didactique, en grande partie d'origine vaudoise.
— Sans être les inventeurs du roman chevaleresque, les
Provençaux s'y sont exercés avec succès. Nous possédons
les manuscrits d'un certain nombre de romans proven-
çaux, tels que Ferabras, Geoffroy et Brunissende, Flore
et Blanchefieur, Gérard de Roussillon, Benaud de Mon-
tauban, Lancelot du Lac, etc., et les indications d'un
très-fsrand nombre d'autres (7. Fàuriel, Histoire de la
poéste provençale). Toutefois, la littérature du Nord est
bien plus riche dans ce genre que le roman du Midi. —
Les Provençaux reprennent l'avantage dans la Pastou-
relle, dont Ils paraissent avoir créé le genre. Le trouba-
dour Guiraud Riquier (1260) y excella, et fut souvent
imité des Trouvères. Mais l'invention de ce^nre remonte
beaucoup plus haut que l'époque de Guiraud : on en
trouve aes exemples dans Cercancour, troubadour qui
florissalt avant 1150, et 11 est désigné comme auteur de
pastourelles dans le goût ancien,
La littérature provençale a été comme le premier essor
de l'esprit dans une civilisation naissante; ses produc-
tions, principalement en poésie, annoncent un vif senti-
ment de l'art. Mais le temps manqua aux Provençaux :
leur langue, en tant que langue littéraire, et leur littéra-
ture furent emportées dans la révolution qui, en écrasant
leur pays, détruisit leur nationalité. Voilà pourquoi la
littérature provençale est moins riche en prose qu'en
poMe. La prose est l'instrument de la raison, qui ne
peut atteindre son développement qu'avec le temps et à
l'aide de la civilisation. Or, la nationalité provençale fut
éteinte dMis son printemps, et la politique prit tous les
moyens de l'empêcher de revivre. Au premier rang il
faut placer le tribunal de l'Inquisition, fondé en 1229, et
rétablissement de l'Université de Toulouse, imposé, la
même année, à Raymond vn par Louis IX. On interdit
remploi de la Ungue provençale dans les actes publics,
et on proscrivit les livres écrits en cette langue. Dans
cette proscription de tout ce qui rappelait la nationalité
ou l'hérésie, disparurent une grande quantité d'écrits
S l'avait fait naître la controverse reliapeuse. Les matières
éologiques pandssent, en effet, avoir surtout exercé la
plume des écrivains provençaux, et la bibliotlièque de
Cambridge a longtemps possédé beaucoup de Traita vau-
dois. Pierre Raimond le Preux composa un traité Contre
l'erreur des Ariens; Raoul de Gassin traita de la Doctrine
des Albigeois et Tuiohins. On connaît aussi les titres de
plusieurs ouvrages historiques par Geoflh>y Rudel, Ber-
trand de Allamanos et Sonlello. Ce dernier avait encore
composé une Somme du DroU. Bastera mentionne, d'après
Salviati, une traduction toscane de Tite-Live, empruntée
au provençal, et il affirme que cette traductièn d'un an-
cien en langue proTonçale est loin d'être la seule.
L'emploi do la langue d'oc ou provençale s'est pro-
PRO
1511
PRO
Itm^ ctans .t:s municipalités da Midi jusqa*à Vordon-
nance de François I«' de 1525, rendant obligatoire, dans
tons les actes publics, remploi de la lan^e française.
Un grand nomoro de chroniques, dinscriptions et de do-
cuments rédigés on provençal font partie des archives de
toutes les villes importantes du Midi. Cette langue est
encore parlée dans les villes et les campagnes, et des
siècles s*écouleront avant qu'elle ait totalement disparu.
V, Millot, Histoire littéraire des Troubadours, Paris,
i774, 3 vol. in-i2, ouvrage fort médiocre, rédigé d*après
les matériaux de Sainte-Palaye; W. de Schlegel, Obser-
vations sur la langue et la littémture provençales, Paris,
1818, in-8"; Riwnouard, Choix des poésies originales des
Trotibadours, Paris, 1816-21, 6 vol. gr. în-8»; Sismondî,
Histoire des littératures du midi de V Europe, 3* édit,
Paris, 1819, 4 vol. in-8'*; Mandet, Histoire de la langue
romane, Paris, 1840, in-8*»; Bruce- White, Histoire des
tangues romanes et de leur littérature, Paris, 1841,
3 vol. in-8*; Diez, Poésie des Troubadours, traduct. de
l'allemand par Roisio, Paris, 1845. in-8<*; E. de Laveleye,
Histoire de la langue et de la littérature provençales,
Bruxelles, 1845, in-8°; A. de Glosset, Histoire de la
langue et de la littérature provençales, Bruxelles, 1845;
Fauriel, Histoire de la poésie proveriçale, Paris, 1846,
3 vol. in-8'; Gatien-Âmoult, Monunhents de la littérc^
iure romane depuis le jvt* sUcle, 4 vol. gr. in-8'»; Nou-
let. Recherches sur Vétat des lettres romanes dans le
midi de la France au xiv* siècle, 1860, in-8^ E. B.
PROVERBE, vérité morale tirée de l'observation et
acceptée comme incontestable, formule heureuse et con-
cise de la philosophie pratique. Le proverbe se distingue
de la sentence, en ce qu'il est passé dans le domaine
populaire; de Vadage, en ce qu*il n'exige que du sens et
de la précision, tandis que l'adage veut de l'esprit et de
la finesse. Au reste, ces mots se confondent dans l'usage
ordinaire. — Les Proverbes ont existé de tout temps; on
les rencontre à l'origine de toutes les littératures. Salo-
mon les appelle la voix de la sagesse, et on en trouve
une riche collection dans deux de ses ouvrages, les Pro-
verbes et VEcclésiaste, ainsi que dans deux autres livres
canoniques de l'Ancien Testament, la Sagesse et VEcclé-
riastique. En Grèce, les Proverbes étaient tenus en si
e^ande estime, que, pour les avoir sans cesse présents,
on les inscrivait sur les monuments publics, sur les
Hermès , et sur les bornes des chemins ; d'où leur nom
de parémies (du grec para, en^ et tiUmos, chemin), c.-à-d.
instructions prises sur les chemins ou recueillies dans
les voyages. Pour cette raison Platon disait qu'an par-
courant l'Attique on pouvait faire un excellent cours de
morale. Les poètes gnomiques et les philosophes attri-
buaient une extrême importance aux proverbes, généra-
lement empruntés aux oracles, aux lois, aux doctrines
des savants et des sages; ils les regardaient comme les
restes de cette langue qui avait servi à l'instruction des
premiers hommes , et que Vico appelle la « langue des
Dieux. » Pvthagore, Selon, Théognis, Pbocylide, Socrate,
Platon, Anstote, Théophraste, Chrysippe et Cléanthe en
formèrent des recueils, renfermant de précieuses règles
de conduite pour la vie privée et pour la vie publi<jue.
Plutarque a parsemé ses OEuvres morales de citations
proverbiales; il a comparé les proverbes aux mystères :
les premiers, selon lui, recelaient un sublime enseigne-
ment sons des expressions vulgaires, comme les seconds
cachaient la divine sagesse sous les formes en apparence
puériles de leurs cérémonies. Ce furent les Romuns qui
donnèrent aux vérités morales brièvement exprimées le
nom de Proverbes (pro verbo)^ parce qu'elles devaient
tenir lieu de longs discours. Caton l'Ancien, qui en a
laissé quelques-uns de sa façon, en était très-amateur.
Jules César les Jugeait Infiniment utiles, à cause du fré-
quent emploi dont ils lui paraissaient susceptibles pour
les usages de la société et pour les besoins de la vie ac-
tive, (M agendum (d'où fut tiré le nom d^adage). Les
Proverbes tiennent une grande place dans les œuvres de
Gicéron et de Sénèque ; 11 s'en trouve aussi dans Horace.
SotiB l'empereur Adrien, ils furent l'objet spécial des
travaux de deux grammairiens, Zénobius et Diogénien,
qui en rassemblèrent une quantité considérable. An
ni* siècle parurent les Distiques de Dionysius Gaton,
dans lesquels la sagesse antique se tronve môlée aux en-
"icignements des premiers chrétiens.
An moyen âge, les Proverbes Jouirent ausA d'une
grande iaveur. Tandis que parmi les populations de la
Germanie se répandait le Hava-mal, espèce de poème
gnomique des Scandinaves, on vit se propager en France
kt Distiqu*^ ^^ Caton traduits en langue vulgaire, ainsi
que d'autres recueils de préceptes puisés dans la philoso-
phie de l'Antiquité, dans les moralités orientales Impor-
tées par les moines voyageurs et par les Croisés. Le
clergé du xii* siècle fit revivre encore les traditions de la
sagesse celtique consignées dans les Triades galloises,
ainsi nommées parce Qu'elles présentent les faits rangés
trois par trois. On employa, pour désigner les expressions
proverbiales, d'abord le mot respit, plus tard celui de
réprouviez ; au xiii* siècle on adopta le mot proverbe des
Latins. Nos usages, nos mœurs, notre histoire on» donné
matière h un grand nombre de proverbes, qu'on trouve
dans les chroniqueurs et les poètes du xu* et du xni* siè-
cle, dans les romans do chevalerie, dans les poésies de
Villon au xv* siècle, dans les contes et les nouvelles du
XVI*, dans les pamphlets satiriques, tels que la Ménippée,
V Apologie pour Hérodote d'Henri Estienne, et les C *tes
dÈutrapel de Noël du Fail. Clément Marot et tous-'^es
poètes de son école firent usage de nos anciens pro-
verbes; Régnier en a introduit beaucoup dans ses poé-
sies. On en rencontre même dans les vieux recueils de
notre Droit coutumier; ils étaient accrédités en Justice,
et considérés comme ayant presque la force d'une preuve
testimoniale : on ne faisait en cela qu'obéir au conseil
d*Aristote et de Quintilien , qui recommandent à l'ora-
teur de les invoquer, à cause de leur caractère de vérité
universellement reconnu. Les proverbes Jouèrent enfin
un grand rôle dans l'éducation : on faisait apprendre
par cœur , dans l'Université , ceux de Salomon et dos
écrivains sacrés; les Distiques de Caton, traduits, imités
et paraphrasés, furent mis entre les mains do la jeu-
nesse pendant plusieurs siècles. — Les études parémio-
graphiques prirent, après la découverte de l'imprimerie,
un développement extraordinaire : on rassembla non-
seulement les proverbes épars dans les écrivains d'Athè-
nes et de Rome, mais encore ceux des Hébreux , des
Pères de l'Église, des Arabes, des Indiens, et ceux qui
avaient cours en Allemagne, en Espagne, en Italie et en
Angleterre, dans toutes les langues, et même dans les
patois. Les plus importants de ces recueils sont le Violier
d'Apostolius, le Florilegium ethico-politicum de Gruter,
les Adages d'Érasme. Il existe un recueil de plus de 500
proverbes, écrits de la* main de Luther ; un libraire de
Breslau l'a retrouvé en 1862. Cet engouement pour les
proverbes, si vif au commencement du xvi* siècle, dis-
parut à la fin : on s'occupa moins de les recueillir que
de les commenter et d'en expliquer l'origine. Etienne
Pasquier a consacré le 8* chapit^ de ses Recherches sur
la France à cette curieuse étude. Trois autres livres ori-
ginaux furent publiés sur cette matière dans le cours du
xvu* siècle ; ce sont : VÉtymologie ou Eacplication des
proverbes français, par Fleury de,Belllngen, La Haye,
•1656, petit in-S**; les Origines de quelques coutumes an-
ciennes et de plusieurs façons de parler triviales, par
Moisans de Brieux, Caen, 1672, in-18 ; les Curiosités fran-
çaises pour servir de supplément aux Dictionnaires, par
Antoine Oudin, Rouen et Paris, 1656, ln-12. Si les pro-
verbes tombèrent dans le discrédit, il faut l'attribuer à
l'abus qu'une foule d'auteurs en avaient fait : Cervantes
semble avoir voulu s'élever contre cet abus par la bouche
de Don Quichotte, oui, donnant des conseils à son écuyer
Sancho sur la conduite qu'il doit tenir dans le gouver-
nement de l'Ile de Barataria, le tance vigoureusement
sur sa manie de débiter des proverbes à tout propos.
Rabelais est l'auteur qui prodigua le plus les proverbes,
et qui, sans contredit, contribua le plus à en dégoûter
notre nation. Une autre cause motiva cet abandon : c'est
que le goût commençait à s'épurer. La comédie des Pro^
verbes, du comte de Gramail, Adrien de Montluc, publiée
en 1616, œuvre pleine de gaieté et de scènes plaisantes,
acheva de perdre les proverbes dans l'opinion du beau
monde, et fis furent relégués parmi les curiosités philo-
logiques. Malherbe et Balzac lesproscririrent; Vaugelas
leur ferma l'entrée du Dictionnaire de l'Académie fhin-
çaise : les autres écrivains du même temps, à l'exception
de Ménage et de Furetière, partagèrent cette antipathie.
L'héritage du vieil esprit gaulois fut répudié, et notr«
littérature fut privée d'un assez grand nombre de locu-
tions originales et pittoresques : toutefois. M"** de Se-
vigne, La Fontaine et Molière, qui s'en sont servis avec
un tact infini et un à^propos des plus Judicieux, les lui
ont restituées en partie ; la dernière édition du Diction-
naire de l'Académie (1835) a donné droit de cité à quel*
ques-unes. Quoique moins estimés que dans l'antiquité
et au moyen ftge, et bannis en général de la langue aca-
démique, les proverbes ne sont pas moins intéressants
et utiles à étudier. Comme leur style change arec les
PRO
1512
PRO
liècles, aussi bien que les opinions dominantes dont ils
sont le reflet, ils éclairent Thistoire des faits et des idées.
Les uns expriment des sentiments universels, et résu-
ment Texpérience du genre humain ; leur cours est per-
pétuel par tous pays, et le temps ne fait que rajeunir leur
forme; on les appelle la Sagêss» det nations. Les autres
sont particuliers à certaines nations, à certaines locali-
tés, et ils reproduisent la pbysioDomie caractéristique du
peuple qui les a créés. Il n'est pas une science,ain art, un
usage, un événement célèbre, qui n*ait donné lieu à des
proverbes : religion, politiaue, législation, morale, his-
toire, astronomie. Jurisprudence, lettres, médecine, pro-
fessions diverses, métiers, coutumes, vêtements, meubles,
nourriture, repas, etc., tout est de leur domaine, n est
à remarquer qu*au milieu de cette variété de pensées
inspirées par tous les sentiments qui agitent r&me hu-
maine, par toutes les vicissitudes de la vie, il ne s'en
trouve pas une seule qui soit entachée d'athéisme ou dé-
pourvue de moralité. V. G. de Backer, Dictionnaire des
proverbes français, Bruxelles, 1710, in-8^; Panckoucke,
Dicttonnaire des proverbes français^ Paris, 1758, in-12;
La Mésangère, Dictionnaire des Proverbes français ,
3« édit., 1823, in-8'>; G. de Méry, Histoire ginéraie des
proverbes, adages , sentences ^ etc., Paris, 1828, 3 voU
in-8o ; Grapelet, Proverbes et Dictons populcUres, 1831 ,
in-8° ; Leroux de Lincy, le livre des proverbes français,
1842, 2 vol. in-8<*; Quitard, Dictionnaire étymdogtque ,
historique et anecdotique des proverbes français, 1842 ,
in-8°; le même. Éludes historiques, littéraires et morales
sur les proverbes français et le langage proverbial, in-8°;
Duplessis, Bibliographie parémiologiquey Etudes biblio-
graplùques et littéraires sur les ouvrajges, fragmenti
aouvrages et opuscules spécialement consacrés aux Pro-
verbes acMS toutes les langues , Paris, 1847, in-8«; le
même, la Fleur des Proverbes français, Paris, 1851,
in-32 ; le P. Cahier, Quelqw six mille proverbes et apho-
rismes, en 12 langues, Paris, 1856, in-1 2. II existe des re-
cueils de Proverbes italiens, par Cornazzano ; espagnols ,
par Pinciano (Madrid, 1616 et 1804); hollandais et alle-
mands, par Gruter; anglais, par Howell. Ray. Flelding,
Kelly, Bennett, Chenevix Trench, etc. P— s.
PROVERBES DRAMATIQUES. AU Commencement du xvn' siô»
cle, lorsque les proverbes furent exclus des livres sérieui
et do toute conversation polie, on les exprima encore
par des gestes, on les repr&enta en pantomimes, et quel-
quefois en de petites scènes dialoguées, dans lesquelles
on les donnait à deviner. G'est ce qu'on appelait jouer
aux proverbes. De ce Jeu, tantôt mimique, tantôt parlé,
fort en vogue sous Louis XIIT, résulta un nouveau genre
de composition littéraire, le Proverbe dramatique, que
M"'* de Maintenon se plut à cultiver. Le recueil qu'a
laissé cette femme éélëbre, et oui fut publié pour la pre-,
miëre fois en 1829, contient 40 petites pièces à deux ou
quatre personnages au plus, et où le nombre des scènes
varie de deux à dix, suivant le développement qu'exige le
proverbe qu'elle s'est proposé de mettre en action; la
dernière scène est arrangée de manière à amener le mot
même du proverbe, lequel tient 11^ de conclusion mo-
rale. M™* de Maintenon composa ce livre pour ses pu-
pilles de Saint-Cyr : les voyant près d'échapper à sa
sollicitude, elle voulut leur dépeindre à l'avance et sous
son véritable Jour ce monde qui les réclamait, et leur
communiquer un peu de la sagesse pratiicrae que renfer-
ment des adages tels que ceux-ci : ly'ivedle» pas le chat
qui dort; — Méchant ouvrier n'a jamais bon outil; —
Oui se fait brebis^ le loup la mange; — Tant vaut
Vhomme, tant vaut la terre; -— Les femmes font et dé-
font les maisons, etc. Ces vérités, profondes sous une
apparence vulgaire, lui ont inspiré des binettes d'un Jet
facile et d'un style simple, qui n'ont pas le temps de
fatiguer l'enfant à qui Jles s'adressent, mais qui, le
faisant réfléchir sans effort, déposent dans son esprit
comme une intuition précoce de la vie réelle. Ces scènes,
/ouées en famille au lieu d'être lues, exercent les Jeunes
personnes à une bonne diction, et obligent leur mémoire
a retenir d'excellents conseils, d'autant plus efficaces
qu'ils sont donnés indirectement et sous une forme
aimable. — Des Proverbes de M"^ de Maintenon, qui
n'étaient pas destinés à franchir la pieuse enceinte de
Saint-Cyr, à ceux qui devinrent à la mode vers le milieu
du xviii* siècle, et oui firent, dans les salons et les ch&-
teaux, les délices des riches 'désœuvrés, la distance est
grande. Un paravent pour tout décor suffisait à la repré-
sentation de ces pièces légères et sans prétention. On
avait commencé par les improviser sur un canevas cou-
rir, u ; mais, les difficultés de l'improvisation n'étant pas
toujours heureusement vaincues, il fallut en venir à
écrire la pièce d'avance. Beaucoup d'hommes du monde
et de beaux esprits se livrèrent à ce passe-temps : l'oubli
a fait Justice de leurs productions. Les Proverbes de
Carmontelle, qui ont seuls été respectés, fournirent de
nouveaux aliments à la passion de Jouer la comédie, qui
s'était emparée de la haute société; ils avaient iine si
grande vérité d'observation, une gaieté si naturelle, que
les auteurs dramatiques les arrangèrent pour les théâtres
publics, où la même faveur les suivit. Ils soutiennent
encore aujourd'hui la lecture, quoiqu'ils portent le cachet
d'une époque déjà bien éloignée de nous, moins par le
temps que par la différence de ses mœurs, beaucoup
moins prudes que les nôtres. — Les demi&res années
du xvm* siècle et les premières du xix* n'étaient guère
favorables à la littérature légère : le goût de la comédie
se ranima un peu à partir du Consulat, mais surtout
après 1815. Les Proverbes de Gosse (Paris, 1819, 2 voU
in-8«) ne fournirent pas une longue carrière : trop loués
d'un côté par le parti libéral, auauel l'auteur apparte-
nait, ils furent trop dénigrés de l'autre, sous pi^xte
que les personnages n'y parlaient pas le langage de la
bonne compagnie; mais si leur succès fut éphémère, il
faut l'attribuer avant tout à leur médiocrité même.
Théodore Leclercq Ait plus heureux ; il eut la vogue et la
récondité de Carmontelle, qu'il surpassa en finesse et en
distinction. Homme de loisir et très-répandu dans le
monde, observateur original et indulgent, railleur en-
joué, écrivain indépendant et peu avide de renommée, il
a peint les travers, les ridicules, les mesquines passions,
les vices même, mais vus sous un aspect comique. Le
cadre de ses tableaux est étroit, et cependant les person-
nages les plus différents de ton et de caractère s'y meuvent
avec aisance et dans l'attitude qui leur est propre. Un
grand nombre de ces esquisses pourraient passer pour de
petites comédies, moins pai l'intrigue, qui ne tient qu'à
un fil, que par l'intérêt des situations et le sel du dialogue.
Dans quelques-unes oc remarque une teinte assez pro-
noncée d'opposition au gouvernement de la Restauration.
Après 1830, Théodore Leclercq continua de produire avec
autant de bonheur. Cependant le goût des Proverbes,
reflets d'un monde prosaloue et bourgeois, allait s'aifoi'
blissant , lorsqu'un poète aéià célèbre, Alfred de Musset,
adopta cette forme pour quelques-unes de ses créations.
Ses Proverbes ne furent pas écrits pour être Joués dans
les salons ou au théâtre, mais pour être lus par un public
d'élite. Parmi ceux qui plus tsûrd ont été transportés sur
la scène et qui sont sortis triomphants de cette éi>reuve,
nous citerons deux chefs-d'œuvre de grâce et d'él^ance :
Un caprice t et H faut qu'une porte soit ouverte ou
fermée. Ce qui a fait la fortune de ces compositions, c'est
la délicatesse du dialogue, la finesse de l'observation,
l'originalité des personnages, l'absence de procédés vul-
gaires pour provoquer l'émotion , un heureux mélange de
senribilité et de gaieté, un certain tour d'esprit plein de
piquant et d'imprévu, et surtout le don bien rare de nous
entraîner dans les régions de l'idéal et de la fantaisie,
tout en restant dans le vrai. Depuis quelques années, la
comédie de salon est redevenue à la mode; les Proverbes
ont repris faveur : mais les gens du monde qui cultivent
ce genre suivent plutôt les traces de Théodore Leclercq
que celles d'Alfred de Musset, qui sera peut-être long-
temps un modèle inimitable. P — s.
PROVIDENCE. Ce nom, qui est celui d'un des attri-
buts divins, semble , d'après son étymologie (pro videre^
prévoir), signifier la même chose que Prescience. De
fait, la Prescience est impliquée dans h Providence;
mais celle-ci s'étend beaucoup plus loin, et comprend,
outre la prévision des événements futurs, le gouverne-
ment du monde en général, et particulièrement le gou-
vernement du monde moral, c-àrd., en œ qui nous
concerne, des déterminations de la volonté, conformé-
ment aux lois de la sagesse et de la bonté souveraine.
Dieu étant conçu comme l'être parfait (F. Dieu — I^reuves
de l'Existence de ), on peut inunédiatement conclure sa
Providence de l'ensemble de ses perfections, n serait
contradictoire que l'être parfait ne possédât pas la science
et la puissance parfaites; ou que, les possédant, il us
s'en servit pas pour diriger tontes choses et spécialement
la volonté des créatures libres, « ce qu'il y a de plus ex-
cellent dans l'univers », dit Bossuet. Réciproquement,
on peut commencer par prouver que le monde est gou-
verné par des lois qm dénotent une sagesse , une bonté,
une puissance infimes ( V. le même art, et l'art. Causes
PWALES}, et prouver l'existence de Dieu par les manifes-
tations éclatantes de m Providence. Parmi les philoso-
PRO
1513
PRO
phes de Tantiquité, Socrate, Platon, les Stoïciens (ceax-ci
non sans auelque inconséquence avec leurs opinions sur
ta destinée), sont ceux qui ont crn et professé le plus hau-
tement le dogme de la Providence. Affaibli chez Âristote,
ce dogme est absolument rejeté par les Épicuriens, qui ,
s'ils ne nient pas absolument Texistence des Dieux, veu-
lent du moins qu'ils ne se mêlent point du tout des
affaires humaines :
tjgo Deftm genns esse semper doxi , et dloam oœlitnir. ;
Sed eot non enrsre opiner qnid agat humannm genna.
EifHxus, in Cicérone, De Divinai., II, 56.
1 J*at tonjonrs crn des dienz, et crn toi^onrs aussi
« Que des faibles mortels ils n'ayaient nul souci, m
n tient naturellement une grande place dans la philo-
sophie et dans la théologie chrétiennes; mais il y a sou-
levé des débats sans fin. En effet, ce premier point établi,
que Dieu est tout-puissant et qu'il gouverne toutes choses,
y compris notre volonté, on se demande comment celle-ci
peut rester libre, malgi^â la direction c(ui lui est impri-
mée ; et, si elle n'est pas libre, que deviennent notre res-
ponsabilité, nos mérites? Telle est , dans ses termes gé-
néraux et philosophiques, la question de l'accord de la
Providence divine et de la liberté humaine. Suiv%z-la
dans son application spéciale aux déterminations qui in-
téressent le salut ; ce sera la grande question théologique
de l'accord du libre arbitre et de la Grâce.
Faut-il donc, sous prétexte de sauver la liberté, nier ou
amoindrir l'efficacité toute-puissante du gouvernement
divin? La raison et la foi s'y opposent également. Ferons-
nous, au contraire, bon marché du libre arbitre? Entr^
rons-nous en défiance du sentiment intime qui nous
avertit que nous sommes libres, c.-à-d. maîtres de
choisir entre différentes déterminations? Et faudra-t-il
nous persuader que, quand nous croyons choisir par
nous-mêmes, nous cédons à notre insu à une influence
irrésistible? Ceci est également insoutenable. Cependant,
comme l'accord et la conciliation ne sortent d'aucun des
systèmes inventés par les théologiens (V. dans le Traité
du libre arbitre de Bossuet l'exposition sommaire des
principam d'entre eux, ou directement les art. Science
moyenne, Contempératum , Délectation victorieuse, Pré-
motion physique)^ comme Ils laissent la balance incliner
plus fortement ou du côté du libre arbitre, ainsi que
firent les Pélagiens et les Molinistes , ou du côté de la
gr&ce, ainsi qu'on le voit chez les PrédestinaUens, les
Calvinistes et les Jansénistes; après avoir posé ce prin-
cipe que nous empruntons à Bossuet : « La raison nous
oblige à croire ces deux choses, quand même nous ne
trouverions pas le moyen de les accorder ensemble, »
nous nous bornerons à suggérer l'opportunité d'une dé-
claration d'incompétence. La question dont il s'agit n'est-
elle pas une de celles qu'il ne nous est pas donné de
rendre? Précisément parce que Dieu est tout-puissant,
et que notre intelligence imparfaite ne peut ni imaginer
ni concevoir en quoi consiste la puissance infinie et les
moyens qu'elle met en œuvre, le rapport de cette puis-
sance infinie avec notre liberté nous échappe. Estrce une
raison pour nier l'une ou l'autre? En aucune façon. Nous
ne comprenons et nous n'expliquons pas davantage l'in-
fluence réciproque du corps sur l'&me et de l'&me sur le
corps : nous ne les révoquons pas en doute pour cela. Il
doit en être de même ici , où nous nous trouvons en pré-
sence, non d'une contradiction absolue et démontrée, mais
seulement de vérités simultanées dont le rapport nous
échappe, et qui, une fois établies chacune à part, avec
le genre d'autorité qu'elles comportent , l'une par l'évi-
dence du sens intime, l'autre par l'évidence de la raison,
ne sauraient^ quoi qu'il advienne, se détruire l'une
l'autre. F. Bersot, Essai sur la Providence, Paris, 4853,
in-8*». B— B.
PROVINCE. ) V, ces mots dans notre Dictionnaire
PROVINCIAL. > de Biographie et d'Histoire.
PROVINCIALES (Les), nom qu'on donne dans l'usage
à un ouvrage de Pascal dont le véritable titre est : Lettres
écrites par Louis de MontcUte à un provincial de ses
imit et aux RR. PP, Jésuites sur la morale et la poli-
tique de ces Pères. Ces Lettres, composées pour soutenir
les solitaires de Portp Royal et les doctrines Jansénistes
contre la compagnie de Jésus, furent publiées successi-
vement depuis le 23 janvier 4656 Jusqu'en mars 1657, et
eurent un très-grand succès : les premières étaient tout
à fait anonymes, et le pseudonyme Louis de Mowtalte
ne parut que plus tard. La 4 >* et la S* roulent sur deux
questions théologfques qui étaient très -débattues au
XVII* siècle, le pouvoir prochain et la grâce suffisante
(V. Grâce) : elles ont perdu pour nous un peu de leur
intérêt, ainsi c[ue le sujet lui-même. La 3* est relative à
la condamnation qui avait frappé Antoine Arnauld, à
propos de sa querelle avec les Thomistes sur la grâce
suffisante et la grâce efficace. Les Lettres suivantes, de-
puis la 4* Jusqu'à la 18*, cpii est la dernière, sont dirigées
contre la morale des casuistes. Il avait été facile à Pascal
de recueillir, dans des livres presque oubliés, certaines
maximes de théologiens qui avaient écrit en des temps
de trouble pour la pensée, maximes d'ailleurs attaqua-
bles en droit : les Jésuites eurent le tort de ne pas les
abandonner, et, en essayant de les défendre, de s'exposer
à l'ironie d'un de nos plus habiles et de nos plus grands
écrivains. Voltaire, dont le témoignage ne peut être sus-
pect en cette matière, a dit dans son Siècle de Louis XI V
« Tout le livre {Les Provinciales) portait sur un fonde-
ment faux. On attribuait adroitement à toute la Société
les opinions extravagantes de plusieurs Jésuites espa-
gnols et flamands. On les aurait déterrées aussi bien
chez des casuistes Dominicains et Franciscains; mais
c'était aux seuls Jésuites qu'on en voulait. On tftchait
dans ces Lettres de prouver qu'il y avait eu dessein formé
de corrompre les mœurs des hommes, dessein qu'aucune
secte, aucune société n'a Jamais eu et ne peut avoir. Mais
. il ne s'agissait pas d'avoir raison, il s'agissait de divertir
' le public. » Ces réserves faites quant au but poursuivi
par Pascal et au moyen qu'il employa pour l'atteindre,
il est de tonte éridence que Les Provinciales , ainsi que
l'a dit M. Sainte-Beuve, ont tué la Scolastique dans la
morale, comme Descartes l'avait tuée dans la métaphy-
sique, et qu'elles ont beaucoup fait pour séculariser la
notion de l'honnête, comme Descartes l'esprit philoso-
phique. Admirables d'exécution, elles effarent au lecteur
des séductions de tout genre, la finesse et la vigueur de
la raillerie, la nouveauté des tours, la hardiesse de la
dialectique, la grandeur même de l'éloquence. Il paraît
que l'on peut relever plus d'une inexactitude dans les
assertions de Pascal, qui écrivit plusieurs de ces Lettres
d'après des notes qui lui étaient fournies à la hâte.
F. l'abbé Majnard, Ias Provinciales,*., publiées sur la
dernière édition revue par Pascal, avec les variantes de
éditions précédentes; et leur réfutation consistant en
nombreuses notes ^historiques, littéraires, et théologir
ques, Paris, 4854, 2 vol. in-8*.
PROVISEUR, titre donné autrefois au chef de cer-
taines maisons {V. notre Dictionn. de Biogr. et d*Histoire)^
et qui , depuis la réorganisation de l'instruction publique
en 4802. désigne le fonctionnaire placé à la tête d'un
Lycée national. Comme l'indique son nom (en latin pro-
visor, pourvoyeur), le proviseur pourvoit a tous les be-
soins de rétablissement : il surveille l'administration,
l'instruction et la discipline, notifie et fait exécuter les
règlements de l'autorité supérieure, et porte seul la res-
ponsabilité. Les autres fonctionnaires lui sont subordon-
nés, et il donne au recteur des notes sur leur compte. 11
est amovible. Il a un traitement de 9^000 fr. à Paris
et à Versailles; dans les départements, s'il est de 1^*
olasse, il reçoit 7.500, 7,000, 6^500 ou 6,000 fr., selon la
catégorie de lycées; de 2n« classe, il a 7,000, 6^500,
6^000 et 6,500 fr.; il est, de pins, logé, éclairé et
chauffé. C'est sur sa proposition que sont nommés les
maîtres répétiteurs et le médecin de l'établissement, n
nomme directement les maîtres d'art et d'agrément ,
ainsi que les personnes de service. Tous les trois mois,
il adresse des notes aux parents sur la conduite et le tra-
vail de leurs enfants. Pour devenir Proviseur, il fallait
être, selon le décret du 17 mars 4808, docteur es lettres
et bachelier es sciences ; l'ordonnance du 26 mars 4820
n'exige plus que le titre de licencié es lettres ou es
sciences. B.
PROVISION, en termes de Droit, ce qui est adjugé
dans le cours d'une instance à une partie qui annonce
des droits sur la chose demandée, en attendant le Juge-
ment définitif, mais sans préjudice des droits de l'autre
partie au principal. C'est encore la somme allouée avant
jugement à une partie dont le droit parait certain , et
lorsqu'il n'y a contestation que sur la quotité de la valeur
demandée ; ainsi, dans la séparation de corps, on adjuge
souvent à la femme, à titre de provision, une somme pour
subvenir à ses besoins durant l'instance. La Provision
alimentaire est la somme allouée par les tribunaux aux
veuves ou aux femmes séparées sur les biens de leurs
époux, aux pères ou aux mères sur les reteous de leurs
enfants. On accorde aussi des provisions aux faillis ou à
leur famille sur les biens meubles ou immeubles , pour
PRU
lal4
PSA
leurs besoins jti8qa*aa concordat ou au syndicat définitif.
^ En termes de Banque, la Provision est la valeur né-
cessaire pour assurer le payement d*une lettre de change.
Elle doit 6tre faite par le tireur, ou par celui pour le
compte de qui la lettre de change est tirée, sans que le
tireur cesse d*6tre personnellement obligé. V. Provi-
sions, dans notre Dictionnaire dé Biographie et d'Histoire.
PROVOCATION (du latin provocare, appeler, exciter,
pousser à quelque chose). LÀ prorocation à une action
qualifiée crime ou délit constitue la complicité {V, ce
mot). — La provocation B*entend encore des coups ou
violences graves que peut alléguer comme excuse celui
qui est poursuivi pour meurtre ou blessures.
PROXÈNES. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire,
PROXÉNÈTE (du grec proxénètes, courtier) , celui qui
s'entremet pour faire conclure un marché, un mariage
ou quelque autre affaire.
PRUDENCE (U), Divinité allégorique des Anciens,
représentée tantôt avec une tête à deux visages regardant
le passé et Tavenir, tantôt avec iln miroir entouré d*un
serpent, et quelquefois une lampe à la main. Les Égyp-
tiens lui donnèrent pour emblème on serpent à 3 têtes,
dont une de chien qui flaire, une de lion dont la gueule
puissante est près d*agîr, et une de loup qui médite une
retraite en cas de besoin. — Pour les Chrétiens, la Pru-
dence est une des quatre vertus cardinales.
PRUDERIE , affectation de sagesse, de décence, de déli-
catesse, dans le langage et dans le maintien. La pruderie
Joue les vertus morales, comme l'hypocrisie Joue les ver-
tus religieuses.
PRUD'HOBIMES, mot qui eut autrefois des acceptions
très-diverses [V, notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire ), et qui désigne aujourd'hui les arbitres char-
gés de Juger les contestations entre fabricants et ouvriers.
Un décret du 18 mars 1806 créa le firemier conseil de
prud'hommes à Lyon : an règlement du 3 Juillet décida
que les membres de ce conseil , élus par les fabricants et
les chefs d'atelier, devraient être âgés de 30 ans au moins,
patentés, et eux-mêmes fabricants et chefs d'atelier de-
puis 6 ans au moins. Un décret du 1i Juin 1809 invita les
autres villes à réclamer l'institution de conseils sembla-
bles, et admit les contre-mattres et les ouvriers patentés
(travaillant chez eux ) à en faire partie. Par décret du
oaoût 1810, les prud'hommes, qui Jugeaient les demandes
Jusqu'à la somme de 60 fr., sans formes ni frais de pro-
cédure et sans appel, purent prononcer Jusqu'à concur-
rence de 100 fir.; on leur confia aussi les mesures conser-
Tatoires de la propriété des dessins industriels et des
marques de fabrique. Après la Révolution de 18i8, un
décret des 27-29 mai reconstitua les conseils de prud'-
hommes sur de nouvelles bases ; il a été modifié par la
loi du l*' iuin 1853, qui est ai^ourd'hul en vigueur. Les
présidents et vice-présidents sont nommés par l'Empereur
et peuvent être pris en dehors des éligibles ; les secrétaires
sont nommés par le préfet, sur la proposition du prési-
dent. Sont électeurs : 1® les patrons âgés de 25 ans ac-
complis, patentés depuis 5 ans au moins, et depuis 3 ans
dans la arconscription du conseil; 2<* les chefs d'atelier,
contre-mattres et ouvriers âgés de 25 ans accomplis,
exerçant leur industrie depuis 5 ans au moins, et domi-
ciliés depuis 3 ans dans la droonscription. Sont éligibles
les électeurs âgés de 30 ans accomplis, et sachant lire et
écrire. Chacune des deux catégories d'électeurs nomme
un nombre égal de prud'hommes. Les Conseils se re-
nouvellent par moitié tous les 3 ans; ils sont rééligibles.
Les jugements sont définitifs et sans appel auaud le chiffre
de la demande n'excède pas 200 fr. en capital; au-dessus
de cette somme U peut y avoir appel au tribunal de
commerce. Les Conseils peuvent être dissous par TEm-
f>ereur, sur la proposition du ministre compétent. F. Mol-
ot^ De la compétence des Conseils de prudf hommes, 1842,
in-S** ; Binot de Villiers , Manuel des Conseils de pru^-
hommes, 1845; in-12; Durut, Code des prud'hommes,
1837, in-12, et Dictionnaire raisonné de la législation
usuelle des prud'hommes et de leurs justiciables, 1846,
in-12 ; Ungée, Code des prud'hommes, i9^, in<42. Le Hir
publie un Journal des prud^hommes.
PRUSSIEN (Idiome). C'est la langue allemande qu'on
(Murle aujourd'hui en Prusse; mais il y eut autrefois,
entre la Vistule et le Memel, un idiome distinct, le bo-
russien ou vieux prussien, qui appartenait à la branche
lettînue des langues slaves , et qui s'est éteint sous la
nommation des margraves de Brandebourg. Il en reste un
monument unique : c'est une traduction du Catéchisme
4e Luther, imfirimée en 1561 pour quelques communes
rurales. On y remarque ^ue le nombre des caa de la dé-
clinaison est plus restremt qu'en lithuanien , et que le
duel n'existe pas. V, Vater, La langue des anciens Prus'
siens, en allem., Brunswick, 1821 ;Nesselmann, Lalan»
gue des anciens Prussiens, en allem., Berlin, 1845.
PRYTANÉE, PRYTANES. K. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
PSALLETTE (du latin psallere, chanter), vieux root
synonyme de Maîtrise.
PSALBUSTE , auteur de Psaumes. C'était aosai autre-
fois le nom des chantres.
PSALMODIE, chant des psaumes de David et des can-
tiques de l'Ancien et du Nouveau Testament. Suivant
plusieurs Pères des premiers siècles , entre autres S' Clé-
ment d'Alexandrie, les Grecs auraient formé leur mode
dorien d'après les éléments de la psalmodie des Hébreux.
Les psaumes sont divisés en versets offrant pour la plu-
part un sens complet. Le chant du premier verset d'un
psaume est divisé en quatre parties distinctes : 1^ l'inio-
nation proprement dite ou commencement; 2<^ la domi-
nante; 3** la médiation; 4<* la terminaison ( V. ces mots).
Chaque ton du plain -chant a pour les psaumes une
mélodie qui lui est propre. Le ton d'un psaume est subor-
donné à celui de Vantienne ( V. ce mot) qui précède ce
psaume. Dans la psalmodie, les syllabes sont longues,
hrèves, ou communes. Les dernières syllabes d'un mot
suivi d'un monosyllabe sont toi]Jours brùves, même lors-
qu'elles sont naturellement longues; une syllabe brève
ne peut entrer dans la formation de l'intonation , de la
médiation, ou de la terminaison. Lorsqu'il se trouve à la
médiation des versets des psaumes un mot hébreu ou un
monosyllabe, on arrête la médiation sur une note élevée
d'un ton au-dessus de la dominante, mais seulement dans
la psalmodie des 2*, 4«, 5* et 8* tons. F. C
PSAL TÊRION ( du grec psalléin , Jouer d'un instru-
ment) , instrument de musique. Les anciens Grecs don-
naient ce nom au nablum ou nebd ( V, ce mot) dont les
Hébreux accompagnaient le chant de leurs psaumes,
instrument à cordes obliques et du g^enre de la harpe.
Le psaltérion mentionné par les écrivains du moyen âge,
et qu'ils appelaient psaltere, saltérion et salteire, était
imité de celui de TOrient. Il consistait en une cat^o
sonore, carrée ou en forme de delta ( A) , sur laquelle était
collée une table d'harmonie en sapin : sur cette table un
certain nombre de cordes en métal ou en boyau étaient
tendues par des chevilles, et accordées de manière à ren-
dre tous les sons de la gamme. On attaquait ces cordes
avec une plume. — On appela aussi Psaltérion une sorte
de tympanon, qu'on frappait avec de petites baguettes.
Un chœur d'enfants reçut encore le nom de Psaltérion ,
et ce mot était enfin appliqué pendant le xv* siècle,
comme aujourd'hui le mot Violon, à la prison où l'on
déposait pour une nuit les gens arrêtés. B.
PSALTEUR, vieux mot synonyme de choriste et de
chantre.
PSAUMES, nom sous lequel on désigne spécialement
les chants religieux et nationaux des Juifs , contenus dans
l'Ancien Testament , et dont on attribue la composition
au roi David , quoiqu'ils ne soient pas tous de lui. Les
chants dits psaumes de David, dans lesquels sont racon-
tées les merveilles des ouvrages de Dieu , sont au nombre
de 150; ils forment un recueil nommé psautier. Les
titres en attribuent 71 à David ; mais un certain nombre
de ceux-là même appartiennent à une époque plus ré-
cente. Le 90* psaume porte le nom de Moise, le 72* et
le 127* celui de Salomon. Plusieurs portent les noms de
divers lévites, Asaph, Ueman, Ethan ou Jeduthun. Un
certain nombre qui sont consacrés à la tristesse pour-
raient bien provenir de prophètes persécutés. Les psaumes
119-134,' qui portent le nom des enfants de Coi*é, sont
appelés graduels, parce que, suivant Dom Calmet, leur
titre hébreu signifie cantiques de la montée, et qu'ils
furent chantés au retour de la captivité de Babylone ,
quand les Juifs montèrent sur la colline de Sion. Les
psaumes 6, 31, 37, 50, 101, 129 et 142 sont dits Psaumes
de la Pénitence, parce qu'ils sont consacrés spécialement
à l'expression du repentir du pécheur. Les psaumes
étaient, du temps de David, chantés par 4,000 lévites,
avec accompagnement d'instruments que le roi avait fait
faire pour cet usage. Leurs mélodies , soit qu'elles nous
viennent directement des Hébreux, soit qu'elles nous
aient été transmises en passant par les Grecs, sont admi-
r{d)les par leur simplicité et leur variété. Le pape S^ Grc-
golre le Grand, au vi* siècle, disposa les mélodies des
psaumes dans un ordre régulier, les appropria au service
de la Uiurgie, les fit suivre d'une antienne qui corres-
PSY
1515
PST
pondit aree elles mub le doubla rapport du texte et du
ton , les classa suivant les exigences des Heures cano-
niales, et en forma un ensemble parfait ( V. Psalmodib),
Les Protestants chantent aussi des psaumes dans leurs
temples : ce sont des cantiques en langue vulgaire, imi-
tés des psaumes de David. En France, ils se servent d*une
traduction commencée par Clément Harot, qui mit en
vers 52 psaumes, et terminée par Théodore de Bèze;
dans les plus anciennes éditions, chaque psaume est pré-
cédé d*un verset en musique prise d'airs connus ou
composée par divers maîtres , tels que Louis Bourgeois ,
Guill. Ftanc, et Claude Goudimel. Conrart et Labastide
ont rêva la traduction au xvn* siècle; de nos Jour*, la
musique a été améliorée par Wilhem et Potier.
PSCHENT, coiiTure des anciens rois d*Én^pte, emblème
de la toute-puissance. C*était une espèce de cône à som-
met un peu arrondi. Voyez-en la figure sur la tète du
serpent, à l'article Apis (Taureau).
PSÈQUES. V. Chevelure.
PSEUDISODOMON. V. Appareil.
PSEUDO-DIPTÈRE, c-à-d. faux diptère, ordonnance
de colonnes que les Anciens employaient dans plusieurs
de leurs temples. L'espace entre les colonnes et le mur
de la cella était aussi large que dans le diptère, mais ces
colonnes étaient sur un seul rang, au lieu de deux.
PSEUDONYME (du grec pseudos, faux, et onama,
nom), qui a un nom faux et supposé. Beaucoup d'ou-
vrages, dans l'Antiauité et chex les Modernes, ont été pu-
blia sous des pseudonymes. Par exemple, le baron d'Hol-
bach mit son Système de la Nature sous le nom du
comte de Mirabaud; Voltaire donna la plupart de ses
écrits philosophiques et polémiques sous des noms sup-
posés. F. Barbier, Dictionnaire des ouvrages anonymes
ou pseudonymes, 2* édit., Paris, 4823 ; Quérard, Les Au-
teurs déguisés de la littérature française, 1845, br. in-8°;
Les Supercheries littéraires déwUées, 1845-56, 5 vol. in-8^,
et Les ouvrages polyonymes et anonymes , 1848 et suiv.
PSEUDO-PÉRIPTÈRE. V. WRiprfeRE.
PSILITES. V, ce mot dans notre Dictionnmre de Bio^
graphie et d'Histotre,
PSYGHË. La fable de Psyché ( T. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire) a une origine orientale, et est
postérieure à l'époque mythologique de la Grèce. De tous
les écrivains grecs et latins dont les ouvrages nous sont
parvenus, Apulée est le seul qui la raconte: il faut
mettre sur le compte de son imagination la plu[)art des
détails qu'il a multipliés autour de la légende primitive,
car ils ne s'accordent pas avec les monuments de l'art
grec inspirés par le mythe d'Amour et Psyché, et bien
antérieurs au siècle d'Apulée. Parmi les interprétations
de ce mythe, la première en date est celle de Fulgence
Planciade, évèque de Carthage au vi* siècle, qui l'a expli-
qué dans le sens des doctrines chrétiennes : selon lui , la
flamme de la lampe que tient Psyché symbolise la flamme
de la passion ; la goutte d'huile qui brûle l'épaule de
Cupidon, c'est le stigmate du péché qui s'imprime dans
notre chair. Les hypothèNMs des érudits modernes sont
moins arbitraires et moins subtiles. Pour les uns, l'his*
toire d'Amour et Psvché est un mythe moral qui a pour
but de représenter les dangers courus par la foi conju-
Ssle, la fidélité diversement éprouvée et triomphant en
éfinidve des périls qui la menaçaient. Pour les autres,
c'est une allégorie de la destinée de l'âme humaine, oui,
d'origine céleste, est, dans sa prison du corps, exposée à
Terreur; c'est pourquoi des éprouves lui sont prescrites,
afin qu'elle puisse s'élever a une vue supérieure des
choses et aux vraies Jouissances. On a cru encore re-
trouver dans cette fable un dogme pythagoricien de la
chute de l'âme; une exposition vivante et animée des
doctrines de Platon sur l'âme; une image de l'alliance
mystique de l'âme et de l'amour divin ; une théorie de
l'amour idéal ; une théorie de l'expiation des péchés, etc.
Queloues-uns enfin , renonçant à pénétrer le sens caché
die l'allégorie, conjecturent qu'Apulée la reçut à l'état de
tradition bien altérée, la modifia encore à sa guise, et
considèrent la manière dont il l'a mise en scène comme
ane transition du récit mythologique aux contes de Fées
et où le conte domine.
La fable de Psjché ne se prête pas seulement aux in-
terprétations religieuses et philosophiques, mais mieux
encore aux fantaisies des poStes et des artistes. Sa popu-
larité, en France, date de la publication (1669) des
Amours de Psyché et de Cupidon , par La Fontaine, sorte
de roman pastoral , mêlé de prose et de vers, et où l'au-
teur a ta se montrer original , tout en imitant Apulée.
En 1760 9 Tabbé Aubert donna un pofime en 8 chants
sur le même sujet. Au rt* chant de ses Veillées du Par*
nasse, Lebrun a mis dans la bouche d'Apollon s'adres-
sant aux Muses le récit de l'histoire de Psyché, qu'il
regarde comme le chef-d'œuvre de l'imagination grecque.
M. de Lamartine, dans son poème de la Mort de So-
crate, a résumé en beaux vers cette allégorie , en décri-
vant la coupe de bronze où Socrate va boire la ciguë ,
et sur le contour extérieur de laquelle la sculpture l'a
représentée. M. de Laprade a publié, en 1841, un poème
de Psyché, en 3 chants; il affirme, dans l'introduction,
mais sans en donner de preuve positive, la concordance
du sens de cette fable avec les idées de la Genèse et de
l'Évangile. On a enfin de H. E. de Calonne un poème
d'amour et Psyché^ qui ne manque pas d'intérêt. —
Ce sujet a encore donné naissance à quelques produc-
tions dramatiques et musicales. Dans un de ses Autos
sacramentales, le poète espagnol Calderon a peint l'amour
de l'âme pour Jâius-Christ sous le voile de l'amour de
Psyché et de Cupidon. A peine le roman de La Fontaine
fut-il répandu, que Molière, sur l'ordre de Louis XIV,
y puisa le sujet d'une tragédie-ballet, qui fut repré-
sentée en 1670 ; il en avait fait le plan, écrit le i" acte,
la l'* scène da second, et la 1" scène du troisième;
le reste est de P. Corneille ; LulK composa les airs de
danse, et la musique chantée sur les paroles qu'on devait
à la collaboration de Quini^lt. En 1678 parut, sous le
nom de Thomas Corneille, un opéra de Psyché, en cinq
actes ; mais Fontenelle y eut la plus grande part ; Lulli
en fit aussi la musimie. En 1857, on a représenté à Paris
un opéra-comique oe Psyché, musique de M. Ambroise
Thomas.
Dans les œuvres d'art, Psyché est presque toujours re-
présentée avec des ailes de papillon ; quelquefois elle est
voilée comme les Jeunes mariées, et cache un papillon
dans son sein , comme pour retenir l'âme de son époux.
Les statues antiques qui reproduisent son image, soit
seule, soit formant groupe avec celle de Cupidon, sont
nombreuses dans les musées de l'Europe. Le Louvre pos-
sède un groupe où l'on voit Psyché implorer à genoux la
pitié de l'Amour, et une statue de Psyché persécutée par
Vénus. Parmi les bas-reliefs, le plus remarquable est
celui du Musée Britannique de Londres, représentant une
sorte de banquet nuptial et d'hymen sacré. Un camée,
gravé dans la collection du duc de Marlborough, offre une
charmante composition, qui a le mérite rare d'être signée
de son auteur, Tryphon, contemporain d'Alexandre. Parmi
les œuvres modernes, nous citerons, au Louvre: deux
groupes de Canova, Psyché posant un papillon sur la
main gauche de l*Amour, et l'Amour venant au secours
de Psyché; une statue de Pajou, Psyché abandonnée
M 795); un autre de Milhomme (1810); une autre de
Ghauoiat, représentant V Amour tenant un papillon et lui
présentant une rose. — Les osuvrès de peinture inspirées
par la fable de Psyché ne sont pas nombreuses, mais
très-importantes : Raphaël a peint cette fable sur un pla-
fond du palais Famèse, à Rome. Il a aussi laissé des
dessins qui traduisent toutes les situations du récit
d'Apulée, et que Marc-Antoine Raimondi et d'autres gra-
veurs ont reproduits dans 32 ou 38 planches. D'autres
dessins furent composés par le même peintre pour les
vitraux que Bemanl Palissy exécuta en 1541 et 1542 au
château d'Écouen {V. ce mot) : ils ont été reproduits en
45 gravures par Alex. Lenoir ; on les retrouve en partie,
et bien mieux exécutés, dans 29 eaux- fortes d'Hyaidnthe
Langlois, conservées â la Bibliothèque de Rouen. Le
musée du Louvre possède un tableau de Gérard, Amouf
et Psyché^ crue la gravure a popularisé. Prudhon peignit
une Psyché enlevée par les Zéphyrs (1808). On a enfin
de Chaudet un remarquable dessin qui a pour sujet le
Triomphe de Psyché, à laquelle tous les peuples viennent
rendre les honneurs divins. M. Renan a découvert, en
1861, aux environs de Saïda, en Syrie, une suite de pein-
tures antiques, ayant pour sujet le mythe de Psyché.
V. l'Introduction aux Œuvres d'Apul&, traduites en
français par Bétolnud, Paris, 1862, 2 vol. gr. in-18; Ful-
gence Planciade, Mythologiarum libri lit, Lyon , 1508,
in-8o; Montfaucon, l'Antiquité ea^liquée, Paris, 1719,
t. n, in-fol.; Description des principales pierres gravées
âiu Cabinet du duc ^Orléans, Paris, 1780, 2 vol. in-fol.;
Alex. Lenoir, AffM^ des monuments français, Paris, 1803,
t. VI; Hirt, Le livre des figures de la Mythologie, de
l'Antiquité et de VArt, Berlin, 1805-1816, 2 vol. in-4»;
Séroux d'Agincourt, Histoire de l'art par les monuments,
Paris, 1823, 4 vol. in-fol.; Creuser, ReUçfions de Vanti"
quUé, trad. par Guigniaut,* t. m et IV, in-8®; le comte
1 de Clarac, Musée de sculpture antique et moderne. Paria,
PSY
1516
PSY
1850, 7 vol. gr. in-8«; Saint-Marc Girardin , Cours de
liltératurê dramatiqtie, gr. in-18. P — s.
PSYCHÉ., grand miroir où Ton se voit en pied, et qu'on
peut incliner à Tolonté au moyen d*un axe qui s'attache
au milieu du montant d'un chftssis.
PSYCHOLOGIE (du grec psukè^ àme, et â>gos, dis-
cours) , science de T&me. La chose est presque aussi
ancienne que la Philosophie; le nom ne date guère que
du xvn* siècle. Wolf , s'il n'est pas absolument le premier
qui s'en soit servi, est du moins le premier écrivûn de quel-
3ue célébrité qui ait spécialement désigné par là une des
ivisions de la Philosophie (K. Wolp, dans notre Diction^
noir» de Biographie et d'Histoire)» 11 faut ajouter que, si
la science de r&me est restée longtemps innommée, cela
tient à ce qu'elle n'était point traitée comme une science
distincte, mais demeurait pour ainsi dire incorporée aux
autres parties de la Philosophie, dont elle est le soutien
et le point de départ. Que, d'ailleurs, l'étude de l'&me
humaine ait attiré presque dès l'origine l'attention des
{philosophes; que Socrate, Platon, Aristote, les Stoïciens,
es Pères de l'Église, les ScolasUques, aient amassé sur
ce sujet, pour le transmettre à la philosophie moderne,
un véritable trésor d'observations, qui n'a fait que s'ac-
croître et se coordonner depuis que Descartes a établi
f»Ius scientifiquement, plus méthodiquement qu'on ne
'avait fait Jusqu'alors, l'existence distincte du principe
pensant: il ne pouvait en être autrement, suivant l'idée
que nous nous faisons de la Philosophie ( V, Philoso-
phie). Dans l'état actuel de cette dernière seience, disons
la place que doit y tenir la Psychologie, à
La Psychologie a pour objet l'&me humaine, c'est-à-
dire sa nature intime, ses attributs essentiels, ses dif-
férentes fonctions, les lois auxquelles elle est soumise.
Dès le premier pas, elle se trouve en présence d'objections
plus ou moins spécieuses, bien vieilles au fond, mais sans
cesse renouvelées, qui ne vont -à rien de moins qu'à nier
sa légitimité, son droit à exister comme science distincte.
L'àme, disaient les Épicuriens, est une partie de l'homme
au même titre que les mains, les pieds et les yeux (F*. Lu-
crèce, de NcUurà renmi, III, ▼. 95 et suiv.), et ils en con-
cluaient que c'est à la Physique au'appaitient l'étude de
l'homme tout entier. Avec plus de science et moins de
décision, le matérialisme moderne dit, au fond, la même
chose, lorsqu'il proclame que le moral n'est aue le phy-
sique retourné (Cabanis), que toutes les racultés de
l'homme sont attachées à son encéphale, que la pensée
n'est (][u'une sécrétion du cerveau (Broussais), et qu'il
revendique à ce titre, pour la Physiologie, l'analyse des
fonctions du moral humain, que la Métaphysique et
l'Idéologie ont déclaré devoir être de leur domaine ex-
clusif. JonflEroy, dans une polémique spécialement diri-
gée contre Broussais, a vivement combattu cette pré-
tention j et établi par les raisons les plus fortes la
Légitimité de la distinction de la Psychologie et de la
Physiologie : c'est le titre de son Mémoire sur ce sujet
Voici le résumé de son argumentation : Il ne suffit pas,
pour prouver que la Psychologie a un objet qui Im est
Êropre, de s'appuyer, comme on le fait ordinairement, sur
L différence aes phénomènes de la vie morale et de la vie
animale, et de conclure de cette différence celle des prin-
cipes de l'une et de l'autre vie. La différence des effets
ne crée, en effet, qu'une présomption et nullement une
certitude en faveur de la différence des causes. Cest à
celles-ci qu'il faut remonter. Or, si l'on recherche la cause
des phénomènes de la vie animale, on en est réduit aux
hypothèses, comme lorsqu'il s'a^t des forces purement
physiques. La respiration, la digestion, etc., ont une
cause; mais cette cause, qu'es^-elle en ru? Est-b!^ une
ou multiple? Nous l'ignorons.
Il n'en est pas de même de la cause des pensées , et
surtout de la cause des volitions. L'enfant lui-même, in-
terrogé sur ce sujet, répondrait : C'est moi qui pense, c'est
moi qui veux. Nous ignorons la cause des phénomènes
de la vie animale : nous avons conscience d'être cause
des phénomènes de la vie morale, et cette perception du
sens intime embrasse à la fois la cause, l'effet, et l'opéra*
tion par laquelle la cause produit son effet. En même
temps, la conscience de l'activité personnelle est un fait
permanent et non interrompu. D'où il suit qu'il y aurait
contradiction à croire que la même cause tantôt eût con-
science d'elle-même dans quelques-uns de ses actes, tan-
tôt s'ignor&t dans d'autres actes. Donc la cause des
phénomènes physiologiques n'est pas identique à la cause
des phénomènes moraux : donc, réciproquement, celle-d
ue se confond pas avec cell^là; elle est un principe, un
être distinct , -^inon absolument indépendant, ayant ses
fonctions et son activité propre, et, à ce titre, elle est et
doit être l'objet d*une science distincte. Alnai se trouve
établie : 1» la légitimité de la Psychologie, et, tout à la
fois , 2<^ la portée et la nature intime du principe qui en
est l'objet, l'àme ou le moi. La Psychologie n'embrasse
pas seulement, comme on l'a cm et répété à satiété, Tétude
des phénomènes, à l'exclusion du sujet de ces phénomènes:
elle pénètre ce sojet Jusque dans sa nature intime. Dire
que l'àme a conscience de ses pensées et n'a pas con-
science d'elle-même, ou que, si elle en a quelque idée, ce
n'est qu'une idée indirecte comme celle que nous avons
de la substance matérielle à propos de ses qualités per-
çues, c'est jouer à plaisir sur les mots pour arriver à une
conclusion radicalement fausse. L'àme, en réalité, se cjr-
nalt mieux qu'elle ne connaît quelque autre chose que ce
soit : elle se connaît comme une force. Toute la difficulté
vient de notre penchant, naturel ou acquis, à vouloir nous
représenter par l'imagination ce qui n'est pas susceptible
de représentation. Ces différents points fixés, il n'est bien
difficile de déterminer ni les limites ni la métliode de la
Psychologie, ni ses rapports avec les autres sciences phi-
losophiques. C'est un fait que l'àme et ses modifications,
passives ou actives, sont l'objet d'une perception sui ge-
nertSs que nous appelons conscience ou sens intime. La
conscience dirigée et concentrée par la volonté prend le
nom de réflexion : la réflexion est essentiellement la
méthode de la l^ychologie. Quant à ses limites, elles sont
tracées par cela même. Où s'arrête la conscience, là devra
s'arrêter la Psychologie. « Le monde interne, dit encore
l'auteur ^e nous citions précédemment, est de toutes
parts délimité par la conscience, et avec lui la Psycho-
logie, car l'objet de la Psychologie est d'écbdrcir ce que
la conscience sait de nous-mêmes, et là où la conscience
ne pénètre pas, il n'y a rien à éclaircir. » {^Mélanges, Ùe
la science psychologique, ) — La Psychologie, d'après son
objet, est évidemment, non pas «mte la philosophie,
mais celle des parties de la philosophie à laquelle toutes
les autres viennent se rattacher; la Logique et la Mo-
rale, « dont l'une nous enseigne à bien raisonner, et
l'autre à bien vouloir, » supposent la connaissance
théorique de rintelligence, des Passions, et de la Vo-
lonté. Il en est de même de la Théodicée : ce n'est que
par la connaissance de nous-mêmes que nous pouvons
nous élever à la connaissance de Dieu. L'àme humaine
est, d'ailleurs, le centre commun où naissent toutes les
idées, où viennent se réfléchir toutes les connaissances.
Elle ne peut être sûre de rien, si elle n'est sûre d'elle-
même. Ce ne sont donc pas seulement les sciences philo-
sophiques proprement dites, mais toutes les sciences, qui
sont en rapport plus ou moins direct avec la Psychologie.
Partout où un système psychologique, c.-à-d. une cer-
taine solution des questions psychologiques, a prévalu,
les caractères de ces systèmes se sont reflétés dans les
autres sciences. Le Ciurtésianisme , la philosophie de la
sensation (Locke et Gondillac), le Kantisme, en ofiriraient
les exemples les plus remarquables. — Il ne faut pas
songer à citer, même partiellement et avec choix, les
ouvrages qui traitent de \sl Psychologie. Il n'est pas un
livre de philosophie, depuis les Dialogues de Platon et
le Traité de Vàme d'Aristote, qui ne lui fasse une large
place. Bornons-nous à indiquer, avec les ouvrages des
écoles éminemment psychologiques que nous venons de
nommer, ceux des philosophes de l'école écossaise, Reid,
Du^ld-Stewart, Adam Smith, et à rappeler, parmi les
écnts encore plus récents, les deux opuscules de Jouf-
froy que nous avons également cités dans le cours de cet
article» et qui contiennent un résumé très-complet et
très-méthodi^ue des idées les plus générale» sur l'objet
et l'organisation de la Psychologie. B — a.
PSYCHOSTASIE, c-à-d. en grec Pesée des âmes, Ia
croyance qu'après la mort les actions humaines sont ju-
gées avec une sévère équité a fait comparer cet examen
à un pèsement, dans lequel la Divinité met en balance
le poids de nos vertus et celui de nos fautes. Cette image
de la rémunération future passant du langage dans les
idées, on prit à la lettre la pesée des âmes. On en trouve,
dès la plus haute antiquité, des preuves écrites ou figu-
rées : sur plusieurs monuments de l'Egypte, Anubis,
Honis, ou Thméi (déesse de la justice),. pèsent les âmes
dans une balance; dans la religion des Hindous, Dherma
pèse aussi les bonnes et les mauvaises actions. La même
idée métaphorique existe dans l'explication que Daniel
donna des trois mots écrits par une main mystérieusn
sur les murs du palais de Balthazar : « Voua avex été pe^
dans la balance, et on vous a trouvé trop léger. » il
ejdste dana Homèro (Iliade, xx, 210) et dans Virgile
PUI
1517
PUN
{ÊnétdBf xn, 725) des allusions à la Psychostasie. Wlnc-
keliliann a publié une patère étrusque en broQze , sur
laquelle Mercure pèse dans une balance doiiX petites
figures d'hommes. Les premiers chrétiens adoptèrent la
balance comme un symbole du Jugement dernier, et la
Psychostasie est un sujet que traitèrent fréquemment les
artistes du moyen âge dans les bas-reliefs et les fresques
des églises, dans les peintures des manuscrits. On la voit
représentée aux cathédrales de Paris, Bourges , Chartres,
Amiens, Rouen, etc. B.
PUBERTÉ (du latin pubes, duvet des Joues), &se où
l'on devient nubile. Chez les Romains , c'était l4 ans
pour les garçons, et 12 pour les filles. Le Code Napoléon
(art 144) établit la puberté, par la permission du ma-
riage, à 18 ans pour les garçons et à 15 pour les filles.
PUBUGAINS. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et â^ Histoire,
PUBLIGISTE, celui (fui écrit sur le Droit public, le
Droit des gens, la Politique, l'Économie sociale, etc. Les
connaissances qui lui sont nécessaires ont été r^umées
dans ItL.Bibliotnèque de Vhomme public, par Condorcet,
Peyssonnel et Lechapellier, Paris, 1790-92, et dans la
Science du publiciste; par Fritot, 1819-23.
PUBLICITÉ , mot synonyme de notoriété publique, et
siçniflant également le caractère de ce qui est rendu pu-
bhc La publicité des débats Judiciaires est une maxime
fondamentale de notre Droit depuis 1789. Celle des dé-
bats législatifs a été supprimée par la Constitution de
1852. Dans le Journalisme, la publicité s'obtient par Van-
nonce {V,ce mot),
PUDEUR (La), divinité allégorique des Anciens. On la
représente enveloppée d'un voile, assise dans une atti-
tude modeste, avec un lis et une tortue pour symboles.
PUERILITIA, nom donné anciennement aux morceaux
de chant qui devaient être exécutés par des enfants.
PUFF, mot anglids qui désigne tout genre de publicité
mensongère qui a pour but d'attirer l'argent des gens
crédules. Celui qui fait des pt/^s s'ap))elle puf/iste.
PUGILAT. V. ce mot dans notre Dtctionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
PUISARD , endroit souterrain creusé en forme de puits
et où se rendent les eaux inutiles d'une habitation ou les
eaux des ruisseaux, qui se perdent ensuite dans la terre
ou rejoignent un aqueduc. Il est ordinairement bâti à
pierres sèches, et recouvert d'une pierre trouée ou d'une
grille en fer. On nomme puisard d'aqueduc l'ouverture
qu'on pratique dans la voAte d'un a^pieduc pour v péné-
trer, un puisard de sou/rce conduit les eaux de cette
source dans le sein de la terre. On fait usa|^ de puisards
pour les exploitations minérales : les eaux qui s'y amas-
sent sont épuises par des pompes à feu.
PUISETTE , vieux mot signifiant petit seau.
PUISSANCE, mot qui s'emploie quelquefois, en Psv-
chologie, dans le sens de faculté : « les puissances de
r&me humaine. » — Dans une acception toute spéciale, et
propre â la Métaphysique péripatéticienne, la Puissance
est opposée à l'Acte et aésigne l'état d'Indétermination de
la matière, avant qu'elle soit passée à l'état d'Entéléchie
par l'adjonction de la Forme, qui constitue l'acte propre-
ment dit. V. Acte et ENTÉLécHis. B~b.
poissauge uaritaus, autorité attribuée au mari sur la
personne et les biens de sa femme. V, Marugb, Fehmb,
Commun ACTé, Dotal (Régime).
PUISSANCE PATBBNBLLE, autorité quo lo père exerce sur
lu personne et les biens de ses enfuits. F. Pins.
PUISSANCES (Les). V. Angbs.
PUITS (du latin puteus), excavation de forme ordinai-
rement circulaire, pratiquée dans le sol pour réunir les
eaux qu'il renferme et en faire usage. On revêt de ma-
çonnene la surface intérieure , afin d'empêcher l'ébode-
ment du terrain. Pour puiser l'eau, on se sert de seaux
auachés à l'extrémité d'une corde qu'on enroule autour
d'une poulie, et qui est tirée soit à bras, soit par un ma-
nège ou une machine, (hiand on creuse des puits pour
les maisons, il faut les éloigner des fumiers, des étables,
des fosses d'aisances, de tous lieux dont les infiltrations
peuvent g&ter l'eau; et fl est bon, malgré quelques in-
convénients, de les laisser découverts, parce que l'eau en
est meilleure. — Nul ne peut creuser de puits sur sa
propriété pr^ d'un mur mitoyen, d'un mur de sépara-
tion, d'une cave, d'un autre pidts ou d'une fosse d'ai-
sances, sans laisser la distance prescrite par les règle-
ments et usages locaux, ou sans faire les ouvrages que
ces règlements ordonnent.
Il existe des puits d'un caractère monamental ; on
en trouve, dans l'Inde^ d'une profondeur et d'un dia«
mètre eonsidérables , et entourés de galeries Jusqu'au
niveau de l'eau. Le puits dit de Joseph, au Caire, construit
f)ar nn prince arabe du nom de Youssouf , est tsillé dans
e roc, et a 93 met. de profondeur sur 14 de circonfé-
rence ; on y descend au moyen d'un escalier circulaire de
300 marches, séparé du puits par un mur qui n'a que
0™,16 d'épaisseur, et qui est percé de petites fenêtres
destinées à éclairer la rampe. A peu près au milieu du
puits se trouve une esplanade avec un bassin ; là, des
bœufs tournent une roue qui fait monter l'eau dans le
bassin, d'où d'autres bœufs, placés à la surface du sol, lui
font franchir le reste de la distance. On voit à Orvieto,
dans les États romains, un puits de S^ Patricef construit
par Ant. San-Gallo, sur l'ordre du pape Clément VII : il
est revêtu en pierres de taille; des mulets vont y cher-
cher l'eau en descendant par un escalier en spirale et en
remontant par un autre : ces escaliers, comme au puits
du Caire, sont éclairés par des fenêtres pratiquées sur
les parois. Le puits de Bicêtre, près de Paris, achevé
en 1735 d'aprè» les plans de Boffrand, a 57 met. de
profondeur et 5 met de diamètre : l'eau s'en extrait
au moyen de deux seaux contenant chacun près de
270 litres d'eau et pesant 600 kilogr., lesquels montent
et descendent au moyen d'une charpente tournante mue
par 8 chevaux ; cette eau est reçue dans un réservoir qui
en contient 10,728 hectol., et d'où elle est distribuée par
72 conduits dans l'établissement A Coutras (Gironde),
là où était un château du xvi* siècle, se trouve un puits
hexagone, recouvert d'une coupole que supportent des
colonnes d'ordre dorique, et que couronne une petite
lanterne surmontée d'une calotte en écaille et d'un dau-
phin. L'architrave, sculptée avec goût, offre alternative-
ment, dans ses six compartiments, des armoiries muti-
lées, et un bras frappant d'un cimeterre plusieurs nœuds
au-dessous desquels on lit : Nodos virtute résolve (Je
délie les ncsuds par mon courage). La hauteur totale de
ce monument est de 7 met. Il existe à Dijon, sous le nom
de Puits de Moïse, autrefois Puits des Prophètes, un
ouvrage intéressant du Hollandais Claux Sluter; c'est le
f piédestal d'une croix de pierre qu'on a détruite pendant
a Révolution; il était placé dans le milieu du cloître de
la Chartreuse, et élevé sur une pile de pierre qui for-
mait le centre d'un puits de 7 met de diamètre. Ce puits
a été comblé, mais le piédestal a été conservé avec les
six statues qui y sont adossées. Gaux exécuta son travail
de 1396 à 1402. Le mur circulaire qu'on voit autour du
puits de Moïse supportait autrefois une toiture. B.
porrs ARTÉsiBN ou PUITS FOBÉ, trou très-profond, d'un
diamètre de 2 à 3 décimètres seulement, que l'on creuse
au moyen de sondes ou tarières de mineur. Jusqu'à ce
qu'on ait atteint quelque rivière souterraine dont l'eau ,
venant d'un sol plus élevé, tende à remonter au même
niveau. Le puits livre à cette eau une issue par laquelle
elle arrive à la surface de la terre. On peut, sans
chercher de source Jaillissante, forer des puits pour étu-
dier la nature des terrains ou trouver des mines. Les
puits forés sont de toute antiquité; on en a creusé en
Egypte, dans les oasis du Sahara, en Chine, en Perse, en
Médie, en Syrie, etc. L'administration firançaifee en a fait
forer sur plusieurs points de l'Algérie. Le plus ancien
2ue l'on connaisse en Fnuice est celui d'un couvent de
hartreux à Lillers en Artois (1126}; de là est venu le
nom d'artésiens donné aux puits de ce genre. Le puits
artésien le plus remarquable qu'on ait creusé de nos
jours est celui de Grenelle. V. ce mot dans notre Diction^
nairs de Biographie et ^Histoire. S.
PUITS DB GARRIÈRB OU DB HINB , OXCavatiOU VOTticalS
pratiquée pour l'exploitation d'une carrière ou d'une
mine, et servant au passage des ouvriers et à l'extraction
des pierres ou du minerai.
PUITS DB FBu, nom de certaines excavations pratiquées
en Chine pour trouver de l'eau , et d'où s'échappent, au
contraire, des gaz inflammables.
purrs, en termes d'Art militaire, trou creusé au devant
d'une circonvallation ou d'un retranchement, et qu'on
recouvre de branchages et de terre pour y faire tomber la
cavalerie ennemie; — creux pratiqué dîans la terre par
les assiégés d'une place, pour découvrir et éventer les
mines des assiégeants.
PDJOLS. V. TuvuLUS.
PULdNELLA. V, PoLicHmBLLB, dans notre Diction»
noire de Biographie et d'Histoire,
Sm ^RSP* } V' c« mots dans notre Dictionnaire
POI^SarT V de Biographie et d^Histaire.
PUNCn, abréviatîAn populaire de Punchmelto, mol
PUR
1518
PUR
qui désigue chez les Anglais un personnage grotesque,
analogue à notre Polichinelle. Son nom sert de titre à un
^ournal satirique de Londres.
PUNCTATOR. F. PiQOEoa.
9- PUNIQUE (Langue). V. Carthagoiois.
PUPUXe ( du latin pupellus, diminutif de pujnu, en-
fant, poupon), enfant en bas âge ou mineur, qui, privé
de ses père et mère^ ou de l'un d*eux , est sous la con-
duite d'un tuteur. V. Tutbllb, Toteus.
FDpnxBS DB LA 6ARDB iMpiaiALB. F. uotro Dtctionnoire
de Biographie et d'Histoire, au Supplément.
PUPITliE, meuble en bois qui sert à supporter des
livres, des papiers, des parties de musique, etc. A Féglise,
le mot est svnonyme de LiUrin, 4»
PURANAS, mot qui pourrait se traduire assez exacte-
ment par Antiquités, et qui désigne certains pofimes in-
diens où sont renfermées des légendes humaines ou
divines, recueillies par leurs auteurs dans les traditions
nationales et les anciens écrits des Br&hmanes. Ce sont
des recueils où les faits relatés sont enchaîna les uns aux
autres dans un ensemble poétique souvent assez mal or-
donné, entaché même de contradictions visibles. Néan-
moins, un travail critique Judicieux pourra, dans l'avenir,
rétablir entre ces faits Tordre que les poètes n'ont pas
toujours su leur donner, et recomposer des séries vé-
ritablement historiques. Les récits contenus dans les
recueils pur&niques se rapportent aux plus grandes pé-
riodes de l'histoire de l'Inde, antérieurement au boud-
dhisme, et remontent souvent Jusqu'à la période primi-
tive du Véda : comme nous possédons ce dernier recueil,
dont les hymnes sont d'une nature tout à fait historique
et positive, les tableaux et les listes puràniques y trou-
vent naturellement leur contrôle, et servent à leur tour
à les coordonner selon leur succession réelle. Les Indiens
attribuent aussi une grande valeur historique et théolo-
gique aux Purànas ; la lecture du Véda et des épopées
étant interdite aux castes inférieures, l'enseignement
leur est donné par les PurAnas » qui semblent avoir été
composés expressément pour elles. Le nombre des Purà-
nos, nommés ordinairement if aMpurdnaj, c.-à-d. grands
Pur&nas, est de 18 : les principaux sont le Bliâgavata-
purâna, le Vishnu^purâna, le Mâtsya-purâna, VAgnéya"
purâna, le Mârkandéya-purdna, le Padma^purâna, le
Brahmà^uràna. Les 18 recueils pris ensemble renfer-
ment 400,000 stances, en tout 1,600,000 vers; on est loin,
en Europe, d'en posséder une traduction complète ; ils ne
sont pas encore tous imprimés ; nous n'avons pas même
tous les manuscrits, et , parmi ceux que l'Inde s'est laissé
ravir, plusieurs sont incomplets ou remplis de fautes.
Comme les Purànas sont généralement très-populaires
et font la lecture habituelle des femmes, ils ont été tra-
duits en plusieurs dialectes modernes, pour être acces-
sibles à des peuples entrés dans le système brahma-
nique, mais ignorants de la langue sanscrite.
La tradition attribue la composition des Purànas à
Vy&sa, le môme auquel on rapporte le Mahâbhârata et
la récollection des Védas. Biais ce nom de Vyàsa est un
terme général , une épithëte que l'on donne aux auteurs
des collections brahmaniques, et qui n'implique nulle-
ment que ces sortes d'éditeurs soient les poètes eux-
mêmes qui ont composé ces-chants. Les Purànas ne sont
ni d'un même auteur ni d'une môme époque. Il est diffi-
cile, d'ailleurs, d'admettre qu'un seul homme, après
avoir composé le grand poème épique, recueilli et mis en
ordre le corps entier des Védas, eût encore trouvé le
temps de rassembler les antiques traditions de l'Inde, de
les coordonner, et de composer sur elles un million et
demi de vers : il y aurait donc lieu de chercher pour
chaque Purâna le nom de l'auteur auquel il appartient
véritablement. Nous connaissons déjà, selon toute vrai-
semblance, plus d'un d'entre eux ; on peut espérer oue
les autres seront également reconnus.
Un Purâna contient, en général, deux sortes de sujets
très-distincts : de la cosmogonie, et des traditions plus
ou moins historiques. La cosmogonie vient d'abord ; les
légendes forment les derniers chapitres du poème. Ces
deux sujets sont rattachés l'un à l'autre sans disconti-
nuité : car la cosmogonie conduit naturellement le poète,
des principes abstraits d'où le monde est issu , aux divi-
nités brahmaniques qui en sont les personniilcations
diverses, et de ces divinités aux familles royales ou sa-
cerdotales qui les reconnaissaient nour leurs auteurs. De
plus, comme le sujet ordinaire des Purànas est Vishnu
et ses incarnations successives, œ Dieu est donné dans la
cosmogonie purànique comme l'auteur de toutes choses
ec le principe suprême, de même que, dftos Texposé des
traditions humaines, il reparaît nécessaireniAnt plosienrt
fois sous les formes diverses par lesquelles il s'est mani-
festé. C'est donc le personnage divin de Vishnu, dont
l'histoire est poursuivie à travers ses transfigurations, qui
donne de l'unité à chaque Purâna, et même peut^-être à
la collection tout entière. Les doctrines religieuses expo-
sées, quelquefois très-longuement, dans ces poèmes,
appartiennent en majeure partie à la secte vishnuvite,
ou, pour mieux dire, à la période de l'histoire de llnde
où le dieu Vishnu a eu la prééminence dans les croyances
publiques. L'intérêt môme et la complaisance avec les-
quels les poètes s'attachent à décrire ses incarnations
sont un^ preuve de l'importance qu'avait son culte ao
temps où les Purànas furent composés. Le Vishnu^pu^
râna et le Bhâgavata^purâna renferment non-seulement
le récit de ces avatâras ou descentes successives du
Dieu, mais de nombreuses tirades de vers où l'auteur
exalte avec une sorte d'effusion de cœur les vertus su-
blimes et les attributs métaphysiques de Vishnu. C'est
autour de ce nom que se groupent les idées religieuses
des poètes, leurs théories mystiques; c'est lui qui est le
centre de leurs croyances, l'objet de leur culte et de leur
amour. Les PurAnas, en général, appartiennent donc
bien réellement à la période vishnuvite de la religion
bràhmaniaue. — Au point de vue philosophique, il est
bien difficile de démêler dans les expositions poétiques
des Purànas \a doctrine d'une école déterminée, et de
rapporter ces poèmes soit aux Védântistes, soit au SAn-
khyct. Il semble même (c'est du moins ce que prouve la
lecture du Bhàgavata^purAna) qu'il n'y ait point Id de
doctrine arrêtée, et que l'auteur flotte pour ainsi dire
entre toutes les écoles. Dans certains passages on trouve
la pure métaphysique fondée sur la théologie issue du
Véda; ces passages sont d'une parfaite orthodoxie, et
sembleraient avoir été composés dans le plus beau temps
des écoles brahmaniques de l'antiquité. Dans d'autres, la
philosophie rationaliste, connue sous le nom de Sânkhya,
prend le dessus; le Véda est écarté pour un temps; le
sens privé est mis à la place de l'autorité sacrée, et la
raison au-dessus de la foi. Bien plus, les doctrines elles-
mêmes se contredisent quelquefois de la manière la plus
formelle, sans que l'auteur ait paru s'en apercevoir t
Dieu, l'homme avec son moi, le monde avec ses révolu-
tions à longue et à courte période, les sens, l'intelligence,
l'esprit de logique et d'examen, la morale même, tantôt
humaine et pratique comme la nôtre, tantôt mystique et
impraticable, tout ce qui compose la philosophie de rinde
y est présenté sous les Jours les plus divers et parfois les
plus opposés. En doit-on conclure que chacun de ces
{>oemes, de ceux du moins que nous connaissons, est
'ouvrage de plusieurs hommes, de plusieurs écoles, de
plusieurs époques? Cette conséquence n'est point néces-
saire. En effet, si l'on sort des PurAnas, et que l'on se
reporte aux épopées d'abord, puis aux Védas et à l'im-
mense littérature brahmanique fondée sur eux, on re-
trouve dans ces écrits des passages entiers que l'on avait
lus dans les PurAnas. Comme les Védas sont de beau-
coup antérieurs aux épopées, et ^ue celles-ci remontent
elles-mêmes à une haute antiquité, on eu conclut que
c'est l'auteur purànique qui est le copiste, et que les pas-
sages originaux et primitifs doivent être cherchés dans
ces anciens écrits. D'ailleurs, l'extrême diversité qui se
rencontre dans le style et même dans la langue de ces
divers passages montre à elle seule que les PurAnas qui
les renferment sont des ouvrages de seconde main, et
pour ainsi dire des compilations. Or, ce ne sont pas seu-
lement les récits de faits tout humains, tels que les lé-
gendes royales, qui renferment de tels emprunts, c'est
aussi la partie des poèmes où se trouve la cosmogonie
avec les exposés philosophiques qui s'y rapportent. Les
auteurs ont emprunté des morceaux tout faits à des ou-
vrages qui existaient avant eux et qui avalent acquis
dans l'Inde une réputation étendue et une sorte d'auto-
rité. Les écoles les plus opposées ayant tour à tour, par-
fois même simultanément , Joui de cette autorité et de ce
renom, les écrits des unes et des autres qui pouvaient
servir au but de l'auteur lui ont également fourni des
fragments philosophiques, sans qu'il ait paru se mettre
en peine d accorder ou de dissimuler les contradictions :
de là cette espèce de syncrétisme, souvent grossier, qui
dépare ces grands poèmes. Quand les études indiennes se
seront portées tour à tour sur tous les monuments de la
littérature sanscrite, on pourra vraisemblablement dé-
membrer les PurAnas, rendre aux ouvrages antiques les
morceaux qui leur appartiennent , et reconnaître ce qui
est vraiment l'œuvre de leurs auteurs. On pfu( déjà re-
PUR
1519
PUR
connaître comme rœayre de ceux-ci des chapitres en-
tiers, souvent les derniers de chaque livre, où Tinspirar
tion religieuse et la foi du poète, laissant de côté toutes
les citations et les légendes, s*ezalte elle-même et s*é-
panche dans la contemplation des perfections adorables
de Vishnu. Ces chapitres sont presque toujours les plus
beaux, parce qu'ils sont les plus originaux et les plus
naïfs.
Les conditions où se sont placés les poètes pur&niques
ne leur permettaient guère de composer des œuvres litté-
rairement bien faites : comment écrire, même sur un
héros unique tel que Vishnu , un bon poôme avec des
fragments empruntés à tous les temps et à toutes les
écoles? Ils étaient d'ailleurs retenus dans les limites
de la foi et de la tradition philosophique et littéraire
des Br&hmanes. Aussi la composition des Purânas est-
elle ordinairement confuse; les développements sont
diffus; les parties sont disproportionnées, tantôt trop
courtes pour être claires, tantôt trop longues pour l'im-
portance relative des sujets. Les mêmes idées reviennent
souvent , exprimées dans les mêmes termes. Comme l'au-
teur ne nomme pas les poètes ou les ouvrages qu'il cite,
on n'est point averti, et tout à coup l'on est transporté
d'un morceau en stvle et en langue épique, emprunté par
exemple au Mahàbhdrata ou au nàmâyana, dans un
autre tout différent de langue et de forme, et qui n'est
autre chose qu'un hymne du Véda, Il n'y a donc d'unité
littéraire ni dans Tensemble ni dans les parties de ces
poèmes. Le seul lien qui les rattaclie et forme un tout de
ces éléments si disparates, c'est la foi en Vishnu et la
pensée qu'il faut Tadorer ; mais c'est là une unité mo-
rale et non littéraire. — A un autre point de vue, les
Purânas nous offrent de très-beaux modèles de style.
A l'époc^ue où ils furent composés, les hommes instruits
possédaient non-seulement une langue parvenue à sa
perfection, mais des connaissances poétiques, littéraires,
grammaticales, extrêmement profondes et étendues. Là
où Tauteur est redevenu lui-même et exprime ses propres
sentiments comme il les éprouve, la langue sanscrite
atteint un degré de perfection que l'on ne trouve ni dans
les épopées ni même dans les drames. Le style de ces
derniers est souvent maniéré, affecté, déparé par des
figures de rhétorique qui lui ôtent une partie de son na-
turel ; celui des épopées, beaucoup plus simple, a géné-
ralement encore quelque chose de rude ou du moins de
positif qui n'indique pas une longue culture littéraire.
Quant au Véda , c'est presque un autre idiome ; ce n'est
pas du moins le sanscrit proprement dit. Les passages
empruntés aux anciens livres font dans les Purânas un
contraste qui fait ressortir encore la he^xité du style
propre de leurs auteurs, cette délicatesse infinie de la
pensée qui , sans perdre sa vigueur, est rendue dans ses
nuances les plus charmantes ou les plus touchantes. Il y
a aussi de fort beaux récits dans les Purânas, et qui
n'ont rien à envier à aucune de nos narrations classiques
les plus estimées. A ce point de vue leur étude offre un
véritable intérêt. Enfin, ce qui caractérise peut-être le
mieux ce genre et cette époque littéraire, c'est un mé-
lange étonnant de poésie et de métaphysique. La littéra-
ture indienne a toujours uni ces deux choses, mais à des
de^és et avec des succès divers : dans ces poèmes, la
science la plus abstraite se fond avec la poâie la plus
pénétrante. Les nombreux passages où elles s'imissent
ainsi nous étonnent d'abord, puis nous charment par
degrés, et enfin nous subjuguent.
Le Purâna est le Vêda des femmes et des castes non
brahmaniques. 11 n'est pas non plus l'œuvre des brah-
manes : c'est ce que prouvent l'étude de ces poèmes et
les renseignements donnés par les grammairiens et par
les commentateurs. En effet , il est hors de doute aujour-
d'hui que les grands Purânas ont été précédés par
d'autres beaucoup plus anciens, moins nombreux et
moins étendus. Ces anciens Purânas étaient au nombre
le six : ils traitaient de la création, de la naissance et du
règne dc^ ISanûs, et de l'histoire des familles qui en des-
rendaient. On peut croire que les doctrines théoso-
phiques qu'ils renfermaient dérivaient exclusivement du
Védîa; car ils sont cités dans le Râmâyana, dans le
Mahàbhdrata, dans Manê, ouvrages appartenant aux
premiers développements de la littérature sanscrite et an-
térieurs certainement au bouddhisme, c.-à-d. au vi* siècle
avant notre ère. Us sont même cités dans les Upanishads,
lesquelles appartiennent à la littérature du Véda et sont
par conséquent antérieures aux productions en langue
sanscrite. Il ne semble pas qu'il reste rien dans l'Inde dp
ces Purânas primitifft; mais ou voit que leur CQ5C60U I
était sensiblement différent de celui de nos Purâna».
Ceux-ci, en effet, contiennent des doctrines empruntées
à des écoles brahmaniques de beaucoup postérieures aux
temps védiques et même très-modernes. Telles sont les
parues de ces grands poèmes où l'on traite de la disso-
lution finale du monde (pralaya) ; de l'affranchissement
ou de la délivrance par le moyen, non des œuvres, mais
de la dévotion ; de Hari et de ses perfections; et enfin des
dêvas. Ces sujets ne sont pas indiqués comme faisant
partie des Purânas primitifs, et %s savons par le fait
Si'ils ont été l'objet d'études de x/jaucoup postérieures,
ais il y a toute apparence que les grands Purânas mo-
dernes ont été faits sur le modèle des anciens, avec cette
différence qu'ils ont pris un aspect plus métaphysique et
se sont surtout attachés à faire prévaloir le culte sectaire
de Vishnu. Dans tous ces poèmes également, c'est la
forme du dialogue qui est employée; ou, pour mieux
dire, il y a un narrateur et une personne qui écoute,
n'interrompant que rarement, là où le récit est naturel-
lement coupé. Ce narrateur porte invariablement le nom
générique de Sûta, qui signifie cocher ou écuyer; mais
le nom de famille de cet écuyer n'est pas le même dans
tous les Purânas. Or, nous savons que les Sûtes for-
maient dans l'Inde une caste, dont une des fonctions
principales était celle de bardes ; fils d'une br&hmanl et
d'un xattriya, ils étaient à la guerre les écuyers des
xattriyas, et, pendant la paix, ils mettaient en vers les
actions béroiques de ces derniers ou leurs généalogies ;
celles-ci, remontant aux dieux eux-mêmes, c.-à-d. aux
êtres divins qui font mouvoir le soleil et la lune et qui
président à la vie, conduisaient le poète Jusqu'aux temps
de la création primitive et aux règnes successifs des
Blanûs. Ainsi se sont composés les anciens Purânas, les-
quels ne pouvaient contenir de théologie et de métaphy-
sique que ce qui en était enseigné ou permis à la caste
des écuyers. Ce fait est d'autant plus curieux, que, dans
la suite, lorsque des hommes tels que Vôpadêva (auteur
probable du Éhâgavaia-purâna) composèrent des poèmes
sur les Antiquités, le caractère général des œuvres an-
tiques des Sûtes se conserva, malgré 'es développements
qui furent donnés à la partie cosmogonique. Les grandes
épopées, soit les itihâsas, dont le Mahâbhârata fut le
ÎliuA considérable, soit les kavyas, tels que le Bâmâyana,
urent au contraire l'œuvre des brahmanes, et purent se
développer avec une richesse de poésie et une liberté de
pensée et de mouvement qu'un Pturâna pouvait difficile-
ment atteindre. Ces faits attestent néanmoins la force du
génie indien , qui voyait naître, jusque dans la caste dé-
classée des écuyers, des poèmes devenus célèbres, et qui
ont été par la suite des modèles et des objets d'étude pour
les plus savants br&hmanes.
Est-il possible de déterminer 1 époque où furent com-
posés nos grands Purânas? Lorsque nous posséderons,
imprimés, traduits et commentés, les 18 recueils purà-
niques, il est à croire que l'on aura les meilleurs élé-
ments pour résoudre la question. Toutefois, la date
approximative de ces ouvrages, comme de tous les autres
écrits brahmaniques, ne sera véritablement fixée que
quand le corps entier de la littérature indienne sera
connu de nous. Dans l'état présent de la science, la ques-
tion de date ne peut être abordée que pour ceux des Pu-
rânas que nous possédons pleinement, et surtout pour
le Bhâgavata-ifurâna, Sa rédaction est antérieure au
commencement du xiv* siècle de notre ère. Cette antério-
rité n'est pas sans doute très-considérable; car la reli-
gion indienne ne s'est concentrée dans le culte de Vishnu
qu'après l'expulsion définitive du bouddhisme de l'Inde ;
encore le développement de ce culte a-t-il exigé on cer-
tain temps. Or, nous le voyons en pleine vigueur dans le
Bhâgavata-purâna, poème dont le titre est le nom le
plus sublime qui ait été donné dans l'Inde à cette divi-
nité. De plus, la confusion des doctrines philosophiques
dans ce poème montre que les écoles avaient depuis long-
temps dépassé le point de leur plus grand développe-
ment, puisque nulle d'entre elles ne domine exclusive-
ment dans la théosophie des Purânas. Si l'on ajoute les
remarques que peut fournir la langue ou le style de l'au-
teur, on est conduit à considérer son csuvre comme assez
récente et comme appartenant aux temps modernes. Mais
ce (tât n'ôte rien à sa valeur, soit comme pièce historique,
soit comme monument de la littérature sanscrite. Car,
si l'on en vient à penser que l'Inde n'a eu en réalité ni
moyen âge ni âge moderne, et qu'elle en est encore à son
antiquité, les œuvres faites il y a seulement quelques
siècles devront "attre antiaues, aussi bien que les épo-
pées et les ouvrages SDtérieiirs à Tère diréueiiiie. Teo*
PUR
1520
PUT
toan trèft-BapérIeure en civilisation aux barbares qui
l'ont tour à tour envahie, elle a continué sans intemip-
tion à développer ses idées, ses croyances et ses institua
tiens, sans presque rien emprunter au dehors, tirant tout
de son propre fonds, même le bouddhisme qui fut sur le
point de produire en elle une révolution totale. Cette
jierpétuité de la race et du génie des Aryas donne à This-
toire de ce peuple une unité qui ne se trouve nulle part
ailleurs ; les œuvres de littérature faites les dernières, et
celles même qui se font aujourd'hui, ont le caractère
antique au plus haut degré. Tels sont les Purànas; de
là vient ^ue la valeur de ces grandes collections n'est
point dinunuée par leur peu d'ancienneté. Au contraire,
il est beaucoup plus instructif pour nous de posséder des
œuvres récentes d'une aussi ^nde valeur intrinsèque,
lorsaue nous avons, pour représenter les âges antérieurs,
les drames, les ouvrages bouddl^iques, les épopées, et,
pour les temps primitifs, le Véda avec ses développements
poéti(}ues ou scolastiaues. De la sorte il devient possible
de suivre pour ainsi aire pas à pas le développement des
idées et de la civilisation de l'Inde depuis un temps qui
remonte au moins à douze ou quinze siècles av. J.-C.
Jusqu'à nos Jours. Les Farânas forment l'un des der-
niers anneaux de cette chaîne continue, et sont eux-
mêmes le point de départ et la plus belle expression des
cultes modernes où l'Inde est parvenue. On voit ainsi la
notion d'Âgni, presque physique dans le Védat s'idéa-
liser et s'abstraire, se transformer bientôt entre les mains
des Brahmanes, et devenir l'idée de producteur du monde
et de père de la vie; c'est ensuite Bràhma, l'être parfait,
neutre, insaisisuble à la pensée ; alors, pour expliquer
l'origine et la formation des êtres, la notion abstraite de
Bràlima se complète et engendre la doctrine tout in-
dienne des incarnations. Cette doctrine était déjà dans
toute sa vigueur au temps de Bouddha; elle prit pins
d'empire encore sur les esprits pendant la lutte de la ré-
forme et du brahmanisme ; de sorte que, quand la vic^
toire fut restée aux anciennes institutions et que le
bouddhisme eut été chassé de l'Inde, la foi populaire
{)renait pour centre et pour objet principal du cuite
'une ou l'autre des figures humaines de l'antique divinité
védique. Ainsi prévalurent les cultes de Vishnu, de Qiva,
de Krishna, dans lesquels la crédulité d'un peuj^le asservi
à des maîtres étrangers ne vit plus pour ainsi dire que
des idoles. Mais si les hommes ignorants étaient conduits
à l'idolâtrie, la caste supérieure demeurait fort au-dessus
de ces croyances grossières, et comprenait encore la va-
leur métaphysique des anciens symboles. C'est à cet état
des esprits que répondent les Purânas, Depuis lors, ils
sont demeurés en honneur dans l'Inde entière ; ce sont
eux qui contribuent le plus, parmi les livres sanscrits, à
maintenir et à perpétuer les croyances indiennes; car les
Védas et leurs développements ne sont presque plus com-
pris de personne, on ne sont étudiés que pour être inter-
prétés dans un sens moderne qu'ils n'ont Jamais eu. Les
doctrines pur&niques ont donc prévalu sur celles de
l'Écriture sainte elle-même ; et c'est aujourd'hui dans les
Purânas qu'il faut chercher le dépôt des croyances popu-
laires de l'Inde. — La Bhàgavaùirfuràna a été publié,
avec scelles, à Calcutta en 1830, à Bombay en 1839, et,
avec traduction française par Eug. Bumouf, à Paris en
1840-44, 2 in-fol. Wilson a traduit en anglais le Vxsknu-
purâna, et donné, dans une Introduction à cet ouvrage,
l'analyse des autres Purànas. F. Nôve, les Pourànas,
Paris, 1852. En. B.
PURETÉ, qualité du style qui consiste à n'employer
que des mots consacrés par l'usage et par ^a^torité des
maîtres. On manque à la pureté de deux manières : par
Varchal^sme^ quand on emploie des formes vieillies ; par
le nédogisme , quand on emploie des formes nouvelles ,
des mots ou des tours empruntés aux langues étrangères.
On altère encore la pureté d'une langue en y introduisant
des mots techniques, c-àrdire qui appartiennent exclu-
sivement à une science ou à un art, et qui ne sont pas
du fonds de la langue commune. L'affectation de la pu-
reté et de la correction s'appelle purisme, H. D.
PCJRGATION. ) V* ces mots dans notre Dictumnaire
PURGATOIRE. { de Biographie et d^Histoire.
PURGE, un des moyens par lesc{uels on purge, c-à-d.
on affranchit les immeubles des privilèges et hypothèques
dont ils sont grevés. Le Code Napoléon (art. 2167, 2181*
2195) et le Code de Procédure civUe (art. 834 et suiv.)
en ont réglé les formalités. — Purger une contumace,
c'est anéantir, en se constituant prisonnier ou par le fait
d'être arrêté avant l'époque de la prescription , le jugCH
niexzt par lequel on a été condamné comme contamax.
Le dâaî pour purger U contumace est de 5 ans {Code
d'instruet. crimin.y art. 476 et suiv.).
PURGEOIR, espèce de filtre en sable et en cailloux,
qu'on pratique à la tête d'un aqueduc, ou de distance
en distance le long de sa rigole, pour purifier ses eaux.
PURIFICATION. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
PURIFICATOIRE, morceau de toile de lin ou de chanvre
qui sert à essuyer le calice après le saint sacrifice de la
messe. On le plie en trois dans sa lari^ur, et il doit être
assez long pour que, placé sur le calice, ses extrémités
retombent sur le pied de ce vase.
PURISME, affectation excessive d'écrire ou de parler
avec pureté. Cette prétention, qui ne se rencontre que
dans des esprits médiocres, donne au langage et au style
quelque chose de sec, de languissant, d'ennuyeux. On a
comparé ce style ou ce langage sans impureté, mais sans
substance, à un bouillon d'eau claire. « H y a des gens,
dit La Bruyère, qui ont une fade attention à ce qu'ils
disent, et avec qui l'on souffre dans la conversation de
tout le travail de leur esprit; ils sont comme pétris de
phrases et de petits tours d'expression, concertés dans
leur geste et dans tout leur maintien : ils sont puristes, et
ne hasardent pas le moindre mot, quand il devrait faire le
plus bel effet du monde; rien d'heureux ne leur échappe,
rieu ne coule de source et avec liberté; ils parlent pro-
}rement et ennuyeusement. » — « Le purisme est ten-
eurs pauvre,» a dit Voltaire; et Domergue l'appelle
'ennemi secret de la pureté. Une grande connaissance de
U lan^e, jointe à un esprit Judicieux et élevé, fait éviter
le punsme : aussi les grands écrivains n'ont-ils Jamais
ce défaut ; et l'on trouve chez eux plus de fautes contre
les règles que chez les écrivains de second et de troisième
ordre; seulement elles sont rachetées par de sublimes
beautés dont ceux-ci n'offrent presque jamais aucune trace
(V. les chap. 27, 28, 30, de la traduction do Traité du
Sublime, de Longin, par Boileau). — Le purisme dans la
critique est un défaut aussi grave que dans le langage et
dans le style : il consiste à condamner des toun vifs ,
heureux , plejns d'originalité, trouvés par de grands écri-
vains, et qui ont mieux exprin\é leur pensée que n'aurait
pu le faire l'exactitude rigoureuse et la froide correction.
Le puriste qui a bl&mé l'hémistiche de Racine {Plièdre,
V, Cj : « A ces mots ce héros expiré, » n'a pas tenu compte
des privilèges de la poésie, ni de l'impossibilité où était le
poète de s'exprimer autrement avec la même précision
et la même vivacité. On a critiqué plus injustement en-
core le même poète d'avoir dit {Mithridate, 1, 5), par ui -
syllepse pourtant bien usitée dans notre langue :
Awumt avec tntiiiport, tnali jeUtmx aani retour.
Sa haine va toi^oan plas loin que ton amour.
Avec le système de ces puristes, il n'y aurait presqu»
pas de pages d'Homère, de Sophocle, de Pindare, de
Démosthènes, de Cicéron, de Virgile, de Bossuet, de
Racine, de La Fontaine, de Massillon, où il ne fallût signa-
ler des négligences et des solédsmes (F. Montaigne «
Essais, livre I", chap. 25). P.
PURITAINS. V. ce mot dans notre Dhlicnnatre de
Biographie et â^ Histoire.
PURYA-MIMAMSA. V. Indienne (Philosophie).
PUSEYISME. ) K. ces mots dans notre Z)icfi(mitaîr« de
PUTÉAL. I Biographie et d'Histoire.
PUTICULES, sortes de puits d'ensevelissement, où les
anciens Romains jetaient pêle-mêle les corps des esclaves
et des gens de la plèbe. L'empereur Auguste les fit fermer.
PUY (Église Notre-Dame, au). Cette église cathédrale,
assise sur la crête du mont Anis, appartient , pour ses
parties les plus importantes, aux xi* et xii* ailles. On
y arrive par un immense escalier de 260 marches, tail-
lées dans le roc, un crypto-portique, composé de trois
travées^ascendantes, et dont la voûte, élevée de 20 met.
«nviron, recouvre un autre escalier de 108 degrés,
supporte kl nef principale de l'église, où l'on accédai i
autrefois par une ouverture pratiauée dans le pavé du
transept; disposition originale, qui permettait au prê-
tre officiant d'être vu du peuple répandu sur les de£^ et
jusqu'au bas de la montagne. Deux chapdles, consa-
crées à S^ Martin de Tours et à S^ Gilles, sont pratiquées
dans ce vestibule : elles ont des portes en bois, couvertes
de sculptures et d'inscriptions intéressantes. On y voit
aussi deux magnifiques colonnes en porphyre rouge an-
tique, de chaque côté de l'arcade qui donnait entrée dans
l'église. Aujourd'hui l'on sort du crypto-portique par la
gauche, en continuant de s'élever» et c'est latéralemsat
PYG
1521
PYX
Îa'oQ pénètre dans Péglise. L'intérleor de la cathédrale
u Puy est divisé en trois nefs, basses et lourdes, son-
tenaes par de gros piliers. Le croisillon septentrional a
été supprimé, comme menaçant ruine. Les voûtes for-
ment des espèces de coupoles correspondant aux travées,
ce qui indique une influence des idées byzantines , sen-
sible également dans quelques monuments du Midi et
do l*Ouest de la France. On aperçoit aussi des traces de
peintures byzantines, particulièrement une figure colos-
sale de S^ Michel , auquel Féglise, comme toutes les con-
structions élevées sur des hauteurs , avait été primitive-
ment consacrée. L*orgue et la chaire, chargés de sculi>-
tures, sont dignes d*attention. Sur le maitre-autel, fait
en marbres de diverses couleurs, est une statue de la
*^'* Vierge, qui a remplacé celle apportée d*Égypte par
Louis IX et brûlée en 1793. La grande façade de rédifice,
située aa- dessus de rentrée du crypto- portique, est
simple et sévère : elle offre quatre ordonnances de co-
lonnes supportant des arcades a plein cintre ; à la grande
nef et aux collatéraux correspondent des frontons trian-
gulaires , qui dépassent considérablement la hauteur du
toit. Du côté de Tévèché, il y a un beau porche à colonnes
rudentées. Le clocher, carré jusqu'aux deux tiers de sa
hauteur, et terminé en pyramide, est isolé de l'église.
La cathédrale du Puy a conservé ses dépendances , une
salle capitulaire et un cloître. B.
PUT, nom donné, pendant le moyen âge, à des com-
pagnies littéraires qui , à certaines époques de Tannée,
se réunissaient dans différentes villes de France, pour
juger des concours de poésie. Les pièces de vers ayant
exclusivement pour objet les louanges de la S^* Vierge,
ces compagnies étaient appelées Puys Notre-Dame, Le
Pny d'Amiens fut institué en 1393 ; une copie des pièces
qu'il avait couronnées, faite en i517 pour la mère de
François P', existe à la Bibliothèque impériale de Paris.
On établit à Rouen, en 1486, le Puy de la Conception,
ainsi appelé parce qu'il se tenait le 8 décembre, jour de
la Conception de la Vierge; l'assemblée de Caen portait
le même nom ; elle remontait an xi* siècle. Quant à la
dénomination de puy, on la fait généralement dériver du
latin podium (colline), parce que les concours auraient
eu lieu à l'origine sur des hauteurs ; quelques-uns ont
imaginé de la tirer d'un miracle opéré par Notre-Dame,
qui aurait sauvé un enfant endormi sur le bord d'un
puits. — Les Puys de musique ont été l'origine des So-
ciétés philharmoniques modernes. B.
POT-JOLT. V, TOMDLUS.
PYGNOSTYLE, le plus étroit des entre-colonnements
employés par les architectes de 4'Antiquité. Il était d'un
diamètre et demi.
PYGMALION, sculpteur de l'île de Chypre, qui, selon
la Fhble, fit une statue de marbre à laquelle il donna le
nom de Galatée, et qui, après avoir obtenu des dieux
qu'ils lui donnassent la vie, la prit pour femme. Ovide
{Métamorphoses, liv. X) a décrit en vers charmants la
métamorphose de Galatée en femme. On a va dans ce
mythe Fenthouslasme natnrel de l'artiste pour le produit
de son intelligence, l'effet de son illusion sur la valeui
de l'œuvre, ou bien encore la puissance créatrice d«
l'art poussée aux dernières limites de sa perfection*
J.-J. Rousseau a écrit une scène lyrique intitulée Pyg
malion. Goethe a aussi traité le même sujet. On a d^
Falconnet, sculpteur français du xviii* siècle, un Pygma.
lion estimé, et du peintre Girodet un tableau de Pygma*
lion et Galatée (1819), oui obtint un succès populaire. Un
opéra- comique de iScuatée, composition distinguée de
M. Victor Massé, a été représenté à Paris en 1852. P— s.
PYLONE (du grec pwdn, grande porte), nom donné
à un double massif de forme pyramidale, laissant un
passage entre ses parties, et place en avant des temples
égyptiens. On montait au sommet par des escaliers inté-
rieurs. Les faces étaient couvertes d'ornements , comme
les parois des temples eux-mêmes.
PYRAMIDES. I V. ces mots dans notre IHctionnaire
PYRÉE. \ de Biographie et dHistoire.
PYROBALISTIQUE (du grec pur, feu, et balléin, lan-
cer) , se dit de toute arme ou machine de guerre qui
lance du feu.
PYROPHORBS. V. notre DicL deBiogr. et d^ Bistoire.
PYROSGAPHB (du grec pur, feu, etscaphos, navire),
mot synonyme de bateau à vapeur.
PYROS lÉRÉOTYPIE. V. au .Supplément.
PYROTECHNIE { du grec pur, feu, et tekhnè, art) , art
de préparer les pièces d'artifice, soit pour les feux a'arti-
fice, soit pour les besoins de l'artillerie. Il existe en France
deux écoles de^iyrotechnie, à Metz pour l'armée de terrOf
et à Toulon pour la marine.
PYRRHIQUE, oied de la versification grecque et la-
tine, composé de 2 brèves, comme bônà , Agé, fèrÛs, et
dont le nom venait de l'usée fréquent que l'on en faisait
dans les airs de la danse pyrrhiaue« Le pyrrhique se sub-
stituait souvent à l'ïambe final des vers lambiques; ches
les lyriques éoliens , il précède quelquefois le vers chor«
iambique, auquel il sert comme de prélude. On le trouve
aussi à la fin de certains hexamètres héroïques ( V, Mivros).
n y a dans les poésies d'Ausone un quatrain composé ae
pyrrhiqnes , qui , scandés deux à deux, donnent un tétras
mètre procéleusmatique catalecticjue; scandé parpyrrhC^
ques, il donne des vers de sept pieds et demi. P.
PTRRHiQUB, danse. V, notre IHctionnaire de Biographie
et d'Histoire,
PYRRHONISME. V. Scbpticismz.
PYTHAGORICIENNE (Philosophie). V. l'article Pr*
THAGoatciENS, daus notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire,
PYTUAULB, nom par lequel on a désigné autrefois la
musette et la cornemuse.
PYTHIEN (Nome). 7. Noms.
PYTHIQUES , titre d'un recueil d'odes triomphales ,
consacrées par Pindare à la louange des vainqueurs dana
les jeux pythiques.
PYXIS. F. GiBOiRB.
Q
Q , 17* lettre et 13« consonne de notre alphabet, à la-
quelle on donne l'articulation du fc ou du c dur. Les an-
ciens Grecs l'admirent d'abord, sous le nom de koppa,
au nombre de leurs signes alphabétiques, et on la trouve
figurée sur quelques monuments; puis, ils l'abandonnè-
rent comme faisant double emploi avec le kappa, mais
ta conservèrent parmi les signes de numération. La lettre
Q manquait dans l'alphabet primitif des Latins, et les
mots où on l'introduisit plus tard s'écrivaient par un C;
Varron ne voulut même jamais l'employer. On s'en servit
dans les mots où Vu qui raccompagne formait diph-
thongue avec la voyelle suivante (quum, antiquus, qui,
qum, quod, quotidtè, reliquus, aqua)^ tandis qu'on em-
ploya le e lorsque les deux voyelles conservaient cha-
ci ne leur râleur distincte (ciii). Parfois les poètes, prin-
cipalement Plante et Lucrèce, employèrent pour un
mi'me mot l'une et l'autre orthographe, afin de faire une
leuia syllabe oa émi^ selon lea besoina de U mesura»
Au xvi* siècle, les émdita français supprimaient le son u,
lorsque cette lettre accompa^ait la consonne q : ils pro-
nonçaient, par exemple, kis, kalis, kantus, kanmm,
kontam, pour quis. quidis, quantus, quanquam^ guo-
ntam. Ramus soutint l'opinion contraire, et finit par
l'emporter ; Ménage défendit cependant encore , an
XVII* siècle, la prononciation antérieure. En français, il y
a deux manières de prononcer le groupe qu : il n'a que
la valeur du fc ou du c dur, dans question, qualité, quan*
tité, quatre, quarte, quinte, quête, quille, piqûre, etc. ;
on donne à Vu le son ou dans quatuor, quadrature,
aquatique, aquarelle, équation, Quadragésime, équtUeur,
quadrupède, etc.; on le fait sonner dans questeur équi»
latéral, équitalion, équestre. Le mot Quinquagésime oflïe
la réunion des deux prononciations. La lettre q manque
aux alphabets slavon, anglo-saxon, et irlandais. An liée
du groupe qu^ les Anglo- Saxons écriraient kw, et les
i4l0mtnd8 donnent encore an même groupe la pronoe-
OUA
1522
OUA
cUUon kv. En anglais, où la lottre q est d*un asscx fré-
quent usage, elle uo termine jamais un mot ; en français,
elle est finale dans coq et cinq, — Dans les inscriptions
romaines, Q est rabr6viation de Quintus, QuincUus, Qut-
rinus, Quirites, quirinalis, qui ou qiuB, qtie (et), quœs-
tor, etc.; Q Q Hgnide qumquennalis; QK., qtuBStor c<m-
didalus,' Q. U., qtiœstor rêipublicœ; Q. Y., qui ou quœ
vixit; Q. B. V., quod bene vertat; Q. I. S. S., qum infra
scripta sunt, — Signe numéral, lefcoppa grec valait 90.
Ghes les Romains, Q valut 500, et, surmonté d'un trait
horizontal {J[)^ 500,000. — Sur les anciennes monnaies
françaises, Q était la marque de fabrication de Perpi-
gnan. B.
QÂNON, instrument de musique des Arabes. Cest une
caisse en bois, de forme tn^;>ézoidale, et surmontée d*une
table sonore : à Tun des côtés sont 75 chenlles , pour 75
cordes en boyau, rangées trois par trois sur 25 rangs et
appuyées sur un chevalet. L'étendue du qftnon , qu'on
peut considérer comme le germe du clavecin, est de a oc-
taves et une auarte. On loue de cet instrument avec deux
plectres en écaille, fixés à l'index de chaque main au
moyen de dés en fer. B.
QUADRAGÉSIMË. ) V. ces mots dans notre Diction-
QUâDRANS. l naire de Biographie et d'His-
QUADRANTAL. ) toire.
QUADRAT, QUADRATIN (dulaUn quadratus, carré),
en termes d'Imprimerie, petites pièces de fonte qui sont
dans les casses, de même volume que les lettres, mais
moins élevées, et qu'on met dans les espaces blancs du
commencement et de la fin des lignes, dans les inter-
valles des titres, etc. , pour tenir les formes en état, en
remplissant les vides.
QUADRATAIRE (Art), nom qu'on donna, pendant le
moyen &ge, à l'art de faire des incrustations en marbres
précieux, parce que les morceaux de marbre étaient
carrés.
QDADRTGINiniI, en termes d'ancienne Musique, com-
position à 4 parties.
QUADRIGAT. I F. ces mots dans notre J!>tcitoiifiatr«
QUADRIGE. \ de Biographie et d'Histoire.
QUADRILLE ( de l'italien quadriglia). Ce moi, qui fut
d'abord féminin, désigna toute troupe de gens à cheval
igurant dans un carrousel. Il y avait quatre quadrilles
nu moins, douze au plus, distinguées par des costumes et
£es couleurs. Devenu masculin, le mot Quadrille fut ap-
pliqué à tout groupe de quatre danseurs et quatre dan-
seuses, se distinguant aussi des autres groupes par un
costume particulier. Aujourd'hui il désigne un nombre
Eair de couples qui exécutent une contredanse, et l'air de
I contredanse elle-môme. B.
QUADRIRÈBIE. ]
QUADRIVIUM. ( K. ces mots dans notre Dtctionnatre
QUADRUPLE. ( de Biographie et d'Bietoire.
QUiESTORIUM. J
QUAI, mot dérivé, suivant Scaliger, du bas latin cayare
(contraindre, resserrer), et qui désigne toute levée revê-
tue de maçonnerie ou en pierres de taille, destinée soit à
contenir les eaux d'une rivière et à les empêcher de dé-
border, soit à retenir les terres de la berge. Les quais
peuvent recevoir, dans les grandes villes, un développe-
ment considérable, et servir de lieu de promenade aux
habitants. Les Anciens vantaient la beauté des quais de
Babylone, le long de l'Euphrate. Ceux de Paris, de Pise
et de Florence sont célèbres parmi les modernes; Rome
et Londres n'en ont pas. Les quais élevés au bord de la
mer, autour d'un port ou d'un bassin, facilitent le mou-
vement des voyageurs, l'embarquement et le débarque-
ment des marchandises. B.
QUAICHE, navire. V. Ketch.
QUAKERS. V. ce mot dans notre Dtetionntttre de Bio^
graphie et d'Histoire.
QUALIFICATIF, terme de Grammaire qui s'applique
aux mots servant à marquer les qualités des personnes,
des animaux, des objets. On l'emploie peu seul : il se
joint habituellement au mot adjectif; ainsi, beau est un
adjectif qualificatif. Dans cette phrase : « Abdolonyme
devint roi, » roi est un nom qualificatif. P.
QUALITÉ, manière d'être des choses. On dit à peu
près indifféremment dans le même sens Qualiù ou At^
trtbttt : cependant Qualiti exprime plutôt un rapport
réel, et Attribut un rapport logique ou grammatical. La
Qualité figure parmi les Catégories d'Anstote, celles des
Stoïciens et celles de la philosophie indienne (K. Caré-
coaiBs). Aristote la définit ce qm fait Qu'on dit des choses
qu'elles sont de telle ou telle fofon, et en distingue quatre
espèces : V la Capacité et la Disposition; 2» la PaÎMaooe
naturelle; 3* les Qualités sensibles; A^ la Figure et la
forme extérieure ( K. le Traité des Catégories d' Aristote,
et l'Analyse de ce Traité dans le livre De la L4)giqu9
d'Aristole, par M. Barthélémy Saint-Hilaire). B— b.
QDAUT& PaauiULES ET QDAUTÉS SEGOHDBS DES COBPS. —
Les corps ne nous sont connus que par leurs qualités;
et c'est une loi nécessaire de l'Intelligence qui nous fait
concevoir, à ces qualités, un fonds commun, substance
ou si^et d'inhérence, de quelque nom qu'on l'appelle,
qui est ce que nous avons en vue quand nous parlons de
la Blatière (F. ce mot)* Les qualità, agissant par l'inter-
médiaire des organes sur les différents sens, nous affec-
tent chacune d'une manière spéciale, et apportent à
l'esprit des informations différentes et d'inégale valeur.
Quoique l'opinion contraire ait été soutenue avec beau-
coup de force et d'insistance {V, dans le Dictionnaire des
Sciences philosophiques l'artide Matière ), nous croyons
bien fondée la distinction des Qualités premières et des
Qualités secondes admise par les Cartésiens, par Locke,
par Condillac, et précisée par les Écossais et par Royer-
CoUard, les premières étant pour nous l'onjet d'une
Eerception immédiate et directe, et produisant tout d'a-
ord la notion de l'extérieur, du non-moi corporel , les
secondes n'élant que les causes inconnues de certaines
sensations. En effet, quand on touche ou que l'on voit,
outre les modifications internes dont on se sent affecté,
on est informé, par le seul fait du toucher et de la vi-
sion, de l'existence d'un objet extérieur, étendu, figuré,
solide. Un son, une odeur apportent-ils le même ensei-
gnement? Sur ce point, nous pensons, avec les Écossais,
que tout se réduit d'abord à une sensation, c-à-d. à une
modification interne et par elle-môme toute subjective.
C'est seulement par une induction rapide, fondée sur l'ex-
périence et sur l'association des idées, que nous passons
de notre propre sensation à l'idée d'une cause extérieure,
et que nous localisons cette cause dans les corps. Les
Qualités directement perçues sont les Qualités premières ;
les autres sont les Qualités secondes. Les Qualités pre-
mières sont, selon Locke, la Solidité, V Etendue, la Ft-
gure, le Moutfementf le Repos, et le Nombre; selon Reid,
VÉtmdue, la Divisibilité, la Figure, le Mouvement, la
Solidité, la Dureté, la Mollesse, et la Fluidité, Royer*
CoUard réduit à VËtendue et à la Solidité la liste des
Qucdités premières. — Ce qui distingue les Qualités pre-
mières des Qualités secondes, c'est, selon Descartes, que
la notion des unes est plus claire que celle des autres;
selon Locke, c'est que les Qualités premières sont tout à
fait inséparables de la matière, tandis que les Qualités
secondes peuvent en être séparéîes, ce qui manque d'exac-
titude. Reid, Stewart, Royer-Collard adoptent la distinc*
tion de Descartes et la précisent; Reid, en disant que
l'inég^e clarté de nos idées des Qualités vient de ce que
la perception des unes est directe et celle des autres re-
lative ; Stewart, en montrant l'idée de l'étendue nécesf
sairement renfermée dans toutes les qualités premières;
Royer-Collard, en reproduisant l'opinion de Reid dans les
termes suivants t « Ce qui sépare les Qualités premières
« des Qualités secondes, c'est que nous connaissons les
a unes, tandis que nous ne savons rien des autres, sinon
« Qu'elles existent et qu'elles sont les causes inconnues
« oe certaines sensations. » Cette distinction nous parait
fondée. Biais s'il est contre la vérité des faits d'assimiler
les Qualités secondes aux Qualités premières, il est en-
core bien plus dangereux de faire le contraire, d'assimiler
les Qualités premières aux Qualités secondes, et de vou-
loir que la Perception des unes soit tout aussi subjective
que celle des autres; en d'autres termes, de confondre la
Perception avec la Sensation (F. ces mots). Par là, en
effet, on ôte encore une fois à l'Intelligence tout point
d'appui pour saisir hors d'elle-même l'existence des
coips. — Les différentes questions que l'on vient d'indi-
quer au 8i:^et des Qualités, ainsi que celle de leur exis-
tence absolue : Les Qualités sont- elles réellement dans
les choses, ou ne sont^lles que des modes de notre faculté
de sentir? qui n'a pu être résolue dans ce dernier sens
que par suite d'une confusion de la Qualité et de la Sen-
sation, c-à-d. de la cause et de l'effet; cea différentes
Suestions, disons-nous, ont été traitées avec beaucoup do
éveloppements, de sens et d'exactitude, par Reid (Essais
sur les Facultés intellectuelles de Vhomme^ Essai II), et
par Royer-Collard, dans les fragments de ses Leçons pu-
oliés par Jouffroy dans sa traduction des Œuvres de Éeidj
t. II et m. B— B.
Qoauré des pbopositiors. Les Logidena appellent ainsi
1a propriété que possèdent les propositions d'être affir-
mativet ou negativas. On rapporte i Alexandre d'Aphrc^
OUA
1S23
OUA
disie, commentateur d'Aristotet l'origlue de cette dôsi-
Smuion. B— b.
QUANTITÉ, ce qui est susceptible de mesure; en Lo-
gique, l'une des Catégories d'Arlstote (F. Catégories);
se divise eu QttantUé discrète, quand ses parties ne sont
point liées, comme le nombre; et Quantâé concrète ou
continue, quand elles sont liées , comme retendue et le
temps (K. le Traité det Catégories d'Aristote, et l'Ana-
lyse de ce Traité dans le li?re De la Logiqtie d*Aristote ,
par M. Barthélémy Saint-Hilaire). B— b.
QDAMTiTi DBS PBOPOsiTiORS , so dit do la propriété
qu'elles possèdent d'être universelles ou particulières.
Cest an commentateur Alexandre d'Aphrodisie qu'on
rapporte l'origine de la distinction entre la Qualité et la
Quantité des Propositions. B— e.
QOAitrrré, terme de Grammaire et de Versification, dé-
rivé du latin qiumtitas (étendue, valeur). C'est le plus
ou moins de durée de la voix sur une syllabe, la mesure
qu'il tàxu observer dans la prononciation de cette syl-
labe. Si elle se prononce rapidement, la quantité est
brève; si elle se prononce avec une certaine lenteur, la
quantité est longue : ainsi, dans malle , la première syl-
labe est brève; dans mâle, elle est longue. En grec, on
avait imaginé un caractère particulier pour représenter
e long, un autre pour représenter o long : les autres
voyelles n'ont conservé qu'un seul caractère, qu'elles
fussent longues ou brèves; non distinguées pour l'œil,
elles l'étaient pour l'oreille. En latin, en français, et dans
les langues modernes en général, toutes les voyelles
sont dans ce dernier cas; seulement, en français, lors-
qu'elles sont longues, elles sont souvent surmontées de
l'accent circonflexe. C'est l'usage , aidé de certaines rè-
gles, qui fait reconnaître la longueur et la brièveté des
syllabes. Ainsi, nous observons très-bien, en lisant et en
parlant, la différence de prononciation qui existe entre
patte et pâte, entre table et câble^ entre cotte et côte:
nous savons que i est bref dans litt et long dans lie. Une
différence non moins sensible existait pour les Latins
eotre les mots os (un os), qui se prononçait bref, et os
(la bouche), qui se prononçait long; entre pater (a bref)
et mater {a long). — La brève vaut la moitié de la lon-
gue : on reste un temps de la mesure sur la brève, et
deux temps sur la longue. Voilà pourquoi on écrivait pri-
mitivement en grec es pour marquer t long, oo pour
marquer o long; en latin on écrivait aa pour r- long, et
pareillement en français : aage, baailler; de même, r(He
s'est d'abord écrit roolle, — En règle générale, une syl-
labe est longue ea grec et en latin, lorsqu'elle est suivie
au moins de deux consonnes. En français, c'est plutôt
llnverse ; une syllabe suivie d'une consonne redoublée
est très-souvent brève; lorsque les deux consonnes ne
sont pas les mêmes , il est difficile de fixer des règles.
Une règle à peu près universellement observée dans
notre laîngue, c'est que toute syllabe terminée par une
voyelle immédiatement suivie d'un • muet est longue, et
que toute syllabe mascuUne est toujours longue lors-
qu'elle est suivie d'un s : ainsi je joue; des sels ( V, la
Prosodie française de l'abbé d'Olivet, et le travail de
Demandre sur la quantité des mots en français). — Il y
a, dans les langues anciennes, des syllabes qu'on appelle
communes, c-iré» qui, éuDs le même mot, peuvent être
prises à volonté, surtout en poésie, soit comme longues,
soit comme brèves ; telle est, en Utin , la 2* syllabe de
tenebrœ, Va des cas indirects 6epater{patris, patri) ^etc,
Ed français, certaines syllabes naturellement brèves se
piOQoncent longues lorscm'elles tombent à la fin d'une
phrase : ainsi « une éternelle amour, » mais « une amour
éUmèUe, » Sur les syllabes naturellement brèves, mais
devenant longues par position, ou plutôt qui sont comp-
tées comme telles dans la versification, on peut consulter
les observations curieuses d'Aulu-Gelle (bv. vi, ch. 45;
va, ? ; IV, 17 ). Il résulte de ces passages que, dans la
lecture des auteurs en prose et dans la conversation, on
ne tenait pas compte, quant à la prononciation, de cet
allongement accidentel, et que l'on faisait entendre la
quantité naturelle des syllabes, à moins ({u'il ne dût ré-
sulter du contraire un effet heureux. Ainsi, dans ol^icU,
on prononçait trois brèves ; de même dans conjicit. La
même observation s'applique à la langue grecque. P.
QUARANTAINE, en termes de Harine et d'Administra-
tion sanitaire, temps penduit lequel les navires de cer-
taines provenances sont obligés, avant de débarquer leurs
passagers ou leurs marchandises, de rester dans un iso-
lement r^ureux,et dans un lieu destiné à cet effet (ju'on
nomme Laoaret (V. ce mot dans notre Ihctionnaire de
graphie «t df Histoire), Ce temps était primitiveuent
de quarante Jours, d'où vint le nom de Quarantaine. Les
navires provenant de pays habituellement sains sont, à
leur arrivée au port et après les visites d'usage, admb à
la libre pratique; ceux provenant de pays qui ne sont
pas habituellement sains ou qui sont accidentellement
infectés, sont soumis à une quarantaine plus ou moins
longue, selon que leur patente de santé, garantie par le
capitaine et par l'agent consulaire du gouvernement, est
brute, stAspecte ou nette , c-à-d. selon qu'elle constate lu
présence, le soupçon ou l'absence de quelque maladie
contagieuse parmi les passagers. Le navire en quaran-
taine arbore le pavillon Jaune au mât de misaine; on ne
communique avec lui aue par la voix ; on lui fait passer
à l'aide de perches ce aont il a besoin; les lettres et les
papiers qu'on en reçoit sont passés au soufre et plongés
dans le vinaigre ; les marchandises sont déballées et ex-
posées à l'air. S'il se déclare un cas de maladie, la durée
de la quarantaine est doublée; en cas de peste, les effets
sont brûlés et le navire submer^. — Ce furent les Véni-
tiens qui créèrent les premiers établissements réguliers
de quarantaine en 4481; les États commerçants ont dé-
livré des patentes de santé depuis 1665 seulement. Après
la peste de Marseille en 1720, la France établit des qua-
rantaines dans tous ses ports. Les lois du 9 mai 1793 et
du 9 mars 1822, et le décret du 24 déc. 1850, ont réglé
la matière. Une convention internationale de 1852 oblige
chaque puissance à établir des lazarets, supprime les ps^
tentes suspectes, et fixe la durée des quarantaines : pour
la peste, 10 Jours au moins, 15 au plus; pour la fièvre
Jaune, 7, 5, et 3 Jours; pour le choléra, 3 jours. B.
QUARANTAINE-LE-ROI. ) V. notre Dictionn, de Bio-
QUARANTIE. S graphie et d'Histoire.
QUARREL, vieux mot, synonyme de carreau. V, ce
mot,
QUART, en termes de Marine, temps durant leauel la
moitié d'un équipage est de service, pendant aue l'autre
moitié se repose. On distinque le quart de tribord et le
quart de bâbord ( 1^. Bâbord). Le quart est, terme
moyen, de 12 heures par Jour pour les matelots ; la du-
rée, pour chaque officier, en est fixée à raison du nombre
de ceux qui sont à bord. Le temps pendant lequel chaque
officier commande sur le pont se nomme également quart,
V, Bordée.
QUART , ancienne monnaie de cuivre, valant 4 deniers.
QUART DE CANON, nom donné, pendant le xvi* siècle,
à un canon ayant 1 7 calibres de longueur, pesant 1 1 25*^,86,
dont la charge était de 3^,91 de poudre, et le boulet de
5^,87. On l'appelait aussi verrat.
QUART DE CONVERSION , en termes d'Art militaire,
mouvement par lequel une des ailes d'une troupe par*
court un quart de cercle, tandis que l'autre aile pivote ,
de manière C[ue le front devienne perpendiculaire à la
direction qu'il occupait d'abord.
QUART D'ECU , monnaie d'argent frappée en France
sous le règne de Henri III , et qui eut cours Jusqu'en
1646. C'était environ le quart de l'écu d'or fixé à 60 soua
en 1677.
QUART DE ROND. V. Ove.
QUARTE, en termes d'Escrime, manière de porter ou
de parer un coup d'épée en tournant le poignet eu de-
hors.
QUARTE, ancien vase, d'une capacité variable, ordinaire-
ment associé à l'aiguière.
QUARTE, en termes de Jeu, série de 4 cartes de même
couleur qui se suivent.
QUARTE, en termes de Musique, intervalle de quatre
degrés ou deux tons et demi. Une quarte est dite simple
ou naturelle, quand elle comprend 5 demi-tous (de ut à
fa en montant) ; fausse ou diminuée, 4 demi-tons (de ut
dièse à /a) ; augmentée ou superflue, 6 demi-tons ou
3 tons (d'où le nom de triton). La quarte simple est
aussi appelée mineure, et la quarte augmentée majeure,
Quarter, chex les anciens musiciens, c'était procéder
par quartes en faisant nn accompagnement sur le plaln-
chant. • B,
QUARTE, un des Jeux à bouche de l'orgue. Il est ouvert
et de mutation, fait en étoffe, de grosse taille, et a toute
l'étendue du clavier. Ce ieu, dont le nom réel serait
quarte de nasard, est ainsi nommé, quoiqu'il soit à l'u-
nisson de la doublette, parce qu'il sonne la quarte au-
dessus du nasard. La quarte est le plus souvent mélangée
avec les nasards et les tierces. On l'emploie au positif et
à la pédale; dans le premier cas, on la fait de moins
crosse taille, et on ne donne à son premier tcyaa que
65 centimètres. P. C.
QUARTE CAXo.'fiQrE, <qaart de certains biens que les ctf
OUA
1524
QUE
lions de l*ÉgKse sltribuaient autrefois à Tévèque et au
curé. La quarte épiscopale était prise sur les legn faits
pour le bien des âmes des défunts. La quarte du curé,
dite paroissiale ou funéraire, était payée pour tout pa-
roissien qu*on faisait enterrer ailleurs.
QUARTE-ET-QUINTE (Accord de), accord dissonant ,
composé du son fondamental, de sa quarte et de sa
quinte. La quarte est un retard de la tierce de Taccord
suivant.
QUARTB-ET-siYTB (Accord de), accord consonnant qui se
fait spf^cialement sur la dominante, et qui se compose de
la quarte juste et de la sixte majeure ou mineure. Cest
le V renversement de Taccord parfait. Si la quarte est
augmentée et la sixte majeure, raccord provient du ren-
versement de la quinte diminuée , et doit être traité
comme l'accord de seconde, c-à-d. comme le 3* renver-
sement de la dominante.
QUARTENIËR. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
' Biographie et d'Histoire.
QUARTIER. Ce mot, qui signifie au propre la A^paftie
d'un tout, a reçu dans Tusage un grand nombre d*accep-
tions différentes. Ainsi, on appelle quartiers les divisions
administratives d'une ville, ou simplement certaines de
ses parties que par habitude on isole. Dans le langage
militaire, tout lieu occupé par un corps de troupes se
nomme quartier^ et le quartier général est le lieu où se
trouvent les officiers généraux et leur état-major. A ia
guerre, une troupe ennemie qui se rend et qu'on épargne
est reçue à quartier. Dans les lycées et les colléjscs, les
quartiers sont les salles d'étude, et le maître d'études
est dit aussi maître de quartier. — En termes de Bla-
son, quartier signifie la 4* partie d'un écu écartelé, et
aussi une des parties quelconques d'un grand écu qui
contient des armoiries différentes. On nomme Quar-
tiers de noblesse les degrés de descendance dans une
ligne paternelle ou maternelle : on ne pouvait être reçu
autrefois dans certains Ordres de chevalerie sans avoir
prouvé un nombre déterminé de-quartiers ; il fallait 10
auartiers en France pour être admis dans les carrosses
u roi. B.
QUARTIER-MAITRE , nom donné jadis, dans les régi-
ments, à l'officior du rang de lieutenant ou de capitaine
qui était chargé du logement, du campement, des sub-
sistances, dos distributions, de la caisse et de la compta-
bilité. Il était le secrétaire du Conseil d'administration,
et remplissait, en campagne, les fonctions d'offîcier de
l'état civil. L'emploi de quartier-mattre fut créé en 1762;
aujourd'hui ce mot est remplacé par celui de trésorier.
Dans quelques ^tats, ou nomme quart ier-maitre général
un officier général qui remplit en partie les fonctions de
chef d'état-major ^énéral. — Dans la Marine, le quar-
tier-maitrej dont le grade correspond à celui de caporal
dans l'armée de terre, est chargé d'aider dans leurs fonc-
tions le maître et le contre-mcatre : il dirige les matelots
dans le service et la manœuvi'e du voilage, veille à la
propreté du bâtiment et aux pompes, et fait exécuter les
ordres du commandant. B.
QUARTIMIO. V. LisBONNiNE.
QUASI-CONTRAT, engagement qui dérive de certains
faits, et que néanmoins on ne peut nommer contrat,
parce qu'il n'y a pas eu convention. Ainsi, la gestion vo-
lontaire et sans mandat des biens d'un absent est un
âuasi-contrat qui oblige à lui rendre compte. La répéti-
on d'une chose non due et payée par erreur dérive éga-
lement d'un quasi-contrat, car celui qui a reçu est sou-
mis à robligation de restituer.
QUASI-DÉLIT. V. Délit.
QUASIMODO, nom du dimanche de l'octaye de Pâques,
de ce que l'introït de la messe de ce jour commence par
ces mots Quasimodo geniti infantes.
QUATERNE. V, Loterie et Loto.
QUATORZE. V. Piquet.
QUATORZIÈME, en Musique, réplique ou octave de la
septième. H faut former 14 sons poiM passer diatonique-
ment d'un de ses termes* à l'autre.
QUATRAIN, accouplement de 4 vers, de mesure quel-
conque, à rimes plates ou croisées, renfermant un sens
complet. Le quatrain convient à l'épigramme, au madrigal,
aux inscriptions et aux épitaphes. Un sonnet est composé
de deux quatrains et de deux tercets. Les auteurs les plus
connus de quatrains moraux sont Pibrac, P. Matthieu, et
More! de Yindét Lo quatrain s'applique k tout; voici
répitapiie du cheyaiier de Boufflers, faite par lui-môme
en un quatrain ; ^
Cl-gU un chevalier qnl mhb eeose courut,
Qu> &<<r 'ch ^idi-.ds ctiemins naquit, vécut, mouTUt,
Pour prouver ee qn^a dit le
Que notre rie est nn passage.
QUATRE ARTICLES (Les). V, DécLABATion do clbbgé,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
QUATRE-FEUILLES, ornement de Tarchitecture ogi-
vale divisé en 4 lobes et sculpté en creux ou en relief sor
les murailles. On donne le même nom aax rosaces à
4 divisions qu'on voit dans le réseau des hautes fenêtres.
QUATRE FLEURS (Jeu des), jeu de hasard, qui n'est
autre que le biribi (K. ce mot)^ avec cette différence
qu'il y a 80 numéros, plus 4 fleurs (une à chaque coin)
qui se jouent comme des numéros.
QUATRE-NATIONS (Collège des). | V. notre Diction-
QUATRE-TEMPS. } naire de Biogr.
QUATRIENNAUX. ) et d: Histoire.
QUATUOR (du latin quatuor, quad«), morceaa de
musique vocale ou instrumentale à 4 parties. Un qua-
tuor, soit vocal, soit instrumental, peut, lorsqu'il est con-
certant, c-à-d. à 4 parties récitantes et obligées, être
accompagné par l'orchestre. Le quatuor vocal n'a pas une
origine ancienne : on n'en trouve dans les opéras que
depuis les dernières années du xviii* siècle. Entre autres
quatuors célèbres, on remarque ceux de Don Juan par
Mozart, de Stratonice et de XIrato parMéhul, de Afa
tante Aurore par Boieldieu, de Joconde par Nicole. Lei
quatuors pour instruments à cordes sont ordinairement
écrits pour 2 violons, alto et violoncelle, et se composent
de 4 morceaux, un Allegro, un Andante, un Schêrso ou
Menuet, et un Finale. Haydn fut le créateur de ce genre
de musique de chambre; après lui., Mozart, Boccherini,
Beethoven, Onslow, s'y sont particulièrement distingués.
- En instrumentation , on nomme Qu€ttuor l'ensemble
des Instruments à cordes, par opposition à la masse des
instruments à vent, dite Harmonie. B.
QUATUORVIRS. V. notre Dict. de Biogr. et d'Histoire.
QUAYAGE; droit nue l'on paye pour avoir la permis-
sion de déposer des marchandises tur le quai d'un port
QUEMINELS (de cheminée)^ anc. mot signifiant chenets.
Ql}K^^E, ancien vase de forme allongée et d'une cai-
pacité convenue.
QUENOUILLE (du latin canna, roseau, bâton, ou de
columna, colonne), b&ton de fileuse, entouré, vers le
haut, de chanvre, de lin, de laine, de soie, etc., que l'on
étire avec la main. Chez les Romains, on portait derrière
les nouvelles mariées une quenouille garnie de laine,
pour signifier leurs occupations futures. La quenouille
était un attribut des Parques, spécialement de Clotho.
Dans le Blason, elle indique la ligne féminine. Un
royaume tombe en quenouille, quand les femmes y snc-
cèdent à la couronne. Le musée de Cluny, à Paris, ren-
ferme un certain nombre d'anciennes quenouilles en bois
sculpté : Tune d'elles, d'un travail florentin, est toute
couverte de figures représentant les femmes fortes de
l'Écriture. De semblables quenouilles étaient, en général,
le principal ornement d'un cofi^t de noces au moyeo
âge.
QUENTIN (Église de Saint-), remarquable mo'^umeDt
de l'architecture ogivale, qui avait autrefois titre de col-
légiale. C'est un édifice presque entièrement du xiu* et
du XIV* siècle ; la travée qui est sous la tribune de Tonme
remonte seule au xn*. Le plan général est àti*ois nefs, et
en forme de croix archiépiscopale, c-à-d. à deux tran-
septs; le croisillon de gauche du transept le plus orien-
tal est du XV* siècle. Le grand portail, construction mo-
derne, lourde et massive, sert en même temps de clocher.
Le vaisseau a i 10 met. de longueur environ, 43 met. de
largeur aux transepts, 30 met. de hauteur sous voûte. On
compte 7 grandes travées depuis celle de l'orgue jusqu'au
premier transept ; l'une des extrémités de ce transept
offre un portail, avec tympan intérieur à jour, surmonté
d'une belle galerie également à jour et d'une fenêtre de
style flamboyant; l'autre, qui n'a pas de porte, présente
un premier étage formé de deux belles ogives, et, au-
dessus, une fenotre à trois compartiments, avec une rose
au sommet. Le long des bas côtés de la nef, il y a quatre
chapelles d'un côté, et trois seulement de l'autre; celle
des fonts baptismaux a un curieux retable en pierre. Le
f premier transept est séparé du chœur par une haute ba-
ustrade. Le chœur a 4 travées ; vient ensuite un second
transept, dont les croisillons ne sont pas percés déportes,
puis une abside à 7 travées, avec 5 chapelles. A l'ouver-
ture de chacune de ces chapelles sur les collatéraux, il y
a deux colonnes monocylindriques supportant des re-
tombées, ce qui fait que chaqpe chapelle communique
STec les nefs mineures par trois oïdves; cette disposition.
OUE
1525
QUI
très-rare, se TetrooTe dans Téglisc de S*-Remi à Reims.
Au-dessus des arcades ogivales règne autour de Téglise
une galerie aveugle, surmontée de fenêtres hautes de
i3"*,30, divisées en deux parties par un meneau, excepté
dans le chœur, où elles sont à 3 compartiments et plus
larges, et toutes couronnées par une rose élégante. B.
QOENTiR (Hôtel de Ville de Saint-), édifice élevé sur
Tun des quatre côtés de la grande place de la ville,
spécimen intéressant de transition entre le style ogival,
qui domine à la partie inférieure, et le style de la Re-
naissance, plus nettement caractérisé dans la partie su-
périeure. Il fut achevé en 1509. Le rez-de-chaussée est
formé de 7 arcades, en arrière desquelles sont un corps
de garde et des bureaux. Le premier étage est éclairé par
9 grandes fenêtres, avec niches dans les trumeaux. Rien
n'est plus original et plus pittoresque que l'ensemble de
ce monument, dont les ogives, les corniches, les chapi-
teaux et les frises sont ornés de figures fantastiques.
Trois frontons triangulaires forment son couronnement :
une élé^nte tour carrée, surmontée d*une lanterne à
jour, s*élève au-dessus du fronton central. La lanterne
renferme un carillon. A Tintérieur de l'édifice, on re-
marque la Salle des Conseils, qui a conservé son an-
cienne décoration. B.
QUESTEURS. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire,
QUESTION (en latin quœstio; de quœrerey chercher^.
En Droit, on nomme question tout point soumis à la dé-
cision des juges. Une question de droit est un point de
Droit sujet à contestation dans Tapplication de la doG-
trine à Tespèce. Une question de fait est l'incertitude qui
existe au sujet d*un fait allégué, lequel, quand il aura
été prouvé, donnera naissance à un droit. L'examen de
la question de fait précède donc logiauement et néces-
sairement celui de la question de droit. On nomme
question préjudicielle celle qui s'élève dans le cours d'un
débat, et dont la solution, pouvant influer sur le juge-
ment do l'action principale, doit le précéder : il est de
principe que le même juge prononce, à moins que la loi
n'ait expressément attribué à une autre autorité la con-
naissance du fond de cette question.
QUESTION, moyen de Procédure. V, notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
QIESTION DB CABINET. V. CABINET.
QOESTioN d'État. V. État.
QUESTION PRÉALABLE, OU stylo parlementaire, formule
par laquelle on écarte une motion comme intempestive
ou inconstitutionnelle; c'est dire qu'on va discuter préa-
lablement une autre question qui est à l'ordre du jour.
QUESTIONS PERPÉTUELLES. V. notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
QUETE, autrefois Queste (du latin quœsitum, chose
demandée), action de recueillir des aumônes pour les
pauvres on pour une œuvre pie. Les quêtes ecclésiastiques
ont été réglementées en France par un décret du 12 sep-
tembre 18U6 et par un autre décret de 1809; les quêtes
des bureaux de bienfaisance, par un arrêté du 25 mai
i8t)3. Toute quête à domicile doit être autorisée par le
maire de la commune.
QuéTE, en termes de Marine, inclinaison en dehors de
la partie de derrière d'un navire ; elle allonge le navire,
comme l'élancement à l'avant.
QUEUE, terme de Chancellerie. Une lettre est scellée
sur simple queue, quand le sceau est sur la partie de
parchemin qu'on coupe en forme de queue ; sur double
queue, quand il est sur une bande de parchemin traver-
sant la lettre.
QUEUE, genre de coiffure. V, notre DictionncUre de Bio-
graphie et S Histoire,
QUEUE, instrument du jeu de billard. V, Bilijird.
Qi EUE d' ABONDE OU d'hirondk (du vloux français hironde
ou aronde, hirondelle), tenon en queue d'hirondelle fait
'lans une pièce de bois ou de fer, et qui doit entrer dans
une entaille de même forme. C'est un puissant moyen
l'assemblage pour les pierres de grand appareil et pour
i'îs charpentes. — Dans la Fortification, on nomme queue
'Vhironde une sorte de tenaille dont les branches se ter-
minent en se rapprochant du côté de la courtine; quand
les branches vont en s'élargissant, c'est une contre-
queue d^hironde.
QUEUES ROUGES (Emploi des), en termes de Théâtre,
rôles de bas comique, bouffons se n^procfaant des Jo-
crisses.
QUEURRE, vieux mot signifiant chariot,
QUEUX. V. ce met dana notre Dictionnaire de Bio»
graphie M d^Bistoinfi»
QUICHE (Idiome). V, Mexique (Langues dn).
QUICHOTTE (Don), célèbre roman espagnol de Ceiw
vantes : il n'est personne qui ne connaisse le chevalier
de la Manche, à qui les romans de chevalerie avaient
tourné la tête, et son écuyer Sancho Pança ; personne qui
ne se rappelle la veille des armes dans l'hùteilerie, l'aven-
ture des moulins à vent, la conquête de l'armet de Mam-
brin, la pénitence de Don Quichotte à l'imitation du Beau
ténébreux, l'enchantement de Dulcinée, l'administration
de Sancho dans l'Ile de Barataria, et tant d'autres mé-
morables aventures que termine cette défaite qui ramène
Don Quichotte dans sa patrie, où il ne tarde pas à ex-
pirer, après avoir recouvré la raison. — Pour beaucoup
d'esprits, même éclairés, V Histoire de Don Quichotte
n'est qu'une satire des romans de chevalerie ; c'est en
méconnaître la véritable portée : si le Don Quichotte
ne se proposait que cette satire, eût-il été traduit dans
toutes les langues de l'Europe? S'il se lit et se réim-
prime sans cesse, il faut nécessairement qu'à côté d'une
fable des plus amusantes, se trouve un fond des plus
sérieux; que parmi beaucoup d'aventures burlesques
le lecteur rencontre des vérités de tous les temps; qu'à
de faciles bouffonneries se mêlent des réflexions profi-
tables à toutes les époques et à tous les hommes. L'//ù-
toire de Don Quichotte n'est qu'un cadre où Cervantes a
eu l'art d'introduire ses jugements personnels sur quel-
ques-unes des questions les plus importantes de la litté-
rature, de la morale et de la politique. Là même n'est pas
la principale raison de la vogue extraordinaire de cet in-
Sénieux ouvrage : elle vient de l'opposition du caractère
es deux héros, et du jeu symbolique de ces deux carac-
tères sur la scène du roman ; car le Don Quichotte tient
de très-près à l'apologue oriental : on retrouve avec le
plus vif intérêt, dans la conduite et les discours du che-
valier de la triste figure et de son écuyer, la reproduction de
la nature humaine, et l'image de la vie, soumise à deux
mobiles généraux, l'imagination et le bon sens. — Il faut
noter aussi, pour prendre une idée complète de Don
Quichotte, un ^nd nombre d'épisodes qui ne tiennent
guère au dessein général de l'ouvrage qu'en supposant
que, tout en ayant pour but d'écrire un livre utile à son
siècle, Cervantes se proposait aussi de le rendre utile à
son auteur. Tels sont : l'Histoire du Captif, le Curieux
impertinent, les Aventures de Cardenio et de Lucinde,
de Don Fernand et de Dorothée. On y trouve aussi de
véritables pastorales, selon la mode d'alors, comme l'His-
tqire de Chrysostome et de la bergère Marcelle, et les fa-
nïeuses Noces de Gamache, si agréables à Sancho. Tous
ces ornements un peu disparates n'avaient pour but que
d'attirer des lecteurs à l'ouvrage, en y semant des pièces
de genres et de goûts divers.
Toutefois, ce serait nier Tévidenoe que de refuser à
l'auteur de VHistoire de Don Quichotte l'intention de
faire la satire des romans de chevalerie. Cervantes ne
s'élève pas contre les romans de chevalerie en général $
ce qu'il attaque, ce sont les détestables imitations des ro-^
mans primitifs, qui, par l'excès de leurs extravagances,
menaçaient la raison et le goût en Espagne d'un naufrage
universel.
La 1*^ partie du Don Quichotte parut à Madrid en 1605.
Cervantes venait d'entreprendre la seconde, et l'annonçait
en juillet 1613, lorsque fut imprimée à Tarragone, en
1614, une Suite à l'histoire de Don Quichotte, sous le
nom d'un certain Avellaneda, pseudonyme qui cache,
dit-on , le P. Aliaga, confesseur de Phihppe III. Cet ou*
vrage, écrit par un ennemi de Cervantes, reproduit,
non le portrait, mais la caricature de Don Quichotte et.
de Sancho ; il a été traduit en français par Lesage, et
depuis, par Germond de Lavigne, Paris, 1853. Devant
cette impudente contrefaçon de son œuvre, Cervantes fit
paraître, en 1615, la 2* partie de l'histoire de Don Qui-
chotte, où il se vengeait, avec autant d'esprit que de
dignité, de son plat imitateur. — Les meilleures éditions
de Don Quichotte sont, en espagnol, celles de Pellicer,
Madrid, 1797-08, 5 vol. in-S", et de Clemencin , Madrid ,
1833-39, 6 vol. in-4°. Ces deux éditions doivent beaucoup
à l'édition donnée en Angleterre par J. Bowle, Salisbury,
1781, in-4<>. Les traductions françaises les plus estimées
sont celles de Filleau de Saint- Martin, de Viardot, de
Damas-Uinard, et de Bretonne. Furne a essayé aussi une
traduction dans le genre de celle de Florian, qui n'es^
qu'une imitation. E. B.
QUICHUA (Langue). V, PéROViBNiiBS (Langues).
QUIDDITÉ (du latin quid, quelle chose?', terme
barbare par lequel les Scolastiques désignaient la nature,
l'essence, le caractère diatinctif d'om cnose; en d'autres
QUI
1526
QUI
termefl, ce qui répond à la question : Qu'est celte cliose ?
QUILSCENTES (Lettres), nom que les hébra!sants
<*onnent à certaines lettres de Thébreu qui ne se pro-
noncent pas toujours, et qui sont alors comme en repos
(en latin quiescere, se reposer).
QUIÉTISME. V. ce mot dans notre Dictionnmre de
Biographie et ^Histoire.
QUILANDO, instrument de musique des habitants du
Congo. C'est une très-grande calebasse, large par le fond,
fort étroite au sommet, et qui sert à faire la basse du
cassuto (r. ce mot),
QUILI5ME, nom d*nn ancien agrément de chant re-
pràenté par une ligne brisée on ondulée. C'était, selon
les uns, une sorte de tremblement de la voix, et, selon
les autres, un groupe de 3 ou 5 notes ascendantes. Quel-
ques-uns identifient le quilisme avec la plique (F. ce
mot),
QUILLAGR, droit que les navires mardiands payent
dans les ports de France, la première fois qu'ils y entrent.
QUILfuË, longue pièce de bois, plus haute que large,
qui va de la poupe à la proue d*un navire. C'est la base
sur laquelle on construit toute la charpente, et, par con-
séquent, la première pièce qu'on ]3lace sur le chantier.
En comparant la carcasse du navire à un squelette, la
quille est Tépine dorsale, et les couples ou membres
montés sur elle sont les côtes. La quille porte Tétambot
à son arrière et Tétrave à son avant. Emprunter sur la
quille d*un bâtiment, c'est hypothéquer le corps du bâti-
ment en gage du prêt.
QUILLE (FaDSSE-). V, FaOSSC-QuILLC.
QUILLES (Jeu de), Jeu qui consiste à abattre, au
moyen d'une grosse boule ou d'un disque qu'on fait
rouler d'une certaine distance, neuf quilles de bois, ran-
gées ordinairement «n carré trois par trots. — Au jeu
de Quilles au bâton, on se sert de 7 quilles grosses et
hautes, qu'on plante sur une même ligne dans du sable,
et qu'il s'agit d'abattre avec un bâton; pour gagner, il
faut en renverser un nombre pair. — Dans le jeu de
Quilles sur table, un certain nombre de petites quilles,
pouvant se redresser au moyen de cordons, sont rangées
sur un plateau ; on fait tourner la boule autour d'une
flèche à laquelle elle est attachée.
QDILLES DES INDES. V, TOOPIE.
QUIMPER (Kglise S^-CoREirm, à). Cette église cathé-
drale est le plus beau monument de style ogival que
Eossède la Bretagne. Le chœur, ainsi que la chapelle
btre-Dame-de-la-Victoire qui en était primitivement
séparée et qui forme actuellement l'abside, date du
xiu* siècle; les troubles du xiv* ajrant suspendu les tra-
vaux, on n'entreprit les voûtes du chœur qu'en 1408;
le transept, les nefs, les deux tours du grand portail,
s'élevèrent dans le cours du même siècle et dans les pre-
mières années du xvi*; les flèches qui surmontent ces
tours ont été bâties récemment. L'édifice a les dimen-
sions suivantes dans œuvre : longueur, 92 met. ; largeur,
i5'",70; hauteur, 20'",20. H est en forme de croix latine,
et fortement incliné sur son axe (F. Axe); la nef est ac-
compagnée de bas côtés, et le chœur de déambulatoires.
Dien que chaque période ogivale ait laissé, dans la catiié-
dralc de Quimper, des signes de son influence, elle est
remarquable par l'unité du plan. L'extérieur a de la
grâce et de la majesté; la façade occidentale, large de
34 met., offre une ornementation distinguée, où l'on re-
connaît l'approche de la Renaissance. A l'intérieur, le
ehœur est la partie la plus belle : les chapiteaux des pi-
liers y sont sculptés avec beaucoup de luxe et de goût;
an-desaus des arcades se déroule une frise, dont les des-
sins sont traités avec une verve pleine de fantaisie, puis
an triforium d'une disposition originale, et enfin de
larges fenêtres à trois meneaux. Les arcades de la nef
sont an peu surbaissées; les ornements n'ont ni la même
ampleur, ni la même noblesse ; le triforium n'a point été
achevé, et les fenêtres sont un peu plus larges qu'à l'ab-
side. Dans les transepts, de grandes fenêtres à meneaux
flamboyants tiennent lieu de roses. Il ne reste de ver-
rières anciennes qu'aux fenêtres les plus élevées de
l'édifice. B.
QUINAIRE, monnaie. V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
QUINCONCE (du latin quinque, cinq), plant d'arbres
espacés et disposés de manière à présenter des lignes
droites de quelque sens qu'ils soient vus. Ces arbres sont
ordinairement distribués par carrés de quatre en tous
lec?, avec un M au milieu. Il y a de beaux quinconces
sur l'esplanade des Invalides â Paris, et sur la rive droite
de la Gironde à Bordeaux*
QoiNCOTfCB (Ordre en). F. ÉcHiQirnsiu
QUINDÉCEMVIRS. F. ce mot dans notre Dietiùmimrê
de Biographie et d'Histoire.
QUINE. V, LoTEBiE et Loto.
QUINEVILLE (Cheminée de), à 10 kilom. E. de Va-
lognes ( Manche). Cest une sorte de tour, creuse à l'int^
rieur, sans aucune trace de plancher ni de séparation,
et dont l'ouverture, placée au N.-E., s'est agrandie de
plus en plus par suite des dégradations. On remarque, à
l'extérieur, des restes de moulures qui sembleraient in«
diquer qu'il existait jadis un escalier. La base de la tour
a environ 6 met. de hauteur jusqu'au soubassement de
la colonne, et est construite en pierre calcaire dans l'ap-
pareil réticulé. La circonférence, de iO met. près da sol,
va en diminuant jusqu'au point où commence le soubas-
sement. La colonne est ronde, assez bien conservée, et
ornée de 7 pilastres d'ordres corinthien et toscan, avec
un entablement de ce dernier ordre ; elle est surmontée
d'un dôme, soutenu par 18 colonnettes. Les antiquaires
ne sont pas d'accord sur l'origine et la destination de ce
monument : quelques-uns en font remonter la construc-
tion à l'époque de J. César; d'autres y voient un phare,
ou une reduserte du moyen âge. B.
QUINQUAGÉSIME. F. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire.
QUINQUÉ. F. Quintette.
QUINQUENNAL. F. notre Dictumnatre de Biographie
et d^ Histoire.
QUINQUENNIUM, c-â-d. en latin espace de cinq ans;
nom donné, dans l'ancienne Université, â un cours d'études
comprenant 2 années de philosophie et 3 années de théo-
logie.
QUINQUENOVE (du latin quinque, cinq, et novem,
neuf), sorte de jeu â 5 et â 9 points, qui se Joue avec
deux dés.
QUINQUEPORTE (du latin quinque, cinq, etporfa,
porte), sorte de filet ou de nasse de pêcheur, de forme
cubique, soutenu sur des cerceaux , et ayant 5 entrées
qui correspondent â autant de faces du cube.
QUINQUÉVIRS. l V, ces mots dans notre Dictumnaire
QUINT. \ de Biographie et d^Histoire. '
QUINTAINE ( de l'italien quintana) , pal ou poteau ser-
vant de but. La joute à la quintaine, exercice du moyen
âge, était une sorte de jeu de bagues.
QUINTANA. F. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire,
QUINTE (du latin quintus, cinquième), intervalle
consonnant, composé de quatre degrés diatoniques. La
?uinte juste ou naturelle comprend trois tons et demi
Ù!QUl k soi en montant). Si la quinte est altérée par di-
minution, elle est dite mineure^ ou mieux diminuée ( de
ut ksol bémol) ^ et renferme deux tons et deux demi-
tons; si elle est altérée par augmentation, elle est dite
augmentée, et comprend trois tons et deux demi-tons.
Les dénominations de fausse quinte et de quinte superflue^
employées autrefois pour désigner la quinte diminuée et
la quinte augmentée, ne sont pas rationnelles. Dans la
composition musicale, il est défendu de faire deux quintes
justes de suite, et même deux quintes cachées, entre deux
parties qui marchent par mouvement semblable ou paral-
lèle; cette règle cesse si la seconde quinte est diminuée.
— Autrefois, en accordant les orgues, on affaiblissait en-
viron onze quintes d'un quart de comma; comme on ne
parvenait pas ainsi â l'octave juste, on faisait tomber
tout ce qui manquait sur une seule quinte, qui devenait
outrée, et on avait soin qu'elle se trouvât sur le ton le
moins usité. Les facteurs l'appelaient quinte du loup,
QUINTE, nom donné queiâuefois â l'Alto, parce «me
cet instrument est accordé â ta quinte inférieure du vio-
lon. F. Alto.
QomTB, jeu d'orgues, le même que le nasard {V, ce
mot),
QcmTÉ, terme du jeu de Piquet ( F. ce mot),
QUINTEFEUILLE , en termes d'Architecture, rosac<>
â cinq divisions.
QUINTER, ancien terme de monnayage, qui signifiait
marquer l'or ou l'argent, après l'avoir essayé et avoir fait
payer le droit du quint, — Quinter ou quintoyer était
aussi un terme de l'ancienne Musique; c'était procéder
par quintes dans un accompagnement de plain-chant.
QUINTESSENCE (du latin quinta essentia, 5* essence),
nom que les anciens philosophes donnaient â Véther (F. os
mot) , élément plus subtil que la terre, l'eau, l'air et le
feu.
QUINTE -ET- SIXTE (Accord de), 1«' renversement d«
l'accord de septième. Outre la quinte et la sixte, il coeh
Ouo
!527
OUO
Heat aussi la tierce. La quinte s'y résout en descendant
d*an degré*
QUINTETTE , autrefois Quinque, morceau de musique
eomposâ pour 5 Yoix ou 5 instruments. Les quintettes
pour instruments à cordes sont ordinairement écrits
pour 2 Tiolons, 2 altos et un violoncelle; ou bien, comme
ront fait Boccherini et Onslow, pour 2 yiolons, un alto
et 2 violoncelles. Reicha a composé des quintettes pour
flûte, hautbois, clarinette, cor, et basson. En général,
le quintette est divisé en 4 parties, comme le quatuor
V.eemot), B.
QUINTIL, ancien mot désignant une stance de 5 vers,
dans laquelle il y avait 3 vers d'une môme rime, entre-
coupés par la seconde rime.
QUINTILLA. V, Espagnole (Poésie).
QUINTUPLE, monnaie d'or de Naples, valant 15 du«
cats ou 64 fr. 95 c.
QUINZE (Jeu du), Jeu où l'on emploie deux jeux de
cartes entiers, distribués de façon que tous les trèfles et
les piques sont réunis dans l'un, tous les cœurs et les
carreaux dans l'autre. Il se Joue entre 2, 3, 4, 5 ou 6 per-
sonnes, qui ont chacune une cave. On distribue une carte
à chaque Joueur, en prenant en dessous du jeu, et non
en dessus. H est loisible alors de passer ou de rmvier;
dans ce dernier cas, on demande d'autres cartes, à l'aide
desquelles il faut arriver au nombre de 15 points ou très-
peu au-dessous; si l'on dépasse ce nombre, on perd sa
mise : à égalité de points, la primauté l'emporte.
QUINZE-VINGTS. ) V, notre Dictionnaire de BiO'
QUIPOS ou QUIPUS. { graphie et d'Histoire,
QUIPROQUO (du latin qui pro qiM, l'un pour l'autre),
méprise, malentendu. Les médecins du moyen &ge inti-
tulaient Quid pro ^uo tout chapitre où l'on indiquait, à
défaut d'une drogue, une autre drogue de même vertu ;
ces substitutions donnèrent lieu à des erreurs chez les
apothicaires , et de là serait venu, dit-on, le sens moderne
du mot Quiproquo,
QUIQlfANDAINE, sorte de grand vase, avec ou sans
anses, qui flgure parmi les ustensiles de ménage au
moven&ge.
QUIRâT, en termes de Droit maritime, part de pro-
priété dans un navire. Les co-propriétaires sont appelés
quirataires,
QUIRINAL (Palais), à Rome. Commencé par ordre de
Gr^oire XIII, vers 1574, d'après les plans de Flaminio
Ponzio, ii fut continué et achevé sur les dessins de Mas-
cherini et de Dominique Fontana. Sous le pontificat de
Paul V, C. Maderno l'agrandit ; le Bernin et Fuga y tra-
vaillèrent plus tard encore, et enfin il a été restauré au
temps de Pie VIL La grande cour a 100 met. de long,
sur 55 de large : trois de ses côtés sont entourés d'un
portique soutenu par 44 pilastres ; le 4* côté, formant
façade, est orné dVme horloge, e'. d'un tableau en mo-
saïque d'après un dessin de C. Maratta. Sous le por-
tique se développent deux escaliers, qui conduisent à
des salles ornées de peintures par le Guerchin, le Corrègc,
l'EspagnoIet , le Dominiquin, le Guide, Jules Romain,
Annibal Carxîiche, etc. La chapelle est de môme forme et
de même grandeur que la chapelle Sixtine du Vatican;
elle a été peinte à fresque par le Guide. Derrière le pa-
lais sont de beaux jardins, qui ont environ un mille de
circuit. On y remarque une fontaine qui rend des sons
harmonieux produits par le jeu des eaux.
QUITTANCE , écrit par lequel un créancier déclare un
débiteur quitte, c.-à-d. libéré de tout ou partie de son
obligation. Une quittance peut être donnée sous seing
privé ou par-devant notaire; les frais sont à la charge du
débiteur, qui a, s'il a réclamé une pièce notariée, le choix
du notaire. Si la quittance énonce la somme payée, sans
exprisner la cause de la dette, le débiteur peut l'imputer
sur la dette qu'il lui importe le plus d'acquitter ; si elle
énonce la cause de la dette et non la somme payée, elle
lait foi du payement de tout ce qui était dû pour la cause
énoncée; si elle n'énonce ni la somme payée ni la cause
de la dette, elle s'étend à tout ce ((ue pouvait exiger alors
le créancier qui l'a donnée, mais non aux dettes G[^ai
n'étaient pas exigibles à l'époque de la quittance. La quit-
tance da capital, donnée sans réserve des intérêts, en fait
présumer le payement.
QUITUS (Arrêt de). V. Compte.
QUOLIBET ( du latin quod libet, ce qui plaît, comme
on voud»), plaisanterie qui roule sur une phrase à sens
folontairement équivoque. Sa qualité est la finesse, l'es-
prit, la gaieté, et une clarté suffisante dans le sens sati-
rique. Quelqu'un demandait au célèbre Dugazon, acteur
de la Gmnédie Française* ce qu'il pensait d'un de ses ca-
marades qui jouait les rôles de valets avec un certain
talent, mais froid, ce qui lui valait la réputation d'un ar«
tiste médiocre : « C'est, répondit-il, un excellent comique,
plaisanterie à part. » Un calembour bien fait est un vrai
quolibet. M. de Bièvre donne le Séducteur, comédie qui
réussit beaucoup, bien que très-imparfaite; Laharpe en
fait une vive cntique dans le Mercure, et, peu de jours
après, donne sa tragédie les Brames, qui n'obtient aucun
succès. De Bièvre fait alors courir le quolibet suivant,
comme une parole de Laharpe : a Quand le Séducteur
réussit, les Brames tombent (les bras me tombent). » Un
homme de qualité, qui faisait profession de pratiquer la
charité chrétienne, avait mis dans ses armes une devise
empruntée de S* Augustin, et qui rappelait en lui la pra-
tique habituelle de cette vertu. Un Jour qu'il oubliait un
peu ses sentiments d'indulgence pour tous, en parlant de
quelqu'un dont il croyait avoir à se plaindre : « Monsieur le
comte, lui dit un de ses auditeurs, cela ne s'accorde guère
avec votre devise si touchante : in omnibus caritcu ( la
charité sur tous ). — C'est possible, repart le noble in-
terlocuteur, mais je ne mets pas tout le monde dans mon
omnibus, » -> Autrefois on appelait Quolibets des ques-
tions équivoques, émigmatiques, quelquefois burlesques et
ridicules, qu'on adressait sur des matières métaphysiques
aux étudiants en philosophie ou en théologie, pour exer-
cer leur sagacité. — En Musique, le nom de Quolibets fut
autrefois donné à des improvisations à 4, 5 et 6 voix, sur
des thèmes populaires. C. D— t.
QUOTE-PART. V. Cotb.
QUOTITÉ DISPONIBLE, quote-part de biens dont un
donateur ou un testateur a la libre disposition en faveur
de qui lui plaît, par opposition à la portion de biens que
le législateur frappe d'indisponibilité dans l'intérêt des
successibles, et qui prend le nom de Réserve légale. Leur
' fixation a singulièrement varié suivant les principes qui
prédominaient dans les difiTérents systèmes législatifs que
nous offre l'histoire. Elle se rattache intimement à l'or-
ganisation de la famille et à la liberté politique des na-
tions. On peut admettre cependant que, dans certaines
limites, cette réserve apportée à la faculté de disposer dé-
coule d'un principe de Droit naturel qui place au nombre
des principales obligations de l'homme celle de pourvoir
aux besoins de ses descendants, ou de ceux dont il a tenu
l'existence.
Dans notre ancien Droit, les Coutumes admettaient
toutes, en faveur âes enfants, la réserve sous le nom de
légitime. Mais son étendue était très-variable, ici de la
moitié, là du tiers, ailleurs plus ou moins considérable^
parrois même indéterminée, et fixée par la seule Juris*
prudence. Un droit analogue était reconnu aux frères et
sœurs, et même aux collatéraux les plus éloignés, mais
seulement en ce qui concernait les propres, dont cette lé«
gislation assurait la conservation aux familles. Quant
aux pays de Droit écrit, ils avaient consacré les principes
du Droit romain, et accordaient une légitime aux descen-
dants, à leur défaut aux ascendants, et même aux frères
et sœurs, quand il n'y avait ni ascendants ni descen-
dants. Sa quotité variait du tiers à la moitié, et s'augmen-
tait avec le nombre des ayants droit.
La législation intermédiaire s'absorba dans le principe
d'égalité absolue que des esprits extrêmes proclamaient
alors comme un des droits essentiels de l'homme. La loi
du 8 avril 1794 abolit toutes inégalités résultant, dans les
successions ab intesttU, « des qualités d'aîné ou de puîné,
de la distinction des sexes, ou des exclusions coutu-
mières. » La loi du 7 mars 1793 abolit la faculté de dis-
poser. Celle du 5 brumaire an n, la complétant, régle-
menta les dispositions entre époux, et, proclamant
l'égalité entre enfants ou entre collatéraux, permit la
disposition du dixième de son bien si l'on avait des héri-
tiers directs, du sixième si l'on avait des héritien colla-
téraux, mais & condition que ces dispositions ne profi-
tassent à aucun des successibles. Il existait encore de
grandes lacunes; la Convention essaya de les combler par
la loi du 17 nivôse an ii, qui maintint en grande partie
la loi précédente, mais statua sur des difficultés transi-
toires. Elle permettait entre époux et au cas d'enfants la
donation usufructuaire de la moitié des biens. Le Con*^
sttlat présagea le retour à des règles plus équitables. La
loi du 4 germinal an vui permit toutes libéralités, pourvu
qu'au décès du disposant elles n'excédassent pas le
quart des biens s'il laissait moins de quatre enfants, le
cinquième s'il en laissait quatre, le sixième s'il en lais*
sait six, et ainsi progressivement. La quotité disponible
était de moitié s'il n'avait que des ascendants, des frères
oii sœurs, ou descendants d'eux, des trois quarts s'il
QUO
1528
QUO
ii*avaH qae des oocles ou grands-oncles, des consins ger-
mains ou enfants d'eux. Â défaut de ces ordres de pa-
rents, elle était de la totalité. Les libéralités pouvaient
s'appliquer aux successibles, sans être rapportables. Cette
loi du 4 germinal fut la dernière de celles désignées sous
le nom de Lois intermédiaires.
Vint ensuite le système législatif édicté par le Cod»
Napoléon, Il promulgua la liberté absolue de disposer, au
cas d'absence d'héritiers réservataires; de sorte qu*ici la
quotité disponible e&t\ecoTo\\aiTe de la réserve. Ce droit
de réserve est reconnu au profit des descendants d'abord,
6t ensuite au profit des ascendants. Les droits des frères
et sœurs ont été écartés. La réserve des descendants est
de la moitié des biens, s'il n'y a qu'un enfant; des deux
tiers, s'il y en a deux; des trois quarts, s'il y en a trois
ou plus. Toute donation atteignant cette quotité doit être
réduite comme excessive. La réserve des ascendants est de
la moitié, s'il existe des ascendants dans chaque ligne
paternelle et maternelle; du quart, s'il n'en existe que
dans une seule. Mais ce droit ne leur appartient que lors-
Su'ils sont héritiers. Cette fixation nous donne le taux
e la quotité disponible, qui frappe tout ce que la réserve
ne comprend pas. Cependant la quotité disponible entre
époux a ses règles spéciales. Lorsque les époux n'ont pas
d'enfants ni de descendants, la quotité disponible ordi-
naire peut être augmentée de l'usufruit de la totalité de
la portion dont la Toi prohibe la disposition au préjudice
des héritiers. S'ils laissent des enfants, ils peuvent di^o-
ser d'un quart en propriété et d'un quart en usufruit, on
de la moitié de leurs biens en usufruit seulement. Si l'un
des époux avait des enfants d'un premier lit, il ne poui^
rait donner à son nouveau conjomt qu'une part d'enfant
légitime le moins prenant.
La disposition d'un usufruit ou d'une rente viagère
dont la valeur excède la quotité disponible laisse au ré-
servataire l'option ou d'exécuter la disposition, ou de faire
l'abandon de la propriété de la quotité disponible. La
valeur en pleine propriété des biens aliénés à charge de
rente viagère, à fonds perdu, ou avec réserve d'usufruit,
à l'un des successibles en ligne directe, s'impute sur la
quotité disponible, et doit, pour l'excédant, être rapportée
à la masse héréditaire. Le don de la quotité disponible
peut être fait en tout ou en partie par acte entre vifs ou
par testament, sans être sujet au rapport, pourvu qu'il
soit fait par préciput et hors part V. Levasseur, Portion
disponible^ 1805, in-8<>; Benech, De la quotité disponible
entre époux, 2* édit., 1842, în-8<>; Kuhlmann, De la ré'
serve légale en matière de succession, 1846, in-8<»; Saint-
Espès-Lescot, De la portion disponible et de la réduc"
tion, 1849, in-8^; Jouaust, De la qtwtité disponible, 1851,
in-8o; Vernet, De la quotité disponible, 1853, in-S»;
Beautemps-Beaupré, De la portion des biens disponibles
et de la réduction, 1856, 2 vol. in-8«. R. d'E.
R
îi
RÂC
R, 18* lettre et 14* consonne de notre alphabet. C'est
une consonne linguale et liquide, qui s'unit facilement
aux labiales, aux palatales et aux gutturales, ainsi qu'on
le voit dans bras^ priSt front, vrai, crin, trop, dru^
grand. Les liaisons de l'r final avec le mot suivant qui
commence par une voyelle sont toujours très-douces en
français ; c'est une lettre muette à la fin des infinitifs de
la l'* conjugaison , et dans beaucoup de finales en er et
en ter. Elle correspond au rho des Grecs (P, p), qui était,
comme les voyelles, susceptible d'aspiration, et se mar-
quait, en conséquence , tantôt de l'esprit doux, tantôt de
resprit rude. On ne sait si l'aspiration précédait ou sui-
vait l'articulation R : en français, les mots dérivés des
mota grecs où le rho initial portait l'esprit rude com-
mencent par le groupe rh {rhétorique, rhythme). Chez
les Romains, Perse a appelé l'R une lettre canine, à cause
de l'analogie qui existe entre le son de cette lettre et le
grondement du chien. Les Chinois et quelques tribus
indigènes de l'Amérique ne connaissent pas l'articula-
tion que nous exprimons par la lettre R ; souvent môme
ils ne peuvent la prononcer dans les mots étrangers, et
lui substituent L ou N, comme font certains enfants qui
ont quelque difficulté à parler, et qui disent blaSt glande
plis, au lieu de bras, grand, pris. Les Espagnols et les
Portugais changent aussi quelquefois en L l'R de plu-
sieurs mots empruntés à des langues étrangères. Il y eut
chez les Romains permutation de l'R et de TS : on dit
primitivement asena, lasibus, Pusius, Valesius, Papi-
sius, au lieu de arena, laribus, Furius, Valerius, Pa-
piriui. De môme, le mot allemand haase (lièvre) est
devenu hare en anglais, et l'imparfait singulier du verbe
substantif est war en allemand et was en anglais. Les
Romains permutèrent aussi R et L : on disait lémures et
remures, latialis et latiaris, Palilia et Parilia, L'R
existe dans les langues mongole et mandchoue, mais
jamais comme initiale. — Signe d'abréviation dans les
inscriptions latines, R est pour rex, Roma^ Bavenna,
Regulus, Roscius, Rufus; RP. pour respublica ; Rc pour
rescriptumc B.C. pour romana civitus; R. S. pour res-
ponsum. Dans le Commerce, R s'écrit pour reçu, h? pour
recto. En Liturgie, ^ est l'abréviation de répons. — Lettre
numérale, le rho grec, surmonté d'un accent ( p' ), valait
100, et, avec l'accent au-dessous (,p), 100,000. Chez les
Romains, R valait 80, et, surmonté d'un trait horizontal
fK}, 80,000. — R fut autrefois la marque monétaire de
VilMneav6-lds-ATignon et d'Orléans. R.
RABANA, espèce de timbale dont se servent les femmes
indiennes pour accompagner leur chant.
RABANS, en termes de Marine, bouts de cordage qu'on
emploie à faire divers amarrages. Les rabans d^enver-
gure ou de têtière servent à attacher le c^té d'une voile à
la vergue <)ui doit la porter; les rabans d^empointure
lient les coms supérieurs d'une voile à sa vergue; les
rabans de sabord servent à maintenir fermes les man-
telets de sabord; les rabans de volée tiennent fixée contre
la muraille intérieure du bâtiment la volée des canons
qui sont à la serre ; avec les rabans de ferlage^ on serre
sur une vergue tous les plis d'une voile retroussée.
RABAT, partie de l'iabillement. Pour les eocl^iasti-
ques, c'est un morceau de toile ou de crêpe noir, uni,
divisé en deux parties oblongues et bordées de blanc, et
qui tombe du cou sur la poitrine. Le rabat des Frères de
la doctrine chrétienne et de quelques autres congréga-
tions est blanc. Il représente le col de la chemise, qu'on
rabattait autrefois sur le collet de la soutane. Le rabat
que le clergé porte aujourd'hui ne remonte pas plus haut
que Louis XV; auparavant, il était tout blanc et beau-
coup plus large. Les gens de robe et les professeurs de
l'Université portent de longs rabats blancs à plis.
RABBAN, titre d'honneur chez les Juifs. Il ne fut porté
que par 7 docteurs de la loi. Tout docteur de la loi s'ap-
pelait rabbi (maître), titre inférieur à celui de rabban.
BABBIN. y. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d^ Histoire.
RABBINIQUE (Langue, —Littérature). V. Hébraïque.
RACAGE , en termes de llarine, sorte de collier qui lie
une vergue à un mât
RACCORDEMENT, en termes de Beaux-Arts, réunion
et ajustement convenable de deux bâtiments non sem-
blables, de deux systèmes différents de décoration en
sculpture ou en peinture. Les constructions faites à Paris
pour réunir le Louvre et les Tuileries sont un exemple de
raccordement.
RACCOURCI, en termes de Peinture, aspect qu'offre
une figure ou une partie de fiçure qui n'est pas vue dans
tout son développement. Ainsi, dans un tableau, un bras
qui vient plus ou moins directement vers le spectateur
est vu en raccourci. Les raccourcis sont la principale con-
dition de la composition dans les peintures de plafondi
et de coupoles.
BACE ET FAMILLE. V, notre Dictionnaire de Biogrm^
phie et d^Histoire.
RAD
1529
RAI
RACES HUMAINES. F. ce mot dans notre Dictionnaire
iù Biographie et d* Histoire^ et, dans le présent ouvrage.
Tan. Kthnographie.
RACHAT ou RÉMf.RÉ ( Faculté de), pacte par lequel
un nendeur se réserve le droit de reprendre la chose
veisdue. Réméré vient du latin rursiis emere^ acheter de
nouveau, racheter. Dans le contrat pignoratif ou contrat
d'engagement , celui qui engage conserve la propriété, et
lie transfère que le droit de la posséder et d'en perce-
voir les fruits ; dans la vente avec faculté de rachat, celui
qui vend transfère la propriété, et conserve seulement le
droit de la racheter. La faculté de racliat ne peut être
stipulée pour un terme excédant 5 années; elle passe aux
héritiers du vendeur, et peut aussi être cédée à un étran-
ger. Faute par le vendeur d*avoir exercé son action dans
le délai prescrit, l'acquéreur devient irrévocablement
propriétaire. Si un acquéreur revend sans révéler le ra-
chat dont Tobjet est susceptible, le nouvel acquéreur,
malgré sa ^nne foi, peut être dépossédé. Le vendeur
qui use du pacte de rachat doit rembourser le prix prin-
cipal, les frais et loyaux coûts de la vente, les réparations
nécessaires et celles qui ont augmenté la valeur du fonds;
(nais il n'est pas tenu des charges ou hypothèques dont
Tacquéreur l'aurait grevé. S'il y a des récoltes sur pied
au moment du rachat, elles sont partagées eu égard au
temps qui s'est écoulé de Tannée de la récolte. Le ven-
deur qui rentre dsms son fonds est obligé d'exécuter les
baux faits sans fraude par l'acquéreur.
RACHIMBOURGS. K. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d^Histoire.
RACINE , partie élémentaire des mots, celle qui ex-
f^rime Tidée la plus générale et la plus simple. Prob est
a racine du mot probable ; corp , celle du mot incoT"
porer, etc. La dérivation ou la composition font souvent
subir aux racines une altération plus ou moins sensible,
soit dans la prononciation, soit dans Torthographe; ainsi,
les mots peuple^ peupler^ populeux, populaire^ public,
ont pour racine commune pop. La racine véritable d'un
grand nombre de mots français est souvent difficile à dé-
couvrir, et on ne la trouve d'ordinaire qu'en remontant
à la forme latine de ces mots, parce que notre langue est
presque tout entière dérivée du latin. Par exemple, la
racine du mot également n'est pas ég, mais éq ou œq,
ce mot étant dérivé du latin œqualis , dérivé lui-même
du mot cequtu ; la racine du mot témoin est tem en ap-
parence, mais en réalité teet, ce mot étant une altération
du latin testimonium; celle des mots oeuvre, ouvrer, ou-
vrier, est dans les mots latins opera^ operari, operaritAS,
et, par conséquent, n'est ni œuv ni ouv, mais op. Au
reste, il est rarement utile pour la connaissance pratique
d'une langue de descendre Jusqu'à une analyse aussi
subtile, aussi abstraite : on donne généralement le nom
de Uacine au mot le plus simple d'une famille de mots,
et Ton ne s'occupe ^uère d'en chercher la racine élé^
mentaire; ainsi, pleure est admis comme la racine de
plaisir, plaisance, plaisanterie; témoin, comme la racine
de téfnotgner, témoignage ; présent, comme celle de pré-
senter, présentement^ représentation , etc. Presque tous
nos mots scientifiques ou techniques ont leur racine
dans la langue grecque ancienne, comme curithmétique ,
géométrie, physique, astronomie, musique, harmonie,
grammaire, rhétorique, logique, psychologie, anatomie,
physiologie, géographie, apogée, baromètre, épithète,
stratégie, tactique, liturgie, etc.; quelques-uns dans
l'arabe ancien, comme amiral, almanach^ alcool, étioÂr,
alcali, etc. Bon nombre de termes indus^els sont em-
pruntés, soit à la langue grecque, soit au latin, à l'an-
glais ou à l'allemand, et c'est là qu'il faut en aller cher-
cher la racine si l'on veut se rendre compte de leur vrai
sens et de leur acception en français : tels sont, entre
lutres, wagon, rail, express, etc. (K. Radical). Le 7arc/m
des rticmes grecques, par Lancelot et plusieurs autres
savants de Port-Royal, contient une explication rimée.
Fourmont en 1706 et Duplan en 1789 ont donné les Ra-
cines de la langue latine. P.
RACOLEURS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
fÛiDK (du latin ratis, vaisseau, ou de l'anglais roacE,
route, rade ), partie de mer qui s'avance dans une an-
fhictuosité de côte, et où les navires sont abrités des
vents et des courants. Une rade est dite foraine, quand
on y est exposé aux assauts de la vague. Parmi les plus
belles rades de l'fiurope, on cite celles de Spithead , de
Brest, et de la Spezzia.
RAD£AU« assemblage de pièces de bois, liées ensemble
te formant une espècs de plancher où l'on peut placer
des hommes, des chevaux, des objets de toute naturs.
On en fait usage, soit pour sauver un équipage après un
naufrage, soit pour opérer des transports par eau. Dans
les ports, on se sert de radeaux régulièrement fabriqués,
encadrés d'un bordage, pour réparer les parties infé-
rieures de la coque des navires; quelques-uns ont uoa
petite cale, où l'on met des cordages, des palans, etc.
RADICAL, partie d'un mot qui reste après la suppres-
sion, par analyse, de la terminaison, et qui de sa nature
est invariable; ainsi, aim est le radical du verbe aimer
dans la plus grande partie de sa conjugaison. Au futur
et au conditionnel présont, c'est l'iufinitif qui sert de
radical : J'a/mer-ai J'a mer-ais. Consider sert de radical
au verbe considérer, à l'adjectif verbal considérable, au
substantif abstrait considération, etc. Le radical n'est
pas la même chose que la racine : celle-ci, envisagée
dans son essence, est monosyllabique, tandis que le ra-
dical peut se composer de plusieurs syllabes. Lorsque le
radical est monosyllabique, il n'en résulte pas toujours
qu'il soit en même temps la vraie racine. Ainsi , aimer,
aimable, ont pour radical aim; mais la racice de ces
deux mots est am, qui se retrouve dans ami, amour,
amitié^ mots où s'est conservée la racine latine {am-o,
am-eibilis, am-icus, am-or, am-icitia). Le radical peut
changer de forme dans une seule et même conjugaison ;
ainsi, celui de mourir, en français, prend tantôt la forme
mor, comme dans mort, morte, tantôt la forme mou,
comme dans mourir, mourant^ mourez, et tantôt la
forme fiMU, comme dans je meurs, que je meure, ils
meurent. Gatte confusion apparente a sa source dans
l'analogie ou l'affinité qui existe entre les trois voyelles
0, ou, eu. Cest ainsi qu'on dit à la fois probable , pro-
bant, prouver, preuve; bceuf^ bouvier, bovine (race);
voeu, vouer, votif; oeuf, oval, ovaire; oeuvre, ouvrer, etc.
V. Racine et Affinité. P.
RADICALISME, système politique qui pousse toutes
choses Jusqu'aux dernières conséquences d'un principe, et
pour ainsi dire Jusqu'à sa racine (en latin radix). On
nomme Radicaux ceux qui professent un pareil système.
En France, ce nom a été souvent donné à toutes les
espèces ^e Libéraux^ parce qu'ils veulent opérer une
transformation plus ou moins complète de l'ordre de
choses existant.
RADIER, construction en charpente ou en maçonnerie^
immergée au fond de l'eau, et sur laquelle sont fondas
les portes ou les écluses d'un bassin, les piles d'un pont,
les murs d'un quai, etc.
BADOUB, en termes de Marine, réparation extérieure
de la coque d'un navire. Pour radouber un bâtiment, il
faut d'abord éventer, c.-à-d. mettre hors de l'eau la
partie ordinairement immergée; puis les charpentiers et
les calfata font les réparations nécessaires.
RAFIAU , petit bateau à voiles et à rames en usage
dans la Méditerranée.
BAFLE, espèce de filet ou de tramail contre-maillé«
dont on se sert pour prendre les petits oiseaux pendant
la nuit ; — filet ae pêche garni d'ailes, et ayant plusieurs
ouvertures à chaque extrémité.
BAFLE, coup du Jeu de dés, dans lequel les dés amè-
nent chacun le même point.
BAFLOUEB, en termes de Biarine, remettre à flot un
bâtiment échoué.
BAGOUT, mot usité en Peinture au xvra* siècle, pour
désigner un certain effet piquant, provenant de la viva-
cité et de la chideur du coloris, d'une certaine facilité de
la touche, et d'autres agréments propres à de petits su-
Jets. On disait un pinceau, un crayon ragoûtant, pour
dire une manière de peindre, de dessiner avec ragoût.
BAGRÉEB, en termes de Marine, polir la surface ex-
térieure, les bordages et les ponts d'un bâtiment dont la
construction est achevée. — En Architecture, ragréer, c'esl
mettre la dernière main à un ouvrage de maçonnerie ,
réduire les superfétations, remplir les vides, en un moi
faire disparaître les petits défauts du premier travail.
BAGUE , en termes de Marine , petit bloc en bois
presque sphérique, percé diamétralement pour laisser
passer un cordage, et mii facilite les mouvements de bas
en haut et de haut en nas d'un racage (V. ce mot). Une
rague est dite goujée, quand elle a deux goujures ou en«
tailles à angle droit sur sa surface, l'une servant au pas-
sage d'un cordage dormant, l'autre recevant la ligna Qui
fixe la rague sur le dormant.
BAGUVANÇA^ V. Bamatana.
BAIAS. V. Bâtas , dans notre Dictimnatre de Bioara^
phie et d^Bistoire.
BAIL, mot anglais qoi signifie ornière, ramure, et pai
RAI
1530
RAM
lequel on a désignô toute bande de fer, de bois ou do
{lierre, destinée à recevoir les roues des voitures. On
'applique encore aux bandes de fer sur lesquelles rou-
lent les roues des locomotives, bien qu'elles ne soient
!>In8 creusées en ornière, et que l'on fasse au contraire
<es roues creuses. Les Anglais nomment les chemins de
fer rail^ways, c.-à-d. chemins à ornières.
RÂIMONDINS, nom donné, on ne sait pourquoi, aux
pièces de monnaie de billon que frappaient au moyen ftge
les évêques d'Albi, et qui valaient environ 0 fr. 8 c. de
notre monnaie. — C'était aussi le nom de sous frappés
à Arles par l'archevêque Raimond de Montrond au
xn* siècle. r
RAINOUART, 14* branche de la chanson de GuUlaume-
atHiourP-nez, Guillaume trouve, dans les cuisines de
l'empereur Louis, un marmiton d'une taille gigantesque.
Il découvre qne c'est le fils de Desramé , émir de Cor-
doue, et , par conséquent, le frère de la belle Orable. Il
l'emmène avec lui , et le cluurgo de venger la mort de
Vivien. Rainouart combat avec un tinel T massue), et tra-
vaille si bien, qu'il finit par être baptisé, adoubé cheva-
lier, et marié à la belle Aélis, fille du roi Louis, qui met
au monde le géant Maillefers. — La chanson de Rainouart
est conservée à la Bibliothèque nationale de Paris dans
sept manuscrits, à la suite de la Bataille d^Aleschans»
K. Histoire littéraire de la France^ tome XXII. H. D.
RAmooAaT (le Moniage), 16* branche de la chanson de
Guillaume-au-court-nez, C'est une imitation comique du
Moniage de Guillaume. Rainouart , devenu moine, est la
terreur du couvent. L'abbé cherche à s'en défaire de mille
manières. A bout d'expédients, il se donne à Mahomet
pour livrer Rainouart aux Sarrasins. Mais Rainouart bat
les mécréants, et fait la conquête d'Aljeste (Alger). Il re-
vient mourir à Brioude. — Il existe de cette chanson,
dont l'auteur est Guillaume de Bapaume, quatre ma-
nuscrits à la Bibliothèque nationale de Paris. K . Histoire
littéraire de la France, tome XSU, H. D.
RAIS , en termes de Blason, b&tons pommetés et fleur-
delisés, disposés comme les rayons d'une roue ; — pointes
qui sortent d'une étoile.
RAISON, forme supérieure de l'Intelligence. C'est, k
proprement parler, la faculté de concevoir, à propos de ce
qui est , ce qui doit être ; à propos du contingent , le né-
cessaire; du fini, l'infini; de l'imparfait, le parfait. On la
nomme aussi Entendement pur^ Intellectum pure. Les
notions qui sont l'objet de cette faculté, telles que celles
du Umps, de l'e^poc^, de Vétre, de la substance et de la
cause absolues, du vrai, du beau, du bien, etc., sont la
base réelle de toutes nos connaissances, et se retrouvent
dans tous nos jugements : leur caractère d'universalité
indique celui de la Raison elle-même. Elles sont imper-
sonnelles, c-ii-d. indépendantes des intelligences, aux-
quelles elles s'imposent; c'est comme la lumière qui
éclaire tout homme venant en ce monde. Il y a, entre la
Raison d'une part, la Perception externe et la Perception
de conscience de l'autre, la même différence qu*entre le
contingent et le nécessaire, le relatif et l'absolu. Les doc-
trines matérialistes ont nié cette différence, en cherchant
b expliquer par l'Expérience l'origine des idées données
par la Raison, et, par suite, en niant la Raison elle-
même comme faculté spéciale : mais elles ont été refu-
sées de tout temps par les plus grands philosophes, de-
puis Platon , Aristote, Descartes, Malebranche, Leibniz,
fiossuet, Fénelon, Kant, etc., jusqu'à l'école française de
notre temps. — Le mot Raison reçoit encore, dans
l nsage, d'autres significations. Ainsi , il s'entend de la fa-
culté qu'ont tous les hommes de connaître, de juger, de
raisonner, de discerner le vrai du faux, et alors il est
:ynonyme dHntelltgence et de sens commun, La Raison,
quand elle s'exerce dans le domaine de la vérité pure ou
de la science, est dite spéculative. Dans son rapport avec
la volonté, et dans le cercle des vérités morales, elle s'ap-
^ pelle Raison pratique. Dans les jugements qu'elle porte
sur la beauté dans les ouvrages de la nature et de l'art ,
c'est le Goût {V. ce mot). V. les Méditations et les Entre-
iiens métaphysiques de Malebranche ; le Traité de Vexis-
sence de Dieu par Fénelon; V. Cousin, 1*^ préface des
Fragments philosophiques, et Eooamen de la philosophie
de Locke, cours de 1828 ; Bouillier, Théorie de la raison
intpersonnelle. R.
RAISON D'éTAT, motlf tiré des besoins de la politique
pour justifier quelque grande mesure.
RAISON SOCIALE OU NOM SOCIAL, OU tenucs de Com-
merce, s'entend du nom ou des noms sous lesquels des
associés indiquent au public leur association, et qui figu-
reront sur les lettres missives, billets et lettres de
change. La signature du nom social oblige non-seulement
celui qui ilgoe, mais tous ses associés.
RAison SUFFISANTS (Principe de la). V. Caosb finalb.
RAISONNEMENT (du latin ratiocinatio), opération de
l'esprit qui consiste à faire passer sa croyance d'un juge-
ment à un autre jugement. On raisonne par Analogie,
par Indiuition, et par Déduction. Raisonner par analogie,
c'est s'appuyer sur plusieurs ressemblances partielles
entre plusieurs objets, pour affirmer une ressemblance
totale; par induction, c'est observer des faits particu-
liers en plus ou moins grand nombre, pour s'élever à la
connaissance des lois qui les régissent, c'est allefdu pax^
ticulier au général {V. Analogie, Induction). L'opération
contraire, qui consiste à descendre du général au parti-
culier, constitue le raisonnement déductif. Tout raison-
nement de cette nature suppose au moins deux vérités
acquises, et, par conséquent , deux jugements antérieurs
(A=3B, et BsssC), de la comparaison desquels résulte
le troisième (C =s A ). De plus, il faut que les deux juge*
ments antérieurs, au lieu de quatre termes distincts, n'en
renferment que trois (A, B et G), et que l'un d'eux (B)
soit commun aux deux jugements; sans cette condition,
toute conception de rapport entre eux serait impossible;
avec elle, cette conception devient irrésistible et fatale,
et il se produit un troisième jugement. Cette conception
résulte d'une application que fait la Raison d'une vérité
nécessaire : deux choses (A et C), éga!cs à une troisième
(B), sont égales entre elles ; ou bien : ce (C) qui est dans
le contenu (B) est aussi dans le contenant (A). Cela re-
vient à dire que la même chose, substance ou mode, ne
peut à la fols être et n'être pas; le Raisonnement a donc
pour base le principe de contradiction. II n'est accompli
que quand notre raison a conçu un troisième rapport et
porté un troisième Jugement implicitement contenu dans
les deux premiers. Il se compose donc de trois jugements :
deux antérieurement porté et comparés, appelés pré'
misses; puis un troisième, déduit de lune d'elles sur
l'indication de l'autre, et qu'on appelle conclusion, ex-
pression de la conséquence, ou rapport entre les deux
jugements comparés. Les deux premiers jugements ne
renferment que trois termes distincts (A, B, G), dont
l'un (B) est commun. II est encore appelé terme moyen,
parce qu'il sert à faire saisir un rapport entre les deux
autres, qui sont les extrêmes, et qui se trouvent réunis
dans la conclusion (G = A ou G < A). Ainsi , trois juge*
ments et trois termes distincts, dont chacun figure deux
fois, tels sont les éléments de tout raisonnement déductif
complet. V. DinucnoN et Stllogisiib. R.
RAISONNEUR, emploi de comédie. Les raisoimenni
sont les personnages qui parlent le luigaee de la morale
et du raisonnement. Tel est Philinte dansls Misanthrope
de Molière.
RALINGUE , en termes de Marine, cordage cousu au-
tour des bords d'une voile pour la fortifier. La ralingue
de têtière ou d'envergure borde la partie supérieure de
la voile; la ralingue de fond ou de bordc^e, la partie in-
férieure; les ralingues de chute, les côtés verticaux. Ao-
linguer ou mettre en ralingue, c'est placer les voiles dans
la direction du vent, dé manière qu'elles ne le reçoivent
ni sur l'une ni sur l'autre face.
RALLA , manteau des anciens Romains, en étoffe claire
ot légère.
RALLIEMENT (Mot de). V. Mot d'ordrb.
RAMADAN. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio^
graphie et d'Histoire,
RAMAYANA, c.-à-<i. en sanscrit Histoire de Râma,
l'une des deux grandes épopées indiennes. RAma était fils
de Daçaratha, roi d'Ayôdhyà (Oude), sur les rives de la
Sarayù, l'un des affluents uu Gange : le centre des événe-
ments, ou du moins le point de départ et le lieu où ils
se terminent, est par conséquent au milieu de la vallée
principale de l'Inde, dans un pays où la culture des
terre, les arts et métiers, les parties les plus élevées de la
science philosophique et théologique, étaient portés à un
haut degré de perfection dès l'époque même où fut com-
posé le ndmàyana. Les castes y étaient organisées depuis
longtemps; la loi et les pouvoirs publics veillaient à leur
conservation. On peut même voir, au I*' chant de cette
épopée, que Ràma y accomplissait une sorte de révolution
que la force des choses avait amenée, en confirmant pour
tot^jours entre les mains des Xattryas, c.-à-d. des sei-
gneurs, l'autorité temporelle, dont son antique prédéces-
seur Paraçu-Ràma avait mis une grande partie entre !rs
mains des br&hmanes ou prêtres : ceux-ci demeurèrent
hiérarchiquement les premiers dans l'ordre spirituel^
mais se montrèrent depuis lors constamment soumis an
RAM
1531
RAM
poaTolr d'action de la royauté. Ce fut là ane des causes
qui rendirent célèbre, dans la poésie et dans Thistoire do
rinde, le nom de notre R&ma, appelé Ràma-Tchandra
pour le distinguer de Tantique br&hmane. Les événe-
ments racontés sons une forme poétique dans le Ad-
mdyofia contribuèrent aussi à la gloire de ce person-
nage : il ne s'agit, en effet, de rien moins que de la
conauôte des pays du Sud par les Aryas, et de Textension
de rinfluence ftryenne jusqu'à Tlle de Ceylan. Si Ton en
Juge par le poème, que confirment du reste toutes les
données antérieures et postérieures, la puissance des
Aryas avait alors pour limite, au Sud, les monts Vindhya.
Arrivés dans les vallées de Tlndus, ils y avaient trouvé
des hommes de couleur Jaune ou noire appartenant au
type chinois et au rameau dravidien, et ils les avaient
soumis ou relégués dans les montagnes, où on les trouve
encore aujourd'hui. La période des hymnes du Véda nous
montre les Arras établis dans les vallées de Tlndus, et
touchant déjà à la Yamunà (Jumna), afQuent du Gange;
le pays de Hastin&pura (Delhi) est le centre des événe-
ments racontés dans le Mahabhàrata {V. o» mot)*, le
Bâmâyana nous porte encore plus vers TOrient, de six
degrés environ, et au milieu même de la grande vallée du
Gange. Le Sud de la presqu'île, occupé par des hommes
d'une autre race, auxquels, dans le poème, on donne le
nom de Singes, à cause de leur couleur et de leur lai-
deur, est parcouru pour la première fois par Ràma, qui
fait alliance avec eux, parvient jusqu'à l'extrôme promon-
toire méridional, au lieu appelé aujourd'hui Ramnad
(Ràma^nadl, fleuve de Ràma), et, franchissant le canal,
procède à la conquête de Ceylan. Cette lie porta le
nom de Tâmrapama, qui a produit cdui de Taprobane,
par lequel elle est désignée dans nos auteurs classiques.
Si l'on s'en rapporte aux poésies indiennes de tous ces
anciens temps, les Aryas avaient à lutter sans cesse
contre une race d'êtres malfaisants nommés Râœasas,
parmi lesquels on parait ranger à la fois les hommes
ennemis de la race conquérante, les animaux sauvages
dont on avait à se carder, et aussi des conceptions fan-
tastiques de l'imagination populaire s c'est contre ces
puissances hostiles que Ràma et ses alliés ont à lutter
pendant tout le cours dn poème.
Issu de l'antique race d'Ixwàku, fils de Manu, Daçaratha
régnait dans la ville d'Ayôdhyà, et tous ses sufets étaient
heureux ; les religions éteient respectées, les brahmanes
honorés par les trois autres castes. Il avait trois femmes
légitimes qui lui avaient donné des fils, dont l'atné était
Ràma, fils de la première reine Causalyà. Le roi désira
l'associer à l'empire. Mais la seconde épouse Gaikêyl,
femme jalouse et violente, réclama l'accomplissement
d'une promesse que le roi lui avait faite ; elle demanda
l'exil de Ràma, et la consécration royale pour son propre
fils Bharata. Fidèle à sa parole, le roi exila son fils aîné,
qui partit, accompagné de son jeune frère Laxmana et de
sa femme, la belle et vertueuse Sttà. Tous trois franchirent
à pied des forêts impraticables, des fleuves et des lacs, et,
sur l'avis du sage Bharadwàja, s'établirent sur le mont
Tchitracûta, où ils vécurent dans une agréable cabane,
vêtus de peaux de chèvres et d'écorces. Pendant ce temps.
Daçaratha mourut, pleurant l'absence de son fils. Poussé
au trône par de nombreux brahmanes ayant à. leur tête
Vasishtha, Bharata, plein de Justice, refusa le pouvoir, et
se rendit auprès de Ràma : celui-ci, dont l'exil n'était
point terminé, repoussa à son tour l'offre de son frère, et
lui remit les chaussures, symbole de la royauté. Bharata,
de retour, établit le siège du royaume à Nandigràma, at-
tendu! t la fin de l'exil de son frère aîné. Mais celui-ci,
s'éloignant davantage, alla se fixer dans la forêt Dandaka,
qu'il délivra du ràxasa Viràdha, prit pour sa défense, sur
l'avis du sage Agastya, l'arc du dieu Indra avec ses deux
carquois inépuisables, et établit sa demeure dans le lieu
nommé Pantchavatl. Infesté de ràxasas horribles et mal-
faisants, ce pays n'avait d'espoir que dans Ràma. Celui-
ci, armé de son arc invincible, les détruisit au nombre de
quatorze mille. Alors, en apprenant le sort de sa race, le
célèbre et puissant Ràvana, ràxasa aux formes chan-
geantes, se rendit, malgré les conseils des siens, à l'er-
mitage du héros. Là, usant de prestiges, il parvint à
é^uer Sttà, s'approcha d'elle, l'enleva et disparut. Bien
des événements s'accomplissent avant que Ràma ait pu
découvrir le lieu où était retenue sa femme; et, de plus,
il lui fallait des alliés. D'après l'avis donné par le corps
^orieux de Kabandha, tué et brûlé par Ràma, celui-ci se
rendit auprès d'une sainte femme, Çavar! ; sur la rive
de la Pampft, II rencontra le singe Hanumat, et par son
conteii flt la connaissance do Sugrlva, roi des singes.
Sugrtva lui raconta son inimitié avec Bàli, autre prince
de la même race, fit l'épreuve de la force et de Tadresse
de Ràma, et contracta avec lui une alliance solide. Ils
partirent ensemble pour la caverne où se tenait Bàli ;
Ràma le tua dans la bataille, et établit à sa place Sugriva.
Après les quatre mois de la saison des pluies, Sugrlva
convoqua tous les Singes, et los envoya dans toute la
contrée à la recherche de Sitâ. Sur l'avis du vautour
Sampàta, Hanumat traversa la mer : arrivé dans l'Ile de
Lancà (Ceylan^, il vit Sttà pensive, assise dans les jardins
de Ràvana, lui montra son signe de reconnaissance, lui
fit savoir ce qui était arrivé, reçut d'elle un signe à son
tour, et attaqua ceux qui, dans l'Ile, soutenaient l'auto-
rité du grand ràxasa. Après avoir tué cinq conseillers et
cinq chefs d'armée, et atteint même le Jeune prince Axa,
il fut pris; mais s'étant dégagé de ses liens, il mit le feu
. à la ville de Lancà, revit la belle Sltà, et, l'ayant conso-
lée, s'en retourna vers son époux, auquel il raconta ce
({ui s'était passé. Accompagné de Sugriva et de la troupe
innombrable des singes, Ràma descendit vers le Sud, et
gagna le rivage de la mer. Là il lança dans l'Océan une
de ses flèches divines; l'Océan se fit voir à lui, et lui or-
donna de construire le pont Nala entre la grande lie et
le rivage. Hanumat et la foule des Singes participèrent à
cette grande construction. Par là, le héros d'Ayôdhyà
marcha vers la ville ennemie, tua le prince des Ràxasas,
et, dans la ville même, sacra roi Vibhishana, soutenu
par un parti contraire. Joyeux d'une si grande action, les
dieux, Indra à leur tête, rendirent honneur au fils de
Daçaratha. Mais, dans le trouble de la victoire, Ràma fit
à sa femme un reproche qu'elle ne put supporter; Sltà,
affligée, se Jeta dans les flammes. Aussitôt une brise
s'éleva, une voix incorporelle se fit entendre, les cymbales
des dieux retentirent, une pluie de fleurs tomba : Sltà,
que le feu épargnait, retourna avec son époux bienheu-
reux. Montés sur un char paré de fleurs, ils se rendirent
à Nandigràma. Le temps de l'exil étant terminé, Ràma
coupa sa chevelure de pénitent; réuni à ses frères et à
sa femme, il reprit la royauté des mains de Bharata qui
l'attendait, et gouverna dans Ayôdhyà ses peuples heu-
reux.
Tels sont les événements qui se déroulent dans le .Td-
mdyana. Ce poème est l'œuvre d'un seul homme, Vàl-
mlki, dont la personnalité n'a été contestée ni chez les
Indiens, ni par la critique européenne; il y a unité dans
le sujet et la suite des événements, égalité dans la poésie,
unité de style et de langage, accord dans les traditions,
symétrie dans la composition et dans la disposition
des parties. On constate dans le Ràmâyana un art in-
connu aux auteurs du McMbhârata. L'étendue de l'on*
vrage ajoute aussi quelque chose au mérite poétique de
Vàlmlki : car il ne renferme pas moias de 48,000 vers ;
et néanmoins, dans une action simple et qui ne languit
Ï^as, se trouvent rassemblés un nombre surprenant de
àits, de mythes, de traditions, de tableaux de la nature,
et de scènes humaines ou fantastiques de l'intérêt le
plus varié.
Plusieurs caractères distinguent éminemment le RA"
mâyana. D'abord les descriptions des lieux et des grands
phénomènes de la nature y offrent une ampleur et un
éclat incomparables; il n'existe rien de semblable dans
toute la poésie grecque; telle est, par exemple, la des-
cente du Gange, au I*' livre. Ensuite les scènes tou-
chantes, les sentiments tendres du cœur humain sont
rendus avec un naturel et une expression pénétrante que
les modernes n'ont point dépassés, ni peut-être atteints :
la scène entre Ràma et Sltà, lorsqu'ils vont partir pour
l'exil, nous semble laisser derrière elle, par le sentiment
et l'élévation morale, les adieux d'Hector et d'Andro-
maaue, dans V Iliade; citons encore l'épisode si touchant
de la mort de Yajnadatta, au II* livre. — Une valeur
symbolique parait avoir été donnée par l'auteur aux per-
sonnages et aux événements de son pofime. Sans compter,
en effet, les récits de faits purement mythologiques, l'ap-
parition d'êtres divins et b production de phénomènes
surnaturels dont le poème est comme parsemé, le héros
principal, Ràma, est lui-même une incarnation de Vishnu,
laquelle occupe une place considérable parmi celles de
ce dieu que l'Inde reconnaît. Sltà est un mot qui signifie
le sillon du labour. Les Ràxasas sont, dans la mytholo-
gie, des forces hostiles de la nature, qui se présentent
sous mille formes, et luttent partout contre la race pieuse
et agricole des Aryas. Il serait possible enfin d'identifier,
malgré la tradition, Ràma, fils de Daçaratha, avec Bala-
, Ràma, le çorte-charrue, et de ne voir dans tout le poËme
qu'un récit d'événements symboliques où serait repré*
RAM
1532
RAM
lentéd la propagation de la culture aryenne vers le Sod de
THindoustan. Telle est la tendance de l'école orientaliste
allemande aujourd'hui. Nous ne nions pas que cette in-
terprétation ait quelque vraisemblance; mais- nous
croyons que le poôme de V&lmiki a une tout autre por-
tée, et que, si la culture de la terre est pour quelque
chose dans sa valeur symbolique, il renrcrme aussi le
souvenir d'un des grands événements de Thistoire
d'Orient, l'extension de la puissance aryenne jusqu'à
Ceyian, la mer franchie, la religion védique portée chez
des peuples qui, par elle, furent en partie transformés;
de sorte que R&ma, à l'arc divin, n'est pas seulement un
agriculteur, mais un des grands propagateurs de la civi-
lisation. Par le fait nous voyons, dans la suite de la lit-
térature sanscrite, les Aryas établis jusqu'au bas du
Gange, aussi bien que sur les rivages et dans les îles,
leur langue se propager dans les diverses contrées du
sud, et, bientôt, les populations prêtes à recevoir et à
comprendre l'enseignement des missionnaires bouddhi-
ques. Quant au rôle supérieur de R&ma, comme incarna-
tion de Vislinu, nous ne pensons pas qu'il soit nécessaire
d'y voir une influence postérieure et de regarder comme
des interpolations tous les vers on fragments de vers nui
le désignent de la sorte : car, dès les temps du Vêâa,
Vishnu tend à devenir la personne divine qui se mani-
feste dans les intelligences supérieures, primitivement
issues d'Agni (F. Véda'). Et, si l'on tient compte de la
distance qui sépare les Hymnes du Ràmâyana, tel a pu
être le rôle de vishnu dans la doctrine reli|:ieuse au temps
de VâJmtki, avant que Tadoration exclusive de ce dieu
eût engendré la secte des Vishnuvites.
Le caractère moral des personnages est ici fortement
accusé. Envisagés simplement comme des êtres humains,
R&ma, Slt&, Laxmana, Bharata, ont leur nature propre
et celle qui convient expressément à leur rôle. La vertu
sublime et inspirée ; cette force d'&me qui rend un homme
juste, véridi<{ue, fidèle, constant, pur dans ses mœurs,
attentif au bien de tous; ce sentiment réfléchi du devoir
qui fait une &me courageuse et sereine, grande et douce
à la fois ; voilà, avec la beauté physique qui en est le
reflet, ce qui met Ràma au-dessus de tous les hommes
et l'égale aux dieux. Sità ne lui est point inférieure : la
piété pour les dieux, l'admiration soumise pour son
époux, le dévouement sans bornes, cette entière abné^ir
tion qui rend courageuse et dure pour elle-même une
jeune femme accoutumée au luxe de la cour, un amour
passionné et une pureté inviolable, voilà la belle et douce
Sità. Laxmana et Bharata ont aussi le caractère de leur
rôle : l'un, fort, mais soumis, comme un jeune frère à
son atné, dévoué à R&ma et à sa belle-sœur, les servant
dans leur exil et dans les batailles ; l'autre, sachant son
devoir et la limite de ses droits, cédant avec plaisir un
pouvoir dont il s'est chargé sans le désirer, parce que ce
pouvoir ne lui appartient pas et qu'il n'en a que le dé-
pôt. A ces caractères si grands et si touchants, le poète
oppose, dans l'action, R&vana, l'ennemi du héros et en
qui sont réunis les vices opposés à ses vertus, les riva-
lités et les trahisons de Vibhlsbana et des autres R&xasas,
et, dans un monde intermédiaire, l'agilité, la force et la
ruse, tantôt violentes, tantôt bienfaisantes, de Sugrlva,
de Hanumat et des singes, leurs sujets.
Les Indiens ont rangé le Hâmàyana dans le genre lit-
téraire qu'ils nomment kâvyas, c.-à-d. poèmes épiques,
entendant par ce mot que chacun de ces poèmes forme
une unité et est l'ouvrage d'un seul homme. Les épopées
de cette espèce étaient assez nombreuses : parmi celles
qui nous restent, outre le RAmàyana, il faut compter le
Riighuvança ou histoire de la descendance de Raghu et
particulièrement de R&ma, et le Kumdrasambhava, qui
portent tous deux le nom de K&lid&sa. Si ces deux
poèmes sont bien réellement de cet auteur, et si K&lid&sa
vivait à l'époque de Vikram&ditya ou de l'empereur Au-
guste, ils sont :iotablement postérieurs au Râmâyana :
c'est, du reste, ce qui est indiqué par la composition
très-savante et par la langue très-étudiée de ces deux
kâvyas, La langue de V&lmîki, au contraire, bien que
précise et élégante, est simple et dépourvue de subtilité
et de recherche. Les formes grammaticales des mots et
les tournures des phrases sont également, dans notre
épopée, d'une époque évidemment plus ancienne. Les
poètes indiens des temps postérieurs ont professé pour le
style, l'art et l'influence morale de l'œuvre de V&lmîki
une admiration presque sans bornes. Le Râmâyana a été
regardé par eux et a été, en elïét, la souche d'où sont
sorties un grand nombre de compositions poétiques de
toute longueur et de tout genre.
On doit opposer, comme l'ont fait les criticiues indiensi
le Râmâyana au Mahâbhârata d'un côté, et, ae l'autre,
à la classe de poèmes nommés Purânas ( V. ce mol ). Le
Mahâbhârata est un ensemble de morceaux épiques pins
ou moins anciens, ajoutés, à diverses époques, à un fono
primitif : ce fond et la plupart de ces morceaux étaient
connus sous le nom d'IUhâsas (légendes). Leur réunion
fut l'œuvre de Vy&sa, selon la tTcuution; mais, outre que
l'on cite plusieurs Vy&sa, ce nom ne signifie pas autre
chose ici que compilateur. Si l'on rend, autant que pos-
sible, à chaque époque historique les morceaux qui lui
reviennent, on trouve un poème ii^tial d'environ 12 ou
15,000 distiques, ne renfermant que des récits de ba-
tailles dans un style fort antique, et qui se rapportent à la
grande guerre des Kurus à Hastin&pura (Delhi). Cest à
la période, probablement assez longue, comprise entre la
fin des Hymnes védiques et l'époque des Kâvyas que se
rapporterait la composition des Itihâsas. Vinrent ensuite
les Kâioyas, qui sont aussi des épopées, mais d'une na-
ture toute différente, puisqu'ils sont l'œuvre d'un seul
homme, n'ont reçu dans la suite que de petites interpo-
lations le plus souvent aisé^ à reconnaître, et se distin-
guent par l'unité de l'action, la vérité et la suite dans le
développement des caractères, et un art de composer et
d'écrire porté à une haute perfection. Jusqu'où s'étend
cette période des poèmes épiques? Cest cf qu'il est dif-
ficile d'apprécier, puisque nous voyons le Raghuvança et
le Kumiârasambluiva indiqués comme appartenant au
commencement de l'ère chrétienne et se rapprochant
peut-être même plus encore de nos jours. Quoi qu'il en
soit, la période moderne des compositions épiques est ca-
ractérisée par les Purânas, ouvrages où sont réunis,
comme dans le Maliâbhârata, des traditions et des mor-
ceaux empruntés aux siècles antérieurs et même aux
Védas, mais qui sont presque entièrement théologiques.
Quoique attribués à des auteurs particuliers, et dont la
réalité n'est pas plus douteuse que celle de V&lmîki, ils
n'offrent aucune unité d'action, ne répondent à aucune
époque histori(;[ue déterminée, mêlent les faits, les hom-
mea» les doctrines, les langages, et ne semblent per-
mettre au critique de laisser à leurs auteurs qu'une
très-petite portion de leur immense étendue. Ces réper-
toires archéologiques sont d'un &ge évidemment mo-
derne, et ne remontent pas aux temps où les vraies com-
positions littéraires se sont produites dans l'Inde. De
plus, les auteurs des Purânas et ceux des kâvyas n'ap-
partiennent pas à la même caste. Les premiers sont des
Sûtas (écuyers), hommes qui ne faisaient qu'à moitié
partie de la caste brahmanique, et qui étaient au service
des Xattriyas ou seigneurs. Ils ne possédaient donc
qu'une portion de la science sacrée, et n'avaient pas sur
elle un droit complet d'interprétation ni même d'exposi-
tion ; leur rôle était surtout de recueillir les traditions et
d'en former des volumes pour l'instruction des jeunes
princes et des femmes. Le Râmâyana est, au contraire,
l'œuvre d'un pur br&hmane, que la tradition nous re-
présente comme un saint pénitent, vivant au déserl, et
ayant des relations directes avec Brahm& lui-même, qui
lui apparut et lui fit connaître R&ma. Il en résulte que
son poème peut développer avec une entière liberté d'es-
prit non-seulement les doctrines religieuses et leur fond
métaphysique, mais encore les lois, les devoirs des
hommes, des castes, des rois même, et donner à chacun
des leçons pleines d'autorité pour la conduite de la vie.
La tradition non plus n'enchaîne pas l'auteur; ne voyant
dans plusieurs personnages de l'antiquité indienne que
des figures symboliques propres à représenter les idées
et les événements qui se développaient de leur temps, il
les rapproche sans scrupule. Ainsi, il est hors de doute
que les deux R&ma ont vécu à deux époques fort éloi-
gnées l'une de l'autre, puisque celui de V&lmlki régnait
sur la Sarayù et le Gange; que l'autre est d'un temps où
les Aryas dépassaient à peine la SaraswaU vers l'Orient,
et qu'enfin toute la période des événements racontés dans
le Mahâbhàrala les sépare. Cependant le poète fait con-
verser ensemble les deux Ràma. Ce merveilleux poétique,
que les Indiens emploient plus encore que les Grecs,
autorisait V&lmiki à dépasser même cette limite, car il
fait paraître et agir dans son poème, à côté de R&ma et
avec lui, des personnages qui appartiennent au Vêda lui-
même, qui ont écrit des Hymnes védiques dont l'authen-
ticité n'est point douteuse, et qui sont antérieurs à l'an-
tique Paraçu-R&ma. Tels sont Viçw&mitra, Vasishtha.
Bharadw&ja, et Atri. Cette liberté extrême prise par le
poète de rapprocher ainsi sur une même acâie des per-
sonnages d'époques si différentes prouve deux choses s
/
RAM
1533
RAN
efest que Vàlmlki ne.yivait pas au temps de Rftma, mais
beaucoup après; de sorte que V&lmtki n*a pas lu son
poëme en présence du héros, comme le disent les brah-
manes; et, secondement, ^e les temps des poëtes vé-
diques ci-des<(us nommés étaient passés depuis assez
longtemps pour que leurs figures fussent devenues en
quelque sorte idéales, et pareilles h. celles des dieux qui
échappent au temps. Or, si Ton ne peut guère fixer la
limite de la période védique plus près de nous que Tan-
née 1500 ou 1600 av. J.-C., on ne peut pas non plus la
reculer indéfiniment dans le passé. Si la période comprise
entre les deux R&ma comprend plusieurs siècles, et qu*un
assez long temps se soit encore écoulé entre notre H&ma
et son chantre Vàlmiki, on voit ^ue Tépoque de ce der-
nier ne saurait guère être antérieure à celle d*Homère.
D*on autre côté, l'on ne peut guère admettre que le Râr-
mâyana soit postérieur à Tapparition du bouddhisme. La
période des Kàvyas, ou du i^dmdyana, serait ainsi com-
prise entre le milieu du vn*> siècle et le commencement
du lx^ Les Itihâsas ont certainement précédé les Kâ^
rayas; le Mahâbhârata primitif se trouve ainsi placé
entre le Ràmàyana et la guerre des Kums, qui elle^
même a suivi rétablissement des Aryas védiques dans
les hautes vallées du Gange et de la YamunlL. Cette
guerre serait ainsi reportée à une date un peu anté-
rieure à la guerre de Troie. Si le fond premier du Ma-
hâbhârata est antérieur au Râmâyana, il n*en est pas
de même de ses additions postérieures : une foule d*épi-
sodes, des fragments très-lonp^s do morale et de législa-
tion, des expositions de doctrine, et enfin de véritables
poèmes philosophiques, tels que le Bhagavad-Gitû ( V. ce
mot)^ sont ou postérieurs au Ràmàyana^ ou même pos-
térieurs au bouddhisme. Il faudra donc démembrer ce
grand hihâsa, et en rendre les diverses parties aux
siècles auxquels elles appartiennent. Un tel travail ne
sera pas à faire pour le poème de V&lmiki, du moins à
peu d'exceptions près, car il est presque tout entier
l'œuvre de son auteur désigné.
Diaprés la tradition exprimée en tête du poème, le Râ-
mâyana a d'abord été composé et enseigné verbalement
par V&Imlki à ses disciples. Malgré ce que cette tradition
peut avoir de surprenant pour un poème d'une telle
étendue, elle semble confirmée par ce fait qu'il existe
dans rinde plusieurs recensions du Râmâyana. Ces re-
censions, faites en divers lieux et indépendamment les
unes d(^ autres, s'accordent entre elles quant aux événe-
ments, aux rôles et aux caractères des personnages. Mais
elles suivent un arrangement différent; elles présentent,
de plus, des divergences considérables dans les expres-
sions. On en pourrait donc conclure avec vraisemblance
qu'en effet le poème n'a été fixé par l'écriture qu'un
temps plus ou moins long après sa composition, et qu*il
avait auparavant circulé de bouche en bouche dans une
grande partie de Tlnde. On sera moins surpris de ces
' faits si Ton observe que renseignement oral et la réci-
tation étaient le principal exercice des Brahmanes, et
que les maîtres exerçaient les novices à retenir ainsi par
cœur la Sainte Écriture tout entière, et cela depuis
l'époque où les hymnes avaient été composés. La seule
édition complète que nous possédions du Râmâyana est
celle de M. Gorresio (Paris, 1843 et suiv.), où le texte
comprend 5 volumes: elle reproduit, sous le nom de
Gaudanaf la récension du Bengale. Les éditions anté-
rieures de Carey (Sérampore, 1806-1810), et de Schlegel
(avec traduction latine, 1829-38), offrent d'autres recen-
sions, ainsi, dit-on, que les manuscrits de Berlin.
Le nom de kâvya, donné dans l'Inde à ce genre de
poèmes épiques, dérive du mot kavi^ qui veut dire poëte,
et qui désigne toujours une personne réelle et non un
être collectif tel que Vy&sa. Lorsque la littérature des
iaivyas florissait, elle fut transportée par Témigration
indienne dans l'Ue de B&li, voisine de Yava, et traduite
en une langue qui porte le nom de kam. Nous trou-
vons aujourd'hui dans ce pays des œuvres indiennes con-
sidérables, traduites du sanscrit en cette langue : tels
sont le Raghuvança et le Kumâra-Sambhava , ainsi
qu'une partie du Mahâbhârata lui-même. C'est un pays
et une mine qui n'ont pas encore été suffisamment
explorés.
Le Râmâyana tient dans la littérature indienne une
place très-considérable; il est estimé presque à l'égal des
livres saints, à cause des doctrines et des exemples qu'il
propose; il est un objet d'études spéciales pour ceux qui
apprennent la langue, la prosodie, l'art de la composition
littéraire. Pour nous aussi, il est un des monuments les
fim importants ds 1» langue sanscrite. Pour le» histo-
riens, il offre un double intérêt : par les tnditioDt
tiques qu'il renferme, il projette un Jour très-vif sur les
temps qui ont suivi la période du Véda^ et dont les dé-
veloppements religieux et philosophiques sont contenus
particulièrement dans les livres nommés Brâhmanas;
par son fond principal, il nous fait assister, à travers
mille conceptions merveilleuses qu'il faut élaguer, à la
marche des Aryas vers l'ouest et vers le sud de l'Hin-
doustan, c.-à-d. à Tun des plus importants mouvements
que notre race ait exécutés sur la terre ; on y voit agir
non-seulement les Aryas conquérants et civilisateurs,
mais les races primitivement établies sur ce sol, les unes
s'al liant avec les Aryas et les aidant, les autres luttant
contre leurs progrès. Après cette grande expédition du
fils de DaQ^u*atha, le Gange est parcouru et soumis dans
toute sa longueur, la presqu'île est explorée, la mer est
ouverte sur une grande étendue de côtes ; Ccylan, tribu-
taire des rois du continent, va devenir un point aussi
important pour le commerce que pour la propagation à
travers les mers des doctrines civilisatrices issues du
V4da, — Outre les éditions déjà mentionnées du Râ-
mâyana, et une traduction française par M. H. Fauche,
nous en possédons un épisode, le Yajnadattabadaf tra-
duit par Chézy, 1827, in-4<», et qui se trouve aussi dans
les Fleurs de l'Inde, Nancy, 1857 ; le texte avec traduction
aété publié par Chézy et H. Burnouf, 1826. Le Raghuvança
a paru avec une traduction en prose anglaise à Calcutta,
1832 ; Stenzier l'a donné avec une traduction latine, Lon-
dres, 1832, et Galanos avec une traduction grecque,
Athènes, 1850. On doit aussi à Stenzier le Kumâra-
Sambhava, texte et traduct. latine, Berlin, 1838. En. B.
RAMBERGE (de rame, et de berge pour barque)^ an-
cien navire de guerre, dont les m&ts portaient des ^ies
ou espèces de hunes.
RAMBOUILLET (Hôtel de). F. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire^ et, dans le présent ouvrage,
l'art. PaéciEDSES.
RAME, pièce de bois dont on se sert pour faire avan-
cer une embarcation. La partie qui plonge dans l'eau
se nomme le plat ou la polie; celle que tient le rameur,
manche.
RAME (de l'allemand ramen, liasse), quantité de
500 feuilles de papier, divisée ordinairement en 20 mains
de 25 feuilles chacune. Mettre un livre à la rame, c'est
le vendre au poids du papier.
RAMONAGE DES CHEMINÉES. Il doit se faire aux
époques déterminées par l'usage des lieux, sous peine
d'une amende de 1 à 5 fr., et est à la charge des loca-
taires ou occupants.
BAMPANT, en termes de Blason, se dit des animaux
qui, dans les armoiries, sont représentés debout et s'éle-
vant comme le long d'une rampe. On l'oppose à passant.
— En Architecture, toute ligne inclinée ou en pente est
un rampant. On a aussi donné ce nom aux nervures qui
descendent des croisées d'ogives vers la partie inférieure
d'une clef pendante.
RAMPE, balustrade d'appui qui règne dans toute
l'étendue des escaliers. Selon l'importance des b&timents,
on fait les rampes en balustres de marbre, de pierre, de
bois ou de métal ; on les couronne, soit par une plate-
bande plus ou moins ornée, soit par une main courante,
corps arrondi et continu sur lequel la main s'appuie. —
Par extension, on appelle Rampe un plan incliné en
pente douce, par lequel on monte ou descend, et qui tient
lieu d'escalier dans des jardins, sur des quais, dans des
ouvrages de fortification , etc.
RAMPB , rangée de lumières placée au bord de la scène
dans une salle de spectacle, et qu'on lève ou baisse à vo-
lonté. Elle Jette sa lumière principalement sur la scène
et les acteurs.
RAMS, jeu de cartes qui se Joue à 4, 5 ou 6 personnes,
avec un jeu de piquet. Chaque joueur prend un nombre
convenu de Jetons, et reçoit 5 cartes. Le donneur, s'il
veut tenir le jeu, échange l'une de ses cartes contre la
retourne, qui a déterminé l'atout. Il est loisible de passer :
si tout le monde passe, le donneur fait ramSy et est dé-
barrassé de 5 jetons. Quand on Joue, on est tenu de
fournir et de forcer sur la carte jouée, ou de couper, et
même de surcouper. Celai qui n'a fait aucune levée
prend cinq jetons de plus, il est ramsé: chaque Joueur
se débarrasse d'autant de jetons qu'il a fait de levées, et
le premier à qui il n'en reste pas est le gagnant.
RANÇON (de l'italien rancone, crochet), sorte de
pique dont l'extrémité présentait à chacun des côtés une
courbure en forme d'hameçon.
RANÇON (de ritalien ranzion)^ ce que l'on paye poui
RAP
1534
RAT
tirer un prisonnier des mains de Tennemi. L'usage de
donner des rançons a existé de toute antiquité, et Jusqu'à
la Révolution française. Pendant le moyen ftge, les yas-
■aux étaient obligés de payer la rançon de leur suzerain;
c'était une des aides féodales. Louis IX , prisonnier en
Egypte, donna la ville ie Damiette pour sa propre
liberté, et 400,000 besants pour celle de ses compagnons
de captivité. Jean le Bon fut racheté aux Anglais au prix
de 3 millions d'écus d*or. Dans un traité conclu en 4780
entre la France et l'Angleterre pour l'échange des pri-
sonniers de guerre, la somme à payer pour un simple
soldat ou un matelot était de 25 Ir., et elle augmentait
en raison du grade ; un vice-amiral français, un amiral
anglais commandant en chef, un maréchal de France, un
feld-maiiéchal anglais, étaient estimés 60 matelots ou
soldats. Aujourd'hui, les nations européennes ne font
plus que des échanges de prisonniers à égalité de grade.
RANËLAGH, nom emprunté à un établissement de
divertissements publics des environs de Londres, et ap-
pliqué au local d'un ancien bal public du bois de Boulo-
gne à Paris, pjès le ch&teau de la Muette. Le Ranelagh
du bois de Boulogne a été détruit vers 1852.
RANGIER, meuble d'armoiries qui représente le fer
d'une faux. Il paraît ordinairement en pal, la pointe vers
le chef. •
RANZ DES VACHES , antique mélodie nationale que
les bergers de la Suisse chantonnent ou Jouent en faisant
paître leurs troupeaux. On raconte qu'autrefois les Suisses
enrôlés comme mercenaires à l'étranger ne pouvaient
l'entendre sans éprouver un invincible besoin de revoir
leur pays, et qu'ils désertaient ou mouraient de langueur.
C'était le souvenir de la patrie qui donnait au ranz cette
puissance; car c'est un air fort simple, sans art, et
même grossier; il ne produit son effet qu'au milieu des
montagnes. C'est un trois-huit qui commence par un
adagio plaintif de 4 mesures répétant les mêmes notes ;
puis vient un allegro, comme si l'àme secouait sa mé-
lancolie; elle y retombe par un court adagio, se relève
encore dans un nouvel allegro, et tout se termine par un
adagio de 21 mesures. Le ranz n'est pas le môme pour
toute la Suisse ; chaque canton possède le sien. Ranz si-
gnifie « suite d'objets qui vont à la file; » le ranz des
vaches, c'est donc la marche des vaches. En effet, c'est
surtout lorsque les vaches rentrent au village, à la fin de
la belle saison, que l'on joue cet air. B.
RAOUL DE CAMBRAI, vieille Chanson de geste qu'on
peut diviser en quatre parties. Dans la 1'*, Raoul réduit
en cendres l'abbaye d'Origni ; dans la 2*, Bernier tue
Raoul pour venger la mort de sa mère; dans la 3% Ber-
nier se réconcilie avec les parents de Raoul , et épouse
la fille de Gerin le Sor ; dans la 4*, il est tué par Gerin.
Les faits racontés dans cette Chanson sont historiques, et
se rapportent à l'an 9A^, C'est la lutte des enfants de
Herbert de Vermandois contre l'usurpateur Raoul, comte
de Cambrai , sous le règne de Louis d'Outre-mer. L'au-
teur de la Chanson est Bertolcds de Laon. Son ouvrage est
conservé dans un seul manuscrit du xiii* siècle. On y re-
connaît un grand nombre d'interpolations, dont la cor-
rection et l'élégance font un singulier contraste avec la
rudesse et la simplicité du texte priniittf. Ce roman a été
publié par Edw. Le Glay, Paris, 1840. F. Histoire litté-
raire de la France, tome XXII. H. D.
RAOUT. V. RouT.
RAPATRIEMENT, renvoi dans leur patrie des hommes
de tout navire perdu ou délaissé à l'étranger. Il se fait
par les soins des agents consulaires, dans le plus bref
délai possible, et aux frais des armateurs. On rapatrie
également los enfants d'origine française abandonnés en
pays étranger, ceux d'origine étrangère abandonnés en
France, etc.
RAPIDES. V. Cataracte.
RAPPE, au pluriel Rappen, monnaie de compte de
Suisse, valant un centime.
RAPPEL (contraction de réappel) ^ action par laquelle
on rappelle quelqu'un (K. Lettre de rappel). Dans les
assommées délibérantes, on se sert des expressions rap'
pel à la question, rappel à Vordre, qui s'expliquent
d'elles-mêmes.
RAPPEL, en termes de Comptabilité, mesure par la-
quelle on alloue à un fournisseur déjà pavé une somme
complémentaire, à un fonctionnaire un traitement arriéré
ou itjmontant à une époque antérieure à son entrée en
fonctions.
RAPPEL, batterie de tambours ou sonnerie de clairons
qu'on fait exécuter pour rassembler immédiatement une
troupe de soldats.
RAPPEL (Association du). V, Acre B'innoii , dans notn
Dictionnatre de Biographie et d* Histoire,
RAPPORT, compte-rendu ou exposé sommaire que l'on
fait sur un travail dont on a^té chargé, sur une mission
que l'on a reçue.
RAPPORT, en termes de Droit, action de faire rentrer
dans la masse d'une succession les objets donnés par le
défunt à l'un de ses héritiers, pour qu'ils figurent dkns Ia
partage. Tout héritier est soumis à l'obligation du rap-
port , à moins que les dons et legs n'aient été faits e^-
pressément à titre de ptédput et hors part, et pourvu
qu'ils ne dépassent pomt la quotité disponible. Le rap-
port n'est dû qu'aux cohéritiers, et non aux légataires ou
aux créanciers de la succession. Les frais de nourriture,
d'entretien, d'éducation, d'apprentissage, d'habillement,
de noces et présents d'usage, no sont pas sujets au rap-
port. Il n'y a pas obligation de rapport pour l'héritier
qui renonce à la succession (K. le Coà» Napol,y art. 843-
869, 1468 et 1469).
RAPPORTEUR, celui qui fait un rapport sur un tra-
vail, sur une loi, etc., au nom d'une commission. Dans
les tribunaux, le Juge-rapporteur est celui qui a été
spécialement chargé d'une affaire, d'an règlement de
compte, et qui en fait le rapport k une Chambre ou à
une Cour. Dans les Conseils de guerre et de discipline^
on nomme Rapporteur l'officier qui fait les fonctions de
ministère public.
RAPT (du latin rapttis), enlèvement par violence
(F. Enlèvement). L'ancienne législation, outre ce fait
qui emporte toujours pour nous l'idée d'un crime, recon-
naissait le rapt par séduction, parce que la violence était
ici exercée contre les parents ; presque toujours elle les
punissait l'un et l'autre de mort.
RAQUETTE , instrument dont on se sert pour Jouer à
la paume et au volant; — nom que l'on donne chez plu-
sieurs peuples à la fusée de guerre.
RAS DE CARÈNE, radeau dont on se sert pour les
travaux de radoub et de carénage.
RAS DE MARéB, élévRtlon subito et bouillonnement de
la mer par la rencontre de deux marées ou de deux cou-
rants opposés.
RASGADO (de l'espagnol rasgar, arpéger), prélude
que les Espagnols exécutent en attaquant successivement
toutes les cordes de la guitare avec le pouce, et en sui-
vant la mesure et le rhythme des boléros et des ségni-
dilles, dont il est la ritournelle ordinaire.
RASSEMBLEMENT. V. Attroupement, Émbdtb.
RASTREADOR (de l'espagnol rastro, trace du pied),
nom qu'on donne, dans l'Amérique du Sud, aux Imiicrs
de Justice, à ceux qui cherchent la piste des coupables.
RATELIER (du Latin rastellum)^ sorte d'échelle atta-
chée par l'un de ses montants le long du mur d'une
écurie ou d'une étable, avec lequel elle forme un angle
où se place le foin ou la paille qu'on destine aux animaux.
— Dans les corps de garde, on nomme Râtelier deux pièces
de bois qui servent à poser et à soutenir les fusils.
RATIFICATION (du latin ratum facere, rendre cer-
tain ), en termes de Droit , approbation donnée à un acte
contre lequel la loi admettait la demande en nullité ou eu
rescision ; — en Diplomatie, confirmation par le chef de
l'État d'un traité que ses plénipotentiaires ont conclu.
RATION , portion Journalière de vivres , de four-
rages, etc., qui se distribue "uix troupes et aux matelots.
Elle est déterminée par les règlements. On y a droit même
lorsqu'on ne la consommerait pas.
RATIONAL. K. ce mot dans notre Dictiomt^ire de Bio-
graphie et d*Histoire,
RATIONALISME , procédé de l'esprit qui consiste dans
l'emploi exclusif du raisonnement et de la raison dans
l'étude des questions religieuses et philodophiques. Ce-
pendant on peut distinguer deux sortes de Rationalistes,
Il en est qui , avec l'emploi de la raison, admettent le fait
d'une révélation primitive et commune à tout le genre
humain; en accordant que la raison peut s'élever jus-
qu'aux vérités fondamentales, telles que l'existence de
Dieu, rimmortalité de Tâme, etc., ils Ajoutent qu'elle
n'est pas suffisante ; presque tous les grands docteurs du
moyen &ge étaient rationalistes en ce sens. Mais on
appelle plus exclusivement Rationalistes ceux qui n'ad-
mettent, au point de vue religieux, que la raison, sans
tenir compte de la tradition et de la révélation ; et , au
point de vue philosophique, ceux qui ne voient que dans
la Raison la source de toutes nos connaissances. — On a
donné le nom de Rationalisme à un mouvement qui s'est
propagé en Allemagne et qui a pour objet llnterprétatioa
critique de l'Ancien et du Nouveau*Te8tamenti comin^
RAV
1535
RÊA
ce mouvement conduisit aux doctrines de Semler, de
Rœhr, de Wegscheider, de Paulus, de Genesius, de
Strauss, de Feuerbach, doctrines cpii ne vont à rien
moins qu'à nier toute révélation , et auxquelles Spinoza
avait imprimé une forte impulsion par son Tractatus
theologicQ-politicuSf le mot Rationalisme a désigné toute
doctrine qui semblait vouloir marcher sans la Révéla^
tion. R.
RATIONNEL, en termes de Philosophie, ce qui est
fondé sur la raison ou sur le raisonnement. Le mot s'op-
pose à empirique.
RATISBONNE (Église S<-Pierre, à], église cathédrale
commencée en 1274 par André Egl, et encore inachevée
aujourd'hui. On Ta restaurée en 1838. Malgré la réputa-
tion que lui ont faite les Allemands, elle témoigne de la
décadence de l'architecture religieuse. Ia façade, qui est
de la fin du xv* siècle, rappelle plutôt un hôtel de ville
qu'une église, avec son balcon du premier étage, sur
lequel s'ouvrent deux grandes fenôtres, surmontas d'un
pignon aigu dont le milieu est marqué par une tourelle
féodale. Les deux tours qui accompagnent ce frontispice
profane, et qui s'élèvent à une hauteur de 70 met., ne
sont pas terminées; les sculptures qui y sont répandues
sont de l'ordre le plus commun; l'une de ces tours, celle
do Nord, est appelée Tùwr de VAne, parce que des &nes
furent employés au transport des matériaux destinés à
sa construction. La cathédrale de Ratisbonnfî a la forme
extérieure d'une basilique, car la longueur de la croisée
ne dépasse pas la largeur de la nef et de ses collatéraux.
One autre particularité intéressante, ce sont les trois
chevets gothiques qui terminent les trois nefs. A l'inté-
rieur, l'édifice a 111 met. de long, 52 de large, et 40 de
haut. On y remarque : dans la nef majeure, le monu-
ment en marbre élevé en 1598 à Tévèque Ph. Guillaume,
avec une statue en bronze; dans le collatéral de gauche,
le tombeau du prince-primat Gh. de Dalberg, ex&uté en
alb&tre par Zendemeneghi, d'après les dessins de Ca-
nova; divers mausolées d'évôques, rangés dans les bas
côtés du chœur; le maltre-autel, en argent massif; les
vitraux, exécutés de nos jours d'après les dessins de
Schnorr et de Ruben, etc. Les cloîtres yoislns de la ca-
thédrale sont du XV* siècle; ils renferment des bustes et
des statues antiques et du moyen &ge, des tombeaux,
des pierres sépulcrales. Sur leurs flancs se trouvent une
petite église et un baptistère, antérieurs à la cathédrale
actuelle.
RATisBONRB (Abbayo de S^Emmeran, à), immense amas
d'églises et de cloîtres, qui montre quâ accroissement
cette abbaye bénédictine, fondée en 052, agrandie par
Charlemagne, et aujourd'hui sécularisée, pnt de siècle
en siècle. Une entrée gothi^e, façonnée au xv* siècle
dans un goût élégant, conduit à une sorte d'avant-cloltre
byzantin du xi* siècle, d'où Ton passe sous un grand
portique roman, qui date peut-être de la fondadon. On
pénètre ensuite dans trois églises Juxtaposée» : celle du
Nord est consacrée à S^ Rupert; celle du Sud, recon-
struite de 1642 à 1731, porte le nom de S^ Emmeran, dont
elle contient le tombeau ; celle du milieu, accompagnée
de bas côtés, offre les formes byzantines, défibrées par
des constructions et des ornements du xvm" siècle, et, à
l'une de ses extrémités, on voit, au-dessus d'une a7pte,
un vaste chœur provenant d'une basilique primitive. Les
anciens b&timents de l'abbaye sont, depuis 1809, le pa-
lais des princes de Tour-etr-Taxis, qui ont fait bâtir, au
milieu des cloîtres, une chapelle gothiaue, avec caveau
sépulcral pour les membres de leur famille.
RATITES , nom que les antiquaires donnent aux mé-
dailles portant la figure d'une proue (en latin rates),
RATURE (du bas latin radiotura, action de rayer).
Toute rature dans un acte authentique doit être faite de
façon qu'on puisse compter le nombre des mots sur les-
quels elle s'étend. Le nombre des mots annulés doit être
mentionné par un renvoi à la marge ou à la fin de l'acte;
il faut ({ue toute mention de ce genre soit approuvée par
les parties au moyen d'un parafe. L'omission de ces for-
malités peut entraîner la nullité des ratures, ou même de
l'acte (Loi du 25 nivôse an xi; Code NapoL, art. 42).
RAVALEMENT {d'aval, en descendant), travail qu'on
fait à un mur, à une façade, lorsque, après les avoir
élevés, on les crépit du haut en bas. On retouche les
angles et les parties apparentes des pierres, pour corriger
les imperfections de leur taille; on sculpte les moulures
des bandeaux, des fenêtres, et en général tous les orne-
ments. *
lAVALEMENT, terme de facture des orgues. Il désigne les
botes ajoutées à l'étendue ordinaire des claviers. Un ra*
▼alement aux pédales part de Vut, et peat se prolonge!
au-dessous de cette note Jusqu'au fa. Les notes qui ex-
cèdent la 4" octave dans les dessus des claviers à la main
constituent aussi un ravalement, qui, dans la plupai-t
des orgues, augmente l'étendue ordinaire d'une demi«
octave. F. G.
RA VELIN. F. Demi-ldrb.
RAVENNE (Baptistère de). 7. BAPnsTiRB.
RAVBNNB (Église S^-ViTAL, à), le type le plus complet de
l'architecture byzantine en Occident. Elle fut élevée au
VI* siècle, pendant le règne de Justinien, sur un plan oc-
togone. Ses façades extérieures, dénaturées par la con-
struction d'un vestibule moderne, offrent peu d'intérêt
aujourd'hui. A l'intérieur, huit pillera, correspondant
aux huit angles, forment une espèce de galerie circu*
laire : entre les pilien s'élèvent deux à deux des co-
lonnes supportant des arcades. Une galerie, établie au
premier étaige, forme des tribunes semblables à celles
qui, dans les églises d'Orient, étaient réservées aux
femmes. Une coupole hémisphérique, construite en vases
d'argile emboîtés les uns dans les autres, couronne le
monument, et l'édaire par des fenêtres percées dans la
partie basse de la voûte. Tout est revêtu de marbre. Les
mosaïques du chœur ont conservé leur fraîcheur primi-
tive : elles représentent Justinien précédé de son clergé
et an milieu de sa cour, et l'impératrice Théodora appor-
tant avec ses femmes des ofiirandes au temple. D'autres
mosaïques, dont les sujets ont été tirés de l'Ancien et du
Nouveau Teatament, ornent le reste de l'édifice. On con-
serve, près du maître-autel, on précieux bas-relief en
marbre de Parus, provenant d'un temple de Neptune, et,
dans la sacristie, un autre bas-relief où est figurée l'apo-
théose d'Auguste.
RAVITATLLEAIENT, introduction de vivres et de mu«
nitions dans une place forte. G'est une importante et dif-
ficile opération pour une armée de secoure.
RAWIS, nom que donnent les Arabes à des espèces
de rapsodes ou rédtateura qui débitent les compositions
des poètes.
RAYAS. V. ce mot dans notre Dicttotmatre de Biogra^
phie et d'Histoire,
RAYONNANT (Style). V. Ogivale (Architecture).
RAZZIA. V. ce mot dans notre Dictiormaire de Biogror
phie et d* Histoire.
RÉ ou RA, dieu du soleil chez les anciens Égyptiens.
II est représenté sous la figure d'un homme à tête d'é-
pervier, surmontée du pschent,on plus ordinairement du
disque solaire.
RiS, note de musique, appelée D dans l'anrienne solmi-
sation. G'est le 2" degré de notre échelle musicale. — Ou
donne aussi le nom de ré à la 3' corde du violon, à la
2* de l'alto, du violoncelle et de la contre-basse, parce
qu'elles sonnent l'unisson ou Toctave de la note ri.
RÉACTION, en Politique, action en sens contraire de ce
qui se faisait auparavant. Les partis qui arrivent au pou-
voir après avoir été opprima apportent des maximes nou-
velles ou opposées dans la conduite des afiîûres : mais la
réaction ne se borne pas d'ordinaire à professer et à
appliquer des principes, elle satisfait des rancunes et des
vengeances.
REAL, monnaie. V. notre DictUmnavre de Biographie
et d'Histoire.
RÉALISME, dans le langage de la Littérature et des
Beaux-Arts, signifie imitation systématique de la réalité.
La nature physique et morale peut être imitée dans les
œuvres d'imagination et dans celles des arts représenta-
tifs suivant deux méthodes différentes : ou l'on se pro-
pose de reproduire exactement la réalité, c.-Â-d. les objets
tels qu'ils sont extérieurement; ou l'on veut exprimer ce
qu'on y voit, ce qu'on y sent, quelquefois ce qu'on y
voudrait trouver. Dans le premier cas, c'est la chose
qu'on veut peindre ; dans le second, on veut rendre Vidée
qu'on s'en forme. Le réalisme est la méthode qui ren-
ferme l'art dans la représentation de la chose; Vidées
lisme, si l'on peut employer ce mot, est celle qui aspire
à l'expression de l'idée. Contemplons, par exemple, la
mer agitée : les vagaes se soulèvent, s'abaissent, se
succèdent, se choquent, sonnent, écument, se confon»
dent , se relèvent. Qu'y ap-tp-il lii-dedans? Une chose faite,
il est vrai , pour étonner les yeux, étourdir les oreilles,
donner le vertige; mais, si l'on se borne à l'extérieur,
rien qu'une chose. Un spectateur inintelligent, mais doué
des mêmes sens que vous, la percevrait comme vous.
Essayez de la repràenter par le langage, par la peinture,
par la musique, vous ne rappellerez que des figures, des'
tons et des mouvements, vous ne parlerez qu'aux sensi a
RËA
1536
RRA
BoIm que, lans le voaloir, tous n*y mêliez quelque idée
tirée de vous-même. Car il est presque plus facile, îl est
au moins plus naturel , d*animer ce tableau, c.-à-d. d*y
introduire quelque chose de notre imagination toujours
artive, que de s'enfermer strictement dans la peinture de
Tobjet matériel. En effet, supposez sur ces flots agités un
▼aisj^eau et des hommes en danger : aussitM ce désordre
prend un sens, ce vain mouvement devient une menace.
Peignez une digue opposée par les hommes à la fureur
des flots; que la mer semble réunir ses forces pour
s*élancer à Tassant de ce rempart, derrière lequel s*abrite
un peuple : alors Télément soulevé prend un caractère ;
c*est une puissance ennemie, c*est un adversaire infati-
gable de Thomme. Donnez -lui encore un sens plus
abstrait : qu'elle soit la saisissante image de la mobilité
et de la diversité, ou une sorte d'emblème de Tinflui.
Pensez, rêvez, sentez; nutis toujours faites en sorte que
dans un objet sensible un voie quelque chose par où cet
objet parle à notre esprit. — II en est de même de la na-
ture morale ; elle peut à certaines conditions demeurer
pour notre esprit une simple chose, un objet vide de
sens. Les phénomènes intellectuels et moraux, les traits
de carat^ère et de mœurs n'ont de signification qu'au-
tant qu'ils nous paraissent se rattacher à l'ensemble de
la nature humaine, telle que nous la connaissons par
noua-mêmes et par l'ezpénence. En un mot, dans les
faits psychologiques, nous ne comprenons que ceux dont
nous apercevons la raison. Supposons quelque infirmité
de l'intelligence, telle que l'idiotisme, la folie, les hallu-
cinations; quelque monstruosité morale, telle que le goût
du crime pour le crime même ; considérons ces singula-
rités en elles-mêmes, elles ne nous offriront aucun sens.
Elles se trouvent pourtant dans la réalité, et peuvent être
l'objet de l'imitation. Mais l'écrivain qui les représentera
devra les lier avec leurs causes ou leurs effets, les mettre
en opposition avec la nature saine, en faire ressortir des
motifs de crainte, de haine, de compassion , enfin leur
trouver quelque raison d'harmonie avec le fond de nos
pensées et de nos sentiments; ou bien il n'aura fait
qu'une représentation stérile , et en quelque sorte pu-
rement mécanique, il n'aura pas mis dldée dans son
œuvre.
Cette absence d'idée est-elle professée systématique-
ment? Existe-t-il des écrivains ou des artistes qui se soient
attachés à reproduire scrupuleusement la réalité, sans y
ajouter aucune idée venant de leur esprit? Si l'on répon-
dait affirmativement, peut-être faudrait-il citer des noms,
et des noms de contemporains, ce dont nous devons nous
abstenir. Peut-être d'ailleurs aurait-on droit d'objecter
que tel ou tel nom ne rappelle que l'impuissance d'un
esprit fait pour reproduire comme un miroir la réalité,
sans avoir la faculté de la féconder par la pensée; que tel
enfin n'a pas une doctrine, mais seulement une manière,
imposée par la stérilité de son imagination, et qu'il dé-
guise de prétentions systématiques pour racher la nudité
de son génie. Laissons donc la question de personnes, et
essayons de saisir les doctrines.
Nul ne professe le mépris de toute idée; mais plus d'un
croit ta réalité digne par elle-même d'être l'objet de
l'imitation, et n'admet l'idéalisme que dans certaines
limites. Il faut donc s'entendre : de quelle réalité et de
quel idéalisme parle-t-on? Veut-on dire que l'art (nous
prenons ce mot dans son acception la plus étendue) ne
doit pas s'égarer dans le domaine des rêves, de manière
ft n'être plus mie Texpression de la fantaisie de chacun;
et oue, pour rempêcher de dégénérer en caprice indivi-
duel, il faut le ramener à l'étude et à l'imitation du
réel , qui est le seul fondem<*.nt solide des œuvres d'ima-
gination? Tous les bons esprits souscriront à cette doc-
trine; mais ce n'est pas la peine de créer un nom nou-
veau pour une théorie aussi ancienne que l'art classique.
Il s'agit donc d'autre chose; d'autant plus que tel écrivain
dont on fait l'apôtre du réalisme ne renonce nullement à
la liberté de concevoir les choses à sa manière, et môme
semble faire du réalisme une nouvelle forme de l'indé-
pendance absolue du génie. Or, qu'est-ce que cette indé-
pendance, sinon l'idéalisme poussé à sa dernière limite?
Car, l'idée étant ce qui vient de l'auteur et ce qu'il im-
posa aux choses sur lesquelles il travaille, plus il croit ne
relever que de son sens propre, plus il est porté à mettre
ses idées personnelles à fa place des choses. On arriverait
donc à cette bizarre conclusion, que l'école qu'on appelle
réalinte serait la plus idéaliste de toutes les écoles.
Mais nous sommes égarés par la rigueur des termes,
' tant il est difficile de s'entendre quand les termes sont
ttal définis s ramenons à l'usage commun des mots, et ces*
tons d'être rigoureux pour être plus vrais. — Tous les
maîtres, dans la poésie et dans les arts, ont cherché à
donner à leun créations une certaine perfection relative
qui ne se trouve pas dans la réalité. Nul objet réel n'est
accompli dans son genre. La beauté et la laideur, ra bonté
et la méchanceté ne sont , dans les œuvres de la nature,
pour ainsi dire, qu'à l'état d'ébauche. L'observation aper-
çoit ce qui est , l'imagination conçoit ce qui manque. Le
propre de l'art est d'exécuter ce qui est conçu par l'es-
prit , c.-à-d. de réaliser cette perfection qui n'était aupa-
ravant qu'une idée. Mais cette idée de perfection est-elle
quelque chose d'absolu, qu'on saisisse du premier coup,
et au delà duçfuel il n'y ait plus rien? Nullement: c'est
une limite qui fuit toujoura; on s'en approche sans cesse,
on ne l'attemt jamais, ni par la pensée ni par l'exécution.
Cette perfection insaisissable, et cependant toujours
pourauivie, est ce qu'on appelle l'idéal. 11 recule selon la
portée de l'esprit qui le considère, et ainsi chaque esprit
a son idéal : il diffère encore selon la nature du génie
gui le conçoit ; l'idéal de Michel-Ange n'est pas celui de
laphafil , Racine en a un autre que Corneille. De même
diffère celui des simples spectateura, des juges désinté-
ressés des œuvres d'art : aussi chacun a-t-il son écrivain,
son artiste favori. Et cependant un ouvrage fait en vue
d'un idéal, quel qu'il soit, porte un caractère auquel
aucun bon Juge ne se méprend , tant il s'éloigne de la
simple représentation de la réalité.
Ce oju'il y a de commun entre tous ceux qui poursui-
vent l'idéal, c'est l'aspiration vera la beauté, la grandeur,
la force, ou vera des qualités inférieures, mais de même
genre; et, d'autre part, l'averaion pour ce qui est vul-
gaire ou mesquin ; c'est l'enthousiasme pour tout ce qui
peut élever l'àme en la touchant et la charmant , et le
mépris pour tout ce qui affadit le cœur et rapetisse l'es-
prit. S'il existe une école, qu'on l'appelle réaliste ou au-
trement, qui se déclare contraire à cette noble manière
de concevoir l'art, elle n'est digne que de raillerie ou de
pitié. I>roscrire des arts l'idéal , c'est nier l'art lui-même;
déclarer ciu'on s'en tient dans ses œuvres à la réalité,
c'est répudier le glorieux titre de l'homme d'imagination,
celui de créateur ; s'enfermer dans la reproduction de la
réalité, c'est aspirer au rang de manœuvre. Il faut sans
doute beaucoup de talent pour peindre les choses telles
3u'e]les sont ; mais on en peut dépenser beaucoup dans
es œuvres stériles et funestes, et alora mieux vaudrait
n*avoir rien fait. L'homme qui travaille pour faire dire
qu'il a du mérite, bien que son œuvre soit en elle-même
vaine ou mauvaise, n'est pas digne de l'attention des gens
sensés. Quand vous aurez mis votre temps et votre ta-
lent à répéter ce qui ne m'intéresse pas ou me dégoûte,
vous n'aurez rien changé à mes sentiments. Un écrivain
qui a fait un livre en faveur du réalisme, en protestant
qu'il ne sait pas ce que c'est, dit avec ironie : a Nul doute
qu'à un moment donné, les critiques, pris dans leur
proprer piège, ne cherchent à diviser les écrivains en
bons et en mauvais réalistes. » Nous ne savons pas en-
core s'il peut y en avoir de bons : ce que nous affirmons,
c'est qu'il y en a de mauvais ; ceux-là sont les écrivains,
les peintres, les sculpteura, les musiciens qui prennent
sans choix autour d'eux leura objets d'imitation ; il y en
a même qui choisissent le laid, le bas, le trivial, les figures
sans expression , les passions sottes ou brutales, et qui
s'attachent à reproduire ces objets avec une indifférence
qu'ils prennent pour la sérénité de l'art. Ceux-là sont les
mauvais réalistes, soit qu'ils se parent de ce nom, soit
qu'ils le répudient.
Mais il y a une autre manière de se séparer de la grande
tradition de l'art classique, qui a pour but l'idéal. L'idéal
a un double caractère, général et personnel : il doit plain*
à tous, et il sort des méditations d'un seul. Il faut qu*il
n'ait rien d'exclusif, et en même temps qu'il porte une
empreinte particulière; aussi se form&-t-il, d'une part,
£ar voie d'abstraction, et, de l'autre, par voie d'invention,
l'artiste choisit, dans les modèles diven que lui présente
la nature réelle, ce qui convient le mieux à son senti-
ment et à son dessein, et il néglige le reste. Car tout se
trouve mêlé dans la nature, dont le plan est trop Taste
et trop complexe pour les œuvres humaines; il faut donc
choisir et isoler, c-à-d. abstraire. D'autre part , lé génie
de l'auteur anime ces fragments et ces extraits, en les
combinant sous une idée qui vient de lui ; par là il im-
pose aux choses sa manière de voir. Les représentations
qu'il donne des objets sont donc en même temps des re-
présentations de ses pensées personnelles. Or,' il peut
sortir de ce double procédé deux exagérations : une
•fattractioa iiidiscrôte enlèrt à la natore sa fie ei aoa
AEB
1537
REC
moovemect, ou un excès du personnalité dans l*0Ba?re de
l'artiste en fait, au lieu d'une imitation de la nature, une
créaiioD capricieuse et tout à fait étrangère à la yérité.
L'un de ces excès mène à la sécheresse et au style de
convention, Tautre à la fantaisie effrénée. Le premier a
produit dans notre siècle la froideur des faux classiques,
le second a donné naissance aux exagérations du roman-
tisme. Pour se placer entre ces deux extrêmes, il faut se
tenir le plus près possible de la nature réelle. L'observa-
tion attentive et intelligente de la réalité peut seule em-
pêcher l'esprit de s'égstf^r soit dans le vide, soit dans la
fantaisie. La vraie nature est le correctif de la fausse nar
cure. Ainsi, que l'art, fatigué d'exagérations contraires,
qui ont troublé tous les esprits, revienne au modèle im-
muable de la réalité, rien de mieux, pourvu quMl n'ab-
dique pas ses titres de noblesse. Si le réalisme n'est pas
autre chose qu'une réaction du bon sens contre l'oubli
de la vraie nature, qu'il soit le bienvenu dans le domaine
de l'art.
Un prodigieux génie, qu'on ne dira pas dépourvu du
don de création, Goethe, fut de son vivant accusé de
réalisme. 11 accepta l'accusation. Sou réalisme consistait
en deux points : ne pas exclure de ses créations les pei
sonnages humbles et les sentiments familiers, pourvu
qu'ils offrissent des caractères intéressants ; mettre toute
BOL imagination à créer des êtres assez complexes, asse?
divers, pour qu'ils parussent sortir tout entiers, non de
l'art, mais de la réalité. En un mot , tandis que les créa-
tions de l'art portent ordinairement le cachet de leur au-
teur, Gœthe a, quand il l*a voulu, dissimulé le sien. On voit
l'œuvre, et l'on cherche en vain l'auteur. L'homme môme,
que Pascal se réjouissait de trouver dans l'écrivain, est
absent : nulle trace de ses affections. De môme, la nature
paraît indifférente aux objets qu'elle enfante : ils vivent,
et elle continue de produire. Ce genre de réalisme est le
secret d'un génie qui n'a guère de pareils. Tel autre, qui
affecte cette étrange indifférence, obtient du même coup
Ja nôtre, ou révolte nos affections et notre honnêteté. Ce
modèle est donc dangereux à suivre. Mais sur le premier
point, Gœthe a devancé son siècle. Les révolutions de la
société se propagent dans les arts. Depuis que les bar-
rières que la naissance mettait autrefois entre les hommes
se sont abaissée, l'art est devenu moins dédaigneux dans
le choix de ses personnages. II a découvert que les plus
iiuiubles oui une ùdue et un cœur, qui valent bien la
peine d'être analysés et représentés. 11 n'y a plus d'ex-
clusion de conditions dans le domaine du beau. Si tous
les hommes ont droit à l'attention de l'artiste, l'intérêt
qu'ils inspirent s'étend nécessairement sur les lieux où
<ls vivent , sur les circonstances dans lesquelles se déve-
loppent leurs sentiments et leurs pensées. Sans doute,
dans le cadre où ils sont placés, comme dans leurs per-
sonnes mêmes, l'élégance et le charme des sens peuvent
manquer. L'intérêt moral doit donc suppléer aux agré-
ments physiques ; de là, une révolution dans l'art : moins
de grâce extérieure, et plus de sensibilité. De beaux ta-
lents ont donné l'exemple : ils ont montré l'attrait que
peut offrir la peinture de la vie rustique, les drames que
renferme la condition des obsciuv travailleurs, les sources
de pathétique qui sont cachées dans des régions trop
longtemps méprisées. C'est en serrant de plus près la
réalité, qu'ils ont ouvert ces voies nouvelles ; mais, gui-
dés par un Juste sentiment de l'art, ils ont vu que cette
réalité sévère avait aussi son idéal , et ils l'ont poursuivi.
Ce n'est pas à ces esprits, il est vrai , qu'on donne le
nom de réalistes : on le réserve à ceux qui croient que la
réalité toute crue, quelle qu'elle soit, est digne d'imita-
tion; qui proscrivent l'idéal comme un mensonge; qui
relèguent la poésie parmi les puérilités passées de mode,
et qui placent l'avenir de l'art dans la négation même de
l'art. Cg réalisme-là n'a pas encore d'histoire; il affirme
lui-même n'être qu'une forme transitoire ; il a raison :
c'est le cauchemar d'une génération ennuyée et fatiguée,
parce cp'elle n'a que des appétits sensuels, avec un
esprit vide de toute généreuse aspiration. Ce malaise ne
saurait durer longtemps, et peut-être avons-nous parlé
trop longuement de ce qui ne mérite oue l'oubli et sera
vite oublié. V. Théry, le Génie philosopkique et littéraire,
Paris, 18C4, în-8°, liv. IV, c 2. C.
aéALisMB, terme de philosophie scolastique. V. Sco-
LASTigUB.
REBAB, instrument de musiaue des Arabes. Il a la
forme d'une tortue ou d'une sphère, avec un manche
rond, et est monté de 3 cordes en crin, droites et non
tressées ; on en Joue avec un archet, en le tenant sur les
seaoox» U jr a des rebab montés de deux cordes, et d'au-
tres qui n'en ont qu'une : on no peut faire sur ceax-d
que 0 notes formant une sixte mineure. B
REBEC (de l'arabe rebab, ou de l'hébreu rebiac, ou du
celtique r«6er), sorte de violon à 3 cordes accordées de
quinte en quinte, mi, la, ré. On en Jouait avec un ar-
chet. Instrument favori des anciens ménestrels, il avait
la forme d'un battoir de blanchisseuse échancré par les
quatre angles, au lieu d'être arrondi comme le violon
moderne ; on ne trouvait dans sa construction ni voûtes ni
éclisses; la table d'harmonie, au milieu de laquelle était
une rosace, était collée à plat sur les bords du corps de
l'instrument. 11 y eut des dessus, des hautes -contre, des
tailles et des basses de rebec. Cet instrument s'est main-
tenu en France jusqu'à la fin du xvii^ siècle, et on le
trouve encore aujourd'hui chez les paysans de quelques
cantons de l'Angleterre. B.
RËBEL, un des noms de la vielle au moyen âge.
RÉBELLION , résistance avec violence et voies de fait
aux officiers ministériels, aux gardes champêtres et fores-
tiers, à la force publique, aux percepteurs des taxes et
contributions, aux porteurs de contraintes, aux préposés
des douanes, aux officiers et agents de la police adminis-
trative ou judiciaire, agissant pour l'exécution des lois,
des ordres ou ordonnances de l'autorité publique, des
mandats de justice ou jugements. Procès-verbal de ré-
bellion doit être dre^ par tout officier public insulté
dans l'exercice de ses fonctions. La rébellion est qualifiée
:rime : 1» quand elle a été commise par plus de vingt
personnes, armées ou non armées; dans le premier cas,
elle est punie des travaux forcés à temps; dans le se-
cond, de la réclusion ; 2* ^uand elle a été commise par
une réunion armée de trois personnes et plus jusqu'à
vingt, elle est alors punie de la réclusion. Dans les autres
cas, c'est un simiile délit, puni correctionnellemeot (Cods
pénal, aru 209-221). Quand il y a rébellion d'un débiteur
soumis à la contrainte par corps, l'huissier peut établir
garnison aux portes pour empêcher l'évasion, et le débi-
teui^est poursuivi conformément à la loi. '
RÉBUS ( du latin res, chose ; abl. plur., rébus ) , expres-
sion tigurôe d'une pensée par une suite d'images, de
chiffres, de syllabes et de mots. Ainsi , on représente un
homme agenouillé oui tient sur sa main un grand I peint
en vert, et on lit : Un grand 1 vert main dénomme à ge»
noiLx porte, ce qui signifie ; Un grand hiver maint dom^
mage nous porte. Ménage appelle les Rébus « des équi*
voques de la peinture à la parole. » Rabelais les avait en
aversion , et les traitait u d'homonvmies ineptes, fades,
rustiques et barbares. » Mais , en dépit de ses anathèmes^
ils continuèrent d'être à la mode. — L'origine des Rébus
est fort ancienne; c'est à la Bazoche de Picardie qu'il
faut en attribuer le perfectionnement. Elle composait
chaque année, au Carnaval, des espèces de libelles inti-
tulés : De rébus quœ geruntur^ u des choses qui se font, »
c.-à-d. récit de ce qui se passe dans la ville. La partie
satirique de ces récits était cachée sous des signes ana-
logues à ceux que nous venons de citer, afin, sans doute,
de piquer plus vivement la curiosité. Le goût de ces
bizarres compositions avait été développé antérieurement
par l'usage de porter des marques distinctives dans les
tournois, et par les Jeux littéraires de la confrérie de
Notre-Dame-du-Puy. Le Rébus devint populaire dans la
France septentrionale ; il conquit un rang dans le Blason,
dont il égaya les armes parlantes; il figura sur les en-
Aseignes et sur les monnaies des évoques des Fous ; il se
"glissa même dans les épitaphes. La Bibliothèque impé-
riale de Paris possède deux manuscrits (n®* 7,618 et
10,278) intitulés Rébus de Picardie illuminés, qui datent
de la fin du xv* siècle, et parmi lesquels il s'en trouve
en patois picard. ÉUenne Tabouret, dans ses Bigarrures
du seigneur des Accords (Rouen, 1648; Paris, 1062),
consacre son chapitre II* aux Rébus de Picardie, et en
donne de curieux échantillons. De nos jours, le Rénus est
redevenu florissant : après avoir r^né sur les tabatières,
les éventails et les écrans, il a étendu son domaine Jus-
qu'aux assiettes de faïence. Jusqu'au papier qui enve-
loppe les bonbons; certains Journaux publient aussi des
Rébus. P — s.
RECEL, détention de choses enlevées, détournées ou
obtenues à l'aide d'nn crime ou d'un délit, avec cette
circonstance qu'on les sait provenir d'une source illicite.
Le receleur est puni comme complice. — On se sert
plutôt du mot Recèlement , pour l'action de cacher un
accusé et de le soustraire à la Justice. Le recèlement est
punissable, excepté de la part des père et mère, fils on
filles, époux, frères ou sœurs {Code pénal, art. 61, 83 V.
Aux termes de la loi du 21 mars 1832, celai qui a recéM
«I
REC
1538
RÉC
•u pris à sou service un soldat insoumis est puni d'un
emprisonnement dont la durée ne peut excéder 6 mois;
sMl est fonctionnaire public, la peine peut être portée à
Sans. — En matière civile, le Recèlement est l*acte de
soustraire par fraude et en cachette certains objets qui
dépendent d'une succession ou d*une communauté au
partage de laquelle on a des droits. Si les objets sont en>
levés ou détournés, Taction 8*appelle Dherlissement.
L*bérltier coupable de recèlement est privé du bénéfice
d'inventaire, du droit de renoncer à la succession, et,
dans certains cas, de sa part dans les objets distraits
(Code NapoLy art. 791, 801, 1477). La veuve qui a diverti
ou recelé quelques eflets de la communauté est déclarée
commune, nonobstant la renonciation qu'elle aurait faite;
il en est de même à l'égard de ses hén tiers. Le mari est
privé de sa portion dans les effets soustraits à la com-
munauté. Des omissions dans l'inventaire, faites sciem-
ment et dans un but firauduleux, constituent le recèle-
ment; si la fraude n'est pas constante, les objets sont
seulement rapportés à la masse.
RECENSE, c.-à-<L nouveau cens, nouvelle marque que
l'administration du contrôle applique, chez les orfèvres
et les bijoutiers, sur les objets d'or ou d'argent, quand
elle change le poinçon, pour dérouter les faussaires qui
auraient contrefait la marque connue.
RECENSERENT, opération administrative qui consiste
à dénombrer, soit la population d'un État, soit les indi-
vidus auxquels sont imposées certaines obligations par-
culières, comme le service militaire, le service de la
garde nationale, etc. Les anciens Égyptiens et les Ué-
reux faisaient de fréquents dénomorements ; on en
trouve deux dans la Bible, celui de Moïse [Nombres,
chap. P'), et celui de David (liv. des Rois). Dans l'an
cienne Rome, le dénombrement de la population, accom-
pagné d'une évaluation des fortunes, s'appelait cens ; il
avait lieu tous les 5 ans, et était fait par dos magistrats
spéciaux, appelés censeurs. C*était une opération im-
f>ortante, puisque les citoyens étaient rangés, d'après
e'ur fortune, dans l'une des classes établies par Servius
Tullius, et exerçaient une influence politique d'autant
plus grande qu'ils faisaient paitie d'une classe plus éle-
vée (JK. Classe, dans notre Dictionnaire de Biographie
et d'aistoire). En France, le recensement de la popula-
tion se fait tous les 5 ans ; en Angleterre et aux Etats-
Unis d'Amérique, tous les 10 ans x il sert h, apprécier les
forces de l'État, et à répartir également les charges.
RECENSEMENT (Conseil do). V. Conseil de recensement,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
RECËNSION, en termes de Bibliographie, révision
des manuscrits originaux et des diverses éditions d'un
livre, dans le but de préparer une édition nouvelle.
RÉCÉPISSÉ (mot latin qui signifie avoir reçu), écrit
par lequel on reconnaît avoir reçu des papiers, des actes,
des pièces quelconques.
RÉCEPTICES (Biens). V. Biens.
RECETTE, mot qui se dit : l*" de l'action de recevoir
ou de recouvrer ce qui est dû ; 2<> de ce qui est reçu en
argent ou autrement; 3<* du lieu ou du bureau où l'on
reçoit.
RECEVEUR, fonctionnaire de l'administration des
finances, chargé de percevoir les deniers publics. Les
Receveurs particuliers résident dans chaque chef-lieu
d'arrondissement , réunissent les fonds recueillis par les
percepteurs, et les versent, tous les dix jours, ou à des
(époques plus rapprochées, s'il y a lieu, dans la caisse du
Receveur général. Ils reçoivent aussi les fonds versés par
les communes, par les établissements publics, par les
corps de troupes, à titre de placements au Trésor; ils
sont les préposés de la caisse des Dépôts et consigna-
tions; ils payent les mandats émis pour les dépenses du-
bud^t de l'État et des départements, sur le visa des
Payeurs. A la demande des particuliers, ils achètent et
vendent des titres de rentes. Ils font payer aux rentiers
de leur circonscription , et sans déplacement, les arré-
rages de ces rentes. Ils sont responsables de la gestion
des percepteurs, vérifient leurs actes dans une tournée
annuelle d'inspection, et peuvent aussi les mander avec
toutes les pièces nécessaires. Ils surveillent aussi les
caisses et les écritures des receveurs spéciaux des com«
munes et des établissements de bienfaisance, les caisses
d'épargne et de prévoyance, la gestion des secrétaires
agents comptables des établissements d'enseignement
supérieur. — Us exercent les fonctions de receveurs mu-
nicipaux pour les communes dont les revenus ordinaires
ne dépassent pas 30,000 fr. Leur traitement fixe est de
tl|400 fr. ; mais ils ont certaines remises, et des bonifica*
tions d'intérêts sur le recouvrement des contributiooi
directes. — Les Receveurs généraux centralisent aui
chefs-lieux de département toute la recette des arrondis-
sements, répondent des fonds qu'ils ont en caisse et de
la gestion des receveurs particuliers et des percepteurs,
sont en compte-courant avec la caisse centrale du Trésor^
lui doivent l'intérêt de l'argent qu'ils gardent , lui font
des avances dont ils prélèvent k leur tour l'intérêt, émet-
tent des bons dans le public, dirigent les sommes qni
leur sont demandées sur la Banque de France ou sur les
lieux où le service les rend nécessaires, et doivent, un
an après la clôture de l'exercice, représenter à leurs ris-
ques et périls au compte de l'Etat tout le montant doF
contributions portées au rôle. Depuis 1864, Ils ont reçu
les attributions des Payeurs et le nom de Trésoriers
payeurs généraux. Leur traitement est de 12,000 fr.*,
ils ont des remises et des bonifications dlntérèts. — In-
dépendamment des receveurs généraux et particnliers,
il y a des receveurs des douanes, de Venregistrement et
des domaines, des contributions indirectes, des octrois
( V. ces mots). L.
RECfiZ. V. notre Dict. de Biogr. et d'Histoire.
RECHANGE , c-à-d. nouveau change , action de se
rembourser du principal d'une lettre de change non payée
et protestée, ainsi que des frais de protêt et autres, sur
le tireur ou sur l'un des endosseurs.
RÉCHAUD, récipient en tôle ou en fer forgé dans le-
quel on place de la braise allumée. Autrefois on se ser-
vait de réchauds montés sur roulettes pour chauffer
l'intérieur des appartements. On en voit un qui est fort
curieux dans la sacristie de l'église S*-Pierre, à Bcauvais.
RÉCIDIVE (du latin rectdere^ retomber), action de
commettre de nouveau un crime ou un délit pour lequel
on a d^à été condamné. Quiconque commet un second
crime emportant dégradation civique est condamne an
bannissement; si le second crime emporte le bannisse-
ment, la peine est la détention ; s'il emporte la déten-
tion, la réclusion, les travaux forcés à temps, on applique
le maximum de la peine; s'il emporte la déportation, la
peine est celle des travaux forcés à perpétuité. Pour un
délit commis après une condamnation motivée par un
crime, on applique le maximum de la peine correction-
nelle, qui peut même être élevée jusqu'au double. 11 en
est de même pour les condamnés correctionnellement à
un emprisonnement de plus d'une année , quand ils sont
récidivistes, et de plus ils sont mis sous la surveillance
pendant 5 ans au moins et 10 ans au plus {Codepénai,
art. 56-58). V. Meynadier, Des récidives en matière cri-
minelle, 1836, in-8° ; Bonneville, De la récidive, ou des
moyens les plus efficaces pour constater, rechercher et
réprimer les rechutes dans toute infraction à la loi pé-'
nale, 1839, in-8°; Hoorcbcke, De la récidive, dans ses
rapports avec la réforme pénitentiaire , Bruxelles, 1846,
in-8».
RÉCIPIENDAIRE, celui qu'on reçoit avec un certain
cérémonial dans un corps, dans une compagnie.
RÉCIPROQUE (Pronom). Ce pronom n'existe que dans
la langue grecque, et est formé du mot cUlos répété deux
fois et combiné avec lui-même, de manière à représenter
d'abord le sujet, puis le complément. Il a toujours la
terminaison plurielle. Ainsi, allèlôn, allèlois , allMous.
En français, pour exprimer l'idée de réciprocité, on se
sert du pronom réfléchi de la 3* personne avec ou sans
l'addition de l'un Vautre , les uns les autres, ou des ad-
verbes entre eux, mutuellement, réciproquement. P.
néciPROQUE (Proposition), proposition telle que le sujet
peut devenir Tattribut, et l'attribut le sujet : VAsie est la
plus grande contrée de Vancien monde, et la plus grande
contrée de l'ancien monde est VAsie.
RÉCIPROQUES (Verbes). On appelle ainsi, en français, les
verbes réfléchis dans la composition desquels entre la
préposition entre : s^entr*aider, s^entre-tuer^ etc. Souvent
le simple pronom réfléchi suffit à exprimer la récipro-
cité : les Anglais et les Français se sont longtemps cotn-
battus. P.
RÉCIT, en termes de Rhétorique, est synonyme de
Narration (F. ce mot). — En Musique, on appelait au-
trefois Récit tout ce qui était chanté par une voix seule,
ou exécuté par un instrument seul : on se sert aujour-
d'hui du mot italien Solo (seul). On donne quelquefois
le nom de récit, dans la symphonie, à l'instrument prin-
cipal. On l'a aussi employé comme synonyme de rictUy-
tif {V. ce nMt). B,
Récrr (Jeux de), jeux d'orgue oui correspondent au 3"
clavier, dit clavier de récit. Les Jeux oue l'on peut faire
Jouer su^ le wmmier du rédt sont : le nnit-pieds otifert.
RÉC
1539
REC
le bourdon da 8 pieds, le cornet de 5 tuyaux sur marche,
la musette de 8 pieds , la Toix humaine de 8 pieds, la
Qûte octaviante de 4 pieds, Toctavin de 2 pieds, la trom-
pette harmonique de 8 pieds, le clairon harmonique de
4 pieds. On enferme actuellement ces jeux dans une
i>o(te dite expressive, formée de jalousies qui peuvent
s*ouvrir ou se fermer à Tolonté au moyen d*une pédale
et donner un passage plus ou moins libre au son. On
obtient ainsi des effets plus ou moins heureux d^éloigne-
ment et de rapprochement des sonn. F. G.
RÉCITATIF, sorte de déclamation musicale, accompa-
gnée par Quelques notes d*orchebtre. Le Récitatif n'est
assujetti m & la mesure, ni au rhythme; placé entre les
airs, duos, trios et ensembles d*un opéra, il se chante
d'une manière plus ou moins soutenue ; c*est un langage
de conyention , qui tient le milieu entre la parole et le
chant : il repose l'auditeur, quu la continuité des mor-
ceaux fatiguerait aisément, et il sert aussi & faire avancer
nn peu Faction. Il est syllabiqne, c-i-d. que chaque note
porte sur une syllabe : on n'y répète point les- mots,
comme on le fait dans les morceaux mesurés; les notes
marouent l'intonation , mais non la durée des sons, qui
est anandonnée au goût du chanteur. Le récitatif est dit
obligé f quand ses interrallus de repos sont remplis par
des traits de symphonie. L<) premier emploi du récitatif
est attribué à Péri et à Monteverde; il fut ensuite per-
fectionné par Garissimi et par Alexandre Scarlatti. B.
RÉCITATION , prononciation , sur un ton soutenu ,
d'un discours ou morceau littéraire c^uelconque appris
par cœur. La récitation peut se défînir une « déclama-
tion simple et sans geste. » Bien réciter est aussi rare
q^e bien lire, et ce talent annonce l'intelligence nette de
Fensemble et des détails du morceau étudié, l'art d'en
reproduire exactement le i*.aractère, le ton, la couleur, et
de rendre sensibles à l'auditeur jusqu'aux nuances les
Ï>lus délicatesi Une bonne récitation excite plus vivement
'intérêt que la lecture la plus parfaite; et, quoique moins
animée , moins vivante que le débit d'un discours per-
sonnel ou qu'une improvisation, elle éveille en nous lidée
d'un orateur.
A Home, sous l'Empire, le mot Récitation s'appliqua
spécialement à la lecture que les beaux esprits faisaient
de leurs ouvrages devant une réunion d'amis ou d'ama-
teurs. Asinius Pollion, le premier, eut cette idée, dont
l'empereur Auguste encouragea la réalisation ; et bientôt
les lectures publiques devinrent une mode. On « récitait»
non-seulement chez soi, mais dans les bains publics,
sur les marches des temples, dans toutes les places. Au-
guste assistait à certaines lectures, et parfois en faisait
lui-même. Claude, Néron surtout, l'imitèrent, et maintes
fois ce César bel-esprit convoqua le peuple entier au
thé&tre pour se faire entendre. Sous son règne les Réci-
tationa devinrent une manie, une fureur ; non-seulement
elles pouvaient durer plusieurs heures, mais souvent
elles 86 prolongeaient pendant deux ou plusieurs jours.
Après Domitien commença la décadence, et la vogue des
lectures diminua sensiblement depuis Trajan. C'est dans
ces réunions littéraires que paraissent avoir été « réci-
téeSf » sinon « déclamées, » les tragédies dites de Sé-
nèque, bon nombre des Silves de Stace, et presque toutes
les pièces de poésie composées pendant le 1*' siècle de
l'Empire. Ce système de récitation a été funeste au goût :
il encouragea chez les écrivains le penchant au ton dé-
clamatoire, aux traits saillants et neufs, aux phrases à
facettes, aux expressions ingénieuses et brillantées; dé-
fauts qui séduisent toujours les auditoires nombreux. P.
RÉCLAME (du latin reclamaref rappeler), en termes
de Typographie, mot qu'on mettait autrefois au-dessous
de la dernière ligne d'une feuille ou d'une page, et qui
était le premier de la feuille ou de la page suivante. Le
mot réclame ne désigne plus guère aujourd'hui que la
note manuscrite qui rappelle au correcteur ou au metteur
en pages le dernier mot et le dernier folio d'une épreuve.
Les réclames facilitaient le travail du brocheur et du re-
lieur, en leur permettant de vérifier d'un coup d'œil la
jonction des pages entre elles. On y supplée maintenant
par un numéro d'ordre, mis au bas de chaque feuille
d'impression, au recto, et qui a reçu le nom de signa-
ture* Il y a des réclames dans les manuscrits dès le
XI* siècle, mais l'usage n'en devint général qu'au xiv*.
Le premier livre où l'on rencontre des réclames par
mots est le Tacite de Vindelin (Venise, 1468 ou 1469}.
V. Magné de MarolleSj Recherches sur Vorigine et le
prefmitT usage des regutres , des signatures , des ré-
eiamê$ et dês chiffres de pages dans les livres imprimés,
Paris, 1 782, ia-8^ B.
RiScLAMB , petit article inséré dana le corps d'un jour*
nal, au milieu des nouvelles et des faits divers, pour r^
commander un livre ou une marchandise dont Vannonce
se trouve plus loin. Séparée de la partie de la feuille qui
est ostensiblement consacrée à la publicité à prix fixe, la
réclame est censée contenir une appréciation impartiale
et indépendante. Cependant on la paye; ou bien elle est
une bonification que le journal fait à ceux qui achètent
sa publicité. Dans ce cas, elle est calculée sur le pied de
10 p. 100, c.-à-d. que celui qui fait une annonce de 100
lignes a droit à une réclame gratuite de 10 lignes. On
peut obtenir que la réclame ne passe que le lendemain
du jour où parait l'annonce. B.
RÉCLAME, terme de Liturgie. V, Répons.
RECLUS (du latin reclusus, renfermé), nom donné
autrefois à tout pénitent qui se condamnait à vivre en-
fermé dans une cellule, ordinairement attenante à une
église ou à un monastère, pour s'v livrer à la prière et à
la mortification. Il fallait la permission de l'évèque ou de
l'abbé. On voit encore une cellule de ce genre centre la
chapelle S^'-Barbe de la cathédrale de Bourges. B.
RECLUSION (du latin recludere, enfermer), peine
afflictive et infamante, infligée par les Cours d'assises,
et qui consiste à être détenu, pendant 5 ans an moins et
10 ans au plus, dans une maison de force, et à être
employé, dans l'intérieur de cette prison, à des travaux
déterminés par les règlements administratifs. Une partie
du salaire de ces travaux est réservée aux condamnés, et
leur est remise au moment de leur libération. La réclu-
sion est de droit accompagnée de Vexposition {V. ce
mot^j^ et emporte nécessairement la dégradation civique
et l'interdiction légale : il est donc nommé au condamné
un tuteur, dont les fonctions cessent avec la peine. —
Autrefois on appelait Réclusion l'action d'enfermer quel-
qu'un pour la vie dans un monastère.
RÉCOGNITIONS. V. CLéMENTDiES, dans notre Die*
tionnaire de Biographie et d^Histoire,
RÉCOLËMENT (du latin recolere, revoir, examiner de
nouveau), en termes de Jurisprudence, lecture de leur
déposition faite à des témoins qui ont été entendus dans
une procédure criminelle, pour voir s'ils y perustent;
— acte constatant qu'on a vérifié tous les efiTets et meu-
bles compris dans un inventaire ou portés'sur un procès-
verbal de saisie ; — en général, toute vérification d'une
opération ou d'un compte antérieur.
RÉCOLTES. En Droit, les récoltes pendantes par ra-
cines, c.-à-d. encore attachées au sol, sont considérées
comme immeMes; une fois détachées du sol, et quoique
non enlevées , elles sont meubles. La loi accorde privi-
lège sur la récolte de l'année pour l'exécution du bail.
Le vol et la tentative de vol de récoltes, non commis à
plusieurs et pendant la nuit, sont jugés correctionnelle-
ment, et punis des peines portées en l'art. 401 du Codé
pénal; commis par plusieurs et pendant la nuit, ils
sont jugés par la Cour d'assises, et punis conformément
à l'art. 388.
RECOMBfANDATION, terme de Droit féodal. V. notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
RECOMiiANDATioN , oppositiou quo l'ou met à la sortie
d'un prisonnier. Un créancier, qui a le droit d'exercer la
contrainte par corps contre son débiteur, peut le recom^
mander lorsqu'il est déjà détenu pour un délit ou pour
toute autre cause, et même lorsque son élargissement a
été prononcé. Les formalités à suivre en cette matière
ont été réglées par le Code de Procédure civile (art.
792-7«6 ).
RÉCOMPENSE, en termes de Droit, indemnité que
l'un des époux qui sont sous le régime de la commu-
nauté doit à l'autre, pour tout ce dont le premier aurait
personnellement et abusivement profité des biens du se-
cond. V. le Code NapoL, an. 1436-37.
RÉCONCILIAriON , en termes de Droit canonique,
acte solennel par lequel un hérétique est absous des cen-
sures qu'il avait encourues; — cérémonie qui se fait
pour rendre au culte une église profanée, par exemple
quand il y a eu meurtre dans le saint lieu, effusion cri-
minelle de sang, inhumation d'un excommunié, d'un
hérétique ou d'un infidèle, ou lorsque l'église a été con-
sacrée par un évêquo excommunié ou hérétique.
RECONDUCTION (du latin reconductio, louage à nou-
veau), renouvellement d'une location ou d'un bail à
ferme. La reconduction peut être expresse, c-à-d. faite
par écrit ou verbalement; ou tacite, par la contfaraation
de la jouissance après la fin du bail, sans nue le proprié-
taire s'y soit oppÎMé. V. le Codé NapoUon, art 1760
et ^•"ô.
RKC
1540
RÈC
RECONNAISSANCE. Dans la poésie épique et drama-
tique et dans les romans, ce mot désigne le moment où
nn personnage qni ne se connaît pas, ou qui ne connaît
pas celui avec qui il est en action, on n'en est pas connu,
acquiert ou fait acquérir cette connaissance. Ce sont les
recomuMsances de personnes. Il y a aussi les reconnais-
sances de choses, par exemple, lorsqu'on reconnaît que
l*on aTait porté sur tel ou tel personnage un faux Juge-
ment, lorsqu'une accusation injuste est confondue, etc.
Ces diverses Reconnaissances doivent naître du dévelop-
pement même de l'action ou de la peinture des passions
et des caractères; elle peuvent être amenées aussi par
quelque circonstance extérieure, par un souvenir fortuit,
une réflexion soudaine, un signe involontaire que l'in-
connu laisse échapper ou apercevoir. VOdyssée offre un
bel exemple de ce dernier genre , dans la scène entre
Ulysse et sa nourrice Euryclée. En général, la Reconnais-
sance prépare et amène la Péripétie (F. ce mot) ; quel-
ouefois elle se confond avec elle , comme dans VOEaipe-'
Èoi, de Sophocle ; mais elle ne doit pas constituer le
si^et môme, et c'est en quoi le plan de VBéraclius de
Corneille est vicieux. Elle peut être simple ou double :
simple, lorsqu'elle n'a lieu que pour un personnage;
double, lorsqu'un personnage, en se connaissant lui-
mdme, en reconnaît un autre, ou réciproquement. Elle
est simple dans Athalie, dans Electre; double ou mu-
tuelle dans OEdipe-Roi, dans Fphigénie en Tauride; elle
est mixte dans Mérope, car la reine ne se fait connaître
d'Égisthe qu'aseez longtemps après qu'elle a reconnu
elle-même qu'il était son fils. La Reconnaissance, ame-
nant la Péripétie, peut influer sur la Catastrophe ; mais
II n'en est pas toujours ainsi : dans YHippolyte d'Euri-
pide et la Phèdre de Racine, où l'innocence d'Hippolyte
est connue trop tard, et dans ZcOre, où Orosmane con-
naît également trop tard son erreur et ses soupçons in-
justes, la Reconnaissance ne change rien au dénoûment,
mais elle achève de Jeter de l'intérêt sur les victimes.
Corneille, dans son Héraclius, l'a placée après la Catar
strophe : c'est, dans sa pièce, un défaut qui diminue beau-
coup l'intérêt d'une situation intéressante en elle-même
et iH$pand de la fh)ideur sur la dernière scène ; Phocas
nne fois mort jet Héraclius proclamé empereur, qu'im-
porte que le vrai Héraclius soit reconnu 7
Dans les romans, dans les drames, et les œuvres comi-
ques, la Reconnaissance est un ressort d'un usage plus
fréquent que dans l'épopée et la tragédie. Chez les Ân-
ciens^ il était prodigué d'une maniera un peu trop uni-
forme, autant qu'on en peut Juger par ce qui nous raste
de leur thé&tre comique et de leurs romans. Toutefois il
est emplo)[é avec beaucoup de bonheur dans les Captifs
et V Amphitryon de Plante , dans le Phormion et VAnn
drimne de Térence, et il y contribue à l'intérêt des situa-
tions. Au reste, les meilleures scènes de reconnadssance,
dans les genres comiques, sont celles qui deviennent une
source nocivelle de ridicules : les Précieuses ridictdes ,
VAvaf^^m Fourberies de Scapin, V Amphitryon^ de
Molièra; la Métromanie^ de Piron; V Avocat Patelin, de
Brueys, etc., en offrent de bons modèles. Dans le drame,
elles peuvent se rapprocner de l'émotion tragique : les
deux scènes de V Ecole des Mères, de La Chaussée, où
M. Argent se fait connaître à sa fille llarianne, et celle-
ci à sa mère, sont à la fois naturelles et touchantes : elles
produisent la péripétie, rendent le dénoûment intéres-
sant, et contribuent à la moralité de la pièce. ^ P*
BiGONif AissANGB, OU tormes de Droit, acte écrit qui con-
tient l'aveu d'un fait ou d'une obligation antérieure. Plu-
Bienrs reoonneussances conformes, soutenues de la pos-
session, et dont l'une a 30 ans de date, dispensent de
représenter le titre primordial. On nomme reconnais»
s€tnce de promesse ou d'ecn'^rs la déclaration par la-
quelle une personne reconnaît qu'un écrit privé qu'on
lui représente émane d'elle ou qu'elle l'a souscrit. — La
reconnaissance d^enfant est la déclaration faite devant
l'officier de l'état civil et par laquelle on reconnaît être
le père ou la mère d'un enfant naturel ; elle doit être
inscrite sur les registres de l'état civil. L'intervention et
le consentement de l'enfant ne sont pas nécessaires. La
reconnaissance contenue d^ns un testament olographe est
régulière et valable. Celle qui serait faite par l'un des
époux au profit d'un enfant né avant le mariage et d'un
antre que son conjoint, ne peut nuire ni à celui-ci ni
aux enfants nés de ce mariage : toutefois, elle produirait
son effet après la dissolution du mariage, s'il n'en restait
pas d'enfants. L'enfant reconnu par son père a le droit
de porter son nom ; il suit, sous le rapport de la natio-
aalitéf la conditiPii de celui de ses pèire et mèro qui l'a
reconnu. Ses père et mère peuvent mettre obitacle à sod
mariage, et, oans certains cas, requérir contre lui la d^
tention correctionnelle ; mais leur puissance ne s'étend
pas sur ses biens, et ils n'en ont point l'usufruit légsl
jusqu'à ce qu'il atteigne 18 ans. Le» enfanta reconnus
ont certains droits sur les biens de leurs père et mère
décédés, mais non sur les biens des parents de ceux-d.
t la totalité de l'héritage, quand il n'y a point
de parents au degré successible, c-à-d. au iz* degré;
Ils prennent
si le père ou la mère a laissé des descendants légitimes,
l'enfant reconnu n'a qu'un tiers de la portion d'un en-
fant légitime; il a la moitié, s'il ne reste que des ascen-
dants ou des frères et sœurs, et les trois quarts, s'il n«
reste ni descendants, ni ascendants, ni frères ou sœurs,
ni descendants de frères et de sœurs. Le père et la mère
ne peuvent attribuer à l'enfant reconnu, ni par donation,
entre vifs, ni par testament, une part plus forte que celle
qui lui est assignée; mais ils peuvent réduire cette part
à la moitié, si l'enfant a reçu de leur vivant ce qm loi
est attribué pour tenir lieu de ses droits dans la succes-
sion future. La succession de l'enfant est dévolue an
père ou à la mère qui l'a reconnu, ou par moitié à tous
les deux.
RBCONNAissAifCB, OU tormos d'Art militaire, opération
ayant pour but d'examiner le théâtre de la guerre, on
les forces, les dispositions, ainsi que la situation de l'en-
nemi. La reconniidssance des lieux est l'œuvre des offi-
ciers d'état-major.
\ RBGOiiNAissANCB , OU tormos de Diplomatie , action de
reconnaître un gouvernement étranger et de nouer avec
lui des relations officielles.
REGONNAissAifCB, écrit psT lequel on constate qu'on a
reçu une somme, soit par emprunt, soit en dépôt, ou
autrement. Les Monts-de-Piété délivrent aux emprun-
teurs des reconnaissances qui constatent la nature et h
valeur des objets déposa, et la somme prêtée.
RECONVENTION, en termes de Droit, demande qu'op-
pose le défendeur à celle qui a été formée contre lui. Tel
est le cas d'un débiteur qui, sans nier la dette qu'on Ini
réclame , revendique de son côté une somme au moins
égale Que lui devrait son créancier. La reconvention
n'est aamise que quand il y a connexité entre les deui
demandes. Un luge de paix peut prononcer sur des ré-
clamations supérieures à celles que la loi laisse à sa com-
pétence , quand il en est saisi par une demande recoo-
ventionnelle.
RECORD. j r. ces mots dans notre DicUoimaère
RECORDER. ) de Biographie et é^Histoire,
RECORS, Jadis Record (du vieux français reoorder,
rappeler, constater^, nom donné aux individus dont un
huissier se fait assister dans ses actes, pour lui servir de
témoins, et au besoin pour lui prêter main forte.
RECOUPE , terme de Gravure. F. Coupe.
RECOUPEBfENT, en termes d'Architecture, large re-
traite qu'on laisse à chaque assise de pierres dans les
ouvrages construits sur un terrain à pente escarpée, ou
dans ceux qui sont fondés sous l'eau , pour leur donner
plus d'empattement et de solidité.
RECOURS , en termes de Droit, action en garantie oa
en dommages-intérêts que l'on a contre quel(p'un. Ainsi,
la loi accorde un recours au cohéritier qui a payé an
delà de ce dont il était tenu dans les dettes de la com-
munauté; an codébiteur d'une dette solidaire, qu'il s
payée en entier ; aux mineurs et aux interdits, contre
leur tuteur ; aux femmes mariées, contre leurs maris
{V. Code Napol.^ art. 875, 942, 1214 et suiv.).
RECOURS EN CASSATION. V, CASSATION Ot POURVOI.
RECOURS EN GRACE , demande adressée au chef de l'État
pour obtenir la remise ou la commutation d'une oeine
infligée par un Jugement ou un arrêt.
RECOUSSE, en termes de Marine, reprise d'un bâti-
ment sur l'ennemi par un autre bâtiment de sa nation.
Le navire est rendu à l'srmateur, nui paye le tiers de sa
valeur, comme droit de recousse. K. PosTumifiB.
RECRÉANCE, nom donné autrefois à un jugement
provisoire qui maintenait ou envoyait dans la jouissance
d'un bénéfice en litige, pendant la durée du procès, la
partie dont les droits paraissaient le mieux fondés.
RECRéANCB (Lettre de). F. Lettre de aBCRiancEt
RÉCRIMINATION, en termes de Rhétorique, accusa-
tion opposée à une autre. Ainsi t « Milon a tué Qodius;
mais Clodius attentait à sa me. — Oreste a tué sa mère;
mais Clytemnestre avait tué Agamemnon et vivait avec
son complice. » Les rhéteurs grecs appelaient ce genre
de discussion Anticatégorie (de anti, contre, et IcSégO'
rein, accuser), Antenclème on AntkUme (de mUi, eoaa%
RED
1541
RED
8t mclima, reproche ) , et ies Latins, mtUtui accusatw ou
(mc9riativa oratio.
RECRUE (du vieux français recroître, croître de nou-
Teaa), nouTelle levée de gens de guerre. Par extension ,
on a appelé recrues tous les Jeunes soldats.
REGROTEMENT, mot d*origine récente (F. Recbctb-
HENT, dans notre Dictionn, de Biographie et d^ Histoire) ,
par lequel on désigne le mode de formation de Tannée
en France. D'après la loi du 21 mars 1833. Tannée se
recrate de deux manières, par engagement {V. ce mot) ^
ou rarôlement libre, et par appel ou engagement forcé.
Lesenrice militaire, personnel et gratuit, est obligatoire
pour tous les Français &gés de 20 ans. Les jeunes gens
avant atteint cet ftge sont soumis au recrutement : des
listes sont dressées à cet effet dans chaque canton, et
l'ensemble des individus portés sur ces listes forme la
e/af30 de Vannée. Une loi annuelle détermine le nombre
d'hommes mis à la disposition du gouvernement (80,000
depuis 1830, 100,000 depuis 1860). Un tirage au sort fixe
l'ordre dans lequel les jeunes gens d'une même classe
seront examinés par les Conseils de révision, pour savoir
s'ils sont propres au service. Ceux qui sont reconnus aptes
au service forment la liste du contingent jusquà concur-
rence du nombre fixé par la loi ; ceux qui , par le béné-
fice du sort, n'y sont pas compris, restent dans laréserTe,
Outre ceux qid, par leur taille on leurs infirmités, sont
impropres an service, la loi exempte : Talné d'orphelins ;
le fils unique ou aîné, gendre ou petit-fils de veuve, de
pèA aveugle ou septuagénaire ; le plus âgé de deux frères
appelés au môme tiraçe ; celui dont le frère est sous les
ebupeaux à un autre titre que celui de remplaçant ; celui
dont le frère est mort en activité de service, ou réformé
ou retraité par suite de blessures reçues à l'armée. Tout
condamné à une peine afflictive ou infamante, ou même
correctionnelle avec surveillance de la haute police, est
exclu du service militaire. Sont considérés comme ayant
satisfait à la loi : les élèves des écoles Polytechnique et
Normide supérieure, et ceux des séminaires, pourvu
quUls suivent leur carrière ; les membres de Tinstruction
publique qui ont signé un engagement de 10 années; les
grands prix de TInstitut; les prix d'honneur du concours
.'enéral des lycées de Paris, La loi ne reconnaît plus
Il X soldats, comme aulrofois, le droit do remplace'
ment ( K. ce mot), 11 y a, dans chaque département, un
officier supérieur ou un capitaine commandant le dépôt
de recrutement, et chargé du détail des levées; il est
assisté de deux sous-ofiiciers. — Le recrutement de l'ar-
mée de mer est Tobjev de la loi du 3 brumaire an iv (25
oct. 1705) { V. Inscription haritihb, dans notre Diction-
naire de Btographie et d^ Histoire). V. Swanton, Diction-
naire du recrutement, 1838, in-8* ; Pradier-Fodéré, Lots
sur le recrutement^ 185i, in-12; Gonvot, Manuel du
recrutement , 3* édit., 1855 ; Corriger, Recueil méthodique
des dispositions qui régissent le recrtUement de l'armée,
1857, in-8*. F. Rbcrotement, dans le Supplément. B.
RECTEUR. V. ce mot dans notre Dicttonnatre de Bio-
graphie et d^ Histoire.
RECTO. V, Fouo.
RECUITE , opération par laquelle le peintre sur verre
on en émail parfond ses couleurs, en soumettant la pièce
peinte à Taction du feu.
RÉCUPÉRATEUR. V. ce mot dans notre Dictionnaire
iê Biographie et (^Histoire.
RÉCURRENT (Vers). V. Anactguqdb.
RÉCUSATION fdu latin recusatio, refus} , action de
décliner la compétence d'un tribunal ou d'un Juge, de
refuser un Juré, un expert, un arbitre, un témoin, etc.
Les causes de la récusation relatives aux Juges sont appli-
cables au ministère public, lors^'ll est partie Jointe ;
mais il n'est pas récusable quand il est partie principale.
Le Code de Procédure civile (art. 378) et le Code d'In-
struction criminelle (art. 332, 339) déterminent les cas
et les modes de récusation.
RECUSES , monnaies surfrappées, c.-jh1. qui ont été
marquées de deux types l'un sur l'autre.
REDAN ou REDI^NT (par contraction du latin rece-
dens^ se retirant, rentrant), se dit, dans la Fortification,
des lignes ou faces qui forment des angles rentrants et
saillants, pour se protéger les unes les autres. Les redans
se nomment encore ouorages d scie. — En Architecture,
redan est synonyme de recoupement ( V. ce mot),
KëDMEPTION (en latin redemptio, rachat), mot sp6-
talement consacré pour signifier le rachat du genre
humain par Jésus- Qirist, appelé pour cette raison le
Rédempteur. Âutiefoia, le rachat des chrétiens qui étaient
au pouvoir des lafidèlm se nommait aussi rédemption.
liÉDUIBITlGN (en laUn redhibit/}, action de ravoir )«
terme de Jurisprudence qui désigne Taction attribuée
dans certains cas à l'acheteur d'une chose mobilière dé-
fectueuse, pour en faire annuler la vente. 7. Vicbsi
RÉDIFS, c.-à-d. en turc qui xnennent après, soldats
organisés en Turquie à peu près sur la môme base que la
landwehr prussienne. On les oppose au nixam {nouvel
ordre, ou promit levée).
REDIMICULUM, ceinture des dames romaines qui en»
tourait deux fois le cou, se croisait sur la poitrine, pas-
sait sur les côtés , et faisait quelques tours pour assu-
jettir la robe sur les reins. Les anciens peintres chrétiens
donnèrent cette espèce de ceinture au Bon Pasteur et
aux Anges, sans doute parce qu'elle oSnlt la figure de la
croix,
REDINGOTE ( de l'anglais riding-coat, vêtement pour
monter à cheval ). C'était autrefois une espèce de casaque
plus ample que l'habit ordinaire, et dont on se couvrait
en temps de pluie ou de gelée, et pour monter à cheval :
la France l'emprunta à l'Angleterre vers 1725, Aujour-
d'hid la redingote est un vêtement plus long que l'habit,
de même forme jusqu'à la ceinture, mais dont les pans en-
tourent le corps et couvrent une partie des Jambes.
REDONDANCE, défaut du style, vicieuse superfluité
de paroles qui nuit à la netteté du discours. Cest comme
un bondissement de la pensée qui , après avoir frappé
l'esprit, rejaillit et retombe avec moins de force.
REDONDILLA. V. Espagnols (Poésie).
REDORTE (du latin retorta), meuble de Técu qui re-
présente une branche d'arbre tortillée en quatre cercles
l'un sur l'autre, et dont les deux bouts se trouvent au-
dessus, vers le chef.
REDOUBLEMENT, en termes de Grammaire grecque «
répétition de la consonne initiale d'un verbe devant Taug«
ment syllabique au parfait de tous les modes ; ainsi , le
verbe basileuô fait au parfait b-e-bcuileuka. Dans les
verbes commençant par une voyelle, le redoublement
affecte la forme de Taugment temporel ; ainsi , agô fait
au parfait ékha : cependant certains verbes de ce genre
ont un redoublement réel, qui consiste dans la repéti-
tion des deux premières lettres du radical ; tel est le verbe
égheirô, dont, le porfaii rigoureusement régulier serait
êgherka, mais qui fait à ce temps éghégherka. Ce redou-
blement est dit attique, quoiqu'il fût aussi usité dans
les trois autres dialectes littéraires. Dans la langue homé-
rique ou épique, le redoublement existe aussi à l'aoriste
second de certains verbes : ainsi, terpô faisait tétarpon
aussi bien que étarpon. Enfin les verbes dits allongés
prenaient souvent devant leur radical un redoublement;
ainsi , le verbe ghirpnomai ( pour ghi-ghénomai) est l'al-
longement du primitif ghénomai. — Certains verbes latins
ofiTrent des particularités analogues : tango fait au parfait
tetigi; pello, pepuli; curro, cucturi, etc.
Le redoublement des consonnes en français n'est qu'un
simple fait orthographique, étymologique, ou de pronon*
ciation. Très-souvent le caprice seul Ta introduit, ot ce
n'est pas Tune des moindres difficultés de notre langue,
au point de vue de l'orthographe, même pour les natio-
naux ( V. Ginmit-Duvivier, Grammaire des Grammaires,
paoes 944-956, édit. Lemaire).
On redouble un mot , une expression, lorsqu'on veut
Îr attirer l'attention du lecteur ou de l'auditeur, surtout
orsque le sentiment de celui qui parle a quelaue chose
de vif et de passionné, comme dans ce vers de Racine
(Athalie.l, i)i
Bompes , rompes tout pacte aveo Timpiété.
Quelquefois le redoublement se fait par un mot à peu
près svnonyme : « Retiré du milieu des ruines et des d^
bris de la maison rovale. n (IIassilloii.) Souvent l'idée,
non le mot, est redoublée; dans ce cas, on s'exprime
d'abord en termes plus ou moins généraux, plus ou moins
vagues, et la seconde forme de la pensée a quelque chose
de plus précis, de plus particulier :
L*arclie sainte est muette , et ne rend pins d*orades.
(RiiciiiB, /Mtf.)
Dlen, qnl hait les tjrrans , et qnl dans JesralU
Jura d'exterminer Âchab et Jtfaabel. ( Id. IWd, 1. )
On bien le redoublement de Texpression i^oute à la pr»*
mière , renchérit sur elle, lui donne plus de force et
d'éclat, comme dans cette phrase de Massillon t « Rien
ne lui pandt digne de récompense dans set s^|et8 que let
talents utiles àla patrie: les faveurs annoncent toi^ooTt
le mérite ou le suwent de près, a
REF
1542
RÊF
Dans notre ▼eniflcation, le mot redoubUtnent ft*ap-
pliqne aa retour ou h la continuation de la mdme rime
dans le cours d^une période, quelquefois d'une pièce en-
tière. Bien employée, cette licence donne à an morceau
an air de facilité, soutient Tharmonie, charme Toreille,
et peat produire on effet poétique; mais Tabus en est
insipide et rebutant. La Fontaine Ta employée avec succès
dans la pièce d^euToi qui précède la fable lé Chat €t la
Souris (Xn, 5) t les consonnances en u s'entendent douze
fois, mais entremêlées de rimes féminines variées; la
fable elle-même présente cette rime cinq fois dans les
9 premiers vers. Dans V Homme et la Puc$ (VIII, 5), les
rimes en «r et en im sont redoublées avec bonheur. La
poésie lyrique offre plusieurs beaux exemples de ces re-
doublements, particalièrement les chœurs d*E$iher et
d*Athalie. P.
.REDOUTE (de l'italien ridotto, réduit), en termes de
Fortification, petit fort détaché, construit en maçonnerie
ou en terre, et propre à recevoir de l'artillerie. Une re-
doute consiste en un simple rempart avec fossé, et pré-
sente de 3 à 8 fh>nts, selon les circonstances et les lieux.
Elle sert à arrêter la marche de Tennemi, à défendre un
point stratégique, à prolonger la résistance d'une place.
— Dans plusieurs villes d'Italie et de France, on nomme
encore Redoute un endroit public où l'on se réunit pour
Jouer ou danser.
REDOWA, sorte de valse qui tient de la pollca (F. ce
mot). C'est la même mesure à 3 temps, mais avec un
rhythme moins précipité.
RÉDUCTION, en termes de Beaux-Arts, opération qui
consiste à copier un objet, en donnant à la copie une
moindre grandeur qu'à l'original. Divers procédés méca-
niques ont été inventés pour exécuter cette opération
avec une précision mathématique ( V. Carreaux, Diagra-
PBB, Pantographb). Vassri parle d'un certain Alberti qui,
au XVI* siècle, avait inventé un instrument pour copier
les tableaux en les réduisant à volonté.
Rioocnoii, ancien terme de Musique. V. DéovcTioiii.
RéDOcnoR (Action en), en termes de Jurisprudence, ac-
tion dont le but est de ramener à moindre valeur une
libéralité, une disposition dans laquelle a été excédée la
faculté permise par la loi. Les hbéralités entre vifs ou à
cause de mort qui excèdent la quotité disponible sont
réductibles à cette quotité lors de l'ouverture de la suc-
cession. L'action en réduction ne peut être exercée que
par les héritiers à réserve, leurs successeurs ou ayants
cause. Elle peut être dirigée et contre les donataires
entre vifs et contre les tiers détenteurs des inmieubles
faisant partie de la donation.
RéDocTiON A l'absurde, OU tcrmos de Logique, argu-
ment par lequel on démontre une proposition en faisant
voir que le contraire serait impossible ou absurde, ou
conduirait & des conséquences entachées des mêmes vices.
RÉDUIT, en termes de Fortification, poste ménagé
dans l'intérieur d'une demi-lune (K. ee mot)^ et où l'on
se retranche quand celle-ci est enlevée. On peut de là,
par un feu vivement soutenu, empêcher l'ennemi de
s'établir dans la demi-lune, et même le contraindre de
Tabandonner.
RÉDUPLICATION, nom donné autrefois à une répéti-
tion de neumes sur le dernier mot des grands répons.
On la faisait pour donner le temps de rentrer au chœur
après une station dans la nef.
RÉDUPLICATIVE (Proposition). V. Causals.
RÉFACTION DE DROFfS , réduction des droits de
douane accordée aux marohandises qui ont été avariées
par événements de mer , et qui n'ont plus la valeur
fixée par le prix-courant des mêmes espèces de mar-
chandises.
RÉFECTOIRE , salle où les moines d'un couvent, et,
en général, tous ceux qui mènent la vie commune, tels
que les élèves internes d'une maison d'éducation, se
inêunissent pour prendre leurs repas. Il s'y trouve une
chaire, où quelqu'un fait de pieuses lectures.
REFENDS, en termes d'Architecture, lignes horizon-
tales ou verticales creusées régulièrement sur une face de
construction, pour indiquer réellement ou en apparence
la grandeur des pierres ou les assises, ou pour empêcher
qu'on en aperçoive les Joints. Les murs de la Maison
carrée à Nîmes, et ceux de l'église de la Madeleine à
Paris, sont divisés à l'exturieur par des refends. Les re-
fends qui suivent les assises ont pour effet de les pro*
téger contre les intempéiies; c'est un contre-sens d'en
mettre à des constructions susceptibles d'être lavées par
des eaux coarantes, telles que des piles de ponts. —
^ On nomme Mur de refend un mur intérieur qui sépare
les pièces d*un bâtiment; Pierre de refend, une piem
angulaire.
RÉFÉRÉ, recoon exercé devant on juge dans le mt,
soit en cas d'urgence do faire statuer provisoirement poui
la conservation d'un droit, soit de parvenir à résoudre
des difficultés soulevées par l'exécution des Jugements ou
des actes exécutoires. !« principe de cette Juridiction se
retrouve dans l'Ordonnance de 1685. La connaissance
des référés appartient aujourd'hui au président du tribu-
nal de première instance ou au Juge qui le remplace. U
}r a trois modes de les introduire : !• par assignation à
'audience des référés, <m suivant les délais ordinaires;
2P à bref délai à l'audience ou à l'hêtel du président, ou
sur l'heure, mais après en avoir obtenu l'autorisation
préalable; 3* par t^ournement sur les procès-verbaux
des Juges de paix, notaires, hidssiers, gardes du com-
merce, etc. Les ordonnances ou Jugements de référé
sont toujours exécutoires par provision. L'ordonnance
peut être exécutée sur la minute, mais toujoun après
signification à personne ou domicile. Elle peut être atta-
quée par la voie de l'i^ipel, si la valeur du litige excède
le taux du dernier ressort. L'appel doit être interjeté
dans la quinzaine de la signification. Les. décisions en
matière de référé ne sont pas susceptibles de pourvoi,
par ce motif qu'elles n'engagent pas le principal. V. Bil-
bard. Traité des référés, 1834, in-8« ; Dèbelleyme, Or-
donnances sur requêtes et sur référés, 3* édition, 1856,
2 vol. in-8<>. R. d'E.
RÉFÉRENDAIRE. V. ce mot dans notre JDtcftofNUtire
de Biographie et d'Histoire,
RÉFÉRENDUM, dépêche qu'un agent diplomatique
expédie à son gouvernement pour lui demander des
instructions nouvelles, 'orsque les négociations qu'il
poursuit l'entraînent bon de la limite de ses pouvoirs.
En attendant la réponse, il ne peut négocier que ad ré-
férendum et sub sperati,
RÉFLÉCHI (Pronom), pronom qui sert à exprimer
l'objet d'une action lorsque cet objet représente le sujet
même, comme lorsqu'on dit : t Elmire se regarde; » se
est l'objet de l'action exprimée par le verbe regarder, et
représente le sujet de cette action qui est Elmire. Le
pronom réfléchi se distingue du simple pronom person-
nel, en ce qu'il ne peut Jan^ais s'employer que comme
régime. En français, il n'a \\b forme spéciale qu'à la
3* personne, se, soi, qui sert pour les deux nombres et
les deux genres. A la l'* et à la 2* personne, l'idée ré-
fléchie est exprimée par les simples pronoms personnels
répétés sous leur forme de complément. Quelquefois le
pronom est répété pléonastiquement avec l'addition de
l'adjectif même . « d'aimer trop svi-même est un ridicule
et un vice. » D arrive souvent que, même à la 3* per-
sonne, le pronom personnel ordinaire fait fonction de
pronom réfléchi, surtout lorsque le sij^et n'est pas vague
(l'Empereur réunit autour de lui tous les officiers), ou
est du pluriel (les prisonniers priaient le vainqueur
d'avoir pitié d*eux) ; enfin, lorsqu'il faut représenter par
un pronom, sous forme de complément, dans une pro-
position subordonnée, le sujet d'une proposition princi-
pale : « Diogène voulut qu'on l'abandonnât sans sépulture
après sa mort. »
En latin, le pronom réfléchi, dont la forme est sui pour
le génitif, sibi pour le datif, se ou sese pour l'accusatif et
l'ablatif des deux nombres, est plus fréquemment em-
ployé que le nôtre, et contribue beaucoup à la précision
des phrases. L'emploi en a lieu invariablement toute» les
fois que le pronom personnel se trouve dans la môme
proposition que le nom qu'il représente, ou même dans
une proposition immédiatement dépendante de la prin-
cipale où se trouve ce nom, *' à comme sujet, soit
comme complément. — La langue grecque faisait égal^
ment un usage très-précis du pronom réfléchi héaiUoû,
héautés, héautoù. Ni en latin ni en grec le pronom r^
fléchi ne pouvait avoir de nominatif. Dans les deux
langues anciennes, aussi bien que dans le français, le
pronom réfléchi exprime très-souvent la réciprocité. V. Ré-
ciproque (Pronom). P.
RéFLécHi (Verbe), verbe dont le complément, soit direct,
soit indirect, représente le sujet : « Vorgueilleux aimii à se
louer; — Je me suis trompé; — Nous nous sommes égarés,*
Aux temps composés ces verbes se conjuguent avec l'auxi-
liaire être; mais comme cet auxiliaire remplace le verbe
avoir, l'accord du participe se fait, par une espèce de syi-
lepse, comme s'il était uni au verbe avoir, c-à-d. que, si
le pronom complément est employé comme complément
direct, c'est avec lui que l'accord du participe a lieu, el
que, si ce complément est indirect, le participe reste in*
RÉF
1543
RÉF
rarittbie. — Beaixcoap de verbes françaift sont réfléchis
piiT la forme, mais oot un sens passif, et se construisent,
quant à la syntaxe, comme les ?erbes passifs : « Un mal
invétéré ne saurait se guérir promptement (c-à-d. être
guéri)'\ — Les États se ruinent par la discorde (c-à-d.
sont ruinés), » Un fait plus étrange, c*est la forme ré-
fléchie donnée par un très-vieil usage à certains verbes
neutres qui logiquement n'en sont point susceptibles ;
tels sont s*en àler^ s'en venir, se mourir, etc. Certains
antres verbes ne s'emploient jamais que sous la forme
réfléchie, comme s'enfuir, se repentir, sHngénier, s'ar^
roger, s'obstiner, etc. Enfin la forme réfléchie donne à
certains verbes actifs ou neutres une nuance de sens
toute particulière; ainsi, se douter de n'offre qu'une ana-
logie très-lointaine avec le verbe douter; s*apercevoir de
exprime une idée un peu différente de celle du simple
apercevoir. Il en est de même de étudier et s'étudier à,
aviser et s^aviser de, défaire et se défaire de, etc. V. Pro-
ROMniAL (Verbe).
En latin, lorsqu'il s'agit de donner au verbe le sens
réfléchi, on rait le même système qu'en français, sinon
que la conjugaison même du verbe n'y est jamais modi-
fiée. Il en est de môme généralement en grec, atec cette
seule différence que toujours l'adjectif correspondant au
français même {aiUos, autè, auto) est ajouté an pronom
de chaque personne; ainsi on ne oit pas en grec jem^aime
{égd mé phild)^ mais faime moUméme {égô" émauton
phHd)\fX ainsi de suite, tu aimes toi-même, U aime
soi-même, nous aimons notu-mémes, etc. Dans un cer-
tain nombre de cas, la voix moyenne exprime d'une façon
à la fois concise et nette l'idée réfléchie. V. Motki. P.
RÉFLECTEUR ACOUSTIQUE, plaque de métal con-
cave qu'on adapte au pavillon des Instruments à vent,
et dont la mobilité permet de lui faire prendre toutes les
directions voulues. A l'aide de ce réflecteur, inventé
par Sax en 1839, on peut diriger les sons vers tel ou tel
point.
RÉFLEXION (du latin reflectere, replier), acte par
lequel l'esprit se replie en quelque sorte sur lui-même
pour considérer les faits qui se passent en lui. La Ré-
flexion n'est que Vattention ayant pour objet un phéno-
mène interne; le géomètre et le philosophe qui cherchent
la solution d'un problème de mathématiques ou de mo-
rale font acte de réflexion. Cet acte embrasse les percep-
tions par les sens, les faits de la mémoire aussi bien que
ceux de la conscience et de la raison; les idées qui
proviennent de ces différentes sources ont besoin du
travail intérieur de la pensée pour devenir claires, et
pour que l'esprit puisse les distinguer les unes des
autres. On peut donc dire avec Locke que la Réflexion
est la connaissance que prend l'&me de ses différentes
opérations, mais sans en conclure comme lui qu'elle est
elle-même une source d'idées nouvelles. R.
RÉFLEXIONS ET MAXIMES, titre sous lequel Vauve-
nargues nous a laissé un certain nombre de Pensées à la
manière de La Rochefoucauld. Les éditions qu'on en a
données contiennent aussi plusieurs autres écrits ou
fragments de philosophie morale, où l'on entrevoit é^i-
iement ce qu'il y eut de tendresse et d'élévation dans
son âme, de distinction et de ^vité dans son esprit. Ce
sont : 1<> an Traité sur Vesprtt humain, en trois livres,
oCi l'auteur considère successivement l'esprit en lui-
même, puis les passions, puis le bien et le mal moral
avec les dispositions de l'àme qui produisent l'un et
l'autre; œuvre incomplète et faiblement conçue, mais
qui renferme pourtant quelques vues originales et fines;
2^ des Réflexions d'une certaine étendue sur divers su-
jeis capricieusement rapprochés de philosophie, de litté-
rature, de morale et de critiaue; Z^ des Conseils à un
jeune homme sur la conduite de la vie ; leçons qu'on di-
rait parfois dictées par an stoïcien, et où Vauvenargues,
malheureux jusqu'à son dernier Jour, affirmait pourtant,
en dépit de ses propres déceptions, qne le mérite per-
sonnel et le courage finissent par triompher de tout; qu'il
faut être d'abord soi-même, si Ton veut s'acquérir les
étrangers, et qu'une &me courageuse ne doit demander
qu'au travail une destinée digne d'elle; 4^ des Réflexions
critiques sur quelques poëtes du xvii* et du xvm* siècle,
où l'on relèverait aisément, à côté de plusieurs erreurs
sur Corneille et sur Molière, et de complaisances inévi-
table pour le talent tragique de Voltaire, son ami, des
jugements d'un bon sens exquis sur La Fontaine, Boi-
leaa et Racine; suit une page éloquente sur Bossuet,
Pascal et Fénelon, puis une appréciation très-solide et
très-éclaîrée des Caractères de La Bruyère; 5<» des Co-
iradàres imités de La Bruyère et de Théophraste, parmi
lesquels brille le portrait de cet infortané Clazomèna
(entendez Vauvenargues lui-même), « qui a eu l'expé-
rience de toutes les misères de l'humanité, » mais qui
n'eût pas voulu changer sa misère pour la prospérité des
hommes faibles, car « si la fortune peut se jouer de la
sagesse des gens vertueux, il ne lui appartient pas de
faire fléchir leur courage; » &* deui Discours sur la
gloire, après laquelle Vauvenargues soupira toute sa vie,
suivis d'un troisième sur les plaisirs, où il se montre le
censeur sévère des mœurs de son temps ; 7* des Cofist-
dérations sur le caractère des différents siècles, où sa
hardiesse éclairée et libérale défendait contre les atta-
ques légères et dédaigneuses de ses contemporains les
mœurs et même les superstitions des temps les plus
anciens; puis vient un Discours sur les mœurs du
xvni* siècle, véritable contre-partie du précédent opus-
cule, sorte Nde procès intenté à tous les vices de cette
société corrompue. « bassement partagée entre l'intérêt
et les plaisirs, et aevenue incapable des grandes choses,
depuis qu'elle avait appris le mépris de la gloire et de la
vertu ; » 8<> un Discours sur Vinigalité des richesses, où
Vauvenargues défendait la Providence en disciple de
Pascal, de Bossuet et de Fénelon, peut-être plus encore
qu'en philosophe. Le même sentiment chrétien, profond
et sincère, qui avait animé déjà VÉloge funèbre de cet
Hippolyte de Seytres, ravi dès l'&ge de.l8 ans par la guerre
à la tendre amitié de Vauvenargues, a é^ilement inspiré
la Méditation sur la Foi, la Prière à la THniU, le Traité
sur le libre arbitre, le EHscours sur la Liberté, et le mor-
ceau intitulé Imitation de Pascal sur la relipon chré-
tienne, sur le stoïcisme, sur les illusions de l'impie et la
vanité des philosophes. Enfin, au commencement de
notre siècle, furent publiés 18 Dialogues des Morts, où
Ton sent encore l'influence de Fénelon sur Vauvenargues;
agréables imitations qui rappellent, avec moins de force,
le bon sens et la rimplicité des Dialogues du modèle. Les
relations et la Correspondance de Vauvenar^es avec
Voltaire l'ont fait appeler quelquefois son disciple, n est
vrai qu'il professa toute sa vie une admiration sincère et
un tendre attachement pour le premier génie de son
temps, qu'il demanda ses avis et les suivit; il est vrai
encore qu'il tint du grand apôtre de la tolérance et du
chef des libres-penseurs au xvm* siècle la haine de la
persécution et le doute sur le dogme; mais, du reste, il
appartient plutôt au siècle précédent, non-seulement par
le culte qu'il rendit ouvertement aax oénies chrétiens
contre lesquels guerroyait Voltaire, mais encore par la
pureté, l'élévation et le caractère éminemment spiritua-
liste de ses Pensées. Tandis qu'autour de lui la vanité,
le scepticisme moqaeur et la volupté régnaient à peu près
sans partage, il vanta, il prêcha presque la verta, l'amour
de la gloire, la confiance en Dieu et la soumission à la
Providence. Il écrivit que « les premiers jours du prin-
temps ont moins de gr&ce que la vertu naissante d'un
jeune homme, % et que « les premiers feux de l'aurore
ne sont pas si doux que les premiers resards de la gloire. »
Il chercha en Dieu l'espérance et Ta force pour son
&me triste et délaissée. Plus malheureux en cela que
Pascal, qui du moins n'eut à lutter que contre sa raisen,
il eut a défendre les croyances où le portait son cœur, et
contre son propre, esprit, et contre les mille objections
dont l'obséaait son entourage. Ce combat courageux et
perpétuel contre le scepticisme, les petites passions, la
misère, le découragement et même le désespoir, qui est
comme le fonds des Pensées de Vauvenargues, constitue
son originalité dans le xvm* siècle et son pins beau titre
de gloire auprès de la postérité. A. H.
RÉFORME ou RÉFORMATION, terme d'ffistoire reli-
gieuse. F. ce mot dans notre Dictumnaire de BiograpkU
et ^Histoire,
R^poRMi, en termes d'Administration militaire, licen-
ciement partiel d'une armée, réduction d'an corps de
troupes à un moindre nomlKre ; — renvoi d'an homme
impropre an service, soit quand il passe devant le con*
seil de révision, soit par congé (F. Gonoé); — position
de l'officier sans emploi , prononcée pour infirmités incu-
rables, ou pour incondmte habituelle, on pour fantes
graves commises soit dans le service, soit contre la dis-
cipline, ou pour prolongation au delà de 3 ans de la po-
sition de non-activité. L'officier réformé, n'étant plus
susceptible d'être rappelé à l'activité, ne peut prétendre
à une pension de retraite, mais seulement à un traite^
ment de réforme, pourvu qu'il ait 7 ans de service ac-
complis ; s'il a moins de SO ans de service, il reçoit, pen-
dant un temps égal à la moitié de la durée de ses
services effectifs, les 2/3 da minimum de la pension d&
RÉF
au
RÉ6
retraits de son grade; sMI a plus de 20 ans de serffce, la
quotité de flon traitemept est déterminée par le minimum
de la retraite de son grade, à raison d'un 30* pour chaque
année de serdce efTectif.
b6k>bme DBS HoiiiiAUS. uom ([u*on donnait Jadis à Tacte
de rétablir la Taleur réelle des espèces dont on avait fic-
tivement snrhauMé le prix. Leur réformation était Tacte
de les refrapper, sans les fondve, pour en changer ou la
valeur ou Tempreinte.
RÉFORlfÊES (Éelises). V. Êgusbs sépORHéBS, dans
notre Dictionnaire de Biographie et fT Histoire.
RÉFRAGTAIRBS. F, ce mot dans notre Dictumnaire de
Biographie et d^ffistoire,
REFRAIN (du bas latin referaneus cantus, chant qui
revient toujours], répétition d*un ou plusieurs mots, d'un
ou plusieurs vers, dans les ballades, les rondeaux , trio-
lets, chansons, rondes, vaudevilles, romances, barcar
roUes, etc. Le refrain des ballades se composait d*un
même vers répété à la fin de chaque couplet et de TEn-
▼oi. Dans le rondeau ordinaire, il consiste dans la répé-
tition des premiers mots du 1*' couplet & la fin du 2' et
<lu 3*. Dans les rondeaux des opéra^omiques, le refrain
forme une sorte de couplet iniUal, qui se répète après
les deux couplets proprement dits. Dans les triolets, le
refrain était la reproduction du premier vers après le
3*, et des deux premiers à la fin de la pièce. Dans les
chansons, les refrains sont plus libres et plus variés :
tantôt on répète un ou deux vers, soit au commencement,
soit à la fin de chaque couplet; tantôt le premier et le
dernier vers du 1* couplet reviennent dans les couplets
suivants; quelquefois le môme vers se répète à la fois au
commencement et à la fin de chaque couplet; souvent
c*est le couplet initial qui forme le refrain. Après avoir
répété le refrain sans aucun changement un certain
nombre de fois, on peut le modifier à la fin de la chanson,
n arrive aussi quil ne conserve dans le cours de la
chanson qu'un mot ou une rime, et que l'idée fonda-
mentale se modifie successivement à chaque couplet. Le
refrain peut être double : il consiste alors dans la répé-
tition d^un ou deux vers du couplet précédent au com-
mencement de chaque couplet et avant le refrain régulier
et périodique. Dans la chainson légère, le refrain consiste
souvent dans le retour de certaines onomatopées, comme
ton ton tontaine ton ton, mironton mirontaine, plan plan
rantanplan , etc. Un refrain peut dans certains cas se
bisser, ou se répéter trois, quatre et Jusqu'à huit fois.
La plupart du temps, il se chante en chœur, et , dans les
rondes, on le chante en tournant. — Le refrain se trouve
aussi dans la poésie lyrique élevée, soit dans les opéras,
soit dans les tragédies où Ton a essayé d'introduire des
chœurs. Les chceurs des tragédies et des comédies grec-
ques en offrent déjà des exemples; les épithalames, les
Idylles, les églogues, les pièces pastorales ou erotiques,
étaient souvent divisées en couplets avec retour pério-
dique d'un ou plusieurs vers. Mus dans -ce qui nous reste
de petits poèmes anciens, le refrain ne se présente nulle
part avec les formes variées que lui ont données nos au-
tenrs de chansons et de vaudevilles. P.
REFRAPPÉES (Médailles), médailles dont les contours
du type sont douoles, par 1 effet des coups redoublte du
marteau et du mouvement du flan.
REFRÉDOIR , vieux mot signifiant mse à rafraichir.
RÉFUGIÉS POLITIQUES , nom par lequel on désigne
les étrangers que des motifs, ou même des crimes poli-
tiques forcent de chercher un refVige en pays étranger.
Les réfrigiés,à leur arrivée sur le territoire français,
doivent se présenter au maire de la première commune,
qui leur donne une passe provisoire pour se rendre au
cnef-lieu du département. Là, le préfet peut leur déli-
yrer un passe-port pour la résidence qu'ils ont choisie ,
en prévenant le ministre de l'Intérieur. Ils peuvent ob-
tenir des secours de l'État. Le ministre a le droit de les
expulser par mesure de police ( Règlement du 30 mai
1848; Loi du 3 déc. 1849).
RÉFUTATION, en termes de Rhétorique, partie du
discours q^xi se place ordinairement après la Confirma-
tion , et qv* a pour objet de ruiner ou du moins d'affai-
blir les raisons de l'adversaire. Cicéron ne veut pas qu'on
la sépare de la Confirmation : « II n'y a, dit-il , qu'un
seul procédé pour étayer vos preuves, et ce procédé ren-
ferme les deux parties ou'on voudrait disjoindre; car
TOUS ne pouvez ni détniire ce qu'on vous objecte, sans
appuyer ce qui orouve en votre faveur, ni établir vos
moyens, sans réfuter ceux de l'adversaire; ce sont deux
choses Jointes par leur nature, par leur but, et par
r usage qie vous en faites. * Blalgre l'avis de Cicéron, les
rhéteurs ont persisté à faire de la Réfotation une partie
distincte du uiscours ; mais Us laissent au disoemeroeot
de l'orateur à déterminer la place qu'elle doit occuper.
Quand l'auditeur est prévenu et circonvenu par les rai-
sons de l'adversaire, il faut que la Réfutation commence
dès l'Exorde, ou du moins qu'elle précède la Conflrmar
tion, et quelquefois même la Narration; il y a enfin une
espèce de discours qu'on appelle Réplùitie, et qui n'est
d'un bout à l'autre qu'une réfutation. Dans cette partie
du discours, l'orateur prend séparément chaque raison
de l'adversaire, la dépouille de tous ses ornements, la ra-
mène à l'expression la plus simple, et s'attache à prou-
ver : ou que le principe de l'adversaire était faux ; ou que
d'un principe vrai il a tiré une conséquence fausse; ou
qu'il a affirmé un Mi douteux. Quand on ne peut arriver
à une conclusion aussi précise, on cherche du moins à
ieter dans l'esprit de l'auditeur quelque doute sur la va-
leur des preuves de l'adversaire. Les moyens les plus
communs de la Réfutation sont : la négation, quand on
nie absolument le fait; la distinction^ quand on sépare
le droit du fait , ou le fait du droit , ou le principe des
conséquences; la récrimination, quand on montre que
l'adversaire a fait aussi ce dont il vous accuse, moyen
fort usité chez les Anciens, mais qui répugne à la poli-
tesse de nos mœurs, et qui d'ailleurs ne prouve rien, car
on n'est pas Justifié pour avoir montré qu'un autre est
également coupable; Vévasion, quand on élude de ré-
pondre et qu'on détourne l'attention de l'auditeur; la
compensation, quand à une action blâmable on oppose
une action digne d'éloges, ce qu'on appelle chez nous les
circonstances atténuantes; enfin, \h confutatUm , quand
on s'empare du côté ridicule des raisons de l'adversaire,
pour le railler et faire rire à ses dépens. La Réfutation
est la partie du discours où l'orateur doit surtout se mon-
trer logicien : il lui faut une grande habitude de l'aigu-
mentation, une grande sagacité pour saisir la liaison des
idées, discerner si elles se conviennent , et confondre les
sophismes qui se cachent bien souvent sous les fleun
d'une éloquence facile et brillante. H. D.
RÉGALE (Jeu de), le plus ancien des jeux à anche àt
l'orgue. Ce Jeu, formé d'anches battantes montées sur
leur pied et sans tuyaux, était autrefois très-estimé; c'est
pourquoi il reçut le nom de régale ou jeu royal. Aujour-
d'hui, il n'est plus en usage dans les orgues d'église; il
n'existe que dans quelques orgues en tables. F. C.
nécALB, instrument de musique, le même que le claque-
bois (V. ce mot).
Ri^r.ALB (Droit de). > V. notre DictionmUre de BiO'
RÉGALIENS (Droits). ( graphie et d'Histoire.
REGARD , en termes d'Architecture, ouverture maçon-
née, pratiquée pour faciliter la visite d'un conduit, d'un
aqueduc, d'un égout. On nomme regard de fontcûne l'ou-
verture d'un aqueduc où est établi un robinet servant à
la distribution des eaux. — En Peinture, deux portraits
de grandeur égale ou à peu près, peints de taçon que
les figures se regardent l'une l'autre, sont appelés un
regard.
REGARDS , nom donné autrefois à de menues rentes
oui accompagnaient les rentes principales. C'étaient or-
dinairement des volailles, des œufs, des pains, etc.
RÉGATES (de l'italien regatta), nom donné autrefois
aux joutes de gondoles qui avaient lieu à Venise. On Ta
étendu à toutes les courses en bateau ou en canot. Depuis
1853, le ministère de la marine en France accorde des
prix aux régates qui ont lieu sur le littoral de la mer :
c'est que ces Joutes déterminent chez les constructeurs
une rivalité dont la navigation peut recueillir des avan-
tages.
RÉGENCE (du latin regere, gouverner), se dit (lu
temps pendant lequel l'administration d'un État est con-
fiée à une ou plusieurs personnes suppléant le souverain
mineur, empêché ou absent , et du pouvoir que ces per-
sonnes, dites régents, exercent. En France, des ordon-
nances de 1403 et 1407 établirent (quelques règles pour
les régences : les reines-mères devaient être appelées à
diriger l'État si elles vivaient, ainsi que les plus prochains
du lignage. La loi de régence du 30 août 1842, rendue
après la mort du duc d'Orléans, investissait de la régence
le prince le plus proche du trône dans l'ordre de succes-
sion, et parvenu à l'ftge de 21 ans accomplis. Aux termes
du sénatus-consulte du 8 juillet 1856, sous un empereur
mineur, dont le père n'aurait pas réglé la régence avant
son décès, l'impératrice-mère serait régente; elle per-
drait ce droit en convolant à de secondes noces. A défont
d'un régent institué d'avance ou de l'impératrire-mère,
la régence appartiendrait au premier des princes français
RÉ6
1545
RËG
dans Tordra de l*hérédité à la couronne, et, si aucun
prince français n'était en ftge de I*exercer, le sénat défé-
rerait ce mandat. En tout cas, le mariage de Tempereur,
les sénatus-consultes organiques, les traités de paix, d'al-
liance ou de commerce, devraient être soumis à la déli-
bération du Conseil de régence, formé des princes
français et d*un petit nombre de personnages chOisis par
l'empereur- ou le sénat , convoqué et présidé par l'impé-
ratrice-mère, le régent ou leurs délégués.
afoENCB, nom donné à Tadministration de certaines
villes, comme Amsterdam et Kiel, et au gouvernement
de certains États, notamment des États Barbaresques.
RÉGENT, celui qui est chargé de la régence d'un État.
On donne le même nom aux membres du Conseil supé-
rieur d'administration de la Banque de France, et aux
maîtres chargés de l'enseignement dans les collèges com-
munaux. Dans l'ancienne Université, le nom de régents
était appliqué à tous les professeurs indistinctement, et
on appelait docteurs régents les docteurs qui professaient
la théologie, le droit ou la médecine.
RÉGICIDE (du latin rex, roi , et cœdere, tuer), assas-
sinat d'un roi , et celui qui le commet ou tente de le com-
mettre. En France, avant 1789, les régicides étaient écar-
telés ou périssaient sur la roue; aujourd'hui ils subissent
la peine du parricide ( V, ce mot). On a aussi donné le
nom de régicides aux membres du Parlement qui con-
damnèrent à mort Charles P' en Angleterre, et à ceux de
la Convention qui condamnèrent Louis XYI en France.
RÉGIE (du latin regere, diriger, gérer ), administration
de biens, à «la charge d'en rendre compte. Un particulier
donne ses biens en régie, quand il confie à un régisseur,
moyennant salaire, la perception des revenus qu'ils peu-
vent produire. Un collège est en régie, lorsque le prin-
cipal l'administre pour le compte de la ville. En matière
d'administration publique, on nomme Bégie toute admi-
nistration chargée de la perception directe de certains re-
venus; ainsi, ron dit la Régie des tabacs, la Régie des
poudres et salpêtres, la Régie des contrioutions indi-
rectes. Une régie est dite intéressée, quand le régisseur
a une part des produits, comme cela a lieu pour les
droits d'enregistrement. On met des travaux publics en
régie, quand on les fait exécuter sous la surveillance
d'agents de l'État, au compte du soumissionnaire qui n'a
jea tenu ses engagements.
RÉGIME (du latin regimen, venant de regere, gouver-
ner, conduire), en termes d'Économie sociale, toute ma-
nière de constituer une société, de gouverner un État.
Ainsi l'on dit le régime despotique, le régime constitu-
tionnel, le régime féodal, etc. En Droit, l'ensemble des
dispositions législatives qui régissent la société conjugale
se nomme régime dotal ou régime de la communauté
(F. ces mois).
aéoiMB, en termes de Grammaire, mot immédiatement
dépendant d'un autre, et qui peut, en raison de cette
dépendance, modifier sa propre forme. Cette modificaUon
n'a guère lieu que dans les langues riches en flexions
grammaticales; ainsi, en grec, en latin, en allemand,
un nom qui dépend d'un verbe actif se met à l'accusatif;
d'autres rerbes exigeront qu'il prenne la forme du datif.
Les noms changent également de forme suivant qu'ils
sont construits avec telle ou telle préposition, ou que
cette préposition est prise dans un sens ou dans un
autre. De là on dit qu'un nom est régi au génitif, au
datif, à l'accusatif, etc., par tel ou tel mot, ou que ce
mot régit ou gouverne le génitif, le datif, etc. Dans les
langues dépourvues de flexions casuelles, le mot com-
plémentj comme plus général, est plus juste que le mot
réginu. On distingue, comme pour les compléments, le
régime direct et le régime indirect. Le direct est celui
qui modifie sa forme sans l'intermédiaire d'aucune pré-
position ; l'indirect, celui qui, outre la modification ca-
suelle qu'il éprouve, se Joint au mot régissant à l'aide
d'une préposition. Ainsi, en grec, les verbes passifs ré-
gissent directement le datif, indirectement le génitif, ce
deniier cas ne s'employant (^'avec la préposition 6ic6, oh
Kopâ, ou ix, ou icpoc En latin, scripst ad patrem episto-
km présente deux accusatifs, dont le premier est ré^me
indirect, le second direct. Dans vestem dabo paupert, les
deux régimes sont directs, comme dans doceopueros gram-
maticam, hoc te rogo , etc. Ainsi un mot grec ou latin ,
directement régi à tel ou tel cas, peut avoir pour équi-
valent dans notre langue un mot servant de complément
indirect; comme on le voit par la traduction des exem-
Eles cités : « J'ai écrit à mon père ; je donnerai un ha-
it d ce pauyre; j'instruis les enfants sur la grammaire;
je demande cela de vous, etc. » F. CoMPLéMioiT. P»
RÉGIMENT. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
RÉGIOLES , regiolœ , petites portes placées au devant
de la confession d'un autel dans les anciennes églises ,
et par lesquelles on introduisait les linges qu'on voulait
faire toucher aux reliques,
RÉGISSEUR, celui qui est chargé de la régie d'un bien
(F. RéGis). Au théâtre, les foncUons de régisseur con-
sistent à monter les pièces qu'il s'agit de représenter, et
à répondre aux interpellations du public.
REGISTRE , en termes d'Imprimerie , correspondance
que les lignes des deux pages d'un même feuillet ont
l'une avec l'autre. — Autrefois on appelait registre une
petite table rappelant les premiers mots des feuillets qui
composent la moitié de chague cahier : c'est le moyen
dont les imprimeurs se servirent d'abord pour régler et
faciliter l'assemblage et la reliure des livres. Les olus
anciens ouvrages où l'on trouve le re^stre sont les Phi-
lippiquês de Cicéron et le Tite-Live imprimés par Ulrie
Han, en 1469 ou 1470.
REGISTRES DE l'orgcb (du latin regere, régir, gouver*
ner), règles mobiles en bois, percées de trous h des dis-
tances égales aux trous du sommier, servant à ouvrir ou
à fermer les difiérents Jeux ou séries de tuyaux de l'or-
gue. On fait nuu*cher les registres au moyen des tirants,
tringles carrées, placées à la droite et à la gauche de la
fenêtre du clavier, et que l'organiste tire ou pousse, sui*
vaut qu'il veut ouvrir ou fermer le vent à telle ou telle
série de jeux. — Par extension, on appelé Begistres de
la voix les sons graves, les moyens, et les aigus, qui for-
ment comme trois jeux dans la voix humaine. Ou bien
on ne distingue que deux registres, l'un comprenant
tous les sons de poitrine, et l'autre les sons de tête ou de
fausset. F. C.
RÈGLE (en latin régula; de regere, diriger), tout prin-
cipe sur lequel s'appuie la pratique de la morale, du
Droit, des sciences, des arts, etc. Il y a des règles aux-
quelles l'écrivain doit s'astreindre, s'il veut perfectionner
son talent. Ces règles sont des conseils dictés par l'expé-
rience, plutôt que des lois inflexibles, et ne détruisent
pas l'indépendance de l'esprit : car, dit Quintilien, si on
les prenait servilement pour guides, si l'on s'assujettis-
sait à une seule méthode, ce serait vouloir éprouver la
lenteur pénible des gens qui marchent sur une corde :
le chemin public n'est pas une loi indispensable; nous
le quittons souvent pour abréger la marche; si le pont
est Drisé, nous faisons un circuit, et, si la porte est en-
vironnée de flammes, nous sortirons par la fenêtre. Les
r^les n'ont pas précédé, mais suivi les modèles; on ad-
mirait les chefs-d'œuvre de Sophocle et d'Euripide, avant
qu'Horace eût tracé les règles de l'art dramatique : les
préceptes ont été puisés dans les œuvres de ceux qui
écrivaient de manière & plaire et à entraîner, et les cri-
tiques n'ont fait qu'observer et formuler. Les règles,
comme on l'a dit, sont l'itinéraire du génie.
RÈGLE , ensemble des statuts que les religieux d'un
Ordre sont tenus d'observer.
RÈGLEBIENT, statut qui détermine et prescrit ce que
Ton doit faire. Les décrets impériaux sont des règlements,
qui obligent les citoyens comme les lois elles-mêmes.
Les règlements de police, prescrivant des mesures rela-
tives à la propreté , à la salubrité, à la sûreté et à la
tranquillité publiques, sont faits par le préfet de police
à Paris, par les préfets dans les départements, par les
maires àms les communes, et sont obligatoires pour les
administrés. On nomme règlements d'administration
publique ceux qui établissent de quelle manière les
lois, décrets et ordonnances doivent être exécutés. —
Dans l'ancien Droit français , on appelait Arrêts de r^
glement les r^ements ^ue les Parlements rendaient
soit sur la procédure, soit sur des Questions civiles ou
ecclésiastiques, et qui avaient force de loi dans les tri-
bunaux : ils ont été supprimés parla loi du 24 août 1790.
Ai^ourd'hui, en Procédure , le Bèglement de juges est
l'arrêt d'une autorité supérieure décidant devant quels
juges un proeès sera porté ; cas oui se présente lorsque
deux tribunaux se sont déclarés incompétents , ou lors-
qu'ils veulent tous deux retenir la cause (F. le Code de
Procédure civile, art. 363-367 , et Code d:instruction
criminelle, tit. v, ch. 1).
RÈGLEMENT, en termes de Commerce, remise de va-
leurs destinées à solder un compte ouvert
RÉGLET, petite moulure plate et droite qui sert, dans
les compartimenta et les panneaux, à en séparer les par-
ties, et a former des guillochés et des entrelacs.
REGNE (dû latin regnum), mot qui dési^ le gouver-
RÉH
1546
REI
ncnient d'an senTerafn. On l'emploie au figuré en par-
lant des choses qui ont de Tautontô, de rinflaenoe, de la
vogue, comme quand on dit le règne de la justice, le
règne des lois , le règne de la mode,
RÉGNICOLB (da latin regnwn, royaume, et incola,
habitant), se dit, en Jurisprudence, des habitants d'un
royaume, d'un pays, avant droit comme tels à certains
droits. On l'oppose à étranger.
REGRÈS, en termes de Droit canonique, retour à un
bénéfice que l'on avait résigné ou permuté.
RÉGULIER, religieux soumis à une règle. Les Ordres
monastiques forment le clergé régulier ,
BÉGuuKR , se dit , en Grammaire , de tout ce qui est
conforme à certaines règles établies par l'usage et consa-
crées par les écrivains les plus distingués. Ce terme s'ap-
plique à la forme des mots isolà^ à celfe des vers, à la
composition des stances, des strophes, à la syntaxe et à
la construction des phrases, à Tordonnance des ou-
vrages littéraires. On se sert quelquefois, dans la môme
acception, du mot normal (du latin norma, règle). Dans
les langues modernes, le mot régulier s'applique surtout
aux verbes dont la conjugaison est conforme aux para-
digmes adoptés, parce que cette espèce de mots y est la
plus susceptible de variations, souvent capricieuses. P.
RteDLiBRS (Tons ou Modes^, nom donné dans le Plain-
Cliant aux tons ou modes qui se terminent par leur note
final A.
REHABILITATION (de la particule re, et habUis, ha-
bile, propre à), en termes de Droit, rétablissement d'un
condamné dans ses anciens droits. Avant 1789, les lettres
de réhabilitation accordées par le roi anéantissaient la
condamnation prononcée contre un accusé, à qui l'on ne
devait plus imprimer aucune note d'infamie. Il n'en est
pas de même ae la réhabilitation actuelle : elle fait seu-
lement cesser les incapacités qui résultaient de la con-
damnation; il n'y a point de réhabilitation de la mé-
moire . puisqu'il ne s'agit que de réintégration dans
l'exercice de droits personnels, abstraction faite du bien
ou mal Juçé , et sans aucun retour vers le procès ; notre
réhabilitation est une récompense de la bonne conduite
du condamné , et s'applique à l'innocent comme au cou-
pable. C'est faute d'avoir fait cette distinction qu'on n'a
pas compris l'impossibilité de réhabiliter certains con-
damnés fameux. Tout condamné qui a subi sa peine, ou
qui a été gracié , peut être réhabilité; pour les condam-
nés aux travaux forcés ou à la réclusion, la demande en
réhabilitation ne peut être formée que 5 ans après l'ex-
piration de la peine (ce délai n'est que de 3 ans pour les
condamnés à une peine correctionnelle); pour les con-
damnés à la dégradation civique, le délai do 5 ans court
du jour de l'exécution de l'arrêt. Un séjour de 5 ans dans
le même arrondissement, de 2 ans dans la même com-
mune, est encore exigé. La demande de réhabilitation
c^t déposée au greffe, rendue publique, et, après avis de
la Cour d'appel, le chef de l'Etat prononce en Conseil
privé ( V. le Code d^Instruct. crxm,^ art. tti9-634, et
la Loi du 3 juillet 1852).— En matière commerciale, le
failli qui a intégralement acquitté ses dettes peut être
réhabilité par une décision judiciaire; mais il n'y a
pas de réhabilitation pour les banqueroutiers fraudu*
Icux ( V. le Code de commerce, art. 526, 531, 604-614).
— Autrefois il y avait une réhabilitation de mariage^
que les Parlements ordonnaient pour réparer quelque
vice de forme dont le mariage avait été entaché; on
procédait alors à une nouvelle célébration, si les par»
ties consentaient à rester unies.
BÉHABiuTATioii uTTÉRAmB , teutativo de Jugement en
appel devant la postérité, en faveur d'un ouvrage con-
damné depuis longtemps par l'opinion publique, et dont
l'auteur est mort. Il arrive parfois qu'un ouvrage n'ob-
tient pas le succès auquel il a droit; mais s'il a un vrai
fond de mérite, l'opinion contemporaine revient, et il
prend son rang. Quant au livre ou à l'ouvrage quelconque
qui, après avoir eu an succès contemporain, n'est
qu'une œuvre médiocre, il finit toigours par tomber.
Quelques parties remarquables ne le soutiendront pas,
et, malgré les efforts, les fantaisies de bon sentiment de
quelques critiques dans la postérité, il est mort et bien
mort, et on ne parvient pas même à le galvaniser. Cer-
tains ouvrages s'éteignent en conservant an petit éclat ,
reste de leur fortune première, un écho de leur réputation
contemporaine; semblables & ces corps ensevelis dans les
catacombes de Rome , gardant encore leur forme après
des siècles, mais qui tombent en poussière dès qu'on lei
touche. Thomas ComeUle a eu, de son vivant, de très-
grands succès au théâtre, et aujourd'hui on ne connaît
plus que son nom; d^Âubignét Scudéry, Ihw'sault, Lu-
motte, Dancourt, etc., ont été dans le même cas. Vou-
loir exhumer de prétendus chefs-d'œuvre littéraires,
c'est toujours perdre son temps, et courir après le plaisir
et l'instruction pour n'atteindre que l'ennui et le dégoût.
De là tant d'auteurs dont les noms surchargent les bio-
graphies, et qui ne laissent littéralement qu'un nom et
le souvenir d'une réputation entièrement évanouie. Les
tentatives de réhabilitations littéraires sont ordinaûrement
des fantaisies de critiques , des thèses paradoxales que
les critiques soutiennent pour faire briller leur propre
esprit. Si la thèse est bien faite, cÂle amuse, on y peut
rencontrer quelques parcelles d'or tirées d'un tas de dé-
combres; mais elle ne persuade personne ,
Et ravare LUhé ne lâche pas m proie.
REHAUTS, touches vives et brillantes par lesquelles
le peintre ajoute à l'éclat des plus grandes lumières de
son tableau, et, par là, à l'échelle de tons dans laquelle
il s'était d'abord renfermé. Les rehauts du dessinateur
sont des touches d'un crayon plus blanc que le papier
dont il s'est servi. Les décorateurs usent, pour les r^aats,
de feuilles d'or ou d'argent, et de clinquants de diverses
couleurs.
REIMS fArc de), monument romain connu sout le nom
de Porte ae Mars, élevé , selon les uns, en l'honneur de
J. César au temps d'Auguste , et , selon les autres, par
l'empereur Julien. Il servit de porte de ville Jusqu'en
1544 : à cette époque on ouvrit une nouvelle porte ^ et
l'arc fut enfoui dans le rempart II fut retrouvé en 1505,
puis oublié de nouveau. On le déblaya en 1677, mais
il est resté enclavé dans le mur d'enceinte, et ne pré-
sente à la vue qu'une de ses faces. Il est percé de trois
arcades, entre chacune desquelles sont deux colonnes
corinthiennes engagées, d'un mètre de diamètre, de
13 mètres de hauteur, et qui reposent sur un soubas-
sement. On voit encore, dans les entre-colonnements,
de grands médaillons , où étaient des bustes eo demi-
ronde-bosse, et des niches à fronton. La hauteur de
Tare, non compris l'attique, dont il ne reste plus de ves-
tiges, est de 11 met.; sa largeur, de 28 met. L'arcade
principale, dite des Saisons, à cause des bas-reliefs dont sa
voûte est décorée, a 9'",50 de hauteur, sur 4"",50 de lar-
geur; les deux autres, dites de^Romulus et de Léda, ont
9"» d'élévation, sur 3™,15 d'ouverture. B.
RBMis r Église Notrb-Damb, àj. Sur l'emplacement
d'une église bâtie par les soins de S^ Nicaise vers 401 ,
et dans laquelle Clovis reçut le baptême, un nouvel édi-
fice fut élevé au temps de Louis le Débonnaire par l'ar-
chitecte Romuald. Flodoard, dans son Histoire de Végliss
de Reims, en a décrit les magnificences. En 1211, an
incendie dévora une partie de la ville, et la cathédrale
dut être reconstruite. On y travailla dès 1212. Robert de
Coucy donna les dessins du monument actuel, qui oc-
cupe une superficie de 6,650 met., et qui est une des
plus belles œuvres de l'architecture ogivale pour la ré-
gularité du plan, l'unité du style, l'ordonnance des par-
ties, l'harmonie des détails et la perfection des orne-
ments. Le chapitre put prendre possession du chœur en
1241 ; les tours de la façade principale furent acherées
en 1430. Un incendie, en* 1481, consuma cinq clochers
qui surmontaient la croisée; on ne les a pas rétablis.
— * Ia cathédrale de Reims est en forme de croix la-
tine : elle a 138 met. de longueur et 31 mètres de lar-
geur ; la croisée est large de 50 met. Robert de Coucy
avait conçu son édifice avec des dimensions colossales,
auxquelles on renonça bientôt : c'est ce que prouve la
puissance des soubassements, à laquelle les étapes supé-
rieurs sont loin de répondre ; on reconnaît au'on a di-
minué, autant que possible, le volume primitif des points
d'appui ; la base des contreforts a une saillie et une force
que ne motive pas la légèreté de la partie supérieure. Le
grand portail occidental, qui a 47 met. de largeur, est
une merveille, et, dans les idées populaires, il constitue-
rait avec la nef d'Amiens, le chœur de Beauvaîs, la flèche
de Chartres ou de Strasbourg, un corps véritsJilement
parfait. Sa partie inférieure, divisée par trois ouvertures,
offre une certaine ressemblance avec la partie correspon-
dante de la cathédrale d'Amiens : elle a peut-être moias
de majesté dans l'ensemble, mais beaucoup plus de ri-
chesse dans les sculptures, et l'on ne saurait trouver
rien de plus intéressant que cette réunion de niches, cr
daia, de statues et statuettes (au nombre de 530), de pi-
nacles, de feuillages, d'aiguilles et de clochetons. Des
trois arcades ea ogive, celle du milieu est plus haute
REI
1547
BEL
qne les autres : elle a il '",66 d'oa?erture, et les autres 7°*.
Leurs jparois latérales sont décorées de 35 statues colos-
aalee (ï^JS de hauteur) de patriarches, de prophètes, de
rois, d*évéaues, de vierges et de martyrs, reposant sur un
stylobate d'assez mauvais goût et qu'on croit avoir été
refait au xvui* siècle. Au pilier qui partage en deux
rentrée principale est adossée une statue de la S^* Vierge,
et les bas-reliefs qui couvrent les faces de ce pilier re-
présentent la chute du premier homme. La voussure
offre cinq rangs de petites figures, au nombre de 160 ; ces
rangs sont' séparés par des guirlandes de fleurs. Les
voussures des deux autres portes ont chacune 97 sta-
tuettes. Les tympans sont à Jour et vitrés. Les pieds-droits
et les linteaux des trois portes sont chargés aussi de
sculptures historiques ou allégoriques. L*arcade du mi-
lieu représente le couronnement de la Vierge, celle de
droite le Jugement dernier, et celle de gauche la Pas-
sion. Le second étage du portail présente quatre contre-
forts d'une rare élégance : ils accompagnent la grande
rosace , surmontée d'un arc ogival dont la voussiire est
ornée de dix statues ayant rapport ^ Thistoire de Da-
vid. Le sommet de la façade est formé par la galerie
des Hois^ où 4'2 statues de rois de France , depuis Clo-
vis jusqu'à Charles VI, remplissent autant d'arcades
aiguës, ornées de découpures en trèfles et surmontées de
petits frontons triangulaires. Deux tours sveltes et élé-
gantes, de 7 met. de côté, complètent cet ensemble : en-
tourées de statues d'évôques, evidées à jour par de larges
ouvertures , flanquées à leurs angles de tourelles égale-
ment découpées, elles ont une apparence tout aérienne;
leur hauteur est de 83 met. — Les portails latéraux
offrent aussi de beaux détails d'architecture et de sculp-
ture. Du côté du Nord, il v a deux portes voisines l'une
de l'autre, et de même dimension que les petites du
grand portail : à Tune, qui est fermée depuis longtemps,
on voit la résurrection des morts, le jugement dernier,
le supplice des réprouvés, et les Joies du Paradis; l'autre,
flanquée de 3 grandes statues de chaque côté, présente,
é^lement en bas-reliefs, le martyre de S^ Nicaise et les
miracles de S^ Rémi. A l'extrémité de l'abside s'élève, de
18 met. au-dessus du toit, une'gracieuse flèche en char-
pente recouverte de plomb, dite flèche de l'Ange, parce
qu'elle porte à sa pointe un ange doré qui tient une croix :
sa base est supportée par 8 figures colossales, espèces de
cariatides, dont l'attitude, l'expression et les attributs
ont exercé en vain jusqu'ici la sagacité des archéologues.
Toute l'église est couverte en plomb. Alentour régnent
22 contre-forts à doubles arcs-boutants, et couronnés
chacun par une statue d'ange ou de roi.
L'intérieur de la cathédrale de Reims a un aspect im-
posant. La voûte de la grande nef s'élève à une hauteur
de 37'",60; elle est peinte en azur et parsemée de fleurs
de lis, décoration qui fut faite pour le sacre de Charles X.
Les nefs latérales, comme dans tous les édifices du
xm* siècle, sont dépourvues de chapelles, mais il y en a
sept qui rayonnent autour du chevet. Les piliers sont
ronds, cantonnés toutefois de quatre colonnes cylindriques
d'un diamètre moins considérable, et portent d'élégants
chapiteaux h volutes recourbées, à feuiHages légers et
gracieux, d'où s'élancent des colonnettes qui vont soute-
nir les nervures de la voûte. Les travées sont réunies les
unes aux autres par de belles galeries, composées de
petites colonnes à chapiteaux et d'ouvertures ogivales de
3'",30 d'élévation. Les fenêtres ont pour la plupart con-
servé leurs verrières ; les plus remarquables œuvres des
peintres verriers dans cet édifice sont les roses des por-
tails, surtout celle du portail méridional, qui représente
le Père Étemel sous les traits et les attributs de Jupiter,
et entouré des 12 Apôtres. La rose du Nord offre les
12 signes du zodiaque. Dans la cathédrale de Reims, le
transept est beaucoup plus rapproché du chevet que
dans la plupart des autres églises du moyen âge : il en
est résulté que le chœur, trop étroit pour les grandes
cérémonies du sacre des rois de France, a été agrandi
aux dépens de la croisée et même de la grande nef,
sur laquelle il empiète de trois travées. C'est une dis-
position défectueuse, qui a pour effet de rétrécir les pro-
portions des autres parties: le chœur proprement dit
et le sanctuaire ont leur destination naturelle ; mais l'ar-
rière-chœur, qui renfermait avant la Révolution le Trésor
de l'église, vases sacrés, reliquaires, saintes images,
riches off'randes des rois, des seigneurs et des prélats, n'a
plus d'emploi aujourd'hui. Il y avait autrefois une clôture
de chœur en pierre sculptée et un très-beau Jubé : ces
œuvres ont été détruites. L'orgue, fût en 1481, réparé
en 1647, et do rouveau par JoUn Abbey en 1840 , est
regardé comme un chef-d'œuvre : il est haut de 20 met.,
et on j employa 7,250 kilogr. d'étain. Dans le collatéral
de droite, on voit le cénotaphe en marbre de Jovin, pré-
fet de la Gaule celtique : c'est un de^ plus beaux mor-
ceaux de sculpture antique qu'il y ait en France. Il pro-
vient d'une église S*-Nicaise, détruite à la Révolution. Sa
longueur est de 2™, 78, sa largeur et sa profondeur de
i™,50; le bas-relief représente une chasse au lion. Au-
dessus de la sacristie est une curieuse horloge à figures
mécaniques. La cathédrale de Reims contient de nom-
breuses pierres tumulaires, parmi lesquelles on remarque
celle de Hugues Libergier, architecte de S*-Nicaise; elle
a quelques précieux tableaux : Jésits et Madeleine, attri-
bué au Titien; une Nativité, par le Tintoret; le Lave-
ment des pieds , par Jérôme Muziano ; le Christ aux
Anges, par Taddeo Zuccharo ; la Manne dçms le désert,
par le Poussin. Citons encore de curieuses tapisse-
ries (F. Tapisseries), et un Trésor qui renferme, entre
autres richesses: le reliquaire de Sanson (xii* siècle),
celui de S* Pierre et S^ Paul, tous deux en forme de petits
monuments d'architecture; le vaisseau de S^* Ursule,
donné par Henri III ; le reliquaire de la sainte Ampoule;
les vases et ornements du sacre de Charles X; une croix
byzantine, divers ostensoirs, etc. V, Gilbert, Desctiption
htstoriqw de Véglise métropolitaine de Reims, 1825,
in -8^; Povillon-Piérard, Description historiqiie de Té-
glise métropolitaine de Reims, in<^® j Tarbé, Notre-Dame
de Reims, in-8<^; Ch. Cerf, Histoire et description de
Notre-Dame de Reims, Paris, 1861, 2 vol. in-8«, flg. B.
REIMS (Église S*-Remi, h). Cette église, la plus ancienne
de la ville, fut fondée en 1005, sur l'emplacement d'une
chapelle dédiée à S^ Clément martyr, puis à S* Chris-
tophe, et dans laquelle était le tomoeau de S^ Rémi ; on
la dédia en 1049, mais elle ne fut achevée qu'au milieu
du xu* siècle. La partie méridionale du transept dut être
reconstruite en 1481. On remarque, dans la galerie du
transept septentrional, deux colonnettes en marbre cris ,
avec chapiteaux en marbre blanc, et, à la façade princi-
pale, plusieurs colonnes en granit, qui remontent h une
époque plus ancienne que le monument lui-même ; on
ne saurait dire si elles appartiennent aux constructions
antérieures, ou si elles proviennent de quelque édifice
gallo-romain. L'église de S^Remi est en style romano-
byzantin. Elle a 110 met. de longueur. L'extérieur offï'e
des formes monotones et peu variées, et la façade est
surmontée de deux clochers relativement modernes, cou-
verts en ardoise. L'ordonnance intérieure est pleine de
majesté. De belles galeries régnent sur toute la largeur
des collatéraux, comme à S^Étienne de Caen et à Notre-
Dame de Laon ; elles s'ouvrent sur la nef par deux arcades
cintrées qui reposent sur une élégante colon nette centrale.
Le sommet de chaque travée est éclairé par une fenêtre
à plein cintre surmontée d'un œil circulaire. Dans la ré-
gion absidale, les arcades sont ogivales ; la galène prin-
cipale est surmontée d'une autre galerie, composée de six
ouvertures étroites à ogive aiguë; au-dessus s'ouvrent
trois fenêtres à lancette simple. Une belle rose flamboyante
éclaire le côté méridional du transept, et, de ce côté, le
portail extérieur offre une ornementation remarquable.
Le chœur, comme à l'église métropolitaine, est sorti de
ses limites naturelles , et est entouré d'une riche clôture
en style de la Renaissance, laquelle a beaucoup souff^ert :
au fond s'élève un mausolée moderne de S^ Rémi , où l'on
a employé 12 statues de pairs de France et un groupe de
S^ Rémi catéchisant Clovis , qui appartenaient au mau-
solée ruiné pendant la Révolution. Les cinq chapelles
absidsdes offrent une disposition architecturale pleine
d'originalité, et qu'on ne retrouve oue dans la collégiale
de S*- Quentin ( K. ce mot) ; celle de la &*• Vierge, qui oc-
cupe le fond, a 14", 28 de longueur, sur 7*, 50 de largeur.
V. Lacatte-Joltrois , Essai historique sur Véglise de
S^'Remi, Reims, 1843, in-12. F
RÉINTÉGRANDE. V. Possbssoirb.
REIPDS (de l'allemand reif, corde, courroie, lien),
somme que payait une veuve pour se remarier, d'après
la loi Salique.
REIS. i F. ces mots dans notre Dictionnaire de
REITRES. S Biographie et d* Histoire.
REKHTA (Langue), c-àrd. mélangée, nom qu'on
donne dans l'Inde à Vourdou. F. Indiennes ( Langues).
RELACHE (Droit de), droit qu'ont les navires , en cas
de danger imminent, d'être reçus dans les ports non ou-
verts au commerce. Des traités garantissent et règlent
ce droit. —En termes de théâtre, suspension des repré-
sentations pendant un ou plusieurs jours.
I RELAIS (du latki relaxatus, reposé), station de posta
REL
1548
REL
où Ton peat trouver des cheraux firais, soit de selle, soit
d'attelage.
RBLAis , eD termes de Fortiflcatioii , espace réserré entre
le pied du rempart et Tescarpe da fossé, pour recevoir
les terres qui s'éboulent
RBLâis , terrain. V. Lais.
RELAPS. F. ce mot dans notre DktMmnakre de Biogrtk-
phie et d'Histoire.
RELATIF, eu latin Belativw (formé de relatus^ parti-
cipe de refera, Je rapporte), <pii a rapport à quelque
chose. Ce mot, en Grammaire, s'applique soit au sens
d'une phrase : « La raison doit gouverner les passions
( la raison est considérée Ici dans ses nq>ports avec les
passions, et réciproquement) ; » soit à la valeur d'un mot :
ainsi père, mère, fUs, rot, citoyen, tujet, vis, mort,
eult9, etc., sont des mots relatifs, car ils ne peuvent se
comprendre sans une idée de relation. Les verbes tran-
sitifs sont également des mots relatifs ; car aimer, haUr,
Umer blâmer, lire, écrire, donner, recevoir, gouver-
ner, etc., ont toujours rapport à un objet quelconque de
l'action ou du sentiment qu'ils expriment. Les noms pro-
pres, les acUectifs, les adverbes, les pronoms et l'article,
sont des mots relatifs. Les grammairiens grecs et latins,
et la plupart des grammairiens modernes ont donné spé-
cialement le nom de relatif ami pronoms personnels, aux
{pronoms et adverbes conjonctifs, à certains adverbes de
ieu (en, y; inde, ibi) très-souvent employés avec la va-
leur de ]ironoms aussi bien que les trois conjonctifs où
(ubi, 9UO)i d'aï*, dont {unde). Aujourd'hui l'usage a
prévalu de restrmndre cette dénomination aux adjectifs
qui, lequel; au nom indéfini de quoi, à quoi (Cest de
3uol j'ai Itesoin , C'est à quoi Je pense) ; aux adverbes oà,
'où, par où, dont (ce dernier classé à tort parmi les
pronoms proprement dits, puisque, venu du bas latin
ds-undtf, il est absolument synonyme du mot d'où (de-
«M, et n'on diffère que dans certains cas par des nuances
Sue l'usage a consacrées). La dénomination d'adjectif ou
'adverbe conjonctif et celle de pronom ou & adverbe re-
{ati^ sont indifféremment employées; en effet, si Je dis :
« Dieu qui a créé le monde est tout* puissant, » le mot
qui, servant à réimir les deux pensées Dieu est tout-puis-
sant et Dieu a créé le monde^ a la valeur d'une conjonc-
tion ; et comme il est susceptible d'accord avec le mot au-
2uel 11 se l'apporte, il peut être considéré comme adjectif,
l'autre part, comme le mot qui se rapporte au substantif
Dieu et le représmte, il peut à ce double titre s'appeler
pronom relatif. Ce dernier terme est le plus usité
(F. Coiuo.'^ctif).
Dans l'analyse logique des propositions composées, on
donne souvent le noitn de proposition relative à toute pro-
position subordonnée commençant par un pronom relatif.
Dans la ivosodie ancienne, on peut donner le nom de
quantité relative à la quantité des syllabes qui sont brèves
ou longues suivant l'occurrence; ainsi, dominus, absolu-
ment parlant, a sa finale brève, mais cette brève compte
comme longue lorsqu'elle est suivie d'un mot commen-
çant par une consonne. C^taines svllabes peuvent donc
être longues ou brèves relativemeiu à leur position dans
on vers. P.
RELATIF (Mode) , en termes de Musique, mode qui offre
à la clef les mômes signes de tonalité qu'un autre mode.
Tont mode majeur a un mode mineur qui lui est relatif,
et réciproouement. Chaque mode majeur a pour relatif
mineur jelui de sa 6« note, et chaque mode mineur a
pour relatif majeur celui de sa 3* note : ainsi, le mode
de la mineur est le relatif du mode d'ut majeur, le mode
de ré majeur a pour relatif celui de si mineur, etc.
RELATION, en termes de Musique, rapport qu'ont
entre eux les deux sons qui forment un intervalle. La
relation est juste, quand les deux notes forment une
consonnance exacte; fautse, quand la consonnance est
altérée.
RELÉGAHON. V, Exil, dans notre Diettonnatre de
Biographie et d'Histoire.
RËLEVAILLES , acte de religion fait par une mère après
sa délivrance. Cette cérémonie, toute de dévotion et sans
caractère obligatoire, consiste dans la récitation d'une
antienne et d'un psaume, l'aspersion et le signe de la
croix fait par le prêtre, qui tient son étole au-dessus de
la tète de la femme, pendant que celle-ci porte un cierge
à la main. Les relevailles rappellent la Présentation de
Jésus par la S^ Vierge au Temple de Jérusalem.
RELIEF, ouvrage de sculpture plus ou mohiArdevé en
bosse. V. Bas-rblosp.
RBLiBP (Droit de). F. notre Dictionnaire de Biographie
tt d^Bistoire.
RELIEURS, ancienne corporation, dont tons les mem-
bres dépendaient de l'Université, excepté le relieur de la
Chambre des comptes. Dans les cérémonies, ils prenaient
rang après les libraires.
RELIGIEUX, REUGIEUSE, celui et celle qui se sont
consacrés à Dieu par un vœu solennel dans un Ordre
monastique.
RELIGION. L'idée exprimée par ce mot repose sur le»
rapports de l'homme avec Dieu. L'homme a besoin que
Dieu s'occupe de lui, et il a des devoirs envers lui ; Tac-
complissement de ces devoirs sous une certaine forme
appelée culte, constitue Ul religion, du ktin religare,
lier, la religion étant le lien qui relie l'homme à Dieu.
La religion embrasse tous les devoirs, elle les sanctifie, et
en rend l'accomplissement plus facile et plus sûr. C'est
en quoi elle se distingne de la Morale, sans toutefois s'en
séparer: la Morale indique à l'homme ses devoirs, elle
lui dit ce qu'il doit faire sans égard aux conséquences;
la religion montre à Thomme ses devoirs et les suites
inévitables de la vertu et du vice; elle lui dit ce qu'il doit
faire, ^e qu'il doit craindre et ce qu'il peut espérer. La
première s'adresse à la volonté par Tintelligence; U se-
conde preaprit également, mais elle intéresse le cœur et
parle à l'&me tout entière ; elle s'occupe de la destinée de
l'homme avant et après cette vie.
Il y a une religion naturelle, fondée sur la raison seule,
qui reconnaît l'existence de Dieu, l'immortalité de l'àme,
le devoir; mais il faut qu'entre Dieu et l'homme il y ait
un rapport direct et personnel ; ce rapport se trouTe dans
la religion positive, au moyen du culte. Aussi , dans tous
les temps et chez toutes les races humaines, on trouve
une religion positive, mais sous des formes bien diverses.
Cette différence provient de l'idée que les hommes se sont
formée de la divinité à différentes époques. Sous ce rap-
port , les religions peuvent être divisées en deux grandes
classes : les unes, fondées sur Iq polythéisme; les autres,
sur le monothéisme. Parmi les premières, il faut citer le
Fétichisme, la plus grossière de toutes les religions , et
pratiquée par les hommes placés au plus bas deigré de la
civilisation ; le Sabéisme^ qui consiste dans l'adoration
des corps célestes, soit séparément , soit tous ensemble;
le Polythéisme grec et romain. Parmi les reliions de la
seconde classe, on compte : le JudaXsme, qui se divise en
plusieurs sectes, dont les principales sont ai^ourd'hui la
secte des Talmudistes , celle des Garantes, et celle des
Réchabites; le Christianisme, oui comprend VÊglise la-
tine ou d'Occident (c'est VEglise catholique)^ VÊglise
grecque ou d'Orient, et le Protestantisme, dans leqruel
on embrasse les Luthériens, les Zwingliens, les Calvi-
nistes, les Remontrants, les Presbytériins, les Anglicans,
les Mennonites ou Anabaptistes, les Qttakers, les Frères
Moraves, les Métliodistes ; V Islamisme ou Mahométismet
dont les principales sectes sont celles des Sunnites, des
Chyites, des WcÛMbites; le Brahmanisme, et son dérivé le
Bouddhisme; le Magisme ou la Religion de Zoroastre.
Voici , d'après Balbi , le chiffre des adhérents de cha-
cune des religions qui se partagent le globe :
Église latine ( catholique ) 139,000,000.
Église grecque 62,000,000.
Églises protestantes 59,000,000.
Judaïsme 4,000,000.
Islamisme 96,000,000.
Brahmanisme 60,000,000.
Bouddhisme 170,000,000.
Religion de Confucius, Magisme,
Fétichisme, etc 147,000,000.
On peut consulter, sur la religion naturelU, principale*
ment Locke, Collins, Wissovatius, les écrits des Soci-
niens, J.-J. Rousseau, et J. Simon, La Reliqionnaturdle:
— sur les religions anciennes : les Religions de f anti-
quité, par F. Creuzer^ le Génie des religions, par E. Qui-
net; — sur le Catholicisme : V Exposition de la doctrim
catholique, par Bossuet ; le Dictionnaire de théologie et le
Traité de la vraie religion, par Bercer; les Prœlectiones
theologicœ du P. Perrone; les Histoires ecclésiastiques de
l'abbé Fleury, de Dupin, d'Orsi, de Rohrbacher, etc.;'
parmi les écrivains protestants, Basnage, Jurieu, Mos-
beim, Jablonsky, J. Matter, etc. ; — sur la relidon en
général : Benjamin Constant, la Religion considérée dasu
sa source, ses formes et ses développements, 5 vol. in-8",
Paris, 1824-1830; Anot de Merières, Code sacré, esnosi
comparatif de toutes les religions, Versaillea, 1836,
in-foL; Meiners. Histoire critique de UnUes les rmigfons,
Hanovre, 1806-1807 ; Delacroix , Dictionnaire historiqve
des cultes, Paris, 1775 et 1821.
REL
1549
REL
«cijGioii ( Entrer m) , se dit des personnes oui s'engi^
geot par des rœux à suivre les règles de rOrdre monas-
tique dans lequel elles Teulent entrer. C'est une appli-
cation du sens étymologique du mot religion ; c'est encore
en ce sens qu'on dit la religion du serment, R.
RELIQUAIRE, boite, coffiret, vase, de formes et de
dimensions variables, où l'on renferme des reliques. Le
rtliquaire et la châsse ( K, ce moi) diffèrent non-seule-
meot par la forme, mais en ce que la cb&sse peut contenir
des fnpients d'assez grande proportion , tandis que le
reliquaire ne contient que des parcelles toujours minimes.
Le nom de reliquoÂre s'appliqua Jadis aux ossuaires éle-
vés dans les cimetières catholiques. H existe encore
ai^ourd'hni Quelques édifices de ce genre en Bretagne,
par exemple a Plestin, à Pleyben, à La Roche (près de
Laademeau).
RELIQUAT (du bas latin reliquatuim^ dérivé de relic-
tum, restant), en termes de Jurisprudence, de Compta-
bilité et de Commerce, reste de compte ou débet. Celui
qui, après reddition de compte, reste devoir auelque
chose , est dit réliqueUaire. Un tuteur doit l'intérêt du
reliquat à partir du Jour où le compte a été clôturé, et
un mandataire, seulement à partir du Jour où il a été mis
en demeure {Codé Napd.^ art. 474 et 1906).
RELIQUES (du latin rêliquiœ, restes) , restes des coips
des Saints, auxquels l'Église catholioue rend un culte
d'honneur et de vénération. On étend le même nom à
tout ce qu*on a pu recueillir des instruments de la Pas-
sion. Le culte des reliques s'est introduit au iv* siècle.
Les Protestants le rejettent absolument.
RELIURE , art d'attacher, de lier ensemble les feuilles
d'un livre, et d'y mettre une couverture, dans le but d'en
prévenir la détérioration par le temps ou par un fréquent
usage. Un livre entièrement recouvert en peau a une re-
liure entière ; si le dos seul est en peau, c'est une demi-
reliure. Après avoir mis en cahiers par le pliage les
feuilles imprimées , on les bat sur un bloc de marbre ou
de pierre dure, avec un lourd marteau k tète un peu con-
vexe, et on les tient en presse un certain temps ; puis on
procède au grécage, qui consiste en plusieurs incisions
faites en travers au dos du volume avec une scie à main,
pour guider la brocheuse dans l'opération de la couture.
On met alors les cahiers sur le cot«50tr, et on passe des
fils autour de plusieurs ficelles qui entrent dans les in*
ci<iions, et dont les bouts sont ensuite rattachés au car-
ton de la couverture. On fait ensuite Vendossure, c-à-d.
ou'on frotte à plusieurs reprises le dos des feuillets avec
de la colle de farine, ou de la colle-forte, pour qu'ils
ne puissent plus boi^ger, et on le polit avec un /h>^•
toir. On ébarbe, on rogne^ on dore ou colorie la tran-
che, on pose le signet et la tranchefUe, et on procède à
un second battage. Quand on a applicjué sur le dos une
bande de parchemin mouillé ou de toile, on colle sur le
carton la peau, la toile ou le papier oui doivent le recou-
vrir. Le rcLcinage consiste à donner a la peau d'agréables
nuances. La couverture étant faite, il ne reste plus qu'à
coller les gardes, à dorer le dos. et à mettre le titre. Les
peaux que Ton emploie sont la hasame ou peau de mou-
ton, le maroq^imt peau de bouc ou de chèvre, et le vea^.
Au xvm* siècle, le célèbre Hunter fit relier en peau hu-
maine an Traité sur les maladies de la peau. Une Consti-
tution de la République française, imprimée à Dijon en
1793, et qui faisait partie de la bibliothèoue de Villenave,
était, d'après une note de ce savant, reliée en peau hu-
maine.
Les nianascrita des Anciens, consistant en rouleaux
d'écorce d'arbre, de papjrrus ou de parchemin, n'ont pu
rc evoir une reliure pareille à celle de nos livres mo-
dernes; on se bornait à mettre les rouleaux dans des en-
veloppes en parchemin, et à les enfermer, pour les garantir
de la poussière, dans des boites cylindriques garnies de
couvercles. Quand on fit des livres carrés, on réunit les
feuillets, consos ou collés dans un dos mobile, entre deux
planches de bois, de métal, d'ivoire ou de cuir, sur l'une
desquelles on écrivit le titre, car ces livres furent d'abord
souches à plat dans les bibliothèques. V. Peignot, Essai
historique ei archéologique sur la reliure des livres cheg
les Anciens, Dijon, 1834; Géraud, Essai sur les livres
ions PAntiquité, Paris, 1839, in-8«.
il est difiBcUe de préciser ce que fut l'art de la reliure
pendant le moyen ftge; dès le v* siècle, les relieurs
avaient recours aux orfèvres et aux lapidaires pour d6-
eorer les reliures. Bélisaire trouva dans le trésor de Gé-
dmer, roi des Vandales, le livre des Évangiles orné de
pierres prédenses. L'Énmgéliaire grec donné à la basi-
lique de MoQza par Tbéooelinde^re^iie des Lombards, a
une couverture formée de deux plaques d'or enrichies de
pierres de couleur et de camées antiques. On conserve à
la bibliothèque Laurentienne de Florence un exemplaire
des Pandectes de Justinien, du vi* ou vu' siècle, relié
avec des tablettes de bois, couvertes de velours rouge et
garnies d'ornements en argent sur les plats et aux angles.
La Bibliothèque impériale de Paris est très -riche en re-
liures de ce genre ; celle du Louvre renferme le célèbre
livre d'Heures écrit en lettres d'or sur parchemin de
couleur pourpre, et pourvu d'une couverture en velours
rouge, livre dont Charlemagne fit présent à la ville de
Toulouse. Ce prince eut tellement à cœur la préserva-
tion des livres, qu'il accorda aux moines de Sithiu (S^
Omer) un droit de chasse illimité, afin de leur fournir les
moyens de se procurer des peaux pour les couvertures*
Geoffh>y Martel, comte d'Anjou, donna aux moines d'une
abbaye qu'il avait fondée à Saintes la dlme des cerfs et
des biches qu'on prendrait dans 111e d'Oléron, pour servir
à la reliure de leurs livres. Dans les contrées maritimes
du Nord, on employait les peaux de phoque et de requin ;
aillenra, la peau de truie. Hugues Capet possédait, dit-on^
un almanach relié en peau de serpent avec des lames
d'argent. Aux xi* et xii* siècles, on fit des reliures en
cuivre émaillé : le musée de Cluny, à Paris, possède deux
plaques d'émail incrusté, de la fabrique de Limoges,
qui ornaient sans doute la couverture d'un livre ; l'une
a pour sujet l'Adoration des Mages; l'antre représente
Etienne de Muret, fondateur de l'ordre de Grandmont,
conversant avec S* Nicolas. Les Croisades amenèrent un
progrès dans l'art de la reliure : les Arabes apprirent
aux Occidentaux à couvrir les livres avec des cuirs à
empreintes dorées et argentées , et ces couvertures re*
curent le nom d*alœ (ailes), à cause de leur analode
de position et d'éclat avec les ailes d'un oiseau à riche
plumage. Les livres en langue vulgaire se multipliant,
il falliut, d'ailleurs, les rendre moins lourds que les
livres d'église : on employa encore, pour les couvrir,
la laine, la soie et le velours; des clous de métal bor-
daient les plats, afin de pràerver du frottement ces
étoffes. Les plus belles reliures du xv* siècle sont celles
de la bibliothèque formée à Bude par Mathias Corvin,
roi de Hongrie, et dont on trouve la plus grande partie
aii^ourd'hui dans la bibliothèque puDli((ue de Munich.
L'imprimerie fnt d'abord fatale à l'art de la reliure : tant
que les manuscrits avaient eu, en raison de leur rareté,
une grande valeur, on les avait ornés de splendides re-
liures; les livres s'étant multipliés à l'infini, on ne les
revêtit plus que de couvertures grossières.
Mais, au xvi* siècle, à l'époque de la Renaissance, l'art
de la reliure prit un grand essor. Le liviB d'Heures de
Marguerite de Savoie mérite surtout d'êtru cité. Le goût
des reliures artistiques fut très-répandu (\n France. Les
reliures que le trésorier-général Grollier Ht exécuter en
veau et en maroquin présentent des compartiments et
des filets d'or mat, d'élégants entrelacements, des ara-
besques rehaussées d'or et de couleur; sur l'un des plats
on voit sa devise en lettres d'or : Poriio fnea. Dominé^
sit in terra viventium, « que ma part, Seipieur, soit sur
cette terre des vivants, » et, sur l'autre plat, son nom,
ou les mots Tanquam ventus est vita m«i», « ma vie est
comme le vent. » Un amateur dont le nom ne nous est
point parvenu eut aussi des reliures imitées de celles de
Grollier; ses livres portent la devise suivante : Nulli pltu
fortuna quàm consUium valet, « un bon conseil vaut
mieux que la fortune. » Maioli, amateur italien de la
même époque, fit orner ses reliures de compartiments en
or et couleur; quelques-unes ont une ti^anche gaufrée,
ciselée, ou couverte de sujets peints. Les reliures à com-
partiments de couleur au nom et aux armes de Jacobus
Malinfantius sont également très-recherchées. On a aussi
Sielques charmantes reliures d'un amateur appelé Lau«
n. Les reliures italiennes de François I*% presque tou-
jours en veau fauve, portent son chiflire et sa devise, la
salamandre. Sur quelques rares volumes, lo nom, le mé-
daillon et la devise de Charles-Quint sont gravés en or et
en couleur. Mareuerite d'Angoulême et Mivguerite de Va-
lois ont laissé plusieurs livres reliés à leur chiffre et à
leurs armes; ceux de Henri H et de Diane de Poitiers,
orn^ de croissants et de chifiûres sur les plats, sont d'une
rare élégance. Catherine de Médicis, les ducs de Guise, le
cardinal de Bourbon, Henri UI avec sa tel e de mort pour
emblème, Henri IV avec l'H couronné semé à profusion
sur les plats, ont laissé des reliures précieuses à la fois
comme exécution et comme souvenirs. Nous ne mention-
nons que pour mémoire les reliures historiées, ornées de
métaux ciselés et fouill^^ d'ivoire sculpté, de pierres
KEL
1550
RÉM
précieuses^ et où le reliear n*a que le mérite de l'ajaste-
ment.
Aa xvm* siècle, l'art subit une transformatioii : les re-
liures italiennes, avec les arabesques et les entrelacs or
et couleur, font place à des reliures simples et sévères,
mais d*uii excellent goût. L'historien De Thou entra le
premier dans cette voie, et, parmi ceux qui l'y suivirent,
on peut citer Richelieu, Mazarin, Habert de Montmort.
Les livres aux armes de Louis XIIl portent presque tou-
jours aussi le chiffre de la reine Anne d'Autriche. Le luxe
des reliures reparut à la cour de Louis XTV. Les livres de
ce prince, reliés par Ruette, et semés d'L et de fleurs
de lis d'or, sont généralement assez mal établis; on en
trouve très-peu oui portent son emblème, le soleil. Ceux
du chancelier Seguier, de M"** de Gbamillart, sont beau-
coup plus recherchés. — Pendant le xvni* siècle, l'art
de la reliure a Jeté un incomparable éclat : rien n'égale
les reliures exécutées par Le Guaoon, Ënguerrand, Pas-
deloup, les Der6me, Boyet, Du Seuil, Bisiaux, Brade!,
Courtenval, pour le duc de La Vallière, Longepierre, le
prince Eugène de Savoie, Marie Leczinska, le comte
d'Hoym et une foule d'autres. Mais, pendant la Répu-
blique, le premier Empire et la Restauration, il y eut
une profonde déoidence : seuls quelques artistes d'un
talent consciencieux, Purgold, Bozerian, Closs, Simier,
Thouvenin, luttèrent contre le mauvais goût et contre la
théorie désastreuse du bon marché, et furent encouragés
par Méon, Cailhava, Pixérécourt, Didot, Chardin, Lan-
glès, Labédoyère et autres amateurs distingués. Les
libraires Debure, Renouard, Brunet, Merlin, Techener et
Potier; les bibliophiles Ch. Nodier, Aimé-Msrtin etLeber,
sont parvenus aepuis à relever la reliure; les meil-
leurs relieurs de notre époque sont : Bauzonnet, Trautz,
Marins, Ottmann-Duplanil, Lenègre, Kœhler, Duru,
Niédrée, Cape, Thompson , Lesné , Despierres, Lortic,
M"** Gruel, Lardière. — Certains amateurs ont relié eux-
mêmes leurs livres : De Tune, bibliophile de La Hâve au
xvEi* siècle, y montra un véritable talent; mais, si l'on
en croit une* épigramme de Maynard, M. de Marolles
aurait fait des reliures aussi mauvaises que ses vers. Pen-
dant la Révolution, un émigré, le duc de Caumont, tint
un atelier de reliure à Lon(&es. Le roi Louis XVIII aimait
à relier; il faut bien avouer que ses essais n'ont aucune
valeur.
Le plus ancien spécimen de la reliure anglaise est un
psautier latin-saxon du ix' siècle, qui a récemment pris
Îilace dans la collection Stowe. Cest un volume grossier,
ié avec des courroies en cuir, et revêtu de planches de
chêne, dont les coins sont protégés par des plaques de
cuivre. Quand la littérature classique fut remise en hon-
neur , les livres devinrent un objet de luxe, et, dans les
cloltrM, il y eut une pièce à part destinée à la copie et à
la reliure des manuscrits, nommée le scriptorium. Les
moines qui se livraient k ce travail étaient fort estimés;
on cite surtout le frère Herman, habile relieur venu en
Angleterre lors de la conquête normande, et qui devint
évêque de Salisbury. Sous le règne d'Edouard III, on
mentionne un livre couvert d'or Sntdllé, et enrichi d'un
fermoir en rubis ; sur les plats brillaient des croix de
diamants et des lis en pierres précieuses. Mais le spéci-
men le plus curieux en ce genre est un missel, qui fut
commandé par le duc de Bedford, oncle d'Henri Vi; il y
a plus de 59 tableaux en miniature avec encadrements
d'or, fleurs coloriées, initiales bleu et or.
Il ne faut pas oublier le superbe livre d'Heures de la
reine ÉlisabeUi. Il est relié en or massif; sur la couver-
ture est une peinture représentant le Jugement de Salo-
mon, et, de l'autre côté. Moïse avec le serpent d'aii-ain.
On y voit encore l'anneau où s'accrochait la chaîne d'or
fixée & la ceinture de la reine.
Cependant les relieurs anglais des xvi* et xvn* siècles,
même du commencement du xvm*, sont bien inférieurs
aux artistes français de la même époque. Après Harley,
comte d'Oxford, ami de Pope et favori de la reine Anne,
dont les livres se distinguent par leur reliure invariable
de maroquin rouge, orné de filigranes d'or et d'une étoile
sur la couverture, vint un amateur nommé Hollis, qui fit
mille excentricités. Un artiste célèbre lui avait confec-
tionné quantité de flgui'es allégoriques, telles que bonnet
de la Liberté, hibou de Minerve, caducée de Mercure,
baguette d*Esculape, etc. Si un livre respirait l'ardent
amour du patriotisme, Hollis y faisait appliauer sur les
plats le bonnet de la Liberté; le caducée âe Mercure or-
nait les livres d'éloouenoe; les traités de médecine avaient
Esculape, et ceux ae philosophie Minerve et son oiseau.
Ces folW furent bientôt dépaÂséest Go ne reliait plus les
livres sur la chasse qu'en peau de eerf ; an fanatique fit
même relier une histoire du célèbre ministre Fox en
peau de renard {renard se dit en anglais fox). — Cest en
1766 que l'art de la reliure atteignit son apogée en An-
gleterre, avec Robert Payne. Ses reliures sont un modèle
de bon goût et d'élégance; il affectionnait surtout un
maroquin olivâtre, qu'il décorait du nom de maro(juin à
la vénitienne. Il était aussi passé maître dans l'art de
restaurer les vieux livres et de refaire les caractères go-
thiques. On admire surtout son Eschyle de Glasgow
(dans la bibliothèque de lord Spencer], dont la reliure
coûta 16 liv. sterl. Les bibliomanes se disputent ses fac-
tures; rien de plus curieux : l'ouvrier y décrit complai-
samment les moindres détails de son travail, entonne
son éloge, et dénigre ses confrères. A côté de Payne, on
remarque Baumgarten, Welcher et Kalthober. Dans notre
XIX* siècle, les meilleurs relieurs anglais sont Clarke,
Lewes, Hering, Riviéro, Halloway, Bedford, Leig^ton,
Hodge et Ausnn. B.
RELOTGE, en latin relotgium, vieui mot signifiant
horloge publique.
REMANCIPATION. V. ce mot dans notre Dictionnatre
de Biographie et d^Histoire.
REMBLAI, en termes de Construction, opération qui
consiste h établir, au moyen de terres rapportées, un sol
factice plus élevé que le sol naturel ; par suite, on donne
le même nom au résultat de l'opération. Les remblais
doivent être maintenus par des murs de soutènement ou
par des talus.
REMÈDES SECRETS, médicaments dont les inven-
teurs gardent par devers eux la formule, et dont ils se
constituent une propriété. La vente et la distribution de
ces remèdes sont prohibées en Frsnce; c'est un délit pu-
nissable d'une amende de 25 h 600 fr., et, en outre,
lorsqu'il y a récidive, d'un emprisonnement de 3 à
10 Jours. Les inventeurs doivent remettre la formule au
ministre de l'Iut^eur, qui fait examiner le médicament,
et qui fixe, s'il y a lieu, l'indemnité à payer pour la di-
vulgation de la découverte (Lois du 21 germinal an xi et
du 20 pluviôse an xm — 11 avril 1803 et 18 fév. 1805;
-r- Décret du 18 août 1810).
RÉMÉRÉ. V. Rachat.
REMI (Arc de SAii<rr-), dans le département des Bou-
ches-du-Rhône. Cet arc triomphal romain, gravement en-
dommagé, n'a qu'une seule arcade. Entre ses colonnes
engagée, on voit encore des bas-reliefs, représentant
des esclaves enchaînés : ces figures, de 2 met. de hau-
teur, sont mutilées, et deux têtes seulement ont échappé
aux ravages du temps. Deux bas-reliefs représentant des
Renommées ornaient, sur chacune des grandes faces, le
dessus des impostes : on n'en voit plus que des traces
légères sur la face occidentale ; elles sont mieux conser-
vées à l'Orient. Une guirlande de feuilles et de fruits
sculptés avec une grande délicatesse décore l'archivolte.
Dans la voûte est un compartiment de caissons hexagones,
au centre des(|uels sont des rosaces. — Près de l'arc de
S^-Remi on voit un mausolée carré de la même époque.
11 s'élève, sur un socle en gros quartiers de pierre, à une
hauteur de 19 met., et forme une sorte de pyramide com-
posée de trois ordonnances : d'abord, une sorte de stylo-
bate quadrangulaire, orné, dans la partie supérieure de
ses faces, de 4 bas-reliefs représentant des combats;
puis, une riche ordonnance de portiaue et de colonnes
cannelées et engagées, dont les chapiteaux sont corin-
thiens; enfin, un petit temple composé de 10 colonnes
corinthiennes cannelées, qui portent un entablement sur-
monté d'une calotte parabolique. Au milieu de ce petit
temple à Jour sont placées deux statues d'hommes re-
vêtus de la toge. Les frises et les archivoltes sont ornées
de bas-reliefs. On pense que ce mausolée fut élevé par
trois Romains de la famille Julia à la mémoire de J. César
et d'Auguste. Certains antiquaires lui assignent cepen-
dant une date postérieure. V, Lamy, Description de deux
monuments anciens près de la vtlle de S^Remi, 1737,
in-8o; Malosse, Monuments antiques de S^^Remt décrite
et expliqués, Avignon, 1818, in-8». B.
RÉMINISCENCE, dans son acception usuelle, aussi
bien en Psychologie que dans le langage ordinaire, dé-
signe un souvenir imparfait, une conception qui se pré-
sente à notre mémoire sans que nous en reconnaissions
précisément l'origine ; par exemple, un vers qui nous re-
vient à l'esprit sans que nous nous rappelions quel en est
l'auteur, un motif musical que nous fredonnons sans sa-
voir où nous l'avons entendu, l'idée que nous avons déjà
vu quelque part une personne que nous rencontrons, etc.
Dans un sens qui ne s'éloigne pas beaucoup du prôcé-
REM
1551
REN
icxiv, mais qui le restreint et le précise, PlatOD a fait de
la Réminiaoenoe (en grec anamnésis) le principe d'une
théorie qui lot est propre. Les idées, selon lai, en tant
que conçues par Tesprit, sont Pobjet de réminiscences.
C'est dans une existence antérieure à celle-ci {V. Pa^
bxistbrcb) que nous avons connu le bien, le vrai, toutes
les idées générales et absolues; maintenant nous ne fai-
sons plus que nous en ressouvenir; et ce souvenir in-
complet (car nous ne nous doutons pas que nous nous
souvenons; le philosophe seul Ta deviné; et, au fond,
l'objection la plus sérieuse qu'on puisse faire à son sys-
tème, c'est qu'il repose sur une hypothèse tout à fait ar-
bitraire), ce souvenir incomplet, disons -nous, cette
réminiscence l'éveille en nous à mesure que quelques
perceptions présentes en font naître l'occasion. On trouve
partout dans Platon les traces de cette théorie ; mais c'est
surtout dans le Ménon qu'il l'a régulièrement exposée.
Dans le Phèdre^ les ailes de T&me poussant à la vue de ce
qui est beau pour l'emporter vers les régions idéales de
la beauté en soi ont bien l'air de n'dtre encore qu'un
symbole poétique de la Réminiscence. B — e.
REBIINISCERE, nom du 2« dimanche de Carême. Il
est ainsi appelé parce gue l'introït de la messe commence
par ces mots : Reminiscere miserationum iuarum,
REMISE, en termes de Droit, action de livrer à un dé-
biteur le titre de son obligation. La remise volontaire de
ce titre opère libération {Code Nap., art. 1282-88).
KEiiiSE, en termes de Banque, se dit des valeurs que
les négociants font remettre à leurs correspondants, par
lettres de change ou autrement, pour les couvrir de leurs
avances. Ces valeurs doivent figurer plus tard en ligne
de compte.
REMISE, lieu o& l'on met une voiture à couvert. Les re-
mises entrent dans l'ordonnance des b&timents des écuries.
REMISES , en termes d'Administration financière ,
sommes qu*on abandonne à ceux qui sont chargés de
foire les recettes. Elles s'ajoutent à leurs appointements
ou en tiennent lieu. C'est le revenu principal des Rece-
veurs généraux et particuliers.
RÉMISSION (du latin remittere, remettre, se rel&cher),
s> iioiiyuie de pardon dans le langage ecclésiastique : la
rémission des péchés.
n^issiON (Lettres de). V. Lettres de rémission, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
REMONTE, achat de nouveaux chevaux pour la cava-
lerie. Il y a en France un corps de remonte générale,
chargé «racheter ci do dresser les chevaux français propres
au aen ice ; son effectif est de 90 officiers, avec un nombre
de sous-officiers et de soldats qui varie selon les besoins.
L*uniforme est l'habit bleu, avec collet, parements en
)>oiiite et grenades de retroussis garance; retroussis,
brides d'épaulettes, passe-poil du collet et des parements
bleu; boutons blancs ayant en relief un cheval; po-
ches figurées par une patte à la Soubise; les épaulettes
et le pantalon garance; le shako en tissu noir, avec
ganae garance, pompon sphérique & flamme garance; la
buflSeterie blanche. Les officiers ont l'épaulette d'argent.
K. dans notre Dictionnaire de Biographie et â^Histovre,
Farticle France, Armée*
REMONTRANCES. V. ce mot dans notre Dictwnnaire
de Biographie et d'Histoire,
REMORDS, phénomène complexe de conscience, com-
posé d'un jugement par lequel l'auteur d'une mauvaise
action la condamne, et d'un sentiment de douleur oui
en est la suite. C'est une des sanctions de la loi morale.
Les artistes ont figuré le remords par le vautf ur rongeant
les entrailles de Prométhée, ou par un hoVi.me se mor-
dant les poings et dont un serpent déchire le cœur.
REMORQUE (du latin remulcum, câtle de halage),
action de faire avancer sur l'eau un navire ou tout autre
corps flottant, au moyen d'une corde attachée & un autre
bmment md par des rames ou des voiles, par des che-
vanx ou par la vapeur. On nomme Remorqueurs des
bâtiments à vapeur spécialement destinés à traîner ainsi
des navîn^s, soit sur des fleuves, soit à l'entrée ou à la
lortie diK ports.
REMPART, tout mur, toute levée de terre qui entoure
une place fdHe et sert à sa défense. On fit d'abord les
remparts en maçonnerie pleine; mais, depuis l'emploi de
l'artillerie dans les sièges, ce sont des massifs en ter-
rasse, formés de la terre extraite du fossé qui est à leur
pied, revêtus à l'extérieur d'en mur de soutènement,
couronnés d'un parapet, terminés intérieurement par un
talus où l'on pratique des rampes, et percés de portes et
de poternes. Ils sont protégés et presque entièrement
poaiqué» par des ouvrages extérieurs, que rassiégeoat
doit enlever avant d'arriver au corps de place* F. Forti-
nCATION.
REMPIÈTEMENT, reprise en sous-oeuvre de la partie
inférieure d'une construction.
REMPLACEBiENT MIUTAIRE. Le remplacement, au-
torisé en France par la loi du 21 mars 1832, est juste en
lui-même, parce qu'il profite à ceux qui s'en servent,
sans nuire a ceux qui ne s'en servent pas; il ne crée pas
une inégalité, il est seulement ane conséquence de l'iné^
galité des conditions humaines. A un autre point de vue,
rintérêt de l'agriculture, de l'industrie , des professions
libérales, des carrières civiles, des sciences et des arts,
défend d'imposer à tous indistinctement le métier de sol-
dat pendant les années les plus fécondes de la \ie. Mais
la méthode de remplacement qui a été en usage durant
plus de 20 années était très -défectueuse : des Compa-
gnies d'assurance contre le recrutement se chargeaient
de fournir des remplaçants moyennant une somme dé-
battue avec les jeunes conscrits; elles cherchaient des
hommes au meilleur marché possible, déguisaient leurs
défauts physiques à l'aide de ruses infiniment variées,
et ne trouvaient guère que des débauchés, des vagabonds
et des paresseux; après un certain temps passé au corps,
les infirmités de ces hommes reparaissaient, il fallait les
réformer, et c'était l'État qui supportait les conséquences
de la Araude. La loi du 26 avril 1855 a substitué à ce
mode de remplacement Vexonération et le rengagement
(V. ces mots). — Le remplacement entre parents ou par
substitution de numéros, établi par la loi de 1832, a été
également supprimé, si ce n'est entre les frères, beaux-
firères et parents jusqu'au 4* degré ; encore fallait-il,
pour la substitution de numéros, que ce fût au tirage
de la même classe et dans le même canton.
REMPLACE, en termes de Construction, blocage en
moellons, en briques ou en cailloux, dont on remplit,
avec du mortier, l'entre-deux des parements d'un mur
construit en pierres de taille ; — en termes de Charpen-
terie, bois qu'on place dans un pan ou une cloison pour
remplir les vides.
REMPLOI, en termes de Droit, placement de deniers
qui proviennent de la vente d'un immeuble ou d'une
rente, et que la loi oblige de réemployer. Le remploi des
deniers dotaux est une des clauses ordinaires des con-
trats de mariage ; celui des biens en communauté qui
ont été aliénés durant le mariage est réglé par le Code
Napoléon (art. 1433 et suiv.).
RENAISSANCE, dénomination qu'on applique pardcu*
lièrement à la période qui suirit la prise de Constanti-
nople par les Ottomans (1453), et qu'on appela plus tard
le siècle de Léon X. Les Arts et les Lettres, qui parais-
saient avoir péri dans le même naufrage que la société
romaine, semblèrent refleurir, et, après dix siècles do
ténèbres, briller d'un nouvel éclat : de là, comme s'ils
eussent en effet reparu tout à coup à la lumière, le nom
de Renaissance, choisi pour caractériser un événement
qui avait été pourtant préparé dès le moyen Age. Un pre-
mier réveil des esprits avait eu lieu sous Charlemagne :
mais les malheurs qui suivirent sa mort éteignirent ce
faible rayon de politesse naissante, et reculèrent de trois
siècles la restauration des Lettres. L'époque de Louis IX
vit un nouvel essor des esprits, plus vigoureux cette fois
et plus durable : alors naquirent ou se multiplièrent, en
France, en Angleterre, en Espagne, en Italie, les Univer-
sités, qui tirèrent la science, en quelque sorte, de la
prison des cloîtres et la sécularisèrent. Des guerres
étrangères et des divisions intestines retardèrent en
Espagne, en Angleterre et en France le mouvement in-
tellectuel; mais en Italie, même au milieu des discordes
civiles, l'action bienfaisante de Dante, de Pétrarque et de
Boccace lui imprima au contraire un pins vif élan. Ce uo
fut pas seulement par leurs propres œuvres que ces
grands génies exercèrent une puissante influence sur les
esprits; ils mirent aussi leur gloire à étudier et à ré-
pandre les écrivains de l'Antiquité, Dante prit Virgile
pour maître et pour guide dans le voyage imaginaire de
sa Divine Comédie; Pétrarque écrivit des Lettres sur la
recherche des manuscrits anciens, et retrouva lui-même
les Institutions oratoires de Quintilien, une partie des
Lettres et des Discours de Cicéron, et quelques tragédies
de Sophocle. Boccace, dès 1360, fit établir à Florence une
chaire de lan^e grecque en faveur du Grec Léonce Pi-
late, qui rendit Homère à l'Occident. Ajoutons que les
petites Républiques et les Principautés, entre lesquelles
l'Italie était partagée, se disputaient les talents, et que le
mérite, partout accueilli, pouvait braver la persécution
e; Vwm^ cbftDger de si^our aao» changer de patridi
REN
15S2
REN
certain de rencontrer toc^ourB, auprès da pape, on du
prince, on de la cité libre, des Juges éclairés et des pro-
tecteurs généreux. Enfin, les progrès des Turcs ayant
amené des rapports plus fréquents entre POrient et l'Oc-
cident, les savants de TEmpire grec s*accoutumërent à
tenir cbercher en Italie un asile et la sécurité pour leurs
études : Ghrysoloras fit ses premières lectures publiques
à Florence vers 1396, et Tenthousiasme qu*il excita dé-
termina à un exil volontaire plusieurs de ses com-
patriotes. Le plus célèbre de tous, Bessarion, reçut la
pourpre romaine en récompense de son mérite. 7. Ita-
UKfNB (Littérature).
La Renaissance ne fut donc pas une résurrection sou-
daine et imprévue des Lettres anciennes ; seulement la
chute de Constantinople, en Jetant sur Tltalie les Lascaris
et d'autres Grecs qui jusque-là ne s'étaient pas séparés
de leur pays, précipita le mouvement , et lui communiqua
une impulsion extraordinaire. Tandis que ces fugitifs
apportaient à leur patrie nouvelle, pour prix de son hos-
pitalité, les ouvrages des orateurs et des poètes d'Athènes,
on fouilla les monastères avec une ardeur incroyable, et
Ton en tira les manuscrits latins. Par un hasard qu'on
peut appeler providentiel, rimprimerie fut découverte,
et l'on put multiplier et perpétuer les chefs-d'œuvre :
entre les années 1457 et loOtf, on compte 1300 auteurs
imprimés. C'est alors que les Juntes et les Blanuces pu-
blièrent ces fameuses éditions principes des clainiques,
tant recherchées encore aujourd'hui.
Rien ne saurait donner l'idée de l'ardeur avec laquelle
on cultiva alors l'Antiquité. Laurent de Médicis donnait
h ses amis, le Jour de la naissance de Platon, un banquet
dont Marsile Ficln a consacré le souvenir ; le cardinal
Bembo ne lisait pas son bréviaire en latin, de peur de
g&ter son style; Érasme ne craignait pas d'appeler Gicéron
un saint, et, pour un manuscrit de Tite-Live, Alphonse
d'Aragon, roi de Naples, renonçait à faire la geurre aux
Florentins.
Ce culte passionné des Ancien9, qui fut d'abord le
propre de l'Italie, les Français le rapportèrent de leurs
expéditions dans la Péninsule, mais sans se douter que
ce fût là le plus précieux résultat de leurs guerres. De
toutes les nations modernes, la France est celle où la Re-
naissance littéraire a porté ses plus beaux fruits: aucune
autre ne s'en est plus profondémenl ressentie {V, Fran-
ÇAisB — Littérature). Qu'est-ce,, à vrai dire, que notre
littérature du xvn* siècle, sinon une heureuse fusion et
l'union définitivement accomplie de la forme antique
avec l'esprit moderne? Quelques amis du paradoxe ont
déploré cette invasion de la France par l'Antiquité : à les
en croire, l'enthousiasme môme que nos écrivains du
XVI* siècle professèrent pour les œuvres anciennes, et
leurs efforts pour en reproduire les beautés, détournèrent
l'esprit français de sa voie naturelle, et substituèrent des
qufidités d'emprunt et d'imitation à son originalité primi-
tive. Autant vaut se plaindre que la Grèce conquise par
les Romains ait subjugué ses farouches vainqueurs,
qu'Homère ait inspiré Virgile, et la lyre d'Archiloque ou
d'Alcée celle d'Horace. L'homme peut méditer les causes
et les effets des événements, mais il ne saurait en arrêter
le cours ; et les faits historiques se subissent plutôt qu'ils
ne se discutent. Le Jour où Corinthe tomba, il était inévi-
table que la civilisation grecque envahit la société ro-
maine; le Jour où Mahomet II prit Constantinople et
poussa sur l'Occident les vénérables débris de l'ancienne
Grèce, il fut impossible que la vieille Hellade ne fit pas
la conquête des peuples c[ai lui donnèrent asile. D'ail-
leurs, l'originalité est-elle mcompatible avec l'imitation?
Qui oserait soutenir que VAndromaque ou la Phèdre de
Racine, pour être imitées de VAndromaque et de l'Htp-
polyte d'Euripide, ne sont pas des œuvres profondément
originales, éminemment modernes, chrétiennes et fran-
çaises? Enfin , on s'accorde à reconnaître que la malice,
la finesse, la grâce, le tour ingénieux et piquant, sont
comme le fonds de l'esprit gaulois : les Grecs et les Ro-
mains ont-ils étouffé chez nous ces qualités aimables? Et
faut-il tant regretter qu'ils y aient ajouté l'ampleur de la
forme, l'élévation, la grandeur, l'éclat?
La Renaissance eut un autre effet sur les destinées du
monde moderne : elle fut l'occasion et l'une des causes de
la Réforme. Elle en fut l'occasion ; car c'est pour avoir
voulu embellir Rome des chefs-d'œuvre de l'art, que
Léon X épuisa son trésor, et fut réduit à autoriser cette
vente des indulgences d'où sortit la querelle des Augus-
tins et des Dominicains, et la révolte de Luther ; elle en
fut l'one des causes, lointaines à la vérité, puisqu'on
éveilUut kê esprits, elle les prépara aux discussions re-
ligieuses et à la liberté. V. Hallam , ntsUnre de la litté^
rature de V Europe pendant les xv*, xvi* et xvn* siècUs,
traduite de l'anglais par Borghers, 1839, 4 vol. in-tS*;
Charpentier, Histoire de la Senatssance des lettres au
xv« siècle, 1843. A. H.
La Renaissance littéraire du zv* et du xvi* siècle
fut naturellement accompagnée d'une Renaissance artis-
tique : l'esprit d'innovation et de réforme qui fermentait
dans la société avait pénétré au milieu des artistes, aussi
bien que parmi les politiques et les théologiens; de
même que la connaissance plus générale et plus appro-
fondie des écrits de l'Antiquité profane avait donné une
direction nouvelle au génie littéraire, de même la décoo-
verte des manuscrits de Vitruve et les travaux de Bru-
nelleschi, d'AIberti, de Palladio, de Vignole et d'autres
architectes italiens, ramenèrent les artistes à l'étude des
modèles grecs et romains. Le style classique ne remplaça
pas immédiatement, en Architecture, Vb style chrétien du
mojren ftge , mais il y eut un mélange, une combinaison
de formes d'origines différentes, et c'est là ce qu'on
nomme, à proprement parler, le style de la Renaissance :
ainsi , le plein cintre romain allia sa gravité à l'élégance
de l'ogive, et revêtit les ornements du style flamboyant.
On entreprit alors une quantité prodigieuse de monu-
ments, d'un caractère plutôt privé que public, car on fit
beaucoup moins d'églises que de palais, de châteaux et
d'hôtels. Non-seulement l'originalité devint plus rare,
puisqu'on se bornait à imiter plus ou moins heureuse-
ment les œuvres de la Grèce ou de Rome, mais le senti-
ment des convenances architecturales s'amoindrit : à
force de prendre pour types les édifices antiques, les ar-
tistes en vinrent à une sorte d'uniformité dans le plan ,
qu'il s'agtt de construire une église, un palais, une Bourse
ou un théâtre. En ce qui concerne le plan des églises, la
forme de la croix fut généralement conservée ; mais, au
lieu de suivre le modèle adopté depuis bien des siècles
dans l'Occident, on le modifia suivant une foule de cir-
constances ou le caprice de l'architecte, et le transept fut
{>lacé tantôt à la partie supérieure comme dans la croix
atine, tantôt au milieu comme dans la croix grecque.
Les colonnes, qui avaient reçu tant de développement en
hauteur dans les monuments gothiques, et qu'on avait
composées d'un assemblage de colon nettes , revinrent à
la forme sphérique, ou furent remplacées par des piliers
quadrangulaires, décorés de pilastres. On les ramena les
uns et les autres aux proportions indiquées par les An-
ciens, en établissant des rapports assez exacts entre le
piédestal , le fût , le chapiteau et l'entablement. Le cha-
piteau affecta des formes antiques, mais on le couvrit
aussi de dessins capricieux. Les arcades semi-circulaires
prirent la place des arcs en tiers-point ; cependant l'ogive
alterna assez fréquemment avec le plein cintre, surtout
aux portes et aux fenêtres. Le portail fut souvent cintré,
tandis que les fenêtres conservèrent leur amortissement
aigu, et même les légers compartiments et le réseau
flamboyant du style çothique de la dernière époque. On
continua de construire d après les principes du st^ie
ogival les voûtes de grande portée, mais en les surbais-
sant , et en les couvrant de culs-de-lampe et de penden-
tifs ciselés ; les voûtes plus petites furent ordinairement
cintrées, et leur surface, divisée en caissons symétriques,
reçut des sculptures très-variées, fleurs, fruits, emblèmes,
têtes humaines, génies ailés, images fantastiques, etc. La
science et la richesse de l'ornementation sont un des ca-
ractères distinctifs de la Renaissance : à aucune époque
on n'a exécuté avec autant de pureté, d'élégance et de
finesse, avec une telle perfection de profils et de contours,
les moulures, les festons, les rinceaux, les arabesques,
les fleurons, les guirlandes, les dentelles, les rosaces, les
médaillons garnis de personnages en demi-relief. Hais on
apporta des modifications qui ne furent pas toujours heu-
reuses aux principes de l'Antiquité : ainsi , l'on fit des
entre-colonnements inégaux, des pilastres d'une projeo>
tion démesurée, des flrontons circulaires ou brisés, etc.
La Renaissance des arts eut lieu dans le reste de l'Eu-
rope aussi bien qu'en Italie : les artistes italiens se ré-
pandirent en Allemagne, en Espagne, en France et en
Angleterre ( V. les articles de ce Dictionnaire consacrés
aux arts de chaque pays). B.
RËNART (Le roman de), poème allégorique et sati-
rique fort célèbre au moyen âge. Les héros en sont Goupil
(le renard) et Isengrin (le loup), en qui se personnifient
la ruse et la force. Autour d'eux se meut tout un monde,
qui est l'image du monde féodal avec sa hiérarchie, ses
castes, ses préjugés, ses mœurs et ses lois : le roi Nolde,
le Uon, et dame Orgueillevues sa fenme; Brun, Toiirti
REN
oo3
REN
^Bsviueent^ leiangner, conseillers darai ; Varchiprèlre
Ber^iari^ Ta ne; BraianU le Uoroau ; le bon sire Belin^
te moaton; Tardi$u, le limaçon, brillant et preux cbcva-
Tallor; Roonel, le m&tin « qui sait de plusieurs latins, »
u vieux routier; Tabbé Damp Petifpas, le paon ; Chan»
twlair, le coo; frère Tybert, le chat; frère Hubert, Tes-
couffle (le milan), confesseur; dame Hersent, la louve,
épouse d*l8engrin; Hermeline, la femme de Renart; le
juge Brichemer, le cerf; Grinbert, le blaireau, parent
de Renart; dame Rfigu^neau, la guenon, vieille plai-
deuse^ également parente de Renart; dom Espinart, le
hérisson; le page Rossel, l'écureuil; les huissiers (por-
tiers) WankeZf le geai, et Urediel, le perroquet; Martin,
le singe, le jongleur, etc. — Le commencement du drame
est la séduction de dame Hersent par Renart. Isengrin
porte plainte devant le roi Noble, qui ne semble pas dis-
posé à donner suite à PalTaire. Après nn débat auquel
prennent part Brun et Grinbert, après que dame Hersent
a protesté de son innocence à la grande édification de
Bernart, tout va s'arranger; mais Cbanteclair et dame
Pinte (la Poule) viennent à leur tour accuser Renart, qni
a tué la sœur de dame Pinte. Renart est condamné an
gibet : on Vy traîne, etc*est à qui insultera le plus à son
malheur, d'ailleurs mérité. Tremblant à l'aspect de Fin-
stniment du supplice, il implore la gr&ce d*allcr en pèle-
rinage à Jérusalem. Le roi refuse d'abord, puis consent,
et le vaurien échappe an châtiment. Retombé entre les
mains de la justice, la reine s'interpose, et le sauve en-
core. Après maintes aventures, Renart prie le hibou do
recevoir sa confession, et celui-ci lui adresse un sermon,
parodie de ceux des prêtres et des moines. Feignant
d'être touché de componction, Renart saute sur son con«
fesseur et l'étrangle. Tel est le sujet du Renart primitif,
auquel ont été rattachés toutes sortes d'épisodes. La
tendance générale de ce poème est la négation et la
destruction de l'esprit chevaleresque ; il montre la ruse
triomphant partout du droit et de la force. 11 raille non-
seulement les mœurs du moyen &ge, mais trop souvent
aussi ses croyances, enveloppant dans la même morfuerie
les sacrements, les miracles . tes pèlerinages , les croi-
sades, les tournois, les coui's pléniëres, etc.
Le Renart remonte beaucoup plus haut que les m»-
nuscrits qui nous en ont été conservés, et qui sont du
xni*, du XIV* et du xv* siècle : plusieurs des fables qui
furent mises en œuvre par les Trouvères appartiennent au
viti* ; mais on ne trouve pas avant le xii* un document
qui atteste l'existence du roman dans une langue quel-
conque. C'est à cette époque qu'il faut placer deux poèmes
latins qui ont pour titres hengrimus et Reinhardus, et
qui paraissent avoir été composés en Flandre. Vers le
milieu du même siècle, Helnnch de Glichesœre composa
un Renart allemand, dont le texte n'existe plus, mais
qui servit de modèle à d'autres poètes de la même nation.
Enfin, dès les premières années du xu* siècle, la tra-
dition de Renart était populaire en France. L'idée même
de Renart est-elle française ou germanique? Elle semble
être née non loin du Rhin ; mids le Renart français pa-
raît avoir été l'original du Renart iJiemand.
Ce vaste roman , dont l'ensemble ne foi me pas moins
de 80,000 vers, est divisé en une trentaine de branches,
qui furent composées à diverses époques et par divers
auteurs. Deux sont attribuées à Pierre de Saint-Cloud,
qui écrivait au commencement du xm* siècle, une à
Richard de Lison (village de Normandie), et une autre à
un curé de la Croix-en-Brie. A la fable primitive les Trou-
vères ajoutèrent bientôt de nouveaux épisodes, comme
Renart couronné, attribué par Méon à Blarie de France,
Rena^ le Nouvel par Jackemars Giélée, Renart le Ses-
tourné par Rutebeuf, et Renart le Contrefait par un
Trouvère champenois du xiv* siècle.
Fies savants allemands qui cherchèrent les premiers
Torigine de la fable de Renart y virent une allusion &
certains événements accomplis dans leur pays. Eckhart
au XVIII* siècle, et M. Mone de nos jours, ont supposé que
le loup Isengrin était Zwentibold , fils de l'empereur Ar-
nulf et roi de Lorraine, qui fut en guerre avec un ministre
perfide nonamé Regpnanus (Reinnart, Renart), et issu,
comme lai, du sang de Charlemagne. Cette hypothèse
a ét^ combattue par Raynouard dans le Journal des Sui-
vants (Juillet 1834), et l'on s'accorde à voir dans le
Toman ae Renart une peinture satirique de la société
féodale. Noble lion, le roi, n'ean pas toujours le maître
dans sea États; Isengrin, le seigneur fort et brutal, est
Msveni battu par k» ruses d'un ennemi moina vaillant
et notas fbrt; Bornart, le baudet, c*est la patiei.li
£i|lifift. an i vit fw pi'ii avec tout le monde, et l'on VolteA*
lien des luttes affreuses, des combats qui divisent et
sanglantent la terre.
Le roman de Renart a été publié pur Meon, < . ^
1826, 4 vol. in-8'; M. Chabuille a donné une éu;ii''i
avec Supplément, Paris, 1X35, in-i^ Il existe un icMe
flamand du xii* siècle, publié par J.-F. Willems, et tra-
duit par Delepierre, Bruxelles, 1837. Un texte d'Henri
d'Alkmaar en bas savon a été reproduit, avec plus 6u
moins de fidélité, par Gottsched, Scheltema, HofTmann de
Fallersleben , etc. Reinhardus a été édité par M. Mone,
Stuttgard, 1832, et hengrimus par Grimai dans son re-
cueil du Reinhart Fuchs , Berlin, 1834. Le roman de
Renart a servi de modèle aux Animc^ix parlants de Qisti,
et Gœthe en a fait une élé^nte imitation dans un poème
en 12 chants. V, V Histoire littéraire de la France,
t. XXII; A. Rothe, Les romans de Renart examinés^
analysés et comparés d'après les manuscrits les ptus
anciens, Paris, 1854, în-8». H. D.
RENCHIER, en termes de Blason, meuble de l'écu qui
repi^sente un cerf de la plus haute taille; sa ramure,
aplatie et couchée en arrière, est beaucoup p'iis longue
que celle du cerf ordinaire. Le rcnchier e&i sans doute le
renne des Lapons.
RENCONTRE, en termes de Blason, tête de quadru-
pède qui paraît de front dans l'écu. Ainsi l'on dit : un
rencontre de cerf, un rencontre de bœuf, etc.
RENÉGAT (du latin qui renégat, qui renie), celui qui
a renié la foi chrétienne pour embrasser une autre reli-
gion et particulièrement le mahométisme.
REnQAGEMENT, rentrée des anciens mililaires au
service. Il fut substitué, par une loi de 1855, h l'Hucien
système de remplacement ( V, ce mot). Le rengagement
four sept années donnait droit : {• k une somme de
,000 fr. dont 100 fr. payables In jour du rengagement
ou de l'incorporation, 200 fr. noit au jour du ren^'age»
nient ou de l'incorporation, soit pendant le cours du ser-
vice, sur l'avis du Conseil d'administration du corps, et
700 fr. à la libération du service; 2® h uni* hauie paye
de 10 centimes par jour. Tout rengagement pour moins
de sept ans donnait droit: l» h une sumnie de 10 Ir.
par an, payable à la libération du service; i« h une ha» le
paye de 10 centimes par jour. Après Uann de bcrvice,
le rengagé ne recevait qu'une Imnle paye de 20 centimes.
Les soui^-ofTiciers nommes oITiciers, ou apiielés h un
des emplois qui leur sont dévu us en vertu des lois et
règlements, avaient droit, sur les sommes allouées pour
rengagements,^ une part proportionnelle h la dure» du
scrv'ce qu'ils avaient accompli: il en étaitde même des
militaires réformés et de ceux passant dans un corps
qui ne se recrute pan pir la voix des appels. Les sommes
attribuées aux rengagés après libér;<tion étaient iiics-
sibleset in^aississables. En cas de mort, une part de ces
sommes, proportionnelle h la durée du service, était dé-
volue aux héritiers; en cas de désnérence, les sommes
dues profitaient h la dotation de l'armée. La condamna-
tion à une pi'ine afTIictive ou infam.-iute, nu boulet, aux
travaux publics, à 'une peine correctionnelle de plus
d'une armée, eniraînaii la déchéance de tout droit .ux al-
locations non soldées Le r^nni h In haute paye érailsus-
pendu par l'absence illégale, par l'envni dans une com-
pagnie de discipline, et pendant rempriM<inMemeni subi
en vertu d'u' e condamnation rorreclioimelle. B.
RENIER, 17* branche de la chanson de Guillaume-au'
cùurt'nei. Renier, fils de Maillefer, a été enlevé au ber-
ceau, et porté chez les Sarrasins & Venise; devenu grand,
il se met à la recherche de son père, au'il tire des mains
des Infidèles. — L'auteur de cette cnan<^on y rattache
d'une manière ridicule tous les événements de son temps:
on y voit figurer les Guelfes et les Gibelins, Robert
Guiscard , etc. Il en existe un seul manuscrit à la Biblio-
thèque nationale de Paris. V. VHistoire littéraire de la
France, tome XXII. H. D.
RENOMMÉE (La). V. notre Dictionnaire de Biogror
phte et d* Histoire,
RENONCIATION, en termes de Droit, action de répu-
dier des droits acquis ou éventuels. La femme mariée ne
peut renoncer à la communauté de biens, et ses héritiers
ne peuvent y renoncer pour elle, que suivant certaines
formes et dans certains délais aprèo la dissolution du ma-
riage {Code Napoléon, art. 1464-60). — La renonciation
à un héritage est soumise à de nombreuses conditions
( Ibid^y art. 784-793, 845, 1389) : ainsi , il ne dépend pas
d'un héritier d'abdiquer une succession opulente et de
frustrer ainsi ses créanciers du gage sur lequel ils ont dû
compter, et ceui-ci peuvent , en cas de négligence ou de
mauvais vouloir du débiteur, exerow bs dreHs qui nu
REN
1554
RÉP
■ppartiennent. L*art. 181 ne permet pu de renoDcer ft la
Bucc(%ssïon d*nne personne vivante. — La renonciation à
la prescription ne peut avoir lieu que quand celle-ci est
acquise lart 2220-27).
HBNTE, se dit en général de tout revenu annuel, et
plus ordinairement de ce qui est reçu annuellement
comme prii ou intérêt d*un fonds, d*un capital aliéné ou
cédé. Avant 1789, la forme des rentes variait à l'infini;
notre Droit actuel reconnaît deui sortes de rentes, les
rentes perpétuelles et les rentes viagères, toutes deux dé-
clarées biens meubles [Code Napoléon, art. 529 j, et dont
les arrérages se prescrivent par 5 ans (art 2277). Les
rentes perpétuelles ont un nom assez impropre, puis-
qu'elles sont rachetanles; seulement les parties peuvent
convenir que le rachat ne sera pas fait avant un délai qui
ne pourra excéder dix ans, ou sans avoir averti le créan-
cier au terme qu'elles auront déterminé d'avance. Le dé-
biteur d'une rente constituée en perpétuel peut être con-
traint au rachat : 1° s'il cesse de remplir ses obligations
pendant deux années ; 2° s'il manque à fournir au prêteur
les sûretés promises par le contrat. Le capital de la rente
devient aussi exigible en cas de faillite ou de déconfiture
du débiteur. La rente peut s'éteindre par la prescription
trentenaire, c.-à-d. s'il s'est écoulé 30 ans depuis sa créa-
tion sans aucun payement d'arrérages. Les rentes viagères
sont celles dont la durée est subordonnée au décès d'une
ou plusieurs personnes indiquées au contrat; elles peu-
vent être constituées à titre onéreux ou à titre gratuit.
Elles ne sont pas limitées, comme les rentes perpétuelles,
au taux légal de l'intérêt. On ne peut les racheter ; mais
le créancier peut demander la résiliation du contrat, si
le constituant ne donne pas les sûretés convenues. Une
rente viagère ne peut être déclarée insaisissable dans le
contrat que lorsqu'elle est constituée à titre gratuit. Elle
s'éteint par la mort naturelle , mais non par la mort
civile. V. Pœlix et Henrion, Traité des rentes foncières,
1820, in-8^; Menant, Des rentes en Droit romcûn et en
Droit français, 1860, ln-8«.
Les rentes sur l'Etat sont les sommes annuel1en.^nt
payées par le gouvernement pour les intérêts des em-
prunts publics : elles sont inscrites au Grand-Livre de la
dette publique, et les titres délivrés aux rentiers s'ap-
pellent inscriptions de rente. Les rentes se désignent par
le taux de l'intérêt qu'elles rapportent; ainsi l'on dit le
3, le 4, le A 1/2, le 5 p. 100. Le cours de la rente est le
le taux auquel elle est cotée chaque Jour à la Bourse, et
d'après lequel ont lieu les achats et les ventes de titres ;
ce taux subit des fluctuations continuelles, à cause de
l'affluence ou de la rareté des titres sur la place. Les évé-
nements politiques exercent une grande influence sur les
cours de la rente; on en Jugera par quelques chiffres re-
présentant la valeur du 5 p. 100 français à certaines
époques importantes : en 1707, 6 fr. 95 ; en 1800, 47 fr.;
en 1804, 55 fr.; en 1807, 76 fr. 40; en 1809, 86 fr.; en
1812, 82 fr.; en 1814, 51 fr.; en 1820, 71 fr.; en 1827,
iOO fr.; en 1830, 109 fr.; en 1831, 75 fr.; au commence-
ment de 1848, 116 fr., et, après la Révolution, 50 fr.;
après les événements de Juin, 80 fr.; après le coup d État
de 1851 , 110 fr. Le 5 p. lOl) date de 1707 ; le 3 p. 100 et
le 4 1/2 furent créés en 1825. Pour se libérer, l'État a
deux moyens, V amortissement ( V. ce mot) et le rem-
boursement. Celui-ci n'est guère qu'une mesure commi-
natoire, pour amener les rentiers a accepter une conver-
sion, c-à-d. une réduction de rente. La première opération
de ce genre eut lieu en 1825 : vivement combattue par
l'opposition libérale, elle ne put être imposée; les porteurs
de rente 5 p. 100 eurent seulement la faculté de convertir
.«urs titres soit en 4 1/2 au pair, avec garantie de non-
remboursement pendant qu.nze années, soit en 3 p. 100
au taux de 75 fr. Cette conversion toute volontaire pro-
cura au Trésor une économie annuelle de 6 millions. Sous
le gouvernement de Juillet 1830, la Chambre des députés
vota de nouvelles conversions de rentes; mais la Chambre
des psÀT? les rejeta invariablement. Pendant la Prési-
dence de Louis-Nupoléon , un décret du 14 mars 1852
convertit toute la rente 5 p. 100 en 4 1/2, avec faculté de
remboursement au pair pour les rentiers qui le deman-
deraient , et garantie contre le droit de remboursement
pendant 10 ans pour ceux qui accepteraient la conver-
sion : sur une dette de près de 6 milliards, les rembour-
sements demandés s'élevèrent à peine à 30 millions, et
la conversion fut pour le trésor une économie annuelle
de près de 20 millions. En 1862, une autre conversion du
4 1/2 et du 4 en 3 p. 100 a été proposée, avec cette par-
Ocularité que les rentiers devaient payer une soulte pour
souserver avec leurs nouveaux iitr^ la même quantité
de rentes : ropératlon « en grande partie réussi. Depiris
ce moment, la dette publique est presque uniRée, et 10
service des intérêts se fait, non plus par semestre* mait
par trimestre. Un autre résultat du gouvernement de Na-
poléon m a été de démocratiser la rente, surtout par les
divers emprunts nationaux qui ont été contractés : la
rente n'est plus concentrée entre un nombre restreint de
capitalistes, elle est dans toutes les mains. En 1847, il
n'y avait que 207,000 rentiers, dont les trois quarts à
Paris; dès 1854, on en comptait 664,000, dont plus de la
moitié dans les départements.
RENTOILAGE, opération par laquelle on enlève d'une
toile pourrie ou usée la peinture à l'huile qui la recou-
vre, pour la transporter sur un fond neuf. Au siècle der-
nier, Hacquin et Picault, restaurateurs de tableaux,
imaginèrent le procédé suivant : au mo^en d'un encollage
fait avec de la farine de seigle bien cuite et une ou deux
gousses d'ail, on couvre entièrement le tableau, d'abord
avec de la gaze, puis avec du papier fin, et ensuite avec
du papier commun, ce qui se nomme cartonnage; la
peinture étant plus fortement fixée sur la nouvelle su-
perficie que sur l'ancien fond, on retourne le tableau, et
on enlève avec précaution la toile; si quelques parties
sont trop adhérentes, on les use en les frottant avec
une pierre ponce. Après Venlevage, on réapplique par
une opération analogue la peinture sur un autre fond,
enduit d'un mordant, et l'on tamponne en allant toujours
du centre vers les bords, pour (aire échapper l'air qui
pourrait rester entre les toiles et y occasionner des bour-
souflures ; puis on presse sur la toile neuve avec un fei
chaud, ce qui rend la peinture plus adhérente et fait sortir
l'excédant de la colle. Il ne reste plus alors qu'à enlever
le cartonnage à l'aide d'une éponge, et le tableau se
trouve rentoilé. On procède à peu pr^ de mftme pour
sauver les peintures qui recouvrent des panneaux ver-
moulus; mais souvent on amincit le bois avec de petits
rabots, et, quand il n'en reste plus sur la peinture qu'un
épiderme pour ainsi dire, on l'use aussi à la pierre ponce.
Le ubleau de la Ckarité, peint par André del Sarto en
1518, fut rentoilé par Picault en 1750; il est an musée du
Louvre. Le même artiste rentoila ensuite le ^ MirhA de
Raphaël. On peut citer encore an autre tableau de ce
peintre, la Vierge de Poligno, que Hacquin flb rentoila
avec beaucoup d'adresse. B.
RENTRÉE, terme de Commerce et de Finances, syno-
nyme de recouvrement,
RENTR^B , en termes de Musique, retour du sujet , sur^
tout après un silence, dans une fugue, dans une imita-
tion , etc. Une partie qui reprend après avoir été inter-
rompue fait aussi une rentrée, qu'elle itsproduise ou non
le sujet. — Dans les troupes dramatiques des théâtres
pem^anents, les artistes ne sont pas astreints aux trois
débuts, quand ils ont été reçus l'année précédente; ils
font une simple rentrée^ après laquelle le public pro-
nonce sur leur admission.
RENVERSEMENT DES ACCORDS. V, Accord.
RENVl , en termes de Jeu , ce qu'on met par-dessus
l'enjeu.
RENVOI, addition à un corps d'écriture, soit en mai^,
soit à la fin. D'après la loi du 25 ventôse an xi, les ren-
vois dans les actes notariés doivent être écrits en roar^,
approuvés, signés ou parafés chacun par l'oflîcier public,
les parties et les témoins : le défaut d'approbation em-
porte la nullité des renvois, mais non celle de l'acte lui-
même^ Dans les actes sous seing privé, les renvois doi-
vent être approuvés, signés ou parafa par les parties
contractantes.
RENVOI (Demande en). On appelle ainsi, au dvil , les
conclusions d'une partie qui demande que le tribunal,
mai à propos saisi , la renvoie devant les juges compé-
tents. Au criminel, la demande en renvoi a pour objet
d'obtenir, soit pour cause de sûreté publique ou de sus-
picion légitime, soit à défaut d'un nombre suffisant de
juges pouvant connaître de l'affaire, que le jugement soit
déféré à un autre tribunal : c'est la uhambre criminelle
de la Cour de cassation qui statue en cette matière.
RÉPARATION D HONNEUR. Celui à l'honneur duquel
on a porté atteinte n'a d'autre moven légal d'obtenir ré-
paration que de s'adresser à la Juridiction correctionnelle.
REPARATIONS^ travaux d'entretien que néceositenf
les bâtiments. Les grosses réparations, comme celles
des murs, des planchers, des couvertures, sont à la charge
des propriétaires. Les menues réparatione ou réparations
locativet, comme celles des vitres, des carreaux, des
àtres, etc., incombent aux locataires, à moins ^usleâ dé-
gradations ne proviennent de Tétusté ou de force
RÉP
15»5
REP
tenre ; on les nomme réparations viagères ou d'mtr&tien,
quand elles sont à la charge de Tusufraitier.
RÉPAiATiONS CIVILES, sommo adjugée par an tribunal à
la partie civile, pour la dédommager du tort qu'un crime
ou un délit lui a causé; — dommages-intérêts accordés à
an individu contre la personne qui Ta injustement ac-
cusé. Les réparations civiles entraînent la contrainte par
corps.
RÉPARTITION, opération par laquelle, après que le
budget des recettes a été voté par le Corps législatif,
Tautorité centrale répartit entre les départements la
somme à percevoir. La répartition est faite ensuite par
l'autorité départementale entre les arrondissements, par
^ l'autorité d'arrondissement entre les communes, et par
l'autorité communale entre les individus. — En matière
de faillite, le Code de Commerce (art. 513) a réglé le mode
de répartition de l'actif mobilier du failli entre ses créan-
ciers. Ceux d'entre eux qui n'ont pas fait l'affirmation de
leurs créances ne sont pas admis au partage ; la voie de
l'opposition leur est ouverte jusqu'à la dernière distribu-
tion inclusivement, mais ils ne peuvent rien prétendre
sur les répartitions consommées. V, Failutb, Distri-
simoN, Ordre.
REPAS. K. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogror
phie et d* Histoire.
RÉPERTOIRE, en latin repertoriwn (de repenre,
trouver), table, recueil, inventaire où les choses, les
matières sont rangées dans un ordre qui permet de les
trouver facilement. Le mot s'emploie en Jurisprudence
pour désigner les recueils où l'on enregistre les arrêts
mémorables des Cours et tribunaux: ainsi, l'on a le
Répertoire universel et raisonné de jurisprudence par
Merlin (1827-28, 18 vol. in-4» ou 36 voL in-8») , le
Répertoire général de législation, de doctrine et de juris-
prudence par Souquet (1846, 2 vol. gr. in-4*), le Réper-
toire de la l^islation du notariat ( 1837, 2 vol. in-4'*),
et le Répertoire de la nouvelle législation civile, commer-
ciale et administrative par Favard de Langlade (1823,
5 vol. in-4*), etc. — Dans le Commerce, on nomme Ré-
pertoire an livre tenu par ordre alphabéticfue, une table
des noms des débiteurs ou créanciers, qm sert à trou-
rer avec facilité sur le grand-livre les divers comptes qui
y sont portés. — Les notaires, greffiers, huissiers, com-
missaires-priseurs, ont un Répertoire, registre sur lequel
ils sont tenus d'inscrire sommairement et par ordre de
date les actes qu'ils reçoivent ou rédigent. — Dans le
langage du Thé&tre, le Répertoire est la nomenclature des
pièces dont se compose le fonds particulier de chaque
théâtre.
RÉPÉTITEUR, nom donné aux maîtres particuliers
qui se chargent de répéter aux élèves les leçons des pro-
fesseurs de l'enseignement public, de les exercer, de cor-
riger leurs devoirs. Depuis nn décret du 17 août 1853,
c'est la qualification des fonctionnaires des lycées qu'on
appelait précédemment maîtres d'études ou maîtres de
quartier : les maitres répétiteurs doivent être pourvus du
diplôme de bachelier (k lettres ou es sciences. Ils sont
chargés de surveiller les élèves à l'étude, au réfectoire,
an dortoir, pendant les récréations et aux promenades,
de les diriger et de les aider dans leur travail ; ce n'est
que par exception qu'ils donnent des répétitions. Ils
peuvent être appelés a faire les classes élémentaires et à
suppléer les professeurs absents. Ils sont de deux classes,
dont le traitement est de 1,000 fr. et de 1,200 fr.; tous
sont log^ et nourris an lycée. Pour être élevé à la
1** classe, le diplôme de licencié est obligatoire. C'est
parmi eux que Ton prend les surveillants généraux, aux
iq>pointements de 1,400, 1,600 et 1 ,800 fr. Il y a des aspi-
rants répétiteurs, dont on exige 18 ans d'âge, le diplôme
de bachelier, et ojui ont un traitement de 700 fr. Ces
divers fonctionnaires sont nommés et promus par le
ministre de l'Instruction publique, sur la proposition des
Proviseurs et l'avis des R ct:iurs.
RÉPÉTITION , figure de Hhétorique oui consiste à em-
ployer plusieurs fois les mêmes mots ou le même tour pour
donner plus d'énergie à la phrase. Fléchier dit , en par-
lant de la mort de M"** d'Aiguillon : « Moment fatal pour
tant de pauvres, dont elle était la protectrice et la mère I
Moment heureux pour elle, qui entrait en possession de
l'éternité! Moment triste, mais utile pour*nous, si nous
apprenons à vivre et à mourir comme elle. » On appelle
Conversion les répétitions faites symétriquement, comme
dans ces vers de P. Corneille relatifs à Richelieu :
Qa*on parle mal on blm da fameux cardinal.
Ma prose ni met tom n'en diront Jamah rien :
0 mil ftlt trop do bien , pour en dire dn oial;
U m*a Cftlt trop de mal , pour en dire du bien.
Les rhéteurs distinguent différentes sortes de Répétition
par les noms dAnadiplose, d^Anaphore, et d'Anttstrophe
\V. ces mots).
K^pérmoN (dn latin repetere, redemander), en termes
de Droit , action par laquelle on réclame ce qu'on a donné
par erreur, ce qu'on a payé de trop, ce qu'on a avancé
pour un autre.
RfréTiTiON , leçon particulière dans laquelle un profes-
seur répète les exercices d'une classe, pour les compléter
ou pour aider l'élève à en résoudre les difficultés.
Rép^iTioif , dans le langage du Thé&tre, essai que l'on
fait d'une pièce avant de la représenter en public.
REPIC. y. PiQCET.
RÉPIT, ancien terme de Droit, délai accordé aux dé-
biteurs de bonne foi. U s'obtenait en vertu de lettres de
la grande Chancellerie ou par arrêt du Conseil.
RÉPLIQUE, en Musique, signifie la même chose qu'oc-
tave. En Composition, on appelle aussi réplique l'unisson
de la même note dans deux parties différentes. Quand il
s'agit d'une fugue, la réplique est la reprise du sujet, —
On appelle encore réplique un fragment de mélodie pris
dans la partie récitante et écrit en petites notes sur une
partie secondaire, pour signaler à celui qui ex^ute celle-
ci l'instant de la rentrée qu'il doit faire après un long
silence.
RÉPONS, en bas latin responsorium, morceau com*
posé de paroles empruntées à l'Écriture, et qu'on dit ou
chante après chaque leçon des matines. Il est ainsi ap-
pelé, parce qu'après le verset qui en fait partie et que
chantent deux choristes, le chœur répond en répétant
une certaine portion du morceau nommée réclame. On
chante aussi les répons aux processions, et avant les
hymnes des laudes et des vêpres. Outre ces grands ré-
pons, il y a des répons brefs ^ d'un chant simple et uni-
forme, qui sont chantés à Tierce, à Sexte, et à Nono.
RÉPONSE. V. FuoDB.
aiSpONses de nsorr, nom que les Romains donnaient
aux décisions des jurisconsultes sur les questions qui
leur étaient soumises.
REPORT, en termes de Comptabilité, action de reporter
une somme ou total d'une page à une autre, ou d'un livre
à un autre. La somme ainsi reportée se nomme également
report.
REPORT, terme de Bourse. V. Bourse.
REPORT DB PiULUTB, fixatlou de l'ouvorture de la fail-
lite à une époque antérieure au Jugement qui l'avait
déclarée.
REPORTERS, nom qu'on donne en Angleterre aux
écrivains chargés de rendre compte, dans les Journaux,
des séances du parlement, des audiences des cours et
tribunaux, des meetings publics et des discours qu'on y
prononce. Une classe inférieure de reporters a reçu le
nom de penny-a-liners (un sou la ligne); ce sont ceux
qui recueillent les nouvelles locales et fabriquent ce
qu'on nomme en France des canards.
REPOSOIR I du latin repositorium)^ sorte de chapelle
temporairement élevée sur une place publique, dans une
rue, ou un carrefour, et qui est comme un lieu de repos
pour les processions de la Fête-Dieu. On y dépose le S^-
Sacrement, et, après quelques prières, le prêtre donne la
bénédiction à la foule.
REPOUSSÉ (Sculpture au), genre de travail qui con-
siste à repousser au marteau des feuilles de métal, de
manière à leur donner la forme que l'artiste veut pro-
duire, et à exprimer à leur surface des figures ou des
ornements en relief. Ce procédé est quelquefois désigné
par le nom de Sphyrélaton (d'un mot grec qui sif;nifie
étendu sous le marteau). Il remonte à une haute anti-
quité : les objets métalliques dont parle Homère sont
toujours travaillés au marteau. Le repoussé a été em-
ployé princi paiement dans la confection des armures de
luxe et dans l'orfèvrerie, dans des bas-reliefs d'or ou
d'argent, et Ton terminait les ouvrages au clselet.
REPOUSSOIR , outil, en forme de long ciseau, dont se
servent les sculpteurs pour pousser des moulures.
REPOUSSOIR, en termes de Peinture, tout objet vigou-
reux de couleur ou très-ombré qu'on place sur le devant
d'un tableau, pour repousser les autres objets dans yéloi-
gnement.
REPRÉSAILLES, en latin barbare reprœsalia (de re-
prehendere, reprendre ce qui a été pris), actes d'hostilité
qu'on État exerce contre un autre ou contre ses natio-
naux, pour obtenir la réparation de droits méconnus
RÉP
1556
RÉP
Ta Tiolés, ou pour 8*indemiii8er d*an dommage qu'il a
éprouvé.
REPRÉSENTANT, celui qui tient la place d*un autre,
et qui a reçu de lui des pouvoirs pour agir eu son nom.
Les ambassadeurs sont les représentants des souverains
qui les accréditent. Dans quelques Assemblées législa-
tives, les députés prennent le titre de représentants * il
en a été ainsi on France à Tépoque de la Convention,
pendant les Cent-Jours, et âpres la Révolution de 1848.
— En Droit, on nomme représentant celui qui est appelé
à une succession, du cbef d''me personne prédécédée et
dont il exerce les droits.
REPRÉSENTATIF ( Système), système d'organisation
politique dans lequel la nation entière, ou seulement
une partie de la nation offrant plus de garanties de lu-
mières et d'indépendance, est appelée à élire des repré-
sentants ou députés, chargés de contrôler les dépenses
publiques, de voter l'impôt, et de concourir à la confec-
tion des lois.
REPRÉSENTATION, mot qui signifie : i» Vexhibitiony
la production d'un acte ou d'une pièce quelconque ;
2* l'état que tiennent certains fonctionnaires, et pour
lequel une somme leur est allouée; 3* l'action de jouer
une pièce de thé&tre, de donner un spectacle quelconque.
Rp.pa^.sBNTATiON (Droit de), en Jurisprudence, subro-
nition légale d'un homme vivant à un homme mort.
r. Succession.
REPRiSsRNTATiOFi NATioNALB, Hom géuériquo SOUS lequel
on désigne les Assemblées représentatives.
RÉPRIMANDE, peine disciplinaire prononcée par les
Conseils de discipline de l'ordre des avocats, les Cham-
bres des avoués et des notaires, les Conseils de discipline
de la garde nationale, les Conseils académiques et le
Conseil supérieur de l'instruction publique, contre les
manquements légers de leurs Justiciables. Elle peut être
faite avec ou sans publicité.
REPRIS DE JUSTICE, celui qui a subi une condam-
nation criminelle. Quand il est prévenu d'un délit, il ne
peut être mis en liberté provisoire dans le cas où la loi
accorde ce bénéfice à d'autres accusés.
REPRISE, terme de Droit. La reprise ^instance est
l'acte par lequel on reprend un procès contre une nou-
velle partie. On nomme reprises matrimoniales ce que
chacun des époux a droit, par lui ou par ses représen-
tants, de prélever avant partage sur les biens de la com-
munauté qui a été dissoute. Les reprises de la femme
s'exercent avant celles du mari ; en cas d'insuffisance de
la communauté, elle exerce ses reprises sur les biens
personnels de son époux. V, Jousselin, Des prélèvements
et reprises de la femme mariée, 1855, in-8'*; Tessier, Le
droit de reprise de la femme, 1857, in-8®.
REPRISE, en termes de Musique, partie d'un moroeau
qui doit être exécutée deux fois. La séparation des re-
prises se marque par deux barres perpendiculaires tra-
cées sur la portée et accompagnées latéralement de deux
points : lorsque ces points ne sont marqués que d'un
côté, on ne répète que la partie qui suit ou qui pré-
cède , selon que les points sont à droite ou à gauche des
barres.
REPRISE, représentation qu'on donne d'une pièce de
théâtre qui n'a pas été jouée depuis un certain temps.
REPRISE, se dit des vers d'un rondeau, d'une ballade,
d'un couplet de chanson, que l'on reprend, que l'on ré-
pète pour refrain.
REPRIS! , commencement d'une phrase de Plain-Chant
dont la première note est la même que la dernière de la
phrase précédente.
REPRISE, terme employé dans la faetnre des orgues et
f)articulièrement dans l'accord de certains Jeux, tels que
a fourniture, la cymbale, le plein-Jeu, le clairon. Ces
Jeux ne pouvant, au moyen de la progression ordinaire,
atteindre l'acuité des dessus d'un clavier de 54 notes par
exemple, à cause de la petite dimension de leurs tuyaux
et de leur intonation élevée, on reprend plusieurs fois
dans le cours de la succession des notes l'intonation de
l'octave précédente, et on arrive par ce moyen à la der-
nière note aigué du clavier. C'est ainsi que le clairon de
4 pieds parlant difficilement à partir de la 3* octave, on
fait une reprise de cette octave pour former la 4* et
compléter les dessus, de telle sorte que ces derniers
tuyaux se trouvent à l'unisson de ceux de la trompette
de 8 pieds auxquels ils donnent par ce moyen plus de
rondeur et d'éclat. F. C.
RÉPROBATION , en termes de Théologie, Jugement
par lequel Diou exclut un pécheur du bonheur éternel ,
et le condamne aux supplice* «^>, l'Enfer.
RÉPUBLIQUE (du latin res publica, la choie pu-
blique), mot qui, s'appliquant à une forme de gouverne-
ment, désigne, dans son sens le plus général, un gou-
vernement à la tête duquel un monarque n'est pas placé.
Ce gouvernement peut reposer sur des principes divers:
ainsi, un peuple dirigé par un corps sacerdotal est con-
stitué en république théocratique ; Sparte, régie par uo
Sénat, fut une république aristocratique . au moyen &ge,
Venise forma une république oligarchique (K. Thkocra-
T1E, Aristocratie, Ougarchib); Athènes, où le pouvoir
était exercé par rassemblée du peuple, était une répti-
blique démocratique (V. Dknocratir). L'ancienne Rome
eut un gouvernement républicain mixte, renfermant tout
à la fois des éléments aristocratiques et des éléments
démocratiques. Dans les temps modernes, les Provlnc^cs-
Unies, sous le gouvernement des stathoudcrs, avalant
encore un système républicain d'une nature particulière.
La Suisse et les États-Unis de TAmér que du Nord for-
ment des républiques démocrati :ues fédératives, c.-à-d.
composées de cantons et d'États indi'pendduts quant à
leur souveraineté intérieure, mais unis les uns aux au-
tres par un lien fédéral, tandis que la Répultlique fran-
çaise, en 1792 et en 1849, a été une et indivisible. Dans
une république démocratique d'une certaine étendue, le
gouvernement est nécessairement représentatif, c-à-d.
que chaque citoyen, ne pouvant exercer directement son
droit de souveraineté, le délè^oie à des repn^Nentants
dont la réunion forme l'assemblée nationale. En Franre,
au temps du Directoire, le pouvoir législatif fut partagé
entre deux corps également électifs, le Conseil des An-
ciens et le Conseil des Cinq cents; il en est ainsi aux
États-Unis, qui possèdent un Sénat et une Chambre des
représentants : cette division du pouvoir a été regardée
comme une garantie d'ordre et de maturité des délibé-
rations. Le pouvoir exécutif peut émaner, soit de l'As-
semblée nationale, comme on le vit en France au temps
de la Convention et du Consulat, soit directement du
peuple par le suffrage universel, comme aux États-Unis,
et dans la République française de 1848. Ce pouvoir peut
être exercé collectivement par plusieurs citoyens, ou
confié à un seul ma:4strat, appelé Président : le premier
système fut en vigueur pendant la Convention, le Direc-
toire, et le Consulat; le second, appliqué en France en
1848, a toujours été adopté aux États-Unis. La base de
toute république démocratique est le sufi'rage universel.
Cicéron signalait, dès l'antiquité, les écueils des répu-
bliques démocratiques : « Lorsque Tardeur du peuple
s'est enflammée d'une soif intarissable d'indépendance, et
que, servi par des complaisants pervers, il a bu avide-
ment la coupe remplie de libt^rté sans mélange, alors si
ses magistrats et ses chefs ne sont tout à fait mous et
obéissants, »\\s ne lui versent à flots la lil^erté, il les
poursuit, les incrimine, les accuse, il les appelle domi-
nateurs, rois, tyrans. » La courte durée du pouvoir,
incessamment renouvelé par l'élection, encourage les
ambitieux, et fait naître les flatteurs des peuples. 1^
multitude choisit trop souvent, en haine de toutes les
supériorités, des chefs nouveaux, hardis, acharnés contre
tout ce qui est grand. On ne tarde point à passer de la
démocratie à la démagogie, et l'on ne sort de celle-ci que
par le despotisme. Loi publicistes n'hésitent pas à re-
connaître que la république exige des citoyens un assem-
blage bien rare de qualités, désint(^ressement, instruction,
patriotisme à toute épreuve, respect absolu de Ul loi,
obéissance aux magistrats, etc. a II ne faut pas beaucoup
do probité , disait Montesquieu , pour qu'un gouverne-
ment monarchique ou un gouvernement despotique se
maintiennent ou se soutiennent. La force des lois dans
l'un, le bras du prince toujours levé dans Tautre, règlent
ou contiennent tout. Mais, dans un État populaire, il faut
un ressort de plus, la vertu. » J.-J. Rousseau a dit à son
tour : M Que de choses diiliciles à réunir ne suppose pas
ce gouvernement! Premièrement, un État très-petit, où
le peuple soit facile à rassembler, et où chaque citoyen
puisse aisément connaître tous les autres ; secondement,
une grande simplicité de mœurs, qui prévienne la mul*
titude d'affaires et les discussions épineuses; ensuite,
beaucoup d'égalité dans les rangs et dans les fortunes,
sans quoi l'égalité ne saurait subsister longtemps dans
les droits et Tautorité; enfin, peu ou point de luxe; car,
ou le luxe est l'efi'et des richesses, ou il les rend nfei'S-
saires; il corrompt à la fois le riche et le pauvre, l'un
par la possession, l'autre par la convoitise ; il vend la
patrie à la mollesse, à la vanité; il ôte à l'État to<is ses
citoyens pour les asservir les uns aux autres, et tous à
l'opinion... Ajoutons qu'il n'y a paa de gouvernement d
RÉP
1557
RÉS
iajet tan gaerres dviles et aux agitations intestines,
parce qu*il n*y en a aucun qui tende si fortement et si
continuellement à changer de forme, ni qui demande
{)Ius de vigilance et de courage pour être maintenu dans
a sienne... S*il y avait un peuple de dieui, il se gouver-
nerait démocratiquement; un gouvernement si parfait
ne convient pas à des hommes n {Contrat social , III, 4).
népuBLiQUB (Traité de la). Nous possédons trois ou-
vrages célèbres qui portent le litre de République, et
dont les auteurs sont Platon, Cicéron, et Bodin. L'ouvrage
de Platon est, à proprement parler, une utopie : le phi-
losophe grec bâtit sa république sur le plan de sa psy-
chologie; distinguant dans T&me un élément raisonnable,
un élément irascible, et un élément sensuel ou pas-
sionné, il partage TÉtat en trois ordres qui leur corres-
pondent, à savoir: les jti^es, qui gouvernent; les guerriers,
qui défendent TÉtat; le peuple, livré aux travaux de
Tagriculture et de Tindustrie. Dos quatre vertus que
comprend la Morale de Platon, la prudence est le par-
tage des Juges, le courage est Tapanage des guerriers,
la tempérance règle Taccord des classes supérieures et
inférieures, la justice veille à ce que chaque ordre Joue
le rôle qui lui appartient. De même enfin que Platon
compte cinq états de Tàme, dont Van est sain et les
quatre autres dépravés, de même il distingue cinq gou-
vernements ou états de la société : les quatre mauvais
' sont la timocratie, ïoligarchie, la démocratie, et la ty^
rannie^ qui correspondent à Tétat moral de VambitietLX,
de l'avare, du passionné, et du coléreux; le bon est
VaristorreUie ou gouvernement des sages, de même que
rhommn le plus heureux est celui qui obéit à la raison.
Partant de Tinégalité nécessaire et éternelle des hommes,
Platon les divise en castes qu'il subordonne les unes aux
autres. A Tharmonie idéale qu'il cherche à établir, il sa-
crifie complètement l'individu : il anéantit en lui tout
désir qui n'a pas pour objet le bien de la république; il
détruit la propriété, le mariage, la liberté civile et poli-
tique. Tous les biens appartiennent à la république;
toutes les femmes sont communes; les enfants sont les
enfants de l'État, et nul n'a le droit de les regarder
esmme siens. Platon voulait par là reporter sur la chose
publique toute l'activité individuelle et en faire l'unique
passion, l'unique amour. — La République de Cicéron ne
nous est point parvenue en entier : longtemps on n'en
connut que le fameux Songe de Scipion qui la terminait,
et quelques passages cités par les anciens auteurs; en
182*2, Angelo Mai retrouva, sur un manuscrit palimpseste,
le l*' livre presque entier, un long fragment du 2*, quel-
ques parties du 3*, du 4* et du 5*. L'ouvrage avait pri-
mitivement 9 livres, qui furent ensuite réduits à 6. L'au-
teur suppose que, pendant les Fériés latines, Scipion
Émilien, Lélius, Fannius, Tubéron, Scévola et d'autres,
discutent sur la meilleure forme do gouvernement. Les
interlocuteurs cherchent quelles sont les conditions de la
vie politique, comment une nation doit être constituée
pour devenir et demeurer puissante; ils signalent les
causes de la grandeur de Rome, et les moyens de sus-
pendre une décadence dont les symptômes commençaient
à se révéler. Cicéron n'a donc point foit une utopie; son
but était tout patriotique. — Dans sa République^ publiée
en 1570, Jean Bodin examine les diverses sortes de gou-
vernements que l'histoire des nations nous présente,
s'eflorce de fiier leurs principes et leurs caractères, et,
sans en condamner aucun, hormis ceux qui sont exces-
sifs, tels que la tyrannie et l'anarchie, laisse voir son
penchant pour la monarchie tempérée par des lois. Au
lieu d'adopter, comme avait fait Machiavel, pour principe
de la politique l'intérôt des princes, il prend pour point
de départ l'intérêt général de la communauté. La néces-
sité du consentement des sujets pour lever des subsides,
et l'inaliénabilité du domaine royal, lui paraissent des
garanties des libertés publiques. Il met la famille et la
propriété au-dessus du gouvernement, et attaque le com-
munisme de Platon, de Thomas Morus, et des Anabap-
tistes. Il blAme l'altération des monnaies et la vénalité
des charges. Il conseille d'alléger les droits d'entrée sur
les articles dont le peuple ne peut guère se passer, mais
de les faire peser sur les produits manufacturés, afin de
forcer le peuple à se livrer à l'industrie. 11 veut le moins
Eossible d'impôts directs, mais il demande une contri-
ution sur les objets de luxe et sur le revenu. Il s'étonne
que l'impôt ne pèse que sur le peuple, et que la noblesse
et le clergé en soient exemptés. Enfin il se montre parti-
san de ta liberté du commerce.
RÉPUDIATION. V. ce mot dans notre Dietionnawê de
Biographie et d'Histoire.
REQUÊTE (du latin requisitum, venant derequirere,
réclamer ), demande par écrit présentée suivant certaines
formes établies k un tribunal ou à un magistrat. On
donne le même nom aux Mémoires fournis par les avoués
dans les causes qui sont instruites par écrit, et à l'acte
par lequel une partie condamnée par défaut forme oppo-
sition motivée au jugement rendu contre elle. La ne-
qitéte civile est une voie ei^traordinaire employée pour
obtenir la rétractation d'un Jugement rendu en dernier
ressort, en démontrant au tribunal même dont il éihane
qu'il a commis une erreur ; elle doit être précédée d'une
consultation fournie par trois avocats, et le Code de Pro-
cédure civile (art. 480 et suiv.) en a déterminé les cas et
la forme.
REQUÊTES (Chambre des). V. Cassatiou (Cour de).
REQUETES (Maîtres des). F. notre Dictionnaire de Bik*»
graphie et d'Histoire,
REQUIEM (accusatif du mot latin requies, repos), nom
donné à la Messe des morts, parce que l'introït de cette
messe commence par les mots suivants : Requiem œter"
nom dona eis. Parmi les messes de Requiem en musique,
on distingue celles de Palestrina, de Jommelli, de Mo-
zart, de Winter, de Cherubini, de Vogler, de Neukonim«
de Berlioz, etc.
RÉQUISITION (du latin rêquirere, demander), en
termes de Droit, demande incidente formée à l'audience,
par le ministère public ou par les parties, pour obtenUr
acte d'une assertion ou d'un fait articulé dians les plai-
doiries, apport au greffe ou communication d'une pièce*
RÉQUISITION, acte de requérir pour le service public,
soit des hommes, soit des denrées et autres objets ap-
partenant à des particuliers. V. R^Quismon, dans notre
Dictionnaire de biographie et d'Histoire,
RÉQUISITOIRE, acte écrit contenant une réquisition,
et, spécialement, demande faite à une Cour ou à un tri-
bunal par le Ministère public
RESQSION (du latin rescindere, retrancher, annuler),
en termes de Droit, annulation d'un acte. Une action en
rescision doit reposer sur des vices radicaux de l'acte
attaqué, tels que la violence^ le dol, Verreur, la fraude ,
la lésion. Elle est arrêtée par la prescription deux ans
après la date de l'acte, à moins qu'elle n'ait été inter-
rompue pour cause de minorité du poursuivant. Les
moyens employés pour obtenir la rescision sont dits res*
cindants, et la décision obtenue en vertn de ces moyens
est dite rescisoire. La rescision peut être demandée :
1^ par les mineurs non émancipés, pour simple lésion
dans toute convention qui excède les bornes de leur ca-
pacité; 2<* par les vendeurs d'immeubles, pour dol ou
fraude lors de la vente, ou pour lésion d'outre moitié;
3* par les cohéritiers d'une succession à l'occasion du
partage, pour Iteion de plus d'un quart. Dans ce dernier
cas, le défendeur à la demande en rescision peut en ar-
rêter le cours, en offirant et en fournissant au demandeur
le supplément de sa portion héréditaire, soit en nature,
soit en numéraire, les objets étant estimés suivant leur
valeur à l'époque du partage.
RESCRIPTION , mandement par écrit que l'on donne
pour toucher une somme sur quelque fonds, sur quelque
personne. Avant 1789, les rescript ions étaient des man-
dats fournis par les receveurs généraux à l'ordre du Tré-
sor public. En 1705, on appela rescriptions les billets
d'État substitués aux assignats, et ayant comme eux hy-
pothèque sur les domaines nationaux.
RESCRIT. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio»
graphie et d'Histoire,
RÉSEAU, en termes d'architecture, broderie do tympan
d'une fenêtre ogivale.
RÉSERVE, nom donné, dans le langage militaire t
1^ à tout corps de troupes momentanément distrait d'une
armée par le général en chef, pour suppléer à l'insuffi-
sance des premiers corps qui ont été engagés, et se
porter aux endroits qui ont besoin de secours; 2° à la
partie des forces militaires d^un État qui reste dans ses
foyers , et qu'on peut appeler sous les drapeaux quand
les circonstances l'exigent. On appelle cadre de réserve,
par opposition au cadre d'activité , un cadre sur lequel
sont portés les intendants militaires et les généraux de
brigade à 62 ans, les généraux de division et les contre-
amiraux à G5 , les vice-amiraux à 68 : ces officiers géné-
raux reçoivent les 3/5 de leur solde, et ne peuvent plus
être employés qu'en temps de guerre. Un général de di-
vision est maintenu au cadre d'activité, s'il a commandé
un corps d'armée, ou du moins l'artillerie et le génie
dans une armée composée de plusieurs corps.
RéSBRVB, en termes de Utuigie, saintes espèces qee
RES
1558
RES
roB oomenre pour la communioa des malades et celle
des fidèles communiant aux messes où Ton n'a pas con-
sacré de petites hosties. Les vases servant à conserver les
hosties, avant Tiavention des tabernacles, s'appelaient
aussi réserves.
aéSBRVB, terme de l'ancien Droit. V* notre Diciioii-
naire de Biographie et d* Histoire,
R&SBRVB L^GALB. V. QuOTrrtf DISPONIBLB.
RKSERVOIR, récipient destiné à tenir en réserve une
quantité d'eau plus ou moins considérable. S*il est [)ra-
tiqué dans un corps de b&timents , il consiste ordinaire-
ment en un bassin revêtu de plomb; en plein air, c'est
un bassin de forte maçonnerie, avec un double mur ap-
pelé mur de douve, et glaise ou pavé dans le fond. Il y a
de très-vastes réservoirs dans l'Inde (K. Indibn — Art).
Le château de Versailles en a un, revêtu de lames de
cuivre étamé, soutenu par 30 piliers de pierre, et qui con-
tient 1270 hectolitres. Le réservoir de Sorèze a 1,559 mèL
de longueur, 780 met. de largeur, et 33 met. de profon-
deur.
RES FAGTA, c-à-d. en latin chose faite; on appelait
ainsi au moyen &ge la musique écrite, par opposition au
déchcMt ( V. ce mot) qu'on improvisait au lutrin.
RÉSIDENCE (du latin residère , être assis, demeurer),
demeure ordinaire et habituelle d'une personne. Elle
diffère quelquefois du domicile, qui est la demeure lé-
gale. L^ maires délivrent des certificats de résidence
dans le cas où il s'agit d'avoir la preuve des 6 mois de
résidence qui établissent le domicile, avant de procéder
à la célébration du mariage. — Résidence se dit aussi du
Béjour actuel et obligé d'un évêque, d'un préfet, d'un
magistrat, d'un administrateur, etc. , dans le lieu où ils
exercent leurs fonctions. Le concile de Trente a ordonné
la résidence à tous les ecclésiastiques qui ont charge
d'&mcs.
RÉSIDENT (Ministre), agent dip1omati({ue de 3* rang,
accrédité auprès d'un Etat de médiocre importance. Il
n'a pss droit à la qualification d'Excellence, qui appar-
tient aux ambassadeurs et aux envoyés extraordinaires.
RÉSIGNATION, entière soumission, sacrifice absolu
de sa volonté à celle d*un supérieur ou de Dieu. — En
1 Droit, c'est un abandon de biens ou de droits en faveur
de quelqu'un, ou la démission d'une charge, d'un office,
d'un bénéfice.
RÉSILIATION (du latin resUire, sauter en arrière, se
retirera, annulation d'un acte. En matière de vente,- il y
a lieu ^ résiliation quand l'acquéreur est victime d'une
éviction assez considérable pour qu'il n'eîkt point acheté
s'il eût pu la prévoir, ou quand le fonds se trouve grevé
de servitudes non apparentes et qui n'ont pas été décla-
rées par le vendeur. Les baux sont soumis à de nom-
breuses causes de résiliation {V, Rail). La résiliation
d'un marché à forfait a lieu par la seule volonté du
maître, à charge par lui d indemniser l'entrepreneur de
•es dépenses et de ce qu'il aurait pu gagner dans l'entre-
prise. V, Rescision.
RÉSILLE, ensemble des filets de plomb qui réunissent
les verres d'une fenêtre.
RÉSOLUTION, en termes de Droit, annulation d'un
contrat par Jugement. C*est une peine que la loi prononce
contre celle des parties qui manque à ses obliptions.
L'action résolutoire est celle qui a pour but de faire pro-
noncer la résolution.
aïteoLDTiOFi , en termes de Musique, chute d'un inter-
iralle on d'un accord dissonant sur un intervalle ou un
accord consonnant. Elle s'opère en faisant descendre
d'un degré le son dissonant.
RÉSOLUTION (Méthode de). V. Analtsb.
RESPECT HUMAIN , crainte qu'on a des discours et
du Jugement des hommes.
RESPECTUEUX (Acte). V. Mariage.
lŒSPONSABILITÉ , obligation de répondre de ses
actes. Tonte sanction des lois divines et humaines a pour
base la responsabilité morale de l'homme, et celle-ci est
kt conséquence naturelle de la liberté. On nomme re^-
ponsabilUé cimle l'obligation imposée à chacun par la loi
ie répondre du dommage qu'il a causé à un tiers , lui
on les personnes qui sont sous sa dépendance, ou les
choses qui Ini appartiennent, qui sont sous sa garde
(V, Sourdat, Traité gériéral de (a responsabilité, 1852,
S vol. in-8®). Les officiers ministériels sont responsables
envers les parties dont ils ont compromis les intérêts
ipar leur faute. Quant à la responsabilité des agents du
Kuvemement, ils ne peuvent être poursuivis pour des
its relatifs à leurs fonctions qu'en vertu d'une décision
éa fimfiemiaent. JAveiponBabilité dea ministres diffère
selon que l'État est absolu ou constitationnel : dans le
premier cas, les ministres ne sont responsables qu'en-
vers le prince, et doivent obéir sans restriction à ses
ordres ; dans le second, outre la responsabilité à l'égard
dn prince, ils en ont une autre, plus importante dans la
pratique, à l'égard de la Représentation nationale, et
peuvent être attaqués, pour tous les actea du gouverne-
ment, au lieu du prince lui-même, déclaré irresponsable.
En France depuis 1815 jusqu'en 1848, un Ministère dont
la politique était blftmée par la majorité de la Représen-
tation nationale cédait la place à d'autres hommes; il en
est toujours ainsi en Angleterre. Quand il s'a^t de
mettre des Ministres en accusation , c'est d'ordinaire la
Chambre élective qui exerce ce droit, et l'autre Chambre
qui juge ; quelquefois il faut le concours des deux Cham-
bres, ou bien une Cour spéciale instruit l'affaire et pro-
nonce. En Angleterre, l'accusation n'est admise qu'à
raison d'actes qui tombent réellement sous le coup de la
loi pénale; aux Étata-Unis, où l'accusation a un champ
beaucoup plus large et s'étend aux simples fautes d'ad-
ministration, tout se borne à faire perdre son emploi au
ministre reconnu* coupable et à l'exclure à l'avenir des
fonctions publiques.
RESPONSAIRE ou RESPONSORIAL. V. AmnraoNAiRE.
RESSAUT , en termes d'Architecture, toute partie de
construction qui se projette en dehors de la ligne hori-
zontale et fait une saillie sur cette ligne.
RESSAVIQUE (Idiome). K. Srrbb.
RESSORT, étendue du territoire dans lequel nn tri-
bunal exerce sa juridiction, ou un officier public ses
fonctions. Ressort se dit aussi des degrés de juridiction :
un arrêt en dernier ressort est un arrêt non susceptible
d'appel (V. Appel).
RESTAURANT. V, ce mot dans notre Dicftomuitre de
Biographie et d'ffistoire.
RESTAURATION , action de rétablir une chose dans
son état primitif. En Politique, une Restauratum est le
retour à un régime qui avait été détruit, le rétablisse-
ment de dynasties et de principes renversés par des ré-
volutions ( V, Restauration, dims notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire), Les Restaurations sont des
événements funestes pour les peuples : outre qu'elles sont
accompagnées de réactions et de représaillea, elles ne
peuvent réussir, parce qu'elles sont, plus ou moins, un
pas en arrière, et que l'humanité n'aime pas à reculer.. Si
une société est arrivée à son extrême décadence, c'est une
transformation qu'il lui faut, et non la Restauration d'une
famille princière. Les Restaurations de France et d'An-
gleterre n'ont abouti l'une et l'autre qu'à une nouvelle et
définitive révolution. Le rétablissement de l'Empire en
1852 n'a point été une Restauration, mais la consomma-
tion de la ruine de la Restauration bourbonienne, et la
prise de possession définitive de la Révolution de 1789.
— Le mot Restauration est d'un emploi très-fréquent dans
la langue des Beaux-Arts. En Architecture, il s'applique
aux réparations que l'on fait à de grands monuments, teb
que les églises et les palais. Trop souvent on détruit sous
prétexte de restaurer, lorsque, par exemple, on recouvre de
badigeon les monuments anciens, ou quand on fait dispa-
raître sous des couches de peinture les plus fines sculp-
tures. Les élèves architectes qui ont obtenu le grand prix
de l'Académie sont obligés, durant le temps de leur pen-
sionnat à Rome, de restituer, de recomposer par l'étude
et par des conjectures raisonnées quelque édifice en
ruines, et ce travail se nomme aussi une restauration.
Dans la sculpture, une restauration consiste soit à ré-
unir certaines parties brisées et séparées, soit à réparer
des parties mutilées, soit enfin à restituer des parties
dont il ne reste rien. Parmi les sculpteurs oui s'enten-
dirent le mieux en restaurations, on cite Guillaume délia
Porta, Sansovino Tatta, François-Jean Agnolo, Pierre
Tacca, Salvetti , etc. ; Michel-Ange a restitué le bras élevé
du groupe de Laocoon, Restaura un tableau, c'est réta-
blir quelques parties enlevées, remplir les craguelures,
repiquer les points où la toile se trouve à nn, ndre dis-
paraître une déchirure ou un trou par le marouflage, etc.
Les restaurations de tableaux à l'aide du pinceau exigent
une connaissance approfondie des procédés employés dans
les différentes écoles de peinture, et uue longue expé-
rience pour prévoir, dans le choix et l'emploi des cou-
leurs, ce que le temps peut apporter de changement
dans les teintes nouvelles. Le rentoUage ( V, ce mot)
est aussi un procédé de restauration. La restauration
d'une gravure consiste à la recoller avec assez d'adresse
pour faire disparaître les déchirures, à remettre une
petite pièce dans les anglea, à boucher lea trooa da nrsv
RES
1559
RES
à donner au nouveau papier la teinte de l'estampe, a re-
faire quelques tailles, etc.
RESTAURATION DBS SGENCES ( Grands) , ouvrage
du chancelier Bacon, plan général pour Tétude métho-
dique, et, par suite, le progrès de toutes les sciences hu-
maines. 11 rintitula ainsi , parce que les méthodes alors
en usage lai paraissaient, avec raison, essentiellement
vicieuses , manquer de fondement/ et ne tendre qu*à une
stérile satisfaction de notre curiosité. Bacon voulait une
Kiencê active, c.-à-d. qui eût pour but et résiiltat le bien-
être, la prospérité, la grandeur de la race humaine; enfin
ano science dont découleraient des axiomes qui , expri-
mant les lois mêmes de la nature des choses , permet-
traient à l'homme d'approcher le plus possible de cette
nature, et de la soumettre à son empire. Les moyens qu'il
propose d'employer sont Vobsêrvation, et l'expérimenta-
tion à laquelle il donne le nom dHnduction. En un mot,
il veut substituer la puissance de la méthode à celle du
génie. Son ouvrage est conçu en six parties, dont il a
tracé le sommaire suivant :
I. Revue et répartition des sciences; de leur dignité et
de leur accroissement.
II. Novum Organum, ou mi^thodepour l'interprétation
de la Nature.
III. Phénomènes du Monde , ou histoire naturelle et
expérimentale propre à servir de base à la philosophie.
lY. Échelle de l'entendement.
V. Science provisoire, prodromes ou anticipations de
philosophie.
VI. Science définitive, ou philosophie seconde et
science active, composée des vérités découvertes par la
vraie méthode seule, et qui doit diriger l'homme dans
l'action.
r Le S ' ^^ UDO revue générale , nne sorte d'inventaire
des sciences, au moment où l'auteur commençait son
ouvrage; il y constate leur faiblesse, montre les rapports
qui les unissent, les progrès dont elles sont susceptibles,
et signale leurs lacunes.
Le S H expose la nouvelle méthode qu'il propose. Nous
en avons parlé au mot Novim organcm.
Bacon n'a pu exécuter que ces deux premières parties;
il n'a laissé des autres que des ébauches, ou même seule-
ment ridée. Le S 11 i devait être une ample collection de
faits, déduits de ses observations; — le S IV eût été consa-
cré à en indiquer les causes, en tirer Tes conséquences,
comme pour préparer à des découvertes plus complètes :
c'était, dans sa pensée, comme une initiation, et voilà
pourçfuoi il l'appela Echelle de l'entendement. — Le S V
aurait réuni les vérités déjà démontrées, et, en outre, les
opinions les plus généralement admises et les plus répan-
dues. — Enfin le S V! devait présenter le résultat général,
les vérités démontrées par l'induction. Il donnait à cette
partie le nom caractéristique de philosophie seconde , en
vue de l'opposer aux vues intuitives et aux hypothèses ,
{procédés ordinaires de l'ancienne science, et qui sont, en
ait , la philosophie primitive de l'esprit humain.
Ce plan de Bacon était toute une Encyclopédie, et lui-
même ne devait pas se dissimuler que son exécution
complète était au-âessus des forces d'un seul homme,
même quand cet homme n'aurait pas été, comme lui,
distrait par les devoirs et les travaux d'une carrière poli-
tique. Les deux parties q^^'il a pu terminer suffisent à sa
gloire. Le Traite de la Lt^iti et de V Accroissement des
sciences est en 9 livres; on y trouve toutes les qualités
vraiment encyclopédiques de la belle intelligence du phi-
losopiie, et c'est un de ses ouvrages les plus pariaits. Il
débute par venger les sciences, en général, des mépris de
leurs détracteurs, et fait voir leur grandeur et leur utilité.
Il s'exprime en homme de génie convaincu et ému, et
montre, dans ces espèces de prolégomènes, une éloquence
presque sublime. Après avoir examiné ce qui a été fait pour
les sciences et pour les savants, tant dans l'antiquité que
dans les temps modernes, il présente un tableau de toutes
les connaissance^ humaines. Nous l'avons donné page 190.
La description cbressée par Bacon ne contenait pas seule-
ment toutes les sciences existant de son temps : fidèle à
sa promesse de signaler les lacunes, il fit figurer dans son
tableau synoptique plusieurs sciences dont il donna l'idée,
telles que, par exemple, l'histoire littéraire, l'histoire de
la philosophie, et d'autres. Il déclara la nécessité de les
comprendre dans le tableau des destinées d'un peuple,
en leur assignant la première place, car c'est l'hisiv^ire de
l'esprit humain décrit par ses œuvres, et il dit de l'histoire
Utt&idre en particulier que, sans elle, l'histoire politique
ressemblait à Polvphème privé de son œil. Ces idées qui
■OUI semblent si 8iI^ples aujourd'hui, tant elles sont
Justes, ne furent pas acceptées de ses contemporains, n
voulait aussi rattacher à l'histoire ecclésiastique une his-
toire secrète des conseils de Dieu dans le gouvernement
des aff'aires du monde, cette grande idée de Bossuet dans
son Discours sur ('Histoire universelle. Bacon ne s'en-
ferme pas toujours dans la forme purement philosophique :
Joignant quelcjuefois l'exemple au précepte, il donne des
fragments plems d'intérêt ou d'élévation sur le sujet ((u'il
traite, lorsque, dans ses recherches et ses méditations,
une inspiration impromptu est venue lui dicter quelques
belles pages. Le livre VIII* se termine par un court traité
de la rédaction des lois et des sources du Droit, véritable
chef-d'œuvre qui assure à Bacon un rang éminent parmi
les meilleurs publicistes. Il consacre le IX* livre, qui est
très-court, à la science de l*usage légitime de la raison
humaine dans les choses divines, et, là encore, il montre
beaucoup de sagesse.
La classification de Bacon n'est pas irréprochable; ce*
pendant elle parut assez bonne à Dalembort qui l'adopta
pour r£ncyc(op^(ft0, sauf quelques changements {V. le
Tableau page 191). Mais la Grande Hestauratton est tel-
lement pleine d'idées neuves et pratiques , touchant des
améliorations que le progrès des lumières a forcé les gou-
vernements à réaliser depuis, que la classification des
connaissances humaines n'y est vraiment que d'un inté-
rêt secondaire, bien qu'elle ait fait oublier toutes les au-
tres. Un écrivain français, M. Riaux, juge ainsi l'œuvre
de Bacon : « Un pareil ouvrage, qui est presque une En-
cyclopédie, et qui est lui-même une analyse des plus bril-
lantes, ne s'analyse pas. Il faut le lire pour apprécier
cette raison vaste et profonde qui a tout vu, tout pesé,
tout rapproché; qui marque à chaque chose sa place, à
chaque connaissance son domaine ; pour y sentir cet en-
thousiasme pénétrant pour la science, cet amour pas-
sionné pour l'humanité, ces élans d'une grande &me qui
défend une grande cause, qui ont fait du livre De la
Dignité et de l* Accroissement des sciences un des plus
beaux monuments élevés à la gloire de l'esprit humain. »
Bacon publia d'abord son ouvrage en anglais en 1G05,
et en deux livres; vers la fin de sa carrière, il lui donna
les développements qu'il a maintenant, le traduisit en
latin et le republia en 1623, in-fol. Lasalle a tmduit en
français les OEuvres de Bacon , Dijon, 1799-1802, 15 vol.
in-8<*; M. Riaux a donné : OEuvres de Bacon , traduction
revue, corrigée (c'est celle de Lasalle), et précédée d'une
Introduction, Paris, 1843, 2 séries gr. in-iS; La Dignité
et V Accroissement des sciences est dans la i'* série.
V. aussi Ch. de Rémusat, Bacon, sa vie, son temps, sa
philosophie, et son influence jusqu'à nos jours, chap. 3,
2* édit. Paris, 1852, gr. in-18. C. D— v.
RESTITUÉES (Médailles), en termes de Numisma-
tique, médailles d'un empereur romain frappées par
l'ord^ d'un de ses successeurs. Elles sont assez rares,
et entièrement semblables, sauf la légende constatant la
restitution , aux types primitifs.
RESTITUT (Chapelle de SS, près de S»-Paul-les-troîs-
Chàteaux (Drôme) C'est un petit monument carlovingien,
qui s'est conservé Jusqu'à nous dans son état primitif; on
en rapporte la fondation à Charlemagne. Il offre un carré
parfait, dont les faces sont décorées de portiques irrégu-
liers. A une hauteur de 6'",14, se trouve une corniche,
avec une frise sculptée à personnages; à l'^,50 plus haut,
le plan carré devient octogone au moyen des quatre pen-
dentifs soutenus par des trompes dont le centre est orné
d'une coquille. Une seconde corniche, placée à S'f^O de
la première, pourtourne l'octogone, et forme la naissance
d'un dôme qui couronne la chapelle : au centre de ce
dôme, qui est évidemment un diminutif de celui d'Aix-
la-Chapelle, on a percé une ouverture circulaire d'envi-
ron un mètre de diamètre. A l'intérieur, la chapelle a
12<",30 de hauteur, et 5'",85 de côté. Elle est divisée dans
sa hauteur en deux parties : la partie inférieure forme
un caveau voûté en berceau plein cintre, et contenait
autrefois les restes de S^ Restitut dans un magnifique
sépulcre en marbre gris.
RESTITUTION, en termes de Droit, remise, volontaire
ou forcée, de ce qu'on a indûment exigé. Les causes de
restitution résultent, soit de la nature des contrats, soit
de l'incapacité des contractants, soit de l'absence du libre
consentement des personnes, soit du dommage dont elles
se déclarent lésées. Celui qui a reçu de bonne foi re qui
ne lui était pas dû n'est tenu de rendre la chose qu'au-
tant qu'elle existe encore en sa possession, ou qu'il s'en
est enrichi, et dans l'état où elle se trouve : celui qui a
reçu sciemment doit rendre la chose dans son intégrité,
plus rusufruit pendant tout le temps qu'il l'a possédée.
RÉT
1960
RET
Les officiers publics qui auraient exigé de plus forts droits
que ceux qui leur sont accordés par les tarifs sont sou-
mis à la restitution, et même, sil y a lieu^ punis de
rinterdiction. V. Dépôt, Mineur.
RE^rrruTiON, terme d'Architecture. V. Ubstauration.
RESTRICTION, terme de Droit, synonyme de réduc-
tion { V» ce mol ).
SESTRicTioN MENTALE, réservo d*une partie de ce que
Ton pense, pour induire en erreur celui à qui Ton parle.
RESUMPTE, mol désignant autrefois, à la Faculté de
théologie de Paris, la thèse que devait soutenir un doc-
teur avant d'entrer en possession de tous ses droits. Elle
roulait sur la critique ou Therméneutique sacrée.
RÉSURRECTION (du latin resurgere, se relever), re-
tour d'un mort à la vie. Ce ne peut être que le fait d'un
miracle. Le prophète Élie ressuscita le flis de la veuve de
Sarepta, et Elisée celui d'une femme sunamite. Le flls
de la veuve de Naîm et Lazare furent ressuscites par
Jésus-Christ; c'est en mémoire de sa résurrection à lui-
même que rÉglise célèbre la fête de Pfiques. La résurrec-
tion des mmts pour subir le dernier Jugement est une
croyance des Hébreux, des Chrétiens, et des Mahométans;
on la trouvo aussi chez les Parsis ou Guèbres, chez les
Péruviens et quelques autres nations.
RETABLE, décoration qui surmonte les autels des
églises catholiques, surtout ceux qui sont adossa à une
muraille. Le marbre, la pierre, le stuc et le bois sont les
matériaux employés à ces sortes de constructions. Le
fond placé au-dessus de l'autel, en manière de panneau
ou de lambris , et où l'on enchâsse un tableau, un bas-
relief ou une statue, se nomme contre-retable. Il n'y eut
point de retables fixes avant le xiii* siècle, parce qu'ils
auraient caché le siège de l'évèque, placé Jusqu'à cette
époque au fond de l'ai side : mais on avait des retables
meubles que l'on posait sur l'autel à l'occasion de cer-
taines solennités; telle est la célèbre pala d*oro de
l'éi^lise S^-Marc à Venise; on peut citer encore un retable
de cuivre repoussé et émail lé que l'on conserve dans la
sacristie de l'église abbatiale de S^-Denis, et celui qui
est accroché dans le bas côté méridional du chœur de
l'église de Westminster à Londres. On voit d'intéressants
retables fixes de la période ogivale à Nevers, à Troyes, à
Noyon, à S^-Bertrand de Comminges, à La Celle (Eure),
dans la chapelle du Saint-Lait à la cathédrale de Reims,
à l'église de Brou, aux cathédrales de Cologne, et de Bar-
celone, etc. Le musée de Cluny, à Paris, possède le re-
table d'or que l'empereur Henri II donna à la cathédrale
de Bàle. Depuis le xv< siècle, les Italiens, les Espagnols
et les Allemands ont couvert leurs retables d'un fouillis
de bas-reliefs, de niches, de clochetons , qui s'élevèrent
Jusqu'aux voûtes des églises. A partir de la Renaissance,
cette décoration fut exécutée dans un style quasi païen ,
avec colonnes, corniches, entablements, etc. La chapelle
de la Vierge, dans l'église S^-Sulpice de Paris, a un beau
retable, exécuté sur les dessins de l'architecte De Wailly ;
on remarque aussi les retables des chapelles latérales de
l'église de la Madeleine, également à Paris. B.
RÉTENTION Droit de), droit en vertu duquel le dé-
tenteur d'un objet qu'il est tenu de remettre à un tiers
peut cependant en conserver la possession , Jusqu'à ce
qu'il ait été indemnisé des dépenses qu'il a faites dans
l'intérêt de cet objet
RETENUE, prélèvement d'une portion d'un traitement
ou d'un salaire, soit pour payer un remplaçant, soit pour
verser à une caisse de retraite ( V. ce mot ).
RÉTIAIRE. V^. Gi^DiATEUR, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
RÉTICENCE (du latin reticere^ taire), ou Aposiopèsb
(du grec apoxiâpaâ, s'interrompre en parlant, s'arrêter
court ), figure de Rhétorique qui consiste à s'arrêter brus-
quement au milieu d'une phrase, pour taire une chose
qu'on allait dire, mais que la colère, la honte, l'horreur,
l'inquiétude, le scrupule, ou quelquefois simplement
l'empressement, le besoin de passer tout de suite à autre
chose, a comme retenue au passage dans le gosier. Elle
diffère de l'Ellipse, en ce que la chose omise laisse l'au-
diteur dans l'incertitude, ou exigerait de longs développe-
ments, tandis Cjue l'Ellipse est l'omission d'un petit nom-
bre de mot.s, omission ordinairem(;nt consacrée par l'usage,
et qui ne doit Jamais laisser ni doute ni obscurité dans
l'esprit de l'auditeur ou du lecteur ( V, Ellipse). Voici
qut^lques exemples de réticence : — Alceste , indigné de
l'excès d'indulgenre de Philinte pour les vices de la so-
ciété, s'écrie [Le Misanthrope, 1, 1) :
J^ Bt verrai trahir, mettre en pièces , Toier«
Sanê que Je êoU..,,, Morbleu I Je ne T«ax point parte.
Tant ce ralioniiement eit plein d*impertlnencet
Britannicus, dans Racine, ditàJunie (Britannkutt
II, 6) :
Néron TOttf plairait-il 7 Vons eera!t-Je odienz t
Aht tije U eroyaiâ! An nom des dienz, madaraOy
Edaircissex le trouble oh votu jetei mon âme.
Racine a dit encore dans la même tragédie (IV, 2) :
J*appélai de Vexil, Je tirai de Tann^
Et ee même Sénëqne et ce même Barrlins ,
Qui depuis Eome alora estimait leart vertos.
Neptune, dans Virgile, gourmande les Vents qui se sont
déchaîna sans ses ordres, et ajoute avec menace, mail
pour s'arrêter tout à coup {MnM,, 1, 135) :
Quos ego sed motos prsstat componere flnctoa.
< Je devrais mais 11 fknt ealmer les tlots dmns. •
Dans la conversation, Tesprit de médisance et de déni-
grement emploie fréquemment la réticence avec une
adresse et une jperfidie qui manquent rarement leur effet.
Rien n'est si aisé, ni si commun, ni si l&che que de ca-
lomnier à demi-mot. P.
RETICULAIRE (Appareil). V. Appareil.
RÉTICULE. V, ce mot dans notre Diciionncùre de Bio-
graphie et d'Histoire,
RETIRO f Ch&teau de Bcen-). V, BuEN-RETino.
RETOMBÉE, terme d'Architecture. La retombée d'un
arc ou d'une voûte sont les claveaux qui sont le plus près
du point d'appui horizontal, et dont la projection est assez
peu considérable pour qu'ils puissent se soutenir au be-
soin par leur propre poids, alors que les autres seraient
tombés. Ainsi l'on voit, surtout dans les églises de cam-
pagne, des nefs non aclievées où les retombées des voûtes
restent apparentes.
RÉTORSION (du latin retorquere, retourner), en ter-
mes de Dialectique, emploi que l'on fait, contre un adver-
saire, des preuves dont il s'est servi lui-même. Certains
rhéteurs donnent à ce genre d'arpumentation le nom de
Conversion, — En termes de Droit international, on s'est
quelquefois servi du mot Rétorsion comme synonyme de
neprésailles,
RETOUCHE, dernière façon qu'un peintre donne après
coup à son ouvrage pour le perfectionner, ou à Touvrage
d'un élève pour le corriger.
RETOUR (Compte de). V. Compte.
RETOUR (Droit de), droit en vertu duquel un donateur
rentre dans la possession des objets par lui donnés, en cas
de prédécès du donataire et de ses descendants. H est dit
droit de retour conventionnel , quand il est stipulé dans
l'acte de donation. On appelle droit de retour l^al ou
droit de réversion, le droit en vertu duquel les ascen-
dants succèdent, à l'exclusion de tous autres, aux choses
par eux données à leurs enfants ou descendants décédés
sans postt^rité, lorsque ces choses se retrouvent en nature
dans la succession ; si les biens ont été aliénés, les ascen-
dants recueillent le prix qui peut en être dû; ils sno>
cèdent également à l'action en reprises que pourrait avoir
le donataire. V. le Code Napoléon, arU 747, 833, 951.
RETOURNÉS (Vers). V, Akacvcuque.
RÉTRACTATION , désaveu verbal ou écrit de ce qu'on
a fait, dit ou écrit précédemment. Le mot s'applique
spécialement, en Jurisprudence, à l'action de révoquer
un Jugement rendu par défaut.
RETRAIT, en termes de Droit, action de reprendre ce
qu'on avait aliéné. Avant 1789, on distinguait : i** le
retrait féodal ou seigneuricU , par lequel le seigneur pou-
vait retirer et retenir le fief mouvant de lui et vendu par
son vassal, en remboursant à l'acauéreur le prix de son
acq[uisition et les loyaux coûts ; cela s'appelait aussi pré-
lation et retenue féodale; 2° le retrait lignager, par lequel,
en cas de vente d'un héritage, les parents de la ligne d'où
{irovenait cet héritage pouvaient le retirer des mains de
'acquéreur, en lui en remboursant le prix et dans un délai
fixé; 3<* le retrait conventionnel ou coutumier, qui s'exer-
çait en vertu de la faculté conventionnelle de réméré. Ces
différents retraits et beaucoup d'autres ont dispara. La
Code Napoléon reconnaît : 1° le retrait conventionnel.
résultant d'une convention stipulée dans le contrat de
▼ente ( V. Rachat); 2° le retrait de droits lUigieuX', fa-
culté accordée à celui contre lequel on a cédé un droit
litigieux de s'en faire tenir quitte par le ceeslonnaire, eo
lui remboursant le prix de la cession ; 3* le rHrmU stM»-
BET
1561
RET
CêitonU, facalté accordée aux héritiers oa à l*un d'eux
d*écarter du partage toute personne non successible qui
le serait rendue cession naire d*une port de l*hérita^, en
lui remboursant le prix de la cession. V, Benoit , TrcUU
du retrait successoral, Paris, I8i0, in-8\
RETRAITE, en termes d*Art miliuire, mouvement d*an
corps de troupes en arrière après un combat désavanta-
geux. Cest une opération délicate et difficile, surtout
quand elle se prolonge ; car, en môme temps qu'elle in-
quiète et intimide ceux qui TefTectuent, elle augmente la
confiance et l'audace de l'ennemi, et l'on manque des
moyens de se réorganiser. Une marche en retraite est
toujours lente, parce que, tout ce qu'on laisse en arrière
étint perdu, il faut tout rallier, et proportionner la mar-
che à celle de ce qu'il y a de plus lent. Parmi les retraites
célèbres, nous citerons celles des Dix Mille après la ba-
taille de Cunaxa (401 av. J.-C. ), du triumvir Antoine
dans la guerre contre les Parthes, de Turenne en Alsace
(1674), du maréchal de Belle-lsle (1742), de Jourdan et
de Moreau (179G) en Allemagne, de Napoléon I*' en
Russie (1812).
RBTRArTB, signal donné aux militaires par le tambour
ou la trompette, pour rentrer le soir au quartier. Dans
les ports de TÊtat, il y a un coup de canon de retraite,
aETRArrE , éloi^nement où l'on se tient du monde pen-
dant un temps plus ou moins long, pour se recueillir et
ne vaquer qu'aux exercices de piété. Ainsi , une retraite
précède la première communion ; elle dure ordinaire-
ment trois Jours. On fait des retraites prépsratoires à la
communion pascale. Il y a des retraites ecclésiastiques
annuelles, où l'on fait venir une partie des prêtres d'un
diocèse.
sETiuiTB, en termes de Banque, signifie noiwelle traite.
Cest une nouvelle lettre de change au moyen de laquelle
le porteur se rembourse, sur le tireur ou sur l'un des
endosseurs, du principal d'une lettre protestée, de ses
frais, et du nouveau change qu'il paye {Code de Com-
merce^ art. 178).
RKTRAiTB OU «BTRArr, en termes d'Architecture , dimi-
nution progressive de l'angle que le plan d'une construc-
tion inclinée en arrière forme avec la verticale du lieu.
Un mur fait souvent retraite sur son empattement. Tout
corps est en retraite d'un autre, quand il est en dedans
du plan do ce dernier.
RETPAiTB (Caisses de), caisses instituées pour recevoir
les sommes versées par un certain nombre de sociétaires,
et leur servir un revenu annuel à un ftge déterminé. Le
calcul des probabilitèi, appliqué aux chances de morta-
lité, est un élément des opérations de ce genre; car les
annuités que pavent les caisses de retraite sont calculées
non-seulement sur létaux de l'intérêt composé des sommes
versées par chaque dépositaire , mais encore sur la part
dont les prédôcédés ont grossi le fonds social. Dès Tan-
née 4635, les pasteurs de Berlin établirent sur ces don-
nées une caisse au profit de leurs veuves. Dans la seconde
moitié du xviii* siècle, plusieurs mathématiciens, Kritters,
Samlung, Tetens, Gunther Fuss, Euler, essayèrent de
donner une base scientifique aux institutions de ce genre,
et l'on vit les caisses des veuves se multiplier en Prusse,
en Danemark, et dans tout le nord de l'Allemagne. La
czarine Catherine II en fonda une pour toute la Russie,
en 1772. La même année, Mazères, mathématicien fran-
çais, publia à Londres un projet de constitution de rentes
viagères au profit des ouvners : un projet de loi conforme
à son plan nit admis par la Chambre des communes en
1773, mais repoussé par la Chambre des lords; une nou-
velle proposition, appuyée sur les tables de mortalité de
Price, ne devait pas avoir plus de succès en 1789. En
1778, une caisse de retraite générale fut fondée à Ham-
bourg. Ces questions étaient paiement agitées en France :
dés 4754, Chamousset avait tenté d'appliquer aux prin-
cipales causes d'indigence, à la maladie et à la vieillesse,
l'association mutuelle et le calcul des probabilités. Aux
débuts de la Révolution, la tontine Lafarge, celle des
Sans-CtUottes^ et VAdministration nationale des écono-
mies du peupte, furent des entreprises déloyales, où l'on
abusa de la confiance des ouvriers (jui avaient cru s'as-
surer par leur économie une retraite pour leurs vieux
jours. La Convention se préoccupa d'organiser des caisses
de retraite, et chargea le mathématicien Duvillard de lui
proposer un plan d'association de prévoyance : mais les
événements ne permirent pas de donner suite à ce tra-
vail, qui fut seulement imprimé. Un Mémoire sur le
même sujet, présenté en 1H09 par Mourgues au Conneil
général des hospices de Paris, n'eut pas plus de résultat.
'■'outefols, un certain nombre de caisses de secours mu-
tuels se formèrent à Paris et dans les départements,
pour servir non-seulement des secours en cas de ma'adie,
mais des pensions de retraite ; leurs opérations furent de
courte durée. Sous le règne de Louis-Puilippe, des pro-
jets nouveaux furent élaborés en vue des classes labo-
rieuses par le duc de Mouchy (iMtre sur l'utiliié des
maisons de retraite comme complément des caisses d'épar'
gne, 1841), par l'ingénieur Cazeau [Statuts d'une caisse
générale de retraite et de pensions pour les travailleurs
invalides, 18i2), par MM. Oliiide Rodriçues et Macquet
( Statuts d'une caisse de retraite pour les classes labo»
rieuses des deux sexes, 1842), par M. Bergson {Aperçu
sur l'établissement des caisses de retraite et de pré»
voyance pour les classes laborieuses , lK4i), par M. de
Romanet ( Des pensions viagères pour les vieillards des
classes ouvrières, 1847). C'étaient autant de provoca-
tions à l'initiative du gouvernement : aussi , un projet
de loi sur les caisses de retraite venait d'être annoncé
aux Chambres, lorsque la Révolution de 1848 arriva.
Un rapport sur cette question fut lu à l'Assemblée consti-
tuante, le 6 octobre 1840, par M. Benoist-d'Azy ; mais
ce fut seulement l'Assemblée législative oui fonda la
Caisse des retrutes générale, par une loi du 18 juin 1850,
loi modifiée par celle du 28 mai 1853, par un règlement
du 18 août de la même année, enfin par une loi des IG-
26 Juin 1861.
Pour réserver le bienfait de la caisse des retraites à
ceux qui en ont besoin et qui ne sauraient en abuser
contre les intérêts de leur famille, on a fixé le maximum
de la pension viagère à 1,000 fr.; cette pension est insaisis-
sable jusqu'àconcurrence de 3()0fr. Les versements doivent
être de 5 fr. au moins, et sans fractions de francs : ceux
qui sont effectués au profit de deux conjoints doivent être
de 10 fr. au moins, et multiples de 2 fr. On peut en faire
au profit de toute personne âgée de trois ans au moins
et Jouissant des droits civils. Le versement opéré anté-
rieurement au mariage reste propre à celui qui l'a fait ;
le versement fait pendant le mariage par l'un des con-
joints profite séparément à chacun d'eux par moitié. Dans
le cas où l'un des époux aurait atteint le maximum de
rente fixé par la loi, les versements ultérieurs sont, jus-
qu'à la même limite, au profit exclusif de l'autre époux. Les
versements au coippte d'une même personne ne peuvent
excéder 3,000 fr. dans le cours d'une année. Au premier
versement, il faut déclarer : 1» si le capital est abandon tié,
c-à-d. si , au décès du titulaire, le capital devient la pro-
priété de l'État, ou s'il est réservé au profit, soit des
héritiers ou légataires du titulaire, soit d'un tiers dépo-
sant; 2^ à quel &ge le titulaire veut entrer en jouissance
de la rente. Ces circonstances influent nécessairement
sur le montant de la rente. La pension ne peut être liqui-
dée avant l'&ge, de 50 ans; mais, en cas de blessures
graves ou d'infirmités prématurées, on la liquide en pro-
portion des versements efi'ectués. La caisse des retraites
emploie le montant des versements en acha: de rentes
sur l'État.
L'utilité des caisses de retraite est incontes^ble : elles
assurent la conservation des épargnes quotidiennes, don-
nent un avenir à des classes oui vivraient au Jour le Jour
ou dans l'inquiétude, et diminuent, par conséquent , le
nombre des mendiants et celui des pauvres admis dans
les hospices; elles permettent au travailleur dont les
forces déclinent de suppléer à l'insuflisanre de son saF*
laire. On a prétendu que les caisses de retraite, basées
sur le calcul des chances de mortalité, et absorbant dans
la masse commune les mises des prémourants, encoura-
geaient les placements à fonds perdu , propageaient
l'égoîsme, et tendaient à détruire l'esprit de famille, à
abolir Tbi^ritage. Mais c'est abuser ici du sens des mots.
D'une part, il y a deux tables d'annuités, l'une avec alié-
nation du capital, l'autre pour le cas de restitution du
capital aux héritiers du déposant, et l'option entre ces
deux tables a été laissée au déposant. D'autre part, les
déposants ne sont pas, comme dans ane tontine, par-
tage en séries et en classes, dont les membres ont un
intérêt mutuel à la mort de leurs associés : chaque dépôt
constitue un contrat complet, et le livret constate le
chifl're de rente correspondant au capital versé. Loin de
porter préjudice à lu famille, la caisse des retraites admet
que tout versement du mari ou de la femme est supposé
fait dans Tintérêt des deux époux, et profite par mo'tié
à tous deux ; elle vient en aide aux enfants, qui n'au-
raient pu Assister sullisumment leurs vieux parents. A la
difl'érence des sociétés privées d'assurances sur la vie,
elle a un maximum que les déposants ne peuvent dé-
passer et qui ne permet pas les opérations aléatoires «
RET
1562
RET
elle ne te prèle point à des réelliations de contrat qui
favoriseraient la dissipation , et elle n*exige pas des dé-
posants, sous peine de déchéancb, une continuité et une
régularité de versements auxquelles il est impossible d^as-
Bujettir TouTrier. En se chargeant de la gestion des caisses
de retraite, l'État ne court pas les risques auxquels Tex-
pose Torganisation des caisses d'épargne : en effet , la
dette qu'il contracte, an lieu d'être continuellement et
instantanément exi^ble, n'est remboursable qu'à longs
termes et par annuités échelonnées: il jouit donc d'une
grande latitude pour faire des fonds qu'il a reçus un em-
ploi productir. Quelques économistes oot pensé que toute
personne vivant de salaire devrait être assujettie envers
k caisse des retraites à une contribution forcée : mais,
outre que l'État ne pourrait se servir utilement des
sommes énormes qu'une telle mesure accumulerait dans
ses caisses, outre qu'il serait impossible de percevoir la
contribution dans les temps de chômage ou de crise, la
retenue obligatoire supprimerait l'effet moral qu'on doit
attendre de l'épargne volontaire. On créerait, d'ailleurs,
sous un nom déguisé, une véritable taxe des pauvres,
taxe d'autant plus vicieuse, qu'elle serait prélevée sur
le capital même des gens peu aisés. Objectera-t-on que
les patrons pourraient être tenus de verser dans la caisse
des retraites une contribution égale ou même supérieure
aux retenues faites à leurs ouvriers ? Dans ce cas, la
contribution sera prise, soit sur les bénéfices toujours
variables des patrons, ce qui en fait une charge injuste-
ment fixe et permanente, et transforme les annuités
payées par la caisse des retraites en un subside humi-
liant, en un genre d'assistance qui répugne aux senti-
ments d'indépendance des ouvriers ; soit sur le salaire
de ces ouvriers, qui seraient soumis ainsi à une double
retenue, l'une directe, l'autre indirecte ; soit enfin sur la
▼ente des produits, par une élévation de prix, dont souf-
friraient encore les ouvriers et comme consommateurs
et comme producteurs, puisqu'il leur faudrait payer les
objets plus cher, et que la cherté des objets en restrein-
drait l'écoulement et la fabrication. Les établissements
industriels où l'on a établi des caisses spéciales de se-
cours ou de retraite échappent aux inconvénients de la
retenue obligatoire qui serait faite par l'État : car l'ou-
vrier qui accepte d'y travailler sait à quoi il s'engage; le
contrat en vertu duquel il abandonne une certaine por-
tion de son salaire est consenti par lui.
L'Angleterre a devancé la France dans la constitution
des caisses de retraite : par deux bills du 10 juin 1833 et
du 9 août 1834^ les caisses d'épargne furent autorisées
à acheter au Trésor des annuités immédiates ou diffé-
rées. On exige du déposant la déclaration qu'il ne jouit
pas d'un revenu de 150 liv. sterl.; la pension de retraite
peut s'élever à 30 liv. sterl. (750 fV.). Toutefois, le succès
de l'opération a été médiocre. 11 faut l'attribuer, !• à la
taxe des pauvres, qui dispense de toute prévoyance la
classe malaisée; ^^ à l'existence d'un grand nombre de
Sociétés d'Amis, riches associations qui possèdent des
écoles, des hospices, des maisons de charité; 3° à la con-
currence des sociétés particulières d'assurances sur la
vie, qui sont établies solidement et jouissent d'un grand
crc^dit. — Depuis 1839, il existe en Prusse un système
de retraites fondé par le gouvernement sur une sorte de
tontines par séries ou par classes. — Une caisse générale
de retraites a été organisée en Belgique par une loi
de 18.^. On admet tous les déposants, sans distinction
de sexe, de profession, de fortune, et même les étrangers
résidants : il faut seulement avoir i8 ans, parce que la
mortalité des premiers &ges est trop variable pour que
les i-alculs de probabilité soient sérieux, et parce qu'une
famille, avant de pourvoir à la vieillesse de ses membres
naissants, doit consacrer ses ressources à leur éducation.
Le maximum de la pension est fixé à 1,200 fr.
jiETRAiTB (Pensions de), rentes viagères attribuées aux
anciens fonctionnaires, serviteurs et employés de l'État,
à titre de droit, et comme rémunération de leurs travaux
et services. Elles leur sont dues après un certain nombre
d'années, abstraction faite des ressources propres qu'ils
f peuvent posséder; elles se gagnent par l'ancienneté, par
e payement des retenues dont leur traitement d'activité
est passible, et ne sont ni une rémunération honorifique,
ni un secours exceptionnel. L'établissement des pensions
se justifie sans peine : il importe à la considération de
l'État que ceux qui l'ont servi ne soient pas exposés à
l'indigence pendant leur vieillesse ou en cas d'infirmités:
leur traitement n'est généralement pas assez considérable
pour qu'ils puissent faire des épargnes ; le système des
retraites entretient leur dévouement, écarte d'eux les
tentations dangereuses pour la probité, les attache à leor
profession, et leur rend le service de l'État préférable à
celui de l'industrie privée. Pour obtenir ces divers avan-
tages, un État ne doit pas craindre de s'imposer des
sacrifices. — Le service des pensions de retraite peut ie
faire de trois manières différentes : tantôt les retenues
faites sur les traitements sont versées dans de^ caisses
spéciales, qui acquittent les pensions, à leurs risques et
périls; tantôt ces caisses sont subventionnées par rÉtat;
ou enfin l'État, confondant les retenues dans les recettes
du trésor, prend directement les pensions à sa charge. Ce
dernier mode est le plus conforme à la dignité do gouver-
nement, et le plus propre à maintenir son autorité sur les
fonctionnaires, à garantir leurs intérêts : avec des caisses
de retenues pour chaque administration, il est presque
impossible de ne pas avoir un déficit, dont aoufDriraient
les fonctionnaires et employés si l'État ne leur venait en
aide ; l'octroi des pensions ne parait être que la restitu-
tion d'un dépôt; le pouvoir exécutif ne peut révoquer ud
mauvais serviteur, sans être accusé de confiscation.
Dans l'ancienne monarchie française, il n'y av:ût pas
de pensions de retraite proprement dites. Le prince ac-
cordait à certains individus, ou même à certaines caté-
gorie* de personnes , des ^tiflcations qui dépendaient
uniquement de sa générosité : chacun pouvait les solli-
citer et les obtenir, personne n'avait le droit de les ré-
clamer; elles étaient le prix de la flatterie, de la com-
plaisance, de l'intrigue, aussi bien que la récompense
des services; aucune condition d'&ge n'était imposée
pour ces grâces pécuniaires, qui étaient même quelque-
fois héréditaires. Toutefois , quelques mesures furent
prises en faveur des armées de terre et de mer : Colbert
créa, en 1673, une caisse des Invalides de la marine ,
dotée de revenus spéciaux, et chargée de fournir des
pensions aux marins qui auraient bien mérité de l'État;
une ordonnance de 1764 accorda aux officiers et aux sol-
dats infirmes l'option entre l'admission à l'hôtel des In-
valides et la Jouissance au dehors d'un traitement de
retraite proportionné au grade de chacun. L'organisation
des pensions de retraite date de la Révolution. Par la loi
du 22 août 1790, l'Assemblée Constituante supprima
toutes les concessions antérieures, et fixa les conditions
auxquelles les pensions seraient désormais accordées :
30 ans de service, 50 ans d'âge (à moins de blessures
reçues ou d'infirmités contractées dans le service pu-
blic^, et absence de ressources personnelles. Le chiffre
de la pension, croissant par chaque année au delà du
minimum de 30 ans, ne pouvait dépasser le traitement
d'activité ni en aucun cas excéder 10,000 fr. Le cumul de
deux pensions était interdit, ainsi que le cumul d'un
traitement d'activité et d'une pension de retraite. La
pension n'était pas réversible; seulement, si le fonc-
tionnaire mourait dans le cours d'un service public et
sans laisser de patrimoine, sa veuve pouvait obtenir une
pension alimentaire, et ses enfants être élevés aux dé-
pens de la nation. Une somme invariable de 10 millions
de francs avait été affectée au payement des pensions
civiles : ce fonds ne tarda pas à être insuffisant; on fut
obligé de conserver en place, aux dépens de l'intérêt pu-
blic, un certain nombre de fonctionnaires usés; d'autres
durent attendre, pour faire valoir leurs titres, que la
mort eût créé des vacances parmi les titulaires des pen-
sions. Ces inconvénients suggérèrent la pensée de faire
un prélèvement annuel sur les traitements d'activité, et
de constituer ainsi un fonds destiné à fournir les pen-
sions de retraite. Suivant l'exemple qui avait été donné
avant 1789 par la Compagnie des Fermes, diverses admi-
nistrations générales et locales, départementales et mu-
nicipales, opérèrent, à partir de 1 796, des retenues sur
leurs employés, et il fut stipulé qu'une part des pensions
serait réversible sur la tête des femmes et des enfants.
Ces caisses distinctes de retraite devaient-elles être con-
sidérées comme des institutions exclusivement privée^ .
comme des caisses d'épargne , ou comme des tontines ?
Devaient-elles exonérer le Trésor? Ces questions ne Tu-
rent pas même posées, tant que les administrations
purent remplir leurs engagements et se passer de sub-
sides. Mais il n'en pouvait être longtemps ainsi : on avait
mal calculé le taux des retenues, le nombre et la durée
des pensions à fournir; on accueillit des titres anté-
rieurs à l'établissement de l'association, et on attribua
ainsi des dividendes à des actionnaires qui n'avaient que
peu ou point contribué à l'encaisse social. Dès le temps
du premier Empire, l'État dut accorder des subsfdes à
plusieurs caisses de retenue. Les événements de 1814
et 1815 créèrent de nouveaux embarras : let réactioiit
IIET
15G3
RÉT
politiqaes maltiplièrent les retraites liàtircs, ponr faire
place à de nouveaux fonctionnaires; Ai départements
ayant été détacliés du territoire français, la plupart des
agents, devenus . inutiles, furent mis à la charge des
caisses de retenue. Alors les pensions montèrent de 28
à 02 millions. Pour garantir aux fonds de retenue une
comptabilité régulière, une loi du 28 avril 4816 chargea
la Caisse des dépôts et consip;natioDs de les administrer.
Pciidant tout le gouvernement de la Restauration, et
BOUS le règne de Loais-Philippe, les allocations récl»-
méca par les catases de retenue s*accrurent d*année en
année; on discuta plusieurs projets qui avaient pour but
d'établir an service de pensions régulier et uniforme,
mais aucun d*eux n'aboutit On réela seulement les
P'^nsions de Tarmée de terre par la loi du 11 avril 1831,
et celles de la marine par la loi du 18 avril de la même
aonée : ces lois ont été modifiées par celles des 15 et
4 7 juin 1861. Les pensions civiles n'oQt été soumises à
une règle commune et uniforme que depuis la loi du 0
Juin 18.^3, complétée par un décret du 9 novembre sui-
vanL
I. Pensions civiles. — Tons les agents rétribués par
rÉtat, fonctionnaires ou employés, sont soumis au ver^
lement de la retenue, flxée au 20* de leur traitement;
quand ce traitement s*accroIt, l'augmentation du premier
mois passe également à la caisse des retenues. Les mi-
nistres, les sous^secrétaires d'État, les préfets et les sous-
firéfets ne sont point passibles de la retenue. Le droit à
a pension de retraite est acquis à 60 ans d'âge et à
30 ans accomplis de service. La pension est calculée sur
la moyenne des traitements touchés pendant les 6 der-
nières années ; elle est réglée, pour chaque année de ser-
vice, au 60" du traitement moyen, sans pouvoir excéder
les 2/3 de ce traitement ni être supérieure à 6,000 fr. La
veuve d'un fonctionnaire mort en jouissance de pension
ou en possession de droiu à cette pension a droit an
tiers de la pension de son mari.
Ces règles générales souflfrent quelques exceptions.
Ainsi, pour les ambassadeurs , dont quelques-uns tou-
chent des traitements de 150,000 et 200,000 fr., le maxi-
mum de la pension de retraite a été élevé à 12,000 fr.
Aux fonctionnaires qui ont passé 15 ans dans les emplois
désignés sous le nom de service actif, la loi ne demande
3ue 55 ans d'âge et 25 ans de service; et môme ils sont
ispensés de toute condition d'&ge, s'ils sont reconnus
hors d'état de continuer leurs fonctions. En outre, les
actes de dévouement accomplis et les accidents éprouvés
par un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions ,
s'ils ont eu pour effet de le rendre incapable de con-
tinuer son service, créent en sa faveur un titre excep-
tionnel à la pension; les infirmités contractées dans
l'exercice des fonctions permettent nimi d'abainer la
limite d'Age et la durée du service.
Une loi du 11 sept. 1807 avait constitué de hautes pen-
sions pour les grands fonctionnaires de l'État et pour
leurs veuves; des abus criants la firent abroger en 1832,
et, depuis cette époque, le gouvernement, pour récom-
penser des services exceptionnels, dut présenter aux
Chambres des demandes spéciales. Une loi des 2-17 Juil-
let 1856 a accordé à l'Empereur le droit de donner des
pensions au maximum de 20,000 fr. aux ministres, aux
présidents des grands corps de l'État, aux ambassadeurs,
ainsi qu'à leurs veuves et à leurs enfants^ aux veuves et
aux enfanta des maréchaux et des amiraux : ces pensions
ne peuvent être cumulées avec d'autres; un fonds de
500,000 fr. pour cet objet est inscrit chaque année au
budficct. V. Delarooue, Codé des pensions civiles, 1854,
in-8"; Dareste, Code des pensions civilest 2* édit., 1858.
II. Pensions militaires, — Jusqu'en 1855. deux
choses ont donné droit à la pension de retraite : l» l'an-
cienneté {IX) ans accomplis de service effectif dans
l'armée de terre, et 25 dans l'armée de mer, sauf k
ajouter les années de campagne et de service faites
en sus du taux légal) ; 2» les blessures graves et incu-
rables, provenant d'événements de guerre, d'accidents
éprouvés dans un service commandé, et les infirmités,
également graves et incurables, résultant des fatigues
ou des dangers du service militaire. Le taux des pen-
sions s'échelonna, selon les grades, depuis 365 fr., mi-
nimum du soldat, iosqu^ 6,UU0 fr., maximum d'un gé-
néral de division. Une loi du 26 avril 1855 a augmenté
de 165 fr. le maximum et le minimum de la pension de
tetraite fixés par la loi de 1831 pour les sous-officiers,
caporaux, brigadiers et soldats, et décidé que le droit
k h pension par ancienneté serait acquis k ces militaires
après 25 ans de service effectif. Des règlements minis-
tériels fixèrent fkge de la retraite des colonels k 60 ans,
celui des lieutenants-colonels k 58 ans, celui des cbefi
de bataillon ou d'escadron k 55 ans.
D'après la loi de 1831, les femmes et les orphelins
de militaire héritèrent du droit k la pension acquis par
leur époux et leur père, pourvu que te mariage eût été
contracté deux ans avant la cessation de l'activité ou
du traitement militaire ; lea orphelins de père et de mère
conservèrent, jusqu'k ce que le plus jeune eût atteint sa
majorité, cette même pension de retraite, (}ui était fixée
au quart du maximum de la pension d'ancienneté affec-
tée au grade dont le défunt était titulaire, aucune tou-
tefois ne pouvant être moindre de 100 fr. Une loi du
26 avril in56 éleva cette pension du quart k la moitié,
pour les veuves et orphelins des militaires et des marins
qui avaient été tués sur le champ de bataille ou dans
un service commandé, ou qui étaient morts des suites
de blessures reçues et de maladies contractées dans
les mêmes circonstances. La pension des veuves des
maréchaux de France fut fixée à 6,000 fr.
Les pensions furent réglées comme il soit :
àfiut c DE TEnns.
Alinimum. Htzimm^,
Général de division 4,000 fr. 6,000 fr.
Général de brigade 3,000 4,000
Colonel 2,400 3,000
Chef de bataillon ou d'escadron. . 1,500 2,000
Capitoine 1,200 1,600
Lieutenant 800 1,200
Sous-lieutenant 600 1,000
Sergent-major 465 665
Sergent 415 565
Caporal 385 505
Soldat 365 465
ARUés DE UER.
Vice-amiral 4,000 fr. 6,000 fr.
Contre- amiral 3,000 4,000
Gapiuine de vaisseau 2,400 3,000
— de frégate 1,800 2,400
— de corvette 1,500 2,000
Lieutenant de vaisseau 1,200 1,600
— de frégate 800 1,200
Élève de marine. 600 1,000
llaltre entretenu et conducteur de
travaux de l'* classe 6C0 1,000
Maître entretenu et conducteur de
2* et de 3" classe 500 700
Second maître et contre-maître. .415 565
Aide et quartier-maître 385 505
Matelot, novice et mousse 365 465
Les pensions militaires, viagères et personnelles, sont
incessioles et insaisissables, mais passibles de la retenue
du 5* dans certains cas déterminés. — V, le SuppL
m. Pensions ecclésiastiqws. — Un décret du 28 juin
1853 a institué une Caisse de retraite pour donner des pen«
sions aux ecclésiastiques kgés, ou infirmes et nécessiteux,
qui Justifient de plus de 30 ans de services et qui sont pré-
sentés par l'évèque diocésain. Les ressources de cette
caisse se composent : 1* d'une subvention prélevée an-
nuellement sur le budget des cultes ; 2** des intérêts de
la dotation de cinq millions accordée par l'Empereur sur
le produit de la vente des biens de l'État que le décret du
27 mars 1852 a affecté k cette destination; 3^ des dons et
legs faits k cette caisse.
RETRANCHEMENT, en termes de Fortification, obstacle
naturel ou artificiel dont on se Tortifie contre une attaque
ou une surprise de l'ennemi. Les retranchements natu-
rels sont les ravins, les cours d'eau , les marais, les escar-
pements, les bois, etc. Un retranchement artificiel se
compose, soit d'un talus en terre formé des déblais de la
tranchée et sur lequel on peut dresser des palissades ou
des chevaux de frise, soit d'ouvrages détachés qui se flan-
quent réciproquement.
RÉTROACTIVITÉ (du latin rétro agere, agir en arrière,
reculer), caractère d'une loi , d'un décret, d'une ordon-
nance ou d'un règlement qui revient aur le passé. La loi,
dit le Code Napoléon (art. 2), ne dispose que pour
l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif. Pour qu'un délit
puisse encourir une pénalité, il faut que cette pénalité
ait été édictée et en vigueur k l'époque où le délit a été
commis {Code pénal , art. 4) ; si, avant le Jugement, une
loi fifiiaoe le caractère de délit on de crime attribué k l'ao»
REV
♦
1564
RlïV
tion que hi Justice poursuit^ Taccusé doit être absous.
V, Maiiher de Chassât , Traite de la rétroactivité des lois,
1845,2 vol. in-8».
RÉTROCESSION (du latin retrocedere, rebrousser
chemin), action de remettre à une personne un bien ou
un droit qu*elle avait précédemment cédé.
RETROGRADES (Vers). V. Anacycuqob.
RETROUSSIS , partie dos pans ou basques d'un habit
qui est ou qui semble retroussée; — pièce de cuir de
couleur jaune qui se rabat ou parait se rabattre dans le
haut des bottes à revers.
RETS (du latin rete), filet de chasse ou de pèche fait
de niuilles carrées ou à losanges.
RÉUNION (Droit de). V. Association polittqdb.
RÊVE, état de Tesprit plongé dans le sommeil et pon*
dant lequel il perd la direction de ses pensées ; aussi le
rêve est généralement regardé comme une folie passa-
gère, résultant des sentiments, des idées et des actes de
l'état de veille. La matière et la forme des rêves sont
fournies par Tintelligence et l'imagination, mais sans
ordre, au moins apparent; car, si nous pouvions saisir la
liaison des idées, nous trouverions moins d'incohérence
entre elles. Quoique Tàme paraisse entièrement passive
dans le rêve, elle n*a cependant pas perdu son activité
originelle ; il arrive même quelquefois (][u'on saisit par-
faitement dans les rêves certaines volitioiis du moi; ce
qui fait défaut, c'est la réflexion, et c'est la liberté qui
manque plutôt que la volonté. Ce qui donne au rêve son
caract(*re le plus frappant, ce sont des sensiitions fausses,
relatives aux sens externes, et c'est là que l'imagination
joue son plus grand rôle. Les sensations du goût et de
Vodorat sont les moins fréquentes, celle du toucher se
reproduit souvent; mais celles qui prennent la plus
grande part aux drames fantastiques des rêves sont les
sensations de l'ouïe et de la vue. II y a un rapport évi-
dent entre ces phénomènes, l'organisme, et Tétat de
santé ou de maladie : les rêves des malades sont encore'
plus décousus et plu^ extravagants que ceux de l'homme
en santé. On a demandé si , pendant le sommeil , l'&me
rêve toujours ; ceux qui penchent pour l'affirmative s'ap-
puient sur ce fait que l'&me ne cesse jamais entièrement
de penser, et que d'ailleurs il est certain que pendant le
sommeil nous exécutons une foule de mouvements qui
ne s'expliquent que par des sensations oubli<^es au réveil.
— Le rêve, à l'état de veille, ne signifie plus que chi-
mère, et se rapproche de la rêverie: celle-ci se distingue
du rêve proprement dit, en ce qu'elle a lieu pendant la
veille, et que l'esprit se complaît dans ses illusions, qui
deviennent des rêveries {V, Sommeil, Songe, Sohnahbu-
USMB ). R.
RÉVÉLATION (du latin re pour rétro, en arrière, et
vélum, voile), connaissance que Dieu donne à l'homme,
par des moyens surnaturels, de vérités importantes que
celui-ci ne pourrait découvrir par les seules lumières de
sa raison. Toute religion positive a pour base une révéla-
tion, et le bouddhisme, le mahométisme prétendent être
des religions révéla, tout au<%si bien que le christia-
nisme. La révélation a pris différentes formes dans l'his-
toire : tantôt Dieu se met en communication directe avec
l'homme, comme lorsqu'il parle à Adam dans le Paradis
terrestre ou à Moïse sur le mont Sinaî; tantôt il revêt la
figure humaine , ainsi qu'il arriva dans l'incarnation de
Jésus-Christ; tantôt il envoie un Ange annoncer quelque
^nd événement; ou bien enfin il procède par pure
inspiration, comme à l'égard de ceux qui écrivirent l'An-
cien et le Nouveau Testament. Des livres, qui demeurent,
en général, dans les mains d'un corps sacerdotal, con-
tiennent la doctrine révélée, qui peut ainsi se transmettre
d*&ge en âge.
RÉVÉLATION , en termes de Droit, est synonyme de Dé-
nonciation, avec ce caractère qu'elle suppose complicité
dans le crime dénoncé. V, Délation, Dénonciation.
REVENDICATION (du latin rem vindicare, réclamer
une chose qui nous appartient), action par laquelle le
propriéttiire d'une chose la réclame à celui qui l'en a in-
justement di^pouillé ou qui eu est détenteur {Code Na"
poléon, art. 649 et 930). Le mot est svnonyme de Âe-
pétilion et d^ Action en restitution (K. ces mots). La
ri'vendication de marchandises vendues et livrées à un
failli , et dont le prix n*a pas été payé, est soumise à des
règ'^s particulières.
HF.VKNU, somme des profits qu'une personne retire
des fonds productifs qu'elle possède, c.-à-d. de ses terres,
de ses capitaux , de sa capacité industrielle, etc. Le mot
s'emploie comme synonyme do rente et d*tntérét. Le
B0verm public comprend tout ce que l'État retire, soit de
ses propriétés (revenu domanial)^ soit des contribudons
prélevées sur les citoyens {revenu fiscal)^ soit de services
spéciaux qu'il rend aux particuliers, comme le transport
des dépêches, le monnayage des métaux, la fabrication
des poudres et salpêtres, le commerce des tabacs {revenu
industriel).
RKVENt; (Impôt sur le). V. Impôt.
RÉVERBÈRE, grande lanterne en fer battu, vitrée toui
autour et en dessous, et contenant une lampe munie d'un
ou de plusieurs réflecteurs, et dont on se sert pour l'éclai-
rage public dans les localités où Téclairage au gaz n'a
point pénétré. Les réverbères furent introduits à Paris
en 1766.
RÉVÉRENCE. F. notre Dictionn. de Biog. et d: Histoire,
REVlilRS , côté d'une médaille opposé à la fttce.
RËVERSALES (Lettres), déclaration par laquelle an
État s'engage à ne pas contrevenir à un usage établi ou ï
des arrangements antérieurement convenus.
RÉVERSION, terme de Droit. V. Retour.
REVERSiS , jeu de cartes qui se joue à quatre per*
sonnes, avec on jeu complet dont on a retiré les dix.
Chaque joueur reçoit 11 cartes, et il en reste 4 au talon.
La règle générale est de ne faire aucune levée , ou de
réunir le moins de points possible dans celles qu'on s'est
vu forcé de faire. Ces points se comptent ainsi : l'as 4,
le roi 3, la dame 2, le valet 1. On se débarrasse donc, en
renonce, de ses plus grosses cartes, ou l'on joue, sur les
cartes moyennes, des cartes basses de la m Ame couleur.
La carte principale est le valet de cœur, appelé quinola,
il ne faut ni le jouer le premier, ni le donner sur du
cœur, mais toujours en renonce; si l'on s'en débarrasse,
on gagne, non-seulement le panier des bêtes ou mis -s,
mais une contribution convenue du joueur qui Ta reçu;
s'il est placé à la bonne, c-à^i. à la dernière levée, le
payement est double; s'il fait levée, on double le panier,
et on donne une consolation au joueur par qui l'on a été
forcé. La réunion des 4 as, ou 3 as et le quinola, forment
espagnolette, et donnent le droit de renoncer en toutes
couleurs pendant les 9 premières levées, avantage qui
fait presque toujours gagner la partie. — Le rêverais est
d'origine espagnole; son nom vient du latin reversus (re-
tourné ), parce qu'au rebours des autres jeux on y gagne
en faisant le moins do levées.
REVERTIER ou REVERQUIER , jeu qui se joue sur un
trictrac, et qui consiste à faire revenir toutes ses dames
dans la table d'où elles sont sorties.
REVÊTEMENT, en termes d'Architecture, placage de
plâtre, de mortier, de bois, de stuc, de marbre, etc.,
qu'on fait à une construction, pour la rendre plus solide
ou plus riche. On donne le même nom au mur ordinai-
rement en talus qui sert à fortifier l'escarpe ou la con-
trescarpe d'un fossé, ou à retenir les terres d'un fossé»
d'un bastion, d'une terrasse.
revêtement (i>emi-). V. Deui-revAtement.
REVINCTUM OPUS. V. Appareil.
RÉVISEURS, officiers de la Chancellerie romaine char-
gés par le datai re de réduire aux termes de Droit les sujh
pliques adressées à la cour de Rome.
RÉVISION , action de revoir, d'examiner de nouveau.
On se sert de ce mot, en Politique, pour désigner les
modifications que Ton fait subir par des voies lé^les aux
traités, aux lois, aux Constitutions dont on a reconnu les
inconvénients. — En Jurisprudence , la Révision est an
nouvel examen d'un procès qui a été jugé en dernier
ressort II y a lieu à révision : l'^ lorsque deux accusés
ont été condamnés, chacun comme unique auteur du
même crime, par deux tribunaux différents; le ministre
de ta justice, soit d'ollice, soit sur la réclamation des con-
damnés, ou de l'un d'eux, ou du procureur générai, fait
dénoncer les deux arrêts à la Cour de cassation, qui les
casse et renvoie les accusés devant une autre Cour;
2" lorsqu'après une condamnation pour homicide on dé-
couvre l'existence de la personne dont la mort supposée
a donné lieu à la condamnation ; si le condamné n'existe
plus, la Cour de cassation nomme un curateur à ta m^
moire, avec lequel se fait la nouvelle instruction ; 3** lors-
qu'une Cour, convaincue que les jurés se sont tiomp-*'*»
au fond, renvoie l'affaire à la session suivante pour virt
soumise à un nouveau jury, mesure qui ne peut être
prise qu'en faveur de l'accusé, jamais contre lui.
RévisioN (Conseil de). V. Conseil de révision, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d* Histoire.
révision (Tribunal de), tribunal permanent, ecabli
dans chaque arrondissement maritime, pour juger les
appels des tribunaux maritimes. Il est composé du major
général de la marine, président « et de 4 Juges : le préà-
REV
1565
RHË
dent da tribunal de l'« instance, le procureurde la ré*
publique, un capitaine de vaisseau, et un commiNsair»
de ta marine. It y a près chaque tribunal de révision
an commissaire public, nui est un officier supérieur
du corps de la marine ou ae celui du commissariat. Si
le tribunal dont le jugement a été attaqué était présidé
par un officier général, le tribunnl de revision doit être
[iréîiidé par un ofîlcier du mArae grade ; le miyor général,
s'il n'a. pa.4 ce grade, ne siège que comme jutre, et le
capitaine de vaisseau ne prend point part à l'afTaire.
RévisioN DE COMPTE, Opération qui se fait quand il y a
en erreurs, omissions, doubles emplois ou faux dans un
compte. La demande de révision doit être portée devant
les mômes Juges qui ont connu du compte {Code de Fro-
idure civile^ art. 541 ).
nÉVOCATION, action de retirer une fonction ou des
privilèges concédés soit à une personne, soit à une classe
de citoyens. — En Droit , une donation entre-vifs peut
être révoquée en certains cas {V, Donation). Les dona-
tions entre époux faites pendant le mariage sont toujours
révocables {Code Napoléon, art. 1090). Il en est de
même des mandats ( art. 2003 ). Un testament peut être
révoqué. V. Tkstahfnt.
RÉVOLTE. F. RÉBELLION.
RÊ\0LUTION (du latin revolvere, rouler, revenir sur
soi ), tout changement considérable qui s*opère dans le
gouvernement et les lois des nationa, dans les mœurs,
dans les opinions, dans les sciences et les arts.
REVOLVER, mot anglais qui désigne un pistolet à
plusieurs canons , inventé aux États-Unis par le colonel
Coït , et avec lequel on peut tirer rapidement plusieurs
coups de suite. Les canons sont tournants, et, quand on
monte le chien , cela met en mouvement un levier qui
opère la rotation.
REVUE , en termes d*Art militaire, inspection qu*un
offîrier supérieur fait d*un corps de troupe rangé en ba-
taille. Il en examine la tenue, et lui fait exécuter quelques
manœuvres.
REVUE, sorte de journal périodique qui paraît à des in-
tervalles plus ou moins rapprochés, et qui a pour objet
de ptuser en revue les questions à l'ordre du jour dans
les lettres, les scienres, les arts et la politique. Les Re-
vues ont généralement le format des livres, et beaucoup
d'écrits ont passé par elles avant d'être mis en volum&s.
C'est en Angleterre que ce genre de publication a pris
naissance, et ^u'il a conquis aussi la plus grande impor-
tant^' ; à la différence des Revues françaises, où la per-
sonnalité dpfl auteurs tient une place considérable, les
Revnes anelaises ne contiennent que des articles ano-
nymes. Tandis que la presse quotidienne ne donne au-
cune considération aux journalistes, les Revues donnent
à leurs écrivains une position et parfois la direction dea
alTairuH, |)arce qu'elles représentent de grands partis po-
litiques. Elles publient ces Essais qui forment une si
notable portion de la littérature anglaise moderne, et
rintér^^t qui s*attache à elles est si vif, qu'elles peuvent
ne paraître que tous les trois mois et cependant ne point
décourager leurs lecteurs. Le Monthly Hevieio date do
1749, et le Critical Review de i7;t6; mais ces deux Re-
vues n'atteignirent jamais la hauteur où devait parvenir
la Revue d'Edimbourg, fondée en 1808 par Sidney Smith,
Jeffrey, Brougham , Leslie et Playfair, auxquels se joi-
gnirent bientôt Mackintosh, Hazzlet, Bamilton, etc. Puis
on vit s'élever la Quarterly Review (1800), la West^
minster Review , la Foreign Review, la London Review,
f^ Weekly Review. — La France voulut suivre Texemple
de l'Angleterre; mais ses Revues ont pris de jour en jour
un caractère plus frivole, en admettant le roman, la
nouvelle, le proverbe. Les plus anciennes se consacrèrent
à peu orès exclusivement à la critique : ce furent la Revue
philosophique, qui succéda à la Décade, et une Revue
encyclopédique, qui subsista de 1819 à 1831. En 1825,
commença la Revue Britannique, composée d'articles
traduits des diverses Revues anglaises, et qui subsiste
encore aujourd'hui. Après la Révolution do 18^0, la Revue
des Deux Mondes et la Revue de Paris commencèrent
leur brillante existence la première, dirigée par M. Bu-
lok, èi dont George Sand, A. de Musset, Mérimée,
Sainte-Beuve, Aug. Thierry, Alfred de Vigny, E. Quinet,
Pliilarète Cbaales, Lerminier, etc., firent la réputation,
a pris et conservé la position la plus élevée; la seconde,
à laquelle collaborèrent Ch. Nodier, Balzac, Alex. Dumas,
Cessa de paraître en 18i5. Une Revue du Progrès, que le
talent de Louis Blanc ne put faire vivre, fut remplacée
m 1841, pour le parti démocratique, par la Revue tndé'
tendante, où travaillaient Pierre Leroux, George Sand
et Lamennais, et qui subsista jusqu'en 1848. La Revuê
nouvelle, entreprise à peu près vers la mf^me époque,
s'éteignit après un an d'existence, bien que soutenue par
le gouvernement. Une nouvelle Revue encyclopédique,
non politique, parut en 1840, et ne vécut que deux ans.
Depuis la Révolution de 1848, les seules Revues impor-
tantes que l'on ait fondées sont la Revue contemporaine,
la Revue eurtypéenne, qui a duré deux ans à peine, la
Revue germanique, la Revue nationale. D'autres recueils
sont étrangers aux questions politiques ; par exemple, la
Revue philologique de M. Léon Renier, la /fetnie archéolo-
gique de M. Leleux , diriKée par M. L. Renier depuis
1800, la Revue numismatique de M. de La Saussa^re, la
Revue de législation de M. Wolowski , la Revue scienti-
flque du D*" Quesneville, la Revue de l'Orient , etc.
REVUE, nom donné, dans le langage du Théâtre, a aea
pièces de circonstance jouées sur les thé&tres de vaude-
ville vers la fin de chaque année, et où Ton passe en
revue les événements plus ou moins comiques, les modes,
les bévues, les ridicules de cette année. Ce sont, en gé-
néral , dn très-médiocres compositions.
REYNOLD ( Code), code de signaux maritimes, inventé
par Reynold de Chauvancy, lieutenant de port à l'île de
La Réunion, et rendu obligatoire à bord de tous les na-
vires de commerce français depuis 1855.
REZ-DE-CHAUSSLE, partie d'une maison qui est au
niveau du terrain , immédiatement au-dessus des sous-
sols et des caves.
REZ-MUR, surface des gros murs en dedans de l'œuvre.
RHAMESSÉUM. V. TnkBES.
RHAPSODES. ( V, ces mots dans notre Dictionnaire
RHEDA. ) de Biographie et d* Histoire,
RHÉTEUR, nom qu'on donnait dans l'Antiquité à ceux
qui faisaient profession d'enseigner l'éloquence et qui en
avaient laissé des préceptes.
RHÉTIEN (Idiome), appelé aussi rhéto^romain, rO"
manche ou roumancJie, idiome parlé dans le canton
suisse des Grisons. Il appartient au groupe des langues
romanes ou néo-latines, et s'est formé à la suite de l'oc-
cupation du pays par les Romains : il contient un cer-
tain nombre de racines celtiques, antérieures à la con-
quête, et des mots franciques ou tudesques en plus grande
quantité qu'aucun autre idiome du mAme groupe. On y
distingue deux dialectes : le rumonique, parlé à Coire,
dans toute la vallée du haut Rhin, et près des sources
de ce fleuve, et le ladinique, dominant dans l'Engadine,
sur les deux rives de l'Inn.
RHÉTORIQUE (du grec érô ou rliéô, dire), art de
parler. — Définitions et caractères, — Quintilien, après
avoir critiqué plusieurs définitions de la Rhétorique,
s'arrête, à une formule adoptée généralement apr^s lui,
et la plus convenable, dit-il, d l'essence de l'art oratoire :
« La Rhétorique est l'art de bien dire, définition qui
comprend d'un mot toutes les qualités, et ensemble les
mœurs mêmes de l'orateur; car il lui est impossible de
bien dire, s'il n'est homme de bien. » La définition
d'Aristote, sous une formule un peu sèche, n'est paa
moins belle ni moins féconde : « La Rhétorique est, dit-
il, la faculté de découvrir tous les moyens possibles de
persuader sur quelque point que ce soit. >
L'Éloquence est le talent de persuader, c-à-d. le don
naturel et l'art tout ensemble. La Rhétorique n'est que
Vart, c-à-d. la réflexion ot la méthode appelées au se-
cours des dons naturels. « Ses préceptes, fondés sur les
principes du bon sens et de la droite raison , ne sont
autre chose que des observations {udicieuses, faites par
d'habiles gens sur les discours de» meilleurs orateurs,
qu'on a ensuite rédigées par ordre et réunies sous de cer-
tains chefs; ce qui adonné lieu de dire que l'éloquence
n'était pas née de l'art, mais que l'art était né de l'élo-
quence. B (Rollin, Traité des Etudes, ni, 1.)
Utilité et moralité de la Hh^torique, — Nous avons
montré ailleurs ( V^. Éloquence), par des exemples em-
f^runtés aux œuvres des poètes, que la Rhétorique ou
'art oratoire fait la supériorité de l'éloquence savante
sur l'éloquence naturelle. A plus forte raison en est-il de
même chez les orateurs. L'éloquence instinctive eût -elle
plaidé seule ce grand procès de la Couronne, où, dans la
(personne d'Eschine et de Démosthène, étaient en cause
a politique et la gloire d'Athènes? La haine eût-elle
dicté seule à Cicéron les Calilinaires et les Philxppiques?
Dans l'éloquence religieuse, la foi et la piété eussent-
elles inspiré toutes seules l'ordre merveilleux et la pro-
gression irrésistible des Sermons et des Oraisons /»•
fi^6rM de Bossuet, et la Rhétorique admirable que l'on
pourrait tirer de ce grand homme? On lait quelles études
RUE
1566
RHO
solides les orateurs de la Révélation mirent ao serrioe
des idées nouvelles et des passions ardentes de leur
époque. La Rhétorique est moins populaire aujourd'hui.
Les uns, trop familiarisés avec elle, en connaissent trop
bien les procédés et le mécanisme. Les autres la dédai-
gnent par une sorte d*insouciance rustique, et croient
parler toujours assez bien du moment quMls se font en-
tendre. D'autres, admirateurs exclusifs des sciences, ne
demandent aux orateurs que la clarté et la précision du
langage scientifique, sans croire que les sentiments et les
idées aient rien à démêler avec les règles traditionnelles
de la composition et du style. Ni Thomme ni les choses
n*onr thangé cependant. La chaire, le barreau, l'Aca-
démie, renseignement, sans être livrés aux rhéteurs,
usent toujours de la Rhétorique. Les orateurs de nos
assemblée politiques ne se condamnent plus sans doute
aux études minutieuses demandées par Gicéron et par
Quintilien ; mais ils n*en obéissent pas moins comme eux,
depuis an demi-siècle, aux lois essentielles de la logique
et de l'expérience, sur lesquelles la Rhétorique est fon-
dée. Les hommes se succèdent à la tribune : l'éloquence
parlementaire réussit tour à tour par ta gravité austère
et puissante, par Tabondance pénétrante et lumineuse,
par le pathétique d*un geste oratoire et d'une voix mélo-
dieuse, par l'infatigable habileté d'une logique incisive et
mordante. Mais, sous la variété des noms et des talents,
. où le public reconnaît toujours l'éloquence, l'homme de
goût retrouve toujours l'intelligence et la pratique des
grandes règles oratoires. Non, la Rhétorique n'est pas
une vaine science de mots et de phrases symétriques.
Ne lui reprochons pas non plus avec Platon (un si grand
orateur cependant, et an rhéteur si habile ! ) qu'elle n'est
bonne à rien, parce qu'elle sert à tout et n'a pas d'ap-
plication spéciale. La Rhétorique est l'art de la parole
mis à la portée de tout le monde, et le développement
méthodique et réglé d'une faculté universelle.
Il n'est pas besoin de démontrer l'utilité morale de la
Rhétorique. Souvent attaquée parce qu'elle donne les
moyens de plaider lo pour et le contre, elle ressemble par
cet endroit à toutes les forces de la nature, qui s'em-
ploient au mal comme au bien. On connaît l'apologue
d'Ésope servant des langues à son maître Xantus, comme
la meilleure et la pire chose qui soit au monde. « La
mer, dit Montesquieu, engloutit les vaisseaux ; elle sub-
merge des pays entiers; et elle est pourtant utile aux
humains. » La Rhétorique est comme la mer : elle porte
son remède avec elle, et guérit les plaies qu'elle a faites.
Elle fait descendre plus aisément la vérité parmi les
hommes; elle empêche les erreurs de la Justice; elle
combat ses propres excès, et corrige même les scandales
qu'elle donne. Enfin, comme le remarque Aristote, la
bonne caase est plus facile à plaider que la mauvaise, et
le bien se défend plus éloquemment que le mal. S'il en
était autrement, et que l'homme, entre le sophisme et la
vérité, s'attach&t toujours au premier par instinct et par
intérêt, il faudrait accuser la Providence.
Division de la Rhétoriqw, — Tous les rhéteurs ont
divisé la Rhétorique en trois parties, V invention, la
Disposition, et VÊlocution, — Si le sujet est laissé à la
discrétion de l'orateur et de l'écrivain , Vlnvention le
trouve et le choisit. Si, comme il arrive d'ordioaire à
l'oratcnr, le sujet est donné, Vlnvention fournit les idées
et les développements qui s'y rattachent, les preuves, les
arguments, le ton, les mœurs, les passions, en un mot,
les moyens de la persuasion. — La Disposition déter-
mine l'ordre de ces moyens et l'emploi de ces matériaux ,
les rapports et la progression des idées et des sentiments,
les divisions et le plan du discours. — L'i^^ocution ou le
style traduit par le langage les résultats de Vlnvention
et de la Disposition; elle ajoute à leur puissance la vi-
gueur et l'éclat de l'expression.
On voit que cette ai vision est commune à la Rhéto-
rique et à tous les arts. Le peintre, comme l'orateur et
comme le poâte, détermine en idée les personnages, les
épisodes, les plans de son tableau ; il les dispose et en
arrête l'ordonnance générale avant de commencer l'ébau-
che; il peint enfin, et la couleur est pour lui ce que le
style est pour Pécrivain.
A ces trois parties de la Rhétorique, que Gicéron ap-
pelle les membres de Véloquence, il en ajoute deux,
VAction et la Mémoire. L'action est la traduction du
discours par la voix et le geste. Gelle des Grecs et des
Romains était bien plus passionnée et plus violente que
la nôtre. L'orateur frappait du pied; il déchirait la robe
de son client pour montrer les blessures qu'il avait re-
çues pour son pays. La tribune était pour lui un pié-
destal et comme an théâtre où il paraissait tout entier.
On sait que Démosthène proclamait Vemtion à la fois la
première, la seconde et la troisième condition de l'élo-
quence. Les Modernes ont plus d'écrivains que d'orateurs.
L'action oratoire est d'ailleurs, de nos jours, bien plus
calme et plus modérée. L'orateur à la tribune, l'avocat
au tribunal, le prédicateur dans la chaire, sont cachés
Jusqa'à la moitié du corps. L'action a donc perdu natu-
rellement le caractère tbé&tnJ qu'elle avait chez les
Grecs et chez les Romains. -Gependant on peut voir, dans
le second DicUogue sur Véloquence, que Fénelon la re-
commande au prédicateur, et en donne les règles. Les
avocats et les orateurs en savent encore mieux le prix;
car l'auditeur est toujours sensible à son influence. ^
La Mémoire était encore une partie accessoire de la Rhé-
torique, élevée au rang d'une science, objet, sous 1«
nom de Mnémoniqiie, d'études longues et minutieuses.
On en trouvera les singuliers détails dans Gicéron.
L'Invention oratoire se divise en trois parties, les Preu"
vesy les Moeurs, et les Ptissions; la Disposition com-
prend les subdivisions du discours, Exorde , Confir-
motion f Péroraison, et les antres. Pour ces différentes
matières, ainsi que pour VÊlocution et le Style, no"S
renvoyons aux articles spéciaux où elles sont traitées.
V. chez les Anciens : Aristote, Rhétorique; Longin,
Traité du sublime: Gicéron, les ouvrages techniques, les
deux grands Dialogues sur i'orofeur et les orateurs cé-
lèbres, et le Traité de V orateur; Quintilien, V Institution
oratoire; Tacite, Dialogue sur les causes de la corruption
de Véloquence; S' Aujiçustin, la Doctrine Chrétienne; —
chez les Modernes : Fénelon, Dialogues sur l'éioquence;
RoUin, Trailédes Éludes; Crévier, Rhétorique française ;
l'abbé Batteux, Principes de littérature; Dumarsals,
Traité des tropes; Marmontel, Éléments de liltéralure;
Maury, Eloquence de la chaire: Blair, Cours de Rhéto-
rique; Victor Le Clerc, Rhétorique, etc. A. D.
RfléroRiQDB (Ghambres de). K. Ghaiibrcs db anéro-
RiQUB, dans notre Dictionnaire de BiogrcBphie et d^His-
totre.
RHÉTO- ROMAIN (Idiome). V. Rnéncpi.
RUINGRAVË. V. ce mot dans notre Dictumntùre de
Biographie et d'Histoire,
RHODES (Golosse de), fameux monument de l'anti-
quité, au sujet duquel les érudits sont loin d'être d'ac-
cord, et que Muratori a même traité de chimère. Selon la
tradition générale, c'était une statue en bronze d'Apollon
ou du Soleil , érigée par reconnaissance envers ce dieu,
protecteur des Rbodiens, et envers Ptolémée Soter qui les
avait délivrés de l'armée de Démétrius Poliorcète. Elle
fut faite vers 300 ou 280 av. J.-C., par Gharès de Un-
dos, disciple de Lysippe; Pline l'attribue, au contraire, à
Lâchés, statuaire du même pays, qui aurait consacré i^ ans
à cette œuvre. Elle avait 70 coudées de hauteur (32 met.) ;
peu d'hommes pouvaient embrasser son pouce, et la lon-
gueur de ses doigui surpassait la hauteur des statues ordi-
naires. On avait aflfermi cette masse de métal , en l'em-
plissant de grosses pierres. La dépense fut de 300*talents
(1,050,000 fr. ). Le colosse de Rhodes fut renversé par
un tr^oiblement de terre, 56 ans après son érection. En
055, ies Arabes le mirent en morceaux, qu'ils vendirent à
un Juif d'Emèse; il aurait fallu , dit-on, 900 chameaux
pour emporter la charge, ce qui , à 400 kllogr. par cha-
meau, donnerait un poids de 300,000 kilogr. L'écartpment
des Jambes du colosse ne pouvant , d'après sa hauteur,
être de plus de 12 met., il n'a pu être placé, comme le
dit la tradition, à l'entrée du grand port, où, d'ailleurs,
le tremblement de terre l'eût précipité dans les flots. Il
était au fond du port et en face de l'entrée , devant le
bassin des galères, au-dessus de deux tours qa'on voit
encore aujourd'hui.
RUODIEN (Style], genre de style mixte, qui tenait le
milieu entre la sobriété attiqûe et fabondance molle et
pompeuse du style asiatique. Il était caractérisé par une
certaine langueur, un certain laisser-aller, qui n'était
pas sans consistance : un critique de l'antiquité disait
qu'on ne pouvait pas le comparer à l'eau d'une source
limpide ni à celle d'un torrent limoneux, mais au'il of-
frait plutôt l'image d'un lac paisible. Son dom lui vint
de ce qu'on le remarqua pour la première fois, dans le
m* siècle av. J.-G., chez quelques écrivains rbodiens,
formés à l'école des successeurs d'Eschine, qui, vaincu
dans sa lutte contre Démosthène à l'occasioD du grand
débat sur la couronne, et banni d'Athènes, alla fonder à
Rhodes^ une école de rhétorique restée longtemps cé>
ièbre. p
RHOPAUQUES (Vers), nom donné, chez les Andena,
k
RHY
1567
RHY
à une Mite de vers qui commençaient par yn monosyl-
labe, et qui continuaient par des mots tous plus longs
les uns que les autres. Le mot venait du grec rhopeUon
(massue), parce que ces vers ressemblaient à une mas-
sue, qui commence par un bout très-mince et finit par
une grosse t£te.
RHOTACISME, nom que les anciens Grecs donnaient
à l'usage fréquent de la lettre p (rb). Telles sont ces
formes de Tancien dialecte laconien : Timotheor pour
TimolhêoSf Milenor pour MUesios, Les Êléens et les Éré-
trions retinrent plus longtemps cet usage, et ces derniers
étaient souvent tournés en ridicule, à cette occasion, par
les poètes comiques , surtout ceux de la vieille Comédie.
Au reste, chez les Athéniens eux-mêmes, le ^ se substituait
assez souvent au a. Des changements analogues ont été ob-
servés dans le latin : plures^ plurima, lares, amare, labor,
arbor, etc., s'écrivirent primitivement pluses, plwima ,
. lases, amase, labos, arbos, etc. En français, orfraie s'est
formé de ossifraga; varlet s'est dit longtemps pour vas-
let , abréviation de vasseUt ; les mots apôtre^ chapitre,
épltre, renferment un r peu conforme aux mots originaux
qui ont l : apostolus, capitulum, etc. Diacre s'est dit
aussi par une sorte de rhotacisme au lieu de diacne
(dioconus). P.
KHYPAROGRAPHES (du grec rhuparoe, sale, impur,
î^graphUn, tracer), nom que les Anciens donnaient aux
peintres dont les sujets étaient licencieux ou d'une
grande trivialité. .
RHYnON ou RHYTON, coupe. V. notre Dicttonnaire
âe Biographie et et Histoire,
RHYTUME (du grec rhythmos, mouvement réglé et
inesuré), en termes de Poétique et de Rhétorique, dé-
signe un espace quelconque ( vers ou membre de phrase)
ayant un rapport , facile à saisir, avec un autre espace
semblable, analogue, ou différent; et de ce rapport ré-
sulte ce qu'on appelle Vharmonie, Le rhythme est natu-
rellement plus sensible dans les vers , grâce à la symétrie
des sons et à la fixation régulière des espaces. Ainsi, dans
notre vers alexandrin, la symétrie des rimes, l'égalité
du nombre des syllabes de chaque vers, les repos de
l'hémistiche symétriques à la fois entre eux et avec la
fin du vers, constituent notre principal rhythme poétique.
Dans la poésie lyrique, le rhythme se fonde en outre,
non-seulement sur la symétrie des strophes et des stances
entre elles, mais souvent encore sur la variété des me-
sures dont elles se composent, sur le mélange ou le retour
alternatif des petites et des grandes mesures ( F. Stancb,
Strophe). Le rtiythme fait Ta base unique de notre ver-
sification, au lieu que dans celle des Grecs, adoptée de-
puis le II* siècle av. J.-G. par les Latins, le rhythme
s'unissait au mètre, lequel contribuait bien au rhythme,
mais néanmoins s'en distinguait nettement. Ainsi, le
rhythme de nos vers français de 12 syllabes ressemble
assez bien, quant aux espaces mêmes, à celui du vers
asclépiade de l'antiquité; mais celui-ci , outre le rhythme
proprement dit, renferme encore un genre de mètre par-
ticulier, une variété de pieds prosodiques qu'il est impos-
sible de reproduire dans notre versification ( V. NouBaB).
Lorscpie le sentiment de la quantité prosodique latine se
perdit à l'époque de la décadence littéraire du vi* siècle,
le rhythme fut néanmoins conservé ; et le nouveau sys-
tème d'assonances ou de consonnances en prit même le
nom : de là le mot rime, dans les langues néo-latines.
I^s premiers exemples s'en rencontrent dans les proses
chantées à Téglise; elles offrent un rhythme sensible,
mais tout à fait étranger aux règles qui avaient prévalu
pendant la durée de l'Empire romain; car les syllabes
n'y sont plus évaluées, mais simplement comptées.
Les ouvrages écrits en prose sont susceptibles d'un
certain rhythme différent oe celui des vers, mais non
moins manifeste. Il repose sur une série d'espaces qui
peuvent être fréquemment variés suivant les besoins de
la respiration, la portée naturelle de l'oreille, l'expression
progressive des idées ou des sentiments, enfin suivant la
distinction naturelle des objets mêmes des opérations de
l'esprit. L*exorde de l'Oraison funèbre de la reine d'An*
gleterrt par Bossuet débute par une phrase où le rhythme
n'est pas moins sensible que dans les vers les plus pom-
peux, et où il suit une progression frappante. Celui qui
régne dans les deux | et de qui relèvent toiu les empires
(ici le rhjfthme eat à peu près égal; il varie et s'étend
dans le membre qui suit:); à qui seul appartient la
gloire, la majesté, et l'indépendance \ (dans les deux der-
niers membres de la période il monte encore :)\est aussi
le seul qui se glorifie de faire la leçon aux rois \ et de
leur doMher quisndil MplaU de grandes et de terribles
leçons, Mms cet exemple, le rhythme suit une marcht
ascenda.:te : quelquefois il suit une progression contraire.
L'exorde d'un sermon de Bourdaloue sur la Résurrection
{Ces paroles sont bien différentes de celles, etc...), et les
dernières lignes de l'Oraison funèbre de Condé par Bos-
suet, en offrent deux exemples remarquables. Les Anciens,
depuis Thrasymaque et Gorçias, portèrent souvent à l'excès
l'amour du rhythme dans Ta prose. Isocrate, à force de
bon goût, en modéra l'exagération ; mais c'est chez Dé-
mosthène qu'il faut chercher le vrai rhythme oratoire,
celui qui est toujours en rapport avec la pensés et le
sentiment 9 et qui varie pour ainsi dire de lui-même selon
les diverses nuances qui s'offrent à l'esprit ou à l'imagi-
nation de l'orateur. Chez les Romains, Cicéron, disciple
intelligent des Grecs, et surtout d'Isocrate et de Démo-
sthène, n'a pas eu de rival pour la science du rhythme : s'il
laisse voir, à cet égard, plus d'apprêt que Démosthène,
du moins il échappe à la froideur, souvent mêlée de vague,
d'Isocrate. Le rhythme, tant prisé des Anciens, a dû être
beaucoup moins recherché par les modernes, dont les
langues sont enpénéral moins musicales que celles de
l'antiquité, et qui d'ailleurs préfèrent infiniment l'abon-i
dance et la Justesse des idées k la richesse des cadences.
Fléchier, plus que tout autre, s'est attaché à donner sur
ce point à notre langue toute la perfection dont elle est
capable; mais, à cet égard même, il reste en général
inférieur à Bossuet , qui , sans se préoccuper du rhythme,
le trouvait d'inspiration, en faisait toujours l'emploi lo
plus naturel et le plus expressif, et toujours évitait cette
monotonie qui règne dans tous les écnts de Fléchier et
leur communique un certain caractère de froideur. V. Ben-
loBw, Précis dune théorie des rhythmes, 1862, in-8**, P.
^ RHTTHMB, eu M usiquo, signifie, non pas, comme on l'a
dit, le nombre des mesures que contient une phrase de
musique, mais la quantité et la valeur des signes ou
notes qui servent à représenter les sons contenus dans
une phrase, et dont les retours établissent un ordre quel-
conque entre les temps qui font partie de chacune des
mesures. C'est l'arrangement symétrique des diverses
valeurs de temps, et le retour périodique des formulée de
cet arrangement; c'est, si l'on veut encore, la symétrie
appliquée an mouvement. Le rhythme est une oies par-
ties constitutives de l'art musical : sans lui la mélodie
ne serait qu'une succession de sons sans caractère, tandis
f que, selon la disposition des valeurs, selon le degré de
vitesse ou de lenteur avec lequel on l'exécute, elle expri-
mera ou la douleur ou la Joie. Par le rhythme, on coor-
donne la succession des sons au moyen de l'emploi varié
de leurs signes représentatifs, on les classe dans les
cadres appelés mesures, on les fait entendre selon le
besoin sur les temps forts ou sur les temps faibles de
ces mesures, on établit un ordre entre les membres de
phrase et les phrases qui forment les périodes du dis-
cours musical, lequel, pour être intelligible, a besoin
d'être ponctué aussi régulièrement que le discours ora-
toire. Le rhythme est à la musique ce qu'est le mètre à
la versification. Il est indépendant de l'intonation et de la
mélodie : un tambour, ou tout autre instrument de per-
cussion, nous transmet la nature du rhythme d'un chant
quelconque. Il est d'autant plus sensible à l'oreille que
le mouvement est plus rapide; plus il se ralentit, plus la
sensation s'aflfkiblit. Le rhythme est simple, lorsqu'il ne
renferme qu'un seul genre de mouvement; composé,
lorsqu'il en renferme plusieurs : si un rhythme simple
est facilement appréciable, il n'en est pas de même de
celui dont les éléments sont multipliés, lequel exige de
l'auditeur une certaine éducation musicale. — Chez les
anciens Grecs, le rhythme poétique et le rhythme mu-
sical étaient presque une seule et même chose, surtout à
l'époque primitive où la poésie et la musique étaient étroi-
tement unies, et composées d'un seul Jet par le même ar-
tiste. Il y avait trois genres de rhythmes : i^ le rhythme
égal, où Tarais était égal à la thésis ( V. ces mots), e^ qui
correspondait à notre mesure binaire; à ce rhythme se
rapportaient le pied pyrrhique (2 brèves), le procéleus-
matique (4 brèves), le spondée (2 longues), le dactyle
a longue et 2 brèves), l'anapeste (2 brèves et 1 longue),
ib double spondée; 2^ le rhythme double, où l'arsis était
à la thésis dans le rapport de 2 à 1 , ou de 1 à 2, répon-
dait à notre mesure ternaire*, il comprenait l'ïambe
(1 brève et \ longue), le trochée (i longue et 1 brève), le
tribraque (3 brèves), et le molosse (3 longues); 3^ le
rhythme hémiole ou sesquialtère , où l'arsis était à la
thésis comme 2 à 3, ou comme 3 à 2; le péon (5 brèves,
ou 1 brève et 2 longues, ou 1 longue et 3 brèves) était
particulier à ce rhythme, qui est à peu près perdu pour
RIC
1568
HIG
I
f
r
f
r
wnm t on a poorttnt Maayé de créer une niesare à
5 temps, employée par Catel dans deux études quMl
écrivit pour te Consenrstoire de musique de Paris, et par
Boic.ldieu dans l*allégro de Taîr : Viens, gentille dame^ de
son opéra la Dame blanche. Un autre rhythme. l'epi-
trile. où les deux temps étaient Tud à Tautre dans la
proportion de 4 à 3, rut peu usité : nous en avons des
imitations dans un passage de l* Enfance du Christ par
Berlioz, et dans la mélodie du Voyageur par VaucorbeiU
où il y a des alternatives régulières de 3 et de 4 temps. B.
RHYTHMIQllE, nom qu(> les anciens Grecs donnaient
à la science des durées, en tant que susceptibles de pro-
portions entre elles, depuis les rhytlimes de la nature et
de rinstinct, tels que le battement des ailes de l'oiseau,
les pulsations du cœur, la cadence des marteaux de for-
gerons, etc., Jusau'au rhythme artistique et musical, dont
les parties ont des n^ports qui peuvent s'exprimer par
des nombres.
RHYTHMOMfeTRE. K. CHRONOiifcTRB.
RHY PHMOPÊE, nom donné par les anciens Grecs à
Tart de choisir, d'employer, de varier, de mélanger les
rhythmes. C'était la pratique des règles.
RHYTON. V. Rhytion.
RIBAUDEQUIN ou RIBAUDEAO, arbalète de grande
dimension. — Espèce d'afTût des anciens canons.
RIBAUDS. y. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d* Histoire.
RIBBONISME, nom donné, en Irlande, à une associa-
tion secrète de paysans catholiques, dont le but, plus ou
moins avoué, est de faire rentrer la propriété du sol aux
mains des catholiques. Les membres de cette association,
qui emploient l'incendie et l'assassinat, sont dits ribbo~
nistes ou riband-men.
RIBORD. V. BORDAGB.
RICA. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d^ Histoire,
RICERCARI. V. Prélude.
RICHELIEU ( Cliàteau de). Ce château, que le cardinal
Richelieu flt élever en 1637 par l'architecte Lemercier,
et qui a été abattu à la Révolution, rivalisait en étendue
et en magnificence avec les palais des souverains. Il
s'élevait au milieu d'un parc immense, arrosé par l'Ama-
ble, et formait un quadrilatère réiiulier à quatre bas-
tions, avec fossés remplis d'eau. Trois corps de bâtiments
à double étage enclosaient une vaste cour. A chaque
angle et au centre de l'aile opposée à la porte, ouverte
dans une galerie à arcades, étaient des pavillons plus
élevés que le reste des b&timents; un arc triomphal,
surmonté d'une statue de la Renommée, couronnait la
grande porte, où l'on parvenait par un pont-Ievis. Deux
cours précédaient le château : celle qui n'en était sépa-
rée que par le fossé était un carré de même surface que
celui du ch&teau; les b&timents des écuries la bordaient
lutéralemeut ; la grande cour, ou cour d'entrée, était car-
rée aussi, un peu plus large que l'autre, flanquée aussi
de bAtiments divers, destinés à la suite du cardinal. La
pr<*mière porte s'ouvrait au centre d'un demi-cercle de
murs, à la jonction de trois routes. Derrière le ch&teau ,
et comme lui entouré d'eau, était un Jardin carré, ayant
au centre on ch&teau d'eau, et formé de quatre parterres
symétriques. D'autres parterres s'étendaient au delà du
fossé, autour d'une grande pièce d'eau, et se terminaient
par une galerie décorée de niches, de statues, de vases, etc.
Ces différentes pièces étaient parfaitement svmétriques
entre elles : de vastes jardins, des potagers, ae spacieux
miissifs d'arbres percés de belles allées, les entouraient;
puis, des bois et des taillis complétaient le parc, qui était
ceint d'une muraille. Dans cette demeure vraiment royale,
los plus habiles artistes avaient prodigué leurs talents;
de nombreux et précieux chefs-d'œuvre antiques la dé-
coraitMit. V. une Notice de M. de Chersé dans les Mé"
moirfs lie la Société des Antif^uaires deVOuest, t. IL
RICHESSE En termes d'Economie politique, tout ce
qui a une valeur quelconque, c.-à-d. une utilité directe,
comme Tair, les aliments, ou une utilité indirecte,
comme l'argont, la marchandise dans la boutique d'un
pas moins pour lui une utilité bien réelle. Ces richesses
n|ont pas de valeur échangeable (espèce de valeur bien
difTérente de la valeur proprement dite; quand elles sont
en telle abondance que chacun peut se les procurer en
aussi grande quantité qu'il le veut sans avoir besoin du
secours de personne. Ainsi, dans un village situé au bord
d'une grande rivière, l'eau n'a pas de valeur échangeaUt.
Ainsi encore, l'air n*a pas ^rmi nous nne valear édian*
geable; il en* aurait u"etrè>-prande pour des gens placés
dans un souterrain où ils étouflTeraienU — z* l«s ri-
chesses artificielles ou sociales . qui «ont un prodoit de
l'activité humaine appliquée aux richesses naturelles. A
d*autres points de vue, on distingue : les richesses malè^
rielles, données par la nature (terres, forêts, animaux,
mines, etc.. ), ou créées par l'homme produits industriels
ou manufacturés^ et les richesses intellectuelles (instruc-
tion, œuvres de l'esprit) ; les richesses réelles, indépen-
dantes de conventions (une terre, une maison, des ré-
coltes, un capital j, et les richesses factices (effets de
commerce ) ; les richesses productives (les capitaux qui,
par le placement ou le travail, donnent un revenu), et les
richesses improductives (b&timents d'une usine, vivres,
approvisionnements ).
Relativement à la source de la richesse, les Écono-
mistes ne sont pas d'accord. Les uns l'ont uniquement
trouvée dans Vargent : c'était le système de l'école mer-
cantile, qui date de Colbeit. Les autres, comme les Phy-
siocrates du xvni* siècle, l'ont placée dans les seuls pro-
duits de la nature. Adam Smifh et ses disciples ont
proclamé qu'il n'y avait de richesse que dans le (raooti,
parce que le travail seul servait de mesure & toutes les
autres richesses. Les trois écoles se montraient exclu-
sives, et prenaient la partie pour le tout : c'est la réunion
de ces divers éléments qui forme la richesse générale.
RICHESSES (Production, Distribution, Consommation
des). V. pRObucTiON, Distribution, Consommation.
RICINIUM, vêtement. V. notre Dictionnaire de liiogro^
phie et d'Histoire.
RICOCHET (Tir à). V. Tiiu
RICOS HOMBRES. V. notre Dictionnaire de Biogro'
phie et d'Histoire.
RIDE, cordage qui sert à tendre les haubans. Cette
tension se nomme ridage.
RIDEAU (de ride, à cause des plis de l'étofTe), voile on
pièce d'étoffe dont on couvre ou ferme quelque chose, et
qu'on attache à des anneaux coulant sur une tringle,
pour qu'on puisse la tirer & volonté. On met des rideaux
surtout aux fenêtres et aux lits. Les Anciens n'em-
ployaient souvent pas d'autre moyen de fermeture pour
les portes intérieures des mai<^ons et des palais; les]uges«
dans les causes qui demandaient un examen réfléchi,
laissaient tomber un rideau devant leur tribunal, afin de
délibérer avant de rendre la sentence; dans les temples,
on suspendait souvent un rideau devant la statue de U
divinité pendant le temps qu'on ne sacriflait point. —
Au théâtre, il ne parait pas que les anciens Grecs aient
eu des rideaux entre la scène et le public ; le peripf-
tasma dont Pollux fait mention était plutôt une toile
qu'on étendait par-dessus le thé&tre pour mettre les spec-
tateurs à l'ombre. Chez les Romains, la aoène était fer*
mée par un rideau {aulœum, siparium)^ orné de figures
peintes, brodées ou tissues; mais on ne levait pas œ ri-
deau, comme cela se pratique aujourd'hui; on le baissait,
et il restait ployé sur la partie antérieure du proscenium,
ou était reçu en dessous par une trappe.
BiDKAu (Lever de). C'était autrefois une gratiflcados
allouée aux auteurs, à la première représentation d'un
ouvrage dramatique. Aujourd'hui, c'est une petite pièce
qu'on Joue au premier lever de la toile, pour donoiT le
temps au gros du public d'arriver au commencement de
la grande pi(^ce.
RIDELLES. V. CnARRBTTB.
RIDICULE. V. R^icuLB, dans notre Diclwnnatrs
Biographie et d'Histoire.
RIEZ (Rotonde de) (Basses-Alpes^, monument rom
formé de huit Jolies colonnes corinthiennes de granA
gris, placées sur un cercle en pierre qui leur sert di
socle, et dont la circonférence est de 16*" environ. On l>
surmonté, d'une espèce de dume octogonal, dont les face;
correspondent au plan des entre-colonnements. On croi>
qu'il était consacré à Apollon.
RIFFLART (de riffler ou raffier), vieux mot qui dé-
signait un sergent, un recors. — On s'en est serri poui
désigner un énorme parapluie, depuis qu*un acteur à(
rOdéon, Jouant, en 1801, le rôle de Rifflart dans la P^if*
ville, comédie de Picard, parut en scène avec un meuble
de ce genre.
RIGAUDON ou RIGODON (de Pinventeur Rigaud'^},
ancienne danse, dont l'air, d'un mouvement vif et eai,
se battait à 2 temps et se divisait en S reprises, phi>
sées de 4 en 4 mesures et commençant par la dcroièic
note du second tf'mps.
RIG-VÊDA. r. \«0A.
RIM
1569
RIM
RILEK, aorte de lyre fort grossière, en usage cfaei les
Russes.
R]ME (corruption euphoniaue du mot rhythme)^ re-
tour du même son à la fin de aeux ou plusieurs Yera. La
rime est dite masculine, quand les mots se terminent
par UQ son plein, par une syllabe sonore, sans « muet
(fierté, btmUé; soupir, désir; armer, charmer). Les troi-
sièmes personnes du pluriel des imparfaits et des condi-
tionnels en at0fU forment des rimes masculines, parce
que ces syllabes ont le son de Ve ouvert. La rime est
féminine, quand les mots se terminent par un e muet
(victoire, gloire; s»arète, poëte; belle, rebelle)^ ou par un
e muet suivi de consonnes qui ne se prononcent pas
(armes, choÊrmes) ; Ve muet ne se faisant point sentir et
ne comptant pour rien, la ressemblance de son se tire de.
la pénultième syllabe. Le dernier hémistiche des vers à
rime féminine a une syllabe de plus que celui des vers
masculins; c'est la syllabe formée par Ve muet. Une
rime est riche, si elle est formée par plusieurs syllabes
identiques {auteur, hauteur; souvenir, revenir) \ pauvre^
si la ressemblance n*est que dans le son final (J*atfnat,
je parlai) ; suffisante^ quand il y a identité, non-seule-
ment entre les voyelles finales, mais entre les consonnes
qui les précèdent (candeur, pudeur) ; insuffisante, quand
elle se borne à une seule lettre (ennemi, ennui),
Lorsc^ue, dans un poème, deux rimes masculines et
deux rimes féminines alternent constamment, on a des
rimes plates ou suioies : c*est le système adopté dans
notre haute poésie. Quand on entrelace les deux espèces
de vers, on masculin après un féminin, ou deux mascu-
lins de même rime entre deux féminins qui riment en-
semble, comme dans Tode, le rondeau, le sonnet, etc.,
on a des rimes croisées. Un certain nombre de rimes
semblables qui se suivent sans interruption sont appe^
lées rimes redoublées. Les rimes mêlées sont celles qui
ne sont pas disposées dans un ordre uniforme.
La prosodie française exige, comme condition de la
rime, que l'un des mots ne soit pas au singulier, et
Tautre au pluriel; ainsi, loi ne rime pas avec bois, hon-
neurs avec bonimur, jeu avec feux. Mais il est admis
qa*un mot qui, au singulier, s'écrit avec s ou a? à la fin,
peut rimer avec un pluriel terminé par les mômes lettres;
par exemple, un choix avec les voix. — Deux mots ter-
minés, Tun par r, Tautre par rs (amour, recours)^ for-
ment une rime défectueuse. — La dernière lettre d*un
mot à désinence masculine doit être la même ou du
même ordre que celle de Tautre mot avec lequel on veut
le faire rimer : ainsi, exploit ne rime pas avec noter, ni
genou avec goût ou courroux, ni an avec enfant, ni sut"
tan avec pédant. Mais, si la dernière lettre est la même
ou de même ordre, on peut faire rimer des mots qui n*ont
que la consonnance avec une orthographe toute diffé-
rente : ainsi, Goths avec nouveaius, accord avec fort,
voix avec bots, mort avec 6ord, flanc avec sang. — La
consonnance, tant pour les rimes masculines que pour
les rimes féminines, doit tenir à la prononciation régu-
lière, à Taccent le plus généralement accrédité dans le
langage correct : on ne fera donc point rimer fier avec
altter, mer avec aimer, enfer avec étouffer, fiancés avec
succès. — Pour qu'une rime féminine soit bonne, il faut
qa*en retranchant 1*6 muet final, ce qui reste offre une rime
masculine suffisante et régulière : monde ne rime pas avec
demande, mais peut rimer avec profonde. — On admet à
rimer ensemble tous les mots dont la dernière syllabe
a le son de. la nasale m, de quelque manière qu'elle
s'écrive : main et chemin^ faim et fin, etc. — Les mots
terminés en ent et en aient ne riment qu'avec des mots
qui ont ces mêmes terminaisons : on ne ferait pas rimer
m^rtsent avec entreprise, surface avec surpassent. Un
mot terminé par s (trépas) ne peut rimer avec un mot
terminé par t (état); ni une syllabe longue avec une
brève (maitre et mètre^ disgrâce et place, abattre et tcfo-
làtre); ni une lettre mouillée avec une autre qui ne Test
pas (fille et fUe) ; ni le mot simple avec son composé
(prudent et imprudent, tieureux et malheureux, juste et
injuste)^ à moins que le composé ne difière tout à fait de
eeoB avec le mot dont il dérive (garder et regarder, courir
et secourir). Les deux hémistiches d'un vers ne doivent pas
rimer ensemble. On doit encore ériter la rime dans les
premiers hémistiches de deux vers qui se suivent.
La question de Torimne de la rime est fort incertaine.
La rime peut avoir été suggérée par le phénomène phy-
sique qu'on nomme écho, sâon Jean Lemaire, elle aurait
été inventée en Gaule, 700 ans avant la guerre de Troie,
par un roi Bardus, dont le nom est resté aux Bardes. On
a remarqué aussi que^ dans la Bible, certaines conso»-
nances se reproduisaient à la fin des versets; que la riuM
n'a point été inconnue dans l'Inde, dans la Chine, et
même dans le Nouveau-Monde. Les consonnances sem-
blables, dont on constate le retour dans certains vers des
poètes de l'ancienne Rome, s'expliquent autrement q^e
par ie dessein de rimer (V. LéoNms — Vers). La versifi-
cation latine, comme la versification grecque, était établie
sur la quantité prosodique, et non sur fa rime : ce fut
seulement dans le désordre inhérent à la décomposition
du latin, qu*au lieu de prendre pour base dans les vers
la longueur relative des sons, on prit chaque syllabe
comme unité vis-à-vis de toute autre syllabe; on ne me-
sura plus les syllabes, on les compta. Il fallut alors que
le poète marquât l'endroit où il avait accompli la seule
condition ^*on exigeait désormais de lui : la rime parut ;
elle fut, dit M. Sainte-Beuve, placés au lieu qu'elle oc-
cuije, comme un coup de cloche pour avertir qu'un vers
était fini et qu'un autre allait commencer. Le plus ancien
chant latin rimé est peut-être la chanson de Clotaire II,
antérieure à l'an 6So. Dans les hymnes et les proses
d'église, l'ignorance ou la simplicité abandonna comme
profanes les rhythmes de l'ancienne poésie latine, et les
remplaça aussi par la rime : les stancps de ces chants
sacrés ont été composées de vers syllabiques rimant
entre eux; le Veni, sancte Spiritus du roi Robert, le
Lauda Sion de S' Thomas d'Aquin, le Dies irœ, le Stabat
mater, etc., en sont des exemples. Rien n'est donc moins
fondé que l'opinion qui attribue l'invention de la rime
aux Arabes, qui l'auraient communiquée à nos Trouba-
dours du moyen &ge.
Une fois ce nouvel élément adopté dans la versification,
on en exagéra l'importance : la nme devint pour le poète
et ftireur et fatigue. Ce fut surtout au xv* siècle qu'on
poussa Jusqu'à ses dernières limites la recherche des
difficultés en ce genre. Ainsi, on appela rime annexée^
concaténée ou enchainée, une sorte d'anadiplose ( V. ce
mot) consistant à commencer un vers par la dernière
syllabe du vers précédent, ou par une partie considérable
du dernier mot, ou par ce mot tout entier. Ainsi s
Dien gard* ma maîtresse et régente,
Gmte de oorps et de façon;
Son cœur tient le mien dans sa tente.
Tant et plus d'un ardent Arisson.
Les vers dont la fin rimait avec le repos du vers suivan
formaient une rime bàtelée :
Quand Neptnnns, pnlssant dlen de la mer.
Cessa d'aniwr caraqaes et galées.
Les Gallicans bien le durent aimer,
Kt réclama* ses grands ondes salées.
Cl. Marot.
Les rimes brisées consistaient à construire des vers dont
les repos rimaient entre eux, de façon qu'en les brisant
on fit d'autres vers : Octavien de Saint-Gelais s'est beau-
coup exercé en ce genre.
Voici un exemple tiré de ses œuvres :
De cœur par/ail, chassez toute douleur;
Soyes Boignfvx; n'uses de nulle feinte;
Sans Tllaln faH entretenes douceur ;
Vaillant et prAis, abandonnes la feinte.
La rime était couronnée, quand elle se présentait deux
fois à la fin de chaque vers :
Ma blanche Colombelle, belle,
SouTont Je Tais priant, cridni;
Mais dessous la eordelle d'elle
Me Jette un ccsur triant, riant.
Cl. Marot.
La rime empérière était celle qui au bout du vers frap-
pait l'oreille jusqu'à trois fois :
Bénins lecteurs, trës-dili(^efM gewt, gens.
Prenez en gré mes impar/ojd faits faits.
Dans les rimes équivoques, les dernières syllables de
chaque vers étaient reprises en un autre sens dans le
vers suivant :
En m'ébattant. Je Ikis rondeaux en Hmt,
Et en rimant bien souvent Je m'enrime.
Bref, c'est pitié entre nous rimaiUevr»,
Car TOUS trouTcz assez de Hme ailleun.
Et quand tous plait, mieux que moi rimassn.
Des biens avez et de la rbne assez.
Cl. Ml rot.
99
RIQ
1S70
ROB
On tombait dans Tineptie, et une réaction était inévi-
table : mais, au lieu de ise borner à corriger les abus de
la rime, on essaya de la supprimer, et de revenir à la
prosodie ancienne basée sur la quantité. De là les nom-
breux essais de vers métriques qui furent faits au
xvi« siècle (V. Vers). Notre langue, notre accentuation ne
s*y prêtaient guère; le principe de la rime prévalut. Sans
avoir autant de charme que la mesure des Anciens, elle
plaît à Toreille, soulage la mémoire, et impose à l'esprit
du podte certaines entraves d*où il peut, s*il en triomphe,
tirer de véritables beautés. V, Poésie. B.
RIMINI (Arc de), arc honoriûre romain, dédié à Tem-
pereur Auguste à l'occasion du rétablissement de la voie
Flamioienne depuis Rimini Jusqu'à Rome. Il est construit
en pierre blanche d'Istrie, et percé d'une seule arcade.
Le fronton est porté par deux colonnes corinthiennes à
demi engagées. Entre l'arcade et les demi-colonnes sont
des médaillons contenant les bustes en demi-relief de Ju-
piter, de Véous, de Neptune et de Minerve, sculptures
d'un très-beau caractère. V. Briganti, lUtutrazione delV
areo di AitgusU)^ Rimini, 1825, in-fol.
RINCEAU, en termes de Beaux-Arts, branche d'orne-
ment prenant naissance d'un culot, et formée de feuilles
naturelles ou ' imaginaires, de fleurons, graines , bou-
tons, etc. On en décore les frises, les gorges, les ruden-
tures, les champs des pilastres et des panneaux, quelque-
fois les fûts de colonnes, les vases, les candélabres, etc.
RIOT-ACT. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
RIPIËNO , mot italien qui signifie remplissage. En
Musique, les ripieni sont les parties de chœur ou d'or-
chestre qui ne se chantent ou ne se Jouent que dans les
ensembles, et qui se taisent pendant les solos.
RIPU AIRES (Lois des Francs). On en attribue la ré-
daction à Tbéodoric ou Thierry I", fils de Clovis et roi
d'Ostrasie, mais la forme sous laquelle cette loi nous est
parvenue ne parait p^ remonter plus haut que Dago-
nert. La loi ripuaire contient 80 ou 01 titres et 224 ou
277 articles (selon les distributions diverses); il y a 164 ar-
ticles de Droit pénal, 113 de Droit politique ou civil, de
Procédure civile ou criminelle. C'est donc une législation
essentiellement pénale, comme la loi Salique; toutefois,
le Droit civil y tient plus de place. Le combat judiciaire
est plus souvent mentionné et mieux réglé que dans la
loi Salique, comme si la loi devenait plus puissante que
la vengeance personnelle; le roi apparaît comme posses-
seur de plus vastes domaines et d'une plus grande auto-
rité. L'Eglise est assimilée au roi, et les mômes privilèges
sont accordés à ses terres. Divers emprunts ont été faits
aux lois romaines, particulièrement pour l'affranchisse-
ment des esclaves. V. Weber, De legihits Salicà et Ri-
puarià, Heidelberg, 1821 ; Rogge, De peculiari legis Ri-
puariœ cum Salicà. Kœnigsberg, 1823; Davoud-Oghlou,
Histoire de la législation des anciens Germains, Berlin,
4845, 2 vol. in-8». B.
RIQUIER (Église de Saint-), à 10 kilomèt. d'Abbeville.
Commencée dans les dernières années du xv* siècle,
cette église, autrefois abbatiale, est un des derniers mo-
numents que l'on a élevés dans le style ogival. La fa-
çade, à laquelle on monte par un perron de cinq marches,
a 28 met. de largeur, et présente trois portes pratiquées
sous de profondes voussures. La porte centrale, séparée
des autres par deux tourelles octogones qui montent Jus-
qu'au sommet de la façade, est flanquée des statues de
Louis XII et de François I*', et de deux autres qu'on
eroit représenter S^ Benoit et S^ Maur ; dans les ban-
deaux des voussures, on a figuré les principaux traits de
la vie de S' Riquier et de celle de S^ Angilbert, abbés du
monastère; un arbre de Jessé occupe le tympan. Dans le
fronton qui surmonte la porte, il y a un groupe de la
S^* Trinité, et, de chaque côté de ce fronton, sur le mur
de face, sont pratiquées des niches qui contiennent les
ètatnes colossales des Apôtres. Un fronton triangulaire
qui les surmonte renferme les statues de la S^* Vierge,
de Dieu le Père et de J&us-Christ, et, un peu en re-
traite, s'élève, à une hauteur de 50 met., une tour carrée,
percée de deux baies sur chacune de ses faces, et ter-
minée par une balustrade à Jour. Les portes qui donnent
entrée dans les bas côtés sont disposées en arrière-
corps : celle de droite est décorée des statues de S^*
Marie-Madeleine et de S** Catherine, et, dans les vous-
sures, on reconnaît quelques traits de la vie de S' Joachim,
de S** Anne et de la S^* Vierge; celle de gauche présente
les statues de S^ Antoine et de S* Roch, et les princi-
paux traits de la vie de ces saints. Dans tout le pourtour
éê régli09. tes murs sont lisses et sans ornements ; mais
les contre-forts et leur double rang d'ârcs-boutants don-
nent à l'ensemble une certaine légèreté. A rintersection
des transepts s'élevait autrefois un beau clocher en char-
fente, couvert en plomb; à la suite d'un ouragan, en
800, il fut abattu. L'intérieur de l'église de S'-Riquier,
en forme de croix latine, se distingue par une noble
simplicité, par la justesse et l'accord des proportions : il
a 104 met. de longueur, 27 met. de largeur et autant de
hauteur. Au-dessus des arcades régnent des tribuns
bordées de balustrades à jour, et 10 grandes fenêtres,
aujourd'hui privées de vitraux peints, éclairent tout l'édi-
fice. Autour du chœur on compte onze chapelles : l'une
d'elles, celle de la S^**Vierge, offre un assez grand déve-
loppement; on remarque dans son axe une déviation
avec l'axe du chœur. La menuiserie des stalles du chœur
est d'un beau travail. Le pourtour du sanctuaire a été
défiguré par un corps d'architecture d'ordre ionique : au-
dessus du maître-autel se trouve un très-beau Christ en
bois, œuvre de Girardon. A droite du chœur, au-dessus
de la partie d'un ancien cloître qui sert de sacristie, est
une pièce voûtée en ogive et qu'on appelle la Trésorerie :
on y conservait anciennement les châsses, les reliquaires
et les vases sacrés; ce qu'elle offre de plus intéressant,
ce sont des fresques qui représentent la translation des
restes de S^ Riquier, et quelques scènes de la Danso ma-
cabre, y. Gilbert, Description historique de l'ancienne
abbaye de S^-Riquim', Amiens, 1836, in-8®.
RIS, en termes de Marine, partie des voiles destinée à
être repliée quand le vent est trop fort A cet effet, on y
pratique en ligne horizontale un rang d'œillets, dans
lesquels on passe des garoettes ou cordes longues de
2'",30 à 3'",^0, pendant par moitié* de chaque coté des
voiles, et servant à les lier sur les vergues. Les basses
voiles n'ont qu'un ris, les huniers en ont trois ou quatre,
espacés de 2 met. à 2*,60. Prendre un ris, c'est raccourcir
la voile dans le sens de sa hauteur; être au bas m, c'est
avoir tous les ris pris; larguer les m, c'est détacher les
garcettes qui tiennent la voile repliée sur la vergue, lors-
que le vent devient plus modéré.
RISDALE. V. RixDALB, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire.
RISQUE (de l'espagnol risco)^ chance que l'on court
d'une perte ou d'un dommage. Prendre une affaire à ses
risques et périls, c'est s'exposer sciemment à tout œ, qui
{>eut en résulter. Les risques loceUifs sont les faits dont
a responsabilité incombe aux locataires vis-à-vis do
propriétaire; tel est, par exemple, l'incendie : les com-
pagnies d'assurances les garantissent à cet égard, moyen-
nant une prime annuelle. On nomme risques de mer les
chances i^ultant pour l'assureur d'un contrat d'assu-
rance maritime.
RISTOURNE, en matière d'assurances maritimes, se
dit de la dissolution d'un contrat à la grosse, soit pour
défaut ou insuffisance d'objets exposés aux risques, soit
pour fraude de la part de l'emprunteur.
RIT ou RITE (du latin ritus)^ manière ou ordre sui-
vant lequel doivent se pratiquer les cérémonies du culte.
Les rites diffèrent selon les religions, et il peut y avoir
aussi différents rites dans une même religion : par exem-
ple, dans la religion catholique, on distingue les rits
ambrosien, grégorien^ romain, mozarabe, etc. Il y a, à
Rome, une Congrégation des rits, chargée de fixer les
cérémonies; elle a été instituée par le pape Sixte-Quint.
RITOURNELLE (de l'italien ritoriMilo, diminutif de ri-
tomo, retour), nom donné primitivement, en Musique, à
toute phrase (l'accompagnement qui répétait une phrase de
chant, soit comme prélude en tête d'un air, soit au mi-
lieu, pour donner au chanteur un temps de repos, soit à
la fin comme conclusion. La ritournelle a pris ensuite
plus d'importance, et est devenue un trait de symphonie
plus développé. Elle a surtout son emploi dans la mu-
sique dramatique ; elle annonce le sentiment que le per-
sonnage va exprimer, et permet les jeux de scène. —
Dans la poésie italienne, on nomme ritournelles de petits
chants populaires, d'un caractère simple et mélanooliquer
et d'un rhythme arbitraire. B.
RITUEL, livre contenant les rites qu'on doit observer
dans les cérémonies relideuses.
RIXDALE, monnaie. V. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d^ Histoire.
ROB. V. Whist.
ROBE, vêtement ordinaire des femmes. Choi les An-
ciens, une sorte de robe fut amsi la partie principale du
costume civil des hommes ; tels étaient, chez les Romains,
les vêtements appelés toge, prétexte, trabée. Nous don-
nons encore le nom de roibe au costume des magistrilii
ROB
1571
l\OB
des avocats, des professeurs, dans l'exercice de leurs
fonctions. Par extension, le mot robe a désigné la pro-
fession de la judicature, comme quand on dit les gens de
robe, la noblesse de robe. Autrefois les magistrats et les
membres du clergé étaient dits gens de robe longue, et
ceux qui portaient Tépée gens de robe courte.
ROBERT LE DIABLE, poémo d*ayentures du xiii« siè-
cle. Une duchesse de Normandie ne pouvait avoir d'en-
fants : après avoir vainement invoqué Dieu, la Vierge et
les saints, elle s'adresse au diable, et devient mère; mais
son fils porte la peine de son origine infernale. Impie,
déloyal, féroce, il commet tant de crimes, qu'il inspire
à tout le monde une profonde horreur. L'isolement où on
le laisse le fait réfléchir à son passé; il se repent avec la
même ardeur qu'il avait fait le mal, se rend à Rome, et
se soumet à une rude pénitence qui lui est imposée par
un saint ermite. Bientôt la ville est assiégée par les
païens. Un messager céleste apporte des armes à Robert,
aai sauve plusieurs fois Rome et l'Empire. Biais, humble
dans le succès, il ne se fait pas connaître, et, quand
enfin il est convaincu, il refuse la main de la fille de
l'empereur, qui lui est offerte pour prix de ses services.
Les barons normands qui viennent le supplier de régner
sur eux ne sont pas mieux accueillis : Robert demeure
dans son ermitage, et y meurt en odeur de sainteté. — Ce
roman existe à la Bibliothèque nationale de Paris dans
an manuscrit du xrii* siècle; il a été publié par Trébu-
tien, Paris, 1837. Dès 1496, on imprima à Paris la Vie
du terrible Robert le Diable, lequel fut après l'hon^nù de
Dieu : c'est de là que fut tiré un vaudeville de Robert le
Diable, joué en i813, et Topera de même nom, écrit par
Heyerb^r sur des paroles de Scribe et de Germond De-
lavigne, et représenté en 1831. Un Miracle de Nostre
Dame de Robert le Dyable a paru à Rouen en 1836 : les
éditeurs supposent que Robert le Diable n'est autre que
Robert Courte-Heuse, fils de Guillaume le Conquérant.
Mais on considère généralement Robert le Diable comme
le type idéal de ces seigneurs grossiers et violents qui,
après une vie de débauches et de rapines, allaient cher-
cher dans les cloîtres l'oubli et le pardon de leurs crimes.
La légende de Robert le Diable existe en prose dans les
Chroniques de Normandie, œuvre du xiii* siècle. Elle a
été reproduite en anglais et en espagnol; enfin clic a
inspiré à Manzoni un épisode de son roman des Fian-
cés, V, V Histoire littéraire de la France, t. XXII. H. D.
ROBIN, expression de dédain par laquelle les grands
seigneurs et les gens d'épée désignaient autrefois les
hommes de robe, c-à-d. les magistrats et le barreau.
ROBIN ET BIARION (Le Jeu de), pièce pastorale du
poète d'Arras , Adam de La Halle. On j voit figurer dix
personnages, Robin, Marion, un chevalier, six bergers et
une bergère. Le chevalier rencontre Marion et cherche à
la séduire; mais il perd son temps et ses paroles, et se
retire fort peu satisfait. Arrive Robin, k i^ui son amie ap-
prend tout : le pauvre berger, craignant le retour de son
rival, court appeler d'autres bergers qui s'arment de
b&tons. Cependant le chevalier revient, insulte Robin, et
emmène de force Marion, que son amoureux n'ose dé-
fendre; elle se délivre enfin elle-même de l'importun che-
valier, et, après divers jeux et divertissements, la pièce se
termine par le mariage de Robin avec Marion. — Ce Jeu
ne fut pas représenté du vivant de l'auteur; il parait,
d'après le prologue dont il est précédé , qu'il fut donné
sur la scène pour honorer sa mémoire. Il a été publié
par Moomerqué dans son Théâtre français au moyen âge,
et par Renouard, Fabliauxet Contes, Paris, 1829. V. V His-
toire littéraire de la France^ t. XX. H. D.
ROBIN HOOD ou ROBIN DES BOIS (Ballades de),
groupe de chants populaires de la Grande-Bretagne, com-
posés sur Robin Hood, chef d'Outlaws ( V. ce mot dans
notre Dictionnaire de Biographie et d^Histoire). Les
Bardes ont personnifié, sous le nom de ce chef de oande,
toutes les antipathies des Anglo-Saxons contre les Nor-
mands, leurs vainqueurs : toutefois, Robin Hood n'est
pas un personnage imaginaire. Né, d'après la tradition,
en li60, il était comte de Huntingdon : après avoir perdu
son patrimoine par ses prodigalités et par l'injustice d'un
shérif et d*un abbé, il voua une haine implacable à la
noblesse normande et au clergé, recruta quelques aven-
turiers avec lesquels il vécut au milieu de la forêt de
Sherwood, et.se donna la mission de redresser les torts,
et de venger la servitude populaire. Quelques critiques
ont fait de lui un soldat de Simon de Montfort révolté
contre Henri III; d*autres ont nié son existence. Son ha-
bileté k tirer de l'arc fut proverbiale, et les corporations
4'archert en Angleterre Instituèrent plus tard des Jeux et
des fêtes en son honneur. Aujourd'hui encore on montre
des pierres où il s'est assis, des citernes où il a bu. Son
cor n'était pas moins célèbre que celui de Roland en
France; on conserva son arc et une de ses (lèches à
Fountains-Abbey jusqu'à la fin du xvm" siècle, et sa
tombe est dans le cinictiùru Je Hathersage. Les noms de
ses lieutenants vivent aussi dans la mémoire du peuple :
on remarque surtout Arthur, tanneur de Nottingham, et
Petit-Jean {Little John). Les ballades de Robin Hood, en
grande faveur au xvi* siècie, dédaignées depuis le xvii*^,
attirèrent de nouveau l'attention quand Joseph Ritson
en eut publié la plus graqde partie en 1795, avec une
sorte d'épopée qui a pour titre Lytile Geste, et dont le
franc archer est aussi le héros. V, Aug. Thierry, Histoire
de la conquête de l'Angleterre par les Normands; Barry,
Sur le cycle de Robin Hood, thèse, Paris, 1832; Mathcw
Gutch, The Robin Hood garlands and ballads, wUh the
taie ofthe Lyttle Geste, Londres, 2 vol., 1850 ; J. Huntcr,
The great hero of the ancient^ minstrelsy of England,
Robin Hood^ ibid., 1852; L. Etienne, Les ballades du
cycle de Robin Hood, dans la Revue des Deux Mondes,
1" octobre 185t.
L'Allemagne possède aussi son Robin des Bois : mais
celui-ci n'est plus un chef de proscrits, un brigand ver-
tueux; ce n'est autre chose que le génie du mal, venu sur
la terre pour y faire des victimes. Un des mille moyens
employés par ce génie malfaisant a fourni à Weber le
sujet de son opéra de Freyschutz ou Robin des Dois.
ROBINSON CRUSOÉ (La Vie et les Aventures do) ,
célèbre roman anglais, publié par Daniel de Foë en 1710.
Le succès en fut tel, que l'auteur publia une suite, puis
une 3* partie toute morale, qui ne réussit point. On ne
saurait dire si De Foë eut autre chose en vue que de faire
un livre amusant. En voyant son héros se reprocher sans
cesse de n'avoir pas écouté les remontrances de son père,
déplorer les dangers et les malheurs qui le frappent
comme le juste châtiment de sa désobéissance, reporter
douloureusement sa pensée vers les biens dont Ta privé
sa funeste passion pour les voyages, on pourrait croire
qu'il a voulu inspirer à ses concitoyens l'aversion des
courses maritimes, et que la moralité de son livre est
qu'il y a folie à courir les aventures , quand on est à peu
près assuré de vivre sur terre. Ce serait un but assez
étrange chez un Anglais, jaloux de la gloire et de la pros-
périté de son pays. On peut supposer que, tout en do'n-
^nant à Robinson un sentiment vif et profond de ses peines
*au moment où il les éprouve, et en même temps une
passion irrésistible qui Tentraine toujours à de nouveaux
voyages. De Foô a voulu faire connaître aux Jeunes ma-
rins que leur profession a des charmes qui surpassent
tous les maux auxquels ils peuvent être exposés : il aurait
ainsi servi les intérêts de sa patrie avec une étonnante
adresse, puisçiu'il aurait tendu et serait arrivé à ce but
par des chemins dont la direction y semble opposée. Ce
qui est certain, c'est que le Robinson Crusoé a toujours
eu de nombreux et avides lecteurs dans la marine an-
glaise : le matelot prend un grand plaisir à tous les expé-
dients que Robinson imagine pour se nourrir, se loger
et se vêtir "VUr une terre abandonnée; il compte bien
les mettre en usage et en inventer de meilleurs encore,
si la tempête le Jette seul aussi sur quelque plage déserte;
les ressources que Robinson fournit d'avance à son esprit
pour se tirer d'une position critique sont plus propres à
lui déguiser les dangers de sa profession , que ses do-
léances ne sont capables de lui en inspirer le dégoût, et
il doit lui sembler qu'en pareil cas il prendrait mieux
son mal en patience, qu'il ne s'abandonnerait ni aux
mêmes plaintes, ni aux mêmes terreurs. Sans avoir au-
tant de popularité qu*en Angleterre, Robinson Crusoé a
obtenu dans tous les pays de l'Europe un grand et dura-
ble succès. C'est partout le livre de l'enfance et de la pre-
mière jeunesse, qu'il charme par l'intérêt des situations
et le merveilleux des accidents, et qu'il captive en leur
donnant des notions légères , mais assez fidèles , sur les
arts mécaniques, la navigation, le commerce, les climats,
les races d'hommes et d'animaux , les productions natu-
relles, les institutions sociales, etc. J.-J. Rousseau, qui
y trouvait beaucoup d'analogies avec le système d'éduca-
tion naturelle qu*il préconisa dans VÊmile, en faisait une
estime toute particulière. Pour les esprits les plus élevés
et les plus difiiciles , Robinson Crusoé se recommande
par la naïveté des récits, des réflexions et du style : de
tous les voyages imaginaires « e'est celui qui porte au
Elus haut de^ d'illusion le caractère de la vraisem-
lance. Aussi fut-on longtemps persuadé que De Foô avait
fait une relation d'aventurei véritables, et qu'il avait pu-
ROC
1572
ROD
Mié, en changeant seulement les noms et les dates, le
Journal d*iui matelot écossais, Alexandre Selkirk, aban-
donné de 17ai à 1709 dans IMle Jaan-Fernandez. Toute-
fois, rintérêt du roman faiblit lorsque Robinson n*est
plus seul , lorsque Vendredi , puis deux autres person-
nages, viennent partager son sort et Taider de leur indus-
trie. L*ouvrage devrait finir, quand un vaisseau le tire de
son Ile : tout ce qui sait est vulgaire et presque ennuyeux.
LeA lecteurs qui ne sont pas Anglais , et qui n'ont point
pour les discussions religieuses le coût que TAngleterre
avait pour elles au temps de Daniel De Fo6, peuvent
encore bl&iner les fréquentes et longues dissertations
théologiques de Robinson , là oCi il s*agit de l'éducation
chrétienne de Vendredi et de la conversion de Guillaume
Atkins. — On a fait beaucoup d'imitations de Robinson
Crusoé : la meilleure est le Jeune Robinson^ par Campe,
Hambourg, 1780, 3 vol. in-12. B.
ROBOTJBS (du slave robota, travail) , nom qu'on donne
aux corvées dans les pa^s slaves.
ROCAILLE, composition d'architecture rustique qui
imite les rocailles naturelles, et qui représente des grottes,
des fontaines, etc., à l'aide de pierres irrégulières et
brutes. Il y a une salle en rocaille an ch&teau de Ram-
bouillet, lii grande cascade du bois de Boulogne, à Paris,
est en rocaille. — On a aussi donné le nom de Rocailles
à de petits meubles du temps de Louis XV, tels que pen-
dules, vases, flambeaux, dont Textérieur imite des rochers
ou des amas do coquillages.
ROCAMBEAU, cercle en fer qui embrasse librement
un mStt; on y fixe une voile par son point d*amure ou de
drisse, et cette voile est par là susceptible d'être amurée
ou hiuée à divers points de ce màt. Le rocambeau sert
principalement à l'installation des focs.
ROCAN'flN , nom donné Jadis : 1^ aux vieux militaires
qu'on appelait aussi mortes-payes, et qui étaient prépo-
sés à la garde des rocs, des lieux fortifiés; ^^ à une
chanson composée de fragments de plusieurs autres , en
guise de centon.
ROCU (Église de S*-)t à Paris. Cet édifice, un des plus
ornés de la ville, mais aussi un des plus répréhensibles
au point de vue du goût et de la pureté, est en style mo-
derne. Lemerder le commença en 1632, mais il ne fut
achevé qu'au siècle suivant. Robert de Cotte en dessina
le portail , qui s'élève au-dessus d'un assez grand nom-
bre de marches. Imitation assez médiocre du style de
Mansard, ce portail se compose de deux ordres, dorique et^
corinthien , superposés et surmontés d'un fronton ; sa'
largeur est de 28 met., son élévation de 26. La disposi-
tion inténeure de l'église S'-Roch est fort singulière :
au delà de la nef et du chœur, l'œil aperçoit trois cha-
pelles qui se suivent dans l'alignement du portail ; la
l'* est celle de la S^*-Vierge, dont la coupole, peinte par
Pierre, représente V Assomption, et où 1 autel offre une
Annonciation exécutée sur les dessins de Falconnet; la
2*, autour de laquelle tournent les bas côtés de la nef,
est celle de la Communion, dont l'autel est surmonté d*un
groupe sculpté par Slodtz ; la 3*, dite du Calvaire, est une
espèce de rotonde coupée, ajoutée depuis à l'église, et dont
la décoration, composée par Falconnet, a été sculptée
par Michel Anguier. Ces trois chapelles sont éclairées par
une lumière difiérente et dégradée à dessein, et l'on a
Ainsi obtenu un effet presoue théâtral. Les diverses cha-
]>elles ont été ornées de taoleaux et de statues, dont plu-
sieurs ne sont pas sans mérite : on peut citer le Triomphe
de Mardochée par Jouvenet, la Guérison du mal des
ardents par Doyen, un Jésus de Vien, le Vceu à la Madone
par Schnetz , les statues de 8* Joachim et de S^* Aune
par Lemoine, de S^ Augustin et de S^ François de Sales
par Pajou , du cardinal Dubois par Coustou, un Jésus
dans la crèche sculpté par François Anguier, le buste de
Le Nôtre par Coysevox , le monument du comte d'Har-
court par Falconnet , celui de l'abbé de l'Épée par Lassus
et Préault. Au nombre des personnages illustres qui ont
été enterrés dans l'éelise S^-Roch, figurent M"** Desliou-
lières, P. Corneille, Te président Hénault, les frè««s An-
guier, Pontchartrain, Mably, Maupertuis. La chaire, qui
passe pour une des plus belles de Paris , est surchargée
d'ornements que Charles dessina, et qui ont été depuis
restaurés par Laperche; les Vertus théologales qui la sou-
tiennent manquent de grâce et de légèreté. B.
R0CHE3TER ( Cathédrale de ) , un des plus beaux mo-
numents de l'architecture romano-byzantine en Angle-
terre, commencé par Gondulfe, ancien moine de l'abbaye
du Bec en Normandie, qui fut nommé évoque en 1077.
La dédicace eut Heu en 1 130. Cette église est b&tie sur le
ptiùi baailical| avec transept : une tour massive s*élèvc
au point d'intersection de la nef et du transept. La (hçade
occidentale est construite avec beaucoup d'habileté : la
porte est formée par une très-belle arcade en retraite,
dont les moulures sont couvertes d'arabesques, de feuil-
lages, de médaillons, et de tètes d'animaux, et qui est
supportée par quatre piliers annclés; deux de ces pilien
sont en forme de caryatides, et-pr^ntent les statues du
roi Henri I*' et de la reine Mathilde ; le linteau de la
porte offre la figure des douze Apôtres, et, sur le tympan,
on voit le Sauveur accompagné des symboles des quatre
Évangélistes. Les arcs de la nef, semi-circulaires, ornés de
zigzags, et entourés d'une archivolte couverte de pointes
de diamant, reposent sur des piliers carrés, garnis de
colon nettes sur leurs faces antérieure et postérieure. Le
triforium est composé d'un grand arc, semblable à celui
du premier étage, et encadrant deux arcs moindres, ap-
puyés sur une colonnette; au-dessus de ces deux arcs
est une ouverture en œil-de-bœuf. Les fenêtres sont éiOL-
lement à plein cintre, et la voûte est en bois. Une vaste
crypte s'étend sous une partie du chœur et sous le
transept; on y trouve encore des traces de peintures à
fresque. B.
ROCHET (de l'allemand rock, vêtement, robe), sorte
d'aube courte, garnie de broderies et de dentelles, que
portent les évoques, les abbés et les chanoines. Dans cer-
tains diocèses, les prêtres et môme tous les gens de chœur
portent des rochets dépourvus d'ornements. Le rochct a
des manches et des poignets, ce qui le distingue du sur-
plis (V. ce mot). — On donne aussi le nom de rocket ao
mantelet de cérémonie des Pairs d'Angleterre : le rochet
des vicomtes a deux bordures et demie, celui des comtes
en a trois.
ROCHKTTE. V. Fosée.
ROCOCO ( Style }, nom qu'on donne à un certain style
d'architecture et d'ornementation du xviii* siècle, lequel
emploie les façades hérissées de lignes courbes, les fron-
tons recourbés et brisés, les encadrements tout à fait
arbitraires des portes et des fenêtres, les rocailles, les
guirlandes de fleurs bizarrement entrelacées, et toutes
sortes de formes tourmentées pour les tables, fauteuils,
sofas, candélabres, etc. Tous les moyens de l'art y sont
mis en œuvre mal à propos et uniquement en vue de
l'effet. Le rococo fit place, vers la fin du siècle, à un nou-
veau style classique, qui mit à la mode tout ce qui était
à la grecque.
RODAGE , droit féodal. V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d*Histoire,
RODEZ (Église Notre-Davb, à). Cette église catlié-
dralo, élevée sur l'emplacement d'un autre édifice qui
s'écroula en 1275, est en une sorte de grès rougeàtre. Elle
fut construite avec beaucoup de lenteur : les chapelles
absidales et les premières travées du chœur appartien-
nent au XIV* siècle; pendant le xv*, le chœur fut terminé
et orné de stalles, on éleva le transept, la nef et la tour;
enfin, au xvi*, un secrétaire du cardinal d'Armagnac,
Philandrier, qui avait étudié l'architecture dans Vitnive
et visité les œuvres de la Renaissance en Italie, exécuta
le portail à fronton, et Bachelier éleva, dans le même
style déplacé, la lourde tribune qui occupe le fond de la
nef et se prolonge en partie sur les bas côtés. L'exté-
rieur de la cathédrale de Rodez n'offre pas ces merveilles
de sculpture au'on trouve dans les monuments gothiques
de la même époque ; tout y est nu et sévère. La seule
partie remarquable est la tour, achevée en 1501 ; elle
est carrée jusqu'au milieu de sa hauteur, puis formée
d'un corps octogonal, que flanquent quatre tourelles
posées sur les angles de sa base, et portant chacune ia
statue d'un Évangéliste. Elle se termine par une plauv
forme, au milieu do laquelle est une coupole qui contient
le timbre de l'horloge et qui porte une sratue colossale
de la Vierge. L'élévation de ce clochei «t de 80 met.
L'église n'a que des entrées latérales, et, à l'endroit où
se trouve d'ordinaire la principale en rée, en face du
chœur, on voit un grand autol appuyé contre la muraille.
La disposition intérieure de l'édifice présente la forme
d'une croix latine, avec collatéraux et chapelles acces-
soires : la longueur est de 97'°,45{ la plus grande lar-
geur, prise dans la croisée, de 36"; la hauteor sons
voûte, de 33"'. Les chapelles, au nombre de 27, n'ont
pas toutes le même plan : celles qui accompagnent la
nef, et les deux premières au delà du transept, son!
élevées sur un plan carré, tandis que celles qui rayon-
nent autour dn sanctuaire sont hexagonales. La chapelle
du S^-Sépulcre est remarquable par la voûte plate qui
lui sert de plafond. La construction manque générale-
ment d'élégance et de gr&ce : les pilien ne sont omto
ROL
1573
ROL
ipie de simples nervures prismatiques ; les galeries sont
lourde» ^ obscures ; de grêles colonnettes, contournées
à ^eul parUe supérieure en cœurs, on flammes ou en
figures fantastiques, partagent les feiiôtres en plusieurs
compartiments. Le chœur seul est bâti dans des propor-
tions harmonieuses et avec toute la perfection désirable.
Le jubé, quoique mutilé, est une œuvre précieuse. Les
boiseries du chœur sont un des plus curieux monuments
de la sculpture à la fin du xv® siècle : c*est un ensemble
de dais très-riches, reliés aux stalles par un panneau
rempli d*arcades simulées, d*ogives, d'arcs trilobés et
de quatre-feuilles; de chaque côté des stalles s*élèvent
des colonnettes qui, partant d'une base commune, vont
se réunir au dais supérieur. Le *trône épiscopal est plus
beau encore : la stalle est formée de trois panneaux,
dont les deux latéraux sont découpés à jour; le recou-
vrement supérieur projette un magnifique pendentif, et
est surmonté d'une sorte de pyramide flanquée de clo-
chetons à ses angles. V. Tabbé Magne, Notice archéolo-
gique stur la cathédrale de Bodez, B.
BOE , vieux mot qui désignait un pupitre disposé en
forme de roite tournante, soit horizontalement sur un
pivot perpendiculaire au centre, soit verticalement sur
un axe horizontal, de manière à maintenir la même in-
clinaison à tous les volumes au*ii soutenait. On l'appli-
quait aussi aux couronnes de lumière {V. ce mot).
ROG, instrument de musique. V. Russe (Art).
ROGATEURS. I V. ces mots dans notre Dictionnaire
ROGATION. ( de Biographie et d'Histoire.
ROGATOIRE (Commission). V. Commission.
ROI, souverain d'un État ({ui porte le titre de royaume
{V. RoYADTâ). — Le mot roi a été employé dans d'autres
acceptions que celle-là. Ainsi, il y avait, dans Tancienne
Athènes, un archonte-roi, chargé de présider à tous les
sacrifices. Certaines corporations du moyen &ge donnè-
rent à leurs chefs le nom de roi (F. Basochk, Ribadds,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire, eU
dans le présent ouvrage, les art. MEnciKns, MéNéTRiERs).
BOi d'armes. ) V. ces mots dans notre Diction-
Hoi DES FESTINS. [ luzirtf de Biographie et d^His-
noi DES SACRIFICES. } toire.
ROIS ( FOte des), j V. ces mots dans notre Dictionnaire
ROIS (Livres des). ) de Biographie et d'Histoire.
ROJOK, instrument de musique. V. Russe (Art).
ROLAND (La Chanson de) ou Chanson de Boncevaux,
la plus ancienne et la meilleure de nos Chansons de
gestes, appartenant au cycle carlovingien. Le héros en
est Roland, comte des Marches de Bretagne, et neveu de
Charlemagne. Cette Chanson, sous la forme que nous
connaissons, remonte au xii* siècle, et on y trouve le
nom de son auteur, Turold ou Théroulde , sur lequel il
n^exiftto aucun renseignement. Mais, d'après le témoi-
gpage même de Turold, il a puisé dans des œuvres anté-
rieures, dans les Gesta Francorum , dans le- livre d'un
certain Gilie, qui est demeuré complètement inconnu
pour nous. Si, d'ailleurs, on se rappelle que Taillefer
entonna la Chanson de Roland avant la bataille d'Has-
tings, en 1066, il devient évident qu'il y eut de cette
Chanson un thème primitif, que Turold aura sans doute
recueilli avec les changements et les amplifications que
la tradition devait y apporter sans cesse. Le fonds de son
œuvre est assurément plus ancien que celui de la Chro-
nique de Turpin {V. ce mot). Voici la fable développée
par Turold :
Marsile, roi musulman de Saragosse, instruit que
Charlemagne venait attaquer ses États, lui députe Blan-
candrin, l'un de ses preux et conseillers, dans l'espoir
que des présents et une promesse de se convertir arrê-
teront l'invasion. L'empereur assemble ses ban^ns, et ne
paraît pas éloigné d'accepter les propositions de Marsile;
Roland, qui en suspecte la véracité, demande à se rendre
auprès du chef sarrasin ; mais c'est Ganelon , son en-
nemi, qui est chargé de cette mission. Celui-ci, entraîné
par la naine qu'il porte à Roland, s'entend avec les Mu-
sulmans pour le perdre, et, à son retour de Saragosse ,
persuade à Charlemagne que Marsile va se rendre à Aix-
la-Chapelle pour recevoir le baptême. La retraite est ré-
solue, et, par l'influence funeste de Ganelon, le com-
mandement de l'arrière - garde est donné à Roland,
qu'accompagneront les autres Pairs de France. Le gros
de l'armée est déjà loin, quand une armée considérable
de Musulmans fond sur les Français dans la vallée de
Roncevaux. Roland, Olivier, l'archevêque Turpin et les
autres paladins font des prodiges de valeur; mais le
nombre l'emporte, et, après cina chocs furieux des deux
parais, il ne reste plus que 60 chevaliers chrétiens. Ro-
land, couvert de blessures, sonne de son cor Olifan pour
appeler du secours : Charlemagne, toujours trompé par
Ganelon, ne tient pas compte de cet appel, «t continue
sa route; mais le corse fait entendre de nouveau; l'em-
pereur, désabusé par le duc Naisme, fait arrêter le
traître, et revient sur ses pas. Il arrive trop tard, et ne
trouve que des morts : pour les venger, il se met à la
poursuite des ennemis, et ce n'est qu*après les avoir
taillés en pièces, qu'il recueille les corps des paladins.
Au moment où il va rentrer en France, l'amiral Bali-
gant, venu de la Babylonie sur la nouvelle de la défaite
de Marsile, lui offre une seconde bataille : il est vaincu
et tué. Les mosquées de Saragosse sont détruites ; plus
de cent mille habitants sont faits chrétiens. Charlemagne
retourne dans ses États, dépose l'Olifan de Roland dans
l'église S^-Séverin à Bordeaux, son corps à Blaye, et,
arrivé à Aix-la-Chapelle, où la belle Aide, fiancée de
Roland, meurt de douleur, il livre Ganelon au supplice.
Le poème se termine par la conversion de la veuve de
Marsile.
Tel est ce poème véritablement épique par l'unité du
plan, la vérité et la variété des caractères, par la gran-
deur des événements. « Les beautés dont il étincelle ,
dit M. Gérusez, nous frappent encore sous la rouille d'un
langage inculte, sous la négligence d'une versification
qui se contente, pour tout élément musical, du repos de
l'hémistiche, du nombre régulier des syllabes, et trop
peuvent d'une assonance imparfaite bien éloignée de la
rime. Toutefois l'expression simple et forte y traduit
énergiquement de belles pensées et de nobles senti-
ments... Le caractère exclusivement guerrier et religieux
de ce poème, où la galanterie n'a point de place, où le
merveilleux se laisse à peine entrevoir, le sentiment de
patriotisme qui l'anime, la majesté de Charlemagne tou-
jours respecté, toujours obéi, autorisent la critique à rat-
tacher l'inspiration première de la Chanson de Roland
au règne môme de ce prince, quand l'autorité royale
n'avait reçu aucune atteinte, et quand les efforts de l'hé-
ritier des Césars pour constituer l'unité d'une grande
nation avaient imprimé le patriotisme au cœur des peu-
ples unis sous sa main puissante. C'est le seul qui ait
conservé profondément l'empreinte de ce sentiment de
nationalité que les divisions féodales devaient altérer si
promptement. »
Le manuscrit de la Chanson de Boland est à la biblio-
thèque Bodléienne d'Oxford. Il a été publié par Fran-
cisque Michel enl837,in-8% etparGénin en 1850, in-8^
V, Monm, Le Boman de Boncevaux, Paris, 1833, in-8; et
un article de M. Vitet dans la Bévue des Deux Mondes,
juin 1852. B.
ROLAND AMOUREUX (Le), en italien Onandotnnamorato,
poème romanesque ou comte Bojardo, où le merveilleux
de la féerie est étalé dans toute sa richesse. L'ouvrage est
trop long et l'action trop vaste, trop compliquée, pour
qu'on puisse en faire une analyse suivie : mais il faut
noter ce qu'il y eut de nouveau dans le plan de l'auteur,
et dans sa manière de concevoir l'action et les person-
nages. Jusqu'alors les romanciers avaient respecté les
caractères traditionnels, notamment celui de Roland,
toujours représenté comme un modèle de toutes les ver-
tus chevaleresques. Bojardo , le premier, en le montrant
amoureux d'Angélique, l'a fait déchoir de cette hauteur
morale où l'avaient placé les vieux auteurs. Non-seule-
ment il changea la physionomie des personnages connus,
mais il créa une foule de caractères de fantaisie : tels sont
les rois Agramont, Sobrin, Bilandricart, Sacripant et Ro-
domont. ces caractères sont bien tracés, et contrastés
avec art. Le plan du Boland amoureux est bien conçu et
bien ordonné ; l'imitation des Anciens est sensible dans
quelques parties. Malheureusement la mort. empêcha Bo-
jardo d'achever son poème, et ce manque de dénoûment
fait tort à l'ouvrage; un misérable continuateur essaya
de mener à fin les aventures de Roland. Le Berni osa en-
treprendre, après Domenichi , de refondre entièrement le
Boland amoureux, en le dégageant des formes sérieuses
que Bojardo lui avait données, et il y réussit, tout en
suivant son auteur chant par chant avec la plus grande
exactitude. C'est donc presque uniquement le style qu'il
a refait ; mais c'est surtout par le st^le que vivent les
poèmes. Le Boland amoureux, refait par Berni, est,
après le Boland furieux d'Arioste, le romar épique ita-
lien qu'on lit le plus. ^ E. B.
ROLAND FURIEUX (Le), OU italien Orlando furioso,
épopée romanesque qui parut en 1516. Arioste, attaché
à la maison de Ferrare, et en particulier au cardinal
Alphonse d'Esté, tout en prenant pour sujet apparent de
ROL
1574
ROM
ion ouvrage la folie de Roland, neven de Charlemagne,
te proposa en réalité de célébrer l'origine de la maison
d*Este^ oui prétendait descendre de Roger et de Brada-
mante. Ce sont les véritables héros du poème, dont ils
remplissent la plus grande partie : à côté d'eux nous
retrouvons tous les personnages des romans carlovin-
giens et de la Chronique de Turpin, Charlemagne, Ro-
land, Renaud de Montauban et son héroïque famille,
Ganelon le traître, Roger et Bradamante, Angélique la
belle reine de Gathay, Marflse l'Amazone, puis les Sar-
rasins obligés, Ferragus, Sacripant, Rodomont , enfin les
enchanteurs et les bonnes et mauvaises fées, indisnen-
sables à ces sortes de compositions où le merveilleux
Joue un grand rôle.
Trois actions principales se partagent le poème : i* les
amours et les exploits de Roger et de Bradamante, dont
le mariage forme le dénoôment de Touvrage ; S** la
guerre imaginaire que les Sarrasins firent à Charle-
magne, et les efforts de cet empereur et de ses paladins
pour délivrer la France et l'Europe de ces barbares;
3<* l'amour de Roland pour l'insensible Angélique, et sa
folie & la fois terrible et touchante, quand il apprend le
mariage de cette reine avec le beau Médor. Au milieu de
ces trois actions, que Tauteur mène presque toujours de
front, naissent une foule d'incidents merveilleux qui s'en-
tre-croisent sans nuire à l'ensemble. Quelquefois même
l'auteur oublie son sujet pour conter une histoire qui lui
Tient & l'esprit , comme, par exemple, celle de Joconde,
après quoi il s'excuse auprès de son auditoire de sa dis-
traction, et reprend le fil de son récit. L'épopée roma-
nesque admettant tous les tons, Arioste a pu donner car-
rière à son génie inventif: tantôt il imite heureusement
Virgile, comme lorsqu'il nous montre Buridan et Médor
gardant le corps de leur malheureux roi Dardinel, épisode
peut-être supérieur à celui d'Euryale et Nisus dans
V Enéide. Tantôt il lutte avec Catulle, comme dans ces
gracieuses stances : « La jeune fille est semblable à la
rose, etc. » Puis il nous raconte quelque fait incroyable,
et ajoute avec une fine bonhomie : » Je ne l'aurais pas
cni , mais Turpin l'a écrit. » Sans cesse nous assistons à
de nouveaux combats, celui de Renaud et de Ferragus, de
Sacripant et de Bradamante, de Roger et de Mandri-
cart, etc., et Arioste trouve le moyen de diversifier à
l'infini la description qu'il nous en fait. L'histoire d'As-
tolphe allant dans la lune chercher la raison de son cousin
Roland, et y trouvant la sienne et celle d'une foule de
Sens que Jusqu'alors il avait crus fort sages, est connue
e tout le monde. Ces traits d'ironie profonde sont semés
à profusion dans le Boland furieux. C'est ainsi que l'ange
S^ Michel , envoyé sur la terre pour chercher le silence,
se dirige aussitôt vers un couvent de moines, où il no
trouve que la discorde. Dans la description des jardins do
l'enchanteresse Alcine, Arioste a imité le Tasse, et lui est
resté inférieur; mais il a réussi à créer des êtres fantas-
tiques qui sont presque devenus réels, tant ils sont fami-
liers à notre imagination : tel est ce cheval ailé, l'Hippo-
Sriffe, sur lequel voyagent Angélique et Roger. Au milieu
es aventures merveilleuses de ses héros, Arioste a
amené délicatement l'éloge de la maison d'Esté, presque
toujours sous forme de prédictions faites à Bradamante
par les enchanteurs, et en particulier par la bonne magi*
cienne Mélisse, qui fait passer devant les yeux de la jeune
guerrière toute la postérité d'elle et de Roger. Chose triste
à dire, le cardinal Hippolvte d'Esté ne sut apprécier ni la
louange ni le poème; mais la postérité lui a donné tort ,
et le mland furieux est universellement regardé comme
le modèle du genre, et même comme une œuvre unique,
mélange de pathétique, de fine raillerie, et d'inventions
originales qu'il est impossible d'imiter. *
Le Roland furieux a été traduit en français par J.-B.
Mirabaud, 1741; d'Ussieux, 1775; Tressan, 1780; Panc-
koucke et Framery ; A. Mazuv, 1839 ; A. Délateur, 1842;
Philippon de La Madeleine, 1843. On a aussi des traduc^
tiens en vers par Creuzé de Lesser et Duvau de Cha-
vagne, et quelques courts fragments par Voltaire. La
meilleure édition de l'original est celle de Panizzi , Lon-
dres, 1830, 8 vol. in-8°. E. B.
RÔLE (du latin rotuius, rouleau), feuille de papier
ou de parchemin , roulé ou non, sur laquelle on écrit des
listes de non^s, des états, des expéditions, etc. En ce sens
on dit, dans la Marine, un rôle d'équipage; dans l'admi-
nistration des finances, le rôle des cantributions ; au Pa-
lais, une affaire inscrite au rôle, ou plaidée à tour de
rôle. Les expéditions des actes chez les notaires et les
avoués se payent à tant le rôle, et par ce mot on entend
HO feuillet écrit des deux côtés et portant un nombre de
lignes déterminé. — En Angleterre, on nomme rôiei
{rolls) les anciens actes du Parlement, les lettres royales,
les titres ou chartes, et le Matire des rôles est un magis-
trat de li^ Cour de la chancellerie qui supplée le chanci^
lier dans ses fonctions judiciaires.
RÔLE, en termes de Théâtre, partie d*une pièce que
cha({ue acteur doit jouer. Dans la copie qui lui en est
remise, on a écrit non-seulement les tirades et les phrases
au'il a à débiter, mais aussi les répliques, c.-à-d. les
erniers mots de celles qui les précèdent, afin qu'il sache
quand il faut prendre la parole. On y met également les
indications des actions et des mouvements à exécuter sur
la scène. Créer un rd/«,, c'est le jouer le premier; com-
poser un rôle, c'est se pénétrer du personnage qu'on
représente, de manière que le jeu, la démarche, les
gestes, la voix, le costume, portent l'empreinte spéciale
de ce personnage. Un rôle muet est e^lui où l'acteur ne
parait sur la scène que pour entendre ce que disent ceux
qui sont chargés du dialogue, ou pour exécuter ce qu'ils
commandent. — Par extension. Rôle est devenu syno-
nyme à^emploi , et les rôles ont été soumis à une classi-
fication, d'après leur importance et leur caractère. Ainsi ,
on distingue : pour les honimes, les premiers rôles, les
jeunes premiers, les pérej nobles, les deuxièmes rôles,
les troisièmes rôles et raisonneurs^ les financiers, les
amoureux, les comiques jeunes, grimes et marqués, les
utilités, les accessoires; pour les femmes, les premiers
et deuxièmes rôles, les jeunes premières, les coquettes,
les amoureuses, les ingénuités, les duègnes,^ les -mér^s
nobles, lés caractères, les soubrettes, les utilités, etc.
ROMAIN (Art). — L Architecture, Les Romains ne
furent pas doués d'un esprit original et créateur dans
les arts : après avoir reçu des étrusques les premières
notions de l'architecture, ils devinrent les élèves des
Grecs. Inférif'urs à ces derniers par le goût , ils mirent
dans leurs constructions moins de pureté et de simpli-
cité; mais ils imprimèrent à leurs œuvres un caractère
remarquable de solidité et d'utilité pratique, et s'applic[uè-
rent à divers genres de monuments que les Grecs avaient
négligés, tels que cloaques, aqueducs, amphithéâtres,
mausolées, voies publiques, arcs de triomphe, thermes, etc.
Dans leurs imitations des ordres grecs, ils s'attachèrent
peu au dorique et à l'ionique ; mais ils s'approprièrent
le corinthien , qui devint pour ainsi dire leur ordre na-
tional , et auquel ils surent donner des formes nouvelles,
sans qu'il perdît ses traits distinctifs. Ainsi , le temple
de Vesta à Tivoli diffère autant de celui de Jupiter Stator
à Rome, que celui-ci du monument choragique de Lysi-
crate à Athènes, et cependant tous les trois comptent
parmi les modèles les plus beaux de l'ordre corinthien.
Les Romains ont porté cet ordre dans toutes les contrées
soumises à leur domination, en Espagne, en Gaule, en
Istrie, en Syrie, en Egypte, etc. L'emploi de l'arc, et,
par suite , de la voûte, est un autre caractère de l'archi-
tecture romaine : plus de plates-bandes, plus de toits
aigus comme dans le style grec, mais des arcades et des
coupoles. A la place des poutres et des pierres d'un seul
morceau et d'une étendue nécessairement limitée, qui
formaient les plafonds et les entablements grecs, les Ro-
mains, par le moyen de Tare, purent se servir de pe-
tits matériaux , surtout de briques, qui ofi'raient encore
l'avantage d'être peu dispendieuses et de pouvoir se prépa-
rer sur le lieu même où on en avait besoin. Dans les mo-
numents qui nous sont parvenus, on ne trouve qu'une très-
petite quantité de colonnes et d'entablements en marbre
ou en granit, et fort peu d'édifices en pierre travertine;
le reste est en briques. Le Colîsée, le Mausolée d*Âdrien,
le temple de la Fortune Virile et les anciens ponts du
'nbre sont en travertin; les colonnes des principaux
temples, les colonnes intérieures du Panthéon, Textérieur
des arcs de triomphe, les colonnes des cénotaphes de
Trajan et d'Antonin, sont en marbre : mais tous les autres
monuments , tels que le Panthéon (excepté le portique
et les colonnes ) , les temples de la Paix , de Vénus et
Rome, les thermes de Titus, etc., sont en briques. On
doit attribuera l'emploi de l'arc les vastes dimensions des
édifices romains : mais ce moyen nouveau exigeait des
points d'appui dont la masse fût assez solide, assez ho-
mogène pour résister au poids et à la poussée des voûtes ;
il fallait des matérieux d'une parfaite cohésion, et dont
toutes les parties, dépourvues d'élasticité, se maintinssent
par leur parfaite adhérence. A la différence des Grecs,
qui obtenaient la solidité par la seule observation des
lois de la pesanteur et sans usage des mortiers, les Ro-
mains composèrent leurs maçonneries avec de petits ma-
tériaux « des pierrailles et des cailloux jeté» à bain âê
ROM
1575
ROM
mortier, et «nformèrent ces blocages dans an ancaîMe-
roent de brique, de moellon oa de pierre de taille. lia
formèrent leurs voûtes sur cintres au moyen d*arcs de
briaao «a de pierre en tôte et de béton battu sur couchis
de Dois.
G*6st une opinion généralement admise, que les Ro-
mains s*adressèrent, pour la construction de leurs mo-
ouments, à des architectes grecs : toutefois, il ne faut
riea exagérer à cet égard. Il serait étrange que des Grecs
civilisés, devenus esclaves de maîtres barbares, eussent
abandonné leurs traditions artistiques pour se plier si
rite aux exigences d'un goût tout différent. Or, de même
qu*on a trouvé à la villa d*Adrien (près de Tivoli), à Her-
culanum et à Pompéi, des candélabres, des vases et
autres objets en style grec, qui prouvent qu*oa les avait
importés de la Grèce ou que les artistes gérées employés
en Italie avaient conservé leur genre propre de travail,
de même il faut admettre quMl y eut en architecture une
direction essentiellement romune. Le style romain ne
le distingue pas seulement du style grec par l'adoption
presque exclusive de Tordre corinthien et par remploi
systématique de Tare, mais encore par le mélange des ar-
cades avec la disposition en colonnes. Ce mélange, qui
fit naître les entre-colon nements inégaux et les entable-
ments brisés, détruisit l'harmonie et la simplicité primi-
tives de l'art grec; on en vint aux combinaisons mons-
trueuses que présentent le palais de Dioclétien àSpalatro,
le temple de Pallas et les ruines du Forum de Nerva à
Rome. Que Ton compare l'intérieur du Panthéon dans
son état primitif avec l'église actuelle de S^*-Marie-des-
Anges, ou le temple de Jupiter Stator avec celui de la
Concorde, et Ton verra combien la chute fut profonde.
Cest peut-être pour avoir senti cp'on ne pouvait mal-
traiter de la sorte l'ordre corinthien, que les Romains
Imaginèrent le système hybride qu'on nomme ordre
composite.
Bien que la construction du pont du Danube par Trajan
soit un ouvrage des plus surprenants, les restes des con-
structions romaines publiques et privées font supposer
que l'art de la charpenterie n'avait pas pris une grande
extension : autrement, les Romains ne se seraient pas
donné la peine d'employer des arcs, là où la charpenterie
aurait été préférable. Il ne parait pas non plus qu'ils
aient connu la menuiserie : les parquets étaient rem-
placés par des pavages en mosalojue, et le stuc, destiné à
recevoir des ornements, tenut lieu de lambris.
Jusqu'à l'époque des guerres Puniques, Tarchltecture
romaine s'inspira des modèles étrusques. Sous les pre-
miers Tcîz, loo lemples furent de petits édifices carrés,
couverts de roseaux, où la statue du dieu pouvait à peine
trouver place; les habitations n'étaient que de misé-
rables ccJoanes, comme celle de Romulus, que l'on con-
serva soigr£usement plusieurs siècles en la réparant.
Ancus Marcius entoura Rome de murs, et creusa le port
d'Ostie. Au temps de Tarquin l'Ancien s'élevèrent les
premiers monuments remarquables, le Cirque, le temple
du Capitole, et la Cloaque Maxime. Servius Tullius bâtit
un temple à la Fortune sur le marché aul bœufs (Forum
hoarium)y et la prison appelée de son nom TuUianum,
Le plus ancien temple construit sous la République fut
celui que Spurius Cassius dédia à Bacchus, à Cérès et à
Proserpine : Démophile et Gorgase l'ornèrent de statues
et de tableaux ; sur les tympans du fronton étaient des
statues d'aigle et d'airain doré. Quand les Gaulois in-
cendièrent Rome, en l'an 300 av. J.-C., la plupart des
temples échappèrent à la destruction : la ville fut recon-
struite avec pi^ipitation et sans plan. Dans les guerres
que les Romains faisaient aux peuples voisins, les géné-
raux vouaîeat des temples aux divinités dont ils implo-
raient Tassistance, et le butin fait sur les vaincus était
en partie consacré aux dépenses : parmi les édifices de
ce genre, celui de Quirinus , bâti par Papirius Cursor
après sa victoire sur les Samnites, excita un intérêt tout
particulier, parce qu'on y avait établi le premier cadran
solaire. A la même époque appartiennent l'aqueduc et la
voie que le censeur Appius Claudius fit construire, et le
tombeau de Scipion Barbatus.
La conquête de la Sicile, et surtout celle de la Grèce,
développèrent le goût des arts chez les Romains, et sub-
stituèrent le luxe et l'élégance à la simplicité antique.
Longtemps encore le progrès se borna à décorer, avec les
statues et autres objets emportés des pays conquis, les
édifices que Ton continuait d'élever dans le goût ancien ,
et ce ne fat guère qu'au temps de Sylla qu'on se mit à
imiter rarchitecture des Grecs. Lorsqu'après la prise de
Syracuse Marcellus rapporta à Rome de riches dépouilles.
on tira du butin les ouvrages d'art pour en décorer nn
temple de l'Honneur et de la Vertu, dont G. Mutius fut
l'architecte; de même, des dalles do marbre enlevées aa
temple de Junon Lacioienne à Crotone servirent à cou-
vrir le toit du temple que Fulvius Flaccus avait voué à la
Fortune Équestre pendant la guerre des Celtibériens. Vers
cette époque, les riches Romains, qui avaient vécu Jus-
que-là à la campagne, se fixèrent à la ville , et Rome
commença de s'embellir : Caton l'Ancien bâtit la basi-
lique Porcia, et Titus Sempronius la basilique Sem-
pronia; les censeurs Fulvius Flaccus et A. Postumius
Albinus contribuèrent surtout à l'embellissement de la
ville; ils la firent paver et orner de portiques, agran-
dirent le Ciraue, et établirent des voies publiques et des
ponts au dehors de la ville. Le péperin et la brique
avaient été employés presque exclusivement dans les
constructions ; Métellus le Macédonique fit bâtir le pre-
mier temple en marbre, celui de Jupiter Stator, œuvre
d'Hermodore de Salamine : toutefois on continua à se
servir de briques pour remplir Tintérleur des murs et
pour les voûtes, et de pierres de taille pour les parois
des murs, le marbre étant généralement réservé pour les
colonnes. Bien peu de Romains s'appliquaient à l'archi-
tecture et allaient l'étudier en Grèce : outre Mutius, que
nous avons cité, on mentionne Cossutius, qu'Antiocbus
Épiphane prit à son service pour réédifier le temple de
Jupiter Olympien à Athènes, et les frères Caius et Marcus
Stallius, chargés par Ariobarzane, roi de Cappadoce, de
reconstruire l'Odéon incendié pendant le siège de la
• même ville par Sylla.
De ce personnage date une période nouvelle de l'archi-
tecture romane. Peu de temps avant la 3* guerre Pu-
nique, le Sénat avait refusé aux censeurs Messala et Cas-
sius l'autorisation d'élever un thé&tre à Rome : à partir
de Sylla, les constructions de ce genre se multiplièrent.
Le théâtre de Scaurus, construit en bois, fut assez vaste
pour contenir 80,000 spectateurs; Pompée en fit bâtir un
en pierre ; Curion imagina les amphithéâtres ( V. ce mot).
A cette époaue appartiennent le Tabulaire (Archives et
Trésor), qui se dressait sur la pente du Capitole, le
temple delà Fortune Virile (auj. S^'-Marie-l'Égyptienne),
et le temple de la Fortune à Préneste. Les constructions
particulières se ressentirent aussi de cet essor des arts :
on vit un Clodius habiter une maison qui lui coûtait
15 millions de sesterces ; les Scaurus et les Lucullus riva-
lisèrent de magnificence dans leurs palais et leurs villas.
Mais c'est surtout le règne d'Auguste qu'on peut regarder
comme l'apogée de l'architecture : l'ancien triumvir avait
voulu faire de Rome la ville la plus belle de l'univers, et
il put dire qu'après avoir trouvé une ville bâtie en bri-
ques, il en laissait une bâtie en marbre. Alors, en effet,
s'élevèrent les portiques du cirque Flaminius, lu portique
d'Octavie, la pyramide de Cestius, le théâtre de Mar-
cellus, le temple de Jupiter Tonnant, le mausolée d'Au-
guste, le Panthéon d' Agrippa, l'amphithéâtre de Statilius
Taurus, une foule d'aqueducs, de bains, de fontaines, etc.
Des architectes grecs furent amenés à Rome comme es«
claves, d'autres y vinrent librement, mais nous n'en con-
naissons qu'un très-petit nombre, Cyrus, Posphorus,
Saurus, Batrachus. Parmi les Romains, on remarque :
L. Gocoéius Auctus, qui creusa sous la montagne cette
route qu'on appelle la Grotte de Pouzzoles, et que l'on
suppose avoir bâti le temple de Pouzzoles dédié à Au-
guste; Valérius d'Ostie, architecte du Panthéon, et qui
imagina de couvrir les amphithéâtres ; enfin Vitruve, le
plus important pour nous à cause de son Traité d'archi-
tecture, le seul ouvrage qui soit resté de l'Antiquité sur
cette matière.
Aj>rès Auguste , l'architecture ne tarda point à dégé-
nérer. Déjà Tare de triomphe élevé par Tibère à son pré-
décesseur est démesurément large, soutenu par des
piliers de maçonnerie , avec deux maigres colonnes , et
un fronton mal posé qui les relie; dans celui de Titus,
les colonnes ont Jusqu'à 9 diamètres et demi, et ce dé-
faut sera encore exagéré dans la suite. Celui de Trajan à
Ancûne pèche par l'excès contraire, écrasé qu'il est entre
deux piliers, et les soubassements, très-élevés, sont sur-
chargés de moulures insignifiantes. Le goût des empe-
reurs devait nuire aux beaux-arts : après l'incendie de
Rome sous Néron, ce prince employa Celer et Sévérus a
la reconstruction de plusieurs édifices, et principalement
à cette Maison dorée dont les splendeurs moules ne pou-
vaient rien avoir de commun avec le bon goût. Le Coli-
sée de Vespasien et la colonne Trajane sont les seuls
monuments de Rome qui portent encore un caractère de
grandeur. Il n'y a pas de prince qui ait ordonné autant
ROM
1576
ROM
ée constructions qu*Adrien, et son nom était écrit sur
tant d'édifices, qu'on l'avait surnommé le Pariélaire :
Il fit bfttir le Môle ou Mausolée qui porta son nom et le
r»nt yBtlus à Rome, une villa à Tivoli, un amphithéâtre
Capouc, une muraille destinée à protéger les Bretons
contre les incursions des Pietés et des Scots, etc. Les
archit<Hïtes connus de cette période sont Frontin, Rabi-
rius, ApoUodore de Damas, Julius LAcérus, Détrianus.
Entre autres innovations qui éloignaient des modèles
grecs les monuments romains, nous citerons les piédes-
taux sous les colonnes, les colonnes accouplées, les bas-
reliefs sur les côtés extérieurs du b&timent, les frontons
ronds et de profil. — Sous les Antonins, on remarque le
temple d'Antonin et de Faustine, la colonne Antonine et
eelle de Marc-Aurèle. Puis, on ne rencontre plus, avec
des traces de décadence de plus en plus visibles, que
l'arc de Septime Sévère, les thermes de Caracalla, le pa-
lais de Dioclétien à Spalatro, et l'arc de Constantin. La
translation du siège de l'Bmpire & Byzance porta le der-
nier coup aux arts.
IL Sculpture, — Les premiers ouvrages de sculpture
chez les Romains furent des statues des dieux , faites de
bois et d'argile par des artistes étrusques. On éleva,
dit-on, une statue de bronze à Horatius Coclès, une sta-
tue équestre à Clélîe; ces œuvres étaient saps doute
d'un travail fort médiocre. A partir des guerres Puni-
ques, les Romains enlevèrent des pays vaincus une quan-
tité prodigieuse de statues, et ces spoliations les dispen-
sèrent sans doute de toute étude, puisque l'histoire de
l'art n'a pas enregistré le nom d'un seul grand sculp-
teur romain. Les statues arrachées aux vaincus ne servi-
rent d'abord qu'à orner les triomphes; puis on en rem-
plit les places, les monuments publics , et les maisons
des particuliers. Quelques chifTres peuvent donner une
idée de la quantité d'ouvrages qui s^accumulèrent à
Rome : 280 statues de bronze et 230 de marbre embel-
lirent le triomphe de Marcus Fuivius sur les Étoliens -,
l'abbé Barthélémy a établi que le nombre des statues
et statuettes exhumées du sol de Rome dépasse 70,000.
Le nom de VeiTës rappelle à l'esprit le moyen le plus ha-
bituel aux Romains pour acquérir les chefs-d'œuvre de
l'art. Depuis le temps de César, les sculpteurs grecs affluè-
rent à Rome : parmi eux on cite Pasitèle, Colotès, Ste-
phanuB, Arcésilas, Posis, Ménélas, Décius, Damasippe.
VAthénien Diogène fit les statues qui décoraient le fronton
du Panthéon d' Agrippa. Le Gaulois Zénodore exécuta la
statue colossale de Néron. Une œuvre très-importante de
sculpture est la colonne Trajane, dont les bas- reliefs
ne contiennent pas moins de 2,500 figures humaines,
outre les chevaux, les trophées et les machines de guerre.
Le buste célèbre d' Antinous date du règne d'Adrien. Il
est certain que, jusqu'à l'époque de ce prince, il y eut de
beaux ouvraîges : cependant il y a décadence par rapport
à l'art de la Grèce indépendante, en ce que 1 idéal n'est
ftius la base de la conception et de l'exécution ; le souflle
ntcricur, la poésie de l'inspiration ont disparu ; les sta-
tues se rapprochent de plus en plus du portrait, et le style
vise à la perfection du poli, au raffinement. La sculpture
possède toujours la beauté harmonieuse de la forme,
mais la sève native lui manque. Il faut remarquer que
les artistes, adroits et élégants imitateurs do tous les
styles, se sont exercés aussi bien sur les divinités égyp-
tiennes que sur les dieux de la Grèce et de Rome : ils
ont préparé de cette façon beaucoup d'erreurs aux anti-
quaires, qui peuvent rapporter certaines statues à un
âge plus reculé que celui auquel elles appartiennent. —
Après Adrien, la sculpture fit une chute rapide et pro-
fonde : quand on construisit l'arc de Constantin, les ou-
vriers étaient si peu habiles, qu'on fut contraint, pour
l'orner, d'enlever des sculptures à l'arc de Trajan. Déjà
Caligula avait donné l'exemple de faire décapiter une
foule de statues, pour leur donner sa propre image : les
empereurs des derniers siècles multiplièrent aussi leurs
portraits; on fit des bustes sans tète, afin de les changer à
volonté. V. Gauric, De sctUpturà sive stcUtutrià veterum,
Florence, 1504, in-4*; Aide Manuce, De coelaturA et
sciUpturà veterum, opuscule inséré, comme le précé-
dent, dans le Thésaurus de Gronovius; le comte de
Guasco, 00^145(7016 des statues chez les Anciens, Bruxelles,
1768, in-8<*; Hofstœter, Essai d'une histoire de la sculp-
ture chez les Anciens, en allem.. Vienne, 1778, in-8^
III. Peinture, — On ne doit pas plus accorder aux
Romains le goût de la peinture que celui de la sculpture.
Ils ne s'en occupèrent nullement pendant plus de quatre
siècles, et les plus anciennes peintures que l'on connaisse
à Rome, du moins par tradition^ furent exécutées par
des Étrusques. Depuis qu'ils eurent commencé à trans-
porter dans leur capitale les dépouilles artistiques des
peuples vaincus, on n'a tu chez eux aucun pemtre re-
commandable. Les généraux Tictorieux étaient flattés
d'étaler à leur ti'iomphe les richesses dont ils s'étaient
emparés ; mais combien eût-on trouvé pturmi eux, pour
quelques hommes de goût comme lesScipions,deMum-
mius capables de laisser leurs soldats jouer aux dés sur
les chefs-d'œuvre des peintres de laGrècel L'estime que
Ion faisait des tableaux était fondée, non sur la connais-
sance de l'art, mais sur le prix qu'y attachaient les peu-
ples auxquels ou les avait enleves.Le Fabius qui fut sur-
nommé Pictor (le peintre; pour avoir orné de pmntures
le temple de la déesse Salus, vers Tan 300 av. J.-C, du;
avoir bien peu de mérite, puisque Pline s'y arrête à
peine. Marcus Valérius Messala, Lucius Scipion, L. Hos-
tilius Mancinus, représentèrent les combats qu'ils avaient
livrés; Pline ne fait encore aucun éloge de leurs ou-
vrages. Le poète Pacuvius peignit le temple d'Hercule,
sur le Forum Boarium (marché aux bœufs). La peinture
fut de moins en moins cultivée par les citoyens romains:
on l'abandonnait aux étrangers. On remarque toutefois,
au temps d'Auguste, le chcvulior Tnrpilius, qui peignait
de la main gauche, et Marcus Ludius, peintre de ma-
rines et de paysages; plus tard, Amulius, que Néron
employa à la décoration de sa Maison dorée; Antistius
Labeo, plein de vanité et objet de la risée publique:
Corn. Pinus et Accius Prisrus, contemporains do Ycs-
pasien. Tel est le petit nombre de peintres que Rome a
produits. Les œuvres de quelque valeur furent exécutées
par des Grecs.
IV. Musique, — V. Mdsique.
BOMAiN (Caractère). V, CACACTènEs D'iiT"i\n«T.iE.
non AIN (Droit), ensemble des règles de Droit en vi-
gueur chez les Romains. Son histoire est externe ou
interne, selon qu'elle embrasse les nsodincations succes-
sives subies par ces règles mêmes, ou qu'elle se borne à
l'étude des sources auxquelles l'histoire peut les étudier.
L'histoire externe du Droit romain peut se diviser en
quatre périodes : la première s'étend de la fondation de
Rome à la promulgation des Douze Tables; la seconde, de-
puis la promulgation des Douze Tables Jusqu'à Cicéron;
la troisième, depuis Cicéron jusqu'à Alexandre Sévère; la
quatrième finit à Justinien.
Première période, — Rome dut sa naissance à une
fusion de peuples : son Droit civil se ressentit de cette
origine et des circonstances qui présidèrent à la cn^ation
de la ville nouvelle. Les citoyens y furent divisés en
deux classes, patriciens et plébéiens. Aux premiers seuls
le droit à Vager publicus^ aux charges publiques, et une
sorte de noblesse héréditaire; les seconds formaient une
sorte de bourgeoisie libre, et le patronat les rattachait
en partie, sous le nom de clients, aux familles pa-
triciennes. A la tête de l'État se trouvait le roi, chef
unique et viager : à ses côtés le Sénat, corps délibérant
composé de patriciens. Les lois étaient votées par le
peuple en comices. Les anciennes lois furent collisé^
par un pontife du temps de Tarquin, Sextus ou Publius
Papirius ; son recueil prit le nom de Droit Papirien. On
suppose qu'il n'embrassait que les choses du culte.
Après l'expulsion des rois, le pouvoir passa à deux
consuls choisis parmi les patriciens. Jusqu'aux Douze
Tables, l'histoire de Rome est remplie de luttes entre les
deux ordres, et des succès des plébéiens, obtenant suc-
cessivement les tribuns, les édiles, des comices particu-
liers où ils votaient les plébiscites, et enfin la promul-
gation de règles de Droit générales réunies par des
Décemvirs et transcrites sur \*i tables de pierre. Elles
posaient le principe de l'égalité légale entre les deux '
ordres, précisaient le pouvoir Judiciaire, donnaient la
formule des actions. Elles furent jusqu'à Justinien la base
du Droit public et privé. Exposées aux rostres, puis bri-
sées par les Gaulois, elles furent ensuite reconstituées et
remises à leur place primitive; on les y voyait encore
au m* siècle de l'ère chrétienne. Des auteurs modernes
ont essayé de recomposer leurs fragments, entre autres
Godefroy, Haubold et Dirksen. '
Deuxième période, — A partir des Douze Tables se ré-
vèle une double source de Droit, le Droit écrit et le Droit
non écrit. Le Droit écrit, ce sont : 1** les (oit, votées dans
les comices par centuries, sur la proposition du magistrat
qui présidait le Sénat ; 2<> les plébiscites^ votés dans les
comices par tribus, sur la proposition des tribuns du
{>euple; obligatoires d'abord pour 1» seuls plébéiens, ils
e devinrent d'une façon générale : les lois et les plé-
biscites portaient les noms de ceux qui les avaient piro-
ROM
1577
ROM
posés; 3* les séncUtu-consultes, édictés par le Sénat sans
Ift participation du peuple; les plébéiens ne reconnurent
leur force obligatoire que (^uand on ne contesta plus
celle des plébiscites. Le Droit non écrit se puisait dans
la tradition des ancêtres {mores majorum)^ Topinion gé-
néralement reçue {consuetiido)^ et Tautorité de la chose
iugée {auctoritas rerum perpétua similiter judicatarum).
Cette dernière se retrempait à une double source; la
plus considérable était Védit du préteur, magistrat annuel
chargé de rendre la justice soit entre les Romains seuls
iprœtor urbaniu)^ soit entre les Romains et les étran-
gers {prœtor peregrinus). Ce fut surtout par les décisions
de ce dernier que s'introduisirent un certain nombre de
principes reconnus comme communs à toua les peuples
[jus gentium)^ dont Tapplication, d*abord restreinte aux
étrangers, s'étendit bientôt aux Romains. Chaque année,
en entrant en fonctions, le préteur publiait l'ensemble
des règles d'après lesquelles il rendrait la Justice. Cétait
an moyen d'éviter le soupçon de partialité. Cet édit, après
avoir fait de nombreux emprunts aux coutumes, était
chaque année complété par les soins du nouveau préteur,
si une lacune s'était révélée. C'est aux préteurs que le
Droit romain fut redevable des exceptiones et prœscrip-
tiones, moyens inventés par eux de repousser une de-
mande injuste, mais conforme aux règles strictes du
Droit civil; de même les restitutianes et les fictiones
juris, moyens d'attaquer un acte régulier, quand l'équité
en exigeait l'annulation. Ces édits n'étaient pas changés
chaque année, mais se transmettaient de préture en pré-
ture, sauf les modifications qu'exigeait la marche des
idées. Les édiles publiaient également un édit qui, bien
aue spécial aux aÎTaires de police, n'était pas sans in-
uence sur le Droit privé. La réunion des règles ducs
aux préteurs et aux édiles reçut le nom de Droit préto-
rien ou !ionoraire. Le Droit non écrit puisa à une autre
source : dans les travaux des jurisconsultes, dans leurs
consultations {responsa prudentum)^ dans leurs écrits.
Ces écrits furent du reste postérieurs à l'époque où un
secrétaire d'Appius Claudius, Cn. Flavius, lui déroba la
formule des diverses actions de droit, et la connaissance
du calendrier judiciaire (dies fasti et nefasti), suivant le-
quel il était permis ou défendu d'agir. Tibérius Corunca-
nius, le premier plébéien parvenu au pontificat, fut aussi
le premier qui professa publiquement le Droit. Sextus
JEMus Catus publia un nouveau recueil d'actions (Jus
^lianum). Ou cite également à cette époque Caton l'An-
cien et ses Commentaires de droit, Publ. Mucius Scsevola,
Junius Brutusy et Blanilius, considérés comme les fonda-
teurs du Droit, enfin Hostilius, l'auteur des Actiones
BostUianœ, qui probablement étaient des formules de
testament.
Troisième période. — Dans l'histoire romaine, c'est
l'époque de la dissolution de la République sous les coups
que lui portent des ambitions dévorantes : ces agitations
sont terminées par le triomphe d'Octave à Actium. 11
reçoit le nom d'Auguste, prend le titre de princeps reipu-
blicœ, réunit dans sa main les plus importantes magis-
tratures, et Jette les fondements d'un pouvoir qui, sous
ses successeurs, deviendra du pur despotisme. Les sources
du Droit sont alors : 1** les décrets du peuple, lois ou
plébiscites, dont le plus remarquable fut alors la loi
Pappia Poppœa, qui avait pour but de restreindre le cé-
libat; 2o les sénatus-consultes, votés sur la proposition
du prince, que ce fût par écrit ou de vive voix {per episto-
lam ou cîd orationem principis)\ 3** les constitutions
impériales : placita ou constitutiones, ordonnances ou
règlements rendus par le prince; décréta, décisions ren-
dues sur les décisions dont connaissait en appel le con-
seil privé de l'empereur {auditorium principis)i rescripta,
instructions qu'il adressait soit aux particuliers, soit aux
fonctionnaires ; A** les édits des préteurs, dont un tribun,
Cornélius, fit prohiber les variations par une loi rendue
l'an 687. Le premier travail d'ensemble fait sur l'édit fut
celui d'Ofilius, ami de César. Ce n'était que l'osuvre
d'un particulier; aussi plus tard, Salvius Julianus, arri-
vant à la préture, refondit complètement l'édit prétorien,
avec l'assentiment de l'empereur Adrien, qui confirma
son travail» Il fut suivi de plusieurs commentaires, parmi
lesquels on distingua ceux de Julien lui-même et celui
d'Ulpien; 5** les avis des jurisconsultes. Un certain nom-
tre d'entre eux fut choisi par Auguste pour répondre en
ton nom. Plus tard, Adrien décréta que, quand leurs avis
seraient unanimes, ils auraient force de loi. — De nou-
veaux progrès furent eu outre réalisés dans la science du
Droit par les travaux des jurisconsultes; seulement, de-
puis Auguste, ils semblent s'être divisés en écoles, dont
l'une, celle des Proculéiens, eut pour ses plus célèbres
maîtres Antistius Labeo, Nerva, Proculus, et Celsus; et
l'autre, celle des Sabiniens et Cassiens^ compta Atejus
Capito, Sabinus, Cassius Longinus, et Salvius Julianus.
Depuis Adrien, les différences qui séparèrent ces écoles et
qui furent vidées par les Constitutions ou par l'usage
s'effacèrent insensiblement; mais on vit encore briller
Marcianus, Pomponius, Gains, Papinianus, Ulpianus,
Paul us et Modestinus. Les Pandectes offrent les noms
d'un grand nombre d'autres, mais d'une autorité moins
considérable.
Quatrième période. — Les changements que sunit à
cette époque l'Empire romain, la fondation de Byzance,
l'adoption du christianisme par les Césars, les invasions
des Barbares, et enfin la conquête de Rome par Odoacre,
roi des Hérules (476), finirent par limiter l'ancienne do-
mination romaine au seul empire d'Orient, qui subsista
Jusqu'à l'invasion des Turcs en 1453. Le Droit ne com-
prit plus, à vrai dire, que deux sources, les Constitutions
et Vusage, et encore, avant Constantin, ces Constitutions
font à peine autre chose qu'appliquer les anciens prin-
cipes de Droit. On fes distingue en Constitutions gèné^
rales^ auxquelles tous les sujets devaient se conformer,
ce qui comprend les édits, et en Constitutions person*
nelles, spéciales à certains, et comprenant les mandements
adressés aux magistrats {mandata)^ les décisions sur les
procès soumis à l'empereur {décréta)^ les rescripts (re-
scripta). — La décadence de la science du Droit, l'incer-
titude et l'arbitraire judiciaire résultant de la multiplicité
des opinions, et de la confusion des sources, tel était
l'état du Droit au commencement du v* siècle. Constantin
paraît avoir senti le besoin de porter dans ce chaos quel-
3ue lumière; il indiqua les jurisconsultes à l'opinion
esquels il faudrait avoir égard, ce qui fut érigé en prin-
cipe par une Constitution de Théodose II (420 de J.-C),
déclarée applicable à l'Occident par Yalentinien III. Pa-
pinien, Paul, Gains, Ulpien et Modestin durent seuls être
suivis. Le même désordre existait dans les Constitutions.
Gregorianus et Hermogenianus, au iv* siècle, les réunirent
en deux Codes, dont le premier embrassait les règnes
d'Adrien à Constantin, le second ceux de Dioclétien et
Maximien.
En 438, Théodoso le Jeune, aidé par Antiochus, pu-
bliait un recueil d'édits, que Yalentinien III adoptait pour
rOccident. Il était divisé en 16 livres, que l'on ne pos-
sède complets que depuis la moitié du sixième. Des friig-
ments des autres livres ont été extraits du Bréviaire
d'Alaric. Théodose II et Yalentinien III publièrent en
outre de nouvelles ordonnances, réunies à leur Code sous
le nom de Novellœ. Les Vaticana Fragmenta, la Notitia
dignitatum Orientis et Occidentis, la Collatio legum Mo-
saïcarum et Romanarum, la Consultatio veteris hti, tels
sont les seuls ouvrages que nous ayons à citer sur cette
époque comme antérieurs à Justinien, et ils n'ont guère
d'autre valeur que celle des fragments de jurisconsultes
anciens qu'ils ont sauvés de I'oudU.
Ces recueils ne pouvaient être longtemps suffisants, et,
après l'invasion, les Barbares eux-mêmes sentirent la
nécessité do recueillir, pour l'usage des Romains soumis
à leurs lois, les principes de Droit qui devaient les régir.
De là, \^ chez les Ostrogoths, VEdit de Théodoric, publié
à Rome en 500, et applicable aux Ostrogoths comme aux
Romains; 2*' le Breviarium Alaricianum ou Aniant,
qu'Alaric II, roi des Yisigoths, fit extraire des Codes Her-
mogénien et Théodosien, et dont il fit revêtir les exem-
plaires de la signature d'Anianus, son référendaire. Cette
compilation fut connue au moven âge sous les noms de
Corpus Theodosianum, Lex Theodosiana, Liber legum,
Lex Romana; 3* la Lex Romana (517-534) pour les sujets
romains des Burgondes, à qui une erreur de Cujas, plus
tard reconnue par lui, a fait donner aussi le nom de Pa-
pmiani liber responsorum. — En Orient, on ne trouve
aucun essai de codification jusqu'à l'avènement de Justi-
nien, en 527. Les compilations qu'il ordonna sont nom-
breuses, et leur importance les a fait survivre Jusqu'à
nous. D'abord parut Vancien Code, rédigé par une com-
mission de dix jurisconsultes, dont faisait partie Tribo-
nien, et qui comprenait en 12 livres les extraits utiles
des Constitutions impériales. II parut en 528 ; il est au-
jourd'hui perdu. En 530, Tribonien fut chargé avec seize
autres jurisconsultes de compiler les ouvrages des légistes
les plus considérés. En trois ans, le travail de la com-
mission fut achevé, et les Pandectes furent promulguées.
Elles parurent en 50 livres, sous le nom de Digesta ou
Pandeclœ juris enucleati ex omni vetere jure eollecti»
L'ordre de l'ancien Êdit y avait été conservé pour
ROM
1578
ROM
llter les rnchercbes. Instinien en défen^t les Commen-
taires, et n*en permit que la traduction en grec, mot
pour mot, et de simples concordances. De cette publica-
tion si étendue naquit Tidée d*en résumer les principes
élémentaires dans un corps de Droit plus abrégé, dont la
rédaction fut encore confiée à Tribonien, assisté de Do-
rothée et Théophile. Ce recueil reçut le nom d*lnstitutês.
ÛB n'était à proprement parler que la reproduction, mo-
difiée et appropriée au temps, des Instttutes de Ga!us.
Théophile, Tun des collaborateurs, publia le meilleur
commentaire que ce travail ait pu recevoir, sous le titre
de Paraphrasts grœca Instituttonum Cœsarearum. Ces
deux publications furent, sur Tordre de l'empereur, sui-
vies d'une révision du Code publié en 529; elle fut
achevée l'année môme où elle avait été commencée, et la
nouvelle édition put être promulguée en 534. On le dé-
signa sous le titre de Codex repetitœ prœlectionis. Il est
divisé en 12 livres, qui se subdivisent en titres. — Depuis
535 Jusqu'en 565, Justinien rendit une multitude d'or-
donnances, écrites partie en latin, partie en grec, et qui
modifiaient ses premières décisions. Elles reçurent le
nom de Novellœ Constitutiones. Après la mort de Justi-
pien, on en colligea 1(58, dont 154 seulement lui appar-
tiennent. Plus tard les glossateurs en firent 9 collations,
comprenant 97 novelles, en 98 titres. Les antres qui n'y
figuraient pas furent connues sous le nom d'extrava-
gantes : elles sont réunies aux autres dans les recueils
modernes.
Nous noterons après Justinien quelques ouvrages nui
découlent des siens : un résumé de 125 Novelles publié
par Julien en 570, avec le titre d'Epitome ou Liber No-
vellarum, et plus tard une traduction des Novelles que
les glossateurs désignèrent sous le nom de Corpus on»
thenticum.
Bientôt les traductions, les commentaires des livres de
Droit dont nous venons de parler, abondèrent à un tel
Kint, que la confusion qu'elles produisirent, Jointe à
ccumulation des Constitutions postérieures, nécessita
la rédaction do nouvelles compilations. Elles furent or-
données par l'empereur Basile le Macédonien. La pre-
nûère, bien élémentaire, divisée en 40 livres, parut en
876 : ce fut le Tcpoysi^ tôôv vô(jLa>v. La 2*, plus considéra-
ble, comprenant 60 livres, ne vit le Jour que sous le rè^ie
de Léon le Philosophe, qui lui donna le nom de Basihca.
En 945, Constantin Porphyrogénète en fit paraître une
nouvelle édition : Basilica repetitœ prœlectionis , dont
malheureusement une partie nous manque. De 887 à 893,
l'empereur Léon fit paraître 113 Novelles qui portent son
nom, et qui, traduites en latin par Agyleus en 1560, sont
restées dans le Corpus juris. Aujourd'hui les Basiliques
et les Novelles sont encore la base du Droit public des
Grecs.
En Occident, les corps de Droit de Justinien péné-
trèrent avec la conquête qu'il fit de l'Italie sur les Ostro-
eoths en 535. Le Brémaire d'Alaric y fut cependant
introduit plus tard. Vers 1100, un Lombard publia un
abrégé de Droit civil intitulé Brachylogus juris ctvUis.
Au xn* siècle, l'École de Bologne fit refleurir en Italie
l'étude du Droit, éclairé par les gloses et les leçons d'Ir-
nerius, et de ses disciples Balduinus et Accurse. C'est
ftux glossateurs que l'on doit encore l'intercalation dans
le Code des Constitutions postérieures qui Tavaient mo-
difié. Ces extraits prirent le nom d'authenticœ. Ils y
Joignirent quelques extraits des ordonnances des empe-
reurs d'Allemagne, Frédéric I et II; on les appela Au^
thenticœ Fridericianœ,
La France, du temps de Justinien, avait sa population
romaine régie par le Bréviaire d'Alaric et le Code Théodo-
sien. Mais avant les glossateurs, l'étude du Droit romain
y eut quelques succès. Lanfranc, abbé du Bec, plus tard
archevêque de Cantorbérv, enseigna le Droit romain, et
e'est à un Français que doit être attribué le livre connu
sous le nom de Pétri exceptiones legum romanarum, qui
contient de nombreux emprunts aux compilations Justi-
niennes. Les succès de l'école de Bologne excitèrent en
France une heureuse émulation. Le livre Ulpianus de
edendo, cours de procédure tiré des livres de Justinien,
est dû à la France ou aux Pays-Bas. Placentinus enseigna
le Droit à Montpellier. Louis IX fit traduire des livres de
Droit romain. Pierre Desfontaines composa au milieu du
xm* siècle le Coutumier français^ et le compara au Droit
romain. Ce Droit continua à être honoré, malgré la dé-
fense du pape Honorius III, et c'est à lui que nous de-
vons la grande école des Jurisconsultes français du
svi* siècle. Il demeura d'ailleurs. Jusqu'à la promulga*
tton da Codé NapoUon, la règle des pays de Droit écrii^
sauf les modiflcatfont Introduites par les ordonnances
des rois. Dans les pays de Coutumes, au contr^:c, M ne
fut consulté qu'à titre de conseil et comme raison écrite.
C'est la seule valeur qu'il ait aujourd'hui. De nos Jours
le Droit romain a encore force de loi en Allemagne, mais
seulement pour les parties que la coutume et les lois ont
consacrées.
V. Bach, Historia jurisprudenttœ romanœ, Lucques,
1762, în-4»; J. Berriat Saint-Prix, Histoire du DroU ro-
main, 1821, in-8o; Hugo, Histoire du Droit romain, trad.
gar Jourdan et revue par Poncelet, 1821-22,3 vol. ln-8«;
avigny. Histoire du Droit romain au moyen âge, trad.
par Guenoùx, 1839, 3 vol. in-8»; Holtius, Historiœ juris
romani Uneamenta, 2* édit., 1840,{n-8o; Giraud, Histoire
du Droit romain^ Aix, 1841, in-8o; Mackeldey, Hist, des
sources du Droit romain, trad. de l'allem. par Poncelet,
1846, in-12; Ortolan, Histoire de la législation romaine^
4* édit., 1846, in-8o; Troplong, De l'influence du chris-
tianisme sur le Droit civil des Romains, 2« édit., 1855,
in-i2; Dupin, Principia juris civilis tum romani tum
galHci, 1806-1818, 5 vol. in-12; Leclercq, le Droit ro-
main dans ses rapports avec le Droit français, Liège,
1810, 8 vol. in-8<>; Biret, Application au Code civU des
Institutes et des oO livres du Digeste^ 1824, 2 vol. in-8";
Delvincoun, Juris romani elementa, 4« édit., 1823, in-S*»;
Benech, Programme d'un Cours de Droit romain, 1837,
in-4<»; Bravard, Étude et enseignement du Droit romain,
1837, in- 8*»; Savigny, Traité de Droit romain, trad. de
l'allem. par Guenoux, 1840-40, 8 vol. in-8»; Poncelet,
Cours d'histoire du Droit romain, 1843, in-8«; Mackel-
doy. I^anuel du Droit romain, trad. de l'allemand par
Beving, 18'i6, in-8®, et Systema juris romani hodie ust-
tatt, I^ipzig, 1847. \n-H^; Lagrango, Manuel de Droit
romain, 5* édit., 1850, in-12; Molitor, Cours de droit
romain approfondi, avec Us rapports entre la législation
romaine et la légtslatiom française, 1850 et sui v. It. ii'E.
ROMAIN (Ordre). V, Composite.
ROMAUV (Bit), ensemble des rèjglements prescrits ou
recommandés par l'autorité du Saint-Siège pour la célé-
bration des offices divins, le choix des prières liturgiques
et les cérémonies du culte.
ROMAINE (École), une des g^ndes écoles moaemes de
peinture italienne. Itapliaël, qui en est le véritable fonda-
teur, procédait de l'école ombrienne, par son maître Pierre
Vanucci, dit le Pérugin, dont il eut la gr&ce ascétique, et
de l'école florentine, dont quelques maîtres, principale-
ment Fra Bartolomeo et Michel-Ange, exercèrent sur lu<
de l'influence par leurs conseils ou leurs exemples
Après Raphaël, on doit citer comme ayant honoré l'école
romaine, d'abord ses élèves Jules Romain, Penni dit il
Fattore , Perino del Yaga, Jean d'Udine, Polydore de Ca-
ravage, Tisio dit le Garofalo^ puis Frédéric et Thaddée
Zuccaro, Nicolas Circignani, Jérôme Muziano. L'éooie
négligea, au xvu* siècle, l'étude du dessin et de l'antique
qui la caractérisait, et tomba dans la manière : celui qui
représente le mieux cette nouvelle période est Joseph
C^ri, plus connu sous les noms de Joséphin et de che-
valier d'Arpino; on peut citer aussi Baroccio, André
Sacchi, Pierre de Cortone, Domenico Feti, Domenico
Cresti dit Passignano, Giro Ferri, Francesco Romanelli,
Louis Garzi, J.-B. Saivi dit Sassoferralo , Roncalli dit
Pomerance, et Carlo Maratta. En opposition à ces pein-
tTEss, qui professaient encore un utsiiain idéalisme, Mi-
chel-Ange Amerighi dit le Caravage copia la nature sans
choix et sans goût. Le paysage, dernier venu dans l'art
de la peinture, atteignit, au milieu de cette décadence,
son plus haut degré de perfection en Italie avec Gaspard
Dughet dit le Guaspre. Les peintres du xvui* siècle sont
loin de leurs prédécesseurs : les seuls qui méritent
d'être mentionnés sont Jean-Marie Morandi, Pierre NelU,
J.-B. Gaulli, Rapliaél Mengs, Pompeo Battoni.
ROMAINS (Langue, — Littérature). V, Laumb.
ROMAINE (Numismatique). V, Nuiiisvatiqub.
ROMAINE (Philosophie). A Rome, la philosophie ne fut
qu'une production exotique, une science empruntée à la
Grèce; c'est à peine si elle y fut considérée comme
science spéculative. Mais si elle ne fut pas un but pour
le génie romain, elle fut étudiée comme un instrument
utile, comme un moyen de se perfectionner dans l'art
oratoire, la politique et la Jurisprudence. La plupart des
Romains qui s'occupèrent de philosophie étaient des
poètes, des orateurs, des furisconsultes. La philosophie
ne se montra dans Rome, où d'abord .elle fut très-mal
reçue, qu'après que la conquête eut ouvert le chemin de
la Grèce et de l'Asie. VEpicuréisme, qui attira plus faci*
lement l'attention^ eut pour premien interprètes Amafr-
ROM
1579
ROM
âtts, RabMuB, puÎB Lucrèce, qui fit oublier tous les
»atres. I^ Stoïcisme, pratiqué par des esprits élevés, fut
en quelque sorte une doctrine d'opposition sous les em-
pereurs; il comptait dans ses rangs Brutus, qui se rat-
tachait aussi à l'Ancienne Académie, et qui écrivait en
grec un livre de morale, Sénèque, Perse, Épictéte et son
maître Musonius Rufus, Tempereur Marc-Aurèle, et une
foule d'hommes remarauables qui apprenaient du stoï-
cisme à bien mourir On vit quelques pythagoriciens :
Nigidius Figulus, Sextius, auteur présumé des Sentences,
et dont la belle et forte morale faisait dire à Sénèque,
son disciple, que la philosophie de Sextius était faite de
mots grecs et de mœurs romaines. V Ancienne Académie
était représentée par Varron et Pison, la Nouvelle par
Cicéroo principalement. I^es deux caractèries principaux
de ses écrits philosophiques sont Téclectisme et le scep-
ticisme. Cicéron suit la Moyenne Académie dans les
questions spéculatives, Platon dans la psychologie, Aris-
totoet surtout Zenon dans la morale; il n'est dogma-
tique que sur ce dernier point. Cet éclectisme aboutissant
au scepticisme se retrouve, moins fortement accentué, il
est vrai, dans presque tous les écrivains romains qui
parlent de philosophie; tous reprt^scntaient plus ou
moins respnt de l'époque, où il n'y avait de croyances
bien arrêtées sur rien. Il n'y eut pas de philosophie ro-
maine proprement dite; mais il est juste de constater
l'influence qms le stoïcisme exerça sur la jurisprudence ^
Rome; on comptait parmi ses adeptes les Tubéron^ k*»
Rutilius Rufus, les Scevola, les Luciiius Barbus, les
Servius Sulpicius, et la secte des Proculéiens. R.
RovAifSE (Religion). La religion des anciens Romain
n'a point eu, comme celle de différents autres peuples
une existence propre et originale, durant laquelle s
seraient progressivement développés les dogmes et ir*
culte : elle se forma en quelque sorte par voie d'acces-
sion, en s'assimilant les croyances et les rites des peu-
ples qui subirent la domination romaine. Ce fut un de^
principes de la |>olitique suivie par le Sénat, d'accordci
le droit de cité aux divinités étrangères, aussi bien que
d'adopter les institutions utiles qu'il trouvait chez Icf
vaincus. Les Dieux primitifs de Rome furent ceux dt
l'antique Italie, et ses croyances paraissent avoir été
empruntée» aux Pélasges, aux Étrusques et aux peuplades
aborigènes : au Latium appartiennent le culte de Sa-
turne, de Janus, de Picus, de Faunus, et, entre autres
rites, les Lupercales, les Lémurales et les fôtes de Paies ;
de la Sabine vinrent les dieux Consus et Mamers ou
Mavors, le culte des astres, et les idées 'î'une nntro vie ;
i'Etrurie donna aussi quelques-unes fie ses divinités,
ses collèges de prêtres, et sa science nugurale. A partir
des guerres Puniques, les Romains empruntaient aux
(irecs les immortels habitants de leur Olympe; Apollon,
Gérés, Proserpine, Mercure, Esculape, Castor et Pol*
lux, etc., prirent place au Panthéon romain, et eurent
des temples et des prêtres, comme les dieux nationaux
de ritaiie. Sous l'Empire, toutes les divinités, toutes les
superstitions de l'Orient furent à leur tour accueillies
avec faveur : la pierre noire, image du Soleil pour les
Syriens, fut apportée au Capitole par Héliogabale; on
emprunta Sérapis et Isis k l'antique Egypte ; les danses
frénétiques des prêtres de Cybèle eurent autant de suc-
cès que le baptême du Taarobole. Ainsi , sans avoir par
elle-même aucune supériorité, sans posséder ni une théo-
gonie plus élevée, ni une morale plus pure, ni un céré-
monial plus parfait, la religion romaine, par Tanion
même de tous les cultes, prit un caractère d'universalité
dans le monde ancien. Elle imposa k tant d'éléments di-
yen une forme toute latine, soutenue qu'elle était d'ail-
leurs par la prépondérance politique du peuple qui la
professait. Toutefois, il y avait là un grave danger ;
l'admission de dieux et de cultes exotiques implique une
foi peu robuste : quand on a des convictions sérieuses et
profondes, on ne passe point avec tant d'aisance à des
conrictions nonve!!es. Les annexions religieuses prati-
Suées par les Romains ne pouvaient engendrer que le
oute, rincrédulité, ou rindifférence. Les uns, à l'exem-
ple de J. C^ar, se moquaient ouvertement des dieux ;
les autres, comme Alexandre Sévère, pouvaient associer
dans un même oratoire les images de Jupiter, d'Orphée,
d'Apollonius de Tyane et de Jésus-Christ. Les empereurs
eux-mêmes occupèrent, par l'apothéose, une place con-
sidérable dans le culte : on adora leur génie, ils eurent
des autels et des sacrifices.
Dn autre caractère delà religion romaine fut son union
intime avec la politique. Aucun acte de la vie publique
ae ^aocoiBpUasait sans être précédé, aecqmpagnéoa suivi
de quelque cérémonie. Les Patriciens, en possession,
pendant plusieurs siècles, des fonctions sacerdotales ,
firentde la religion la servante de leurs intérêts ; les Au-
gures pouvaient, sous prétexte de mauvais présages, dif-
férer ou dissoudre les assemblées, ou bien, en alléguant
l'omission de quelques rites, annuler les délibérations
et abroger les lois ; ils faisaient parler à leur gré la voix
des oiseaux, les éclairs et le tonnerre, les entrailles des
victimes. A mesure qu'une province était conquise, Rome
y faisait pénétrer par ses colonies son organisation reli-
gieuse; elle admettait sans doute les divinités locales,
mais en les tenant dans un rang secondaire, ou en les
identifiant avec des divinités latines; ses pontifes n'a-
bandonnaient nulle part la direction des rites ; ils
avaient la surveillance, non-seulement des cérémonies
publiques, célébrées aux frais de l'État, mais des céré-
monies privées, faites par les familles en l'honneur de
leurs divinités domestiques.
Remarquons enfin, dans la religion romaine, la place
immense qui était donnée au culte. Ia théogonie , le
dogme n'est presque rien ; les rites sont à peu près tout.
Le génie éminemment pratique des Romains a laissé ici
son empreinte : ce qui leur importe, ce n'est pas de con-
naître les générations divines et les phases de l'existcnco
du monde, ce sont les rapports entre les divinités et les
hommes, c'est une règle morale. Il leur faut attirer la
«rctection et la faveur des dieux, détourner Inur coicnj
Sis interrogent les phénomènes de la nature, potir y dé-
couvrir des marqiK'« 'es manifestations d'une pensée
ou d'une volontt^ divine : dn là ro^ f^'-'inns de !:n\\rcs, ces
conjurations, ces oxpiaiionj^ multipliées qui 'composent
le culte romain. Un penchant à la superstition, naturel
dans tous les temps aux populations italienne*^, secon-
dait, chez les Romains, les desseins de la politique : Ils
s'empressaient d'admettre les divinités étrangères à côté
de leurs dieux nationaux , parce qu'ils croyaient saisir
dans certains événements, dans des circonstances for-
tuites, la preuve de la puissance de ces divinités. En as-
siéçeant une ville, ils avaient soin d'en conjurer les
dieux; <;uand ils l'avaient subjuguée, ces dieux faisaient
partie des trophées de la victoire. K. Hartung, La Reli-
gion des Romains, eu allemand, Erlangen, 1830, in-8<*;
G. Zeiss, Archéologie romaine, en allemand, léna, 1842,
in-8*»; Creuzer, Religions de V Antiquité, trad. par M. Gui-
gniaut ; Lacroix, Recherches sur la religion des Romains,
Paris, 1846, in-8°; Preller, Mythologie romaine, en
allem., Beriin, 1858, in-8«.
ROMAIQUE (Langue). V. Grecs modernes (Langue
des).
ROMAN. Un savant évêque du xvii* siècle, Huet, a
composé, à la prière de Segrais, sous le nom duquel avait
d'abord paru le roman de Zayde, une dissertation su»
Vorigine des romans. Il les appelle « un a^^éable amuse-
ment des honnêtes paresseux, » et les définit o des fictions
d'aventures amoureuses, écrites en prose avec art, pout
le plaisir et l'instruction du lecteur. » Cette définition,
qu'il a doctement développée, paraîtra peut-être bonne
pour les lecteurs de son siècle, qui aimaient, comme
M'"* de Sévigné, à mêler au frivole un peu do solide,
mais bien pauvre pour ceux du nôtre, que la prodigieuse
variété du roman moderne a gâtés. Elle n'est pas cepen-
dant aussi surannée qu'on pourrait le croire ; tout au plus
est-elle incomplète. Né du besoin de distraction et du
goût que tous les peuples ont pour les fables, le roman
est un récit comme l'épopée, avec les différences qui sé-
parent la prose de la poésie, la narration familière et
facile de la composition régulière et sérieuse, la vie bour-
geoise de l'idéal et des sentiments héroïques. Dans notre
littérature même, le roman et l'épopée se confondaient k
l'origine, et n'avalent ^'-jn même nom, tiré, selon
Huet, du langage romaxn ou roman, c-à-d. du latin
transformé que parlaient les conteurs de Provence : cette
étymologie en vaut bien une autre. L'art de conter en
prose se forma plus tard, avec le besoin de faire du nou-
veau, et d'écrire plus facilement et plus vite. Les auteurs
arrivèrent à peindre les mœurs, les sentiments, les pas-
sions de leur époque; et, lorsqu'ils eurent un talent
supérieur, ils s élevèrent k l'étude des caractères et à
l'expression de la vérité générale et universelle. — On
sait jusqu'où ils ont porté l'ambition. Déjà, en 18^3, un
homme d'esprit écrivait, dans la préface d'un roman qu'il
appelait une Histoire contemporaine : « Tout peut être
compris dans un genre qui, embrassant à la fois V Emile
et la Cyropédie, Gulliver et Tom Jones, Corinne et le Ao-
fTian comique... .^ les créations de Rabelais et le chef-
d'œuvre de Cervantes, appartient en même temps à la
ROM
1580
ROM
pastorale par Paul et Virginie, à la politiaue par Béli-
taire etLascaris, à Thistoire par Ivanhoé ot les Puritains
dÊcosset à l'épopée par le Télémaque et tes Martyrs,
Vaste comme rimagination, et changeant comme la so-
ciété, le roman échappe à toute définition comme à toute
entrave. Il pénètre avec Fontenelle dans le sanctuaire des
sciences, il interroge l'Antiquité sur les pas de Barthé-
lémy. Ses limites ne sont autres que celles du sentiment
et de la pensée. Son domaine est l'univers. Mesurant sa
marche sur les progr^ de la civilisation, et enrichi par
tout ce qui la développe, appauvri par tout ce qui l'altère,
il réfléchit la vide image dé cette reine du monde; c'est
là son vrai titre et sa gloire. » (Do Salvandy, préface
d!Âlon2o.)
Depuis ce brillant panégyrique, le roman moderne a
fait encore du chemin : nous le voyons, depuis 4830 en-
viron, agiter et résoudre, au gré de la passion et du so-
f)hisme, les questions les plus délicates et les problèmes
es plus redoutables de l'humanité. Il travaille « à l'in-
struction des lecteurs, » autrement certes que ne l'en-
tendait le bon Huet, et sans se préoccuper comme lui de
l'art et du style. Le public n'est cependant pas très-
ambitieux, et l'on peut croire que le plaisir, comme le
bon sens et le goût, s'accommoderait de moins d'au-
dace et de plus de simplicité. Après tout, moral, histo-
rique ou philosophique, le roman se réduit à la peinture
des mœurs ; et, comme l'a dit un juge que Ton aimo à
citer : a Ce que le savant évèque d'Avranches désignait
comme la source unique des romans en est toujours la
source la plus féconde et la plus heureuse. On ne peut
inventer rien de mieux que l'amour; et de nos Jours
l'admirable Walter Scott, dans ses créations si éclatantes
et si nombreuses, dans cette vie nouvelle qu'il a donnée
au monde romanesque, en le rendant quelquefois plus
vrai que l'histoire, emprunte encore ses plus touchantes
inspirations à la peinture de cette passion, qui a si long-
temps occupé les crayons des romanciers et des poètes. »
(Villemain, Essai sur les romans grecs.)
Dans une si grande variété de matière et de formes,
les règles du genre ne peuvent être que les grandes
règles du goût : vérité des caractères, observation Juste
et délicate, vraisemblance des événements, mesure et
sobriété des analyses, des descriptions et des peintures,
mouvement et rapidité du récit, surtout pour les lecteurs
français. Est-il besoin d'ajouter la décence et la dignité?
Malheureusement, les livres ont plus de libertés quo le
thé&tre, qui cependant en a beaucoup ; et celles que les
romanciers prennent trop souvent avec les mœurs ont
rendu bien difficile le choix des bons romans. On doit
proscrire avec la même sévérité les paradoxes ou les
mensonges qui faussent ou détruisent les principes éter-
nels de la morale et de la société, a 11 y a, dit un autre
critique qui, dans cette matière, a la double autorité
d'une érudition peu commune et d'une raison aussi pi-
quante que solide, — il y a des romans qui ont la -préten-
tion pernicieuse de mettre l'idéal hors du bien. Cette
prétention est ordinairement celle des siècles dans les-
quels la corruption passe du cœur à l'esprit, et où les
passions cessent d'être des emportements des sens pour
devenir des doctrines... Le sophiste s'ajoute au libertin :
le plaisir ne suffit plus ; il faut le scandale, et le scandale
poussé jusqu'à une sorte de victoire sur la morale, grâce à
î'ébahissement des badauds, qui trouvent fier ce qui n'est
3u'insolent. n (Saint-Marc Girardin, Courx de littérature
ramatique, ch, xxxix.) Le xvm* et le xix*' siècle se sont
rendus étrangement coupables de cette Intrépidité d'ima-
gination qui ne recule devant aucune licence, et de ces con-
ceptions audacieuses qui, pour exciter le goût du public,
mélangent dans des proportions effrayantes les éléments
les plus dangereux. Mais une invention réservée à notre
époque, c'était de faire du roman une espèce de mar-
chandise littéraire, de le mettre en commandite, ou, pour
mieux dire, en atelier, et de distribuer l'exécution et les
détails à des collaborateurs, en réservant au chef de l'en-
treprise la direction suprême, l'honneur du nom d'au-
teur, et le principal bénéfice. C*est ainsi que nous avons
vu se conduire et s'acbever, au profit des journaux poli-
tiques aussi bien que des romanciers à \a mode, ces
, longues ébauches des feuilletons, où la main inhabile et
distraite trace des contours irréguliers et confus, mêle
les couleurs, et s'inquiète peu de la ressemblance des
I portraits. Ainsi s'ajustent ces effets dramatiques, achetés
à force d'invraisemblances et de concessions imposées au
bon sens ; ces canevas d'intrigues qui se brisent tous les
Îours à la fin de la page, pour se renouveler péniblement
e lendemain, sasa souci des oublis, des contredictioas ou
des redites; ces amples narrations, renouvelées d^Alark
et de Cléliey
OU Ton volt commo il (kut berner les nations,
et qui font regretter le bon temps où les romans avaient
une fin. Encore Cyrus et Clélie parlaient-ils français;
tandis que leurs héritiers ont remplacé leur style pn''-
cieux et leurs dissertations subtiles par un idiome ptat
et incorrect, quand il n'est pas prétentieux et ampoulé.
Ceci est affaire de goût et de langage ; mais Thonnêteté
se révolte contre le système odieux des romanciers à
bout d'invention, qui ont fait de la société une caverne
de voleurs, et de la famille un repaire de vices drama-
tiques. Hâtons-nous d'ajouter que les Revues respectent
le lecteur beaucoup plus que ne le font les journaux quo-
tidiens; qu'en dépit de l'engouement du public, les
œuvres immorales ou extravagantes font leur temps,
ainsi que les platitudes, et que les bons romans sur-
nagent seuls, comme tous les bons livres.
L'histoire du roman serait plus longue que Clélie et
Clarisse; à peine pouvons- nous en indiquer les points
essentiels. Les contes et les fables sont communs à tous
les peuples. Les Arabes ont les Mille et une Nuits, les
Indiens leurs interminables épopées. Chez les Grccs> le
genre romanesque semble dater de Platon et de Xéno-
phon. L'évêque d'Avranches même, avec le plus grand
sérieux et le plus profond respect, le ferait presque re-
monter jusqu'aux paraboles des livres saints et aux allé-
gories du Cantique des Cantiques. Sans aller si loin, il
faut reconnaître dans la Cyropédie et V Atlantide les ca-
ractères de la fiction, qui frappèrent même Cicéron. Mai*
la vie publique et poéti(][ue des Grecs, au temps de leur
prospéité, se passait facilement de ce divertissement des
tt honnêtes paresseux, » parce qu'elle était bien remplie;
et une civilisation qui tenait les femmes de condition
honnête renfermées dans l'ombre du gynécée ne permet-
tait guère les peintures de l'amour tel que l'entendent
les Modernes. Il ne restait pour les contes et les romans
que des lieux communs facilement épuisés, des aventures
bizarres, des histoires de pirates et d'enfants enlevés, et
des reconnaissances, qui étaient le fond monotone et
obligé du genre. Les Fables Milésiennes ne nous sont
connues que par la tradition ; mais on devine aisément le
caractère de ces productions de la molle et voluptueuse
lonie, puisqu'elles scandalisèrent les Partlies,qui les trou-
vèrent dans le bagage des lieutenants de Crassus, à peu
{>rès comme nos officiers virent en 1812, dans les riches
)ibliothèques de Moscou, les plus mauvais romans du
xviii* siècle. N'oublions pas cependant aue la poétique
histoire de Psyché est donnée par Apulée comme une
fable milésienne. — Dans la décadence des lettres grec-
ques, le genre fabuleux devient à la mode, et Lucien
écrit son flistoire véritable pour se moquer des voyages
imaginaires. Le goût obstiné de Racine et la sévérité de
Port-Royal ont popularisé le titre des Amours de Théagène
et de Chariclee, premier type du roman d'amour, et
ouvrage d'Uéliodore, évêque.do Tricca. On lira dans hi
lettre de Huet à Segrais, ou plutôt dans VEssai de M. Vil-
lemain sur les romans grecs, ce qu'il est bon de savoir
de ces compositions, qui peut-être n'amusaient pas trop
leurs lecteurs, sauf la pastorale élégante et gracieuse die
Daphnis et CfUoé, traduite par Amyot d'un Longus in-
connu, avec une naïveté qui n'appartient pas à l'auteur
original.
Les Romains eurent le goût romanesque par imitation ;
mais ils semblent l'avoir cultivé plutôt dans lea décla-
mations des écoles que dans les récits d'imagination. A
peine peut-on nommer le livre odieux de Pétrone, où les
seuls passages lisibles sont de la critique et non du ro-
man. Quant à VAne d'or de l'Africain Apulée, malgré des
défauts de même nature, au moins offre-t-il des inven-
tions plaisantes et bouffonnes dont on peut rire de bon
cœur.
Avec le moyen âge, époque d'aventure&, de hasards et
de crédulité, le roman arrive à sa vraie forme et à sa po-
pularité universelle. En prenant son nom moderne, il a
d'abord le caractère épique, et une certaine grandeur
poétique et morale qu'il doit aux idées et aux sentiments
chrétiens. La femme a obtenu dans la société la place
qu'elle y tiendra désormais; la chevalerie remplit les inoa»
ginations de sentiments au-dessus du vulgaire et d'aven-
tures merveilleuses. Nous avons indiqué plus haut rs
rapport de l'épopée classique et du roman populaire : la
transition se fait par les chansons de gestes et les cycles
épiques de BoUmd, da Saint-Graci^ d^AleoDœedrê ie
ROM
1581
ROM
Qrmi^ de Rohm Bood ( 7. et mots). Ces légendes en
vers amaMDt Toiaiveté et Tignorance pendant les heures
de solitude* ot les longues veillées. Mais on finit par se
lasser de Roland et de ses « pairs. % Le roman devient
allégorique : au xn'* siècle, il conserve la forme des vers,
mais il s*essaye à la peinture des mœurs et à la satire
dans le Uoman de la Rose, et surtout dans le Boman du
lienard [V, ces mols)<t long fabliau maintes fois imité :
nous ne sommes pas loin de la prose et de Rabelais. —
On sait tout ce que renferme « la vie très-horrificque »
de Gargantua et de Pantagruel ; il manque cependant à
cette verve prodigieuse d'invention, qui s*est tout permis,
ce ^rand él'.'rT^cnt du roman moderne, Tamour. Les con-
çu rs (le récoii! do Rabelais, Bonaventure Despériers, la
reine de Navarre elle-même, ne le connaissent pas beau-
coup plus que lui. La galanterie légère et brillante de
Bocrace leur convenait mieux, et le Décaméron a plus
d'une fois servi de modèle aux bons conteurs français,
tandis que d'autres légendes italiennes fournissaient à
Shakespeare, entre plusieurs sujets de drames, les amours
désormais impérissables de Roméo et de Juliette et la
jalousie d'Othello. — Rabelais a porté dans le roman la
philosophie, la politique, Tesprit d'examen et de scepti-
cisme qui doivent aller si loin après lui. Et néanmoins
c'est de son temps, c'est au xvi* siècle que l'amour plato-
nique, poussant jusqu'à l'extravagance l'idéal de la déli-
catesse, ressuscite la chevalerie dans les imaginations
populaires, et fait éclore ou renaître l'héroïque et nom-
breuse famille des Amadis ( F. ce mot)^ qui a été trans-
portée en Espagne et transformée : il eut le privilège de
tourner la tète aux lecteurs espagnols et fhmçais, jusou'à
l'immortelle plaisanterie de Cervantes, plus meurtrière
pour les romans de chevalerie que le bras même de la
gouvernante et des bons amis de Don Quichotte. On
ne connaît plus ces ouvrages. Nous avons aujourd'hui
i'autres lectures, d'autres tentations et d'autres folies
« que celles de l'ingénieux hidalgo de la Manche; » mais
ane spirituelle leçon de M. Saint- Marc Girardin peut
iu moins nous donner une idée des sublimes amours
d'Amadis et d'Oriane. Quant au Don Quichotte^ il a suffi
à faire la gloire littéraire de l'Espagne, puisque, du moins
jusqu'à ce jour, le seul livre espagnol qui soit populaire
en Europe est un roman, chef-d'œuvre d'invention phi-
losophique et plaisante, où la comédie et le sentiment
s'allient avec autant de bonheur que la folie et la raison
dans le héros.
Une autre inftuence étrangère, celle des pastorales
italiennes du Tasse et de Guarini, de VAminta et du
Pastor Fido {V, ces mots)^ vint modifier en France le
caractère du roman, et donner au goût une direction
nouvelle. VAstrée marque une époque dans l'histoire de
ce genre, devenu tout français. Céladon remplace Ama'
dis; les amants se font bergers, et quittent la lance pour
la houlette ; mais les sentiments délicats et la dévotion
d'amour, que d'Urfé appelle « les effets de l'honnête ami-
tié, » n*j perdent rien; au contraire, Tanalyse et la dis-
sertation savante et subtile se mettent de la partie.
L'Hôtel de Rambouillet en fait ses délices, et M^* de Scu-
déry consacre la fécondité laborieuse de son imagination
à en divertir les pricietues et les honnêtes gens. Tout le
monde a ri des vigoureuses attaques de Molière et de
Boileau contre les héros de roman et leurs admirateurs,
contre les portraits de fantaisie, les intrigues sans fin. On
sait encore le mépris que Bossuet témoigne, du haut de
sa chaire, pour ces « froides et dangereuses fictions. »
Elles ont amusé cependant d'excellents esprits. M*"* de
Sévigné et son ami La Rochefoucauld « se prenaient, dit-
elle, au style maudit et détestable de La Calprenède
comme à de la glu. » Peut-être môme préféraientr>ils les
Quinze intrigues de la Cléopâtre aux vingt volumes du
ynu et de la Clélie, fidèle, mais trop longue expression
des idées et des sentiments d'une société spirituelle et
polie jusqu'à l'excès. — Il faut remarquer dans M"* de
Scudéry la part littéraire que les femmes commencent à
se faire dans le roman, où leur imagination et leur sen-
sibilité les appellent à de grands succès. Signalons aussi
l'apparition de l'histoire, si défigurée qu'elle soit par les
auteurs qui l'habillent à la française. Ces Grecs, ces Ro-
mains de fantaisie ne sont pas, comme les chevaliers
errants, sortis tout armés du cerveau du narrateur; ils
portent des noms vrais, ils réveillent des souvenirs.
Nous n*en sommes pas encore au roman historique;
mais on peut d^à le prévoir. En attendant, la peinture
des mœuTB devient plus simple et plus humaine, quoi-
que toujours noble et délicate, sous la plume de M'"* de
La Fayette, dans Zayde et dans la Princesse de Clèves,
« Passer , dit Laharpe, de M*"* de La Fayette à Scarron,
c'est aller de la bonne compagnie à la taverne; » mais le
Aoman comtatie Justifie trop bien son titre pour se pas
compter, dans l'histoire du cenre, comme le modèle le
plus franc et le plus vif de la gaieté populaire qui parle
français. Scarron fait penser aux comédies bouffonnes de
Molière, M™* de La Fayette aux comédies héroïques de
Corneille. Citons encore, comme modèle d'agrément, le
roman de Psyché, où La Fontaine mêle si naturelle-
ment la fiction, la grâce et la plaisanterie. Nous ne ferons
pas au Télémaque l'injure de le compter parmi les ro-
mans. Si Fénelon écnt en prose, s'il a l'esprit un peu
imagination
couleurs. — Mais la fiction « aspire à descendre » des
hauteurs sublimes d'autrefois, à suivre la pente de l'es-
prit et des mœurs du siècle nouveau. Lesage, qui tient
encore du xvu* siècle par le goût et le stvle, qui élève
même le roman au rang de la haute comédie par la pein-
ture des caractères, Lesage n'a plus cet amour du grand
et de l'idéal dont ses devanciers avaient abusé; la prose
a pour longtemps remplacé la poésie. — Bientôt même
le roman s'altère et se dégrade : il ne se propose plus de
divertir, mais de détruire, à force de licence et d'impiété t
c'est l'œuvre déplorable de Voltaire, et de ses imitateurs,
aui n'ont pas son génie; œuvre qui se poursuit jusque
ans la Révolution, et au delà. Il y avait cependant,
même an xvni* siècle, d'autres moyens de réussir. LaIs-
sons de côté la pédanterie philosophique de Marmontel,
ennuyeux dans Bélisaire et dans les Incas^ agréable avee
effort, mais froid dans les Contes moraux; laissons éga-
lement les fadeurs chevaleresques et pastorales de Fio-
rian. Le grand roman de l'époque futia Nouvelle Héloise^
où la magie du style fit admirer des sentiments souvent
déclamatoires et des situations fausses, auxquels on est
moins sensible aujourd'hui. J.-J. Rousseau, d'ailleurs,
avait dévoré des ronians pendant son enfance, et il en fit
toute sa vie. Au moins n'avait-il pas, comme Diderot et
Crébillon fils, cherché de faciles succès dans la satire et
le scandale. Ce mérite est également celui de l'abbé Pré-
vost, peintre touchant, mais souvent diffus, de la passion,
des fautes et du malheur. Il appartient surtout au pre*
micr et illustre élève de Rousseau, Bernardin de Saint-
Pierre, qui purifie le roman par l'immortelle idylle de
Paul et Virginie,
Ainsi, dans le xviu* siècle, le fopd du genre s'était dé-
veloppé; le cadre s'était agrandi; à la forme première de
la narration s'étaient Routées celles de la correspon-
dance, des mémoires, des confessions; effet d'une popu-
larité qui augmentait tous les Jours. Les autres peuples
de l'Europe n'étaient pas restés en arrière de la France;
Swift, salué par ses compatriotes du nom de « Rabelais
anglais, » fit servir le merveilleux à la satire mordante
des folies humaines dans les Voyages de Gu//tt;er; Daniel
de Foé, son contemporain, rencontra une inspiration de
génie dans l'histoire de Robinson Crusoé^ aux prises avec
toutes les misères et tous les dangers de la solitude.
Trente ans plus tard, l'Angleterre et la France applau-
dissaient, dans Tom Jones, à la gaieté naturelle et plai-
sante, quoique trop libre, de Fielding ; dans Grandtsson
et dans Clarisse Harlowe, aux longues et pathétiques
peintures de Richardson, qui passionnaient Diderot. Ci-
tons aussi, parmi les bons ouvrages du genre, le Vicaire
de Wake/ield, où Goldsmith a donné l'expression con-
sciencieuse, édifiante et un peu prolixe de la vie familière,
des sentiments honnêtes et de la vertu. — L'Allemagne
en était encore à la chevalerie et au merveilleux un peu
puéril de ses fantômes et de ses ondines, lorsque Gœthe
vint ébranler profondément les imaginations avec les
Souffrances de Wertfier, le seul bon roman qu'il ait fait
S'il est vrai, comme on l'a dit, que le suicide de son
héros ait été contagieux parmi les étudiants allemands,
cette fidélité trop scrupuleuse d'imitation serait une
preuve singulière du danger des romans pour les têtes
peu solides. Cétait bien assez d'imiter de Werther les
vagues désirs, les répugnances, le dégoût de la vie, ainsi
que l'a fait à la même époque l'Italien Ugo Fosoolo dans
son roman de Jacopo Orlis.
Le xviu* siècle avait la passion des romans ; le xix* en
a eu la fureur. Cette littérature, lucrative et facile, nous
a inondés de productions et de produits éphémères. C'est
surtout depuis l'industrie du roman-feuilleton que Ton
pourrait dire avec Boileau :
En poorrait-oii troavsr deiuL oa troU eatrs iiilU«f
ROM
1582
ROM
On peut cependant choisir dans cette multitude, et s'ar-
rêter à quelques grands noms et à quelques bons ou-
vrages. En premier lieu se présentent deux écrivains de
^nie, M">* de Staâl et Chateaubriand, dont les livres ont
inégalement résisté à Taction du temps. L*étude des carac-
tères, le sentiment passionné des arts, môme des scènes
dramatiques, n'ont pas empêché Delphine et Corinne de
vieillir. Atala, dont le prodigieux succès « enivra son au-
teur des jouissances de Tamour-propre, » a un peu perdu
l'éclat et' la richesse de son coloris. René seul, écrit avec
la force du génie que la flatterie n'a pas gftté, est de-
meuré l'expression la plus originale et la plus belle de
ce « vague des passions, « maladie du siècle, qui com-
mence à Rousseau et ne finit pas avec Alfred de Musset.
Les Martyrs {V.c$ mot) n'ont pas été aussi heureux; en
aspirant à l'épopée, l'auteur ne s'est pas .élevé au-dessus
du roman, sans être d'ailleurs branchement romancier,
parce qu'il avait toutes les qualités du poète, excepté
le don des vers. — Après Chateaubriand, il paraîtrait
presque ridicule de citer Fiévée et la Dot de Suzette,
M"** Cottin et Malvina, et à plus forte raison les longues,
sinistres et puériles élucubrations de Ducray-Duminil,
imitées de l'Anglaise Anne Radcliffe, si ces ouvrages,
oubliés aujourd'hui, et refaits d'ailleurs dans d'autres
conditions, ne témoignaient du goût d'une génération.
Ce sont des divertissements plus littéraires que les
esquisses de caractères et de situations comme Adolphe
de Benjamin Constant, Ourika de M"** de Duras, Valérie
de M"'' de Krudener. Les femmes ont excellé chez nous
dans ces vives et courtes peintures, et rempliraient à
elles seules une grande partie de l'histoire du roman.
Mais le goût et le progrà des études historiques, qui
sont la gloire du xix* siècle, allaient ouvrir aux roman-
ciers une vaste carrière : on a rencontré plus haut le nom
et l'éloge de Walter Scott ; peut-être sa popularité prodi-
gieuse a-tp^lle souffert du temps, comme celle de tous
ses pareils; encore ne semble-tp-il pas qa*Ivanhoë ou les
Puritains d'Ecosse puissent vieillir; et si tel est le pri-
vilège des tableaux historiques restitués par la longue
patience de l'étude et du génie, ou en peut dire autant
de conceptions originales et touchantes comme la Prison
d'Edimbourg. — De tels succès mirent le roman histo-
rique en grande faveur. Depuis le Cinq-Mars, sérieux et
rouie, d'Alfred de Vigny, Jusqu'aux faciles et joyeux héros
d'Alexandre Dumas, l'histoire fut fouillée, retournée, ha-
billée et falsifiée de toutes les manières, sous prétexte de
lui rendre son véritable costume. Dan s cette profusion de
livres souvent amusants à lire vite, comme l'interminable
légende des Trois^ Mousquetaires de Dumas, se détache
ce que l'école romantique appellerait le colosse du genre,
Notre-Dame de Paris. La critique a fait bonne et sévère
justice des invraisemblances, des antithèses systéma-
tiques, des tendances dangereuses, du mauvais goût, des
contre-sens archéologiques; mais il reste à l'œuvre de
Victor Hpgo ce qui ne s'emprunte ni ne s'altère, c-î-d.
le mouvement, la vie et la puissance; on peut bl&mer
les traits qu'il donne à ses personnages : on ne les ou-
blie pas. — Les Misérables, écrits trente ans après Notre-
Dame de Paris, ont été l'objet d'un véritable engouement
de la part des partisans déterminés de M. Victor Hugo;
il y a cependant beaucoup à réduire de tout le bruit
qu'on en a fait. L'auteur a voulu tout mettre dans cette
vaste composition : drame, peinture des mœurs, histoire
contemporaine, théories philosophiques, sociales, écono-
miques, administratives; mais il use et abuse de tout;
il appuie avec une étrange complaisance sur des idées et
des images immondes ; fi fatigue le lecteur par des di-
gressions à perte de vue, par l'étalage d'une érudition
prétentieuse et incommode, par un style qui pousse k
Dout tous les défauts de l'école, alliances de mots ambi-
tieuses et forcées, néologismes indigestes ou même bar-
bares, et jusqu'aux incorrections grammaticales, où le
poète n'était jamais tombé. Non pas qu'il ne se rencontre
dans les Misérables des conceptions touchantes ou gra-
cieuses, quelques peintures fortes, quoique toujours
chargées, des touches de style excessives et vigoureuses :
mais l'impression générale du livre est dangereuse, la
composition diffuse, incertaine, souvent puérile, chargée
d'invraisemblances et de contradictions que le talent in-
contestable de l'auteur ne suffit pas à faire accepter.
Ainsi nos romanciers se font moralistes et philosophes,
comme ilss'étaient faits historiens. Nous rappellerons seu-
lement, tans insister sur les détails, de quelle étrange ma-
nière a été accommodée la morale dans les laborieuses
mais énergiques combinaisons de Frédéric Soulié, dans
l'immense Comédi» humaine de Balzac, dans les concep-
tions séduisantes, et trop souvent dangereuses, de Georgi
Sand, ajoutons dans les tableaux de mœurs contempo-
raines d'Eugène Snfi et des deux Dumas. £stF<:e donc une
nécessité pour les sociétés trop civilisées de se complaire
dans les peintures réelles et vivantes de leurs maux et de
leurs plaies, exagérées encore par l'audace ou la fantaisie
de l'écrivain ? ou bien encore d'accueillir, sous le couvert
d'une richesse admirable d'imagination et d'un grand
éclat de style, les attaques les plus pernicieuses contre
des vérités dont le seul tort est d'être aussi vieilles gue
le monde? La mode a partagé ses faveurs aux Mémoires
du Diable de Frédéric Soulié; à Lélia de George Sand ; a j
Père Goriot, aux Parents pauvres de Balzac; aux Mys'
tères de Paris, à MathUde d'Eugène Sué; & Monte-Cristo
de Dumas père, sans s'inquiéter si les esprits faibles pren-
draient au pied de la lettre ces vilaines images de b
société, comme le chevalier de La Manche tenait pour ar-
ticles de foi les aventures des chevaliers errants.
Nous ne ferons pas à la littérature l'injure d'accepter
pour un dédommagement de ces lectures dangereuses la
gaieté populaire et grivoise de certains romanciers. Nous
serions cependant injustes de ne pas signaler des compo-
sitions dont le succès prouve que le naturel et l'intérêt
suffisent encore pour fonder la réputation d'un homme
de talent et le condubre à l'Académie, depuis Colomba,
de M. Mérimée, jusqu'à la Maison de Penarvan de M. J.
Sandeao, et Jusqu'au Roman d'un jeune homme pawore^
de M. Octave Feuillet. — Par là s'explique le succès que
trouvent chez nous les romans étrangers, qui, d'ailleurs,
changent de caractère pour répondre à la mobilité du pu-
blic. Le jour où Walter Scott eut épuisé le roman histo-
rique, les Anglais revinrent avec Dickens au roman de
mœurs et d'observation familières, tel à peu près que
l'avaient compris, au xviu* siècle, FieldingetRichardson.
L'Américain Cooper avait mis à la mode les scènes de la
mer et de la vie sauvage. Lorsque de nombreuses imita-
tions de ses romans le Pilote et les Mohicans eurent usé
la mer et les sauvages, les romanciers américains adop-
tèrent le genre anglais ; une forte et pathétique pointure
de l'esclavage, sortie, sous le titre de la Case tù ronde
Tom, de la plume d'une femme. M"** Beecher Stowo,
émut et toucha les deux mondes, à la veille do la lutte san-
glante des deux Amériques. Le goût anglais, du reste,
est celui des peuples du Nord ; lorsque la Suède essaye
d'exprimer dans les romans les idées et la vie de ses
froides régions, elle adopte le ton, les manières et le tour
d'esprit de l'Angleterre et de l'Amérique. — Dans cette
vogue universelle du roman, il n'y a pas jusqu'à la piété
qui n'essaye de combattre le mal par ses propres armes,
et d'opposer le roman chrétien au roman philosophique
et socialiste : un grave et pieux prélat refait dans Fa-
biola le roman des Martyrs, et appuie ainsi, peut-être
involontairement, ce que Tévêque d'Avranches avait écrit
pour la justification de ses amis.
Que faut-il conclure de cette revue si longue et cepen-
dant si incomplète où nous ne pouvions et ne devions
pas tout dire? La sévérité proscrit des lectures presque
toujours inutiles. Si l'on regarde seulement le bon em«
plot de notre vie, si courte et si troublée, ne dira-troo
pas de tous les romans ce que le curé de Don Quichotte
dit de V Histoire du fameux Tirant le Blanc^ qu'il dé-
clare d'ailleurs « le meilleur livre du monde pour le
style et le naturel? avec tout cela, l'auteur eût mérité de
passer le reste de ses jours aux galères, pour avoir débité
tant de sottises sans y être contraint. » Cependant, les
romans ont rencontré rarement des juges aussi sévères.
L'indulgence tolère au moins les bons, dans l'intérêt de
la faible humanité, qui demande une trêve et une dis-
traction aux préoccupations trop sérieuses de notre &ge,
et répète timidement après La Fontaine (VDI, Cab. 4) :
Le monde eat vieux, dit-on : Je le crois; cependant
Il le fiiat amiuer encor comme an enfont.
A.D.
ROMAN HDialecte^, nom donné quelquefois à lldiome
rhétien {V. ce mot).
ROMAN (S^le). V, RoMANB (Architecture).
ROMANCE, mot qui désigna d'abord un poôme composé
en langue romance ou romane , et qui s'est ensuite i^h
fOiqué dans un sens restreint aux cnants populaires ds
'Espagne, célébrant les grands événements de l'histoire
nationale, les hauts faits des héros et des rois. Ces n>-
mances espagnoles sont généralement divisées en cou-
plets (copias) de 4 vers ; les vers ont 8 syllabes, et ne sont
pas rimes, mais seulement assenants. K. RoMANGiaOt
ROM
1583
ROM
ROHAiici, petite pièce de ven, divisée en couplets
J'égale étendue et de môme mesure, et destinée à être
chantée. La mélodie que le musicien lui applique est la
même pour les di?ers couplets. La romance exprime
particulièrement les sentiments tendres et langoureux,
mais peut prendre un caractère dramatique ou passionné.
L'origine de ce genre de composition remonte aux Trou-
badours et aux iSrouyèrM. Celles de leurs pièces qui nous
ont été conservées avec une notation musicale prouvent
que la mélodie était courte, sans tonalité précise, d*un
rnythme indécis, et consistait en quelc[ues sons plain-
tifs, monotones, dont la persistance finissait par saisir
Toreille et toucher le cœur : tel est le caractère des chants
du châtelain de Coucy, d'Adam de La Halle, de Lescu-
rel, etc. A partir du xvi* siècle, la romance française eut
plus de vie et de mouvement, un rhythme plus accusé,
et un air de grftce qui la fit rechercher par toute TEu-
rope : les musiciens qui s*y exercèrent avec le plus de
succès furent Guill. Leheurteur, Pierre Vermond, Beau-
lieu, Deschamps, Ciaudin, Du Gaurroy. On a des ro-
mances agréables de Louis XIII, de Guédron, son maître
de musique, et, sous Louis XIV, de Lulli, de Boisset, de
Lambert, de Bemier, de Colin de Boismont, de Bory, de
Colasse, de Campra, etc. Vers le milieu du xviu* siècle,
la romance prit un développement analogue à celui de la
musique elle-même, et Ton vit se succéder une multi-
tude de fraîches inspirations, entre autres : Que ne suiS'
je la fougèret charmante idylle écrite par Riboutté sur
un vieil air gu*on a faussement attribué à Pergolèse'; Je
l'ai planté, je Vai vu naStre, par J.-J. Rousseau ; 0 ma
tendre musette, paroles de Labarpe, musique de Monsi-
gny; // pleui, il pleut, bergère, de Fabre d'Églantine,
musique de Simon (directeur du théMre des Variétés);
i* Amour est un enfant trompeur, et Plaisir d'amour ne
dure fiu'un moment, petits chefs-d'œuvre du musicien
J.;P. Martini; les Petits oiseaux , par Rigel; J'ai vu
Lise hier au soir, par le hautboïste Garnier ; faime à
voir les hirondelles, par Devienne; Pauvre Jacques,
œuvre de la comtesse de Travenet, que les royalistes
chantaient dans les premiers temps de la Révolution.
C'irtains compositeurs commencèrent à se consacrer tout
entiers au genre de la romance; mais le sopraniste Alba-
nèse est le seul de ce temps-là qui ait laissé des recueils
agréables encore aujourd'hui. Après les orages de la
Révolution, sous le Directoire, le Consulat et le premier
Empire, plusieurs musiciens donnèrent des romances
qui jouirent d*une popularité méritée : de ce nombre
étaient Garât, Boleldieu, Pradher; on n*a point oublié
non plus Carbon nel, auteur de Brigitte et de Pauvre
Use à quinze ans, ni Lambert, qui nous a laissé Les
bords de la Loire, et De ma Céline amant modeste, ni
Choron, dont la Sentinelle fit le tour de l'Europe, ni Fol-
let, auteur de la romance Fleuve du Tage, Mais les com-
positeurs qui eurent les succès les plus nombreux et les
plus prolongés furent Plantade et d'Alvimare, chez qui
Ton commence à remarquer une certaine ambition dra-
matique dans les accompagnements. Quelques Italiens
vinrent aussi cultiver la romance française ; tels furent
Godefroy Ferrari, Lamparelli, Mengozzi, Ballochi, et
surtout Blangini, auteur de délicieux nocturnes. Deux
femmes se firent également une brillante réputation ,
M'"* Gail, et la reine Hortense, auteur du chant Partant
pour la Syrie, que le second Empire français a pris pour
chant national. C'est à la reine Hortense qu'on doit
l'idée de former des albums de romances, et celle de
joindre un dessin à chaque morceau. — Pendant le ç;ou-
vernement de la Restauration, le premier ranç parmi les
auteurs de romances appartint à Romagnesi, dont les
mélodies claires, faciles, bien écrites pour la voix, ont
cette juste mesure de gaieté et de sentiment qui est aussi
éloignée du pros rire que de l'emportement de la passion.
A coté de lui brillèrent Amédée Rousseau, dit de Beau-
plan, qui publia une foule de chansonnettes vives et pi-
quantes; Edouard Bruguière, dont les romances respirent
une sensibilité touchante; M"** Pauline Duchambge,
M»* Malibran, Panseron, etc. A la suite de la Révoluuon
de 1830, ao même temps que triomphait dans la littéra-
ture l'école romantique, Hippolyte llonpou tenta une
transformation analogue de la romance : son Andalouse,
d'une tournure si cavalière, eut une vogue immense.
Mais la mort prématurée de Tauteur fit avorter la mu-
sique romantique. Alors fut introduit un genre nouveau,
que Lotsa Paget, gui en fut la créatrice, porta immédia-
lement à la perfection : ses romances sont de petits
drames, de petits épisodes de la vie bourgeoise, mé-
l«u)^és de douce seasibilité, de bon sens et de gaieté
pérée, avec des mélodies vives, bien rb^hmées et facilei
à saisir. Dans le même temps, Masini, originaire d^
Florence, mettait dans la romance la grîce et la limpi-
dité qui caractérisent le génie italien ; 11 eut dans les
salons de Taristocratie la même vogue que Loisa Puget
avait obtenue chez les bourgeois. 11 y eut moins de déli-
catesse, mais plus de franchise et de couleur, chez Théo-
dore Jjibarre. Acôté de Fréd. Bérat, plein d'émotion et de
naturel, Grisar, Clapisson, Thys, Lagoanère, Latour,
Chéret, Scudo, Vimeux, Vogel, Arnaud, Henrion, Na-
daud, se sont fait de nos jours une réputation méritée.
ROMANCERO, c.-à-d. en espagnol recueil de romances»
Il y a cette différence entre les Romanceros et les Can»
cioneros ( V. ce mot)^ que les premiers ne renfermaient
originairement que des chants populaires, tandis que les
seconds furent consacrés à des compositions étudiées,
dont les auteurs faisaient plus ou moins œuvre de poésie*
Le Romancero espagnol , tel que Ta donné son dernier
éditeur, M. Duran (Madrid , 1850 ], renferme des pièces
d'une nature et d'un mérite très-différents, soit par le
sujet, soit par la date de la composition. Il est arrivé,
en effet, que les chants véritablement populaires et pri-
mitifs de l'Espagne ont été imités et remaniés par les
poètes depuis le xvi* siècle, tels que Lope de Vega, Que-
vedo, Juan de Timoneda, Cervantes; en sorte qu'il se
rencontre, sous la môme rubrique, des pièces d'une qua-
lité, d'une origine et d'un mérite extrêmement divers.
Assigner à chaque pièce sa date approximative est une
des plus graves difiicultés qu'ait rencontrées M. Duran :
il distingue des romances de huit époques différentes;
les anciennes sont les meilleures, et les plus curieuses
comme écho naïf des sentiments et des opinions popu-
laires. Après la diversité des dates vient la diversité des
sujets. Le Romancero peut être considéré comme offrant
les éléments d'une ou de plusieurs épopées : aussi les
dramaturges castillans ont abondamment puisé dans ce
riche trésor des traditions nationales. Nous distinguerons
plusieurs groupes dans les romances espagnoles : 1® les
romances chevaleresques; 2*^ les romances historiques,
qui se rapportent à l'histoire de l'Espagne; 3^ les ro-
mances ne mœurs; 4^ les romances moresques; 5^ les
romances, de beaucoup les plus mauvaises, qui se rap-
portent à l'antiquité fabuleuse ou historique.
Les Romances chevaleresques se divisent en plusieurs
cycles, dont les principaux sont ceux de Charlemagne, de
Bernard de Carpio, de Fernand Gonzalès, des sept infants
de Lara, et du Cid. Dans ces divers cycles, les pièces vé-
ritablement anciennes, ou même celles qui , relativement
modernes, renferment Quelques éléments d'antiquité,
offrent des morceaux de la plus grande beauté. Le sujet
du cycle carlovingien tient à l'expédition de Charle-
magne dans la vallée de l'Èbre, expédition qui se termina
par le désastre de Roncevaux. Il fut donné au puissant
empereur de remuer fortement les imaginations au Sud
comme au Nord des Pyrénées ; mais la vanité espa^ole
se plut à opposer au chef des Francs un héros national
dont l'histoire paraît assez fabuleuse , Bernard de Car-
{)io, fruit des amours furtives du comte de Saldana et de
a sœur d'Alphonse le Chaste. Ces éléments fabuleux sont
bien loin d'être incompatibles avec la poésie. Bernard
humilie Charlemagne et les douze Pairs. — On trouve
également des morceaux étincelants de beautés m&les et
fortes, toutes colorées par les mœurs du temps, dans les
ordes de Fernand Gonzalès et des sept infants de Lara.
Fernand Gonzalès, dont la mémoire est encore fidèlement
conservée à Burgos, fut un des premiers comtes de Cas-
tille; il reconquit ce pays sur les Arabes ou Mores. On
conçoit donc la vénération dont son nom est encore en-
touré. Quant à Thistoire des sept infants de Lara, traî-
treusement livrés au fer des Mores par leur oncle Ruy
Velasauez, et vengés par le bfttard Mudarra, elle est des
Elus oramatiques, et a inspiré quelques-unes des plus
elles pièces du Romancero.
Mais quelque soit l'intérêt que présentent ces divers
cycles, cet intérêt est cependant effacé par les beautés du
cycle du Cid. Nul héros, en effet , n'a mieux résumé les
diverses qualités du caractère espagnol ; il n'y eut jamais
de figure poétique plus chère à un peuple. L^magination
espagnole s'est donc plu à parer le Cid des plus aimables
et des plus nobles qualités. De là un grand nombre de
romances destinées à chanter les grandes actions du héros
castillan par excellence, depuis son enfance jusqu'à aa
mort; elles célèbrent l'appui prêté par le Cid à don
Sanche, sa fidélité à l'ingrat Alphonse, sa lutte contre les
Mores, la conquête de Valence, le mariage de Ma fiUet,
dona Êlvire et dofia Sol , leur insulte Tengée tur les In-
ROM
1584
ROM
fants de Carrion , principalement la vengeance de don
Diègue, et Thistoire des amours avec Chimène. Les
pièces que renferme le cycle du dd, bien que de mérites
très-divers, prfeentent toutes un grand intérêt. On doit
regretter que la m&le légende ait été quelquefois affadie
par les poètes du xvi* siècle; Tintroduction de la galan-
terie y gâte Tesprit héroïque du moyen Age. Mais on
doit à ce mélange le Cid de Guilhem de Castro et de
Corneille.
La classe très-intéressante des rvmanceshistonques em-
brasse rhistoire entière de l'Espagne }usqu*au xvi* siècle
exclusivement. Dans ce vaste cadre, limagination popu-
laire s'est naturellement emparée de tous les événements
les plus propres à la fhipper. Elle a donc chanté la
{>erte de l'Espagne causée par l'amour de Roderic pour
a Cava, la trop fameuse fille du comte Julien ; la défense
de Zamora par l'infant Urraca; les batailles du Rio Verde
et du Rio Salado; le siège de Calatrava la Viéla; le dé-
vouement de Diéso de Mendoza à la bataille d'Aljubar-
rota; la mort tragique d'Alvaro de Luna; le siège de Gre-
nade et la fondation de Santa-Fé, etc., compositions
charmantes, d'une vérité et d'une variété qui sont la
source d'un inépuisable intérêt.
Les romances moresqtteSf composées dans les derniers
temps de la puissance des Arabes dans la Péninsule, ou
même après la prise de Grenade, ne sauraient présenter
l'intérêt puissant qui s'attache à la poésie naive et pas-
sionnée do certaines romances du cycle chevaleresf^ue ou
historique ; leur intérêt est d'un autre genre : il tient à
la couleur originale qu'elles empruntent aux mœurs, aux
usazes qu'elles décrivent, et qui, grâce au caractère des
Arabes d'Andalousie et à leur civilisation, étaient extrê-
mement poétiques. On retrouve dans ces petites pièces
quelque chose de l'originalité do l'AIhamora; et on ne
peut lire sans attachement les amours du beau Gazul et
de Xarisa, les descriptions des Joutes arabes sur la Viva-
rambla de Grenade, les défis d^Alboacem et de Ponce de
Léon, la vengeance que Garcilaso de la Vega tire de l'in-
sulte faite à l'Ave Bfana. Qu'on ajoute la peinture des
aimes, des coursiers, des costumes, et toute la civilisa-
tion arabe de la péninsule reparaît aux yeux dans ces ro-
mances. Quel parti un génie tel que Walter Scott ne
pourrait-il pas en tirer!
Il en est de même des compositions populaires que nous
rangeons sous le titre de Romances de mœurs, faute d'en
trouver un autre ^ui leur convienne mieux. Nd\is trou-
vons ici l'imagination du peuple espagnol dans toute sa
liberté, prenant tour à tour le ton élégiaque, pastoral ,
burlesque, satirique, picaresque. Le cadre des romances
est toujours restreint. La langue espagnole fournit aisé-
ment la rime; par conséquent, ce petit poème n'excède
pas la portée d'un esprit même inculte ; de là la saveur
particulière, l'agrément infini de cette classe de romances
qui durent encore aujourd'hui et dureront probablement
autant que le peuple espagnol lui-même. Les ballades
anglaises et écossaises, d'une époque plus rude, n'offrent
rien qui puisse être comparé à ces petits tableaux de la
vie espagnole, composés en général durant le xiv* siècle.
Nous ne citons que pour mémoire les romances dont
les si:^ets sont cris dans l'Antiquité. Il suffit de les
nommer pour faire entendre qu'elles sont l'œuvre de
poètes érudits, et qu'elles n'offrent, par conséquent»
aucun des caractères qui font le charme du Romancero,
la spontanéité, la naîjireté. Ce sont des compositions p^
dantesques et d'un genre faux. E. B.
ROMANCHE (Idiome). V. Rhétie!!.
ROMANE (Architecture), nom inventé par M. de Ger-
ville et généxiilement adopté pour désigner le style d'ar-
chitecture qui fut employé en Occident depuis le v* siècle
de notre ère Jusqu'au xn*. Cest une transformation da
style romain dégénéré, et Texpression de style roman a
été formée, par analogie, de celle de langues romanes,
qui désigne les langues dérivées du latin ou langue des
Romains. Le Comité historique des arts et monuments,
n'appliquant qu'aux constructions du xt* et du xii* siècle
la dénomination de style roman, a rapporté celles des
âges antérieurs à un style particulier, dit style latin.
L'art des premiers siècles du moyen âge portant l'em-
preinte, non-seulement de l'influence latine ou romaine,
mais encore de l'influence grecque ou byzantine, l'abbé
Bourassé a proposé l'expression d* architecture romano-
byzantine, cfui ne convient en réalité qu'aux monuments
des XI* et xu* siècles.
Les monuments de style latin sont rares, en France
surtout : nous mentionnerons l'église SMean à Poitiers,
et la Baftse-OEuvri' à LSiuiuvais. D'après les dMoripàons
qu'on trouve dans les autenrs^ il y a Hea de croire qull
existait alors une grande variété dans la forme et la dis-
position des édifices consacn^ au culte^ et que la plupart
des plans qu'avaient pu fournir les édifices profanes des
Romains, basiliques, thermes, prétoires, cénacles, avaient
été adaptés à cette destination. Toutefois, la forme baai-
licale, modifiée par l'adjonction d'un transept, parait
aroir été la plus générale. Les églises à trois nc£B étaient
peu nombreuses; les autres avaient la forme d'un rec^
tangle terminé par une abside circulaire. La maçonnerie
était généralement de petit appareil; la brique simulait
des assises régulières et de grossières archivoltes. Les
colonnes ont fait place à de lourds supports, et les cha-
piteaux, quand ils existent, attestent que la sculpture
était tombée dans la barbarie. L'entablement antique a
été brisé : des trois parties qui le constituaient, il en est
deux, l'architrave et la (rise, qui ont disparu; la 3', la
corniche, est imparfaitement exécutée, et s'appuie, à
l'extérieur, sur des corbeaux ou modillons de formes
très-variées. Les arcades, les voûtes, les portos, les fe-
nêtres, sont à plein cintre. Quelques fenêtres pourtant,
percées en forme de meurtrières, se terminent à la partie
supérieure par une espèce de linteau.
Après l'an mil, il y eut une véritable renaissance en
Architecture, et on reconstruisit la plupart des églises,
mais en suivant des règles rigoureuses. C'est surtout i
partir du xi* siècle <pie l'influence byzantine se fit sentir,
gr&ce aux communications que les Croisades établirent
entre l'Occident et l'Orient. Le plan des églises se modi-
fiant, les bas côtés de la nef s'allongent et tournent autour
du sanctuaire, et l'on établit des chapelles abndales.
L'aire du chœur est souvent plus élevée que le pavé de la
nef, parce qu'elle recouvre une crypte. Les colonnes
commencent à se grouper d'une manière assez élégante,
et ont des chapiteaux historiés. Le plein cintre est tou-
•Jours un caractère dominant; toutefois, on trouve aussi
l'arc surbaissé ou en anse de panier, et l'arc outre-passé
ou en fer à cheval. Les fenêtres sont de petites dimen-
sions : leur baie extérieure est formée de claveaux très-
réguliers et artistement appareillés; parfois elle est ac-
compagnée de deux colon nettes, et surmontée d'une
archivolte. On voit apparaître les fenêtret géminées.
Dans plusieurs églises, des voûtes en coupole s'élèvent à
l'intersection des transepts. Les tours, construites primi-
tivement dans un but d'utilité, pour recevoir les cloches,
se multiplient pour le coup d'œil et pour la régularité de
plan. Le» ornements le plus fréquemment usités sont les
chevrons, les étoiles, les méandres ou frettes, ]«s losanges
enchaînés, les tores coupés, les pointes de diamant, les
câbles, les torsades, les damiers, les têtes de clou.
Le xn* siècle est un fige de transition. On découvre
la première apparition d'une nouvelle forme d'arcade,
l'ogive, qui caractérisera bientôt une nouvelle période
d'architecture. L'ogive se montre timidement encore;
elle est employée concurremment avec le plein cintre :
il n'est pas rare alors de rencontrer une ogive encadrée
dans un plein cintre, ou des arcades alternativement
semi-circulaires et ogivales. L'ogive n'a point encore sa
forme parfaite : tantôt elle s'éloigne peu du plein cintre,
tantôt elle est très-aiguê, et elle conserve les ornements
et les moulures propres à l'architecture romane. Les co-
lonnes continuent de se perfectionner : leur fût est mieux
profilé, plus élancé, et les chapiteaux historiés sont rem-
placés par les chapiteaux à feuillages. Les pieds-droits
des portes reçoivent des statues, et la voussure elle-
même se garnit de statuettes. Les fenêtres, comme les
portes, sont encore à plein cintre, mais elles reçoivent
des encadrements plus riches, et sont surmontées de roses.
On applique l'ogive à la construction des voûtes. Dans
l'ornementation, on aperçoit pour la première fois les
trèfles et les quatre-feuilles.
Parmi les églises romanes postérieures à l'an mil, nous
citerons : S*-Germain-des-Pr^s, à Paris ; les cachédralcs
d'Avignon, du Puy, et d'Angoulême; les abbayes du
Montr-S*-MicheI, de Jumiéges, de Preuilly ; S*-Étieonc, i
Gaen; la Trinité, à Angers; S**- Croix, à Bordeaux,
S^Remi, à Reims; Notre-Dame-de-la-Couture, au Mans;
S'-Paul, à Issoire; Notre -Dame-du-Port, à Clermont^
Ferrand ; les églises de S*-Germer, de S'-Georges de Bo-
cherville ; une partie de Notre-Dame de Noyon. B.
ROMANES (Langues), nom qui convient à toutes les
langues issues du latin, parié joar les anciens Romains.
Romanes est svnonyme de lyéo4atinês {V, ce mot ).
Ravnouard appelait roman ou langue romane un idiome
unique, formé aussi par corruption du latin, et qui aurait
été parlé dans toat le midi de l'Europe depuis le x* iièds
1
ROM
15S5
ROM
Jusqu'à la fin du xm* ; de cet idiome, qui était le pro-
rençal, seraient sortis ensuite l'italien, le français. Tes-
nagnol, et le portugais. Cette opinion, combattue par
nariel et d'autres philologues, est aujourd'hui aban-
donnée. Les compositions des T^ubadours provençaux,
répandues hors de leur patrie, ont sans doute propagé
la connaissance de leur langage, qui fut adopté dans la
société polie et dans le monde httéraire, à Barcelone
comme a Florence; le provençal eut une sorte d'univer-
salité, comme le français au xvin* siècle. Mais on ne peut
pas admettre que le latin se soit corrompu d'une manière
oniforme dans tous les pays où il avait eu cours : l'idiome
des Troabad,ours n'exista loin de la Provence que dans le
cercle étroit de la société des princes, et concurremment
avec divers idiomes locaux, moins cultivés, mais popu-
laires. Chaque langue romane ou néo-latine s'est formée
indépendamment des autres, avec le concours d'idiomes
différents, celte, ibérien, teuton, etc. V, Planta, Histoire
des langues romanes , Colre, 1776; Roquefort, Glossaire
de la langue romane, Paris, 1808, 3 vol. in<-8°; Rav-
nouard. Grammaire de la langue romane, Paris, ISlo;
le même. Grammaire comparée des langues de V Europe
latine, dans leurs rapports avec la langue des Trouba-
dours, 1821, et LKcique roman ^ 1835; Bruce -White,
Histoire des langues romanes et de leur littérature,
Paris, 1841, 3 vol. \n-%^% Diez, Grammaire des lan^s
romanes, en allem., Bonn, 1836-43, 3 vol., et Diction-
naire étymologique des langues romanes, ibid., 1853.
ROMANESCA (La), danse. V, Gaillabdb.
ROMANISTES, nom donné en Allemagne aux juriscon-
tultes qui se livrent à l'étude spéciale du Droit romain.
ROMANO-BYZANTIN (Style). V. Romane (Architecture).
ROMANO-SLAVE (Langue). V. Roumanb.
ROMANTISME. S'il est un nom heureusement né
pour exprimer des doctrines mal définies ; nom vague,
sous lequel peuvent se réunir des aspirations, des ten-
dances, des instincts qui ont quelque chose de commun,
mais qui n'ont pas trouvé ou ne veulent pas de formule
commune ; nom de guerre, qui désigne un parti et non
des idées, commode pour l'attaque et la défense, tant
qu'on désire bien plus de combattre que de s'entendre ;
c'est le nom de Romantisme, Il paraît avoir pris nais-
sance en Allemagne, vers la fin du xvm* siècle, avec
l'école poétique dont Louis Tieck fut l'un des principaux
chefs. M*"* de Staël l'a rapporté de ses conversations
d'outre-Rhin , et naturalisé en France. Suivant elle, le
nom de Romantique désignerait « la poésie dont les
chants des Troubadours ont été l'origine, celle qui est
nOe de la chevalerie et du christianisme. » Ainsi le ro-
mantisme serait l'esprit des races romanes opposé à
Tes prit antique, c.-à-d. le génie moderne en lutte avec
rinspiration du génie grec et romain. Mais, s'il en est
ainsi, pourquoi emprunter le nom de l'esprit moderne
aux races romanes, qui tirent le leur de l'élément an-
tique qu'elles renferment? C'était Germanisme qu'il eût
fallu dire. En effet, les inspirations et les doctrines qui
forment l'essence de ce qu'on appelle le Romantisme sont
nées du fond même du génie que les plus anciens historiens
ont reconnu comme propre aux peuples de la Germanie ;
et c'est chez des nations d'origine germanique que nous
sommes allés prendre les exemples et les théories qua-
lifiés de romantiques. Mais puisqu'on ne peut changer un
nom devenu historique, essayons de dire ce qu'il désigne.
On entend par Ikmantisme deux choses différentes, se-
lon qu'on se place au point de vue exclusivement fran-
çais, ou qu'on embrasse tout le mouvement littéraire de
TËurope dans les temps modernes. Le Romantisme est
la plus grande révolution qui se soit accomplie dans les
lettres et dans les arts depuis l'Antiquité classique; ou
bien c'est simplement une école littéraire du xix* siècle
en France. Dune part, c'est nne transformation des
genres et de l'idéal que nous avaient légués la Grèce et
Rome, transformation qui s'accomplit soit naturellement,
par la simple force du génie moderne, soit de parti pris,
par la réflexion et la cntique. De l'autre, c'est une réac-
tion entreprise par un groupe de vaillants esprits, sous
la Restauration, contre des principes de goût alors
régnants.
1. Le mouvement littéraire d'un peuple peut être le
développement naturel du génie propre à ce peuple, ou
l'effort des imaginations conduites par la critique à la
poursuite d'un idéal conçu et indiqué par elle. Si l'on
veut appréciei- l'esprit d'un temps ou d'une race, c'est
dans les œuvres spontanées qu'il faut le chercher, bien
plus que dans celles qui sont nées de la réflexion et de la
volonté. Ainaî, pour examiner le caractère de l'esprit
moderne, laissons de côté tout ce qui nous paraltia
inspiré de quelque modèle étranger ou de quelque théorie
savante : attachons-nous à ce qu'il y a de plus original
dans les littératures modernes, et voyons si ces œuvres
ne présentent pas au premier aspect des contrastes frap-
pants avec les chefs-d'œuvre de l'Antiquité.
Qu'on passe en revue le Dante, Shakespeare, le vieux
poème germanique des Niehelungen, notre Chanson d^
iioland, le théâtre espagnol du xvi* siècle, on y trouvera,
malçré la variété des cadres, des sujets, des pensées,
plusieurs grands traits communs à opposer à d'autres
traits communs de la po^ie antique. La fatalité a dis-
paru du monde : l'homme est libre, dépendant de sa
volonté, et de la gr&ce divine, qui peut lui faire déraut,
mais non le contraindre. La divinité désormais agit dans
les cœurs, bien plus qu'elle n'intervient dans l'ordre
physique des événements. L'homme devient une àme ,
le corps ne tient presque plus de place. La souffrance
physique n'est plus un sujet de tragédie : Philoctète,
Prométhée, font place aux damnés du Dante, qui souf-
frent dans une chair indestructible et mystique. L'amour
se dépouille si bien des sens, ({u'il devient parfois chi-
mérique : c'est l'union et l'aspiration mutuelle de deux
âmes à travers le temps, à travers l'espace, à travers la
mort. La nature extérieure change d'aspect : elle est,
comme l'homme, plus troublée, plus inquiète; il y voit
un reflet de son &me; il la peuple, non plus de divinités
occupées chacune de leur petit domaine, mais de puis-
sances amies ou malfaisantes, d'Ames bonnes ou mau-
vaises ; en un mot, de personnifications variées du bon
et du mauvais principe qui se disputent le monde sous
le gouvernement de Dieu. Mais la plus grande transfor-
mation est celle de la femme : elle a gagné, dans la
poésie comme dans la société, l'égalité à l'égard de
l'homme, non pas l'égalité d'intelligence, de volonté, de
puissance réelle, mais l'égalité de dignité, de vertu, de
respect. Cest peu dire, l'éf^lité, il faudrait dire souvent la
prééminence. La religion la met de niveau avec l'homme,
parce que l'&me de l'une pèse autant que celle de l'autre;
l'amour la met plus haut : ce qui la rabaissait dans
l'Antiquité la relève dans les temps modernes. — Ainsi
partout r&me, au lieu des sens, donnant aux choses leur
prix, et partout des agents libres substitués à la fatalité :
tel est le grand sens de cette révolution intellectuelle issue
du christianisme et du génie des peuples germaniques.
De là aussi la transformation des genres, et une esthé-
tique nouvelle. D'abord, l'esprit d'indépendance person-
nelle, inné chez les Germains, tend à s'affranchir du
joug des formes étrangères, ou plutôt tend à prendre
celles qu'il lui plaît, sans s'occuper de celles qui satis-
font les autres. Qu'on ne parle donc pas à un Dante, à
un Shakespeare, à plus forte raison aux vieux poètes à
demi anonymes, de s'enfermer dans le cadre des genres
antiques : ils les ignorent, ou ils ne s'en soucient guère.
Si quelqu'un prétendait le leur imposer, ils répondraient t
Il faut que mon habit soit fait pour moi, et non pour un
autre. — En second lieu, dans l'exposition du sujet et
dans le style, différence forcée. Car le sujet ordinaire est
l'àme et ce qu'elle a déplus intime; mystère inépuisable,
où la curiosité enfonce et ne peut jamais se satisfaire;
en même t«mps source d'émotions profondes, variées,
inattendues. Difficilement le poète gardera ces belles or-
donnances des œuvres antiques, pleines de majesté, de
sérénité, qui exigent plus de possession de soi et du
sujet, quelque chose de mieux limité. Le poète grec
dessine des perspectives avec des horizons purs ; le poète
moderne laisse flotter l'esprit dans le clair-obscur du
drame intérieur, il n'ouvre à ses regards qu'un lointain
mêlé de nuages. Le style n'aura pas non plus la pureté,
la simplicité, la beauté du style antique. Le langage ne
rend pas aisément ce qui n'offre aucune analogie avec
les sens : à vouloir rendre ce que l'imagination ne saisit
pas bien, il fait effort, se tourmente, prend quelque chose
de nngulier, quelquefois de bizarre. Le style, appliqué à
des pensées quelquefois un peu trop sublimes pour la
nature humaine, et seulement entrevues, ou à des émo-
tions trop fortes pour la faiblesse commune, perd cette
mesure exquise, cette noble discrétion de l'art antique.
— Faut-il ajouter enfin qu'aucun peuple moderne n'a
été doué pour les arts aussi bien que le fut le peuple
grec, par qui les Romains à leur tour furent initiés au
culte du beau ? Mais c'est là une cause pour ainsi dire
accessoire : elle expliquerait d'ailleurs l'infériorité, et
non la transformation.
En résumé, ce qui donne aux littératures modemet
leun caractères propres, c'est la nalv«té et la sincérité
«00
ROM
1586
ROM
ff ee lesquelles l'esprit moderne s'est pris lui-môme pour
lujet de ses œuvres. Qu'on exprime si Ton veut, ayec
M"* de Staël, cet esprit moderne par les mots de chris-
tianisme et de chevalertê, ou qu'on mi assigne d'autres
noms et d'autres élôments ; toujours y a-t-il, dans les
Eeuples qui ont occupé Tancien monde grec et romain,
ï source d'une poésie nouvelle, poésie légitime au même
titre que l'ancienne, et qui diffère d'elle par son fond et
par sa forme. Qu'on préfère la poésie antique comme
plus parfaite et moins ambitieuse, c'est le droit de la
critique éclairée par l'étude approfondie de l'Antiquité;
mais on ne peut méconnaître la grandeur et la beauté
particulière de cette poésie moderne, que nous appelle-
rons maintenant romantique.
Mais, spectacle surprenant I ces peuples de l'Europe
moderne, uni, en général, ont débuté d'instinct par une
poésie originale, se sont presque tous réduits plus tard,
leurs lumières croissant, à une poésie d'imitation. Il
semble que le progrès du savoir ait éteint le génie en
eux, et que le goût ait étouffé l'imaginationi ou bien
3u'ils n'aient pu voir les œuvres de l'Antiquité sans rougir
es leurs. La plupart donc se sont mis à imiter, après
avoir été originaux. Mais entre ces imitations il faut faire
une différence. Les Français, au ivii* siècle, ont imité
directement les Anciens, et se sont créé par là une litté-
rature, qui est la leur propre, bien plus que leur littéra-
ture du moyen Age, qu'ils ont oubliée et reniée. Les
autres nations ont imité la littérature française du
xvii« siècle, et, par cette imitation de seconde main, n'ont
fait qu'énerver leur génie pendant une période plus ou
moins longue. La littérature française est donc devenue,
au regard des autres littératures modernes, une nou-
velle littérature classique, ou, si l'on veut, la continua-
tion de l'Antiquité classique. C'est que l'esprit, français
est le seul dans l'Europe moderne pour qui l'esprit an-
tique ne soit pas étranger : pour lui l'imitation des mo-
dèles grecs et romains n'était pas servilité ou mode,
c'était une sorte de tradition de famille retrouvée. La
preuve de cette assertion est dans notre littérature du
xvii* siècle, qui, en imitant les Anciens, est devenue un
modèle : on n'en saurait citer une autre de qui l'on en
puisse dire autant. — Cependant cette nouvelle littéra-
ture classique est devenue pour la plupart des nations de
l'Europe un Joug : elle a fini par en devenir un pour la
France. Formée sur les modèles antiques, mais bien plus
encore sur certaines règles empruntées, ou que l'on
croyait empruntées à l'Antiquité, elle tendit peu à peu à se
prendre pour un t^pe de perfection, qui devait être im-
muable. L'immobilité répugne à la nature humaine, et
particulièrement dans les ouvrages de l'esprit, expres-
sions d'idées qui changent sans cesse, joutons que
chaque nation a son génie propre, qui s'accommode
malaisément de formes empruntées à des nations étran-
gères. Or, s'il est vrai que les littératures antiques, par
un merveilleux privilège des génies de la Grèce et de
Rome, ne sont étrangères pour aucun peuple civilisé de
l'Europe moderne, il n'en était pas de même de cette
nouvelle littérature classique façonnée par le génie fran-
çais. Elle portait si bien, malgré son caractère d'univer-
salité, le cachet propre de notre esprit, qu'elle devenait
une gêne pour le libre développement du génie original
chez les peuples étrangers qui l'avaient prise un moment
pour modèle. L'influence rayonnante de la littérature
française au xviii* siècle provoqua une réaction. Pendant
même qu'elle régnait jusque dans les cours du Nord et
dans la plupart des cours de l'Allemagne, elle rencontra
un adversaire passionné et clairvoyant dans le critique
Lessing. Cet esprit érudit et sagace consacra presque
toute sa cairière à ruiner le crédit dont jouissait la liûé-
rature française, surtout dans le domaine dramatique.
L'éclat de la poésie dramatique en Angleterre au temps
de Shakespeare, en Espagne sous les premiers succes-
seurs de Charles-Quint, ne s'était jamais beaucoup étendu
%u dehors, et, depuis, le thé&tre français avait tout éclipsé.
>3sing voulut détruire ce qui lui paraissait une tyran-
nie, pour rendre au génie allemand la liberté de ses mou-
vements. Il le fit de deux manières : en ruinant les théories
sur lesquelles reposait tout l'art dramatique des Français,
et en proposant d'autres modèles à l'admiration des Alle-
mands. Le thé&tre français s'appuyait principalement sur
l'autorité d'Aristote, et subsidiairement sur celle d'Ho-
race t Lessing entreprit de démontrer que les critiques
et les poètes français ne comprenaient pas la Poétique
d'Aristote, et qu'ils avaient substitué des règles arbi-
traires aux préceptes du philosophe de Stagyre, qu'il ac-
ceptait d'ailleurs pour à peu près infaillible. Tout le
monde reconnaît aujourd'hui lus abus d'interprétation
de la critique française du xvii* siècle ; mais ce qui parait
quelque peu paradoxal, c'est que Lessing, voulant mon-
trer un exemple de l'application juste des enseignements
d'Aristote, proposa aux Allemands le théâtre de Shakes<
peare, qui ne parait guère s'être soucié des leçons du
philosophe grec. Lessing transportait donc l'autorité,
dans la théorie, des critiques français à leur maître mieux
interprété, et, dans la pratique, des poètes français à
Shakespeare. Ce nouveau modèle était, il faut l'avouer,
beaucoup plus conforme à l'esprit germanique, et à h
liberté du génie en général, que ceux auxquels on le
substituait. L'Allemagne, excitée par Lessing, se jeta
dans des voies nouvelles; l'esprit allemand rentra en
possession de lui-même, et produisit sa littérature origi-
nale, celle qu'il a appelés sa poésie classique. Les grands
noms de Gœthe, Schiller, Herder, en disent assez.
Mais bientôt cette révolution littéraire , entreprise aa
nom de la liberté du génie, exigea plus de liberté, tou-
jours plus de liberté. De là, l'école romantique, éclose au
temps même de la pleine floraison des grands génies que
nous venons de nommer, c.-À-d. dans les dernières an-
nées du xviii* siècle. La littérature allemande entrait dans
sa période d'anarchie, qualifiée, par les esprits les plus
autorisés, de retour à Vétat sattvage ( Verunld^rung ).
Comme si l'esprit moderne, pour garder son originalité,
devait être toujours dans l'enfance, la poésie s'efforça de
se replacer dans les temps du moyen ftge, et d'en retrou-
ver l'inspiration à la fois violente, bizarre et naïve. Cette
résurrection fut une grande nouveauté; mais elle avait
le tort d'être une sorte de tour de force, un pastiche in-
génieux de sentiments et de croyances disparus. Aussi ,
après avoir ébloui un moment, devait-elle assez vite tom-
ber dans le discrédit, surtout quand les néophytes mala-
droits commencèrent à exagérer les bizarreries de la secte.
Mais on n'aurait qu'une idée très-incomplàte du mou-
vement romantique, si l'on n'y voyait que des poètes épris
du moyen âge, et qui le ressuscitent avec plus ou moins
de goût. En réalité, c'est une grande révolution de la
critique, qui provoque un renouvellement dans les arts,
mids après avoir renouvelé toutes le^idées religieuses et
philosophiques du siècle. C'est, aprè^fa sécheresse de h
philosophie négative et matérialiste du xviii* siècle, un
retour passionné et plein d'intelligence vers les grandes
sources d'émotion, la religion du cœur, et la sympathie
enthousiaste pour tout ce qui est sincère et puissant. La
critique destructive du xviii* siècle n'avait engendré que
l'esprit d'examen : le romantisme est l'esprit d'examen
uni à l'imaçination, pour comprendre la beauté du passé
qu'on venait de détruire; c'est un effort généreux pour
refaire une foi nouvelle composée de critique et d'enthou-
siasme. De là, une vigoureuse impulsion donnée aux
études religieuses et philosophiques en Allemagne, avec
une largeur de vues jusqu'alors sans exemple. De là aussi,
dans toute l'Europe et de proche en proche, un réveil des
sentiments religieux et de toutes les plus nobles facultés
de l'àme humaine ; et dans la philosophie, dans les arts,
dans la poésie du commencement du ux* siècle, une
réaction énergique de spiritualisme.
II. Quand M"** de Staël , de retour de son voyage
d'Allemagne, ravie des lumières que la hardiesse et reten-
due des ^nies allemands répandait sur la critique et sur
la poésie, voulut, avec son livre De VAllemctgriey les pro-
pager en France, le mouvement romantique nous était
encore étran^r. Cependant, Chateaubriand avait déjà
donné le Génte du cfiristianisme^ ouvrage inspiré de cette
foi refaite par la critique, dont nous venons de parler.
C'était bien commencer la révolution littéraire. Néan-
moins, elle couva encore assez longtemps. Le livre de
M'"* de Staôl demeura plusieurs années enseveli , par les
soins de la police impériale. Tant que dura l'Empire, la
littérature resta officielle, comme toutes les opinions et
tout ce qui avait le droit de paraître. Il semblait que la
poésie classique fût sous la haute protecdon du gouver-
nement, et que l'orthodoxie littéraire fit partie de la fidé-
lité d'un bon citoyen. Cependant, si l'on examinait ces
dogmes de la littérature soi-disant classique, et les œuvres
qui s'en inspiraient, on n'y voyait, d'une part, au'nne
foi superstitieuse aux préceptes de l'Antiquité, déngurés
par la théorie et la pratique du xvn* et du xvm* siècle;
et de l'autre, que de pâles imitations des chefB-d'cenvrs
de Corneille et de Racine, lesquelles prétendaient de-
voir être ainsi pour l'honneur des règles. Les esprits plus
libres, et qu'irritait cette médiocrité tyrannique, com«
mencèrent à prendre en haine les règles, et le nom iie
eUusique. Les unes parureut n'être que des chaînes
ROM-
1587
ROM
bilemeot Jetées par rimpuissaiice sur le génie, et Tautre
deriot synonyme d'esprit étroit et stérile. Ainsi Tabus de
Taatorité en matière de goût provoqua une réaction vio-
lente* et aveugle, où le sens des mots fut altéré comme
les idées, et dont le mot d'ordre fut le mépris de toute
régie. Ce (ùt sous la Restauration que ce mouvement
éclata. L'imitation de l'Antiquité ayant été un des canu>
tëres de la Révolution et de l'Empire, il était naturel que
la royauté rétablie tournât le dos à l'Antiauité. Ainsi fit
la poésie. Elle devint à la fois royaliste, catholique et ro-
mantique : trois expressions d'une même idée, au moins
à ce que l'on croyait, c-à-d. triple forme de l'esprit de
• liberté, où l'on ne voulait voir qu'un retour aux andennes
traditions de l'esprit français , violemment rompues par
la Révolution. Le Romantisme s'acclimata donc en France
sous un air de piété pour le passé : la plus audacieuse
des révolutions littéraires se prit peut-^tre elle-même
pour une restauration.
Analysjsr les différentes formes du Romantisme et ses
phases diverses sous la Restauration et jusque dans les
premières années de la monarchie de 1830, serait un
travail aussi considérable que difficile. Dans l'étrange
effervescence des esprits , dans la confusion féconde des
idées de cette époque, les divergences d'opinions sont in-
nombrables, môme entre les hommes qui paraissent
combattre pour la même cause. Nous l'avons dit, le Ro-
mantisme est un nom de guerre: c'est assez dire toutes
les passions et toutes les injustices qui s'y sont attachées.
Les plus illustres combattants sont aujourd'hui presque
tous survivants : les uns ont modifié leurs opinions de ce
temps-là, d'autres les ont exagérées. Il n'est pas encore
temps de faire l'histoire des personnes et des oeuvres.
Bornons-nous à indiquer les caractères principaux de ce
grand mouvement des esprits.
Le Romantisme est d'abord une réaction contre les doc-
trines trop exclusives de l'école soi-disant classique. De
là, son premier caractère, qui est une protestation abso-
lue contre toutes les r^les d'école. Ne lui demandez pas
de se soumettre aux lois d'un genre; il ne reconnaît pas
de délimitation formelle des genres : tout est dans tout.
Le premier livre du plus illustre poète de l'école roman-
tique portait le titre d^Odês et ballades; des critiques
dirent à l'auteur que ses odes n'étaient pas des ode», et
que ses ballades n^étaient pas des ballades; il répondit :
« Soit ; qu'on leur donne tel autre titre qu'on voudra, j'y
souscris d'avance. » Quand on lui parlait des convenances
d'un genre, il déclarait « ne rien comprendre à tout cela ; »
il y cherchait, disait- il, « des choses, » et n'y voyait
• que des mots; » il lui semblait que « ce qui est réelle-
ment beau et vrai est beau et vrai partout, n Ainsi,
l'unique règle est de bien faire : quant à des préceptes
sur l'art de bien faire, le génie n'en veut pas. Il s'inspire
de lui-même, et ses lumières sont plus sûres que toutes
les traditions d'enseignement. Il ne s'agit donc plus de
savoir si l'on a bien ou mal entendu Aristote : discuter une
autorité, c'est admettre qu'il en peut exister. Le poète ne
relève que de son sens propre. Quant à la classification
des genres, c'est une abstraction arbitraire, une œuvre de
botaniste qui range des fleurs mortes dans un herbier.
Dans la nature vivante, tout se mêle; ainsi doit faire la
poésie. Elle va du tragique au comique, du sublime au
grotesque, sans transition. Elle n'a de dégoût ni d'aver-
sion systématique pour rien : le trivial existe au même
droit que le noble, et, pourvu qu'il ait un sens, il est
poétique : « La poésie est tout ce qu'il y a d'intime dans
tout. » Loin donc l'idéal antique, ou du moins Tidéal
pseudo-classique. Unité de couleur dans un ouvrage, di-
gnité soutenue, beaut ésans mélange : pure superstition !
Le laid et le grotesque ont droit de até dans la poésie
comme dans & nature : les contrastes sont les grands
moyens de Tart; les discordances sont les éléments de
l'harmonie. L'art traditionnel s'appliquait à donner à la
nature plus d'unité; l'art romantique s'attache à faire res-
sortir les oppositions qu'elle renferme.
Mais, disent les adversaires du Romantisme, la raison
et le bon goût sont choqués de ces disparates. — Bon
goût! Qu'entendez-vous par là? Dites : votre goût. De quel
droit le prenez- vous pour la mesure du bien? Si l'ouvrage
ne vous plaît pas, laissez-le, vous êtes libre. Mais ne pré-
tendez pas assujettir le génie aux timidités ie votre goût.
Quant à la raison, qu'a-t-elle à faire avec la poésie? La
puésieest l'œuvre de l'enthousiasme, et non de la raison.
Ccst rimagî nation qui fait le poète : la raison ne peut
créer, elle ne peut qu'enchaîner. Tout au plus la raison
peut-elle former un critique, lilais qu'est-ce qu'un cri-
tiauelî Un oisif maussade ou enthousiaste, selon qu'il
est ou pour ou contre vous. Car, puisqu'il ne peut ni con-
seiller le génie, ni juger ses œuvres par principes, puis-
qu'il ne peut formuler d'autres Jugements que ceux-ci :
« Cela est bon , cela est mauvais, » et qu'il ne peut don-
ner à ces appréciations d'autre autorité que celle de son
goût personnel, il s'ensuit que la critique n'est rien , et
qu'il y a, d'une part, le poète, c-àrd. le génie planant à
une hauteur effrayante au-dessus des simples mortels,
et, de l'autre, des spectateurs, admirateurs ou ennemis,
mais sans droit de contrôle et sans influence légitime sur
le vol sublime de cet être divin.
Cest par là que le Romantisme devait périr, se rédui-
sant lui-même à n'être qu'une coterie, jpar cette supersti-
tion du poète envers son propre génie. 6n pouvait prévoir
que le bon sens public ne se soumettrait pas longtemps
à une pareille idolâtrie, et qu'il arriverait en France,
plus encore qu'en Allemagne une génération auparavant,
gu'on se lasserait de n'avoir affaire qu'à des génies qu'il
fallait adorer sans les comprendre. Le mépris de la cri«
tique entraînait le développement exagéré de la person*
nalité, la concentration du poète en soi, l'enivrement de
soi-même, les airs de pythonisse sur le trépied, le dédain
Kédant pour le vulgaire ignorant, la hauteur à l'égard du
on sens qui protestait. Le nouvel idéal devait donner
naissance à des œuvres difibrmes, quand le génie, qu'on
ne supposait jamais absent, trahirait l'audace des faiseurs
de contrastes, et que la disparate ou la laideur resterait,
sans la beauté et l'effet saisissant de l'opposition. Enfin
l'anarchie absolue, où menait l'exagération de l'indépen-
dance du génie, étant à chacun les rorces qu'on puise dans
des doctrines acceptées de tous, ne pouvait aboutir pour
beaucoup d'esprits qu'à l'avortement, et pour la littéra-
ture qu'au chaos. — Ainsi finit l'école romantique, ou
plutôt la secte romantique, laissant après elle le souvenir
d'une ambition démesurée et d'afTectatioos ridicules. Après
quelques années de silence, elle a reparu métamorphosée,
sous le nom de Réalisme ( V. es mot). Cette nouvelle
secte n'est autre chose que le Romantisme dépouillé de
ses ailes. Comaie celui-ci avait la fureur de s'élever trop
haut , l'autre a la passion de ramper.
Mais les excès du Romantisme ne doivent pas nous fer-
mer les yeux sur les éclatants services qu'il a rendus à
l'esprit humain, et à l'esprit français en particulier : il a
proclamé la liberté du génie, et l'a conquise. On n'a pas
à craindre que le vrai génie en abuse jamais ; car un de
ses caractères essentiels est l'instinct des véritables élé-
ments du beau. Il a enhardi notre langue trop timide; il
l'a débarrassée du style de convention et de la fausse
élégance. Il nous a dotés d'une poésie lyrique dont nous
n'avions Jamais eu l'idée : audacieuse, profonde, tou-
chante et sublime. Il a fait du théâtre, qui est la moins
bonne de ses créations, une arène où luttent les passions
de la vie moderne, au lieu d'une académie où foutent
l'archaïsme et le bon goût. Là aussi, il a comii.. des
excès; mais y avoir introduit la vie, après les froidISs re-
présentations de la tragédie pseudo-classique, c'est l'avoir
sauvé. Enfin, ce qui est plus grand encore, il a commu-
niqué une vaillante impulsion à tous les arts, qui se sont
rajeunis par son souffle; à la critique, dont il a élargi
les horizons; à l'histoire, qu'il a animée de sa bienveil-
lance intelligente pour le moyen âge, et de son génie pour
ressusciter les figures des temps ténébreux ; à la religion
même, où il a fait circuler la sève de la poésie. On peut
donc dire que le Romantisme a été le réveil de la littéra-
ture et des arts au xix* siècle : cela doit faire pardonner
bien des erreurs.
ROME (Monumento de) :
I. Àntiguités.
V. CaprroLB.
Cirque.
Gloaqdb.
Cousis.
Colonnes monumbhtalis.
FORDM.
Mausoléb.
Panthéon.
Prison.
Tabdlarium.
Thermes.
V. Amphithéâtre.
Antonin et Faustinb (Temple d').
Aqoeduc
Abc de triomphe.
Bauliqub.
Cbstios (Pjrramide de).
Marcellos (Théâtre deV
G.
dans notre /)to-
tionnairs de
Biographie et
d*Histoire»
dans le présent
Dictionmair*,
ROM
II. Basiliques chréitennes.
1588
ROM
f Samt-Pierre, V. Pierre (Église de S»-).
2° Saint-Jean-de-Latran, K. Jean-db-Lataan (Église
de S»-).
3° Sainte-MarU-Maéeure, V. MAïuB-liAJBURE (Église
de S»'-).
4° Sainte-Croix-^e-Jérusalem. Cette église fut érigée
sur le mont Esquilin par S** Hélène, mère de l'empe-
reur Constantin, pour y déposer une partie de la sainte
croix, trouvée par elle à Jérusalem. L*église fut consacrée
par le pape S' Sylvestre I". Les constructions primitives
ont depuis longtemps disparu , et Tédifice actuel ne date
que de 1743; il a été élevé par ordre de Benoit XIV, par
Gregorini. Il est divisé en trois nefs par 8 pilastres et
8 grosses colonnes de granit d*Égypte. Le maître -autel
est isolé, et décoré de 4 belles colonnes de brèche sup-
portant un baldaquin : sous cet autel on conserve, dans
une urne antique de basalte, les corps de S' Césaire et
de S* Anastasc, martyrs. Les fresques de la voûte sont
du Pinturicchio.
5° Saint-Laurent-hors-les-murs. Construite par Con-
stantin, en 330, sur un terrain appartenantes^' Cyriaque,
à 1 kilomèt. environ de la ville, sur la voie Tiburtme,
cette église fut rebâtie par Pelage II en 578, agrandie en
1216 par Honorius m , qui en éleva le portique, et res-
taurée par Alexandre VII en 1657. Le portique est sou-
tenu par 6 colonnes antiques, et peint à fresque. A côté
de la porte principale, un sarcophage romain, avec un
bas-relief représentant un mariage, sert de tombeau au
cardinal Fieschi. L'intérieur de la basilique est à 3 nefs,
séparées par 22 colonnes ioniques de granit ou de dpol-
lin, tirées de divers monuments antiques ; dans la nef
du milieu sont deux ambons de marbre. La tribune éle-
vée au-dessus de la nef a une mosaïque du vi* siècle ; on
y voit un ancien siège épiscopal, et le sarcophage de
S^ Zosime, orné de bas-reliefs représentant des sujets
bachiques.
6° Sainte-Marie-in-Cosmedin. Construite, au m* siècle,
sur les ruines du temple de Cérès et de Proserpine, res-
taurée en 782 par le pape Adrien P% cette église est sé-
parée en trois nefs par 12 colonnes antiques de marbre.
Le pavé est en cette mosaïque de pierres dures de cou-
leur qu'on appelle appareil alexandrin {V. C9 mot). Le
maltre-autel est décoré d'une urne antique en ^anit
d'Egypte, et surmonté d'un baldaquin que soutiennent
quatre colonnes de ce môme granit. Dans la tribune est
un siège pontifical de marbre. Sous le portique de l'église
est la Bouche de la vérité ( K. ce mot dans notre Diction-
naire de Biographie et d'Histoire),
7° Sainte- Marie-in-TroAtevere, Cette église occupe
l'emplacement d'un oratoire que le pape S^ Calixte l""
avait érigé en 224 : plusieurs fois renouvelée, elle date,
dans son état actuel, du pontificat de Nicolas V (au milieu
du XV* siècle), qui chargea des travaux Bernardin Ros-
sellino. Puis Clément XI fit faire le portique. Les mosaï-
ques de la façade remontent à l'année 1139. L'intérieur
présente trois nefs, séparées par 21 grosse^colonnes de
granit rose d'ordre ionique, et provenant d'un temple
d'isis et de Sérapis. Le pavé est en appareil alexandrin.
Au milieu de la voûte, le Dominiquln a peint une belle
Assomption. Le grand autel est décoré d'un baldaquin
soutenu par quatre colonnes de porphyre. La tribune
oflre des mosaïques du xu* et du xiu" siècle.
8° Saint-Pierre-aux-Liens, Cette église, située près des
thermes de Titus, fut élevée en 442 par £udoxie, femme
de l'empereur Valentinien III, pour y conserver la chaîne
avec laquelle Hérode fit attacher l'apôtre S^ Pierre dans
la prison de Jérusalem. Le pape Adrien I**" la fit rebâtir ;
Baccio Pintelli la renouvela au temps de Jules II, et, en
1705, Fr. Fontana la mit en l'état où elle est aujourd'hui.
L'intérieur est partagé en trois nefs par 20 colonnes en
marbre antique. C'est là qu'est la célèbre statue de
marbre de Moïse par Michel-Ange.
9° Sainl-Pa\U-horsAes-murs, Cette basilique, située à
2 kilomèt. 1/4 de la ville, sur la route d'Ostie, fut fon«
dée par Constantin, en 323, sur une propriété de S^* Lu-
cine, où l'apôtre avait reçu la sépulture de Timothée, son
disciple. Théodose l'agrandit en 388, et Honorius l'acheva
'^ 423, telle qu'on la voyait encore en 1823. A cette
s.,ioque, le feu prit à la toiture, qui était construite en
bois de cèdre, et l'incendie se propagea partout. Le pape
Léon XII, à J'aide de souscriptions fournies par les ca-
a 106 met. de longueur, 69 met. de largeur au tran-
sept , et 30 met. de hauteur ; il est divisé en 5 nefs par
80 colonnes corintlûennes en granit, avec bases et cha-
piteaux de marbre blanc. Au milieu de la nef S6 oresse
l'autel, qui date de 1280 : il a un baldaquin soutenu par
4 colonnes d'alb&tre oriental, présent de Mébémet-Ali,
pacha d'Egypte. Les frises sont ornées des portraits des
papes, en mosidque. Les autels en malachite qui garnis-
sent les extrémités du transept ont été donnés par l'em-
Çereur de Russie, Nicolas I**". — Un beau cloître, de
220, contenant des fragments et des inscriptions anti-
ques, est contigu à la basilique. V. Nicolai , Deila 6a-
silica di San Paolo, Rome, 1815, in-fol.
10° Saint-Sébastien-hors-les-murs. Cette église fut
bâtie en 367, sous le pape Damase, à 3 kilomèt. 1/2 en-
viron de la porte Capène, et restaurée au xvii* siècle par
Flaminio Ponzio ; elle n'a qu'une seule nef. Près de là on
descend dans les Catacombes de S^'-Calixte. V. Cata-
combes DB RoMB, dans notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire,
m. Églises diverses.
Sainte-Agnès, Cet édifice, situé sur la place Navone,
occupe l'emplacement d'une église plus ancienne. (*^m-
mencé en 1550 par Jérôme Rainaldi , achevé par Borro-
mini , il a la forme de la croix grecque, et est surmonté
d'une coupole. L'intérieur est en marbre blanc jusqu'à
l'entablement , orné de stucs dorés, et décoré de 8 co-
lonnes corinthiennes en marbre. Les peintures de la cou-
pole sont de Ciro Ferri et de Corbellini; celles des pen-
dentifs ont été faites par Baciccio. Les quatre autels et
les chapelles offrent des bas-reliefs et des statues ; on re-
niarque principalement une S^' Agnès voilée par ses
longs cheveux, bas-relief exécuté par l'Algarde.
Une église de S^^-Agnès-hors-les-murs , à 1 kilo-
mèt. 1/4 de la porte Pia, sur la voie Nomentane. est le
modèle qui se rapproche le plus des basiliques vies an-
ciens Romains. On y descend par un escalier de 45 mai^
ches, parce que l'ancien sol a été rehaussé. L'église ren-
ferme une statue de la sainte, formée, dit-on, du torse
d'une statue antique en alb&tre oriental, un candé-
labre antique en marbre blanc, et une tète de Christ
attribuée à Michel-Ange.
Saint-André-della-Valle, Commencée en 1501 par Oli-
vieri , et finie par C. Maderno, cette église occupe, selon
les uns, l'emplacement du théâtre de Pompée, et, selon
les autres, celui de la curie où César fut tué, salle qui
était contigue à ce théâtre. Sa façade, une des plus belles
de Rome, est de Ch. Rainaldi ; elle est à deux rangs de
colonnes d'ordres corinthien et composite, et décorée de
statues sculptées par Dominique Guidi, Hercule Ferrato
et Antoine Fancelli. L'intérieur de l'édifice contient des
peintures célèbres : la coupole, de 18 met. de diamètre,
a été peinte par Lanfranc, et, sur les quatre penden-
tifs, le Dominiquin a représenté les quatre Évangélistes.
C'est ce dernier maître qui a peint aussi la voûte de la
tribune.
Saint-Clément , sur le mont Esquilin, au S. des thermes
de Titus. On y retrouve la forme basilicale des église
primitives. S^ Jérôme faisait déjà mention de cette ^lise
en 392 ; restaurée plusieurs fois, elle a été mise en Tétat
actuel par Clément XI, au commencement du xvin* siècle^
Fontana en fut l'architecte. La porte est précédée d'un
petit portique soutenu par 4 colonnes de granit ; de ce
portique on entre dans un atrium, environné d'un por-
tique plus grand , que supportent 16 colonnes. L*église
elle-même est divisée en trois nefs par 18 colonnes de
marbres différents. Le maltre-autel est isolé, avec un ta-
bernacle porté sur 4 colonnes de marbre violet. Une ba-
lustrade de marbre enferme le chœur, et sur les côtés
sont deux ambons (F. ce mo^-Masaccio a peint l'histoire
de S^' Catherine d'Alexandrie dans la chapelle de la Pas-
sion ; ses fresques ont été altérées par le temps et par de
fréquentes restaurations.
Église de Jésus, C'est une des églises les plus vastes et
les plus riches de Rome; elle est dans le Corso et ap-
partient aux Jésuites. Commencée en 1568 par Vignole,
elle fut continuée depuis 1575 par Jacques deila Porta.
L'intérieur est remarquable par ses pilastres corinthiens,
ses stucs doiés, ses sculptures en marbre et ses pein-
tures. Les fresques de la coupole et de la tribune sont
de Baciccio. On voit le tombeau du cardinal Bellarmin à
côté du maltre-autel. Les Jésuites ont accumulé toutes
les magnificences dans la chapelle de S^ Ignace de Loyola^
dont l'autel a été dessiné par Pozzi, membre de leur
orHrtt . « côté d»« coloonet eu laoia-lazuii. des baa-relîcfs
ROM
1589
IlON
en bronze et en marbre, on distingue deux groupes par
Théodon et LegroB. La maison professe des Jésuites, où
réside le général de Tordre, est annexée à cette église.
Sainte-Marit-des-Anges, Michel-Ange donna le plan de
cette église, qui était une salle des thermes de Dioclé-
ticn. 1^ croix grecque qu'elle figurait a été altérée au
xvnr siècle par Vanyitelli. L*édiiice a 112 met. de lon-
gueur : on y remarque les tombeaux de C. Maratta, d'Aï-
ciat et de S/ilvator Rosa, une statue de S' Bruno par
lioudon, vr&i chef-d'œuvre, une fresque du Domini([uin,
enfin 8 colonnes corinthiennes d'un seul bloc de granit,
hautes de 15 met., et d'une circonférence de 5 met. —
Derrière Téglise est un vaste cloître de Chartreux, dessiné
par Michel-Ange, et où se trouve un portique soutenu
par 100 colonnes de travertin.
Sainte 'Marte-in-Ara-CœH, église de Dominicains
d'abord , aujourd'hui de Franciscains, b&tie sur l'empla-
cement de l'ancien temple de Jupiter Capitolin, mais en
travers. On y monte par un large escalier de 124 marches.
Elle est divisée en trois nefs par 22 colonnes diverses,
mais presc^ue toutes de granit d'Egypte. Quelques cha-
pelles contiennent des fresques remarquables de Muziano
et du Pinturicchio. On conserve dans cette église le san~
tissimo bambino, petite statuette que la léçende dit avoir
été taillée d'un arbre du Jardin des Oliviers, k Jérusa-
lem, par un moine, et coloriée par S^ Luc, et qu'on expose
dans une crèche pendant les fêtes de Noël.
Sainle-Marie-de-la-Minerve. B&tie au xiv" siècle sur
remplacement d'un temple de Minerve, près du Pan-
théon, elle est la seule église de Rome où l'on conserva
une simplicité dénuée de tout ornement; mais les Do-
minicains en ont récemment effacé le caractère sous les
dorures et le clinquant de l'ornementation. On y re-
marque : le tombeau de Paul IV, par Pirro Ligorio ; ceux
de Léon X et de Clément VII , par Antonio da San-Gallo,
avec leurs statues par Raphaél dà Montelupo et Nani di
Baccio Bigio, et des bas-reliefs par Baccio Bandinelli ; une
statue du Christ debout, tenant la croix, par Michel-
Ange ; diverses peintures de Baroccio, de Fra Angelico,
de Filippino Lippi, de Baciccio, d'André Sacchi, de
C. Maratta. — Le couvent attaché à cette église est la ré-
sidence du général des Dominicains. Il contient une cé-
lèbre bibliothèque.
Saintê-Marie-de-la-Paix. Elle fut construite en 1487
par ordre de Sixte IV, près de la place Navone, en ac-
tion de grâces pour la paix entre les princes chrétiens,
sur les dessins de Baccio Pintelli. ÎÂ façade, avec un
portique semi-circulaire, est de P. de Cortone. Le cloître
est de Bramante. L'intérieur de l'église est composé d'une
nef, un peu étroite, que complète bien une belle coupole
octogone, peinte par C. Maratta, Balthazar Peruzzi, et
Fr. Vanni. Mais l'œuvre d'art la plus importante est la
fresque de Raphaël représentant les Sibylles.
IV. PàUns.
Palais Barberinû Un des plus vastes de Rome, et l'un
des plus remarquables par son apparence extérieure, il
fut b:\ti pour le cardinal Barberini, neveu d'Urbain VIII.
Carlo Maderno le commença vers 1624, et il fut continué
par Borromini et le Bernin. Dans le grand salon, Pierre
de Cortone a peint le Triomphe de la Gloire, un de ses
plus beaux ouvrages. Le palais renferme un assez grand
nombre de tableaux précieux et une bibliothèque consi-
dérable.
Palais Borghèse, V. Borghèsb.
Paicûs de la Chancellerie. Ce palais, résidence du car-
dinal vice-chancelier, et où siégea le parlement romain
en 1848, est une œuvre capitale de Bramante. Il fut b&ti
pour le cardinal Riario, neveu de Sixte IV. La cour est
entourée d'un portique à double étage, formé par 44 co-
lonnes doriques, en granit, et provenant, dit-on, du por-
tique Hécatonstylon, joint an thé&tre de Pompée. Ce fut
sur les premières marches de l'escalier que le ministre
Rossi fut assassiné en 1848.
Palais Colonna. Construit par le pape Martin V, de la
famille des Colonna, il sert de résidence k l'ambassadeur
français. L'extérieur n'a rien de remarquable, mais les
appartements intérieurs sont de la plus grande magnifi-
cence. La galerie de tableaux est fort belle. Les jardins
s'étendent sur les hauteurs du Quirinai.
Palais des Conservateurs. Il est ainsi appelé parce que
des magistrats municipaux, nommés conservateurs, et
comparables à nos anciens échevins, y siégeaient autre-
fois. Ce qui le tend intéressant , ce sont les monuments
de la statuaire antique qui ornent la cour et les apparte-
ments. On y conserve les célèbres fragments des Fastes
consulaires. Les appartements sont aussi ornés de fres-
ques par le chevalier Arpino, Annibal Carrache, Daniel
de Volterre, etc.
Palais Corsini. Bâti pour les neveux de Sixte IV, ha-
bité au xvii* siècle par la reine Christine de Suède, le
cardinal Neri Corsini, neveu de Clément XII, l'acquît en
1732, et le fit reconstruire par l'architecte Fuga. Le ves-
tibule et le double escalier ont un magnifique aspect. Le
Ealais contient une galerie de tableaux et une riche bi-
liothèque.
Palais Doria Pamfili. C'est une réunion de trois pa-
lais*, aussi son architecture manque d'unité : la cour en-
tourée de portiques est peut-être de Bramante ; mws on
reconnaît une époque de décadence dans les façades, qui
sont attribuées à Pierre de Cortone, au Borromini, et
môme au Bernin. La galerie de tableaux est importante.
Palais Famèse. V. Farnèsb.
Palais Massimi, ciief-d'œuvre de Balthazar Peruzzi. Il
n'est pas moins remarquable par l'habileté de son plan
dans un espace irrégulier et étroit, que par la pureté et
l'élégance de ses profils et de sa décoration. La façade
consiste en une élévation circulaire. Un portique élégant,
de 0 colonnes doriques, donne entrée dans un vestibule
carré, qui semble être un atrium antique du dessin le
plus heureux. C'est au palais Massimi que se trouve le
Discobole trouvé sur l'Esquilin et que l'on croit être une
copie du célèbre bronze de Myron.
Palais Ouirinal. V, Quirinal.
Palais Rospigliosi, Il a été construit par le cardinal
Scipion Borghèse, sur les ruines des thermes de Constan-
tin, par Flaminio Ponzio, Vasanzio, puis Carlo Maderno.
On y visite de nombreux tableaux, mais particulièrement
l'Aurore du Guide, qui orne la voûte du salon d'un pa-
villon du jardin.
Palais Spada. B&tî sous Paul III pour le cardinal Cu-
podifarro, par Jules Mazzoni, il fut remis à neuf par
Borromini. C'est ce dernier qui a fait l'escalier. Indépen-
damment d'un certain nombre de tableaux modernes, ce
palais renferme des antiquités ; par exemple, la statue
colossale, en marbre, de Pompée, trouvée en 1552, et
qu'on suppose être celle aux pieds de laquelle J. César
tomba assassiné dans le sénat.
Palais du Vatican. V. Vatican, dans notre Diction^
naire de Biographie et d'Histoire.
ROMÉRIES, fêtes villageoises en Espagne. Romeria
signifie pèlerinage, et rappelle le sentiment religieux qui,
dans l'origine, attirait les populations à ces fêtes.
ROMESTECQ, jeu de cartes qui se joue à 2, 4 ou 6
personnes, avec un jeu de piquet auquel on a ajouté les
six. Son nom vient des mots rome et stecq, employés,
le !•' pour exprimer une levée de deux cartes inférieures
semblables, le 2* pour la dernière levée, qui compte tou-
jours pour un point.
ROiNCEVAUX (Chanson de). V. Roland.
RONDACHE, bouclier. F. notre Dictionnaire de Bio»
graphie et d'Histoire.
ROND-CREUX. V. Scotib.
RONDE, visite qui se fait, surtout la nuit, pour s'as-
surer que les sentinelles et les corps de garde font leur
devoir, et pour voir si tout est en bon ordre. Le môme
nom se donne à ceux qui font cette visite. Les rondes se
désignent par le çrade de l'officier qui les fait. Les rondes
ordinaires d'officiers sont reconnues par le caporal de
consigne, qui en reçoit le mot d'ordre; les rondes major
et d'officiers supérieurs sont reconnues par le chef du
poste, ({ui donne le mot d'ordre après avoir reçu le mot
de ralliement. 'Dans ce second cas seulement, la troupe
prend les armes. Quand deux rondes se rencontrent, la
moins élevée en grade donne le mot d'ordre à l'autre,
qui lui rend celui de ralliement. Les sentinelles isolées
reconnaissent les rondes sans les arrêter.
RONDE (Chemin de) , voie pratiquée au haut du rem-
part d'une place ou autour d'un camp retranché, pour
servir de passage aux officiers qui font la ronde. Il y a
aussi un cnemin de ronde autour des prisons, entre les
bâtiments et le mur d'enceinte.
RONDS, note de musique, blanche, de forme ovale et
sans queue, valant 2 blanches ou 4 noires. C'est la note
la plus longue, celle qui sert d'unité de mesure.
RONDE, chanson dont les couplets sont chantés tour à
tour par plusieurs personnes, avec un refrain en chœur.
BONDE, danse en rond, accompagnée de chant.
RONDE, sorte d'écriture arrondie, et dont les lettres sont
presque perpendiculaires.
RONDEAU , petite pièce de poésie particulière à la litté-
1
ROO
1990
ROS
rature françalie. On distingue le rondeau commun ou
rondeau rouble^ le rondeau redoublé, et le rondeau 5U»-
ple. Le rondeau commun comprend 13 vers, roulant sur
deux rimes seulement, dont la première est employée
huit fois, et l'autre cinq, dans Tordre suivant : le l'*" vers,
le 2% le 5«, le 6«, le 7«, le 9«, le 10* et le 13« riment
ensemble, et sont masculins ou féminins, comme on
veut; le 3% le 4% le 8«, le 11* et le 12« riment pareille-
ment entre eux, et la rime y est d'espèce différence de
celle des autres. On forme avec les 13 vers deux stances
de 5, séparées par un tercet, et on ajoute au tercet et à
la dernière stance un refrain pris des premières paroles
du rondeau. La grâce, la finesse, la naïveté, sont les ca-
ractères principaux de ce genre de poème, où Ton em-
{)Ioie pres<^ue exclusivement les vers de 8 et de 10 syl-
abes. Voici un rondeau de Voiture :
Ma foi, 6*6$$ fait de mol, car Iiabean
M'a commandé de loi faire an rondeau.
Cela me met en une peine extrême.
Quoi I trelie rer», linit en eau, cinq en émet
Je lui ferai» aussi tOt un bateau.
En Toilk cinq pourtant en un monceau.
Formona-en huit en invoquant Brodean;
Et puis mettons, par quelque stratagème,
Ma fol, e'eit fait.
Si Je pouvais encor de mon cerveau
Tirer cluq vers, l'ouvrage serait beau.
Mais cependant me voilà dans Tonal ème;
Et si Je crois que Je fais le douzi^e;
En vollk treize ajustés au niveau
Ma foi, c'est fait.
Le rondeau redoublé est ordinairement composé d(
5 quatrains ; les quatre derniers se terminent successive
ment par un vers du premier. On y Joint quelquefois ur
Envoi ( K. ce mot)^ où se trouvent, par forme de rcfraîn
les deux ou trois premiers mots de tout le poème. L(
rondeau simple consiste en 2 quatrains sur mêmes rimes,
et séparés par un distique, auquel le refrain était atia
ché, ainsi qu'à la iln du dernier quatrain. — Le Rondel
se compose de deux couplets de quatre vers, et d'un re-
frain de deux vers répété trois fois, au commencement,
au milieu et à la fin ; il est tout entier sur deux rimes
Tel est cet exemple de Charles d'Orléans :
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s'est vdtu de broderie.
De soleil luisant, clair et beau.
Il n'y a bète ni oiseau
Qu'en son Jargon ne citante et crie:
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie.
Rivière, fontaine et rulneau
Portent en livrée Jolie
Gouttes d'argent d'orfévrerla.
Chacun s'habille de nouveau.
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie.
Selon Boileau, Clément Marot est le premier qui sut as-
servir le rondeau à des refrains réglés : toutefois, Charles
d Orléans et Villon en avaient déjà trouvé le tour et la
forme. Saint-Gelais, Benserade et Voiture ont fait égale-
ment de bons rondeaux.
En Musique, on nomme Rondeau toute œuvre dont le
thème se reprend plusieurs fois. Ce thème commence le
morceau, et doit aussi le terminer; les différentes redites
en sont entrecoupées d'épisodes, de phrases accessoires,
où 1 on doit préparer avec art le retour du motif principal.
On peuf'citer comme exemple le rondeau Enfant chéri
des dames, dans l'opéra des Visitandines d« Devienne.
Beaucoup d'airs (F. ce mot) procèdent, pour la redite
du motif, comme le rondeau; mais le nom de rondeau
ne convient pas à un air où les épisodes ont autant et
même plus d'importance que le thème primitif.
RONDE -BOSSE. V, Bosse.
RONDELLE, bouclier. V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
ROND-POINT, partie semi-cîroulaire qui termine un
édifice, comme les églises qui finissent en abside.
RONGO, sorte de cor en ivoire dont on se sert en
Afrique, surtout dans le Loango.
ROQUEFAVOUR (Pont-aqueduc de), pont Jeté sur la
vallée de l'Arc, à 8 kilomèt. d'Aix, et construit pour
amener les eaux de la Durance à Marseille. Il se compose
de trois ponts superposés qui Joignent deux masses de
rocs. Le premier a 12 arches, élevées à 34'",i0 au-dessus
de rétiage de la rivière; le second en a 15^ à 38 met. de
hauteur au-dessus du plain-pied du couronnemenv du
premier rang; le troisièn^e en a 53, à 10"* ,00 de hauteur
au-dessus du deuxième rang. La construction, longue de
400 met., atteint une hauteur de 86 met. au-dessus de la
rivière, non compris les fondations, qui ont de 9 à
10 met. de profondeur. Les piliers, espacés de 21 m^t.
d'axe en axe, supportent des voûtes à plein cintre de
15 met. d'ouverture et arasées à 2'",50 au-dessus de la
clef, qui a l'",20 d'épaisseur. Pour diminuer le poids de
de la construction, on a conservé vides les reins de ces
voûtes en les recouvrant d'une petite voûte longitudinale
de 3'",30 de largeur à plein cintre, sur laquelle est obtenu
le passage de plain-pied da premier rang. Ce passage,
d'une largeur de 5 met. sur les voûtes, franchit les piliers
Ear une ouverture de 1 met. de largeur et de 2 met. de
auteur, que l'on a ménagée à chacun d'eux. Formée de
blocs énormes posés en plates-bandes, cette allée produit
l'effet le plus pittoresque, et se répète sur le deuxième
rang d'arcades. Le pont-aqueduc de Roquefavour a été
construit par Tingémeur Mont-Richer, et achevé en 1818;
c'est un des plus beaux ouvrages de l'architecture con-
temporaine.
ROQUELAURE, manteau fermé sur le devant par des
boutons depuis le haut jusqu'en bas. Il tire son nom du
duc de Roquelaure, qui le mit à la mode.
ROQUETAILLADE (Château de), dans le département
de la Gironde, sur la route de Langon à Bazas. C'est un
carré de 35 met. de c6té, entouré de fossés et défendu
Ëar 6 tours : 4 aux angles et 2 devant la porte d'entrée.
)u milieu de cet espace s'élève, à la hauteur de 35 met.,
un donjon crénelé, percé sur sa face occidentale de trois
fenêtres superposas qui marquent les étages de l'inté-
rieur. Toute la construction date du xiv* siècle. A l'époque
de la Renaissance, on y pratiqua de vastes appartements,
où sont de belles cheminées ornées de statues d'un bon
style. A l'Ouest du ch&teau sont les ruines considéra-
bles d'un château antérieur, et, à rE:>t, une chapelle du
xiii' siècle.
RORAIRES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio»
graphie et d'Histoire.
ROSACE, terme d Architecture. V, Rosb.
ROSAIRE (du latin rosarium^ couronne de roses),
grand chapelet composé de 150 petits grains, et de 15 grains
plus gros qu'on nomme roses et qui séparent les autres de
dizaine en dizaine. On récite un Pater sur les gros grains,
et un Ave Maria sur les petits; sur la croix qui pend au
bout du rosaire, on récite le Credo, V. Chapelet.
ROSALIE, ancien terme de Musique, signifiant la ré-
pétition d*un même chant ou d'un même dessin de plu-
sieurs mesures, faite sur un de^ chaque fois plus bas
ou plus haut. Les rosalies, quand elles étaient au nombre
de trois, s'appelaient des révérences, par allusion aux
trois révérences qui étaient de rigueur autrefois.
ROSE ou ROSACE, ornement d'Arohitecture en forme
de rose, placé dans les caissons des voûtes et des plafonds,
ou dans les intervalles qui séparent les modillons d'une
corniche, ou au milieu de chaque face de l'abaque du
chapiteau corinthien, etc. — On donne le même nom aux
grandes fenêtres circulaires placées au-dessus des portails
des églises. Les artistes du moyen &geles ont découpées en
compartiments variés, dont les intervalles sont remplis
de vitreux peints. Au xu* siècle, les roses offrent l'aspect
d'une roue, dont les rais sont formés par de petites co-
lonnes à bases et à chapiteaux, et ont été reliés entre
eux par des arcs en plein cintre ou trilobés ; on les
nomme roues de S^*'Catherine. A partir du xiii* siècle,
les compartiments qui rayonnent du centre sont formés
d'ogives, de trèfles, de quatre-feuilles. Dans le style ogi-
val tertiaire, les meneaux des roses se contournent en
lignes sinueuses et s'entrecoupent avec un art infini.
ROSE, ouverture circulaire pratiquée sur la table des
téorbes, des luths, des guitares, etc.
ROSE (Roman delà), poème allégorique, composé de
deux parties; la l" est l'œuvre d'un Trouvère du xiii* siè-
cle, animé de sentiments chevaleresques, qui célèbre la
galanterie des Cours d'amour; la 2% écrite an siècle sui-
vant, étale une érudition sceptique, et raille toutes les
croyances du moyen ftge. La conception même da poème
est des plus (h>ides. L'Amant, qui n*est autre que le
poète, est dans un Jardin, et entouré de personnages allé-
goriques, qui sont les vices et les vertus chevaleresques,
Haine, Félonie, Villenie, Courtoisie, Envie, Vieillesse,
Papelardic, Pauvreté, et bien d'autres. Il s'éprend d'une
Rose que défendent Dangier, Male-Bouche^ Bassesse,
HainOi Avarice, Chasteté, Honte, Jalousie et Peur. L'Amoar
ROS
1591
ROT
ftdresse à TÂmant an long discours, où il expose les devoini
des amanu fidèles, devoirs difficiles et remplis d'épreuves
avant d'atteindre au bonheur. Bel-Accueil et Doux-Regard,
écuyers du dieu d'amour, conduisent l'Amant vers la
Rose; mais Dangier, aussi vigilant que le dragon du jar-
din des Hespérides, déjoue tous leurs efforts, s'empare de
Bel-Accueil, et l'enferme dans une tour construite par Ja-
lousie.— Là s'arrête la 1'* partie du poôme; elle com-
prend environ 4,000 vers. L'auteur, Guillaume de Lorris,
imite et traduit souvent VArt d'aimer d'Ovide; il est in-
génieux et naïf, mais il manque de hardiesse et de poésie.
C'est à peine si quelques traits heureux rompent parfois
la monotonie de sa fade et ennuyeuse allégorie. Son style,
doux et coulant, mais faible et langoureux, n'a rien qui
puisse saisir et attacher le lecteur.
Jehan de Mehun ou Meung-sur-Loire, surnommé Glo-
pinel ou le Boiteux, continua le Roman de la Rose :
son œuvre forme environ 18,000 vers. Tout en accep-
tant la forme allégorique de la première partie, il s'in-
quiéta peu d'accorder ses opinions avec celles de Guil-
laume de Lorris. L'action continue. L'Amant se désole
au pied de la tour où Bel-Accueil est enfermé: Raison sur-
vient, et lui donne d'excellents conseils pour se débar-
rasser de l'amour et des soucis qu'il entraîne; mais elle
ne peut persuader l'Amant et se retire. L'Ami prend la
place de Raison auprès de l'Amant; il le console, et lui
apprend qu'il pourra posséder la Rose, s'il se peut aider
de Richesse. Mais il ne peut s'entendre avec Richesse, et
serait réduit au désespoir, si Amour ne lui promettait
d'assiéger la tour. Le dieu mande toute sa baronnie, et
commence le siège avec Noblesse de cœur. Franchise,
Largesse, Courtoisie, Abstinence, Contrainte, Faux-Sem-
blant. Celui-ci, déguisé en moine, pénètre dans la tour
et égorge la garde. L'Amant se croit vainqueur ; mais Dan-
gier survient et le bat. Amour ramène ses barons; la
mglée devient furieuse; la victoire est indécise. Alors
Nature envoie son confesseur Genius au camp d'Amour;
la crosse en main , la mitre en tète, il harangue les ba-
rons avec tant d'éloquence, qu'ils sont tous transportés
d'une ardeur nouvelle, culbutent l'ennemi , et demeurent
maîtres de la tour. Courtoisie intercède en faveur de
l'Amant , et lui fait octroyer enfin la Rose vermeille. —
Jehan de Meung continue l'œuvre de son devancier, mais
il n'en conserve pas le caractère. Son récit est semé de
satires. Bien différent de Guillaume de Lorris, qui ne
fiarle qu'avec respect de l'amour et des femmes, il fait de
'amour un plaisir tout physique, et de la femme un être
capricieux, esclave des sens, dépourvu de tout principe
d'honneur et de vertu. La royauté, la noblesse, l'Église,
ne sont pas mieux traitées. Jehan de Meung ose écrire
que le corps d'un noble « ne vaut pas une pomme plus
que le corps d'un charretier. » Il explique l'origine de la
royauté; il ne la fait point procéder du droit divin, mais
de l'élection des hommes, qui tiennent ainsi le roi dans
leur dépendance. Le poète ne se contente pas de poser ce
principe ; il en tire cette conclusion peu conforme aux
traditions monarchiques du moyen &ge :
Quand ili voudront
Leur aido an. roi retireront,
Kt le roi tont senl restera.
Sitôt que le peuple roudra.
Les attaques contre l'Église tiennent aussi une place con-
sidérable dans le Roman de la Rose, Le mysticisme avait
poussé beaucoup de monde dans les couvents ; les maisons
religieuses, en se multipliant, avaient corrompu la pureté
de leur institution, et leurs richesses étaient devenues un
sujet de scandale. Jehan de Meung attaque ces moines qui
s'ingéraient dans toutes les affaires publiques ou privées,
et dont l'humilité s'accommodait fort bien des grandes
affaires et des grandes pitances, sans se soucier en aucune
façon des pauvres. C'est sous la figure d'un moine qu'il
représente Faux-Semblant, l'hypocrite, un des ancêtres de
Tartufe. Enfin il attaque la vie monastique comme con-
traire au vœu de la nature. Dame Nature, se confessant à
Genius, se plaint de l'homme, ^i , seul de tous les ani-
maux, n*obéit pas à sa loi ; Génius prêche aussitôt sur ce
texte : crescUeet multiplicamini, et prononce l'excommu-
nication contre quiconque ne pratique point ce précepte.
Jehan 'de Meung développe une philosophie grossière et
matérialiste, que n'arrête aucune monstruosité, pas même
la communauté des femmes. D'interminables digressions
coupent çà et là son récit, et arrêtent l'action ; il y expose
toutes ses connaissances en philosophie, dans les lettres
et dans les sciences. Il traduit Platon, Pythagore, Virgile,
GMde, Lacain, Cicéron, Horace, Juvéoal^ Suétone, Solin,
Claudien, VAlmageste dePtolémée, les Institutea de Justi-
nien : c'est un amas indigeste de connaissances confuses,
une encyclopédie sans méthode. Malgré ces défauts , le
poème de Jehan de Meung parut une œuvre admirable à
ses contemporains. Les esprits commençaient à se tour-
ner vers les trésors de l'Antiquité ; le Roman de la Rose
annonçait la Renaissance ; aussi fut-il accueilli comme le
plus parfait ouvrage qui eût jamais été écrit en français ;
il eut même tant d'admirateurs , qu'on dut bientôt re-
douter les effets pernicieux de sa morale rel&chée. Gerson
composa un traité pour condamner les erreurs de Jehan
de Meung; mais, en combattant ses doctrines, il rendait
hommage à son érudition, et proclamait que personne
en France ne pouvait lui être comparé. La Rose repré-
sente la femme aimée; cependant l'éditeur de 1^38 ex-
pliqua la fable dans un sens religieux, la Rose étant
l'état de grâce ou la Sainte Vierge elle-même; pour les
alchimistes, la Rose était la pierre philosophale. Le Ro-
man de la Rose a été publié par Méon, 1813, 4 vol.
in^». H. D.
ROSE d'or. V. notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire.
ROSEAU, mot Quelquefois employé comme synonyme
de rudenture, de baguette, de colonnette.
ROSES (Baillée des). V, Baillée des roses, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d* Histoire,
ROSETTE (Inscription de). \ V, notre Dictionnaire de
ROSIÈRE. ) Biogr, et d^Histoire.
ROSINE, ancienne monnaie d'or de Toscane, valant
21 fr. 54 c. Il y avait des demi-rosines.
ROSLIN (Église de), en Ecosse, dans le comté de
Midlothian , lieu de pèlerinage. Elle est située sur une
hauteur appelée College-Hill et boisée, ce qui lui a fait
donner le nom de chapelle au milieu des bois, B&tie on
1445, dans le style gothique Tudor, elle est surmontée de
12 clochetons au nord et de 12 au sud, évidés de niches
pour des statues, et couverts d'animaux bizarres , de la
famille des gnomes et des démons. L'intérieur est à
3 nefs, et a 26 met. de long, 11 de large, 13 de haut;
5 grandes fenêtres l'éclairent de chaque; côté. Les piliers
sont composés d'un faisceau de colonnettes, avec chapi-
piteaux à feuillages mêlés d'animaux. Il en est un, qu'on
nomme Pilier de Vapprenti , dont la base est ornée de
dragons en bas-relief et le fût garni de trois spirales de
fleurs : selon la légende, l'architecte de l'édifice tua par
jalousie un de ses apprentis qui avait sculpté ce pilier.
Sous les dalles de la chapelle reposent les barons de
Roslin, enterrés avec leur armure.
ROSSIGNOL, nom que l'on donnait, au commence-
ment de notre siècle, & une sorte de chalumeau dans
lequel on introduisait un piston, pour obtenir différents
sons en raccourcissant plus ou moins la colonne d'air.
Les enfants en font ainsi avec un bout de branche de
tilleul, de saule, ou de peuplier, coupé au moment de la
sève, et dont ils séparent le bois de Técorce, en battant
un peu celle-ci, sans la casser ; elle forme le tuyau, et le
bois détaché fait le piston.
ROSTRALE (Colonne,— Couronne).) V. notre Dtct,
ROSTRES. [ de Biographie
ROTE. ) et d'Histoire.
ROTISSEURS, ancienne corporation qui existait dès le
xiii* siècle. Ou les nommait oyers ou oyeurs, parce que les
oies étaient un des mets les plus estimés à cette époque.
Ils se confondirent plus tard avec les maîtres queux ou
maîtres cuisiniers.
ROTONDE ( du latin rotundus^ rond) , en termes d'Ar-
chitecture, construction sur un plan circulaire, et parti-
culièrement celle qui se termine par une couverture éga-
lement circulaire ou sphérique, en bois, en fer, ou en
maçonnerie. La rotonde ne fut pratiquée que chez les
peuples où l'art de b&tir était déjà fort avancé. Les
Égyptiens, chez lesquels cet art resta toujours presque à
l'état primitif, ne la connurent pas. Les Grecs, pins
avancés, plus calculateurs, trouvèrent les moyens de sus-
pendre en l'air, avec solidité, de vastes toits de rotondes,
soit en charpente, soit en maçonnerie. Ils appelaient
tliolos ce genre de construction. On voyait à Athènes une
rotonde en marbre où les Prytanes avaient coutume de
sacrifier. La rotonde porte directement sur les murs for-
mant l'enceinte de l'édifice; telle est celle du Panthéon
de Rome, désignée souvent sous le nom de la Rotonde;
la grande chapelle des Médicis, à Florence; l'église de
V Assomption, et la Halle au blé, à Paris, la première en
bois, la seconde en fer, etc. Si la rotonde est une tour,
dominant le reste du monument dont elle fait partie,
comme S^^Pierre de Rome et d'autres églises de la m^me
UOU 1
TJIIo; S^'-Gmemim, les Invalides, le Val-de-Grûce, la
Sorboana, do Paris; la chapelle de l'Escurial: S'-Paul,
de Loadres; S^-Isaac, de S*~Pétersbourg, etc., on l'ap-
pelle coupoU, du nom seul de la couverture.
La Rotond» d« Aaomnï, construite en 530 pour Stre
le loreieau de Théodoric, roi des Ostrogoths, bien que de
oiËdiocrea pr^mrlions, montre ce qu'auraient pu faire ea
ce g(>nre les Egyptiens, qui pratiquaient tant l'architec-
ture avec d'immenses blocs de pierre, dont une seule ror-
mut quclqui:fois le plafond d un temple. Cette Rotonde
■e compose d'abord d'un rei-d»-chsussée décagone, orné
d'une fausse arcade sur chaque taxe, et formani à l'intâ-
rieur une croix grecque; ensuite d'un étage circulaire,
un peu en retraite, où l'on accède par deux escaliers ei-
lérieurs. L'éta^ forme uoe salle ronde, couverte par
une coupole monolithe en pierre d'Istrîe, et mesurant
]I met. de diamètre sur 0"',90 d'épaisseur. Elle pèse
environ iT0,0O() kilog. Les petites parties en saillie, au
nombre de douie, sont des espèces de poignées qui ont
servi k élever cet énorme bloc. La hauteur totale au mo-
nument est do IS^iSO. La salle supérieure, aujourd'hui
convertie eu une chapelle dédiée A la Vierge, n'est écliiiréo
que par de petites Tunetres placées soub la frise. V. la
figure ci-desiout.
Holonât il Rrnvnw.
LC nom de Rotonde se donne aussi & des Cdifice» cir-
culaires, en arcades ou en colonnade, et & del ouvert :
toi est le brillant Boaqtut d'Afollon, dans te parc du
cfaïteau de Versailles.
On nomme Solondt la caisse ordinairement arrondie
qui forme le derrière des diligences, — On appela de
même au ivm* aiècle une esptee de fraise que portaient
les élégants. C. D— t,
ROTRCENGE , vieux mot désignant une chanson que
l'on chantait en ronde avec accompagnement de rote
BOTULUM, nom latin des rouleaux, banderolles ou
pancartes que tiennent certaines statues des portails des
Églises, et où sont écrits des textes de l'Écriture ou les
noms des personnage».
ROTURIER. V. ce mot dans notre Dictionnaire da
Biographie et d'Histoire.
itou ( Le Roman de), poSme compote vers 1170 par
Robert Wace, et qui est comme une suite du roman de
Brut {V, ce moi ). L'auieur retrace l'histoire des Nor-
mand» et de ia Normandie depuis Ron, Roll ou Rollon,
jusqu'à Henri I" (1106). Bien quece.iesoil qu'une seule
et même histoire, les i50 premiers vers sont octosyllabi-
ques; tes Mi suivanis sont des aleiaodrins; puis on
retrouvé la première mesure dans la fin de l'ouvrage.
Quelques crftiqoes pensent que la 3' partie du roman
pourrait bien être seule de Rnben Wace, parce que :
i' les renseiRnements qui lui sont personnels se trou-
vent dan* cette partie, tandis qu'il n'est ni nommé ni dé-
signé dans lei deux premières; 2° Cous les anciens ma-
Biucrit* siijonrd'hu) connus ne renferment que la 3*
n Rou
partie, les deux autres ne s'y trouvant Jointes que di.is
un seul manuscrit dont il ne reste plus qu'une co|iie
moderne; 3' on lit dans la 3* partie une tirade Bar l'ori-
gine du nom de Normandie qui se retrouve k peu prùi
textuellement dans ta première, et des emprunt! de ce
genre étaient alors très-fréquent»; i' il est difficile d'ci-
pliquer ce changement de rhytlime dans l'ouvrage d'un
seul écrivain; â" l'auteur des vers alexandrins déclare
qu'il ne veut s'en rapporter qu'aux témoignages garantis
par le nom d'un hisioden, tandis que Wace a'^puie vo-
iontiers sur de simples traditions. Le Roman de Sou a
été publié par Pluquet, Rouen, 1827, in-8°.
ROUAGE. V. Rouage,
graphie et d'Rialoire.
HOUBAYEH, monnaie d'or .
de sequin, ou S fr. OU c.
ROUGB, monnaie d'argentd
■ n 7* ■'
'e Dictionnaire de Ba-
I Turquie, valant xta tiers
.valant 10 pans,
Dicliomuùre de
Dialionnatr» d* Bio-
ROUBLE, monnaie russe
Biographie et d'Histoire.
ROOCHI. V.WiLLOH.
ROUE (Supplice de la). V.
graphie et d'Histoire.
RODE, nom donné h ta bordure de
^lises o^vales , par exemple celle de la cathédrale
d Amiens, où sont sculpli^ divers personnages dont les
uns gravissent la rampe de l'orbitit, tandis que les autres
descendent, la tète en bas, du cùté opposé. C'est une al-
légorie de la vie humaine.
RODR, V. CooHOnnE de LCHI»HB.
ROUELLE , vieux mot signidant disque, roue, et qui
désigna, par extension, des médaillons et des enseignes
de cette forme.
ROUEN (l'iglise NcrTnE-OAKE , ù). Cett« église métro-
politaine, une des plus importantes de la France, est,
dans sa rousse principale, l'ouvragi des premières anij^
du xin' siècle ; quelques parties, comme la base de la
tour septentrionale du grand portail, sont plus an-
ciennes; d'antres ont été ajouta postérieurement, ou
ont subi des modidcations considérables. La chapelle de
la S" Vierge est du xiv' siècle; les portails latéraux
furent édifléa au xv', le portail occidental et 1» tour di
droite dans la première moitié du ivi*, ainsi que la pj-
ramide qui s'élevait au-dessus du centre des trsnaepts
et dont il ne reste que la partie inférieure. La gravitd du
s^le ogival primitif se trouve donc tempérée par l'al-
liance des formes les plus élégantes, et, malgré la diffé-
rence des époques dont on reconnaît l'empreinte, on
trouve dans ce monument l'unité de peniée et 'xae cer-
taine harmonie.
L'œi I ne peut embrasser l'extérieur de la cathédrale de
Rouen, dont les flsncs sont bordés de rues étroites, et à
laquelle s'adossent encore de cliétives maisons partira^
lières; l'abside est enclavée dans les b&timents de l'ar-
cbevècbé, et les abords de l'édiilce ne sont d^gésqnel-
Îue peu qu'en avant du portail occidental. Ce portail ,
ont les travaux durèrent de 4509 k 1530, serait an mo-
dèle du style ogival de !a dernière époque dans toute la
richesse de son ornementation, si le temps et les hommes
n'y avaient exercé d'effroyable» ravages -. e'estun assem-
blage étonnant de galeries h. jour, de statues, de bas-
reliefs, de feuillages découpés, de colonnettes, de dais,
de pinacles, d'aiguilles, de Ileurons, sculptés arec une
grande flnease, mais mutilés par les calvinistes en 1S63,
ou rongés par l'humidité du climat. Trois portes, qui
correspondent aux nefs intérieures, sont percées k la base
de cette façade ; la porte cenlralc, qui est la plus grande
et la plus riche, offre un tympan où l'on a sculpté l'orfrra
de Jessé {V. ce mot); la porte de gauche a aussi un
tympan, représentant la danse d'Hérodiide et la décolb-
,,,.„ rfoBi i».n_D-„.;„.„, I" tympan de la porte de droite
ible, La tour qui termine la
m de Tour 5* Romain: lûïe
C3L sufiiiuiiire u une pyramide do charpente, recouverte
d'ardoise, qui fut placée en 1177; les cloches et le mé-
canisme de l'horloge y sont placés, La toor méridionale,
comptée parmi les plus belles et les plus grandes con-
structions de ce genre, fut élevée de 1*85 k 1507 ; elle a
77 met. de hauteur : on la nomme Tour de beurre .
parce qu'elle fut bfltie avec le produit des aumftnes failps
par les Hdèles, auxquels avait été accordée la permission
de faire usage de beurre pendant le C««me. Elle conte-
nait autrefois une cloche dite de Georges d'Amboise. pe-
sant 18,000 kilogr,, ei qui, fêlée lor» de l'entrée de
Louis XVI en 1786, fut convertie en canons en 1793. Sur
la tour de pierre dont il reste encore deux étages aa
de S'
est aujourd'hui
fa(ade au Kord porte
ROU
1593
RuU
eenire du transept, Robert Becquet aTaît conttrait,
]a8qu*^ une hauteur de 132 met., une élégante pyra-
mide, que la foudre incendia en 1822 ; on Ta remplacée
par une flèclie en fer, dont Alayoine donna les dessins,
et qui doit s'élever à 148 met. du sol. Cette œuvre, dont
on évalue le poids à 600,000 kilog., est encore inache-
vée; les lignes en sont dures et sèches, et Teffet général
ne répond pas à ce que Ton avait espéré. — Le Portail
des Libraires, àTextrémité du croisillon septentrional,
emprunte son nom à des libraires dont les boutiques en
occupaient Jadis les abords : commencé en 1280, il ne fut
achevé qu*en 1478, et MM. Desmareat et Barthélémy Tont
h201)ilement réparé de nos jours. Il est décoré d^un nombre
infini de bas-reliefs, qui représentent, les uns des traita
de rhistoire sainte, les autres des sujets bizarres et
môme grotesques. Le bas-relief du tympan de la porte
n'a jamais été comploté; on n*a exécuté que les deux
compartiments inférieurs, qui ont pour sujet la Résur-
rection des morts. Cette entrée, accompagnée de deux
tours carrées, ajourées de grandes fenêtres ogivales, est
précédée d'un avant-portail, construit en 1481, et que
couronne une claire-voie fort curieuse. Du côté droit se
trouve un cloître du xiii* siècle, le plus beau qui nous
soit conservé possédant un premier étage. Les travées
inférieures sont larges, percées à la base par 4 arcades
libres qui portent des colonnettes monolithes et au-
dessus desquelles la claire-voie est vitrée. Une épaisse
archivolte soutient un grand talus sur lequel pénètrent
les piles et trumeaux des fenêtres {umellesdu 1*' étage, et
celui-ci est couronné par une corniche et une balustrade.
Le cloître forme, avec les b&timents de la maîtrise, la
Cour de VAlbane, ainsi appelée de l'archevêque Pierre
de Colmieu, cardinal d'Albe. Le portail méridional, dit
de la Calende, fut b&ti vers la même époque que celui
des Libraires, et présente à peu près la même disposi-
tion. Des deux côtés de la porte sont de grandes statues
plus ou moins mutilées, et de petits bas-reliefs à profu-
sion. Le bas-relief du tympan, divisé en trois comparti-
ments, représente Joseph vendu par ses frères, les Fun(^
railles de Jacob, et Jésus sur la croix.
La cathédrale de Rouen est un des monuments gothi-
ques dont la vue intérieure cause le plus d'impression ,
bien qu'elle ait été reblanchie en 1778. Le plan est en
forme de croix latine, avec deux collatéraux jusqu'au
transept, et quatre jusqu'aux chapelles absidsLies. Les
bas côtés se prolongent dans les croisillons du transept.
L'axe de l'édifice présente, au chevet^ une inclinaison
très-sensible (K Axe). Les dimensions générales sont :
longueur, 130 met.; largeur, 32<", 30; longueur de la
croisée, 54'", 60 ; hauteur de la grande nef sous voûte,
28"* ; hauteur des collatéraux, 14'" ; hauteur de la lan-
terne au centre de la croisée, 53'", 30. Des chapelles, au
nombre de 25, régnent dans toute la longueur de l'église;
celle de S^ Etienne, au pied de la tour méridionale, a des
proportions exceptionnelles; elle servait à une paroisse
de même nom, supprimée en 1791. Les fenêtres, dont on
ne compte pas moins de 130, offrent des formes et des
compartiments variés, suivant l'époque où elles furent
construites; celles à lancette, la plupart géminées, se
remarquent particulièrement au pourtour de l'abside, et
sont garnies d'éblouissants vitraux du xiii* siècle; les
fenêtres rayonnantes et flamboyantes ne sont pas toutes
pourvues de verrières, mais on distingue celles de la
chapelle S'-Romain, peintes au temps de la Renaissance.
Les roses des trois portails sont d'un riche dessin : les
vitraux de celle de l'Ouest représentent le Père éternel
environné d'Anges qui jouent de divers instruments de
musique. Les arcades ogivales sont généralement très-
aiguës ; celles qui se trouvent au point d'union des nefs
et de la croisée sont d'une hardiesse prodigieuse. Les
piliers , cylindriques autour du chœur, se composent
partout ailleurs d'un iaisceau de colonnettes ; les quatre
qui soutiennent la lanterne n'ont pas moins de 12™, 66
de circonférence. Les galeries du triforium ne sont à
jour qu'autour du chœur et du sanctuaire j, dans le reste
de r^ise, leur balustrade se détache sur le fond de la
muraille elle-même, et il y a là une opposition de tons
sur deux plans différents (jui produit un agréable effet;
Dans l'encoignure du croisillon septentrional, un joli
escalier gothique donne accès à l'ancienne bibliothèque
du Chapitre. Autrefois, un jubé eh pierre, délicatement
sculpté, et es harmonie de style avec le reste de l'édifice,
ornait l'entrée du chœur : par une faute de goût fort
commune au xvin* siècle, on lui substitua, en 1777, le
Jubé d'ordre ionique en marbre blanc qui existe encore
aujourd'hui ; la tribune qui rèfci^e dans la partie supé-
rieure est surmontée d'un Christ en plomb doré, exécuté
par Clodion ; deux petits autels s'élèvent au pied de ce
jubé, et sont ornés chacun d'une statue d'un caractère
païen , une S** Vierge par Lecomte, et une S** Cécile par
Clodion. Le chœur, long de 36™, a des stalles sculptées
en 1467, et dont les consoles sont décorées de sujets
très-curieux, pleins de naïveté et de verve. Il contenait
aussi jadis les tombeaux de Richard Cœur de Lion, de
son frère Henri, de leur oncle Guillaume, et du fameui
duc de Bedford ; mutilés par les calvinistes en 1502, ils
disparurent quand on exhaussa le chœur en 1736. Des
fouilles ont amené, en 1838, la découverte du cœur et
d'une statue de Richard, et, en 1802, celle du cœur du
roi Charles V. A la droite du chœur, dans le collatéral ,
on remarque la clôture en maçonnerie et la porte en fer
de la sacristie, ouvrages estimés, de la fin du xv* siècle.
Les monuments funéraires sont encore nombreux dans
la cathédrale de Rouen, et plusieurs méritent de figurer
parmi les chefs-d'œuvre de l'art. Dans la chapelle dite
du Petit S^ Romain, la première du collatéral droit, près
du transept, on voit sous un enfoncement cintré le tom-
beau de Rollon, 1*' duc de Normandie : la statue couchée
sur ce tombeau est d'un travail assez moderne, et forte-
ment endommagée. La dépouille mortelle de Guillaume
Longue-Épée, fils de Rollon, se trouve en face, dans la
chapelle S^* Aune du collatéral opposé. Avant d'entrer
dans la chapelle de la S^* Vierge, à gauche, on rencontre,
soas une arcade à plein cintre, la statue couchée d'un
évêque ; des Anges, aux ailes déployées, conduisent au
ciel r&me du défunt, représentée sous la figure d'un pérît
enfant; à la partie inférieure du sépulcre, sont quelques
bas-reliefs à demi efTacés. Ce tombeau est celui de l'ar-
chevêque Maurice, mort en 1235. — La chapelle de la
S** Vierge, où l'architecture ogivale a étalé toutes ses ri-
chesses, est une des plus belles qui existent à l'absido
des grandes cathédrales ; elle n'a pas moins de 29 met.
de longueur. Au fond, un retable tout doré encadre une
Adoration des bergers, par Philippe de Champagne. Sur
le côté gauche de la chapelle on remarque trois tom-
beaux. Le premier, en pierre, sans inscription, sans
statue, et néanmoins remarquable par ses gracieuses
proportions, par l'élégance et la délicatesse de son archi-
tecture, est celui de Pierre de Brézé, comte de Maulo-
vrier, grand sénéchal de Normandie, tué à la bataille de
Montlhéry en 1465. Le second a été érigé à Louis de
Brézé, petit-fils du précédent, par sa veuve Diane de
Poitiers. Le cénotaphe est de marbre noir : au-dessus
gît la statne en marbre blanc du sénéchal ; le corps est
nu, et la mort y est peinte avec une vérité efiirayante.
Du côté de la tête, Diane est agenouillée, les bras croisés,
et en habits de veuve; aux pieds, la S** Vierge, tenant
l'enfant Jésus. Cette scène est encadrée de 4 colonnes en
marbre noir, dont les chapiteaux et les bases sont en
alb&tre. Au-dessus de l'entablement, dans une arcade
que soutiennent quatre caryatides, la Prudence et la
Gloire d'un côté, la Victoire et la Foi de l'autre, on voit
la statue équestre du sénéchal, en marbre blanc. Le cou-
ronnement est un attique formant une niche : elle con-
tient une statue en alb&tre, tenant une épée, et qui est
la Force selon les uns, la Justice selon les autres. La
corniche se termine par deux chèvres portant les armoi-
ries du sénéchal. Toutes les frises sont en albfi.trc, les
architraves et les corniches en marbre noir. Ce beau
mausolée est attribué à Jean Cousin ou à Jean Goujon.
Le troisième tombeau, ouvrage de M. Barthélémy, a été
érigé en 1857 au cardinal prince de Croy, mort en 1844.
Sur le côté droit de la chapelle de la Vierge s'élève le
magnifique monument funéraire élevé de 1518 à 1525
aux deux cardinaux d'Amboise. La Renaissance n'a point
d'œuvre qui lui soit supérieure. Deux belles statues en
marbre blanc, agenouillées, la tête nue et les mains
jointes, sont posées sur le tombeau de marbre noir. A la
partie inférieure, dans des niches séparées par des pi-
lastres, sont 6 charmantes statuettes en marbre blanc,
représentant la Foi, la Charité, la Prudence, la Force, la
Justice et la Tempérance. Sur le fond, derrière les
grandes statues, est un bas-relief représentant S* Georges
qui terrasse un dragon ; sur les côtés sont distribuées
huit autres figures, parmi lesquelles on reconnaît la
S*« Vierge et S* Romain. Une voussure décorée de sculp-
tures aussi remarquables par le bon goût que par la
richesse des ornements soutient un attique, où l'on voit
les 12 Apôtres, placés deux à deux dans des niches élé-
gantes que séparent des pilastres. V, Pommeraye » His-
toire de l'église cathédrale de Rouen; Gilbert, Descrip-
tion historique de Véglise cathédrale de Notre-Dame dt
ROD
1594
ROU
Rouen, Rouen, 1816, in-8*; Dcvîlle, Tombeaux de la
cathédrale de Rouen, 1833, in-8**; Langlois, Stalles de
la cathédrale de Rouen, 1838, in-S». B.
ROUEN (Église S^-OuEN, à). Cette église, la plus belle
de toutes les abbatiales, et digne d'être comparée aax
cathédrales les plus illustres, fut commencée en 1318
sous ra5bé Jean Roussel, dit Marc-d*Argent, par un ar-
chitecte dont le nom est inconnu , et qui, dans l'espace
de 21 ans, acheva le chœur, les chapelles absidales, les
piliers et la plus grande partie du transept. Au siècle
suivant, Alexandre de Berneval dirigea les travaux. Vers
1404, on b&tit deux travées de la nef ; le reste ne fut
continué que vers la fin du xv* siècle et au commence-
ment du XVI*. Le grand portail occidental n*a point été
fait d*après les plans primitifs et grandioses qui nous ont
été conservés; deux massifs en lourde maçonnerie flan-
quèrent le bas de la nef pendant de longues années : on
les a abattus de nos jours, et M, Grégoire a édifié le por-
tail actuel, large de 38 mèu
Trois portes s'ouvrent à la base de cette façade. La
voussure de la porte centrale est à cinq cordons de sta-
tuettes et de dais, sculptés avec beaucoup de délicatesse :
la baie est coupée par un pilier vertical, auquel s'adosse
une statue du Christ; les pieds-droits sont garnis des
statues de 10 Apôtres, parmi lesquels S* Paul a été sub-
stitué & S^ Matthias, et les deux autres Apôtres ont été
ajoutés, après coup, un peu en saillie sur la façade. Les
deux autres portes n'ont que deux cordons à la voussure,
et deux statues sur chacun de leurs côtés : à gauche,
Dagobert, S* Éloi, S» Philbert et S«« Austreberthe ; à
droite. S* Nicaise, S* Romain, S* Benoit et S* Ouen. En
retour sur les flancs de l'édifice sont percées deux portes
semblables aux précédentes ; celle du Nord présente les
statues de Glotaire P', de l'impératrice Mathilde, de
S'« Clotilde, et de Charies de Valois (fils de Philippe le
ITardi); celle du Sud, les statues aes abbés Nicolas,
Marc-d' Argent, Hildebert et Bohier. Elles n'ont aucune
utilité, puisqu'elles donnent accès dans les petits vesti-
bules qui sont à la base des tours de la façade, et où Ton
pénètre déjà par les portes antérieures. Les cinq portes,
contrairement à l'usage le plus répandu, n'ont point de
tympan, mais, à la place, une rosace à jour. Elles sont
toutes surmontées d'élégants frontons, découpés à jour,
et couronnés d'un pinacle, sauf celui de la porte cen-
trale, que termine un groupe de la Trinité. Au-dessus de
cette porte et en arrière de son fronton s'ouvre une ga-
lerie vitrée, et, plus haut, une magnifique rose, à la-
quelle beaucoup d'archéologues ne reconnaissent d'égale
en aucun lieu du monde. La façade est couronnée par
une galerie ogivale, où sont contenues onze statues
(S^ wandrille, S^ Germer, les archevêques Flavius, Ans-
bert, Maurileet Geoff'roy, Richard l**", duc de Normandie,
Richard II, Guillaume le Conquérant, Henri II, roi d'An-
gleterre, et Richard Cœur de Lion ), et par un pignon
élégamment sculpté, dont une statue de S^ Ouen occupe
le point culminant. Les diverses statues du portail ont
été faites par M. Victor Villain ou sous sa direction. Deux
tours s'élèvent au-dessus des petites portes : elles ont
deux étages de forme octogonale, en retraite l'un sur
l'autre, et percés de longues baies ogivales sur leurs
faces; le 1*' encadre la grande rose, le 2* dépasse le
comble de l'édifice ; puis, des flèches également octogo-
nales atteignent à une hauteur de 76 met. On reproche à
Venscmble du portail de n'être point assez en relief sur
a nef de l'église, dont il masque la dernière travée, et
aux flèches, de paraître un peu grêles à une certaine
distance. — Sur le flanc septentrional de l'église est un
petit cloître, qui servit longtemps de prison municipale,
et dont on a fait une sacristie après l'avoir reconstruit.
Le croisillon du même côté, attenant à l'Hôtel de Ville ,
qui était autrefois le dortoir des moines de l'abbaye, n'a
point de portail ; on aperçoit seulement, au-dessus du
comble de l'Hôtel de Ville, un pignon sculpté qui repré-
sente la partie culminante de ce portail. Au delà des
bâtiments municipaux, dans le jardin public qui enve-
loppe tout le chevet de Téglise, on remarque une petite
tour en style du xi* siècle, appelée la Chambre aux
clercs, et qui parait provenir d'une église plus ancienne:
elle est divisée intérieurement en deux éta<;es, dont l'un
renferme le mécanisme de l'horloge. Rien n'est plus beau
que la perspective de l'abside, avec ses contre-forts élan-
cés, ses deux rangs d'arcs-boutants, et ses onze chapelles
à toits pyramidaux en ardoise. En passant sur le côté
méridional du monument, on trouve une autre sacristie,
puis, à l'extrémité du croisillon, le Portail des MarmoU"
sets. C'est un des spécimens les plus élégants de l'archi-
tecture ogivale : la voûte, qui supporte une petite biblio-
thèque, projette deux pendentifs d'une exécution hardie;
le tympan de la porte contient un bas-relief divisé en
trois parties, qui sont consacrées à l'ensevelissement de
la Vierge, à son Assomption, et à son entrée dans le ciel:
on n'a jamais rien sculpté de plus gracieux et de plus
achevé. Plus bas que le croisillon, une petite porte donne
accès dans l'église. — La grande tour qui s'élève ao
centre du transept, et qui est haute de Si met., est un
monument de force et de légèreté tout ensemble. Sa base
carrée est percée sur chaque face de deux grandes fen^
très surmontées de pignons élégamment découpés. La
partie supérieure, de fbrme octogone, est accompagnée
de quatre jolies tourelles qui se rattachent aux angles de
la tour. Une couronne travaillée à jour, et d'un effet in-
comparable, la surmonte. Qu'on l'examine de près dans
SCS moindres détails, ou des hauteurs qui avoisinent la
ville, c'est un chef-d'œuvre unique en son genre.
A l'intérieur, l'église de S* Ouen a 138"» de longueur,
dont 80 pour la nef et 35 pour le chœur; 26"* de liîgeur,
dont 11*",33 pour la nef mineure et 7'",33 pour chaque
collatéral; 42'",22 de largeur au transept; 32'",50 de
hauteur sous voûte. Contre le premier pilier de droite en
entrant par le portail occidental, est un grand bénitier
de marbre, où, par un effet d'optique assez curieux, se
reflète l'église dans toute son étendue. Nul édifice peut-
être ne frappe les yeux et n'étonne la pensée à un si haut
degré : la grandeur des proportions, la régularité de l'en-
semble, l'harmonie des parties, la pureté des lignes, tout
concourt à former l'impression qu'on éprouve à la vue
de ce vaisseau, où aucun monument accessoire, aucun
ornement superflu n'embarrasse la perspective; où P25
verrières disposées sur trois rangs, sans y comprendre
les trois roses, projettent leur lumière mystérieuse; où
enfin la pierre, noircie par les ans, et par les forges que
la Révolution installa aJsns ces vastes nefs, ajoute à la
sévérité de l'architecture. Le premier rang de fenêtres
éclaire les collatéraux, ainsi que les chapelles absidalei^.
Les piliers de la nef, élancés et largement espacés, sont
flanqués de colon nettes élégantes, dont quelques-unes
montent jusqu'au sommet de l'édifice, pour recevoir la
retombée des nervures de la voûte. Un certain nombre
de ces piliers offrent des consoles et des dais, entre les-
quels devraient se trouver des statues. Le sommet des
arcades à ogive est à 15'",23 au-dessus du sol. Une élé-
gante galerie, de 6"\2j d'élévation, formée de colon nettes
que couronnent des rosaces à cinq lobes, surmonte as
arcades dans tout le pourtour de l'église. Plus haut, une
claire-voie compose le second rang de fenêtres. Le troi-
sième rang est garni de vitraux, qui représentent, sur le
côté méridional de l'édifice, les personnages les plus
illustres de l'Ancien Testament et les figures des Si-
bylles, et, sur le côté septentrional, quelques sainte é%c-
ques des premiers temps du christianisme, des Pères de
l'Église, et des abbés de Tordre de S^ Benoît. Les colla-
téraux n'ont pas de chapelles ; une seule, de très-petite
dimension, a été pratiquée près du croisillon méridional.
Il en existe une autre, aussi peu importante, dans le croi-
sillon septentrional. Les chapelles absidales sont déco-
rées pauvrement et sans goût : la l'* à gauche du chœur
contient les fonts baptismaux ; dans la seconde, on voit
la pierre sépulcrale d'Alexandre de Berneval et d'un de
ses élèves, qu'il tua, selon la lé^nde, pour avoir exécuté
dans le transept une rose supérieure à celle dont il était
lui-même l'auteur. Dans quelques autres chapelles, il y
a des autels à colonnes grecques. Le chœur était autre-
fois séparé de la nef par un beau jubé du xv* siècle ,
dont on a conservé du moins le dessin ; il possède encore,
autour du sanctuaire, plusieurs grilles en fer, bel ou-
vrage de serrurerie. Une chaire en bois, sculptée dans le
style du xiv* siècle, et dessinée par M. Desmarest, a été
placée dans la nef en 1861. F. Pommeraye, Histoire de
Vabbaye royale de S^ Ouen^ 1GG2, in-fol. ; Gilbert, Des-
cription historique de Véglise S^ Ouen dé Rouen, 18:î2,
in-80. B.
ROUEN (Église S*-Maclod, à). Construite dans la se-
conde moitié du xv' siècle, cette église est un charmant
spécimen du style gothique fleuri. Son grand portail , de
forme un peu convexe, offre cinq portes , dont deux ont
été condamnées : celle du centre est surmontée d'un bas-
relief qui représente le Jugement dernier. Le panneau de
la porte voisine à gauche a été sculpté, ditr09, par Jean
Goujon , et , au milieu d'arabesques, un grand médaillon
renferme le Baptême de Jésus-Christ, On attribue an
même artiste la porte qui sert d'entrée sur le flanc sep-
tentrional de l'église; le relief principal est la Mort de Um
ROU
1595
ROU
Vtêrge, Du côté opposé se trouve un aitre, où Ton a dé-
couvert les fragments d'une Danse des Morts {V,ce mot),
Aa-dessus de l'église S^-Maclou, & rentrée du chœur,
s'élève une tour formant lanterne ; elle était couronnée
par une élégante pjnramide, qui s'élançait jusqu'à 78 mot.
du soi , et qui, ébrmiée par un ouragan en 1705, fut
bientôt abattue : on /; remplaça par le beffroi disgracieux
cp charpente recoui -fte d'ardoise qu'on voit encore au-
jourd'hui. A l'intérieur, l'édifice a 47 met. de longueur,
sur 25 de largeur en y comprenant les collatéraux. On
remarque l'escalier sculpté h, jour qui conduit h l'orgue,
et les vitraux des fenêtres, malheureusement mutilés. B,
RODEN (Hôtel du BouRGTHEnoDLDB , à), édiflco com-
mencé vers la fin du xv* siècle par Guill. Leroux, sci-
i;neur du Bourgtheroulde, et terminé par son fils, abbé
d'Âumale et du Val-Richer. L'extérieur, sur la place de
la Pucelle d'Orléans, offre un rez-de-chausséo avec un
étage, dont les sculptures sont à peu près détruites. Le
corps principal d'habitation, occupé aujourd'hui par le
Comptoir d'escompte, est situé au fond d'une cour à peu
pris carrée : sa façade est somptueusement décorée de
bas-reliefs. Le 1*' bas-relief à gauche , sous la petite
croisée, représente un triomphe; le 2" a été détruit; le
3* offre une salamandre au milieu des flammes, devise
de François 1*'; le 4* représente un phénix couronné
dans les flammes. Les bas-reliefs de l'étage supérieur
offrent des sujets analogues aux précédents. Les fenêtres
du comble sont en ogivp, et couronnées de frontons py-
ramidaux chargés d'orn'^jents gothiques : sur le tympan
de l'une, on voit un écusson supporté par des chevaux.
A gauche de cette façade, une très-belle tourelle hexago-
nale est ornée de 6 bas-reliefs, qui représentent des
scènes champêtres et pastorales, aussi remarquables par
leur belle conservation que par le mérite du travail. Une
galerie couverte, à 5 arcades, forme le côté gauche de la
cour, et Joint cette tourelle à la façade : on y voit, à hau-
teur d'homme, au-dessous des arcades, cinq bas-reliefs
figurant l'entrevue de François P' et de Henri VIII au
Camp du drap d'or; ce sont de véritables chefs-d'œuvre,
f)récieux pour la connaissance des costumes, mais que les
ntempénes de l'air et les mutilations ont singulièrement
détériorés. Au-dessus des arcades est un entablement,
dont la frise se divise en 6 panneaux, ornés d'autres bas-
re/iefs symboliques : les deux premiers sont à peu près
détruits; le 3' représente un char traîné par des bœufs,
et sous les roues duquel sont écrasés plusieurs person-
nages; sur le 4% la Mort précède un char traîné par
deux éléphants, et sur lequel une femme sonne de la
trompette; le 5* offre un char couronné d'un dais, traîné
par ôuatre chevaux, et entouré de diverses personnes ;
dans le 6", les trois personnes de la Trinité sont sur un
char que traînent un lion , un aigle, un bœuf et un ange,
symboles des quatre Êvangélistes, et sous les roues de ce
char une foule de personnages figurent sans doute les
hérétiques. Le b&timent & droite de la cour n'a rien de
remarquable. B.
ROUEN (Le Palais de Justice de), monument de l'ar-
chitecture gothique, le plus beau de tous ceux qui sont
affectés en France au service des tribunaux. Il fut bâti en
1409 pour l'Échiquier de Normandie par Roger Ango. Sa
façade, exposée au midi , a 65 met de développement , et
offre ce qu'on peut ima^ner de plus riche et de plus dé-
licat dans l'ornementation. L'élégante tourelle octogone
qui occupe le milieu, les piliers angulaires que recou-
vrent de la base au sommet les dais et les statues, les
Hnes sculptures dont sont entourées les fenêtres, la série
d'arcades qu forment galerie sur toute la longueur de
l'entablement, les belles lucarnes percées à la base du
toit, tout est d'un excellent goût. Des statues, sculptées
par M. Brun , représentent Louis XH, Anne de Bretagne,
le cardinal d'Amboise, François I^, la Justice, un labou-
reur, une Tillageoise, une dame, un seigneur, un moine,
un artiste, c.-à-d. les personnages qui concoururent à
l'érection de l'édifice, et le^ différentes classes de la so-
ciété du temps. A l'intérieur, l'ancienne grande chambre
du parlement, où siège aujourd'hui la Cour d'assises, est
une merveHle en son genre : le plafond, à compartiments
et caissons , décoré de rosaces et d'ornements en bronze
doré, est d'un bois de chêne que le temps a rendu cou-
leur d'ébèno; un Christ en croix, qu'accompagnent les
statues de la Justice et de la Force, est placé à l'extré-
mité de la 82^10, au-dessus des sièges de la Cour. Dans
la chambre du conseil, on remarque plusieurs portraits
de présidents et conseillers au parlement de Normandie,
et un Christ en croix, aux pieds duquel sont deux saintes
femm<«9 précieux tableau sur fond d'or, donné par
Louis XIL — Le Palais de Justice a deux ailes en sailUe
vers le midi à ses extrémités : toutes deux sont flanquées
à leurs angles de tourelles octogones qui contiennent des
escaliers. Celle de l'Ouest, antérieure au corps prin-
cipal, date de 1493, et fut construite pour servir de lieu
de réunion aux marchands. Le rez-de-chaussée en est
occupé par la Conciergerie et les prisons. Un vaste esca^-
lier extérieur donne accès au premier étage, en grande
partie formé par la Salle des Procureurs ou des Pas
Perdus. Cette salle, oui fait l'admiration des architectes,
est longue de 48™,72, large de 16™ ,24, et sa voûte im-
mense de charpente, en forme de carène de navire ren-
versée , n'est soutenue par aucun pilier. D'élégantes
niches, vides de statues, se détachent en i*elief sur les
murailles. A l'une des extrémités de la salle, on a placé
le modèle en pl&tre de la statue de P. Corneille, par
David, érigée en 1834 au centre du terre-piein du pont
de pierre ; à l'autre extrémité, par où Ton entre dans la
salle des assises , sont les tombeaux du premier prési-
dent Claude Groulard et de sa femme, provenant du châ^
teau de S^-Aubin-le-Cauf, près de Dieppe. L'aile de l'Est
avait été bâtie, au commencement du xvni« siècle en
style moderne, qui faisait disparate avec le reste du
monument : une partie de cette construction s'étant
écroulée en 1812, on éleva l'aile actuelle, extérieurement
semblable à celle qui lui fait face.
RODBN (Faïences de). F. au Supplément.
ROUET, terme de Construction, synonyme d'En*
rayure (k. ce mot),
ROUF, terme de Marine, qui a le sens de carrosse ou
dunette,
ROULADES, nom donné vulgairement aux traits de
chant qui consistent à exécuter avec rapidité plusieurs
notes sur une même syllabe. La voix semble rouler en
passant légèrement d'un son à un autre.
ROULAGt) , transport des marchandises ou autres ob-
jets analogues par voitures h roues, sur les chemins pu-
blics ordinaires. Les conducteurs de ces voitures s'appel-
lent routiers. On distingue le roulage ordinaire, dont la
vitesse est de 30 à 40 kilom. par jour, et le roulage accé-
léré^ qui fait 75 kilom. Par le 1"% le prix de transport
d'un tonneau de marchandises à 4 kilom. de distance est
de 0 fr. 00 c. ; par le 2% de 2 fr. 15 c. Pendant long-
temps, des mesures furent prises pour protéger les routes
contre les dangers qui paraissaient résulter pour elles de
la circulation de voitures trop chargées ou mal con-
struites ; pour arriver à la limitation du poids, on em-
ployait deux movens, la limitation du nombre des che-
vaux, et un système de pesage public (ponts & bascule ]•
La loi du 30 mai 1851 a remplacé à peu près par la li-
berté cette protection économique : elle pose en principe
que toute voiture peut circuler sans condition de poids ;
elle a réservé seulement, au point de vue de la conser-
vation des routes, le principe de quelques dispositions
relatives à la forme des bandes de roues et des clous de
bandes, à la circulation pendant les jours de dégel, à la
protection des ponts suspendus, et ces dispositions ont
4té l'objet d'un règlement d'administration publique,
ëdicté le 10 août 1852. Ce règlement a pris aussi les me-
sures nécessaires pour prévenir les accidents qui résul-
teraient de la manière dont les voitures sont construites,
attelées, chargées et conduites, et pour assurer la répres-
sion des contraventions. Les contraventions sont de la
compétence du Conseil de préfecture du département où
le procès-verbal a été dressé : elles peuvent être consta-
tées par les maires et adjoints, les commissaires et agents
de police, les ingénieurs des ponts et chaussées, les
agents voyers, les conducteurs, les cantonniers-chefs, les
gendarmes, les gardes champêtres, les agents forestiers
on des douanes, les employés des contributions indireo»
tes, etc. V, Verlet-Dumesnil, Police du roulaae^ 1857,
in-8';Guilbon, Traité de lapoliceduroiUageyiSoT, in^S',
ROULEAUX DES MORTS. V, le Supplément,
ROULEMENT, batterie de caisse produite par le mou-
vement alternatif et très-rapide des deux baguettes. On
fait un roulement pour ordonner à une troupe de re-
prendre son rang, de faire halte, de se préparer à une
manœuvre, etc. — Dans un orchestre, on fait aussi des
roulements sur les timbales : ils produisent un grand
effet dans le crescendo et le forte. Plusieurs symphonies
de Haydn commencent par un roulement de timbales.
ROULEMENT (Fouds do), eu termes de Commerce et de
Finances, somme en espèces métalliques .ou en billets
de banque nécessaire aux payements ordinaires et quo-
tidiens.
ROULETTE, jeu de hasard. C*est an cylindre dt
ROU
1596
ROU
0™,66 àe diamètre environ, au centre duquel est sus-
pendu uiv plateau mobile, et dont les bords sont garnis
de petites eases numérotées. Les numéros 1 à 36, le zéro
simple et le zéro double y sont mélangés, et alternative-
ment inscrits en rouge' et en noir. Le cylindre est placé
au milieu d'un tapis vert , divisé lui-même en autant de
compartiments sur lesquels les Joueurs placent leurs
pontes ou mises. Le banquier fait tourner le plateau , et
y lance une bille dMvoire qui , après un certain nombre
de tours , d'ondulations et de soubresauts, se loge dans
une des cases, dont le numéro est le gagnant. Si le joueur
a spéculé sur un seul numéro, ou sur Tun des zéros, le
banquier paye 36 Tois la mise; si l'enjeu est sur deux nu-
méros voisins, la sortie d'un seul rend 18 fois cet enjeu;
s'il est sur quatre, 9; sur six, 6. Si toutes les mises
étaient égales, le banquier, recevant 38, ne rembourse-
rait que 36, et aurait toujours un 17* de bénéfice. Mais il
s'est ménagé des chances bien plus profitables encore. Les
joueurs, au lieu de poursuivre un numéro, préfèrent or-
dinairement jouer le rotige ou notr, le pair ou impair ^
le pcuse ou manque (1 à 18, ou 10 à 36) ; ce ne serait
que la chance vulgaire de un contre un , si le banquier
n'avait pour lui les zéros rouge et noir : un zéro sortant ,
la moitié des enjeux lui appartient. La roulette est donc
un des jeux les plus dangereux pour les joueurs. Intro-
duite en France dans les malsons de jeu sous la lieute-
nance de police de M. de Sartine, elle a été supprimée
en 1838; mais elle existe toujours en Allemagne et en
Italie.
ROULETTES. F. PnoPYLfes de Paris.
ROULIS, oscillation d'un bâtiment dans le sens de sa
largeur. L'oscillation de poupe en proue se nomme
tangage.
ROUMANCHE (Idiome). V, Rh^ien.
ROUMANE ou ROUMAINE (Langue), une des langues
néo-latines ou romanes, parlée par les habitants de la
Valucliic et de la Moldavie, qui aiment à se dire descen-
dants des anciens Romains. Le fond de la langue est, en
efTet, le latin , apporté dans le pays au temps de l'empe-
reur Trajan , après la soumission des Daces. Du nom de
ce peuple on l'appelle daco^omane, et, à cause des élé-
ments slaves qu'elle a conservés, elle a reçu encore la
dénomination de romana-slave. Quelques racines grec-
3ues et turques B*y sont introduites. Parmi les termes
'origine latine, il en est qui ne se trouvent plus dans les
autres langues néo-latines, par exemple : alb, digitt
vuorbê,masa, ruoga, dérivés d'albus (blanc), aigi-
tus (doigt), verbum (parole), mensa f table), rogare
(prier), etc. Dans beaucoup de substantifs, les Roumans
se sont bornés à supprimer la consonne finale, sans
altérer la voyelle précédente comme l'ont fait les Espa-
gnols et les Italiens : ainsi, de Dmu (Dieu), domus
( maison \ fructus (fruit), ventus (vent), vinum (vin),
templwn (temple), ils ont fait Deu, domu, fructu, ventu,
vinu, templu, etc. Ils ont adopté l'article défini , mais ils
l'emploient principalement sous forme de suffixe. Les
augmentatifs et les diminutifs sont nombreux dans la
langue roumane. Les degrés de comparaison s'expriment
à l'aide de particules. La conjugaison, assez compliquée,
a plus d'analogie avec celle des langues slaves qu'avec
celle des langues néo-latines; l'emploi des auxiliaires y
est fréquent, non-seulement pour la formation du passé,
mais aussi pour celle du futur. Certains linguistes dis-
tinguent dans le rouman quatre dialectes : le valaque ou
munleni; le moldave ou moldovenif usité en Bessarabie
aussi bien qu'en Moldavie; VardicUien, parlé en Tran-
sylvanie et en Hongrie; et le zinzar, appelé aussi ma-
cédo-vaXaquBy vlaco-macédonien et thraco-vaîaque. On
remarque dans la prononciation du rouman les voyelles
nasales an, in, on. Il s'écrit tantôt avec les caractères la-
tins, tantôt à l'aide d'un alphabet de 28 lettres , dont les
formes sont empruntées à celles de l'alphabet slave-illy-
rien. V. Klein et Schinkay, Elementa lingiuB daco-ro-
manœ seu walachicas. Vienne, 1780, in-8**; J. Molnar,
Grammaire valaque, Vienne, 1788, in-8^; J. Alexi,
Gi'ammatica daco-romana, Vienne, 182C, in-8°; Jean
Bob, Dictionnaire latin, roumain et hongrois, Klausen-
burg, 1830, 3 vol.; J.-A. Vaillant, Grammaire roumane,
Bukharest, 1840, in-8'»; Poyenar, Aaron et Hill , Diction-
naire français^vialaque , Bukharest, 1840, '2 vol. in-S*»;
Iszer, Dictionnaire valaque-ailemand , Kronstadt, 1850,
în-8«», et Grammaire valaque, ibid., 1855; Baritz et
Munteau, Dictionnaire allemand et roumain, ibid.,
1853-54, 2 vol. gr. in-8<»; Schoimul, Grammaire théo-
rique et pratique de la langue roumane, en allcm..
Vienne, 1855. — Les Holdo-Valaques ont des poésies na-
. tionales. Un de leurs poètes, V. Alexandri , a recueilli des
Ballades et chants populaires de ta Roumanie, et en a
publié une traduction française, PaMS, 1855, in -12.
ROUPIE, monnaie. V. notre Diciionnaire de Dtogro
phie et d'Histoire,
ROUSKI. V, Rosse (Langue).
ROUSSNIAQUE. V. RcssifiAQOB.
ROUT , mot anglais qu'on prononce raout , et qui ,
après s'être originairement appliqué à une bande tumul-
tueuse formée par des gens de la populace, désigne de-
puis le commencement du xvm* siècle toute assemblée
du grand monde. — Un véritable Rout exige des salons
spacieux, où deux cents ou trois cents personnes, la plu-
fiart inconnues les unes aux auties, se promènent eo
ong et en large, et à peu près silencieusement. La su-
prême fashion exigeant que le Rout soit très- nombreux,
on multiplie les invitations, de sorte que les promeneurs
se pressent, se coudoyent, se heurtent dans une circula-
tion incessante, car il y a peu ou point de sièges dans le
lieu de réception, et marcher vaut mieux que stationner;
c'est au moins faire quelque chose. La plupart du temps
les dames sont entre elles et se donnent le bras, et les
hommes à parL Ces cohues aristocratiques, ou qui am-
bitionnent l'air aristocratique, ont un grand charme pour
le flegme des Anglais. En 1 802, la célèbre peintre M"** Vi-
gée-Lebrun, se trouvant dans un magnifique Rout, y fut
acostée par un gentleman qu'elle avait connu en Italie,
et qui, rompant pour elle le yî'ence général, lui dit, avec
un air de satisfaction : « N'estr-ci' ]^ que ces réunions sont
amusantes? — Vous voua amurtéz, repartit la spirituelle
artiste, comme nous nous ennuierions. » C. D — r,
ROUTE , mot employé oans l'usa^ comme synonyme
de voie et de chemin, mais qui éveille particulièrement
l'idée qu'on peut y rouler en voiture. Il parait, en effet,
dériver du latin rota (roue), et les Anciens avaient per-
sonnifié les voies publiques sous la figure d'une femme
appuyée sur une roue. En France, on distingue aujour-
d'hui : 1^ les routes impériales (ci-devant nationales et
royales)^ subdivisées en trois classes (14 met., 12"*, et
10 à 11 1^ de largeur), et qui , ayant pour but l'utilité gé-
nérale de la nation, sont entretenues aux frais de l'État;
2° les routes départementales, subdivisées également en
plusieura classes (8 à lOi" de largeur), tracées pour l'utilité
particulière des départements, et entretenues à leure frab ;
3*> les chMiins de grande communication, entretenus
aux frais des départements et des communes intér^sées;
4^ les chemins vicinaux ou communaux (F. Cheiii?i
vicmAL), destinés à établir les communications utiles à
l'intérêt privé des communes, ouverts et entretenus aux
frais de ces communes. Il y a, en outre, une catégorie de
routes spéciales comprises dans le système général de
défense du pays, sous le nom de routes stratégiques. En
1790, les routes furent placées dans les attributions da
ministère de l'Intérieur; en 1799, on en chargea un con-
seiller d'État; depuis 1839, cette branche de l'adminis-
tration dépend du ministère des travaux publics. Nos
routes sont généralement empierrées ou macadamisées,
si ce n'est aux abords et dans la traversée des villes ou
villages, où Ton a presque constamment employé le pavé.
L'entretien d'une route impériale est d'environ 0 fr.
82 cent, par mètre pour les parties pavées, et 0 fr. 30 c.
pour les parties empierrées. Les prix de revient sont
aussi à l'avantage de ces dernières (19 fr. par mètre,
contre 44 fr. ). Les routes pavées sont plus commodes
pour les voitures allant au pas; les routes cmpii^rrées
sont d'un moindre tirage pour les voitures allant au
trot. Le rapport de l'efibrt de traction au poids traîné C5t
de 1/40 à 1/60 sur les routes pav^^es, et de 1/25 à 1/50 sur
les empierrements. Sur les routes bien entretenues, les
frais de transport sont, pour le roulage ordinaire, de
20 centimes par tonne et par kilomètre, avec une vitesse
de 28 à 40 kiloni. par jour ; et, pour le roulage accéléré,
de 35 centimes, avec une vitesse de 65 à 70 kilom. La
construction et l'entretien des routes appartiennent k
l'administration des Ponts-et-chaussées.
On attacha, dès la plus haute antiquité, une grande
importance aux voies de communication, qui sont, à vrai
dire, l'un des signes de la puissance et de la richesse des
nations. Il y a, entre Bagdad et Ispahan, une route très-
ancienne, qui remonte, dit-on, jusqu'au temps de Sémî-
ramis. Les Égyptiens, les Hébreux et les Grecs distin-
guaient les routes selon qu'elles étaient d*un intérêt
général ou d'une utilité particulière, et donnèrent aux
premières le nom de chemins royaux {viœ regiœ ). Le soin
de ces chemins était dans les attributions du Sénat à
Athènes, et des premiers hommes de l'État à Sparte, à
ROU
1597
ROY
Thèbes et dans d'antres villes : des ofSciers subalternes
étaient chargés de la police des yoies publiques, sur le
bord desquelles on plaçait des dieux tutélaires. Ce furent
les Carthaginois qui imaginèrent de paver les routes;
mais nous ignorons le mode de construction, de répara-
tion et d*entretien qu*il8 avaient adopté. Les Romains
donnèrent à cette invention tous les développements dont
elle était susceptible, et couvrirent leur Empire de voies
considérables, dont quelques-unes ont duré jusc[u*à nous
( V. Voies romaines, dans notre Dictionnaire de Biographie
et (V Histoire). Pendant les invasions des Barbares, nul,
si ce n*est la reine Brunebaut, ne prit souci des voies de
communication par terre, qui subirent dMrréparables dé-
tériorations ou furent entièrement détruites. Charlemagne
tâcha de rétablir les voies romaines ; mais Tincurie repa^
rut après lui. Dans les temps féodaux, chaque seigneur
entretint les chemins qui traversaient son domaine, avec
le produit des péages qu^il exigeait. Un système de sur-
veillance générale sur la viabilité ne fut possible qu*après
un accroissement notable du territoire et de la puissance
des Capétiens. Philippe-Auguste et Louis IX surtout s'oc-
cupèrent de réparer les vieux chemins et d'en ouvrir de
nouveaux. Philippe de Beaumanoir nous apprend qu*on
distinguait alors le sentier de 4 pieds, la carrière de
8 pieds, le chemin de 32 pieds, le chemin de César de
64 pieds, et le chemin royal. L'habitude de planter des
arbres sur les grandes routes semble avoir pris naissance
à cette époque, bien qu'elle ne soit devenue générale que
plus tard ; on en plantait du moins aux abords des villes,
et une ordonnance de 1358 montre que le concierge du
Palais avait un droit sur les ormes des environs de Paris.
C'est aussi à une époque ancienne que remonte l'usage
d'indiquer les directions par une main placée ou dessi-
née sur un poteau ; il en est question dans les romans de
chevalerie du moyen âge. On construisait aussi, sur les
chemins, des fontaines entourées de bancs de pierre ; il en
existe encore quelques-unes. La guerre de Cent ans causa
la ruine d'un grand nombre de routes, ou en empêcha
l'entretien. Louis XII enjoignit aux tribunaux de con-
traindre les propriétaires des péages, pavages et barrages,
à entretenir les ponts et les chaussées; mais ces trai-
tants continuèrent & percevoirl'impôtet à nerien réparer.
Lorsqu'on 1583 on eut attribué la surveillance des chaus-
sées aux juges des Eaux et Forêts, les résultats ne furent
pas plus satisfaisants. Henri lY, sentant toute l'impor-
tance des communications, créa, en 1500, un office de
grand voyer : Sully, qui en fut revêtu, fit réparer les
routes, rendit générale et maintint, malgré de nombreuses
mutilations, la plantation des ormes. « C'est un Sully,
disait le peuple en parlant de chacun de ces arbres ; fai-
sons-en un Biron, » et ils le décapitaient. Louis XIII sup-
prima, en 1G26, la charge de grand voyer, et, après avoir
attribué la surveillance des grands chemins aux trésoriers
de France, se la réserva dé^nitivement, mais sans faire
aucune amélioration. Il était alors passé en principe que
chaque ville devait fournir de ses deniers à la réparation
des chemins ouverts sur son territoire ; toutefois , dans
certaines provinces, c'était une charge inhérente à la pro-
priété même des fonds de terre riverains. Sous Louis XIV,
Coibert apporta un soin particulier à la construction des
routes; les intendants des provinces reçurent l'ordre
d'achever l'œuvre de Sully, et nientôt M™* de Sévignô put
écrire ce qui suit : « Cest une chose extraordinaire que
la beauté des chemins; on n'arrête pas un seul moment;
ce sont des mails et des promenades partout. Toutes les
montagnes aplanies; la rue d'Enfer est un chemin de
paradis; mais non, car on dit que le chemin en est étroit
et laborieux, et celui-ci est large, agréable et délicieux.
Les intendants ont fait des merveilles, et nous n'avons
pas cessé de leur donner des louanges. Si jamais j'allais
à Dieu, Dieu me préserve d'une autre route I » Le progrès
continua sous Louis XV : une administration spéciale fut
créCe pour les voies publiques. Les chemins étaient alors
classés en chemins royaux, chemins publics ou vicinaux,
et chemins de traverse : étaient réputés vicinaux ceux où
il n'y avait ni postes, ni messageries , ni voitures publi-
3ues; un chemin de traverse était celui qui communiquait
'une commune à une autre. On doit au ministre Tru-
daine les bornes placées sur les routes royales, à partir
du parvis de Notre-Dame à Paris, d'abord de mille toises
en mille toises, puis de lieue en lieue. C'est aussi de son
temps que l'on fixa la largeur que chaque route devait
avoir d'après son importance. En 1776, Turgot obtint un
arrêt du Conseil qui établit une nouvelle division des
chemins de la France et fixa des règles pour leur con-
Blruction, leur entretien et leur réparation : il y eut quatre
classes de chemins^ ceux qui menaient de la capitale aux
principales villes du royaume, ceux qui conduisaient
d'une province dans une autre, ceux qui établissaient des
communications entre les villes d'une même province,
et ceux qui servaient à la circulation des habitants d'un
même bourg ou d'un même village. Napoléon I*^*" donna
une fÇTdXide impulsion à la construction des routes : on
lui doit, entre autres, celles du Cenis, du Gcnèvre et du
Simplon. Le rogne de Louis-Philippe demeurera égale-
ment célèbre pour ce genre de travaux d'utilité publique.
Sous Napoléon III, des sommes considérables ont été
affectées aussi aux voies de communication.
En Russie et en Norvège, où les pierres ne sont pas en
abondance, on construit des routes en bois : des rondins
mis en travers d'un chemin tracé par le hasard forment
la voie sur laquelle roulent, avec d'épouvantables cahots,
des véhicules d'une construction grossière. V. X. Gar-
nier. Traité des chemins de toute espèce^ 1834-42, 2 vol.
in-8o. B.
RODTE (Feuille de), sorte de çasse-port militaire, écrit
qu'on délivre à une troupe, ou bien à un soldat qui voyage
isolément. On y indique les logements et le chemin à
parcourir.
ROUTIER , en termes de Marine, grand livre contenant
des cartes marines, des vues de côtes ou de terres, des
instructions sur les routes à suivre, sur les écueils et les
passages à éviter. — Une carte routière est une carte de
géographie où les routes sont marquées.
ROUTIERS. F. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio^
graphie et d'Histoire,
ROVi^IES , nom par lequel on désigne aux États-Unis
les vagabonds et les voleurs des grandes villes.
ROXBURGH-CLUB, société de bibliophiles qui se
forma à Londres en 1813. Chacun des membres devait
faire réimprimer k ses frais un livre devenu rare. V, Bi-
BUOMANE.
ROYAL DE BILLON, ancienne monnaie attribuée à
tort à Philippe-Auguste, et qui fut frappée sous Philippe
le Bel. Sa valeur était la même que celle des deniers
tournois.
ROYAL d'or , monnaie. V, notre Dictionnaire de Bio»
graphie et d* Histoire,
ROYALE. V. Barbe.
ROYALE ( Place) , à Paris. V, notre Dictionnaire de B\o~
graphie et d^ Histoire,
ROYALISME, mot qui date de la Révolution de 1780,
et par lequel on désigna le dévouement à l'idée monar-
chique, l'opposition au nouvel ordre de choses qui s'éta*
blissait sur les ruines de l'ancien régime. Sous le 1^ Em-
pire, les Royalistes furent ceux qui ne regardaient comme
légitime que la monarchie ancienne, et qui en désiraient
ou en secondaient le rétablissement. Pendant le gouver-
nement de la Restauration, on appela Royalistes ^ par
opposition aux Libéraux, les hommes qui voyaient un
danger dans les concessions faites par la Charte de 1814,
et ^i les auraient volontiers sacrifiées. Depuis la Révo-
lution de 1830, leur nom fut réservé aux partisans de la
branche aînée des Bourbons, ceux de la branche cadette
prenant le nom d'Orléanistes 014 de Philippistes. B.
ROYAUTÉ, dignité, pouvoir de roi. La royauté re-
monte aux premiers temps des sociétés humaines , et elle
a pris, à travers les siècles, des caractères très-divers.
Dans l'ancien Orient, elle nous apparaît avec le plus fas-
tueux appareil, entourée du respect et de l'admiration
des peuples, consacrée par la religion : rattachés à la divi-
nité même par leur généalogie, les princes la représentent
sur la terre; tout le monde s'incline devant leur pouvoir
solitaire et sans contrôle. Vêtus comme on se figurait les
Dieux, objet des mêmes hommages, k peu près invisibles
dans leurs palais comme au fond d'un sanctuaire, ils pui-
saient dans la source apparente de leur autorité l'audace
d'accomplir de grandes choses et aussi de commettre
d'effrayants forfaits. Ninns, Sémiramis, Nabuchodonosor,
les rois de Perse depuis Cyrus, sont les types de cette
monarchie orientale qui s'est perpétuée presque sans
modification jusqu'à nous au milieu de^ peuples de l'Asie,
Il est vraisemblable que la théocratie précéda partout la
royauté ; c'est, du moins, ce que l'on peut affirmer pour
l'Egypte, où Menés, chef de la classe des gue.nriers, en-
leva le pouvoir aux prêtres. Ceux-ci conservèrent néan-
moins une grande influence dans l'État; ils élurent les
rois, déterminèrent par les règlements les plus minu-
tieux l'emploi de toute leur vie, leur imposèrent, aussi
bien qu'à la nation, des lois qu'ils disaient émanéos des
Dieux, et mirent un frein à leur despotisme par la menace
du jujsoment publit qui serait prononré sur eux après la
ROY
1598
ROY
iiiorl. La royaiil'iî^'yp tienne devint héréditaire après
l'ox pulsion des HyksosouPasteurs. — ChezlesHébroiix,
laroyauttS telle qu'elle fut instituée par Samuel, n'était
qu'un pouvoir oxécutif permanent: le roi représentait
Jéliovab lui-même; les prophètes et les prètre8,^ardieu8
et interprètes des lois ecriteSy étaient i«es conseillers ou
i en c'^n^eurs, selon qu'il était ou n'était pas fidèle au pacte
fo 1 1 (lamentai qui fixait ses droits et ses devoirs. Ce pacte,
nous n'en possédons plus le texte' mais ilyestiaitde
fréquentes allusions danslaBible. Les rois juifs avalent
le droit de juger en dernier ressort, de faire grâce, de
déclarer la guerre et de conclure des traités; leur pou-
voir s'étendait aussi sur Torçanisation du culte et des
cérémonies. La couronne devait passer à l'un des fils du
du roi , et, à défaut de fils, au plus proche parent. SaQl,
David et Salomon furent consacrés par la cérémonie
de l'onction ; mais ce genre de sacre ne fut pas reproduit
pour leurs successeurs, à l'exception de Jéhu, qui com-
mençait une dynastie différente de celle de David. Salo-
mon, par son goût pour la magnificence et les plaisirs,
donna à la royauté hébraïque le caractère des autres
royautés de l'Orient. — La royauté existait en Grèce pen-
dant les temps héroïques : les rois, que les poèmes ho-
mériques appellent les pasteurs des peuples, exerçaient
une sorte de pouvoir patriarcal ; on les voit surtout pré-
sider les assemblées, commander les guerriers, adminis-
trer les choses de la religion, et ce sont les fonctions qu'ils
conservèrent à Sparte, (dors que la royauté avait fait place
f)artout ailleurs à des gouvernements aristocratiques ou à
a démocratie. — Chez les Romains, depuis Romulus jus-
qu'à Tarquin le Superbe, le gouvernement fut presque
une monarchie constitutionnelle : à côté du droit d'un
roi électif, il y avait le droit de la nation, représenté par
le Sénat et les Comices. Lorsqu'à la République succéda
TRlmpire, un nouveau pouvoir se forma de la concentra-
tion des anciennes magistratures dans une seule main :
rieti ne paraissait extérieurement changé quant à la dis-
tribution des fonctions ; il y avait toujours des consuls ,
des tribuns , des censeurs , des préteurs , etc., rouages
légaux dans la marche des aifaires, mais Tempereur pos-
sédait l'essence de leurs divers pouvoirs, et, comme ces
pouvoirs étaient autrefois donnés par le peuple, il se sub-
stituait au peuple lui-même dans sa souveraineté. Le dé-
pôt de la souveraineté dans les mains des Césars étant
personnel et viager, le peuple à leur mort était censé
rentrer dans ses droits ; mais ce furent les soldats, et non
le peuple entier, qui exercèrent le droit d'élection. Depuis
Dioclétien, les empereurs se rapprochèrent, par le faste
et l'étiquette, des rois de l'Orient : leur séjour aNicomédie
ou à Byzance les jeta au milieu des délices asiatiques; la
couronne de laurier et la robe de pourpre des anciens
Césars furent remplacées par le diadème et par la robe
de soie et d'or; la personne du prince et son palais de-
vinrent sacrés, et l'on n'approcha de lui ou'en se proster-
nant comme devant un Dieu. Il était, d^ailleurs, grand
pontife du paganisme, et cette union du pouvoir poli-
ti(jue et du pouvoir religieux dans le même homme ex-
plique pourquoi le christianisme ne put s'accorder avec
l'Empire. ^
Avec les invasions germaniques , la royauté se présente
sous une forme nouvelle. Par quelque filiation dont le
souvenir s'est perdu, les rois des Barbares se rattachaient
aux Dieux : à ce titre, les Âmales chez les Goths, les Agi-
lolflngeschez les Bavarois, les Mérovingiens chez lesFranks
Saliens, étaient des familles privilégiées dans lesquelles la
royauté, bien qu'élective, se perpétuait. Mais les guerriers
n'en choisissaient pas moins, pour les expéditions particu-
lières , tel chef qui leur inspirait confiance par sa force
physique et sa bravoure. Ces deux qualités étaient aussi
celles qu'un roi devait posséder, pour être respecté et
obéi : les derniers Mérovingiens, connus sous le nom de
Rois fainéants, furent dédaignés par leur tribu. Le pou-
voir royal était limité : absolu sur le champ de bataille,
il s'évanouissait pendant la paix. Clovis impuissant à dis-
traire du butin le vase de Soissons, et se vengeant plus
tard du soldat qui le lui a disputé ; Clotaire I*' battu par
ses guerriers, pour n'avoir pas voulu marcher contre les ^
Saxons; Frédégonde obligée de comparaître devant l'as-
semblée des Franks, et de jurer que son enfant Clotaire II
est le fils légitime de Chilpéric; Contran suppliant ses
guerriers de le laisser vivre encore quelques années, afin
qu'il puisse veiller sur la jeunesse de ses neveux; Brune-
haut menacée par les Ostrasiens d'être foulée aux pieds
de leurs chevaux : tous ces faits et beaucoup d'autres
donnent une idée de la faiblesse des rois Barbares, même
après leur établissement sur les ruines de l'Empire ro-
main. Ce n'est pas que Forganisation de cet Empire , et la
puissance impériale à laquelle ils succédaient, n'aient
frappé d'étonnemunt quelques-uns d'entre eux; mais
Théodoric cliez les Ostrogoths , plus tard Charlemagne
chez les Franks, ne firent qu'une résurrection factice de
l'administraklon romaine, et ne purent transmettre à leurs
descendants œ pouvoir absolu que poss(^daient les anciens
empereurs. Lw seuls changements que l'invasion ait ame-
nés dans la condition de la royauté barbare, c'est d'abord
la substitution assez prompte de l'hérédité à Télection;
c'est ensuite qne la fiuissance des rois eut pour base la
possession des terres conquises, et que les guerriers qui
reçurent quelques portions de ces terres en récompense
de leurs services devinrent dépendants, non plus par le
respect, mais par les obligations auxquelles ils s'étaient
astreints en retour. Ce caractère nouveau de la royauté
devait causer sa ruine : car, à mesure que les rois s'ap-
pau\Tirent par leurs dons, les propriétaires de terres fu-
rent moins dociles, et, après Charlemagne, ils s'attribuè-
rent sur leurs domaines tous les droits de la souveraineté;
en sorte que, pendant les temps féodaux, la royauté ne
fut plus qu'un nom. I^e clergé, il est vrai , la concevant
comme un pouvoir social , comme une magistrature pu-
blique, avait essayé de l'élever au-dessus de toutes les
forces individuelles , pour trouver auprès d'elle un rem-
part; se rattachant à la tradition hébraïque, il avait sacré
les premiers Carlovingiens, dans l'espoir que Ponction
sainte leur attirerait la vénération des peuples. Hais les
dignitaires de l'Église, évêques et 2d)bés , puissants sei-
gneurs eux-mêmes à cause des grands biens qu'ils avaient
reçus, aflermis désormais dans leiu^ domaines temporels
et dans leur empire sur les esprits, s'isolèrent du trône
à leur tour, pour être plus indépendants, et voulurent
tenir leur rang dans la hiérarchie féodale.
Il fallut plusieurs siècles pour reconstituer la royauté
en France. Les Capétiens, à l'origine seigneurs peu res-
pectés de l'Ile-de-France, trouvèrent pour auxiliaires,
dans leur lutte contre la féodalité, tous ceux qui avaient
à souffrir de ce s^rstème social , c-à-d. la bourgeoisie et
l'Église : l'une, privée de droits politiques jusqu'au jour
où elle forma des communes; l'autre, envahie par la (ir-
ruption et l'ignorance des liûques. Les Capétiens ayaient
pu prendre sans opposition le titre de roi ; c'était même
une sécurité pour les autres seigneurs, qui n'avaient plus
à craindre, ainsi qu'au temps des Carlovingiens, la reven-
dication de leurs domaines usurpés et la menace d'être
ramenés à l'obéissance. Toutefois, le roi «enant le pre-
mier rang dans la hiérarchie féodale, les Capétiens de-
vaient, du jour où ils auraient la force. Imposer comme
un droit leur autorité souveraine. Au reste, la royauté
tend de jour en jour avec eux à exister indépendamment
de la suzeraineté : elle s'érige en pouvoir d'équité, d'ordre
et de paix, qui a mission et droit d'intervenir pour éta-
blir la justice et protéger les faibles, et dont la fore» réside,
non dans quelque fait antérieur, mais dans son harmo-
nie avec les besoins de la société, dans le remède qu'elle
apporte ou promet aux maux qui la travaillent. Aussi
les Capétiens cherchent-ils à faire renaître l'idée chré-
tienne qui voit dans le roi l'image de Dieu même : Hugues
Capet renouvelle la cérémonie du sacre ; il demande aussi
l'onction sainte pour le fils ^ui doit le remplacer, et ses
f>remiers successeurs, en imitant cet exemple, donnent à
eur dynastie naissante le prestige de la religion et comme
la garantie de la perpétuité. Sous les deux premières
dynasties, à la mort de chaque roi, ses enfants se parta-
geaient l'hérita^, conformément aux coutumes de suc-
cession des anciens Germains : les Capétiens adoptèrent
la loi d'hérédité du Droit féodal ; Hugues Capet fixa Tordre
de succession dans la ligne masculine par ordre de pri-
mogéoiture, et assura de cette manière l'unité et par con-
séquent la force du pouvoir royal. Enfin les Capétiens^ à
partir de Louis IX, se rattachèrent à la tradition romaine;
c'était l'époque où le Droit romain commençait à être
étudié avec ardeur; les légistes répandirent dans la so-
ciété les maximes les plus favorables an pouvoir absolu,
et travaillèrent à subordonner les nobles, le clergé et les
communes, à ce pouvoir public, général , qu'on nommait
royauté. Le roi devint la loi vivante ^ et la jurisprudence
formula cet axiome : « Si veut le roi , si veut la loi. »
Tels sont les éléments dont s'est formée la royauté ca-
pétienne, qui se développa principalement par les con-
auêtes de Philippe-Auguste, et par les lois de Louis IX et
de Philippe le Bel. La guerre de Cent Ans semblait de-
voir lui être funeste : elle en sortit, au contraire, plus
puissante, car elle prit en main la défense du pays com-
promis par les fautes des seigneurs, elle créa l'ooité de
ROY
1599
RUD
la France, e( fut le symbole de la nationalité. C'est ce oui
donna la force à Louis XI d'abattre une nouvelle féoda-
lité, la féodalité princière ou apanagée. François I*' mit
la royauté hors de pages, c-à-d. qu'il la délivra de tout
contrôle et lui enleva tout contre-poids : le Concordat de
iolC, en lui donnant la nomination aux bénéfices ecclé-
siastiques, plaça le clergé sous sa main ; la noblesse, déjà
rompue à l'obéissance par les habitudes de la vie mili-
taire pendant les guerres d'Italie, se transforma, au mi-
lieu des plaisirs et des intrigues de la cour nouvellement
formée, en une sorte de domesticité des princes; le Par-
lement, qui voulait profiter de la formalité de l'enregis-
trement pour contrôler les édits royaux, vit briser son
opposition par l'emploi des lits de Justice, et dut rentrer
dans ses attributions Judiciaires. L'arbitraire règne alors
dans toutes les parties de l'administration publique, et
l'absolutisme le plus complet est résumé dans cette for-
mule de conclusion des ordonnances : « Car tel est notre
bon plaisir. » L'anarchie des guerres de religion a pu
faire faire à la royauté un pas en arrière ; les derniers
Valois l'o mèoie avilie : mais, après l'œuvre déjà répa-
ratrice de Henri IV, le cardinal de Richelieu rétablit dans
•a plénitude la prérogative royale, et il a porté 'de si
rudes coups aux ennemis du trône, qu'ils n'ont pu, mal-
gré leur vouloir, renverser Mazarin et prendre une re-
vanche. Le gouvernement de Louis XIV marque l'apogée
de la royauté en France : alors, en effet, triomphe la
doctrine du droit divin (V. ce mot). Le caractère de la
monarchie du xvii* siècle, c'est de se donner comme la
personnification de cette volonté unique, supérieure, es-
sentiellement légitime, qui a seule le droit de gouverner
la société, c.-à-d. de Dieu même. Dans les Mémoires et
Instrwtions qu'il rédigea pour le dauphin, Louis XIV
semble croire que les rois sont d'une nature supérieure
au reste de l'humanité, et qu'ils reçoivent comme des
illuminations d'en haut : « La fonction des rois consiste
à laisser agir le bon sens ; un roi doit se décider lui-
même, parce que la décision a besoin d'un esprit de
maître, et que, dans le cas où la raison ne donne plus de
conseils, il doit s'en fier aux instincts crue Dieu a mis
dans tous les hommes et surtout dans les rois... Celui
qui a donné des rois aux hommes a voulu qu'on les res-
pectât comme ses lieutenants, se réservant à lui seul le
droit d'examiner leur conduite. Sa volonté est que qui-
conque est né sujet obéisse sans discernement. » Quoi
d'étrange, après cela, que les rois aient disposé librement
de la propriété (K. ce mot), de la liberté et de la vie de
leurs sujets? On comprend aussi qu'ils aient cru parti-
ciper de l'infaillibilité, de la sainteté de Dieu, et , quand
le duc de La Feuillade entretenait un luminaire devant la
statue de Louis XIV, c'était un hommage naturel plus
encore qu'une flatterie. Non-seulement la royauté repré-
sente Dieu même, elle est encore la personnification de
l'intérêt général; tous les besoins, tous les pouvoirs
se concentrent en elle : « L'État , c'est moi , » disait
Louis XIV.
Arrivée à de pareils excès de doctrine, la royauté de-
vait rencontrer une autre puissance, la souveraineté
nationale, et succomber dans la lutte. Dès le milieu
du XIV* siècle, dans les États Généraux de 1357, Robert
Lccoq et Etienne Marcel avaient conçu une importante
révolution , la périodicité des assemblées représentatives
et leur droit à voter l'impôt, c-à-d. ce qui fait l'essence
des monarchies tempérées par le pouvoir national. Les
Éi?ts de Tours, en 1484, avaient formulé les mêmes dé-
sirs. Depuis plusieurs siècles aussi, ces réformes, qui
avaient paru prématurées en France, avaient été accom-
plies en Angleterre, où les libertés publiques se dévelop-
paient sous un gouvernement constitutionnel. Après la Ré-
volution anglaise de 1688, Locke, dans un Traité du gouver-
nemeni civU , destiné à Justifier philosophiquement cette
Révolution, posa le dogme de la souveraineté du peuple,
proclama la séparation du pouvoir exécutif et du pouvoir
législatif, la nécessité que la loi fût faite et l'impôt dé-
crété avec le concours des députés de la nation, la révo-
cabilité de l'autorité royale dont il serait fait mauvais
usage, etc. Louis XIV crut la royauté menacée par ces
doctrines; en soutenant Jacques II contre Guillaume III,
il combattit pour le droit absolu des rois. Vaincu sur la
question de principe, puisqu'il reconnut au traité de Rys-
wyck le nouvel ordre de succession établi en Angleterre
par la volonté nationale, il transmit à ses successeurs un
pouvoir gravement compromis par cette défaite. Pendant
le xviii* siècle, les idées anglaises se propagèrent en
France, et Montesquieu en fut un apôtre convaincu. Mais
|A< était le degré d'abaissement où tombait avec Louis XV
la royauté elle-même. Qu'elle fut emportée avec ses abus
dans la tourmente de 1789. Les efforts de Meunier, de
Malouet, de Lally-ToUendal, dans l'Assemblée consti-
tuante, ne purent faire adopter le mécanisme de la Con-
stitution anglaise, et, quand il eut été décidé qu'une
seule assemblée, investie d'une autorité souveraine, co«
existerait avec la monarchie, ce dernier rouage ne tarda
pas à disparaître. Le principe monarchique fut restauré
par Napoléon I**", et il a toij^ours subsisté depuis, sau!
pendant le règne éphémère de la République de 1848.
liais il ne parait pas qu'une monarchie, de quelque nom
qu'on l'appelle, puisse désormais aspirer à vivre, sans
accepter d'être limitée par une Constitution et par divers
pouvoirs, et sans reconnaître le principe de la souverai-
neté nationale. Les idées libérales et les essais d'institu-
tions représentatives pénètrent Jusqu'au milieu des mo-
narchies les plus absolutistes, Jusqu'en Russie et en
Autriche. V, A. de Saint-Priest, Histoire de la royauté,
considérée dans ses origines, Paris, 1842. B.
RUBAN , bande de soie, de fil , de laine ou de coton ,
2ui sert à lier ou à orner d'autres tissus, des vêtements,
es tentures, des meubles, etc. Les rubans où entrent
l'or et l'argent reçoivent généralement le nom de galons.
Dès les temps les plus anciens, on se servit de rubans
pour lier les cheveux, attacher les sandales, orner cer-
taines chaussures. Au moyen âge, les fabricants de ru^
bans, qu'on appelait TissiUiers-Bubaniers ou Otwriers de
la petite navette, formèrent une corporation, dont les
statuts furent promulgués en 1403 et re visés en 1666 :
l'apprentissage et le compagnonnage duraient chacun
quatre ans. De 1680 date la mode des rubans gaufrés, sur
lesquels on imprimait certains ornements, des fleurs, des
oiseaux, des ramages, des grotesques. En notre siècle, la
rubannerie de soie a pris des développements considé*
râbles : les rubans n'ornent plus, comme avant 1780, les
coiffures et les habits des seigneurs, ils sont réservés aux
femmes, et leur prix peu élevé permet aux classes tout à
fait inférieures d'en porter, même à profusion.
RUBAN, nom donné quelquefois aux moulures appelées
baguettes. V. ce mot.
RUBB, monnaie. V. Rodbb.
RUBEBBE , sorte de viole au moyen &ge. Le dos de cet
instrument était rond comme celui des mandolines, et sa
table collée sur les bords. La rubebbe n'avait que deux
cordes, qui s'accordaient à la quinte.
RUBRICATËURS, calligraphes qui exécutaient autre-
fois les rubriques dans les manuscrits.
RUBRIQUE, en latin rubrica (de ruber, rouge), nom
que les Romains donnaient quelquefois au Droit civil ,
parce que, dans les manuscrits, les titres des lois étaient
écrits avec de la rubrique, espèce de sanguine ou d'ocre
rouge. Les titres des livres de Jurisprudence moderne
sont dits de même rubriques : telle loi se trouve sous
telle rubrique. Après la découverte de l'imprimerie , on
imprima en rouge tout ou partie des titres des ouvrages ;
de là l'usage d'appeler rubriques, non-seulement ces
titres, mais toutes les lettres rouges contenues dans un
livre. Le lieu où l'on imprimait un livre se mettait aussi
en rouge; ce livre poitait donc la rubrique du lieu. Par
extension, on dit, dans le Journalisme, qu'on lit telle ou
telle nouvelle sous la rubrique de Londres, devienne, etc.
Enfin, en termes de Liturgie, le mot rubrique désigne
les règles placées au commencement du Bréviaire et
du Missel, et qui déterminent l'ordre et la manière dont
il faut dire ou faire- les différentes parties de Toffice de
l'Église : ces règles étaient autrefois imprimées en carac-
tères rouges. B.
RUCHE , bande plissée d'étoffe, de tulle ou de dentelle,
i sert d'ornement à diverses parties de l'habillement
es femmes, tels que bonnets, chapeaux, robes, col-
lerettes.
RUDENTDRE (du latin rudens, corde), moulure en
forme de corde ou de ruban , dont on remplit quelquefois
les cannelures des colonnes jusqu'au tiers de leur hau-
teur. Ces colonnes sont dites rudentées.
RUDÉRATION, opération qui consiste à appliquer sur
les parements d'un mur en moellons ou en pierres brutes
un premier enduit de mortier grossier, sur lequel on
étend ensuite l'enduit lisse et poli.
RUDIAIRES. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
RUDIMENT , mot d'origine latine qui signifie comment
cernent. Il se dit des premières notions d'un art ensei-
gnées aux esprits non encore formés. Despautère a donné
ce titre à la 1" partie de ses Commentarii grammatici^
et QD 1*8 longtemps appliqué d'une manière toute spô-
dei
RUN
1600
RUS
eiale aux livres élémentaires sur la langue latine : depuis
Lliomond, il ne se dit plus guère que de la Grammavr»
latxM de ce célèbre professeur. P.
RUDIS. K. ce mot dans notre Ihctionnaire de Biogra»
phiê et d^ Histoire.
RUE, voie publique bordée de bâtiments dans les
dtles, bourgs et villages. On fait venir le mot du latin
rupta ou ruga ( terre défrichée), ou du grec rhéô ou rhtiâ
(couler), parce que c*est par les rues que s^écoulent les
eaux. La salubrité, la sédùrité publique, la belle ordon-
nance des villes, exigent que des mesures soient prises
pour la largeur et le nettoyage des rues, pour la hauteur
des maisons, etc. V. Augnement, Balayage, Boues et
Immondices, Bâtiments (Police des). Salubrité, Voirie.
RUELLE. Outre sa signification propre de petite rue,
ce mot désigne Tespace qui , dans les chambres à cou-
cher, surtout dans celles qui ont des alcôves, se trouve
libre entre le lit et le mur. Au xvn* siècle, on appelait
ruelles les alcôves, les chambres à coucher des Précieuses
( V. ce mot) ; les visites y étaient reçues, et Ton y cau-
sait comme dans un salon. On peut visiter comme
exemples la chambre à coucher de Louis XIV à Ver-
sailles, et celle d*Anne d'Autriche au Louvre.
RUHKENG (Dialecte). F. Birmane (Langue).
RULE BRITANNIA, c-àrd. Triomphe, Bretagne, chant
national des Anglais, dans lequel le poôte célèbre l'antique
liberté de TAngleterre, et revendique pour son pays la
domination des mers. Il a été composé par Thomson,
Tauteur du poôme des Saisons, dans un orame intitulé
Alfred, pièce fantastique dite à mcuque par les Anglais,
et joué en 1740, à Clifden, devant le prince et la prin-
cesse de Galles. Le chant se compose de six couplets en
vers fambiques de quatre pieds, à rimes croisées , et
chaque couplet a 6 vers, y compris 2 vers pour le refrain.
Rule Britannia est une des plus belles inspirations du
génie poétique et du patriotisme le plus profondément
senti ; on y trouve la calme fierté du caractère anglais.
Le célèbre compositeur Arne en fit la musique, et rendit
assez heureusement les sentiments énergiques exprimés
{»ar le poète, surtout dans le refrain ; néanmoins, il ne
'égale pas. Ce chant a été inséré, sous le titre de Ode in
the mask of Alfred, dans les œuvres de Thomson, car il
lui appartient en propre, bien que la pièce d'Alfred ait
été écrite en société avec le poète David Mallett ou Mal-
loch.
RUMONIQUE (Dialecte). V. Rh^er.
RUNES, caractères particuliers d'écriture de la race
germanique primitive. Runa signifiant mystère, les Runes
étaient des signes mystérieux, qui avaient besoin d'inter-
prétation. On fait aussi venir le mot de runen '(faire
une entaille), et c'est en effet de cette manière que se tra-
çaient les runes sur la pierre ou le bois. Il existe en
Norv^, et dans la province suédoise d'Upland, des ro-
chers couverts d'inscriptions runiques. Plusieurs lettres
de l'alphabet runic[ue présentent un certain rapport avec
les caractères sémitiques ; d'autres ont de l'analogie avec
l'écriture cunéiforme : on ne sait ni comment ni à quelle
époque elles arrivèrent aux Germains. 11 n'y avait primi-
tivement que 15 runes, exprimant les articulations a, b,
f, h, i, fc, l, m, n, 0, r. s, t, th, u. Les Scandinaves
ajoutèrent plus tard quelques caractères pour des sons
subordonnés, et, en inscrivant un point dans ceux qui
représentaient fc, t, t, b, figurèrent les articulations g,
e, d, p. De leur côté, les Anglo-Saxons constituèrent , au
moyen de certains changements, retranchements ou ad-
ditions faits aux anciens caractères, un alphabet de
24 caractères. Les run«5 marcomans, dont Raban Maur
fait le premier mention au ix* siècle, sont regardés
comme un remaniement des runes anglo-saxons, opéré
par des savants , sans aucun but d'usage pratique. L'in-
troduction du christianisme amena l'abandon des runes ;
ils furent remplacés, chez les Goths, par un alphabet
nouveau que créa Ulfllas au iv* siècle, et nlus tard, dans
le nord et l'ouest de l'Europe, par l'alphanet romain. —
Depuis le xvi* siècle, on s'est occupé de réunir des inscrip-
tions runiques; mais leur interprétation donna lieu aux
systèmes les plus divers et les plus hasardés, et les an-
ciens ouvrages relatifs aux runes n'ont plus guère de va^
leur aujourd'hui qu'en raison d9s matériaux qu'ils peuvent
contenir. Cest G. Grimm qui a donné à la théorie des
runes une base scientifique.
Les runes n'ont pas seulement servi d'écriture; on les
employa comme moven d'interroger le sort et de prophé-
tiser. Nous lisons dans Tacite qu'on prenait un certain
nombre de bâtons runiques, c-à-d. sur chacun desquels
00 avait gravé un re^ie, et 'fu'après les avoir agites en-
semble, on les Jetait sur un morceau d'étoffe déplié; oo
cherchait ensuite à trouver un sens dans les caractères
que le hasard avait Juxtaposés. Les noms des lettre*
étant significatifs, une valeur magique fut attachée à cha-
cune d'elles : ainsi , une n, dont le nom est ncUh ( néces-
sité), tracée sur le revers de la main ou sur les ongles,
préservait des trahisons féminines; un th {thur, géant)
inspirait l'épouvante; il y avait des runes fanestes, des
runes propices, des runes médicinaux; les uns assoraif'nt
la victoire, d'autres garantissaient des naufrages, etc. On
gravait des runes, comme signes préservatifs et protec-
teurs, sur une foule d'objets, tels que cornes à boire,
coupes, avirons, fléaux, fourreaux d'épée, manches de
hache, etc. Ainsi, on trouva en 1734 à Gallehuas, près
de Tondern, une corne d'or du iv« siècle, couverte de
runes : placée an musée de Copenhague, elle fut volée
et fondue par des malfaiteurs. Une bractéate d'or du
musée de Stockholm présente l'alphabet anglo-saxon de
24 lettres. Il existe d'anciens calendriers en bois, sur les-
quels on a indiqué en caractères runiques les constella-
tions, le nombre d'or, les lettres dominicales, les jours
de la semaine; on y voit souvent des gravures hiérogly-
phiques qui représentent pour chaque jour, soit la qua-
lité dominante du Saint, soit quelque circonstance de sa
vie, par exemple, une harpe pour S' David, une paire
de souliers pour S* Crépin , etc. — V. Grimm, Sur les
Runes allemands, Gœttingue, 1821, et Sur la littérature
runique, Vienne, 1828 ; Brynjulfsen, Periculum runolo'
gicum, Copenhague, 1823; Liljezren, Runlœra, Stock-
holm , 1832 ; Edelestand du Ménl , Mélanges archéolo'
giques et littéraires, Paris, 1850, in-8°.
RUPTURE, en termes de Peinture, opération par la-
quelle on forme sur la palette les couleurs variées, les
tons et les teintes, par le mélange des couleurs primi-
tives entre elles ou avec le noir et le blanc.
RURAL (Droit), droit spécial, encore à codifier, qui
comprend dans son ensemble les dispositions législatives,
traditions et usages auxquels sont soumises l'acquisition,
la conservation et la transmission des propriétés rurales.
Cette codification, plusieurs fois tentée, encore aujour-
d'hui promise par le gouvernement, n'a pas Jnsçpi'à pre-
ssât été réalisée, à cause des difficultés exceptionnelles
Su'elle présente, et qui tiennent à la nature particulière
e ce Droit. Le Code niral ne peut pas contenir de dis-
positions nouvelles : innover, ce serait ou provoquer
l'inobservation de la loi, ou jeter dans les usages une
perturbation dont les effets seraient incalculables. Ici il
s'agit de réglementer les usages, essentiellement varia-
bles, et de leur donner une force nouvelle en augmen-
tant la publicité. Les eaux, les bois, les moissons, les
mines, les privilèges et les restrictions apportés à la pro-
priété foncière dans l'intérêt public, la fixation et la limi-
tation des droits qui en découlent, comme les droits de
chasse et de pèche, sont du ressort du Droit rural. Les
rapports de propriétaire à fermier ou à colon, de maître
à ouvrier, la législation des chemins, des cours d'eau, les
charges qui grèvent la propriété foncière, l'impôt et son
assiette, sont encore des accessoires du Droit rural, qui
embrasse tous les moyens d'acquérir, de conserver, de
protéger et d'aliéner la propriété foncière. On ne peut
(fue faire des vœux pour que l'ensemble de cette législa-
tion, réuni dans une compilation habile et complète, soit
mis à la portée de tous, et mette fin aux difficultés qu'en-
tretient et soulève l'ignorance ou l'oubli des usages ru-
raux. V. Vaudoré, le Droit rural français, 1823, 2 vol.
in-8® ; Devemeilh, Observations des commissions consul^
tatives sur le projet de Code rural, 1810-14, 4 vol. in-4*;
Biret, Code rural, 1824, in*8"; Cappeau, De la législation
rurale et forestière, 1824, 3 vol. in-8<*; Guichard, Cours
de Droit rural, 1826, in-8°, et Manuel de la police ru-
rale et forestière, 1829, in-8°; Foumel, les Lois rurales
de la France, 1833, 2 vol. in-12; Neveu de Rotrie, Com-
mentaire des lots rurales de la France, 1815, in-8"; Val-
serres, Manuel de Droit rural; Bourguignat, Trotte' com-
plet de Droit rural appliqué, 1852, in-8®. R. d'B.
RUSPONE , monnaie d'or de Toscane, qui valait 3 se-
quins aux lis, c.-ii-d. 36 fr.
RUSSE (Art). Les Beaux-Arts vivant d'inspiration et
de liberté, les institutions de la Russie ne leur ont guère
été Jusqu'ici favorables. Une belle nature ne leur a pa5
moins fait défaut. Toutefois, le gouvernement n'a pas p u
négliger un aussi puissant moyen de civilisation; mais,
s'il a donné des encouragements aux architectes, aux
peintres, aux sculpteurs, aux graveurs, il n'est point par-
venu à créer une école nationale, et les artistes qui vom
se perfectionner à l'étranger en rapportent qi^clque i«»
RUS
1601
RDS
lent, sans parvenir h roriginalit^. — En Architecture, les
Russes n*ont rien trouvé, et leurs imitations sont géné-
ralement peu judicieuses : le caractère des édifices n'est
g oint en harmonie avec les conditions physiques au mi-
eu desquelles la volonté des czars les a érigés. Les mo-
ouments religieux reproduisent ceux de Tart byzantin.
On est étonné de retrouver le style italien dans les con-
structions civiles modernes, sans que rien, dans un pays
d'une telle latitude, annonce ou justifie le choix de ce
genre d'architecture. Ces toits horizontaux, si peu favo-
rables à Técoulement des neiges; ces statues de marbre,
couvertes de frimas, et dont la nudité donne le frisson ;
ces façades à colonnes, dont les fenêtres manquent de
lumière : tout cela est un non-sens.
Les Russes sont doués d'une heureuse organisation
musicale. Leurs chants nationaux ont une mélodie douce,
empreinte de mélancolie, et (quelquefois vive et gra-
cieuse. Les instruments de musique qui leur sont parti-
culiers sont : le rojok, espèce de cornet des montagnes,
Îu'on croit être le chalumeau pastoral de Théocrite ; le
udka {V. ce mot); la gelaïka ou sipooka, espèce de
double flûte, semblable à celle des Grecs ; la swirella ,
flûte de roseaux ou flûte de Pan ; le rog, espèce de trompe
de chasse; le pilai y sorte de cornemuse; la balaïka, le
gudak, le gusli, le rilek ( V. ces mots); le loschki, modi-
fication du sistre antique. Les Russes ont aussi une mu-
sique de cors d*un caractère fort original (V. Cor busse).
On cite, parmi les compositeurs, Bortniansky et Béré-
■oosky, dans la seconde moitié du xviii® siècle, et
Glinka, au xix«.
RUSSE (Langue), la plus répandue des langues slaves,
celle qui a le plus fidèlement conservé les éléments em-
pruntés au vieux slavon ou slavenski, et qui présente les
traces les plas évidentes d'une origine aryenne. Le vieux
slavon fut longtemps la seule langue littéraire de la
Russie, et Ton ne {ugea pas que le russe vulgaire, em-
ployé dans les relations ordinaires de la vie, fût digne
d'être écrit. Mais, depuis Pierre le Grand, le slavon n'est
plus qu'une langue liturgique ou ecclésiastique, désor-
mais invariable : le russe, qui s'est élevé au rang^ de
langue cultivée, contient, outre son vocabulaire spécial ,
certains mots tirés du slavon des livres, quelques termes
grecs gue la communauté de religion entre la Russie et
l'Empire byzantin a naturellement introduits et qui ex-
priment principalement des idées religieuses , enfin des
mots tartares apportés par l'invasion des Mongols, et des
mots latins, allemands, hollandais, anglais et français,
provenant du développement des relations politiques et
commerciales. La langue russe possède une grande abon-
dance de racines, et une singulière facilité pour faire des
mots composés, des augmentatifs et des dimic^itifs. Elle
a trois genres , que distinguent des flexions très-carac-
téristiques, mais seulement deux nombres, parce qu'elle
n'a pas conservé le duel du slavon. Comme dans les
autres langues slaves, il n'y a pas d'article défini. La
déclinaison a lieu au moyen de désinences, et offre une
f'ande complication de règles et d'exceptions : il y a
cas; certains grammairiens réduisent à 4 les para-
digmes de déclinaison, tandis que d'autres en comptent
90 pour les substantirs et 40 pour les adjectifs. On a
compté aussi 13 paradigmes de conjugaison, sans compter
les verbes irréguliers et les verbes défectifs. Le russe
ne peut, comme les autres langues slaves, employer par-
tout le verbe sans pronom personnel; dans la plupart
des cas, il est obligé d'y ajouter ce pronom. On peut, à
l'aide de flexions particulières, ajouter à l'idée qu'exprime
la racine du verbe certaines circonstances de l'action :
par exemple, l'infinitif est susceptible d'être indéfini ou
défini, simple ou fréquentatif. Des auxiliaires, signifiant
être et devenir, entrent dans la composition du futur
indéfini et de la voix passive; mais les temps passés ne
se forment pas de cette manière. Le conditionnel et le
subjonctif n'existent pas ; on y supplée par des particules.
Les conjonctions sont peu nombreuses. La syntaxe de la
langue russe est simple et naturelle; bien que les cas de
déclinaison permettent de prendre beaucoup de liberté
pour l'ordre des mots, on remarque dans les écrivains
une tendance de plus en plus prononcée à éviter les
inversions. La prononciation, qui n'est pas toujours con-
forme à Torthographe, a de la gr&ce et de l'harmonie,
et le russe est incontestablement la plus douce des lan-
gues du Nord. Pour l'écrire, on emploie 34 caractères
empruntés à Talphabet slavon, et qui ont reçu une forme
ylus cursive. La langue russe [roi^ki) est parlée en plu-
sîpiirs dialectes : ainsi, le veliki-rouski ou russe de la
Grande-RuMÎe, idiome de l'autorité et de la littératart.
a son type le pins pur à Moscou; le maUhrouski, ippeM
aussi russniaque et petit russien, s'éloigne du précédent
pour l'acception de beaucoup de mots, pour la gram-
maire, et pour la prononciation {V. Rossniaqob); il en
est de même du dialecte en usage dans la Russie Blanche,
dans les gouvernements de Volhynie et de Podolie, dam
une partie de la Pologne et de la Gallicie; le souzdalienf
parlé dans le gouvernement de Vladimir, contient un
certain nombre de mots étrangers aux langues slaves ; le
dialecte d'Olonetz est mêlé de mots finnois.
V. H.-W. Ludolf, Grammatica rtAssica, Oxford, 1696,
in-l°; Lomonosoff, Gramnuùre nuse, 1755; Charpen-
tier, Êlémetits de la langue russe, S^-Pétersbourg, 1768,
in-12; Grammaire de V Académie impériale, S' Péters-
bourg, 1802; Maudru, Éléments raisonnes delà langue
russe , Paris , 1802, 2 vol. in-8«; A.-W. Tappc, Gram-
maire théorique et pratique de la langtM russe, en alle-
mand, S'-Pétersbourg et Riga, 1810; J.-S. Vater, Gram^
maire pratique de la langue russe, en allem., Leipzig,
1815, in-8°; Heym, Grammaire russe, en allem., Riga«
1816 ; Puchmayer, Grammaire russe, en allem. , S*-Péters-
bourg, 1821 ; Hamonière, Grammaire russe, Paris, 1817 ;
Gretsch, Grammaire russe , S^Pétersbour^, 1823, tra-
duite en français par Reifi*, 1828; Dictionnaire de VAcor-
demie impériale, S*-Pétersbourg, 1789-96, 6 vol. in-4<*;
Heym, Dictionnaire russe-français-allemand , Leipzig,
3 vol. in-8®; Reiff*, Dictionnaire français-russe et russe-
français, 1835, et Dictionnaires parallèles des langues
russe, française, allemande, anglaise, S^-Pétersbourg et
Leipzig, 1855, 2 vol.; Schmidt, Nouveau Dictionnaire
portatif russe-français et français-russe, Leipzig, 1842 ;
Lemontey, Essai sur la littérature et la langue russe,
dans le t. V de ses Œuvres ; Balbi, Coup d*œU sur l'hif»
toire de la langue slave, dans son Introduction à V Atlas
ethnographique,
RUSSE (Littérature). Les plus anciens monuments au-
thentiques de la littérature russe datent du xi" siècle :
ce sont les lois d'Iaroslaf, dont le texte a été découvert
seulement en 1738, et la Chronique de Nestor. Les chants
populairp de la même époque et des âges précédents ne
n'^Qs sont parvenus qu'après avoir subi des modifications
ultérieures : les traditions mentionnent Bolan comme le
plus célèbre des anciens poètes , et l'œuvre la plus re»
marquable est VExpéditton dlgor contre les habitants
de Poloutx, poème composé vers l'an 1200, et retrouvé
seulement en 1795 à Kiew, par le prince Mussin Pouch-
kine. Les discordes civiles et l'invasion des Mongols a«
xni* siècle arrêtèrent l'essor des esprits, et, pendant plu-
sieurs siècles, les études ne furent guère cultivées que
dans les couvents. Quelques chants en Thonneur de Vla-
dimir le Grand et de ses chevaliers, les Annales écrites par
Simon, évêque de Susdal, le Livre des Degrés du métro-
politain Cyprien, et la chronique de Sophie, qui em-
brasse les temps écoulés de 862 à 1534, tels sont les seuls
ouvrages qu'on puisse mentionner jusqu'au xvi' siècle,
et ils appartiennent à la littérature slave proprement dite.
La littérature se ranima après la chute de la domina-
tion des Mongols. Iwan IV fonda des écoles, et créa, en
1564, la première imprimerie à Moscou. L'évêque métro-
politain Macarius publia des Vies de Saints et d'Archi-
mandrites, et Zizania une Grammaire slave. En 1644,
Alexis Michailovitch fit imprimer une collection impor-
tante de lois russes, et, bientôt après, fut fondée l'Aca-
démie de Moscou, où l'on enseigna la grammaire, la rhé-
toriaue, la poétique, la dialectique, la philosophie et la
théologie. Le ministre Matfiejeflf, Nikon, le prince Con-
stantin Basile d'Ostrog, méritèrent aussi des lettres par
la protection éclairée qu'ils leur accordèrent. On vit pa-
raître une foule d'Annales écrites soit en slave plus ou
moins altéré, soit dans le dialecte russo-polonais usité en
Lithuanie, et, par suite des relations commerciales et
Eolitiques, le polonais domina dans les réunions des
oiards. A Kiew surtout, les étudiants se mirent à repré-
senter des récits dialogues de la Bible ; ces essais gros-
siers firent bientôt place à des drames composés par
Siméon de Polocz, précepteur de Fédor III, et traducteur
d'un Psautier en vers : ses pièces de Nabuchodonosor et
de V Enfant prodigue furent jouées avec succès à la cour^
sous les auspices de la princesse Sophie.
Jusque-là, le russe n'avait pas encore été élevé à la
dignité de langue littéraire. Pierre le Grand voulut qu'on
fit au plus vite à la Russie une littérature, comme on bâ-
tissait des villes et des manufactures. En 1689, Te&sing,
imprimeur à Amsterdam, fit paraître le premier livra
russe, une sorte d'Histoire universelle. Un grano nomnre
d'ouvrages français, allemands et hollandais furent tra*
101
RUS
1602
RUS
4uiU en russe. En 1705, on imprima la première gaiette
rasse à Moscou ; une autre fut publiée a S*-Pétersbour^
en 1714. Pierre le Grand fonda, d*après le plan qui lui
avait été fourni par Leibniz, rAcadémie des Sciences de
S^-Pétersbourg , qui ne s'ouvrit toutefois qu'après sa
mort, et à laquelle fut i^outé un Gymnase, destiné à
former des maîtres. Ces fondations éveillèrent naturelle-
ment Tesprit littéraire et scientifique. Les principaux au-
teurs de cette époque sont : Dmitri ou Démétrius, évèque
de Rostoff, auteur d'une Vie des Saints ; Jaworski, pré-
d'jcateur distingué; Prokopovitch , archevêque de Novo-
^orod, qui publia plus de 60 écrits sur la théologie et
%ur rbistoire, et auteur d'une Oraison funèbre de Pierre
)e Grand dont Téloquence est encore admirée ; le moine
Nicodème SelliJ , qui réunit beaucoup de matériaux pour
l'histoire de sa patrie. Trediakovsky fixa les règles de la
prosodie, mais ne donna lui-même qu'une médiocre tra-
duction en vers du TéHmaqxte, La poésie fut cultivée avec
Élus de succès par deux auteurs cosaques, Klimoffsky et
laniloff, et surtout par le prince Kantemir, auteur de
fables et de satires, et qui a fait connaître à ses compa-
triotes Horace et Fontenelle. Enfin TatischtschefT com-
posa une Histoire de Russie, qui est encore estimée.
Le développement le plus brillant de la littérature
russe date des règnes d'Elisabeth et de Catherine II. La
première fonda l'Université de Moscou en 1755, et l'Aca-
démie des Arts en 1758 : tous la seconde, on créa l'École
des Mines en 1772 , une Académie pour le perfectionne-
ment de la langue et des études historiques en 1783 , et
l'Académie des Sciences prit un rang émincnt parmi les
sociétés savantes, gr&ce aux travaux de Pallas, de Gmelin,
de Gyldenstedt et de Roumovski. La gloire d'avoir nette-
ment séparé l'ancien slave et le russe, et d'avoir fait pré-
valoir ce dernier idiome en poésie, appartient à Lomono-
soff : il lui assigna des règles par la publication d'une
Grammaire, apprit aux Russes, par ses études sur le
rhythme, toutes les ressources poétiques de leur langue,
et, unissant l'exemple au précopte, donna des modèles de
tous les genres de style ; on distingue son Ckie à la Paix,
une Êpitre sur le verre, des Psaumes , et des Eloges
acadétniques. Le reproche qu'on peut lui adresser, c'est
d'avoir cherché à ne former la langue que d'après le latin ^
à lui imposer en poésie les règles de la versification la-
tine, et, par conséquent, de l'avoir soumise à des en-
traves contre nature. Sbumarokoff, son contemporain et
son émule, fonda le the&tre national, et fut secondé par
un acteur de mérite, Théodore Volkoff, qui joua ses
drames d'Bamlet, du Faux Dmitri, etc. Kniaschnine ,
dont on représente encore aujourd'hui quelques ouvrages,
où il a peint divers ridicules de son temps, eut un style
plus pur, plus noble, mais un peu froid. Wizine, célèbre
Sour ses contes en prose, écrivit deux spirituelles comé-
ies, VEnfant gâte et le Brigadier, Kapnist, poète ly-
ri<][ue, composa aussi une tra^die d^Anligone, et une
Jolie comédie intitulée la Chtcane. Ablesimoff peignit
fidèlement les mœurs populaires dans son charmant vau-
deville du Meunter, On a de Cheraskoff, outre des tragé-
dies, des odes et des épltres, deux poèmes épiques sur la
conquête de Kazan et sur Vladimir le Grand : considéré
de son temps comme l'Homère de la Russie, il est à pré-
sent presque oublié. Oserofit a composé des tragédies en
vers alexandrins , telles que Fingal , OEdipe , Dmitri
DonskoU, où il ne montre ni pureté ni élégance de style,
mais une certaine énergie et des peintures pathétiques.
Le prince Michailovitch Dolgorouki a écrit des odes phi-
losophiques et des épitres. On doit au comte Chwostoff
des poésies lyriques et didactic^ues Justement estimées;
à Booroff, beaucoup d'odes, imitations un peu empha-
tiques des poètes anglais, et un poôme descriptif, la
Chersonida; à Pétroff,des odes riches d'idées et d'images,
où il a célébré Catherine U , Potemkin et RomanzolT, et
fene traduction de V Enéide en vers alexandrins; à Bog-
danovitch, un gracieux pofime de Psyché; à Popovsky,
une élégaute traduction de VEssai sur l'homme de Pope.
Citons encore Chemnicer, dont les fables sont pleines de
sel ; Neledinsky, chansonnier national ; Kostroff, tiaduc^
teur de Vlliade et des poésies d'Ossian. Cette période
littéraire est close d'une manière brillante par Derza-
wine, le premier poète de la Russie pour la sublimité des
pensées : son Hymne à Dieu, reproduit dans la plupart
des langues de l'Europe, a pénétré Jusqu'au Japon et en
Chine, où il a été inscrit dans les palais et les temples ;
d'autres compositions, Felica, la Cascade, VÊpUre à un
Grand, le placent aussi au premier rang des chantres
^Tiques.
Il fallut plus de temps à la prose pour parvenir au
degré de perfection qu'avait atteint la poésie. Elle dut ssi
premiers perfectionnements à la chaire évangélique,
dont les productions déguisent pourtant le plus souvent
l'absence de pensées sous une fausse rhétorique. On cite
dans ce genre : Platon Levschine, métropolivûn de Mos-
cou, auteur d'une Histoire de l'Eglise nuse, et de plu-
sieurs sermons remarquables; Iwan Lewanda, archî-
prêtre de Kiew; les prélats Bodobiedoff et Bratanovsky,
orateurs pleins de gravité et d'onction, dont le premier
s'est surtout rendu fameux par V Éloge funèbre de Cathe-
rine II. Dans le genre historique se distinguèrent : Tscher-
batoff, auteur d'ime Histoire de Russie qui n'annonce
pas des recherches bien profondes ; Hilkoff, collecteur d0
documents sur le même sujet ; Golikofi*, (jui a écrit V His-
toire de Pierre /*■" ; Boltin, critique Judicieux des sources
de rhistoire de sa patrie; Nowikoff, auteur d'ouvrages
biographiques, et fondateur d'une revue satirique inti-
tulée le Peintre; Gérard Fr. MùHer, qui publia une mul-
titude d'anciens manuscrits; MourawiefT, qui composa
plusieurs traités d'histoire et de morale.
Avec le xix* siècle commence une ère nouvelle dans
la littérature russe. Un désaccord profond s'était peu à
peu manifesté entre les éléments nationaux et les élé-
ments provenant de l'étranger. L'influence des idées
étrangères était devenue si grande sur la noblesse et sur
la classe des fonctionnaires, que Paul I^ en prit om-
bxage, et défendit à ses sujets de voyager sans une per-
mission impériale. U fonda néanmoins l'université de
Dorpat. Après lui, Alexandre I'*" porta le nombre des Uni-
versités à sept, fonda 4 Académies théologiques, 36 sé-
minaires, et un grand nombre d'écoles de gouvernements
et de cereles. Une classe pour renseignement des lan-
gues orientales fut créée à l'Université de S^Pétersbourg.
Un nom domine toute cette époque; c'est celui deKa-
ramsin, qui secoua le Joug du classicisme imposé pv
Lomonosoff et dont Derzawine avait déjà essayé de s'af-
franchir. Après s'être fait connaître par d'élé^ntas poé-
sies lyriques, par ses Lettres d*un voyageur russe, par
une suite d'articles littéraires où il ridiculisait la manie
de l'ode, l'enflure et le clinquant des poètes, et rappelait
la poésie à sa véritable source, à la simplicité des senti-
ments humains, il publia son Histoire de Russie, mo-
nument immortel qui éleva la langue de la prose à son
plus haut degré de perfection : en la dégageant de la rai-
deur et de la complication des formes classiques , il lui
donna une allure à la fois noble et facile, unissant la
vivacité à l'harmonie, l'énersie à la simplicité. En même
temps, Schiskoff montrait, dans son Traité sur Vancien
et le nouveau style, la supériorité de l'ancien slave sur
tous les emprunts étrangère. Les poètes ne manquèrent
pas à l'école nouvelle. Dmitrieff publia des élégies , des
contes et des apologues pleins de grâce ; le genre de la
fable fut également cultivé par Izmalloff, et par Kryloff,
celui de tous les Européens qui a le plus approché de
La Fontaine. Dans l'art dramatique brillèrent : Alexandre
Schachovskoi, poète comique d'une imagination féconde
et riante ; Gribojedofi*, auteur de la charmante comédie
des Inconvénients de l'esprit; Kriukovsky, célèbre par sa
tragédie de Pozarskoi ; Nicolas Polewor et Nestor Kukol-
nik, qui ont emprunté les sujets de leure drames surtout
à l'histoire nationale, tandis que Nicolas Gogol peignait
gaiement dans ses comédies les mœurs des petites villes
de la Russie. La poésie didactique et héroïque, soit ori-
ginale, soit imitée, fut cultivée avec succès par Voieikoff,
traducteur de Virgile, et auteur d'ingénieuses épltres;
Merzliakoif, heureux imitateur d'un grand nombre de
poésies classiques ; Gnieditch, qui traduisit Vlliade d'Ho-
mère et le Roi Lear de Shakspeare ; PanaefT, auteur de
gracieuses pastorales; Kozloff, émule de Byron, mais
avec une inspiration plus religieuse et plus touchanter
connu par un poème remarquable intitulé le Moine,
Raisch, qui a traduit les Géorgiques avec une rare fidé»
lité. Dans le genre lyrique proprement dit, nous men-
tionnerons : Zukovsky, traducteur de la Jeanne d^Are de
Schiller, de la Lkiore de Burger et des poésies de Hébel,
auteur d'odes et de ballades originales, parmi lesquelles
on distingue Svietlana et le Barde au camp des Russe- .
Ba^uschkoff, qui a publié, entre autres poésies, la Mor*
du Tasse et une ÊpUre aux Pénates , où régnent une
grâce naive et une touchante sensibilité; Pouschkine,
auteur d'une tragédie de Boris Godunoff, des poèmes de
Ruslan et Ludmila, du Prisonnier du Caucase, de la
Fontaine, du Zigane, et dont toutes les poésies, portant
le cachet de la nationalité, expriment admira) ile!::;ent les
joies, les tristesses, la gloire, l'amour de la patrie et la
gaieté du peuple russe; Lermontoff, le génie le plus rs-
RUS
1603
RTP
marquable de notre temps. A ces noms IHnstree on peut
ajouter Baratynskl, qui a laissé des épttres et des contes
ingénieux; WJasemsky, inimitable dans ses poésies
légiàres, et connu aussi comme critique ; Delwig et Rosen,
chansonniers renommés; enfin lasikoff, Benediktoff et
Podolinski, auteurs de poésies diverses.
L'Église russe a eu de bons orateurs au xn* siècle,
entre autres, Eugène Bolchovitinofr, évêque de Kiew, et
Philarète Drosdoff, archevêque de Moscou, qui ont aussi
écrit des ouvrages théologiques d'une profonde érudition.
— HerslJakofT, professeur à Moscou, s*est fait un nom
dans la critique, et MartynofT dans le genre de la traduc-
tion. Bischurine a publié des Mémoires et des Voyages
remarquables. Sokoloff, Wostokoff, Kalaidovitch, Stroieff,
et surtout Gretsch, se sont occupés avec zèle des monu-
ments de la littérature russe et du développement pro-
gressif de la langue, tandis que NovikofT, Kaschine, Maxi-
inovitcb, Makarotr et Sacharoff faisaient des collections
■ de chants et de traditions populaires. Les travaux philo-
sophiones de Golubinski, de Wellanski, de Sidonski, de
Kodroir, se rattachent aux systèmes de TAllemagne. Dans
la Jurisprudence on remarque Rewolin, Moroschkin et
Nikita Krylofi". Mais les deux genres en prose qui ont fait
le plus de progrès sont l'histoire et le roman. Au nombre
des historiens se placent Ustrialoif, auteur d'un abrégé
de l'histoire de Russie destiné aux écoles publiques; Po-
dogine, qui a Jeté une vive lumière sur les origines
russes; Polewoy, auteur d'une Histoire de Russie très-
étendue; Wasili Berg, dont on a plusieurs monographies
de czars; Michallovski Damlevski, qui a laissé divers ou-
vrages sur les guerres de la Russie et de la France; enfin
Glinka, Siijegfreff, Slovroff, Sreznewski, Samailoff, Solo-
vieff, Strojeff, NeverofT, Arzenieff, etc. — Quant aux ro-
mans, nouvelles et contes russes, on y trouve, en général,
la peinture d'un état social où la barbarie lutte contre la
âvilisation : Bestouchef, Boulgarine, Pavloff, Zagoskine,
Oschakoff, LaxeschnikofT, le comte Solohub, le prince
Odojevski, le baron KorfT, Constantin Masalski, Senkovski,
Sogol, Grebenka, Kwitka (sous le pseudonyme d'Osno-
^rianenko), etc., ont rempoité dans ce genre de littérature
tes succès les plus honorables et les plus légitimes.
V. Goetxe, Vladimir !•' «t sa TabU-Rands, Leipzig,
1840; le prince GertelefT, CollecUon d*anciennss poésiss
russes, S^Pétersbourg, 4822, 2 vol.
RUSSNUQUE ou RUTHËNE (Langue), appelée aussi
mal(Mrouski et petit russien, une des langues slaves, par-
lée par les Russniaks de la Gallicie, de la Hongrie sep-
tentrionale, de la Podolie, de la Wolhynie et de la
Lithuanie. Elle a beaucoup de ressemblance avec le po-
lonais. C'était autrefois une langue écrite, comme on le
voit par une traduction de la Bible imprimée à Os-
trog en 4584. On se contenta de la parler depuis qu'au
XVII* siècle les Russniaks furent soumis aux Lithuaniens
et aux Polonais; mais, de nos Jours, on a recommencé à
imprimer en russniaque. I>es chants mssniaoues ont été
recueillis et publiés par Waclaw {Piesni polskie i ruskie,
Lemberg, 4833). Leivicki a donné en allemand une Gram'
maure de la langue russniaque, Przemjrsl, 4833.
RUSTIQUE (Ecriture), écriture grecque ou latine des
plus anciennes inscriptions. Les lettres n'y sont formées
que des traits essentiels, ajustés inégalement et sans pr^
osion.
RUSTIQUE fLangue). V. Frarçaisb ÇLangue).
RUSTiQUB (Ordre), en termes d'Architecture, ordre dans
lequel les colonnes et les membres de l'entablement sont
ornés de bossages vermiculés ou unis. — Une construc-
tion est dite rustique, miand elle est fidte de pierres
brutes ou de pierres taulées à l'imitation des pierres
brutes. La grossièreté et l'irrégularité des ornements n'y
sont au'apparentes. Palladio a fait l'usage le plus heu«
reux de ce genre.
RUSTIQUER, en termes de Construction, piquer le
parement d'une pierre avec la pointe d'un marteau, pour
lui faire perdre le poli du trait de la sde et lui rendre en
quelque sorte sa rudesse primitive.
RUSTRE, en termes de Blason, macle percée en rond.
RUTHÈNE (Langue). K. Rossnmqob.
RUYDER ou RYDER, c-à-d. cavalier, nom sous lequel
on désigne quelquefois le ducaton hollandais. V, Ducat,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d^Histoire.
RYPBR, monnaie d'or de Hollande, valant à peu prêt
3 ducats, ou, en monnaies françaises, 34 fr. 65 c.
S
S, 19* lettre et 45* consonne de notre alphabet C'est
ane sifflante, dont Tarticulatlon exige le concours de la
langue et des dents. Le signe qui la figure en hébreu a
les deux valeurs de notre sifflante s et de notre chuin-
tante ch : ces deux sons ont , en effet , des rapports in-
times; les Hébreux de la tribu d'Éphraim, par un vice de
prononciation qui leur était particulier, remplaçaient
dans beaucoup de mots la chuintante par la sifllante, et
il en est de même chez un certain nombre de nos en-
fants, oui prononcent sat , sien, au lieu de chat,chien, etc.
Les Allemands de l'ancienne Souàbe donnent aussi à
Ys le son de notre ch. Les Grecs et les Romains chan-
geaient quelquefois la dentale t en sifflante ; par permu-
tation contraire, le français donne le son de Vs au t dans
certaines finales, comme dans action, captieux, martial,
balbutier, etc. Le même phénomène se remarque en an-
glais, où le t qui termine la 3* personne du singulier
dans les verbes allemands s'est coangé d'abord en den-
tale sifflante th, puis en s : ainsi, de hat (il a), on a fait
successivement nath et has. En latin , Y s initiale repré-
sente souvent l'esprit rude d'un primitif grec : c'est ainsi
que des mots grecs ex, epta^ udàr, uper, us, marqués de
l'esprit rude, sont venus les mots latins sex, septem,
sudor, super, sus, etc. Dans le passage du latin au fran-
çais, les mots qui commençaient par une s, suivie d'une
autre consonne, ont reçu un e comme auf^ent eupho-
nique : spiritus, spcUium , spes, scola, scribere, status,
sttidium, ont fait esprit, espace, espérance, escole (école),
•iscrire (écrire), estât (état), estude (étude). Dans quel-
ques-uns de ces exemples, Vs a fini par être supprimée;
c'est une suppression semblable que rappelle l'accent
circonflexe d'autres mots, comme honnête (du latin ho-
nestus)^ lie (de tiwuia), etc« En français, Y s finale se
fait entendre dans as, aloès, chorus. Mars, Reims, laps,
vis, etc.; elle est muette dans un pins grand nombre,
comme dans clos, dans, gris, pas^ous, très, etc.; quand
elle se lie avec le mot suivant, elle a le son du s {mes
amis, bons ^èves). C'est ce même son que l'on donne
dans le corps des mots à Ys placée entre deux vovelles :
on en excepte désuétude, monosyllabe, parasol, pr^
séance, parce qu'il existe comme une séparation entre lea
deux parties de ces mots composés, et que l'r est l'initiale
de la seconde partie. Par exception à l'usage général oui
donne à Ys précédée d'une consonne le son x, on fui
donne celui du x dans balsamine, transaction, transit,
transiger, transition. Dans les langues française, an-
glaise, espagnole, portugaise, Ys finale est le signe
ordinaire du pluriel des noms ; elle est aussi la carac-
téristique de la 2* personne du singulier dans les verbes
français, excepté à rimpéradf.
Dans les abréviations latines, S est pour sanctus, sa-
crum, sua, solvit, solutum; S. C. signifie senatus eon»
sulto; S. J., sacrum Jovi; S. M., sacrum Manibus;
S. S., supra scriptus; S. P. Q. R., senatus populusquê
romanus. En tète des lettres missives, S. D. était la for-
mule de salutation, salutem dicit. Qiez nous, S. se met
pour Sud, pour Scùnt; SS. pour Saints ou Sa Sainteté,
S. M. pour Sa Majesté; S. H. pour SaHautesss; S. A. pour
Son Altesse; S. E. pour Son Eminence ou Son Excel»
lence, etc. Une S, traversée obliquement par une barre,
est employée en Musique comme rigne de renvoi. Préc^
dée d'un nom de nomore, la lettre S voulait dire en latin
semi ; barrée ou précédée d'une bure, elle était le signe
du sesterce. Dans le commerce, 8/C signifie son compte^;
S. E. ou O., sauf erreur ou omission. On emploie en-
core S. V. P. pour s^il vousplail. —Lettre numérale, te
SAB
1604
SAC
iigtna grec, avec un accent en dessus (9^^ valait 200, et,
avec l'accent en dessous (,<r), 200,000; l'S des Romains
valait .7, et, selon quelques-uns , 90 ; surmontée d'un
trait (S}, c*éuit 90,000. •— S a été la marque monétaire
de la ville de Reims. B.
SABAYE, cordage employé dans les canots pour leur
servir d*amarre à terre, quand les grappins sont mouillés
au large.
SABBAT. V, ce mot dans notre DicUofunaire de Bio'
graphie et d'Histoire.
SABBATINE, petite thèse que les écoliers des anciennes
Universités soutenaient, les samedis, sans solennité,
pour s'exercer à en soutenir d*autrûs publiquement
SABÉEN (Alphabet). V. Striaqdb (LAngue).
SABÉISME, culte des astres, répandu dans TArabie
avant Mahomet, en Syrie, en Mésopotamie, en Perse, et
même dans l'Inde. Lies Sabéens regardaient les astres
comme la demeure de certains Esprits, auxquels ils attri-
buaient une puissante influence sur l'homme et sur la
nature physique qui l'entoure. Par suite, ils accordaient
une grande influence aux talismans confectionnés d'après
les préceptes de l'art astrologique.
SABELLIEN (Idiome), un des idiomes de l'antique
Italie, parlé par les Marses, les Marrucins, les Picéniens
et les Sabins.
SABLE , en termes de Blason , désigne la couleur de la
martre zibeline, et, par suite, la couleur noire. Des traits
croisés en sont l'imaee dans la gravure des armoiries.
Sable dérive de zabeïle, nom sous lequel on désignait
jadis la martre zibeline. Le sable désignait s;^mbolique-
ment la terré, la sagesse, la mortalité, le deuil.
SABLIÈRE , en termes de fjliarpenterie , désigne :
I» toute pièce de bois posée horizontalement pour porter
un pan de bois ou une cloison ; 2® la pièce qui , à chaque
étage d'un pan de bois, en reçoit les poteaux, et porte les
solives d'un plancher; 3<* les membrures qu'on attache
aux côtés d'une poutre, et qui reçoivent par enclaves les
solives dans leurs entailles.
SABORD , ouverture ordinairement carrée, faite dans
la muraille d'un navire, soit pour servir de fenêtre, soit
pour tirer le canon. C'est au côté supérieur des sabords
que sont fixés les gonds des volets qui servent à les
fermer et à les ouvrir. Les sabords d'un côté doivent être
exactement opposés à ceux de l'autre; quand il y en a
plusieurs rangs du même côté , ceux de la rangée supé-
rieure se placent au-dessus du milieu de l'intervalle qui
sépare deux sabords de la rangée au-dessous. Les grands
vaisseaux de guerre ont trois rangs de sabords. On nomme
sabords de retraite ceux qui sont percés dans la poupe,
pour tirer encore sur l'ennemi devant lequel on se retire;
sabords de chasse, ceux qui sont placés dans le sens de
la longueur du navire pour tirer sur l'ennemi qui fuit.
Les navires marchands ont quelquefois de faux sabords,
exécutés en peinture, afln de passer pour bâtiments de
guerre aux yeux de l'ennemi et de commander le res-
pect; mais les vrais marins ne s'y laissent guère trom-
per. On appelle sabords de charge, de grandes ouvertures
pratiquées dans la cale des navires, à l'avant et à l'ar-
rière, au-dessous de la coifle du premier pont et de la
barre du pont, pour charger des m&tures et des bois de
construction, et que Ton ferme ensuite nvec soin. Les sa-
bords ont été inventés en 1500 par Descharges, construc-
teur à Brest.
SABOT, nom par lequel on désigne : 1° une chaus-
sure de bois faite tout d'une pièce, et creusée de manière
à contenir le pied ; 2® toute garniture de cuivre qu'on
met au bas des pieds de certains meubles ; 3^ la pièce de
fer creusée pour recevoir le bout d'un pilotis, et dont la
pointe doit s'enfoncer en terre ; 4° un outil de menuisier
qui sert à pousser les moulures dans les parties cintrées;
h^ un morceau de bois carré, dont se servent les maçons
pour pousser des moulures; 6> la pièce de fer ou de bois,
un peu courbée et à rebords, qu'un mécanisme adapte
aux roues d'une voiture pour enrayer; 7^ une sorte de
toupie que les enfants font pirouetter au moyen d'un
fouet ; 8^ un crochet autrefois employé pour raccourcir la
corde d'une harpe et la hausser d'un demi-ton. V. Harpe.
SABRE (de l'allemand sabel)^ arme offensive et d'es-
crime. C*est une sorte d'épée, dont la lame, moins
longue, plus éfiaisse et plus forte que celle des épées or-
dinaires, n'a qu'un seul tranchant , et se courbe un peu
vers la pointe. A l'époque des Croisades, le sabre allait
en s'élargissant jusqu'au bout, recoupé en biais. Les
modèles en ont, du reste, fréquemment varié. Aujour-
d'hui , en France, il y a trois modèles de sabre pour la
cav:\Io.rio : le .^ahre de la cavalerie de réserve f carabiniers
et cuirassiers), dont la lame, appelée latte, est presque
droite, et propre à pointer; le sabre de la cavalerie de
ligne (dragons et lanciers), à lame cambrée, propre à
pointer et à tailler ; le sabre de la cavalerie légère (chas-
seurs et hussards), à lame cambrée et évid^ propre à
tailler. L'infanterie, qui, jusqu'au milieu du x.viii* siècle,
porta l'épée, reçut ensuite le sabre-briquet, lame à un
tranchant, légèrement cambrée, sans gouttière ni pans
creux, avec un faux tranchant vers la pointe. En 183),
on l'a remplacé par le sabre-poignara, lame droite à
deux tranchants, a gouttière et à pans creux, avec une
croisière pour garde, et une poignée cisela en écailles.
Plus tard, on a imaginé le sabre-baJlonnette , qui peut
s'adapter au canon du fusil en guise de baïonnette, et
qui est une arme particulière aux chasseurs d'Afrique.
Le sabre d^abordage, à l'usage des marins, est légèremen.
cambré, évidé, et long de 75 centimèt.; la poignée est eo
bois; la garde est formée par une coquille en fer forgé,
avec branches portant une pièce de tôle qui protège la
main. « B..
SABRETACHE (de l'allemand sabel, sabre, et t€tschen,
poche ), sorte de gibecière volante, attachée au ceinturon
du sabre des hussards, par trois bélières en bulSe, et qui
pendait le long de la cuisse gauche. Sa faoe extérienre,
en vache noire et lisse, portait une plaque de cuivre
estampé où était le numéro du régiment au milieu de
feuilles de chêne et delaurier; l'intérieur étaiten basane
noire. La sabretacbe a été supprimée en 1868.
SAC-A-TËRRE , enveloppe de maçonnerie qu'on éta-
blit autour des soutes aux poudres pour les préserver.
SAGCOM (Les) , membres d'une congrégation des
États romains, qui ont le droit de pénétrer partout pour
s'assurer qu'on ne transgresse pas les prescriptions de
l'Église relativement aux abstinences, et la mission de
dénoncer les blasphémateurs, de fouiller dans les papiers
des personnes suspectes. Ils perçoivent une partie dos
amendes qu'on inflige aux coupables. Leur nom vient de
ce qu'ils ont un vêtement en forme de sac, avec un ca-
puchon, une corde autour des reins, des sandales sui
pieds, et, sur la figure, un voile percé de deux trous à la
hauteur des yeux.
SACERDOCE (du latin sacerdos, prêtre), diguitê et
fonctions des ministres du culte.
SACOLÈVE, navire du Levant, très-tonturé, avec l'ar^
rière élevé. Il a trois m&ts à pible, et la voile à livarde.
SACOME. V. Sagoma.
SACRAMENTAIRE, livre contenant des prières pour
l'administration des sacrements et pour les bénédictions.
SAGRAMENTAIRES. V. ce mot dans notre Dictiot^
naire de Biographie et d^Histoire,
SACRARIUM, nom donné par les auteurs ecclésias-
tiques : 1° à la sacristie d'une église; 2° à une sort«
d'armoire creusée dans la muraille ou dans un pilier du
côté de l'Évangile, et où l'on plaçait les espèces consa-
crées; 3» quelquefois au sanctuaire. — Petit oratoire,
dans les grandes maisons des riches Romains; on y gar-
dait et on y honorait les dieux Lares; on y déposait aussi
des papiers de famille; souvent ce petit temple domes-
tique était somptueusement orné.
SACRE DES ROIS, i V, notre Dictionnaire de Bio"
SACRÉE ( Voie) . ( graphie et d'Histoire.
SACREMENT. Chez les Romains, le mot Sacramentum
désigna d'abord le serment que prêtaient les soldats, en-
suite la caution qu'on était tenu de fournir en engageant
une action judiciaire, et enfin toute chose consacrée aux
Dieux. Il fut employé par les premiers chrétiens dans le
sens de secret . et signifia toute chose ou doctrine mys-
térieuse. Depuis le xii* siècle, on a appelé Sacrement le
signe sensible d'un effet intérieur et spirituel que Dieu
opère en nos &mes. En ce sens, la oirconcision et les pu-
rifications étaient des sacrements pour les Hébreux.
L'Église catholique a 7 sacrements : le Baptême, la Con-
firmation, V Eucharistie, la Pénitence, VOrdre, le Ma-
riage et V Extrême-Onction {V, ces mots). Outre la gr&cc
sanctifiante que produisent tous les sacrements , troi^
d'entre eux impnment à l'àme un caractère inefllâçablo,
et , pour ce motif, ne peuvent être renouvelés : ce sont
le Baptême, la Confirmation et l'Ordre. Les prêtres sont
les ministres des sacrements; toutefois, en cas de nt>
cessité, le Baptême peut être administré par toute per-
sonne raisonnable. Les conciles ont décidé qu'il n'est pas
nécessaire, pour la validité des tMicrements, que le prêtre
qui les administre soit en état de gr&ce. L'administration
des Sacrements est gratuite; les fidèles ont le droit de
les recevoir sans rétribution, et ce qu'ils donnent au
prt'trc est une ofTrrxndf^ volontaire. Il y a même des Sa-
SAG
1605
SAI
creroeDts pour TadmiDistration desquels fe prêtre ne
doit rien recevoir; ce sont: la Pénitence, rEucharistie,
ei l'Extrôme-Onction. — Sous le nom de Saint Sacre-
ment, on désigne spécialement Je sacrement de TEu-
charistie, et, par dérivation, l'hostie consacrée, ou
même Tostensoir qui renferme cette hostie.— L'Eglise
grecque et les églises d'Orient admettent aussi sept
sacrements, et les appellent mystères, équivalent cçrec
du latin sacramentvm. — Les Protestants n'ont ^ue
deux sacrements, le Baptême et la Cène
SACRIFICATEUR, ministre d*un culte chargé des sar
criflces.
SACRIFICATORIUM, nom donné quelquefois par les
écrivains ecclésiastiques à Tautel des églises.
SACRIFICE (du latin sacrum , chose sacrée, et facere^
faire), offrande d*une chose extérieure ou sensible, faite
à la Diviuité par un ministre légitime, pour apaiser sa
colère ou pour lui rendre hommage. L'usage des sacri-
fices a existé de tout temps et dans toutes les religions,
et ce fut, jusqu'au christianisme, une opinion universelle,
que le pardon ne pouvait s'obtenir que par le sang. Chez
les Hébreux, les hosties ou victimes étaient ordinaire-
ment des bœufs, des veaux , des moutons, des agneaux,
des béliers, des boucs et des chevreaux. On appelait /lo-
iocauste tout sacrifice où la victime était entièrement
consumée sur l'autel ; sacrifice expiatoire, celui où Ton
ne mettait qu'une partie de la victime sur l'autel , le
reste appartenant aux prêtres; sacrifice de prospérité ou
de reconnaissance, celui où l'on ne brûlait que la graisse
des animaux immolés. Celui qui avait offert la victime en
mangeait une partie avec ses convives sur la table des sa-
crifices. — Chez les Païens, on offrait généralement à
chaque divinité l'animal qui lui était consacré, le cheval
à Neptune, le bouc à Bacchus, etc. Les bœufs, les tau-
reaux, les moutons, les agneaux , les oiseaux , étaient les
victimes les plus ordinaires. Un sacrifice de 100 bœufs se
nommait Hécatombe; mais le plus souvent on n'immo-
lait qu'un seul de ces animaux , et la valeur des autres
était donnée aux prêtres. Il y avait à Rome un Boi des
sacrifices iV,ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d^ Histoire). Les Germains sacrifiaient des chevaux
à Odin. — Les Tyriens et les Carthaginois offrirent des
victimes humaines au dieu Moloch ; les Gaulois prati-
quèrent aussi ces horribles sacrifices en l'honneur de
Teutatès, et l'on raconte qu'ils entassaient leurs prison-
niers de guerre dans de gigantesques statues en osier,
auxquelles ils mettaient le feu. Les Européens qui dé-
couvrirent l'Amérique trouvèrent l'usage des sacrifices
humains chez les habitants du Mexique et du Pérou. Il
y en a aussi à Nonka-Hiva, dans l'Océanie. — Pour les
ciirétiens, il n'y a de sacrifice réel que celui de Jésus-
Christ, qui s'est immolé pour le genre humain ; et le sa-
crifice sanglant du Calvaire est représenté, et renouvelé
d'une manière non sanglante dans la Messe, qu'on ap-
pelle pour cela le Saint-Sacrifice,
SACRILÈGE , profanation de ce qui est sacré. On dis-
tiogue : le sacrilège personnel , par lequel on insulte un
ecclésiastique dans l'exercice de ses fonctions; le sacrilège
local, qui consiste à profaner les lieux sacrés, églises,
autels, cimetières, etc.; et le sacrilège réel, par lequel on
profane les choses sacrées, telles que les sacrements, les
vases sacrés, les hosties, les reliques, les croix, les
images des saints, les ornements sacerdotaux, etc. V. Sa-
caiLéoB, dans notre Dictionnaire de Biogr. et d* Histoire.
SACRISTAIN , celui qui a soin de l'élise, et qui a la
garde des vases et ornements sacrés, placés dans la sor
cristie. C'est généralement un laïque. A Rome, il y a un
sacristain du pape ou préfet de la sacristie, qui est d'or-
dinaire évèque m partibus,
SACRISTIE (du latin sacrarium ou secretartum) ,
partie d'une église où l'on conserve les vases et orne-
ments sacrés, et où le clergé se revêt des habits propres
à la célébration des oflSces.
SAFRAN, partie U plus large du gouvernail, et dont la
surface, opposée à l'action des eaux vives qui fuient sous
la carène, est le principal agent du mécanisme qui fait
évoluer le navire.
SAFRE , en termes de Blason , aigletto de mer peinte
dans quelques armoiries.
SAGAIE oa ZAGAIE, espèce de dard ou de Javeline
dont se servent les habitants de l'Océanie.
SAGARIDE, arme. V. notre Dictionnaire de Biogrc^
phie et dk Histoire,
SAGASf mot qui désignait, dans les anciennes langues
du Nord, les récits concernant la vie des héros et des
nris. Cas Sagas, qui forment une partie de la littérature
norvégienne et islandaise, se transmirent d'abord pèt
tradition orale ; puis, à partir du xiu* siècle, on en com-
posa par écrit. Elles sont en prose, d'un style simple et
sans art, et ne contiennent que des faits. Au milieu du
XIV* siècle, le goût public ayant changé, les récits histo-
riques cédèrent la place à des récits romanesques, aux-
quels on conserva néanmoins le nom de Sagas. V, Mill-
ier, Bibliothèque des Sagas, Copenhague, 1817-tO, 3 vol.
SAGE-FEMME, c-à^l. femme qui possède la science,
femme dont la profession est de faire des accouchements.
Il y a, dans les Écoles de médecine, des cours pour les
personnes qui se destinent à cette profession. Celles qui
ne les ont pas ft*équentés doivent avoir suivi pendant
2 ans les cours particuliers qu'on fait pour elles dans les
grands hôpitaux des villes, et avoir pratiqué sous la sur-
veillance d'un professeur. Le diplôme de 1*^ classe, con-
féré par les Facultés ou Écoles de médecine, est valable
pour toute la France ; celui de 2* classe, conféré par les
Écoles préparatoires de médecine et de pharmacie, ne
vaut que pour un département. L'un coûte 130 fr., l'autre
25 fr. Il est défendu aux sages-femmes d'employer les
instruments dans les cas difficiles, sans appeler un doc-
teur en médecine ou en chirurgie (Loi du 19 ventôse
an XI, ou 10 mars 1803). A défaut du père de l'enfant
nouveau-né, elles doivent faire à la mairie la déclaration
de naissance.
SAGES (Les sept). V, notre Dictionnaire de Biographie
et d:* Histoire,
SAGES (Roman des). V. Dolopathos.
SAGESSE, mot qui fut d'abord synonyme de science.
Le sage était le savant; la sagesse consistait à savoir par
réflexion, et à appliquer les conséquences des idées et des
principes. Elle avait un sens tout spéculatif, et c'est dans
ce sens que Bossuet a dit que la sagesse est la connais-
sance certaine des effets par les premières causes, comme
quand on rend raison des événements ou de l'ordre de
l'univers par la Providence. Ce qu'on appelait la sagesse
des Égyptiens et des premiers philosophes n'était que
leur sctence. On s'aperçut bientôt que cette science pri-
mitive ne répondait pas à la réalité, et la sagesse devint
lu philosophie (amour de la sagesse). Cette dernière prit
alors un sens exclusivement moral et politique : ainsi,
les sept Sages de la Grèce se montrent tous avec ce ca-
ractère commun, que leur sagesse était toute pratique.
Pour Socrate, la sagesse était tout entière dans la morale,
et c'est ainsi qu'on Ta comprise depuis ; on vit en elle la
conseillère de l'homme, lui disant ce qu'il doit faire : elle
est en quelque sorte une voix de la conscience. — Tous
les écrits traitant de la Morale se rattechent à la sagesse;
mais il y a plus spécialement le Ltvre de la Sagesse,
attribué à Salomon ; le Traité de la Sagesse, de Charron;
les Leçons de la Sagesse, de Débonnaire; il faut citer
aussi ce qu'on a des petites gnomiques de la Grèce, et les
vers dorés de Pythagore.
Les Grecs personnifiaient la Sagesse sous la figure de
Minerve, avec une chouette à ses pieds, pour montrer
que la sagesse veille toujours. R.
SAGBSSB (Le livre de la). ( V, notre Dictionnaire dé
SAGIBARONS. S Biographie et d*Histoire.
SAGITTAIRE. V. Dariqdb, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^Histoire,
SAGOMA, mot italien désignant l'étui qui contient une
arme et qui en laisse deviner la forme. Par extension,
il a signifié pour les artistes ce que nous appelons
silhouette : ainsi, la sagoma d'une statue est la silhouette
de son enveloppe ou de ses contours. De sagoma est venu
le français sacome, qui signifie le profil exact d'un membre
d'architecture.
SAGONTE (Thé&tre de), un des monuments romains
de l'Espagne. Dans la partie qu'occupait le public, on
compte encore 33 gradins coupés en e divisions (cunet)
par § escaliers, qui aboutissent à autant de vomitoires.
Un rang de portiques règne à l'intérieur, tout autour de
la partie supérieure des gradins. Il existe aussi un autre
rang de portiques extérieurs, sous lesquels s'ouvrent les
portes d'entrée. Les restes de ce monument sont encore
assez considérables et en assez bon état pour qu'à la fin
du siècle dernier on ait pu y donner une représentation
théâtrale. Il contenait dix mille spectateurs.
SAGUM, vêtement. V, notre Dictionnaire de Biogra^
phie et d* Histoire,
SAIDIQUE (Dialecte). V. Copte (Langue).
SAIE, vêtement, v. Sagcv, dans notre Dictionnaire
de Biographie et SHistoire.
SATGA. V, Françaises (Monnaies).
SAIGNÉE. Elle fut, au témoignage d'Aulo-Galle (Am»i
SAI
1C06
SAI
aUitjuett X, 8), uû châtiment militaire dans l'Antiquité.
SAILLIE, 80 dit des constructions saillantes, c.-à-d.
qui débordent les murs des bâtiments. A Paris, il ne peut
être établi, sur les murs de face des maisons, aucunes
saillies autres que celles qui sont déterminées par Tor-
donnance de police du 34 décembre 1823. L'arrêté du
7 brumaire an n charge les maires de surveiller, per-
mettre ou défendre les ouvrages qui prennent sur la voie
publique. On ne peut avoir de balcons ou autres sem-
blables saillies sur la propriété close ou non close du
voisin, s'il n'y a 1"\9 de distance entre le mur où on les
pratique et cette propriété {Code Napoléon, art. 078).
SAINÈTE, nom donné en Espagne à tout Divertisse-
ment joué après une pièce principale. Le mot signifie
sauce, assaisonnement, et a été employé pour la première
fois par Louis Quinones de Benavente, dans ses Joca-
Séria, en 1653. Les auteurs de nos jours qui se sont le
plus distingués comme auteurs de salnètes sont Rumon
de la Cruz et Gonzalës del Gastillo.
SAINT (du latin sanctiis)^ ce qui est pur, parfait^
exempt de vices ou de souillures. Cette qualification , qui
ne convient absolument qu'à Dieu, a été étendue aux
hommes d'une vie exemplaire, irréprochable, et appro-
chant autant que possible du caractère de la Divinité. Le
nom de saint était autrefois donné honorifiquement aux
évêques, et même aux rois; depuis le xiv* siècle, il est
réservé aux papes. Dans TÉglise catholique, on nomme
Saints les personnages qui ont été canonisés. V. Cano-
nisation.
SAINT (Le). V, notre Dictionnatre de Biographie et
^Histoire,
SAINT-ANGE (Ch&teau). V, BIaosoUb, dans notre Die-
tumnavre de Biographie et d'Histoire.
SAINT-AUGDSTIN. V, Caractères d'im}»rimbrie.
SAINTE-BARBE, endroit d'un navire où sont renfer-
mées la poudre et les munitions. On l'appelle ainsi du
nom de la patronne des canonniers. La sainte-barbe est
toujours un lieu séparé dans la première batterie, sous
i'entre-pont, et à l'arrière du b&timent.
SAINTES (Amphithéâtre de). Il se trouve hors de la
ville, an fond d'un vallon qui sépare le faubourg S^-
Maclou de la paroisse S^-Eutrope. Ce qui en reste suffit
pour faire Juger de sa forme et de ses dimensions. C'est
une ellipse de 130 met. de longueur sur 108 de largeur.
Il n'y avait qu'un étage de voûtes inclinées vers l'arène,
et qu'une précinction avec trois rangs de gradins. On
aperçoit encore les restes du podium. Autour de l'aire,
et dans ^a partie inférieure de l'édifice, se trouvaient les
loges des bêtes féroces; elles paraissent être enterrées
aujourd'hui, mais on voit les voûtes qui conduisaient aux
Tomitoires. Autant qu'on en peut juger par les ruines
des piles, l'amphithéâtre devait contenir 60 voûtes; il n'y
en a plu% à l'extrémité méridionale que douze ou treize
assez bien bien conservées. Tout porte à croire que
Tarène servait non-seulement à des combats de gladia-
teurs, mais encore à des naumachies : c'est ce qui semble
résulter de son assiette au fond d'une vallée, et de l'exis-
tence d'une voûte d'aqueduc dans la partie du coteau qui
descend de l'Est. L'amphithéâtre de Saintes pouvait con-
tenir de 20 à 22,000 spectateurs.
SAINTES (Arc ou Pont de). Un pont romain, jeté sur la
Charente, donnait entrée à la ville. Ce pont, renouvelé et
modifié à diverses époques, était précédé originairement
d'une porte qui existe encore, et qui aujourd'hui se trouve
au milieu du pont, probablement par suite des change-
ments qui se seront opérés dans le lit de la rivière. La
base de cette porte, au fond de l'eau, est un massif de
maçonnerie de 20 met. de longueur sur 3"^,05 de lar-
geur. Au niveau du pont, l'édifice a 15 met. de largeur
sur 10 de longueur, et consiste en deux arcades à plein
dntre, de 4 met. d'ouverture chacune, et dont les piles
massives sont en gros blocs de pierre. Des pilastres co-
rinthiens reçoivent la retombée des archivoltes, et au-
dessus dos impostes il y a, à chaque angle, une petite
colonne engagée qui supporte l'entablement; le tout est
surmonté d'un attique, au-dessus duquel on voit des
traces de créneaux. Sur chaque face du monument, la
frise de l'entablement porte une inscription ; on en dis-
tingue une autre sur l'attique, du côté de la ville : elles
sont toutes trës-altérées, mais on les avait recueillies
avant leur entière dégradation. L'arc de Saintes fut élevé
au temps de l'empereur Auguste ^ en l'honneur de Ger-
manicus. L'architecte Blondel le restaura en 1665.
SAINTtlTÉ. V. ce mot dans no*re Dictionna%re de Bio-
uphie et d* Histoire.
SAINTONGEOIS (Dialocte). V. l'omvm.
SAINTRÊ (Histoire plaisante et Cronicque du Petit
Jehan de) et de la jeune Dame des Belles Cousines, ro-
man en prose du xv* siècle. Jehan de Saintré, k^\ de
13 ans, sert comme enfant d'honneur à la cour du roi
Jean, et, grâce à ses habiletés, à sa douceur, à sa cour-
toisie» à sa gentillesse, il est aimé et loué du roi, de la
reine, des seigneurs et des dames. Une jeune veuve,
ou'on appelait la Dame des Belles Cousines, lui déclare,
dans le but d'en faire un chevalier renommé, qu'elle veut
être sa dame, lui fournit secrètement tout l'argent dont
il à besoin pour paraître avec éclata s'occupe de son édu-
cation, lui trace les devoirs du fidèle amour qui chasse
du cœur tous les vices et préserve l'homme de péché
mortel. Elle lui ordonne de lire les histoires des anciens
héros, afin de s'affermir par de beaux exemples dans la
route de l'honneur et du devoir. Arrivé à l'&ge de courir
les aventures, Saintré fait une emprise d'un bracelet que
sa dame lui attache au bras gauche, se rend en Aragon,
où son vœu avait été publié, est vainqueur dans tous les
combats, et revient en France couvert de gloire. Nommé
chambellan du roi , il continue de servir la I)aine des
Belles Cousines avec tant de discrétion et de prudence,
que nul ne soupçonne leur amour. Pour obéir à sa re-
quête, il demande au roi la permission d'aller en Prusse
et de faire la guerre aux Sarrasins. Après avoir exterminé
l'armée des infidèles, il fait une nouvelle emprise sans
l'aveu de sa dame, qui, tourmentée d'inquiétude, se re-
tire dans ses terres pour penser à son ami absent. Mais
là elle succombe à une indigne passion pour l'abbé d'un
monastère voisin. Saintré, qui revient plein de joie pour
annoncer à sa dame ses nouveaux triomphes, est accueilli
d'abord comme un importun, puis insulté et bafoué; il
se venge en perçant la langue de l'abbé d'un coup d'épée,
et arrache à la dame sa ceinture bleue, symbole de
loyauté. Il retourne à la cour, où la Dame des Belles
Cousines est bientôt rappelée par la reine. Un soir, aprèi
souper, en présence du roi, de la reine et de toute la
cour, Saintré, sans nommer personne, raconte ce qui
s'est passé, et demande à chaque dame quel châtiment a
mérité l'amie déloyale : toutes répondent qu'elle doit
être chassée d'honnête compagnie. Saintré s'iidresse à la
Dame des Belles Cousines elle-même, et veut qu'elle
donne aussi son avis : éludant la question, elle dit <^e
le chevalier fut mal gracieux d'enlever à la dame sa cein-
ture. Alors Saintré tire la ceinture de sa manche, et, un
genou en terre, la rend à la Dame des Belles Cousines,
2 ni fut ainsi déshonorée aux yeux de toute la cour. —
é roman, d'un style simple, naturel et agréable, est un
mélange de vérité et de fable. Les personnages ne sont
point imaginaires : Jehan de Saintré était fils de Jeanne
Chaudrié et de Jean de Saintré ou Xaintré, chevalier,
sénéchal d'Anjou et du Maine. La Dame des Belles Cou-
sines est toujours désignée sous ce seul titre, mais elle
appelle les ducs d'Anjou, de Berry et de Bourgogne ses
beaux oncles : on suppose que c'était une petite -fil le du
roi Jean, Marie, fille de Jeanne, reine de Navarre;
cette Marie épousa en 1394 Alphonse d'Aragon, duc de
Candie. On comprend facilement que l'auteur n'ait point
voulu la nommer, à cause du déshonneur qu'elle s'attira
par sa déloyauté. L'histoire n'est pas toujours rapportée
avec fidélité dans ce roman : les anachronismes y sont
nombreux. La scène du roman est placée sous le règne
de Bonne de Bohême; or. Bonne, première épouse de
Jean, mourut en janvier 1349, et ne fut jamais reine de
France, puisque Jean ne monta sur le trône que le
22 août 1350. Il ne régna que 14 ans, et l'auteur mt que
les amours de Saintré et de la Dame des Belles Cousines
durèrent 16 années ; les aventures de Saintré n'ont donc
fm s'accomplir pendant le seul règne de Jean. D'ailleurs,
es ducs d'Anjou, de Berry et de Bourgogne sont appela
frères du roi, ce qui place la scène sous Charles V. Enfif
l'auteur dit que le fameux Boucicaut accompagna Saintii
dans son expédition de Prusse; la campagne de Bouci*
caut en Prusse est de 1383, sous Charles YI. Quoi qu'on
pense de ces erreurs, qui furent peut-être volontaires,
et qui sont toujours permises dans un roman, l'histoire
du Petit Jehan de Saintré n'en est pas moins une pein-
ture naïve de l'esprit et des mœurs du xiv* siècle ; elle
est surtout précieuse par la description exacte des ar*
moiries de la plupart des grandes maisons de France. Ce
roman fut écrit vers 1459 par Antoine de La Salle, qu'on
suppose avoir été secrétaire de Jean d'Anjou, duc de Ca-
labre et de Lorraine. H. D.
SAINTS (Actes des). V, Actes des SAmrs.
SAINT -SIMONISME, ensemble des doctrines reli-
gieuses, sociales et économiques, professées par l'école
SAI
1607
SAI
qvi procédait de Saint-Simon. Exposées dans plasieurs
livres dv aiattre au temps de la Restauration, elles y
sont noyées au milieu de grandes phrases yides de sens,
et ne présentent le plus souvent que des divagations, des
lieux communs plus ou moins bien dissimulai sous une
terminologie nouvelle. Quand les disciples essayèrent,
après la Révolution de 1830, de les mettre en pratique,
ils n'aboutirent qu*à se rendre ridicules et à pro? oquer
les rigueurs du pouvoir Judiciaire.
Le saint-simonisme prétendit être une religion, et prit
le nom de nouveau cnristianisme. An fond, ce fut une
sorte de panthéisme. « Dieu est tout ce qui est, disait
Enfantin, i*un des principaux sectateurs de Saint-Simon;
tout est en lui, tout est par lui. Nul de nous n*est hors
de lui, mais aucun de nous n*est lui. » Les saint^simo-
niens firent de leur maître un prophète ou un Messie :
Moïse, Orphée, Numa, avaient, disaient-ils, organisé les
travaux matériels, Jésus-Christ les travaux spirituels, et
Saint-Simon les travaux religieux; Saint-Simon avait
résumé Moise et Jésus-Christ; pour les hommes de Tave-
nir, Moise devait être le chef du culte, Jésus-Christ le
chef du dogme, et Saint-Simon le chef de la religion ou
le pape.
Les théories sociales ne sont pas moins bizarres. Se-
lon la secte, Jésus-Christ a préparé la fraternité univers
selle, Saint-Simon la réalise. L'Église nouvelle gouverne
lo temporel comme le spirituel, le for intérieur comme
le for extérieur. La science est sainte, l'industrie est
sainte. Des prêtres, des savants, des industriels, voilà
toute la société; les chefs des prêtres, les chefs des sa-
vants, les chefs des industriels, voilà tout le gouverne-
ment. Ces chefs doivent administrer la communauté
dans la voie et selon la formule du maître, qui est Vamé^
liorcUion morale, tnteliectUêHe et physique dé la classe
la plus nombreuse et la plus pauvre. L'industrie doit
occuper le premier rang, parce que c'est elle qui fournit
les moyens de donner satisfaction à tous les besoins et à
tous les désirs des hommes : la classe des travailUurs ,
sur laquelle repose l'existence de la société, a donc be-
soin d'être affranchie de l'esclavage où la retiennent les
débris de l'organisation féodale et la puissance des ban-
quiers ou capitalistes. Cette importance accordée à l'in-
dustrie a fait donner au saint-simonisme le nom d'^o^e
tndtutrialiste. Saint-Simon fut un adversaire de la doc-
trine de la libre concurrence; il regrettait les corpo-
rations. — Les saint-simoniens furent accusés de prê-
cher la communauté des biens et la communauté des
femmes; mais les chefs de la secte protestèrent énergi-
quement : « Le système de la communauté des biens
s'entesd universellement du partage égal entre tous les
membres de la société, soit du fonds lui-même de la
production, soit du fruit du travail de tous. Les saint-
simoniens repoussent ce partage égjal de la propriété ,
qui constituerait à leurs yeux une violence plus grande,
une injustice plus révoltante que le partage inégal qui
s'est effectué primitivement par la force des armes, par
la conquête. Car ils croient à l'inégalité naturelle des
hommes, et regardent cette inégalité comme la base
même de l'association, comme la condition indispensable
de l'ordre social. Ils repoussent le système de la commu-
nauté des biens ; car cette communauté serait une violer
tlon manifeste de la première de toutes les lois morales
qu'ils ont reçu mission d'enseigner, et qui veut qu'à Va-
venir chacun soH placé s^on sa capacité et rétribué
selon ses csuvres. Mais, en vertu de cette loi, ils deman-
dent Vabolilion de tous les privUéges de naissance, sans
exception, et par conséquent Vctbolition de Vhéritage, le
pins grand de ces privilèges. Ils demandent que tous les
instruments du travail , les terres et les capitaux qui
forment ai^jourd'hui le fonds morcelé des propriétés par-
ticulières, soient exploités par cusociaiton et hiérar-
chiquement, de manière que la tâche de chacun soit
l'expression de sa capacité, et sa richesse la mesure de
ses œuvres. Les saint-simoniens ne viennent porter at-
teinte à la constitution de la propriété qu'en tant qu'elle
consacre pour quelques-uns le privilège de l'oisiveté,
c.-à-d. de vivre du travail d'autrui ; qu'en tant qu'elle
abandonne au hasard de la naissance le classement social
des individus Le christianisme a tiré les femmes de
la servitude; mais il les a condamnées pourtant à la su-
baltemité, et partout, dans l'Europe dirétienne, nous les
voyons encore frappées d'interdiction religieuse, poli-
tique et civile. Les saint-simoniens viennent annoncer
leur affranchissement définitif, leur complète émancipa-
tion, mais sans pour cela abolir la sainte loi du mariage.
Us demandent, comme les chrétiens, qu'un seul homme
soit uni à une seule femme; mais ils enjetgnent que
l'épouse doit devenir l'égale de l'époux, et que, selon la
grâce particulière que Dieu a dévolue à son sexe, elle
oit lui être associée dans l'exercice de la triple fonction
du temple, de l'État, et de la famille; de manière qu#
l'individu social , qui. Jusqu'à ce Jour, a été l'homme
seulement, soit désormais l'homme et la femme. »
Le saint-simonisme n'a eu aucune puissance comme
religion ; il n*a pas non plus trouvé une bonne formule
d'organisation sociale. Mais ses critiques ont du moins
attiré l'attention sur plusieurs plaies de la civilisation
moderne, à savoir, la misère du plus grand nombre con-
trastant avec l'opulence de quelques privilégiés, la pro*
priété aspirant au monopole, l'héritage retournant av
système de la mainmorte et de la substitution, l'oisive;
des élus de la fortune. II a réhabilité le travail et le grand
principe de la capacité; il a suscité des questions dont la
solution doit désormais préoccuper les publicistes et les
Souvemements. Son influence est incontestable sur les
ivers socialismes de nos jours, qui ont tant gémi sur les
souffrances des travailleurs et poursuivi le capital d'une
haine si ardente. V. Socialisvb , Comvunismb. B.
SAINTZ, vieux mot qui désignait les cloches*
SAISIE, voie d'exécution forcée que la loi met à la dis*
position des créanciers, et qui leur permet de mettre
sous la main de la Justice les biens meubles ou immeu-
bles de leurs débiteurs, et de contraindre ceux-ci à l'exé-
cution des obligations qu'ils ont contractées. Il y a pour*
tant des objets insaisissables (V. ce mot). Les saisies
varient suivant la nature et l'importance des biens saisis ;
on distingue : 1* la saisie-^arrét , au moyen de laquelle
le créancier arrête aux mains d'un tiers les effets et de-
niers appartenant à son débiteur, et s'oppose à ce que
remise lui en soit faite. Le payement fait par le tiers ,
au mépris d'une saisie-arrêt régulière, l'expose à payer
deux fois. Les sommes arrêtées entre les mains des dé-
positaires doivent être versées à la Caisse des dépôts
et consignations [Code de Procédure, art 561 et suiv. ) ; —
2^^ la xaifts-6raiiaon, qui permet au créancier muni d'un
titre exécutoire de saisir les fruits pendants par racines
appartenant à son débiteur, et d'en opérer la vente
pour s'indemniser à due concurrence lorsqu'ils seront
parvenus à leur maturité; elle ne peut être faite que
dans les six semaines qui précèdent l'époque ordinaire
de la maturité. La vente doit être faite un dimanche
ou un Jour de marché (/bûi., art. 626-635); — 3« la
saisie conservatoire , qui donne le droit au créancier,
même dépourvu de titre, de faire saisir les effets mobi-
liers de ses débiteurs, avant qu*une décision Judiciaire
soit intervenue, à la condition de s'y faire autoriser i)ar
le président du tribunal de comkierce; — 4** la saisie*
exécution ou saisie mobilière , an moyen de laquelle le
créancier porteur d'un titre exécutoire peut faire saisir
et vendre les meubles corporels de son débiteur, et se
faire payer sur le prix; elle doit être précédée d'un com-
mandement fait un Jour an moins avant l'exécution du
Jugement (arU 583 à 625); — 5* la saisie foraine, exercée
même sans titre, avec la permission du président du tri-
bunal de première instance, on du juge de paix, et sans
commandement préalable, sur les effets d'un débiteur
forain, trouvés dans la commune qu'habite le créancier;
— 6* la saisie-nagerie, en vertu de laquelle un proprié-
taire ou principal locataire fait vendre, après Jugement
de validité, les objets nantissant les lieux par lui loués,
et sur lesquels l'article 2102 du Code Napoléon lui ac-
corde un privilège; — 7^ la saisie immobilière, qui
permet au créander, après des formalités de commande-
ment, de transcription et autres préparatoires, d'expro-
prier les immeubles appartenant a son débiteur, et de se
faire payer sur le prix. Elle a été réglementée a novo par
la loi du 2 Juin 1841 ; — 8* la saisie des rentes^ qui ar-
rête aux mains du débiteur les arrérages échus ou à
échoir d'une rente, et permet d'arriver à l'adjudication
publique du droit d*en percevoir les arrérages ; — 9° la
saisie-revendication , au moven de laquelle un créan-
cier prétendant avoir des droits de propriété, de posses*
sion ou de gage sur une chose possédée par un tiers, la
met sous la main de la Justice, jusqu'à ce qu'il ait été
statué sur le mérite de sa prétention (art. 826 et suiv.).
V. Roger, TVotté de la saisse^rrét, 1837,in-8*;Lacbaixe,
Traite de la vente des immeubles par expropriation
forcée, 1820, 2 vol. in-8<*; Paignon, ComÊnentasre théo-
rique et pratique sur les ventes judiciaires de biens tm-
meubles, 1841, 2 vol. in-8*; E. Persil, Commentaire de
la loi du 9 juin 4841 sur les ventes judiciaires de biens
immeubles^ 1842, in-8*'t Ghauvean, Cod£ de la saisit
SAL
1608
SAL
inmotnlièn, 1843, 2 yoI. in-8°; F. Berriat Saint-Prix, I
Manuel de la saisie immobilière, 1855, in-8°; BressoUes,
Explication de la loi du 24 mai 48S8, contenant les tno-
difications au Code de Procédure civile en matière de
saisie immobilière, Toutoase, 1858, iD-8<*; Grosse et
Rameau, Commentaire ou eooplication de la loi du
21 mai 4858, 2 vol. ia-S»; Ollivier et Mourlon, Com^
mentaire de la loi portant modification du Code de pro-
cédure sur les saisies immobilières, 1858, in -8*'; Piogey,
Commentaire de la loi du 21 mcÀ 4858 sur la saisi» tm-
mobilière, 1858, iQ-8<*; Seligman et Paul Pont, Eayplir'
cation théorique et pratique de la loi du 21 mai 4858 sur
les saisies immobilières , 1859, iD-8<*. R. d'E.
SAISIE, en matière de Douanes, arrestation que les pré-
posés, et autres auxquels le droit en a été conféré, font des
marchandises à regard desquelles les lois sur les impor-
tations, exportations et entrepôt ont été violées. Toute
feusse déclaration dans la aualité ou Tespèce de la mar-
chandise pour éluder un droit de 12 fr. et au-dessus,
toute importation illicite ou tout débarquement sans per-
mis de produits donnant ouverture à un droit de 3 fr.
au moins, peuvent entraîner la confiscation. Un déficit
dans le nombre déclaré, une omission au manifeste, ne
sont passibles que d'une amende. L*administration des
Douanes peut transiger sur les procès résultant des con-
traventions.
SAISINE, terme de Droit; c'est le fait d'être saisi d'une
chose, c'est-à-dire la possession de cette chose. On dis-
tingue la saisine de droit et la samntf de fait. La première
est attachée par la loi à certaines situations légales;
ainsi, celle d'héritier légitime , par opposition aux en-
fants naturels , au conjoint survivant ou à l'État^ qui
doivent se faire envoyer en possession par Justice des
biens laissés par le défunt; — celle des héritiers à ré-
serve, par opposition aux légataires, même universels,
qui doivent leur demander la délivrance des biens lé-
gués; lorsqu'il n'y a pas d'héritiers à réserve, le I^taire
universel a la saisine; — celle d'exécuteur testamen-
taire, mais seulement au cas où elle leur a été donnée
par le testateur. La saisine de fait suppose une possession
réelle ; ainsi, en matière d'action possessoire. V, Simon-
net, Histoire et théorie de la saisine héréditaire dans les
transmissions de biens par décès, 1851, in-8o. R. n'E.
SAISONS (Les), figures allégoriques auxquelles les
Anciens ont donné des attributs rappelant chaque saison
de l'année. Le Printemps est couronné de fleurs, et tient
par la main un chevreau, ou trait une brebis ; VÉté, cou-
ronné d'épis, tient d'une main un faisceau d'épis, et de
l'autre une faucille; V Automne a des grappes de raisin
dans les mains, ou un panier de fruits sur la tête; V Hi-
ver, couvert de vêtements épais, tient d'une main des
fruits secs, de l'autre des oiseaux aquatiques, et auprès
de lui est un arbre dépouillé de verdure. V, au Suppt,
SALADE , casque. V. notre Dictumnaire de Biogra-
phie et d*Histoire.
SALADERO, nom qu'on donne, dans l'Amérique du
Sud, à des abattoirs privés, appartenant à des particu-
liers ou à des compagnies.
SALADINB, cotte df'armes du xn' siècle, ainsi appelée
sans doute parce qu'on l'avait empruntée aux Musul-
mans commandés par Saladin.
SALAIRE, en latin salarium (de soi, sel; parce que
dans l'origine les Romains payaient avec du sel), prix
du travail Journalier de l'ouvrier, et en général de tous
les gens de service. Le Code Napoléon accorde pour le
Î payement des salaires' un privilège sur les meubles et sur
es immeubles pour l'année échue, et pour ce qui est dû
de l'année courante; l'action se prescrit par 6 mois.
L'Économie industrielle n'envisage dans le salaire que
le prix de la main d'œuvre : elle a constamment en vue
la réduction de ce prix, parce qu'elle ne se préoccupe
que du débit des produits et de l'abondance des béné-
fices, sans nul souci des agents du travail. II en est au-
trement de l'Économie politique, dont l'objet est la pros-
périté sociale, et par conséquent la meilleure répartition
possible entre tous des avantages sociaux. Elle s'inquiète
sans doute aussi de la multiplicité croissante des pro-
duits, mais en même temps de la facilité de vivre pour
ceux qui concourent à les faire naître ; elle recherche les
moyens par lesçfuels les travailleurs pourront vivre dans
une certaine aisance. C'est là un d^ plus grands pro-
blèmes sociaux. Il est manifeste qu'un trop grand nombre
d'hommes peuvent être condamnés à une sorte d'escla-
vage, si l'équité et la pleine liberté du contrat n'ont pas
présidé à la distribution des salaires ; (pie le salarié est
souvent dominé par le besoin, et obhgé de subir de
dures conditions ; que le salaire peut manquer on être
insuffisant. La seule difl'érence qui sépare alors le salarié
de l'esclave, c'est que nul ne peut par sévices le con-
traindre au travail ou punir sa résistance ; mais du
moins l'esclave est toujours nourri par son maître. As-
surer par une bonne législation la suffisance constante
des salaires, et faire en sorte que, dans les circonstances
difficiles, les mœurs suppléent à ce que n'auraient pu
faire les lois, voilà la question.
On a peine à comprendre que de nos Jours on ait pu re-
muer et passionner les travailleurs avec un non-sens et
une chimère aussi absurde que Végalité des salaires.
Évidemment l'homme qui travaille plus ou mieux qu'un
autre a droit à une rémunération plus forte; ou bien il
faudrait que toute idée d'équité fût bannie de la terre.
L'égalité des salaires signifiait sans doute, pour ceux qui
la réclamaient, l'élévation du salaire général au niveau
des gains de certains privilégiés.
Le taux des salaires est nécessairement variable, comme
le sont les prix de la matière première, le loyer des ma-
chines et des ateliers, et les frais généraux. Lorsque la
main d'œuvre est abondante, la fabrication peu active,
ou les produits peu recherchés, le salaire tend à la baisse ;
lorsque les produits sont demandés et les bras insuffi-
sants, la main d'œuvre est à la hausse. C'est là une des
lois les plus simples du mécanisme industriel. Ceux qui
ont voulu faire intervenir l'autorité dans la fixation du sa-
laire se sont étrangement trompés : toute liberté doit
exister à cet égard, et le débat est entre l'ouvrier et le
fabricant. Comment, d'ailleurs, fixer le taux du salaire?
Serait-il le même pour toutes les professions? L'incapa-
cité et la paresse seraient donc récompensées comme le
talent et l'activité? L'inhabileté ne vivrait-elle pas aux
dépens du mérite? A moins 'de la tyrannie la plus com-
plète, toute fixation de salaire serait vaine : on a fait bien
des tarifs en Angleterre, et aucun n'a subsisté ; les mi-
nimum et les maximum fixés durant les crises sont tou-
jours devenus inutiles au bout de quelques Jours. Enfin
la fixation des salaires serait nuisible à l'ouvrier : car, en
haussant les salaires, on augmente naturellement les prix
de vente; par suite, on diminue les achats, par consé-
quent la production elle-même. — V, Mac-CuUoch, Essai
sur les circonstances qui déterminent le taux des sa-
laires et la condition des clauses laborieuses, en anglais,
Edimbourg, 1826, in-12 ; Senior, Trois leçons sur le taux
des salaires, en anglais, Londres, 1830, in-8<'; Carrey,
Essai sur le taux des salaires, en anglais, Philadelphie,
1835, in-8°; F. Schmidt, Recherches sw la population,
les salaires et le paupérisme, en allemand, Leipzig, 1835,
in-8<>; J. Gamier, Étude sur les profits et les salaires,
Paris, 1848, in-8o.
SALAMALEC (de l'arabe salam alat kom, la santé
soit avec vous), mot par lequel on désigne la salutation
des Orientaux, accompagnée de révérences profondes.
SALAMANDRE, reptile dont les Anciens avaient fait
l'attribut du feu, parce qu'on prétendait qu'elle pouvait
vivre au milieu des flammes. Les poètes la prirent aussi
pour emblème de l'amour.
SALAMANIE, flûte turque.
SALAMINIENNE (Galère). ; V. notre Dictionnaire de
SALARIA (Voie). ) Biographie et d'Histoire.
SALE, mot désignant autrefois une soucoupe sur la-
quelle on présentait divers objets à la reine de France.
SAUCET, SALCIONALou SAUCIONAL (du latin salix,
saule), un des Jeux de flûte de l'orgue. On le fait quel-
quefois à doubles lèvres.
S ALIENS reliants des). V. Axamsnta.
SALIÈRE. V. au Supplément.
8AL1QUË (Loi). V. notre Dict. de Biogr. et SBisioire
SAUSBURY (Cathédrale de). Cette église, bâtie de
1220 à 1260, c-à-d. à l'époque la plus brillante de l'ar-
chitecture ogivale, est considérée comme la plus par-
faite de l'Angleterre. Elle se distingue, en effet, par la
régularité du plan, l'unité de style, la noblesse et la I^è-
reté de la structure, l'élégante simplicité des détails, et
l'harmonie de toutes les parties. Son plan est en forme
de croix archiépiscopale , c.-à-d. à double transept. Sur
le milieu des transepts est une tour bâtie au temps d'E-
douard III : elle est formée de deux étapes, distingués
par des fenêtres que surmontent de petites arcades c4
des frontons d'ornementation ; aux angles se dressent
quatre clochetons aigus, qui dissimulent avec art le pas-
sage du carré à l'octogone, et une pyramide assez élancée,
dont les longues lignes sont interrompues par des orne-
ments d'un bon effet, atteint une hauteur de 123 met.
au-dessus du sol ; la pointe de la flèche est inclinée de
SAL
1609
SAL
0*^,50 environ. La façade occidentale de l'église est ans»i
remarquable par sa belle ordonnance que par la délica-
tesse des ornements. Trois portes un peu pauvres, et ,
au-dessus, trois hautes fenêtres, puis un pignon aigu;
aux angles, des tourelles surmontées de clochetons; le
tout , orné d'arcatures ogivales : tels sont les traits dis-
tinctifs de cette façade. L'intérieur de la cathédrale de
Slisbary a 138™ de longueur, 24<" de largeur, 25'" de
Sauteur ; le premier transept est long de 65™, le deuxième
de 44"*,20, et leurs extrémités sont carrées, ainsi que
rabside. Tout est d'une froideur inexprimable, et cette
froideur provient de Tabsence complète de sculpture.
L'édifice est éclairé par 365 fenêtres superposées en trois
rangées, mais dont les vitraux peints ont été détruits au
XVI* siècle ; on n*en a replacé de nos Jours que dans le
chœur, où Ghantrey a sculpté les tombeaux du premier
comte de Salisburv , qui vivait au xut* siècle, et d'un
comte de Malmesbury. — Sur le flanc méridional de
l'église, depuis le grand portail Jusqu'au premier tran-
sept, se développe un beau cloître carré, de 55™ de côté.
Au milieu du côté oriental de ce cloître, un vestibule
élégamment orné donne accès dans une salle capitulaire
octogone, de 17™,67 de diamètre, éclairée par huit larges
et hautes fenêtres. Cest un monument incomparable. Au
centre de la salle s'élève un çilier composé d'un faisceau
decolonnettes, comme soutien apparent des nervures
ramifiées de la voûte. Une arcade est creusée à la partie
inférieure des murailles, avec une plinthe saillante en
pierre, où les chanoines s'asseyaient sur des tapis ; des
sujets tirés de l'Ancien Testament y ont été sculptés en
bas-relief. La salle contient une table dont se servait le
chapitre , reposant sur huit colonnettes que relient de
gracieuses arcades ogivales : elle est un intéressant spé-
cimen du mobilier du xiu* siècle. V. John Britton, The
^istory and antiquitiês ofthe cathsdral church of Scdis-
bury, L/)ndres 1^14. B.
SAUTE (de l'italien salita, montée, saillie). Ce mot,
quelquefois employé dans la langue de l'architecture,
désigne un genre de montée très-usité en Italie : c'est
une pente plus ou moins douce, coupée, de mètre en
mètre environ, par une traverse en pierre haute de 0 à 10
centimètres, et à bord très-arrondi. Elle forme une es-
pèce de contre-marche, dont le giron est en pente très-
marquée Cest une tradition de l'Antiquité, car on en a
trouvé à Pompéi. Lessalites tiennent la place de marches.
On en fait quelquefois de très-longues, et elles ont cet
avantage que les chevaux et autres bêtes de somme peu-
vent y monter, et même les carrosses , moyennant un
cahot à chaque changement de çiron. A Rome, la montée
du Capitole moderne est en salite. C'est également une
salite, mais en lima^n, qui conduit sur la plate-forme
de la ooloesale basilique de S^- Pierre. Les salites sont
toujours construites en briques de champ, rangées en
épi ; le cordon seul est en pierre. On les appelle aussi
escaliers à cordons. C. D— t.
SALIVI (Idiome^, un des Idiomes indigènes de l'Amé-
rique da Sud, parlé par les Salivis, sur les bords du haut
Orénoque, entre ses affluents le Meta et le Guaviare. Il
est plein de sons nasaux. Le P. Anisson en a rédigé la
Grammaire.
SAIXB (du celtique salât maison), pièce plus ou moins
grande d'une habitation privée, d'un palais ou d'un éAi-
flce public, destinée à un usage déterminé. Il y a des
salles à manger, des salles d'armes, do bal, de concert,
d'audience, de réception, de billard, de bain, etc.
SALLE GAPITULAIRB. V, CAPITULAiaE.
SALLE D*ASILB. V, ASILE.
salle' DE POLICE, chambro d*arrêt pour les militaires
coupables de fautes légères. Elle fait partie de la caserne,
et est garnie d*un lit de camp. On n'y entre pas |K)ur
moins de 24 heures , et l'on ne peut y rester plus de
15 jours. Les détenus reçoivent la nourriture de l'ordi-
naire, sortent pour faire leur service et aller deux fois par
Jour à l'exercice, et sont astreints aux corvées de propreté
dans les quartiers.
SALOMON (Enfants de). V, Covpagnoniiagb.
SALON , pièce destinée dans une maison à recevoir la
compagnie. On a donné le nom de Salon à la galerie où
se font à Paris les expositions périodiques des Beaux-
Arts, et à l'exposition elle-même, parce que les exposi-
tions n'avaient lieu primitivement que dans le ffnnd
salon carré du Louvre. Les membres des Académies de
peinture et de sculpture avaient alors le droit exclusif
d'y exposer leurs ouvrages.
SALONIKA , costume oriental. V. Aba.
ftALOUNG. f^. Challouno.
SALPÊTIUÈRB (La), hospice de Paris, destiné à
voir les femmes indigentes, infirmes ou âcées de 70 ans«
et en outre au traitement des folles. Fondé en vertu d'un
édit du 27 avril 1656, on y renferma d'abord les men-
diants, les vagabonds et les femmes de mauvaise vie.
Les constructions premières furent élevées par Libéral
Bruant; d'autres corps de bâtiment ont été ajoutés à me-
sure que le besoin s'en faisait sentir. L'église est bâtie
sur un plan circulaire qui a près de 20 met. de diamètre,
et couverte d'un dôme octogone : l'intérieur est percé de
8 arcades, qui communiquent à 4 nefs, de 23 met. de
longueur, et à 4 chapelles ; ces nefs et ces chapelles, dis-
posées en rayons, ai>outissent au centre de l'église, où
est l'autel principal.
SALTARELLE (du latin saltare, danser), danse ita-
lienne, d'un mouvement rapide et toujours croissant , que
le danseur accompagne avec sa guitare. Elle est à trois
temps ou à six-huit; le premier temps de chaque me-
sure est fortement marqué, quoique commençant par
une brève. On la danse au 3' acte de la MuetU ds Por^
tici, grand opéra de Scribe et G. Delavigne, musique
d'Auber.
SALTATION , nom donné par les anciens Romains à
l'art qui comprenait la danse, la pantomime, l'action
théâtrale et l'action oratoire.
SALTIMBANQUE (de l'italien saltare in banco, sauter
sur des tréteaux). Jongleur, bateleur, charlatan, qui fait
ses exercices et débite ses drogues sur les places pu-
bliques. Les saltimbanques doivent être munis d'une
permission de la police. A Paris, d'après une ordonnance
du 30 nov. 1853, ils ne peuvent exercer avant 8 heures
du matin , et doivent se retirer avant 6 heures du soir
du i*' octobre au l*' avril, avant 9 heures du l*' avril
au l*' octobre; il leur est interdit de se ûdre accompa-
gner d'enfants au-dessous de 16 ans.
SALUBRITÉ PUBLIQUE, soin que l'Administration
{>rend de la santé publique. Elle comprend notamment :
es dessèchements de marais; la police sanitaire; la
voirie; la surveillance des halles et marchés, avec celle
des boutiques à comestibles et liquides, principalement
des boulangers, bouchers, marchands de vins, limona-
diers, épiciers, pharmaciens et confiseurs; l'arrosement;
le balayage ; l'enlèvement des immondices, des neiges et
glaces. Le gouvernement prescrit les travaux généraux
de salubrité qui intéressent les villes ou communes, et
les dépenses en sont supportées par chacune d'elles. L'ad-
ministration munici|>ale prend les mesures nécessaires :
d'abord pour assainir l'air, afin de prévenir ou d'arrêter
les épidémies, les épizooties, les maladies contagieuses;
ensuite pour l'observation des règlements concernant le
nettoiement des voies publiques, les inhumations, les
fosses d'aisances, le curage des mares, puits et puisards,
l'enfouissement des animaux morts, et la suppression des
com^tibles g&tés ou corrompus. Elle impose des obliga-
tions spéciales pour l'établissement des manufactures et
ateliers insalubres ou incommodes; elle surveille les
échaudoirs, les salles de dissection et lieux d'exposition
de cadavres ; elle interdit d'élever, sans autorisation, dans
certaines localités, des volailles, lapins, pigeons, porcs,
vaches , chèvres et moutons. A Pans , aux termes d'une
ordonnance de police du 23 nov. 1823, les maisons doi-
vent être tenues en état de propreté, pourvues de tuyaux
et cuvettes, afin que les eaux aient un écoulement con-
venable sur la rue ou dans un égout ou puisard ; les loges
de portier bien ventilées ; les latrines sans odeur, avec
tuyau d'évent et sol imperméable; le sol des écuries éga-
lement imperméable, et les fumiers enlevés chaque jour;
les chambres louées en garni ayant au moins 14 met
cubes par personne. Il est défendu de Jeter ou déposer
dans les cours aucune matière pouvant entretenir l'hu-
midité ou donner des exhalaisons ; le sol des ruisseaux
doit être propre ; enfin toutes les précautions d'assainis-
sement et d'intérêt de santé publi(|ue font le complément
d'une bonne salubrité. Les infractions aux règlements lo-
caux concernant la salubrité sont punies d'amende, et ,
en cas de récidive, d'emprisonnement , par les art. 471 ,
474 et suiv. du Code pénal. V. Monfalcon et Polinière,
Traité de la scUubriU dans les grandes villes, Paris, 1840,
in-8* ; A. Tardieu , Dictionnaire d'hygiène jmblique et de
salubrité, Paris, 1852-54, 3 vol. in-8^ T.
SALUT ou SALUTATION, action de saluer, par res-
pect , bienséance ou amitié. Chaque peuple a sa manière
de saluer. La plupart des Européens se découvrent et
s'inclinent; les Anglais, et surtout les Américains, se
pressent la main sans se découvrir ; les Turcs s'inclinent
en portant la main droite sur le cœur, ou en élevant les
SAL
1610
SAN
mains au-dessus de la tète; les Japonais Ment un pied de
leur pantoufle; les habitants des Philippines prennent la
main ou le pied de celui qu'ils veulent honorer, et s'en
frottent le visage ; certains nègres d'Afrique s'abordent
en se serrant trois fois le doigt du milieu ; les Lapons et
les Otaitiens se posent le nés l'un contre l'autre, etc. —
Les paroles de salutation ne sont pas moins vanées que
les gestes. Les anciens Grecs disaient en s'abordant:
Travaille 9t prospère, ou Occûpe-^toi awc stÂCcès. Les Ro-
mains disaient : Combien valez-vous? ou Quelle est votre
force? ou Sois robuste et bien sain {vale et saive). Les
Prauçais disent : Comment vous portez-vous? ou Com-
ment allez-vous? Un Espagnol et un Italien ne manquent
pas de dirQt: Comment vous tenez-vous debout? {Como
estad? — corne sta?). On dit en anglais : Comment
faites-vous faire? {how do you do?); en allemand : Com-
ment vous trouvez-vous? {wie beflnden sie sich?)\ en
hollandais : Comment se tient votre manger? (smakelijk
eten?), ou Comment vous voiturez-vous? {hoc waart
uwe?). Les Hébreux disaient: La paix soit avec vous!
et les Turcs : Le salut ou la santé soit sur vous! — Il y
a aussi des formules employées dans les lettres, dans les
préambules des lois et ordonnances, des lettres patentes,
des mandements, des bulles, etc. Ainsi, les Romains
commençaient leurs lettres par cette formule de salut :
S. D. [salutem dicit.,.). En tête des actes émanés de l'au-
torité royale en France, on lisait ; A tous ceux qui ces
présentes verront, salut. Sous la 1** République, les
lettres se terminaient par ces mots : Salut et fraternité.
Autrefois, dans l'office divin , les Épltres et les Préfaces
portaient les mots : Au lecUur, salut.
Le salut militaire est un témoignage de respect ou
d'honneur rendu par les militaires isolés ou en troupe
au souverain, aux princes, aux grands dignitaires de
l'Etat, aux officiers, aux décorés, etc. Oo distingue le
salut des armes, le salut du drapeau, le salut de Vépée,
le salut à feu, le salut sans armes {V, Militaires —
Honneurs). — Dans la Marine, les vaisseaux qui se ren-
contrent, ou qui passent devant quelque place, saluent,
soit par le pavillon et les voiles, soit par le canon. Les
coups de canon se tirent alternativement d*un bord et de
l'autre. Lorsque le salut a lieu entre égaux, il se rend
en nombre pareil; si celui qui salue est inférieur, le su-
f»érieur rend quelques coups de moins. Les bâtiments de
'Etat, salués par ceux du commerce, rendent ordinaire-
ment le tiers (F. l'ordonnance du 31 oct. 1827}. B.
SALUT, dans le langage de la Religion, félicite étemelle
qui attend le juste, mort en état de gr&ce. C'est un dogme
que nous ne pouvons obtenir le salut que par Jésus-
Christ, et que c'est pour nous le procurer qu*il est venu
sur la terre. La maxime : Hors de l'Eglise, point de salut!
s'applique, d'après les meilleurs théologiens, non à tous
les hommes en général , mais à ceux qui , ayant eu con-
naissance de la vraie doctrine, n'ont pas voulu la suivre.
SALDT, en termes de Liturgie, ensemble des prières qui
se chantent après Compiles, ou dans un office spécial
du soir, et qui se terminent par la bénédiction du Saint-
Sacrement.
SALUT d'or, monnaie d'or frappée en France à la fin du
règne de Charles VI, et qui valait 15 sous tournois ou
environ 11 fr. 41 c. Elle portait l'empreinte de la Vierge
recevant la Salutation angéliqi^.
SALUTATION, terme de Diplomatique. V. Diplôme.
SALUTATION ANGl^LiQUE, prière adressée à la S*« Vierge,
et composée : 1** des paroles que l'Évangile met dans la
bouche de l'ange Gabriel , quand il annonça à Marie le
mystère de l'Incarnation {Ave, Maria, etc.) ; 2« de celles
que proféra Elisabeth, lorsqu'elle reçut la visite de Marie
IBenedictu tu.,.) ; 3<* de celles que l'Église emploie pour
implorer l'intercession de la Mère de Dieu {Sancta Ma-
ria, etc.;. Grégoire I*' décida que cette prière serait ré-
citée par les prêtres, le 4* dimanche de l'A vent, à l'ofTer-
toire de la Messe; depuis le xi" siècle, elle est devenue
commune aux laïques. V. Angélus.
SALDTATORluM, nom donné autrefois h une sorte de
sacristie des églises, où les prêtres entendaient les affaires,
discutaient les causes, et où se tenaient même des sy-
nodes. On y venait scàuer celui qui allait officier.
SALVATION, ancien terme de Pratique, désignant un
écrit en réponse aux arguments de la partie adverse.
SALVE , décharge de coups de canon, en l'honneur de
quelqu'un et pour le saluer, ou pour la célébration d'une
fête, ou pour annoncer une bonne nouvelle.
SALVE REGINA, c-à-d. en latin Salut, reine; an-
tienne chantée en l'honneur de la Sainte- Vierge, depuis la
Pentec6t« Jusqu'à TAvent, et attribuée soit à Hermann
Contract, soit à Pierre de Monsoro, évèque de Compos-
telle, soit k Adhémar de Monteil, évèque du Puy.
SAMARITAIN (Idiome), idiome araméen qui se forma
en Palestine, dans le pays de Samarie, lorsque les Cu-
théens, venus du centre de l'Asie après la conquête du
royaume d'Israël par les Assyriens, se furent mélangés
avec les Hébreux laissés par les vainqueurs dans le pays.
On y trouve naturellement un grand nombre de mots et'de
formes hébraïques. L'alphabet samaritain a été composé
avec les antiques caractères, et Ton n'y rencontre pas de
signes représentatif^ des voyelles. Quelques familles de
la Syrie moderne descendent des Samaritains; elles pos-
sèdent en leur dialecte le Pentatwque, des livres de
liturgie, et un grand nombre de chants religieux. V, Uhle-
mann , Institutiones linguœ Samaritanœ, Leipzig, 1837,
in-S<>; Gesenius, De Pentateuchi Samaritanorum origine.
Halle, 1815, in-4^; Winer, De versionê Pentateuchi sa»
maritanâ, Leipzig, 1817, in-S».
SAMARITAINE (La), pompe et ch&teau d'eau, con-
struits de 1603 à 1608 à Paris, sur le côté occidental du
Pont- Neuf, d'après les plans d'un Flamand appelé J. Lint-
lan, pour alimenter d'eau le Louvre et les Tuileries. Le
nom venait d'un groupe en bronze doré, placé sur la fa-
çade, et représentant Jésus et la Samaritaine près d'un
vase d'où tombait une nappe d'eau. Toute la construc-
tion, maladroitement restaurée en 1775, ornée d'une hor-
loge et surmontée d'un carillon, fut démolie en 1813.
SABIA-VÊDA. V. Véda.
SAMBUE, vieux mot désignant la selle particulière aux
femmes pour se tenir à cheval.
SAMBÛQUE (du latin sambucus, roseau), sorte de
flûte des Anciens, ainsi appelée parce qu'elle fut primiti-
vement en bois de sureau. On donna le m-ime nom au
trigonê ou cithare triangulaire, et à une trompette dont
les tuyaux mobiles s'emboîtaient les uns dans les autres.
SAMDCQUE, engin de guerre des anciens Romains. C'était
une sorte d'échelle qu'on appliquait aux murailles d'une
place assiégée, et dont la forme rappelait, selon Plu-
tarque, celle de l'instrument de musique qui portait le
même nom.
SAMINE , vaisseau propre aux Samiens. Plutarque dit
qu'elle avait le corps fort large, la proue très-basse, et
néanmoins qu'elle était propre à la haute mer et légère à
la course.
SAMNITE (Idiome), un des idiomes de Tandenne
Italie. Il paraît avoir eu de grands rapports avec l'osque
(K. ce mot), puisqu'au dire de Tite-Live (X, 20), les Ro-
mains envoyOTent, pour espionner l'armée samnite, des
gens qui connaissaient Vosque,
SAMOYÈDE (Idiome), un des idiomes ouralo-altalques.
Il a été étudié par Castrèn, dont le& travaux, traduits de
l'allemand, sont insérés dans les Nouvelles Annales des
voyages, 5« série, et qui a publié une Grammaire sa-
moyède, S»-Pétersbourg, 1854, ln-8«.
SAMPOGNE ou SAMPUNIA, sorte de musette (K. ce
mot).
SAN-BENITO. V. Ghbmisb ardentb.
SANCIR, en termes de Marine, couler à Ibnd sous
voiles et à l'ancre, en plongeant par l'avant.
SANCTIFICATION (du latin sanctus, saint, et fUri ,
r^evenir), action et effet de la GrAce qui nous rend purs
et saints. Par sanctification des dimanches et des fêtes,
on entend leur célébration suivant la loi et l'intention de
l'Église.
SANCTION (du latin sandre, établir). Sanctionner une
loi, c'est appliquer les peines ou décerner les Técom-
penses attachées à la violation ou à Tobservation de cette
loi. I^ sanction ne s'adresse pas à la raison, m^ à la
sensibilité; elle n'est pas le principe même de la loi. L.i
sanction est nécessaire pour retenir l'homme ou Pencou-
rager; de là la pénalité introduite dans la législation
civile, comme une sanction indispensable aux prescrip-
tions légales. Au-dessus de cette sanction des lois posi-
tives, il y en a une supérieure, qui est celle de la loi mo-
rale. Celle-ci a diverses sanctions : 1* la satisfaction
morale et le remords; 2* les conséquences de nos actes;
3** l'opinion ; mais toutes ces sanctions, imparfaites et in-
suffisantes, appellent la sanction religieuse, qui repoeê
sur l'immortalité de l'&me. R.
SANCTUAIRE ( du latin sanctuarium), nom que Ton
donnait à la partie la plus secrète et la plus intime da
Temple de Jérusalem, au Saint des Saints, où l'on con*
servait l'Arche d'alliance, et où le grand-prêtre seul pou-
vait pénétrer. On l'applique également à la partie des
temples païens où se trouvait la statue du Dieu, et, dans
les éidiaes catholiques, à la portion da chœur, ordinaî-
SAN
1611
SAN
rement soi élevée, qui contient le maltre-autel , et que
ferme une balustrade ou cancel.
SÂNCrUS, c.-à-d. Saint, mot latin par lequel com-
mence la partie de la messe qui suit immédiatement la
Préface. Le Sanctus parait avoir été usité dès le ii* ou le
m' siècle. On le trouve désigné chez les Grecs par les
noms d'Epinicion (chant de victoire] et de Trisagion
(trois fois saint).
SANDALE, chaussure. V. Solba, dans notre Diction-
naire d» Biographie et d'Histoire.
SANDALE, bateau de transport des côtes de la Barbarie.
SANDAPILA, cercueil grossier dans lequel on empor-
tait les morts pauvres chez les anciens Romains.
SANDJÂK. K. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
SANDWICH (Idiome), idiome des habitants de Tarchi-
pel Sandwich. II n*a que deux pronoms personnels, et
deux particules pour déterminer le temps de Taction,
Tune pour le futur, Tautre pour le passé.
' SANDYX, tunique lydienne, du tissu le plus transpa-
rent, et teinte avec le suc de la sandyx, plante de cou-
leur rouge de chair.
SANGLIER. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
SANGUINE, crayon fait avec du fer oligiste ou héma-
tite rouge, et qui est d*un grand usage dans le Dessin. On
voit au musée du Louvre des dessins à la sanguine par
Haphaôl , le Corrége, le Dominiquin , Pierre de Cortone,
Carlo Maratta, Vouet, Van der Meulen, Rigaud, Largii-
lière, Lesueur, Watteau, Bouchardon, Carie Vanloo,
Pierre, Bourher, Cochin , Greuze, Demarteau , etc.
SANHÉDRIN. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
SANKHYA (Philosophie). V. Indie!«ne (Philosophie).
SANKO , instrument de musique des indigènes de la
Sénégambic. C'est une boite étroite, dont la partie supé-
rieure est couverte d'une peau de crocodile : 8 cordes sont
tendues sur un chevalet et attachées à un bâton forte-
ment entaillé qui est fixé à l'extrémité de la boite.
SANNIO, bouffon de théÂtre chez les anciens Romains,
celui qui cherchait à exciter le rire par des gestes gro-
tesques, des mouvements ridicules, des contorsions du
visage et du corps.
SANSCRIT (d'un mot composé qui signifie <ichevé,
parfait)^ antique idiome de l'Inde, désigné par les pre-
miers Européens qui en eurent connaissance sous les
noms de hanscret et de sanscredam, où l'on reconnaît le
nom véritable, et sous ceux de nagrou et de grantham,
indiquant la langue écrite, la langue des livres. Des sa-
vants ont prétendu qu'on ne parla jamais le sanscrit, et
que c'était une langue artificielle, créée par des ministres
du culte et pour leur usage particulier : mais il est im-
possible d'admettre qu'une langue dont on trouve des
traces dans toutes les langues dites Aryennes ou indo-eu-
ropéennes {V, ce mot) ait été une création capricieuse
de quelques individus. Le sanscrit a été parlé dans des
temps très^nciens sur les bords du Gange par les ado-
rateurs de Bràhma. Ce n'est pas qu'il y ait pris nais-
sance; mais il fut apporté par cette race puissante qui
habitait l'antique Arie, sur le revers de l'Hindou-kho, et
qui a laissé de ses lointaines migrations, en des direc-
tions diverses, tant de témoignages irrécusables dans une
foule d'idiomes. Apporté par des hommes plus avancés
en civilisation que les habitants primitifs de l'Inde, il
régna de la môme façon que plus tard le latin dans les
pays où l'imposa la conquête romaine. Quant à l'époque
où il cessa d'être employé comme langue vulgaire, on ne
saurait la préciser : des idiomes issus de lui l'ont rem-
placé {V, Indiennes — Langues), et il n'est plus aujour-
ci'liui que la langue de la religion, des lois et de la haute
littérature.
Le sanscrit est la langue la plus achevée de toute la
famille, celle qui satisfait le mieux à toutes les exigences
du langage et qui offre le plus de ressources pour l'ex-
pression de la pensée. Sa iprammaire, complexe en appa-
rence, est en réalité d'une simplicité étonnante et qui
laisse loin derrière elle celle du latin, du grec et de l'al-
lemand. Synthétique par excellence, le sanscrit exprime
avec une aisance pleine de clarté les idées les plus abs-
traites et les raisonnements les plus subtils; c'est la
vraie langue philosophique des hommes.
C'est aussi une dos langues les plus poétiques, par la
facilité qu'elle a de composer des mots, et par la valeur
pittoresque de ses expressions. Le génie synthétique de
la race iuyenne ne se montre nulle part aussi nettement,
et DOttB pouvons attribuer à cette qualité des Aryas de
rinde non-seulement la facilité qu'ils ont communiquée
à leur langue d'exprimer dans une même phrase et par
de simples changements dans la fin ou le commence-
ment des mots un grand nombre d'idées avec leurs rap-
ports, mais encore la puissance d'esprit avec laquelle ils
ont composé leurs grandes épopées, non moins éton-
nantes par leur ensemble et par l'unité de Tintérêt que
par la variété infinie des détails. C'est à ce même génie
synthétique des Aryas de l'Inde qu'il faut attribuer, avec
le caractère si éminemment philosophique de leur langue,
la grandeur de composition qu'ils ont mise dans leurs
conceptions religieuses et philosophiques. 11 est à remar-
quer, en effet , qu'ils n'ont emprunté rien à personne, et
que, séparés, dès l'origine, du tronc commun , ils ont b
eux seuls donné à leur langue et aux idées qu'elle a ex-
primées toute la perfection qui s'y trouve.
Les racines de la langue sanscrite sont monosylla-
biques, et, contrairement à ce qui s'observe dans les
langues sémitiques, les voyelles importent ici au sens
des radicaux, qui finissent en effet, en prenant des va-
leurs primitives différentes, tantôt par une consonne,
tantôt par une vovelle. Le nombre des radicaux ne s'élève
pas à plus de 1,700; mais des mots simples on peut for-
mer un nombre indéfini de mots composés. Ce n'est pas
seulement dans l'identité des radicaux que consiste l'ana-
logie du sanscrit avec les langues indo-européennes; les
mêmes rapports existent dans la structure grammaticale.
Par exemple, le sanscrit présente l'a privatif, les aug-
ments et les redoublements du grec, les créments du
latin ; il a, comme le latin et le grec, trois genres gram-
maticaux; il a trois nombres comme le grec. Sa déclinai-
son offre huit cas (deux de plus qu'en latin, le locatif et
l'instrumental ); toutefois, au nombre duel, les cas se
réduisent à trois. Les adjectifs ont, aussi bien que les
substantifs, les flexions casuelles. Comme en latin et en
grec, la terminaison du nominatif singulier est ordinai-
rement la voyelle a pour le féminin, et une nasale pour
le neutre; Vs est la finale la plus ordinaire du génitif. La
conjugaison sanscrite présente 6 temps, 6 modes et 3 voix.
L'indicatif a 3 présents et 2 futurs; les modes subjonctif
ou optatif, impératif, précatif, conditionnel et infinitif
n'ont qu'un seul temps, le présent. A l'actif les verbes
réguliers présentent, selon les différents grammairiens,
de 7 à 14 conjugaisons. Le passif n'a qu'une seule forme,
mais il faut y rattacher les verbes causatifs, désidératifs,
fréquentatifs, qui en dérivent. La conjugaison n'admet
qu'exceptionnellement l'emploi d'un auxihaire, qui est le
verbe substantif contracté. Nos prépositions sont souvent
remplacées en sanscrit par les flexions casuelles des
noms; cependant cette langue abonde en particules de
toute sorte. Le sanscrit est U^s-libre dans la construction
grammaticale; il offre dans la prose une grande variété
de tours de phrases, et dans la poésie une grande ri-
chesse de mètres. On l'écrit avec un alphabet qui lui est
propre, et dont la forme actuelle n'est pas très-ancienne,
le aévanàgari {écriture des dieux)^ alphabet qui n'a pris
son {Lspect actuel que du vu* au x' siècle, et qui com-
prend 14 voyelles et diphthongues, 2 caractères exprimant
la nasalité et l'aspiration finsdes, et 35 consonnes : il n'y
a ni ponctuation dans les phrases, ni séparation entre les
mots, et la connaissance de la langue fait seule distin-
guer où chaque mot commence et où il finit. L'ortlio-
graphe est toujours d'accord avec la prononciatiou.
Les linguistes reconnaissent dans le sanscrit deux états
différents, qui correspondent aux deux périodes princi-
pales de son histoire. Les Védas, les monuments les
plus anciens de la littérature indienne, s'éloignent beau-
coup des ouvrages postérieurs qui se rapportent à Tàge
classique de cette littérature. Le style en est irrégulier,
presque informe; les mots manquent souvent de dési-
nence grammaticale, les phrases sont courtes, et la con-
struction très-simple ; on ne trouve pas cette recherche
de l'euphonie, qui a été poussée si loin dans la suite,
cette précision de formes oui distingue le sanscrit litté-
raire; certains mots dans les Védas n'ont pas le même
sens que dans la langue classique; enfin les particules
séparaibles ^ sont plus fréquentes.
Les principales Grammaires de la langue sanscrite sont
celles de Colebrooke (Calcutta, 1805), de Carey (Seram-
pour, 1806), do Ch. Wilkins (Londres, 1808), de H.-P.
Forster (Calcutta, 1812), de Wilson (Londres, 1815), de
W. Yates (Calcutta, 1820), d'Othmar Franck (Wurï-
bourg, 1823), de Fr. Bopp (Beriin, 1827), de W. Pricc
(Londres, 1828), de Desgranges (Paris, 1845-1848, 2 voL
in-8°), de Benfcy (Leipzig, 1852-54, 2 vol.), d'Em. Bur-
nouf et Leupol (Nancy, 1800). Le P. Paulin de SainI»
SAN
1612
SAR
Barthélémy en a puDlié une sous le titre de Sidharubam,
seu Grammatica iamscrudonica (Rome, 1790, in -4°),
ainsi qa*un Dictionnaire intitulé i4mar£Utn/ia (Rome,
1798, in-4«). V. aussi Yates, Saniscrit Vocabulary, Cal-
cutta, 1820, in-4°; Bopp, Glossarium sanscritum, 1828-
30 ; Wilson, Sanscrit and English Dictionary, Calcutta,
1832, in-4»; Loiseleur-Deslongchamps, Amarakocha, ou
VocabulairB fTAmarasinha, Paris, 1837, in-8<> ; Em. Bur-
nouf et Leupol, Dictionnaire fonscrit-français, Nancy,
1863; Wilkins, Radicals of the sanskrita language,
Londres, 1815, in-4^; Fr. Rosen, Radices sanscritœ, Ber-
lin, 1827, in-8<>; Monier Williams, English and samcrit
dictumctry, Londres, 1851 ; Westergaard, Radices linguœ
sanscritœ, Bonn, 1841, in-8o; Colebrooke, On the san-
scrit and pracrit langtuiges, dans le tome VU des Re-
cherches asiatiques^ et On sanscrit and pracrit pœtry,
dans le tome X; Bopp, Sur le système de la conjugaison
en sanscrit, en allemand, Francfort-sur-Mein, 1816, et
Analyse comparée du sanscrit et des langues qui s*y rap-
portent y en allemand, 1824, in-4®; Othmar Frank, Chres-
tomathie sanscrite, Munich, 1821-22; Fr. Adelung, Es^ai
sur la littérature sanscrite, en allemand, S*-Pétersboarg,
1837, in-8<'; Sroutabodha^ traité de prosodie sanscrite,
composé par K&lidàaa, traduit en français par Lancereau,
1855, in-8«.
SANS-SOUCI (Ch&teau de). V. Potsdav.
SANTAR, nom qu'on donne en Corse aux nuraghes
{V. ce mot),
SANTÉ (La), déesse allégorique des Anciens, fllle
d'Esculape. Les Grecs la nommaient Hygie, et les Ro-
mains Salus. On la représentait sous la figure d'une belle
jeune fllle assise sur un trôoe, tenant d'une main une
patère, de l'autre un serpent, et couronnée d'herbes mé-
dicinales.
SANTé (La), nom donné quelquefois aux établissements
placés dans les ports de mer ]M>ur recevoir les individus
soumis à la quarantaine (K. ce mot). Les chaloupes au
moyen desquelles ces établissements communiquent avec
les navires suspects sont appelées bateaux ou canots de
santé,
SAini (Conseil de). V. Conseil db sant^, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d* Histoire,
SANTiS fCorps de), corps charp;é du service médical dans
l'armée. Il se compose de Médecins et de Pharmaciens
{V, ces mots), assimilés aux grades de la hiérarchie mi-
litaire ainsi qu'il suit : ,
Inspecteur • . Général de brigue.
Principal de l'* classe. . . . Colonel.
Principal de 2* classe .... Lieutenant-colonel.
Major de 1*^ classe Chef de bataillon.
Major de 2* classe Capitaine.
Aide-major de 1** classe. . . Lieutenant.
Aid&-miJor de 2* classe . . . Sous-lieutenant.
SANTé (Maison de). V, Maison db sant^.
SANTé (Officier de). V, Officier db sant^.
SANTUGO ou S«-JACQUES DE COMPOSTELLE (Ca-
thédrale de). Un ancien sanctuaire de l'apôtre S^ Jacques,
saccagé par les Sarrasins, forme au-dessous de la cathé-
drale actuelle une sorte de crypte. L'église a été com-
mencée en 1082. La façade principale présente an har-
monieux ensemble, à quatre corps, couverts à profusion
de statues et d*omement8 : les tours se terminent en
coupoles à 67 met. de hauteur. Une partie d'une des fa-
çades latérales est soutenue par une console d'une grande
hardiesse, figurant une coquille que l'on regarde comme
un chef-d'œuvre d'architecture. L'intérieur de l'édifice
est en forme de croix latine, et mesure 75 met. de long
sur 57 de large; 25 chapelles sont pratiquées dans le
pourtour. Une coupole s'élève sur le transept, à une hau-
teur de 33 met. ; en trayers on a suspendu, à deux arcs
en fer, une poulie qui sert dans les solennités à manœu-
vrer un colossal encensoir. La chapelle de S^-Christophe
contient une custodia d'or et d'argent. Joli temple de
1'",50 de haut, richement ciselé, liais ce qu'il y a plus
curieux dans la cathédrale de Santiago, c'est l'autel oe la
crypte, surmonté de la statue de S^ Jacques Qu'environ-
nent quatre rois agenouillés, et d'une pyramide où Ton a
représenté le saint mettant les Maures en déroute; le tout
est d'une grande magnificence, sinon d'un goût bien pur.
A la cathédrale est attenant un cloître carré, de 39 met.
de côté, dont on recouvre les murailles, le jour de l'oc-
tave de la Fête-Dieu, avec des tapisseries très-précieuses.
SANTIR, instrument de musique des Arabes, fait à peu
près dans la forme du q&non {V, ce mot). Les cordes
sont en métal ; on les frappe avec de petites baguettes.
SANTONS. V, ce mot dans notre Dictionnatre de Bw-
graphie et d'Histoire,
SAOULE, jeu. V, Soulb.
SAPE (de l'italien zappa), action de saper, c.-4-d. de
creuser sous les fondements d'un édifice pour le faire
tomber. Dans le Génie militaire, la sape est tout travail
de pic, de pioche et de hache, ayant pour objet d'ouvrir
des tranchées, des chemins couverts, des boyaux qui con-
duisent les assiégeants sur le corps de la place qu'ils
attaquent. Si les feux de l'assiégé ne peuvent produire
que peu d'effet, on se contente d'un parapet élevé leste-
ment avec des gabions; c'est la sape volante. Dans queU
aues positions, il faut deux parapets, et alors la sape est
aouble. On nomme sape ouverte celle qui se fait sous
terre. La tête de sape est le point le plus avancé du che-
min qu'on creuse, et, par conséquent, le plus exposé :
c'est un poste d'honneur.
SAPÈQUE, monnaie de Chine, le même que le each
{V, ce mot). On en a fait en fer, en plomb, ou en alliage
de cuivre, de plomb, d'étain et de zinc. Les sapèques sont
percées d'un trou carré, qui sert à les enfiler par cen-
taines.
SAPEURS, y. ce mot dans notre Dictionnaire de BiO"
graphie et d* Histoire,
SAPHIQUE (Vers), hendécasyllabe grec et latin com-
posé de 5 pieds et demi, dont le l'*" est trochée, le 2* tro-
chée ou spondée, le 3* trochée, le 4* et le 5* ïambes. La
strophe sapbique se compose de trois de ces vers suivis
d'un adonique. On trouve quelquefois en grec après le
3' pied une césure, ^ui est plus fréquemment obser-
vée par les poètes latins. Horace en met souvent une
après le 2* pied. Lorsque le sens unissait étroitement le
mot final d'un vers avec le commencement du vers sui-
vant, une élision pouvait avoir lieu d'un vers à l'autre;
quelquefois même un mot était commencé à la fin d'un
vers et terminé au suivant :
RômtUa gêna daté rèmquè prôlèmquè
Et dècûs ômnè,
_ HOKAOB.
Thrâdlô bâchante mUgis sûb intër-
lûriïâ vèntô.
In.
P.
SAPHIR, pierre précieuse, de couleur bleu d'azur.
Dans la Symbolique, le saphir représente l'espérance
chrétienne, la sainte contemplation. 11 était aussi l'image
de NephUli, de S^ Paul, et de S^ André.
SAPIENCE (du latin sapientia, sagesse, science), mot
du vieux langage, qui n'est plus guère usité que dans
cette phrase : Le pays de Sapience, pour désigner la Nor-
mandie. L'Université de Rome est ordinairement appelée
Collège de Sapience, à cause de cette inscription latine
placée sur l'édifice qu'elle occupe : Initium sapientiœ
timor Domini,
SAPIENTIAUX (Livres). V. ce mot dans notre Diction^
naire de Biographie et d Histoire,
SAPINE, embarcation légère en usage pour descendre
quelques rivières.
SAQUEBUTE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^Histoire,
SARABALLA ou SARAfiAllA, large et long pantalon
que portaient les Parthes et quelques autres Asiatiques,
SARABANDE , danse espagnole à 3 temps, sorte de
menuet dont le mouvement est grave et sérieux. L'air
se compose de deux parties, chacune de 8 mesures, et
doit être exécuté avec rapidité et énergie; on le chantait
autrefois avec des paroles en s'accompagnant de casta-
gnettes. Cette danse fut, dit-on, introduite en France par
une comédienne espagnole, Zarabanda, qui loi a laissé
son nom.
SARAPIS, tunique des anciens rois de Perse, d*an
rouge pourpre, et décorée par devant d'une large bande
blanche.
SARBACANE (de l'italien cêrbottana?)^ tube droit de
verre, de métal, de sureau, etc., qui sert à lancer quel-
que petit projectile en soufiflant fortement. Les enfants
tirent avec des sarbacanes sur les oiseaux. Sous Henri III
et Henri IV, les courtisans se prirent d'une belle passion
pour ces engins, avec lesquels ils Jetaient des dn^ées au
nez des passants. On a employé des sarbacanes pour
lancer des flèches et le feu gr^eois. Dans l'Ile de Bornéo,
on ne parle au roi que par des sarbacanes.
SARCOPHAGE (du $rec sarx, gén. sarkos, chair, et
phaghéin, manger), nom aue l'on donna, selon Pline, à
une pierre de la Troade dont on faisait des œiwieila, à
SAT
1613
SAT
cause de ses qualités caustiques et de la propriété qu'elle
avait de dévorer promptement les chairs. Par extension,
CD Tapplioua à toute espèce de tombeau ou de cercueil.
Les sarcopiiages qui nous sont restés de rAntic{uité por-
tent quelquefois la statue du personnage quMls conte-
naient. Leur capacité est très-variable : u en est qui ont
reçu les corps de deux époux ; au iri* siècle de notre ère,
on en fit de grandeur colossale, capables de contenir
toute une famille. Les bas-reliefs qui les décorent offrent
tantôt des compositions de pure fantaisie, tantôt des
traits de la Fable ou de Thiatoire, ou bien des allégories
morales, des figures relatives à la profession ou aux goûts
du défunt. Les chrétiens des premiers siècles ont con-
servé Tusage des sarcophages en pierre, et les ont dé-
corés de sujets pieux, tirés presque toujours de TAncien
et du Nouveau Testament. Pour les llSdernes, le mot
sarcophage est la partie d*un monument funèbre qui
reprâente le cercueil, sans renfermer les restes du mort.
SARDE, agate rouge&tre, transparente, d'une teinte
approchant de celle du feu. Dans la Symbolique, elle
figure la foi et le martyre. Elle est aussi l'image de Ru-
ben, à cause de la publicité de ses scandales représentée
f^ar la lumière. Comme on supposait qu'elle épouvantait
es b^tes féroces, elle figurait aussi S*- Barthélémy, ter-
rible au démon.
SARDE (Idiome), idiome dérivé du latin, et bien distinct
ie l'italien. On le parle dans les montagnes de 111e de
Sardaîgne, tandis que l'italien est employé dans les villes
et pour les actes administratifs. On y distingue trois dia-
lectes : celui de Capo Suso au N., celui de Capo Giusu
au S., et Varborese, parlé au centre, dans l'ancienne
Arborea.
SARDON YX, pierre composée de sarde et d'onyx, d'une
teinte brillante, pourpre, nuancée de plusieurs couleurs,
et rappelant le plus souvent celle des grains de la gre-
nade. Dans la Symbolique, elle figure la charité vive, que
désigne aussi ce fruit; sa variété de nuance rappelle la
fécondité de cette vertu. Le Cabinet impérial de Vienne
possède un sardonyx d'une dimension très-rare et d'une
pureté remarquable : c'est un camée gravé sur les deux
faces; d'un côté est une aigle, de l'autre le buste de l'em-
pereur Auguste. Il existe aussi une apothéose d'Auguste
sur sardonvx au Cabinet des antiques de la Bibliothèque
impériale de Paris.
SARISSE, arme. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
SARRASINE. l. Herse.
SARRASiNB (Architecture). K. Arabe.
SAS. F. Canal et Écluse.
BASSE, pelle creuse munie d'une anse ou d'une poi-
gnée, et qui sert à jeter Teau hors des embarcations.
SATE^ déesse suprémedu Ciel dansl'ancienne Egypte,
épouse de Kneph^et mère d'Anouké.EUe rappelle Isis
8 ar les cornes qui garnissent souvent sa coiffure, formée
e la partie supérieure du pschent; d'autres fois ces
cornes sont remplacées par Tépervier étendant ses ailes
sur la tête de la déesse, que couronne la tiare royale.
SATIRE, composition littéraire qui se rattache au genre
didactique, à la poésie dont l'objet est d'enseigner direc-
tement aux hommes le bien, le beau et le vrai. Elle fait
la guerre à tous les travers de l'esprit et du cœur, diri-
geant tour à tour ses attaques contre les individus et
contre les hommes en général, contre la société tout en-
tière et contre les différentes classes qui la constituent.
Sœur de la poésie comique, elle lui emprunte ses armes,
l'ironie, le ridicule, l'invective, et une observation impi-
toyable; et, sans monter sur la scène, elle poursuit le
même but et traite les mêmes sujets. Morale, elle raille
sous toutes leurs formes les faiblesses ou les vices inhé-
rents à la nature humaine; religieuse, elle démasque
l'hypocrite, et, aveugle dans ses reproches, s'en prend
parfois à Rome des excès dont celle-ci ne peut mais ;
littéraire, elle attaque l'ignorance, la sottise et le mauvais
goût, et revendique les droits du bon sens et de la rai-
son ; poliUque,éi\e prend à partie les chefs d'État et leurs
ministres, les institutions et les lois; personnelle, elle
apostrophe l'homme en particulier qui éveille ses co-
lères, ac^ourd'hui Domitien, demain Messaline, un jour
Pradon, une autre fois l'abbé Cotin. Son langage est varié
comme ses sujets ; elle prend et parcourt tous les tons,
depuis linâulgent badinage d'Horace jusqu'à l'indigna-
tion amère, hyperbolique, d'un Gilbert ou d'un André
Chénier. — Quels sont les droits de la satire à gourman-
der môme le ?ice, à persifler et à régenter le monde?
Nous n'avons pas à considérer ici ce que les législateurs
en ont pensé, ni les mesures qii'ils ont prises contre ses
excès, dans Tintérèt de la société, ou pour complaire soit
à un despote ombrageux, soit à des privilégiés jaloux de
leur dignité collective. Il y a longtemps que le comique
Névius payait de sa liberté le plaisir d'avoir décoché
quelques épigrammes contre les Hétellus, et que Cassius
Sévérus expiait en exil le crime d'avoir médit de la per-
sonne sacrée d'Auguste. Il est clair €[ue le poôte exerce à
ses risques et périls sa veine sarcastique. Mais la critique
peut se placer à un autre point de vue gue le législa-
teur; elle est plus accommodante et plus libérale. Elle
ne voudrait pas que l'auteur satirique consacr&t son ta-
lent à la satisfaction de sa haine personnelle; que la
vengeance, l'intérêt, ou quelque autre passion basse et
méprisable, lui mit la plume à la main ; que sa Muse»
insouciante de la mesure et des convenances, viol&t sans
scrupule ce qui, chez tous les hommes, mérite et com-
mande le respect, c-à-d. les droits de la liberté et de la
dignité humaines; que sa conduite enfin donnât lieu de
retourner contre lui ses propres traits. Mais elle respecte
en lui, comme dans tous les écrivains, les droits de la
pensée et de Tinspiration ; elle comprend que l'indigna-
tion lui dicte ses vers (facit indignatio versum)<t de
même que l'enthousiasme fait les poètes lyriques ; elle
considère que le génie, le caractère et l'intention de l'au-
teur, le choix du sujet, la puissance même des travers ou
des vices attaqués, sont ou peuvent être la meilleure jus-
tification de la satire ; qu'après tout, l'opinion publique
demeure maltresse de prononcer entre l'agresseur et ses
victimes, que ses arrêts ne sont point aveugles, ni tou-
jours favorables au poète, et qu'ainsi la nécessité de
complaire à ce tribunal suprême et de mettre les rieurs de
son côté n'est pas seulement la première condition du
succès, mais encore le frein le plus salutaire contre les
oublis de la Muse. — Il faut pourtant le reconnaître, la
satire a ses écarts; et si son utilité n'est pas contestable,
ses excès autoriseraient parfois le moraliste austère à lui
faire son procès. Assurément, elle rend des services .de
plus d'un genre : elle a réformé, par Boileau, la poésie
française ; dans l'ordre moral, elle nous ramène à rési-
piscence, en nous faisant rire des travers de notre voi-
sin, qui sont aussi les nôtres; et, comme l'a dit Boileau
{Art poétique, ch. II), elle
Venge rhnmble verta de la ricbeaae altl^re.
Et rhonnite homme à pied da ftqnln en litière ;
elle ch&tie du moins le coupable, quand elle ne l'amende
pas; elle marque comme d'un stigmate indélébile et dé-
nonce à la haine et au mépris de la postérité les turpi-
tudes d'une société corrompue, ou les débauches des
grands que leur puissance défend des insultes du pré-
sent. Mais cette punition a ses dangers. La crudité des
termes et l'énergie des peintures, quand la pudeur n'en
est pas effarouchée, risquent d'allumer l'imagination des
lecteurs, et il est à craindre dès lors qu'ils n'arrêtent
leurs regards devant certains tableaux du vice, moins pour
le prendre en aversion ou en horreur, que pour goûter le
plaisir coupable d'un spectacle qui flatte les mauvais
instincts de la nature humaine. Et c'est ainsi que le
poète va directement contre le but qu'il se proposait, et,
contre son attente , contribue à g&ter encore les cœurs
déjà malades, au lieu de les guérir et de les corriger.
Si l'on s'en rapportait au mot connu de Quintilien
{salira tota nostra est\ la satire serait d'origine ro-
maine, et les Grecs, créateurs des autres genres litté-
raires, eussent laissé du moins à leurs imitateurs la gloire
de découvrir celui-là. Mais le jugement trop absolu du
critique latin souffre diverses restrictions. Horace ra-
conte, à la vérité, que les premiers campagnards du La-
tium, une fois la moisson faite, célébraient la fin de leurs
travaux, en offrant un porc à la Terre, du lait à Silvain,
des fleurs et du vin au Génie qui nous rappelle la briè-
veté de notre existence ; puis, en vers dialogues, ils se
renvoyaient alternativement des injures et des bouffon-
neries, d'où les premiers poètes romains devaient tirer
la satire. De plus, le mot satire est un mot exclusive-
ment latin; il signifia d'abord la réunion de différents
fruits qu'on offrait à Gérés, ou bien un plat de différents
mets {satura, sous-ent. lanx). Quand Ennius entreprit
d'enrichir les chants rustiques des vieux laboureurs ro-
mains, et de les soumettre à une forme régulière et dé-
terminée, il divisa ses compositions nouvelles en plu-
sieurs morceaux, et donna à chacun son mètre propre.
De ce mélange de vers inégaux est sorti le nom que la
satire n'a plus cessé de porter. En ce sens, elle est toute
latine, et Just.-flo !e mat do Quintilien. Maïs, qu'on né-
SÂT
1614
SÂT
gUge un instant la forme et la dénomination particulières
Gue rimagination romaine s^est plù à lui appliquer, pour
I envisager dans ses caractères essentiels, la Grèce re-
prend ses droits d'ancienneté. Et d^abord, si dans la
satire on considère seulement Tinvectiye , les Grecs en
ont donné l'exemple : témoin Archiloque, dont les ïambes
poussèrent, au ctire de la légende, une fiancée et un beau-
père infidèles à se pendre de désespoir; témoin Simo-
nido d'AmorgoB, qui démontra, dans un pofime de 119
▼ers, que les femmes n*ont été créées que pour être le
fléau de l'autre sexe; témoin le Margiiàs, œurre d*un
auteur inconnu, mais citée maintes fois, et où les podtes
comiques, selon le témoignage d'Aristote, avaient trouvé
plus d'un personnage ; témoin enfin Théognis de Mé-
gare, qui, chassé de son pays par la faction démocra-
tique, maudissait, dans des vers pleins d'amertume et
de rage, la tyrannie de ses adversaires. Mais la satire
n'est pas renfermée dans l'invective : c'est même à la
condition d'en franchir les limites qu'elle a tout son
prix, et, pour ainsi dire, sa vraie dignité. Elle n'atteint
à la hauteur d'un genre littéraire qu'en s'élevant au-
dessus des personnalités, pour faire la leçon aux travers
et aux vices d'un siècle, d'un monde, de l'homme de
tous les temps. Elle s'imposa de bonne heure cette t&che,
.et la remplit sous deux formes distinctes : tantôt elle
mêla la prose à la poésie; tantôt elle se refusa ce mé-
lange, et ne parla qu'en vers. Un Grec encore inventa le
premier des deux genres, et lui laissa son nom ; c'est le
philosophe Ménippe, le héros des Dialogues de Lucien.
II avait composé, en prose mêlée de vers, 13 livres de
satires, où la plus haute morale, selon Cicéron, s'alliait
à beaucoup d'esprit et de gaieté. On n'en a rien con-
servé, mais elles ont eu leurs imitations célèbres : dans
l'Antiquité, les satires Ménippées de Varron , et le Sa-
tyricon de Pétrone; au xvi* siècle, la ScUire Ménippée,
2 m couvrit les Ligueurs de ridicule et acheva le triomphe
'Henri IV (K. MéNippés). L'autre genre, plus particu-
lièrement cultivé chez les Latins que chez les Grecs, a
Jour principaux représentants, à Rome, Lucilius, Horace,
uvénal et Perse* Lucilius n'a pas été flatté, du moins
comme artiste et versificateur, par Horace : celui-ci lui
reproche, et avec apparence de raison, des vers mal tour-
nés, bizarrement mêlés de grec et de latin, dictés à la
hâte, sans soud des règles de l'art et de l'harmonie, et
il le compare au torrent qui roule beaucoup plus de li-
mon que de pailiettds d'or. Mais il ne fait pas difficulté
do reconnaître que son prédécesseur osa le premier ar-
racher le masque brillant sous lequel l'hypocrite cachait
son hideux visage, et flageller de vers sanglants un Mé-
tellus ou un Lupus; il proclame que le vieux poète, dont
la haute naissance assurait l'impunité, n'eut d'^pirds
qn% pour la vertu et les amis de la vertu. Pour la cri-
tique, Lucilius possède encore, outre cette ressemblance
de caractère et d'intention morale avec le vieux Caton ,
son contemporain, un autre titre à l'estime publique et
au souvenir de la postérité : il fut un novateur. Il força
le grand vers, le vers épique, l'hexamètre majestueux, à
se plier au genre si familier de la satire, et traça ainsi la
route que ses successeurs ont suivie Jusque dans les
temps modernes. Il est regrettable que de 30 livres de
satires qu'il avait composa en différents mètres, 'il ne
reste que des fragments. — Horace, dans ses 18 satires
comme dans Je reste de ses œuvres, est tout d'abord ce
que Lucilius ne fut Jamais , un artiste consommé ; sous
sa plume industrieuse, l'hexamètre, assoupli et docile,
reproduit la prestesse, l'allure aisée et légère, la verve et
la variété de la conversation la plus spirituelle, et plu-
sieurs de ses petites pièces sont de véritables comédies ,
au même titre que certaines fables de La Fontaine. Au
lieu de s'indigner contre les débordements du siècle , et
de traîner dans la boue, au risque de s'y salir lui-même,
les vices de ses contemporains, il aima mieux, doux et
modéré qu'il était, ne voir (^ue le côté ridicule des choses,
et il fut gai et plaisant, mais non pas irritant et acerbe ;
il s'interdit le plus souvent les personnalités blessantes,
et, à part le débauché Nomentanus, un RufiUus trop par-
fumé, et un Gorgonius qui l'était trop peu, tous les Ro-
mains , et lui-même le premier, avaient droit de se r^
connaître dans les travers qu'il persiflait avec tant de
gr&ce piquante et tant de bon sens. Le lire lui-même est
le moyen le plus charmant de connaître tout ce qu'il y
avait de fin, d'attrayant et d'aimable dans cet esprit ex-
Suis. Pourquoi faut-il qu'il ait payé tribut à la corrup-
on du temps, et qu'il faille jeter un voile sur plusieurs
de ses expressions et de ses peintures? — Juvénal , au
rebours dliorace, fut tout indignation dans les Id dia-
tribes tour à tour générales et personnelles , mo^es et
politiques, qu'il a composées, « chronique privée d'une
époque dont Tacite a écrit l'histoire publique. » L« juge-
ment de Boileau {Art poétique, ch. ii) sur les qualités et
les défauts de son génie satirique demeure encore au-
jourd'hui le plus éloquent :
Jartfool, élertf dana 1m eiia de Téoole,
Poona Jnaquli Toxoès m mordante hyperboto;
Sea oamagea, tout pleine d'affreuaee véritéa,
étincellent pourtant de anblimea besatéa.
Perse l'avait précédé de queloues années : quoique!
fût mort à 28 ans, l'élève du philosophe Comutus, le
condisciple de Lucain, eut le temps d'écrire 6 satires, qui,
pour être d'unetobscurité proverbiale, peuvent se comp-
ter cependant parmi les inspirations élevées du Stoï-
cisme. Il n'appartenait qu'à une belle âme de trouver sur
les méchants ce fameux vers (Pers., Sat. 3, v. 38) :
Virtntem videent, intabeacantqve rellctâ,
« Qu'ils voient la vertu, et se dessèchent du regret de
l'avoir quittée. »
Citons enfin une contemporaine de Domitien, Sulpicia,
qui, pour venger les philosophes et son mari qu'un édit
avait chassés de Rome, composa contre le tyran une
satire au demeurant médiocre , et, au dernier siècle des
lettres latines, Claudien et ses invectives quelque peu
longues contre Rufin et Eutrope : ils terminent la liste
des satiriques romains.
Le genre reparaît et brille en France au xvi* siècle.
Mathurin Régnier et Agrippa d'Aubigné le représentent
alors avec honneur : Régnier, disciple ingénieux des An-
ciens et de la Pléiade, imitateur d'Horace et des Italiens
modernes, h la fois très-libre et très-vigoureux dans
quelques-unes de ses peintures, et, dans les autres,
d'une aimable nonchalance et d'une bonhomie qui n'ex-
clut ni la malice, ni la finesse ; ennemi de Malherbe, et
pourtant, par les grâces nouvelles de son style, l'un des
fondateurs de la poésie française ; — d'Aubigné, le fou-
gueux huguenot, l'auteur des sept diatribes intitulées TVo*
giques, né satirique, et qui le fut d'humeur et par besoin,
pour ainsi dire, beaucoup plus que par imitation de ses
contemporains et de l'Antiquité; « Juvénal du xvi* siècle,
dit M. Sainte-Beuve, âpre, austère, inexorable, Hérissé
d'hyperboles, étincelant de beautés, rachetant une vodesse
grossière par une sublime énergie, esprit vigoureux,
admirable caractère, grand citoyen. » — Au xvn* siècle,
la satire, sous la plume de Boileau, rendit aux lettres un
double service. Elle triompha d'abord du mauvais goût,
que n'avait pu vaincre Malherbe; elle renvoya aux Èpa-
gnols leur emphase, aux Italiens leurs pointes et leurs
iadeurs, et força les écrivains, comme le public, de rêve-,
nir au goût du naturel et du vrai. Elle ramena ensuite
les poètes au respect d'eux-mêmes, et leur donna des
leçons de dignité, qui n'étaient pas superflues à une
époque où les auteurs faisaient encore partie de la do-
mesticité des grands seigneurs, et où le prince de Condé,
dans un jour de colère , frappait avec des pincettes son
poète Sarrazin. — Mentionnons, dans l'âge suivant, les
PhilippiqueSf invectives sanglantes que La^nanfle-Cbanoel
composa contre le régent Philippe d'Orléans; les ïambes
d'André Chénier contre les proscripteurs de 1793, et les
satires de son frère Marie-Joseph ; mais laissons à Gil*
bert l'honneur d'avoir, dans ses deux pièces intitulées
le Dix-huitUme siècle et Mon apologie, porté dignement
l'héritage de Boileau. Mort trop tôt, et sans avoir eu le
temps d'épurer son goût, le malheureux champion des
croyances morales et religieuses, l'adversaire hardi de
Voltaire et de V Encyclopédie, eut les défauts de Juvénal
comme il en avait les qualités, et fut tour à tour sublime
et déclamatoire dans ses invectives contre le tout-puis-
sant parti des philosophes. — Le moment n'est pas veau
de juger en toute franchise et sans préjugé les produc-
tions des satiriques de notre temps. Les ïambes de
M. Barbier, tout en images matérielles et familières d'une
singulière énergie, ne méritaient peut-être nt la vogue
immense dont ils furent l'objet à leur apparition, ni le
discrédit où ils semblent être tombés depuis. MM. Bar-
thélémy et Méry se sont également signalés dans li
même genre, tantôt en collaboration, tantôt l'un sans
l'autre, par des diatribes morales et politiaues que l'ave-
nir appréciera.
L'esprit satirique n'est pas la satire ;1T l'a précédée,
et, depuis qu'elle est née, il n'a pas cessé d'inspirer ou
d'animer d'autres œuvres; les arts mêmes, autant q««o U
SAT
1615
SAT
littérature, en ont aubi Tinfluence. La liste serait longue
dos principales créations de l'esprit satirique à travers
les siècles, Thersite et la mésaventure de Mars et de Vé-
nus dans Homère ; la Pandore d*Hésiode ; tant de chœurs
des comédies d'Aristophane \ les Dialogues de Platon ,
où Socrate, des traits de sa malicieuse ironie, perce à
jour les travers des Sophistes ; les Caractères de Théo-
phi'ftste; les Dialogues de Lucien : voilà pour la Grèce;
— les vers Fescennios; les chansons des soldats derrière
le char des triompluiteurs ; les mimes ; certaines fables de
Phèdre; les épigrammes de llartial ; les romans, tels que
VAtiê d'or d'Apulée : voilà pour les Romains. — Au
moyen âge, les sirventes des Troubadours et les chan-
sons des Trouvères; certains Fabliaux pour ou contre les
femmes, les prêtres, les moines et les maris ; le Boman
de la Ros€ et le Roman du Renard; les légendes sur les
tours et les exploits du Diable ; les boutades de Villon ;
les sermons politiques contre les Armagnacs et les Cabo-
chiens; les Cent nouvelles nouvelles; et, sur le théâtre
naissant, les Clercs de la Basoche et l&s bottât;— dans les
temps modernes, le Gargantua de Rabelais, les Protnn-
ciales de Pascal, plus d'une fable de La Fontaine, les
Caractères et Portraits de La Bruyère, les Lettres Per-
sanes de Montesquieu, les Contes de Voltaire, V Ency-
clopédie , les romans de Diderot , et les Mémoires de
Beaumarchais; — depuis la Révolution, les Journaux, les
Pamphlets, les Chansons, les Parodies ; devant tant
d'exemples, que peut-on conclure, sinon que le rire est
aussi naturel à l'homme que l'admiration et l'enthou-
siasme, et que ces deux penchants vivront éternellement,
destina à se partager les œuvres humaines ? A. H.
SATISFACTION, dans le langage de la Religion, répa-
ration qu'on doit à Dieu ou au prochain pour Tin jure
qu'on leur a faite. C'est une peine temporelle que les pé-
cheurs pénitents s'imposent ou acceptent de leur con-
fesseur.
SATRAPE. i V. notre Dictionnaire de
SATURNE (Temple de). S Biographie et d'Histoire.
SATURNIEN (Vers), le plus ancien vers romain, et
qui domina jusqu'à ce qu*£nnius eût fait adopter le vers
héroïque des Grecs. Horace semble regretter fort peu cet
ancien rhythme, qu'il appelle horridus et rustums, et
même grave virus, à peu près comme nous dirions mau-
vaise drogue. Il se plaint qu'il reste encore de son temps
des vestiges de l'antique rusticité, faisant peut-être allu-
sion à Varron qui avait composé quelques pièces de ses
Satura dans ce vieux mètre. Dans sa forme la plus ré-
gulière, le saturnien présentait quelque chose comme le
dimètre iambique catalectique suivi d'un ithyphallique;
ainsi :
Dabnot I malarn | Metéltll H Nnrio poets.
Koyem f JotIb I concordlet || Alla sorores.
Vais les substitutions de pieds et les solutions de syl-
labes ou de pieds longs étaient fréquentes, comme dans
celui-ci où les spondées et les dactyles remplacent les
ïambes et les trochées :
Oblit|l RomI« loqailer Q •ont latins Ilogua;
et dans cet autre qui commence par un tribraque :
8ieill|eiiMi | paci8|clt Q obsides nt reddant
On vient de voir le spondée dans l'ithyphallique final ;
on y trouve aussi l'iambe et le dactyle ; et le trochée pou-
vait être admis dans la partie fambique. G*était donc un
rhythme confus, et il n'est pas étonnant que tous les
hommes de goût lui aient préféré les mètres réglés, riches
et gracieux de la versification hellénic|ue. — Les inscrip-
tions trouvées sur le tombeau des Scipions sont en vers
saturniens très-grossiers. On a cru découvrir des vers sa-
turniens dans l'oracle delphique rapporté par Tite-Live
(V, c. 16) à propos du siège de Véies. La fameuse prédic-
tion du devin l&rcius relative à la bataille de Cannes pa-
rait également composée de saturniens. V* Dunzer, De
vtrsu quem vocant Satwmino. Bonn, 1838, in-8<'. P.
SATYRES. V. notre Dictumnairê de Biographie et
d^Histoire,
SATYRICOI^, titre d*un ouvrage qui nous est arrivé
sous le nom de Pétrone, et qui semble avoir été composé
sur le modèle des Saturœ ae Varron et des Ménippées;
car il renferme des morceaux de prose et de vers entre-
mêlés dans la suite du récit. Cet ouvrage ne nous est
parvenu que par fragments, et nous en possédons peut-
être an plus la dixième partie. Il présentait sans doute
dans son enaeoible Ift peinture des mœurs dépravées de
la Rome impériale et des grandes villes de l'Italie, estrc
autres Néapolis. L'un des premiers fragments et le plus
long de tous est la description du souper de Trimalcion,
qui se fait en très-mauvaise compagnie et avec un fiiste
ridicule dont l'auteur s'est étudié à outrer l'extravagance.
Un autre fument d'un caractère plus neble est l'histo-
riette de la matrone d'Éphèse, rajeunie par La Fontaine.
Plus loin, on lit une correspondance entre deux amants,
Circé et Polyènos, qui ne manque pas d'élévation. Le
livre est parsemé d'observations et de critiques littéraires
mises dans la bouche d'un certain Eumolpe : le censeur
s'élève avec chaleur contre le faux goût des écrivains du
temps, contre l'abus des déclamations d'école; on y re-
marque surtout une satire de la Pliarsaie de Lucain. Et,
joignant l'exemple à la critique, Eumolpe trace l'esquisse
d'un poème sur la guerre civile. Ces vers, dont il nous
reste environ 300, n'ont pas les défauts reprochés à ceux
de Lucain ; mais ils n'ont pas non plus les fortes qualités
3ui distinguent le chantre de la Pharsale; ils ont moins
e coloris que d'élégance, moins de vigueur que de cor-
rection, et, s'ils se rapprochent davantage^ en général, du
bon goût, ils témoignent d'un talent moins original. Ce
morceau est ce qui nous reste de plus i]pmarquable dans
toute l'œuvre. La prose de Pétrone, souvent spirituelle,
rarement forte, presque toi^ours élégante, n'est pas sans
aflféterie; les expressions sont quelquefois bizarres et<
obscures; et quoique son style soit moins forcé que celui
d'Apulée, il s'en rapproche presque toujours plus que de
colui de Sénèque et de Pline le Jeune. Il a de la vivacité
et de Tan'ination, mais il vise trop au pittoresque, et
tombe ainsi maintes fois dans les défauts qu'il reproche
à ses contemporains. Enfin l'obscénité de la pensée, l'in-
famie du sujet, se communiquent trop souvent à la forme
elle-même. P.
SATYRIQUB (Drame), composition dramatique de l'an-
cien théâtre grec, tenant le milieu entre la tragédie et la
comédie, ou plutôt prenant alternativement le ton de
Tune et de l'autre. Dans l'origine on le joua seul ; mais,
vers le temps de la 2* guerre médique,on ne le jouait déjà
plus qu'après la représentation d'une trilogie tragique.
Le nom de Satyrique lui vint de ce que le chœur était
toujours composé de ces êtres mythologiques et bizarres
qui formaient le oortége du grotesque Silène, les SeUyres,
et qui tantôt exécutaient des danses vives et sautillantes,
particulièrement la Sicinnis, tantôt dialogiudent on chan-
taient avec les dieux et les héros : ceux-d étaient pris la
plupart du temps parmi ceux qui avaient joué un rôle
dans la trilogie. La scène olTrait des bocages, des mon-
tagnes, des grottes, des paysages de toute espèce. La ca-
tastrophe du drame n'était Jamais funeste, ou bien le
malheur qui arrivait à l'un des personna^ présentait
un côté ridicule qui lui ôtait toute ressemblance avec le
sérieux de la tragédie. Les traits, les bons mots, les bouf-
fonneries, y étaient admis comme dans la comédie aristo-
phanienne, mais sans aucune de ces mordantes person-
nalités qui la caractérisaient; dans certaines scènes
régnait un ton de dignité et d'élévation, qui contribuait,
par le contraste, à l'effet comique général. Le drame sa-
tyrique s'appelait aussi poésie satyrique, ou, par abrévia-
tion, une scUyrique {saturikè)^ un satyrique {saturikon)^
ou bien encore satyre {saturos) ou satyres (saturoï).
— Ce genre de représentation tné&trale prit naissance,
comme la tragédie et la comédie, dans les fêtes rurales
en l'honneur de Bacchus ; il fut longtemps grossier, et ne
revêtit quelque élégance qu'à dater de son introduction
dans les villes. On rapportait chez les Anciens qu'Arion
le premier imagina d'introduire les Satyres dans les
chœurs dithyrambiques, dans la composition desquels,
suivant Hérodote, il excellait Pratinas de Phlionte trans-
porta, dit- on, cette innovalolon en Attique, et donna
32 drames satyriques; après lui, son fils Aristias, puis
Chœrile, puis Eschyle, traitèrent avec un succès croissant
ce genre demi-burlesque. Sophocle et Euripide compo-
sèrent également des drames satyriques; mais, d'après
le témoignage des critiques anciens, que nous ne pou-
vons plus contrôler, puisqu'il ne nous est parvenu qu'une
seule pièce de ce genre, le Cyclope d'Euripide, ces deux
poètes restèrent inférieurs à Eschyle. Le sujet du drame
satyrique d'Euripide n'est autre que l'aventure tragi-co-
mique d'Ulysse et du Cyclope racontée au 9* chant de
VOayssée, et mise en dialogue par le poète athénien.
Ulysse y conserve partout le caractère séneux qu'Homère
lui a donné, sauf la scène où , comme dans YÔdyssée, il
dit au Cyclope s'appeler Outis (Personne); les rôles
bouflbns sont remplis par Silène et les Satyres, qui étaient
tombés aux nudns de Polyphême tandis qu'ils cherchaient
SAU
1616
SAX
à travers les mers leur mattre Bacchtis enlevé par des
pirates. Les rodomontades du pacifique Silène, qui se
vante d*avoir jadis pourfendu le terrible géant Encelade^
sa passion naïve pour la liqueur vermeille de son ancien
nourrisson, la poltronnerie des Satyres lorsque Ulysse ré-
clame leur concours au moment où il s'apprête à crever
Tœil unique du monstre à l'aide d'une tige d'olivier
taillée en pointe avec son épée et rougie au feu, tels sont
les éléments de gaieté de ce drame satyrique. — V. Ca-
saubon, De scUyrica Grœcorum poesi $t romana salira;
Spanheim, Préface de sa traduction franc, des Césars die
Julien f p. v-xx; M. Rossignol, Dissertation sur le drame
que les Grecs appelaient satyrique; M. Patin, Études sur
les tr<igiques grecs (1843), tome III, p. 443- i59; et sur
le Cyclope, M. Patin, ihid.^ pages 459-483. P.
SAUCÉES (Médailles), médailles de cuivre couvertes
d'une mince feuille d'argent.
SAUCIERS, ancienne corporation, dont les statuts da-
tent de i394. Au commencement du xvi* siècle, ils Joi-
gnirent à leur nom ceux de distillateurs, moutardiers et
jinaigriers. Les distillateurs formèrent une corporation
distincte en 1537.
SAUCISSON, ^ termes d'Art militaire, désigne : 1» une
espèce de fascine, confectionnée avec des troncs d'ar-
brisseau ou de grosses branches d'arbre, et servant dans
les sièges pour la construction des épaulements de batte-
ries ou pour réparer les brèches; %^ un sac de toile ou
de cuir, long et étroit, rempli de poudre, et dont on se
sert pour porter le feu dans la chambre ou le fourneau
d'une mine.
SAUF-CONDUIT, permission donnée par une autorité
publique d'aller dans un endroit, d'y séjourner pendant
un certain temps et de s'en retourner, sans craindre
d'être inquiété, une personne munie d'un sauf-conduit
est inviolable. On garantissait ainsi autrefois à un accusé
qu'il pouvait se présenter devant la justice, et qu'il ne
serait ni arrêté ni détenu préalablement. En Diplomatie,
un sauf-conduit est une sorte de passe-port remis aux
étrangers qui doivent se retirer d'un pays en guerre avec
le leur. Un chef d'armée peut accorder un sauf-conduit
à un dos ennemis qui, pour affaires privées ou pour cause
de santé, demande à passer sur le terrain qu'il occupe.
Dans le Droit commercial, on nomme sauf-conduit la
permission donnée par un tribunal à un failli ou à une
personne placée sous le coup de la contrainte par corps,
d'user provisoirement de sa liberté, moyennant une cau-
tion et certaines formalités (Code de Comm,, art. 466-
469, 490; Code de Procéd. civ,, art. 782).
SAUMOIER, vieux mot synonyme de psalmodier»
SAUNAGE (du latin sal, sel), fabrication et débit du
sel marin. Le faux saunage, ou débit du sel en fraude,
est sévèrement défendu : autrefois il était puni des ga-
lères.
SAUNERIE, ensemble des b&tîments, puits, fontaines
et instruments propres h la fabrication du sel.
SAUNIER, ouvrier qui travaille à faire le sel.
SAUT, terme d'Hydrographie. V. Cataracte.
SAUT, en termes de Chorégraphie, pas de ballet où l'on
élève tout le corps en l'air. Il est simple^ quand les jamb^
ne font aucun mouvement ; battu, quand les talons bat-
tent en l'air l'un contre l'autre une ou plusieurs fois.
SAUT DB CARPE, saut quo los baladii.s exécutent à plat
ventre en s'élevant et en retombant horizontalement.
SAUT DE LOUP, fossé quo l'on fait au bout d'une allée,
d'un parc ou d'un jardin, pour en défendre l'entrée sans
borner la vue.
SAUTE-MOUTON, jeu d'enfants qui consiste à sauter
de distance en distance les uns par-dessus les autres.
SAUTEREAU. V. Clavecin.
SAUTEUSE, espèce do valse à 2 temps et d'un mouve-
ment très- rapide, que, dans les premières années du
XIX" siècle, on faisait succéder à la valse ordinaire.
SAUTOIR, mot qui désignait anciennement un cordon
de soie ou de chanvre couvert d'une étoffe précieuse, at-
taché à la selle d'un cheval, et servant d'étrier. Dans le
Blason, il désigne une pièce honorable de l'écu, formée
de la bande et de la barre mises l'une sur l'autre de
manière à former l'X ou croix de S*-André. La dévotion
à S^ André a pu rendre le sautoir fréquent en armoiries;
la cause en serait aussi, dit-on, que, pendant les que-
relles des Armagnacs et des Bourguignons, ceux qui te-
naient le parti du duc de Bourgogne portaient des croix
de S'-André. — Un ordre de chevalerie se porte en sau-
toir, q\iand le cordon ou la chaîne tembe en pointe sur la
poitrine en soutenant l'insigne de l'ordre.
SAUVAGE (de l'italien selvaggio ou salvaggio, dériré
lui-même du latin silva, forêt), se dit des Sommes qid
vivent dans l'état de nature, au milieu des bois, sani
demeure fixe, sans lois, et s'oppose à civilisé. Parmi les
paradoxes que soutint J.-J. Rousseau au xviii* siècle, il
en est un qui consiste à placer l'état sauvage au-dessus
de l'état de civilisation, h considérer l'homme civilisé
comme un être dénaturé. liOin d'avoir été, créés pour la
vie solitaire, notre existence n'est complète que dans
l'état social. Le sauvage, toujours pressé par le besoin,
devient égoïste et féroc«; dans sa lutte contre les agents
qui l'entourent, il ne développe que ses forces physiques :
l'homme civilisé, assuré contre les premières nécessités,
aspire plutôt h perfectionner ses facultés intellectuelles,
et connaît les plaisirs moraux. Mieux et plus régulière-
ment nourri, il est même susceptible d'une puissance
musculaire supérieure à celle du sauvage. Celui-ci, aban-
donné dans ses maladies, délai^é dans sa vieillesse im-
prévoyante, exposé aux bêtes féroces et même aux coups
de ses semblables, est-il plus heureux que l'homme so-
cial, qui est préservé des maux extérieurs et entouré de
soins affectueux? Il n'a point, si l'on veut, à subir l'op-
pression ou l'humiliation de l'inégalité des rangs et de la
fortune; mais ces maux sont des accidents, et non l'es-
sence de l'état social. On ne saurait admettre, d'ailleurs,
que, pour se courber sous le joug des lois, l'homme ab-
jure toute indépendance et ne conserve plus aucune di-
gnité. Enfin, est-il plus glorieux pour l'homme de vivre
comme la brute, que d'atteindre par son intelligence aux
connaissances les plus élevées? La vie civilisée est si bien
supérieure à la vie sauvage, que les peuplades barbares
invoquent la science des Européens, redoutent leurs ar*
mes, étudient leur tactique, admirent les produits de
leur industrie. On pourrait donc dire avec H. de Bonald
que l'état sauvage est une dégradation de notre nature.
SAUVEGARDÉ (Lettres de). V. Lettres de sauve-
garde, dans notre Dictionn. de Biographie et d^Histoire,
SAUVETAGE. Un arrêté du 17 floréal an ix (7 mai
1801) a réglé tout ce qui est relatif au sauvetage des b&F
timents naufragés. A défaut des armateurs, propriétaires,
subrécargues ou leurs fondés de pouvoirs, le commissaire
de l'inscription maritime, et, à l'étranger, le consul, est
chargé des opérations du sauvetage, et de l'information
sur les causes et circonstances du sinistre. Les intéressés
ont un an et un jour pour réclamer ce qui leur appar-
tient; après quoi, il y a lieu h vente publique par le
commissaire, qui en verse le produit à la caisse des gens
de mer. La vente peut être avancée en cas de dépérisse-
ment ou de danger pour les objets. On prélève sur If
{>roduit les frais dus a l'administration de la marine et de
a douane, les frais d'expertise, les salaires des ouvriers
et de l'équipage, l'enregistrement, etc. ; le reste est ré-
parti entre les intéressés, qui doivent payer à la caisse
des invalides de la marine 0 fr. 15 c p. 100, comme in-
demnité de dépôt.
SAVANES. { V. notre Dictionnaire de
SAVANTS (Journal des). ) Biographie et d^ Histoire.
SAVETIERS, ancienne corporation qui avait pris pour
patron S'-Pierre-ès-Liens. L'apprentiùage était de trois
ans; le compagnonnage de quatre. Le brevet coûtait
15 livres, et la maîtrise 300.
SAVEURS (Clavecin des). F. CiJiVEcm.
SAVIN (Église de Saint-), dans le département de la
Vienne. Cette église, dont on fait remonter la fondation à
Charlemagne, est une ancienne abbatiale, qui se dis-
tingue par le peu de largeur et la hauteur extraordinaire
de sa nef. De chaque côté, 8 colonnes isolées et 2 pi liera
la séparent des bas côtés, fort étroits aussi, et dont la
voûte surbaissée repose sur les mêmes chapiteaux qui
supportent les arceaux à plein cintre de la voût«. Ces
chapiteaux sont à rinceaux et k larges feuillages. Un
transept à bras assez longs sépare la nef d'un chœur à
10 colonnes isolées, derrière lesquelles tourne un couloir
étroit où s'ouvrent 5 chapelles. Toute la grande voûte,
séparée en 4 zones dans toute une longueur de 48'",75,
est couverte de peintures du ix* siècle, représentant des
sujets de l'Ancien et du Nouveau Testament, et ne com-
prenant pas moins de 250 figures. On entre dans l'élise
de S*-Savin par un porehe peu élevé, surmonté d'uno
tour, dont la flèche, de construction plus récente, est
flanquée de quatre clochetons et garnie de crochets sur
les arêtes. Une autre tour, d'un seul étage et à toit plat,
s'élève sur la croix du transept.
SAVONNERIE (La), manufacture de tapisseries. V. notre
Dictionnaire de Biographie et d^Hisloire.
SAXE (Miroir de). V. MrROiR.
SAXHORN (de Sax, n9» de TinvenVear» et <• h
SAX
1617
SAX
nand hom, cor), nom d*uoe fainillo dMostruments à vent
et à bocal, en cuivre, à embouchure de cuivre, armés
i*un mécanisme de cylindres, et destinés non-seulement
à remplacer le bugle et Tophicléide dans Téchelle géné-
rale des instruments, mais encore à combler les lacunes
qui existaient précédemment. Cette famille comprend, en
allant de l'aigu au grave : 1^ le saxhorn-soprano en si &é-
mol aigu, à Toctave supérieure de Tancien bugle en si
bémol ou db la clarinette en si bémol, ou encore une
quinte au-dessus du petit bugle en mi bémol; ^ le sax-
jiorn-mezzo-soprano en mi bémol aigu; 3° le saxhorn-
, alto en si bémol; 4" le saxhorn-ténor en mi bémol; 5° le
saxhorn baryton-basse en si bémol; G» le saxhorn con-
tre-basse en mi bémol ; 7® le saxhorn contre-basse grave
on si bémol; i^ le saxhorn bourdon en mi bémol; 9° le
s-ixhorn contre-bourdon en si bémol, deux octaves au-
dessous de Tophicléide. Chacun de ces instruments peut
• ti-c exécuté un ton au-dessus, c.-à-d. en ut pour ceux
en 51* bémol, et en fa pour ceux en mi bémol. Le saxhorn
contre- bourdon, avec ses tubes additionnels, n*a pas
moins do 1G met. de développement, et cependant on en
joue avec facilité et sans fatigue. Les saxhorns se con-
struisent ou droits en avant, ou avec le pavillon en Tair.
Ils se sont introduits depuis 1843 dans la musique mili-
taire et dans les orchestres : ils ont plus de force, d*éclat,
de pureté et de justesse que n'en ont jamais offert le
bugle et l'ophicléide. En 1851, Sax a inventé les saxhorns
doubles, qui ont deux pavillons et sont armés de cinq i
cylindres : celui en mi bémol possède à lai seul retendue !
du soprano en mi bémol, du contralto en si bémol, et ^^ l
l'aho-ténor en mi bémol, B '
SAXON (Idiome). Ce n'est pas autre chose que le bas
allemand ancien, parlé non-seulement dans la Saxe, |
mais depuis la Baltique jusqu'à la mer du Nord. Un dej
monuments les plus précieux de cet idiome est un poëmcv
intitulé le Sauveur, d'après lequel Schmeller a compose
son Glossarium sticonicum, Munich et Stuttgard, 18i0.
11 y a plus de 300 manuscrits saxons à la bibliothèque de
Bourgogne à Bruxelles. V, Kinderling, Histoire de la
langue de la bcuse Saxe^ en allemand, Magdebourg, 1800,
in-8<> ; Scholler, Hibliognosie de l'i liome saxon bas alle-
mand, en allemand, Brunswick, 18*26.
SAXON (Style). V. Ogivale (Architecture).
SAXONS (La Chanson des), ou Vidukindde Saxe, un
des romans des douze Pairs. Le sujet de ce poëme est la
f?ijnrre deCharlemagne contre les Saxons. Guiteclins(Wi-
liliind) apprend la défaite de l'empereur à Roncevaux, et
la mort d'Olivier et de Roland : il mande aussitôt ses
barons, convoque tous les rois sarrazins, ses alliés, et
envahit les possessions de Charles sur la rive droite du
Khin. L'empereur appelle ses barons; mais ils lui repré-
sentent qu'il les a retenus 14 années en Espagne, qu'ils
sont fatigués de toujours faire la guerre sans profit, et
di^larent qu'ils lui refuseront désormais le service mili-
taire s'il ne fait payer l'impôt de quatre deniers à la gent
de Hérupe (BAaine, Anjou, Bretagne, Normandie). Charles
envoie l'ordre au comte du Mans de payer cet impôt, et
de venir à la tête de ses vassaux pour repousser les
Savons. Le comte convoque tous les barons de Hérupe,
et leur communique le message de l'empereur : après
une délibération fort tumultueuse, il est décidé que les
barons attacheront les quatre deniers au bout de leurs
lances, et iront en bataille défier l'empereur de venir re- '
ccvoir l'impôt. En effet, ils se mettent en marche, pillent
hiris et tout le royaume Jusqu'au Rhin, et, arrivés à
une petite distance d'Aix, envoient deux messagers à
Charles pour lui porter leur défi. Charles les accueille
avec courtoisie, et Jure qu'il n'a jamais songé à leur de-
mander d'autre impôt que le service militaire. La paix
est faite; les Hérupois retournent chez eux. Cependant
les Saxons font des progrès; Guiteclins doit surprendre
les Français et les exterminer. Mais la belle Sébile,
femme de Guiteclins, est persuadée qu'un Jour viendra
où elle devra renoncer à la loi de Mahomet pour suivre
celle du Christ. D'ailleurs elle a dans l'armée française
on ami de cmur, Baudoin, le propre neveu de l'empe-
reur. Elle écrit donc à Charles pour lui faire connaître
en détail le plan d'attaque des Saxons. Les Français sont
vainqueurs. Les Hérupois, <^ue Charles avait mandés, ar-
rivent et se couvrent de gloire. Maie Charles n'a pas en-
core passé le Rhin : pen&nt 2 ans et 4 mois il est retenu
sur la rive gauche du fleuve, toujours gros et profond.
Baudoin, appelé par l'amour, pénètre plusieurs fois dans
le camp des Saxons. Charles le gourmande, et lui défend
de s*exposer sans profit pour l'armée. Baudoin s'emporte,
U reproche à son oncle de n*avoir fait encore aucune
prouesse contre les Saxons. Charles, irrité, sort de son
camp le lendemain avant le jour, traverse le fleuve, et se
dirige vers les Saxons. 11 rencontre huit rois mores; il en
tue cinq, les autres prennent la fuite. De retour parmi
les siens, il appelle Baudoin, et lui déclare qu'il ne lut
pardonnera son insulte de la veille qu'à une condition :
c'est qu'il traversera le fleuve, qu'il embrassera sa mie à
la vue des Saxons, et qu'il lui rapportera l'anneau d'or
de la belle. Baudoin, obligé d'accepter cette condition,
passe le fleuve encore une fois, tue l'infidèle Justamnn,
revêt ses armes, prend son cheval, et, ainsi déguisé, pé^
nôtre facilement dans la tente de Sébile. Mais pendant
que les amants s'ébattent, un espion voit leurs jeux ; il
court avertir Guiteclins, qui arrive avec 500 hommes.
Baudoin le défie en combat singulier, le renverse d'un
coup de lance, et revient dans le camp de Charles, à
qui il présente l'anneau de Sébile. Jusqu'alors il n'y a
f>as eu de bataille générale; les deux armées sont lou-
eurs séparées par le fleuve. Le jour de la Pentecôte, une
nche, poursuivie par des chiens, se jette dans le Rhin.
Charles voit dans cet événepient un avertissement de
Dieu; il ordonne de construire en cet endroit un pont
assez large pour laisser passer cent chevaliers de front.
Les barons ne veulent pas faire métier de bûcherons, et
se retirent. Charles leur fait dire que, s'ils ne reviennent
aiussitôt dans son camp, il va faire- la paix avec Guite-
clins, pour ensuite les exterminer, l^s barons ciïrayôs
exécutent les ordres de l'empereur. Le pont est ronstniit;
une grande bataille se livre snr la rive droite du Rhin.
Charles tue Guiteclins; Sébile reçoit le baptême, et de-
vient l'épouse de Baudoin, à qui l'empereur donne le
royaume de Saxe. Ici finit la première partie de la Ckan-
son des Saxons, — Charles, avant de revenir en France,
recommande expressément à Baudoin de ne pas engager
de bataille au cas qu'il soit attaqué par les Saxons, mais
de lui demander promptemcnt des secours. A peine a-t-il
repassé le Rhin, que les Saxons se lèvent do tous côtés :
Baudoin oublie les conseil:- de son oncle, et, après de
brillante» exploits, il est obligé do céder au nombre, et de
se retirer dans sa capitale, où il est assiégé. Cest alors
seulement qu'il demande dos secours à l'empereur.
Charles vient à la tête d'une armée : grande bataille;
Baudoin tue Fieramor, un des fils de Guiteclins ; mais il
est lui-même blessé; entouré par un corps de Saxons, il
succombe. Le lendemain, Charles accepte le défi de Dya-
las, second fils de Guiteclins ; il en triomphe, et l'emmène
prisonnier. Dyalas promet de se faire chrétien : pour
donner à Charles un gage éclatont de sa foi, il combat
v.iillamment contre les Saxons qui sont complètement
vaincus. Knfln il reçoit le baptêuie, cl Charles lui donne
le royaume de Saxe. Quant âi Sébile, elle s'enfi^rmo dans
un couvent pour pleurer son ami.
La Chanson des Saxons est un dô nos plus anciens ro-
mans jde chevalerie; elle remonte au xiii* siècle. L'auteur,
Jean Bodel, était d'Arras; il n'a pas épargné dans son
poème les expressions empruntées au patois artésien, ce
qui en rend quelquefois la lecture difficile. Du reste,
c'est une œuvre véritablement héroïque. En voyant ces
chevaliers qui se défient sur le champ de bataille, qui
rappellent leurs exploits, qui se demandent leurs noms,
qui se menacent et se battent en présence des deux ar-
mées, on croit assister à une des batailles décrites par
Homère. Quant à l'exactittide historique, elle est nulle,
comme dans tous les romans de chevalerie. Les Saxons
sont représentés comme adorateurs de Mahomet, et l'on
voit parmi leurs alliés des princes de Polo^^ne, de Hon-
grie, de Turquie, de Perse, de Nubie, de Maroc, etc.
Dans le roman, Witikind est tué par Charlemagne; dans
l'histoire, il se fait chrétien : si l'auteur eût conservé le
dénoûment historique, il n'aurait pu couronner l'amour
de Baudoin, qui est le véritable héros du poëme. Bau-
doin fait mille prouesses pour l'amour de sa dame ; c'est
un parfait modèle de chevalerie. Les barons sont inso-
lents vis-à-vis de l'empereur ; ils lui marchandent leurs
services; c'est bien la féodalité du xn" siècle, mais elle
n'a rien de commun avec Charlemagne. Un épisode cu-
rieux est le siège de S^-Herbert, dont la tradition s'est
conservée pendant tout le moyen âge. Charles, avec les
rois ses alliés, est tout entier à la guerre : les reines et
les duchesses, qu'on a laissées à S*-Herbert, y mènent
joyeuse vie, et, pour se soustraire & la vengeance de leurs
maris, elles se fortifient dans la place. Charles en fait le
siège; après une belle défense, les dames sont vaincues.
D'après l'ordre do l'empereur, chacun rvprond sa femme,
et il est convenu qu'on oubliera à jamais le siège de
S^-Uerbert. Cet épisode a été retranché de plusieurs ma*
40i
SCA
1618
SCA
nuscrits, comme peu conforme h la réputation d'honneur
des dauics françaises. 1^ Chanson des Saxons a été pu-
bliée par M. Francisque Michel, 1839. H. D.
SAXOPHONE ( de Sax, nom de l'inventeur, et du grec
phônè, voix, son), instrument de musique à vent, qu'on
peut rapprociier de la famille des clarinettes, parce que
le son y est produit, comme dans celles-ci, par une anche
battant contre la table d'un bec. Le saxophone est un
cône parabolique en cuivre, dans lequel les intonations
se modifient par un système de clefs, qui sont au nombre
de 19 à 2*2, suivant les individus de la famille. Différent
de la clarinette parles nœuds de vibration de sa colonne
d'air, il est accordé par octaves; en sorte que toutes les
octaves sont justes, ce qui n'a pas lieu dans les clari-
nettes. Toutefois, dans une grande partie de son étendue,
il jouit aussi de la faculté de donner l'harmonique de la
douzième ou octave de la quinte. Le doigté, semblable à
celui des instrument-^ qui ortavient, est peu différent de
celui de la flûte ou du hautbois. Le son du saxophono
est beau, sympathique, susceptible de toutes tes nuauc* s
d'intensité : son timbre, qui n'est celui d'aucun autre
instrument, oiïre de vagues analogies avec ceux du vio-
loncelle, de la clarinette et du cor anglais, et une demî-
tcinte cuivrée lui donne un accent particulier. On dis-
tingue huit variétés de saxopliones formant une famille
complète et qui sont à la quinte ou à l'octave les unes
des autres : P le saxophone soprano, en ut ou en si bé-
mol (étendue chromatique de deux octaves et une tierce) ;
2" le saxophone aigu en mi bémol (môme étendue); 3" le
saxophone alto, en fa ou en mi bémol (étendue chroma-
tique de deux octaves et une quinte ) ; 4^ le saxophone
ténor, en ut ou en si bémol (même étendue) ; 5° le saxo-
plione baryton, en fa ou en mi bémol (même étendue);
0° le saxophone basse, en ut ou en si bémol iméme éten-
due); 7° le saxophone contre-basse, en fa ou en mi bémol
(étendue de deux octaves et une seconde); 8° le saxo-
phone contre- basse, enut ou en si bémol (môme étendue).
Tous possèdent la faculté d'enfler et d'éteindre le son
comme dans l'orgue expressif. B.
SâXO TKOMBA, instrument en cuivre à bocal, armé
d'un mécanisme de cylindres. Il a été inventé par Adol-
Ehe Sax vers 18i3. Il comporte une famille de sept mcm-
res, allant de l'aigu au grave, et divisés par quinte et
quarte : 1 ° le saxotromba suraigu en si bémol , une oc-
tave au-dessus de l'ancien bugle en si bémol , 2° le saxo-
tromba soprano en mi bémols à l'unisson du petit bugle
en mi bémol; 3° le saxotromba contralto en s} bémol , à
l'unisson du bugle ordinaire; A° le saxotromba alto-ténor
en mi bémol, à l'unisson de l'ophicléide alto; 5** le saxo-
tromba baryton-basse en si bémol, à l'unisson de l'ophi-
cléide basse en si bémol; G» le saxotromba contre-basse
en mi bémol, une octave au-dessous de l'opliicléide alto;
7" le saxotromba contre-basse grave en si bémol, une oc-
tave au-dessous de l'ophicléide basse. Chacun de ces
instruments peut être exécuté un ton au-dessu», c.-à-d.
en ut et en fa, La voix du saxotromba tient le milieu
entre celles des trompottes et des trombones d'une part,
des buglcs et des ophicléides de l'autre ; moins strident
que les premiers, il n'a ni la lourdeur ni le son empâté
des seconds. Le doigté est le môme pour tous les mem-
bres de la famille. B.
SAXTUBA, instrument de cuivre à bocal, armé d'un
mécanisme de cylindres. Il fut inventé vers 1850 par
Adolphe Sax. II surpasse en puissance tous les instru-
ments connus jusqu'à ce jour, sans cesser pour cela d'ôtre
un instrument musical d'une sonorité claire, parfaite-
ment saisissable. Sa famille comporte sept membres de
l'aigu au grave, comme celle du saxophone. On se servit
pour la première fois de saxtubas dans le Juif errant,
opéra d'Halévy. Lors de la distribution des drapeaux à
l'armée par l'empereur (20 mai 1852), 14 saxtubas domi-
nèrent une masse de 1 ,500 musiciens militaires. B.
SAYNÈTE. V, Sainète.
SAYON, espèce de casaque ouverte que portaient au-
trefois les gens de guerre.
SBIRE (de l'italien sbirro), nom donné en Italie, sur-
tout dans les États de l'Église, aux employés de justice
et de police. Chez nous le mot ne s'emploie qu'en mau-
vaise part.
S(^ABELLON (du latin scabellum, escabeau), en termes
d'Archite-ture, sorte de piédestal ou de socle sur lequel
on pose des bustes ou des girandoles. Il a la forme d'un
balu«^tre, ou d'une gaine qui va diminuant de bas en haut.
SC\IiILLU\L i ,, ^ . . n- .•
S(;aiiI\S. t "' ^^^ ^^^ °*"* notre Dictionnaire
SCALDES i ^ Biograohi» «t d'Histoire,
SCANDALE, en termes de Droit canon, parole ou ac-
tion qui donne occasion à autrui de pécher. Le scanflale
actif est celui dont nous nous rendons coupables par nos
mauvaises actions ou par celles qui n^en ont que l'appa-
rence; le scandale passif est celui dont nous sommes la
cause, sans en ôtre coupables, comme lorsque notre for-
tune ou notre état excite certiûnes personnes & l'envie.
SCANDER (du latin scandera, monter), terme de Pro-
sodie. Dans les langues anciennes, c'est mesurer un vers,
c.-à-d. compter combien il a de pieds, en indiquant dans
la prononciation les longues et les brèves. Chaque espèce
de vers se scande d'une façon différente, suivant le
nombre et la nature des pieds dont il est composé. Dans
les langues modernes, scander c'est mesurer les vers par
le nombre de leurs syllabes.
SCANDINAVE (Mythologie). C*est par l'étude et la com-
paraison des différents poèmes composant les deux Ed-
das qu'on peut espérer de reconstruire le système my-
thologique des anciens Scandinaves. Il embrasse en même
temps unecosmo^nie et une histoire des Dieux.
Au matin du monde, quand la terre ni Peau ni le ciel
n'étaient encore créés, il n'y avait qu'un abi me dévorant,
nommé le Ginungagap. Le Nifelhem, c-à-d. le monde
du froid et des ténèbres, situé aux extrémités du Nord ,
fut créé longtemps avant la terre. Au milieu du Nifelhem
se trouvait la fontaine Hvergelmer. Mais il y eut aussi,
aux extrémités du Sud, le Muspelhem, c.-à-d. le monde
de la lumière et de la chaleur : Surtur habite sur la fron-
tière de ce monde et en est le dominateur ; il porte une
épée flamboyante, et il viendra à la fin du monde pour
combattre et vaincre les Dieux et détruire par le feu tout
l'univers. De la fontaine Hvergelmer s'échappent douze
fleuves, appelés Elivogor. Ils débouchent dans le Ginun-
gagap, fort loin de leur source, et, comme la scorie du
métal en fusion, le poison que contiennent leurs eaux se
condense et forme une glace épaisse, dont les couches
successives s'accumulent. La région du Ginungagap qui
e^t située vers le Nord se remplit ainsi de glaces qu'en-
tourent et pénètrent les vents et la tempête, tandis que
celle qui est située vers le Sud est protégée par les étin-
celles qui sortent du Muspelhem et conserve ainsi une
atmosphère tranquille. Peu à peu cependant la chaleur
qui rayonne de ce côté atteint les glaces qui se sont formées
vers le Nord ; ces glaces commeocent à se fondre goutte
par goutte ; les gouttes reçoivent la vie par l'énergie de
celui qui a exhalé cette chaleur, et elles prennent la forme
d'un être humain : c'est Ymer. Ymer est méchant, lui et
toute sa descendance. Il s'endort et tombe en sueur.
Alors naissent de de.^sous son bras gauche un homme et
une femme, et d'un de ses pieds un fils : c'est l'origine
de la race des Hrimthursar. Mais en même temps que
Ymer les gouttes de la glace fondante ont engendré une
vache nommée Audhumbla : quatre ruisseaux de lait cou-
lent de ses mamelles, et Ymer s'en nourrit. Audhumbla
elle-même lèche les rochers couverts de sel et de givre ;
il en sort le premier jour une chevelure humaine, le se-
cond jour une tète d'homme, et le troisième jour un
homme entier x c'est Bure; il est beau, grand et fort; il
a un fils, BOrr; de la géante Bestia il a trois fils : Odin,
Vile et Ve, maîtres du ciel et de la terre. Ceux-ci tuent
le géant Ymer; au moment où il tombe, il s'échappe taot
de sang de sa blessure, qu'ils y noient toute la race
des Hrimthursar, excepté le seul Bergelmer, le sage
géant, qui, avec sa f^mme, s'est échappé dans une barque.
Ils forment à eux deux la tige des nouvelles familles de
Gcauts. — Après la naissance du géant Ymer et de la
varhe Audhumbla, naissance due aux actions réciproques
de l'obscurité et la lumière, de l'eau et du feu, du froid
et du chaud, après la défaite des Géants par les grands
Dieu 1, bienfaisants et organisateurs^ issus de la vache
Audhumbla, alors seulement les puissances propices en-
treprennent la création du monde ou plutôt l'ordonnance
générale des parties de la matière. Ils prennent le corps
d'Ymor; de sa chair ils forment la (erre, de son sang la
mer, de ses os les montagnes, de ses dents les pierres et
les rocs, de ses cheveux les arbres, et de son crâne le
ciel; de ses sourcils ils forment le séjour de Midgord
pour les fils des hommes, et de son front ils façonnent
les nuages épais. Mais le soleil ne savait pas encore où
était sa demeure, les étoiles ne connussaient pas leur
place, et la lune ignorait quelle force elle avait en eHe.
Alors les saints Dieux, sur leurs sièges élevés, tiennent
conseil. Ils prennent les étincelles jaillissant du Muspel-
hem, et les fixent dans l'espace, en haut et en bas, pour
éclairer le ciel et la terre. Us donnent leurs noms à la
ttuit, au matin et au midi, lia façonnent la terre; pdi**
SCA
1619
SCA
dessus ils étendent les cieux, avec, aux quatre coins, les
nains Orient, Occident, Nord et Sud. Au delà des rivages
de la mer du monde qui entoure la terre, ils placent le
pays des Géants ; on deçà du cercle extérieur de la terre,
lis se choisissent à eux-mêmes une demeure, quMls pro-
tègent tout autour par un mur contre les Géants ; la de-
meure de ceux-ci est appelée Utgord, celle des Dieux et
des hommes est appelée Midgord. Au milieu de Midgord
ils se sont bâti une ville appelée Asgord. Là habitent les
Dieux et leur descendance. Odin, avec les Dieux qui Ten-
tourent, 8*y est édifié un temple nommé Gladshem, avec
douze sièges pour les Dieux et un haut siège pour lui-
môme. Ils ont élevé un autre temple, Vingolf, avec des
autels pour les Déesses. Ils ont ensuite construit des four-
neaux, et fabriqué des instruments et des armes. — Les
choses en étaient là quand trois puissants Ases, fils de
Bor, ayant quitté l'assemblée des Dieux, rencontrent sur
un rivage deux arbres, dont ils façonnent deux êtres hu-
mains. Odin leur donne le souffle, Haner IMntelIigence ,
Loder le sang et la belle physionomie; ils leur donnent
aussi des vêtements et des noms : Thomme s'appelle Ask
et la femme Embla. C'est d'eux que sortiront les enfants
des hommes, à qui il sera permis d'habiter Midgord.
Quant aux nains, issus des vers qu'avait engendrés le
torps d'Ymer, les Dieux leur ont donné la forme et l'in-
telligence humaines, mais ils habiteront dans les en-
trailles de la terre et sous les rochers.
Les Dieux ont construit de la terre au ciel un pont ap-
Kelé Bâfrôst ou Pont des Ases. 11 est de trois couleurs, et
àti avec un art admirable. Au point où ce pont rejoint
Je ciel, se trouve la demeure d'Hcimdal; c'est de là
qu'Heimdal surveille les Hrimthursar et les Géants des
montagnes qui pourraient vouloir escalader l'empire cé-
Jeste. Ce pont est visible encore aujourd'hui : c'est l'arc-
en-ciel ; le rouge qu'on y aperçoit, c'est le feu éclatant ;
les eaux célestes bruissent tout autour. Il se brisera
quand les fils de Muspel parviendront à l'escalader.
Mais le principal séjour des Dieux est à l'ombre du
chêne Yggdrasil; ses branches recouvrent le mondç en-
tier et s'élèvent jusqu'au ciel. Ses trois racines traversent
l'abîme, le ciel et la terre. L'une pénètre jusqu'au Nifel-
hem^ là où le serpent NidhOgg, dans la fontaine de Hver-
gelmer, ronge sa racine; la seconde va jusqu'au Hrim-
thursar, et par-dessous est la fontaine de Mimor, où sont
cachées l'intelligence et la sagesse. Un jour Odin vint à
cette fontaine et voulut boire; mais il fallut qu'il donnât
un de ses yeux en gage, et c'est depuis lors qu'Odin est
resté borgne. La troisième racine s'étend jusqu'au séjour
des Ases et des hommes, et par-dessous on trouve la fon-
taine sacrée d'Urd. C'est là qu'est le tribunal des Dieux;
ils s'y rendent à cheval chaque jour en franchissant
BâfrOst. — Un aigle, qui sait beaucoup de choses, se tient
perché sur le haut du chêne. Dans la demeure pratiquée
entre les racines de l'arbre, auprès de la source d'Urd ,
habitent les trois savantes sœurs, Urd, Verdande et
Skuld (c'est-à-dire le passé, le présent et l'avenir). Ce
sont les Nomes; elles sont très-puissantes; elles creu-
sent les runes du destin pour les Dieux et pour les
hommes,* et leurs décrets sont irrévocables. Il y a d'au-
tres Nornes encore, par exemple celles qui, présentes à
la naissance d'un homme, filent la trame de son destin;
los unes sont bonnes et bienfaisantes, les autres mé-
chantes et perfides.
Parmi les Dieux qui habitent le palais des Ases ou
Asgord, le premier est Odin ou Allfader, le père univer-
sel. Deux corbeaux, perchés constamment sur ses deux
épaules, Hugin (l'Esprit) et Munnin (la Mémoire \ lui
di.^nt à Toreille ce qu'ils ont vu ou appris dans leurs
courses à travers le monde. — Freia ou Frigga, proba-
blement la déesse Hertha des Germains, n'est autre chose
oue la Terre, principe de toute fécondité. — Thor, fils
d'Odin et de Freia, est le dieu de la force par excellence;
il commande aux vents, aux saisons, particulièrement à
la foudre. Il est armé contre les monstres et les géants
d'un marteau qui revient de lui-même dans sa main
après qu'il l'a lancé : il possède en outre une ceinture
qui, pendant le combat, renouvelle ses forces à mesure
qu'il les prodigue. — Parmi les Dieux du second ordre
on rencontre : Balder, fils d'Odin , beau, sage et bon.
L'éclat de son palais radieux se refiète dans la zone lu-
mineuse qui biille au ciel les nuits d'été. Niord règne
sur les vents et la mer. Brage est le dieu de l'éloquence
et de lf\ poésie. Loki personnifie enfin le mauvais prin-
cipe. Trois monstres sont nés de lui : le loup Fenris, le
srrpwnt Midgiird, Hel ou la Mort. Nous avons déjà nommé
Heiindal, le dernier de ces Dieux secondaires.. Viennent
ensuite les douze Déesses, qui entourent Freia: puis les
douze Valkyries , chargées de verser l'hydromel aux
braves du Valhalla , de choisir au combat ceux qui doi-
vent être tués, et de faire pencher la victoire vers le côté
que favorise Odin. Quant aux guerriers qui ont mérité
rimmortalité, ils habitent après la mort le brillant VaN
halla, dans lequel ils goûtent éternellement le plaisir de
boire la bière et l'hydromel, ou celui de combattre sans
se lasser.
L'arrivée des filles des Géants troublera le bonheur
parfait qui aura été pendant un certain temps le partage
des Dieux et des hommes. Vainement Loki, le génie du
mal, aura été vaincu une première fois. Vainement la
puissance et la vie même des Dieux auront-elles été assu-
rées pendant la vie de Balder; raimalilc Baldcr, au sort
duquel est suspendu celui de la nature entière, avertit
lui-même les Dieux que des songes lui annoncent une fin
funeste. A la prière de Freia, sa mère, toute la nature
promet de l'épargner; toute la nature, excepté le gui,
qui s'est trouvé omis dans cette prière universelle. Loki
s'en aperçoit; aussi, lors des jeux du \alhalla, en pré-
sence de tous les Dieux réunis, comme chacun lançait
son arme sur la poitrine de Balder qu'on croyait invul-
nérable, Loki met dans la main de l'aveugle Hoder,
frère du Dieu, une branche de gui, et lui fait commettre
un fratricide involontaire. Les Ases veulent punir le mé-
chant Loki ; mais il leur échappe sous la forme d'un
iaumon. Eux-mêmes d'ailleurs doivent bîenttU périr. Le
poôme intitulé Voluspa, dans l'ancienne EtUla, décrit
les signes précurseurs de la fin de ce monde : « L'arbre
du monde craque et se fend d'horreur; le loup Fenris
rompt ses chaînes et dévore le soleil; la flamme détruit
le monde... » Mais tout atissitôt une nouvelle création
commence : « Une terre admirablement verte sort du
sein des fiots. Les cascades se précipitent. L'aigle guette
le poisson du haut des rochers. Les champs jiroduisent
sans être ensemencés. Tout malheur est détruit. Balder
est de retour... »
Tel est le résumé de la cosmogonie et de la mv'thologie
Scandinaves, telles que les montrent les deux Éddas, Ce
sont bien les dogmes d'un peuple qui croit à la guerre ,
à la force, à l'énergie de la personnalité humaine. On y
retrouve quelques-unes des opinions et des espérances
qui sont communes à toute l'humanité : celle d'une des-
truction universelle par la victoire du mal, mais celle
aussi d'une autre vie, pendant la(juclle le hien triouiplicra
à son tour; double témoignage d'un sentiment profond
de l'imperfection des choses créées et d'une noble con-
fiance dans la victoire définitive de l'éternelle justice.
Nous nous sommes appliqué à exposer ici, d'après les
monuments écrits, la doctrine mythologique du paga-
nisme Scandinave. On sait combien c'est un travail aven-
tureux que de chercher à interpréter de tels systèmes,
qui le plus souvent se sont formés sous mille impres-
sions diverses et à travers des époques fort différentes.
Nous nous contenterons d'indiquer ici les livres où de
telles interprétations ont été sérieusement tentées. Nous
avons en français les travaux de M. Bergman, de Stras-
bourg; ce sont des traductions des Edilas, accompajiuées
de commentaires perpétuels, fort savants, quelquefois
obscurs. On a surtout en danois Finn Magnussen, la
Doctrine de VEdda {Edda laeren), 4 vol. in-12, 1824-26;
du même : Priscœ velerum Ùorealium Mythologiœ
Lexicon, Havniîe, i8t>8, in-4°; du même, une traduction,
avec savants commentaires, do l'ancienne Edda, ,Eldre
Edda, 4 vol. in-12, 1821-23; Grundtvig, Mythologie du
Nord, Copenhague, 1832, in-8° ; N.-M. Petersen, His-
toire du Danemark pendant le paganisme , 3 vol. in-i2,
i^' vol., 1834. K. aussi Sulir, Des croyances, des con-
naissances et de la poésie des anciens Scandinaves, Co-
penhague, 1815; Nierup, Lexique des mytiies Scandi-
naves, ibid., 1816; Mone^ Histoire du paganisme dans
l'Europe du Nord, Heidelbere, 1822-23, 2 vol. in-8°;
Berger, Mythologie du Nord, 2« édit., 1824. A. G.
SCANDINAVES (Langues), nom donné aux langues
parlées dans la presqu'île Scandinave et dans les pays et
les Iles qui en dépendent, c.-à-d. au danois , au norvé-
gien, au suédois, et à Vislandais {V, ces mots)^ langues
formant une des trois grandes branches détachées du
tronc germanique sous le nom de Norraana ( langue du
Nord).
SCANDINAVISME, mot créé de nos jours pour dési-
gner la tendance des esprits en Danemark et en Suède
à reconstituer l'ancienne union politique des États scan*
dinaves.
SCANSOAIUM. F. ACROBATIGON,
SCE
1620
SCE
SCAPHISME (du grec skaphè, auge), geure de supplice
en usage chez les anciens Perses. Le patient était placé
sur le dos dans une auge échancrée., de manière que la
tête et les mains passassent en dehors; une autre auge
de même forme recouvrait la première, avec laquelle elle
était clouée. Dans cet état, le patient était abandonné aux
tortures produites par la chaleur et par la piqûre des in-
sectes.
SCAPIN. / V, notre Dictionnaire de Biographie
SCAPDLAIRE. \ et d'Histoire,
SCARABÉE, insecte dont les Égyptiens sculptaient
l'image au bas des statues des héros, pour exprimer la
vertu mâle et guerrière, exempte de faiblesses. Cela vient
de ce qu'ils croyaient tous les scarabées m&les. Le sca-
rabée était aussi pour eux le symbole de Timmortalité et
IMmagedu soleil. Dans la Glyptique, on appelle scarabées
les pierres qui ont la forme de cet insecte posé sur une
base aplatie; elles sont tout à la fois intailles et camées.
On en a de TÉgypte et de TÉtrurie.
SCA BAGUA YTA, nom latin de Téchauguette (K. ce
mot),
SCARAMOOCHE. V, ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d' Histoire,
SCAZON (Vers). V, Choliambb.
SCICAU , pièce de métal qui a une face plate où sont
gravés en creux certains signes, et qu'on applique sur de
la cire ou toute autre matière molle : les empreintes dé-
tachées qu*on a ainsi obtenues s'attachent, par un cordon
ou autrement, aux lettres ou actes auxquels on veut
donner de Tauthenticité. Les empreintes elles-mêmes se
nomment sceaux, La Sigillographie ou Sphragistique
(du grec sphragis, cachet, sceau) est intimement liée
h la science de la Diplomatique; elle sert encore à con>
naître les armoiries des anciennes familles, et fournit des
lumières sur les mœurs et les costumes. Pour trouver
l'origine du sceau dans les actes, il faut remonter aux
temps les plus reculés : on voit dans la Bible qu'Achab,
roi de Jérusalem, avait un anneau dont Jézabel se per-
mit de sceller un ordre qu'elle écrivit faussement au nom
de ce prince. De l'Orient cet usage passa chez les Grecs,
et des Grecs chez les Romains , dont la littérature men-
tionne fréquemment les anneaux à sceller, annuli signa-
torii, annuli sigillarii {V. Anneau). Les peuples qui
s'emparèrent de l'Empire Tadoptèrent , et pendant très-
longtemps la pratique en fut générale, bien qu'elle n'ait
pas toujours eu la même importance. A une époque fort
ancienne, on signait et scellait en même temps : au
vu* siècle encore, nous voyons S' Bertrand, évêque du
Mans, faire mettre à son testament les signatures et les
sceaux de sept personnes illustres. Mais, du viii* à la fin
du xii*, dans une multitude de chartes, le sceau ne parait
plus; on se contente, pour toute marque d'authenticité,
d'indiquer les témoins aux dernières lignes de la charte,
ou de faire tracer par les parties intéressées une croix
devant leurs noms au bas de la pièce. Même au xiv« siècle,
il y avait des pays où l'on ajoutait foi à des actes non
scellés : à Toulouse, les actes des consuls n'ont pas été
scellés jusqu'à l'ordonnance relative à la création des no-
taires; il est vrai qu'à cette époque, c'était là un fait ex-
ceptionnel. Au xui" siècle, le sceau est employé d'une ma-
nière à peu près constante, tant dans les contrats passés
devant les baillis, les sénéchaux et les prévOts, que dans
ceux que les parties rédigeaient elles-mêmes ou faisaient
rédiger par des clercs sans intervention d'un officier pu-
blic; et li était regardé comme suffisant pour rendre les
actes authentiques, à défaut de la signature, qui ne pou-
vait être exigée dans un temps où si peu de personnes
étaient initiées à l'art de l'écriture. Il y eut plus; le sceau
tint souvent lieu de témoin, comme le prouve cette for-
mule : Teste sigillo. L'usage de sceller les actes sans les
signer persévéra pendant le xiv*' siècle en Angleterre, en
Ecosse et en Irlande, et jusqu'au xvi* en Suisse et en
Allemagne : il en fut autrement en France; la signature
était commune dès les premières années du xiv* siècle ,
et, au siècle suivant, on commençait à signer les actes
sans les sceller.
L'importance attribuée aux sceaux explique les pré-
cautions prises pour prévenir leur contrefaçon et l'emploi
frauduleux des sceaux véritables. On peut citer pour leur
bizarrerie certaines pratiques, au fond assez insigni-
ilantea, comme d'insérer dans la cire des cheveux , des
poils de la barbe , d'y imprimer la marque de ses dents
ou de ses doigts. Le contre-sceau ( V, ce mot) était une
précaution mieux imaginée et plus efficace : comment,
sans briser ou du moins altérer une seconde empreinte,
détacher le sceau de l'acte authentique auquel il était
appendu, pour l'appliquer à un acte supposé? On dé-
truisait aussi le sceau lors du décès de l'individu auquel
il appartenait : cet usage s'observait aux funérailles d&
papes, pour le sceau et pour Vanneau du pécheur. Par-
fois, au lieu de détruire le sceau, on le plaçait dans le
tombeau du défunt; il y a deux exemples célèbres de
cette antique coutume : ce sont les 40 anneaux trouvés
dans le tombeau de Marie, épouse de l'empereur Hono-
rius, quand on jeta les fondements de la chapelle de
S*-Picrre au Vatican, en Î54i, et le cachet de Cbildéric 1",
découvert à Tournai dans son tombeau eu 1C03.
L'anneau fut la première forme du sceau. Le mot an-
nuius, qui servait à le désigner, tomba en désuétude au
XII* siècle. Jusqu'au vi", il avait eu pour synonyme le
mot signum , qui , passé cette époque , change dé sens,
et s'applique d'ordinaire aux croix et aux monogrammes
destinés à remplacer les signatures. Bulla (du grec
bouUa), qui est surtout employé pour indiquer les em-
preintes sur métal , s'est entendu, pendant un temps, de
toute sorte de sceaux : aussi voyons-uous, dans le pays
messin, le sceau public appelé Burlete ou Bullette, Dans
d'anciens textes français, les sceaux sont souvent désignés
par le terme de coins^ qu'on trouve employé notamment
dans les Coutumes du Ùeauvoisis de Beauinanoir et d:ins
les Assises de Jérusalem, Mais, quelque vogue qu'aient
eue ces divers noms, le mot sigillum (on français sael ,
seel, et postérieurement et par corruption scel, sceau ],
a été le plus fréquemment et le plus généralement em-
ployé. 11 était connu de la plus haute antiquité, et dési-
gnait proprement l'empreinte du sceau : plus tard, à
partir du ix* siècle, il désigna le type ou le moule du
sceau, tout en conservant sa première signification.
On distinguiit le gros sceau, le sceau public, le grand
sceau, du petit sceau, du sceau secret ou du secret, du
signet ou contre-scel. Le sceau commun paraît n'Otre
autre que celui qu'on appelait en France sceau ordonné
en l*absence du grand, La qualification d*authentique ,
attribuée plus particulièrement au grand sceau, n^em-
pêche pas que les petits sceaux n'aient participé à l'au-
thenticité des grands. Il n'en faut pour preuve qu'une
foule d'ordonnances de nos rois, qui font foi comme les
autres, tout en n'étant scellées que du sceau secret. L'or-
donnance de Compicgne en 1358, conformément aux ré-
clamations des États généraux, régla que les lettres pa-
tentes ne seraient plus, à peine de nullité, scellées du
sceau secret , hormis en cas de nécessité ou quand il
s'agirait du gouvernement de l'hôtel du roi. On a cepen-
dant des patentes du 18 mai 1370 signées du signet et du
scel secret , pour lesquelles le roi réclame la même con-
sidération que si elles étaient signées de a son grant scel,
lequel est absent. »
On remarque entre les sceaux une grande variété, soit
qu'on les considère par rapport à la matière, ou par rap-
port à la forme, ou à la couleur, ou à la manière dont ils
sont attachés aux actes. — Matière des sceaux : — Les
auteurs de la Nouvelle Diplomatique rapportent à Char-
lemagne l'institution des sceaux d'or. Parmi les empe-
reurs de Constantinople, Théophile est le premier qui les
ait employés; ce fait bien constaté doit faire écarter l'idée
que les rois d'Occident ont emprunté cette magnificence
à la chancellerie du Bas-Empire. Il est vrai que les suc-
cesseurs de Théophile ont affecté plus que les autres
princes de se distinguer par les sceaux d'or, dout ils
usaient généralement dans les lettres qu'ils adressaient
aux plus hauts personnages, aux rois et aux sultans. On
connaît des sceaux d'or des rois d'Angleterre, d'Espagne,
de Hongrie et de Bulgarie, des empereurs d'Allemagne,
des rois de France et des papes. Le diplôme où Clé-
ment VII donne à Henri Vlll, roi d'Angletcn-e, le titre de
défenseur de la foi, fut scellé d'une bulle d'or. Au
xvi* siècle, c'était l'usage dans la république de Venise
d'attacher un sceau d'or aux chartes qui conféi'aient la
dignité de chevalier. — Les sceaux d'argent, de bronie
et d'étain ont été très-rarement employés. Le plomb , aa
contraire, l'a été très-fréquemment et dans tous les pays.
Ficoroni a publié un certain nombre de sceaux en plomb
des emp(jreurs chrétiens d'Orient et d'Oocident Depuis
Deusdedit, les souverains pontifes n'ont pas^ jessé de
sceller en plomb. En Languedoc, les plus anciens sceaax
pendants furent en cette matière, et l'usage en fut plus
général et plus persistant que dans les autres contrées ée
la France. Les substances molles ont été employées pour
servi/ d'empreintes aux sceaux concurremment avec les
matryes métalliques, comme la creta, terre de nature ar-
gileuse, d'un usage général du temps de Cicéron, le
plâtre (gypsum), la glaise {lutum)^ la maltha, composée
,\
SCE
1621
SCE
de poix, de cire, de pl&tre et de graine, et enfin la cire
divci-sement mélangée, qui fut préférée aux autres ma-
tières. La manière dont elle est préparée n'est pas indif-
férente pour distinguer les époques : ainsi, on ne sau-
rait confondre les empreintes d'un ton blanch&tre et
terne de certains sceaux carlovingiens avec la cire blonde
et claire des xii* et xni* siècles ; les sceaux fermes et ré-
sistants des rois de France des xiii" et xiv* siècles avec
ceux de leurs successeurs, surtout à partir de la fin du
XV* siècle ; ces derniers sont en cire molle et ductile, et
présentent des inscriptions et des reliefs peu distincts.
Auuint la matière des sceaux des anciens temps est sèche
et dure, autant celle des sceaux des derniers siècles est
onctueuse. — Au xvi« siècle on rencontre très-fréquem-
ment des sceaux recouverts d*un papier faisant corps
avec la cire et reproduisant ^empreinte du type. Le pre-
mier sceau de ce genre que Ton connaisse est suspendu
à un acte de 1385; il a été signalé par M. Natalis de
Wailly. — La cire à cacheter connue sous le nom de cir€
d'Espagne a été inventée ou plutôt introduite en France
sous Louis XIII, par un marchand de Paris nommé
Rousseau , qui en avait apporté le secret des Indes
Orientales.
Forme dês sceaux, — Ni chez les Anciens ni chez les
Modernes, les sceaux ne nous apparaissent avec une
forme constante. La forme carrée est celle d'une bulle de
plomb de l'empereur Trajan. C'est aussi celle de deux
bulles, du même métal, portant les noms des papes
Serge et Etienne, et que l'on rapporte au viii*' siècle. La
simplicité de la forme ronde ou orbiculaire dut lui faire
donuer la préférence. On la remarque aux médailles et
aux sceaux dont sont revêtus les actes les plus anciens.
On a découvert un grand nombre de bulles de plomb,
orbiculaires, des empereurs paiens; tels sont le sceau
d'Antonin, et celui sur lequel on voit réunis les bustes
de Marc-Aurèle et de Lucius Vérus. Les papes, les rois
de France de la i*^ race à Texception de Childéric I'*' et
de Childéric III , les rois Carlovingiens , ceux-ci seule-
ment pour leurs bulles d'or et de plomb, tous les rois
Capétiens, moins toutefois le roi Robert, ont donné la
préférence à la forme ronde. La forme ovale fut adoptée
par les deux princes Mérovingiens dont nous venons de
citer les noms, et parles Carlovingiens pour leurs sceaux
de cire. Au xji* siècle, les sceaux oblongs, ufTcctant le
plus généralement la forme ogivale, sont extrêmement
nombreux. Ils étaient surtout employés par les évêques,
les abbés, les abbesses, les monastères, les chapitres, les
ofiicialités, et par les dames. Les Bénédictins ne faisaient
remonter l'origine des sceaux en ogive qu'au xii" siècle ;
M. N. do Wailly a cité comme présentant cette forme un
sceau du roi Robert , et un autre d'un évêque de Beau-
vais de 1090. Mais il ne faut voir là que des faits excep-
tionnels ; il demeure constant que l'ogive n'est pas or-
dinaire dans les sceaux avant le xii* siècle. Rarement
employée au xv*', la forme ogivale disparaît au xvi*. —
Sur les sceaux, l'inscription n'occupe pas toujours le
môme plan que la figure, soit qu'elle soit plus basse, soit
qu'elle soit plus élevée. Dans la seconde moitié du
xiii' siècle, on commence à rencontrer des sceaux appli-
qués dans une espèce de moule fait avec une cire difl'é-
rente de celle où a été frappée l'empreinte. Ils sont nom-
breux au siècle suivant. Aux xv* et xvi* siècles, les
moules de cire sont souvent remplacés par des boites de
bois, de cuivre ou de fer-blanc.
Couleur des sceaux, — Depuis les premiers temps de
la monarchie française Jusqu'à la fin du xi* siècle, le
sceau royal a été appliqué sur une cire de nuance blan-
rhàtre. Sous la 3* race, l'usage de la cire blanche était
encore assez ordinaire. Les rois d'Angleterre jusqu'à
Charles T' ont presque toujours donné la préférence à
la couleur blanche. — Le jaune étant la couleur natu-
relle de la cire, il semblait raisonnable d'en faire re-
monter l'usage à la plus haute antiquité ; et telle a été,
en effet, l'opinion de certains diplomatistes. Mais Ma-
billon établit que l'emploi de cette couleur n*est point
antérieur au xii* siècle. M. de Wailly reconnaît que les
diplômes, au xt* siècle, étaient habituellement scellés
en cire blanche ; il pense toutefois qu'il serait plus pru-
dent de ne pas nier d'une manière trop absolue l'usage
de la cire jaune à celte époque, parce qu'on ignore jus-
qu'à quel point l'action du temps peut influer sur la co-
loration de la cire. — La cire rouge fut employée assez
fréquemment sous nos rois Mérovingiens. Adoptée sous
la 3* rare dès Louis VII îc Jeune, elle ne fut potirtant d'un
usage commun que postérieurement à la K* moitié du
lui* siècle, et encore faut-il noter que le grand sceau de
France ne présente jamais cette coloration après le règM
de Louis VIL On voit la cire rouge à la plupart des sceaux
plaqués des xiv* et xv* siècles, et à ceux imprimés avec
Vanneau du pécheur sur les brefs des papes à partir de
Nicolas V. — L'usage de la cire verte ne remonte pas en
France au delà du xu* siècle; on pense que Philippe-Au-
guste est le premier qui s'en soit servi. A la chancellerie
royale, dès le règne du roi Jean, la cire verte était ré-
servée aux ordonnances, aux édits, et, en générai , ai'x
lettres qui devaient durer à perpétuité, tandis que la cire
jaune servait pour les lettres royales et les expédittona
les plus ordinaires.
Différentes manières dont les sceaux sont attachés aux
pièces. — Les sceaux sont distingués en plaqués et pen»
dqnts : les premiers, sigilla membranœ af^a, innexa
dtplomati, chartœ agglutinata; les seconds, sigilla pen^
dentia ou pentilia. Les bulles métalliques ont toujours
été pendantes; les sceaux en substances molles ont jté
tantôt plaqués sur le papyrus ou le parchemin, tantôt
suspendus à l'aide d'attaches de difi'érentes natures. Les
sceaux en cire des rois de France jusqu'au xi* siècle «
ceux des empereurs d'Allemagne jusqu'à Frédéric I«', des
comtes de Flandre jusqu'à Baudouin la Hache, ont été
plaqués sur les diplômes. Les chartes des évêques et des
abbés offrent des sceaux en placard jusqu'au déclin du
xu* siècle. Abandonnés à cette époque, ces sceaux revin-
rent en faveur au xiv* siècle; on en rencontre de fré-
quents exemples dans les ordonnances et les mandements
des gens des comptes. — La place des sceaux plaqués
sur les diplômes a varié : sous les rois Mérovingiens, ils
sont un peu au-dessus des derniers mots de la date; sous
les Carlovingiens, ils sont après ou sur les traits des pa-
raphes qui suivent le nom du chancelier. — L'application
du sceau s'opérait au moyen d'une incision dans le bas
du diplôme: pressée par le type, la cire débordait de
Tautre côté, et se trouvait ainsi fixée d'une manière assez
solide pour qu'un certain nombre de sceaux carlovingiens
soient arrivés jusqu'à nous. — D^iprès Mabillon , Louis
le Gros est le premier de nos rois qui ait fait usage de
sceaux pendants ; mais depuis longtemps déjà les évêques
et les grands du royaume s'en servaient. — On s'est
servi , pour suspendre les sceaux , de lemnisques ou
attaches de parchemin, de soie, de fil, de ruban, de cuir,
de Iriine, de cordes ou de cordelettes. A la chancellerie
des rois de France, on employait les lacs de parchemin
pour les actes de moindre importance , et l'on réservait
les lacs de soie rouge et verte pour les diplômes solen-
nels. De même, à la chancellerie romaine, la matière et
la couleur des lacs était et est encore déterminée par la
nature des diplômes. — Vers le milieu du xiii* siècle* on
commença à sceller les chartes sur des parcelles mêmes
de la pièce qu'on avait eu soin de découper : c'est ce
qu'on appelait sceller sur simple queue, M. de Wailly cite
un exemple de ce genre d'application du sceau, de l'aa
1215. Attacher les sceaux aux actes avec une lanière dis-
tincte, une courroie, ou une cordelette de fil, de laine ou
de soie, qui passait dans une double fente du parchemin
et dont les extrémités venaient ensuite traverser le sceau,
c'était sceller sur double queue, — Parfois on rencontre
des inscriptions écrites à la main sur les lemnisques de
parchemin qui servent d'attaches ; elles sont, en général,
sans importance.
Des inscriptions, des ornements, symboles, etc, des
sceaux. — Dans l'ancienne monarchie française, le grand
sceau représentait le roi dans ses habits royaux et assis
sur son trône; sous la République, le sceau de l'Etat
porta d'un côté la figure de la Liberté et la légende Au
nom du peuple français, de l'autre une couronne de
chêne et d'olivier enveloppant les mots République fran-
çaise, une et indivisible, avec la légende Liberté, Égor
lité. Fraternité; sous le gouvernement do la Restaura-
tion , on y vit un écusson à trois fleurs de lis ; sous
Louis-Philippe, il représenta un livre ouvert portant ces
mots : Charte de 1850, et entouré de drapeaux trico-
lores; sous l'Empire, il porte l'aigle, surmontée d^une
couronne fermée et entouré du grand collier de la Lé-
gion d'honneur, avec le sceptre et la main de Justice en
sautoir.
V, Hœpingk, De jure sigillorum, Nuremberg, 1642,
{n-4; Saumaise, De subscribendis et subsignandis testa*
mentis et de antiquorum et hodiemorum sigiliorum dif-
ferenliâ, Leyde, 1053, in-8**; Heineccius, De veterum
Germanorum aliarumque nationum sigillis, Francfort,
1709 et 1710; Ficoroni, / piombi antichi, Rome, 17 iO;
Manni, / sigilli antichi de' secoli bassi, Florence, 1730,
8 vol. in-4<>; Strick, De exceptione deficientis sioUlin
/
SCË
1622
SCE
Halle, i702 ; Leyser, De contrasigillis medii œvi , Helm-
statit, 1720, in-4°; Beck, De resirjnatione , avulsione et
turbatione sigUlorum, Altorf, 1723; Bœhtner, De jure
et auctontate sigilli autlientici. Halle, 1742, in-4°; Thu-
lemar. De buUa aurea, argentea, plumlea ac cerea^
Hftidelberg, 1682, in-4», et Opuscula de bullis, 1097,
in-fol. ; Muratori, De sigillis medii cevi, dans le t. III de
ses Antiquitates itaiicœ: Ch. Lenormant, Trésor de
numismatique et de glyptique; Chassant et Delbarre,
Dictionnaire de sigillographie, în-12 ; De Wailly, Notice
sur les sceaux, dans V Annuaire de la Société de l'his^
toire de France pour 1840; et les divers Traités de Di-
plomatique et de Paléographie. C. de B.
SCEAU DBS TITRES (Conscil du). Conseil créé par décret
du 1*'' mars 1808 pour connaître des titres de noblesse
et statuer sur les constitutions de majorât. 11 se compo-
sait, sous la présidence de rarchi-chancelie r de l'Empire,
de trois sénateurs, de deux conseillers d'État, d'un pro-
cureur gt''nénil, d'un secrétaire général et d'un trésorier.
Une ordonnance du 15 juillet 1814 le remplaça par une
Commission du sceau, que présidait le garde des sceaux,
et qui fut elle-même supprimée le 31 octobre 1830. Un
décret du 8 janvier 18j9 a rétabli le Conseil du sceau des
tii^G", qui se coin pcsa de trois sénateurs, deux ooiiscillei s
d filât, deux membres de la (leur de cass.ilion, trois
maîtres des r^quAtes, un commissaire ini[)érial et un
Sfcrétaire sous la présidence du ^arde des sceriux. Le
Conseil donnait son avis sur les demandes en collation,
confirmation et reconnaissance do titres sur I» s de-
mandes en vérification de litres, sur le» d^îmandes en
remise tut.iie ou |>artie|le(î<'sdr)its de sceau. Des Droits
dejtceauhireni fHîPçus par le Trésor ainsi qu'il suit: pour
les dispenses de parenté ou d'alliance, 294 fr.; pour les
dispenses d'Age, 172 fr. ; pour les additions et change-
ments de noms, 050 fr. ; pour les autorisations de servir
ou de se faire naturaliser à l'étranger, (i60 fr. ; pour les
admissions à domicile, les naturalisations et les réin-
tégrations dans la qualité de Français, 172. 11 faut
ajouter un droit proportionnel d'enregistrement de 20
pour 0/0. B.
SCtlAUX fGarde des). V. G\Rnc des sceaux, dans notre
Diclumnaire de. Biographie et d'Histoire.
SCKLLEMENT, en termes de Construction, action de
sceller ou d'arrêter l'extrémité d'une pièce do bois ou de
métal dans un mur, avec du plomb, du soufre, du plâtre
ou du mortier.
SCELLÉS, apposition par un fonctionnaire public de
bandes de papier maintenues par l'empreinte d'un sceau
qui Lui est propre, et qui a pour but d'interdire l'ouver-
ture d'une armoire, d'un meuble ou d'un appartement.
Cette apposition est ordinairement préalable à l'inven-
taire ( V, ce mot)y dont elle a pour but de garantir la
sincérité. L'apposition des scellés est ordonnée par la loi
orsque s'ouvre une succession, si parmi les héritiers il
s'en trouve de mineurs, d'interdits ou d'absents. Dans
ce cas l'apposition a lieu d'office par le juge de paix du
canton do l'ouverture de la succession. Elle peut être
requise par les créanciers , sous certiiines garanties.
Elle est ordonnée par la loi, en ras de faillite, sur tous les
papiers, registres, meubles et effets du failli (V. Code
Napol., art. 8I0-S21 ; Code de Procéd., art. 907 et Ruiv.>.
Il y a encore apposition de scellés, (juand un individu
disparaît et qu'il n'y a personne pour veiller à la conser-
vation de ses effets et papiers. Il en est de mAme dans le
cas de demande en séparation de corps, et lors d'une de-
mande en interdiction lorsqu'il n'y a personne près du
défendeur pour veiller à la conservation de ce qui lui
appartient. V, Jay, Traité des scellés, 2* édit., 185i-,
in-8**. — Le bris des scellés est puni ^ suivant la gravité
des cas, de la réclusion ou des travaux forcés [Code pé-
nal, articles 249-256). R. d'E.
SCÈNE, partie d'un théâtre sur laquelle les acteurs
Joucîit devant le public les ouvrages dramatiques. Le mot
n'avait pas le mAme sens chez les Anciens {V, Scène,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire). —
Par extension, le mot .Scène désigne la décoration du
théâtre, l'artion elle-même, et enfin le lieu où un acteur
suppose que l'action qu'il raconte s'est passée.
scKNF, division d'un- acte d'ouvrage dramatique, où
l'entretien des acteurs n'est interrompu ni par l'arrivée
d'un nouvel acteur, ni par la sortie d'un de ceux qui sont
sur le théâtre.
SCÈNE (Avant-). V. Avant-Scknk.
SCKNE (Mise en). V. Mise en scène.
SCÉNOGHAPHIE (du grue sUènè. sc^ne, et graphéin,
décrire), représentation d'un corps en perspective sur un
plan, e.-à-d. dans toutes ses dimensions, tel qn'il parait
à l'œil.
SCÊPHROS, nom d'un chant lugubre chez les ancieni
Grecs, analogue au Linos {V. ce mot),
SCEPTICISME. Ce mot, dérivé du grec («teptomai ,
j'examine;, ne donne pas une idée bien exacte de la na-
ture et des caractères généraux du système qu'il désigne.
Rien, en effet, n'est plus véritablement philosophique que
l'esprit d'examen ; rien ne l'est moins que le scepticisme
avec sa prétention de ne tenir quoi que ce soit pour as-
suré, avec le doute et l'incertitude perpétuelle à laquelle
il veut condamner l'esprit humain. Le doute est excellent;
mais dans quelle mesure ? Descartes nous le dit : « Fai-
sant réCcxion en chaque matière sur ce qui pouvait la
rendre suspecte et nous donner occasion de nous mé-
prendre, je déracinais de mon esprit toutes les erreurs
qui s'y citaient pu glisser auparavant. Non que j'imi-
tasse pour cela les sceptiques, qui ne doutent que pour
douter, et affectent d'être toujours irrésolus; car au coii-
traire mon dessein ne tendait qu'à m'assurer, et à rejeter
la terre mouvante et le sable pour trouver le roc ou l'ar-
gile. » {Discours de la Méthode, 3* partie.) Ainsi le phi-
losophe doute et suspend son jugement jusqu'à ce que,
à l'aide d'une méthode sévère, il ait trouvé la vérité. I^
sceptique ne veut pas que la vérité soit accessible à
l'homme, soit parce que ses facultés sont essentiellement
trompeuses, soit parce qu'il n'y a rien de vrai en soi; et
de ces principes désespérants il conclut, autant que le
scepticisme permet de conclure, que nous ne pouvons rien
croire ni rien affirmer. Pour l'un, le doute est le com-
mencement de la science; pour l'autre, il en est le der-
nier mot et le tout. Il est curieux de voir comment Hod«
taigne exprime cette fantaisie : « L'ignorance qui sesçait,
qui se juge et qui se condamne, dit-il, ce n'est pas une
entière ignorance; pour l'estre il fault qu'elle s'ignore
soy-mesme : de façon que la profession des Pyrrhomens
est de bransler, doubter et s'enquérir, ne s'asseurer de
rien, de rien ne se respondre... En tout ils cherrheut
qu'on les contredie pour engendrer la dubitation et sur-
séance du jugement qui leur est fin. Ils ne mettent en
avant leurs propositions que pour combattre celles qu'ils
pensent que nous ayons en notre créance... Leurs façons
de parler sont : je n'cstablis rien; il n'est rien plus
ainsin qu'ainsin ou que ny l'un ny l'autre; je ne le com-
prends point; les apparences sont égales partout; la loy
de parler et pour et contre est pareille; rien no semble
vray qui ne puisse sembler fauls... Leur efTect, c'est u: e
pure, entière et très-parfaicte surséance et suspension do.
jugement; ils se servent de leur raison pour enquérir et
pour desl attre, mais non pas pour arrester et choisir. ■
[Essais, II, 12.)
Quelles sont donc les raisons ou plutôt les prétextes
sur lesquels s'appuie le scepticisme? Nous avons déjà dit
que tantôt il s'en prend à la nature môme des choses,
tantôt à celle de l'esprit humain. L'esprit de l'hommo,
disait le sophiste Protagoras, est la mesure de touii^
choses, c.-à-d., rien n'est absolument vrai ; la neige est
blanche pour qui la voit blanche, noire pour qui la voit
noire. En réalité, elle est blanche et noire tout à la fois
ou elle n'est ni blanche ni noire, ce qui revient au même,
et je me trompe également, quoi aue j'en affirme ou que
j'en nie. Voil«\ bien la confusion, le chaos, rincenitudc,
« la très parfaicte surséance et suspension de jugement «.
que l'on nous vantait tout à l'heure, produite par le fait
même des choses. Il en sera de même si l'on considère
rintclligcnce du biais que veulent les sophistes. Les uns
se bornent à en signaler avec complaisance toutes les mé-
prises : illusions des sens, mirages de l'imagination et de
la mémoire, écarts du jugement, contradictions du rai-
sonnement, fluctuations et revirements de l'opinion, etc.
Puis ils disent : comment se fier à un instrument tant
de fois pris en défaut? D'autres (il s'agit ici d'un scepti-
cisme de date as«;ez récente) vont plus avant, et, nôsli-
geant tous ces détails, c'est l'aptitude générale de l'in-
telligence à connaître la vérité qu'ils mettent en doute.
On pourrait résumer ainsi leur argumentation : « En
admettant qu'il y ait une vérité absolue, rien ne nous
assure que ce soit celle que perçoit l'intelligence hu-
maine. Rien ne nous assure que l'intelligence faite autre-
ment n'aurait pas, de toutes choses, des idées tout à fait
difTérentes; et qu'ainsi, comme certaines personnes, par
suite d'une disposition particulière de rorjiane de la vi-
sion, éprouvent la sensation de vert là où d'autres éprou-
vent la sensation de rouge, toutes nos conceptions, môme
celles qui nous semblent les plus néressaii*es, ne seraient
pas entièrement changées, si les lois et la constitution
SCE
1623
SCH
de notre entendement étaient tant soft peu modifiées. »
Le germe de ce scepticisme était dans Descartes. « Que
ftais-j«}, dit-il, si Dieu n*a point fait qu'il n'y ait aucune
lerre, aucun ciel, aucun corps étendu, aucune figure,
lucune grandeur, aucun lieu, et que néanmoins j'aie les
sentiments de toutes ces choses? Quesais-jc s'il n'u point
fait que Je me trompe aussi toutes les fois que je Tuis
l'addition de deux et de trois, ou que je nombre les côtés
d'un carré, ou que Je juge de quelque chose encore plus
facile, si l'on se peut imaginer rien de plus facile que
cela? n Et s'il répugne à la bonté de Dieu que je sois
déçu de la sorte. Je puis supposer « qu'un certain mau-
vais génie, non moins rusé et trompeur que puissant, a
employé toute son industrie à me tromper. » (!'« Médi-
tation.) Mais ce n'est, pour Descartes, qu'une supposition
extrême. Encore une fois, il ne s'arrête pas au doute; il
ne fait que le traverser pour arriver à des connaissances
plus assurées. C'est Kant et l'École allemande qui, sur
ce point, ont eu l'étrange hardiesse, ou, si l'on veut,
l'étrange timidité de ne vouloir pas affirmer la' réalité
objective des conceptions de la raison, et de ne consi-
dérer les vérités nécessaires que comme des formes sub-
jectives de l'entendement (^V. Kantisme, Forme, Objec-
tif). Nous ne pouvons ici ni exposer ' ni discuter ces
théories. Bornons-nous à dire avec JoufTroy, quoique avec
moins de sympathie pour le scepticisme, que la question,
en Philosophie et dans les sciences en gainerai, n'est pas
do savoir ce que serait la vérité pour l'intelligence con-
stituée autrement qu'elle n'est, mais de savoir ce qu'est
la vérité pour l'intelligence telle qu'elle est; que d'ail-
leurs le scepticisme dont il s'agit, bien ou'invincible en
théorie, est tout à fait sans danger duns la pratique, les
hommes ne pouvant s'empêcher de croire; et que, s'il est
impossible de démontrer que l'intelligence humaine voit
les choses telles qu'elles sont, il est également impossible
de démontrer le contraire. Quant au scepticisme vul-
gaire, la grande et très-décisive réfutation de tous ses ar-
guments tirés de nos erreurs, c*est de dire que toutes ces
erreurs, nous sommes capables de les reconnaître. Donc
nous avons un critérium ( V. ce mot) pour distinguer le
vrai du faux; donc, si nous sommes accidentellement
exposés à nous tromper, nous sommes par nature capables
de connaître la vérité. Il ne s'agit que d'apporter dans sa
recherche tous les soins et toutes les précautions néces-
saires. Une fois que nous l'avons trouvée dans ces condi-
tions, nous lui devons toute notre confiance.
Après avoir exposé les principes fondamentaux du
scepticisme et en avoir indiqué les principaux aspects,
il suffit de quelques noms et de quelques dates pour en
esquisser l'histoire. Dans l'Antiquité, le scepticisme date
presque de l'origine de la Philosophie; il se dégage, avec
les Sophistes, des premières luttes des systèmes qui re-
présentent à cette époque le Sensualisme et Tldéalisme
( V. ces mots), Gorgias de Léontini, Prodicus de Céos,
Protagoras d'Abdère, Hippias d'Élis, Thrasymaque de
Chairédoine, Polus d'A^igente, Calliclès d'Acharnse ,
Euthydème de Chio, Diagoras de Mélos (fin du v* siècle
av. J.-C ), sont les coryphées de la sophistique. Un
scepticisme frivole, mais universel, dit M. Cousin, faisait
le fond de leur enseignement. Socrate réagit avec succès
contre les Sophistes; mais après lui, et cette fois encore
comme conséquence de l'ant^igonisme des grandes écoles
socratiques, le scepticisme, qui trouve plus commode et
plus court de mettre tout en doute que de chercher à rien
concilier, repnt de nouvelles forces, et se développa, non
sans quelque éclat, à ce qu'il semble, avec Pyrrhon
(vers 340), qui en est resté longtemps comme la personni-
fication et le type; avec Arcésilas (316-229) et Carnéade
(215-126), dans la Nouvelle Académie ( V. Acaiémie',)
avec iEnésidème, contemporain de Cicéron, Agrippa (date
incertaine, ii* ou i"* siècle ap. J.-C. ) et Sextus Empiri-
cus (a* siècle ap. J.-C). Longtemps étoulTé par l'esprit
dogmatique de la Philosophie chrétienne, il se ravive à
l'époque de la Renaissance, et trouve dans Charron et
dans son ami Montaigne les interprètes les plus capables
de le faire accepter s'il était acceptable. Au xvu' siècle,
La Mothe Le Vayer, Bayle, et quelques autres continuent
avec plus ou moins de force et de talent la tradition
sceptique, destinée à subir plus tard, notamment avec
Kant, la transformation notable que nous avons indiquée
plus haut. Pour en revenir au xvii* siècle, ce que cette
époque eut de plus original , en fait de scepticisme, c'a
été de tourner le doute, comme une machine de guerre,
non-seulement contre le libertinage et l'incrédulité, mais
encore contre la raison et la philosophie, au profit exclu-
uf de la Foi et de l'autorité. Montaigne en avait quelque-
fois fait le semblant ; mais il nous paraît bien difficile
de le prendre au sérieux dans le rôle de défenseur du
christianisme. Telle fut, au contraire, bien sincèrement
la pensée de Huct, évôaue d'Avranches, auteur d'une
Censure de la Philosophie cartésienne et d'un Traité
philosophique ile la faiblesse de l'esprit humain, telle
fut surtout celle de Pascal , qui mit, dans cette lutte obsti-
née contre la raison, toute la sombre ardeur et toute
l'àpreté de son puissant et étrange génie. Nous pourrions
citer plus près de nous de nouveaux exemples de cette
tactique, moyen désespéré de précipiter de force l'esprit
humain dans la Foi, en le dégoûtant de la Raison. Mau-
vaise tactique après tout , et dangereuse à la cause même
qu'elle veut servir. Pour nous, non-seulement nous ne
saurions nous résigner à ne voir dans la Raison, qui nous
vient de Dieu comme le reste, qu'une lumière trom-
peuse propre à nous égarer ; mais, à un autre point de vue,
nous ne croyons p^is que l'esprit qui se déKe ainsi de lui-
même puisse se reposer avec une parfaite quiétude dans
la Foi. Nous n'en voudrions pour preuve que les anç^oissos
incurables de cet illustre et infortuné Pascal, et nous
trouverions encore ici la confirmation éclatantt d'une
pensée de Roy cr-Col lard, que l'on a bien souvent citée :
tt On ne fait pas au Scepticisme sa part; quand il a pé-
nétré dans l'entendement, il l'envahit tout entier. » B— e.
SCEPTRE (du grec sképtron, bâton d'appui), bâton de
commandement, de forme variable, plus ou moins onié, et
qui est un des insignes de la royauté. Dans Homère, les
chefs grecs ligués contre Troie portent tics sceptres d'or ou
garnis de clous d'or : le sceptre d'Agamemnon était, au
temps où chantait le pofito, conservé i Chéronée; mais les
Phocidiens avaient enlevé les lames d'or dont le bois était
recouvert, Tarquin le Superbe introduisit à Rome Tusasçe
du sceptre comme attribut de la puissance souveraine. IMus
tard, Vimperator, c.-à-d. le général victorieux et admis aux
honneurs du triomphe, eut le droit de le porter. Le plus
ancien des sceptres des rois de France était celui que te-
nait Clovis au portail de l'abbaye de S*-Germain-des-
Prés; c'était un b&ton surmonté d'une aigle. Childebert
avait son sceptre surmonté d'une touffe de feuilles sem-
blable par la forme à une pomme de pin. Selon Velly, le
sceptre des premiers rois était tantôt une simple palme,
tantôt une verge d'or courbée par le haut comme une
crosse : on ne connaît pas de sceptre de cette dernière
forme. Sur le sceau de Dagobert, tiré des archives de
S^-Maximin de Trêves, on voit un sceptre qui ressemble
à une branche composée de plusieurs rameaux. La partie
supérieure du sceptre que l'on conserva longtemps au
Trésor de l'abbaye de S'-Denis sous le nom de sceptre de
Dagobert, représente un homme placé sur le dos d'une
aigle qui vole. Plus tard le sceptre des rois de France fut
surmonté d'une fleur de lis double. Celui des empereurs
d'Allemagne avait une aigle à deux têtes. — Jurer par le
sceptre fut une pratique de l'Antiquité ; on a aussi touché
ou baisé le sceptre comme marque de soumission. D.
SCEVOPHYLACIUM (du grec skeuos, meuble, et phy-
lax, gardien), nom donné, dans les églii^s grecques, au
local où l'on renferme le mobilier précieux dont on se
sert dans les cérémonies.
SCHABRAQUE, sorte de housse ou de couverture en
peau de mouton ou en drap, qu'on étend sur la selle et
qui couvre les fontes des pistolets. Elle a été importée en
France en li>02 par les hussards hongrois. Les scha«
braques en peau sont garnies d'un galon en laine de cou-
leur; celles en drap ont aussi un galon, avec le chiffre du
régiment, ainsi (qu'une grenade, deux lances, etc., selon
l'arme. Les officiers ont deux galons d*or ou d'argent à
leur schabraque.
SCHAH. V. Chah, dane notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire.
SCHAH-NAMÈH, c-hrà. le Livre des Rois, poème his-
torique composé en persan par Firdoucy, d'après l'ordre
de Mahmoud le Gaznévide, et consacra à la gloire pri-
mitive de la Perse. Il n'a point pour sujet un événe-
ment important, qui naît, se développe, et se termine
par une catastrophe, mais il embrasse une série de faits
qui se succèdent durant 37 siècles, jusqu'à l'introduction
de rislamisme ; on y trouve peu d'ordre, et l'art manque
presque complètement dans la manière dont los épisodes
sont rattachés à l'ensemble. L'unité de l'œuvre réside
dans la lutte du mauvais génie contre le bon, de la civi-
lisation contre la barbarie, des rois de l'Iran contre les
hordes du Touran; dans les vicissitudes de l'ordre sorial,
assis par Djemscliid, régénéré par Zoroastre, éb.anlé
sans être abattu par Alexandre le Grand, opprimé par
les Arsacidcs, relevé par les Sassanides, modifié par les
scn
1624
SCI
Arabes. Firdoucy ne s'est point yraisemblablement pro*
posé pour but de faire tourner son poëme au profit de la
morale; il n'a eu d'autre intention que de raconter les
faits qu'il avait recueillis dans les traditions persanes. On
ti'ouve dans le Schah-Namèh le pendant, sinon le mo-
dèle, des mœurs chevaleresques de notre moyen âge :
Roiistam et les autres héros de Firdoucy rappellent les
personnages des DOëmes de la Table ronde ou de Charle-
ma<;ne, et vivent au milieu d'enchanteurs et de monstres
fabuleux. La valeur poétique de l'ouvrage ne répond pas
h ^ on importance : des distiques composés sur une me*
sure constamment la même, formés de deux vers qui
riment ensemble et renferment presque toujours un sens
complet, ne présentent que de faibles moyens au génie
quand il s'agit de grandes compositions. Le Sc/ia/tr-TVamé^
a été publié à Paris par Jules Mohl, avec traduction fran-
çaise et commentaires. II en existe une traduction en
prose arabe à la BibIioth6que impériale. 1^. Langlès,
Notice sur la vie et les ouvrages de Ferdoussif dans les
Fables et Contes persans publiés en 1798; de Wallem-
bourg, Notice sur le SchaJi-Namèh, Vienne, 1810; Sil-
vestre de Sacy, article dans le Magasin encyclopédique^
tome IV. B.
SCHAKO (du hongrois czàko)^ coiiïure militaire, parti-
culière aux hussards hongrois, et qui, introduite en
France au siècle dernier, ne fut d'abord en usage que
dans les régiments de hussards et de chasseurs & cheval.
Il était alors sans visière et orné de torsades. Au com-
mencement du premier Empire, toute l'infanterie quitta
le ciiapeau à trois cornes pour prendre le schako. Aujour-
d'hui les schakos sont, selon les corps, en feutre ou en
drap de couleur noire ou bleue, soutenu par une car-
casse en carton ou en bois qui se rétrécit au sommet; on
les orne de jugulaires, de plaques à aigles et portant le
numéro du régiment, de galons, de cocardes, de crinières,
aigrettes, panaches ou pompons.
SCHALL. K. Chale.
SCHAMANISMË. V. Chamanisue, dans notre Diction-
naire (le Biographie et d^ Histoire,
SCHEEREN, nom qu*on donne aux récifs qui existent
le long des côtes de la Suède et de la Finlande.
SCHEIKH. i V, ces mots dans notre Dictionnaire
SCHIXLING. S de Biographie et d'Histoire.
SCHÈME (du grec skéma, forme, figure), mot employé
autrefois en Construction comme synonyme de Figure ou
de Plan, Il a désigné aussi toute Figure de Rhétorique.
En Philosophie, Leibniz appelle schème le principe essen-
tiel à chacune de nos idées et qui les distingue entre
elles, tandis que Kant, faisant du mt^me mot un syno-
nyme de Forme, l'applique à tout objet qui existe dans
l'Entendement indépendamment de la Matière. Schéma-
tiser, c'est considérer les objets comme des schèmes ou
des abstractions ; faire des schématismes, c'est faire des
actes résultant de l'application des formes de l'Entende-
ment pur à celles de la Sensibililé physic{ue pure.
S(^HÊUir. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
SCHERZO, mot italien qui veut dire badinage, et
qu'on emploie en Musique pour désigner les morceaux à
trois temps des symphonies, quatuors, etc., qu'on nom-
mait autrefois menuets {V, ce mot). Le mot scherzando,
c.-^-d. en badinant, indique un mode d'exécution légère
et badine. Les Italiens appellent scherzi musicali cer-
taines œuvres plaisantes, telles que les fugues qui, quœ,
quod et hic, hœc, hoc de Merula, les fugues tri liées de
Porpora, les canons burlesques du P. Martini , etc.
SCHIFATI, pièces de monnaie grecques de la Sicile au
moyen &gc, ainsi appelées parce qu'elles portaient la
figure d'une barque {scapha),
SCHILDERBENT, association de peintres flamands qui
existait à Rome pendant les xvi* et xvii* siècles. Les
désordres qu'elle commit amenèrent sa suppression par
le pape Clément IX en 1720.
SCHISME. F. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
SCHLAGUE (de l'allemand schlag, coup), punition
militaire en usage en Allemagne, et qui consiste dans
l'application de coups de canne.
SCHOEISBRUNN, ch&teau impérial de la Basse-Autriche,
à 0 kilomèt. S.-O. de Vienne. Il occupe l'emplacement
d'un ch£Lteau de chasse b&ti sous Maximilien II, et d'un
palais d'été construit par Léopold T'. L'impératrice
Marie-Thérèse le fit élever en 1744 par Pacassi, d'après
les plans de Vatmagini. L'aspect du château de Schœn-
brûnn, avec ses volets peints en vert sur des murs badi-
geonnés en jaune, n'a rien d'imposant En ayant se
trouve un grand parterre, orné de 32 statues et grouyvs
en marbre, et à l'extrémité duquel s'élève un amphi-
théâtre de verdure que couronne la Gloriette, vaste oor-
tique ouvert. Le ch&teau contient 1,441 chambrel et
139 cuisines. Les appartements impériaux sont richement
meublés, mais n'ont rien de particulièrement intéres-
sant. On remarque la grande salle, où peuvent tenir
1,500 personnes, et qui a un beau plafond peint par Gu-
glielmi; la salle Hamilton, ainsi appelée à cause des
peintures exécutée par Jean, Georges et Philippe Ha-
milton ; la salle des cérémo:iies, avec peintures par Mey-
tens; le cabinet bleu, où Marie-Thérèse se tenait de
préférence; la chambre habitée par Napoléon I^'en 1809,
et où son fils, le duc de Reichstadt, mourut en 1S3'i; le
cabinet chinois, la galerie de tableaux, la chapelle, le
théâtre, etc. Le jardin ou parc, d'une très-grande éten-
due, est une évidente imitation de celui de Versailles : il
contient de magnifiques allées, de belles pièces d'eau,
une faisanderie, une ménagerie, une orangerie, un jardin
botanique, etc. B.
SCHOËNION , nom d*un air de flûtes chez les anciens
Grecs. Il avait quelque chose de l&che et de flexible,
comme le jonc {sclioinon en grec).
SCHOLIES (du grec skholè, loisir), annotations appo-
sées sur les marges des manuscrits grecs par leurs pos-
sesseurs, dans les loisirs d'une lecture assidue et réitérée.
Par extension, on a appelé Scholiastes les auteurs de notes
destinées à éclaircir certains passages des écrivains clas-
siques, particulièrement des écrivains grecs. Les plus
célèbres scholiastes sont Eustathe, Tzetzès, Didyme, Mos-
chopulus, etc.
SCHOONER, nom que les nations du Nord donnent à
la goôlette.
SCHOTTISH. V. Shottish.
SCHYARI, ancien instrument à vent, dont la structure
ressemblait h celle de la cornemuse, si ce n'est qu'il était
ouvert dans la partie inférieure. Outre les trous ordi-
naires pour les doigts et le pouce, il en avait d'autres
qu'on bouchait avec la paume de la main. Le diapason
du plus grand instrument de ce genre s'étendait du fa
au-dessous des lignes avec clef de fa, jusqu'au si Itémol
au-dessus; le plus petit, du sol au-dessus de la 4' ligne
avec clef de fa jusqu'à l'ut du 3*^ espace à la clef de sol.
SCIAGRAPHlË (du grec skia, ombre, et graphéin,
tracer), mot employé par les anciens Grecs pour dt^i-
gner ce que nous appelons soit le clair-obscur, soit la
silhouette. — En Architecture, il signifie la coupe d'un
édifice, c.-à-d. la représentation de son intérieur.
SCIE (Dent de). V. Dent de scie.
SCIENCE, en latin scientia (de scire, savoir). La
science à son début n'était qu'une synthèse étroite, vague
et confuse, comprenant l'ensemble du savoir humain,
décoré du nom de Sagesse ( V. ce mot). S'il était donné à
l'esprit humain de s'élever jusqu'à une connaissance
universelle et parfaite, la Science serait une syniii^
complète, emhrassimt l'ensemble et les parties de l'uni-
vers dans leurs moindres détails et dans leurs rapporU;
l'homme posséderait la science absolue, ce qui lui est
impossible. Entre ces deux extH^mes il y a des parties de
la science ou des synthèses partielles auxquelles l'homme
arrive par des analyses de plus en plus exactes et pro-
fondes; c'est ce qui donne les sciences particulières.
Chaque science, ayant son objet propre, comprend les
diverses connaissances des faits qui sont relatifs à ce4
objet, des lois qui régissent ces faits; d'après cela, une
science est un système de propositions qui, liées entre
elles, dépendent d'un seul et même principe. C'est ce qui
distingue la science de Vopinion, qui juge sans motif suf-
fisant, et môme de la connaissance raisonnée, qui ne
s'appuie que sur des principes hypothétiques, tandis que
savoir, c'est rattacher des notions positives à des prin-
cipes clairs, évidents et incontestables. Toute science peut
être considérée comme renfermant trois parties : la des-
cription des faits, la théorie des lois, et Tapplication de
ces lois, qui constitue un art. C'est ce qu'on voit dans
la marche de la civilisation ; mais cette marche est assez
difficile à suivre pour la science dans les premiers temps.
Chez les peuples antiques de l'Orient, l'imagination Vetn-
portait de beaucoup sur l'observation et sur le raisonne-
ment. En Grèce, la science se confond d'abord avec la
philosophie {V. ce mot). Socrate sépara cette dernière drt
autres sciences, et Platon essaya de les diviser méthodi-
Îuement, en mettant au premier rang la connaissance de
>ieu et des Idées, objet de la raison ; au second, les ma-
thématiques, science intermédiaire entre la niwo el
l'opinion; ao troisième, les connaissances pAysiçAC*»
SCI
1625
SCO
oblet de fopfnion. ArîBtote, développant lMd(5e de Platon,
constitua la Métaphysique, puis l'Histoire naturelle et la
Météorologie descriptives, la Psychologie, la Morale, la
Politique, la Rhétorique et la Poôtiqu;'. LYcolc d'Alexan-
drie accrut le domuine des sciences, surtout en ce qui
concerne la Mécanique, l'Optique, TAstronomie, la Géo-
graphie mathématique. Au moyen à|^e, la science subit
une éclipse, pendant laquelle tout se réduisait aux sept
Arts libéraux, comprenant le Trivium (Grammaire, Dia-
lectique, Rhétorique) et le Quadrivium (Astronomie,
Géométrie, Arithmétique et Musique). Cependant, au
XIII* siècle, Vincent de r;eauvais essaya un résumé des
connaissances humaines dans son Grand Miroir ^ divisé
en Miroir naturel. Miroir moral, Miroir scientifique.
Miroir historique. La première classification sérieuse est
celle de F. Bacon, à la fin du xvi» siècle; elle fut adoptée
au XVIII* par les auteurs de V Encyclopédie, avec des cor-
rections relatives surtout à la théologie, à la poésie et aux
mathématiques {V, Arbre BNCYCLOPéDiQUE). Depuis, de
nombreux essais ont été tentés pour arriver à une classi-
fication plus exacte. Ampère prit pour base ce principe :
que l'observation des faits apparents et de ceux qui sont
cachés, puis la détermination des lois et des causes de
ces phénomènes, constitue métaphysiquement la marche
de l'esprit dans l'acquisition des connaissances. M. Cour-
not a publié en 1852 un Essai sur les fondements de
nos connaissances, utile à consulter, ainsi que VEssai
sur la classification d'Art-et-Science de J. Bentham, et
Y Encyclopédie d'Krsch et Grubcr; on trouve aussi une
tentative de classification dans la !*h>jsiologie philoso-
phique des sensations et de l'intelligence du D' Gerdy.
Sans adopter exclusivement aucune de ces classifications
plus ou moins arbitraires, il nous suffira de donner un
tableau abrégé des sciences et de leurs applications dans
les arts.
D'après la nature des objets dont elles s'occupent, les
sciences peuvent être divisées en deux grandes classes :
1° les Sciences de raisonnement, comprenant : les Mathé-
matiques pures (Arithmétique, Algèbre, Calcul intégral,
différentiel; Calcul des variations, des probabilités, etc.;'
Géométrie, Trigonométrie, Géométrie analytique); les
Mathématiques appliquées ou mixtes (application des
sciences mathématiques aux sciences physiques et natu-
relles); et les Sciences métaphysiques (Ontologie ou Méta-
pli}sique générale. Métaphysique particulière. Théologie,
logique transcendante ou rationnelle. Morale transcen-
dante ou rationnelle); 2<* les Sciences d'observation,
ayant pour objet les corps et leurs modes (Physique gé-
nérale. Chimie, Gazologie, Hydrologie, Minéralogie, Bota-
nique, Zoologie, Physiologie, Cosmographie, Astronomie,
Géographie, Géologie, Dynamique, Mécanique, Statique),
et le principe pcn«iant et ce qui le concerne (Psycholo};ie,
Logique, Esthétique, Morale, Science historique. Indus-
trie, Beaux-Arts et Litiératuro). A chaqiie science princi-
pale se rattache une application dans l'industrie ou dans
l'art. Ainsi, à Tarithmétique correspond le calcul; à la
géométrie, l'arpentage ; à la mécanique pure, la mécanique
appliquée; à l'astronomie, Tart de la navigation et de la
fabrication des instruments dont elle a besoin; à la géo*
logie, la métallurgie, et les arts du lapidaire, du joaillier,
du bijoutier, etc. ; à la physique, l'optique, l'acoustique et
la fabrication des instruments nécessaires; à la chimie,
la tannerie, Tamidonnerie, la brasserie, la distillerie, et,
en général, les arts industriels; à la botanique, l'agricul-
ture; à la zoologie, la médecine, l'art vétérinaire; à
l'histoire, la politique ; à la théologie, le culte.
Dans ce tableau ne sont pas comprises les Sciences
occultes, par la raison qu'elles ne sont pas des sciences;
au lieu de s'appuyer sur l'observation et le raisonnement,
elles ont recours au mystère et se dérobent au jour; elles
sont d'ailleurs tombées dans un discrédit que le progrès
des Sciences réelles augmente toujours. Ces sciences
et iinnt Talchimie. l'astrolngie, la cabale, la magie, la
'"liiromancie, la nécromancie. R.
SCIENCES (Académie des), fondée en 1666 par Col-
I crt, sur l'ordre de Louis XIV, mais sans acte ofTiciel
émané do Tautorité royale. Elle ne comprit d'abord que
les sections de géométrie, d'astronomie, de mécanique,
d*unatomie, de chimie, et de botanique; ses membres
funînt partagés en 4 classes : les membres honoraires,
les membres effectifs, qui recevaient des émoluments, les
associés, et les élèves; la l""* se composait de 10 mem-
bres, et les trois autres do 20 chacune. Le roi choisissait
/e président dans la 1" classe; le secrétaire et lo trésorier
étaient pris dans la 2*. Le régent Philippe d'Orléans sup-
orima les élèves, et créa deux nouvelles classes, Tune de
12 adjoints, l'antre do 6 a^^sociés ; on établit nn vice-pré-
sident, choisi parmi les iiici'.îbres honoraires, un direc-
teur et un sous-directeur, qui devaient être memlirea
effectifs. En i785, on créa des classes d'histoire naturelle,
d'agriculture, de minéralogie, et de physique. L'Aca-
demie des Sciences, supprimée en 1793, reparut modi-
fiée dans l'Institut. Elle avait publié jusque-là 139 vo-
lumes in -4" de Mémoires, Aujourd'hui elle se composa
de 03 membres, divisés en onze sections, savoir : pour
les Scienctc matJiématiques, les sections de Géométrie,
Mécanique, Astronomie, Géogi'aphie et Navigation, Phy-
sique générale; pour les Sciences physiqiAes, Chimie,
Minéralogie, Botanique, Économie rurale et Art vété-
rinaire, Anatomie et Zoologie, Médecine et Chirurgie.
L'Académie des Sciences peut être regardée comme ua
véritable tribunal scientifique, dont l'Europe ^tière re-
connaît l'autorité.
SCIENCES MORALES ET POLiTiQDBS (Académie des), établie
comme une des classes de l'Institut en 1794, supprimée
par Napoléon l»»- en 1803, elle ne fut rétîiblio((.i'i.n i«;{2.
Elle comptait alors 30 membres, répartis on 5 sections.
Un décret jmpérial du 14 avril 1855 Ta divisée en six
aections : lo Philosophie; 2« Morale; 3" Législation,
^roit public et Jurisprudence ; 4" Économie politique et
Statistique; 5" Histoire générale et philosophique; 0" l>o-
litique. Administration et Finances. En ISfiii. la (]" sec-
tion a été réunie :\ la 4» Ses membres sont au nombre
de 40. Elle publie des Mémoires.
SCIENCES (Facultés des), établissements d'enseignement
supérieur, au non^bre de 15 en France : à Besançon,
Bordeaux, Caen, Clcrmont, Dijon, Grenoble, Lille,
Lyon, Marseille, MuntpeUier^ Nancy, Paris, Poitiers,
Rennes, et Toulouse. L'enseignement complet d*une
Faculté des Bciences comme celle de Parie, comprend
l'astronomie physique, l'astronomie mathématique, l'al-
ffèbre, la mécanique, la méciinique physique, le calcul
diCTérenliel, la géométrie, le calcul des prob tbilités, la
physique, la chimie, la zoologie, la botanique, la miné-
ratogie, la géologie. Dans les F.icuît>''s des dépnriemcnta,
le nombre des chaires varie de quatre à six. V. le ^uppl.
SCIENCES (Ecoles prepap.ilonesà î'en^^eignement su-
périeurdes)ET des lettres, écoles institueras paniéci-et
au22aoûtl85i. Ce soni desétablissements municipaux,
fondés et entretenus aux Trais dt*s communes, mais dont
les professeurs, [jHs k<'' né raie ment dans le personnel
des lycées, sont nom (i]é:< par le min'sirederin'»lruction
publique. Il y en a qunir»»: \ Anfr<TP, Cliambéry,
Nantes et Rouen. L*enscignement comprend les mathé«
matiques, la mécanique, la physique, la chimie, riiistoire
naturelle, la littérature française, Thistoire do France, la
géographie physique et politiqiie, le dessin Industriel.
Les inscriptions prises dans les Kcoles préparatoires peu-
vent être converties en inscriptions dans les Facultés des
Lettres ou des Sciences. Ces Écoles délivrent des certift"
cals de capacité pour les sciences appliquées,
SCINDAPSOS, instrument de musique des Anciens,
monté de 4 cordes de laiton qu*on touchait avec une
plume.
SCIOLTI (Vers). V. Italirn?!E (Versification),
SCIOLTO. V, DfrfACHé.
SCIPION (Bouclier de). K. Boccuer.
SOPIONS (Tombeau des), monument romain situé
près de Tarragone en Espagne. La tradition, qui ne re-
pose du reste sur aucun fondement, veut que ce soit le
mausolée élevé par Scipion TAfricain h la mémoire de
son oncle et de son père, et Ton a prétendu que les deux
statues mutilées qui le décorent représentent Cnélus et
Publ. Cornélius Scipion : mais leur costume n'est pas
celui des généraux romains; il ressemble plutôt à celui
des esclaves. Des médailles d*Auguste, une urne funé-
raire contenant les cendres d'un enfant, et divers autres
objets trouvés au pied de cette construction, paraissent
remonter à un temps moins éloigné que le prétendu tom-
beau des Scipions.
SCIROPHÔRION. K. Parasol.
SCOLARITÉ ( Privilège dej, privilège en vertu duquel
les causes des membres des Universités et celles des étu-
diants étaient autrefois portées devant les Conservateurs
des privilèges de ces Universités.
SCOLASTIQUE, nom donné à la philosophie du moyen
âge, et dérivé, dit-on, du latin scolasticus, titre de IVco-
làtre qui enseignait dans Técole attaché*» aux cathédrales.
Le caractère de la Scolastique n'était pas l'indépendance
philosophique; mais sa soumission à l'autorité religieuse
n'allait pas Jus<[u'à la servilité. L'histoire de la Scolas-
tique se divise en 4 périodes : i^ du n* siècle Jusqu'à la
SCO
1626
SCO
relie des Unwersaux; 3° d*Abailard au xiv* siècle, où
triomphe le Nominalisme avec Guillaume Occam; 4** de
ce dernier jusqu'à la fin du xv* siècle. — Dans la 1""* pé-
riode se montrent Scot Érigène, qui reproduisit, dans son
ouvrage De la Division de la Nature, la doctrine des
Alexandrins, et avec lequel la Scolastiqne reflète le pan-
théisme oriental ; llaban Maur, Lanfranc, Gerbert d'Au-
rillac, S' Anselme de CantorbC'ry. Jusqu*alors le carac-
tère de la Scolastiijue, sans être bien déterminé, inclinait
à devenir ce qui fut le Héalisme; il n'en Tut pas de
même à la 2* période. Vers la fin du m" siècle. Porphyre,
dans une Introduction aux Catégories d'Aristote, s'était
demandé, sans résoudre la question, si les genres et les
espèces répondent par une existence réelle aux idées gé-
nérales; en un mot, sMIs sont des êtres. Roscelin, cha-
noine de Compiègne, reprit la question. Il s'agissait donc
de savoir si Vhumanité, par exemple, existe indépen-
damment des individus qui la composent, si l'idt^e géné-
rale humanité est un être, une entité, ou si elle n'est
qu'une appellation collective donnée à un ensemble d'in-
dividus. Boscelin répondit négativement; il prétendit
môme que les idées générales ne sont que des mots,
tlatus vocis; que les idées générales, bien loin d'être
des réalités préétablies, univcrsalia ante rem^ comme on
disait, ne sont que des abstractions provenant des indi-
vidus, universalia post rem. Ce Nominalisme de Rosce-
lin, qui allait jusqu'à mettre en question la Trinité
divine, souleva contre lui l'autorité religieuse, qui le
força à se rétracter. Au point de vue philosophique, il fut
combattu d'abord par Guillaume de Champeaux, chef
des Réaux ou Réalistes. Ceux-ci soutenaient que les idées
générales sont des entités réelles, qu'elles sont distinctes
de l'esprit qui les conçoit, et des individus dont elles
sont les types; bien plus, que les individus n'ont d'exis-
tence que par leur rapport avec elles; que c'est, par
exemple, Vnwnanité qui existe réellement, et que les in-
dividus n'en sont que des parties sans existence propre ;
ainsi, d'après eux, les idées générales répondent à une
nature universelle et réelle; de là vient qu'on appelle
aussi toute cette polémique la question des Universaux.
Abailard, disciple de Guillaume de Champeaux, tenta un
compromis entre les deux doctrines opposées, en cher-
chant à établir que les Universaux ne sont ni des choses
ni des mots, mais des produits, des conceptions de l'es-
prit; de là le nom de Concept ualisme (V. ce mot) donné
h son système. Abailard mécontenta les deux partis.
L'issue de cette première lutte fut la défaite du Nomina-
lisme, qui eut contre lui tous les docteurs qui croyaient le
dogme catholique intéressé dans le débat : S^ Anselme,
Alain de Rissel, Bernard de Chartres, Pierre le Lombard,
surnommé le Matlre des Sentences, comme auteur d'une
Theologia christiana sententiarum, compilation qui flt
loi dans les écoles pendant toute la Scolastique. L'époque
suivante fut celle des traducteurs et des commentateurs ;
on y vit Robert de Lincoln, Michel Scot, Jean de La Ro-
chelle, Guillaume d'Auvergne et Vincent de Beauvais. Il
faut signaler principalement Albert le Grand, dominicain,
aui professa en Allemagne et à Paris ; il s'occupa beaucoup
e physique; son principal mérite est d'avoir en grande
partie traduit et commenté Aristote. S' Thomas, sur-
nommé VAnge de iÉcole, étudia aussi le StagjTite, mais
avec un esprit plus élevé et plus réellement philosophe.
Grand métaphysicien et moraliste distingué, il remonte
aux principes et en développe les conséquences avec un
esprit de suite et de riçucur inconnu de son temps. Son
Commentaire de la Métaphysique d'Aristote est un des
meilleurs qui existent, et sa Somme, Summa Theologiœ,
est un des grands monuments du moyen àsçe. S' Thomas
était dominicain, comme Albert le Grand, son maître.
Sa doctrine se trouva en opposition, sur plusieurs points,
avec celle du franciscain Duns Scot, né l'année même do
la mort de S* Thomas (1274). Celui-ci, tout en admettant
la liberté de Dieu, était plus frappé de sa bonté et des
lois de la nature; il fondait le bien, non sur la volonté
de Dieu, mais sur sa nature: Duns Scot, au contraire,
faisait sortir la loi morale de la volonté divine, ainsi que
la création avec ses lois ; de là l'école des Thomistes et
celle des Scotistes, et la lutte entre ces deux écoles. Duns
Scol, surnommé le Docteur subtil, est remarquable par
son opinion sur l'origine de nos connaissances; il en
parle en rationaliste éclairé; il est platonicien et réaliste,
comme Henri de Gand. 11 faut encore citer S' Bonaven-
turo, qui 8'adonaa au mysticisme, déjà apparent à la fin
du xn* siècle, dans l'école de S' Victor; Raymond Lulle,
Doctor illuminatus, inventeur d'un Ars untversalis, ma-
chine dialectique plus curieuse qu'utile; Roger Bacon,
homme supérieur à son temps, et qui, dans un ^rit
remarquable, Opus majus, faisait pressentir la réforme
opérée par son homonyme Fr. Bacon, trois siècles plus
tard. Les travaux d'érudition de cette époque furent faci-
lités par ceux des Juîfs ojt des Arabes sur Aristote; les
plus célèbres sont Alkendi, Alfarabi, Aviccnne, Algazel,
Tophail, Averroès, Mosès Mai mnnide. La dernière période
vit renaître la querelle des Universaux. Guillaume Oc-
cam, franciscain, reprit la cause du NomineUisme. 11 eut
pour protecteur Philippe le Bel et l'empereur Louis de
Bavière, pour lesquels il prit parti contre Boni face VI II ( t
Jean XXII. Plus tard les Nominalistes furent pcrsécut''^
^ par Louis XI. Les Thomistes et les Scotistes se réunirent
' pour combattre une doctrine qui, dans la bouche d'Oc-
cam et des siens, annonçait une tendance as&az pro-
noncée au sensualisme et au scepticisme. Les principaux
nominalistes d'alors furent, après Occam, Gabriel Bict,
Durand de Saint-Pourçain, Jean Buridan, Pierre d'Ail-
ly, etc. Gerson, une des plus imposantes ri«:urcs du
moyen âge, ne fut pas un réaliste exclusif: dans son
traité De Concordiâ Metaphysicœ cum Logicâ, il tente
un accord déjà cherché par Abailard; il accomplit l'œuvra
de la dernière époque, qui était de juger les précédentes,
Gerson est surtout célèbre comme mystique ; sa Theologia
mystica présente le mysticisme comme un système bien
distinct, ayant ses conditions et ses lois. A partir de la
fin du XIV* siècle, la Scolastique s'eiïace graduellement;
les découvertes, les événements religieux et politiques
annoncent une ère nouvelle. Elle avait touché à toutes
les grandes questions qui intéressent riiommc, et, sans
les avoir résolues, elle ne fut pas ?^ns influence ni sans
utilité pour les progrès de l'esprit humain dans les àgi^s
suivants.
Deux éléments constituent la Scolastique : l'esprit du
catholicisme, et la philosophie proprement dite, mais,
dans celle-ci, la Logique surtout. De là sa méthode et
son principe. Sa méthode 6iait le procédé déductif; son
instrument, le syllogisme. Une majeure étant donnée,
en tirer la conséquence : telle était Tunique tâche qui
semblait lui être dévolue; ce qui aurait fait de la philo-
sophie au moyen âge la servante de la théxilogie. si une
soumission complète eût été possible. Son principe éuit
le principe d'autorité, ce qui ajournait le libre examen.
Il était diflicile qu'il en fût autrement : au sortir de !a
barbarie, l'esprit humain ne pouvait pas trouver, dans les
écoles fondées par Alcuin et Charlcmagne, la méthode
d'observation et d'analyse qui ne fut en usaî^ que long-
temps après. Cependant, si l'emploi exclusif du procédé
déductif eut de grands inconvénients , il produisit aussi
d'heureux résultats, en soumettant l'esprit et le Ianp:age
aux habitudes sévères du raisonnement. V. Thomas! us.
De doctoribus scolasticis, Leipzig, 1676, in-^*; Salaber-
tus, Philosophia Nominalium vindicat^ , Paris, 1051,
in-8°; Ch. Meiners, De Nominalium ac Realium initiis,
dans le t. XII dcsCommentairesdela Société de Goettingue;
Saint-René Taillandier, Jean Scot Erigène et la philoso-
phie scolastique, 1S43; Cousin, Fragments philosophi-
ques, t. III; Patru, De la philosophie du moyen âge^
in-8°; X. Rousselot, Études sur la philosophie du moyen
âge, Paris, 1840-42, 3 vol. in-8**; Do Caraman, ffistoire
des révolutions de la philosophie en France, 1847, 3 vol.
in-8<^; B. Hauréau, De la philosophie scolasttque, 185U,
2 vol. in-8o. R.
SCOLASTIQUES , nom par lequel on désignait, chez
les Romains, les maîtres d'éloquence attachés aux écoles
impériales.
SCGLIES, couplets chantés vers la fin des repas chci
les Grecs, et dont Terpandre passait pour être l'inventeur.
Plutarque donne quelques détails à ce sujet, dans son
livre des Propos de table, à la fin du l**" Problème. Il
ne reste rien , ou à peu près, des scolies de Terpandre,
d'Alcée, de Sappho; nous en avons un d'Hybrias de Crète,
un de Gillistratc d'Athènes, et quelques fragments de
ceux de Pindare. Scotie vient du grec skolios (oblique
tortu), soit à cause de la course irrégulière de ce cluin*
autour de la table, soit à cause des irrégularités de forme
et des licences métriques qu'on s'y permettait. V. //iï-
toire de l'Académie des Belles- Lettres, t. IX, p. 330.
SCORDATURA, mot italien qui n'a pas d'équivalent
en français, et qui signifie l'action de désaccorder les in-
struments pour produire des efl'cts particuliers. Le fSi-
meux violon Paganini fit souvent usage de la scordatmra;
les guitaristes y ont aussi recours.
scu
1627
SEC
8C0BPT0N, machine de gaerre. V. notre Dictionnaire
d$ Riographie «t d'Histoire.
SOOTIE, moulure ronde en creux bordée de deux fllets
plats, qui se place entre les tores des bases attiques,
corinthiennes, et composites. LorsquMI y en a deux dans
une môme base, comme à la base corinthienne, on les
nomme scotie supérieure et scotie inférieure. La scotie
s'appelle aussi Rond-creux et TrochUe (du grec irokkos,
roue, cercle).
SCOTISTES. V. SCOLASTÎQOB.
SCRAMSAX ou SCRAMASAX , poignard à double tran-
ant doit se servaient les Franks.
SCI\EEN. V. ÉCRAN.
SC-RIBE (du latin scriba, écrivain), celui qui fait le
mH\eT de copiste. A la cour des rois de Juda, le mot Scribe
(ir-sif^naît un haut personnage, faisant l'office ^e secrétaire.
Dans Jérémie et les Machabées, il est appliqué & un com-
missaire d'armée, chargé de faire le dénombrement des
troupes. Le plus ordinairement, la Bible appelle Scribes
les docteurs qui interprètent la loi, qui copient et expli-
quent les livres saints; on distinguait : 1" les scribes de
la loi, dont les décisions étaient reçues avec respect;
3* les scribes du peuple, qui étaient des magistrats; 3° les
scribes communs, remplissant les fonctions de notaires
publics ou de secrétaires du Sanhédrin. Chez les Grecs et
les Romains, les Scribes étaient des employés subalternes
qui transcrivaient les lois, lesédits, les juf^^ements et tous
les artes publics : il y avait des scribes prétoriens , ques-
ioriens, ediliens, etc.
SCRINIUM. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
SCRlPTlOiSAL, nom donné autrefois au pupitre que
l'on se mettait sur les genoux pour écrire, ou qui était
monté sur pieds.
SCRIPTORILM, salle des grands monastères où Ton
transcrivait des manuscrits.
SCROBICl^LUS. K. Autel.
SCRUTIN ( du latin scrutari, fouiller, examiner), opé-
ration qui consiste h recueillir les suffrages d'une assem-
blée délibérante. Dans le scrutin secret , chaque votant
d(''pose dans l'urne une boule blanche ou noire, qui
exprime son vote; la boule blanche signifie l'acceptation,
la boule noire le rejet de la proposition ou du projet sur
lequel on délibère. Dans le scrutin public , les votants
écrivent sur un bulletin leur nom avec oui et non. En
matière d'élections, on distingue le scrutin simple, ou
individuel , dans lequel les votants ne désignent sur leur
bulletin qu'une seule personne, et le scrutin de liste, où
Ton écrit sur le bulletin autant de noms qu'il y a de no-
minations à faire. Les Scrutateurs sont ceux qui recueil-
lent les votes et en font le dépouillement. — Ancienne-
ment on appelait scrutin l'assemblée où l'on examinait
les dispositions des catéchumènes.
SCU DO, monnaie. V.no^re Dictùmnairê de Biographie
et dHistoire.
SCULPi'URE, en latin sculpfura [dQSCulpere, graver,
tailler au ciseau) , l'un des Beaux-Arts ( V. ce mot) , celui
qui forme une figure, une image, un ornement quel-
conque, soit en taillant à Taide du ciseau une matière
dure, comme le bois, l'ivoire, la pierre, le marbre, etc.,
soit en façonnant une pâte molle, soit en coulant des
métaux. Envisagée par rapport aux objets qu'elle repré-
sente, la Sculpture comprend la Statuaire ou représenta-
tion des figures animées, et la Sculpture d^ornements,
qui est inséparable de l'Architecture. D'après la manière
dont elle représente les objets , elle se distingue en ronde-
bosse ou plein relief, et en bas-relief ( V. ces mots). Enfin
au point de vue des procédés employés , cet art embi*asse
la statuaire, la sculpture proprement dite, le modelage,
la ciselure, et Tart du fondeur (F. ces mots ). On a réussi,
depuis le xvfii* siècle surtout , à exécuter par des pro-
cédés purement mécaniques la plupart des ouvrages de
sculpture. Les principaux de ces procédés sont le mou-
lage, le tour à portrait, Vestampage ( V. ces mots).
Sur l'histoire de la Sculpture, on peut consulter, outre
les articles de ce Dictionnaire qui lui ont été consacrés
pou*- chaque pays, les auteurs suivants : Émeric David,
Bec'erches sur Vart statuaire, 1805, et Hiataire de la
sculpture française. puhWée par P. Lacroix et Duseigneur,
1853; Cigognara, Histoire de la sculpture, en italien,
Venise 1K13, et Prato, 1824: de Clara'-, Musée de sculp-
ture au/ique et moderne, 1827-52 ; Flaxman, leçons sur
la scilpture, Londres, 1829; Folkstone Williams, His-
toire de la sculpture sur bois, en anglais , Londres, 1835.
sc! i.pTf PE { Académie de Peinture et de). V, Peinture.
SCURAA , nom que les anciens Romans donnaient à
tout citoyen pauvre qui s'attachait à un riche et se fai-
sait nourrir par lui. Les scurrœ ayant cherché à se rendre
agréables par toutes sortes do flatteries, de bassesses et
de farces, leur nom devint synonyme de parasite et de
bouffon.
SCUTUM. i V. ces mots dans notre Dictionnaire de
SCYTALE. I Biographie et d'Histoire.
SCYTHIQUE (Ordre). V. Ordre de bataille.
SCYTHIQUES (Ungucs), dénomination qu'on ap-
plique quelquefois aux langues ouralo-altaïques ( V, ce
mot).
SDRUCCIOLO , mot italien employé en Musique pour
indiquer une certaine manière de glisser enharmonique-
ment avec la voix sur quelques sons. C'est un agrément
employé surtout dans le Cantabile.
SKBKHA, nom domié en Afrique à des lacs formés au
milieu de montagnes sans issue par les eaux qui viennent
s'y réunir. Ces eaux sont généralement chargées de sel ,
dont le sol est imprégné. Elles s'évaporent pendant les
chaleurs de l'été, et finissent quelquefois par disparaître.
SECEDERS, nom d'une secte dissidente de l'Kglise
presbytérienne d'Ecosse. Cette secte remonte h 1733: elle
n'a rien changé aux doctrines, mais son organisation est
essentiellement démocratique; tous les fidèles concou-
rent à l'élection de leurs prêtres , qui ne connaissent au-
cune hiérarchie.
SÉCHERESSE, défaut du style qui consiste à ne faire
qu'indiquer les idées, à ne leur donner aucun dévelop-
pement , à omettre tous les détails. Le style précis dit
tout ce qu'il faut; le style sec ne le dit Jamais. Les id('>e3
qu'il exprime sont incomplètes, et l'on ne voit pas le
rapport qu'elles ont entre elles ; la composition manque
alors tout à la fois de clarté et d'intérêt.
SECHOUANA. V. Siciiouana.
SECONDE, nom donné, dans les établissements d'in-
struction publique, à la classe qui vient au-dessous de la
Rhétorique, celle-ci étant considérée comme la Première.
SECONDE, en termes de Musique, intervalle dissonant
d'un degré conjoint. La seconde mineure est formée d'un
demi-ton {ut k ré bémol); la seconde majeure, d'un ton (ut
à ré naturel ) ; la seconde augmentée, d'un ton et demi ( tU
à ré dièse). — L'accord de seconde, composé du son fon-
damental dissonant, de sa seconde, de sa quarte et de sa
sixte {fa, sol , si,ré) , est le 3» renversement de l'accord
de septième : la seconde peut être mineure, majeure ou
augmentée, la quarte juste ou augmentée, et la sixte ma-
jeure ou mineure. Vaccord de seconde et quinte est com-
posé du son fondamental, de la seconde et de la quinte
(fa, sol, ut) '. h quatre parties on y aioute ou la sixte
Ifa, sol , ut, ré) , ou la quarte {ut, ré, fa ,,sol), ou la
tierce {mi, fa, sol dièse, si) ^ ou la septième {fa, sol,
ut, mi).
SECONDE , en termes d'Escrime, coup d'épée qu'on allonge
à son adversaire de dehors et sous les armes. C'est comme
la tierce , si ce n'est que la lame passe sous le bras de
l'adversaire ; de là le nom de tierce basse qui lui est aussi
donné.
SÉCOS, nom donné au naos ( V, ce mot) des temples
égyptiens.
SLCOURS AUX ASPHYXIÉS ET AUX NOYÉS. Un
échevin de Paris, nommé Pia, eut le premier l'idée, en
1772, de former des établissements pour ce genre de
secours; il fit établir des boites fumigatoires. Ces instru-
ments furent perfectionnés ensuite par Seanegatti , et en-
fin, en 177ft, les boites de secoura, telles qu'elles existent
aujourd'hui, furent composées d'après les avis de Réaumur
et de Portai. Une instruction, rédigée par ordre de l'Ad-
ministration, approuvée par le Conseil de salubrité en
1850, et affichée dans chaque corps de garde, indique les
secours à donner aux asphyxiés et aux noyés ; une boite
de secours doit être déposée dans les mêmes lieux.
SECOURS MUTUELS (Sociétés de), sociétés formées par
des personnes qui versent périodiquement dans une caisse
commune une certaine cotisation, pour venir en aide,
dans une mesure fixée à l'avance, aux sociétaires vic-
times des chances prévues par les règlements (chômage,
maladie, etc.). De tout temps, les corporations, confré-
ries et associations suscitées par l'espnt religieux, par la
politique ou par l'intérêt industriel, ont assisté ceux de
leurs membres qui tombèrent dans le besoin; mais cette
assistance était arbitraire, elle dépendait des générosités
individuelles, et le secours ne pouvait être ni fixe ni
certain. Au contraire, dans les sociétés de secours mu-
tuels , la quotité des mises des .sociétaires, les condi-
tions, la forme et la proportion de l'assistance, sont dé-
terminées. Le premier essai en France fut fait en ilbk
SRC
1628
SËE
par les six corps des marchands de Paris, soas le nom
de Maison d* association; l'entreprise eut peu de suite.
Il en fut de même d'une Compagnie d'assurance pour la
santé, proposée en 1770 par Cliamousset. A la Révolu-
tion^ jcs ouvriers ayant voulu s*associer par spécialité
dN^tat, l'Assemblée (^.onstituanto s*y opposa par décret du
1i juin 1791 : c'était, disait-on, l'office de la nation de
fournir du travail aux valides et des secours aux in-
firmes ; mais l'État prenait ainsi des engagements qu'il
ne devait ni ne pouvait tenir. En 1702, un médecin, Mar-
sillac, conçut le projet de Sociétés civiqties qui assure-
raient des secours aux artisans rnïilad&H et nécessiteux ,
et de Maisons d'industrie qui donneraient gratuitement
à teurs enfants une certaine éducation et des métiers.
Toutefois les sociétés de secours mutuels formées par des
ouvriers laborieux et économes ne se sont établies que
depuis le commencement du \i\* siècle. En 1800, la
Société Philanthropique de Paris institua dans son sein
un Comité chargé d'étudier l'organisation et de favoriser
le développement de ces sociétés; en 1820, elle publia
une instruction détaillée sur l'économie des Sociétés
d'amis {Friendly societies) qui existaient déjà depuis
longtemps en Angleterre. Depuis la Révolution de 1830
surtout, l'appui et le patronage des municipalités firent
naître diverses associations dans les départements, par
exemple à Rouen et à Nantes en 1832, à Metz et h Niort
en 1838, à Poitiers en 1840, à Colmar en 1840, à Mul-
house en 1847.
Les sociétés de secours mutuels sont des institutions
e^^sentiellemcnt locales. Leur intervention e^t préférable
à tout autre mode d'assistance, parce qu'elle ne peut
jamais avoir l'apparence humiliante de l'aumône. Dans
le plus grand nombre de localités, elles sont ouvertes à
dus personnes de toute condition, et peuvent être com-
posées à la fois de membres elTectifs, soumis aux mêmes
contributions, jouissant des mômes droits, et de mem-
bres honoraires, qui, tout en payant là cotisation conve-
nue , renoncent à profiter des profits qu'offre l'associa-
tion. Dans les villes les plus importantes, les sociétés
sont, formées entre personnes de même profession ; elles
ont l'avantage de constituer autant de familles, vivant de
la même vie, animées du même esprit de confraternité,
où l'on apprécie mieux les besoins de chacun, et où il
est difficile de se faire donner des secours sans* y avoir
droit; mais elles ont aussi un danger, c'est de pouvoir
plus facilement dégénérer en foyers de coalitions indus-
trielles et même d'agitations révolutionnaires. Une loi
du 15 juillet 1850, sans porter atteinte à la liberté des
sociétés, a offert certains privilèges à celles qui se fe-
raient reconnaître comme établissements d'utilité pu-
blicfue. Pour obtenir ce titre, elles doivent : 1° se borner
à distribuer des secours temporaires, et ne point pro-
mettre de pensions de retraite; 2° compter au moins 100
membres, et ne pas dépasser 2,000, & moins d'autorisa-
tion ministérielle accordée sur la demande du maire et
du préfet ; 3" accepter la protection et la surveillance de
l'autorité municipale; 4° fixer la cotisation de leurs
membres d'après les tables de maladie et de mortalité
dre>sées ou acceptées par le |!;ouvernement. A ces condi-
tions, elles possèdent le droit de recevoir des donations
et legs dûment autorisés, celui de faire des dépôts aux
caisses d'épargne, l'usage jE^tuit des locaux nécessaires
à leurs réunions, l'exemption des droits de timbre et
d'enregistrement pour les actes qui intéressent l'asso-
ciation, et on leur donne les livrets et registres requis
pour l'administration et la comptabilité. Un décret du
26 mars 1852 a cherché à écarter les périls que pour-
raient présenter les sociétés de secour» mutuels : pour
être approuvées^ elles doivent réserver an chef deTEtat
In nomination de leurs présidents, consacrer l'admission
de membres honoraires^ ne pas promettre de secours en
cas (le chômage, stipuler qne le nombre des membres net
peut excéder 500 (à moins d'une autorisation préfecto-
rale), n'apporter aucune modification aux statuts et au
règlement, sans autorisation préalable. Au 1" janvie*
18H8, on comptait en France 4,1 27 Sociétés approuvées^
et l,7(i2 Sociétés simplement ati/o/'}>^f^. Les premières
comptaient plus de 700,000 membres participants; le
nombre des membres honoraires dépassait 1 00,000. Les
secondes ne comptaient que 9,096 membren honoraires
et 108,383 membres participants. L'avoir total des so-
ciétés était d'environ 46 millions.
Kn Angleterre , les Sociétés d^amis ont pris un déve-
loppement considérable. On voit, par un rapport présenté
à rAsscmbh'c lé?;islativc de France, le 0 octobre 1849,
qu'il y avait alors 33,223 sociétés, comprenant 3,052,000
individus, et possédant un revenu annuel do 1S5 mil-
lions de francs et un capital accumulé de 280 millions;
elles embrassaient donc la moitié de la population mâle
et adulte. — V, Cerfbeer, Des sociétés di bienfaisance
mutuelle, 1830; Deboutteville, Des sociétés de prévoyance
et de secours mutuels, Rouen, 1842; Ad. Bernard, Trailé
pratique dès Sociétés de secours mutuels, Paris, 1853;
Laurent, Études sur les Sociétés de prévoyance oude se-
cours mutuels, 1856, in-16. ^ B.
SECOURS PUBLICS^ V. Assistance, BnsiiPAiSARCB,
Charité légale. Police, etc.
SECRET, en latin secretum (de secemere, mettre à
part ). En termes de Procédure criminelle, mettre au
secret, c'est isoler un prisonnier, et l'empêcher d'avoir
aucune communication, même avec ses codétenus. La
mise au secret ne peut avoir lieu qu'en vertu d'une or-
donnance dtf juge d'instruction ou du président des
assises. — Quiconque, chargé ou instruit soit officielle-
ment, soit à raison de son état, du secret d'une négo-
ciation ou d'une expédition, le livre aux étrangers ou
ennemis, est passible de la déportation {Code pénal,
art. 76; Loi des 8-16 juin 1850). — L'action de livrer des
secrets de fabrique à quelqu'un en France est punie d'un
emprisonnement de 3 mois à 2 ans, et d'une amende de
10 à 200 fr. ; si c'est à un étranger, l'amende est de 500 à
20,000 fr., plus une condamnation à réclusion {Code
pénal, art. 418}. — Pour le secret des lettres à la poste,
V» Lettre.
SECRÉTAIRE , meuble où Ton renferme les papiers
précieux, et sur lequel on peut écrire. Les secrétaires ont
souvent des serrures à secret ; l'art de l'ébéniste s'y dé-
ploie dans toute sa richesse.
SBCRéTAiRE, cclui dout l'emploi est de faire et d'écrire
des lettres, de rédiger des actes, pour une personne à
laquelle il est attaciié. Dans les Ministères et dans les
graiides Administrations, il y a des secrétaires généraux,
secrétaires du cabinet ou chefs du secrétariat, qui ont
mission d'ouvrir et de distribuer les lettres, de contre-
signer les actes administratifs, etc.
SBCRéTAiRES o'éTAT. ) V. notre Dictionn, de Bio^
SKCR^AiRES DR LA If AIN. ] graphie et d'Histoire.
SECRëTARIUM, abside secondaire des basiliques, ser-
vant de sacristie.
SECRÈTE , oraison que le prêtre récite teat bas à la
messe, immédiatement avant la Préface. — On nomme
tables des secrètes les trois tableaux d'autel sur lesquels
l'officiant lit le Canon de la messe, le Lavabo, et l'Évan-
gile de S^ Jean.
SECTE (du latin secta\^ parti composé de personnes
qui font profession de la 'même doctrine. Le root était
employé chez les Anciens pour désigner les écoles phi-
losophiques ou les partis politiques : ainsi, l'on disait la
secte stoïcienne, la secte de César, etc. Pour les Mo-
dernes, il ne s'applique guère qu'aux partis religieux, et
ceux qui s'en servent en parlant de leurs adversaires y
attachent une idée d'erreur.
SÉCULAIRE (Poôme), nom donné chez les anciens
Romains aux pièces de vers qui se chantaient ou se réci-
taient aux Jeux Séculaires {V. ce mot dans notre Diction-
naire de Biographie et d'flistoire). Nous avons un poème
séculaire {Carmen seculare) d'Horace.
SÉCULARISATION, i V. notre Dictionnaire de Bith
SÉCULIER (Clergé). I graphie et d'Histoire.
SÉCURITÉ PUBLIQUE, condition essentielle de l'exis-
tence et de la prospérité des nations. Elle embrasse la
sûreté de l'État, la protection des personnes et des pro-
priétés. L'autorité qui en est chargée se nomme Pmtcf,
dans le sens le plus large de ce mot. V, Police.
SÉDANOISE. V. Caractères d'imprimerie.
SÉDITION, en latin seditio (de sedis exitio, action de
sortir du repos), révolte contre l'action légale des agents
du pouvoir. Tout ce qui tend à compromettre la sûreté
intérieure ou extérieure de l'État, la résistance avec at-
troupement aux ordres légaux de ceux qui sont revêtus
de l'autorité publique, la dévastation et le pillage publics,
les violences commises par plusieurs individus réunis
dans le but d'empêcher autrui d'exercer ses droits civils
ou politiques, les provocations à la révolte par discourt
publics, placards affichés, écrits imprimés ou non im-
primés, constituent le crime de sédition, puni nar les
art. 60 et 82 du Code pénal. V. Attrodpevent, âiEim,
RÉBELLION.
SÉDUCTION, y. Corruption, Enlèvement.
SÉEZ (Église Notre-Dame, à). Quelques antiquaires
normands ont prétendu que ce monument remontait aux
premières années du xi* siècle ; mids les caractères ar-
SEI
1629
SËM
ehitectoniques de rédlflce permettent d'affirmer que le
corps est de la fin du xii* siècle et du commencement
du XIII*. Oii sait, d^ailleurs, qu'une église antérieure fut
brûlée en 1048, et qu'une autre, pour laquelle on avait
voulu employer les antiques fondations, s'écroula en
IIU. Une consécration nouvelle eut lieu en 1126, et les
travaux duraient encore 80 ans plus tard. La cathédrale
de Séez subit ensuite des retouches nombreuses : ainsi,
la nef, bâtie au commencement du xiii* siècle, fut rema-
Dire dans sa partie supérieure un demi-siècle après ; le
chœur, presque entièrement détruit par un incendie,
dut ùtrc repris de fond en comble vers 1260; vers la fin
du XIV* siècle, on renforça les contre-forts extérieurs du
chœur. Toute la construction a fait de sérieux mouve-
ments, ct^ malgré de fréquentes réparations, la cathé-
drale de Séez est un monument fort compromis. A l'en-
trc-(Toi<«oment des nefs et du transept , s'élevait une
pyramide; on lui substitua, au xvii* siècle, un dôme
quadrangulaire, qui lui-même a fait place à une flèche
aiguô en forme d'obélisque. — L'extérieur de la cathé-
drale de Séez n'a rien de remarquable , sauf le grand
portail, qui est d'une sévérité imposante, et qui pré-
sente, au-dessus de la porte d'entrée, deux étages d'ar-
cades, disposition à peu près unique en France. Les sta-
tues et les autres sculptures ont été mutilées.. Les deux
tours, surmontées de flèches iné^les et dont la plus
élevée atteint 75 met., produisent un bel effet. L'inté-
rieur de rédifice se distingue par la légèreté de l'en-
semble et l'harmonie des parties ; les voûtes sont large-
ment exécutées; les piliers, d'un profil élégant et hardi,
ont des chapiteaux formés de riches feuillages. Les ar-
cades et les fenêtres passent de l'ogive très-obtuse à
Togive aigu 6 en descendant vers l'entrée. La portion la
plus belle est le chevet, avec ses cinq chapelles profondes;
malheureusement la voûte du chœur, primitivement en
pierre, s'est écroulée au commencement de notre siècle,
et n'a été reconstruite qu'en bois. Le chœur contient
quatre bas-reliefs d'un bon style, et dont les sujets sont
tirés de la vie de la S^* Vierge. Il y en a un autre très-
beau à l'autel, qui représente l'extraction des reliques de
S* Gervais et de S* Protais. Les deux extrémités du tran-
sept ont été décorées de deux magnifiques roses au
XVI* siècle. B.
SÉGESTE (Ruines de), en Sicile. Ces ruines, indépen-
damment de quelques débris informes, se composent
d'un temple et d'un théâtre. Le temple, environné de
profonds ravins, parait avoir été isolé de la ville, et l'on
oe sait à quelle divinité il était consacré. Il est d'ordre
dorique, et forme un rectangle allongé, de 59 met. de
longueur sur 25 de largeur ; 36 colonnes l'environnent ,
dont 6 sur chacune des faces orientale et occidentale, et
reposent sur un stylobate divisé en quatre gradins; elles
ont 9'",30 de hauteur, 2"* de diamètre, et supportaient
un entablement gigantesque de près de 3™. Des avances
laissées aux pierres de la base, et quelques traces de
cannelures commencées, donnent lieu de croire que l'édi-
fice ne fut pas achevé ; il semble aussi qu'il n'eut jamais
de toiture. Le thé&tre de Ségeste, situé à 200 met. du
temple, est tourné vers l'occident : la partie circulaire,
adossée à un rocher et composée de 20 rangs de gradins,
a 115 mot. d'étendue; une galerie s'étend derrière les
gradins, et reçoit 5 escaliers, dont deux, aux extrémités,
répondent à des vomitoires communiquant avec la mon-
tagne.
SÉGOVIE (Alcazarde). K. Alcazar.
séGOViB (Aqueduc de), monument romain dont la grâce
et la légèreté rappellent notre pont du Gard. Il en reste
encore 119 arcades sur deux et parfois trois rangs su-
perposés; les pierres en ont été taillées avec une ex-
trême précision, et ne sont liées entre elles par aucune
o>pèc6 de ciment. Cet aqueduc, qui atteint une élévation
r'o 34 met., traverse toute la ville, sur une étendue de
^18 met., et domine la plupart des maisons situées dans
' i partie basse.
SEGUIDILLA, forme de vers particulière. à la poésie
espagnole {V. Espagnole — Poésie); — air de chant et
de dianse à 3 temps et d'un mouvement rapide. Il est
moins étendu que le boléro et le fandango, dont il a le
caractère; la ritournelle se fait entendre au commence-
ment et même au milieu de chaque couplet.
SEID. I V, ces mots dans notre Dicttonnaire de
SEIGNEUR, f Biographie et (f Histoire.
SEILLE, ancien vase particulièrement employé pour
porter Teau bénite.
SEIM , nom que portait autrefois la Diète de Pologne.
SEINE ou SENNE , filet de pèche, beaucoup plus long
Sue large, garni en tête de flottes et en bas de plombs ou
e cailloux, et que l'on traîne sur le fond des eaux et sur
les grèves.
SEING (du latin signurrif signe, marque), signature
apposée par une personne au bas d'une lettre ou d'un
acte, pour les confirmer ou les rendre valables. Un blanc
seing est un papier signé d'avance et que l'on confie à un
tiers pour qu'il le remplisse à volonté. On appelle Seing
privé une signature qui n'a point été faite en présence
d'un officier public, et on oppose les Actes sous seing
privé aux Actes notariés ou authentiques. Toutes les
transactions de la vie privée peuvent être faites sous
seing privé, excepté les contrats de mariage, les dona-
tions, les actes respectueux, les constitutions d'hypothè-
ques, les sociétés anonymes, les emprunts avec subroga-
tion. Les parties peuvent charger des tiers de rédiger
leurs actes sous seing privé; mais il est d'usage qu'elles
mettent au bas : Approuvé Vécriture ci-dessus, et elles
doivent les signer. Les personnes qui ne savent pas si-
gner ne peuvent faire des actes sous seing privé en y
apposant seulement une croix. Tout acte sous seing privé
contenant des conventions synallagmatiques doit, à peine
de nullité, contenir la mention expresse qu'il en a été
fait autant d'originaux qu'il existe d'intérêts distincts.
Ces actes sont soumis au timbre; la formalité de l'enre-
^strement leur donne seule une date certaine et authen-
tique, et ceux qui ne l'ont pas sont rejetés par les tribu-
naux. V. Biret, Manuel des actes sous signatures privées,
1836, inS° ; Malepeyre, Traité jfratique des actes privés,
1836, in-18; Pivert, Fonnulaire universel et raisonné
des actes sous seing privé, 1844, in-8*; Frémy-Li^ne-
ville, Dictionnaire général des actes sous seing privée
1850, 2 vol. in-8°; Lhoste, Le Praticien de la ville et de
la campagne, 1852, in-12; Lecerf, Traité complet des
actes sous seing privé, 2* édit., 1854, in-12 ; Pilard, Jlfct-
nuel des a^tes sous seing privé, 1856, in-12.
SEL (Impôt du). V. Gabelle, dans notre Dictiennairf
de Biographie et d^ Histoire,
S^XAM. V. Fleurs (Langage des).
SÉLANDRE. V. CHéL\NDB.
SÊLINONTE (Ruines de), en Sicile. Ces ruines, fort
intéressantes pour les antiquaires, et les architectes , ne
présentent au premier abord que des monceaux de co-
lonnes,, de corniches, d'architraves, et des restes de fon-
dations et de murailles. Mais on parvient ensuite à dis-
. tingucr l'enceinte de l'Acropole, et, dans cette enceinte,
trois temples dirigés parai ièlq^inent du côté de l'Orient,
et différant entre eux par les 'dimensions. Le plus grand
a mérité le nom de Piliers des Géants que lui donnent
les habitants du pays, car c'était un des plus vastes de
l'antiquité grecque : sa longueur est de 110 met., et sa
largeur de 49 met. Deux métopes qui en faisaient partie,
et qu'on a transportées au musée de Palerme, rappellent
les types de la sculpture égyptienne ; elles offrent un in-
térêt d'autant plus grand , qu'elles sont antérieures à
celles d'Kgine, et indiquent, par conséquent, le pas<age
entre le style égyptien et l'art grec. Le temple est périp-
tère et hexastyle; il est soutenu, dans sa longueur, par
17 colonnes, disposition dont on n'a pas d'autre exemple;
la hauteur des colonnes, y compris le chapiteau, est d'un
peu plus de 5 met. V. Pisani, Memoria suite opère di
scoltura in Selinunte ultimamente scoperte, Palerme,
1824 ; Harris et Angell, Sculptured Métopes discovered
amongst the ruins of the temples of the ancient city of
Selinus; Hittorff et Zanth, Architecture antique de la
Sicile, Paris, 1827 et suiv. ; Martclli, Le anlichità dei
Siculi, Aquila, 1830; Serra di Falco, Le antichità délia
Sicilia, Palerme, 1834-37.
SELLE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire.
SELLETTE, petit siège de bois fort bas sur lequM,
avant 1780, on obligeait un accusé de s'asseoir pour subir
le dernier interrogatoire, lorsque les conclusions du mi-
nistère public tendaient à une peine afilictive.
SELLIERS, ancienne corporation, qui avait S' Éloi pour
patron. Elle absorba les Chapuiseurs. Les limites qui la
séparaient de celles des Bourreliers et des Lormierz
furent souvent assez incertaines.
SEMAINE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio*
graphie et d^Histoire,
SEMAINIER, celui qui est chargé de faire un service
quelconque pendant huit jours de suite.
SÊMANTflRION ou SÊMANTRON, instrument de per-
cussion des Grecs, consistant en une planche sur laquelle
on frappait avec un marteau. C'était une espèce de cré-
celle, dont on se servit dans l'Église grecque pour appeler
SÉM
1«30
SEM
les fidèles aax offices de la Semaine sainte, quand les
cloches sont muettes.
SÉMAPHORE (du grec sema, signal, et p1iérô,JQ porte),
m&t établi sur une côte ou dans un port, et qui sert, au
moyen d'ailes semblables à celles du télégraphe aérien, à
faire des signaux.
St^MBELLA, monnaie romaine. V. notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
SÈME ou SEPME (du latin septimus, septième), vieux
mot désignant le service mortuaire qui se faisait autrefois
le 7* jour aprè» le décès.
SÉMÉIOLOGIE, SÉMÉIOGRAPHIt: (du grec sêméion,
signe ), termes employés Quelquefois en Musique comme
synonymes de iVotofton (K. ce mot),
SEMESTRE (Congé de). V. Congé.
SEMI-BRÈVE, ancienne note de Musique, en forme de
losange. Elle correspondait à ce que nous nommons la '
ronde.
SEUI-DOUBLE, degré de festivité en usage dans TE-
glise catholique, et placé entre le Double et le Simple.
SEMI -FUSA, ancienne figure de notation musicale,
répondant à notre croche.
SÉMINAIRE. j V. notre Dictionnaire de BioQror
SEMIS, monnaie. ( phie et d* Histoire»
SÉMITIQUES (Langues), dénomination introduite dans
la science par Eichhorn pour désigner les langues parlées
par les peuples Sémites, et qui a remplacé relie de Lan"
gués orientales, devenue, par TefTet des progrès des étu-
des, insv:fTisante et peu pri^rise. Elle est elle-même dôfec-
tiifîuse, en admettajit les données ethnologiques de la
Bible, puisque les Phéniciens, dont Tidiomc appartient
a cette famille, descendent de Cham, et que les Elamites
ou Perses, do race sémitique, ne parlaient pas une
langue si^mitique. La famiile des langues sémitiques se
divise en trois branches : 1* Varaméen , comprenant le
chaldéen et le syriaque ; 2" le cananéen, dont font partie
]q phénicien et V hébreu; 3° V arabe, auquel on peut ratta-
cher Véthiopien {V. ces mots). Ces langues pressentent les
caractères suivants, qui les distinguent essentiellement
des langues indo-européennes {V. ce mot) : racines pres-
que toujours composées de trois lettres ; système gram-
matical où dominent surtout la roideur de l'élément
consonnant et la fluidité de l'élément vocal \ système or-
thographique d*apr^ lequel il n'y a que les consonnes
qui s'écrivent comme base véritable du mot, tandis que
les voyelles n'y sont qu'accessoirement indiquées lors- ^
Su'elles ne sont pas le plus ordinairement supprimées '
ans l'écriture; prédominance des sons gutturaux. Tandis
que les formes pour les divers temps manquent à la con-
lugaison, il y a abondance d'inflexions aptes à modifier
la signification et à étendre la valeur des verbes, à la fin
desquels s'unissent les suffixes des noms personnels.
Dans le rapport du génitif, c'est le substantif qui se mo-
difie au lieu de l'adjectif. Privées de particules et de con-
jugaisons propres à préciser le rapport des paroles entre
elles, les langues sémitiques ne sont pas de nature à
élever l'esprit à des idées abstraites et spéculatives : elles
sont, en revanche, très-favorables aux simples récits
historiques, et k une exquise poésie de pures impressions
et de sensations se succédant avec rapidité. Aussi n'ont-
elles fourni aucune école de philosophie rationnelle, et,
ians leurs plus sublimes compositions, on ne rencontre
Î>as un seul élément de pensée métaphysique. Les plus
lautes révélations de la foi, les prophéties les plus ef-
frayantes, la plus sage morale, sont, dans la Bible, re-
vêtues d'imaptes -corporelles : il faut en dire autant du
Koran.
Un phénomène assez surprenant, c'est que la fa-
mille des langues sémitiques s'est réduite avec le temps
à un seul idiome, l'arabe : aujourd'hui, tout ce qui s'écrit
en sémitique dans le monde s'écrit sans la plus légère
nuance de dialecte; les idiomes parlés eux-mêmes diflè-
rent assez médiocrement l'un de l'autre. Tandis que les
langues indo-européennes ont eu la facilité de former des
langues analogues, et que le latin, par exemple, engen-
dra les langues néo-latines, les Ian;;uo.s sémitiques ont
abouti à l'unité, mais non par développement orga-
nique. Ces langues ont aussi une nature primitive qui
!d3 distingue des autres. Partout, en effet, les langues
nous apparaissent, à leur début, synthétiques, obscures,
compliquées, chargées de flexions pour exprimer les rap-
ports infiniment délicats de la pensée ; l'esprit y accu-
mule les éléments dans une confuse unité, et perd dans
le tout la vue analytique des parties : le besoin d'un lan-
gage facile porte les générations postérieures à aban-
donaer la langue savante des ancêtres ; des dialecte» plu|
clairs, plus explicites, correspondant à des progrès d*ana«
lyse, séparent ce que les anciens assemblaient , brisent
les mécanismes de l'ancienne langue, pour donner a
chaque idée et à chaque relation son expression isolée.
Au contraire, plus on remonte vers l'origine des langues
sémitiques, plus elles se montrent avec un caractère de
simplicité : plus on s'éloigne de leur berceau, plus elles
se complètent et s'enrichissent. Ce sont des langues
essentiellement analytiques; la synthèse n'existe pas
pour elles, et ce n'est qu'avec le temps et par de ion^
eiïorts qu'elles sont anivées à donner une expression
complète aux opérations logiques de la pensée. Au lieu
de rendre dans son unité 1 élément complexe du dis-
cours, elles l'expriment terme à terme. Elles ignorent
l'art d'établir entre les membres de la phrase cette réci-
procité qui fait de la période comme un corps dont les
parties sont connexes, de telle sorte que l'intelligence
de l'un des membres n'est possible qu'avec la vue collec-
tive du tout. C'est parce qu'elles furent analytiques dès
le premier jour, qu'on remarque peu chez elles la tendance
à remplacer les flexions par le mécanisme plus commode
des temps composés et des particules. V. Renan, Histoire
générale et système comparé des langues sémitiques,
Paris, 1855 ; l'abbé Leguest, Études sur la formalion des
racines sémitiques, 1858.
SEMI-TON. V. Ton.
SEMI- VOYELLES, c.-à-d. demi-voyelles, en latin sami-
vocales, en grec liémipliones , nom donné par les gi^am-
mairiens grecs aux lettres X, !&, v, p, «, C« (« 4^1 9"^*
parait-il, pouvaient se prononcer isolément, quoique
d'une manière imparfaite : ils les opposaient aux lettres
muettes, qui étaient les autres consonnes. En latin, le
nom de seini-voyolles était donné aux consonnes dont le
nom commençait par une voyelle, f, l, m. n, r, s, x {ef,
el, em, en, er, es, ix); celles au contraire dont le nom
faisait d'abord entendre la consonne, s'appelaient mti^tes^
b, c, d, p, t, etc. ( be, ce, de, pe, fe, etc.]. P.
SEMONCl^, en termes de Marine, signal que fait od
b&timent de l'État à un navire de commerce, par un coup
de canon à poudre ou à l'aide d*un porte-voix, pour lui
enjoindre de s'arrêter et de se soumettre aune visite.
SEMONCËUR, SEMONDEUR ou SEMONKUR, vieux
mots désignant autrefois le crieur d'enterrement, celui
ui distribuait les lettres d'invitation, et aussi le porteur
â cercueils
SEMUR (Église Notre-Dame, à). Fondée en 1065 par
Robert le Vieux, duc de Bourgogne, cette église fut b&îie
en moins de G ans : aussi la principale nef et le ponail
avaient-ils été seuls construits avec soin, et il fallut, ad
xiv*' siècle, reconstruire le reste. Un incendie, en 1591,
consuma les campaniles dont étaient surmontées les deux
tours du portail. La tour du Nord est aujourd'hui sur-
montée d'une horloge et d'un méridien sonnant. Au-
dessus du chœur s'élève une flèche en pierre, àiteClocher
des morts, qui renfermait autrefois un trezeau ou carillon
de 13 cloches. L'édifice entier s'élève de 9 marches au-
dessus du niveau du parvis. Il est précédé d'un joli porche
du XV' siècle, décoré de quatre contre-forts pyramidaux,
et surmonté d'aune galerie à jour : ce porche était orné, à
l'intérieur, de nombreuses statues et de riches sculprures,
qui ont été mutilées à la Révolution. Trois portes, dont
les sculptures ont été mutilées, donnent entrée dans
l'Église, qui a 66 met. de longueur. La voûte de la nef
s'appuie sur 12 piliers à colonnettes, tandis que les arc»-
doubleaux des bas côtés reposent sur des pilastres. I.es
bas côtés tournent autour du sanctuaire, qui est flanqué
de cinq chapelles absidalcs. Un triforium règne autour do
l'église; seulement, dans le chœur, il y a un double rang
de galeries. Le chœur et la sacristie sont revêtus de bci-*
séries de bon goût; le maltre-autel a été sculpté par uQ
artiste de Semur, Marion, sur les dessins de Bruzard^
Dans une des chapelles, on remarque deux volets d'autel
peints au xv* siècle, et représentant l'un l'Adoration des
Mages, l'autre la Circoncision. La chapelle dite des Dra-
piers est fermée par une belle grille en fer du xiv* siècle^
et contient d'intéressants vitraux où l'on a représenté le
tissage, la tonte, le puignage et le foulage du drap. Il y s
aussi de curievix vitraux dans la chapelle des Bouchers.
Une autre chapelle renferme un Saint Sépulc*x du
xv^ siècle. Au pied de l'escalier de la chaire, on voit une
custode en pierre, haute de 3 met., sculptée à jour avec
un goût exquis, et destinée jadis à renfermer les saintes
huiles. La porte septentrionale de l'église, appelée Porté
des blés, à cause des champs cultivés qui s'étendaient
autrefois jusqu'aux murs où elle fut ouverte, présente
quatre bas-reliefs, où l'on a représenté^ dit-oo. oerMûii
3
SEN
iG31
SEN
iklts de Ift vie de Robert le Vieax. Il existe an charmant
petit cloître sur le flanc méridional de l'église de Semur;
il est malheureusement engagé dans des constructions
plus récentes. V. Maillard de Chambure, Histoire d»
Notre-Dame de Semur, in-8«. B.
SENAGULUM. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
SKNAIRE, nom donné chez les Latins au vers lambique
tri mètre ou de 6 pieds {versus senarius). V, Iambique.
SÉNANQUE ( Abbaye de j, dans le département de Vau-
cluse. Cette abbaye cistercienne est en style roman du
XII* siècle. L'église rappelle par son plan la basilique la-
tine. A côté s'élëye un cloître quadrilatère presque régu-
lier, formé par des galeries entourant un préau : chaque
face de ces galeries se compose de quatre arcatures;
ciiaque arcature se divise en trois petites arcades plein
cintre, supportées par deux faisceaux de colonnettes ac-
coiipk^s. La voûte des galeries est à plein cintre, avec
quelques arcs-doubleaux qui portent sur des consoles ou
t(^te» grijnaçantes. La salle du chapitre est contigufi au
transept septentrional de Téglise; elle est longue de
9 met., large de 7, et la voûte en est soutenue par deux
gros piliers flnnqués de colonnettes en saillie : à Tétage
supérieur se trouvent deux pièces, dont Tune est éclairée
par une rose circulaire. Une partie des bâtiments de Tab-
baye est construite sur des voûtes au-dessous desquelles
coule un torrent.
séisatÊur I ^* ^®* ^^^ ^^"* "^^"^ ^^'
SÉNATORERIE. A^^tZ.^ Biographie el
SÉNATUS-CONSULTE. ) « «*«*o«»^«'
SENAU , grand bâtiment à deux mâts, gréé comme un
carré, et ayant un màt de tapecu.
SÉNÉCHAL. l V. notre Dictionnaire de Biogrch
SÉNÉCHAUSSÉE. ( phie et d'Histoire,
SENKSTROCHÈRE, en termes de Blason, bras gauche
mouvant du flanc dextre de Técu. Il est ordinairement nu,
et armé ou paré.
SEN LIS (Église Notre-Dame, à). Cette église, autre-
fois cathédrale, et qui reconnaît pour patrons secondaires
S^ Gervais et S* Protais, fut b&tie dans la seconde moitié
du XII* siècle. Incendiée en partie par la foudre en 150i,
elle fut restaurée sous Louis XII et François I*'. Il en
résulte qu'on trouve dans ce monument la trace de di-
verses époques architectoniques. L'extérieur de la cathé-
drale de Senlis est un peu lourd : les contre-forts sont
épais, et surmontés de deux petits clochetons à feuilles
grimpantes. La façade principale est la partie la plus an-
cienne : elle présente, à sa partie inférieure, une large
porte centrale à voussure, dont les statues, mutilées pen-
dant la Révolution, ont été rétablies par le sculpteur Ro-
binet, et deux portes latérales très -étroites; au-dessus
de la grande porte est une fenêtre à meneaux, puis trois
roses. Des deux tours du portail , l'une, celle du Sud ,
est surmontée d'une flèche élégante , à 8 pans, haute de
70 met., et Tune des plus belles de France : deux étages
de clochetons de forme pyramidale se dressent aux angles
de cette flèche , dont les arêtes sont ornées de crochets
en pierre ; son rez-de-chaussée sert de vestibule à l'un
des collatéraux. La nef et le chœur appartiennent à la
construction restaurée du xn* siècle. Les transepts furent
édifiés par Jean Desieulx pendant le règne de François I*%
et ont des portails de stjrle gothique fleuri , flanqués de
tourelles à dentelle de pierre ; de chaque côté de la porte
sont des colonnes torses; la salamandre, TF de Fran-
çois I", les fleurs de lis, se montrent parmi les orne-
ments. Les bas côtés sont surmontés de vastes tribunes,
comme & Laon, à Paris, à Chàlons, etc. Les colonnes
monocylindriques alternent avec les piliers, comme à
Noyon. La balustrade du chœur, qui était du mémo style
que les balustrades des galeries, a été remplacée, au
xvni* siècle, par de lourds balu«tres. Tandis que les co-
lonnettes des piliers de la nef montent jusqu'à la voûte,
celles du chœur ne descendent pas Jusqu'en bas, et se
terminent par des culs-de-lampe ou reposent sur Ta-
baque des chapiteaux. On remarque de belles clefs pen-
dantes dans deux chapelles latérales. L'église n*a pas de
vitraux peints; quelques essais modernes n'ont pas été
pius heureux que la restauration coloriée de la chapelle
de la Vierge. B.
SENNE , filet V. SsniB.
SENS ( Église S*-Éticni«b, à). Une première église mé-
tropolitaine avait péri par un incendie en 970 ; un autre
édifice avait été dédié en 997, lorsque, par suite d'acci-
dents graves, on le reb&tit presque entièrement de 1143 à
ii6<f. Lea bu cOtée du sanctuaire remontent au xi* siècle i
le chœur et la plus grande partie des nefs appartiennent
à la fin du xu" et au commencement du xiir, et Ton y
trouve par conséquent le style romano-byzantin à sa di*r-
nière période avec le style ogival primitif; trois arcades
à l'entrée de la grande nef, du coté droit, approchent du
temps de la Henaissance. La cathédrale de Sens se dis-
tingue donc par son architecture mélangée : elle a de la
grandeur et de la majesté plutôt que de belles propor-
tions et do riches ornements, et ne peut être placée qu'à
un rang secondaire parmi les édifices religieux de la
France. Elle a 117"\35 de longueur, 38 met. de largeur,
et 30 met. de hauteur sous*voûte. Son plan est régulier
dans l'ensemble : mais il n'y a pas de symétrie dans la
disposition des chapelles, dont on compte lU autour du
chœur et 10 le long de la nef. On remarque deux petites
absides sur le côté oriental des transepts. L'extérieur de
l'édifice est d'une excessive sc^vériié : ce ne sont que sur-
faces nues, murailles lourdes, contre-forts massifs; les
arcs-boutants sont rares et sans hardiesse, les fenêtres
étroites et peu divisées. Le portail occidental avait seul
reçu une belle ornementation ; mais les statues et les
bas-reliefs qui décoraient les trois portes ont été détruits
à la Révolution. Dans cette façade à trois portes, d'un
développement de 48 m^t., une large fenêtre rayonnante
tient la place de la grande rose que présentent la plupart
des édifices gothiques. Deux tours carrées la flanquent;
on a placé dans l'une, dite Tour de pierre, et élevée de
73 met., deux cloches famenses, fondues en 1500, la 5a-
vinienne (15,585 kilogr.), et la Potentienne (13,865 kilogr.).
L'autre, appelée Tour de plomb à cause de sa couver-
ture, a été découronnée de sa charpente en 1844, parce
qu'elle menaçait de s'écrouler. Los portails latéraux, dits
d'Abraham au nord et de S^-lUicnne au sud, furent élevés,
le premier de 141)1 àlDOG, le second au commencement
du XVI* siècle ; ils ont également beaucoup soufi'ert. A
l'intérieur, la cathédrale de Sens ofl're quelques beaux
vitraux, particulièrement ceux du chœur, de son bas côté
septentrional, et de la chapelle de S*-Savinicn, qui da-
tent du XIII* siècle; les roses des transepts, aussi très-
remarquables, furent exécutées au xvi«. Il y a des vitraux
attribués par les uns au Primatice, par les autres à Jean
Cousin ; la rose dite du Paradis est assurément de ce der-
nier. Le chœur, dont la porte est un bel ouvrage de serru-
rerie du xviii* siècle, est séparé de la nef par un jubé en
stuc, d'un goût déplorable, construit en 1072 : un beau
baldaquin, supporté par quatre colonnes de marbre rouge,
couronne le maltre-autel. On vante avec raison le mauso-
lée du Dauphin, père de Louis XVI, et de sa femme Morie-
Josèphc de Saxe, ouvrage de G. Coustou, placé dans la
chapelle de S^*- Colombe. Le Trésor, malgré les pertes
qu'il a faites, est peut-être encore le plus riche de France;
il renferme, entre autres objets précieux, ane croix à
doubles branches, donnée par Charlemagne ; un ciboire
en vermeil , qui fut volé en 1541, et pour la récupération
du(|uel on célèbre une fête annuelle; une boite ronde en
ivoire, qu'on dit être du m* siècle, et où l'on a sculpté
une chasse aux lions; une autre boite découpée à Jour,
portant des inscriptions en caractères arabes, et qui fut
apportée d'Orient à l'époque des Croisades; une boite
carrée, également en ivoire, et du xv' siècle, représen-
tant quelques scènes de la Bible; un grand coflnre en
ivoire, à l4 faces, surmonté d'un couvercle de forme py-
ramidale, bordé d'un cercle de cuivre émaillé, appelé
autrefois cat<Kombe parce qu'il contenait des reliques, et
orné de trois rangs de bas-reliefs exécutés à la fin du
xn* siècle, et empruntés à l'histoire de Joseph et à celle
de David ; le peigne de l'évèque S^ Loup, orné de figures
d'animaux et de pierreries; l'anneau du même saint; un
anneau du pape Grégoire XI (1378), cfui avait été grand
archidiacre de Sens; plusieurs bas-reliefs en argent , des-
tinés à décorer la châsse de S^ Loup et celles des SS. Po-
tentien et Savinien ; quatre magnifiques contre-retables
en tapisserie; les habits pontificaux de Thomas Becket;
un Christ en ivoire, admirable ouvrage de Girardon, etc.
V. Quantin, Notice historique sur la construction de la
cathédrale de Sens; Alex, de Laborde, Monuments de la
France, U II.
SENS, en termes de Grammaire, se dit pour signi/ico'
tion. Le sens absolu est celui qui est achevé, complet; le
sens littéral , celui qui résulte de la force naturelle des
termes. On distingue encore le sens propre, qui est la pre-
mière signification d'un mot, et le sens figuré, lorsqu'on
change la signification pour lui en donner une qu'on em-
prunte à un autre ordre de faits. Dans le sens composé,
un mot conserve sa signification à tous égu*dB, et cette
•igniflcatioo entre dans la composition du aeiu de toute
SEN
1632
SEN
U plirase; tel est cet exemple : « Les idolâtres n'entre-
ront point dans le royaume des deux, n Dans le sens
divise, ce n*est qu'en un certain sens et avec restriction
qu'un mot conserve sa signification, comme dans cette
phrase de TÉvangile : « L^ aveugles voient, les boiteiix
marchent. » Les saintes Écritures ont un sens littéral et
un sens mystique. Il y a aussi le sens allégoriquej le sens
moral d'une fable.
SENS, fonctions vapées de l'Intelligence appliquée à
la connaissance des objets extérieurs. La distinction des
sens est motivée d'un côté par les différences spécifiques
des sensations (V. ce mot)^ de Fautre par celle des appareils
organiques qui servent d'intermédiaires entre les corps
et l'intelligence. Aussi, malgré quelques tentatives faites
pour étendre ou pour abréger la liste des sens, la division
commune, fondée sur des faits positifs et faciles à saisir,
a-t-elle prévalu. Elle admet cinq sens : i° le Tact, qui
s'exerce plus on moins confusément par toutes les par-
tics du corps, mais qui a pour instrument spécial la main,
et ((ui , localisé dans cet ori^ane, prend le nom de Toucher;
2° la Vue: S» VOuie; 4° VOdorat; 5° le Goût, On a dit
ailleurs (V. Perception) la part pour laquelle chaque
sens contribue à la formation de la notion complexe des
corps. Le Toucher est celui de tous les sens qui nous
donne les notions les plus sûres, et qui embrsise les don-
, nées les plus diverses : étendue, figure, solidité, dureté,
mollesse, fluidité, température, etc. La Vue vient en-
suite, avec les notions de l'étendue plane, de la lumière
et des couleurs. Les données respectives des autres sens,
sons, odeurs et saveurs, sont moins instructives et plus
restreintes.
Ce n'est qu'à l'extérieur que les organes des sens sont
variés et séparés les uns des autres. Toutes les impres-
sions reçues par eux doivent, pour donner lieu à un acte
de l'inielligence, être transmises au cerveau. Des expé-
riences dues aux physiologistes les plus habiles ont fait
connaître les nerfs par lesquels s'opère la transmission
des sensations à cet orçane, qui fait fonction de réceptacle
commun des impressions organiques. Elles ont prouvé
que la sensation et la perception peuvent êtrt; également
empochées, soit par la suppression ou la maladie de l'or-
g me extérieur, soit par l'interception de l'impression en
un point quelconque de son trajet de cet organe au centre
cérébral , par paralysie, section ou ligature des nerfs con-
ducteurs. Ainsi , la cécité résulte également de la des-
truction de l'œil , et, l'œil restant intact, de la paralysie
des nerfs optiques. Ce n'est pas à dire que le sens réside
dans l'organe, encore moins lui soit identique. Dire que
les sens sont les mains, les yeux, les oreilles, le nez, le
palais, les nerfs ou le cerveau, serait le comble de l'ab-
surdité. Mais, dans les conditions de l'existence présente,
les sens ne peuvent s'appliquer à leurs objets respectifs
et la perception avoir lieu que par l'intermédiaire d'or-
ganes déterminés. Les adeptes les plus passionnés du
magnétisme animal ont la prétention de se mettre au-
dessus de cette appropriation, et exhibent des sujets qui,
dans le sommeil magnétique, voient avec le dos et lisent
avec les coudes : ces prétendues merveilles, qui n'ont ré-
sisté à aucun contrôle nérieux, doivent, jusqu'à nouvel
ordre, être mises sur le même rang que celles des presti-
digitateurs.
Les philosophes sceptiques, et ceux qui ont considéré
comme une des conditions du spiritualisme le dédain de
la matière et le dénigrement des fonctions où le corps
est intéressé, se sont étendus avec complaisance sur ce
qu'ils ont appelé les erreurs et les illusions des sens. Nos
sevs nous trompent est devenu en quelque sorte un des
lieux communs de la philosophie. Si Ton examine de près
ces prétendues erreurs, que Montaigne et Bavle, après
Pyrrhon et Sextus Empincus, et, dans un autre camp,
Descartes, Iluet, Malebranche, ont ki ingénieusement ra-
contées, on reconnaîtra qu'elles tiennent toutes à la pré-
cipitation de nos jugements, soit que nous jugions sur
des données manifestement insuffisantes, comme quand
un corps est trop mal éclairé ou trop distant pour que
nous le voyions distinctement, un son trop éloigné ou
trop faible pour que nous puissions l'apprécier; soit sur-
tout que, par suite de l'habitude où nous sommes d'asso-
cier les perceptions aux sensations et de substituer les
perceptions acquises aux perceptions naturelles, nous
fassions, entre les fonctions des sens, une véritable con-
fusion, c'est entre les perceptions du Toucher et celles de
la Vue que cette confusion a lieu le pins souvent. Habitué
que l'on est à Juger de la distance, de l'étendue, de la
forme réelles, par la perspective, l'étendue et la forme
visibles, oa en vient à preudi'c tout cela pour une seule
et même chose ; et lorsqu'on se trouve en réalité éloigné
d'un objet qu'à le voir on avait d'abord cru très-proche,
ou que l'on reconnaît que ce qui avait paru de loin une
petite éminence est une montagne énorme, que le bâton
qu'on voit brisé à son point d'immersion dans l'eau est,
en réalité, parfaitement droit, on accuse d'erreur ou le
sens de la Vue ou la Vue et le Toucher à la fois. C'est
une injustice manifeste. La Vue, et, en général, tous les
sens, ne nous ont pas été accordés pour doubler le Tou-
cher, mais pour en compléter les données, et, au besoin,
pour y suppléer. Si facile et si naturelle que soit l'asso-
ciation des apparences visibles avec l'idée des réalités
tangibles, les données des deux sens ne sont identiques
ni en elles-mêmes, ni par les impressions qu'elles pro-
duisent sur nous. L'erri'ur consiste donc à prendre le
signe habituel pour la chose même; et ce n'est pas au
sens qu'il faut l'attiibuer, mais à une précipitation de
jugement, qu'il dépend de nous de réprimer. A propre-
ment parler, il ne faut pas dire que les sens nous trom-
pent, ce qui semble mettre en cause la sugcsse ou la
bonté de celui qui nous en a pourvus, et du mémo coup
nous condamner toujours à l'erreur ou tout au moins au
doute; mais il faut dire que nous nous trompons en
usant mal des sens. II dépend de nous d'atténuer de plus
en plus nos chances d'erreur, non-seulement en surveil-
lant les opérations des sens et les jugements qui en sont
la suite, mais en exerçant judicieusement l'esprit et les
organes, ce qui est un moyen de les perfectionner, et en
faisant concourir avec eux les instruments artificiels qui
en étendent la portée et en amplifient la puissance. — Sur
les sens en général et sur les lois propres à chacun d'eux,
V. Aristote, De l'Ame, liv. n; Descartes, L Homme: Ma-
lebranche, Recherche de la vérité, liv. i ; Condillac, trailé
des sensations ; Reid, Recherches sur V Entendement et
Essais sur les facultés de l'Esprit humain, Essai ii, ch. 1
et 2; Dugald Stewart, Esquisses de i*hilosophie morale,
\^ partie, 2*^ section; Éléments de la Philosophie de l'Es^
prit humain, ch. 1 ; Essais philosophiques. Essais i et ii.
Sur les erreurs des sens, on peut consulter les mémcâ
auteurs, et, sur le perfectionnement des sens par l'exer-
cice et par la comparaison de leurs données, quelques-
unes des meilleures pages de VÊmile de J.-J. Rous-
seau, liv. II. D — E.
SENS COMMUN. Dans une acception spéciale, désor-
mais tombée en désuétude, les philosophes appelaient
Sens commun une certaine faculté destinée suivant eux
à opérer la réunion des sensations, et à en rapporter la
cause à un objet unique, lorsque effectivement nous nous
trouvons en présence d'un objet dont les qualités pro-
duisent respectivement, sur chacun de nos bens, des
impressions variées. Nous croyons qu'Arist'.»te est le pix*-
mier qui en ait parlé en termes explicites ( Traité de l'âme,
liv. III, ch. 2). Bossuet, dans le Traité de la connaissance
de Dieu et de soi-même, le définit « une faculté de ràitie
qui réunit les sensations et ne fait qu'un seul objet do
tout ce qui frappe ensemble nos sens. » « On peut, ajt)i:;.'-
t-il un peu plus loin, douter du Sens commun, n En cIT -c,
l'hypothèse d'un sixième sens, ou d'un sens intérieur,
comme on l'appelle encore, n'est pas nécessaire pour ex-
pliquer ce qui se passe quand nous affirmons, parcxeinp t\
que c'est le même objet qui est blanc et doux. 11 su (lit de
dire que les sens ne sont en réalité que les difrèrciiics
fonctions de l'entendement, appliquées à la percepiUm
des objets extérieurs; et que c'est le moi inuUligent, per-
cevant les difîércntes qualités et jugeant ses perceptions,
qui opère ce rapprochement.
Voici maintenant queUfue chose de plus important ce
de plus usuel. On appelle ordinairement Sens commun
l'ensemble des notions et des jugements communs à tous
les hommes, qui résultent du développement spoi«tar.L
des différentes facultés de Tlntelligence, et spécialement
de la Raison. Le Sens commun, à ce titre, est appelû à
exercer, sur les sciences en général, et notamment sur la
Philosophie, une sorte de contrôle et de juridiction dont
il convient de fixer l'origine et les limitas. A moins Oe
prétendre, ce qui nous parait insoutenable {V, Sctpri-
gisme) , que nous avons reçu de Dieu des facultés essen-
tiellement trompeuses , on ne peut admettre que ces fa-
cultés fassent fausse route, aussi longtemps du moins que
la volonté n'intervient pas dans leur direction. L^ con-
naissances que par elles nous obtenons de toutes chos^.*»,
sont superficielles et confuses, il est vrai, mais exactes.
Toutes les erreurs qui ont eu et qui continuent d*uvoir
cours dans le monde sont l'œuvre, non du Sens commun,
mais de la Réflexion qui, s'attachant d'ordinaire à un soûl
côté des choses, prend volontien pour le tout qui lai
SEN
1«33
SKN
échappe la partie que seule elle aperçoit, et tire, ùes don-
nées incomplètes qu'elle a recueillies, des conclusions
prématurées et excessives. La science a plus de profon-
deur, plus de précision, mais moins de sûreté que le Sens
commun, et aussi moins d'étendue. D'ailleurs, le temps et
les soins qu*il faut lui consacrer en font naturellement la
prérogative d'un petit nombre d'esprits, tandis que le
Sens commun est le partage de tous. Lors donc qu'il s'agit
des questions générales et fondamentales, à la solution
/ desquelles nul homme ne saurait sans inconvénient de-
meurer étranger, on conçoit que le Sens commun (cette
solution s'est produite spontanément) la tienne eh réserve
pour la comparer, à un moment donné, à celle que la
science apporte sur le même sujet, et que les philosophes
eux-mêmes s'en servent comme d'un CrUerium (V. ce
mot) pour Juger leurs propres doctrines. Or, telle est la
nature des questions philosophiques, que, sous une forme
ou sous une autre, elles intéressent tout le monde. Il n'en
est pas tout à fait de même des sciences physiques et
mathématiques. A part quelques principes élémentaires,
et <|uelques notions d'une utilité pratique, il n'est pas
indispensable que tout le monde ait des idées arrêtées sur
les questions dont elles s'occupent. Mais sur la distinction
de la Matière et de l'Esprit, sur la nature et les phéno-
mènes de l'Âme hunuàine , sur le Vrai et le Faux en géné-
ral, sur Dieu, sur la Justice, sur le Bien et le Mal, etc.,
c.-à-d. sur tout ce qui fait l'objet de la Philosophie, qui
pourrait se résigner à une ignorance absolue? Aussi a-t-il
été pourvu non-seulement à ce que cette ignorance ne fût
pas notre lot, mais encore à ce que les idées les plus
communes sur ces divers sujets fussent aussi les plus
vraies et les plus sûres. Est-ce à dire que toute la Philo-
sophie soit implicitement contenue dans le Sens commun?
Cette opinion n'a pas laissé d'avoir des partisans , parmi
lesquels il faut citer au premier rang les philosophes de
l'École écossaise. Ce que les Écossais désignent sous le
nom de VériUs ou Principes du Sens commun, ce sont
les principes mCrmes de la Philosophie, et l'écrivain émi-
nent qui, parmi nous, se borna d'abord au rôle modeste
et laborieux de propagateur de la Philosophie écossaise,
Jouffroy, a dit expressément ; « Éclaircir par la Réflexion
les intuitions obscures que tout le monde reçoit en pré-
sence des choses, voilà tout ce que la Philosophie peut,
et tout ce qu'elle voudra, le Jour où, se repliant sur elle-
même, etc. tt Cest faire trop grande la part du Sens com-
mun, trop petite celle de la science. Le Sens commun
(et c'est là son seul rôle) prévient, signale, réprime les
écarts de la Philosophie; il n'en forme pas le cadre tout
entier; car la réflexion, en s'appliquant aux questions
philosophiques, y découvre des points de vue que le
Sens commun , dans ses intuitions rapides et synthéti-
ques, est incapable d'y saisir ; et ces points de vue sont ,
à eux seuls, de ^andes questions. — V, le P. Buffier,
Traité des premières vériUs et de la source de nos juge-
ments, Reid, Essais sur les facultés de V Esprit humain,
notamment VEssai VI; Jouffroy, Préface de la traduc-
tion des OEuwes de Reid, et Mélanges, De la Philosophie
et du Sens commun; et un Mémoire de M. Amédée Jac-
ques sur le Sens commun comme principe et comme mé-
thode philosophique. B — e.
SBifS BSTHéTiQUB OU SBPiS DO BEAU. C*est la même chose
que le Goût ( V, ce mot).
SENS INTIME. V. CONSCIENCE.
SENS MORAL. Quelques philosophes, professant d'ail-
leurs, sur la nature du bien, des idées différentes, mais
également frappés de ce fait , que l'acte par lequel nous
distinguons le bien du mal est un acte simple et irréduc-
tible, ont cru devoir l'attribuer à un sens spécial et tout
intérieur, et c'est ce prétendu sens qu'ils ont appelé le Senx
moral. Shaftesbury, Hutcheson et Hume, sont, en tant
que théoriciens, les principaux représentants de cette
doctrine. Au premier abord, on pourrait croire qu'entre
elle et celles qui réservent à la Raison , sous le nom de
Conscience, le discernement du bien et du mal , il n'y a
qu'une différence verbale : pourtant il n'en est pas ainsi ;
la faculté désignée sous le nom de Sens moral, procé-
dant à la manière des Instincts, reconnaissant le bien
exclusivement à ce signe qu'il lui agrée, et le mal au
signe contraire, n'a ni la fixité, ni l'autorité de la Raison,
dont les Jugements reposent sur la conception d'un prin-
cipe immuable et absolu. La doctrine du Sens moral ,
malgré quelques côtés estimables, est donc une doctrine
incomplète et insuffisante. K pour le développement de
cette doctrine, Shaftesbury, Essai sur le mérite et la
•^t»rfn: Hutcheson , Recherches sur les idéê$ du beau et du
^en, Cume, Essai sur VEnt^dement; et pour la réfu-
tation, Jouffroy, Cours de Droit naturel, t. Il, leçons it
et 20. B— E.
SENS MUSICAL, faculté de comparer les son^ et d'en
établir les rapports; par suite, sensibilité qui se mani-
feste dans l'homme à l'audition des sons combinés sous
le triple rapport de la mélodie, de l'hannonie et du
rhythme. Le sens de l'ouïe n'est que le sens du son isolé,
ce n'est point le sens de la musique, car la musique est la
science du rapport des sons. Le sens musical ne résulte
pas de telle ou telle conformation particulière de l'or-
gane auditif, et c'est une mauvaise locution dédire qu'on a
de Voreille, qu'on a Voreille juste ou Voreille fausse. La
conformation plus ou moins parfaite de l'organe ne peut
exercer d'influence que sur la perception plus ou moins
rapide, plus ou moins fine et délicate, et non sur la com-
paraison des sons pour en déduire des rapports. Le sens
musical a son siège dans l'âme, non dans l'oreille ; il se
compose, d'un élément sensible et d'un élément intel-
lectuel. Non-seulement il distingue ce qui est beau, mais
il connaît les moyens dont on s'est servi pour le pro*
duire. B.
SENSATION. Ce mot s'applique à deux sortes de faits
3ue, d'ordinaire, on ne distingue pas suffisamment. Il
ésigne, d'une part, les impressions spéciales produites
sur l'esprit par les objets physiques et par leurs diverses
propriétés, résistance, chaleur, froid, lumière, odeur, sa-
veur, bruit, etc. ; de l'autre, les phénomènes affectifs du
plaisir et de la souffrance. Ces derniers, que nous appelle-
rions volontiers Sensations affectives, accompagnent, il
est vrai, le plus souvent, les sensations de la première
espèce ou ^tsations perceptives; mais ils n'en sont pas
inséparables. Il est tel contact, telle odeur, telle couleur,
tel oruit, qui nous laissent indifférents, sans plaisir
comme sans souffrance ; et, d'un autre côté, nous (.^prou-
vons du plaisir et de la douleur, sans que les Sens y
soient pour rien. Il y a donc bien réellement deux sortes
de Sensations.
I. La réalité des Sensations, en tant qu'impressions
produites sur nous par les objets extérieurs, ne peut Ctre
mise en doute. Odeur, son, saveur, ces phénomènes ne
fussent-ils pas autre chose, seraient au moins des modi-
fications internes, perçues par la conscience avec rerti*
tude. Leur caractère subjectif est tout aussi incontestable.
La Sensation est un acte de l'Intelligence ; mais c'est un
, acte incomplet et insuffisant pour nous procurer directe-
ment la notion de l'extérieur. Mais, ultérieurement, in-
struits par d'autres voies de l'existence des corps, habi-
tués, par une expérience réitérée, à associer nos Sensations
soit à l'idée des corps en général , soit à l'idée de certains
corps en particulier, nous jugeons que les causes des
Sensations résident précisément dans les corps à titre de
propriétés (K. Qualités pREMiènEs et Qualités secondes),
et, par une induction si naturelle et si rapide qu'elle en
devient presque insaisissable, nous concluons de nos
Sensations l'existence actuelle, la présence des corps, alors
même que nous ne les percevons pas autrement. C'est
ainsi que de l'intérieur d'une chambre, et sans avoir
besoin de regarder dans la rue, nous inférons du bruit que
nous entendons qu'il y passe une voiture, un corps de
troupes, etc. (F. Perception). L'ouie, l'odorat, le goût,
ne procurent que des Sensations ; la vue et le toucher don-
nent à la fois des Sensations et des Perceptions. Quoique
faciles à distinguer en théorie, les Sensations et les Per-
ceptions sont pour la plupart si étroitement unies et pour
ainsi dire enveloppées les unes dans les autres, qu'il fau-
drait, pour en dresser la liste exacte, entrer à ce sujet
dans une longue et minutieuse discussion. Il est essen-
tiel surtout de ne pas assimiler la Perception à la Sensa-
tion ; car la Sensation étant un fait subjectif et relatif,
il suivrait de là que nous n'aurions aucune connaissance
aJiisolue des corps. C'est la conséquence forcée contre la-
quelle se débat vainement Condillac, lorsque, après avoir
posé en principe que nous ne connaissons rien que par
nos Sensations, c-a-d. expressément par nos propres mo^
difications ou manières d'être, il s'efforce de trouver dans
les Sensations spéciales du toucher quelque chose qui
décide l'esprit à transporter au dehors les (|ualités aue
Jusqu'alors il n'avait considérées que comme siennes. Une
autre confusion non moins grave, c'est celle des Sensations
avec les qualités, soit que cette confusion se borne aux
qualités secondes, soit qu'elle s'étende aux qualités pre-
mières. Elle s'explique en partie par ce fait, que les qua-
lités secondes ne nous apparaissent qu'à travers nos Sen-
sations et portent presque toujours le môme nom ; ce qui
a peut-être été, dans l'origine, un effet de la confusion
dont il s'agit, mais ce qui, en tout cas, con'j'ibne eef*
SEN
1634
SEN
teioMiient à Fentretenir. Il ne faut pas se laisser abuser
par cette équivoque. Odeur, saveur, etc., tous ces mots
désignent deux choses bien différentes : les Sensations
que nous éprouvons et qui sont en nous, et les qualités,
c.-ik-d. lea causes des Sensations qui sont hors de nous;
les premières relatives à la personne qui les éprouve, les
secondes existant d*une manière absolue, du moins comme
propriétés des corps, et subsistant alors même qu*elles
ne sont pas senties. — On n*a indiqué, dans ce qui précède,
que les conséquences, déjà fort graves, de la confusion de
la Sensation et de la Perception. On n'examine point ici
celles auxquelles on est conduit en réduisant à la Sensa-
tion, entendue dans un sens plus ou moins large, toutes
les opérations de l'Esprit, et, entre autres, l'origine de
toutes nos connaissances ( F. Sensualisme). Pour Tana-
Ivse des Sensations, on peut consulter Gondillac, Traité
des Sens(Uions, et, sur les différentes questions auxquelles
les Sensations peuvent donner lieu, Reid, Recherches sur
l'Entendement humain, ch. 2-6, et Essais sur les facul"
Us, Essai II; Dugald Stewart, Eléments de la Philoso-
phie de V Esprit humain, ch. !*', et Essais philosophiques,
Essais I et II; et les Fragments de Royer-CoIIard an-
nexés par Jouffroy à la traduction des Œuvres de Reid.
n. La Sensation affective, c-à^d. agréable ou doulou-
reuse, souvent unie à la précédente, et, comme elle,
subjective et relative, ne laisse pas d*en différer essen-
tiellement. Elle est un des phénomènes les plus simples
3ui s'ofl'rent à Tobservation intime. Aussi ne peut-on la
éffnir. Ses espèces sont, au point de vue de l'impres-
sion produite sur l'esprit, le plaisir et la douleur; au
point de vue de leur origine, la sensation proprement
dite ou sensation physique, et la sensation morale ou le
sentiment {V, ce mot). Une des principales questions
auxquelles l'étude de la Sensation peut donner lieu, c'est
de savoir si l'àme, dans le phénomène de la sensation,
est toute passive. 11 faut ici s'entendre sur le sens qu'on
prétend donner aux mots. SI l'on veut dire que Vkme ne
produit pas ses sensations comme elle produit une partie
de ses pensées et toutes ses résolutions volontaires,
qu^elle les subit sans pouvoir les anéantir ou en changer
la nature, l'&me sans doute est passive dans la sensation.
Encore faut-il remarquer qu'à défaut d'une action pré-
sente et instantanée, elle peut exercer sur la sensation
une action indirecte en s'y prenant de longue main, et
arriver 'à la modifier, même profondément, par l'habi-
tude (K. ce mot). Hais, en outre, l'activité de l'&me se*
manifeste dans la sensation : i<* en ce que l'intelligence
réagit sur chacune des sensations pour en prendre con-
naissance, une sensation dont nous n'aurions pas con-
naissaace étant comme non avenue; îi^ le fait de sentir
suppose une prédisposition à l'action, qui n'existe pas
chez les êtres inertes et inanimés. Dans quelque accep-
tion que l'on entende la sensation, elle n'a lieu que parce
Su'une excitation quelconque éveille en nous le pouvoir
e sentir, que ne possèdent ni les plantes ni les miné-
raux. Or, ce pouvoir est évidemment une forme de l'ac-
tivité. Si donc il est vrai de dire que cette activité n'est
pas libre, au moins ne peut-on dire qu'elle n'est pas.
Ainsi l'&me, dans la sensation comme dans le développe-
ment de toutes ses facultés, conserve les mêmes carac-
tères et le même type, et demeure essentiellement la
cause des phénomènes dont elle est aussi le sujet. B—b.
SENSIBILITÉ, faculté de sentir. Gomme sentir est un
phénomène parfaitement simple, la Sensibilité elle-même
est une faculté irréductible, et ne peut, à proprement
psTler, se définir. En effet, ce n'est pas la définir, c'est
seulement la diviser en ses différentes espèces, que de
la qualifier de Faculté de jouir et de souffrir, ou bien, à
un autre point de vue, de répartir les phénomènes sen-
sibles, sensations et sentiments {V, ces mots)^ entre la
Sensibilité physiqw et la Sensibilité morale. La Sensibi-
lité, chez l'homme, parait destinée à suppléer à l'imper-
fection de rintelligence et de la volonté, qui ne se dé-
veloppent que lentement et progressivement, et qui,
parvenues i leur maturité, sont encore sujettes à bien
des défaillances. La Sensibilité, plus restreinte, mais non
moins vive, dès le premier jour, qu'elle ne le sera plus
tard, nous excite, par l'attrait du plaisir, à rechercher ce
qui nous convient, par l'aiguillon de la douleur à éviter
ce qui nous est nuisible, lis ressorts qu'elle presse sont
les instincts {V. ce mot), qui correspondent eux-mêmes
wi différents besoins de notre double nature. Ainsi,
lans rien savoir, sans rien vouloir encore, l'enfant fait
spontanément et aveuglément, sous l'incitation de la Sen-
sibilité, ce que sa raison éclairée par l'cxpt^rience l'an-
^éii décidé à faire librement et pur choix. Pi us lard, ia
Sensibilité conserve un rôle analogue. Elle nom Ta|^>eUe
nos besoins et nos tendances naturelles, lorsqu'au mi-
lieu des distractions qui nous entourent et nous assiè-
gent, nous serions disposés à les perdre de vue et à les
négliger. Les phénomènes sensibles primitifs sont donc
comme autant de signes de la satisfaction ou de la non
satisfaction des tendances de notre nature. Tel est. du
moins, le rôle de la Sensibilité dans son développement
normal, et c'est à ce titre que l'étude des instincts peut
être rattachée à celle de la Sensibilité. Mais, autant et plus
3ue les autres facultés, la Sensibilité peut être détournée
e ses vbies naturelles et légitimes. Cela tient à plusieurs
causes. La plus générale est notre imperfection native.
En outre, la Sensibilité se trouve excitée par des causes
et par des oï^eiA si variés et parfois si disparates, qu'entre
tous ces objets il est difficile qu'elle garde un parfait
équilibre. L'attrait, d'abord légitime, que nous ressen-
tons pour certains plaisirs, bientôt s'accroît à ce point,
que le goût des autres plaisirs s'affisiblit ou s'efface. Ainsi,
trop souvent, in SensibiUté physique empiète sur les
jouissances plus nobles de l'espnt et du cœur. C'est alors
qu'il y a déviation et abus. Le plaisir est devenu no signe
trompeur, puisqu'il ne correspond plus à la satisfaction
de besoins réels et de tendances Intimes. Il en est de
même de la Sensibilité excitée par les besoins factices
que créent l'habitude et l'imitation. Il faut donc sur-
veiller la Sensibilité, et la maintenir, par le concoois de
la raison et de la volonté, dans la ligne tracée par la
Providence. Cela est d'autant plus important, que, pat
l'adjonction d'éléments nouveaux, les phénomènes pri-
mitifs se transforment en passions qui tiennent dans
notre vie une place considérable ( F. Passion). Or, les
passions, dès que leur origine n'est pas parfaitement
irréprochable, deriennent bien vite dangereuses par leur
vivacité même. Aussi, tandis que certains philosophes
placent à tort dans les phénomènes de la Sensibilité les
principes de la loi morale, voyons-nous les moralistes les
plus sévères, les Stoïciens par exemple, et tous les ascé-
tiques, recommander ou mettre en pratique l'anéantisse-
ment des passions et de la Sensibilité; ce qui est un excès
contraire. — On ne peut guère citer de traités spéciaux
sur la Sensibilité; mais les phénomènes qui en dérivent
ou qui s'y rattachent ont été de bonne heure étudiés,
analysés et décrits. Platon, Aristote, l'École épiairienne
et les Stoïciens avaient accumulé sur ce sujet une foule
d'observations, que les Modems ont considérablement
accrues. V, Descartes, les Passions de Vàme; Haie-
branche, Recherche de la mrité, liv. IV et V t Locke,
Essais sur l'Entendement; Leibniz, Nùuœaux Essais,
liv. II, chap. XX; Reid, Essais sur les Facultés actives^
Essai III; Dugald Stewart, Esquisses de Philosophie mo-
rale, 2* partie, chap. i*' ; Adam Smith, Théorie des senti-
ments moraux; Jouffroy, Mélanges pliUosophiques (les
morceaux intitulés t De V Amour de soi et Des Paeiutés
de Vâme humaine) ; Paflîe, De la Sensibilité,
Kant a donné au mot Sensilnlité (en allemand sinn-
lichkeit) un sens différent du sens ordinaire. D définit
expressément la Sensibilité « la capacité de recevoir des
« représentations par la manière dont les objets nous
« affectent. » Elle est l'origine expérimentale de nos con-
naissances, et embrasse à la fois les représentations des
Sens extérieurs et celles de la Conscience, sous ia double
condition des concepts d'espace et de temps, ou'on nomme
pour cette raison Formes de la sensibilité (K. Forme). La
partie de la Philosophie critique consacrée à Tanalyse
de la Sensibilité norte chez Kaat le nom d^Esthélique
transcendentale (otaOvivK, sensation). F. dans Kant toute
cette partie de la Critique de ta raison pure^ et l'analyse
qu'en a donnée M. V. Cousin dans son HuUrire de la
Philosophie au xviu« sièele, P* série, t. V. B—a.
. SENSIBLE (Accord), nom donné à l'accord que porte
la dominante du ton, parce que la note sensible eit ton-
Jours la tierce de cette dominante.
SENSiBLB (Note), 7* note d'une gamme. Elle est ainsi
appelée parce qu'elle est le plus souvent obligée de
monter sur la 8* note, qui est l'octave de la tonique, et
qu'elle fait pressentir cette note. Dans le PlaSn-Ctaaat, il
n'y a pas de sensible, parce qu'aucune note n'a de ten-
dance nécessaire vers une autre i al on la AUt entendre
dans l'harmonie, c'est seulement par eupliooie, et dans
les parties intermédiaires. •
SENSIBLERIE, ridicule aflécCaftien de sensibilité.
SENSORIUM ou 6ENS0RIUM COimUNE. Dans rbf*
pothèse d'un sens intérieur ou sens eommun (V,ce ssà)
destiné à réunir les sensations, oo appelait Sensorium
Cea grec aistliétérion) Vorssne dans lequel on supposait
i
■I
SKN
1635
SÉP
que résida cette facalté. G*était« en général, celui que Too
considérait comme le siège de T&me elle-même ; de sorte
que, sur Tan ou sur l'autre sujet, les hypothèses philo-
sophiques ont subi à peu près les mêmes variations.
Y. AMR (Siège de V). ^ B— e.
SENSUALISME, nmit générique donné aux systèmes
philosophiques dans lesquels un rôle prépondérant est
assigné aux sensations. 11 faut entendre ici par sensations
non-seulement les impressions diverses produites snr
nous par les objets matériels, mais l'élément expérimen-
tal qu'a?alent en vue les auteurs de la maxime sen-
sualiste par excellence : Rien dans Tlntelligence qui n'ait
été d'abord dans la Sensation ; Nihil in Intellectu quod
non prius fuerit in Sensu. C'est dire qrue la signification
de ce mot est assez élastique pour que la famille des sys-
tèmes lensualistes embrasse des doctrines qui présen-
tent, avec quelques grands traits communs, dos diffé-
rences encore très -importantes. Aussi n'essayera- 1 -on
pas de faire ici l'histoire du Sensualisme, histoire trop
vaste, et qui manquerait d'unité; mais on indiquera ce
qui peut en être considéré comme les pôles opposés, en
comparant deux pbilosophies bien différentes : d'une
part, celle d'Aristote, dont le caractère sensualiste est on
ne peut plus nettement marqué dès les premières lignes
de la Métaphysique : « Les animaux naissent avec la
faculté de sentir; de celle-ci résulte, pour quelques-uns
d'entre eux, la mémoire... De la mémoire provient pour
les hommes l'expérience,.., et Texpérience produit Tait et
la sciences » — de l'autre, celle de Condillac, dans la-
quelle tout dérive également de la Sensation : « Toutes
DOS connaissances et toutes nos facultés, dit Condillac,
viennent des Sens, ou, pour parler plus correctement, de
la Sensation; car, dans le vrai, les Sens ne sont que
cause occasionnelle. C'est l'&me qui sent à l'occasion aes
organes, et c'est des sensations qui la modifient qu'elle
tire toutes aes connaissances et toutes ses facultés, n —
Ne semblerait-il pas que des principes, en apparence si
semblables, doivent conduire à des doctrines semblables?
Il n'en est rien pourtant, et il suffit de la connaissance la
plus légère de l'une et de l'autre pour dire que ce ne
sont pas seulement les doctrines qui diffèrent, mais l'es-
prit même qui les inspire. Le Sensualisme, chez Aristote,
?st aussi mitigé que possible; tandis que, chez Condillac,
il est absolu et ne laiflie place à aucun autre élément
de pliilosopbie que là Sensation , dans son acception la
plus étroite. Que conclure de ceci? Que des désignations
très-généntles, comme celle dont nous nous occupons
et comme celles d'Idéalisme; d'Empirisme, de Rationa-
lisme, etc., quoique justes dans une certaine mesure, et
conmiodes dans certaines circonstances, restent néces-
sairement toujours un peu vagues, et ne caractérisent
Qu'imparfaitement un système. Nous sommes bien éloi-
gnés de vouloir en proscrire Tusage; mais il ne faut pas
leur attribuer une valeur trop absolue, et on doit remar-
quer, en outre, que l'esprit humain est, suivant l'expres-
sion de Montaigne, si ondoyant et si divers, qu'il n'y a
presque pas de système philosophique auquel une de ces
qualifications puisse s'appliquer de toutes pièces, sans
restrictions et sans réserves. B — e.
SENSUALITÉ, attachement aux plaisirs des sens.
SENTENCE, en latin Sententia (de eentire, sentir),
proposition évidente, vérité qui tombe immédiatement
•ous le sens. Elle n'a point, comme la Maxime, un rap-
port nécessaire avec la Morale, avec la conduite qu'il faut
tenir. Connaii'ioi toi-mime est en même temps une
maxime et uoe sentence; Dieu est bon est simplement
une sentence.
seutehgb, en termes de Jurisprudence, est svnonyme
éB jugement, et se dit surtout des décisions arbitrales.
SENTIMENT, plaisir ou peine résultant d'une cause
morale. C'est surtout par son origine que le sentiment
diffère de la sensation proprement dite (V. Sensation). Il
en diffère aussi en ce qu'il ne peut être localisé dans
aocuna partie de l'organisme, sur lequel il ne réagit
qu'indirectement, et seulement auand il est très-intense
et trâs-¥ir. Alors, qoelle que soit la nature du Sentiment,
agréable ou péiiiblè« il en résulte uniformément une souf-
france.
...On pftme ds joie ainsi que de tristesse :
Un eKcks de plaisir nons rend tout lan^nissens,
Et» quand U surprend rtœ, il eeeable les sens.
P. CoanïhUB, le Cid, IV, •.
D'ailleurs, le Seotiment, dans son expansion normale, est,
comme la sensation, le signe des tendances satisfaites ou
VmtiBriéee. lias seosatioos correspondent aux aopijtits.
les sentiments aux penchants et aux affections. V. ces
mots. B^B.
SENTIMENT RELIGIEUX, scntîmont ^ui naît en nous de
l'idée de l'in/lni, appliquée h la puissance, à l'amour, h
la sagesse du Créateur. Quelque accablante que soit cette
idée pour la raison de l'homme, elle ne laisse pas de re-
muer son âme par les plus profondes émotions.
SENTIBIENTAIJTÉ, exagération de la sensibilité. Elle
a constitué pendant quelque temps en Littérature un
genre dont VObermann de Sénancour est le type le plus
complet, et où l'on a abusé des soupirs et des larmes,
des imprécations contre la fatalité.
SENTINE (du latin sentina)^ la partie la plus basse
d'un nayire, située au fond de la cale, et le réceptacle de
toutes les ordures.
SENTINELLE (de l'italien sentinella, fait du latin sen-
tire, sentir, entendre), soldat armé qu'on charge de
veiller près d'un poste, et de prévenir les surprises. On
nomme Sentinelle perdue le soldat qu'on place dans un
lieu avancé et dangereux. Les sentinelles ne doivent pas
s'écarter de leur poste au delà de 30 pas : elles rendent
les honneurs militaires à ceux qui y ont droit, arrêtent
les rondes et patrouilles. Celles gui abandonnent leur
poste ou qui s'endorment sont punies plus ou moins sé-
vèrement, selon la gravité des cas.
SÉPARATION. On distingue en Droit la Séparation de
biens et la Séparation de corps.
La Séparation de biens est la situation d'époux qui ad-
ministrent leurs biens chacun séparément. Elle est vo-
lontaire, lorsqu'elle résulte des clauses du contrat de
mariage : dans ce cas, la loi impose à l'époux, marié sous
ce régime, qui devient commerçant, de le porter à la
connaissance des tiers par un extrait publié aux greffes
des tribunaux de commerce. Elle est judiciaire, et peut
être demandée par la femme, lorsque sa dot est mise en
péril, ou lorsque le mari, par le déisordre de ses affaires,
fait péricliter la garantie que ses biens doivent offrir aux
réprises de la femme. Le Code de Procédure civile régle-
mente (art. 805 et suiv.) les formalités à suivre pour y
parvenir. V. Dufour de SaintrPathus, Traité de la sépor
ration de biens, 1812, in-12; Dutruc, Traité de ktsépa^
ration de biens judiciaire, 1853, in-8<*.
La Séparation de corps est le moyen offert par la loi
de rel&cher le lien conjugal, et de suspendre la cohabita-
tion des époux, lorsque la conduite de l'un d'eux rend
la vie commune impossible. Les seules raisons admises
par la loi sont : de la part de la femme, l'adultère; de la
part du mari, l'entretien d'une concubine dans le domi-
cile conjugal ; de la part de tous deux, les excès, sévices
ou injures graves, la condamnation à une peine infa-
mante. La séparation de corps ne peut jamais avoir lieu
par consentement mutuel. Elle entraîne to'ijours la sé-
paration de biens. La chose jugée, l'exception tirée de la
compensation des torts et de la provocation, la réconci-
liation, sont des fins de non-recevoir générales contre la
demande en séparation de corps. Il en est une spéciale à
la femme demanderesse, c'est le défaut de résidence dans
le domicile qui, sur sa demande, lui a été désigné par le
président au début de l'instance. La jurisprudence a ap-
pliqué à la séparation de corps la disposition tirée des
règles du divorce, qui fait perdre à l'époux, contre lequel
la séparation intervient, tous les avantages résultant
de son contrat de mariage. Le Code de Procédure civile
(art. 875 et suiv.) détermine les formalités des demandes
en séparation de corps. V. Massol, De la séparation de
corps, 1840, in-8°; Demolombe, Du mariage et de la se'
paration de corps, 2 vol. in-8".
On appelle Séparation de dettes une modification du
régime de communauté, par laquelle les époux stipulent
qu'ils paveront séparément leurs dettes personnelles, et
qui les oblige à se faire raison, lors de la dissolution de
la communauté, des dettes acquittées par elle h la dé-
charge de chacun d'eux.
La Séparation des patrimoines est une faculté accordée
aux créanciers d'une succession cbar^ de dettes, de de-
mander que le palrimoine du de cujus ne soit pas con-
fondu avec celui de l'héritier. Elle s'exerce contre les
créanciers de l'héritier, mais ne peut réciproquement être
exercée par eux. Elle ne peut plus s'exercer quand il y a
eu novation de la créance, c-à-d. quand les créanciers
successoraux ont accepté l'héritier pour débiteur person-
nel. Elle se prescrit relativement aux meubles par le laps
de trois ans, et peut être invoquée à l'égard des immeubles
tant qu'ils ne sont pas sortis des mains de l'héritier.
V, Code Napoléon, art. 878 et suiv.; Blondeau, Traité
de la séparation des patrimoines, 18i0, in-8<>; Dufresœ*
SÉP
1636
SÉP
Traité de ta néparatton des patrimoines, 1842, iii-8<';
Bureaux, Études sur le Code ciml, i8i7*53, 3 vol.
ln-8^ R. d*E.
SÉPIA, espèce d*encre provenant d*une vessie que les
sèches (en italien ffppt^'j ont auprès du cœur, et qu'on
emploie plus particulièrement pour exécuter les lavis
(F. ce mot). Elle diffère de Tencre de Chine par une
couleur plus rougeàtre. Dans les dessins à la sépia, les
couleurs s'appliquent par teintes superposées et plus ou
moins foncées ; il faut attendre qu'une couche soit sèche
pour la couvrir d*une autre. Dans les endroits qui ont be-
soin de vigueur, les dernières touches se font quelquefois
à la plume. On attribue Ut première idée d'emplover la
sépia h un Allemand nommé Seydelmann, en 1780.
SEPME. V. SfeME.
SEPTA. 1 V.notte Dictionnaire de Biogro'
SEPTANTE (Les), l phie et d'Histoire.
SEPTAIN, stance de 7 vers, composée d'un quatrain et
d*un tercet, ou réciproquement. Une des rim&s du qua-
train passe dans le tercet Le septain est fort ancien dans
notre poésie, et remonte au xii* siècle; presque toujours
il y fut isomètre.
SEPTÉNAIRE, nom donné en latin : !• au vers tro-
chaïque tétramëtre catalectique, c-à-d. de 7 pieds et
demi. Ex. :
Intallt se | bellicosl In | Romali geii|tem feram.
Mauifici co|niesqoe amicis | nostria Tidea|mar vlri.
2" au vers lambique de même mesure :
Qnid immerenltibua noces? | quid inrides | amlcls?
Domum redijinas clancalani{; dormimiiB ln]cœnati.
Et la mihl aoaidet naptiaB | quantum queam | maturem.
F. Umbiqoe, TrochaIqub. P.
SEPTENAIRE, nom qu'ou donnait autrefois au cours
d*études de 7 années, comprenant le Quadrivium et le
Trivium.
SEPTENNALITÉ, mot créé pour désigner la durée de
sept ans qui a été assignée depuis 1716 à la Chambre des
communes en Angleterre. Une loi du 16 Juin 1824 éta-
blit la septennalitô en France pour la Chambre des dé-
putés ; cette loi, à laquelle le parti libéral s'était vivement
opposé, fut abolie par la Révolution de 1830.
SEPTIÈME, en termes de Musique, intervalle disso-
nant de sept notes. On distingue : la septième majeure,
composée de 5 tons et un demi-ton {ut à si naturel ) ; et
la septième mineure, composée de 4 tons et 2 demi-tons
( ut à 51 bémol). L'intervalle de septième n'est pas admis
dans le plain-chant : on ne le trouve aue dans la prose
de la Pentecôte, à la strophe Lava quoà est sordidum , et
encore n'y^ est-elle que comme reprise de chant qui n'a
pas de liaison avec ce qui la précède. — Vaccord de sep-
tième, composé du son fondamental, de sa tierce, de sa
quinte et de sa septième, est de trois sortes : 1<* il a la
septième mineure, et en ce cas il aura ou la tierce ma-
jeure et la quinte juste {sol, si, ré, fa), et alors il est
aussi appelé accord de dominante, ou la tierce mineure
et la quinte diminuée (si, ré, fa, la)\ 2® il a la septième
majeure, la tierce majeure et la quinte Juste ; 3° il a la
septième diminuée, la tierce mineure et la quinte dimi-
nuée {sol dièse, si, ré, fa), quelquefois même la tierce di-
minuée {ré dièse, fa, la, ut).
SEPTIME-SÉVÈRE (Arc de). V. Arc de triomphe.
SEPTIZONIUM. i V, ces mots dans notre Diction-
SEPTUAGÉSIME. I naire de Biogr. et d Histoire,
SEPT SAGES (Le Roman des). V. Dolopathos.
SEPTUM, barrière qui , dans les basiliques romaines,
séparait le^ nefs et l'abside. V. Transept.
SEPTUOR , composition musicale à 7 parties de voix
ou d'instruments.
SÉPULCRE, en latin sepulcrum (de sepelire, ense-
velir), lieu destiné à recevoir un mort. A peu près syno-
nyme de tombeau, le mot est assez peu usité aujourd'hui
dans le langage ordinaire. On l'applique souvent à des
groupes de sculpture qui représentent, dans certaines
églises, Jésus-Christ au tombeau, entouré de divers per-
sonnages. Un beau monument de ce genre est celui de
l'église de S'-Mihiel, sculpté par Ligier Richier. On peut
citer aussi celui de l'église SWean, à Ghaumont (Haute-
Marne), qui est du xv* siècle.
séroLCRE ^Église du S^-), à Jérusalem. Par ce nom l'on
désigne réglise qui renferme non-seulement le sépulcre
de Jésus-Christ, situé dans le Jardin de Joseph d'Arima-
thie, entre le lieu des exécutions et le rempart de la ville,
mais le Calvaire ou les lieux consacrés par la Passion.
Elle est fort irrégulière, parce qu'il a fallu s'assujettir à
l'irrépularité des lieux qu'on voulait y renfermer ; pour
déduire en p\ate- forme la surface iné^e du Calvaire, on
dut trancher le rocher en plusieurs endroits, et Tex-
hausser en certains autres. Les premiers travaux , entre-
pris par S^* Hélène, mère de l'empereur Constantin, du-
rèrent de l'an 326 à l'an 335 : Eusèbe nous en a laissé la
description. Le rocher du sépulcre fut détaché du flanc
de la colline, de manière à former une masse isolée ; on
l'entoura d'une chapelle qui fut appelée Anastasis ( Ré-
surrection ) ; une autre chapelle, nommée Martyrion, fut
élevée sur le lieu même de la Passion ; à l'orient du sé-
pulcre s'ouvrait une basilique, séparée du dehors psr
deux cours, dont la première était entourée de portiques.
L'édifice de Constantin fut ruiné, en 615, par les troupes
de Chosroès H, roi de Perse. Mais, par l'intervention de
la femme de ce prince, chrétienne et sœur de l'empereur
grec Maurice, le moine Modeste, depuis patriarche de
Jérusalem, put recouvrir de constructions nouvelles les
lieux vénérés par les chrétiens : il y eut une église de la
Résurrection, une église du Golgotha, une église de l'In-
vention de la croix, nommée aussi Martyrium, et une
église de la Vierge. Ces monuments ayant été rasés en
1010 par le calife Hakem, des architectes grecs, sur
l'ordre de l'empereur Constantin Monomaque, reprirent
en 1048 les travaux en suivant le plan de Modeste, c-à-d.
qu'ils firent une rotonde et trois églises ou chapelles sé>
parées. En 1130, les Croisés les réunirent en an seul mo-
nument, et l'on peut constater dans leur œuvre l'alliance
du style roman et de l'ogive sarrasine. En 1808, un in-
cendie détruisit presque complètement le S^-Sépulcre; on
l'a reconstruit depuis, sur un plan qui diffère peu de
l'ancien. Il est aujourd'hui partagé entre des religieux
de huit nations clirétiennes, qui l'habitent et le des*
servent : Grecs, Abyssins, Coptes, Arméniens, Nestoriens
ou Jacobites, Géorgiens, Maronites, Latins ou Romains.
L'église du S* -Sépulcre, presque entièrement enve-
loppée de bâtiments élevés à diverses époques, n'est ac-
cessible que du côté méridional. Un parvis, qci a environ
20 met. carrés de superficie, et dont les côtés sont
occupés par des chapelles, était autrefois précédé d*un
portique , dont quelques chapiteaux attestent encore
l'existence. A l'angle N.-O. de ce parvis est un clocher
tronqué à base rectangulaire , percé de trois fenêtres sur
deux de ses faces, et de deux seulement sur les deux
autres. La façade du fond du parvis porte les caractèrrs
de notre architecture du xii* siècle : deux portes, dont
une est murée actuellement, sont en ogive, et ornées d'ar-
chivoltes finement sculptées; une espèce de frise est
couverte d'un bas -relief représentant l'entrée triom-
phante de Jésus à Jérusalem ; le premier étage est percé
de deux fenêtres ogivales. Quand on a franchi la porte
d'entrée, en laissant à gauche plusieurs chapelles armé-
niennes et à droite l'église du Calvaire, on rencontre b
Pierre de l*onction, rectangle de marbre rouge presque
au niveau du sol, mesurant 2 met. de longueur sur
0™,50 de largeur, et recouvrant la pierre sur laquelle le
corps du Christ fut déposé et oint de parfums par les
saintes femmes : à quelques pas à gauche , une pierre
circulaire indique la place où se tenait la Vierge pendant
l'embaumement. De là on entre dans une Rotonde de
20 met. de diamètre, autour de laquelle sont pratiquées
des chapelles, et dont le mur contient les sépulcres de
Joseph d'Arimathie et de Nicodème : 16 colonne» de
marbre soutiennent, en décrivant 17 arcades, une ga-
lerie supérieure, également composée de "16 colonnes et
de 17 arcades plus petites; des niches corTespondant<*8
aux arcades s'ouvrent au-dessus de la frise de la der-
nière galerie, et un dôme prend sa naissance sur l'arc de
ces niches. Ce dôme, ouvert au sommet, est en bois et
en plâtre, depuis l'incendie de 1808 qui a consumé sa
belle charpente en bois de cèdre. Au centre de la Rotonde
et au-dessous de l'ouverture qui donne entrée au jour,
s'élève un édicule de forme pentagonale, long de 8 met.,
large de 5"*,50, revêtu de marbre blanc et Jaune, et sou-
tenu par de maigres colonnes surmontées a*un dôme qai
a un peu Papparence d'une couronne. Cet édicule, d'an
goût détestable, recouvre le saint tombeau. Une porte
étroite, qu'on y a pratiquée à l'orient, donne accès dans
une sorte de vestibule, appelé CJiapelle de VAnge, parce
que, selon la tradition, ce fut là qu'un Ange annonça la
Résurrection aux saintes femmes; la pierre carrée, qui
est enchâssée au milieu, passe pour avoir recouvert le
tombeau primitif. Une seconde porte ti^basse condaît
dans le sanctuaire ou chambre sépulcrale, qui n*a «fue
2 met. carrés, et qui est revêtue dA anarbre, ainsi que le
SKU
i(;:7
SKR
•épalcre placé da côté droit : 2 tableaux et 42 lampes
d'or et d'argent ornent ce sanctuaire. — Au N. de la Ro-
toude, on montre le lieu où Jésus apparut à Madeleine,
i endroit où celle-ci demeurait, la chapelle de la prison
^ù Jésus fut enfermé avant le cruciflement, et un couvent
de Franciscains latins, dont la chapelle marque le lieu
où le Seigneur apparut à sa mère après la Résurrection,
et con^'ent un fragment de la colonne de la Flagellation.
A ri^M en face de Tentréo de Tédicule de la Rotonde, se
troQve ïéglisê des Grecs, encombrée d'ornements de mau-
vais goût : on y remarque, dans le pavé, un cercle de
marbre blanc, au milieu duquel est une petite colonne
indiquant, disent les Grecs, le centre du monde ; le pour-
tour du chœur présente la chapelle de Longin, soldat
juif qui perça le Christ de sa lance et se retira dans cette
grotte après sa conversion ; celle où les vêtements de
Jésus furent partagés; celle où on le couronna d'épines,
et oui contient la colonne impropere (corruption d'op-
probrii), bloc de marbre sur lequel il était alors assis.
Ëntro ces deux dernières chapelles, on descend, par un
escalier de 28 marches, à Véglise de S^'-Hélène, qui a
20 met. de long sur 12 de large. Elle est en partie taillée
dans le roc, et surmontée d'une coupole surbaissée per-
cée de fenêtres en meurtrières. Cette coupole est soutenue
par 4 colonnes massives à chapiteaux corinthiens. L'édi-
fice communique au S.-E. avec la grotte de l'Invention
de la vraie croix , à laquelle on descend par un escalier
de 13 degrés, et que le voisinage d'une citerne rend ex-
trêmement humide.
Au sortir de l'église de S**-Hélène, après avoir passé
devant la chapelle du Couronnement d'épines, on monte
par un escalier de 18 degrés à Véglise au Calvaire, qui
n'a que 10 met. sur 9. Cette église est, pour ainsi dire, à
deux étages : la partie inférieure, dite Chapelle d^Adam,
renfermait les tombeaux de Godcfroy de Bouillon et de
son frère Baudouin, détruits par des Grecs fanatiques
durant l'incendie de 1808; l'autre partie, plus élevée
d'une vingtaine de marches, renferme le trou où fut
plantée la croix. Un escalier, en face de celui par lequel
on est entré, ramène à la porto de la façade principale. B.
SEPULCRËTUM. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d*Ristoire,
SÉPULTURE, en latin SepiUtura (de sepelire, ense-
velir). Donner la sépuhure aux morts est uu devoir de
religion pour tous les peuples civilisés, et la privation de
sépulture a été considérée comme une punition sévère,
quelquefois même comme une infamie. Le mode de sé-
pulture a varié selon les temps : les Égyptiens embau-
maient le» morts pour les conserver, les Juifs les dépo-
saient dans des sépulcres, les Grecs et les Romains les
brûlaient; depuis le christianisme, on les met en terre
(K. iNcménATiON , Inhumation). Les rois d'Egypte que
l'assemblée de la nation avait condamnés après leur
mort étaient privés des honneurs de la sépulture royale.
Les Grecs et les Romains croyaient que ceux qui n'avaient
point reçu la sépulture erraient pendant cent ans sur les
bords du Styx, et c'est pour ce motif que les généraux
victorieux aux îles Arginuses, bien qu'ils eussent été em-
pêchés par une tempête de recueillir leurs morts, furent
condamnés à l'exil ou à la peine capitale par les Athé^
niens. — Dans les pays catholiques, le clergé refuse la
sépulture chrétienne à celui qui n'est pas catholique ou
qui a abjuré sa foi, à celui qui a fait profession publique
d'impiété ou d'erreur, qui est mort dans l'impénitence ou
dans un flagrant délit. Par une décision du 16 juillet
1806, Napoléon l*' exigea que tout individu fût enseveli
suivant le rit du culte qu'il avait professé toute sa vie, à
moins qa*il n'eût formellement demandé le contraire.
Notre Code pénal (art. 300) punit la violation de sépul^
ture d'un emprisonnement de 3 mois à un an , et d'une
amende de IC fr. à 200 fr. — V. notre art. Cimetière, et
B. Feydeau, Histoire des usages funèbres et des sépultures
des peuples anciens, 1856, Paris, 2 vol. gr. in-4<>, fig.
SÉQUELLE, ancien droit de demi-dlme, dû aux curés
par ceux qui labouraient les terres dans leur paroisse.
SÉQUENCE (du latin seqtientia, choses qui se sui-
vent), en termes de Jeu, série de cartes de môme cou-
leur et dont les nombres se suivent.
séguEHCB, terme de Liturgie. V, Prose, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
SÉQUESTRATION, acte d'enlever par violence une
personne e^ de la retenir comme en séquestre. C'est un
crime puni des travaux forcés à temps, si la séquestra-
tion n'a duré qu'un mois, et des travaux forcés à perpé-
tuité, si elle s'est prolongée au delà. Quand la personne
séquestrée a été rendue à la liberté dans les dix premiers
Jours et avant toutes poursuites, la peine est réduite à uo
emprisonnement de 2 à 5 ans. L'arrestation exécutée
avec le faux costume, sous le faux nom ou paf un faux
ordre d'une autorité publique, entraîne les travaux forcés
à perpétuité. Si le séquestré a été menacé de mort , s'il
a été soumis à des tortures corporelles, la peine capitale
doit être prononcée. V, le Code pénal , art. 341 et suiv.
SÉQUESTRK, terme de Droit. V. Dépôt.
Iw^mw™^^' } y- notre Dictionnaire de Buh
SéKu SÉRAIL. S ^^'^^^ '' ^'^^^^»-*-
SÉRAPÉUM, nom de deux célèbres monuments ég3rp-
tiens, l'un dans la ville d'Alexandrie, l'autre dans celle
de Memphis. — Le Sérapéum d'Alexandrie était situé
dans le quartier dit Rhacotis, et se compt)sait d'un temple
de Sérapis, entouré de portiques et de vastes dépen-
dances où l'on trouvait des exèdrcs (salles avec des sièges)
pour la conversation des philosophes, des rhéteurs, des
amis des lettres, et une bibliothèque célèbre par sa ri-
chesse. Le tout avait un caractère de magnificence, et la
colonne faussement dite de Pompée, encore debout auprès
d'Alexandrie moderne, ornait une des cours de ce Si^
rapéum.
Le Sérapéum de Memphis était un monument sépul-
cral. On nourrissait à Memphis et on adorait le bœuf
Apis vivant, dans un temple dit Apiéum, Lorsqu'il mou-
rait, on le portait en grande pompe à la nécropole de la
ville, dans un temple de Sérapis, le plus ancien de tous
ceux que cette divinité avait en Egypte. Il fut choisi
parce qu'en mourant le bœuf divin s'identifiait à Osi-
ris, et recevait le nom d'Osir-Apis, Osor-Apis, en grec
Sorapis, Ce Sérapéum est resté surtout célèbre, parce
qu'on en a retrouvé une ruine importante dans les
sibles qui s'étendent entre les villages d'Abousir et de
Sakkaran. Il était dans un temenos, grande enceinte car-
rée, un peu irrégulière, de 325 met. du N. au S., sur
300 de l'E. à l'O., et mesurait environ 130 met. sur 83.
Là était, ou plutôt est une descente qui conduit, à
10 met. de profondeur, à de vastes cavernes taillées en
voûtes dans le calcaire, et composées d'une gUerie prin-
cipale haute de 8 met., large de 5, avec plusieurs em-
branchements semblables qui se croisent. La plupart des
galeries sont bordées à droite et à gauche d'arcades for-
mant autant de chambres sépulcrales, avec chacune le
tombeau d'un Apis embaumé; c'est un grand sarco-
phage de granit poli, quadrangulaire, long de 5 à 6 met.,
haut de 3 met. à 3'" ,30, et fermé par une énorme pierre
surchargée encore d'un pan de mur pour en rendre la
fermeture plus assurée. En outre, la chambre était murée
à son ouverture sur la galerie.
Le Sérapéum sépulcral existait déjû 1700 ans av. J.-C,
sous Aménophis III, roi de la 18" dynastie, la plus bril-
lante de toutes, et il servit de sépulture aux Apis jusqu'à
l'époque des derniers Ptolémées, au i"' siècle de l'ère
vulgaire. Un Sérapéum grec, élevé par les Grecs d'Alexan-
drie, en conséquence des modifications apportées au culte
de St^rapis sous les premiers Lagides, vers la fin du
IV" siècle av. J.-C, ou plutôt peut-être un propylée, lui
servait d'entrée à la ligne du désert. De là partait un
dromos ou chemin, long de 2 kilomèt., large de 4'",50,
pavé en grandes dalles de pierre, et bordé de 160 statues
de sphinx, couchés sur autant de grands piédestaux. 11
aboutissait au pylône d'un petit temple placé à l'entrée
de l'enceinte du grand, et y conduisant par une allée in-
térieure bordée de statues de poètes et de philosophes
grecs illustres, tels qu'Homère, Lycurgue, Platon, Selon,
et de divinités comme Plu ton, Bncchus, etc., ou de Gé-
nies montés sur des animaux qui les symbolisaient.
Le Sérapéum de Memphis fut détruit du temps de
Théodose, vers 390, par les chrétiens; ses ruines et ses
grottes ont été perdues aux regards depuis le ivf ou le
v" siècle de notre ère. Un membre de l'Institut d'Egypte,
M. Jomard, avait indiqué avec assez de précision l'en-
droit où il devait se trouver; mais on ne l'avait pas bien
cherché. Situé dans une plaine si sablonneuse que, du
temps de Straboh, les vents y avaient déjà poussé des
amas assez considérables de sables pour que les sphinx
de la grande allée y fussent enterrés les uns à moitié, les
autres jusqu'à la tête, il finit par disparaître entièrement
quand la conquête, puis la destruction, eurent affligé
cette contrée.
M. Aug. Mariette, chargé, en 1850, par le gouvernement
français d'une mission scientifiçiue en Egypte, entreprit
la recherche du Sérapéum, qui fut entièrement déblayé
sous sa direction après quatre années o^os^cn^ives de
travaux. La couche de sable enlevée avait, dû f^sri'^^ics
SFU
ig:]8
SEl\
endroits, de 25 à 30 met. d*épaisseur. Les monuments
principaux que M. Mariette put tirer des fouilles se
voient au Musée égyptien du Louvre, et consistent prin-
cipalemen* en grandes stèles, datées, où sont gravées
des prières à Àpis mort, en statues, statuettes, bijoux,
vases, etc. — Nous avons rédigé cet article sur des notes
que nous devons à l'obligeance de M. Mariette. V. les ou-
vrages suivants du savant ég}'ptoIogue : le Sèrapéum de
Memphis^ Paris, i857 et suiv., in-fol. (en cours d*exécu-
tion; l'ouvrage aura iiO planches photolithographiées,
avec un texte explicatif et critique); Mémoire sur une
représentation gravée en tête de quelques proscynèmes
du Sèrapéum, Paris, 1856, in-4°; Renseignements sur les
64 Apis trouvés dans les souterrains du Sèrapéum, suite
d'articles publiés dans le Bulletin archéologique de
VAthénéum français ^ 1857-58; Choix de monuments et
de dessins découverts ou exécutés pendant le déblayement
du Sèrapéum de Memphis, Paris, 185G, in-4<^, 10 planches.
V. aussi Strabon, Geogr., liv. xvii. C. D — ^y.
SÉRAPHINE, petit instrument du genre de l*orgue
expressif, construit en 1830 par le facteur Grûn.
SÉRAPHINS. V. Anges.
SÉRASKIER. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire,
SERBE ou SERVIEN (Idiome), une des langues slaves
comprises sous la dénomination générale d'itlyrien. La
langue serbe se rapproche plus du russe que du polonais
et du bohème. Comme, à la différence de ses sœurs, les
voyelles y dominent, elle occupe parmi elles le premier
rang pour la douceur et la mélodie : elle doit cet avan-
tage & rinlluence des langues italienne et grecque, dont
Tune fut apportée par le commerce, l'autre par la reli-
gion. Beaucoup de consonnes sont ou supprimées ou
transformées en vovelles, par exemple {. L'accent ne
s'appesantit pas toujours sur une seule et même syllabe,
comme en polonais sur l'avant-dernière. Le turc a in-
troduit quelques-uns de ses éléments dans le serbe.
Cette langue a de commun avec les autres langues slaves
une déclinaison et une conjugaison complètes, ainsi que
la liberté de la construction; elle se prête facilement
aussi & reproduire les locutions des anciennes langues
classiques, et même la mesure de leurs vers. Les Serbes,
en adoptant l'alphabet cyrillien, y ont ajouté quelques
signes, destinés surtout à exprimer Vi bref qui amollit
et atténue les consonnes. On distingue dans la langue
serbe trois sous-genres : Vfierzégovin ou herzégovique ^
parlé dans l'Herzégovine et la Bosnie; le rasavique ou
ressavique, parlé sur les bords de laRazawa ou Ressava;
le syrmien ou syrmique, parlé en Syrmie et en Kscla-
vonie. K. Wouk Stéphanovitch , Grammaire serbe ,
Vienne, 1815, traduite en allemand par Jacob Grimm,
Leipzig et Berlin, 1824; le même. Dictionnaire serbe-
latin-allemand, Vienne, 1818 ; Berlic, Grammaire serbe
à Vusage des Allemands, Agram, 1842; Babukic, Gram-
maire serbe, traduite en allemand par Frœhlich, Vienne,
1844; Frœhlich, Grammaire serbe. Vienne, 1854, in-16;
Richter et Ballemann, Dictionnaire allemand -illyrien et
Uty rien- allemand, Vienne, 1830-40, 2 vol. ; Mouzouranic
et Ovzarewic, Dictionnaire allemand-illyrien , Agram,
1842 ; Schafarlk, Choix de lectures serbes, ou Examen
historique et critique du dialecte serbe, en allem., Pesth,
1833.
SERBE (Littérature). Les Serbes, dont on voit paraître
le nom pour la première fois au commencement du
vu* siècle, se servirent d'abord, ainsi que les Bulgares ,
de Vancien slave ou langue ecclésiastique. A partir du
xi' siècle, cette langue, réservée au style d'église, se dis-
tingua du serbe vulgaire, employé pour le style de chan-
cellerie. Les ouvrages qui nous sont parvenus en style
d'église ne sont pas seulement des livres de prières, mais
des écrits historiques, composés pour la plupart par des
prêtres et des moines. Parmi les écrivains on mentionne:
le roi Etienne (1195-1228), qui raconta la vie de son père
Etienne Nemanja; son frère l'archevêqae S< Sava. dont
on a des règles pour les couvents ; Dometian, moine de
Chiljendar, oui écrivit les Vies de S^ Siméon et de
S^ Savft; l'archevêque Daniel, dont la Chronique retrace
rhistoire de la Servie de 1276 h 1336. Quant aux ou-
vrages en serbe proprement dit, il est resté des di«
plûmes, des lettres de donatioo, âos actes de gouver*
iiement, dont une partie a été publiée à Belgrade en
1840:, mais le plus important monument est le Gode de
lois promulgué en 1349 par Douschàn,
La Servie ayant 6té conquise par les Ottomans à lafin
£!l\ XIV* siècle, la littérature sacrée s'éteignit avec la li-
berté^ une foulede manuscrits furentllvrés aux flammes.
ou enfouis et oubliés dans les couvents. Tontefoit, la
langue nationale, abandonnée dans les villes, trouva ua
refuge au milieu des montagnes. Des poésies popnlairea,
produits spontanés d'une imagination ardente et mélan-
colique à la fois, passèrent de bouche en bouche et de
siècle en siècle : les unes peignent avec gr&ce et enjoué
ment les plaisirs et les peines, les sensations indivi-
duelles des Serbes ) les autres, plus solennelles et plus
austères , retracent leurs luttes et leurs exploita, leur
dévouement et leur martjrre pour la foi des ancêtres.
Nous citerons particulièrement le Mariage de Maxime,
la Fondation de Scutari, les Aventures de Marko, la
Bataille de Kossovo, et tous les chants dont Stéphano-
vitch composa le premier un vaste recueil. Une Histoire
de la Serbie, écrite vers la fin du xvii* siècle par Georges
Brankovitch, est le dernier livre slavon de cette nation.
Le réveil de la littérature eut lieu dans les dernières
années du xvni* siècle. L'archimandrite Jean Raitsch
écrivit alors son Histoire des Slaves (Vienne, 1792-95,
4 vol.), dans un style ecclésiastico-4lave, mêlé de msse
et de serbe. Puis la langue populaire serbe fut élevée aa
rang de langue écrite par Obradoritch, auteur de plu*
sieurs ouvrages d'éducation; par Solaritsch, renommé
pour son érudition paradoxale; par Davidovitch , qui
publia une Gazette serbe de 1814 à 1822 , puis un Al'
manach serbe; par Wouk Stéphanovitch, connu par ses
travaux sur la langue. Depuis ces hommes de talent, des
Annuaires serbes ont été publiés par Spiridion Jovitsch à
Vienne, Pavlovic à Pesth, Nikolic et Vozarovic à Bel-
grade. Mouschicki, archevêque deCarlowitz^ s'est montré
lyrique plein d'onction dans les Poésies qui ont paru à
Ôfen, 1840. On a de Miloutinovitch, sous le nom de
Serbianza, nne série de chants héroïques. Les plus im-
portants des poètes serbes aujourd'hui vivants sont
Branco Raditschevitz et Jov&n Ilitz. Des Chants serbes
ont été publiés, en allemand par Kapper (Leipzig, 1852,
2 vol.), en anglais par Bowring, en français par H°** E.
Volart (183i, 2 vol.), et par Aug. Dozon (1859, in-18).
SERDAR. ) K. ces mots dans notre Dictionnaire de
SERDEAU. j Biographie et d'Histoire.
SÉRÉNADE (du latin sera, soir), concert donné le soir
ou la nuit, en plein air, sous les fenêtres de quelqu'un.
C'est de l'Espagne et de l'Italie que les sérénades sont
originaires. On y exécute, sinon de la musique spéciale-
ment écrite pour cet emploi, du moins des romances et
des barcarolles adaptées ^ la situation. Le nom de séré'
nade a été étendu aux morceaux exécutés dans les con-
certs nocturnes, et même à des compositions qui n'en
rappellent que de fort loin le caractère ; tels sont le trio
instrumental que Beethoven a intitulé Sérénade, la mé-
lodie de Schubert qui porte le même nom, la canaonette
exécutée dans le Don Juan de Mozart sous les fenêtres de
la camériste, la barcarolle du dernier acte de VOtello de
Rossini , rintroduction du 1" acte du Barbier de Se'
ville, etc. B.
SÉRÉNISSIME.
SFRF
' K. ces mots dans notre Dic*
tionnaire de Biographie el
SERGENT DKBATAILLE. ' d'HlStoirS,
SEROENT DE VILLE.
SEaoENT-Focnaiea* V, FocinnisR« dans notre Dte^on^
naire de Biographie et d'Histoire.
SBEGENT-MAJOR, le premier sons-officier d*uDe compa-
gnie d'infanterie. Il doit connaître la conduite, les mœun
et la capacité des autres soua-officiera, des caporaux et
des soldats de sa compagnie ; il les commande en tout ce
qui est relatif au service, k la tenue et à la discipline, et
en est responsable envers les officiers. Il surveille le four-
rier, chargé, sous sa direction, de faire les écritures. Il a
pour signe distinctif un double galon d'or ou d'argent
cousu diagonalement au-dessus de chaque parement des
manches de son uniforme. Dans l'artillerie, la Rendar-
merie et la cavalerie, ses fonctions sont remplies par
un marécheÀ-desAogis-chef, Le grade de sergent^major a
été créé par une ordonnance de 1770; ce grade avait déjà
existé depuis longtemps sous le titre de sergent d'af'
faires. Au xvi* et au xva* siècle, on appelait sergent-
major un officier supérieur dont les fonctions étaient
analogues à celles de nos Majors.
SERGENTËRIE, nom donné en Normandie à des fiefs
nobles patrimoniaux et héréditaires, qui passaient aux
filles comme aux fils, dont l'exercice pouvait être affermé,
et dont les propriétaires devaient foi et hommafce. Ceux-
ci avaient pour fonctions de maintenir le droit de justice
par la force des armes; c'est poui'quoi on les appelait
SERGENT.
SEnoENT d'armes.
SER
1639
SRR
tergêfUs nobles du plaid de Vépée on sergents de la que-
relle. Ils jugeaient provisoirement dans les affaîres ordi-
naires, recevaient les plaintes, faisaient les informations,
et citaient les parties devant Ib iuc ou la cour de l'Échi-
quier.
SERINETTB, sorte A'orgue ^ cylindre (K ce mot)
dont on se sert pour instruire les serins. Son étendue est
ordinairement d*une octave; elle peut Jouer 4 ou 5 airs
différents.
SERMENT, acte civil et reli^eux par lequel on Invoaue
Dieu comme témoin de la venté d*un fait, ou de la sin-
cérité d'une promesse, et qui contient implicitement une
sorte dMmprécation contre celui qui le prête, au cas où il
se parjure. Le serment est dit affirmatif ou assertoire,
quand il s'applique k un fait passé, sur lequel il y a incer-
titude; promissoire, s'il se réfère à une chose future.
Chez la plupart des nations, il est accepté comme une
sûreté des engagements, des témoignages ou des décla-
rations. Le Droit romain Tezigeait des tuteurs et cura-
teurs avant leur entrée en fonctions. Le serment poli-
tique est celui qu'on exige des fonctionnaires publics
dans un grand nombre de pays au moment de leur
entrée en fonctions, et par lequel ils promettent obéis-
sance aux lois dç l'État et fidélité au souverain. La né-
cessité du serment de la part de tout fonctionnaire faisait
pour ainsi dire partie du Droit public en France avant
1789; les rois le prêtaient au moment de leur sacre,
et, pour les magistrats, on considérait au'il accomplissait
en eux le car^ictère de l'office et leur déiéralt la puissance
publique. La Révolution maintint ce principe, et exigea
le serment civique : on se rappelle les désordres que sou-
leva la loi sur la Constitution du clergé en voulant l'exiger
des prêtres. Les différentes ' Constitutions qui se sont
succédé ont maintenu le serment des fonctionnaires ,
en modifiant seulement ses termes i ordonné par la loi
du 31 août 1830, aboli en 1848, il a été rétabli en 1852.
Un serment professionnel est imposé aux employés des
Postes relativement au secret des lettres, ainsi qu'aux
avocats en ce qui concerne le loyal exercice du ministère
de la défense, un autre genre de serment spécial à la fonc-
tion ou à la mission confiée est celui des experts et des
interprètes > des Jurés [Code dUnstruction criminelle,
art. 312), des témoins en matière criminelle Ubid.^ art. 75,
155, 317). fin matière civile, on n'exige des témoins que le
serment de dire la vérité. — Le serment judiciaire s'ap-
plique aux objets des contestations entre particuliers, et
est de deux sortes, le serment décisoire et le serment dé-
féré d* office. Le serment décisoire est celui qu'une partie
défère à l'autre, pour en fdre dépendre le lugement de la
cause : quand il a été accepté par l'adversaire, la rétracta-
tion n'est pas possible, et^ après qu'il a été fait, on n'est
point recevable à en prouver la fausseté. Mais le serment
doit avoir pour objet un fait personnel ^ la partie à la-
quelle on le défère. Il ne peut être réfiré, lorsque le fait
n*est pas celui des deux parties. Le plaideur qui refuse
le serment qu'on lui défère, ou qui ne consent pas à le
référer à son adversaire, succombe nécessairement; il en
est ainsi de celui à oui le serment a été référé et qui le
refuse. Un serment déféré d'office par le Juge à l'une des
parties ne peut être référé par elle à l'autre partie ; il est
appelé serment supplétif ou supplétoire, si la décision
de la cause doit en dépendre, et serment in litem, s'il ne
s'agit que de déterminer le montant de la condamna-
tion. Le serment ne peut être déféré d'office que si la de-
mande ou l'exception n'est pas pleinement justifiée, et si
elle n'est pas non plus totalement dénuée de preuves. Le
serment sur la valeur de la chose ne doit être déféré qu'au
cas où il n'y a pas d'autre moyen de la constater, et le Juge
doit déterminer la valeur de la somme Jusqu'à concur-
rence de laquelle le serment fait foi (Code iVap., art. 1357,
1370). En général, le serment Judiciaire doit être fait par
la partie en personne et en audience publique : mais, en
cas d'empêchement légitime et dûment constaté, il peut
être prêté devant un Juge commis par le tribunal et qui
se transporte avec le greffier chez la partie ; en cas d'éloi-
gnement trop grand, il peut èUe oraonné que la partie
prêtera le serment devant le tribunal de sa résidence. Il
n'y a pas de termes prescrits par la loi pour la presta-
tion du serment Judiciaire; mais le Juge aoit exiger qu'il
soit prêté suivant le rit de la reli^^on que professe la
partie. La personne à qui le serment a été déféré et qui
est convaincue d'avo:r fait un faux serment est punie
de la dégradation civique [Code pénal, art. 366).
Chez les Anciens, le serment se prêtait devant les au-
tels. Chez les peuples chrétiens, il s'est longtemps prêté
la maSa sur l'Évangile ou sur des reliques : aujourd'hui
on le prête debout, la tête découverte, la main droite nue
et levée vers le ciel ou en ftice d'un crucifix. Les Juifs
Erêtent serment dans la synagogue, en présence du rab-
in, et la main sur le Talmud. Les Quakers, s'appuyant
sur un passage de TÈvangile de S' Matthieu (v, 33), pro-
hibent le serment. F. G. Walckenaer, De ritibui in it«-
rando à vHeribus, Hebrœis maxime ac Grœcis, obser^
vatis, 1755, in-4».
SERMENT CIVIQUE, Serment d'accomplir tous les devoirs
du citoyen^ En usage chez les Anciens, il n'a aucun sens
parmi nous.
SERMENT coNSOLATRB. ) V. cos mots daus notro Dîc-
SERMENT DE GLADIATEUR. > ttOMiaire de biographie et
SERMENT MiUTAiRE. ) d*Histoire.
SERMOLOGE, c.-&-d. recueil de sermons; nom donné
autre-fois à des livres qui contenaient des discours ou
sermons des papes et autres personnes vénérées pour
leur sainteté. On y faisait des lectures aux fêtes des Con-
fesseurs depuis Noj^l Jusqu'à l'octave de l'Epiphanie, à la
Purification, à la Toussaint, et à quelques autres fêtes.
SERMON (du latin sermo, discours, entretien), dis-
cours du genre démonstratif, prononcé en chaire, dans
une église, sur un sujet de morale ou de dogme. Dans le
premier cas, on l'appelle sermon de morale; dans le
second , sermon de mystère. Les règles du sermon ont
été développées par S* Augustin dans son traité De doc-
trinà chrtstianA , et par Fénelon dans ses Dialogues sur
Véloquence, Ce qui le distingue de l'Homélie et du Prône
{V, ces mots), c'est qu'il exige un texte, un exorde, un
plan régulier, et une péroraison {V. ces mots). Le texte,
emprunté à l'Écriture sainte, renferme en substance le
sujet du discours. L'exorde est terminé par une invoca-
tion, à la suite de laquelle les auditeurs disent tout bas
un Ave, Maria, Le sermon est de tous les discours reli-
gieux celui qui comporte le mieux une division régu-
lière : on le partage d'ordinaire en deux points; le sicTmoii
sur la Passion en a souvent trois. V. Chaire (Éloq'.ience
de la). ».
SERMONNAIRE, se dit tout à la fois d'un recuuil de
sermons, et du prédicateur qui s'est voué h, ce genre de
discours.
SERPENT, reptile dont on a fait le symbole du men«
songe, de l'astuce et de l'envie, mais aussi l'emblème
de Ta prudence et de la séduction. C'est sous la forme
du serpent que le démon tenta Eve dans le Paradis ter-
restre. Dans l'ancienne Egypte, le serpent entourait la
tête d'Isis, le sceptre d'Osiris, le corps de Serapls. Dans
la mythologie grecque et romaine, des serpents arment
le fouet des Furies et forment leur chevelure ; ils entou-
rent le caducée de Mercure. Le serpent était l'attribut
d'Esculape, dieu de la médecine, et d'Hygic, déesse de
la santé, parce que, changeant de peau tous les ans,
il rappelait le malade entrant par la 8un!é dans une nou-
velle vie. Un serpent sur un trépied marquait l'oracle
de Delphes, sans doute en souvenir de Python, tué par
Apollon à Delphes. Pour les chrétiens, le serpent est
l'image de l'esprit malin ; il est représenté vaincu au
pied de la croix, ou foulé sous les pieds de la Vierge im-
maculée. Un serpent qui mord sa queue est le symbole
de l'éternité. Les habitants de la Nigritie rendent encore
aujourd'hui un culte au serpent. • B.
SERPENT , instrument à vent, longtemps employé pour
soutenir le chant d'église, et même pour Jouer la basse
de l'harmonie dans la musique militaire. Il était com-
posé de deux pièces de bois de noyer fort minces, accolées
en regard l'une à l'autre de manière à former un tube
rond, tortillé en S comme un gros serpent, recouvert
d'un cuir très-fin ou d'une peau de chagrin, ouvert aux
deux bouts, effilé vers l'embouchure, et grossissant peu
à peu Jusqu'à l'autre extrémité. Il était percé, sur le
côté, de 0 trous, dont les trois supérieurs étaient bouchés
par les doigts de la main muche, et les trois inférieurs
par les doigts de la droite. Sa musique était écrite sur la
clef de fa 4« ligne. Le serpent, inventé en i590 par un
chanoine d'Auxerre, nommé Edme Guillaume, était un
instrument imparfait : il avait des intonations fausses,
et, k côté de notes très-fortes, on en rencontrait de bien
faibles. Pour le perfectionner, on y ajouta des clefs, qui
le rendirent plus Juste, mais qui ne lui donnèrent pas
d'égalité. Il a disparu complètement de nos Jours, et a
été remplacé par le basson russe ou par lophicléide. —
Dans certaines orgues, à la pédale de seize pieds, il y a
un Jeu d'anche appelé serpent. Le son en est plus faible
que celui de la posaune {Y. ce mot), mais plus fort que
celui du basson. Il imite le serpent de la musique mili-
taire. B.
SRR
16*0
SER
SERPENTEAU , fusée volante sam bagpette, qui , au
ilea de monter droit, va obliquement en zigzag et comme
en serpentant; — cercle de fer muni de grenades char-
gées de pointes de fer, qu'on Jette sur une brèche.
SERPILLIÈRE, toile grossière d'emballage, et, par
extension, tente que les marchands placent au devant
de leurs boutiques pour les garantir des rayons du soleil.
SERRE , lieu clos et couvert où Ton abrite pendant
rbiver les plantes qui redoutent le froid, et pendant
toute Tannée celles qui demandent une température
constamment élevée. Les serres doivent être abritées
contre le vent, tournées entre l'Est et le Sud, et vitrées
d'un ou de plusieurs côtés pour laisser pénétrer les
rayons du soleil. Il faut q[ue les vitrages puissent s*ou-
vrir, afin de renouveler Tair. On nomme Serre tempérée
celle qui se chauffe par les rayons solaires seulement, et
Serre chaude celle qui se chauffe en outre au moyen de
\ oêles ou de calorifères, ou par la vapeur de l'eau bouil-
lante. B.
SERRE-BOSSE, gros cordage qui tient une ancre sou-
levée par une de ses pattes, entre le bossoir où cette
ancre est suspendue et le porte-hauban de misaine.
SERRE-FILE. V. File.
SERRURERIE, art qui fournit, non-seulement les ser-
rures, dont il tire son nom, mais à peu près tous les ou-
vrages en fer qui entrent dans la construction des ma-
chines, des instruments et outils, et des édifices de toute
espèce. Ce n'est aujourd'hui, à proprement parler, qu'une
industrie; mais il fut un temps où l'on pouvait le placer
parmi les Beaux-Arts : le maître serrurier ne devait pas
se contenter de savoir travailler le fer, il fallait qu'il fût
encore sculpteur, artiste, mécanicien. La serrurerie du
moyen âge produisit de magnifiques ouvrages, grilles,
croix, reliquaires, portes de tabernacles, pupitres, cof-
frets, plaques de serrures, ferrures de portes, etc. On
Jtaît les ferrures des portes de la cathédrale de Paris.
Elle fut également florissante à l'époque de la Renais-
sance; on fit alors des clefs et des plaques de serrures
remarquables par leur fini, des bas- reliefs en fer re-
poussé et rehaussé d'or pour décorer les meubles. La
grille de la galerie d*Apollon, au vieux Louvre, témoigne
de la perfection à laquelle on était arrivé. Sous Louis XIV,
la serrurerie produisit encore quelques oeaux ouvrages.
SERRURIERS, ancienne corporation, qui prit pour pa-
tron S' Éloi, et dont les statuts, accordés par Charles VI
en 1411, furent confirmés par François V en 1543 et par
Louis XIV en 1650. L'apprentissage et le compagnonnage
duraient 5 ans chacun. Le brevet coûtait 30 livres, et
la maîtrise 8U0. Les serruriers ne pouvaient, sous peine
de punition corporelle, faire ouverture do serrures hors
de la présence du propriétaire de la chose, ou du loca-
taire de l'appartement. Il leur était défendu, sous peine
de mort, de fabriçiuer des clefs sur modèles de terre ou
*\e cire, sans avoir la sen'ure, ou de fa!rc des ustensiles
pouvant s'Tvir au faux monnayage.
SERVAGi:. I V. notre Dictionnaire de Bio-
SERVANT D'ARMES. { graphie et d'Histoire.
SERVANTE, meuble qui commença à être en usage
vers la fin du règne de Louis XIV. C'était une crédence
de forme carrée, montée sur roulettes, avec deux ou trois
tablettes et deux ronds pour y placer une bouteille et une
carafe, et au moyen de laquelle un petit nombre de con-
vives pouvaient se servir eux-mêmes sans le secours des
domestiques et sans être obligés de se lever de table.
SERVANTS, artilleurs qui se tiennent de chaque côté
d*une pièce pour la servir.
SERVICE (du latin serviref servir), état on fonctions
d'une personne qui sert en qualité de domestique. Le mot
se dit encore de l'emploi de ceux qui servent l'État dans
la magistrature, les finances, Tinstruction publique, etc.
La durée du service est déterminée par l'âge auquel on a
droit à une pension de retraite ( V. Retraite — Pensions
de). — Le Service militaire a eu une durée très-variable.
Chez les Hébreux, tout homme pouvait être appelé de 20 ans
à 50. Chez les Spartiates, tout citoyen était soldat de
20 ans à 60 ; à Athènes, on servait de 18 à 40 ans ; à Rome,
de 17 à 45. Au moyen &ge, chez les Franks, le LetMfe ou
Fidèle devait le service à toute réquisition de son chef ;
VAhriman ou homme libre, seulement dans les guerres
générales. A l'époque féodale, le service militaire fut une
des obligations du vassal envers son suzerain : il durait,
chaque année, de 40 à 60 Jours. Depuis le xv* siècle,
l'armée en France se recruta par enrôlements volontaires;
pour la Milice ( V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie »•/ (V Histoire) , la durée du service fut de 5 ou
% ftBL Depuis la Hévoiution qui soumit tous les citoyens
à la conscription, le service militaire fut fixé à 5 ans pai
la loi du 18 fructidor an vi, à 6 ans par colle du 18 févr.
1 808, k 6 ans pour l'infanterie et à S ans pour la cavalerie
et les armes spéciales par la loi du 10 mars 1818 : porté
à 8 ans pour toutes les armes par la. loi du 9 juin fS'il.
il a été réduit à 7 par celle du 21 mar» 1832. Il y eut des
exemptions, et le remplacement fn\ permis (K.REcauTB-
MENT, Exonération^ Remplacement). F. le SuppL B.
SERVICE , en termes de Liturgie , célébration solennelle
de l'office divin. Un Service de bout de Van est celui qui
se célèbre pour un défunt au premier anniversaire de son
décès.
SERVICE (Lettre de). V. Lettre de service.
SERVICES FONQERS. K. Servitudes.
SERVIEN (Idiome). V. Serbe.
SERVIETTE, linge de table^qui, si l'on en croit Mon-
taigne, ne fut en usage que depuis son temps, c.-à-d. à la
fin du XVI* siècle : auparavant les convives s'essuyaient
avec la nappe. Cependant, on trouve dans des temps an-
térieurs les mots facitergium ( linge de figure) et manu-
mundium (essuie-mains). Il fut un temps où, dans les
grandes maisons, on changeait de serviette à chaque
service, et même à chaque assiette. — De nos Jours, on
donne aussi le nom de Serviette & un grand portefeuille
mou, à deux poches, en maroquin ou en basane, et que
l'on porte sous le bras.
SERVITUDES, en termes de Droit, charges établies sur
un héritage pour l'usage ou l'utilité d'un héritage appar-
tenant à un autre propriétaire. On les nomme aussi Ser-
vices fonciers. L'héritage auquel la servitude est due est
dit dominant; celui qui la doit, se)'vant. Les servitudes
n'établissent, dit la loi, aucune prééminence d'un héri-
tage sur l'autre, et dérivent ou de la situation naturelle
des lieux, ou des obligations qu'impose la loi, ou des con-
ventions intervenues entre les propriétaires : de là une
distinction des servitudes en naturelles, légaies, conven-
tionnelles.
Les servitudes naturelles sont, par exemple, celles qui
tiennent à l'écoulement des eaux (K. Cours d*eau), ou
encore l'obligation au bornage entre propriétaires voisins.
V. Bornage.
Parmi les servitudes légales, il y a d'abord celles qui
ont pour objet l'utilité publique ou communale; ainsi,
pour le marchepied le long des rivières {V. Marchepied),
la construction ou la réparation des chemins : des règle-
ments particuliers les régissent. Ce sont encore la mi-
toyenneté des murs, haies et fossés (F. Mitotenketf,
Haie, Fossé). La loi règle également au titre des Servi-
tudes la distance et les ouvrages intermédiaires requis
pour certaines constructions, telles que cheminées, fours,
étables, fosses d'aisances, etc. Elle s'occupe du droit de
vue, c.-à-d. qu'elle détermine la hauteur et la dimension
des jours qui peuvent être ouvcits dans les murs joignant
la propriété d'auVui, et fixe la distance obligatoire pour
l'ouverture des vues droites ou fenêtres d'aspect et celle
des vues obliques. Végout des toits doit être recueilli par
chacun sur son terrain, ou projeté directement sur la
voie publique; ce n'est qu'à titre de servitude qu'il peut
être projeté sur le fonds voisin. Le passage sur le fonds
voisin ne peut être exigé qu'au cas d'enclave : il se fixe
alors moyennant indemnité, et s'exerce par Tendroit le
plus court et le moins dommageable.
Les servitudes établies par le fait de l'homme sont
susceptibles de toutes les variétés que la volonté humaine
peut leur faire revêtir. La loi les respecte toutes, pourvu
que l'usage et l'utilité soient revendiqués par un fonds
en faveur d'un fonds et n'aient rien de personnel, pourvu
encore qu'ils n'aient rien de contraire à l'ordre public.
On les distin^e en servitudes urbaines ^ lorsque leur
usage est spécial à des bâtiments, et servitudes rurales,
lorsqu'elles s'appliquent aux fonds de terre; en servi-
tudes continues ou discontinues, suivant que leur usage
a ou n'a pas besoin du fait de l'homme pour être con-
tinué ; en servitudes apparentes ou non apparentes, sui-
vant qu'elles ont ou n'ont pas un signe extérieur de leur
existence. De ces servitudes, les unes peuvent s'acquérir
par titre ou par la prescription trentenaire, ce sont les
servitudes continues et apparentes ; les autres ne peuvent
s'établir que par titre, ce sont les servitudes continues
non apparentes, ou discontinues apparentes ou non ap-
parentes. A l'égard de la première catégorie, la destina-
tion du père de famille vaut titre.
Les frais nécessités par l'usage et la conservation de la
servitude sont, à moins de conventions contraires, à la
charge du fonds dominant : mais, au cas niêmn où le
' fonds servant y est assujetti , oc peut s'y soustraire en
SES
1641
SRV
abandoniiant le fonds amujetti au isropriétaire da fonds
dominant. Rien ne doit être fait ni par le propriétaire du
fonds servant pour rendre l'usage de la servitude plus
incommode , a/i par le propriétaire du fonds dominant
pour a^raver la situation du fonds assujetti. — Les ser-
vitudes s'éteignent lorsqu'elles se trouvent dans un état
tel qu'on ne peut plus en user; elles revivent lorsque les
choses sont rétablies, & moins qu'il ne se soit écoulé un
temps néce<)saire pour Pextinction du droit. Ce temps est
thé par la loi à 30 ans ; il commence à courir, pour les
servitudes discontinues, du jour où l'on a cessé de jouir;
pour les servitudes continues, du jour il a été fait un
acte contraire à la servitude. La réunion des deux fonds
dans la même main amène l'extinction de la servitude.
V, Lalaure, Traité ies servitudes réelles, revu par Puil-
liet, 182X, in -8^'; Selon, Traité des servitiuies réelles,
1837, iû-8°; Pardessus, Traité des servittides ou Services
fonciers, 8« édit,, 1838, 2 vol. in-8'>; Astruc, Traité des
servitudes réelles, 1843, în-12; Jousselin, Traité des ser-
vitudes d'utilité publique, 18:iO, 2 vol. in-8°; Féraud-
Giraud, Servitudes de voirie, 1851, 2 vol. in-8<»; Gavini
de Campile, Traité des servitudes, 1853; Demolombe,
Traité des servitudes ou Services fonciers, 1856, 2 vol.
in-S». R. d'E.
SERVITUDES MiuTAiRBS, restricUons apportées, dans l'in-
térêt de la défense du territoire national , au droit de
Jouissance ordinairement Inhérent à la propriété foncière.
II existe, autour des places de guerre et des postes mili-
taires, trois zones de servitudes; dans la première, qui
s'étend à 250 met. de l'enceinte de la place ou du poste,
il ne peut être fait aucune construction, à l'exception des
clôtures en baies sèches ou en planches à claire-voie, sans
pans de bois ni maçonnerie; les haies vives et les plan-
tations d'arbres ou d'arbustes formant haies y sont spé-
cialement interdites. Dans la seconde zone, qui s'étend à
487 met,, il est interdit, autour des places de premier
ordre, d'exécuter aucune construction en maçonnerie et
en pisé; mais on peut y élever des constructions en bois
et en terre, à charige de les démolir, sans indemnité, à la
première réquisition de l'autorité militaire, dans le cas
où ces places seraient déclarées en état de guerre; pour
les places de second ordre et les postes militaires, il est
permis d*élever des constructions quelconques, sous cette
même conoition de démolition. Dans la troisième zone,
qui s'étend à 074 met. pour les places, et à 584 pour les
postes, il ne peut être fait aucun chemin, aucun exhaus-
sement de terrain, aucune fouille, aucun dépôt de maté-
riaux, sans que leur alignement on leur position n'aient
été concertés avec les ofTlciers du génie. Des exceptions
à ces règles peuvent être autorisées par le Ministre de la
guerre, qui prescrit les conditions qu'il juge convenables.
— Indépendamment des zones de servitudes, il y a la
zone des fortifications ou le terrain mUitaire, C'est le
sol sur lequel reposent les fortifications, les fortifications
elles-mêmes, et les terrains accessoires indispensables
au service de la défense. La zone des fortifications est
limitée à l'intérieur par la rue Militaire ou rue du Rem-
part, destinée à assurer les libres communications le
long de l'enceinte. Les contraventions aux lois et règle-
ments sur les servitudes militaires sont constatées par les
gardes du génie, et, au cas où des ouvrages seraient in-
dûment exécutés par des particuliers, ils seraient dé-
molis aux frais de ces derniers, sans préjudice des peines
applicables aux contraventions analogues en matière de
grande voirie.
II existe, dans tous les départements frontières, une
zone frontière, dans l'intérieur de laquelle les proprié-
taires sont soumis à des servitudes spéciales. De plus,
sous le nom de polygones ou de territoires réservés,
on désigne certains grands obstacles naturels, tels que
fleuves, forêts, massifs de montagnes, etc., qui bordent
les frontières, et sur lesquels l'État s'est réservé des droits
au point de vue de la défense du pays. V. la Loi du
7 avril 1851, et le Décret du 10 août i853; Delalleau,
Traité des servitudes établies pour la défense des places
de guerre et de la zone des frontières, 1836, in-8<>.
SESQUI, particule employée par les anciens musiciens
dans la composition le plusieurs mots qui servaient à
exprimer différentes sortes de mesures. Elle signifiait
trois moitiés, ou un et demi; ainsi, on appelait sesqui'
altère la mesure à 3/2, parce qu'elle contient trois blan-
ches ou trois moitiés de ronde; sesquinquarte, la mesure
àfy4 ou neuf quarts de ronde ; sesqui-octave, la mesure à
0/8 ou neuf huitièmes de ronde. Le sesqui-diton était la
tierce mineure ou un ton et demi. — Il y a un jeu d'or-
gues appelé se$q^icUter, formé de deux rangées de tuyaux
en étaln ou en étoffe, du diapason du Principal (F. et
mot). Il se compose d'une quinte et d'une tierce supé-
rieure, de manière que les deux rangées donnent une
grande sixte.
SESSION, en latin sessio (de sedere, être assis), temps
pendant lequel un corps délibérant, un tribunal excep-
tionnel , une Cour d'assises, est assemblé.
SESTERCE. \ V. ces mots dans notre Dictionnaire
SESTERTiUM. { de Biographie et d'Histoire.
SESTINA. V. Italienne (Versification).
SETH, dieu égyptien, type de la force et de la vic-
toire. Il est représenté avec la tête d'un animal à museau
allongé et à oreilles droites. Quand on en fit un esprit
malfaisant, son image fut martelée sur les monuments.
SEUIL, partie inférieure d'une porte, pierre ou pièce
de bois qui est entre ses tableaux ; — pièces de bois qui
ferment l'avant et l'arrière des bateaux. On nomme seuU
d^écluse la pièce de bois qui, percée de travers entre deux
poteaux au fond de l'eau, sert à appuyer par le bas la
porte d'une écluse.
SÉVICES (du latin sœvire, sévir), mauvais traite-
ments exercés par un mari envers sa femme, par un père
envers ses enfants, par un maître envers ses serviteurs.
Les sévices sont une cause de séparation entre mari et
femme {Code NapoL, art. 231 ), et de révocation de dona-
tion entre-vifs (art. 055 et 1046).
SÉVILLE (Alcazar de). F. Alcazar.
sÉviLLB (Cathédrale ae), un des plus beaux monu-
ments de l'Espagne, dédié à la S^* Vierge. A part une
vieille muraille moresque, située du côté du Nord , cou-
ronnée de créneaux et de mâchicoulis, soutenue par de
lourds contre-forts, et qui est un reste de mos(|uée, l'en-
semble de l'édifice appartient à la fin du xv* siècle et au
commencement du xvi" : commencé en 1480, il était
assez avancé en i510 pour servir à la célébration du
culte. La façade principale, du côté de l'E., a été achevée
seulement en 1827. Le plan de la cathédrale de Séville
est quadrilatéral; elle a 132 met. de l'E. à l'O., et 06 du
N. au S. On y entre par 0 portes, surmontées presque
toutes de statues en terre cuite exécutées par Lope Marin,
et dont les plus intéressantes sont la porte de S*-Chris-
tophe, près de laquelle Luis de Vargas a peint à fresque
un S^ Christophe de 10 met. do haut, et la porte du Cro-
codile, sous laquelle est suspendu un énorme reptile,
envoyé, dit-on, a Alphonse le Sage par le sultan d'Ég>'pte.
L'intérieur de l'église est à 5 nefs, sans compter un double
rang de chapelles latérales, au nombre de 37 : il est
éclairé par 03 fenêtres, dont la plupart sont garnies de
vitraux peints, dus à des maîtres flamands, tels que
Charles de Bruges, Arnaud de Flandre et son fils. L'effet
est majestueux et saisissant : aucune église d'Espagne n'a
des proportions aussi imposantes ; les piliers, formés de
faisceaux de colonnettcs, ont près de tO met. de hauteur.
Tout le sol est pavé de grandes dalles de marbre blanc et
noir. Il serait impossible d'énumércr toutes les richesses
que contient cette cathédrale : l'œuvre la plus célèbre,
bien que le goût n'en soit pas très-pur, est le retable du
maltre-autel , auquel Alexis Fernandez, Arfian, Antoine
Ruiz et d'autres artistes travaillèrent pendant 68 ans; il
est tout en bois de cèdre , et composé de 44 panneaux
finement sculptés, où l'on a représenté en bas-reliefs les
traits principaux de l'Ancien et du Nouveau Testament.
Le chœur est fermé par des grilles de fer doré : il con-
tient un orgue immense, 127 stalles de style gothique, et
un magnifique lutrin exécuté en 1570 par Bartolomé Mo-
rel ; le cierge pascal , haut comme un m&t de vaisseau ,
pèse 1,025 kilogr., et le chandelier de bronze qui le 9up«
porte a été copié sur le chandelier du Temple de Jéru-
salem. A rentrée de la grande nef, une pierre tombale
rappelle que là fut inhumé Ferdinand Colomb, dis de
Christophe Colomb : pendant la semaine sainte, on élève
sur cet emplacement un grand édifice de bois et do p&te,
haut de 30 met., dans lequel on dépose le S^-Sacrement,
et qui produit, quand il est éclairé, dans la nuit du
jeudi au vendredi, un effet vraiment merveilleux. Au
nombre des chapelles, nous citerons : celle du Baptistère,
où se trouve le fameux tableau de S* Antoine de Padoue,
par Murillo ; celle de S^-Pierre, oui a un beau retable de
style gréco-romain, et neuf tableaux de Zurbaran; la
Chapelle royale, longue de 27 met. et large de 20, à la-
quelle donne entrée un arc de 20 mè^ d'élévaGon orne
de IS statues de rois de l'Ecriture, et qui renferme di-
vers tombeaux, la ch&sse du roi S' Ferdinand, l'étendard
d'Espagne, etc. La sacristie contient , outre de précieux
tableaux et un riche Trésor, le Tenebrario^ chandelier
triangulaire en bronze, haut de 7 met., portant 15 cierges
SIC
1642
SIÈ
rr les Gérémonies de la semaine sainte, terminé par
figures qui représentent Jésus, ses apôtres et dis-
ciples, et une Custodia d^argent , construite eu 1587 par
Juan d*Arfe, haute de 4 met., que 24 liomroes portent
dans les processions. B.
sÉviLLB (La Giralda, à). V. Giralda.
SÉVIRS. 7. notre Dictionnaire de Biographie et d^HiS'
toire,
SëWURI, espèce de citliare en usa^e dans l*Orient.
Elle est montée de 4 cordes d*acier, et d*un rang de
€Drdes doubles de laiton.
SEXACORDE , lyre à 6 cordes.
|pîi?w?**^* l y- ces mots dans notre Dictionnaire
SEXm S ^ Biographie et d'Histoire.
SEXTUOR , composition musicale à 0 parties obligées
de voit ou dMnstruments. Gomme chefs-a'ŒUYre de sex-
tuors vocaux, on peut mentionner ceux de Don Juan et
des Noces de Figaro par Moxart, de Lucie de Lammer^
moor par Donizetti.
SEXTUPLES (Mesures), nom qu*on donnait assez im-
proprement dans l'ancienne musique aux mesures à
2 temps composées de six notes égales, trois pour chaque
temps.
SKUMATO, mot italien employé en Peinture, pour dé-
signer le moelleux extrôme du pinceau, efla fusion très-
douce des tons et des contours.
SGRAFFITO, c-à-d. en iulien ègrattgnè; espèce de
grand dessin qu*on trace avec une pointe sur un mur où
Ton a préeilablement appliqué une couleur noire ou grise.
La pointe met à découvert le blanc qui est dessous. C'est
ce qu'on nomme Peinture de blanc et de noir ou Manière
égratignée» Les sgraffiti, imaginés en Italie, ont été peu
durables, parce que le temps salit les murailles; il existe
encore quelques restes de ceux que Polydorc de Caravage
et Uaturino, élèves de Raphaôl, avaient exécutés.
SHAKO. K. Schako.
cmn ijowvv l V' cos mots dans notre Dictionnaire
SHIRE; \ ^ Biographie et d'Histoire.
SHO rnSH ou SCHOn ISH , air de valse à 2 temps. Il
n'a d'écossais que le nom.
SHRAPNEL, nom mi'on donne qnelquerois à Vobfis à
mitraille. C'est celui d'un colonel d'artillerie anglais qui
en eut le premier l'idée.
SI , septième note de la gamme d'ut. Elle n*a été intro-
duite que fort tard dans la musique t on y suppléait au-
paravant au moyen des muances ( V, ce mot).
SIAM, jeu qui se joue avec des quilles et un disque
en bois qui sert à les abattre.
SIAMOISE ou thaï (Langue), langue parlée depuis la
frontière méridionale de la Chine jusqu'aux montagnes
de la presqu'île de Malacca. Elle est monosyllabique; on
y compte 5 tons ou accents qui donnent aux mots des
significations difTérentes. V. J. Low, A grammar of the
Tai or Siamese langiuige, Calcutta, 1828, in-4^; Léon de
Rosny, ObserwUions sur la langue siamoise et sur son
écriture, Paris, 1855, in-8*.
SIBYLLINS (Livres). V. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire.
SICAIRE (du latin sica, poignard), mot synonjrme
d'assassin et de meurtrier. Il implique l'idée du crime
salarié par le fanatisme religieux ou politique.
SICHOUANA ou BETJOUÀNA (Idiome), un des idiomes
calmes {V, ce mot). Les articulations d, j, v et % lui
manquent. II y a peu de syllabes terminées par des con-
sonnes, et très-rarement par deux consonnes de suite;
Tabondanoe des voyelles et des lettres mouillées rend
cette langue aussi douce qu'aucune autre. Les plus longs
mou n'ont jamais plus de quatre syllabes, ni les plus
courts moins de deux. La première syllabe de tout mot
n'est qu'un préfixe , et elle joue le rôle qui appartient
ailleurs aux terminaisons. L'unique cas obhque que pré-
sente la déclinaison, et qui parait avoir la valeur de
l'ablatif ou plutôt du Jocatil', est caractérisé par la termi-
naison ng. Quant au cas direct, qui n'est que le nom
avec sa particule inséparable, il est à la fois le nominatif
et tous les autres cas. Le vocabulaire des substantifs est
riche, et exprime, dans l'ordre physique du moins, des
nuances de signification fort délicates. La distinction des
nombres se fait par un changement dans le préfixe; le
E réfixe se répète entre le substantif et l'adjectif son attri-
ut. Placé entre un nom et un verbe, le préfixe répété
répond au pronom relatif. I>e vocabulaire des adjectirs
•st très-limité, et l'on (tût par suite un fréquent usage du
•ttbetantif comme attribut ! ainsi l'on dit nomme d'amer
biUté m Ifm de kmmm mmahlê. tfm même rmrine ver*
baie peut passer par les formes efiective, causative, reli»-
tive, dans chacune desquelles elle est susceptible de%
voix active, passive, moyenne ou réfléchie, et souvent
encore d'une voix réciproque. La conjugaison se Torme
en partie au moyen de deux auxiliaires, na pour le pa^sé
et iv'A pour le futur. Les personnes ne sont différencitVs
p«r la désinence qu'à l'impératif. Le verbe substantif
s'emploie rarement. La construction grammaticale est
directe. Le préfixe du si^et exerce une grande influence
sur toute la phrase, dont il modifie, en lui imposant sa
propre initiale, les pronoms et les prépositions. V. Ca-
salis, Études sur la langue sichouana, Paris, 1841, in-S**.
SICILIEN (Dialecte), un des dialectes italiens, dont
Vigo a trouvé des vestiges évidemment antérieurs à
l'an 1000. Dante le vantait, pour l'opposer au toscan. La
lettre t tient une grande place dans le sicilien, où elle est
substituée à Ve presque partout. L'o des autres dialectes
est de môme chassé par Vu; U se change en dd, b en v,
d en nn, I en r, A en sci^ que en chi. Les Siciliens font
une multitude d'élisions, de redoublements, de retran-
chements, de modifications particulières, qui rendent
leur dialecte vif et énergique, mais peu élégant. V. Vigo,
Canti popolari, Catane, 1857.
SICILIENNE . air de danse originaire de Sicile, dont la
mesure est à 6/4 ou plus souvent à 6/8, et d'un mouve-
ment modéré.Chaque mesure de cet air commence par
trois croches, dont la première est pointée. — Le nom de
Sicilienne a été donne aussi k des morceaux de chant;
telle est la Sicilienne du 1* acte de Robert le Diable
(0 Fortune, à ton caprice).
siauENNB (Comédie). V. Dorienns.
siciUBNNB (Littérature). La Sicile occupe une place
importante dans l'histoire de la littérature grecque an-
cienne, et le dialecte dorien v donna ses plus beaux pro-
duits. A Sparte, chaque année, on lisait publiquement le
traité de la République ^ composé par Dicéarque de Mes-
sine. Épicharme, l'un des premiers, donna une forme r^
guliëre à la comédie; Sophron inventa les mimes; Corax
et Tisias ouvrirent les premières écoles de rhétorique. La
poésie pastorale fut créée en Sicile par Stésichore, et,
plus tard, perfectionnée par Théocrite et Mnschus. Les
sciences ne brillèrent pas d'un moins vif éclat t 'cétis de
Syracuse connut la rotation de la terre; Empédocle figura
l'attraction et la répulsion newtoniennes dans l'Amour ci
la Discorde, et l'on a prétendu même qu'il n'ignorait pa^
les phénomènes de l'électricité; Archimède a laissé de»
traces indélébiles dans l'histoire de la science. — Au
moyen &ge, selon Crescimbeni , les Provençaux rimèrent
en Sicile avant les Siciliens; mais les premières poésies
italiennes partirent de la Sicile : au nombre de ceux qui
imprimèrent le mouvement , on doit citer Ciullo d'Al-
camo (fin du xn* siècle), l'empereur Frédéric II, son
chancelier Pierre des Vignes, Hazzeo di Ricco, Nina de
Messine, etc. De nos Jours, l'abbé Meli a écrit de gra-
cieuses poésies qui rappellent les bucoliques de l'An-
tiquité.
SICILIENNE (Numismatique). La Sicile est le pays qui a
fourni les monnaies les plus belles de l'Antiquité : 1 or j
est beaucoup plus employé que dans la plupart des autres
contrées. Le monnayage, qui existait dans cette lie dès
les temps les plus recula, cessa à peu près sous le règne
de Tibère. Parmi les types particuliers k la Sidle, on
doit citer : la triquetra, formée de trois jambes hu-
maines disposées en triangle, et faisant allusion aux trois
promontoires de l'Ile; le taureau à tète humaine, em-
blème de BaecbuB i et las bigea, triges et quadriges. Les
noms des fleuves, Acragas, Anîtliuse, Gelas, Hipparis,etc.,
sont souvent gravés sur les monnaies siciliennes. Les lé-
gendes sont écrites en grec, en puniaue, en latin ; le grec
est emprunté principalement au dialecte dorien. Il nous
est parvenu de grands médaillons d'argent représent iiu
à l'avers une femme voilée et couronnée d'épis, au revers
une Victoire dans un quadrige; ils ont été fhqipés en
l'honneur de la Sicile, on ne sait à quelle occasion. V. Tor-
rcmuzza, Sicilia populorum et urbium nummi. Païenne,
1781, in-fol.
ciniNiirc f V' <^es mots dans notre Dictionnaire de
SICLE. S Biographie et d'Histoire.
SIDÈRISME (du grec sidéros, fer, acier), nom donné
à la faculté que prétendent posséder certains individus
de reconnaître sous terre l'existence de masses métal-
liques.
SIÈCLE (du latin sœculum), espace de 100 années. La
division par siècles était en usage chez les Romains, 4{ai,
SIR
16t3
SIG
à ebftque retour de siècle^ célébraient des Jeux Séculaires.
Chaque peuple compte les siècles à partir de l'ère qu'il a
adoptée. Dans renonciation des années d*un siècle, la
dernière seule (1800 par exemple] porte le nom du chiffre
de centaine qui sert a écrire ce siècle. — Pline nous ap-
prend que les Druides entendaient par siècle une durée
de 30 ans seulement.
SIECLE, période indéterminée qui porte le nom d'un
grand homme. On dit, par exemple, le Siède dû Péri-
cUSj le Sièele â^ Auguste, le Siècle de Léon X, le Siècle d$
louis XIV, F. GaECQint, RoMAmiy iTAUBNNit Française
( Littérature )«
sifccLB, mot qui s*entend de la vie mondaine, par oppo-
sition à la vie religieuse et cloîtrée. C'est de ce sens que
dérivent les mots séculier (clergé) et sécularisation,
SIÈGE (du latin sedes]^ tout meuble fait pour s'as-
seoir ; tels sont les bancs, les fauteuils, les chaises, etc.
{V, ces mots), — Par extension. Siège désigne le lieu
où résident certaines autorités, par exemple un gouver-
nement, un tribunal, un év6c|ue. Cest en ce sens que
Rome est appelée le ScUnt-Siége, parce que le pape y
réside.
si^GE, action d*attaquer une place fortifiée, dans le but
de s*en rendre maître. Si Ton se contente d'investir la
place, d'occuper les points par lesquels elle pourrait re-
cevoir des secours, et de ramener par famine à se rendre,
c'est un blocus (V. ce mot). Si on Vattaque do vive force,
c'est un siège proprement dit. Avant l'invention de l'ar-
tillerie, les opérations consistaient en jets de pierres,
coups do bélier et autres machines, mines, escalade;
aujourd'hui elles comprennent le tracé des parcUlèles et
- des tranchées, le travail de la sape et de la mine, l'éta-
blissement des batleriesy la formation de la brèche et Vas-
saut ( K. ces mots). Parmi les sièges célèbres, on peut
citer ceux d'Azoth par Psammétichus (il dura, dit-on,
20 ans ), de Troie par les Grecs, de Tyr par Nabuchodo-
nosor et par Alexandre le Grand (585-573 et 332 avant
J.-C), de Syracuse par Marcellus (212), de Carthage et
dcISumance par Scipion Émilien (146 et 134), d'Alesia
par César ( 52), de Jérusalem par Titus (70 ap. J.-C), de
Calais (1347) et d'Orléans (1428) par les Anglais, de
Grenade par Ferdinand le Catholique (1492), de Rhodes
(1522) et de Vienne (1520 et 1083) par les Turcs, de La
Uochelle par le cardinal de Richelieu (1628), de Lille
par les Autrichiens (1709 et 1792), de Mantoue par le
pt^néral Bonaparte ( 1 797 ), de Saragosse par les Français
(i8U8), du Sébastopoi (1855) etc.
9ih:GE (Etat de), mesure de sûreté publique qui suspend
momentanément l'empire des lois ordinaires et remet
tout pouvoir à l'autorité militaire. lies lois du 10 juillet
1791 et du 10 fructidor an v, le décret Impérial du 24 déc.
1811 ei la loi du 9 août 1849 ont successivement réglé
cette matière. Dans les localités mises en état de siège, la
Justice civile fait place au régime des Conseils de suerre ;
l'autorité militaire a le droit de faire des perquisitions
le jour et la nuit dans le domicile des citoyens, d'éloi-
gner les repris de justice et toute personne non domici-
liée, d'enlever toutes les armes, d'interdire les publica-
tions et les réùbions. V, le Suppl,
SIENNE (Le Dôme de), église cathédrale qu'on croit
généralement avoir été b&tie au milieu du xiu* siècle. On
l'admire moins à cause de sa beauté que de sa richesse.
Elle est formée tout entière d'assises horizontales alter-
natives de marbre blanc et noir. La façade, attribuée à
Giovanni de Pise, est couverte de sculptures, parmi
lesquelles on remarque des Prophètes et des AngM par
Jacques délia Quercia, les animaux héraldiques des villes
qui furent les alliées de Sienne, et un bas-relief repré-
sentant au-dessus de la grande entrée la vie de Marie.
Le clocher a été élevé par Agnolo et Agostino de Sienne.
A l'intérieur, Duccio di Buoninsegna plaça, au commen-
cement du xjv* siècle, ces pavages de marbre blanc qui
produisent l'efTet de nielles gigantesques, et où des traits
de dessin gravés en creux ont été remplis de poix en fu-
sion : c'est un ouvrage sans rival en Italie, et que l'on
tient couvert d'un plancher mobile, pour qu'il ne soit
pas usé par le frottement des pieds. Les voûtes sont
peintes en azur, avec des étoiles d'or; les arcades infé-
rieuree sont à ogive. Les objets les plus précieux que
contient l'édiflce sont : les peintures au cliœur, par Bec-
cafumi; le tabernacle en bronze du mattre-autel, par
Lorenzo di Pietro del Vecchictta (1472); les vitraux
peints, cxé<'Utés par Pastorino, sur les dessins de Perl no
del Va^si (1549); la frise, ornée des portraits en terre
cuite des papes et des antipapes; la chaire, admirable
ouvnge de Nicolas de Pise, qu'aidèrent ses enfants Gio-
vanni et Arnolfo; les trophées de la bataille de TArbia
(1250), qui ornent les pilastres au-dessous de la coupole.
Au-dessous du chœur est un ancien baptistère, appelé
aujourd'hui chapelle de S^-Jean : les foats baptismaux
sont décorés de bas-reliefs par Donatello, Ghiberti, Pol->
lajuolo et Jacques délia Quercia. La sacristie, qu'on ap-
pelle aussi la Librairie, parce qu'on y conserve des
manuscrits précieux sur vélin, enlumina, a été peinte
à fresque par le Pinturicchio, d'après des dessins de
Raphaël : au milieu est un groupe exquis des trois Grâces,
un peu mutilé, et que l'on trouva dans les fondations au
xm* siècle. B.
SIENNE (École de), école de peintres italiens, rivale de
l'école florentine, et remarc^uable par son style gai , franc
et facile, en harmonie parfaite avec le caractère du peuple
lui-même. Lanzi en fait remonter l'origine aux peintres
grecs qui vinrent s'établir à Sienne pendant les Croi-
sades : cependant cette ville comptait , dès le xii' siècle,
un certain nombre de peintres, de miniaturistes surtout,
et l'on conserve, entre autres manuscrits, un Ordo o/yi-
ciorum de Senensi ecclesiâ, enluminé par le chanoine
Oderigo en 1213. Les Siennois furent les premiers, eu
Italie, qui apprirent des Grecs la méthode do peindre sur
une couche de plâtre recouverte d'or. Le chef de l'école
fut Guido ou Guidone (xiii* siècle), dont Mino d& Tur-
rita, Simone di Martino (dit Simon Mommi), Ambroise
et Pierre Lorenzetti, Bonaventure de Lucques, Ugoiioo
de Sienne, et Duccio di Buoninsegna, paraissent avoir
été les disciples. La fameuse peste de 1348 moissonna
beaucoup d'artistes, et la fin du xiv« siècle ne compta
guère que deux maîtres célèbres. Berna et Taddco di Bar-
tolo. Au xv% l'école de Sienne se laissa devancer par
celle de Florence : elle montrait un singulier esprit d'ex-
clusion, au point qu'on avait établi une taxe et l'obliga-
tion d'une caution pour tout étranger qui voulait tra-
vailler dans le pays, une décadence sensible dans l'art Ut
rouvrir Sienne aux étrangers, et l'on y attira le Pérugin,
le Pinturicchio, Luca Signorelli ,, et Raphaôl lui-même.
Sous leur influence, la pointure prit un nouvel essor
d ins les œuvres de Fungai , d'Andréa del Brescianino, de
Pacchiarotto, et surtout d'Ant. Razzi , dit le Sodoma. Ce
dernier eut pour élèves Anselmi, Bartolommeo Neroni, et
Salimbeni. Puis, l'école eut pour chef Beccafumi , le der-
nier grand nom qui la représente, car Baltliazar Peruzzi
fut plus remarquable comme architecte que comme
peintre. On ne trouve plus à mentionner ensuite que
Ventura, Rustici, Manctti , Joseph Nasini , etc. — L'art de
la mosaïque a pris à Sienne un caractère particulier.
Duccio di Buoninsegna fut le premier à exécuter, sur le
pavé des églises, des dessins à sgraffito ( V'. ce moO« rem-
plis d'un mastic noir, auauel Matteo di Giovanni ajouta
bientôt des marbres de ai verses couleurs. Le secret de
colorer les marbres pour^'*^ .ter les mosuques fut trouvé
par Michel-Anse Yanni*
SIERRA, j V, ces inuts dans notre Dictionnaire de
SIEUR. ) Biographie et d'Histoire,
SIFFLANTES, nom donné en Grammaire aux lettres
a, Zt c (doux) , X, parce qu'on ne peut les prononcer sans
faire entendre un sifflement F peut être regardée comme
une demi-sifflante. Le thdes Anglais est aussi une sifflante
plus ou moins aspirée. H en est de même du thêta (6, 0)
et du dzêta (2,0 grecs : la 1*** de ces lettres a le même
son que th des Anglais, et la 2* un son intermédiaire
entre le thêta et le sigma. Les Grecs avaient encore
d'autres sifflantes : le xi (S, l) et lep^t (^F). — On ap-
pelle mot sifflant, phrase sifflante, langue sifflante, un
mot, une phrase, une langue, où les sons siiSants, par-
ticulièrement s, reviennent fréquemment. P.
SIFFLET, petit instrument avec lequel on siffle. La
coutume de siffler les auteurs dont on est mécontent, re-
monte à l'antiquité : il en est question dans les Lettres
de Cicéron {Éplt, famil,^ viii, 2). C'est au temps de l'em-
pereur Auguste que les coups de sifflet paraissent s'être
introduits dans les spectacles comme signes d'improba-
tion. Chez nous. Préville regardait le sifflet comme un
avertissement utile, ce qui est aussi rare que des auteurs
et des acteurs détestant la claque. Apjourd'hui , il n'est
plus guère de bon ton de siffler au théâtre ; on murmure
ou on garde le silence.
SIFOINE. V, Chifonie.
SIGILLOGRAPHIE. V, Sceao.
SIGISBÉE (de l'italien cigisbeo)^ nom donné en Italie
à l'homme qui fréquente habituellement une maison, qui
rend des soins assidus à la maîtresse ot se tient â
ordres. C'est ce qu'on appelle un cavalitr servant*
SIGLES. V, Abrévutions.
SIC
1644
S[L
SIGMA, lit romain. V, notre Dictkmnaurê de Biogra-
phie et dP Histoire,
SIGNAL, tout moyen employé pour transmettre des
ordres ou des a^is à de certaines distances. Les feux, les
fusées, les pavillons, les drapeaux, les coups de canon,
les appareils télégraphiques, les batteries de tambour,
les sons de la trompette, les coups de cloche, etc., de-
viennent des signaux, lorsque les combinaisons dans
lesquelles on les fait entrer ont un sens connu de ceux à
qui on les adresse. Dans la Marine, il y a un Livre de
signaux où les signes à employer dans chaque circon-
stance sont indiqués, et que possèdent tous les comman-
dants de bâtiment.
SIGNALEMENT, dcwnption d'une personne, faite par
ses caractères extérieurs, et qu'on donne pour la faire
reconnaître. Les passe-ports et les permis de chasse con-
tiennent le signalement de ceux auxquels ils sont déli-
vrés. On donne à la gendarmerie les signalements des
déserteurs, des accusés, des malfaiteurs évadés.
SIGNATURE, nom d'une personne, écrit de sa main à
la fin d*une lettre ou d'un acte. En Jurisprudence, la si-
gnature est nécessaire pour rendre un acte valable et
obligatoire. Les actes peuvent ne pas être écrits de la
main de ceux qui les signent, excepté les testaments
olographes (Codi NapoL, art. 260) ; les billets sous seing
privé, portant obligation d*une somme d'argent ou d'une
chose appréciable, doivent, s'ils ne sont pas écrits par
celui qui les souscrit, avoir un bon ou approuvé (F. Ap-
probation t)'^.CRrrimE). Les signatures données en blanc
se nomment blancs seings (K. ce mot). On n'est pas censé
avoir signé un acte sans l'avoir lu : on ne peut dans ce
cas le faire annuler qu'en prouvant qu'il est frauduleux
et q\iQ la signature a été surprise. Ce qui est ajouté après
la signature et sans approbation est regardé comme non
écrit. Dans le cas où la signature d'un acte sous seing
privé est déniée par son auteur, et dans celui où des hé-
ritiers déclarent ne pas la connaître, la vériRcation en
est ordonnée en justice {Code A'apol., art. 13241. Les actes
notariés doivent être signés par les parties, les témoins et
les notaires; il doit être fait mention de la déclaration
des parties ou témoins qui ne savent ou ne peuvent si-
gner (Loi du 25 ventôse an xi). Un acte authentique fai-
sant foi par fui-mème de tout son contenu, celui qui
nierait la signature qu'on lui oppose devrait prouver, par
la voie de l'inscription de faux, que cette signature ne
lui appartient pas. S'il est prouvé qu'une pièce est écrite
ou signée par celui qui l'a déniée, il est condamné à
150 fr. d'amende, outre les dépens, dommages et inté-
rêts. L'extorsion de signature par violence est punie des
travaux forcés à temps. — La loi du 10 juillet 1850 exige
que les articles de Journaux sur les matières politiques,
philosophiques ou religieuses, soient signés de leurs au-
teurs.
SIGNATURE, terme de Diplomatique. V. Diplôme.
siGMATORE, rescrit du pape. F. notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire,
SIGNATURES, en termes d'Imprimerie, lettres ou
chiffres qu'on met au bas de la première page d'une
feuille, pour en indiquer l'ordre et faciliter le travail de
l'assemblage des feuilles de tout un volume. Ce moyen a
été employé pour la première fois dans les Concor-
dantiœ Bihliorum de Conradus de Alemannia, en 1470.
SIGNATURES, caractèros mystiques, de bon ou de mau-
vais augure, dont on croyait, au moyen &ge, c^ue chaque
homme était marqué par l'astre sous lequel il naissait.
SIGNATURES, uom qu'on donne aux figures des gens de
métiers ou d'arts cpii se trouvent comme donataires au
bas des vitraux peints.
SIGNAUX , nom donné auti^fois aux gros grains qui
forment les séparations entre les dizaines d'un chapelet.
SIGNE, fait visible qui a pour but de manifester une
chose invisible à l'intelligence; !1 est un intermédiaire
entre l'esprit et la chose signifiée. Il ne peut révéler cette
chose qu'à la condition d'un rapport entre elle et lui; de
plus, il faut que l'esprit conçoive ce rapport lorsque le
signe parait. Ce rapport étant naturel ou de convention,
il suit qu'il y a, en général, deux sortes de signes : no-
turels et artificiels. 11 y a, entre les signes et la pensée
2u'ils sont appelés à manifester, des rapports étroits, qui
onnent lieu à une influence réciproque. Cette liaison
étroite est exprimée par le discours et l'analogie des
mots : >6yoç, parole, raison : ratio, oratio. Pour les
Stoïciens, la Dialectique était la science du signe et de la
chose signifiée {V, Langage). Un ensemble de signes peut
non-seulement manifester une pensée, une croyance^
comme le eigne de la croix (V, ce moQ, c'est quelquefois
un système complet de langage, eomme ches les sovd»-
muets. R.
SIGNES ACCIDENTELS, en Musique. F. Acodehts.
signes d'accentuation. V. Accent.
SIGNET (diminutif de signe)^ un ou plosieurt petits
rubans liés ensemble, tenant à un bouton ou à un pe-
loton, et qu'on place au haut d'un livre, pour marquer
les endroits qu'on veut trouver aisément, ou le lieu où
l'on s'est arrêté.
SIGNIFÈRE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
SIGNIFICATION, en termes de Procédure, notification,
connaissance que l'on donne d'un arrêt, d'un jugement,
d'un acte quelconque par la voie judiciaire. Elle se fait
ordinairement par ministère d'huissier, et, suivant les
cas, à personne ou domicUe, ou par acte d'auotie à avoué.
En cas de refus d'une signification, l'original est visé par
le procureur impérial, et le refusant peut être condamné
à une amende {Code de Procéd., art. 1030). Aucune si-
gnification ne peut être faite depuis le l'' octobre jusqu'au
31 mars avant 6 heures du matin ni après 6 heures du
soir, et depuis le l'' avril Jusqu'au 30 septembre avant
4 heures au matin ni après 9 heures du soir, non plus
Sue les dimanches et les jours de fête légale, à moins
'une permission du juge s'il y a péril en la demeure
(/ôtd., art. 1037). C'est à partir du jour de la signification
que se comptent les délais de procédure. — Il y a des
règles particulières à la signification de certains actes.
V. Ajocrnrment, Citation, Jugeuent, etc.
SIGNINUM OPUS. V. Signia, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
SIGNUM. ( V. notre Dictionnaire de Biographie
SILRERGROS. ( et d'Histoire,
SILENCE (Le), divinité allégorique, représentée sous la
forme d'un enfant qui tient un doigt appuyé sur ses lèvres.
SILENCES, en termes de Musique, interruptions me-
surées comme les sons eux-mêmes, et signes de ces in-
terruptions. Ils correspondent aux différentes valeurs des
notes : en prenant la ronde pour unité de durée d'un
son, le silence d'une ronde se nomme pause; celui d'une
blanche, demi-pause; celui d'une noire, soupir {V. ces
mots). La ronde avec un point se représente par une
pause suivie d'une demi-pause ; la blanche pointée, par
une demi-pause suivie d'un soupir, et ainsi du reste. B.
SILENTIAIRE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
SILHOUETTE, visage tiré de profil, d'après l'ombre
qu'il projette. Ce genre de dessin était connu des An-
ciens, qui l'appelaient Sciagraphie (dessin des om-
bres); mais le nom en est tout moderne, et vient d'Etienne
de Silhouette, contrôleur des finances sous Louis XV :
les réformes que ce personnage entreprit ayant paru
mesquines et ndiculcs, on appela silhouettes les dessins
imparfaits où l'on se bornait à indiquer par un simple
trait les contours des objets. Le nom de silhouettes est
également donné à des figures découpées aux ciseaux
dans du papier noir.
SILLAGE, trace qu'un navire laisse derrière lui sur les
eaux et qui ressemble à un sillon; — par extension,
espace qu'il parcourt dans un temps donné, et qui se me-
sure avec le loch ( V. ce mot).
SILLES (du grec sillos, sarcasme), vers mordants cbex
les anciens Grecs. Xénophane en avait composé contre
tous les poètes et les philosophes de son temps. Timon
de Phlionte et Didyme figurent aussi parmi les Sillo-
graphes.
SILLET, en italien capotasto, petit morceau dlvoire,
d'ébène ou autre bois très-dur, placé à rextr&mité supé-
rieure du manche des instruments à cordes, pour servir
de point d'appui aux cordes et les élever de manière
qu'elles ne posent pas sur la touche.
SILO, mot d'origine espagnole par lequel on désigne
une cavité souterraine où l'on dépose les grains pour les
conserver. Il faut un terrain sec, à température con-
stante, et où la pluie ne puisse pénétrer. Les silos ne
furent, à l'origine, que des moyens adoptés contre le
pillage : les Anciens les connaissaient; ils sont très-com-
muns en Algérie, et l'on en trouve aussi en Chine, en
Espagne, en Italie, en Russie, en Pologne, en Hongrie. On
en voit à Amboise, sur le bord de la Loire. Ils sont tantôt
circulaires, tantôt en forme de cône renversé, ou bien en
cône évané à sa partie supérieure, quelquefob revêlos
d'une maçonnerie. On a réussi en France à faire de bons
silos en fer battu, vernis à l'extérieur, et enfoi.is dans la
maçonnerie. V. Doyère, Conservation des jrains
Vensilage, Paris, 18G2,gr. in-8««
SIM
1645
SliN
SMLVâ. y. Espagnols (Poésie).
SILVES ou SYLVES, nom donné par les Latins & un
recueil d*opuscuIes littéraires roulant sur différents sujets
et disposés au hasard comme les arbres d*une foréU
C*est à peu près ce que nous appelons Mélanges. Ou ap-
pelait aussi du nom de Silve une simple pièce de vers ou
de prose écrite avec toute la rapidité et la négligence
d*un premier jet, et dont les détails avaient besoin d'être
tevus, élagués, retouchés, polis et mieux ordonnés; à peu
^rès ce que nous nommons une esquisse ou une improvi-
iBfton. Le seul recueil qui nous soit parvenu sous ce titre,
if est celui du poôte Stace, qui vivait au temps de Do-
^itien. Il Ta nommé SUves à cause de la variété des ma-
tières, et parce que chacune des pièces qui le composent a
été écrite de prime saut, et porte tous les caractères de la
précipitation : au témoignage du poète lui-même, quel-
ques-unes, même assez longues, ne lui ont coûté qu*un
Jour de travail, et aucune pas plus de deux jours. Ce
recueil contient 33 poèmes groupés en 5 livres. Stace y a
déployé de merveilleuses ressources de style et de ver-
sification ; l'esprit étincelle dans les mots, dans les tours;
l'imagination du poète enrichit et féconde de maigres et
stériles sujets à l'aide de tous les procédés enseignés
dans les écoles de rhétorique; tout y sent l'artifice; nulle
part ne parait la trace d'un sentiment, d'une pensée sortis
de l'àme; nul naturel, nul abandon. Ces défauts ne vien-
nent cependant pas du manque d'invention : Stace a des
qualités sérieuses ; mais il eut le malheur d'écrire à une
époque où il était dangereux de se montrer hardi ailleurs
que dans l'art d'agencer des mots ingénieux et brillants,
et de cadencer d'harmonieuses périodes; où la force
d'àme, la vérité, la franchise, menaçaient sans cesse
l'orateur ou le poète du sort d'Helvidius et de Lucain ; où
Tart suprême de faire fortune consistait à flatter les
grands, l'empereur et ses affranchis. — Une des meilleures
éditions des SUves est celle de Markiand, Londres, 1728,
in-4^, reproduite en partie dans la Bibliothèqw latine de
Lemaire, 1825, in-8<*. Il existe une traduction française
des SUves, par Rinn et Âchaintre, dans la Bibliotlièque
latine-française de Panckoucke, Paris, 1829-30, in-8°. P.
S1MARRË (de l'italien zimarray qu'on fait dériver du
mot latin et grec syrma, robe à longue queue), habille-
ment long et traînant que les femmes portaient autrefois.
On donne le même nom à une ample et longue soutane
que les prélats italiens et espagnols mettent en certaines
circonstances, et à la grande robe que porte en France le
chef de la ma^strature.
SIMIKION , instrument de musique des anciens Grecs,
qui , selon plusieurs auteurs, était monté de 35 cordes.
SIMILITUDE (du latin similis, semblable), ressem-
blance, rapport exact entre deux ou plusieurs choses^
entre deux ou plusieurs personnes. En Rhétorique, la
Similitude est une figure par laquelle on fait voir quel-
que rapport entre deux choses d'espèces différentes, afin
de faire comprendre l'une par l'autre : ainsi, c'est par
une Similitude que le prophète Nathan, dans la Bible,
fait comprendre a David son péché.
SIMONIE. ( V, ces mots dans notre Dictumnatre de
SIMOUN. ) Biographie et d*Histoire.
SIMPLE ( Genre ou Style), un des trois genres d'élo-
quence établis par les rhéteurs. Son caractère est la clarté,
la précision. Il s'attache moins à persuader au'à instruire;
aussi n'a-t-il pas besoin de véhémence. Il luit donc tous
les artifices destinés à émouvoir les passions; il néglige
le nombre, il marche avec facilité ; mais, en évitant la
contrainte, il ne se permet aucun écart, aucune licence.
Comme il veut, avant toute chose, être clair, il ne recule
pas devant une construction qui peut paraître quelque-
fols languissante; il évite l'inversion, quand elle n'est
£as nécessaire pour faire ressortir la pensée; il rejette
ien loin les antithèses et toutes les figures qui trahis-
sent le travail et l'artifice oratoire. Il ne cramt pas de
décomposer une pensée pour la faire mieux comprendre,
mais il ne l'amplifie pas; il se renferme dans les détails
nécessaires; il n'admet rien de superflu. Sobre et mo-
deste, il ne crée point d'expressions nouvelles, il évite
les mots vieillis; il est humble partout, et ne prétend pas
produire cette harmonie qui remplit l'oreille d'un son
divin, a Sa construction n'est point pleine et serrée; mais
ces hiatus, ces voyelles qui se rencontrent, ont souvent je
ne sais quel aimable abandon qui nous montre l'heureuse
négligence d'ua homme plus occupé des choses que des
mots. Toutefois l'orateur, libre du travail de la période,
de l'enchaînement de la phrase, a d'autres conditions à
remplir : ces tours si rapides et si simples ne dispensent
pas de toute application; il est un art de paraître sans
art. Comme il y a des femmes à qui il ûed bien de n'être
point parées, l'élocution simple nous plaît, même sans
ornements : c'est une beauté négligée, qui a des grâces
d'autant plus touchantes qu'elle n'y songe pas. » Msiis la
simplicité n'est pas la sécheresse, ni la bassesse, ni Dn-
corrcction ; et le style simple, quoique nu, doit être élé-
gant. Il n'admet ni la parure ni l'éclat, mais il demande
un goût exquis; l'amour des choses simples est la marque
d'un jugement sain. L'écueil du style simple est la fami-
liarité; en craignant d'être recherché, on manque sou-
vent de noblesse, on emploie des expressions communes,
on remplace la simplicité par la bassesse. « Le genre
simple, dit Rollin, n'est pas le plus facile, quoiqu'il le
paraisse. Comme le style qu'on y emploie est fort naturel,
et qu'il s'écarte peu de la manière commune de parler,
on s'imagine qu'il ne faut pas beaucoup d'habileté ni de
génie pour y réussir; et, quand on lit ou qu'on entend
un discours de ce genre, les moins éloquents se croient
capables de l'imiter. On le croit, mais on se trompe;
et, pour s'en convaincre, il ne faut qu'en faire l'essai ;
car, après bien des efforts, on sera contraint souvent
d'avouer qu'on n'a pas pu y parvenir. Ceux qui ont quel-
que goût de la vraie éloquence, et qui y sont le plus
versés, reconnaissent qu'il n'y a rien de si difficile que
de parler avec justesse et solidité, et cependant d'une
manière si simple et si naturelle que chacun se flatte
d'en pouvoir faire autant. » Le style simple convient par-
ticulièrement à la preuve et à la narratior Darties du
discours qui demandent plus de clarté que de torce pour
instruire les auditeurs. Il peut arriver qu'un discours
tout entier appartienne à ce genre, lorsqu'il faut discuter
une question de Droit, une ordonnance, un texte de loi.
Cicéron nous en donne un exemple : o Mon plaidoyer
pour Cécina, dit^il, roulait entièrement sur l'ordonnance
du préteur; je me contentai d'éclaircir les points obscurs
par des définitions; je fis l'éloge du Droit, j'expliquai les
mots équivoques. » En dehors de l'art oratoire, il est plus
d'un genre qui exige le style simple. L'histoire et la phi-
losopnie, quand elles se contentent d'exposer et d'é-
claircir les Caits, usent communément du style simple :
tel est le Siècle de Louis XIV par Voltaire. Quand elles
y ajoutent des considérations sur la destinée de l'homme
ou sur les agrandissements et la décadence des empires,
alors elles s'élèvent jusqu'au genre tempéré et quelque-
fois jusqu'au sublime, comme les Annales et les Histoires
de Tacite et le Discours sur Vhistoire universelle de Bos-
suet. Le style simple est celui qui s'accommode le mieux
à l'usagQ de la vie. Dans les Lettres, quand elles ne sont
pas familières, et dans les Rapports , si nombreux chez
tous les peuples modernes, il doit régner à l'exclusion de
tout autre. H. D.
SIMPULE, vase. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire,
SIMULATION, mensonge inséré à dessein dans un acte,
pour en cacher le sens et la portée, et faire croire à des
conventions autres que celles qu'il semble constater. La
simulation est faite dans un but de dol et de fraude. Elle
entraîne la nullité de l'acte, si elle a été employée pour
échapper à une prescription ou à une prohibition de la
loi, pour couvrir une incapacité légale.
SINCA (Idiome). V. Mbxiqdb (Langues du).
SINDHI (Dialecte), un des dialectes indiens dérivés du
sanscrit. On le parle dans les contrées du Sind ou Indus
inférieur. Wathen en a publié une Grammaire (Bombay,
1836), et Stack un Dictionnaire (Bombay, 1849).
SINÉCURE (du latin sine cura, sans soin, sans charge),
se disait autrefois d'un bénéfice ou d'une dignité n'obli-
geant à aucune fonction. Le mot désigne aujourd'hui une
charge salariée qui n'exige que peu ou point de traviûL
SINGALAIS (Idiome). V, Cingalais.
SINGLER, en termes d'Architecture, mesurer au cor-
deau les parties courbes d'une construction.
SINGLETON, c.-&-d. seul ton^ swle couleur; mot an-
glais qui désigne, au Boston et au Whist, l'unique carte
d'une couleur qui se trouve dans la main d'un joueur,
et qu'il joue pour pouvoir couper ensuite.
SINGULIER, terme de Grammaire. V. Nohbbb.
SINISTRE (du latin sinister, placé à gauche, et, par
suite, de mauvais augure), se dit substantivement, en
termes d'Assurances, des p(9rtes et dommages qui arri-
vent aux objets assurés. En matièra d'Assurance mari-
time, la loi distingue les sinistres majeurs, dont la sur^
venance, emportant la preuve légale de la perte de l'objet
assuré, autorise le délaissement ( V. ce mo6^^ et les n-
»»'>/rr.ç mineurs, qui n'emportent point ave:: cu\ la preuve
lOgalc du la perte, et qui donnent simplemc;i\ k i'askurà
SIX
1646
SLA
le droit de réelamer à titra d'avarie ane Inuemnité pro-
portionnelle an dommage éprouvé.
SINOLOGUE (da latin Sina, Chine, et du gras logos,
discours), celui qui connaît la langue et la littérature
chinoines.
SINOPLE, en termes de Blason, désigne la couleur
Terte. Dans la gravure des armoiries, le sinople se mar-
Sue par des traits en bande, e.-à-d. qui vont de l'angle
roit du chef de l'écu à Tangle gauche. Sinoplê vient,
•uivant Court de Gébelin, de l'arabe stin, herbe, verdure,
et de bla, blé naissant et d'nn beau vert.
SINTOISME. \
sÎr^*^'^^' f F. ces mots dans notre Dictionnaire
SIRE \ ^ Biographie et d! Histoire.
smo'co. )
SIRVENTE, nom donné par les Troubadours à toute
poésie l}Tique <{ui ne roulait pas sur l'amour, et qui, par
cela même, était, suivant eux, d'un ordre inférieur, une
poésie de servant alarmes (sirventêse, de sirvmt)^ par
opposition avec la poésie noble, qui roulait sur l'amour,
et qui était appelée cansd. Les sirventes sont donc de ca-
ractères et de tons fort divers. La plupart appartiennent
ma genre satirique ; mais beaucoup sont des chants de
guerre, des appels à la croisade, des manifestes poli-
tiques; quelques-uns sont des élégies {planhs). Le sir-
vente satirique dut être d'abord pour les Troubadours un
moyen d'exprimer leurs passions haineuses contre ceux
qui les avaient excitées; mais il servit bientôt à censurer
les désordres des différentes classes de la société, à re-
procher aux seigneurs, aux souverains, au Saint-Sii^ge
même, leurs vexations, leurs torts, leurs erreurs. Un des
Troubadours qui réussirent le mieux en ce genre fut
Bertrand de Born; il floriseait en 1460. M. Villemain
{Littérature au tnoysn âge, 1. 1*') a donné une belle tra-
duction d'un de ses chants de guerre. Bertrand de Born
a laissé aussi une admirable élégie sur le trépas de Henri
Court-Hantel, mort en 1183. V, E. Baret, Espagne st Pro-
vence, Paris, 1857, in-8». E. B.
SISAGHTHIE. ]
SISTRE. ( F. ces mots dans notre Dictionnaire
SITICINE. ( ds Biographie et tTHUtoire.
SITOPHYLAX. )
SIXAIN ou SIZAIN , petite pièce de poésie composée
de six vers. On distingue deux sortes de sixains : les uns
ne sont autre chose qu'un quatrain, auquel on ajoute
deux vers d'une rime différente de celle qui a terminé le
quatrjtin ; comme dans l'exemple suivant de J.-B. Rous-
aeau [Odes, 1, 1) :
Selgnenr, dans ta gloire adorable
Qael mortel est digne d'entrer f
Qui poarra, grand Diea, péoétror ,
Ce •anctaaire Impénétrable,
Oh tes saints inclinés, d'an œil respectueux.
Contemplent do ton front Téclat mi^estueux t
Les autres comprennent deux tercets (F. ce mot), qui
ne doivent Jamais enjamber le sens de l'un à l'autre.
Exemple s
QaMls pleurant, 6 mon Dion, qnlls Arémiseant de crainte,
Ces malbeorenz, qui de ta cité sainte
Ne rerront point l'éternelle splendeur.
Cest à nous de cbanter, nous U qui tu rér^les
Tes clartés ImmorteHes;
Cest k nous de chanter tes dons et ta grandeur.
Bagikb, AUialUf H, 9.
RXÂTii , monnaie de billon qui fat frappée soui Fran-
çois I*', et qui prit la place du petit blanc, comme le
douzain avait remplacé le grand blanc. C'était le daoïi-
•ou.
SIX BLANCS, monnaie. V. Blanc.
SSrQoî&RE ( »*«^"«» ^)- ^' M««»«-
SIXTE, en termes de Musique, intervalle formé de tfo
sons diatoniques. On distingue : la sioste mineure, compo-
sée de troll tons et deux demi-tons (de utkla bémol) \ la
sixte majeure, composée de 4 tons et 1/3 ton (de utkla
naturel); la siaUe augmentée, dite improprement autrefois
superflue, composée de quatre tone et deux demi-tons (de
vtkla dièse). Les deux premières sont consonnantes, la
9* est dissonante. L'intervalle de sixte est rarement
employé dans le Piain-Ghant. — Vaeeord de sixte est le
i*' renversement de l'accord parfut; Vaccord de sixte et
quarte en est le 2«. Vaccord de sixte et quinte est le
î*' renversement de l'uccord de septième. 11 y a un ac-
cord de stxte augmentée dans le mode mineur {fa, ia,
ré dièse); k quatre parties., on y ajoute la quarte aug-
mentée (fa, la, si, re dièse) ou la quinte naturelle {fa, la,
ut, ré dièse).
81XTINE, pièce de poésie provençale, qui parait avoir
été inventée par Arnaud Daniel. Elle se composait d«
6 couplets, et chaque couplet de 6 vers ne rimant pu
entre eux. Les bouu rimes du 1*' couplet étaient répàés
à la fin de tous les couplets suivants dans un ordre ré^-
«ilier. Ceux du 2* couplet se composaient de ceux dn
l*', en prenant alternativement le dernier et le premier,
et successivement de bas en haut et de haut en bas jus-
qu'à ce que toutes les rimes Tassent employées. Chaque
couplet suivant se comoinait d'une manière semblable
avec le couplet précédent. ïjl pièce se terminait par un
Envoi, dans lequel tous ces bouts^rimés se trouvaient
répétés.
sixnNi (Chapelle). V, Vatican, dans notre Dietionnair
de Biographie et d^ Histoire.
SKIE , sorte de patin dont se servent les Norvégiens e*
les Lapons pour marcher sur la neige. C'est une léger*
planche, longue parfois de plus de z met., large seule-
ment comme le pied, terminée en pointe et recourbée à
ses extrémités. On l'attache au pied avec une bride en
cuir.
SKINDAPSOS. r. ScnmAPflos.
SLANG, langue du monde excentrique en Angleterre.
V. au Supplément.
SLAVE (AnciEM), langue morte aujourd'hui, nub qnl
est conservée dans la liturgie des peuples slaves attaciiés
à l'Église grecque. On la nomme encore ancien davon on
esclatxm, vieux bulgare^ langue ecclésiastique ou ecclé'
siastico^lave, langue cyrillique. C'est la première des
langues slaves qui ait été cultivée, et elle en est le type
orignal, le modèle le plus accompli. Entre le vni* et le
xu* siècle, on la reprda comme l'égale des langues grec-
que et latine, tandis que les autres idiomes de l'Europe
parvenaient à peine à l'état de langues écrites. Elle porte
à un haut degré le caractère de langue synthétique, el
elle est douée d'une richesse rare de racines, de formes
et d'inversions. L'admirable symétrie et les désinences
sonorçs de la langue sanscrite, dit Eichhoff, s'y retrou-
vent en grande partie. Riche d'un alphabet de plus de
40 lettres, qui réunit presque tous les sons de la voix
humaine, elle rend facilement les nuances de la pensée
par la simple modification des déiinencas. Sa déclinaison,
sans article, offre trois genres, trois nombres, et sept cas
(nominatif, vocatif, accusatif, génitif, locatif, datif, cau-
satif). Sa conjugaison est moins psrfaite quant aux finales,
qui ne se distinguent qu'à l'indicatif présent, au prétérit
et anx participes, celles du subjonctif et du futur même
étant confondues dans le préient; mais elle olfre en re-
vanche cette singularité remarquable, qu'au moyen de
certaines additions faites dans le corps môme du radical,
elle peut exprimer, dans leurs gradations les plus déli-
cates, non-seulement les modes et les temps, mais les
diTérentes conditions de l'action, son étendue, eon ac-
tualité, sa fréquence, son accomplissement. Des préfixes
et des aflixes. Judicieusement déterminés, conmbuent
puissamment à l'abondance du langage, en même temps
Su'ils amènent la précision la plus grande en dispensant
e périphrases. L'ancien slave s'est conservé pur dans la
traduction des saintes Écritures par Cyrille et lIétho->
dius. L'antagonisme des Slaves convertis à la foi grecqne
et des Slaves convertis à la fol romaine empèdia que
cette langue ne devint le lien de toutes les tribaa. V. Do-
browski, Instituiiones lingum sla^iccs diaUcti veleris.
Vienne, 1929; Miklosich, Radioes lùigum slooenieœ ve^
teris, LeiprijE, 1S45, eC LeoBicon lingum sloveniem vetcris.
Vienne, 4 850; Joannoviea, Grammatioa Ungum êodasia»^
tico-stavicœ. Vienne, 1851, in-S».
SLAVENSU. V. Rossi (Langue).
SLAVES (Langoes), une des grandes famiUet de langues
Indo-européennes (r. ce moi). On divise les langues
slaves en deux groupes : {• celles da sud eC de l'est,
c-à-d. l'ancien slave, le russe, le bulgare, Yillffrien
(comprenant le dalmate, le croate, le v)ende, et le serbe
ou servien) ; S* celles du nord et de l'ouest. c.-à^. le
bohème, le polonais^ le sorabe. Certains linguistes y
ajoutent le groupe des langues Lettiques {borussien ou
viettx prussien, lithuanien, letton ou /mioimmi^, doof
d'autres font une famille particulière. Tous les idiomes
slaves sont beaucoup moins différents entre eax que ne le
sont les idiomes germaniques. A l'égard de la grammaire,
ils sont de beaucoup supérieurs à tous les idiomes ger-
maniques et néo-latins. Le substantif u'a pas darUclo, el
SLA
1647
SOB
le verbe se conjugue presque partout sans pronom per-
Boonel. L*exîstence de sept cas dans la déclinaison rend
remploi des prépositions très-restreint. L'adjectif a,
comme en allemand, deux formes : Tune déterminée,
l'autre indéterminée. h& substantif a les trois genres;
mais, au pluriel, le féminin et le neutre sont souvent
confondus. Le masculin des objets animés se sert du gé^
iiitif au lieu de Taccusatif pour se distinguer du masculin
Inanimé. Plus rapprochées de la souche première que les
langues germaniques, les langues slaves ont naturelle-
ment des mots longs; par suite, elles ont beaucoup moins
que Tallemand et le grec la faculté de former des com-
posés. C'est aux langues slaves que les idiomes germa-
ni(
et
1
paraissent que' rarement dans l'ancien haut allemand et
ranglo-saxon. Dans les idiomes germaniques, les voyelles
apparaissent en majorité; les consonnes, surtout les gut^
turales et les dentales, dominent dans les langues slaves ;
la plupart des consonnes y sont doublées, et même beau-
coup ae mots, tels que bolk, pulk. Ion, ne s*y trouvaient
primitivement que comme des agrégations, des triples
consonnes {blk, plk, lin). C'est à la suite d'un mélange
que les gutturales et les dentales pénétrèrent dans les
langues germaniques. Ce qui s'est toujours opposé k la
fusion des idiomes et des littératures slaves, c'est la di-
versité de leurs alphabets, tels que le cjrrillique, le glago-
litiqoe, le latin, l'allemand. V, Schafarik, Histoire de la
langue el de la littérature slaves d'après tous ses diaJectes,
en allemand, Bude, 1826; Talvi (M"« de Iakob), Coup
d^œil historiqiMe sur la langm slave et ses divers dia-
lectes, en anglais, 1834; Eichhoff, Histoire de la langue
$t de la littérature des Slaves, Paris, 1839; Mickiewicz,
Cours sur la littérature slave, en allemand, 4*' édition,
Leipzig, 1849; Schleicher, les Langues de l Europe mo-
derne, trad. de l'allemand par Ewerbeck, Paris, 1852.
SLAVES (MyUiologie des). I>es renseignements que nous
possédons sur ce sujet sont peu nombreux, et ne con-
cernent le plus souvent que telles ou telles tribus slaves.
Toutefois, Hamsich Ûa Science du mythe slave, Lemberg,
1842) est parvenu à dégager des traditions diverses un
certain nombre de faits généraux. Il n'est pas vrai, comme
l'ont pensé la plupart des mythographes , que le culte
primitif d^ Slaves ait été un culte grossier de la nature :
ce fut, au contraire, un monothéisme qui s'obscurcit à
la longue, qui admit des éléments étran{;ers et dégéném
en polythéisme. Si les Slaves ont honoré des divini&s des
champs, des forêts, des fleuves, etc., ils reconnurent un
Dieu suprême, tout-puissant, qui laissait le soin de régir
les événements terrestres à des Dieux subalternes, issus
de lui. Ce Dieu, on le trouve mentionné sous les noms
de Swantevit, Sujetovid ou SwiatovU; c'est un Dieu de
la çucrre : un long glaive est suspendu à son côté, et sa
main gauche tient un grand arc; près de son idole étaient
déposai le frein et la selle que l'on mettait au cheval
blanc qui lui était consacré, et que le grand prêtre seul
avait le droit de monter. On croyait quUl chevauchait la
nuit sur ce mystérieux coursier, et allait combattre les
ennemis de son peuple. Il avait à Ai'kona, dans Tlle de
Rugen,un grand temple, qui fut détruit par Waldemar P',
roi de Danemark. Après Swantevit venaient : Radegast
ou Roswodiz, dieu de la force, dont l'idole, placée à
Rhétra, avait une tête de taureau, et portait un cygne
sur la poitrine; Pérun, dieu de la foudre; Prove, dieu
de ré<]uité et des Jugements, représenté sous les traits
d'un vieillard au long vêtement, et ayant pour attributs
le serpent, symbole de la prudence, et le fer chaud des
ordalies ; Stwa, déesse de la rie et de l'amour, figurée
par une jeune fille aux longs cheveux, couronna de
feuillages, tenant une pomme d'or d'une main et une
gnippe de raisin de l'autre; Sweitix, dieu des rayons so-
lairâs, représenté recouvert de magnifiques vêtements et
entouré de flammes^ Diewana ou Oziewonna, déesse des
forêts; Podaga, qui présidait à la chasse, à la pêche, à
l'élève des bestiaux et à l'agriculture, et au'on figurait
80U6 les traits d'un vieillard, court vêtu, corné d'un bon-
net pointu, le front surmonté de deux cornes, et tenant
d'une main un olifan, de l'autre une houlette; Zislbog,
dieu de la pleine lune et du temps; lutrebog, dieu du
matin ou de l'aurore; Bjelbog, le dieu blanc, dieu du
bien; Cxemebog, le dieu noir, dieu du mal, etc. Les
images des Dieux slaves rappellent l'Inde d'une manière
frappante : c'est la même multiplicité de têtes, de bras et
de Jambes. Les Slaves croyaient à la résurrection après
Ia mort, à rimm.^rtaiité de l'àme, aux poines et auy ré-
compenses futures. Les prêtres, organisés en une hiérar-
chie régulière, ont dû être primitivement les chefs du
peuple, leur nom de Ksiadz ou Knies ayant la double
signification de prêtre et de prince. Hs accomplissaient
les cérémonies du culte dans des bois consacrés ou dans
des temples s les sacrifices consistaient en bœufs, mou-
tons, fruits ; les sacrifices humains, introduits de l'étran-
ger dans quelques tribus, n'y eurent qu'une durée éphé-
mère. B.
SUVON. V. SuvB.
SLOKA , mètre héroïque dans la poésie sanscrite.
SLOOP, petit b&timent de cabotage h un seul màt. Il
est construit comme le cutter, mais dans de plus petites
proportions.
SLOVAQUE (Idiome), idiome parlé par les Slaves du
nord de la Hongrie, et que l'on regarde comme un dia-
lecte du bohème [V. ce mol). Il n'y a pas longtemps au'il
s'est élevé h la dignité de langue écrite. Parmi les écri-
vains qui l'ont manié avec succès, nous citerons, au siècle
dernier. Bel etKrman, traducteurs de la Bible; Steplian
Leschka, iqui publia le premier un Journal en slovaque;
BernoUk, auteur d'une Grammaire. Dans notre siècle,
Georges Palkovitch, chanoine de Gran, a traduit l'Écri-
ture sainte; Plachy, Tablitsch, Holly, se sont fait un nom
par leurs poésies. J. KoUar a publié une collection de
chants populaires, 1834, 2 vol.
SLOVÈNE. V. Wende.
SBIACK, sorte do grand sloop à un màt, gréé d'une
voile oui se hisse avec sa vergue. Il est en usage sur les
eûtes d'Ecosse.
SMALA. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogrch
phie et d'Histoire,
SMOGLEUR (de l'anglais to smuggle, faire la contre*
bande), petit bâtiment du Nord destiné à la contrebande.
On nomme aussi Smogleurs ceux oui le montent.
SNAYPURE (Idiome), un des idiomes indigènes de
l'Amérique du Sud, parlé dans le territoire du haut Oré-
noque. Il a quelque affinité avec le caraïbe tamanaque,
mais des formes grammaticales moins abondantes. Dans
sa construction, les prépositions suivent leurs complé-
ments, et les conjonctions, dont le nombre est d'ailleurs
trè»-restreint, se mettent à la fin de la phrase. La pro-
nonciation, exempte de sons gutturaux, a beaucoup do
douceur.
SOBRIQUET (du grec hybristicos, injurieux, ou du
latin subridiculum ; ou du roman sobra, sur, et quest,
acquis ), mot qui désigna, dans le principe, un geste, un
acte outrageant, de la nature de lis chiquenaude, de la
croquignole, puis une injure en parole. C'est ce qui dis-
tingue le sobriquet du surnom proprement dit, lequel
rappelle indifféremment les qualités et les défauts per-
sonnels. Le sobriquet n'exerce pas sa malignité seule-
ment sur les individus, il s'attaque aussi à des catégo-
ries, à des agrégations de personnes, à des populations
entières; et son caractère satirique lui assigne une place
dans l'histoire des mœurs populaires, à côté des pro-
verbes et des dictons, dont il ne diffère souvent que
parce qu'il est exprimé en un seul mot. Les peuples do
l'antiquité faisaient usage, les uns envers les autres, de
qualifications qui leur étaient inspirées par des senti-
ments d'exclusion, d'inimiUé, de mépris ; les Hébreux ne
connaissaient, en dehors de la postérité d'Abraham, que
des Gentils; les Grecs traitaient de barbares tous les
autres peuples, et ils furent imités en cela par les Ro-
mains, qui transformaient encore en coqs (galli) les
puissants, les forts {gallu) des bords de la Seine et de
la Loire, et pour qui les Scots étaient des bannis, les
Parthes des fugitifs, les Slaves des serfs. Les individus
ne se ménageaient pas davantage entre eux : dans les
po6mes d'Homère, les héros s'adressent des épithètes
empreintes de la grossièreté des mœurs de ce temps-là,
et qui ont dans le fond une certaine analogie avec les so-
briquets modernes. Chez les Romains, les hommes dis-
tingués ne furent pas à l'abri de ces surnoms injurieux
qu'Impose souvent le caprice ou l'erreur de la malignité
publique : un Calpurnius fut surnommé la Bête {Bestia);
un Scipion, VAnesse [Asina); un Fabius, la Buse (Bu-
têo), etc. Au moyen âge, en France, le sobriquet fut une
arme dont le peuple se servit contre ses oppresseurs. Les
provinces, les villes, les hameaux qu'animait une haine
réciproque, se poursuivirent d'épigrammes. Les sobri-
quets s'inspirèrent aussi des faits historiques, des insti-
tutions locales, des coutumes ou des travers particuliers
à toute une région, à une cité, ou à une partie de ses ha-
bitants. On disait, par exemple, les Bacouais d'Amiens;
Dacouais est un terme de mépris qui indique la niai-*
soc
1648
SOC
terie, un souvenir de Tépoque où la ville d* Amiens se
laissa prendre par les Espagnols, gr&ce à quelques sacs
de noix. On disait les Sots de Ham, par allusion à la
compagnie de Sots ou de Fous qui était autrefois établie
dans cette ville. Les Chanteurs de Sens, les Ribauds de
Soissons, les Usuriers de Metz , les Friands de Noyon ,
les Ivrognes de Péronne, les Dormeurs de Compi&ne,
les Singes de Chauoy, les Corbeaux de La Fère, les Lar'
rons de M&con, etc., sont des dénominations caractéri-
sant la moralité et les habitudes véritables ou supposées
de toute une ville. Leur goût pour la bouillie a valu aui
Normands le sobriquet de Bouilleux. Le nom môme de
Normand se donne à quiconque est fort réservé dans ses
paroles ou paye tribut au vice de la chicane, ou passe pour
avoir la conscience un peu large. Le sobriquet de Gascon
n*est pas pris en meilleure part. Ces deux sobriquets ont
même cours à rétranger ; les habitants de Bade sont ap-
pelés les Normands deTAIIemagne; ceux de Berlin en sont
les Gascons. On dit les Guêpins (du mot^ti^e) d'Orléans,
soit à cause de l'humeur difficile dont les Orléanais ont
été accusés quelquefois, soit à cause des gens de palais
nombreux, que Ton compara à des guêpes, et qui vivaient
dans cette ville quand elle possédait une École de Droit.
Des sobriquets furent aussi imposés à des partis poli-
tiaues : tels sont cenx de Cabillauds et de Hameçons
(V. Cabillauds, dans notre Diclionnaire de Biographie et
d'Histoire) y de Chaperons blancs^ de Gueux, dans les
Pays-Bas ; de MaiUotins, et, plus près de nous, de Bleus,
de Blancs, de Rouges, en Francn. Dans les correspon-
dances diplomatiques, pour ne point nommer les per-
sonnes dont on parle, on a quelquefois employé des so-
bri({uets : il en est ainsi dans les dépêches de Villeroy,
secrétaire d'État des affaires étrangères sous Henri IV.
De nos jours, Pusage des sobriquets est encore très-ré-
pandu dans les campagnes, et principalement dans le
nord de la France : un ridicule, une infirmité physique,
une parole maladroite, une bévue, un acte de poltron-
nerie, une condamnation judiciaire, sudisent pour qu*un
nom soit affublé d'un sobriquet, qui reste parfois hérédi-
taire. Les peuples et certaines classes sociales n'en sont
pas plus exempts aujourd'hui qu'autrefois. Sous le nom
flétrissant de Giaour (chien j, les Ottomans confondent
tout ce qui n'est pas musulman. L'Anglais appelle déri-
soirement Yankees {V. notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire) les commerçants de l'Amérique du Nord.
Le peuple, en Angleterre, se nomme John Bull; aux
États-Unis d'Amérique, Jonathan; en France autrefois,
Jacques Bonhomme. On dit, dans un sens ironique, ler
badauds de Paris, les cockneys de Londres. Les artistes
et les écrivains traitent de bourgeois quiconque ne sait
tenir un pinceau ou une plume, ce qui signifie dans leur
bouche qu'on est dépourvu d'imagination et d'intelli-
gence. Récemment, Thackeray, célèbre romancier an-
glais, a infligé, comme marque de niaiserie, le sobric^uet
de Snob à cette classe de gens toujours prêts à admirer
sottement les choses plates et vulgaires. P— s.
SOCCUS, chaussure. V. notre Dictionnaire de Biogror
phie et d^ Histoire.
SOaABILITÉ. V. Société.
SOCIALISME, mot employé pour la première fois en
1835 par Louis Reybaud, et qui s'applique à tout système
ayant la prétention de refaire à neuf la société entière.
Les réformateurs qui veulent abolir toute propriété indi-
viduelle et mettre tous les biens en commun, sont dits
communistes ( V, Communisme); ceux qui veulent seule-
ment transformer par l'association la propriété et la
famille, sont \&a sociaiistes proprement dits. Les socior
listes et les utopistes ont cela de commun, c^u'ils préten-
dent non-seulement réformer la société, mais la changer
de fond en comble ; ils affectent un mépris égal pour la
tradition et l'autorité établie ; ils procèdent par la même
méthode, une imagination sans frein. Mais ils diffèrent
par un trait important : les utopistes, rêveurs solitaires,
plus soucieux de l'idée que de la pratique, aspirent unique-
ment à cette propagande naturelle et insensible que tout
auteur de bonne foi souhaite d'exercer en publiant ses
pensées; ils n'ambitionnent pas le rôle de chefs d'école
ou de chefs de parti, et Thomas Morus, par exemple, pre-
nait lui-même le soin de déclarer que ses idées n'étaient
pas réalisables. Au contraire, les socialistes ont à cœur
de mettre en œuvre leurs conceptions; ils les déclarent
immédiatement oraticables; dévorés d'un prosélytisme
trdent, ils sont impatients d'entraîner les masses, et ne
néfcligent aucun moyen de propagande. Les uns, comme
Saint-Simon et Fourrier, socialistes philosophes, veulent
convaincre les hommes de rex=ill-.'''«-i-.leursplans:les
autres, socialistes révolutionnaires ei anarcniques,comnM
Babeuf et certains sectaires de 1848, spéculent sur Is
misère publique et font appel à la violence. Lq sociaUsme
proprement dit ne date donc aue de la fln du xvin* siècle.
Gomme doctrine, on en a aémontré le néant (V. Foc-
RiÉBisMB, SAiNT-SiMONisyB). Tout socialisme conduit aa
despotisme : un maître absolu, l'État, c-à-d., après tout,
cet ensemble d'individus que le hasard et l'intrigue, plu
souvent encore que le mérite, mettent à la tête de
affaires, commanderait à tous comme à des esclaves, dis
tribuerait les occupations , les honneurs et les profits
Selon les socialistes, il ne doit plus y avoir d'babitationi
isolées, ni d'entreprises particulières; hommes et choses
tout doit être associé. Sans doute, l'association est puis-
sante et avantageuse; mais il faut, contrairement à ce
qui aurait lieu dans le système, qu'elle soit libre et équi-
table, constituée de manière à entretenir l'émulation et
non à ressusciter les corporations, de manière à respecter
dans l'homme ses sentiments, ses instincts, ses idées, s£
nature, et non à les combattre pour en faire un travail-
leur sans intérêt, un sociétaire sans liberté. Dans les
systèmes socialistes, on institue des chefs qui règlent la
production, répartissent le travail, fixent la consomma-
tion : l'homme n'a plus de droits propres, il est dépouillé
de sa personnalité, il n'est que le rouage d'une vaste ma-
chine. On case chacun dans un métier; mais de quel
droit? Et si l'ouvrier ne veut pas du métier? S'il en a
voulu, et qu'il lui déplaise? S'ils vont tous au même? On
fixe les salaires par voie de règlement; mais c'est mécon-
naître les lois de l'Économie politique (K. SALAniB),'jt
assurer en quelque sorte la paresse.
Si le socialisme scientifique a fini sa carrière, oe se-
rait une erreur de croire que te flot d'idées et de passions
qu'il a soulevé se soit & jamais retiré. Ce qui a fait la
force et le succès des socialistes, ce ne sont pas les sys-
tèmes qu'ils ont proposés, mais les critiques qu'ils ont
lancées contre les défauts et les abus de l'organisation
sociale ; critiques qui n'auraient pas ébranlé le monde, si
elles n'avaient renfermé quelque part de vérité. Il faut
qu'une sage politique et une philanthropie éclairée s'ef-
forcent sans rel&che, sinon de faire dispaûraltre, du moins
d'atténuer les imperfections de l'ordre social. V, Du Puy-
node, Dps lois du travail et des classes ouvrières, Paris,
1845, in-8<*; L. Reybaud, Éludes sur les réformateurs
ou scjcialistes modernes, 1847, 5* édition, 2 vol. in-8<>;
^Vs\ii^ Le Socialisme et le Communisme en France, 2* édit.,
1847 (en allemand); Ozanam, Les origines du Socia-
lisme, Paris, 1848, in-8<' ; Ch. Périn, Les économistes Jes
socialistes et le christianisme, 1849, in-8*^; A. Sadre,
Histoire du Communisme , ou Réfutation historique
des utopies communistes, i* édit., 18i9, in-12; Tho-
nissen , le Socialisme depuis V Antiquité jusqu'à la Con-
stitution française du H janvier 18o2, Louvain, 1853,
2 vol. in-80. B.
SOCIÉTÉ, réunion d'hommes assiemblés par la nature
ou par les lois. J.^. Rousseau a voulu soutenir que l'état
naturel de l'homme n'était pas l'état social, mais l'état
sauvage, qu'il appelait état de nature (K. Sauvage) ; il
a prétendu que la société n'avait d'autre origine qu'un
contrat entre les hommes ( V, Contrat soqal). Hais
l'iiomme est évidemment fait pour la société : il y est
poussé par un instinct irrésistible qu'on nomme sociabi'
Uté; ses affections, comme ses besoins, l'y appellent et
l'y retiennent. Ceux qui, exagérant les imperfections de
l'état social, et ne songeant pas que la société ^t l'œuvre
du temps, prétendent reconstruire l'édifice de fond en
comble, sont appelés Socialistes.
SOCIÉTÉ, en termes de Droit, réunion de deux per-
sonnes ou plus, qui conviennent de mettre quelque chose
en commun, dans la vue de partager les bénéfices et de
contribuer aux pertes qui pourront en résulter. Toute
Société doit avoir un objet licite, et être contractée pour
l'intérêt commun des parties. Chaque associé doit y ap-
porter ou de l'argent, ou d'autres biens, ou son industrie.
La convention qui donnerait à l'un des associés la totalité
de? bénéfices, est nulle. Il en est de même de la stipu-
lation qui affranchirait de toute contribution aux pertes
les sommes ou effets mis dans le fonds de la Société par
un ou plusieurs associés. Mais il n'est pas néce^ire que
la part de chaque associé soit proportionnelle à son ap-
port. Toute Société doit être rédigé(9 par éorit, quand son
objet est d'une valeur de plus de 150 fr., calculée sur le
montant réuni des apports. La preuve testimoniale n'est
point admise contre et outre le contenu en l'acte de société.
Clmquo associé peut^ sans le consentement des autres,
s'u-isocicr une tierce personne Tela4ivement à la pari qail
\.
soc
164*
SOC
m dans la Société ; mais il ne peut , sans ce consentement,
l'associer 4 la Société. U Société finit : !• par l'expiration
du temps pour lequel elle a été contractée; 2« par l'ex-
tinction de la chose, oa la consommation de la négocia-
tion ; 3<» par la mort de q aelatm ni*'- Hiociés ; 4® par 1 in-
terdiction on la déconfiture de l'un d'eux ; 5o par la volonté
qu'un seul ou plusieurs expriment de n'être plus en So-
ciété. La dissolution de la Société par la volonté de l'une
des parties ne s'applioue qu'aux Sociétés dont la durée
est illimitée; elle s'opère par une renonciation notifiée à
tous les associés. Cette renonciation n'est pas admise si
elle n'est point de bonne foi , c.-à*d. si l'associé renonce
pour s'appropripr à lui seul le profit que les associés
s'étaient proposés de retirer en commun , ni si elle est
faite à contre-temps, c.-à-d. lorsque les choses ne sont
λlus entières, et qu'il importe à la Société que sa disso-
ution soit différée. La prorogation d'une Société à temps
limité ne peut être prouvée que par un écrit revêtu des
mêmes formes que le contrat de Société.
On nomme Sociétés civiles celles qui n'ont pas pour
objet de faire un commerce ou des actes de commerce.
Dans ces Sociétés, les associés ne sont pas tenus solidai-
rement des dettes sociales, mais chacun pour une part
égale seulement , encore que la part de l'un d'eux dans
la Société BOit moindre qfae celle des autres ; t moins
Îue l'acte n'ait spécialement restreint l'obliffatîop de ce-
ui-ci 4itr le pied de cette part. L'un des associés ne peut
obliger les autres , à moins qu'ils ne lui en aient conféré
le pouvoir, ou que l'obligation n'ait tourné au profit de
la Société. Les Sociétés civHes sont universelles ou partie
euiières. Il y a deux sortes de Sociétés universelles :
i** celles de tous biens présents, meubles et immeubles,
des profits qu'ils peuvent produire, et de toutes espèces
de gains; les biens à venir n'.v entrent que pour lajouis-
aance ; ^ celles des gains seulement , ne comprenant que
ce que les associés peuvent acquérir pendant la durée de
la Société, les meubles que chacun d'eux possède à
l'époque du contrat , et la Jouissance de leurs immeubles
personnels. La simple convention de Société universelle
faite sans autre explication n'emporte que la Société uni-
verselle de gains. Nulle Société universelle ne peut avoir
lieu qu'entre personnes respectivement capables de se
donner ou de recevoir l'une de l'autre, et auxquelles il
n'est point défendu de s'avantager au préjudice d'autres
personnes : ainsi , elle ne peut exister entre un père ou
une mère et son enfant naturel adultérin. — La Société par-
ticulière ne s'applique qu'à certaines choses déterminées,
ou à leur usagis, ou aux fruits à en percevoir. Le contrat
par lequel plusieurs personnes s'associent soit pour une
entreprise désignée, soit pour l'exercice de quelque mé-
tier ou profession, est aussi une société particulière.
Les Sociétés commerciales sont celles qui ont pour
objet de faire un commerce ou des opérations commer-
ciales. Elles sont réglées par les lois qui régissent les
Sociétés civiles, par les lois particulières au commerce,
et par les conventions des parties. Il y a quatre espèces
de Société commerciale : la Société en nom collectif, la
Société en commandite, la Société anonyme, et la Société
00 participation.
La Société en nom collectif est celle que contractent
deux personnes ou un plus grand nombre, et qui a pour
objet de faire le commerce sous une raison sociale. Elle
doit être constatée par acte authentique ou sous seing
privé : dans ce dernier cas, l'acte doit être fait en autant
d'originaux qu'il y a d'associés. On ne peut suppléer à
Pacte écrit, ni par la preuve testimoniale, ni par l'aveu
ou le serment. Les clauses de l'acte de èociété doivent
6tre rendues publiques : à cet effet, l'extrait de l'acte est
enregistré au greffe du tribunal de commerce, affiché
pendant trois mois dans la salle d'audience, et inséré dans
le Journal ou les Journaux de l'arrondissement désignés
pour les annonces Judiciaires. Les associés sont tenus en-
tera les tiers sur leurs biens personnels, chacun pour le
tout et solidairement. Quand il n'est pas nommé de gé-
rant, chaque associé a le droit de gérer et d'administrer,
et, en contractant sous la raison sociale, il oblige la
Société sans avoir besoin de mandat spécial, sauf aux
autres associés à s'opposer aux actes avant qu'ils soient
accomplis. Quand il y a des gérants, ils ont seuls le
droit d'enga^r les autres associés , en contractant sous
la raison sociale. Les pouvoirs des gérants ne sont pas
Tévoad>les sans causes légitimes, si leur nomination a été
fûte par l'acte de Société; ils sont révocables si ia nomi-
nation a été faite par acte postérieur.
La Société en commandite est celle qui ert contractée
entre un ou plusieurs associés rcsponsai^^s et solidairv^
et un ou plusieurs associés simples bailleurs de fonds,
que l'on nomme commanditaires ou associés en com-
mandite. Elle est régie sous un nom social , qui ne peut être
que celui d'un ou de plusieurs des associés responsables
et solidaires. Le commanditaire n'est passible des pertes
que jusqu'à concurrence des fonds qu'il a mis ou dû
mettre dans la Société. Il ne peut faire aucun acte de
gestion, ni être employé dans les affaires de la Soci«Hé,
même en vertu de procuration ; sinon, il serait obligé
solidairement pour toutes les dettes et engagements de
la Société. L'acte de Société doit être publié; il porte les
valeurs fournies ou à fournir par les commanditaires,
sans que les noms de ces derniers y figurent. Quand le
capital social n'est pas divisé en actions, la Société se
nomme commandiU simple; auand il est divisé en ac^
tiens, elle se nomme commandite par actions. Les asso-
ciés solidaires gèrent tous ensemble, ou délèguent l'ad-
ministration à un ou plusieurs gérants : dans les Sociétés
. ^. i« . j». ^—•^•«•ikiAy^A ^^a/^ftîj^nrKkîfAA dans
naires et les représente auprès de la gérance, vérifie i^
livres. In caisse, le portefeuille et les valeurs de la Société.
Une loi du 13 Juin 1867 a décidé que le capital ne peut
, être dirisé en actions ou coupons d'actions de moins de
1 100 fr., s'il n'excède pas 200,000 fr., et de moins de
500 fr., lorsqu'il est plus élevé; que la Société ne peut
être définitivement constituée qu après la souscription
de la totalité du capital social et le versement du quart
au moins des actions souscrites; que les souscripteurs
sont responsables du payement total de leurs actions
pendant deux ans; que les actions ou coupons sont né-
gociables après versement du quart ; que la majorité
dans les délibérations des assemblées générales doit
comprendre le quart des actionnaires, et représenter le
quart du capital social en numéraire; que le Conseil de
surveillance , composé de trois actionnaires au moins,
est nommé la première fois pour un an, et est ensuite
■oimnis à la réélection, aux époques et suivant les condi-
tions déterminées par les statuts; que, quand une So-
ciété est annulée pour contravention aux prescriptions
légales, les membres du Conseil de surveillance peuvent
être déclarés responsables, avec les gérants, du dommage
résultant, pour la Société ou pour les tiers, de l'annula-
tion de la Société ; que la même responsabilité atteint
les fondateurs qui ont fait un apport en nature, ou au
profit desquels ont été stipulés des avantages particu-
liers; que les membres des Conseils de surveillance
sont responsables chacun de ses fautes personnelles dans
l'exécution de son mandat, mais n'encourent aucune
responsabilité en raison des actes de la gestion et de
leurs résultats. L'émission d'actions ou coupons d'ac-
tions d'une Société constituée contrairement à la loi est
punie d'une amende de 500 fr. à 10,000 fr. Les mêmes
peines frappent le gérant qui commence les opérations
sociales avant l'entrée en fonctions du Conseil de sur-
veillance. Elles sont aussi applicables à ceux qui, en se
présentant comme propriétaires d'actions ou de coupons
qui ne leur appartiennent pas, ont créé frauduleusement
une majorité factice dans une assemblée générale , et à
ceux qui ont remis ces actions, sans préjudice des dom-
mages-intérêts envers la Société ou envers les tiers; et,
de plus, un emprisonnement de 15 jours à 6 mois peut
être prononcé. La négociation d'actions dont la valeur
ou la forme serait contraire aux dispositions de la loi,
ou pour lesquelles le versement du quart n'aurait pas
été effectué, est punie d'une amende de 500 fr. à 10,000 fr.
Sont punii d*un emprisonnement d'un à cinq ans, et
d'une amende de 50 fr. à 3,000 fr. : P ceux qui, par
simulation de souscriptions ou de versements, ou par
la publication faite de mauvaise foi de souscriptions ou
de versements qui n'existent pas, ou de tous autres faits
faux, ont obtenu ou tenté d'obtenir des souscriptions on
de versements; 2o ceux qui, pour provoquer des sou-
scriptions ou des versements, ont publié les noms de
personnes désignées contrairement à la vérité comme
étant ou devant être attachées à la Société; 3" les gé-
rants qui, en l'absence d'inventaires, ou au moyen d'in-
'ventaires frauduleux, ont réparti des divUendes non
acquis à la Société.
La Société anonyme n'existe pas sous un nom social,
et n'est désignée sous le nom d'aucun associé : elle est
qualifiée par l'objet de son entreprise. Elle peut être
formée par un acte sous seings privés fait en double ori-
Kinal, et baus l'autorisation du gouvernement. Il ne peui
404
r^
son
1650
SOI
y ftToir moins de 7 associés. Le capital est soumis aux
mômes conditions que dans les Sociétés en commandite.
L'administration de la Société anonyme s'exerce par des
mandataires élus pour 6 ans au plus par rassemblée
générale, et rééligibles sauf stipulation contraire ; si les
' statuts les désignent sans qu'il y ait lieu de demander
Tapprobation de l'assemblée, ils ne peuvent être nom-
més pour plus àft 3 ans. V, le Supplément.
La Société en participation est celle par laquelle deux
ou plusieurs personnes conviennent de participer à une
affaire, dans la prop<Mon déterminée par leur conven-
tion. Elle est affranchie de toutes formalités, et n'est pas
nécessairement constituée par un acte écrit. Le juge peut
la constater par toutes sortes de preuves, livres de com-
merce, correspondance, preuve testimoniale.
II peut être stipulé dans les statuts de toute Société
Sue le capital social sera susceptible d'augmentation par
es versements des associés ou l'admission de nouveaux
sociétaires, et de diminution par la reprise totale ou
partielle des apports. Dans ce cas, le capital social ne
peut être porté par statuts constitutifs de la Société au-
dessus de 200,000 fr. ; chacune des augmentations, dé-
cidée annuellement par l'assemblée générale, ne peut
être supérieure à 200,000 fr. ; les actions doivent être
nominatives, même après leur libération, et les coupons
ne peuvent être inférieurs à 50 fr.; la reprise des
apports ne peut réduire le capital social au-dessous
du 10«.
Dans tous les actes, factures, annonces, pcblications
et autres documents émanés des Sociétés anonyznes et
des Sociétés en commandite par actions, la natun» rie
ces Sociétés doit figurer en toutes lettres, sous peine
d'une amende de 50 fr. à iOOO fr.
V. Malepeyre et Jourdain, Traité des Sociétés com^
merciales, 1833, in -8®; Troplong, Commentaire sur
le contrat des Sociétés civiles et commerciales, 1841,
2 vol. in-8»; Del angle, Commentaire sur les Sociétés
commerciales, 1843, 2 vol. in 8®; Frouard, De ta So-
ciété en commandite par actions ftaprés l'ancien DroU
1858, in-8*».
SOCIÉTÉS BIBLIQUES. V. Bibuques.
SOaÉTtfS CHANTANTES OU CHOSALBS. V. OftPHlSON.
SOCléTéS d'AGRICULTOSB. F. AGRICULTURE.
SOCléréS DB SECOURS HUTUELS. V. SECOURS MUTUELS.
MCIÉTéS DE TEMPÉRANCE. V. TeMPI^RANCB.
SOCIÉTÉS SECRETES, associations formées dans les buts
les plus divers : les unes religieuses, comme dans les
Mystères ( V. ce mot) de l'Antiquité, parmi les Esséniens
de la Judée, les Illuminés du xviu* siècle, etc.; les autres
philosophiques, comme la secte Pythagoricienne; celles-
ci philanthropiques, comme la Franc-Maçonnerie; celles-
là politiques, comme la Sainte-Vehme, le Tugenbund et
le Burschenschaft en Allemagne, le Carbonarisme en
Italie et en France, THétérie dans la Grèce moderne, etc.
F. Association POLmouE.
SOCLE. V, Plinthe.
SOCQUES, chaussure en bois ou en cuir, à semelle
* Raquée, qui se met par-dessus la chaussure ordinaire,
|ir garantir de la boue ou de l'humidité. Elle a été in-
jntée en 1822 par un certain Duport.
SOCRATIQUE (Philosophie). Ce qui constitue la phi-
losophie socratique ne consiste pas dans un système, ni
même dans une école particulière. Par opposition aux
écoles antérieures et aux Sophistes, Socrate changea l'ob-
jet de la philosophie, en s'attachant bien plus à la con-
naissance de rhomme qu'à celle du monde; sa marche,
en substituant la philosophie pratique à de vaines spécu-
lations; sa méthode, en remplaçant l'affirmation hardie
et dénuée de preuves des premiers philosophes et les
déductions sophistiques par l'observation, l'analyse et
l'induction. En ajoutant à cela l'idée d'un Dieu-Provi-
dence, d*une sanction de la loi morale après la mort, on
aura la philosophie socratique. Ce qui la distingue des
écoles précédentes , c'est surtout son esprit moral : le
sage, selon Socrate, ne s'occupe que de sa nature morale,
ne consulte que lui-même pour savoir ce qui est vrai et
faire ce qui est bien. Les Écoles qui sortirent du priur
cipe socratique l'appliquèrent diversement et partielle-
ment : les Cyniques, les plus recommandables, ne pré-
sentèrent que son héroïsme moral ; les Cyrénaïques, son
sens pratique de la vie ; les Méfjariques, sa dialecti(|ue,
mais tous avec exagération. L'école d'Êlis ou d'Êrettie
est regardée comme ayant marché plus fidèlement sur les
pas du maître; peut-être est-ce parce que cette école a
Uièdé moins de traces dans l'histoire. Platon et Aristote
reproduisent la philosophie socratique dans sa métliode
et dans ses principes essentiels; on y retroore l'esprit
critique, qui n'était pas le scepticisme, et qui distinguait
avec soin l'opinion de la science, deux choses que le scep-
ticisme confond volontiers. Platon s'attache de préférence
aux idées rationnelles du beau, du vrai, du bien et du
Juste, que Socrate avait laissé percer dans son enseigne-
ment. L'école d'Épicure et celle du Portique se rattachent
aussi à quelques égards à Socrate ; celui-ci anime de son
souffle toute la philosophie grecque, dont il est en quel-
oue sorte le fondateur, de même qu'on retrouve l'esprit
de Descartes dans toute la philosophie moderne. R.
SODALICIUM. l F. ces mots dans notre Dictiaimaire
SODAUS. y de Biographie et d'Histoire,
SORNDAou SOUNDA (Idiome). V. Javanaise (Langue).
SOEUR, nom donné aux enfants du sexe féminin par
les enfants du même père et de la même mère, ainsi que
par les enfants qui n'ont de commun que le père ou la
mère. On nomme sœur germaine celle qui est issue du
même père et de la même mère ; sœur consanguine^ celle
avec laquelle on n'a de commun que le père ; sœur uté^
rine, celle avec laquelle on n'a de commun que la mère.
La belle-sosur est la femme du frère. La sœur hérite
de ses frère ou sœur morts sans postérité {Code Napol,^
750-752). V. Frère. — On appelle Sœurs les religieuses
et certaines filles qui vivent en communauté; elles quit-
tent leur nom propre pour prendre un nom de sainte,
comme sœur Tnirise, sosur Marthe.
SOFA ou SOPHA, mot de la langue turque par lequel
on désigne une estrade élevée, couverte de tapis, et sur
laquelle le grand vizir donne ses audiences. S'il reçoit
des ambassadeurs, on met leurs sièges sur le sofa; c'est
accorder les honneurs du sofa. — Chez nous, un sofa est
utie sorte de lit de repos à dossiers ou à coussins.
SOFFITE (de l'italien sof/Ua)^ en termes d'Architec*
ture, dessous de tout ce qui est suspendu. C'est la sur-
face de tout membre d'architecture qui se présente hori-
zontalement au-dessus de nos têtes, notamment d'un
plafond à compartiments et à caissons. Ia soffite d'archi-
trave, de larmier, etc., est la face de dessous d'une
architrave, d'un larmier, unie ou décorée d'ornements.
SOFIS. V. SopHis, dans notre Dictionnaire de Btûgra»
phie et d* Histoire.
SOIERIES, étoffes de soie de tous les genres. Dans les
temps anciens, la soie fut un produit spécial de la Chine,
qui, pendant de longues années, en fit un objet de tralic.
De la Chine l'industrie de la soie passa dans l'Inde, où
elle fit de rapides progrès, puis en Perse, et les Phéni-
ciens firent commerce de ses produits. Les soieries eurent
un grand succès à Rome aussitôt que la conquête eut mis
les Romains en rapport avec l'Orient; ils avaient long-
temps ignoré la nature et l'origine de la soie, pensant
que c'était tantôt un duvet très-fin qui naissait sur les
feuilles de certains arbres et de certaines fleurs, tantôt
une espèce de coton ou de laine très-déliée. Héliogabale
fut, dit-on, le premier qui porta chez eux des Têtements
de soie. Aurélien en refusa une robe à sa femme, parce
2u'il ne voulait pas payer du fil au poids de l'or. Au temps
e Pline, on fabriquait des soieries à Cos. Toutefois, ce fut
l'empereur Justinien qui, le premier, voulut affjranchir
l'Occident du tribut qu'il payait à l'Asie, et surtout du
monopole que les Perses s'étaient attribué : par ses or-
dres, deux moines pénétrèrent Jusqu'en Chine, et en
rapportèrent, dans une canne creuse, des œufs de ver à
soie, en 555. Les mûriers et leurs hôtes précieux s'accli-
matèrent fort bien autour de Constantinople, en Grèce,
et surtout dans le Péloponèse, qui prit pour ce motif le
nom de Morèe. En 1147, Roger II , roi de Sicile, a}[ant
fait quelques conquêtes en Grèce, emmena des ouvriers
en soie à Palerme, où/ s'élevèrent de belles fabriques. On
présume généralement que c'est de la Sicile, et par les
lies Baléares, que l'Espagne a connu le travail de la soie:
cependant, d'après le témoignage d'Édrisi, les Arabes
l'auraient introduit dans ce pays avant le xii« siècle.
Quoi qu'il en soit, les soieries de Sérille, de Grenade, de
Tolède, de Murcie, de Valence, rivalisèrent pendant le
moyen âge avec celles de la Chine. En Italie, Naples,
Florence, Venise, Milan, Bologne, Lucanes et Gènes s'io-
slruisirent à l'école de Palerme. D'Italie, la soie vint en
Provence : ce seraient les papes d'Avignon qui auraient,
scion les uns, importé le rer à soie et le mûrier; selon
les autres, les premiers mûriers furent plantés sous le
règne de Charles VIL Louis XI établit, en 1470, des ou-
vriers italiens aux environs de Tours. L'industrie deLjroo
date seulement de 1520. En 1546, l'ambassadeur vénitien
Mariuo Cavalli écrivait qu'il y avait en Toundne 8,000
métiers. En 1550, Henri II porta les premiers bas de soie.
SOL
1651
SOL
et les seignean élégants rimitèrent à la oonr. Les guerres
de religion arr^lôrent Tessor de l'industrie : après Te réta-
blissement de la paix, Olivier de Serres, en 1599, dédia
au corps municipal de Paris son traité de la Cueillette
de la soie; le succès de ce livre di^termina Henri IV à
faire planter des mûriers blancs dans toutes les maisons
royales, et à en mettre 20,000 pieds dans le Jardin des
Tuileries, à Tendroit où Le Nôtre planta plus tard les
deux massifs de marronniers qui existent encore : dans
Forangerie de ce jardin on éleva des vers à soie. Dès lors
le commerce des soienes de Tours, Orléans, Paris et
Lyon, acquit une grande importance : des lettres pa-
tentes de Louis XIII disent que plus de 25,000 ouvriers
travaillaient^ soie à Tours. Sous l'administration de Col*
bert, une pnme de 20 sols fut accordée aux agriculteurs
pour chaque mûrier qu'ils planteraient. Lyon devint,
grftce aux frères Mascany, une fabrique au moins ég:ale
aux fabriques italiennes. Il y eut un moment de déca-
dence après la révocation de Tédit de Nantes et Jusqu'au
milieu du xviu* siècle : puis le travail se releva, et, au
moment de la Révolution, les 18,000 métiers de Lyon
fabriquaient par an pour plus de 100 millions d'étoffes de
toute espèce. La République porta à son tour un coup
fatal à cette industrie, qui ne se ranima que sous Napo-
léon I''. Ce fut alors qu'apparurent les appareils à la Vau-
canson, le chaufllage à la vapeur pour le dévidage des
cocons; les régulateurs de Dutilleul pour faciliter le tis-
sage, le système de fllaissiat pour aider à la confection
des étoffes brochées, et enfin la découverte de Jacquart.
Aujourd'hui on évalue à 160,000 les métiers employés à
l'industrie de la soie dans toute la France, et à plus de
400 millions de francs la valeur des soieries fabriquées
annuellement. B.
SOIES (Condition des ). V. CoNDrnoNNEMBNT.
SOISSONS (Église S^-Gervais, à). Le corps de cette
église cathédrale a été élevé pendant le xu" siècle, et ap-
partient au style romano-byzantin ; les parties supérieures
sont en style ogival primitif. Le plan général est régulier,
avec cette particularité remarquable que le transept mé-
ridional est en foirme d'abside comme à Noyon, et flanqué
à l'Est d'une chapelle circulaire à deux étages comme à
Laon. L'édifice a 100 met. de longueur, t26 de largeur, et
33",30 de hauteur sous voûte. Le chœur est accompagné
de 5 chapelles circulaires et de 8 chapelles carrées. V. Po-
quet etDaras, Notice sur la cathédrale de Soissons, in-8<>.
SOL, en termes de Droit, fonds de la propriété. La pro-
priété du sol emporte celle du dessus et du dessous : le
propriétaire peut y faire toutes les plantations et con-
structions qu'il Juge à propos, sauf le respect des servi-
tudes et des règlements de police ; il peut y faire des
fouilles et en retirer les produits, sauf le respect des
lois et décrets relatifs aux mines {V, le Code NapoL,
art. 552 et suiv.). Tout ce qui se réunit au sol par accès--
sion ou allumon {V.ces mots) ^partient au propriétaire,
A>us certaines conditions.
SOL, monnaie. V. Sou^ dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
SOL, note de Musique, la 5* de la gamme d'ut. Les Al-
lemands la nomment G*
SOLAllANIE, sorte de flûte des Turcs, faite avec un
roseau ou un morceau de bois mince. Elle est ouverte
aux deux bouts, sans embouchure, et, par conséquent,
difficile à faire résonner : certains dervichea excellent
cependant t en jouer.
SOLAR. > V. ces mots dans notre Dictionnaire de
SOLARIUM. S Biographie et d: Histoire.
SOLDAT, tout militaire qui reçoit une solde, et spé-
cialement celui qui n'est pas gradé. Suivant le baron de
Reden, l'Europe compterait actuellement, en temps de
paix, 2,731, 085 soldats, c-à-d. 1,02 pour 100 de sa popu-
lation totale, et leur entretien exigerait annuellement la
somme de 1,561,618,211 fr.; de sorte que chaque soldat
coûterait 571 fr. 79 c, et que chaque habitant contri-
buerait ponr 5 fr. 78 c. à l'entretien de l'armée. Le coût
annuel de chaque soldat serait, approximativement : en
Russie, de 362 fr. 78 c. ; dans les États allemands, de
466 fr. 83 c. ; en Turquie, de 549 fr. 52 c. ; en Espagne,
de 718 fr. 63 c. ; en France, de 860 fr. 17 c ; en Angle-
terre, de 2,344 fr. 78 c.
SOLDE (du latin solidus, soldus, sou, monnaie), ce
qui est alloué aux militaires pour leur entretien et pour
les dépenses qu'exige d'eux le service. La solde augmente
^ en proportion du grade, et varie selon le pied de paix et
* le pied de guerre. Le service de la solde pourvoit à toutes
les prestations en deniers et en nature qui composent le
traitement des troupes. Los prestations en deniers sont :
la solde proprement dite, les suppléments de solde,
les hautes payes, les frais de représentation^ les indem-
nités représentatives de fourrages, les indemnités de
logement et d'ameublement, les frais de bureau, les
indemnités en remplacement de vivres, les indemnités
pour le cas de rassemblement de troupes, les indemnités
pour perte de chevaux ou d'effets, les gratifications de
première mise d'équipement allouées aux sous-oflîciers
promus officiers, les gratifications aux sous-officiers in-
structeurs, les gratifications d'entrée en campagne, la
masse de première mise de petit équipement donnée à
chaque soldat à son entrée au corps, la prime Journalière
d'entretien de la masse individuelle, la masse générale
d'entretien allouée aux corps de troupes, et la masse
d'entretien de harnachement et de ferrage. Les presta-
lions en nature sont les subsistances et le chauffage. —
Avec la solde proprement dite du soldat, on fait trois
parts : la i^^ destinée à alimenter la masse (F. ce mot) y
reste en réserve dans la caisse du corps; la 2* est con*
sacrée aux dépenses de l'ordinaire {V. ce mot) ; la 3* est
remise à chaque homme sous le nom de centimes de poche.
Les deux dernières sont distribuées à l'avance sous le
nom de prêt, les 1", 6, 11, 16, 21 et 26 de chaque mois.
— La solde des militaires, inférieure à 600 fr., est insai-
sissable; quand elle excède 600 fr., elle est saisissable,
mais pour un 5« seulement.
Nous avons donné, dans notre Dictionnaire de Biogror
phie et d^ Histoire (art. Patb), l'historique de la solde.
Voici le tableau des soldes d'aclivité accordées av»nt
1870, et, ao Supp^, celles données le 25 déc. 1875.
Êlat-major général.
Maréchal de France 30,000 fr.
Général de division (pied de paix). . 15,000
— (pied de euerre). 18,750
Général de brigade (pied de ^x). . 10,000
— (pied de guerre). 12,500
Corps d^état-major.
Colonel 6,250 fir«
Lieutenant-colonel 5,300
Chef d'escadron 4,500
Capitaine de i"^ classe 2,800
— 2« classe 2,400
Lieutenant 1,800
Intendance militaire.
Intendant. 10,0<0fr.
Sous-intendant de l'^ classe 6,250
— de 2* classe 5,300
Adjoint de l^** classe. 4,500
— de 2« classe 2,800
Garde impériale.
Colonel 7,975 fr.
Lieutenant-colonel 6,235
Chef de bataillon et major 5,230
Médecin-major de 1'* classe 6,525
— de 2* classe 4,900
Médecin aide-major de l'* classe. . . 3,670
— de 2« classe. . . 3,300
Capitaine de l'hélasse 4,200
— de 2« classe 3,500
Lieutenant de 1'* classe 2,930
— de 2« classe 2,655
Porte-aigle 2,560
Sous-lieutenant . . . *. | q tnK
Chef de musique ) ^'*'^
Infanterie,
Colonel 5,500 fr.
Lieutenant-colonel 4,300
Chef de bataillon et major 3,600
Médecin-major de 1'* classe 4,500
— de 2« classe 2,950
Médecin aide-mijor de l'* classe. . . 2,000
— de 2* classe. . . 1,800
Capitaine de i^ classe 2,400
— de 2» classe. 2,000
lieutenant de l'* classe 1,600
— de 2« classe. 1,450
Porte-drapeau 1,400
Sous-lieutenant 1,350
Chef de musique 1,350
Cavalerie.
Colonel 6,000 St.
SOL
Llmtenant-colonel.. . . .
Chef d^escadron et major.
Capitaine de l'* classe. .
— de 2* classe . .
Lieutenant de 1*^ classe..
— de 2« classe. .
Sons-lieutenant
1652
SOL
• • o ■
Artillerie.
Colonel
Lieutenant-colonel
Chef d'escadron et major. .
Capitaine de\^ classe. . •
— de 2* classe. . . .
Lieutenant de l'* classe. . .
— de 2* classe. . •
4,700 fr.
4,000
2,500
2,300
i,800
1,600
1,500
6,750 fr.
5,700
4,900
3,000
2,600
2,050
1,850
Géîiie.
Colonel 6,250 fr.
Lieutenant- colonel 5,300
Chef de bataillon et major 4,500
Capitaine de 1^ classe 2,800
— de 2« classe 2,400
Lieutenant de l'* classe 2,050
— de 2« classe 1,850
Gendarmerie départementale.
Colonel 6,500 fr.
Lieutenant-colonel 6,000
Chef d*escadron 4,500
Capitaine commandant de compagnie | , qq^
— trésorier ( *»"""
— command. d'arrondissem. 2,700
Lieutenant trésorier 2,400
— d'arrondissement 2,100
Sous-lieutenant trésorier 2,100
— d'arrondissement.. . 1,800 .
Âdjudant-sous-officier, à cheval. . . . 1,536
— — à pied 1,386
llaréchal des logis chef, à cheval. . . i ,286
— — à pied. . • . 1,136
Maréchal des logis, à cheval 1,136
— — à pied 986
Brigadier, à cheval • 1,036
— à pied.
Gendarme , à cheval. . . .
— à pied
Élève gendarme, à cheval. .
— à pied. . .
886
900
750
800
650
Marine.
Amiral 30,000 fr.
Vice-amiral 15,000
Contre-amiral 10,000
Capitaine de vaisseau de 1** classe. . 5,000
— — de 2« classe. . 4,500
Capitaine de frégate 3,500
Lieutenant de vaisseau de l'* classe. 2,500
— — de 2* classe. . 2,000
Enseigne de vaisseau 1,500
Aspirant de l'" classe 1,000
— de 2* classe 600
Commissaire général de 1*^ classe. . 10,000
— — de 2« classe. . 8,000
Commissaire de I'* classe • 5,000
— de 2« classe 4,500
Commissaire-adjoint de I*"* classe. . 3,500
— — de 2" classe. . 3,000
Sous-commissaire de 1'* classe. . . . 2,500
— de 2» classe. . . . 2,000
Aide-commissaire 1,500
OLDE DB COMPTE. V. COMPTE.
SOLDURIERS. V. notre Dictionn. de Biogr. et d'Hist.
SOLE , en termes de Marine, fond des b&timents qui
D*ont pas de quille.
SOLEA , chaussure. V. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d*Histoire,
SOLÉCISME, faute contre la syntaxe. Le mot vient de
Soles, colonie grecque en Cilicie ; les habitants de cette
ville altérèrent la langue de la mère patrie, où l'expres-
sion parler comme un habitant de Soles, faire un sole-
eisme, signifia manquer aux règles de la grammaire. 11 y
a, suivtint ies grammairiens d'aujourd*hui, un solécisme
dans ce vers de Boileau {Sat. IX) :
C'eat d voué, mon esprit, d gui i* venz parler ;
Mais il faut se rappeler que ce pléonasme est dans le gé-
nie et la tradition de la vieille langue. V. Génin, Lsxiquê
comparé de la langue de Molière, au mot : A redoublé,
SOLENNEL, en latin solemnis (de solus in annq. qui
se fait une seule fois Tan), degré de festivité dans l'Église
catholique, celui des fêtes qu'on célèbre avec le plus de
pompe. Il vient après V annuel , et se divise en solennel
majeur et solennel mineur.
SOLESMES (Abbaye de). Cette abbaye bénédictine,
située sur la rive gauche de la Sarthe, à 2 kilom. de Sa-
blé, n'a plus rien de remarquable aujourd'hui que son
église, ancienne basilique à trois nefs, dont il ne reste
néanmoins qu'une partie. Les voûtes se distinguent par
Télégance et la pureté de leurs nervures; une gros^
tour carrée, dont la base est romane et la partie supé-
rieure ogivale, fait saillie dans les murs de la nef, et est
couronnée, à une hauteur de 40 met., d*un dôme à lan-
terne construit en 1731. Des sculptures attirent Tat-
tention sur deux chapelles, dont Tune contient un Saint
Sépulcre, et l'autre cinq grandes scènes de la vie de la
Vierge, sa Pâmoison, sa Mort, sa Sépulture, son Assomp-
tion, sa Glôriflcation. Ces sculptures méritent la célébrité
dont elles jouissent : on les a attribuées tantôt à Ger-
main Pilon, tantôt à dés artistes italiens, et même à des
Allemands. — En 1833, une association de jeunes prêtres
s'établit à Solesmes pour ressusciter Tordre de Saint-Be-
noit, et se livrer à des travaux littéraires. Le pape Gré-
goire XVI érigea, en 1835, l'ancien prieuré en titre abba-
tial, et déclara cette association chef d'une nouvelle
congrégation française.
SOLFÈGE, livre élémentaii*e dans lequel sont réunis
tous les principes de la lecture musicale, et où Ton peut
apprendre à solfier ( V. Solhisation). Un solft^e doit con-
tenir une série de leçons écrites alternativement sur
toutes les clefs, dans tous les tons, dans les deux modes
majeur et mineur, et dans les différentes mesures. O^s
leçons doivent être classées selon leur ordre de difficulté
progressive. On les écrit d'ordinaire pour une voix, et
quelquefois pour deux ou trois, afin d'accoutumer rélère
à entendre des sons différents de ceux qu'il émet et pro-
cédant par un rhythme tout autre, sans que la justesse
de son intonation et la précision de sa mesure en soient
altérées. L'étendue du diapason n'étant pas la même pour
toutes les voix, puisque celles-ci varient selon les âges et
les sexes, on a dû placer, dans les solfèges complets, des
leçons écrites tour à tour pour soprano, contralto, ténor
et basse : autrement, le professeur doit recourir à la
transposition pour élever ou abaisser l'échelle dans la-
quelle les leçons ont été écrites. Après avoir fait une
étude approfondie du solfège, l'élève doit être en état de
lire couramment toute espèce de musique. On estime
les Solfèges dits d* Italie et du Conservatoire (de Paris),
ceux de Rodolphe, de Chelard, de Catrufo, de Garaudé,
de Panseron, etc. B.
SOLICITOR, nom donné, en Angleterre, aux avoués
et aux fonctionnaires de Tordre judiciaire qui portent h
parole. Le Solicitor gênerai est notre Procureur impérial.
SOLIDARITÉ , en termes de Droit, confusion établie
entre les droits de plusieurs coîntéressés, de telle sorte
que chacun d'eux est obligé pour le tout comme s'il était
seul débiteur, ou qu'il a une action pour le tout comme
s'il était seul créancier. Ainsi, le créancier solidaire peut
réclamer du débiteur la totalité de la créance, bien qu'en
réalité il ne soit créancier que d'une partie; le d^Ueur
solidaire paye non-seulement pour lui , mais pour autrui
{Code Napoléon, art. 1197-1216). Une obligatioti est so-
lidaire, quand chacun des obligés peut être contraint
pour le tout. Ceux qui ont signé, accepté ou endossé nr.e
lettre de change, sont tenus à la garantie solidaire en-
vers le porteur, c.-^-d. que celui-ci a une action pour
le tout contre chacun d'eux. Un créancier peut actionner
directement l'une quelconque des cautions solidaires de
la créance. La solidarité ne se présume pas, et , à moins
qu'elle ne soit prononcée par la loi , elle doit être cxpre»*
sèment stipulée. La solidarité légale existe surtout en
matière de quasi-délits, de délits et de crimes. Ùobliga-
tion imposée à chacun de réparer le domust^ qa*il a
causé par son fait, s'étend à tous ceux qui ont pris pan
au fait dommageable; tous sont tenus à cette rcparatiou
au même titre et pour la totalité, parce que le fait est in-
divisible relativement à celui qui a souffert. Tous ies in-
dividus condamnés pour un même crime ou un même
délit sont tenus solidairement des amendes, des restitu-
tions, des dommages-intérêts et des frais ^ode pénal,
art. 55 ). La condamnation aux frais est prononcée dani
toutes les procédures solidairement contre tous les au-
teurs et complices du même fait et contre les personoet
VT
SOL
16S3
SOM
civilement responsables du délit. V, Rodière, D9 la «ol»-
âjQwxié Bi de VxndmsibiliU, 1852, in-8<».
SOLÏDEO» V. Calotte.
SOLTDOS , monnaie. V. notre Dictionnaire de Biogror
phie et d'ffhtoire.
SOLIER, vieux mot qui parait avoir désigné un appai^
tement supérieur dans une maison.
SOLILOQUE (du latin solus^ seul, et loqui, parler),
discours d*un homme qui s'entretient avec lui-même. Le
mot est synonyme de Monologue, S^ Augustin a composé,
sous le nom de Soliloques , un traité qui a été traduit en
français par Pélissier, 1853.
SOLIN, en termes de Construction, se dit r 1<> de chacun
des intervalles qui se trouvent entre les solives; 2<^ du
pl&tre qu'on met sur la poutre pour la séparer des so-
lives; 3<> de Tenduit de plâtre fait le long d'un pignon
pour y joindre et retenir les premières tuiles.
SOLITAIRE , espèce de jeu de patience que l'on joue
seul. C'est une tablette de bois percée de 37 trous, dans
lesquels on introduit des fiches en os ou en ivoire. On
enlève à volonté une des fiches, puis on prend à ce jeu
de la même manière qu'à celui des Dames. 11 faut qu'il
ne reste en définitive qu'une seule fiche sur la tablette ;
s'il y en a plusieurs qui, se trouvant isolées, ne peuvent
plus se prendre réciproquement , la partie est perdue.
SOLIUM. V. ce mot duis notre Dictionnaire de Bio^
graphie et d^ Histoire.
SOLIVE, pièce de charpente qui sert à former un plan-
cher, et qui porte sur les murs ou sur les poutres. On
nomme solive de brin, celle qui est de toute la longueur
d'un arbre équarri ; solive de sciage^ celle qui est débitée
dans un gros arbre; solive passante, celle qui fait la lar-
geur d'un plancher sous poutre; solives d'enchevêtrure,
les deux plus fortes solives d'un plancher, cpii servent à
porter le chevêtre, — et les plus courtes solives qui sont
assemblées dans le chevêtre; solive boiteuse, celle dont
une des extrémités est scellée dans le mur, et l'autre as-
semblée dans un chevêtre; solive de remplissage, celle
qui est placée entre d'autres solives pour remplir les in-
tervalles; solive en empanon, une solive assemblée en
biais sous un linçoir.
SOLLERETS, nom donné, à la fin du xv« siècle, à des
chaussures arrondies du bout, suivant la forme du pied.
SOLMISATION, action de solmier, verbe qui s'em-
ployait autrefois pour dire solfier. Le mot vient de ce
que l'échelle diatonique sur laquelle était basé ce genre
a*étude commençait par sol, et que les notes sol et mi
constituaient les deux extrêmes du système des hexa-
cordes adopté primitivement par la musique moderne.
Solfier, c'est chanter en prononçant les syllabes qui
servent de dénomination aux notes. Ces syllabes sont
celles de la gamme de Gui d'Arezzo, ut , ré, mi, fa, sol,
la, auxquelles on ajouta plus tard le si. Nous n'avons
aucune syllabe usitée pour exprimer en solfiant les demi-
tons de réchelle : l'usage a repoussé toutes les inno-
vations qui ont été tentées pour remédier à cette imper-
fection. Les anciens Grecs avaient pour solfier <}uatre
syllabes ou dénominations de notes, qu'ils répétaient à
chaque tétracorde , comme nous en répétons sept à
chaque octave : ces syllabes étaient, du grave à l'aigu,
té, tè, ta, ta. V. BoBiSATio. B.
SOLO, mot italien francisé, par lequel on désigne un
morceau de musique joué par un seul instrument on
chanté par une seule voix, avec ou sans accompagne-
ment. Oïl l'applique aussi à l'artiste qui, dans un or-
chestre, exécute les solos écrits pour son instrument : un
violon solo, un violoncelle solo, etc.. B.
SOLSTICES (du latin solis statto, arrêt du soleil),
points de l'écliptique situés entre les équinoxes et dans
lesquels se trouve le soleil lorsqu'il est le plus éloigné de
l'équateur. Ils ont été ainsi appelés, parce que le soleil
semble y être stationnaire pendant quelques jours. Le
solstice arrive deux fois l'an : le 20 ou 21 juin , jour au-
quel le soleil, après s'être approché du pôle boréial , s'ar-
rête à l'entrée du signe du Cancer, est le solstice dété, le
jour le plus long; le 20 ou 21 décembre, où, après s'être
approché du pôle austral , il s'arrête à l'entrée du Capri-
corne, est le solstice d'hiver, le jour le plus court. Les
cercles parallèles à l'équateur que le soleil semble dé-
crire aux époques des solstices ont reçu le nom de tro»
piques^ Le grand cercle qui passe par les pôles et par les
points solsticiaux s'appelle le eolure des solstices.
SOLVABILITÉ, état de celui qui est solvable, c-àrd.
qoi peut payer, qui peut répondre d'une dett«. La solva-
bilité d'une caution ne s'estime qu'eu égard à ses pro-
priétés foncières, excepté en matière de commerce, oa
bien lorsque la dette est modique (Code Napoléon,
art. 2019).
SOMAULIS (Idiome des), un des idiomes africains.
On y remarque, dans le pronom et dans les terminaisons
du verbe, la trace de l'influence sémitique. Il y a deux
sortes do pronoms, les séparés et les préfixes. Le pronom
possessif est indiqué par un suffixe. L'article se place en
suffixe, et il existe une véritable déclinaison s'effectuant à
l'aide de propositions. Les deux genres sont nettement
distingués, et on les attribue, même arbitrairement , aux
objets inanimés. V. Rigby, An ouUine ofthe somauli lan^
guage, dans les Transactions de la Société géographique
de Bombay, 1850.
SOMBRER, en termes de Marine, couler bas sous
voiles par l'action d'un coup de vent. Le mot vient de
l'espagnol sombrero (chapeau), parce qu'on s'abîme
dans les flots, le vaisseau sur la tête en gidse de chapeau.
SOMBRERO, chapeau à bords très-larges dont on se
sert en Espagne pour se garantir du soleil. Il est ainsi
nommé de ce qu'il assombrit le visage.
SOMMAGE , obligation féodale de fournir des chevaux
et des voitures pour le transport des denrées ou des meu-
bles du seigneur.
SOMMAIRE, abrégé contenant en peu de mots la
somme ou la substance d'un chapitre, d'un traité, d'un
ouvrage.
SOMMAIRES ( Causes ou Matières ). V. Matières som-
maires.
SOMMATION, action de sommer, c.-à-d. d'enjoindre à
quelqu'un, suivant certaines formes établies, qu'il ait à
faire telle ou telle chose; sinon, qu'on l'y contraindra.
Un général , avant de donner l'assaut à une place, lui fait
sommation de se rendre. Lorsqu'il se forme des attrou-
pements sur la voie publique , l'autorité doit faire trois
sommations avant de les disperser par la force. — En
Droit ciTil , Som^nation se dit des actes par écrit conte-
nant une sommation faite en justice. Les avoués font des
sommations de donner des copies de pièces, de fournir
des défenses, de venir plaider, etc. Les huissiers font des
sommations de payer, de faire des ouvrages, d'être pré-
sents à telle opération. Dans certains cas, le créancier
doit faire sommation à son débiteur pour le mettre en
demeure (Code Napoléon, art. 1139). Dans les offres de
payement, la sommation doit précéder la consignation
(art.l259etl2()4).
SOMMATION RESPEGTDEOSE, synonymo à* Acte respectueux.
V, Mahiagb.
SOMME (du latin stêmma), titre de certains ouvrages
3ui traitent en abrégé de toutes les parties d'une science,
'une doctrine. Le plus célébra est la Somme de S' Tho-
mas d'Aquin , sorte d'encyclopédie de théologie et de mé-
taphysique. La Somme rurale de Jean Bouthillier est un
traite de Droit et de Pratique à l'usage du parlement de
Paris.
SOMMEIL. Après un état de veille plus ou moins long,
l'homme éprouve un sentiment de fatigue, les mouvements
deviennent plus difficiles, l'intelligence se trouble, le be-
soin d'un repos qui répare les forces perdues se fait im-
périeusement sentir, et l'homme cède au sommeil. Aloi*s
les sens ne fonctionnent plus ; la vue cesse d'abord, puis
le goût, l'odorat, l'oufe, et enfin le tact. Le sommeil est
profond ou léger, mais il arrive souvent que plusieurs
organes de la vie de relation conservent leur activitét
comme quand on dort debout, en marchant. Un ou plu-
sieurs sens peuvent rester éveillés, le cerveau ressentir
des manières d'être qui se développent; l'intelligence
s'exerce également (F. Révb, Songe, Somrambuusmb^.
L'esprit ne perd pas entièrement son activité, mais la
volonté se repose. V. Aristote, Du sommeil et de la veille;
Formey, Essai sur les songes, dans les Mémoires de
V Académie de Berlin, 1746; Cabanis, 10" Mémoire, Du
sommeil; Maine de Biran, Considérations sur le som-
meil; Jouffroy, Becherches sur le sommeil, dans ses Mé-
langes; Macnish, Philosophy of sleep, Glasgow, 1830;
Charma, Du sommeil, 1851. R.
SOMMEIL (Le)i divinité allégorique. V. notre Diction^
noire de Biographie et d^Histoire.
SOMMELIER (de somme argent, capital), celui qui,
dans une Communauté ou dans une grande maison, sur-
veille le linge, la vaisselle, le pain, le vin, etc.; — dans
un sens plus restreint, celui qui a la charge de soigner
le vin.
SOMMIER, en termes de Construction, première pierre
qui pose sur les pieds-droits on les colonnes, quand on
forme un arc, une plate-bande ou quelque couverturB
carrée; — cxosse pièce de bois qui porte sur deux pieds»
y
SON
1684
SON
droiti de maçonnerie, et sert de linteau à une porte ou
à une croisée; — pièce de bois à laquelle est suspendue
une cloche, et dont les extrémités sont garnies de touril-
lons ferrés qui en facilitent le jeu.
SOMMIER , en termes de Comptabilité, gros registre où
les commis inscriyent les twnmat qu'ils reçoivent.
SOMMIER. C'est, dans Torgue, la pièce sur laquelle sont
implantés les tuyaux. Le sommier, placé au-dessus d*un
réserroir d'air nommé laye^ reçoit Pair qui lui est trans-
mis par la soufflerie, et le distribue dans les différents
tuyaux an moyen de registres ( V, ce mot) que Torganiste
fait mouvoir à volonté. En pressant les touches du cla-
vier qui correspondent aux soupapes des sommiers, les
tuyaux parlent chacun selon sa nature et son intona-
tion. Il y ft dans tout orgue autant de sommiers qu'il y a
de claviers. F. C.
SOMBIISTB, officier de la chancellerie romaine dont
les fonctions sont de faire faire les minutes, et de les
plomber.
SOMNAMBULISME (du latin somnus, sommeil, et
ambiUare, marcher ), état d'un homme endormi et qui
marche, qui agit comme s'il était éveillé ; c'est le cas du
somnambulisme naturel. Dans le rêve ordinaire, le dor-
meur reste couché; dans le somnambulisme, il se lève,
il exécute tous les mouvements volontaires de l'état de
veille. La mémoire retrace au somnambule, et dans un
enchaînement parfait, ses idées, ses affections, et l'ima-
S 'nation lui représente avec force et clarté les objets qui
i sont connus, et dans des rapports perçus durant la
veille. Il est probable que l'organe de la vue n'est pas en-
tièrement annulé dans le somnambulisme; mais le sens
le plus éveillé est celui du toucher. C'est par lui surtout
que le dormeur peut exécuter ses promenades périlleuses
sur les toits, au bord des fleuves; comme il ne les fait
que dans les lieux qu'il connaît , la mémoire lui est d'un
grand secours. C'est encore au toucher que le somnam-
bule doit de pouvoir écrire, et choisir, parmi les objets
les plus ténus, ceux au'il destine aux ouvrages les plus
délicats. On a prétendu que le somnambule ne conserve
aucun souvenir des faits qui constituent son état pen-
dant le sommeil ; mais il existe des exemples de som-
nambules qui conservaient quelque souvenir de cet état;
le valet de Gassendi était dans ce cas. Le somnambulisme
résulte d'une excitation du système nerveux qui agit sur
le cerveau. '
On rattache an somnambulisme naturel un état avec
lequel il a de Tanaloçie, et qu'on désigne sous le nom de
somnambulisme artificiel, de magnétisme animcU. Le
corps et ses organes, ainsi que l'&me, sont amenés à cet
état artificiellement, par les procédés du magnétiseur. 11
en résulte une grande insensibilité externe, et pour l'in-
telligence une lucidité merveilleuse. Le sujet qui est
amené au somnambulisme magnétique peut goûter des
saveurs par le creux de l'estomac, percevoir les objets,
lire à travers les corps les plus opaques et même à des
distances sans bornes. Il est difficile de savoir ce qu'il y
a réellement de vrai ou de faux dans ces prétentions, en-
tachées pour le moins d'exagération. Les faits proclamés
par les parti^^ns du somnambulisme artificiel sont ren-
dus suspects par tant de supercherie, et par des échecs si
notoires, que le doute est piermis pour une certaine caté-
gorie de phénomènes extiturdinaires ; ceux qu'on peut
admettre rentrent dans la classe des faits physiologiques
et psychologiques ordinaires. V. Magn^smb animal. R.
SOMPTUAIRES (Lois). F. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
SON, mouvement de vibration ou d'ondulation im-
primé à un corps sonore ou élastique, communiqué en-
suite par ce corps à l'air qui l'environne, et transmis
enfin par VsXr à l'organe de l'ouïe, qui en reçoit l'impres-
sion. Un son est plus ou moins grave ou cûgu, suivant le
nombre des ondes qu'il produit en un certain temps dans
l'air. Vintensité du son dépend des compressions plus ou
moins fortes et des vitesses plus ou moins grandes que
l'air a reçues du corps sonore et qui se transmettent jus-
qu'à l'ouie. Le timbre des sons dépend de l'ordre dans le-
<^el se succèdent les vitesses et les changements de den-
sité dans les différentes tranches d'air qui sont comprises
entre les deux extrémités de l'onde.
Il y a une infinité d'intonations possibles entre le son
le plus aigu et le son le plus grave. Chacune de ces into-
nations étant un son distinct, leur nomenclature eût été
un embarras pour la mémoire : mais, au delà d'un cer-
tain nombre de sons rangés dans un ordre ascendant ou
descendant, les autres se reproduisent dans le môme
ordre, et n'ont avec les premiers d'autre différence que
celle qui résulte d'une voix algue à une voix grave qoS
s'accordent ensemble ; on a été amené ainsi à reconnaître
que, parmi les sons, les uns ne sont que la répétition des
autres à une certaine distance, et c'est cette distance qui
s'appelle octave. Pour nommer les sons, on n'a donc en
besoin que de 7 lettres. A, B, C, D, E, F, G, ou de 7 syl-
labes, ut, ré, mi, fa, sol, la, si. La série de ces lettres on
de ces syllabes est la gamme. Après avoir ainsi désigné
les sons, on s'aperçut qu'il y en avait d'intermédiaires,
que l'oreille appréciait parfaitement; qu^entre les sons
désigna par ut et ré, par exemple, il y en avait un troi-
sième également éloigné de l'un et de l'autre. Pour ne
pas multiplier les noms, on supposa que ce son est quel-
quefois ut élevé, quelauefois ri abaissé; on nomma l'un
ut dièse, l'autre ré bémol, et l'on fit de même pour les
antres sons intermédiaires en conservant au mot dièse le
sens d^élevé, au mot bémol le sens d'abaissé. La succes-
sion des sons se nomme mélodie {V. ce mot) ; de leur
simultanéité résulte Vharm(mi9 (V. ce mot). Le rapport
d'un son à un autre est un intervcdle {V, ce mot). La
musique ne s'est pas bornée à nommer les sons, elle
les écrit, elle en détermine l'intonation et la durée : l'en-
semble des signes employés à cet effet constitue la nota-
tion mtjuicale ( V, ce mot). — Les sons appréciables sont
ceux dont on peut trouver ou sentir l'unisson et calculer
les intervalles. On compte 8 octaves et demie, depuis le
tuyau de trente-deux pieds de l'orgue jusqu'au son le plus
aigu de cet instrument. — Il y a aussi un degré de force
au delà duquel le son ne peut plus s'apprécier : on ne
saurait, par exemple, apprécier le son d'une grosse cloche
dans le clocher même. B.
SONS BOUCHÉS. V, COR.
sons HARMONIQUES. V, HARMONIQUES.
SONATE fdu latin sonore, jouer d'un instrument),
toute pièce de musique écrite pour un instrument. Elle
se compose ordinairement d'un allegro, d'un adagio , et
d'un presto ou rondo; quelquefois on y joint un menuet
ou scherzo, Sébastien Bach a fait des sonates à 4 et
même à 5 morceaux. Les Italiens distinguaient autrefois
la sonate de chambre et la son€Ue â^ église, celle-ci de-
mandant un style et une harmonie plus travaillée que
celle-là. Quand la sonate est accompagnée par un ou
deux instruments , elle prend le nom de duo ou de trio,
La sonate est une étude, un exercice, et presque toujours
très-difficile : elle demande à être jouée avec précision,
sans broderies ni traits brillants. Au xvin* siècle, les com-
positeurs écrivirent un grand nombre de sonates ; aujour-
d'hui c'est un genre abandonné pour les airs vanéf et
les fantaisies. Les meilleures sonates de piano ont été
faites par Ch.-Ph.-Em. Bach, Haydn, Mozart, Beethoven,
Clementi, Dussek, Steibelt, Pleyel, Adam, Cramer, Kalk-
brenner, Moschelôs, Field, Hummel; celles de Sébastien
Bach pour clavecin et violon sont des chefs-d'œuvre.
Gorellî, Tartini, Locatelli, Nardini, Leclair, Viotti, Baillot,
Kreutzer, Rode, en ont composé pour le piano, Francis-
chello et Duport pour le violoncelle, Krumpholtz pour la
harpe. On en fait beaucoup moins pour les instruments à
vent : on peut citer toutefois celles de Krommer, de
Reicha, de Devienne, de Berbiguier, etc. B.
SONGE ( du latin somnium)^ mot employé souvent
comme synonyme de Rêve {V. ce mot)^ et qui se dit par-
ticulièrement d'un rêve dont les idées sont bien suivies,
qui a toute l'apparence de la réalité, et que l'on se rap-
pelle dans son entier. V. Songes, dans notre Dictionnah'e
de Biographie et d* Histoire.
SONHO (Idiome), dialecte de l'idiome congo (F. ce
mot). Le P. Cannecattim en a publié un Dictionnaire, à
la suite de sa Grammaire de la langue abounda.
SONNERIE , son de plusieurs cloches qui se font en-
tendre soit ensemble, soit successivement; —^totalité des
cloches d'une église. V. Carillon.
sonnerie, air de trompettes ou de clairons indiquant
un service de cavalerie. Il y a 2S sonneries; les princi-
pales sont le réveil, la générale, le bout^^seUe, Vappel, la
retraite^ la charge^ etc.
SONNET, petite pièce de vers composée de deux qua-
trains, sur deux rimes, et de deux tercets, sur d'autres
rimes. Boileau, dans son Art poétique, en a tracé les
règles. Il parait certain que le sonnet remonte au temps
des Trouvères, bien que Pétrarque passe pour en être
l'inventeur : mais le sonnet, à cette époque, n'était qu'une
pièce de vers en stances ou coblas, qu'on accompagnait
au son d'un instrument. Le véritable sonnet, dont la
forme poétique est due peut-être à Tinfluence des Arabes,
n'apparaît en Sicile qu'au xiii* siècle : ce n'est qu'au xvi*
que nos poètes, Mellin de Saint-Gelais, Joachim Du Bel-
SOP 11
btjr M Pontas deTbtut, l'empruntèrent aux Italiens. La
règle S iacjuelle ont toujours cru devoir s'astreindre le»
pMtes Italiens, de terminer le sonnet par un trait bril-
lant, est peiit-etro une des caase» de ces conetUi qu'on
leur reproche. En France, Is sonnet ne fut dans toute sa
Togue fpie sous I/iuis Xlll et au commence ment du rèane
de Louis XJV. Les deux factions qui, sous la nom i'Ura-
nisiBïet de Jobelms, divisèrent, en 1(151, la tour et Ib
Tiile, à i'occaaioQ dos sonnais asseï médiocres da Voitura
« de Banaerade, montrent quelle importance on atta-
cliait alors il ce genre de poésie. Desbarreaui, Malierille,
Hesnault, s'y diaiiaguërent. Cest l'époque enflo où Boi-
lesu proclamait le sonnet sans défaut égal à un long
poème. I^ sonnet da Miionthropa Tut la premiire pro-
testation i et, dès ce moment, la rogne du sonnet déclina
do plus en plus Jusqu'au xvin* siècle, oii U fut totale-
ment abandonae. Quelques-uns da nos contemporains
ont essayé de le rajeunir : H. Sainte-Beuve, entre tatres,
a pris chaleuraiiaement M défense dans un sonnet où
sont isppelâs les ooma de tous ceux qui s'y sont distin-'
gaés; et c'est ta moUt qui nous délarmineà lecjter:
: nm ID Thh va te
HtltoD, cbaDtanE lei t1
S critiqua niDqun
fil ta grand Sbaki;
IX qoB P^trarqns ■
SONNETTE, machine dont en se sert pour enftincer des
pilotis et des pieux. Elle parte le mouton, masse dabois,
de Ter ou de fonte, qu'elle élère en l'air et laisse ensuite
retomber. La force du coup porta aplomb sur la tète
des pilotis. Oa distingue deui sortes de sonnettes : !<■ la
lonnettt d tiraude, composée d'un mouton glissant dans
deux coulisses ou montants verticaui, et suspendu i. une
poulie placée au sommet des montants ; la corda se di-
vise, de l'autre cOté de la poulie, en un faisceau de
cordes, sur lesquelles des ouvriers tirent et qu'ils IIL-
chent ensemble; 2° ]^ son/ttUt d diclie , plos puissante
que la précédente, est manœuvrée par un cheval placé
dans un manège, qui par correspondance fait marcher un
treuil autonr duquel s'enroule la corde du mouton; la
tête du mouton est saisie par des pinces en X, qui, ar-
rivées d 1» hauteur voulue, s'ençagynt dans la déclic ou
espèce d'entonnoir renversé qui les force k s'ouvrir et
i. lâcher le mouton ; d'autres fois le déclic porte sur 1«
treuil, y. au Supplémtnt. E. L.
SONOMETRE fdu latin loniu, son, et du grec mitron,
mesure), appareil composé de plusieurs cordes paral-
lèles, supportées par des chevalaU mobiles. On s'en sert
pour trouver les rapports des Intervalles harmoniques.
50PHA. y. Sop*.
temple A la Sagesse éternelle, k Saints Sophi». Cet édi-
fice, où l'on avait entassé les marbres les plus rares et
les matières les plus précieuses , fut agrandi sous le
règne de Constance, mais devint la proie des flammes
dans une émeute soulevée par les Ariens contre S' Jean
ChrreoslOQie en 404, sous le régne d'Arcadius. Théo-
dose Il le Ht réparer en 415; mais, en b32, un nouvel
incendie, allumé par les factions du cirque, le consuma
complètement. Justinien ordonna aussitôt la construc-
tion d'une nouvelle basilique, dont !aa travaux, dirigés
par Anthémius de Tralies et Isidore de Hitet, employè-
rent 10,000 ouvriers. Quand le monument fut achevé,
l'empereur, pensant au Temple de Jérusalem, s'écria
avec orgueil : • Salomon, Je t'ai vaincu i ■ La forme pri-
mitive de S'*-Sophie était celle d'une croix grecque sur-
montée d'une coupole sphérlque : un tremblement de
terra ayant renversé le dûme en 558, l'architecte chargé
de le reconstruire Qt la voûte surbaissée et elliptique, de
sphérique qu'elle était, et, pour lui donner plus de soli-
dité, il plaça entre les gra[:ds piliers deux rangs super-
fmiia de colonnes de granit réunies par des arcades.
(Test en cet étal que les Turcs trouvèrent la basilique
en 1403, époque où elle fut convertie en mosquée.
S5 SOP
I* pian de S"-Soplil« forme prestpie un carrf i H
mesure 83 met. de longueur, sur 74 do largeur. Dcnx
galeries transversales, longues do 60 met., forment deux
vestibules. Dans la 1™, dite narth»x, et large de 6 met.,
les pénitents s'arrêtaient avec humilité. La !•, lar^e de
10 met., donne entrée dans l'i'Rliae par 9 belles pones
de bronie, ornées de bas-reliefs. L'édillce, vu de l'ex-
térieur, présente un aspect peu agréable, pa> le mélange
confus de constructions hétérogènes. Cependant l'effet
du dame, appuyé par d'énormes contre-forls, est impo-
sant. Les 'lurcs ont élevé aux angles, dès les premiers
temps de leur conquête, quatre grêles minarets iV. la
■ ■ était jadis
fig. ci-daiimu). L'intérieur du
Baitlijiu dt SaCnle-Soplili.
couvert de peintures et de fresques; ces œuvrea Intéree-
santes ont été masquées sous un badigeon par les Turcs.
Le pavé, en mosaïque de vert anticiue et de porphyre,
est caché par des tapis, pour que le bruit des pas du
passant ou du visiteur ne trounle pas les prières des
fldèles. Les colonnes de porphyre, de sranit égyptien et
d'autres marbres précieux, sont fort belles; mais elles
ont été surmontées de chapiteaux mai assortis , et la
mélange des ordres et des proportions indique que ce
sont des débris d'autres temples, placés ]k sans godtet
contre toutes les règles de l'architecture. Sur les parois
des murs on volt de grandes tables où sont écriis, en
caractères arabes, les noms de Dieu, de Mahomet, et des
quatre premiers califes, Abou-Beitr, Omar, Othman, et
Ali. A la hauteur de la naissance de !a voûte, au-dessus
des bas eûtes, régnent de spacieuses pleriea, aniquellee
on arrive par un chemin voûté et qui s'élève en spirale;
elles étaient autrefois réservées aux femmes, qui, d'après
le rit grec, devaient être séparées des hommes i l'inté-
rieur des églises. La voûte, dorée i profusion, est com-
posée de petits morceaux de pierre et de verre colorés,
qui forment des groupes de fleurs ou des dgares géomé-
triques. La croix grecque est couverte d'une coupole de
34 met. de diamètre, reposant sur un tambour court,
percé da 34 fenêtres petites et basses , qui éclairent
l'église. C'est le premier modèle des coupoles soutenues
à une grande hauteur sur des arcs et des pendentifs. La
tentative fut d'autant plus hardie, que ta courbe du dama
est très- médiocre, et que la profondeur du dbme n'égale
pas un sixième de son diamètre. Des groupes de fleurs
parfaitement peints ornent cette coupole ; aux quatre
angles sont quatre Archanges, avec leurs noms inscrits
en coloasales lettres turques : un grand nombre de lampes
en verres de diverses couleurs, et mêlées de globes de
cristal, d'œufs d'autruche, et d'ornements d'or et d'argent
ntiochés k des cercles, sont suspendaes au dùme. Une
large abside, (fui occupe le fond de la nef principale.
SOP
1656
SOT
Hqae ; on y conseire aujourd'hui rexemplaire \>riginal
in Koran. Près de Tabside est le trône du sultan, en
marbre blanc uni; du côté opposé est une chaire en
pierre, où le mufti monte tous les vendredis pour lire le
Koran au peuple. L'édifice ne renferme aucuns sièges
pour les fidèles'. Quatre salles irrégulières, pratiquées
extérieurement à la rencontre des bras de la croix grec-
que , ont donné au plan de S^-Sophie la forme carrée
quMI présente actuellement. B.
SOPHIS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio^
graphie et <r Histoire. ,
SOPHISME, faux raisonnement qui provient de la
mauvaise foi. Il se distingue du Paralogisme {V, ce mot)^
qui est Teflet de la faiblesse de Tintelligence. Le so-
phisme suppose l'intention de tromper ; c'est un argu-
ment faux, qui, revêtu d'une forme captieuse, est destiné
à exploiter notre faiblesse, nos préjugés, notre igno-
rance, au profit de la passion, du mensonge et de la sub-
tilité. Les sophismes sont innombrables : toutes nos opi-
nions, toutes nos erreurs peuvent devenir des sophismes.
Aristote les divise en sophismes de mots ou de grammaire
et sophismes de raisonneiïient ou de logique. Les pre-
miers affectent le sens des termes; les seconds sont des
vices de raisonnement, et sont relatifs, soit à l'induc-
tion, soit à la déduction. Les principaux sophismes de
mots sont : Véquivoquet le sophisme de composition^ le
sophisme de division. Les sophismes d'induction sont :
le sophisme de la cause, le sophisme de Vaccident, le
dénombrement imparfait. Les sophismes de déduction
sont : l'ignorance du sujets la pétition de principe, le
cercle vicietix {V. ces mots). H. D.
SOPHISTES (du grec sophos, sage). Le nom de So-
phiste se prit d'abord en bonne part, ensuite il devint
une sorte de flétrissure. A peu d'exception près, les So-
phistes étaient des hommes avides et adroits, qui pré-
tendaient tout savoir et tout enseigner. En Grèce, où la
parole donnait le crédit et la puissance, ils gagnaient la
jeunesse en lui enseignant la rhétorique, qui n'était pour
eux que l'art de fortifier' les mauvaises causes, d'affaiblir
les bonnes, et de plaider indifEi^remment le pour et le
contre. Leur procédé consistait, selon Aristote, à com-
battre par des raisonnements captieux la proposition
(établie, à amener leurs adversaires à avancer une chose
fausse ou à soutenir un paradoxe, à les mettre en opposi-
tion avec les règles du langage, à les faire tomber dans
des expressions tautologiques. Parmi ceux qui marquè-
rent comme philosophes, on cite Gorgias de Léontium ,
qui voulut prouver: \° que rien n'existe; 2° que, lors
môme qu'une chose existerait, nous ne pourrions la con-
naître; 30 que, lors même que nous connaîtrions ce qui
existe, nous ne pourrions le faire connaître aux autres.
Cela revenait à dire que l'être et la vérité sont impos-
sibles. Gorgias laissa la philosophie pour la rhétorique
comme plus lucrative ; I^otagoras, dont le principe était
que l'homme est la mesure de toute chose, ce qui vou-
lait dire que ce qui est vrai pour l'un ne l'est pas pour
l'autre, qu'une chose est et n'est pas à la fois, arrivait
au même résultat que Gorgias. On a prétendu que ces
deux Sophistes, hommes d'un talent réel, n'avaient pas
parlé sérieusement, et qu'ils s'étaient proposé, dans leurs
doctrines, de faire la critique des systèmes antérieurs,
surtout de ceux de l'école de Mégare et d'Heraclite.
Après eux, on cite Métrodore de Ciiio, Prodicus, Hip-
pias, Diagoras, surnommé V Athée, Anaxarque, Euthy-
dème, et Critias, qui fut, à ce. que l'on croit, l'un des
trente tyrans d'Athènes. I^ plupart étaient plus rhé~
teurs que philosophes : mais tous avaient en commun un
esprit de négation qui distingue les sophistes des scep'
tiques, mais qui conduisait, par le dérèglement de la
raison, à méconnaître les vérités les plus précieuses et
les lois les plus sacrées de la morale, soutenant, comme
on le voit dans le Gorgias de Platon, que le juste et le
beau, dans l'ordre naturel, consistent dans le bonheur,
et le bonheur dans la liberté pour chacun de s'aban-
donner à ses passions. Cependant les Sophistes ne furent
pas sans utilité. Ils rendirent plus générale la culture in-
tellectuelle, l'étude des lettres et des sciences; par eux la
philosophie et l'enseignement en général revêtit les
formes d'un langage clair, élégant, et accessible à tous.
Ils firent comprendre les dangers d'un dogmatisme témé-
raire; par leurs excès mêmes ils préparèrent Socrate.
F. la plupart des dialogues de Platon, et en particulier
Les Sophistes ou Protagoras, le Gorgias, le Premier Hip^
pias, le Tlïéétète; Aristote, Des argumentations sophis^
tiques. R.
SOPHISTIQUE , mot qui s'entend de l'art des So-
phistes, et de la partie de la Logique qui traite des so*
phismes.
SOPRANO , mot italien (pii 8*empIoie pour désigner li
plus aiguë des voix humaines (F. Voix) et des partiel
vocales de la musique. On l'appelle en France le Dessus
{V. ce mot). Les voix de soprani sont celles des femmes,
des enfants, et des castrats (F. ce mot)^ et ces derniers
sont souvent désignés par le nom de Sopranisles. Un
mezso soprano est une voix de femme intermédiaire
entre le soprano et le contralto (V, ce mot)^ et qui par-
ticipe de l'une et de l'autre. B.
SORABE (Idiome), appelé aussi Vénède, idiome slave
parlé dans une partie de la Lusace, depuis Lobau jus-
qu'à Labben, et qui était Jadis répandu entre la Saaie,
l'Elbe et l'Oder, dans toute la contrée occupée par les
Sorbes ou Sorabes. Il est partagé en deux dialectes, rap-
prochés l'un du bohème, l'autre du polonais. Il a em-
prunté à l'allemand beaucoup de mots, l'article et antres
particularités inconnues aux idiomes slaves non mélangés.
SORBONIQUE, thèse qu'on soutenait autrefois en â>r-
bonne pour être reçu docteur en théologie : elle durait
depuis 6 heures du matin jusqu'à 6 heures du soir. On
appelait Sorboniste tout gradué de la Sorbonno.
SOHBONNE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
SORDONE ou SOURDON, instrument à yent formé
d'un double tube, comme le basson, et qui n*est plus en
usage.
SORITE (du grec sôros, monceau), raisonnement com-
posé de plusieurs syllogismes, enchaînés entre eux de
telle sorte que l'attribut de la majeure devienne le sujet de
la mineure, l'attribut de la mineure le sujet de la proposi-
tion suivante , et ainsi jusqu'à la dernière proposition,
dont l'attribut doit être combiné avec le sujet de la pre-
mière. C'est à l'aide du sorite que les Stoïciens démon-
traient que le sage est heureux et que la sagesse suffit
au bonheur. Voici ce raisonnement : « Qui est sage est
tempérant; qui est tempérant est constant; qui est .con-
stant est sans trouble; qui est sans trouble est sans tris-
tesse; qui est .sans tristesse est heureux : donc le sage
est heureux, et la sagesse suffit au bonheur. » Le sorite
abrège et simplifie tous les syllogismes dont il est com-
posé; aussi convient-il parfaitement aux sciences ma-
thématiques, qui, opérant sur une seule idée, celle de
quantité, peuvent passer rapidement d'un rapport à ud
autre, en supprimant les propositions intermédiaires
dont la répétiuon n'est pas nécessaire à la clarté de la
démonstration. Leibnitz remarque que les démonstrations
d'EucIide ressemblent à des arguments en forme, en se
rapprochant cependant beaucoup plus du sorite que du
syllogisme complet. Mais si le sorite est la forme la plus
commune des démonstrations mathématiques, il ne sau-
rait être employé de la même manière dans les autres
sciences ; il demande une attention soutenue pour saisir
le rapport non exprimé des propositions entre elles; et,
quand on opère sur des idées complexes, comme dans la
Jurisprudence ou la Philosophie, il faudrait une intelli-
gence au-dessus de l'humanité pour suivre uo raisonne*
ment en sorites, sans jamais se laisser abuser par ui
rapport mal établi entre deux idées, ou par une consé-
quence mal déduite. H. D.
SORTIE, grand morceau d'orgue que l'on Joue à la fin
de l'office divin, pendant que les fidèles se retirent.
SORI'ISATK), nom latin que de vieux théoriciens de
la musique donnent à un déchant (F. ce mot) improvisé
à plusieurs voix, et en quelque sorte deviné. En vieux
français, sortisser signifiait deviner.
SOTADÉEN ou SOTADIQUE ( Vers), vers grec et latin,
ainsi appelé d'un certain Sotadès qui l'avait ou inventé
ou plutôt très-fréquemment employé. Il parait avoir été
primitivement destiné à la récitation plutôt qu'au chant.
Il a pour base le mètre ionique majeur, et forme propre-
ment un tétramètre bracbycatalectique, c.-à-d. qu'il se
compose de trois ioniques et d'un trochée final ; quelque-
fois les ioniques sont remplacés par autant de ditrochées;
d'autres fois, et c'est la forme la plus usitée, il commenos
par deux ioniques suivis de trois trochées :
Ter compuit tembil\em man\u bilpennêm,
(PÉTROTIB.)
Quelquefois l'un des trochées se réaoat en un tri*
braque:
Ferrum ttmu\i, quod trepidlo mal\ë dSibàt | imun.
(Ptatom.)
SOT
1657
SOU
Le Botadéen par, lu h rebours, pobvait former un hexa-
mètre ; Sotadès, dit-on, s'était amusé à ce jeu. Quintilien
cite un yers de ce genre, improvisé par un de ses amis :
Mêssem a^'ea], classes mare], ecelum tênet \ <utra.
Les vers sotadéens étaient souvent employés dans les
sujets licencieux, et Quintilien dit qu'il n'oserait pas ex-
poser les règles de ce genre de poSme. P.
SOTIE, satire dramatique née du mélange de la Farce
et de la Moralité. Ce nouveau genre fut mis en honneur
par les Enfants Sans Souci , Joyeuse réunion de jeunes
gens dont le chef s'appelait le Prince des Sots. Ils furent
autorisés par Charles VI à élever des échafauds sur la
place des halles, pour y représenter leurs soties. La liberté
de leurs attaques alla souvent Jusqu'à la licence ; ils ne
respectèrent ni la religion, ni la politique, ni même la
vie privée des personnagjBs qu'ils mettaient en scène. Il
est vrai qu'ils commençaient par se Jouer eux-mêmes, et
se livraient les premiers à la risée de la multitude. Néan-
moins l'extrême hardiesse de leurs satires, le langage
irrévérencieux qu'ils se permettaient dans des allusions
que tout le monde pouvait comprendre, leur firent de
nombreux ennemis pacmi les gens de robe, d'église et
d'épée. Mais ils furent presque constamment protégés par
la royauté. Charles VIII seul , dans un moment de colère,
leur enleva les privilèges qu'ils tenaient de Charles VI ;
Louis XII les leur rendit. Ce prince supporta avec une
admirable patience les railleries souvent indécentes des
Enfants Sans Souci : une seule fois la colère l'emporta,
après une allusion blessante pour la reine Anne de Bre-
tagne; mais il se calma bientôt, et, plus tard, quand il
fut en lutte avec le pape Jules II , il se servit des Enfants
Sans Souci pour faire approuver sa politique par l'opinion
populaire. Sous François I*', la liberté de ces représenta-
tions fut d'abord restreinte par l'institution de la cen-
sure, puis complètement abolie par l'interdiction des
Farces et des Soties.
Les plus célèbres soties sont : le Vieux-Monde , le
Nouveau-Monde, et le Prince des sots, Vieux-Monde est
un vieillard décrépit, qui se plaint toujours. Abus l'en-
gage à prendre du repos , et lui promet de gouverner le
monde pendant son sommeil. Le vieillard est à peine en-
dormi, qu'Abus appelle à lui tons les Sots ses amis. On
voit alors arriver Sot dissolu, habillé en homme d'église.
Sot glorieux en gendarme. Sot corrompu en robe de pro-
cureur. Sot trompeur en costume de marchand. Sot
ignorant, grand niais qui représente le peuple, et Sotte
PoUe, qui persuade aux autres de tondre le Vieux-Monde
et d'en b&tir un autre. Ils conviennent qu'ils construiront
leur édifice sur Confusion : c'est Abus qui dirige les tra-
vaux comme architecte. Chaque Sot construit son pilier.
Sot Dissolu met au rebut Chasteté^ Dévotion, Oraison,
Humilité, et compose son pilier d' Ypocrisie, Ribaudise,
Apostasie, Lubricité, Symonie, Irrégularité. Sot Glorieux
rejette Noblesse et Libéralité, et leur substitue Lâcheté
et Avarice. Sot Corrompu repousse Justice, et envoie
chercher Corruption. Sot Trompeur bâtit avec Usure,
Larcin et Fausse Mesure, Sot Ignorant rejette Innocence,
Simplicité, Obéissance, et s'accommode de Murmure, Fu-
reur et Rébellion. L'édifice est construit ; les Sots se dis-
putent entre eux pour savoir à qui appartiendra la main
de Sotte Folle. Dans la chaleur de la querelle, ils ren-
versent le Monde qu'ils avaient à peine achevé. Abus les
chasse ; le Vieux-Monde se réveille, déplore l'imprudence
des Jeunes Sots, et engage les assistants à ne point b&tir
comme eux sur Confusion. — La sotie du Nouveau-
Monde, attribuée à Jean Bouchet, est une protestation
contre les empiétements de la papauté. Bénéfice Gi'ant
est vacant. Ambitieux vient solliciter auprès du cardinal-
légat. Celui-ci promet de séduire Élection et Nomination;
mais il faut commencer par Pragmatique, vieille dame
qui a la tète dure. Comme elle ne veut pas entendre
raison, l'on fait venir Père Saint, qui arrive avec un gros
bâton dont il assomme Pragmatique. Élection et Nomi-
nation effrayées s'enfuient chez leur aïeule Université.
Cest ainsi que les Enfants Sans-Souci mettaient à la
portée du peuple les difficultés de la politique avec la
cour de Rome. Trois ans après la représentation du Nou-
veai^-Monde, c-à-d. en 1 Mi , la lutte était engagée avec
le pape ; il s'agissait de lever les scrupules de ceux qui
pouvaient en avoir, et de prouver au roi lui-même, s'il
hésitait, qu'il pouvait faire la guerre au pape légitime-
ment et canonfquement. Tel est le but que se propose
Pierre Gringore dans 1a Jeu du prince des. Sots, qui fut
représenté le mardi gras de l'an i51i. Cette pièce com-
mence par une espèce de prologue où sont passées ea
revue toutes les affaires du temps. Ensuite paraissent les
Sots ; d'abord la Noblesse, le seigneur de Nates, le sei*
gneur de Joye, le général d'Enfance, le seigneur du Plat,
le seigneur de la Lune; puis le clergé, 1^ abbés de
Plate-Bourse, de Frévaulx, de la Courtille; enfin le
prince des Sots, bonhomme endurant et pacifique, qui'
n'est autre que Louis XII lui-même. Les États du royaume
de Sottise sont ouverts ; tous les Sots parlent à la fois,
sar la paix, sur la guerre, sur les Jacobins, sur le pape,
sur l'Université. Sotte Commune, qui s'appelait Jadis Po-
vreté, profite de la bonté du prince des Sots pour dire
aussi son avis : elle n'aime pas ces guerres lointaines
dont il ne lui revient que des charges; car c'est elle qui
paye toujours Técot. Les doléances de Sotte Commune
sont interrompues par la brusque arrivée de Mère Sotte
sous les habits de l'Église ; elle est accompagnée de Sotiê
Fiance et Sotte Occasion ; elle arrive d'Italie, d'où elle
apporte une drogue nouvelle qui s'appelle Trahison,
Mère Sotte, à force de cajoleries, séduit les abbés; elle
leur promet de rouges chapeaux. Mais les nobles repous-
sent avec indignation toutes ses offres, et demeurent
fidèles au roi. Mère Sotte, furieuse, ordonne aux prélats
de commencer l'assaut; le Prince hésite encore, mais
enfin un Sot lui crie qu'il peut se défendre canonique-
ment. Bref, le Prince des Sots est forcé par ses sujets à
faire la guerre : c'est la conscience du peuple, c'est l'hon-
neur national qui se révolte contre les entreprises de
l'Église sur la tempoValité. H. D.
SOTTO VOCE , expression italienne emplojfée dans la
Musique pour signifier à demi-voix ou à demi-jeu.
SOU , monnaie. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
SOUABE (Dialecte). V. Al^aniciqob.
souABB (Miroir de). V. Miroir.
SOUAGE, nom donné autrefois à une moulure, à une
sorte de boudin, simple, double ou triple, enroulé autour
du pied des pièces d'orfèvrerie. Les souages étaient sou-
vent verres, c.-à-d. qu'ils se détachaient par la dorure
sur l'argent. Il y avait aussi des souages aux bords supé-
rieurs des vases, des corbeilles, et ils servaient quelque-
fois d'anses. Le mot fut appliqué, par extension, aux
bordures des vêtements.
SOUBASSEMENT (de sous et de base)^ partie infé-
rieure d'une construction , sorte de piédestal sur lequel
semble porter tout l'édifice. Le mot s'emploie surtout en
parlant des édifices à colonnes.
SOUBISE (Enfants du Père). V. Compagnonnagi.
SOUBRETTE, en termes de Théâtre, suivante de co-
médie. Elle est rusée, bavarde, caustique, a le propos
leste et l'œil mutin, et met ses bons offices auprès de sa
maîtresse aux gages du soupirant le plus généreux, dont
elle épouse souvent le valet.
SOUBREVESTE (de veste, et de l'espagnol sobre, ))ar-
dessus), sorte de Justaucorps sans manches, que portaient
autrerois les Mousquetaires.
SOUCHE, en termes de Généalogie, se dit du person-
nage auquel remonte une famille.
soDCHB, en termes de Construction, partie du corps
d'une cheminée qui sort du toit et s'élève au-dessus du
comble.
soDCHB, tube de fer-blanc peint couleur de cierge et en
ayant la forme, qu'on met dans les chandeliers d'église,
et dans lequel est un ressort de fil de fer en spirale qui
pousse la bougie et la fait brûler Jusqu'au bout.
SOUCHE, partie qui reste des feuilles d'un registre lors-
qu'on les a coupées en zigzag. En rapprochant la partie
détachée du registre et celle qui y reste, elles doivent se
correspondre exactement. On se sert de registres à souche
pour donner des quittances , délivrer des actions et des
mandats, etc.
SOUCHETAGE, marque faite autrefois par les officiers
des Eaux et Forêts après la coupe des bois, pour compter
le nombre et la qualité des souches abattues ; — compte
et marque des bois de futaie avant l'adjudication.
SOUDAN. V. ce mot dans notre Dictionnaire de BUh
graphie et éTHistoire.
SOUnSME. V. Arabb (Philosophie).
SOUFFLAGE, en termes de Marine, revêtement ea
planches qu'on applique extérieurement sur la carène
d'un navire, vers la flottaison, soit pour l'enfler, et re-
médier ainsi à un défaut de stabilité , soit pour la pré-
server du choc ou du contact de ce qui po'Hrait l'endom-
mager.
SOUFFLERIE , ensemble des soufflets d\m orgue , et
I lieu où ils sont placés. Le nombre des soufflets dont se
sou
1G58
son
compose la soufllerie variait auirefoii de deux k qua-
torze, suivant Timportance de rinstrument. Les soufiQets
sont mis en mouvement par un ou plusieurs hommes,
tandis que Torganiste touche. La soufflerie est toujours
placée ie plus près possible de l'orgue. Dans les orgues
modernes, la soufflerie a été de beaucoup simplifiée : un
'eeul homme peut, au moyen d'un moteur ingénieux,
emplir d'air plusieurs réservoirs placés dans diverses
parties de Torgue, et alimenter ainsi un grand instru-
ment. F. soDKPLET, au SuvplémenU F. C.
SOUFFRANCE, en Droit féodal, surséance ou délai que
le seigneur accordait à son nouveau vassal pour faire f(H
et hommage.
SOUILLARD , en termes de tlharpenterie, pièce de bois
assemblée sur des pieux, et que Ton pose au devant des
glacis entre les piles des ponts; — en termes de Con-
struction, trou percé dans une pierre pour livrer passage
à Teau.
SOOILLE, Ut qu'un navire se creuse dans la vase quand
il y échoue.
SOULE ou SAOULE , Jeu des paysans bretons. Il con-
siste à jeter un ballon, bien huilé en dehors pour le
rendre plus glissant; les Joueurs le poursuivent en s'en
disputant la possession : celui qui parvient à le saisir et
à le porter dans une autre paroisse que celle où se fait
le jeu, gagne le prix proposé.
SOULIER (du latin solea, semelle, sandale), chaussure
de cuir qui couvre le pied en tout ou en partie, et qui
s'attache par-dessus avec des cordons, une ooucle ou des
boutons. Il est formé de quatre parties : Vempeigne, des-
tinée à couvrir le pied; les qtMrtiert, qui emboîtent le
talon; les semelles, superposées Tune sur l'autre; le
talon, qui sert à exhausser le derrière du pied. De nos
Jours, en fait des souliers à vis, sans couture.
SOULIERS A LA PODLAiNB. V, PouLAiNB, dans notro DiC'
tionnaire de Biographie et d'Histoire,
SOULTE (du latin solutum, supin àesolvere, payer),
en termes de Pratique, est synonyme de retour, et se
dit , en matière de succession et de partages, de ce qu'un
des copartageants doit payer aux autres pour égaliser les
lots, lorsque celui qui lui est échu est d'une valeur plus
grande et ne peut se diviser (Code Napoléon, art. 833 et
1i76). — Dans le Commerce, Soulte est synonyme de
Solde de compte.
SOUMISSION, en termes de Pratique, obligation que
l*on prend en justice de faire une chose, d'effectuer un
payement , d'exécuter un ouvrage. — Lorsque les admi*
nistrations publiques proposent des marchés avec con-
currence, pour fournitures ou travaux, ceux qui veulent
s'en chaiiger déposent des sown^sUms cachetées, conte-
nant les clauses et conditions qu'ils acceptent. S'il s'agit
d'opérations de quelque importance, on exige des Sott-
missionnaires le dépôt préalable d'une somme plus ou
moins forte à titre de cautionnement, laquelle leur est
restituée s'ils ne sont pas déclarés adjudicataires.
SOUNDA (Idiome}. V, Soenda.
SOUPENTE (du latin suspensum, chose suspendue),
petit réduit, espèce de faux plancher à demi- hauteur
d'une pièce un peu élevée, pour loger les domestiques
ou pour tout autre usa^e.
SOUPER. V, notre Dictionnaire de Biogr, et d^ Histoire.
SOUPIR , en termes de Musique, signe de silence dont
la durée est égale à celle d'une noire. On le marque par
un signe assez semblable à un 7 renversé. Le demi-
soupir est le silence d'une croche ; le quart de soupir,
d'une double croche; le demi-qttart de soupir, d'une
triple croche.
SOUPIRAIL, baie pratiquée en abat-lour dans l'épais-
seur d'un mur de fondation, ou aplomb dans le sommet
d'une voûte, pour donner de l'air et un peu de Jour aux
caves et aux.autres lieux souterrains.
SOUQUENILLE (du latin barbare sttccania ou surca-
nia), espèce de surtout très-long, fait de grosse toile, et
qu'on donne aux palefreniers pour s'en servir quand ils
pansent leurs chevaux.
SOUQUER , en termes de Marine, roidir un cordage ou
une amarre.
SOURDELINE, ancien instrument de musique à vent.
-C'était une espèce de musette (K. ce mot),
SOURDINE , petit morceau de bois, d'ivoire ou de mé-
tal, en forme de peigne, à 3 dents évidées, que l'on en-
ch&sse sur le chevalet des instruments à cordes pour
assourdir les sons et produire certains effets particuliers.
— Les sourdines des hautbois et des clarinettes sont des
pavillons rentrants en dedans et qui n'ont qu'une petite
ouverture. La sourdine du cor est un c6ne de carton,
percé d'un trou à sa i>ase, et qu'on place dans le pavil«
ion. Celle de la trompette est un petit tube en bois que
l'on place dans l'ouverture inférieure. Un mouchoir placé
entre la double corde en boyau et la peau inférieure du
tambour, intercepte les vibrations de cet instrument. Le
voile d'étoffe qu'on jette sur les timbales produit aussi
l'effet d'une sourdine, et donne au son un caractère
sombre et mélancolique. Les pianos ont une pédale gui
fait l'office de sourdine : elle fait mouvoir des étouffoirs,
réglettes de bois garnies le peau, qui amortissent le son
en s'appliquant sous les cordes. B.
sooRDiNB, sorte d'épiaette ( V, ce mot),
SOUHDON. V, SORDONB.
SOURDS-MUETS. L'éducation des sourds-muets a été
longtemps considérée comme impossible : c'était Taris
d'Aristote et du poète Lucrèce, et S^ Augustin, prenant à
la lettre les paroles de S^ Paul , fides ex auditu, croyait
qu'un sourd-muet était incap{û>le d'être admis dans le
sein de l'Église. On lit dans Bède le Vénérable que Jean
de Beverley, archevêque d'York au vii* siècle, apprit à
parler à un jeune sourd-muet , qu'il avait recueilli par
charité. Au xv* siècle, Rodolphe Agricola, profœseur &
Heidelberg, dit avoir vu un sourd de naissance qui tenait
une conversation par écrit. Au xvi*. Cardan démontra,
mais d'une manière purement théorique, la possibilité
d'instruire les sourds-muets, et bientôt Pedro de Ponce,
bénédictin espagnol , apprit h plusieurs la lecture, l'écri-
ture et le langage. Pendant le cours du xvii* siècle, des
essais furent faits avec bonheur par Juan Pablo Bonet,
secrétaire du connétable de Castille, par John Bulwer,
John Wallis et William Holder en Angleterre, par Van
Helmont en Hollande et Conrad Amman en Suisse. Il pa-
rait qu'on s'en occupait également en Fnmce; car le par-
lement de Toulouse confirma, en 1679, le testament olo-
graphe d'un sourd-muet. En Allemape, un certain
Georges Raphel fit lui-même l'éducation de ses trois
enfants sounls-muets, et publia sa méthode. L'éducation
des sourds-muets a pris, à partir du xviii* siècle, un d<y-
veloppement considérable : parmi ceux qui s'y sont con-
sacrés avec le plus d'éclat jusqu'à nos jours, on remarque
Rodrigues Pereira, Ernaud, l'abbé de L'Épée, l'abbé Des-
champs, l'abbé Sicard, Daniel Guyot, Saintr-Sernin, Lau-
rent Clerc, Jean Massieu , Bébian et Ferdinand Berthicr,
en France; Thomas BraÂdwood, en Ecosse; le docteur
Watson, en Angleterre; Miguel d'Alea, en Espagne; Sa-
muel Heinicke et l'abbé Storck, en Allemagne; Thomas
Gallaudet« aux États-Unis,
La France possède aujourd'hui 51 institutions de sourd v
muets. Celles de Paris , de Bordeaux et de Chambéry
sont des institutions nationales, qui relèvent du minis-
tère de l'Intérieur ; on y compte beaucoup de boursiers
à titi« gratuit, qui reçoivent une éducation profession-
nelle et industrielle autant que littéraire.
On a employé, pour instruire les sourds-muets, plu-
sieurs métliodes. Tantôt on s'est borné à développer chez
eux le langage naturel d'action, et à en faire d'excellents
mimes; tantôt on a créé pour eux un alphabet^manuel
purement conventionnel, désignant chaque lettre par un
signe particulier. Ce dernier système est appelé la i}ac-
tylologie, c-à-d. l'art de parler à l'aide des doigts. Les
signes se rapprochent plus ou moins des formes de récri-
ture; pour indiquer la fin d'un mot, d'une phrase, la
main trace une ligne horizontale de gauche k droite;
l'accentuation et la ponctuation sont tracée en l'air par
l'index, qui peut aussi Jouer le même rôle relativement
aux chiffres.
V* Juan Pablo Bonet, Reduccion de las letras y arte
para ensefUir a hablar los mudos, Madrid, 1620, in-4«;
J. Bulwer, Philocophus (l'Ami du sourd-muet), Lon-
dres, 1648; Amman, Surdus loquens, Amsterdam, ICO'i;
J. Wallis, Epistola.., de mutis surdisque informandis^
dans les Transactions philosophiques de Londres, IGOS;
Dalgarno, Didasoalocophus , Oxford, 1778; l'abbé de
L'Épée, Institution des sourds et muets par la voie des
signes méthodiques, Paris, 1774, et la Véritable manière
d'instruire les sourds-muets, 1784; l'abbé Deschamps
Cours élémentaire d'éducation des sourds-muets, l^ris,
1779; Hervas y Panduro, Escuela espaHola de sord*.»-
mutos, Madrid, 1795, 2 vol. in-8^; l'abbé Sicard, Ifémoir^s
sur Vart d'instruire les sourdsrmuets de naissance, 1781) ;
le même. Cours d'instruction d*un sourd-muet de naiS'
sance, Paris, 1803, in-8<^, et Théorte des signes pour
l'instruction des sourds-muets, 1 808; Bébian, Essai sur les
sourds-muets et sur le langage naturel, Paris, 1817, in-8%
et Manuel d'enseignement pratique des sourds -tnuêts,
1827, 2 vol. in-8<>; Do Gérando, De l'instruction dei
son
1659
sou
rowHt-mtiMt àê naissance, Paris, 1827, 2 vol. in-8o;
Ferdinand Berihier^ Histoire et statistique de l'instruction
des sourds'fnuets, Paris, 1836, in-8<^, et Les sourds-muets
avant et depuis Vabbé de VÊpée, 1840; Léon Vaisse, Le
mécanisme de la parole mis à la portée des sourds de
naissance, 1834, et Essai d'une Grammaire symbolique
à Vusage des sourds-muets, 1830; le môme. Essai histo-
ri(iue sur la condition sociale et l'instruction des sourds-
muets en France, 1844; Valade-Gabel, Méthode à la
portée des instituteurs primaires pour enseigner aux
sourds-muets la langue française sans Fintermédiaire
du langao;e des signes, Paris, 1857, in-8<>.
SOURIS, en termes d'Art militaire, appareil destiné à
mettre le feu à un fourneau de mine, dit lui-même Sou-
ricière.
sooais (Pas de). V, Pas de sodbis.
SOUS-BARBE, en termes de Marine, pièce de bois qui
soutient Fétrave d*un navire dans le chantier ; — gros
cordage en double ou chaîne qui descend du beaupré à la
guibre, pour retenir le beaupré lorsqu'il tendrait à se re»
lever dans les agitations du navire.
SOUS-BASSE, jeu de l'orgue employé principalement
par les facteurs allemands pour donner plus de rondeur
et de gravité aux jeux de fond des pédales, et introduit
dans les grandes orgues en France depuis plusieurs an-
nées. C'est un huit-pieds bouché sonnant seize-pieds. Ce
bourdon a un son plus fort que le bourdon ordinaire; il
est de plus grosse taille, et absorbe une plus grande
quantité de vent. Ses tuyaux sont en bois. F. C.
SOUSCRIPTION, apposition que l'on fait de sa signa-
ture au bas d'ua acte pour en approuver le contenu.
F. DiPLOVE.
sooscaiPTiON, en termes de Librairie, engagement pris
d'acquérir quelque grand ouvrage, que l'on paye d'avance
en totalité, ou par fractions à mesure que sont livrées
certaines parties de l'ouvrage. C'est «n moyen par lequel
le public peut venir en aide aux éditeurs, qui ne sont
plus obligés d'enfouir dans une entreprise un capital con-
sidérable, et qui rentrent dans la totalité ou une partie
de leurs débours. L'usage des souscriptions a pris nais-
sance en Angleterre au milieu du xvu* siècle, à l'occasion
de l'impression de la Bible polyglotte de Walton. D'An-
gleterre il passa immédiatement en Hollande; mais il
n'arriva en France qu'en 1717, à propos du fameux ou-
vrage de Montraucon sur Y Antiquité expliquée. En 1780,
on payait encore généralement à l'avance, avant d'avoir
rien reçu, la moitié de l'ouvrage que promettait l'éditeur;
depuis 60 ans, on ne paye plus que sur livraison.
SOUS-DIACONAT, le 1" des ordres sacrés ou majeurs
dans l'Église catholique. Il n'imposait point autrefois la
nécessité du célibat. Les fonctions du Sous-diacre con-
sistent à avoir soin des vases sacrés, verser le vin et
l'eau à la messe, chanter l'épltre, soutenir le livre de
l'Évangile au diacre et le porter à baiser aux prêtres,
porter la croix dans les processions, recevoir \q% offrandes
do peuple, etc.
SOUS-DOMINANTE, la 4» note d'un ton quelconque.
Ainsi, dans le ton d'ut, fa est la sous-dominante.
SOUS-FACE, mot employé quelquefois comme syno-
nyme ûesof/lte {V. ce mot),
SOUS-FAITE, pièce du comble posée de niveau au-
dessous du faite et liée par des croix de S^-André ou des
entretoises. Elle sert à rendre plus solides les assem-
blages de charpente.
SOUe-UEUTENANT. V, Lieotenaht.
SOUS-LOCATION. V. Bail.
SOUS-MÉDIANTE, nom donné par quelques musiciens
à la 6« note du ton, qui fait tierce au-dessous de la to-
nique comme la médiante au-dessus.
SOUS-OEUVRE (Reprise en). V. OSovre.
SOUS-OFFICIER. V. Ofpicieii.
SOUSOU (Idiome), un des idiomes de la Nigritie ma-
ritime, parlé par les Sousous ou Suzees. C'est le premier
dans lequel on ait publié des livres pour instruire les
Nègres dans le christianisme.
SOUS-PRÉFECTURE. V. Préfectori. ,
SOUS-SECRÉTAIRE D'ÉTAT, titre donné à de hauts
fonctionnaires qui, dans divers Ministères, furent à cer-
taines époques chargés de diverses parties du service, et
qui partageaient la responsabilité comme le pouvoir des
Ministres.
SOUSTRACTION, en termes de Droit criminel, action
de prendre furtivement. Les soustractions commises par
les dépositaires ou comptables publics, par les fonction-
naires publics de l'ordre civil ou Judiciaire, par les parti-
culiers dans les dépôts publics, sont punies des peines
portées par les art. 169-173 du Code pénal. Celles com-
mises par l'un des époux au préjudice de l'autre ou de
ses héritiers, par les enfants ou descendants au préjudice
de leur père ou mère ou de leurs ascendants, par ceux-ci
au préjudice de leurs enfants ou descendants, par les
alliés au même degré, ne donnent lieu qu'à des répara-
tions civiles ; la loi ne prononce de peine que contre ceux
qui ont recelé les objets soustraits par eux.
SOUTACHE, tresse de galon ou de lacet plat de soie,
d'argent, ou d'or.
SOUTANE (de l'italien sottana, qui est en dessous),
vêtement des ecclésiastiques, à manches étroites, et des-
cendant jusqu'aux talons. La soutane est de couleur noire
pour les simples prêtres , violette pour les évêques et
archevêques, rouge pour les cardinaux, blanche pour le
pape. Du XII* au xv* siècle, la soutane fut portée aussi
par les magistrats, les avocats, les médecins et les pro-
fesseurs.
SOUTANELLE, petite soutane qui ne descend que jus-
qu'aux genoux.
SOUTE (de l'italien sotto, sous, au-dessous^, nom
donné à de petits magasins au'on établit dans l'entre-
pont ou dans la cale des grands navires. Il y a la soute
aux poudres, la soute au biscuit, la soute au vin, la soute
aux légumes, la soute aux voiles, etc.
SOUTÈNEMENT, en termes de Comptabilité, raisons
que l'on donne pour soutenir ou justifier les articles d'un .
compte.
SOUTÈNEMENT (Mur de). F. Mun.
SOUVENIR, V, MÉMOIRE.
SOUVERAIN, se dit adjectivement de tout ce qui est
au plus haut degré en son genre, de ce qui ne reconnaît
pas d'autorité au-dessus de soi. On appelle Cour souve-
raine. Tribunal souverain, une Cour, un Tribunal qui
juge en dernier ressort; leurs arrêts sont des jugements
souverains. — Pris substantivement, le mot Souverain
s'applique à tout chef d'État.
SOUVERAIN, monnaie. V, notre Dictionnaire de Biogror
phie et d'Histoire.
SOUVERAINETÉ. Si l'on entend par ce mot la pleine
liberté, l'entière indépendance, Dieu seul est souverain,
parce qu'il ne dépend que de lui-même et possède sur
toutes choses un pouvoir inflni. Le pouvoir en lui se
confond avec la souveraineté. La créature dépendant de
l'Être qui l'a créée, ne peut, à l'égard de cet Être, se
qualifier de souveraine : nul homme n'est souverain, en
ce sens que sa raison et sa volonté soient pleinement in-
dépendantes; car elles relèvent des lois du vrai et du
bien, qui ont leur origine en Dieu. Mais tout homme est
souverain, en ce sens que ni sa raison, ni sa volonté, ni
par conséquent ses actes, ne dépendent de droit d'aucun
autre homme; il est primitivement et complètement libre
à l'égard de ses semblables, il ne doit obéissance à aucun
d'eux, et, à ce titre, il possède une souveraineté relative.
L'homme ne vit pas isolé ; sa condition normale est Tétat
de société : or, il existe deux sociétés humaines : la fa-
mille, et la nation ou la société civile et politique. La
famille est fondée par l'ordre même de la nature, et il est
de droit naturel, par conséquent de droit divin, que la
volonté du père fasse loi pour ses enfants. Seulement, la
société de famille ne durant pas toujours, la m^orité
émancipant les enfants, le père n'a plus de droit strict,
il n'est plus chef que de nom et par déférence ; l'autorité
n'existe plus, et chaque enfant prend à son tour posses-
sion de son indépendance, de sa souveraineté. La société
civile et politique est, comme la famille, une nécessité
naturelle, mais une nécessité durable et permanente : du
moment qu'elle existe, c'est une des lois de l'organisation
du monde qu'il y ait une puissance directrice. Ici, le mot
Souveraineté prend une nouvelle acception ; il désigne
le pouvoir de commander à tous les individus qui com-
posent la société, et le souverain est l'être, un ou mul«
tiple, qui exerce ce pouvoir.
La souveraineté sociale possède trois attributions prin-
cipales : faire des lois, veiller à leur exécution , et en
punir les infractions. Faire une loi, c'est prescrire ou
défendre : or, un supérieur pouvant seul prescrire et dé-
fendre, et tous les hommes étant égaux par nature, un
homme, un conseil de plusieurs hommes, une assemblée
plus ou moins nombreuse, n'a pas le droit de faire, en
son nom, la loi à tous les membres du corps social. Le
droit de légiférer, attribut essentiel de la Souveraineté,
n'émane donc pas des hommes. D'un autre côté, per-
sonne dans la société civile n'a le droit, à part le cas de
légitime et immédiate défense, de se faire Justice à soi-
même. Si aucun individu n'a le droit de punir, comment
sou
!6(iO
SPT
les individus réunis le po5s<!dcraient-iIs? Et cependant ce
droit existe dans la société, il est aussi un des attributs
de ia Souveraineté. De tmit cela il résulte que la souve-
raineté sociale possède et exerce des droits qui ne vien-
nent pas de rhommc. et qui supposent une puissance
supérieure. Cette puissance, c'est Dieu. Lui seul peut
faire des lois, parce quMl est supérieur aux autres êtres;
lui seul peut imposer une obligation morale ou de con-
science, p&Tce qu'il est le principe de la justice et du
bien ; lui seul peut ôter la vie, parce que seul il la donne.
C'est donc en son nom seul, ou, si Ton veut, au nom de
réternelle justice et du souverain bienr dont il est en
quelque sorte la substance, au'une souveraineté sociale a
le droit dMmposer la loi, d'obliger les consciences, de re-
dresser les torts. — De ce que tout pouvoir vient de
Dieu, de ce que les attributs de la Souveraineté n'existent
qu'en lui et par lui, il ne faudrait pas conclure que ceux
qui sont chargés du pouvoir sont institués par Dieu : ce
genre d'intervention divine mettrait du surnaturel dans
l'histoire, comme les miracles en mettent dans la nature.
La société civile et politique ne se constitue pas par des
miracles ; elle est un produit naturel, et la Souveraineté,
qui vient de Dieu, se réalise dans la société à la manière
d'une propriété qui suit la nature de la chose. 11 y a
{)assage tout naturel de la Souveraineté en puissance à
a Souveraineté en acte. Dès qu'une société se constitue,
. elle ne peut pas ne pas produire spontanément un gou-
vernement qui la dirige. Elle s'organise par l'exercice de.
la raison et de la volonté de ses membres; elle confère,
par un consentement implicite ou explicite, la puissance
qui lui vient de Dieu, soit à un homme, ce qui forme une
monarchie, soit à plusieurs hommes, ce qui fait une
aristocratie, ou bien ses membres cardent celte puissance
pour l'exercer en commun, ce qui constitue une démo-
cratie. Le pouvoir, c.-à-d. la Souveraineté en exercice,
n'est donc légitime, dans l'ordre naturel ^ que s'il sort,
nous ne dirons pas du peuple (le mot a reçu trop d'ac-
ceptions diverses), mais de la société, et, quand ce peuple
ou œtte société fait entendre sa voix, ce n'est pas lui seul
qui parle, c'est le principe même de toute souveraineté
qui parle en lui : Vox populi, vox Dei,
Une fois la Souveraineté constituée dans une société,
quelle est l'étendue de ses droits? A cette question deux
théories politiques diamétralement opposées ont donné
une réponse identique : « Le souverain est absolu.» L'an-
cienne monarchie, dite de droit divin, ne reconnaissait
en dehors d'elle-même aucun droit; les apôtres modernes
de la Souveraineté du peuple attribuent de même au pou-
voir constitué par le peuple un droit illimité. Dans l'une
et l'autre théorie, l'individu est sacrifié, avec ses droits,
avec tout ce qui lui appaitient. Il ne peut pas y avoir de
Souveraineté illimitée en ce monde, parce qu'elle impli-
querait la perfection et l'infaillibilité, attnbuts qui ne
conviennent qu'à la souveraineté de Dieu. Les individus
conservent dans la société un certain nombre de droits
qui sont supérieurs à tous les gouvernements. Toute au-
torité civile et politique est dominée par les règles im-
muables de la justice, et elle a mission de les appliquer.
Ceux qui en sont les dépositaires ont pour obligations
essentielles de garantir l'existence et les biens des indi-
vidus, de protéger le développement de leurs facultés,
d'empêcher l'iniquité et de punir les désordres, de don-
ner aux intérêts légitimes une suffisante satisfaction, en
un mot, de travailler au bien de tous et de chacun :
c'est ainsi qu'ils fortifient par la vertu la légitimité de
leur oripnne. B.
S0UVIGNY(Ëgli8ede], dans le département de l'Allier.
Cette éelise, autrefois abbatiale de Bénédictins, est re-
marquable par sa longueur. La grande nef, un peu
étroite, est d'une belle élévation; elle fut bâtie au
XIV* siècle. Les deux tours carrées qui ornent la façade
paraissent appartenir à un édifice plus ancien. Deux cha-
pelles contiennent les tombeaux des anciens ducs de
Bourgogne : on remarque surtout celui de Charles I*' et
de sa femme Agnès de Bourgogne. — On nomme Bible
de Souvigny un précieux manuscrit du xn* siècle que
possédaient les religieux, et que l'on conserve actuelle-
ment dans la Bibliothèque de Moulins : il est sur très-
beau vélin, d'une écriture fort nette, et enrichi de mi-
niatures; sa couverture, en bois de chêne revêtu de
peau de truie, est ornée d'animaux fantastiques en cuivre.
SPADASSIN (de l'italien spada, épée), nom qu'on
donna d'abord a tous les soldats, puis aux ferrailleurs
seulement, à ceux qui ne respirent que duels.
SPADINS, piikïes de monnaie frappées par les ducs de
Lorraine aux xui*i xiv* et xv* siècles
SPAHIS. V, ce mot dans notre DicUonnain de Bùh
graphie et cT Histoire.
SPEAKER, c-èi-d. en anglais orateur; nom qne Von
donne en Angleterre au président de la Chambre des
communes , parce qu'il sert d'intermédiaire à cette
Chambre dans ses rapports avec la couronne.
SPECTE, monnaie de Norvège, équivaut à 5 fr. 64 e;
SPÉCIFICATION, terme de Droit. V. Accession.
SPECTACLE, en latin spectaculum (de spectare, regar-
der), tout ce qui attire et retient les regards, et, dans un
sens restreint, représentation thé&trale donnée au public.
SPÉCULAIRE (Pierre). V. notre Dicttonnatre de BiO'
graphie et d*Histoire.
SPÉCULATIF, SPÉCULATION (du latin speculari, ob-
server), se dit des recherches et des études entreprises
Î^our le seul plaisir de savoir et sans arrière-pensée d'uti-
ité pratique. Les sciences, suivant la nature des ques-
tions dont elles s'occupent, présentent un caractère plus
ou moins spéculatif : ainsi la Philosophie, dans son en-
semble, est une science plus spéculative que la Physique;
et entre les parties de la Philosophie, la Psychologie et
la Métaphysique sont plus spéculatives que la Logique ou
que la Morale, qui, sans se résoudre entièrement dans
l'Art de penser ou de se conduire, ont un côté pratique
que la Métaphysique ne présente pas, et que la Psycho-
logie n'offre qu'indirectement. B — b.
SPEOS, nom donné aux excavations faites de main
d'homme dans les rochers en Égy'pte.
SPÉRONARE, petit navire maltais non ponté, à fond
plat, gréant une voile à livarde sur un ra&t placé vers
l'avant.
SPHÈRE(du grec^p/iaïra, globe, corps rond^, nom donné
vulgairement aux elobes terrestres {V. Globe). On appelle
Sphère armillaire {d'armilla, bracelet) un assemblage de
cercles de métal, de bois ou de carton, au centre desquels
est placé un petit globe figurant la terre : on l'emploie
pour représenter le cours apparent du soleil *»t le mouve-
ment des astres. Elle est dite Sphère de Ptolémèe^ bien
que l'invention en ait été attribuée à Thaïes, ou à Anaxi-
mandre, ou à Archimède. Il en existe une autre, la
Sphère de Copernic^ où la terre et les autres planètes
sont placées à diflTérentes distances do soleil, qui occupe
le centre.
SPHKRISTÈRE. V. notre Dictionnaire de Biographie el
d'Histoire,
SPHÉRISTIQUE, partie de la Gymnastique des Anciens
qui comprenait les exercices de la balle (en grec sphatra),
SPHÉROMACHIE.) V. ces mots dans notre Dictionnain
SPHINX. ] de Biographie et d'Histoire.
SPHRAGISTIQUE. V. Sceau.
SPHYRÉLATON. V. Repoussé (Sculpture au).
SPICATUM OPUS. y. Appareil.
SPICCATO, terme italien de Musique, synonyme de
staccato {V. ce mot).
SPICILEGIUM, c.-à-d. en latin collection d^épis, gerbe;
nom donné à des recueils de pièces, d'actes, etc. Tels
sont le Spicilegium de D'Achéry (1633-77) et le Spicile-
gium Solemense de dom Pitra, 1853.
SPINOZISME, nom donné à la philosophie de Spinoza,
citée comme un exemple frappant de l'abus que peut
faire de la pure Logique un esprit vigoureux, parti de
principes incomplets ou arbitraires. Spinoza avait trouvé,
dans Descartes, cette définition de la Substance : « Lors-
que nous concevons la substance, nous concevons seule-
ment une chose qui existe en telle façon, qu'elle n'a
besoin que de soi-même pour exister. En quoi il peut y
avoir de l'obscurité, touchant l'explication de ce mot
n*avoir besoin que de soi-même; car à proprement parler
il n'y a que Dieu qui soit tel... » Quant à la notion que
nous avons des substances créées, matérielles ou imma-
térielles, a pour entendre que ce sont des substances, il
faut seulement que nous apercevions qu'elles peuvent
exister sans l'aide d'aucune chose créée. » ( Principes de
la Philosophie, 51 et 52.) Restriction Judicieuse dont Spi-
noza n'a pas tenu compte! Dans ce passage, il ne vit que
la définition deJa Substance, qu'il prit dans le sens le plus
absolu dont elle fût susceptible : « Il ne fit, dît quehque
part Leibniz, que cultiver certaines semences de la Pdî-
losophie de Descartes. » Ceci n'est vrai qu'à un point de
vue; car cultivant ces semences à sa manière, les déve-
loppant dans un sens exclusif, et par une méthode qui
lui est propre, il en fit sortir un système étrange, dont
les vrais cartésiens et les admirateurs de Descvtes re-
poussent à juste titre la solidarité. D'abord, rien de plui
opposé que sa méthode et la méthode de Descartes. Celui nâ
part du sentiment intime de l'existence personnelle qu'il
SPl
1661
SPI
dégage du fait de la pensée; et Bossuet, avec sa puis-
sance et sa clftité pour résumer à grands traits un* sys-
tème, n*est Jamais plus cartésien que quand il écrit :
« La sagesse consiste à connaître Dieu et à se connaître
soi-même; kl connaissance de nous-mêmes nous doit
^ever à la eonnaissance de Dieu. » Spinoza, tout au con-
traire , posé d'abord ridée de Dieu, pour en déduire
géométriquement, et par voie de démonstration, toute sa
philosophie. C'est là toute sa méthode ; méthode dange-
reuse, quand même les principes dont il partirait seraient
irréprochables; et l'on sait déjà que le premier de ces
principes est une définition équivoque de la Substance,
définition interprétée de telle façon qu'il ne peut y avoir
d'autre Substance que Dieu, et que dorénavant ces deux
Boms : DieUf la Substance, n'exprimeront plus qu'une seule
et même idée, celle de l'Être 2d}solu et infini, hors duquel
rien ne peut être conçu. La Substance, ainsi entendue,
possède des attributs, sans quoi elle ne serait qu'une
abstraction, ce que Spinoza nie énergiquement ; et comme
infinie, elle possède une infinité d'attributs infinis. Il faut
bien comprendre, cependant, en quoi cousiste, pour cha-
cun de ces attributs, son infinité. Parlons des deux seuls
qui nous soient connus, l'Étendue et la Pensée. L'Éten-
due, comme attribut de la Substance infinie, est infinie,
mais seulement d'une infinité relative ; c.-à-d. qu'infinie
en tant qu'Étendue, elle n'est ni la Pensée, ni tout autre
attribut de la Substance infinie; et de même la Pensée,
infinie en tant que Pensée, n'est point absolument infinie,
car si elle l'était, elle serait et l'Étendue, et tous ks
autres attributs de la Substance infinie, et la Sub-
stance infinie elle-même. Au reste, pourquoi l'Étendue et
la Pensée sont-elles les seuls attributs de la Substance qui
nous soient connus (car Spinoza ne nomme pas attributs
de Dieu son éternité, son immutabilité, etc : il ne les con-
sidère que comme des conditions nécessaires et inhérentes
de son existence)? pourquoi la faculté d'intuition ration-
nelle, qui nous les découvre, ne nous en découvre-t-elle
pas d'autres? Nous aurions le mot de cette énigme s'il
nous était permis de faire appel aux facultés expérimen-
tales de l'intelligence : mais il ne faut pas oublier qu'elles
n'ont rien à voir dans la philosophie de Spinoza. Il faut
donc nous borner à prendre, telles qu'elles nous sont
données, les assertions hardies de son auteur, et voir
comment il conçoit le développement nécessaire de l'Être
dans ces attributs et dans les modes qui les développent
à leur tour. En efifet, tout attribut a nécessairement des
modes, et un attribut infini a une infinité de modes, la
Pensée une infinité d'idées, l'Étendue une infinité de
grandeurs, de figures et de mouvements; mais ici s'ar-
rête l'analogie du rapport des attributs à la substance et
des modes aux attributs.
U y a pour chaque attribut une infinité de modes; mais
chacun de ces modes est fini, déterminé, et n'exprime que
d*une manière finie l'infinité de l'attribut. N'oublions pas
que les modes sont unis aux attributs, les attributs à la
substance, par un enchaînement nécessaire, et qu'ainsi
modes, attributs, et substance, quoique distingués par
resprit, forment un tout réellement indissoluble, dont la
Substance est le fond et tout l'être : «J'entends par Sub-
stance, dit Spinoza (Éthique, i^ partie. Définitions), ce
qui est en soi et est conçu par soi; par Attribut ce que la
raison conçoit dans la Substance comme constituant son
essence; par Modes les afi^ections de la Substance. J'en-
tends par Dieu un être absolument infini , c'est-à-dire
une substance constituée par une infinité d'attributs in-
finis, dont chacun exprime une essence éternelle et in-
finie. » Et ailleurs : « Il est de la nature de la Substance
de se développer nécessairement par une infinité d'attri-
buts infinis infiniment modifiés. » Grâce à cette assimi-
lation, à cette identification de Dieu et de la Substance,
Dieu est infini. C'en est assez pour conclure qu'il est un ;
mais Spinoza ne se borne pas aux considérations très-
simples qui font de l'unité une condition de l'infinité ;
pour la démontrer, il s'appuie sur un principe qui, bien
que vrai, ne nous paraît ni sulfisamment établi par la
discussion, ni assez évident pour servir d'axiome ; c'est
à savoir, que deut substances d'attributs identiques se
confondraient en une seule; cela nous parait surtout le
résultat, d'une part, de la Substance, de ses Attributs
et de ses Modes de l'autre. On sait désormais très-
positivement à quoi s'en tenir sur le véritable carac-
tère du Spinozisme; on sait, non plus par oui-dire et
approximativement, mais très-précisément, et preuves
en madn, qu'il est rabM>rption la plus complète, la
plus absolue de toutes choses en Dieu, le type le plus
complet du Panthéisme. On verra un peu plus loin ce qui
reste à l'homme et à la nature. Achevons l'exposition dt
l'idée de Dieu, autant que cela est possible dans un ré-
sumé aussi rapide et à l'égard d'un système où cette
idée domine tout, explique tout, se retrouve par4:out. Un
fait assez curieux, c'est que Spinoza, maître de cette idée
par une intuition tout aussi sûre et évidente, à ce qu'il
semble, que celles qui donnent naissance aux définitions
fondamentales de la Géométrie, ait cru nécessaire d'en
démontrer la réalité. Il est vrai que la preuve qu'il in-
voque pour démontrer l'existence de Dieu est la preuve
que J'appellerais volontiers Leibnizo- Cartésienne, qui
conclut l'existence de Dieu de son essence telle que nous
la concevons {V, Dieu — Preuves de l'existence oa). Dieu
conçu comme parfait est conçu par cela même comme
existant ; car il ne saurait être parfait sans être. Toutes
formes techniques mises de cô^, ceci revient à dire :
Nous croyons que Dieu existe parce que nous le conce-
vons nécessairement, et c'est en définitive ce qu'il y a de
plus vrai et de plus convaincant. Spinoza a eu, pour
rendre cette pensée, une expression des plus heureuses :
« Si Dieu n'existait pas, la pensée pourrait concevoir plus
que la nature ne saurait fournir. »
Dieu est infini ; c'en est assez pour conclure qu'il est
un ; mais Spinoza ne se borne pas aux considérations
très-simples qui font de l'unité une des conditions de
de l'infinité. Pour la démontrer, il s'appuie sur ce prin-
cipe qui, bien que vrai peut-être, ne nous paraît ni suf-
fisamment établi par la discussion, ni assez évident par
lui-même pour servir d'axiome : que deux substances
d'attributs identiques se confondraient en une seule. Ce
principe admis, comme la Substance, telle qu'elle a été
définie, ne peut êtro ni créée ni produite par une sub-
stance difi'érente d'elle-même, il s'ensuit rigoureuse-
' ment que Dieu est un ; cela nous paraît partout le
résultat d'une appréciation étroite et faible de l'intelli-
gence divine. -Cette prétention nous semble surtout in-
tolérable et illogique ici, où, pour exclure le monde de
la pensée de Dieu, il faut en quelque sorte scinder Dieu,
le séparer de lui-même; et cela, quand toutes les autres
parties du système tendent à l'unification la plus absolue,
la plus excessive. — Nous ne pourrions, sans étendre
démesurément cet article, insister sur des points qui ont
pourtant de l'importance ; il faut donc glisser sur la ma-
nière dont Spinoza entend ce qu'il appelle la Liberté en
Dieu, conservant le nom, supprimant la chose ; car qui
reconnaîtrait la Liberté dans cette activité gui n'a ni le
choix des motifs, ni le pouvoir de ne pas faire ce qu'elle
fait, et que Spinoza ne qualifie de Liberté que parce qu'il
la considère comme déterminée par elle-même et par sa
nature; en d'autres termes, parce que la Liberté, telle
qu'on la comprend d'ordinaire, lui faîit complètement dé-
faut? Aussi est-il plein de dédain pour l'opinion puérile
et superstitieuse, selon lui, qui fait de la création l'efiet
d'une détermination prise, à un moment donné, par la
volonté divine. Non, Dieu n'est pas le créateur du monde,
comme on l'entend vulgairement ; mais il en est la cause
immanente, créant sans cesse, en ce sens que sans cesse
il se développe, « remplissant la durée infinie de l'iné-
puisable variété de ses effets. » Toutes choses, dans le
monde, sont donc ce qu'elles doivent être; il ne faut pas
en chercher hors d'elles-mêmes la cause finale; elles sont
non en vue d'une certaine fin, mais par la nécessité qui
leur est inhérente; elles font partie d'un ordre immuable
et nécessaire; tout est bien par cela seul qu'il est; il ne
faut pas chercher d'autre idée du Bien. Voilà le principe
métaphysique. On verra tout à l'heure quelles consé-
quences Spinoza en a tirées en Morale.
L'Ame, qui est une idée, ou, pour parler plus exacte-
ment., une collection d'idées, une suite de modes de la
Pensée étroitement unie à une suite de modes de l'Éten-
due, en deux mots Vidée du corps humain, n'a point, à
proprement parler, de facultés. U serait assez difficile
d'expliquer comment, au sein de ce grand tout dont elle
n'est qu'un humble élément, elle garde la conscience de
sa personnalité. Quant aux différentes fonctions de l'En-
tendement, quant à la volonté, ce sont des êtres de rai-
son, sous lesquels on ne retrouve, au vrai, que telle ou
telle pensée, telle ou telle volition déterminée. La pensée
d'ailleurs et la volition ne sont pas difl'érentes; la pensée
est l'idée considérée comme représentative; la volition
est encore l'idée, mais considérée comme active; deux
points de vue différents sans doute, mais ml fond tout
tend à l'unité. L'Ame se connaît elle-même, voilà Ix
conscience; elle connaît le corps humain, voilà les sens.
L'impression des corps étrangers laisse des traces qu^
subsistent en leur absence. L'Ame, en saisissant c»
SPI
1662
SPI
traees. Imagine et se souvient ; en les saisissant dans leur
liaison, elle associe ses idées. Tout cela constitue la por-
tion la plus humble de Tintelligence, YExpériMce vague,
au-dessous de laquelle il n'y a que cette perception très-
imparfaite qui se fonde sur un simple oui-dire, mais au-
dessus de laquelle la perception des rapports, puis, en
8*élevant toujours, la conception de TEssence et de la cause
immédiate des choses, sont le yéritable acheminement
à la science. De là une Logique que Spinoza lui-même a
suivie, ou du moins &*est efforcé de suivre en toute cir-
constance avec toute la rigueur possible, allant droit, en
tout, à la Substance. Une conséquence de tout ceci, consé-
quence qui reparaîtra bientôt en Morale sous un jour tout
à fait singulier et inattendu, c'est que plus TAme s*élève,
dans l'ordre de la pensée, vers la Substance, c-à-d. vers
Dieu, plus ses idées deviennent claires et adéquates, et
plus, dans l'harmonie de la Pensée, de l'Être et de l'ac-
tion, elle éprouve de jouissance et de bonheur. C'est, en
effet, se tromper grossièrement que de séparer soit dans
l'homme, soit en Dieu, l'action de la Pensée et de l'Être.
La manifestation la plus énergique de l'activité, la vo-
lonté, n'est dans l'homme que l'effort naturel par lequel
il tend à conserver et à augmenter son être. Quand cette
tendance se rapporte à l'homme tout entier, corps et
&me, pensée et étendue, Spinoza la nomme Appétit;
quand elle se rapporte exclusivement à l'Ame, il la
nomme Volonté. « Le Désir, ajoute-t-il, c'est l'appétit avec
conscience de lui-même. » Il est impossible d'assimiler
plus positivement le Désir et la Volonté, ce qui est une
source féconde d'erreurs en Morale. Et de ce^ deux
phénomènes, quel est celui au profit duquel cette assi-
milation a lieu, et dans lequel l'autre se trouve ab-
sorbé? Le Désir est fatal (F. Désm); selon nous et se-
lon le sens commun, la Volonté est libre, tellement libre,
qu'elle est la liberté elle-même (7. Volonté, Liberté,
LiBRB Arbitkb^. Or, la liberté consistant pour Spinoza
dans une activité qui n'est déterminée par aucune cause
étrangère, qui se détermine par soi-même et se déve-
loppe par la nécessité de la nature, non-seulement la
liberté, au sens ordinaire du mot, ne se trouve nulle
part, mais cette liberté nominale elle-même ne se trouve
qu'en Dieu; elle n'existe point chez l'homme. Si l'homme,
dans le système de Spinoza, conserve quelque chose qui
retient le nom de Volonté, ce n'est en réalite que le désir
dont l'Ame est fatalement possédée de persévérer dans
son être et de l'étendre. Et comme l'Ame, encore une
fois, n'est qu'âne collection d'idées, qu'ainsi c'est par les
idées qu'elle existe, d'autant plus réelle qu'elle a des
idées plus claires et plus adéquates ; comme il n'y a pas,
ainsi qu'on l'a dit pi^édemment, d'idées plus claires^ et
{)lus adéquates que celles qui résultent de l'intuition par
aquelle la Raison pénètre les choses dans leur essence,
et comme Tobjet le plus noble auquel elle puisse et
doive tendre, c'est l'Être infini et éternel qu'elle possède
avec plénitude dès qu'elle le conçoit clairement, il s'en-
suit, en dernière analyse, que le désir unique et suprême
dans lequel Spino7A anéantit la volonté, et dont il fait
dériver toutes les passions particulières, est ce désir de
connaissance et de vérité qui ne peut être satisfait que
par la fusion et l'absorption de l'Intelligence dans l'Être
absolu. Tel est effectivement le dernier mot de la Morale
de Spinoza (une Morale, chose étrange dans un système où
tout est livré à la fatalité!) et le contre-poids qu'il oppose
tout à coup aux conséquences déplorables vers lesquelles
il a marché avec une hardiesse inouïe. En effet, livrés que
nous sommes à dm appétits et à des désirs qui deyien-
nent joie ou tris'cesse, suivant qu'ils sont favorisés ou
contrariés par l'action des causes étrangères, ne faisant
pas notre destinée, mais la subissant, n'ayant pas à
choisir entre le bien et le mal, dépourvus de vraie liberté,
et réduits à l'état d'automates spirituels, que pourrions-
nous faire de mieux que de chercher partout, toujours et
à tout prix, la satisfaction de nos appétits et de nos dé-
sirs? Quel autre droit, quel autre devoir aurions-nous à
remplir, si cette Morale égoïste et passionnée ne se rele-
vait tout à coup par l'apparition d'un principe qui vient
tout épurer, l'amour de Dieu, identique à l'amour de la
vérité? A la lumière de ce principe, tous les appétits bas,
tous les grossieors désirs s'effacent et disparaissent, et
l'Ame, enivrée, dès cette vie. de l'avant-goût de la vérité,
commence à jouir de la béatitude qui lui est réservée pour
l'éternité. Spinoza professe très-expressément la croyance
à l'immortalité de l'Ame. On lui a reproché de n avoir
point, dans sa -Métaphysique, les principes d'une dé-
monstration légitime à ce sujet. Le reproche (il est vrai
^e c'est là ce qu'il y a de plus grave) ne me parait fondé
qu'en ce qui concerne l'immortalité accompagnée de con-
science. Quant à la persistance dans l'Être, elle résulte
directement de la manière dont l'&me est définie : un
mode de la Substance nécessaire, éternelle. 11 en est de
même du corps, dira-tron. Aussi Spinoza ne croit-il pas
qu'il soit détruit absolument, et sa Métaphysique hardie,
qui veut, dans les corps, les modificauons infiniment
variées de l'Étendue infinie, ne s'éloigne pas trop des
conclusions de la Physique moderne, qui ne voit, elle
aussi, dans les phénomènes relatifs à la génération, à la
vie et à la destruction des êtres matériels, qu'une suite de
transformations. Quant à l'immortalité de l'Ame con-
sciente d'elle-même, il faut avouer qu'elle parait bien
hypothétique dans un système qui n'admet ni la distinc-
tion fondamentale du bien et du mal, ni le libre arbitre,
ni le mérite et le démérite, ni par conséquent la n^
cessité et la justice d'une réparation. Il est de fait ce-
pendant que Spinoza, tout en pensant que certaines
actions de l'&me cessent avec les affections du corps qui
les i)rovoqoent, déclare que la meilleure partie de l'Ame
est immortelle, et que la vie future, loin d'exclure la
personnalité, en fait une condition du iwnheur dont nous
devons y jouir.
Ce bonheur, on voit Spinoza en jouir par avance dans
la vie austère, de solitude, de travail manuel et de mé-
ditation qu'il s'était faite, et que les biographes nous ont
racontée. (V. pour les renseignements à ce scyet l'artide
Spinoza de notre Dictionnaire de Biographie). Ceci n'est
point une apologie de sa philosophie, mais une juste ap-
préciation de son caractère. Cet homme, qui a embra^
l'erreur avec tant de résolution, semble n'avoir en qu'une
passion, celle de la vérité. 11 est et il restera le type des
esprits hardis qu'un premier pas jette à tout jamais en
dehors de la bonne voie, et qui se perdent par leur ar-
deur et leur sincérité même. Aussi ne peut-on pas dire
qu'il ait fait école. Le Spinozisme, malgré l'enthou-
siasme de quelques rêveurs, malgré la conformité plos
apparente que réelle que présentent avec lui, sur cer-
tains points, les doctrines panthéistes de l'Allemagne
contemporaine, n'est et ne sera jamais que la philosophie
de Spinoza. Dans l'intention d'absoudre le Cartésianisme
de la responsabilité d'une pareille doctrine, on a cherché
récemment jusqu'à quel point elle pourrait être rattachée
à la tradition rabbinique dont Spinoza, bien qu'en de-
hors de l'orthodoxie judaïque, devait être pénétré. Cette
recherche a donné lieu à des travaux intéressants, (de
M. V. Cousin, dans le Journal des Savants, de M. Ém.
Saisset dans la Revue des Deux Mondes); mais nous ne
pouvons aborder ici cette discussion érudite et délicate.
Sur le Spinozisme, F., outre les ouvrages indiqués à l'art.
Spinoza de notre Dictionnaire de Biographie, l'article
Spinoza du Dictionnaire critique de Bayle, et, dans le
Cours de Droit naturel de Jouiffiroy, les deux leçons con-
sacrées au Panthéisme. . B^-e.
SPINTfiniENNES (des Spinthries, compagnons de dé-
i/auche de Tibère à Caprée), nom donné à certaines mé-
dailles de rAnti(}uité, qui n'eurent jamais cours comme
monnaies, et qui représentent des sujets licencieux.
SPIRE (Cathédrale de). Commencée vers l'an 916 par
le roi Conrad 1*', continuée par Conrad II le Salique et
Henri III, et terminée en i097 sous le règne de Henri IV,
cette église jouit d'une grande célébrité : on en vantait
les dimensions, la belle ordonnance et les six clochers.
Un incendie la dévasta en il65, et les archéologues rap-
portent à la restauration considérable' qui suivit cet acci-
dent la coupole byzantine à huit pans qu'on voit au-
jourd'hui au-dessus du transept. A la suite de nouveani
incendies en 1289 et en 1450, il fallut encore procéder à
des reconstructions. L'église de Spire eut ensuite à souffirir
les horreurs de la guerre : les Français l'ayant livrée aax
flammes en 1689, il n'en resta que les deux tours. Faute
d'argent, on remit seulement le chœur en état de servir
au culte; les nefs ne furent relevées que de 1772 à 1784.
Dix ans après, l'édifice fut converti par les Français en ma-
gasin à fourrages; il a été réparé et achevé depuis 1823.
— La cathédrale de Spire appartient à la famille romane
des églises à double abside. Elle a 117 met. de longueur
et 36 met. de largeur (58 au transept) ; le diamètre de
l'hémicycle de l'abside est de 19"*,50 ; les tours, appliquées
aux bras du transept ont 73 met d'élévation, ut décora-
tion extérieure de l'église est simple, et néanmoins d'us
grand effet; elle se compose surtout de lignes ardiitecto-
rales, de colonnes et de colonnettes, de cordons, d'ar- '
cades et de moulures. L'intérieur est couvert de belles
peintures murales, exécutées d'après les cartons de
Schraudol()h. 0^4uu piliers carrés séparent la grande nd
SPT
1G63
SPl
A ses collatéraux. An milieu de la nef, on voit, à terre,
a roses de pierre qui marquent la place où S' Bernard
Tècha la seconde Croisade. Une dizaine de marches con-
c lisent de la nef dix Chœur des roiSf sous lequel Con-
rad II et sa femme Gisèle, Henri IIJ, Henri IV et sa femme
Berthe, Henri V, Béatrix, 2* femme de Frédéric Barbe-
rousse, Philippe de Souabe, Rodolphe de Habsbourg^
Adolphe de Nassau, Albert d'Autriche, furent inhumés.
Neuf degrés montent du Chœur des rois sous la coupole
où 8*élèye le maître- autel. Sous la partie orientale de
l'église 8*étendune crypte, soutenue par 20 piliers massifs
et courts; on y voit des fonts baptismaux du ix* ou
X* siècle, et un vieux tombeau de Rodolphe de Habsbourg.
L'église de Spire avait un beau cloître, bâti en 1437 ; il
n'existe plus. On regrette également la perte du Baptis-
tère, édifice en forme d'octogone, orné de hait colonnes
et surmonté d'un dôme. B.
SPIRE, en termes d'Architecture, base d*une colonne
lorsque le profil de cette base va en serpentant.
SPIRITISME, doctrine d'après laquelle les Esprits ou
âmes qui ont animé autrefois des con>s humains sont er-
rants dans le monde invisible, et peuvent être évoqués et
interrogés dans le nùtre. Un spirite définit le spiritisme :
« la doctrine fondée sur l'existence, les manifestations, et
l'enseignement des Esprits, » [ou, plutôt, par les Esprits];
car cet enseignement est surtout la grande prétention
des spirites. Voici par quels faits et quels raisonnements
ils furent conduits à cette découverte : vers 1850, aux
États-Unis d'Amérique, divers phénomènes étranges,
consistant en bruits, coups frappés, et mouvements d'ob-
jets inertes, attirèrent l'attention. Ils avaient lieu spon-
tanément, disait-on, mais plus particulièrement (ce qui
parait moins invraisemblimle) sous l'influence de cer-
taines personnes, qui pouvaient en quelque sorte les
provoquer à volonté. Ces personnes étant les intermé-
diaires entre les effets produits et la cause ou puissance
inconnue qui les produisait, à peu près comme un fer
aimanté dégage une attraction vers la foudre, on ima-
gina de les appeler médiums. Ces magiciens naturels
firent tourner des tables, des chapeaux, les firent même
frapper un certain nombre de coups, à volonté. On at-
tribua d'abord ces effets extraordinaires, et bien consta-
tés, à un courant électrique ou magnétique, à Taction
d'un fluide inconnu. C'était la conjecture la plus natu-
relle à former, bien que ce ne fût pas une explication.
A-t-on expliqué les phénomènes de l'électricité , ceux du
magnétisme, etc.? On les a constatés, et, jusqu'à présent,
la science n*a pu aller au delà. Les spirites, moins ré-
servés, ont absolument voulu expliquer pourquoi une
table, mise en rapport avec un médium, lui obéissait
tant qu'il la touchait ; se dirigeait à droite ou à gauche,
suivant ce qu'il lui commandait, vers une personne pré-
sente désignée ; frappait de ses pieds le nombre de coups
qu'il lui demandait, battait la mesure, etc. Alors ils ont
conclu que ce phénomène devait être exécuté par une
tntelligence ; mais ne la voyant point dans le médium
lui - môme ou dans les assistants à l'expérience , alors
ils supposèrent que tout cela s'exécutait par un être in-
visible , et imaginèrent un langage de convention pour
cet être non moins muet qu'invisible: ce fut, après
chaque question, un certain nombre de coups de l'Esprit
frappeur, les uns signifiant oui, les autres non. On alla
même, dit-on, jusqu'à faire un alphabet au moyen des
coups, de sorte c|ue l'Esprit pouvait converser avec au-
tant de facilité, smon de célérité, qu'un vrai sourd-muet
de naissance, ou qu'un cadran de télégraphe électrique.
Ce langage fut appelé tables parlantes, terme un peu am-
bitieux, car frapper ou faire des signes n'est pas parler.
Quoi qu'il en soit, il paraît que les coups de pied furent
si intelligemment donnés, que « tous les êtres qui se
communiquèrent de cette façon, dit un spirite, interrogés
sur leur nature, déclarèrent être des Esprits, et appar-
tenir au monde invisible. » Cette déclaration n'est peut-
être pas des plus concluantes; car, dans tous les mondes
possibles, qui n'a pas l'ambition d'être un esprit, surtout
en présence de gens disposés à vous croire tel? Quant à
l'invisibilité, la déclaration était superflue, attendu que ce
que Ton voyait le mieux dans chaque manifestation, c'est
qu'on ne voyait pas l'Esprit qui l'efifectuait
Ces Esprits, amsi que nous l'avons dit au début, étant
des âmes, on demandera peut-être si la philosophie est
venue enfin à bout de résoudre d'une manière formelle,
positive, palpable, pour ainsi dire, la grande question de
la nature de Tftme? Voici ce que répond un spirite : —
« On se fait généralement des Esprits une Idée complé-
leniunt fausse ; ce ne sont pas, comme beaucoup se les
figurent, des êtres abstraits, vagues et indéfinis, ni quAl«
que chose comme une lueur ou une étincelle; ce sont,
au contraire, des êtres très-réels^ ayant leur individualité
et une forme déterminée. On peut s'en faire une idée
approximative par l'explication suivante : — Il y a en
l'homme trois choses essentielles : i^ VAm& ou Esprit ,
principe intelligent en qui résident la pensée, la volonté,
et le sens moral; 2* le Corps, envâoppe matérielle,
lourde et grossière, qui met l'Esprit en rapport avec le
monde extérieur; S"» le Périsprit, enveloppe fluidique,
légère, servant de lien et d'intermédiaire entre l'Esprit
et le corps. Lorsque l'enveloppe extérieure est usée et ne
peut plus fonctionner, elle tombe, et l'Esprit s'en dé-
pouille conmie le fruit se dépouille de sa coque;... c'est
ce qu'on appelle la Mort, L'Esprit ne meurt pas; il ne
quitte que le corps matériel : il conserve le Pénsprit, qui
constitue pour lui une sorte de corps éthéré, vaporeux,
impondénible pour nous, et de forme humaine, qui pa*
raît être la forme type... C'est à l'aide du Périsprit que
l'Esprit agit sur la matière inerte. »
Voilà sans doute le lecteur bien instruit des forces de
l'Esprit, et de l'idée « approximative » de sa forme. Quant
à nous, cette forme « qui paraît être la forme humaine, »
nous ne la voyons qu'à travers une perspective aérienne
si éloignée, si éthérisée, c[ue nous ne distinguons rien.
Cependant, par impartialité, hàtons-nous de dire (tou-
jours au rapport du spirite qui nous sert de guide) que :
« les Esprits peuvent encore se manifester par la vue et
par l'audition. Certaines personnes, dites médiums au^
ditifs, ont la faculté de les entendre, et peuvent ainsi
converser avec eux; d'autres les voient; ce sont les
médiums voyants. Les Esprits qui se manifestent à la
vue se présentent généralement sous une forme analogue
à celle qu'ils avaient de leur vivant, mais vaporeuse;
d'autres fois, cette forme a toutes les apparences d'un
être vivant, au point de faire complètement illusion, et
qu'on les a quelquefois pris pour des personnes en chair
et en os, avec lesquelles on a pu causer et échanger des
poignées de main , sans se douter qu'on avait affaire à
des Esprits, autrement que par leur disparition subite. »
A la rigueur, rien ne prouverait mieux un Esprit que
cette disparition subite, car eux seuls peuvent être doués
d'une telle prestesse. Mais le fait dt leur présence, in-
contestable pour ceux qui en ont joui , n'est pas pai*ti-
culier aux médiums; bien d'autres personnes ont eu la
môme faveur, en tout temps, et l'ont encore, sans l'in-
voquer, il est vrai, mais à la condition d'être plongées
dan» le sommeil. L'apparition ne s'évanouit qu'à leur ré-
veil, et en cela ces voyants ne sont pas des médiums.
Un autre point de supériorité des privilégiés du spiri-
tisme, point attesté par des faits connus, c'est de pouvoir
servir de secrétaires aux Esprits, et de se transformer mo-
mentanément, et à leur propre insu, en savants ou en ar-
tistes, sans être ni l'un ni Tautre, « L'écriture, dit encore
un spirite, offre aux Esprits le moyen 'le plus complet ,
le plus rapide, et le plus commode d'exprimer leurs pen-
sées; aussi est-ce celui qu'ils préfèrent. Par la même
raison qu'ils peuvent faire former des caractères, ils peo-
vent guider la main pour faire tracer des dessins, écrire
de la musique, exécuter un morceau sur un instrument;
en un mot, à défaut de leur propre corps qu'ils n'ont
plus, ils se servent de celui du médium pour se manifester
aux honames d'une manière sensible. »
Nous lyouterons que , sauf les phénomènes dont vient
de parler un adepte de la science, le Spiritisme n'est
autre chose que la métempsycose ou transmigration des
âmes allant animer d'autres corps dans d'autres pla-
nètes, mondes supérieurs ou inférieurs, où elles vivent
heureuses ou malheureuses, suivant le degré de mérite
ou de démérite de leur conduite dans le monde dont elles
sortent. Elles passent ainsi indéfiniment, disent les spi-
rites, d'incarnation en incarnation, jusqu'à ce qu'elles
aient, par l'exercice de leur vertu propre, acquis la per^
fection morale. Alors elles deviennent de purs Esprits,
admis à jouir de la vue complète de Dieu et d'un bon-
heur sans mélange, durant l'éternité. Pendant les inter-
valles de ses existences corporelles, l'Esprit est errant ;
mais' rerratidté n'ayant pas de durée déterminée, dans
cet état il ressent un bonheur ou éprouve un malheur
proportionnés au bon ou mauvais emploi de sa dernière
existence. — Gomment sait-on tout cela, direz-vous?
Belle question ! Par ceux qui ont été y voir, par les Es-
prits eux-mêmes, gens les plus sociables du monde, se
communiquant avec plaisir, et décrivant volontiers leurs
impressions de joies ou de peines, dit encore notre spi-
rite, dans l'Empyrée où ils se promènent , en disponib**
SPÎ
1664
sr!
lité pour un des milliers de mondes de Tunivers. Quand
ils entrent dans une nouvelle incarnation , ils n*ont plus
eonscience de la précédente; ils n*en gardent que les
penchants, bons ou mauvais, qui sont les instincts ou les
aptitudes de leur nouveau jeune âge, et qu^ils doivent dé-
relopper ou combattre pour faire un nouveau pas vers la
perfection.
Le Spiritisme a passé promptement d'Amérique en Eu-
rope, et aujourd'hui , dit-on , il est très-répandu dans
notre vieux monde. L'esprit humain aime tant le mer-
veilleux, que cela n'a nen d'invraisemblable. Il serait
puéril de nier qu'il y a du surnaturel dans certaines pra-
tiques du Spiritisme; mais la prétention de l'élever au
rang de doctrine philosopliique et religieuse ne nous pa-
rait guère admissible de nos jours. Les raisonnements,
les déductions sur lesquels ils s'appuient, nous ont invo-
lontairement rappelé ces jolis vers de G. Delavigne, dans
ion Êpttre à V Académie fntnçaise :
L'homme a dit : « Je sais tout , et J'ai toat défini ;
J'ai poar loi la raison , pour borne l'infini ;
L'étude me rarlt k des hauteurs sublimes;
De ce globe étonné J'ai sondé les abîmes;...
Est-il quelques secrets cachés au fond des cieux
Que n'ait point pénétrés mon regard curieux? »
Moias fier de sa raison il eût mieux dit peut-être :
« J'ai su tout expliquer, ne pouvant tout connaître, x
Il ne sera pas sans utilité de donner ici une courte
exposition do la doctrine de la métempsycose chez les
Grecs, qui la déduisaient ainsi : « Nous avons deux &mes,
l'une sensitive, grossière, corruptible, périssable, com-
fiosée des quatre éléments ; l'autre intelligente, indisso-
uble, émanée de la divinité même. Je ne parlerai que de
cette dernière; elle établit les rapports les plus intimes
entre nous, les Dieux, les Génies, les animaux, les plantes,
tous les êtres dont les &mes ont une commune origine
avec la nôtre. Ainsi la nature animée et vivante ne forme
Su'une seule et même famille, dont Dieu est le chef,
'est sur cette affinité qu'est fondé le dogme de la mé-
tempsycose, que nous avons emprunté des Égyptiens,
que quelques-uns admettent avec différentes modifica-
tions, et auquel Empédocle s'est cru permis de mêler
les fictions qui parent la poésie. — Cette opinion suppose
la chute, la punition et le rétablissement des âmes. Leur
nombre est '^limité; leur destinée, de vivre heureuses
dans quelqu'une des planètes. Si elles se rendent cou-
pables, elles sont proscrites, et exilées sur la terre. Alors,
condamnées à s'envelopper d'une matière grossière, elles
passent continuellement d'un corps dans un autre, épui-
sant les calamités attachées à toutes les conditions de la
vie, ne pouvant supporter leur nouvel état , assez infor-
tunées pour oublier leur dignité primitive. Dès que la
mort brise les liens qui les enchaînent à la matière, un
des Génies célestes s'empare d'elles; il conduit aux En-
fers et livre pour un temps aux Furies celles qui se sont
souillées par des crimes atroces ; il transporte dans les
astres celles oui ont marché dans la voie de la iustlce.
Mais souvent les décrets immuables des Dieux soumettent
les unes et les autres à de plus rudes épreuves : leur exil et
leurs courses durent des milliers d'années ; il finit lors-
que, par une conduite plus régulière, elles ont mérité
de se rejoindre à leur auteur, et de partager en quelque
façon avec lui les honneurs de la divinité. — Empédocle
disait : « J'ai paru successivement sous la forme d'un
«jeune homme, d'une jeune fille, d'une plante, d'un
« oiseau, d'un poisson. Dans une de ces transmigrations,
•j'errai pendant quelque temps, comme un fantôme lé-
« ger, dans le vague des cieux; mais bientôt je fus pré-
« cipité dans la mer, rejeté sur la terre, lancé dans le so*
« leil, jelancé dans les tourbillons des airs. » ( Voyage
d'AiMtcharsig, ch. 64.)
Le Spiritisme, on le voit, ressemble à une opinion
renouvelée des Grecs, avec cette différence, cependant,
que les Spirites n'admettent pas la transmigration des
âmes humaines dans des corps d'animaux, ou dans des
plantes; les Grecs l'avaient renouvelée des Égyptiens;
ce peuple ou plutôt ses prêtres l'avaient probablement
reçue des Indes, où elle règne encore chez les HiiH
dous et surtout les Banians, qui s'abstiennent de chair,
respectent, et souvent donnent de la nourriture à toute
espèce d'animaux ou d'insectes. Les Siamois, les Japo«
nais, les noirs de la Guinée pratiquent la même croyance.
Un point tù les Anciens et les Modernes demeurent
inférieurs aux spirites d'aujourd'hui , ce sont les tables
tournantes, parlantes, frappantes, etc.; encore faut-il
mettre là «xuelque réserve, car les castes religieuses
pourraient bien avoir connu et pratiqué ces phénO'^
mènes. Quant aux conversations avec les morts, à leur
apparition, les Anciens avaient leurs évocations, et ils
ont dû jouir de toutes ces laveurs spirituelles réservées
à nos plus sensitifis médiums. Cette fonction était rem-
plie chez eux par des personnes de la caste feligîeuse :
devins, pythies, pythonisses, etc. Certains Esprits eurent
un avantage sur les nôtres, ce fut de se rappeler leurs
existences antérieures , comme Empédocle , que nous
avons cité, comme Pythagore, qui affirmait avoir été Eu-
phorbe au siège de Troie ; ils l'affirmuent; disalent^iU
vrai? La métempsycose, la divination, les évocations,
voilà les compléments du Spiritisme.' En prenant l'en-
semble de ces systèmes tant anciens que modernes pour
des doctrines, l'une n'est pas plus explicable que l'autre
dans le petit nombre de ses effets physiques réels, et
l'une vaut l'autre au point de vue de l'utilité morale^ bien
que la dernière se dise le spiritisme chrétien, ce qui-ne
sera vrai qu'aprte que l'on aura prouvé que le christia-
nisme et le dâsme sont la même chose.
V. Allan Kardec, Philosophie spirUwUiste, le Livre des
Esprits, 5« édit, Paris, 1861, gr. in-18; le Livre des Mé-
diums, Paris, 1862, gr. in-18; le SpirUisme réduit à sa
plus simple expression, Paris, 18C3, br. in-13; le docteor
Castle, la Phrénologie spiritualiste , Paris, 1862, gr.
in-18; de La Villemarqué, VEnchanteur Merlin, Paris,
1862, gr. ixiAS; Apollonius de Tyane, sa vie, ses voyages
et ses prodiges, par Philostrate, traduit du grec par Chas-
sang, Paris, 1862, gr. in-18, etc. ; Bibliographie catho-
lique, année 1861. C. D— T.
SPIRITUALISME (du latin spiHtus, esprit). Le Spiri-
tualisme est une doctrine philosophique qui a été diver-
sement interprétée. On a nommé ainsi le système de
ceux qui nient absolument la réalité de la matière, comme
Berkeley, et qui ne croient cru'à celle de l'esprit. Ce n'est
là qu'une des formes de V Idéalisme (V. ce mot). Pour le
distinguer de tout ce qui n'est pas lui, il faut voir dans
le Spiritualisme la doctrine de ceux ((ui croient égale-
ment au témoignage des sens et à celui de la conscience,
à l'existence de la matière et à celle de l'esprit, du corps
et de Fàme, du monde et de Dieu. Le véritable Spiritua-
lisme repose sur cette vérité, que nous ne pouvons con-
naître de la même manière ce qui est en nous et ce qui
est hors de nous. L'intelligence sent ce qui se passe au
dedans, elle voit ce qui se passe au dehors, elle conçoit
par la raison ce qui dépasse les limites des sens et de la
conscience. Croire aux sens et ne pas croire à la con-
science, c'est en même temps croire et ne pas croire i
l'intelligence. Ainsi compris, le Spiritualisme, faisant
droit à tous nos moyens et ne niant aucune réalité, est
en quelque sorte la doctrine commune du genre humain;
la majeure partie des hommes sont spiritualistes, les
les uns sans se l'expliquer, les autres par réflexion et
après un examen sérieux du matérialisme (F. ce mot, et
l'article Ame). Dans l'histoire de la philosophie, les ma-
térialistes sont rares; le Spiritualisme, au contraire,
outre qu'il est implicitement compris dans les religion»
qui, avec l'immortalité de l'&me, admettent la sanction
de la loi morale dans une autre vie, est la doctrine des
écoles les plus recommandables de l'Antiquité, comme
celles de Pythagore, de Socrate, de Platon, d'Alexandrie;
Aristote, en lui refusant la personnalité après la mort,
distinguait cependant l'àme du corps. Chez les Modernes,
Descartes l'a établie en distinguant d'une manière biea
tranchée l'esprit de la matière; s'il n'a pas bien démontré
l'existence de cette dernière, il ne l'a pas niée ; Bossuet,
Fénelon, Locke lui-même, l'ont également soutenue. CeA
la doctrine de l'École française actuelle, qui se rattache
à Descartes et à Platon. R.
SPIRITUALITÉ. En parlant de l'àmo, ce mot indiqae
la nature du principe pensant, différente de celle du
corps, et que le Spiritualisme a pour but de faire con-
naître et de démontrer. Spiritualité est synonyme d*tm-
matériàlité, et, par conséquent, opposé à matérialité;
ainsi, dire que l'àme est spirituelle, c'est dire qu'elle est
incorporelle. Dans' la pratique religieuse, et surtout dans
la vie dévote, la spiritualité s'entend des pensées, des
actions et de la conduite de l'àme ; tels sont les Entre-
tiens spirituels de S^ François de Sales. La spiritualité
est quelquefois voisine du mysticisme, comme dans quel-
ques écrits de Fénelon ; elle peut même devenir linspi-
ration directe du mysticisme, comme dans S^ Thérèse
ou Jean de La Croix. C'est alors qu'elle indique le r&le
exclusif de l'esprit, au mépris et souvent an détriment
des droits du corps. Cest de cette idée de spiritualiie
qu'on distingue dans l'interprétation des Écriturea nintaa
SQU
166S
STA
le Aens spirituel ou mystique du sens ttttéraU De là
Tient encore Texpression de spirituel en parlant de ce
qai concerne TÉglise, et la distinction du pouvoir spiri-
iwl et du pouvoir temporel, V, Pouvoir. R.
SPOUAIRE. V. notre Dictionn. de Biogr, et d* Histoire.
3POLIATORI13M. V. BAms.
SPONDAIQOE (Vers), nom donné dans la Versification
grecque et latine au vers héroïque dépourvu de dactyle
aa 5" piedw Le vers totalement spondaique est fort rare :
on en trouve une douzaine d'exemples environ dans
YHiade et YOdyssée. A partir de Virgile, la poésie latine
n'en offre plus d'exemple. Moins rares, surtout en grec,
sont les vers n'offrant i, 2 ou 3 dactjrles que dans le
1" hémistiche ; Virgile en a encore quelques exemples.
La manière la plus ordinaire de construire un vers spon-
daique est de mettre un dactyle au moins au 4* pied. Le
vers spondaique avait une allure plus élégante et plus
naturelle en grec qu'en latin : aussi les poètes latins ne
Temploient-ils que dans les cas où la pensée demande
une expression grave; chez les Grecs, il suffisait qu'il
fût harmonieux et coulant, et leurs poètes ne paraissent
pas l'avoir recherché en vue d'un effet littéraire. P.
SPONDÉASMB, accident de la musique des anciens
Grecs, qui élevait le son de trois quarts de ton.
SPONDÉE, en termes de Versification grecque et la-
tine, pied composé de deux syllabes longues, comme
tcmplûm. Le nom vient du grec spondè (libation), parce
que ce pied était en usage dans les chants qui accompa-
gnaient les libations.
SPONTANÉITÉ* On nomme ainsi (du latin sponte sud,
de son propre mouvement) le second moment ou la se-
conde forme de l'activité. Celle-d est d'abord fatale,
dans l'organisme, elle produit les contractions du cœur,
les pulsations des artères; dans l'ordre psychologique,
la pensée; faits sur lesquels la volonté n'a aucun em-
pire. L'activité devient ensuite spontanée; c'est la volonté
irréfléchie, produisant certains faits, mais pouvant les
changer ou les arrêter, comme certains mouvements
musculaires, certaines pensées. L'homme se porte d'a-
bord à l'action sans avoir délibéré ni réfléchi, mais sans
obéir, dans tous les cas, à une loi fatale de l'instinct. II
y a des actes spontanés qui excitent l'admiration, comme
le cri : il mot, Auvergne ! de d'Assas. Dans ce cas, c*est
la noblesse de la nature humaine qui se révèle, et l'on
Ju^re de la valeur morale d'un homme selon qu'il est plus
"«lontanéraent porté au bien ou au mal. On distingue
parfaitement un acte fatal d'un acte spontané; celui-ci
tient déjà de la liberté ; il ne résulte pas de la volonté ,
mais il est d'un caractère supérieur à l'instinct, et il
peut résulter de l'habitude. R.
SPORT, mot anglais qui se dit de tout Jeu ou divertis-
sement en plein air, comme la chasse, la pêche, les com-
bats de coqs, et les courses de chevaux. Le sporlsman
(iiomme du sport) est l'amateur de ces sortes de plaisirs.
SPORTULE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
SPRUCH-SPRECHERS, c.-à-d. diseurs de bons mots,
improvisateurs allemands du xv* siècle, qui s'en allaient
dans les ch&teaux et les villes rimer et faire des bouffon-
neries pour quelque mince salaire. Parmi eux on citait
Guillaume V^eber, natif de Nuremberg.
SQUARE, mot anglais qui signifie carré, et qu'on
emploie pour désigner une place publique dont le centre
est occupé par un Jardin clos de grilles. A Londres et
dans quelques autres grandes villes de l'Angleterre, les
squares appartiennent aux propriétaires des maisons ri-
veraines, qui seuls en jouissent. Le chancelier Bacon,
dans les premières années du xvn* siècle, étant ministre,
se fit autoriser à convenir en promenade les champs de
Uncoln's Inn, et créa ainsi, à Londres, le premier square.
— Depuis le règne de Napoléon III, les squares ont été,
pour ainsi dire, importés à Paris, maie pour être rendus
tout à fait publics, et fournir au peuple et à la petite
bourgeoisie, dans leur quartier et sans dérangement, de
vertes et fraîches promenades avec des bancs de repos et
des chaises en fer et à claire-voie. Le premier fquare
planté à Paris fut celui de la place Vintimille : il date
de 1844, et, à la mode anglaise, resta propriété particu-
lière Jusqu'en 1862, que la ville en prit possessicn ; sa
forme est ovale, et il a 822 met. de superficie. Les autres
squares parisiens sont, par ordre de création, ceux : —
de la Tour Saint' Jacques . ouvert en 1856, superficie,
5,897 met.; —"de Sainte-Clotilde , ouvert en 1856, su*
pcrf., 1,797 met.; — du Temple, ouvert en 1857, su-
perf ^ 7,692 met.; — de Louvois, ouvert en 1858, 8u«
perf, 1,827 met.; — du ?^ouveau Louvre, divisé eu deus
parties, ouvert eu 1859, superf., ensemble, 5,000 met. ; *•'
des Innocents, ouvert en 1860, superf., 2,000 met.; —
des Arts-et-Métiers, ouvert en 1861, superf., 4,145 met.;
— de BellevUle, ouvert en 1862, superf., 8,645 met. —
Chaque square est encadré dans un petit soubassement
de pierre, portant soit un Joli treillage de feo haut de
l'",iO ou l'",20; soit une grille de fer, haute de 1"*,60 à
2 met.; soit enfin une balustrade de pierre, haute de
l'",10 : telle est, par exemple, celle du square des Arts-
et-Métiers. Quelques-uns, ceux de la Tour S^- Jacques,
des Innocents, de Louvois, ont à leur centre d'élégants
monuments : le l*^ une belle tour gothique du xvi* siècle;
le second, une charmante fontaine de Jean Goujon ; le 3*,
une belle fontaine dans le style Renaissance, œuvre de
Visconti; celui des Arts-et-Métiers est orné de 2 bassins
de pierre, oblongs, avec une vasque et un jet d'eau entre
deux statues de bronze assises de chaque côté; celui du
Temple a un petit lac où tombe, d'un rocher, une abon-
dante nappe d'eau.
Ces charmants jardins s'augmentent chaque jour, grâce
aux soins constants de l'Administration municipale pour
l'embellissement de Paris et le bien-être des habitants
de toutes classes : il y a encore en ce moment (no-
vembre 1862) quatre squares en cours d'exécution, qui
sont ceux : — de Montrouge, superf., 7,000 met ; — aes
Batignolles, superf., 19,826 met. ; — de ia Réunion (Cha-
ronne), superf., 1,808 met; de Malesherbes , superf.,
9,000 met — On doit, en outre, transformer celui de
VArchevéché, en créer un très-beau à l'un des carrefours
de la rue La Fayette prolongée, de sorte que, dans un
temps prochain, Paris aura 16 de ces élégants et com-
modes jardins de quartier, car il faut compter parmi les
sauares le jardin de la Place Royale (V, Rotale —
Place, dans notre Dictionnaire de Biographie et d'His"
toire) ; cette plantation ayant tout à fait, par sa position
et sa forme quadrangulaire, le caractère de ce que les
Anglais ont appelé square, il est probable qu'elle en aura
donné l'idée, car elle fut terminée en 1612, sept ans
avant l'entrée au ministère de l'illustre chancelier au-
quel Londres doit son 1*' square. — Les squares sont
créés et entretenus par V Administration des Promenades
et Plantations de Paris, sous la direction de M. Alphan,
ingénieur en chef. On les ouvre au public dès 6 heures
du matin, et on les ferme quelque temps après la chute
du jour. C. D— Y.
SQUATTERS. V. Pionnikbs.
STABAT BiATER, prose qu'on chante pendant la se-
maine sainte, et qui rappelle les souffrances de la Vierge
pendant le crucifiement de Jésus. On en a attribué la
composition au pape Jean XXII, ou à l'un des Grégoire,
ou à Innocent III; mais, selon l'opinion la plus pro-
bable, l'auteur est Jacoponus ou Jacques de Benedictis .
jurisconsulte, puis fhmciscain du xiii* siècle. Le Stabat
mater a été mis en musique par Palestrina, Astorga ,
Pergolèse, Boccherini, Haydn, Winter, Neukomm, Ros-
sini , etc. B.
STACCATO, c-à-d. en italien détaché; mot usité en
Musique pour indiquer un mode d'exécution dans lequel
les sons doivent être vivement détachés et sans aucune
liaison entre eux.
STADE. V, ce mot dans notre Dicttonnatrê de Biogra-
phie et d'Histoire,
STAGE (du bas latin stagium^ demeure), temps d'é-
preuve dont on doit justifier pour être reconnu apte à
exercer certaines professions. Le mot s'entend de la ré-
sidence que le licencié en Droit est tenu de faire, lors-
qu'il a prêté son serment, auprès d'une Cour ou d'un
tribunal, afin de suivre les audiences : la durée de ce
stage est fixée à 3 ans consécutifs, sans pouvoir être in-
terrompue plus de 3 mois; mais les Conseils de discipline
ont le droit de la prolonger en certaines circonstances.
La preuve du stage se fait par un certificat du Conseil de
discipline, ou du procureur impérial, ou du président du
tribunal. Les avocats stagiaires ne sont admis à plaider
ou à écrire dans une cause que sur un certificat d'assi-
duité aux audiences pendant 2 ans, ou lorsqu'ils ont
22 ans accomplis. On ne peut être inscrit qu'après le
stage sur le tableau des avocats (Décret du 14 déc. 1810;
Ordonnance du 20 nov. 1822). — Pour être huissier, il
faut, aux termes du décret au 14 juin 1813, avoir tra-
vaillé au moins pendant deux ans, soit dans l'étude d'un
notaire ou d'un avoué, soit chez un huissier, ou pendant
trois ans au greffe d'une Cour impériale ou d'un Tribunal
do l** instance. — Le stage exigé pour les notaires varie
de 4 à 5 ans, selon qu'ils sont établis près .4*uno Cour
impériale, ou d'un Tribunal de 1^* instwice, ou d'un Tri-
lOB
STA
1666
STA
bun&l de oaix. Le ^avernement accorde dies dispenses
aax ihdividas qui ont exercé des fonctions adtoinistiA-
tifm ou Indiciaires (Lbl da 24 ventôse an xi). — Il y A
aussi nn sta^ce pour tes avoués ( V. àvobÉ). — Pour former
Ht) établissement dHnstnictSon secondaire, il faut un cer-
tificat de stage, délivré pAr llo Conseil départemental d*in-
Atmctiôn puJblique, et constatant que le postulant a rem-
pli, piendant 5 ans au moins, les fonctions de professeur
on de surveillant dans nn établissement de môme nature
(Loi du 15 mars 1850). — Autrefois , dans certaines
églises. On appelût Stage la résidence que devait faire
j ttki chanoine, pendant 6 mois ou an an, après la prise
j de possession, pour jouir des honneurs et revenus de son
^ canonicat.
STALLE fdu bas latin itàllus, dérivé de stare)^ nom
tfottné aux uéges en bois qui sont placés dans le chœûr
des égtisei, et qui se haussent et se baissent à volonté.
On s'est aussi servi du nom de Forme. Quand la stalle
est baissée , elle offre un siège assez bas ; levée , elle
présente un appui attaché sons te siège. Cet appui , en
forme de console on de cul-de-lampe, permet de s'asseoir :
où rappelait autrefois pcUienee ou miséricorde, parce que
l'uèa^ était de chanter debout, et qu'on permettait seu-
lement par tolérance au clergé de s'y appuyer. Les sculp-
teurs du moyen ftge ont souvent orné les miséricordes de
sujets grotesques et même indécents : ils aimaient à jr re-
présenter Tes vices qui rampent dans les régions infù-
rieurs^ et amènent la chute de l'homme ; mais ils abusè-
rent dey;etteidée symbolique pour se Jeter dans des écarts
bl&ihables. On nomme Accotoir ou Accoudoir, et, dans de
vieuic documents, Indulgence et Croche, la séparation des
stalles, (Jul permet auk personnes assises de s'accouder
lors(l{ue les miséricordes sont relevées : il est élargi à son
extrémité en forme de spatule, et fréquemment supporté
Sar des animaux, des tètes, des figures ou des colon-
ettes. C'est à tort qu'on a dit que les accoudoirs étaient
ai^ssi appelés Museaux, parce qu'ils étaient ornés d'une
tète d'animal : le museau de la stalle est l'extrémité die
ta pièce de bois dans laquelle s'engage la partie supé-
rfcnre die la parclose {spcrnda)^ et par ce mot l'on entend
Te côté de la stalle auquel on a donné une échancrure et
nne cohrbe élégante. Dans les cathédrales et les grandes
églises, il y a deux rangs de stalles : lé dossier de celles
du premier rang est très-bas ; c'est le contraire pour le
dossier de celles du second rang, orné tantôt d'àrihoi-
ries, tantôt de bas-reliefs représentant des scènes em-
pruntées h la Bible ou à la Vie des Saints, et quelqui^ois
surmonté d'Un dais ou baldaquin, La construction des
stalles de chœur ne parait pas remonter plus haut que le
ti* siècle : auparavant, les ecclésiastiques se servaient
d'âne espèce de béquille appelée tau, dissimulée sous
les plis de leur robe, afin de se soutenir dans leurs lon-
gues prières. O'n voit de belles stalles aux cathédrales
d'Albi, d'Amiens, d'Auch, de Bayeuk, de Rodez, de S*-
Cfaude, de l^)itiers, de RoueA, à l'église abbatiale de
S^-Denis, à S^-Bcrtrand de Comminges, à Notre-Dame
de BrOu, aux églises de Pontigny, d'Orbais (Marne), de
Cham peaux (Seine-et-Marne), de S*-AnatOîle à Salins, de
RoTesmos, de Pecquigny (Somme), de hue (Ibid.), de S*-
Martin-au-Bois (Oise), de Mortain, de la Chaise-Dieu, etc.
n y en a aasM de très-remarquables aux cathédrales
d'ulm, de Tolède, de Westminster, de Genève, de Lau-
sanne, dé Montréal (Sicile), etc. B.
STABLES, nom donné, dans les saltes de spectacle, à
des sièges séparés et numérotés, M qui ont ordinaire-
ment là forme dé fauteuils. DaUs fe théâtre du Châtelet
et le théâtre Lifrique, construits eu 1862, pour la ville de
Paris, par M. l'architecte Davioud, On a placé des stalles
en fantcuilÀ dont Te sfége se redresse, à la manière des
fitallés d'église, maïs se redresse seul, par un mouvement
mécanique agissant dès qu'on se lève.
SVANCti: (de IMtalîcn stanisa, arrêt, repos), période de
S'crs formant un sens complet, et présentant un nombre
déterïhiné de vers dont le m'ètre et les rimeà sont assu-
Jottis à urie fègle qui s'observie dans toute la pièce, tjnc
sthuce dompôsée de 3 vers (c'est la plus courte ) s'appelle
fcrce^'de 4, quatrain; de o, qtvihtn: de 6, sixain; de 7,
^eptain; de 8, hititain 'ou octat)e; de 9, nevCvain; de 10,
dizaîfi; de il, omam; de i^^ dousain. Les stances qni
n'eim^Tofent qà'un mètre unique sont isomètres, par
Werti^yie, celles des odes vu et x du 2* livre de J.-B. Rous-
-Rcau. Quelles que sôîent là "natore et l'étendue de la stance,
WTc doit, àotànt que possible, ehîibrasîïer une pensée
ùnïqiïe'; si elle comient plusieurs '^na finis, ces dïVers
sens doîvei^t toujours dànft leur en*jei^ble présenter un
cadi 0 résMHcr : rarement Tè sens est sospendo ponr con-
tinuer dans la stance suivante t cela est permis sortoui
lorsque celle-ci commence un discours, comme dans
l'ode VI du 2* livre de V. Hugo. Les stances se terminent
presque toujours par une rime masculine, et commen-
cent par une rime féminine. Les rimes sont croisées r
deux rimes plates peuvent s'y entremêler, mais avet
discrétion , et seulement lorsque l'effet rhythmique de-
vient ainsi plus sensible. Le chœur du 2" acte d^Esther
en offre quelques beaux exemples. P.
STANCES , pièce de poésie composée d'un certain
nombre de stances. Telles sont les pièces qui composent
le livre second des poésies de Malherbie. Au temps de
Corneille, il était de mode de partager en stances en
monologue dans les tragédies. On connaît, dans (s Cid
(fin du !•' acte), celles de D. Rodrigue , et celles de l'In-
fante (V, n] ; celles de Polyeocte (IV, u), imitées par Ro-
trou dans le Martyre de ^ Genêt, etc. P.
STANGUëTT£S , en termes de Musique, barres de di-
vision dans les partitions, d'une partie à l'autre*
STAROSTIE )
STATËRE r V. ces mots dans notre DictiQnnaxit
STATHOUDER. \ ^ Biographie et d^Histoire,
8TATILÉG1Ë. V. LEcnmB.
STATION, en termes de Utargie^ tout lieu, églisn^
chapelle, autel, reposoir, etc., où l'on s'arrête dans Ic^
processions ou les pèlerinages pour faire certaines prières.
Le mot se dit aussi du temps pendant lequel on s^arrûtn.
Dans te Chemin de ta Croix {V» ce mot)^ il y a 14
Stations.
STATION, en termes de Marine^ séfOur que font pendant
un certain temps les b&timents de guerre en ffBL.y& étran-
ger, ou dans les colonies, pour faire respecter le pavillon
national, protéger et favoriser le cominerce. Le temps de
ces stations est de S ou 3 ans.
8TATI0NNAIRE, en termes de Marine, petit bâti-
ment de guerre mouillé à l'entrée d'une rade ou d'un
port, afin d'exercer une sorte de police sur les navires
qui entrent et qui sortent.
STATISTIQUE, mot inventé par Achenwall en 174^^,
et qui signifie proprement Science de l'État ( en latin
status). Cest la science des faits naturels, sociaux et po-
litiques, exprimée pat des termes numériques. Elle ne
doit rien laisser ignorer de ce qui concerne les États,
territoire, population, forces de terre et de mer, finances,
agriculture, industrie, commerce, etc. Elle dresse ria-
ventaire des sociétés à un moment donné, et donne
l'état de l'humanité à telle ou telle époque. L'étude de b
Statistioue est indispensable à tout administrateur, ï
tout législateur; car, sans les connaissances qu'elle seule
peut donner, on s'expose à commettre les erreurs les
plus regrettables et les plus dangereuses, par exemple
s'il s'a^t d'asseoir un impôt ou de lever des soldats.
Elle est nécessaire i tout historien qui veut apprécier
sainement les progrès d'un pays, ou juger en connais-
sance de cause des raisons de sa décadence. Elle n*est
pas moins utile aux économistes, aux financiers, aux
commerçants, aux industriels, aux agriculteurs, aux mo-
ralfsteà, etc. A l'aide des éléments qu'elle fournit, oii
peut apprécier l'état des institutions, et, par suite, pro^
poser Ou prendre les mesunes nécessaires.
Si le nom de Statistique est nouveau, la chose ne IVsà
pas, et quelques-uhs des éléments que cette science em-
brasse ont figuré à toutes left époques dans les traités de
Politique et d'Économie sociale. La Statistique exista pu
pratique^ elle intervint dans les aflhîres gouvernemen-
tales, bien avant que la théorie en ^ût reconnu l'étendue
comme science. Car lé^ hommes ont toujours troaré
utile de se compter, de compter leurs ennemis, de nom-
brer leurs troupeaux et de supputer leurs richesses. La
Bible nous offre l'eXempîe de plusieurs dénombrements;
et, sous l'Emphre romain, Ànguste avait, au dire de Ta-
cite, écrit de sa piropre main nn état des richesses de
l'Empire, du nombre des citoyens et des alliés portant
les armes, des flottes , des tributs et autres parties du
revenu public, des dépenses ordinaires et des gratifica-
tions au penpTe. Au moyen ft^, la Statistique partages
te sort de toutes iei sciences : on l'oublia, on la mé-
conhnt ; les plus grosses erreurs se répandirent et ftarent
acceptées. Ainsi, la Chronique de S'-Denîs raconte qn*cn
1404 Charles VT songea à rétablir tes finances en frap-
pant d'uh impôt de zO écus par an les villes, bourgs et
villages de la ÏVance, et 11 les évalue à l,7W,000î Ce
qu'il y a de curieux et de déplorable en mente temps,
c'est que de pjùteîlles appréciations se perpétuaient : cift
15^3, les auteurs de lÀ Sottirç Mànippée parlent à I^^
tour de 1,700,000 clodicrs. A combien de ttOron>rW%
STA
1667
STA
A^étâlt-on pas exposé dans une telle ignorance? Les fiûts
de ce genre ne sont point particuliers à la France : en
1340, Edouard lîl, roi d'Angleterre, voulant lever un im-
pôt de 50,000 liv. sterling, calcula sur 45,000 communes,
et Ton n*en trouva que 0,000; en 1527, dans un Mémoli-e
présenté à Henri VIII, on affirmait qu'il y avait en An-
gleterre 52,000 paroisses, et, quelque temps après, Camb-
dcQ constata qu'il n*y en avait pas tout à f^it 10,000 ;
en 1775 même, la Chambre des Communes, taxant
chaque paroisse pour un impôt, supposa qu'il y en avait
45,000.
Des travaux un peu sérieux de Statistique n'ont com-
mencé à être publiés que depuis le xviii" siècle : on doit
mentionner ceux de Vauban, de Messance, de Monthyon,
de Necker, etc. Toutefois, les données publiées par ces
savants avaient été obtenues au moyen de la méthode
d'induction. Ainsi, on comptait dans une province com-
bien il naissait d'enfants par an sur une étendue d'une
ou deux lieues carrées, et l'on multipliait le chiffre obtenu
par le nombre de lieues carrées dont se composait le ter-
ritoire : or, il y avait là beaucoup de sources d'erreurs ,
la population n*étant pas également dense em tous lieux,
ni la fécondité des mariages la même partout. Lavoisicr,
voulant établir le chiffre de la production, comptait 1c
nombre des charrues. Arthur Young, après avoir étudié
l'état physique et agricole d'un certain district de la
France, puis évalué ses produits , découpait une carte
divisée en provinces, prenait en guise de poids la par-
celle contenant le district qu'il connaissait, pesait chaque
morceau aui représentait une province, et multipliait les
produits du district par le nombre de parcelles de papier
auc pesait la province. La nécessité des travaux de Sta-
tistique a été bien sentie surtout depuis la Révolution.
Sous le Consulat, un bureau de Statistique fut créé au
Ministère de l'Intérieur; au temos de 1 Empire, cette
institution s'étendit aux autres départements ministé-
riels. Mais les documents recueillis à cette époque furent
méconnus et rejetés, après la chute de Napoléon I**", par
la haine des partis; le gouvernement de la Restauration
se borna à faire dresser quelques tableaux ou états, qui
sont plutôt des pièces administratives que des données
dont la Statistique puisse tirer profit. Enfin, des sociétés
se sont formée dans les principaux pays de l'Europe
pour hâter les progrès de cette science; des hommes de
talent, MM. Charles Moreau, De Férussac, Ch. Dupin,
Moreau de Jonnès, etc., se sont mis à l'œuvre; une Sta-
tistiqtie générale de la France a été publiée de 1834 h
1852 par les soins du Ministère de l'Intérieur; un décret
du l*** janv. 1852 a créé dans chaque chef-lieu de canton
une commission de Statistique, dont les travaux doivent
^tre centralisés dans ce Ministère. Les statistiques par-
ticulières sont aujourd'hui assez précises dans un certain
nombre d'États de l'Europe; mais il n'en est plus de
même quand il s'agit des autres parties du monde, où
la Statistique est à peu près ignorée. V, Achenwall, In-
troduction à la science de la description des États, en
allem., Goettingue, 1748; Gatterer, Idéal d'une statistique
générale du monde, ibid., 1773; Arthur Young, Arithmé-
tique politiqîte, en anglais, Londres, 1774-1779, 2 vol.
in-8o; i. Mader, Théorie et méthode de la statistique,
en allem., Prague, 1793, in-8°; Gœss, De la statistique,
en allem., Anspach, 1804, in -8°; A.-L. de Schlœzer,
Introduction à la science de la statistique, traduit, de
l'allem. par Donnant, 1805, in-8*»; Niemann, Abrégé de
st^istique^ Altona, 1807 ; Krug, Idées sur la Statistique
dans ses rapports avec l'Économie politique, Berlin,
1807 ; Tamassia, Del fine délia statistica, Milan, 1808,
in-8°; Cagnazzi, Elementi deW arte statistica, Napics,
1808-1809, 2 vol. iti-8«; Ltider, Histoire cintique de la
statistique, en allom., Gœttinguc, 1817, in-8**; Graberg
de Hemsoe, Théorie de la statistique, Gênes, 18*21, in-8°;
Padovani, Dou2re livres de la science statistique, en ital.,
Pavie, 1824, in-S'»; Melchior Gioja, Filosofla délia sta-
tistica, Milan, 1826, 2 vol. in-4»; Mone, Théorie de la
statistique, trad. de l'allem. par Tandel, Louvain, 1834,
in -S* ; Dufati , Traité de Statistique , 1840 ; Moreau
de Jonnès, Eléments de Statistique, 1847; G.-F. Koîb,
Traité pi'otiqite de la Statistique comparée, en allem.,
Zurich, 1857. , B.
STATOR. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'FTistoire.
STATUAIRE , se dit du sculpteur qui fait des statues,
et de l'art de ff^ire des statues. La statuaire est la partie
h plus importante de la sculpture. Les Latins employaient
le mot itatuafi^ pour désigner l'artiste qui faisait dos
itatutis en bronze.
STATUE, ouvrage de sculpture qui représente la figure
humaine en plein relief et isolée. Les statues se divisent
en pédestres et équestres; quand la figure humaine n'est
représentée que jusqu'au tronc, c'est un buste ( V, ce
mot ). L'exécution d'une statue en marbre ou en pierre
comprend : 1° la plastique, ou composition du modèle en
matière molle; ^^ le dégrossissement du bloc, exécuté
par \q praticien; 3* l'œuvre de l'artiste, qui se fait avec
le ciseau. Pour les statues coulées en bronze, le ti*avuil
comprend la composition du modèle, la fabrication du
moule, et le coulage ; cette dernière opération est l'œuvre
du fbndeur. V. Curyséli^phantine, Polychromie.
STATULIBBË. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
STATU QUO, mots latins qru'on emploie, surtout dans
le langage de la Politique et de la Diplomatie, pour dire
qu'une chose reste dans le même état qu'auparavant (m
eodem statu quo ante).
STATUT (du latin statutum, ce qui est statué ou dé-
cidé), nom donné, dans l'ancien Droit, aux règlements
locaux qui avaient force do loi. On distinguait les Statuts
personnels, relatifs aux personnes, et les Statuts réeh,
relatifs aux choses. F. Mailher de Chassât, Traité des
Statuts, 1845, in-8°. — En Angleterre, on nomme Statuts
les lois Alites par les trois grands pouvoirs de l'État. Star
tuts se dit aussi des règles établies pour la conduite d'une
corporation, d'une compagnie, d'une communauté, etc.
STEAM, STEAMER et STEAJVI-BOAT (de l'anglais
steam, vapeur), dénominations employées pour désigner
les bateaux à vapeur.
STEEPLE-CHASE. V. CoonsES ne chevaux.
STÉGANOGRAPHIE (du grec stégatios, couvert, caché,
et graphéin, écrire), art d'écrire en chiffres. V. Crypto-
ORAPHR, Chiffres.
8TEIKKERQUE, nom donné en 1692 à des cravates et
à des fichus, en mémoire de la bataille de Steinkerquc,
où les officiers français,- attaqués à l'improviste par Guil-
laume ni, n'avaient eu que le temps de jeter négligem-
ment leur cravate autour de leur cou.
STÈLE fdu grec stélè, colonne), nom donné, chez les
Anciens : !• à un monument monolithe en forme d'obé-
lisque ou de fût de colonne ; 2*^ à une espèce de cippo ou
de colonne brisée, destinée à porter une inscription fu-
néraire ou autre ; 3*^ à un poteau où Ton exposait les con-
damnés.
STELLIONAT, du latin stellionat^s, fait de stellio,
espèce de lézard dont le corps est marqué de petites
taches qui brillent comme des étoiles {stellœ). Les Ro-
umains appelaient stellaturm , stellionaturce , steltionata ,
les vols et les mensonges, parce que les différentes taches
de ce lézard représentent assez bien les artifices d'un
faux vendeur. De même on a donné en français le nom
de grivelées aux concussions, aux petits profits illicites
que l'on fait dans un emploi , & cause de la variété du
plumage de la grive, à Pimitation des Grecs, qui disaient
trôctès (truite) pour désigner les voleurs et les men-
teurs, à cause des diverses marques du dos de ce pois-
son. En termes de Pratique, on comprend sous le nom
de stellionat toute fraude qui n'a point de nom, et qui
est employée pour se procurer de l'argent. Ainsi , celui
qui vend deux fois le même efi'et à deux différentes per-
sonnes, celui qui vend comme sien ou qui hypothèque ce
qui appartient à autrui, celui qui présente comme libres
des biens hypothéqués ou qui déclare des hypothèques
moindres que celles dont ses biens sont chargés, celui qui
donne en gage des effets qui ne lui appartiennent pas,
celuf qui emprunte avec promesse de faire tel emploi et
qui ne le fait pas, se rendent coupables de stellionat. Le
stellionat est, comme on voit, un abus de confiance. Le
stellionaîaire est passible de la contrainte par corps {Code
Napol.^ art, 2059). Il n'est pas admis au bénéfice de ces-
sion de biens (Code de Procéd.^ art. 905), ni à la réhabi-
litation après raillite {Code de Comm,^ art. 612 ). B.
STÉNOGRAPHIE (du grec sténos, resserré, abrégé, et
graphéin, écrire), art d'écrire aussi vite que la parole à
l'aide de signes abréviatifs et conventionnels. Cet art se
propose de réduire & sa plus simple expression la repré-
sentation des sons du langage, et se fonde sur l'omission
facultative de certaines lettres. Il a pris un très-grand
nombre 'de formes, gu'on peut ramener h trois princî
pales, la tachygraph\e, Vohjgraphie, et la sténographie
proprement dite. La tachygraphie est une écriture sylla-
baire : chaque son c^ rendu d'après sa prononciation ,
sans égard à l'orthographe, et par un signe très-simple ;
mais les différentes syllabes du môme mol se lient dîfft-
c^.lement entre elles. Dans rojkygraphic, on écrit le»
STÉ
ir.68
STO
lettres détachées sur plusieurs lignes tracées à ravance
Komtne les portées de la musique. Dans la sténographie,
on trace, ou plutôt Ton devrait tracer tous les mots d*un
seul jet, et sans jamais lever la plume, si ce n'est pour
commencer le mot suivant : la ligne droite, le demi-
cercle, la boucle et le point sont les signes que Ton em-
ploie, en leur donnant des positions diverses.
L'emploi de signes abréviatifs a été connu des Anciens
{V, ÂBRéviATioNS); en Grèce, Xénophon en fit usage le
premier pour reproduire les discours de Socrate qu'il a
publiés. Cet art ne fut point connu, ou du moins prati-
2ué, à Rome, avant Cicéron : il fit recueillir les discours
e Caton, soit au Sénat, soit au Forum, en postant plu-
sieurs sténographes parmi Tauditoire. Tiron, affranchi
de Cicéron , inventa une sorte de sténographie connue
sous le nom de Notes tironiennes. Dès lors on con-
tinua d'user de ce mo3'en, môme pour des travaux par-
ticuliers : des auteurs avaient des esclaves sténogra-
phes, et leur dictaient ce qu'ils composaient. D'autres
déchiffraient ensuite ces dictées, et les mettaient en écri-
ture courante. Les deux Pline, entre autres, procédaient
ainsi. Mais la véritable sténographie ne remonte pas au
delà du xvi* siècle. A cette époque, en Angleterre, lla-
caulay donna une méthode qui fut longtemps en videur.
En 1659, Shelton en publia une nouvelle, qui fut intro-
duite en France par le chevalier Ramsay en 1681, lors-
que déjà un abbé Cossard s'était occupé de tachygraphie
dans un traité Sur Vart d'écrire aussi vite que Von parle.
En 1743, de nouveaux procédés furent indiG[ués par Wes-
ton , et eurent un succès assez durable. Vinrent ensuite
les méthodes de Coulon-Thévenot en 1770 et de Taylor
en 1786. Depuis 1789, l'existence des Assemblées délibé-
rantes rendit de plus en plus nécessaire l'emploi des
moyens tachygraphiques. Parmi les nouvelles méthodes
qui ont été proposées, on remarque celles de Montigny,
de Conen de Prépéan, de Blanc, de Vidal, d*Astiea, de
Chauvin, de Lagache, de Midy, d'Aimé Paris, de Prévost,
de Patev, etc. De 1790 à 1792, on fit usaoe d'un procédé
appelé Logographie (V, ce mot). V, Jomard, Comparaison
des différentes méthodes tachygraphiques et sténographi-
ques, Paris, 1831, inS^\ Scott de Martinville, Histoire
de la sténographie, 1849.
STENTÉ, terme de Peinture emprunté à l'italien sten-
tato, et qui signifie pénible. Un tableau slenté est celui
où se manifeste l'effort du travail. Le faire stenté est
l'opposé du faire facile.
STEPPES. V. notre Dictionn. de Biogr. et d^Histoire.
STÉRÊOBATE, en termes d'Architecture, soubasse-
ment sans itoulure et qui affecte la forme d'un vaste
socle
STÉRÉOGRAPHIE (du grec stéréos, solide, ai gra-
phéin , décrire, tracer), art de représenter les solides sur
un plan. C'est la Perspective des solides.
STÉRÉORAMA (du grec stéréos, ferme, fixe), carte to-
pographique en relief, faite de pâte de papier.
STÉRÉOTOMIE. V. Coupb des pierres.
STÉRÉOTYPIE (du grec stéréos^ solide, et tupos, type,
caractère), art de convertir en formes solides les planches
d'imprimerie composées avec des caractères mobiles. Il y
a trois procédés différents : \^ prendre l'empreinte de la
page de caractères mobiles, en appliquant avec force cette
page sur une matière métallique particulière, puis verser
dans l'empreinte creuse, prise pour moule, un métal en
fusion qui reproduit le relief de la nage primitive (pro-
cédés Garez, F. Didot, Genoux); 2» employer, pour la
composition en mobile, des caractères dont l'œil est
frappé en creux, et qui servent eux-mêmes de moule
pour la planche en relief ( procédé Herlian ) ; 3° prendre
l'empreinte de la page avec du plâtre fin et liquide, ou
)vec une pâte de carton, enfoncée avec une brosse dans
1 oeil de la lettre, pour le reproduire en creux, la sécher
au feu , et y couler un alliage métallique (procédé Du-
rouchail et de Paroy). Ce dernier procédé, qu'on nomme
Clichage au papier, est à peu près le seul employé aa-
lourd'hui. Avec les clichés ou planches stéréotypées,
on conserve indéfiniment la composition d'un ouvrage,
et l'on peut tirer, à mesure des besoins, un nombre
Suelconque d'exemplaires. On a, de plus, le moyen
'épurer les textes et d'arriver à une exactitude de
plus en plus grande : pour cela, on enlève avet un em-
rrte-pièce le passage fautif d'un cliché, et l'on introduit
la place un nouveau morceau que l'on soude. — Les
premiers essais d'imprimerie ont été de vrais stéréotypes,
puisque tous les caractères d'une page étaient alors gra-
vés en relief sur des planches solides. Vers 1725, Val-
levre« imprimeur à Paris, eut , le premier, Tidée d'appli-
quel 'des caractères mobiles sur une madère argileuse, et
de fondre un bloc en cuivre sur le monte ainsi obtenu.
Peu d'années après, d'autres essais furent faits à Édim-'
bourg par Torfévre William Ged, et à Erfurth par l'im-
primeur Funkter. Hoffmann à Strasbourg (1784), Carez
à Tout (1786) ; F. Didot et Herhan à Paris (1708), ap-
portèrent à la stéréotypie de grands perfectionnements.
En 1844, Duverger appliqua cet art à la reproduction de
la musique et des cartes géographiques. Les graveurs en
médailles ont recours an clichage pour faire épreuve de
leurs ouvrages : à cet effet , ils appliquent le coin sur de
l'étain en fusion.
STERLING. V. Livre, dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
STIBADIUM. V. notre Dictionnaire de Biographie el
d'Histoire.
STICUODE (du grec stikhos, vers, et ôdè, chant), mot
par lequel les anciens Grecs désignaient une sorte de
Rapsodes ( V. ce mot) , ceux qui chantaient des vers
simples, non combinés en systèmes, purs de tout alliage
avec des vers d'autre mesure.
STICHOBIÉTRIE (du grec stikhos, vers, et métron, me-
sure), numération des lignes d'un manuscrit. Les An-
ciens, qui ne connaissaient pas les divisions par para-
graphes et chapitres, supputaient ainsi l'étendue des
ouvrages. On mentionnait d'ordinaire à la fin d*un ma-
nuscrit combien il contenait de lignes ou de vers.
STIGMA , ancien caractère grec, composé du sigma et
du tau, était employé comme lettre numérale, et valait 6.
STIGMATES, marques qu'on imprimait, dans TAnti-
quité, sur l'épaule gauche des soldats enrôlés. On a
donné le même nom aux marques des plaies de Jésus-
Christ, miraculeusement imprimées sur le corps de
S^ François d'Assise.
STILE, Stilus, nom qu'on donnait pendant le moyen
âge à tout ouvrage qui exposait la procédure observée
dans les tribunaux et les règles les plus usitées do la Ju-
risprudence. Tel était le Stilus curiœ Parlamenti, com-
posé en 133U par Guill. Du Brueil, avocat au parlement
de Paris.
STIPS , monnaie. V. notre Dictumnaire de Biographie
et d'Histoire.
STIPULATION , toute clause, condition ou convention
qui entre dans un contrat.
STIRATOR (de l'italien stirare, tendre, étirer), cadre
en bois dont les dessinateurs à l'aquarelle et au lavis se
servent pour tenir leur papier bien tendu.
STOCK, c-à-d. en anglais provision, s'emploie dans
le Commerce pour signifier la quantité d'une marchan-
dise qui se trouve en magasin dans les entrepôts ou sur
les marchés d'une place de commerce. A la Bourse de
l/>ndres, on entend par Stocks toutes les actions, titres
et obligations, et les Stock-Jobbers sont les agioteurs
qui Jouent sur la hausse on la baisse de ces effets, et
riont les opérations se soldent presque toujours par de
simples différences.
STOÏCISME. Le Stoïcisme, dont les principaux repré-
sentants furent Zenon, Cléanthe, Chrysippe, Panetius.
l'ossidonius, Sénèque , Épictète, Arrien et l'emp^rcai
Marc Aurèle {V. ces noms dans notre Dictionnaire de
Ifiographie, et l'article Stoïciens), fut, dès son commen-
cement, une philosophie morale et pratique ; et ce carac-
:ère se prononça de plus eu plus, lorsqu'elle eut passé
de la Grèce à Rome. A ce point de vue le Stoïcisme csi
généralement bien connu, et; pour l'exposer, nous n'au-
rons qu'à rappeler et à résumer quelques idées déjà
familières au plus grand nombre des lecteurs. Il n'en
ost pas de même de la Métaphysique stoïcienne, qui,
bien qu'en décadence sur celle de Platon et d'Aristote,
auxquelles elle est postérieure, ne mérite pas moins
d'être étudiée, tant comme exemple de ce qui pouvait
encore être essayé après le Platonisme et le Péripaté-
tisme, que pour le jour qu'elle jette sur quelques points
singuliers de la Morale. — Comme œuvre de décadence,
la Métaphysique des Stoïciens est loin d'être exempte de
contradictions : d'abord, considérée dans son ensemble,
elle est plutôt une Physique qn*une Méta4)hysiqoe, ei
elle en porte le nom. Hors de Fesprit, tout est corps;
dans l'esprit, tout est perception sensible; tel est le
double jprincipe de rOntolo|ie et de la Logique des Stoï-
ciens. On parle souvent du caractère idâliste de leurs
doctrines, et il est bien vrai que l'idéalisme y domine à
certains é^ds. A côté de ce principe, voilà une de ces
contradictions dont nous parlions tout à rheore : Tout
est corporel; tonte connaissance est connaissanœ sen-
sible. Gela ne veut pas dce que tonte coonaissanœ r«stc
STO
4669
STO
àlVtat de sensation paniculijie^ et q^c nous ne p-à'.s-
sions connattre que les corps limités et périssables avec
lesquels nous sommes habituellement en rapport. L'es-
prit généralise ses sensations ; en cela consiste l'Antici-
pation ou Prolepse ; et, en les généiulisant, il arrive à
concevoir un principe (unique peutrètre, peut être mul-
tiple, la question se présentera plus loin), rinflni, quHl
serait plus exact de nommer rindéflni, nulle sensation ,
nulle expérience particulière ou généralisée ne pouvant
donner rinflni, principe qui est, comme tout le reste,
corporel ; de sorte que le corps est partout, remplit tout,
et que le vide, contrairement à l'opinion des Épicuriens,
n'est nulle part; principe enfin qui, en se déterminant,
devient tout ce qui est, le monde, Dieu et l'homme tout
à la fois. — Pr^nté sous ce jour, le Stoïcisme a tout
l'air d'une philosophie panthéiste; mais en arrivant au
monde et à Dieu, on retrouve le Dualisme. Toute exis-
tence présente plus ou moins clairement un caractère
de dualité : dans la pierre, il y a autre chose que les
molécules matérielles ; il y a la force de cohésion qui les
maintient^ agrégées; de même les éléments constitutifs
de la plante ne se ressemblent et ne se conservent que
sous l'influence de je ne sais quelle force végétative ;
dans les animaux, dans l'homvie, la dualité est encore
plus marquée. On peut hésiter et se méprendre sur la
question de savoir si la vie elle-même est double ; mais
on ne peut méconnaître la distinction de la matière et
de la vie. Ces faits étaient frappants, et d'ailleurs une
philosophie antérieure, celle d'Aristote, avait profondé-
ment tracé la distinction universelle de la matière et de
la force. Cette distinction, les Stoïciens se l'approprié*
rent et en tirèrent parti conformément à leurs idées. Le
monde tout entier rés ilte, suivant eux, de l'union de la
substance ou de la matière (hylé) avec la force ou raison
génératrice {logos spermaUkos) qui s'appelle aussi la
nature (physis). Comment se fait cette union, et qu'est-
ce au juste que cette force génératrice qui s'unit à la
matière 7 C'est ici le lieu de dire quelques mots d'un
nouveau principe qui reparaîtra à tous les degrés de
l'existence, de la Tension, qui est, suivant les Stoïciens,
le principe de tout bien, comme son contraire, le Rel&-
chement| est le principe de tout mal. Or, c'est précisé-
ment par la tension de la force dans la matière que tout
est produit. Jl ne faut pas s'y tromper : la substance est
corporelle; mais la force l'est aussi. C'est ce corps plus
subtil que l'air, plus subtil que le feu, qu'on voit si sou-
\ent fl^rer dans la Physique des Anciens; l'Éther qui
échauffe et pénètre toutes choses, qui porte partout la
vie, et qui, combiné dans des proportions diverses avec
la matière, devient force de cohésion dans le minéral,
force végétative dans la plante, &me raisonnable dans
l 'homme, âme du monde dans le grand Tout. Rien n'est
plus bizarre et plus curieux que les idées des Stoïciens
sur la formation, la conservation et la destruction du
Monde: il est, à leurs yeux, un grand être animé {Zôon)
qui vit et respire comme les autres animaux. II y a, dans
le Monde comme dans les animaux, un véritable mou-
vement respiratoire, dont les alternations forment les
phases de son histoire. Ainsi, au commencement l'Éther,
la Raison ou l'Ame (c'est tout un^ commence à se tendre,
c'est-à-dire à se condenser. De la résulte, dans son sein,
la formation d'un milieu plus dense, d'une sorte de
noyau ; c'est l'Air. Puis la Contraction se prolongeant, la
sphère de l'Eau se forme dans la sphère de l'Air ; puis,
dans celle-ci, la sphère solide; ce qui n'empêche pas les
combinaisons partielles d'où naissent les plantes, les
animaux, etc. C'est là la période du développement.
Quand le Monde est arrivé au terme de cette période, le
relâchement, c'est-à-dire la dilatation, succède à la con-
traction, et, par un mouvement rétrograde, tout s'ab-
sorbe dans l'Éther après en être sorti, jusqu'à ce que ,
les choses étant revenues à leur état primitif, une nou-
velle contraction recommence qui ramène les mêmes
phénomènes, non-seulement dans leur ensemble, mais
jusque dans leurs moindres détails, et ainsi de suite
pendant toute l'infinité de la durée, où chacune de ces
périodes occupe plusieurs milliers d'années. Les Stoï-
ciens, ^ui aimaient à rattacher leurs idées aux croyances
populaires et mythologiques, trouvaient, dans la fable
du Phénix , le symbole de cette cosmogonie. Le Monde,
comme l'oiseau, recommence indéfiniment son existence;
comme lui, il périt dans le feu {œlher; œthô, brûler) et
renaît 'de ses cendres. — Ainsi l'Éther est, à propre-
ment parler, l'esprit qui anime le grand Tout, l'Ame du
monde i mens agitât mohm âins la théorie stol*
cienue, il n'y a pas d'autre cause, pas d'autre Dieu , à
îiK îns qii'o.i ne mouille donner ce nom à rincxorable Fa-
talité, dont le dogme, par une contradiction non moins
étrange que les précédentes, y subsiste à côté du dogme
de la Providence. Les Épicuriens avaient nié la Provi-
dence, et étaient arrivés au fatalisme par la doctrine du
hasard ; les Stoïciens y arrivèrent par la voie contraire,
celle de l'universelle détermination des causes. En réa-
lité, la Providence est la sagesse et la puissance de Dieu
librement appliquée au gouvernement du monde. Rien
de pareil chez les Stoïciens; et, bien qu'il? attribuent à
Dieu l'Intelligence et la Puissance, bien qu'ils le repré-
sentent comme s'occupant des affaires de ce monde, il
est clair que c'est là un soin stérile, qui ne peut rien
changer à l'ordre immuable des choses, qu'une nécessité
aveugle (fatum stoUcum) avait fatalement déterminé de
toute éternité. C'est donc, pour ainsi dire, d'une ma-
nière subreptice , que ces idées de Providence et d'at-
tributs moraux ont pénétré dans la théorie des Stoïciens.
Nous avons annoncé que ces spéculations métaphy-
siques des Stoïciens, toutes chimériques qu'elles soient,
étaient propres à éclairer quelques points de leur Morale.
Il s'agit surtout de la Tension, qui est, comme on l'a dit,
le principe de tout bien, et non-seulement de tout bien ,
mais de toute science; car, en ceci du moins, conséquents
avec eux-mêmes, les Stoïciens ont toujours eu cette idée
présente à l'esprit, dans leur Logique et dans leur Morale,
aussi bien que dans leur Physique. Partout la force et
l'effort. Hercule est le rénovateur de la Philosophie, et
le stoïcien Cléanthe est le second Hercule. Donc, au lieu
de se laisser aller au courant de l'opinion, dont les in-
certitudes troublent le sage , il faut tendre la raison ,
d'abord pour passer des images sensibles aux représen-
tations compréhensives, qui les rapportent à leurs objets et
à leurs causes, puis aux Prolepses qui expriment les rap-
ports naturels et invariables des choses. De là à la science
il n'y a plus qu'un pas, et c'est encore l'effet d'une ten-
sion nouvelle et supérieure.
A la réception passive des images, et aux trois degrés
de tension qui lui succèdent, correspondent différents
états de l'àme, la Représentation, l'Assentiment, la Com-
préhension, la Science, respectivement exprimés par les
emblèmes de la main ouverte, demi-fermée, fermée, fer-
mée et serrée fortement avec l'autre main. « Zenon, dit
Montaigne , peignoit de geste son imagination sur cette
partition des facultoz de l'àme : la main espandue et ou-
verte, c'estoit Apparence; la main à demy serrée et les
doigts un peu croches. Consentement ; le poing fermé.
Compréhension; quand de la main gauche il vepoit en-
cores a clorre ce ploing plus estroict. Science. »
La même préoccupation se fera sentir dans toutes les
parties de la Morale. L'homme, constitué, comme tous
les autres êtres, par l'union de la Matière et de la Force,
qui est en lui Raison, a conscience de celle-ci et de sa
supériorité sur la Matière. Assujetti , comme les autres
animaux, aux fonctions de nutrition et de reproduction,
il sait bien que ce sont là des fonctions inférieures , et
que ce qui le fait homme, c'est, avec la Raison elle-même,
l'amour de la science et de la vérité, les soins de la fa-
mille et de la société, l'exercice de la tempérance, du
courage, de la grandeur d'àme, de la bienfaisance, qui
lie sont autre chose que le développement de la Raison.
Telle est la nature propre de l'homme, dans laquelle les
derniers Stoïciens donnent surtout une grande place aux
vertus sociales , à tout ce qui tend au salut et au bien
des autres hommes. L'homme, dit Marc-Aurèle, est na-
turellement sociable et ami des autres hommes {philan-
thrôpos kai koinânikos ). Or, pour tout être, le bien, c'est
de vivre conformément à sa nature, et de maintenir sa
constitution par des actes convenables. Ce sera là aussi
le bien de l'homme, et par suite sa loi : Vivre conformé-
ment à la nature, formule célèbre, qui se traduira pour
lui en celle-ci : Vivre conformément à la Raison. Mais
la Raison, c'est le principe de l'effort et de la tension.
11 faut donc, ici encore, que l'homme tende sa raison , et
qu'au lieu de céder à l'instinct, comme les animaux, il
agisse par raison, même quand il s'agit de donner satis-
faction aux besoins inférieurs de sa nature. A ce prix
seulement, les fonctions naturelles (bfflcia) deviennent
actions droites et vertueuses. La vertu est un art , c'est
l'art de la vie, ou l'art de devenir bon ; et l'on devient
bon en rendant la Raison maîtresse des passions, ({ui
sont un relâchement, une maladie de l'&me, produite,
comme les maladies du corps, par l'atonie (a privatif,
tonos, tension, défaut de tension) ; et l'on arrive à la per-
fection, en étendant aussi loin que possible cet empire de
•a Raison. — Jusqu'à présent cette Morale n'offre que do
sxn
1670
STR
m&tcs et vigoureux préceptes; mais voici le moment oCi
elle va dégénérer en paradoxes, par l'excès même d*élé-
ration où elle s'efforce de monter. Gomme rien n'est bon,
suivant les Stoïciens, de ce qui n*est encore qu'un moyen
d'être appliqué à de mauvaises fins, et comme on peut
faire un mauvais usage des richesses, du pouvoir, de la
santé, de la vie même, au lieu de nous montrer le sage
gouvernant par la Raison les penchants qui portent
l'homme à rechercher ces biens inférieurs, le Stoïcisme
placera l'idéal de la sagesse dans je ne sais quelle vertu
ascétique et hautaine, plus négative que positive, s'iso-
îant du monde et de la vie active, et toute prête à rejeter
l'existence même, pour peu qu'elle y sente un embarras
et une cause de trouble. Il serait mjuste, toutefois, de
faire peser sur la secte entière la responsabilité de ces
maximes, aussi bien que de quelques autres paradoxes
bien connus, dont déjà, de son temps, Horace se moquait
à bon droit. Le Stoïcisme, en descendant de cet hauteurs
chimériques pour se mettre à la portée de l'homme, non
tel que le veut et le conçoit l'esprit de système, mais tel
qu'il est réellement, loin de rien perdre de sa puissance
et de son autorité, a conquis, au contraire, par là les titres
3ui en font, malgré ses imperfections, une philosophie
estinée à ne point périr. B — s.
STOLPi. V. ce mot dans notre DicUonnair^ de Biogra^
phiê et d'Histoire.
ST0NEHEN6E. V, Celtiques (Monuments).
STOP, c.-à-d. en anglais arrête, mot adopté pour le
commandement dans la Marine. On appelle Stopper une
machine en forme de mâchoire, servant d'arrêt aux
càbles-chalnes.
STORE (du latin storea, natte), rideau de coutil, de
taffetas ou de toute autre étoffe claire et transparente,
qu'on met, en le tenant bien tendu, devant une portière
de voiture ou une fenêtre, pour se garantir de la pous^
sière et du soleil. Il se lève et se baisse par le moyen
d'un ressort.
STORTHING. V. ce mot dans notre Dicttotmaire de
Biographie et d^Histoire,
STRAMBOTTI, nom d'une sorte de poésie italienne,
ordinairement en octaves, que les amoureux chantent à
leur maltresse. L'improvisateur Serafino l'inventa dans
les dernières années du xv* siècle.
STRAPASSON , ancien terme de Peinture, désignant
l'artiste qui strapassait, c-à-d. qui exagérait jusqu'à
l'incorrection la forme et le mouvement des figures, qui
affectait la science dont il était dépourvu. Le/not est une
abréviation d'ej;tra-pa9«er, passer parniessua toutes les
règles et les mesures, peindre ou dessiner à tort et à
travers.
STRAPONTIN (du latin stratus, couché, étendu, et
pons, pont), siège qu'on met sur le devant d'une cita-
dine, au fond d'un omnibus, ou dans les passages entre
les banquettes des théâtres, et qui peut , comme un pont-
levis, se lever et s'abaisser à volonté.
STRASBOURG (Cathédrale de). Cette église, bâtie à
diverses reprises, laisse beaucoup à désirer dans l'en-
semble, ce qui ne permet pas de la placer au premier
rang de nos édifices religieux. Le chœur et le transept
appartiennent aux xi* et xii* siècles; le style romano-
byzantin domine exclusivement dans les constructions
basses de ces parties, tandis que, vers le haut, par suite
de restaurations ultérieures, il se mêle au style ogival. La
nef date de la fin du xm* siècle, et présente tous les carac-
tères du stvle ogival primitif. En 1277, l'évêque Conrad
de Lichtenberg posa la première pierre du portail prin-
cipal. Deux flèches parallèles devaient le couronner ; une
seule a été bâtie : les plans en furent donnés par Erwin
de Steinbach, et l'exécution, continuée par son fils Jean ,
fut terminée en 1439 par Jean HQltz, maître de Cologne.
La décoration de la façade et la flèche élancée qui la do-
mine ont valu à la cathédrale de Strasbourg la célébrité
dont elle jouit. La disposition générale du grand portail
est à peu près la même que dans les autres cathédrales
importantes : une porte centrale à 5 voussures, remar-
quable par ses dimensions, et deux autres portes plus
petites ; au-dessus, entre deux galeries, sculptées et trans-
parentes, une rose de 50 met. de circonférence, et d'une
grande magnificence; puis deux tours, qu'on a eu ensuite
l'idée de relier ensemble par un corps de maçonnerie,
percé de deux fenêtres ogivales juxtaposées, et dont le
sommet forme balustrade à une hauteur de 60 met. Mais
ce qui distingue ce portail , c'est le système de la dé-
coration : les moulures y sont disposées sur deux plans
différents, de telle sorte que les moulures extérieures
se détachent complètement de celles qui sont en ap-
plication sur la muraille, et forment claîre-yoie; \» cr-
ncments de la façade sont comme placés derrière un
écran découpé à jour. La rose, en particulier, est précédée
d'un cintre isolé, festonné en dentelles, et qui n'est sou-
tenu que par ses tangentes et par des rosaces plus petites,
placées aux angles du cadre dans lequel il est retenu. La
flèche qui surmonte la tour du Nord s'élève à 142 met.
au-dessus du sol, et l'on parvient au sommet à l'aide
d'un escalier de 635 degrés s la tour, au-dessus de la
balustrade, est flanquée de quatre tourelles rattachées
à la pyramide octogone par le moyen d'arcs en forme de
pont volant, et dont l'une contient un escalier à double
spirale où deux personnes peuvent monter ou descendre
en causant ensemble sans se voir. Cette flèche, la plus
haute construction que les hommes aient élevée, offre
une extrême légèreté de matériaux; elle est ouverte sur
toutes ses faces. La foudre l'ayant endommagâe à dfiui
reprises au xvii* siècle, les deux Heckler (Jean et Geor^ps)
la restaurèrent. — Les portails latéraux, comme la grande
façade, ont beaucoup souffert pendant la Révolunon;
mais on a réparé tous les actes de vandalisme. Du côtû
du Nord, il y a un avant-portail, dit de S^^LoMtrmt, k
cause des bM*reliefs qui rappellent le martyre de ce
saint.
L'intérieur de la cathédrale de Strasbourg, long seule-
ment de 112 met., large de 38 met. au transept, ne répond
E as à la magnificence du grand portail : c'est un aaaem-
lage disparate de constructions de diverses époques, qui
néanmoins ont leur intérêt pour les archéologues. La par-
tie voisine de la façade est plus élevée que le reste de Tédi-
flce, et forme comme un vestibule ^gantesque, éclairé
par la grande rose et par de vastes fenêtres à nombreux
meneaux, dont les vitraux peints représentent d'un côté
la création de l'homme, sa chute et le déluge, de l'autre
le Christ au milieu des splendeurs de la Jérusalem cé-
leste. La nef majeure , remarquable par la noblesse de
ses proportions, mais d'une hauteur de 25 met. à peine., s
aussi de belles fenêtres et de précieuses verrières, où Ton
voit un grand nombre de Saints et de Saintes, quelques
figures emblématiques ou allégoriques, et doa traits de
l'histoire sacrée. Les piliers, d'une coupe ingénieuse, sont
couronnés de chapiteaux à feuillages sculptés avec élé-
gance et délicatesse. Le chœur, d'une simplicité extrême,
n'a que 14 met. de longueur, et il a fallu , pour l'agran-
dir, y ajouter tout le milieu de la croisée et une travée
de la nef : il ne se termine à l'orient, ni , comme dans
le système romano-byzantin, par une abside semi-drcu-
laire, ni, comme dans le système ogival, par un octo-
gone, mais carrément , par une ligne droite, et ce fond est
percé d'une grande fenêtre, dont l'effet est peu agréable.
Au-dessous du chœur sont pratiquées des cryptes, qui
paraissent être antérieures au x* siècle i les colonnes qui
en soutiennent les voûtes sont courtes, avec chapiteaux
cubiques d'une excessive simplicité et dont quelques-uns
portent des figures bizarres.
La cathédrale de Strasbour^^ possède quelques chefs-
d'œuvre isolés. Tel est le Pilier des Anges, dans l'aile
méridionale. C'est une masse centrale garnie de quatre
grandes colonnes engagées, entre lesquelles quatre autres
plus petites sont interrompues par trois étages de statut
de grandeur naturelle. Au bas sont les Évangélistes, ca-
ractérisés par leurs attributs symboliques; plus haut,
quatre Anges embouchant des trompettes ; enfin , le
Christ, accompagné de trois Anges tenant les instruments
de la Passion. Ces statues sont travaillées avec beaucoup
de soin; on en attribue quelques-unes à Sabine, fille
d' Erwin, — Le baptistère, exécuté en pierre sur les des-
sins de Jodoce Dotzinger, en 1453 , est une merveille de
délicatesse et de fini. — La chaire, construite en 1480,
sur les plans de Jean Hammerer, et restaurée en 1834,
est de style ogival flamboyant; il n'en existe pas d3
plus belle, et on ne peut guère lui comparer que celle
do la cathédrale de Mayence. Le dais qui la couvre a
été fait en 1677 par Conrad (^ulUn et son fils, maîtres
menuisiers à Strasbourg. — Les orgues, fabriquées en 1 714
par André Silbermann, sont placées sur le côté gauche
on entrant par la grande porte ; le buffet en est entière-
ment doré. — Enfin on remarque dans l'intérieur de
l'église une horloge très-curieuse, faite en 1842 par
Schwilgué. Elle comprend une sphère céleste et ud ca*
lendrier indiquant le temps sidéral , les fêtes mobiles, les
éclipses, le lever et le coucher du soleil, les équations so-
laires et lunaires, les jours de la semai net- le temps
moyen, les phases de la lune , les quatre âges, etc. Da
oôté ^uche, quand midi va sonner, un coq de métal bat
des ailes, chante trois fois, et les A])ôtrcs défilent de?ant
STR
1671
STY
te Christ. V, Grandidier, Essai histoPiq%iê sur (a oeUhé»
drale de Strcubourg, 1780, in-8<^; SchweighiBuaer, Dis-
sertation nouvelle sur la cathédrale de Strasbourg, 178(i,
in-8<* : Miller, Nouvelle description de la cathédrale de
Strasbourg, in-18; Guesber, Essai sur les vitraux de la
cathédrale de Strasbourg, in-S^ ; Fréd. Pitoa, La oathé^
drale de Strasbourg^ 1862, in-8o. B.
STRATAGÈME (du grec stratos, armée, et aghéin,
conduire), ruse de guerre. Peux ouvrages importants
pour )*bistoire de Tart militaire chez les Anciens nous
sont parvenus sous le nom de StratagèmeSy Tun en grec
par Polyen , l'autre en latin par Frontin.
STRATÈGE, F. ce mot oaqs notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire. '
STRATÉGIE (du grec çtratègos^ général), partie de la
science militaire. Bulow, dans son Esprit du système de
guerre moderne , distingue )a Stratégie et la Tactique.
Pour lui , la Stratégie est la science des mouvements nui
se font hors du rayoR visuel réciproque des deui armées
combattantes, ou, si Ton veut, hors de la portée du
canon t la Tactique (du latin tangere, toucher) est la
science des mouvements qui se font en présence de Pen-
ncmi , et de manière à pouvoir être vu de lui et atteint
par son artillerie. Par conséquent, les mouvements qui
tiennent à un choc direct des troupes appartiendraient à
la Tactique, les marches prolongées et les campements
à la Stratégie, L'archidqc Charles a établi upe distinction
plus exacte et plus ratioi^nelle. « La Stratégie, diHl^
conçoit et forn)e le plan des opérations de la guerre, en
embrasse l'ensemble, et détermine leur marche. La Tac-
tique enseigne la manière d'exécuter )es plans 4e 1^ Stra-
tégie, liBS plans généraux d'opérations militaires, et les
mouvements d'armées qui en sont la conséquence, sont
donc stratégiques^ et les mouvements eu remploi parti-
culier des troupes sont tactiques. » Seloii d'&utres, la
Stratégie est Tepsenible des connaissances théoriques et
pratioues que dojt posséder un général : les opérations
dont la conception , la réalisation et les développements
sont indépendants de la disposition particulière et des
manœuvres de détail des troupes qui les exécutent, ap-
partiennent à cet art : 1^ tactique est l'art qui règle Tor-
donnance et les manœuvres des troupes de la pnanière la
plus avi^ntageuse relativement au but de leur emploi ; les
différents ordres de bataille, 4e marche, de campement,
Tarmement et l'emploi des armes, sont de son ressort.
La Tactique est une action , la Stratégie est upe série 4è
n^ouvements préparatoires. On peut être un ^n tacti-
cien, sans être un bon stratégiste, et réciproouementj
mais il nV a pas de grand général s^ns lu réunion des
deu:if qualités. V, J. de Maizeroy, Cours d^ Tactique,
1706-69; Guibert, Essai général de Tactique, i^n-, l'ar-
chiduc Charles* Principes fU la Stratégie A^\i^ 3 vol.;
Jorainî , Précis de Vart de la guerre, 1822, Traité des
opérations militaires, 1830, et Tableau analytique des
principales combinaisons de la guerrfi, 1836; 6. d'Ar-
zac. Traité de Tactique, augmenté par ff. Koch , 18^2 ;
Dekker, Tactique des trois armes, tra4. par ff. de Brade,
1836; Brémond, la Tactique appropriée fltA moumment
des armes à feu, 1853.
STRATQCBATIE (du grec stratos, armée, et cratos,
pouvoir ), mot employé quelquefois pour désigner \p gou-
vernement militaire.
STRÉLITZ. V, ce .mot dçins notre Dictionnaire de Bior
graphie et if Histoire,
STRBTTE ( de l'italien stretto, dérivé du latin strin-r
gère, serrer ). Partie l<^ plus brillante d'une fugue ( V. ce
mot\ celle ov le sujet est traité d'une manière plus serrée
qu'au Gown^encement. —r On se sert du même mot pour
indiquer le mouvement accéléré d'un finale^
STRIBDBJ). V. TniBORD.
STJUJ^ ( du latin stria)j en termes d'Architecture, eut
synonyme de Cannelure. Tout objet dont la surface porte
des cannelures est dit strié.
STRIÇILE. V. ce mot dans notre Dtçtionnatre de B{0'
graphie et d'Histoire.
STRII^E, nom qu'on donne en Angleterre à ces sus-
pensions générales du travail que nous appelons grèves.
STAOsIaXES (du grec strômata, tapisseries), mot
employé dans Je sens do Mélanges. Ainsi , les Stromates
de S' CléoAent d'Alexandrie se composent de sujets Sort
divers historiques, philosophiques, théologiques, etc.
STJROPftE. Dans l'ancienne poésie lyrique et reli-
peyse des Grecs., ce mot .désigne la partie de l'ode qui se
chantait ^ads^nt .le premier tour du chœur (stropnè; de
stréjphéi'a , toiirner) : ce j)re9Tier laur se faisait de droite
k gauche (V. Antistropue). Strophe avait aussi une ac-
ception plus générale, et désignait le retour de certi^ine^
mesures et de certi^ns rhythmès à intervalles égaux ou
inégaux : c'était donc à peu près ce qui , chez Tes Mo-
dernes, s'appelle couplet, stc^ce, strophe, etc. Dans la
versiflcation française, le mot strophe désigne les stances
de l'ode. La strophe peut y admettre, soit un métro
unique, soit une combinaison de difTérentes q^esures;
elle se compose généralement de 3 vers au moins, 4e lÛ
au plus ; il est rare d'y rencontrer plu^ de deux mesures
différentes. Les strophes lyriques des chœurs d'Eslher et
d^Atkalie ont une marche tout à fait libre : le poëte leur
a donné une variété presque infinie j les mélanges de 3,
de 4 mètres différents y sont très-usités. p.
STROPHIUM. V. ce mot dans notre Dictionnaire dfi
Biographie et d'Histoire.
STUC, en italien stucco (de ralleman4 stack, frag-
ment), composition faite avec du mar|)re ])lanc pulvérisé,
de la chaux éteinte et de la craie, qu'on g&che dans ^ea^
de manière à obtenir une espèce de mortier. On fî^it en-
core du stuc avec du pl&tre cqit exprès, bien pilé et ta-
misé, puis gâché dans de Teau chaude contenant de la
colle de Flandre en dissolution. Il peut recevoir, qu
moyen de p&tes colorées, la couleur des divers marbres.
Le stuc sert à faire des revêtements, des bas-reliefs, des
corniches et autres ornements : outre qu'il p^ut reppvoir
le poli du marbre, il a sur le pldtre Tav^n^ge àù ne pas
sécher presque subitement, et de ponseryer t^ez lopgr
temps sa ductilité ; il devient aussi 4^f <iuè la pierre,
et n'est point sujet à se fendiUçr p^r le retrait qu pn
cédant à une pression. Les Romains connaissaient le stuc
et en faisaient usage. ^.
STUD-BOÛK (de l'anelais stud, haras, et book, liyre),
registre qu'on tient des chevaux entretenus dans le^ haras
de l'État et de leur filiation. Ia Fr^ncfs en â epipri^tg
Pusage à l'Analeterre en 1853.
STUPASi. V. TOMBBAOX.
STYLE. Les Anciens éprivaieiit s^r d@s tabI^tte# fecpu-
vertes d^une légère CQuche de cire, et le pipt styl$ ^|
venu de l'instrument qui leur servait à tri^cer Ipurs
lettres i le style , stylus, était proprement Hn petit poin-
çon. En Littérature, on confond souvent le style àyef;
Vélocution , bien qu'il y ait entre l'un et Ta^ti'^ une po-
table différence. En effet, l'élocution est un terme abi^r
trait et général; elle consiste 4 traduire la pensée par
la parole ; c^est un art qui n'appartient proprement ^ per-
sonne, et que chacun est maître de cultiver ^ son gré. té
style indique, au contraire, l'originalité qn'un /icri^rai^
sait donner à Pexpression de ses idées et de s^ .^jenlir
ments. Le style est donc personnel ; chaflue auteur a \9
sien , que nul ne saurait lui dérober. T044 an pll^ est.-
ii possible de le contredire, au risque dV 0li)gner |^
réputation d'un maJadroit ou d'un impertioept imitâr
teur. Ainsi l'entendait Buffon , lorsqu'il disait : « J^ style
est de l'homme même. » On peut ravir au sav^^t ses dé-
couvertes, au philoepphe ses principes, h l'historien ses
observations morales sur l'homme et sur les progrés djs
la civilisation ; tout cela se r^a^d, se propage, et 'ûf^}i
par devenir en quelque sorte uiue propriété pul^Jique :
maison o'eniève point h ^écrivain son style ; par le ^yle^
il vivra ; faute de style, il périra. Toi est le sens prjécj;^
de la parole de BuSbn. On a pr^èté p/ouxtant à cette
maxime une autre si^nificatioDi et plus jd'/une personnvè
l'emploie, qui veut dire i Tel sjtyle, te^ hoipaAic. Voulez-
vous, par exe«Dple, connaiti» l'hu^^^e^r 4'un écriyâiii?
Lisez ses œuvres; vous vejrez »'y refiéter, coouné en y^
miroir, son caimotère el sas secrètes jj^CçUmutâçns. Cette
jfvterprétatioQ, à la .vérité, eat ai^i traire, et dépasse l^
vraie pensée de Butfon; mais son tMf, y répugne si pei^:
d'eâMeurs, qu'on peut affirmer qu'jl en dérive. Oia ^ le
«tyle de l'éciivain est un ^ien im^iMetÀ^^ qui déde ^
pillage et le vol dans le préaen>t cocnnie dans l'avenir;
mais cestyle mème,4'où le tient-ij, MQon ,4e ses Jcnoe^vrs,
4e ses hsintudes, du tour particulier 4e .son e^rit .e,t de
son imagination, de sa senaibiUté, 4e tbviÀ .ce mil Xait
enfin qu'il n'est ni vous ni moi , mais ^lui-roème? J)q ià
vient aussi que chaque nation a un style 4il^érent, sui-
vant «on caractère et son génie. « f)es £g^res fortes et
hyperboliques donnaient une >ive ohfileur h celui des
<;k1entaux; les Athéniens, peuple spirituel et poli, ^!é-
4aient formé un style .pcéds , .clair et joigne; Jc^ A^îf^-
«tiques, licencieux ôt amis du Ivgte , affectaient un stylo
fleuri, mais diffus. On .remarque les mêmes ,^méreDCQÂ
caractéristiques d^nsJe^tyle des Français, dés Anglf^is et
.des Espagnols. 'En 4>aclaat.du Atyle en gén^U QP <4U
qu'il «et necveux, .faible «n .vK^ .qwité9 qui, dans i^n
écrivain, dôâisjncnt à.la.-foi^.Qtâa manière de sentir et jia
STY
1672
SIJB
manière de s'exprimer; tant il est difficile de les séparer
Tune de Tautre. » L'illustre académicien avait donc
raison, et ceux-là n*ont pas tort non plus, C[ui com-
mentent sa parole dans un sens qu'il n'entendait pas lui
donner. Le style est de l'homme même; mais c'est l'hu-
meur qui fait le s^le.
Cette originalité qu'un grand écrivain sait communi-
quer à l'expression de sa pensée, le véritable artiste en
laisse aussi l'empreinte sur ses productions. C'est ainsi
que Michel-Ange imprimait à ses toiles une physionomie
que n'oCTrent pas celles de Raphaël ; que les mélodies de
Mozart ont un caractère dont s'éloignent celles de Bee-
thoven ; que les statues de Phidias annoncent un autre
ciseau que celui de Praxitèle. C'est pourquoi , pour mar-
3uer le talent particulier, la manière propre du peintre,
u musicien, du statuaire, on emploie le même terme
qui sert à distinguer entre eux les écrivains, et l'on dit
le style de Rossini , comme on dit le style de Beaumar-
chais. Le mot a passé des individus aux écoles, et, dans
l'histoire des arts, il s'applique parfois à des périodes en-
tières où règne quelque genre spécial. De là ces expres-
sions qui reviennent sans cesse sous la plume des cri-
tiques : style roman, style gothique, style Renaissance,
style Louis XV.
La conclusion qui ressort de tout ce qui précède s'offre
naturellement à l'esprit : de même que les humeurs sont
aussi dissemblables que les visages, de môme les styles
sont aussi dissemblables que les humeurs. Ce n'est pas à
dire pourtant que cette diversité soit sans bornes : il y a
des limites immuables, marquées par le bon sens et le
goût, en deçà desquelles les écrivains et les artistes sont
tenus de se renfermer; au delà, l'originalité dégénère en
bizarrerie, et conduit au ridicule. Pour ne parler que des
Lettres, c'est le droit et le devoir d'un auteur d'être lui-
même, mais à condition de respecter certaines lois préa-
lables que lui impose la raison. Parmi ces règles géné-
rales, les unes regardent l'arrangement et la composition
des ouvrages : tel est le prix d'un plan bien fait et mûre-
ment étudié, que Buffon lui-même n'a pas craint de définir
le style : « l'ordre et le mouvement (pi'on met dans ses
pensées; » comme s'il n'était pas possible que l'on conçût
nettement la suite et l'enchaînement de ses idées, sans
que les mots n'arrivent aisément et comme d'eux-mêmes
pour Tes rendre Les autres portent sur l'expression , et
déterminent les qualités de l'élocution indispensables à
tous les écrivains; ce sont : la clarté, la prMsion et la
propriété, la correction et la pureté, le naturel et la no-
blesse, Vharmonie (V. ces mots). — La Rhétorique ne
s'est pas bornée à dresser ainsi la liste de ce qu'on appelle
les qualités générales du style. Mais , considérant la va-
riété des œuvres littéraires et la diversité des si^ets
qu'elles traitent sur des tons si différents, elle a cru ne
point établir une classification arbitraire en distinguant
dans les ouvrages de l'esprit et dans le style trois genres,
à chacun desquels elle assigne ses qualités respectives :
le genre simple, qui recherche principalement la simpli-
cité, la brièveté, la naïveté, la finesse, la délicatesse et
la grâce ; le genre tempéré, qui brille par la variété, l'abon-
dance, la richesse, le sentiment, la vivacité, l'énergie et
le trait; enfin le style sublime, qui s'accommode particu-
lièrement de la véhémence, de la magnificence, de la
profondeur et de l'enthousiasme (V. Simple, TmipéRé,
Sdbumb). Seulement, elle ajoute que lef trois genres
peuvent se rencontrer dans un même sujet, et notam-
ment elle cite les Oraisons funèbres de Bossuet comme
d'admirables modèles où tous les styles sont harmonieu-
sement fondus. — Une autre subdivision , plus fondée
peut-être, certainement plus impérissable, consiste à dis-
tinguer le style de la poésie, avec ses mouvements extraor-
dinaires, ses tournures hardies, ses expressions originales,
ses épithètes, ses synonymes, et ses figures de prédilec-
tion, telles que l'inversion, l'ellipse, la périphrase, du
style de la prose, avec ses termes de la langue commune,
avec son allure libre et dégagée, faite pour répandre sur
la pensée la clarté et la lumière. La langue française offre
à peine quelques mots exclusivement propres au style
poétique: un coursier, là plaine liquide, Vétker, etc.; mais
les Latins en comptaient davantage, et, chez les Grecs,
les deux idiomes avaient si bien leurs termes et leurs
tours respectifs, qu'un critique Alexandrin put un Jour
traduire en prose Ylliade d'Homère. Dans la prose môme,
en a distlnçié.le style sdentifique, celui du géomètre et
du dialecticien, dont la perfection suprême semble être
d'atteindre à la précision algébrique, et le style littéraire,
où l'écrivain met quelque chose de son âme. Il appartient
au goût de déterminer à quelles matières les différents
styles sont le mieux assortis, et dans quelle mestire il
convient, quelque sujet qu'on traite, d'en mêler les formel
diverses. A« H.
STYLE, en termes de Chronologie, manière particulière d«
supputer les années. Le vieux style est la manière dont on
comptaitavant la réforme de Grégoire xm, etqui est encore
en usage chez les Russes et les Grecs; le nouveau style
est la manière dont on compte depuis cette réforme. Le
vieux style est en retard de 12 jours sur le nouveau : le
l«r janvier dans le vieux style est pour nous le 13.
STYLE ( Peinture de) , nom donné quelquefois à la pein-
ture d'histoire ( V, ce mot).
STYLET , poignard à lame très-mince et ordinairement
triangulaire. C'est l'arme favorite des Italiens et des Es-
pagnols.
STYLITES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d'Histoire.
STYLOBATE (du grec stulos, colonne, et basis, base),
en termes d'Architecture, espèce de piédestal continu ou
de soubassement qui a base et corniche, et qui forme
avant et arrière-corps sous les colonnes qu'il porte. Sty-
lobate a été aussi employé comme synonyme de Plinthe.
STYRIEN , dialecte parlé par les \Vendes de la Styric.
V. Wende,
SUAIRE (du latin sudarium)^ nom donné d'abord à
un ling<^ dont on se servait pour essuyer la sueur du vi-
sage, puis à un voile dont on couvrait la tête et le visage
des morts, enfin au linceul dans lequel on les ensevelit.
Plusieurs églises du monde catholique prétendent possé-
der le saint suaire, qui servit à la sépulture de Jésus-
Christ.
SUASORLE. V. DéCLAMATioNS.
SUBALTERNES (Propositions), propositions formées
avec le môme sujet et le même attribut; opposées en
quantité, l'une universelle, l'autre particulière; et de
même qualité, toutes deux affirmatives ou toutes deux
négatives. Telle est la nature de leurs rapports , que la
vérité des propositions universelles entraine celle des
propositions particulières : 5t tout homme est animeU,
quelque homme est animcU ; et Si mU homme n*est par-
fait, quelque homme n*est pas parfait. Mais la vérité des
particulières n'entraîne pas celle des universelles. En
revanche, la fausseté des universelles n'empêche pas né-
cessairement la vérité des particulières; quoiquMl no
soit pas vrai que tout nombre soit exactement divisible,
il est vrai que certains nombres sont exactement divi-
sibles ( V. fjogique de Port-Royal , 2« part., ch. IV). B— e.
SUBARMALE.- V. ce mot dans notre Dictionnaire dâ
Biographie et d'Histoire,
SDBCONTRAIRES (Propositions). V. Cotthaires.
SUBHASTATION (du latin sub hastà, sous la pique s
en termes de Droit romain, vente à l'encan. H était d'usage
de planter à l'endroit où devait se faire l'encan une pique,
comme marque d'autorité, parce que ces ventes ne se
faisaient qu'en vertu d'une ordonnance du préteur.
SUBITAIRES. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
SUBJECTIF. V. Objectif.
SUBJECTION, figure de Rhétorique, la même que
l'Antéoccupation (V.ce mot).
SUBJONCTIF, mode des verbes qui exprime l'affirma-
tion d'une manière subordonnée et comme dépendante
d'un autre verbe, auquel le verbe au subjonctif est le plus
souvent lié par le moyen d'une conjonction. Aussi le sub-
jonctif ne s'emploie-t-il jamais que pour marquer une
chose douteuse ou indécise. Les verb^ du sens de per-
mettre, défendre, souhaiter, désirer, craindre, vouloir,
ordonner, douter, nier, etc., se construisent en français
avec le subjonctif. D'autres verbes (jui n'entraSnent pas,
par l'idée qu'ils expriment, l'emploi du subjonctif dans
une proposition subordonnée, gouvernent ce mode dè^
qu'ils prennent la forme négative ou interrogative; e'e:^t
ainsi qu'on dit : a Je ne crois pas qu'il vienne; Croyez-
vous qu'il vienne? » tandis qu'on dit : «• Je crois qu'il ne
vient pas. » Certains verbes se construisent avec Tindi-
catif ou avec le subjonctif selon la nuance de sens qu'ils
expriment; ainsi le verbe prétendre signifie à la fois
affirmer et vouloir avec énergie : dans le l*' cas, il ist
suivi de l'indicatif; dans le 2*, du subjonctif. Il parait ,
Il me semble, se construisent avec l'indicatif; // ne pa-
rait pas, Il semble, avec le subjonctif. Toutefois, il peut
arriver que II semble ait pour complément une proposi-
tion exprimant une réalité, surtout si ce verbe laisse per-
cer quelque ironie, comme dans cette phrase de La
Bruyère : « Il semble que la Logique est l'art de convain-
cre de quelque vérité. » C'est sur l'idée d'indéciaion
SUD
1873
SUB
tehérente au sabjonctif que repose remploi de ce mode
après tes pronoms conjonctifs, comme lorsqu'on dit:
I Je cherche quelqu'un qui me rende service. » Il y a ce-
dendant telle» manières de parler où il est difficile de
rendre compte du subjonctif, comme lorsqu'on dit : a Le
chien est le seul animal dont la fidélité sott à l'épreuve. »
Le subjonctif n'est pas pi us logique avec avant que, dans
beaucoup de cas, que ne le serait l'indicatif; la preuve
en est qu'en grec et en latin les mots qui correspondent
à cette locution conjonctive se construisent fréquemment
avec l'indicatif. Bien que et quoique ne gouvernent pas
rssentioL'cmcnt le subjonctif, et cependant toujours ces
conjonctions sont suivies de ce mode. Comment se fait- il
que la conjonction que^ mise pour éviter la répétition do
si, qui ne gouverne que l'indicatif, gouverne le subjonc-
tif? Comment si ne gouveme-t-il en aucun cas ce mode?
Ce sont là de pures décisions de l'usage ou de l'euphonie.
Le subjonctif n'est pas toujours nécessairement accom-
pagné d'une conjonction; dans certains tours vifs de
phrase, on l'omet avec avantage : « Écrive qui voudra. —
Fuissé-je y voir tomber la foudre ! — Dieu vous soit en
aide !» — Le subjonctif a différents temps, le présent ,
Vimparfait, le parfait ou passé, le plus^que-parfait, et,
dans quelques langues, le futur, qui se confond le plus
souvent avec le présent. P.
SUBUCACULUM. V. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et â^ Histoire,
SUBLIME (Genre ou Style ) , un des trois genres d'élo-
quence établis par les rhéteurs. « Il est riche, majestueux,
éclatant, armé de toute la force de la parole. C'est cette
élévation, cette grandeur de style qui a commandé l'ad-
miration aux peuples, et leur a fait accorder, dans le
gouvernement , tant de pouvoir à l'éloquence : je parle
e cette éloquence qui se i>récipite et retentit comme un
torrenty qui étonne, qui saisit, et qu'on désespère d'at-
teindre* (Cioeron.) Le sublime est extraordinaire, oe
merveilleux qui échauffe et remue T&me, qui produit en
nous une admiration mêlée d'étoonemeot et de surprise,
qui nous enlève par ses mouvements et sa véhémence, et
nous éblouit de ses tonnerres et de ses éclairs. Le style
sublime admet la grandeur, la pompe, l'éclat de Texpres-
sion, et tout ce qui peut produire sur les auditeurs une
impression durable. Mais il repousse les ornements etlcs
fleurs qui font Tagrémen* du style tempéré; son mérite
n'est point dans na parure, mais dans sa force. Il exista
par l'audace des pensées et la véhémence des pafstous;
il s'tnquiétc peu du choix des mots, et, loin d'en, être
esclave, il leur commande comme un tyran ; il les force
à rendre sa pensée avec grandeur et noblesse, en négli-
geant souvent le nombre oratoire. Et pourtant c'est au
style sublime qu'est réservée la grande période, avec
touies les figures et tous les moyens d'exciter les pas-
sions ; mais il ne les emploie pas sans repos, sans inter-
ruption ; il sait user à propos du simple et du tempéré ;
il produit souvent tout son effet par un seul mot; d'ail-
leurs, il ne peut se soutenir également partout , car il
fatiguerait les auditeurs.
On doit distingnei^ le style sublime du sublime. Les
rhéteurs appellent style sublime celui qui déploie toutes
les pompes de l'éloquence, et qui joint à la grandeur des
pensées la majesté de l'expression, la véhémence, la fé-
condité, la richesse, la gravité, les grands mouvements
pathétiques. Le sublime peut exister sans toutes ces con-
ditions. « Tout ce qui est véritablement sublime, dit Lon-
gin, a cela de propre, quand on l'écoute, qu'il élève TiUne
et lui fait concevoir une plus haute opinion d'elle-même,
la remplissant de Joie et de je ne sais quel noble orgueil,
comme si c'était elle qui eût produit les choses qu'elle
vient simplement d'entendre. » Le sublime suppose des
sentiments élevés, un cœur généreux, qui n'a rien de bas
ni de rampant; il conçoit l'idée dans sa plus grande élé-
vation, et il l'exprime comme il la conçoit. II y a plu-
sieurs espèces de sublime : sublime de pensée, sublime
de sentiment, sublime d^image. Le sublime de pensée est
une grande idée exprimée soit avec simplicité, soit avec
maj€»té. Longin cite, en le mettant au-dessus de tout ce
qu'il y a de plus beau dans Homère, ce verset de Moïse :
« Dieu dit : Que la lumOre soit, et la lumière fut. »
Les premières paroles de l'Oraison funèbre de Louis XIV
par Massillon, en présence du cercueil du roi, sont les
suivantes : Dieu seul est grand, mes frères I Ici le su-
blime consiste dans la ^nsée, et nullement dans l'ex-
pression. Ces exemples justiflent un philosophe qui a dit :
• Il n'y a point de style sublime; c^es* !a chose qui doit
Tètre. Et comment le s^le pourraitp-il être sublime sans
•llej on plus qu'elle? » ^ Le sublime de sentiment nous
élève au-dcs~ns de nous-mOmcs, et nou^ pt^iièiro d'eiH
thousiasme, d'étonnement et de plaisir. On vient annon-
cer au vieil Horace que deux de ses fils ont été tués, et
que le troisième a pris la fuite; il est indigné de cette
l&cheté {Horace, III, 6) :
' Qae Touliet-Toaa qu'il flt contre trois? — Qa*il mourût.
«Voilà, dit Voltaire, ce fameux Qu'il mourût, ce trait du
plus grand sublime, ce mot auquel il n'en n'est aucun do
comparable dans toute l'Antiquité. » — Le sublime d'ima{;e
est celui qui présente d'une manière vive et eaisissanto
un grand objet, une grande action, comme dans ces vers
de Corneille sur Pompée devant ceux qui allaient l'as-
Bassiner {La Mort de Pompée, II, 3) :
et 8*aTance an trépM
Ayeo le mftiae front qttll donnait les Étati.
L'écuoil du style sublime est l'enflure. Quand on veut à
tout piix être plus grand que son sujet, on entasse de
grands mots sonores, des périodes ronflantes, des expres-
sions qui paraissent hardies, mais qui ne sont que fausses;
enfin on tombe dans le galimatias. Les auteurs les plus
sublimes sont ceux qui offrent le plus grand nombre
d'exemples de ce défaut. Voici des vers de Corneille où il
est frappant {Cinna, 1, 1) :
Impatient! désirs d*une illustre rengcance,
A qui la mort d'un père a donné la naissance,
Enfants impétueux de mon ressentiment,
Que ma doulenr séduite embrasse sveuglément.
Vous régnes sur mon âme sToeque trop d'empire;
Pour le moins un moment souATres que je respire...
Boileau trouvait dans ces paroles une généalogie des tm-
patients désirs d'une illustre vengeance, qui étaient les
enfants impétueux d'un noble ressentiment, et qui éttAent
embrassés par une douleur séduite, H. D.
SUBRÉCâRGDB (d'un mot espagnol qui signifie pre-
posé au chargement)^ nom donné autrefois h l'agent
chargé, dans chaque comptoir des colonies espagnoles,
d'acheter et de vendre les marchandises, et aujourd'hui
au préposé choisi par un armateur pour veiller, sur le
navire, à la conservation des marcnandises formant la
cargaison, pour en rendre compte aux divers chargeurs
ou expéditeurs, pour faire les achats d'objets destinés au
retour. Le subrécargue engage son armateur de la même
manière qu'un commis engage son commettant.
SUBRËPTION. K.Obreptioii.
SUBROGATION (du latin subrogare, mettre à la place),
mot qui désignait, chez les anciens Romains, tout articio
ajouté à une loi. Il s'applique aujourd'hui à une fiction
de Droit par laquelle une chose ou une personne est mise
à la place d*une autre. La transmission qu'un créancier
fait de tous ses droits et actions contre un débiteur, à
celui qui le désintéresse, est une subrogation. La subro-
gation peut être conventionnelle, légale ou judiciaire
{CodeNapoL, art. 1240-52; Code de Procéd.^ 612, 721).
Elle diffère de la cession, en ce qu'elle peut avoir lieu à
rinsu do débiteur et par la seule volonté du créancier.
V. Mourlon, Traité de la subrogation, 1848, in -8°;
A. Bertauld, De la subrogation à l'hypothèque légale des
femmes mariées, 1853, in-8<^; Gauthier, TS'aitéde la sub-
rogation de personnes, ou du payement avec subroga»
tion, 1853, in-8«.
SUBROGÉ TUTEUR. V. Tuteor.
SUBSIDES (du latin subsidium, secours), impôts que
les peuples payent au chef de l'État pour subvenir aux
besoins publics. Autrefois, on distinguait l'impôt propre-
ment dit, établi par le gouvernement, et les subsides,
réglés par la nation et donnés de son plein gré. Le se-
cours d'argent qu'un État donne à un autre, son allié;
en vertu de traités faits entre eux, se nomme également
subside. — En termes de Droit canonique, on appelait
jadis subsides caritatifs certains droits perçus par les
évêques qui allaient à des conciles ou faisaient d'autres
voyages pour l'utilité de leurs églises; le payement en
était fait à titre de charité {caritas),
SUBSIDIAIRE, en termes de Droit, se dit de ce qui n'a
lieu que comme un dernier recours, une dernière res-
source : ainsi, des conclusions subsidiaires, V. Couclo-
SlOlfS.
SUBSISTANCES lilLITAIRES, partie du service des
armées, consistant à pourvoir h leur alimentation, et
dans laquelle on fait rentrer tout ce qui est relatif k l'ha-
billement et à réquipement des troupes. Ce service est
confié an corps de l'Intendance militaire : en temps da
SUD
1674
SUC
(pierre, les Foumtsseurs ou Munitionnaires lui viennent
en aide. — Un Boldat est «n tubêuiancê dans un régi-
ment, quand 11 y est nourri et soldé, en attendant qu*il
puisse rejoindre le corps auquel il appartient et dont les
circonstances Tont éloigné.
SUBSTANCE, du latin sub, sous, et stare^ se tenir, ou
stemi, être étendu ; d*où substantia, mot d'origine sco-
lastique. La substance est donc une réalité que nous con-
cevons dans tous les êtres, revêtant les qualités qu'ils
possèdent : c'est le support, ou, comme on disait encore
dans l'École, le st4bstratum de toutes les manières d'être.
Cette concepUon se fait en nous par une loi appelée loi
d$ la substance, en vertu de laquelle nous concevons fata-
lement que tout adjectif suppose un substantif, tout attri-
but un sujet, tout mocitf une substance. C'est par l'idée que
nous prenons d'abord de notre fnot, que nous acx[uérons
celle de substance, et, par-dessus tout, celle du mot comme
cause. Pour causer, il faut être, et, en s'affîrmant comme
cause, le mot s'affirme comme substance. Les qualités des
corps nous révèlent de même qu'il y a une réalité qui
les revêt. S'il est impossible de ne pas concevoir sous
les modes une réalité substantielle qui les supporte, il
est impossible de la connaître en elle-même. C'est ce que
tentèrent les premiers philosophes en cherchant à ex-
pliquer la nature des choses. Aristote, en disant que la
substance peut s'entendre ou de la matière, ou de la
forme, ou du composé des deux, ne fut pas beaucoup plus
heureux. En comparant la substance aux phénomènes, on
fut amené à dire, par opposition h Vaccident, qu'elle est
ce qui existe par soi-même. Cotte définition n'était pas
sans danger, car on ne peut nier la substance dans les
êtres contingents; ceux-ci n'existant point par eux-
mêmes, ils ne seraient plus que des modes de l'être, et
on arriverait au panthéisme. Au-dessus des substances
contingentes et flnics, il faut reconnaître une substance
nécessaire, qui est aussi la cause nécessaire et première,
Dieu. Par là sont repoussés le panthéisme, qui nie la per-
sonnalité dans l'homme ; le sensualisme, qui ne voit dans
la substance spirituelle qu'un assemblage de qualités sen-
sibles ; l'idéalisme de Kant, qui ne voit dans la substance
qu'une forme de la pensée, ainsi que celui de Berkeley,
qui met en question la réalité de la matière. R.
SUBSTANTIF, variété du nom, qui s'appelle ainsi lors-
qu'il signifie quelque substance, quelque être ayant une
existence propre. Tels sont : esprit, corpt, plante, arbre,
pomme, fruit, grain, etc. (K. Nom). — On donne aussi
cette dénomination au verbe être, parce qu'il exprime par
lui-même l'affirmation de l'existence d'une substance
sans égard à aucun attribut : l'attribut doit être exprimé
ensuite à part (Dieu est — juste). Le mot substantif
s'oppose en ce cas h, attributif, nom donné à tout verlie
qui exprime tout à la fois en un seul et même mot l'af-
firmation de l'existence d'une substance et l'affirmation
de l'attribut qui lui convient. Le verbe substantif s'ap-
pelle aussi verbe abstrait. P.
SUBSTITUT, magistrat chargé de remplacer au parquet
le procureur général ou le procureur impérial. Les sub-
stituts sont nommés par le chef de l'État : ceux des pro-
cureurs généraux doivent avoir 25 ans, ceux des procu-
reurs impériaux 21.
SUBSTITUTION (du latin fubêtituêre, mettre à la
place), en termes de Droit, disposition «n vertu de la-
quelle on appelle à une succession un ou plusieurs héri-
tiers après celui qu'on a institué, de manière que celui-ci,
qui doit Jouir des biens le premier, ne peut les aliéner.
On nomme grevé celui qui reçoit ainsi à diarçe de con-
server et de rendre à sa mort; appHé, celui qui doit
succéder à Iliéritier premier institué. Les substitutions,
permises dans le Droit romain et dans l'ancien Droit fran-
çais, furent prohibées par la loi du 14 novembre 1702,
puis par le Code Napoléon (art. 896) : car elles avalent
l'inconvénient d'enrichir une branche de la famille au
préjudice des antres, d'exposer ceux qui contractaient
avec OD grevé à la perte de leurs créances après ta mort,
et de nuire à la propriété elle-même, dont le gnevé,
simple usufruitier, cherchait à tirer le plus de produits
possible. Toutefois, notre loi permet aux pères et aux
mères de donner à un ou plusieurs de leurs «ofants tout
ou partie de la nuotiié éUsponiMe {V.cê mot) de tours
biens, à charge de les rendre aux enfants née ov à naître,
au premier degré seulement, des donataires. La même
disposition est permise 4 celui qui ne laisse que des
frères ou des sœurs, en favear de leurs enfants nés ou 4
naître, «tissl a» 1* degré «eulement. La loi du 17 mai
lé26 a atitorisé pour toute personne la euèsdtutloii Jus-
«{u'aii î*degré ; on a touIu arrêter ainsi ta division CouJ<Htn
croissante de la propriété. La prohibitioR de substiiasr
n'est maintenue qu'en ce qu'il n'est pas permis de grever
le donataire de la charge de rendre à un étranger; ce
n'est qu'au profit des enfants que la substitution peut
avoir heu. -^ La loi n'assimile pas à la substitution la
disposition par laquelle un tiers serait appelé à reoueillir
un legs, dans le cas où l'héritier ne pourrait en profiter,
et où la disposition deviendrait caduque à son égard :
c'est la Substitution vulgaire. Mais elle interdit le genre
de substitution cfu'on nomme Fidéir-commis {V. ee mot).
V. Rolland de Villargues, Des Substitutions prohibées par
le Codé civil, 3> édit., 1833, in-S»; Saint- Ëspèa Lescot,
Traité des Substitutions prohibées, 1849, in-i^
SDB8TITDT10N, tormo de Musique, V. Accoan.
SUBSTlTimOll &■ DBTTB ET DE DéBITEDE. F. NOVATIOU.
SDBSTrruTioN DB PART OD d'bnpant, Bction do remplacer
un enfant mort-né ou dont le sexe ne répond point aux
vues que l'on peut avoir, par un enfant vivant ou par un
enfant d'un sexe différent. Elle est punie de la reclusîoc
{Code pénal, art. 345).
SUBSTITUTION BB PERSORNB, délit quI oonsiste à sa pré*
senter sous le nom d'un autre. Il a été prévu et puni par
la loi du 31 mars 1832 sur le recrutement militaire.
SUBSTRATUM. V. Substancb.
SDBSTRATOH ( du Istîn sub , dcssous, et structus, eon-
struit), construction souterraine ou qui en supporte une
autre. Le mot s'emploie surtout en pariant des éditioes
antiques, sar les restes desquels on a élevé des construc-
tions modemet.
8UBUCULA. 1 V. ces mots dans notre Pietionw
8UBURBANUM. I noire de tiiogr, et d'Uiitoire.
SUBVENTION (du latin êubvenire, venir an seeour»),
secours en argent, accordé soit par les particuliers i
l'État dans un cas pressant (c'est la subvention de guerre)^
soit par l'État à certains établissements, à oertaines en*'
treprisea d'intérêt publie, par exemple aux Lycées, à
quelques théâtres, à des entreprises maritimes, à des
journaux même. — Au xviii« siècle, on appela Sub^oên^
tîon territoriale un impôt que le ministre De Calonne
voulut établir sur la propriété foncière.
SUCCADE6, vieux mot désignant les dragéM* las
épices qu'on servait dans le drageoir.
SUCCESSIFS (Degrés), en termes de Jurispnidenea,
df^és do parenté dans lesquels on peut hériter.
SUCCESSIFS (Droits), sa dit des droits qu'on peut aroir k
un héritage, et de l'impôt qu'on doit payer sur uaa sue*
cession à recueillir.
SUCCESSION (du latin suceedere, prendre la place de\
mot qui désigne a la fols la totalité des biaas, droits cl
actions dont une personne est investie aetivemeat ou
passivement au moment de son décès, et leur transmis-
sion à une ou plusieurs personnes qui sunivent. Ls
Cods Napoléon distingue 1 1* la sfieossstoii ooniraciudU
réglée par le contrat de mariage des époux, qui a'aitri-
buent, ou attribuent aux enfants à naître de leur mariage,
une partie ou la totalité de la quotité dispooîMo dans les
biens qu'ils laisseront au jour de leur décès (V. Qnonvl
nispoiifBi.E); ^* la moMSfftofi testamentaire, c^d. dé-
férée par teetam^nt (V.ee mot) ; essertielleeseat révoeaUe,
elle diffère en cela As la précédente; 3^ la sueoetsùm légi-
time ou ab intestat, transmise par la force même de la loi,
en l'absence de dispositions contraireade la part 4u défunt
{V. Ab IfiTESTAT). Une saocessioB légitime est réguiière
quand elle est déférée aux parents lotîmes du défunt ;
irréguiière, lorsqu'elle est attribuée, par défaut diiéru
tiers légitimes, à des personnes qui n'avaient fief et ee
auelque aorte «n titra régulier pour exiger eatte mtHknm
en, par exemple aux enfants DKUirels, à féposix eurvl»
vant, ottàrÉtat.
Le partage d'une euceesetoD pouvant causer des dis*
eussions 4ans les familles , la loi a donné m. pète le
droit de répartir de son vivant ses biens entra ses ne»
fants t e'est ee qu'on nomme le partage d'eueemdMmiê. Il
doit être fait dans la ferme des déflations entra vifs eu
des testaments; il n'est pas nécessaire qo^l compronng
la totalité des Mens, owls 11 fkut que tous les héritiers
présomptifs soient appelés à y prendre parts eeu des
biens qui n'auraient p«n dté eeinjMls dana le psita^e aeiit
partagés conformément à la loi. Le partage fait par Tea-
cendant peut être attaqué pour cause de lésien de pins
du quart, on s'il réwlie des diepositiene faites par ppéi-
ciput que l'un des copartageents aurait un avantage |d«s
grand que la loi ne le permet. Les frais de cette action
sont avancés par celai qui Itntente, et Us nesteot à ea
<4iarge «'il enooembe dans ea demande.
Penr «ente succession, il faut d'abord Axer fépe^pfte de
suc
1675
SUE
roaverture et le» formalité» & remplir pour que la dé-
volution des biens s*opère par la saisine de Thérltier
( V. Saisine). L'ouverture de la succession est fixée, en
général, par le fait du décès, et par l'acte qui en a été
transcrit sur les registres de l'état civil ; c*est à l'héritier
qu'il appartient de procéder & l'établissement de cette
preuve du décès. Mais l'ouverture de la succession peut
aussi résulter d'une fiction de la loi, aui, dans certaines
circonstances, suppose mort celui qui est ou peut être
rivant, comme cela arrivait, avant 1854, dans le cas d'une
condamnation à la vnort civile ( V. ce mot)^ et comme
cela arrive toujours dans le cas d'une déclaration d^ab-
sence ( V. ce mot). Quand il y a eu omission de la décla-
ration de décès, ou impossibilité de la faire, il faut
s'adresser à la justice; les tribunaux apprécient les cir-
constances, et prononcent selon l'équité sur les droits
de chacun. On a seulement posé quelques règles, par
exemple : si plusieurs personnes, respectivement appe-
lées à la succession l'une de l'autre, périssent dans un
môme événement, et si l'on ne peut reconnaître laquelle
est décédée. la première, la présomption de survie est
déterminée par les circonstances du fait, et, à leur dé-
faut, par la force de l'&ge et du sexe; si ceux qui ont péri
ensemble avaient moins de 15 ans, le plus &gé sera pré-
sumé avoir survécu; s'ils étaient tous au-dessus de
00 ans, la présomption sera en faveur du moins &gé; si
les uns avaient moins de 15 ans et les autres plus de 60,
les premiers seront présumés avoir survécu ; s'ils avaient
tous 15 ans accomplis et moins de 60, le m&le est présumé
avoir survécu lorsqu'il y a égalité d'ùge ou que la diffé-
rence n'excède pas une année, et, s'ils étaient du môn^c
sexe, la présomption de survie est en faveur du plus
Jeune.
La succession étant ouverte, il faut savoir à qui elle
est dévolue. Comme il est de principe que la transmission
ne peut s'opérer que du mort au vif, celui-là seul est
habile à succéder qui était né à l'époque du décès de son
auteur, ou tout au moins qui était conçu à cette époque el
qui est né viable; celui qui n'est pas né viable est réputé
n'être jamais né. Si reniant n'est pas né viable, il n'a pu
rien recueillir; s*il a vécu un seul moment, cela a sufh
pour qu'il ait dû recevoir et transmettre tous les droits
qui se sont ouverts en sa faveur, il a une succession qui
s'ouvre et des héritiers qui recueillent de son chef.
L'héritier, étant subrogé dans les droits du défunt, re-
cueille ses biens, mais aussi ses charges, comme s'il avait
contracté les mômes obligations. Mais la loi lui accorde
la faculté de renoncer à la succession (K Renonciation),
ou celle de ne l'accepter que sous bénéfice d'inventaire
{V, ce mot).
L'ordre des successions est déterminé d*après le droit
de famille, dans un rapport direct avec les liens de pa-
renté (V, ce mot). Les descendants légitimes en ligne
directe sont préférés à tous autres héritiers ; ils excluent
les ascendants et tous les parents collatéraux. Après les
descendants^ viennent en seconde ligne les ascendants,
qui ont droit h une réserve, mais qui pour cela n'ex-
cluent, parmi les collatéraux, ni les frères ni les sœurs;
ils prennent tous part concurremment h la succession.
En troisième ordre sont les parents collatéraux, autres
que les frères et les sœurs : ici l'on ne fait que deux
parts de la succession, attribuées aux lignes paternelle et
maternelle; dans chacune de ces lignes, le parent le plus
proche en degré prend toute la portion ; s'il y a plusieurs
parents au même degré, ils partagent par tète. Le droit
de succéder ne s'étend pas au delà du 12* degré; et, s'il
ne se trouve pas, dans l'une des lignes^ de parent au de-
fxé successible, c*est à l'autre ligne que le tout appartient
(V. Dévolution).
Une fiction de Droit permet d'appeler les enfants dos
frères et sœurs à partager avec leur oncle ou leur tante?,
comme s'ils étaient de même degré, quoique dans l'ordre
de la famille ils soient placés a un degré plus éloigné.
C'est ce qu'on nomme la représentation; elle a pour effet
de faire entrer les représentants dans la place, dans le
degré et dans le droit du représenté. Du reste, les frères
et sœurs, ou oncles et neveux, tantes et nièces, partagent
entre eux par tète, si les frères et sœurs sont de même
lit, et sous la condition que les enfants d'un frère ou
d'une sœur ne compteront que pour une seule tète. Si
les frères et sœurs sont de lits différents, la part qui leur
est attribuée se divise en deux portions pour être distri-
buées aux deux lignes paternel le et maternelle. Les frères
et sœurs germains qui appartiennent aux deux ligne?
viennent au partage dans chacune des deux portions ; les
frères et sœurs consanguins et utérins ne viennent cba*
cun que dans leur ligne seulement. Les enfants qui se
f présentent par représentation exercent dans chacune des
ignés les droits qui auraient été attribués à leur père ou
à leur mère. La représentation est admise en ligne di-
recte & l'infini au profit des descendants; elle ne Test
Jamais au profit des ascendants, parmi lesquels le plus
proche exclut toujours le plus éloigné.
La loi a déterminé certains cas où l'on est frappé d'in-
capacité en matière de succession (V. Indigne).
On nomme succession vacante une succession aban-
donnée par ceux qui auraient droit de la recueillir. Sur
la réclamation des ayants droit, ou sur la réquisition
du procureur impérial, le tribunal de 1'* instance nomme
un curateur à cette succession. Ce curateur a l'adminis-
tration des biens, dont il fait constater l'état par un in-
ventaire ; c'est contre lui que peuvent être dirigées les
actions qui intéressent la succession, et il en exerce et
en poursuit les droits. Il ne peut faire que des actes de
pure administration, sans qu'il lui soit permis do faire
des transactions ou des compromis, encore moins d'alié-
ner et d'hypothécpier. Il ne doit toucher aucuns deniers,
mais les faire verser dans la caisse des Dépôts et Consi-
gnations; il ne peut acquitter aucune dépense. Il faut
qu'il soit toujours prêt à rendre compte de sa gestion.
Toute succession attribue aux héritiers une propriété
nouvelle, pour laquelle ils sont tenus do payer des droits
de mutation (V. ce mot).
Le droit de succéder, conséquence du droit de pro-
priété (V. ce mot)^ a été reconnu chez tous les peuples
civilisés; mais le mode d'exercice de ce droit a été très-
variable. Tantôt la faculté de tester a été accordée, tantôt
on l'a refusée ou restreinte. Ici le partage s'est fait éga-
lement entre tous les enfants; là on ne voulut y admettre
que les m⩽ ailleurs, tous les biens furent réservés à
1 aîné. De nos Jours, le droit même de succéder a été mis
en question par certaines écoles socialistes, notamment
par les Salnt-SImoniens.
V. Martin, Traité des successions, 1811, 2 vol. in-8»;
Favard de Langlade, Manuel pour l'ouverture et le par-
tage des successions, 1812, in-8°; Pailliet, Législation et
jurisprudence des swcessions, 1823, 3 vol. in-8°; Malpel,
Traité élémentaire des successions, 1826, in-8'; Fouet de
Confians, Esprit de la jurisprudence des successions,
1839, in-8^; Chabot, Commentaii^e sur la loi des succes-
sions, i^Oy^ vol. in-8<^; DesfTéSiViZypictionnaire général
des successions, 1841, gr. ^-8"; Richefort, Traité de
Vétat des familles légitimes et naturelles, et des succes-
sions irrégulières, 1842, S vol. in-8«; Poujol, Traité des
successions, 1842, 2 vol. ln-8°; Genty, Traité des par-
tages d'ascendants, 1850, in-8®; Nicolas, Manuel du par-
tage des successions, 1855, in-8o; Vazeille, Résumé et
conférence des Commentaires du Code civil, sur les suc-
cessions, donations et testaments^ 1847, 3 vol. in-8°;
Dulruc, Traité du partage des successions, 1855, in-8°;
Demolombej Traité des successions, i^bl-^0^ 3 vol. in-8°;
Gans, Histoire du droit de succession en France au moyen
âge, traduite de l'allemand par De Loménie, 1845, in-12.
SUCCURSALE ( du latin succurrere, secourir, aider),
se dit, en général, de tout établissement subordonné à
un autre et créé pour lui venir en aide. Ainsi, les Ban-
ques, les Caisses d'épargne, les Monts-de-Piété, ont des
succursales. •— Dans une acception toute spéciale, une
Succursale est une église où le service paroissial est fait
par un prêtre qui n'a que le titre de desservant.
SUDARIUM. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio*
graphie et d'Histoire.
SUDATORIUM. V, Bains.
SUÈDE (Les Arts en). Pendant plusieurs siècles, les Sué-
dois demeurèrent presque complètement étrangers aux
beaux-arts i les sculptures, d'ailleurs assez rares, de leurs
monuments étaient exécutées par des artistes venus de
Flandre et d'Allemagne, et la fameuse cathédrale d'Up-
sal, bâtie sur le modèle de Notre-Dame de Paris, fut
commencée par un architecte parisien, Bonœil ou Bon-
ncuil. On avait construit déjà la cathédrale de Lund
(10I2-'1123), décrite de nos Jours par Brunius, et celle
de LinkOping (1134-1151). M. Mandelgrén a publié, en
1802, un important ouvrage sur les anciens monu-
ments d'architecture Scandinave. -^ La Réformation du
XVI* siècle, avec ses tendances iconoclastes, n'était pas de
nature h encourager les arts. Mais quand les Suédois
prirent part à la guerre de trente ans, ils rencontrèrent
on Allemagne une foule de chefs-d'œuvre^ dont la vue
éveilla leur goût et excita leur émulation. La reine Chris-
tine commença à former des collections de tableaux, de
sculptures et de médailles; toutefois, pendant son règjDC,
SUE
1676
SUE
les arts furent encore cultivés par des étrangers : Tarchi-
lecture, par Simon de La Vallée; la peinture, par David
Beck, Munichhoffen et Bourdalot. Charles XI appela è
son tour auprès de lui les sculpteurs Chaveau et Laporte,
auxquels on attribue les lions gigantesques placés de-
vant le ch&teau royal de Stockholm, et les deux Renom-
mées qui surmontent le grand portail du Nord. Alors aussi
les Suédois se livrèrent enfin avec quelque succès à
rétude des beaux-arts : Olor RQdbeck devint bon Archi-
tecte et bon dessinateur; Nioodème de Tessin éleva le
ch&teau de Stockholm, celui de Drottningholm, la cathé-
drale de Calmar, et le tombeau de Benoit Oxenstierna.à
Upsal ; le peintre Ehrenstrahl, qui alla se perrcctionner
en Italie sous Pierre de Cortone, fit pour la grande église
de Stockholm un Jugement dernier dont la réputation
n'a point été usurpée ; Philippe Lcmbke peignit les ba-
tailles de Charles X, d'après les dessins du comte deDahl-
berg ; Pilo réussit assez bien à imiter Téniers, et forma à
.V)n tour Wertmuller et AkerstrOm^ Sâfvenborn, élève
de notre Vernet, se distingua comme paysagiste; HofT-
man se rendit célèbre par son tableau du maître-autel
de réglise de S'*-Claire; enfin Hillerstrôm, après avoir
étudié aux Gobelins de Paris, peignit de charmantes
scènes comiques de la vie domestique. — Au xviii* siècle,
le sculpteur français Bouchardon vint passer deux an-
nées en Suède, où il exécuta les médaillons des rois de
ce pa3^s ; ses exemples et ses conseils donnèrent une nou-
velle impulsion aux arts. On vit bientôt paraître un
grand artiste suédois, Sergell, élève d'un autre Français,
Larchevêque : il sculpta d'abord un Faune, qui décore
aujourd'hui le palais du Luxembourg à Paris, puis donna
la statue du Spartiate Olhryadès, le groupe de Mars en-
levant Vénus blessée par Diomède, celui de Diomède en-
levant le Palladium, les statues en bronze de GtuUwe lU
et du maréchal A^Éhrensvœrdt un bas-relief représen-
tant la Résurrection du Christ, les mausolées de Des-
cartes, de Gustave 111 et de Linné, enfin un Cupidon et
une Psyché, qui sont deux chefs-d'œuvre. — Dans notre
xi\" siècle, la Suède a produit le peintre d'histoire Wcb-
tin, et les sculpteurs Gdthe, BystrOm et Fogelberg. On a
de Gothc une statue colossale de Méléagre et un flac-
chus. BystrOm a laissé un bas-relief représentant la Mère
des Gracques, un Hercule allaité par Junon, des statues de
Vénus et de V Amour, une statue colossale de Charles XUl^
une foule de tombeaux, etc. Quant à Fogelberg, on lui
doit un Mercure, des statues d'Odtn, de Thor et de
Freya, etc.
La Suède a eu de bonne heure des mélodies natio-
nales : composées toutes dans le mode mineur, elles sont
remarquables par leur douceur et leur mélancolie, et les
compositeurs modernes les ont souvent prises pour
thèmes de leurs fantaisies variées. Gergev et Afzelius
ont publié une collection de chants populaires , avec les
anciennes m^odies arrangées par Hefner d' Upsal. Les
Suédois avaient, dès les temps reculés, des harpes et des
violons; nuds ces instruments, entre les mains des
paysans, sont demeurés fort imparfaits. Jusqu'au temps
de Gustave Wasa, les musiciens furent considérés comme
inf&mes et dangereux à l'État : peu d'années avant ce
prince, il existait une loi qui les bannissait du royaume
et permettait môme de les tuer partout où on les rencon-
trait. La musique n'est réellement goûtée et cultivée au-
jourd'hui que parmi les hautes classes et les classes in-
termédiaires de la nation; ses progrès ont été l'effet
des relations de la Suède avec les pays du Sud. Une
Académie de musique a été fondée par Gustave III à
Stockholm en 1772, et il y a dans cette ville un thé&tro
où l'on représente les opéras italiens et les opéras fran-
çais. Les compositeurs les plus estimés de nos jours sont
Bervald, Crusell , AhlstrOm, et le comte Skjoldebrand ;
mais leur renommée ne s'est point étendue dîans le reste
de l'Europe. La Suède a produit une grande cantatrice,
Jenny Lind. B.
SUÉDOISE (Langue^. La Suède fit usage, dans les pre-
miers siècles de son histoire, et jusqu'au xiv* environ,
de la môme langue qu'on parlait dans tout le reste du
Nord et ^u'on écrivit après l'époque de la conversion au
christianisme ; c'est la langue norrène, conservée dans
les anciens po€mes des deux Eddas, dans les inscriptions
runiques datant de l'époque chrétienne, et dans les Sagas
islandaises les plus anciennes ; l'Islande a parlé plus
longtemps que !e reste du Nord cet idiome, et sa langue
ne s'en éloigne môme pas beaucoup encore aujourd'hui :
un paysan islandais comprend aisément de nos jours les
anciens livres qu'un Danois, un Suédois ou un Norrégiea
• de la peine à interpréter. Au xiv* siècle, les idiomes
suédois et danois se sont dégagés du tronc commun, avec
leurs différences essentielles. Les trois caractères distînc-
tifs des langues Scandinaves se retrouvent dans le sué-
dois : l'article défini se place à la fin du substantif, avec
lequel il fait corps; le passif se marque par un simple
changement de désinence; enfin l'infinitif actif se tei^
mine toujours par une voyelle. Les substantifs et les ad-
jectifs sont susceptibles des trois genres ; mais, tandis
que les substantifs n'ont que.deux cas, dont l'un, le gé-
nitif, a pour caractéristique une s finale, les adjertifs ont
un 3* cas, qui représente à la fois l'accusatif et l'ablatif.
Il y a 4 déclinaisons , 4 conjugaisons, et 5 verbes auxi>
liaires. Le suédois a puisé à la source finnoise un cer-
tain nombre d'expressions relatives à la pèche et aux
travaux du ménage ; il a fait de plus nombreux et de
plus importants emprunts à l'allemand, soit au moyen
âge, où, sous les comtes de Holstein , il y eut souvent
des troupes allemandes en Suède, soit lorsque ilorissait la
Hanse, soit pendant la Réformation et la guerre de trente
ans. Il se distingue par l'énergie et l'éclat de sa pronon-
ciation , surtout à mesure qu'on pénètre vers le Nord.
La langue polie et écrite ne formait autrefois que le dia-
lecte particulier de la province d'Upland, où se trouTe la
capitale. Les linguistes rattachent à ce dialecte les idiome
secondaires de la Dalécarlie et du Norrland, et reconnais-
sent un autre dialecte, le suédois-gothique, dominant en
Gothie, et qui se rapproche plus que l'autre de l'alle-
mand. Les lettres gothiques se sont longtemps conser-
vées dans l'écriture suédoise : l'alphabet actuel diffère de
l'allemand par l'absence du c/i, auquel se substitue or-
dinairement le k, et l'emploi d'une lettre spéciale, à,
2U1 se prononce comme un o très-ouvert. V, Jonas Peter,
^ictionarium tatino-stieco-germanicum , Linkuping,
1640, in-fol.; Velerius, Index Unguœ véterù scytho-
scandicœ seugothicœ, Upsal, 1691, in-8<*; Spegel, Glos-
xarium stteco-^othicum , Londres, 1712, in-4"; M511er,
Dictionnaire suédois- français, Stockholm et Upsal, 1754,
in-4<>; Ihre, Glossarîum sueco-^othicum , Upsal, 1769,
2 vol. in-fol.; Bjorkegren, DictionwUre français-sué-
dots, Stockholm, 1705, 3 vol. in-4'*; Eric Nordforss,
Dictionnaire suédots-françats, ibid., 1805, 2 vol. in-8";
Delen, Dictionnaire français-suédois, ibid., 1814, 2 vol.
in-4°; Hof, Dialectus westro-gothica, Holm, 1772, in-8<*;
Suenon Tiliander, Grammaiiea g^rmono-svetica, Stock-
holm, 1691, in-12; Nils-Tjallmann, Grammaiiea sue-
cana, ibid., 1696, in-8o; Sahistedt, Grammaire suédoise,
en allem., Lubeck et Leipzig, 1796, in-12; Rydquist,
Grammaire suédoise, en suédois, Stockholm, 1852.
sréDoiSE (Littérature). A vrai dire, il n'y a de littéra-
ture suédoise qu'à partir de la Réformation. Quelques
traductions de nos poômes français du moyen ftge, et de
fragments de la Bible, quelques éditions d'anciennes
lois, enfin les chants populaires, tels sont les plus an-
ciens monuments de la langue. Les traductions nouvelles
des textes sacrés, faites par les prédicateurs de la Ré-
forme, ont, là comme partout, servi particulièrement à
émonder et fixer la langue vulgaire. Les œuvres drama-
tiques sont assurément au nombre de celles qui consta-
tent le mieux l'existence d'une littérature. Or, il est cu-
rieux de remarquer que les premiers essais dramatiqQes
en langue suédoise coïncident avec les traductions popu-
laires de la Bible par les réformateurs : la comédie de
Tobie, d'Olaûs Pétri, est de 1550, et les traductions du
Nouveau et de l'Ancien Testament par Laurentius An-
dréas et Laurentius Pétri sont de 1526 et de 1541. La
traduction de toute la Bible par Laurentius Pétri a sur-
tout exercé une grande influence sur la langue. Bientôt
après, Jean Messenius (mort en 1637) se proposa de
traiter toute l'histoire suédoise en 50 comédies ou tragé-
dies; il n'en écrivit que 6, assez platement. Son fils
Arnold l'imita (mort en 1651). Jean réussit mieux comme
historien, et sa Scandia illustrata (1620-1632), écrite en
latin, est encore aujourd'hui une source importante pour
l'histoire suédoise. — Le xvi* siècle fut d'ailleurs extrê-
mement fécond pour la Suède en œuvres historiques. On
vit paraître (l'imprimerie avait été introduite vers 1483;
révoque Brask avait établi la première presse à Unkô-
ping) de nombreuses chroniques ; les rois Charles IX et
Gustave-Adolphe furent eux-mêmes historiens; Erik
Gôransson Tegel (mort en 1636) donna une histoire de
Gustave I*'et d'Éric XIV. L'archevêque Johanues Magous
(mort en 1541) écrivit en latin une curieuse Histoire de
tous les rois des Goths et des Suédois, et son finère,
Olatts Magnus (mort en 1558), une Histoire des natiom
septentrionales, d'une égale importance, et aussi en latio.
Ainsi se montrait, au début môme de la littérature sué-
SUÉ
1677
SUÉ
doiso« la prédilection qui devait 8*y montrer sans cesse
pour les études historiques.
Vers le milieu du ivii* siècle, un grand progrès s'ac-
complit : Gustave-Adolphe a réformé TUniversité d*Up-
sal ; Christine a créé de nombreux gymnases ; une nou-
velle Université est fondée à Lund, dans cette province
de Scanie qui est précisément alors réunie à la Suède,
et de riches Mécènes, comme le célèbre Aiel Oxens-
tierna, Pierre Brahé le jeune, Magnus Gabriel de La
Gardie, suscitent des savants et des littérateurs. La Suède,
devenue si grande alors par la politique étrangère, aspire
au même progrès dans la sphère intellectuelle et morale.
Les deux principaux noms , pendant la seconde moitié
du xvii* siècle, sont ceux de George Stiernhielm et d'Olof
RQdbeck. Stiernhielm (1598-1672) a créé le style poétique
par son poème d'Hercule, ses Chants héroiques et de
fête, et ses Hallets, etc., composés pour la cour bril-
lante de Christine, et il a eu de nombreux élèves : Sa-
muel Columbus , qui a écrit des psaumes et des épi-
grammes ; Gustaf Rosenhane, qui a composé des chants
d'amour à la manière italienne ; Lasse Lucidor, poëte
désordonné et passionné; Haquin Spegcl, archevêque
d*CpsaI, poëte religieux. Olof RQdbeck, mort en 1702, a
été à la i^is naturaliste, anatomiste, botaniste, ornitho-
logiste; mais ce qui rappelle surtout aujourd'hui son
souvenir, c'est son grand ouvrage de VAtlantica, où il
cherche à faire de la Suède dans le passé le berceau de
toute civilisation ; il s'est montré là, avec un pareil excès
de qualités et de défauts, archéologae, antiquaire, histo-
rien , philologue fort érudit, et rêveur utopiste. Les
mêmes rêveries patriotiques avaient animé Olof Vere-
lius, mort en lo82, et ainsi s'était fondée toute une
école, dans les rangs de laauelle il faut surtout nommer
PeringskiOld, mort en 1720. — La littérature Juridique
de la même époque a produit Loccenius, mort en 1677,
auteur de nombreux ouvrages {AntiquitCLtes sveo-gothicœ;
De jure marilimo; Lexicon juris sve(hgothict , etc.),
et StiernhOôk, mort en 1675, auteur d*un livre resté cé-
lèbre dans le Nord pour la sûreté de ses vues sur le passé
de la Suède {De juré Sueonum et Gothorum vetusto^
1672 ). — La science du Droit public a donné le Jus nor
turcB et gentium de Puffendoif, qui habita la Suède de
1668 à 1688. — I^es sciences naturelles commençaient
aussi à ^tre étudiées avec succès : il su/fit de nommer,
ici encore, Olof Radbeck.
La Suède parut vouloir racheter par l'essor des lettres
les humiliations de l'époque dite de la liberté, qu'on
nommerait mieux l'époque des partis, depuis la mort de
Charles XII jusqu'au coup d'état de Gustave ni; le nom
de ce dernier roi suffit ensuite h désigner toute une
époque de développement intellectuel, artistique et litté-
raire. Dans la première de ces deux périodes paraissent
avant tout des Mécènes comme le comte de Tessin, HOp-
ken, Scheffer, Bielke, etc., et Louise-Ulrique elle-même.
Dès 1710, une Société des sciences s'était formée à
Upsal, qui devait être honorée par E. Benzelius, Polhem ,
et le fameux Svedenborg; c'est toutefois à V Académie
des Sciences^ fondée en 1739 à Stockholm, que la Suède
est vraiment redevable de sa gloire scientifique. Parmi
les fondateurs mêmes de cette Académie, on rencontre
tout d'abord Charles de Linné (1707-1778), qui forma de
nombreux élèves : Hasselquist , voyageur en Palestine ;
Forsk&l, Toyageur en Arabie; Sparrman, navigateur au-
tour du monde; Thunberg, voyageur au Japon, etc. Tor-
bem Bergman (mort en 1784), J.-G. Wallerius et C.-V.
Scheele se distinguent comme chimistes ; Rosén von Ro-
lenstein, Olof Akrell et Bierkén, comme médecins et chi-
rurgiens; Anders Celsius (1701-1744), comme astronome;
Samuel Klingenstiema et Melanderhielm, comme ma-
thématiciens. C'est l'époque du grand ingénieur Polhem ,
constructeur du port de Carlscrona et du canal de Troll-
hâtte ; et enfin de Svedenborg (mort en 1772), philo-
sophe, poète latin, minéralogiste, zoologiste, astronome,
ingénieur, théosophe et mystique. — Un si grand essor
scientiflope marquait évidemment en Suède un dévelop-
pement intellectuel dont la littérature devait profiter. La
. langue suédoise dut beaucoup à Jean Ihre (mort en 1780),
i professeur à Upsal, éditeur de la Bible gothique d'Ul-
philas, dont le précieux et uniqne manuscrit (Codex ar-
genteus) est à la bibliothèque de l'Université d'Upsal. On
doit encore à Ihre un Glossarium Svioçothicum (1766),
f^m Dictûmnain des dialectes suédois, une Gram-
maire, etc. — Les études historiques suscitaient aussi
des noms devenus célèbres : Olof von Dalin (mort en
i763)« auteur d*nne Histoire duroyaumê de Suéde allant
Jusqu'à Charles IX et écrite d'un stylo pur, mais sans
critique; Sven Lagerbring (mort en 1786), professeur à
Lund, chercheur érudit ; l'évêque Olof Celsius le jeune
(mort en 1794) , auteur d'une histoire de Gustave I*' et
d'Éric XIV, et de la première histoire critique de l'église
suédoise; JQran Norberg, auteur d'une Histoire de
Charles XII , etc. Ajoutons les zélés érudits , comme
Palmskiuld (mort en 1719), dont les innombrables pa-
Eiers, intéressant l'histoire de la Suède, sont conservés à
i bibliothèque d'Upsal [V. Notice et extraits des ma^
nuscrits concernant Vhistoire ou la littérature de la
France qui sont conservés dans les Archives de Suéde,
par A. Geflroy, 1855). Warmhoitz, Giurwell, Loen*
bom, etc. , ont laissé do pareilles collections. L'archéo-
logie comptait déjà BiOrner, GOransson, auteur du célèbre
Bautil, tous les deux élèves de Rûdbeçk. — La poésie
suédoise s'était faite, dès le commencement du siècle ,
l'imitatrice du goût français; elle y fut encouragée encore
par Olof von Dalin, dont les petits morceaux lyriques
contribuèrent à épurer le langage. Bientôt se formèrent
de nombreuses sociétés littéraires ; une des principales
avait pour centre Hedvig&-Charlotte Nordenflycht (morte
en 1763), qui, avec les comtes Creutz (auteur de l'opéra
d'Atis et Camilla) et Gjrllenborg, fonda la société litté-
raire appelée Utile duld. Cette création et plusieurs au-
tres du même genre amenèrent l'institution, par Louise-
Ulrique, de l'Académie des belles-lettres, dont le premier
secrétaire fut Dalin, et dont H&pken, Ihre, Scheffer, etc.,
furent membres. Cette société succomba à la mort de la
reine; mais elle fut renouvelée en 1786, sous le nom,
Qu'elle porte encore aujourd'hui, d' Académie royale des
Belles-Lettres , Histoire et Antiquités. La prédominance
du goût français sur la poésie suédoise fut augmentée
par l'institution de V Académie Suédoise ou des Duc-hud,
qui décerna son premier prix d'éloquence à Gustave III ,
son fondateur (20 mars 1786), devenu simple concurrent.
Cette Académie compta surtout parmi ses membres
J.-U. Kellgren (mort en 1795), auteur dramatique et ly-
rique ; Léopold ; J.-G. Oxenstierna ; C.-G. Adlerbeth ;
Gustave III lui-même, qui écrivit des harangues, des
éloges, et de p&les œuvres dramatiques, comme Gustave
Vasa, 'Gustave- Adolphe et Ebba Brafii, Siri Brahé et
Jean Gyllenstiema, etc. Mais tous ces écrivains, il faut le
dire, noyaient dans leur imitation servile du goût clas-
sique français toute originalité propre, et l'on aime à
signaler à côté d'eux pendant la même époque quelques
« oiseaux sauvages » qui revendiquaient leur indépen-
dance, comme Bellman (1740-1795), dont les chansons,
d'une poésie souvent lyrique, sont encore dans toutes les
mémoires; Bengt ou Benoît Lidner (mort en 1793), poète
passionné; Hallman (mort en 1800), habile auteur co-
mique ; J. Wallenberg (mort en 1778); Anna Maria Lenn-
gren; Thorild enfin (mort en 1808], en même temps
poète et penseur émment. 11 y a ae Toriginalité aussi
dans les deux petits ouvrages de l'amiral Ch.-Aug. Ehrens-
v&rd (mort en 1800) : Voyage en Italie, et Philosophie
des Beaux-Arts ; ce sont les principales œuvres esthéti-
ques de ce temps.
La réaction suédoise contre le goût français date du
commencement du xix* siècle. Elle fut suscitée par At-
terbom, qui fonda, en 1807, à Upsal une société littéraire
nommée Aurora, Les membres de cette société, Palm-
blad , Ingelgren , HammarskOld, etc., initiés au récent
essor de la littérature allemande, exprimèrent leurs idées
dans deux recueils périodiques : le Polyphème et le
Phosphores^ d'où on appliqua aux disciples de cette jeune
école le surnom de Phosphoristes. Ils publièrent en
outre deux recueils : le Journal de littérature suédoise,
et le Calendrier poétique. De cette école procèdent : Wal-
lin, mort archevêque en 1839, poëte et orateur sacré; et
Franzen (1772-1847), né en Finlande, et dont les poésies
idylliques vivent dans toutes les mémoires. — En dehors
des Phosphoristes, aussi bien que de l'école académique,
se forma ensuite VÊcole gothtque, représentée surtout
par E.-G. Geijer (1783-1847), poète et historien, connu
en France par une traduction de son Histoire de Suède.
A côté de lui, et devenu pareillement célèbre en France
même, il faut nommer l'évêque Esaîas Tegnér (1782-
1846), l'auteur de la Saga de Frithiof, d'Axel, etc.
P.-H. ling (1776-1839), qui a donné un poëme sur les Aies,
s'est fait en même temps, par une inspiration semblable
à celle de Jahn en Allemagne, le créateur de la gymnas-
tique suédoise, adoptée aujourd'hui en Angleterre et
dans tout le Nord de l'Allemagne. M. Arv.Aue. Afze-
lius (né en 1785) a publié, de concert avec Ge(jer, les
Chants populairet suédois^ et a écrit dans un ttyle épique
les Traditions du peuple suédois, ouvrage devenu po-
8Ù(3
1678
SUJ
palaîro et non encore terminé. M. B. von Bcskow (né
en 1796) est fort connu car un poème intitulé : Les DeS"
tinées de la Suède, Ch.-Aug. Nikander (mort en 1839),
fioHe lyrique dans le Itoi Enzio, le Lion dans le désert,
es BespérideSf 8*est montré poôte dramatique dans le
Glaive runiqtie, qui a été traduit en français. — Ce n*cst
pas une école très-diiTérente d'inspiration et de principes
3UÎ a produit Atterbom (mort en 1855). auteur de poëmes
istingués comme VOiseau bleu et Vile du bonheur, et
remarquable écrivain en prose dans son grand ouvrage
intitulé : les Poètes et voyants suédois, suite d'études
sur Svedenborg, Ling, etc. Il faut encore nommer Stag-
nelius (mort en 1823), poôte Ivriaue supérieur, et poète
dramatique aussi (son drame des Martijrs a été traduit en
fï-ançais), et Vitalis (Erik Sjôberg, mort en 1828), talent
surtout satirique. — Réservons une place à part pour
M. J.-L. Runeberg, le grand poGte Anlandals ; il a chanté,
dans une belle langue suédoise, avec l'énergie d^un sin-
cère patriotisme et l'élévation d'un vrai sentiment ly-
rique, la résistance de sa patrie contre la conquête russn
de 18Ô9. Les deux parties de ses Bécits de Venseigfie Sldl
forment une série de petits poômes inimitables, et que
Fauteur de cette notice a essayé de traduire en français.
Nous ne devons pas omettre les œuvres scientifiques
de la Suède au xix* siècle, celles de Berzélius en chimie,
de Hisinger et Wahlenberg en géologie, de 01. Swartz,
Acharius, Elias Pries, G5ran Wahlenberg et C.-A. Agardh
en botaniçiue; de Paykull, Dalman, SchOnherr en zoolo-
gie; de NilssoQ, Sundevall, B. Pries, EkstrOm pour l*en-
tomologie ; de Svanberg à Upsal et de Hill à Lund pour
les mathématiques ; des astronomes Cronstrand et Sc-
lander; du physicien Rudberg; des médecins et chirur-
giens André Retzius, Huss, San tesson, Florman, etc. —
La science du Droit a produit Calonius (mort en 1817),
et M. Schlyter, éditeur d'une excellente cellcction des
anciennes lois suédoises qui se termine aujourd'hui ; la
philosophie, Benjamin Hôijer, professeur à Dpsal (1776-
1812); l'histoire enfin, outre Geijer, que nous avons
nommé déjà, Strinnholm, mort en 1861 ; M. And.Fryxell,
dont les Récits de Vkistoire suédoise se continuent au-
jourd'hui encore avec succès; M. Wieselgren, poëtos
archéologue, bio^phe, historien, à qui Ton doit une
excellente Histoire de la littérature suédoise, et qui a
pris une large part h. la publication du Dictionnaire 6io-
graphique suédois en 23 volumes, dont une série nou-
velle s'entreprend aujourd'hui; M. Garisson, professeur
à Upsal, continuateur de V Histoire de Suède commencée
par Geijer; M. MalmstrOm, etc. L'archéolorae a produit
de notre temps M. Nilsson, professeur à Lund, et H. Sâve,
d^Upsal, qui a étudié profondément l'ancienne langue et
les monuments primitifs du Nord. — Le journalisme est
florissant en Suéde : M. Crusenstolpe, esprit satirique ,
publie une petite revue mensuelle mrt curieuse, sous le
titre de : Situation et circonstances. II. L. Ilierta a fondé
avec talent le principal journal suédois, VAftonblad, —
Nous ne devons pas taire les noms de trois femmes qui
lionorent la littérature actuelle de la Suède : M^* Frede-
rika Bremer , dont les romans , naïves peintures de
mœurs, les Voisins, le Foyer de famille, etc., ont été
traduits dans toutes les langues; M"** Emilie Flygare-
Carlén, et M*"* Knorring, auteur des Cousins, etc. A. G.
SUÈVE (Monnaie). H ne nous reste qu'un seul monu-
ment de la numismatique des Suèves en Espagne : c'est
un denier d'argent, frappé par le roi Richiaire, vers Tan
470. Il porte d'un côté le buste et le nom d'Honorius, de
l'autre une croix accostée des lettres B et R {Braga, en
Lusitanie) et la légende ivssv aicRiAnii régis.
BUFFÈTES. ( V, ces mots dans notre Dictionnaire
SUFFIBULUM. ) de Biographie et d^Bistoire.
SUFFIXE (du latin sub, sous, après, et ^xus, attaché),
en termes de Grammaire, lettre ou syllabe qu'on ajoute
à la fin d'un mot pour en modifier la signification. Ainsi,
la plupart des désinences dans les déclinaisons et les
conjugaisons sont des aufBxes. Ëx. : rosa, rosarum;
y aime, j'aimerai.
SOFFRAGANT, titre donné aux évèques relativement
à leur archevêque métropolitain, soit parce qu'étant ap-
pelés à son synode ils y ont droit de suffrage, soit parce
qu'ils ne peuvent être consacrés sans son suffrage ou con-
sentement, soit parce que, dans Torigine, les évoques de
chiqueprovince ecclésiastique élisaient l'archevôque.
SUFFRAGE (du latin suffragium)^ voix que l'on donne
dans une assemblée où l'oa délibère aur quelque objet,
•ù l'on élit quelqu'un pour une charge.
suFiniAGis DNivsRSCL. ( V. notreUicUonnovre àet^io^
SUGGESTUS. S graphie et d'Uisioire.
SUICIDE (du latin sut, de soi, et cœdes, meurtre), acte
par lequel un homme est son propre meurtrier. Qtielle«
que soient les causes qui le produisent, excepté l'état do
folie, le suicide est un crime ; il sacrifie le devoir à une
autre fin, ce qui est le renversement de toute morale. Il
a donné lieu à plus d'un débat entre les moralistes;
mais, en principe, rien ne peut l'autoriser. Tant qu'il
s'agit du devoir, dit Kant , par conséquent tant qnll
vit, l'homme ne peut se défaire de sa personnalité; il
y a contradiction à supposer qu'il puisse 8*affranchir
de toute obligation. Détruire dans sa propre personne le
sujet de la moralité, c'est, autant qu'il est en soi, faire
disparaître du monde la moralité môme, c'est avilir
rhomme dans sa personne. La morale et la religion sont
d'accord pour condamner le suicide^ Il le fût dans l'An-
tiquité par les P}'thagoriciens et les Platoniciens; Virplo
{Enéide, vi] livre les suicides au supplice de regrets éter-
nels; les Stoïciens, dans leur exagération, permettaient
le suicide au sage, mais plus tard, sans le proscrire en-
tièrement, ils le subordonnèrent à la pensée meilleure
de la résignation, comme on le voit chez Épictète. Les
lois civiles en Grèce, dans plusieurs États, étaient très-
sévères à l'égard de ceux qui se donnaient la mort :
Thèbes flétrissait leur mémoire, Athènes mutilait leurs
cadavres et les privait de la sépulture. Depuis, la légis-
lation s'est montrée souvent plus sévère encore : le corps
des suicidés était traversé d'un pieu, ou traîné sur la
claie; leurs biens étaient confisqués, leur mémoire flétrie.
On a vu des moments où le suicide devenait une ma-
ladie de r&me, où il se propageait comme une contagion
morale, soit dans les camps, soit au centre des villes ; ort
vit se former des sociétés dont les membres devaient
finir par se donner la mort V. Robeck, De morte volun-
tariâ; Buonafede, Istoria critica e lilosoficadel suicido,
Lucques, 1761, trad. en fhinçais nar Armellino et Gu^-
rin, 1841; Hermann, Disserlatio ae autochiria H philo ^
sophice et ex legibus romanis ûonsiderata ; StasndYin ^
Histoire des opinions et des doctrines sur lé suicide,
Gœttingue,1824 ; J. -J. Rousseau, Nouvelle Héloïst, y par-
tie, lettres 21* et 22«; Tissot, De la manie du suicidi
et de Vesprit de révolte; l'abbé Guillon^ Entretien sur te
suicide; M™* de Staôl, Bé/lexions sur le suicide, 18li;
Brierre de Boismont, Du suicide et de la folie suicide,
1855; E. Lisle, Du suicide, staiisttque, médecine, his-
toire et législation, 1856, in-8<* ; L. Bertrand, Traité du
suicide, considéré dans ses rapports avec la philosophie,
la théologie, la médecine et la jurisprudence^ 1857,
in-8«. R.
SUISSE (Langues de ta). V, Poisse ^ dans notre Die-
tionnaire de Biographie et d^ Histoire, et les auteurs sui-
vants: Bertrand, Recherches sur les langues anciennes
et modernes de la Suisse, 1758 ; Stalder, Dictionnaire des
idiomes de ta Suisse^ Genève, 1804 , 2 vol. in-8<*, et Essoà
sur les idiomes suisses, avec des remarques étymoio»
giques, en allem., Bàle et Aarau, 1806 et 1812, 2 vol.
SUISSES (Cent-). V. Cent-Sdissbs, dans notre Die-
tionnaire de Biographie et d'Histoire.
SUITE (Droit de), droit féodal en vertu duquel les sei-
gneurs réclamaient l'héritage d'un homme né dans
l'étendue de leur seigneurie^ quoiqu'il se fût absenté de-
puis longtemps et eût établi son domicile dans un llca
franc.
SUITES, nom qu*on donnait autrefois aux Sonaies
( V, ce mot)^ parce qu'elles se composaient de plusieurs
morceaux.
SUJET (du latin subjectum, placé dessous), en termes
de Métaphysique, s'oppose soit à objet , soit à qualité.
Dans le premier cas. Il s'entend de l'être qui a conscience
de lui-même, c-à-d. du moi; dans le second, il est sy-
nonyme de substance,
SUJET, en termes de Cramm^re, celui des termes de
la proposition dont on affirme l'existence avec tel ou te)
attribut. Il est représenté soit par un nom, soit par un
pronom personnel, démonstratif, relatif, soit par un
infinitif. Quelquefois c'est une proposition entière qui
sert de sujet; mais, dans ce cas, il y a presque toi:û<>"^
un double si^et, rtin réel, et l'auti^e apparent, qui
sert soit à annoncer le sujet réel, soit à le rappeler,
sait à soutenir l'harmonie de la phrase. . Ex. : « iZ est
temps de faire de plus grands efforts; — Que je re^
nonce à mes principes, {cela) est impossible; — Ces\
une impiété de ne pas aimer ses parents; — Drompe'r
sciemment raclaeteur sur la valeur de la marchandise,
(c')est montrer sciemment la fausse route au royagear
égaré, k On voit par deux de ces exemples que l'infinitif
employé comme sujet peut être précédé de la préposition
SUP
!6Î9
SUP
d9, f^\ est explL^tivc. dette cortôtHltUdïl ÔtniHBUcore plus
fréquemment usitée dans Tancieh^elatigtie, soit en vêk^,
soit en prose. Les vers suivants de Boileau {Sat, IX) en
offrent uti exemple :
De choquer un antenr qnl choque le bon sens,
C'est ce que tout lectear eut toujours droit de faire.
En principe» lorsqu'un verbe a un sujet multiple, il âe
met au plunel; néanmoins il arrive souvent qu'on le fait
accorder avec le sujet le plus rapproché :
...Quel uoureaa trouble exdU en mes esprits
Le sang du pfere, 0 clell et les larmes du fll^?
Kaciks, âfithridate, IV, 4.
...Le fcTp le bandeaut la fkanme est toute prête.
iD.t Iphigénie, III, 5.
surtout ti les deux sujets expriment des idées ana-
logues :
On dit que ton ftwa faune et ton teint sans couleur
Perdit en ce moment son antique pftlenr.
BoxLKAU, Le Lutrin f cb. I.
« La sagesse et la pîêtè du souverain peut faire toute
seule le bonheur des sujets. » (Massillon.)
La place du sujet lest d'ordinaire et logiquement avant
le verbe. Mais il y a des cas où il est placé aprôâ; par
exemple, dans les phrases interrogatives; dans certaines
phrases où cette inversion tient lieu de là conjonction si;
dans les phrases exclamât! ves commençant par puisse ou
un subjonctif quelconque : * Puissions-hotts réussir! »
Tombe sur moi le eiel, ponrm que Je me venge I
GoBSBiLLE, Rodogune, V, 1.
lorsque le verbe dire, répondu»^ repartir, etc^ est mis en
parenthèse dans une citation :
Je crains Dieu, dites-^dxu, 'sa vdritë me touche.
lUciHJK, Athalie, ï, 1.
C'était un usage général dans notre ancienne îaugroe
de placer le sujet après le verbe dans les phrases qui
commençaient par certains adverbes ou adjectifs, surtout
fersqu'elles venaient comme principales à la suite d'Une
subordonnée. Cet usage ne s'est (nière maintenu qu^après
les adviert>es encore, aussi, toujours, etc., et après l'ad-
jectif tel. Dans les langues anciennes, grtce aux termi-
naisons casuelles, la place du sujet est indifférente; \\ se
hiet toujours au nominatif devant les modes personnels ;
avec rinftnitif, sou veut à l'accusatif. Dans les phrases
încîdeùtes ^ui ne renferment qu'un participe, te sujet,
s'il est sans aucun rapport avec le sujet ou les complé-
ments de la proposition principale, se met au génitif eh
grec, h Tablatif en ïatin. P.
SUJET, en termes de Musique , est synonyme oè thème
et de motif. V. Ftocra.
SULPnCE (Église Saint-), h Paris. } V. notre iHct. âe
SULTAN. S Èiogr.etd'Bist,
SUMARA, sorte de flûte double des Turcs. On se sert
de l'un des tuyaux pour joUer l'air ; l'autre fait estendre
un son semblable au boufdon de la musette.
SUNNITES. V, notre Dictionnaire de Biographie et
â^ffistoû'e.
SUOM! (Idiome). V. PmLAWBATs.
SUPERLATIF (du latiù super, au-dessus, et Jatus.
porté), en termes de Cramïnaîre, degré de comparaison
qui exprime la qualité port^ soit à un très-haut degré,
sans rapport à une autre chose ou à une autre personne,
comme très-sage, fort bien ; soit au plus haut degré, eh
la comparant avec tous les objets semblables, comme le
plus sage, la plus belle. Dans le premier cas, le Supe^'-
Ifitifest dit absolu: dans le second, il est relatif. On dis-
tingue aussi un Superlatif d'infériorité, qui s'exprime
par les mots le moins, la moins. Dans les langues an-
ciennes, le Superlatif s'exprime presque toujours par un
changement dans la terminaison de l'adjectif : ainsi , en
latin, doctuê (savant), doctissimvts (très-savaùt, le plus
savant).
SUPERNATURALIS?flE. V. SupranaVoralisite.
SUPERPOSïtrON, nom donné autrefois à Un Jeune
où Ton passait 24 heures sans manger.
SUPERSTITION (du latin superesse, être superflu, où
de supersta;r'^, s'élcV'er au-déSs'us, être au delàj^ mot paV
lequel les Anciens entcndaîeïit en général uùe crainte
vaine et excessive des Dieux, qui donnait naissance à des
pratiques ridicules. II. eut chez lés Romains un sens l'es-
Ircint: il déisignait tous les rites étrangers ^ la rc!ip;i6û
rom&iHe^ tout culte non autorisé. Quand le ch Istianisme
tùi devenu triom][)hant dans le monde, le titre méprisant
de superstition fut appliqué à toute pratique antachéc de
paganisme et qui tendait a dénaturer la religion nouvelle.
La lutte des chrétiens éclairés conti^ les superstitions
païennes n'a pas été complètement heureuse, puisque,
aujourd'hui même, certains esprits ciroient encore aux
songes, aux présages, aux non:U)res et aux Jours funestes,
aux accidents qui portent ma" eur, etc. Parmi les chré-
tiens aussi, il n'est pas rare de trouver des superstitions
d'un autre genre, et l'on peut consulter, entre autres ou-
vrages sur ce sujet, ceux du P. Lebnin, Sur les pratiques
superslifieuses (Pnni, 1732-i738, 4 vol. in-12), et de
J.-B. Thiers, Traité des superstitions selon VEcriture
sainte, 17G9, in-12. Les femmes et les enfants sont plu?
superstitieux que les hommes mûrs, le simple paysan
plus que l'homme éclairé, les nations barbares plus que
les peuples civilisés. Les hommes deviennent plus supiîr-
stitieux à mesure qu'ils éprouvent un plus grand nombre
d'accidents dans le cours de leur vie ; les joueurs et les
marins en sont la preuve frappante. Transporter à la
créature le culte qui n'est dû qu'à Dieu, vénérer de
fausses reliques, ajouter aux rites canoniques certaines
cérémonies ou pratiques dont l'Église ne se sert point,
porter des amulettes et des talismans, etc., voilà des actes
de superstition. La superstition, étant le résultat d'un
sentiment mal raisonné, se fonde souvent sur des faits
vrais ; par exemple, beaucoup de personnes regardent le
vendredi comme un jour funeste, parce que c'est ce jour-
là qu'est mort N. S. Jésus-Christ, et elles n'entrepren-
draient rien un vendredi. D'autres ont une crainte super-
stitieuse pour le nombre 13, probablement parce que
Judas était le 13* apôtre de Jésus-Christ. Voici un calcul
qui a été fait, d'après le Journal des règnes de tienri îli
et Henri IV, par L'Estoile, sur le nombre 14; nous
livrons ce catcul aux gens qui ont la superstition du 13.
— Henri IV naquit 14 siècles, 14 décades et 14 ans après
la nativité de Notre-Seiçneur ; il vit le jour un 14 dé-
cembre, et mountt uU 14 mai ; il y avait 14 lettres dans
son nom (ttenrî de Bourbon); il vécut cjuatre fois 14 ans,
quatre fois 14 jours et 14 semaines; il fut roi, tant de
lYance que de Navarre, 14 triétérides (période de 3 ans),-
il fut blessé par Jean Chàtcl 14 jours après le 14 dé-
cembre, en l'année 159t, entre lequel temps et celui de
sa mort il n'y a que 14 ans, 14 mois et 14 fois cinq jours;
il gagna la bataille d'ïvry le 14 mars; le dauphin naquit
14 jours après le 14 septembre, et fut baptisé le 14 août ;
le roi fut tué le 14 mai, 14 siècles et 14 olympiades après
l'IncaiDation ; l'assassinat eut lieu deUx fois 14 heures
après que la reine était entrée en pompe dans l'église
de S*-Denis pour y être couronnée; havaillac fut exécuté
14 jours après la mort du roi, en Tannée ICIO, laquelle
se divise justement par 14, car \\h fois 14 font lOlO.
Sous la l^estauration , le gouvernement fit fondre d'un
seul jet, dans les ateliefs du Roule, à Paris, une statue
colossale, haute de 8 met, de l'infortuné roi Louis XVl.
Au moment où l'on voulut la retirer du moule, on s'a-
perçut d'un singulier accident : la lète était séparée du
corps, et la statue sortît décapitée. C'était l'effet d'un
bouillon produit par le refroidissement de la matière.
L'explication put être donnée sur-le-champ ; mais les té-
moins du fait n'y virent pas moins un funeste présage
pour la royauté. V. Fr. Bernard, Superstitions anciennes
et modernes, Amsterdam, 1733-36, 2 vol. in-fol.; PlU-
quet. De la Superstition, 1804.
SUPËRSUS, nom qu'on donnait dans l'ancienne Mu-
sique au Dessus ou Soprano, quand il était très-aigu.
SUPIN ( du latin supinus, couché sur le dos, noncha-
îàti't , parce qu'il semble oisif et sans action ), forme vcr-
baTe Ipropre au latin et qui se rattache à la conjugaison
de l'infinitif. Le supin est terminé tantôt en um , tantôt
en tt. La forme en um est une sorte d'accusatif équiva-
lente au gérondif en dum accompagné d'une préposition :
eo visum est comme s'il y avait eo ad visendum. Il se
met après tous les verbes qui expriment une directioù
vers Un but déterminé. Le supin en u est une sorte de
datif ou d'ablatif. Il se met après les mots qui renferment
une idée de passivité, comme facile, difficile, admirable,
étonnant , affreux, agréable, honorable, honteux, bon ,
mauvais^ incroyable, etc. : Facilis visu, facHe à voir; mt-
rabile dictu, étonnant à dire; juctmdum lectu, agréable
à lire, etc. De là le nom de supin passif donné à cette
ferme en u, tandis qu'on donne celui d'âcfifà là forme cù
um. Quelquefois il y à confusioti, au moîn^ apparente,
d'acception entre les deux formes; ainsi, facitis ad nàf-
randum équivaut h narratu facilis; mais le gérondif u,
SLP
1680
SUR
dans ce cas , un sens passif. Le supin a pour équivalent
dans les autres langues Tinfinitif avec ou sans prépo-
sition. P.
SUPPARUH. V. ce mot dans notre Dlciwnnaire de
Biographie et d'Histoire,
SUPPLÉMENT, ce qu*on ajoute à un livre pour le com-
pléter. C'est tantôt une addition contenant les choses
omises ou celles qui sont survenues pendant et depuis la
publication, tantôt une partie qui comble des lacunes,
comme sont les Suppléments de Tite-Live par Freinshe-
mi us et do Tacite par Brotier.
SUPPLÉTIF, en termes de Grammaire, se dit des mots
dont la destination dans la phrase est de suppléer les
idées accessoires de relation qui doivent être ajoutées à
la signification primitive d'autres mots. La liaison des
idées accessoires aux mots principaux se fait par des pré-
positions ou par des adverbes. Ainsi, dans : « roi de
France, — aimer avec tendresse, — sincèrement hon-
nête, » les expressions de France, avec tendresse, sin--
cèrement, ajoutent à la signification du substantif roi^
du verbe aimer et de l'adjectif honnête des idées acces-
soires de relation à la France, à la tendresse, à la sin-
cérité.
SUPPLICATION. F. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d' Histoire.
SUPPLICE , châtiment corporel Infligé par arrêt de la
Justice. Par dernier supplice, on entend la peine de mort.
Les supplices ont été très-variés dans tous les temps , et
rimagination des hommes s'est souvent appliquée à en
inventer d'horribles. Les Hébreux employèrent la lapi-
dation, la décollation, la strangulation, le crucifiement,
le précipice, la scie, le feu, le chevalet, la bastonnade,
le fouet, Tavulsion des yeux, des cheveux, de la peau de
la tête, la flagellation d'épines. L'écartèlement , l'écorche-
ment, l'étouffement sous la cendre, furent pratiqués par
les Perses. A Athènes, à Carthage, certains coupables
étaient enfermés et roulés dans des coffres ou des ton-
neaux hérissés de clous. Ce furent les Grecs qui imagi-
nèrent de donner la mort par la cigufi. Les Romains
enterrèrent vivantes les Vestales qui avaient laissé étein-
dre le feu sacré ; ils marquèrent d'une lettre au front les
calomniateurs. Les persécutions dirigées contre le chris-
tianisme naissant engendrèrent des peines Jusque-là
inconnues, le gril ardent, le bûcher, les bêtes féroces,
le plomb fondu et l'huile bouillante versés sur les plaies
vives, etc. Au moyen &çe, on ^outa aux supplices détà
usités le pilori , la question, l'estrapade, l'immersion, la
roue, les oubliettes, les trappes, les basses-fosses, les
cages de fer; on perça d'un fer rouge la langue des blas-
phémateurs; certains faux-monnayeors furent bouillis
dans de l'eau ou dans de l'huile. La Révolution de 4789
abolit en France tous les genres de supplices, et ne con-
serva que la décapitation par la euillotine; le carcan et
la marque ont disparu depuis 4832. Mais les autres États
n'ont pas tous suivi cet exemple : les Prussiens ont con-
servé les supplices du glaive, de la corde, de la roue, du
feu ; les Russes, le knout ; les Anglais, la corde, les ba-
guettes; les Espagnols, la garrotte, etc. Les Asiatiques
ont pratiqué jusqu'à nos jours les supplices les plus bar-
bares : ainsi, les Turcs ont le pal , les Chinois la cangue
[V. ces mots) et la scie. On peut remarquer que, dans
tous les pays, la barbarie des supplices est en raison
directe du aegré arriéré de la civilisation, et du manque
des lumières de la religion bien comprise, ou de la phi-
losophie. V. Beccaria, des Délits et des Peines, 4764,
in-42. B.
SUPPORTS , terme de Blason. V. Tenants.
SUPPOSITION, en termes de Droit, action de mettre
une personne ou une chose à la place d'une autre. Sup-
poser un contrat ou un acte quelconque, c'est arguer
d'un titre nul, qui a bien les apparences extérieures d'un
acte valable, mais qui n'a pas été réellement passé entre
les personnes auxquelles il est attribué; c'est faire un
faux (V. ce mot). La Supposition de nom, quand elle a
pour bqt de tromper la surveillance de la police, est un
délit Justiciable des tribunaux correctionnels ; en matière
de passe-ports, elle est punie d'un emprisonnement de
trois mois à un an. Quand elle s'attaque à la fortune
d'autrui, elle se confond avec la Supposition de personne,
laquelle résulte de fausses signatures, d'altération des
actes, écritures ou signatures, d'interodation ou addition
d'écritures nouvelles sur des actes, et qui est punie des
travaux forcés a temps. La Supposition de pa9't ou d'en-
fant consiste à présenter un enfant comme né de parents
dont il n'est pas issu; cette fraude, qui a ordinairement
pour but d'enlever à dos collatéraux un titre ou une suc-
cession, en introduisant dans la famille un héritier direct,
est punie de la réclusion.
SUPPOSITION, terme de Musique. Quand plusieurs notes
montent ou descendent diatoniquement dans une partie
sur une même note d'une autre partie, elles ne sauraient
toutes faire harmonie ni entrer à la fois dans le même
accord : celles qu'on y compte pour rien sont des notes
par supposition. En général, si les notes sont égales,
celles qui frappent sur le temps fort portent harmonie;
celles qui passent sur le temps faible sont des notes par
supposition. Quand les degrés sont disjoints, il n'y a
point de supposition, et toutes les notes doivent entrer
dans l'accord. On nomme accords par supposition ceux
où la basse continue ajoute ou suppose un nouveau son
au-dessous de la basse fondamentale ; ce qui fait que de
tels accords excèdent toujours l'étendue de l'octave.
SUPPOT (du latin suppositus)^ nom donné autrefois
à ceux qui étaient membres accessoires d'un corps et qui
remplissaient certaines fonctions pour le service de ce
corps. Ainsi, les imprimeurs et les libraires étaient les
suppôts de l'Université. La Justice avait aussi ses suppôts.
SUPPRESSION , action de supprimer, c-ànd. d'em|>ê-
cher de paraître, ou de soustraire, ou d'anéantir. On dis-
tinguo : la Suppression d'actes ou de pièces , qui rentre
dans la classe des soustractions frauduleuses ( V, Sous-
traction) ; la Suppression d'écrits, ordonnée par justice
quand ils peuvent porter atteinte à la morale publique
ou à riiouoeur des particuliers {Code de ProceVi., art. 4<h26):
la Suppression d^etat, qui consiste dans l'enlèvement, la
destruction ou la soustraction des registres constatant
l'état civil d'un citoyen, c-à-d. sa naissance , son adop-
tion, son mariage ou son décès, et qui est punie, selon
les cas, de la réclusion ou des travaux forcés à temps
{Code Napol, art 326-330; Code pénal, 345 ) ; la Sup-
pression de part ou d*enfant , consistant à soustraire et
cacher un enfant après sa naissance, et à le priver ainsi
de son état civil , crime puni de la réclusion.
SUPRANATURALISME ou SUPERNATURALTSME (du
latin supra, super, au-dessus, et natura, nature). On
donne ce nom à tout ce qui est en dehors des lois de la
nature, et par suite en dehors ou au-dessus de la raison.
Les sciences occultes, comparées aux sciences véritables,
pouvaient passer pour surnaturelles. En matière de
Physique et de ce qui tient au somnambulisme et au
magnétisme animal, le supranaturalisme se montre en
Allemagne dans les écrits de Schubert, de Justin Kerner,
de Keiser, et dans le curieux ouvrage de Gerber : le Do-
maine nocturne de la nature. En matière religieuse, le
Supranaturalisme repose sur des données qui ont pour
fondement la foi , et qui sont inaccessibles à la raison
humaine. C'est encore en Allemagne qu'il prit son carac-
tère le plus prononcé ; ses principaux organes sont Tho-
luck, Guericke, Harms , Hengstenberg, Sartorius. R.
SURABONDANTS (Mots), terme de Grammaire grec-
que et de Grammaire latine qu'on applique aux noius et
adjectifs ayant deux ou plusieurs formes de déclinaison.
Tels sont, en grec, les moU phylax (3* décl.) et phyla-
cos (2* décl. ) , gardien ; lagos ( lagou) , lagôs {lagô)^ et
Ictgôos {lagôou}^ lièvre; taos ( taou)^ taôs ( taâ), et taân
(todnos), paon; en latin, vultur et mUtuHus (vautour),
juventa et juventus (Jeunesse), evenitis et eventum (issue),
sentum, senecta et senectus (vieillesse), etc. Quelques
verbes latins, qui ont à la fois une forme active et une
forme passive sans changer de sens, pourraient recevoir
aussi le nom de surabondants : tels sont fenero et fene-
ror,\Q place à intérêt; ludi/ico et ludificor, Je me fais un
jeu de; assentio et a^sentior, Je donne mon assentiment,
impertio et impertior, je donne ma part de, etc. P.
surabondants (Tons ou Modes). On nomme ainsi dans
le Plain-Chant les tons ou modes qui montent ou descen-
dent d'une, de deux ou de plusieurs notes au delà des
limites de leur échelle diatonique. Un ton cMtJkentiqne
{V, ce mot) est surabondant lorsqu'il s'élève au-dessus
de l'octave de sa finale; un ton plagal (V, ce mot) en
surabondant lorsqu'il descend de plus d une quarte au*
dessous de sa finale. F. C
SURANNATION (Lettres de), nom donné, en termes
d'ancienne Chancellerie, aux lettres qu'on obtenait pour
rendre de la force et de la validité aux actes nurannés.
Ce dernier mot s'appliquait : 4<* à certains actes publics,
lorsque l'année au delà de laquelle ils ne pouvaient
avoir d'effet était expirée ; 2® aux concessions qui, faute
d'avoir été enregistrées dans le temps prescrit, deveDsient
nulles.
SURARBITRE, terme de Droit, synonyme de lien
arbitre on troisième arbitre.
SUR
1C81
SUR
SURBAISSÉ (Arc). V, Arc en anse de panier.
SURCHARGE , mot écrit sur un autre mot. Les sur-
charges sont interdites dans les actes , dans les registres,
dans les pièces comptables ; la rectification des erreurs
commises ne peut se faire que par rature ( V. ce mot).
SURCOT , riche vôtement que les dames au moyen ftge
mettaient par-dessus leur cotte ou robe. Plus tard, on
donna le même nom au vêtement que les chevaliers de
Tordre de rÉtoile portaient sous leur manteau. Le surcot
devint enfin commun aux deux sexes; ce fut une sorte de
soubreveste descendant généralement Jusqu'à la ceinture,
quelquefois plus bas.
SURDASTÎIUM, nom donné anciennement à un tam-
bour qui servait à accompagner la flûte de Pan dans les
airs de danse.
SURENCHÈRE, enchère mise sur une enchère précé»
dente. Dans les ventes immobilières, on distingue la
Surenchère swr cUiénation volontaire, accordée seulement
aux créanciers qui ont hypothèque inscrite sur IMmmeu-
ble aliéné, et la Surenchère sur expropriation forcée,
permise à toute personne indistinctement {Code de Pro-
céd., art. 710-12, 832-38, 2183-85, 2192). Dans les ventes
d'immeubles appartenant à. un débiteur failli , tout créan-
cier a le droit de surenchérir : la surenchère ne peut être
dans ce cas au-dessous du 10* du prix principal de Tad-
Judication [Code de Comm,, art. 565). V. Petit, Traité
des surenchères, 1848, in-S^*; Piogey, Commentaire de la
loi du Sf mai 4838 sur la saisie immobilière, Vordre et
surenchère swr aliénoAion volontaire, 1858, in-8°.
SURÉROGATION (Œuvres de), en termes de Théo-
logie, bonnes œuvres faites au delà de ce qui est prescrit
par la loi.
SURESTARIE (du latin super, au delà, et stare, res-
ter), en termes de Droit commercial , retard apporté dans
le chargement d*un navire frété. Quand le délai convenu
ou déterminé par Tusage des lieux est expiré, le fréteur
qui a mis TaiTréteur en demeure de tenir son en^e-
ment a droit à des dommages-intérêts appelés frais de
surestarie.
SURETE GÉNÉRALE (Loi de), loi votée en 1858,
et par laquelle le gouvernement a été armé, jusqu'au
31 mars 1865, de pouvoirs extraordinaires. Etait puni
d'iiQ emprisonnement de deux à cinq ans, et d une
amende de t>00 fr. à 10,000 fr., tout individu qui avait
provoqué publiquement, aux crimes prévus par les
art. 86 et 87 da Code pénal, lorsque cette ppovocalioa
n'avait pas été suivie d'effet. Etait puni d'un emprison-
nement d'un moisà deux ans, etd'une amende de 1 00 fr.
à 2,000 fr., tout individu qui, dans le but de troubler
la paix publique, ou d'exciter à la haine ou au mépris
du Gouvernement, avait pratiqué des manœuvres ou en-
tretenu des intelligences, soit à l'intérieur, soit à l'é-
tranger. Quiconque, sans y être autorisé, avait fabriqué
ou fait fabriquer, débité ou distribué des machines
meurtrières agissant par explosion ou autrement, ou
de la poudre fulminante, était puni d'un emprisonremen t
de six mois à cinq ans et d'une amende de 50 fr. h
3,000 fr. La môme peine était app icable au détenteur
ou porteur, sans autorisation, des objets ci-dessus spé-
ciGes. Ces peines étaient prononcées sans préjudice de
celles que les coupables auraient pu encourir pour
tous autres crimes et délits.
Les individus condamnés pouvaient être interdits,
en tout ou en partie, des droits mentionnés en l'art. 42
du Cocle pénal, pendani un temps égal à la durée de
l'emprisonnement prononcé.
Tout individu condamné pouvait être, par mesure
de sûreté générale, interné dans un des départements
de l'Empire ou en Algérie, ou expulsé du territoire
français. La même mesure pouvait être appliquée aux
condamnés pour crimes ou délits prévus: 1^ par les
art.86 à 101,153, 154, §1", 209 à 211,213 à 221 du Code
pénal; 2» par les art. 3, 5, 6, 7, 8 et 9 de la loi du 24
mai 1834, sur les armes et munitions de guerre; S*"
par la loi du 7 juin 1843, sur les attroupements; 4»
par les art. 1 et 2 de la loi du 27 juillet 1849. Pouvait
être interné dans un des départements de l'Empire ou
en Algérie, ou expulsé du territoire, quiconque avait
été condamné, interné, expulsé ou transporté par
mesure de sûreté générale, à l'occasion des événe-
ments de moi etde juin 1848, de juin 4849 ou de dé-
cembre 1851, et que des faits graves signaleraient de
nouveau comme dançereuz pour la sûreté publique.
Tout individu interné en Algérie, ou expulsé du ter-
ritoire, qui rentrait en France sans autorisation,
pouvait être placé dans uns colonie pénilcnliairc, soit
en Algérie, soit dans une aulre possession française.
Les mesures de sûreté générale étaient prises par
le ministre de l'iutérieur, sur l'avis du préfet du
département, du général qui y commandait, et du
procureur gépéral.
SURFRAPPEES (Monnaies), monnaies qui ont reçu
un nouveau type légal.
SUBHAUSSE (Arc). V. Arc surhaussé.
SURINTENDANT. V. ce mot dans notre Dictionnatre
de Biographie et d* Histoire.
SUR-LE-TOUT, en termes de Blason, écusson posé sur
un écartelé. On lui donne en largeur deux parties et
demie des sept de la largeur de Técu, et en hauteur trois
parties des huit. Le sur-le-tout est ordinairement affecté
aux armes propres de la famille, et les quartiers aux
armes de succession ou d*alliance. En blasonnant, on
nomme d'abord ces quartiers, puis le sur-le-tout. On
nomme Sur-le-lout-du-tout un petit écusson posé sur le
sur-le-tout : on lui donne, par rapport au sur-le-tout,
les proportions qu*a celui-ci par rapport à Técu.
SUBNOM (du latin supra nomen, en sus du nom), dé-
signation qui sert ordinairement à distinguer les indi-
vidus d*une môme famille. Dans Torique, les surnoms
ne furent pour la plupart que des sobriquets {V. ce mot)^
dérivés de quelque particularité physique ou intellec-
tuelle, ou de quelque événement amvé au personnage.
Puis ils devinrent de véritables noms de famille. Tels
sont L» Sourd, Le Noir, Le Gris, Le Blanc, Le Gros,
Le Roux, Le Jeune.
SURNUMÉRAIRE (du latin super, au-dessus, et nw
merus, nombre), (|[ui est au-dessus du nombre déterminé.
Le mot se dit particulièrement, dans les Administrations,
des commis qui travaillent sans appointements et font
un temps d*épreuve avant d'obtenir une place rétribuée.
SURPLIS, pour sur pelisse (ea latin super^pellidumV
vêtement que les ecclésiastiques portent par-dessus la
soutane lorsqu'ils assistent au service divin ou qu'ils
prêchent. Cest une sorte de tunique en toile ou mous-
seline blanche, sans manches, descendant jusqu'à mi-
jambes, avec deux ailes plissées qui pendent des épaules
par derrière et qui représentent les manches. Dans quel-
ques diocèses, le surplis a de vastes manches pendantes.
SURPLOMBER, en termes de Construction, n'être pab
aplomb, pencher, le haut avançant plus que le pied.
SURPRISE, en termes d'Art militaire, attaque prémé-
ditée par celui qui la fait, mais inopinée pour celui qui
la reçoit. C'est une tentative d'un des deux adversaires
pour saisir l'autre dans la disposition la plus défavorable
à la défense. Les surprises de jour sont rares, et ne réus-
sissent que par un concours de circonstances qu'il est
difficile de réunir, à moins d'avoir affaire à un ennemi
négligent ou inexpérimenté. Les surprises de nuit sont
sujettes à de nombreux inconvénients, à de nombreuses
méprises, qui peuvent les faire échouer.
SURSIS, délai accordé par le juge et pendant lequel la
poursuite d'une affaire est suspendue. Le Code Napoléon
(art. 4244, 22i2) et le Code de Procédure civile (art. 127,
240^ déterminent les cas où il y a lieu à sursis, et ceux
où il est permis d'en accorder.
SURTOUT, sorte de justaucorps très-large, cfu'on met
par-dessus les autres vêtements; — grande pièce d'or-
fèvrerie qu'on place comme ornement sur la table dans
les repas d'apparat.
SURVEILLANCE DE LA HAUTE POLICE, mesure de
sûreté dont le but est de garantir la société contre les
nouveaux crimes ou délits qui pourraient être commis
par les condamnés libérés. La mise en surveillance est
toujours prononcée, dans certains cas, comme une con-
séquence de la condamnation ; dans d'autres, elle est
facultative, et la loi s'en rapporte à cet égard à la pru-
dence des juges. Elle donne au gouvernement le droit
d'interdire certains lieux au libéré. Celui-ci doit déclarer,
à l'expiration de sa peine, l'endroit où il veut fixer sa ré-
sidence : il reçoit alors une feuille de route contenant un
itinéraire dont il ne peut s'écarter, et déterminant la durée
du séjour qu'il peut faire dans chaque lieu de passage. I!
est tenu de se présenter, dans les 24 heures de son ar-
rivée, devant le maire de la commune ; il ne peut changer
de résidence sans avoir indiqué à ce magistrat, 3 jours à
l'avance, le lieu où il compte aller habiter, et sans avoir
reçu de lui une nouvelle feuille de route. La désobéis-
sance à ces prescriptions entraine un emprisonnement
qui peut aller jusqu'à 5 ans. — Vintemement est une
sorte de haute surveillance administrative, mise en pra-
tique en France depuis 1851, et qui consiste à imposer à
! une personne le séjour d'une ville, d'un endroit plus ou
i06
sus
168.2
SYL
moins limité, avec obligation de se présenter devant les
autorités certains |ours et à toute réquisition. En cas de
contravention, l'interné peut être éloigné de France.
Pour sortir du département, il a besoin de l*autorisatioa
du ministre de Tlntérieur, sauf quelques cas d'urgence.
SURVENANCE D'ENFANT, en termes de Droit, nais-
sance d'un enfant légitime après une donation entre-vifs.
Elle révoque les donations; celles-ci ne peuvent revivre
ou avoir de nouveau leur effet ni par la mort de l'enfant
du donateur, ni par aucun acte conlirmatif ; il faut pour
oela une nouvelle disposition {Code Napol., art 953, 060-
9G0). La révocation ne frappe pas les donations qui
auraient été faites entre époux pendant le maxiage (ar-
ticle 1006).
SURVIE (Gains de). V. Gains de survie.
sunviE (Présomption de). V. Succession.
SURVIVANCE, droit de succéder à un homme dans sa
charge. C'était, avant 1789, un privilège gue le roi ac-
cordait à quelqu'un, ordinairement aux enfants des titu-
laires de certaines charges; ce droit avait fini par devenir
un abus, comme toutes les faveurs, et, dès le temps de
Henri III> un si grand nombre de charges étaient deve-
nues héréditaires, que ce prince en signala les survivances
comme une des premières réformes à faire. Néanmoins
l'abus subsista, et, sous le règne de Louis XIV, en 1661,
le secrétaire d'État des alTaires étrangères avait obtenu la
survivance de sa charge pour son jeune fils, Loménie de
Bricnne. Il sufTisait alors que la charge convint à l'indi-
vidu, peu importait que l'individu ne convint pas à la
charge. Les survivances sont un des plus criants abus
Sue la Révolution a déracinés, et que seule elle pouvait
étruire. C. D— v.
SUSCRIPTÏON, terme de Diplomatique. V. Diplôme.
suscRiPTiON (Acte de), acte qui est écrit par un notaire
sur la surface extérieure du papier clos et scellé conte-
nant un testament mystique, ou sur la feuille qui lui
sert d'enveloppe. Il doit être fait en présence de six té-
moins au moms, et être siçné par le notaire, ainsi que
par le testateur : si ce dernier ne sait ou ne peut écrire,
un témoin de plus est appelé, et signe l'acte avec les
autres {Code NapoL, art. 976 et 977).
SUS-DOMCNANTE. V. Ton.
SUSE (Arc de), arc honoraire romain, élevé à l'empe-
reur Auguste. II est assez bien conservé, et entièrement
dt'gagé des constructions qui l'environnèrent pendant
plusieurs siècles. Il ne consiste qu'en une seule arcade,
dont l'archivolte retombe sur des pieds-droits formant
pilastre. Aux quatre angles extérieurs du monument sont
des colonnes corinthiennes engagées, qui supportent Ten-
tablciiient. V, AAassazza, VArco antico di Suza, Turin,
1750, in-fol.
SUSIN, pont brisé op partie du tillac d'un vaisseau qui
s'étend depuis la dunette jusqu'au grand m&t.
SUSPECTS (^Loi des). V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
SUSPENSE, en termes de Droit canonique, mesure par
laquelle l'autorité diocésaine suspend un prêtre de ses
fonctions ou le prive de l'usage de son bénéfice pendant
un temps plus ou moins long. — On appelait autrefois
Charte de suspense une charte royale en venu de laquelle
tout procès intenté à une personne absente pour le ser-
vice ou par les ordres du prince était suspendu jusqu'à
son retour.
SUSPENSION, figure de Rhétorique qui consiste à tenir
l'esprit de l'auditeur en suspens, pour mieux piquer sa
curiosité, et l'amener ensuite à une tout autre conclusion
que colle qu'il avait prévue. Cette figure est également
propre à tous les genres de composition. Bossuct {Orai^
son funèbre de la reine d'Angleterre) en offre un exemple :
« Combien de fois a-t-elle remercié Dieu de deux grandes
grâces : Tune, de l'avoir faite chrétienne; l'autre... Mes-
sieurs, qu'attendez -vous? peut-être d'avoir rétabli les
affaires du roi son fils? non ; c*est de l'avoir faite reine
malheureuse. » Dans le CinnQ, de Corneille (V, 1), lorsque
l'empereur Auguste déclare à Cinna qu'il connaît tous
ses projets, il y a aussi une longue suspension, qui se
termine par cette terrible parole s
Giiina, ta t'en loaTiens, et veax m*MM88lnerl
Dans le genre simple, on connaît la fameuse Lettre de
M'"<' de Sévigné à Bl. de Goulanges sur le mariage de
Lauzun ; la suspension y est prolongée indéfiniment, pour
mieux faire ressortir ce que ce mariage avait d'extraor-
dinaire. B.
SUSPENSION, interdiction temporaire d'exercer une fonc-
tion. C'esi une peine que les Cours, les Tribunaux, les
Conseils de discipline des avocats, les Chambres des no-
taires et des avoués, peuvent prononcer contre ceux
de leurs membres qui ont commis quelque faute dans
l'exercice de leurs fonctions {Code de Procédure civile,
art. 90; Décret du 30 mars 1808; Loi du 20 avril 1810).
Elle est également applicable aux membres du corps en-
seignant (Loi du 15 mars 185U). La suspension pour les
ecclésiastiques se nomme suspense {V, ce mot).
SUSPENSION, en termes de Musique, retard, sur la basse
d'un accord, d'un ou de plusieurs sons de l'accord pré-
cédent.
SUSPENSION D*ARMES, trève de quelques jours, conclue
par les belligérants pour l'accomplissement de certaine
devoirs indispensables, comme l'inhumation des morts.
SUSPENSION DE PAYEMENTS. SI elle n'a pas été suivi?
d'une cessation effective, elle ne donne pas ouverture ^
la faillite. Le commerçant qui a éprouvé un cmban-as
momentané peut trouver ensuite des ressources et satis-
faire à ses engagements.
SUSPICION. En Droit, il y a Suspicion légitime, quand
on peut présumer qu'un tribunal saisi d'une affaire
pourra se laisser influencer par des préoccupations étran-
gères. Le renvoi pour cause de suspicion légitime peut
être invoqué en matière criminelle, correctionnelle, ou
de police ; il est porté devant la Cour de cassation {Code
d'/HS/r. crim,t art. 542-52),
SUS-TONIQUE. V. Ton.
SUTRAS. K. Indienne (Littérature).
SUTTIE. \ V. notre Dictionnaire de Biographie et
SUZERAIN. î d'Histoire.
SWIRELLA. V. RossE (Art).
SYCOPHANTE. ) V. notre Dictionnaire de
SYDENIIAM (Palais de), j Biographie et d'Histoire.
SYLLABAIRE, petit livre dont on se sert pour ap-
prendre à lire. On l'appelle ainsi parce qu'il enseigne à
assembler les syllabes, c-à-d. à épeler.
SYLLABE, voyelle seule, ou jointe à d'autres lettres
(consonnes ou voyelles), qu'on prononce par une seule
émission de voix. Les mots d une seule syllabe sont
dits monosyllal^es ; ceux de deux, dissyllabes; ceux de
trois, trisyllabes; ceux de plusieurs en général, poly^
syllabes. La prosodie, dans toutes les langues, reconnaît
des syllabes longues et des brèves.
SYLLABIQUE (Augment). V. Augment.
SYLLEPSE, mot d'origine grecque {syllepsis, compré-
liension), et qui s'emploie en Grammaire pour désigner
une figure par laquelle on fait accorder un mot, non pa^
gi*ammaticalement avec le mot même auquel il se rap-
porte, mais logiquement avec l'idée comprise dans ce
mot; comme dans cette phrase de Bossuet : a Quand le
peuple Mbreu entra dans la terre promise, tout v célé-
brait leurs ancêtres; » dans celle-ci de Racine {Athalie,
V, 2) :
Fntro U pauvre et tous, Toas prendrei Dlen pour Jnge,
Vous sonrenant, mon fils, que, cachd sous ce lin,
Comme eux vous fûtes pauvre, et comme eux orphelin;
dans cette autre de La Bruyère : n Les personnes des-
prit ont en eux les semences de tous les sentiments. •
C'est par syllepse que les verbes se mettent au pluriel
après les collectifs partitifs suivis d'un nom pluriel, qui
souvent même est sous-entendu : a La plupart se lais-
sent emporter à la coutume. » C'est encore par syllepse
qu'on dit en latin : Mea unius opéra factum est tout a
été fait par mes seuls soins), phrase où unius a été ml^
au génitif parce que mea est l'équivalent de met. Ce
genre de syllepse n'est possible que dans les langues à
flexion : aussi est-il commun dans la langue grecque. P-
SYLLOGISME (du grec sullogismos. raisonnement 1,
argument régulier construit avec trois termes et trois
propositions de la manière et d'après les règles suivantes :
Toute connaissance se résout dans un jugement, c-à-d.
dans l'affirmation ou dans la négation d'un attribut par
rapport à un sujet; de sorte que, si nous pouvions tou-
jours percevoir clairement à première vue les rapports de
deux termes quelconques, nous aurions {mu* cela même la
science universelle. Il n'en est pas ainsi. On grand
nombre de rapports nous échappent, et la plupart de
ceux que nous pouvons saisir ne sont pas directement
perçus, et nécessitent un travail de l'esprit analogue à
celui que nous faisons pour apprécier le rapport dedeui
grandeurs, lorsque, ne pouvant pas les comparer direc-
tement, nous les comparons séparément à une troisième
grandeur (l'unité, par exemple), et concluons leur rap-
port entre elles de celui que chacune d'elles présente
avec cette grandeur moyenne. Tel est le mwanisme fon*
SYL
1683
SYM
damental du raisonnement déductif ou de la déduction
( V. c$ rnot)^ qui revût, dans le syllogisme, sa forme la
plus exacte et la plus rigoureuse. Le syllogisme est essen-
tiellement composé de trois termes, les deux dont on
cherche le rapport et que l'on nomme Tattribut grand
termêf le sujet petit terme, et le moyen terme auquel on
les compare successivement. Soit le syllogisme suivant :
Tout être citié est impwrfUtt
I«e inonde est nn être créé :
Donc le monde est imparfait.
Imparfait est le grand terme, monde le petit terme,
créé le moyen terme. Or, il suffit qu'on sache le m(
être
qu'on sacne le moyen
terme contenu dans Textension du grand terme, et le
petit dans le moyen, pour que Ton conclue nécessaire-
ment que le petit est contenu dans le grand. C'est ce que
certains logiciens, notamment quelques éditeurs d'Aris-
tote et plus récemment Ëuler, ont voulu rendre sensible
à l'œil, en figurant les termes par des cercles. Un cercle
contenu dans un autre {fig. 4 et 4^ partie de la flg. 3) re-
présente une proposition affirmative universelle; deux
circonférences qui se coupent {fig, 2) représentent dans
Fig. 2.
Fig. 1.
Fig. 3.
leur partie commune l'affirmation particulière, et dans
leura parties séparées la négation particulière; deux
circonférences entièrement extérieures Tune à l'autre
(/k/* ^)y 1^ négation universelle. Nous devons nous bor-
ner à indiquer cette méthode d'exposition. On en trouvera
le développement et les applications dans Euler {Lettre
à une princesse d'Allemagne^ II" partie. Lettres 34-37).
En résumé, quels que soient les rapports des termes et
leurs dispositions, ces termes comparés deux à deux for-
ment trois propositions : celle où l'on compare le grand
tenne au moyen terme est dite majeure {a majore ter-
mino)\ celle où l'on compare le petU terme au moyen
terme est dite mineure {a minore termino), La roi^jeure
et la mineure portent en commun le nom de Prémisses
du raisonnement; ce sont les propositions que Ton met
en avant {prœ-^nissœ). Il est bien entendu qu'il ne suffit
pas, pour qu'il y ait conclusion, qu'il y ait un rap-
port quelconque entre le moyen terme et chacun des
extrêmes. Ces rapports sont strictement détermina par
certains principes qui figurent soit dans les règles géné-
rales du syllogisme, soit dans les règles particulières
applicables &6es différentes variétés (F. Modes et Figures
DU syllogisme). Les règles générales sont : 1° Le syllo-
gisme doit être compose de trois termes, le petite le grand
et le moyen; 2» les termes de la conclusion ne peuvent
être pris plus universellement dans la conclusion que
dans les prémisses; 3° la conclusion ne doit jamais con-
tenir le moyen terme; 4» le moyen ne peut être pris deux
fois particulièrement; U doit être pris au moins une fois
universellement; bo on ne peut rien conclure de deux
propositions négatives; 6o on ne peut prouver une pro^
position négative par deux affirmatives; 7° la conclu-
sion suit toujours la plus faible partie, c.-à-d. que, s'il
y a une des deux prémisses qui soit négative, elle doit
être négative, et,s'il y en a une particulière^ elle doit être
particuiaire ; %^ de deux propositions particulières il ne
s*ensuit rien. «^ La théorie du syllogisme a été exposée
de la manière la plus approfondie par Aristote dans son
traité Du Syllogisme {Premiers Analytiques), Les nom-
breux travaux et commentaires que l'Antiquité, la Scolas-
tique et la Renaissance ont accumulés sur ce sujet, n'y
ont presque rien ajouté d'important. En effet, les histo-
riens de la Logique n'ont rien de plus remarquable à
citer à cet égard que l'invention de la 4* figure, soit par
Galien, soit par Eudème et Théophraste, et les développe-
ments donnés par Boôce à la théorie du syllogisme hy-
pothétique. Telle est d'ailleurs l'exactitude que ce sujet
comporte et celle avec laquelle Aristote en a traité toutes
les parties, que les réformateurs les plus hardis et les
plus hostiles, Ramus, Bacon, n'ont pas cru devoir com-
prendre le syllogisme dans les attaques qu'ils ont diri-
gées contre la Logique péripatéticienne. C'est qu'en effet
le syllogisme est, dans une sphère encore fort étendue
quoique très-nettement circonscrite, l'instrument natu-
rel du raisonnement et de la démonstration. Il ne con-
vient pas de l'employer dans toutes sortes de sujets, et
d'ailleurs il est facile d'en abuser en le faisant servir au
développement de principes faux, chimériques ou mul
établis. Mais lorsqu'on l'applique à des vérités claires et
certaines, il en met au Jour toutes les conséquences avec
une rigueur et une évidence que nulle autre méthode ne
comporte. V. Barthélémy Saint-Hilaire, Logique d' Aris-
tote, traduite en français et accompagnée de notes perpé-
tuelles {Premiers Analytiques) ^ et De la Logique d' Aris-
tote, Mémoire couronné par l'Institut ; Euler, iMtres à
une princesse d'Allemagne; la Logique de Port-Jloyal, et
nos articles Prémisses, Conclusion, Majeure, Miivelue,
Termes, etc. B— e.
SYLVliS. V. SiLVES.
SYMBOLE, SYMBOLISME , SYMBOLIQUE, mots dé-
rivés du grec sj/mfco/on, signe. Un Symbole est l'expres-
sion figurée d'un objet qui ne tombe pas sous les sens, la
forme corporelle, peinte ou sculptée, d'une idée. Le Sym-
bolisme est cette langue mystérieuse qui, pour faire par-
venir à notre intelligence certaines idées, frappe nos sens
et notre imagination au moyen de signes physiques liés
avec ces idées par une connexion intime. On nomme
Symbolique, soit l'ensemble des symboles propres à une
nation, à une époque, soit la science qui cherche à inter-
préter les symboles par la critique et l'histoire.
SYMBOUQDE PAÏENNE.
I. Symboles muets, — Le symbole a préexisté aux
époques historiques. Antérieur h, toute institution civile,
son histoire est celle de presque toutes les religions; il a
régné longtemps dans la jurisprudence, et occupé uno
place importante dans le domaine des arts plastiques. Les
premiers hommes se servirent, pour communiquer entre
eux, d'une pantomime animée, d'images sensibles, de
représentations figurées : les objets répandus sur la sur-
face du globe, animaux, plantes, pierres, etc., furent,
après le geste, les éléments de la langue symbolique. Les
premiers instituteurs du genre humain, en présence du
langage si pauvre et des organes si grossiers des peuples
naissants, eurent également recours à des images prises
dans la nature, pour faire comprendre leur enseigne-
ment : ainsi , par exemple, ils firent de l'œuf le symbole
de la création, des forces productrices de l'univers ; le
serpent qui se mord le bout de la queue, en formant un
cercle, signifia l'éternité de la vie générale, à cause de
l'analogie qu'on avait remarquée entre le renouvellement
annuel de la peau de ce reptile et celui des saisons. Ils
ne se contentèrent pas de déposer dans les objets exis-
tants les vérités qu'ils voulaient transmettre ; ils créèrent
d'autres symboles en personnifiant la Divinité, et furent
ainsi les premiers sculpteurs. Mais il y eut toujours de la
disproportion entre la forme et le sens, entre l'expression
et l'idée : de là, dans le symbole religieux, ce vague, cette
indécision inhérente à tout symbole, mais propre à
pénétrer l'&me d'une respectueuse terreur, car ce que
l'homme ne fait que pressentir lui laisse une impression
plus formidable que ce qui se présente ouvertement à ses
yeux. Quand le symbole entreprend de tout dire, il de-
vient confus, obscur, énigmatique ; on appela mystiques
les symboles de ce genre, parce qu'ils contenaient les
mystères, les doctrines secrètes, et ne pouvaient être
compris que des initiés. Ce nom convient surtout aux
figures symboliques de l'Inde, de la Perse et de l'Égj'pte,
à ces idoles monstrueuses et fantastiques, à ces Dieux à
plusieurs tôtcs et à plusieurs bras, surchargés d'attributs
dont l'intelligence se fatiguait à deviner ou à retenir le
sens. L'absence de règle et de mesure, jointe à l'usage de
représenter les divinités assises ou couchées, couvertes
de riches étoffes et d'ornements de toute espèce, urrOtii
s Y 11
1GS4
SVM
pour Jamais les nations orientales dans la route du beau,
tundis que les Grecs, simplifiant les attributs, renonçant
à exprimer ce qui est inexprimable par son essence,
adoptèrent lo nu , prirent pour type la figure humaine,
ci surent allier, dans les limites du possible, la beauté de
la forme avec la sublimité de Tidée. Des signes caracté-
ristiques, soit dans la forme des membres, soit dans Tha-
bitude générale du corps, des différences palpables fon-
dées sur une convention réfléchie, établirent si bien les
individualités divines, qu*à la fin le secours de leurs
attributs particuliers n*était plus nécessaire pour les faire
reconnaître. Ces statues symboliques, créées au plus
beau temps de Tart, ont reçu le nom de symboles plas-
tiqties.
Il est des symboles qui se rattachent au symbole reli-
gieux et se confondent avec lui dans l'usage, bien qu'ils
en diffèrent: ce sont V Allégorie et V Emblème (K. ces
mots). L'Allégorie, soit muette, soit parlée, renferme un
sens caché sous une figure ou un récit qui exprime une
chose et en signifie une autre, tandis que le Symbole est
ridée même rendue sensible et personnifiée. VEmblème
est une image dépourvue de tout caractère auguste et
sacré, où la pensée humaine se révèle bien plus que la
pensée divine : il a un sens limité et fini, et rentre essen-
tiellement dans Tallégorie ; la réunion de plusieurs em-
blèmes constitue une allégorie. Le» Anciens avaient un
si vif penchant pour ce mode d'expression, qu'ils ne né-
gligeaient aucune occasion de l'employer; ils allaient
mênfie quelquefois jusqu'à donner an sens allégorique à
la matière de leurs ouvrages. Suivant Pausanias, une
statue de Vénus, qu'on voyait à Temnus en Éiide, était
faite du bois d'un myrte femelle ; l'Ile de Naxos possédait
un Bacchus fait d'un cep de vigne. Les sculpteurs choi-
sissaient, dans une vue d'allégorie, la couleur des pierres
qu'ils mettaient en œuvre, ou peignaient leurs statues :
celles de Memnon et du Nil étaient noires, par allusion
sans doute aux Étliiopiens; Saturne était noir ou bleu
foncé; Jupiter, couleur de terre, de cendre ou de feu;
Mars était rouge; le Soleil était d'or, et portait un sceptre
d'or; Vénus paraissait avec l'éclat du pourpre, mais le
Jaune et le blanc lui étaient aussi dédiés; le temple de
la Lune était en pierre verte, son image portée sur une
vache blanche, et ses ministres, vêtus de vert ou de
blanc; le bleu était consacré à Mercure et à Neptune. On
représentait aussi par des couleurs allégoriques les quatre
saisons et les quatre éléments. V. Cocleurs.
Voici des symboles antiques d'un autre ordre : les
l^uôpes placées sur le tombeau d'Archiloque représen-
taient le trait acéré de l'iambe ; le papillon était le sym-
bole de l'àme, et en même temps du sommeil (V. Psyché
et Mort — Images de la) ; les Herméfacles {V. Hermîîs)
exprimaient souvent l'association de la force avec le génie
d'invention. Il faut aussi ranger parmi les symboles les
représentations figurées qui désignent sur les monnaies
les provinces, les villes, et servent à les faire reconnaître
(1^. Numishatiquk). Une autre variété de symboles con-
sistait dans les signes qui servaient à la fois d'expression
b. certains dogmes enseignés dans les Mystères et de
moyens de reconnaissance pour les initiés, tels que les
cigales d'or portées par les Athéniens dans leurs cheveux,
ou bien le triple triangle, formant cinq triangles et un
pentagone, adopté pour les affiliés à la doctrine secrète
des Pythagoriciens. Les Anciens désignèrent enfin sous le
nom de symboles certains gages formés des deux moitiés
d'une tablette brisée, que se donnaient deux personnes
qui contractaient des liens d'hospitalité, et qui , conservés
soigneusement, servaient aux hôtes à se reconnaître par
la suite. Plus tard, on appela symboles tous les objets
destinés à sanctionner les conventions, toute espèce de
gages, tout signe et môme tout mot de reconnaissance,
tout si;;nal à la guerre.
II. Symboles parlés, — On entend par là les symboles
et les allégories qui emploient comme moyen d'expres-
sion le son ou la voix, qui prennent la route de l'oreille
pour arriver au sens intérieur. A cette classe appartien-
nent le Mythe, V Apologue, la Parabole, la Sentence et !a
Maxime. Le Mythe n'est autre chose qu'un récit plus ou
moins étendu dont tous les personnages sont symbo-
liques : quand il se compose d'antiques croyances, de
dogmes religieux et autres, de leçons et de préceptes de
morale, il est théologique ou mystiqtte; quand il renferme
d'anciens événements, il s'appelle proprement la tradi-
iion. Le mythe était rhythmé, et on le chantait dans les
f<Hcs publiques des Dieux et des héros; mais peu à peu
il se dépouilla des formes roides et sévères du symbole,
et prit une forme pbiA douc^ dIiT Dure ni plua humaine,
qui s'alliait mieux avec la poésie. Tel est dans ce sens
VHymne homérique à Cérès : Démètcr est la fécondité
de la Terre, la Terre même, comme l'indique son nom ,
car Dé n'est qu'une forme de Gé. Perséphonè , fille de
Zeus, qui est la pluie, et de Démèter, représente la vé-
gétation qui nait de la terre fécondée par les pluies du
ciel ; elle est, dit Cicéron, la graine des plantes; on l'ap-
pelle le plus souvent ^é, forme féminiàe de koros,
l'abondance. Elle est enlevée par Aidés, l'invisible, le
Dieu souterrain, parce que les graines des céréales dis-
paraissent sous la terre. La tristesse de sa mère repré-
sente le deuil de la Terre pendant l'hiver, quand la vé-
gétation a disparu. Perséphonè passe un tiers de l'année
avec son époux, le reste avec sa mère, et cette alterna-
tive de mort et de renaissance l'a fait regarder comme la
Déesse des morts; son retour à la lumière est le symbole
de l'immortalité de l'àme. Les Grecs excellèrent dans ces
récits; leur imagination créatrice s'y donna carrière avec
tant de charme et de fécondité, que leur pays peut passer
pour la terre natale des mythes. — V Apologue , dans sa
forme primitive, est un symbole moral développé: il
exprime, comme le symbole, une vérité importante, mais
plutôt morale que profonde ou sublime, et prend égale-
ment ses images dans le monde matériel; il s'inspire
des habitudes constantes des plantes, des lois invariables
de l'instinct chez les animaux, c.-à-d. de l'immuable na-
ture. C'est pour ses enseignements faciles à comprendre
qu'il était quelquefois admis dans les harangues popu-
laires, d'où le mythe était exclu. L'apologue existe chez
tous les peuples de l'ancien monde qui atteignirent un
certain degré de civilisation : chaque contrée chercha
dans les races d'animaux, dans les familles de plantes
qui lui étaient propres, les emblèmes naturels des ac-
tions et de la conduite de l'homme. — La Parabole, cet
apologue des chrétiens, qu'ils se sont approprié par la
supériorité de celles qu'inventa Jésus-Christ, fiction chère
dans tons les temps aux nations orientales, au lieu de
chercher la forme de ses enseignements dans la nature
végétale et dans le règne animal, prend une situation de
la vie humaine, qu'elle imagine à plaisir, pour offrir au
peuple une leçon vivante. A ce titre elle figure dans la
Symbolique religieuse. — La Sentence et la Maxime s'y
rattachent également lorsqu'elles s'enveloppent d'une
forme allégorique, comme celles dont se servaient quel-
ques Sages de la Grèce, et particulièrement la secte des
Pythagoriciens, pour communiquer aux initiés les vérités
pratiques ou religieuses et les aécouvertes de la philoso-
phie spéculative. Les symboles de Pythagore, au nombre
de 75, avaient un sens propre et littéral , et un sens sym-
bolique, sur lequel les interprètes ne sont pas toujours
d'accord. Ainsi : « Ne t'assieds point sur le boisseau »,
signifiait, selon Porphyre : « Ne vis point inactif », et,
selon Jambliqoe : « Ne transporte point les soins de la
vie animale dans le domaine de l'esprit; vis plutôt pour
l'àme et pour la méditation que pour le corps et ce qui s*y
rapporte. » — Les sentences des prophètes hébreux, les
oracles des sibylles, sont aussi des symboles parlés. II
faut encore donner ce nom aux nombreuses applications
symboliques que recevaient la musique et le chant, par-
ticulièrement dans le culte secret, chez les Grecs, les In-
diens et les Égyptiens. V, Noiib.
STUDOUQDE CHRéTIBNNB.
Les mots Symbole et Allégorie passèrent du paganisme
dans le christianisme, mais avec un caractère différent
et un sens tout spiritualiste. Les premiers chrétiens, pour
entrer dans la voie du symtK)le, n'eurent qu'à imiter
leur divin maître, qui leur avait donné l'exemple par ses
paroles dans ses enseignements allégoriques, et par ses
actes dans l'institution du Baptême et de la Cène. U
religion mosaïque avait eu, d'ailleurs, son Symbolisme:
ainsi, le Tabernacle représentait la résidence de Jéhovah
au milieu des Hébreux ; la circoncision était le symbole
de l'élection du peuple juif; le sabbat rappelait aux Hé-
breux le repos de Dieu après la création ; la Pàque et ses
rites perpétuaient le souvenir des miracles qui accom-
pagnèrent la sortie d'Egypte, et la fête des Tabernacles
celui du séjour dans le désert , etc. Les 12 pierres pré-
cieuses qui ornaient le rational du grand prêtre avaient
un sens syinl)olique. Les chrétiens symbolisèrent de
bonne heure leurs principales doctrines. La Résurrec-
tion fut représentée dans le phénix sortant immortel
de ses cendres; le Sacrement de l'Eucharistie, par le
raisin et l'épi de blé, ou bien par uo agneau blessé,
dont le sang, coulant du cœur o». ji^ pieds, tombait dam
SYM
ICSj
SYM
an calice. L'Église était désignée par TArche, et par le
vaisseau sur lequel le Seigneur s*est endormi ; la pu-
reté et l'innocence du chrétien, par la colombe, la-
quelle représentait encore les &mes de ceux qui avaient
souffert pour la vérité. Plus tard, la colombe figura le
S<-Esprit , qui prit cette forme pour descendre sur la tète
de Jésus au moment où S^ Jean le baptisa dans les eaux
du Jourdain. Les Catacombes romaines sont remplies de
peintures et de sculptures allégoriques, dont les sujets
ont été empruntés à TAncien et au Nouveau Testament.
Ainsi , Noé dans T Arche, sur les eaux déchaînées, signifie
la foi sûre de son avenir au milieu des persécutions; Job
sur le fumier prêche la patience ; Daniel parmi les lions
est rhomme de désirs domptant par la prière les puis-
sances du mal: Élie, enlevé sur un char de feu, annonce
le triomphe des martyrs; la multiplication des pains,
c'est la propagation de la parole sainte; la guérison des
paralytiques et des aveugles prophétise la renaissance
morale et intellectuelle de Tunivers. Les chrétiens des
trois premiers siècles avaient aussi, pour se reconnaître
entre eux, certains signes, tels que le signe de la croix, la
récitation de la profession de foi des Apôtres ou le Credo,
enfin des anneaux sur lesquels était représenté un pois-
son ( V. ce mot). — Depuis Constantin le Grand, TÉglise,
libre et triomphante, multiplia ses symboles. Les plus
beaux spécimens du Symbolisme catholique sont encore
vivants aujourd'hui, et nous sont offerts par l'architec-
ture, la sculpture et la liturgie.
I. Architecture, — Le Symbolisme se montre dans la
construction matérielle des églises : elles ont la forme du
vaisseau de S*-Pierre, d*où le mot nef (dn latin navis)
appliqué à leur allée principale. Cette allégorie du vais-
seau représente la condition de l'Église militante, pour-
suivant jusqu'à la fin des temps sa navigation laborieuse,
et ballottée par les tempêtes du schisme, de l'hérésie et de
l'incrédulité. « Une église, disent les Constitutions apo-
stoliques, doit être de forme oblongue, et tournée vers
rOrient. » La forme oblongue était regardée comme le
symbole d*un vaisseau ou de l'Arche qui doit nous sauver
d'un monde orageux; la coutume de prier en se tournant
vers l'Orient était presque universelle dans l'Église primi-
tive ( V. Orientation ). — Le plan général de l'église doit
avoir la forme d'une croix, afin de rappeler l'instrument
de la rédemption, laquelle a encore inspiré l'idée de la
déviation de l'axe longitudinal à partir de la naissance du
chœur Jusqu'au fond de l'abside (F. Axe). — On a donné
quelquefois un sens mystique aux diverses parties d'une
^lise : ainsi, les murailles désignent les Juifs et les
païens qui accouraient des quatre coins du monde vers
le Christ; la chaux est le symbole d'un brûlant amour;
les tours sont les prédicateurs et les prélats, forteresses
de l'Église, etc. — La doctrine de la Trinité est proR)n-
dément tracée dans la structure des églises : à 1 époque
romane, elle est figurée par la nef et les deux bas côtés,
par la triple division de la nef, du chœur et du sanc-
tuaire, ou par la tour centrale, le chœur et la nef, enfin
par le triple arceau du chœur. Le nombre trois domine
non-seulement dans le plan général, mais encore dans
chacune des parties, comme en font foi la triplicité des
arcades, le triple arrangement des moulures, les trois
fenêtres percées dans la muraille orientale, les marches
de l'autel qui vont trois par trois ou quelque multiple de
trois, le tnplet ou groupe de trois fenêtres accolées, les
fenêtres on forme de triangle éauilatéral , les trois portes
d'entrée de la façade principale, les trois tours des grandes
églises, etc. Pour le symbolisme des nombres, K. Nom-
bres SACRfe, dans notre Dictionnaire d» Biographie et
d*Histoxre, — La doctrine de la Régénération est repré-
sentée par les baptistères et les fonts, ordinairement
1>lacés à l'entrée, car nous n'entrons dans l'Église que par
a régénération ; ils sont de pierre, parce que Jésus-Christ
est la pierre ; le couvercle, terminé en flèche, nous avertit
qu'aprte être sortis des eaux purifiantes, nous devons
rechercher les choses d'en haut. La plupart ont la forme
octon>ne; la création s'étant accomplie en sept Jours, le
nomore huit se prend pour indiquer la nouvelle création
ou la régénération. — Le JuM, qui sépare le chœur
d'avec la nef, le clergé d'avec les laïques, exprime sym-
boliquement la division entre l'Église militante et l'Église
triomphante, c-àrd. la mort des fidèles. Cette pensa se
montre dans la croix qui le surmonte, dans l'image de
Celui qui a vaincu la mort. Les saints et les martyrs ap-
paraissent dans les panneaux inférieurs comme nos mo-
dèles dans la foi et la patience; dans les couleurs <}ui
brillent à la clôture même, le rouge cramoisi dépeint
leurs tourments, l'or leurs victoires. Les sculotures à
Jour sont l'emblème du voile qui cache eneore à l'Église
militante la vue des choses célestes ; à travers on aper-
çoit le sanctuaire lointain , les stalles massives qui re-
présentent le repos éternel du ciel , la piscine qui rap-
{^elle que les élus ont lavé leur robe dans le sang de
'Agneau , et en dernier lieu l'autel , figurant avec ses
cierges allumés et ses sculptures dorées la tête glorieuse
du Christ , de même que la nef et ses transepts en rap-
pellent le corps et les bras étendus.
n. Sculpture, — Les animaux tiennent une grande
place dans la Symbolique chrétienne, et ils apparaissent
sur les monuments avec les mêmes caractères, les mêmes
attributs que dans les légendes et dans les écrits des
mystiques, non plus comme une conception incohérente
de la fantaisie individuelle, mais comme l'expression ré-
fléchie de la tradition générale. Tout en adoptant la plu-
part des représentations matérielles de l'Antiquité, l'art
en change la signification, et leur fait parler une langue
nouvelle. Ainsi , le cerf, qui , d'après les écrivains païens,
se rajeunit en mangeant des serpents, devient l'em-
blème du Christ, qui régénère le monde en écrasant le
tentateur. La colombe, spiritualisée, n'est plus l'oiseau
sensuel qui traînait le char de Vénus : altérée, comme les
chrétiens, de ce breuvage divin que le Sauveur a versé
aux hommes, elle est représentée, sur les sarcophages des
Catacombes, becquetant des raisins et buvant dans une
coupe ; ou bien , les ailes étendues, elle porte dans son
bec le rameau d'olivier, gage de la réconciliation et de la
nouvelle alliance. Le cerf, altéré, comme la colombe, de
la parole divine, boit duis les eaux du Jourdain, le fleuve
du baptême. Le serpent, indice de salut pour les Grecs,
qui l'attribuaient au dieu de la médecine, et pour les
Hébreux, auxquels il rappelait la figure d'airain élevée
dans le désert, devint l'image de l'esprit du mal, et fut
représenté vaincu au pied de la croix , puis foulé par la
Vierge immaculée. La sirène, en qui s'unissent les deux
natures humaine et animale, représente, par sa portion
supérieure, l'excellence de l'&me, et , par sa portion in-
férieure, la subordination du corps. L'ancienne chouette
de Minerve est devenue le symbole de ceux qui voient
dans les ténèbres, c.-à-d. qui sont sages et habiles dans
les choses de la terre, mais dont les regards ne peuvent
contempler les choses du ciel. Le lion, image de la force
brutale, fut placé hors des églises avec un agneau ou un
enfant dans la gueule ; ou bien il est un indice de force
morale, et soutient la chaire épiscopale, le cierge pascal
ou des colonnes. L'agneau seul, avec la croix, indique
le Sauveur; combiné avec l'image du Bon Pasteur, il
exprime la communauté des fidèles. Le coq, en compagnie
de S^ Pierre, c'est la vigilance; avec la palme, c'est le
triomphe des chrétiens sur le démon , des martvrs sur
la cruauté des bourreaux païens. Le dauphin est le sym-
bole du trajet des &mes vers une rive hospitalière; le
pélican , celui de la charité. Le cheval , palmé comme
le coq, c'est le fidèle qui a combattu vaillamment. L'an-
tilope est la figure du chrétien; ses deux cornes sont
l'emblème de la connaissance des deux Testaments ,
c-à-d. de la Loi ancienne et de la Loi nouvelle, qui
sont l'armure de son &me. — Mais si , dans les premiers
temps, le sens symbolique est transparent, il s'obscurcit
et se complique en avançant à travers le moyen &ge.
S'éloignant des types ofierts par la nature, les artistes
évoquent dans leurs rêves des dragons à sept tètes et à
dix cornes, des léopards avec des pieds d'ours et des
gueules de lion, des sauterelles avec des visages d'homme
et des queues de scorpion. Sur la cathédrale de Stras-
bourg, les Évangélistes sont représentés portant , an lieu
de leur tète d'homme, celle de l'animal qu'on leur donne
pour attribut. A cette époque, tous les êtres du monde
réel et du monde de la vision se montrent dans les
églises. De même que dans les écrivains ecclésiastiques
les hommes sont toujours partagés en deux classes, les
élus et les réprouvés, de même, dans la Symbolique, les
animaux peuvent se diviser en deux catégories expri-
mant, l'une l'idée du bien, de la vertu, de la pureté,
l'autre l'idée du vice, de la dégradation, de l'impiété : les
premiers forment le cortège du Christ et des Saints, les
seconds le cortéjse de Satan, des infidèles et des impies.
Les représeiitations de Satan sont tré»-variées : on lo
trouve tantôt sous la forme d'un aspic, d'un loup, d'une
couleuvre, d'un àne, d'un hibou, d'un crapaud, d'un cor-
beau, d'un bouc, tantôt unissant le type dégénéra de
l'homme au type des bêtes dont il a les grossiers in-
stincts. Représenté par le bouc ou le pourceau, il per^^on*
nifie la gourmandise, la luxure, tous les plaisirs sensuels,
et c'est pour cela qu'on le plaçait auprès de S^ Antoine,
SYM
1686
SYM
i
qui aralt rainca tant et de si pressantes tentations. Le
loup et l'ours, à cause de leurs instincts féroces, parais-
sent aussi dans les sculptures comme des emblèmes se-
condaires du Diable. Il en est de même des gargouilles et
de tous les êtres bizarres qui forment un contraste frap-
pant avec les Anges et les Saints. La sirène dévorant un
poisson, c*est le démon faisant sa proie du pécheur; le
dragon aux pieds des Saints, c'est le démon vaincu ou
ridol&trie terrassée {V. Diable). — Les vices et les pas-
sions sont, comme le Diable, symbolisés par des ani-
maux. Pris en général , on les a figurés par des rats,
parce qu'ils rongent celui qui leur donne asile en son
cœur. L'orgueil est désigné par le cygne, dont le plumage
blanc recouvre une peau noire; l'hypocrisie, par Tau-
truche, que ses larges ailes semblent devoir porter au
ciel, et que ses lourdes pattes retiennent sur la terre; le
scandale, par le dragon à la tête de femme et aux pieds
de cheval ; la rapacité et l'injustice, par le griffon ; la
prudence dans le mal, par le hibou, etc. Après avoir
montré par des images sensibles le vice et le péché, l'art
exprimait encore par des images nouvelles la rémunéra-
tion des œuvres et les châtiments. La croyance générale,
qui faisait de certains animaux les bourreaux des dam-
nés , lui a fourni de nombreuses inspirations : dans
l'église S'-Sauveur à Dinan , un homme à cornes de bœuf
est écartelé par des crocodiles fantastiques; sur un cha-
piteau de S^-Trophime d'Arles, on voit des réprouvés
dévorés par des lions ; sur la façade méridionale de la ca-
tliédrale de Chartres, des démons poussent les damnés à
coups de fourche dans cette large gueule de dragon qui ,
sur les thé&tres du moyen âge, représentait rentrée de
TE n fer. V. Animaux syiiboliques.
III. Liturgie. — Le Symbolisme de la liturgie catho-
lique ne le cède en rien h celui de l'architecture et de la
sculpture. L^ premières cérémonies dont une église est
témoin sont la Dédicacé {V. ce mot dans notre Dictionnaire
ie Biographie et d'Histoire) , puis la consécration de l'au-
tel. L'évêque seul peut dédier les églises et les autels,
parce qu'il est l'image et le type de l'évêque par excel-
lence, qui est J.-C. Ces cérémonies, éminemment symbo-
liques dans leurs nombreux détails , étant achevées, le
saint sacrifice commence. Vlntrùït de la messe signifie
rentrée du fils de Dieu en ce monde, la conversion des
peuples qui furent introduits à une vie nouvelle. La Col-
lecte que dit l'ofQciant en tenant ses bras ouverts depuis
le coude et sans dépasser l'épaule, c'est le symbole des
âmes qui s'élèvent vers Dieu. UÊpttre aui se lit sur le
pupitre symbolise la limite qui sépare la Synagogue et
l'Église, l'Ancien et le Nouveau Testament, la supériorité
de la loi chrétienne sur la loi figurative des Hébreux,
la promulgation de l'Évangile. La Préface est un avertis-
sement symbolique donné aux assistants sur le grand acte
qui va s'accomplir. Le Sanctus, répété trois fois, signifie
l'unité de Dieu dans la Trinité. ÏÀ prêtre qui, en célé-
brant la messe, va du milieu de l'autel au côté droit ,
exprime le passage de Jésus-Christ de la Passion à la gloire
de sa Résurrection ; (juand il va de la droite à la gauche,
il rappelle sa vie pénible et terrestre ; lorsqu'il se tourne
vers l'Orient, c'est encore pour rappeler que c'est là que
le Sauveur a fait succéder la lumière aux ténèbres. Ven-
eens brûlé avec profusion sur l'autel , c'est la multitude
des prières qui s'élèvent continuellement vers le ciel.
Le calice, c'est le symbole du sacrifice universel, la
coupe de la vie céleste. Le pain bénit qu'on distribue
pendant la grand'messe est un symbole de la foi com-
mune des chrétiens, et de l'étroite union qui doit régner
entre eux. Le saint sacrement, le ciboire, la patène, les
corporaux, les burettes, sont autant de signes représen-
tatifs d'idées spirituelles analogues à leur respective des-
tination. Il en est de même de l'aube, de la chasuble,
du surplis, de l'amict, de la chape, du manipule ou fa-
non, de l'étole, de la ceinture, de la dalmatique, de la
mitre des évoques, du camail, de la croix pectorale, de
la crosse, de l'anneau épiscopal , des gants, et, en géné-
ral, des vêtements et ornements sacerdotaux. Ce symbo-
lisme existe encore pour tous les meubles et ustensiles
servant au cérémonial du culte, tels que l'encensoir, les
chandeliers, le cierge pascal , les cierges ordinaires allu-
més en plein Jour, le dais, le baldaquin, le siège élevé
des évêques, le bénitier, le chrême, l'etiu, le sel, le
goupillon , le gonfanon ou bannière, les cloches, etc.
SYMBOUQCB DU DROIT.
Le Droit , dans ses manifestations extérieures , nVi pas
toujours exclusivement revêtu ia forme do la parole ou
[ de récriture : les premiers préceptes de morale, qui étaient
le Droit des hommes primitifs , furent, pour 6&e mieux
compris, donnés sous une forme symbolique. Le symbole
Juridique a donc son origine dans les mêmes causes qui
ont produit le symbole religieux. Dans sa signification la
plus élevée, il est une véritable émanation du ciel, signe
soudain, imprévu, qui avertit l'homme de son droit, qui
règle une détermination , ou qui fixe la solution d'une
difficulté judiciaire. Mais ordinairement il est pris dans
une acception inférieure; c'est un signe qui a pour objet
de représenter d'une manière fictive, soit une chose pliy-
siaue ou abstraite appartenant au monde de la vie usuelle,
soit un acte ou une personne. Le symbole Juridiaue a
aussi ses formes diverses, qui sont le mythe, V emblème y
la marque ou étiquette, la formule, la ftction de droit.
Le mythe est une légende ou croyance populaire qui ra-
conte et conserve, sous une forme métaphorique, un
ancien usage, un ancien fait Juridique. L'institution de
la propriété, en tant qu'idée abstraite, est figurée dans
le mythe de Cérès. Mais cette institution amène la divi-
sion du sol, sa mensuration, ses limites, éléments néces-
saires de l'idée concrète de la propriété : de là le dieu
Terme, pour représenter le principe pratique de l'insti-
tution. L'idée générale de la justice répressive respire
dans les mythes de Némésis et des Euménides, ces
vengeresses du crime. — Vemblème àésigae ^ dans le
Droit, une image ou représentadon allégorique souvent
accompagnée d'une légende ou devise, et se rattache h
l'art héraldique, qui lui-même fait partie du domaine
Judiciaire, comme science des signes distinctifs des Étatii.
et des villes, et comme explication des marques hérédi-
taires des familles. — La marque ou étiquette que le»
fabricants appliquent sur leurs produits pour en prévenir
la contrefaçon est un signe symbolique de propriété. —
La formule Juridique n'a de rapport avec le symbole que
quand elle s'enveloppe dans l'obscurité et l'équivoque.
Telle est cette terrible formule des Romains : ïgnis et
aquœ interdictio , véritable mise hors la loi du citoyen
qui l'avait encourue, et qui signifiait l'absence de toute
protection du Droit civil figuré par l'eau, du Droit divin
figuré par le feu. Les formules d'excommunication : Sacer
esto, diris devotus, sont également symboliques. Il en est
de même de cette formule du moyen ftge : Wargus sit ,
wargus habeatur, appliquée à celui qui , banni et chassé
de son pays, pouvait être tué impunément comme un
loup, s'il y rentrait sans autorisation. — C'est par le fond
et non par la forme que la /letton de Droit, comme image
de la vérité, prend les caractères du symbole. Elle inter-
vient entre deux faits pour les lier ensemble, en procla-
mant ce qui doit être, et en donnant à une supposition
l'autorité et la force de la vérité. C'est ainsi qu'elle de-
vient emblématique, parce qu'elle est chargée de repré-
senter le vrai , plutôt qu'elle ne le manifeste en réaliu' .
La règle qui décide que la chose Jugée est une vérité ,
celle qui veut que les lois soient connues do tous aprùs
leur promulgation officielle, le principe d'après lequel nul
n'est censé ignorer la loi, sont des fictions de ce qui doit
,.être, bien plutôt que l'expression de ce qui est.
Les symooles Juridiques proprement dits peuvent se
diviser en symboles naturels et en symboles artificiels.
I. Symboles naturels, — Ils sont fournis par la nature
inorganique (la terre et ses productions, le feu, l'eau),
par la nature vivante (les bêtes) , par la nature vivante
et pensante (l'homme). Une motte de terre, une glèbe,
pendant le moyen âge, figure un champ. Vherbe et legason
ont le même sens symbolique. Dans le Grand coutumier
de France, on trouve : mettre le gazon de Vhéritage en sa
main, pour signifier la saisie et le séquestre d'un héritage
rural. L'herbe représente quelquefois une forêU^La paille
fut employée partout dans le moyen âge pour rinvestiture
d'un champ, d'une prairie, d'un verger, d'une maison, etc.
Elle servit aussi dans les cérémonies de l'hommage, dans
le délaissement d'un duché; elle figura dans la déposi-
tion du roi Charles le Simple. Cest par le symbole de la
f>aille, du chaume qui couvre les maisons, que Guillaume
e Conquérant se saisit de l'Angleterre au moment de sou
débarquement. Au lieu de briser la paille, dont chaque
contractant conservait une partie comme gage d'une pro*
messe antérieure, on l'Insérait souvent dans le diplôme,
dans la charte; on l'y fixait, on l'y attachait, afin de
donner à l'acte écrit un plus haut caractère d'authenti-
cité. — Le rameau ou la branche d'arbre est un symbole
très-usité dans tous les temps. Tantôt 11 est enfoncé dans
la motte de terre ou de gazon, pour indiquer qu'on trans-
porte non-seulement le sol , mais encore tout ce qui le
couvre et ce qui en fait partie, y compris les colons et
SYM
ir,87
SYM
tes serfs ; tantôt cl le plus souvent il e$t seu'I , et néan-
moins il est tout aussi bien IMmage de la propriété fon-
cière. La rupture d'un rameau était, chez les Romains,
un mode d'interruption de la prescription des biens ruraux.
Cette voie de fait est encore usitée en France, notamment
en Normandie, comme symbole de prise de possession.
— Les (leurs et les fruits jouent un rôle symbolique, chei
la plupart des peuples , dans les cérémonies juridiques
du mariage. On connaît le sent de la couronne et du
bouquet d*oranger. Mais , en Russie, la couronne blanche
n'est pas seulement le signe de la piflreté de la jeune
épousée, elle est encore un symbole de liberté; car il n*y
a que la flUe libre ou affranchie qui puisse en orner son
front le jour de son mariage ; la fille serve ne peut porter
qu'un bandeau de laine. Les fruits (noix, figues, graines,
blé, amandes, noisettes ) sont un symbole de fécondité et
d'abondance. — Le feu, dans les idées de tous les peuples,
est considéré, au point de vue cosmogonique et religieux,
comme un principe fécondant et générateur; au point de
vue juridique, comme image de la propriété : car il n'y a
de propriété que par la culture, le défrichement, que le
feu seul a rendu possible. A ces idées se rattache le feu
allumé par l'acquéreur, en signe de prise de possession
sur la propriété récemment acquise. 11 y avait une for-
malité véritablement obligatoire dans ces bouchons de
paille placés sur un fonds de terre destiné & être vendu
par autorité de justice : pour consommer légalement la
prise de possession, on mettait le feu à ces bouchons de
paille, après que la vente avait été adjugée; c'est de là
qu'est venu le nom de la saisie-brandon, dont parle notre
Code de Procédure civile. Symbole de la propriété, le feu
est aussi nécessairement le symbole de la famille ; car
avec la propriété s'est créée la famille, et ces deux insti-
tutions son indissolublement unies l'une à l'autre. Les
Grecs, en effet, comptaient par feux ou fwnées les fa-
milles nombreuses composées de parents ou alliés; chez
les Romains et pendant le moyen &ge, feu était synonyme
de famille et de maison; le même mot sert encore chez
nous aujourd'hui à désigner, dans le langage légal , un
ménage ou un chef de famille. — L'eau figure rarement
dans les usages juridiques. Ce sont les peuples de l'Orient
qui la font intervenir le plus fréquemment. L'eau répan-
due sur la teiTe, recueillie dans la main par l'acquéreur
ou le donataire, et bue par lui, est. chez les Indiens, un
mode d'aliénation d'un fonds ; en buvant cette eau, l'ac-
quéreur fait acte de propriétaire, il s'assimile et s'appro-
prie la chose. La terre et l'eau que demandaient Darius
et Xerxès aux Athéniens étaient le symbole de la domi-
nation. C'est encore en vertu de l'eau puisée dans le
Danube, d'un peu de terre et d'herbe porté à Arpad par
son envoyé, que celui-ci envahit la Hongrie et la reven-
dique comme sienne par la force de ces symboles.
Les bêtes et leur produit ne donnent naissance qu'à un
petit nombre de symboles Juridiques. Nous citerons le
coq y comme un des principaux symboles de la maison ,
de la famille pendant le moyen âge. Dans les Établisse-
ments de S* Louis, il désipe, en effet, le principal ma-
noir, celui qui doit revenir à la fille aînée d'un gentil-
homme, lorsqu'il ne laisse à son décès que des filles. De
là peut-être l'usage de placer au-dessus du faîte des châ-
teaux la figure d'un coq. qui en surmonte les girouettes.
Vabeille, chez les Égyptiens, désigne soit un roi , soit
un peuple obéissant à son roi : de là le manteau impérial
semé d'abeilles d'or. Le cheval blanc, dans. le moyen âge,
représentait la domination, la suzeraineté : les rois de
France ont quelquefois usé de ce symbole à l'occasion de
leurs entrées solennelles dans les villes de leur royaume,
et surtout dans les villes et pays de conquête.
La personne de l'homme, avec ses membres principaux
et ses gesles, son attitude, son regard, fournit de nom-
breuses variétés au Symbolisme juridique. La main re-
présente la force physique et personnelle de l'homme;
elle devient dès lors le signe de sa puissance. De là l'usage,
admis chez presque tous les peuples, d'employer la main
comme symbole du pouvoir. A Rome, le fils de famille
et l'esclave, pour être affranchis de la puissance du père
et du maître, sont placés hors de sa main {^emancipatiOy
manumissio); la femme qui prend un mari tombe en sa
main (in manu maj-iti). Pendant le moyen âge, la tra-
dition de la propriété est consacrée par le symbole de la
main : pour l'acquisition comme pour la vente, la main
est indispensable, car ces deux actes sont toujours suivis,
l'un d'une main mise sur la chose par l'acquéreur, l'au-
tre d'une main levée de la part du vendeur; les hommes
qui n'avaient pas le droit d'acquérir, d'aliéner, de mettre
leur main sur une chose, étaient appelés lionimcs de main
morte. Comme les gens d'une infime condition sont sans
pouvoir, presque toujours sans propriété, on les nomma des
hommes de basse main. Si la main est un symbole de
puissance et d'autorité, elle est encore un symbole d'al-
liance, d'amitié, de fraternité, de fidélité, de paix et
d'hospitalité. Jadis, dans une convention, le consentement
était exprimé en donnant la main à celui avec lequel on
contractait, et la convention ainsi formée recevait le nom
de manu datum, qui est resté à un genre particulier
d'engagement appelé mandat. Ces deux significations
différentes, mais non opposées, appliquées à la main,
d'une part comme symbole de puissance, d'autre part
comme signe de fidélité, de consentement, naquirent du
rit symbolique du serment féodal , qui consistait pour le
vassal à mettre ses mains enire celles du suzerain ; for-
malité qui présentait un double sens, sens de consente-
ment mutuel de la part du suzerain et du vassal, et sens
de soumission de la part de ce dernier. De là la formule
encore usitée : prêter serment entre les mains c/e..., et
cette autre formule : donner les mains , pour consentir,
adhérer, La main nue qu'on élève vers le ciel pour prêter
serment est considérée comme le symbole du serment;
la Coutume de Reims fait du mot main le synonyme de
serment, — Dans la Symbolique du Droit, le pied joue
aussi son rôle. C'est en posant le pied sur la terre que
l'homme l'occupe et se l'approprie naturellement , et de
là est venu le mot po^ie^^ton {pes-sitio, quasi pedum po-
sitio); de là sans doute aussi, pendant le moyen âge, les
mots plain pied pour signifier la plénitude du droit de
propriété. — I^es Germains avaient fait de la bouche lo
symbole de l'autorité, le «igné du pouvoir royal comme
du pouvoir domestique ; le même mot, chez eux {mund^
bouche ) , exprimait en môme temps la tutelle, l'autorité
civile, et l'autorité politique. On disait des hommes de
guerre rangés sous un chef, qu'ils obéissaient à sa bow-
che, La bouche est , dans l'hommage féodal , le signe de
la fidélité : l'hommage était, en effet, accompagné d'un
baiser appliqué ordinairement sur la bouche, ce qui avait
donné naissance à diverses locutions symboliques, telles
que : être engagé, de la bouche; devenir Vhomme de
bouche et de mains de quelqu'un ; devoir la bouche et les
mains. Mais il n'y avait que les nobles qui fassent admis
au baiser; les roturiers possédant des fiefs n'obtenaient
pas un pareil honneur. — Dans tous les temps et peut-
être chez tous les peuples, le casur a été considéré comme
le symbole de l'amour, de la conscience, de la vérité;
chez les nations modernes, il est , en outre, l'emblème
de l'honneur. Les prêtres catholiques, au lieu de lever la
main pour jurer devant les tribunaux, la placent sur leur
cœur. C'est aussi la main placée sur son cœur que le chef
du jury prononce le verdict, en disant que la déclaration
du Jury est rendue sur son honneur et sur sa conscience.
II. Symboles artificiels. — La verge, la baguette, le
bâton surtout, furent longtemps usités dans la transmis-
sion de la propriété. Ce symbole, lorsqu'il était joint au
rameau enfoncé dans la motte de gazon, représentait le
droit et la puissance du maître sur la chose, sur les serfs.
La verge ou le b&ton étaient Joints à l'acte écrit, et con-
servés avec soin. On les brisait quelquefois par le milieu
après la formalité, et chaque partie contractante en pre-
nait un morceau en témoignage de la convention. Le
bris du bâton ou de la verge pouvait parfois signifier le
sentiment du vendeur qui se séparait de la chose sans
regret ; il indiquait aussi la rupture du lien Juridique, la
dépossession, ce qui s'appelait exfestucare, exfusticare
(de festuca ou fustis), — L'arc et les (lèches sont les
signes de la force, de la puissance, du génie guerrier.
Ciiez les Indiens, une fille de la classe militaire qui se
marie avec un brahmane doit tenir une flèche, à laquelle
son mari doit en même temps porter la main. Chez les
anciens Perses, l'arc était le symbole de la royaui»', de
la puissance : homme fort, homme de Varc, étaient syno-
nymes; sur les monuments de Persépolis, on voit cette
arme entre les mains du monarque. La flèche et l'arc
servirent, chez les Normands, à la tradition d'un fonds
de terre ; ils transportèrent cet usage en Angleterre. ChQz
les Germains, et particulièrement chez les Lombards, la
flèche servit dans la solennité de l'affranchi^^sement. -^
La lance fut, chez les Romains, dans l'ordre des idées
Juridiques, le symbole do domaine quiritaîre, acquis à la
guerre. Elle était dressée devant le tribunal des centum-
virs, juges des questions de propriété. Les ventes pu-
bliques se faisaient sub hasta, d'où notre ancien Droit a
pris les mots subhastation et subhaster. Nos anciens
rois, en monUmt sur le trône, recevaient une Innce ou
un javelot comme signe de leur pouvoir. La lance est
SYM
tG88
SYM
encore le symbole de la propriété féodale : le royaume de
France et les fiefs ne tombent point en guenoutZ/e, leur
héritage appartient à la lance; d*où cette maxime : Vhé^
redite passe de lance en quenouille^ pour exprimer que la
fille est admise à la succession du fief. — L^épée sert de
symbole dans le commandement militaire chez les an-
ciens Francs. C*est par l'épée qu'on était admis chevalier,
qu*on recevait Hnvestiture d*un royaume; de là, dans le
sacre des rois de France, Tusage de tirer hors du four-
reau Tépée du roi, dont il était ceint par l'archevêque.
Dans rinvestitore do duc, Tépée figurait le commande-
ment militaire ; dans celle du comte, elle était plus ordi-
nairement le signe de la Juridiction criminelle. — L'in-
vestiture des provinces, des grands gouvernements, des
duchés, des évêchés, des villes, se faisait par un étendard
ou une bannière. Il en était de même des royaumes ;
c'est par un étendard que le pape Clément IV investit le
frère de Louis IX du royaume de Sicile, et qu'Alexandre II
octroya à Guillaume de Normandie le royaume d'Angle-
terre. Le drapeau est encore aujourd'hui le symbole de
la nationalité, de la patrie, n en est de même du pavil-
lon d'un navire : lorsqu'il est hissé, le navire est le ter-
ritoire de la patrie avec le pouvoir de juridiction et de
souveraineté. — La forme symbolique du gant fut usitée
chez tous les peuples de la race germanique, et particu-
lièrement en France. Elle consistait, en matière d'inves-
titure, à remettre son gant, communément celui de la
droite, au magistrat, qui le passait à celui qu'il investis-
sait de la chose donnée ou vendue. Comme signe de
défi, le ^nt était jeté à terre par celui €{111 demandait le
duel judiciaire; d'où notre expression : jeter le gant. —
Vanneau ( V. ce mot) a eu aussi son emploi synâ)olique.
— Le chapeau ou le bonnet, symbole d'honneur et de
liberté chez les Romains, tout en conservant un sens
identique pendant le moyen âge, prit une signification
opposée : il est tantôt le signe de l'autorité et de la puis-
sance, tantôt celui de l'ignominie, de la faiblesse et du
déshonneur. Le Roi garde le chapeau sur sa tête, tandis
qu'autour de lui tous demeurent la tête nue; le vassal a
la tête découverte quand il fait hommage à son seigneur;
le débiteur qui fait cession de biens se présente à l'au-
dience descetnt et tête nue; le juré qui prête serment
est debout et découvert, tandis que le président qui re-
çoit le serment est assis et a la tête couverte; l'avocat,
comme signe de son indépendance, plaide avec son bon-
net carré sur la tête ; nous gardons notre chapeau à la
main, en signe de salut, de soumission, de déférence;
mais dans l'Orient c'est un acte de mépris et une grave
incivilité que de se découvrir la tête en présence de
quelqu'un. — Dans les idées des anciens Germains, le
manteau, particulièrement celui des rois et des princes,
des reines et des princesses, était un signe de protection.
Le manteau ou le voUe {pallium) était étendu sur les
enfants qu'on voulait légitimer par le mariage : le Droit
allemand les appelait eafants du manteau. Le manteau
fut usité comme mode d'investiture dans la donation
d'une maison à un couvent, dans la mise en possession
d'une église, dans la nomination aux fonctions de gou-
verneur de la ville de Rome pendant le xii" siècle. —
Chez les peuples du Nord de l'Europe, chez les anciens
Hébreux, et dans notre moyen &ge, la chaussure occupe
une place importante dans la Symbolique judiciaire. Le
soulier est un signe de dépendance, d'infériorité, d'hu-
milité, de soumission ; par opposition, il est quelquefois
aussi un symbole de supériorité et de puissance. Ainsi,
chez les Francs Saliens, dans la formalité de la cession
de biens, le débiteur abandonne son habitation en che-
mise et sans chaussure. Chez les anciens Hébreux, la
cession de droits et de biens entre parents avait lieu en
ôtant son soulier, et en le donnant à celui à qui on fai-
sait cette cession. Dans le moyen &ge, le fiancé présen-
tait à sa future épouse ou lui faisait présenter un sou-
lier; ordinairement c'était le sien, et quelquefois il en
chaussait lui-même sa fiancée : par cet acte, il s'humi-
liait devant elle, et, d'un autre côté, en se déchaussant ,
il s'exposait à marcher d'un pas moins ferme, et se pla-
çait dans une condition inférieure vis-à-vis de sa fiancée.
De là vient que, pour désigner un mari que sa femme
gouverne, on dit encore aujourd'hui en France qu'il est
« sous la pantoufle de sa femme. » — Ldlit sur lequel
l'homme repose est le symbole du mariage ; d'où enfant
du premier lit, du second lit; et, dans l'ancienne Cou-
tume de Bar, lit brisé, pour signifier la séparation de
corps, etc.
V. Creuzer, Religions de l'antiquité, ouvrage traduit de
l'allemand par M. Guigniaut; B»hr, Symbolique du culte
mosaique, en allem., Heidelberg, 1837-39, 2 vol. in<j^;
Mo ne, Histoire du Paganisme dans l'Europe du Nord,
en allemand, Heidelberg, 1822-23, 2 vol. in-S*"; Neale et
Webb , Du Symbolisme dans les églises du moyen âge,
traduit de l'anglais , Tours , 1849; Munter, Symbola
veteris Ecclesiœ artis operibus txpressa , Copenhague ,
1819, în-4'*; Cyprien Robert, Cours d^hiéroglyphique
chrétienne, publié dans V Université catholique; Félide
d'Ayzac, Symbolisme des pierres précieuses, dans le
t. Y des Annales archéologiques, 1846; Ch. Louandre,
V Epopée des animaux, dans la Revue des Deux Mondes,
décembre 1853; Michelet, Origines du droit français ^
1837, in-8<*; Chassan, Essai sur la symbolique du Droit,
Paris, 1847, in-8°. P— s.
STv BOLB , formulaire de foi. V. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
SYMÉTRIE (du grec sun, avec, et métron, mesure),
rapport et proportion des parties entre elles, dans les
ouvrages où doivent exister des parties égales et sembla-
bles. Par exemple, dans une œuvre d'Architecture où des
parties similaires se répètent, s'il y a 4 colonnes ou 4
fenêtres d'un côté, il faut, pour la symétrie, qu'il y en
ait 4 de l'autre. Des quatre façades de la cour du pîalais
du Luxembourg, deux sont symétriques en elles-mêm^
sans être symétriques entre elles, et les deux autres sont
symétriques entre elles, sans l'être en elles-mêmes. Dans
la cour du Louvre, les quatre façades sont, du moins
jusqu'à la naissance du troisième ordre, symétriques tout
à la fois en elles-mêmes et entre elles. — La symétrie
du style, en Littérature, est la correspondance des mots
et des membres d'une phrase entre eux, ou de plusieurs
phrases entre elles. — En Musique, la symétrie est un
rapport de durée et d'intonation que les parties d'un
air ont entre elles et avec le tout ; c'est une répéti-
tion ou une corresoondance de formes. F. Carrure des
PHRASES. B.
SYMPATHIE (du grec sun, avec, et pathos, affection),
disposition naturelle à reproduire instinctivement en
nous le sentiment ou la passion que nous croyons voir
dans un être animé, et à nous placer ainsi dans un état
sensible analogue à celui où nous le supposons; à souf-
frir de sa douleur, à Jouir de son plaisir, à partager ses
émotions; en un mot, à sympathiser avec lui. Ce senti-
ment s'étend à tout ce qui a vie et sensibilité, mais il
devient plus vif à mesure que les êtres qui en sgnt l'ob-
jet se rapprochent de l'homme. La sympathie est un
principe d'expansion et de bienveillance. Par elle nous
cherchons le bien des autres, souvent même au détri-
ment du nôtre, et, quoiqu'une émotion douce et agréable
accompagne l'exercice de ces affections bienveillantes, on
ne peut pas dire qu'elles aient ce plaisir personnel pour
objet, puisque la sympathie s'exerce instinctivement et
spontanément. Elle n'a rien d'intéressé ni d'égoïste;
c'est de tous points l'opposé de Vantipathie, principe de
concentration et de malveillance. Adam Smith, croyant
qu'on pouvait juger les actions humaines selon le degré
d'émotion sympathique ou antipathique d'un spectateur
impartial, donna la sympathie pour base à la Morale;
mais cette base est équivoque, car la passion est essen-
tiellement partiale, et si l'on invoque l'impartialité de la
raison, on détruit le système. De plus, cette règle est
arbitraire, car la sympathie est un fait instinctif, qui n'a
ni le caractère ni l'autorité que réclame la loi morale.
— Une conformité d'humeur, de goûts, fait naître entre
plusieurs personnes un sentiment qui est d'abord de la
sympathie, et qui, selon les circonstances, peut devenir
de l'amitié, de l'amour; la sympathie, à son tour, fait
naître la pitié, la compassion, la charité, et quelquefois
le dévouement. R.
SYMPHONIASTE, compositeur de Pkiin-Cli|mt.
SYMPHONIE (du grec sun, avec, et phônè, son), mot
qui signifie proprement réunion de sons, et par lequel
on a entendu tantôt un assemblage de voix ou d'instru-
ments de différentes natures, tantôt la production simul-
tanée de plusieurs sons. En ce damier sens, il a été
synonyme d'harmonie (V. ce mot)^ qui est aujourd'hui
d'un usage général. On l'a encore employé pour dési-
gner une ouverture d'opéra, par exemple dans les œu-
vres de Caldara. Les Modernes entendent par sympho-
nie un grand morceau de musique d'orchestre, qu'on
divise d'ordinaire en quatre parties : 1° un Allegro,
d'un mouvement plus ou moins rapide, et divisé en deoi
sections dont la première se reprend ; le compositeur y
développe toute sa science, au moyen de modulatioDs',
d'imitations, de canons et de fugues; S* un AndanU 00
un Adagio, où la mélodie doit jouer le premier rôle, ci
SYM
1089
SYN
1 1\ s*écrit, soit dans le mode relatif du morceau prccû-
lient, soit dans le ton de la dominante ou de la sous-do-
ninante de ce morceau ; il est divisé quelquefois en
ieax, plus souvent en quatre, cinq et même six re-
Srises, dans lesquelles on développe et varie le motif;
''un Menuet, c-à-d. un morceau écrit dans le style de
Tair de danse qui porte ce nom, et composé de deux re-
prises d'un mouvement analogue, entre lesquelles se
place un plus petit morceau de môme caractère et aussi
de deax reprises; le compositeur traite ici son motif
d*une manière un peu scolastique, et il termine par un
épisode appelé trio , sans doute parce qu'il ne s'écrivit
d*abord qu'à trois parties, mais qui ensuite en a compté
quatre, cinq et même six ; 4<* un RondeoM ou Finale,
écrit d'un mouvement vif, dans le ton de la première
partie, et où le motif reparait sous toutes sortes de formes.
Une symphonie est dite caractéristique, quand elle se
{propose pour but de peindre un caractère moral, comme
e Distraite de Haydn, ou un phénomène physique,
comme une tempête. — La symphonie était en germe
dans les concertx grossi de Corelli, de Geminiani, de
Vivaldi; on fait figurer, parmi ceux qui la cultivèrent,
Jean Agrell, Vanhall, Toelsky, Van Bfalder et Stamitz en
Allemagne, Palludini et Sammartini en Italie; mais ses
formes régulières ne se sont établies qu'au xviii* siècle.
Gossec, l'un des premiers, se distingua dans ce genre de
composition, qui devait être bientôt porté k sa perfection
par Haydn et Mozart ; Méhul et Pleyel y obtinrent aussi
des succès, même après ces deux grands génies. De nou-
veaux effets ont été ensuite introduits dans la sympho-
nie par Beethoven, depuis Beethoven, par SchneitzhœfTer,
et de nos jours, par Onslow, Mendelssohn, Reber, Berlioz
et Félicien David, qui s'y sont encore acquis une répu-
tation méritée. B.
SYMPHONIE , un des noms de la vielle au moyen ^.
SYHPHONIK. On nommait ainsi autrefois, suivant Isidore
de Séville et Cassiodore, l'accord des sons graves et aigus.
Suivant Hucbald, la symphonie, considérée comme in-
tervalle harmonique, était un accord agréable de sons
dissemblables réunis entre eux. La symphonie était donc
le contraire de la Diaphonie {V. ce mot). On comptait
six symphonies : l'octave, la quarte, la quinte, l'octave et
la quinte, l'octave et la quarte, et la double octave. F. G.
SYM PHOMSTA, instrument de musique. V, au Sup"
pléfnent,
SYMPLOQUE , en grec symplokè ( de syn , avec, et
plokè, tissu), nom donné par quelques rhéteurs à la Figure
appelée Complexion (K. ce mot),
SÏMPOSIAQUES (du grec symposion, banquet), titre
d'un ouvrage de Plutarque qui signifie proprement :
« Choses relatives aux réunions de buveurs ou de con-
vives, » et qu'on peut traduire en français par : « Propos
de buveurs » ou « Propos de table. » Ces propos consis-
taient en questions ou problèmes roulant sur des ma-
tières faciles, agréables, de peu d'importance, propres à
soutenir le ton de ^ieté franche inspirée par les vapeurs
légères d'un vin pris modérément , mais aussi sur des
matières utiles, graves, et même élevées. Les Grecs re-
cherchaient beaucoup les réunions à table, surtout en
vue du plaisir de la conversation ; on ne s'y réunissait
qu'entre amis et partant en petit nombre (neuf au plus
généralement), de manière à pouvoir parler de tout libre-
ment , sans crainte, sans autre gêne que celle des règle-
ments établis par le symposiarque ou chef du banquet
pour maintenir les convives dans les limites de la modé-
ration et des bienséances : l'ouvrage de Plutarque est
divisé en 9 livres, dont chacun traite une dizaine de
questions. Une des parties les plus remarquables est la
in question du H* livre : elle renferme d'excellents pré-
ceptes sur la manière de se questionner entre convives ,
sur la nature des questions que l'on peut s'adresser, sur
l'usa^ qu'on y peut faire de la plaisanterie, sur le genre
de raillerie qu'on s'y peut permettre. Ailleurs, Plutarque
traite du nombre et du genre de convives que l'on doit
réunir suivant les différentes circonstances, et s'élève
contre le ridicule et le désagrément de ces réunions si
nombreuses qu'il semble qu'on assiste à une représenta-
tion musicale ou dramatique, ou à une assemblée de
l'Agora (la Place publiaue); il veut qu'on abandonne
cette manie aux gens qui ne songent qu'à étaler leur ri-
chesse, et qui ne l'estimeraient pas richesse, si elle n'avait
beaucoup de témoins. Il condamne aussi l'usage d'amener
avec sol à un repas où l'on est convié ce qu'on appelait
dénombres, sauf certains cas qu'U énumère avec bon sens
(Liv. VII, quœit. G). Convient-il de mêler les instruments
de musique à un banquet, et ne doit-on pas de préférence
so borner au simple chant, ou s'accompagaant tout au
plus de la lyre? Quelles sont les choses bonnes à enten-
dre pendant qu'on est à table? Convient-il d'y délibérer
sur les matières politiques, d'y tenir conseil? Ce sont
encore des questions où Plutarque déploie beaucoup do
Jugement et de finesse. Il est remarquable pour nous qu'il
n'ait nulle part introduit aucune femme comme interlo-
cutrice dans tout le cours de ses 9 livres ; mais Tusago
de l'Antiquité excluait les femmes des repas où il y avait
des invités; on n'en voyait que dans les repas de dé-
bauche, et ce ne pouvait être par conséquent que deu
SYMPOSION. ; V. notre Dictionnaire de Biographie
SYNAGOGUE. { et d'Histoire,
SYNALLAGMATIQUE (Contrat). V, Contrat.
SYNALOBPHE, terme de Grammaire grecque qui si-
gnifie /iujton, mHange {syn, avec, ensemble; aloiphr,
onction, frottement), et qui désignait d'une manière gi*-
nérale les divers moyens par lesquels les Anciens évi-
taient le choc des voyelles. La synalœphe comprenait
Vélision, la crase, la synérèse, et d'autres sous-divisions
imaginées par la subtilité des grammairiens, et qui re-
viennent à ce que nous appelons contraction. Le nom
grec de cette figure correspond à peu près au latin con^
glutinatio, P.
SYNATHROISME. V. AccoMUiJiTiON.
SYNAULIE, en termes de Musique p^rccque, réunion
de joueurs de flûtes qui exécutaient alternativement la
même chose en se répondant l'un à l'autre.
SYNAXAIRE , nom donné dans l'Église grecque à un
livre contenant en abrégé la vie des Saints, avec une
courte explication du sujet de chaque fête. On appolltj
encore Synaxaires des tables qui se trouvent dans quel-
ques exemplaires grecs manuscrits du Nouveau Testa-
ment, et qui indiquent les Évangiles qu'on lit dans les
églises pendant tous les jours de l'année.
SYNCELLE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire,
SYNCHRONISME (du grec sun, avec, ensemble, et
khrottos, temps), rapprochement de personnes qui ont
vécu à une même époque, ou d'événements qui sont ar-
rivés simultanément dans divers pays. Des Tableaux
synchroniques ont été dressés par Lamp, Bredow, Vater,
Blair, Leclerc, Buret de Longchamps. On en trouve aussi
dans les AtlcLs de Gueudeville, de Bucy de Mornas, de
Kruse, de Lesage, etc.
SYNCOPE (du grec syncopé, coupure, retranchement),
se dit de la suppression d'une lettre, et particulièrement
d'une consonne, ou même d'une syllabe, au milieu d'un
mot; comme lorsqu'on dit en latin amarunt pour ama^
verunt, amassem pour amauissem, dixti pour dixisti,
exstinxem pour eoistinxissem, cepse pour cepisse, valde
pour valide, ciUdus pour calidtis, La syncope joue un
grand rôle dans la formation des mots français tirés du
latin ; c'est ainsi que dubitare s'est abrégé en doubter,
puis douter/ cubitus en coubde, puis coude; magis en
mais; magtster en maître; oraculum, spectaculum, en
oracle, spectctcle, syncopes déjà faites dans l'ancien latin,
où l'on trouve oraclum, spectaclum. La syncope se borne
à peu près dans les mots français à la suppression de Ve
intérieur de certains mots, surtout en vers : comme dé-
voûment, gaité, pour dévouement, gaieté; yessairai pour
yessaiercU, etc. P.
STNcoPB, en Musique, prolongement sur le temps fort
d'un son commencé sur le temps faible. Son emploi re-
monte au XIV* siècle.
SYNCRÉTISME, c.-à-d. en çrec réunion. On désignait
ainsi la réunion* des villes rivales do la Crète contre
l'ennemi commun. On l'employa ensuite pour exprimer
le mélange de plusieurs doctrines différentes. A Alexan-
drie, le syncrétisme philosophique se montra avec Philon
le Juif, Potamon, Numénius et d'autres. A la Renaissance,
on vit un syncrétisme à la fois philosophique et religieux
dans les tentatives de Pic de la Mirandole, de Beuchlin,
de Marsile Ficin et de plusieurs autres, qui essayèrent de
concilier les dosmes du christianisme, les uns avec Pla-
ton et la Kabbale, les autres avec les doctrines d'Alexan-
drie, de Pythagore et du Stoïcisme. Le nom de Syn-
crétistes fut donné, au xvii* siècle, aux partisans de
l'Allemand Georges Calixte ou Gallisen, qui voulait réunir
dans un même symbole les catholiques et les protestants.
Le syncrétisme diflTère de V éclectisme en ce qu'il n'est
qu'un mélange sans choix et sans critique de doctrines
opposées et souvent inconciliables. V, Éclectishb. R.
SYNDÉRÈSE (du grec syndtaXrésis, déchirement, dis-
cernement)! nom donné par les Tl^éolugicns à la Cuih
SYN
1C90
SYN
science morale , au discernement naturel du bien et du
mal, et aussi à la contrition de l'àmc qui voit son péclié.
SYNDIC ^du grec sun, avec, et dikè, cause, procès),
mandataire chargé de veiller aux intérêts d'un corps,
d'une communauté, d'une association, d'une compagnie.
Avant 1789, cliaque corporation d*arts et de métiers avait
son syndic, qui Taisait exécuter les règlements, et on ap-
pelait Syndicat tout à la fois la cliarge de syndic et le
temps que durait cette charge. Le titre de Syndic était
aussi, dans beaucoup de villes, celui d'un magistrat mu-
nicipal, dont les attributions avaient beaucoup d'analogie
avec celles des maires actuels, et il est encore porté aujour-
d'hui par le premier magistrat de Genève. De nos Jours,
certaines corporations privilégiées, comme celles des
agents de change, des notaires, des avoués, des agréés,
des imprimeurs, ont leurs Chambres syndicales, espèces
de tribunaux disciplinaires qui Jugent les infractions aux
règlements de la corporation ou aux devoirs imposés à ses
membres. — Dans les faillites, on nomme Syndics ceux
que le Tribunal de commerce délègue pour représenter
la masse des créanciers dans les opérations, pour réaliser
et gérer l'actif Jusou'à la conclusion d'un concordat
IV. Faillite). Virolle a publié un Guide des syndics,
4838, iu-8°. — Dans la Marine, on nomme Syndics des
gens de mer les employés qui , dans Ips sous-quartiers
maritimes, exercent à l'égard des marins classés et de
leurs familles le patronage attribué dans les quartiers
aux commissaires de marine. Les sous-quartiers qu'ils
administrent s'appellent Syndicats,
SYNECDOCHE ou SYNECDOQUE (du grec synekdokhè,
compréhension), figure de Rhétorique par laquelle on
donne une signification particulière à un mot qui, dans
le sens propre, a une signification plus générale, et réci-
proquement; c.-à-d. qu'elle fait concevoir & l'esprit pl^rs
ou moins que le mot dont on se sert ne signifie dans lu
sens propre. Dans la Métonymie (V. ce mot)^ c'est un
nom pour un autre; dans la Synecdoche, c'est le plus
pour le moins, ou le moins pour le plus. Elle étend ou
restreint la signification des mots : cent voiles pour cent
vaisseaius; deux cents feux pour deux cents maisons;
mille âmes pour mille habitants. Elle emploie le genre
pour l'espèce {les mortels pour les hommes)^ l'espèce
pour le genre, le singulier pour le pluriel {le Français,
né malin, créa le vaudeville)^ le pluriel pour le singulier
(lesCicéron, les Virgile), un nombre certain pour un
nombre incertain {vingt fois sur le métier remettez votre
ouvrage]^ la partie pour le tout {j'ignore le destin d'une
tête si chère), le tout pour la partie (Virgile parle d'un
bouclier fait de trois tcMreaux), la matière dont une
chose est faite pour la chose même (Vatrain pour le ca-
non ou les cloches). G.
SYNKCPHONÈSE, V, SYNiïkSB.
SYNÉRÈSE (du grec sun, ensemble, et aXrém, prendre),
en termes de Grammaire, désigne une contraction de
deux voyelles qui ne fait que changer en diphthongue les
deux syllabes formées par ces voyelles. C'est par syné-
rèse que les poôtes latins font de deux syllabes le mot
Orpheus : les deux lettres contractées n'ont subi d'autre
modification que d'être prononcées en une seule émission
de voix. Lorsque les deux voyelles en se contractant for-
ment une diphthongue qui ne reproduit pas les lettres
primitives, il y a crase (K. ce mot),
SYNERGISTES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'fiistoire»
SYNGRAPHE (du grec sun, ensemble, et graphéin,
écrire), nom qu'on donnait autrefois à un acte souscrit
de la main du débiteur et du créancier, et gardé par
tous deux.
SYNiZÈSE ou SYNECPHONÈSE, énonciation de deux
syllabes en une seule, lorsque l'une d'elles finit et l'autre
commence par une voyelle. C'est ce qui arrivait en grec
lorsqu'on faisait de théoi une seule syllabe, en latin lors-
que meus, tuus, eius, huius, nauem, Dauus, devenaient,
chez les po6tes comiques et sans doute aussi dans le lan-
gage usuel, monosyllabiques. Les syllabes françaises en
te, to, résultant de l'altération d'une voyelle latine simple
comme a, e, o, se rattachent à la synizèse : ainsi, chien,
deoznem; bt>n, de bene; lieu de locus; (nous) aimions,
(vous) eÀmiez, de amabamus, amabo^û. La synizèse n'a
plus lieu lorsque deux syllabes latines se sont conser-
vées : ainsi, action forme trois syllabe» {âctïônem); lien,
(le lï{g,àmen, en forme deux. Voilà pourquoi les substan-
tifs passion et pression sont trissyllabiques, tandis que
{nous) pressions, (nous) passions, ne sont qiie dissyl-
labes. — La synizèse avait quelquefois lieu en grec d'un
mot à un autre, lors même que la finale du i*** était
longue ; ainsi, mè ou ne comptent presque Jamais que
pour une syllabe dans les vers; 0p0i ou n'en forme que
deux. P.
SYNODE. V, ce mot dans notre DictionnairB de B'u>»
graphie et d'Histoire.
SYNONYME (ParalléUsme). V. HkboaIqub (Versifio
tion).
SYNONYMES (du grec syn, avec, et onyma, nom), mot
qui s'applique proprement à deux ou plusieurs motsdilTé-
rents parla forme, mais qui expriment le même sens et peu-
vent être employés indifféremment l'un pour l'autre. Tels
sont, en français : Benoit et Bénédict; Louis et Ludov'r:
Fabre, Favre, Lefèvre et Lefébure; hypothèse et supposi-
tion; péninside et presqu^Ue, cap et promontoire, pénul-
tième et avant-dernière, f>aillant et courageux, immortel
et impérissable; en latin : pater, parens, genitor, sator:
mcUer, parens, genitrix; filius, natus; nata, filia: so-
boles, progenies, etc. Toutefois, il arrive la plupart du
temps que deux ou plusieurs mots, tout en désignant une
même idée principale, ne sont pas véritablement syno-
nymes lorsqu'ils se trouvent aussi exprimer des idées
accessoires difilôrentes qui ne permettent pas d'employer
indistinctement et au hasard ces mots les uns pour In
autres. Par exemple, le défaut contraire à rapplication
de l'esprit, à l'amour du travail, peut s'exprimer d'une
manière générale en français par les mots paresse, né-
gligence, indolence, nonchalance; mais on est paresseuj
par défaut d'action, négligent par défaut de soin, indolnt
par défaut de sensibilité, fionchalant par défaut d'ardeur.
Considérés au point de vue de ces idées accessoires, ce»
quatre mots cessent d'être synonymes, et, si on les em-
ployait les uns pour les autres, on s'exposerait maintes
fois à parler sans netteté et sans Justesse. On poumùt
donc définir plus exactement, au point de vue de la pra-
tique, les synonymes, « des mots dont le tsns a de grands
rapports et des différences légères mais réelles. » (M. Gui-
zot.) 11 arrive fréquemment aux écrivains d'employer
deux termes à peu près synonymes pour exprimer' h
même pensée, comme dans cette phrase de MassilloD :
u Toute sa vie n'a été qu'un travail, qu'uM occupation
continuelle ; n et dans cette autre de Marmontel : « Dam
tous les ftges de la vie, V amour du travail, le goût de
l'étude est un bien. » Ce procédé est familier surtout aux
poètes et aux orateurs qui y cherchent un moyen d-
rendre leur pensée plus nette et plus expressive; mais il
suppose une connaissance approfondie des ressources dt.
la langue, et une intelligence parfaite des nuances le^
plus délicates et les plus subtiles qui différencient li>
mots de signification en apparence identique. Sans cel:.
on risque de tomber dans une insipide tautologie comm.-
serait celle-ci : « Les corps après la mort sont réduits en
cendre et en poussière; » tandis que dans cette pbra<c :
« Longin entend par le sublime ce qui fait qu'un ouvnzc
enlève, ravit, transporte, » la synonymie n'est cru'appj-
reutc, et les trois verbes enchérissent réellement l'un su:
l'autre; un seul de ces verbes aurait été insuffisant pour
rendre la pensée avec cette clarté et cette force que,
réunis, ils lui communiquent.
Nous possédons un Traité des Synonymes en grec par
Ammonius; A. Pillon l'a traduit en français. Paris, iSii.
Laurent Valla, Ausone Popma, A.-D. Richter, se sf^nt
occupés de la synonymie latine; les Synonymes latih^
de Gardin-Dumesnil, et le Traité des synonymes de la
langue latine par Barrault, Paris, 1853, in-8", ont rendn
inutiles leurs travaux. Pour la langue fk^uiçaise, nous n-
terons : les Remarques de Ménage et de Bouhourv; K's
Synonymes finançais de l'abbé Girard, 1736, % vol. in-12.
et ceux de Beauzée, 1769, 2 vol. in -12; les /VoiirsiTtu-
Synonymes français de l'abbé Roubaud, 1785, 4 roi.
in-8<*; le Nouveau Dictionnaire universel dês Syiionym^f
de la langue française par M. Guizot, 1861, $* édit..
refondue, gr. in-8<*; le Dictionnaire complet des Syn-
nymes français par Em. Haag, 1835; les Syntmynifi
français de Benjamin Lafaye, 1841 et 18&5, in-8*>. P.
SYNOPTIQUE (du grec syn, ensemble, et optomm. y
vois) , ce que l'on voit dans son ensemble, du mêmeo ir<
d'œil. On nomme tableaux synoptiques les travaux r -
présentant sous un seul et même point de vue les prir-
cipes, les classifications et les faits décrits en détail dans
le cours d'un ouvrage. — On a appelé synoptiques U^
f-vangiles de S^ Matthieu, de S^ Marc, de S^ Luc, d.
S' Jean, et les Actes des Apôtres, parce qu*en raisnn de
leur ressemblance dans les faits et dans les paroles ils ic
rencontrent souvent. .
SYNTAGMA, mot grec qui signifie ordre, «miM*-
mcnt, et que les philosophes des xvi* et x\ii* siècles pri-
SYN
1C91
SYU
rent souvent pour titre de leurs recueils de dissertations.
SYNTAOMA , corps dcs armôcs grecques. F. Armée,
SYNTAXE, mot d'origine grecque {suntaxis, du verbe
tynlassô, coordonner) qui signifie en Grammaire ordon-
nance régulière des mots. Il y a deux sortes de syntaxes :
la syntaxe d'accord^ et la syntaxe de régime ou de dé-
pendance. La syntaxe d'accord détermine les formes
diverses que doivent prendre les mots lorsqu'ils se rap-
portent à un seul et même individu ou à plusieurs indi-
vidus à la fois; c'est ainsi que l'adjectif s'accorde en genre
et en nombre avec le substantif qu'il détermine ou qua-
lifie, et de plus en cas, dans les langues à flexion ; que le
verbe suit le nombre et la personne du sujet auquel il
se rapporte, etc. La syntaxe de régime ou de dépendance
nous fait connaître quelle forme il convient de donner
au mot qui complète l'idée commencée par un substan-
tif, un adjectif, un verbe, comme : « La chambre du roi;
semblable à son père; né pour les armes; J'aime T^tudd;
Marseille a été fondée par une colonie de Grecs venue de
Phocée. » Dans les langues pourvues de cas, les flexions
casuelles suffisent souvent pour exprimer le rapport de
dépendance: « cubiculum régis; similis pcUri ; Massi-
liam condidere Grsci Phocœa profecti; mœrore conficior.»
A la syntaxe de régime se rattachent les règles qui déter-
minent la forme que doit prendre une proposition dépen-
dante d'une autre proposition : « On craint qu'il ne se
venge; on craignait qu'il ne se vengeât; j'espère revenir
ou que je reviendrai bientôt. » La syntaxe d'accord et la
syntaxe de régime ont pour objet commun la correction
et la justesse du langage. Appliquer mal ou no pas appli-
quer une règle de syntaxe s'appelle, en termes de l'École,
faire un solécisme ( V. ce mot. ). P.
SYNTHÈSE (du grec synthésis, composition). Tout
travail complet de l'intelligence comprend deux opéra-
tions fondamentales : l'une est la décomposition d'un tout
en ses parties, l'autre la recomposition et par suite l'ex-
posé de la science. La synthèse est la partie de la mé-
thode qui réunit ce que V analyse a divisé; elle combine
les idées, saisit les rapports, et forme des principes ; elle
va du simple au composé. De même qu'il y a deux sortes
d'analyse, il y a deux sortes de svnthèse : expérimentale,
logique; ou empirique, rationnelle. C'est par la synthèse
expérimentale qu'on recompose un corp^ décomposé par
l'analyse, soit une machine démontée pour en étudier les
parties, et qu'on remonte dans l'ordre voulu; on connaît
SOS parties, leurs rapports entre elles et avec l'ensemble,
on a une connaissance synthétique, exacte et complète.
La synthèse logique part d'une vérité générale, déduit les
conséquences qu'elle renferme, et arrive ainsi à démon-
trer un théorème ou à trouver la solution d'un problème.
Elle va du général au particulier, du simple au composé.
Comme procédé, la synthèse logique surtout est appelée
méthode de composition et aussi méthode d'enseignement.
Elle est plus démonstrative qii'escplicative ; c*est le con-
traire pour l'analyse. La synthèse suppose vrai le prin-
cipe d^où elle part, et, de plus, identité entre le principe
et les conséquences, ainsi qu'une gradation régulière et
bien fondée , d'où dérivent la clarté et la légitimité dans
les déductions et les démonstrations. R.
SYNTHÈSE, tunique romaine. V. notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
SYNTHÉTIQUE (Parallélisme). V. HébraIqob (Versi-
fication ).
SYNTHÉTIQUES (Conjugaisons). V. Conjugaison.
SYNTHÉTIQUES (Languos), langues qui ont la faculté de
combiner en un seul mot plusieurs idées , à l'aide de suf-
fixes , de préfixes , de terminaisons et flexions grammati-
cales, de voyelles de liaison. Tels sont le sanscrit et le
grec ancien. Ainsi, lélumétha exprime en un seul mot,
dans la langue grecque, ce qu'en français nous exprimons
par les quatre mots : nous avons été délivrés. Le latin est
également une langue synthétique, mais à un degré infé-
rieur par rapport au grec : ainsi , lélumétha ne peut y
être traduit que par deux mots , soluti sumus. Le carac-
tt^re synthétique s'étend aussi à la syntaxe; ainsi, les
mots latins fortior pâtre ne peuvent se rendre en notre
langue que par cinq mots : ptttë brave que son père. Les
langues synthétiques manqueraient de clarté et de pré-
cision , si elles n'étaient riches en inflexions variées des-
i.uecs à marquer les différents rapports des mots entre
eux : de là le système de déclinaisons et de conjugaisons
qui les caractérisent. Le grec et le latin sont également
synthétiques uant à la déclinaison; mais cette égalité
cesse au désavantage du latin en te qui regarde la conju-
gaif^on et la composition. La conjugaison grecque est
cutièrement synthétique, excepté pour exprimer le futur
antérieur actif dans les propositions principales. La coiH
jugaison latine devient analytique aux deux futurs de
l'infinitif actif; au passif, le parfait et tous les temps qui
s'y rattachent dans les divera modes ne sont qu'analy-
tiques. Quant à la faculté de composition, elle est rela-
tivement très-bornée en latin. Au reste, lorsqu'on dit
qu'une langue est synthétique, ce mot ne doit pas être
pris dans une acception trop absolue : il signifie seule-
ment que cette langue a une préférence marquée pour
la syntnèse, et que c'est là le fond de son génie. Car
elle admet aussi les procédés analytiques, comme on
peut le voir et par le grand usage des prépositions et des
conjonctions de subordination dans les deux langues clas*
siques anciennes, et par la décomposition que subissent
souvent en grec les formes verbales. De même, les langues
cmalytiques sont ainsi appelées d'après leur caractère
général ; car elles admettent aussi dans une certaine me-
sure les procédés synthétiques. On entend souvent dire
que les langues synthétiques sont moins claires que les
langues analytiques : ce jugement est faux dans sa géné-
ralité; la clarté d'une langue bien faite ne dépend point
de ses formes grammaticales et syntaxiques, mais de
l'écrivain qui la manie : toute pensée bien et clairement
conçue s'énonce clairement dans toute espèce de langue,
et la langue française doit sa réputation de clarté, non pas
à ce qu'elle est analytique (car toutes les langues modernes
le sont) , mais aux esprits éminemment nets et justes qui
lui ont donné sa forme littéraire. P.
SYNTH RONOS. V. Abside.
SYRIAQUE (Langue) , une dos langues sémitiques, do
la branche araméenne. Masoudi , Ibn-Khaldoun et d'au-
tres écrivains orientaux considèrent le syriaque comme
l'idiome primitif des hommes; c'est, du moins, celui qui,
de tous les idiomes de l'Orient , se rapproche le plus de
l'hébreu par la forme et la signification des mots; c'est
le seul qui puisse expliquer bien des particularités qui
sont inexplicables dans l'hébreu considéifé isolément. Cor-
tains linguistes, qui ne tenaient pas suffisamment compte
deladifl'érence des flexions grammaticales, ont été jusqu'à
dire que le syriaque et l'hébreu ne se distinguaient que
par la prononciation. Il v a aussi, entre le sjyriaque et le
chaldéen, d'assez grandes analogies. Le dialecte qu'on
parlait en Judée à l'époque de Jésus-Christ, et que le
Nouveau Testament désigne sous le nom d'hébreu , mais
que les orientalistes modernes appellent syro-chaldéen ,
tenait plutôt du chaldéen que du syriaque. Le syriaque
eut plusieura dialectes, tels que le palmyrien, le sabeen,
le nabathéen. Il se modifia profondément par l'adjonc-
tion d'éléments persans, grecs, latins et arabes, et l'arabe
finit car le supplanter comme langue vulgaire au moyen
âge : il n'exista plus qu'à l'état de langue ecclésiastique
chez les Maronites , les Jacobites et les Nestoriens. On
prétend qu'il est encore parlé aujourd'hui par les Nosaîris
du Liban et dans la petite ville de Mara. — Il existe plu-
sieurs alphabets syriaques, désignés par les noms d'e«-
tranghelo, de peschito, de nestorien et de sabéen. Ce
dernier fait entrer les voyelles dans le corps de l'écriture,
tandis que les autres les placent au-dessus ou au dessous
des consonnes. V. A. Caninius, InstittUiones syriacœ,
Paris, 1554; Amira, Grammatica syriaca, Bome, 1596,
in-4°; Trost, Lexicon syriacum, Cœthen, 1623, in-4*»;
J. Buxtorf , Grammqtica chaldaica et syriaca: Accurens,
Grammatica linguœ syriacœ, Rome, 1647, in-8<'; Gutbicr,
Lexicon syriacum, Hambourg, 1667; Zanolino, Lexicon
syriacum, Padoue, 1742,in-4°;J.-D. Michaelis, Traité de
la langue syriaque, avec une Chrestomathie , Gœttingue,
1772, etGray^matica syriaca, Hall,1784,in-4°; J.-G. Hase,
Grammaire syriaque, en allemand, 1791; E. Castell,
Lexicon syriacum, Gœttingue, 1788, 2 volume in-4<>;
A.-T. EoffmBXin, Grammatica syricuia. Halle, 1827, in-4»;
Bar-Hebneus (Aboul-Faradj), Grammatica linguœ sy-
riacœ, ouvrage publié par Butheau, Gœttingue, 1843,
in-8<' ; Brian Walton, Disserlatio de lingua syriaca, dans
les Prolégomènes de sa Bible polyglotte, Londres , 1657,
in-fol.; J.-G. Hase, Dissertatio aedtalectis linguœ syriacœ,
1787. Des Chrestomathies pourvues de Glossaires ont été
publiées par Kirsch et Bernstein (Leipzig, 1834), par
Oberieitner (Vienne, 1836), par Rœdiger (Halle, 1838^.
SYRIAQUE (Littérature). La Syrie a été, pendant les
premiers siècles de l'ère chrétienne, le centre d'un mou-
vement littéraire assez considérable, et les écrits qui sont
sortis des écoles d'Êdesse et de Nisfbis ont une grande
importance pour l'histoire de l'Orient. Il on est un cer-
tain nombre où Ton trouve la mention ou la traduction
de livres persans et surtout de livres grecs dont les ori-
ginaux sont perdus aujourd*hui. Les ouvrages syriaques
SYS
1G92
SYZ
sont principalement consacréfl wjx matières religieuses :
ce sont des versions et des commentaires de l'Écriture
sainte, des liturgies, des traités dogmatiques ou polé-
miques. Une des versions de la Bible date du i\* siècle,
et l'on peut la regarder comme la première traduction qui
ait été faite de Toriginal : il y en a une autre de Phi-
loxène, évéque monophysite d'Hiéropolis au v" siècle, et
une 3* dite de Palestine ou de Jérusalem. Le gnostiquo
fiardesane composa des poésies syriaques au u* siècle.
Au IV*, S^ Éphrem, auteur de poésies sacrées, de com-
mentaires sur la Bible, et de traités contre les Marcio-
nites et les Bianichéens, se servit tantôt de la langue
grecque, tantôt du syriaque. Théophile d'Édesse fit, en
770, une traduction syriaque des poèmes d'Homère. Bar-
HebriBus (Aboul-Faradj ) écrivit, pendant le xni* siècle,
une Histoire universelle, qu'il traduisit ensuite en arabe;
il a laissé en outre deux Grammaires, l'une en vers et
l'autre en prose. — L'attention de l'Europe savante n*a
été attirée sur la littérature syriaque que depuis le pon-
tificat de Clément XI, qui fit commencer une collection
de manuscrits à la bibliothèque du Vatican. Dans notre
siècle, le Musée britannique de Londres a acquis plus
de 500 volumes syriaques, recueillis dans un couvent à
Nitria (Haute-Égypie); on en a tiré, pour les imprimer,
les Lettres de S^ Ignace de Césarée et la Théophanie
d'Eusèbe. V, Assemaoi, Bibliotheca orientaliSf Rome,
1719-28, A vol. in-fol.; Rosen, Catalogus codicum mon
rmscriptorum syriacorum, Londres, 1838; Wenrich,
De auctorum grœcorum versionibus et commentariis sy-
riacis, Leipzig, 1842; Gureton, Spiciiegium syriacum,
Londres , 1855.
SYRIEN Ë (Idiome) , idiome finnois ou tartare, parlé
par la tribu des Syriènes entre la Dwina septentrionale
et le M ézen. Il a souvent des formes plus anciennes que
le finnois ou finlandais ; par exemple, il a la consonne t
là où elle est remplacée par s dans les langues occiden-
tales de la famille. Beaucoup de mots russes s'y sont in-
troduits. La Bible a été traduite en syriène avec l'al-
phabet russe ; mais on se sert aussi de l'alphabet latin.
V, Gabelentz, Essai sur la grammaire syrien», en
allem., Altenbourg, 1841 ; Castrén, Elementa gramma-
tices syrienoBf et De nominum declinoHone m lingua sy-
riena, Helsingfors,1844; Wiedemann, Essai sur la gram-
maire de la langue syriène, en allem., Revel, 1847.
SYRINGES, nom donné aux galeries des hypogées
égyptiennes.
SYRINX. V. Flotb de Paw.
SYRMA, manteau. V. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d'Histoire.
SYRMIEN (Idiome). V. Sebbb.
SYSSITIES. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
SYSTÈME (du grec systéma, assemblage; dérivé de
syn, avec, et tithémi, je place), littéralement, réunion
de plusieurs choses pour former un seul tout. Scientifl-
3uement, ce mot exprime la mise en ordre des idées,
es matériaux d'une science, et son unité. Cet arrange-
ment méthodique des parties d'une science est encore
une synthèse. 11 v a autant de systèmes qu'il y a de
sciences particulières ; et celles-ci contiennent des sub-
divisions, qui donnent lieu à des systèmes plus res-
treints. Un système, étant le résultat d'une étude plus ou
moins approfondie, est plus ou moins l'expression de la
férité, selon que les recherches ont été plus ou moins
exactes et complètes; tels sont : en astronomie, le syv
tème de Copernic; en philosophie, le spiritualisme-, cq
histoire naturelle, le système ou la méthode des deu\ Ds
Jussieu pour les végétaux , de Cuvier pour les animaux.
Un système est le plus souvent un point de vue exclusif.
incomplet, contenant partiellement la vérité, et, par
suite, l'erreur. Ainsi la philosophie donne le matOrii-
lisme, l'idéalisme, le mysticisme, etc.; l'histoira niitu-
relle donne les systèmes de Toumefort, de Linné, etc.
En général , un système peut être faux d'autant de ma-
nières que l'analyse qui sert de base à la synthèse doni
il est Texpression peut être inexacte. De là vient que lo
mot système se prend quelquefois en mauvaise part , une
foule de tentatives dites scientifiques, surtout dans ki
temps anciens, n'offrant que des conceptions de Timagi-
nation, comme on en voit tant d'exemples dans les s)s-
tèmes hypothétiques des philosophes, des astronomes,
des naturalistes, des médecins. — Système exprime en-
core un ensemble de parties liées entre elles et qui dé*
pendent l'une de l'autre, comme le système alpique pour
désigner la chaîne des Alpes. En Finances, le mot Sys-
tème ^ employé seul , veut toujours dire le système de
Law. Condillac a écrit un Traité des systèmes, surtout au
point de vue philosophique. R.
SYSTÈME, nom donné, dans la Métrique ancienne, à un
assemblage de plusieurs vers formant un enchaînement
continu : telles sont les strophes lyriques grecques et la-
tines. II y avait le système trochaîque, le système dac-
tylique, anapestique, etc. Tant que le système n'était
pas terminé, on pouvait passer d'un vers k l'autre en
coupant un mot; mais tout système devait se terminer
sur un mot entier. Un système ne pouvait contenir des
strophes de différentes espèces ; mais une strophe pou-
vait contenir plusieurs systèmes, et l'on passait, par
exemple, du système anapestique au système dacty-
lique. Un fragment de Simonide présente des tercets
dont le l*' vers est un héroïque, le 2* un élégiaque, le
3* un trimètre lambique, et la pièce tout entière devait
se poursuivre dans cet ordre. P.
SYSTàHB, mot employé dans la Musique des anciens
Grecs pour signifier, tantôt ce que nous appelons gamme
ou échelle , tantôt un intervalle composé.
SYSTOLE (du grec systole, resserrement, abrévia-
tion ), terme de Grammaire et de Prosodie grecque, qui
s'appliquait k l'abréviation d'une syllabe longue soit à h
fin , soit au milieu des mots, lorsque cette syllabe était
immédiatement suivie d'une voyelle. Ainsi l'oméga de
aoDÔ compte comme bref devant hélôn; la diphthongue ei
de épei (après que) s'abrège devant la particule e\piétire
è (donc); Véta de dèïos (ennemi) s*abrége au be^ioin,
surtout au ^nitif et au datif des trois nombres et à l'ac-
cusatif pluriel ; la diphthongue oï du verbe poïéô devient
fréquemment brève chez les poètes athéniens, etc. On
retrouve en latin l'équivalent de ces s^toles dans c(^
deux fins de vers de Virgile : sûb ïlïë alto, BhÔdÔpèUt
ârcês; au commencement de celui-ci d*Horace : Si mè
àmàs, inquit; dans l'abréviation de la pénultième des
troisièmes personnes en erunt : mîscUèruntque hêrbàs.
Le contraire de la systole est VEctase ( V. ce mot), P.
SYSTYLE (du grec syn, avec, et stylos, colonne ,
c.-à-d. à colonnes serrées, se dit, en Architecture, d'un
édifice dont les colonnes sont distantes les unes des
autres de deux diamètres ou quatre modules.
SYZYGIE , terme de Prosodie ancienne. V. Dipodib.
T
T, 20* lettre et IC" consonne de notre alphahct, repré-
sentant une articulation à la fois linguale et dentale. Le
t final dans les mots français est généralement muet : bât,
fluet, lit, pot, fût, vent, part, mort, tant, il vaut,
veut, sert, peint, meurt, etc.; mais on le fait entendre
dans fat, net, granit, dot. bnU, rapt, lest. Le t sMntercale
quelquefois comme lettre euphonique entre le verbe et
le pronom sujet , quand celui-ci est placé en dernier :
dkt-tl, aime-^-on, ose^U-elle, L*affinité naturelle qui existe
entre les articulations t%td explique les permutations
qui ont souvent lieu entre elles : ainsi , dans les anciens
manuscrits latins, on trouve set pour sed, quoi pour
quod, haut pour haud, adque pour aUjue; le motlaiia
tu a pour équivalent en allemand le mot du; les Alle-
mands, qui distinguent difiicilement, en parlant les tan-
gues étrangères, les articulations t et d, ont écrit leur
nom national indistinctement teutsch et detdsch, et leur>
mots gott et tag sont devenus en anglais god et day; noua
avons écrit verd aussi bien que vert, et nous prononr^i
le d final comme un t, quand il est suivi d*an mot cois-
TAD
1693
TAB
.ncnçnnt par une consonne oa une h muette {grand
arbre, grand homme], — Outre le tau (T, t) qui corres-
pond à notre f, les Grecs avaient une lettre appelée
thêta (6, 6), dont l'articulation, aspirée et sifflante, était
analogue à celle du th anglais. Nous la traduisons aussi
par le groupe th, auquel nous ne donnons cependant
pas d'autre son que celui du t. Toutefois, un son ana-
logue à celui du thêta est attribué au t suivi de i dans
certains mots : abbatial , ambition, argutie, balbutier,
factiet4X, initié, patient, partiel , etc. — Comme abrévia-
tion dans les inscriptions et sur les médailles romaines,
T indique certains noms d'hommes ou de lieux, Titus,
Tibérius, TiUlius, Tarraco. A Rome, les tribuns du
peuple apposaient un T, lettre initiale de leur nom, sur
les sénatus-consultes qu'ils approuvaient. Dans la nota-
tion musicale du moyen âge, T signifiait ton on seconde
majeure, TS ton et semi-ton ou tierce mineure, TT, ton
et ton ou tierce majeure. T indiquait aussi la partie de
Taille. Chez nous, T. F. veut dire travaux forces; T. P.,
travaux forcés à perpétuité. Dans les prénoms, Th. est
pour TModore, Thomas, Thérèse, — Signe numéral , le
thêta grec valait 9; le tou, 300, et, précédé d'un accent
en bas (^t), 300,000. Pour les Romains, T parait avoir
représenté 160, et'T 160,000. T a été la marque monétaire
de Nantes. B.
TAALIK ou TALIK (Écriture). V. Perse (Langues de la).
TABAC. L'impôt sur le tabac en France date de 1629 :
il fut d'abord de 40 sous par 100 livres ; puis, en 1638, on
le porta à 7 livres. Le gouvernement, frappé de la grande
consommation de cette plante, se r^rva bientôt Te mo-
nopole de la fabrication et de la vente. Le privilège en
fut affermé, en 1674, pour 6 ans, à un certain Jean Bre-
ton, moyennant 600,000 liv.; on flxa alors un certain
nombre de Généralités où la culture du tabac fut per-
mise. En 1718, la Ferme du tabac fut cédée à la Compa-
gnie des Indes pour 4,000,000 de liv.; en 1771, elle éUit
de 27 millions; en 1789, de 32 millions. En 1791, le mo-
nopole fut supprimé et la culture rendue libre, moyen-
nant des droits qui ne s'élevèrent pas en moyenne à plus
de 15 millions par an. A la fin de 1810, le gouvernement
décréta la reprise du monopole des tabacs, et le reprit
au I*' juillet 1811, en payant 100 millions de tt, le ma-
tériel et les marchandises des fabricants. Le tabac a
donné au Trésor des bénéfices toujours croissants : en
1824, de 42 millions; en 1841 , de 72 millions; en 1850,
de 122 millions; en 1855, de 152 millions; en 1861, de
183 millions. Le système du monopole ayant développé
Il contrebande sur une grande échelle, on vend, k prix
niduits, dans les départements frontières, certains tabacs
ilits de cantine; mais ce moyen a peu d'efficacité pour
neutraliser le mal. L'achat, la fabrication et la vente des
tabacs, tant indigènes qu'étrangers, sont attribués exclu-
sivement k la Régie des contributions indirectes. Nul ne
peut avoir en sa possession des tabacs en feuilles, 8*il
n'est cultivateur dûment autorisé. Nul ne peut avoir en
provision d'autres tabacs fabriqués que ceux des manu-
factures nationales, et cette provision ne peut excéder
10 kilogr. La culture du tabao est autorisée dans 12
(lépariements : les Alpeâ-Maritimes, les Bouohes-du-
Hhône, la Dordogne, la Gironde^ rille-et-Vilaine, le
Lot, le Lot-et-Garonne, la Meurthe-et-Moselle, le Nord,
le Pas-de-Calais, la Haute-Saône, et le Var. Il y a encore
l'Algérie, et, à titre d'essai, la Corse et la Haute-Sa-
voie. Les cultivateurs sont astreints àtivrer leur tabac
k la Régie à des prix déterminés. Les faits de vente
Illicite, de colportage, de possession de tabac au delà
d'une certaine quantité, sont punis de peines spécifiées
dans les décrets du 29 nov. 1810 et 12 janv. 4811, la
loi du 26 avril 1816, et les ordonnances royales des 27
août 1839, 22 oct. 1843, 16 juin 1844, et 28 juin 1846.
Une administration particulière est chargée de la fa-
hrioation des tabacs; on compte 16 manufactures na-
tionales: Paris (Gros-Caillou et Reuilly), Bordeaux,
Ohàteauroux, Dieppe, le Havre, Lille, Lyon, Marseille,
Morlaix, Nantes, Nancy, Nice, Riom, Tonneins, et
Toulouse ; plus de 20,000 ouvriers, hommes ou femmes,
y sont employés dans ces manufactures. On appelle Bu-
t-eaux de tabac les licences concédées par le gouver-
lement pour la vente en détail des tabacs de la Régie;
il y en a plus de 36.000. ^ En Belgique, dans les
Pays-Bas, en Danemark, en Suède, en Russie et dans les
États allemands du Zollverein , la culture, la fabrication,
l'introduction et la vente des tabacs sont abandonnés à
riudustrie particulière, qui paye seulement un impôt
3ivis ou moins élevé sur l'importation et la fabrication.
Zù Autriche, le gouvernement a le monopole, comme en
France. Le système des fermes existe en Espagne et en
Portugal. La fabrication et la vente sont libres en An-
gleterre, sauf le payement de droits très-élevés ; mais la
culture est interdite. B.
TABARD, ancienne espèce de surtout ou de tunique. Il
fut porté d'abord par plusieurs classes d'hommes pendant
le moyen âge, puis réservé aux hârauts d'armes. Il porta
alors les armoiries du seigneur que le héraut représen*
tait Les manches du tabard, élargies par le bas, ne
descendaient pas an-dessous du coude.
TABELLAIRE. ) K. ces mots dans notre Dictionnaire
TABELUON. ) de Biographie et d^Histoire,
TABERNACLE. Ce mot, outre le sens qu'il reçut chez
les Hébreux (F. notre Dictionnaire de Biographie et
d*Histoire)y d&igne un édicule de marbre ou de menui-
serie qui est placé au centre de l'autel dans les églises
catholiques, et où Ton renferme le ciboire et les hosties
consacrées. Il y a des tabernacles isolés; d'autres sont
assembla avec le retable et le contre-retable. La forme
qu'on leur donne actuellement ne remonte pas à une
époque très-ancienne ; car, pendant plusieurs siècles, la
résôre eucharistique fut conservée dans le ciborium
(K. ce mot). L'art a souvent épuisé toutes ses ressources
pour construire et décorer les tabernacles ; parmi les mo-
numents de ce genre, on peut citer ceux de la cathédrale
d'Ulm , des églises S^Laurent k Nuremberg, S'-Martin k
Courtray, S^Pierre à Louvain, des cathédrales de Tour-
nai , de Grenoble et de SWean-de-Maurienne, de l'église
S'-Georges à Haguenau, etc. — Quelques archéologues
donnent le nom de tabernacle au dais ouvragé qui sur-
monte les statues de la période ogivale, B.
TABLATURE (du latin tabula)^ nom donné, dans l'an-
cienne Musique, à la totalité des signes de la musique, à
l'art de les employer pour noter un morceau vocal ou
instrumental, et à l'art de les lire. Les Italiens disaient
Intavolatura. Comme les signes étaient alors les lettres
de l'alphabet, majuscules pour la f* octave ou la plus
grave, minuscules pour la i*, surmontées d'un petit trait
horizontal pour la 3*, de deux petits traits pour la 4*, et
3u'on employait encore d'autres signes pour indiquer la
urée des sons , il y avait là des difflcultés sérieuses .de
lecture. Aussi a-t-on dit proverbialement : Donner dé la
tablature k quel(iu*un, pour dire qu'on lui donne de
l'embarras. Depuis qu'on a préféré les notes aux lettres,
les Allemands ont seuls conservé pendant quelque temps
encore l'ancienne tablature. — Tablature a désigné aussi
une certaine manière de noter par lettres les parties du
luth, du théorbe, de la guitare, et de quelques instru-
ments du même genre. On figurait les cordes par des
lignes parallèles : A, sur la ligne d'une corde, marquait
3u'il fallait la pincer avide; B, qu'il fallait mettre un
oigt de la main gauche sur la première touche du
manche, etc. — On i4>pelle encore Tablature un tableau
représentant un instrument à vent et k trous, flûte, fla-
geolet, clarinette, basson, etc. : de chacun des trous par-
tent des lignes horizontales, sur lesquelles reposent, de
distance en distance, des O pleins ou vides; si l'O est
plein, il indique que le trou doit être bouché; s'il est
vide, le trou doit rester ouvert, pour former tel ou tel son
désigné en marge. Comme la plupart des sons ne s'ob-
tiennent que par le concoun de plusieura doigts, et
môme de tous les doigts ensemble, la tablature présente
encore des lignes qui tombent perpendiculairement sur les
lignes horizontales : en suivant cette autre direction, et
en faisant attention aux O pleins on vides qu'elle donne,
on parvient à connaître la quantité de trous qaMl faut
ouvrir ou fermer pour obtenir telle Ou telle note. On
trouve la tablature de chaque instrument en tète des Mé-
thodes de cet instrument. Il y a quelquefois une tabla-
ture particulière qui marque le doigté de certains trilles,
inexécutables avec le doigté ordinaire. B.
TABLE (du latin ta6tf/a) , meuble de matière et de formes
très-variées. Les anciens Grecs y apportèrent un grand
luxe. Leura tables étaient faites en bois poli avec art, les
pieds peints de couleun diverses; les uns prétendent
qu'elles étaient circulaires, les autres qu'elles présen-
taient un parallélogramme. Les citoyens de condition
moyenne n'employaient à la fabrication de ces meubles
qu'un bois grossier, et des tréteaux pour le supporter;
les riches se servaient de bois précieux, et les supports
ou pieds, travaillés en ivoire, représentaient des lions,
des léopards ou quelque autre animal. Comme l'usage du
linge n'était pas connu , on lavait les tables avec des
éponges. — Les Romains, avant de pénétrer an Asie,
n'eurent, comme nous l'apprend Horace, que des tables
de frêne, d'érable ou de chêne, quadraogulaires, et à
TAB
1694
TAB
tflois ou quatre pieds. Après leurs conquêtes en Orient,
ils surpassèrent les Grecs en magnificence : leurs tables,
rondes, portées sur un seul pied d'argent, d'ivoire ou
d'airain, furent formées des bois les plus rares, enrichis
de sculptures. G. Graochus en eut une supportée par
deux dauphins en argent massif. Les tables les plus re-
cherchées étaient prises dans un nœud de la racine du
citre, arbre qui croissait en Mauritanie, et leur méritn
consistait dans certaines dispositions des Teines du bois.
Il y avait les tables tigrines, où les veines ondulées s'al-.
longeaient comme les rayures de. la peau du tigre; les
panthérines, où les veines contournées et revenant sur
elles-mêmes s'arrondissaient en forme de taches; les
apiatês, dont les veines, entassées et serrées, ressem-
blaient k un semis de graines de persil {apium). D'autres
oflTraientdes ondulations crêpées, estimées surtout si elles
imitaient les yeux de la queue du paon. La nuance do
vin miellé, avec des lignes brillantes, était collo qu'on
préférait, La plus grande table en citre que l'on ait vue
est celle de Ptolémée, roi de Mauritanie; elle avait l'",50
de diamètre et 0"*,8 d'épaisseur. Cicéron paya une table
on bois de citre 1 million de sesterces (2 iO,OÛOfr.);Asini us
Gailua en avait une de 1,100,000 sesterses (231,000 fr. ) ;
une table provenant du roi Juba fut vendue 1,200,000 ses-
terces (252,000 fr.)i Pline (XIII, iî)-30) en mentionne une
autre qui avait été achetée 1 ,400,000 sesterces (294,000 fr.) .
Les Romains eureot de petites tables appelées abaques,
sur lesquelles ils étalaient des vases précieux; elles
avaient un rebord destiné à empêcher la chute des ob-
jets. On se servit aussi d'abaques pour Jouer aux dés.
Les premières tables à manger dont on ait gardé la tra-
dition en France étaient des plateaux demi-circulaires,
avec rebords ou galeries d'où tombaient des draperies qui
cachaient les tréteaux : sur ces tables étaient posées seu-
lement les choses solides, et, quand le convive avait soif,
il se levait pour aller boire au dressoir ou à lacrédence;
les plats eux-mêmes n'étaient pas toujours servis, et le
buiTet en était paré; les vins fins, les liqueurs, les épices,
attendaient leur emploi sur de petites tables à demeure
on bois, en métal, en marbre, quelquefois en argent ou
en or, enrichies de mosaïques, d'incrustations, de pein-
tures et de pierreries. Plus tard, les tables devinrent
ovales, oblongues, à pieds droits, à devanture découpée,
grillagée ou pleine, sur laquelle pour amusement se
voyaient des sujets, des devises, des sentences d'hygiène
ou de cuisine. Au rapport d'Éginhard, Gliarlemagne fit
faire trois tables d'argent, sur lesquelles on avait repré-
senté Rome, Gonstantinople, et tout le monde connu. Il
y eut, au moyen âge, des tables tout étroites, pour manger
deux seulement, non pas vis-à-vis, mais côte à côte. La
grande table des festins était ce qu'elle est restée, une
suite de planches assemblées sur des tréteaux, en fer h
cheval presque toujours, les convives assis d'un seul côté,
le dos au mur, afin d'être h Taise pour voir les BtUre^
mets ou divertissements; les domestiques servaient par
devant. On fit sous Louis XI le guéridon, la table carréo
à un pied, et la table à jouer. B.
TABLB, en termes d'Architecture, partie de mur unie et
lisse, saillante ou renfoncée, et ordinairement de forme
rectangulaire. Surmontée d'une corniche, elle est dite
table couronnée. Quand une table saillante doit recevoir
un bas^relief ou une inscription, on la nomme table
d'attenU.
TABU^ nom qu'on donnait autrefois en Hongrie à la
Diète, qui se composait de deux chambres ou Uibles, la
table haute et la table basse.
TABLE, tableau dti certaines matières sont disposées de
façon qu'on peut les embrasser d'un seul coup d'œil
ou les trouver facilement; telles sont les Tables chrono-
logiques,
TABLB ( sainte), balustrado ou grille qui, dans les églises,
sépare le chœur du sanctuaire, et où les fidèles viennent
s'sigenouiller pour recevoir la communion. Elle est garnio
de nappes que les communiants tendent au-dessous de
leur visage. — Par extension, Sainte Table s'entend de
la Communion elle-même.
TABLB d'aotel, table do pierre élevée sur des piliers, de
pierre aussi, ou sur un massif de maçonnerie, et sur la-
quelle on dit la messe. Ce peut être aussi une table de
menuiserie.
table dd «ATI, nom donné, dans le Banat (royaume de
Hongrie), & la Cour de Justice qui siège à Agram et que
le Ban préside.
TABLB D'UARMONIB. V, HABPB, PiAHO.
table isiaqdk. I V. ces mots dans notre Diction'
T\BLB nB vinBRB. { naire (îs Hiogr, et d'Histoive,
table des MATiènEs, liste, plus ou moins dûtailUJt», i-i
par ordre alphabiHiquc, des matières traitées dans tm
livre. Elle se met ordinairement à la fin de l'ouvrage, et
son but est d'y faciliter les recherches, quand, aprrs
l'avoir lu, ou même sans l'avoir lu, on veut le consulter,
y faire ou refaire des lectures partielles. Les Tables da
matières sont une invention de l'Antiquité latine, mais
qui ne remonte pas plus haut qu'un contemporain et
ami de Cicéron, le médecin Valérius Soranus : dans un
ouvrage intitulé Épotides, il avait placé en tête on som-
maire détaillé des chapitres. Columelle, dans son Aori-
culture, mit & la fin du onzième livre les arguments des
livres précédents. Enfin Pline l'Ancien, publiant son
immense recueil qu'il appela Histoire natwrelle, le fit
précéder, à l'instar de Soranus, dont il cite l'exemple,
d'une table, détaillée chapitre par chapitre, des matières
contenues dans chacun de ses 31 livres. Avant Soranus,
on avait eu l'idée, pour jeter un peu de clarté dans les
livres, qui se copiaient toujours à pages pleines, d'uo
bout à l'autre, de transcrire en marge de très-brefs som-
maires de la matière traitée. C'était exactement ce que
nous appelons aujourd'hui des manchettes {V, ce mot >.
— Les Anciens ne paraissent pas avoir connu la Taille
analytique, cette invention si précieuse pour faciliter Ita
recherches et secourir la mémoire des savants. Il faut un
certain talent pour bien dresser une pareille table, beau-
coup d'exactitude, de la sagacité dans la lecture et le
dépouillement préliminaire, enfin de la concision, pour
ne mettre dans la rédaction ni un mot de plus, ni un mot
de moins, et être toujours très-clair. G. D— y.
TABLB RONDE. \ y ^^ ^^j^ j^^S HOtTe DlC-
TABLB THÉoDOSiENîiB. ( tlonnaire de Biographie et
TABLES (Les DoDXB). i d'Histoirc.
TABLES AUMENTAIRES. ]
TABLES d'amalfi. V. AtfALnTATNEs (Tables).
TABLES DBS cÉRiTES. K. DotTO DtctionncUre d€ Biogra'
phie et d'Histoire,
TABLES B0GUBINE8. V. EOGUBITIES.
TABLES DB LA LOI. V. notTO Dictionnoire de Biographie
et d'Histoire,
TABLEAU (du latin tubvtla^^ ouvrage de panture exé-
cuté sur une toile, ou sur une table de bois, de cuivre, eir.
— Aux termes du Code Napoléon (art. 525, 5M), les ta-
bleaux sont considérés comme immeubles quand ils sont
placés k perpétuelle demeure; ils sont meubles, quand
ils font partie d'une collection dans un cabinet ou une
galerie.
TABLEAU, en termes d'Architecture, partie de Tépaiv
sour d'un bois de porte ou de fenêtre qui est en dehors
de la fermeture; partie de l'épaisseur d'un mur qui forme
le côté d'une baie, et s'étend depuis l'arête extérieure
jusqu'à la feuillure.
TABLEAU, en termes de Marine, partie de la poupe d'un
navire qui est en dessous des contours du couronnement,
et où sont percées des fenêtres. Elle est généralement
ornée de pointures et de sculptures.
TABLEAU, sorte de planche ou de cadre où des matièrps
didactiques sont rangées méthodiquement, de manièro
(}u'on peut les embrasser d'un coup d'œil et les retenir
plus aisément. L'Histoire naturelle et l'Histoire ont cic
souvent mises en tableaux.
TABLEAU, en termes de Thé&tre, nom donné aux diri-
sions que l'on pratique de nos jours dans les actes des
pièces, et qui sont marquées par un changement instan-
tané de lieu et de décoration, sans que l'action cesse de
l'une à l'autre.
TABLEAU d'or, nom donné autrefois aux pièces d'orfévrc-
rie estampées, représentant des scènes k personnages,
et souvent rehaussées d'émaux ou de pierreries. Elles nï-
taient souvent que d'argent doré, et le métal, y compris
le cadre, pesait moins que la garniture de pierreries.
TABLEAU voTUP, tableau consacré dans un temple peur
satisfaire un vœu. V. Ex-voto.
TABLEAUX VIVANTS, nom qu'on donne aux repn'^
scntations d'œuvres de la peinture et de la plastique p ir
des personnes vivantes. H*"* de Genlis inventa, dit-o:-,
ce mode d'instruction et d'amusement pour les princ'^>
d'Orléans, et s'aida des peintres David et Isabey pour eu
diriger la pratique. Lady Hamilton passe pour avoir ima-
giné de représenter, non plus les tableaux ou les groupo^
célèbres, mais l'expression corporelle des divers éMs de
l'ùme. De nos jours, les tableaux vivants ont eu, comcie
spectacle public, un moment de succès.
TABLETIERS^ ancienne corporation dont falaatent au^si
partie les peign ter s on marchands de peignes, les /ovr-
fuiwrs et tailleurs d'images. î^s tatuea de cette corpon*
TAI
1695
TAL
tlon furent renouvelés en 1507, et confirmés en 1578,
lOOOetlOni.
TABLKTTE, en termes d'Architecture, pierre plate qui
termine les murs d'appui et autres pièces de maçonnerie;
— planclie de bois ou pièce de marbre qui est posée à
plut sur le chambranle d'une cheminée ou sur Tappui
d'une fen^^tre.
TABLI^rrES, nom donné k des livres où les faits sont
présentés sous formes de tables. Telles sont les Tabletles
chronologiques de Lenglet-Dufresnoy.
TABLKTTES A ^CRiRB. F, notFo Dictionnairs de Biogra-
phie et d'Histoire,
TABLKrrERIE, industrie qui tient à la fois de l'art de
l'ébéniste, et de ceux du marqueteur ot du tourneur.
Elle embrasse une foule de menus ouvrages d'écaille en
lames ou fondue, de corne, d'ivoire, de nacre, d'os, de
bois, tels que tabatières, peignes, pièces d'échiquier et
de damier, billes de billard, jetons, fiches, dés, étuis,
brosses de toilette, boutons, nécessaires de voyage, cou-
teaux à papier, montures de cannes et de lorgnettes, bé-
nitiers, crucifix, etc.
TABLIER (de table)^ pièce d'étoffe, quelquefois de cuir,
qu'on s'attache à la ceinture, pour préserver les habits
en travaillant. Chez les femmes d'une certaine condition,
c'est un ornement de toilette.
TABLIER, en termes de Marine, doublage en toile à
voilps qu'on ajuste au bas des huniers, pour les garantir
du frottement.
TABLiEn, table de tout Jeu qui se joue avec des pièces
nr>l)iles sur une surface plane.
TABLIER, en termes d'Architecture, ensemble des poutres
et des planches qui forment une des travées d'un pont de
bois; — partie d'un pont^levis qui s'abaisse pour donner
passage sur le fossé.
TABLINUM. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biouraphie et d* Histoire,
TABLOIN (de table) ^ plate-forme de madriers, où l'on
place les canons qu'on met en batterie.
TVROIînFT l ^' ^®* ™°^ ^^"* "®*'"® ^'C*'Oîl-
TABliLARIliM \ *^^^^^ ^ Biographie et d'Histoire.
"TABUREL, nom du tambour au moyen ftge. Cet in-
strument a été aussi appelé taborellus, tabomum, tabu-
rium, taburcinum, t^ioorinum.
TACET, c.-&-d. en latin {/ se tait, mot qu'on écrit dans
la musique pour indiquer le silence d'une partie pendant
un morceau.
TACHYGRAPHIE (du grec takhus, rapide, et graphe,
écriture), tout système d'écriture abrégé qui a pour objet
do transcrire le discours au fur et à mesure qu'il est
prononcé. V, Sti^noghaphie.
TACITE RECONDUCTION. V. Reconduction.
TACTIQUE. V. Stratégie.
TAEL, TAIL ou TALE, monnaie de compte usitée en
Chine et au Japon, et qui vaut à peu près 8 fr. 25.
TAGALE (Langue), langue parlée par les Tagales de
nie de Luçon (Philippines). Riche, harmonieuse, plus
compliqué» dans ses formes q^ue beaucoup d'autres lan-
gues malaises, elle possède trois passifs, un duel pour les
trois personnes, et, outre le pluriel ordinaire, un autre
pluriel de la 1'" personne qui exclut celle à laquelle on
parie. Elle omet presque toujours le verbe être, dont le
sens est sous-entendu ou exprimé par la position des
mots dans la phrase. Il y a une littérature tagale assez
abondante, composée de productions ascétiques, de tra-
gédies traduites de l'espagnol, et de poésies nationales.
L'alphabet tagal est le plus incomplet que l'on connaisse :
il contient seulement 14 consonnes et 3 voyelles.
TAGÉTIQUES (Livres). V. Achérontiens.
TAILLE, ancien impôt, V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
taille, petit bâton fendu par le milieu en deux parties,
sur lesquelles, quand elles sont réunies, les boulangers
marquent par de petites entailles les pains qu'ils vendent
à crédit h leurs pratiques. Une des deux parties reste au
marchand, et se nomme la souche; l'autre, dite échan^
tillon, reste b, l'acheteur.
taille, quantité d'espèces monnayées qui doivent être
faites d'un marc d'or, d'argent, ou de cuivre. On disait
autrefois que les louis d'or étaient à la taille de30 pièces,
quand on faisait 30 louis avec un marc d'or.
taille, en termes de Gravure, toute incision faite sur
le métal avec le burin ou la pointe, ou creusée par
I eau- forte. La taille-douce est la taille faite au burin
seul, et sans eau -forte, sur une planche de cuivre.
V. Contre-taillï, Gravure.
taille, aux jeux de Pharaon, de Trente-et-nn, ctc.« se
dit de la si^rie dos coups qui se suivent jusqu'à ce que le
> banquier ait retourné toutes les cartes du Jeu qu'il a
dans la main.
TAnxB, en termes de Musique, nom qu'on donnait au-
trefois h la voix d'homme intermt^diaire entre la haute-
contre et la basse, et aux parties de chant qu'elle exécu-
tait. On distinguait la haute-taille, qui est notre ténor
d'aujourd'hui, et la basse-tcUlle, qui est notre baryton
( V. ce mot). — Le mot taille a été aussi employé pour
désigner une variété de la viole, ainsi qu'une espèce de
hautbois à sons graves. B«
TAILLE DE FOND, TAILLE-POINT. V. CaRGDE.
TAILLE DBS PIERRES. V. COUPB DES PIERRES.
TAILLÉ, en termes de Blason, une des partitions de
Técu. Il le partage diagoiialement de gauche à droite.
TAILLEURS D'HABITS, ancienne corporation, formée
depuis 1C55 par la réunion de deux communautés dis-
tinctes, les marchands tailleurs et les Pourpointiers,
Pour parvenir à la maîtrise, il fallait avoir été 3 ans ap-
prenti et '3 ans compagnon, et produire un chef-d'œuvre.
TAILLEVAS, nom donné quelquefois au pavois^ bou-
clier.
TAILLE-VENT, voile de grandeur moyenne qui rem-
Elace la grande voile dans les lougres, chasse-marées et
ateaux de pèche, quand le vent soufije bon frais.
TAILLOIR. V. Abaqob.
TAITIEN (Idiome), un des idiomes polynésiens, le plus
doux de tous. En aucun cas on n'y rencontre deux con-
sonnes de suite. Il lui manque les sons représentés par
nos lettres c, f, g, k, s. Sa déclinaison a un duel. Les
plus petits changements dans la prononciation des mots
modifient leur valeur.
TAK-KAY, instrument de musique des Siamois, assez,
semblable à un lézard. Il est fait de bois dur, et garni
tout autour en nacre de perle. Le corps est creux, et par
derrière se trouvent trois ouvertures sonores. Trois
cordes, une de cuivre et les deux autres en soie, sont
tendues sur l'instrument d*un bout & l'autre, et accordées
au moyen de longues chevilles. L'exécutant appuie f%i
main çauche sur les cordes, et les frappe avec le bout
des doigts de la main droite.
TALAPOINS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
TALARO, monnaie d'argent de Venise, valant environ
5 fr. 25 c. Le talaro de Raguse ne vaut que 3 fr. 90 c.
TALAVA (Idiome), une des langues dravidiennes (K. ce
mot) de l'Hindoustan, parlée dans la zone comprise entre
les Ghattes occidentales et la mer d'Oman.
TALAYOTS {d'atalaya, tour d'observation), nom qu'on
donne dans les lies Baléares à d'antiques monuments de
forme conique, b&tis en grosses pierres posées sans ci-
ment et par assises horizontales, et dont quelques-uns
contiennent des escaliers intérieurs. Les plus grands Ta-
lavots sont accompagnés de plus petits qui semblent en
dépendre. Quelques-uns sont environnés de cercles for-
més de pierres longues fichées en terre. On suppose
qu'ils avaient tous une destination religieuse.
TALE. V. Tael.
TALEMELIERS, ancien nom des boulangers (K.C6 f7M}^)
TALENT, aptitude à exécuter quelque chose avec suc-
cès. Le talent est très-varié; on a le talent de la parole,
de la musique, d'un art et d'une industrie quelconques,
comme on a celui des affaires ou de l'intrigue. Le talent
ne demande pas, comme le génie, un esprit créateur; un
musicien, par exemple, passera pour avoir du talent dan»
son art, s'il est bon exécutant, et l'on n'exige pas de lui
qu'il soit compositeur; un écrivain de talent n'a pas be-
soin d'avoir des idées neuves et de produire des aperçus
nouveaux, il suffit qu'il dispose h(û>ilement et exprime
avec élégance et clarté les idées qu'il a recueillies, et
qu'il fasse ainsi une œuvre conforme aux règles de l'art
et du goût. Le talent peut être un don naturel, comme
le génie; mais il est beaucoup moins rare, et peut s'ac-
quérir par le travail. Le génie est une inspiration en
quelque sorte passagère, une illumination souda'ne qui
brille et disparait tour à tour : le talent est une aptitude
habituelle et permanente.
TALENT, monnaie, j V. notre Dictionnaire de Biogra-
TALION (Loi du). » phie et d'Histoire.
TALISMAN, c.-à-d. en arabe consécration, nom donné
à certaines figures en métal ou en pierre, à certains signes
gravés sur une matière quelconque, et auxquels la su-
perstition attribue la propriété de porter bonheur k celui
qui les possède, de lui donner une puissance supérieure
et magique.
TAM
1696
TAS
TALMA, sorte de manteau d'hiver, qui fut à la mode
vers 1858 et années suivantes, et dont la forme rappelle
celle de Tancien balandran {V. ce mot).
TÂLMUD. V, ce mot dans notre Dictionnaire d$ BiO'
graphie et d'Histoire.
TALOCHE, vieux mot désignant un petit bouclier.
— Les maçons donnent ce nom à une tablette de bois
longue de 0",50, environ, munie d'un manche court par
derrière, et sur laquelle ils mettent, avec la truelle, du
pl&tre gâché, pour l'appliquer sur un plafond à enduire.
TALON, en termes d'Architecture, moulure concave
par le bas et convexe par le haut. Si la partie concave est
en haut, c'est un talon renversé. Le talon est composé
d'un quart-de-rond et d'un cavet, dont la saillie égale la
hauteur.
TALON, en termes de Jeu, portion de cartes qui reste
après qu'on a distribué aux Joueurs 1» nombre nécessaire.
TALON, partie d'un registre d'où l'on a détaché des
quittances, des actions ou des titres quelconques, et qui
reste à la souche. On y a répété les indications inscrites
au titre délivré, dont la découpure doit se rapporter
exactement à celle du talon.
TALON, en termes de Marine, extrémité arrière de la
quille d'un bâtiment. Un navire taionne quand il touche
le fond de l'eau avec son talon. — On nomme Talonnier
une pièce de bois qui s'applique sous le milieu d'une va-
rangue {V. ce mot) qui ne fournit pas de quoi former son
talon ou support. — La Talonnière est la partie basse, le
bout d3 la mèche du gouvernail.
TALONNIER ES, ailes que Mercure porte aux talons.
TALPACHE. V. Tolpache.
TALUS, pente qu'on donne à un fossé, aune terrasse, à
un épaulement, pour que les terres se soutiennent mieux.
TAMANAQUE (Dialecte). V. Caraïbe (Langue).
TAMBOUR ou CAISSE (de l'espagnol tanibor, dérivé
de l'arabe al tambor)^ en latin tympanum, instrument de
percussion dont on fait particulièrement usage dans l'ar-
mée. Il est composé d'une caisse rende en cuivre jaune
ou en bois, dont les extrémités sont couvertes d'une peau
d'iVoe, de chèvre ou de veau, tendue au moyen de cer-
ceaux et de cordes. Une double corde en boyau, tendue
sur la peau de l'extrémité inférieure, donne du timbre à
l'instrument. On bat le tambour avec deux baguettes.
Los principales bcUleries sont : le rappel, ]& générale,
la marche, la charge, la retraite, le ban, la breloque,
la diane, le roulement, etc. — Le tambour a été connu de
toute antiquité en Orient, où l'on s'en servait dans les
lûtes de Cybèle et de Bacchus; mais il ne paraît pas avoir
été en usage dans les armées chez les Grecs et les Ro-
mains, qui le remplaçaient par les timbales et la bue-
cine. Importé en Europe par les Sarrasins, il était déjà
adopté par les Espagnols, les Italiens, les Allemands et
les Anglais, lorsqu'il fut introduit dans les troupes fran-
çaises en 13i7. Divers noms lui furent donnés pendant
le moyen âge (K. Taburel). On n'a cessé que de nos jours
lie remployer dans les musiques de cavalerie. Il figure au
théâtre dans les morceaux militaires. Le son du tambour
n'étant pas de nature h ûtre noté, les compositeurs figu-
rent par une note arbitrairement choisie celle qu'ils sont
censés attribuer à cet instrument ; et ce n'est que par les
valeurs assij^nées & cette note qu'ils indiquent à l'exécu-
tant les roulements ou les coups qu'il doit frapper.
TAMBOUR, soldat portour de l'instrument appelé tam-
bour ou caisse, à l'aide duquel il cadence le jis de l'in-
fanterie de ligne. En France, il y a aujourd'hui deux
tambours par compagnie. Chaque régiment a une école
de tambours, dont les élèves sont pris parmi les enfants
de troupe, les enrôlés volontaires et les nouvelles recrues.
L'habit des tambours est recouvert de galons de laine au
collet de l'habit et aux manches. Tout détachement com-
mandé par un officier est toujours précédé d'un tam-
l>our. Les tambours et les trompettes accompagnent les
parlementaires chargés de négociations militaires en pré-
sence de l'ennemi. — Il y a, dans chaque bataillon, un
Caporal-tambour ou Tambour-maitre , chargé de. l'in-
struction, de la police et de la discipline des tambours.
— Dans chaque régiment, un Tambour-major surveille
et commande les tambours et les clairons, et dirige leur
instruction. On le choisit parmi les hommes de haute
taille, et il a rang de sergent-major. Son habit est riche-
ment galonné d'or ou df'argent, avec deux épaulettes &
graines d'épinard mélangées d'or ou d'argent et de soie
de couleur; sa coiffure est un colback avec un plumet;
son sabre, suspendu h, un baudrier brodé, enfermé dans
un fourreau en maroquin ou en métal doré, a la mon-
Viro garnie d'orncnicnts ciselés; il poriccnlin une grande
canne à grosse pomme argentée, le long de laqneiW
s'entre-croisent deux chaînes de métal, et qui lui sert i
faire les commandements. Le tambour-major s'appebdi,
au XVI* siècle, tambour-colonel ou capitaine-tambour.
TAMBOUR, en termes d'Arehitecture, chacune des as-
sises de pierres cylindriques, plus larges que hautes,
(pii forment le fût d'une colonne, ou le noyau d*un esca-
lier à vis. On nomme tambour de coupole l'étage sur le-
quel porte la coupole. — Le nom de tambour est aussi
employé comme synonyme de tympan et de fronton.
TAMBOUR, en termes de Menuiserie, enceinte de Iam<
bris avec une ou plusieurs portes, placée aux principales
entrées des églises et autres édifices, à Tintérieurf pour
empêcher le vent d'y pénétrer.
TAMBOUR, en termes de Fortification, retranchemeoi
qui couvre la porte d'une ville ou l'entrée d'un ouvrage.
TAMBOUR , coffre de plomb dont on se sert dans un bas
sin pour rassembler l'eau qu'on doit distribuer à diflCé
rents conduits ou à plusieurs jets.
TAMBOUR, en termes de Marine, assemblage de plan-
ches clouées en forme de coffre pour couvrir soit la tète
du gouvernail , soit une écoutille, soit les roues des ba-
teaux à vapeur.
TAMBOUR DE BASQUE, petit tambour formé d*an cercle
de bois de 4 à 5 centimèL de large, avec une peau tendue
a'un côté du cercle, et auquel sont attachés des grelots
et des plaques de métal. On fhippe la peau avec le dos
de la main; pour faire résonner les grelots, on agite
l'instrument, ou l'on glisse le pouce sur la peau. Steibelt
a composé des bacchanales pour piano avec accompagne-
ment de tambour de basque, dont la partie est notée. Le
tambour de basque a toujours été inconnu aux Basques,
dont il porte le nom on ne sait pourquoi. Il existait chez
les Anciens, et il est souvent figuré dans les bas-reliefs et
les peintures antiques. B.
TAMBOURIN , sorte de tambour, moins large et plus
long que le tambour ordinaire, sur lequel on bat avec
une seule baguette, et qu'on accompagne ordinairement
avec une petite flûte ou galoubet pour faire danser les
villageois. On le nomme aussi Tambour de Provence. —
Le nom de tambourin fut donné autrefois à une danse de
théà're, fort gaie, en mesure à 2/4, dont la musique imi-
tait les efTetAdutambourinJointau galoubet. F. an Supn/.
TAMIL ou TAMOUL (Idiome), une des langues dr>
vidiennes ( V. ce mot ) de l'Hindoustan, parlée sur la cète
orientale depuis le cap Comorin jusqu'à Palicate, c-à-d.
sur les côtes du Coromandel et du Malabar. Cet idiome
diffère peu du malabar {V. ce mot)^ avec lequel on l'a
souvent confondu, et encore moins du kamatique (F. ce
mot). Il est harmonieux, et n'a pas les aspirations si
communes dans le karnatique et letélinga (V. ce mot).
Il possède 3 genres et 2 nombres. Ses adjectifs sont in-
déclinables. Sa conjugaison a le passif et le mode sub-
jonctif qui manquent au malabar, outre un mode inter-
rogatif et plusieurs impératifs qui lui sont particuliers.
Les prépositions sont jointes à la fin des substantifs, des
pronoms et des verbes. La construction ne souffre aucune
inversion. Letamoul s'écrit avec un caractère qui s'éloigne
plus du dêvanàgari que ne le fait aucun des alphabets de
l'Inde. V. Beschi, Grammatica latino-tamulica. Madras,
1816 et 1849; Brown, Grammaire du langage tamoul.
Madras, 1840; Campbell, Dictionnaire tamoul, Madr&s
1821 et 1848 ; Bottier, Dictionnaire tamoul. Madras, 1836
Dupuis et Mousset, Dictionarium IcUino-tamulicum,
1846. — Il existe beaucoup d'ouvrages écrits en tamoal,
et ils servent souvent k comprendre les livres sanscrits;
les plus anciens remontent à peu près à l'an 1000 de notre
ère. Parmi les productions originales, on remarque les
Sentences (Kural) de Tiruvalluver, dont Ane! a publié
des extraits en français, Paris, 1852.
TAMPON , rouleau avec lequel les imprimeurs en taille-
douce appliquent l'encre sur la planche gravée.
TAM-TAM ou GONG ou BEFFBOI, instrument de per-
cussion , originaire de la Chine ou de l'Inde. C'est un
plateau de métal ( 4 parties de cuivre jaune et une partie
d'étain ) , large et peu épais, qu'on porte suspendu à une
corde, et sur lequel on frappe avec un marteau ou une
forte baguette garnie d'un tampon de peau. Le son qui en
résulte est d'un caractère luguore; il a d'abord une très-
grande puissance, puis se perd dans des vibrations lentes
et prolongées. Le tam-tam, fort en usage dans la musiqus
des Orientaux, n'est employé chez nous qu'avec beau-
coup de réserve, par exemple dans les cérémonies fu-
nèbres, ou dans certaines scènes de musique dramatiqoe
où l'on veut produire des effets terribles. Ce fut aux
funérailles de Mirabeau, le 4 avril 1701, qu'on entendit
TAP
1697
TAP
^uui la preujière fois le tam-tam dans un orchestre^
V. Stanislas Julien, Notice sur la fabrication des tom-
tams , dans les Comptes^endus des séances de l'Académie
des sciences , t. XXIV. B.
TANASSÉRIM (Dialecte). V. Birmane (Langue).
TANBOUR, sorte de mandoline des Arabes et des
Turcs, dont on frappe les cordes de métal avec un plectre
en écaille. L'échelle des tons est marc^uée sur le manche.
Il y a des tanboura de diverses dimensions : 1° le tanbour
kebir-tourki , dont la partie inférieure est bombée et un
{)eu plus qu'hémisphérique; la table d'harmonie est plate ;
es cordes, au nombre de 8, sont accordées deux par deux
à Toctave et à l'unisson, et donnent une échelle de 2 oc-
taves et demie; — 2» le tanbotur charki, long de 1*",12,
Rt monté dp 3 cordes doubles, dont 2 en laiton et une
en acier; son échelle est de deux octaves et une quarte;
^ 3** le tanbour bouzourk, monté de 6 cordes, dont trois
(en laiton) servent pour une seule note, deux (en acier)
pour une autre note accordée un demi-ton plus haut, et
la dernière (aussi en acier} pour une note à une quinte
inférieure de la seconde ; l'étendue de l'instrument est
de deux octaves et demie ; — 4° le tanbour baghlamah,
ou mandoline d'enfant, ne différant du bouzourk que
par la petitesse de ses dimensions, et ayant une étendue
de 2 octaves; — 5» le tanbour boulgkari, excessive-
ment orné, monté de 4 cordes, dont deux simples et une
double, et d'une étendue de deux octaves.
TANENGSARI (Dialecte). V, Birmane (Langue).
TANGAGE. V. Roulis.
TANGON , en termes de Marine, espart double, placé
en travers sur l'avant du m&t de misaine, et saillant au
delà du pont pour soutenir les ancres loin du bord ou
pour amarrer les chaloupes, qui ne peuvent ainsi accos-
ter les flancs du b&timent.
TAN74EURS, ancienne corporation formée en 1345,
sous le patronage de S^ Barthélémy. L'apprentissage était
de 5 ans au moms.
TAM'E, sœur du père et de la mère. V, Oncle,
Nevbo.
TANTEORISTE. V, Collier.
TANTRAS. V. Indienne (Littérature).
TANZIMAT. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d^Histoire,
TAO (Religion du). V, Chinois (Philosophie des).
TAORMINI (Antiquités de). Cette ville de Sicile, ap-
pelée autrefois Taurominium, possède des ruines antiques
qui attestent sa grandeur passée. Ce sont : cinq réservoirs
tï,-*. grande dimension, et les aqueducs destines à y con-
duire les eaux; des murailles en brique, de près de
i'iO met. d'étendue, ornées d'arcades et de niches, et ayant
appartenu à un édifice considérable, naumachie, gymnase
ou cirque ; beaucoup de tombeaux ; les restes d'un bain ;
les murs latéraux d'un petit temple dont on a fait une
é[;Iise. Mais le monument le plus important est un théâ-
tre grec, agrandi et orné par les Romains, saccagé par les
Normands au moyen &ge, et réparé en 1748. Il a 69 met.
de diamètre, et peut avoir contenu 25 h 30,000 specta-
teurs. Les gradins, qui paraissent avoir été au nombre
de 28 ou 30, et qui étaient recouverts de plaques de
marbre, sont aujourd'hui effacés ; cette portion de l'édi-
fice était bordée, à sa partie supérieure, par une double
galerie couverte, construite en orique, et ornée de pilas-
tres, de colonnes, et de statues dont les niches subsistent
encore. On retrouve aussi la trace de deux escaliers pour
les spectateurs, une partie des petits murs qui entou-
raient le podium, un étage de la galerie rectiligAe qui
forme l'avant-scène, deux salles voûtées , les galeries par
lesquelles les acteurs entraient en scène, etc.
TAPAGE. V. Bruits et tapages.
TAPE , en termes de Marine, morceau de bois travaillé
en cône tronqué, qui sert à boucher hermétiquement un
rcubier ; — tampon en liège ou en bois qui sert à fermer
la bouche d'un canon, pour empêcher l'eau d'y pénétrer.
TAPECU , en termes de Marine, petite voile trapézoïdale
ruiblie sur l'extrémité arrière des louées et des cha-
loupes. On donne le même nom au petit m&t qui porte
eetie voile.
TAPECU, fermeture à bascule, spécialement adaptée aux
poternes, et qui, roulant sur un axe horizontal, retombe
sur les talons du sortant.
TAPECU y petit cabriolet découvert et mal suspendu.
TAPER, en termes de Peinture, exécuter d'une touche
très-libre, négligée en apparence, comme si l'on n'avait
fait que taper la toile çà et là de quelques coups de brosse.
Un tableau tapé doit être vu d'un peu loin.
TAPIS (du mot grec et latin tap^), pièce d'étoffe en laine
ou en soie, à dessins variés, dont on eoam une table,
une estrade, un carreau ou un parquet de chambre, etc.
Il y a 6 genres i>rincipaux de tapis : i^ les tapis veloutés
ou de Savonnerie, en haute lisse (7. ce mot)^ d'un seul
morceau et des plus grandes dimensions; la laine n'est
Sue passée, et non nouée à la chaîne ; 2^ les tapis ras ou
"Awmsson, à basse lisse, d'un seul morceau, et dont le
dessin s'exécute à l'envers et par la trame; 3» les mo'
quettes {V. ce mot)^ qui se fabriquent sur un métier, et
dont le dessin s'exécute par la chaîne; on les dit velou»
tées ou épingléeSf selon qu'on a coupé ou non la boucle
que forme la laine à chaque brin; 4® les tapis écossais,
ou à double face, qui n'ont pas d'envers, et qui se fa-
briquent sur métiers k la Jacquart; b^ les tapis véni^
tiens, dont le dessin ne consiste qu'en rayures, et qui m
s'emploient aue pour passages d'appartements et pou*
escaliers; &* les tapis jaspés, dont le fond est rayé o
chiné, et qui se composent d'une grosse trame en étoupe
revêtue d'un peu de laine.
Les premiers tapis consistèrent en tresses de Jonc et
de paille, et aujourd'hui encore il en arrive du Levant
qui sont fabriqués avec une extrême délicatesse. L'Anti-
quité vantait les tapis d'étoffe fabriaués à Sardes, à Per-
game, àMilet, à Samos, àl^ et k Sidon. Plus tard,
Alexandrie eut le monopole de ce genre d'industrie. Dans
les premiers temps du moyen &ge, les arts languirent; la
fabrication des tapis ne reprit en France qu'au ix* siècle.
A la fin du x*, l'abbaye de S'-Florent , à Saumur, se livra
au tissage des étoffes ornées de fleurs et d'animaux. Au
XI*, la ville de Poitiers eut une manufacture dont les pnn
duits étaient fort recherchés : les tissus qu'elle exécutait
offraient des portraits d'empereurs et de rois, des sujets
tirés de l'Écnture sainte. A la même époque, les peuples
du Nord, et surtout les Anglais, se distinguèrent aussi
dans cet art nouveau , et l'on disait un ouvrage anglais
pour un ouvrage brodé; l'Orient envoya aux Occidentaux
ces étoffes chargées d'écussons ou d'animaux, qu'on ap«
pelait scultatœ ou ocellcttœ vestes, puis celles qui reçurent
le nom de tapis sarrasinois. Aux xii* et xni* siècles, les
villes de Flandre fournirent de tapis toute la chrétienté.
Le goût en était devenu si vif, qu'on les faisait entrer
dans la confection même des tentes de guerre : les tapis
de pied, de table ou de lit , qu'on plaçait à l'intérieur, se
nommaient aucubes; on appelait tref (de trt/o/tt^m ) ceux
qui recouvraient la charpente, parce que les draps de la
tente étaient partagés en trois lés. Sous le gouvernement
des ducs de Bourgogne, Arras devint un grand centre der
fabrication pour les tapis, d'où le nom d*arrazzi sous
lequel on les désignait en Italie. On employait générale-
ment la laine ; la fabrication des tapis en soie ou en fils
d'or se concentra surtout à Florence et à Venise. Au
XVI* siècle s'ouvre une ère de perfectionnement et de
progrès : en 1539, François I*' fonde à Fontainebleau la
première manufacture royale. Alors on se met k tisser les
tapis d'une seule pièce, au lieu de les fabriquer par frag-
ments, que l'on rapprochait ensuite en les recousant.
Henri 11 continua d'encourager cette industrie, et créa uns
autre manufacture à Paris, dans l'hôpital de la Trinité.
Sous Henri IV, il y eut au Louvre une fabrique de tapis
de Perse ou de Turquie, nommés aussi tapis du Levant «
sous la direction d'ouvriers musulmans attirés en France
au moment où Philippe IH venait de les chasser d'Es-
pagne et des Pays-Bas. Louis XHI transporta cette manu-
facture près de Chaillot , dans la maison de la Savonnerie
( V, ce mot), qui fut réunie sous Louis XIV à celle des
Gobelins ( K. ce mot). La manufacture de Beauvais fut
fondée en 1604 par Louis Hinart.
TAPIS FRANC, en termes d'argot, lieu de refuge du
plus bas étage, où les gens de mauvaise vie se réunis-
sent dans les grandes villes pour jouer, boire, fumer et
dormir.
TAPIS VEBT, vaste pièce de gazon, pleine et entière,
qu'on trouve dans les grands jardins. Le Tapis vert du
parc de Versailles est célèbre.
TAPISSERIE (de tapis), mot qui se dit : 1° de tout
ouvrage fait à l'aiguille, sur du canevas, avec de la laine,
de la soie, du fil , de l'or, etc. ; c'est la broderie { V. ce
mot) ; 2<* des grandes pièces faites au métier avec de la
laine, de la soie ou de l'or, représentant des tableaux,
des personnages , des dessins de toute sorte, et servant
principalement de tentures. Le voile du Saint des Saints,
chez les Hébreux, dont la broderie représentait diverses
figures de Chérubins, était un magnifique ouvrage dû &
l'habileté du tisserand. Chez les Babyloniens, on se ser-
vait de tapisseries pour retracer les mystères de la religion
et perpétuer les faits historiques; les maisons royalet
107
TAP
1698
TAP
tiitnt ornées de tapisseries tissées d'argent et d*or. Les
Égyptiens paraissent aToir été également habiles dans la
broderie et dans la tapisserie. Chez les Grecs , selon la
Fable, Philoroèle exécuta en laine la triste aventure de
Progné ; selon rhistoire, Pénélope broda sur la toile les
événements qui avaient agité la vie d*Ulysse. U Iliade
d'Homère nous montre Hélène travaillant a un merveil-
/euz ouvrage de broderie, où étaient représentés les com-
bat» des Grecs et des Troyens ; Andromaque est occupée
k un travail de ce genre, lorsqu'on vient lui annoncer la
mort d*Hector. Aristote parle d'un Sybarite qui fit broder
une tapisserie représentant les six grandes divinités de
/a Grèce; la bordure supérieure était ornée d'arabesques
de Sttse, et l'inférieure d'arabesques persanes. Les Ro-
mains eurent de riches tapisseries qu'ils nommaient
atUœa , des couvertures qu'Us étendaient sur leurs lits
et qu'ils appelaient vestes : souvent on y voyait repré-
sentés des sujets fabuleux ou héroïques. Caton d'Utique
posséda un tapis babylonien qui valait 800,000 sesterces
(163,067 (t.), et, au rapport de Pline (Vlli, 48), Néron
en paya un 4 millions do sesterces. Cartlia^ connaissait
aussi les tentures brochées, et ses tisseranderies jouis-
saient d'un grand ronom. Au moyen âge , on voit fré-
quemment les étoffes brochées employées à la décoration
des églises. Ce fut ainsi que Dagobert fit couvrir de ten-
tures les murailles de l'abbaye de S'-Denis. Les châte-
laines et leurs suivantes brodent les gestes glorieux des
ancêtres, et l'on orne de ces nobles souvenirs les mu-
railles des châteaux. Non-seulement les tapisseries ser-
vent à tendre les appartements et à déguiser leur nudité,
mais on les emploie dans les occasions solennelles, par
exemple, aux entrées des princes, pour donner une pny-
sionomie Joyeuse aux villes et aux places publiques. Les
salles de festin sont tendues de riches tentures; dans les
tournois, autour des lices et du haut des galeries Jusque
dans l'arène, se déroulent les exploits aes preux; les
caparaçons déploient aux yeux de la foule de riches
housses ymagées. Un usage assez général à cette époque
fut que les tapisseries portassent les armoiries de ceux
à qui elles appartenaient ou par ordre desquelf elles
avaient été confectionnées; dans d'autres, au contraire,
les personnages représentés offraient leurs propres armes
vw leurs habits. Quant aux ymaiaes . elles étaient très-
variées : elles retraçaient des scènes tirées de l'histoire
ancienne, les gestes fabuleux des héros, les faits histo-
riques modernes, des chasses, des animaux bizarres, ou
encore des occupations propres aux diverses saisons,
enfin les principales scènes des romans de chevalerie.
Ce qui pipuve que l'Europe était loin de le céder en
cela aux Orientaux, c'est que Louis IX envoya en pré-
sent au khan des Mongols une tente en tapisserie re-
présentant l'Annonciation, et qu'une partie ae la rançon
3ue Jean de Nevers pa^a à Bigazet I*', après la bataille
e Nicopolis (1396), était composée de tapisseries d'Arras
représentant l'histoire d'Alexandre. Il nous est resté du
moyen ftge un certain nombre de tapisseries historiées,
ou à personnages ; voici quelques renseignements sur les
plus célèbres :
h Tapisserie d*Atx. — Achetée à Paris en 1656, pour la
cathédrale d'Aix, elle provient d'Angleterre, et est une
de celles que les Anglais vendirent ]orsqu*après s'être
séparés de l'Église romaine ils dépouillèrent les édifices
religieux. Dans les grandes fêtes on la place au-dessus
des stalles des chanoines; en temps ordinaire, elle est
roulée et renfermée dans la sacristie. £lle représente
Thistoire de Jésus et celle de la Viei^, et se compose
de 27 compartiments, qui offrent à eux tous une longueur
d'environ 62 met.; 'elle est travaillée en laine mélangée
de soie. Chaque panneau contient deux compartiments ou
tableaux; le dernier n'en a qu*un seul. Il y a des armoi-
ries de deux en deux compartiments; on remarque celles
de Henri Vlll, roi d'Angleterre, et de William Warhain,
archevêque de Cantorbéry de 1506 à 1532. Le genre de
la composition des sujets, ainsi que leur exécution,
appartient à l'école flamande : cependant l'aiti^te s'en
est écarté en ce qui concerne les femmes; les figures
de femmes de la tapisserie d'Aix sont grandes, sveltes,
d'une nature fine et déliée, bien éloignée du type flamand.
Les costumes et les armes sont des xv* Qt xvi* siècles.-
On voit qu'au moment où cette tapisserie a été faite
I>>i1}, l'ancien style et le goût gothique commençaient
à ^der k de meilleures compositions.
II. Tapisseries d*AiUhac ouAulhat (Puy-de-I>ôme). -^
£Ues furent enlevées pendant la Révolution à leur pro-
étaîre qui résidait à Aulhac, puis transportées à
oire et déposées dans une des salles du pa'uis de
Justice. Le peu de soin qu'on en a pris depuis cette époqae
est cause au'à cette heure elles sont détériorées. Les car-
tons d'après lesquels furent exécutées ces tapisseries en
font des objets d'art d'un haut mérite. Elles sont en laine.
On ignore le lieu où elles furent fabriquées, ainsi que la di-
mension totale de leur collection. Il est probable cependant
Qu'elles représentaient les principaux faits de la guerre
e Troie. Leur hauteur est de 4"*, 33. A en Juger par le^
chaussures à la poulaine, les armures, les panaches, lc>
vêtements, elles sont du xv* siècle, et plutôt de la seconde
moitié que de la première. ,
III. Tapisserie de Bayard. — Elle décorait autrefois la
grande salle du ch&teau de ce nom, près de Grenoble ;
elle fut vendue, en 1807, à un artiste de Lyon, qui la céda
en 1837 à H. Achille Jubinal. Elle se compose de trois
fragments nui se suivent sans interruption, et qui ont
chacun 4"',$3 de hauteur sur 2"*, 33 de largeur; mais elle
devait être Jadis bien plus considérable. L'architecture,
les costumes, les armes, tout dénote qu'elle est du com-
mencement du XV* siècle; l'écriture des légendes qui
expliquent le sujet offre même quelques caractères pa-
reils à ceux de la fin du xiv*. Le sujet est tiré de V Iliade
d'Homère, et il est probable que ce poôme se trouvait
reproduit en laine presque tout entier. Le premier com-
partiment représente la ville de Troie : les édifices sont
construits dans un sin^culier système architectural qui
n'appartient à aucune époque; quelques-uns cependant
sont ornés de dentelures gotlûques. On remarque aa
premier plan un groupe dont toutes les tètes sont d'une
grande correction de dessin et ont beaucoup d'expression
de physionomie; les personnages qui composent ce groupe
portent leur nom écrit sur leurs vêtements, EnecLS, An--
thénor, le roy Pviam, Panlhasilea. Une l^nde tracée
au bas du compartiment explique qu'il s'agit de Pentlié-
Bilée, reine des Amazones, venant avec ses guerriers au
secours de Troie, où elle est reçue par Priam et sa cour.
Les costumes et la coiffure se rapprochent des modes en
usage sous Charles VU. Le 2° compartiment reprcseutc
un combat dans lequel la lance de Polydamas se croise
avec l'épée à'Ajax Télamon; ou y voit aussi Philiménés
qui combat et la reine Parunesilea qui frappe de son
glaive Dioniède renversé de cheval. — Le 3* comparti-
ment offre une scène plus paisible Sous une tente {Aè-
^auie, Pi/rrhus est debout: ou l'arme chevalier avec les
cérémonies du moyen âge; autour de im se tieinient Ajax
et Agamemnon, qui semblent lui servir de parrains; il
saisit d'une main la bannière qu'on lui présente^ et paraît
ému de l'honneur qu'on lui décerne; à ses pieds est ud
écuyer ^ui lui chausse l'éperon. — Au résumé, toute cette
composition est fort expressive. La tapisserie de Elayard
est, en outre, curieuse par son travail , qui est en pièces
de rapport comme les premières tapisseries de Flandre,
par les costumes , qui sont riches et élégants , enfin par
la beauté des figures.
rv. Tapisserie de Dayeux, — V. Batbux (Tapisserie de).
V. Tapisseries de Beauvais. — 11 y en eut deux bien
distinctes, représentant, l'une des sujets religieux, l'autre
des sujets profanes. Les tapisseries religieuses. Jadis en
plus giund nombre qu'aujourd'hui, furent données vers
1460 a la cathédrale, dont elles ornèrent le chœur Juv
u'au xviu" siècle, par Guillaume de Hollande, évêque
e cette église. Elles sont présentement dispersées, et
plusieurs même ont péri. Les fragments qui ont été con-
servés représentent quelques faits miraculeux de la rie
de S^Pierre. Un de ces fragments, en la possession d^
M. Dusommerard, est remarquable à cause des costuir.os
militaires et de l'arohitecture : c'est celui où est retracvx*
l'évasion de S* Pierre, conduit par un ange hors de aa
prison, tandis que les soldats chargés de le garder sont
endormis. Les autres fragments que conserve la cathé-
drale do Beauvais se distinguent aussi par la richesse des
costumes et le naturel des physionomies; des inscrip-
tions explicatives et en caractères gothiques sont plactiT^
au haut de chaque compartiment. — Les tapisseries à
si^Jets profanes sont de la première moitié du xvi* siècle,
ainsi que l'indiquent le costume des personnages et la
date de 1530 marquée sur l'une d'elles. On supposa
qu'elles proviennent des manufactures d'Arras; il ne é^r-
reit pas impossible non plus qu'elles fussent sorties de
celles de Beauvais, qui ont eu aussi un grand renom.
Elles sont relatives à la fondation des principales rilles
des Gaules, et offrent quelques-uns des personnages qui
ont donné leurs noms aux anciennes divisions territo-
riales du pays, avec quelques lignes sur leur histoire
plus ou moins apocryphe. Ces personnages sont , entre
autres : Bel {pus, roi des Gaulois, fondateur de Beaavfiit)
3
TAP
1699
TAP
P&rîs, fondateur de Paris; Lugdus, roi des Celtes, fonda-
teur de Lyon ; Rômus, frère de Romulus, fondateur de
Reims. Dans un compartiment qui représente la France
et quelques contrées voisines, on voit sur une carte géo-
graphique les noms de rivières et de pays suivants : le
Rhin, Souisse, Savoye, Méditerranée, Loyre, Aquitaine,
Gironde, Gascogne, France, Seine, Bretaigne, Angleterre,
Normandie, Picardie, Flandres, Artois, Holande, Ardene.
Tout cela est disposé d'après les quatre points cardi*
naux, dont les noms sont tracés aux quatre côtés de la
tapisserie.
VI. Tapisseries de Berne, — Elles sont au nombre de dix.
On les conserve dans la sacristie de la cathédrale, et elles
sont exposées dans le chœur en des occasions solennelles,
notamment lors de l'ouverture de la diète helvétique. Les
couleurs en sont parfaitement conservées, et Texécution
en est remarquable. Six de ces tapisseries furent prises
sur Charles le Téméraire à Granson et à Morat (1476);
leur confection remonte à la première moitié du x v* siècle.
Les principaux sujets qu'elles représentent sont : TAdo-
ration des Mages; Trajan écoutant la requête d*une
veuve, faisant exécuter le meurtrier de son mari tué in-
justement, et, dans un dernier tableau. S* Grégoire de
Nazlanze arrachant aux Enfers par ses prières l'âme de
cet empereur; César passant le Rubicon, et livrant di-
verses batailles (cette tapisserie a près de 8 met. de lon-
gueur sur 4'",50 de hauteur). Les quatre dernières ta-
pisseries proviennent de l'ancienne fabrique de Berne,
ot datent de la première partie du xvi" siècle. Les deux
plus longues ont 5 met. de largeur sur 1"*,50 d'éléva-
tion , ce qui est aussi la hauteur des autres. Le sujet ,
développé en divers tableaux, est la Vie de S^ Vincent de
Saragosse, patron de la cathédrale de Berne.
VIL Tapisseries de la Chaise-Dieu (Auvergne). — Don-
nées en 1518 à l'église qu'elles ornent encore aujourd'hui
par Jacques de S^-Nectaire ou Sennectère, dernier abbé
régulier, dont elles portent les armoiries, il serait diffi-
cile de désigner le lieu où elles furent fabriquées, et l'au-
teur des cartons originaux. Tout ce qu'on peut affirmer,
c'est qu'elles ne sont pas un ouvrage flamand : le type
de physionomie donné à chacun des personnages est
trop empreint d'idéalité pour ne pas démentir cette ori-
gine. C'est ce qui , joint à la flnesse de l'exécution et à
la richesse du travail, fait penser qu'elles sont sorties
peut-être des fabriques de Florence ou de Venise, ou
qu'elles sont l'œuvre d'artistes italiens établis en France
depuis l'expédition de Charles VIII. Ces tapisseries sont
au nombre de 14, dont 3 de forme carrée, ayant 3™,33 en
tous sens; les autres ont 2 met. de hauteur, sur G de
longueur, à l'exception d'une seule qui n'a pas moins de
8"*,Ô0. Douze sont appendues au-dessus de la boiserie du
chœur de la grande église; les deux autres sont placées
dans Véglise des Pénitents, ancien réfectoire des moines
qui forme aujourd'hui une chapelle. Les tapisseries de la
Chaise-Dieu sont un tissu de laine et de soie fait au mé-
tier, et l'on aperçoit encore sur presque toutes des flls
d'or et d'argent que le temps a respectés. Elles repré-
sentent l'histoire de l'Ancien et celle du Nouveau-Testa-
ment misps en regard , c.-à-d. la figure et la réalité.
Chacune d'elles est divisée en trois compartiments formés
par des colonnettes : celui du milieu est presque tou-
jours occupé par un trait de l'histoire de JésuBr-Christ ,
et les deux autres par les points de l'histoire de l'An-
cien Testament qui sont ta figure du Nouveau. Des
exergues placés en haut renferment un quatrain en
prose latine rimée; les deux premières lignes sont tirées
de la Bible et expliquent la figure, les deux dernières la
réalité. Dans le milieu et en bas de la tapisserie, on lit
des sentences tirées des Prophètes, des passages em-
pruntés soit aux Psaumes, soit aux autres livres de la
Bible, mais toujours relatifs au sujet représenté dans le
compartiment où ils sont placés. Les trois tapisseries
carrées forment à elles seules un abrégé de l'histoire de
Notre-Seigneur dans ses trois faits principaux, la nais-
sance, la mort et la résurrection. La fabrication des ta-
pisseries de la Chaise-Dieu doit remonter au commence-
ment du XVI* siècle ou k la fin du xv« : elles dénotent, en
eflet , dans l'architecture et dans les costumes qu'elles
reproduisent, fes règnes de Charles VIII et même de
Louis XI plutôt que ceux de Louis XII et de François I*'.
VIII. Tapisserie de Dijon. — Elle représente l'histoire
du siège que soutint cette ville contre les Suisses en 4513,
et est divisée en trois tableaux, qui retracent : le l"", le
siégQ à son commencement; le 2*, la procession solen-
Mlle qui eut lieu dans an momeot de trêve, le long du
Nns^arty en l'honneur do Notre-Dame-de-Bon-Espoirt
îo 3% la fin du siège, ou l'exécution du traité conclu elisn
les habitants et les Suisses, ainsi que les actions drt
gr&ces que le gouverneur vient rendre à la Vierge. Cetto
œuvre dut être faite peu de temps après Tévénement
dont elle était destinée à perpétuer le souvenir, puis*
au'elle représente avec exactitude les divers monuments
e la ville, les costumes et les armes du xvi* siècle. Le
dessin se distingue par une expression naive et par un«
grande richesse de composition , opposées à des fautes
d'ordonnance et de perspective. La tapisserie de Dijon a
2'",384 de hauteur sur 6">,604 de longueur; elle ne con-
tient pas moins de 50 personnages par compartiment. On
ignore de quelle manufacture elle sort, et par qui elle
fut commandée. Elle dépendait anciennement du mobi-
lier de la fabrique de Notre-Dame; achetée pendant la
Révolution à un brocanteur par le maire de Dijon, et
placée dans une des salles de l'ancien hôtel de ville, d'où
elle a passé au Musée en 1832, elle est aujourd'hui tendue
dans la cage de l'escalier de ce Musée; bien que le temps
en ait altéré la fraîcheur, elle n'en est pas moins intacte,
et assez bien conservée jusque dans ses moindres détails.
IX. Tapisserie du Louvre, — Cette tapisserie, après
avoir passé en plusieurs mains depuis Richelieu, un de
ses plus anciens possesseurs, fut achetée par le roi
Charles X au peintre Révoil. L'architecture, les costumes
et les légendes qu'elle offre placent son exécution vers le
milieu du xv* siècle; malgré cette antiquité, elle est très-
bien conservée, et n'a subi que peu d'altérations. Le sujet
est un miracle de S^ Quentin, qu'expliauent huit qua^
trains en caractères gothiques placés au oas des person-
nap;es. Un larron a dérobé le cheval d'un prêtre; il est
pris, et condamné à être pendu. Le prêtre sollicite sa
gr&ce, qui lui est refusée; il prie alors pour le coupable
devant la ch&sse de S^ Quentin. On procède à l'exécution t
mais un accident arrivé au gibet fait que le patient tombe
avant le moment fatal : le prévôt reconnaît dans ce fait
un ordre du ciel. Le patient, délivré, s'agenouille devant
la chftsse du saint , et le remercie de son intervention.
Autour de cette tapisserie, qui a environ 8'<>,33 de lon-
gueur sur 4 met. de hauteur, règne une magnifique bor->
dure composée de feuillages, de fleurs, de fruits, et de
divers ornements très-pittoresques. Le terrain lui-même
est semé d'herbes et de fleurs sur fond vert. Le vêtement
du prêtre est rouge, celui du prévôt riolet, celui des
gardes jaun&tre; les coifTures consistent presque unifor-
mément en une sorte de calotte ou bonnet rouge, ayant
une partie qui se relève par derrière et s'attache sur le
sommet. Le toit des maisons est tantôt en tuiles, tantôt
en ardoises, à la manière flamande; ce qui , indépendam-
ment du type général du dessin , ferait penser que cette
tapisserie peut provenir des anciennes fabriques d'Arras.
X. Tapisseries de Nancy. — L'une de ces tapisseries
remonte à une assez haute antiquité : elle a d'abord ap-
partenu à Charles le Téméraire; prise dans la tente de ce
prince par les Lorrains après la bataille de Nancy en
1477, elle servit au palais des ducs de Lorraine jusqu'à
Charles IV, qui en fit don à sa Cour souveraine. Ce qui
reste de cette tapisserie a 25 met. de longueur sur près de
4 met. de hauteur, et garnit aujourd'hui une des cham-
bres de la Cour impériale et une autre salle inoccupée.
C'est une de ces œuvres flamandes dont le tissu de laine
trè&-Ane est éclairé par l'or et la soie; la soie et la laine
subsistent encore, mais l'or ne s'aperçoit plus que dans
quelques endroits et avec l'aide d'un beau soleil. Le sujet
est une histoire allégorique qui a pour but de repr^ntcr
les inconvénients de la bonne chère. Les personnages, de
grandeur naturelle, portent leur nom écrit sur eux; ce
sont, pour les amphitryons : Dtner, Souper. Banquet;
pour les convives : Passe ~temps, Bonne-dompagnie,
Gourmandise, Friandise, Je Boy-àrvous, Je Plaise-^'au^
tant, Acoustumance; pour les maladies qui attaquent les
convives après le repas \ Apoplexie, Paralisie, Pleurésie,
Colicque, Esquinancie, Tdropisie, Jaunisse, Gravelle et
Goutte; pour les remèdes qui viennent à leur secours i
Sobriété, PiltUe, Clistère, etc. Des inscriptions en carac^
tères gothiques, placées dans le haut, expliquent les
scènes. L'histoire est incomplète, et le dénoùment perdu.
La tapisserie^ été coupée en plusieurs morceaux, et mal •
heureusement ce n'est pas aux endroits indiqués comme
changement d'action par les divisions de rarîiste lui-
même. On n'a pas été plus heureux quand on' a voulu re-
joindre ces morceaux : on les a placés dans l'ordre erroné
oh on les voit aujourd'hui ; mais l'ordre naturel a été ré«
tabli dans la reproduction qui eo a été faite par la gra-
vure, grftce à une Moralité dont le sujet a été puisé dans
cette tapisserie, et qui peut servir aitasi à retrouvw U»
TAP
1700
TAR
•cèses qui manquent. Cette Moralité a pour titre : Con-
damnacton des banquetz, et pour auteur Nicole de La
Chesnaye; on la trouvé isoléuient, et dans un recueil
dédié à Louis XII et intitulé : La nef de santé avec le
gouvernail du corps humain et la condamnacion des
bancquetz, etc. On peut regarder les deux premières
scènes de la tapisserie de Nan(^ comme le tableau fidèle
d^un repas seigneurial au xv* siècle, tant sous le rapport
des ornements de la salle du festin que sous celui des
vases qui servent à table et des serviteurs qui assistent
au repas. Le costume des personnages est aussi tout à
fait caractéristique ; ce sont les vêtements et ornements
en usage vers le milieu du xv* sié^sle, et la disposition
artistique, le choix du sujet, l'exécution elle-même, por-
tent bien Tempreinte du style des œuvres de cette époque.
— Le local de la Cour d'appel de Nancy possède une
autre tapisserie, qui n*a aucun rapport avec la précé-
dente, et qui provient, dit-on, de la même source. Elle
représente Thistoire d'Assuérus révoquant son édit contre
les Juifs. Les principaux personnages, après le roi , sont :
Esther, Aman et Mardochée. L'artiste, ayant voulu leur
donner un costume oriental , les a affublés de vêtements
de fant^iisie, qui ne sont d'aucun peuple ni d'aucune
époque. Comme dessin, les figures d'Esther et de ses
trois dames d'honneur sont très-belles; leur physionomie
est d'une exécution remarquable, et, dans l'expression
du visage, ainsi que dans la posture d^Esther, il y a
quelque chose de cette langueur que donnèrent à leurs
madones aux siècles suivants les grands génies de la
peinture italienne.
XI. Tapisseries de Petms, dans l'église métropolitaine.
— Il y en a environ 40, formant diverses collections, et
représentant toutes, & l'exception de deux ou trois, des
sujets religieux. L'église de S' Rémi compte aussi dix ta-
pisseries, toutes d'égale grandeur et de forme pareille,
données en 1531 par Robert de Lenoncourt, abbé com-
mendataire. Elles représentent la bataille de Tolbiac, le
baptême de Clovis, la peste de Reims, et les événements
qui donnèrent lieu aux miracles de S^ Rémi , et sont très-
belles de couleur et de travail. C'est surtout & l'envers
qu'il faut les voir; les couleurs, garanties de ce côté
contre l'action de l'air, ont conservé presque tout leur
éclat. Sur les dix, il y en a quatre moins altérées que les
autre^et qui paraissent avoir moins servi. En effet, dans
les processions et autres cérémonies, on n'étale en gé-
néral que six tapisseries. La perfection du travail, l'agen-
cement de la composition, l'habileté avec laquelle les
dessins ont été tracés, peuvent être un objet d'étude et
d'instruction pour les artistes de nos Jours. Quant aux ta-
pisseries de la cathédrale, elles sont pour la plupart
constamment exposées sur les murailles des nefs collaté-
rales et contre la grande porte centrale ; il en est aussi
qu'on tient roulées dans la sacristie, et qu'on n'expose
que dans les solennités. Parmi ces tapisseries, il en est
d'assez médiocres; elles n'appartiennent point, comme
les autres, au xvi*' siècle, mais au xvii*, et sont l'ouvrage
d'un nommé Pepersak, artiste flamand.
XII. Tapisserie de Valenciennes. — Cette ville, autre-
fois célèbre par ses manufactures de tapis de haute lisse,
ne possède plus qu*un monument de ce genre, un de ces
admirables ouvrages qui faisaient la gloire des fabriques
de Flandre aux xv« et xvi* siècles. Découverte, en 1830,
par M. Vitet, dans un grenier de l'hôtel de ville, la ta-
pisserie de Valenciennes occupe aujourd'hui une des
grandes salies de l'édifice. La bordure seule est un peu
endommagée, mais le fond est dans un parfait état de
conservation. Elle a 5 met. de hauteur, sur 5™,50 de
large. Elle représente un tournoi : 12 chevaliers, cui-
rassés des pieds à la tête, et mont^ sur des chevaux
richement caparaçonnés et couverts de housses armoriées
et étincelantes d'or, s'attaquent à grands coups de dague;
las lances courtoises ont été rompues, et leurs débris
jonchent l'arène. Dans le fond, on voit des tribunes gar-
nies d'un triple rang de spectateurs. Les costumes sont
de l'époque de Maximilien ( xv* siècle), et ont une ori-
gine allemande que révèlent la multiplicité des panaches
et leur exagération ridicule. Le sujet pourrait bien appar-
tenir à Tun de ces 36 tournois tenus en Allemagne Jus-
3u'en 1487, et décrits par André Favin dans son Théâtre
'honneur et Je chevalerie. L'ordonnance générale du
tableau est 'parfaite; une grande harmonie règne entre
ses diverses parties; les lois de la perspective, fort sou-
vent oubliées dans les tapisseries, sont dans celle-là com-
plètement observées. On y admire encore la fermeté et
le fondu des nuances, la netteté et la franchise du dessin,
la hardiesse et le charme de la composmon. Dans la bor-
dure, formée d*an riohe feuillage arabesque, et terminée
du côté du tiUïleau par une chaîne de pierreries mer-
▼eilleusement imitées, on a placé vingt écussons où l'on
a cru distinguer, autant que l'a permis l'altération des
couleurs, les armoiries de quelques maisons du pays de
Liège et des provinces rhénanes.
V. Les anciennes tapisseries historiées, ou CoUection
des monuments les plus remarquables de ce genre qui
nous soient restés du moyen âge, à partir du xi* siècle
au XVI* inclusivement, texte par Achille Jubinal , dessins
de Sansonetti, Paris, 1838,2 vol. in-fol. obloog; Recher-
ches sur l'usage des tapisseries à personnages, par
A. Jubinal, 18^, in-8*; Mémoire sur la tapisserie du
choeur de Véglise cathédrale d*Aix, par Fauris de Saint-
Vincent, Paris, 1812, in-8** ; Toiles peintes et tapisseries
de Reims, par Paris et Leberthais, 2 vol. in-4o ; Notice
sur les tapisseries de la cathédrale de Beauvais, par
l'abbé Santerre; Études sur les beaua>-arts. Essais d^ar-
chéologie et Fragments littéraires,]^ Vitet, Paris, 1847,
2 vol. in-12; Lacordaire, Notice historique sur les ma-
nutactures impériales de tapisseries des Gobelins et de
tapis de la Savonnerie, Paris, 1853, in-8^ P— s,
TAPISSIÈRE , voiture suspendue et couverte, mais ou-
verte sur les côtés, et dont les tapissiers se servent pour
ti-ansporter des meubles. On l'emploie aussi pour les dé-
ménagements et pour le transport de certaines mar-
chandises.
TAPISSIERS, ancienne corporation qui existait déjà
au temps de Philippe-Auguste, et qui avait plusieurs pri-
vilèges de concession royale, entre autres l'exemption du
guet. Les tapissiers étaient aussi appelés Sarrazinois
(F. Tapis); ils ne travaillaient pas en hante lisse. Une
autre corporation, celle des hauts lissiers, se réuait à
eux en 1302. En 1625, il y eut encore fusion avec les
courtepointiers. Le patron de la corporation était Saint
Julien des Ménétriers.
TAPON, gros tambour en usage dans llnde. On le
frappe avec le dos de la main.
TAQUE, plaque de fer fondu, qui forme le contre*
cœur d'une cheminée.
TAQUET, morceau de bois taillé qui sert à maintenir
l'encoignure d'un meuble; — piquet qu'on enfonce en
terre pour servir de repère dans les alignements; — cro-
chet en bois auquel les marins amarrent des manoeuvres;
— pièce de bois sur laquelle on frappe pour appeler les
oiseaux dressés à la chasse.
TAQUOIR , morceau de bois tendre, très-uni , et doublé
de bois de chêne, sur lequel les imprimeurs en typogra-
phie frappent avec un marteau, pour égaliser les carac-
tères dont la forme est composée.
TARAHUMARA (Langue). 7. Mexique (Langues du).
TARANTASSE, grande et lourde voiture de voyage,
dont la caisse repose sur deux longues traverses de bois
flexibles, supportées par des essieux. On s'en sert dans
le Midi de la Russie.
TARASQUË (Langue). V, Mexique (Langues du).
TARBOUCH, bonnet de couleur rouge terne, en drap,
avec un long gland bleu, et qui commence à remplacer
le turban chez les Musulmans. Cette espèce de révolution
a été ordonnée par le sultan Mahmoud II.
TARE (de l'arabe tarah, rejeter), en termes de Com-
merce, désigne tout à la fois : \^ tout défaut ou déchet sur
le poids, la ({uantité et la qualité des marchandises; ^^ le
poids des colis ; 3" la déduction faite, pour le poids de l'enve-
loppe, sur les marchandises qui n'ont pu être posées à
nu lors de la vente.
TARE DE caisse , perte qui a lieu communément sur les
sacs d'argent, soit à cause des fausses espèces, soit à
cause des erreurs auxquelles on est exposé en payant ou
en recevant.
TARE D'ESPfeCES, diminution qu'on supporte dans le
compte de l'argent lorsqu'on change un billet ou une
monnaie, et qui est le droit du changeur.
TARENTELLE, danse d'un caractère gai, originaire
du pays de Tarente. L'air en est à 6/8 ; il est court, mais
se répète plusieurs fois. On l'accompagne d'ordinaire avec
le calascione {V. ce mot) et le tambour de basque.
TARGE, bouclier. V. notre Dictionnaire de Biographt
et d* Histoire.
TARGETTE , platine de métal qui porte un verrou plat,
et qu'on met aux portes, aux guichets, aux croisées, à la
hauteur de la main, pour servir à les fermer.
TARGUM. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Dîo^
graphie et d'Histoire.
TARI , monnaie de Sicile au moyen Age. Sur la fin dn
XII* siècle, on faisait 24 tari avec une once d'or; le tari
TAT
1701
TAX
nJaît alors 2 fr. 63 e. d'aujourd'hai. Plosi taid , on en
tira 29 ift d*ane once.
TARIF (d'un mot arabe aigniftaut série) , tableau qui
indique les prix de certaines denrées, de certains services,
et le taoz de certains droits. Il y a des tarifs pour la na-
vigation, le passa^ ou le parcours des rivières, pour
Texportation ou Timportation des denrées et marchan-
dises, pour les ameodes et les AtbIs judiciaires , pour les
actes délivrés par les Administrations, pour les émolu-
ments des officiers ministériels, etc. Le premier tarif
général des Douanes en France fut établi par Colbert en
1604; d*autres tarifs ont été ensuite promulgués en 1791,
en 1816, en 1835, en 1853, en 1861 {V. Douanes, Librb
ÉcHATiGB, I^OTEGTEDB — Systèmo). Les Cours souveraines
fixaient autrefois les tarifs dans toute la Juridiction de
leur ressort : un tarif général pour les tribunaux de tous
les degrés fut établi par la loi du 6 messidor an vi (24
Juin 1798); un nouveau tarif des frais et dépens a été
promulgué en matière civile par décret du 16 févr. 1807,
en matière criminelle et de police par décret du 18 Juin
1811.
TAROTS , grandes cartes à Jouer, ainsi appelées, dit-on,
de la ville de Taro, en Lombardie, où on les avait in-
ventées. V. Cartes a joder.
TARRAGONE (Cathédrale de). Le portail de cette église,
auquel on arrive par un large escalier, se compose d*une
vaste arcade à voussure ogivale, dont les pieds-droits
sont garnis de statues et flanqués de deux épais contre-
forts. En arrière d'un fronton obtus et uni qui surmonte
cette arcade s'ouvre une rose à vitraux, et, au-dessus,
la façade se termine par un autre fronton mutilé et
découronné. Un dôme octogone, lourd et peu gracieux,
s*élève au milieu des transepts. La nef, très-vaste, est
divisée en trois parties que séparent cinq arcs, soutenus
par des piliers massifs ornés de colonnes corinthiennes.
Le style de la voûte est ogival. Le maltre-autel est dé-
coré de bas -reliefs en marbre représentant diverses
scènes de la vie de S** Thècle. Des mausolées ont été
élevés dans deux chapelles à deux archevêques de Tar-
ragone. A Téglise est attenant un grand cloître carré ,
dont la cour est décorée de colonnes doriques en marbre,
avec chapiteaux sculptés avec beaucoup d'art et de goût.
TARTANE, petit b&timent léger de la Méditerranée,
portant une^nde voile à antenne et un hunier au grand
màt, une autre voile à antenne au màt de tapecu, et deux
focs sur le beaupré. On remploie pour la pêche et le
cabotage.
TARTANE, fllot de pècho à mauche, dont on se sert sur
les côtes du Languedoc.
TARTARELLE ou TARTAVELLE. V. Ck^blle.
TARTARES (Langues), dénomination appliquée quel-
quefois & toutes les langues Ouralo-AUaicines ( K. ce mot).,
mais que Ton réserve généralement & un groupe de cette
famille, lequel comprend le mongol , le bouriate, le ^-
motick, le mandchou^ le turc ( F. ces mots)^ etc. V. Abel
Rémusat, Essai sur les langues tartares, Paris, 1820,
in-4^; W. Schott, Essai sur les langues tartares, on
allem., Berlin, 1836; Roehrig, Éclaircissements sur quel-
ques particularités des langues tartares et finnoises,
Paris, 1845, in-8^
TASSE ou TASSETTE, vieux mot signifiant bourse.
Un tassetier était un faiseur de bourses. L'étymologie
reporte ce mot au te^che des Allemands, au ttuca des Ita-
liens et de la basse latinité, et au mot tasque usité en
France pendant le xvi* siècle.
TASSEL, mot qui désignait autrefois un mors de
chape, et tout ornement de forme carrée placé sur la
poitrine.
TASSETTES, pièces de métal disposées sur quatre
rangs et qui rattachaient autrefois la cuirasse aux cuis-
sards.
TASTO SOLO , c-à-d. en italien à Umche setde, mots
qu^on écrivait autrefois dans la partie de Torganiste pour
lui indiquer qu'il ne devait pas accompagner la basse
par les accords de la main droite.
TATOUAGE , action de t€itouer, c-à-d. d'imprimer des
dessins indélébiles sur la peau du corps. On pique Jus-
qu'au vif dans la peau avec un instrument aigu; on cou-
vre immédiatement la partie dessinée de poudre à canon
très-fline, et on y met le feu; l'explosion fait pénétrer
dans la peau des pirticules de poudre, et le dessin se
montre de couleur bleue. En mélangeant à la poudre des
substances colorées, on obtient des dessins Jaunes,
rouges, noirs, etc. Tel est le procédé de tatouage usité
en Europe chez un certain nombre de matelots , de sol-
dats et d'ouvriers. Les peuples de l'Océanic et quelques
tribus de l'Inde se tatouent en versant des substances
colorées dans les incisions qu'ils se sont faites; c'est un
moyen de distinguer les races et les rangs , de constater
des alliances contractées , de rappeler le souvenir d'évé-
nements mémorables. Il est question du tatouage dès
l'Antiquité, chez quelques peuplades riveraines de la mer
Noire, les Gelons par exemple, et chez les Pietés de la
Grande-Bretagne.
TATTERSALL. F. au Supplément,
TAU , instrument en forme de tau grec ( T, x ;, que plu-
sieurs divinités égyptiennes portent à la main. V. Croix.
TAUD ou TAU DE, tente goudronnée qu'on établit sur
les embarcations et entre les deux passavants des b&ti-
ments, ou dont on couvre les marchandises sur les na-
vires et dans les ports.
TAUPINS. V. Fbancs-Taupins , dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
TAUREAU, en termes de Marine, navire de charge, en
usage dans la Manche. Il est très-enflé de l'avant, porte
deux mâts (le plus grand est à l'avant) et deux voiles.
TAUREAUX (Combats de). Ces divertissements étaient
en usage chez les anciens Grecs , notamment en Thes-
salie ; selon Pline, ils furent introduits par César à Rome,
où les empereurs, puis les papes, les interdirent. On n'en
voit plus guère aujourd'hui qu'en Espagne , où on y as-
siste avec une véritable passion : il existe une école de
tauromachie k Séville, et la plupart des villes possèdent
des cirques destinés aux luttes de taureaux contre des
chevaux et des hommes. Celui de Madrid, appelé Coliseo
de los toreros, contient plus de 10,000 spectateurs. Les
hommes qui combattent contre les taureaux se nomment
toréadors {k cheval) et toreros (à pied}; on distingue
parmi eux les picadors, les matadors ( K. ces mots)^ et
tes chulos ou banderilleros, armés de petites flèches à
banderoles de toutes couleurs.
' TAUROBOLE. V. notre Dict. de Biogr. et d'Histoire.
TAUTOGRAMMES (du grec tauto, le même, etgramma,
lettre), nom donné à des vers ou à des poèmes dont tous
les mots commencent par la môme lettre. F. Allitération.
TAUTOLOGIE ( du grec légô. Je dis, et tauto pour to
auto, la même chose). C'est proprement la répétition
d'un mot ou d'une locution, mais presque toujours la
répétition d'une seule idée sous deux ou plusieurs formes.
C'est d'ordinaire un défaut qui donne de la lenteur au
style et le refroidit Voiture a fait cette tautologie : « Cicé-
ron avait étendu les bornes et les limites de l'éloquence. »
Il y a en grec un genre de tautologie très-nsité, qui con-
siste à exprimer une idée d'abord sous forme affirmative,
puis avec une double négation, ou réciproquement. Ren-
due en français avec une exactitude matérielle, cette
manière de s'exprimer est étrange; mais on en rend
l'esprit à l'aide de l'expression bien loin de, ou autre sem-
blable. Parfois néanmoins elle constitue un défaut réel.
Il y a enfin une espèce de tautologie, fréquemment em-
ployée par les poètes et les orateurs anciens et modernes,
et qui consiste à redoubler l'expression d'une idée pour
en faire ressortir la valeur et frapper plus fortement l'at-
tention. P.
TAVAIOLE (de ^italien tavaglia, nappe), linge très-
fin, garni de dentelles, dont on se sert à l'église pour
présenter un enfant au baptême, pour couvrir les bran-
cards sur lesquels est placé le pain bénit, pour porter en
procession les statues de la Vierge ou des Saints, etc.
TAVERNE ( du latin tabema ) , cabaret , auberge de bas
étage.
TAXE (du grec taxis, fait de tasséin, régler), fixation
faite par le Juge des salaires, émoluments ou frais dus
aux officiers ministériels, aux experts, aux témoins, etc.
Les parties condamnées aux dépens peuvent toujours,
avant de les payer, en exiger la taxe, et celle-ci se fait
d'après un tarif établi par l'autorité.
taxe, prix fixé par l'autorité pour cortaines denrées
(F. PADt, Bouchers), ou pour certains services, comme
les chevaux de poste.
TAXE DES lettres transportées par la poste. La taxe des
lettres, en France, fut pendant longtemps progressive
d'après la distance parcourue; ce mode fut établi en
1673, et réglé de nouveau par la loi du 15 mars 1827. Le
poids normal d'une lettre était de 7 1/2 grammes, et la
taxe de 2 décimes par 40 kilomèt. (F. Poste, dans, notre
Dictionnaire de Biographie et d' Histoire), En 1848, l'As-
semblée nationale, par décret du 24 août, établit une
taxe unique de 20 centimes pour toute lettre afi'ranchie,
et 30 centimes pour les autrâs, dans toute la France, ki
Corse et l'Algérie, à partir du 1* Janvier 1840. En 1869,
un décret impérial éleva le poids normal de la lettre a
TAX
1702
TEE
f 0 grammes, sans changer la taxe. Voici, dans les ta-
bleaux suivants, le tarif des lettres de tout poids, affran-
cliies et non affranchies :
I. D» direction à direction.
roiDfl.
Lrmtn
«fl^anchies.
non
tt. 0.
fr. 0.
» 80
1 80
» 40
• «0
* 80
1 80
1 60
8 40
a 40
8 GO
Jaaqa'à 10 grammes incIiisiTement.
De 10 à 80 gr
De 80 à 100 gr
De 100 à 200 gr
De iOO à 300 gr.
et ainsi de suite, en ijoutant, par chaque iOO gr. ou
fraction de 100 gr. excédant, 80 c. en cas d'affrancliisser
ment et 1 fr. 20 c. en cas de non-aiïranchissement.
II. Dans Vétendue d^une même direction.
POIDS.
Jusqu'à 15 grammes exclanvement.
Do 15 à 80 gr
De 30 à ÛO gr
De 60 à 90 gr
De 90 à 120 gr
LniRKS
aflhinehlM
ou non.
fr. a.
10
80
30
40
50
»
et ainsi de suite, en ajoutant 10 c. par chaque 30 gr. ou
fraction de 30 gr. excédant,
ni. D'une ville pour la ville même
(Paris excepté)
POIDS.
LrtTRBS •
alTranchlM
ou non.
lasqu'à 7 gr. 1/8 exclu^lTement. . . .
De 7 gr. 1/2 à 15 gr
De 15 i 80 jrr
fr. 0.
• 10
• 80
• 80
• 40
M 50
De 80 à 60 gr
De 60 à 90 ta
et ainsi de suite, en ajoutant iO c. par chaque 30 gr. ou
fraction de 30 gr. excédant.
lY. Intérieur de Parti
POIDS.
LBTTRKa
•irraaehiM.
LKTTRKS
oiTranehies
ou non.
ff. c.
» 10
» 20
■ 80
» 40
M 50
fr. 0.
> 15
* 25
• 85
• 45
* 55
Jusqu'à 15 gr. exclusivement.
De 15 à 30 gr
De HO à 60 gr
De 60 à 90 gr .'
De 90 à 180 gr
et ainsi de suite, en ajoutant 10 c par chaque 30 gr. ou
fraction de 30 gr. pour les lettres affranchies ou non
affranchies. F. le Supplément,
Les lotlrcs de l'intérieur de la France pour les soldats
à Tétranger et sous le drapeau, pour les marins sous le
pavillon dans les colonies, et réciproquement les lettres
qu'ils envoient, ne supportent que la taxe de direction
à direction, lorsqu'elles sont transportées exclusivement
par des services français : elles doivent être déposées
dans les bureaux de postes militaires, non dans les
bur^inx civils.
TAXE DES DéPêCHBS TÉLÉORAPHIQUES. LoS tSXOS appH*
cables k la correspondance télégraphique privée circu-
lant à rintérieur de la France furent fixées au début,
depis le 1" janvier 1862, par application de la loi du
3 juillet 1801. Pour une dépèche de un à vingt mots,
snresse et signature comprises : 1° entre doux bureaux
d'une même ville on d'un même département, 1 fr. ;
2^ entre deux bureaux de département* «liff^rents, 2 fr.
(par exception les dépèches à destination de la Corse
restent provisoirement soumises à une surtaxe de 1 fr. 50c
Un avis nouveau fit connaître Tépoque où ce sopplc-
ment de prix cessa d'être perçu) ; 3" entre un bureau
de France et un bureau : !• de l'Algérie, 8 fr. ; 2* de
Tunisie, 10 fr. Pour chaque dizaine de mots ou fraction
dedixaine au-dessus de vingt mots, les taxes précédeo les
furent payées le double. L'expéditeur peut comprendre
dans sa dépèche la demande de colla tionoement ou d ac-
cusé de réception par le bureau de destination. La taxe
do collationnement est é^ale à celle de la dépèche. La
taxe de l'accusé de réception avec mention de rfaeure de
la remise à domicile est égale à celle d'une dépèche sim-
ple pour le même parcours télégraphique. Les dépèches
transmises pendant la nuit ne sont soumises à aucune
surtaxe; mais il ne peut être échangé de dépêches de
nuit qu'entre deux bureaux ayant un service de nuit per-
manent. Ces bureaux sont Bordeaux, Boulogne, Calais,
Chambérj, Dijon, Lille, Lyon, Marseille, Montpellier,
Nancy, Narbonno, Nice, Paris, rue de Grenelle, 103, et
place de la Bourse, Toulouse, Tours. V, le Supplément,
TAXB DBS PADVEBS. \ V. notre Dicttonnoire de Biogra»
TAXIARQUE. | phie et d'Histoire,
TAXOLOGIE ou TAXONOMIE (du grec taxis, ordre,
arrangement, et de logos, discours, ou nomos, loi),
théorie des classifications.
TAYSIER (de tay, boue, fumier), vieux mot qui pa-
raît avoir signifié un décrottoir.
TCHÈQUE (Langue). V. Bohême.
TCHÉRÉMISSE (Idiome) , idiome finnois parlé par les
Tchérémisses des bords du Volga. Il a deux déclinaisons
avec 0 cas, et une déclinaison spéciale pour les pronoms.
Le comparatif se forme par Taddition de la particule raJ»
au positif, et le superlatif en lui préposant la particule
pesch, La conjugaison a 3 temps, le présent, l'imparfait
et le plus-que-parfait (on exprime le futur en ajoutant
un adverbe au pi-ésent); elle a 4 modes, l'infinitif « le
passif, le neutre, et le causal, ayant chacun une conju-
gaison différente lorsque le sens est négatif. Les préposi-
tions sont ordinairement ajoutées à la fin du mot qu'elles
régissent. V, Wiedemann , Essai sur la Grammaire de
la langue tchérémisse, en allem., Revel, 1847; le même.
Les Tchérémisses et leur langage, dans les Archives d'Er-
man, 1839 ; Castrén, Elementa grammatices tcheremissœ,
Kuoplo, 1845, {n-8».
TCHERKCSSË (Langue). V, CiRCASsnomE.
TCHIBYZGA, instrument de musique des Tartarcs.
C'est une flûte, ordinairement de roseau, quelquefois do
bois, longue d'un demi-mètre ou un peu plus, avec trois
ou quatre trous à l'extrémité. Elle a des sons désagréables.
TCIIICKIRNÉ, gabarre de TÉtat turc. Ce b&timent n'a
qu'un màt à pible, au centre, et un beaupré. Il grée une
voile à baliston , une grande voile, un hunier, un perro-
quet , une trinquette, et un foc.
irjlOUDES ( Langues). V. Finnoises.
TCHOUTCHI (Idiome), idiome parlé par les Tchout-
chis, dans le Kamtchatka et sur la côte d'Amérique qui
lui fait face. On le rattache aux idiomes eskimaux.
TCHOUVACHE (Idiome), idiome de la famille turque,
parlé par les Tchou vaches de la Russie d'Europe. Il con-
tient plus d'un tiers de mots d'origine finnoise. Les sub-
stantifs, les pronoms, les noms de nombre, se déclinent,
mais non pas les adjectifs. On forme le pluriel des sub-
stantifs en ajoutant zam ou sam au nominatif singulier
et en le déclinant ainsi. Les prépositions se placent après
leur régime. La conjugaison a 3 temps à l'indicatif; les
autres modes n'ont qu'un temps. Il n'y a pas de passif.
TECHNIQUES (Mots), termes spéciaux dont on se sert
pour indiquer les objets d'une science, les instruments
et les procédés d'un art (en grec tekhnè, art).
TECHNOLOGIE (du grec tekhnè, art, et logos, dis-
cours), mot qui a signifié d'abord la science dos termi^s
techniques, c-à-d. employés dans les arts industriels, et
qu'on a transporté à la connaissance de ces arts meniez.
TECTORIUM OPUS, sorte de mortier des Anciens, fait
avec de la chaux et du sable, auquel on mêlait quelque-
fois un peu de marbre pulvérisé. On en étendait succf's-
si vement trois couches sur les murailles des appartements;
il acquérait une grande solidité, ne s'écaillait en aucune
façon, et présentait une surface polie, qu'on recouvrait
presque toujours do peintures. Les ruines de Pompéi et
d'Herculanum ont fourni de précieux débris de ce genre
d'enduit.
TE DEUM. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio*
graphie et d'Histoire,
TEETOTALLER, nom qu'on donne, en Angleterre et
TEL
1703
TEL
aux ÊCato-UniB de TAinérique du Nord, aux membres des-
Sociétés de tempérance. Le mot, peut-être un peu iro-
nique, signifie partisan de Vabstinence totale,
TEINTE, en termes de Peinture, s'entend de diverses
nuances d'une même couleur, indépendamment des effets
et des combinaisons du clair-obscur.
TEiTfTB (Dbhi-). V. Demi-teinte.
TEINTER, en termes de Peinture, colorier d'une cou-
leur plate, plus du moins foncée, comme on fait pour un
plan d'architecture dont certaines parties sont teintées
pour indiquer les diverses natures oe travaux.
TEINTURIERS, ancienne corporation qui existait déjà
au temps de Louis IX. Elle avait pour patron 8' Maurice.
TF.KINICA (Idiome). V. Fuégibns.
TÉLAMONS. V, Atlantes.
TÉLARQUE, commandant d'un Ulos chez les anciens
Grecs. V. AaMés.
TÉLÊGA, charrette russe, sans aucune espèce d'abri.
TÉLÉGRAPHE (du grec télé, de loin, et i)frap/id J'écris),
appareil destiné à transmettre rapidement au loin des
nouvelles, des avis ou des ordres, par le moyen de si-
gnaux qui répondent à des lettres de l'alphabet, à des
mots ou à des chiffres. La Télégraphie est l'art d'em-
ployer ces signaux. On en fit des essais dans l'Antiquité.
Polybe raconte qu'au temps de Philippe III, roi de Ma-
cédoine, on imagina de diviser en 5 colonnes les 24 lettres
de l'alphabet grec : la vigie qui donnait un signal levait
deux fanaux; la vigie suivante en élevait un pareil
nombre pour répondre qu'elle était prête; la première
vigie levait alors, à sa gauche, un nombre de fanaux in-
diquant le numéro de la colonne où se trouvait la lettre
à désigner, et, k sa droite, un nombre de fanaux indi-
quant le rang de cette lettre dans la colonne. Cette mé-
thode de transmission était longue., mais précise. Sur les
voies romaines étaient élevées des tours de distance en
distance; on en volt encore à Uzôs, à Bellegarde, à Arles,
à Ntmes, à Resançon, etc. Suivant Suétone, Tibère ob-
servait du haut des rochers de Caprée les signaux qui lui
apportaient des nouvelles de Rome et des différentes par-
ties de l'Empire. Un des bas-reliefs de la colonne Trajane
nous offre la représentation d'un poste télégraphique. —
Au moyen ftge, l'art de la télégraphie fut néglijsé, et il faut
regarder comme de simples et imparfaits signaux, non
comme des signes télégraphiques, les feux, les drapeaux,
les coups de canon, employés à la transmission d'avis dé-
terminés. Au xvi« siècle. Porta, physicien de Naples, pro-
posa d'employer, pour communiquer à de grandes dis-
tances, quatre signes qui, combines entre eux, pourraient
tenir lieu des lettres de l'alphabet : le l*', montra une fois,
aurait représenté A, deux fois B, trois fois C, et ainsi de
suite; le 2% montré une fois, aurait correspondu à H, deux
fois à I , etc. Dans les dernières années du xvu* siècle,
l'Anglais Hooke, partant de cette idée que, pour écrire de
loin à l'aide de la télégraphie aérienne, il faut voir de loin,
imagina un appareil mettant en mouvement des caractères,
des mots même, d'une grosseur suffisante pour être aperçus
à une certaine distance : son système ne fut point appli-
2ué. Peu d'années après, vers 1690, Amontons proposa
'employer des lunettes d'approche ou longues-vuesjpour
l'observation de signaux transmis par des postes nxes ;
mais la tentative n'eut qu'un commencement d'exécution.
Dans la seconde moitié du xvui* siècle, de nouveaux sys-
tèmes de télégraphie furent proposés en France par Lin-
guet, en Allemagne par Hoffmann et par Bergstrasser.
Enfin, les frères Ghappe, aidés de l'horloger-mécanicicn
Bréguet, imaginèrent, en 1792, le système que la Con-
vention nationale adopta presque aussitôt, et qui a été
appliqué Jusqu'à nos Jours. Leur appareil consistait en
une grande branche ou régulateur, mobile sur un axe,
et dont les ailes on petites branches, indépendantes l'une
de l'autre, pouvaient être mises en mouvement à l'aide
de pédales, de cordes et de poulies. Le régulateur était
susceptible de 4 positions : verticale, horizontale, obliciue
de droite à gauche, oblique de çauche à droite ; les ailes
pouvaient former des angles droits, aigus ou obtus. Leurs
mouvements, isolés ou combinés, exprimaient les lettres
de l'alphabet^ les syllabes, et un certain nombre d'idées
générales. La distance entre les stations télégraphiques
était, en moyenne, de 12 kilom. On put recevoir à Paris
des nouvelles de Strasbourg (480 lui.) en 6 minutes et
demie, par 4i télégraphes; de Toulon (S40 kil.), en 20 mi-
nutes, par 100 télégraphes; de Brest (600 kil.), en 8 mi-
nutes, par 54 télésiaphes. L'idée de pourvoir les navires
d'un appareil télégraphique appartient au vice -amiral
Rosily,en 1806. Le brouillard et l'obscurité interrompent
ta tnnsmission des signaux de la télégraphie aérienne :
plusieurs systèmes furout proposés, notamment psf
MM. Vilalongue et Gonon, pour arriver à employer le
télégraphe pendant la nuit; mais les essais de télégraphie
nocturne furent infructueux, à l'exception de ceux de
M. Château, qui, vers 1845, fit fonctionner la ligne de
Cronsiadt à Varsovie.
Déjà l'on était entré alors dans une voie nouvelle, celle
de la télégraphie électrique, Cavendish et Franklin con-
çurent la possibilité d'emplover l'électricité à la transmis-
sion des dépêches. Dès l'année 1774, un Genevois d'origine
française, Lesage, conçut le projet d'appliquer l'électricité
à la télégraphie : on devait se servir de la machine élec-
trique et de 24 électromètres, à chacun desquels était
affecté un fil particulier; en faisant passer la décharge de
la machine à tfavers tel ou tel fil, on eût produit à l'autre
extrémité l'effet représentatif de telle ou telle lettre de l'al-
phabet. En 1787, le physicien Lomond construisit à Paris
une petite machine à signaux, fondée sur les attractions
et les répulsions des corps électrisés, et l'ingénieur *Bet-
tancourt se servit de bouteilles de Leyde, dont il faisait
passer la décharge dans des fils allant de Madrid à Aran-
juez. En 1704, un Allemand, Reiser, proposa d'éclairer à
distance, au moyen d'une décharge élfîctnque, les lettres
de l'alpbi^t découpées sur des carreaux de verre recou-
verts de bandes d'étain; l'étincelle électrique devait se
transmettre par 24 fils métalliques isolés correspondant
aux 24 lettres. En 1796, le docteur Franc. Salva reprit en
Espagne les essais de Bettancourt. La découverte de la
pile de Volta ayant donné le moyen de faire agir l'élec-
tricité à travers un espace fort étendu, sans déperdition
sensible, Soemmoring proposa à l'Académie de Munich,
en 1811, un appareil télégraphique ayant pour principe
la décomposition électro-chimique de l'eau : cet appareil .
se fût composé d'une pile et de 35 circuits métalliques,
dont 25 représentant des lettres, et 10 des chiffres;
chacun de ces circuits eût été interrompu dans un vase
plein d'eau distillée, qui, en se décomposant dès que le
courant eût été étid)li, aurait indiq[ué une lettre ou un
chiffre quelconque. Cette idée était d'une application
diflScile. La découverte de l'électro-magnétisme fit enfin
faire un pas décisif à la question : GErsted ayant, en
1820, reconnu qu'un courant électrique fait dévier l'ai-
guille aimantée de sa position normale. Ampère pensa
qu'on pouvait appliauer ce fait à la télégraphie. Après
que Scnwei^er eut découvert le multiplicateur ou gcuva--
nomètre, qm permet de faire produire aux forces électro-
magnétiques des effets sensioles. Schilling commença à
S^-Pétersbourg, en 1833, des expériences que poursui-
virent Cooke et Wheatstone en Angleterre, Morse en
Amérique, Steinheil en Allemagne, et <^ui amenèrent
presque tout à coup la télégraphie électnque à sa per-
fection. L'appareil adopté aujourd'hui en Angleterre et en
France est celui que Wheatstone inventa en 1841. La
première ligne de télégraphie électrique aux États-Unis
fut établie, en 1844, entre Washington et Baltimore,
d'après le système de Morse. La première en France fut
celle de Paris à Rouen, en 1845. Le premier télégraphe
sous-marin, celui qui relie l'Angleterre à la France par
Douvres et Calais, date de 1850.
Les avantages de la télégraphie électrique, réservés
d'abord à l'État, ont été mis à la disposition des particu-
liers en France depuis 1851. Le service télégraphique
comprend 10 Inspecteurs divisionnaires, 1 directeur gé-
néral, 3 inspecteurs généraux, 65 inspecteurs départe-
mentaux, 14 sous-inspecteurs, 93 directeurs de trans»
mission, plus les chefs de stations et les autres em-
ployés inférieurs. Leurs traitements sont fixés ainsi
qu'il suit:
Diractenr général
Inspecteurs généraux
Inspecteats
Sous-Inspecteurs
Directeurs de transmission..
Chefs de station
Elèves
Commis principaux
Traducteurs
Oardfs-magasins
Employés
Employés surnuméraires . . .
Chefs surveillants
Surveillants
Facteuxf
CLiSSI
unique.
85,000
10,000
•
4,000
»
1,800
8,000
*
S,000
1,400
»
»
I'«.
f
«
8,000
*
3,500
8,500
*
1
3,000
*
1,800
*
«
1,800
1,000
8».
1
»
7,000
•
3,000
2,000
»
8,500
1
1,000
»•*
1,100
900
3«.
*
1
6,000
*
*
■
8,000
*
Moo
*
»
1,000
H 0
4«.
5,000
M
»
>
f
*
»
TEL
1704
TEL
TÉLÉMAQUE (Les AvENTimBS db), poSmo en prose ou
roman poétique composé par Fénelon pour l'éducation du
duc de Bourgogne, son élève. Les voyages de Télémaque,
à la recherche d'Ulysse son père, que l'on ne voyait pas
revenir du siège de Troie, font le sujet du livre. Télé-
maque, étant très-Jeune, part d'Ithaque avec Mentor, le
plus fidèle ami d'Ulysse, et auquel ce prince, en allant au
siège de Troie, avait confié son fils et sa maison. Mais la
déesse du courage conduit par l'intelligence, Minerve,
qui, k ce titre, protégeait les héros, veut, par une fa-
veur spéciale, accompagner elle-même le fils d'Ulysse,
afin de l'instruire dans Tart du gouvernement; elle prend
la figure de Mentor, sans que Télémaque en sache rien,
et part avec lui. Après qu'ils ont visité plusieurs pays,
une tempête qui brise leur navire les jette dans l'ile
d'Ogygie, où règne la déesse Calypso. Elle avait connu
Ulysse; elle s'intéresse à Télémaque, lui offre l'hospita-
lité, et lui demande le récit de ses aventures depuis son
départ d'Ithaque. Télémaque lui raconte qu'il a été à
Pylos, à Lacédémone; qu'il a fait naufrage sur la cète de
Sicile; qu'il fut ensuite captif en Egypte; que, rendu k
la liberté, il visita Tyr, l'île de Chypre, et la Crète, où il
prit part à divers jeux et à diverses épreuves pour décider
de l'élection d'un roi. La couronne lui fut proposée : mais
il la refusa, préférant sa patrie, et se rembarqua pour
rentrer à Itliaque. Alors une horrible tempête, suscitée
par Neptune, à la prière de Vénus, le jeta dans l'ile de
Calypso. Cependant la déesse a conçu une vive passion
pour Télémaque, qui, de son côté, s'est épris d'Eucharis,
une des nymphes de Calypso. Mentor, afin de dérober le
fils d'Ulysse au danger, construit un vaisseau pour quitter
l'ile; mais les nymphes l'incendient, excitées par Cupi-
don. A la vue des flammes, Mentor précipite Télémaque
à la mer et s'y jette avec lui, pour gagner à la nage un
navire phénicien en vue de l'ile, et où ils sont recueillis.
Adoam, qui le commandait, et qu'ils avaient connu k
Tyr, leur raconte la mort de Pygmalion, roi de cette ville,
et d'Astarbé son épouse. Adoam naviguait vers Ithaque,
lorsque Vénus, toujours irritée, demande à Jupiter la
perte de Télémaque; mais les destins s'y opposent : alors
elle obtient de Neptune qu'une divinité trompeuse en-
chante les sens du pilote Acamas, et, comme il croyait
entrer à Ithaque, il arrive dans le port de Salente. Ido-
ménée, roi du pays, leur fait l'accueil le plus affectueux.
Mentor arrête une guerre que les Manduriens allaient
faire k son hôte, et la termine par un traité de paix.
Télémaque va soutenir les Manduriens dans une guerre
qu'ils ont avec les Dauniens. Idoménée fait connaître à
Mentor l'état de son royaume, les intrigues de sa cour,
les machinations de son favori Protésilas, qui lui a fait
exiler Philoclès, ami sage et prudent. Mentor lui ouvre
les yeux sur l'injustice de cette conduite : Idoménée rap-
pelle Philoclès, et exile Protésilas. Cependant Télémaque
gagne l'affection des alliés, celle même de Philoctète, qui
lui raconte ses aventures, et, par sa valeur, donne la vic-
toire aux Manduriens. Pendant son séjour dans leur
camp, averti en songe que son père Ulysse n'est plus sur
la terre, il descend aux Enfers pour aller Vy chercher;
là il rencontre Arcésius, son bisaïeul, qui lui assure
(||u'Ulysse est vivant. Il revient au camp. Une bataille est
livrée, dans laquelle Télémaque tue Adraste, roi des Dau-
niens ; il lui fait donner Polydamas pour successeur, et
retourne à Salente, où il admire la prospérité que Mentor
y a établie. Il s'éprend d*amoor pour Antiope, fille d'Ido-
ménée; mais il faut repartir pour Ithaque. Surpris par
un calme en mer, nos héros descendent dans une Ile dé-
serte; Mentor y reprend la figure de Minerve, aux yeux
mêmes de Télémaque : la déesse lui donne ses derniers
conseils, puis disparaît dans un nuage d'or et d'azur.
Télémaque se h&te de se rembarquer, et arrive à Ithaque,
où il reconnaît son père chez le fidèle Eumée.
Le Télémaque est une suite de VOdyssée; aussi tout y
est emprunté aux Grecs. Fénelon a pris pour modèles :
Homère dans ses deux poèmes ; Xénophon, dans sa Cy-
ropédie; Platon, dans son Criton et ses traités de la
Politiqw, de la Républiqtie, et des Lois; enfin, il doit à
Sophocle l'épisode tout entier de Philoctète. Il a fait de
tous ces emprunts, à la manière des grands poètes, sa
propre substance ; il en a tiré un ouvrage vraiment ori-
ginal. Néanmoins, son livre, sauf les principes de^morale
générale, ne pouvait être bien utile pour le prince auquel
il le destinait; cette éducation à la grecque, ces disser-
tations philosophiques sur la paix et la guerre, ces pré-
ceptes utopiques d'administration, sont sans application
dans nos Etats modernes; en les lisant, on ne peut s'em-
jpêcher de se rappeler les paroles de Louis XIV sur le bon
archevêque, que c'était le plus bel-esprit chimérique ds
Fnnce.
Fénelon n'avait point destiné son Téléfnaqtêek la publi-
cité ; il devait l'offrir au duc de Bourgogne, à l'époque oà
ce prince se marierait. Mais ayant dû q^itte^ son élève
deux ans auparavant, en 1695, pour prendre possession de
l'archevêché de Cambrai, il conserva son ouvrage. Un do-
mestique, chargé d'en transcrire le manuscrit . en 1698,
abusa de sa confiance, et prit une copie subreptice, qui
fut imprimée à Paris, en 1699, sous le titre de : Suite du
quatrième livre de VOdyssée, ou les Aventures de Télé-
maque, fUs d'Ulysse. La cour y voulut voir des allusions
satiriques à Louis XIV et à ses mim'stres. Le livre fut saisi
et défendu avant même d'être entièrement imprimé. Les
libraires de Hollande s'en emparèrent, et le Télémaque
circula dans toute l'Europe, avec des clefs imaginées pai
la malignité : on dit qu'il fallait y voir Louis XIV dans
les traits dont étaient peints Idoménée, Adraste, P}'g-
nudion ; Louvois dans Protésilas ; M"* de Maintenon dans
Astarbé. Fénelon repoussa avec force ces interprétations
dans une lettre écrite en 1710 au P. Letellier, confesseur
du roi. En effet, les seules allusions manifestes ont rap-
port au duc de Bourgogne, que Fénelon voulait éclairer
sur ses défauts naturels, et instruire des devoirs et des
périls de la royauté ; quant au reste, il avait, à la ma-
nière des grands moralistes, peint les mœurs, les carac-
tères généraux, en s'inspirant des modèles qu'il avait
autour de lui, sans néanmoins en faire les portraits.
Ce. mélange de faits contemporains, peints sous les
couleurs d'une civilisation antiaue, avec un idéal fabu-
leux, jette un peu de froideur aans le Télémaque, bien
que le plan en soit heureux, le récit rapide, et le style
fdein de cette verve tempérée, mais entraînante, qui est
e propre du talent de Fénelon. Trop souvent, au mo-
ment où l'imagination de l'auteur nous emporte dans le
monde d'Homère, un anachronisme de politique et de
morale nous ramène involontairement en plein siècle de
Louis XIV. C'était un des écueils et, en même temps,
une des nécessités de ce sujet allégorique. D'une autre
part, dans cette fable païenne, et malgré l'appareil my-
thologique, les idées sont celles du christianisme. Les
dieux de l'Olympe ne figurent là j[ue pour l'embellisse-
ment de la fable. Considéré dans son but, l'éducation
morale d'un roi futur, le Télémaque est admirable; par
le choix du sujet, Fénelon mettait sans cesse son élève
en présence de lui-même ; par la création du person-
nage de Mentor, il l'instruisait à rapporter tout le mérite
de ses actions à la protection divine.
Le Télémaque a éUS publié le plus souvent en 24 livres;
mais on sait maintenant que Fénelon l'avait lui-même
partagé en 18 livres, ce qui est effectivement la division
la plus naturelle, parce qu'ainsi chaque livre comprend
une série complète d'aventures. Ce bel ouvrage a été tra-
duit dans toutes les lan{:^es de l'Europe; des professeurs
( Heurtant, de Caen, 1729 ; Destoùches, 1764 ; le P. Viel,
1808 ) ont cru lui mieux donner le caractère de poème en
le tournant en vers latins; tentatives malheureuses, que
la réputation de l'original n*a pu faire vivre. — Les Ci-
tions françaises du Télémaque sont presque innombra-
bles; nous citerons en première ligne, et pour l'exacti-
tude, celles des Sulpiciens, dans les œuvres complètes
de Fénelon, Versailles, 182(^24, 23 vol. in-8°, et de Le-
fèvre, Paris, 1844, grand in-16; et, comme édition plus
littéraire, avec des notes et des appréciations littéraires
et critiques de chaque livre, celle de M. Colincamp, Paris,
1853, in-12. — V. de Bausset, Histoire de Fénelon, t. lU,
liv. IV; Voltaire, Essai sur la poésie épique^ conclusion;
Laharpe, Cours de littérature, 2* partie, ch. m, sea. 2;
Chateaubriand, Génie du christianisme, U* partie, c. 8, et
préface des Martyrs ; Villemain, Discours et Mélanges.
Notice sur Fénelon ; D. Nisard, Histoire de la littérature
française, U III, ch. 13, S 8; Rigault, Histoire de la
querelle des Anciens et des Modernes, 3* partie, chap. m
Becherches bibliographiques sur le Téleinaque, 2* édit..
Paris, 1840, in-8<», très-intéressante brochure de M**'
(l'abbé Caron), directeur au séminaire de Saint^Sulpicc
de Paris. F. B.
TÉLÉOLOGIE (du grec télos, fin, but, et logos, dis-
cours) , traité des causes finales ( V. Causes ninALES). L«
preuves qu'on en déduit en faveur de l'existence de Dieu
sont dites téléologiques,
TÉLÉPHONIE (du grec télé, loin, etphânè, voix, son •,
art de correspondre à de grandes distances par le moyen
des sons. C'est une télégraphie acoustique ou musidle»
Elle a pour inventeur Sudre, qui en eut la premirre
idée dès 1817 ; mais ce fut seulement 10 ans aurèt», qu il
TÉM
1705
TEM
proposa remploi de son système pour la transmission des
ordres dans Tarmée. Il donnait aux sept notes de la mu-
sique et à leurs diverses combinaisons une valeur ana-
logue à celle des signaux du télégraphe. Invité à modifier
sa méthode de façon à n*employer que les notes du clai-
ron d'ordonnance II y réussit en 1829, et, depuis cette
époque, il simplifia encore en réduisant à trois le nombre
des notes nécessaires, sol, ut, sol. Deux signaux succes-
sifs, dont Tun servait d'avertissement, suffisaient pour
transmettre l'un quelconque des ordres inscrits à l'avance
dans un livre de tactique militaire ou navale. Au lieu de
clairons, Sudre faisait aussi usage du tambour, en substi-
tuant à chacune 'des trois notes une batterie particulière.
Le canon môme pouvait être utilisé dans les circonstances
où les clairons et les tambours n'ont pas une portée suf-
fisante. La faculté de changer à volonté la clef des signes
garantissait le secret des dépèches. Enfin Sudre employait
de la même façon trois disques colorés pendant le Jour,
trois fanaux pendant la nuit, trois fusées de couleurs
différentes. Il est mort en 1862, avant <l*avoir vu accepter
sa téléphonie, bien qu'elle eût été l'objet de rapports fa-
vorables. B.
TËLÈTE , chant d'initiation chez les anciens Grecs.
TÉLIAMBE, nom donné par certains grammairiens
modernes aux yers hexamètres héroiaues terminés par
un ïambe (du grec télos, fin, et iamhoSf ïambe). Les
critiques grecs l'appelaient Meiowos ( V. Miurus et Ansis).
Ce nom s'applique également aux vers crétiques et aux
vers bacchicujues terminés par un ïambe, comme ceux-ci
de Plante :
Melius an\nohôc mtJû \ non fUit | dômi (Grétique).
PôtXôra ês\sèf eût car i môdèsiè | sïtûm 'sL
(Bacchiaque) P.
TÉLINGA ou TEL013G0U (Langue), une des langues
dravidiennes ( V, ce mot) de l'Hindoustan , parlée dans
le bassin inférieur du Godavéry et celui de la Kistnah.
C'est de toutes la plus mélangée de sanscrit. Sa gram-
maire et sa syntaxe ressemblent à celles du tamoul et du
karnatique ( K. ces mots). Elle a fourni un certain nombre
de mots au malais et au Javanais. Son alphabet présente
le même nombre de lettres que le dôvanàgari. L'écri-
ture, par ses formes arrondies, a un aspect tout différent
de l'ancien type indien à forme carrée. V. A.-D. Camp-
bell, A Dicttonary of the Teioogoo language^ Madras,
1821, gr- in-4^; Brown, On the language and literature
of Ihe Telugu, Madras, 1840, 2 vol.
TÉMOIGNAGE, TÉMOINS. Le témoignage des hommes
«'entend proprement de la déposition de nos semblables,
qui nous fait connaître des faits passés loin de nous ou
avant nous, par un récit oral ou écrit. Vautorité de ce
témoignage est la valeur qu'on doit lui reconnaître, et qui
varie suivant le nombre et le caractère des témoins, et
suivant la nature des faits. Elle a son fondement dans la
confiance naturelle de l'homme en la véracité de ses sem-
blables. Cette confiance est fondée sur l'induction ; elle est
nécessaire, parce que nos moyens individuels de con-
naître sont limités en puissance et en étendue dans le
temps et dans l'espace. Comme les hommes peuvent se
tromper ou vouloir tromper, il y a certaines conditions,
qui sont en résumé : la présence des témoins au fait, la
capacité relative, la moralité reconnue, l'absence de pas-
sion et d'intérêt, le nombre. Ces conditions sont appli-
cables aux faits contemporains; quant aux faits passés,
le témoignage se transmet ou par la tradition, ou par les
monuments, ou par Vhistoire, et souvent par ces trois
moyens à la fois; les conditions sont données par la cri-
tique historique, qui est l'art de Juger la valeur des
témoignages sur lesquels reposent les écrits du passé.
La certitude qui résulte du témoignage est dite morale,
parce qu'elle est fondée sur les lois qui régissent les
nommes dans leurs rapports entre eux ; elle est dite his"
torique, quand il s'agit du passé.
En Droit, le témoignage prend deux caractères, ce qui
donne lieu à deux sortes de témoins : judiciaires, instru'
mentaires. Les témoms judiciaires déposent d'un fait dont
ils ont connaissance. Pour que leur témoignage soit va-
lable, ils doivent être &gés de 15 ans au moins; cepen-
dant ils peuvent être entendus avant d'avoir 15 ans révo-
lus, si cela est jugé nécessaire. Chaque témoin doit déclarer
ses noms, profession, &ge et demeure, s'il est parent ou
allié d» l'une des parties et à ouel degré, s'il est servi-
teur ou domestique de l'une d'elles; il s'engage par ser-
ment à dire toute la vérité, n doit n'avoir subi aucune
peine afflictive ou infamante. Les juges peuvent se dé-
cider sur la déposition d'un seul témoin. En matière
civile, la preuve par témoins n'est pas toujours admise
(V. Prbcvb). En matière criminelle, on ne reçoit pas les
dépositions : 1° du père, de la mère ou de tout autre as-
cendant de l'accusé; 2° des fils, fille, ou tout autre des-
cendant ; 3° des frères et sœurs ; 4*^ des alliés aux mêmes
degrés; 5** du mari ou de la femme ; ti<^ des dénonciateurs
récompensés pécuniairement par la loi. Si '^'une de ces
personnes a été entendue sans opposition, il n'y a pas
nullité de la procédure. Les témoins peuvent être forcés
de comparaître, sous peine d'amende et par voie de con-
trainte par corps. Une indemnité leur est due pour venir
déposer en justice. Les personnes qu'on a le droit de
reprocher^ c-à-d. dont on peut écarter la déposition,
sont : les parents ou alliés Jusqu'au 6* degré des parties
ou de leurs conjoints, les héritiers présomptifs ou dona-
taires, les serviteurs et domestiques, ceux qui ont bu ou
mangé avec la partie et à ses frais. — En matière crimi-
nelle, le faux témoignage est puni des travaux forcés à
temps; en matière correctionnelle et en matière civile,
de la réclusion ; en matière de police, de la dégradation
civique, d'un an de prison au moins, et de cinq ans au
plus. Chez les Anciens , le faux témoin était condamné à
la peine encourue par l'accusé, en cas de culpabilité. Au
moyen &ge, la confiscation des biens, la langue coupée,
la mutilation du poignet, et le plus souvent la mort,
étaient la punition du faux témoignage.
Les témoins instrumentaires sont ceux qui assistent
l'officier civil dans l'exercice de ses fonctions, pour donner
plus d'authenticité à l'acte qu'il reçoit. Les témoins
produits aux actes de l'état civil ne peuvent être que du
sexe masculin; ils doivent être âgés de 21 ans au moins.
Pour les actes de naissance ou de décès, il faut deux
témoins; pour les actes de mariage, quatre; pour les actes
notariés, deux témoins, citoyens français, sachant signer,
et domiciliés dans l'arrondissement communal où l'acte
est passé. Pour un testament reçu par deux notaires , il
faut quatre témoins, deux s'il est reçu par un notaire ;
les témoins doivent être majeurs et jouir de leurs droits
civils; ils ne peuvent être ni légataires du testateur, ni
ses parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclusive-
ment, ni parents ou alliés des notaires présents! F. Code
Napoléon^ art. 37, 975, 980 ; Code de Procédure, art. 262,
271 ; Code d'Instruction criminelle, art. 71, 155, 189,
269, 317, etc.
Autrefois les témoins dans un duel se battaient sou-
vent entre eux. Us sont poursuivis aujourd'hui comme
complices.
Par métaphore on nomme témoins : dans les travaux
de terrassement, de petites élévations de terre qu'on
laisse pour indiquer le niveau primitif et la hauteur des
terres enlevées; les arbres de lisière, et dans les forêts
ceux qu'il est défendu d'abattre; les feuillets que les re-
lieurs ne rognent pas, pour montrer le soin qu'ils ont
mis à laisser le plus de marge possible. R.
TEMPERA , en termes de Peinture, tout liquide avec
lecpiel l'artiste mélange ses couleurs sèches, afin de pou-
voir les appliquer au moyen d'un pinceau. Dans une ac-
ception plus restreinte, on a appelé Peinture à tempera
ce que nous nommons la Détrempe ( V. ce mot ).
TEMPÉRAMENT , en termes de Musique, manière do
modifier les sons, en accordant les instruments à clavier,
de telle sorte qu'au moyen d'une légère altération dans
la juste proportion des intervalles on puisse employer
les mêmes cordes pour moduler en tous les tons sans
déplaire à l'oreille.
TEMPÉRANCE (Sociétés de), associations dont les
membres prennent l'engagement de ne pas s'adonner aux
boissons spiritueuses, et surtout de s'abstenir, complète-
ment ou dans une certaine mesure, de l'usage de l'eau-
d&-vie. Il en exista quelques-unes dès le xvi* siècle en
Allemagne, notamment i Mayence. Mais elles sont deve-
nues nombreuses de notre temps dans les États-Unis de
l'Amérique du Nord : la première y fut fondée en 1828,
et, deux ans après, on en comptait déjà 1,700. En Angle-
terre, le P. Mathew a été le principal apôtre des Sociétés
de tempérance; il a entrepns des tournées et provoqué
des meetings à cette occasion. Certaines Sociétés prescri-
vent l'abstention absolue des liqueurs spiritueuses, ce
qui est une exagération ; aussi , en 1844, le gouvernement
prussien défendit aux militaires engagés sous le drapeau
de s'affilier aux Sociétés de tempérance 4e cette sorte.
TEMPÉRÉ (Genre ou Style), genre d'éloquence qui
se place entre le simple et le sublime. On l'appelle aussi
orné ou fleuri^ parce qu'il admet tous les ornements ^
toutes les fleurs de la Rhétorique. L'orateur ne parle pai
TEM
1706
TEM
•eulement pour se faire entendre , il veut plaire et tou-
cher ; il ne doit donc pas se contenter d*ètre clair et in-
telligible; il faut qu'il charme Timagination, et il ne peut
y réussir qu'en empruntant son langage. « Le plaisir, dit
Quintilien, aida à la persuasion, et l'auditeur est disposé
à croire vrai ce quUl a trouvé agréable. » L'agrément naît
de la beauté, de la délicatesse, de Téclat de Teipression,
Îui mettent en relief la solidité des pensées et des preuves.
e genre tempéré ne prétend pas k Ténergie ; son carac-
tère est la douceur. Plus riche que le simple, plus humble
que le sublime, ce qui le distingue, c'est Tart de plaire.
11 ae présente avec une certaine gravité, qui n'est pour-
tant ni de la hauteur, ni de la dignité. Il recherche la
phrase qui a du nombre et de l'harmonie; cependant il
évite les grandes périodes. 11 aime l'inversion, parce
qu'elle donne au discours la variété avec l'élégance; mais
il ne la cherche pas Jusqu'à cesser d'être naturel. Il bannit
les termes généraux ; il admet toutes les figures de mots
et quelques figures de pensées. « Il y a un genre d'élo-
quence qui est uniquement pour l'ostentation, et qui n'a
d'autre but que le plaisir de l'auditeur, comme les dis-
cours académiques, les compliments qu'on fait aux
puissances, certains panégyriques et d'autres pièces
semblables, où il est permis de déployer toutes les ri-
chesses de l'art et d'en étaler toute la pompe. Pensées
ingénieuses, expressions frappantes, tours et figures
agréables, métaphores hardies, arrangement nombreux
et périodique; en un mot, tout ce que l'art a de magni-
fique et de plus brillant, l'orateur peut non-eeulement le
montrer, mais même en quelque sorte en faire parade,
pour remplir l'attente d'un auditeur qui n'est venu que
pour entendre un beau discours, et dont il ne peut enle-
ver les suffrages qu'à force d'élégance et de beautés, n
Hais, même &ns ces discours qu'on est convenu d'appe-
ler académiques, et où il semble qu'il y ait plus de place
f^our une élégance recherchée et des ornements travaillés,
1 faut éviter que l'usage des fleurs dégénère en abus. Un
plaisir trop prolongé amène la satiété et le dégoût ; un
éclat continu éblouit et fatigue les yeux; ainsi fait un
discours dont les ornements ne sont pas variés. Le style
tempéré doit être habilement mêlé de style simple; ce-
lui-ci , placé à propos, fait Tofiice des ombres qui donnent
du relief à un tableau. Les ornements que le style tem-
péré reçoit ne doivent pas naître du caprice de l'orateur ;
ils doivent sortir du fond même du sujet pour être mâles,
nobles et sévères. Car Téloquence, même celle qui n'a
d'autre but que de plaire, est ennemie de tout jfard et
de toute afféterie; sa véritable beauté est dans sa force.
Tout ornement qui n'est pas nécessaire au sujet qu'on
traite n'est pas naturel, et,Join d'embellir le discours,
il le dépare et lui 6te de sa vigueur. Il appartient à ce
genre de style dont parle Quintilien , qui se complaît
dans le dérèglement du langage, qui court sans cesse
après de petites pensées froides et puériles, ou qui s'enfle
outre mesure, ou qui s'égare en des lieux communs vides
de sens, ou qui brille de Je ne sais quelles petites fleurs
qui tombent pour peu ^u'on y touche. Cette élégance
recherchée, ce travail mmutieux pour polir et arrondir
des phrases et pour y semer des traits d'esprit, n'a Jamais
séduit les génies sérieux ; ce sont des défauts communs
chez les jeunes gens et dans les écoles , ils ne sont pas
excusables dans un orateur. Le genre tempéré renferme
les discours du genre démonstratif; il sert pour les dis-
cussions longues et soignées, pour les lieux communs
qui n'ont pas besoin de véhémence. H. D.
TEMPLE, en latin templum (du grec twnnert, couper,
séparer), nom donné par les anciens Romains aux ré-
gions du ciel que les Augures formaient fictivement avec
leur lituus ou bâton augurai pour observer les présages,
et à tout lieu qu'une consécration religieuse distinguait
du terrain environnant. Par extension, on l'a appliqué à
tous les édifices consacrés au culte de la divinité, et dont
la construction varia selon les besoins de ce culte et selon
le degré de civilisation des peuples. En France, on ap-
pelle temples les édillces où les Protestants se réunissent
pour pratiquer hiurs cérémonies, et on réserve la déno-
mination d'églises à ceux où l'on célèbre le culte ca-
tholique.
I. Temples indiens» — Les monuments sacrés de l'Inde,
connus en Europe depuis un demi-siècle seulement, sont
sans contredit les ouvrages les plus gigantesques, les plus
extraordinaires que nous ait laisséa l'Antiquité. Ils peu-
vent se diviser en trois classes : i<* les temples souter-
rains, comme ceux d'Ellora (F. o# mot), avec plusieurs
étages de salles et de galeries immenses^, sontenne^ par
ÙM pilioi'S carrés dont des éléohants colossaux furincnt
souvent la base; î? ceux qui sont construits an-d»sus
de terre, mais dont la partie inférieure est souterraine, et
aui, se rapportant au second âge de l'architecture in-
ienne, ont pour signe caractéristique la colonne à cha-
piteau circulaire; Z^ ceux qui s'élèvent au-dessus du soL
et dont le style, correspondant à la troisième période de
l'art, se distingue par une grande variété de colonnes, de
chapiteaux et de bas-reliers où les attributs du boud-
dhisme se mêlent aux symboles du culte de firahma.
V.Indien (Art).
n. Temples cusyrtêns. — Les monuments religieux de
Babylone se rattachent à deux époques distinctes, doui
la première correspond au règne des dynasties natio-
nales, et la seconde commence avep le règne des prinrcs
chaldéens, au vu* siècle av. Jf.-C. De tous ces édifices, le
type le plus remarquable était le temple ou tour de Bel us,
de forme pyramidale, et dont le sommet était recouvert
d'un dais sous lequel se trouvaient un grand siège et une
table destinée aux lectistemiês ou repas du dieu. Plus
tard, BOUS les rois chaldéens, au pied du monument pri-
mitif on éleva un petit temple, pour recevoir les statues
de Bélus, de Uéra ( Junon) et de Rhéa (Cybèle), qui for-
maient la trinitâ babylonienne.
III. Temples égypttms. — V. Égyptien (Art).
IV. Temples grecs, — Les édifices religieux de la Grèce
n'égalèrent Jamais en étendue ceux de l'Egypte, mais ils
les surpassèrent par la beauté des formes et la perfection
des ornements. Voici quelles étaient les principales dis-
positions des temples chez un peuple dont le culte, tout
extérieur, n'exigeait point de monuments à grandes pro-
portions : — le Naos, appelé aussi Cella^ ou partie prin-
cipale de l'édifice, avait ordinairement la forme d'un carré
long, et se trouvait quelquefois précédé d'une cour en-
tourée d'une colonnade, comme aux temples d'isis à
Pompéi et de Jupiter Olympien à Athènes. Autour de h
Cella s'étendait un portique où s'assembhut le peuple, ci
dont la partie antérieure s'appelait Pronaos, tandis oue
la partie opposée portait le nom de Posnvtim ou Opîstko-
domos. La façade, tournée vers l'Occident, était orn^
d'un nombre pair de colonnes; au contraire, sur les
côtés, les colonnes étaient toi^ours en nombre impair.
L'ordonnance la plus simple fut celle du temple à antes;
vinrent ensuite le prostyle, Vamphiprostyle^ le périptère,
le pseudo-périptèref le diptère^ Vkypèihre {V, ces mots).
Selon le nombre des colonnes de la façade, le temple
était dit tétrastyle, hexcatylet octostyle, décattyle, etc.
La partie supérieure de la façade était surmontée d'un
fronton, parfois richement décoré de sculptures et de
bas-reliefs. Dans l'intérieur du temple s'élevait la statue
de la divinité à laquelle il était consacré ; alentour on
voyait encore d'autres statues de dieux ou de héros, ainsi
que de riches offrandes consacrées par la piété des
{(rinces ou des particuliers. Les temples grecs, parmi
esouels se distingue encore le Parthénon d'Athènes, sem-
blaient réunir toutes les perfections, la simplicité dans
le plan, l'harmonie dans les proportions, l'élégance la
plus exquise dans les détails. V. Ghecqdb (Architecture).
V. Temples romains, •— > Les premiers monuments re-
ligieux de Rome furent construits d'après les n^les de
l'art étrusque, comme le temple de Côrès, bâti l'an 494
av. J.-C. Plus tard, Rome, victorieuse de la Grèce, lai
prit son goût pour les arts, et fit élever, par des archi-
tectes et des ouvriers grecs, des temples qui avaient beau-
coup de rapports avec ceux d'Athènes ou de Corinthe. Une
différence essentielle se trouvait toutefois dans la dispo-
sition et le nombre des colonnes placées sur les deut
faces latérales du monument. Du reste, les distributions
et les ornements intérieurs étalent à peu près les mêmes.
Outre les édifices précédents, les Grecs et les Romains
avaient des temples de forme circulaire, recouverts d'une
coupole, et appelés monoptères ou périptères selon la dis-
position de la colonnade extérieure : tels sont le Panthéon
à Rome, et la Rotonde de Philippe à Olympie.
Quant au jour qui devait éclairer les temples, îl pént>
trait par l'intervalle des colonnes dans les monoptères;
mais, dans les périptères, comme dans les temples de
forme carrée, il entrait par des fenêtres pratiquées au
milieu du mur ou dans la partie supérieure du monu-
ment. Toutefois, quelques temples de petites dimensions
étaient seulement éclairés par la porte, par exemple la
Maison carrée à Ntmes {V. IAaison CARBis). Les temples
hypèthres étaient éclairés par le haut. V. L. Allatias, ÏÏi
templis Grœcorum, Cologne, 1645; J. Kool , De templis
anttqtiorum, Leyde, 1695; Ballet, Histoire dês temples
poleiw, Paris, 1761 , in-i2 ; May, Temples anciens et mo-
detmes , Paris, 1774, gr. iu-8<*; Sticgiitz, Archéoiogie de
TEM
1707
TEN
Carehitêeture des Grecs et des Romains, en allom., Woi-
mar, 1801, 3 toK in-8*. B.
TBMPLB (Églises du), nom donné en France, en Angle-
terre et en Allemagne, à des églises Mties pendant le
moyen âge sur un plan circulaire, en Thonneur du S^ Sé-
pulcre de Jérusalem. L*autel y était placé au centre, et
entouré de colonnes.
TEMPLE fLeV a Jérusalem. ) V, notre Dictionnatre dé
TEUPiji (Le), à Paris. j Biogr. et d'Histoire.
TEMPOREL, revenu qu'un ecclésiastique tire de son
bénéfice.
TEMPOREL f Augment, Pouvoir). V. Adgment, Poovoir.
TEMPS. L idée du temps ne peut pas se définir ; mais
on conçoit le temps comme une quantité continue, au
sein de laquelle tous les faits se produisent, se succèdent,
s*écoulent, et sans laquelle aucune succession, aucun
changement ne serait possible. L'idée du temps nous est
donnée par la mémoire, et, comme on ne se souvient que
de ses propres modes et de ses états antérieurs, c'est en
nous que nous trouvons l'idée d'une durée qui est la
nôtre, et que nous appliquons ensuite aux choses du
monde extérieur. Nous concevons ainsi , par la raison ,
une durée nécessaire, étemelle, le temps sans bornes. De
même que nous trouvons en nous l'iaée de durée, c'est
en nous que nous trouvons le moyen de mesurer le
temps ; et ce oui sert de base à cette mesure, c'est l'acte
volontaire, l'enort de la volonté, comme l'a fait voir
Hoyer-Gollard. — Les recherches faites pour connaître la
nature du temps n'ont donné aucune solution satisfai-
sante. Loclce ne voyait dans le temps que l'idée de suc-
cession, identifiant ainsi les faits et le temps, le conte
nant et le contenu ; Clarke, adoptant l'idée de Newton ,
fait de l'espace et du temps deux attributs de Dieu;
Leibniz repousse cette opinion, pour ne voir dans le
temps que l'ordre des successions, comme il ne voyait
dans l'espace que l'ordre des co^stences; pour Kant , le
temps n'est qu'une des formes de la sensibilité; pour Schel-
ling, c'est Vactivité pure avec la négation de tout être. R.
TEMPS (Le), divinité allégorique. V, Saturne, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
TKMPs, se dit des moments précis où il faut faire cer-
tains mouvements distingués et séparés par des pauses,
dans le maniement des armes, dans l'escrime, dans la
danse.
TEMPS, modification spéciale de la forme du verbe pour
exprimer si le Jugement que nous portons d'une chose,
objet de notre pensée, se rapporte à un t&capn présent ,
passé ou futur. Mais chacun de ces temps est susceptible
de nuances, qui amènent de nouvelles modifications dans
la forme de la conjugaison : ainsi , il peut y avoir un pré-
sent, un passé, un futur absolus, et chacun de ces temps
peut être pris aussi dans une acception relative. L'état ou
l'action exprimés par un verbe peuvent être par eux-
mêmes passés, mais présents à l'égard d'un état ou d'une
action également passés; ainsi : « Je dormais quand vous
entrâtes. » Cette nuance du verbe a reçu le nom do passé
imparfait ou de passé simultané. Un des deux états ou
actions passés peut être antérieur à l'autre : « J'arrivai
lorsque vous fûtes parti (c'est ce qu'on appelle passé an-
térieur); — vous étiez parti lorsque J'anrival (c'est ce
qu'on appelle passé plus-que-parfait), » L'expression de
cette nuance parait être particulière au français. De
môme, il peut arriver qu'entre deux états ou actions ap-
partenant à l'avenir, il y en ait un (ou une) qui soit
passé par rapport à l'autre, comme lorsqu'on dit : « J'aurai
terminé lorsaue vous arriverez. » C'est le futur antérieur
ou passé. Dans le passé proprement dit, on peut consi-
dérer l'action ou l'état, soit d'une manière indéfinie :
« J'ai commis bien des fautes (c'est le passé indéfini)^ »
soit d'une manière dé^nie : m A ces mots. Je me préci-
pitai dans ses bras (c'est le passé défini). » Cette double
nuance est encore particulière à la langue française. —
On peut considérer aussi la passé, soit par rapport aux
résultats actuellement durables de telle ou telle action
(c'est le passé parfait ), soit simplement par rapport à
une époque plus ou moins vague et passagère (c'est le
passé aoriste) : cette distinction appartient à la langue
grecque. Tout ce qui n'est pas rigoureusement présent
est passé ou futur; cependant on peut distinguer dans le
présent même des nuances, selon qu'il exprime un sens
général , une idée d'habitude, ou quelque chose d'actuel,
d'instantané. Il n'existe pas de forme spéciale dans la
conjugaison pour chacune de ces nuances.
Parmi les trois langues classiques, la plus riche en
temps est la langue grecque ; vient ensuite le français, et
an iroisiëme lieu le latin. Le grec compte à l'indicatif
7 nuanées de temps 1 1 pour le présent, 4 pour le paaté
( imparfait, aoriste, parfait , plus-que-parfait), S pour le
futur (futur proprement dit et fatur antérieur). Le mode
impératif est susceptible de 3 temps, ainsi que le sub*
Jonctif (présent, aoriste, parfait). L'optatif, rinfinitif, le
participe, ont tous les temps, excepté l'imparfait et le
plus-que-parfait. En tout, le grec compte donc 31 temps.
Le français compte à l'indicatif 8 nuances de temps, 4 au
subjonctif, 2 au conditionnel, 1 à l'impératif, 2 k l'infinitif,
2 au participe; en tout 19. Le latin admet à l'indicatif
6 temps (présent, imparfait, parfait, plus-que-parfait,
fbtur, et futur passé), 4 au subjonctif, 1 à l'impératif, 4 à
l'infinitif (actif), 2 au participe (présent et futur à l'actif,
passé et futur au passif) ; en tout 17. Les temps grecs se
divisent, dans les méthodes à l'usage de l'enseignement,
en temps principaux f présent, parfait, les 2 futurs) et
en temps secondaires (imparfait, aoriste, plus-que-par-
fait). Ils ont pour caractères distinctifs d'être terminés, les
premiers à la 3* personne du pluriel par un i, à la 3* du
duel par ov ; les seconds, d'avoir la 3* personne du pluriel
terminée par un v à l'actif, un o au passif et au moyen,
et par y|v au duel. Tous les temps du subjonctif sont
considérés, relativement à ceux de l'optatif, comme temps
principaux, et réciproquement, ceux de l'optatif comme
temps secondaires, et ils en ont les formes caractéris-
tiques. En français, on distingue les temps, soit en temps
prtmitifs et en temps dérivés, division peu précise et sur
laquelle il ne saurait y avoir accord, parce qu'elle est
arbitraire, soit en temps simples et en temps composés,
division beaucoup plus simple et plus nette; les temps
simples sont ceux qui n'emploient ni l'auxiliaire être
ni l'auxiliaire avoir. Au passif il n'y a que des temps
composés, ou plutôt il n'y a pas de conjugaison. La
conjugaison latine se prête parfaitement à la division
en deux séries de temps, les uns exprimant l'action non
accomplie (présent, futur de l'indicatif, imparfait), les
autres l'action accomplie (parfait, plus-que-parfait, futur
antérieur de l'indicatif). Au passif et dans les verbes dé-
ponents, les temps de la 2* série se conjuguent invariable-
ment à l'aide du verbe sum, et il semble que ce soit la
conjugaison déponente qui ait servi de type à la conju-
gaison française. Les temps à forme composée se retrou>
vent même dans auelques verbes de forme active, comme
audeo, gaudeo, ftao, etc. Le grec n'a de temps invariable-
ment composé que le futur antérieur de l'actif : cette
forme est régulièrement employée dans la prose attique
à la 3" personne du pluriel du parfait et du plus-que-
parfait passif de certains verbes.
La manière dont les temps se forment dans les di-
verses langues est extrêmement variée : tantôt c'est par
un changement dans la finale, tantôt c'est par l'union do
deux ou de plusieurs verbes. Quand il s'agit d'expri-
mer quelque circonstance de temps pour laquelle une
langue ne fournit pas de forme particulière, on a re-
cours, soit à des adverbes, tels que hier, aujourd'hui,
demain, récemment, bientôt; soit à des noms spéciaux
comme heure, jour, semaine^ mois, année, siècle^ unis à
des adjectifs numéraux (un, deux, trois, dix, premier,
deuxième, vingtième, centième, etc.) ou à des adjectifs
formés de noms d'époque, comme en latin et surtout en
grec : inerant hestema (ils s'y trouvaient depuis hier,
depuis la veille), soit enfin à des verbes ou à des locu-
tions exprimant un passé ou un futur relatif et plus ou
moins rapproché. P.
TEMPS, en termes de Musique, durée des sons marquée
par la mesure. Une mesure contient autant de temps
qu'elle a de parties égales : elle est à 2, à 3, à 4 temps,
selon qu'elle se divise en 2, 3 et 4 parties. On nomme
temps faibles, les temps pairs d'une mesure (c'est le 2*
dans les mesures à 2 et à 3 temps, le 2* et le 4* dans la
mesure à 4 temps; temps forts, les temps impairs (le
1*' dans les mesures à 2 temps, le l*' et le 3* dans les
mesures à 3 et à 4 temps). V. Mesure.
TEMPS LiSoADX, en termes de Droit, tout ce qui est re-
latif aux prescriptions, déchéances, délais, dates, durées,
àffes requis par la loi. Il existe un Dictionnaire des temps
légaux par Souquet, 1846.
TENAILLE, en termes de ForUflcation, ouvrage com-
poaé de deux faces qui présentent un angle rentrant vers
la campagne, et qui sert à couvrir une courtine. Une
double tenaUle est celle qui a un angle saillant au mi-
lieu, entre deux angles rentrants. Dans le système de
fortification k tenailles, les bastions manquent, et le
rempart ne consiste qu'en angles saillants et rentrants.
Quelquefois les extrémités do deux tenailles voisines
sont reliées l'une à l'autre; c'est ce qu'ont pratiqué les
TEN
I7ft8
TÉO
Ingénieurs hoIIar.daU Landsberg et Virgin, ainsi que
Montalembert et Carnot.
TENAlLLEMErfT, supplice. F. notre Dtctionnaire de
Biographie et d'Histoire.
TËNAILLONf en termes de Fortification, petite tenaille
qu'on place des deux côtés d'une demi*lune.
TENANCIER. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'histoire.
TENANTS, nom qu*on donnait, dans les joutes et
tournois, aux chevaliers qui s*engagaient à tenir contre
tout assaillant.
TENANTS, en termes de Blason, figures d'hommes ou
d'anges qui soutiennent un écu. Lorsque ce sont des ani-
maux, on les appelle Sitpports. Ils ne paraissent sur les
sceaux qu'à partir du xiV siècle.
TENANTS ET ABOUTISSANTS, circonstances qu'il faut avoir
soin de mentionner dans tout acte relatif à un im-
meuble, afin de fixer la situation et la contenance de cet
immeuble. Les exploits d'huissier et les procès-verbaux
de saisie doivent les énoncer ( Code de Procédure, art. 64
et<27).
TENDRE (Pays de). V. Clélie.
TÉNÈBRES, terme de Liturgie. V, notre Dicttonnaire
de Biographie et d'Histoire.
TENEUR. V. Dominante.
TÉNÏE, terme d'Architecture. V. Bandelette.
TElNON (de tenir)^ bout d'une pièce de bois on de
métal taillée de manière à entrer dans une mortaise.
TÉNOR, terme de Plain-Chant usité autrefois pour dé-
signer le chant sur lequel étaient formées les différentes
parties qui constituaient l'harmonie simultanée. V. Oa-
GANUM, TrIPLUM. F. C.
TéNOR, la plus aigufi des voix d'hommes, égale en
étendue à celle de Soprano (V. ce mot)^ mais à une oc-
tave plus bas. On la nommait autrefois Taille (K ce
mot). La voix qu'on appelait Hauta-contre ( V. ce mot)
était une voix de ténor possédant à l'aigu quelques notes
de plus que les voix ordinaires. On nomme aussi Ténor
le chanteur qui possède une voix de ce genre. La mu-
sique écrite pour ténor est en clef d'ut 4* ligne ou en clef
de sol. Les sons de la voix de ténor sont de deux sortes,
les sons de poitrine et les sons de tète; le passage des
uns aux autres, qui a lieu généralement entre le fa et le
sol au-dessus du diapason, exige beaucoup d'art pour que
la différence des timbres soit peu sensible. Dans les
troupes lyriques, on nomme fort ténor le chanteur qui
tient les premiers rôles de ténor dans le grand opéra
(les rôles de Robert dans Robert le Diable, de Raoul dans
(es HuguenotSy d'ÉIéazar dans la Juive, d'Arnold dans
Guillaume Tell, eto., appartiennent k cet emploi); ténor
léger, le premier ténor d'opéra -comique, lequel tient
aussi certains rôles du grand opéra, comme ceux de Raim-
baud dans Robert le Diable, de Léopold dans la /utve, etc.;
trial (du nom d'un ancien acteur), le ténor comique. Le
laruette (autre nom d'acteur), dans l'ancien opéra-co-
mique, est aussi un ténor. B.
TENSA. V. Thensa , dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
TENSEMENT, redevance en nature et en argent par
laquelle les vassaux achetaient autrefois la protection de
leur seigneur.
TENSON, pièce de poésie en dialogue, particulière k
la poésie provençale, et dans laquelle ordinairement deux
interlocuteurs défendaient tour à tour, par strophes de
môme mesure, et en rimes semblables, leur opinion con-
tradictoire sur diverses questions d'amour, de chevalerie,
de morale, etc. Tenson veut dire débat, et vient du latin
contentio, qui subsiste tout entier dans contencio, nom
par lequel les Troubadours désignent quelquefois c« genre
de poésie. Le dialogue des Tensons était généralement
partagé en couplets pairs suivis de deux envois^ afin que
chaque contondant eût un avantage égal dans l'attaque et
dans la réplique. Ce dialogue était quelquefois divisé par
distiques, et même vers par vers. La question qui faisait
la matière de la tenson demeurait souvent indécise, et
chaque interlocuteur, après avoir fait briller la finesse ou
k subtilité ôfi son esprit, s'en tensût à son opinion. Il
arrivait aussi parfois que le sujet proposé était soumis,
après la discussion, ou k des Cours d*amour, ou au juge-
ment d'arbitres choisis par les deux poètes.
La tenson était quelquefois une satire dialoguée entre
deux personnages, qui se faisaient mutuellement des re-
proches hardis et injurieux, et dont chacun attaquait et
combattait l'autre dans des couplets ordinairement im-
provisés, toujours sur une même mesure et sur les
.nêmes rimes. Parfois aussi elle contenait des plaintes
réciproques de deux amants^ ou celles que l'un d*eax
seulement adressait k l'autre. La plus célèbre teiuon de
ce genre est celle entre Raimbaud d'Orange et la comtesse
de Die, qui offre quelque ressemblance avec la pièce
d'Horace Ùonec gratus eram tibi.
Il est probable que des tensons étaient composées
quelquefois par un seul et même poète, qui se servait
alors de cette forme pour louer plus adroitement sa dame,
ou le seigneur dont il était protégé. C'est ainsi qa*il y a
des tensons allégoriques encre un amant et un oiseau,
ou même avec un être moral personnifié. Itfais ces sortes
de pièces étaient aussi l'ouvrage de Troubadours diffé-
rents. Plusieurs tensons contiennent des injures, des
accusations, des reproches, qui ne peuvent avoir été
dictés que par la haine ou une franchise grossière. L»
monuments du temps indiquent quelquefois les auteurs
qui ont travaillé concurremment à ces sortes d'ouvrages.
— Par allusion à la forme dialoguée des tensons et à la
manière dont le sujet était souvent proposé, on les nomma
aussi partimen (division), du verbe partir (séparer),
souvent employé dans le sens de diviser une question
proposée. Le titre de partimen s'appliqua particulière-
ment aux tensons qui avaient pour objet la discussion
d'une question d'amour. On les nomma aussi joco; partits,
ou simplement partia : les Trouvères en firent ieti-parti,
empruntant aux Troubadours le nom et la chose.
Les Troubadours les plus connus pour leurs tensons
sont Guillaume de Mur et Guîraut Riquier, Raiotbaud de
Vaqueiras et Albert de Malespina, Geoffroy et Raynaud
de Pons, Hugues de Saint-Cyr et le Dauphin d'Auvergne,
Gaucelm Faydit, Savaric de Mauléon, etc. E. B.
TENTATIVE (du latin tentare, essayer). La tentative de
cime, manifestée par des actes extérieur, et suivie d*un
commencement d'exécution, si elle n'a été suspendue ou
n'a manqué son effet que par des circonstances fortuites os
indépendantes de la volonté de l'auteur, est considérée
comme le crime même {Code pénal, art. 2, 3, 86). La ten-
tative de simple contravention n'est pas punie par la loi.
tentative, nom qu'on donnait autrefois k la thèse qu'il
fallait soutenir pour obtenir le grade de bachelier en
théologie, parce que c'était la première épreuve qu'on
subissait devant les Facultés.
TENTE (du latin tentoriumj^ espèce de pavillon ou de
logement portatif, fait ordinairement de grosse toiie d(
chanvre, et qu'on dresse en pleine campagne pour s^
mettre à l'abn du soleil et des intempéries de Tair. Lc>
anciens patriarches, les Hébreux dans le désert, vécifent
sous la tente; aujourd'hui même, la plus grande partie
des populations Arabes et Tartares ne connaissant p:is
d'autre habitation. L'usa^ des tentes k la guerre exista
dès l'Antiquité; il se perdit au moyen &ge, parce qu'où
ne faisait presque jamais campagne pendant Thiver;
mais on y revint en France au temps de Louis XIV, où
l'on tint sur pied des armées dans toutes les saisons.
Depuis la Révolution, la rapidité des mouvements straté-
giques n'a guère permis de se servir de tentes; alors
l'usage du bivoucui (V. ce mot) s'est introduit. Aujour-
d'hui on ne voit plus de tentes que dans les camps do
manœuvre. En Algérie, les soldats se servent de sacs de
campement disposés de telle sorte que plusieurs réunis
ensemble forment une tente improvisée. F. Baraqce,
Canonnière.
Dans la Marine, une tente se nomme taud ou taudt
{V. ce mot).
TENTURE (de tendre)^ toute pièce d'étoffe qui sert à
tapisser un appartement. Le même nom s'applique aux
étoffes de deuil que l'on tend, lors d'un convoi funèbre,
à la maison mortuaire, dans l'intérieur et à l'extérieur de
l'église, et qui sont placées par l'administration des
Pompes funèbres. ^
TENUE, dans le langage militaire, s'entend de l'uni-
forme ou de la toilette du soldat. Il y a la tenue d'hiver,
la tenue d'été, la petite tenue, la grande tenue.
tenue, temps durant lequel se tiennent certaines as-
semblées, telles que les Chambres législatives et les
Assises.
TENUE, en termes de Marine, qualité da fond d'un
mouillage. Elle est bonne, quand l'ancre y mord bien.
TENUE DES livres. V. COIIPTABIUTÉ,
TENURE, en Droit féodal, se disait de l'étendue d'un
fief, de sa mouvance, et de la manière dont il était tenu
ou possédé. On distinguait la tenure féodale pour les fiefs
nobles, et la tenure de roture pour les fiefs roturiers. On
tenait par hommage, par parage^ par bourgage, etc.
TÉOCALLTS. V. ce mot dans notre Dictionnaire dti
BiograpIUe et d'Histoire,
TER
1709
TER
TÉORBB, instrument de musique. V, TiiéonoB.
TEPIDARIUM. y. Bains.
TEPONAZTLI, instrument de musique des anciens
Mexicains. C'était une sorte de tambour, formé d'un cy-
lindre de bois qu'on avait creusé en dedans, mais sans
autre ouverture que deux fentes parallèles dans le milieu,
sur lesquelles on fhippait avec de petites baguettes.
TÉRAGHITE (Langue), nom donné par quelques phi-
lologues % la langue hébraïque, et dérivé de Térach ou
Tharé, père d*Abraham.
TERCET (du latin ter, trois fois), couplet ou stance
de trois vers. Il en entre deux dans le sonnet ( V. ce
mot). Le !•' vers rime avec le 3», le 2* avec le !•' et le
3" au tercet suivant; ou bien il commence par deux
rimes plates suivies d*un vers féminin rimant avec le 3*
du tercet suivant, comme dans cet exemple de VEsther
de Racine (1, 5; :
TOUT LS CIIŒTTS.
Lo Dien qne nons servons est le Dieu 4cs combats .*
Non, lion, 11 ne sonffiira pas
Qa*on égorge i^nsi rinnocence.
UVS IRXAÎLXTS, tCUle.
Hé qnoll dirait l'impiëtë,
Oh donc est-il, ce Dlea si redonté
Dont Israël nons Tantait la puissance?
Si les rîmes plates sont féminines, le 3* vers est mascu-
lin. En tout cas, les deux premières rimes sont différentes
dans Tune et Tautre stance.
TERCET. V. EsPAGNOLi (VeTsîflcation).
TEREBRA, machine de guerre dont les Anciens se
servaient pour percer les murs des villes assiégées.
Cétait une espèce de bélier qu*on faisait agir en le tour-
nant sur lui-même, comme une tarière.
TERME, se dit des Idées (F. ce mot) employées comme
éléments logiques du Jugement et de la Proposition , et
y figurant comme sujet et comme attribut. Aristote (Pre-
miers Analytiques^ liv. I, ch. 1*') définit le terme : ce en
quoi se résout la Proposition, c'est-à-dire l'attribut et le
sujet, soit qu'on les unisse, soit qu'on les sépare par les
idées d'être ou de non>ètre (affirmation ou négation).
Deux termes étant donnés, l'un comme sujet et l'autre
comme attribut, on peut toujours, dialectiquement du
moins, en former quatre propositions, en affirmant ou
niant, soit en totalité, soit seulement en partie, l'attribut
du sujet De là les quatre espèces de propositions :
1* affirmative universelle (tout A est B) ; 2° affirmative
particulière (quelque A est B) ; 3» négative universelle
(nul A n'est B^; A^ négative particulière (quelque A n'est
pas B); à quoi il faut ajouter celles que l'on peut former
par le renversement des termes ( V. Proposition et Con-
version DBS propositions). Si l'on prend pour type des
propositions la proposition affirmative universelle, on
remarque <|ue l'extension de l'attribut {V. Extension) y
est nécessairement plus grande que celle du sujet. On
ne peut affirmer l'attribut divisible du sujet nombre pair,
par exemple, que parce que ce sujet est compris (avec
d'autres, les nombres impairs non premiers) dans l'ex-
tension de l'attribut. De là, dans l'analyse du syllogisme,
l'adoption des désignations suivantes : Grand Terme; on
appelle ainsi l'attribut de la Conclusion, celui dont le
rapport avec son sujet n'est pas d'abord tellement clair
qu'on puisse le saisir au mo^en d'une comparaison di-
recte ; d'où la nécessité du raisonnement, c'est-à-dire de
l'intervention d'une idée intermédiaire; — Petit Terme;
c'est le sujet de la Conclusion; — Moyen Terme; c'est
l'idée intermédiaire qui, introduite entre le grand terme
et le petit, permet d'opérer par voie indirecte le rappro-
chement ou la séparation que l'on n'avait pas le moyen
de faire directement. Comparé au grand terme, le moyen
forme avec lui la Majeure; il forme avec le petit terme
la Mineure, Une fois le rapport du grand et du petit
terme trouvé, le moyen disparaît; c'est une des règles
générales du svllozisme, que la Conclusion ne doit ja-
mais contenir le Moyen. — Aristote, et toute l'ancienne
Logique à son exemple, ont indiqué certains procédés
pratiques pour l'invention du moyen, qui est comme le
nerf de la démonstration. C'est là l'objet propre du Trcùti
det Topiques, Ailleurs {Premiers Analytiques, liv. I,
ch. 27 et 28), il recommande plus simplement, deux
termes étant donn^ entre lesquels il s'agit de trouver
un moyen, d'examiner tous les conséquents de l'un, tous
les antécédents de l'autre (K. Antécédents et Consé-
quents), et si, dans le nombre, il se trouve quelque
terme que l'on puisse donner à la fois comme attribut à
l'un et comme sujet à l'autre, d'essayer si en le prenant
comme moyen on n'arrivera pas à la démonstration chcr«
chée. Il faut dire que la Logique a renoncé i\ pru pris
complètement à ces procédés factices. Lorsqu'une ques-
tion se pose, et qu'elle est susceptible de démonstra-
tion syllogistique, c'est dans l'étude approfondie du su-
jet, c'est en s'aidant de la sagadté naturelle de l'esprit
fécondée par la réflexion, qu'on aura encore le plus de
chances de trouver les éléments d'une solution bien so-
lide et bien claire. V. Syllogisme, Majeure, Mineure,
PRâlISSES. B— E. •
TERVB, mot considéré dans son rapport avec l'objet
qu'il représente. Ainsi , l'on dit que coloris est un terme
de Peinture; mais on dira qull est un mot, et non un
terme, de trois syllabes.
TERME, nom donné aux temps préflx de payement pour
les choses qu'on tient à loyer. Par extension, on l'ap-
plique à la valeur même du loyer. On distingue d'ordi-
naire quatre termes par an, Noël, Pâques, la S'- Jean, et
la S'-Michel; nubien, lesi*'* Janvier, avril. Juillet et
octobre.
TERME, en Droit civil, limitation d'un temps donné
pour faire une chose. Le terme de rigueur est celui passé
lequel il n'y a plus de délai à espérer. Ce qui n'est dû
au à terme ne peut être exigé avant l'échéance ( V, Code
Napol,y art. 11S5-88). Il y a, pour le débiteur, déchéance
du bénéfice du terme, s'il tombe en faillite ou en décon-
fiture, ou s'il a, par son fait, diminué les sûretés qu'il
avait données par le contrat au créancier.
TERME, divinité allégorique. V. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
TERME (Marché à). V, MARCHé.
TERMINAISON, nom donné, en Grammaire, aux suf-
fixes qui terminent un mot et en caractérisent l'espèce,
ou le nombre, ou le genre, ou le cas, ou la personne, etc.
Ainsi, ment est la terminaison de la plupart des ad-
verbes de manière en français {utilement, méchamment) ;
asse est la terminaison de l'imparfait du subjonctif à la
l'* personne du singulier dans les verbes de la i'* con-
jugaison; ir caractérise l'infinitif présent des verbes de
la 2*, etc. En latin, us est la terminaison des noms de la
2* déclinaison au nominatif singulier, os celle de l'accu-
satif pluriel ; ibus caractérise le datif et l'ablatif pluriel
de la 3* déclinaison, is les mêmes cas à la l^* et à la 2*.
La terminaison modifie quelquefois la dernière lettre du
radical : ainsi , neu/* devient neuv dans neuve, neuvième,
neuvaine, etc. Certaines terminaisons sont assez fré-
quentes dans telle ou telle langue pour la caractériser ;
et c'est surtout dans les noms propres que cela se re-
marque. Ainsi, une terminaison en ôs ou en es ou en
idas annonce généralement un nom grec; en us, un nom
latin; en er, un nom allemand; en o, un nom italien. Une
syllabe nasale ou un e muet annonce à coup sûr un nom
français {Durand , Bertrand , Marchand, Bertin, Gués-
clin, Gilles, Leblond, Lecomte, Laporte, etc.). Au reste,
les terminaisons des noms français sont extrêmement va-
riées ; il a été tellement impossible de les ramener à des
classifications rationnelles, qu'on a adopté la division en
terminaisons masculines et terminaisons féminines; les
l'** sont celles qui offrent un son plein ; les 2**, celles qui
ne sont nuirquées que par un e muet : si bien qu'à vnu
dire les unes se distinguent à peine des autres pour l'o-
reille, puisque, dans les noms à terminaison féminine,
la pénultième porte l'accent tonique. Si faible que soit
cette distinction, elle forme néanmoins une des bases de
l'harmonie de nos vers. V. Rime. R.
TERMINAISON, terme de Plain-Chant par lequel on dé-
signe la modulation qui sert de cadence finale à chaque
verset. Elle est indiquée dans les livres par les syllabes
seculorum amen qui terminent la doxologie Gloria patH :
E uou a e. Comme tous les psaumes et les cantiques
sont terminés, à de rares exceptions près, par le Gloria
patri , on en a choisi les dernières paroles pour y placer
les notes de la terminaison. La terminaison est la même
pour tous les versets. La suite de sons qui forme la ter-
minaison d'un verset de psaume s'appelait autrefois
neume (V. ce mot). La terminaison est indiquée par
l'une des sept premières lettres de l'alphabet : A, B, C,
D, E, F, 6. L'une de ce3 lettres est toujours la note finale
de la terminaison. La terminaison est complète, lors-
qu'elle a pour finale celle du ton auquel la mélodie ap-
partient ; on se sert alors d'une lettre majuscule pour la
désigner. Elle est incomplète, lorsqu'elle ne finit pas par
la note finale du ton, par exemple^ lorsau'elle finit par
fa dans le l*' ton, au heu de finir par re; par la dans
le 3*, au lieu de finir par mt. Dans ce cas, on la design*
par une minuscule. F. G.
TÈT
1^10
THA
TERMINISME, mot qui a été employé comme syno-
nyme de Déterminisme (V, ce mot).
TERMINOLOGIE (du latin terminus, tenne, et da
grec logos, discours), science des termes ou expressions
propres à une science, à un art.
TERNAIRE (Mesure). F. Mbsobb.
TERNE (du latin temus, triple, trois à la fois), en
termes de Loterie, réunion de trois nombres pris en-
semble et qui sortaient au môme tirage. Le terne sec se
composait de trois numéros pris sans jouer sur les trois
extraits ni sur les trois ambes que formaient ces numé-
ros; il se payait 270 fois la mise. Le terne déterminé était
celui où le Joueur avait indiqué d'avance Tordre dans
lequel devraient sortir ses trois numéros; il gagnait
4,500 fois la mise.
TERPODION, instrument de l'espèce des clavi-cy-
lindres, inventé vers 1817 en Saxe par Jean-David
Buschmann.
TËRPSICHORE. i K. ces moto dans notre Diclionnairtf
TERRAGE. ] de Biographie et d*Histore.
TERRASSE, nom de la toiture d*un édifice quand elle
est en plate-forme. On voit beaucoup de terrasses dans
les pays méridionaux de l'Europe et en Orient,
TERHASSB, élévation de terre, ménagée dans un parc ou
an terrain, ordinairement épaulée par de la maçonnerie,
et plantée d'arbres, pour servir de promenade ou de point
de vue. Telles sont les terrasses de S^-Germain-en-Laye,
de Meudon, de S*-Cloud, etc. On nomme Contre-terrasse
une terrasse b&tie au-dessus d*une autre , pour quelque
raccordement de terrain ou élévation de parterre.
TEHRASSE, uom que donnent les sculpteurs à la partie
de la plinthe d'une statue où pose la figure.
TERRASSEMENT, opération de Construction qui a
pour objet le déblai et le remblai des terres. Les ouvriers
employés à ce genre de travail sont dits Terrassiers.
TERRE, l'un des quatre élémento des Anciens. L'opi-
nion qui fait de la Terre un élément et l'un des principes
substantiels de la Nature parait remonter à Empédoclc,
qui , suivant ce que rapporte Aristote, t'ajouta à l'Air, à
l'Eau et au Feu , recounus au même titre par les autres
philosophes de l'école Ionienne, et les soumit tous en-
semble au pouvoir de l'amour et de la Discorde, pris
comme principes moteurs. V. Ionienne (École). B— e.
TERRE-PLEIN, amas de terres rapportées formant une
surface plate et unie. C'est la partie supérieure d'un rem-
part où se trouvent les canons. C'est aussi tout terrain
élevé, soutenu par des murailles, comme le terre-plein
du Pont-Neuf à Paris.
TERRES CUITES, nom sous lequel on désigne les an-
tiques en argile. Les Anciens employèrent la terre cuite
pour les frises de leurs temples, pour les bas-reliefs de
leurs frontons, et en firent aussi un grand nombre de
vases cft ustensiles. On distingue les ouvrages séchés
uniquement à l'air, ceux qui ont été cuits tout simple-
ment , ceux qui ont été cuito avec des couleurs étendues,
mais non fixées, ceux dont les couleurs furent cuites,
ceux où les couleurs sont mi-partie fixes et mi-partie
peintes, enfin ceux qui sont plus ou moins richement
dorés. Au xvi« siècle, les artistes se remirent à employer
la terre cuite : Bernard Palissy se rendit célèbre par ses
figures et ses vases; on exécuta en Italie des bustes et
d'autres ouvrages. La terre cuite fut de nouveau délaissa
aux XVII* et xvni* siècles; elle a repris faveur de nos
Jours, et on l'emploie principalement, à cause de son bon
marché, pour les ornemento architectoniques. B.
TERRIER. \
TËRRIPAVIUM. ( F. ces mots dans notre D/c(tontiair0
TERRITOIRES. de Biographie et d'Histoire.
TERUNaUS. )
TERZA RIMA. F. Itauenhb (Versification).
TERZËITO, terme italien de musique, signifiant peftt
trw.
TERZINA. r.TaiOLBT.
TESSÉRAIRE. \
TESSÈRE. ( F. ces moto dans notre Dictionnaire
TEST. ( de Biographie et d'Histoire.
TESTAMENT. /
TESTAMENTAIRE (Exécuteur). F. ExécoTBOH.
TESTIÈRE ou TÊTIÈRE, partie de l'armure du moyen
âge qui couvrait la tète du cheval.
TESTIMONIALE (Preuve). V. Pbeove.
TESTON , monnaie. V. ce mot dans notre Dictionnaire
de BiograpJUe et d'Histoire,
TÊTE (Voix de). V. Faucbt.
tAtb db clou. V. Gloo.
fÉn M PONT, ouvrage de fortificati«ii qui ne diffère
du redan que parce que les faces sont brisées, pour
donner deux flancs dont les feux se croisent au saillant.
TÔTE OB PORC. V, notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire,
TÊjB DR TRÈE>'LE« sommet d'uno arcade trilobée.
TETRACORDE (du çrec tétra, quatre, et khordé, cor-
de), en termes de Musique grecque, système de qnain
cordes ou sons dont les extrêmes étaient à distance île
quarte. Les Grecs divisaient l'échelle musicale en tétra-
cordes, et non en octoves comme font les Modernes.
A l'origine, les tétracordes n'étaient que diatoniques ; par
la suite ils devinrent aussi chromatiques et enharmo-
niques. V, Gbbcqob (Musique).
TéTRAGORDB , lyre ii quatre cordes.
TÉTRADRACUME, monnaie d'argent de 4 drachme^
chez les anciens Grecs. V. Draghub, dans notre Diction-
naire de Biographie et d* Histoire.
TÉTRAÉTÉRIDE (du grec tétra, quatre, et étos, année\
en termes de Chronologie, cycle ou période de quatre an-
nées, en usage chez les anciens Athéniens.
TÉTRAFOLIÉ , en termes d'Architecture, qui est h
4 feuilles ou à 4 lobes.
TÉTRALOGIE (du grec tétra, quatre, et logos, dis-
cours), représentotlon de trois tragédies suivies d'nn
drame satyrique, chez les anciens Grecs. Un grammairir-n
a cité celle-ci d'Eschyle : Phinée, les Perses, Glaucus de
Potnies, tragédies; Prométhée, drame satyric^ue. On voit
par ce témoignage qu'il n'étoit pas nécessaire que les
trois pièces tragiques eussent aucun lien entre elles , non
plus qu'avec la pièce finale. On sait encore, soit par de»
scoliastes, soit par des polygraphes, entre autres Élicn,
3u'Euripide donna une tétralogie ainsi composée : Alexcui-
re, Païamède, les Troyennes, tragédies; Sisyphe, drame
satyrique, en concurrence avec une tétralogie d'un certain
Xénoclès, comprenant les tragédies d'OEdipe, de Lycaon,
des Bacchantes, et le drame satyrique Athamas. Médce
fut représentée avec Philoctète et Dtctys^ et les Moisson-
neurs, Enfin on cite une tétralogie d'Euripide sans drame
satyrique, et composée des Cretoises, d'Alcméan à Pso-
phis^ de Télèphe, et &Alceste. V, Patin, Études sur les
Tragiques f(recs. P.
TÉTRAMÈTRE, vers grec ou latin composé de quatre
mesures représentent soit quatre pieds, comme dans les
systèmes cboriambique, dactylîque, ionique, soit quatre
dfpodies , c-à-d. huit pieds , comme dans les systèmes
lambique, trochalque, anapestique. Les vers bacchiaques
et les vers crétiques admettent des tétramètres téli(unb€S
( V. ce mot), P.
TÉTRAMORPHE, réunion des quatre attributs d«
Ëvangélistes en une seule figure. Le tétramorphe, fré-
quemment représenté dans l'Iconographie grecque, très-
rare dans l'Iconographie latine, marque que les quatre
Évangélistes ne font qu'un , et ne doivent pas être sC-
parés.
TÉTRAPHONIE, nom donné, dans l'ancienne Musique,
à un chant à 4 parties.
TÉTRAPLES (Les), nom d'une Bible où Origène avait
placé sur 4 colonnes les quatre versions grecques d'Aquila,
de Symmaque, des Septante, et de Théodotion.
TÉTRARCHIR. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
TÉTRASTIQUE, mot employé quelquefois comme sy-
nonyme de qtuUrain.
TÉTRASTYLE , édifice qui présente quatre colonnes à
sa façade.
TÉTRATONON , dans la musique grecque, intervalle
de quatre tons, ce que nous nommons une quinte aug-
mentée, ou une sixte mineure.
TÉTRAVELA. V. BALDAQom.
TÉTROBOLE (du grec tétra, quatre, et obolos, obole),
monnaie de 4 oboles des anciens Grecs. V. Obolb, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
TEUGUE ou TUGUE, en termes de Marine, sorte do
gaillard qu'on fait à l'arrière d'un vaisseau pour le ga-
rantir des injures du temps.
TEXTE (du latin textus, tissu), en termes de Philo-
logie, les propres paroles d'un auteur, par opposition aux
notes et aux commentaires.
texte , passage de l'Écriture sainte <ju'un prédicatwr
prend pour sujet de son sermon, et qui revient souvent
dans le discours , qui doit en être le développement oa
l'application.
TEXTE (Gnos — , Perrr). V. Gabactèiie» D'OfFRORBOb
TEYEMMON. V. Ablution.
thaï (Langue). V. Siamois.
tHÉ
lia
tHÈ
fHALAHÈGUE , navire. F. notre Dktionnatrs de Dio^
graphie et d'Histoire,
THALAMISTËS. V. Navales (Constractions).
THALAMUS, i V. ces mots dans notre Dictionnaire de
THALER. \ Biographie et d'Histoire.
THALMUD. K. Taliiud, dans notre Diotionnatre de
Biographie et d'Histoire»
THALWEG, y. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire, au Supplément.
THAUUATOPES. V. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
TUAUUATURGE (du grec thauma, merveille, miracle,
et er(7on y ouvrage), littéralement, faiseur de miracles.
On donnait ce nom, surtout dans les premiers temps de
l'Église, aux saints personnages ; un disciple d'Origône,
Grégoire de Néo-Césarée, fut surnommé le thaumaturge,
il cause de tftS QOBbreux miracles. Dans le même temps,
les adversaires du christianisme lui opposaient de pré-
tendus faiseurs de miracles, comme Apulée et le néopla-
tonicien Apollonius de lyane ; ils citaient aussi Pytbagore.
Les prêtres égyptiens qui luttèrent contre Moïse, Simon
le Magicien, étaient des thaumaturges; on peut d'ailleurs
donner ce titre à tous ceux qui prétendent , par des opé-
rations quelconques, produire des phénomènes opposés
aux lois de la nature. Dans le xvm' siècle, J. Gassner fut
regardé comme un thaumaturge, ainsi que le prince de
Uohenlohe, évoque de Gross-Wardein en Hongne. F. Bi-
bliothàque magique, 1776, in-8°; le Thaumaturgus physi^
ctis, du P. Schott; Windischmann , Essais de thaumor
turgie. R.
THÉÂTRALE ( Législation ). La liberté des représenu-
ttons théâtrales peut , comme la liberté de la presse,
dégénérer en licence, et un gouvernement ne saurait
abandonner tout contrôle. En Angleterre, le pays le plus
libre du monde, la formalité de Tautorisation préalable
pour rétablissement d'un théâtre et la censure drama-
tique ont été étaJ>lies en 1737. De môme, en France,
avant 1780, les représentations théâtrales ne pouvaient
avoir lieu qu*en vertu d'une autorisation expresse du gou-
vernement. La loi des 16-24 août 1790 décidaque les spec-
tacles publics ne pourraient être permis et autorisés que
par les oihciers municipaux, et astreignit les directeurs
et entrepreneurs alors existants à se pourvoir devant eux
pour faire confirmer leur Jouissance. Celle des 13-10 Jan-
vier 1701 permit à tout citoyen d'élever un théâtre pour
y faire représenter des pièces de tous genres, sous la
seule condition d'en faire préalablement la déclaration '
à la municipalité du lieu. Un décret du 8 Juin 1806 décida
qu'aucun théâtre ne pourrait s'établir b, Paris sans auto-
risation de TEmpereur; que le ministre de l'Intérieur
pourrait assigner à chaque thé&tre an genre de spectacle
déterminé; que, dans les grandes villes, les théâtres se-
raient réduits à deux, et que, dans les autres, un seul
serait maintenu; qu'ils devraient tous être munis de
l'autorisation du préfet; qu'aucune pièce ne pourrait être
Jouée sans l'autorisation spéciale du ministère de l'Inté-
rieur. La loi du 0 septembre 1835, reproduisant à peu
de chose près ce décret, porta que l'ouverture d'un
Uiéàtre ou la représentation de pièces non autorisées
serait punie correction nellement d'un emprisonnement
d'un mois à un an, et d'une amende de 1,000 à 5,000 fr.,
sans préjudice des poursuites auxquelles pourraient don-
ner lieu les pièces représentées ; et que, pour des motifs
d'ordre public, .l'autorité pourrait toujours suspendre la
représentation d'une pièce, et même ordonner la ferme-
ture provisoire du théâtre. Cette législation fut abolie par
le Gouvernement provisoire de 1848; mais la liberté illi-
mitée ayant engendré des désordres , l'Assemblée législa-
tive, par une loi du 30 juillet 1850, rétablit l'autorisation
préal-able, laquelle pouvait toujours être retirée pour des
motifs d'ordre public, et porta à l'égard des contrevenants
la peine d'une amende de 100 fr. k 1,000 fr., sans pré-
judice des poursuites auxquelles les pièces pourraient
donner lieu. Un décret de 1863 a proclamé la liberté
des entreprises théâtrales : il n'y a pi un de directeurs
privilégiés qui prélèvent un cinquième de la recette brute
sur tous les spectacles ; mais le Droit des pauvres a été
maintenu. Aujourd'hui les thé&tres sont placés sous la
direction du ministre de Tlntérieur; leur police est
confiée, à Paris, nu Prélet de police ; au préfet dans les
chefs-lieux de département qui ont iO^OitO âmes et au*
dessus; et dans les autres communes à i'autoritô mu*
nicipaic. L'exploitation d'un théâtre étant un acte de
commerce, lusacleurs, auteurs, eréanciers qui ont dee
féciamaiious judiciaires à exercer contre le directeur,
'M^iVitat le citer devant le tribunal de commerce.
V. Vulpian et Gauthier, Code des théâtres, 1820,in-18t
J. Rousseau, Code théâtral, 1820, in-18; Vivien et Blanc,
Traité de la législation des théâtres, 1838, in-8«; Mau-
d'heux etCh. d'Argé, Répertoire raisonné dejurispn^'
dence théâtrale, 1843, in-8<^; Simonet, Traité de la po-
lice administrative des théâtres de Paris, 1850, in-8«;
Lacan et Paulmier, Traité de la législation et de la juris^
prudence des théâtres, 1853, 2 vol. in-8°.
THÉÂTRE (du grec théatron, dérivé de theaomai, Je
regarde) , édifice destiné aux représentations scénl'^ues.
Par extension, le nom de tliéâtre désigne l'ensemble des
ouvrages dramatiques composés par un aulemr ( le théâtre
de Corneille, le théâtre de Racine, etc.) , ou qui figurent
dans une littérature complète (le théâtre grec, le théâtre
espagnol, etc.). Au point de vue de l'Architecture, les
théâtres ont été, après les temples, les monuments les
plus remarquables des Grecs et des Romains en grau*
deur et en magnificence.
I. Théâtres antiques. — La tragédie et la comédie sont
également nées dans les fêtes de Bacchus : la partie sé-
rieuse de ces fêtes, représentée par le dithyrambe, engen-
dra la première; la partie Joyeuse, ou le c&mos, donna
naissance à la seconde. Mais la fête entière eut toujours
pour centre l'autel du dieu, sur lequel se brûlaient des
parfums, et qui reçut à cause de cela le nom de thymélé.
De bonne heure on prit l'habitude de réciter ou de chan-
ter auprès de l'autel quelqu'un des faits relatifs à l'his-
toire de Bacchus : le récitateur se tenait d'un côté de la
thymélé; les assistants se tenaient de l'autre côté. Dans
la suite, au lieu de raconter simplement une aventure
du dieu conquérant, le poète mit en dialogue les parties
du récit où une action se passait entre deux personnages ,
et s'adjoignit un répondant ou hypocrites ; ce mot servit
toujours depuis lors à désigner les acteurs dr,amatiques.
En même temps, pour être plus en vue des assistants,
ces acteurs montèrent sur une sorte d'estrade qui portait
le nom de scène, et vis-â-vis d'eux l'on dressa des gra-
dins, nommés Hcria, sur lesquels se rangèrent les spec-
tateurs. Tels furent les commencements du théâtre, dont
on voit que les trois parties essentielles sont Vautel , la
scène et les gradins; au fond, les théâtres antiques ne
continrent Jamais autre chose, et toutes les parties qu'ils
reçurent en se développant ne furent que des accessoires
ajoutés à ces trois éléments fondamentaux.
Les théâtres furent longtemps de bois : le premier théâ-
tre de pierre fut construit â Athènes au temps d'Eschvls
(76» olympiade, 500 ans av. J.-C.) sous le nom de Tlïéâti-e
de Bacchus, après l'écroulement des anciens gradins de
bois. Les théâtres qui furent élevés plus tard no s'éloi-
gnèrent pas beaucoup des dispositions adoptées ici. On
choisissait pour emplacement la pente de la colline qui.
dans toutes les villes grecques, portait le nom d'Acro-
pole; dans ce terrain, le plus souvent rocheux, étaient
taillés les gradins, que l'on complétait au besoin par des
blocs de rapport et par de la maçonnerie; ces gradins
formaient un amphithéâtre demi-circulaire, d'où les spec-
tateurs Jouissaient ordinairement d'un horizon étendu.
Le dernier gradin vers le bas dessinait ainsi une aire en
demi-cercle, dans laauelle s'élevait l'autel. Cette aire
portait le nom ô*orchestre, parce que c'était là que le
chœur exécutait en chantant les mouvements cadencés
de la strophe et de Vantistrophe qui formaient une sorte
de danse {orctiésis). On voit, par les grandes ruines de
théâtres qui existent encore en Grèce et en Asie Mi-
neure , que les mouvements du chœur étaient indépen-
dants de ceux de la scène, et que des deux côtés de
l'orchestre il y avait un passage qui lui permettait d'en-
trer et de sortir librement, selon les nécessités de l'action.
Le front de la scène s'élevait en ligne droite devant l'hé-
micycle, à une petite hauteur au-dessus de rorchestri\
Quand l'usage du rideau se fut introduit, on le logea dans
une rainure le long de cette rampe, et c'est là qu'il res-
tait pendant la représentation : on disait donc baisser l(
rideau dans le même sens où nous disons lever le rideau.
La scène formait en face des gradins une construction
3uelquefois très-considérable, et généralement composée
e trois corps de bâtiments : celui du fond , qui portait
le nom d'épiscénion, et ceux des côtés , qui étaient les
ailes. Ces bâtiments étaient destinés & contenir le maté-
riel du théâtre, les machines , les costumes, les masques,
et â servir de vestiaires et de retraite aux acteurs pen-
dant les représentations ; ils remplissaient donc le rôle
de garde-meuble et de coulisses. C'est devant ces façades
intérieures que l'on dressait au besoin les décoratftms
mobiles appropriées au sujet de chaque pièce; c'est entre
elles que descendaient à ciel ouvert les dieux et les êtrei
THÉ
1712
THÉ
aériens que Ton fusait souvent apparaître; l'art du ma-
chiniste consistait surtout à dissimuler les moyens de
suspension quMl employait. La surface scénique comprise
entre Tépiscénium et les ailes était généralement très-
étroite eu égard à sa longueur. Comme il paraissait rare-
ment sur la scène beaucoup de personnages à la fois, et
qu'on n'y voyait guère des peuples entiers ou des armées,
chacun des acteurs sortait à son tour de Tune des ailes
et rentrait dans Tautre. Face à face, et occupés de leur
propre action, ils n^avsient pas sans cesse le visage tourné
vers les spectateurs*, m les voyait le plus souvent de
profil , disposés de manière à ne pas se cacher les uns les
autres; et ils ressemblaient ainsi à une suite de bas-reliefs
se dessinant sur la façade de Tépiscénium. Le chœur
n*étant point sur la scène, mais k Torchestre, une faible
profondeur de scène suffisait toujours, même dans les
plus grands théâtres. D'ailleurs, cette disposition nous
prouve que les décors ne pouvaient qu'être mis à plat
contre les b&timents de la scène, et qu'ainsi les théâtres
grecs ne pouvaient offrir ces plans nombreux et ces effets
de perspective obtenus aujourd'hui par les coulisses et
les échafaudages. Du reste, les gradins supérieurs étaient
assez élevés pour atteindre au niveau des constructions
scéniques, et apercevoir au delà les montagnes et les
horizons lointains. Comme les représentations se faisaient
en plein Jour, le paysage naturel servait de décor au fond
de la scène. Aucune toiture, aucun abri ne couvrait les
spectateurs et ne leur dérobait la vue du ciel.
La commodité du spectateur était entendue tout autre-
ment qu'aujourd'hui. Car, s*ils étaient exposés à la cha-
leur du jour, ils avaient le plein air pour en tempérer
la rigueur, lis étaient assis sur la pierre; mais celle-ci
était taillée suivant des plans bien conçus, comme on le
voit au théâtre d'ftpidaure, œuvre do Polyclète. La circu-
lation se faisait aisément par les chemins qui montaient
de l'orchestre aux gradins les plus élevés. Li le spectateur
pouvait en outre prendre le frais sous une colonnade qui,
le plus souvent, régnait au haut de l'amphithéâtre, d'une
aile à l'autre.
L'illusion scénique semble également avoir été en-
tendue tout autrement que chez nous; en effet, d'uoei
oart, il n'est pas croyable que les décorateurs aient pour-
buivi une représentation pour ainsi dire scrvile de la na-
ture, laquelle eût été à peine possible sous la lumière du
soleil; ils ont dû, par conséquent, s'en tenir à de cer-
taines conventions qui leur permettaient de simplifier
leurs moyens et leure ressorts. D'un autre côté, l'esprit
artiste des Grecs n'eût jamais souffert qu'un acteur vint,
avec sa figure, représenter sur la scène un dieu, un héros,
ou un être idéal; on comprend, en effet, qu'il eût paru
fort déplacé au milieu d'objets qui avaient un sens trop
étendu et trop général pour que sa personne pût se ren-
contrer parmi eux; enfin comprend-on qu'un peuple
réellement artiste eût supporté, au milieu d'événements
divins et sous un costume héroïque ou même céleste, le
visage d'un homme que l'on rencontrait chaque Jour dans
la rue? L'art dramatique fit donc usage du masque de
très-bonne heure ; il ne tint nul compte de l'expression
des traits du visage sur la scène, et trouva plus avanta-
geux de les cacher sous une figure immobile doutée d'une
expression générale et appropriée au personnage et à
l'ensemble des événements. Le masque avait pour effet
de dénaturer les proportions du corps humain et de gros-
sir monstrueusement la tète : de là naquit le besoin d'éle-
ver la taille de l'acteur au moyen du brodequin appelé
cothurne, et d'allonger les vêtements en proportion. En
somme, le personnage paraissait plus grand que nature,
sa voix était amplifiée, son visage réduit à un type connu
du peuple, ses gestes rendus plus lents et plus solennels ;
ces changements n'avaient aucun inconvénieut, pui;*-
qu'ils rapprochaient l'acteur de l'idée qu'on se faisait
vulgairement des héros et des dieux.Ces cuuditious scé-
niques imposées aux poètes les obligeaient a ne point re-
chercher les petits moyens d'action, et à ne compter que
surleagrandespéripétiesetsurlaforce môme du drame.
Les dimensions des théâtres antiques imposaient aux
poëtes et aux acteurs les mômes nécessités. Celles de nos
théâtres modernes n'en donnent qu'une très-faible idée.
Non-seulement on ne voyait aucune construction ou gar-
niture analogue à nos loges et à nos galeries, mais la
conmiode disposition du théâtre en gradins concentriques
permettait à la fois de loger le plus grand nombre pos-
sible de spectateurs sur un espace donné, et d'étendre
vers le haut cet espace à fort peu de frais. Ainsi, les
gradins du théâtre de Bacchus à Athènes pouvaient con-
tenir .^0,000 spectateurs ; ceux d'Épidaure avaient 146 met.
de diamètre ; ceux de la petite ville de Sicyone 130", ceux
d'Éphèse 214" et pouvaient contenir 150,000 spectateurs.
La voix de l'acteur, amplifiée par le masque, renvoyer*
par la construction de la scène, et concentrée par la ga-
lerie supérieure, devait remplir cette immense enceinte ;
la forme évasée que présentait l'ensemble des gradin.o
était très heureuse pour l'acoustique, à laquelle d'ail-
leurs, nous savons que le plein air ne faisait aucuu>-
ment obstacle. Le grand nombre des spectateurs et le?
vastes dimensions qu'il imposait aux théâtres avaif-nt
plusieurs causes chez les Grecs : d'abord, les représenta-
tions dramatiques faisaient partie d'une fête religieu$^
et étaient un usage sacré auquel l'art des poètes donna
une puissance nouvelle sur les esprits; en second lieu,
ces représentations étaient rares dans l'année et non quo-
tidiennes comme chez nous, ce qui nécessairement derait
attirer un grand nombre de personnes, préparées d'ail-
leurs par leur éducation à comprendre même les chefs-
d'œuvre de l'art le plus élevé ; enfin l'entrée au théâtre
était gratuite, et permise aux hommes de toute condition.
Cette institution des théâtres, dont les villes faisaient les
frais, était donc entièrement démocratique. Elle ne l'a
jamais été chez les modernes, et il est même à remsrquej
3ue les nouveaux théâtres construits chez nous éloignent
e plus en plus par le prix des places les personnes que
leur fortune trop médiocre retient chez elles; l'argent
règne au théâtre. Les Grecs seuls, et, parmi eux, les
peuples ioniens, les Athéniens surtout avec leurs colo-
nies, ont su faire des théâtres de vrais établissements
démocratiques : ce caractère est imprimé à toute Tarcbi-
tccture des théâtres de la Grèce, aussi bien qu'aux œu-
vres de ses poètes dramatiques.
Quand l'art dramatique passa de la Grèce en Italie et
se fut établi dans Rome, son caractère religieux disparut
d'abord. Onallaitau théâtre pour se récréer; les repré-
sentations furent données au public le plus souvent pour
briguer ses suffrages ; les théâtres furent élevés par de
riches particuliers pour les plaisirs des électeurs popu-
laires; le métier d'acteur fut avili, et l'auteur même fut
soumis à une censure rigide et arbitraire. Tout le monde,
(lu reste, y fut admis, hommes, femmes et enfant^; ei
pour ne rien négliger de ce qui pouvait relever les don.v
teurs aux yeux du peuple, ■»;) y déploya une magnificcnre
inconnue aux Grecs. Tels furent le théâtre de Scannl^,
cnlui de Pompée. Plus tard on en construisit dans io it
l'Empire. Ce fut sur le modèle des théâtres grecs : stuie-
ment , le caractère sacré ayant disparu et avec lui l'ori-
gine même de l'art dramatique, il n'y eut ni thymélé ni
chœurs; l'espace vide laissé par l'orchestre fut occupi
par l'aristocratie romaine, tandis que les gradins Tétaieni
par le peuple. On peut donc regarder les théâtres ro-
mains comme ayant formé la transition entre ceux de la
Grèce et les théâtres modernes.
Aux théâtres on doit rattacher un genre d'édifices qui
s'en rapprochaient beaucoup : ce sont les Odéont ou théâ-
tres de musique ( V, Odéon). Le plus célèbre fut rOdé^n
de Périclès à Athènes. Les concours musicaux n'ayant
point une origine sacrée, il n'y eut point là d'autel de
Bacchus ; et comme on y allait pour entendre et non pour
voir, on n'eut pas besoin de disposer les places en cni-
dins. De plus, les dimensions de ces salles étant loin
d'égaler celles des théâtres , on put lea couvrir d'un t»!»
de forme circulaire, et donner à tout l'édifice la forme
d'une rotonde. On voit par quels côtés les salles de mu*
sique se rapprochaient des théâtres et par quels côtés elks
s'en éloignaient.
V Amphithéâtre romain, entièrement inconnu des Grecs,
n'est au fond qu'un théâtre où les èpiscénia ont été sup-
primés avec la scène même, ce qui a permis de doubler
les gradins et d'en former une enceinte unique et con«
tinue, presque toujours ovale, et où l'orchestre également
doublé s'est trouvé transformé en arène on espace sablé;
et comme il n'était guère possible d'adosser un tel édi-
fice aune colline, on l'élevade toutes pièces sur un trr
min plat, avec cet art des constructions voûtées q<:
dans les ruines romaines , fait encore l'admiration d* v
modernes. V. Amphithéâtre. Eh. B.
II. Théâtres modernes. — On ne saurait détermina r
d'une manière précise l'époque de la construction d<'«
premiers théâtres en Europe pendant le moyen âge. !/?«
Mystères (F. ce mot) se représentaient sur des échafa»-
dages dressés dans les places publiques ou dans de vastes
salles. Ce fut seulement au xvi* siècle que des archi-
tectes italiens édifièrent des théâtres fixes. Tel fut celui
eue Bramante construisit en pierre, et dans la forme des
théâtres antiques, à l'extrémité de la grande cour du Va-
THfi
1713
TITft
tican. Palladio éleva à Vîcence, en 1580, toujours d'après
Ips modèles laissés par les Anciens, mais en ajoutant une
toiture, un thé&tre que Ton conserve encore aujourd'hui
avec un soin religieux, n est de forme demi-ovale; la
scène ofire 7 rues, avec des palais, des temples, des arcs
de triomphe en relief; mais ces édifices étant nécessai-
"«ment petits, le coup d'œil est d'un mauvais effet. Vin-
cent Sciunozzi modela élément sur l'antique, avec plus
de rigueur encore, le thâtre de Sabionnetta; en lui don-
nant la forme demi-circulaire, il rendit la scène visible
pour tous les spectateurs. En 1618, J.-B. Aleotti con-
struisit le thé&tre de Parme, dont la forme générale est
un hémicycle prolongé par des lignes droites : autour
du parterre est un vaste amphithéâtre, surmonté de deux
galeries ornées de colonnes et d'arcades; au-dessus est
un acrotère avec des figures qui semblent porter le pla-
fond; Tavant-scène offre deux rangs de niches ajustées
avec de petites colonnes qui rappellent en grande partie
la décoration des scènes antiques; vers les deux faces, en
retour de Tavant^-scène et en retour avec les loges, sont
deux arcs de triomphe surmontés de figures équestres.
La disposition des thé&tres antiques ne pouvait pas
convenir aux usages modernes. On ne tarda pas à rem-
placer les gradins par des rangs de loges ou des balcons,
et la scène devint plus profonde, afin de faire jouer les
machines et de produire des effets pittoresques. Dans le
xvii* siècle, toutes les villes d'Italie voulurent avoir leur
théâtre fixe, et ces thé&tres furent construits à peu près
9ur le plan que nous avons conservé jusqu'à présent.
Toutefois, si l'on excepte le thé&tre de S^ Charles à Na-
ples, et celui que Galli da Bibiena éleva à Bologne vers
1703, les anciens thé&tres italiens ne présentaient pas
les conditions que l'on exige aujourd'hui : point de fa-
çade extérieure qui les caractérise; point de portique
pour tenir la foule & couvert avant l'ouverture de la salle ;
point d'abri pour descendre de voiture, ni de foyer pour
la promenade des spectateurs pendant les entr'actes;
point de café à l'intérieur.
En France, ce ne fut guère qu*au xvii® siècle nue l'on
bâtit des thé&tres durables. Un des premiers et des plus
importants fut le thé&tre construit dans le Palais-Royal
par ordre du cardinal de Richelieu : l'intérieur de la
salie consistait en 27 gradins et 2 rangs de loges ; la
noblesse occupait des banquettes sur les côtés de l'avant-
scène {V. BATsotiinrTES ) ; dans les gradins, les femmes de
la cour se faisaient apporter des fauteuils ou des chaises ;
au parterre, on restait debout. Les autres salles ont dû
présenter & peu près les mômes dispositions. Les repré-
sentations n'avaient encore lieu alors que pendant le
jour : les ordonnances de police prescrivaient de finir les
spectacles, en hiver, & quatre heures et demie. Louis XIV
lit construire aux Tuileries, par Tarchitecte italien Gas-
pard Vigarani, une salle de style composite qui occupait
toute la largeur du pavillon Marsan. La scène avait
H met. de profondeur, 10'»,66 d'ouverture, et H"',33
ilc hauteur; le dessus, pour la retraite des décorations,
était de 12'",33, et le dessous de 5"'. La partie livrée aux
spectateurs avait 16™,33 de largeur, sur 31'" de profon-
deur; la hauteur du parterre & la voûte était de i0"',33.
Quand on donna les représentations le soir, il fallut
éclairer les salles de spectacle : de 1& l'emploi du lustre
( V, ce mot ). On éclaira également la rampe^ et tout
d'abord avec des chandelles, car la salle de l'Odéon, &
Paris, fut la première où l'on employa des lampes ou
quinquets en 1784.
Les dispositions des thé&tres modernes sont à peu près
les mômes chez toutes'les nations européennes. Cepen-
dant, l'emploi des balcons appartient plus spécialement
aux peuples du Nord, et les loges fermées & ceux du Midi.
Les Italiens ne connaissent pas ces longues galeries qui,
chez nous, font le tour de la salle en avant des loges.
En Espagne, jusqu'à la fin du xviii" siècle, les salles de
spectacle ont été carrées : au-dessous des trois rangs
de loges il y avait un amphithéâtre où se plaçaient les
femmes; dans toute la façade du fond étaient des gale-
ries grillées, n^rvées aux moines, et le parterre était
disposé en gradins, avec un espace libre au milieu, qui
répondait & l'orchestre antique.
Après bien des t&tonnements et des expériences , il a
été reconnu que la meilleure forme pour les théâtres
modernes est la forme elliptique. Tout spectateur, en se
rendant au spectacle, se propose d'entendre et de voir ;
or, TelUpse est la courbe la plus favorable & la libre cir-
culation du son, et la disposition des loges et des galeries
sur cette courbe est la plus avantageuse pour voir sur la
i^èue. Si, aoi*èa avoir fiié les deux foyers de l'ellipse, on
tire une ligne parallèle au petit diamètre et au quart dn
la longueur du grand, la longueur de cette ligne donne
exactement les meilleures proportions de l'ouverture de
l'avant-scène. Si l'on tire au ael& de l'avant-scène une
ligne parallèle au petit diamètre de l'ellipse et au hui-
tième de la longueur totale du grand diamètre, si Ton
tire ensuite deux lignes des extrémités du petit dia-
mètre et passant aux extrémité de la ligne parallèle, le
point d'intersection de ces deux lignes obliques donne
celui de la profondeur nécessaire du thé&tre, tant sous le
rapport des rayons visuels que sous celui des lignes
acoustiques. Il n'est guère possible, pour que les acteurs
soient entendus, de donner plus de 25 met. à la salle,
depuis l'avant-scène jusqu'au fond des loges du point
opposé. Pour que des places latérales les plus élevées
les spectateurs puissent voir convenablement sur la
scène, il faut que le rang de loges ou de galerie le plus
élevé de la salle ne surpasse pas en hauteur les deux
tiers de la longueur totale de cette salle. C'est d'après
ces principe» qu'ont été construits beaucoup de thé&tres
italiens, qui peuvent servir de modèles, tels que : l'an-
cien thé&tre de Fano, b&ti sur les dessins de Torelli ;
celui de Mantoue, dû & Galli da Bibiena; celui d'imola,
œuvre de Cosme Morelli ; le thé&tre San-Bcncdetto à
Venise, et la salle Argentina, & Rome, que le comte Teo^
doli a faite sur le môme modèle; le grand théâtre de la
Fenice, à Venise, construit par Selva; celui de la Scala,
& Milan, par Piermarini; le nouveau thé&tre de Parme.,
par Bettoli, etc. Les avantages de la forme elliptique étant
connus, il en résulte que le plafond d'une salle de spec-
tacle, surtout d'une salle d'opéra, doit être tracé sur une
courbe elliptique, qu'il faut se garder d'interrompre par
une ouverture au centre, comme on le fait sous prétexte
de favoriser le renouvellement de l'air dans la salle : avec
cette forme, il favorise autant que possible la circulation
du son. Par suite, le plafond doit offrir une surface plane,
nue pour ainsi dire, dépouillée de ces compartiments et
autres fantaisies arcltitecturales qui n'ont d'autre effet
que de dénaturer la masse du son, de la disperser, et de
donner aux voix un caractère différent en divers points
de la salle.
11 est encore une forme que l'en peut donner aux
thé&tres avec avantage : c'est celle du cercle, tronqué vers
le quart par l'ouverture du proscenium, et au cinquième
par celle du rideau. Elle a été adoptée complètement ou
à peu près au thé&tre SM^harles de Naples ; au thé&tre
de Bordeaux, construit par Louis; au Thé&tre Français
de Paris, ouvrage du môme architecte, mais où l'on a un
peu perdu de la propriété du cercle par une trop grande
élévation intérieure; dans la môme capitale, au théAtre
de la Porte-S*-Martin, par Lenoir; au thé&tre des Va-
riétés, par Cellerier ; au thé&tre de l'Opéra, rue Le Pele-
tier, par Debret. — On a fait & Londres un essai bizarre,
et sans succès, celui d'une salle en forme de porte-voix ,
dont la partie la plus resserrée est vers la scène : si cette
disposition a pu ôtre déterminée par des raisons d'acous-
tique, elle privait entièrement des propriétés de l'optique
les parties latérales de la salle.
Une des erreurs les plus grandes des architectes dans
la construction des thâttres a été de séparer la scène et
le reste de la salle par un mur avancé ou par une masse
solide, soit que cette masse soit arrondie en forme d'ar-
chitrave, soit qfu'elle forme un encadrement. Ce mur ou
cette masse solide est un repoussoir qui d'une part re-
jette en arrière la voix des acteurs, et de l'autre produit
une répercussion des effets de l'orchestre, laquelle déna-
ture la qualité du son et ne le fait parvenir que réfléchi
jusqu'au public. De môme, les colonnes placées commu-
nément aux loges de l'avant-scène, avec leurs chapiteaux
et l'espèce de fronton qu'elles supportent, non-seulement
interrompent la ligne acoustique et gônent les effets
de la vision, mais encore forment des gouffres où le son
s'engloutit. Cet inconvénient a disparu dans le nouveau
Théâtre impérial du Châtelet, ouvert & Paris en 1862 :
l'architecte, M. Davioud, a prolongé jusqu'& la scène les
galeries des spectateurs. Ce thé&tre présente une autre
innovation, qui est toute une révolution dans le système
d'éclairage des salles : l'énorme lustre qui intercepte la
vue & un certain nombre de spectateurs des galeries su*
périeures, et d'où se dégage, surtout depuis l'emploi du
gaz, une chaleur suffocante, a été supprimé; >e plafond
de la salle est formé par un immense verre ovale, dépoli
et ciselé, au-dessus duquel on a concentré de nombreux
becs de gaz, et la lumière arrive en quelque sorte tamisée
et singiili^;rement adoucie. Ce système d'éclairage a été
«ncore adopté au Tliéâlre-hjrique de la place dn Cl»&lo-
THÊ
nu
tHÉ
let, da même artiste, ainsi qu'au théâtre de la Gaité, sur
l« square des Arts et Métiers, Tun et l'autre construits
aussi en 1862. Au théâtre de la Gaité, Tarchitecte, M. Cui-
lin, a introduit quelques modifications heureuses : la
décoration du plafond a la forme d'une vêla disposée en
panneaux; au centre est un grand cercle, rempli par
une sorte de culnde-lampe en verre dépoli et en cristaux,
et fixé un peu en contre-bas du plafond, de sorte que
la lumière se projette mieux dans la salle ; l'extrémité
des panneaux est plissée en demi-cercles par où la lu-
mière pénètre encore; et en outre le milieu de chaque
panneau a un médaillon qui est aussi une ouverture
pour la lumière^ et qui sort au-dessous de la vêla, à peu
près en demi-globe. Cette disposition donne un effet gé-
néral plus lumineux.
Tous les matériaux ne peuvent être employés indiffé-
remment dans les constructions intérieures d'une salle
(le spectacle. C'est ce qui ne préoccupe pas assez les ar-
chitectes, dont les uns multiplient les corps durs qui
répercutent le son avec sécheresse, et les autres em-
ploient avec profusion les toiles et les étoffes qui l'absor-
bent. Il faut qu'une salle soit sonore, et qu'elle vibre
dans son ensemble à peu près à la manière d'un instru-
ment : la pierre, le fer et les autres métaux, ne vibrent
I)oint harmoniquement, et répercutent avec dureté; le
bois, au contraire, et surtout le bois léger, tel que le
sapin, a toutes les qualités propres à donner des vibra-
tions faciles, et conséquemment à seconder la sonorité
de la salle. Il suit de là que toute enceinte intérieure de
salle de spectacle doit être faite en bois de cette espèce :
plus le bois est compact, moins il facilite la résonnance ;
par conséquent, le chêne, l'orme, le charme doivent être
rejetés ; le hêtre est admissible. On recouvre souvent de
toile le pourtour des galeries, dans le but de faciliter les
travaux du peintre décorateur; c'est un mal par rapport
& l'acoustique, car le son s'insinue et s'absoroe dans les
mailles de cette toile.
La difficulté do disposer convenablement Torchestre
pour la bonne résonnance est assez grande. S'il est trop
bas à l'égard de la scène, il devient sourd, et ne forme
point un tout homogène avec les voix ; s'il est assez élevé
pour l'effet musical, il devient un obstacle à la vue des
spectateurs les plus rapprochés de la scène. La meilleure
position, sous le rapport de l'homogénéité des sons , est
celle où l'extrémité du plancher de l'orchestre opposée
à la scène forme avec le plancher de l'avant-scène un
ongle d'environ 25 degrés : mais il n'est possible d'élever
autant l'orchestre qu'en donnant aussi beaucoup d'éléva-
tion au fond du parterre, afin d'obtenir une pente douce
qui permette aux spectateurs les plus voisms de l'or-
chestre de voir la scène sans obstacle. V, Orchestre.
La décoration d'une salle de spectacle n'est point livrée
au caprice du jour ou des hommes ; elle est prescrite par
le genre des représentadons affectées à tel ou tel théâtre.
Elle résulte essentiellement de la disposition architecto-
nique, puis du ton local, et enfin des détails d'ornements
allégoriques qui lui sont spécialement applicables. D'un
autre côté, il n'est pas possible d'adapter à deux salles de
différente grandeur une disposition semblable, par exem-
ple un égal nombre de rangs de loges ou de loges fer-
mées, sans violer les lois de l'optique.
V. Bulengerus, De theatro ludisque scenicis lit. FI,
1603, in-8° ; Boindin, Discours sur la forme et la con-
struction du tfiéâtre des Anciens, dans les Mém. de VAcO'
demie des Inscriptions^ t. I et IV; Poleni, Degli teatri
antichi, Vicence, 1735, in-8°; J. Carpi, Opère del teatro
antico e modemo, Vérone, 1769 ; Motta, Trattato sopra
la struttura dt^ teatri e scene^ Guastalla, 1676, in-fol. ;
Roubo, Traité de la construction des tïtéâtres, Paris,
1776, in-fol.; Lamberti , La regolata construzione dé*
teatri, Naples, 1787, in-fol. ; Bicati, Délia construzione
de' teatri, Bassano, 1790, in-4''; Saunders, Treatise on
théâtres, 1790, in-4°; Patte, Essai sur l'architecture
théâtrale, 1782; Boullet, Essai sur l'art de construire
les théâtres, Paris, an viii; Genelli, Le théâtre d'Athènes,
son architecture, son mécanisme scénique, en allem.,
Berlin, 1818, in-8°; J. Ferrario, Storia e descrizione de'
principali teatri antichi e modemi, Milan, 1830, in-8°;
E. Trélat,Le Viéâtreet i'arcAifecfe, Paris, 1800, in-8°. B.
THÉÂTRE (Directeur de). Les théâtres des Anciens
n'avaient pas de directeurs en titre : les archontes et les
autres magistrats en Grèce, les édiles à Rome, présidaient
à Tadministration de ces établissements, qui étaient,
pour la plupart, des propriétés de l'État. Chez nous, nul
D8 put, jusqu'en 1863, être directeur de théâtre oe
j8 spectacle, sans un yriviléoe ou une tolérance. La
directeur privilégié était à peu près assuré de res-
ter le maître de son entrepribe pendant le temps qui
lui était concédé par son privilège; le directeur par to-
léranca u% relevait que de la police, et pouvait, sur un
simple ordre émané d'elle, être contraint de fermer de 1«
veille au lendemain. A Paris, les directeurs de l'Académie
impériale de musique, dite plus habituellement aujour-
d'hui VOpéra, ceux de l'Opéra -Comique, da Théâtre-
Français, du Thé&tre-Italien et du Théâtre de l'Odéon
sont subventionnés par le gouvernement; l'Etat «
pris à sa charge l'excédent des dépenses nécessitées pour
la splendeur de l'Opéra. Dans les départements, les di-
recteurs privilégiés à résidence fixe reçoivent générale-
ment des subventions des villes, tandis que ceux qui
n'ont que des troupes d'arrondissement et qui desservent
plusieurs localités sont à peu près abandonnés à leurs
seules ressources.
TH^TRB (Moralité du). S'il est vrai que le premier
thé&tre digne de ce nom ait été construit dans Athènes
par Eschyle, le père de la tragédie grecque, le glorieux
prédécesseur et rival de Sophocle, on peut dire que les
représentations dramatiques avaient pris naissaaœ parmi
les hommes sous les plus favorables auspices. La « hau-
teur divine » où d'abord avaient atteint les deux émules
était faite pour justifier et recommander les spectacles
naissants, par les sentiments élevés qu'ils excitaient dans
l'âme des spectateurs. Mais, depuis, les différentes litté-
ratures ont vu naître d'innombrables aspirants à la gloin
du cothurne, qui n'ont pas su toujours conserver à k
tragédie sa beauté sévère et sa grandeur morale des pre-
miers temps. D'autre part , la comédie, sortie du délire
et de l'ivresse des Bacchanales, dès sa naissance et par la
suite parcourut capricieusement tous les degrés qui sé-
parent le haut comique du grotesque et du bouffon : tour
a tour ou tout ensemble, dans Molière comme dans Aris-
tophane, grossière, licencieuse, fantasque et élé^nte^
fine, épurée, de bonne et honnête compagnie. Ajoutez
qu'à toutes les époques, tragiques et comiques se sont
montrés généralement plus soucieux d'être applaudis du
spectateur que de lui donner, même indirectement, des
leçons de vertu qu'il ne leur demandait pas. Pourvu
qu'en somme le public se pressât aux représentations et
battit des mains, n'avaient-ils pas atteint leur but? Mais
la philosophie ni la religion n'ont été d'avis que le succès
justifiât l'institution, et de bonne heure elles condam-
nèrent le théâtre.
Platon commença l'attaque. « Nous ne recevons, dit-il,
dans notre République, ni la tragédie ni la com^e. »
Admirateur des institutions de Lycurgue et du caractère
Spartiate, précurseur du Stoïcisme, il censurait les la-
mentations des théâtres, propres à exciter et à flatter en
nous cette partie faible et plaintive qui s'épanche en gé-
missements et en pleurs, et cette autre partie pÂus em-
portée de notre âme, où régnent l'indignation et la co-
lère, comme s'il y eût rien dans les choses humaines ouf
valût la peine qu'on s'en irritât et qu'on en versât des
larmes. Il n'approuvait pas davantage cette pente aveugle
et impétueuse à se laisser emporter par l'envie de rire,
aussi capable que les représentations tragiques d'entre-
tenir et d'augmenter en nous ce qu'il y a de déraison-
nable. Par un autre principe encore plus universel , l'aus-
tère législateur, jugeant que tous les arts qui n'ont pour
objet que le plaisir sont dangereux à la vie humaine,
parce qu'ils vont le puisant indifféremment aux sources
bonnes et mauvaises, étmt amené à exiler à la fois de sa
cité idéale tous les poètes comiques, tragiques, épiques,
Homère lui-même. Celui-ci, d'ailleurs, était en gr^de
partie le créateur de la mythologie grecque; n*était-il
donc pas pernicieux de nourrir de fables et de fictions
l'esprit des jeunes gens? — Plus positif et plus pratique,
mis en garde aussi contre un esprit de système trop ex-
clusif et trop absolu par ce sentiment de la réalité qui,
chez lui , contraste si fort avec le penchant de son maître
pour l'utopie, Aristote rédigea les règles de l'art qu'avait
réprouvé Platon. Et pourtant, il ne croyait point qu'on
pût admettre la jeunesse à la représentation dee comé-
dies, ni même des tragédies : il craignait les impressions
que ces spectacles produiraient sur des âmes tendres et
novices, trop facilement accessibles â l'émotion.
A Rome, Cicéron, qui, comme ami des lettres, goûtait
les œuvres des vieux poètes latins au point de les savoir
par coeur, raillait, comme philosophe, la comédie, qui
mettait au nombre des dieux l'Amour, l'auteur des ricei
et de la licence, et qui affichait néanmoins la prétention
d'être une école de morale. Sénèque, plus sévâe, renoo-
felle, sous l'inspiration de la doctrine steSdemie, les
THÉ
1715
THÊ
eusatiooB de Platon, et enseigne à son ami Lucilius qu'il
n'y a rien de plot nuisible à Tàme que la fréquentation
du thé&tre. Il est vrai qull entend surtout parler du
Cirque et des spectacles de gladiateurs. « C'est là, lui
dit-il , que le plaisir introduit aisément le vice dans le
cœur des hommes; on en sort toujours plus cupide, plus
ambitieux, plus porté au luxe et au plaisir. » Il n*est pas
étonnant, d'ailleurs, que la môme philosophie qui con-
seille d*éviter le monde et les nombreuses compagnies
recommande de fuir le théâtre, qui n'en est souvent que
la séduisante et trompeuse image.
Le langage des philosophes fait pressentir celui des
chrétiens. Les Pères de TÉglise furent, en effet , d*accord
pour condamner les spectacles, et ils devaient Tôtre.
D'abord, le thé&tre était une institution païenne, et il
tenait par d'innombrables liens à la mythologie, contre
laquelle combattaient unanimement tous les grands re-
présentants du christianisme. D'autre part , soutiens et
propagateurs d'une doctrine plus rigide encore que le
Stoïcisme, laquelle prétendait apporter au monde le culte
de la chasteté et tourner vers le ciel toutes les pensées
des hommes, les reprâientations théâtrales avaient na-
turellement à leurs yeux le double tort de porter atteinte
à la pureté des mœurs, et de préoccuper de plaisirs ter-
restres et mondains des &mes qui devaient chercher
toutes leurs Joies dans le service de J^us-Christ et les
espérances de l'autre vie. — Leurs arguments divers ont
été reproduits dans la polémique qui s'engagea au xvii* et
au XVIII* siècle sur la môme matière. Le débat s'ouvrit en
1665 entre Desmarets de Saint-Sorlin et Nicole, qui re-
présentait Port-Royal ; mais ce qui fut plus intéressant
peut-ôtre que la lutte, ce fut le rôle inattendu qu'y Joua
Racine. Desmarets, l'auteur infortuné de la comédie des
Visionnaires et du poème épique de Clovis, las d'ôtre
poète, dit Louis Racine dans ses Mémoires sur la vie de
son père, voulut ôtre prophète, et prétendit avoir la clef
de VApocalypse, Il eut l'honneur d'être foudroyé par
Nicole. Celui-ci composa contre ses prétentions des Lettres
imitées des ProvincicUeSj et qu'il intitula Visionnaires^
parce qu'il les écrivait contre l'auteur de la comédie de
ce nom , devenu lui-môme un visionnaire d'un nouveau
genre. Dans la première de ces Lettres, il faisait remar-
quer que ce prétendu illuminé ne s'était d'abord fait
connaître dans le monde que par des romans et des co-
médies; puis il ajoutait : « De telles qualités, qui ne sont
pas fort honorables au Jugement des honnêtes gens, sont
horribles, considérées suivant les principes de la religion
chrétienne. Un faiseur de romans et un poôte de thé&tre
est un empoisonneur public , non des corps , mais des
Ames. Il se doit regarder comme coupable d'une infinité
d'homicides spirituels, ou qu'il a causés en effet, ou qu'il
a pu causer. » C'est ce mot qui mit à Racine la plume à
la main. Formellement invité, depuis ses liaisons avec
les comédiens, & ne plus se présenter à Port-Royal , et
cela par sa propre tante, qui faisait partie du couvent,
il se persuada aisément que la sortie de son ancien maître
contre les poètes le regardait, se froissa, et, se lais-
sant entraîner inconsidérément au premier mouvement
de son dépit, répliqua par une Lettre fort vive, spiri-
tuelle et mordante, mais dans laquelle il tournait plutôt
les Jansénistes en ridicule qu'il ne défendait le thé&tre.
Nicole ne répondit pas, et fit bien : le silence, vis-à-vis
d'un élève oublieux de ses devoirs, était de la dignité.
Mais deux Jansénistes, Dubois et Barbier d'Aucourt,
ripostèrent, non sans succès. Racine alors acceptant
le défi, et s'enivrant pour ainsi dire de son esprit, com-
pose une seconde Lettre, plus piquante, plus amère,
plus sarcastique encore que la première, et court la lire
& Boileau. Celui-ci l'écoute avec calme, puis, pratiquant
dès lors la sincérité courageuse qu'il recommande, dans
son Art poétique, au critique honnête homme, répond
d'un grand sang-froid à son ami : « Voilà un ouvrage qui
fera honneur à votre esprit, mais qui n'en fera pas à votre
cœur. Vous attaquez, après tout, des hommes fort esti-
més, et c(ui ont été vos maîtres. » Ce mot fit une révolu-
tion subite dans les dispositions de Racine; ce fut comme
une lumière soudaine qui lui dessilla les yeux; Jusque-là
son amour-propre avait seul parlé, le naturel mainte-
nant reprenait le dessus : Racine sentit sa faute et la re-
connut noblement. |.'esprit est souvent la dupe du cœur,
a-t-on dit : c'est le contraire qui fut vrai dans cette cir-
constance. La lutte finit avec cet incident, qui, d'ailleurs,
avait été une querelle personnelle plutôt qu'un débat
général et régulier entre les défenseurs et les adversaires
es spectacles. Il n'en fut plus de môme en 1694, lorsque
Bossuet descendit dans la hce. Nicole, il est vrai, dès 1675,
et le prince de Conti, qui, de protecteur avoué de Mo*
liëre, était devenu dévot sincère et Janséniste, avaient
d'avance publié l'un et l'autre, sur la comédie, des consi-
dérations qui nous expliquent de reste le nom dont Port-
Royal flétrissait les poètes dramatiques; mais Bossuet
allait reprendre pour son propre compte leurs arguments
et les animer de toute la force de son éloquence.
On venait de publier le Thé&tre de Boursault, et,
comme préface, on avait reproduit une lettre qu'on
attribuait à un Théatin , le P. Caffaro, et où l'auteur s'ef-
forçait de prouver qu'on pouvait très-innocemment com-
poser, lire, et voir représenter des comédies. L'arche-
vêque de Paris condamne publiquement la Dissertation ,
et retire au Théatin tous ses pouvoirs, tandis que Bossuet
lui écrit une lettre de reproches et de réfutation. Le
P. Caflàro se disculpa, et, selon l'expression de Bossuet,
satisfit au public par un désaveu aussi humble que so-
lennel ; mais le grand prélat controversiste et militant du
xvu* siècle, désirant prémunir les faibles contre les prin*
cipes qu'on cherchait à insinuer dans leur esprit, publia
son 'ouvrage intitulé Maximes et Réflexions sur ta Co^
médiê, exposé complet des opinions de l'Église sur les
spectacles. On avait dit, dès le début de la Lettre, que
les comédies du Jour étaient si épurées, qu'il n'y avait
rien que l'oreille la plus chaste n'y pût entendre. Blessé
de cette assertion aventureuse comme d'un sacrilège,
Bossuet répond sans mesurer son irritation : « Il fauchti
donc que nous passions pour honnêtes les impiétés et les
infamies dont sont pleines les comédies de Molière...
Songez si vous osez soutenir à la face du ciel des pièces
où la vertu et la piété sont toujours ridicules, la corrup-
tion toujours excusée et toujours plaisante, et la pudeur
toujours offensée, ou toujours en crainte d'être violée
par les derniers attentats. Je veux dire par les expressions
les plus impudentes, à qui Ton ne donne que les enve-
loppes les plus minces. » — L'inexorable théologien s'en
prend ensuite à l'Opéra: à Quinault, qui a réduit en
maximes la corruption, avec toutes ses invitations à Jouir
du beau temps de la Jeunesse; puis à Lulli , qui ne sert
qu'à insinuer les passions les plus décevantes, en les
rendant plus agréables et plus vives encore par le charme
de la musique. Puis enfin, à propos des tragédies de
Corneille et de Racine qu'il enveloppe dans le même
anathème, s'élevant à des considérations plus générales,
il affirme et démontre que la représentation des passions
agréables a pour objet de les exciter; que le succès de
l'auteur est à ce prix ; qu'il manque son but si les spec-
tateurs ne sont pas, comme ses héros, épris des belles
{personnes, ne les servent pas comme des divinités, et ne
eur sacriffent pas tout, sauf la gloire; et qu'ainsi ces
peintures portent naturellement au péché. En vain pré-
tendrait-on que le thé&tre purifie l'amour en le faisant
aboutir au mariage : cela fût-il vrai , répond-il , selon ces
principes, on devrait au moins bannir du milieu des
chrétiens les prostitutions qu'on voit toutes crues dans
les pièces de Molière, où sont étalés au grand Jour les
avantages d'une inftlme tolérance dans les maris, où les
femmes sont sollicitées à de honteuses vençeances contre
leurs Jaloux. Mais une telle excuse est vaine, et ne dé-
fendra pas plus des vengeances de Dieu ceux qui s'en
autorisent, que l'auteur du Malade imaginaire ou du Mè-
decin maigri lui. Car on aime les personnages, au thé&tre,
non pas comme époux, mais comme amants, et c'est
amants qu'on veut être, sans songer à ce qu'on pourra
devenir après. La confession , disait la Dissertation , n'a
pas encore manifesté les dangers des spectacles : comme
si, réplique Bossuet, l'on ne pouvait pas être malade
sans s'en apercevoir, et que les maladies dont le malade
n'a pas conscience n'étaient pas les plus dangereuses!
Et compte-t-on pour rien les crimes des chanteuses, des
comédiennes et de leurs amants ! « Quelle mère, je ne
dis pas chrétienne, mais tant soit peu honnête, n'aime-
rait pas mieux voir sa fille dans le tombeau que sur le
thé&tre? » N'y a-t^-il pas, d'ailleurs, des choses qui,
sans avoir des effets marqués, mettent dans les &mes de
secrètes dispositions très-mauvaises? « Qui saurait con-
naître ce que c'est en l'homme qu'un certain fonds de
Joie sensuelle et je ne sais quelle disposition inquiète et
vague au plaisir des sens, qui ne tend à rien et tend à tout,
connaîtrait la source secrète des plus grands péchés, a
Que si vous alléguez enfin l'indulgence des lois civiles,
le prélat vous dira que les lois de la cité sainte et celles
du monde sont différentes, et que tout ce qui se permet
au dtoven ne se permet pas au chrétien. — Après
avoir ainsi montré que les spectacles sont mauvais en
eux-mêmes, Bossuet discute les témoignages que Thit-
TIIÊ
1716
Tllfi
toîrc du christianismo fournit contre lo tliéÀtre, et dé~
montre qu*à l'exemple des philosophes paiens, les Pères
de l'Église Vont prosent , et que les arguments qu'ils ont
exposés ne s'appliquent pas moins aux laïques qu'aux
membres du clergé. On avait mis en avant S' Thomas,
Fun des grands repr^ntants de la Scolastique : Bossuct
établit qu'il n'est pas certain que S' Thomas ait parlé de
la comédie; qu'il est plutôt certain qu'il n'en a pas voulu
parler; qu'enfin l'eûtril approuvée spéculativement, la
comédie moderne est explicitement condamnée par ses
paroles. Tout au plus S^ Thomas s'est-il écarté de la doc-
trine primitive au sujet des divertissements, en montrant
plus d'indulgence que les anciens Pères pour toutes lc<$
sortes de discours qui font rire. Rire ne convient pas aux
disciples de Jésus-Christ, qui a dit qu'on rendra compte,
au Jour du jugement, m^me des paroles oiseuses. Con-
cluez donc hardiment , si vous suivez les maximes chré-
tiennes, qu'il faut ranger la comédie parmi les choses
les plus pernicieuses qui se puissent concevoir. Tel était
le dernier mot de Bossuet.
Religieux au xvii" siècle, le débat redevint philoso-
phique au xviii', prenant ainsi chaque fois quelque chose
du caractère du temps. 11 s'engagea, en 1758, entre
J.-J. Rousseau et d'Àlembert inspiré par Voltaire. Ce-
lui-ci venait de s'établir à Ferney : après avoir fait jouer
dans son ch&teau, sur un théâtre privé, plusieurs de ses
pièces, il eut envie d'un ^Tai parterre et d'applaudisse-
ments publics, à la place de ses invités intimes et de leurs
éloges moins bruyants et qu'il pouvait croire quelque
peu intéressés. Genève était près de Ferney : D'Alembert
insère dans VEncyclopédie un article sur Genève, et con-
seille aux Genevois d'avoir un théâtre. Rousseau lit l'ar-
ticle, et répond par sa Lettre sur les spectacles, qu'il
repoussait au nom de la famille et de l'État, comme
Bossuet l'avait fait au nom de la religion. Son œuvre com-
prend trois parties : d'abord il justifie les pasteurs gene-
vois sur certains sentiments que D'Alembert leur attri-
buait en matière de religion ; puis il attaque les spec-
tacles pris en eux-mêmes, et montre enfin que, quand la
morale les pourrait tolérer, la Constitution de Genève ne
lui permettrait pas d'en avoir. De ces trois points, le se-
cond seul nous intéresse. Parmi les arguments de Rous-
seau contre le théàtra, les uns sont reproduits, à son insu
peut-être, de Bossuet, les autres lui appartiennent en
propre. En voici le résumé. — Un spectacle est un amu-
sement; or les amusements ne sont permis qu'autant
qu'ils sont nécessaires; ils sont funestes, s'ils sont inu-
tiles. Celui des spectacles est inutile, parce qu'il ne dé-
rive pas de la nature de l'homme. « Un père, un fils, un
mari, un citoyen ont des devoirs si chers à remplir, qu'ils
ne leur laissent rien à dérober à l'ennui. » — Il est fii-
cheux pour les spectacles que leur espèce soit détermi-
née, non par leur utilité, mais par le plaisir qu'y goûte
le spectateur. Un peuple féroce et bouillant veut du san^,
des combats, des passions atroces ; un peuple voluptueux
veut de la musique et des danses; tous deux, des spec-
tacles qui favorisent leurs penchants, au lieu qu'il en
faudrait qui les modérassent. Premier inconvénient. —
La scène en général peint les passions humaines, mais en
les flattant; sans quoi les spectateurs se rebuteraient, et
ne voudraient plus se voir sous un aspect qui les fît mé-
f>rJscr d'eux-mêmes. Second inconvénient. — L'émotion,
c trouble et l'attendrissement qu'on emporte du spectacle
n'annoncent pas une disposition bien prochaine & sur-
monter et régler ses passions. L'image des peines qui
naissent des passions n'efface pas celle des transports de
plaisir et de joie qu'on en voit aussi naître. Ici Rousseau
parle comme Bossuet et Nicole. — Le théâtre, dit-on ,
nien dirigé, rend la vertu aimable et le vice odieux. L'une
était aimable et l'autre odieux avant qu'il y eût des spec-
tacles. Ajoutez qu'il n'est pas rare de haïr les vices re-
présentés beaucoup plus avant la représentation qu'après.
Conclusion : le théâtre est au moins inutile, sinon per-
nicieux. — Vous mettez en avant l'admiration que la
tragédie produit dans les âmes. L'effet de cette admira-
tion est de porter l'homme qui l'éprouve à s'applaudir de
ses nobles instincts ; précieux résultat , en vérité ! Tout
le monde saisit ici le paradoxe. — Le monde du théâtre
tragique est si différent du nôtre, que nous n'y voyons
plus rien qui nous convienne : le moyen, après cela, d'en
faire sortir une leçon? Les mœurs de la comédie se rap-
prochent davantage des nôtres; mais le plaisir du co-
mique étant fondé sur un vice du cœur humain, il s'en-
suit que plus la comédie est agréable et parfaite, plus son
effet est funeste aux mœurs. Et à ce propos, Rousseau ,
prenant à partie Molière, dit que son théâtre est une école
de vices et de mauvaises mœurs, plus dangereuse qtif
les livres mômes où l'on fait profession de les enseigner.
Regnard est encore beaucoup plus malmené. — L'amour
fait le fonds des pièces françiuses : elles ont donc pour
effet de donner aux femmes l'ascendant sur les hommes,
aux jeunes gens le pas sur les vieillards; double grief,
dont le premier est déjà formulé daac- Bossuet. — Bos-
suet avait signalé tous les dançer& de la peinture de
l'amour; Rousseau y revient et insiste. 11 revient aass
sur les acteurs et les actrices. L'art du comédien, dit-îK
est Tart de se contrefaire, de revêtir un autre caractère
que le sien, d'oublier sa propre place à force de prendre
celle d'autrui. C'est un métier par lequel on se donne en
représentation pour de l'argent, on se soumet aux sifilett
pour de l'argent. Ce trafic a déjà je ne sais quoi de servile
et de bas; pourtant il y a quelque chose de pis encore, le
désordre des actrices, désordre inévitable et qui entraîne
inévitablement celui des acteurs.
Tels sont les principaux arguments de la philoso-
phie et de la religion contre le théâtre. Que conclure?
D'abord, on éprouve une répugnance instinctive à pro-
scrire une des formes les plus belles et les plus élevées
de l'inspiration poétique. En niant, au nom de la mo-
rale, les droits de la poésie dramatique, on tend à com-
promettre ceux de l'ode et de l'épopée : si le théâtre est
absolument condamnable, en ce qu'il peint d'une manière
séduisante les passions humaines, il faudrait condam-
ner aussi toutes les œuvres de l'imagination , dans le»
Lettres et dans les Arts, puisqu'elles offrent ou peuvent
offrir les mêmes peintures. En ce qui regarde la tragé-
die, il nous semble que la représentation des passions,
même la plus forte et la plus vive, cesse d'être dange-
reuse quand elle a pour résultat d'élever l'&me par le
spectacle du grand et du beau , ou de lui inspirer, par
la vérité même de la peinture, l'horreur et l'effroi des
passions criminelles et des vices. Que Corneille et Racine
aient produit une seule fois cette impression (et, d'an
accord unanime, ils y sont plus d'une fois parvenus), la
tragédie est justifiée. Ce n'est pas sa faute ai tous les
poètes dans toutes leurs œuvres ne lui donnent pas ce
caractère. Pour la comédie, on peut dire, au point de
vue des gens du monde, que, malgré des abus certains,
le danger est moins grand qu'il ne le paraît à des esprits
austères. Nous ne saurions convenir que le poète comique
prêche une mauvaise morale et préconise des exemples
funestes, parce qu'en effet il ne prêche ni ne préconise
rien; il peint les vices sans les proposer pour modèles; il
en fait comme un miroir qu'il met devant les yeux des
vicieux, ainsi que <Ies honnêtes gens, et on ne voit guère
que la corruption soit souvent sortie de ces tableaux.
Pourquoi? Parce que le monde ne vient chercher au
théâtre ni des leçons, ni des modèles, pas plus en mal
qu'en bien, mais une pure distraction et des émotions de
quelques instants : au sortir de là, nul ne prend au siv
rieux les fictions qu'il vient de voir, pas même ceux qui
en ont été les plus touchés. Voilà 2,300 ans (en ne par-
tant que des Grecs) qu'il y a un théâtre public, et il se-
rait assez diflScile de prouver que le monde a été en
empirant. Descendons jusqu'aux temps modernes : à
l'origine de notre théâtre, à l'époque des Mystères, où
les drames n'étaient que des représentations du Nouveau
Testament, voit-on que les mœurs fussent meilleures
qu'aujourd'hui? Cela est plus que douteux. La préten-
tion des partisans outrés du théâtre, d'y voir une sorte
d'école philosophique, n'est pas très-soutenable non plus;
nous leur répondrons par cette ingénieuse observation de
M. Saint-Marc Girardin : « Nous ne croyons pas que le
théâtre soit, de tous les genres de littérature^ le plus dé-
pourvu de morale. Image de la vie humaine, le théâtre
est moral comme rexpërience; et ajoutons, hélas! pour
ne rien déguiser de son inefficacité, moral comme Texpé-
ricnce d'autrui, qui touche et C[ui corrige peu. » — Main-
tenant, pour les personnes c[ui veulent se placer au point
de vue exclusivement chrétien, il leur est difficile de ne
pas prendre pour règle le mot de Bossuet à Louis XIV,
qui le consultait sur ce sujet : « Sire, il y a de grands
exemples pour, et des raisons invincibles contre. » A. H.
THÉÂTRE FRANÇAIS. F. notre Oicttotmoirtf de Biogro'
phie et ^Histoire,
THÉBAIDB (La), pofime laUn de Stace. Cest une épo-
pée en 12 ishants, et en vers hexamètres, dont le sujet
est la guerre de Poljmice contre Étéocle, sijet atroce où
tout est sang et carnage. Il eut à Rome un grand succès,
qu'il dut à la sagesse du plan et à Télénifcion des pensées,
bien que ce ne soit guère qu'une œuvre d'érudition mjthfh
logique. Stace s'est vraisemblablement inspiré de la Thi»
TnÈ
1717
THÈ
hàide d'Antimaqae, aujourd'hui perdue. La ThébaXde a
été traduite par Achaintre dans la Bibliothèque latine^
française de Panckoucke, Paris, 48311-32, 2 vol. in-8».
THÈBES (Ruines de), en Egypte. Ces ruines, dont la
me excita dans toute Tarmée française, en 1198, une ex-
plosion d'enthousiasme, couvrent les deux rives du Nil,
et sont répandues au milieu de villages arabes. Sur la
rive occidentale du fleuve se trouvent les localités de'
Koumah ou Gowttah, et de Médinet-Abou ; sur la rive
orientale, Ijiuqsor et Karnac.
Le PcUais de Koumah, appelé Ménephthéum, du nom
du roi Ménephtha l***, son fondateur, appartient aux
temps pharaoniques. Par la disposition de son plan , il
annonce Thabitation d*un homme, et, par ses décora-
tions, celle d'une divinité. On y arrive par un pylône en
partie détruit; une allée de sphinx, difficile à reconnaître
aujourd'hui au milieu de bouquets de palmiers et de ma-
sures moderncsf conduit à un portique qui a plus de
50 met. de long, 30 de hauteur, et que soutiennent 10 co-
lonnes, dont le fût est un faisceau de tiges de lotus, avec
chapiteau en boutons de cette même plante tronqués
pour recevoir le dé. Trois portes pratiquées sous ce ves-
tibule donnent accès dans l'intérieur de l'édifice. La salle
du milieu a 16 met. de profondeur sur 11 de largeur, et le
plafond en est soutenu par 6 colonnes semblables à celles
du portique ; deux longues inscriptions servent d'enca-
drement aux vautours ailés qui décorent ce plafond, et
les parois des murs sont couvertes de bas-reliefs. C'était
le manôskh, la salle d'honneur, le lieu où se tenaient les
as<iemblées religieuses et polliiques, où siégeaient les
tribunaux. A droite et à gauche oe cette salle sont trois
petites chambres, avec une salle latérale couverte égale-
ment de bas-reliefs; à l'extrémité, s'ouvrent cinq autres
chambres, dont l'une, celle du milieu, conduit à une
nouvelle salle soutenue par 4 piliers carrés. Au delà était
enfin un sanctuaire; mais la dégradation de l'édifice ne
permet plus d'en reconnaître la disposition. — Au N. du
Ménephthéum, on trouve des hypogées royaux, dont les
parois sont revêtues de bas-reliefs ou de peintures : les
tombeaux dits de Sésoslris et de Memnon sont particu-
lièrement remarquables par leur étendue et leur orne-
mentation.
En remontant le Nil à partir de Koumah, on arrive au
village de Médmetr-Abou, Là s'élèvent les restes du Hha-
messéum , palais de Sésostris ou Rbamsès II, connu dans
beaucoup de relations sous la dénomination de MemnO'
nium, et qui a, dans ses inscriptions, celle diAménophionm
IL est admis que l'édifice décrit par Diodore de Sicile sous
le nom de Tombeau d'Osymandias n^est autre que le
Rhamesséum , bien que les proportions de ce dernier ne
concordent pas entièrement avec les données de Thisto-
rien grec. Le palais, dans son ensemble, se composait
d'une entrée monumentale, d'une vaste cour ornée d'une
double ligne de colonnes formant galerie, de deux grandes
salles successives soutenues par de nombreuses colonnes,
enfin d'une suite d'appartements; l'axe de toutes ces
constructions, que saccagea vraisemblablement Cambyse,
avait une longueur de 167 met. environ. Les deux py-
Idnes qui formaient la façade, sur une largeur totale de
68 met., et entre lesquels était la grande entrée, sont en-
core debout , mais dégradés ; leurs bas-reliefs commen-
çaient la série de tableaux historiques qui se déployait
sur le palais tout entier. La cour était presque carrée
( 5(î met. sur 52^ ; ses murs de clôture sont presque en-
tièrement détruits, ainsi que les galeries soutenues par
la double ligne de colonnes. Au fond de la cour qui fait
face aux pylônes, un peu vers la gauche, gisent les dé-
bris d'une statue colossale de Rbamsès en granit rose de
Syène ; cette statue devait avoir plus de 1 1 met. de hau-
teur. La salle carrée où l'on pénètre en quittant la cour
a 52 met. de largeur sur 43 de profondeur : une double
rangée de colonnes, à droite et à gauche, y formait deux
galeries; le côté de l'entrée et celui du fond n'avaient
3u'une rangée de piliers à caryatides, hauts de0"S50, et
ont plusieurs existent encore ; ce qui reste des murs est
couvert de bas-reliefs. Trois perrons, dont l'un , celui du
milieu , est flanqué de deux bustes colossaux, conduisent
de cette première salle à un vestibule garni d'un rang
de colonnes dans toute sa longueur de droite à gauche ;
de là on pénètre par trois portes, répondant aux trois
perrons, dans la seconde salle, large de 41 met., pro-
fonde de 31 met. Les murs latéraux ont péri. On comp-
tait 48 colonnes, disposées sur 8 rangées de 6 de profon-
deur ; 5 rangées entières sont restées debout, et portent
encore une partie des plafonds, qui étaient pemts en
bieu et semés d'étoilus dur; le plafond du ccutru est
plus élevé que les deux plafonds latéraux. Des chambres
qui formaient le fond de l'édifice, il ne reste plus qu'une
à peu près entière; le plafond, décoré d'un curieux ta-
bleau astronomique, est supporté par 8 colonnes. Quatn'
colonnes de la chambre suivante subsistent; tout le rest-;
est détruit. — A peu de distance du Rhamesséum s/,
trouve un vaste emplacement semé èd débris, au milieu
desquels on distingue les fameux Colosses de Memmm
{V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire). — Médinet-Abou présente encore d'autres
monuments intéressants. Le Petit temple des Thoutmosis
est précédé d'une cour rectangulaire qui a 25 met. sur
39, et que des murs en talus ferment sur trois côtés; hi
porte d'entrée, large de 5 met., annonce, par les inscrip-
tions dont ses montants sont couverts, que ces construc-
tions appartiennent au temps des Antonins. Le fond ùt
la cour est fermé par un double pylône, en avant duquel
s'étend une rangée de 8 colonnes, que relient des murs
d'entre-colon ncment. On pénètre dans une seconde cour,
où un autre pylône, qui date du vu*' siècle av. J.-C, ot
qui est à 15 met. du précédent, donne accès dans une
troisième cour, de 19 met. de long. Celle-ci , dont la clô-
ture est une addition du temps des Ptoléroées, offre de
chaque côté une rangée de 9 colonnes. On arrive enfin
au temple, entouré de trois côtés par une galerie de
piliers carrés, et du quatrième côté par un massif do
6 petites chambres. A 30 met. N.-O. du temple sont W*;
restes d'un bassin carré revêtu en pierres de taille, et ce
15 met. de côté, ainsi que les fragments de deux colossrs
en granit. Au S.-O., un mur rattache aujourd'hui le pc: Il
temple au Pavillon de Bliarnsès-Méiamoun. Deux tour:»
rectangulaires à murs inclinés en forment l'entrée. Des
appartements dont il se composait, quelques-uns seule-
ment subsistent encore : ce qu'ils ofi'rent de plus digne
d'attention, ce sont les peintures de leurs murailles. La
partie supérieure du pavillon se termine par des cré-
neaux. Le Grand temple, qui date aussi de Rhamsès-
Méiamoun, est séparé du pavillon , dans la direction du
N.-O., par un dromos de 83 met. d'étendue. Deux touro
de forme pyramidale, réunies par un portail intermé-
diaire, forment comme un seul pylône de 63 met. dt)
largeur et de 22 met. de hauteur. Quand on a franchi ce
portail garni de bas-reliefs, on se trouve dans une cour
de 34 met. sur 42, ayant à droite une galerie formée du
7 piliers à caryatides, à gauche 8 grosses colonnes cir-
culaires à intervalles inégaux. Elle est encombrée r!*;
briques qui proviennent de constructions modernes. Un
pylône forme le fond : deux portes, qui y sont pratiquées
à l'extrémité des deux galeries, s'ouvrent sur un des e-'^-
caliers qui conduisent à sa terrasse supérieure, garnie
circulairement de cynoscéphales assis. La porte médialo
de ce pylône donne accès à une seconde cour de 38 met.
sur 41, qu'entourent des galeries formées à TE. et à l'O.
par 8 piliers à caryatides, au S. et au N. par 5 colonnci
massives, peintes et ornées de figures emblématiques :
les plafonds de ces galeries sont peints en bleu et semés
d'étoiles, et les parois en sont couvertes de tableaux reli-
gieux et historiques. Au delà ce ne sont plus que des dé-
combres.
Le Temple de Louqsor^ œuvre d'Aménophis III et do
Rbamsès II, était précédé d'un dromos, que recouvre
aujourd'hui un monticule de décombres et de sable. A lu
partie antérieure des constructions sont quatre statues
colossales , taillées dans un seul bloc de granit rouge de
Syène, mais enterrées maintenant aux trois quarts ; de \
deux obélisques monolithes qui les accompagnaient, l'un,
haut de 23">,57, a été transporté à Paris en 1836, et
l'autre mesure 25'",6. En arrière s'élèvent deux massifs
pyramidaux, hauts de 23 met., distants l'un de l'autre
de 30 met., et réunis par un portail de 17 met. de hau-
teur : après avoir passé ce pylône, on est dans une cour
rectangulaire de 59 met. sur 52, encombrée par une
mosquée et des masures musulmanes, et entourée d'un
double rang de colonnes qui formaient une galerie con-
tinue surmontée de terrasses. Au fond de cette cour, on
franchit un second pylône, derrière lequel 14 colonnes
sur deux rangs, enfouies jusqu'aux deux tiers de leur
hauteur, qui est de 15 met., se déploient sur une lon-
gueur de 53 met.; elles ont 3 met. de diamètre. A 18 mè>.
de cette colonnade, il y a une seconde cour, farge de
52 met., profonde de 48, avec deux galeries latérales do
12 colonnes sur deux rangs, et, au fond, un pronaos ou
portique couvert, soutenu par quatre rangées de 8 co-
lonnes chacune. Au delà de ce portique, sans doute à la
place d'appartements antiques, les musulmans ont bftti
de surùidcs cunsirucilctià. Laliu on atteint le nuos, gi&rca
TUÊ
1718
THÊ
Mlle dans Tintérieur de laquelle est ane coastnictioii
entièrement isolée, le sanctuaire, dont le plafond est co-
lorié et les murs couverts de scènes religieuses. Après le
naos, on se trouve dans une galerie transversale de
22 met. de longueur sur 9 met. de profondeur, soutenue
par 12 colonnes sur deux rangs, et où 6 portes donnaient
accès dans une suite de chambres, dont plusieurs existent
encore.
Les mines de Kamac, les plus vastes et les plus belles
de toute TÉgypte, sont au N.-E. de Louqsor, à TE. et en
face de Kournab. On y arrive par une avenue de 2 kilom.
de longueur, dite Avenue des sphinxy bordée d*une double
rangée de 600 sphinx accroupis sur leur piédestal et dont
la plupart sont mutilés; ils tiennent entre leurs pattes
antérieures la statue du roi Aménophis II. Vient ensuite
V Avenue des béliers, un peu plus large que la précédente,
longue de 300 met. environ, bordée de sphinx à tète de
bélier, et à Textrémité de laquelle est une porte triom-
phale construite par Ptolémée Évergète. Au delà de cette
porte, une nouvelle avenue de sphinx, dont plusieurs
subsistent encore , conduit aux restes d*un temple con-
sacré au dieu Khons par Rhamsès III, et d'un autre
temple dédié par Évergète II à la déesse Athor. Au N. du
temple de Rhamsès, se trouve le Grand temple. L'entrée,
tournée vers TO., c-àr-d. du côté du Nil, est formée par
deux massifs de 44 met. de hauteur, de 15 met. d'épais-
seur, entre lesquels est une porte précédée de doux sta-
tues colossales : ce portail a 113 met. de développement.
Quand on Ta franchi, on arrive dans une cour longue de
84 met., large de 103; à gauche, 18 colonnes de 15 met.
de hauteur forment une galerie de 2'",60 de largeur ; à
droite, la colonnade est moins régulière, à cause d'un
temple d'Ammon qui est encastré dans le mur d'enceinte
et qui s'avance de près de 12 met. sur la cour; an centre
de la cour sont les restes d'une avenue formée par deux
files de 6 colonnes chacune, et , dans l'angle N.-O., les
restes enfouis d'un petit édifice construit par Ménephtha II.
Au fond de la cour, un perron de 7 marches, aux deux
côtés duquel se dressaient deux colosses monolithes,
donne entrée dans un vestibule pratiqué au milieu d'un
énorme pylône, et d'où l'on passe dans la Salle des Co-
lonnes. Cette salle, oui a 102 met. de large sur 53 de pro-
fondeur, présente dans son axe une avenue de 12 co-
lonnes qui ont plus de 10 met de circonférence et 23 met.
de hauteur; 134 colonnes presque aussi colossales sont
distribuées en quinconce de chaque côté de l'avenue, et
supportent le plafond, plus bas id de 10 met. Au delà
d'un troisième pylône, à peu près ruiné comme le pré-
cédent, deux obélisques monolithes, dont l'un est au-
jourd'hui renversé, s'élevaient au milieu d'un espace dé-
couvert, large de 15 met. Un quatrième pylône, moins
élevé que les trois premiers, et dont un vestibule de
13 met. de largeur sur 4 de profondeur occupe le milieu,
sépare cet espace d'une nouvelle cour intérieure, large
de 75 met., profonde de 19, et au pourtour de laquelle
une galerie continue était formée par des piliers à carya-
tides. On sort de cette cour par un vestibule de 6 met.
sur 12, et, au delà d'une petite enceinte découverte, on
rencontre enfin le sanctuaire» Ce n'est plus maintenant
qu'un amas de décombres , qu'on appelle les Ajyparte-
ments de granit, Deirière le sanctuaire, à une distance
de 50 met, est le Palais de Thoutmosis III, fort délabré
en général, mais où l'on remartjue la Chambre des an-
cêtres, importante par sa décoration intérieure. An reste,
toutes les constructions de Kamac sont couvertes de bas-
reliefs très-intéressants. Elles étaient enfermées dans
une vaste enceinte en briques crues, dont quelques par-
ties sont encore reconnaissables, et au delà de laquelle
on voit les ruines d'un petit temple construit sous Psam-
métichus et Amasis, celles plus considérables d'un Temple
d^Aménophis III, les restes d'un bassin revêtu de pierre,
une suite de colosses monolithes formant ce qu'on nomme
les Propylées du Sud, etc.
Outre les ouvrages cités à notre article Égyphbn (Art),
on peut consulter : Norden, Drawings ofruins at Thebes,
Londres, 1741, in-4° ; Letronne, Mémoire sur le monu-
ment dVsymandias , Paris, 1831, in-4% et La Statue
vocale de Memnon, 1833, in-4^ B.
THÈBBS (Le Roman de) , poème où est retracée l'histoire
tragique d'Étéocle et de Polynice. L'auteur, Benoit de
Sainte-Maure, peint les héros grecs avec les mœurs, les
costumes et les sentiments de la féodalité. Ce roman du
XIII* siècle forme, avec lee romans de Troyes et d'Ênéas,
un des plus beaux manuscrits de la Bibliothèque na-
tionale de Paris. V, V Histoire littéraire de la France^
t XIX. H. D.
THECA, étui à renfermer les styles à écrire.
THÉISME (du grec théos. Dieu ) , croyance à l'existence
de Dieu. Le mot s'oppose à Athéisme.
THÈME (du grec théma, position), tout sujet qu'on
entreprend de tjraiter. Le texte ( V, ce mot) d'un sermon
peut être appelé thème» En Grammaire, on donne ce
nom : 1^ au radical primitif d'où un verbe a été tiré, et
'spécialement, chez les Grecs, au présent du verbe, parce
que c'est le premier temps que l'on pose pour en tirer les
autres; 2® aux morceaux que les écoliers doivent traduire
de leur langue naturelle dans une autre langue qu'ils
apprennent En Musique , thème est synonyme de sujet
ou de motif. Enfin, thème a désigné une circonscription
militaire de l'Empire d'Orient, r. notre Dictionnaire de
Biographie et ^Histoire.
THKNSA , char. F. notre IHc^onnaire de Biographie
et d'Histoire,
THEOCRATIE (du grec théos. Dieu, et cratos, pou-
voir), gouvernement où Dieu est regardé comme l'unique
souverain et où les lois sont des ordres émanés de lui.
Les prêtres y sont les représentants du souverain invi-
sible, qui confère aussi à d'autres la mission de parler ei
d'agir en son nom parmi les hommes. Le gouyemement
des Hébreux était une véritable théocratie. Il en fut de
même de celui de l'Egypte primitive, et de celui des Incas
au Pérou. La théocratie est en vigueur dans le Tliibet,
où règne le Grand-Lama. On donne quelquefois le nom
de Théocratie au gouvernement des papes, tel qu'il était
constitué pendant le moyen âge.
THÉODICÉE (du grec théos, Dieu, et dikè, justifica-
tion). Ce mot fut introduit dans la philosophie par
Leibniz, qui l'employa dans un ouvrage ayant pour titre :
Essais de Théodtcée sur la bonté de Dieu, la liberté de
Vhomme et l'origine du mal : il se proposait de repousser
les attaques dirigées contre la Providence, les objec-
tions tirées de l'existence du mal contre la bonté divine,
et de concilier la liberté humaine avec la sagesse suprême
qui a tout prévu et tout ordonné d'avance. Il ne faut donc
pas confondre la théodicée avec la théologie rationnelle.
dont elle n'est qu'une partie. En Allemagne, les questions
qu'elle embrasse étaient comprises dans la Métaphysique:
en France^ elle fut désignée dans l'enseignement comme
une partie de la Philosophie, qui a pour objet de démon-
trer l'existence de Dieu, d'énumérer ses principaux at-
tributs, d'étudier sa sagesse dans le plan de l'univers,
afin de mieux pénétrer ses desseins sur l'homme, et
d'apprendre à celui-ci , avec sa propre destination , ses
devoirs envers le Créateur. — Avant Leibniz, les questions
dont s'occupe la Théodicée avaient été traitées plus ou
moins directement, surtout dans Platon, Cicéron, Sénèque:
on peut même citer, avant eux, le Livre de Job. Depuis
la Théodicée de Leibnitz, on a écrit sur le même sujet,
entre autres ouvrages : De origine mali, de W. King;
De la Providence, par G. Sherlock; la Théodwée ehre-
t^enne de Mgr Maret Kant a laissé un petit écrit intitulé :
Du mauvais succès de tous les essais philosophiques en
théodicée. R.
THÉODISQUE. V. THtonsQOB.
THÉODORIC (Cycle de), nom que l'on donne quel-
quefois aux poèmes dont "Théodoric, roi des Ostrogoths,
est le héros, et qui sont réunis dans le HMmbuch
iV. ce mot).
THÊODOSIEN (Code). V. notre Dicti(mnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
THÈ0D0S1ENNE (Colonne). V. Colonnes honcmrv-
TALBS, dans notre Dictionnaire de Biographie et d^ His-
toire.
THÉonosTCNTVB (Table ou Carte). V. Pecttiigeii, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
THÉOGONIE (du grec théos, Dieu, et gonos, rare,
génération ) , tout système imaginé par les païens pour
expliquer l'origine et la filiation des Dieux. Chez les an-
ciens Grecs, Musée, Orphée et quelques autres avaient
composé des Théogonies ; elles ont péri. Il ne nous en est
parvenu qu'une seule, sous le nom d'Hésiode, et quelques
critiques l'ont attribuée à un certain Cynéthus de Chio. Ce
n'est pas qu'Hésiode ait créé la mythologie grecque, ainsi
Sue le croit Hérodote : il n'appartient pas à un seul homme
'imposer ses croyances à tout un peuple; c'est là' une
œuvre éminemment populaire, qui , ébauchée par fio-
stinct religieux et poétique des nations, ne peut s'achever
que par le travail de plusieurs siècles. Mais ce que peut
faire le génie d'un homme, c'est de rassembler et de con-
cilier ces croyances populaires qui jusque-là étaient in-
certaines et flottantes, et de leur donner une forme
double. Tel a été le travail d'Uêsiodc sur la vieille ui} tlio-
THÉ
1719
THË
logie (tes Hellènes; après avoir recueilli toutes les tradi- \
lions éparses, il les a constituées en un corps de doctrine.
L'idée fondamentale de la Théogonie est la succession des
générations dirines représentant symboliquement les
grandes phases de la formation du monde dans Tespace
et dans le temps : on y reconnaît les efforts de IMmagi-
nation populaire pour peindre le chaos des vieux âges et
peupler le ride de ces siècles dont toute trace avait dis-
paru. Ce qui semble appartenir au siècle d*Hésiode, ce
sont quelques mythes semés çà et là à travers son épopée
divine; par exemple, celui de Prométhée, où apparaît la
première révolte de Tintelligence humaine contre son
Créateur, qui nMnspire déjà plus cet invincible effroi que
l*homme dut éprouver d*âbord à la vue de la Nature ; ou
bien celui de Pandore, gracieuse, mais satirique allégorie
de Torigine du mal sur la terre. Ce qui appartient au
poëte lui-même, c'est l'explication qu'il donne de cer-
taines traditions, et les étymologies par lesquelles il essaye
de Justifier ces fables grossières aux yeux de la raison;
on reconnaît là les premiers tâtonnements de la critique.
La Théogonie d'Hésiode jouit d'une grande autorité dans
la Grèce, et les croyances qu'il n'avait pu accorder restè-
rent désormais reléguées dans l'obscurité des cultes
locaux. Elle ne nous est point parvenue intacte ; on y
reconnaît du désordre et des interpolations. V, Gui-
gniaut. De la Théogonie d'Hésiode, Paris, 1835. B.
THÉOLOGAL. V, ce mot dans notre DictUmnaire de
Biographie et d' Histoire.
THÉOLOGALES (Vertus). V. Vertu.
THÉOLOGÉION, machine de théâtre des Anciens, pla-
cée dans la partie supérieure de la scène, et qui servait à
faire descendre les Dieux.
THÉOLOGIE (du prec théos. Dieu, et logos, discours,
traité), science de Di«^u, ou, plus convenablement, rela-
tive à Dieu et aux choses divines. Les Anciens donnaient
le nom de théologiens aux portes qui vivaient à l'époque
de l'école dite École de la vieille théologie, et qui com-
prenait des personnages peut-être symboliques, tels que
Orphée et Musée, jusqu'à Hésiode. La théologie ne devint
une science proprement dite qu'à partir d'Aristote, qui
en fit une partie de la Philosophie. S^ Jean Damascène
est, parmi les écrivains chrétiens, le premier qui l'ait
oumise à l'appareil des règles dialectiques, dans son livre
de la Foi orthodoxe. Chez les Romains, on distinguait :
la Théologie mystiqw, celle des premiers poètes de la
Grèce; la Théologie physique, qui s'unissait à la Philo-
sophie; la Théologie civile, fondée par les législateurs.
Avec le christianisme, la Théologie prend un caractère
plus élevé. Dans le moyen âge, non-seulement elle se
confond avec la Philosophie, mais elle cherche à l'annu-
ler, sans y réussir entièrement. C'est le règne de la Théo-
logie scolastique. Les docteurs de cette époque la traitent
avec les procédés de la méthode en usage, et au nom du
principe d'autorité. Le nombre des écrits th(iologiques
d'alors est trop grand pour être tous cités ; il suffit de
rappeler ceux d'Abailard, Sic et non (oui et non) , Intro-
duction à la Théologie, et Théologie chrétienne ; de Pierre
Lombard, Le Maitre des sentences; d'Alexandre de Halès,
la Somme théologique; d'Albert le Grand, la Somme de
Théologie, et V Abrégé de Théologie; enfin du plus grand
de tous , de S' Thomas, la Somme tkéologique , et la
Somme contre les Gentils. Ces grands docteurs eurent
des continuateurs, parmi lesquels on remarque : Suarès,
Tournély, Gabriel Vasquez, Jean de Salas , Billuart , Col-
let, dom Liguori, le P. Péronne, etc. A mesure que la
Philosophie prenait une position plus indépendante, la
Théologie arrivait à se distinguer en deux sortes : la Théo-
logie naturelle, qui se base sur des conceptions et sur des
principes rationnels (F. Wolf,77i«o/ofl[ia naturalis methodo
scientifica pertractata) ; la Théologie révélée, qui se dis-
lingue, au point de vue de l'enseignement, en théologie
positive ou dogmatiqi^y qui comprend le dogme, et théo-
logie morale, ce qu'il faut pratiquer ( V. la Théologie dog-
matique de Schleiermacher ). — Les traités de Théologie
les plus suivis en France dans l'enseignement sont ceux
de Mgr Gousset, de Mgr Bouvier, de Bailly, de Carrière.
On a sur cette matière un Dictionnaire des sciences
théologiques de Richard, 1670; un Dictionnaire théolo-
gique de Bergier, 1789, complété par M^ Donnet; V His-
toire de la Théologie par Noêl-Bonav. d'Argon ne (jusqu'à
S' Bernard), Lucques, 1785, et par Staûdlin, en allemand,
Gœttingue, 1810-11 ; un Dictionnaire encyclopédique de
la Théologie catholique, publié par Wetzer et Welte, et
trad. de l'allemand par Goschler, 25 vol.— A l'étude de la
Théologie se rattache nécessairement celle de l'Écriture
lainte, la Critique sacrée et l'Exégèse, ce qui a donné liea,
en Allemagne, à une sorte de Théologie rationnelle, qui
explique avec une grande liberté les textes sacrés et les
monuments sur lesquels repose l'enseignement religieux.
^ THÉOLOGIE (Facultés de), corps d'ensei?nement supé-
rieur. Il y a en France six Facultés catholiques de théo-
logie : à Paris, à Aix , à Bordeaux, à Lyon , à Rouen , à
Toulouse; et une seule faculté protestante, à Mon-
tauban. Les Facultés catholiques comprennent des
chaires de dogme, de morale, dliiotoire et de discipline
ecclésiastiques, et d'ucriture sainte. Quelques-unes y
ajoutent des chaires de Droit canon^ d'hébreu, et d'é-
loquence sacrée. Il y a à Montauban une otiaire de
philosophie et une chaire .de haute latinité et de
grec. K. le Supplément. R.
THÊOPHILANTHROPES. V. notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire. -
THÉORBE, en italien tiorha, instrument à cordes, in*
venté au xvi* siècle en Italie par un certain Bardella, ou,
selon d'autres, par un Français nommé Hotteman, et qui
fut en usage jusqu'au milieu du siècle dernier. C'était
une sorte de grand luth à deux manches accolés paral-
lèlement; l'un portait le même nombre de cordes que le
luth, pour y poser les doigts de la main gauche; l'autre
soutenait huit cordes plus grosses qui servaient de basses
et qu'on pinçait à vide. Le théorbe était en grande faveur
parmi les dames du temps de Louis XIV ; Ninon de Len-
clos excellait à en jouer. — II y avait, dans les anciennes
orgues, au clavier à la main, un jeu d'anche de quatre
pieds, peut-être de huit, qu'on appelait théorbe, parce
qu'il imitait le son de cet instrument. B.
THÉORÈME , proposition qui doit être rendue évidente
au moyen d'une démonstration.
THÉORIE (du grec théôria, contemplation), partie
spéculative d'une science; elle est opposée à la Pratique.
Dans ce sens., la connaissance n'est çiu'une idée sans
manifestation, une règle sans application. Mais il n'en
est pas toujours ainsi. Quand l'objet dont on s'occupe est
un fait dont toutes les circonstances ont été séparées par
V analyse, et rapportées aux lois qui paraissent les régir
et les expliquer, la synthèse fournit une explication du
fait qu'on appelle théorie, et qui permet de reproduire le
fait à volonté, comme cela a lieu dans la médecine, la
mécanique, etc. Une théorie ne peut être exacte et vraie
qu'autant que l'analyse du fait a été scrupuleuse et com-
plète. Les théories explicatives des faits régis par les
mêmes lois et produits par les mêmes causes, présentées,
réunies et comme liées entre elles par cette communauté,
puis disposées dans un ordre méthodique, forment une
science de théories, comme la physique, la chimie, l'as-
tronomie, etc.
Dans l'Art militaire, la Théorie est l'ensemble des
principe/s qui président au maniement des armes, aux
exercices , aux manœuvres des troupes et à la tactique.
Les Grecs nommaient Théories des députations envoyées
pour honorer certaines divinités à Delphes, à Tempe, et
surtout à Délos. Elles étaient composées de deux chœurs
de garçons et de filles, et conduites par des théores,
ambassadeurs chargés d'offrir des sacrifices au nom de la
ville qui envoyait la théorie. Les plus brillantes étaient
celles des Athéniens. Depuis le départ du vaisseau qui
portait la théorie à Délos Jusqu'à son retour, la loi dé-
fendait de mettre à mort aucun condamné ; son absence
durait trente jours. R.
THÉOSOPHIR ( du grec théos, Dieu, et 5op^ûi, science).
Il y a cette différence entre la Théosophie et la Théologie,
que, dans celle-ci, l'homme cherche à connaître Dieu,
et que, dans celle-là, cette connaissance lui vient par
illumination ; dans l'une l'homme va à Dieu, dans l'autre
c'est Dieu qui vient à l'homme. La Théosophie n'est
qu'une aberration de l'esprit humain qui tient bien moins
du mysticisme que de Vllluminisme, dont elle n'est qu'une
variété. On ne peut y voir qu'un syncrétisme où se trou-
vent confondus l'enthousiasme et l'observation de la na-
ture, la tradition et le raisonnement, l'alchimie et la
théologie, la métaphysique et la médecine. Son langage
est ordinairement symbolique. On compte, parmi les
théosophes, de grands esprits, dupes de leur imagination
et d'un sentiment religieux mal compris et mal dirigé :
les uns, moins savants et plus portés vers les idées reli-
gieuses, comme Paracelse, Jacob Boehme, Gichtel, Saint-
Martin, Scheiblet ; d'autres, plus instruits et plus portés à
la discussion , comme Cornélius Agrippa, Valentin Wei-
gel, Robert Fludd, Mercurius Van Helmont, Jean Amos.
Le» Néoplatoniciens se rattachaient bien plus à la théur-
gie qn*k la théosophie. — On a donné le nom de ThéO'
sophtsme à la doctrine de quelques Cartésiens qui se
THÉ
1712
TTTÉ
aériens que l'on faisait souvent apparaître; Tart du ma-
chiniste consistait surtout à dissimuler les moyens de
suspension qu'il employait. La surface soénique comprise
entre Tépiscénium et les ailes était généralement très-
étroite eu égard à sa longueur. Gomme il paraissait rare-
ment sur la scène beaucoup de personnages à la fois , et
qu'on n'y voyait guère des peuples entiers ou des armées,
chacun des acteurs sortait à son tour de l'une des ailes
et rentrait dans l'autre. Face à face, et occupés de leur
propre action, ils n'avaient pas sans cesse le visage tourné
vers les spectateurs; m les voyait le plus souvent de
profil, disposés de manière à ne pas se cacher les uns les
autres; et ils ressemblaient ainsi à une suite de bas-reliefs
se dessinant sur la façade de l'épiscénium. Le chœur
n'étant point sur la scène, mais à l'orchestre, une faible
profondeur de scène suffisait toujours, même dans les
plus grands thé&tres. D'ailleurs, cette disposition nous
prouve que les décors ne pouvaient qu'être mis à plat
contre les b&timents de la scène, et qu'ainsi les théâtres
grecs ne pouvaient offrir ces plans nombreux et ces effets
de perspective obtenus aujourd'hui par les coulisses et
les échafaudages. Du reste, les gradins supérieurs étaient
assez élevés pour atteindre au niveau des constructions
scéniques, et apercevoir au delà les montagnes et les
horizons lointains. Comme les représentations se faisaient
en plein jour, le paysage naturel servait de décor au fond
de la scène. Aucune toiture, aucun abri ne couvrait les
spectateurs et ne leur dérobait la vue du ciel.
La commodité du spectateur était entendue tout autre-
ment qu'aujourd'hui. Car, s'ils étaient exposés à la cha-
leur du jour, ils avaient le plein air pour en tempérer
la rigueur, lis étaient assis sur la pierre; mais celle-ci
éUxh taillée suivant des plans bien conçus, comme on le
voit au thé&tre d'Épidaure, œuvre de Polyclète. La circu-
lation se faisait aisément par les chemins qui montaient
de l'orchestre aux gradins les plus élevés, bi le spectateur
pouvait en outre prendre le frais sous une colonnade qui,
le plus souvent, régnait au haut de Tamphithéàtre, d'une
aile à l'autre.
L'illusion scénique semble également avoir été en-
tendue tout autrement que chez nous; en effet, d'anci
oart, il n'est pas croyable que les décorateurs aient pour-
buivi une représentation pour ainsi dire scrvile de la na-
ture, laquelle eût été k peine possible sous la lumière du
soleil ; ils ont dû, par conséquent, s'en tenir à de cer-
taines conventions qui leur permettaient de simplifier
leurs moyens et leurs ressorts. D'un autre côté, l'esprit
artiste des Grecs n'eût jamais souffert qu'un acteur vînt,
avec sa figure, représenter sur la scène un dieu, un héros,
ou un être idéal; on comprend, en effet, qu'il eût paru ,
fort déplacé au milieu d'objets qui avaient un sens trop
étendu et trop général pour que sa personne pût se ren-
contrer parmi eux; enfin comprend-on qu'un peuple
réellement artiste eût supporté, au milieu d'événements
divins et sous un costume héroïque ou même céleste, le
visage d'un homme que l'on rencontrait chaque jour dans
la rue? L'art dramatique fit donc usage du masque de
très-bonne heure ; il ne tint nul compte de l'expression
des traits du visage sur la scène, et trouva plus avanta-
geux de les cacher sous une figure immobile douée d'une
expression générale et appropriée au personnage et à
l'ensemble des événements. Le masque avait pour effet
de dénaturer les proportions du corps humain et de gros-
sir monstrueusement la tête : de là naquit le besoin d'éle-
ver la taille de l'acteur au moyen du brodequin appelé
cothurne, et d'allonger les vêtements en proportion. En
somme, le personnage paraissait plus grand que nature,
sa voix était amplifiée, son visage réduit à un type connu
du peuple, ses gestes rendus plus lents et plus solennels ;
ces changements n'avaient aucun inconvénient, puis-
qu'ils rapprochaient l'acteur de l'idée qu'on se faisait
vulgairement des héros et des dieux. Ces conditions scé-
niques imposées aux poètes les obligeaient à ne point re-
chercher les petits moyens d'action, et à ne compter que
sur le8 grandes péripéties et sur la force môme du drame.
Les dimensions des théâtres antiques imposaient aux
poètes et aux acteurs les mêmes nécessités. Celles de nos
théâtres modernes n'en donnent qu'une très-faible idée.
Non-seulement on ne voyait aucune construction ou gar-
niture analogue à nos loges et à nos galeries, mais la
commode disposition du théâtre en gradins concentriques
permettait à la fois de loger le plus grand nombre pos-
sible de spectateurs sur un espace donné, et d'étendre
vers le haut cet espace à fort peu de frais. Ainsi, les
gradins du théâtre de Bacchus a Athènes pouvaient con-
tenir 30,000 spectateurs ; ceux d'Épidaurc avaient 146 met.
de diamètre ; ceux de la petite ville de Sicyone 130*. ceux
d'Éphèse 214" et pouvaient contenir 150,000 spectateurs.
La voix de l'acteur, amplifiée par le masque, renvoyée.
par la construction de la scène, et concentrée par la ga-
lerie supérieure, devait remplir cette immense enceinte ;
la forme évasée que présentait l'ensemble des graiiins
était très heureuse pour l'acoustique, k laquelle d'ail-
leurs, nous sa^'ons que le plein air ne faisait aucuoc-
ment obstacle. Le grand nombre des spectateurs et le^
vastes dimensions qu'il imposait aux théâtres avair-nt
plusieurs causes chez les Grecs : d'abord, les représenta-
tions dramatiques faisaient partie d'une fête religieu»>,
et étaient un usage sacré auquel l'art des poètes donna
une puissance nouvelle sur les esprits; en second lieu,
ces représentations étaient rares dans l'année et non quo-
tidiennes comme chez nous, ce qui nécessairement devait
attirer un grand nombre de personnes, préparées d'ail-
leurs par leur éducation à comprendre même les chefs-
d'œuvre de l'art le plus élevé ; enfin l'entrée au théâtre
était gratuite, et permise aux hommes de toute condition.
Cette institution des théâtres, dont les villes faisaient les
frais, était donc entièrement démocratique. Elle ne l'a
jamais été chez les modernes, et il est même à remarquer
que les nouveaux théâtres construits chez nous éloignent
de plus en plus par le prix des places les personnes que
leur fortune trop médiocre retient chez elles; l'argent
règne au théâtre. Les Grecs seuls, et, parmi eux, les
peuples ioniens, les Athéniens surtout avec leurs colo-
nies, ont su faire des théâtres de vrais établissements
démocratiques : ce caractère est imprimé à toute l'archi-
tecture des théâtres de la Grèce, aussi bien qu'aux œu-
vres de ses poètes dramatiques.
Quand l'art dramatique passa de la Grèce en Italie et
se fut établi dans Rome, son caractère religieux disparut
d'abord. On allait au théâtre pour se récréer; les repré-
sentations furent données au public le plus souvent pour
briguer ses suffrages; les théâtres furent élevés par de
riches particuliers pour les plaisirs des électeurs popu-
laires; le métier d'acteur fut avili, et l'auteur même fut
soumis à une censure rigide et arbitraire. Tout le monde,
(lu reste, y fut admis, hommes, femmes et enfants: et
pour ne rien négliger de ce qui pouvait relever les dona-
teurs aux yeux du peuple, *'»\ y déploya une magniflcenre
inconnue aux Grecs. Tels furent le théâtre de Scaurus,
celui de Pompée. Plus tard on en construisit dans to it
l'Empire. Ce fut sur le modèle des théâtres grecs : ssul»*-
ment , le caractère sacré ayant disparu et avec lui l'ori-
gine même de l'art dramatique, il n'y eut ni ihymélé ni
chœurs ; l'espace vide laissé par l'orchestre fut occupé
par l'aristocratie romaine, tandis que les gradins Tétaieiu
par le peuple. On peut donc re^rder les théâtres ro-
mains comme ayant formé la transition entre ceux de la
Grèce et les théâtres modernes.
Aux théâtres on doit rattacher un genre d'édifices qni
s'en rapprochaient beaucoup : ce sont les Odéons ou théâ-
tres de musique ( V, Odéon). Le plus célèbre fut l'Odéon
de Périclès à Athènes. Les concours musicaux n'ayant
point une origine sacrée, il n'y eut point là d'autel de
Bacchus ; et comme on y allait pour entendre et non pour
voir, on n'eut pas besoin de disposer les places en sx^-
dins. De plus, les diniensions de ces salles étant loin
d'égaler celles des théâtres , on put le^ couvrir d'un tui»
de forme circulaire, et donner à tout l'édifice la forme
d'une rotonde. On voit par quels côtés les salles de ma*
sique se rapprochaient des théâtres et par quels côtés elles
s'en éloignaient.
UAmphithéAtre romain, entièrement incoimu des Grecs,
n'est au fond qu'un théâtre où les épiscénia ont été sup-
primés avec la scène même, ce qui a permis de doubler
les gradins et d'en former une enceinte unique et con-
tinue, presque toujours ovale, et où l'orchestre également
doublé s'est trouvé transformé en arène on espace sablé;
et comme il n'était guère possible d'adosser un tel édi-
fice à une colline, on i'éleva de toutes pièces sur un tr:
min plat, avec cet art des constructions voûtées q^i
dans les ruines romaines , fait encore l'admiration d< ^
modernes. V, Amphithéâtre. Em. B.
II. Théâtres modernes, — On ne saurait déterminf^r
d'une manière précise l'époque de la construction de>
premiers théâtres en Europe pendant le mojren âge. U^
Mystères (V. ce mot) se représentaient sur des échafa»-
dages dressés dans les places publiques ou dans de vastes
salles. Ce fut seulement au xvi* siècle que des archi-
tectes italiens édifièrent des théâtres fixes. Tel fut celui
aue Bramante construisit en pierre, et dans la forme des
tnéâtres antiques, à l'extrémité de la grande cour du Va-
Tnft
1713
TiTft
tifan. Palladio éleva à Vioence, en 1580, toujours d'après
les modèles laissés par les Anciens, mais en ajoutant une
toiture, un thé&tre que Ton conserve encore aujourd'hui
avec un soin religieux. Il est de forme demi-ovale; la
scène offre 7 rues, avec des palais, des temples, des arcs
de triomphe en relief; mais ces édifices étant nécessai-
"«ment petits, le coup d*œil est d*un mauvais effet. Vin-
cent Sceunozzi modela également sur l'antique, avec plus
de rigueur encore, le thé&tre de Sabionnetta ; en lui don-
nant la forme demi-circulaire, il rendit la scène visible
pour tous les spectateurs. En 1618, J.-B. Aleotti con-
struisit le théâtre de Parme, dont la forme générale est
un hémicycle prolongé par des lignes droites : autour
du parterre est un vaste amphithéâtre, surmonté de deux
galeries ornées de colonnes et d'arcades; au-dessus est
un acrotère avec des figures qui semblent porter le pla-
fond; l'avant-scène offre deux rangs de niches ajustées
avec de petites colonnes qui rappellent en grande partie
la décoration des scènes antiques; vers les deux faces, en
retour de l'avanV-scène et en retour avec les loges, sont
deux arcs de triomphe surmontés de figures équestres.
La disposition des théâtres antiques ne pouvait pas
convenir aux usages modernes. On ne tarda pas à rem-
placer les gradins par des rangs de loges ou des balcons,
et la scène devint plus profonde, afin de faire Jouer les
machines et de produire des effets pittoresques. Dans le
XVII" siècle, toutes les villes d'Italie voulurent avoir leur
théâtre fixe, et ces théâtres furent construits à peu près
3ur le plan que nous avons conservé jusqu'à présent.
Toutefois, si l'on excepte le thé&tre de S^ Charles à Na-
ples, et celui que Galli da Bibiena éleva & Bologne vers
1703, les anciens thé&tres italiens ne présentaient pas
les conditions que l'on exige aujourd'hui : point de fa-
çade extérieure qui les caractérise; point de porti((ue
pour tenir la foule à couvert avant l'ouverture de la salle ;
point d'abri pour descendre de voiture, ni de foyer pour
la promenade des spectateurs pendant les eiitr'actes;
point de café à l'intérieur.
En France, ce ne fut guère qu'au xvii* siècle que l'on
b&tit des thé&tres durables. Un des premiers et des plus
importants fut le thé&tre construit dans le Palais-Royal
par ordre du cardinal de Richelieu : l'intérieur de la
salle consistait en 27 gradins et 2 rangs de loges ; la
noblesse occupait des banquettes sur les côtés de Tavant-
scène (F. Baivqdettes ) ; dans les gradins, les femmes de
la cour se faisaient apporter des fauteuils ou des chaises ;
au parterre, on restait debout. Les autres salles ont dû
présenter & peu près les mêmes dispositions. Les repré-
sentations n'avaient encore lieu alors que pendant le
jour : les ordonnances de police prescrivaient de finir les
spectacles, en hiver, & quatre heures et demie. Louis XIV
lit construire aux Tuileries, par l'architecte italien Gas-
pard Vigarani, une salle de style composite qui occupait
loutc la largeur du pavillon Marsan. La scène avait
i% met. de profondeur, 10'" ,66 d'ouverture, et 11 '",33
lie hauteur ; le dessus, pour la retraite des décorations ,
était de 12'",33, et le dessous de r>™. La partie livrée aux
spectateurs avait 16"*,33 de largeur, sur 31"* de profon-
deur; la hauteur du parterre & la voûte était de 10™,33.
Quand on donna les représentations le soir, il fallut
éclairer les salles de spectacle : de là l'emploi du lustre
( V. ce mot ). On éclaira également la rampe^ et tout
d'abord avec des chandelles, car la salle de l'Odéon, à
Paris, fut la première où l'on employa des lampes ou
quînquetsenl784.
Les dispositions des thé&tres modernes sont à peu près
les mêmes chez toutes'Ies nations européennes. Cepen-
dant, l'emploi des balcons appartient plus spécialement
aux peuples du Nord, et les loges fermées à ceux du Midi.
Les Italiens ne connaissent pas ces longues galeries qui,
chez nous, font le tour de la salle en avant des loges.
En Espagne, Jusqu'à la fin du xviii" siècle, les salles de
spectacle ont été carrées : au-dessous des trois rangs
de loges il y avait un amphithô&tre où se plaçaient les
femmes; dans toute la façade du fond étaient des gale-
ries grillées, réservées aux moines, et le parterre était
disposé en gradins, avec un espace libre au milieu, qui
répondait à l'orchestre antique.
Après bien des t&tonnements et des expériences , il a
été reconnu que la meilleure forme pour les thé&tres
modernes est la forme elliptique. Tout spectateur, en se
rendant au spectacle, se propose d'entendre et de voir ;
or, l'ellipse est la courbe la plus favorable à la libre cir-
culation du son, et la disposition des loges et des galeries
sur cette courbe est la plus avantageuse pour voir sur la
icèue. Si, ao^ avoir fixé les deux foyers de l'ellipse, ou
tire une ligne parallèle au petit diamètre et au quart du
la longueur du grand, la longueur de cette ligne donne
exactement les meilleures proportions de l'ouverture de
l'avant-scène. Si l'on tire au delà de l'avant-scène une
liçne parallèle au petit diamètre de l'ellipse et au hui-
tième de la longueur totale du grand diamètre, si l'on
tire ensuite deux lignes des extrémités du petit dia-
mètre et passant aux extrémités de la ligne parallèle, le
point d'intersection de ces deux lignes obliques donne
celui de la profondeur nécessaire du thé&tre, tant sous le
rapport des rayons visuels que sous celui des lignes
acoustiques. Il n'est guère possible, pour que les acteurs
soient entendus, de donner plus de 25 met. à la salle,
depuis l'avant-scène jusqu'au fond des loges du point
opposé. Pour que des places latérales les plus élevées
les spectateurs puissent voir convenablement sur la
scène, il faut que le rang de loges ou de galerie le plus
élevé de la salle ne surpasse pas en hauteur les deux
tiers de la longueur totale de cette salle. C'est d'après
ces principes qu'ont été construits beaucoup de thé&tres
italiens, qui peuvent servir de modèles, tels que : l'an-
cien thé&tre de Fano, b&ti sur les dessins de Torelli ;
celui de Mantoue, dû à Galli da Bibiena; celui d'imola,
œuvre de Cosme Morelli ; le thé&tre San-Bencdetto à
Venise, et la salle Argentina, à Rome, que le comte Teo^
doli a faite sur le même modèle; le grand théâtre de la
Fcnice, à Venise, construit par Selva; celui de la Scala,
à Milan, par Piermarini; le nouveau thé&tre de Parmp.,
par Bettoli, etc. Les avantages de la forme elliptique étant
connus, il en résulte que le plafond d'une salle de spec-
tacle, surtout d'une salle d'opéra, doit être tracé sur une
courbe elliptique, qu'il faut se garder d'interrompre par
une ouverture au centre, comme on le fait sous prétexte
de favoriser le renouvellement de l'air dans la salle : avec
cette forme, il favorise autant que possible la circulation
du son. Par suite, le plafond doit offrir une surface plane,
nue pour ainsi dire, dépouillée de ces compartiments et
autres fantaisies architecturales qui n'ont d'autre effet
que de dénaturer la masse du son, de la disperser, et de
donner aux voix un caractère différent en divers points
de la salle.
H est encore une forme que l'en peut donner aux
thé&tres avec avantage : c'est celle du cercle, tronqué vers
le quart par l'ouverture du proscenium, et au cinquième
par celle du rideau. Elle a été adoptée complètement ou
à peu près au thé&tre S^Charles de Naples ; au thé&tre
de Bordeaux, construit par Louis; au Thé&tre Français
de Paris, ouvrage du même architecte, mais où l'on a un
peu perdu de la propriété du cercle par une trop grande
élévation intérieure; dans la même capitale, an thé&tre
de la Porte-S^-Martin, par Lenoir; au thé&tre des Var-
riétés, par Cellerier ; au thé&tre de l'Opéra, me Le Pele-
tier, par Debret. — On a fait à Londres un essai bizarre,
et sans succès, celai d'une salle en forme de porte-voix,
dont la partie la plus resserrée est vers la scène : si cette
disposition a pu être déterminée par des raisons d'acous-
tique, elle privait entièrement des propriétés de l'optique
les parties latérales de la salle.
Une des erreurs les plus grandes des architectes dans
la construction des thé&tres a été de séparer la scène et
le reste de la salle par un mur avancé ou par une masse
solide, soit que cette masse soit arrondie en forme d'ar-
chitrave, soit qu'elle forme un encadrement. Ce mur ou
cette masse solide est un repoussoir qui d'une part re-
jette en arrière la voix des acteurs, et de l'autre produit
une répercussion des effets de l'orchestre, laquelle déna-
ture la qualité du son et ne le fait parvenir que réfléchi
jusqu'au public. De même, les colonnes placées commu-
nément aux loges de l'avant-scène, avec leurs chapiteaux
et l'espèce de fronton qu'elles supportent, non-seulement
interrompent la ligne acoustique et gênent les effets
de la vision, mais encore forment des gouffres où le son
s'engloutit. Cet inconvénient a disparu dans le nouveau
Théâtre impérial du Châtelet, ouvert à Paris en 1862 :
l'architecte, M. Davioud, a prolongé Jusqu'à la scène les
galeries des spectateurs. Ce thé&tre présente une autre
innovation, qui est toute une révolution dans le système
d'éclairage des salles : l'énorme lustre qui intercepte la
vue à un certain nombre de spectateurs des galeries su*
périeures, et d'où se dégage, surtout depuis l'emploi du
gaz, une chaleur suffocante, a été supprimé; le plafond
de la salle est formé par un immense verre ovale, dépoli
et ciselé, au-dessus duquel on a concentré de nombreux
becs de gaz, et la lumière arrive en quelque sorte tamisée
et singulièrement adoucie. Ce système d'éclairage a été
«encore adopté au Tliéâtre-hjnque de la place du Ciiâio-
: m
TIM
1722
TIM
bassin demi-sphériqne en cuivre, recouvert d*uDC peau
lor laquelle viennent frapper des baguettes de bois revê-
tues de peau. P. G.
TIBiBRE, sorte de petite cloche immobile et sans bat-
tant, et qui est frappée en dehors par un marteau. C'est
au moyen d'un timbre que les horloges et les pendules
sonnent les heures. On se sert aussi, depuis une vingtaine
d'années envbron, de timbres au lieu de sonnettes dans
les appartements. Certains compositeurs de musique en
ont introduit dans leurs œuvres.
TIMBRE, qualité sonore d'un instrument on d'une voix.
C'est, avec VitUonaHon et Vintensité, une des trois quar-
lités essentielles du son ; elle en est en quelque sorte la
matière. Le violon, la flûte, la trompette, tous les instru-
ments, en un mot, ont dans le son un caractère distinctif,
indépendant du ton et de la force; c'est leur timbre. Des
différences analogues existent entre la voix d'homme et
la voix de femme, entre la voix de ténor et la voix de
basse. Il y a des instruments dont le timbre est suscep-
tible de plusieurs nuances, au moyen de changements
que l'exécutant y pratique, ou d'après le mode de s'en
servir : ainsi, le timbre ou violon varie selon qu'on fait
résonner l'instrument avec un archet, ou en pinçant les
cordes, ou en employant la sourdine, ou en tirant des
sons harmoniques ; un même trait. Joué sur deux cordes
différentes, prend un autre caractère; on varie le timbre
de l'orgue au moyen des registres; une voix diffère de
timbre, selon qu'elle rend des sentiments d'amour ou de
colère, etc. B»
TiMBiiE, nom que les vaudevillistes donnent aux airs
connus sur lesquels ils composent leurs couplets.
TiuBRE, double corde à boyau tendue contre la peau
Inférieure du tambour militaire, et qui vibre avec elle.
TIMBRE, en termes de Blason, ce qui se met sur l'écu,
comme bonnets, mortiers, casques, etc., à cause de la
ressemblance de ces objets avec le timbre d'une horloge.
L'usage des timbres dans les armoiries est postérieur aux
Croisades.
TIMBRE, marque imprimée par l'État sur le papier dont
la loi oblige à se servir pour certaines écritures, comme les
actes authentiques, les titres de propriété, les contrats,
tes effets de commerce, les actions et obligations négo-
ciables, les quittances dans les services publics, les bor-
dereaux des agents de change et des courtiers, les polices
d'assurances, les pièces destinées aux actes civils et judi-
ciaires, et même pour certaines impressions, telles que
les affiches, les prospectus, les Journaux, etc. On dis-
tingue le tinU>re de dimension, dont le prix est en raison
de la grandeur du papier employé, et le timbre propor-
tionnel, dont le prix varie suivant les sommes et valeurs
auxquelles il est destiné : le premier s'applique en encre
noire, le second est frappé à sec. Chaque timbre porte
son prix. Le timbre de (Ûmension est exigé de tous les
actes, extraits, copies et expéditions, soit publics, soit
privés, devant ou pouvant faire titre, ou être produits
pour obligation, décharge. Justification, demande ou dé-
rense; de tous les livres, registres, minutes de lettres,
qui sont de nature à être produits en justice et dans le
cas d'y faire foi, ainsi que des extraits, copies et expédi-
tions qui en sont délivrés; enfin, des actes paas^ aux
colonies ou à l'étranger, et dont il est fait usage en
France. Le timbre des livres de commerce a été sup-
primé par la loi du 20 juillet 1837, et remplacé par 3 cen-
times additionnels au principal de la contribution des
patentes. Tous les effets de commerce, tels que billets à
ordre ou au porteur; les rescriptions, mandats, mande-
ments, ordonnances, lettres de change; les titres d'ac-
tions émises par les sociétés commerciales; les obliga-
tions sous seing privé, etc., sont assujettis au timoré
proportionnel. Depuis 1862, le timbre de dimension fot
fixé ainsi qu'il suit : demi-feuille de petit papier, 0 fr. 50 c;
feuille de petit papier, 1 fr. ; feuille de moyen papier,
i fr. 50 c; feuille de grand papier, 2 fr.; feuiUe de grand
registre, 3 fr. La faculté d'a[oonnement établie par la loi
du 5 Juin 1850 au profit des sociétés, compagnies d'assu-
rances et assureurs, s'exeiça à raison de 0 fr. 03 c. par
1,000 fr. du total des sommes assurées. Les bordereaux
et arrêtés des agents de change et des courtiers furent
assujettis au droit de timbre pour les sommes employées
aux opérations qui y sont mentionnées ; 0 fr. 50 c. pour
les sommes de 10,000 fr. et au-dessous; 1 fr. 50 c. au-
dessus de 10,000 fr. Le prix pour le timbre propor-
tionnel des effets de commerce tut de 5 c. Jusqu'à 100 fr.
inclusivement, de 10 c. jusqu'à 200, de 15 c. jusqu'èi
300, de 20 c. jusqu'à 400, de 25 c. jusqu'à 500, de 50 c,
depuis 501 fr. jusqu'à 1-000; au-dessus, le prix aug-
menta de 50 c. par 1,000 fr. jusqu'à 20,000 tr. Un act«
écrit sur papier libre n'est pas annulable parce qu'il n'i
point été écrit sur papier timbré : seulement, la contra-
vention donne lieu à une amende de 5 fr., s'il fallait
prendre du papier au timbre fixe; l'amende est de 6 pouf
100 des sommes exprimées, pour le souscripteur d*ua
billet ou obligation assujetti au timbre proportionnel.
L'accepteur, le bénéficiaire ou premier endosseur de Peffct
non timbré sont aussi passibles de l'amende de 6 p. 100«
s'ils ne le font viser pour timbre dans les 15 jours de sa
date et avant toute négociation. On i^)pelle tin^e à
Vextraordinaire celui qui s'applique en noir sur les pa-
piers présentés par les particuliers, comme les feuilles
destinées à l'impression des Journaux, des afiQcbes,
des prospectus, des écrits politiques qui ont moins de
5 feuillea, etc., les actes qui auraient dû. être écrits sur
papier timbré, les effets de commerce dont la valeur dé-
passe 20,000 fr. Sont exemptés les avis contenant une
simple indication de domicile, les bulletins du cours des
changes, les annonces et prospectus des Journaux qui
s'occupent exclusivement de science et d'art, les billets
de faire part de mariage, naissance et décès. La musique
n'est dispensée du timbre que depuis peu d'années. Le
timbre des journaux, affiches et prospectus, est propor-
tionnel à leur dimension, mais d'une quotité bien infé-
rieure à celle nui est fixée pour les actes : pour les jour-
naux, le droit lut de 6 c. par feuille de 72 décimèt. carrés
et au-dessous, dans les départements de la Seine et de
Seine-et-Oise, et de 3 c. partout ailleurs. Pour chaque
fraction en sus de 10 décimèt. carrés et au-dessous, il
fut perçu 1 cent, et demi dans les départements de la
Seine et de Seine-et-Oise, eti c. partout ailleurs. Il faut
encore mentionner, comme frappés de la contribution du
timbre, les passe-ports et les ports d'armes de chasse. La
contrefaçon des timbres de l'État est punie par la réclusion
ou les travaux forcés et la dégradation civique. L'Admi-
nistration du timbre fait partie de la Direction générale
des Domaines et de l'Enregistrement, l'une des subdivi-
sions du Ministère des Finances. — Le timbre fut établi
pour la première fois en 538, par Tempereur Justinien,
et reçut le nom de protocole, parce qu'on ne l'appliquait
que sur la première feuille des actes. Introduit en Es-
pagne et dans les Pays-Bas en 1553, puis en Allemagne
et en Angleterre, il fut question de l'imposer en France
en 1655 ; mais l'innovation ne fut consacrée que par les
déclarations des 19 mars et 2 juillet 1673, et par un édit
du mois d'avril 1674. Une ordonnance de juin 1680 dé-
signa les actes qui devaient être timbrés. Cette ordon-
nance, une déclaration du 18 avril 1600 et un édit de
février 1748, augmentèrent successivement les droits fixé»
d'abord par le tarif du 22 avril 1673. Un édit proposé en
1787, pour augmenter les recettes de l'impêt du timbre,
fut un des prétextes de la Révolution. Cet impôt reçut de
nouvelles extensions par les lois du 18 février 1701, du
9 vendémiaire an vi, et du 6 prairial an vn. La loi du
11 nivôse an iv établit la distinction du timbre de dimen-
sion et du timbre proportionnel. Les deux lois fonda-
mentales de la législation du timbre sont celles du 13 bru-
maire an vn et du 28 avril 1816; les modifications
qu'elles ont subies par suite des lois du 25 mars 1817,
du 15 mai 1818, du 16 Juin 1824, du 24 mai 1834 et du
5 Juin 1850, ne sont guère relatives qu'à la quotité des
droits et à la pénalité. Les Journaux, soumis au timbre
par un règlement du 0 vendémiaire an vi, en furent
affranchis par décret du 6 mars 1848; mais ils y ont été
soumis de nouveau par la loi du 27 Juillet 1850. Une loi
du 11 Juin 1859 a créé, pour les effets de commerce ve-
nant, soit de l'étranger, soit des lies ou colonies dans
lesquelles le timbre n'a pas encore été établi, des timbres
mobiles que vend l'administration de l'Enregistrement,
et que tout commerçant peut apposer lui-même sur ces
effets payables en France, avant qu'ils soient endossés,
acceptés ou présentés à l'encaissement. L'impôt du timbre
était autrefois très-lourd pour les journaux en Angleterre:
à la fin du siècle dernier, il était de 8 sous par feuille;
en 1836, on le réduisit à un penny (2 sous). Comme on
ne timbre qu'à Londres, à Dublin et à Edimbourg, il faut
faire venir de ces villes tout le papier timbré. V. Tardif,
Lois du Timbre et de V Enregistrement, 1iC26, 2 voL in-8«:
A. Sorel, Nouveau tarif ou Dictionnaire abrégé des droits
de timbre, d^enregistrement, de greffe, d*hypothèques et de
sceau, 1854, in-12 ; Camps, Code et thctionncûre d'enre-
gistrement, de timbre, de greffe, d^kypothèque, etc., 1838,
ln-8^ B.
TIMBRE, marque particulière que chaque bureau de
poste en France imprime sur les lettres qu'il fait partir,
TIR
1723
TIR
po!ir Indiquer le lien et le jour du départ, et sur celle
qu'il reçoit, pour constater le jour de l'arrivée.
TIMBRE-POSTE, estampille vendue par TAdministra-
tion des postes, et qae l'expéditeur d'une lettre colle, pour
l'affranchir, sur un coin de l'adresse. Elle porte l'effigie du
souverain, ou les armes de la nation, ou quelque figure al-
légorique. Le taux des timbres-poste varie suivant le poids
des correspondances. Il y en a, en France, de 6 couleurs
différentes : gris-vert, valeur 1 centime ; vert-clair, 5 c. ;
jaune, 10 c; bleu, 20 c.; orange, 40 c. ; rouge, 80 c. Toute
lettre pour l'intérieur, revêtue d'un timbre-poste insuffi-
sant, est considérée comme non afihranchie, et taxée comme
telle, sauf déduction du prix du timbre. Les lettres pour
l'étranger, revêtues de timbres insuffisants, sont considé-
rées comme non affranchies et ne peuvent avoir cours, si
elles sont à destination de pays pour lesquels l'affranchis-
sement est obligatoire. Le poids des timbres-poste est com-
pris dans le poids des lettres sur lesquelles ils soAt appo-
sés. L'emploi fait sciemment d'un timbre-poste ayant
déjà servi est puni d'une amende de 50 à 1,000 fr. (Loi du
16 oct. 1849). — L'idée première du timbre-poste remonte
à l'année 1653 : la Muse historique de Loret (16 août) fait
allusion à une Instruction adressée au public, conservée
aujourd'hui à la Bibliothèque impériale de Paris, et par
laquelle on était informé qu'on pouvait acheter d'avance,
pour les attacher d'une manière ou de l'autre aux lettres,
des billets portant les mots port payé, et sur lesquels on
aurait à écrire le jour et le mois de l'envoi. Il y avait
aussi, pour les personnes de la suite du roi quand il
n'était pas à Paris, certaines marques qu'elles apposaient
sur leurs lettres à destination de cette ville. Vers 1635
on 1642, les membres du Parlement anglais obtinrent le
privilège du port gratuit de leurs lettres; il suffisait d'une
enveloppe ponant leur signature : les enveloppes signées
en blanc devinrent l'objet d'un véritable commerce. En
1823, un Suédois, Treffenberg, lieutenant d'artillerie,
proposa à l'ordre de la noblesse dans la Diète l'émission
d'un papier timbré destiné à servir d'enveloppe aux
lettres, qui se trouveraient ainsi affranchies : l'idée fut
repoussée, mais elle a été reprise depuis en Prusse et en
Russie. Le timbre-poste, tel qu'il existe aujourd'hui, est
dû à sir Rowland Hill, et fut employé en Angleterre à
fartir de 1840. L'exemple a été suivi par la Belgique en
847, la France en 1848, l'Espagne, la Suisse, la Prusse,
l'Autriche et les principaux États de la Confédération ger-
manique en 1850, le Piémont et le Danemark en 1851, la
Hollande en 1852, la Suède en 1855, la Russie en 1857,
la Grèce en 1861, la Moldavie en 1862. En France et ail-
leurs, on se sert de timbres -poste comme de papier-
monnaie, pour le payement de sommes minimes. B.
TIMOGRATIB (du grec iimè, cens, et cratos, pou-
voir], gouvernement dans lequel les fonctions appartien-
nent aux citoyens payant un cens, c-à-d. possédant une
fortune déterminée.
TIMON (du latin temo)^ longue pièce de bols qui fait
partie du train de devant d'un chariot ou d'un carrosse,
et aux deux côtés de laquelle on attelle les chevaux. Les
chevaux ainsi attelés sont dits timoniers.
TIMONNERIE, en termes de Marine, espace situé sur
le gaillard d'arrière, près du mât d'artimon, et où se
trouvent la roue du gouvernail, les habitacles, les com-
pas de route, les horloges, les boussoles, etc. Le nom
vient de ce qu'autrefois la barre du gouvernail s'appelait
timon. Les timoniers sont les hommes de l'équipage à
qui l'on confie le soin de diriger le timon. Le Maître de
timonnerie est chargé de tout ce qui a rapport aux si-
gnaux, aux sondes, an loch, etc.
TIR, action de lancer, avec une arme quelconque, un
projectile dans une direction déterminée. La théorie du
tir constitue la science appelée Balistique. La ligne sui-
vant laquelle on tire une pièce d'artillerie se nomme
également tir, et l'on distingue le tir plongeant^ le tir
perpendiculaire, le tir oblique, le tir rasant, le tir à ri'
eochêt : ce dernier fut employé pour la première fois par
Vauban au siège d'Ath, en 1697. II y a, dans tous les ré-
giments français, des Ecoles de tir, où Ton décerne des
prix : les instructeurs chargés de cet enseignement sont
formés à VÊcole normale de tir qui est établie à Vin-
cennes.
TIRADE, nom qu*on donne à tout long développe-
ment mis dans bouche d'un personnage par le poète dra-
matique.— Le même mot s'employait autrefois en Mu-
sique pour désigner une série de notes dont l'exécutant
remplissait un intervalle, mais en procédant plus lente-
suent que dans la fusée (V. ce mot).
TilîAGE, eu termes d'Imprimerie, se dit de l'action
de mettre les feuilles sous presse ponr les Imprimer. Le
tirage est confié à une classe distincte d'ouvriers, qui éta-
lent l'encre sur la planche, étendent et fixent les feuilles
blanches sur le tympan, font mouvoir la presse, etc. Tout
ce travail a été singulièrement simplifié par l'invention
des presses mécaniques. — Faire plusieurs tirages, c'est
exécuter des réimpressions sur les mêmes formes ou
planches.
TIRAGE AD SORT. V, RbCRDTEITEIIT.
TIRAILLEURS, soldats d'infanterie qnl se dispersent
en avant d'une colonne pour commencer l'attaque. Ils se
placent de 4 à 10 pas de distance les uns d^s autres, ou
constituent de petites bandes, et exécutent leurs mouve-
ments d'après des signaux de clairon. Le feu une fois en-
gagé, ils se soutiennent mutuellement, de sorte que l'un
ne décharge son arme que quand son voisin a fini de
charger la sienne. Ils doivent être exerce à former, par
de rapides mouvements de concentration, des groupes
capables de se défendre à la baïonnette. Avant 1789, on
se servit rarement de tirailleurs : ils étaient appelés en
France Chasseurs à pied et Enfants perdus. Mais les
guerres de la Révolution, où le temps man(jua souvent
pour discipliner les troupes, et où le combat isolé fut au-
tant de mode que de nécessité, en virent naître de nom-
breuses bandes. Quand on en revint à la guerre de
manœuvres, le nom de tirailleurs cessa d'être une dési-
gnation de troupe. En 1811, Napoléon I*' créa 20 régi-
ments de tirailleurs, rattachés à l'arme des grenadiers à
pied, comme les flanqueurs l'étaient aux chasseurs. Ils
furent licenciés après la chute de l'Empire. Pendant la
Restauration, on s'occupa beaucoup, en théorie, de la
tactique des tirailleurs, et ces études aboutirent à l'or-
donnance du 4 mars 1831. En 1840, on donna le nom de
TiraUletérs aux bataillons de nouvelle formation, qui ont
été appelés ensuite Chasseurs d'Orléans, Chasseurs de
Vincennes, Chasseurs à pied. En Algérie, les troupes in-
digènes d'infanterie sont dites Tirailleurs algériens, et
ont reçu de nos soldats le nom de Turcos; tous les offi-
ciers supérieurs, tous les capitaines, la moitié des lieute-
nants et des sous-lieutenants, les sergents-majors et les
fourriers, y sont Français. B.
TIRANNAS, sorte d'airs populaires espagnols du genre
des boléros et des seguidilles. Ils se cnantent et ne se
dansent pas. La mesure est à 3 temps, d'un mouvement
un peu lent. On y introduit beaucoup de syncopes.
TIRANT, en termes de Construction, désigne : 1^ une
pièce de bois qui tient en état les deux Jambes de force
d'un comble; 2^ une barre de fer attachée à une poutre,
et dont l'extrémité porte un œil qui reçoit une sorte
d'ancre pour prévenir l'écartement au mur.
TIRANT d'eau , quantité dont un navire enfonce dans
l'eau, mesurée depuis le bas de la quille jusqu'à la flot-
taison {V. ce mot). Le tirant d'eau est marqué, à l'avant
et à l'arrière, par des chiffres placés sur l'étrave et sur
l'étambot.
TIRANTS. V. Registres de l'orgue.
TIRASSE, filet où l'on prend des cailles, des perdrix,
des alouettes, en tirant les cordons qui le ferment.
TIRASSE, nom donné dans l'orgue à un clavier de pé-
dale qui n'a point de sommier particulier et qui tire les
basses des touches du clavier à la main. La tirasse ne se
trouve que dans les orgues qui n'ont point de pédales
séparées. F. C.
TIRA-TUTTO, registre qui ouvre tous les Jeux de l'or-
gue à la fois.
TIRE, en termes de Blason, est sjmonjnne de rangée.
TIRE-BALLE ou TIRE-BOORRE, instrument dont on
se sert pour décharger les fusils.
TIRE-BORD, instrument en bois, avis et à écrou, dont
ou se sert dans les chantiers de la Marine pour faire re-
venir à sa place le bordage d'un bâtiment qui s'en est
écarté.
TIRE-FOND, anneau de fer terminé par une vis et qui
sert à soutenir au plafond un lustre, un dais, un ciel de
lit, etc.
TIRE-LIGNE, petit instrument terminé par deux lames
d'acier à pointe mousse, qui se resserrent i)lus ou moins
au moyen d'une vis, et qui sert aux dessinateurs pour
tirer des lignes plus on moins fines. On peut l'adapter à
un compas.
TIRET, petit trait horizontal qui, dans un dialogue
écrit ou imprimé, indique le changement d'interlocuteur.
Il remplace aussi les points de suspension, ou Indique
que l'on passe d'un sujet à un autre.
TIROIR (Pièces à) on à travestisffemenfa , pièces de
thé&tre du genre comique, composées d'une succession
TOC
1724
TOL
do scènes à peu près détachées les ânes des autres, et
qui déroulent autour d'un personnage toujours en scène
Taction de plusieurs autres, ou l'action d*un seul sous
divers travestissements. Molière a donné deux modèles
du genre dans la Critiqua de l*Êcole des femmes et dans
les Fâcheux. On peut citer encore le Mercure gaiant, les
Fables d'Ésope et Ésope à la cour de Boursault, le Pro'
cureur arbitre de Poisson, les Originaux de Fagan, etc.
Le mérite des pièces à tiroir dépend du talent et du Jeu
des acteurs, de Tintérét des détails et du style, car il n*y
a ni incidents ni mouvement.
TIROIRS , se disait, au moyen &ge, des lanières qui
s'attachent aux fermoirs de livres.
TIRONIENNES (Notes). V. ÂBnéviATions.
TISSERANDS, ancienne corporation qui avait pour pa-
tron S^ Biaise ou S^ Roch. Ses statuts, rédigés en 1281 ,
furent renouvelés en 1586, et confirmés en 4608 et 1640.
TITRE, degré de fin de Tor et de l'argent. V, Buocterie.
TrrRB, inscription placée en tète d'un livre pour indi-
quer le sujet qui y est traité. On donne le même nom à
la page qui contient cette inscription. Le faux titre est
un titre abr^é, imprimé sur le feuillet qui précède celui
du titre entier. Le titre courant est la ligne en petites
capitales qui est répétée en haut de chacune des pages
d'un livre.
TITRE, subdivision dans les Codes de lois, dans les re-
cueils de Jurisprudence. Un livre se subdivise en titres,
et les titres en chapitres.
TrmB, propriété d'une charge, d'un office, d'une
chaire, etc. Celui qui possède un titre se dit titulaire,
TITRE, en termes de Jurisprudence, acte constatant une
propriété, un droit ou une Jouissance. Il est autfientique,
quand il a été reçu par un officier public; exécutoire,
quand il emporte exécution parée contre l'obligé ; gra-
tuit, s'il n'entraîne aucune obligation ; onéreux, si cer-
taines charges ou conditions y sont attachées. Un titre
fait foi de ce qu'il contient; il ne peut être détruit que
par un titre contraire, ou par une inscription en faux
reconnue fondée. La remise volontaire du titre par le
créancier au débiteur fait preuve du payement ou de la
remise de la dette.
TITRE, qualification honorifique qu'on donne à certains
individus, en raison de la position qu'ils occupent dans
les rapports de la vie sociale. Tels sont les titres que por-
tent les membres des maisons souveraines, et les titres
de noblesse. V. Nous et TnrRBS.
TITULUS, placard attaché au bout d'un long bâton, et
que, chez les Romains, les soldats portaient dans les
triomphes, pour apprendre à la foule le nombre des pri-
sonniers, la quantité du butin, les noms des villes et des
pays soumis, renseignements écrits en gros caractères.
TITUS (Arc de). V. Ane db Triouphe.
TLAPANÈQUë (Idiome). V. Mexique (Langues du).
TMÈSE (du grec tmèsis, coupure, retranchement), sé-
paration des éléments qui concourent à former un mot
composé ; ainsi, les mots latins circumdare, septentrio,
peuvent admettre un ou plusieurs mots entre circum et
dare, entre septem et trio :
Talls hyperboreo teptem subjects triinU.
(ViRoiLB, Gtorg., III, 881.)
Tergft daiU
Ter sqnamea dretim
{ld.,jEneid., II, S18.)
Les mots terminés par le suffixe cunque peuvent se sé-
Earer ainsi : « Quoi Judicium cunque subierat, damna-
atur (Cicéron). » La poésie grecque ancienne et la langue
allemande offrent de nombreux exemples de cette figure
de mots. P.
TOAST, mot anglais qu'on prononce tôste, et qui est
dérivé de tostus (participe de torrere, rôtir), proposition
de porter une santé à quelqu'un, de boire au souvenir
d'un événement ou à la réalisation d'un vœu. Le nom est
une allusion à la tranche de pain que certains Anglais
mettent dans le vin qui leur sert à boire des santés. Les
toasts étaient connus dans l'Antiquité ; c'est ce qu'on
appelait à Rome grœco more bibere (boire à la manière
grecque), 0}iadnumerum bibere (boire un certain nombre
de fois).
TOC rJeu du), en italien toccadegli (touchez-les), en
espagnol toccatille, sorte de trictrac qui était en grande
vogue au xvi* siècle, et où le seul but du joueur était de
toucher^ c.-àrd. de battre son adversaire.
TOCCATE, en italien toccaka (participe féminin de
toccare, toucher), pièce de musique cci-Ilc pour uu iustru-
t
ment à touches, tel que le clavecin, le piano, Torgne. La
toccate, qui a été remplacée par la sonate (K. ce mot)^
n'était le plus souvent composée que d'un seul morceau.
TOCSIN (du vieux français toquer, frapper, et seing on
sing, cloche ), façon de battre une cloche à coups redoa-
blés pour donner l'alarme. Autrefois on a aussi sonné le
tocsin en signe de réjouissance.
ÎS^ aÎ^**^^* / y* ces mots notre Dktionnaire de
TOGE \ ^^^^P^^ ** d'Histoire.
TOILETTE \ mot d'origine peu ancienne, par lequel on
désigna d'abord toute petite toile qui servait à envelopper
des vêtements ou objets précieux, par exemple ce qui
était nécessaire à l'ajustement d'une femme. Il s'est en-
suite appliqué à la table sur laquelle on étendait cette
toile pour y prendre les objets d'ajustement, et à l'ajus-
tement lui-même.
TOISÉ, art de calculer les dimensions des ouvrages
d'architecture civile et militaire^ c-à-d. les surfaces et
les solidités de ces ouvrages.
TOIT (du latin tectum, fait de tegere, couvrir), couv^-
ture d'un b&timent (F. Cooveatdrb). U prend les form»
du comble (F. ce mot).
TOLÈDE (Cathédrale de). Cette église, primatiale de
l'Espagne, a été commencée en 1227 par ordre de S^ Fer-
dinand, sur l'emplacement d'un autre édifice que les
Arabes, pendant leur séjour dans la ville, avaient con-
verti en mosquée. Le plan est dû à l'architecte Pedro Pc-
rez, qui présida aux travaux pendant près de 50 ans. I^
dédicace n'eut lieu qu'en 1492. Le monument est en
style ogival le plus pur, variant parfois de caractère en
raison des époques. La grande façade occidentale pré-
sente trois portes garnies de statuettes et d'ornements
délicatement sculptés; l'arc de celle du milieu est divisé
en deux plus petits, et surmonté d'une sainte Cène. Deux
énormes piliers en forme de tours, partagés symétrique-
ment en étages et ornés de 20 statues, s'élèvent entre
ces portes. Des deux tours d'angle, l'une est restée ina-
chevée, et a été couverte d'un dème octogone par Georgirs
Teotocopuli. L'autre, dont TefTet est très-beau, a été ter-
minée en 1535, et atteint une élévation de 90 met. Elle
est partagée en trois grands corps : le 1'', de forme car-
rée, monté sur une base massive, est décoré de colon -
nettes et d'arcs gothiques, d'asulejos ou faïences vernier.,
et couronné par un balcon à jour ; le 2% en retrait sur
le 1*', est octOKone, flanqué à ses angles d'élégantes py-
ramides rattachées à la tour par des arcs-boutants, et
présente sur chaque face une fenêtre ogivale double, ter-
minée en fleurons ; le 3* est une flèche octogone à la
base, arrondie au sommet, cerclée de trois couronnes
d'épines, et finissant par une série de globes et une croix
de fer. La façade méridionale de l'église a deux portes :
l'une, dite Porte des lions, précédée d'un parvis ferme
dont la grille est soutenue par 6 colonnes surmontées de
lions, forme une belle voussure où les statuettes et les
dais ont été semés à profusion ; l'autre, reconstruite en
1800, est d'ordre ionique, et fait un contraste malheu-
reux avec le reste de Tédifice. La façade du Nord est
encaissée entre les hautes murailles d'un cloître et quel-
ques vieilles maisons particulières. — L'intérieur de la
cathédrale de Tolède est à 5 nefs, séparées par 88 piliers,
chacun de 16 colonnes groupées. Il a 113" de longueur,
57 de largeur, 45 de hauteur à la nef centrale, et e^t
éclairé par 150 fenêtres ornées de vitraux de couleur. De
riches chapelles sont pratiquées tout autour de l'édifice.
La Grande chapelle, dont la grille, hante de 9"*, large
de 12, et surmontée d'un Christ colossal, a été exécutée
Ear Francisco de Yillalpando, contient un riche retable en
ois de mélèze, un entassement bizarre de volutes, de con-
soles, de balustres, de chapiteaux, de nuages et de rayons
solaires qu'on nomme le transparent, et les tombeaux d'Al>
phonse YII, de Sanche le Désiré, de Sanche le Brave, etc.
La chapelle mozarabe renferme une belle mosaïque re-
présentant la Conception, et des fresques gotliîques où
l'on a figuré des combats entre lesTolédans et les Mores.
Dans la Chapelle des rois nouveaux, reposent Henri II,
Jean II, Henri III, et les reines leurs femmes. On re-
marque encore le tombeau du connétable Alvaro de Luna
dans la chapelle S^-Jacques, celui du cardinal Garillo de
Albornoz dans la chapelle SMldefonse, ^ dans la cha-
pelle du Sagrario, un riche monument de bronze et de
marbre, appelé l'Oc^vo en raison de sa forme octogone,
et où l'on a renfermé un grand nombre de reliques. Le
chœur attire l'attention par ses trois rangs de stalles,
sculptées au xvi* siècle par Philippe de Bourgogne et
Berruguete ; il a aussi d'énormes pupitres de bronze , et
TOM
1725
TOM
dtiux orgues de dimensions colossales. A la sacristie,
dont la voûte a été peinte par Luca Giordano, est atte-
nante ane salle où Ton conserve, entre autres trésors,
une custodia en argent doré de 3°^ de hauteur, un man-
teau de la S^* Vierge tout couvert de pierreries, plusieurs
statues en argent massif, une urne contenant les osse-
ments des rois gotlis Receswinde et Wamba, etc. B.
TOLÉRANCE, permission expresse ou tacite qu*un
gouvernement accorde aux citoyens de pratiquer telle
religion qui leur convient. G*est ce qu*on appelle la tolé-
ranc9 civile. Ainsi comprise, la tolérance ne date que de
la Réformation du xvi* siècle. Toutefois, elle n'est point
inhérente à cette Réformation, puisque Luther, Calvin ,
les Anglicans, ont été très-intolérants à Tégard des ca-
tholiques, tout en réclamant la tolérance pour éux-
roèmes. Il en est de même de TÉglise grecque russe à
regard des autres communions chrétiennes. Le luthéra-
nisme obtint la tolérance en Allemagne à la suite d'une
guerre de religion, par la paix d'Augsbourg, en 1555; le
calvinisme ne s'y fit légalement une place qu'après la
guerre de Trente Ans, lors des traités de Westphalîe,
en 1648. En France, les guerres de religion aboutirent,
en 1598 , à un édit de tolérance pour les calvinistes :
ce fut redit de Nantes, que Louis XIV révoqua en 1685;
la tolérance reparut au temps de Louis XVI, mais elle
n'est devenue complète que depuis 1781K La tolérance la
plus absolue règne aux États-Unis d'Amérique. L'intolé-
rance dans l'ordre politique et civil deviendra de Jour en
jour plus rare chez les nations. B.
TOLÉRANCB, différence que la loi tolère dans le poids
légal des denrées, ou dans la fabrication des monnaies
par rapport à l'alliage et au poids prescrits. V. Droit et
ABUS.
TOLET, cheville en bois ou en fer enfoncée dans le
plat-bord d'une embarcation pour retenir l'aviron.
TOLETIÈRE , renfort en bois placé sur le plat- bord
d'un bateau à rames, et dans lequel on perce des trous
pour recevoir les tolets.
TOLLENON , machine de siège. V. notre Dictionnaire
de Biographie et d* Histoire.
TOLMAN, mot employé en Angleterre comme syno-
nyme de dolmen {V. Celtiques — Monuments).
^TOLPACHE ou TALPACHE, nom qu'on donnait autre-
fois aux fantassins hongrois.
TOMAHAWK, hache d'armes ou casse-tète des Indiens
de l'Amérique du Nord ( K. Cassb-tétb). Il est le symbole
(lo la guerre, et Ton dit au figncirô : enfouir le tomahawk,
pour dire qu'on observe la paix.
TOMAN. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio^
graphie et d^Histoire,
TOMBALES (Pierres), un des principaux ornements
du pavé des grandes églises au moyen &ge. Ces pierres,
garnies d'inscriptions et de sculptures gravées en creux,
ne paraissent pas remonter au delà du xii' siècle; mais,
à partir du xm', elles reçurent une très-riche ornemen-
tation : les traits de la gravure furent remplis de mastics
colorés, et môme de métal fondu. On représentait d'or-
dinaire le personnage défunt, les mains jointes sur la poi-
trine, les pieds appuyés sur un animal symbolique. Sou-
vent la tête était abritée sous un dais, et de chaque côté
s'élevaient des colonncttes ou des contre-forts simulés,
interrompus de distance en distance par des niches gar-
nies d'Anges ou de Saints. Parfois on voyait dans lo cou-
ronnement Abraham portant dans son sein l'àme du
dt^funt, à moitié cachée sous un voile tenu par ce pa-
triarche. Tout autour des pierres tombales règne une
inscription, où sont relatés les noms, titres, qualités du
défunt, le jour de sa mort, son âge, avec une courte
prière. Au xv* siècle, la figure et les mains des grands
personnages étaient souvent en marbre incrusté dans
la dalle funéraire. On trouve de belles pierres tom-
bales dans les églises de Rouen, de Troyes, de Noyon, de
liaon, de Ch&loo-sur-Saône, etc. C'est principalement en
Angleterre qu'on a incrusté du cuivre dans les dalles de
pierre, pour représenter, soit la figure des morts, soit des
emblèmes religieux.
TOMBEAUX, monuments élevés à la mémoire des
morts, et empreints d'un caractère sacré en rapport avec
la religion des peuples qui les érigent. Chez les Anciens,
lo culte du tombeau s'est partout mêlé au culte public,
et c'est ce qui explique comment de simples monuments
funéraires égalaient en grandeur et en magnificence les
édifices consacrés à la Divinité. Sous le nom général de
tombeaiux, on comprend : les tombes, ou pierres tom"
baies, pierres tumulaires, soit plates, soit dressées, qui
recouyjriQt les modestes sépultures; les tombeaux pro-
prement dits, petites constructions au-dessus des sépul-
tures, ou qui renferment des morts; les mausolées, les
sépulcres, les hypogées, les cippes, les colombaires, les
tumuli (K. ces mots).
TOMBEAUX ARTIQUESr
Hindoustan» — Les topes ou stupas, monuments funé-
raires signalés peut la première fois par Elphinston ,
sont des édifices cylindriques couverts d'une coupole
sphérique, mais dont les pierres ne sont pas appareillées
par joints rayonnants. La chambre sépulcrale était petite,
carrée, et placée au centre de la masse, que couron-
naient souvent quatre sphères placées en pyramide. On
compte quatre groupes principaux de topes : le 1'' pn-s
de Peichaver, sur la rivière de Caboul ; le 2* dans Ici
environs de Jellabad; le 3* près de Caboul, où on les
appelle burj ou tours ; le 4* à Béghram, au pied de l'in-
dou-Kooch. V. Ritter, Die stupas, in-8°, 1838. — Dans
l'Ile de Ceylan, les tombeaux ou dagobas ont une grande
analogie avec les topes. Ce sont, en général, des tumuli
gazonnés, recouverts ou entourés d'un mur en brique.
Le plus célèbre, appelé Djata-Ouana-Rama, est un cône
de gazon qui repose sur une large plate-forme et que sur-
monte une construction ovoide en brique parfaitement
conservée ; ce monument n'a pas moins de 80 met. de
hauteur. Un peu au N.-E. d'Arenadjapura, on rencontre
un grand nombre de dagobas entourés de rochers à pic
et abrités par de belles plantations d'acacias.
Chine, — Les cimetières se placent hors des villes ,
sur quelque éminence garnie de pins ou de cyprès. Les
pauvres se contentent d'un tumulus; les princes et les
riches se font construire de vastes tombeaux contenant
de nombreuses salles, et qui ressemblent plutôt à des
pillais qu'à des monuments funèbres. On trouve aussi
en Chine des monuments tout à fait analogues à ceux
de rinde: on les désigne par les noms de tha (tour), et de
sou-tu-po (éminence).
Perse. — A 8 kilom. environ des ruines de Persé-
polis, la colline qui circonscrit la plaine de Mardascht
renferme quelques sépultures royales. L'un de ces pré-
cieux monuments n*a pas moins de 33 met. d'élévation :
la porte donne accès à plusieurs salles funèbres qui com-
muniquent entre elles, et dont les parois étaient ornées
de bas-reliefs aujourd'hui presque ruinés, et d'inscrip-
tions qui ont permis de regarder les tombeaux qu'elles
renfermaient comme ceux de Darius Nothus, d'Artaxerxès
Longue-Main, d'Ochus, et d'Artaxerxès Mnémon. Quant
au tombeau de Csnrus, nous savons par les traditions
historiques qu'il était isolé, et b&ti en forme de py-
ramide.
Asie Mineure. — Le monument funéraire le plus re-
marquable et le plus fameux est celui que la reine Ar-
témise fit élever à Halicarnasse en l'honneur de son
époux Mausole, roi de Carie : cette construction prit le
nom de mausolée, qui ensuite a été donné aux monu-
ments funèbres du même genre (V. Mausolék, dans
notre Diciionn. de Biographie et d'Histoire). — Les tom-
beaux de la Lycie ont cela de particulier, qu'ils offrent
an des premiers exemples de l'arc en ogive.
Palestine. — Près de Jérusalem se trouvent un certain
nombre de tombeaux des anciens Juifs. Ainsi, dans le
village arabe de Siloan, qui occupe une partie de la vallée
de Josaphat, et au milieu d'une multitude de débris, on
distingue les tombeaux de Zacharie, de Josaphat, et d'Ab-
salon. Au N. de la ville, près de la porte d'Éphraîm, sont
les Sépulcres des rois, non pas des rois antérieurs à la
captivité de Babylone, qui furent inhumés sur le mont
Sion , mais des derniers rois de la Judée , successeurs
d'Hérode. C'est un précieux monument d'architecture
antique. On y pénètre par une excavation assez semblable
à une carrière, et l'on arrive à une salle taillée dans lo
roc, de 10 met de côté, et haute de 5 met. Au centre de
l'un des côtés, une grande porte carrée, d'ordre dorique,
surmontée d'une frise très-délicatement sculptée, donne
accès à un couloir bas, qui aboutit par une pente assez
roide à une nouvelle chambre cairée. Là, des trous de
2"* de long sur l"* de large ont été pratiqués dans les
parois, pour y placer des cercueils. Trois portes voûtées
conduisent de cette chambre dans d'autres demeures sé-
pulcrales d'iné^Ede grandeur, toutes taillées dans le roc
vif, et où l'on voit aussi des trous pour les cercueils, et
des fragments de cercueils en pierre ornés d'arabesaues.
Il est remarquable que les portes de ces chambres sépul-
I craies sont de la même pierre que la fn'otte, ainsi que
' les gonds et les pivots sur lesquels elles tournent. Un
TOM
1726
TOM
peu au N.-O. des sépulcres dt» rois, il y a d'autres tom-
beaux qu'on donne pour ceux des Juges d'Israél, Otho-
aiel, Gédéon, Jephté, Samson, etc.
Egypte. — Les sépultures égyptiennes sont de diffé-
rents genres. Il y a d'abord les hypogées ou syringes ,
creusés dans le flanc des montagnes, et dont les plus im-
portants se rencontrent dans la Nubie et dans la Haute-
Egypte. Depuis un certain nombre d'années, ils ont été
visités et étudiés avec soin : on y a trouvé des bas-reliefs,
des peintures aussi vives que lorsqu'elles furent appli-
quées, et où sont représentés tous les us et coutumes de
ces époques reculées. La façade est ordinairement taillée
verticalement dans le rocher, et ornée de peintures et de
sculptures. La vallée de Biban-el-Molouk, dépendance de
l'ancienne Thèbea, présente un hypogée royal, où ont
été placés les souverains des 18**, 19* et 20* dynasties
de l'Egypte. £n second lieu, l'Egypte nous a laissé des
monuments funéraires isolés, tels que les Pyramides,
dont quelques-unes avaient une entrée apparente, tandis
que cellç des autres était masquée (F. Pyramides, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire). Enfin
les Nécropoles étaient de vastes galeries souterraines où
l'on empilait les corps grossièrement embaumés des gens
du peuple. Les plus grandes qu'on ait visitées étaient
celles d'Abydos et de Sais. Il y avait des nécropoles par-
ticulières pour les animaux sacrés, tels que les croco-
diles, les ibis, etc.
Grèce. — En Grèce, les lieux de sépulture étaient situés
ordinairement hors des villes. A Athènes, on enterra
d'abord les morts dans leur maison ; mais, aux temps
historiques, les tombeaux furent relégués hors des murs.
On les toléra dans l'intérieur de Sparte et de Mégare.
Les tombes s'élevaient le plus souvent au bord des routes
et près des portes des villes. Dans le principe, les mo*
numents funéraires furent d'une grande simplicité; ils
se composaient d'un tumulus où l'on déposait l'urne ci-
néraire, qu'on entourait d'un mur, et qu'on surmontait
d'une stèle ou d'une colonne commémorative , portant
quelque figure allégorique et le nom du défunt. Plus tard,
on déploya dans les tombeaux une magnificence que les
magistrats essayèrent vainement plusieurs fois de répri-
mer. Ce fut ainsi que Solon défendit d'élever aucun
tombeau que dix ouvriers ne pourraient bâtir en trois
Jours, et que Démétrius de Phalère interdit les monu-
ments de plus de trois coudées de hauteur (1"\33). La
décoration reçut les ordonnances dorique, ionique ou co-
rinthienne, et il y eut de vastes tombeaux composés
de plusieurs salles richement meublées et décorées,
où les parents venaient à certains Jours offrir des sa-
crifices aux divinités infernales. L'usage des peintures
sur les parois était inconnu. On considérait les tom-
beaux comme des propriétés privée ; ils appartenaient
exclusivement aux familles dont les membres y avaient
été placés.
Êtntriê. — Plusieurs colonies venues de pays divers
apportèrent des coutumes différentes : c'est ce qui ex-
plique pourquoi, à Tarquinies et à Vulci, fondées par des
peuples venus d'Orient, les cadavres étaient vêtus, et
couchés dans les sépultures sur des lits funèbres; à
Castel d'Asso, à Norcnia, à Bormazzo, suivant les usages
des Aborigènes, les corps étaient déposés dans des sar-
copbages bruts ou décorés de peintures; à Chiusi, à Vol-
terra, à Toscanella, les cendres des corps brûlés étaient
déposées dans des urnes de pierre sculptées, et plus tard
dans des vases en terre cuite. Dans les plaines de Vulci
et de Tarquinies, on creusait des galeries souterraines
où se plaçaient les sépultures, et on les surmontait d'un
tumulus conique, soutenu à sa base par un mur circu-
laire, et couronné d'une stèle ou de quelque figure sym-
bolique. A Toscanella, les sépultures sont creusées dans
la rocbe, et présentent, à l'extérieur, des portes en sail-
lie, formées d'un soubassement du genre dorique, et
surmontées d'une pyramide quadrangulaire; à l'inté-
rieur, de lourds piliers soutiennent les plafonds, remar-
quablement découpés en caissons couverts de peintures
et de sculptures. Telles sont, notamment, les grottes de
Corneto. K. Étbcsqoe (Art).
Rome. — Les sépultures romaines présentent les formes
les plus diverses. Dans le principe, elles reproduisirent
la forme des monuments funéraires de l'Étrurie; le tom-
beau dit des Horaces et des Guriaces rappelle celui de
Porsenna. plus tard, les artistes romains s'inspirèrent
des modèles de la Grèce, et créèrent une foule de monu-
ments funéraires riches et gracieux, sur lesquels on lisait
toujours, en tète de l'inscription, les mots Dis Manibus.
Uiïï tombeaux étaient placés en deUom é9^ villes, et s'ac-
cumulaient près des portes en formant de longues avenues
La grande porte de Pompéi offre un modèle de ce genre de
constructions. On distinguait plusieurs espèces de tom-
beaux : le monumentum était un édifice consacré à la
mémoire d'une personne, de sorte que le même mort
pouvait en avoir plusieurs; le sepulcrum renfermait b
dépouille mortelle; le cenotaphium, tumulus honorarius
ou inanis, était destiné à conserver la mémoire d*uo
homme dont on ne pouvait retrouver le corps; le mou-
soleum était un édifice d'une grande magnificence ; il y
avait encore les pyramides, les columelles ou cippes, qui
formaient la classe la plus nombreuse des monuments
funéraires des Romains. Quelques tombeaux ont atteint
des proportions gigantesques, comme ceux d'Auguste et
d'Adrien (F. Madsol^b, dans notre Diciionn. de Biogra-
phie et d^ Histoire). Il y avait des sépulcres souterrains
{conditoria, conditiva) où l'on plaçait les cadavres qui
n'avaient pas été brûlés. L'usage de déposer, dans les
tombes, des vases, des objets chers aux défunts, a donné
une bien grande importance aux recherches archéologi-
ques, en faisant retrouver, encore intacts, après bien des
siècles écoulés, tous les ustensiles dont se servaient les
Romains dans la vie ordinaire.
Gaule. — V, Celtiques (Monuments).
Sardaignê. — Il existe dans ce pays des monuments
qui remontent à une haute antiquité et auxquels on at-
tribue un caractère funéraire. Ce sont d'abord des exca-
vations pratiquées dans le flanc vertical des collines : les
ouvertures, petites et carrées, rangées en ligne, ressem-
blent de loin à une file de fenêtres; elles donnent entri'e
à des chambres basses, étroites et communiquant entre
elles. Ailleurs, on voit des pierres rangées suivant un
contour plus ou moins régulier, et rappelant les monu>
ments druidiques de la Gaule; on les nomme les Sépul-
tures des Géants. Enfin viennent les Noraghes^ construc-
tions funéraires bâties sur un plan elliptique ou circulaire
et le plus souvent terminées dans leur partie supérieure
par une espèce de tour en forme de pain de sucre. 11 y
en a de très-compliquées, qui sont entourées de construc-
tions adjacentes, et, suivant leur forme, on les distingue
par les désignations dt simples ^ agrégées, réunies, et
ceintes. V. Noraghes, dans notre Dictionnaire d eBiogra-
phie et d'Histoire. — V. Bellori, Veterumsepulcra, Lej'de,
1728, in-fol. ; Quensted, De septUcris veterum, Yiterbc,
1700, in-S*.
TOMBEAUX MODERNES.
Les pi*emiers monuments funéraires des chrétiens
furent les Catacombes ( V, ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d^Histoire). La forme la plus ordinaire
des tombàiux depuis Constantin fut la forme circulaire.
Ce prince, ayant perdu sa fille Constance, en déposa les
restes dans le baptistère de S**-Agnès, dont il fit une
chapelle funéraire. Le monument le plus remarquable
de cette époque est l'église du S^-Sépulcre à Jérusalem,
à laquelle on imprima un caractère funèbre en lui don-
nant la forme circulaire, tandis que l'église de Bethléem,
où l'on ne devait entendre que des chants de fête, avait
reçu la forme basilicale.
Dans les premiers temps de l'ancienne France, les
tombes ne furent, la plupart du temps, que des au^ de
pierre sans ornement. Quand on voulut, dans le ix* siècle,
donner à Charlemagne un tombeau digne de lui, on
n'imagina rien de mieux que de prendre un sarcopha^^
antique représentant l'enlèvement de Proserpine. Plus
tard, l'art s'empara des monuments funèbres. Le moyen
âge et la Renaissance n'adoptèrent pas de formes parti-
culières pour les tombeaux, qui furent successivement
décorés suivant le goût variable des époques. A l'arcade
romane et aux ornements byzantins succédèrent Togive et
les découpures gothiques. Il nous est parvenu beaucoup
de monuments funéraires du moyen &ge ; on en avait éri.^é
de très -remarquables, entre autres : ceux des comtes de
Champagne, Henri I*' et Thibaut III , dans l'élise S^
Etienne de "Troyes, mais qui n'existent plus; ceux des ducs
de Bourgogne, Philippe le Hardi et Jban sans Peur, qui se
voient encore à Dijon. La Renaissance italienne ramena
la finesse des détails de l'art antique, et nous en avons
de eharmants modèles dans les tombeaux de Louis XH,
de François I", et de Henri II dans l'église abbatiale de
S^-Denis; des cardinaux d'Amboise et de Pierre deBré2é
dans la cathédrale de Rouen ; du duc de Bretagne Fran-
çois II, dans la cathédrale de Nantes; de Marguerite de
Bourbon, de Philibert le Beau et de Marguerite d'Au-
triche, dans l'église de Brou ; de Charles le Téméraire et
de Marie de Bourgogne, à Notre-Dame de Bruges. L'Aile*
tON
Un
tON
ttagno vante avec raison le tombeau de S* Sébald à Nu-
remberg, et celui de Tempereur Maximilien I*' à Ins-
prQck ; ritalie, les tombeaux de Jules II et des Médicis
par Michel-Ange, et celui du pape Alexandre VII par le
Bernln. On aimait alors soit à placer Timage couchée du
mort sur le sarcophage, soit h. accompagner de statues le
mausolée, et, tandis que les tombeaux de TAntiquité ont
été surtout des monuments de construction et d'archi-
tecture, les mausolées modernes sont plutôt des ouvrages
do sculpture. Le xvii« siècle introduisit un nouveau
genre de mausolées, composés de la statue du personnage
et d'un sarcophage accompagné de statues allégoriques ,
comme ceux de Colbert, de Mazarin, etc. De nos -jours,
la forme des édifices funèbres dépend du caprice de Tar-
chitecte, de même que la beauté dépend de son talent.
Le cimetière du Père La Chaise ou de TEst, à Paris, en
renferme de très-remarquables , parmi lesquels nous ci-
terons ceux d'Héloise et d'Abaihurd, de Casimir Périer,
de Talma, de Masséna, etc. L*œuvre la plus remarquable
est le mausolée de Napoléon I'' sous le dôme de l'église
aes Invalides ( V. Mausol^b, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire), ht» architectes modernes
emploient avec succès le style ogival pour les tom-
beaux.
L'architecture musulmane a donné aux tombes des
formes diverses ; mais les tombeaux de quelque impor-
tance sont couronnés d'une coupole. Les turbés ou cha-
pelles funéraires se placent près des mosquées, auxquelles
elles ressemblent pour la forme; elles renferment les
corps des fondateurs de la mosquée ; une grille laisse
voir le tombeau, recouvert de riches tapis. A la tète du
défunt est le turban ; aux pieds brûlent d'énormes cierges,
et un grand nombre de lampes éclairent l'intérieur de
l't'difice. On élève, en Tlionneur des scheiks, des tombes
qui deviennent un but de pèlerinage, comme celles qui
renferment les corps des saints et qu'on appelle santons.
Les tombeaux des simples musulmans sont indiqués par
une stèle portant inscription et couronnée d'un turban.
Dans l*lnde, les tombeaux des princes musulmans sont
des édifices considérables, bâtis sur le même plan que les
mosquées, et servant de lieu de réunion pour la prière :
on en voit un grand nombre à Dehli et à Agra ; parmi
les plus remarquables nous citerons ceux de l'empereur
Cbah-Djihan, d'Akbar, et de Hyder-Ali. E. L.
TOMBELLE. V. ïomolos.
TOMBEREAU , ancien instrument de supplice dont on
se servait pour plonger dans Teau les femmes coupables
de quelque violence ; — charrette remplie d'ordures, qui
portait les condamnés au dernier supplice.
TOMBOLA (de Titalien tombolo, culbute), sorte de
loterie dont les lots sont, les uns en objets de valeur, les
autres en objets ridicules ou plaisants.
TOirBOLA. V. Loto.
TOME (du ^c tomos, coupe ), partie d*un livre as-
semblée et reliée à part.
TON (en latin tonus, en grec tonos)^ terme de Mu-
sique. La gamme se compose d'une succession de huit
sons différents : la valeur acoustique de réloignement qui
existe d'un Eon ou degré à l'autre le plus voisin se nomme
ton. Toute gamme est divisée par tons pleins ou simple-
ment tons, et par demi-tons. Les demi-tons se trouvent,
dans le mode majeur, entre le 3* et le 4* degré, et entre
le 7* et le 8*; dans le mode mineur, le premier demi-ton
est entre le 2" et le 3* degré. Les demi-tons peuvent être
déplacés dans le cours de la mélodie par l'emploi des
signes accidentels ( V. AcaoENTS). La gamme du mode
majeur, comme celle du mode mineur, contient une va-
leur réelle de six tons. — Le mot ton désigne aussi le
degré de l'échelle musicale que le compositeur choisit
pour en faire la base et le point de départ d'un morceau,
c-à-d. pour lui faire prendre le rang de 1*' degré : ainsi,
un morceau est écrit dans le ton d'ut, dans le ton de
fa , etc. ; la nature de la tierce du ton détermine le mode
de ce ton, qui est majeur ou mineur {V, Mode). La note
qui sert de 1*' degré est la tonique ; celle du 2*, la sus-
tonique;^^ 3*, la méiiante: du 4*, la sous-dominante;
du 5*, la dominante; du 6% la sus-dominante; du 7*, la
ensible; du 8*, Voctave, On attribue d'ordinaire aux tons
certains caractères particuliers, qui varient l'expression
musicale et ses effets : par exemple, les tons de ré et de
mi majeurs seraient propres à exprimer des sentiments
nobles et belliqueux, le ton de fa mineur serait lu-
gubre, etc. C'est une erreur qui provient de l'usage des
instruments à tempérament, c-ii-d. qui font le dièse
et le bémol sur la même touche ou avec le même doigté ;
presque toujours, sur ces instrnmcnt«, certaines gammes
sont rendues plus justes aux dépens des autres : delà
l'inégalité réelle des gammes et les effets différents qu'elles
produisent sur nous. Mais pour la voix , à quelque degré
gu'on prenne la tonique, les rapports des sons restent
identiauement les mêmes; si l'air affecte plus ou moins
agréablement notre oreille, c'est qu'il a pour ainsi dire
son point d'andition, hors duquel il perd de ses qualités.
C'est pour cette raison qu'il est mauvais de transposer à
l'orchestre certains morceaux, pour la commodité des
chanteurs. On appelle tons relatifs ceux dont la gamme
présente de l'affinité ( V, ce mot) avec le Ion principal.
— Dans le Plain-Chant, le mot ton a reçu une acception
particulière ( V. Mode). — Donner le ton, prendre le ton,
c'est, dans une réunion de musiciens, s'accorder avant
de commencer ( V. Accord des instruments). B.
TON, degré d'élévation, de gravité ou d'acuité, que
prennent les voix ou sur lequel sont montés les instru-
ments. En ce sens on dit que le ton d'un piano est trop
haut ou trop bas.
TON , nom donné aux tubes qu'on ajoute & certains in-
struments, comme le cor, et dont le développement plus
ou moins grand baisse ou hausse le diapason général.
TON , tonte inflexion de la parole humaine. En ce sens
on dira un ton suppliant , un (on de maitre, le ton plai-
sant, le ton oratoire , etc. De là cenaines locutions:
prendre un ton, changer de ton, baisser le ton, etc.
TON , se dit du langage et des manières : le bon ton ,
le mauvais ton, le ton de la cour, le ton des halles, etc.
TON, en termes de Peinture, exprime la nature des
teintes , leurs degrés de force ou d'éclat : un ton clair,
un ton vigoureux, etc.
TON, en termes de Marine, partie du mât comprise
entre les barres de hune et le chouquet. Là s'assemblent,
par en haut, et au moyen du chouquet, le bout du tenon
du màt inférieur avec le màt supérieur ; par en bas , et
au moyen d'une cheville de fer appelée clef, le pied du
mftt supérieur avec le tenon du m&t inférieur.
TON D*onGUE. Lorsque l'orgue était accordé d'après les
proportions canoniques des longueurs de 32, ou 16, ou
8 pieds pour Vut grave, cet accord constituait le ton
d'orgue, et le distinguait du ton de l'orchestre, plus haut
d'un demi-ton environ en 1790, et aujourd'hui élevé de
plus d'un ton. Les facteurs de nos jours assimilent le
diapason de l'orgue à celui de l'orchestre. Autrefois, en
Italie, en Espagne et en Portugal, l'orgue était (Dêmc ac-
cordé une tierce mineure an-dessous du ton du aiapason
moyen.
TON DO QUART, Dom qu*oo a donné dans la musique
d'Église an plagal du mode mineur, qui s'arrête et finit
sur la dominante au lieu de tomber sur la tonique. II
vient de ce que telle est la modulation du 4* ton dans le
Plain-Chant.
TONS DE CHASSE, petits airs que les piqueurs son-
nent sur la trompe pour guider les chiens dans une
chasse. Ils sont écrits à G/8, dans un mouvement vif, et
n'ont guère plus de 8 mesures. Ils sont au nombre de 10.
TONADILLA ou TONADILLE, nom qu'on donne en
Espagne à une chanson bouffonne ou satirique dont la
mesure et le mouvement changent plusieurs fois. On l'a
appliqué de nos jours à une espèce de scène théâtrale,
assez semblable à notre vaudeville, si ce n'est qu'on y
introduit de grands morceaux empruntés aux meilleurs
opéras.
TONALITÉ , en termes de Musique , propriété caracté-
ristique d'un ton (V. ce mot), La tonalité d'un morceau
est déterminée par la note sensible et Vaccord parfait,
qui établissent le ton et son mode. — On nomme aussi
Tonalités les diverses manières de combiner les sons et
d'en former un système. Chez les Anciens, la tonalité
était formulée par les tétracordes ou séries de quatre sons
qu'on ajoutait les uns aux autres, et dont la combinaison
produisait 15 notes ou échelles tonales. Dans le Plain-
Chant , les formules ou intonations de la psalmodie ont
été le principe de quatre modes, subdivisés plus tard en
huit, et dans lesquels est compris tout le corps du chant
ecclésiastique. Dans la musique moderne, il n'y a plus
que deux modes, le majeur et le mineur. Chacun des
modes, dans chsique tonalité , a son expression propre,
qui résulte des rapports et de l'affinité des sons dont il
se compose, rapports qu'on ne peut altérer, soit dans la
mélodie, soit dans l'accompagnement, sans changer im-
médiatement la tonalité, et, par conséquent, l'effet par*
ticulier du mode. Il est mauvais, par exemple, d'associer,
dans l'accompagnement d*une phrase de Plain-Chant , la
tonalité actuelle avec la tonalité ecclteiastiaue, c-à-d. d'y
introduire de» modulations, lea modes mineurs ou ma«
TON
1728
Ton
Jenre, l'ait raction d'une note vers raatre, et toutes les
autres combinaisons de Tart moderne. B.
TONARIUM, nom que Quintilien donne à la flûte avec
laquelle OQ donnait le ton aux orateurs.
TONDIN (de l'italien Umdino), en termes d'Architec-
'ture, petite baguette ou astragale placée au bas d'une
colonne. Dans la facture des orgues, c'est un cylindre de
bois dont on se sert pour former et arrondir les tuyaux.
TONGA (Idiome), un des idiomes polynésiens, parlé
dans l'ile Tonga et dans les lies du même archipel. Il a
peu de prépositions, et un seul article, indéclinable
comme toutes les autres parties du discours; mais il
possède trois nombres pour les verbes et pour les pro-
noms personnels. La déclinaison compte sept cas; la
conjugaison est dépourvue de passif. La prononciation est
plus aspirée et moins douce que celle du taltien.
TONIQUE, en termes de Musique, note sur laquelle
le ton ( V. c$ mot) est établi , la première de la gamme
de ce ton. Tous les aira finissent cuinmunéinent par cette
note, surtout à la basse. C'est l'espèce de tierce que porte
la tonique qui détermine le mode ( '/. ce mot), — Dans
le Plain-Ghant, il n'y a pas de tonique, parce qu'il n»y
a aucune note qui porte plus qu'une autre le sent i-
ment du repos, et qui caractéme ainsi la tonalité. B.
TONIQUE fAccftnt). V. Accent.
TONLlEu. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
TONNAGE, capacité d'un naTire, nombre de tonneaux
({u'il peut contenir, un détermine le tonnage au moyen
tiii jaugeage ( V, Jaugedrs), et selon le mode établi par
une loi du 12 nivôse an ii. — Le droit de tonnage ou de
fonnelage est un droit que tout navire paye à son entrée
dans un port, proportionnellement à sa capacité. Ce droit
concerne le bâtiment et non la cargaison. En France, il
est de 4 fr. 12 c. par tonneau; les navires français en
sont exempts, à moins qu'ils ne viennent d'Angleterre,
cas auquel ils payent 1 fr. par tonneau, non compris les
décimes.
TONNE, unité de poids employée pour l'application du
tarif des marchandises qui circulent sur les chemins de
fer : elle équivaut à 10 quintaux métriques, ou 1,000 kilog.
Dans la Marine, la tonne est le demi-tonneau, environ
500 kilogr.
TONNE d'or , valeur de 100,000 florins en Hollande, de
100,000 thalers en Allemagne.
TONNEAU, en termes de M.".rine, ca|/ac(té de 13 met.
ctibes environ, et poids d 1,000 kilogr.
TONNEAU, coffre de bois élevé sur pieds à la hauteur
d'un tonneau, et percé, au-dessus, de plusieurs ouver-
tures, dans lesquelles on cherche à Jeter de loin des palets
do cuivre, pour gagner un certain nombre de points. On
ne joue guère à ce jeu qu'à la campagne.
TONNELAGE. V, Tonnage.
TONNELET. V. Braconniêre.
tonnelet, vieux mot daignant un vase à boire, en
forme de petit tonneau.
TONNELIERS, corporation qui avait pour patron
S^ Nicolas. Antérieure k Louis IX, elle possédait des sta-
tuts plusieurs fois confirmés par nos rois. L'apprentissage
était de 5 ans; le brevet coûtait 30 livres, et la maî-
trise 800.
TONNELLE , berceau de verdure ; — filet en forme
de tonneau ouvert, dont on se sert pour prendre les
perdrix.
TONOTECHNIE (du grec tonos, ton, air, et tekhnè,
art), art denoterde la musique sur lescylindres des orgues
de Barbarie, des tabatières, pendules et tableaux à mu-
sique. Le P. Engramelle a publié une Tonotechnie en
1775.
TONSTRINE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire,
TONSURE, en latin tomura (de tondere, raser, tondre\
place de forme orbiculaire sur le derrière de la tète, où les
ciieveux sont rasés. C'est un signe distinctif des ecclé-
siastiques. La tonsure romaine ou de S^ Pierre est celle
qui est généralement adoptée aujourd'hui; mais on dis-
flngue encore la tonsure grecque, qui s'étend sur toute
la tête, et la tonsure écossaise ou de S^ Paul, qui va
d'une oreille à l'autre sur le devant de la tète. Déjà, dans
l' Antiquité, un crâne chauve était considéré comme l'un
des signes honorifiques du corps sacerdotal. Ce fut le
concile de Tolède, en 633, qui rendit la tonsure obliga-
toire. La tonsure se confère avant les ordres; générale-
ment on ne peut y être admis avant Tftge de 14 ans :
c'est le signe de la prise de l'habit ecclésiastique. D'après
le rituel romain, la tonsure du simple tonsuré doit avoir
32 millimèt. de di<imètn); celle du minoré, 4 centimèt.;
celle du sous-diacre, 4 1/2; celle du diacre, 6; celle du
prêtre, 8; celle du pape occupe presque toute la partie
antérieure de la tête.
TONTINE, association de personnes qui placent chacune
un capital en commun, pour en retirer une rente via-
gère à une époque déterminée, avec la condition que
l'intérêt sera réversible, à chaque décès, sur les survi-
vants. Le nom vient de Lorenzo Tonti, Napolitain qui
proposa en 1653 au cardinal Mazarin une opération de ce
genre : il s'agissait de faire un emprunt, et d*attirer les
prêteurs par l'app&t de bénéfices considérables en cas de
survie. Mais le Parlement refusa d'enregistrer l'édit du
ministre, En 1689, Louis XIV ouvrit une tontine rouaie
de 1,400,000 livres de rentes, qui ne finit qu'en 172U.
L'État eut encore plusieurs fois recours à ce genre d'em-
prunt, notamment en 1733 et en 1734; mais, comme on
le reconnut trop oné^'eux, une déclaration du 21 no-
vembre 1763 et un arrêt du Conseil de 1770 l'interdirent
pour l'^ivenir. Les plus célèbres tontines particulières
qui aient été fondées en France sont : la Caisse Lafar^e
autorisée en 1759, supprimée en 1770, ouverte de nou-
veau en 1791 , et la Compagnie royale d^assurances .
autorisée en 1787. Les calculs de mortalité avaient été si
erronés, les promesses de rente si exagérées, et par suite
les déceptions si nombreuses, qu'un décret du 25 mars
1809 mit les tontines en gérance, et défendit d'en établir
aucune autre sans autorisation du gouvernement. En
1819, une nouvelle Compagnie tontinière d'assurances
sur la vie fut formée à Paris; d'autres ne tardèrent pa.^
à suivre. Ces entreprises sont soumises à la surveillance
de l'État, en vertu d'une ordonnance du 12 juin 1842 et
d'un décret du 16 janvier 1854. V. Assurance.
TONTURE, en termes de Marine, courbure que pré-
sente de l'avant à l'arrière le pont d'un bâtiment, et qui
fait que le milieu est dans un plan inférieur à celui des
extrémités. Le mot vient de l'italien tondo (rond, arrondi/.
TOPAZE, pierre précieuse d'un jaune brillant, figure
symboliquement la sagesse, la chasteté, le mérite des
l>onnes œuvres. Elle était la 2* pierre du premier rang
sur le rational du grand prêtre des Juifs, et portait gravé
le nom de Siméon.
TOPES. V. Tombeaux.
TOPIARIUM OPUS, expression dont Pline se sert pour
désigner une espèce d'ornement de jardinage qui consis«
tait à donner toutes sortes de formes, même d'animaux,
aux buissons de certains arbres ou arbustes. — Le root
topia signifiait aussi les paysages qu'on peignait sur ]es
murs des appartements.
TOPIQUES, nom que les Anciens donnaient aux traités
sur les lieux commune (en grec topoï) d'où l'on tire des
arguments. Nous avons un traité des Topiques d*Aristote
et un de Cicéron. La Topique est l'art de trouver les ar-
guments. La Topique grammaticale, distincte de la To-
pique oratoire, traite de la place qu'il faut assigner aux
mots et aux phrases.
TOPOGRAPHIE (du grec topos, lieu, et graphéin, dé-
crire), description exacte et détaillée d'un lieu particulier,
art de décrire un lieu et d'en lever le plan. Il y a, dans
le cadastre, des employés chargés de la confection des
cartes topographiques. Les officiers du génie militaire
auxquels appartient cet emploi sont les ingénieurs-géo-
graphes. On enseigne la Topographie dans les écoles mi-
litaires.
TOPOLOGIE, théorie des principes que doit suivre un
théologien pour choisir et traiter les arguments qu'il
emprunte au texte de la Bible.
TOQUE (en espagnol toca: de tocar, couvrir), coiffure
ronde de drap, de velours ou de soie, quelquefois brod<^
ou soutachée, et garnie d'un gland ou d'une houppe. On
donne le même nom à la coiffure des juges, des avocats,
et des membres de l'Université.
TOQUET. V. DoQOET.
TORCHE (du latin torquere, tordre), sorte de flambeau
fuit avec de la grosse corde enduite de résine ou de c:rt\
ou consistant simplement en un bâton de bois résineux
entouré de cire ou de suif. Dans l'Antiquité, la torche
était un des attributs de Diane, de Cérte, de Bellone, de
r Hymen et des Furies ; on représentait le Sommeil et l.i
Mort tenant une torche à rebours. On portait des torches
dans certaines processions, à la célébration des mariages
et des funérailles. Les Modernes ne s'en servent plus que
dans certaines cérémonies funèbres, et pour éclairer
quelque cortéj^ pendant la nuit. — Dans le service litur-
gique de l'Église catholique, on nomme Tordus de lon-
gues tiges de bois contenant un souche [V,cê mot)^ il
TOR
1729
TOU
que Ton porte près du Saint-Sacrement à l'autel àt dans
les processions. B.
TORCHÈRE (de torche)^ vase de fer percé à Jour, placé
au bout d*un long manche, et dans lequel on met des
matières combustibles pour éclairer momentanément les
places et rues où l'on fait des réparations; — sorte Me
guéridon à pied triangulaire, et dont la tige soutient un
plateau disposé pour porter un luminaire.
TORCHIER ou TORSIER, chandelier dans lequel on
brûlait autrefois des torches, et qu'on plaçait dans le mi-
lieu des grandes salles. Il avait quelquefois l'apparence
d'une tour de château fort.
TORCHIS, mortier fait de terre franche corroyée avec
de la paille ou du foin haché, et employé dans les con-
structions rurales, soit pour lier les pierres d'un mur,
soit pour garnir les panneaux des cloisons. Il se resserre
en Réchant, et subit les impressions de l'atmosphère, qui
le dégradent; aussi lui préfère-t-on le pisé (K. ce mot),
TORE (du latin torus, corde), grosse moulure ronde
qui fait ordinairement partie des bases de colonnes. |^e
style roman en a fait usage aussi dans les archivoltes,
et le style ogival dans les nervures, les meneaux, les
trèfles, et«.
TORÉADOR, y. Taureaox (Combats de).
TORELLAGE, droit que les seigneurs d'autrefois pré-
levaient sur les torailles, lieux où Ton faisait sécher les
grains servant à la fabrication de la bière.
TOREOTIQUE, en grec toreutikë (de toreiiiiny décou-
{»er, ciseler, tourner), mot par lequel on entend généra-
ement l'art de travailler en relief le bois, l'ivoire, la
pierre, le marbre, et toutes les matières dures. Winckel-
mann en limitait la signification aux œuvres d'art en ar-
gent ou en airain. Pline se sert du mot ToretUique pour
désigner uniquement l'art du fondeur, et ne Tétend point
aux œuvres produites par la sculpture ou par la gravure.
Certains auteurs l'ont employé en parlant des figures en
relief sur les vases ou sur les pierres taillées. Enfin, il a
encore désigné le travail qui consiste à donner avec le
ciseau le fini à une statue qui vient d'être fondue. B.
TORIES. V. notre Dictionn, de Biogr. et d'Histoire.
TORNÂDAS, dédicaces que les troubadours mettaient
à leurs pièces de vers.
TORNADO, c.-à-d. tourbillon, Tent violent qui règne
au mois de juillet, d*août et de septembre, sur la cÔte
d'Afrique, depuis le Sénégal jusqu'à Téquateur. II tient
de la nature de la trombe.
TORNEBOUTTE, ancien instrument de musique à
vent, en usage en Angleterre. 11 avait la forme d'une
crosse, était percé de 10 trous, et s'embouchait avec une
anche. H n'était pas sans analogie avec le cor anglais
(K. ce mot),
TORNEYAMEN, c.-à-d. en provençal tournoiement,
nom qu'on donnait à la Tenson ( V. ce mot) quand elle
avait plus de deux interlocuteurs, parce que chacun avait
régulièrement la parole à son tour.
TORQUE, terme de Blason. V. Bodruelet.
TORSADE (de tors), frange tordue en spirale, dont on
orne les rideaux, les tentures, les draperies et certaines
coiffures; — petits rouleaux de fils d'or ou d'argent dont
sont faites les épaulettes des officiers généraux et des
officiers supérieurs; — moulure romane qui imite un c&ble.
TORSE (de l'italien torso, trognon), nom qu'on donne,
dans la langue des Beaux-Arts, 1<> à la partie du corps
humain qu'on nomme encore le tronc, 2^ à toute statue
antique mutilée, dont les membres et la tête ont été
brisés. Le fameux Torse du Belvédère, qui est au Vati-
can, et dont une copie est à Paris, à l'École des Beaux-
Arts, est regardé comme un fragment d'une statue d'Her-
cule.
TORSELLUM, nom qu'on donnait anciennement aux
orgues composées de deux, trois ou quatre jeux accordés
à la quinte ou à l'octave.
TORSIER. V, ToRCHiKR.
TORTILE, terme de Blason. V. Boorrelet.
TORTILLIS, espèce de vermoulure qu'on fait avec des
outils sur le parement des bossages rustiques.
TORTUE, terme militaire. V, notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
TORTURE (du latin torquere, tourmenter), tourment
accessoire qu'on faisait autrefois subir aux accusés, avant
et après leur condamnation, pour les forcer à avouer
leur crime et à révéler leurs complices. Les instruments
les plus ordinaires de torture étaient les verges, la roue,
le chevalet, les brodeqains : ou bien encore on versait
une grande quantité cPeau dans la bouche du patient, on
lui brûlait les extrémités avec des torches ardentes, on
lui coulait du plomb dans les oreilles, etc. La torture i
existé chez tous les peuples anciens. A Sparte, il était
défendu de croire aux déclarations d'un esclave, s'il
n'avait été mis à la torture. A Athènes, un citoyen ne pou-
vait y être soumis pour des crimes privés. La torture
s'est perpétuée dans la plupart des États de l'Europe jus-
qu'à la fin du xvni* siècle. V. QresTiON, dans notre Die
tionnaire de Biographie et d'Histoire,
TOSCAN (Ordre), le plus simple et le plus solide des
cinq Ordres d'architecture. Il doit son origine à d'anciens
peuples de Lydie qui vinrent habiter l'Étrurie ou mo-
derne Toscane et y b&tirent des temples. Nous ne pour-
rions le connaître, si Vitruve, au temps duquel il y avait
encore à Rome un temple de Cérès d'architecture tos-
cane, n'en avait laissé une description. La hauteur de la
colonne toscane, y compris le chapiteau et la base, était
le tiers de la largeur du temple; le diamètre inférieur
était égal à la 7* partie de la hauteur, et le fût diminuait
du quart de son diamètre inférieur. C'est à tort qu'on a
quelquefois rapporté à l'ordre toscan les colonnes monu«
mentales de Trajan et de Marc-Aurèle à Rome, les édi-
fices de Psstum, et l'amphithéâtre de Vérone; on n'y
retrouve pas les dimensions données par Vitruve. La co-
lonne toscane n'est jamais ornée de cannelures; son cha-
piteau n'offre que de rares moulures, et la frise ne reçoit
point d'ornements. V, Base.
TOSCAN (Art). V, ÉTRUSQUE.
TOSCAN (Dialecte), un des dialectes italiens. C'est l'ita-
lien le plus pur, et il a eu la principale part dans la
formation de la langue classique, en raison de ce que les
plus grands poètes et prosateurs du xiv* siècle, où cette
langue se forma, ét^ent tous Florentins ou Toscans. Tou-
tefois, les Toscans reconnaissent qu'ils ne parlent pas le
mieux l'italien, dont ils définissent l'idéal « la langue
toscane dans une bouche romaine. » Ils donnent à Vh,
au c dur et au ch la valeur du ch allemand ou de la jota
(i) espagnole : ainsi, à Florence, on dit hasa, hamera,
hosta, pour casa, caméra, costa,
TOSKARIA ou TOSKE (Dialecte). V, Albanais.
TOSTAO, monnaie de compte et monnaie d'argent en
Portugal. Cest à peu près 0 fr. 60 c.
TOTONAQUE (Idiome). V. Mexique (Langues du).
TOUAGE (de l'anglais to tow, tirer, attirer), action de
iouer une enibarcation, c-à-d. de la faire avancer en ti-
rant d'un point fixe, & force de bras ou au moyen d'un
cabestan, un cordage appelé touée. V, ara Supplément
TOUAILLE, vieux mot signifiant serviette,
TOUAREG ou TOUARIK (Idiome). V. Berbère
TOUCHE, nom donné, dans les instruments de mu-
sique à clavier, aux leviers sur lesquels les doigts agissent
pour tirer des sons. Les touches destinées aux notes de
la gamme naturelle d'ut sont blanches ; celles destinées
aux notes diésées ou bémolisées sont noires. — Dans les
instruments à manche et à cordes pincées, les touches
sont les filets saillants, d'ivoire ou de métal, qui traver-
sent le manche, et où il faut poser les doigts pour obtenir
les diverses intonations. — Dans les instruments h ar-
chet, la Touche est la partie supérieure du manche re-
couverte en ébène, et sur laquelle les doigts pressent les
cordes.
touche, en termes de Peinture, maniement du pincean
et des couleurs. La touche est légère, ferme, hardie, etc.
TOUE, embarcation plate, faite de planches de sapin
assemblées avec des chevilles, et dont on se sert comme
bac, ou pour le service d'un port, ou pour remonter une
rivière avec un chargement de marchandises.
TOUÉE, en termes de Marine, gros c&ble.
TOUGH. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio*
graphie et d'Histoire.
TOUGRA. V. Thogra.
TOUL (Cathédrale de). Cette église, qui n'a pas con-
servé son évêché, est un des beaux édifices religieux de la
France. Commencée dans les dernières années du x* siè-
cle, elle ne fut achevée qu'en 1496. Le portail, dont Jac-
qucmin de Commercy donna les dessins en 1447 et dirigea
la construction, est un chef-d'œuvre. Large de 33 met.,
il présente trois portes, dont les voussures sont garnies
de niches nombreuses, à bases et à dais élégamment
sculptés. Au-dessus de la porte principale, une rose,
garnie de vitraux de couleur, est encadrée dans un vaste
triangle ogival. Les trois galeries à balustres en feuilles
de trèfle qui régnent sur toute la largeur du portail sont
d'une élé^nce sans rivale. Deux tours, d'une hauteur de
76 met. environ, ont une couronne découpée à Jour, et
rappellent la magnifique tour de l'église de SMOuen à
Rouen* L'intérieur de la cathédrale de Toul est d'una
109
TOU
17^0
Ton
excellente architecture : il est peu d'églises da moyen
&ge où Tordonnance générale soit plus harmonieuse.
Touffes les ouvertures sont en ogives à divisions paires,
surmontées d9 losaces. La nef principale a 80 met. de
longueur et 3Ô met. de hauteur, et a deux collatéraux :
la voûte en est soutenue de chaque côté par neuf colonnes
accompagnées chacune de quatre colonnettes engagées,
deux qui supportent les arcs-doubleaux des ogives de la
nef, une pour Togive transversale des bas côtés, et la
quatrième qui se prolonge jusqu'à la grande voûte, au-
dessus des fenêtres qui Téclairent. On a conservé une
chaire en pierre, dite de S^ Gérard, et qui date du
XII* siècle. Sur le flanc gauche de ré:;tise est un cloître
carré long du xiii" siècle, formant promenoir, et destiné
originairement aux processions intérieures ; il a 6 divi-
sions parallèles à Téglise, et 9 dans l'autre sens; le sol
des galeries est de 11 marches plus bas que celui de
l'église, et le préau est plus élevé que les galeries de
toute la hauteur du soubassement. On remarque sur les
murs de ce cloître une suite d'arcatures trilobées, sous
chacune desquelles était sculpté un petit bas-relief porté
sur une tablette saillante. B.
TOULINK (de l'anglais tow^ remorquer, et Une, corde),
en termes de Marine, cordage au moyen duquel on traîne
un bâtiment
TOULOUSAIN (Dialecte). V. Agiînais.
TOULOUSE (Cathédrale de). Cette église est placée
sous l'invocation de S^ Etienne. La plus ancienne de ses
parties est la nef, bâtie au commencement du xm* siècle
par Raymond VI, comte de Toulouse, dont on voit encore
les armoiries sculptées sur l'une des clefs de la voûte.
On devait construire une nef latérale; mais ce projet fut
abandonné : de là l'irrégularité de la disposition gé-
nérale. Le chœur, brûlé dans les premières années du
XVII* siècle, fut reconstruit de 1609 à 1612; il représente
le commencement d'une nouvelle église qui n'a pas été
continuée, et son axe ne répond pas à celui de la nef.
Il a quelques beaux vitraux. Un jubé à bas-reliefs et à
arabesques de mauvais goût le sépare de la nef. Le por-
tail est du XV* siè'le; il a beaucoup souffert des injures
du temps, et du vandalisme de la Révolution : on y re-
marque néanmoins une rose à compartiments nombreux,
ciselés avec délicatesse.
TooLOosis (Église S^-Sernîn ou S'-Satcr!vin, à), un des
monuments les plus intéressants du midi de la France,
construit au xi* siècle. Cette église est en forme de croix
allongée, et a deux collatéraux. Des galeries supérieures,
soutenues par des colonnes élégantes, donnent à l'en-
semble une grâce toute particulière. Le chœur, dont les
stalles sculptées sont couvertes de sujets satiriques, et à
la voûte duquel on a peint Notre Seigneur entre les sym-
boles des quatre Évangélistes, est bordé de chapelles,
qu'on a malheureusement gâtées par des badigeon nages
et des dorures de mauvais goût. L'église S^-Sernin est
une des plus vastes qui existent en style roman : elle
mesure, dans œuvre, 105 met. de longueur et 30 met.
de hauteur. Le collatéral du midi a deux portails : l'un,
précédé par une arcade de la Renaissance, offre des cha-
piteaux sculptés qui représentent le massacre des Inno-
cents et autres sujets sacrés, dans le goût le plus pri-
mitif; l'autre, plus grand et plus moderne, a des chapi-
teaux où Ton a représenté les sept péchés capitaux. Une
crypte a été creusée sous l'église pendant le xiv* siècle,
pour y placer le mausolée de S^ Saturnin : ce tombeau
fut démoli plus tard, et les reliques furent recouvertes
du riche, mais peu convenable baldaquin que l'on voit
aujourd'hui. Le clocher de l'église S'-Saturnin est pos-
térieur aux autres constructions : il repose sur des piliers
octogones oui ne sont pas en harmonie avec l'ordonnance
générale. V. Roachach, Saint-Semin, Études d'art et
d'histoire, Toulouse, 1802.
TOULOUSE (Église des Jacobitis, à). Cette église, bâtie
vers la fln du xiii* siècle, se compose d'un seul vaisseau
divisé en deux nefs par une rangée de longues colonnes
pesées sur l'axe de ce vaisseau. Des chapelles rayonnent
autour de l'abside unique. Sur le flanc septentrional de
l'édifice, en avant des travées rayonnantes, s'élève, sur
une base épaisse, un grand clocher octogonal, tout en
briques, sauf les bandeaux, les gargouilles, les chapiteaux
et les pinacles qui sont en pierre, et les colonnettes de
la balustrade supérieure qui sont en marbre. Le rez-de-
chaussée de ce clocher est seul voûté, à une hauteur de
24"\75; au-dessus de cette voûte, la construction est
d'une seule venue, sans voûtes ni planchers. Le l**" étage,
compris entre le dessus de la voûte et la corniche du
vaisseau, est plus élevé que les autres, et présente, Bur
chaque face, des arcades jumelles aveugles; les qoatro
autres étages, semblables entre eux comme hauteur et
comme ordonnance, et en retrait les uns sur les autres,
sont ajourés d'arcatures fermées, non par des archi-
voltes, mais par des imbrications formant des angles
droits au sommet. Un escalier à vis accolé au clocîier
monte jusqu'à la hauteur de la corniche de l'église; de
là au sommet de la tour on montait autrefois par des
échelles. B.
TOUPET (du latin tufa, touffe), touffe de cheveux qui
est en haut du front. Les Tartares se rasent la tète et ne
conservent qu'un toupet. Un faux toupet est une petite
perruque qui ne couvre que le sommet de la tête et qui
se confond avec les cheveux naturels.
TOUPIE (pour turpie; du latin turbo)^ jouet d'en-
fant. Il est en bois, en forme de poire, et armé d'une
pointe de fer sur laquelle on le fait tourner au aïoycn
d'une corde. La toupie d'Allemagne est creuse, percée
d'un côté, ce qui la fait bourdonner en tournant. Le jeu
de toupie hollandaise ou de quilles des Indes se compose
d'une table divisée en compartiments, dans lesquels sont
rangées les quilles qu'on abat avec une toupie. Le scUmi
est une grosse toupie qu'on fait tourner en la fouettant
d'une lanière.
TOUR (du latin turrts), construction d*ane grande
hauteur par rapport à sa base, de forme ronde, ou
carrée, ou à pans, dont on flanqua, dès l'antiquité la
plus reculée, les murailles des villes et des forteresses.
Les tours étaient destinées tout à la fois à protéger les
longues lipes des murs et à fournir les moyens
de découvrir au loin la contrée environnante. Les par-
ties basses servaient de magasins ou de prisons : pen-
dant la période romane, on les fit pleines, ce qui avait
l'inconvénient de ne laisser à l'assiégé que le sommet
des tours pour se défendre, et de livrer tous les soubasse-
ments aux mineurs ou pionniers ennemis. Au moyen âge
les tours isolées étaient fort en usage pour la défense
d'un défilé ou d'une position quelconque. Dans notre
siècle, on a appelé tours mcummiliennes, du nom de Tar-
chiduc d'Autriche Maximilien de Modène, des ouvrages
murés et isolés, et protégés par un fossé ; on les a em-
ployées pour la première fois à la défense de Lintz. La
tour se compose d'un rez-de-chaussée surmonté de deux
étages et d'une plate-forme, dont les plafonds sont voûtés
et à l'abri de la bombe, le tout haut de 11 met.; la plate-
forme est munie d'un parapet circulaire, et on y place
des bouches à feu montées de manière qu'on puisse en
diriger dix à la fois sur le m^me point; les deux étages
sont également disposés pour recevoir du canon ; l'étage
inférieur loge la garnison, forte de 150 hommes, et les
munitions et provisions sont placée au rez-de-chaussée.
TOUR, sorte d'armoire ronde et tournante, placée dans
l'épaisseur du mur des couvents de femmes ou des hos-
pices d'enfants trouvés, et qui sert à faire passer ce qui
vient du dehors, sans avoir besoin d'ouvrir la porte et
sans être vu. La sœur chargée du service du tour est ap-
pelée touriè're, — Les tours d'hospices, destinés à rece-
voir les enfants abandonnés, ont existé dans quelques
localités avant d'avoir été légalement établis par un dé-
cret de ISI1. La multiplication de ces tours est un en-
couragement à l'exposition des enfants, et à l'oubli des
devoirs de famille. V. Hamel Des enfants trouvés et du
danqer de la suppression des tours, Paris, 1838; Vau-
doré. De la suppression des tours pour les enfants, ibid.,
1838; d'Herbigny, Du tour des enfants trouvés, Bor-
deaux, 1839; Aug. Nicolas, Du tour des enfants trouvés,
ibid., 1839; Perrot, Considérations sur la suppression
des tours d'enfants trouvés, Paris, 1840; Nepveur, De la
suppression des tours, Rouen, 1848.
TOUR ou ROC, pièce du jeu d'échecs qui se place de
chaque côté et à l'extrémité de l'échiquier. Elle marche
toujours en carré.
TOUR A PORTRAIT, machinc au moyen de laquelle on re-
produit un bas-relief ou une médaille sur métal, sur
ivoire, ou sur toute autre substance convenable. Le tour
à portrait se compose essentiellement d'une pointe
émoussée, entraînée par un mouvement très -lent sur
tous les points du modèle à copier, et qu'un ressort ou
un poids force à pénétrer dans toutes V^ cavités qu'elle
rencontre; et d'une pointe coupante, qui suit tous les
mouvements de la première, et qui les reproduit sur une
échelle égale, ou plus grande, ou plus petite. Quand la
pointe émoussée s'enfonce dans une cavité de l'originai,
la pointe coupante creuse de la même manière la matiera
à tailler; lorsque la première est sur une saillie, la se-
conde ontamc la matière moins profondément. Des tours
Totr
ini
totj
à portrait ont été construits de manière à donner bosse
pour creux, et creux pour bosse; par leur moyen, une
médaille peut donner un cachet.
Toim DE BATAILLE, uom douné à des tours de bois dres-
sées sur des chariots, et qui, dans TOrient, surtout en
Perse, faisaient partie de Vattirail de guerre. Cyrus en
avait à la bataille de Thymbrée : elles étaient hautes de
15 pieds (4'",64) ; chacune contenait 20 archers; 8 paires
de Ixpufs la traînaient. Elles furent rangées derrière
rinfanterie, et les archers, se trouvant élevés à 8 ou
9 pieds au-dessus de la phalange, tiraient avantageuse-
ment sur Tennemi par-dessus la tète des phalangistes.
TOUR D*ér.LiSK. V, Clocher.
TOUR DE LONDRES. V» LoNDRES, daus uotro DiCtionnairB
d$ Biographie 9t d'Histoire.
TOUR DE PORCELAmS. V. NaNKIN.
TODR DE siécE, tour en bois, portée sur des roulettes, et
qu'on garnissait de soldats, qui, poussés près d'une place
assiégée, s'élançaient sur le rempart. On en fit usage
dans l'Antiquité et au moyen Age.
TOUR DES VEWTS. V. VbîITS.
TOURS PENCHÉES. La plus célèbre des constructions
de ce genre est le Campanile de Pise, commencé en 1174
par Guillaume d'Insprûck et Buonanno de Pise, et ter-
miné vers le milieu du xiv' siècle par Thomas de Pise. H
est cylindrique, haut de 56 met., et orné extérieure-
ment d'une profusion de bas-reliefs et de statues; sur lui
s'enroulent 207 colonnes formant sept étages, et dont
les ordres ont été alternés avec goût ; son diamètre est de
17 met. Son inclinaison est telle que, si l'on descend un
fil à plomb du sommet, il s'écarte de 4 met. de la base.
Cette inclinaison effrayante, qui ne parait cependant
avoir altéré en rien la solidité du monument, provient,
suivant toute probabilité, d'un tassement inégal dans les
fondations. La tour de Pise, construite tout en marbre,
sert de clocher à la cathédrale, et contient 7 cloches ; on
monte à sa plate-forme à Taiâe d'un escalier de 330 de-
grés. C'est là que Galilée fit ses célèbres expériences sur
les lois de la gravitation. — Bologne possède deux tours
penchées : la tour Asinelli, b&tie vers 1100 par la famille
Asinelli, est hante de 102 met. et a une déviation de
l'^,55; la tour Garisenda,b&tie en 11 10 par Filippo et Odo
Garisenda, n'a guère plus de 40 met. d'élévation, et in-
cline de près de 3 met. B.
TOURBIÈRES. Elles ne peuvent être exploitées que
par le propriétaire du fonds où elles se trouvent, ou avec
son consentement. Il faut aussi, sous peine d'une amende
de 100 Tr., avoir obtenu une autorisation préfectorale.
Les règles relatives à la police des mines sont appli-
cables aux tourbières. Les contrevenants aux règlements
d'administration publique sur l'exploitation sont con-
traints à cesser leurs travaux. Les habitants d'une com-
mune ne peuvent se partager les tourbières communales,
ni vendre celles dont ils jouissent en commun (Décret
du 12 frimaire an xin, Lois du 21 août 1810 et du
20 mars 1813). '
TOURELLE , petite tour, le plus souvent en encorbelle-
ment, placée aux angles d'une construction. La tourelle
est pour les Allemands ce qu'est le balcon pour les Ita-
liens : mais le balcon est à découvert , tandis que la tou-
relle est fermée. Dans beaucoup de monuments, les tou-
relles renferment des escaliers.
TOURIE, grosse bouteille de grès, entourée de paille
ou d'osier.
TOURIÈRE. F. Tour.
TOURILLON, petite tour accolée à une plus grande.
TOURMENTIN. V, Foc.
TOURNAI (Église Notre-Dame, à). Cette église cathé-
drale est une des plus importantes que possède la Bel-
gique, et peut-être la plus remarquable sous le rapport de
l'art et de Tantiquité. On pense que la construction en
fut commencée vers 1030; la nef et les transepts sont du
XI* siècle, c.-à-d. en style roman ; les portails latéraux, de
la seconde moitié du xn'. Le chœur, incendié en 1213,
fut reconstruit en 12i2; il est d'architecture ogivale. La
nef centrale, d'abord couverte d'un plafond, n*a été voûtée
qu'en 1777. Le grand portail est un ouvrage conçu dans
le mauvais goût du xvii« siècle, lié à gaucne avec la
Bibliothèque et un établissement de vieux prêtres, à
droite avec les bâtiments de l'archevêché. Il se compose
d'un péristyle en avant-corps, à arcades ogivales d'inégale
ouverture; au-dessus et en arrière, un oculus s'ouvre
entre deux tourelles romanes à toit d'ardoise, et est sur-
monté d'un pignon. Quatre tours s'élèvent dans les
angles des transepts : elles sont percées de plusieurs
stages lift croisées, toutes à plein cintre dans l'une, mais
alternant avec l'ogive dans les trois autres, et supportent
des toits élancés en ardoise. Les tours placées à l'occident
des transepts sont portées par des piliers, et les autres
sur des murs pleins avec voûtes de décharge. Au centra
des transepts est un cinquième clocher. Le^ transepts
sont terminés en abside. — La cathédrale de Tournai est
à trois nefs : elle a 125<",50 de longueur, porche compris,
24 met. de largeur (67™,25 au transept), 23",75 de hau-
teur. Les arcades romanes de la nef centrale reposent
sur des piliers courts et trapus : au-dessus du rez-de-
chaussée est un second rang d'arcades, formant une ga-
lerie qui règne au-dessus des collatéraux. Celle-ci sup«
porte à son tour un triforium, surmonté lui-même de
fenêtres à plein cintre. Dans les transepts, les colonnes
sont très-élancées au rez-de-chaussée, plus courtes à la
galerie; elles sont à cintre surhaussé. Chaque transept est
composé d'une abside, d'une travée à laquelle les faces
opposées de deux clochers servent de parois, et d'une
troisième partie qui sert d'entrée aux coîlatéraux du
chœur, et de sortie aux collatéraux de la nef. La lanterne
qui est au-dessous du clocher central s'élève à une hau-
teur de 48™, 50. Le collatéral de droite de la nef, destiné
dans le principe aux hommes, est plus large et plus haut
que celui de gauche. Le chœur, avec la légèreté de ses co-
lonnettes élancées et ses grandes fenêtres ogivales, forme
un heureux contraste avec la sévérité de la nef; il en est
séparé par un Jubé en marbre blanc et noir, percé de
trois arcades à plein cintre, et dont les archivoltes re-
tombent sur des colonnes de marbre de couleur. Ce jubé,
élevé en 1566 par Corneille de Vriendt ou Floris, est sur-
monté d'un S^ Michel terrassant le démon , groupe en
bronze exécuté par Lecreux, artiste de Tournai. Le
chœur a perdu ses belles stalles du xv* siècle, et n'a que
des verrières modernes peintes par Capronnier. A gauche
du maitre-autel est une châsse de S* Éleuthère, remar-
quable travail d'orfèvrerie qui jrarte la date de 1247.
V. Le Maistre d'Anstaing, Histoire de la cathédrale de
Tournai, 2 vol. in-8°; Capronnier, De Keghel, etc.,
Vitraux de la cathédrale de Tournai , in-fol. B.
TOURNEBRIDE. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
TOURNELLE (La). V. Parlement, dans notre Diction^
naire de Biographie et d'Histoire.
TOURNEVIRE, cordage roulé autour d'un cabestan,
dont on fait usage sur les navires pour élever les ancres
et autres corps pesants.
TOURNIQUET, croix de bois ou de fer, posée horizon*
talement sur un pivot dans une rue ou un chemin , pour
ne laisser passer que des gens à pied et qu'une personne
à la fois.
tourniquet, disque autour duquel sont marqués des
numéros, et portant au milieu un piton avec une aiguille
de fer ou de baleine. On le fait tourner, et le chiflTre où
l'aiguille s'arrête indique la perte ou le gain.
TOURNIQUET, poutTo garoio de pointes de fer qu*on place
dans une brèche, pour disputer le passage à l'ennemi.
TOURNIQUET, rouloau de bois tournant autour d'un axe,
3u*on place près des mâts ou des pompes d'un navire
ans la direction des cordages, pour subir le frottement
de ceux-ci quand on les manœuvre.
TOURNISSE , terme de Charpenterie, nom donné aux
poteaux qui servent de remplissage dans les jouées de
lucarnes , dans les cloisons où il y a des décharges, des
croix de S* André, etc.
TOURNOIR, vieux mot signifiant tournebroche.
TOURNOI^. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
TOURNUS (Église de), dans le département de Saône-
et-Loire. Cette église, ancienne abbatiale de Bénédictins,
et placée sous l'invocation de S' Philibert, fut commencée
vers 960, et consacrée en 1019; les tours doivent avoir
été terminées dans le xii' siècle, et les chapelles latérales
de la nef aux xm* et xiv*; le portail est une mauvaise
construction du xvn* ou du xviii*. La tour de gauche de
ce portail a quatre étages : le 1'% sans ouvertures, est
couronné par un cordon à dents de scie; le 2* et le 3*
présentent chacun quatre fenêtres inscrites dans deux
autres plus grandes et à plein cintre; le 4* est percé do
trois fenêtres dont les archivoltes découpées de contre-
arcatures reposent sur des colonnes très-ornées, quelque-
fois torses. A chaque angle de la tour sont des figures de
Saints grossièrement sculptées. La tour de droite est
semblable, sauf qu'elle n'a que trois étages. Entre les
deux tours et au-dessus du portail, on remarque un as-
sommoir en saillie, porté sur des mftchicoulis, et servant
autrefois à défendre l'entrée de l'église. Un troisièiM
TOU
1732
TOU
docher, également carré, s'élève ati peint d'intersection
de la nef et da transept : il est à deux étages, dont le
premier offre, sur chaque face, une arcature composée de
six cintres é^ux, et le second est percé de trois fenêtres
polylobées. A Textérieur du chœur, une rangée de lo-
sanges, surmontés de triangles rouges incrustés dans la
pierre, règne au-dessus des fenêtres. L'église est pré-
cédée d'un vestibule ou narthex, long de 18'",70, large
de 13™,65, divisé en trois nefs par deux rangs de piliers
très-bas, d'un diamètre de 2">,60, terminés, au lieu de
chapiteau, par un gros tore, et qui soutiennent une voûte
d'arêtes cintrée : au-dessus de ce vestibule est une vaste
salle, dont la voûte, également soutenue sur de gros pi-
liers ronds, atteint la hauteur de celle de la nef. Le ves-
tibule donne accès par trois portes dans l'intérieur de
l'église, qui a la forme d'une croix latine, et 75 met. de
long (y compris le vestibule) sur i8™,50 de large, et
17°*,85 de hauteur. La nef est accompagnée de deux col-
latéraux; on y voit huit piliers analogues à ceux du nar-
thex, mais plus élevés (9'",30 au lieu de 7 met.) et d'un
moindre diamètre (1<",35). De leurs chapiteaux, espèces
de pyramides tronquées dont les angles sont abattus,
s'élèvent des colonnes engagées, qui reçoivent les arcs-
doubleaux de la maltresse voûte. Celle-ci se compose
d'une série de voûtes en berceau transversales; les bas
côtés ont des voûtes d'arêtes, et tournent autour du
chœur. Toutes les fenêtres sont étroites, petites, cintrées
et sans aucune décoration. Les piliers des transepts
sont renforcés d'un massif carré. Le collatéral de gauche
a été élargi pour recevoir une rangée de chapelles ogi-
vales; le transept du même côté est terminé par une
grande chapelle avec son abside. Un mur sépare du tran-
sept les collatéraux : il est percé, à droite, d'une porte
cintrée, et, h gauche, d'une porte ogivale. La cx>upoIe
ovoïde qui s'élève au centre de la croisée est une des
plus élégantes qu'on ait faites en France durant le moyen
âge : à sa base elle est décorée d'arcades bouchées re-
tombant sur des colonnes à chapiteaux historiés. Les ai^
cades du chœur, qui ont été bouchées, étaient fermées
autrefois au moyen d'un grille en fer ouvragé. L'absidt
se termine par trois chapelles à pans qui ne servent plus
au culte. Sous le chœur règne une crypte accompagnée
de cin^ chapelles, et divisée en trois nefs par deux rangs
de petites colonnes cylindriques.
TOURS (Église S'-Gatien, à). Deux églises, fondées,
l'une au temps de Tempereur Constantin par l'évêque
Lidoire, l'autre au vi« siècle par S^ Grégoire, l'historien
des Francs, et toutes deux sous l'invocation de S^ Maurice
et de ses compagnons, précédèrent l'église métropolitaine
actuelle de Tours, dont la première pierre fut posée en
1170. Après avoir été poussée pendant quelque temps
avec vigueur, la construction de ce monument fut sus-
pendue ; on la continua plus tard avec lenteur, et on y
travaillait encore en 1547. Néanmoins un heureux accord
règne entre toutes les parties. Ce fut la confrérie de
S^-Gatien qui acheva les travaux, et l'édifice prit le vo-
cable de ce saint. Quelques parties peu importantes de la
cathédrale de Tours proviennent , non pas de la basilique
de S^ Grégoire, mais de constructions faites au xi* siècle
pour la soutenir ou l'agrandir : ce sont quelques arcades
romano-byzantines, à la base des deux tours du grand
portail. L'abside, le chœur et les chapelles absidales, qui
sont la plus belle partie du monument, appartiennent
au style ogival primitif; le transept et deux travées de la
nef, au style secondaire; le reste de la nef, ses cha-
pelles, le portail , au style tertiaire. Un clocher en bois
avait été élevé en 1377 au-dessus de l'entre-croisement de
la nef et du transept ; il fut détruit par la foudre en 1425.
Peu de temps après, un certain Guillaume Rufus ou Le-
roux exécuta la charpente des grands combles. La partie
supérieure des tours fut bâtie pendant la période de la
Renaissance : elles reçurent leur couronnement, l'une en
1507, l'autre en 1547 ; leur hauteur est de 70 met.
La cathédrale de Tours est en forme de croix latine,
avec déviation très-sensible dans son axe longitudinal
{V, Axe). Elle a 100 met. de longueur, 30 met. de lar-
geur (46 à la croisée), et 28 met. de hauteur sous voûte :
elle ne peut être comparée à certaines autres églises go-
thiques pour l'étendue des proportions, mais elle ne le
cède " aucune pour la pureté du style, l'harmonie des
iigne^, la symétrie dans la disposition des masses, l'or-
donnance pittoresque et l'élégance des détails. La façade
occidentale est complète : les voussures des trois portails
sont chargées de ces ciselures fines et délicates qui carac-
térisent Tart du xvi* siècle, et sannontées de firontons
pyramidaux découpés à jour ; mais les niches sont vides
de leurs statues, et bon nombre de bas-reliefs ont ete dA*
gradés par le vandalisme révolutionnaire. Quatre contre*
forts, couverts de panneaux et de crosses vitales,
s'élèvent jusqu'au sommet de la façade, et la divisent en
trois parties : au milieu se déploie une belle rose. Au
point où les tours ogivales se terminent d'ordinaire, rr-
posent deux pyramides, tronquées à leur extrémité, et
couronnées par une coupole hémisphérique; de la base
au sommet, elles sont couvertes d*ornementSi ce qui fai-
sait dire à Henri IV : « Voilà deux beaux bijoux, il n'y
manque que des étuis. » Dans tout le pourtour de l'édi-
fice, les contre-forts et les arcs-boutants, surtout vers la
région de l'abside, dessinent une charmante perspective.
— L'intérieur de la cathédrale de Tours est d'un effet
très-remarquable. Rien de plus achevé que le chevet,
dont l'ordonnance première n'a jamais subi d'altération :
ses arcades, légèrement surélevées, lui communiquent
un élancement qui étonne; les chapiteaux à feuillages et
à volutes des colonnes groupées sont d'une gr&ce exquise;
des galeries à jour, composées de trèfles, de qûatre-
feuilles, de rosaces, et les fenêtres encore garnies â»
leurs vitraux du xui* siècle, forment une merveilleuse dé-
coration ; les voûtes, d'une construction savante, présen-
tent des nervures toriques et des clefs sculptées. Les
chapelles absidales sont disposées avec art et avec goût
autour du chevet. Aux extrémités du transept brillent
deux splendides rosaces, qu'on doit ranger parmi les
plus extraordinaires productions de ce genre. La grande
nef parait un peu étroite par rapport au corps général de
rédifice; les colonnes y conservent les mêmes proportions
qu'au chœur et au transept, mais les chapiteaux sont
remplacés par de simples feuillages ; les galeries et les fe-
nêtres présentent les nombreux compartiments du style
ogival flamboyant ; les voûtes, appuyées sur des arceaux
prismatiques, sont embellies de clef portant les armoi-
ries de S^ Maurice, des papes et des évèques bienfaiteurs
de l'œuvre, et, à leur sommet, une chaîne de feuil^
lage s'étend d'une extrémité à l'autre. Une chapelle con-
tient le tombeau en marbre blanc de. deux enfants de
Charles VIII et d'Anne de Bretagne, sculpté par les
frères L^uste, et restauré en 1825. V. Manceau et Bou-
rassé, Verrière du choeur de Véglise métropolitaine de
Tours, 1849, in-fol.
TOURS (Eglise S^ Jduen k)j ancienne abbatiale, con-
struite dans la première moitié du xuio siècle, sauf la
tour, qui provient d'un édifice antérieur. Cette tour car-
rée, haute de 25 met. seulement, supportait autrefois
une pyramide en charpente, qu'on a abattue pendant la
Révolution. Elle est soutenue par d'épais contre-forts
d'angle, et ornée, sur chaque face, de deux étages de fe-
nêtres à plein cintre : les fenêtres, primitivement ouvertes
à rOrient, ont été fermées au moment de la construction
du nouvel édifice. L'église SWulien a 46'",85 de lon-
gueur, 20 met. de largeur (dont 9",00 pour la grande
nef), 21 met. de hauteur sous voûte à la nef majeure^
0 met. aux nefs mineures. Le transept a 30 met. de lon-
gueur, et S"' ,20 de largeur. Il y a deux collatéraux jus-
qu'aux branches du transept, et quatre dans la partie
absidile, qui se termine par une muraille droite. Les
chapelles établies en prolongement des collatéraux n'ap-
partiennent pas au plan primitif, et furent ajoutées pen-
dant le XVI* siècle. Les piliers de la nef majeure sont can-
tonnés de quatre colonnes, et surmontés de chapiteaux à
feuilles recourbées ; ceux de la région absidale sont ar-
rondis en forme de colonnes monocylindriques. On
compte de chaque côté de la nef neuf arcades qui corres-
pondent à autant de travées. La paroi du croisillon m^-
dional , et la muraille qui suit le collatéral du même côté,
sont ornées d'une série d'arcatures; disposition qui ne te
répète pas du côté opposé. Les galeries qui circulent tout
autour de l'église s'ouvrent par de larges arceaux trilo-
bés, dont le centre repose sur une légère colonnette. Le
triforium n'est pas transparent, parce que les nunpants
des toits des nefs mineures viennent buter au niveau de
la partie inférieure des fenêtres principales. Les colon-
nettes de la galerie du fond du transept méridional sont
appuyées sur des figures bizarres, idée peu commune et
dont on trouve une autre application dans la cathédrale
de Nevers. Le transept méridional est terminé par une
rose, celui du nord par des fenêtres à lancette. Une im-
mense fenêtre, d'une très-belle constructioQt mais sanr
vitraux de couleur, est percée dans le mut- de l'abside.
Les voûtes de l'église S'-Julien sont d'une exécution par-
faiter seulement , toutes celles des nefs mineures ne sont
pas M:>rmées de pierres d'appareil t mais de libages r»»
vêtus d'un enduit sur lequel on a simulé les apparcilf
TRA
1733
TRA
ftvec de larges traits. La charpente des combles, en bois
de chêne blanc, offire un grand intérêt. V, Manceaa
et Bourassé, iVb/tc0 mr Véglise S^-Julien de Tours,
18i0, in-8«. B.
TOURTEAU; en termes de Blason, même figure que le
Besant (K. ce mot); seulement, le tourteau est toujours
de couleur. Les tourteaux ont reçu différents noms selon
leur couleur : on appelle agœsses ceux de sable, guipes
ceux de pourpre, guses ceux de gueules, heurtes ceux
d*azur, volets ceux de sinople.
TOUTES TABLES (Jeu de). V. TnicriiAC.
TRABANS (de Tallemaod traben, trotter), anciens sol-
dats des régiments suisses, vêtus à Tespai^nole, armés
d*une hallebarde et d*un estoc, et dont les fonctions
étaient d'accompagner le capitaine et de le défendre.
TRABÉE , to^ romaine. K. notre Dictionnaire de Bi<y-
graphie et d'Histoire.
TRABUCAIRES , soldats espagnols armés du trahuco.
Le mot a été appliqué spécialement à des bandits qui in-
festèrent la Catalogne il y a trente ans.
TRABUCO. V. EspuiGOLB.
TRADITION (du latin tradere, livrer), en termes de
Droit, action de livrer une chose à quelqu'un. Autrefois,
la tradition réelle était nécessaire pour transférer la pro-
priété, et, tant qu'elle n'était pas effectuée, le vendeur
était encore maître de vendre et de transmettre à un
autre l'objet déjà vendu. Le Code Napoléon (art. 1138)
établit, au contraire, que l'obligation de livrer une chose
est parfaite par le seul consentement des parties; il n'y
a d'exception que pour les choses mobilières, dont la tra-
dition s'effectue par la remise réelle ou par la remise des
clefs des b&timents qui les contiennent (art 160G). La
tradition des droits incorporels se fait par la remise des
titres, ou par l'usage que l'acquéreur en fait du consente-
ment du vendeur.
TRADiTion , récit transmis oralement de génération en
génération, et ce mode même de transmission. Avant
l'invention de l'écriture, la tradition orale était le seul
moyen de conserver le souvenir des événements, et c'est
à cette source que puisèrent les premiers historiens.
A défaut de preuves écrites et de monuments commémo-
rât! fs, la tradition peut fournir des renseignements
utiles, mats à la condition d'être contrôlée par la cri-
tique; car elle est d'autant plus enveloppée de mythes et
d'obscurités qu'elle remonte plus haut dans le temps. —
Par tradition, l'Église catholique entend la parole non
écrite de Jésus-Christ, c-à-d. ses enseignements transmis
oralement par les Apôtres, conservés par les Pères et par
les évêques, qui , avec l'assistance du Saint-Esprit, se les
transmettent fidèlement les uns aux autres ; elle attribue à
cette tradition une autorité divine, et en fait une des bases
de ses dogmes. Les Protestants n'admettent la tradition
comme fondement d'une vérité religieuse qu'autant cpi'elle
est confirmée par quelque passage de l'Évangile ; ils ont
cependant conservé plusieurs des usages qu'elle consacre.
TRADUCIANISME (du latin trodiic^re, transmettre),
doctrine suivant laquelle Tàme des parents est transmise
par la génération dans le corps de l'enfant naissant.
TRADUCTION (du latin traducere, transmettre), ac-
tion de faire passer un ouvrage d'une langue dans une
autre. La première et la plus essentielle condition que
doive remplir un traducteur est de se pénétrer profondé-
ment de l'esprit de l'ouvrage qu'il veut faire passer dans
sa langue maternelle, et d'en rendre fidèlement le ton
général, les idées partielles, et par suite d'en reproduire
autant que possible le style. Dans le détail, il ne doit
s'attacher à l'exacte reproduction des tours et des ex-
pressions au'autant que cette fidélité pour ainsi dire ma-
térielle ne blesse pas le génie et les habitudes de la langue
dans laquelle il traduit. Il en est d'une traduction comme
de la Justice : on doit s'y garder de tout excès; rien de
plus infidèle qu'une extrême fidélité. Maintes fois une
expression, dans l'original, est forte, hardie, ou élevée ,
et celle de la langue du traducteur qui y correspond di-
rectement est faible, ou étrange, ou basse ; une image
vive, brillante, naturelle, en latin ou en allemand, est
extraordinaire ou triviale en français; une période har-
monieuse et expressive , si on veut la calquer de trop
{>rè8, peut devenir languissante et raboteuse , parce que
es deax langues n'ont pas le même génie, et que la con-
structioa des phrases ooéit dans l'une et dans l'autre à
des lois nécessairement différentes. Il faut donc, dans ces
divers cas , recourir à des éouivalents, se borner à con-
server le fond de la pensée, le sens de chaque membre
de phrase , rendre l'ensemble d'une manière conforme
au caractèrs de notre langue, et ne pas s'exposer à re-
buter le lecteur par une etrangetd (roi dans son esprit
ne se distingue pÂs de l'obscurité. Cha(][ue écrivain doit
aussi être rendu avec la physionomie qui le caractérise :
une traduction d'Homère et de Démosthène ne saurait
être faite d'après les mêmes principes qu'une traduction
de Lucien et de S^ Jean Chrysostome ; la fécondité Ingé-
nieuse, mais souvent diffuse, d'Ovide doit reparaître
sous la plume d'un habile traducteur, qui ne saurait,
sans ridicule, adapter les mêmes procédés au style âpre
et vigoureux de Lucrèce, & la précision forte et brillante
de Virgile; il ne tombera pas dans la faute pave du
5 rince Lebrun, qui a traduit du même ton VFltade et la
érusalem délivrée. Au reste, quoi que l'on fasse, une
traduction est toujours, dans son ensemble, inférieure à
l'original, et ne peut donner d'un auteur étranger qu'uno
idée superficielle; pour le connaître de près et à fond, i!
faut recourir à son texte, le lire dans sa langue. Il n'y a
d'exception à ce sujet que pour les écrivains qui n'ont
point d'originalité ou de talent sérieux, ou qui ont écrit
dans une langue en décadence : souvent un habile tra-
ducteur donne à leurs ouvrages un cachet distingué et
brillant, seul capable de les rendre lisibles; c'est ce qu'a
fait souvent avec un remarquable bonheur Augustin
Thierry pour les chroniques mérovingiennes. Sans doute
une semblable traduction est trahison, selon le pro-
verbe italien (traduttore traditore); mais du moins la
trahison profite à l'auteur original, et ne lui fait pas le
tort que la sèche et lourde prose de Larcher, par exemple,
fait au coloris naïf et gracieux des récits d'Hérodote.
Quand on commence l'étude d'une langue, il faut s'as-
treindre pour la traduction à un double travail : d'abord
reconnaître le sens de chaque mot et de chaque phrase ,
et les rendre, comme on dit, littéralement ; puis, s'assi-
miler la pensée, et donner à la phrase originale le tour
3u'elle aurait eu naturellement dans la langue du tra-
ucteur, si la pensée lui en avait appartenu. Dans les
écoles, ce double travail se fait le plus souvent de vive
voix après une préparation préalable ; quelquefois aussi
on s'aide de traductions imprimées, présentant d'une
part le texte original et en regard la traduction française
définitive, d'autre part les mots ou groupes de mots tra-
duits exactement par les mots correspondants sans au-
cun souci de l'élégance, enfin des notes philologiques on
archéologiques destinées à lever les diflicultâ nue la
traduction ne suffît pas à résoudre, et ^i ont oesoin
d'être telairdes par des explications spéciales.
La traduction d'un morceau détaché en une autre
langue s'appelle Version, si cette langue est la mater-
nelle; Thème, si c'est une langue étranjçère. Ces mots
sont surtout usités pour les exercices scolaires. V. Thème,
Version. P.
TRAGÉDIE, l'un des deux genres principaux de com-
position dramatique, celui où l'on met en scène une
action héroïque capable de provoquer la pitié, la terreur,
l'admiration. Peindre l'homme aux prises avec une im-
placable destinée , avec les grandes douleura, avec ses
passions les plus fortes, tel est le but du poète tra-
gique ; et, pour peu ^e ses peintures soient vraies, il
n'y a pas d'oeuvre qui puisse offrir plus de charme, ex-
citer un plus vif intérêt ; car, au plaisir instinctif qu«
produit en nous toute imitation fidèle de la nature,
s'ajoute ici la sympathie que nous éprouvons pour nos
semblables. Aristote, Horace et Boileau ont établi dans
leura Poétiques les règles de la tragédie : mais si, parmi
ces règles, les unes, fondées sur la raison H le goût,
sont imprescriptibles et étemelles, les autres ne sem-
blent reposer que sur la tradition et la convention , et
sont par là même fort contestables. Ainsi, il est conforme
au bon sens (Boileau, Art poétique, ch. m) que
, la passion émno
AUlô cb«rcher le oœor, réchauffe et le remac.
parce que, selon le mot de Rousseau , singulièrement ex«
pressif par son exagération même et son air paradoxal, il
n'y a que la raison qui ne soit bonne à rien sur la scène,
et que l'impassibilité stoïcienne d'un Gaton serait fort
peu tragique. De même, il est dans les convenances du
genre que la tragédie, qui est, après l'épopée, la forme
la plus digne et la plus belle de l'inspiration littéraire ,
emprunte à la poésie son langage; que le sujet s'explique
dès les premiers vera; que le trouble croisse de scène en
scène, et que l'intrigue se débrouille, tout à coup et sans
peine, au moment voulu ; que les personnages, s'ils sont
connus d'avance, conservent le caractère que l'histoire
ou la légende leur attribue ; qu'ils soient, jusqu'au bout,
tels qu'on les a vus d'abord ; que chaque passion parle
TRA
1734
TRA
loo langage propre et conforme à la nature. Cea pré-
ceptes ne sont que les inspirations du sens commun. Mais
la raison n*oblige nullement à croire que la règle des
trois unités {V. Unités), à laquelle se sont péniblement
asservis les tragiques français, soit légitimement obli-
çttoire.
TRACéDIB CHEZ L£S AlfCIKNS.
I. Tragédie ches les Grecs, — Lar tragédie prit nais-
sance en Grèce, dans les fêtes de Bacchus. Chaque an-
née, on chantait à Athènes un dithyrambe (V. ce mot)
en l'honneur de ce Dieu mis en pièces par les Titans :
un chorége (V. ce mot) rapportait quelque partie de la
légende religieuse, tandis qu*un chœur de cinquante
personnes hurlait en tournant autour d'un autel où Ton
immolait un bouc. De là vint le mot tragédie ( du grec
tragos, bouc, et d(ié, chant), qui veut dire ohantdu bouc.
Selon quelques-uns, les personnages du chœur se dégui-
saient en Satyres, avec des jambes et des barbes de bouc,
pour figurer le cortège habituel de Bacchus. L'auteur du
plus beau dithyrambe obtenait en récompense un bœuf,
et non pas un bouc, comme l'ont dit Horace et Boileau.
Thespis semble avoir, le premier, mis en action, en
drame (drama)^ la léjgende, qui, jusque-là, n'était
qa*un simple récit : le chœur suivit son rôle, mais non
plus d'une façon continue; de temps en temps un per-
sonnage s'en détachait et parlait seul, soit pour répondre
aux cris du chœur, soit pour le provoquer à de nouveaux
chants. Une seconde et plus importante innovation de
Thespis fut de prendre quelquefois le sujet do ses drames
en dehors de la légende consacrée, et d'émanciper la
tragédie du cercle où la renfermait la religion : c'est ainsi
qu'on lui attribue une Atceste, De ce jour, la tragédie,
telle (lue nous la concevons aujourd'hui, était au moins
ébaucnée; seulement le chœur la remplissait encore
presque tout entière. Il appartenait aux successeurs de
Thespis de réduire l'élément chorégraphique et musical,
et de développer au contraire l'action proprement dite.
Eschyle, qu'on regarde comme le père de la tragédie
grecque, a eu de glorieux prédécesseurs. Phrynichus,
qui introduisit sur le théâtre les personnage.* de femmes,
avait, dans l'une de ses œuvres intitulée ta Prise de Mi-
let, peint sous des couleurs si vives les malheurs de
cette cité, qu'il fut mis à l'amende pour avoir réveillé
trop fortement le souvenir d'une calamité nationale. En
revanchOp il conquit une grande popularité avec ses Phé-
niciennes, où il exposait, comme Eschyle dans sa tra-
gédie des Perses, la défaite de l'Asie et la victoire de la
Grèce à Salamine. Pratinas, à qui l'on rapporte l'inven-
tion du drame satyrique {V. ce mot), et Chœrilus, qui,
dit-on, imagina les décorations de la scène et fit prendre
aux acteurs le costume propre à leur rôle, vainquirent
plus d'une fois Eschyle dans les concours poétiques. Le
temps, en détruisant leurs œuvres, ne nous a laissé
d'autre preuve de leur génie que le souvenir de leurs
triomphes. Il n'a guère plus épargné, du reste, les com-
positions d'Eschyle, puisque, de tO œuvres dramatiques
que les critiques anciens lui attribuent, il ne nous en est
arrivé que 7, avec quelques lambeaux d'autres pièces.
Elles suffisent néanmoins pour attester la puissance et
l'élévation de son génie. On pourrait dire qu'il y a trois
poètes dans Eschyle : le poète lyrique, avec toutes les
qualités qui le distinguent, l'enthousiasme, des images
tour à tour sublimes et gracieiises, des pensées pro-
fondes, dignes d'un sage qui fut initié aux mystères
d'Eleusis et compté parmi les adeptes de la philosophie
pythagoricienne, et un style assorti à l'audace de ses
conceptions; le poète épique, dont les récits ont la rapi-
dité, la chaleur et l'éclat de ceux de V Iliade; le po^te
dramatique, qui sait déjà l'art d'exposer un sujet à l'aide
du chœur ou d'un personnage détaché, et de préparer
les spectateurs aux scènes qui vont se dérouler sous leurs
yeux ; bien plus, dans une action d'une simplicité ex-
trême, où les personnages, animés d'un sentiment unique,
n'apparaissent un moment que pour accomplir leur des-
tinée, instruments aveugles et roides comme la Fatalité
qui les pousse, il égale cependant du premier coup les
plus grands maîtres par la vivacité du dialogue. Rien ne
lui manqua que la mesure, qui fut le privilège de son
jeune rival Sophocle. En effet, tandis que l'un pousse
parfois la grandeur jusqu'au gigantesque, l'autre ne
s'égare jamais au delà de certains limites. Il en résulte
que plusieurs personnages d'Eschyle, un Océan, un Pro-
méthée même, nous surpassent et ne nous touchent plus
guère ; ils excitent notre étonnement, ils frappent par le
merveilleux notre imagination, mais sans remuer not
cœars; ils nous sont devenus étrangers. Lea héros àt
Sophocle demeurent au-dessus de nous, mais à une hau-
teur où l'humanité peut encore atteindre : s'ils nous sont
supérieurs, ils restent cependant des hommes, et provo-
quent ainsi chez les spectateurs un intérêt qui ne lisqoe
point de s'aflTaiblir. La langue des deux poètes présente
le même contraste : Eschyle a des images outrées, des
expressions bizarres , extraordinaires , imprévues ; le
style de Sophocle est élevé , mais sobre ; assez savant
pour être original et poétique jusque dans les détails
familiers, il ne l'est pas au point d'offrir, comme celui de
son émule, des difficultés insurmontables ; sévère autant
3u'il faut pour éviter le trivial, il ne s'écarte nulle part
e la saine et vraie simplicité. En un mot, la critique,
qui regrette en Eschyle une inspiration trop souvent in-
tempérante, admire en Sophocle un artiste consommé,
une inspiration toujours réglée par un goût exquis. —
Les personnages d'Eschyle se montrent à la fin du drame
tels qu'ils étaient au début; un seul sentiment les oc-
cupe tout entiers, et les mène, sans exaltation ni défail-
lance, au but marqué par la Fatalité. Sophocle, au con-
traire , observe dans la peinture des passions une
progression pleine d'art et de goût; en sorte que, dans
Eschyle, les événements semblent créer les caractères,
au lieu que, dans Sophocle, c'est le développement des
caractères qui semble produire les événements. — Es-
chyle laissait au chœur une place importante, quelque-
fois la principale : Sophocle lui donne une part plus
discrète. Avec lui les chants du chœur sont devenus
comme le cri de la conscience publique, et l'expressio''
des émotions diverses que le spectateur éprouve à tra-
vers les péripéties de l'intrigue; son rôle désormais est
à la fois secondaire et moral. Par une révolution défi-
nitive, l'intérêt a passé du dithyrambe au dialogue, des
choreutes aux personnages ; la vraie tragédie est consti-
tuée, et, dès son début, a atteint la perfection suprême.
Il est vrai qu'elle déclina presque aussitôt avec Euri-
pide. Novateur, et, si l'on peut parler ainsi, représen-
tant du romantisme en Grèce, il altéra les vieilles lé-
gendes et rabaissa les héros. Philosophe , il fit le procès
aux Dieux en vrai disciple de Socrate, attaqua les super-
stitions, et sema inconsidérément dans ses pièces les sen-
tences morales. D'autre part, il déplaça la Fatalité : chez
Eschyle, elle était ce pouvoir aveugle et tyrannique qui
contraignait invinciblement au crime les mortels, puis
les punissait de leurs fautes involontaires; Sophocle, &me
éminemment religieuse, avait cherché à concilier ce
dogme inique et redoutable avec les inspirations de la
conscience et le sentiment instinctif de la justice, et ses
personnages, victimes du Destin , l'étaient aussi de leurs
passions coupables; Euripide fit descendre du ciel dans
le cœur humain la Fatalité, en présentant à l'homme,
comme la cause souveraine de ses souff'rances, ses propres
faiblesses {V, Fatalité). Orateur, il ne se garda point
assez des subtilités et des raffinements de la sophistique,
et l'on vit les passions plaider sur son théâtre comme
des avocats sur la place publique. Mais, en revanche,
personne n'a connu plus profondément et décrit par des
analyses plus délicates les passions humaines; personne
n'en a représenté d'une façon plus tragique les mouve-
ments désordonnés. De là vient que chez lui le rôle prin-
cipal est aux femmes : il en a médit ; on l'a nommé leur
ennemi {misogyne); il ne faut pourtant pas oublier ses
touchantes figures d'Iphigénie, de Polyxène et d'Alceste.
Eschyle avait pour lui l'enthousiasme, et Sophocle une
majesté douce et sereine; Euripide se distingua par la
délicatesse exquise de sa sensibilité et quelque chose de
féminin dans la nature de son génie. Son style est clair,
harmonieux, coulant et flexible ; son langage se prête à tous
les besoins de la pensée, et en illumine les plus fugitives
nuances; mais on y relève deux défauts, le trivial et la
subtilité. Il inventa les prologues, en homme qui veut
arriver tout de suite aux situations émouvantes, et le
merveilleux, en homme qui , ayant épuisé le pathétique
des situations, ne sait plus comment se retirer et finir.
Sur un théâtre ainsi conçu, le chœur était au moins
inutile, sinon gênant : aussi la matière de ses chants
n'est le plus souvent qu'un lieu commun, très-indirecte-
ment lié au sujet.
Avec Euripide périt la tragédie grecque ; nous ne cite-
rons que pour mémoire Ion de Chios, rival quelquefois
heureux de Sophocle; Achéus d'Érétrie, qui excella,
dit-on , dans le drame satyrique ; Agathon , l'un des per-
sonnages du Banquet de Platon, auteur d'une tragédie in-
titulée la Fleur, où tout était d'invention pure ; Jophon et
Ariston, fils de Sophocle; Sophocle le Jeune « son petit-
TRA
1735
TRA
flli; enfin Earipide le Jeune, fils on nevea d*Euripidc
(V. Grecqob — Littérature). V. Patin, Études sur les
tragiques grecs, 2* édit.. Pari», 1858, 4 vol. çr. in-l8.
II. Tragédie chez les Romains, — La tragédie latine est
trèîv-inférieure à la tragédie grecque, et il y a plusieurs
raisons de cette infériorité. D'abord, la tragédie n'était
pas une production du pays : il était difficile que les
Romains y prissent le même intérêt que les Grecs, qui
avaient vu le drame sortir et se dégager progressivement
du culte d*un de leurs Dieux. Les premiers tragiques
d'Italie, Livius Ândronicus, Névius et Ennius, ne firent
guère que traduire les œuvres des Athéniens; tout au
plus Névius hasarda-t-il quelques pièces où les mœurs
étaient latines comme la langue. Et à quel auditoire
offraient-ils leurs plagiats? On était au temps des guerres
Puniques, et les Romains généralement conservaient en-
core la rudesse et Tignorance des siècles primitifs. Quel
plaisir pouvait leur procurer la représentation de ces lé-
gendes grecques dont ils ignoraient le premier mot?
D'ailleurs, il faut des esprits déjà façonnés par la culture
des lettres, pour trouver du charme aux spectacles tra-
giques. — Peu à peu cependant, et par l'influence de ces
premiers spectacles, et gr(ice aux relations de la Grèce et
de Rome, les chevaliers et les sénateurs se passionnèrent
pour cet art nouveau, et la foule, entraînée par leur
exemple et mieux éclairée, partagea dans une certaine
mesure leur enthousiasme. Cette transformation s'opéra
au u" siècle avant notre ère, et maint passage de Cicéron
atteste les applaudissements qui accueillirent le DuIch
restés (Oreste esclave) de Pacuvius et le Brutus d'At-
tius. Le premier, tout en imitant les Grecs, savait mieux
que ses prédécesseurs mettre déjà dans ses œuvres de
l'&me et de l'originalité; le second, à qui Eschyle avait
communiqué quelque chose de son souffle puissant , eut
la gloire de créer la tragédie nationale : élégance soute-
nue, noblesse, élévation , versification correcte et variée,
telles paraissent avoir été ses qualités, déparées çà et là
par des fautes de goût. Malheureusement , de l'un et de
l'autre il ne nous reste que des fragments. Cette époque
fut l'àge d'or de la tragédie latine, et cependant elle conte-
nait déjà un germe puissant de décadence. En effet , les
combats de gladiateurs s'étaient établis conjointement
avec les théâtres, et leur firent dès l'origine une concur-
rence funeste : comment un peuple d'humeur belliqueuse
et farouche eût-il senti vivement les délicatesses des fic-
tions théâtrales, et goûté longtemps le plaisir purement
intellectuel d*une représentation tragique, quan i on l'ac-
coutumait aux jouissances bien autrement acres et fortes
que donne la vue du sang humain coulant sur l'arène?
Les classes élevées se laissèrent elles-mêmes gagner à
cette contagion. Ni Asinius Pollion , tant vanté par Ho-
race {OdeSf II, 1 ), ni Varius avec son Thyeste, ni Ovide
avec sa Médée , ne ressuscitèrent la tragédie, morte avec
Attius. Simples exercices d'esprits lettrés, leurs œuvres
ne parurent pas sur la scène, ou n'y furent pas écoutées.
Sénèque ne fut pas plus heureux : il emprunta quelaues
sujets à la Grèce, mais moins pour composer de véritables
tragédies conformément aux règles établies, que pour en-
fermer dans un cadre d'un nouveau genre ses tirades
stoïciennes. Philosophe dogmatique un jour, il rédigeait
en prose un traité De la Colère; versiQcateur dramatique
le lendemain, il mettait en ïambes, dans la bouche d'une
Cassandre ou d'un Tbyeste, des préceptes analogues.
Aussi , dans ces œuvres d'un goût ^té moins encore par
le siècle que par le ^spectacle des cruautés et des turpi-
tudes de la cour, les dialogues, à part quelques situations
fortes et vraiment tragicjues, ne sont que des assauts de
bel esprit; les descriptions superflues y succèdent aux
déclamations ampoulées, et les pensées subtiles aux lieux
communs; tous les personnages sont transfigurés en stoï-
ciens, ou plutôt sont copiés tour à tour sur Sénèque et
sur Néron , quelquefois sur l'un et l'autre à la fois. Ta-
cite, dans son Dialogtie des Orateurs, introduit un der-
nier représentant de la tragédie romaine, Maternus, dé-
fenseur ardent et inspiré de la poésie, champion passionné
des Muses contre l'interlocuteur Aper, qui avait dénigré
leur culte au nom de l'éloquence; mais, s'il mérite d'être
mentionné, c'est plutôt pour avoir bravé la niort en com-
posant son drame de Caton,q\ie pour la valeur de son
œuvre, aujourd'hui inconnue et oubliée (K Latins —
Littérature). V. Boissier, Le poète Attius, Etude sur la
tragédie latine pendant la République, Paris, 1857, in-8».
TRAGÉDIE CHEZ LES MODERNES.
L Tragédie en France, — C'est l'école aventureuse et
vM rmatrice de Ronsard qui restaura U tragédie. Seule-
ment, Jodelle, le membre de la Pléiade qui s'était charge
de remettre au jour les tragiques anciens, ne nous ren-
dit qu'un fantôme , une ombre du drame grec. Rien ne
manquait à sa Cléopâtre de tout ce qui s'emprunte :
l'appareil, le dialogue, les chœurs, et même le sacrifice
du bouc ; mais rien ne s'y trouvait de ce qui ne s'em-
prunte pas, les caractères, la passion, la vie. Garnier,
qui fit oublier Jodelle, suivit ses errements : il imita
aussi les Grecs, mais à travers Sénèque, se jeta dans des
monologues d'une longueur démesurée, da.ns des des-
criptions minutieuses, dans des récits plus épiques que
dramatiques ; en même temps, comme Ronsard, il parla
grec et latin en français, et, faute d'un théâtre public, il
n'eut pas, pour l'engager et le retenir dans la bonne voie,
les applaudissements salutaires ou les sévérités de la foule.
Son meilleur titre sera d'avoir élargi le cercle des sujets
dramatiques : il emprunta une Antigone à Sophocle,
mais composa aussi une Bradamante, tirée peut-être de
l'Arioste ; il fraya la route à Corneille, en prenant pour
héroïnes Porcie, la femme de Brutus, et Comélie, la
veuve de Pompée ; il devança Racine par son drame de
la Juive ; il donna sur la scène française le premier mo-
dèle des imprécations trag!(iues, et sa Cornélie, qui mau-
dit les assassins de Pompée, a peut-être inspiré celle de
Corneille. — Hardy commença, assez grossièrement du
reste, l'éducation du public. Vers IGOO, une troupe d'ac-
teurs s'établit à Paris, sur un théâtre autorisé, dans le
quartier du Marais, et invita à ses représentations , non
plus les lettrés et les savants officieux, mais quiconque
put payer sa place au parterre. Pendant vingt ans, avec
le nombre énorme de cinq ou six cents pièces de tout
genre, de tout mérite, dont les meilleures étaient au plus
médiocres, Hardy soutint cette troupe : durer était le
grand point. Bientôt Théophile apporta sa Thisbé, Mairet
sa Sylvie, sa Sophonisbe surtout , où l'on vantait l'obser-
vation scrupuleuse des règles aristotéliques. Tristan , et
principalement Rotrou, futur auteur du VVenceslas et du
Saint-Genest , pièces qui vivent encore par quelques
inspirations vraiment tragiques, achevèrent de préparer
l'avènement de P. Corneille. Celui-ci , qui cherchait sa
voie depuis 1629, après avoir préludé par quelques co-
médies d'essai et la tragédie de Médée, donna enfin . en
1636, l'immortelle « merveille du Cid, »
Dans les tragédies de Corneille, ce qui charme et sub-
jugue, c'est la grandeur et l'héroïsme des principaux per-
sonnages; et l'efi'et général est une admiration bienfai-
sante pour les hautes vertus dont la nature nous a faits
capables. Cette élévation suit une marche ascendante
depuis le Cte{ jusqu'à Polyeucte : il est beau que Rodrigue
et Chimène fassent taire leur amour devant l'honneur de
la famille ; il est plus beau que les aff'ections de la famille
soient sacrifiées dans Horace à l'honneur de la patrie ; à
son tour, cet héroïsme est surpassé par celui d'Auguste,
qu'aucun devoir n'invitait à la clémence, que l'intérêt de
l'Empire autorisait, obligeait peut-être à se montrer
sévère, et qui , « maître de lui comme de l'univers »,
pardonne à Cinna. son assassin. Qu'y a-t-il de supérieur
à cette générosité? Rien, sinon l'héroïsme de Polyeucte,
et la victoire, sur tous les attachements terrestres, même
les plus purs et les plus saints, d'une àme pleine de la
grâce divine et de l'enthousiasme du martjnre. — Le goût
trop peu sûr de Corneille lui a fait dépasser le but lors-
qu'il choisit le sujet de Théodore, où la délicatesse mo-
rale et la pudeur ée l'auditoire sont tenues à la g^ne et
dans une inquiétude étrange. Corneille fut un génie sin-
gulièrement inégal, et la critique est forcée de recon-
naître que , sur plus de trente pièces qu'il a composées,
quelques-unes seulement sont des chefs-d'œuvre ; il crut
trop souvent qu'une intrigue industrieusement conduite
valait en intérêt la peinture des caractères, et l'on doit
reconnaître que, chez lui , la grandeur dégénère parfois
en emphase, l'éloquence en déclamation, le raisonnement
en subtilités sentencieuses; que des idées d'ordre co-
mique s'y mêlent aux plus nobles pensées; qu'enfin il a
payé tribut à la mode de son siècle en affadissant de ga-
lanteries déplacées le langage héroïque de ses vieux Ro-
mains. Ces défauts, moins le dernier, tenaient d'abord à
la pente naturelle de son esprit et de son imagination,
que la fausse grandeur semble avoir facilement séduite,
puis aux modèles espagnols qu'il imita le plus complai-
samment , parce qu'il y avait entre leur génie et le sien
comme une affinité secrète, Guilhem de Castro et Lope
de Vé^ parmi les modernes, Sénèque et Lucain parmi
les Anciens. Quelque chose toutefois atténue ces fai-
blesses : il ne faut pas oublier que Corneille n'avait eu
d'autres guides que les ébauches informes de ses prédé-
TRA
1736
TRA
eMseurt ou leurs calques froids et décolorés de la tra-
gédie antique, qu*il eut Téritablement à créer son art, et
que^ du premier coup, par la seule force du génie, il le
porta à la perfection ; que telle fut la variété de ses con-
ceptions, qu*il offrit à la fols le modèle de toutes les
œuvres thé&txales, de la tragédie dans ses premiers ou-
vrages, de la comédie dans le Menteur, du drame pro-
prement cUt dans Nicomède, de la tragédie bourgeoise
dans Don Sanche; et qu'enfin la gloire des grands hommes
se doit mesurer aux moyens dont ils ont disposé pour
l'acquérir.
On signale d'ordinaire entre Corneille et Racine deux
différences principales d'où découlent toutes les autres :
l'une a sa source dans les tendances particulières de leur
génie, l'autre dans la façon dont ils ont conçu le drame.
Corneille avait incliné à représenter le côté noble de
l'àme humaine, Racine voulut peindre les hommes tels
qu'ils sont ; Corneille avait imité de préférence les Espa-
gnols, Racine aima mieux chercher ses modèles parmi les
tragiques grecs. Ces dispositions allaient renouveler la
tragédie française. — Puisque Racine aspirait à mettre
sur la scène l'homme après le héros, la vérité commune
après la vérité d'exception, le triomphe de la passion
après celui du devoir, il était naturel qu'il recherchât
surtout les sujets dont l'am&ar est le fond, parce qu'il n'y
a pas, en général , de sentiment qui remplisse autant la
vie humaine, et dont la peinture puisse intéresser et tou-
cher plus d'esprits. Et s'il est vrai que la passion exerce
particulièrement son empire sur le cœur de la femme, il
était inévitable que, sur ce nouveau théâtre, les hommes
cessassent de jouer les principaux rôles. Chimène, Ca-
mille et Pauline exceptées, les héroïnes de Corneille ont
une àme toute virile. En effet, selon la remarque d'un
critique éminent. Corneille « esprit plus vigoureux que
délicat , plus subtil que pénétrant , n'avait pas la curio-
sité tendre et patiente qui nous fait lire au fond de ce
système de mobilité et de persévérance, de dissimulation
et d'abandon , d'amour et de haine, d'ambition et de dé-
vouement que recèle le cœur d'une femme. » Cette ana-
lyse est*, au contraire, le triomphe de son rival , que sa
propre sensibilité éclairait sur tous ces mystères. Voilà
pourquoi il a peint avec autant de variété que de profon-
deur, danp Hermione, Roxane et Phèdre, l'amour sensuel
et violent; dans Iphigénie, Monime, Junie et Bérénice,
l'amour innocent, ou du moins voilé, timide et contenu;
dans Ândromaque, Clytemnestre et Josabeth, la ten-
dresse maternelle; dans Âgrippine et Âthalie, la passion
du pouvoir chez les femmes; dans Esther enfin, les
alarmes d'un cœur en qui le dévouement à la patrie
Juive se confond avec la crainte et l'amour de Dieu.
Aussi, qu'on écoute les héros de Corneille et les hé-
roïnes de son émule, et que l'on compare leur langage :
les uns ne parlent , pour ainsi dire, que par sentences,
et mettent en maximes les règles du devoir qui dicte
leur conduite; les autres, dominées par la passion, en re-
produisent dans leurs discours tous les mouvements
divers, l'ivresse de l'espérance, l'emportement de la fu-
reur et de la jalousie, les agitations, les inquiétudes, les
défaillances, le désespoir. Corneille avait subjugué l'ima-
Î;i nation ; Racine toucha les cœurs ; l'un avait produit
'admiration , l'autre produisit l'émotion et arracha des
larmes. Les personnages de Corneille, vainqueurs de la
gassion, recevaient le salaire de leur triompne ; ceux de
lacine, pour avoir succombé, périrent ou perdirent leur
raison. Chaque thé&tre eut ainsi sa moralité appropriée à
son auditoire : Corneille écrivait pour les esprits indé-
pendants et fiers de la Fronde ; Racine, pour les courti-
sans assouplis et galants de Louis XIV. — La forme de
leurs drames n'offrait pas moins de différence : sur les
traces des Espagnols, Corneille avait penché de plus en
plus vers les tragédies où les situations font les carac-
tères, où la complication des événements se substitue à
la peinture des passions; sur les traces des Grecs, d'Eu-
ripide en particulier. Racine demeura fidèle au système
dramatique où les caractères font les situations, où l'ana-
lyse des sentiments tient la place des incidents, où de
cin^ mots : Invitiu invitam Titus Berenicen dimisit ,
« Titus, malgré lui , malppré elle, con^dia Bérénice, » on
tire une tragédie. Euripide lui fournit trois sujets : An-
dromaque, Iphigénie, et Phèdre ; il ne les imita qu'en les
transformant pour les accommoder à l'esprit de son siècle,
et il réalisa pour sa part l'idéal que la littérature pour-
suivait depuis la Renaissance : l'harmonieux accord de la
forme antique avec les idédà modernes. On a' pu lui re-
procher avec raison de convertir ses personnages grecs
en contemporains de Louis XIV; mais la mauvaise foi
seule Itd refuserait le mérite d'avoir, sous llnspiratiov
du christianisme, singulièrement épuré et ennobli les
données de son modèle : la chaste fidélité d'Ândromaqae
au souvenir de son premier époux, la touchante résigna-
tion d'Iphigénie, moins dramatique, si Ton veut, que les
pleurs et les regrets de l'Iphigénie antique, enfin le sen-
timent profond que Phèdre a de sa faute^ les remords
Su'elle éprouve de ses « honteuses douleurs », ce sont là
es vertus chrétiennes qui communiquent aux imitations
de Racine autant d'originalité que d'élévation.
Quand on passe aux tragiques du xviii* siècle, on
est tenté de croire que le génie même de Racine a
porté malheur à la tragédie. L'incomparable beauté de
son théâtre avait si fortement saisi les imaginations, que
tous les poètes y voyaient le type de la perfection. Ils
imitèrent donc le maître avec une aveugle et déplorable
obstination. Le fond de ses œuvres avait été la peinture
de l'amour; l'amour devint la règle fondamentale de
notre théâtre. Il avait débuté par une exposition , mêlé
à l'action les récits, donné à ses personnages une dignité
royale, à ses dialogues une noblesse soutenue; ses habi-
tudes furent désormais des lois. Il avait demandé plu-
sieurs de ses sujets à Euripide; on traduisit et défigura
les Grecs. Athalie, comme la Pauline de Corneille, avait
eu un songe; les songes furent en' possession de la mode.
Tel est le caractère commun que présentent, dans la di-
versité de leur génie, les poètes dramatiques depuis la
mort de Racine jusqu'à la Révolution. Et si parfois « un
homme de talent , sorti de la foule des imitateurs, entre-
voyait quelques effets tragiques dans la vérité de l'his-
toire, ou dans la libre hardiesse d'un théâtre étranger, il
les ramenait aux conventions de notre scène, et, au mi-
lieu même d'une pensée originale, il évitait toute nou-
veauté dans les formes extérieures du drame. » C'est le
reproche qu'on peut adresser à La Fosse, l'auteur de
Manlius, qui consacra un incontestable talent à convertir
en tragédie romaine des vieux âges uu drame moderne
et vénitien d'Otway ; à Lagrange-Chancel , le propre
élève de Racine, qui épuisa sa faible sève à dénaturer
des pièces antiques; à Crébilloh même, qui, laissant,
comme il disait , le ciel à Corneille et la terre à Racine,
et se jetant à corps perdu dans l'Enfer, sut tirer de la
terreur quelques effets nouveaux; à La Motte enfin, qui
passa sa vie à protester contre les usages établis, contre
les trois unités, les confidents, les monologues, les vers
mêmes, et à respecter gauchement dans le corps de ses
œuvres ce qu'il attaquait dans la préface. Un homme de
génie devait seul opérer quelques-uns des changements
dont 'La Motte n'avait eu que la théorie, et rajeunir la
scène ; ce fut Voltaire.
Voltaire a quelques rapports de resseo'i^lance lointaine
avec Euripide. Inférieur à ses deux devanciers, comme
Euripide à Eschyle et à Sophocle, il fut pourtant, comme
lui , novateur ; il eut son originalité dramatique et son
idéal. Chez Corneille et Racine, le devoir et la passion
avaient lutté et vaincu tour à tour, selon le point de vue
particulier du poëte ; et l'un et l'autre spectacle avait eu
son enseignement moral : Voltaire cessa de mettre la pas-
sion aux prises avec le devoir ; il la peignit , le plus sou-
vent du moins, en elle-même, et ne chercha d'autre
effet que d'émouvoir les âmes. Ainsi , pareillement à la
Fatalité, qui , toute-puissante chez Eschyle, puis associée
dans Sophocle aux passions humaines, avaft fini par
jouer avec Euripide le moindre rôle, le principe moral ,
triomphant dans Corneille, combattu par la passion dans
Racine, apparut à peine sur le théâtre de Voltaire; de
telle sorte que la tragédie française a été moins morale
à mesure qu'elle est devenue plus pathétique; si ce
n'était pas un progrès, c'était du moins une transforma-
tion et un acte d'indépendance. — Euripide avait con-
verti parfois ses personnages en disciples de Socrate;
Voltaire eut le tort aussi de faire de la scène une tribune,
et de ses héros des philosophes , bien i)lus , des révolu-
tionnaires avant la Révolution. Il fut mieux inspiré dans
une autre innovation : il osa demander à tous les siècles
ses sujets tragiques, à l'antiquité, au moyen &ge, aux
temps modernes ; il promena ses spectateurs sur toutes
les terres et sur toutes les mers, de la Chine à l'Amé-
rique, du palais de Sémiramis au sérail d'Orosmane; il
parcourut capricieusement le champ de l'histoire ou le
domaine illimité de l'imagination, tantôt sans guide,
tantôt à la suite de l'italien Maffei , dont il imita la Me-
rope, tantôt sur les traces de Sophocle ou de Shakspeare,
qu'il eut le tort de mal juger, de mal comprendine, de
mal imiter, et dont il n'atteignit point la profondeur, le
naturel et la vérité; enfin, dans l'intention systématique
TRA
1737
TRA
d'enhardir et d*an1mer la scène, il multiplia les effets du
théâtre, précipita inaction, et, pour arriver plus sûre-
ment aa cœur, ne dédaigna pas d'intéresser les yeux par
Tappareil et les pompes de la représentation.
Tant de hardiesses et de nouveautés n^affranchirent pas
Voltaire des préjugés qui devaient le moins Tasservir.
En ce qui concernait les formes extérieures du drame,
il resta le disciple timide de Racine; aussi manque-t-il
très-souven* de couleur locale. Ses successeurs crurent
bien faire de*suivre son exemple, et Ton ne voit pas que
le public ait songé Jamais à se récrier contre cette servi-
lité étrange, qui de plus en plus écartait de la vérité la
tragédie française. On ne s'imaginait pas qu'on pût faire
autrement, et, dans ce siècle de doute et de polémique,
où la philosophie montait sur le théâtre pour attaquer
publiquement toutes les traditions, la tradition du théâ-
*tre elle-même était respectée jusqu'à la superstition. Les
formes transmises par le xvii* siècle étaient devenues
comme un nouveau lit de Procuste où l'on forçait d'entrer
tous les sujets dramatiques, à quelque source qu'ils
eussent été puisés ; heureux encore lorsqu'à l'imitation
de Racine on n'ajouta point par surcroît l'imitation de
Voltaire, et que, dans l'étemel cadre des trois unités, on
n'amalgama point bizarrement, aux applaudissements
d'un parterre aveuglé par la mode, la philosophie et
l'amour! C'est sur ce modèle que travaillèrent, avec des
talents et des succès divers, Saurin {Spartaciu) , Lemierre
(Guillaume Tell)^ Guimond de La Touche {Iphigénie en
Tauride)^ 0e Belloy {le Siège de Calais). La Harpe, en
traduisant le PhilocUte de Sophocle, essaya de reproduire
plus complètement sur la scène moderne un modèle an-
tique; le succès ne répondit pas à l'intention. Ducis même,
génie vigoureux, et talent très-incomplet, ne sut pas faire
acte d'indépendance, et continua d'étreindre dans le moule
français ses imitations de la Grèce et de Shakspeare. La
Révolution, qui semblait vouloir ne rien épargner du
passé, laissa pourtant subsister le respect des règles pré-
tendues classiques; alors naquirent les tragédies répu-
blicaines, véritables pamphlets en cinq actes, remplies
d'allusions propres à flatter les passions de l'époque :
Charles IX, Henri VIII, la Mort de Calas ^ Gracckus,
Fénelon, Timoléùn, de M.-J. Ghénier; Marius à Min-
tûmes et Lucrèce, d'Arnault Toutes ces pièces ont eu le
sort des œuvres écrites pour un jour, et n'ont pu sur-
vivre aux circonstances qui les avaient inspirées; une
seule, bien que froide et sans animation , le Tibère de
Ghénier, a été sauvée de l'oubli par des beautés excep-
tionneUes de style et de situation. Lemercier, Luce de
Lancival, Raynouard, Ancelot, Banur-Lormian et Jouy,
avec des imitations de l'antique telles qa^Agamemnon et
Hector, ou des œuvres de fantaisie comme Joseph, ou des
drames historiques comme les Templiers et Louis IX,
ou des tragédies d'allusion comme 5y//a, s'étaient dis-
puté la faveur populaire, lorsque éclata la guerre des
Classiques et des Romantiques ( K. ces mots). Quelques
hommes de talent, G. Delavigne sous la monarchie de
183U, et, de notre temps, MM. Ponsard et Legouvé, sem-
blent avoir eu pour rôle de réconcilier les deux écoles en
fondant ensemble les deux systèmes. Ils ont brisé réso-
lument avec les prescriptions trop rigoureuses et trop
absolues des Classiques, mais ils ont conservé la tragédie
qu'on avait proclamée déchue; seulement, pour la ra-
jeunir, ils ont emprunté aux Romantiques plus d'indé-
pendance dans la conduite du drame, plus de hardiesse
dans les situations, plus de liberté dans l'allure, plus de
simplicité et de familiarité dans le style. On peut croire
qu'avec ces conditions nouvelles la tragédie survivra, à
moins de prétendre que les Enfants d'Edouard , Manno
Faliero, Louis XI, de G. Delavigne, la Lucrèce de H. Pon-
sard et la Médèe de H. Legouvé, ne peuvent être appelées
tragédies ; que, le tragique et le comique, le noble et le
bouffon, l'héroique et le bas se heurtant sans cesse et
partout dans la réalité, le goût se refuse à permettre
qu'on détache l'un de l'autre dans aucune peinture idéale
de la vie ; qui» la nature ne créera plus à l'avenir aucun
poète capable de trouver, soit en histoire, soit dans les
profondeurs de son imagination, et de traiter avec génie
auelque scène tragique ; et qu'enfin la source de la pitié,
ae la terreur, de toute émotion noble, est tarie dans l'âme
humaine. Si l'homme naît sensible au spectacle des in-
fortunes ou des grandeurs même fictives de l'homme, et
que les larmes ou l'admiration lui soient aussi naturelles
que le rire, il est difficile de contester que la tragédie
doive durer aussi longtemps que la comédie. Toutes deux
flattent un instinct de notre cœur, toutes deux répondent
à un besoin de notre nature.
n. Tragédx» che» les autres peuples, — n est si vrai
que la tragédie, prise comme peinture des passions hu-
maines, comme représentation de la vie dans ce qu'elle
a d'héroïque et d'attendrissant , est une des formes na-
turelles de l'inspiration poétique, qu'on l^'-retrouve chez
tous les peuples modernes où les Lettres ont été culti-
vées. Les Italiens, les Espagnols, les Anglais et les Alle-
mands ont eu, comme nous, leur tragédie, mais sans la
calquer, comme nous, sur des modèles étrangers. Ce n'est
pas (|[ue leur théâtre n'offre en aucun temps nulle trace
d'imitation : à l'époque de la Renaissance, les Espagnols
dressaient , en face de leur scène nationale, une scène
réservée aux œuvres reproduites de l'Antiquité, et, chez
les Italiens, le Trissin composait des drames dans le
goût des Grecs, comme Alfleri, deux siècles plus tard,
composait les siens dans le goût français ; sous les der-
niers Stuarts, les Anglais préférèrent aux drames de
Shakspeare des pièces copiées sur celles que Ghai'les n
et son entourage avaient vu jouer à la cour de Louis XIV,
et, au xviii* siècle, conformément à nos habitudes, ils
acceptaient comme un principe fondamental la sépara-
tion , dans le drame, du sérieux et du plaisant. Il n'est
pas jusqu'à Wieland, le Voltaire de l'Allemagne, qui n'ait
subi l'ascendant des lettres françaises, et écrit quelques
tragédies à demi classiques. Toutefois ces imitations de
l'antique ou du moderne n'ont pas empêché ces peuples
d'avoir leur tragédie propre et sortie, pour ainsi dire,
du sol même. Lope de Véga, Shakspeare, Schiller et
Gœthe en sont les plus illustres représentants.
On peut signaler, entre la tragédie telle que l'ont géné-
ralement conçue ces grands hommes et la tragédie fran-
çaise , deux différences principales, dont l'une tient au
choix des sujets, et l'autre à la façon de les traiter. Le
plus souvent, les poètes français ont emprunté leurs
sujets à l'histoire ^ecque et à l'histoire romaine; fort
peu les ont tirés de l'histoire de France. Sans dédaigner
les ressources que leur offraient les âges antiques , les
tragiques étrangers ont puisé de préférence leurs inspi-
rations soit dans les vieilles chroniques de leur pays,
soit dans les légendes mystérieuses et terribles du moyen
âge, soit dans les événements les plus dramatiques des
temps modernes, soit enfin dans le domaine du roma-
nesque, du fantastique et de la sorcellerie. Qui ne se
rappelle la Jeunesse du Cid, le Roi Léar, Bornéo et
Juliette, Marie Stuart , la trilogie de Walstein, le Comte
d*Egmont, Macbeth, etc.? L'amour est le fond obligé de
toute tragédie française : ils ont composé des tra^dies
sans amour, telles que Coriolan , et la Mort de César,
Des rois et des reines, des princes et des princesses,
semblent les seuls personnages dignes de figurer avec
leurs confidents sur notre scène : ils ont introduit sur la
leur des fous, des geôliers, des nourrices, quelquefois
une foule entière, pêle-mêle avec les héros et les hé-
roïnes de noble race. Racine et ses successeurs se seraient
bien gardés de vouloir unir le tragique et le comique :
chez les tragiques étrangers, les impuretés grossières et
les bouffonneries d'un lago succèdent aux poétiç^ues ac-
cents d'amour d'un Othello. Telle est la vie, dit-on ; et
l'on ajoute que le drames grecs présentent plus d'une
fois ce mélange, témoin VAlceste d'Euripide, et même
VAntigone de Sophocle.
Plus indépendants, plus hardis et plus variés dans
leurs sujets, les tragiques étrangers se sont également
affranchis des entraves que s'étaient librement imposées
leurs rivaux français dans l'ordonnance et la conduite de
leurs pièces: lésons, comme Shakspeare et Lope de
Vé^, ne connaissaient même pas les trois unités, excel-
lente ndson pour ne pas les mettre en pratique; les au-
tres, comme Goethe et Schiller, qui connaissaient la
théorie classique, n'en ont pas pns pour cela plus de
souci. — Ce n^est pas tout : on sait l'idée que Racine se
faisait de la tragédie ; à ses yeux, l'intérêt et la perfec-
tion du drame consistaient avant tout dans la peinture
vraie des passions et dans le développement habilement
ménagé des caractères : aussi , combien les incidents tien-
nent peu de place dans son théâtre! Les artistes dont nous
parlons ont représenté comme lui les passions humaines ;
mais ils ne se sont pas interdit, quelque inférieur et quelque
accessoire qu'il pût paraître à l'école classique^ cet autre
genre d'agrément que répandent sur une pièce fes coups
de surprise précipités , la variété des situations, la mul-
tiplicité des changements et des péripéties. Une analyse
pénétrante, pathétique €\ progressive de l'amour sous
toutes les formes ou de l'aiîibition, tel semble être l'idéal
de Racine; les autres ne cherchent pas moins à plaire
pur l'intérêt des événements, par le mouvement et par la
TRA
1738
TRA
Tivadté de raction. De là vient qae, pour être goûtés, ils
)*ont pas besoin d'un parterre aussi -délicat , instruit et
ehoisi que le poète favori de Louis XIV et de sa cour.
Nous avons dit qu*à certaines époques la littérature
dramatique des peuples modernes avait subi rinfluence
de la nôtre ; /'effet a été réciproque. Déjà Corneille , an
xvii* siècle, après avoir pris le Cid aux Espagnols , avait
fini par adopter leur système dramatique; ce qui Tin-
duisit bientôt, malheureusement pour sa gloire, à croire
que la tragédie la plus industrieusement embrouillée
était aussi la plus parfaite. Au xviu* siècle, Voltaire inju-
riait Shakspeare; mais il lui emprunta sans scrupule
une bonne partie de ses sujets, et lui fut ainsi redevable
peut-être de ses plus heureux coups de théâtre, comme
de ses plus beaux et de ses plus populaires succès. Ducis,
à son tour, imita le poète anglais avec plus de respect et
autant de profit. Enfin, de notre temps, c*est dans le
théâtre de Shakspeare, de Schiller et de Goethe, que les
Romantiques ont trouvé leurs arguments les plus solides
et leurs meilleures armes pour attaquer les doctrines par
trop rigoureuses des Classiques, et contraindre la trar
gédie racinienne à se transformer; transformation peu
regrettable, si, comme nous le pensons, elle doit ayoir
pour effet de sauver la tragédie elle-même [V. Allemande,
Anglaise, 1!)spagnolb, Italienne — Littérature). A; H.
TRAGÉDIEN, acteur de tragédie, chez les Modernes.
On donne spécialement ce nom aux artistes qui jouent
les premiers rôles. Pour devenir un grand tragédien, il
faut un génie naturel, de Pinstruction, beaucoup d'étude,
et de la sensibilité, a Selon moi, dit l'illustre tragL'dien
Talma, la sensibilité n'est pas seulement cette faculté que.
l'acteur a de s'émouvoir facilement lui-même, d'ébranler
son être au point d'imprimer à ses traits, et surtout à sa
voix, cette expression, ces accents de douleur qui viennent
réveiller toute la sympathie du cœnr, et provoquer les
larmes de ceux qui l'écoutent; J'y comprends encore l'effet
qu'elle produit, l'imagination dont elle est la source, non
cette imagination qui consiste à avoir des souvenirs tels
que les objets semblent actuellement présents, ce n'est pro-
prement là (^ue la mémoire; mais cette imagination qui,
créatrice, active, puissante, consiste à rassembler dans un
seul objet fictif les qualités de plusieurs objets réels; qui
associe l'acteur aux inspirations du poète, le transporte à
des temps qui ne sont plus, le fait assister à la vie des per-
sonnages historiques, ou à celle des êtres passionnés créés
par le génie; lui révèle comme par magie leur physiono-
mie, leur stature héroïque, leur langage, leurs habitudes,
toutes les nuances de leur caractère, tous les mouvements
de leur àme, et Jusqu'à leurs singularités spéciales. J'ap-
pelle encore sensibilité cette faculté de l'exaltation qui
agite l'acteur, 8*empare de ses sens, l'ébranle Jusqu'à
r&me, et le fait entrer dans les situations les plus tra-
giques, dans les passions les plus terribles, comme si
elles étaient les siennes propres.
« L'int«IIigence, qui procède et n'agit qu'après la sen-
sibilité, juge des impressions que nous fait éprouver
celle-ci; elle les choisit, elle les ordonne, elle les soumet
à son calcul. Si la sensibilité fournit les objets, l'intelli-
gence les met en œuvre. Elle nous aide à diriger l'emploi
de nos forces physiques et intellectuelles, à Juger des
rapports et de la liaison qu'il y a entre les paroles du
poète et la situation ou le caractère des personnages, à
y ajouter quelquefois les nuances qui leur manquent ou
que les vers ne peuvent exprimer, à compléter enfin leur
expression par le geste et la physionomie... Comme toutes
nos émotions ont avec nos nerfs un rapport intime, il
faut que le système nerveux soit chez l'acteur tellement
mobile et impressionnable, qu'il s'ébranle aussi facile-
ment que la harpe éolienne résonne au moindre souffle
de l'air qui la touche. Si l'acteur n'est pas doué d'une
sensihilité au moins égale à celle des plus sensibles de
ses auditeurs, il ne pourra les émouvoir que faiblement;
ce n'est que par un excès de sensibilité qu'il parviendra
à produire des impressions profondes, et à émouvoir
même les âmes les plus froides. La force qui soulève ne
doit-elle pas avoir plus de puissance que celle qu'on veut
ébranler?...
(t Pour former un grand acteur, tel que Lekain, il faut
la réunion de la sensibilité et de l'intelligence. Chez l'ac-
teur qui possède ce double don de la nature, il se fait un
genre de travail particulier : d'abord, par des études ré-
pétées, il essaye son àme aux émotions, et sa parole
aux accents propres à la situation du personnage auMI a
à représenter. Il va de là au théâtre exécuter non-seule-
ment les premiers essais de ses études, mais se livrer
encore à tous les élans spontanés de sa sensibilité^ à tous
les mouvements qu'elle lui su^re à ton insu. Qae faiu
il alors? Pour que ces inspirations ne soient pas perdues,
sa mémoire recherche dans le repos, lui rappelle les in-
tonations, les accents de sa voix, l'expresKÎon de ses
traits, de son geste, le degré d'abandon auquel il s*est
livre, enfin tout ce qui, dans ces mouvements d exalta-
tion, a concouru à l'effet qu'il a pn>dtiit. Son intelligence
alors soumet tous ces moyens à- la révision, les épure,
les fixe dans son souvenir, et les conserve en dépôt, pour
les reproduire à sa volonté dans les représentations sui-
vantes. Souvent même, tant ces impressions sont fugi-
tives, faut-il qu'il répète, en rentrant dans la coulisse,
la scène qu'il vient de Jouer, plutôt que celle qu'il va
jouer. Par cette sorte de travail, l'intelligence accumule
et conserve toujours les créations de la sensibilité. C'est
par là qu'au bout de vingt ans (il faut au moins cet
espace de temps) une personne destinée à avoir un beau
talent peut enfin offrir au public des rôles, à peu de
chose près, parfaitement conçus et joués dans toutes leurs
parties. Telle a été la marche qu'a constamment suivie
Lekain, et que doivent suivre tous ceux qui ont l'ambition
de marcher sur ses traces. » (Talma, Réflexions sur Le-
kain et sur l'art théâtral, p. 45 et suiv., in-18.)
On peut considérer tout ce que Talma vient de dire
comme sa propre confession, au moins autant que comme
la tradition sur Lekain ; car, étant né en 1703, il n'avait
sans doute pas connu Lekain, mort en 1778. Le fragment
suivant achèvera de faire connaître l'art du tragédien ; c'e^t
un Jugement, ou plutôt ce sont des souvenirs de M"**^ de
Staël sur Talma dans toute la plénitude et l'a perfection
de son talent, juste après cette période de vingt ans quMl
jugeait lui-même nécessaire à Téducation d'un acteur
tragique. M">* dQ Staël le vit souvent dans ses plus beaux
rôles, et l'a Jugé avec un sentiment de l'art aussi vif
que profond. Elle s'exprime ainsi :
« Quand il parait un homme de génie en France, dans
quelque carrière que ce soit, il atteint presque toujours
à un degré de perfection sans exemple; car il réunit l'au-
dace qui fait sortir de la route commune, au tact du bon
goût qu'il importe tant de conserver, lorsque l'originalité
du talent n'en souffre pas. Il me semble donc que Talma
peut être cité comme un modèle de hardiesse et de me-
sure, de naturel et de dignité. Il possède tous les secrets
des arts divers; ses attitudes rappellent les belles statues
de l'antiquité; son vêtement, sans qu'il y pense, est drapé
dans tous ses mouvements, comme s'il avait eu le temps
de l'arranger dans le plus parfait repos. L'expression de
son visage, celle de son regard, doivent être l'Aude de
tous les peintres. Quelquefois il arrive les jeux à demi
ouverts, et tout à coup le sentiment en fait Jaillir des
rayons de lumière qui semblent éclairer toute la scène.
« Le son de sa voix ébranle dès qu'il parle, avant que
le sens même des paroles qu'il prononce ait excité l'émo-
tion. Lorsque dans les tragédies il s'est trouvé par ha-
sard quelques vers descriptifs, il a fait sentir les beautés
de ce genre de poésie, comme si Pindare avait récité
luf-même ses chants. D'autres ont besoin de temps pour
émouvoir, et font bien d'en prendre; mais il y a dans la
voix de cet homme Je ne sais quelle magie qui, dès les
premiers accents,, réveille toute la sympathie du cœur.
Le charme de la musique, de la peinture, de la scnlpture,
de la poésie, et par-dessus tout du langage de Tànie,
voilà ses moyens pour développer dans celui qui l'éoDute
toute la puissance des passions généreuses et terribles.
« Quelle ^connaissance du cœur humain il montre dans
sa manière de concevoir ses rôles! Il en est le second
auteur par ses accents et par sa physionomie. Lorsque
Œdipe raconte à Jocaste comment il a tué Laïus, sans le
connaître, son récit commence ainsi : Tétais jeune et su-
perbe; la plupart des acteurs, avant lui, croyaient devoir
jouer le mot superbe, et relevaient la tête pour le si-
gnaler : Talma, qui sent que tous les souvenirs de l'or-
gueilleux Œdipe commencent à devenir pour lui des
remords, prononce d'une voix timide ces mots faits pour
rappeler une confiance qu'il n'a déjà plus. Phorbas arrive
de Corinthe au moment où Œdipe vient de concevoir des
craintes sur sa naissance : il lui demande un entretien
secret. Les autres acteurs, avant Talma, se hâtaient de
se retourner vers leur suite, et de l'éloigner avec un geste
majestueux : Talma reste les yeux fixé sur Phorb^; il
ne peut le perdre de vue, et sa main agitée fait un signe
pour écarter ce qui l'entoure. Il n'a rien dit encore, mais
ses mouvements é^és trahissent le trouble de son àme;
et quand, au dernier acte, il s'écrie en quittant Jocaste :
Oui, La!oa est mon père, et Je tuia votre tUi»
TRA
1739
TRA
•a croit voir s*entr*ouyrir le séjour du Tartare, où le Des-
tin perfide entraîne les mortel"^.
« Dans Andromaque, quand ilcrmione insensée accuse
Oreste d'avoir assassiné Pyrrhus sans son aveu, Oreste
répond :
Et ne m'arez-voua pas
VoiUHaafime, tel, tantôt, ordonné son trépas?
On dit que Lekain, quand il récitait ces vers, appuyait
sur chaque mot, comme pour rappeler àHermione toutes
les circonstances de Tordre qu*il avait reçu d'elle. Ce se-
rait bien vis-à-vis d'un juge; mais quand il s'agit de la
femme qu'on aime, le désespoir de la trouver injuste et
cruelle 9st l'unique sentiment qui remplisse r&ine. C'est
ainsi que Talma conçoit la situation : un cri s'échappe du
cœur d'Oreste ; il dit les premiers mots avec force, et
ceux qui suivent avec un abattement toujours croissant ;
ses bras tombent, son visage devient en un instant p&le
comme la mort, et l'émotion des spectateurs s'augmente
à mesure qu'il semble perdre la force de s'exprimer.
« L& manière dont Talma récite le monologue suivant
est sublime. L'espèce d'innocence qui rentre dans l'&me
d'Oreste pour la déchirer, lorsqu'il dit ce vers :
J*aMaMine à regret un roi que Je révère,
inspire une pitié que le génie même de Racine n'a pu
prévoir tout entière. Les grands acteurs se sont presque
tous essayés dans les fureurs d'Oreste; mais c'est là sur-
tout que la noblesse des gestes et des traits ajoute singu-
lièrement à l'efTet du désespoir. La puissance de la dou-
leur est d'autant plus terrible, qu'elle se montre à travers
le calme même et la dignité d'une belle nature.
« Dans les pièces tirées de l'histoire romaine, Talma
développe un talent d'un tout autre genre, mais non
moins remarquable. On comprend mieux Tacite après
l'avoir vu Jouer le rôle de Néron; il y mani-feste un esprit
d'une grande sagacité; car c'est toujours avec de l'esprit
qu'une âme honnête saisit les symptômes du crime;
néanmoins il produit encore plus d'efTet, ce me semble,
dans les rôles où l'on aime & s'abandonner, en l'écoutant,
aux sentiments qu'il exprime. Il a rendu à Bayard, dans
la pièce de De Belloy {Gaston et Bayard) y le service de
lui ôter ces airs de fanfaron que les autres acteurs
croyaient devoir lui donner : ce héros gascon est rede-
venu, grâce à Talma, aussi simple dans la tragédie que
dans l'histoire. Son costume dans ce rôle, ses gestes
simples et rapprochés, rappellent les statues de cheva-
liers qu'on voit dans les anciennes églises, et l'on s'étonne
qu'un homme qui a si bien le sentiment de l'art antique
sache aussi se transporter dans le caractère du moyen
âge...
« On peut trouver beaucoup de défauts dans les pièces
de Shakspeare adaptées par Ducis à notre théâtre; mais
il serait bien injuste de n'y pas reconnaître des beautés
du premier ordre ; Ducis a son génie dans son cœur, et
c'est là qu'il est bien. Tatma joue ses pièces en ami du
beau talent de ce noble vieillard. La scène des sorcières,
dans Macbeth, est mise en récit dans la pièce française.
II faut voir Talma s'ess:iyer â rendre quelque chose de
vulgaire et de bizarre dans l'accent des sorcières, et con-
server cependant dans cette imitation toute la dignité
que notre théâtre exige.
Par des mots inconnus, ces êtres monstruenz
S'appelaient tour à tour, s'applaudissaient entre eux.
S'approchaient, me montraient avec un ris farouche :
Leur doîRt mystérieux se posait sur lear bouche.
Je leur parle, et dans Tombre ils s'échappent soudAlu;
L'un avec un poignard, Tautre un sceptre à la main.
L'autre d'un long serpent serrait son corps livide :
Tous trois vert ce palais ont pris un vol rapide.
Et tons trois dans les airs, en ftiyant loin de mol,
U'ont laissé pour adieu ces mots : « Tu seras roil •
« La voix basse et mystérieuse de l'acteur, en pronon-
çant ces vers, la manière dont il plaçait son doigt sur sa
bouche, comme la statue du silence, son regard qui s'al-
térait pour exprimer un souvenir horrible et repoussant;
tout était combiné pour peindre un merveilleux nouveau
sur notre théâtre, et dont aucune tradition antérieure ne
pouvait donner l'idée...
« Hamlet est son triomphe parmi les tragédies du
genre étran^r. Les spectateurs ne voient pas l'ombre du
père d'Hamlet sur la scène française, l'apparition se
passe en entier dans la physionomie de Talma, et certes
elle n'en est pas ainsi moins effrayante. Quand, au mi-
lieu d'un entretien calme et mélancolique, tout à coup il
aperçoit le spectre, on suit tous ses mouvements dans
les yeux qui le contemplent, et Tou ne peut douter de
la présence du fantôme, quand un tel re^rd 1 att^ste^
Lorsque, au troisième acte, Hamlet arrive seul sur la
scène, et qu'il dit eu beau vers français le fameux mono-
logue : To be or not to be,
La mort, c'est le sommeil, c'est un réveil peut-fttre.
Peut-être I — Ahl c'est le mot qui glace, épouvanté.
L'homme, au bord du cercueil, par le doute arrêté;
Devant ce vaste ahlme, il se Jette en arribre,
Ressaisit rexistence, et s'attache k la terre.
« Talma ne faisait pas un ^ste, quelquefois seulement
il remuait la tète, pour questionner la terre et le ciel sur
ce que c'est que la mort. Immobile, la dignité de la mé-
ditation absorbait tout son être. L'on voyait un homme,
au milieu de deux mille hommes en silence, interroger
la pensée sur le sort des mortels! Dans peu d'années
tout ce qui était là n'existera plus, mais d'autres hommes
assisteront à leur tour aux mêmes incertitudes, et se
plongeront de même dans l'abîme, sans en connaître la
profondeur. Lorsque Hamlet veut faire jurer à sa mère,
sur l'urne qui renferme les cendres de son époux, qu'elle
n'a point eu de part au crime qui l'a fait périr, elle hé-
site, se trouble, et finit par avouer le forfait dont elle est
coupable. Alors Hamlet tire le poignard que son père lui
commande d'enfoncer dans le sein maternel; mais au
moment de frapper, la tendresse et la pitié l'emportent,
et, se retournant vers l'ombre de son père, il s'écrie :
« Grâce, grâce, mon père! n avec un accent où toutes les
émotions de la nature semblent à la fois s'échapper du
cœur, et, se jetant aux pieds de sa mère évanouie, il
lui dît ces deux vers qui renferment une inépuisable
piété :
Votre crime est horrible, exécrable, odieux ;
Mais il n'est pas plus grand que la bonté des deux.
« Ënfln on ne peut penser â Talma sans se rappeler
Manlius, Cette pièce faisait peu d'effet au théâtre : c'est le
sujet de la Venise sauvée, d'Otway, transporté dans un
événement de l'histoire romaine. Manli us conspire contre
le Sénat de Rome; il confie son secret â Servilius, qu'il
aime depuis quinze ans : il le lui confie malgré les soup-
çons de ses autres amis, qui se défient de la faiblesse de
Servilius et de son amour pour sa femme, fille du con-
sul. Servilius ne peut cacher â sa femme le danger de la
vie de son père ; elle court aussitôt le lui révéler. Man-
lius est arrêté, ses projets sont découverts, et le Sénat
le condamne â être précipité du haut de la roche Tar-
péienne.
« Avant Talma, l'on n'avaitguère aperçu dans cette pièce,
faiblement écrite, la passion d'amitié que Manlius ressent
pour Servilius. Quand un billet du conjuré Rutile apprend
que le secret est trahi, et l'est par Servilius, Manlius
arrive, ce billet â la main ; il s'approche de son cou-
pable ami, que déjà le repentir dévore, et, lui montrant
les lignes qui l'accusent, il prononce ces mots : « Qu'en
dis-tu? M Je le demande âtous ceux qui les ont entendus,
la physionomie et le son de la voix peuvent-ils jamais
exprimer â la fois plus d'impressions différentes? Cette fu-
reur qu'amollit un sentiment intérieur de pitié, cette in-
dignation que l'amitié rend tour âtour plus vive et plus
faible, comment les faire comprendre, si ce n'est par cet
accent qui va de l'âme â l'âme, sans l'intermédiaire
même des paroles? Manlius tire son poignard pour en
frapper Servilius, sa main cherche son cœur et tremble
de le trouver; le souvenir de tant d'années pendant les-
quelles Servilius lui fut cher élève comme un nuage de
pleurs entre sa vengeance et son ami.
« On a moins parlé du cinquième acte, et peut-être
Talma y est-il plus admirable encore que dans le qua-
trième. Servilius a tout bravé pour expier sa faute et
sauver Manlius; dans le fond de son cœur il a résolu, si
son ami périt, de partager son sort. La douleur de Man-
lius est adoucie par les regrets de Servilius; néanmoins
il n'ose lui dire qu'il lui pardonne sa trahison effroyable;
mais il prend â la dérobée la main de Servilius, et l'ap-
proche de son cœur; ses mouvements involontaires cher-
chent l'ami coupable qu'il veut embrasser encore, avant
de le quitter pour jamais. Rien, on presque rien dans la
pièce, n'indiquait cette admirable beauté de l'âme sen-
sible, respectant une longue affection, malgré la trahison
qui l'a brisée. Les rôles de Pierre et de Jaffier, dans la
pièce anglaise, indiquent cette situation avec une grande
force. Talma sait donner à la tragédie de Manlius l'énergie
qui lai manque, et rien n'honore plus son talent que la
vérité avec laquelle il exprime ce qu'il y a d invincible
TRA
1740
TRA
dans l'amitié. La passion peut haïr Tobjet de son amour ;
mais quand le lien s'est formé par les rapports sacrés
de Tàme, il semble que le crime même ne saurait
^anéantir, et qu*on attend le remords, comme après une
iongue absence on attendrait le retour. » {De V Alle-
magne, c. 27.)
Après avoir lu ces pages, on ne peut s*empècher de
dire qu*un artiste, dont le talent et le génie ne peuvent
laisser de traces que dans les souvenirs des contempo-
rains, et qui emporte dans la tombe ses plus belles créa-
tions, est bien heureux de rencontrer des Juges comme
M'"" de Staël.
TRAGÉLAPHE, animal symbolique figuré sur quelques
monuments. C'est un cerf à tète bumjLine, saisi par un
lion. On y voit l'image du chrétien attaqué par un
démon.
TRAGI-COMÉDIE, dénomination autrefois appliquée
aux pièces de thé&tre dont l'action est sérieuse et se
passe entre personnages considérables, mais n'a point un
dénoûment tragique, ou est mêlée d'incidents et de per-
sonnages appartenant à la comédie. Le Cid et Nicomède
de Corneille furent intitulés tragi-comédies.
TRAGIQUES (Les), titre d'une composition satirique
en près de 9,000 vers, commencée par Agrippa d'Aubigné
dès 1577, mais (|ui ne vit le jour qu'en 1616. L'ouvrage
est divisé en 7 livres : dans le l***, intitulé Misères, l'au-
teur retrace les calamités et les guerres civiles qui ont
désolé la France durant la dernière moitié du xvi* siècle,
et qui ont été amenées par les vices des rois et des
grands^ qu'il flagelle dans le 2* livre, les Princes, et par
la corruption et la bassesse des gens de justice, dont la
satire est le sujet du 3*, la Chambre dorée. Le 4", les
Feux, est la peinture des persécutions exercées contre les
Protestants, et le suivant , les Fers, celle de leurs com-
bats et de leurs victoires. Le 6*, Vengeances, offre le ta-
bleau des châtiments dont Dieu a frappé sur cette terre
les persécuteurs, en attendant l'expiation suprême h la-
quelle le poète nous fait assister en décrivant, dans le
Jugement, la fin du monde et le jugement dernier. D'Au-
bigné est en proie à une colère continuelle, qui finit par
être monotone; il a des défauts qui sont un peu ceux de
son temps, l'enflure, le fatras théologique, un certain
mysticisme apocalyptique, mais aussi des Qualités incon-
testables, beaucoup d'expressions fortes et bien frappées,
des vers d'une large facture.
TRAHISON, HAUTE TRAHISON, termes généraux
applicables aux attentats commis contre la sûreté exté-
rieure ou intérieure de l'État. Les crimes contre la sû-
reté extérieure comprennent l'acte de porter les armes
contre la France, les machinations, manœuvres, intelli-
gences et correspondances coupables avec les ennemis de
l'État, les communications de plans, le recel d'espions
ou de soldats ennemis, toutes les actions hostiles non
autorisées par le gouvernement et qui sont de nature &
provoquer une déclaration de guerre ou des représailles.
Les crimes contre la sûreté intérieure embrassent les at-
tentats et complots contre le Souverain et contre les
membres de sa famille, les actes tendant à troubler l'État
par la guerre civile, etc. Les crimes de haute trahison
étaient jugés autrefois par la Cour des Pairs; ils le sont
aujourd'hui par la Haute-Cour de justice, (quelquefois
par les Cours d'assises. Les lois du 21 brumaire an v et
du 21 prairial an vi, le décret du 16 mai 1793 pour les
militaires, les art. 75 et suiv. du Code pénal pour les
autres citoyens, en déterminent le châtiment.
TRAILLE (du latin trahere, tirer, traîner), mot syno-
nyme de bac (V. ce mot),
TRAIN (du latin trahere, traîner), convoi de marchan-
dises ou de vo3rageurB sur un chemin de fer. On nomme
trains de plaisir les trains d'aller et de retour que les
compagnies organisent pour les voyageurs seulement,
entre un point et un autre, à prix réduits, mais dans
un temps déterminé et toujours très-bref.
TRAIN, en termes de Typographie, partie de la presse
sur laquelle on pose la forme, et qui se meut sous la
platine. La mise en train est l'action de tout disposer
Eour le tirage d'une forme, de manière que celle-ci presse
ien également sur le çapier.
TSAiN, mot qui désigne le matériel roulant dont se
compose un parc* d'artillerie, les caissons de vivres et
d'ambulance, etc. Jusqu'au Consulat, on s'était contenté
de réunir au besoin les bêtes de trait et les gens d'équi-
page. Le général Bonaparte créa un corps spécial sous le
nom de tram d'artillerie ; chaque régiment eut son train,
sous les ordres d'un capitaine. Le train, primitivement
formé de 38 bataillons, fut licencié en l'ao ix, puis re-
constitaé en 8 bataillons seulement; mais, à la fin âa
premier Empire, il s'était élevé à l'efErayant effectif ds
30,000 hommes. Sous la Restauration, le train fut remis
sur un pied nouveau; les bataillons devinrent des esca-
drons, dont on compta six , & 6 compagnies chacun, avec
un cadre de dépôt en temps de guerre; il y eut en outre
3 compagnies du train du génie, en cas de guerre seule-
ment. Le train des équipages, pour le transport des vi-
vres, des effets de campement, des blessés et des ma-
lades, avait été constitué en entreprise vers 1807 ; il fut
constitué, en 1823, en corps spécial militaire, et, après
avoir été formé de 8 comptignies, fut réduit à 4 en 1824.
Sous le règne de Louis-Philippe, les escadrons du train
d'artillerie furent portés k 8 compagnies chacun ; les
compagnies du train du génie furent incorporées dans
les régiments, et leurs hommes reçurent le nom de sof
peurs-conducteurs; le train des équipages, successive-
ment augmenté, compta 4 compagnies d'ouvriers, et
4 escadrons du train, avec 4.compagnies et un cadre de
dépôt. De 1852 à 1870, il y eut : pour la garde impériale,
un escadron des équipages, à 3 compagnies; pour
l'armée 5 escadrons du train, et cinqcompag^nies d'où-
yricrs constructeurs. F. le Su/pplément.
TRAIN DE BOIS. K. FlOTTAGB.
TRAINE, en termes de Marine, cordage qu*on laisse
pendre à la mer lelon^ du bord, pour y attacher un objet
quelconque que le bâtiment train» à sa suite.
TRAINEAU, sorte de voiture sans roues qu'on fait
glisser, en la traînant, sur la glace ou sur la neige. Les
traîneaux sont les seuls véhicules des régions tout à fait
septentrionales, et ils servent aux fantaisies du luxe
comme au transport des provisions et des marchandises.
Chez les Lapons et les Kamtchadales, on y attelle des
rennes et des chiens.
TRAINEAU, grand filet qu'on traîne dans les champs
pour prendre des alouettes, des cailles, des perdrix, on
dans les rivières pour prendre du poisson.
TRAIT, autrefois traict (du latin tractus, formé de
trahere^ tirer^, toute arme qu'on lance à la main, ou avec
l'arc et l'arbalète.
TRAIT, ligne qu'on trace avec le crayon, la plume ou
tout autre instrument, et qui marque seulement le con-
tour des objets. Les dessins au trait prennent en Archi-
tecture le nom d^ épures (K ce mot),
TRAIT , en termes de Musique, suite de notes rapides
exécutée sur un instrument ou avec la voix. Le mot se
dit aussi d'une phrase mélodique, et d'une succession
brillante d'harmonie.
TRAIT, en termes de Plain-Chant, psaume ou partie de
psaume qu'on chante après le Graduel, en remplacement
de r Alléluia, dans les messes de l'A vent, du Carême, et
des Morts. Ce morceau de chant tire son nom de la ma-
nière en quelque sorte traînante dont on doit l'exécuter.
Il est toujours écrit dans le 2« ou dans le 8* ton. — Trait
a été encore synonyme de Plique (K. ce mot),
TRAIT, en termes de Blason, se dit des carreaux de
l'échiquier. L'échiquier est ordinairement de 6 traits;
quand il y en a moins, on précise le nombre.
TRAIT, en termes de Marine, «st synonyme de ixHie.
On dit, par exemple, aller à traits et à rames. Un
trait carré est un natiment dont les voiles principales
sont carrées.
TRAIT d'union , sîgno d'écrituro marquant la liaison
entre plusieurs mots qui n'en forment plus qu'un ou qui
sont accidentellement rapprochés : chet'd'OBUvre , tragi-
comédie, vient-il. etc.
TRAITANTS. V. Partisans, dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
TRAITE, lettre de change que les banquiers tirent sur
leurs correspondants.
TRAITE DBS Noms. S ^^^^^^^ ** ^ Histotre.
TRAITÉ , ouvrage où l'on trait» de quelque art, de
Quelque science particulière : Traité de botatwme. Traité
es pierres précieuses, etc.
TRAITÉ , convention faite entre deux ou plusieurs États
pour le rétablissement de la paix, la conclusion d*uD6
alliance, un échange, une cession ou un partage de ter-
ritoire, pour des intérêts de commerce, de propriété lit-
téraire, etc. Les anciens Romains distinguaient le traité
d'amitié, qui avait pour objet le maintien de la paix et la
protection du commerce; le traité d*alltance, qui n'obli-
geait pas seulement au maintien de la paix, mais qui
imposait une assistance active dans la guerre; le iratU
d'isopolitie, qui établissait une sorte d'é^pdité politique
TRA
ilH
TRA .
entre le Romain dans le monicipe et le citoyen du mu-
nicipe dans Rome ; le traité d'nospitaïité, qui unissait
entre eux soit de simples particuliers, soit des cités en-
tières. F. Dumont, Rectml des traités de paix, d^al^
liancej de commerce, etc., Âmst., 1710, 2 vol.: Rousset,
Reci^tl historique iTticteSf négociations, mémoires et
traités de paix, La Haye, 1728-52, 25 vol. in-12; Koch,
Table des traités entre la France et les puissances étran-
gères, Bàle, 1802, 2 vol. in-8°; Martens, Becueil de
traités de paix, d^alliances, de trêves, de neutralité, de
commerce, etc., depuis i761, Paris, 1857, 47 vol. in-8® ;
Schœll, Histoire abrégée des traités de paix, 1832,
23 vol. in-8o; Hoffmans , D^Hauterive et de Cussy, Re-
cueil des traités de commerce et de navigation de la
France avec les puissances étrangères, 1834-44, 10 vol.
in-8®; Garden, Histoire générale des traités de paix et
autres transactions géniales entre toutes les puissances
de VEurope, 1848 et suiv., 20 vol. in-8o; Ghilland, Re-
cueil des traités de paix européens les plus importants,
trad. en français par Schnitzler, 1856, 2 vol. in-S».
TRAITEMENT, émoluments accordés par TÉtat aux
fonctionnaires publics. Il est saisissable pour un cin-
quième sur les premiers 1000 fr., un quart sur les
5000 fr. suivants, et un tiers sur ce qui dépasse 6000 fr.
TRAITEURS. Y. Cuisiniers.
TRAJAN (Rempart de). V, MunAiixES, dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire,
TRA JANE (Colonne). V. Colonnesvonuhentai.es, dans
notre Dictionnaire de Biographie et d^ Histoire,
TRAMAIL. V. Halueb.
TRAMONTANE , nom donné par les Italiens au vent
du Nord, qui leur vient d*au delà des Alpes {irans
montes). On rappliqua aussi à l'étoile polaire, oui in-
dique le côté du Nord : de là Texpression perdre la tra-
montane, pour dire s'égarer, parce que les marins s'o-
rientent à Taide de Tétoile polaire.
TRANCHE, bord extérieur de l'épaisseur d'une mé-
daille.
TRANCHÉ (Le), terme de Blason, une des partitions
de l'écu qui le divise diagonalement de droite à gauche.
TRANCHÉE, ouverture pratiquée dans la terre pour
asseoir les fondations d'un mur, placer des conduits pour
les eaux ou le gaz, planter des arbres, faire un fossé, etc.
En Architecture, on nomme tranchée de mur une entaille
faite dans un- mur pour y encastrer l'extrémité d'une
poutre ou un tuyau de cheminée. En termes d'Art mili-
taire, les tranchées sont des fossés que les assiégeants
creusent pour se mettre à couvert du feu de la place
qu'ils attaquent, et dont les terres. Jetées du côté do cette
place, forment un parapet (K. Parallèles) ; par exten-
sion, le mot s'applique au rempart qu'on fait avec des
fascines, des gantons, des sacs remplis de laine ou de
terre, quand le terrain est de roche ou difficile à creuser.
TRANCHEFILE, petit rouleau de papier ou de parche-
min, recouvert de soie ou de fil, que les relieurs mettent
aux extrémités du dos d'un livre pour soutenir la coiffe.
TRANCHOIR, table carrée qui fait le couronnement
du chapiteau des colonnes.
TRANCHOIR. V, PaIN-ASSIETTE.
TRANGLES, terme de Blason. V, Bdrellb.
TRANSACTION, en latin TransactU) (de transtgere,
négocier, s'arranger), contrat par le(juel les parties ter-
minent une contestation née ou préviennent une contes-
tation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit, soit
dans la forme authentique, soit sous seing privé. Pour
transiger, il faut avoir la capacité de disposer des objets
dont il est fait mention dans l'acte. Les transactions ont,
entre les parties, l'autorité de la chose Jugée en dernier
ressort; elles ne peuvent être attaquées pour cause d'er-
reur de droit, ni pour cause de lésion , mais l'erreur de
calcul qui y serait intervenue doit être réparée. Il y a
lieu à rescision, lorsqu'il y a erreur dans la personne ou
sur l'objet de la contestation, lorsque la transaction a été
faite sur un titre nul ou dans l'ignorance d'un titre tenu
cacJaé par Tune des parties, enfin dans le cas de dol ou
de violence. V, le Code Napoléon, art. 2044-58 ; Mar-
beau , Traité des Transactions, 1833, in-8°; Rigal,
Traité des Transactions, 1834, in-8° ; Troplong , Com-
mentaire du titre du Mandat, du Cautionnement et des
Transactions, 1841, 2 vol. in-8°.
TRANSACTIONS PHILOSOPHIQUES, célèbre recueil
mensuel, publié par la Société royale de Londres, et
composé surtout de Mémoires et d'Observations sur les
sciences mathématiques et nat'trelles. La plupart des
pièces sont en anglais, et quelques-unes en latin. La
publication commença en 1665. Elle était anouello» Inter-
rompue plusieurs fois au \ynf siècle, elle a été reprisé
régulièrement, et compte auj. (1862) 151 vol. in-4^.
TRANSCENDANTALE (Philosophie). Doctrine philoso-
phique qui recherche ce que l'homme apporte du sien
dans la connaissance des objets; sa méthode est cri-
tique, elle examine. Elle s'occupe du sujet, tandis que
la philosophie transcendante s'occupe de l'objet, c-à-d.
de toute connaissance qu'on peut obtenir sans l'expé-
rience. La philosophie transcendantale tend à réduire
l'esprit humain à lui-même, la science à un seul de ses
termes essentiels, le sujet, à mettre en doute la nature et
Dieu, et enfin à les tirer du moi^ comme on le voit dans
Fichte. Kant est l'auteur de cette philosophie, dont il a
exposé les principes dans sa Critique de la raison pure.
Cet ouvrage contient la théorie de la sensibilité pure ,
celle de l'entendement pur, celle de la raison pure. Sur
elles repose toute la philosophie transcendantale. La pre-
mière traite du mode de génération des objets sensibles,
de l'espace, et du temps; ceux-ci sont les deux formes do
la sensibilité , subjectives , dont l'entendement revêt les
êtres et les faits , qui ne sont que des phénomènes, Jjà
2« est la logique transcendantale, divisée en deux par-
ties : Tune, s'occupe du mode de génération des lois uni-
verselles qui règlent les objets sensibles, des catégories
ou formes de la pensée, reposant sur les guatre formes
de nos jugements : quantité, qualité, relation, modalité;
Kant nomme cette partie de sa logique Analytique .
f^arce qu'elle consiste dans une analyse des fonctions do
'entendement. L'autre, nommée Dialectique transcen-
dantale, a pour objet le mode de génération des objets
intelligibles, les idées transcendantales, les paralogismes,
les antinomies et l'idéal de la raison pure, les preuves
spéculatives de l'existence de Dieu, preuves qu'il est con-
duit à rejeter. Kant Joint à ce qui précède une Méthodo-
logie transcendantale, qui a pour but de déterminer les
conditions formelles d'un système complet de la raison
pure. La conclusion générale de la philosophie trans"
cendantale, pour Kant, c'est que nous ne pouvons affir-
mer la réalité objective de rien. Elle aboutit au scepti-
cisme. — Cette doctrine de Kant manquait de rigueur ;
Fichte, son disciple, poussa la philosophie transcendan-
tale à ses dernières conséquences, . dans sa Théorie de la
science. Pour lui, plus d'élément objectif; tout est déduit
d'un seul terme de la connaissance, du sujet. La Nature
et Dieu ne sont que des développements du moi; le moi
est seul principe, il crée tout, il se crée lui-même. La
philosophie transcendantale devint ainsi Vidéalisme sub-
jectif absolu : mais les conséquences montrèrent toutes
les erreurs renfermées dans le principe. Les successeurs
de Kant et de Fichte la modifièrent et la transformèrent
ensuite. Schclling, qui avait paru l'accepter d'abord dans
son premier écrit : Du moi comme principe de la philo-
Sophie^ y renonça bientôt, et du scepticisme de Kant elle
arriva au dogmatisme de Schelling et de Hegel. La phi-
losophie inaugurée par Kant, malgré ses défauts, im-
prima à l'Allemagne un immense mouvement philoso-
phique et littéraire ; elle fut la pensée mère des grands
travaux qui signalèrent en ce pavs la fin du xviii* siècle
et le commencement du nôtre, v, J. Willm, Histoire de
la philosophie allemande depuis Kant jusqu'à Hegel ,
4 vol. in-8°, Paris, 1849; et, dans le présent Dictionnaire,
l'art. Allemande (Philosophie). R.
TRANSCRIPTION, en termes de Pratique et de Com-
merce, action d'insérer dans un acte un autre acte, un
jugement ou un arrêt, de transporter sur un autre livre
un article ou un compte. La transcription hypothécaire
est le report intégral d'un acte translatif de la propriété
d'immeubles sur le registre du conservateur des hypo-
thèques de l'arrondissement où sont situés ces immeu-
bles : le contrat de vente est parfait entre les parties par
le seul effet de leur consentement, mais il n'a d'effet à
l'égard des tiers qu'après la transcription. Cette formai
lité a pour but de prévenir certains abus : ainsi, un pro-
priétaire ne peut plus vendre et se faire payer plusieurs
fois le même immeuble ; il ne peut hypothéquer un im-
meuble déjà vendu. L'antichrèse, la concession d'une
servitude, les baux de plus de 18 ans, les quittances an-
ticipées de 3 années de loyer ou de fermages, ont été
soumis à la transcription, en vertu d'une loi du 23
mars 1855. V. Boume, Transcription hypothécaire.
Commentaires sur la loi du 23 mars i8o5, in-8° ; Herr
vieu. Interprétation de la loi du 23 mars i855 sur la
Transcription hypothécaire, 1856, in-8® ; Lemarcis, Com-
mentaire de la loi sur la Transcription, 1855, in-S** ;
Lesenne, Commentaire théorique et pratique de la loi
du 23 mars 1855 sur la TrantcriptUm hypothécaire,
TftA
1711
TUA
1856, in-S<*; Bîvière et François, Explication ds la loi
du S3 mars I800 sur la transcription en matière hypo-
thécaire, et Questions ttieoriques et pratiques sur la
transcription hypothécaire, 1856, in-8"; Troplong, Trans"
cription en mcUièi-e hypothécaire, 1856, in-8° ; Mourlon,
Traite théorique et pratique de la transcription, in-8°.
TRANSEPT (du latin trans, an delà, et septum, en-
ceinte), nef transversale qui, dans une église, sépare du
chœui la grande nef et les bas côtés, et forme les deux
bras d'une croix dont le chœur et la nef sont le montant.
Le transept est aussi appelé croisée; ses deux extrémités
ont reçu les noms de transepts (par abus), d*ailes de
croix, branches de croix, et croisillons. Vintertransept
iiSt le centre du transept. Le transept se termine d'ordi-
naire carrément, parfois en abside ou en hémicycle. Cer-
taines églises ont deux transepts, de sorte que leur plan
rcprL'sente une croix archiépiscopale. On trouve quelque-
fois, comme à Téglise de Ijo, Charité-sur-Loire, un tran-
sept dans la chapelle de la Sainte Vierge.
TRANSFERT, acte par lequel on déclare transférer à
une autre personne la propriété d*une rente sur TÉtat,
d'une action de société, d'une marchandise en entre-
pôt, etc. Un agent de change doit certifier Tindividualité
du vendeur de rentes, la vérité de sa signature et des
pièces produites, et en demeure garant pendant 5 ans
après la déclaration do transfert.
TRANSIT. V. Douanes.
TRANSITIF, nom donné par les grammairiens mo-
dernes aux verbes qui marquent une action s'exerçant
par le sujet sur la chose ou la personne qui sert de com-
plément. Tous les verbes actifs et bon nombre de verbes
neutres sont transitifs (V, Intransitip ). — D'anciens
grammairiens ont donné le nom de transitifs à certains
mots ou réunions de mots servant à marquer une tran-
sition. Telles sont les conjonctions au reste, cependant ,
or, après tout, et autres de sens analogue. P.
TRANSITION (du latin transire, passer}, en termes de
Rhétorique, manière de passer d'un ordre d'idées à un
autre, de lier ensemble les parties d'un discours. Les
transitions ne sont pas des conjonctions grammaticales,
mais de petites phrases pour ainsi dire copulatives, dont
on se sert pour enchaîner l'une k l'autre plusieurs pen-
sées. On ne peut y réussir qu'après avoir sérieusement mé-
dité son sujet, de manière à embrasser d'un coup d'oeil
toutes les parties et à en voir les rapports.
TRANSITION (Style de), nom donné en Architecture au
style intermédiaire entre le roman et le gothique, et dans
lequel se trouve un mélange de ces derniers.
TRANSITION, eu termes de Musique, passage d'un ton à
un autre. La transition enharmonique est celle dans la-
quelle une ou plusieurs notes, après avoir été entendues
comme appartenant à un ton , sont employées comme
notes d'un autre ton.
TRANSITORIUM, nom donné, dans le rit ambrosien,
à l'antienne qu'on chante après la Communion.
TRANSMIGRATION DES AMES. V, Métempsycose.
TRANSPARENT, peinture exécutée sur toile fine en-
duite d'huile, ou sur papier serpente, et dont on fait
ressortir les couleurs en la plaçant devant une vive lu-
mière. Les transparents sont suitout en usage au théâtre,
et pour les illuminations dans les fêtes publiques.
TRANSPORT, en termes de Jurisprudence, acte par
lequel on cède à une autre personne une créance ou tout
autre droit incorporel. Celui qui fait le transport est ap-
pelé cédant; le cessionnaire est celui au profit duquel
l'acte a lieu. Cet acte peut être fait soit en la forme au-
thentique, soit sous seing privé. K. Cession.
TRANSPORT, QTi termes de Marine, bâtiment affrété par
le gouvernement p^ur porter des troupes ou des muni-
tions. Quand l'État emploie à ce service ses propres na^
vires, ce ne sont plus des transports, mais des corvettes
de charge, des gabarres, et quelquefois des vaisseaux : 00
dit alors que ces bâtiments sont armés en flûtes.\. Flute.
TRANSPORTATION, peine particulière à l'AngleteiTe,
et qui consiste à être emmené dans quelque colonie
lointaine. En France, elle a été une mesure politique et
exceptionnelle^ qui n'implique point un jugement comme
la Déportation {V. ce mot). D'après une loi de l'an 11,
tout mendiant repris pour la 3* fois devait être trans-
porté aux colonies. Après les journées de juin 1848, la
transportation éloigna du pays une foule d'individus ré-
putés dangereux. Elle fut également appliquée, depuis
1852, comme adoucissement de peine, aux condamnés
renfermés dans les bagnes; on les transporte à la Guvane.
La condition des transportés est régie par la loi du 4 Jan-
fier 1850 et le décret du 28 mars 1852.
TRANSPOSITION, en termes de Musique, changd-
ment par lequel un morceau est porté dans un ton
différent de celui dans lequel il a été écriL Une per-
sonne transpose naturellement et sans le remarquer,
quand elle place l'air qu'elle chante dans la position la
plus favorable à sa voix. Mais l'opération de l'instrumen-
tiste qui accompagne ou Joue un morceau en transposant
est beaucoup plus compliquée ; car elle consiste à faire
d'autres notes que celles qui sont écrites, à introduire ou
à supprimer des accidents, à faire des dièses là où sont
indiqués des bémols, et réciproquement. H est un moyen
de simplifier cette opération : c'est de supposer une autre
clef que celle qui est placée au commencement des por-
tées, et de choisir celle qui correspond au ton dans le-
quel on veut transposer. Toutefois, la transposition de-
meure une des plus grandes difficultés de la musique au
point de vue de la pratique ; elle exige une aptitude par-
ticulière. Les facteurs Relier, Blanchet, Pfeiffer, ont ima-
giné de construire des pianos qui opèrent la tranposition
d'une manière mécanique, et qu'on nomme piano; trans-
positeurs. — Un instrument est dit transpositeur, quand
le son qu'il donne est différent de la note écrite : tels
sont les clarinettes, les cors, les trompettes, les cornets
à pistons. B.
TRANSPOSITIVES (Langues), langues où, les rapports
des mots entre eux étant indiqués par des terminaisons
spéciales, on n'est pas obligé de placer ces mots dans
l'ordre analytique, comme cela est presque toujours né-
cessaire en français. Le système de la transposition des
mots est propre à l'ancien grec et au latin. Les langues
modernes , la française surtout , ne les transposent qu'avec
une extrême réserve. Aucune ne peut se permettre une
inversion du genre de celle-ci , qui est cependant très-
modérée en latin : Cur me querelis exanimas tuis ? et qui,
rendue mot par mot, donne en fiançais un assemblage
de mots inintelligible : Pourquoi me par -plaintes dé-
soles-lu tes? Or, la construction de la phrase latine est
très-naturelle, très-claire, et même très-simple. P.
TRANSSEPT. V, Transept.
TRANSSUBSTANTIATION (du latin trans, au delà, et
suhstantia, substance), changement d'une substance en
une autre. Le mot ne s'applique qu'au changement mira-
culeux de la substance du pain et du vin en la substance
du corps et du sang de N. S. Jésus-Christ dans l'Ëncba-
ristie , par la vertu des paroles sacramentelles du prêtre.
C'est un des dogmes de l'Église catholique.
TRAPÈZE, appareil de gymnastique, composé d'une
barre de bois suspendue horizontalement par deux cordes,
et sur laquelle on se livre à des exercices de force et
d'adresse.
TRAPÉZITES. V, ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire^ au Supplément.
TRAPPE ( du bas latin trappa, dérivé de trabs, poutre),
sorte de porte posée horizontalement sur une ouverture
à rez-de-chaussée ou au niveau d'un plancher; — fenêtre
qui se hausse et se baisse dans une coulisse.
TRAPPE, trou que l'on fait en terre, et que l'on couvre
soit d'une bascule, soit de branchages et de feuillages,
pour y faire tomber les bêtes fauves. De là le nom de
Trappeurs donné dans l'Amérique du Nord aux chas-
seurs de profession.
TRAQUENARD (contraction de traque-renard)^ piège
en forme de trébuchet, que Ton tend pour preitdre lès
renards, les loups, les belettes et autres bêtes nuisibles.
TRAQUENARD, nom d'uuo ancienne danse dont les pas,
prompts et mal réglés, étaient accompagnés de mouve-
ments particuliers du corps. Le mot venait du (roc ou
mouvement de la haquenée.
TRAVAIL, action suivie, dirigée vers un but. Les Éco-
nomistes définissent le travail a la puissance de Thomme
appliquée à la Production. » L'ouvner qui sait son métier
a en réserve un capital; cela ne lui suffit pas pour vivre;
il faut qu'il applique cette science à la production; il
faut qu'il travaille Le savant a un riche capital de science;
mais ce capital est un bien inutile à la société et au ^sa-
vant lui-même, tant qu'il n'en use pas : il faut que par
son travail il produise. Le travail est donc la mise en
œuvre, par l'activité de l'homme, de ses facultés phy-
siques et morales. Il est un des instruments directs de la
Production ; il en est l'élément moral , puisqu'il est IMo-
tervention de la personnalité humaine*
L'homme est subordonné en partie au capital. S*il est
vrai de dire que plus il y a de capitaux dans une nation,
plus il y a de produits et de richesse, il n'est pas égale-
ment vrai de aire que plus il y a d'hommes, plus il y a
de travail et de richesse. Pour qu'un Lommc puisse ein*
TftA
mi
TRE
ployer tes bras, il faat qu*il y ait un capital qui lui en
fournisse les moyens. On peut donc dire : il faut que les
hommes dans le passé aient eu la prévoyance de travail-
ler et d^épargner, pour que les hommes puissent tra-
vailler danf le présent. Il y a toujours au fond de cette
doctrine un profond enseignement moral. II s^ensuit que
la population doit se proportionner dans un pays à la
quantité de travail qui peut lui être fournie; et, comme
le chiffre des naissances est presque toujours plus élevé
que les moyens de subsistance ne le comportent, il ar-
rive que, dans presque toutes les sociétés, il y a un grand
nombre de malheureux, et que la mort se charge de réta-
blir réquilibre. De là cette conséquence : multipliez les
produits, et la population augmentera.
Un des moyens les plus puissants pour multiplier les
produits est la division du travail. « Cest , dit Rossi , le
grand levier de l'industrie moderne. » Une carte à Jouer
subit environ soixante-dix opérations avant d'être livrée
à la consommation; toutes ces opérations sont d'une
grande simplicité; chaque ouvrier n'est chargé d'en exé-
cuter qu'une, deux ou trois au plus, et répète sans cesse
le même travail, dans lequel il acquiert beaucoup d'ha-
bileté. Trente ouvriers font ainsi par jour 15,000 cartes :
soit environ 500 cartes par ouvrier. Combien en ferait un
ouvrier, s'il devait tout exécuter seul , depuis la fabrica-
tion du carton jusqu'à Tempaquetage des jeux? — La
division du travail est souvent limitée par l'étendue du
marché. A la campagne, l'épicier sera à fa fois droguiste,
pharmacien, marchand de nouveauté. Dans une grande
ville, un marchand ne tiendra qu'un seul genre d'ar-
ticles, parce qu'il aura un débit suffisant; le consomma-
teur aura la marchandise à meilleur marché et en meilleure
qualité. Aussi la division du travail ne peut-elle pas être
prescrite par des règlements administratifs; c'est à la
concurrence des producteurs à l'établir dans les limites
possibles. — La liberté du travail est une des conditions
importantes de la production, et les corporations d'arts
et métiers qui existaient avant 1789 étaient autant d'en-
traves au développement de l'industrie ( V. Arts ei Mé-
TiEns ). L.
TRAVAIL (Droit an], n ne des fausses doctrines que le
Socialisme ( K.,ce mot) a mises en circulation pour agiter
la multitude. C'est le droit qu'aurait tout individu sans
occupation d'exiger de V .tat un travail salarié. Admis
Çlus ou moins implicitement dans les Constitutions de
701 et de 1793, il fut proclamé par les décrets du 26 et
du 28 février 1848. On a été amené ainsi à la création
des Ateliers nationaux ( V. ce mot)^ et à l'insurrection
de Juin de la même année. V, Proudhon, Le Droit au
travail et le Droit de propriété, 1848 et 1850 ; Léon Fau-
cher, Du Droit au travail , 1848.
TRAVAIL (Organisation du), une des utopies socialistes
destinées à éteindre la misère parmi les hommes. Elle a
pour base l'égalité des salaires, et pour condition essen-
tielle la direction universelle de l'industrie par l'État.
V. Communisme, FouRiéaisMB, Icarie, Phalanstère, Sa-
laire, Socialisme; et Louis Blanc, Organisation du tra-
vail , 1830 et 1850; Michel Chevalier, Uttre sur Inorgani-
sation du travail, 1840; Du Puynode, Des lois du travail
et des classes ouvrières, 1845, in-8'; Wolowski, De
l'organisation du travail, 1848.
TRAVAUX (Les) et les Jodrs. F. OEovres et Jodrs.
TRAVAUX FORCÉS, peine afflictive et infamante qui
a remplacé les galères. Les hommes qui y sont condamnés,
et que l'on nomme forçats, subissaient préalablement
autrefois une exposition publique ( K. Exposition). Ils
sont employés aux travaux de l'État les plus rudes et les
plus pénibles; ils traînent à leurs pieds un boulet, ou,
lorsque la nature des travaux le permet, ils sont attachés
deux à deux avec une chaîne. Ils subissent leur peine
dans les bagnes ( V. n* mot ^ , et , depuis la loi du 30 mai
18r>i, dans les colonies pénitentiaires. Les femmes et les
filles subissent la peine dan5 *ine maison de force. Les
travaux forcés sont à perpéiutf '^^ • temps (5 ans au
moins et SO ans au plus) : les premiers, avant 1854, en-
traînaient la mort civile {V. ce mot)\ les seconds em-
portent la dégradation civique et Vinterdiction légale
( V. ces mots ). V. Ltei^.Rés.
travaux publics , travaux qui intéressent la généralité
des habitants du pays. Ce sont les routes, les chemins
de fer, les cours d'eau navigables, les usines situées sur
les cours d'eau, la police du roula^ et de la navigation,
les ports de commerce, les phares, les monuments publics,
les dessèchements de marais, les mines et minières, etc.
V. Agriculture ( Ministère de V ).
tBAVâui PUBLICS , poine infligée aux militairet coapablet
de désertion. Les condamnés sont employés à des tra«
vaux militaires ou civils : ils ne portent ni chaînes ni
fers ; leurs vêtements ne doivent point avoir la couleur
de ceux de l'armée ; ils reçoivent le pain militaire, et une
ration de riz ou de légumes secs.
TRAVÉE (du latin trabs, poutre), espace compris entre
deux poutres et qui est rempli par un certain nombre
de solives. On nomme travée de comble, la distance
d'une ferme à l'autre sur deux ou plusieurs pannes ; tror-
vée de balustres , un rang de balustres entre deux co«
lonnes ou piédestaux ; travée de grille , un rang de bar-
reaux entre deux pilastres. Dans m^ pont, les travées
sont les parties de la charpente qui forment les arches
et supportent le tablier. En Architecture religieuse , on
appelle travée chacune des divisions d'une nef d'église :
elle comprend l'espace qui se trou/e entre deux piliers,
y compris la moitié de chaque pilier, et se compose, en
élévation, de l'arc principal , de la galerie ou triforium ,
de la haute fenêtre et de la voûte.
TRAVERS (Droit de). V, notre Dicttonnaire de Bio-
graphie et d'Histoire.
travers, en termes de Marine, côté d'un navire ^ans
toute l'étendue comprise entre la poupe et la proue.
Mettre en travers, c'est mettre en panne ou à la cape.
TRAVERSE, pièce de bois ou de métal que l'on met en
travers à certains ouvrages pour les assembler ou les
affermir.
traverse, nom donné, dans la Fortification, à des
espèces d'épaulements qu'on élève entré des ouvrages,
surtout dans les chemins couverts, pour qu'ils ne soient
pas enfilés par les boulets de l'ennemi. Les soldats se
mettent à l'abri derrière les traverses.
TRAVERSIN, e** lermes de Marine, se dit des pièces
de bois posées en cravers de la charpente d'un b&timent.
Ainsi , on nomme traversin des bittes une forte pièce de
bois qui croise horizontalement les deux montants des
bittes, afin de les Mkt l'une avec l'autre; traversin d'écou-
tille, un morceau de bois volant qui traverse l'écontille
par le milieu afin de la soutenir ; traversins de hune, des
pièces de charpente fixées en travers sur les élonges des
m&ts, et sur lesquelles reposent les hunes, etc.
TRÉBUCHET (de trébucher), piège à prendre les
petits oiseaux. Cest une sorte de cage, dont la partie
supérieure est couverte de grain et arrêtée si délicate-
ment, que l'oiseau, en se posant, fait partir un ressort,
et se trouve enfermé dans la cage.
TRÉBUCHET, engin de guerre du moyen Age. Cétaitune
machine de jet , composée d'une verge ou flèche tournant
autour d'un axe horizontal porté sur des montants : à
l'une des extrémités de la verge on fixait un contre-
poids, et à l'autre une fronde qui contenait le projectile.
Pour bander la machine, c.-à-d. pour abaisser la verge,
on se servait d'un treuil. Une machine de ce genre fut
exécutée en 1850 par ordre du prince Louis- Napoléon,
alors président de la République; la flèche avait 10"\30,
le contre-poids était de 4,5U0 kilogr. : on lança un boulet
de 24 à la distance de 175"', une bombe de 0"*,22 rem-
plie de terre, à 145™, des bombes de 0™,27 et de 0'»,32
remplies de terre, à 120". ^
TRËCANUM , nom donné, dans les premiers siècles de
l'Église, à un chant exécuté par le chœur pendant qu'on
distribuait la Communion. On ne sait en quoi il consis-
tait : c'était peut-être le Symbole des Apôtres, par lequel
on exprimait la foi en la Trinité^ ou simplement un ré-
pons à trois versets.
TRÈFLE , une des quatre couleurs des cartes , ainsi
nommée de la feuille de trèfle qu'elles portent
TRÈPi.E , ornement d'Architecture imité de la feuille de
trèfle. On nomme trèfles de moderne, dans les constnictions
otnvales, de petites roses à jour, formées par trois arcs en
tiers-point.
TRÈFLE, en termes de Blason, figure du trèfle posée sur
un écu aux extrémités d'une croix. On dit une croix tré'
fiée, une croto; cantonnée de trèfie.
TRÉFONDS (du latin terrœ fundus, le fonds du sol) ,
fonds qui est sous le sol et qu'on possède comme le sol
même. On appelle tréfoncier le propriétaire du fonds et
du tréfonds.
TREILLE, terme de Fortification, V. Galerie.
TREILLES ' Les), lax Treilhas^ danse du paysdeMnnt-
Cellicr, exécutée par 8 à 12 couples de femmes, vêtues de
lanc, avec des ceintures hleues pour la moitié des dan-
seuses, roses pour h*s autres. Le» danseuses portent des
fragments de cerceaux , garnis de mousseline blanche et
de nœuds bL-nis ou roses, dont elles tiennent les extré-
mités à la main. Elles exécutent des évolutions variées ,
TRE
1744
FRÈ
pendant lesquelles les deux troupes se mêlent sans se
confondre.
TREILLIS, ouvrage de bois ou de métal qui imite les
mailles en losange d'un filet et qui sert de clôture.
TREILLIS, châssis divisé en compartiments ou carreaux,
et qui sert à copier dos tableaux qu*on veut poiter à des
dimensions plus grandes ou plus petites. V, Carreaux.
TREIZIÈME, en termes de Musique, intervalle com-
posé d'une octave et d*une sixte. Il comprend 13 tons et
demi-tons.
TREKSCHUYTES (du hollandais irékken, tirer) , bar-
ques pontées en usage sur les canaux de la Hollande, tirées
par des chevaux, et servant au transport des voyageurs.
Elles ont de 12 à 18'" de longueur, et de 2 à 4'** de largeur.
TRÉLINGâGE, gros filin qui attache les bas haubans
do b&bord avec ceux de tribord.
TRÉMA (du grec tréma, trou), signe d'accentuation
formé de deux points, que Ton place sur les voyelles e,
%, u, lorsque, suivant une autre voyelle, elles doivent
être prononcées séparément : SaÛl , ciguë, neuf. On ne
remploie pas s*il peut être remplacé par Ve fermé : Chloé,
poésie,
TRÉMAIL. V. Hallier.
TREMBLANTS. V. Bedooxes.
TRÉMIE (Bande de). V. Bande.
TREMOLO, mot italien qui signifie tremblement. Il
désigne, en Musique, Teffet produit sur les instruments
à archet quand on fait aller et venir Tarchet sur les
cordes avec tant de rapidité, que les sons se succèdent
sans laisser r(vnarquer une solution de continuité. On
obtient cet effet sur le piano , en frappant au moins deux
touches alternativement et avec une grande célérité.
TREMPLIN (de trembler) , planche inclinée et très-
élastique, sur laquelle les gymnasiarques courent pour se
donner de Télan et faire des sauts.
TRÉNITZ, une des figures de la contredanse, ainsi
nommée d'un M. de Trénitz, beau danseur de société, du
temps du Directoire.
TRENTE-ET-QUARANTË, Jeu de cartes où Ton se
sert de 6 Jeux entiers , mêlés ensemble, ce qui fait en
tout 312 cartes. Il y a un banquier et des pontes ou
joueurs. Sur la table sont deux cartons, Tun rouge, l'au-
tre noir, où les joueurs mettent leurs enjeux. Le ban-
quier, jouant d'abord pour la noire, découvre l'une après
1 autre un certain nombre de cartes. Jusqu'à ce qu'elles
aient dépassé le nombro 30 et sans aller au delà de 40
(l'as compte pour 1, les figures pour iO, les autres cartes
pour les points qui y sont marqués ). La même opération
a lieu ensuite pour la rouge. Le point le plus favorable
est 31, et ensuite celui qui en approche davantage. Le
banquier double les mises de la couleur gagnante, et ra-
masse les enjeux mis sur l'autre couleur. Si le nombre
31 est amené, la moitié des enjeux appartient au ban-
quier, et, au coup suivant, il ne court le risque d'au-
cune perte, parce que les joueurs qui gagnent à ce coup
retirent simplement leur enjeu. En cas d'égalité dépeints,
le coup est nul. — Le jeu de Trente-et-quarante avait
remplacé, un peu avant 1789, le Pharaon et le Biribi.
La ferme des jeux l'exploita concurremment avec la Rou-
lette. Il est prohibé aujourd'hui.
TRENTE -ET -UN, jeu où l'on se sert, suivant le
nombre des joueurs, d'un ou de plusieiirn jeux de piquet.
Chaque joueur reçoit une à une trois caïk^s, et, à chaque
tour, celui qui donne en retire une. Si rui<. des joueurs a
dans ses cartes le nombre 31, il arrête h*- jeu; sinon,
chaque joueur échan^ii une de ses cartes centre une des
cartes retournées, jusqu'à ce que le jeu doit arrêté : on
abat alors les cartes, et celui qui a le point le plus faible
perd un jeton.
TRÉON , voile de forme carrée que les navires latins
hissaient pendant le mauvais temps à la place de leurs
voiles latines ; c'est le tref des vieux documents.
TRÉPIE, ancien nom du triangle i^V, ce mot).
TRÉPIED. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et (V Histoire.
TRESGHEUR, en termes de Blason, une des pièces
honorables de l'écu. Il est fait comme un filet mis en
orle, et est ordinairement double.
TRE-SETTE ou TROIS-SEPT (Jeu de), Jeu de cartes
d'origine italienne, ainsi appelé à cause de l'importance
2u*on y donne aux nombres 3 et 7. Il se joue entre
joueurs associés deux à deux, avec un jeu entier dont
on a extrait les 8, les 0 et les 10. Le 3 est la carte la plus
forte; viennent ensuite le 2, l'as, le roi, la dame, le valet,
le 7, le 6, le 5 et le 4. Les cartes sont partagées entre les
)oaeurSy qui ea reçoivent cliacua dix en trois fois. La
partie est de 21 points, qui résultent des points qa*on t
dans la main et des levées qu'on fait en jouant. Le 3, le
2 et l'as d'une même couleur forment une napolUainef
et valent trois points. Une napolitaine suivie de trois
cartes pareilles s'appelle calladon; suivie de sept cartes
de même couleur, elle est dite calladondrùm; l'une et
l'autre font gagner d'emblée. On compte un point pour
chacune des cartes ({ui font une séquence à la napoli-
taine. On marque trois points pour trois 3, ou trois 2, ou
trois as; 4 pour trois sept; 1 pour trois rois, ou trois da-
mes, ou trois valets, ou tix>is 6, ou trois 5. Trois figura,
de quelque couleur qu'elles soient, valent un point; les
3 et les 2- comptent comme les figures et se mêlent avec
elles. Chacun des as compte pour un point. Chaque levée
vaut aussi un point; la dernière en vaut deux. Si les as-
sociés parviennent au nombre 21 avant que leurs adver-
saires aient marqué 11, la partie leur est p^yée double.
TRÉSOR (du latin thésaurus)^ mot qui se dit vulfcaire-
ment d'un amas d'or, d'argent ou d'autres choses pré-
cieuses mises en réserve, et que le Code Napoléon définit
« toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne
peut justifier de sa propriété, et qui est déoDuverte par
l'effet du hasard. » En ce dernier sens, le trésor appar-
tient à celui qui l'a découvert dans son propre fonds;
s'il est trouvé par un tiers dans le fonds d'autruî, il est
partagé entre celui qui l'a découvert et le propriétaire du
fonds. — Trésor se dit aussi du lieu où les choses pré-
cieuses sont renfermées. — Le Trésor public est l'endroit
où l'on renferme les sommes provenant des impôts et
autres revenus de l'État. Dans l'Antiquité, on donnait le
nom de Trésor à certaines parties secrètes des temples,
et à des temples tout entiers, qui servaient de trésors pu-
blics, comme à Atliènes, par exemple, les temples de
Jupiter Sauveur et de Plutus; à Rome, le temple de Sa-
turne, etc. — Enfin au moyen âge, dans certaines églises
cathédrales, on appela aussi Trésor une chambre ou une
galerie attenant à l'église, et contenant beaucoup d'objets
précieux sacrés ou profanes. Le Trésor de l'abbaye de
S^-Denis était célèbre dans ce genre.
TRÉSOR (Bons du). V. Bons do Trésor.
TRÉSOR (Chambre du). ) V^ notre Dictionnaire de Bto-
TRÉSOR DES CHARTES. { graphie et d'Histoire.
TRÉSORERIE, mot oui signifie tantôt le Trésor publie
ou même le Ministère des Finances, comme quand on dit
en Angleterre les Lords delà Trésorerie: tantôt le mou-
vement des fonds qui appartiennent à l'État, comme
dans ces expressions : service de trésorerie, opérations
de trésorerie, etc.
TRÉSORIER, celui qui est chargé de garder, ou même
de percevoir ou de distribuer les fonds d'un souverain,
d'un État, d'un établissement quelconque. V. Trésorier,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
TRESQUE, terme de Blason. V. Bourrelet.
TRÊVE (de l'allemand treu, foi, promesse), convention
par laquelle deux parties belligérantes suspendent pour
un temps déterminé les actes d'hostilité sur tous les
théâtres de la guerre (V. Armistice, Sospension d'arues).
Une tréoe marchande est celle durant laquelle le com-
merce est permis entre deux États qui sont en guerre.
On nomme trêve pêcherie la convention de ne pas consi-
dérer, en temps de guerre, comme ennemis les navires
qui font la pêche.
TRÊVE DE DIEU. V. notre Dictionnaire de Biographe
et d'Histoire.
TRÈVKS (Amphithéâtre de), monument romain, taillé
dans le Marsberg, et déblayé par ordre du gouvernement
prussien en 1817. Les uns en attribuent la fondation à
l'empereur Auguste, les autres le croient postérieur à
Trajan. Il est de forme elliptique, et a 75 met. de lon-
gueur sur 52 de largeur. II pouvait contenir 6,000 per-
sonnes. Des portes flanquées de tours, et dont il ne reste
aucune trace, y donnaient accès au N. et au N.-E.; on y
entrait encore, du côté de la ville, par deux vomitoirei
ou passages creusés dans le roc : l'un de ces passages est
actuellement fermé, l'autre sert de cave. C'est dans l'am-
phithéâtre de Trêves cpie Constantin, en 306 et en 313,
livra des milliers de prisonniers franks aux bêtes féroces.
TRÊVES (La Porte noire, à), monument romain, situé
au N. de la ville, et qui parait avoir été bâti au temps de
Constantin le Grand. C'est un bâtiment long de 38 met.,
large de 22, haut de 23, construit en blocs énormes posés
sans ciment les uns sur les autres, et qui étaient liés
autrefois par des crampons de fer dont on ne voit plus
aujourd'hui que les morsures. Il a deux portails et trois
étages, et est flanqué de deux tours. Au xi* siècle, Is
partie principale de ce mopumeat fut transformée eo
TRI
i74r>
TRI
6\;Iise, en Thonneur d*an anachorète grec, nommé Si-
méoQ, qui s*y était tenu renfermé pendant 7 ans. A la
lin du siècle dernier, les Français en firent un arsenal et
on magasin. C'est aujourd'hui un musée d'antiquités.
TaèvES (Cathédrale de). La construction de cet édifice
appartient à plusieurs époques. Le vaisseau forme un
carré long divisé en trois nefs. Aux deux extrémités de
la nef centrale sont deux absides, occupées par deux
chœurs. Les murs de la nef, depuis le chœur de l'Est Jus-
qu*& la hauteur des avantrdemiers piliers du côté de
rOuest,sont, dit-on, de construction romaine, et auraient
fait partie d'un palais d'Hélène, mère de Constantin. Le
reste de l'église date du xi" siècle, et est en style romano-
liyzantin. Au xii' on éleva les deux tours ; à la fin du
y vu*', on accola & l'abside orientale la Rotonde ou chambre
du Trésor. Un cloître du xin* siècle est adossé au flanc
méridional de l'église. Outre les tombeaux des anciens
archevêques-électeurs, la cathédrale de Trêves contient
beaucoup de reliques, parmi lesquelles la tunique sans
couture de Jteus-Christ.
TRÉVIRB, en termes de Marine, cordage ployé en
double, amarré en son milieu au sommet d'un plan in-
cliné, et servant à faire rouler sur ce plan un corps cylin-
drique tel qu'une barrique, pendant que les deux bouts
du cordage, un peu écartés l'un de l'autre, sont tirés ou
lâchés doucement.
TRÉVIRS. V, notre Dictionnaire de Biographie et
d'Histoire.
TRÊZALÉ, se dit, en peinture, d'un tableau dont la
surface est couverte d'une multitude de petites fentes
ou gerçures. Cet accident est ordinaire aux tableaux
peints à l'huile sur une impression de détrempe, à ceux
où l'on a fait entrer trop d'huile grasse, ou qui ont été
exposés à l'ardeur du soleil.
TRI (Jeu de), jeu composé de 34 cartes. Il y manque le
G de cœur, le 10, le 9 et le 8 de cœur, de trèfle et de
pique, et tout le carreau, à l'exception du roi.
TRIADE (du grec trias, nombre ternaire), assemblage
de trois unités, de trois personnes, de trois divinités. La
Trimourti des Indiens (Brahma, Vichnou, Siva) était une
triade. La mythologie égyptienne contenait un grand
nombre de triades, composées chacune d'un Dieu, de son
épouse et de leur fils; le Jeune Dieu de ces triades pre-
nait le nom de Peschère ou PekrotUi (enfant, rejeton),
qu^on retrouve dans celui d'Harpocrate ou Harpekroti,
désignant Horus enfant. La triade thébaine, composée
d'Ammon, de Mouth et de Khons, était manifestée sur la
lerre par une autre triade, Osiris, Isis et Horus, d'où déri-
vait une troisième, Horus, Isis et Malouli. Dans la ville
d'Hermonthis, on adorait une triade formée de Mandou,
iUtho et Harphré; à Edfou, Har-Hat, Athôr et Harsont-
I ho ; à Esnèh, Knouphi3,Néith et H&ké; à Ombos, Serak-
Pia, Athôr et Khons-Hor, Aroéris, Tsonénoufré et Pnevtho ;
à Mcmphis, Phtba, Bouto ou Ma, et Phré ou Ra (le Soleil).
Ciiez les Grecs, il y avait la triade de Jupiter, "Neptune et
Pluton, celles des Grâces, des Parques, des Furies, etc.
TRIAGE (Droit de), privilège en vertu duçiuel les sol-
deurs possédaient autrefois le tiers des biens commu-
naux.
TRIAIRE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
TRIAL. V. TÉNOR.
TRIANGLE, instrument de musique en acier, construit
comme la figure appelée triangle, et dont on joue en le
frappant intérieurement avec une verge de même métal.
II produit un bon efiTet dans la musique militaire, où il
n'unit aux autres instruments de percussion ; on l'emploie
aussi dans quelques airs de danse. Selon Athénée (iv, 23],
il est d'origine syrienne; au moyen &ge, on l'appelait
tripie,
TRIANON. V, Versailles, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
TRIBANAU, nom que l'on donne en gallois à certaines
poésies morales dont l'origine remonte aux temps drui-
diques, et qui sont partagées en couplets de trois vers
liés par la même rime. Le mot revient à notre mot tercet.
TRIBONION (du grec trt&dn, usé, vieux), nom qu'on
donnait au manteau brun ou noir, souvent râpé et dé-
chiré, que les philosophes grecs portaient par ostentation.
TRIBORD ou STRIBORD, cèté droit d'un navire, en
regardant de l'avant à l'arrière. Le mot est une corrui^
tion de dextribord, côté droit, ou de styrbord ou star-
board, t^té du gouvernail, parce qu'autrefois le gouver-
nail était à droite. V, Bâbord.
TRIBRAQUE (du ^rec treis, trois, et brahhus, bref),
pied de la versification grecque et latine, composé ce '
trois brèves, comme UnèniÔs en grec, et Hntmii en latin.
On l'appelle aussi Brachysyllabe. Ce pied, étant l'équiva-
lent de l'ïambe C -,^ ^ ^) et du trochée (" '^,'^ ^ '^),
entrait comme substitution dans les vers lambiques et
trochaiques. P.
TRIBU. V. Tribus, dans notre Dictionnaire de Biogro
phie et d'Histoire.
TRIBULE. F. Chaussb-trappb.
TRIBUN. V. ce mot dans notre Dictionnaire de BiO'
graphie et d'Histoire.
TRIBUNAL, nom donné, chez les Romains, au siège
du haut duquel les tribuns rendaient la justice. Il ne
s'entend plus que du siège et de la juridiction d'un ou de
{plusieurs magistrats. En France, on distingue, suivant
a nature des matières qu'ils ont à ju^r, les tribunaux
de simple police, correctionnels, civils, criminels, les
tribunaux de commerce, les tribunaux administratifs,
les tribunaux maritimes: — suivant le degré de juri-
diction, les tribunaux de 4^ instance, les tribunaux
dappelf anc. Coure impériales, et la Cour de cassation*
Les Tribunaux se classent encore en ordinaires et e3>
traordinaires ou exceptionnels. Les tribunaux ordinaires
sont ou temporaires, comme les Cours d'assises, ou jper>
manents, comme les tribunaux de simple police, les jus^
tices de paix, les tribunaux de i'« instance civils et correo-
tionnels, les Cours d'appel et h Cour de cassation*
Les tribunaux extraordinaires sont les ConseiU de guerre,
les tribunaux maritimes, la Haute Cour de Justice, les
Conseils de discipline, les Conseils de prud'hommes, le
Conseil de l'Instruction publique, etc.
tribunal civil ou de PREWlfeRB INSTANCE, Juridlctlon
établie dans chaque arrondissement pour toutes les af-
faires civiles et correctionnelles qui ne sont pas spéciale-
ment attribuées à d'autres tribunaux. Au civil, il connaît
des affaires civiles, et même des affaires de commerce
quand il n'y a pas de tribunal de commerce dans l'ar-
rondissement; de toutes les difficultés d'exécution des
jugements rendus par les juges de paix, les arbitres, les
tribunaux de commerce; de celles qui naissent des con-
damnations civiles prononcées par les tribunaux correc-
tionnels. Il juse en premier et en dernier ressort les
affaires mobilières et personnelles jusqu'à 1,500 fr. de
principal, les affaires i^Iles ou mixtes dont l'objet prin-
cipal est 60 fr. de revenu, les affaires où les parties ont
consenti à être jugées sans appel, enfin les fautes de
discipline des officiers ministériels. Une des Chambres
dont se compose le tribunal juge en matière correction-
nelle (F. Police correctionnelle). Les fonctions du mi-
nistère public sont exercées dans chaq[ue tribunal par
un procureur ds la Rép.on par un substitut. Il y a, près
chaque tribunal, un gveilier et des commis greffiers.
tribunal de com^ERGE. V. Commerce (Tribunal de).
TRIBUNAL criminel. V. ASSISES (Cour d').
TRIBUNAL MARITIME. V. MARITIMES (TribunaUX).
TRIBUNAL MIUTAIRE. V. GUERRB (CoUSeil de).
TRIBUNAL DE POLICE. V. POUCB.
TRIBUNAT FRAKgAIS. V. notre Dictionnaire de Bio^
graphie et d'Histoire.
TRIBUNE. V. Rostres, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^Histoire.
TRIBUNE, un des noms donnés anciennement à l'abside
des basiliques ; — lieu élevé, muni d'une balustrade,
d'où le re^rd domine dans toute une église.
TRIBUNE (Éloquence de la). V. Politique (Éloquence).
TRIBUNITIENNE (Puissance). V. notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
TRIBUT (du latin tribr^um, fait à^tribuere, accorder),
mot qui désignait, chez les anciens Romains, l'impOt pu-
blic, et qui signifie, gour les Modernes, la redevance en
argent ou en nature qu'un État paye à un autre, comme
signe de dépendance.
TRICËRION. V. Dic^RiON, dans notre Dictionnain de
Biographie et d'Histoire.
TRICHORIE (du grec treis, trois, et koros, choeur^,
danse lacédémonienne, ainsi nommée de ce Qu'elle étais
exécutée par trois chœurs, représentant les trois âges de li
vie, l'enfance, la jeunesse et la vieillesse, marchant dan:i
cet ordre. Les vieillards commençaient et chantaient :
KOQS arons été Jadis
Jeunes, vaillants, et hardis.
Les jeunes gens ou hommes faits, par l'Antiquité compfp
nait dans la jeunesse ce que nous appelons la force dé
r&ge, répondaient :
Nous le sommes mabitananl
A rèpreuTC à tout venant.
il)
TRT
17^fi
TRI
Rnftn Im enfants dilatent à leur ton.:
Et won» va jour le leronf
Qqi M«a tou nirpaMeroM.
La Triehorie avait été inventée par Tyrtée ; on la chan-
tait dans pres<[ue toutes les fêtes de Sparte.
TRIGINIUM, dans la basse latinité, chant à 3 parties.
TRlCLINiUM. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
TRIC0M08. K. CoHos.
TRICTRAC. Jen dont le nom, formé par onomatopée,
rend asses bien le bruit que font des dés agités dans un
cornet et Jetés sur un tablier de bois. En allemand on
rappelle bretspiel (Jeu de tables), en italien tavoliere,
en espagnol tablas reaies, en portugais jof70 de tabolas.
11 se Joue à deux personnes, sur un tablier divisé en deux
grands compartiments carrés, que sépare une eloisoii
moins haute que les ttords. De chaque côté dos bords
•ont 19 petits trous garnis d'ivoire, dans lesquels on place
un liehêi chaque fois que Ton a gagné 1S points; 24 flè-
ches, de deux couleurs difTérentes, sont incrustées sur le
fond noir du tablier, et opposées pointe à pointe. Chaque
Joueur a 15 dames d'une couleur particulière; empilées
d'abord à sa gaucho, elles descendent une à une ou deux
^ deux à chaque coup de dé. Par exemple, si les dés ont
amené 5 et ti, on a la faculté d'abattre du bois, c.-à*d.
de placer deux dames sur les flèches correspondant aux
numéros 5 et 6, ou d'abattre une seule dame sur le nu-
méro 11, ou d'avancer dans la mémo progression une ou
deux dames déjà casées. On Joue généralement la partie
•ni) trous. Las règles et les combinaisons du trictrac
sont trèoovariéea ; les jans ou coups ont reçu des déno-
minations bisarrea, grand jan, pettt jan^ eontre-ian, jan
de rvlotir, jan de méséas, etc. Le double as se nomme
beset ou ambesas ; le double trois, terne: le double quatre,
earme; le double cinq, quine; le double six, sonneM; le
double deux est innommé. Le Jeu de trictrac était connu
des Anciens I les Grées l'appelaient Diagrammismos,
et les Romains Duodena soripta; la dénomination de jan
vient peut*ètre de ee que les Romains l'avaient placé sous
la protection de Jan us. Il fut en grande vogue au temps
de Louia XIV, mais la mode en passa sous la Régence,
-^ Il existe bien des variétés de trictrac : ainsi, le /oc-
fU0l, le Reoertiêr, le Too, le Baok^ammon ou Toutes
tables, ete.
TRIDENT.
TRIKNNADX.
TRIEN8,
TRIKRARQUE.
TRIÉTÈRIDE.
r. ces mots dans notre Dictionn<iire
de Biographie et d'Histoire^
TRIFORIUH, mot imaginé par les antiquaires anglais
pour désigner la galerie qui s^étend au-dessus des bas
côtés d'une église, parce qu'elle s'ouvre communément
sur la nef par trois arcades {très fores). Il n'est ni heu-
reusement trouvé, ni très-Juste. Le triforium, partie
essentielle des basiliques anciennes, est rare dans les
églises romano-byzantines du xi' siècle; il y est seule*
ment indiqué par des arcades aveugles. Au xii* siècle, il
reprit des proportions plus vastes, et les conserva dans
certains monuments de la période ogivale, comme à
Notre-Dame de Ch&lons, à Laon, à Paris, etc., tandis que
dans d'autres il fut une simple galerie de passage, tantôt
aveugle, tantôt éclairée. V, Galerif.
TRIGE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogror
phie et d'Histoire,
TRIGÉMINKE (Baie), baie subdivisée en six parties.
TRIGLÈNE, pierre précieuse dont on faisait des boucles
d'oreilles chez les Anciens. On ne sait ce qu'elle était. On
suppose qu'elle était une onyx à plusieurs couches con-
centriques de couleurs différentes et qui offraient l'appa-
rence de la prunelle de l'œil (en grec glènè\,
TRIGLYPHB (du grec treis, trois, et glyphè, gravure,
rainure), ornement quadrilatéral saillant, placé à des dis-
tances égales sur la frise dorique, entre les métopes
{V, ce mot). Il présente sur la face deux cannelures ou
rainures verticales, appelées glyphes ou canaux, et, sur
les côtés, deux demi-cannelures, ce qui en fait trois. Les
triglyphes représentent l'extrémité des poutres trans-
versales posées sur l'architrave.
TRÏGONALE. V, Ballb, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
TRIGONE (du grec trets, trois, et ^dnta, angle), nom
que les Anciens donnaient à une cithare de forme trian-
gulaire, inventée, dit-on, par les Phrygiens, et qu'on ap-
pelait aussi Samùuquê.
TRIHÉMIMËRE. V. Césvslb,
TRIHÉMITON, nom donné par lei anciens Grecs |
l'intervalle musical de tierce mineure.
TRTHORI, ancienne danse française.
TRILITHB8. V, Gbltiqubs (Monuments).
TRILLE (de l'italien trUlo, tremblement), agrément
musical consistant en une succession rapide et alterna-
tive de deux notes. On dit qu'il était depuis longtemps es
usage sur les instruments, lorsqu'un chanteur de laclis-
pelle pontlflcale, Lucas Gonforti, imagina, en 1591, de le
pratiquer avec la voix : le trille, longtemps appelé im-
proprement cadence, était indiqué, sur la musicrue écrite
ou gravée, par la lettre t, comme aujourd'hui par ir.
L'abus des trilles est une preuve de mauvais goût.
V. Battehent, Diable (Cadence du). B.
llilLOBÉ, en termes d'architecture, qui a trois lobes.
TRILOGIE , nom donné ches les anciens Grecs à une
réunion de trois pièces dramatiques représentées dans la
même séance théâtrale, et généralement liées entre elles
par l'analogie plus ou moins étroite des sujets. C'est ainsi
qu'on désignait psr le nom collectif d*Orestie VAgamem-
non. Us Coéphores et les Euménides d*Esehyle. Dans sa
comédie les Femmes aux Thesmophories, Aristophane
parle d'une autre trilogie d'Eschyle intitulée Lvcurgie,ùh
le poète avait dramatiquement développé les divers inci-
dents de la lutte du roi de Thrace Lycurgue contre les
sectateurs du culte oriental de Bacchus, qu'on essayait
alors d'introduire dans les pays de l'Occident : elle com-
f prenait les pièces intitulées leêldones, les Bassaridet et
es Jeunes gens. Lorsqu'à la trilogie tragique on ajoutait
un drame satyrique, cet ensemble prenait le nom do 70-
tralogie ( V, ce mot). — Quelques dialogues de Platon
présentent aussi l'apparence de trilogies; tels sont la Ré-
publique, le Timée^ le Critias, d'une part; «t, de l'autre,
le Théétète, le Sophiste, le Politique. P.
TRIMÈTRE, vers grec et latin do trois mesures ou di-
podies {V, ce mot}. Il y a des trlmètres ïambiques, tro-
chaïques, anapesltques, etc. Pour les vers dactyliques,
ohontambiques, ioniq%tes, le mot trimètre désiane, non
pas trois dipodies, mais trois pieds {V. ces àifférents
mots). P.
TRIMOURTI. V. ee mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et ^Histoire.
TRINCADOURES, nom donné à des péniches espagnoles
qui font le service de garde-côte dans le golfe de Biscaye.
TRINGLE, moulure plate qui termine le triglypheà sa
partie inférieure.
TRINITÉ (du latin tnnuf, triple), mot qal désigne,
dans la Théologie chrétienne, le mystère d'un seul Diea
en trois personnes, le Père, le Fils et le 8'» Esprit. Il
représente l'unité de trois personnes divoraea, distin-
pniéos réellement, et l'identité d'une nature indivisible.
C'est un dogme fondamental. — Les artistee du moyen
àgc ont imaginé diverses représentations de la Trinité:
c'(;st d'abord une main placée au-dessus de Jésus cru-
cifié, qu'elle bénit, et dont elle est séparée par la co-
lombe, emblème de l'Esprit saint. Ensuite, c'est un
vieillard portant l'enfant Jésus sur ses genoux, et lais-
sant échapper vers lui une colombe. Ou bien le Christ
en croix est entre les genoux du Père, de la bouche
duquel la colombe s'échappe avec le souffle. Sur la
voûte d'une chapelle latérale, à l'église de Saint-Pol-
de-Léon, une peinture représente trois faces humaines
n^.unies par le front, ayant un nei et une bouche
chacune, mais trois yeux seulement pour le tout; on
réunit à volonté les yeux deux à deux, pour chaque face
prise isolément. En plusieurs lieux de la Picardie, la
Trinité est représentée tantôt par deux tètes humaines
ayant trois yeux, tantôt par deux tètes avec des ailes.
On l'a figurée encore par trois poissons à une tète, par
un triangle, par trois cercles entrelacés. Dans un ma-
nuscrit du XV* siècle, conservé à la Bibliothèoue impé-
riale de Paris, trois hommes en tunique sont rimage de
la Trinité : au centre, le Saint-Esprit est bous la figure
d'un Jeune homme sans barbe, avec un nimbe surmonté
d une colombe; à sa droite, le Père ost coiffé do la tiare
<a porte un globe surmonté d'une croix ; à sa gauclie,
Jésus-Christ tient sa croix. F. au SupplémemU
TRINQUART (de l'espagnol tnncar, trancher), petit
bàtimhnt léger dont on se Bert dans la Manche pour la
pèche du hareng.
TRINQUET, nom donné dans la Méditerranée an mât
de misaine des blttimenta gréés en voiles triangulaim
ou latines.
TRINQDBT. V. PaUVB.
TniNQUF.rrE. V. Foc
TRI
i7n
TRO
TRINUNDINUM . V. ce mot dans notre DklwnnairB de
Biographie et d'HisUnre,
TRIO, morceau de musique à trois parties concertantes
de voix ou d'iDstrament3. Il peut èlre accompagné par
d^autres parties, peu obligées, sans cesser d^ètre trio.
Les trios de Viotti, de Kreutser et de Balllot pour le
violon ne sont à proprement parler que de belles sonates,
accompagnées d*un second violon et d'un violoncelle.
Mozart et Beethoven en ont composé de très-beaux pour
piano, violon et violoncelle. Les trios d'instruments à
vent font peu d'effet. C'est dans l'opéra bouffe que Lo-
groscino fit le premier essai du trio d'opéra, vers 1750.
Il y a des trios célèbres dans le Maritige secret de Gima-
rosa, dans Vltaiienne à Alger, dans la Pie voleuse et
dans Guillaume Tell de Rossini. — On appelle aussi trio
la â* partie d'un menuet ou scherzo de symphonie, après
laquelle on reprend le morceau principal. B.
TRIODION, nom donné, dans l'Église grecque, au
livre de chant qui contient le Commun des Saints.
TRIOLET, petite pièce de huit vers, dont le i» se ré-
pète après le 3*, et le i*' et le â* après le 6* < en sorte
que, de ces huit vers, il v en a trois, le 1*', le 4* et le 1\
qui ne sont qu*un seul et même vers. C^est de cette
triple répétition que ce genre de poème est appelé triolet.
Le mélange des rimes n'est pas déterminé. L'idée qui
forme le fond du triolet doit être agréable et gracieuse )
il faut que les refrains paraissent ramenés sans effort, et
plus par agrément que par néousité. Voici un Joli triolet
jle Ranchin, podte peu connu :
Le premier Jour du mois de m»)
Put le plus heureux de ma vie :
Le beaq dessein que |c formai
Le premier Jour du mois de waI \
Je vous via, et Je vous ^Imal.
$i ce dessein tous plut, Sylvie,
Le premier Jou^ du mois de mai
Fut le plus benreux de su vlo.
thiolet, en termes de Musique, groupe de trots notes
pour deux.
TRIOMPHALE (Voie). ) t^ „^.^ n,v.*.v.«««,v^ ^.
TRIOMPHATJBUK. \J^^ ,^^^}^^re de
TRIOMPHE. ) ^*<>9^<*9h^ «* dlU^stwre.
TR10MPHB (Arc de). V. Ane de moiiPH».
THioifPHB (La)i Jeu de cartes qui se Joue eomme
l'écarté (K. ce mol)'^ seulement en nV écMte pas, et l'on
ne compte pas de point pour le roi. — Dans certains
Jeux, la couleur de la retourne, ou atoui, se nomme
triomphe.
TRIOMPHÉS (Psaumes ou Cantiques), nom que l'on
donnait autrefois à certains psaumes ou o^ntiques, tels
?ue le Bilagnifioa^j le Beneduitus, le Cogii enarranty le
xiudate Dominumf le Dominus regfMvii, etc., lorsque
entre chaque vereet on répétait l'antienne, en tout ou en
partie. C'était une marque de solennité.
TRIPET, vieux mot désignant une sorte de gobelet.
TRIPH01RË, vieux mot synonyme dHncrusté.
TB1PHONE, instrument de musique en forme de cla-
vecin droit, inventé en 1810 par un certain Weidner, de
Fraustadt. Pour en jouer, on mettait des gants dont les
doigts étaient enduits de colophane pulvérisée, et l'on
frottait les cordes de haut en bas. Le son du triphone
était agréable, et ressemblait à celui de la flûte.
TRIPHTHONGUE (du grec treis, trois, et phthoggos,
son), syllabe composée de trois sons qu'on fait entendre
en une seule émission de voix ; par exemple, eau. Les mots
oui, lieUf yeuXf bien qu'écrits avec trois voyelles, sont
des dipbthongues, parce qu'ils font entendre deux sons.
TRIPITAKA. y. iNDiEims (Littérature).
TRIPLE CANON. V, Cahagtbbbs n'utpatMERiB.
TRIPLES ( Fêtes), degré de festivité dans certains dio-
cèses catholiques, placé au-dessous du Solennel, 11 y
avait le triple de 4^ classe et le triple de ^ classe. Le
mot parait être venu de ce qu'on disait trois fbis les an-
tiennes du Benedictus et du Magnificat , la i'* avant le
cantique, la 2* avant le Gloria Patri, la 3* après le
Sicut erat.
TRIPLET, groupe de trois ienêtres, placé assez corn-
abunément aux façades des églises du XIII* siècle. II a une
signification symbolique: c'est l'eniblème de la Trinité.
Une archivolte couronnant les trois fenêtres signifie
Tunité dans la Trinité. Quelquefois une rosace à 4 ou 5
divisions est placée au-dessus du triplet, comme emblème
de la couronne qui ceint le front du Roi des rois.
TRIPLUM , nom donné au contre-point à trois parties,
c.-À-d. au d^c^rnt à trois voix. Francon de Cologne est le
premier qui en a défini les règles. Quand' en voulait tain
un triplum , on ne devait pas perdre de vue le ténor et le
déchant {V. oe$ fitolf), et s*arranger de manière que si
la troisième voix discordait avec le ténor, elle concordât
avec le déchant, et réciproquement. 11 fallait ensuite que
le triplum procédât par concordances, tantôt en montant
avec le ténor, tantôt en descendant avec le déchant. F. C
TRIPOT (du latin IriptMitui» , Vépignement , saut),
mot qui signifiait originairement un jeu de paume, et qui
ne désigne plus qu'une maison de jeu clandestine, un lieu
de mauvaise compagnie.
TRIPTYQUE, mot d'origine greeqne qui signifie triple
ou plié en'H'oia, et par lequel on désigne une tablette
divisée en trois parties, dont les deux latérales se replient
sur celle du milieu. Beaucoup de triptyques, représen-
tant en relief des sujets sacré», ont été portés au cou en
guise d'amulettes ou de phylactères. 11 en existe un assez
grand nombre qui furent exécutés par des artistes bysan*
tins. Pendant longtemps les tableaux d'église furent en
forme de triptyques.
TRIQOE. V. CoLLiBB.
TRIQUBTRA. V. SidUBiffiB (Numismatique).
TRIRÈGNE , nom donné quelquefois à la tiare.
TRIRÈME, y, ee mot dans notre ùéctionnmre de Bi9»
graphie et (JtHistotre.
TRISTAN DE NANTEUIL. F. le Suppiément.
TRISTAN DU LÉONAIS, un des chevaliers de la*|U>le
ronde, héros d'un grand nombre de romans, soit en vers,
soit en prose. Le siyet du roman roule sur les amours
adultères de Tristan du Léonais et d'Iseult d'Irlande,
femme du roi Marc. Le roman de Tristan passe pour
le chef-d'œuvre des romans de la Table ronde : c'est
un des thèmes qui ont le plus exercé les poètes. L'ou-
vrage le plus ancien sur Tristan fût écrit en latin, el
traduit en prose française par Luce du Gast. Cette tra*
duction fut imprimée pour la première fois ii Rouen
en 1489, et traduite elle-même dans toutes les langues
de l'Europe. Chrétien de Troyes avait composé un ro-
man en vers Du rot Mam et dtYselt ta Blonde, et
Ton a ora lonp:temp8 que le poème en vers sur Tristan,
que l'on savait exister en Angleterre, était l'œuvre de
notre trouvère : on y a reconnu depuis tous les caractères
de la littérature anglo^normande, et Ton suppose ^ue
c'est l'œuvre d'un poète anonvme de la ooup de Henri 11
ou de Henri Hl. Les manuscrits du Tristan en prose sont
nombreux à la Bibliothèque nationale \ le Tristan en
vers appartient à la bibliothèque d'un bibliophile anglais,
M. Douce. — Quant à la morale de ces récits, où pas un
mot de blâme n^t prononcé contre la femme adultère et
parjure, où le mari est toujours ridicule, où ceux qui
veulent défendre son honneur sont des traîtres, elle
pourrait donner une triste idée des cours du xiu* siècle.
M. Francisque Michel a publié le Ikcueit des poëmes de
Tristan, 1835 et 1848, 3 vol. V. Histoire tUtéraire de la
France, t. XIX. H. D.
TRITAGONISTB , 3« acteur de la tragédie grecque pri-
mitive. C'est ordinairement une puissance étrangère et
invisible, qui fait agir le Protagoniste ou le héros et est
l'auteur de ses souffrances.
TRITON. V. QvARTB.
THiîrîîvÎRè^' / V, ces mots dan» notre |>tc*w#*»atrs
TRIVIUM ) ^* Biographie et d'Histoire.
TROCHAIQUE (Césure), r. Césorb.
TROCHAîQUE (Nomo). F. NOVB.
TROCHAîQUE (Vors), vors grec et latin composé de tro-
chées, ou dont le trochée fait la base. 11 se scande par di-
podies. Il pouvait être monomètre, dimètre, trimètre,
tétramètre, pentamètre. La dernière syllabe est indiffé-
rente. Le monomètre ne s'employait que comme clausule
d'un système. — Le dimètre est très-usité dans le théâtre
grec ; on n'en trouve d'exemples, parmi ce qui nous reste
de pièces latines, que chez les auteurs de la décadence,
Boèce, par exemplow II admet comme substitution le tri-
braque aux pieds impairs. Les comiques en faisaient
quelquefois le pied final. Le dactyle n'était admis que
dans les noms propres. — Le trimètre est inusité dans le
thé&tre grec, et il ne nous en reste d^xemples latins que
chez les grammairiens, qui ne citent ppint les auteurs, et
les ont probablement forgés sur quelque patron grec. —
Le tétramètre était inusité dans les tragédies et comédies
d'Athènes ; mais il est fréquent chez les comiques latins,
non pas cependant sous sa forme pure : Us^y admettent
des substitutions de pieds avec une licence extrême; le
spondée, le dactyle, le tribraque^ Faoapeste, s'y reacoa-
trent parfois de la manière la plus déréglée.
TRO
1748
TRO
Les formes catalectiques, brachycatalectiqucs, hyper-
catalectiques de ces différents vers sont d'un grand usage.
Le monomètre caialectique ne sert que de clausule, et se
confond avec le crétique. Le monomètre hypercataleo-
tiqttê ne sert également que de clausule : le spondée peut
y être substitué au 2* trochée. — Le dimètre brachycor
talectiqite n*est autre que Tithyphallique. Il ne s'emploie
pas seul, et sert souvent de clausule. Lorsque le dimètre
catalectique admet le dactyle ou le spondée au 2* lieu ,
il se confond avec le glyconique et le phérécratien. Se-
nèque offre quelques exemples de dimètres hypercai^ir
lectiques, avec le spondée au 2« et au 4* lieu , ou avec le
spondée aux 2« et 3* pieds et Tanapeste au 4^ — Le tri-
mètre brachycatcUecttqw est le vers saphique avec sub-
stitution du spondée au 2* lieu , du dactyle au 3*^, et le
▼ers phalécien lorsque le spondée est au 1*' pied, le dac-
tyle au 2*. Le trimètre catalectique admet les mêmes
substitutions que le saphique, mais se présente souvent
pur. Le trimètre hypercatiUectique reçoit le dactyle au
2* lieu, le spondée au 4*, au 5* et au 6*. — Le tétramètre
hrachycatcuectique se trouve quelquefois au théâtre : il
admet Tanapeste pour les noms propres. Le tétramètre
catcUectique est fort usité chez les tragiques et les co-
miques. On y remarque une césure après la 2* dipodie;
les longues y sont fréquemment résolues en brèves aux
pieds impairs, surtout lorsqu'il y a une préposition ou des
monosyllabes étroitement unis ; le spondée est fréquent
aux lieux pairs, particulièrement au 2* et au 4* ; le dac-
tyle se trouve quelquefois aux lieux impairs, surtout
lorsqu'il y a un nom propre. Sénèque suit à peu près
constamment ces règles du trochaique grec : mais il
admet aussi Tanapeste. On le retrouve encore assez pur
dans l'hymne d'église attribuée à S^ Bernard, Ponge linr-
giia, où l'on remarque la rime concurremment avec la
mesure prosodique. Les comiques latins se sont donné
les plus grandes licences dans la composition de ce vers,
au point de le défigurer quelquefois : ainsi, le 7« pied,
où ils maintiennent d'ordinaire le trochée qui a disparu
des autres pieds, présente souvent un tribraque. Ce vers
est quelquefois asynartète (V. ce mot). Les îambographes
faisaient usage d'un tétramètre scason, c.-à-d. boiteux,
parce que le 7* pied avait un spondée au lieu d'un tro-
chée. — On trouve dans Gallimaque des pentamètres ca^
talectiques, ayant par conséquent 9 pieds et demi. P.
TROGHÉ, vieux mot désignant un assemblage de
pierres précieuses et de perles en boutons, en fleurs, etc.
TROCHÉE , pied de la versification grecque et latine,
formé d'une longue et d'une brève : têlà. C'est l'inverse
de l'ïambe; mais il a, comme lui , pour équivalent le tri-
braque. Ce dernier nom lui est même quelquefois donné
par les Anciens, Cicéron et Quintilien entre autres. Tro-
chée signifie proprement vif et rapide comme le mouve-
ment d'une roue {trokhos)j et on le traduisait exactement
en latin par le mot rotatilis. Ce pied était fréquemment
employé dans les airs de danse animés et dans les mar-
ches militaires. Le trochée remplace très -souvent le
spondée final de l'hexamètre héroïque. Il entre dans la
composition de certains mètres Ijrriqucs avec le rhythme
(lesquels il peut s'accorder. Il fait la base du mètre iro-
chaî(|ue, termine les vers crétiques catalectiqucs, peut
terminer l'adonique, etc. Dans l'hexamètre héroïque, par-
ticulièrement en grec, il fait césure après le 2" pied :
It proni dont Icra j : rolat vl feryldas axit.
P.
TROCHILE. V, ScoTiB.
TROCHISQUES. V. Couleurs.
TROCHLI^ON, instrument de musique inventé par
Dietz en 1814. Il était de forme ronde; ses touches mé-
alliçiues étaient mises en vibration par un archet cir-
ulaire qu'une pédale faisait mouvoir.
TROCHUS. K. notre Dîct. de /Uugr. et d'Histoire.
troïka, voiture russe attelée do trois chevaux.
'i ROILUS (Légende de). K. au Supplément.
TROIS (Le nombre). Daûs l'Antiquité, ce nombre était
mystérieux et en quelque sorte fatidique. L'empire de
l'Univers était partagé entre trois dieux, Jupiter, Neptune
et Pluton; il y avait trois Grâces, trois Parques, trois
Furies, trois Harpies, trois Gorgones, trois Sibylles, etc.
Diane était au«^i une triple déesse sous le nom d'Hécate.
— Dans les cérémonies sacrées, le nombre trois était
sacramentel : les victimes d'un sacrifice étaient promenées
trois fois autour de l'autel. Les superstitieux se cra-
chaient trois fiiîs dans le sein pour détourner un maléfice.
TROIS CHAPITRES (Les). V. notre Dictionnaire de
Bwgrapfueet d^Htstotre,
TROIS-MATS , terme générique par lequel on désigne
les navires à voiles carrées qui ont un grand mit, un aùi
de misaine et un m&t d'artimon.
TROIS-PONTS, b&timent de guerre de la plus grande
dimension, qui, indépendamment de laesrcasse, contient
3 ponts ou étages de canons.
TROIS-SEPT (Jeu de). V. Trb-seite.
TROITZA (Couvent de). V. notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d Histoire,
TROMBA, nom italien de la trompette.
TROMBLON. V. EspmooLB.
TROMBONE, sorte de grande trompette composée de
quatre branches ou tuyaux emboîtés les uns dans les
autres, et qu'on allonge ou raccourcit à volonté, tout en
la jouant, au moyen d'une pompe à coulisse, pour pro-
duire les différentes notes, données toutes en sons
ouverts. Si l'on veut quitter la marche diatonique , la
pression des lèvres suffit, comme dans le cor et la trom-
pette, pour faire résonner la tierce, la quinte ou Toctave
du ton sur lequel on s'est arrêté. Lo trombone a trois
dimensions, qui correspondent à trois étendues de son
différentes : le trombone-cUto^qm est en fa; le trombont
ténor, en si bémol ; et le trombone basse, qui est à l'oc-
tave inférieure de l'alto. La musique s'écrit pour le l^'sur
la clef d'ut 3* ligne, pour le 2* sur la clef d'ut 4* ligD^
pour le 3* sur la clef de Ai, 4* ligne. Ces trois trombone^
s'emploient presque toujours ensemble k l'orchestre et
dans la musique militaire. Ils sont surtout bien plac^
dans les symphonies, les ouvertures, les chœurs guerriers
et religieux, les marches triomphales. Leur son, qu'on ne
peut soutenir longtemps, est plus sec, plus dur et plus
énergique que celui de l'ophicléide ; il a des effets propres,
et qui ne ressemblent à ceux d'aucun autre instrument.
On emploie, dans la musique militaire, un trombone d'une
espèce particulière, appelé buccin (F. ce mot). — Le trom-
bone nommé autrefois saqiiebute est originaire d'Allema-
gne, où on l'appela posaune. II fut indxKiuit en France
par Gossec, qui le fit entendre pour la première fois en
1773, dans son opéra des Sabines. Il possède, à l'extrémité
inférieure de son échelle , quatre notes énormes , dites
pédales, et isolées des autres par une lacune d'une quarte
augmentée : au moyen d'un piston adapté au coips de
l'instrument, et que l'exécutant fait mouvoir avec le
pouce de la main gauche en conservant la liberté de son
bras droit pour agir sur la coulisse, le facteur Sax a
comblé cette lacune, et, ajoutant ainsi au trombone les
cinq demi-tons qui manquaient à sti première octave
grave, lui a donné l'étendue de trois octaves et demif.
Il existe des Méthodes de trombone par Braun, Frœlirh,
Schiitz, Vimeux, Berr et Dieppo, etc. — Le trombone à
pistons, imaginé de nos Jours, se prête mieux aux
inflexions de la mélodie que ie trombone à coulisse; mais
il a moins d'énergie. B.
TROMPE, en termes d'Architecture, portion de votktc
en saillie, servant à porter l'encoignure d'un bâtiment
ou toute autre construction qui semble se soutenir en
l'air; telle est, par exemple, à l'église S*-Sulpîce de
Paris, la demi-tour qui contient la chapelle de la Vîen:i\
en saillie sur la rue Garancière. On nomme trompe de
voûte une pierre ronde faisant partie des voussoirs d'uue
niche ; trompe en niche, une trompe concave en forme
de coquille ; trompe en tour ronde, une trompe dont le
plan, sur une ligne droite, rachète une tour ronde par le
devant, et qui est faite en forme d'éventail; trompe sur
le coin, celle qui porte l'encoignure d'un b&timent;
trompe dans Vangle, celle qui est dans le coin d'un angle
rentrant.
TROMPE , nom donné, pendant le moyen ftge, non pas à
la trompette proprement dite, mais à une trompette
longue que les Grecs appelaient strombos. Puis on l'ap-
pliqua au cornet à bouquin (K. ce mot). On ne connaît
plus aujourd'hui que la trompe de chasse, impropre-
ment nommée cor de cîuisse, instrument en cuivre
inventé en 1680. Malgré le peu de justesse et le son
rauque de quelques-unes de ses notes, l'éclat et la force
de sa sonorité la rendent très-propre à l'emploi qu'on en
fait à la chasse. La trompe est en ton de ré; la musique
qu'on écrit pour elle est toujours en ut.
TROMPE-L'GEIL, nom donné à des tableaux où cer-
tains objets sont représentés avec une vérité qui fait
illusion. On connaît l'histoire des raisins de Zeuxis, que
les oiseaux vinrentbecqueter,et celle du rideau de Par-
rhasius, qui trompa Zeuxis lui-même. Le Baasan peignit
sur un tableau un livre avec tant de vérité, qu'Annibal
Carrache y porta la main pour le nreoifTe; celul-ci re-
présenta un cheval, dont la vue m hennir un cheval
TUO
1749
7m
?ivant. Jean Rosa, peintre de Técole romaine, peignit
des lièvres qui attirèrent des chiens. Des paons se mirent
à becqueter un fraisier que Bernazzano avait peint dans
une basse-cour. Jean Contarino fit un portrait si ressem-
blant, que des chiens et des chats le prirent pour leur
maître, et vinrent le caresser. Le buste d'un abbé peint
par Ch. Coypel, découpé et placé deiTière une table, pro-
duisait une illusion telle, que plusieurs personnes le
saluèrent. Gennari et Bramantino furent aussi très-ha-
biles à exécuter des trompe-rœil. Les peintures en gri-
sailles de la grande salle de la Bourse de Paris sont des
trompe-rœil. Enfin les Panoramas sont la plus vaste ap-
plication que Ton ait faite des peintures en trompe-rœil.
TROMPETTE, en italien tromba, instrument de mu-
sique à vent. C'est un tube droit en cuivre, sans trous ^
ni clefs, à petit pavillon, et avec lequel on produit des
sons différents par la pression plus ou moins forte des
lèvres sur l'embouchure. La trompette, employée d'abord
seulement pour les fanfares de la cavalerie, puis admise
dans les orchestres, sonne une octave au-dessus du cor, et
peut, comme lui, changer ses intonations au moyen de
tubes additionnels, qui permettent d'allonger le corps prin-
cipal de l'instrument ; mais elle n'a cfue des sons ouverts,
et sa qualité de son est plus argentine, plus claire, plus
pénétrante. La musique pour trompette est toujours notée
en ton d'ut et sur la clef de sol. Les parties de trompettes
qu'on voit dans les opéras de Lulli offrent des diffîcultés
surprenantes; mais c'étaient des trompettes à trous,
dont le P. Mersenne nous a laissé la description. Au
commencement de notre siècle, on a fait des trompettes
semi-circulaires, (^ui n'étaient à proprement parler que
de petits cors ; mais leur son n'avait pas le même éclat,
et l'on ne tarda point à les abandonner. Le clairon
{V. ce mot) est une sorte de trompette. 11 existe des Mé-
thodes de trompette par Âltenburg, Leroy, BQhl, etc. —
On a fait de nos jours des trompettes à coulisse, conser-
vant le son strident de la trompette ordinaire, tout en
donnant la possibilité de produire d'autres notes,* elles
ont été inventées par Legeran. — Les Anciens ont connu
la trompette, et ils ont eu de cet instrument bien des
variétés, dont il est difficile aujourd'hui de préciser
les différences. Jl.eB noms de plusieurs de ces trom-
pettes, clariOf claro, clarasius, ne témoignent que
de l'éclat de leurs sons. D'autres noms, taurea, cor-
nix, scUpinx, indiqueraient plutôt leurs formes : on
sait, en effet, que les pavillons des, trompettes repré-
sentaient ici une tète de taureau, là ' une tète d'oiseau ,
ailleurs une tôte de serpent. La cornix était appelée
trompette gauloise ou celtique ; la taurea, trompette
paphlagonienne. La trompette argienne était droite , et
Végyptienne recourbée. Chez les Romains, la tiiba était
la trompette droite; le lituus avait l'extrémité recourbée.
TROiffPEiTB A CLEFS, instrument de musique à vent,
dont l'inventeur, l'Anglais Halliday, au commencement
du XIX* siècle, croyait faire un perfectionnement de la
trompette droite, mais qui est en réalité un instrument
nouveau, dont le timbre et la qualité de son ont peu
d'analogie avec ceux de cette trompette. Halliday nomma
son instrument bugle-hom, d'où l'on a fait simple-
ment bugle. 11 en existe des Méthodes par Schiltz, par
Baissières-Faber, etc.
TROMPETTB (Jeu de), un des jeux d'anche de l'orgue.
Ses tuyaux sont coniques, et en étain fin ; il a 2 mètres
60 centibi. (8 pieds). Ce jeu, l'un des plus brillants et
des plus éclatants de l'orgue, et auquel on donne toute
l'étendue du clavier, sonne à l'unisson du huit-pieds
ouvert, et parle une octave plus haut que la bombarde.
Les grandes orgues ont deux et quelquefois trois trom-
pettes sur le même clavier; on en met aussi une dans le
positif. Quand on se sert de ce jeu à la pédale, il prend
le nom de pédale de trompette; il doit alors avoir plus
d'étendue dans les basses que les autres trompettes : il
descend jusqu'à VF ut fa du ravalement, ce qui donne à
son tuyau une hauteur de 3 mètres 90 centim. (12 pieds).
Le jeu de trompette employé au clavier de récit est
nommé trompette de récit; on le fait alors de toute l'é-
tendue du clavier. F. C.
TROMPETTB MARINE, ancien instrument de musique,
consistant en une caisse de bois triangulaire, sur l'une
des faces de laquelle s'étendait une grosse corde de
boyau soutenue par un chevalet. On en jouait en pres-
sant la corde avec le pouce de la main gauche, et en fai-
sant agir de la droite un archet pour la faire vibrer avec
une plaque de verre ou de métal collée à la table. Le son
avait de l'analogie avec celui qu'on tire de la conque du
mollusque appelé Triton.
TROMPETTE PARLANTE, uom douné quelquofois au porte*
voix dont on se sert en mer.
TROMPILLON, en termes d'Architecture, pierre qui
sert de base à une trompe, et en forme pour ainsi dire la
clef.
TRONC, nom donné quelquefois par les architectes au
fût d'une colonne, et à la partie d'un piédestal qui est
entre la base et la corniche.
TRONC , coffre en bois qu'on place dans les églises pour
recevoir les aumônes des fidèles. Cet usage ne remonte
pas en France au delà du xu* siècle.
TRONCHINE , robe que les dames du xyiii» siècle se
faisaient faire pour les promenades du matin ordonnées
par le médecin Tronchin.
TRONE (du grec thronos)^ siège élevé où les souve-
rains prennent place dans les occasions d'apparat. On y
monte ordinairement par plusieurs degrés, et il est sur-
monté d'un dais. Chez les anciens Grecs, le trône ne
dovint un attribut de la royauté que dans les temps pos-
térieurs à Alexandre; jusque-là on l'avait réservé aux
Dieux.
TRÔNE éPISCOPAL. V, ChAIRB ÉPISCOPALE.
TRONES (Les). T. Anges.
TROPAIRE, nom donné, dans l'Eglise grecque, à un
livre contenant des mélanges d'hymnes, de répons et
d'antiennes.
TROPE,terme de Rhétorique. V. Figdrb.
TROPE, en termes de liturgie, désignait autrefois toute
partie intercalée dans une pièce de plain-chaut, pour en
développer ou en expliquer le texte. On regarde les traî-
nées de notes sur la dernière syllabe des Kyrie comnui
dos tropes dont les paroles ont été retranchées. — Trope
a été encore synonyme de mode ou ton d'église.
Z^9SJ?^^^r, I V. ces mots dans notre Dictionnaire
TROTTOIR^ chemin élevé de 0"%20 environ au-dessus
de la voie publique, et qu'on pratique le long dc:)
rues, des quais et des ponts, autour des places publi-
ques, pour la commodité et la sécurité des piétons. Les
trottoirs étaient connus des Anciens : on en voit ^ Pf»«* -
péi. Le peu de largeur des rues et la multitude des voi-
tures empêchèrent longtemps d'en établir dans les villes
modernes : les premiers trottoirs furent faits à Londres
vers le milieu du xvni* siècle. L'exemple ne fut suivi à
Paris qu'au commencement du xix*, sous l'administra-
tion du préfet Chabrol de Volvîc : on dalla d'abord les
trottoirs en lave poreuse de Volvic (Puy-4e-Dôme), puis ,
comme cette lave n'était pas assez dure, on lui substitua
les granits de Normandie; on employa aussi la tuile, les
cailloux roulés, la brique posée de champ ; aujourd'hui
l'on se sert beaucoup d'asphalte étendu sur un lit de
béton, ou de petits pavés de grès, avec bordure de gra-
nit ; mais la meilleure construction, et la plus fréquem-
ment employée à Paris, est la dalle de granit. La loi du
17 juin 1845 permet de déclarer d'utilité publique l'éta-
blissement de certains trottoirs, et de mettre à la charge
des propriétaires riverains la moitié de la dépense.
TROUBADOURS (du provençal troubar, trouver, in-
venter), poètes qui ont employé la Langue d*oc (V. ce
mot) pendant le moyen âge. L'institution des Trouba-
dours est d'origine celtique. En effet, leur caractère était
grave, et fort éloigné de cette fadeur que l'ignorance
leur a prêtée depuis : on s'aperçoit, en lisant leurs poé-
sies, que ce caractère était précisément celui des Bardes
bretons, dont le rôle était si important auprès des rois
celtes, et dont le rang et les privilèges sont réglés par un
titre spécial du Code du roi Hoël. Sans ce caractère qui
eut certainement quelque chose de sacré à l'origine, où
les Troubadours auraient-ils puisé la hardiesse de leurs
sirventes satiriques {V, Si rv ente)? L'ivresse avec la-
quelle ils chantent la poésie des combats, l'enthousiasme
avec lequel ils font l'éloge des braves, les amers sar-
casmes dont ils poursuivent les couards, sont autant de
traits communs aux Troubadours et aux Bardes, et qui
doivent faire regarder les premiers comme les descen-
dants des seconds. L'Origine germanique de quelques
Troubadours, tels que Bertrand de Born, n'est pas \xn^
objection : les conquérants adoptèrent, on le sait, plus
d'une institution des peuples conquis. — La poésie n'a
pas fleuri dans tout le Midi de la France avec la même
grâce, le même éclat; la Guionne, TAuvergne et surtout
le Limousin ont produit les premiers et les meilleurs
Troubadours. Quand on embrasse dans son ensemble le
développement général de cette poésie, on y distingue
cinq écoles ou centres littéraires pr:iiripa*.ix, nn^quclt
TRO
1750
TRO
eorrespondetit autant de groupes de poStes. L*j
d'Aquitaine se subdivise en t !• École lÂmousine,
VEcoîe
à la-
quelle appartiennent Guillaume de Poitiers, Bertrand de
fiom, Gftuoelm Faydit, Elias Cairels de Sarlat, Bernard
de Ventadour, Elias d*Ussel, Hugues de Saint-Cyr, Gas-
pard de Puycibot, G. de Borneilh, Gir. de Salignac,
Hugues de La Bachellerie; 2® École de Gascogne, dont
font partie Geoffroy Rudel, Arnaud Daniel, Elias de Bar-
Jols. RamoDd Jordan, Gir. de Calanson, Arnaud de Mar-
Teilh, Aymar de Belvezer, Marchebrusc, Amanieu des
Escas, Gercamons, Elias Fonsalada, Gaubert Amiels ,
Guillaume de La Tour; 3^ École de Saintonge, où Ton
Toit Savarie de Mauléon, Renaud de Pons, Richard du
Barbesieux. — VÊcole d\iuvergne comprend : Pons de
Capdueil, P. du Yemègue, Guilhem de Saint-Didier,
Bertrand de La Tour, Peirols, Pierre de Maensac, Pierre
Pelissier de Mardi, Pierre Roger de Clermont, Guilhem
Adhémar de Marvis, Gavaudan le Vieux, Pierre d'Auver-
gne le Vieux, Perdigon, Pierre Cardinal, la dame Castel-
loze, Garins d'Apchier, Garins Le Brun, Gaubereau dr>.
Saintr-Leydier, le moine de Montauday, le vicomte de
Turenne. — A r^co(« de Bodes appartiennent Arnaud de
Montcuc, Deudes de Pradesen, le comte de Rodez, et
Hugues firunec. — VÉcole de Languedoc se subdivise en :
1^ École de Toulouse, où Ton remarque G. Leroux, Peyre
Remond le Preux, Aymar de Pégnilem, Peyre Vidal ^
Guillaume Anelier, Nat. de Mons; 2° École de Narbonne,
comprenant Raymond de Mirevaux, Guillaume de Ba-
laun, Guillaume Fabra^ Guillaume Riquier; 3<* École de
Béziers, que représentent Raimond Gaucelm et Ermen-
gaud. — Dans Y École de Provence, on distingue : i^ les
Provençatêao projMrement dits, Raoul de Gassin, Bertrand
d'AlIamanon, Raimbaud d'Orange, Ouill. de Montagna-
goût. Gui de Cavaillon, Folquet de Marseille, Raimbaud
de Vaqueiras, Durand de Paernes, Ricard de Noves, Ca-
denet, Guilhem Flguières, Geofl^y du Luc, Anselme du
Mostier, Bertrand de Pezars, Arnaud de Coutignac, Ray-
mond de La Tour, Guillaume de Bargemon, Rostang
Berengnier, Hugues de Loubières, Pierre de SainV-Rem^
Bonifaco de Gastellane , Albertet de Bisteron, Bertrand
de Marseille, Guilhem des Amalric, Raymond Vidal,
Raoul Bistort; ^'^ VÊcole de Vienne, représentée par
Ogiert de Saint-Donat et Folquet de Romans; 3° VÉoole
de Montferrat, à laquelle appartient Raymond de Va*
queiras. F. PaovKNÇALi (Littérature], et les ouvrages
suivants : Galvani, 08sen)azioni sulïa pœsia de* Tro*
vadori, Modène, 4830; Gidel, Let Troubadours et Pé^
trarque, 1857, fn^». E. B.
TROUBLE , en termes de Jurisprudence, interruption
faite à quelqu'un dafts sa possession. Il y a trouble de
fait, quand on nuit par action au possesseur, par exemple
en faisant labourer ou ensemencer la môme terre, en ré-
coltant les fruits, ou en empêchant le possesseur de le
faire ; trouble de droit, lorsque, sans ftdre obstacle à la
{possession de fait, on empêche qu'elle ne ioit utile pour
a prescription, comme quand on fait signifier quelque
acte au possesseur pour interrompre sa possession. Le
propriétaire ou bailleur est tenu d'indemniser le loca-
taire ou fermier troublé dans sa jouissance {Code NapoL.
art. 1725-26).
taoufiLi Ou TRDBLB, filet en forme de poche, monté sur
un cercle ou un ovale, traversé par une perche qui en
forme le manche, et avec lequel on pèche le long des
rivages en troublant l'eau. Un troubleau est une petite
trouble.
TROU DE CHAT, nom donné, dans la Marine, aux ou-
vertures qui se trouvent des deux côtés intérieurs des
hunes de mftt d'un grand bâtiment, et par lesquelles pas-
sent les hommes qui montent au haut du mftt« Les An-'
glais disent trou du lâche, parce que les jeunes gens pas-'
sent timidement par là*
TROU DE LOUP, nom donné, dans l'Art militaire,
aux excavations qu'on fait sur trois rangs autour d'une
redoute, pour en rendre les approches plus difficiles à
l'infanterie et impraticables à la cavalerie.
TROU-MADAME, jeu d'adresse auquel on joue aven
de petites boules d'ivoire, qu'on tAche de pousser dans
des ouvertures en forme d'arcades plantées sur une table
et marquées de différents chiffres.
TROUSSEAU (de l'allemand tross, bagage], ensemble
des effets d'habillement qu'une fille reçoit de ses parents
on se mariant. D'après l'ancien Droit coutumier de la
France, les filles mariées, quand elles étaient appelées à
la succession de leurs père et mère, devaient rapporter
leur trousseau à la masse de la succession. Le Cooe iVo-
|K)/0on décide que, si le U'ousseau est estimé une certaine
somme par le contrat de mariage, cette somme ûdt parti*
de la dot et en partage les priviléoes.
TROUSSES, nom qu'on donnait autrefois à de largci
chausses.
TR0US30UÈRE, vieux mot qui désignait l'agrafe ser-
vant à relever une robe.
TROUVÈRES. K. ce mat dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire,
TROUVÉS (Enfants, Objets). V. Entants, Obiets
TROOViiS.
TROYES (Éstlise de S^-Pibrrb, à), église cathédrale,
l'une dee plus belles de la Champagne , commencée en
1208, et achevée seulement en 1492. L'abside, le chœur et
les chapelles absidales sont en style ogival primitif; le
transçpt et quelques piliers de la nef, en style secon-
daire ; la nef, les chapelles accessoires et le portail prin-
cipal, en style tertiaire. Un ouragan renversa en 13^
un clocher qui s'élevait au centre de la croisée. Les fon-
dements du grand portail et des tours furent jetés en
1506, et Martin Cambiche, de Beau vais, fut chargé do
cette construction, que poursuivirent après lui Jean de
Soissons et Jean BaïUy. Tous les membres résistants et
épais de la construction sont en matériaux petits, iné-
gaux, de mauvaise qualité { les fondations sont composées
uniquement de mauvais râble et de débris de craie; les
meneaux, corniches et colonnes sont seuls en pierre de
taille; les voûtes sont en craie. L'extérieur de la cathé-
drale de Troyes, bien qu'inférieur dans l'ensemble à celui
de plusieurs autres monuments religieux, ne manqus
ni de grandeur ni de richesse. L'abside, avec ses arcs-
boutants et ses contre-forts couronnés de clochetons py-
ramidaux, est d'un effet pittoresaue. Une balustrade en
forme de créneaux règne autour du comble. Les flancs de
l'édifice sont obstrua en plusieurs endroits. Le portail du
transept méridional et les voûtes du chœur ont dû être
reconstruits de nos jours. Le grand portail, divisé à sa
partie inférieure en trois portiques à voussures pro-
rondes, séparés par des contre-forts solides, offre toute la
richesse de décoration qui caractérise l'art voisin de la
Renaissance. l\ a 53" de largeur et 33" de hauteur. La
rose flamboyante peut soutenir la comparaison avec les
plus belles. Une seule tour, celle du Nord, a été achevée,
en 1648; elle atteint une élévation de 64"; elle est car-
rée, et présente des tourelles de 10™ au sommet de deux
de ses angles. Son étage supérieur, terminé par un cou*
ronnement corinthien, est en désaccord avec le reste de
l'édifice. Le portail du croisillon septentrional, construit
au XIII* siècle, est divisé horizontalement par des balus-
trades en trois étages : le porche, une colonnade ogivale
formant fenêtres, et une rose de style rayonnant. Il a
pour pignon terminal un pan de bois recouvert d'ardoises
et tout à fait disgracieux.— L'intérieur de l'église, à 5 nefs,
tout badigeonné en 1770, se distingue par la richesse de
la perspective et l'élégance des formes t la longueur totale
dans œuvre est de iSO met. environ ; la largeur, au tran-
sept, de 48 met. \ la hauteur sous voûte, de 30 met. Lss
piliers sont flanqués de légères colennettes destinées à
supporter les retombées des voûtes; autour de l'abside,
ce sont de grandes colonnes mohocylindriques accompa-
gnées de deux colon nettes qui ne leur sont réunies que
par les bases et les chapiteaux : sur ces derniers s'élève
un faisceau de trois oolonnettes appliquées, qui soutien-
nent les voûtes du sanctuaire, et dont le fût est inter-
rompu par des dais hexagonaux recouvrant autrefois des
statues. La galerie ou triforium est à claire-voie. Les
fenêtres qui éclairent la cathédrale de Troyes sont larges,
divisées en quatre compartiments par des meneaux que
surmontent des roses à six feuilles, et garnies de magni-
fiques verrières de toutes les époques. Les vitraux des
roses du transept sont également très-remarquables. Les
chapelles absidales sont admirables de tous points, sui^
tout celle de. la S'* Vierge; les chapelles des coUatémux
sont moins grandes, et attirent peu l'attention par leur
architecture. B.
movas (Église 8^ Pantal^ôn, à), édifice construit en
style de la Renaissance, et commencé en 1527. Le portail
seul est du xvui* siècle. L'intérieur de cette église est
digne d'intérêt. Les piliers qui soutiennent les voûtes
sont ornés de dais richement sculptés, abritant des sta-
tues un peu moins grandes que nature et disposées sur
deux rangs. Oh attribue ces statues à f. Gentil et & son
associé Dominique. Les arcades de la nef et du chœur out
été garnies de 0 grands tableaux de Carré, élève de Le-
brun, représentant la vie de S^ Pantaléon, ainsi que de
deux tableaux d'Herluison, qui représentent la Nativité et
le Christ au tombeau. De bonnes grisailles, figurant Ibis*
TRO
1751
UN
toira de Daniel, celle do J.-C, et diverses batailles, ont
été peintes aux fenêtres pendant le xvi* siècle par Maca-
die et Lutereau. La 1'* chapelle k droite de la nef, dispo-
sée en Calvaire, contient plusieurs groupes remarquables,
une Mère de pitié, Pilate montrant le Christ aux Juifs, et
la Vierge soutenue par la Madeleine et S^ Jean. Le re-
table de la chapelle quf suit immédiatement est décoré
d'un groupe en pierre représentant 6^ Grépin et 3^ Gré-
pinien occupés à fabriquer des chaussures, tandis que
des soldats viennent les saisir. B.
TROYPS (Église S^-Urbain , à). Gette ancienne collégiale
est un des chefs-d'œuvre de Tarchitecture ogivale; elle
rappelle par sa légèreté, par la pureté et Téiégance de
son style, la S^«-Chapelle de Paris. Elle fut fondée en
i2C3 par le pape Urbain IV, qui voulait perpétuer le
souvenir de son origine dans une ville où il était né d*un
pauvre cordonnier. L'édiÛce n*a pas été achevé : il ne
contient que le chœur, les transepts, et les premiërrs
travées de la nef, dont la voûte a une hauteur de 36 met.
A envisager la largeur des quatre piliers de la croisée,
ils devaient supporter une tour probablement fort élevée.
Deux porches profonds, bien abrités, donnent entrée
dans les doux branches de la croix i au-dessus du rez-
de-chaussée, à la hauteur de 3"*,30, toute la construction
ne présente plus qu'une lanterne vitrée, d'une extrême
légèreté, maintenue par des contre-forts pleins Jusqu'aux
chéneaux supérieurs. L'architecte de S^-Urbain a fait sa
b&tisse résistante en pierre commune, dite de Bourgogne,
sorte de moellon piqué, et tout ce qui n'était qu'acces-
soire, décoration, chéneaux, claires-voies, en pierres de
Tonnerro, basses de banc, très'fermes, mais de grandes
dimensions en longueur et en largeur ; ces pierres ne
sont réellement que des dalles do champ ajourées. La
claire-voie du sanctuaire est un charmant monument de
l'art du xiu" siècle, qu'on a eu de nos Jours la malheu-
reuse idée de masquer par une énorme décoration de
sapin et de carton^pierre peinte en blanc. B.
TROYBS (Église S^*-MAOBLBiNB,à)» Cette église est la
plus ancienne de la viUe^ car on y remarque des relies
d'architecture du .)îii* siècle. Son plan fbrme une croix
parfaite. A droite du portail s'élève une tour haute de
33 met. On remarque, k l'intérieur de l'édifice, un ma-
gnifique Jubé, construit au commencement du xvt* siècle
par un maître maçon de Troyes, nommé Jean Guaylde ou
Gualdo. Il consiste en une grande arche, dissimulée der-
rière des claveaux pendants qui forment un feston hori-
zontal de trois arceaux gothiques \ de sorte que l'aspect
de la construction est celui d'une large plate-uande. Une
incroyable profusion de nroderies, de petits dais et de
pinaclea garnissent la face de ce balcon aérien, jeté de la
façon la plus hardie, à une hauteur de 6*,45, sur un écar«>
toment de li"*,70. Pour résister à la poussée de l'arche,
les deux piliers contre lesquels il s*appuie ont dû être
enveloppés dans des massifs où l'on a sculpté des niches
et des tableaux dans le goût du jubé lui-mômé. Les
vitraux des chapelles qui entourent le sanctuaire sont
remarquables par leur composition et l'éclat de leurs
couleurs. B.
ThOYss (Le Roman de) , poème de Benoit de Sainte-
Maure. Le préambule en est curieux i l'auteur déclare qu'il
suivra de préférence Darès le Phrygien, et non pas Ho-
mère, parce que celui-ci a rempli son poflme de fables
en faisant combattre les dieux et les déesses. Ce passage
prouve que les ouvrages d'Homère n'étaient point incon-
nus des Trouvères. Benoit de Sainte-Maure nous apprend
que l'histoire de Troie n'avait pas encore été exploitée t
en eflfet, les autres poëmes sur le môme sujet paraissent
avoir été composés après la première moitié du xiii* siè-
cle. Benoît de Sainte-Maure transforme les héros grecs et
troyens en chevaliers du moyen âge. Son Roman dé
Trouêt est dans un magnifique manuscrit* à la Biblio-
thèque nationale de Paris. Y* Hiitoirê littéraire de la
France, t. XIX. H. D.
TRUBLE, filet. V. Troublb.
TRUC (de l'italien trucco)^ grand billard plus long
et plus large que les billards ordinaires; — sorte de ca-
mion ou plate-forme montée sur des roues, où, dans les
gares de chemins de fer, on élève, à l'aide d'un méca-
nisme, ies voitures qui doivent être transportées i -^
appareil en usage dans les thé&tres pour faire mouvoir
certains décors et exécuter des changements à vue.
TRUCHEMENT. 4^. DRôoMAfi, Interprètb.
TRUMEAU, partie pleine entre deux fenêtres, ou entre
deux baies de portes.-^ Le mot se dit aussi du parquet de
glace qui est placé au-dessus d'une cheminée.— Dans l'ar-
sliitecture religieuse, on appelle encore trumeau le petit
piller qui sépare en deux les portes de certaines églises,
et auquel est adossée ordinairement une statue. Dans de'
vieux titres, ce pilier est désigné sous le nom d'estan*
TRUMËUÈRES, pièces d'armure, les mêmes que loi
Grèves.
TUnULAIRES (Ponts). V, Pont.
TUDESQUE ^Langue). V. TnéonsQuEi
TUDOR (Arc). V, Aao Tunoft.
TUGUK. V, Tedgué.
TUILE. Les couvertures faites on tuiles sont d'une
grande solidité, mais elles sont lourdes , surchargent les
bâtiments, et imposent des dépenses plus considérables
en murs de soutènement et en charpentes. On nomme
tuiles plates ou à crochet celles dont on se sert pour cou-
vrir les maisons; tuiles faîtières ou courbes, celles qui
sont larges, de forme circulaire, et destinées à couvrir les
faltageè; tuiles cornières ou girofinéess celles qui se met-
tent sur les angles, arêtes ou encoignures. Depuis quel-
ques années on emploie des tuiles à recouvrements sur
trois côtés, dont l'ensemble forme des quadrilles en
losanges, et qui ne laissent aucun passage pour les neiges
chassées par le vent. On se sert aussi de tuiles plissées,
qui ont le même avantage. Ces tuiles , mieux fabriquées
que les tuiles plates, sont moins épaisses, moins lourdes
et tout aussi solides.
TUILERIES (Palais des). V. notre Dictumwûn d» Éio*
graphie et d* Histoire*
TULLE (Église S^-Martin., à). La plus grande partie
de cette église cathédrale ofifre les caractères architecto-
niques de la fin du ki* siècle et du commencement du
xii*. Elle a toute la gravité du style romano-bysantln. Son
plan est celui de la basilique, sans chœur ni transept. La
construction extérieure est lourde et pauvre d'effet, à l'ex-
ception de la tour et de sa flèche de pierre, une des plus
belles œuvres de cette espèce, bâtie au temps de la Re^
naissance.
TULLIANUM. ) V* notre Dictionnaire de Bwgraphi»
TUMULTE. I 9t d'Histoire.
TUMULUS, mot emprunté du latin t et qui désigne une
colline factice^ un amas de terre ou de pierres en fbrme
de cône, entouré ou non entouré de fbssés ou d^un cercle
de pierres, et ayant servi de tombeau chee les peuples
anciens. On trouve des constructions de ce genre uans
toutes les parties du monde \ elles recouvrent souvent
des cercueils de pierre , des ossements^ des armes, des
idoles, des vases et ustensiles. Les noraghes de la Sar-
daigne, les barrows de l'Angleterre^ les galgals de la
Gaule, les kourganes de la Russie, les ohullpas du Pérou,
les stupas de l'Inde (V. ces mots)^ sont des tumulus. Les
tumulus ont reçu, dans certaines localités de la France,
les noms de Pujols et de Puys-joliSé
TUNDRA4 c-â-d. steppe de marais, nom que les
Russes donnent aux plaines immenses qui bordent la
mer Glaciale* Ce sont des terrains marécageux^ en partie
couverts de mousse*
TUNIQUE , vêtement des Anciens. Fi notre Diction*
naire de Biographie et d* Histoire.
TUNiQUB , redingote d'uniforme, qui a été substituée à
l'habit dans la plupart des armées européennes pour les
troupes d'infanterie. Elle a été aussi introduite dans quel-
ques corps de cavalerie. —La tunique est aussi l^uoiforme
des élèves internes des Lycées.
TUNIQUB, habillement que les évoques revêtent sous la
chasuble, quand ils ofiiclent pontiflcalement \ — par-deS"
sus richemeot orné, en forme de manteau, que portent
les évoques ; — dalmatique des diacres et des sous^oiaores.
V. Dalmatique.
TUNNEL, mot anglais qui veut dire tuyau^ entonnoir.
et par lequel on désigne tout passage souterrain pratiqué
à travers une montagne ou sous une rivière. Les tunnels
sont des ouvrages tr&-dispendieux : on estime que, dans
ceux qu'on étsiolit pour les chemins de fër, Ift dépense
s'élève à 1 ,000 fr. par mètre de longueur. La prudence
exige qu'ils soient voûtés t en France, on construit les
voûtes en plein cintre; en Angleterre, on a adopté la
forme elliptique. Quand le terrain n'est susceptible que
d'exercer une pression verticale, on se contente de donner
aux pieds-droits un peu dMncIinaison^ et à la voûte uns
épaisseur qui varie de 0"*,70 à i"S30t quand il y a une
f poussée latérale, on supprime les pieds-droits, ti on pro-
onge la voûte Jusqu'au radier. La largeur pour an ohe»
min à deux voies est de 7'",40, et la hauteur soUs clef^
de ô"*»50. Les tunnels doivent avoir une pente pour l'écou*
lement des eaux, qu'on est toujours exposé à rencontrer.
Il en est dont la longueur est considérable : on en voi^
TDR
1752
TUR
,&n de 5 kilom. but le cUemin de Sheffield à Maachesicr;
UD de 4,100 met. à Blaisy, sur le chemin de Paris à
Lyon ; un de 4,620*", sur le chemin d*Avignon à Marseille.
Celui du chemin de fer de Chambéry à Turin, à travers
le mont Cenis, aura 12 kilom. Le plus important tunnel
sous un fleuve est celui de la Tamise à Londres (V. Tun-
RBL, dans notre Dictionnaire deBiogr. et (^Histoire)»
TUPI (Idiome). V. BBés[L (Langues du).
TUPINAMBAS (Idiome desV, un des idiomes brésiliens,
parlé dans les provinces de Para, de Maranhao, de Per-
nambouc, de Sergipe, et de Bahia. On le retrouve encore
au confluent du Bfadeira et de l'Amazone.
TURBAN (de Tarabe £u(&an) , coiffure des Turcs et de
plusieurs autres peuples orientaux , faite d*une longue
pièce de toile ou de taffetas qui est roulée et entrelacée
autour d*un bonnet. Il n*est permis de porter le turban
▼ert qu*à ceux qui sont de la race de Mahomet : les autres
turbans sont blancs ou rouges pour les Musulmans,
noirs ou bleus pour les Juifs et les Coptes. Le turban
du sultan est surmonté de trois aigrettes ; celui du grand
vizir en a deux ; les généraux n'en ont qu*une. Le turban
commence à disparaître ; il est peu à peu remplacé par
le tarbouch ( F. ce mot),
TURBINE, mot qui a été employé en Architecture
comme synonyme de tribune. Il dérive du latin turba,
foule.
TURCIES, nom donné jadis aux digues élevées pour
contenir les fleuves et empocher les inondations.
TURCOS. F. Tirailleurs.
TURDITAIN (Idiome), un des idiomes de l'Espagne
avant la conquête romaine. Les Turditains possédaient des
ouvrages écrits en vers, et se vantaient aavoir des an-
nales qui remontaient à 6,000 ans. Il n'est resté de leur
langue que de courtes inscriptions à peu près indéchif-
frables, et où les lettres grecques se mêlent à des signes
phéniciens et lybiques.
TURF, mot anglais qui veut dire gazon, pelouse, et
par lequel on désigne le terrain, effectivement gazonné,
sur lequel ont lieu les courses de chevaux.
TURGOTINËS. F. Messagbhibs.
TURLUPINADëS, insipides bouffonneries, ainsi nom-
mées de Tacteur Henri Leorand, dit Turlupin, qui en
débitait sur le thé&tre de Tnôtel de Bourgogne à Paris,
dans les premières années du xvii* siècle.
TURME. V. ce mot dans notre ùictionnatre de Biogra-
phie et d^ Histoire.
TURPIN ou TILPIN (Chronique de), ouvrage fausse-
ment attribué à l'archevêque de Reims qui mourut vers
l'an 800. Il a j^our titre : De vita et gestis Caroli magni ;
mais il est bien éloigné d'embrasser tout le règne de
Charlemagne. C'est un résumé très-sommaire des exploits
de cet empereur jusqu'à son expédition contre les Sarra-
sins d'Espagne, et encore est-il incomplet. L'histoire de
la guerre d'Espagne est le véritable sujet de la Chronique.
L'auteur raconte que Charlemagne eut un songe où il vit
S* Jacques de Compostelle lui ordonner de délivrer ses
reliques tombées aux mains des Sarrasins. Chemin fai-
sant, il recommande au prince d'élever beaucoup de
monastères pour n'être pas damné; et, après le récit de
l'expédition, il arrive à la mort de Charlemagne. — On a
cru quelquefois que la Chronique de Turpin était anté-
rieure aux premiers romans cariovingiens, et qu'elle leur
avait servi de modèle. C'est une erreur que la lecture de
l'ouvrage peut facilement dissiper : on voit que cette
Chronique est une compilation mforme, tirée des chants
populaires, dont elle reproduit rarement la grandeur et
la naïveté. Elle fut d'abord écrite en latin, et , à ce qu'on
suppose, par un moine de S'-André de Vienne (Dau-
phiné) au xi* siècle, puis traduite en français au xii*, et
de nouveau par Robert Gaguin. Des éditions en ont été
publiées par Ciampi, Florence, 1822, et par Reiffenberg,
Paris, 1836. H. D.
TURQUE (Langue), dénomination sous laquelle on
comprend Vosmami , parlé à Constantinople et dans tout
l'Empire ottoman, Voïgour du Turkestan, et divers idiomes
répandus autour de la mer Caspienne jusqu'au Volga. On
croit y reconnattre quelques racines germaniques. Ces
idiomes turcs ont avec les langues tartares, particulière-
ment avec le mongol et le kalmouck, beaucoup de res-
semblance de mots et de formes grammaticales. L'oîgour
est le plus rude dans sa prononciation, le plus simple
dans sa structure, le moins mélangé d'éléments étrangers.
n fut, le premier. Axé par l'écriture : son alphabet, ap-
porté par des moines nestoriens, est d'origine syriaque,
et analogue au sabéen ; il se trace de droite à gauche.
L'osmani!: a fait de pombreux emprunts à l'arabe et au
persan, et demandé, pour 1 expression des idées relativei
aux sciences et aux arts, on cert»n nombre de termes
grecs et italiens. Sa grammaire est simple et régulière.
11 n'y a ni genres ni article. Les substantifs se déclinent
et ont 6 cas ; leur pluriel se forme par l'intercalation
d'une syllabe particulière entre le radical et la désinence.
L'adjectif est invariable. Jjq verbe substantif est à peu
près le seul verbe irrégulier de 'a langue. La négation
s'intercale dans le corps du verbe, auquel elle forme ainsi
une sorte de voix spéciale. Certaines formes servent éga-
lement à donner à un radical le sens potentiel , causatif,
réfléchi, réciproque, etc. Les prépositions se mettent
après leur complément. La construction est très-invi r-
sive. L'accent tombe sur la dernière syllabe -des mots,
quand elle n'est pas une flexion grammaticale. Le^
Turcs occidentaux ont adopté pour leurs vers la métrique
des Arabes et des Persans. Leur alphabet comprend
28 lettres arabes, les 4 lettres que les Persans y ont ajou-
tées, et un autre caractère qui représente nos voyelles
nasales an, in, on, M. de Saolcy, après examen des in-
scriptions cunéiformes de l'Asie, a démontré que c'e^t
dans le turc principalement qu'on retrouve les débris de
l'ancienne langue des Mèdes. V, Megiser, Institutiones
linguœ turcicœ^ Leipzig, 1612, in-4<'; Duryer, Rudimenia
grammatices linguœ turcicœ, Paris, 1633, in-4*; les
PP. Bernard et Pierre, Grammaire turque ^ 1667; Sea-
man, Grammatica linguœ turcicœ , 1670, in-4° ; Meninski,
Linguarum orientalium, Turcicœ , Arabicœ , et Persicœ
institutiones, Vienne, 1680, in-4^; Holdermann, Gram-
maire turque, Constantinople, 1730, in-4<*; Vignier, É/e-
ments de la langue turque^ ibid., 1 790, in-4<>; Rhasis, Voca-
bulaire françaiS'turc , Saint-Pétersbourg, 1 828-29, în-i" ;
Jaubert» Éléments de la grammaire turque, Paris, 183-1,
in-8^; Blanchi, Vocabulaire français-turc, Paris, 1831 :
Kieffer et Bianchi, Dictionnaire turc -français, 1835,
2 vol. in-8®; Haodjeri, Dictionnaire françats-turc-pei-
san-arabe, Moscou, 1840-1842, 3 vol. in-4"; Redhouso,
Grammaire raisonnée de la langue ottomane, Paris,
1846, in-8<^, et Dictionnaire anglais-ture, Londres, 185G,
in-S»; Zenker, Grammaire turque de Kasem-beg, Leipzig,
1848; E. Bérésine, Recherches sur les dialectes turcs,
Kazan, 18.53, in-8<*; L. Dubeux, Éléments de la gram-
maire turque, Paris, 1856; Kellgrenn, Grammeùre de
la langue osmanli, IIelsingfors,1856.
TORQOB (Littérature). On a cru longtemps à la barbarie
intellectuelle des Turcs; cependant leur littérature est,
sinon originale, au moins d'une grande richesse. Un de
ses monuments les plus anciens, le Trèfle du fauconnier,
composé de trois ouvrages sur la fauconnerie, offre beau-
coup d'intérêt pour la philologie. Suivant BL de Hammer,
le nombre des poètes turcs s'àèverait à plus de 2,000; ils
imitent presque toujours des modèles arabes ou persans.
Parmi eux, nous citerons : Mohammed Tchelebi , qui a
donné une collection des légendes relatives à Mahomet :
Mescihy, poète anacréontique, contemporain de Soli-
man !<'; Liùni, qui florissait sous Soliman II le Magni-
fique, et dont on a quatre poèmes épiques ( Wamik et
Afra, Les Sages et namin, Absal et Selman, Perhàd-
Nâmèh)t ainsi que beaucoup de poèmes lyriques et didac-
tiques; Fazii, au xvi* siècle, auteur d'un poème erotique
allégorique, la Rose et le Rossignol ; B&ki, poète lyrique,
mort en lOÎM). — Dans le genre du roman et du conte,
on remarque le Houmayoun-Namèh, traduction d'une
imitation persane des fables de Bidpal, et le roman des
Quarante vizirs, par le scheick Sade. — Il existe un corps
d'histoire qui embrasse toute la dynastie régnante des
Osmanlis depuis son origine jusqu'à la fin du xviii* siècle :
il est formé d'ouvrages composés successivement par
Saad-Eddin, Nalma, Reschid, Tchelebisade, Sami , Scha-
kir, Subhi , Issi et Wasif. Le style de ces divers auteurs
est affecté, prétentieux, orné de métaphores recherchées
et de comparaisons étranges. L'historien qu'on lit peut-
être le plus souvent est Hâ(iyi-Khalfa, qui est aussi l'au-
teur d'un Dictionnaire géographique. — Pour connaître
la dogmatique musulmane, aucun livre n'est plus pré-
cieux que la Doctrine de la Foi, par Pir-AIi-el-Berkevr.
On peut étudier le Droit des Turcs dans le recueil de
fetwas ou décisions juridiques qui ont été publiées par
Mustafa-el-Koudousi , Abd-our-Rbalm, Numan-Effendi.
Dans le domaine de la philologie, on peut signaler les
Dictionnaires arabes de Djauhari et d'Asim-Effendi , le
Dictionnaire persan d'Achmet-Emin-Effendi, le commen-
taire de Soudi sur le Gulistan de Saadi , etc. V, Donado,
Letteratura dei Turchi, Venise, 1688, in-12; Toderini,
Letteratura turchesa, Venise, 1787, 3 vol.; Chabert,
Notices sur des poètes turcs, trad. du turc de Latifl ea
TUT
1753
TYP
illemand, Zurich, 1800; Hammcr, Histoire de la p:}cste
des OsinanUi, Pesth, 1836, 4 vol.
TUTELLE (du latin tuerit défendre, protéger), charge
imposée à un individu, soit par la loi, soit par la volonté
d*autrui, de prendre soin gratuitement de la personne
d'un incapable, d'administrer ses biens, et de le repré-
senter dans tous les actes civils. Sont soumis h la tu-
telle : le mineur,. Vémancipé, V interdit et le prodigue.
Notre Code distingue trois sortes de tutelle : la tutelle
légitime, légale ou naturelle, la tutelle testamentaire, et
la tutelle dative. La tutelle légitime est celle, qui appar-
tient de plein droit au père, à la mère, ou, à leur défaut,
à l'ascendant m&le le plus proche, et celle que la loi con-
fère sur les enfants admis dans les hospices à l'un des
membres de la commission administrative. La tutelle
testamentaire est celle aui est déférée par le dernier
mourant des père et mère; on la nomme ainsi, parce
qu'elle résulte le plus souvent d'un testament, mais sur-
tout parce qu'elle ne peut produire d'effet qu'après la
mort de celui qui l'a déférée. La tutelle dative est celle
qui est déférée par le Conseil de famille, lorsque le sur-
vivant des père et mère est excusé, exclu ou destitué,
lorsque le tuteur élu par le dernier mourant est dans
l'un de ces cas, ou lorsque l'ascendant le plus proche ne
peut exercer la tutelle qui lui est attribuée par la loi.
— La tutelle étant gratuite, et les devoirs qu'elle im-
pose multipliés et délicats, peu de personnes l'accepte-
raient volontairement; aussi, pour que les mineurs ne
restent pas sans défense, la loi a interdit aux personnes
désignées la faculté du refus. Elle ne reconnaît que six
motifs d'excuse ou de dispense : 1* les fonctions pu-
bliques et le service militaire; 2* la qualité d'étrangôr à
la famille, lorsqu'il y a, dans la distance de quatre my-
riamètres, des parents ou alliés en état de gérer la tu-
telle; 3° l'âge avancé (65 ans); 4<» les infirmités; 5<* le
nombre des tutelles; 6<^ le nombre d'enfants. La loi a
déterminé aussi des causes d'incapacité, d'exclusion et
de destitution : 1<* l'état de minorité; 2« l'interdiction;
3^ le sexe; 4* l'opposition d'intérêts; 5^ l'inconduite no-
toire; 6° la gestion infidèle; 7<* la condamnation à une peine
afflictive et infamante ; 8<^ la condamnation à une peine
correctionnelle pour corruption de mineurs; 9* l'inter-
diction temporaire de certains droits civils.
TUTELLE (Conseil de), conseil que le père mourant peut
nommer à la mère survivante et tutrice, et sans l'avis
duquel elle ne peut faire aucun acte relatif à la tutelle.
Cette nomination doit être faite par un acte de dernière
volonté, ou par une déclaration faite soit devant notaire,
soit devant le Juge de paix assisté de son grefi&er (Code
Napoléon^ art 391-392).
TUTELLE opnciEUSE, coutrat de bienfaisance par lequel
une personne âgée de plus de 50 ans, sans enfants ni
descendants légitimes, s'oblige à élever gratuitement un
mineur &gé d'au moins 15 ans, à administrer sa per-
sonne et ses biens, et à le mettre en état de gagner sa
vie. Ce contrat a pour but de faciliter l'adoption à ceux
qui, voulant adopter un mineur, craignent de mourir
avant qu'il ait atteint sa majorité ; car on peut adopter
après 5 ans de tutelle officieuse.
TOTËUR, celui qui remplit les fonctions de la tutelle.
Ses devoirs se réduisent à deux : i° prendre soin de la
personne du mineur, c.-à-d« pourvoir à son entretien,
veiller sur sa conduite, et lui procurer une éducation con-
venable, en rapport avec son état et ses moyens; 2° ad-
ministrer ses biens en bon père de famille, et le repré-
senter dans les actes civils, tels que les contrats, les
procès, etc. Il y a des actes qu'il a le droit de faire seul,
par exemple, passer des baux, toucher des fermages,
exercer des actions mobilières. Il en est d'autres pour
lesquels il lui Caut l'autorisation du Conseil de famille;
ce sont les actions immobilières, l'acceptation ou le refus
d'une succession, d'une donation, d'un legs. Les actes qui
ont pour objet de transiger, d'emprunter, d'hypothéquer
ou d'aliéner des immeubles, doivent être prâilablement
soumis à l'homologation du tribunal. Il est interdit au
tuteur d'accepter la cession d'aucun droit contre son pu-
pille, ou de se rendre adjudicataire de ses biens, par lui
ou par personnes interposées. Le tuteur qui a de graves
sujets de mécontentement contre le mineur peut obtenir
du Conseil de famille l'autorisation de provoquer sa dé-
tention dans une maison de réclusion. Tout tuteur est
comptable.de sa gestion quand elle finit : les père et
mère ne sont pas exceptés de cette obligation. — On
nomme Tuteur ad hoc celui aui est nommé pour un objet
déterminé : ainsi, à défaut de parents, l'enfant naturel l
ac peut se marier avant 21 ans qu'avec le consentement j
d'un liUeur ai hor, — Oîipr tontn tutelle, il y a un ft«-
brogé tuteur, dont les fonctions consistent à veiller aux
intérêts du pupille, et à les défendre lorsqu'ils sont en
opposition avec ceux du tuteur. Il est toujours nommé
par le Conseil de famille, et peut être dispensé ou ré-
voqué pour les mêmes causes que le tuteur. Il ne rem-
place pas de plein droit ce dernier lorsque la tutollo
devient vacante, et doit dans ce cas provoquer imnu'«
diatement la nomination d'un nouveau tuteur. Il a le
droit de se pourvoir contre toute délibération du Conseil
de famille qui n'a pas été prise à l'unanimité des voix.
— Celui qui a été nommé curateur au ventre {V. ce mot)
est de plein droit subrogé tuteur de l'enfant. — Le co-
tuteur est celui qui est chargé d'une tutelle avec un autre.
Autrefois, la mère qui n'avait pas 25 ans ne pouvait être
donnée pour tutrice à ses enfants qu'en faisant nommer
un co-tuteur qui demeurait responsable solidairement de
l'administration avec elle. Aujourd'hui, si la mère se re-
marie, le second mari est cotuteur et responsable.
TGTTI, mot italien qui veut dire tous. Placé sur une
partition de musique, il indique que toutes les parties
doivent se faire entendre ensemble.
TUTULUS, coiffure. F. notre Dictionnaire de Biogra-
phie et d^Histoire.
TCYAUX D'ORGUE. Ils sont faits d^étain fin, ou
d'étoffe (alliage de plomb et d'un douzième d'étain).
Quelques-uns sont en bois ; la forme alors en est carrée,
et le son plus doux. Les tuyaux sont, pour la plupart, de
forme cyhndrique. Ils sont ouverts par le haut, ou bou-
chés : pour parler à l'unisson d'un tuyau ouvert, un tuyau
bouché doit être de moitié plus court Les ieux composés
de tuyaux bouchés se nomment bourdons (V, ce mot) ; le
son en est plus sourd et plus doux que celui des tuyaux
ouverts. Certains tuyaux ont la forme de fuseau; d'autres
sont à cheminée, c-à-d. qu'ils consistent en un petit
tuyau soudé en haut d'un plus gros. On obtient un son
plus éclatant avec les tuyaux coniques, surtout si le cône
s'évase en pavillon comme une trompette ; au contraire,
la forme conique renversée donne un son étouffé. — Pour
faire parler les tuyaux, il y a deux modes : la bouche et
Vanche ( V, ces mots), — Le degré d'acuité ou de gravité
d'un tuyau dépend de sa hauteur, de sa largeur, et aussi
de la grandeur de la bouche, ou de la rapidité des vibra-
tions de la languette de l'anche. Étant donné, par exem-
ple, le 1*' tuyau d'un jeu, le plus gros, celui qui doit
donner la quarte au-dessus n'aura que les trois <|uarts
de la hauteur, la quinte aura les deux tiers, etc. ; U y a
également des calculs proportionnels pour la hauteur et
la lu^ur, et les chiffres sont invariables et nécessaires,
parce qu'ils répondent aux intervalles naturels de la
musique. — On accorde les tuyaux au moyen de la par-
tition ( V, ce mot). Si un tuyau n'est pas juste, on res-
serre ou l'on desserre légèrement la rasette pour les
tuyaux à anche, et, pour les tuyaux à bouche, on élargit
ou l'on rétrécit de force le haut du tube avec un outil
conique appelé accordoir. — La qualité du son dépend :
i*' de la matière dont le tuyau est fait; 2*^ de l'épaisseur
du métal ; 3^ de la forme du tuyau. C'est là ce qui ex-
plique la différence des timbres et là variété des réson-
nances; c'est ce qui fait que les jeux ont un caractère
spécial de flûte, de cornet, de hautbois, etc. — On dé-
signe un orgue par la longueur en pieds de son plus long
tuyau sonnant la note la plus grave du clavier. Ce tuyau
a l'une des quatre grandeurs suivantes : quatre, huit,
seize ou trente- deux pieds, selon l'importance de l'in-
strument. On dit : un orgue de trente-deux, de seize, de
huit, de quatre pieds. Les tuyaux de 16 pieds de lon-
gueur en ont 3 de circonférence; ceux de 32 en ont 6.
TYMPAN, en termes d'Architecture, espace du fronton
compris dans le triangle formé par les deux corniches
et la base. {V. Fronton). — Par extension, on a appeU
tympan de porte ou de fenêtre la surface comprise entre
l'intrados de l'arcade qui les couronne ei une ligne horr-
zontale passant par les points de naissance de cet arc. A
partir du xii* siècle, les tympans des portes d'église ont
été ornés de bas-reliefs.
TYMPAN, nom donné en l^pographie à des ch&ssis for-
més de 4 barres de bois ou de fer, et sur lesquels est
collée une feuille de parchemin ou de papier fort. On
étend sur le grand tympan les feuilles à imprimer, et le
petit tympan reçoit l'action de la platine.
TYMPANON ou TYMPAN UM, mot qui désignait, chez
les Anciens, toute espèce de tambour. Tout en conser-
vant ce sens, le mot fut encore appliqué au Psaltérion
du moyen âge.
TÏPE (du grec typos^ empreinte), empreinte faite sui
TYP
1754
TYR
ane masse molle, et, par extension, modèle, forme ori-
ginale. Dans la philosophie de Platon, les idées sont les
types des choses créées {V, Archétype, IblSat, Plato-
nismb). Bn Théologie, on nomme type tout ce qui, dans
TAncien Testament, est la figure ou le symhoie des mys-
tères de la loi nouvelle : ainsi, Tagneau pascal est le type
de Jésus-Christ, et la manne celui de l'Eucharistie. En
Littérature, un type est un caractère fortement tracé, une
puissante individualité formée par une combinaison sa-
vante de divers traits épars : Achille, Ulysse, Âlceste,
Figaro, sont des types. En Numismatique, Ja figure sym-
bolique empreinte sur le revers d*une médaille se nomme
type. Le mot type s*est dit, en Histoire, des ordonnances,
rescrits et lettres dos empereurs bysantins. Enfin, en
typographie, il est svnonymc de caractère.
TYPOCHROMIE. V. Cmomotypie, au Supplénien'»
TYPOGRAPHIE (du grec typos, caractère, eXgrapfiéin,
empreindre), motsynonymp d'fmprimeriê,
TYPOLOGIE, doctrine qui considère les pratiques du
culte des Hébreux comme autant de types d'une révéla-
tion postérieure.
TYPOMÉTRIE (du grec typos, type, et métron, me-
sure), art de composer et dMmprimer en caractères mo-
biles des cartes géographiques, des plans, des figures de
mathématiques, des profils, des dessins d*histoire natu-
relle, des caractères symboliques, etc. Des essais furent
faits au XV* siècle par Schweynheim, au xvni* par Haas
de B&Ie, au xix* par Firmin Didot à Paris, Wegener à
Berlin, Dauerkeller à Francfort ; mais RafTelsberger, di-
recteur de l'Imprimerie impériale de Vienne, est le seul
qui ait obtenu, en 1830, des résultats satisfaisants.
TYPOTONE, sorte de diapason imaginé en 1820 par oo
certain Pinsonnat. C'était une lanauette de métal fixée
sur une petite plaque de nacre ou d'argent que l*Oh pla-
çait entre les dents, et que Ton mettait en vibration an
moyen du soufile de la bouche. LMdée vint ensuite de
réunir plusieurs de ces languettes sur une même plaque
et d'en faire un Jouet d*enfant; puis on augmenta suc-
cessivement le nombre des languettes et les dimensions
de rinstrument, au point de ne pouvoir plus le Jouer à
la bouche. Alors on en fixa les lamea à un petit soufile:
qu'on faisait agir entre les mains, pendant que les doigts,
appuyant sur un clavier de quelques touches, donnaient
issue à Talr comprimé, ce qui mettait les lames en vi-
bration : on était arrivé à Vaccordéon {V, ce mot).
TYRAN. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bioffra-
phie et d'Histoire.
TYRANNICIDE (du latin tyrannus, tyran, et cddere.
tuer), meurtre d'un tyran. Le cordelier Jean Petit, après
le meurtre du duc Louis d'Orléans par Jean sans Peur,
duc de Bourgogne, en 1407, soutint publiquement qu'on
a le droit de tuer un tyran. Cette doctrine, condamnée
en 1416 par le concile de Constance, fut reproduite dans
le traité De rege du P. Mariana, Tolède, 1479.
TYROLIENNE, chanson montagnarde du Tyrol, exé-
cutée avec un mélange do la voix de tête, à laquelle oti
arrive par des coups de gosier particuliers et en fhm-
chissant de grands intervalles. — On donne le même
nom à une valse, notée k trois temps et en triolets,
comme celle du t*' acte de Guillaume Tell, par Rossini.
TYRONIENNES OU TIRONIENNES (Notes). V. Abré^
vtATioNs, sect. II, page 8.
u
u
ULM
u, 31* lettre et 5* voyelle de ^alphabet laiin, et de
ceul des langues modernes qui en dérivent* Elle n'a éiù
en usage qu'à une époque asse^ tardive; car on ne la ren-
contre pas sur les anciens monuments graphiques, In^
Bcriptioua lapidaires et médailles, où elle est remplacée
par le V. Alors même qu'elle fut inventée, on la confondit
encore avec cette lettre ! Ramus proposa, au xVl* siècle,
la séparation définitive des deux lettres; cependant, jus-
que dans la première moitié du xviit*, bien que fixées
quant à leur valeur, elles furent mêlées ensemble dans
les Dictionnaires. L'U fUt introduit dans la l^poS^ftphie
française par Zeitner, imprimeur à Strasbourg, en 1620.
Les Romains, qui n'avaient pas notre son u, pronon-
çaient ou la voyelle U , et c'est la valeur que lui donnent
encore les Italieus , les Espagnols et les Portugais t on
retrouve un souvenir de cette prononciation dans certains
mots français, qui offî'ent Vu latin remplacé par ou, tels
que sourd (de surdus), genou (de genu), moult (de
multi^s)^ doux (de dulcis). Toutefois, l'U latin ne doit
pas s'être constamment prononcé ou; car on ne pourrait
s'expliquer les changements orthographiques de m(tru-
mus en maximus, a'optumus en optimus, pessumus en
pessimus, lubet en libet. Sulla en Sylla, ni celle de divos
on divtAs, etc. ^- Vupsilon (U , v) des Grecs a probable-
ment fourni le modèle de l'U latin. Mais il est difficile
d'en déterminer le son d'une manière précise : certains
mots, tels que mus f souris ), transcription littérale du
grec, ofl'rent identité a'écriture et sans doute de pronon-
ciation, tandis nue dans d'autres, comme Lucutlus (en
grec LoukouUos)^ la transcription exige un groupe de
lettres au lieu d'une lettre simple. D'un autre côté, les
Grecs modernes donnent à Vupsilon le son de Vi, et,
dans les mots français qui dérivent du grec, il est con-
verti 'iz^^. — Les Allemands donnent ordinairement &
ru le son ou ; mais ils connaissent notre son u, et s'en
servent ouand la lettre est surmontée d'un tréma (Uber,
fur, etc.). Suivie de q, elle forme une articulation dis-
tincte, qui a la valeur de notre t). — En français, le son
u n'est pas invariablement attaché à la lettre U. Cette
lettre est presque toujours muette après le q, comme
dans que, qui, quoi, quatre, qualité, quantité, querelle,
quittance, équilibre, etc.; il n'y a d'exception que pour
quelques mots, comme équateur, aquatique, quadra-
%mre, quadrupède, etc., où elle a la valeur piionéiiquc ou,
et pour d'autre, Comme équîtattm, quëiteur, é^^Êêstre,
où elle a le son il. Elle est muette encore dans cueillir,
recueil, cefouéil, guet, guérite, guéridon, guidon, gui-
tare, etc., et ne sert qu'à Indiquer le caractère guttural
du C ou du G qui la précède. II y a des groupes de
voyelles que noustprononçons comme un aimple o, et o6
i*U tient étymologiquement la place d'une L qu'ont ftiit
disparaître les phases de la dérivation t ce sont les
groupes AU {haut, de altui: aiUnet de Alniit; fauâ», de
falsus) et EAU {château, manteau, oiseau, qui ont /Ut
d'abord châtêl^ mantel, oisel, etc.]. Un tréma sur TU,
ou l'interposition d'une H, détruit les fausses diphthon-
gués AU et OU , et rend à chaque voyelle sa valeur
propre : Ésaii, SaiU, Antinous^ AchéloUs, bahut, tohu-
bohu. Précédée d'un E, la lettre U forme avec elle un
groupe qu'on prononce en une seule articulation ^rtl-
culière , comme dans Eucharistie, Eustache, Eunpidf,
heureux, jeune^ meuble, meute, etc.; il y a exception
pour j'eus, fai eu, j'eusse, où l'on conserve au groupe
eu le son u, et pour gageure, où il se prononce de même,
en donnant au g qui le précède la valeur du j. De vieux
mots, meur, seur, veue, se sont changés en mûr, sûr.
vue. Le groupe UN représente un son nasal particulier :
brun, aucun, chacun, lundi. Le son mixte entre Tu et
Vo, adopté chez nous pour rendre les terminaisons latine»
en um, est conforme à la prononciation des Romains, car
Plante dit sans cesse equom, quom pour equum, gtiitm.—
En anglais, la lettre U possède trois valeurs phonétiques :
ou {flute\ eu (but), et tou {mute).
UBIQUISTEK. V. Ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d^ Histoire.
UBIQUITÉ (du latin ubiquitas), propriété d'ÔUe par-
tout. Dieu seul est doué d'ubiquité.
UGAB. V, OuoAfi.
tltr A^?^* / y* ces mots dans notre Dictionnaire de
ULÉMAS. \ ^^^r^P^ «* d'Histoire.
ULM (Le Munster d'), église cathédrale de style ogi-
val, l'une des plus importantes de l'Allemagne. Ccm-
mencée en 1377, elle fût interrompue en 1494, et on ne
Ta point achevée depuis. Elle est toute en brique, excepti^
la façade, qui est en pierre, et , pour que cette partie de
l'édifice put avoir un caractère de magnificence sans (klTj
un contraste choquant avec les autres, l'architecte l'n ï)^
UNI
1755
UNI
Jonnée, depuis la base jusqu'au sommet, de lignes har-
dies et élégantes. Une seule tour compose tout ce por-
tail ; les proportions en sont gigantesques, et, bien qu'elle
n'ait été élevée qu'à une hauteur de il2 mot., au lieu de
158 qu'elle devait avoir, l'effet en est très-imposant. Sa
base forme un porche à 3 portes de hauteur égale, haut
de 15 met., profond de 2 met., orné de bas^reliefs et de
statues du xv* siècle. Avant d'entrer dans l'église, on tra-
verse encore un vaste portique, qui supporte l'orgue. Tout
l'édifice intérieur a 162 met. de longueur, 68 de largeur,
47 de hauteur, et est divisé en 3 nefs. Les piliers de la
nef majeure sont tout couverts de sculptures exquises,
qui ne se répètent Jamais. Les œuvres remarquables que
contient la cathédrale d'UIm sont : un baptistère, sculpté
dans le style de transition de l'art gothique à l'art de la
Henaissance; la chaire en pierre, œuvre de Syrliu ou
SQrlem le fils, artiste de la localité, et dont le dais, aussi
élevé que la voûte même de l'église, représente un petit
escalier qui tourne dans un berceau de trèfles et qui se
rétrécit à mesure qu'il s'élève; les stalles du chœur,
sculptées de 1460 à 1474 par Syrlin le père, et où sont
représentés, en trois étages, les personnages célèbres du
paganisme, ceux de la Bible, et divers sujets du Nou-
veau Testament; le tabernacle du mattre-autel, sculpté
en marbre en 1469 par Adam Ki'afil, et qui forme une
riche spirale de 30 met. de hauteur; les vitraux du
chœur, peints en 1480 par Hans Wild et Cramer; les
Tonts baptismaux , exécutés par Syi !in le père ; la cha-
pelle Besserer, intéressante par ses vieux vitraux et ses
vieilles peintures. B.
ULTIMATUM (du latin ultime, dernier), mot qui dé-
signa» dans les relations internationales, une résolution
définitive et irrévocable à laquelle s'arrête un gouverne-
ment au sujet d'une chose en litige, une condition sans
Tacceptation de laquelle il sera impossible de s'entendre.
Signifier un ultimatum , c'est faire acte d'intimidation ,
c*est intimer un ordre que devra suivre le recours à la
iorce.
ULTRA. ) Vt ces mots dans notre Dictiof^
ULTRAMONTAINS. \ nairê de Biogr. et d'Histoire.
ULTRA PËTITA, c-à-d. en latin audtlà de ce qui a
été demandé; mots qui s'emploient, en Jurisprudence^
cour désigner ce qui a été accordé par le luge sans avoir
été demandé par la partie. Les Jugements ou il a été ac-
cordé ultra petita peuvent être rétractés (Code de Pro-
c«dur0, art. 480).
ÙBI&O. V. ce mot dans notre Ùktionnaire de Biogrch
phie et d'Histoire»
UNCTUARIUM. V. Baiws.
UNDA-MARIS, c.-à-d. en latin eau de la mer; nom
d*un Jeu d*orgue à anches, de huit pieds, accordé un peu
plus haut que les autres Jeux, et formant 4 à cause de
cela, une sorte de battement qui a quelque analogie avec
le battement des flots.
UNIFICATION , action de s'unir à un autre être de
manière à ne plus former qu'un avec lui. L'unification
avec Dieu f en grec aplosiSt enôsis) était la fin dernière
pour les Néoplatoniciens et pour le philosophe chinois
Lao^tseu.
UNIFORME t mot employé substantivement depuis le
siècle dernier seulement, pour désigner l'habit mili'
taire, qui est le même pour tous les nommes du même
corps. Il s'applique, non-seulement à l'habillement pro-
prement dit, mais aussi à la coiffure, à l'équipement ,
aux marques dlstinctives, à l'armement, au harnache-
ment {V, Costume). — Par extension, le mot uniforme
se dit aussi du costume des fonctionnaires publics autre
que la robe.
UNILATÉRAL (Contrat). V. Contrat.
UNION (Contrat d'). K. Faillite.
omoN DOUANIÈRE* F. ZoLLVBBBiN, dans notre Diction*
naire de Êiographie et d'Histoire,
UNIPERSONNEL (Verbe). V. Impersonnel.
UNISSON, en termes de Musique, rapport de deux
sons absolument semblables entre eux pour le degré,
l'intensité et la durée. L'unisson est produit par un égal
nombre de vibrations de deux corps sonores dans un égal
espace de temps.
UNITÉ. Au sens philosophique , c'est une notion qui
se présente souvent, à différents titres : l'Unité de Dieu,
l'Unité de Tàme humaine (V. Dieu et Ami) sont tout
autre chose que des hypothèses; la première est démon-
trée par la raison , la seconde attestée par l'observation
intérieure* D'ailleurs, ni en Dieu ni dans l'homme, l'unité
substantielle n'exclut la multiplicité et la variété des
Attributs I et une formule, dont on a pcut-ôtrc abusé,
mais de soi fort exacte, assigne l'unité dans la variété, m
réciproquement , comme le principe de tout ordre et la
loi de toute existence. 11 n'est point d'être, en effet, qui
n'ait son unité; et, d'un autre côté, l'unité absolue sans
aucune variété, en d'autres termes' la substance sans
attribut, n'est qu'une abstraction à peine intelligible pour
la raison pure. C'est pourtant à ce principe, porté au plus
haut degré de généralisation possible, que quelques sys-
tèmes philosophiques ont essayé de tout ramener. Cos
systèmes sont les systèmes panàiéistes anciens, la philo-
sophie de l'école d'Ëlée, le Platonisme poussé à ses con-
séquences extrêmes, et surtout le Néoplatonisme alexan-
drin {V. ÊLifi, Platonisme, Alexandrie — École d').
L'Unité Joue encore un grand rôle, quoique moins ex-
clusif, dans la philosophie mathématique des Pythago-
riciens (V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire), Les Pythagoriciens, qui considéraient le
nombre comme le principe substantiel des êtres, et
aussi comme la cause de leurs modifications et de leurs
états divers, rapportaient, suivant ce que dit positive-
ment Aristote, le nombre lui-même à l'Unité, comme à
son origine; et dans la liste des principes opposés deux
à deux, par lesquels quelques-uns d'entre eux expli-
quaient l'existence et l'harmonie du monde, on trouve
encore l'unité comme le contraire de la pluralité, à côté
du fini et de l'infini , de l'impair et du pair, du repos ot
du mouvement, etc. B — b.
UNITÉS (Les trois). Les vers de Boileau (Art poéL,
ch. m) sont la définition la plus précise de ce qu'on ap-
pelle, dans l'art dramatique, les trois unités :
Qu'en tm lieu, qu*en tin jmtr un seul fait accompli
Tienne Jusqu'à 1a fin le tbéfttre rempli.
C'est à ce précepte, entendu souvent dans son sens le
plus étroit et le plus rigoureux, que se sont généralement
asservis les tragiques français. Ils n'ont produit sur la
scène que des événements qui pussent s'accomplir en
auelques heures \ tout au plus ont-ils osé réduire, sur le
thé&tre, à la durée d'une représentation, des faits qui
eussent, dans la réalité, rempli la longueur d'un Jour; et
tel est le plan sur lequel ils ont uniformément réglé la
marohe de leun pièces, que le drame le plus compliqué
par la multipliciîâ des incidents ou la lutte des passions
opposées n'a eu, pour s'exposer, se nouer et se dénouer,
quune seule scène toujoura la môme, temple, palais,
maison privée, appartement, simple vestibule ou anti-
chambre. Ainsi, chose étrange I les fondateura du théÀtre,
en France, empruntaient aux Espagnols ou aux Grecs la
tragédie, et, sut la foi d'Aristote, ils se refusaient systé-
matiquement les libertés dont les uns et les autres
avaient usé. En effet, les Espagnols et, en général, les
modernes, n'ont pas connu les trois unités ; Lope de Véga,
Shakspeare, Schiller et Qœthe les ont violées comme à
plaisir; et les tragiques arecs, dont les chefs-d'œuvre
avaient précédé la venue du prétendu législateur de l'art
dramatique, sont loin de les avoir toujoura observées.
Ajax, par exemple, dans la tragédie de Sophocle qui porte
son nom, se tue, aux yeux des spectateura, sur un coin
écarté du rivage, et loin de la scène où tout à l'heure il
dOplorait avec amertume le déshonneur où l'avait Jeté un
insiiiut de folie. Aristote lui-môme n*a pas formulé la
règle en toutes lettres : seulement, en comparant la tra-
gédie et l'épopée, il remarque que la première s'efforce
de mesurer sa longueur « sur une révolution de soleil ou
à peu près, » tandis que la seconde ne s'impose « aucunes
limites précises. » Comme il n'a prescrit nulle part en
termes plus formels l'unité de lieu, les trois unités, ou
du moins celles du lieu et du temps, sont d'invention
moderne et presque exclusivement française.
Toutefois, il ne manque pas de bonnes raisons pour les
Justifier, sinon pour les imposer malgré tout à tous les
sujets. Rien n'empôche, en effet, d'envisager la tragédie
comme un moment suprême où la destinée des peraon-
nages. Jusque-là suspendue, va s'accomplir enfin; où
des passions rivales viennent se chercher, se rencontrent
ot se livrent un dernier combat; où quelque événemeni
imprévu suscite tout à coup, dans l'&me d'un héros, entre
des sentiments opposés, une lutte violente, mais d'un
moment, et qui constituera tout le drame. VOEdipe à
Colone de Sophocle, VAthalie de Racine, le Cid de Cor-
neille, sont trois tragédies conçues et traitées sur ce
modèle. ÔËdipe arrive près du bourg de Colone ; là il ap-
prend qu'il est entré dans le bois sacré des Euménides,
où, selon la promesse de l'oracle, doit s'achever avec sa
vie la série de ses longues et douloureuses épreuves. II
adresse sa prii'nc aux redoutables déesses; il refuse de
UNI
1756
URB
suivre Créon, son beau-frère, qui roulait le ramener h
Thèbes ; il maudit les fils qui !*ont délaissé ; il remet ses
lUIcs entre les mains de Thésée, et enfin laisse aux Athé-
niens, comme récompense de leur hospitalité, son tom-
beau, gage mystérieux de victoires futures. Les trois
unités ne sont-elles pas dans Tessence môme de ce sujet?
Quelques heures, ma théâtre comme dans la réalité, ne
suftisent-elles pas à Œdipe pour en finir avec ses des-
tins? Et le poète ne sutisfait-il pas à la vraisemblance en
amenant les uns après les autres tous ces personnages
sur la place où va se débattre la dernière question qui
puisse intéresser le vieil aveugle, celle de savoir où re-
poseront ses restes? — Un songe pousse Athalie dans le
temple des Juifs; elle y retrouve le meurtrier de la pro-
phétique vision, le Jeune Joas, et veut l'en arracher; Joad
la prévient, et fait couronner Théritier de David. Encore
ici , les trois unités ne s'offraient-elles pas naturellement
au poète? -^ Le comte de Gormas donne un soufllet à
don Diègue : sur-le-champ, voilà Rodrigue obligé de
provoquer Tagresseur en duel , Chimène de poursuivre le
meurtrier de son père, tous deux de renoncer peut-être
pour jamais à l'union qui semblait si proche. Faut-il donc
plus de vingt-quatre heures pour nouer et dénouer cette
intrigue, dût Rodrigue prendre le temps de battre les
Mores sur la plage et à la clarté des étoiles? Tant il est
vrai que, dans maint événement tragique, le poète trou-
vera les trois unités, « non comme causes, mais comme
effets, » et les observera plutôt pour se mettre d'accord
avec le bon sens qu'avec les préceptes et les conventions
d'école!
Néanmoins, il ne nous parait guère possible d'en-
fermer indistinctement tous les sujets dans le cercle
étroit de la théorie classique : le tenter serait s'exposer
à violer la règle fondamentale du genre dramatique, la
vraisemblance. Lorsque Lamotte, un des précurseurs,
sur ce point, des romantiques modernes, commença, au
xviii« siècle, la révolte contre les trois unités, il put sou-
tenir qu'il fallait les hasards les plus invraisemblables,
soit pour amener, comme dans le Cinna de Corneille, les
divers personnages toujours au même lieu , qui sert aux
entretiens du pnnce, au complot des conspirateurs, à la
confidence des amants, soit pour mener à bonne fin en
quelques heufes l'intrigue la plus complexe. Il affirmait,
avec autant Ae raison, que, du moment où les specta-
teurs d'un théâtre parisien se prêtaient si volontiers à l'il-
lusion qui les transportait dans Athènes, dans Rome ou
chez le Grand-Turc, leur imagination ne répugnerait pas
davantage aux changements de lieu d'acte en acte, pour
peu que la vraisemblance parût les réclamer ou seule-
ment les autoriser. Et pour confirmer sa théorie par un
exemple, il s'ingéniait à tracer le plan d'une tragédie de
Coriolan ; au 1*' acte, on est sur le Forum ; Coriolan, ac-
cusé par les tribuns, est condamné à l'exil. Au 2" acte,
nous sommes au foyer du proscrit : sa mère, sa femme
et ses enfants fondent en larmes; lui-même les quitte et
s'éloigne partagé entre la douleur et le désir de la ven-
geance. Le 3* acte nous mène chez les Volsques : Coriolan
se présente à leur chef, et lui propose la guerre contre
Rome, etc. Je ne serais pas étonné, disait Lamotte, qu'un
peuple sensé, mais moins ami des règles^ s'accommod&t
de voir ainsi distribuer en cinq actes cet épisode de
l'histoire romaine. A notre tour, nous dirons : qu'un
poète, en lisant le récit des luttes que se livrèrent au
moyen &ge les papes et les empereurs, Gré^ire VII et
Henri IV, Alexandre III et Frédéric Barberousse, Inno-
cent IV et Frédéric II , s'avise d'en tirer un sujet de tra-
gédie. Les spectateurs se refuseront-ils à passer succes-
sivement, dans le cours de la représentation , de la
demeure pontificale au palais des empereurs, et &*effa-
roucheront-ils si on les invite à supposer qu'ils ont mis
plus d'un jour pour faire le voyage? Ce changement de
scène ne leur semblera-t-il pas aussi naturel , plus na-
turel peut-être, que si tous les incidents du drame étaient
systématiquement circonscrits entre les murs du Vati-
can, ou dans un salon de la grande comtesse Mathildc, la
célèbre amie et protectrice des papes? Concluons que, des
trois unités, celle d'action ou d'intérêt est la seule que le
goût invite à ne pas violer; quant aux deux autres, les
nécessités de la vraisemblance doivent déterminer dans
quelle mesure il convient de les observer ou de les en-
freindre. lûA Anglais, les Allemands, les poètes français
de nos Jours, ont secoué leur joug d'une manière nulle-
ment choquante et souvent heureuse; par là ils ont donné
à leurs œuvres plus d'intérêt. A. H.
UMVERSAUX. Ce sont les idées ou les termes géné-
raux, distingués logiquement en cinq classes, suivant ce
2
u'ils nous fout connaître de la nature ou des propriétés
es choses qu'ils expriment. Dans la nature des choses,
les termes généraux se peuvent rapporter : l** soit à ce
qu'elles ont d'essentiel en commun avec d'autres choses:
il est essentiel au triangle d'être une figure rectiligne;
mais cela lui est commun avec beaucoup d'autres figures;
à rhomme d'être animal, mais cela lui est commun avec
les poissons et les oiseaux, etc.; c'est le Genre: 2o soit
à ce qu'elles ont d'essentiel et de propre à la fois, comme
d'être une figure rectiligne à trois côtés, ou un animiil
raisonnable ; c'est V espèce; 3» dans leurs propriétés, soit
à celles qui distinguent l'espèce du genre, et empêchen
qu'elle ne soit confondue avec les autres espèces du
même genre ; dans les exemples précédents, raisonnable,
avoir trois côtés; c'est La différence, appelée quelque-
fois plus précisément différence spéci/ique; 4» soit à quel-
que manière d'être, qui est une dépendance intime de la
différence; par exemple, pour l'homme, parce qu'il est
doué de raison , avoir la notion du beau dont les animaux
sont privés, et, pour le triangle, avoir la somme des
angles égale à trois droits : c'est le propre; 5<* soit enfin
à quelque manière d'être fortuite, nullement essentielle
à l'espèce, et faute de laquelle elle ne laisserait pas de
subsister; pour l'homme, d'être plus ou moins gai , bon,
spirituel ; pour le triangle, d'avoir telles ou telles dlmco-
sions; c'est Vaccident. Aristote parait avoir, le premier,
fait ces distinctions ingénieuses, de peu d'usage pour h
'pratique peut-être ; mais, s'il sert peu, comme disent le<
auteurs de la Logique de Port-Royal , de savoir qu'il y ;i
des genres, des espèces, des différences, des propres et
des accidents, du moins est-il important, de leur aveu,
de reconnaître les vrais genres des choses, les vraies es-
pèces do chaque genre, leurs vraies différences, leurs
vraies propriétés, et les accidents qui leur conviennent.
Bossuet, qui a fondu en grande partie dans sa Logiqw
le petit traité de Porphyre, connu sous le nom d'Isagoç'
ou Introduction ( De quinque vocibus, seu in Categortas
Aristotelis Introductio) ^ résume, dans les termes sui-
vants, la nature des cinq Universaux : 1<* le genre est ce
qui convient à plusieurs choses différentes en espèces;
2^ Vespèce est ce qui convient à plusieurs choses diffé-
rentes seulement en nombre ; 3» la différence est ce par
quoi nous entendons qu'une chose diffère d*une autre en
essence; 4*^ le propre est ce qui dst entendu dans la
chose comme une suite de son essence ; 5<> Vaccident est
ce qui peut être présent ou absent sans que le sujet pt-
risse. — Ce senties Universaux qui donnèrent lieu à la
fameuse querelle scolastique dite tantôt des Universaur,
tantôt des Réalistes et des Nominalistes {V. Scolastiqde .
Sur les Universaux, au point de vue théorique, V. nos
articles Genre, Espèce, Différencb, Propre, Accident:
Aristote, Topiqites; tous les anciens traités de Logique;
la Logique de Port-Roy ai , I, 7, et Bossuet, Logique, ),
38-50. B.
UNIVERSITAIRES (Produits). Ils se composent : !• àr
la dotation, des rentes et des domaines appartenant à
l'Université; 2^ du droit annuel dû par les chefs d'insti-
tution et par les maîtres de pension; 3° des droits à pei-
cevoir dans les Facultés de Droit , de Médecine, de Thé<!-
logie, des Sciences, et des Lettres, ainsi que dans le^
Écoles de pharmacie. Ils font partie des impôts directs.
UNIVERSITÉ. K. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire»
UN PAR CONTRE, négociation de lettres ou billets de
change contre d'autres.
UPANISHADS. V. Indienne (Littérature).
URANION, sorte de mélodium inventé en 1810 par un
Saxon nommé Buschmanq.
URAMSTES et JOBKLINS, nom donné à deux partis
qui s'étaient formés au xvu* siècle, et qui soutenaient la
supériorité, l'un du sonnet à*Uranie par Voiture, l'autre
au sonnet de Job par'Benserade.
URBANITÉ (du latin urbanit<is), mot d'origine et de
famille latine, et qui a eu quelque peine à prendre droit
de cité chez nous. Quintilîen en donne cette définition :
tt On appelle Urbanité une manière de s'exprimer qui,
dans les termes, le ton, la prononciation, fait d'abord
reconnaître un certain goût particulier à la Ville, sorte do
savoir pris dans le commerce des gens instruits; enfin,
c'est le contraire de la Rusticité {InstU, oral., VI, 3). r
C'était, comme il le dit plus bas, le ton propre à la so-
ciété polie de Rome : « VUrbaniÛ, cette qualité propre n
notre Ville, et qu'on n'a commencé de nommer ains^i
qu'après qu'il fut reçu de dire la Ville, sans y ajouter le
nom propre de Rome. » L'Urbanité romaine était con.-
patibleavec la licence d'esprit que pouvaient se permettre
USA
1757
USU
los honnêtes gens; ainsi la raillerie, la satire s'y mùlaionf ,
au moins vers la fia de la République, du temps de Cicé-
ron , qui s'exprime ainsi sur ce sujet : « La médisance
ne veut que faire outrage...; si elle est enjouée, on la
nomme Urbanité {Pro Cœlio, 3). » —Et ailleurs : « C'est
affaire aux ignorants de vouloir qu'après leur mort on
donne des festins pour honorer leur mémoire. Comment
ces festins se passent-ils, et comme vous vous exposez à
toute VUrbanité des hommes facétieux {De Finib,, II, 31) !»
— C'est encore là, sauf des nuances que nous dirons tout
à l'heure, le vrai sens du mot Urbanité, et il n'y aurait
que par un fâcheux oubli des origines qu'on voudrait en
jiire une sorte de synonyme du mot Politesse. « L'Urba-
nité ne fut connue que tard à Rome, » dit Quintilien ; cela
devait être, car elle est le fruit d'une civilisation perfec-
tionnée. En France, elle commença avec la société pré-
cieuse du xvn* siècle : mais bien des gens repoussèrent
le mot comme un mauvais néologisme, même après que
TAcadémie l'eut admis dans la 1'* édition de son Diction-
naire, en 1694, avec cette définition : o Politesse que
donne l'usage du monde. » Elle parut se repentir dans
la 3* édition, publiée en 1740, car elle mit à sa définition
cette sorte de correctif : « Ne se dit guère au'en parlant
de la politesse des anciens Romains. » C'était encore
l'opinion à peu près générale en 1771, lorsque l'on pu-
blia la î* édition du Dictionnaire de Trévoux. Assez lonjg-
temps auparavant, Marmontel , dans ses Éléments de lit-
tércUure, avait donné la définition suivante, qui est bien
celle de VUrbanité française, mais au'il appela le bon
ton : « Le naturel dans la politesse, la délicatesse dans
la louange, la finesse dans la raillerie, la légèreté dnns
le badinage, la noblesse et la grilce dans la galanterie,
une libei^ mesurée et décente dans le lan^e et les
manières, et, par-dessus tout, une attention impercep-
tible de distribuer à chacun ce qui lui est dû de distinc-
tion et d'égards. » On voit que cette Urbanité est un
perfectionnement de l'Urbanité romaine. La dernière édi-
tion du Dictionnaire de V Académie (celle de 1835), de
cette compagnie où l'on pratique éminemment, au moins
dans les discours publics, tous les genres de civilisation
polie et de fines convenances du meilleur monde, donne
une définition incomplète et peu exacte de VUrbanité,
qu'elle confond avec la politesse, chose toute banale à
laquelle tout le monde peut atteindre, saluts et révé-
rences mis, pour ainsi dire, en paroles en même temps
qu'en action : on peut être très-poli et très-gauche en
même temps. L'Urbanité française, qui n'admet la gau-
cherie en rien, est donc, dans sa nuance la plus géné-
rale, cette fleur d'esprit plaisante, légère, piquante,
satirique, toujours de bon ton et de bon goût, fine ou
délicate, et dont Paris est et fut toujours le foyer le plus
actif, comme le modèle le plus parfait. Ce qui rend la
société parisienne si sympathique , si aimable, si amu-
sante; ce qui fait qu'il éclôt, qu'il se produit, qu'il se
dépense plus d'esprit en une seule journée à Paris que
dans tel autre royaume tout entier de l'Europe, c'est
l'Urbanité. C. D— y.
URCÉOLÉE (Corbeille), corb^Ue de chapiteau qui est
un peu resserrée au-dessous de son sommet.
URNE. V. notre Dict. de Biogr. #f ff Histoire.
URNL V. 1m)h-n (Art).
US >,du lui lu Uàsxs, usage, coutume), terme de Droit
^ui se joint presque toujours à coutumes ( les us et cou-
tumes) ^ et qui signifie les règles, la pratique qu'on est
habitué à suivre en quelque lieu touchant certaines ma-
tières.
USAGE (du latin i^sus), s'entend vulgairement d'une
coutume, d'une pratique reçue. En termes de Jurispru-,
dence, c'est « le droit de prendre sur les fruits d'autrui
ce que l'on peut consommer pour ses besoins, ou ce qui
est accordé par le titre constiti:tif. » Les droits d'usage
s'établissent et se perdent de la même manière que l'usu-
fruit ( V. ce mot)., avec cette différence qu'il n'y a point
d'usage établi par la loi, comme il y a un usufruit. C'est
ordinairement le titre qui établit et règle les droits
d'usage. Si le titre ne s'explique pas sur rétendue de ces
droits, Vusager, c-à-d. celui à qui l'on a accordé Tusage
des fruits d'un fonds, ne peut en exiger qu'autant qu'il
lui en faut i^our ses besoins et ceux de sa famille (ses
descendants et les parents à qui il doit des aliments);
autrement l'usage serait un droit d'usufruit. H ne peut
donc ni louer la chose, ni la céder gratuitement à un
autre, même pour le simple usage, ni vendre les fruits
supo^flus, comme le peut l'usufruitier. Le droit d'usage
peut être établi par acte entre vifs ou de dernière volonté^
% titre gratuit ou onéreux ; on ne peut l'exercer sans
donner caution, et sans faire des états et inventaires des
choses soumises à l'usage {Code Napol., art. 625-30). —
Autrefois on distinguait les francs usagers, qjai ne payaient
rien ou presque nen; les gros usagers, qui avaient le
droit de prendre dans la forêt d'autrui un certain nom-
bre de perches ou d'arpents de bois; les menus usagers,
qui n'avaient que le droit de pâturage et la liberté de
prendre le bois mort et épars, tombé ou non. Les Ar«
chives générales de l'Empire, à Paris, possèdent une
collection précieuse des Déclarations ausages faites au
XVII* et au xvTii' siècle par les communes qui étaient en
possession de droits d'usage dans les forêts d'autrui.
USAGES LOCAUX, règles établies dans certains lieux
pour l'exécution des conventions, et qui» sans être déter-
minées par la loi , sont adoptées par tout le monde. Ce
qui est ambigu s'interprète par ce qui est d'usage {Code
Napol., art 1159). Les usages locaux sont obligatoires
en certains cas, surtout dans le silence de la loi; par
exemple, en matière de locations et de congés. V. Clau-
sade. Usages locaux ayant force de loi, 1843, in-S**.
USANCE (du latin usus), en termes de Banque, délai
de 30 jours qui est accordé pour le payement d'une lettre
de change à celui sur qui elle est tirée. On dit en ce sens
qu'une lettre est payable à deux ou trois usances. L'usance
avait originairement l'étendue que lui donnait l'usage de
chaque lieu; c'est l'ordonnance de 1673 qui la fixa à
30 jours, disposition confirmée par notre Code de Com-
merce,
USATIQUES , titre d*un code de lois publié en latin h
Barcelone en 1068, traduit en catalan en 1413, et qui était
encore en vigueur dans la Catalogne au xviii* siècle.
USINE (du latin usus, utilité), se dit de tout établis-
sement de fabrication industrielle dont les produita sont
obtenus plutôt par l'action des machines que par le tra-
vail seul des ouvriers.
USTENSILE (du latin uti, se servir), se dit de tontes
sortes de petite meubles servant au ménage, spécialement
à la cuisine.
USTRINE. l F. ces mota dans notre Dictionnaire
USUCAPION. S de Biographie et d* Histoire.
USUFRUIT (du latin usus fructûs, usage du fruit, du
revenu), droit de jouir des choses dont un autre a la
propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la
charge d'en conserver la substance. Il s'établit par la volonté
de l'homme ou par la loi, c.-à-d. qu'il est conventionnel
ou légal. L'usufruit légal est celui que la loi accorde aux
pères et mères sur les biens de leurs enfanta pendant
que ceux-ci sont sous leur puissance, et au man sur les
biens de la communauté et sur les biens dotaux de sa
femme. L'usufruit conventionnel peut être établi par tes-
tament, par donation entre vifs, ou par convention ; la
loi permet de le constituer, soit purement et simplement,
soit à durée fixe, soit sous une convention suspensive ou
résolutoire; on peut en faire profiter des communes et
des établissements publics, aussi bien que de simples
particuliers. Celui en faveur duquel est constitué l'usu-
fruit ne peut entrer en jouissance qu'après avoir fait
dresser, en présence du propriétaire, un inventaire des
meubles et un état des immeubles soumis à l'usufruit, et
avoir donné caution de Jouir en bon père de famille.
L'usufruit est personnel; à moins de stipulation con-
traire, il ne passe point aux successeurs de la personne
au profit de laauelle il a été établi. Tout usufruitier doit
acquitter les charges annuelles de la propriété dont il
jouit, telles qp'impôta et contributions, arranges de
rentes, et pensions alimentaires. Il a le droit de louir de
toute espèce de fruita, soit naturels, soit industriels, soit
civils, nue peut pro luire l'objet dont il a l'usufruit; C6
droit s'étend à tous les produita utiles ou de simple agrè*
ment, tels que chasse, pêche, etc. Toutefois, le mode de
jouissance et l'étendue du droit varient suivant la nature
des objeta : si l'usufruit comprend des choses mobilières
qui se détériorent par l'usage (linge, meubles meublante),
il n'est tenu de les rendre, à la fin de l'usufiniit, que
dans l'état où elles se trouvent, pourvu qu'elles n'aient
pas été détériorées par sa faute. S'il s'agit de choses fon-
gibles, l'usufruitier doit en rendre de pareille quantité,
qualité et valeur; d'animaux, il doit leur conserver leqr
destination ; de créances ou de rentes, il en perçoit les
intérête ou revenus; de maisons et bâtiments, il a le
droit de les habiter ou de les louer, mais non de changer
leur destination ou leur distribution ; de biens ruraux, il
dispose des fruita naturels et industriels, et Jonit, à titre
gratuit ou onéreux, des objete attachés au senrice du
fonds, tels que bestiaux et ustensiles aratoires ; de bois
et forêts, il doit observer l'ordre et la quotité des coapef
UTI
1758
UTO
leloo Tusagc constant des propriétaires, et ne peut tou-
choT aux afbres d^ haute futaie, ai ee n'est pour faire
des réparations. L'usufruitier ne peut réclamer de dé-
dommagements pour améliorations ou embellissements;
mais il a le droit d'enlever les ornements qu'il aurait
E lacés sur le fonds, en rétablissant Tancien état des lieux,
'usufruit s'éteint : l'par la mort de l'usufruitier; 2" par
l'expiration du temps fixé pour sa durée, ou par l'événe-
ment de la condition résolutoire; 3* par la consolidationt
c.-à-d. par la réunion en la mC^me personne des droits
de propriétaire et d^usufruitier; 4* par le non-usage;
50 par la perte totale de la chose; 6* par la renonciation
de l'usufruitier; 7* par la résolution du droit de celui
qui Pavait constitué; 8* par l'abus de Jouissance. Attri*
bué à des communautés, il s'éteint ptir 30 ans. V. 6al-
viat, Traité de l'usufruit, de l'usage et de l'habitation,
1817, 3 vol. in-S*»; Proudhon , Traité des droits d'usu-
fruit, 3« édit., 1836-48, 7 vol. in-8»; Genty, Traité des
droits d'usufruit, d'usage et d'habitation diaprés le Droit
romain, 1854, in-8°; Lesenne, De la Propriété avec ses
démembrements, iHb%y in-80.
USURE (du latin usura, nsage), mot qni signifla
d'abord l'intérêt de l'argent, le loyer de son usage ou de
sa jouissance, et qui, pris ensuite dans une acception dé-
favorable, n'a plus designé qu'un intérêt exorbitant, su-
périeur au taux fixé par la loi (V. Intérêt). On nomme
usurier celui qui prête à un taux illégal. Tout individu
convaincu de se livrer habituellement à Tusure est puni
correctionnellement d'une amende qui peut s'élever Jus-
3u'à la moitié des capitaux nu'il aura prêtés à usure, et
'un emprisonnement de 6 Jours à 6 mois ; s'il y a eu
escroquerie de sa part, il est, en outre, condamné à un
emprisonnement qui ne peut excéder deux ans ; un fait
unique dfS Técidive entraine le maximum de la peine,
que le Juge peut encore porter au double (Lois du 3 sept.
1807 et du 19 déc. 1850). Les Économistes modernes pen-
sent que le taux de l'intérêt ne devrait point être limité,
et que, par conséquent, le délit d'usure ne devrait pas
exister : l'argent, disent-ils, est une simple marchandise,
un instrument d'utilité générale, un agent de production
ou de travail^ et, à ce titre, 11 doit être loisible à celui
qui le possède d'en louer l'usage à telles conditions qu'il
luge convenable, le prix étant librement débattu entre
. le prêteur et l'emprunteur ; ils croient que la concurrence
> offrirait un correctif à l'avidité du prêteur, et maintien-
drait llntérêt de l'argent à un niveau assex bas pour être
accessible à tous et dans un équilibre presque stable.
V. UsuRB, dans notre Dictionnaire de Bidgraphie et
d'Histoire, et les auteurs suivants : J. Bentham, Défense
de l'usure, Londres, 1787; Chardon, De l'Usure dans
l'état actuel de la législation, Paris, 1823, in-S"; Gar-
nier. Traité de l'Usure, 18^6, in-IS; Petit, Traité de
l'usure, 4840, in-8«; Harin-Darbel, De l'Usure, in-18.
USURPATION (du latin usu arripere)^ en termes de
Droit, action de s'emparer, par violence ou par ruse, d'un
bien, d'un titre, d'une dignité qui appartient à un autre.
L'usurpation d'une fonction publique est punie d'un em-
prisonnement de 2 à 5 ans; celle d'un costume ofTIciol ou
d'une décoration honorifique est punie d'un emprisonne-
ment de 6 mois à S ans {Code pénal, art. 258 et 250).
Les demandes qui ont pour objet les usurpations de
terres, arbres, haies, fossés et autres clôtures, commises
dans l'année, doivent être portées devant le juge de paix
du lieu où est situé l'objet litigieux {Code de Procédure,
art. 3).
UT, note de musique, la 1** de notre gamme naturelle.
Les Allemands la nomment C. Les Italiens ont remplacé
dans la solmisation la syllabe utpar la syllabe do, comme
plus douce et plus sonore.
UTÉRIN, UTÉRINE, se disent des frères et sœurs nés
de même mère, mais non de même père.
UTILITARISME, théorie professée au commencement
de notre siècle par Jérémie Bentham, et d'après laquelle
l'utile ou Vuliltté générale doit être le seul principe du
bien. Ceui oui l'acceptent sont dits Utilitaires, Ben-
tham poussait jusqu'aux plus extrêmes conséquences
l'application de sa théorie, non"«eulement dans la législa-
tion et l'administration publique, mais encore dans la
conduite privée des individus.
UTILl'TÉ, en termes d'Économie politique, propriété
(ra'ont les choses de servir à l'homme. L'utilité est immé-
aiate, dans les objets dont on peut user immédiatement ;
ou médiate^ dans ceux ayant une valeur qui peuts ervir
à se procurer d'autres objets d'usage immédiat. Les objets
de consommation ont une utilité immédiate; une somme
d'argent, un titre de rente, un elTet de comuierce.
ont une utilité médiate. La mesure de l'utilité d*un objet
est le prix que le Jugement des hommes attache à cet
objet et la satisfaction qu'ils en retirent : rutijité est
donc le fondement de la demande qu'on fait des produitst
et par conséquent de leur valeur,
UTILITÉS, en termes de Théâtre, acteurs qiil ne Jouent
que des bouta Je rêle. Ils occupent un rang inteniiédiairB
entre les douhlures et les comparses,
UTOPIE (du grec ou, non, et ^os, lieu), signifie une
chose qui ne se trouve nulle part; c'est ié nom que Tho-
mas Morus donna à la République imaginaire dont^ à
l'exemple de Platon, Il se plut à tracer le plan dans le
livre intitulé : De optimo statu reipublicœ deQ\êê nova
insuJa Utopiœ^ Louvain, 1516, in-4", plusieurs fbis réim-
primé. Tel fut le succès de ee livre chimérique, maif
brillant ; telles sont aussi les ressemblances que présen*
tent entre eux les plans de réforme sociale sortis dt
l'imagination des écrivains qui n'ont été pour la plupart
que des théoriciens, que le nom propre est devenu com-
mun, et, par un effet rétroactif, s'applique même, dans le
passé, à la République de Platon : ce livre, VUtopie, la
Cité du Soleil de Campanella, la Nova Atlantis de Bacon,
l'Oc^ofia d'Harrington , V Histoire des Sévarambes de
Vairasse d'Alais, la Salente de Fénelon, la Polysynodif
de l'abbé de Saint-Pierre, et, de nos jours, les doctrine)
sociales et poHtiaues de Saint-Simon, Ch. Fourier, Ro-
bert Owen et de leurs disciples, forment la liste des prin-
cipales utopies. M. L. Reybaud, dans un livre i^gré^le et
instructif, a traité des Utopies contemporaines, {j'auteur
de cet article avait réuni les éléments d'un travail ana-
logue sur les Utopies antérieures au xix* siècle. Pe-
vancé par un hoporable et savant membre de l'Institut,
M. Franck, qui en a fait le sujet de ses Leçons au Collège
de France et d'articles publies par différentes Revues, il
a dû renoncer à son sujet. Nous tirons seulement des
notes que pous avions recueilliios quelques renseigne-
ments qui, en faisant connaître précisément dans ses
traits principaux VUtopie de Thomas Morus, donneront
en même temps, en raison de la ressemblance précédem-
ment signalée, une idée approximative assex exacte de
toutes celles dont on n'a pas eru devoir donner ici une
exposition spéciale.
Thomas Morus feint qu'il tenait ses renseignements
sur l'histoire et les institutions de l'Ile d'Utopie d'un
certain Rafaël Hytlodeus, voyageur portugais qu'il aurait
rencontré à Anvers en 1513. L'itinéraire de Rafaël et la
géographie des régions utopiennes, quoique présentés
sous une forme un peu plus sérieuse, valent, au fond, ee
oue valent les plaisanteries inspirées à Rabelais bien
évidemment par le livre de son illustre contemporain :
« De là partans firent voile au vent de la Transmontane,
passans par Méden (nul), par Uti (aucun), par Uden (rien),
par Gelasen (pour rire^, par les isies des Phéiss, ei
jouxte le royaume de Acnorie (sans lieu); finalement ar-
rivaient au port de Utopie, distant de la ville des Amau-
rotes par troys lieues et quelque peu dadvantaige.» Quoi
qu'il en en soit, et quelque part qu'elle soft située,
rUtopie est une lie; ce détail n'est pas indifférent comme
moyen de préserver ses habitants du contact des popu-
lations étrangères, et d'assurer la durée des Institutions
qu'ils ont reçues de leur roi Utopus. Son étendue est h
peu près celle de la Sicile; elle contient 54 villes, toutes
spacieuses et magnifiques, toutes b&ties, autant que pos-
sible, dans les mêmes conditions, à égale distance les
unes des autres et au centre de territoires équivalents,
sinon absolument égaux; de sorte que qui a vu l'une
d'elles a vu toutes les autres. Parcourons Amaurole, la
«capitale. Nous y trouverons de vastes bâtiments uni-
formes {aulœ)^ espèces de phalanstères habités chacun
par un groupe de 30 familles désigné par le nom bizarre
de Syphograntie. Ici arrêtons-nous un instant. Le mo-
bile de Th. Morus, en composant son Utopie, a été, d'une
part, la douloureuse indignation que causait à son &mc
généreuse le spectacle des misères et des vices inhérents
à l'état social, et, de l'autre, le désir d'y porter le re-
mède comme tous les réformateurs de cette catégorie.
Triomphant dans la critique et dans la négation, mnis
singulièrement inférieur dans l'invention de ce qu'il veut
substituer à ce qui est, c'est surtout dans la propritHé
qu'il a vu l'origine des maux de la société, de la richesse
excessive des uns et de l'extrême misère des autres, de Is
dureté de ceux-là et de l'envie farouche de ceux-ci, enfin
des vices de tous; et il a cru que tout irait f>our le mieux
le Jour où la propriété serait radicalement détruite. C'est
dans cet espnt qu'est inspirée toute VUtopie. ceuvre fran-
I chement commuuiste. Ceci dit, c'est là Tiaée que nous
CTO
1750
UXM
5?i Mv '^ développer presgue dans let plus petits détails
^^ ^^stème, par exemple dans les habitations qai, belles
^* commodes d'ailleurs, ne ferment que par aes portes
battantes, afin que chacun puisse, à chaque instant, pé-
nétrer ches chacun, et qa*en outre on auitte ao bout de
10 ans, à cette seule fin de ne pas trop s^babituer à Tidée
d*on chei soi, d'une demeure propre. Pour le même
motif, les hôpitaux, secours réserres ailleurs, faute de
mieux, à la souffrance indigente, sont, en Utopie, une
institution générale et obligatoire. L'organisation poli-
tique est essentiellement démocratique, élective à tou»
les degrés, très-simple si Ton admet comme un fait
réalisé la fameuse maxime de Montesquieu, que le res-
sort d'un £tat populaire est la vertu; dans le cas con-
traire, ouverte à tous les désordres, à toutes les brigues,
à toute IMncohérence que comporte la démocratie pure.
La fkmilie, plus respectée par Morus que par Platon, se
conserve par la sainteté du mariage et par l'aggloméra-
tion , sous certaines règles de détail , de ses membres
autour de son chef. La première loi de sa vie intérieure
et extérieure est le travail, qui, comme dû à la commu-
nauté, est aussi soumis à une réglementation minii«
tleuse. Le travail agricole est de beaucoup le plus impor-
tant dans une république d'où le luxe est proscrit. Les
produits en sont déposés dans des magasins publics, où
ils sont délivrés à chacun au fur et à mesure de ses be-
soins. D^ail leurs, la vie commune, les récréations et les
repas, tels qu'ils ont lieu dans un collège ou dans un
couvent, s'ils ne sont impérieusement prescrits, sont for-
tement recommandés par le législateur, qui a pensé que
tout le monde serait amené à les accepter par l'avantage
qu'on V trouverait, avantage matériel, cela est possible,
mais gène perpétuelle pour l'esprit, qui, passé une cer-
taine époque ne la vfc, et hors de certaines conditions.
a besoin de maintenir son indépendance et son vlndll-
dualité. Il n'y a pas lieu de s'étonner en voyant un peuple
réputé si heureux et si sage prendre ses précautions pour
la guerre. La guerre peut toujours devenir une nécessité
à l'égard de voisins entreprenants et injustement agres-
sifs. Mais ce qui surprend et ce qui choque, c'est de voir
Th. Morus admettre dans son Utopie l'odieux esclavage.
On n'est pas moins péniblement afH^cté de ses idées sur
le suicide, dont il fait presque une obligation au mallieu-
reux qui, atteint de souffrances incurables, est réputé no
pouvoir plus servir ni à lui-même, ni aux autres. Un
système de religion, plutôt naturelle que positive, com-
plète l'histoire des Utopiens, leur offre, après la mort, la
perspective d'une vie nouvelle, heureuse ou malheureuse,
selon leurs mérites, et sanctionne les principes de leur
morale, sorte d'Épicuréisnie tempéré oui repousse les
faux plaisirs de la vanité et de la cupidité pour s'attacher
aux plaisirs modérés des sens et de l'intelligence. Philo-
sophiquement parlant, c'est là une des parties les plus
heureuses du livre, à cause de la place qui y est faite à
la tolérance.
Malgré rexcellence des intentions, malgré l'approba-
tion des doctes amis de l'auteur, les Érasme, les Budé,
YUtoptê de Th. Morus, comme toutes celles de la même
famille, doit être jugée sévèrement. Toute pleine de
maximes générales qui charment, au premier abord, par
un faux air d'élévation morale et de simplicité, elle ne
peut contenter à aucun égaixl des esprits instruits par la
réflexion et par l'expérience à peser les difficiles condi-
tions de la vie sociale, et à respecter la Justice et les pen-
chants de la nature humaine. V. Atlantide, Cité du
SOLKIIm RépURLIQUR. B — B.
UTTARA-MIMANSA. V, Imdibnwb (Philosophie).
UXMAL (Buines d*), V, AnéniCAiNBS (Antiquités).
V
VAC
VAG
V, W lettre et 17* consonne de notre alphabet. Cette
lettre représente une articulation semi-labiale faible, dont
la forte est représentée par la lettre F; aussi se prennent-
elles souvent l'une pour l'autre. Par exemple, on pro-
nonoe nêuv arbres y ipoia neuf arbres ; les adjectifs fran-
çais terminés en f changent cette lettre en v pour le
féminin (neuf, neuve: bref, brève; sauf, sauve; actif,
active) \ on dit nerf et nerveux, motif et motiver, neuf et
neuvaine. Le V permute avoo le B (K. l'article B). Autre-
fois il porta le nom d'U consonne, lorsque cette dernière
lettre n'avait pas encore reçu d'existence distincte. L'ar-
ticulation de notre V est représentée en allemand par W,
et le Y de cette dernière langue a le son de notre F. —
Sur les inscriptions et les médailles latines, V est une
abréviation pour Valerius, Valerianus, vir, vole, vixit,
Victor, venerabilis, otc.j V. C, pour vir consularis;
A. V. C, pour ab urbe condità. Ches nous, V. est pour
Victor^ V. M. pour Votre Majesté, V. S. pour Votre
Sainteté, V, A. pour Votre AUesse, V. E, pour Votre
Eajcellence ou Emtnence, etc. Dans les écritures de com-
merce, V» signifie verso, — Signe numéral, V valait 5
chez les Romains, et, surmonté d'un trait horizontal (V),
5,000. 11 sert, avec l'addition d'un I à sa gauche, k re-
présenter 4; avec un, deux ou trois I à sa droite, il re-
présente 6, 7 ou 8. — V a été la marque monétaire de la
ville de Troyes.
VACANCE (du latin vacare, être vacant), état d'une
fonction qui n'est point remplie ou occupée. On dit va-
cances au pluriel, pour désigner un temps de suspension
périodique de certains exercices { telles sont les vacances
données dans les Facultés, les lyeées, les collèges, et, en
général, tous les établissements d'instruction publique.
Les vacances des Cours et tribunaux, dites aussi vaca"
tions, commencent au !•' septembre et se prolongent
jusqu'au mois de novembre : toutefois, les tinbunaux de
commerce, les chambres correctionnelles et les juges
d'instruction ne prennent pas de vacances. Les vacances
du corps enseignant sont établies moins pour les élèves
3ue poor les maîtres, dont la santé a besoin de ce repos
a» leur profession si fstigantOt Cest dans le même
esprit que des vacances sont instituées pour les magfa-
trats, dont les travaux obligent, outre la contention d es-
prit, une assiduité sédentaire.
VACANTS (Biens). V. Bibns.
VACATION, temps que certains officiers publies (juges
de paix, greffiers, notaires, avoués, huissiers, commis-
saires-priseurs, experts, etc.) emploient à une opération.
Une vacation ne peut être moindre de trois heures. Par
extension, le mot vacation désigne le salaire qui leur
est dû.
VACATIONS (Chambre des). Chambre temporaire in-
stituée dans les Cours et tribunaux pour prononcer, pen-»
dant les vacations ou vacances, sur les affaires civilos qui
exigent une prompte décision.
VACHIDS (Ranz des). V. Ranz des vaches.
VADE (du latin vade, va), se dit, aux jeux de cartes,
de la somme dont un joueur ouvre le jeu.
VADE-MECUM, c-à^d. en latin va ou viens avec moi,
mot qui désigne tout livre portatif, destiné à rappeler
eu peu de mots les notions principales d'un art, d'une
tLciopco âtc
vWêSHÎKA (Philosophie). V. Indiernb (Philosophie).
VA-ET-VIENT, en termes de Marine, cordage établi
soit entre deux navires, soit entre un navire et la terre,
soit entre deux rives opposées, et sur lequel un homme
peut se haler.
VAGABOND (du latin vagahundus, errant), celui qui
n'a ni domicile certain, ni moyens de subsistance, et qui
n'exerce habituellement ni métier ni profession. Les lois
de Selon proscrivaient les vagabonds. Dans l'ancienne
Rome, ils étaient l'objet d'uno surveillance spéciale de
la part des censeurs; on les condamnait aux mines ou
à d autres ouvrages publics. D'après le» Établissements
de Louis IX, ils devaient être déportée. Une déclaration
du' 32 mai 1586 défendit expressément aux indigents
u d'errer et de se transporter d'un lieu è un autre, » et
souvent on confondit les vagabonds avec les mendiants
( V. MBiiDiciTi). Notre Code pénal (ait du vagabondage
un délit. Tout individu déclaré vagabond par jugement
est puni de 3 à 0 mois do prison, et mis sous la surveU«
VAL
1760
VAL
.anco de laliaulc police po.ndant 5 ou dO ans (art. *271) ;
s*tl a moins de 16 ans, iî est mis sous cette surveillance
jusqu*à l'âge de 20 ans, k moins qu'ayant ce temps il
n'ait contracté un engagement militaire. II peut, s'il est
étranger, être conduit hors du territoire. Le Ta^d^ond
porteur d'un faux certificat ou d'une fausse feuille de
route est puni du maximum des peines portées en pareil
cas; le simple port d'armes, ou d'objets pouvant servir
à commettre un délit quelconque, seulement même à pé-
nétrer dans les maisons, entraîne un emprisonnement
plus ou moins long.
VAGUEMESTRE (de l'allemand wagenmeister, maître
de chariot, chef d'équipage), nom de plusieurs employés
du service militaire. Le vaguemestre d'armée ou vague-
mestre général est un officier de l'état-major d'un corps
d'armée chargé de la conduite d'un équipage; le vague-
mestre de division est un sous^fficier qui, dans chaque
division militaire, réunit les voitures et les fait marcher
en ordre convenable; le vaguemestre dé corps onde ré-
giment est un sous-officier qui a, dans chaque régiment,
la surveillance des équipages, et qui retire de la poste et
distribue les lettres, paquets, argent et effets adressés
aux hommes de son corps.
VAGULATION. F. ce mot dans notre Dicttonnaire de
Biêgraphie et d'Histoire.
VAIGRES, en termes de Marine, planches ou. bordages
qui revêtent intérieurement la muraille d'un navire. Vai-
grer un bâtiment, c'est le revêtir de ses vaigres; le t7ai-
g rage est l'ensemble des vaigres.
VAINE PATURE. V. Parcours.
VAIR (du latin varius, varié, divers), nom donné
autrefois à une fourrure de couleur bigarrée, blanche et
grise. Le menu-vair était la peau de l'écureuil du Nord,
celle que nous appelons petit^gris, — En termes de Bla-
son, le Vair est un métal formé de plusieurs pièces
égales, qui sont ordinairement d'argent et d'azur, rangées
alternativement, et disposées de façon que la pointe des
pièces d'azur est opposée à la pointe des pièces d'argent,
et la base à la base. V ^ontbe-Vair.
VAISSEAU (du latin va^cellus, dérivé de vas, vase),
vase ou ustensile de matière quelconque, destiné à con^^
tenir des liquides.
VAISSEAU, en termes d'Architecture, se dit d'une église
et de toute autre grande construction vue du dedans.
VAISSEAU, s'entend, dans le langage vulgaire, de tout
bâtiment un peu considérable qui navigue sur mer. On
Hit des vaiss9aux de guerre, des vaisseaux marchands.
Mais les marins ne donnent le nom de vaisseau qu'à un
bâtiment de guerre portant au moins 80 canons. La dé-
nomination de vaisseau de Ugne, par laquelle on distin-
^ait autrefois les vaisseaux capables de combattre en
ligne de ceux qui ne l'étaient pas,est aujourd'hui inutile.
On distingue en France quatre rangs ou classes de vais-
seaux : ceux du l*' rang sont à trois ponts et à quatre
batteries, et portent iW canons; ceux du 2* ont deux
ponts et trois batteries, armées de 100 canons ; ceux du
.1" et du 4" rang ont aus<^i deux ponts et trois batteries,
mais ne portent, les premiers, que 90 canons, et les se-
conds 80. Un vaisseau de i*' rang porte 1,087 hommes
d'équipage ; de 2« rang, 915 ; de 3«, 810 ; de 4«, 677.
VAISSELLE, mot qui désigne l'ensemble des vases et
vaisseaux plus ou moins creux qui servent â l'usage de
la table, plats, assiettes, soupières, casseroles, etc. La
vaisselle commune est faite de terre, de faïence, ou
d'étain ; celle de luxe est en porcelaine, en plaqué, en ar-
gent, en vermeil ou en or. La vaisselle plate est la vais-
selle d'argent (de l'espagnol plata, argent); l'expression
s'explique encore par le mot plata, qui signifiait lingot
ou métal massif dans les langues du Nord, et Ton a dît
d'abord vaisselle en plate pour vaisselle en ar^nt massif.
VAIVODE. V. Vatvode, dans notre /)/cttanfiatre de
Biographie et d'Histoire.
VAKIL ou WAKIL, c.-à-d. en arabe vtcet-rot, nom
qu'ont pris quelques-uns des souverains de la Perse.
VALAQUE (Langue}. V. Roumane.
VAL-DE-GRACE. K. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
VALENÇAY (Château de), dans le département de
rindre. Ce château, bâti au xvi* siècle sur les dessins de
Philibert Delorme, et qui a servi de résidence â Ferdi-
nand VII et aux Infants d'Espagne de 1808 â 1814, à Don
Carlos de 1840 à 1845, a appartenu au prince de Talley-
rand. Il est admirable par sa masse, sa noble architec-
ture, son parc, ses jardins, ses belles eaux. Quoique le
plan primitif ait subi des changements, inspirés par le
caprice plutôt que par le bon goût des différents proprié-
taires qui s'y sont succédé, ce château a encore Tappa-
rence d'un palais. Voici la description qu'en faisait, dans
le siècle dernier, un écrivain qui l'avait visité avant qu'on
eût dénaturé le plan du ffrand architecte contemporain
de François l*^ « On y arrive par trois avenues qui con-
duisent à quatre différentes cours ovales, aux côtés des-
quelles sont les pressoirs et les ménageries. De ces cours
on entre dans le château , entouré de grands fossés.
L'entrée est décorée d'un fort grand pavillon, aux deux
côtés duquel sont deux grosses tours, l'une desquelles
communique à un grand corps de logis double. Les tours
et le pavillon sont bordés de mâchicoulis sculptés ^e
beaux ornements, de même que le corps de logis. La
cour est carrée, et vis-àr-vis du pavillon d'entrée il y a
une muraille â jour qui a vue sur un grand vallon creusé
en amphithéâtre. Le côté qui ferme la cour vers le Nord
est un bâtiment qui a ses usages particuliers. La face
du grand pavillon et celle du grand corps de logis ont,
du côté de la cour, trois galeries, les unes sur les autres,
qui communiquent â tous les appartements, et dont les
arcades sont ornées de fort beaux trophées d'armes, sculp-
tés en bas-relief. Sous ces galeries, il y en a une souter-
raine qui conduit aux offices situés sous le gprand corps
de logis. Le dedans du château a un beau vestibule et un
bel escalier qui conduit à une grande salle, ornée d'ou-
vrages de peinture et de sculpture. Quelques-uns de
ceux-là sont de Pierre de Cortone, et les autres de
Jean Mosnier: mais l'on y fait surtout estime d'une
Vierge ornée d'un fort beau cadre, donnée par le pape
Innocent X à messire Henri d'Estampes, commandeur
de l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, et grand-priexu
de France, né en ce château. On va du corps de logis, pai
un pont de pierre qui traverse le fossé, sur une grande
terrasse ornée de beaux ouvrages de sculpture, Isiquelle
présente à la vue, du côté gauche, une perspective de
prairies, coteaux et forêts, qui la bornent agrâablement;
à la droite est un grand verger et un clos & vignes, sé-
parés de la terrasse par une longue allée d'ormes, au
nout de laquelle est une sortie qui mène dans une riaa*e
campagne. »
VALENCE (Église «-^âpolunaire, à). Cette église ca-
thédrale, qui, avant de porter le nom de l'un de ses évè-
ques, était consacrée à S^ Corneille et à S^ Cyprien, fat
bâtie au xi* siècle. C'est un des monuments les plus purs
de l'architecture romano-byzantine. Le plan en est assez
régulier : il y a deux collatéraux le long de la nef prin-
cipale, sans chapelles accessoires : le transept est assez
vaste, mais le croisillon septentrional a r^u des Mo-
dernes un badigeonnage du plus mauvais goût. Les fenê-
tres à plein cintre de l'abside et du transept sont suré-
levées, et entourées d'une archivolte ornée de grosses
perles ; au-dessus, il y a de petites fenêtres géminé^ éga-
lement à plein cintre. Les grandes fenêtres sont aé{»rées
les unes des autres par deux petits contre-forts en épe-
rons, d'un aspect assez pauvre. La corniche au-dessous
des combles est ornée de modillons fort simples. Les
toits sont aplatis et recouverts de tuiles creuses. Quel-
ques parties de l'église, dévastées pendant les guerres
religieuses du xvi* siècle, ont été rétablies en 1604, mais
dans un style dégénéré d'architecture. Le portail a été
fort endommagé par la chute de la tour, que la foudre
renversa en 1806 : cette tour fut reconstruite en 1820,
mais avec si peu d'habileté, qu'elle ne tarda pas â s'é-
crouler de nouveau. V. Jouve, Notice sur la e<Uhédral$
de Valence, Paris, 1847, in-S». — Au N. de l'église S»-
Apollinaire, dans l'emplacement d'un ancien cimetière,
on remarque un petit édifice funéraire â quatre faces, dont
les angles sont ornés de colonnes corinthiennes à demi
engagées. Sur les faces du levant et du couchant s'ouvrent
deux vastes fenêtres. La porte, ornée de sculptures d'une
grande délicatesse, est placée au nord. Les massifs de
chacune face sont vermiculés, semés d'arabesques et
d'animaux fantastiques. La corniche, richement décorée,
est chargée des armoiries de la famille Mistral. Une toi-
ture â quatre faces et se terminant en pointe couronne
l'édifice. Ce petit monument, qui date de 1548, a été ap-
pelé le Pendentif de Valence, a cause de la construction
de sa voûte, la première de ce genre qui ait été faite en
France.
VALENCE (Cathédrale de), en Espagne. Bâtie sur l'em-
placement d'un temple romain de Diane, qui avait été
consacré tour â tour au Sauveur par les Wisigotbs, à
Mahomet par les Arabes, à Tapôtre S^ Pierre par te Cid,
elle fut commencée en 1262, et achevée seulement en
1561. Au-dessus de son entrée principale s'élève une lo^r
octagone, et d'une hauteur de 45">.76 éisale à la cireon.
VAL
1761
YAN
férencc. Le transept est surmonté d*iine coupole octo-
gone, percée de grandes fenêtres. Lintérieur de Tédiflce,
long de 98 met., large de 60 au transept, est partagé en
crois nefs, que soutiennent 25 piliers carrés formés de
pilastres à chapiteaui corinthiens. On y remarque la
çrille du chœur, en bronze, et le retable du mattre-autel,
fermé par des volets sur lesquels Paolo Areggio et Fran-
cesco Neapoli, élèves de Léonard de Vinci, ont peint
plusieurs scènes de la vie de Jésus-Christ et de la S^*
Vierge. Au-dessus des fonts baptismaux est un immense
tableau de .luan ae ioanes. Le iresor ae Téglise ren-
Terme un grand nombre de reliques et d'ornements pré-
cieux. Dans la salle capitulaire on voit les portraits de
tous les évêques et archevêques du diocèse.
vALENCB (La LoNJA OU la Bourse de], monument vaste,
mais irrégulier, remarquable par Toriginalité de sa con-
struction plus encore que par la beauté ou Télégance de
ses formes. Ce monument, bâti en 1482, présente une
façade de 54 met. de développement, divisée en trois
parties. Le milieu est occupé par une tour massive et
carrée, plus haute que le reste de Tédifice -. Fnne des
Ailes, dépourvue d'ornements Jusqu'aux deux tiers de son
élévation, présente ensuite une galerie de Teffet le plus
pittoresque, où les deux architectures ogivale et moresque
se mélangent, et, entre les riches fenêtres de cette ga-
lerie, d'élégantes colonnettes supportent les bustes et les
armoiries des rois d'Aragon et de Castille. L'autre aile, au
contraire, nue dans sa partie supérieure, est surchargée.
Jusqu'à la moitié de sa hauteur, d'une foule de détails
d'architecture remarquables par la variété et la pureté
de l'exécution. La totalité de l'édifice est couronnée de
créneaux. A l'intérieur de la Lonja, la salle destinée aux
réunions des marchands mesure 36 met. de longueur et
21 met. de largeur ; elle est partagée en trois nefs par
2i colonnes torses, dont 16 sont appuyées aux murs la-
téraux, et 8 isolées, supportant les arcs des voûtes.
VALENQEN (Dialecte), un des dialectes de l'Espagne.
Il parait avoir été d'abord identique avec le catalan. Les
différences qui les distinguent aujourd'hui ne sont même
pas telles qu'elles empêchent les habitants des deux pro-
vinces de se comprendre, puison'cllcs ne consistent guère
qu en idiotismes locaux. La différence de prononciation
est plus grande : le valencien a plus de douceur et
d*harmonie.
VALET. V, ce mot dans notre Dictxonnairt de Bio-
grctphie et d^ Histoire,
VALEUR (du latin valere, valoir),' en termes d'Éco-
nomie politique, ce que vaut une chose suivant l'esti-
mation qu'on en fait. On distingue : la valeur usuelle,
dépendant du prix que chacun attache aux choses qui
peuvent satisfaire ses besoins; et la valeur vénale, ou
rapport de quantité qui existe entre les choses au point
de vue de 1 échange. Une valeur peut être naturelle ,
comme celle du blé, ou factice, comme celle du diamant.
La valeur de chaque chose est le résultat de l'évaluation
contradictoire faite entre celui qui en a besoin ou qui la
demande et celui qui la prodgit ou qui l'offre : elle a
donc un double fondement, l'utilité, qui détermine la
demande qu'on en fait, et les frais de sa production, oui
bornent l'étendue de cette demande, car on cesse de de-
mander ce qui coûte trop. La valeur des choses appréciée
en monnaie est ce qu'on nomme leur prix. — Pour les
monnaies, la valeur nominale est la valeur arbitraire
que la loi leur donne; la valeur réelle ou intrinsèque est
la valeur du métal dont elles font faites.
VALEUR, en termes de Musique, durée que doit avoir
chaque note et qui est indiquée par la figure de cette
note.
vAi.EUB REÇUE, mots qu'on est tenu d'employer dans les
lettres de change et les billets à ordre, pour indiquer
qu'on a reçu autant que la somme qui y est spécifiée. On
doit encore y ajouter en espèces, ou en marchandises, ou
en compte, ou tous autres équivalents {Codé de Com-
merce, art. 110).
VALEURS, toute espèce de biens disponibles. Les va-
leurs sont réelles, quand elles reposent sur des biens
existant matériellement; fictives, quand elles ne repo-
sent que sur des produits éventuels. On entend aussi par
vcUeurs les signes représentatifs de choses évaluables ,
les titres au moyen desquels on peut se les procurer,
lettres de change, billets à ordre, billets de banqne, con-
trats de rentes, actions, obligations, etc.
VALEURS coT^Ks, objets précieux de petite dimension
que l'Administration des postes se charge de transporter.
L'estimation d'une valeur cotée ne peut être fixée au-
dcsioas de 20 fr., ni s'élever au-dessus de 1,C00 fr, l^es
valeurs cotées sont reçues à découvert, puis enfennéea^
en présence du directeur du bureau de poste, dans nn<ft
boite ou dafis un étui, qui est ficelé et cacheté. La botta
ou l'étui ne doit pas avoir plus de O^^flO de longueur*
0'",08 de largeur, et 0'",05 d'épaisseur. La boite, avec ce
qu'elle renferme, ne peut peser plus de 300 grammes. Le
port est de 2 p. 100 de la valeur estimée, plus 35 cen«
times pour le timbre de la reconnaissance remise au dé-
{)0sant. Les valeurs cotées ne sont pas portées à domicile;
e destinataire doit venir les retirer au bureau. En cas
de pnnc (i une valeur cotfa^. t' Administration rembourse le
prix d'estimation. F. le Supplément,
VALEURS DÉCLARÉES. V. le Supplément,
VALIDÉ (Sultane). V, Sultan, dans notre Diction^
noire de Biographie et d^Ristoire, ,
VALLAIRE (Couronne). V, Couronwb, dans notre DtC*
tionnaire de Biographie et d'Histoire,
VALMAGNE (Abbaye de], à 27 kilo met. de Montpellier.
L'église, commencée dans la seconde moitié du xm' siècle
et achevée au xiv*, a 82 met. de longueur, 22 met. do
largeur (30 au transept^, et 24"*,33 de hauteur. La nef
majeure, quoique formée d'arcades ogivales très-aiguês,
n'a point une élévation suffisante. Dans tout l'édifice, les
ouvertures sont rares; les roses de la façade et des croi-
sillons paraissent n'avoir jamais été ouvertes dans tous
leurs compartiments; mais on a percé dans leur diamètre,
en les faisant s*accorder avec les autres découpures, de
hautes lancettes géminées. Le chœur, les neuf chapelles
qui l'entourent et les bras de la croix sont d'une grande
légèreté de construction. Le cloître, construit à la même
époque que l'église, a subi ultérieurement des répara-
tions qui ont altéré la beauté de plusieurs parties. Le
travail des sculptures y est très-soigné. Le préau est
décoré d'une fontaine qu'entoiure une galerie octogone,
surmontée 'Q'une voûte à jour.
VALSE ou WALSE , danse originaire d'Allemagne, où
on la trouve dès le xiv* siècle, et qui fut introduite en
France vers 1700. L'air en est à 3 temps, à 2 reprises de
8 mesures chacune, et s'écrit à 3/4 ou à 3/8 : son mouve-
ment varie de Vallegretto k Vallegro et au vivace. Le
retour périodique des temps forts en frappant détermine
le rhythme d une manière précise et caractérisée. La
valse se danse à deux, un cavalier et one dame : p.n
France, on a transformé l'abandon voluptueux, le balan-
cement que les Allemands lui donnent, en un mouve-
ment précipité de rotation, qui lui enlève une partie de
son charme. La polka, la maxurka, la redowa (V. ces
mots), se rapprochent de la valse par la mesure et le
mouvement. En Allemagne, où la valse est très-répan-
due, il est peu de musiciens qui n'en aient écrit : Haydn,
Mozart, Weber, Beethoven n'ont pas dédaigné ce genre
de composition ; les auteurs de valses les plus populaires
sont Lanner, Strauss, Gungl, Labitzky. On peut citer en
France Tolbecque. B.
VALUE, vieux mot synonyme de valeur, et qui ne
s'emploie plus qu'en Junsprudence, dans les deux mots
composés plus-value et moins-value,
VALVE, mot que certains archéologues appliquent à
chacune des parties d'une voûte divisée par des nervures.
VAMPUMS, colliers composés de grains diversement
colorés, au nombre et aux combinaisons desquels les
Indiens de l'Amérique du Nord attachent un sens gra-
phique, de manière à s'en servir pour transmettre par
leur envoi certaines nouvelles, ou pour conserver le sou<*
venir de certains événements.
VANDALES (Monnaies). On n'a point de monnaies
d'or des Vandales; mais il en existe d'argent et de bronze,
toutes taillées d'après la loi romaine. Les premières sont
des quinaires : elles portent au revers, soit les lettres
D. N. (Dominas noster)^ soit une femme tenant des épis
dans chaque main, et la légende : FEUX CARTHAGO.
Sur les monnaies de bronze, on voit les mêmes légendes,
une tête de cheval (ancien type de Carthage), un guer-
rier debout, la femme tenant des épis, et des lettres nu-
mérales. Il reste un quinaire de Genséric sur lequel on
lit ANNO nil, légende indiquant ane ère vandale qui no
nous est point connue autrement ; il porte aussi l'efifigio
d'Honorius, moins sans doute par respect des Vandales
pour la majesté impériale qu'afin de faire accepter leurs
espèces par les populations romaines.
VANDAUSMK, mot créé par l'abbé Grégoire, aux plus
mauvais jours de la Révolution française, pour désigner
toute aveugle dévastation des œuvres de l'art C'est en
souvenir dos Vandales, qui détruisirent les monuments
romains en Afrique.
VANNE (du latin vannus\ en termes d'Architecture
441
VAU
1764
VÊD
tssynens et les compositions gravôcs sur les cylindres
habylonien&. Certains vases ont des peintures à teintes
rouge, blanche et brune, superposées sur une couverte
noire. Si Ton^a trouvé des vases asiatiques dans les né-
n^poles de TÉtrurie, c'est qu'ils furent apportés dans ce
pays par des navigateurs phéniciens. Le plus beau modèle
est conservé à la galerie de Florence sous le nom de vase
François, — On appelle vases corinthiens ceux dont les
inscriptions sont en caractères de l'ancien alphabet em-
ployé à Corinthe. A cette catégorie appartiennent le cé-
lèbre vase de la chasse de Calydon, oit vase Dodtoell,
trouvé à Corinthe et qui est aujourd'hui au musée de
Munich, et diffcrents vases d'Agylla. C'est tout au plus
au VII" siècle av. J.- C. que ces derniers doivent être rap-
portés : on sait que Démarate vint de Corinthe se fixer
en Étrurie, vers ran 655, avec une troupe de colons oà
i! y avait plusieurs artistes. — Les vases d*un travail
véritablement étrusque sont en pâte noire , d'un émail
terne, et de formes quelauefoîs très-bizarres. On y voit
le plus souvent des sujets bachiques, quelquefois des divi-
nités étrusques, rarement des inscriptions en langue
étrusque. L'aspect en est généralement peu agréable. Il
y en a qui offrent tous les caract^es de l'archaïsme, et
(fiui peuvent être antérieurs à la fabrication grecque ; mais
on pense que les artistes étrusques continuèrent de tra-
vailler dans leur style particulier jusqu'à une époque
très-rapprochée de la fin de la république romaine. —
Des vases italo-grecs, les uns sont à fond jaune ou rouge,
avec figures noires, dont les contours sont gravés au moyen
d'un instrument pointu ; quelques détails des vêtements
au certains ornements sont rehaussés de violet; les chairs
des femmes, les cheveux et la barbe des vieillards sont
coloriés en blanc. D'autres vases à fond noir ont les
figures et les ornements réservés en rouge ou en jaune
sur le fond ; les contours, les traits et les linéaments sont
en noir, mais la plupart du temps le dessin a été ébauché
à la pointe sèche. Les vases de Nola à peintures rouges se
distinguent par la finesse de la terre, l'éclat de la cou-
verte noire, l'élégance du dessin et la simplicité des
sujets. Beaucoup de vases à peintures noires sur fond
rouge, quelques-uQs à peintures rouges ou blanches sur
fond noir, portent la signature de Nicosthènes ; plusieurs
portent les noms de Phanphaios, d'Eschyle, d'Andocide,
de Chacylion, d'Euphronias, d'Euthymiadès, d'Épictète,
de Phintias, d'Hiéron, de Zeuxithéos, etc. Les vases de
la décadence de l'art grec dans l'Italie méridionale se re-
connaissent à un dessin plus négligé, k la surcharge des
ornements, à un émail noir plus terne; cette fabrication
parait avoir persisté jusqu'à un siècle avant l'ère chré-
tienne. Les vases à peintures blanches superposées sont
aussi de la fin de la céramique.
V. Passeri, Picturœ Eiruscorum tn vascults, Rome,
1767 et 1770, 4 vol. in-fol.; d'Hancarville, Antiquités
étnjksques, grecques et romaines, tirées du cabinet de
M. Hamilton, Naples, 1768, 4 vol. in-fol.; Tischbein,
Recueil de gravures d*après des va^es antiques,.», tirées
du c<û)inet de M. ^amt'/ton , Naples, 1791 et suiv., 4 vol.
in-fol. ; Millin, Description des peintures et des vases
antiques, vulgairement appelés étrusques, Paris, 1808-10,
in-fol.; Dubois-Maisonneuve , Introduction à l'usage des
vases antiques, Paris, 1817 ; Hans, Dei vasi Greci, Pa-
lerme, 1823; de Clarac, Mélanges d'antiquités grecques
et romaines, Paris, 1830; Fea, Storia de' vasi ^ttili di-
pinti etruscfU, Rome, 1832; De Witte, Descriptum d'une
collection dé vases peints et bronzes antiques , provenant
des fouilles de l'Êtrurie, Paris, 1837. B.
VASISTAS (de l'allemand was ist das, qu'est cela?) ,
ouverture ménagée dans une porte ou une fenêtre, pou-
vant s'ouvrir et se fermer à volonté , et permettant soit
de parler aux gens du dehors , soit d'aérer une pièce.
VASQUE (du latin vasculum) , bassin rond et peu pro-
fond, en pierre, en marbre ou en bronze, qu'on place
comme ornement sous une fontaine.
VASSAL, i V, ces mots dans notre Dictionnaire de
VATICAN. ( Biographie et d'Histoire.
VA -TOUT (Faire son ) , en termes de Jeu, risquer tout
'argent qu'on a devant soi.
VAUDEVILLE , nom qui fut donné, au xv* siècle, à des
liansons joyeuses ou malignes. Olivier Basselin , maître
foulon de Vire en Normandie, composa des poésies de ce
fi,enre, qui coururent tout le val de Vire, et nui , se pro-
pageant plus loin , continuèrent d'être appelés ^aux-de-
vire. Une édition en a été donnée par M. J. Travers,
Avrancbes, 1833, in-18. Un avocat de Vire, Jean Le Houx,
en écrivit aussi à la fin du x\i* siècle. Le mot vau-de-vire
fut déîiguré par l'ignorance : un musicien de l'Anjou, Jean
Chardavoine, fit imprimer, en 1575 et 1576, des voix
de ville, et Jacques de Callières, dans son ouvrage De$
mots à la mode et des nouvelles façons de parler (Paris,
1690 et 1693, in-12}, nous apprend que le mot vaudeville
date du xvii« siècle. On employa bientôt ce mot pour de-
signer autre chose que des chanson» satiriques, grivoises
ou politiques : ainsi, les comédies de Dancourt, faites
sur des événements du jour et sur des anecdotes qui
couraient , étaient appelées vaudevilles. Les vaudevilles
furent ensuite des pièces de théâtre dans lesquelles en-
traient des couplets; ces compositions dramatiques, qai
prirent naissance vers 1700, aux foires S^-Germain et
S^-Laurent, et auxquelles se livrèrent principalement
Fuselier, d'Omeval et Le.<%age, étaient rimées, pour le
dialogue comme pour les couplets. Puis , ou mêla de la
prose avec les vers, afin de mieux lier les couplets, et le
vaudeville devint, vers la fin du xvm« siècle, ce qu'il ast
resté jusqu'à nos jours , une petite comédie dont le dia-
logue en prose est entremêlé de couplets. Il se distingua
de la comédie à ariettes , appelée opéra-comique, en ce
que ses couplets furent adaptés à des airs vulgaires et
connus. Les couplets qui terminent quelques comédies de
Picard et le Mariage de Figaro de Beaumarchais ne font
pas, de ces pièces, des vaudevilles dans le sens récent de
ce mot. Le vaudeville se prête à tous les tons : comédies
intriguées, scènes de boudoir, pièces villageoises, tabl<Hax
de circonstance, parodies, tout a été de son domaine. B.
VAUDEVILLE (Théâtre du). Un théâtre de ce nom fut bâti
en 1792 à Paris, entre la rue de Chartres et la rue S'-Tho-
mas-du-Louvre, rues qui étaient sur l'emplacement de la
galerie septentrionale et d'une partie de la cour du nouveau
Louvre. Lenoir en fut l'architecte et l'éleva sur l'emplace-
ment qu'occupait une salle de danse appelée Vauxhail
d'hiver ou Petit Panthéon. Les auteurs qui contribuèrent
successivement à la fortune de ce théâtre furent Barré,
Piis, Radet, Desfontaines, les deux Ségur, Prévost d'Iray,
Dieulafoy, Gersin, Désaugiers, Moreau, Francis, Rouge-
mont, Dumersan, Théaulon, Dartois, Dupaty, Merle,
de Jouy, Varner, Dupin, Mélesville, Delestre-Poirson ,
Carmouche, Scribe, Brazier, Frédéric de Courcy, Bayard,
Saintine, Dupeuty, etc. La salle ayant été incendiée en
1838, les acteurs allèrent s'établir place de la Bourse, à
1 ancien Théâtre desNouveautés. Depuis 1874, le Vau-
deville a été transporté sur le boulevard des Italiens.
VAUX -DE -VIRE. F. Vaudeville.
VAUXHALL , jardin public de Londres \ ainsi appelé
d'un propriétaire de cet emplacement au xvi< siècle. Par
imitation, on a donné le même nom à des établissements
du même genre soit à Paris, soit dans d'autres grandes
villes.
VAVASSEUR.
VAYVODE.
VEAU D'OR.
VECTIGALIA.
VÊDANTA. V. Indienne (Philosophie).
VÊDAS. Ce mot, qui signifie science, désigne, un en-
semble d'œuvres poétiques formant la sainte Écriture
des Indiens. Si, à ces compositions primitives, on ajoute
les développements qu'elles ont reçus sous le nom de
brâhmanas et de sutras , on a le corps entier de ces
livres sacrés. Dans lenr état actuel, les Védas sont au
nombre de quatre, le Rig, le Sâma, le Yajur et VAtharva,
De ces quatre recueils, les trois premiers sont reconnus,
non-seulement comme authentiques, mais comme cano-
niques, par tous les savants de l'Inde; VAtharva-véda
jouit d'une moindre autorité, étant sans doute d'une
époque postérieure aux autres. Le Rig-véda, qui est sou-
vent désigné par le simple nom de Véda^ est à la fois le
plus ancien et le plus vénéré de tous ces livres : c-omme
le Sâma, il ne renferme que des vers {rik)\ mais ce der-
nier recueil, qui forme en quelque sorte le rituel des
cérémonies sacrées, se compose de vers empruntés au
Rig-véda, et arrangés suivant les besoins du culte, de
sorte qu'il n'esl guère qu'une reproduction de celui-d
avec des variantes plus ou moins importantes. Le yicu'ur-
véda contient des vers et de la prose : les vers appar-
tiennent généralement au Hig-véda: la partie de prose
consiste en formules appartenant à des écoles diverses
et signalant une époque plus avancée de la théologie in-
dienne. Il forme deux recueils ( sanhità) connus sous les
noms de Ya^us blanc et de Yajus noir, dont les sujets
sont identiques, mais qui ne présentent pas le même ar-
rangement : dans le premier on ne trouve que les for-
mules du sacrifice, les explications et les développcmenfa
étant rejetés dans le bràhma/na; dans le noir, an con-
***!iîrr!, les formulas sont ordinairement 8ui\'!es des cxpl:-
V, ces mots dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire,
VÈD
1765
VÈD
cations dogmatiques et de tout ce quî concerne le céré-
monial. Quant à lAtharva^da, il est composé exclusi-
vement d'hymnes en vers, ainsi que le Rig-véda ; il en
renferme plus de sept cents : mais ces chanls ont surtout
pour objet les puissances malfaisantes de la nature, les
animaux nuisibles, les maladies, les ennemis publics et
surtout privés; et ils marquent une époque où les doc-
trines cosmologiques des temps antérieurs, tombées dans
le bas peuple, y avaient déjà engendré de grossières su-
perstitions.
L*examen du contenu et de la forme même des quatre
Védas prouve qu'ils sont d'époques assez difTérentes et
même de pays assez éloignés les uns des autres. 11 est
probable, en effet, sinon tout à fait certain, que YAtharvor
véda, qui est le dernier en date, a été composé dans
rinde orientale, c.-à-d. dans les vallées gangétiques; le
Yajus parait se rapporter à Tlnde moyenne, à l'orient de
la Saraswati ; le Sàma, comme composé de vers extraits
du Rig, lui est nécessairement postérieur, malgré la
forme archaïque de beaucoup d'expressions. Or, il est
certain que l'organisation définitive des cérémonies du
culte a eu lieu sous le régime de l'institution brahma-
nique, dans un temps où les Aryas s'étaient avancés de
rO. à l'E. Jusque sur les affluents supérieurs du Gange,
au midi des monts Him&laya. Quant au Rig-véda, qui
reste ainsi la plus ancienne des quatre collections, sa
simple lecture ne laisse aucun doute sur les lieux où il a
été composé. H est certain, en effet, que c'est à une
époque assez récente qu'il a été présenté par les brah-
manes sous sa forme actuelle de recueil, et que les
hymnes y ont été rangés dans un ordre déterminé; mais
ce travail a été analogue à celui qui fut fait sous la di-
rection d'Esdras, quand il réunit et publia les anciens
livres hébraïques, qui lui étaient de beaucoup antérieurs.
Les hymnes du Rig-véda, conservés dans les familles sa-
cerdotales, témoignent, à cent reprises, qu'ils ont été
ehantés dans un pays nommé Saptasindhu ou les Sept-
xîvières; ces rivières sont nommées, soit isolément, soit
même toutes ensemble et dans leur ordre géographique ;
les noms qui leur sont donnés sont ceux qu'elles portaient
au temps d'Alexandre le Grand, et que les Grecs ont plus
ou moms défigurés; c'est encore ceux qu'elles portent
aujourd'hui pour la plupart; leur direction vers le sud
est plusieurs fois signalée dans le Véda, ainsi que leur
réunion dans un bassin commun, qui porte constamment
le nom de Sindhu, De tous ces faits il ressort que ces
hymnes ont été composés dans les vallées de l'Indus et
non dans celles du Gange, qui n'y est nommé qu'une
fois, dans un hymne de la fin de la période. Cette con-
trée est donnée comme comprise entre le désert (désert
de Marwar) et la montagne (l'Him&laya) ; vers l'O., elle
ne dépasse pas les monts Bolor ; et à l'E., elle s'étend
jusqu'à la Sarayû, affluent du Gange qui traverse la ville
d'Ayôdhyà (Aoude). Le noyau central des monts d'Asie
est signalé dans le Rig-véda; mais il n'y est point ques-
tion des pays situés au delà et arrosés par l'Oxus, bien
que les rives de ce fleuve soient le berceau même de la
race des Aryas; ce fait prouve qu'à l'époque des hymnes
du Rig, la séparation des Aryas de l'Inde était accomplie
depuis fort longtemps.
Le Rig-véda n'est pas l'œuvre d'un seul homme:
Vyàsa est le nom générique donné en sanscrit à tous les
compilateurs indiens ; les noms qui , dans le recueil, ac-
compagnent chaque hymne, et dont beaucoup sont cer-
tainement authentiques, sont au nombre de plus de
trois cents ; ils appartiennent à des familles, à des épo-
ques et à des parties du Saptasindhu très-différentes les
unes des autres; de sorte qu'on estime à trois siècles en-
viron la durée de la période des hymnes. Biais cette pé-
riode a elle-même été précédée d'une autre, partout
signalée, pendant laquelle ont chanté les ancêtres des
auteurs du Rig . c'est par cette antique période que les
traditions indiennes se rattachent à celles de la Perse, et
de toutes les contrées européennes occupées par des
peuples aryens. A quel temps faut-il rapporter les hymnes
du Rig-véda^ On ne saurait le dire d'une façon précise.
Mais il est fort ancien : car le Bouddha est mort en l'an
544 ou 543 av. J.-C; sa réforme, toute morale, supposait
une civilisation déjà vieillie et usée, la civilisation brah-
manique. Celle-ci avait elle-même eu son point culmi-
nant, sa période de développement régulier, et son moyen
âge, pendant lequel elle s'était élaborée. Cest ce moyen
âge qui est caractérisé par la littérature des Bràhmanas,
écrits en langue védique et non en sanscrit , aussi bien
que les Védas eux-mêmes. Si l'on songe que cet immense
développement d'idées, de civilisation et de puissance.
chez les Aryas de l'Inde, était spontané, solitaire, original
et sans précédents, tandis que celui des Barbares de l'Oc-
cident avait été précédé par les Grecs et les Romains, et
que le christianisme leur était donné tout fait, on sera
plus que modéré en donnant mille années d'existence à
la civilisation brahmanique avant le Bouddha. On est
ainsi reporté au xvi« ou au xvii* siècle av. J.-C. pour le
temps où les hymnes du Rtg furent composés ; mais il se
peut qu'ils soient plus anciens.
Comme œuvres littéraires, les hymnes sont l'unique
monument de ce genre appartenant à notre race, puisque
les hymnes antiques de la Grèce sont perdus sans excep-
tion. Ceux dû Rig-véda sont classiques, dans leur fond
et dans leur forme : la poésie est toute empruntée à la
nature extérieure ou à la vie ordinaire des populations
aryennes. Les phénomènes du jour naissant, de la foudre
et des vents; ceux du feu sacré qui s'allume, se déve-
loppe ou s'éteint; la marche des Aryas à travers des
peuples ennemis et barbares; le labourage et les trou-
peaux ; la naissance, le maria^, la mort avec la sépul-
ture : tels sont les sujets ordinaires des hymnes, sujets
qui y sont traités généralement avec une grande sincérité
d'observation. A côté de ces faits réels, les hymnes pré-
sentent tout un monde de conceptions symboliques,
offrant la plus grande analogie avec les divinités de la
mythologie grecque : chaque ordre de phénomènes na-
turels est rapporté à une puissance vivante, à laquelle
l'imagination prête une forme humaine, et qu'elle fait
agir ensuite à la façon des hommes de ce temps; il y a
donc un Panthéon védique, tout composé d'êtres idéaux
présidant à la nature entière et la reproduisant d'une
façon poétique et classique. On ne trouve pas dans le
vida ces êtres monstrueux qui sont en si grand nombre
dans le Panthéon brahmanique des temps postérieurs; il
y a dans les idéaux védiques autant de mesure et de pro-
portion que les artistes grecs en ont su donner aux divi-
nités de leur pays.
L'état de la société où furent composés les hymnes
est fortement retracé dans tout le recueil du Rig-véda,
Les familles se rattachent étroitement par leur origine
à des ancêtres presque divins et qui sont déclarés être
eux-mêmes les auteurs des dieux, c'est-à-dire des sym-
boles. Comme, dans la doctrine mystique de ces temps,
un même principe igné et intelligent anime tous les
êtres vivants, se transmet à travers les générations et
se manifeste sur l'autel où brûle le feu, les pères sont
pour les fils non-seulement les auteurs de leurs formes
corporelles, mais encore le principe même d'où la vie
leur a été transmise. Et le principe de vie, ne pouvant
périr, unit les générations les unes aux autres et devient
le fondement de la famille. L'état primitif de la famille
est indiqué par les noms de parenté, dont la langue vé-
dique donne la signification première. Les fonctions et les
rapports de ses membres entre eux sont par là claire^
ment aperçus. Le père est le chef, la mère est la mal-
tresse de maison, la fille est celle qui trait les vaches, et
le fils est le défenseur; à un autre point de vue, le père
est le nourricier de la famille, et la mère est la dispen-
satrice. Les mots védiques qui expriment ces relations
sont les mêmes qu'en latin, en grec, en allemand, etc.,
mais n'ont de signification saisissable que dans la langue
des hymnes. On doit dire toutefois que les rôles qu'ils
expriment étaient déjà fort altérés au temps du Véda. 1^
effet, tous ces mots supposent la monogamie, et il n'c \
pas contestable qu'elle a été et qu'elle est demeurée l'in-
stitution commune des Aryas de l'Inde : mais on voit
déjà, dans le Rig-véda^ quelques exemples de polygamie.
Un hymne nuptial nous permet de suivre dans ses détails
la cérémonie religieuse du mariage, et nous montre qu'une
métaphysique sérieuse y présidait dès cette époque : la
liberté de la femme est complète jusqu'au dernier mo-
ment; son autonomie ne fut point détruite par l'usage
royal de la polygamie; il n'y eut jamais de marché toléré
par la loi en pareil cas : il semble que cette pratique
appartienne presque exclusivement aux sociétés sémi-
tiques.
La division en castes de la société indienne n'existe pas
encore au temps du Rig-véda: elle existe à l'époque de
VAtharva-véda; et il semble qu'elle existe même déjà
au temps du Yajus, Il y a, dans le Rig^ des brahmanes,
des râ^as et le peuple, désigné sous le nom de viç : mais
on peut être râja et brahmane à la fois, comme le prou-
vent de nombreux exemples : il n'y a pas d'hérédité ab-
solument établie dans les fonctions; on voit aussi des
brahmanes accomplir les actes qui plus tard furent ré-
servés aux gens du peuple et même aux Çfàdras. Ce dor*
VÊD
1766
VÊD
oier mot ne le rencontre même qne dans un hymne,
reconnu pour appartenir aux temps postérieurs. Le
br&timane du Rig^éda est le père de famille dans Texer-
cice des fonctions sacrées; le roi est le père de famille
commandant à Tarmée et gouvernant son territoire en
temps de paix ; le viç, c^est le peuple des Aryas tout en-
tier. Mais, à mesure que rétablissement des Aryas dans
rinde fut plus ancien et plus solide, il se forma des fa-
milles sacerdotales conservant le dépôt de Thymne et de
renseignement sacré, et des familles féodales dont Tau-
torité, fondée d*aborcl sur la richesse, fut rehaussée par
la cérémonie du sacre. Enfin il vint un temps où la
richesse et le pouvoir d*action des seigneurs tinrent dans
une sorte d*infériorité la classe sacerdotale, qui avait
pour elle le pouvoir spirituel , fondé sur la tradition et
la science : la hiérarchie des castes fut définitivement
constituée lorsque les deux pouvoirs se trouvèrent réunis
entre les mains d*une même famille, celle du grand poôte
védique Viçwàmitra. Cette révolution s'accomplit entre
la période du Hig et colle du Yajus : elle marque le com-
mencement de la société brahmanique dans Tlnde ; mais
ces faits se passaient encore dans les vallées du Sap-
tasindhu et non dans les contrées du Gange. Jusque-là ,
tout Tensemble de la constitution aryenne ressemble de
la manière la plus frappante au système féodal de notre
moyen &ge : à partir de la fin des hymnes du Eig-^éda,
la société tend à se constituer héroïquement, à la ma-
nière de la société grecque du temps d'Homère, c,-à-d.
à se partager en un nombre considérable de petites
royautés.
Quant au culte, les Vidas nous fournissent les détails
les plus circonstanciés sur ses cérémonies. Toutefois,
pour les rétablir sous leur forme la plus ancienne, il faut
surtout les chercher dans le Big^ et constater ensuite
leurs développements dans les autres recueils, ainsi que
dans les BrAhmanas et les Sûtras, Ce culte est fort
simple : point de temple; un autel de terre est dressé
dans un lieu découvert; il y a une enceinte sacrée où les
prêtres, au nombre de quatre, puis de sept, viennent se
placer ; chacun d*eux a son rôle. On allume le feu sacré
par le frottement de deux pièces de bois Tune contre
l'autre; la première étincelle est alimentée avec le beurre
clarifié ; le bûcher 8*enflamme ; les prôtres y portent l'of-
frande solide des gâteaux et la liqueur fermentée et
alcoolique du sôma, qui , par Tintermédiaire du Feu , est
offerte aux Dieux. Ceux-ci sont présents à la cérémonie ;
ils sont assis sur le gazon sacré répandu autour de l'au-
tel. Pendant ce temps, les prêtres chantent l'hymne en
l'honneur des Dieux. Tel est l'ensemble d'une céré-
monie védique : on la répétait trois fois par jour, au lever
de l'aurore, à midi , et au coucher du soleil. Dans des
circonstances rares , on offrait aussi des sacrifices san-
glants : on immolait un cheval précédé d'un bouc ; et la
chair de la victime, rôtie au foyer sacré, était partagée
entre ceux des assistants qui en désiraient; ce sacrifice,
étant fort coûteux, resta une cérémonie royale, connue
BOUS le nom d*açwamâdha.
Tous les détails du culte védique étaient étroitement
liés avec une métaphysique déjà profonde, partout ex-
Eosée dans les Védas et dont voici les principaux traits,
e fond de cette doctrine consiste dans la théorie des
Asuras ou principes de vie {asu). Les Aryas des temps
primitifs, ayant été frappés par le spectacle de la vie ré-
pandue partout dans la nature, en cherchèrent l'explica-
tion ; et ils pensèrent que son principe devait être lui-
même vivant, parce qu'ils voyaient les êtres vivants
s'enchaîner les uns aux autres sans interruption et pro-
venir toujours d'êtres vivants. Ils constatèrent que la vie
est partout unie au mouvement, et que, Tun s'arrêtant ,
l'autre s'arrête; ils furent donc portés à concevoir les
principes de la vie comme doués de mouvement, et,
ainsi, comme ayant un corps. Toutefois, l'ubiquité de
leur action était pour ces premiers philosophes une dif-
ficulté; car il fallait que ces corps fussent en même temps
universels et d'une durée sans fin : la vue des phéno-
mènes de l'air, si puissant et pourtant invisible; des
odeurs, qui , invisibles et impalpables, se répandent au
*oin; du feu surtout, qui semble exister dans tous les
iorps, depuis le bois qui brûle sur l'autel Jusqu'au soleil
et aux étoiles, et qui pourtant se dérobe avec tant de
facilité ; tous ces pnénomènes les portèrent à corcevoir
l'idée des corps glorieux qu'ils donnèrent aux Asuras.
Lorsqu'ils vinrent ensuite à chercher l'origine des ani-
maux et de l'homme, comme ils y constataient la pré-
sence de rintelligence et son union avec la fie, il leur fut
aisé de prêter l'intelligence aux êtres supérieurs qu'ils
concevaient, et de faire d'eux les maîtres et les ordon-
nateurs du monde. L'anthropomorphisme était la consé^
quence naturelle de cet ordre d'idées; car le nom d'Asura
est un nom commun, qui, 4ans le Véda, s'applique à
tous les êtres métaphysiques ou réels dans lesquels il est
possible de voir un principe ou une cause de la vie. Plus
tard, une révolution lente ayant substitué à ces pre-
mières conceptions un peu vagues des personnes divines
mieux définies, on donna à celles-ci le nom de dévas ou
dieux, et le mot asura désigna uniquement cette an-
tique génération divine , analogue aux Titans et com-
posée des ennemis des dieux. Mais ce progrès des idées
était loin d'être accompli au temps du Rig-vêda. Les prin-
cipaux Asuras sont : Agni ou le Feu , qui est d'abord le
feu qui brûle, extrait du bois, et nourri sur l'autel avec
le corps de l'offrande; ce feu s'éteint, mais en réalité ne
fait que se cacher, et peut renaître sans fin dans chaque
cérémonie; Agni est aussi le feu de la vie qui se condense
dans les végétaux et les animaux, le feu de la foudre qui
se rassemble dans le nuage et qui , descendant avec la
pluie, nourrit les plantes et entretient la vie; c'est ce
même principe qui réside dans le beurre consacré, extrait
du lait, première nourriture de tous les animaux, et par
qui l'étincelle du foyer produit un embrasement. Comme
principe de vie, il est aussi l'auteur des formes, et rem-
plit les rôles de Prométhée et de Vulcain ; enfin, comme
les choses n'ont d'utilité que par leurs formes, Agni est
le producteur de tous les biens. Envisagé dans les ani-
maux, il se transmet de l'un à l'autre avec la semence,
et porte le nom de Purusha on principe masculin ; il est
ainsi l'auteur des générations. Enfin, comme auteur de
la lumière et producteur des formes, il est aussi l'auteur
de l'intelligence qui les conçoit. Ce père universel des
vivants réside donc en toutes choses : tel est l'Agni du
Big-véda. Les Asuras du ciel lui sont étroitement unis :
les uns représentent les diverses énergies célestes du
Jour et de la nuit, sous les noms de Mttra^ Varuna,
Aryaman; les autres, celles du Soleil, dont le nom est
Sûria, qui veut dire brillant. Comme voyageur célesto,
Sûria est d'abord un nain , qui grandit et qui en trois
pas parcourt le ciel tout entier; à son point culminant il
porte le nom de Vishnu, qui signifie pénétrant. Sous le
nom de Savitri, cet Asura est désigné comme producteur
dp<^ formes, et, sous le nom de Pushan, comme nourri-
ci r. Enfin Vivasivat est le nom par lequel on veut dire
qu'il pénètre dans tous les êtres et y habite : et ici son
rôle se rapproche de celui d'Agni. En effet , l'énergie
atmosphérique du soleil est symbolisée dans la personne
d'/ndra, dieu des airs, qui parait le matin tout revêtu
d'or, traîné sur un char d'or par des chevaux jaunes,
précédé par les Cavaliers célestes et par l'Aurore, escorté
des Maruts qui sont les vents légers et sonores du Le-
vant. Indra est un chef de guerre : il vient pour livrer
bataille aux génies qui retiennent les eaux dans la nue
et produisent la stérilité ; le Véda est rempli d'hymnes
où est décrit le combat d'Indra, armé de la foudre et
aidé des vents, contre ces génies de l'orage. Par sa vic-
toire Indra fait pousser les plantes, nourrit les animaux
et l'homme, et mérite par là le titre d'Asura. Comme
symbole, il est surtout le dieu des guerriers. Vivaswat est
l'auteur de la race humaine, et père de Manu, premier
être pensant; il est aussi le père de Yarna, dieu dfô
morts et de la Justice ; ces deux personnages sont le
Mi nos et le Rhadamante des Cretois. — Tous les détails
de la mythologie védique se groupent autour de ces deux
conceptions, le feu Agni et le Soleil. Or il arriva, du
temps même des hymnes du Rig, que les prêtres ftrj'ens
saisirent une étroite relation entre le feu terrestre, le feu
de l'éclair et le feu solaire, et ne tardèrent pas à les iden-
tifier : car la race aryenne a toujours eu une tendance
polythéiste en religion , et un besoin d'unité en méta-
physique. Ce dernier besoin porta certains prêtres à
donner la prépondérance à une divinité de leur choix,
jusqu'au jour où, l'unité d'Agni ayant été entrevue, ils
quittèrent l'ancienne doctrine des Asuras et cherchèrent
à définir le principe unique et suprême. Mais dans le
Big-véda, cette définition n'est encore présentée que sous
la forme de question et avec timidité ; l'être unique n'y
a pas encore reçu son nom ; toutefois la tendance pan-
thé»»âque de la doctrine est fortement marquée dans
plusieurs hymnes, lesquels forment le lien historique
entre le polythéisme des temps antérieurs et la grande
théorie du brahmanisme. Cette tendance est fortifiée en-
core par la croyance, non à la métempsvcose, mais h la
reviviscence, constatée dans plusieurs hymnes où sont
d.pj scènes et des formules de résurrectien.
VftD
VÊD
On se demande comment, aussi divisa qu'elle l'était,
la société aryenne de Tlnde a pu parvenir à l'unité de
croyance partout attestée par le Vêda : le Véda lui-
même l'explique. En efTet, fl est incontestable que, si le
culte a commencé par être privé, il est de bonne heure
devenu public : la création des symboles, et ensuite leur
interprétation, distingua les prêtres de la foule du peuple;
et la nécessité de pourvoir aux autres besoins de la vie
retenant les hommes ailleurs, il se forma des familles sa-
cerdotales, attachées au culte et officiant pour tout le
monde : il y en a un assez grand nombre de citées dans
le Véda; et ce farent colles qui continu(^rent d'être à la
tête de la société brahmanique. La perpétuation des
cultes primitifs s'opérait dans ces familles par l'enseigne-
ment paternel, et, dans le peuple, par la répétition
journalière des mêmes cérémonies; c'est ce qu'atteste
mainte fois le Rig-véda. La présence de sept prêtres au-
tour de l'autel, l'existence de nombreux aumôniers à la
cour des rois féodaux , l'enceinte fermée au vulgaire, et
enfin le petit nombre relatif des familles sacerdotales,
montrent que le culte était public. Le roi en faisait le
plus souvent les frais. Du reste, dans toute la période du
Véda, il n*^ a pas de clergé; le sacerdoce n*a point
de hiérarchie; les br&hmanes sont égaux entre eux et in-
dépendants les uns des autres. Si donc il s'établit une
unité de doctrine, ce ne fut pas seulement la force des
anciennes traditions qui en fut la cause, puisque les opi-
nions particulières des prêtres étaient entièrement libres;
cette unité fut le résultat d'un accord entre les prêtres
eux-mème!«. C'est ce que montrent plusieurs hymnes : le
petit nombre des brahmanes dans chaque viUage les rap-
prochait naturellement les uns des autres; leur réunion
il la cour des seigneurs féodaux et dans les cérémonies
^solennelles était pour eux une occasion de discuter et de
s'entendre sur les matières religieuses; enfin les voyages,
même lointains, aux lacs sacrés et aux confluents, étaient
(!éjà en usage au temps des hymnes du Rig^ et, s'accom-
plissant chaque année aux mêmes époques, donnaient
lieu à de grandes conférences métaphysiques, dont l'usage
se perpétua dans les siècles suivants. Il se forma ainsi
des écoles philosophiques et des systèmes, dont les pre-
mières bases furent posées dès le temps des hymnes, et
3ui avaient déjà reçu un grand développement à l'époque
u Yajur-véda.
Les Védas nous font également connaître l*origine du
pouvoir spirituel des prêtres chez les Aryas de l'Inde. Ce
pouvoir se confondit primitivement avec l'autorité pater-
nelle, parce que, le culte étant public, mais la doctrine
se transmettant avec l'hymne dans les familles, le père
était le précepteur de ses propres enfants, et leur don-
nait, par renseignement sacré, cette seconde naissance
qui les faisait nommer dwijcu chez les br&hmanes. La
perpétuité de cet enseignement et sa transmission de
père en fils constituaient l'hérédité du sacerdoce : de
plus, le prêti'e se trouvait, par sa science théologique, le
seul homme capable de comprendre les symboles, d'ap-
pliquer les rites, d'offrir dûment le sacrifice, d'évoquer
les dieux, et de leur demander, en échange de l'offrande,
les biens dont ils disposaient, pour lui-même et pour les
assistants. C'est ce que l'on voit partout dans le Véda,
Plus tard, au temps de VAiharva^véda, la puissance de
l'invocation sacerdotale était regardée comme si grande,
qu'elle pouvait donner la victoire, chasser ou guérir les
maladies, procurer toutes sortes de biens matériels, ra-
nimer les mourants, ressusciter les morts : les prêtres
avaient composé pour cela un ^nd nombre de formules
en vers, nui sont dans ce dernier des Védas, Enfin, lors-
que la société aryenne se fut constituée en castes et qu'elle
eut pris les çûdras pour ses serviteurs héréditaires, les
rôles étant légalement distribués, celui d'étudier et d'en-
sei^^ner la science sacrée appartint exclusivement aux
br&hmanes descendants des anciens auteurs des rites et
des chantres du Véda, Leur indépendance réciproque
lour donna une entière liberté de penser; ils s'enfon-
cèrent sans arrière-pensée dans les. problèmes les plus
profonds de la métaphysique, et arrivèrent à ce grand
développement panthéistique qui caractérise l'Orient in-
dien, mais qui n'a jamais enchaîné malgré lui aucun
brahmane. Ces conséquences sont toutes en germe dans
les hymnes mêmes du Rig-véda,
Il est aisé de comprendre comment ces chants si an-
tiques se sont conservés Jusqu'à nos jours. Il est probable
en effet que la dernière recension des recueils védiques
n'a eu lieu que quelques siècles avant J.-C., et que la
première ne remonte pas très-haut dans l'histoire. Mais
l'hymne contient le dépôt de la foi antique et de la science
traaitfonnelle; fl est le fondement de la religion, de It
loi et de la morale publique ; toute la société repose sur
le Véda. La conservation des cultes de famille étant la
sauvegarde de la famille même, on avait un intérêt ma-
jeur à ne pas laisser périr les hymnes où les symboles de
foi étaient contenus. On voit que les enfants les appre-
naient de bonne heure en les entendant chanter par les
pères autour de l'autel, et en les étudiant plus tard sous
l'autorité paternelle. C'est ainsi que les hymnes se sont
transmis pendant plusieurs siècles : de sorte que le Jour
où l'on a éprouvé le besoin de les recueillir et de les
écrire, on n'a eu qu'à les demander aux descendants des
anciens prêtres, qui les avaient conservés et qui les
chantaient chaque jour à l'autel. Il n'y a donc pas lieu
de douter de leur authenticité, attestée d'ailleurs par toute
la littérature sansciite des temps postérieurs jusqu'à nos
jours.
Dans rinde, le Véda est le fondement de tonte la con-
stitution religieuse, comme l'Évangile chez les chrétiens
et le Koran parmi les musulmans. 11 est en outre la base
de toute la constitution civile et politique et du système
social des castes. Il n'y a donc dans ce pays aucun livre
qui soit révéré à l'égal du Véda, Le grand mouvement
religieux qui produisit les divers cultes brahmaniques a
son point de départ dans ce livre et ne peut trouver
qu'en lui son explication. Les écoles dissidentes y sont
déjà en germe ; il y a des doctrines hétérodoxes signalées
dans le Rig-véda lui-même; et un esprit critique s'y ma«
nifeste, auquel on peut rattacher les opinions de Kapila
et de Patanjali {V, Indienne — Philosophie), et, après
eux, la réforme bouddhique. On voit qu'il est impossible
de suivre les courants d'idées qui se propagent de siècle
en siècle à travers les trois mille ans de la civilisation
indienne, si l'on ne remonte à la source, qui est dans 1§
Véda, et surtout dans le Rig,
A un autre point de vue, le V^ia, quoique appartenant
aux Aryas de l'Indus, jette les plus vives lumières sur les
temps primitifs et sur les anciennes croyances et institua
tiens des autres peuples aryens. Les plus voisins de l'Inde
étaient ceux de l'Iran moderne comprenant surtout les
Mèdes et les Perses. Les peuples anciens de ces contrées
nous ont laissé un livre sacré, VAvesta, qui n'est guère
moins ancien que le Véda, et qui offre avec ce dernier
les plus grandes analogies. Mais il renferme un violent
antagonisme contre la doctrine indienne des Dévas, qui
a succédé à celle des Asuras, et il montre par là qu'il est |
d'une époque un peu postérieure aux hymnes védiques; :
le Véda, en effet, ne renferme aucune trace de cette
rivalité. De plus, la grande conception métaphysique de
VAvesta, Ormuzd, porte en zend le nom d'Ahura
{V. Zend-Avrsta) qui n'est autre que celui d'i4mra, ce
qui rattache la doctrine iranienne à celle qui est dév&*
loppée dans les hymnes du Riy et du Sâma; et , comme
elle l'est beaucoup plus dans ces recueils indiens que
dans celui des peuples de l'Iran, elle y offre une clarté qui
ne se rencontre pas ailleurs. Les cultes iraniens, iden*
tiques à ceux du Véda, ont beaucoup à gagner pour la
critique, si on les compare à ces derniers; de sorte que
l'étude des anciens temps de l'Asie occidentale ne peut
faire de progrès sérieux sans la connaissance des hymnes
indiens. Tel est l'état de la question. — Il en est de même
à plus forte raison des Aryas européens, comprenant , au
Sud, les Grecs et les Italiens, au Nord la plupart des
peuples de notre continent devenus les nations modernes.
Mais l'étude des traditions et des origines grecques est
beaucoup plus diflîcile que celle des antiquités indiennes,
parce que les Grecs ne nous ont pas laissé un livre tel
que le Véda, et parce que leurs origines sont multiples
et non exclusivement aryennes. Toutefois la majeure
partie des anciennes religions grecques, ainsi que les in*-
stitutions civiles et politiques du monde helléni']ue, ap-
partenant à la race des Aryas, trouvent leur explication
dans celles du Véda : non qu'elles procèdent de ces der-
nières, ni qu'elles soient d'une date plus récente; mais
l'antiquité du Véda et la clarté de ses doctrines, où l'ex^
plication naturelle est presque partout à côté du sym-
bole, permettent au critique d'y chercher des lumières
que la Grèce même ne peut lui fburnir. Il faut ajoutet
que les mots, qui, chez les Grecs, désignaient les dieux,
les objets du culte, les degrés de parenté, les fonctions
sociales, etc., n'ont presque Jamais ae sens dans la langue
grecque elle-même, fort éloignée de son origine, tandis
que ces termes se retrouvent dans la langue du Véda et
y ont généralement une signification très-claire. Quand
on procède à cette comparaison, on est frappé de ce fait,
que les ancicuucs populations grecques, nommées Pé*
VftD
1768
YEN
lasgM, avaient apporté des croyances et dos institations
qui se rapprochent de celles du Véda beaucoup plus que
celles des Hellènes proprement dits : de sorte que la pé-
riode des Titans semble répondre à celle des Asuras, qui
est de beaucoup antérieure aux Védas, et qui durait en-
core au temps du Rig, tandis que les dieux nouveaux ou
Olympiens répondent très-exactement au Panthéon brah-
manique, postérieur au Véda. Il est possible d^ lors de
comparer point par point ces anciennes traditions, et de
comprendre celles de la Grèce beaucoup mieux au*on n*a
pu le faire avant la découverte des hymnes. Celle-ci est
toute récente : le premier spécimen a paru en 1833 ; la
traduction française du Rig-véda date de 1851 ; le texte
complet est encore postérieur. Et cependant , malgré le
{>eu que Ton sait encore sur le Yajur et sur VAtMrva,
es anciennes traditions des Aryas européens du Nord ont
déjà reçu de nombreux éclaircissements. Biais, si Ton
excepte VEdda de Sœmund, où se trouve consignée la
mjrthologie Scandinave et qui ne date que du xi^ siècle de
notre ère, on n*a guère pour se guider que les traditions
populaires répandues dans toute TEurope, et dont un
grand nombre ont été recueillies dans ces derniers temps.
Or, il est visible au*une analogie profonde existe entre
ces croyances anciennes de nos contrées et celles qui
sont longuement consignées dans le Véda : dispersées
parmi nous, détachées de tout centre et étrangères aux
doctrines chrétiennes qui les ont remplacées, elles sont
obscures et souvent bizarres ; rapprochées de leurs ana-
logues védiques, elles deviennent naturelles et intel-
ligibles, et elles nous font entrevoir, dans le passé de
nos ancêtres, un monde mythologi(^ue et métaphysique
que, sans le Véda, Ton n'eût Jamais soupçonné. Enfin
l'apparition du texte du Véda en Europe a résolu , d'une
manière définitive, une question depuis longtemps con-
troversée, celle de l'origine de nos langues et de leur pa-
renté. On les faisait venir du sanscrit, et l'on attribuait
au grec une antiquité plus reculée qu'au latin et qu'aux
langues du Nord ; mais quand on a vu que le Véda n'est
pas en sanscrit, mais en une langue d'où le sanscrit est
dérivé et qui se rapproche beaucoup de celle de rAvesta,
on a pu d'abord restituer cette dernière; puis, reprenant
la comparaison des langues de l'Occident avec celles de
rOrient, on s'est convaincu que le grec et le latin ne
sont pas venus Tun de l'autre, que le celte est probable-
ment antérieur à l'ancien allemand et au gothique, aussi
bien qu'aux langues slaves et Scandinaves, et que tous ces
idiomes du Nord peuvent rivaliser d'antiquité avec ceux
des Gréco-Latins; qu'enfin, tous ensemble, les idiomes
de l'Europe sont étrangers au sanscrit, et tirent directe-
ment leur origine de la langue primitive parlée Jadis aux
rives de TOxus. Ainsi s'est rétablie dans ses éléments
l'unité de la famille aryenne, nommée à tort indo-germa-
nique. Parmi toutes les langues qu'elle a parlées ou
qu elle parle encore, il n'en est aucune dont Tétude soit
aussi profitable qu<> celle du Véda, parce que celle-ci ,
très-voisine de son origine, et, d'ailleurs, parfaitement
pure de toute influence du dehors, sert d'explication à
toutes les autres; le sanscrit, qui s'en rapproche beau-
coup, présente les mêmes avantages, mais à un moindre
degré.
Le caractère de la langue, des idées et des traditions
védiques est purement &ryen : aucun mélange étranger
ne s'y remarque. Avant de quitter le berceau central de
leur race, les Aryas avaient pu être en contact, au nord,
avec des populations touraniennes entièrement barbares;
au sud-ouest, ils n'ont été en contact avec les Sémites
que par leur rameau iranien, et nullement par celui qui
franchit les monts pour descendre sur l'Indus. Il n'y a
dans le Véda aucune trace d'influence sémitique, aucune
tradition hébraïque ou chaldéenne : tout ce qu'on y ren-
contre est même en opposition formelle avec ce que
contiennent les livres de Moise. De même, les premiers
Indices de relations entre les Hébreux et les Aryas, qui
se remarquent dans la Bible, ne sont pas antérieurs au
règne de Salomon , et se rapportent au commerce mari-
time. On en a conclu légitimement qu'au temps de ce roi
les Aryas étaient parvenus au bord de la mer, ce qui eut
lieu dans les temps héroïques postérieurs à la période
des hymnes du Rig, Enfin les races Jaunes, que les Aryas
rencontrèrent à leur vrivée dans le bassin de l'Indus,
étaient sauvages, et n'ont exercé aucune influence sen-
sible sur les conquérants de race blanche Jusqu'au Jour où
lis ont pu être en partie admis dans la société aryenne :
or, ce fait n'avait pas eu lieu au temps du Rig-ima, qui
nous les dépeint comme des ennemis acharnés. 11 faut
lionc considérer les hymnes védiques et tout ce qu'ils
renferment comme un produit spontané et entièremeni
original de la race aryenne. Et si on envisage leur haute
antiquité, ils doivent être regardés comme le monument
primitif de notre race.
V. Colebrooke, On thé Védas, dans les Recherchts osto-
iiques, t. VIII ; Roth , Littérature et Histoire des Védas,
en allem., 1846; Anquetil-Duperron , Oupnekkat, Stras-
bourg, 1801, 2 vol. in-4*, et Ezour Vedam, Yverdun,
1778, 2 vol. in-12; F. Nève, Êt%idM sur les hi/mues du
Rig-véda, Paris, 1842, in-8<*; Rosen, RiQ-vedœ spécimen,
Londres, 1833, in-4^ et Rig-véda Sanhita, lib. /. ibid.,
1838, in-4°; Wilson, Rig-véda Sanhita, avec trad. an-
glaise, 1850; Max Mfiller, Rig-véda Sanhita, etc., with
the comment, of Sayanacharya, Londres, in-4o; Rig-
véda, traduit en français par V. Langlois, 1851, 4 vol.
in-8<>; Stevenson, Sanhita of the Sama-véda, Londres,
1843, gr. in-8«, et Translation ofthe Sama-véda, 1842;
Benfey, Die hymnen des Sàma^^oéda, avec. trad. alle-
mande, Leipzig, 1848, in-4°: Weber, The wf^e Yajur-
véda, Berlin et Londres, 1851, 4 vol. in-4<>; Roth et
Whiteney, Mharva-véda, Berlin, 1855: Barthélémy
Saint-Hilaire , Des Védas, Paris, 1854; Hauvette-Bes-
nault. Mémoire sur les hymnes du Rig-véda, couronna
par rinstitut en 1857 ; Ém. Bumouf , Essai sur U Véda,
1862, in-8». Ém. B.
VEDETTE (de Titalien vedeUa, poste d*où l'on voit de
loin) , sentinelle à cheval. Les vedettes doivent tenir à 1a
main leur sabre ou leur carabine, et il leur est défendu
de mettre pied à terre. Attaquées, elles font feu pour
avertir le poste, et se retirent. On met des vedettes d^hon-
neur auprêa des souveraios et des princes {{ui comman-
dent en chef.
VÉGÉTATIVE (Ame), nom que les Anciens et les Sco-
lastiques donnaient au principe des fonctions organiques,
c.-àrd. de la nutrition et de la reproduction , qui sont
communes aux végétaux et aux animaux.
VEHME (Sainte-). \
VEILLE. J
VEILLÉE D'ARMES, l F. ces mots dans notre Dwtion
VÉLABRES. ( de Biographie et d*Bistoire.
VÉLAIRES. \
VKLARIUM. /
VELEITE (pour voUette)^ nom donné, dans le Levant,
à une petite voile latine qu'on grée sur la vergue du grand
màt dans les mauvais temps.
VÉUN (du latin vitellina, sous-ent. pellis, peau de
veau ) , sorte de parchemin préparé avec des peaux de
veau dont l'àg^ ne doit pas dépasser six semaines. Le
meilleur vélin provient des veaux à poil blanc, des veaux
mort-nés, et de ceux dont la mère a été tuée avant qu'ils
fussent nés. Beaucoup d'anciens manuscrits sont sur
vélin. On se sert encore aujourd'hui de vélin pour im-
primer les titres et diplômes, pour dessiner et peindre
en miniature.
VÉUTES. V. ce mot dans notre Dtctumnoire de Buh
graphie et d* Histoire.
VELLON, mot espagnol qui, en Numismatique, est sy-
nonyme du français hillon.
VÉLOCIFÈRES (du latin vtHox, rapide, et ferre, poi^
ter), nom qu'ont pris» il y a un demi-siècle, certaines
voitures publiques qui se prévalaient de leur rapidité.
VÉLOâPÈDE. V. DaAisiENNB.
VELTURE, en termes de Marine, forte ligature qui
réunit l'un à l'autre deux m&ts superposés.
VÉLOAU , vieux mot désignant une enveloppe d'étoiïe
où l'on renfermait quelque livre précieux.
VÉNALITÉ DES OFFICES. V. OmcES.
VENDETTA , c-à-d. en italien vengeance; nom par le-
quel on désigne un usage de la Corse qui oblige tous les
membres d'une famille à venger le meurtre d'un des
leurs, sur le meurtrier ou sur sa famille, sans recourir à
l'intervention de la justice. Il est rare qu'on n*avertiss^
point son ennemi de la résolution où l'on est de le tuer,
ou qu'on feigne une réconciliation pour le mieux frapper;
il n'y a peut-être pas d'exemple qu'on l'ait frappé chez
soi si le hasard l'y conduisait. Celui qui s'est donné le
plaisir de la vendetta est réduit, pour échapper à la
rigueur des lois, à abandonner l'Ile.
VENDIDAD-SADÉ. Ce nom désigne l'ensemble des
anciens livres sacrés de la Perse, comprenant le Fau/r-
dad proprement dit, le Yaçna et le Vispered. Cet ensem-
ble fait lui-même partie de la collection connue sous le
nom de ZendrAvesta (V. ce mot). Le Vendidad est une
partie de la vingtième naçka (en pcrs»an nosk) attribuée
par les Parsis à Zoroastre, qui , selon eux, en avait com-
posé vingt et une; c'est un livre de liturgie et de droit;
YEN
1769
YEN
contenant des données précieuses sar la guograpliie an-
cienne du nord de la Perse, ainsi que sur les institutions
civiles et religieuses de ce pays. Le Yaçna (en persan
heschné\ est également un livre de liturgie, concernant
particulièrement les sacrifices et les cérémonies pieuses;
on y trouve aussi, comme dans le Véda, des doctrines
métaphysiques relatives aux personnages divins et parti-
culièrement à Ormuzd (Ahuramazda). Le Vispered est
un petit recueil dMnvocations et de prières.— Le Vimdidadn
Scidé est tout entier en langue zende, et n'est guère moins
ancien que les Védas. 11 a été apporté en Europe par
Anquetil-Duperron, qui en a déposé les textes à la Biblio-
thèque du Roi; il a été traduit en pehlvi à une époque
inconnue; et le Yaçna l'a été de plus en sanscrit par
Neriosengh ; nous avons ces traductions. C'est d'après le
persan qu'Anquetil a traduit le Vendidad-Sadé , sous le
nom de Zend-Avesta , comprenant en plus les lescht, le
Sirouzé et le Boundehesch, La traduction sanscrite a
permis à Eug. Bumouf de rectifier la traduction d'An-
auetil dans son Commentaire sur le Yaçna, in-4°, 1833.
V, Eug. Burnouf , Vendidad-Sadé , texte lithoer. in-fol.,
1843; OIshausen, Vendidad, Hambourg, 1829, in-4o;
I^assen, Vendiihdi capila quinque, Bonn, in-8% 1852;
Vendida Sade, diê heUigen, etc., herausgegeben von
Aroc/cAau< , Leipzig, 1852, gr. in-8*>; The Yaçna, etc.,
vithagujarati translation, by Aspandiarji, Bombay,
1843, § vol. in-8». Em. B.
VENDOME (Colonne). F. Colonnes iionomentalbs ,
dans notre Dictionnaire de Biographie et d'Histoire,
VENDÔME (Église de la TniNrré, à), beau monument de
style ogival. La façade présente trois portes, entre les-
quelles sont percées des niches où l'on a mis de nos
Jours les statues des Apôtres, en remplacement de celles
que le vandalisme révolutionnaire avait détruites. Les
panneaux des portes sont couverts de sculptures repré-
sentant les anciennes cérémonies de l'Église; celle du
milieu, surmontée d'un balcon de pierre, est divisée en
deux par un pilier dans lequel est pratiquée une niche
renfermant la statue du Christ. Le clocher, haut de
70 met., masse carrée assez lourde, accompagnée de
petites tourelles, et que surmonte une flèche octogone
dont les arêtes sont ornées de petits cordons en croix, est
à droite du portail, et entièrement séparé de l'église. Au-
dessus des contre-forts qui soutiennent l'édifice règne un
balcon découpé à jour qui fait le tour du toit. A l'inté-
rieur, la nef offre de belles proportions : tout autour
une galerie a été percée dans l'intérieur des murs à la
hauteur de la voûte des bas côtés. Le chœur a de beaux
vitraux et des stalles sculptées; la clôture du chœur
n'existe plus, et a été remplacée par une grille.
VÉNÈDE (Idiome). V. Sorabb.
VÉNÉRABLE, titre d'honneur, donné : 1» dans l'an-
cien Empire d'Orient» à une classe de hauts fonction-
naires, tels que les proconsuls, les secrétaires des mi-
nistres; ^ en France, à quelques rois, notamment à
Philippe I*' et à Louis VI; 3<^aux personnages morts en
odeur de sainteté; 4^ aux prêtres et aux docteurs en
théologie; 5** aux francs-maçons qui président les loges.
VÉNERIE. V. Chasse.
VENEUR (Grand-^. V. ce mot dans notre Dictionnaire
de Biographie et d'Histoire.
VENGEANCE, action par laquelle on tire satisfaction
d'un tort ou d'un outrage. Appliquée aux actes que la
loi punit, la vengeance reçoit le nom de justice ou de
vindicte publique; accomplie par les particuliers, elle
est criminelle {V, Vendetta). — Les Anciens avaient
personnifié la Vengeance divine sous le nom de Némésis;
les chrétiens, dans leurs tableaux, la représentent par
un Anfi^ brandissant une épée flamboyante.
VÉNIEL (Péché), r. Pécné.
VENISE (Église S^-Marc, à). V. Marc (Saint-).
VENISE (Le Palais ducal, &). Un palais des doges avait
été commencé en 800, et incendié soixante-dix ans après.
Le monument actuel, du xiv* siècle et en style ogival, a
été élevé par Calendario. Il a quatre façades : l'une, du
côté de l'église S*-BIarc, se confond avec les l>&timents qui
font partie de cette basilique; une autre, de la fin du
XV* siècle et en style de la Renidssance, regarde le canal
della Paglia; les deux plus importantes sont sur la Piaz-
zetta ou petite place S^Marc e* sur la Riva ou le quai.
Un incendie, en 1577, détruisit les principales salles et
bttiucoup de chefs-d'œuvre de la peinture vénitienne; la
restauration de l'édifice fut faite d'après les plans d*An-
konio da Ponte. Le Palais ducal frappe de surprise et
d'admiradîm par la singularité, la hardiesse et la magni-
f conce de son ensemble architectural autant aue par le
fini do ses détails. Une colonnade à fûts robustes, forniani
17 arcades sur le quai et 18 sur la Piazzetta, soutient
toute la construction; au-dessus règne un second rang
de colonnes plus légères, formant une galerie trilobée et
à jour. Tous les chapiteaux sont d'un goût exquis : leurs
bas-reliefs représentent des chimères, des enfants, des
anges, des animaux fantastiques, des sujets de la Bible
ou de l'histoire. Une longue colonnette torse décore
chaque angle de l'édifice. Les murailles, sur la Riva et la
Piazzetta, sont plaquées de marbre blanc et rouge, dont
les dispositions figurent des dessins dans le goût oriental.
Une corniche se festonne en pjrramides évidéc» et en
aiguilles sur tout le sommet du Palais. — La porte d'en-
trée, dite della Carta, du nom d'une église voisine sous
le péristyle de laquelle les écrivains du grand Conseil et
du Sénat se réunissaient autrefois, est ornée de colon-
nettes, de trèfles et de statues; elle conduit par un pas-
sage voûté dans la grande cour intérieure, au milieu de
laquelle sont deux citernes en bronze d'un travail très-
estimé, l'une de Nicolas de' Conti, l'autre d'Alberghetti.
Les façades de cette cour situées du côté de la Piazzetta
et du quai ne sont pas terminées; la façade orientale,
en style de la Renaissance, eut pour architecte et sculp-
teur Ant. Rizzo et Ant. Scarpagnino; la façade où est
l'horloge est décorée de huit statues. V Escalier des
Géants, magnifique ouvrage construit vers 1485 par Ant.
Rizzo, avec des marbres précieux délicatement travaillés
par Domenico et Bernardine de Mantoue, conduit de la
cour à la seconde galerie : il tire son nom de deux sta-
tues colossales de Mars et de Neptune, posées en hr-"^
de la rampe, et sculptées en 1554 par Sansoyino; au pie«
de l'escalier sont les statues d'Adam et d'Eve, par Ant.
Rizzo. La face interne de la porte est toute fleuron née de
volutes, toute plaquée de colonnettes et de statues, ou-
vrage de Bartolomeo. Dans la galerie, VEscalier d'or,
ainsi nommé à cause de ses riches décorations dirigées
par Sansovino, et dont l'entrée est ornée d'un Hercule et
d'un Atlas dus au ciseau de Titien Aspetti, conduit à la
bibliothèque de S^-Marc, ancienne salle du Grand Con-
seil. Autour de cette salle, longue de 53 met., large de 95,
et où des armoires à livres ont remplacé les anciennes
stalles des sénateurs, se déroulent d'immenses peintures
représentant les fastes de la république de Venise, et qui
sont de précieux spécimens de l'emploi primitif de l'huile
sur la toile : dans la frise sont les portraits de 76 doges,
au milieu desquels on remarque un tableau noir à l'en-
droit où aurait Cû être Blarino Faliero ; le plafond, tout
doré et à compartiments carrés, octogones et ovales, pré-
sente trois grandes compositions de Paul Véronèse, do
Tintoret, et de Palma le Jeune. Outre la salle du Grand
Conseil, le Palais ducal contient : un Musée archéolo-
gique, formé dans les anciens appartements des doges;
la salle della bussola , ainsi nommée d'un tambour qui
couvrait la porte, et où l'on voit une ouverture autrefois
masquée par une tète de lion en marbre dans la gueule
duquel on glissait les dénonciations secrètes ; la salle du
Conseil des Dix; la salle des Pregadi ; la salle de l'Aoti-
Collège, où les ambassadeurs attendaient leur audience ;
la salle du Collège, où ils étaient reçus, etc. Toutes ces
pièces sont décorées de précieux tableaux. Dans les caves
du Palais sont les fameuses prisons connues sous le nom
de Pozzi (puits), et, sous la toiture recouverte de plomb,
celles qu'on appelait les Plombs. Un long corridor
double, nommé Pont des Soupirs^ met le Palais en
communication avec la Prison, bel édifice construit en
1589 par Ant. da Ponte. B.
VÉNITIEN (Dialecte), un des dialectes italiens, et le
plus doux de tous. Il adoucit les consonnes : ainsi, il
substitue le z au g; au lieu de padre, madrcy figlU)^
C€ua, il dit pare^ mare, fio, ca, etc. La prononciation est
efféminée, presque enfantine. Le dialecte vénitien a eu,
depuis le xvi« siècle, une littérature assez riche. La
Guerra de Ntcolottx e de Castellani, qui date de 1521,
raconte les querelles des Nicolotti, gondoliers du parti
démocratique, qu'on reconnaissait au bonnet et à la cein-
ture noirs, et des Castellani, gondoliers de l'État et des
dignitaires, ayant le bonnet rouge; Au xviii* siècle, o-"
peut citer les chansons d'Ant. Lambert! , les fables de
Franc. Gritti, les comédies de Goldoni. Un abbé Boaretti
traduisit V Iliade en dialecte vénitien, sous le titre bizarre
d'OfiMTO in Lombardia, et Mordini la Jérusalem délivrée
sous celui de Tasso aila barcarola. Un nouveau chan-
sonnier, P. Buratti, parut au commencement de notrt
siècle. On a publié, en 1817, une collection de poésiet»
vénitiennes en iA, volumes. Des glossaires du dialectp
ont été donnés par Gaspard Patriarchi, Padoue, 1775, et
VEN
1770
VÉN
par Boerio, Venise, 1820. V, Gamba, Seri» degli scriUi
tmprêssi in dialetto ven$%iano, 1832.
VÉNITIENNE (École), ane des écoles Italiennes de
peinture. Les premiers artistes furent des mosaïstes
grecs, appelés à Venise au xi* siècle pour décorer la ba-
silique de S^-Marc. Au xin% la République posséda des
peintres k fresque ou à la détrempe, très- habiles pour
leur temps, entre autres Jean de Venise et Marti nello de
Bassano : leur style n*avait déjà plus rien du caractère
byzantin, ainsi (|u*on en peut juger par «le cercueil de
S'* Julienne, qui offre, avec la figure de cette sainte,
celles de S^ Biaise, abbé, et de S^ Cataldo, évèque. Au
XIV* siècle on cite les noms d*Esegrenio, d'Alberegno et
d*f.tienne Pierano. La présence de Giotto à Padoue en
1307 donna à la peinture une impulsion qui se fît sentir
dans les autres parties des États vénitiens, notamment à
Murano. Les artistes de cette lie, au milieu desquels ne
tarda point à pénétrer Tusage de la peinture à Thuile,
subirent aussi l'influence allemande, par suite des rap-
ports qui existaient entre Venise et TAUemagne, et Ton
vit venir parmi eux le célèbre Albert Durer. Toutefois,
cette influence fut modifiée par les leçons de Squarcione,
qui avait recueilli des fragments antiques dans ses
voyages en Italie et en Grèce, et par les exemples de
Mantegna, qui possédait à fond la science des raccourcis,
l'art de draper et la perspective. Alors se forma une
grande école, déjà remarquable dans ses premiers repré-
sentants, les Vivarini, Giovanni et Gentile Bellini, Cima
da Conegliano, Rocco Marconi, Vittore Carpaccio, Jérôme
Mozzetto, Marco Basaiti, et Palma le Vieux. Privée des
encouragements que la peinture dut aux papes Jules II et
Léon X pendant les premières années du xvi* siècle, et
des modèles antiques si nombreux à Borne et à Florence,
l'École vénitienne chercha principalement à plaire aux
yeux, et, avec cette tendance vers le coloris qui l'a tou-
jours caractérisée, la peinture à l'huile y occupa une
place bien autrement importante que la fresque et la dé-
trompe. De plus l'école vénitienne, toute Drillante de
richesses extérieures, préoccupée avant tout de saisir la
vie réelle, fut presque dépourvue d'idéalisme et de gran-
deur sévère ; dans ses œuvres, les sujets religieux per-
dirent tout cachet mystique et symbolique, et le sen-
sualisme envahit l'art de jour en jour. 'Tels furent les
caractères communs de Georges Barbarelli, dit le Gior-
gione, de Tiziano Vecelli, plus généralement nommé le
Titien, de Paul Caliari, dit le Véronèse, de Jacques Ro-
busti, dit le Tintoret, de Sébastien del Piombo, et, à un
degré moins élevé, de Jacopo dà Ponte, dit le Bassan, de
Palma le Jeune, d'Andréa Schiavone, de Bonifacio, de
Pordonone, de Paris Bordone, de Moretto. Avec le
wii" siècle, la décadence de l'école devint manifeste :
J.-B. Novell!, Carlo Ridolfi, Alexandre Varotari, Jules
'Jarpioni, Pierre Liberi, J.-B. Piazzetta, n'ont laissé qu'un
nom peu connu en dehors de l'Italie. Au xviii^ siècle,
J.-B. Tiepolo, Rosalba Carriera et Canaletto surent con-
quérir une illustration plus grande ; puis toute trace de
génie disparut avec l'indépendance de Venise. V. Carlo
Ilidolfl, fue maravioHe deW arie, owero le vite de* pittori
Veneti, Venise, 1G48, 2 vol. in-4* ; Longhi, Compendio
délie vite de* pittori Veneziani, Venise, 17Ô2, in-fol.
VENTAIL. V. Vantail. .
VENTAILLE, nom donné au moyen âge à la visière
des casques.
VENTE (du latin venditio)^ convention par laquelle
l'un s'oblige à livrer une chose, et l'autre à la payer en
argent. Si l'on donne une chose pour en recevoir une
autre, c'est un échange, et 'non une vente, parce qu'il n'y
a pas de prix. Si l'on transporta la propriété d'une chose
moyennant un prix qui n'est pas sérieux, c'est une dona-
lion, et non une vente, dont le but est de mettre en jeu
deux équivalents. Pour qu'une chose puisse être vendue,
il faut qu'elle soit dans le commerce, que l'aliénation n'en
soit prohibée par aucune loi , et qu'elle appartienne
à celui qui la vend. La vente de la chose d'autrui est
nulle, et peut donner lieu à des dommages-intérêts. Dans
le Droit romain et l'ancien Droit français, le vendeur
n'était pas tenu de transférer la propriété à l'acquéreur;
il sudisait qu'il fit tradition de l'objet vendu, et qu'il ga-
rantit Tacheteur contre l'éviction ; par conséquent, celui-
ci n'aurait pas eu le droit de se plaindre, si on lui avait
vendu un objet dont on se croyait à tort propriétaire.
D'après le Code Napoléon, au contraire, le contrat de
vente emporte l'obligation de transférer à l'acheteur, non-
seulement l'usage paisible, mais la propriété même de la
chose. Le consentement des parties, condition essentielle
de tous les contrats, doit être entièrement libre, et
exempt d'erreur soit sur le prix, soit sur la chose, soh
même sur la matière dont la chose est composée. La
vente est parfadte et la propriété acquise de droit à
l'acheteur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix,
et quoique la chose n'ait pas été livrée ni le prix payé.
Le contrat de vente peut avoir lieu entre toutes les per-
sonnes que la loi ne frappe pas formellement d'incapa-
cité. La vente peut être faite purement et simplement,
ou sous une condition suspensive ou résolutoire; par acte
authentique ou sous seing privé (les frais sont à la chari^
de l'acheteur). La promesse de vente vaut vente : si elle
a été faite avec des arrhes, chacun des contractants peut
s'en départir, celui qui a donné des arrhes en les per-
dant, celui qui les a reçues en restituant le double. Une
vente à Vamiable est celle qui est faite de gré à gré; une
vente jttdiciaire est celle quf est faite en justice, suivant
certaines formes déterminées par la loi. Les ventes judi-
ciaires sont forcées, quand elles ont lieu par suite de
saisie et d'expropriation ; volontaires, lorsqu'il s'agit de
biens appartenant à des incapables, à des époux mariûs
sous le régime dotal, à des absents, à des condamnés par
contumace. V. Dufour de Saint-Pathus, traité des con-
trats de vente, d'échange, etc., 4823, 2 vol. in-12; Persil
et Croissant, Commentaire sur les achats et les ventts,
1838, in-8°;Troplong, Commentaire du titre 6 du livre 111
du Code civil, de la Vente, 4« édit., 1841, 2 vol. în-8».
VENTE, en termes d'Eaux et Forêts, coupe de bois dcs-
tinè3 à être vendue, ou partie d'un bois qui vient d'être
coupée.
VENTE, terme de Politique. V. Carbonari, dans notre
Dictionnaire de Biographie et d^Histoire,
VENTE AU COMPTANT, A DéCODVERT, A TEIIIIE. V, BODRSB.
VENTILATION, en termes de Droit, action de ventiler,
c.-à-d. d'estimer les portions d'un tout vendu, non pas
quant à leur valeur réelle, mais relativement au prix
total.
VENTOUSE, ouverture pratiquée dans la muraille d'un
bâtiment, pour aérer l'intérieur. V, BAaBACANB.
VENTBE (Curateur au). F. CoRATEta.
VENTBILOQUIE (du latin venter, ventre, et loqm,
parler), art de parler sans remuer les lèvres, et de mo-
difler sa voix au point (Qu'elle semble venir d'une autre
personne ou d'un endroit éloigné. On nomme encore cet
art Engrastrimysme (du grec en, dans; gastér, ventre,
et mythes, parole). On dirait en effet que les ventriloques
tirent leur voix du ventre. La ventriloquie était connue
des Anciens, et il en est question dans les œuvres d'Hip-
pocrate ; on suppose que les prêtres païens, les sibylles
et les devins en firent usage pour tromper les peuples et
rendre des oracles. Ce n'est plus aujourd'hui qu'un amu-
sement de société. V. l'abbé de La Chapelle, le Ventri-
loque ou VEngastrimythe, Londres, 1772, 2 vol. in-i2.
VENTS (Tour des), un des monumento de Tancienne
Athènes, qui subsiste encore de nos jours. Construite
Ear Andronicus Cyrrhestès, cette tour, revêtue de mar-
re, a la forme d'un octaèdre, de 8 mètres de diamètre,
dont chaque face est ornée d'une sculpture d'un travail
précieux et représentant l'un des principaux Vents. Au
sommet s'élevait un 'lYiton en bronze, qui tournait au
souffle du vent et en Indiquait la direction avec une
baguette qu'il tenait à la main. Au-dessous de chacun
des Vents était un cadran solaire. Une clepsydre était
placée à l'intérieur de la tour. Chacune des deux portes
par où l'on entrait était précédée d'un petit porche orné
de deux colonnes. La tour des Vents ne s'est sans doute
si bien conservée que parce que les derviches turcs eo
firent une chapelle.
VÉNUS, déesse de l'Antiquité qui a inspiré un grand
nombre d'œuvres d'art. La Vénus dite de Médicis, que
l'on conserve à Florence, est assurément un des chefs-
d'œuvre de la sculpture antique : on a supposé qu'elle
pouvait être une copie de la fameuse statue exécutée par
Praxitèle pour le temple de Cnide ; mais elle appartient
au sculpteur Cléomëne. La Vénus de MUo , découverte
dans l'Ile de ce nom en 1820^ et achetée par le gou-
vernement français en 183i, orne une des salles du mu-
sée du Louvre. Quelques-uns ont pensé que c'était la
statue de Cnide; mais on croit généralement qu'elle a été
faite également par Praxitèle, mais pour le temple de
Cos. Elle est du plus beau marbre de Paros, et a 2",25
de hauteur : elle tient une pomme à la main. Le buste
s'est parfaitement conservé ; la partie inférieure du corps,
que recouvre un vêtement ondoyant de manière à ne
laisser apercevoir qu'on pied, a subi plusieurs restaura-
tions. Il existe dans plusieurs musées de l'Europe, à
■ Borne, à Florence, à Paris, des Vénus accroupies, qui s»
VER
mi
VER
rosMmblent entre elles comme ces choses qiii naissent
de la mode et ont la vogue d*un moment.
VÊPRES. V, ce mot dans notre DictionnavrB de /?îo-
graphie et d'Histoire.
VÉRACITÉ. V. Crédulité.
VERANDA, légère galerie, couverte de toile ou d*un
tissu de Jonc, et qui règne autour des habitations en
Amérique et dans Tlode.
VERBAL, se dit proprement, en Grammaire, de tout
nom formé d*un verbe, comme en français sauveur, li-
bérateur, pourvoyeur, aimable, visible, navigable^ etc.,
mots correspondant par leur forme à des mots latins de
môme sens; et en grec bon nombre d'adjeoifs en ikos et
autres de valeur analogue. Mais, dans Pusage, on applique
spécialement le nom de verbal à des participes français em-
ployés accidentellement comme adjectifs : une histoire
amusante, une peinture parlante, une rue passante, des
cris perçants, des sons pénétrants, etc. L*adjectif verbal
diffère du participe en ce qu'il suit toutes les règles d'ac-
cord de l'aidjectif, tandis que le participe proprement dit
no varie jamais en genre et en nombre. Certains mots
uniquement employés aujourd'hui comme adjectifs ont
dû l'être primitivement comme participes : tels sont les
mots puissant, savant, nonchalant, qui se rattachent
aux formes je puis, savoir, et au vieux verbe chaloir
{ s'échauffer pour une chose, s'en occuper activement).
Plusieurs participes, en devenant adjectifs, ont changé
l'orthographe do leur dernière syllabe, et ont pris ent au
lieu de ant ; ainsi, adhérent, différent, eoscellent, négli-
gent, président, sont adjectifs ; différant, adhérant, né-
gligeant, présidant, appartiennent comme participes aux
verbes différer, adhérer, négliger, présider. Quelques
participes terminés en guant retranchent u lorsqu'ils de-
viennent adjectifs, comme extravagant, fatigant, La
distinction orthographique entre l'aâjectif verbal et le
participe, ou plutôt la distinction grammaticale, est re-
lativement récente, et ne paraît pas remonter plus haut
que la moitié du xvii* siècle. On trouve maintes fois, de-
puis, chez les poètes du moins, les participes écrits
avec «, rarement avec e, lorsqu'ils se rapportent à un
pluriel ou à un féminin ; mais la prose observe constam-
ment la règle fixée depuis environ deux siècles. — On
appelle aussi spécialement adjectifs verbaux, en grec,
des mots terminés en téos et en tos, qui sont forma di-
rectement d'un verbe, et expriment, les premiers une
idée d'obligation, de devoir, de nécessité, les seconds
une idée de possibilité ou quelquefois un état ac(][uis :
on remplace les uns en français par les verbes falloir ou
devoir devant un autre verbe, et les autres répondent
soit à certains participes passés employés sans auxiliaires
et sans compléments, soit aux adjectifs en able et en
ible, P.
VERBE, celui des trois termes de la Proposition qui,
réunissant l'attribut au sujet, affirme que la manière
d'être marquée par l'attribut convient au sujet. Très-
souvent le verbe et l'attribut sont renfermés en un seul
mot; mais l'analyse y retrouve distinctement ces deux
termes; et, dans ce dernier cas, comme dans le premier,
le verbe est toujours le verbe être. Le verbe être est donc
le verbe proprement dit, le verbe par excellence; on
l'appelle souvent verbe substantif ou verbe essentiel. Tous
les autres verbes sont appelés verbes attributifs ou verbes
adjectifs. Tout verbe attributif exprime soit l'action , soit
l'état du sujet Cependant le français, et en général les
langues modernes, n'ont pas de verbes qui expriment
proprement l'état, tandis qu'ils sont nombreux en grec
et en latin : par exemple, calere, (lorere, patere, etc.,
que nous ne pouvons rendre que par le verbe être accom-
pagné d'un adjectif : être chaud, être en fleurs, être ou-
vert, etc. Le verbe est susceptible de diverses modifica-
tions : il y en quatre, communes aux verbes qui expri-
ment soit une action , soit un état : les personnes, les
nombres, les temps, les modes. Les verbes sont égale-
ment susceptibles de flexions particulières, selon que le
sujet est représenté comme agissant (le verbe est dit
alors actif )^ ou comme recevant, éprouvant, souffrant
l'action d'autruî (il est dit alors passif). V. Abstrait,
Concret, Actif, Passif, Neutre, Réfléchi, lypEnsoimBL,
Déponent, Moyen, Conjugaison, Auxiliaire, Modes,
Temps, Défbctip, Irrégolier, Attributif, Transitif,
Intransitif, Fréquentatif, Pronominal, Réciproque. P.
VERBE, terme de Théologie. V. 'Logos.
VERDICT ( du latin verè dictum, dit sincèrement), dé-
claration du jury. Le mot a été emprunté à la législation
anglaise pour désigner la réponse que fait le jury aux
questions qui lui sont adressées sur la culpabilité des
prévenus, et d'après laquelle les Juges n'ont plus qti'à
faire l'application de la loi.
VERDIER. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d*Histoire.
VERDUN (Église Notre-Dame, à). Cette église cathé-
drale, après avoir été l'un des monuments les plus inté-
ressants de France, est devenue un déplorable témoi-
gnage des aberrations auxquelles le goût peut être en-
traîné. B&tie dans les premières années du xii* siècle par
un architecte nommé Garin, dédiée en 1147, elle offrait
le même plan que les églises métropolitaines de Trêves et
de Mayence. Elle avait deux chœurs, l'un à l'Orient,
l'autre à l'Occident ; l'entrée était sur le flanc septen-
trional de l'édifice, au milieu de sa longueur. Chacun
des deux chœurs avait son transept, et chaque abside
était flanquée de deux tours. Au lieu d'être prolongés
en déambulatoires, les bas côtés se terminaient aux
deux extrémités par des absides accessoires. Des cryptes
étaient pratiquées au-dessous des deux chœurs. Le chœur
oriental était environné de murs qui en cachaient la vue,
et fermé par un jubé; le chœur occidental, élevé de
12 degrés au-dessus de son transept, était pavé d'une
grande mosaïque exécutée en 1200 , et représentant un
évêque au milieu d'une vigne. Dans toute l'église, on ad-
mirait des tombeaux et des dalles sépulcrales. — Vers
1380, le chœur oriental, construit en style roman, fut
remplacé par le chœur actuel, d'architecture ogivale, et
plus élevé que l'ancien; l'architecte fut Jean Vautrée.
A la même époque, on fit disparaître le toit de la nef,
qui reposait sur des poutres travaillées et dorées, et Ton
construisit des voûtes : les étroites fenêtres romanes à
plein cintre ayant été fermées par la naissance de ces
voûtes, on en ouvrit de nouvelles, qui sont également pou
étendues, mais de forme ogivale; en sorte qu'il ne sub-
sista de la construction romano-byza»tine primitive que
les piliers carrés, les arcades semi-circulaires de la nef,
et quelques parties des collatéraux. A la suite d'un in-
cendie qui consuma la toiture en 1755, le chapitre entre-
prit d*embellir la cathédrale. On abattit donc les quatre
tours surmontées de flèches, et on construisit, à l'occi-
dent, les deux tours lourdes et écrasées que l'on voit au-
jourd'hui; on enfonça les fenêtres ogivales, avec leurs
meneaux et leurs verrières, pour les remplacer par de
grandes ouvertures circulaires à vitres blanches : on com-
bla la crypte du chœur oriental et on en fit disparaitre
les voûtes pour abaisser le sol trop élevé; on détruisit le
chœur occidental et sa crypte , et à la place on mit les
orgues et les fonts baptismaux ; on enleva les mausolées
et les pierres funéraires, afin de poser un pavé neuf; on
alla jusqu'à dégrossir les piliers romans, k les creuser de
cannelures et k les charger d'affreux ornements; des
portes exécutées dans le même goût furent placées aux
extrémités des transepts. Tel est l'état dans lequel des
remaniements inintelligents nous ont laissé îa cathédrale
de Verdun. L'ancienne sacristie, convertie en chapelle du
catéchisme, est une belle salle du xiii' siècle, dont les
voûtes semblent reposer sur un pilier central entouré de
légères colonnettes. Sur le côté méridional de l'église est
un beau cloître de style flamboyant , dont on a malheu-
reusement badigeonné les murailles et enlevé les dalles
funéraires.
VERGETTE, en termes de Blason, pal diminué, qui
n'a que le tiers de la largeur du pal quand elle se trouve
seule, et moins encore quand il y en a plusieurs dans
l'écu.
VERGUES (du latin virga, verge, bâton), pièces de
bois longues et arrondies, plus grosses au milieu qu'aux
extrémités, et placées horizontalement le long des m&ts
de navires pour porter les voiles. V. Antennes.
VÉRIFICATEUR (du latin verum facere, rendre vra
ou authentique), celui qui est commis pour vérifier soit
des comptes, comme les Vérificateurs de V Enregistre-
ment , soit des travaux exécutés, comme les Architectes-
vérificateurs, ou bien pour examiner si certains règle-
ments sont observés, comme les Vérificateurs des douanes
et des poids et mesures, ou si une écriture est vraie ou
fausse, comme les Experts-vérificateurs près les tri-
bunaux.
VÉRIFICATION D'ÉCRITURES , mesure ordonnée en
Justice quand une partie, dans une contestation relative
à quelque acte sous seing privé, désavoue son écriture ou
sa signature, ou bien lorsque les héritiera d'un défunt
contestent la vérité de sa signature ou de son écriture. Le
Code Napoléon (art. 1156 et suiv.) et le Code de Procé-
dure civile (art. 194-210) règlent les formalités à observer
en Darcjl cas. Celui qui a donné lieu k wne vérification
VER
1772
VER
dont le résultat ne lui est pas favorable est passible d*une
amende de 150 fr. et de dommages-intérêts, et peut être
condamné au payement du principal ainsi qu'à tous les
frais.
VÉRIFICATION DES CREANCES. V. PAILLrTC.
vÉRinCATioN DBS POUVOIRS , examen qu*on fait , dans
une Assemblée législative, des titres d*un député ou re-
présentant nouvellement élu.
VÉRITÉ. La vérité résulte de Tévidence. Si tout ce qui
peut être Tobjet de la connaissance était évident pour
nous, nous aurions la vérité sur toutes choses; la aciencc
et la vérité seraient universelles et complètes* L'une et
l'autre sont impossibles dans les limites de notre intelli-
gence. La vérité consiste donc pour l'homme dans cer-
taines vérité partielles, comme la science en quelques
sciences particulières; elle se reconnaît à la conformité
d'un ju^ment certain avec la réalité, c'est la récUité de-
^nne évidente. En Lo^que, la vérité consiste dans la
conformité de l'objet aveo l'idée, son contraire est l'er-
reur; en Morale, c'est le parfait accord de la parole et de
la pensée, son contraire est le mensonge. Le scepticisme,
mettant la certitude en question, conteste à l'esprit hu-
main le pouvoir d'arriver h la vérité, ou partiellement,
comme Kant, qui n'admet qu'une vérité subjective, ou
plus généralement, comme Hume et l'ancien pyrrho-
nisme (F. Transcendantalb — Philosophie, et Scepti-
cisme). Toutefois, la réalité des faits de conscience n'est
pas mise en doute ; quant au reste, l'affirmation du scep-
ticisme suffirait seule à prouver son erreur.
Il y a, pour chaque science, un ordre de vérités qui
sont constatées par la certitude, car l'esprit ne se sent
certain qu'en présence de la vérité. Les sciences phy-
siques et naturelles ont leurs vérités, les sciences mathé-
matiques ont les leurs , la métaphysique les siennes ; il
y a les vérités déduites, données par le raisonnement,
et les vérités premières, conçues par la raison. Celles-ci
sont les premiers principes, base de tous les autres;
Aristote, Kant, l'école écossaise ont cherché à en dresser
la liste.
Les Anciens avaient fait de la Vérité une divinité. Fille
de Jupiter, elle était mère de la Justice et de la Vertu.
Apelles l'avait représentée, dans son tableau de la Ca-
lomnie, sous les traits d'une femme modeste. On lui met
à la main un miroir de forme ronde. On la représente
ordinairement sortant du fond d'un pi^its, et l'air effrayé
de l'accueil que lui font les humains. R.
VERMICULÉ, se dit, en Sculpture, d'un ouvrage rus-
tique avec certains entrelacs ^vés à la pointe, de sorte
qu'on croit voir des sillons faits par les vers.
VERMILLON, nom donné quelquefois à l'harmonica
{V. ce mot).
VÉRONE (Amphithé&tre de), monument romain, le
mieux conservé de tous ceux de ce genre qui existent en -
core. On l'attribue généralement à l'empereur Auguste,
tandis que Sigonius le rapportait au temps de Maximien.
Il est de forme ovale et construit en marbre. Sa longueur
est de 154">,60, et sa largeur de i22",33; l'épaisseur des
constructions est de 40 met. L'arène a 75 met. sur 45. L'é-
lévation générale de l'amphithé&tre est de 31 met. ; elle
se compose de trois rangs d'arcades, 72 par étage. Sur les
pieds-droits qui divisent ces arcades sont des avant-corps
formant pilastres, qui n'appartiennent à aucun ordre.
L'appareil général est à bossages. Sur la galerie supérieure
était un rang de colonnes portant des figures. Les deux
entrées principales, pratiquées dans le podium, et percées
sur le grand axe, étaient couronnées de tribunes fermées
par des balustrades sur le devant et sur les côtés, et ré-
servées aux personnes de distinction. Quarante-six ran-
gées de gradins en marbre rouge, disposés circulaire-
ment, et ayant 32 issues dans les arcades, pouvaient
recevoir 25,000 spectateurs. On pense que l'arène était
quelquefois remplie d'eau pour les naumacliies. V. Maffei,
beglt an/iUatri e singolarmente del Veronese, Vérone,
1798; Guilari, Fouilles de Vamphithéàtre de Vérone,
ibid., 1818, in-4o.
VERRAT. V. Quart de canon.
VERRE. La découverte du verre est attribuée par Pline
l'Ancien aux Phéniciens. Il est certain que ce peuple est,
avec les Égyptiens, celui qui a pratiqué le plus ancienne-
ment l'art de la verrerie. On ne fabriquait guère que des
vases, des coupes destinées à la table des grands, des
urnes pour leurs tombeaux. De Pauw prétend que les
coupes égyptiennes représentaient des figures dont l'as-
pect était changeant ; qu'en Egypte on ciselait le verre, on
le travaillait au tour, on savait le dorer. Rien n'est plus
commun, dans les ruines égyptiennes, que les pâtes de
verre colorées et non colorées. Un beau et ghsnd plaiew
de verre blanc orne le musée du Louvre. Strabon afhrmf
qu'on fabriquait de temps immémorial à Thèbes des
verres très-transparents, dont la couleur imitait l'hya-
cinthe, le saphir, le rubis, et que Sésostris avait fait
couler, en verre de couleur d'émeraude, une statue qu'on
dit ailleurs avoir existé à Constantinople jusqu'au temp»
de Théodose. Appien affirme aussi qu'un colosse de
même matière se voyait dans fe Labyrinthe d'Egypte.
Pline dit que le théâtre de Seau rus était composé de
trois ordres, dont un était en verre. On lit dans Clément
d'Alexandrie que S* Pierre se rendit dans un temple
d'Aradus pour y voir des colonnes de verre d'une grosseur
extraordinaire. Il est question dans Claudien d'un globe
céleste construit en verre par Archimède. Bien qu'au dire
de Pline certains verres clairs et blancs fussent e^itimés
à l'égal de la vaisselle d'or ou d'argent, il est difficile
d'admettre que la madère en fût supérieure à celle de
notre verre à vitre : quand le même auteur parle de
deux coupes de moyenne grandeur que Néron paya
6,000 sesterces, c'étaient sans doute de ces merveilles
dont le vase de Portland ( V. ce mot) nous donne une si
haute idée, de ces coupes où les grands artistes ne dé-
daignaient pas de ciseler des bas-reliefs en émail blanc
sur un fond de verre coloré. Les verreries de l'Antiquité
fabriquaient des vases à filets de couleurs diverses, dont
les Modernes ont vainement essayé d'atteindre la perfec-
tion. Les Vénitiens, auxquels l'art des Anciens sembla
s'être transmis par une tradition non interrompue à tra-
vers le moyen &ge, n'ont môme pas réussi à imiter ces
petites urnes é^ptiennes à filets dentelés que Ton re-
trouve dans les tombeaux de Memphis et de Thèbes.
Pour les Grecs et les Romains, les objets en verre furent
toujours des objets de luxe, et le prix en était exorbitant.
Ce fut seulement au ii* ou m* siècle qu'on employa le
verre aux vitres : on avait auparavant fait usage de cette
matière pour paver les maisons d'une espèce de mo-
saïque. — Après la chute de l'Empire romain, l'an de
la verrerie fut négligé dans presque tout TOccidenL
Mais, en Egypte et en Syrie, il y eut toujours des fa-
briques importantes. On peut s'en convaincre en lisant
la description des trésors du calife Mostanser-Billah ati
XI* siècle, lequel possédait plus de 20,000 vases de venv
unis ou ciselés, une multitude de miroirs, et de larp^
bassins sur lesquels se dessinaient des figures et des
feuillages. La verrerie ne jeta un grand éclat dans le»
pays chrétiens qu'à Venise et à Murano. Dans le mélange
d'émail pointillé bleu et blanc qu'on Tencontre firéquem-
ment sur les coupes de cette provenance, on reconnaît
l'ornementation propre aux verriers du Levant , celle que
l'on trouve, par exemple, sur le précieux verre arabe con-
servé à Chartres, et dont la tradition faisait un des pré-
sents envoyés par Haroun-al-Raschid à Charlemagne,
mais dont l'époque, nettement déterminée par les carac-
tères couflques de la légende, doit être fixée au milieu du
XIII* siècle. Quant à l'émail appliqué au pinceau et qui
s'élève en saillie, en dessinant, sur le verre incolore et
transparent , des sujets ou des fleurs fes ouvriers orien-
taux l'employaient aux xii* et xiii* siècles avec une soli-
dité de procédés et une beauté de couleurs que les ma-
nufactures vénitiennes n'ont Jamais atteintes. Il suffit,
pour se rendre compte de cette supériorité des maîtres
de la verrerie arabe, de voir dans les mosquées du Ctûre
et de Damas ces belles lampes sur lesquelles sont inscrits,
au milieu des arabesques et des fleurs émail lées, les noms
des sultans fondateurs de ces mosquées. Une coupe du
musée de Cluny, ornée d'inscriptions antiques, prouve-
rait encore l'habileté des verriers de l'Egypte et de la
Syrie, et l'antériorité de leurs produits sur les prodQit>i
de Venise. Au xv* siècle, les verreries de l'Orient ont cesst-
d'exister ; Murano entre alors dans la période brillante de
sa fabrication : ses boires, ses coupes sont recherchées
dans toute l'Europe, et parviennent même aux princes
musulmans de l'Asie; leurs formes se modifient, leurs
dessins se varient, et néanmoins, dans cette industrie de-
venue indépendante, on reconnaît encore les procédt%
premiers et le goût qui a dirigé son ornementation. L'Al-
lemagne tut la première à s'aff'ranchir du monopole de
Venise; la France, qui resta plus longtemps sa tribu-
taire, ne fabriqua elle-même d'excellents produits que
depuis le règne de Louis XIV et par les soins de Colbert
( V. Glaces ). A mesure que l'industrie française a fait des
progrès, l'art proprement dit a dégénéré : en effet, au
lieu que toutes les facultés de l'ouvrier s'appliquent,
comme autrefois, à satisfaire les délicatesses du coût le
plus raffiné, la criâatioii des fantaisies de l'imasnnation lui
YER
177i
VER
mt de plus en pi as interdite ; cfit^ Imagination est môme
•teinte par l*obligation d*un travail presque mécanique;
cir il faut fabriquer le plus grand nombre possible de
pièces identiques en un temps donné, et , dans la lutte
r :)ntre la concurrence, on est plus préoccupé de trouver
( es méthodes expéditives que de créer des objets d*art.
L'art de la verrerie, dans ses conditions actuelles, ne
peut donc ni reproduire les chefs-d'œuvre de TAntiquité
et de la Renaissance, ni les surpasser de toute la supé-
riorité du verre fabriqué de nos Jours. La matière seule
est supérieure à ce qu'elle fut Jadis. Vers le milieu du
xviii* siècle, un certain Bûcher apporta de Bohême en
France l'art de tailler les cristaux; la taille et la gravure
se firent ensuite avec plus de promptitude, gr&ce à la dé*
couverte de Tacide fluorique par Scneele en 1771. La ver-
rerie de vitres s*est perfectionnée en môme temps : le
verre avait été longtemps employé en panneaux à lo-
sanges plombés ; en 1711, on commença a l'employer en
carreaux ench&ssés dans la menuiserie de la fenôtre. B.
VERRR (Châteaux de verre). V, Châteaux de verre.
VERRE (Peinture sur). Le verre coloré fut connu des
Anciens, et, à cause de sa ressemblance avec les pierres
précieuses, et de la lumière affaiblie qu'il transmettait ,
ils le préférèrent au verre blanc pour les édifices consa-
crés au recueillement et au culte. Les vitraux ne se com-
posèrent, au début, que de compartiments de diverses
couleurs, dont TefTet agréable résultait de leur agence-
ment et de leur combinaison. Plus tard , les vitriers cher-
rlièrent à reproduire les ornements employés dans Tar-
chitecture, et ils arrivèrent enfin à la représentation de
scènes à personnages. Il parait que les premiers essais de
cette peinture sur verre furent faits dans le ix* siècle de
notre ère, puisqu'au dire de l'historien de S^-Bénigne de
Dijon il existait dans cette église un vitrail du temps de
Charles le Chauve, où était figuré le martyre de S** Pas-
chasie. Quelques verrières de la nef de la cathédrale d'An-
;;er», celles ae l'abside de l'abbaye de S*-Denis et de la
cathédrale de Bourges, celles du chœur de la cathédrale
(le Lyon, remontent au xii* siècle. Hais, jusqu'au xiv*, les
progrès de l'art furent très-lents, puisqu'on se bornait à
'Je simples traits sans ombres, ou accomp^agné» de quel-
ques hachures pour donner un peu de relief aux figures.
Avec des couleurs très-intenses, telles que le bleu, le
vert , et surtout le rouge, la lumière n'eût passé que dif-
ficilement; on fabriqua des verres de couleur composés
de deux couches, l'une de verre diaphane incolore,
l'autre de verre coloré et moins épaisse ; puis on enlevait
à la meule une portion de la couche colorée, afin d'obtenir
en blanc telle broderie ou tel dessin où l'on pouvait ap-
pliquer une nouvelle couleur. On distingue trois manières
successives dans la peinture sur verre. Dans la première,
qui fut en usage aux xm* et iiv* siècles, les verrières
sont formées d'un nombre plus ou moins grand de car-
touches, qui renferment de petits sujets se rattachant à
une même légende; on les nomme, pour ce motif, ver-
rtérej Xégwdaxrei, Le fond sur lequel se détachent les
cartouches c»t ordinairement une espèce d'ornement ré-
ticulaire plus ou moins orné, où le bleu et Se rouge do-
minent; et de riches bordures encadrent le tableau. Le
môme genre d'ornements et de tableaux est appliqué aux
roses des portails ; celles de Notre-Dame de Paris peuvent
servir d'exemple. A la même période de l'art appartien-
nent les verrières de la S^'-Chapelle, des cathédrales de
Chartres, de Reims, de Cantorbérv. Une seconde manière
fut adoptée au xv' et au xvi* siècle : participant aux pro-
grès que firent alors tous les arts du dessin, la peinture
sur verre produisit ses plus belles œuvres, dont les cou-
leurs émailié^ au feu font corps avec le verre; le modelé
des figures passa bientôt dans les draperies et les ar-
mures; les ornements, mieux travaillés, présentèrent un
fini jusqu'alors inconnu ; personnages de grande dimen-
sion, sujets religieux, scènes empruntées à la Bible, à la
Vie des saints, à l'histoire ou à la vie civile, tout se
trouve sur les vitraux de cette nouvelle époque, qui four-
nissent ainsi de précieux renseignements sur les costumes
et les mœurs. On peut citer prmdpalement les verrières
de Rouen, de Beauvais, de Sens, de Troyes, de Tours,
d'Amiens, de Notre-Dame de Brou, de Bourses, d'Auch,
de Vincennes, de Met2^ de Tournai, etc. Parmi les maîtres
verriers on distingue, tiu xiv* siècle. Clément de Char-
tres, Jehan de Damery, Jacquemin, Guill. Canonce; au
XV* Guill. de Graville, Guillaume et Jean Barbe, Geoffroy
Klasson, Arnould de La Pointe, Cardin Joyle, Robin Du-
meigne, Henri Mellein, en France, Jacques TAllemand et
Albert Dorer en Allemagne; anxvi*, en Flandre, Valère
ProfoBval, Gérard Oruaire, et, 6D France, Claude et Guil- '
laume de Marseille, les frères Gontier, Cornouaillcs, Ar>
naud Desmoles, Angrand-le-Prince, Cordonnier, Gabriel
Havène, Michel Germain, Jean Soubdain, Michel Be-
soche, Pierre Anquetil, Valentin Bouch, Olivier Tardif,
Jean Lequier, Derhode, les Evrard, Bernard Palissy,
Pinaigrier et Jean Cousin. Les artistes français allaient
alors décorer les églises de Bologne, d'Arezzo, de Rome,
et trouvaient de dignes rivaux à Bruxelles, à Gouda, à
Cologne et à Ratisbonne. Mais, arrivé à son apogée, l'art
déclina : les peintres verriers, trop fiers de la richesse de
leur palette, se mirent à mépriser l'emploi du verre co-
loré dans sa masse, procédé qui avait pourtant assuré
aux œuvres de leurs devanciers cet éclat de couleur, cette
solidité de tons qu'on ne dépassera jamais. Ils se livrèrent
presque exclusivement à la 'pemiurt en apprêt, qu'on
peut regarder comme la troitiième manière de la pein-
ture sur verre ; mais, malgré leur habileté, leurs ouvrages
trahirent bientôt l'insuffisance de ce nouveau procédé.
Cette cause de décadence ne fut pas d'ailleurs la seule :
le progrès même des beaux-^rts devait être funeste à l'art
des maîtres verriers. En effet, comme on ornait les
églises de tableaux à fresque et à l'huile, il fallut, pour
en apercevoir les beautés, laisser pénétrer dans les édi-
fices une lumière plus pure et plus vive. On ne fit bientôt
plus que des grisailles, et, pendant le xvii« siècle, on
substitua aux vitraux peints des vitraux en verre blanc
ou entourés seulement d'une bordure en verre coloré.
Jacques de I^aroy en Bourgogne, Sempy, Perrin, Michu,
Pierre Tâcheron, Claude et Israël Henriet, et la famille
des Linck en Alsace, luttèrent vainement contre cette
décadence. La peinture sur verre se réfugia dans les vi-
traux blasonnés et de petites dimensions, dits vitraïuc
suisses, comme on en voit à Bàle, à Fribourg, à Con-
stance.
Au xviii* siècle, P. Leviel fit encore d*inutllcs efforts
en France pour ranimer les grandes traditions : elles ne
furent conservées qu'en Angleterre, comme l'attestent les
verrières d'Oxford, exécutées par Jervayse. L'art a reparu
de nos jours avec éclat , gr&ce aux restaurations qui ont
été entreprises dans les églises du moyen &ge et de la Re-
naissance, et aux imitations que l'on a faites de ces édi-
fices dans les constructions nouvelles. La peinture sur
verre a été renouvelée à la manufacture de Sèvres par
Robert, sous le gouvernement de la Restauration ; on s'y
livre aussi avec succès depuis 1823 dans la verrerie de
Choisy-le-Roi. Dihl, Brongniart, Demarne, Leglay, Mor-
telègue, Paris, Leclair, Constantin, Vatinelle, Béranger,
Vigne, Hesse, Schilt, Maréchal, Lobin, Thévenot, Thi-
haud, Bontemps, Lusson, Gérente, Didron, Oudioot,
ont contribué à la renaissance de cet art.
L'oubli dans lequel était tombée la peinture sur verre
à la fin du siècle dernier avait accrédité l'opinion qu'on
en avait perdu le secret. Mais les procédés de cet art ont
toujours été parfaitement connus, et beaucoup de livres
nous les ont conservés. Voici en quoi ils consistaient :
Après avoir fait un carton, c.-à-d. une aquarelle sur
papier du sujet qu'on voulait exécuter, on calquait sur un
autre papier le trait de ce carton , et on y indiquait par
des teintes plates les différentes couleura. Ce calque ayant
été découpé en autant de parties qvLQ l'exécution deman-
dait de morceaux de verre, on indiquait par un trait sur
le carton original toutes les pièces découpées, dont on
pouvait, à l'aide de numéros de repère, reformer l'as-
semblage. Quand les ouvriers avaient taillé sur ces pa-
trons les verres colorés (et ils choisissaient le verre le
moins fusible), les peintres les plaçaient sur le carton, et
calquaient tous les traits qu'ils voyaient au travers, à
l'aide d'une drague, pinceau long et effilé, et d'un émail
noir composé de battitures de fer broyées avec de l'eau
gommée et mélangées avec un verre très- fusible. Ce
même émail était encore employé pour ombrer les dra-
peries. Les anciens peintres de vitraux ne se servaient
que d'un petit nombre de couleurs, telles que le rouge,
émail dont la sanguine ou l'hématite était la base, et le
jaune, produit par l'argent. On peignait quelquefois sur
les deux côtés du verre ; mais une des couches de cou-
leur était une teinte à plat, et I9 ombres se trouvent
toujours du côté où est le trait. Le travail du peintre
étant achevé, on fixait les couleurs qu'il avait appliquées
en soumettant le verre à la cuisson. Plus tard , la fabri-
cation journalière des émaux employés dans la mosaïque
fit découvrir d'autres couleurs applicables sur le verre, le
pourpre, le bleu, le vert , le violet , etc., et des procédés
plus parfaits pour l'application et la fixation des cou-
leurs. La méthode des premiers peintres, qui employaient
le verre coloré dans sa masse, est préférable à la simple
VËtl
iiu
VER
peinture sur verre blanc ; outre qu'il y a économie de tra-
vail , elle donne des tons plus brillants et plus solides, et
certains effets qu'on ne peut obtenir avec des couleurs
d'application. V. L&f\e\ , Traité de la peinture sur verre,
in-8**; Alex. Lenoîr, Histoire de la peinture sur verre,
Paris, 180-i, in-8**; Hyacinthe Langlois, Essai sur la
peinture sur verre, Bouen, 1832, in-8°; de Caumont,
Cours d*antiquités monumentales ^ 6* partie, chap. 5;
Émeric David, Discours sur la peinture; Schmitbals,
Traité de la peinture sur verre chez les Anciens, en alle-
mand, Lemgo, 1820; F. deLasteyrie, Histoire de la
peinture sur verre d'après les monuments , 1837, in-fol. ;
Bourassé, Essai sur la peinture sur verre, dans son Ar-
chéologie chrétienne, 1841, in-8°; Jouve, Aperçu histori-
que sur Vorigine et l'emploi des vitratur peints dans les
églises, Aîx, 1841, in-8"; Gessert, Histoire de la peinture
sur verre en Allemagne et dans les Pays-Bas, Leipzig,
18i2; Thibaud, Considérations historiques et critiques
sur les vitraux, Clermont, 1842; Thévenot, E^sat histo-
rique sur le vitrail, dans les Annaies scientifiques et
littéraires de V Auvergne, 1837; Batissier, Traité de la
peinture sur verre, Paris, 1850. B.
VERRIÈRE , verre à vitre dont on enveloppe les châsses
et les reliquaires, ou qu'on met devant les tableaux, pour
les garantir de la poussière; — grande fenêtre d'église, le
plus souvent garnie de verres colorés. Dans le premier
cas, on dit aussi Verrxne et Vitrine; dans le second,
Viirail.
VERRINES, nom sous lequel on connaît les sept dis-
cours composés par Cicéron contre Verres, préteur de la
Sicile, accusé d'abus de pouvoir monstrueux dans sa
charge.
VERROTERIE , nom qui désigne toutes sortes de pe-
tits ouvrages en verre, colliers, bracelets, pendants d'o-
reilles et autres ornements.
VERS DANS LES LANGUES ANCIENNES. Le vers est
un assemblage de mots mesurés et cadencés selon cer-
taines règles fixes et déterminées. Chez les anciens
Grecs, la base des vers était la mesure ou la quantité
des syllabes. Leur vers le plus beau, le plus usité et le
plus ancien, était le vers héroïque de six mesures ou
hexamètre, dont la base était W dactyle (F. DACTyuQCE,
HBXAMÈTnE). Ils faisaient aussi un grand usage du vers
de 5 mesures ou pentamètre, construit alternativement
avec un hexamètre (V. Pentamètre). D'autres vers repo-
saient sur Viambe, le trochée, V anapeste, le choriambe,
le tribraque {V, ces mots). Beaucoup de vers avaient
reçu des noms particuliers de certains portes ou de cer-
tains pays, tels que Aristophanien, Asclépiade, Eupoli-
dien,Alcaique, Saphique, Ionique, etc. (V,ces mots). Les
Romains n'eurent pas plus tôt connu les œuvres de la
poésie grecque, qu'ils en adoptèrent la versification en la
modifiant peu à peu dans certains détails pour la mettre
mieux en harmonie avec le caractère de la langue la-
tine, et renoncèrent à la versification grossière de leurs
chants primitifs {V, Saturnien). P.
VERS DANS LES LANGUES MODERNES. En français, les
vers sont rimes, et composés d'un certain nombre de syl-
labes. Le plus grand vers, qu'on nomme alexandrin
(K. ce mot)y se compose de 12 syllabes, et est générale-
ment coupé après la 6", c.-à-d. divisé en deux hémi-
stiches : cette versification serait monotone, si le poète ne
savait varier h propo? les coupes ( V. Coupe). Certaines
langues ont des vers de 11 syllabes ( V, HENoécASYi.-
labe) ; cette mesure est inusitée en français. Le vers de
10 syllabes {V. Décasyllabe) est, au contraire, fort usité,
et l'a été surtout dans les derniers temps du moyen âge
et jusqu'à la fin du xvi* siècle : il a une césure après la
4* syllabe, très-rarement après la 5*; il est susceptible
des mômes variétés de coupes que l'alexandrin. Les vers
de 9 syllabes, assez rares, ont une césure après la 3*. Le
vers de 8 syllabes, très-usité au moyen âge, et depuis
dans les pièces légères, n'est soumis à aucune césure; le
poôte la place à son gré. Il existe aussi un vers de 7 syl-
labes, employé surtout dans la poésie lyrique { V, Hep-
TASYLLABE^; uu vers de 6 syllabes, dont on se sert rare-
ment seul, et qu'on entremôle presque toujours avec
d'autres vers de différentes espèces. Les vers qui ont
moins de 6 syllabes ne sont guère propres qu'aux sujets
simples et badins. — Dans la versification française, Ve
muet final, placé devant un mot commençant par une
voyelle, s'élide; mais il compte toujours devant une con-
sonne, soit au milieu, soit à la fin des mots. Les mots
terminés en ées, ies, ne peuvent s^^fiiMor qu'à la fin d'un
vers. Ceux qui ont la terminaison ent muet, comme ils
mmtnt font compter leur finale devant une voyelle,
mais ne peuvent jamais ^Ire placés à rhémistiche dans
le vers alexandrin, ni à la césure da vers de 10 syllabe».
H faut éviter la rencontre d'une voyelle sonore, letle
que a, é, i, v, avec un mot commençant par nnt
voyelle : autrement dit, Thiatus est banni des vers
français {V. Césure, Elision, Enjambement, Hémis-
tiche, Hiatus, Rejet, Rime).
On nomme Vers libres des vers de diffén^ntes ra^
sures, entremêlés selon le goût ou le caprice du po*?te,
et qui ne sont liés entre eux que par le sens et lei
rimes. Tels sont ceux des Fables de La Fontaine, e:,
en général, de toutes les fables en vers, des obéras de
Quinault, de presque toutes les pièces desUnéei à
ôtre mises en musique, eto.
Au jLVi«= siècle, quelques écrivains voulurent rompo^^
des vers métriques, à l'exemple des Anciens. Un pf» u:
du nom de Mousset, aujourd'hui complètement inconnu,
en eut le premier l'idée, et entreprit en 1530 une tra-
duction de VIliade, dont il ne nous est parvenu que ce
seul vers :
Chàntë, Dè-\êssè, lé \ cœûrfiirï'\eiix et ] lire d:A-\cmh.
Dorât, Ronsard, Bellcau, Balf, Pasquier, Desportes, Ra-
mus, Nicolas* Rapin, Jean Passerat, Henri Estienne, So'-
vole de Sainte-Marthe, d'Aubiené, etc., s'exercèrent aussi
dans la poésie mesurée. Mais leurs efforts furent stériles,
ainsi que ceux de Turgot, qui publia en 4778, sons k
titre de Didon, une traduction en hexamètres du 4' chant
de VÊnéide de Virgile, et ceux du comte de Saint-Len,
ancien roi de Hollande. La plupart de nos syllabes om
une valeur relative presque inappréciable, et ne sont ri
longues ni brèves; elles tiennent leur quantité du r>
price ou de l'habitude particulière de celui qui les pro-
nonce, et, même parmi les lettrés, il n'existe pas d'uni-
formité parfaite dans la prononciation. Cette raison n^l
impossible l'introduction des vers métriques dans noi >
littérature. D'ailleurs, la liberté illimitée de Pinver^i « :
donnait aux Anciens la faculté de rapprocher, de dispos r
les mots de manière à composer facilement tous ! >
mètres admis dans leur versification : notre constracii' -
analytic[ue, qui permet rarement à la poésie elle-min^
d'enfreindre ses lois, s'oppose aux transpositions d-
mots, aux combinaisons do longues et de brèves.
Les autres versifications modernes reposent génénW
ment sur le nombre des syllabes, mais sont de plus sou-
mises à certaines règles d'accent; en anglais et en a!!*^
mand, la rime n'est pas toujours obligatoire. Les \<^r>
non rimes s'appellent vers blancs. On a vainement es»>'
d'en faire en notre langue, qui ne peut se passer de la
rime. P.
VERS DORés. V. Dorés (Vers).
VERS TECHNIQUES , vers faits pour aider la mémoire, '^n
rappelant beaucoup de faits en peu de mots. On en afiii
usage, par exemple, dans la Grammaire latine de D.^-
pautère , et dans le Jardin des racines grecques de
Lanceict.
. VERSAILLES f Château de). V, notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
VERSANTS, pentes ou revers d'une chaîne de mon-
tagnes. Dans la même chaîne, les deux versants oppo^'-^
n'ont pas généralement la même inclinaison : l'un s'in-
cline doucement , l'autre offre une pente abrupte ou ra-
pide. Quand on parle du versant d'une mer, on entend
l'ensemble des terres qui s'infléchissent vers cette mer »t
lui envoient leurs eaux : un versant maritime peut con-
tenir un ou plusieurs bassins (V. ce mot).
VERSELLER, en latin du moyen âge versilare, vteai
mot qui signifiait chanter les psaumes alternativement a
par versets.
VERSET, division d'une phrase par membres et par
sections, écrits chacun en alinéa. C'était ce que Ton app^ -
lait versus en latin, que nous avon& traduit par tvn^'.
Ce fut dans les premiers temps du christianisme que lo-
eut ridée de découper ainsi les phrases de la Bible., p<'>n-
en rendre l'enseignement et l'intelligence plus facil*"^ *
des multitudes de chrétiens ignorants, qui n'en conipn •
naient pas toujours même la traduction latine. Les rh« -
teurs et les grammairiens avaient déjà pratiqué ce mo><-:
pour les auteurs classiques qu'ils mettaient entre l**-
mains de leurs écoliers, et du temps de Qaude, peui-
étre même avant, il existait des ouvrages de Cicéron e>
de Démos^ène ainsi transcrits en versets; comme k^
versets étaient numérotés, les commentateurs s'en wr-
Yt&eni pour leurs citations. C'est ainsi oue l'Ancien et l^
Nouveau Î\i5tanicnt sont restés divisés de cette man.Sirc.
VER
un
VEtJ
ainsi qae beaucoup d'autres livres de sainteté ou de
piété, qui tous sont écrits en prose. L'idée de la division
de la Bible en versets remonte au iv* siècle, au temps de
S^ Jérôme. La division adoptée aujourd'hui est due à Ro-
bert Estienne. Le signe typographique qui marque les
versets est celui-ci : f. C. D— t.
VERSIFICATION, art de faire les vers, ou exposé des
procédés propres à chaque langue pour construire les
vers. La versification grecque repose sur la quantité des
syllabes et sur les différentes combinaisons des longues
et des brèves; celle des Latins est entièrement calquée
sur celle des Grecs. — La versification française repose sur
le nombre des syllabes et sur la rime, — Celle des Italiens,
des Espagnols , des Allemands, des Anglais, repose sur
le nombre des syllabes et des accents, et sur la rime ou
parfois Vassonance, — La versification est à la poésie ce
que le style ou la forme, en prose, est à la pensée, ou ce
que la Rhétorique est à l'Éloquence. La poésie consiste
surtout dans l'imagination, dans la conception des idées
d'ensemble et de détail; la versification n'est que la
forme extérieure dont elles sont revêtues. Les véritables
poètes sont toujours d'excellents versificateurs, parce que
toujours ils savent trouver la forme convenable aux con-
ceptions de leur génie et donner un tour naturel aux
détails créés par leur imagination. Ainsi, Homère est le
meilleur versificateur de l'ancienne Grèce, parce qu'il
ra est le plus grand poôte ; nul poète latin n'ofi're une
forme de vers plus régulière, plus nette, plus riche et
plus variée que Virgile, le premier entie tous par le
génie. Corneille, Molière, La Fontaine, Racine, nos plus
grands poëtes, sont également nos plus purs modèles de
versification. Le talent de versifier, sans le génie ou sans
le goût, n'est qu'un ta'ent froid et stérile : un habile ver-
sificateur peut flatter l'oreille aussi bien qu'un prosateur
habile & ordonner de pompeuses périodes; le poëte seul
sait aller jusqu'à l'àme et enthousiasmer les imagina-
tions. — Le mot Versification s'applique aussi à la ma-
nière spéciale à chaque poète de tourner les vers. P.
VERSION. Ce terme, comme synonyme de traduction,
s'emploie spécialement pour désigner les traductions du
texte hébreu de la Bible en grec, en latin, en syriaque,
en arabe. Ainsi on dit la Version des Septante, la Ver-
sion de S^ Jérôme, etc. — En termes de Pédagogie , le
mot Version s'applique aux exercices de traduction du
grec, du latin, de l'allemand , de l'anglais, en français,
qui font la base de l'enseignement secondaire : seule-
ment, au lieu de dire version du grec, du latin en fran-
çais, on dit, par une abréviation inexacte , mais gue l'u-
sage a conservée, i;er5ton grecque, version lattne. Les
exercices dé version consistent en morceaux extraits des
différents auteurs appartenant aux meilleures époques
littéraires, et que l'on varie de manière à former les
jeunes intelligences aux styles les plus divers, et & les
initier à presque tous les sujets, historiques, philoso-
phiques, moraux, didactiques, oratoires, épiques, lyri-
ques, dramatiques, descriptifs, critiques, etc. L'exercice
de la version est fructueux pour l'esprit : la lutte que
rélève soutient pour reproduire dans sa langue mater-
nelle ane page de prose ou de vers écrite avec élégance,
avec éclat, avec éloquence, éveille son amour-propre,
excite son émulation, le force à étudier les ressources de
sa langue, lui apprend à la manier avec souplesse, tout
en étant sévère sur le choix des expressions et sur la
convenance des tours et du style. P.
YBRSioif , se dit des différences qui existent entre des
fécits relatifs à un môme fait.
VERSO, F. Folio.
VERTU. Ce mot servit d'abord & exprimer le courage ;
en grec arétè, de Ares, Mars; en latin virtw, â&vir,
homme. On l'appliqua ensuite à tous les genres de cou-
rage, surtout h la force qui consiste à vaincre ses pas-
sions. C'est en ce sens moral qu'on peut dire que la vertu
est le sacrifice de la passion et de l'intérêt au devoir.
Selon Aristote, la vertu, au point de vue moral, naît de
l'habitude : entre les habitudes, dit^il, on nomme vertus
celles qui sont dignes de louante. A côté des vertus
morales, il distinguait les vertus intellectuelles, qui sont
plutôt des facultés; de même qu'en parlant des pro-
priétés des corps on dit, par exemple, la vertu d'une
planta. Le contraire de la vertu, c'est le vice, La plus
ancienne division des vertus est celle faite par les philo-
sophes grecs en vertus cardinales, au nombre de quatre:
la force, la prudence, la tempérance, et la justice. Dans
Xénophon, Socrate remplace la prudence par le respect.
dfi la divinité. Platon adopte la première division, en lui
donnant un caractère psychologique : aux sens il ap-
plique la tempérance, au cœur la force et le courage , à
l'esprit la science; de Taccord de ces trois vertus il forme
la justice. On trouve cette division chez les Stoïciens et
dans Cicéron, d'où elle passa chez les modernes. Le
christianisme , trouvant cette division incomplète , y
ajouta les vertus théologales.: la Foi, l'Espérance et la
Charité.
Dans la hiérarchie céleste, les Vertus forment le troi-
sième ordre; c'est le chœur des Anges placé entre les
Dominations et les Puissances : r n leur attribue le pou-
voir de faire des miracles, et de fortifier les Anges d'ordre
inférieur dans l'exercice de leurs fonctions.
Comme divinité allégorique, la Vertu, fille de Jupiter,
était représentée vêtue de blanc, tenant tantôt la pique
et le sceptre, tantôt la couronne de laurier ; elle était
ailée, ou assise sur un cube de marbre, image de la so-
lidité. R.
VERTUGADINS. V, Paniebs.
VERVE, nom qu'on donne, en Poésie, à la vive re-
présentation d'un objet dans l'esprit et à une émotion du
cœur proportionnée à cet objet.
VÈSË, nom de la musette ou cornemuse dans plusieurs
régions de la France.
VESIGA PISCIS. K. Amande.
VESPASIENNES. V, Colonwbs.
VESPÉRAL, livre d'église qui ne contient que le chant
des Vêpres.
VKSPERIE (du latin vesper)^ nom d'une thèse dans
l'ancienne Université de Paris, parce qu'on îa soutenait
le soir.
VESPILLONS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
VEST, vieux terme de Jurisprudence, désignant l'acte
solennel par lequel l'acquéreur d'un héritage tenu en
roture était investi, par le seigneur foncier, du droit do
propriété sur cet héritage. Le Dévest était la permission
que le propriétaire d'une terre donnait à un acquéreur
d'entrer en possession de cette terre.
VESTIAIRE (du latin vestis), lieu où l'on conserve les
vêtements ou costumes des membres d'une assemblée,
d'un tribunal, etc. — Dans l'Empire byzantin, le Ves-
tiaire était un fonctionnaire qui avait soin des habits de
l'empereur, une sorte de grand maître de la garde-robe.
VESTIBULE, en latin vestibulum, pièce par laquelle
on entre dans un palais, dans un château, ou dans tout
autre grand édifice. Le mot est dérivé de Vesta, parce
que les Anciens entretenaient souvent du feu en l'hon-
neur de cette déesse dans les pièces de ce genre. Le ves-
tibule communique d'ordinaire à la cour ou au jardin ;
il donne accès au rez-de-chaussée, et le principal escalier
vient y aboutir. C'est là aussi que restent les gens de
service. Un vestibule ne comporte ni meubles, ni glaces,
ni tableaux, ni riches ornements; on le décore avec des
pilastres, des colonnes simples, quelquefois des statues.
Il est dit simple, quand il a ses deux races également dé-
corées, comme celui des Tuileries; figuré, lorsqu'il forme
des avant-corps et des arrière-corps revêtus de pilastres
et de colonnes ; à ailes, quand il a, outre le passage prin-
cipal, des espèces de bas côtés, comme au Louvre. —
Chez les Romains, le vestibule était une petite place de-
vant la façade des grandes maisons.
VÊTEMENTS. V. Costume.
VÉTÉRANS. ) V. ces mots dans notre
VÉTÉRINAIRES (Écoles). [ Dictionnaire de Biogra-
VETO. , ) phie et d'Histoire.
VÊTURE, acte par lequel un novice revêt solennelle-
ment l'habit d'iin ordre religieux. La vêture précède d'un
an la profession {V. ce mot).
VEUVAGE, état' du mari ou de la femme qui a perdu
son conjoint. Chez les Hébreux , s'il n'était pas né d'en-
fants de la première union, le beau-frère, et, à son dé-
faut, d'autres parents devaient épouser la veuve : quand
celle-ci ne trouvait pas de mari, ou était, par son âge ,
hors d'état d'avoir des enfants , la loi pourvoyait à sa
subsistance. A Rome, les veuves &gées de moins de 50 ans
devaient convoler à de secondes noces, si elles voulaient
échapper aux peines dont les célibataires étaient frappés.
Dans les premiers temps du christianisme , les veuves
qui n'avaient connu qu'un seul mariage et qui avaient
atteint 60 ans étaient associées à certaines fonctions du
sacerdoce : elles visitaient les malades et les prisonniers,
portaient des secours aux pauvres, recevaient et nourris-
saient les étrangers, instruisaieni et surveillaient les
vJiisrgQS çl^ç^tiennes, ensevelissaient les morts, etc. L'Église
catholique admet aux ordres sacrés l'homme veuf d'une
première union, mais les interdit h celui qui se trouve
VËtV
nu
VER
peiaturo sur verre blanc ; outre qu'il y a économie de tra-
vail , elle donne des tons plus brillants et plus solides, et
certains effets qu'on ne peut obtenir avec des couleurs
d'application. V. Lm'ie\ , Traité de la peinture sur verre,
in-8°; Alex. Lenoir, Histoire de la peinture sur verre,
Paris, 1804, in-8°; Hyacinthe Langlois, Essai sur la
peinture sur verre, Bouen, 4832, in-8°; de Caumont,
Cours d'antiquités monumentales, 6* partie, chap. 5;
Émeric David, Discours sur la peinture; Schmitbals,
Traité ds la peinture sur verre chez les Anciens, en alle-
mand, Lemgo, 1820 ; F. de Lasteyrie , Histoire de la
peinture sur verre d'après les monuments, 1837, in-fol. ;
Bourassé, Essai sur la peinture sur verre, dans son Ar-
chéologie chrétienne, 1841, ïn-8°; Jouve, Aperçu histori-
que sur Vorigine et l'emploi des vitraux peints dans les
églises, Aix, 1841, in-8"; Gessert, Histoire de la peinture
sur verre en Allemagne et dans les Pays-Bas, Leipzig,
18i2; Thibaud, Considérations historiques et critiques
sur les vitraux, Clermont, 1842; Thévenot, Essai histo-
rique sur le vitrail, dans les Annales scientifiques et
littéraires de V Auvergne, 1837; Batissier, Traité de la
peinture sur verre, Paris, 1850. B.
VERRIÈRE, verre à vitre dont on enveloppe lea châsses
et les reli<juaîrcs, ou qu'on met devant les tableaiix, pour
les garantir de la poussière; — grande fenêtre d'église, le
plus souvent garnie de verres colorés. Dans le premier
cas, on dit aussi Verrtne et Vitrine; dans le second.
Vitrail.
VERRINES, nom sous lequel on connaît les sept dis-
cours composés par Cicénm contre Verres, préteur de la
Sicile, accusé d'abus de pouvoir monstrueux dans sa
charge.
VERROTERIE , nom qui désigne toutes sortes de pe-
tits ouvrages en verre, colliers, bracelets, pendants d'o-
reilles et autres ornements.
VERS DANS LES LANGUES ANCIEP^^ES. Le vers est
un assemblage do mots mesurés et cadencés selon cer-
taines règles fixes et déterminées. Chez les anciens
Grecs, la base des vers était la mesure ou la quantité
des syllabes. Leur vers le plus beau, le plus usité et le
plus ancien, était le vers héroïque de six mesures ou
hexamètre, dont la base était le dactyle (F. Dactylique,
HBXAMÈTnE). Ils faisaient aussi un grand usage du vers
de 5 mesures ou pentamètre, construit alternativement
avec un hexamètre (V. Pentamètre), D'autres vers repo-
saient sur Viambe, le trochée, Vanapeste, le choriambe,
le tribraque (V. ces mots). Beaucoup de vers avaient
reçu des noms particuliers de certains pointes ou de cer-
tains pa3rs, tels que Aristophanien, Asdépiade, Eupoli-
dicn,Alcaique, Saphique, Ionique, etc. {V.ces mots). Les
Romains n'eurent pas plus tôt connu les œuvres de la
poésie grecque, qu'ils en adoptèrent la versification en la
modifiant peu à peu dans certains détails pour la mettre
mieux en harmonie avec le caractère de la langue la-
tine, et renoncèrent à la versification grossière de leurs
chants primitifs {V, Saturnien). P.
VERS dans les langues MODERNES. En français, les
vers sont rîmes, et composés d'un certain nombre de syl-
labes. Le plus grand vers, qu'on nomme alexandrin
(K. ce mot), se compose de 12 syllabes, et est générale-
ment coupé après la 6*, c.-à-d. divisé en deux hémi-
stiches : cette versification serait monotone, si le poète ne
savait varier à propo? les coupes ( V. Coupe). Certaines
langues ont des vers de 11 syllabes ( K. Hend^casyl-
laoe) ; cette mesure est inusitée en français. Le vers de
10 syllabes {V. Décasyllabe) est, au contraire, fort usité,
et l'a été surtout dans les derniers temps du moyen âge
et jusqu'à la fin du xvi* siècle : il a une césure après la
4* syllabe, très-rarement après la 5«; il est susceptible
des mêmes variétés de coupes que l'alexandrin. Les vers
de 0 syllabes, assez rares, ont une césure après la 3*. Le
vers de 8 syllabes, très-usité au moyen àige, et depuis
dans les pièces légères, n'est soumis à aucune césure; le
poôte la place à son gré. Il existe aussi un vers de 7 syl-
labes, employé surtout dans la poésie lyrique ( V. Hep-
tasyllabeV, un vers de 6 syllabes, dont on se sert rare-
ment seul, et qu'on entremêle presque toujours avec
d'autres vers de différentes espèces. Les vers qui ont
moins de 6 syllabes ne sont guère propres qu'aux sujets
simples et badins. — Dans la versification française, l'e
muet final, placé devant un mot commençant par une
voyelle, s'élide; mais il compte toujours devant une con-
sonne, soit au milieu, soit à la fin des mots. Les mots
terminés en ées, tes, ne peuvent sQ.-p^sigQr qu'à la fin d'un
vers. Ceux qui ont la terminaison ent muet, comme ils
mment font compter leur finale devant une voyelle,
mais ne peuvent jamais élre placés à l'hémistiche dans
le vers alexandrin, ni à la césure da vers de 10 syllabes.
II faut éviter la rencontre d'une voyelle sonore, telle
que a, é, i, v, avec un mot commençant par une
voyelle : autrement dit, l'hiatus est banni des vers
français (r. Césure, Eliston, Enjambement, Hémis-
tiche, Hiatus, Rejet, Rime).
On nomme Vers libres des vers de différpntes me-
sures, entremêlés selon le goût ou le caprice du po^le,
et qui ne sont liés entre eux que par le sens et les
rimes. Tels sont ceux des Fables de La Fontaine, et,
en général, de toutes les fables en vers, des opéras de
Qainault, de presque toutes les pièces destinéei à
ôtre mises en musique, eto.
Au îL\ i" siècle, quelques écrivains voulurent composer
des vers métriques, à l'exemple des Anciens. Un pf^ti)
du nom de Mousset, aujourd*hui complètement inconDu,
en eut le premier l'idée, et entreprit en 1530 une tra-
duction de VIliade, dont U ne nous est parvenu que ce
seul vers :
Chàntè, Dè-\èssè, lé \ cœitr fùrï'\eùx et | l'trè d:A-\chtUês.
Oorat, Ronsard, Bellcau, Balf, Pasquier, Desportes, Bi-
mus, Nicol&s'Rapin, Jean Passerai, Henri Estienne, Scé-
vole de Sainte-Marthe, d'Aubigné, etc., s'exercèrent aussi
dans la poésie mesurée. Mais leurs efforts furent stérile»,
ainsi que ceux de Turgot, qui publia en 4778, sou$ !e
titre de Didon, une traduction en hexamètres du 4* chant
de VÊnéide de Virgile, et ceux du comte de Saint-Leii.
ancien roi de Hollande. La plupart de nos syllabes o::t
une valeur relative presque inappréciable, et ne sont i-i
longues ni brèves ; elles tiennent leur quantité du o
price ou de l'habitude particulière de celui qui les pro-
nonce, et, même parmi les lettrés, il n'existe pas d'uni-
formité parfaite dans la prononciation. Cette raison ren^l
impossible l'introduction des vers métriques dans notn'
littérature. D'ailleurs, la liberté illimitée de l'inversion
donnait aux Anciens la faculté de rapprocher, de dispc^; r
les mots de manière à composer facilement tous 1s
mètres admis dans leur versification : notre construction
analytique, qui permet rarement à la poésie elle-mOnie
d'enfreindre ses lois, s'oppose aux transpositions de
mots, aux combinaisons de longues et de brèves.
Les autres versifications modernes reposent générale-
ment sur le nombre des syllabes, m^s sont de plus sou-
mises à certaines règles d'accent; en anglais et en alii-
mand, la rime n'est pas toujours obligatoire. Les vor«
non rimes s'appellent vers blancs. On a vainement es$avé
d'en faire en notre langue, qui ne peut se passer de la
rime. P.
VERS DORÉS, r. Dorés (Vers).
VERS TECHNIQUES , vers faits pour aider la mémoire, en
rappelant beaucoup de faits en peu de mots. On en a rùt
usage, par exemple, dans la Grammaire latine de Des-
pautère , et dans le Jardin des racines grecques de
Lancelot.
. VERSAILLES (Château de). V. notre Dictionnaire d(
Biographie et d'Histoire.
VERSANTS, pentes ou revers d'une chaîne de mon-
tagnes. Dans la même chaîne, les deux versants oppo^*^
n'ont pas généralement la même Inclinaison : Tun s'in-
cline doucement , l'autre offre une pente abrupte ou ra-
pide. Quand on parle du versant d'une mer, on entend
l'ensemble des terres qui s'infléchissent vers cette mer et
lui envoient leurs eaux : un versant maritime peut coor
tenir un ou plusieurs bassins ( V. ce mot).
VERSELLER, en latin du moyen ige versilare, rienu
mot qui signifiait chanter les psaumes alternativement et
par versets.
VERSET, division d'une phrase par membres et par
sections, écrits chacun en alinéa. C'était ce que Ton uppf'-
lait versus en latin, que nous avons traduit par versft.
Ce fut dans les premiers temps du christianisme que l'on
eut l'idée de découper ainsi les phrases de la Bible, poar
en rendre l'enseignement et l'intelligence plus faciles r.
des multitudes de chrétiens ignorants, qui n'en compre-
naient pas toujours même la traduction latine. Les rlu^-
teurs et les grammairiens avaient déjà pratiqué ce moyt'n
pour les auteurs classiques qu'ils mettaient entre les
mains de leurs écoliers, et du temps de Claude, peut-
être même avant, il existait des ouvrages de Cicéron e>
de Démosthène ainsi transcrits en versets; comme le!^
versets étaient numérotés, les commentateurs s'en ser-
vaient pour leurs dtations. C'est ainsi que l'Ancien et le
Nouveau Testament sout restés divisés de cette manière.
VER
un
VEC
ainsi que beaucoup d*autres livres de saiuteté ou de
piété, qui tous sont écrits en prose. LMdée de la division
de la Bible en versets remonte au rv' siècle, au temps de
S' Jérôme. La division adoptée aujourd'hui est due à Ro-
beri Estienne. Le signe typographique qui marque les
versets est celui-ci : f, C. D— t.
VERSIFICATION, art de faire les vers, ou exposé des
procédés propres k chaque langue pour construire les
vers. La versification grecque repose sur la quantité des
syllabes et sur les différentes combinaisons des longues
et des brèves; celle des Latins est entièrement calquée
sur celle des Grecs. — La versification française repose sur
ie nombre des syllabes et sur la rime,— Celle des Italiens,
des Espagnols , des Allemands, des Anglais, repose sur
le nombre des syllabes et des accents, et sur la rime ou
parfois Vassonance. — La versification est à la poésie ce
que le stvle ou la forme, en prose, est à la pensée, ou ce
que la Rhétorique est à TÉloquence. La poésie consiste
surtout dans Timaginotion, dans la conception des idées
d'ensemble et de détail; la versification n*est que la
forme extérieure dont elles sont revôtues. Les véritables
postes sont toujours d'excellents versificateurs, parce que
toujours ils savent trouver la forme convenable aux con-
ceptions de leur génie et donner un tour naturel aux
détails créés par leur imagination. Ainsi, Homère est le
meilleur versificateur de Tancienne Grèce , parce qu'il
»n est le plus grand poôte ; nul poète latin n'offre une
forme de vers plus régulière, plus nette, plus riche et
plus variée que Virgile, le premier entie tous par le
génie. Corneille, Molière, La Fontaine, Racine, nos plus
grands poètes, sont également nos plus purs modèles de
versification. Le talent de versifier, sans le génie ou sans
le goût, n'est qu'un ta'ent froid et stérile : un habile ver-
sificateur peut flatter l'oreille aussi bien qu'un prosateur
habile à ordonner dç pompeuses périodes; le poète seul
sait aller jusqu'à l'àme et enthousiasmer les imagina-
tions. — Le mot Versification s'applique aussi à la ma-
nière spéciale à chaque poète de tourner les vers. P.
VERSION. Ce terme, comme svnonyme de traduction,
s'emploie spécialement pour désigner les traductions du
texte hébreu de la Bible en grec, en latin, en syriaque,
en arabe. Ainsi on dit la Version des Septante, la Ver-
sion de S* Jérôme, etc. — En termes de Pédagogie , le
mot Version s'applique aux exercices de traduction du
grec, du latin, de l'allemand, de l'anglais, en français,
qui font la base de l'enseignement secondaire : seule-
ment, au lieu de dire version du grec, du latin en fran-
çais, on dit, par une abréviation inexacte , mais que l'u-
sage a conservée, version grecque, version latine. Les
exercices dé version consistent en morceaux extraits des
différents auteurs appartenant aux meilleures époques
littéraires, et que Ton varie de manière à former les
jeunes intelligences aux styles les plus divers, et à 1rs
initier à presque tous les sujets, historiques, philoso-
phiques, moraux, didactiques, oratoires, épiques, lyri-
ques, dramatiques, descriptifs, critiques, etc. L'exercice
de la version est fructueux pour l'esprit : la lutte que
l'élève soutient pour reproduire dans sa langue mater-
nelle une page de prose ou de vers écrite avec élégance,
avec éclat, avec éloquence, éveille son amour-propre,
exdte son émulation, le force à étudier les ressources de
sa langue, lui apprend à la manier avec souplesse, tout
en étant sévère sur le choix des expressions et sur la
convenance des tours et du style. P.
VERSION , se dit des différences qui existent entre des
lécits relatifs à un même fait.
VERSO. K Folio.
VERTU. Ce mot servit d'abord à exprimer le courage ;
en grec arétè, de Ares, Mars; en latin virfus, devir,
homme. On l'appliqua ensuite à tous les genres de cou-
rage, surtout à la force qui consiste à vaincre ses pas-
sions. C'est en ce sens moral qu'on peut dire que la vertu
est le sacrifice de la passion et de l'intérêt au devoir.
Selon Aristote, la vertu, au point de vue moral, naît de
l'habitude : entre les habitudes, dit-il, on nomme verttu
celles qui sont dignes de louante. A côté des vertus
morales, il distinguait les vertus mtellectuelles, qui sont
plutôt des facultés; de même qu'en parlant des pro-
priétés des corps on dit, par exemple, la vertu d'une
plantas. Le contraire de la vertu, c'est le vice, La plus
ancienne division des vertus est celle faite par les philo-
sophes grecs en vertus cardinales, au nombre de quatre:
la force, la prudence, la tempérance, et la justice. Dans
Xénophon, Socrate remplace la prudence par le respect.
de la divinité. Platon adopte la première division, en lui
donnant ua caractère psychologique : aux sens il ap-
plique la tempérance, au cœur la force et le courage , à
l'esprit la science; de l'accord de ces trois vertus il forme
la justice. On trouve cette division chez les Stoïciens et
dans Cicéron, d'où elle passa chez les modernes. Le
christianisme , trouvant cette division incomplète , y
ajouta les vertus théologales. : la Foi , l'Espérance et la
Charité.
Dans la hiérarchie céleste, les Vertus forment le troi-
sième ordre; c'est le chœur des Anges placé entre les
Dominations et les Puissances : m leur attribue le pou-
voir de faire des miracles, et de fortifier les Anges d'ordre
inférieur dans l'exercice de leurs fonctions.
Comme divinité allégorique, la Vertu, fille de Jupiter,
était représentée vêtue de blanc, tenant tantôt la pique
et le sceptre, tantôt la couronne de laurier ; elle était
ailée, ou assise sur un cube de marbre, imago de la so-
lidité. R.
VERTUGADINS. V. Paniers.
VERVE , nom qu'on donne , en Poésie, à la vive re-
présentation d'un objet dans l'esprit et à une émotion du
cœur proportionnée à cet objet.
VÈSE, nom de la musette ou cornemuse dans plusieurs
régions de la France.
VESICA PISCIS. K. Amande.
VESPASIENNES. V. Colonnes.
VESPÉRAL, livre d'église qui ne contient que le chant
des Vêpres.
VESPERIE (du latin vesper)^ nom d'une thèse dans
l'ancienne Université de Paris, parce qu'on la soutenait
le soir.
VESPILLONS. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d* Histoire.
VEST, vieux terme de Jurisprudence, désignant l'acte
solennel par lequel l'acquéreur d'un héritage tenu en
roture était investi, par le seigneur foncier, du droit de
propriété sur cet héritage. Le Dévest était la permission
que le propriétaire d'une terre donnait à un acquéreur
d'entrer en possession de cette terre.
VESTIAIRE (du latin vestis)^ lieu où Ton conserve les
vêtements ou costumes des membres d'une assemblée,
d'un tribunal, etc. — Dans l'Empire byzantin, le Ves»
tiaire était un fonctionnaire qui avait soin des habits de
l'empereur, une sorte de grand maître de la garde-robe.
VESTIBULE, en latin vestibulum, pièce par laquelle
on entre dans un palais, dans un ch&teau, ou dans tout
autre grand édifice. Le mot est dérivé de Vesta, parce
que les Anciens entretenaient souvent du feu en l'hon-
neur de cette déesse dans les pièces de ce genre. Le ves-
tibule communique d'ordinaire à la cour ou au jardin ;
il donne accès au rez-de-chaussée, et le principal escalier
vient y aboutir. C'est là aussi que restent les gens de
service. Un vestibule ne comporte ni meubles, ni glaces,
ni tableaux, ni riches ornements; on le décore avec des
pilastres, des colonnes simples, quelquefois des statues.
Il est dit simple, quand il a ses deux races également dé-
corées, comme celui des Tuileries; figuré, lorsqu'il forme
des avant-corps et des arrière-corps revêtus de pilastres
et de colonnes ; à ailes, quand il a, outre le passage prin-
cipal, des espèces de bas côtés, comme au Louvre. —
Chez les Romains, le vestibule était une petite place de-
vant la façade des grandes maisons.
VÊTEMENTS. V, Costome.
VÉTÉRANS. ) F. ces mots dans notre
VÉTÉRINAIRES (Écoles). J Dictionnaire de Biogra-
VETO. . ) phie et d'Histoire.
VÊTURE , acte par lequel un novice revêt solennelle-
ment l'habit d'un ordre religieux. La vèture précède d'un
an la profession {V. ce mot).
VEUVAGE, état du mari ou de la femme qui a perdu
son conjoint. Chez les Hébreux, s'il n'était pas né d'en-
fants de la première union, le beau-frère, et, à son dé-
faut, d'autres parents devaient épouser la veuve : quand
celle-ci ne trouvait pas de mari, ou était, par son fige ,
hors d'état d'avoir des enfants , la loi pourvoyait à sa
subsistance. A Rome, les veuves âgées de moins de 50 ans
devaient convoler à de secondes noces, si elles voulaient
échapper aux peines dont les célibataires étaient frappés.
Dans les premiers temps du christianisme, les veuves
qui n'avaient connu qu'un seul mariage et qui avaient
atteint 60 ans étaient associées à certaines fonctions du
sacerdoce : elles visitaient les malades et les prisonniers,
portaient des secours aux pauvres, recevaient et nourris-
saient les étrangers, instruisaient et surveillaient les
V^fS^ Cliç^tiennes, ensevelissaient les morts, etc. L'Église
catholique admet aux ordres sacrés Thomme veuf d'une
première union, mais les interdit h celui qui se trouve
VIA
1776
Vie
vâur pour la seconde fois. Chez les Germains, les veuves
se remariaient rarement : la loi des Francs Saliens vou-
lait que le second mariage eût lieu la nuit {V. Noces).
Au moyen âge, la veuve qui renonçait à la succession de
son mari, pour ne point payer ses dettes, déposait sur le
cercueil sa ceinture, sa bourse et les clefs de la niaison.
Lonjrtemps les veuves portèrent, comme les religieuses,
un bandeau qui couvrait leurs cheveux. Les reines veuves
restaient enfermées pendant les 40 premiers jours de leur
deuil. Chez les Hindous, ce n*est point par la contrainte,
mais par Tattrait des récompenses célestes, que la veuve
se brûle sur le bûcher de son époux. Le Code Napoléon a
réglé avec soin la condition des veuves (F. Femme); il
ne leur permet de contracter un nouveau mariage qu'a-
près dix mois révolus depuis la dissolution du mariaçe
précédent. V, Venant, Code de la veuve, Paris, 1854,
în-8». B.
VEXILLAIRE.» F. ces mots dans notre Dtcftonnatr^
VEXILLE. I de Biographie et d'Histoire.
VilZELAY (Église S"e-MADELEiNE, à). Les parties les
plus anciennes de cette église autrefois abbatiale, o.-à-d.
chœur et la voûte d'une partie (fe la nef, et ce fut aussi
sans doute vers le même temps qu'on relit l'étage supé-
rieur de la tour méridionale; le nartbex, où le plein
cintre et l'ogive sont mêlés, porte les caractères de l'ar-
chitecture romano-byzantine de la fin du xii* siècle; les
chapelles absidales et la galerie du chœur appartiennent
au style ogival primitif. L'église de Vézelay présente une
façade à trois portes, qui était accompagnée de deux
tours : la tour septentrionale a été détruite par les cal-
vinistes en 1560. Les portes sont à plein cintre, ainsi que
les étages inférieurs des tours, décorés de quelques ar-
:atures ; les voussures se composent de tores épais, de
quelques rosaces et de zigzags; dans les tympans il y
avait des bas-reliefs, qui ont été brisés pendant la Ré-
volution. L'étage supérieur de la tour méridionale a des
arcades à lancette décorées de colonnettes. Au-dessus de
la porte centrale, une verrière à arcades trilobées gar-
nies de statues produit un effet assez original. Le pignon
a été reconstruit au xiii* siècle. Les trois portes de la
façade conduisent dans an nartbex, qu'on désigne encore
par le nom de porche des catéchumènes^ au-dessus du-
quel, à une hauteur de 19 met., règne une tribune qui
donne sur la nef. Ce vestibule ouvre à son tour dans la
nef par trois portes, dont les tympans ont conservé leurs
!)as-reliefs : ce sont des sculptures grossières et naïves ;
à la porte du milieu on a représenté le Christ dans sa
gloire et entouré de ses Apôtres, et, aux autres, l'Adora-
tion des liages, l'Annonciation, la Nativité, et les disci-
ples d'Emmaûs; une des archivoltes présente un calen-
drier symbolique, divisé en 29 médaillons. La nef a 123"*
de longueur, dont 35 pour le chœur, et 26"^ de largeur y
compris les bas côtés (30*" au transept). Les arcades de
la nef sont en plein cintre, renforcées d'arcs-doubleaux,
les piliers trapus et peu décorés. La voûte du chœur est
en ogive, ainsi que les arcades qui l'entourent, et plus éle-
vée de 2*" que celle de la nef majeure. Les voûtes des bas
côtés s^appuient sur des piliers carrés qui ont une co-
lonne engagée sur chacune de leurs faces. Les piliers du
sanctuaire sont élancés, ronds et monolithes. Au-dessous
du chœur est une crypte que soutiennent 12 colonnes.
Le bras méridional du transept se termine par un clocher
dit de S^-Antoine, et dont la flèche est tronquée; le clo-
cher qui lui faisait pendant au Nord a été détruit par les
Protestants. On voit encore, à l'extrémité du croisillon
méridional, une salle capitulaire et quelques débris d'au-
tres constructions romano-byzantines. B.
VIABLE, se dit de l'enfant qui, au moment de sa nais-
sance, est assez fort et d'une organisation telle qu'on peut
espérer qu'il vivra. Tout enfant né après le 180* jour de
gestation, ou môme le 180*, est réputé viable. Il ne
suffit pas qu'un enfant soit né vivant pour être viable, il
faut encore ^ue les organes aient pu suffire à la vie pro-
longée. La viabilité est une question importante de la
médecine légale, pour les cas d'infanticide.
VIADUC (du latin via, voie, chemin, et ducere, con-
duire), pont en arcades, semblable à un pont-aqueduc et
construit comme lui au-dessus d'une route, d'une rivière
ou d'une vallée, mais servant pour le passage d'un che-
min de fer. Les viaducs sont plus cximmuns en Angleterre
que sur le continent. Le plus grand viaduc du continent
i été construit sur le chemin de fer saxon-bavarois pour
franchir la vallée de Gœltzch : il a 680 met de longueur,
et 89 met. de hauteur au-dessus du point le plus profoiM
de la vallée. Sur le chemin de fer de Londres à Bri^ton,
VOme-viaduc consiste en 37 arches de 10 mèL d*ouver-
ture chacune, et élevées de 30" au-dessus de la rivière.
Le viaduc du val Fleury, construit par l'ingénieur Payen
sur le chemin de fer de Paris k Versailles (rive gauche),
n'a que 140™ de longueur; mais son élévation hors de
terre est de 30"% la première rangée d'arcades en com-
prenant 10, et la seconde 20 ; les fondations ont 12*" de
profondeur.
VIAGER, ce qui est à vie, ce dont on doit jouir la vie
durant. Nous en avons déjà parlé au mot Rente; nous
donnerons ici quelques considérations sur la moralité des
emprunts en viager; nous les empruntons à Mollien, «lui
fut ministre du Trésor sous le l'** Empire français. Il les
publia en 1789, à propos d'emprunts en viager proposés
par Necker dans son premier ministère , et qui étaient
à 10 p. 100 sur une tête, 9 p. 100 sur deux têtes, et
8 p. 100 sur trois têtes. Mollien représenta que : — « Les
emprunts en viager devaient détruire l'esprit de famille^
porter les hommes à s'isoler des générations futures; ces
ea)prunts, ajoutait-il, restreignaient l'avenir des société»
au lieu de l'étendre; leur effet devait être de diminner la
somme du travail dû à la société par tous ses membres,
puisqu'on doublant au moins le revenu que tout autre
placement pouvait promettre, ils favorisaient le goût de
la vie oisive ; qu'ils accoutumaient l'homme à ne rien
voir au delà de soi , à limiter la durée du monde à la
sienne; qu'ils le détournaient du noble désir de se sur-
vivre à lui-même en laissant d'honorables traces de son
existence dans l'amélioration des propriétés immobilières,
dans les établissements utiles, dans les bienfaits qu'ils
pourraient transmettre aux autres; que chacun de ceux
qui s'intéressaient dans les emprunts viagers devrait
s'interroger sur ce qu'ils seraient devenus si leurs pères
avaient fait le même emploi de ce qu'ils possédaient ■
{Mémoires, U I", p. 72, in-8°.)
VIATEUR. I V. ces mots dans notre Dictionnaire de
VUTIQUE. ] Biographie et d^Histoire.
VIBORD, en termes de Marine, grosse planche posée
de champ, qui borde et embrasse le tillac ou pont supé-
rieur d'un navire, et qui lui sert de parapet. Le mot pa-
rait dériver de vice-bord (qui tient heu de bord).
VICAIRE. V, ce mot dans notre Dictionnait^ de Bio»
graphie et d^ Histoire.
VICAIRE DB WAKEPiELD (Le), Célèbre roman anglais d'OU-
vier Goldsmith, publié en 1766. C'est un livre classique
en Angleterre^ et répandu dans toute l'Europe. Le but
en est éminemment moral : Goldsmith a voulu éublir
qu'il n'est aucune infortune à laquelle ne puisse résister
l'homme de bien, avec une conscience irréprochable et
une humble soumission aux décrets de la Providence. Le
principal personnage du roman, le docteur Primerose,
en butte à tons les genres d'épreuves à la fois, ruiné ,
malade, captif, privé de ses enfants, est un modèle ac-
compli de toutes les vertus sociales et domestiques; pour
ajouter & la vraisemblance, l'auteur lui a donné quel-
ques-unes des faiblesses humaines, une petite dose de
pédantisme et d'amour-propre littéraire. Déborah, l'é-
pouse du docteur, contrariant ses plus sages projets par
vanité maternelle; leurs deux filles, Olivia et Sophie,
qui présentent, par la diversité de leur humeur, un
agréable contraste : tout cela compose un tableau d'inté-
rieur que l'on n'a peut-être jamais surpassé. Goldsmith
a également bien réussi dans la peinture des situations
pathétiques, dans les scènes plaisantes, dans la descrip-
tion des mœurs et des occupations champêtres. L'action
du Vicaire de Wakefield est intéressante, rinûigue ha-
bilement conduite, et le dénoûment amené avec art;
une foule de réflexions Judicieuses et d'aperçus ingé-
nieux sur le cœur humain décèlent chez l'auteur une
grande finesse d'observation. B.
VICE. V. Vertu.
VICE-AMIRAL, le second grade dans la marine mili-
taire en France, correspondant à celui de général dfl
division dans l'armée de terre. Il fut créé en 1669. Les
vice-amiraux peuvent commander en chef les anné» na-
vales; ils remplissent les fonctions de gouverneurs des
colonies, inspecteurs généraux, préfets maritimes, mem-
bres du Conseil d'amirauté, etc. Le vaisseau monté par
un vice-amiral porte le pavillon carré au grand màt; si
cet officier n'est qu'en second dans l'armée navale^ ou
s'il ne commande qu'une escadre, son pavillon est hisaë
au màt de misaine.
VICE-ROI, celui qui gouverne au lieu et place d'uc
roi. Les rois d'Espagne ont eu Jadis des vice-rois eo Si-
VIE
,1777
VIE
die, aa Mexique, au Pérou ; il y eut aussi des vice-rois
dans les Indes portugaises. Ce titre a été porté par quel-
ques gouverneurs de Tlrlande, ainsi que par le prince
Eugène Beauhamais, chargé par Napoléon I'' d'adminis-
trer ritalie.
VICESf en termes de Droit, défauts qui peuvent causer
un préjudice quelconque. On distingue les Vices de la
chose et les Vices de forme. Les Vices de forme ne peu-
vent être opposés aux actes qu'on a confirmés, ratifiés
ou exécutés volontairement dans les formes et à Tépoque
déterminées par la loi ; ceux d'une donation entre vifs
ne peuvent être réparés par aucun acte confirmatif, et le
donateur doit la refaire dans la forme légale {Code Â'apo-
léon, art. 1338). — Les Vices de construction peuvent dé-
gager le locataire de toute responsabilité en cas d'in-
cendie {Ibid., art. 1733). — Les Vices rédhti>itoires sont
les défauts cachés dont l'acheteur n*a pu se convaincre
par lui-même et qui peuvent donner lieu à une action
en rescision : par exemple, dans la vente d'un cheval, la
pousse, la morve, le farci n, la courbature, sont des vices
rédhîbitoires. V. Lavenas, Nouveau manuel des vices
rèdhihitoires d*après la loi du 20 mai 4858, in-12; Ar-
bautl. Des vices rédhibitoires, 18i0, în-8°; Huzard et
Harel, De la garantie et des vices rédhibitoires^ 1844,
in-1'2; Galisset et Mignon, Nouveau traité des vices ré-
dhibitoires, 2" édit., 1852, in-8»; Dejean, Traité de Vac-
lion rédhibitoire dans le commerce des animaux, 1856,
in-12.
VICÉSIME. \
VTPOMTP I
vi/^-pimat'dd f "• ces mots dans notre
virîi^ÎR ) Dictionnaire de Biogra-
Vlt.lliVm. I nhittfit iVHûitnirg
VICTOIRE (La). I ^'*** ^' * utstotre.
VICTOIRES (Place des). /
VICTORIA (Pont), pont tabulaire Jeté sur le fleuve
S*->Laurent, à Montréal (Bas Canada). Les deux culées ont
chacune 80 met. de long et 30 met. de large. Les tubes
sont supportés par 24 piliers, distants les uns des autres
de 80 met., sauf les deux du milieu, que sépare un
espace de 110 met.; la largeur de chaque pilier est de
5 met., excepté celle des deux piliers du centre, qui est
de 6 met. Les piliers rapprochés des culées contiennent
chacun 6,000 tonnes de maçonnerie ; ceux qui supportent
le tube central en contiennent 8,000. On estime la ma-
çonnerie totale du pont à un poids de 222,000 tonnes;
les blocs de pierre qui entrent dans les piliers pèsent ëe
7 à 10 tonnes. Les tubes de fer, dont le poids total est
de 10,400 tonnes, 3ont liés et rivés ensemble : chacun
d'eux a 5"\30 de largeur; 6™,30 de hauteur à chaque
extrémité et 7"\50 au milieu. La dépense a excédé
30 millions de francs. Le pont Victoria est le travail le
plus gigantesque qu'il y ait au monde.
VICTOBIAT, monnaie. \ V, noire Dictionnaire de Bio-
VIDAME. S graphie et d'Histoire.
VIDIMUS, c-àrd. en latin nous avons vu; ancien
terme de Pratique, par lequel on certifiait sur un trans-
crit ou copie de pièce qu'il avait été collationné avec
l'original. Collationner un acte, c'était, en terme d'an-
cionne pratique, le vidimer.
VIDRECOME (de l'allemand wieder, de nouveau, et
kommen, venir), grand verre à boire que l'on se passe,
en Allemagne, à chaque santé qui se porte, et que chacun
doit vider à son tour.
VIE (du grec bios, ou du latin vita). Considérée d'une
manière générale, la vie est l'ensemble des phéno-
mènes variables qui s'observent dans chaque être suscep-
tible de formation, de développement, de décadence et
de mort. Dans son principe, elle consiste en une force
unique on multiple qui produit ces phénomènes (V. Vi-
tal — Principe). On distingue trois sortes de vies ; vé-
gétative, animale, humaine; elles sont comprises dans le
règne organique. Plusieurs systèmes, chez les Anciens et
chez les Modernes, ont attribué la vie et l'animalité à
toutes les parties de l'univers, sans exception; tous ces
systèmes, quelle que soit leur forme, reviennent au pan-
théisme (y. ce mot, et Amb do monde). Dans le règne
inorganique, les corps inertes ne naissent pas; ils se
forment par agrégation; ils se développent par juxta-
position ; ils ne meurent pas, à proprement parler. Dans
le règne organique, les corps vivants naissent d'un indi-
vidu vivant, par scission, par bouture, par geijne, en un
mot, chez les végétoux et les animaux, par génération.
Le développement des corps animés a lieu du dedans au
dehors par intus-sasception, par nutrition, par assimila-
tion, en vertu d'une organisation spéciale; après une vie
plu» ou rooisa longu3, vient une période de dôcadonce^
et enfin la mort, quand les organes ne peuvent plus
fonctionner.
Dans la vie hwnaine, il faut considérer : la vie de niH
trition, qu'elle partage avec les végétaux et les animaux
inférieurs à l'homme, et qui comprend les opérations or«
ganiques nécessaires au développement et à la conserva-
tion de l'individu, comme la respiration, la nutrition, la
digestion, la circulation du sang, etc. ;\a vie de relation,
qui met l'animal en rapport avec les êtres extérieurs ;
I homme la partage avec les autres animaux, mais il s'y
joint d'autres faits qui lui sont exclusivement propres,
et qui constituent la vie humaine proprement dite, ou la
vie morale. De même que la vie des végétaux s'arrête
devant la sensibilité et le mouvement volontaire, de
même celle des brutes s'arrête aux limites de la parole
et de la raison.
On a cherché à savoir quel était le siège de la vie,
comme on avait fait pour l'&me. C'était la même ques-
tion ; ainsi, Aristote plaçait dans le cœur le principe de
la vie et de l'intelligence; d'autres dans la poitrine ou
dans la tête. Les physiologistes modernes ont recherché
quels sont les organes par lesquels l'&me reçoit les im-
pressions du corps, et lui fait, à son tour, subir sa propre
influence. Dans ce double rapport, le système nerveux
cérébro-spinal joue nécessairement le premier rôle. Selon
M. Flourens, la vie aurait pour siège un point de la
moelle allongée, appelé le nœud vital. V, Aristote, De
plantis, lib. 1, cap. 1, et De animA^ lib. II, cap. 10; Des-
cartes, V Homme; Glisson, De naiurœ siibstantia ener»
getica, sivedevitœ natura, Londres, 1672; Stahl, TheO'
ria medica vera; Bonnet, Contemplation de la nature,
10* partie, chap. 30 et 31; Barthez, De principio yitali,
Montpellier, 1773; Bichat, Considérations sur la vie et
la mort; Legallois, Expériences sur le principe de la
vie, 1812; Tiedemann, Traité complet de physiologie de
Vhomme; Alquié , Précis de la doctrine médicale de
Montpellier, 1846; Flourens, Recherches sur les fonc"
lions du système nerveux; Tissot, la Vie dans Vhomme,
ses manifestations diverses, etc. R.
viB, en Littérature, est employé comme synonyme de
biographie : on dit les Vies de Plutarque, de Cornélius
Népos, de Brantôme; les Vies des Saints, etc.
VIB (Certificat de], certificat qui a pour objet de con-
stater l'existence a'un individu. Une ordonnance du
6 juin 1839 et une circulaire du 27 juin suivant ont dé-
terminé les cas dans lesquels les certificats de vie sont
exigibles et les formes à suivre pour leur délivrance.
Pour demander le payement des arrérages d'une rente
viagère, d'une pension ou de prestations eu nature éga-
lement viagères, il faut justifier de l'existence soit du
créancier, »oit de la personne sur la tête de laquelle la
rente a été constituée, lies certificats de vie sont délivrés
soit parles notaires, soit, gratuitement, par les présidents.
Pour les rentiers et pensionnaires de l'État résidant hors
du territoire français, ils peuvent s'adresser pour certifier
leur existence aux chancelleries des légations et des con-
sulats, et aux magistrats du lieu ayant qualité à cet effet,
mais en faisant légaliser leur certificat par les agents di-
plomatiques.
VIS FOTDRB. La croyance à une vie future est de tous
les temps et de tous les lieux; il n'est pas de peuple qui
n'y ait cru, pas de religion qui ne l'ait enseignée, et,
parmi les écoles philosophiques, les plus recomman-
dables se sont efforcées d'en démontrer la réalité. Les
Égyptiens y croyaient; on prétend même que c'est de
chez eux que sort le dogme de la métempsycose ; cIhz
les Juifs, les Sadducéens seuls ont cherché ^ repousser
une croyance générale. Si le panthéisme de l'Inde ne
semble pas s'accorder avec ce dogme, la religion de Zo-
roastre ouvre aux âmes des justes le béhescht, et à celles
des criminels Vabime. Cette croyance est également ré-
pandue chez les nations les moins civilisées : les Scandi-
naves avaient le palais d'Odin ouvert aux braves, et
le Niflheim aux l&ches et aux coupables; les Gaulois
croyaient à une nouvelle vie dans d'autres mondes; les
Sauvages eux-mêmes parlent du pays des Amss, Si l'on
remonte aux opinions à la fois religieuses et philosophi-
ques les plus anciennes, on trouve un dogme de la vie
future commun aux Orphiques et aux Pythagoriciens.
Platon attribue aux disciples d'Orphée le dogme de la
chute des &mes dans les corps, de la vie envisagée
comme pénitence, et de la nécessité d'une vie sainte pour
les fautes autrefois commises. La doctrine de Pythagons
outre la métempsycose, posait Texistence d'un Ciel où les
purs seraient réunis, et d'un Enfer où les méchants se-
raicut chiitiés. Cj>uint k Platon lui-même, sans parler des
449
VIE
Î778
i
VIE
mythes du Pliédon, du Gorgias et d*ftutrcs dialogues, on
sait qu'il donna le premier des preuves d'une vie future,
c.'^parant en cela la religion de la philosophie. Celle-ci se
b^rne à démontrer que Tàme ne meurt pas avec le corps,
tans chercher à dire quelle sera sa nouvelle vie; une re-
ligion va plus loin. Le polythéisme parlait du Tartare et
des Champs Élysées \ le christianisme ne s'en tient pas
aux raisonnements du spiritualisme. V, Th.-H. Martin,
la Vie future iuivant la foi 9t suivant la raison, Paris,
1858, f • édit. , 1 vol. gr. in-18. R.
VIeLE, ancien instrument de Musique. V. Violb.
VIELLE, instrument de Musique, monté de cordes qui
ftont mises en vibration au moyen d'une roue enduite de
colophane. Cette roue correspond à une manivelle placée
extérieurement, et à Taide de laquelle Texécutant lui im-
prime un mouvement plus ou moins rapide. Lorsque la
vielle est débarrassée du bourdon, corde qui donne tou-
jours le même son et forme une espèce de pédale, les
sons qu'on en tire ont, dans la partie aigué, de l'ana-
logie avec ceux du violon. Les sons s'obtiennent au
moyen d'un clavier , dont les touches , en s'enfonçant,
pressent les cordes contre la roue, qui, par le mouve-
ment que lui communique la manivelle, fait à peu près
l'efTet d'un archet. — La vielle est dérivée de Vorganis"
trum {V. ce mot), qui était de plus grande dimension.
Au moyen âge, elle porta les noms de rote, symphonie,
ehifonie ou sifoine; elle ne fierait pas dans les concerts
d'instruments, et était abandonnée aux aveugles et aux
mendiants, qu'on appelait pour cette raison ckifonieus;
ia Chronique rimée de Du Guesclin la qualifie d'instru-
ment truant, La vielle prit faveur à la cour de France
au temps de Henri III, et, sous Louis XIV, Janot et
La Rose s'en servirent avec habileté. On l'a de nouveau
délaissée vers la fin du siècle dernier, et on ne la voit
plus père qu'aux mains des enfants de la Savoie qui
sollicitant la charité publique. B'.
vtcixB oRGAFfisÉB, nom par lequel on désigne quel-
quefois l'orgue à cylindre.
VIENNE (Église S^-Étientve, à), Tun des plus*beaux
monuments de l'ancienne architecture allemande. On en
posa les premiers fondements en 4144, et un architecte
de Cracovie,Octavien Jatkner, dirigea les travaux. Des
incendies, en 1258 et en l!2()5, ruinèrent l'édifice, sauf la
fkçade occidentale et ses denx tours , dites tours des
Païeris, mii subsistent encore. Ottocar, roi de Bohème,
ordonna la reconstruction de l'église, mais l'ouvrage n'a-
vança qu'avec lenteur : Albert II, duc d'Autriche, fit
exécuter des ouvrages dont nous ignorons l'importance;
en i326, le chevalier Ulric de Tlrna éleva à ses frais la
chapelle de la Croix, placée aujourd'hui sous le vocable
de S^-Eugène; sous le duc Rodolphe IV, Georges Hauser
b&tit les voûtes de la nef, le chemir, et la base des deux
clochers du transept. La grande. flèche du croisillon mé^
ridional, commencée en ls59 pair Wenzel de Klosterneu-
bourg, élevée par lui Jusqu'aux deux tiers de sa hauteur,
poursuivie par Haas PrachaUet de i404 à 14^, fut enfin
terminée en 1433 par Ant. Pilgram. En 1450, on char-
gea Jean Buschbaum d'édifier sur le même plan et avec
la môme magnificence la tour déjà fondée du croisillon
septentrional ; mais ce travail fut bientôt abandonné, et
il n'a Jamais été repris : seulement, au-dessus de cette tour
haute de 63 met., on a bâti un petit clocheton en 1579.
L'église métropolitaine de Vienne est en forme de
croix latine, et a les dimensions suivantes : longueur to-
tale hors oeuvre, 105'",25; longueur du transept, 70 met. ;
largeur des neft, 3««,30; largeur de la façade, 44'",60.
La charpente qui la couvre, et qu'on nomme la Forêt,
est composée de ^,889 pièces de bois ; elle n'a pas moins de
33 met. d'élévation au-dessus de la nef, et de 20 met. au-
dessus du chœur, et supporte une couverture en tuiles
vernissées, blanches, rouges et vertes, qui forment des
dessins géométriques et encadrent l'aigle d'Autriche. La
jrande porte d'entrée, dite Porte et» Géant, entre les
tours dcJs Païens , offine tous ies caractère? du style ro-
mano-byzantin en usage au xu* siècle : elle est ornée
d'une statue du Christ, qu'entourent deux Anges et les
Apôtres, et surmontée d'une très-longue fenêtre ogivale,
puis d'une galerie qui Joint les deux tours, hautes de
00 met. Aux extrémités du transept sont de beaux porches,
sculptés au XIV* siècle par Henri Kumpf et Christophe
Hom de Dûnkelsptll ; on y a représenté , entre autres
sujets, la mort de la S^* Vierge et son couronnement
dans le ciel. Sur le mur septentrional on remarque une
chaire de pierre, d'où le moine franciscain Jean Capis-
tran prêcha la croisade contre les Turcs 1451. Mais
ce qui attire surtout l'attention à l'extérieur de l'église
S^-Étienne, c'est la tour du Sud ; la pointe de sa flécha
hardie, qui inclinait sensiblement vers le Nord, par suite
d'un tremblement de terre ou du tassement des maté-
riaux, a été enlevée en 1839, et rétablie en 1843. Cette
flèche, au sommet de laquelle on monte par nn escalier
de 553 marches, atteint une hauteur de 135 met. Les clo-
ches sont placées dans la tour : la plus grosse, qpii pèse
plus de 17,000 kilog., a été faite, en 1710, avec 180 ca-
nons pris aux Turcs.
L'intérieur de la cathédrale de Vienne est à trois nefs,
d'égale hauteur (27«,20). Il est éclairé par 31 grandes
fenêtres, et soutenu par 18 piliers isolés et 18 pilastres.
Les piliers sont ornés chacun de six statues, dont quatre
suivant deux diagonales et à la même hauteur, les autres
sur les faces et plus élevées. Tous les autels des cha-
pelles sont en marbre, et quelques-uns surmontés de
tableaux de maîtres. Le chœur, où l'on compte 86 stalles
sculptées, est divisé en trois parties : un chœur principal
et deux chœurs latéraux. Dans le chœur dit de la Pas-
sion, on voit le sarcophage en marbre de l'empereur
Frédéric IV, exécuté par Lerch , artiste de Strasbourg :
il est décoré de 240 figures en relief. La chapelle de
S**-Catherloe contient les fonts baptismaux, œuvre char-
mante de la fin du xv* siècle, et un crudfix avec les
12 Apôtres, sculptés en marbre par Lerch en 1513. Dans
la chapelle de S*-Eugène, que ferme une grille en fer du
XVIII* siècle , d'une richesse inouïe , se trouve le monu-
ment doré du prince Eugène de Savoie. La chaire en
pierre, terminée en 1430, est un chef-d'œuvre, bien
qu'on y sente un trop grand amour du fouillé et de la
recherche : la base est composée de colonnettes, de con-
tre-forts et d'arcs-boutants, de pinacles, de feuilles fine-
ment découpées, et de niches où sont logées de gracieuses
statuettes; le corps offre les bustes des quatre grands
docteurs de l'Église* latine, entourés de moulures, de
feuillages et de fleurons variés à l'infini ; le couronne-
ment, qui est en bois, est couvert de bas-relieis repré-
sentant les sept Sacrements, et terminé par une pyramide
chargée de feuilles épanouies ; sous la rampe de l'e&ca-
lier, un personnage , qu'on croit être Ant. Pilgram, se
penche par une espèce de fenêtre carrée. Le bnnet d*or-
gues est encore une œuvre digne d'être mentionnée.
Sous l'église de S^-Étienne est une crypte, où les mcm*
bres de la famille impériale ont été ensevelis du xv* au
xvii* siècle. B.
VIENNE (Église S*-Madrice, à), dans le Dauphiné. Cette
église cathédrale fut fondée, en 1052, sur l'emplacement
d'un édifice antérieur ; les travaux, interrompus en 1080,
furent repris en 1120, mais, par défaut de ressources et
par suite des guerres du moyen &ge, le monument ne
reçut son complet achèvement qu'en 1533. n eut beau-
coup à souffrir des dévastations des Calvinistes en 1562
et en 1567. La foçade occidentale, large de 38 met., a une
élévation de 30 met., et est couronnée de chaque côté par
une tour carrée, qui la domine de 10 met.; elle est érigée
sur un parvis où l'on monte par 28 degrés. Cette façade
appartient au gothique fleuri ; les voussures des portes
sont remplies de charmantes statues. Des deux côtés des
portes latérales, on remarque des colonnes antiques en
marbre blanc, enlevées sans doute à des monuments ro-
mains. Le portail de gauche est orné d'un zodiaque à l'in-
térieur. L'intérieur de la cathédrale de Vienne a la forme
d'une basilique terminée par trois absides; sa longueur
est de 96 met., et sa largeur de 31 met. (dont 11 pour h
nef majeure, 8 pour les deux bas côtés, 12 pour les cha-
pelles latérales) ; la voûte de la grande nef a 27 met.
d'élévation. Les piliers de la nef sont décorés de pilastres
cannelés et rudentés ; des colonnes eng^es soutiennent
les retombées des arcades, et les chapiteaux des uns vt
des autres sont historiés et de style byzantin. Les arcades
en ogive sont entourées de billettes. Une galerie percée
d'arcades ogivales règne autour de la nef et du chœur :
les arcades autour du chœur reposent sur des colon nettes
gothiques, tandis que dans le reste de la galerie les co-
lonnes sont remplacées par des nervures. Dans le chœur,
au-dessus et au-dessous de la galerie, il y a un cordon
d'ornements rouges, avec frise composée de palmettes,
d'arabesques, de figures d'hommes et d'animaux ; le tout
est d'un dessin grossier, mais d'une bonne exécution. La
cathédrale de Vienne renferme un beau mausolée du car-
dinal Monttaorin, mort en 1723.
VIERGE (Im^ de la S^*). L'historien Nicépbora
(n. 23) a tracé 4e la S^* Vierge un portrait emprunté k
S^ Epiphane : d'une tidlle moyenne, dit-il , elle avait le
teint couleur de froment, les cheveux blonds, les yeux
vifs, la prunelle tirant sur le jaune et à peu près de la
VIL
1773
VIN
couleur d'uno olivOi les sourcils d*an beau noir et bien '
arquési le nez ass6z long, les lèvres vermeilles, la figure
ovale, les mains et les doigts longs. On ne saurait dire
li ce portrait est ressemblant, non plus que ceux qui ont
été peints dans les Catacombes de Home, où la Vierge est
représentée assise, voilée, avec les traits de la Jeunesse,
de la modestie et de la pureté, tenant TEnfant-Dleu sur
ses genoux, tantôt en pied, tantôt en demi-figure, tou-
lours d*une manière qui parait conforme à un type hié-
ratique. Des sarcopbages et des verres ])eint8 nous la
montrent encore dans Tattitude de la prière, ou entre
deux arbres, ou accompagnée de S^ Pierre et de S* Paul ;
ouvent on voit des colombes auprès de sa tète. L*Église
ipplique à la Vierge ces paroles de Tamante du Can-
iique des cantiques : nigra sum (je suis noire), paroles
tjue Ton entend d*ordînaire dans un sens mystique. Ce-
pendant on les a prises à la lettre, et il est des pays où
l'on vénère des Vierges noires : la plupart de ces statues
sont en bois, et en vieillissant le bois devient naturelle-
ment très-brun ; quant à celles en pierre, la Couleur noire
leur est commune avec un grand nombre de statues de.
Saints, et elle provient de quelque vernis. Il en est qui
ne sont autre chose que des statues en basalte, rapportées
d'Orient à l'époque des Croisades. V. Gumppenberg, i4t/a«
Marianus, sive de tmaginibtis Deiparœ, 1657, in-i8;
Bombelli, RaccoUa délie imagine délia beata Maria
Virgme, Rome, 1792, 4 vol. în-8* ; A. Égron, Le culte de
la S^* Vierge dans toute la catholicité, Paris, 1842, in-8<^.
VIGIE (du latin vigilare, veiller), en termes de Ma-
rine, matelot qui est en observation pendant le jour au
haut des mâts d'un navire, pour signaler l'apparition
d'autres b&timents ou de la terre. On dit aussi : être en
vigie j pour dire veiller* Sur les côtes , on nomme Vigie
le poste de guetteurs chargés de signaler les bâtiments
aperçus au large. — Les marins appellent encore vigies
de petits écueils à fleur d'eau.
VIGILE. ( V. ces mota dans notre Dictionnaire
VIGINTÏVIRS. J de Biographie et d'Histoire.
VIGNE, terme de Fortification. V. Galerie.
Vigne, nom oui a été appliqué aux maisons de plai-
sance voisines des villes en Italie.
VIGNETTE, petite estampe qu*on met comme orne-
ment dans les livres. Le nom vient de ce qne c'était , dans
l'origine, un ouvrage en miniature qui représentait des
feuilles de vigne. Par extension, on a appelé vignettes
toutes les estampes des livres illustrés.
tnr ATNc * ( V. ces mots dans notre Dietumnaire de
VILLA. S Biograptàe et d'Histoire,
VILLA ALBARi, uno des plus remarquables villas de
Rome, située hors de la porte Salaria. Le cardinal Ales-
landro Albani la fit bâtir, au milieu du xvlti* siècle, par
l'architecte Carlo Marchioni. Elle contient une riche col-
lection d'antiquités, à l'organisation de laquelle Winckel-
mann prit une grande part. On y remarque : la Cane-
phore, chef-d'œuvre de Criton et de Critolaas ; un Mercure,
par Etienne, élève de Praxitèle ; le bas-relief d'ÂntinoUs,
découvert à la villa d'Adrien ; ufl Apollon Sauroctone, le
Repos d'Hercule, etc.
vfLLA D'ADRIEN , vîlla bètie près de Tibnr (Tivoli ) par
Tcmpereur Adrien, au retour de ses voyages dans les
provinces. Elle avait un périmètre de 8 à 10 milles, et
embrassait un certain nombre de monuments imités de
ceux qui avaient le plus vivement attiré l'attention du
prince. Il n'existe aujourd'hui aucune trace du Lycée, de
l'Académie ni du Prytanée d'Athènes; mais on croit en-
core reconnaître une muraille du Pœcile, quelques restes
du Sérapéum de Canope, le prosceniuqn et les gradins
d*un théâtre, la cella d'un temple de Vénus, des bains,
un circjne ou naumachie, une caserne de Prétoriens, un
palais impérial, le portique d*un Nymphée, une vallée
(le Tempe avec un ruisseau pour Pénée, etc. La villa
d'Adrien parait avoir été ruinée au temps de Totila, roi
des Ostrogoths t à diverses époques, les Romains y sont
venus prendre des matériaux pour leurs constructions, et
on efi a tiré aoasi beaucoup de richesses artistiques pour
les musées de l'Europe. B.
VILLANCICO, espèce d'ode sacrée que les Espagnols
chantent dans les églises à la fête de NoôL
VILLANELLE (de l'italien villano, paysan), ancienne
pièce de poésie pastorale, originaire de ritalie ou de l'Es-
pagne, et composée de plusieurs couplets de 3 vers avec
reirain ; tiû quatrain la terminait. La villanelle fut mise
à la mode en France au xvi* siècle par Grevin ; Passerai
et Honoré dtirfé y excellèrent. En toici un exemple de
Fusserat i
J'ai pcrda ma tourterelle:
Est-ce point elle que J'oif
Je reux aller après elle.
Tu regrettes ta femelle i
Hëlaal aussi fais-Je, moi.
J*ai perdu ma tourterelle.
SI ton amour est fldble « *
De mfime est ferme ma foi;
Je yeux aller après elle.
Ta plainte se renouTclle :
Toujours plaindre Je me doi ,
J*al perdu ma tourterelle.
Kn ne Toyant plus la belle.
Plus rien de beau Je ne vol :
Je veux aller après elle.
Mort, que tant de fols J'appelle,
Prends ce qui se donne II toi !
J*al perdu ma tourterelle,
Je yeux aller après elle.
VILLE, asseml)lage considérable de maisons réunies
par des rues et quelquefois 'entourées de murs. Le mot
est dérivé du latin vUla (ferme, métairie), parce que'
beaucoup de villes modernes durent leur origine à des
agglomérations de maisons autour d'une ferme.
VILLÉGIATURE , mot emprunté à la langue italienne,
où il signifie une partie de plaisir que l'on fait dans uno
villa. Il nous sert à désigner le séjour que les personnes
aisées font à la campagne pendant la belle saison.
VILLE^AGE , ensemble des services que devaient au-
trefois les vilains au seigneur.
VILLICUS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Bio'
graphie et d^Bistoire.
VIMAIRE (du latin vts major, force majeure), en
termes d'Eaux et Forêts, dégât causé par une force ma-
jeure, telle au'un ouragan , la foudre, etc.
VINAGE. V. ce mot dans notre Dictionnaire de W^
graphie et d^Histoire.
VINAIÇRETTE. V. Bbooettf.
VINAYAS, nom donné aux livres bouddhistes qm
traitent des préceptes, des règles et des ordonnances.
VINCENNE3 (Château de). Ce château, commencé par
Philippe de Valois en 1337, et achevé seulement sous
Charles V, a reçu, depuis, plusieurs additions et modi-
fications. En 1560, Catherine de Médicis fit dresser les
f)lans et Jeter les fondations des Pavillons du Roi et de
a Reine, qui ne furent construits et terminés que soui
Louis XIII, de 1610 à 1614. En 1662, Louis XIV réunit
les deux extrémités de ces pavillons par deux galeries
couvertes, dont l'une a été démolie en 1843 et l'autre est
cachée actuellement par des casemates. Tout le château
formait alors, comme aujourd'hui, un parallélogramme
rectangle de 382 met. sur 224 ; mais il était flanqué de
neuf tours adjacentes au mur d'enceinte : ces tours, qui
avaient 31'",60 de hauteur, ont été, de 1808 à 1810, ra-
sées au niveau du mur, et servent do bastions. Napo-
léon P' a fait également démolir plusieurs constructions
qui encombraient les cours. Sous Louis-Philippe on a
construit des casemates pour la garnison, et on a annexé,
du côté de l'Est, un fort entièrement neuf à l'ancienne
forteresse. Avant la Révolution, le château de Vincennes
fut une résidence royale et une prison d'État : parmi les
personnages qui y furent renfermés, on remarque Henri
de Navarre en 1574, le prince deCondé en 1617, d'Or-
nano en 1626, le duc de Beaufort en 1643, les princes de
Condé et de Conti et le duc de Longueville en 1650, le
cardinal de Retz en 1652, Fouquet en 1661, H'"*' Guyon
en 1695, Latude et Diderot en 1749, Mirabeau en 1777.
On établit à Vincennes une fabrique de porcelaine en
1740, une école militaire en 1751, une manufacture
d'armes en 1757. On y jugea le duc d'Enghien en 1804*
Aujourd'hui Vincennes est une forteresse, une caserne,
un arsenal, et une école de tir. — Quand on a franchi la
porte d'entrée et passé entre une double ligne de bâti-
ments affectés à divers services, on entre dans la grande
Cour, où se trouvent, à gauche, la salle d'armes, la ch»-
peiie, le pavillon de la Reine, et, â droite, le donjon et le
pavillon du Roi. La salle dWmes, construite en 1810 f
comprend un rez-de-chaussée destiné k remiser le maf
fériel d'artillerie, un 1*' étage où il v a des armes en
Quantité suffisante pour armer 120,000 hommes, et un
V étage réservé & la sellerie. La chapelle, fondée en 1379|
achevée en 1552, est d'un beau style ogival, très-simple
à l'intérieur, richement ornée au dehors » on y admli«
VIO
1780
VIO
sept verrières exéculces par Jean Cousin d'apivs HapIiEùH ;
«;n monunmnt qu'on y avait élevé au duc d*Knghien ,
(►îuvre médiocre de Deseine, a été transporté dans une
ancienne sacristie. Le pavillon du Roi est converti en
V aseme, et celui de la Reine affecté au logement du gou-
verneur et à divers services. Le donjon, entouré autrefois
d'un fossé indépendant de celui du château, est une tour
carrée, de 52 met. de hauteur, avec une tourelle en saillie
à chaque angle. Un escalier de 237 marches en spirale ,
fl'une construction hardie, conduit à la plate-forme , à
Tun des angles de laquelle s'élève une guérite en pierre
d'une grande délicatesse. Le donjon est divisé en cinq
étages; chacun d'eux présente une chambre carrée, dont
la voûte est soutenue par un fort pilier central, et des
chambres d'angle, pourvues comme elle d'une cheminée.
Quand Vincennes était résidence royale, le rez-de-chaussée
du donjon servaitaux cuisines ; le roi occupait le l*"" étage,
la reine et les enfants le 2*, les frères et proches parents
du roi le 3«, les officiers de service et les domestiques le
4« et le 5«. Au 3* étage est une galerie extérieure en saillie
qui fait le tour du donjon.
VINCENT DE PAUL (Église Sahst-), à Paris. V. notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
yrîïïHK^e / y* ces mots dans notre Dictionnaire de
vÎnDICTA; s ^'^^^-^P^' ^* d^Histoire.
VINDICTE PUBLIQUE , poursuite et punition des
frimes et délits. En France , elle n'appartient qu'au Mi-
nistère public.
VINEA, appareil de siège. V, notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
VINGTAIN ( Droit de), le môme que le droit de Cfmm-
part. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biographie
et d'Histoire,
VINGT- ET-UN, jeu de cartes qui se joue entre un
I anquier et des pontes. On se sert d'un ou de plusieurs
j nix, selon le nombre des joueurs. Les figures valent 10;
los autres cartes valent le point qu'elles indiquent, sauf
l'as, qui compte indifféremment pour 11 ou pour.l, sui-
vant l'intérêt du joueur. Les pontes ayant fait leur mise, le
banquier donne une carte à chacun d'eux, en commençant
par la droite, et à lui-même, puis une seconde. Si l'un
des joueurs «.dans ses deux cartes le point de 21, les
autres payent; tous les joueurs abattent leur ]eu comme
lui , le banquier ramasse les enjeux de ceux dont le point
est inférieur au sien, et perd avec ceux qui ont plus. Si,
après la distribution des cartes, personne n'a 21, le ban-
quier offre une carte à qui la veut , en prend une lui-
môme s'il le juge à propos, puis on abat , et l'on procède
comme précédemment; le joueur à qui la 3* carte a fait
dépasser le point de 21 créi;«, c.-à-d. perd. Il y a, d'ail-
leurs, plusieurs manières de jouer ce jeu. Ainsi, dans le
Macao on ne distribue qu'une carte à chaque joueur
(les fi^rures et les dix ne comptent pas), et c'est le point
de neuf qui gagne.
VINS (Halle aux), à Paris. V, notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
VIOLE, en italien Violât nom que portait autrefois
toute une famille d'instruments de musique à cordes et
à archet. Le mot Vièle, employé par les anciens auteurs,
désignait une viole. La caisse de la viole était d'abord
conique et bombée ; elle devint insensiblement ovale ; elle
avait deux ouïes, en forme d'oreille, au-dessous des cordes.
Le manche, court et large, se terminait souvent par une
espèce de trèfle orné, semblable à une violette^ et qui
aura pu motiver le nom de l'instrument. L'archet, long
et léger, ne portait qu'un fil d'archal. Plus tard, la viole
allongea son manche, aplatit sa caisse et en échancra les
flancs. On n'avait primitivement distingué que deux
violes : la nibebbe, montée de deux cordes accordées à la
quinte; et la tn'ote proprement dite, qui en avait cinq,
accordées do différentes manières. Dans la suite, on re-
connut plusieurs espèces de violes, qui tirèrent leur déno-
mination de l'étendue relative et du diapason de chacune
d'elles : 1" la Violette, ou le Pardessus de viole, petit
instrument dont les dames surtout aimaient à jouer ; z'* le
Dessus de viole; 3» la Haute-contre de viole, sonnant un
ton plus bas que le Dessus; A^ la Taille de viole, une
quarte au-dessous de la Haute-contre ; 5° la Basse de viole^
accordée une quarte plus bas que la Taille, et appelée
par les Italiens viola da gamba (viole de jambe), parce
que, pour en jouer, on la tenait entre les jambes, non à
l'épaule gauche comme la viola di braccio; il y en avait
à cinq et à six cordes ; 6*» le Violons, instrument de très-
grande dimension, monté de six cordes, et qu'on peut
appeler conlre-bar:ss de viole; on le voit dans 1: tableau
des Noces de Cana par Paul Véronèse. VAccordo ou Ae»
cord ( V. ce mot ) était une variété de violone. En Italie,
la Taille et la Haute-contre ne faisaient qu'un même in-
strument à la quinte de la Basse, dont le Dessus ren-
dait l'octave. On appelait Viole bâtarde une viole qui
ne différait de la Basse de viole que par sa; caisse,
plus longue et plus étroite. J.-S. Bach imagina'la Viole
pompeuse, qui s'accordait en quinte, comme le violon-
cefle, avec une cinquième corde à l'aigu. — Tous ces
instruments ont disparu: la Basse de viole a été rem*
placée par le yioloncelle, et le Violone par la coutrebasso^
Il n'est resté que deux violes , celle qu'on a nommée de«
puis Quinte et Alto ( F. ce mot) et la Viole d'amour.
L'ancienne viole d'amour était montée de quatre cordes
en boyau attachées comme aux autres instruments, et
de quatre cordes en laiton, passant sous la touche, accor-
dées à l'unisson avec les précédentes, et rendant des sons
harmoniques quand celles-ci étaient touchées k vide : la
viole d'amour actuelle, montée de sept cordes, dont la
plus grave sonne le sol de la 1** ligne en clef de fa, et
les autres ut, sol^ ut, mi, sol, ut, a des sons pleins de
douceur et de charme ; elle sert à accompagner la ro-
mance de Raoul au 1" acte des Huguenots. On ne lai
donne quelquefois que 6 cordes, en supprimant la plut
grave. B.
VIOLE (Basse de) , un des jeux à bouche de Torgue.
C'est un huit-pieds, mais de même taille que le prestant
à l'unisson duquel il parle, car on le fait octavier. Ce jeu,
dont l'usage est très-peu répandu en France, est fait en
étain ; il occupe toute l'étendue du clavier, et s'emploie
au grand orgue ou au positif. En ajoutant une autre ran-
gée de tuyaux parlant une octave plus haut sur la pre-
mière rangée, on peut faire de la Basse de viole un jeu
composé. F. C.
VIOLENCE, contrainte physique ou morale exercée
sur une personne pour l'obliger à un acte quelconque.
En Droit, elle donne lieu à une action en rescision des
contrats, obligations et transactions de toute sorte.
VIOLETTE , instrument de musique. V. Viole.
VIOLETTE (La), ou GERARD DE Nevers, Ib pIus agréa-
ble et le plus parfait de nos romans de chevalerie. En
voici le sujet : — Le roi Louis tenant une cour plénière
au Pont-de-r Arche, Gérard, comte de Nevers, y chante
la beauté et la fidélité de sa dame; Liziart, comte de Fo-
rest, fait le^pari de séduire la belle Euriante, et le défi
est accepté. Liziart se rend à Nevers, reçoit l'hospitalité
chez le père d'Euriante, et fait sa déclaration : ses sou-
pirs, son éloquence, son désespoir ne produisent aucun
effet. Mais, à l'aide d'une vieille qui ne pense qu*à mal,
il peut apercevoir Euriante au bain ; il lui voit sur le
corps un signe, une violette, et retourne à la cour, où il
déclare ce qu'il a vu, comme preuve de son succès. Eu-
riante est déclarée infidèle, malgré son innocence, et le
comté de Nevers, enjeu du pari, devient la propriété de
Liziart. Gérard emmène Euriante dans une forêt : il va lui
trancher la tète, quand arrive un énorme serpent ; il l'at-
taque et le tue, puis il abandonne Euriante. Cependant
il veut revoir son ancien domaine; là il entend une con-
versation de Liziart et de la vieille, et reconnaît Tinno-
ccnce d'Euriante : il se met aussitôt à sa recherche. Il
délivre une châtelaine, la belle Aigline, des persécutions
du cruel Galerant , s'éloigne sans vouloir l'épouser, fait
une maladie à Ch&lons, p\iis arrive à Cologne. Le lende-
main, la ville est assaillie par les Saxons ; Gérard y fait
tant de prouesses , que les infidèles sont repoussa. Sa
vaillance, sa courtoisie, sa bonne mine, lui gagnent too<
les cœurs; il plaît à Aiglantine, fille du duc de Cologne,
laquelle lui fait boire un philtre au moyen duquel il ou-
blie Euriante. Pendant ce temps, celle-ci est accablée
d'infortunes : une alouette lui enlève l'anneau qu'elle
avait reçu de Gérard ; elle repousse l'amour d'un cheva-
lier nommé Méliatir, qui tue près d'elle, en croyant b
frapper pendant la nuit, une autre femme, et qui l'accuse
ensuite d'avoir commis ce crime. Gérard est sur le point
d'épouser Aiglantine : mais, dans une partie de chasse»
son épervier lui apporte une alouette qui avait au coa
un anneau; il reconniUt Tanneau d'Euriante, et, sans
revoir Aiglantine, il s'éloigne de Cologne pour chercher
son amie. Il délivre en route une belle daœe, et la rend
à son époux. Puis il tue en combat singaller le géant
Brudigolans. Enfin , il rencontre une compagnie de che-
valiers qn'il accompagne à Miès, et, ayant appris l'his-
toire d'Euriante, déclare qu'il sera son champion contre
quiconque osera Taccuser d'avoir commis le meurtre.
Méliatir, obligé d'accepter le combat, est vaincu, et con-
fesse son crime. Enfin, après avoir remporté le prix daai
VfO
1781
VIO
an tournoi à Blontai'gis contre le comte de Forest, Gérard
ae présente devant le roi , accuse Liziart de mensonge et
de trahison envers Euriante, et le défie en combat singu-
lier : le roi ordonne que cette querelle soit vidée le jour
de la Pentecôte, en présence de toute la cour. Liziart
vaincu avoue soK crime; le roi le fait attacher à la queue
d'un cheval , puis pendre à un arbre; la vieille est bouillie
dans une chaudière, et Gérard épouse Euriante. — Ce
poème, en vers de hnit syllabes, fut composé par Gibert
ou Gyrbcrt de Montreuil, au commencement du xiii* siècle.
Il est dédié à Marie, comtesse de Ponthieu, fille de Guil-
laume III, beau-frère de Philippe-Auguste. L'action, in-
génieusement conçue, s*expose clairement, se noue et se
dénoue avec facilité, et emprunte une grâce toujours
nouvelle du récit, qui n*est jamais interrompu par des
lieux communs amoureux oa théologiques. On y trouve
d'admirables tableaux d'histoire et de genre, des descrip-
tions de combats, de tournois, de repas, de costumes,
d'armes, et, en général, des peintures de mœurs à la ma-
nière d'Homère. Le sujet de ce roman n'est point histo-
rique : aucun comte de Nevers ne s'est appelé Gérard, et
il n'a jamais existé un comte de Forez du nom de Liziart.
Quant au roi Louis dont il est question ici, M. Paulin
Pi\ris veut que ce soit Louis le Débonnaire ; M. Francis(]ue
Michel pense que c'est Louis VIII, et fonde cette assertion
sur ce que le roi tient sa cour plénière à Pont-de-I'Arche,
qui ne fut pas réuni à la couronne avant 1204. Cette ob-
servation ne nous parait pas avoir une grande valeur dans
un poème qui est tout d'imagination, et qui nous reporte
aux guerres contre les Saxons, au' siège de Cologne, avec
un autre dénoûment, mais avec les mêmes détails et les
mêmes noms que dans le poème de Witikind. La tra-
duction en prose (xv* siècle) de ce roman place l'action
vus le règne de Louis le Gros.
Les imitations du roman de la Violette sont fort nom-
breuses. II existe un roman en prose Dou roi Flore et de
la bielê Jehane, dont le sujet est au fond le même, et
dont le style parait être des premières années du xiii" siè-
cle; peut-être a-t-il précédé le poème de Gibert de Mon-
treuil. Cn autre roman en vers du xiii* siècle est intitulé
le Comte de Poitiers : l'action se passe sous le règne de
Pépin ; elle est la même que dans le roman de la Vio-
lette, Enfin nous trouvons encore une imitation du même
iujet dans un manuscrit du xiv* siècle ainsi intitulé :
Cy commence J. miracle de Nostre-Dame, cornent Ostes,
roy d*Espaingne, perdi sa terre pour gagier contre Bi-
rengier^ qui le tray et H flst faux entendre de sa femme,
en la bonté de laquelle Ostes se fioit, et depuis le destruit
Ostes en champ de bataille, fioccace, dans la 2* journée
du Décaméron, et Shakspeare, dans Cymbeline, ont aussi
imité le roman de la violette. Ce roman fut traduit en
prose au xv* siècle par un anonyme : il existe deux édi-
tions anciennes de cette traduction. Tune de 1520, l'autre
de 152C. Le roman en prose a été traduit en allemand
par M"** Uelmina de Chézy, Leipzig, 1804. Ce sujet fut
représenté sur la scène française en 1810, au Cirque
Olympique. M"" de Chézy écrivit en vers allemands un
grand opéra en trois actes, intitulé Euryanthe, dont la
musique fut faite par Webor (Vienne, 1823); son poème
ne rappelle en aucune manière l'aventure de la Violette :
au!^si Castil-Blaze le refit-il complètement , quand il tra-
duisit l'œuvre de Weber pour l'Académie royale de Mu-
sique (Paris, 1831 ). Déjà, en 1828, le théâtre de l'Opéra-
Tomique avait donné une pièce en trois actes, intitulée la
Violette, paroles de Planard, musique de Carafa; mais ce
n'était qu'une imitation éloignée et assez ridicule du
poëme original. — Le roman de la Violette a été publié
par Francisque Michel, Paris, 1834; celui Dou roi Flore et
de la biele Jehane, 1859 ; le Comte de Poitiers, 1831. H. D.
VIOLI-CEMBALO, instrument de musique inventé
cn 1G09 par Jean Haydn à Nuremberg. Il avait la forme
d'un piano. Sous les tangentes se trouvaient dix ou douze
petites roues garnies en côté de parchemin frotté de
colophane, et mises en mouvement par une roue plus
grande au moyen d'un cordon à plusieurs poulies. Cette
roue était mue elle-même à l'aide d'une pédale, soit
par l'exécutant, soit par une autre personne. Quand les
touches se baissaient , les tangentes serraient les cordes,
qui étaient toutes métalliques, contre les petites roues,
et l'on obtenait l'effet d'un archet passant sur les cordes.
Le son durait tout le temps que la touche était abaissée,
et son -Intensité dépendait de la plus ou moins grande
pression de la touche. — Des instruments du même genre
furent fabriqués ensuite par Garbrecht, Greiner, Poul-
(cau, etc. On doit ranger parmi eux le clavecin à archet
de Hohlfeld, et le clav^in-vielle ( V, Clavecin). Dans le
violiteinbalo de l'abbé Trcntin, h Venise, les condfs
étaient toutes en boyau : chaque touche mctta't en mou-
vement un levier, qui pressait la corde entrti sa tête
d'ivoire et une barre horizontale garnie de peau ; l'archet,
composé de fils de soie cousus à leurs extrémités sur un
tissu de laine, et un peu élevé vers le milieu, était étendu
horizontalement sur les cordes d'un côté à l'autre de la
table d'harmonie, et tournait continuellement autour do
deux petits cylindres de métal placés aux deux extrémi-
tés ; le mouvement lui était imprimé par une pédale k
roue que faisait marcher l'exécutant. On connaît encore
un violi-cembaio du P. Louis Tiparelli , d'Azeglio. B.
VIOLON, en italien Violino, instrument de musique à
cordes et à archet, monté de quatre cordes en boyau,
dont la plus grave, qui est filée en laiton et s'appelle
bourdon, donne le sol: les trois autres portent re, la,
mi, par quintes du grave à l'aigu. La plus petite se nomme
chanterelle. Plusieurs bois entrent dans la construction
du violon : le fond de la caisse, le manche, les éclisses
et le chevalet sont en érable; la table, la barre (petite
pièce collée au-dessous de la grosse corde ) , les coins, les
tasseaux, les contre-éclisses, l'àme, sont en sapin; la
touche, les filets d'ornement, les sillets, les chevilles, le
cordier ou queue et son bouton, en ébène. La table est
percée, à droite et à gauche des cordes, près de la partie
échàncrée de la caisse, de deux ouvertures en forme d* f.
Le diapason du violon commence au 3* sol du piano, et
est de 4 octaves environ ; mais on peut l'étendre plus
haut encore au moyen des sons harmoniques. Le violon
est l'instrument le plus important de l'orchestre : son
timbre joint la douceur à l'éclat; il a la faculté de soute-
nir, d'enfler et de modifier les sons ; il peut être tour à
tour simple, touchant, gracieux, noble et grandiose,
plein d'audace et de feu; il est propre à tous les tons, à
toutes les modulations, et il n'est pas de traits rapides,
pas de difficultés qu'il n'exécute. Il peut servir tour à tour
au chant et à l'accompagnement ; l'archet pouvant faire
parler plusieurs cordes à la fois, il a les ressources de
l'harmonie aussi bien que le don de la mélodie. D'habiles
exécutants parviennent même à en tirer des sons qui imi-
tent ceux de plusieurs autres instruments. Autrefois en
Italie on distinguait le violon de concerto et le violon
d'orchestre : on appelait le premier voix humaine^ et le
second voix argentine. La musique pour le violon s'écrit
sur la clef de sol 2* ligne. Les méthodes de violon
les plus connues sont celles de Zanetti , Montéclair ,
Geminiani, L. Mozart, Tartini, Lœhlein, Galeazzi, Car-
tier, Baillot, Rode, Kreutzer, André, Mazas, Campagnoli,
Guhr, etc.
Le violon était connu dès le x* siècle , et s'appela d'a-
bord Rebec; il n'avait alors que trois cordes. Sa forme ac-
tuelle date du xv* siècle : ce fut la viole ( V. ce mot) ré-
duite à de plus petites proportions et bornée à quatre
cordes. Il y a lieu de croire que cette transformation se
fit en France, car le violon est indiqué dans les parti-
tions italiennes du xvi* siècle sous le nom de piccolo
violino alla francese (petit violon à la française). Le plus
ancien violon qu'on ait conservé porte le nom de Jean
Kerlin, luthier breton, et la date de 1449. La supériorité
des sons du violon sur ceux des violes lui fit bientôt don-
ner la préférence, et il devint d'un usage général. Des lu-
thiers se formèrent en France, en Italie et en Allemagne,
et de leurs ateliers sortirent d'excellents violons, qui
sont encore très-recherchés aujourd'hui des virtuoses.
Parmi ces luthiers on remarque : le Tyrolien Duiffopru-
géar; Nicolas et André Amati, de Crémone, à la fin du
XVI* siècle; Antoine et Jérôme Amati, fils d'André ; Paul
Magini, Ant. Stradivari, Pierre-André et Joseph Guar-
neri, Jacques Steiner, élèves des Amati. La fabrication
des Tioions n'a point décliné entre les mains de Ber-
gonzi, Maggini, Cappa, Guadani, Clots, et, dans notre
siècle, Pichl, Lupot, Gand, Guersan, Salomon, Chanot,
et Vuillaume ont donné de très-bons instruments. Dans
la seconde moitié du xviii* siècle, on a fabriqué des in-
struments appelés petits violons, plus petits en efiet que
les violons ordinaires, et montés une quarte plus haut :
leur accord était, en partant du grave, ut, sol, ré, la.
Les sons en étaient maigres. L'unique avantage de ces
instruments était de pouvoir être joués par de petites
mains.
L'usage du violon se borna pendant un assez long
temps à jouer des airs populaires ou à faire danser. Plus
tard on l'introduisit dans l'orchestre; mais, au temps do
Lulli encore, ceux qui en jouaient étaient si peu habiles,
que ce compositeur se plaignait de ne pouvoir leur con-
fier que des parties d'une extrùme simplicité. Ce fut seu«
YIO
17i^2
VIS
\
Icment à la fin du xvii* siècle queiCorelIi fonda en Italie
la première école sérieuse de yiolon : il introduisit des
traits, des combinaisons de doigté et des coups d*archet
dont on n'avait pas d*idée ayant lui. Albinoni, Torelli,
Geminiani, Valentini, Mariette, Vivaldi, Tartini, Vera*
ctni, Ferrari, Locatelli, Nardi, Somis, Pugnani, Mestrino,
«étendirent à leur tour le domaine de l'instrument que
(^orelli avait en quelque sorte créé; Viotti recula encore,
par son exécution merveilleuse, les limites qu'ils avaient
atteintes, et surpassa Jamowick, qu'on voulait lui op-
poser. On distingue parmi ses successeurs Rovelli, Gia-
como Costa, et Alexandre Rolla. Dans notre siècle, Paga-
nini a commencé pour le violon une ère nouvelle, celle
de la difficulté vaincue : sa main prodigieusement grande
lui offrait les moyens d'exécuter des passages que nul
autre ne pouvait faire comme lui. Le maniement de
l'archet fut la partie faible de son Jeu; toute son atten-
tion se porta sur la main gauche, et il y a fait une ré-
volution complète. Il est le premier qui ait exécuté des
traits dans lesquels la main gauche pince certaines
notes tandis que l'archet en Joue d'autres, et qui ait
trouvé le moyen de Jouer, sur la 4* corde, des morceaux
entiers qui sembleraient exiger toutes les cordes de
rinstrument. Dupuis Paganini, l'Italie a encore pro-
duit des exécutants remarçiuables , les sœurs Mila-
nollo, les sœurs Femi, Sivori, Baxzini, Nicosia, etc. ^ En
France, le premier violoniste remarquable fut Leclère,
dont la manière appartenait à l'école de Corelli. Madin
et Papin, qui vinrent ensuite, eurent plus de gr&ce dans
leur jeu, mais moins de largeur dans le style et dans le
son. On peut citer encore La Houssaye, Gervais, Saint*
Georges, Fodor, Bertheaume, Guénin. Jusque-là on s'était
surtout occupé de la main gauche : Gaviniès porta son
attention sur le maniement de l'archet, et y acquit une
habileté que Viotti lui-môme admira. Après lui com-
mence l'école moderne, dont Kreutzer, Rode et Bai Ilot
sont les cbefii : elle a été la plus brillante de l'Europe
par la perfection de son mécanisme et l'élévation de son
style. De cette école proviennent Boucher, Lafont, Ha-
beneck, Mazas, Alard, Blaurin, llassart, Cb. Dancla, Gi-
rard, Herman, Armingaud, etc. — La Belgique a pris
aussi, au xix* siècle, un rang glorieux dans l'art du vio*
Ion, avec De Bériot, Artotj et Vieuxtemps. -*• L'Allemagne
a été en retard sur les pays voisins. Wagner, Pisendel,
J.-Th. Graun, Stamitz, et Mozart père sont les premiers
violons de talent que l'on cite. Une école de violon ne
fut réellement fondée que dans la seconde moitié du
xvni* siècle par Benda. Depuis cet artiste, Ramnitz, Rust,
Matthes, Guil. Cramer, Danner, Eck, Frienzel, Maurer,
Mœser, se mirent à la tête des exécutants de leur nation.
Dans notre siècle, Spohr a été la chef des violonistes alle-
mands, parmi lesquels on doit citer Mayseder, Ernst, et
Joachim. La Pologne a produit de nos Jours Wienawski. B.
TIGLON (Jeu de), nom donné dans l'orgue à un jeu de
pédale plus large par le haut qu'à la bouche, fait le plus
souvent en sapin, et qui a seize pieds ou huit pieds. Ce
ieu, qui n'est en usage qu'en Allemagne, est très-souvent
confondu à tort avec le molck di gamba-bast, qui n'a
|)as le môme diapason. Le Jeu de violon a la propriété de
faire entendre l'octave avant le son fondamental. F. C.
VIOLONS (Roi des). F. MKNBSTasLS.
VIOLONCELLE (de l'italien viOionceUo\ instrument
r'e musique à cordes et à archet, qu'on nomme aussi
liasse, parce qu'il est la basse du violon. Il a remplacé
l'ancienne basse de viole (F. ce mot)^ mais en ne con-
servant que 4 cordes, dont deux filées en laiton et deux
on boyau. Ces cordes, accordées en quinte, sont, du grave
à Taigu, ut, sol, ré, la. Le diapason naturel du violon-
celle est de quatre octaves environ. On doit à cet instru-
ment, ainsi qu'à la contre-basse, la puissance et les grands
effets de nos orchestres : mais il ne sert pas seulement
d'accompagnement, il est susceptible d'exécuter la mé-
lodie ; sa qualité de son est pénétrante et a de l'analogie
avec la voix humaine; il se prête merveilleusement à
l'expression des sentiments tendres et mélancoliques. La
musique de violoncelle s'écrit sur la clef de fa 4* ligne,
et sur toute autre clef quanU il y a lieu d'outre-passer
la portée. Les violoncelles de la fabrique de Stradivarius
sont presque tous plats ; ils ont un son énergique qui
les rend propres au concerto : ceux des Amati, bombés et
voûtés, ont le son plus suave, et sont propres à l'accom-
pagnement de la voix, de la harpe, du piano, do quatuor
et du quintette. De nos Jours, les meilleurs fabricants de
violoncelles sont Thibout à Paris, Mongaard à Amster-
dam, Padevelt à Carlsruhe, Mirmont à New- York. — Des
Méthodes pour le violoncelle ont été publiées par Cor*
rette, Kauer, Gunn, Raoul, Olivier Aubert, Louis Do-
port, Stiastuy, Dotzauer, Baillot (celle dite du Conserva»
toire)^ et Baudiot.Dans la seconde moitié du xviii* siècle,
on fit de petits violoncelles, montés une quarte plus haut
3ue le violoncelle ordinaire : un Allemand, nommé Rie-
el, excellait à en Jouer. -^ Le violoncelle, dont on at«
tribue l'invention, soit à un Italien nommé Buononcini ,
m^tre de chapelle du roi de Portugal, soit au P.Tardieo,
de Tarascon , fut introduit à l'Aciuiémie royale de mu<
sique de Paris par un certain Battistini, de Florence,
vers la fin du xvii* siècle. Un Romain, Franciscello, qui
vivait au commencement du aiècle suivant, se rendit le
premier célèbre dans l'exécution des solos. Berthaud doit
être considéré comme le chef de l'école française pour
cet instrument : parmi ses élèves on compte les frères
Janson et les deux Duport. L'école a produit ensuite I»
Levaaseur, Bréval, Lamare, Baudiot, Muntz-Berger, et,
dans des temps tout à fait rapprochés de nous, Vaslin,
Bénazot, Norolin, Franchomme, Alexandre Batta, Ser-
vais. L'Alleouigne se glorifie avec raison d'avoir produit
Romberg, Bohrer, et Dotzauer. L'Angleterre nomme aussi
avec un Juste orgueil Crossdill et Lindley. B.
VIOLONS, instrument de musique. V. Viole.
VIOLON- VIELLE, instrument de musique inventé en
1700 par un certain Dlaine. Il imitait, dit-on, parfaite-
ment le violon, et n'avait point le son nasal do la vielle.
VIRELAI. V. L4I.
VIREMENT (de virer, tourner), en termes de Marine,
rotatioa d'un bâtiment sur lui-même pour présenter au
vent le côté opposé à celui par leçiuel il le recevait. On
dit alors qu'on a viré de bord. Virer au cabestan, c'est
faire tooroer le cabestan sur lui-même pour lever l'ancre
ou tout autre poids au moyen de la tourne-vire.
VIREMENT, terme de Banque et de Commerce. K. Bauqdb.
VIRES, en termes de Blason, annelets posés l'un dans
l'autre.
VIRETON, arme. F. notre Dictionnaire d$ Biographie
et d'Histoire,
VIREVAUT ou VIREVBAU, treuil horizontal placé sur
l'avant des petits navires marchands pour leur tenir lieu
de cabestan.
VIREVOLE, nom donné, dans les Jeux de la Bête et de
l'Hombre, au Joueur qui, ayant entrepris de faire la vole,
c.-à-d. toutes les levées, n en fait pas une.
VIRGINALE, instrument à cordes et à clavier, dont on
trouve le nom dès l'année 1530. On a donc dit à tort que
ce nom était une flatterie pour Elisabeth, reine d'Angle-
terre, oui aimait à en Jouer i il vient plutôt de la douceur
du timoré,
VIRGULE (du latin virguia, diminutif de virga, ba-
guette), signe de ponctuation qui sert à séparer les di-
vers membres d'une même phrase. — Dans l'ancienne
Musique, on appelait virgule la partie dea notes qui se
nomme aujourd'hui queue. Les signes neumatiques , les
petits points placés, sans lignes ni clefs, horiiontale-
ment, perpendiculairement ou obliquement, au-dessus
des textes liturgiques dans les anciens manuscrits, pour
indiauer aux chanteurs la position des sona, étaient dit»
aussi virgules»
VIROLET, en termes de Marine, rouleau de sapin long
et de petite dimension, qui sert à empêcher les cords^'s
de frotter contre les corps durs.
VIRTUEL (du latin virtus, force, puissance^ se dit, en
Métaphysique, de ce qui est seulement en puissance. On
l'oppose à actuel,
VIRTUOSE (de l'italien virtuoso, habile), celui qui a
un talent remarquable pour la musique, principalement
comme exécutant.
VIRURE, en termes de Marine, toute la largeur d'an
bordage, d'un bout à l'autre du navire.
VIS ou VIZ, nom qu'on donnait Jadis aux escaliers en
hélice ou en limaçon.
VISA (du latin visa, sous-entendu res, choie vue), foiw
mule qui se met sur un acte, pour attester qu'il a été vn
et vérifié par celui dont la signature rend cet acte an-
thentique ou valable, ou simplement pour certifier qu'il
a été présenté.
VISIÈRE, pièce des anciens casques, qui se haussait
et se baissait à volonté, et à travers laquelle l'homme
d'armes voyait et respirait. Tanttt s'était une grille,
tantôt une pièce pleine, percée de trous pour les yeux et
la bouche. — On a aussi quelquefois appelé Vistère un
petit guichet percé dans une porte, et qui permet de rs-
con naître ceux qui s'y présentent.
VISION, toute chimère de l'àme, assex vive pour qu'elle
semble provenir d'une apparition véritabld. C'est an effet
VIS
1783
VIT
d'hallucination. Ceux qui ont des rlsions sont appelés
Vistonnatres,
VISION BÉATiFiQDB, OU termes de Théologie, action par
laquelle les bienheureux voient Dieu dans le ciel.
VISION KN DIEU. C'ost une^dos hypothèses destinées à
combler le vide creusé par la Philosophie Cartésienne
entre le monde intellectuel et le monde matériel. On a
souvent répété que Descartes lui-même niait la commu-
nication des deux substances, pensante et étendue, qu'il
avait si bien distinguées. Descartes ne nous parait pas
avoir été explicite à ce point : il nous semble que, chez
lui, cette opinion est à Tétat de tendance plutôt que de
théorie décidément arrêtée ( V, la 6« MédilcUion et les
Principes de la Philosophie, 2* partie). Mais ce qui nous
semble au moins douteux pour Descartes est très<certai-
nement vrai de ses disciples, surtout de Leibniz ( V, Har-
monie pnééTABLiB) et de Malebranche. Quoique Maie-
branche parle, comme tout le monde, de l'union de Tàme
et du corps, il est loin d'entendre par là ce qu'entend le
sens commun; pour lui, T&me de l'homme est si peu
unie, dans le sens ordinaire de ce mot, à son corps, et, par
le corps, aux autres corps de la nature, que c'est seule-
ment par la voie très-indirecte de la Révélation qu'elle
est assurée de leur existence, u II est vrai , dit Male-
branche (Préface de la Recherche de la vérité) ^ que l'&me
est unie au corps; mais elle est unie h Dieu d'une ma-
nière bien plus étroite et bien plus essentielle. Le rapport
de l'Âme à Dieu est naturel , nécessaire et indispensable :
il n'en est pas de môme du rapport de notre esprit à notre
corps. » On va voir que, de plus, dans sa pensée, l'un de
ces rapports est immédiat, tandis que l'autre est tout à
fait indirect, et pour ainsi dire tout extérieur. L'Étendue
et la Pensée sont trop différentes , substantiellement et
essentiellement , pour exercer Tune sur l'autre une in-
fluence quelconque ; aussi , lorsqu'à propos des modifi-
cations de la substance pensante le corps est agité de
certains mouvements , c'est que Dieu intervient, par un
acte exprès de sa volonté, pour les produire. Tel est le
principe de Vassistance divine, déjà indiqué par Descartes,
et qui fait le fond du système des Causes occasUmiMlles
{ V, cemot)» Il s'agit ici de l'action inverse, c.-à-d« de la
manière dont apparaissent à l'esprit les idées des rliUtés
extérieures. Le système de Malebranche appartient à la
famille des systèmes idéalistes; c-à-d. qu'un dd ses
principes est que nous connaissons les choses, non par
oUes-mômes, mais par les Idées, en entendant par Idée
non pas seulement un acte de l'esprit ( ce qui est l'opi-
nion vulgaire, et à notre avis parfaitement sensée), mais
un être distinct et de l'esprit et des objets {V, Id^ausme),
et qui est lui-même v l'objet immédiat ou le plus proche
de l'esprit quand il aperçoit quelque chose. » Sans s'arrê-
ter longtemps à la question de savoir si les Idées sont
matérielles ou immatérielles, si elles sont ou ne sont pas
la représentation de quoique objet existant réellement
hors de l'àme, Malebranche, après avoir établi qu'elles
sont distinctes des pensées de l'esprit , et que, par con«
séquent , elles ont leur existence pzopre, passe immédia-
tement à la question de leur origine. « 11 est absolument
nécessaire, dit-il, que les idées que nous avons des corps,
et de tous les autres objets que nous n'apercevons point
par eux-mêmes, viennent de ces mêmes corps ou de ces
objets; ou bien que notre àme ait la puissance de pro-
duire ces idées; ou que Dieu les ait produites avec elle
en les créant, ou qu'il les produise toutes les fois qu'on
pense à quelque objet; ou que Tàme ait en elle-même
toutes les perfections qu'elle voit dans ces corps; ou enfin
qu'elle sott unie avec un être tout parfait, et qui rvn-
ferme généralement toutes les perfections des êtres créés. »
Il parcourt successivement ces différentes hypothèses, ré-
fute les cinq premières, et s'arrête à la dernière qu'il
développe à peu près comme il suit : Dieu seul possède
en lui les idées de tous les êtres créés, et de toutes leurs
perfections. Les idées que nous avons de ces êtres ne
peuvent donc nous venir que de lui. Dieu est le lieu des
idées, et c*est en lui que nous les voyons. Les idées ne
sont pas Dieu, maJs elles en sont une émanation; elles
sont, par rapport à Dieu, ce que la lumière est par rap-
port au soleil, quelque chose de distinct de lui , qui nous
fait apercevoir les objets. Comment s'opère la communi-
cation des idées de l'Intelligence divine, où elles sont
toutes contenues, à l'esprit de l'homme? Il faut savoir,
dit encore Malebranche, que Dieu est très-étroitement
uni à nos âmes par sa présence. Comme il est le lieu des
idées, il est aussi le heu des esprits, de sorte que c'est
en lui, et par une communion de l'esprit avec son Intel-
ligence, que les êtres extérieurs nous *^nt connus. Cette
communion de l'esprit de l'homme avec Dieu , c'est la
Raison, une pour tous les hommes par cela même qu'elle
est, en chacun, une participation à la suprême Raison de
leur Auteur. Cela met les esprits créés dans une véritable
et entière dépendance de Dieu ; car nous ne saurions
rien voir que Dieu ne veuille bien que nous le voyions ,
et (}ue Dieu même ne nous fasse voir ce que nous voyons.
Mais si l'esprit est ainsi dans une étroite dépendance de'
Dieu, c'est pour en recevoir la lumière : u Car c'est Dieu
qui est proprement la lumière de l'esprit et le père des
lumières, c'est lui qui enseigne la science aux hommes.
En un mot, c'est la véritable lumière qui éclaire tous
ceux qui viennent en ce monde. » Telle est, dans ce
qu'elle a de plus général, la théorie des Idées de Male-
branche et rhypothèse systématique de la Vision en Dieu.
Nous voyons tout en Dieu ; Dieu est le lieu des Idées.
Mais de Dieu lui-même, y a-t-il une idée? Dans la doc-
tri ne de Malebranche, il n'y a pas d'idée do Dieu, et il
ne peut pas y en avoir; car l'idée, intermédiaire entre
l'esprit et l'oDJet, est d'une nature plus excellente que
son objet. Si donc il y avait une idée de Dieu, cette idde
serait quelque chose de plus grand et de plus relevé que
Dieu lui-même, C3 qui est une supposition absurde. Outre
cette première raison, il y en a une autre i c'est que l'idéo
est un être créé, particulier et fini. Elle peut bien repré-
senter d'autres êtres particuliers et finis, mais elle no
saurait représenter l'être sans restricttbn, l'être immense
et universel. Il n'y a donc pas d'idée de Dieu. Est-ce à
dire que nous ne connaissions Dieu d'aucune manière?
Loin oe là : nous le connaissons d'une vue immédiate et
directe, par cette union intime où nous sommes avec lui.
Rien ne peut le représenter ; mais nous le connaissons
par lui-même, quoique la connaissance que nous en avons
en cette vie soit très-imparfaite, a et nous connaissons les
choses corporelles par Iburs idées, c-à-d. en Dieu, puis-
qu'il n'y a que Dieu qui renferme le monde intelligible
où se trouvent les tuées de toutes choses. »
Nous résumerons sous un petit nombre de chefs prin-
cipaux les critiques qm peuvent et doivent être adressées
au système de la Vision en Dieu t i^ L'existence des
idées, telles que Malebranche les conçoit, est purement
hypothétique; 2^ On pourrait s'y passer du Monde et des
objets extérieurs. Que Dieu existe, et en Dieu les Idées;
que l'esprit de l'homme vole les idées en Dieu , cela suffît ;
et tout se passera absolument de la môme manière, soit
qu'il y ait réellement ou qu'il n'y ait pas d'objets aux-
quels ces idées correspondent, ou qui correspondent à
ces idées; 3<» Il est impossible de se faire une idée nette
de cette union dans laquelle, suivant Malebranche, l'es-
Krit de l'homme se trouve avec l'Intelligence divine, aussi
ien que du rapport vrai de celle-ci avec les Idées;
4<> Enfin, et c'est là, à ce qu'il pous semble, ce à quoi
l'on fait le moins attention, la philosophie de Alale-
branche est grosse de conséquences que son autour à
coup sûr eût repoussées avec horreur. Elle est à deux
pas du Panthéisme; et voici comment nous le prouvons :
quoique Malebranche ne prétende nulle part expressé-
ment que les Idées soient identiques à Dieu (elles ne sont
pas Dieu, dit-il , mais elles en émanent , et ceci sent déjà
le Panthéisme); quoiqu'il n'absorbe pas non plus abso-
lument la substance de l'àme dans la substance divine,
cette maxime de TApêtre, qu'il répète avec complaisance:
« C'est en Dieu que nous sommes, que nous vivons et
que nous avons le mouvement, » entendue dans son sens
le plus strict, si elle n'énonce pas cette absorption d'une
manière complète, s'en approche singulièrement. Donc,
unification , ou peu s'en faut du moins , en Dieu , des
idées qud peuvent être sans aucun inconvénient sub-
stituées aux objets, et de l'esprit humain, qu'est-ce autre
chose, encore une fois, que le Panthéisme ( V, ce mot ) ?
La pensée de Malebranche, toute pénétrante qu'elle est ,
n'a pas été à ces conséquences extrêmes , qui l'euss 'nt
fait reculer avec effroi; mais les systèmes ont leur lo-
gique, par laquelle il faut les Juger; et en vérité ce n'était
pas la peine de qualifier Spinoza de misérable et le spi'
nozisme d*épouvantable chimère, pour finir par en aj>
prêcher de si près. R — s.
VISITE (Droit de). V, Daorr de vism, dans notre Dic-
tionnaire de Biographie et d'Histoire.
VISITE DOMICILIAIRE. V. PEHQUlSmOR.
VISITES, nom que l'on donnait, au xvn* siècle, aux
représentations que Molière et sa troupe allaient faire
chez le roi, les princes ou les particuliers.
VISPERED. V, VENniDAi>-SAn#. et Zend-Avesta.
VITAL (Principe). Dès l'Antiquité on avait cherché à
savoir si la vie a un principe distinct de la matière et ^9
VIZ
1734
VOEU
TAme, ce qui avait donné lieu à différentes bypotlièses.
flippocrate, et plus tard Galien, attribuaient l'harmonie
des phénomènes organiques à une sorte de principe di-
vin ; Aristote semble avoir considéré l'&me, ou'ii, nomme
entéléchie^ comme le résumé des propriétés de la' vie. Le
moyen &ge, marchant sur les traces les plus visibles de
l'Antiquité, admettait trois sortes d'âmes ou princi[>e8,
'pour se rendre compte de la vie : végétative, «enràtoe,
raisonnable* Depuis la Renaissance, Paracelse attribua la
génération, l'accroissement et la conservation de tout
lUre vivant à un archée, corps astral, logé dans Testo-
mac, et qui nous défend contre les agents extérieurs de
destruction. J.-B. Van-Helmont fit de cetarc/i^ele prin-
cipe qui préside aux fonctions de la vie et qui donne aux
corps la forme qui leur est propre : il le nommait imago
semincUis, £n opposition à ces hypotiièses, vinrent les
vitromécaniciens, qui voulaient rapporter les fonctions
vitales aux lois de la mécanique et de Thydraulique, et
les ialrochimistes, qui expliquaient la vie par la chimie
ie leur temps. Pour les réfuter, Stahl, dans sa doctrine
«le ï Animisme, donna à Tàme le rôle de Varchée. Il fut
remplacé par Técole des organicistes, dont Bichat et
ilroussais furent les principaux représentants; mais, dans
l'école de Montpellier, V animisme devint le vitalisme.
Bartbez, le chef de cette école, pensait que le principe
vital est essentiellement distinct de la matière organisée,
et qu'il tient peut-être en quelque façon à T&me. Cette
question d\x principe vital est une des plus sérieuses dont
la Philosophie et la Physiologie puissent s*occuper. R.
YITCHOURA, vêtement polonais garni de fourrure, que
l'on met en guise de par-dessus pour se garantir du froid.
VITONIÈRË, en termes de Marine, ferrure qui attache
le gouvernail au b&timent.
VITRAIL. V. Verrière.
VJTRK (Verre à). 7. Verre.
VITRIERS , ancienne corporation dont les membres, à
la fois artisans et artistes, garnissaient de verre les pan-
neaux de plomb, les châssis de bois, les cadres d'es-
lampes et de tableaux, et se livraient à la peinture sur
\ erre. Leurs statuts dataient du règne du Louis XI, et
furent modifiés par Louis XIV en 1666. L*apprentissage
était de quatre ans, et le compagnonnage de six.
VITRINE. V. Vkrrière.
VIVANDIERS, VIVANDIÈRES. V. CAirraB.
VIVIER (du latin vivarium)^ bassin entouré de murs
en terre ou en maçonnerie, rempli d'eau ordinairement
courante, et destiné à recevoir du poisson d'eau douce.
Des grilles en bois ou en fer laissent un passage ouvert à
l'eau, en même temps qu'elles empêchent le poisson de
^'échapper. Les riches Romains avaient presque tous des
viviers auprès de leurs villas : on cite Lucullus, C. Hérius,
Védlus Pollion, comme ayant fait pour cet objet des dé-
penses prodigieuses; le dernier Jetait, dit-on, vivants à
ses lamproies les esclaves qa*il avait condamnés à mort.
Quelquefois on creusait des viviers dans les rochers près
(le la mer, afin d'y faire arriver l'eau salée. — Chez les
anciens Romains, on appelait encore vivier (vivarium)
un parc où l'on élevait de gros gibier de chasse.
VIVIEN (Les Enfances), 11* branche de la chanson de
Guillaume-aiMiourt'nez, Vivien, enfant, est remis aux
Sarrasins d'Espagne, en échange de son père, qu'ils re-
tx^.naient prisonnier depuis huit ans. Il est enlevé par des
pirates, et acheté par une marchande, qui le fait passer
I)Our son fils. Bientôt il retourne en Espagne à la tête de
quelques Jeunes gens, et bat les Infidèles; mais il est
assiégé dans une forteresse par une armée innombrable.
Sa mère adoptive accourt en France, et obtient que l'em-
pereur envoie des secours, grâce auxquels Vivien de-
meure vainqueur. — La suite de ses aventures, qui forme
la 12" branche de la chanson de Guillaume-au-court-nez,
a pour titre le Chevalier Vivien et la bataille d'Aleschans.
A son retour d'Espagne, Vivien est adoubé chevalier par
son oncle, et fait vœu de ne Jamais reculer devant les
Sarrasins; il commence contre eux une guerre d'exter-
mination. Blessé et poursuivi par une armée entière, il
s'enferme dans un château. Guillaume accourt, et alors
s'engage la terrible bataille d'Aleschans, où il coula tant
de sang que,-Aes pierres en sont encore rouges aujour-
d'hui. Vivien y périt après d'héroïques exploits.
Les Enfances Vivien sont conservées â la Bibliothèque
nationale de Paris dans cina manuscrits; le Chevalier
Vivien et la bataille d'Aleschans, dans sept manuscrits
du XIII* siècle. La bibliothèque de l'Arsenal en possède
an. V. Histoire littéraire de la France, t. XXII. H. D.
VIZIR. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Biogror
fHie et d'Histoire,
VLACO -MACÉDONIEN (Dialecte). F. RocMAin (Lan-
gue).
VLADIKA, titre du chef des Monténégrins.
VOCABLE (du latin vocabulum, mot), se dit en général
de tous les' mots qui composent une langue, et particu-
lièrement des substantifs. — On l'emploie aussi en par-
lant du nom du Saint sous le patronage duquel une églt^
est placée : ainsi, telle église est soui le vocabU de
S* Pierre.
VOCABULAIRE (du latin vocabulum^ nom)« liste fie
mots disposés communément dans un ordre alphabé-
tique et accompagnés d'une courte explication. Le Voca-
bulaire est moins développé que le Dictionnaii*e. Il est
spécialement une liste de termes propres à un art, à une
science. V» Dictionnaire, Lexique. P.
VOCALISATION, partie de l'art du chant qui consiste
â bien gouverner sa voix dans les modulations, les rou-
lades et les traits rapides. On nomme Vocalises les exer-
cices destinés à donner de l'agilité et de la souplesse à ia
voix : ces exercices se font sans paroles, et sur une seule
voyelle, a ou e par exemple. Vocaliser, c'est solfier sans
prononcer le nom des notes, en donnant à la voix ses
diverses inflexions sur cette seule voyelle.
VOCATIF (du latin vocare, appeler), flexion casuelle
des substantifs, adjectifs et participes, indiquant qu'on
s'adresse â une personne ou à une chose personnifiée.
Cette forme est propre à l'ancien grec et au latin. Le vo-
catif a généralement la même forme que le nominatif,
excepté dans les noms masculins et féminins de la i* dé-
clinaison. Il est souvent accompagné de l'interjection 0.
VOCATION (du latin wcatio, appel), penchant pro-
noncé qui nous porte à suivre telle ou telle carrière. Dans
un sens religieux, c'est cette voix intérieure par laquelle
Dieu nous invite d'une manière toute spéciale à la pra-
tique de ses lois. On nomme Vocation d'Abraham le
choix que Dieu 'fit de ce patriarche pour être le chef de
son peuple. La Vocation des Gentils est la grâce que
Dieu leur a faite en les appelant â la connaissance de
l'Évangile.
VOEU, promesse faite à Dieu d'une chose qu'on n'est
point tenu de faire, mais que l'on croit lui être agréable.
C'est une obligation de surérogation que l'on s'impose,
en dehors des obligations légales. Les vœux étaient con-
nus des Hébreux, et le chap. 27 du lÀvitique entre dans
de grands détails à ce sujet : on y voit que les vœux de-
vaient être libres et volontaires ; que Moïse en condam-
nait l'indiscrétion, la précipitation, la témérité; qu*il
était permis de modifier et même d'annuler ceux qui
étaient contraires â la prudence. Ainsi dut-il en être du
célèbre vœu de Jephté. La loi chrétienne n'a pas formel-
lement ordonné des vœux, mais elle ne les défend pas;
et s'il existait, dans l'ancienne loi, des moyens de cassa-
tion, de dispense ou de modification des yœux, à^ plus
forte raison doit^-il en exister dans la nouvelle. L'Église
catholique admet que les vœux du baptême obligent en
conscience, et qu'il peut y en avoir d'autres que ceux-là ;
elle reconnaît, par exemple, les vœux monastiques de
pauvreté, de chasteté, d'obéissance, de clôture. Les ca-
nonistes distin^^uent : 1<* le vœu simple, promesse faite
à Dieu en particulier ou dans une communauté non au-
torisée : c'est un empêchement prohibitif du mariage ;
2<^ le vœu solennel, qui se fait avec certaines formalités
dans un corps de religion approuvé par l'Église ; c'est un
empêchement dirimant du mariage; 3^ le vcbu absolu y
qui est sans condition, et qu'on est obligé d'exécuter aus-
sitôt qu'il a été fait; À^ le vœu conditionnel, qui n'oblige
qu'après l'événement de la condition ; 5» le vœu réel,
qui a pour matière une chose hors de la personne qui ie
fait ; 6** le vœu personnel, qui se prend dans la personne
même ou dans ses actions ; 7^ le vcbu mixte, qui tient du
personnel et du réel. Dans l'ancienne France, où les in-
stitutions religieuses étaient inséparablement unies avec
les institutions civiles, les ordonnances réglaient l'âge de
l'émission des vœux, la forme, la solennité et toutes les
conditions de ces vœux. Un décret du 15 février 1790
prononça l'abolition des vœux de religion en supprimant
les communautés religieuses. La Constitution de 1791 dé-
clara que la loi civile ne reconnaissait plus les vœux reli-
gieux. Bien cpie ce principe n'ut pas été exprimé dans le
Code Napoléon, il subsiste toujours; c'est ce qui résulte,
par exemple, de la déclaration de ce Code, que la vœa
n'empêche point le mariage civil. Un décret du 18 fé-
vrier 1809, qui rétablit les sœurs hospitalières, lîmiti
à 5 ans la durée de leurs vœux. La loi du 24 mai 1825,
qui a légalisé l'existence de toutes les communautés de
femmes, n'a rien statué de nouveau sur ce point. H
YOI
1785
VOI
nVst permis de faire des vœux que dans les congréga-
tions religieuses autorisées par rÉtat et après l'^e de
10 ans accomplis. Jusqu*à 21 ans, leur durée ne peut ex-
céder un an. — Vœu désigne aussi Toffrande promise
par un vœu V. Ex-Voro.
vogues!, iiom donné aux fêtes patronales dans cer-
taines parties de la Provence.
VOIES DE COMMUNICATION. K. Canal, Chbuin,
Po?iT, Routes.
VOIES DE DROIT, en termes de Jurisprudence, re-
cours à la justice suivant les formes légales. V. F. Le-
fiormant. Des voies de recours, 1857, in-S*».
VOIES DE FAIT, actes de violence contre les personnes.
Les voies de fait sont poursuivies correction nellement ou
criminellement, selon leur gravité (Code pénal, art. 209-
^212,228-233).
VOIES ET MOYENS, en termes de Législation et de
Finances, revenus de tous genres que l'Etat applique à
ses dépenses.
VOIES ROMAINES. V. notre Dictionnaire de Biogra-
ptUe et d'Histoire,
VOILE, pièce d'étoffe destinée à dérober un objet à la
vue, et, spécialement, celle dont les femmes se couvrent le
visage; dans ce dernier cas le voile est un tissu blanc ou
noir, léger, et à demi-transparent. Dans le Tabernacle des
Juifs, un voile précieux cachait la vue de TArche d'al-
liance aux profanes. L'usage du voile parmi les femmes
est très-ancien : dans la Théogonie d'Hésiode, Minerve
couvre Pandore d'un beau voile ; dans VOdyssée d'Ho-
mère, Pénélope ne se montre que voilée à ses poursui-
vants. S^ Clément d'Alexandrie dit que de son temps les
▼oiles étaient de couleur rouge. En Grèce et à Rome, les
nouvelles mariées ne sortaient sans voile que trois jours
après leurs noces. C'est encore aujourd'hui un usage que
les jeunes filles se parent d'un voile le jour de leur ma-
riage ; il en est de même de celles qui font leur pre-
mière Communion. Le voile est une partie indispensable
du vêtement des religieuses : prendre le voile est devenu
synonyme d'embrasser la vie religieuse, et la prise de
voile est la cérémonie qui a lien à cette occasion. Le Droit
canonique distingue : le voile de probation^ qu'on donne
aux novices, et qui est ordinairement blanc; le voile de
profession, donné aux religieuses quand elles font leurs
vœux; le voile de prélature, qu'on donne aux abbesses.
11 y avait encore autrefois le voile de consécration, que
rOvèque seul donnait aux vierges à certains jours; le
voile d^ordinaire, dont on ornait les diaconesses ; le voile
d'observation, réservé aux veuves.
VOILES, larges pièces de forte toile, destinées à trans-
mettre l'eiTort du vent à un b&timent, au moyen de le-
viers qui sont les m&ts. Elles prennent généralement les
noms des m&ts sur lesquels elles sont fixées, et ont des
dimensions et des qualités de toile différentes, selon la
place qu'elles occupent et l'usage auquel elles servent.
A mesure qu'elles sont plus élevées, elles ont moins de
force et de largeur ; en sorte que toute la voilure dé-
ployée d'un m&t présente une forme pyramidale. Les
voiles, suivant la place qu'elles occupent, sont dites
voiles d'avant et votles d'arrière : les premières, qu'on
nomme en masse fort d'avant, sont toutes celles qui ont
leur appui sur le beaupré et le m&t de misaine ; les
secondes, celles qui appuient sur le grand màt et le màt
d'artimon. On distingue encore les voiles d'après leur
forme. Les voiles carrées, généralement en usage sur les
Océans, sont attachées aux vergues, et sont dites hautes
ou basses voiles, selon qu'elles tiennent aux hautes ou
basses vergues. Les basses voiles ont à peu près la forme
d'un parallélogramme ; les huniers, les perroquets et les
cacatoès {V. ces mots) ont celle d'un trapèze. Lbs voiles
carrées peuvent se rapetisser au moyen des ris ( V. ce
mot). Les bonnettes (K. ce mot) sont les auxiliaires des
voiles carrées. Les focs {V, ce mot) sont des voiles en
pointe, de forme triangulaire, fixées à l'extrême avant
sur des étais du m&t de misaine, avec des bajs^ues ou an-
neaux mobiles qui font l'effet d'anneaux de rideau et ser-
vent à les hisser et à les amener. La voile d'artimon, à
l'extrême arrière, est un puissant auxiliaire du gouver-
nail. On nomme voiles d'etai des voiles de toile légère,
variant de forme selon la place qu'elles occupent, et qui,
placées su** les étais, entre les m&ts, viennent border le
pont ; elles y sont fixées, comme les focs, par des bagues
mobiles. X^es voiles de cape sont celles dont on se sert
dans les tempêtes : ce sont l'artimon, le foc d'artimon ,
le grand hunier (tous les ris pris), la misaine, et le petit
foc. La voUe de fortune est une grande voile carrée qui
tt'est pas fixée sur la vergue, mais qui s*y place provisoi-
rement par le moyen de trois poulies, dont deux aux
extrémités et une au milieu : elle sert pour le vent
arrière ou le grand largue, dans les goélettes et les cut-
ters. La voile livarde, en usage chez les Hollandais, est
une voile à peu près carrée, lacée au m&t par l'un de ses
côtés, et qui se déploie au moyen d'un espare fixé par
ses deux extrémités aux deux angles opposés : ce genre
de voile est aussi très-usité dans les petites embarca-
tions. On appelle voiles latines, parce qu'elles furent
d'abord en usage sur les galères du pape, des voiles trian-
gulaires, attachées à une vergue flexible par le côté de
leur hypoténuse, et par conséquent terminées en pointe
par le bas : on en voit beaucoup dans la Méditerranée.
La voile aurique est & quatre pointes : elle est lacée d'un
côté à son m&t, et enverguée sur une petite vergue qu'on
nomme corne. La voile de houari est une voile aurique
dont la vergue est tellement apic^uée qu'elle semble faire
la continuation du m&t. La voUe à bourcet est qua-
drangulaire; le point de drisse est au tiers de sa vergue,
ce qui lui fait donner aussi le nom de voile au tiers,
— Amener une voile, c'est la faire descendre le long du
m&t quand elle a été hissée ; la carguer, c'est la serrer
ou plier contre la vergue. V, Ferler, Déferler, Lar-
guer.
VOILIER, se dit d'un navire considéré par rapport &
sa marche sous voiles. On dit qu'il est bon ou mauxms
voilier.
VOIRIE (de voié)^ mot qui désigna originairement le
chemin sur lequel on jetait les immondices et vidanges,
et qui signifie, d'après nos anciennes Coutumes, voie,
chemin, carrière, sentier, ou rue commune. Dans l'an-
cienne Rome, les édiles eurent les premiers l'adminis-
tration de la Voirie; en France elle était autrefois un
moyen de fiscalité pour les seigneurs. Entendue comme
partie de l'administration publique, la Voirie a pour
objet les travaux des ponts et chaussées, la confection,
l'entretien, l'alignement, l'amélioration et la police de
toutes les voies publiques; elle tend i rendre les com-
munications promptes, faciles et sûres. Son organisation
est fort ancienne; car, dès que les hommes commencè-
rent & enclore leurs terrains, à construire des habita-
tions, ils durent faire des réserves aux besoins généraux
par la nécessité d'établir des voies de circulation dont ils
jouissaient tous: mais l'homme étant naturellement en-
vahisseur, il a fallu dea lois spéciales pour faire cesser
les empiétements et l'encombrement des chaussées pu-
bliques, qui sont une propriété commune hors du com-
merce, à laquelle personne ne peut toucher sans permis-
sion, une propriété imprescriptible et sur laquelle on ne
peut acquérir aucun droit, aucune servitude, quelle que
soit la durée de la possession. On distingue la grande
voirte et la petite votriê, La grande voirie, placée dans
les pouvoirs de l'administration , comprend : les routes
impériales et les routes départementales; les quais ei
rues qui, dans les villes et villages, font suite aux grandes
routes; les chemins de fer, avec leurs talus et levées:
les fleuves et rivières navigables ou flottables, avec leurs
chemins de halage ; les canaux, avec leurs francs-bord^ :
les ponts, bacs et bateaux publics; les ports maritime^
de commerce; les fossés et les plantations le long dé-
routes; enfin tout cp qui concerne les grandes communi-
cations par terre et par eau; les acquisitions de ter-
rains; l'extraction de matériaux ; la perception des droits
d'octroi et de péage; la police du roulage; la démolitior.
desb&timents menaçant ruine. D'après les lois des 14 oc-
tobre 1790, 29 floréal an x, et 18 juillet 1837, les préfets
dans les grandes villes, les maires ailleurs, accordent le>
permissions de b&tir, et donnent les alignements de
maisons, de clôture et de soutènement, pour construc-
tions, réparations, démolitions et saillies de b&timents
sur ou joignant la voie publique. Les dépenses concer-
nant la grande voirie sont & la charge de l'État, sauf les
contributions communales et individuelles. Ce sont les
Conseils de préfecture qui statuent, sauf recours au Con-
seil d'État, sur les contraventions en matière de grande
voirie, consistant en anticipations, dépôt de fumier, dé-
térioration des arbres, fossés et ouvrages d'art, contra-
ventions <jui ont été constatées par les maires, adjoints,
commissaires de police, ingénieurs, conducteurs, pi-
queurs , agents de la navigation , gardes champêtres et
gendarmes. Les propriétaires riverains des voies publi-
ques sont assujettis à différentes obligations , telles que :
subir toute expropriation pour cause d'utilité et moyen-
nant indemnité ; subir la luuiUe de leurs terrains i)our
l'extraction des matériaux nécessaires aux routes; planter
des arbres le long de ces routes; couper les bois, ô-uucs
VOI
1786
VOI
H broussailles qai les bordent; souffrir râcoulement des
eaux de la voie publique, quand elles débordent les fos-
ses. Une loi du 21 mai 1836 a divisé en deux classes les
chemins vicinaux ou propriétés communales, conduisant
d'un pays tu pays voisin, savoir s les chemins ordi-
naires, qui sont à la charge des communes, sauf Timpôt
de prestation ; et les chemins de grande communication,
placés sous Tautorité du préfet, et h la dépense desquels
e département contribue. Conformément à la loi du
8 juillet 1837, les chemins ruraux, appartenant égale-
ment aux communes, et qui ne servent habituellement
qu'aux riverains, pour l'accès des fontaines, abreuvoirs
ou pâturages, sont réglementés par les maires. L'admi-
nistration des ponts et chaussées est chargée de Texécu-
tion de ce qui concerne la grande voirie, et du règlement
de sa comptabilité. A Paris, où toutes les voies publiques
appartiennent h la grande voirie, le préfet de la Seine
s'occupe des travaux de communication par terre et par
la navigation, du pavage et des trottoirs, de la délimita-
tion des quartiers affectés à l'exploitation du gaz, de la
construction et de l'entretien des égouts, de la distribu-
tion des eaux, de la consolidation des anciennes carrières,
des constructions en général, de l'ouverture des voies
nouvelles, de l'inscription des rues, du blanchiment et
du numérotage des maisons. Il rappelle, ainsi que le
préfet de police, à l'exécution des lois ; il fait publier les
règlements, suspend les constructions dangereuses, gê-
nantes, ou contraires aux règles de l'art, et prend enfin
toutes mesures d'intérêt général et de sûreté publique.
La petite voirie, placée dans les pouvoirs municipaux
qui pratiquent la police de conservation, comprend les
communications dont l'utilité est purement communiUe.
Elle se divise en voirie vicinale, pour les chemins sans
habitations agglomérées, et, pour les autres voies, en
voirie urbaine, dont l'objet est l'établissement , la con-
servation et la police de ces voies publiques dans l'en-
ceinte des communes; elle surveille la confection et
l'entretien des chemins vicinaux, des rues, places, pro*
menades, quais, passages et impasses qui ne font partie
ni des routes, ni des chemins da grande communi ration.
Les préfets et les maires font vérifier par des agents^
voyers la solidité des constructions, la fouille des caves,
la conservation des lieux de sépulture, la clôture des
terrains pouvant servir de refuge aux malfaiteurs ou de
dépôt d'immondices, le nettoiement et l'éclairage, la sû-
reté et la liberté de circulation. Les contraventions aux
ordonnances concernant la petite voirie sont du ressort
des tribunaux de simple police, qui prononcent les peines
d'amende, et, s'il y a lieu, d'emprisonnement, édictées
par les articles 4C4, 471 et suivants du Code pénal, et
qui ordonnent, au besoin, la démolition de toute œuvre
irrégulièrement élevée, la suppression de toute saillie
non autorisée, ou l'exécution de tous travaux prescrits
dans un intérêt da salubrité.
Les décrets des 27 oct. 1808 et 24 décembre 1823 ont
fixé les droits de grande et de petite voirie pour la capi-
tale. 11 est établi que ce qui excède le nu du mur des
maisons forme une saillie que l'autorité municipale peut
accorder ou refuser, tolérer ou supprimer. Il est de prin-
cipe général qu'aucun propriétaire ne peut construire
ni réparer un bâtiment on une clôture donnant sur la
voie publique, sans avoir obtenu préalablement une au-
torisation écrite donnée, soit par le préfet s'il s'agit de
grande voirie, soit par le maire s'il s'agit de petite voirie.
Pour Paris, le décret du 10 oct. 1859 a réuni la grande
et la petite voirie dans les attributions du préfet de la
Seine. V, Isambert, Traité de la voirie urbaine, 1828-29,
3 vol. in-12; Fleurigeon, Code de la voirie, 5* édition,
revue par Ménestrier, 1833, in-8^ ; Gillon et Stourm ,
Code de la grande voirie, 1834, in-12; Daubenton, Code
de la voirie des villes, des bourgs et des villages, 1836,
in-8° ; Davenne, Recueil méthodique et raisonné des lois
et règlements sur la voirie, 1836, 2 vol. in-8^, et Traité
pratique de la voirie urbaine^ 1858, in-S^* ; Husson, Traité
de la législation des travaux publics et de Iw voirie en
France, 2« édit., 1850, 2 vol. in-8°; Herman, Traité pra-
tique de la voirie vicinale, 1854, in-8^ ; Gotelle, Des oii-
gnementset permissions de voirie urbaine, 1836, in-8<>;
Féraud-Giraud, Servitudes de voirie, 1850, 2 vol. \n^9^\
Martel , Manuel de la salubrité, de Véclairage et de la
petite voirie, 1859, in-12. T— y.
VOITURIÎ (du latin vectura, action de transporter),
véhicule à deux ou à quatre roues, destiné au transport
des personnes, des marchandises et des objets quel-
conques, et que traînent des chevaux ou des bétes de
somme. Il y a des voitures d'utilité et des voilures do
luxe ! la structure, la forme et l'ornement dos unes et
des autres ont varié à l'infini, selon les temps et les
lieux. Ainsi, les Romains ont eu 16 ou 17 espèces de voi-
tures, portant des noms différents : benna, carpentum,
carruca, cisium, covinus, essedum^ pilenttÊm, plaus-
trum, rheda, ihensa,etc. ( V. ces mots). Parmi les voitures
qui servent au transport des matières de toute sorte, on
peut citer la charrette, le tombereau, le liaquet, le ca-
mion, le chariot, le fourgon, la tapissière, etc.; parmi
celles qui servent au transport des personnes, le ca-
briolet, le cab, le tilbury, le phaéton, la berline^ le
coupé, le landau, la calèche, le char-à-bancs , Vaméri-
caine, la potache, l'omnibus, le fiacre, la diligence, etc.
( V, ces mots). Tous les essais que l'on a faits de voituret
mécaniques, marchant sans le secours des chevaux, de
voitures à air comprimé, de voitures à vapeur, n'ont pas
été assez heureux Jusqu'ici pour ^ue l'on puisse etpéret
Jamais d'obtenir des résultats vraiment utiles. Par exem-
Île, un ingénieur militaire, Gugnot, exécuta à Paris, eo
770, une voiture à vapeur qui devait rouler sur les
routes ordinaiœs; après quelques essais, elle fut re«
connue insuffisante. En 1804, un mécanicien américain,
Olivier Evans, parcourut les rues de Philadelphie dans
une nouvelle voiture à vapeur ; mais les parties délicates
du mécanisme ne résistaient pas au choc du pavé, et les
mouvements précis que chaque pièce exigeait devenaient
presque impossibles après un parcours de quelques kilo-
mètres. Plus tard, deux Anglais, Vivian et Trevithick,
prirent une patente pour des voitures à vapeur : ils ne
purent garantir les voyageurs de la fumée et de la cha-
leur produites par la chaudière. En 1862, les voitures et
les chevaux ont été soumis à une taxe, déterminée de la
manière suivante i
▼ OITDEB
CHBVAL
desello
' '"■' '
0
ou
à 4 roues.
à fi roues.
d*attcLii?e.
Paris .•
60 fr.
40 fr.
25 fr.
Communes autres que Pa-
ris ayant plus de 40.000
âmes de population. . . .
50
95
20
Comoiunes de 20,000 à
40,000 âmes
40
fiO
15
Communes de 8,001 A
80,000 âmes
fis
10
10
Communes de 8,000 âmes
et au-dessous.
10
5
5
Les ▼oitures et les chevaux employés en parde pour
le service du propriétaire ou de la famille, et en partie
pour le service de l'agriculture ou d'une profession quel-
conque donnant lieu à l'imposition d'une patente, ne
sont point passibles de la taxe. Ne donnent pas lieu au
payement de la taxe : 1<* les chevaux et les voitures pos-
sédés en conformité des règlements du service militaire
ou administratif, et par les ministres des différents cultes;
2° les Juments et étalons exclusivement consacrés à
la reproduction; 3<* les chevaux et voitures exclusive-
ment employés aux travaux de Tagriculture ou d'une
profession quelconque donnant lieu à l'application de la
patente. Il est attribué aux communes un dixième du
produit de l'impôt, déduction faite des cotes ou portions
de cotes dont le dégrèvement aura été accordé. B.
vorruBB (Lettre de). V, Lettre de vorrcHB.
VOITURE CELLOLAiRB, voituro k Compartimenta, dans
laquelle on transporte les prisonniers au lieu de leur
destination, sans qu'ils communiquent ensemble pen-
dant la route. Depuis 1837, elle a remplacé la chaîne des
forçats.
VOITURES PUBLIQUES. Tout individu qui veut mettre
en circulation une voiture publique doit préalablement la
faire examiner par l'autorité, et prendre, après autorisa-
tion, une licence, un laissez-passer, et une estampille;
celle-ci est apposée sur la voiture. Les entrepreneurs de
voitures publiques sont assujettis à des règlements qui
font loi entre eux et les autres citoyens. Ils payent un
impôt spécial, qui fait partie des contributions indirectes,
et qui est du dixième du prix payé pour le transport des
voyageurs et des marchandises : toutefois, la perception
détaillée de cet impôt peut être remplacée par un abon-
nement. Ils doivent tenir registre de l'argent, dos effets
et des paquets dont ils se chargent : ils sont responsables
de leur perte ou de leur avarie, à moins qu'ils ne proo-
\*mi que ces faits ont eu lieu par cas fortuit ou par foret
TOI
1787
VOL
mftjeure {Code Napoiéon, art. 178S-86). Ceux qui contre-
viennent aux ordonnances concernant la solidité et le
chargement des voitures, le nombre et la sûreté des
royagears, l'indication da nombre et du prix des places,
du nom du propriétaire, etc., sont punis d'une amende
de 6 & 10 fr. (Code pénai, art. 475). V. OrniiBos, Fjacsb,
Messagrribs, Roulage.
VOITURIN, en italien Veiturino, celui qui loue des
voitures attelées de deux chevaux et qui conduit lui*
même les voyageurs. Ces voitures sont des espèces de
berlines, k k places an moins, allant à petites Journées
et couchant chaque soir. Elles font des voyages de plu-
sieurs jours, par exemple, de Rome à Naples.
YOIVODE. F. Vatvodb, dans notre Di/otùmnairB de
Biographie et d'Histoire,
YOlX, on termes de Grammaire, flexion particulière
que prend le verbe selon que le sujet est représenté
comme agissant et comme faisant directement subir son
action à autrui, ou au contraire comme recevant, éprou-
vant, souffrant Taction d*autrui. Dans le 1*' cas, on dit
que le verbe est & la voix active: dans le 2* cas, quMI est
à la vota; passive, et, par abréviation, que le verbe est
actif ou passif. Les verbes qui expriment un simple état
ou une action qui reste tout entière dans le sujet sans
avoir besoin d*en sortir ne sont pas susceptibles de la
voix passive, et s'appellent verbes neutres* La langue
grecque ancienne reconnaissait entre la voix active et la
voix passive une voix intermédiaire qu*on appelait voix
moyenne : cette forme verbale, généralement semblable
à la voix passive, était plus souvent active quant au sens,
et en général répondait à ceux de nos verbes pronomi^
naux qui, formés de verbes actifs, sont suivis d'un com-
plément direct et ont pour complément indirect le pro-
nom qui les précède immédiatement, lequel, étant
implicitement exprimé dans la forme moyenne, n'est pas
rendu directement en grec. K. Actip^ Déponent, Motbn ,
Passif. P.
VOIX, ensemble des sons que l'homme peut fkire en-
tendre en chassant l'air de l'intérieur de ses poumons.
Les physiologistes ne sont pas d'accord sur le mécanisme
de la voix humaine, et le comparent les uns k un in-
strument à vent, les autres à un instrument à cordes. La
vota; pa/rlante et la voix chantante, si différentes entre
elles, sont cependant produites par les mêmes organes.
Relativement à l'acuité, une voix est gratw, moyewie ou
aigtië. Une benne voix est celle qui a de la pureté, du
timbre, de l'étendue, de la douceur et de la force tout à
la fois; une voix est mauvaise, quand elle est faible, voi-
lée, aigre, nasillarde, gutturale, etc. La voix fausse est
le résultat d'une conformation imparfaite des organes
vocaux, et non de la fausseté de 1 oreille : car on voit
journellement des individus incapables d'exécuter avec
justesse la gamme la plus simple, et cependant oui signa-
lent avec intelligence les aberrations de tonalité et pren-
nent plaisir à l'audition de la musique. La voix varie avec
l'âge et suivant les sexes. Faible et aigué dans l'enfance,
celle de l'homme change à l'âge de la puberté r alors a
lieu la mue, pendant laquelle la voix est rau(]ue, d'une
émission pénible, quelquefois impossible; puis la voix
%Q trouve avoir pris de la force et de la gravité, elle a
baissé d'une octave ou d'une octave et demie. II n'y a que
le castrat (V. ce mot) qui conserve sa voix première. La
voix des hommes est d'autant plus forte que leur larynx
est plus développé et la capacité de leur poitrine plus
grande. Chez la femme, le timbre vocal change beaucoup
moins que chei l'homme, et il conserve presque toujours
les caractères de l'enfance. Le timbre vocal peut être
modifié par les habitudes des individus : ainsi, ceux qui
se livrent à des professions bruyantes ou qui vivent au
milieu des champs, obligés de dominer en parlant des
bruits intenses ou de se faire entendre au loin, exercent
et développent davantage les organes de la voix. Le cli-
mat doit avoir de l'influence sur les organes vocaux : car
les peuples du Midi ont, en général, la voix plus belle et
plus sonore que les habitants des pays froids ; la voix est
aussi plus belle et plus aiguë dans les saisons cbaudes,
plus rauaue et plus grave pendant l'hiver; la Picardie
produit plut de voix de basse qu'aucune autre province
de France, le Languedoc plus de ténors, la Bourgogne et
la Franche-Comté plus de voix de femmes. La situation
de l'âme influe d'une façon marquée sur la voix, qui
diffère selon le sentiment qu'elle exprime, et c*est là ce
qui fait de la voix humaine le plus beau moyen d'exécu-
tion que l'art musical possède. On distingue, par rap-
port à la qualité, quatre espèces de voix : 1^ la voix
aiguè de femme, appelée soprano ou dessus; 2<* la
voix grave de femme, ou contralto; V la voix aignQ
d'homme, ou ténor; 4<* la voix grave d'homme, ou hasse
{V, ces mots). On reconnaît encore une voix intermé-
diaire chez les femmes, le meszo-soprano, et une autre
chez les hommes, le baryton ( V. ce mot). L'étendue de
toutes ces voix, réunies et mises en ordre, donne cina
octaves. Les voix aigués d'hommes sont naturellement,
et par l'effet d'une conformation physique différente,
plus graves d'une octave que les voix aigués de femmes;
de même, le contralto est à l'octave supérieure de la
basse. Les peuples du Midi aiment beaucoup les voix
aigufis, ceux des pays tempérés préfèrent les moyennes,
ceux du Nord semblent donner la préférence aux basses i
cela peut expliquer pourquoi, en général, les premiers
rôles d'hommes dans les opéras ont été remplis en Italie
par des soprani, en France par des ténors, en Allemagne
par des basses. La voix comprend deux séries de sons
très-distinctes, les sons ou la voix de poitrine, et la voix
de tête ou de faucet {V. ce mot); la liaison de ces deux
espèces de voix est une des grandes difficultés de l'art du
chant. B.
voix (Mise de). V. Mise de voix.
VOIX ANGéLIQOB. V. ANOéUQDB.
voix humainb, nom que les Italiens donnent au cor
anglais.
VOIX HDMAiNB (Jou do), uu dos jeux d'anche de l'orgue,
qui sert à imiter la voix humaine. Ce jeu, fait en étain,
et dont les tuyaux sont très-courts et n'ont pas de me-
sure fixe, a toute l'étendue du clavier auquel il corres-
pond. Il est construit comme le cromorne, & l'exception
de son ouverture, qui est à moitié couverte pour en
adoucir le son. Il sonne 4 l'unisson du huit^pieds ouvert.
Le jeu de voix humaine, qui était autrefois employé à
l'écho et à la pédale, n'est mis maintenant que dans le
grand orgue ou dans le positif. Il est rare d'en rencontrer
un bon t celui de l'orgue de Fribourg jouit d'une réputa-
tion méritée. F. C.
VOL, action '^e prendre furtivement ou par force la
chose d'autrul pour se l'approprier. Notre Code péna*
distingue le vol simple et le vol qualifié. Le vol simple
est un délit, puni correctionnellement d'un emprisonne-
ment d'un an à cinq ans, et d'une amende de 16 tr. à
500 fr. ; les juges ont la faculté d'ajouter l'interdiction
des droits civiques et civils et la surveillance de la haute
police pendant 5 à iO ans. Le vol qualifié est celui qui
est accompagné de circonstances aggpravantes ; tels sont :
le vol domestique, commis par des personnes qui sont
aux gages de celui qui a été volé; le vol avec effraction,
fait en brisant et forçant quelque clôture; le vol de grand
chemin, le vol de nuit, le vol de deniers publics. Les vols
qualifiés sont des crimes, dont connaît la Cour d'assises,
les peines édictées par la loi varient depuis les travaux
forcés à perpétuité jusqu'à la réclusion (V. le Code
pénal, art. 370-401). La soustraction, même frauduleuse,
entre époux ou parents et alliés en ligne directe n'est
qualifiée ni crime ni délit, et ne donne lieu qu'à des ré-
parations civiles. — Il existe dans l'Inde certaines fa-
milles où le vol est pour ainsi dire une profession t ceux
qui s'y livrent ont une étonnante adresse; pour com-
mettre leurs rapines, ils sont armés, nus et frottés d'huile,
de sorte qu'il est aussi dangereux de les arrêter que dif-
ficile de les retenir. Diodore de Sicile raconte que, dans
l'ancienne Egypte, ceux qui voulaient suivre la profes-
sion do voleur se faisaient inscrire chez le chef reconnu
des gens de cette espèce, et lui rapportaient tout le fruit
de leur industrie : ceux qui avaient été volés faisaient,
chez ce même chef, une déclaration écrite, contenant
l'indication des objets qu'ils réclamaient, etcelledu temps,
et du lieu où Ils leur avaient été enlevés ; par une sorte'
de transaction de l'ordre social avec les passions hu-
maines, on laissait, pour la restitution des objets, le quart
de leur valeur à la société des voleurs. On raconte en-
core que les jeunes Spartiates étaient encouragés au vol
comme moyen d'exercer leur adresse, et que, s'ils étaient
pris, on les punissait, non comme coupables d'un crime
ou ^élit, mais parce qu'ils avaient été malhabiles. Dans
le reste de la Grèce et ches les Romains, le fouet et
l'amende furent le châtiment du vol ordinaire : accom-
pagnï de violences, le vol entraînait, suivant les cas, le
bannissement, la condamnation aux mines, certaines mu-
tiladons corporelles, et même la mort. Chez les Ger-
mains, il n'était puni que d'une amende. Dans l'ancienne
France, les voleurs de grand chemin étaient condamnés
au supplice de la roue. D'après le Code pénal de 1791 et
la loi du 25 frimaire an viii, les peines contre le vol va-
riaient deouis 2 ans de fers jusqu'à la mort, i
VOL
1788
VOU
vol., en termes de Blason, deux ailes étendues comme
quand Toiseau vole. On appelait demi^vol une seule
aile. Le vol mis au cimier se nommait vol banneret,'
VOLANT (Jeu du), jeu dans lequel deux personnes
armées de raquettes se renvoient alternativement une pe-
tite boule de liège garnie de peau, et dans laquelle on a
planté do petites plumes qui ralentissent et régularisent
son mouvement.
VOLANTS, garnkures légères, unies, plissées ou tuyau-
'.ées, qu*on attache au pourtour des robes de femmes, et
dont on met un ou plusieurs rangs.
VOLE (Faire la). C'est, à certains Jeux de cartes, faire
seul toutes les levées.
VOLÉE, en termes d* Artillerie, décharge de plusieurs
pièces en même temps. On nomme encore volée d*un ca-
non la partie de la pièc« comprise entre les tourillons et
la bouche.
voLéE, pièce de bois de traverse qui s'attache au timon
d'une voiture et à laquelle les chevaux sont attelés.
VOLÉE, en termes d'Architecture, est synonyme de
rampe. Par volée d'un arc, on entend sa courbure, l'es-
pèce d'ascension qu'il opère.
VOLERIE, en termes de Fauconnerie, chasse qui se
fait avec des oiseaux de proie. On distingue : la haute
Valérie ou volerie du faucon sur le héron, les canards,
les grues ; et la basse volerie, celle du tiercelet sur la per-
drix, la pie, etc.
VOLET, fermeture de menuiserie placée au dedans du
châssis d'une croisée. On nomme volet de parement
celui qui est tout d'une pièce; volet brisé, celui qu'on
peut replier sur l'écoinçon. On a étendu le nom de volets
aux contrevents extérieurs. V, aussi Colombier.
VOLIGE, planche mince de bois blanc; — latte qu'on
emploie pour porter l'ardoise. •
VOLITION, acte de la volonté. Elle est à celle-ci ce que
l'elTet est à la cause. Locke définit la volition « un acte
de l'esprit exerçant avec connaissance l'empire qu'il sup-
pose avoir sur quelque partie de l'homme, pour l'appli-
quer à quelque action particulière ou pour l'en détour-
ner; » il ajoute que la volonté est la faculté de produire
cet acte. Celui-ci est en raison de la valeur des motifs et
de l'énergie de la volonté : faible, si le choix est dou-
teux; mais quand il est motivé par une conviction entière
et invariable, il se manifeste avec la même force et la
même énergie. C'est par erreur qu'on a confondu quel-
ounfois la volonté et la volition, R.
VOLONTÉ. Considérée dans sa manifestation , la vo-
lonté est le pouvoir de prendre une détermination ; dans
sa nature, c'est la liberté spontanée éclairée et conseillée
par l'intelligence. Vouloir, c'est se diriger soi-même au
lieu de se laisser diriger; c'est, à la place d'une détermi-
nation qui vient du dehors, en prendre une qui vient de
nous ; c'est user de nos facultés pour atteindre un but.
La volonté a dû s'éveiller en nous spontanément; il faut
que nous ayons voulu spontanément, pour savoir que
nous pouvons vouloir; mais il suffit d'un seul fait pour
nous l'apprendre à toujours, et pour que la conscience
nous atteste que, môme quand nous ne voulons pas, nous
pouvons toujours vouloir. La volonté se confond avec
l'existence et la causalité du mot ; aussi , comme dit Des-
cartes, elle est ce qu'il y a en nous de plus proprement
nôtre, ou plutôt elle est nous-même, et constitue pour
ainsi dire à elle seule la personne humaine. C'est par la
volonté que l'homme est réellement cause et responsable;
c'est ce qui la distingue de la sensibilité et de l'intelli-
gence, qui sont de leur nature fatales. C'est par suite de
cette différence (ju'on oppose la volition, qui est libre et
imputable, au désir qui est instinctif, spontané, non im-
putable en lui-même. L'homme a la volonté, pour qu'il
tende lui-même à son bien ; il en résulte qu'elle est en
rapport constant avec les autres facultés, dont elle subit
l'induence et sur lesquelles elle réagit d'une manière puis-
sante. Ce rapport l'a fait souvent confondre avec ce qui
n'e^t pas elle. Platon ne la distinguait pas du désir; Ma-
Icbranche eut le même tort ; les Cartésiens ne l'ont pas
toujours assez distinguée de l'entendement. Pour Con-
dillac et son écolo, la Volonté était la réunion de la sen-
sation agréable ou désagréable, du besoin, du malaise, de
l'inquiétude, mi désir, de la passion, de l'espérance, et du
phénomène spécial que l'espérance, jointe à la passion ,
détermine. La confusion est facile à éviter : les autres
f&cultés sont au moi , la volonté est le mot lui-même ;
c'est à elle seule qu'appartient, dans la variété des élé-
ments de notre nature, cette unité si manifestement pro-
clamée par la conscience. V, Debs, Tableau de l'activité
wUontaire, 1844. R.
VOLTE (du latin volutus; de volvere, tourner), en
termes d'Escrime, mouvement qu'on fait pour éviter les
coups de l'ennemi. Vol ter, c'est changer de place pour
éviter l'adversaire. ^- En général , faire volte-face, c'est
se retourner pour faire face à l'ennemi qui poursuit.
voLTE , en termes de Marine, action de se placer pour
livrer le combat.
voLTE, ancienne danse, originaire d'Italie, dans laquelle
le cavalier faisait tourner plusieurs fois sa dame, et ter-
minait en l'aidant à faire un bond en l'air. Elle était du
genre de la gaillarde ; l'air était écrit en mesure à 3/i.
VOLTIGEUR , mot qui , après avoir désigné l'individu
qui prati(^ue la voltige sur une corde ou sur un cheval,
a été appliqué à certains soldats d'infanterie. Le premier
consul Bonaparte décréta, en 1804, l'institution des com-
pagnies de voltigeurs; il les attacha d'abord à Tinfanterie
légère, et bientôt après à l'infanterie de bataille. Aujour-
d'hui , les compagnies de voltigeurs attachées à chaque
bataillon sont des compagnies d'élite, que l'on compose
d'hommes agiles .et bons tireurs, destinés à combattre en
tirailleurs. Ils occupent la queue du bataillon , et sont à
la gauche en bataille. Ils se distinguent à leurs épaulcitcs
et autres ornements, qui sont jaunes, et aux cors de
chasse brodés en jaune sur le collet et les pans de leiin
habits. — Depuis 1822, il y a en Corse un bataillon de
voltigeurs corses^ qui sert d'auxiliaire à la gendarmerie.
VOLUCRAIRES, compositions du moyen &ge, écrites
ordinairement en vers, et contenant des descriptions
d'oiseaux, ainsi que de leurs mœurs, avec des réflexions
rappelant aux fidèles quelques vérités morales ou reli-
^euses. Les Volucraires font presque toujours partie dis
Bestiaires {V, ce mot), V. Hippeau, le Bestiaire divin de
Guillaume, clerc de Normandie, Introduction, Caea,
1852, in-8». C. D— y.
VOLUME, en latin volumen (de voluere, rouler, tour-
ner), nom que les Romains donnaient à leurs livres,
composés de plusieurs feuilles collées bout à bout et rou-
lées autour d'un b&ton. De là leur expression evolvetr
librum ( dérouler un livre ), équivalant à celle de lire un
livre, parce que pour le lire il fallait le dérouler. Pour
nous, le mot volume désigne tout livre relié ou broché,
considéré surtout par rapport à son format : on distingue
des volumes in-folio, in-quarto, in-octavo, in-douze, etc.
VOLUPTUAIRË , en termes de Droit, se dit de toute
dépense d'agrément, de luxe ou de fantaisie. Le vendeur
de mauvaise foi doit rembourser à l'acquéreur les dé-
penses même voluptucUres qu'il aurait faites {Code Na^
poléon, art. 1635).
VOLUTE , enroulement en spirale qu'on voit aux cha-
piteaux ionique, corinthien, et composite ( V, les fig. au
mot Arc, les colonnes de la fig. Arc en déchturge, p. 194,
et aux mots Composite et Corinthien). Il y a quatre vo-
lutes au chapiteau ionique ancien, et huit au moderne;
il y en a seize au chapiteau corinthien, dont huit angu-
laires, et huit plus petites qu'on appelle hélices; il y en
a huit au chapiteau composite. Le centre de l'enroule-
ment, ordinairement rempli par un fleuron ou rosette,
s'appelle œil de la volute, et sa cannelure se nomme ca-
nal, Vitruve dit que les volutes représentent la coiiïure
des femmes et les boucles de leurs cheveux ; d'autres les
croient imitées de l'écorce roulée du bouleau, ou de la
corne du bélier. On met aussi des volute comme orne-
ments aux modillons et aux consoles.
VOMITOIRES. ) V, ces mots dans notre Dictionnairk
VORORT. S de Biographie et d Histoire.
VOTE (du latin votum ), se dit tout à la fois de l'acto
par lequel un citoyen exerce le droit de suffrage, et du
vœu exprimé par cet acte. On vote soit au scnUin^ soit
par assis et levé. Dans l'ancienne Franco, on appelait
vote par ordre une manière de voter dans les États-Gé-
néraux, laquelle consistait , pour chacun des trois ordres.,
noblesse, clergé, tiers-état, à voter isolément comme
corps, et non par tête : c'est ainsi que, chez les Romains,
on votait par curies, ou par tribus, ou par centuries; on
exprimait le vote du groupe, et non les votes individuels.
Sous la Restauration, on nomma double vote le droit
qu'eurent les électeurs les plus fort imposés de voter
deux fois dans la même élection , la première fois avec
les autres électeurs dans le collège d'arrondissement, la
seconde dans le collège départemental où eux seuls étaient
admis. V, Bulletin, Élection, Scrutin.
VOTIFS (Boucliers, — Tableaux). V. Bouclier « El-
VOTO.
VOUSSOIR, en termes d'Architecture, chacune des
pierres disposées pour former une voûte; c'est la même
chose qu'un claveau (F. ce mot). Les voussoirs sout
you
1789
VOY
taillés en forme de coin tronqué par le bas ; celui du mi-
lieu reçoit le nom de clef de voûte (F. Clef). La Hire
a démontré le premier, en 1695, que le calcul, et non
le hasard, doit régler la forme et le poids de chaque
voussoir.
VOUSSURE, en termes d'Architecture, portion de
voûte qui sert d*empattement à un plafond, et qui en fait
la liaison avec la corniche de la pièce ; — toute courbure
en voûte (^ui est moindre qu'une demi-circonférence; —
Intrados biais et décoré de figures des grands arcs qui
couronnent les portes d'église, ou encore chacun des com-
partiments longitudinaux de cet intrados.
VOUTE (autrefois votUte; de l'italien volta, dérivé du
latin volutus, participe de iX)lvere, tourner, rouler), con-
struction formée par un assemblage de voussoirs {V. ce
mot)^ et destinée à recouvrir un espace vide compris
entre deux murs perpendiculaires qu'on nomme pieds-
droits de la voûte. Le poids des voussoirs, ainsi que celui
des masses soutenues par la voûte, se porte sur les pieds-
droits, qui doivent toujours être très-solides, parce qu'ils
ont à résister tout à la fois à un effort vertical et k un
effort horizontal ou de poussée. Les voussoirs sont en
nombre impair : le plus élevé, qu'on place le dernier,
s'appelle clef; les adjacents sont la contre-clef: ceux qui
posent immédiatement sur les pieds-droits, à la nais-
sance de la voûte, se nomment sommiers» Vintrados et
Vextrados sont la surface intérieure et la surface supé-
rieure de la voûte. Les reins de la voûte sont le dessus
de la voûte aux deux côtés de la clef, c.-à-d. l'espace
compris entre un plan vertical qui s'élèverait de la
naissance de l'extrados de la voûte , et un plan horizon-
tal tangent au sommet de cet extrados. L'épaisseur des
voussoirs est ordinairement déterminée par les dimen-
sions qu'offrent les pierres à employer ; ils comprennent
chacun une partie é^e de l'intrados; leurs joints doi-
vent être normaux à la courbe de ce dernier. En principe
général, il faut éviter que les voûtes exercent sur leurs
appuis une poussée trop considérable : on diminue la
poussée en augmentant le nombre des voussoirs, en di-
minuant l'épaisseur de la voûte de la naissance au som-
met , et en taillant l'extrados des voussoirs suivant des
plans horizontaux. La construction d'une voûte se fait sur
un cintre [V. ce mot).
Les voûtes affectent un grand nombre de formes. Dans
une voûte à plein cintre ou en berceau, l'arc est une por-
tion de cercle de 180 degrés, c.-&-d. un demi-cercle par-
fait; le centre est dans le plan de la naissance de la
courbe : c'est le genre de voûte qui produit le moins à,e
poussée oblique, parce que les parties les plus basses de
l'arc tombent perpendiculairement sur les appuis. — Les
voûtes surbaissées sont celles dont la hauteur est moindre
que récartement des deux points d'appui. Tantôt elles
sont formées par une portion plus ou moins considérable
du demi-cercle, et elles présentent alors, parmi toutes
celles de cette espèce, le moins de difficultés d'exécution
H Taspect le plus satisfaisant; tantôt elles sont établies,
•oit suivant ZM ellipse, en prenantl e grand axe pour
largeur et la moitié du petit axe pour hauteur, soit sui-
vant une courbe formée par plusieurs portions de cercle.
Dans ce dernier cas , elles sont dites en anse de panier :
il y en a & 3, à 5, à 7 ou à 9 centres, suivant le nombre
d'arcs de cercle que leur section présente (F. Arc,
p. i9i, col. 1), et leurs arcs extrêmes se raccordent tou-
jours avec les surfaces des pieds-droits. Quand une voûte
surbaissée a un rayon si éloigné qu'on sent à peine la
courbure, on la nomme voûte plate, — Les voûtes sur-
haussées ou surmontées sont celles qui ont une hauteur
plus grande que l'écartement des deux pieds-droits, en
d'autres termes, qui ont plus d'élévation que le demi-
cercle. C'est en elles que la poussée est le plus faible.
Elles peuvent être établies, soit suivant une ellipse, en
prenant le petit axe pour largeur et la moitié du grand
axe pour hauteur, soit suivant plusieurs arcs de cercle
qui se raccordent , soit enfln en prenant deux arcs de
cercle qui se croisent au sommet. Cette dernière disposi-
tion donne la voûte en ogive, qui est le caractère distinc-
tif de l'architecture ogivale. — La voûte en arc de cloUre
est formée par l'intersection de deux voûtes cylindriques,
de manière que celles-ci produisent, par leur rencontre,
des angles dièdres rentrants. Les pierres de ces angles
étendent leurs bras dans les deux voûtes, et portent à
leur partie supérieure une échancrure destinée à recevoir
la pierre supérieure. La clef est carrée en plan, et porte
en dessous le raccordement ou plutôt la réunion des
quatre arêtes rentrantes. Lorsque les voûtes sont biaises,
I appareil se modifie suivant le biais, qui porte eatière-
ment sur les pierres d'arêtes. — La voûte d* arête c^t
constituée, comme la précédente, pai» rintersection df
deux voûtes cylindriques, avec cette différence que les
angles dièdres de rencontre sont saillants au lieu d'être
rentrants, et forment quatre arêtes vives qui viennent se
réunir à la clef. L'appareil diffère de celui de la voûte en
arc de cloître, en ce que les pierres d'angles portent leur
échancrure en dessous au lieu de l'avoir dans la partie
supérieure, et que la clef de voûte est à quatre bras au
lieu d'être carrée. — La voûte annulaire est celle qui
porte sur deux murs circulaires concentriques. Une des
variétés de ce genre est la voûté en vis ou en limaçon^
dite encore voûte hélicoïdale, dont l'axe s'élève suivant,
une suite de spires. — On nomme voûte en cul-de-four
une voûte sphérique ou sphéroïde , surhaussée ou sur-
baissée, élevée sur un plan circulaire. Les voûtes de ce
genre sont les premières qui apparaissent dans l'archi-
tecture romane; elles couvrent les absides ( V. ce mot).
Quand elles ont peu d'élévation de cintre, on les appelle
voûtes en calotte. — La voûte en coquille a la forme plus
ou moins régulière d'une demi-coupole. Elle sert à cou-
vrir une niche. L'appareil de cette voûte se trace par des
divisions également espacées sur la façade verticale qui
est un arc de cercle, et venant aboutir à un point central
inférieur, de manière à former un éventail courbe ; les
claveaux, étroits en bas, vont en grandissant à mesure
qu'ils s'élèvent. A l'époque de la Renaissance, on a sou-
vent décoré les voûtes en coauille, soit avec des caissons,
soit avec des ornements en demi-relief. — Une voûte co-
nique est celle qui est circulaire en plan , et angulaire
en coupe; elle est formée d'un cône creux. Si son axe
est horizontal au lieu d'être vertical, on la nomme voûte
en canonnière.
Les anciens Égyptiens, selon l'opinion générale, n'au-
raient pas connu l'art de construire les voûtes : cependant
la partie supérieure des murs, dans quelques construc-
tions de Médinet-Abou, prouve que les plafonds, aujour-
d'hui tombés, devaient être voûtés en pierre. Strabon
parle des voûtes des monuments de Babylone. On ne peut
pas dire que les Grecs aient ignoré la voûte, puisque l'on
trouve des voûtes dans plusieurs monuments d'un âge
reculé, par exemple, à Orchomène et à Mycènes : mais
il est positif qu'ils n'en firent point usage dans les beaux
temps de leur architecture, au moins d'une manière gé-
nérale; ils préféraient les plates-bandes. C'est, au con-
traire, l'emploi de l'arc et de la voûte qui distingue l'archi-
tecture romaine : mais, des différentes voûtes que nous
connaissons, la seule qu'on y admit fut le plein cintre.
Les Romains surent alléger la maçonnerie des voûtes en
y employant de petits vases ou tubes de terre cuite é vi-
dés et enfilés verticalement les uns dans les autres : ce
genre de construction se retrouve plus tard dans la cou-
pole de l'église S^-Vital à Ravenne, et il a été renouvelé
chez les modernes par l'architecte Louis, quand il bâtit
le Théâtre-Français à Paris. n.
VOYAGE DU JEUNE ANACHARSIS EN GRÈCE,
Voyage fictif coniposé par J.-J. Barthélémy pour servir
de cadre à ai* tableau de la Grèce ancienne dans le mi-
lieu du iv^ siècle avant l'ère vulgaire ; il commence quel-
ques années avant la naissance d'Alexandre le Grand, et
finit à l'époque où Philippe de Macédoine a dompté toutes
les petites republiques grecques. L'auteur suppose qu'un
jeune Scythe de nation, descendant du philosophe Ana-
charsis, curieux de connaître les Grecs et de s'instruire
dans leur civilisation, vient se fixer à Athènes, d'où il
fait plusieurs voyages dans les provinces voisines, obser-
vant partout les mœurs et les usages des peuples, assis-
tant à leurs fêtes, étudiant la nature de leurs gouverne-
ments ; quelquefois consacrant ses loisirs à des recherches
sur les progrès de l'esprit humain; d'autres fois, conver-
sant avec les grands hommes qui florissaient alors, tels
qu'Épaminondas, Phocion, Xénophon, Platon, Aristote,
Démosthène, etc. Dès qu'il voit la Grèce asservie par Phi-
lippe, il retourne en Scythie, après une absence de
22 ans environ, et rédige son voyage.
Cette composition, très-ingénieuse, est en même temps
une grande œuvre d'érudition, car Barthélémy en a puise
les faits et jusqu'aux moindres détails dans tous les au-
teurs de l'antiauité grecque et latine, et ses autorités sont
citées au bas des pages de son texte; Au point de vue de
la science, de l'étendue et de l'exactitude des recher-
ches, l'ouvrage ne laisse rien à désirer, surtout pour
l'époque où il fut fait; mais le plan et l'exécution ont
essuyé d'assez graves critiques : on a reproché au plan
de n'être qu'une fiction, où sont introduits quelques
personnages imaginaires qui n'ont et ne pouvaient avoir
VOY
1790
VUL
ftacuQ intérêt à côté des personnages historiques mis
en scène; la donnée acceptée, l*auteur n*cn a pas tiré
tous les avantages qu*eiie devait produire. « Ce plan,
dit M. Viliemain, ce n^est pas une analyse, ce n*est pas
un récit , c'est Timitation de la vie, la traduction litté-
rale, pittoresque de tout ce que le spectacle de la Grèce
aurait donné d'émotions et d'idées & un contemporain.
Barthélémy s'était donc imposé à lui-même cette vivacité
de coloris, ce naturel dans les détails, cette expression
du moment dont je lui reproche d'avoir manqué. » Avant
M. Yillemain, on avait déjà remarcfué que dans VAna-
char sis la peinture, soit des scènes vivantes, soit des sites
ou des monuments, bien qu'exacte, manquait d'anima-
tion, de vérité, de couleur locale; c'était sans doute un
peu le défaut du temps , qui ne comprenait rien & l'Anti-
3uité, et que l'auteur crut lui fsûre coûter en Taccommo-
ant en contemporaine; c'était aussi, il faut bien le dire,
la faute du tempérament de Barthélémy s il n'avait point
visité la Grèce, où l'amour de son sujet aurait dû le con-
duire, et son imagination était trop calme pour suppléer
par une intuition de génie à tout ce que la vue mdme
des lieux lui aurait pu inspirer. Enfin, Barthélémy com-
mença son ouvrage a 47 ans et le finit à 72 ans, et peut-
être faut-il chercher encore dans ces dates l'origine de
plusieurs des défauts dont nous venons de parler* Malgré
tout , le Voyaçê d*Anacharsis n'en reste pas moins un livre
digne de la plus haute estime : « On ne pourra facilement
l'égaler, et moins encore le faire oublier,» dit encore M. Yil-
lemain, avec autant de justesse que de justice. Cet ouvrage
d'une placide beauté parut en 1788, Paris, A vol. in-i**
et atlas; il fut accueilli avec une sorte d'enthousiasme;
pendant un demi-siècle il a été très-souvent réimprimé,
et on l'a traduit à l'étranger. S'il est aujourd'hui moins
))opuIure, il garde et gardera toujours un haut rang
parmi les meilleures œuvres françaises d'érudition solide
et de littérature élégante et sérieuse. K. M. Yillemain ,
Tableau de la littérature au xvin' siècle, 42* leçon . G. D-y.
voYAGB no pàLBRiiv (Le), célèbre ouvrage anglais, com-
posé par Bunyan. C'est une sorte d'épopée en prose mys-
tique, une allégorie de la vie chrétienne, qui a eu en
Angleterre un succès incroyable. Nulle part ailleurs la
langue anglaise n'a plus de précision, de vigueur et de
richesse. Le Voyage du Pèlerin est lu avec édification
par les ouvriers et les paysans eux-mômea< On ignore la
date de la i'* édition de ce livre ; la 2* parut en 1678. 11
en existe une traduction française sous ce titre t h Pèle"
rinage des chrétiens à la Cité céleste, décrit soui la «i-
milUude cTtm songe ^ Paris, 1831, in-12.
VOYAGE SENTiMEfiTAL (Le), ouvrsge OÙ l'auteuf anglais
Sterne raconte ce qui lui arriva, vers U fin de sa vio,
dans un voyage en France, et oui fut publié en 1707. Le
livre est naturellement épisodlque, et composé d'une
suite de scènes, de petits tableaux détachés i on y re-
marque une exécution savante, une rare perfection de
détails. En rendant compte de ses sentiments et de se^
pensées. Sterne se montre observateur profond, subtil
môme et un peu trop enclin à moraliser : des élans de
vive sensibilité donnent un ^nd charme au Voyage
sentimental, mais parfois aussi l'on est bien près de Taf-
féterie et du sentimentalisme précieux. Au patIuHique se
mêle le plaisant, aux traits touchants les saillies de
gaieté ; Sterne pousse le goût de l'originalité jusqu'au
paradoxe, l'enjouementjusqu'à la bouffonnerie. Son style
ne vise ni à la pureté ni à l'harmonie; il a tout à la lois
des néologismes et des locutions archaïques : mais il est
flexible, animé, pittoresque, et rencontre au besoin des
expressions d'une délicatesse peu commune.
Voyages. On distingue les voyages terrestres et les
voyages maritimes, et, parmi ces derniers, ]eB voyages
de cabotage ( V. ce mot) et les voyages de long oours^
entrepris généralement dans un intérêt de commerce*
Les voyages de circumnavigation ou voyages autour du
monde ont pour but de faire des découvortes, des explo--
ratiofis de régions peu connues. Les voyages ont toujours
été considérés comme le complément de toute bonne
éducation : dès l'Antiquité, on se formait en voyageant,
et ce n'était qu'au retour de longues excursions qu'on
devenait législateur ou philosophe. Lycnrgue, Pythagore,
Selon, Hérodote voyagèrent dans les paysétran|^, pour
en étudier les institutions, les mœurs et riiistoirr. Ln
relations de voyages sont pour le géographe ce que les
Mémoires sont pour rhi»torien : elles lui fournissent une
partie des matériaux qui lui sont nécessaires pour U
composition de ses ouvrages. C'est ainsi que les Périplet
(K. ce mot) des Anciens nous donnent des renseigne-
ments précieux ; mais on ne saurait ranger parmi les re-
lations de voyages les Itinéraires {V, ce mot) parvenus
jusqu'à nous. Si l'on excepte les récits de pèlerinages en
Terre Sainte, le moyen &ge chrétien offre peu de rela-
tions intéressantes; il en existe, au contraire, un certain
nombre dans les littératures arabe et juive. A l'approclic
des temps modernes, le sénie du commerce provoqua,
notamment chez les Vénitiens, les recherches et les des-
criptions utiles 1 puis les découvertes maritimes du w* u
du XVI* siècle, coïncidant avec l'invention de l'imprime-
rie, multiplièrent les entreprises d'exploration. Des lore,
la littérature de voyages est devenue très-féconde. On
peut consulter Vffisloire générale des Voyages par l'abbé
Prévost, 1746, 20 vol. in-4<*, et la Bibliothèque univer-
selle des voyages par Albert Montémont , 1833-36| 44) vol.
in-8«.
VOYAGES D« 6ULLIVEB. V. GdlUVBH.
YOYELLES (du latin vocalis, sonore), lettres qui OM
par elles-mêmes un son, par opposition aux consonnes ,
qui ne sonnent qu'avec le concours d'une voyelle. U y s
en français 5 voyelles, a, e, i, o, u; 6 en comptant y,
3ui fait double emploi avec i, sinon comme caractère,
u moins comme son. Aux voyelles proprement dites
s'ajoutent d'autres voyelles composées de deux ou de
plusieurs lettres, mais formant un son simple, comme
au, eau f ai, aie,- eu, ou. Enfin il y a les voyelles dites
diphthonçues, parce que, bien que prononcées en une
seule émission de voix^ elles laissent entendre un double
son, comme «t dans lui, ié dans amitié, ieu dans lieu, etc.
Les voyelles ce, os, étaient propres aux Latins, mats ont
eu probablement une origine grecque. Les voyelles grec-
ques se divisaient en propres et impropres ; celle»<i
comprenaient tout ce qui est appelé, daaa l'enseign»*
ment de cette langue morte, dipnthongoe. — La langue
française a une espèce de voyelles qui lui est particu-
lière : ce sont les voyelles nasales, formées de la combi-
naison des voyelles simples avec la consonne n ou Is
consonne m, comme an, on, en, in, un, ym (thym); ^m,
aim, ein, etc. Vt NasAUs, BaiVËt, Loiioois« Sm-
YOYELLBS. P.
YOYËR0 (Agants), fonctionnaires obafgéa de l'entve»
tien et de fa rectification des chemins vicinaux. Dans
cfaaaue département , un agent voyer en chef dirige le
service sous l'autorité immédiate du préfet, et centnNse
au chef-lieu toutes les opérations ; U a sous tes oré«es
les agents voyers d'arrondissement^ qui sont préposés
aux travaux des chemins de grande communication, et
les agents voyers cantonaux, chargés de surveiller les
chemins de petite communioAtlen« Le traitement des
agents voyers est fixe, et déterminé par les Conseils ^
néraux*
Y (JE, en termes d'Architecture, toute ouverture pra-
tiquée à un bâtiment pour y faire pénétrer le Joui ou
faciliter l'aspect des objets extérieurs. Une vue peut être
ou droite, ou de côté, ou d'en haut* ou d^en bas* fills
est dite faitière, quand çlle est prisé vers le faite d'un
comble; d^roM, lorsqu'elle est iàite au-dœsns d'ans
corniche, d'une plinthe, ou dans quelque ornementi -*
Du droit de se clore résulte pour le propriétaire le droii
d'empécber autrui d'avoir des vues sur son liéritagri t
aussi la loi a-t-elle déterminé d'une manière précise la
droits et devoirs dos voisins en te qtii concerne lee vum
et jours. V. Mitoybnnsté, Servitode»
vtiB (Seconde), faculté que ceftMds individat préten-
dent posséder de voir ce qui existe ou ce qui tfrive à de
grandes distances. Une sorte de seconde vue est attri-
buée à Socrate par Platon dans son Théagès, et à Apol-
lonius de Tyane par Philostrate. Les phénomènes de ce
genre, dotit rien fie démontre la réalité, sont nngés
dans la même classe que ceux dd aomnambaltaifie ma-
gnétique*
YUl/GATPi. V, ce mot dans notre Dktionnairê de Bio»
graphie et d'flisloireé
WAL
1791
WAL
w
\V, lettre particulière aux idiomes germaniques, et qui
s'est introduile assez tard dans Talphabet des langues
néolatines. Les Allemands la nomment vé, les Anglais
doubla U, et, quand on l'emploie en Avançais & la trans-
cription de mots d'origine étrangère , on l'appelle dour
ble V. Selon MabiUon, les deux V furent séparés jusqu'au
xu* siècle, époque où on les réunit en un seul caractère s
cependant le W se trouve dans un diplôme de Clovis III,
à la fin du vit* siècle. En allemand, le W se prononce
comme notre V simple, lequel reçoit le son de notre F;
il ne parait pas néanmoins qu'il en ait été toujours ainsi,
car l'U de certains mots (prononcé ou) a remplacé le W
qui s'y trouvait anciennement : par exemple, frau
(femme) s'est écrit primitivement frawê. En anglais, le
W au commencement des mots s'articule ou; à la fin ,
tantôt il est muet, comme dans roto, lou>, etc., tantôt
il indique une valeur exceptionnelle dans la voyelle qui
le précède, comme dans law, new, etc. Nous avons con-
servé au W la valeur ou dans les mots venus de l'an-
glais : ainsi, whist se prononce ouist; cependant wagon
se prononce et commence déjà à s'écrire vagon. Dans le
passage d'une langue à une autre, 11 y a eu souvent per-
mutation du W et du G : guerre vient de wehr, ga-
rantie de warrant ; les Gaulois et leurs descendants
sont appelés Wallons par les Flamands ; notre nom
propre de Gauthier répond à l'anglais et à l'allemand
IValter, Guillaume à l'anglais William et à l'allemand
Wilhelm; le nom que nous donnons au pays de Galles
vient de celui de Wales, qui lui est donné par les An-
glais. Le W n'existe pas dans les alphabets slaves ;
quand on ^£rit les noms rosses Souwarow, Nowogorod,
Oczakow, Iwan, etc., on emprunte cette orthographe &
des transcriptions allemandes. — Le W a été la marque
de fabrique des monnaies firappées à Lille.
WAGON, mot anglais qui signifie chariot, et que fé-
blissement des chemins de fer a fait passer dans notre
langue. Il désigne les voitures de transport sur les voies
ferrées
WAGUEMESTRE. V. Vagcbmestrï.
WAKASH (Langue), on NotrrxA, une des langues indi-
gènes de l'Amérique du Nord, parlée dans le Nouveau-
Hanovre, aux lies du roi Georges et Quadra-Vancouver.
Elle abonde en aspirations, en consonnes difiBciles à pro-
noncer, en terminaisons sourdes. C'est une des plus
dures que l'on connaisse. Beaucoup de ses mots finissent
en th et tx, comme dans la langue aztèque.
WAKF ou WAKOUF^ nom qu'on donne en Turquie
aux biens des mosquées et des fondations pieuses. Ces
biens sont exempts d'impôts, à l'abri de toute confisca-
tion, et insaisissables.
WAKIL. F. Vakil.
WALHALLA. V, ce mot dans notre Dtctionnatre de
Biographie et d'Histoire.
WALI, nom que portent tes goavemeors de districts
chez les Arabes.
WALLON (Idiome), idiome parié par les populations
des provinces belges de Hainaut, de Namur, de Liège ,
fie Luxembourg, et dans une partie du Brabant. C'est un
vieux didecte roman qui est demeuré sans culture. 11 se
distingue du français par une quantité plus grande de
mots latins ou à tournure latine qui s'y sont conservés.
On y trouve aussi des mots empruntés au flamand et h
l'ancien haut-allemand. Raepsaet {Analyse des droits po-
litiques et civils des Belges et des Gaulois, Gand, 48*25)
a soutenu que le wallon était un débris de la langue cel-
tique : il a été réfuté par Schayes {Nouvelles Archives
historiques des Pays-Bas, avril 1830). Le nom de wallon,
qui dérive du vieux mot allemand whale (étranger), a été
synonyme de gaïUois. V, Grandgagnage, Dictionnaire
étymologique de la langue wallonne, 1845-50, 2 vol.
in-S^*; Hubert^ Dictionnaire wallon-français, i95%, in-12;
Remach, Dictionnaire wallon -français, Liège, 1857,
2 vol. in-8».
WALNICA, chalumeau en usage parmi les paysans de
la Hussie, et qui consiste en une vessie de bceoi où l'on
ptaci deux ou trois roseaux.
WAL8E. V. VAI.SF.
WALTHER D'AQUITAINE, ancien poème latin dans le-
quel sont racontées les aventures d'un personnage qui
joue aussi un rôle important dans les Niebelungen {V.ce
mot)» En voici le sujet : Attila, roi des Huns, attaque les
Franks, qui obtiennent la paix en payant tribut et en
donnant pour otage Hagen, fils d'un do leurs chefs, puis
les Burgondes, dont le roi livre également sa fille Hilde-
gonde, et enfin le roi des Aquitains, qui donne son fils
Walther. Il fait élever les trois enfants comme s'ils
étaient les siens. Quelques années plus tard, il confie à
Hagen et à Walther le commandement de ses armées ;
Hildegonde est chargée de la garde des trésors de la
reine. Le roi des Franks ayant rompu le ti^té, Hagen
s'enfuit du camp d'Attila, et retourne dans son pays.
Bientôt Walther s'échappe à son tour avec Hildegonde,
qui lui avait été fiancée autrefois par son père : après
quarante jours de marche, ils traversent le Rhin, et en-
trent dans ' ; pays des Franks. Arrivé sur l'un des som-
mets des Vosges, Walther s'endort pour la première fols
depuis sa fuite ; Hildegonde veille pendant qu'il repose.
Elle voit briller des lances, et réveille son fiancé, qui
examine les ennemis et reconnaît Hagen parmi eux :
de son côté, Hagen a reconnu Walther; il engage le roi
des Franks à ne pas attaquer un guerrier si redoutable,
et déclare qu'il se tiendra à l'écart pendant la lutte. Le
roi fait assaillir Walther par onze de ses plus vaillants
guerriers, <^ui succombent tous sous les coups de l'Aqui*
tain. Le roi conjure alors Hagen de le secouqr; celui-ci
finit par céder; ils se mettent en embuscade, et fondent
sur Walther au moment où, quittant la montagne, il
s'engage dans la plaine. Le combat, commencé à la
deuxième heure du Jour, se prolonge Jusqu'à la neu-
vième; les trois guerriers se font de terribles blessures ;
enfin Hagen et Walther se réconcilient, et ce dernier
retourne en Aquitaine, où, dit le poète, il régna durant
trente ans fort aimé de ses peuples. — Là s'arrête le
poème, qui a moins de 1,500 vers. Le premier manuscrit
en fut trouvé dans un monastère de Bavière au milieu
du siècle dernier, et publié par Jonathan Fischer, Leip-
zig, 1780, in-4^. Deux ans après, Frédéric Mol ter décou-
vrit un second manuscrit dans la bibliothèque de Carls-
ruhe, et en publia une mauvaise traduction en vers
allemands. Enfin, au commencement de notre siècle, on
trouva deux nouveaux manuscrits, l'un à Bruxelles,
l'autre à Paris, avec une dédicace contenant le nom de
l'auteur, un certain Gérald, qu'on suppose, d'après cette
dédicace, avoir été moine à l'abbaye de Fleury ou Saint'
BcnoIt-sur-Loire. Le poème est dédié à l'évoque Archam-
bauld, frère de l'uuteur : cette indication ne peut servir
à déterminer avec certitude la date de l'œuvre, parce que
nous n'avons pas la liste complète des évoques de la
Gaule fhmque. Fischer pencherait pour le vi* siècle,
mais le style parait appartenir plutôt à l'époque de Char-
lemagne. L'auteur dit qu'il a mis en vers une vieille
histoire populaire, et comme les aventures de Walther
sont aussi racontées dans les Niebelungen, les Alle-
mands ont voulu en faire une l^ende d'origine germa-
nique. Mais, outre que le poème latin est bâucoup plus
ancien que les Niebelungen, le caractère même de wal-
ther prouve que cette tradition n'est point germanique :
Walther est ennemi des Franks, il les méprise, il les
considère comme des barbares et des brigands, il leur
est toujours supérieur par la force et le courage ; en un
mot, il représente la résistance des Gallo-Romains dé-
fendant leur indépendance contrôles Germains. Aussi ses
exploits ne paraissent-ils pas être ceux d'un seul homme ;
la tradition les aura embellis d'âge en âge, en y ajoutant
les hauts faits des héros qui remportèrent quelque vic-
toire sur les Germsins. Une Chronique anonyme, écrite
vers l'an 1060 dans le monastère de la Novalèse, au pied
du mont Cenis, raconte que Walther, après un lone règne
et des prouesses sans fin, était venu s'enfermer cuins ce
monastère pour s'occuper de son salut éternel t ce trait
rappelle la fin de Waifre, le plus célèbre et le plus digne
adversaire des Franks en Aquitaine. Ainsi, la traditida
WEL
1792
WES.
de Walther appartient h la Gaule ; mais elle pt^i^Hra de
bonne heure chez les Germains, sans doute à cause de
rinfluence que les Gallo-Romains civilisés surent prendre
sur leurs vainqueurs. Elle se répandit mOme chez les
Scandinaves et les Slaves : on la retrouve dans la WU-
ktna-Saga, composée par Biom en 1250, et Boguphali,
évèque de Posen, écrivant une histoire de Pologne vers
le milieu du xiii* siècle, y inséra les exploits de Walther
comme des faits d'histoire nationale. H. D.
WANDilILLE (Abbaye de Saint-). Cette abbave, fon-
dée par S^ Wandrille en 684, h 8 kilom. S. d'Yvetot,
s'appela d'abord Fontanelle ( d'une source voisine du mo-
nastère), et ne prit le nom de son fondateur (jue dans le
XI" siècle. L'église, incendiée en 75<i, détruite par les
Normands en 862, fut encore la proie des flammes en
1250. Le monument ogival qui la remplaça ne fut jamais
achevé, et la nef, par exemple, ne fut close et voûtée
que jusqu'à la 3* travée. La tour, en s'écroulant en 1631,
renversa une grande partie du chœur, et détruisit entiè-
rement la nef : le service divin fut rétabli en 1647, mais
on n'acheva les réparations que 80 ans plus tard. La lon-
gueur de Tédiflce, hors œuvre, était de 82 met.; la lar-
geur de la nef, de 16 met., y compris les collatéraux;
celle du chœur, de 24 met.; la nef avait 23 met. d'éléva-
tion sous voûte. Le centre de la croisée était voûté en
forme de coupole. En 1672, on éleva à l'entrée du chœur
un jubé surmonté de statues. De l'abbaye de S^-Wan-
drille il ne subsiste aujourd'hui que le cloître et le réfec-
toire, utilisés poar des entreprises industricMes; l'église
n'est plus qu'un monceau de ruines. V. Langlois, Essai
historique et description de l'abbaye de S^-^andrille,
Paris, 1827, in-8«.
WAURANT, mot anglais qui veut dire garantie, et qui
désigne, dans la Jurisprudence anglaise, tout ordre écrit
(assignation, mandat d'amener, etc.) dont le porteur agit
par autorité, et avec toute garantie contre les poursuites
auxquelles pourrait donner lieu l'exécution de cet ordre.
En termes de» Commerce, un warrant est un ceitificat de
dépôt de marchandises dans un dock ou entrepôt; ce cer-
tificat est négociable l;omme effet de commerce, et a pour
garantie la valeur constatée des marchandises qu'il re-
présente.
WARVVlCK(Vase de), célèbre vase antique colossal, en
marbre blanc, trouvé dans les ruines de Tivoli en Italie,
ei que sir W. llamilton fit transporter en Angleterre eu
1774. II orne aujourd'hui le château de Warwick, situé sur
TAvon. Ce vase, que Ton croit être du sculpteur Lysippe,
était resté enfoui pendant une longue suite de siècles
dans la villa d'Adrien. La coupe en est presque entière-
ment sphérique. Deux ceps de vigne entrelacés se déta-
chent du marbre pour former les anses, et, serpentant
avec grâce autour du bord élégamment renversé, l'ornent
de leurs grappes et de leur feuillage. Au milieu sont des
t^'tes de Satyres en grand relief, et, au* dessous, une peau
de panthère avec le thyrse de Bacchus et d'autres em-
bellissements. La capacité du vase de Warwick est de
800 litres environ.
WATCHMAN (de l'anglais watch, veiller, et man,
homme], gardien de nuit en Angleterre. Les watchmen
parcourent les rues et proclament l'heure à haute voix.
WEHME (U Sainte-). V. Vehmb, dans notre Diction-
naire de Biographie et d'Histoire,
WEHRGELD. V, ce mot dans notre Dicttonnaire de
Biographie et d'Histoire.
WELCHE (Idiome). V. Gallois,
WELLS (Cathédrale de), en Angleterre, dans le comté
de Somerset. Cette église de style ogival, commencée
dans la première moitié du xiii* siècle, sur l'emplacement
d'un édifice antérieur, ne fut entièrement achevée qu'en
1465, Elle est en forme de croix archiépiscopale, à moins
que les chapelles de S^ Jean et de S^* Catherine, qui se
'correspondent, ne soient pas considérées comme formant
i\n véritable transept. La façade occidentale est accompa-
:;née de deux tours carrées, hautes de 42 met., garnies de
(ontre-forts saillants et d'un charmant effet. Les ornements
y sont multipliés et très-délicats : du côté droit, des hauts-
reliefs figurent les difTérentes scènes de la Création, le Dé-
luge, et les actions les plus importantes des Patriarches; du
côté gaucne, ce sont les principales circonstances de la vie
de J.-C. Au-dessus, deux rangs de statues plus grandes que
nature, placées dans des niches, représentent des rois,
des reines, des saints, des évoques, des moines, et les pa-
trons de l'église. Auprès du fronton, le Sauveur, entoure
pardesAngesetparses 12 Apôtres, présideau Jugement
dernier. Dans la composition de toute la façade, ou ne
compte pas moins de 450 statues, dont 150 sont de gran-
deur naturelle. La cathédrale de Wolls a une tour centrale
haute de 52 met. A l'intérieur, elle a 100 met. de Ion*;:
(dont 64 pour la nef et 36 pour le chœur), et 45 met. de
large au transept. Les voûtes sont soutenues par 46 pi-
liers, composés, dans la grande nef, de plusieurs fais-
ceaux de colonnettes, et couronnés de chapiteaux à feuil-
lages. Les arcades sont ornées de nervures à leur intrados,
et entourées d'un seul gros tore, qui forme archi%'olte et
s'appuie sur une espèce de console saillante. La galerie
ou triforium s'ouvre sur la nef par une série de petites
arcades à lancette, toutes semblables entre elles. Les
nervures de la voûte retombent sur des colonnettes très-
courtes, portées en encorbellement sur des feuillages au
niveau de la tête des arcades du triforium : c'est une dis-
position qui manque de grâce et de légèreté, et l'on peut
également blâmer la lourdeur des arceaux qui séparent les
croisillons de l'intertransept. La chapelle de la S** Vierge
est généralement regardée comme le chef-d'œuvre de l'ar-
chitecture religieuse en Angleterre. — Sur le flanc méri-
dional de l'église il existe un vaste cloître, composé de
39 travées de voûtes. Sur le flanc septentrional* s'élève
une salle capitulaire, chef-d'œuvre du genre, b&tie au-
dessus d'une crypte. Au centre de l'octogone de cette
salle est un piller formé de colonnettes groupées, et du-
quel partent des nervures qui s'épanouissent à* la Toûte
comme les branches d'un palmier. B.
WENDE (Langue), une des langues slaves, parlée
entre la Croatie, la mer Adriatique, l'Isonzo et la Drave.
On la nomme aussi Slovène et Couroutane. Ses princi-
paux dialectes sont le carnique, le corinthien et le sty-
rien. Le wende est un idiome antique, mais très-peu
cultivé, qui se rattache au slavon liturgique ; il présente
toutefois des déviations assez notables dans sa pronon-
ciation et dans son orthographe, représentée jadis par Pal-
phabet glagolitique et maintenant par des lettres ro-
maines. Kopitar a publié en allemand une Grammaire
de la langue slave en Camiolef en Carinthie et en Styhe,
Laybach, 1808. Murko est aussi l'auteur d'une Gram-
maire wende (Gratz, 2« édition, 1843), et Jarnik, d'un
Essai étymologique sur l'idiome Slovène (Kli^nfurt,
1832). — Parmi les productions écrites en langue wende,
nous citerons la traduction de l'Évangile par Trub^r e?
Dalmatin au xvi« siècle, celle de la Bible par lapel îl8(K)},
et les poésies de Vodnik (1806).
. WÉNÉDE (Idirtme). V. Vénède,
WESTMlNSTEil (Abbaye de). CeUe abbaye, dont le
nom signifie monastère de l'Ouest, fut ainsi appelée à
cause de sa situation dans la partie occidentale de Lon-
dres. Elle porte aussi le nom à^Êglise collé^iate de
S^'Pierre, On en attribue la fondation à S^ Mellitus, qui
fut le 1'' évoque de cette ville, au commencement du
vu* siècle. Les Danois l'ayant détruite au ix\ S^ Dunstan
la releva, et le nouvel édifice fit place encore à un autre
plus somptueux, que fit bâtir Edouard le Confesseur, et
dont la dédicace eut lieu en 1065. Henri III comme-nça la
reconstruction de l'église de Westminster par la chapelle
de la S^* Vierge, dont il posa la première pierre en 1220 :
tout le monument, fait en style ogival, fut achevé en
1285, sous le règne d'Edouard V^. D'après le registre des
comptes, on avait dépensé environ 5 millions de francs
de notre monnaie. Plus tard, Henri VII rebâtit encore la
chapelle de la S^* Vierge, et l'architecture de la fin du
XV* siècle y déploya toute la richesse de ses ornements.
L'entrée occidentale de l'église et ses deux tours, qui
s'harmonisent assez mal avec le reste de l'édifice, datent
du xvm* siècle ; les dessins en furent donnés par Chris-
tophe Wren : la grande fenêtre est un morceau remar-
quable de peinture sur verre. L'extérieur de l'abbaye de
Westminster est généralement lourd ; la partie la plus
remarquable est le portail gothique du croisillon septen-
trional, appelé Porte de Salomon; les bâtiments du cloître
sont situés au midi. L'intérieur, en forme de croix, a de la
légèreté et de l'élégance : toutefois, la vue y est en partie
obstruée par des cloisons en bois, des grilles et des con-
structions accessoires. Des piliers d'une grande hardiesse
soutiennent la voûte, qui a 33 met. d'élévation; ^édifice
a 92 met. de long, 24 met. de large dans la nef et 66'",33
dans le transept. Il est encombré de sculptures, de tom-
beaux, de statues, d'œuvres d'art de tous les âges, qui
lui donnent l'aspect d'un Panthéon oix d'un musée, mais
dont la plupart ont peu ou point de valeur artistique;
dans le nombre il n'y a que quelques beaux ouvrages ds
Roubiliac, de Rysbrach, de NoUekens, de Bacon, de
Chantrey et de Flaxman. La nef ofi're les monuments ou
tombes de Ben Johnson, de W. Temple, de Congrère, Hi^
Pitt, de Fox, etc. Dans le transept septentrional, on *>*
WES
1793
WIL
«arque tes tombes de Grattan, de Canning, de Castlereagh,
les monuments de l'amiral Vernon, de lord Chatham , de
Warren Hastings, les statues-portraits de Canning et de
Wilberforce. Une partie du transept méridional a reçu le
nom de Coin des poêles, parce qu'on y trouve les monu-
ments de Chaucer, Spencer, Shakspeare, Butler, Davenant,
Cowley, Prior, Gay, Thomson, Goldsmith, Southey, la
statue d*Âddison, los bustes de Hilton et de Dryden, etc.;
dans le reste de ce transept on a placé les monuments de
CasauboD, de Camden, du duc d*Argyle, de Handel, de
Garrick, etc. Le chœur, où a lieu le couronnement des
souverains d'Angleterre, a un magnifique pavé en mo-
saïque, disposé par des ouvriers de Rome en 1200, sous la
direction d'un certain Oderic, et représentant le temps de
la durée du monde ou le primum mobile suivant le sys-
tème de Ptolémée. Mais un autel de style grec en détruit
l'unité. Il y a 9 chapelles : celles de S^-Benolt, de S^-Ed-
mond, de S^-Nicolas, de S^-Êrasme, de S'-Jean-Baptiste,
et de l'abbé Islip, ne renferment pas d'œuvres d'un grand
mérite. On conserve, dans une salle annexe de la chapelle
S^-Jean, les figures en cire des reines Marie et Anne, et
celle de Nelson, ornées de leurs costumes d'apparat. La
chapelle S^Paul contient un monument élevé & la mé-
moire de James Watt; celle de S^-Édouard le Confes-
seur, les tombeaux de ce prince et de sa femme Edith,
de Henry III, d*Êdouard IIl et de sa femme Philippa, de
Richard H, de Henry V, Tépée d'Edouard II, le casque et
le bouclier de Henry V, enfin les deux sièges en pierre
qui servent au couronnement, et dont Tun est la célèbre
Eierre de Scone des anciens mis d'Ecosse, liais la plus
elle et la plus importante chapelle est celle de la S^*-
Vierge ou de Henry VII, construite par le Florentin Tor-
rigiano : plus élevée que le pavé du reste de l'abbaye,
elle a de belles portes de chêne sculptées et dorées, et
se compose d'une nef centrale avec cinq petites chapelles
à son extrémité, et de deux ailes latérales ; les bannières
et les stalles appartiennent aux chevaliers de l'ordre du
Bain, qui y recevaient autrefois leur investiture. Les tiges
des arceaux jaillissent avec une légèreté inouïe vers la
voûte, dont les clefs pendantes ont une magnificence au-
dessus de toute expression. Un artiste a appelé cette voûte
a le ciel '^ sculpteurs. » La chapelle de Henry VII est
longue de 30 met., et haute de zO. Là sont les monu-
ments de Henry VII et de sa femme, de Marie Tudor,
d'Elisabeth, de Marie Stuart, de Jacques I'% de Monk,
d'Edouard V et de son frère Richard d'York ; Charles II,
Guillaume III, les reines Marie et Anne, George II , le
duc de Cumberland, etc., y ont été également inhumés.
Extérieurement la chapelle est ornée de 16 tours. V. John
Dorth, Thê Histoty and antiqiàties of thê abbey church
S^'Peters Westminster, in-fol., pi.; J. Tismith, Antiqui-
Hes of Westminster, 1807,in-4°; Braylen, The histofy and
antiquitiesof the abbey churck ofS^-Peter, Westminster,
Londres, 1822,in-4<'; Cottingham, Plans, élévations, de-
Utils and views of the magnificent chapel of kmg Henri
Ûie seventh, at Westminster abbey church, Londres,
1822, in-fol. B.
WESTMINSTER -HALL, immense édifice de Londres,
situé sur la rive gauche de la Tamise, entre ce fleuve et
l'abbaye de Westminster. Il occupe l'emplacement de
l'ancien palais royal de Westminster, qu'un incendie dé-
vasta en 1834, et a été construit depuis 1840 sur les
plans de l'architecte Barry. C'est la plus grande con-
stniction de style gothi<][ue qui existe au monde. Elle a
quatre façades : la principale, qui donne sur la Tamise, et
dont le pied est btiigné par les eaux, n'a pas moins de
300 met. de développement. Trois tours principales do-
minent tous les bâtiments : la tour royale ou Victoria, à
l'angle S.-O., s'élève, sur une base de 25 met. carrés, à
une hauteur de 113°*,33; la tour du centre a 20 met. de
diamètre et 100 met. d'élévation ; la tour de l'horloge ou
du clocher, placée à l'extrémité septentrionale de l'édi-
fice, est haute de 106™,66. Un grand nombre d'autres
tours, moins élevées, rompent les lignes d'une vingtaine
de toits de manière à réunir la beauté architecturale à la
noblesse de style. Les frais de construction se sont élevés
k près de 40 millions de francs. De l'ancien palais, on a
conservé, dans l'édifice nouveau, où elle tient lieu de
vestibule, une ancienne salle construite par Guillaume II
et réparée dans les dernières années du xiv* siècle : cette
■aile, dont la toiture de bois de noyer sculpté est admi-
rable, a 02 met. de longueur, 63°*,33 de largeur, et 30 de
hauteur; elle avait été construite pour y donner des fôtes
de cour, et Richard II, lors de son couronnement, y
traita 10,000 convives; elle a servi Jadis aux séances du
Parlement, et c'est Ik que furent jugés W. Wall8ca«
Thomas Morus, le comte de Straiïord, Charles I"", les
nobles rebelles de 1745, et Warren Hastings. La Chambi-e
des Lords occupe la partie méridionale des nouvelles
constructions; elle y siège dans une salle de 32 met.
de long, 15 met. de large et 15 met. de haut. La partie
septentrionale est assignée à la Chambre des Communes,
dont la salle a 20 met. de longueur, 15 met. de hauteur
et 15 met. de largeur. Les b&timents de Westminster-
Hall contiennent aussi les locaux où siègent la Cour de
l'Échiquier, la Cour des plaids communs, la Cour de
diancellerie et la Cour du banc de la reine. B.
WHIGS. V. ce mot dans notre Dictionnaire de Dio*
graphie et d'Histoire,
WHIST, mot anglais qui veut dire chuti ou sUence! et
par lequel on désigne un jeu de cartes où le mutisme est
de ngueur. ii i»e joue avec un Jeu entier de 52 cartes,
entre quatre personnes, deux contre deux. L'as est la
plus forte carte; puis viennent, dans leur ordre naturel,
le roi, la dame, le valet, etc., jusqu'au d%rux. On joue en
parties liées, et les partners qui les ont çagnées ont fait
un rob (mot dérivé de robre, prononciation anglaise de
rubber, partie liée). La partie est ordinairement de
10 points; si on la joue en 5, c'est un short-whist (vhist
court). Pour donner les cartes, on fait couper à droite^
et l'on distribue 13 cartes à chaque joueur, une à une,
de gauche à droite; la dernière se retourne, et détermine
l'atout. Chaque levée {trick) au-dessus de six compte
deux points au whist ordinaire, et un seul au short-whist;
trois honneurs dans les mains des associés valent deux
points, les auatre honneurs en valent quatre. Une manche
gagnée, c.-a-d. 10 points marqués sans que les adver-
saires en aient pu marquer un seul, est comptée triple,
et l'on prend 3 fiches; si les adversaires n'ont pas mar*
que plus de quatre points, elle est double, et l'on n'a que
2 fiches; s'ils en ont marqué plus de quatre, elle est
simple, et l'on n'a qu'une fiche. Ceux qui gagnent le rob
reçoivent, outre les fiches gagnées dans les manches, un
nombre convenu de fiches dites de consolation, ordinal*
rement 3 ou 4, et, si l'on a joué trois manches, on dé-
falque les fiches de la manche gagnée par les perdants.
Le prix de la fiche est conventionnel. Si les partners font
un chelem, c-jmI. les 13 levées, ils gagnent 10 fiches, et
la partie continue. Le jeu de whist exige de l'attention et
de la mémoire, car il faut se rappeler les cartes qui ont
été jouées depuis la première jusqu'à la dernière. La
manière de bien jouer la carte ne peut s'acquérir que
par la pratique : il est, par exemple, telle façon d'atta«
quer qui indique au partner k peu près ce qu'il devra
Jouer quand il aura pris la main. Sur chaque coup de
cartes, on est tenu de fournir la couleur demandée; si
l'on n'en a pas, on peut, soit couper avec de l'atout, soit
renoncer, afin de laisser au partner la possibilité de faire
la levée. On peut gaçner la partie par les honneurs qu'on
a dans la main; mais on doit jouer le coup, parce que
les adversaires peuvent, en marquant des points, dimi<i
nuer le nombre des fiches qu'ils perdent, et même les
points gagnent avant les honneurs. On joue quelquefois
à Venfilaae, c-à-d. qu'on reporte sur la manche suivante
les points faits en plus de 10. Des Traités de whist ont
été publiés par Hoyie (1786) et Deschapelles (1830).
WHITE-BOYS. F. ce mot dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire.
WHITEHALL, palais de Londres, «a N. de SWames-
Park. C'est un vaste édifice quadrangulaire, b&ti au
xiii* siècle, embelli au xvi" par le cardinal Wolsey, con-
fisqué après la disgr&ce de ce personnage par Henri VIII,
et où résidèrent les rois d'Angleterre jusqu'à la fin du
xvn* siècle. Whitehall fut dévasté par un incendie en
1697, sauf la partie que Jacques I*' avait fait reconstruire
par Inigo Jones, et que l'on nomme Banquetting-house
(maison des banquets), à cause des repas publics qui y
furent donnés autrefois. Le dôme de la chapelle est peint
par Rubens, et représente, dans une suite de neuf
tableaux, qui ont été restaurés par Clpriani, l'histoire et
l'apothéose de Jacques I'^ Whitehall est occupé aujour«
d'hui par le commandant des horse-'guards, sauf l'extré*
mité méridionale, où sont les bureaux du Ministère des
aflîaires étrangères. Ce fut contre ce palais que fut élevé
l'échafaud où périt Charles I^, près de l'endroit où s'élève
maintenant une statue en bronze de Jacques II par Gib-
bon!},,
WÎGWAM, cabane de peuplades indigènes et sauvages
de l'Amérique australe.
WIHARA, nom donné, dans 111e de Ge^Ian, aux tem-
ples de Bouddha.
WILDGRAVE, c.-à-d. oomU du gibier, titre féodal
443
WIS
1794
WOR
paiticiilier à TAllemagne, et que prenaient, à une époque
très-ancienne, les petits seigneurs des bords du Rhin.
> WILHBLMSHQBHE, château de plaisance situé à 5 ki-
klomëtres de Gassel (Hesse). Une magnifique arenue de
I tilleuls, bordée de maisons et de jardins, conduit de
Cassel au pied de la hauteur où est o&ti ce château, qui
date de 1701. Le parc qui Tentoure est Justement célèbre
par ses beautés naturelles, par ses pièces d*eau, et par
les ornements de toute espèce que Tart y a réunis. On
y remarque principalement : une cascade haute de
43 met., large de 17; la grande fontaine. Jet d'eau de
03 met. de haut; le bassin des Géants, où Encelade est
ensereli sous des masses de rochers; les cascades, lon-
gues de 300 met., larges de 13™,33, interrompues, de
lo met. en 50 met., par de rastes bassins; le ch&teau des
Géants, octogone dont la plate -forme, soutenue par
192 colonnes toscanes, supporte une pyramide de 32 met.,
que couronne, sur un piédestal de 4 met., un Hercule en
cuivre forsé de 10"',33 de hauteur. B.
WINA, mstrument de musique de Tlnde, consistant
en un corps de bambou attaché à deux grandes courges,
et qui est monté de plusieurs cordes qu'on appuie sur
des chevalets avec les doigts.
WINCHESTER (Cathédrale de), en Angleterre, dans le
comté de Hauts. On prétend qu*une portion de cette
église remonte à l'édifice qui fut b&ti par le roi anglo-
saxon Ethelwold et consacré en 980. Certaines parties,
reconnaissables aux arcs en plein cintre, aux chevrons
brisés, aux billettes et autres ornements usités dans l'ar-
chitecture anglo-normande, peuvent être rapportées avec
plus de certitude au temps de Guillaume le Conquérant :
tel est, en particulier, le croisillon septentrional. La fa-,
çade occidentale et la nef furent reb&ues en style ogival
très-pur, dans la seconde moitié du xiv* siècle; on re-
construisit également la partie orientale de l'église au
XVI* siècle, avec toute l'élégance de la période des Tu-
dors. Vue du dehors, la cathédrale de Winchester a peu
d'apparence : mais l'intérieur en est beau. La nef a onze
travées de chaque côté; le transept est plus rapproché de
la r^ion absidale que dans d'autres monuments d'Angle-
terre. De vieux vitraux et de remarquables grotesques en
bois sculpié ornent le chœur. Au-dessous de l'abside il y
a d'anciennes cryptes. Alfred le Grand et plusieurs autres
princes anglo-saxons ont été inhumés dans la cathédrale
de Winchester, où se trouvent aussi divers tombeaux
sculptés par Flaxman et Chantrey. Au-dessus de l'autel
est une célèbre Résttrrection de Lazare, peinte parWert.
F. Milner, HisUnrê et detcription des anti(iuités de Wm-
ehester, B.
WINDSOR (Ch&teau de), une des résidences royales
d'Angleterre, dans le comté de Berks, à 35 kilomèt. 0. de
Londres, sur la rive droite de la Tamise. Ce ch&teau, b&ti
par Guillaume le Conouérant, reconstruit sous Heniy I*',
puis sous Edouard III , fut encore embelli au temps
de Charles II et de George IV. Les appartements en sont
décorés avec la plus grande magnificence et ornés de belles
peintures. La chapelle S^-George, où sont les portraits des
chevaliers de la Jarretière, est un remarquable morceau
de style ogival fleuri : un caveau où reposent George IH,
George IV, Guillaume lY et plusieurs autres membres
de la maison de Brunswick, en occupe l'extrémité orien-
tale. La chapelle d^CJrswlck renferme le monument de
la princesse Charlotte, et les restes de Henry VI, de
Henry VIII, de Jeanne Seymour, d'Edouard VI et de sa
femme, et de Charles I**. Le ch&teau de Windsor est
entouré d'un parc qui n'a pas moins de 100 kilomèt. de
circuit; le Jardin est décoré de statues de bronze et de
marbre; la terrasse, longue de 575 met, et d'une largeur
proportionnée, est unique en son genre. B.
WISBY (Code de), compilation de règlements mari-
times faite pendant le xiv* siècle à Wisby, dans l'Ile de
Gothland (Suède). Les 12 premiers articles furent em-
pruntés du code ue LQbeck; les 24 suivants le furent des
r^ês d'Oléron et des jugements de Dam me et Westca-
pelie; la plupart des autres étaient conformes aux cou-
tumes d'Amsterdam, d'Enchuysen, de Stavem. Le code
de Wisby devint la règle commune des navigateurs qui
fréquentaient la Baltique, la mer du Nord, et les parages
d'3 la Hollande et de la France. B.
WISIGOTHS (Lois des). Les premières furent pro-
mulguées par le roi Eurik, dans la seconde moitié du
T* siècle : le travail de ce prince n'est parvenu Jusqu'à
nous que refondu par ses successeurs. Léovigilde, au
aiècle suivant, en fit une édition corrigée et ampli-
fiée, que nous ne possédons pas davantage. Pendant le
vu* siècle, Récarèdo, Goodemar, Siscbut, Sisenand,
Chindaswinde et Roceswinde rendirent un grand nombre
de lois nouvelles. Le code des Wisigoths que nous pos-
sédons aujourd'hui est un recueil de toutes ces législa-
tions éparses, qui reçut sa forme définitive au vui* siècle,
puisqu'on y trouve plusieurs dispositions émanées des
rois Wamba, Ervige et Égiza. Les lois des Wisigoths
furent écrites en latin, et c'est à tort que le jurisconsulte
SavignjT a pensé qu'on se servait, dans la pratique, d'une
traduction faite par les Goths en leur propre langue et
qui se senût perdue. Une traduction des lois vrisigothi-
ques fut faite en Espagne pendant le xiii* siècle sous le
titre de Fuerojuzgo {Forum judicum), Merlin de Douai
dit nue ià loi des Wisigoths est la plus belle et la plus
ample des lois barbares; ce fat celle aussi qui consens
le plus longtemps son autorité. Elle régit, en effet, les
provinces méridionales de la Gaule longtemps après que
la puissance des Goths y eut été ruinée; elle régna dans
l'Espagne pendant tout le moyen &ge, et elle a servi de
base aux législations espagnole et portugaise. Ses auteurs
ont visé à l'originalité, à l'élégance, et même à d^ idées
philosophiques; ils ont prétendu tracer des règles exclu-
sives et complètes en déclarant que le Jugement royal
suppléerait à la loi dans les cas non prévus. Le code wi-
sigoth est divisé en 12 livres, chaque livre en litres, et
chaque titre en un certain nombre de constitutions, dont
chacune est précédée soit du nom du prince qui l'a ren>
due, soit du mot antiqua qui annonce une règle ancienne
et d'origine inconnue. Partout on y reconnaît une imita-
tion du code Tliéodosien. Le texte a été publié pour la
première fois par Pithou en 1570; l'Académie royale de
Madrid en a donné, en 1815, une édition accompagnée de
l'ancienne traduction espagnole. On le trouve aussi dans
le Corpus juris germantci de Walter. V. Davoud-Oghlou,
Histoire de la législation des anciens Germains, Berlin,
1845, 2 vol. ln-8<*; Haenal, I,êx romana Visigothorwn,
Leipzig, 1847-48, 2 vol. gr. in^«. B.
WISKI, voiture légère et très-élevée, qu'on importa
d'Angleterre en France vers la fin du siècle dernier, et
qui fut & la mode sous la Restauration.
WITTENAGEMOT. V. ce mot dans notre Dtctionnaire
de Biographie et d'Histoire,
WUDIKA. V. Vladika.
WOIVODE. V, Vatvode, dans notre Dictionnaire de
Biographie et d'Histoire,
WOLOF, OUOLOF ou GHIOLOF (Idiome), langue
parlée dans la Sénégambie. Son système grammatical a
plus d'un trait commun avec celui des langues sémi-
tiques. Dans cette langue, le verbe est susceptible de
17 modifications, qui consistent à ajouter & chaque ra-
dical une ou deux syllabes, et qui en étendent ou res-
treignent racceptlon : ce caractère la rattache aux Idiomes
africains. L'article suit le substantif et fait corps avec
lui ; il en modifie le sens selon que l'objet est présent on
absent, proche ou éloigné. On ne distingue le genre que
dans les objets qui en ont naturellement. Les sons nasaux
sont dominants dans le wolof, et cependant cette langue
riche en voyelles, est harmonieuse. Un certain nombre
de mots arabes et portugais s'y sont glissés. V. J. Dard,
GrammcUre wolofe, Pans, 1826, in-8°, et Dictionnaire
français-^wolof, ibid., 1825; l'abbé Boilat, Grammaire
de la langue ouolof, 1859, in-8*.
WORCESTER (Cathédrale de), é^lse ci>>sacrée &
S* Pierre en 1218 : le chœur, la chapelle de la S^- Vierge,
le transept oriental, qui appartiennent au style ogival
primitif, devaient être achevés à cette époque. La nef ne
tarda point, du reste, à être édifiée; quelques change-
ments y furent opérés pendant la seconde moitié du
XIV* siècle. La tour élevée à lintersectlon de la nef et du
chœur avec le grand transept s'étant écroulée, il fallut la
relever; celle qui existe maintenant, et qui atteint une
élévation de 05 met., parait avoir été finie en 1374, bien
que le couronnement ait dû être refait & une époque plus
moderne. La cathédrale de Worcester est en forme de
croix archiépiscopale : elle a 130 met. de longueur dans
œuvre, 26 met. de largeur y compris les collatéraux, et
32 met. de hauteur. Le transept de l'Ouest a 42 mèL de
longueur et 10 met. de largeur; celui de l'Est, 40 met.
de longueur et 8 de largeur. Les arcades de la nef sont
ogivales; le trifcrium est composé de deux petites ar-
cades ; la claire-voie manque de hauteur. La plupart des
colonnettes sont annelées. Dans ce monument en re-
marque : la chaire, faite d'une seule pierre; la tombe du
prince Arthur, fils de Henri VII, entourée dNui travail
sculpté très-délicat; le tombeau de l'évèque Ht^gh, par
Rouoiliac; celui d'Élise Degby, par Cliantrey. Soos le
chœur est une crypte, qui se compose d'une noir termioét
WOR
i7a5
WUR
eo abside semi-circulaire et de deat ailiss: la nef a étô
divisée en quatre couloirs par trois rangées de colonnes
ajoutées, et chaque aile en deux par un autre rang de
colonnes. A régiise est attenante une salle capitulaire
ronde, de 32 met. de diamètre. Il y a aussi un cloître
carré, de 33*^,33 de côté ; il est orné de sculptures, dont
Tune représente la généalogie des rois d'Israël et de Juda.
V. Wild, An illustration of the architecture, etc, of the
cathedral church of Worcester, Londres, 1820, in-4'».
WOKK-HOUSB, nom qu'on donne en Angleterre à
des maisons de travail forcé où Ton place les indigents
valides et où Ton reçoit aussi les vieillards et les infirmes.
Pour ceux-ci le work-house est un hospice, pour ceux-là
un pénitencier. Tous sont astreints à un vêtement uni-
forme. Le travail imposé est purement mécanique, celui
du moulin à bras ou du moulin à pied. La nourriture est
inférieure en qualité et en quantité à celle des travail-
leurs libres. Aussi le work-house est-il généralement un
épouvantai] pour la paresse.
WORMS (Cathédrale de). Dès Tannée 638, une basi-
lique consacrée à S* Pierre avait été élevée sur remplace-
ment occupé par cette cathédrale; elle fut réduite en cen-
dres en 872, et les incursions des Normands empêchèrent
longtemps de la relever. Ce ne fut qu'à la fin du x* siècle
qu'on reprit les travaux, et l'édifice actuel fut consacré
en 1016. C'est une église romane à double abside, sur-
montée de deux dômes. Le dôme oriental, de forme by-
zantine, porte les caractères du xi* siècle ; près de lui
est b&ti un transept. Le dôme occidental est plus orné,
et l'on y aperçoit plusieurs ogives. Dans la région occi-
dentale du monument, il y a deux tours, l'une du
xn* siècle, l'autre du xv*. Les fenêtres de la cathédrale
de Worms sont à plein cintre, avec archivolte ornée de
dents de scie; les aNâdoes sont également seml-drciH
laires, et les chapiteaux des colonnes formés de simples
moulures. Les chapelles accessoires appartiennent au
style flamboyant. Le portail méridional, qui est orné de
belles sculptures, date de 1472. Du même siècle date la
chapelle du Baptême, entièrement isolée, avec une porte
donnant sur la nef : la voûte en est soutenue par deux
colonnes à chapiteaux décorés de feuilles de chêne; on y
remarque des fonts baptismaux, autour desquels est
figuré Jésus environné des Apôtres, et plusieurs tom<
beaux sculptés dans un style qui se rapproche de celui
de la Renaissance française. B.
WOTIÈQUE: (Idiome), idiome de la famille ourallenne,
parlé par les Wotièques des gouvernements russes de
wiatka, d'Orenbourg et de Kazan. Les substantifs s'y
déclinent de six manières différentes , selon les six pro-
noms possessifs qui les précèdent. Le verbe n'a que deux
conjugaisons, et la négation, en s'y intercalant, produit
de grands changements. Les prépositions suivent leurs
régimes : quelques-unes ont trois terminaisons difiié-
rentes, non d'après les genres, que cette langue ne dis-
tingue pas dans les objets qui en sont naturellement
privés, mais d'après les personnes.
WOUGOI (Idiome). V. CéL^Biens adiomes).
WRIT. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Biograr
phie et d^Bistotre,
WORST, G.-à-d. en allemand boudin, caisson d'artil-
lerie de forme allongée, sur lequel les canonniers étaient
placés à cheval les uns derrière les autres. Originaire
de l'Autriche, 11 a été abandonné, comme peu commode,
en 1792.
WDRST, nom que l'on donne à une calèche longue et
découverte, qni sert à la promenade.
X
X
XYS
X, la 23« lettre de notre alphabet. Elle est la 24* de
l'alphabet des langues germaniques, en raison de la place
que le W y occupe avant elle. Elle était la 21* pour les
Romains, qui ne distinguaient pas le J de 1' I, ni l' U du
V. Comme forme, VX est semblable au khi (X, y) des
Grecs; comme articulation, il répond à leur ksi (3, ^),
inventé, dit-on, par Simonide. Aucun mot d'origine latine
ne commence par X ; les Romains employaient ce carac-
tère comme lettre médiale (maximus, mixtus^uacor) et
comme lettre finale {lux, nox, pax, rex, i)ix). Dans les
cas obliques des noms qui se terminaient au nominatif
par X, cette lettre faisait place à l'un des deux éléments
phoniques dont elle représente la réunion : pax^ pacis;
rex, régis; nox, noctts; lux, lucis. Les deux éléments
phoniques de Vx se font sentir dans la prononciation des
mots français : le c, dans axe, exctàse, fixe, luxe, sphinx,
Pollux, etc. ; le g (suivi du son z ) , dans examen, exem-
ple, exil, exonération, exhaler, exhibition, Xavier, Xéno-
phon, etc. On donne encore à Vx le son du k dans excès,
exception, exciper; de Vs dans six, dix, soixante, Xain-
trailles^ Auxerre, Auxonne, Bruxelles ; du % dans sixième,
dixième. Il est muet à la fin des mots (doux, faux,
heureux, prix, voix ) , à moins qu'i} n'y ait liaison eupho-
nique avec le mot suivant, cas auquel il se prononce 9
[doux espoir, faux ami, heureux état ^ six aunes, prix
élevé, voix humaine). Vx est la marque d'un grand
nombre de pluriels en français, soit avec modification de
la dé&\nence{ égal, égaux; cheval, chevaux; travail, trfi-
vaux; vitrail, vitraux)^ soit par simple addition (ba-
teau, bateaux; étau, etaux; feu, feux; chou, choux).
La lettre X n'existe pas en italien : dans les mots dérivés
de mots grecs et latins où elle se trouvait, on la rem-
place par S simple ou double {escUto, exact; esprimere,
exprimer; assioma, uMXfiuxn Alessandro, Alexandre), ou
par C double {eccellenza, excellence). En espagnol, on
donne ordinairement a ijourd'hui à l'Xla valeur de notre
consonne double es ; cependant il a conservé le son gut-
tural de la joto (J) dans certains mots, comme Ximénès,
Xucar, XH-ès, Xalapa, En portugais, l'X a plusieurs va-
leurs, dont la plus ordinaire est celle da ch français. En
russe, il se prononce comme le khi des Grecs.
Le signe X, qu'on voit sur beaucoup de médailles ro-
maines, est, selon quelques antiquaires, l'initiale du
mot grec khrêma (pièce de monnaie). Coupé par un rho
(P), il forma avec cette lettre, depuis Constantin, un
monogramme qu'on a expliqué comme représentant le
nom du Christ. Ce monogramme, placé en marge des
manuscrits, est une abréviation du grec khrèsimon (utile),
destinée à appeler l'attention du lecteur sur certains pas-
sages. — Signe numéral , le ksi des Grecs valait 60, et,
précédé d'un accent (A), 60,000; le kM, 600. Dans la
numération romaine, X vaut 10, et, surmonté d'un trait
horizontal (%), 10,000. Quand plusieurs X se suivent,
chacun d'eux représente une dizaine ( XX a= 20 ; XXXbs 30).
Un 1, placé à la gauche de l'X , retranche de la dizaine
une unité (IX^O). Placé après un signe numéral plus
fort, X y ajoute 10 (LX == 00 ) ; placé avant, il en retranche
une dizaine (XL =3 40, XCs=90). Couché sur le côté (x),
il a valu quelquefois 1000. — La lettre X fut autrefois la
marque monétaire d'Amiens.
XENAGIE. V, AftMÉE, Grèce, page 213, col. i.
XÉNÉLASIE. ) „ _ ^ , *-^ n- *•
XPNIES > r. ces mots dans notre Dtcttonnatrs
XÉROPHAGIES. \ ^ Biographie et d^Histoire.
XENORPHICA, clavecin à archet, inventé à Vienne
(Autriche), par Rœllig, vers la fin du siècle dernier.
XYLHARMONICON ou XYLOSISTRON, instrument de
musique, du genre de l'Euphone (V. ce moQ, inventé
par Uthe.
XYLOGRAPHIE (du grec xylon^ bois, etgraphéin,
écrire, tracer) , art de graver sur bois (V. Gravcrb). Avant
l'invention de la typographie, on fH des impressions xylo-
graphiques, c-à-d. à l'aide de planchettes en b^ dani
lesquelles les mots étaient taillés en relief.
XYLORGANON, instrument de musique, eq>èoe éê
claqae-bois (V. ce ««oQ.
XYSTE. F. ce ofe Hnt notra Dictionnaire de Biog/w
phie et d^Histaire,
YDR
4796
YOR
Y
Y, 24* lettre de notre alphabet, considérée par beau-
coup de grammairiens comme une 6* voyelle, tandis que,
selon d*autres, elle tient à la fois de la voyelle et de la
consonne. Nous rappelons t grec, bien qu'elle ait été for-
mée sur le modèle, non de Viola (I), mais de VupsUon
(T). Les Grecs anciens ont prononcé VupsUon tantôt
comme notre u, tantôt comme notre t; les Grecs modernes
ont adopté ce second mode, et donné quelquefois aussi
à Vupsiton le rôle de nos consonnes F et V ; les Romains
adoptèrent le son u, puisqu'ils écrivaient indistinctement
satura et satyra, Sulla et Sylla, Dans beaucoup de mots
français dérivés du grec, Vy tient la place d*un upstlon :
tels sont hymen , hymne , hypocrite , martyr, mystère ,
physique, polygone, syntaxe, synonyme, système, style.
En fhincais, l'Y représente plusieurs articulations : tan-
tôt i, comme dans yeux, hier, payen, hyène, yatagan,
Yonne, Mayence; tantôt deux t distincts, comme dans
pays, paysan, royal, moyen, essuyer, payer {pai^is, pat-
isan, rov-iat, moi-ien, essui-ier, pai-ier); tantôt aille,
comme dans Biaye, Biscaye, L'Y a disparu de certains
mots, tels que ami, lis, roi, gai. Douai, Tournai , qu'on
écrivait jadis amy, lys, roy, gay, Douay, Toumay, etc.
En allemand, l'Y a le son de l't; cette lettre Ta même
remplacé récemment dans beaucoup de mots, puisqu'on
écrit, par exemple, bei (près de) pour bey, sein (être)
pour seyn , etc. En anglais, Y a aussi le son de l' t : y es,
York, etc. : il a encore le son ai à la fin de certains mots
{glory, gloire; vanity, vanité), et, dans d'autres, un
son composé. Intermédiaire entre les sons é et t, ou assez
semblable à ail (by, my, rely, lay, may). Les Espagnols,
qui prononcent comme I leur Y dans yo ( Je) et riy (roi),
font entendre le son de l'Y après la double IL Le carac-
tère Y est étranger à l'écriture italienne. Les Russes ne
connaissent pas l'Y que nous employons comme lettre
initiale dans la transcription de certains noms, tels que
Yermolof; leur Y se prononce ou, et ils ont une sorte
d^upsilon tronqué, qui a le son tantôt de l't , tantôt du v,
— Lettre numérale, VupsUon valait 400, et, précédé d'un
accent («v), 400,000. Chez les Romains, Y marquait^le
nombre 150, et, surmonté d'un trait horizontal (y),
150,000. Il a été la marque monétaire de Bourges.
YACHT, petit b&timent de luxe, allant à voiles et à
rames, et dont se servent 1rs riches Anglais pour des
promenades en mer ou pour de courtes traversées. Il a
deux m&ts, et est préé en sloop, en cutter, en goélette,
suivant ses dimensions; son port varie de 80 à 100 ton-
neaux. De nos Jours, on a fait des yachts de plus grande
dimension, et l'on y a appliqué la vapeur. 11 existe en
Grande-Bretagne des associations appelées yachtclubs,
qui entretiennent une foule de charmants yachts : e^les
ont été imitées en Hollande et à Saint-Pétersbourg.
YACHT, partie du pavillon anglais située à l'angle supé-
rieur de la gaine. C'est un carré coupé de diagonales et
de croix en oandes rouges, bleues et blanches. Le yacht
des États-Unis porte sur un fond bleu un nombre d'étoiles
égal à celui des États de l'Union.
YAÇNA ouIZESCHNÉ. V. Vendioad-Sad^ et Zend-
ÀVESTA.
YAJÛR-VÊDA. V, Védas.
YANKEE -DOODLE, nom de l'air national des Yankees
ou Américains du Nord. II fut composé, dit-on, en 1755,
par un médecin nommé Schuckburgh , qui le fit passer
pour une marche célèbre qu'on jouait dans toutes les
années européennes et que devait adopter toute nation
civilisée. D'autres prétendent quMl est tiré d'une marche
que Jouaient, pendant la guerre de l'Indépendance, les
troupes hessoises à la solde de l'Angleterre. Quoi qu'il en
soit, les paroles en sont niaises, et la mélodie triviale.
Un autre chant, appelé HaU-Colombia , commence à le
remplacer.
YATAGAN, arme des Orientaux, un peu plus longue
que le poignard ; la lame en est oblique, et le tranchant
forme vers la pointe une courbe rentrante.
YDRE ou YDRIE (du ^rec udôr, eau), vieux mot dé-
signant un grand yase en forme de cruche, quelquefois
fermé à clef.
YEOliAN , nom donné jadis en Angleterre aux hommes
libres qui tenaient le milieu entre la noblesse et les pro-
létaires. Le yeoman devait posséder un héritage paternel
d'environ 130 liv. sterl., et il avait le droit de paralti^
partout vêtu comme un seigneur, si ce n'est dans la mai-
son d*un lord. De nos Jours , le mot yeoman n'est qu'un
titre d'honneur, donné aux gros fermiers et aux petits
propriétaires fonciers. A l'époque de la Révolution fran-
çaise, on forma en Angleterre, pour la défense des côtes,
une cavalerie qui fut appelée yeomamry, et dans laquelle
entrèrent comme volontaires les plus riches fermiers et
bon nombre de gentilshommes. A Londres on appelle
yeomen un corps de soldats de parade, dont le service se
borne à monter la garde dans la Tour; ils sont armés de
pertuisanes et d'arquebuses, et portent le costume da
temps de Henri Vlil. B.
YOGA. V. iNDiENHB (Philosophie).
YOLE, canot fort léger et très-efiilé, construit pour
marcher à l'aviron plutôt au'à la voile, et qui n'est pas
propre à porter de lourds fardeaux. Dans la Bfarine mi-
litaire, les yoles servent particulièrement aux officiers
supérieurs.
YORK (Cathédrale d'). Une première église fut bâtie à
York, en 627, sur les débris d'un temple païen, par Ed-
win, roi de Norlhumberland ; Oswald, successeur d'Ed-
win, remplaça cette construction, qui était toute en bois,
par un édifice de pierre, qu'un incendie, en 741, puis les
fnrates danois mirent en ruines. Après la conquête de
'Angleterre par les Normands, une nouvelle église, plus
importante que les premières, fut construite par les soins
de l'archevêque Thomas de Bayeux : un incendie la con-
suma encore en 1137. Le monument actuel fut com-
mencé en 1171 par le chœur, auquel on travailla pendant
plus de vingt ans; le croisillon méridional et la salle ca-
pitulai re s'élevèrent dans la première moitié du xiii* siècle,
le croisillon septentrional en 1200, et Ton n'entreprit la
nef qu'en 1291. On reconstruisit le chœur en 1361, dans
un style ogival plus riche que celui des autres parties de
l'édifice, et vers le même temps on éleva la tour cen-
trale. — La cathédrale d York est la plus vaste et la plus
belle de l'Angleterre. La façade occidentale, large de
46 met., est surmontée de deux tours de 58 met. d'élé-
vation. Ce qui en fait la richesse, ce n'est point, comme
ailleurs, la profusion des statues, mais l'adroite combi-
naison des lignes architecturales, la finesse des moulures,
l'abondance et l'heureuse distribution des feuillages et
des fleurons, qui attestent la patience et la dextérité des
sculpteurs. Au-dessus de la porte centrale, s'ouvre , aa
lieu de rose, une grande fenêtre, la plus riche peut-être
qu'il y ait au monde, et dont on voit la pareille au fond
de l'église, dans la muraille de l'Est ; cette dernière, haute
de 25'", large de 10, a des vitraux de covdeur exécutés en
1405 par Jean Thornton de Coventry. Les deux tours sont
partagées en trois étages par des fenêtres élégantes. Une
troisième tour carrée, couronnée de créneaux, s'élève au-
dessus de la croix du transept, à une hauteur de 70*. La
salle capitulaire attenante à l'église est de forme octo-
gone, et a 19*° de largeur; les fenêtres sont divisées par
quatre meneaux très-légers, et terminées à leur sommet
par trois jolies roses, superposées. Le plan de la cathé-
drale d'York est en forme de croix, et à trois nefs : les
collatéraux accompagnent le transept, de la même ma-
nière que la grande nef. Le transept est situé à égale
distance de la façade et de Tabside : celle-ci se termine
carrément. Les dimensions de l'édifice sont considéra-
bles : sa longueur est de 156*", sa largeur de 31" (70"' au
transept), et sa hauteur sous voûte de 33"*. En 1829, la
cathédrale d'York fut incendiée par un stupide matelot
nommé Martin ; elle fut encore la proie des flammes
en 1840, par suite de l'imprévoyance d'un ouvrier: la
restauration est aujourd'hui achevée. Panri les objets
d'art que l'église renferme, on remarque les mausolées
de révêque Scrope et de sir George Saville, et le Jubé,
morceau de sculpture d'une exquise délicatesse, orné
des statues des rois d'Angleterre depuis Guillaume 1"
Jusqu'à Henri VJ. V. Franc. Dradce, Ristorical antiqui-
YPR
1797
YUC
ttês of thê City of York, Londres, in-fol.; Britton, An-
tiquUies eathêdrals of Engiand, in-4°; Wiebekink, les
Cathédrales d'York et de Reims comparées, in-fol. B.
YOROUBA (Idiome), une des langues de la Sénégam-
Die. Son système grammatical est d'une régularité re-
marquable. On y observe un ensemble complet de pré-
fixes qui, en se joignant au verbe, donnent naissance à
une foule d'autres mots : le radical passe ainsi de Tidée
abstraite d*action à toutes les idées concrètes dérivées.
C'est encore l'addition d'un préfixe qui transforme le
substantif en verbe de possession. Un même adverbe
varie de forme et même de nature, suivant l'espèce de
mots qu'il Qualifie. F. Samuel Crowther, A VocabiUary
of tke yoruoa languagej Londres, 1852, in-8°.
YOURTE, nom de la demeure souterraine que se creu-
sent les Kamtchadales pour y passer Thiver. On l*étend
aux villages de Sibérie.
YOUYOU, bateau chinois ordinairement habité par
une famile.
YPRJËS (Hôtel de ville d'), plus connu sous le nom de
Halle aox drapiers, monument colossal, le plus vaste,
le plus commode et le mieux conservé qui existe en ce
genre. II a, dans sa sévère et forte unité, le caractère de
grandeur que les villes du moyen &ge en Flandre impri-
maient à leurs constructions. Sa forme est celle d'un
trapèze irrégulier, de 133 met. de longueur. La première
pierre en fbt posée en 1201 par le comte ikiudouin, qui
devint empereur deConstantinople;mais rœuvre ne lut
achevée qu'en 1342. Un beffroi, tour carrée que flanquent
quatre tourelles, surmonte l'édifice; il passe ])our en être
la partie la plus ancienne. La façade, composée d'un rez-
de-chaussée, avec portiques en arcs-ogives portés sur
des colonnes, a deux étages : entre les fenêtres du l*'
étage on voyait autrefois 12 statues colossales de comtes
et de comtesses de Flandre; des démagogues les bri<i
sèrent en 1792; on les a remplacées depuis par der.
statues modernes. Une aile seulement dp l'édifice sei<(
d'hôtel de ville.
TPRES (Église S*-Martiii, à). Cette église, cathédrale de-
puis 1559 Juscven 1801, est une des plus intéressantes
de la Belgique. Le chœur, qui date de 12*21, est un mor-
ceau remarquable de la transition entre le style roman et
le style ogival ; le transept et les nefs appartiennent au
XIV* siècle, la tour au xv*. L'entrée latérale du Midi est
décorée d'un très-beau porche, surmonté d'une magni-
fique rose. Le chœur renferme la pierre tumulaire du
fameux Jansénius. On voit dans la cathédrale d'Ypres un
Paradis terrestre, tableau en six compartiments, qu'on
a faussement attribué à Jean Van Eyck, et qui parait être
de P. Porbus.
YRMILIK, demi-piastre turque.
YUCATÈQUE (Ungue). F. Mexique (Langues du).
z
ZAM
ZEN
z, 19* consonne et 25* lettre de notre alphabet. Sa
forme a été imitée de celle du dzêta^ 6* lettre de l'alpha-
bet des anciens Grecs, que les Grecs modernes appellent
xita^ et qu'ils prononcent, non plus comme les doubles
ds ou cU, mais comme notre s. Chez les Romains, le Z
se prononçait ds selon Yictorinus, s 5 selon Priscien. Il y
avait, en grec, analogie et permutation entre le delta et
le dzêta, puisque Zeiu (Jupiter) faisait au génitif Dios .
de même, en latin, le D fut quelquefois substitué au Z,
comme dans Medentius pour Mezentius, En français, Z a
le son qui lui est propre dans azur, douze, onze, zigzag,
zèbre, zone, etc. ; mais il prend le son de Vs à la fin des
noms proprei {Coblentz, Cortes, Metz, Rodez) ^ et, dans
d'autres mots, son rôle ne consiste qu*à donner le son
fermé à 1*0 qui le précède (nez, assez, chez, avez, aviez,
aunez, ayez, eussiez) . Il a été autrefois, concurremment
avec Vs, la caractéristique du pluriel : ainsi, on écrivait
beautez, véritez, etc. Le son :: est souvent donné & Vs
dans le corps des mots (buse, chose, Lise, Muse, maison,
misère, peser, usage) ; il appartient aussi à Vs et à Vx
dans les liaisons euphoniques {mes amis, les enfants,
deux arbres, trois hommes, six habits). Par un défaut
de prononciation, les enfants donnent souvent au J le
son du Z (20 zoue, pour je joue)^ et ce défaut a été de
mode au temps du Directoire parmi les Incroyables et les
Merveilleuses. Le Z a, en portugais, le même son qu'en
français ; en espagnol, il se prononce comme le thêta des
anciens Grecs ou le th anglais ; en italien, on lui donne
la valeur tantôt de ts {fazzoletto, mouchoir), tantôt de dx
{mezzo, milieu ) ; en allemand, il a le son ts, et en russe
le son z. L'arabe et l'arménien ont un caractère appelé
za, et qui se transcrit exactement par notre z. Les Po-
lonais emploient le groupe sz pour représenter l'articu-
lation ch, et cz pour l'articulation tch, — Lettre numé-
rale, le dzêta grec valait 7, et, avec un accent en dessous,
7,000. Le Z des Romains représentait 2,000, et, surmonté
d'un trait horizontal (2), 2,000,000. Sur la marge des
manuscrits grecs , un dzêta est l'initiale du mot dzètei
(cherche), et indique qu'à cet endroit le sens ou le texte
est douteux. — Le Z a été la marque monétaire de Gre-
noble.
ZA, nom du si bémol dans le Plain-Chant.
ZAGAIE. V. Sagaib.
ZAHRA (Palais de). V, Alcazaiu
ZAMBO, nom qu'on donne à l*enfant d'un nègre et
d'une Américaine ou d'une mulAtrcssc.
ZAMORIN. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
ZAMPOGNARI. V. Piffbrari.
ZAMR ou ZOURNA, sorte de grand hautbois des
Arabes. On distingue : le grand za/mr ou gabà zournâ,
percé de 7 trous sur le devant et d'un seul en dessous, et
dont on tire deux octaves et une tierce en faisant octavier
l'instrument pour les sons aigus; le zamr moyen, d'une
quarte plus aigu que le grand ; et le petit zamr ou zamr-
el-soghayr, plus élevé d'une quarte que le moyen. On les
joue tous trois avec une anche.
ZANI, personnage niais et bouffon de U comédie ita-
lienne, dérivé du Sannio des Atellanes {V, ce mot), et
analogue à notre Jeannot,
ZAOUIA, nom que les Arabes donnent h. des établisse-
ments qui comprennent à la fois un tombeau de famille,
une mosquée, une bibliothèque, une hôtellerie, un hô-
pital et une école.
ZAPOTÈQUE (Idiome). V. Mbxiqdb (Langues du).
ZARZUELAS, drame lyrique espagnol, qui* ressemble
beaucoup à i'opérarcomique français.
ZÉKAT, aumône légale prescrite par le Moukhtaçar
{V. ce mot). C'était originairement une espèce de taxe
des pauvres, portant sur les biens meubles et immeu-
bles, sur les successions, sur les revenus de toute sorte,
afin de secourir les indigents. Plus tard, la zékat, per-
dant son caractère religieux, fut perçue par les pouvoirs
publics, et appliquée aux besoins administratifs et poli-
tiques. Le Moukhtaçar exclut formellement les chrétiens
des secours provenant de la zékat.
ZEND, une des langues indo-européennes [V. ce mot)^
la souche de la famille iranienne. C'était l'i^ntique langue
des Mages, celle dans laquelle Zoroastre rédigea sa doc-
trine. Elle avait déjà cessé d'être langue vulgaire à l'é-
poque de l'ère chrétienne^ et elle ne subsiste plus au-
jourd'hui que dans la liturgie des Guèbres ou Parsis,
disséminés en Perse et dans l'Inde. Nulle langue n'est
aussi chargée de voyelles, et les mots sont exempts d'as-
piration. On y trouve un a nasal, qui répond à peu près
au son an du français. Le zend présente, comme le sans-
crit et le grec, un a et même un e privatifs. Il a les trois
nombres, mais n'admet pas la distinction des genres
grammaticaux, ni l'article défini. On n*]r remarque
pas de prépositions proprement dites, mais un grand
nombre d'afiixes à l'aide desquels on forme des espèces
de cas dans les noms. Le zend possède, après le grêc et
le latin, l'écriture la plus rigoureusement alphabétique
que l'on connaisse. Il s'écrivit d'abord avec les caractères
cunéiformes ( V, ce mot ) : aujourd'hui son alphabet rcs-
scmllc au clialdécn par la furmc des caractères, et il
ZEN
1798
ZEN
é*^rit de droite à gaache; mais il reproduit les voyelles
usitées en Europe et toutes les articulations du sanscrit.
Cet alphabet se compose de 43 lettres, dont 30 consonnes
et 13 Yoyelles ; Tarticulation que nous rendons par la
lettre / y fait défaut, et est remplacée par r. V. Burton ,
Historia «efem linguœ Persicœ, Londres, 1657 ; Paulin
de Saint -Barthélémy, De antiquitate linguœ Zendicœ,
Rome, 1708; Rask, SurVâge et lé caractère original de
la langue zende, en allem., Berlin, 182G, in-8<'; De Boh-
len, Ùe origine linguœ Zendicœ, dans le Journal des
Savants d'août 1832; J.-A. Vullers, Institutiones linguœ
Persicœ cum Sanscrità et Zendicà linguà comparatœ ,
Giessen, 1840; Fr. Bopp, Grammaire comparée du sans-
crit, du %end, etc., en allem., Berlin, 1833-42, in-4<>;
Eug. Burnouf, Commentaire sur le Yaçna, Paris, 1833,
2 vol. in-4<*, et Études sur la langue et les textes lends,
dans le Journal Asiatique, 184(M4.
ZEND-AVESTA, collection des écritures sacrées des
Parses, aussi nommés Parsis ou Guèbres, qui en attri-
buent la rédaction à Zoroastre (7. ce mot dans notre Die-
tionnaire de Biographie et d^ Histoire). Une partie de cette
collection, le Vendidad, fut apportée en Europe en 1723,
et déposée à la bibliothèque d'Oxford, où elle demeura
sans pouvoir étro lue de personne. Ce fut pour en étudier
la langue et en donner la traduction qu'en 1754 An-
quetil-Duperron entreprit le voyage de Tlnde, d'où il
rapporta, entre autres livres, le texte du Zend-Avesta,
avec une traduction française faite sous les yeux des
destours parsis, et publiée en 1771. VAvesta se compose
de deux ordres d'ouvrages : le Vendidcui-sadi et le Boun^
dehech. Le Vendidad-sadé comprend lui-môme trois
écrits : le Vendidad proprement dit, le Yaçna nommé
en persan Iseschné, et le Vispered; à ces livres fonda-
mentaux sont annexés les lechts et les Sirouzé. Le
Vendidad-sadé est écrit en langue zende. Le Boundehech,
beaucoup plus récent, est en péhlvi; mais il passe,
assertion douteuse, pour être la traduction d'un livre
zend dont l'original n'existe plus.
Quel que soit le temps où l'on fasse vivre Zoroastre et
où l'on reporte la rédaction définitive de VAvesta, il est
certain que les doctrines contenues dans ces livres étaient
admises dans l'Asie centrale à une époque fort reculée et
longtemps avant Darius, flls d'Hystaspe; les Mages, qui
étaient les prêtres de cette religion, sont de beaucoup
antérieurs a la dynastie Achéménide : Zoroastre n'est
donc pas l'auteur premier des dogmes iraniens, mais on
peut dire qu'il les coordonna et leur donna un ensemble
délinitif. Les croyances de VAvesta n'étaient pas seule-
ment celles de la Perse, ni même de la Médie; elles
étaient, sauf les points de dissidence, communes à la
plupart des peuples de l'Asie centrale situés à 1*0. de la
Bactriane , et elles s'étendirent à presque toute l'Asie
Mineure : croyances pleines de grandeur et de pureté ,
dont la connaissance nous montre dans les Perses, non
des barbaces, mais des peuples doux et pieux, parvenus
à une haute civilisation. Dans la suite, les doctrines de
VAvesta se divisèrent et s'amoindrirent, abaissées par les
superstitions populaires; et lorsque le monde romain,
las d'un polythéisme usé, chercha dans l'Orient des
dogmes réparateurs, il n'emprunta de la Perse qu'une
partie de la religion de Zoroastre, le culte de Mithra. —
Le nom des Mages ne vient pas du sanscrit maya (illu-
sion magique) ; les Mages n'étaient pas des magiciens :
leur nom dérive de maida, nom zend d'Ormuzd (Ahura-'
mazda ), lequel parait signifier la Suprême Intelligence,
Quant au nom de Zoroastre, en zend Zarathustra^ le
sens n'en est pas encore éclaird ; mais à coup sûr il ne
signifie pas astre de vie.
Les éléments dont se compose la doctrine du Maz-
déisme ou Magisme ne sont pas empruntés aux livres
hébreux, comme on a pu le croire au siècle dernier, dans
un temps où ni l'Inde ni ses livres sacrés n'étaient con-
nus : les traits de ressemblance entre le Mazdéisme du
Vendidad et le Judaïsme, traits d'ailleurs fort rares, sont
tout extérieurs, et n'atteignent le fond des doctrines que
si on les dénature par des interprétations systématiques.
Les anciennes croyances de l'Iran, de la Perse, ae la
Médie et des autres contrées où s^étendit le Mazdéisme,
tirent leur origine de la Sogdiane et de la Bactriane, et
elles ont, comme le Brahmanisme, leur point de départ
et leur point d'appui dans le Véda {V. ce mot)\ non-seu-
lement la langue zende est venue de la langue védique
comme le sanscrit, mais la plupart des êtres divins, des
dogmes et des usages religieux contenus dans VAvesta
descendent directement de ceux qifl sont célébrés dans
les Hymnes védiques. Il ne faut donc voir ici que le
grand fait admis désormais par les asvants, cefid de b
séparation dernière des peuples aryens et des religioQs
asiatiques dont les origines se retrouvent également <hn
ce recueil sacré; séparation qui, entre autres choses, pro-
duisit, d'une part, le Brahmanisme dans rinde, eu de
l'autre, le Magisme dans l'Asie centrale. Les traces de
cette division se rencontrent à chaque pas dans VAvesta-
on y voit que non-seulement ces deux rameaux de li
race blanche, les Ar^'as et les Iraniens, ont pris lear di-
rection en deux sens opposés, mais que, s*étant établii
dans deux vastes contrées voisines l'une de Tautrejls
sont demeurés dans un antagonisme perpétuel. Otte
hostilité, soutenue par d'antiques traditions et consacré?
par les croyances religieuses, les peuples médo-persiqnei
l'ont portée dans leurs relations avec les races grecques,
dans le polythéisme desquelles ils ont yu une doctrias
analogue à celle des Aryas de l'Inde. Quant aux Hébrcnx,
à leur Loi et à leur Dieu, il n'y est fait aucune allus^
dans VAvesta.
Le Zend-Avesta roule principalement sur le dogme et
sur le culte : il ne contient pas, comme les lois de Masa,
toute une organisation sociale, politique et cÎTile; il o'y
est parlé de la royauté, des castes et des autres éléments
de la société iranienne que par allusion et comm# de
faits existants et non contestés; c'est donc la relizîoi
des anciens Perses et des peuples voisins que Ton y d^lt
chercher avant tout. Malgré l'obscurité qui règne encore
sur beaucoup de points, on peut dire que cette religtos
n'est pas le dualisme, comme ont pu le faire croire et le
culte de Mithra qui en descendait , et le Manichéisme,
véritable Mazdéisme réformé. Mais nous admettons moios
encore qu'elle soit analogue à la doctrine chrétienne, et
qu'elle pose comme son point de départ le dogme de it
création. Le Zervane-akerene , premier principe des
choses, n'est pas un être vivant et agissant , comme le
Dieu des Juifs et des chrétiens ; c'est une conceptioa
toute métaphysique; qu'on lui donne le nom d'ftenMi.
d'Injini ou d'Être absolu, il n'arrive à produire ouèlqQs
chose qu'en se développant sous une forme définie et
personnelle, que les peuples de langue zende nommerez
Ahura-mazda (Ormuzd^ et qui est le véritable créateor.
Il n'y a dans cette doctrine encore vague que le pendant
de la doctrine indienne des deux Brahma (K. Bbahmi-
nisme), c.-à-d. le fond même du panthéisme; et si roo
demande l'origine de cette première idée qui de la Perse
s'étendit dans l'Asie Mineure et dans la Grèce et Tint re-
vivre dans Platon, il la faut chercher dans le Rig-vêda.
Mais on doit observer en même temps que le principe
abstrait des êtres ne parait presque Jamais dans les
livres saints de l'Iran, qu'on ne lui offre aucun sacrifice,
qu'on ne lui adresse aucune prière; culte inutile, eo
effet, puisque ce principe, absolument immuable, n'e^
là que pour expliquer l'existence du créateur Ormuzd.
Ormuzd est le premier être issu du principe éternel ,
et, par conséquent, n'est pas l'être absolu lui-même. H
n'est pas non plus le feu ni le soleil, comme on Ta dit,
et c'est une erreur de regarder les anciens Perses comme
des adorateurs du Feu. Ormuzd est le premier des
Amschaspands {Amscha^penta, Saints Immortels), le
seigneur de la science, le principe actif de tout bien et
l'origine de la vie; s'il a pu être pris pour le soleil , c'est
qu'en effet cet astre est son emblème, puisque de lai
émanent la lumière qui donne la connaissance des objets
et la chaleur qui nourrit les êtres vivants ; aussi Ormuzd
est-il appelé seigneur de la lumière, et dit-il de lui-
même qu'il était avant que le ciel fût , avant le feu, l'eso,
la terre, les arbres et les troupeaux, avant l'homme, avant
les esprits purs et les esprits impurs. Cet agent suprême
de la création est véritablement le principe de tout le bien
qui s'y trouve, bien physique et bien moral ; non-seal^
ment il est l'auteur de la lumière et de la vie, niais il
est le foyer d'où émanent, avec la science, la bonté et It
sagesse, la loi , la pureté, le bonheur et la vie étemelle.
Ahriman, né en même temps qu'Ormuzd, est son plus
pul8&:mt ennemi , mais non son égal. A ce dernier trait,
on reconnaît une doctrine qui n'est pas absolument dua-
liste, puisque la lutte des deux principes n'est ni égale, ni
éternelle. Le nom d' Ahriman [Aghr&-mainifas) signifie
proprement Esprit malin, et n'a, par conséquent, au-
cune analogie avec le nom védique d'Aryaman. L'Esprit
mauvais des Iraniens est, au moral, la cause active de
l'ignorance et de l'erreur, de la malice et du mensonge,
du vice et du crime ; c'est le tentateur ; au physique, i!
est l'auteur de tout ce qui souille, attaque ou détruit les
hommes, de leurs souffrances et de leurs malheurs.
Quand Ormuzd créa le paradis, Ahriman fit l'hiver
ZEN
1799
ZEU
quand Ormuzd créa la Sogdiane et son fleuve purificateur
le Çugda, Âhriman y produisit les émanations pestilen*
tielles, les insectes malfaisants, les animaux impurs et
les plantes vénéneuses. C^est pour <|ue Thomme pût sou-
tenir la lutte contre cet ennemi puissant qui parcourt la
terre de Tlran, qu*Ormuzd a donné primitivement à
Djem-schid (en zend Yima-khchaétô, qui est Yama, fils
de Vivaswat) les livres de la Loi et lui a enseigné le sa-
criflce {yaçna).
Au-dessous d*Ormuzd sont les six autres Amschas»
pands, dont il est à la fois Tauteur et le chef. Ces esprits
célestes le secondent dans Tœuvre du bien et dans la
lutte contre le mal. Le créateur a partagé entre eux la
terre et le temps ; ils protègent la terre, et président aux
différentes parties de la durée, comme aussi aux organes
du temps, qui sont les astres ; par eux arrivent aux êtres
d*ici-bas les biens de toute sorte dont Ormuzd est la
source première, biens de l'&me et du corps i ce sont eux
aussi qui dirigent les grandes révolutions périodiques du
ciel , les mouvements du soleil , de la lune et des pla-
nètes, la distribution de la chaleur et de la lumière dans
Tespace, les jours, les mois, les années ; les sept premiers
jours du mois leur sont consacrés. Les Amschaspands
ont pour rivaux les Darvands^ dont Ahriman est le chef,
darvand lui-même : à chaque œuvre bonne que les
grands Esprits célestes accomplissent, les Darvands op-
posent une œuvre mauvaise ; les désordres de la nature,
dont l'homme et les êtres purs sont les victimes, la nuit,
rhiver, le froid , les guerres impies, les grands crimes,
tous ces maux sont suscités par les Darvands, sous la
direction d'Ahriman. — Ormuzd préside à toute une hié-
rarchie d'esprits célestes, et Ahriman à une hiérarchie
d'esprits mauvais : les Amschaspands ont en effet pour
ministres les heds (en zend Tazatas, c.-à-d. à qui Ton
sacrifie), dont le nombre est plus grand et 1 empire
moins étendu; et les Izeds ont eux-mêmes pour les se-
conder la foule immense et variable des Ferouers (en
zend Frawicin)^ types divins des êtres intelligents et
anges gtirdiens de chacun d'eux. Tous ensemble ils for-
ment une milice céleste, dont plus d'une religion et plus
d'une philosophie nous offrent l'analogue; elle sert, dans
la cosmogonie irinienne, à expliquer cette variété in-
finie de biens dont la nature est remplie ; la hiérarchie
des chefs, obéissant à l'ordre suprême de la première in-
telligence , Ormuzd , en explique l'harmonie et l'unité.
Mais de même qu'à chaque bien moral ou physique est
opposé un mal , Ahriman , pour le produire, a mis sous
Tempire des Oarvands la troupe innombrable des ûews
fen zend Daéva),
Tel est l'ensemble de la cosmogonie contenue dans.
VAvtsta. Le culte rendu aux esprits célestes y est égale-
ment exposé et presque interprété. Ce culte, qui consiste,
avant tout, dans le sacrifice (yopnaj, est donné dans
VAoesia, non-seuiement comme enseigné par Ormuzd à
l'antique Djem-schid (Yama) , mais comme pratiqué par
Ormuzd lui-même et par les esprits célestes. C'est le sacri-
fice védique dans son essence : il consiste dans une offrande
présentée à la divinité, consommée par la bouche du
prêtre et de l'assistance, et accompagnée de prières litur-
giques. Le lieu du sacrifice fqui n'est Jamais un temple),
les jours et les heures, sont fixés d'avance; le feu sacré
destiné à préparer le corps de l'offrande, les ustensiles et
vêtements nécessaires pour la cérémonie, sont entretenus
par les prêtres, qui sont en même temps les défenseurs
et les interprètes de la loi , les chefs des fidèles et les
ministres du sacrifice. Le corps de l'offrande, créé jadis
par Ormuzd, représente la double source de la vie maté-
rielle, le suc des plantes et la chair des animaux. Le sa-
crifice védique du cheval, l'antique asvamidha, noii«
montre peut-être l'origine de l'offrande de chair dans les
cérémoniM iraniennes; mais ce qui est certain, c'est que
l'offrande du hôm (en zend, haâma)^ prescrite par
VAvesiaj n'est autre que l'offrande védique du sôma, suc
de l'asclépiade acide : le nom, la préparation, les instru-
ments, le vase de l'élévation , les vertus mystiques de
cette liqueur, tout est identique dans les deux religions
issues du V^, Cette pensée même que le hôm est offert
dans le ciel par les plus grands esprits divins n'appar-
tient pas moins à l'Inde qu'à l'Iran, car elle fait partie
essentielle des institutions religieuses du Véda, — Le feu
fait aussi partie du sacrifice, non pas seulement comme
purificateur, rôle qui appartient surtout à l'eau bénite,
mais parce qu'il est l'instrument du sacrifice et l'agont
réel de la vie. Fils d'Ormuzd, et produit dès l'origine des
choses, il servit à Vivangham, père de Djem-schid ( VwaS'
wat , père de Yama ), à pr^'parer le corps du sacrifice,
c-a-d. le hôm ei les gîLtcaux sacrés. Mais ce feu avait été
lui-même précédé par la prière nommée honovêt, qui est
la propre parole d'Ormuzd. Aussi, de même que le hôm
et le reste de l'offrande, la prière exerce pour le bien des
hommes une influence toute-puissante. La prière s'adresse
à chacun des esprits célestes, mais elle commence et finit
toujours par une invocation à Ormuzd, dont ils ne sont
que les agents, et auquel on demande la pureté de pen-
sée, de parole et d'action, l'obéissance à la loi et le ciel ,
Téloignement d'Ahriman et des ministres du mal. La
prière peut se réciter ailleurs qu'au jour et au lieu du
sacrifice; elle embrasse toute la vie du Parse; VAvesta
contient des prières pour toutes les circonstances impor-
tantes de la vie, et pour celles qui reviennent périodique-
ment chaque jour, chaque mois, chaque année; c'est à ce
titre surtout , et pour sanctifier la vie entière, que la loi
de Zoroastre attache une si grande importance aux divi-
sions du temps : à chacune d'elles est attaché un esprit
divin, Âmschaspand, Ized tm Ferouer, et à chacune se
rapporte une prière; le Parse yrie à son lever, avant et
après son repas, à son coucher ; k naissance, le mariage,
la mort, ne s'accomplissent point sans un acte pieux ; on
prie pour les morts, et VAvêsta dit que cette prière allège
Eour eux les peines de l'autre vie, hâte leur résurrection
ienheurcuse, et prépare la conversion d'Ahriman. La
pureté en toutes choses est le but moral qui semble avoir
le plus préoccupé le législateur de l'Iran ; à cette pensée
se rattachent non-seulement beaucoup de vertus admi-
rables qu'il exige des fidèles, mais une foule de pratiques
purificatoires dont il donne les règles.
La religion de VAvesta reconnaît pour son point de
départ géographique la Sogdiane, d'oà elle s'est répandue
dans l'Iran et dans une grande partie de l'Asie occiden-
tale. La montagne sainte, œuvre et séjour d'Ormuzd, au-
tour de laquelle çravitent les^ astres, organes du temps,
est appelée Borij ou Albordj par les Persans, et en zend
Berezat , d'oô les Grecs ont tiré le mot Bérécynthe, Cette
montagne fait partie de la grande chaîne de l'Elbourz, à
laquelle se rattachent vers l'est le Mêrou et l'Himalaya, et
qui , vers l'ouest, se termine au grand Olympe. C'est sur
ces sommets purs et exempta des intempéries d'ici-bas,
que, chaque jour, Mithra, Ized du Soleil, offre le sacrifice
éternel ; c'est là qu'Ormuzd l'a établi pour être le média-
teur entre les hommes et lui-même. De là découle la
source sainte Ardviçur, origine des fleuves purificateurs.
Là doivent se réunir, au jour de la grande résurrection ,
les justes conduita par les Izeds; ils y seront suivis par
les méchante que le feu et la douleur auront purifiés;
Ahriman lui-même, avec les Dews et les Darvands, offrira
le sacrifice; tous les êtres entoureront le trône d'or d'Or-
muzd à côté des Amschaspands ; et de ce jour 1» monde
purifié commencera une nouvelle existence. V, Anquetil-
Du perron, traduction d\i Zend-Avesta, Paris, 1771; le
même, trois Mémoires dans le Recueil de VAccuiémie des
Inscr. et belles-lettres, t. XXXIV, XXX VH etXXXVIlI;
l'abbé Foucher, Traité historique de la religion des Perses,
dans le même recueil , t. XXV, XX VII et XXIX ; Pastorct,
Zoroastre. Confudus et Mahomet, 1787, in-8<^; Eug.
Burnouf, Commentaire sur le Yaçna, Paris, 1833^ 2 vol.
in-4<^ ; Reynaud, art. Zoroastre, dans V Encyclopédie not^
velle; Pavie, Mémoire sur les Parsis, dans le t. l*' du
Recwil de la Société ethnologique de Paris; De Hammer,
Mémoire sur le culte de Mithra , publié par J. Spencer
Smith, Paris, 1833, in-8<* ; Lajard, Recherches sur le culte
public et les mystères de Miihra, Paris, 1847-48, in-fol.
et in- 4^. Des éditions complètes du texte original de
VAvesta ont été commencées avec traduction anglaise par
Westergaard (Copenhague, 1852), et avec traduction alle-
mande par Spreger (Leipzig, 1853). Olhausen a publié le
Vendidad, et Mfiller une traduction du Boundehech, En. B.
ZÉPHYRS , troupes d'Algérie. V. ce mot dans notre
Dictionnaire de Biographie et d'Histoire.
ZÉRO. En Musique, le zéro placé au-dessous d'une
note, dans une partie d'instrument à cordes et à manche,
indique que cette note doit être attaquée à v\de.
ZÉTÉTIQUE (du grec zétéô, le cherche), terme peu
usité de Philosophie, par lequel on désigne toute mé-
thode d'invention ou de recherche, et spécialement la
méthode analytique.
ZEUGITES. y. ce mot dans notre Dictumnatr» de Bto-
graphte et d^ Histoire,
ZEUGMA , figure de Rhétorique dont le nom, tiré d*un
verbe grec qui veut dÏTQ joindre { zeugnumi ), signifie pro-
prement ionctton ou plutôt jointure. Ce terme s'applique
aux constructions dans lesquelles un seul et même mot
domine une série de membres de phrase devant chacun
«IN
1^00
2YII
desquels, pour ane régularité rigoureuse, il devrait être
répété. Cette figure est donc une variété de Tellipse. En
voici des exemples : « Si ses sujets, si ses alliés, si VÊglisB
universelle a profité de ses grandeurs, etc. » (Bossuet. )
Je les peins dans le meurtre à renrl triomphante,
Rome euti^re noyée au eaug de aee enfitata ,
Les vm aaaaasinëa.......
(COBNBILLS.)
D'autres fois le zeugma consiste ^ mettre un mot , qui a
plusieurs compléments, en rapport seulement avec un
seul. Ainsi, Boileau a dit : « de mérite et d'honneurs re-
vêtu, n quoique ce participe fasse avec mérite une alliance
incohérente; mais, de fait, la phrase équivaut à « revêtu
d'honneurs acquis par son mérite ; » et ailleurs :
£t la faux d la main, parmi voa marëeagea,
Allez couper vos joncs et presser vo* laitages.
Le zeugma fait généralement dans les langues anciennes
un plus heureux effet que dans le français, grâce à la fa-
cilité des inverslous et à la variété des cas. Les gram-
mairiens anciens, mais seulement au point de vue de la
construction même, avaient distingué trois espèces de
zeugma : le protozeugma, lorsque le mot dominant était le
premier; le mesozeugma, lorsque ce mot était placé dans
le corps de la phrase ; Vk\fpo%euQmat lorsque le mot do-
minant se trouvait à la fin de la phrase. P.
ZÉZAYEMENT, vice de prononciation qui consiste à
remplacer Tarticulation du ^ ou du g doux, quelquefois
même du ch, par celle du % : ptxon, xuzube, pour pigeon,
jujube,
ZIGEUNES, ZINGANES ou ZINGARI (Langue des).
V, BORéMlBNS.
ZIGZAGS , ornement d'Architecture, suite de chevrons
formant des angles alternativement saillants et ren-
trants. — Dans la Fortification, on donne le nom de
iigzags k des tranchées peu larges, formant une suite
d'angles aigus, et tracées de manière à ne pas rencon-
trer la face des ouvrages qu'on attaque.
ZIKRE, o^«'émonie religieuse expiatoire des Musul-
mans.
ZINCOGHAPHIB, procédé qui consiste à substituer le
sine à la pierre pour çraver et imprimer des cartes géo-
graphiques ou des dessins. La zincographie a été inven-
tée en 1828 par Brugnot, et pratiquée avec succès pu
Kœppelin.
ZINZAR (Dialecte). V. Rodmanb (Langue).
ZITHER, instrument de musique à cordes pincées,
originaire de la Hongrie, et fort à la mode aujonrd'hoi eo
Hongrie, en Bavière et dans les provinces rhénanes.
ZODIAQUE, j K. ces mots dans notre Dictioimain
ZOLLVEREIN. ] de Biographie et d^ Histoire,
ZONE ( du grec %onè, bande) , nom donné à des bandes
circulaires que les géographes déterminent suf la surface
terrestre. Il y en a cinq : la zone torride ou intertropi-
cale, qui s'étend à 23 degrés et demi de chaque côté de
l'Equateur Jusqu'aux Tropiques; la zone tempérée septen-
trionale, entre le Tropique du Ûuicer et le Cer\.Ie polaire
arctique, et la zone tempérée méridionale, entre le Tro-
λique du Capricorne et le Cercle polaire antarctique,
arges de 43 degrés chacune; les deux zones glaciales,
comprises , Tune dans l'hémisphère septentrional de la
terre entre le Cercle polaire arctique et le Pôle nord, l'au-
tre dans l'hémisphère austral entre le Cercle polaire an-
tarctique et le Pôle sud, ayant chacune une largeur de
23 degrés et demi,
xom ni SERvmjDB, xonb fbontiêiib. F. Sbb^ttcdes
MILITAIRES.
ZOOLATRIE , culte des animaux. V, AimiAux.
ZOOUQUE , bateau à manège inventé par Guilbaud
de Nantes, en 1822.
ZOOPHORE. V, Frise.
ZOTHECA. V, Alcovb.
ZOUAVES. V, ce mot dans notre Dictionnaire de Bio-
graphie et d'Histoire,
ZOUGGARAH, instrument de musique des Arabf?s.
C'est une sorte de cornemuse composée d'une peau de
bouc et de trois bouts de roseau , percés tous trois de
quatre trous qui peuvent donner chacun quatre sons
différents.
ZOULOU (Idiome), un des idiomes cafres(V. ce mof).
Il en existe un Vocabulaire dans le tome II du Voyagt
dans V Afrique australe par Delegorgue, Paris, 1847.
ZOURNA ou ZURNA, instrument de musique. V.Imkl
ZWANZIGER (de l'allemand zwanzig, vingt), pièceàe
monnaie autrichienne, valant 20 kreutzers, ecTiroi
80 centimes.
ZYGITES. ^. Navales (Construction»).
ZYRIANE ou ZYRIÈNE (Idiome^. V, SiRibii.
DICTIONNAIRE
DES LETTRES
DES BEAUX-ARTS
ET
DES SCIENCES MORALES ET POLITlQUiES
SUPPLÉMENT A LA SEPTIÈME ÉDITION
REVU ET AUGMENTÉ.
ACCOLADE, signe orthographiqae qui sert i réunir
plusieurs articles en un tout, ou à montrer, en les rap-
copistes arrivaient à la fin d*une ligne, pour ne pas
porter à la ligne suivante un mot qui complétait le sens,
ils le plaçaient sous le dernier mot de la ligne avec une
accolade, afin d*indiquer qu'il appartenait A cette ligne.
AGE DE PIERRE, nom donné, en archéologie, aux
siècles primitifs de l'humanité, durant lesquels la pierre
servit presque exclusivement à façonner des armes et
divers ustensiles. On divise ce premier âçe en hge de
la vUrre hrtUe ou paléolithique et &ge de la pierre
pone ou néolithique. L'homme se fit d'abord une sorte
de poignard avec une pointe d'os ou de corne, ou avec
un éclat de silex: plus tard, sivec divers cailloux, A
l'aide du choc ou du frottement, il façonna des dagues,
des haches, des pointes de flèches ou de lances, des
{>ierre8 de frondes. Les premiers spécimens d'armes de
'Âge de pierre nous sont venus de la région Scan-
dinave ; ils furent trouvés dans les cavernes àossements
et dans les amas côtiers (/EJoeA^lESfifiioecUmors). Le Dane-
mark, en outre des pièces dont il a enrichi la plupart
des collections de l'Europe, possède à peu près
35,000 instruments de silex; le musée de Stockholm en
renferme 16,000 environ. On a trouvé aussi des monu-
ments de l'âge de pierre en Irlande et en Suisse, quand
on a découvert dans la tourbe les habitations lacustres
(voir ce mat), ainsi que dans les tumuli de l'Esthonie, de
la Livonie et de la Gourlande, dans le bassin français
de la Somme, en Espagne et en Italie.
A l'Age de pierre succéda Vàge du hronxs ou âge
celtique, qui, à son début, se confond avec celui de la
Eierre polie. L'homme alors employa le bronze pour
L fabrication de ses armes, de ses instruments de tra-
vail.
en
relativement
en Europe par les premières invasions aryennes(20 siècles
av. J.-G.). Sa durée a été aussi relativement très
courte.
Vàge du fer est le troisième Age de l'humanité. Ce
n'est réellement qu'A partir de cette épo(][ue que l'homme
a pu marcher A grands pas dans la civilisation. Le feu
et les métaux ont été les éléments primordiaux du
(progrès : sans l'un, l'homme ne serait Jamais sorti de
'état de la brute ; sans les autres, il ne serait jamais
âle
sorti de l'état sauvage. V. Joseph de Baye, l^Archéo-
logie préhistorique, 1861, et plus loin Gbrmaui (Sanrr-)
AGENCES MATRIMONIAIJBS. Ces institutions sin-
gulières sont de date récente. En 1732, un bourgeois de
Hambourg imagina d'ouvrir un bureau où l'on signa-
lait les partis disponibles ; il lançait de temps en temps
des avis, mais ne négociait pas lui-môme les mariages.
La première agence régulièrement constituée fut fondée
A Paris, sous le Directoire.
AGRIMENSORES, collection de 16 auteurs latins, qui
ont écrit autant de petits traités ou de fragments sur
l'arpentage. Goos, en latin Goesius, en a donné une
édition avec notes, observations^ glossaire, etc. {Rei agi a-
riœ auctores, cum antiquiteUtbus et legUnu agrariisy
Amsterdam, 1674, in-4*, avec planches) , édition ren-
due inutile par celle de Lacnmann (Berlin, 1848).
Ces divers ouvrages, assez arides en eux-mêmes, ont une
certaine importance par les détails que Ton y rencontre
touchant l'histoire de la constitution et de la législation
romaines. Le nom d^Agrimensores, pris du sujet de ce
recueil, a prévalu parmi les philologues. La plupart de
ces auteurs sont inconnus : il y a dans la collection un
Traité de l'empereur Arcadius. CD-— r.
ALEXIS (Saint), un des plus anciens poèmes de
notre langue, antérieur A la Chanson de Roland et
datant du xi* siècle; découvert A Hildesheim (Hano-
vre) et publié par M. Wilhelm Maller en 1845 ; une
édition définitive a été publiée par MM. Gaston P&ris
et L. Panier dans la binliothèque de l'École des hau-
tes études (1872). Ce poème se compose de 625 vers,
répartis en 125 strophes de 5 vers decasyllabiques, et
assonant sur la même voyelle. Il a été composé d'a-
près une vie latine de saint Alexis, publiée dans les
Acta sanctorum. Il raconte comment Alexis, fils unique
d'un grand seigneur de Rome, ouitte sa famille la
nuit même de son mariage pour aller vivre en men-
diant en Asie Mineure; désigné par un miracle A la
vénération du peuple, il s'enfuit, et, poussé par la tem-
pête, revient après 17 ans d'absence A Rome, où il va
demander l'hospitalité A son père qui ne le reconnaît
pas ; il vit lA dix-sept ans encore, dans les mortifi-
cations et les prières, assistant au désespoir de sa
mère, de sa femme et de son père qui ne sont pas
encore consolés de sa perte, sans que sa constance en
soit ébranlée un moment. Épuisé d'austérités, il
meurt enfin après avoir écrit le secret de sa vie. Un
miracle le fait reconnaître au pape Innocent et aux
deux empereurs de Rome, Arcadius et Honorius. qui
114
AQU
— 1802 —
ARM
le fODt enterrer aver pompe au milieu des adorations
de la fouie et de la désolation de ses parents. Ce poème,
outre son importance comme teite de langue, est
d*une Taleur littéraire hors ligne, par la sobriété et la
plénitude de l'expression, par Ut hauteur des senti-
ments et en certains pa88ag:es le pathétique éloquent
(plaintes de la mère d'Alexis]. Il occupe dans la poé-
sie religieuse une place aussi haute que Roland oans
la poésie épique. — La légende latine, sur laquelle est
fondé le poème français, repose sur une légende grecque
qui est elle-même d'origine syriaque. Le texte syriaque
a été publié par H. Amiaud avec tradaciion française
dans la bibliothèque de l'École des hautes études, 1882.
ALINÉA, disposition orthographique qui sert à sépa-
rer les diverses parties d'un' texte. Elle date de Pinven-
tion de Timprimerie. On distingua d'abord les Alinéa
alignés, qui étaient de niveau avec les autres lignes de
la page ; les Alinéa saillants, qui dépassaient de quel-
ques lettres'les autres lignes; et les Alinéa rentrants,
(Jui laissaient un espace Tibre au commencement de la
ligne. Ces derniers sont seuls usités aujourd'hui. Aupa-
ravant on marquait les divisions d'un texte au moyen de
signes conventionnels, qui variaient saivant les copistes.
AMBOTRACE, nom donné à un instrument qui per-
met d'écrire simultanément, sur des papiers séparés,
deux copies du même texte. Des ambotraces ont été
inventés par Gotteneuve à la fin du xviii* siècle, puis
par Lhormite, La Chabeaussière, Obrion, etc. Les pro-
cédés autographiques ont été préférés.
AMORCES ou Capsclbs db gobrab. En 1610, l'écri-
vain militaire Rivault proposa d'employer l'or fulminant
pour mettre le feu aux armes de guerre. Cette idée
passa inaperçue et ne fut reprise que dans notre siècle,
a l'époque de l'invention delà platine à percussion. Le
chlorate de potasse et l'argent fulminant furent d'abord
expérimeniës, mais sans succès. Puis le mercure fulmi-
nant fut employé sous forme de pastilles ou de globules.
L'idée de l'enfermer dans une petite capsule de cuivre
naquit en AngleterrOt vers 1818, et cette invention fut
introduite en France, en 1820, par l'armurier parisien
Deboubert. On commença par fabriquer les amorces
fulminantes au balancier et à l'aide de procédée très
lents; mais, en 1842, le capitaine d'artillerie Humbert
inventa une machine qui, mue par un seul homme,
produisait chaque jour dO,000 amorces.
ANDRICNNE, nom donné, au commencement du
xvui* siècle, à un vêtement de déshabillé pour femmes,
consistant en une robe longue, ouverte et abattue. Ce
vêtement avait été imaginé par la comédienne Dancourt
pour jouAr dans VAndrienns de Térence, traduite par
Baron.
AQUED€G DE LA Dhdts. — Cet aqueduc, qui amène
des eaux pures à Paris, a une longueur de lo9 kilom.
II prend naissance à Pargny (Aisne), traverse les dép.
de l'Aisne, de Seine-et-Marne, de Seine-et-Oise et de
la Seine, et aboutit au réservoir de Ménilmontant. Il est
construit, partie en maçonnerie (118 kilom.), avec pentes
régulières de 0'",10 par kilom., partie en siphons ou
conduites forées en fonte franchissant les vallées, avec
charge de 0'",55 par kilom. L'aqueduc maçonné a été
construit en souterrain sur une longueur de 10 kilom.;
les principaux souterrains sont ceux de Montmeoard,
Montretout, Monceaux et Qûincy, qui ont de 700 à
2,000*" de développement. Les principaux siphons sont
ceux du Petit-Morin, du Grand-Monn, de la Marne et
de Villemonble, qui ont de 1,000 i 4,500*" de longueur.
Le réservoir de Ménilmontant est divisé en deux étages.
L'étage supérieur a le plan de son trop-plein à lOS"*
au-dessus du niveau de la mer, et il reçoit les eaux de
source. Sa capacité est de 100,000°* cubes (ou 100 mil-
lions de litres) ; la profondeur de l'eau y est de 5 "*. Il
est recouvert d'une couche de terre engazonnée, qui
maintient le liquide à une température constante et
suffisamment fraîche. Entre les piliers en maçonnerie
hydraulique qui supportent le radier et les murs d'en-
ceinte du réservoir supérieur, est établi le réservoir infé-
rieur, dont la capacité est de 30,000<" cubes, et qui
reçoit les eaux de la Marne amenées de Charenton et
montées par les machines de Saint-Mau«*. A Belleville,
point plus élevé que Ménilmontant. on a construit un
autre réservoir, qui reçoit les eaux du premier à l'aide
d'une machine à vapeur de 15 chevaux de force, et oui
est également fractionné en deux étapes, l'un pour ies
eaux de source, l'autre pour les eaux de rivière. On est
sinsi à même d'affecter spécialement les eaux de source
aux usages domestiquesi et de restreindre l'emploi des
eaux de rivière aux services publics (fontaines rnoon-
mentalcs, squares, arrosages de la voie, etc.). Les tn-
vaux de l'aqueduc furent commencés en 1863, et lei
eaux arrivèrent à Ménilmontant en 1865. On a emploré
100,000" cubes de pierre, 88,000» de sable, 38 million
de kilogr. de ciment, 10 millions de kilogrr. de foote,
140,000 kilogr. de plomb. Les premiers devis portaient
le coût du travail à 40 millions de francs.
ARMÉE. — AlUmagnê. ~ Le chef de l'armée tHe-
mande est le roi de Prusse. Dans la oionarchie fédé-
ra tive que forme actuellement l'empire d'Allemagne,
lea liens militaires qui attachent les États allemandi
à la Prusse sont de diverses espèces et partagent ceui-ci
en groupes distincts. Les rois de Saxe, de Wo^
temberg et de Bavière ont conservé une certaine au-
torité personnelle sur leurs troupes qui forment res-
pectivement les corps portant les numéros 12, 13, i*' et
z* Bavarois. Les troupes du grand-duché de Bade qui
forment le 14* corps, celles des duchés de Hecklembour;
qui font partie du 9« , celles de Brunswick qui sont
comprises dans le 10*, celles de Hesse-Nassau-Cas-
sel et des duchés de Saxe, qui forment le 11% consti-
tuent des contingents sépares, mais sont instruites,
commandées et administrées par les soins de la Prusse;
les troupes provenant du Schleswig-Holstein et com-
prises dans le 9* corps, celles du Hanovre qui sont com*
prises dans le 10*, celles d'Alsace-Lorraine qui formeai
le 15% celles de quelques petites principautés et celles
des villes banséatiques sont entièrement absorbées dau
l'armée prussienne qui, à elle seule, forme, du reste,
8 corps d*armée et un corps de la garde. — Chacun
de ces 17 corps d'armée réside en permanence sur une
étendue déterminée du territoire allemand où fl ft
recrute et dont la population est environ de S3O.O00
habitants : le corps de la garde se recrute sur le terri-
toire de l'ancien royaume de Prusse. — Les corps
d'armée ont tous la même ^ composition ; ils com-
prennent, sur le pied de paix : les états-majors du
corps d'armée, des divisions et des brigades ; 2 divi-
sions, chacune comprenant 2 brigades de 2 régiments
d'infanterie et 1 brigade de 2 ou 3 régiments de can'
leric ; 1 bataillon de chasseurs à pied, 1 brigade
d'artillerie de campagne à 2 régiments, 1 régiment
d'artillerie à pied, 1 bataillon de pionniers, I
bataillon du train, divers services particuliers,
17 districts de bataillons de landwchr. — L'infanterie
de ligne comprend 148 régiments, dont 9 de la garde,
17 de grenadiers et 13 de fusiliers ; il y a, en outre,
26 bataillons de chasseurs à pied ; tous les bataillons
ont 4 compagnies et tous les régiments 3 bataillons.
La cavalerie comprend 93 régiments. L*artillerie de
campagne comprend 37 règim(*nts, dont 19 ont 8 bat-
teries de 6 pièces et 18 ont 9 batteries de 6 pièces.
L'artillerie à pied contient 18 régiments à 2 batail-
lons. Il y a 18 bataillons de pionniers et 18 bataillons
du train. L'effectif total, sur le pied de paii, est de
17,033 officiers, 401,659 combattants, 3,6U non com-
battants, 96,158 chevaux. — Chaque corps d'armée
mobilisé, c'est-à-dii-e mis sur le pied de guerre, se
fractionne en troupes de campagne, troupes de rem-
placement et troupes d'occupation. Les troupes de
campagne sont formées par 2 divisions dont chacune
contient 4 régiments d'infanterie en 2 brigades,
1 régiment de cavalerie, 4 batteries d'artillerie etl com-
pagnie de pionniers; le corps d'armée comprend en
outre 9 batteries, des services de pionniers, dn trsin
et de santé ; l'effectif de ces troupes est de 881
officiers, 32,000 combattants, 3,900 non combatUnis,
10,600 chevaux, 102 pièces, 1,100 voitures. Toutes
les troupes de campagne de l'armée allemande com-
prennent 17,600 officiers, 599,000 combattanU, 75,000
non combattants, 200,000 chevaux, 1,860 pièces,
23,500 voitures. Mais il y a lieu de remarquer qo'il
s'agit seulement ici de 18 corps, d'armée, tandis que
le nouveau plan de mobilisation de l'armée allemande
doit en contenir 22, dont chacun aura 8,000 hummei
d'infanterie et 4 batteries de plus que jusqu'ici, eji
sorte que l'on peut estimer à 1,200,000 hommes sa
moins l'effectif de l'armée allemande et à 2,8(X) celui
des pièces. — Les troupes de remplacement contien-
nent les dépôts destinés à compléter les vides qni se
firoduisent dans les troupes de campagne : les unes et
es autres sont entretenues par l'appel des hommes de
20 à 27 ans, dont le nombre annuel est de .180,000
environ, ce qui, déduction faite des pertes, fonne à
peu près un toUl 4e 1,300,000 soldats. — Les troapst
ARM
1803 —
ARM
d*oceiipatioii sont foarnies par la Undwehr qui
comprend des hommes de Ï7 à 32 ans et dont l'effectif
moyen est environ de 600,000 hommes ; elles sont ren-
forcées par les iandsturm, levée en masse organisée
on tout temps, comprenant tous les hommes de 17 à
At ans qui ne sont dans aucune des catégories précé-
dentes, et dont il est impossible d*estimer la force
approximative.
Angleterre, — Les armées de la Grande-Bretagne
comprennent : 1» Tarmée active qui se compose elle-
foôme de Tarmée permanente, des troupes indigènes ei
de la première classe de la réserve; 2® Parmee auxi-
liaire, qui comprend la seconde classe de la réserve, la
milice et le corps des volontaires. — L*armée perma-
nente contient 9,895 ofHciers, 181,997 hommes,
26,445 chevaux et 1 ,362 pièces attelées ; elle comporte
148 bataillons d'infanterie formant 112 régiments,
448 troops de cavalerie formant 31 régiments, 227 bat-
teries d'artillerie, dont 112 de campagne, comprises
dans un régiment; 43 compagnies de génie et des ser-
vices divers ; 63,000 hommes et 12,000 chevaux font par-
tie de Karmee des Indes ; celle-ci comprend, en outre,
120,000 indigènes. — La première classe de la réserve
compte 10,000 hommes; il y en a 25,000 dans la
seconde. — La milice est constituée par 132 bataillons
d*infanterie, 340 troops de Yeomanry et 30 régiments
d'artillerie ; elle a un effectif de 155,000 hommes envi-
ron, dont 25,000 doivent, d'après certaines conditions
pécuniaires, servir au même titre que la première classe
de la réserve. — Le corps des volontaires comprend
120,000 rifles à pied, 300 rifles à cheval, 34.000 artil-
leurs, 5,000 sapeurs du génie, 600 cavaliers légers,
c*est-dire 190,000 hommes. — Le total des forces
militaires de TAngleterre est donc de 660,000 hommes
environ.
Autriche- Hongrie, — L'effectif des tronpes de cam-
pagne austro-hongroises est fixé à 800,000 hommes pour
une période de lU ans, de 1868 à 1878 ; il convient d'y
ajouter, en outre, 600.000 hommes de landwehr. — La
composition de l'armée active est la suivante : 80 régi-
ments d'infanterie à 5 bataillons de guerre de 4 com-
pagnies et de 1 dépôt ; 40 bataillons de chasseurs à
4 compagnies, dont 4 de guerre, 7 de ces bataillons
étant compris dans le rôgimentdes chasseurs tyroliens;
61 régiments de cavalerie à 7 escadrons, dont 1 de dépôt;
13 régiments d'artillerie de campagne à 13 batteries de
Spièces, 12 bataillons d'artillerie de place ; 2 régiments
de génie, 1 résiment de pionniers, les services acces-
soires; effectiftoul, 15,315 officiers, 253,040 hommes
46,667 chevaux. — Cette armée active est portée à
800,000 hommes lors de la mobilisation par l'incorpora,
tion de 532,000 hommes de réserve ; elle peut former
13 corps d'armée contenant 40 divisions d'infanterie-
5 divisionsde cavalerie et la réserve générale d'artillerie;
son total est alors de 24,762 officiers, 796,953 hommes
148,623 chevaux, 1,672 pièces, 23,604 voitures. — La
andwehr est distincte selon qu'elle appartient aux pro-
vinces sisleithanes ou aux provinces transleithanes ou
au Tyrol. L'effectif de la landwehr cisleithane est de
250,000 hommes. Celui de la honwed, c'est-à-dire de la
landwehr hongroise ou transleithane, doit être en 1878
de 5,300 officiers, 319,350 hommes, 44,300 chevaux,
900 mitrailleuses et 4,000 voitures ; son organisation
réelle en fait une armée de seconde ligne. Le Tyrol et
le Vorarlberg fournissent 13,000 landes-schuetzen aux-
quels il convient d'ajouter les deux bans du landsturm
comprenant tons les hommes valides de 18 à 45 ans et
qui existe légalement dans cette seule province de la
monarchie austro-hongroise.
Belgique, — L'armée belge comprend, sur le pied de
paix, 3,200 officiers, 41,500 hommes, 7,200 chevaux,
160 pièces attelées. Elle est constituée de la façon sui-
vante : 19 régiments d'infanterie, dont 18 ont 3 bataillons
actifs de 4 compagnies et 1 non actif; 8 régiments de
cavalerie à 5 escadrons, dont de 4 guerre ; 7 régiments
d'artillerie dont 4 de campagne, ayant chacun 10 bat-
teries à 5 pièces ; 1 régiment du génie et divers ser-
vices. — En cas de mobilisation, Teffectif de l'armée
belge ne peut dépasser 80,000 hommes.
Danemark, — L'armée danoise comprend l'armée
active, la réserve et le renfort. — L'armée active
n'a qu'un faible noyau à titre d'armée jpèrmanen te ;
quand elle est mobilisée, elle contient. 38, 100 hommes
5,300 chevaux et 64 pièces; elle est alora composée de
21 bataillons d'infanterie à 4 compagnies, 11 escadrons
de cavalerie, 8 batteries de campagne à 8 pièces, 8 com-
pagnies d'artillerie de placo, lO compagnie du génie et
divers services. — La réserve compte environ 11,700
hommes Kt le renfort en a 10,300. — L'effeciif total,,
sur le pi«*d de guerre, est à peu près de 60,000 hom-
mes, 8,000 chevaux et 96 pièces.
Espagne, — La situation intérieure dans laquelle se
trouve l'Espagne par suite des luttes incessantes aux-
auelles donne lieu la forme du gouvernement rend
ifficUe à apprécier exactement l'effectif des forcftR mili-
taires de ce pays. Toutefois, on peut estimer que Tarmée
espagnole comprend environ 100,000 hommes sur le
pied de paix et qu'il peut être porté à 250,000 hommes
sur le pied de guerre ; on y trouve 40 régiments d'in-
fantene, 20 bataillons de chasseurs, 20 régiments de
cavalerie, 5 régiments d'artillerie de campagne. 2 do
montagne, 4 de forteresse et 4 régiments du génie. Il
convient d'y ajouter environ 100,000 hommes, dont
30,000 de troupes régulières, qui sont employés dans
nie de Cuba.
France, — L'armée française, sur le pied de paix, a
un effectif de 440,787 hommes, dont 27,014 pour la
gendarmerie et dont 52,558 résident en Algc^riè; le
nombre des chevaux y est de 108,791 dont 13.667 pour
la gendarmerie et 14,953 pour l'armée d'Algérie. —
Cette armée forme 18 corps d'armée en France et un
\9^ en Algérie. Les quartiers généraux des corps d'ar-
mée sont les suivant : 1, Lille; 2, Amiens ; 3, Rouen ;
4, Le Mans; 5, Orléans; 6, Ch&lons; 7, Besancon;
8. Bourges; 9, Tours; 10, Rennes; 11, Nantes; 12,
Limoges ; 13, Clermont ; 14, Grenoble ; 15, Marseille ;
16, Montpellier ; 17,Toulouse; 18, Bordeaux; 19, Alger.
Les troupes tenant garnison à Paris et à Lyon sont
respectivement placées sous les ordres d'un gouverneur
militaire. — La composition des 18 corps d'armée de
France est la suivante : 2 divisions d'infanterie, 1 bri-
gade de cavalerie, 1 brigade d'artillerie, 1 bataillon de
chasseurs à pied, 1 bataillon du génie, 1 escadron du
train des équipages militaires, les états-majors et les
services accessoires. — L'infanterie comprend 144 régi-
ments de ligne à 4 bataillons de 4 compagnies, plus 2
compagnies de dépôt ; 30 bataillons de chasseurs .1 pied
à 5 compagnies dont 1 de dépôt ; 4 régiments de zouaves
à 4 bataillons de 4 compagnies, plus 1 compagnie de
dépôt; 3 bataillons d'infanterie légère d'Afrique à
6 compagnies ; 4 compagnies de fusiliers de discipline ;
1 compagnie de pionniers de discipline ; i légion étran-
gère à 3 bataillons de 4 compagnies ; 3 régiments de
tirailleurs algériens à4 bataillons de 4 compagnies, plus
1 compagnie de dépôt; au total : 251,676 hommes et
2,916 chevaux. La cavalerie comprend 74 régiments à
5 escadrons dont 1 de dépôt, savoir : 12 de cuirassiers
26 de dragons, 32 de chasseurs, 10 de hussards ; 4 esca-
drons de chasseurs d'Afrique et 3 de spahis à 6 régi-
ments ; 8 compagnies de cavaliers de remonte; 20 dépôts
de remonte et d'étalons ; au total : 65,035 hommes et
51,505 chevaux. L'artillerie comprend 19 régiments à
3 batteries k pied, 7 batteries montées et 2 batteries de
réserve; 19 régiments à 7 batteries montées, 3 batteries
à cheval et 2 batteries de réserve ; 1 régiment de pon-
tonniers à 14 compagnies; lO compagnies d'ouvriers,
3 d'artillerie et 57 du train ; au toul : 55,629 hommes
28,102 chevaux et 2,394 pièces de campagne. Le génie
comprend 4 régiments à 5 bataillons de 4 compagnies
plus 1 compagnie de dépôt, 1 compagnies d'ouvriers
militaires decbemins de fer et 1 compagnie de sapeurs-
conducteurs; au total : 10,960 hommes et 733 chevaux.
Le train des équipages comprend 20 escadrons à 3
compagnies ; 12 compagnies mixtes en Algérie ; au
total : 7,392 hommes et 7,680 chevaux. Le personnel en
dehors des corps de troupes comprend 26,409 hommes
et 4,362 chevaux. — La force de l'armée française mise
sur le pied de guerre ne peut être donnée exactement
la loi n'ayant pas fixé les effectifs des troupes mobilisées;
mais, d'après les contingents annuels, on sait que les
9 classes formant les troupes de campagne peuvent
contenir 1,800,000 hommes, dont 1,300,000 instruits. —
L'armée territoriale> qui comprend les hommes de 29
à 34 ans, et la réserve de l'armée territoriale, dont font
partie les hommes de 34 à 40 ans, sont réparties par
corps d'armée. L'armée territoriale est seule organisée;
chaque région de corps d'armée est partagée à cet effet
en 8 divisions à raison de 1 par régiment d'infan-
terie de ligne ; chaque subdivision fournit à l'armée
territoriale : 1 régiment d'infanterie à 3 bataillons de
4 compagnies, plus 1 cadre de compagnie de dépôt.
Chaque région du corps d'armée fournit, en outre
ARM
— 1804 —
ARM
1 régiment d'artillerie, i bataillon du génie, 1 esca-
dron da train des équipages militaires, des escadrons
de cavalerie et des compagnies du train d'artillerie.
La force moyenne de 1 armée territoriale peut être
évaluée à 600,000 hommes et celle do la réserve de
cette armée à 600,000 hommes.
Grèce. — L'armée grecque no contient environ que
8,000 hommes ftous les drapeaux ; son effectif de guerre
est de 25,000 hommes environ. Elle comprend 16 ba-
taillons d'infanterie de ligne, 4 bataillons de chasseurs
6 escadrons de cavalerie, 10 batteries d'artillerie de
campagne. II y a, en outre ^ 60,000 hommes de
garde nationale et 30 corps de volontaires contenant
15,000 hommes.
Hollande, — L*armée des Pays-Bas est forte de
30,000 hommes et elle peut atteindre le chiffre de
65,000 hommes sur le pied de guerre. Elle comprend
8 régiments d'infanterie à 4 bataillons, 4 bataillons de
chasseurs à pied, 4 régiments de cavalerie, 18 batteries
d'artillerie de campagne. La garde civique peut donner
environ 65,000 hommes. L'armée des Indes contient
en outre 30,000 hommes dont 13,000 Européens.
Italie, — L'armée permanente de Tltalie contient
13,000 officiers, 205,000 hommes, 26,000 chevaux et
800 pièces de campagne. Sa composition estla suivante :
80 régiments d'infanterie de ligne à 3 bataillons, 3 régi-
ments de bersagliers à 4 bataillons, 20 régiments de
cavalerie à 6 escadrons, 10 régiments d'artillerie de
campagne à 10 batteries de 8 pièces, 4 régiments d'ar-
tillerie de place, 1 régiment du génie, des états-majors
et des services accessoires. — Sur le pied de guerre
cette armée contien il 2,000 officiers, 329.000 hommes,
56,000 chevaux et 800 pièces de campagne ; elle forme
20 divisions et des troupes complémentaires qui con-
stituent 10 corps d'armée. ~ L'effectif de mobilisation
est obtenu par le rappel d'une partie des hommes en
congé illimité qui sont au nombre de 240,000. — Il
convient encore de signaler l'existence de la milice
provinciale qui contient environ 200,000 hommes.
Portugal. — L'armée permanente du Portugal a un
effectif moyen de 80,000 hommes. Elle comprend
18 régiments d'infanterie de ligne à 3 bataillons, 12 bat-
taillons de chasseurs à pied. 8 régiments de cavalerie
à 6 escadrons, 1 régiment a'artillerie de campagne à
i2 batteries de 6 pièces. Sur le pied de guerre, cette
armée peut contenir environ 80,000 hommes ; mais le
Portugal n'a pas de troupe analogue à notre armée ter-
ritoriale, tandis qu'il en existe à peu près dans tous
les Etats européens.
Roumanie, — L'armée permanente de Roumanie con-
tient environ 1,000 officiers, 20,000 hommes, 5,000 che-
vaux, !)G pièces de campagne. Elle se compose de
8 régiments d'infanterie de ligne à 3 bataillons, 4 bauil-
lons de chasseurs à pied, I6 escadronn de cavalerie,
16 batteries d'artillerie de campagne à 6 pièces. Cette
même armée mobilisée peut, avec l'armée territoriale
la milice et la garde nationale, atteindre uu effectif,
de 125,000 hommes et contenir 100 bataillons d'infan-
terie, 75 escadrons de cavalerie, 100 pièces d'artillerie
de campagne.
Russie. — Les forces militaires de la Russie se divisent
en arméepermanentceten milice. L'armée permanente
comprend Tarmée active et sa réserve, dans lesquelles
tout 'sujet russe est compris de 20 à 35 ans, les
iroupes cosaques, les troupes asiatiques. La milice
contient toute la population mâle valide, de 20 à 40 ans
ne faisant pas partie de l'armée permanie. — L'armée
permanente est organisée en divisions et en brigades ;
les troupes de la garde forment uu corps d'armée ;
C'Ues de la lieutenauce du Caucase forment une
armée. — Les troupes de la Russie d'Europe contien-
nent 600 bataillons, 650 escadrons, 2,000 canons de
campagne, 300 mitrailleuses ; il y a, sur le pied de
paix, 19,000 officiers et 5*^0,000 hommes ; sur le pied
de guerre, 24,000 ofliciers et 1,100,000 hommes.
L'armée de la Heutenance du Caucase contient 128
bataillons, 260 escadrons, 300 canons, 50 mitrailleuses ;
il y a, sur le pied de paix, 4,000 officiers et 140,000
hommes ; sur le pied de guerre, 5,000 officiers et
200,000 hommes. Les troupes asiatiques contiennent
61 bauillons, 300 escadrons, 120 canons; il y a, sur
le pied de paix, 1,800 officiers «t 7,800 hommes ; sur
le pied de guerre, 2500 officiers et 1^5,000 hommes.
L'ensemble des forces militaires de la Russie, en y com-
prenant las services généraux, est de 787 bataillons,
1,217 escadrons, 2^852 canons de campagne, 376 mi-
trailleuses ; en paix, il y a 34,000 officiers ot 800,000
hommes ; en guerre, 43,000 hommes, 1,530,000 hom-
mes. — Cette armée pourrait former 24 corps d'armé«
de campagne, non compris la garde impériale et les
troupes du Caucase.
Servie. — L'armée de la Servie n'a que 6,000 hommes
et 1 ,200 chevaux en retenus h l'état permanent. En cas
de guerre, par le rappel des réserves et par la mobilisa-
tion des milices, cette armée peut contenir 140,000
hommes formant 7 divisions et comprenant 129 batail-
lons d*infanterie, 34 escadrons dn cavalerie et 42 bat-
teries d'artillerie de campagne à 6 pièces.
Suède. — L'armée permanente suédoise contient
6,500 hommes ; à cette armée permanente est ajoutée
une réserve de 80,000 hommes. Une sorte d'armée ter
ritoriale, analogue aux anciens réf^ments-frontière
d'Autriche, contient environ 27,000 hommes. Enfin, il
convient d'ajouter environ 20,000 francs-tireurs formés
en compagnies. Cette masse de 130,000 hommes environ
disposH de 200 pièces d'artillerie de campagne. L'armée
norvégienne se compose de la ligne, de la réserve et de
la laodwehr. La ligne contient 12,000 hommes sur le
pied de paix, et son effectif peut être porté à 18,000
hommes sur le pied de guerre; la réserve compte
20,000 hommes ; la landwebr est forte de 12,000 hom-
mes. Il convient d'ajouter 12,000 soldats du train et ie
landsturm, levée en masse qui renferme tous les hom-
mes valides de 18 à 50 ans non liés au senrioe. En ré-
sumé, les forces du royaume Scandinave sont environ
de 200,000 hommes.
Suisse. — L'armée suisses le caractère d'une milice:
elle n*exi8te pas à l'état permanent. Cett'^ armée se
compose de 1 élite, forte de 1 19,676 hommes âgés de
20 à 32 ans, et de la landwebr, forte de 1 06.292
hommes âgés de 32 à 44 ans. — L'élite est seule orga-
nisée ; elle peut contenir 96,232 hommes dMnfanterie
répartis en 98 bauillons de ligne et en 8 bataillons de
carabiniers, les unes et les autres à l'effectif de 76?
hommes et se composant de 4 compagnies ; S,39G
hommes de cavalerie formant 24 escadrons de dragons
et 8 compagnies de guides; 12,100 hommes d'artillerie
servant 48 batteries de campagnes et 2 batteries de
montagne, les unes et les autres à 6 pièces, ou incor-
porés dans 10 compagnies de pontons, 10 compagnies
de parc, 10 compagnies de train de parc, et 2 compa-
gnes d'artificiers ; 4,148 hommes du génie, répartis en
12 compagnie de pionniers, 6 compagnies de ponton-
niers. 2 compagnies de parc et 8 compagnies d'ouvriers
de chemins de fer ; enfin, 1,640 hommes de troupes
militaires, 2,160 hommes de troupes d'administration
à rétat-major fédéral. Cette armée peut former n di-
visions de campagne ayant un effectif moyen de 12,000
hommes.
Turquie. — Les forces militaires de l'empire ottoman
déductions faites des régences et des principautés qui
en sont simplement tributaires, comprennent l'armée
permanente, les réserves, la levée en masse, les
troupes irrégulières. — L'effectif de l'armée permanente
est du 143,740 hommes, 18,700 chevaux, 624 pièces sur
le pied de paix; elle comprend i68 bataillons d'in-
fanterie, 15» escadrons do cavalerie, 104 batteries
d'artillerie de campagne, 7 régiments d'artillerie d&
place, 2 bataillons du génie ; sur le pied de guerre elle
peut atteindre le chiffre de 171,010 hommes et 38,258
chevaux. Les réserves forment deux bans de même
force dont l'ensemble est estimé à 192,000 hommes. La
levée en masse n'est pas du tout organisée, mais eile
ASi évaluée à 250,000 hommes. Quant aux troupes ir-
régulières, elles se composent surtout de bachi-boa-
zouks dont le nombre est an maximum de 30,009.
Récapitulation, — Voici quelle est, en résumé, la
situation approximative des forces que les armées
européennes peuvent contenir, sans tenir compte de
la levée en masse analogue h la réserve de notre ar-
mée territoriale.
Pats
ÂUomagae, . • • • • •
Angleterre •
Autriche-Hongrie • • . .
Belgique •••••...
Danemark. •••••.•
Espagne. ••••••..
France. ••••••.•
Grèce. •••,•••..
A r$porter, . . . ' 1,710,000
Taoum db
Taoura
CAlWAGnS
Tisarroauut
1,100,000
600,000
350,000
300,000
800,000
600 /)00
40,000
40,000
45.000
15,000
160,000
40,000
1,000,000
600,000
15,000
75,000
1,670,000
ARM
— 1805 —
ART
Hepùri 8,720,000
nonande «5,000
Italie 330,000
Portugal 80,000
Roamanie • 30,000
Russie 1,000,000
Servie 30,000
Suède-Norvège 50,000
Suisse 120.000
Turquie. 170,000
1,670,000
25,000
200,000
»
60,000
50,000
60,000
100,000
105,000
190,000
6,300,000 3,500,000
9,900,000
ARMES A FEU. La première^arme à feu portative
«8t de la fin du xvf siècle : elle parait originaire de
Bologne et porta le nom de scolpetos, d*où on ne tarda
pas à (aire scolpeii et escopette. Vers le commencement
dn XV* siècle, on vit paraître la couleuvrine à main
dont il y a un spécimen au musée d*artillerie de Paris.
O^est un canon de fer, long de 0>b,87, foré au calibre
de Vt millimètres, lié à un fut de bois par des brides,
et pour la manœuvre duquel il fallait deux hommes :
Tun portait la couleuvrine; Tautre, au moven d'une
mèche, mettait le feu à la poudre d* amorce placée dans
«n petit calice an centre duquel éuit percée la lumière.
Lorsque, étant à cheval, on voulait se servir de la couleu-
vrine à main, on l'appuyait sur une fourchette rivée au
pommeau de la selle {\. Couledvrinb, dans notre Dic-
iionn, de biogr. et d'htst.). Vint ensuite V arquebuse à
•croc, portant au milieu de son canon un croc, au moyen
duquel on la fixait sur un chevalet au moment du tir.
On reconnut bientôt les iifconvénients d'armes qu'on
ne pouvait utiliser qu'en metunt le feu avec la main :
ce fut en Espagne qu'on imaeina le mécanisme du tnous-
Îuet ou arquebuse à mèche {V, Arquebuse, dans ce
Hetionnaire), Cette arme se transforma k son tour en
mousquet ou arquebuse à inniet, dont les armées alle-
mandes etiuliennes furent pourvues dès le xvi* siècle,
tandis qu'en France on continuait à se servir de l'ar-
quebuse à mèche. Le calibre et la longueur de l'arme à
rouet ayant été diminués pour que le cavalier la ma-
niât plus facilement, on eut un nouvel engin de guerre,
\epistoiety qui, allongé ou raccourci suivant les époques,
donna lieu par la suite aux carabines et aux mousque-
tons. Vers la moitié du xyii» siècle, les Espagnols ima-
ginèrent les platines à la miquelet, dans lesquelles la
mèche et le rouet étaient remplacés par le chien ei la
i>atterie : on eut alors une nouvelle arme appelée fusil
{ K. ce mot dans le Dictionnaire),
L'idée de remplacer les canons lisses par des canons
raves remonte à plus d'un demi-siècle. En 1793, on fit
à fa manufacture d'armes de Versailles quelques cara-
4>ines rayées, dont on arma les offlciers et les soiis-offi-
ders des troupes légères. Hais la difficulté de les charger
•et leur peu dn portée les firent abandonner. En 1813, on
essaya cependant d'armer un bataillon avec ce genre de
carabines, auxquelles on adapta, non plus une baion-
flette simple, mais le sabre-balonnette. En 1826, le
principe de la rayure fut repris par un officier d'infan-
terie, Delvigne, qui imagina un nouveau forcement
pour le projectile ; son arme n'eut aussi que peu de
{>ortée. En 1839, on adopta pour les tirailleurs algériens
a carabine Pontcharra. En 1840, un nouveau modèle
qui avait moins de rayures fut présenté. En 1843, la
«arabine rayée fut donnée aux bataillons de chasseurs
îi pied. Le colonel d'artillerie Thouvenin, en 1844, et
le capiuioe Minié, en 1846, présentèrent de nouvelles
armes. En 1867, les armes rayées ont été adoptées pour
toutes les troupes françaises. B.
ARMES HERALDIQUES. Aux exemples don nés dans
le />tc<tonnAtre,nous croyons utile d'ajouter les suivants:
Bade : d'or, à la bande de gueules ; — Brunswick :
de gueules, au cheval effrayé d argent; —Hesse: d'azur,
an lion burelé d'argent et de gueules, couronné d*or;
— Holslein : de gueules, k trois œillets d'argent mis en
pairie et à 3 feuilles d'oriie du même posées en triangle,
mouvants d'un écnsson d'argent, coupé de gueules ; —
Hongrie : fascé d'argent et de gueules de 8 pièces; —
Lucques : de France à la bordure de gueules, chargé
de 8 coquilles d'argent; — Mecklembourg : k une tète
de buffle de sable, couronnée de gueules, accomée et
bouclée d'argent; —Afoc/énf ; d'azur, à l'aigle d'argent
couronné d'or; — Monaco : fuselé d'argent et de
feules ; — Nassau : d'azur, semé de billettes d'or, au
lion couronné du même ; — Oldenbourg : d'or, à 2 faces
de gueules ; — Parme et Plaisance : d'asur, k S fleurs
de lis d'or, à la bordures de gueules, chargée de 8 co«
quilles d'argent; ~ Pologne: de gueules, à l'aigle d'ar-
gent membrée et couronnée d'or ; — Toscane : d'or,
à 6 tourteaux de gueules, rangés en orle, surmontés en
chef d'un écu rond d'azur à 3 fleurs de lis d'or; —
Empire Birman : d'argent, au coq de gueules mis de
profil, entouré d'un cercle aussi de gueules ; — Brésil:
de sinople, k la croix potencée de gueules, bordée d'or,
chargée d'une sphère armillalre d'or, et environnée d'un
cercle d'azur bordé d'argent et chargé de 18 étoiles du
môme ; — Mexique : d'azur à l'aigle au naturel, po«é
sur un tronc d'arbre, et tenant dans une de ses serres
et dans son bec un serpent aussi au naturel ; - Rio de
la Plata : coupé d'azur et d'argent : l'argent chargé
d'une Bonne Foi au naturel, tenant une pique de fer
surmontée d'un bonnet phrygien d'argent, brochant
sur l'azur.
Les villes ont aussi des armes. Ainsi, Paris : de
gueules, au navire antique d'argent, voguant sur des
ondes du même; au chef semé de France; — Lyon:
de gueules, au lion grimpant d'argent, tenant de sa
patte dextre un glaive de même; au chef cousu de
France; — Marseille : d'argent; à la croix d'azur; —
Bordeaux : de gueules, au château d'argent, ouvert du
champ, maçonné et ajouré de sable, à 5 tours couvertes
en clochers et girouette d'or, accompagné en chef d'un
lion léopardé du 4« émail, et en pointe d'un croissant
du second; au chef semé de France; — Lille: d'azur,
à une fleur de lis d'or; — Nantes : de gueules, au
navire d'or habillé d'hermine, voguant sur des ondes
au naturel, au chef cousu d'hermine ; — Rouen : du
gueules, k l'agneau pascal d'argent, portant une ban-
nière d'azur, an chef cousu de France.
ART DECORATIF (Ecoles d'). Cette dénomination a
été attribuée, au cours de ces dernières années, à
quelques écoles de beaux-arts ou de dessin, soit an-
ciennes, soit de création récente, dont les programmes
visent surtout les diverses applications de l'art à l'in-
dustrie : la plus importante de toutes est celle de Paris,
fondée sous Louis XV par Bachelier, à la requête dos
corps de métiers de la capitale, sous le titre d'Ecole
royale gratuite de dessin; la Restauration l'avait appe-
lée Ecole rot/aie de dessin et de mathémathiques ; elle
porte, depuis le 9 octobre 1877, le nom d* Ecole natio-
nale des Arts décoratifs.
L'enseignement y est gratuit ; il est donné, à l'école
du jour, aux jeunes gens ayant au moins 10 ans révo-
lus, et à l'école du soir, à ceux qui sont âgés de 14 ans
au moins. Il comprend le dessin, la sculpture, l'anato-
mie, les mathématiques, l'architecture, l'histoire et la
composition de l'ornement, enfin un cours d'applica-
cations décoratives consistant en études exécutées d'a-
près les productions les plus remarquables de l'indus-
trie et en exercices de compositions décoratives .
Les Écoles nationales d'art décoratif de Limoges et
d'Augusson ont un programme analogue, au moins
quant aux bases fondamentales de l'enseignement,
avec un but différent quant aux applications pratiques
de la céramique ou de la tapisserie ; elles sont, d'ailleurs,
placées sous la même direction que celle de Paris;
cette sorte d'union, qui date seulement de quelques
années, a déjà produit d'excellents résuluts.
L'Ëcole nationale d'art décoratif de Nice a surtout en
vue, en fait d'application, l'architecture et les indus-
tries qui s'y rattachent; fondée en 1881, elle a déjà
pris un développement considérable.
Celle de Saint- Pierre-lez- Calais est récente égale-
ment; son organisation no sera définitive que Tannée
prochaine ; elle rond déjà d'immenses services aux in-
dustries des tissas, et est destinée à en rendre de plus
importants encore à toute la région du nord. J. C.
ARTS DECORATIFS (Société de l'Union centrale
des) . — Cette société, fondée ea 1863^ et qui est recru-
tée parmi l'élite des amateurs, des artistes et des fabri-
cants français, a exercé sur les progrès de l'art, dans ses
rapports avec l'industrie, une influence trop considéra-
ble,depuisprèsde vingt-cinq ans,pour que nous ne résu-
mions pas ici son histoire et pour que nous ne rappe-
lions pas en quelques lignes son but et la façon dont
elle l'a victorieusement atteint. Au lendemain de l'Ex-
position universelle de 1851, à Londres, qui avait été
pour l'art et l'industrie de la France un vériuble
triomphe, rien n'était plus légitime que le sentiment
de rivalité qui se manifesta en Europe contre nous, et
qui se fondait sur l'observation suivante : « La supé-
riorité artistique de la France n'est pas simplemont le
ART
1806 —
ART
résaltat d'an don de nature; ce n*e8t pas sealement
affaire de territoire et de climat : c'est affaire d'étude
et de tradition. Le goût s'acquiert par le travail Les
bons ouvriers s'obtiennent par l'enseignement du des-
sin . Il ne s'agit donc qne de fonder des écoles et des
musées pour lutter contre la France. » — Et c'est ce
qu'on fit I Ce fut alors que l'Ângletrrre, notamment,
qui s'était rendu compte des causes de son infériorité
à cette exposition de 1851, se signala par son zèle, par
une activité prodigieuse à créer des écoles de dessin,
à favoriser la vulgarisation dos chefs-d'œuvre, etC(
On commença dans ce pays l'organisation du magni-
fique musée, le South Kensington, qui est devenu par
la richesse, l'abondance, la variété de ses collections,
un établissement unique. Les conséquences de l'acti-
vité incroyable dont 1 Angleterre donna l'exemple ne
tardèrent pas à se faire sentir. Dès 1862, à l'exposition
universelle qui eut lieu en cette année, des pro&rrès réels
étaient signalés par un écrivain éminent, P. Mérimée,
dont la compétence était trop certaine pour n'être
point doublée de clairvoyance. Yoid ce qu'il écrivait
alors dans un rapport ofHciel sur ce sujet : c Depuis
l'Exposition universelle de 1851, et même depuis celle
de 1855, des progrès immenses se sont manifestés dans
toute l'Europe ; et, bien que nous ne soyons pas demeu-
rés stationnaires, nous ne pouvons nous dissimuler que
l'avance que nous avions prise a diminué, et qu'elle
tend même à s'effacer. Au milieu des succès obtenus
par nos fabricants, c'est un devoir pour nous de leur
rappeler qu'une défaite est possible, qu'elle serait
même à prévoir dans un avenir peu éloigné, si, dès à
présent, ils ne faisaient pas tous leurs efforts pour
conserver une suprématie qu'on ne garde qu'à la con-
dition de se perfectionner sans cesse. L'industrie
anglaise, en particulier, très arriérée, au point de vue
de Tart, lors de l'exposition de 1851, a fait depuis dix
ans des progrès prodigieux, et, si elle continuait à
marcher du même pas, nous pourrions être bientôt
dépassés. »
De pareils avertissements, devaient être enten-
dus, et c'est de l'inquiétude patriotique qu'ils
excitèrent que naquit la Société de VUnion centrale.
A diverses reprises déjà, des tentatives s'étalent pro-
duites pour créer en France une association, avec le
projet d'organiser un musée spécial consacré aux
œuvres les plus précieuses de l'industrie. L'idée pre-
mière en avait' été émise par Eméric David, le critique
sagace, dès 1796. Elle avait été reprise successivement
et sans succès en 1806, en 1814, en 1834, en 1845, puis
en 1851. En en 1861, quelques artistes et fabricants se
mirent résolument à l'œuvre, et avec une foi, un zèle,
un désintéressement absolus, ils parvinrent à organiser,
au Palais des Champs-Elysées, une exposition exclu-
sivement consacrée aux produlta de l'art appliqué à
l'industrie. Il faut dire qu'on avait obtenu la conces-
sion du Palais de l'Industrie, au moyen d'une ingé-
nieuse combinaison avec le baron Taylor, qui l'avait
demandé au gouvernement sous le couvert d'une des
association^ de bienfaisance dont il était le président.
Quand à l'argent, ce furent les organisateurs qui bra-
venant l'avancèrent. De cette fagon, sans aucune espèce
de protection de la part du gouvernement, par la seule
l'initiative d'une douzaine d'hommes déterminés, on
réussit à jeter les bases de l'édifice qui allait bientôt
grandir. Deux ans après, en 1863, la tentative fut
renouvelée dans les mêmes conditions. Le but pour-
suivi avait été défini en quelques mots par le président
du comité d'organisation M. Guichard : a Honorer, en-
courager, stimuler dans l'œuvre industrielles tout ce
que celle-ci comporte d'art. » C'est ce qu'on chercha à
exprimer dans cette formule adoptée par l'association :
Le beau dam Vutite, qui est inscrite sur i'écusson
de l'Union centrale. Aujourd'hui que ces idées ont
triomphé, elles paraissent toutes naturelles, mais alors
le public ne semblait point du tout pénétré de cette
vérité, que le goût a sa place partout en ce monde
et qu'il doit apparaître aussi bien dans la forme des
meubles que dans un tableau, aussi bien dans le choix
d'une étoffe que dans la composition d'un bijou. Voilà
ce qu'il s'agissait de démontrer au plus vite à tous.
Les organisateurs de l'Exposition de 1863, après leur
premier succès, s'occupèrent donc de se constituer
en société permanente, en appelant a eux toutes les
bonnes volontés. Jusqu'alors, on s'était contenté de se
réunir me du Sentier, n* 8, à intervalles irréguliers. On
place Royale (devenue place des Vosges), un local assez
vaste, et l'on arrêta les statuta qui donnaient défini-
tivement à l'association le titre i' Union centrale de$
beaux-arts appliqués à l'industrie et déterminaient
ainsi la tâche qu'on se proposait de remplir : i<> fonder
un musée rétrospectif et contemporain ; 2<* constitaer
une bibliothèque d'art ancien et moderne, où le tra-
vailleur serait, an besoin, aidé dans ses rcciiercbes ;
Z^ établir des cours spéciaux, des lectures et dos
conférences publiques ayant rapport à l'art ap-
pliqué et des entretiens familiers de nature à pro-
pager les connaissances les plus essentielles à l'ar-
tiste et à l'ouvrier qui voudraient « unir le beau à
l'utile » ; 4* organiser des concours entre les artistes
français et entre les diverses écoles de dessin et de
sculpture de Paris et des départements ; 5<> faire des
expositions bisannuelles de collections particulières
présentant à l'étude dn belles applications de l'art a
l'industrie. Un article des statuta montrait surtout,
dans sa briève simplicité, le désintéressement, l'esprit
de sacrifice, la générosité de ce petit groupe de fonda-
teurs. Il disait : u Tous les membres du comité feront
gratuitement les avances nécessaires à l'organisation
de tout ce que le comité se donne la tâche de fonder. »
Avec de pareils dévouementaon devait sûrement aboutir.
Autorisée par décision ministérielle du 26 juillet 1884
et par arrêté préfectoral du 4 août de la même année,
la nouvelle société ne tarda pas à être entourée des
sympathies des amateurs parisiens les plus distingués.
Les dons en argent^ en livres, gravures, objeto de col-
lections arrivèrent de toute part. En définitive le pro-
gramme de l'Union centrale s^afflrmait avec une netteté
qui ne laissait aucune interprétation vague et indexe :
Il se composait de deux idées fondamentales un prin-
cipe de doctrine : l'dnité de l'art ; un principe d'action :
l'appel a l'initiative privée. Tels étaient les éléments
avec lesquels on entreprenait l'agitation féconde qai
avait pour but : 1* de secouer l'Indifférence du pnplic
relativement aux productions de l'art appliqué, et
d'éclairer son goût; 2*^ de stimuler le zèle des fabri-
canta et des artistes ; 3* de transformer les méthodes
courantes de l'enseignement du dessin en méthode
rationelles, fondées sur la science, proscrivant la copie
exclusive des estampes pour y substituer celle des
modèles en plâtre ou l'étude directe de la nature, afin
de laisser à l'élève une part d'interprétation. Pour
atteindre à ces résultaU, les hommes disting:ués de
l'Union centrale n'avaient point de titres officiels,
point de part dans l'administration des beaux-arts,
aucune action sur les décisions souveraines du gou-
vernement. Mais ils avaient, pour les soutenir, l'ardeur
généreuse de leurs convictions et la volonté opiniâtre.
Ils eurent recours â deux moyens de propagande :
P Les concours organisés dans les écoles de dessin
et parmi les fabricants eux-mêmes, 9 Les expositions
d'art appliqué à Vindustrie.
Quelques mota d'abord sur les concours et les
méthodes d'enseignement ^ue l'Union centrale, après
de longs efforta, a fini par faire prévaloir. Pour entamer
la compagne on se plaçait au point de vue suivant :
par un inexplicable et long malentendu, entretenu
jusqu'alors, 1 art — et, par conséquent, son premier
instrument, le dessin — avait été considéré comme
une superfluité de l'éducation; on l'avait relégué dans
le même et fastidieux bagage des talents d'agrément.
Au lieu de lui donner la part noble et belle qui lui
revient pour développer le jugement^ élever des idées,
perfectionner le sens d'observation exacte par l'exameo
direct des formes^ en dédaignait ses services, ou plut&t
on méconnaissait la grandeur de son rôle. Il importait
donc de déraciner cette idée fausse que le dessin n'est
qu'un sccessoire plus ou moins brillant de l'éducation ;
il importait de le faire entrer, au même titre que la
grammaire, l'histoire et les langues mortes, dans le
traitement gvmnastique des intelligences. Voilà an
des côtés de la question. Il y en avait un autre : c'est
l'action féconde que doit exercer sur les ouvriers l'en-
seignement bien compris du dessin dana les écoles
primaires; car, alors, ils ne s'agissait plus seulement
de ces moyens généraux d'éducation pour les hommes
du monde, il ne s'agissait plus seulement de fournir
à la jeunesse un exercice intellectuel et moral ; il
s'agissait, en outre, de donner aux jeunes gens un
gagne-pain en les préparant, par un fonds commun
de notions professionnelles, aux carrières d'art et
loua, au premier étage d'un des anciens hôtels de la 1 d'industrie. Biais quelle méthode employer pour eet
ART
— 1807 —
ART
enseignement général du dessin, distribué à tons an
Imème titre que la lecture à récriture? G^est ici qyie
l'Union centrale faisait intenrenir ses doctrines et dé-
fendait la grande cause de Vuniti de Cart^ montrant
que rapplication immédiate de ses prirfcipes était de-
Tenue rigoureusement nécessaire, et que les facultés
d'invention que possède notre race, le goût qu'on croit
inné et dont témoignent les créations de nos ouvnVrs,
de nos industriels s'épuiseraient dans une immobilité
affadissante, si l'on ne se mettait énergiquement à les
stimuler. Or, la spécialisation à outrance du travail,
qui est le vice de notre époque, pousse fatalement
nos artistes dans une voie de décadence. On dédaigne,
on ignore tout ce qui ne concourt pas directement et
immédiatement au but restreint que Ton se propose;
on s'imagino que, pour être peintre, il suffit de savoir
copier des formes et des couleurs ; que, pour être
ciseleur, il suffit de bien manier un outil ; que pour
6tre deasinateur d'ornements, il suffit de savoir com-
biner les vieiiK modèles choisis laborieusement dans
les cabinets d'estampes ! Est-ce ainsi que faisaient les
admirables ouvriers de la Renaissance? Par ce système,
ou s'approprie simplement des formes impersonnelles,
on sacrifie l'art au procédé, on étouffe son originalité.
La phrasa apprise tue la pensée. L'auxiliaire, en deve-
nant le but, se transforme en obstacle.
Dans ces conditions, quelle devait être la méthode
à suivre pour l'enseignement du dessin ? Un artiste
éminentM. Eug. Guillaume, se chargea de développer,
le programme dans une conférence qu'il prononça au
siège de l'Union centrale, place Royale, le 33 mai
1866, et qui eut un grand retentissement. Il concluait
ainsi : « Nous partons de cette idée que l'art étant un,
l'on n'est pas plus autorisé à mesurer ses vrais principes
en vue des professions et selon les conditions, qu'on
ne le fait pour la grammaire, les sciences ou la mo-
rale. Nous professons cette opinion, que le sentiment
de l'art peut-être développé conformément à la raison,
et qu'il y a dans se» éléments plus de bon sens que
de subtilité. Pratiquement, nous pensons qu'il est
bon de le considérer par son côté exact et utile, de
lier entre eux, d'une manière indissoluble, le dessin
géométrique, le dessin d'art et le dessin de mémoire,
inséparablement unis dans l'idée générale du dessin
lui-même et dans ses applications. Enfin, en considé-
rant que des modèles doivent être aussi parfaits qu'il
est possible, nous demandons que l'on mette entre les
mains des enfants les chefs-d'œuvre de l'art, comme on
met entre leurs mains, pour d'autres études» les chefs-
d'œuvre littéraires.
Quelle fut la première conséquence de cette agita-
tion heureuse provoquée par l'Union centrale? C'est
que diverses nations introduisirent chez elles l'ensei-
gnement du dessin dans toutes les écoles primaires
communales, d'après les méthodes préconisées par
l'Union. En France, la réforme fut plus lente à venir,
bien que les hommes les plus éminents, écrivains, ar-
tistes, professeurs, emportés par ce mouvement de
propagande qu'imprimait si pasionnément l'Union,
eussent fait cause commune avec elle, en se rangeant
sous sa bannière. Il fallut bien y arriver pourtant ; et,
en 1878, M. le marquis de Chonnevlères soumit au
ministre de l'instruction publique et fit adopter le
projet qui devait aboutir peu après à l'organisation de
renseignement obligatoire du dessin dans toutes le»
écoles du pays. Il s'appuyait sur les doctrines mêmes
de rUnion centrale, et disait dans son rapport : « L'art
est un ; son principe s'étend des plus hautes concep-
tions des grands maîtres au plus infini produit de la
main de l'artisan ; aussi le goût et rintelligence de
Tart sont- il s devenus, dans tous les pays civilisés, la
condition première de leur industrie, la meilleure
raison de leur richesse. » L'Union centrale, on le voit,
avait conquis par l'élévation de ses doctrines, par la
Î;randeur de son but, une influence considérable. Citer
es noms des lauréats formés à son école serait pres-
que dresser la Uste de nos artistes de l'industrie ré-
putés à l'heure qu'il est parmi les plus habiles.
La guerre de 1870 éclata. Ce n'était plus alors
seulement le sort de l'art et de l'industrie qui se trou-
vait en Jeu ; c'étaient les destinées mêmes de la patrie.
D'autres soins, pendant cette époque doulourp.use,
absorbèrent les fondateurs de 1 Union centrale, et
l'œuvre en si bonne voie parut un moment abandonnée.
Hais c'est souvent dans l'àpreté des plus terribles re-
vers que certains courages se retrempent avec le plus
de force. Après une éclipse trop explicable, l'Union
centrale se reforma sur des bases nouvelles et dura-
bles. Jusqu'alors, elle n'avait existé que dans la forme
strictement régulière que la loi impose aux sociétés
ordinaires. On a vu que ses initiateurs avaient poussé
le désintéressement Jusqu'à s'engager « à faire gra-
tuitement les avances nécessaires à l'organisation de
tout ce que le comité se donnait la t&che de de fonder » .
Ceux-ci avaient si bien remplie leurs engagements,
qu'après la guerre on trouva ou'ils avaient déboursé
généreusement une somme de 50,000 francs. Le
29 Janvier 1874, la Société était légalement reconsti-
tuée, toute prête à continuer son rêle et à agrandir
son action. Des hommes nouveaux s'ajoutèrent aux
anciens, et de la première assemblée générale sortit
un conseil d'administration qui désigna comme prési-
dent M. Edouard André, ancien député, et comme
vice-président, M. Henri Bouihet, ingénieur, et l'un
des chefs de la grande maison d'orfèvrerie Christofle.
Il faudrait pouvoir dire ici quels furent l'activité, le
désintéressement, le dévouement de cos hommes
distingués. Il faudrait pouvoir énumérer les services
de quelques-uns de leurs collaborateurs empressés
qui, presque tous commerçants et par conséquent
peu maîtres de leur temps, ne ménagèrent jamais
ni leur temps ni leur argent pour la grande œuvre
f poursuivie en commun. On fera d'ailleurs plus tard
a part des mérites de chacun, lorsqu'on écrira l'his-
toire de cette Société qui a été si utile an relèvement
des industries françaises. La série des expositions
d'art appliqué h l'industrie fut reprise aussitôt après
la reconstitution de l'Union centrale, c'est-à-dire au
mois d'août 1874. Après les exhibitions précédentes
qui avaient eu un caractère très déterminé, il fallait
trouver un terme inédit, pour la section rétrospective
ajouter à celle des écoles et à celle des productions
contemporaines. On s'arrêta à l'histoire du costume,
et le comité s'efforça de rassembler le plus grand
nombre possible des pièces de vêtements anciens,
qui sont rares. On parvint à composer ainsi un en-
semble des plus imposants et des plus instructifs.
Deux ans après, en 1876, l'Exposition rétrospective
était consacrée à l'histoire de la tapisserie, et 1 on or-
ganisa, pour une durée de trois mois, dans les salles
du palais des Champs-Elysées, un merveilleux musée
classé par époque et par atelier, dans lequel on vit
défiler les plus admirables chefs-u'œuvres de l'art tex-
tile. Puis l'Union centrale, pour ajouter encore au ca-
ractère d'enseignement qu elle voulait donner avant
tout à ses expositions, pour affirmer plus nettement la
pensée qui avait inspiré ses fondateurs, décida d*a-
dopter un plan nouveau. En ce qui concernait les
écoles de dessin, le comité pensa qu'il n'était plus
utile de recommencer les expositions dans lesquelles
les élèves venaient montrer leurs travanx. A l'origine,
ces expositions étaient indispensables. On avait dû, en
quelque sorte, passer en revue les forces respectives
des divers centres d'enseignement, faire l'inventaire
des ressources dont on disposait. En 1880, pour sa
sixième Exposition, l'Union n'exposa pas les travaux
des élèves des écoles de dessin, mais elle organisa
une série de concours, presque tous des conconrs de
compogition, dont les programmes furent mis on har-
monie avec la force présumée des élèves, la libre
recherche d'une création d'art. Quant à la partie de
l'exposition comprenant les œuvres des grandes indus-
tries de luxe, qui, d'après les traditions de l'Union
centrale, devait montrer à la fois les productions de
l'art moderne et un choix des productions des an-
ciennes époques, le principe en fut maintenu, avec
une modification importante. Au lieu d'y appeler en
même temps tontes les industries qui relèvent de
l'art et de disséminer la leçon, on résolut de préciser,
par la voie de l'analyse, l'enseignement qui se dégage
de chacune des industries, et de montrer leurs pro-
doits dans nue série d'expositions successives. On
pensa qu'on rendrait les études plus faciles et plus
profitables en groupant, sous la forme d'une démons-
tration visible et parlante, les matières premières, les
instruments qui servent à les façonner, l'œuvre créée
ou embellie par le producteur ou par l'artiste. Il fu*
donc arrêté qu'on mettrait en évidence, dans les ex
positions technologiques successives, l'histoire com-
plète d'une industrie déterminée, en montrant à côté
des éléments naturels confiés à la main de l'ouvrier,
le dessin ou la maquette qui lui sert de modèle, les
ART
— 1808 —
AUG
oaills dont il dispose, et enfin rœnvre partcheyée
sar laquelle l'art, qui est le sceau suprême, imprime
sa marque souveraine. Conformément à ce projet,
l'Eiposition de 1880 fut exclusivement consacrée à
l'industrie du métal; celle de 1882, aux industries
à.^^ tissus y du papier et du 6ot>, appliqué au mobilier;
celle de 1884 aux industries de la/iterre, de la terre et
du verre. Il faut ajouter que, par une disposition nou-
velle, rUnion centrale appela les étrangers à exposer
et a prendre part à ses concours au même titre que
nos nationaux. L'éclat qu^ont eu ces exhibitions et le
succès qu'elles ont obtenu sont encore dans toutes les
mémoires. Plus de deux cent cinquante mille visiteurs
prirent part à ces fêtes de l'intelligence ; et le bienfait
en est incalculable, si l'on songe à toutes les activités
Sue de pareilles entreprises ont fait naître, aux efforts
es fabricants pour y figurer avec honneur et s'y faire
représenter par des œuvres de choix ; aux publications
des remarquables rapports des ^ays, qui sont autant
de saines et permanentes leçons; aux études critiques
2u'à suscitées chez des écrivains éminents le spectacle
e toutes les merveilles accumulées par les soins de
l'Union centrale ; enfin aux reproductions par la pho-
tographie des chefs-d'œuvre anciens obligeamment
prêtés par les collectionneurs et qui sont de précieux
modèles dorénavant mis en circulation dans tous les
ateliers. Voilà ce qu'ont fait ces expositions, organi-
sées par l'Union centrale, et l'on peut Juger par là
de la diffusion, de la puissance d'influence que cette
Société a exercées et exerce encore sur nos industries
d'art. Il est superflu d'entrer ici dans de plus longs
développements sur l'organisation intérieure et sur
l'histoire de l'Union centrale. 11 suffit d'avoir indiqué
à grands traits ce qu'elle a accompli. Depuis le mois
de Janvier 1882, l'Union centrale des beaux-aru ap-
Sliqués à l'industrie a fusionné avec la Société du
lusée des Arts décoratifs qui s'éuit créée à côté
d'elle, en 1877, avec son patronage. Aujourd'hui les
deux Sociétés n'en font plus qu'une seule, sous le
titre é^ Union centrale des Arts décoratifs, ayant plus
de cohésion et de force pour continuer leur entreprise
patriotique. Après la fdsion, M. Edouard André, pré-
sident de Tœuvre de l'Union centrale, se retira. Le
duc de Chaulnes, qui avait été à la tête de la Société
du Musée des Aru décoratifs, éunt mort, il s^agit de
choisir un nouveau président; M. Antonin Proust fut
désigné. Cette nomination imprima une direction si-
non nouvelle, du moins plus étendue aux affaires de
VVnion centrale des Arts décoratifs. C'est à cette
activité incessante que cette société doit d'être sortie
de son domaine primitif, domaine privé en quelque
sorte, pour prendre une vaste place dans l'opinion
publique, et intéresser désormais à ses destinées ceux
qui Jusque-là paraissaient n'avoir aucun motif de s'en
préoccuper. M. Antonin Proust a développé le champ
d'activité ùe l'Union centrale dans tous les sens.
C'est lui qui prit l'initiative de la vaste loterie ^ul a
laissé à la Société un bénéfice de près de six millions,
avec lequel on pourra édifier l'important musée récla-
mé par les artistes de l'industrie. Déjà des collec-
tions se forment, et la Société^ dirigée par un conseil
d'administration de 60 membres' divisés en commis-
sions, a préparé tous les éléments de la future orga-
nisation d'un pareil établissement.
Le Palais de l'Industrie, primitivement accordé par
l'Etat à la Société pour y ouvrir dans quelques salles,
à titre permanent, une exposition des objets d'art cons-
tituant i'embnyon de ce musée, ne saurait être un
local définitif pour une institution de si haute portée
et destinée à prendre les plus grands développements.
V. Ch.
ARTIFICE (Peux d'). L'art de faire des feux d'artifice
en signe de réjouissance parait avoir été cultivé de
très bonne heure dans la Chine et dans l'Inde, et,
aujourd'hui même, il est encore fort avancé dans le
premier de ces deux pays. S'il faut en croire les histo-
riens grecs, un feu d'artifice aurait été tiré par ordre
d'Alexandro le Grand en mémoire de son entrée à Baby-
lone. Flamininus, le vainqueur de la Macédoine, trouva
les feux d'artifice en usage dans les principales villes
qu'il conquit. Le rhéteur Philostrate nous apprend
qu'on utilisait les artifices à la défense des villes,
et cite, près du fleuve Hyphésis, une place considérée
comme imprenable, parce que ses habitants lançaient
des foudres et des éclairs. Claudien, décrivant les fêles
organisées à Rome sons Théodose, mentionne les ser-
penteaux et les girandoles. En ce qui concerne rEoropc,
les connaissances pyrotechniques ont été assez bornées
Jusqu'à l'introduction de la poudre à canon ; on s'était
servi jusque-là de divers mélanges incendiaires. Les
feux d'artifice étaient à la modo en Italie vers la fin do
xv« siècle, où on les employait particulièrement pour
la célébration des solennités religieuses: les Florentins
etjes Siennois se montraient les plus habiles dans la
pyrotechnie. Cet art passa d'Iulie en France, en Espagne
et en Flandre. En 1569, un feu d'artifice représentant
un combat naval fut tiré à Rennes en l'honneur de
Henri II. En 1606, dans une fête donnée à Fontaine-
bleau par Sully, il y eut aussi un simulacre de combat.
Depuis le xvii« siècle, les feux d'artifice ont pris un
développement toujours croissant, et ils atteignent
aujourd'hui les limites du merveilleux, grâce aux tra-
vaux des Ruggieri.
ARTILLERIE. Un décret du 13 mai 1867 constitua
de la manière suivante les troupes de l'artillerie fran-
çaise :
Garde impériale : 1 régiment de 6 batteries toute»
montées ; 1 régiment de 6 batteries à cheval ; 1 esca-
dron du train, de 2 compagnies.
Ligne : 15 régiments (n*» 1 à là), ayant chacun 4 bat-
teries non montées et 8 batteries montées; 1 régi-
ment (no 16), composé de 1 4 compagnies de pontonniers ;
4 régiments (no> 17 à 20), ayant chacun 8 batteries à
cheval; lO compagnies d'ouvriers: 6 compagnies d'ar-
tificiers; I compagnie d'armuriers; 2 rëgimenu du
train, composés chacun de 12 cnmpaignies.
D'après l'organisation de 1875, rartlllerie française
comprend, pour l'armée active :
i^ 38 régiments, tous stationnés en France, et con-
stituant 19 brigades à 2 régiments, à raison de 1 brigade
Car corps d'armée. Le premier régiment de chaqne
rigade est à 13 batteries, dont 3 à pied, 8 montées.
2 montées de dépôt et de sections de munitions. Le
deuxième régiment est à 13 batteries, dont 8 montées,
3 à cheval, 2 montées de dépôt et de sections de muni-
tions;
20 14 compagnies d'ouvriers d'artillerie, chargea de
la construction de la partie du matériel de TarUllerie,
du génie et du tnin des équipages militaires, dont Is
conœction ne serait pas confiée à l'industrie privée ;
30 s compagnies d'artificiers ;
40 38 compagnies du train d'artillerie* à raison de
2 par brigade d'artillerie. Chacune de ces deux com-
pagnies est placée, pour l'administration, la police et
la discipline, à la suite d'un des deux régiments de la
brigade.
Le service permanent de l'artillerie en Algérie est
assuré : 1° par des batteries à pied déucbées des régi-
ments de 1 intérieur et dont un certain nombre sont
organisées en batteries montées et en batteries de mon-
tagne ; 20 par des compagnies du train d'artillerie four-
nies également par les corps de l'intérieur.
ASSIGNATS. L'énorme consommation des «ssignau
vint surtout de leur dépréciation. On la devine aisément
par ce qui a été dit à cet article : les dépenses publiques y
sont pour la moindre part. La dépréciation commençait
dans les mains mêmes du gouvernement à Toccasion des
services qu'il avait à paver hors do France, non seule-
ment aux armées, mais à ses agents et correspondants.
Pour cela il fallait de l'argent, car l'assignat n'avait
aucune valeur au delà de nos frontières. Or l'argent
n'était plus alors, en France, qu'une marchandise, et
encore fort rare, qu'il fallait acheter à des capitalistes.
Les assignats étant l'instrument d'achat, on devait en
donner des monceaux pour des sommes relativement
petites. Un eut de situation, fourni le 14 frimaire au IV
(22 décembre 1795) au Directoire par les commissaires
de la Trésorerie nationale, porte, entre autres choses,
que 2,800,000 fr., à payer mensuellement en numé-
raire pour le prêt des troupes, coûtent 470 millions
en assignats; — que 21 millions, en numéraire, néces-
saires pour le service courant, reviennent à 3 milliards
500 millions en assignats. — Ce fut 17 Jours seulemeot
après la remise de ce rapport, que le Conseil des Cinq-
Cents ordonna la fabrication de 40 milliards en assignats
(K. Gaudin.ducde Gaëte,Afé»ioiVw,t. I, p. 272/ C. D — v,
AUGUSTIN (Eglise Saint), bâtie par Victor Baitard.
dans le VIII« arrondissement de Paris,à l'angle du boule-
vard Malesherbes et de l'avenue Porulis. Le portail ete
un rettangle couronné d'un pignon, que surmonte uns
croix accotée d'anges portant le calice et la couronne
d'épines et sculptés par Schroeder. Au res-de*chaussée
AUT
— 1809 —
BAU
s'ouTre un porche à trois arcades, dont les pieds-droits
biseautés sont ornés de deux étages de niches à colonnes
et portent à leur aplomb l'aigle, le lion, le bœuf et
range, emblèmes des quatre Evangélistes sculptés par
Jacquemart. Les trois portes ont été exécutées en cuivre
galvanoplastiqueparChristofle. Surla partie supérieure
des denx portes latérales, Mathurin M oreau a représenté
de petits anges qui portent les insignes de la Passion,
et, sur la partie supérieure de la porte centrale, les
quatre Vertus cardinales. Les statues qui ornent les
niches sont : Moïse et Elie, par Cavelier; Jérémié, par
Chambard ;Isaio, par Farochon ; Daniel, par Chardigny ;
Ezéchiel. par Gruyère. Au dessus du porche règne une
large frise qui sépare le roz- de-chaussée du clair-étage;
cette frise est décorée de bas-reiier^ do Jouffroy, repré-
sentent le Christ et les douze Apôtres, dont les nimbes
d*or brillentsur iapîerreà la façon byzantine. Au-dessus,
une immense arcade à gorge, dont Tarchivolte fleuron-
née est doublée d'un cordon dorique,occupe tout Tétsge
supérieur; sa voussure mord sur le tympan du pignon.
Au fond de cette arcade est une grande rose en métal,
décorée de vitraux avives couleurs par Lafaye, et flan-
quée de deux anges sons des palmiers tenant les tables
de l'Ancien et du Nouveau Testament, œuvre de Lepère.
— Les profils du portail sont, au rez-de-chaussée,
ajourés par une arcade dont les pieds-droits possèdent
également deux rangées de niches. Au-dessus, deux
contreforts à pilastres composites contre-butent le grand
cintre du portail, et sont amortis par des groupes d'en-
fants et des torchères. Les sulues des faces latérales
sont : saint Léon le Grand, par Farochon; saint Gré-
goire le Grand, par Chambard; Saint Augustin et saint
Thomas d'Aquin, par Cavelier; saint Jean Chrysostome,
Êar Desprez; saint François d'Assise, saint Louis, saint
lominiôue, par Leqlle^ne; saint Basile, par Gruyère.
~ L'édinee a la forme d'un parallélogramme irrégulier,
dont le portail occupe la face la plus étroite. L'architecte
a cherché à dissimuler l'irrégularité de cette coupe par
l'obliquité des lignes latérales du rez-de-chaussée ; de
sorte que les bas cAtés, étroits à l'origine, vont s'éva-
santjnsqu'au transept, undis qu'au dessus le clair-étage
file en ligne droite. Ces imperfections se traduisent à
l'intérieur par un défaut de parallélisme dans les pas-
sages des collatéraux. Les laces du transept, au lieu
d'être percées de portes selon l'usage, projettent entre
les tourelles latérales une saillie trigoniale, sorte de
tour engagée dans l'œuvre, qui est coiffée d'une calotte
hémisphérique à hauteur de premier étage. Ces tours
engagées, les quatre tourelles et deux autres saillies
3m se voient à proximité du porche, forment des reliefs
estinés à tromper l'œil et à dissimuler les écarts qu'il
a fallu faire pour tirer parti d'une surface étrangement
coupée. L'église Saint- Augustin est surmontée, à l'on -
droit du sanctuaire, par un dôme accompagné de tou-
relles et auquel une lanterne en métal sert d'amortis-
sement. — A l'intérieur, les verrières à figures des
fenêtres hautes ont été exécutées par BAaréchal et Clau-
dius Lavergne, les grisailles «des fenêtres basses par
Oudinot, Nicod et Lusson. Les voûtes des chapelles
polygonales des bras de la croix ont été décorées de
grands sujets, saint Pierre et saint Paul, par Bougue-
reau. Sur les pendentifs du dôme, Signol a peint les
quatre Evangélistes ; dans la voûte de la grande coupole,
Bézard a représenté seize grandes figures des fondateurs
de la religion. Dans deux niches au-dessus des portes
des sacristies, Brunet et Taluet ont placé des statues de
saint François de Salles et de saint Charles Borromée.
La chapelle de la Vierge contient des statues de la
Vierge par Jaley, de sainte Marthe par Perrey, et de
«ainte Marie, par Leharivel.
AUTEUR (Droits d'). A partir du I» janvier 1881, le
droit des auteurs et compositeurs au théâtre de l'Opéra
a été fixé à &00 fr. pour tout le spectacle, quel que soit
le nombre des représentations des ouvrages. La sommo
«st répartie conformément au tableau suivant :
Un ourrage seul 500 fr.
Uo opéra en 5, 4 ou 3 actes 375 i kaa r*
Un ballet en i acte Ho I ^"" "'
Un opéra en 4 ou 3 actes 300 1 kaa Tp
Un opéra en 2 ou 3 actes 200 I ^^ ^''
Un opéra en 2 actes 250 1 raa r.
Un ballet en 2 ou 3 actes 250 1 «>""''•
Un opéra en 1 acte..... 200 1 kaa r»
Un ballet en 2 ou 3 actes 300 | »""»'•
Un opéra ou ballet en 2 ou 3 actes 250
Un opéra ou ballet en 1 acte. 125 } 500 fr. '•«
Un opéra ou ballet en 1 acte 125
Un bpéra en 1 acte 200
Un ballet en 1 acte 150^ 500 fr.
Unballet en 1 acte 150
Un acte emprunté à un ouvrage en plusieurs actes
est rétribué comme un ouvrnge en un acte. Les droits
d'auteur sont partagés par moitié entre l'auteur du
poème et le compositeur de la musique, s'il s'agit d'un
opéra; s'il s'agit d'un ballet, ils sont partagés par tiers
entre le compositeur de la musique , l'auteur du pro-
gramme et le compositeur de la chorégraphie. Pour les
opéras dont les poèmes sont traduits en parodies, les
avantages sont réduits de moitié, sans que cette réduc-
tion puisse influer sur la rétribution de l'ouvrage repré-
senté dans la même soirée.
AVIGNON (Faïences d'). l/origine de cette fabrique
de terres vernissées paraît être fort ancienne. Le plus
souvent les poteries d'Avignon sont faites d'une terre
légèrement colorée que recouvre un beau vernis de
couleur brune. La forme en est toujours élégante et
recherchée. La fabrique d'Avignon eut la sp(^cialité des
surtouts do table, fontaines, aiguières et corbeilles à
jour d'un travail ingénieux. Ces pièces rappellent beau-
coup par leur coloration soutenue les ouvrages du nord
de l'Italie et ceux de Monte-Lupo, tout en conservant un
caractère bien tranché d'originalité.Pendant le xvii« siè-
cle les potiers d'Avignon transformèrent la fabrication
de leurs terres émaillées. Ils y ajoutèrent remploi de
l'émail blanc.
B
BANQUET, titre que certains écrivains grecs et
latins donnèrent à des ouvrages où leurs personnages,
groupés autour d'une table, exposaient et discutaient
leurs opinions avec élévation ou familiarité. Ainsi nous
avons les Banquets de Platon et de Xénophon, le Bon'
quft des savants d'Athénée, les Banquets des Satur-
nales de Macrobe, etc.
BARRAGES. Au nombre des grands travanx exécutés
par les Français en Algérie, on doit remarquer ceux qui
ont pour but d'empêcher les eaux fluviales de se perdre,
de les emmagasiner dans des barrages réservoirs, et do
les distribuer au moyen de nombreux canaux. Le bar-
rage du Sig^ construit en amont de la petite ville de
Saint-Denis-dtt-Sig, a été commencé par le génie mili-
taire, et achevé en 1858 par l'administration des ponts
et chaussées sous la direction do l'ingénieur Aucour; il
contient 8.300,000 mètres cubes d'eau, déversés dans la
plaine par deux canaux qui n'ont pas moins de 30 kilom.
de développement. Depuis l'achèvement de ce travail,
la plaine du Sig s'est couverte de riches cultures, de
nombreuses plantations de coton, d'importantes usines.
Le barrage de i'Habra, beaucoup plus Important, a
été exécuté pour le compte et par les soins d'un riche
capitaliste, M. Debrousse ; il sert à irriguer 3ti,000 hec-
tares de terres. La digue n'a pas moins de 41 mètres
à sa base : sa hauteur est de 34 mètres, et sa longueur
de 346 mètres, dont 125 pour le déversoir. Le réser-
voir contient 35 millions de mètres cubes d'eau.
BATARD DE BOUILLON (Le), chanson de gestes,
terminant la série des poèmes qu'on a rattachés au
cycle de la croisade. C'est une œuvre du xiv< siècle,
d'origine wallonne et faisant suite à Baudoin de
Sebourg. Le bAtard de Bouillon est le flls de Baudoin,
le second roi de Jérusalem, et d'Érinamonde, sœur du
roi de la Mecque, qui est devenue amoureuse de lui
sur le bruit de sa valeur et se livre à lui pendant qu'il
fait la guerre à son frère. Le roman raconte les aven-
tures du fils en Syrie et dans le pays des fées. La texte
a été publié par M. Scht'ler, Bruxelles, 1877, etc.
(Histoire littéraire *ie la France^ t. XXV).
BATEAU A AIR, appareil plus spacieux que la cloche
à plongeur, et destiné à la remplacer pour les petites
profondeurs. C'est une grande caisse en fer, ouverte
par le bas, et que l'on maintient éunche au moyen de
l'air comprimé. L'ingénieur français Coulomb eut li
première idée de cet appareil en 1778; mais elle n'i
été pratiquement résolue qu'en 1845 par l'ingénieur
De la Gournerie, qui employa le batean à air pour les
travaux du port de Croisic. On a construit, pour le ser-
vice de la Seine, des bateaux à air qui peuvent con-
tenir 40 ouvriers.
BAUDOIN DE SEBOURG, nom d'une chanson de
geste originaire des provinces wallonnes dans li pre*
BLI
— 1810 —
BRÉ
mière moitié du xiv« siècle. La lang:ue n'en est pas
très pure, et ellei^ompte environ 26,000 vers. Elle est
placée dans le cycle de la croisade. Le chevalier Bau-
doin est aventureux, jovial, d*humeur amoureuse, et
ses histoires semblent avoir subi Tempreinte satirique
des Tabliauz. Un certain Gaufroi, dominé par des
passions impies, matéraliste et avide, le trahit, le
dépouille et prétendrait peut-être au trône; mais la
fortune l'arrête au dernier moment, et il parait mourir
au gibet. La chanson de Baudoin a été analysée dans
V Histoire littéraire de la France^ t. XXV, et imprimée
à Valenciennes, 1842, 2 vol. in-8o.
BAYLE (Dictionnaire historique bt critique de),
recueil de biographies choisies des hommes qui, dans
tous les siècles et chez tous les peuples, ont le plus
influé sur les doctrines religieuses, politiques et phi-
losophiques et de récits ou exposés des faits do ce
même caractère. Bayle fait ainsi connaître, dans sa
préface, le plan qu'il s*était tracé : « J'ai divisé ma
composition en deux parties, dit-il : l'une est pure-
ment historique^ un narré succint des faits; l'autre
est un grand commentaire, un mélange de preuves et
de discussions où Je fais entrer la censure de plusieurs
fautes, et quelquefois même une tirade philosophi-
2ue. M L'idée de cet ouvrage, espèce de dictionnaire
e raisonnement, est heureui>e et grande ; c'est le plus
grand arsenal de septicisme Jusqu'au Dictionnaire
philosophique de Voltaire ; Bayle, « grand amasseur
de nuages ». prête une attention particulière aux
matières religieuses, et se plaît à reproduire les
objections des anciens hérésiarques, en leur prêtant
encore des armes nouvelles. Mais l'ouvrage n'est point
eomposé : chaque article est accompagné d'un com-
mentaire, pour lequel il y a dans le texte de fréquents
renvois, ce qui est très fatigant, car on sent que tout
cela aurait dû se fondre, s'agencer avec le texte. En
outre, le style en est incorrect, toujours lâche et dlfl'us.
Bayle n'a consacré que quatre ans à faire ce travail,
et sa rédaction a été écrite au courant de la plume et
pour ainsi dire improvisée. Ce Dictionnaire parut en
1697, à Rotterdam, en 2 vol. in-fol.; une 2« édition
fût publiée à Amsterdam, en 1101, 3 vol. in-fol. ; puis,
dans l'espace de. 35 ans environ, 8 autres éditions
Çarurent a Rotterdam, Amsterdam, Genève, Bàle et
^évoux. L'édlUon d*Amsterdam, 1740, 4 vol. in-fol.,
fut la plus estimée Jusqu'à celle de Bouchot, Paris,
1820-24, 16 vol. in-8«. L'éditeur a rempli plusieurs
lacunes dans les citations, et donné au livre un carac-
tère plus critique, en y ajoutant des notes extraites
de Cliaulfepié, Joly, La Monnoye, L.-J. Leclerc^ Le Du-
chat, Prosper Marchand, etc., et un ceruin nombre
de cotes nouvelles. C. D — y.
BELLEVDE ^Faïences de). La fabrique de Bellevue
près de Toul, fut fondée en 1758 par un sieur Lefran-
çois. En 1771 elle devint la propriété de Charles
Bayard, ancien directeur de la manufacture royale de
fkience et de terre de pipe de Lunéville, et de Fran-
çois Boyer, artiste faïencier. Cette propriété fut ratifiée
λar lettres patentes de Sa Majesté qui attribuaient à
a fabrique le titre de manufacture royale de Bellevue.
Cette fabrique, qui existe encore aujourd'hui, doit une
partie de sa célébrité à la collaboration du sculpteur
Cyfflé, l'auteur de ces groupes charmants et de ces
figurines qui portent encore son nom. C'est de Bellevue
Sue nous vient ce Joli petit groupe en biscuit de terre
e pipe connu sous le nom de : le savetier sifflait son
sansonnet qui est dans une cage au-dessus de sa tète
(H. 9 pouces, L. 6 pouces ; 9 livres). J. B — z.
BLANCANDIN et VOi gueilleuse (Tamour^ roman
d'aventures du yiu^ siècle, composé de 3,240 vers.
Blancandin est fils d'un roi de Frise, qui va se mêler
aux exercices militaires et amoureux des chevaliers.
Le manuscrit de ce roman est conservé à la Bibliothè-
que nationale de Paris ; il a été publié par M. Michelant,
1867. {V. Histoire littéraire de la France^ t, XXII)
BLINDAGES DES NAVIRES. On croit généralement
que la construction des vaisseaux cuirassés est une
invention toute moderne. Mais Bosio, historien de
l'Ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, parle d'une cara-
qne ou grosse galère de guerre, appelée Santa-Anna^
Sue les chevaliers avaient blindée en plomb pour la
éfendre contre les boulets. Ce navire, construit à
Nice en 1530, fit partie de l'expédition de Charles-Quint
contre Tunis : il avait six ponts, une nombreuse et
puissante artillerie, un équipage de 300 hommes; sa
cuirasse de plomb, fixée par des boulons d'airain, ne
fut pas endommagée parles projectiles. On Toit encore
aujourd'hui une image de la Santa-Anna au milieu
dos anciennes fresques du palais des Hospitaliers à
Rome. Il parait que des navires plus ou moins ana-
logues è celui-là furent projetés par la suite dans
divers pays, mais aucun ne fut exécuté. Les bâtiments
cuirassés actuels dérivent des batteries flottantes
créées, en 1854, par l'empereur Napoléon III pour
attaquer les forteresses russes de la Baltique et de la
mer Noire. Le premier qui ait été exécuté est la fré-
gate ta G/otr«, construite à Toulon en 1858-59, d'après
le plan de Dupuy de Lôme. Depuis cette époque»,
toutes les nations maritimes ont suivi Texerople de
la France. Les navires cuirassés sont tous à vapeur et
à hélice. Plusieurs sont munis, à l'avant et à fleur
d'eau, d'un éperon saillant, destiné à pénétrer dans
les navires ennemis, D'autres portent sur leur pont
une ou deux tourelles ou coupoles ^ tantôt fixes, tantêt
tournantes, et qui sont destinées à renfermer des
canons ; l'idée premières de cette construction appar-
tient au capitaine anglais Cowper Coles. Il y a, enfin,
des navires dont le pont est surmonté d'un blockhaus
ou petit fort, crénelé pour la mousqueterie, et qui a
pour objet d'abriter le commandant et les timo-
niers. B.
BRÉSILIENNE (LmrÂaATUBB]. Pendant tonte la durée
de la domination portugaise, le Brésil fournit un
contingent assez considérable à la littérature de la
métropole. Deux écrivains seulement cherchèrent à y
fonder une littérature nationale, Basilic da Gama et
Duram ou Durfto : l'un chanta, dans son poème de
V Uruguay (1769), l'anéantissement de la puissance des
Jésuites dans les Missions; l'autre publia, en 178i,
Caramurii ou la découverte de Bahia^ poème épiqoe,
dont une traduction française a été donnée par Eug. de
Monglave (Paris, 1829, 3 vol. in- 12). On romarqoa
aussi les compositions d'un poète populaire, Domingo
Caldas Barbosa, homme de couleur, mort en 1880, ei
les Poésies sacrées et profanes de Souza Caldas (1821).
Depuis Que le Brésil est séparé du Portugal, on y
distingue oeux écoles littéraires : l'écoles portugaise
dont Pereira da Silva est le chef, se fait une loi de
suivre sévèrement les préceptes et les exemples des
bons écrivains portugais, tandis que l'école indigène
s'inspire de la nature du pays, peint les mœurs de ses
habitants, et incline Ters un idiome nouveau. Maga-
laens a été le fondateur de cette littérature nationale.
Agent diplomatique en Europe, où il fut témoin de la
lutte des romantiques et des classiques, il rapporta an
Brésil l'idée d'une régénération intellectuelle. On l'a
surnommé le Lamartine brésilien : ses Soupirs poéti-
ques procèdent, en effet de la même inspiration qao
les Méditations^ toutefois avec moins de penchant an
doute. On lui doit aussi une épopée en Thonoeur
d'une peuplade indigène, la Confédération des
Tamoyos. — Plus franchement romantique, Aranjo
Porto-Alegre a transporté dans la poésie les procédés
de la peinture, dans laquelle il excella. Chantre de
ritalie méridionale dans m* Environs de Naples et des
merveilles de sa patrie dans les BrésitienneSf son
œuvre capitale est un poème de Colomb^ où il a surtout
développé le côté religieux du caractère de ce naviga-
teur, et qui est écrit en un style éblouissant. — Les
guerres et les superstitions des Indiens ont été
décrites, avec plus de délicatesse que de force, dans
les Poésies américaines de Gonçalvez Diaz. Noberto de
Sousa et Silva, par ses Modulatiom poétiques, a natu-
ralisé la ballade au Brésil. Le ton mélancolique et la
fin prématurée de Dutra Mello éveillent le souTonir
de Millevoyo. Junqoefra Freire, mort à 22 ans, eut
néanmoins le temps de donner la mesure de son génie ;
ses Inspirations au cloître prouvent qull serait devenu
un des premiers, sinon le premier poète du Brésil.
Ce pays a trouvé non seolement des poètes pour
chanter ses beautés naturelles, mais encore des his-
toriens pour raconter les luttes de son indépendance.
Rocha Pitta a laissé une histoire des temps coloniaux
Juqu'au xvin« siècle. Pereira da Silva, après avoir écrit
une histoire des hommes illustres du Brésil pendant lés
temps coloniaux, a entrepris une Histoire de la fon-
dation de VEmpire brésilien. — Le roman, qui ne
fleurit d'ordinaire que dans la maturité et plus souvent
au déclin dos littératures, a été cultivé au Brésil dès
les premières années de la Renaissance. Mais on n'y
rencontre ni aventures multipliées, ni intrigue»
savamment conduites, ni analyses délicates du cceor
CAD
— 1811 —
GAI
humain : il a retracé les mœurs des tribus indigènes.
De même que les riverains de la Delaware et du
Mississipi, oui ont eu leur peintre dans Cooper, les
peuplades ae l'Amazone et du Parahyba ont inspiré
Alencar pour son roman du Guarani. Pereira da Silva
a mis en scène, dans une œuvre où la légende est
mêlée à l'histoire, Jéronymo Gortereal, ami et élève
de Camoéns. — Bien que le théâtre soit un amusement
cher à la population brésilienne, on se borne le plus
souvent à traduire ou à imiter les pièces françaises.
Parmi les œuvres originales on doit citer Antonio
José, drame en vers de Magalhuens; ia Méret drame
d*Alancar; Luxe et Vanité et le Nouvel Othello, de
J. de Macedo. — La littérature politique est fort
abondante au Brésil : parmi les hommes qui se livrent
à ce genre, on distingue Sales Torres Homen, ancien
ministre des finances, les sénateurs Paranbos, Firmino
et Octaviano, puis Nabuco, Uruguay, etc. (Voy. Ferdi-
nand Denis» Résumé de l'histoire littéraire au Portugal
et du Brésil; Adolphe de Varnhagen, Epicos Brazi-
leiros, 1845, et Florilegio da Poesia Brazileira,
1850-53, 3 vol. ; Pereira da Silva, Plutarcho Brazileiro,)
BROCHAGE. En 1857, Sulzberg, relieur à Frauen-
feld (Suisse), imagina une Brocheuse mécanique,
machine à plier et à brocher les feuilles des livres ; il
s'associa avec le mécanicien Graf pour la construire
et en montra un premier modèle à Leipzig en 1859.
n'éuit encore qu'un appareil imparfait. Avec Taided'un
autre mécanicien, nommé Tanner, un nouveau modèle
fut produit en 1862 à l'exposition de Londres, et adopté
par les relieurs. Cette brocheuse, mue par deux jeunes
garçons, dont d'un la met en mouvement et l'autre
Palimente de feuilles, plie, pique et saline au moins
1,000 feuilles à l'heure, tandis qu'auparavant une
habile ouvrière, travaillant 10 heures par Jour, ne
pouvait plier et brocher que 2,500 feuilles.
BRODERIE. On ne sait à quelle époque précise
furent inventés les papiers quadrillés pour la mise en
carte des dessins de broderie et de tapisserie. Les
plus anciens livres qui renferment des travaux de ce
genre ont été publiés à Venise en 1554 et 1559. Quel-
ques années après, Ant. Bellin et Mavol Larme firent
paraître à Lyon un recueil semblable. En 1587, Vinciolo
publia ses :>in(juliers et Nouveaux Pourtraicts pour
toutes sortes d'ouvrages de lingerie. Vers le même
tempts parut le Moael Fuscà d'Hélène Furstin, de
Nuremberg. Vers 1745, Gatin appliqua une gravure
plus savante aux systèmes de mise en carte de ses
devanciers. Plus tard, Bellin et, au commencement
de notre siècle, Natto et Lehman perfectionnèrent
encore cet art. Ces artistes allemands ont surtout fait
avancer la fabrication des dessins de broderie ; ce sont
liailer (de Vienne), Wittich, Grtlnthal, Hortz et
IVegener (de Berlin). En France, des essais furent
exécutés, depuis 1815, par Aug. Legrand, Mallez,
Robert Helbronner et Martin; en 1839, Rouget de
Lisle introduisit quelques améliorations. C'est depuis
1840 que Sajou a fait des dessins aussi parfaits que
ceux d'Allemagne.
A la France appartient l'idée des Brodeuses méca-
niques. Des tentatives furent faites dès 1821 ; mais la
première machine qui ait fonctionné d'une manière
satisfaisante ne fut donnée qu'en 1829, par Josué Heil-
mann, de Mulhouse. Parmi les autres brodeuses inven-
tées depuis cette époque, on remarque celle de Chevolot,
de Paris, qui permet de produire à la fois de 48 à 100
broderies semblables, imitant les dessins au plumetis
à la main. La plupart des machines à coudre, peuvent,
dans beaucoup de circonstances, être employées pour
la broderie.
G
CADENAS, serrure de fer primitivement fixée aux
derniers anneaux de toute chaîne qu'on passait autour
d'un coffre ou dans les barreaux d'une grille pour les
fermer. On a prétendu à tort qu'Ehrmann, de Nurem-
berg, en avait été l'inventeur en 1540 ; car le cadenas
était connu des Romains qui l'appelaient Sera, et on
en a trouvé des spécimens dans leurs monuments en
mine. Au moyen âge, les cadenas s'appelaient Ploustres
Les cadenas à combinaison datent au xvi« siècle ; Car-
dan {De subtilitate, Nuremb., 1550> en a décrit un
qui avait été construit par Janellus Turrianus, méca-
nicien de Crémone. Au commencement de notre siècle.
Régnier, mécanicien de Paris, inventa un cadenas dont
les viroles étaient susceptibles de 331,777 combinai-
sons. '
CiECOGRAPHIE, art d'apprendre à écrire aux aveu-
gles. Pour atteindre ce but, le docteur Franklin, au
siècle dernier, se servait de feuilles d'ivoire disposées
d'une certaine manière. D'autres procédés ont été pro-
posés par Pingeron (1786), Lhermina (1784), Bérard
(1801). La machine de Julien Leroy (1817), appelée
d'abord Nyctographe, reçut, à la suite de perfectionne-
ments, le nom de Cœcograph. En 1838, Ferdinand
Léger inventa un système de tablettes qui, après
diverses améliorations, fut approuvé par la Société
d'encouragement en 1851. L'appareil à écrire que con-
struisit, en 1843, l'aveugle-né Foucauld est encore le
plus employé aujourd'hui. En 1858, ia Société d'encou-
ragement accueillit avec faveur deux nouveaux appa-
reils : celui de Golard-Vienot, de Paris, et celui de
Massé, de Tours. Enfin, en 186*2, un rapport a été fait à
l'Académie des sciencessurle Cxcirèoleàe Duvignau.
CAIRE (ÉCOLE FBANÇ4ISB Du) OU désigne sous cette
dénomination la Mission archéologique permanente
que le gouvernement français entrelient au Caire de-
puis l'année 1879, dont l'objet est de préparer des
jeunes savants à la pratique des fouilles et à la pu-
blication raisonnée des documents destinées à perpé-
tuer l'œuvre éminemment française du musée de
Boulacq. A proprement parler l'école française du
Caire n'a point encore d'autre existence officielle.
C'est M. Maspéro qui le premier, vers la fin de 1879,
fut chargé par le gouvernement do conduire quelques
égyptologues dans la vallée du Nil. Mariette-pacha
étant mort et M. Maspéro ayant été appelé par le
khédive à prendre la direction du musée de Boulacq,
l'expédition scientifique française passa alors sous la
conduite de M. Lefébure, remplacé à son tour en 1883
par M. Gréband. Les membres de la mission sont
choisis parmi les anciens élèves de l'école des hautes-
études munis du diplôme de la licence es lettres.
Des égyptologues non licenciés peuvent être attachés
à la mission pour une durée de un an, et plus.
D'autre part, l'école des langues orientales vivantes
envoie aussi au Caire quelques-uns de ses élèves
désireux de se perfectionner dans la connaissance de
la langue arabe. Comme les écoles françaises d'Athè-
nes et de Rome, l'école du Caire a sa publication
annuelle où sont consignés ses travaux et ses décou-
vertes. Ces Mémoires publiés par les membres de la
missionarchéologique française au Caire sont l'œuvre
des jeunes savants attachés à cette expédition qui
tous sont tenus d'y fournir au moins un article
dans l'année. G. D. y.
CAISSE D'ESCOMPTE, établissement de crédit pro-
voqué parTurgot, pour favoriser le commerce en géné-
ral, et particulièrement celui de Paris, et qui fut créé
par un arrêt du Conseil du roi ou Conseil royal des
finances du 24 mars 1776. Son capital fut Axé à
12 millions de livres, divisés en quatre mille actions
de 3,000 livres chacune. Circonscrite à des opérations
de Banque, la Caisse fit pour 60 millions d'escompte,
ce qui n'était pas extraordinaire. Comme dans ce
temps-là l'argent n'était pas encore assimilé à une
marchandise, qui doit avoir un cours variable, le taux
de l'escompte de la Caisse fut fixé à 4 p. lUO en temps
de paix et 4 1/2 en temps de guerre. La Caisse d'es-
compte rendait de grands services ; mais entraînée par
les affaires, elle fit des émissions imprudentes, prêta
son crédit au gouvernement, et, en 1783, sa trouva
embarrassée, au point de ne pouvoir rembourser ses
billets qu'en lettres de change. Alors le gouvernement
l'obligea d'augmenter son capital de 3 millions de
livres ; de garder une réserve de 2,500,000 livres; lui
interdit d'escompter des etteu à plus de 90 iours ; lui
imposa d'avoir une encaisse énle au quart de ses bil-
lets en circulation ; enfin ne dépasser jamais 6 p. 100
dans la distribution des dividendes à ses actionnaires.
Ces mesures assurèrent sa prospérité pendant 4 ans,
mais en 17M7 elle prêta de nouveau à l'Eut, d'abord
70millions, puis, en 1789 et 1790, 170 millions, dentelle
ne fut remboursée qu'en assignats. Necker avait tenté
de faire déclarer cotte caisse Banque nationale. Lors-
que vinrent les mauvais jours de la Révolution, quand
les énergumènes eurent inventé le crime de négocian-
tisme^ qu'il n'y eut plus ni commerce ni affaires, et
par conséquent nulles transactions dans les banques,
CAN
— 1812 —
CAR
la Caisse d*escompte n'exista plus pour ainsi dire que
de nom. La C^onvention, par un décret du 24 aoill
1793 la supprima. G. D. — y.
GALCOGRAPHIE, appareil inventé» en 1838, par
Gh. Chevalier, ingénieur-opticien à Paris, pour faci-
liter le tracé sur papier des images fournies par la
•chambre claire. Depuis, Rouget de Lisle a construit,
Kous le même nom. un instrument spécialement ap-
plicable à la reproduction des dessins de fabrique,
mais qui peut servir aussi pour dessiner les objets vus
en perspective.
CANNE. A diverses époques, on a imaginé d*ajouter
des accessoires à la canne, pour la faire servir à plu-
sieurs fins. Ainsi la canne à fusil et ia canne à épée
deviennent, entre les mains du promeneur paisible,
une arme de chasse ou une arme défensive ; la canne à
vent est tantôt une sarbacane, tantôt un diminutif du
fusil à vent ; la canne à liçne est destinée aux pécheurs ;
la canne-abri se déploie en une tente portative; la
canne- fauteuil fournit un siège au voyageur fatigué ;
la canne à lunette se change à volonté en longue-vue,
etc. On a eu même l'idée d'enfermer dans une canne
du gaz comprimé, ce qui a produit la canne-flambeau
ou la canne à gaz. Quant à la eanne hydraulique,
tube pourvu d'une soupape à sa partie inférieure, et
qu*on peut employer à élever les eaux en lui impri-
mant iiu mouvement de va-et-vient; ce n*est qu'un
objet de curiosité.
CANON. Les premiers canons n'avaient pas les
accessoires qu'ils présentent aujourdMiui. Vers H28,
on commença a les renforcer à la culasse. Le renfoi^
cément de la bouche vint un peu plus tard, ainsi que
les tourillons. Les anses et le cul- de-lampe ne furent
communs que sous Charles-Quint. Le grain de lumière,
déjà connu à la fin du xvi« siècle, reçut sa forme
actuelle à l'époque de Louis XV, lors de la réforme do
Tartillerie par Gribeauval.
L'usage de prendre le diamètre du boulet comme
base des dimensions des pièces date du xv* siècle.
Moritz Meyer le fait remonter, il est vrai, au fondeur
Hartmané, de Nuremberg, 1540; mais un texte cité
dans les œuvres de Napoléon III prouve qu'il existait
en 1431. Le calibre des canons a beaucoup varié : dans
les premiers temps, il y avait des canons de toutes
dimensions ; mais on reconnut bientôt l'utilité de les
ramener à un petit nombre de types. Le système de
Gribeauval fut adopté par tous les États d'Europe. En
1819, le colonel Paixhans proposa un canon à bombes,
pouvant lancer des boulets explosirs, et qu'un a em-
ployé pour la défense des côtes et l'armement des
navires. Napoléon 111 a introduit l'unité de calibre dans
l'artillerie de campagne, par la création du canon-
obusier de 13, qui lance indistinctement des projec-
tiles creux et des projectiles pleins.
Les résultats obtenus par les carabines à tige et les
balles cylindro-ogivaics ont donné l'idée de fabriquer
des canons rayés, lançant des boulets coniques ou
cylindro-coniques. Les premiers essais importants
furent faits, en 1845, à Ackcr (Suède), par le major
piémoniais Cavalli, et répétés aussitôt en Angleterre.
Le problème fut résolu en France à la suite des expé-
riences du capitaine Lepage, en 1854, du capitaine
Samisier, en 1855, et du major Ghanal, en 1856; les
nouveaux canons furent employés dans la guerre de la
grande Kabylie, en 1857. Ceux qui figurèrent aux
batailles de Magenu et de Solférino, en 1859. étaient
l'œuvre du commandant Treille de Beaulieu. Depuis
cette époque, les canons rayés ont été adoptés pariout,
avec des modifications de détail : ceux de France se
chargent par la bouche ; les canons italiens de Cavaliif
les canons anglais de Whithworth, d'Armstrong, de
Horsfall, les canons prussiens de Wahrendorflf, se char-
gent par la culasse. L'artillerie de place et de marine
a pris également les pièces rayées.
L'invention du blindage des navires à l'aide de pla-
ques de fer a été ensuite le signal d'une révolution dans
l'artillerie de terre et de mer ; il fallait renforcer la
puissance des canons, afin de percer ces armures mé-
talliques, dont on a même revêtu les batteries de terre.
Le bronze, trop mou pour la résistance qu'on deman-
dait désormais aux bouches à feu, a été abandonné ;
les Etats-Unis ont adopté la fonte, soit seule, soit
soutenue par d'autres métaux ; mais le fer forgé et
surtout l'acier, qui est moins cher, tendent à prévaloir.
On en est arrivé à fabriquer de monstrueux engins ;
les projectiles des canons prussiens de Krupp pèsent
de 100 à 300 kilog., ceux des canons anglais de Bla-
kely, 700 livres (avec une charge de 70 livres de
goudre) ; ceux des canons américains de Rodman et
lahlgren, 500 kilogr. On a vu à l'Exposition univer-
selle de Paris (1867) un canon suédois de Fiosponç,
pèsent 13,600 kilogr.; un canon Armstrong, 33,865 ki-
logr.; un canon Krupp, 50,000 kilogr.; un canon fran-
çais, 38«r00 kilogr. La marine a dû élever ses calibres
de 1B à 24 et à 36 centimètres.
GANT, idiome répandu en Angleterre parmi les
classes dangereuses, argot des bohémiens, des vaga-
bonds et des malfaiteurs. Le mot cant n'est pas, ainsi
que l'a dit Addison.le nom d'un prédicateur écossais.
élopée plaintive
Le caut est dilTérent du slang (V. ce mot plus loin).
Il a un fonds de vieille date, où l'on reconnaît des
mots hébreux, persans, slaves, etc. ; puis des emprunts
ont été faits aux langues vivantes européennes, Talle-
mand, TiUlien, l'espagnol, le français, l'anglais. Un
tel mélange s'explique par la vie nomade des gens
qui parlent le cant. A ce langage ont quelquefois
puisé les auteurs dramatiques, Ben Johnson, Beaamont
et Fietcher, même Shakespeare. (V. Richard Head,
Canting Academy^ 1674 ; Francis Grose. Classical
Diclionary of the vulgar tongUe, 1785; i4 Dictionary
of modem Slang, Cant, and oulgar Words, par un
antiquitaire de Londres, 1864 ; Forgues, La langue du
monde excentrique en ÀJigleterre, dans la Hevue des
Deux Mondes du 15 septembre 1846.) B.
CAPET (poème de Hdgues), chanson de geste con-
poHée au xiv« siècle par un auteur inconnu, et publiée
pour la première foiK, en 1864, par le marquis de La
Grange, d'après le manuscrit unique de Paris dans la
Collection des ancienx poètes de la France. Contrai-
rement à la tradition qui fait descendre Hugues Capet
du Saxon Witikind, le poète donne pour père au pre
mier roi de la 8« dynastie un chevalier de TOrléanais,
Richier, seigneur de Beaugency, vivant à la cour du roi
Louis V ;il l'appelle par erreur/^ Débonnaire), et pour
mère Béàtrix, fille de Simon, riche boucher de Paris.
Son but était sans doute de glorifier l'alliance de la
rovauté capétienne avec le peuple ; cette tradition était
très répandue au moyen âge et Dante et Villon y font
allusion. Hugues Capet arrive au trône comme gendre
de Louis et avec l'assentiment des bourgeois. Il y a
donc ici un poème politique plutôt qu'une chanson de
geste proprement dite. Un autre caractère du poème,
c'est 1 ardeur avec laquelle la loi salique y est défen-
due : on en peut conclure qu'il fut écrit vers l'avène-
ment de Philippe VI de Valois, quand il s'agissait
d'écarter le roi d'Angleterre, prétendant à la couronne
de France, et, à ce titre, il esi l'expression de l'opinion
publique. Le poème de Hugues Capet, jeté dans le
moule des chansons de geste, diffrère de ces anciennes
compositions ; moins héroïque et plus littéraire, il est
sobre de détails : les dialogues y suppléent les récits :
Tauteur intervient quelquefois, en mêlant à l'action
ses sentences et ses réflexions. Traduit en prose alle-
mande au xy^ siècle par Elisabeth de Lorraine, com-
tesse de Vaudemont, mariée au comte de Nassau-Saar-
brQck, il a été très populaire au delà du Rhin, sous le
titre de Hug Schapefer, comme respirant le sentiment
démocratique ; Bûlow Ta rajeuni dans ses Kouiyelles
(Brunswick, 1841). On n'en connut longtemps en
France qu'un extrait inséré dans la Bibliothèque des
romans. B.
CARICATURE. Les anciens Grecs, qui assignaient
pour but à l'art l'imitation de la nature, relevée parle
sentiment d'une beauié idéale, ont généralement évité
de reproduire le laid. Les peintres Athénis et Bupalus,
en se pendant de désespoir à cause des épigrammesdu
poète Hipponax, dont il avaient fait la caricature,
prouvèrent que leur art avait peu de crédit. Aristote et
Aristophane expriment le mépris dont était l'objet, au
siècle de Périclès, le peintre Pauson, qui avait cnitivé
le genre grotesque. En Béotie, une loi proscrivait la
caricature. Cet art n'a guère pris faveur que vers
l'époque macédonienne et n'a fleuri qu^à l'époque ro-
maine ; les monuments de la peinture et de la sculp-
ture où l'on trouve le grotesque ont été tirés des villes
d'Herculanum et de Pompéi, et ne représentent que
l'art grec dégénéré. Le grotesque, chez les Grecs, fat
moins dans les arts du dessin que dans la littérature,
CAR
1813 —
CAR
et les comédies d'Aristophane en donnent la plus com-
plète idée ; certains vases peints offrent des souvenirs
de représentations comiques. — Les grotesques qui
nous sont parvenus ne sont pas des types grecs; on y
reconnaît souvent les personnages des Atelianes,
Maccus, Bucco, Dorsennus, Pappus, Manducus. etc.
Les principales formes de la parodie, les principaux
procédés pour produire le grotesque, avaient été trou-
vés par les artistes de l'Age gréco-romain ; ainsi ils
rapetissent, ils suppriment les proportions, ils mettent
des tètes énormes sur des corps grêles, ainsi que la
fait Dantan de nos tours ; ou bien, comme Granville
dans les Fables de La Fontaine, ils travestissent
rbomme en bète. (V. Gbampfleury, Histoire delà Cari-
cature antique, 18f>5.) B.
CARNAVALET (Hôtel et MusIb). Le musée Carna-
valet, spécialement consacré àriiistoire de Paris et de
la Révolution française, est de fondation toute récente.
Il doit son nom à Tancien hôtel dans lequel il a été
installé; nous nous occuperons donc d*abordde Tédi-
fice illustré par le ciseau de Jean Goujon et par le
souvenir de madame de Sévigné. Nous passerons en-
suite en revue les intéressantes collections qu'il ren-
ferme.
Par contrat passé devant Guillaume Payen et Jean
Trouvé, notaires au Ch&telet de Paris, le mercredi
18 mars 1544, les chanoines de Sainte-Catherine-du-
Yal-des-Écoliers vendirent à messire Jacques des Li-
gneris, président au Parlement, cinq places conte-
nant 8 toises de large sur 15 toises de profondeur,
dans la culture Sainte-Catherine, moyennant trente
livres de rente et trois sous quatre deniers du cent
au proAt des religieux de Saint-Victor, coseigneurs
du fief.
Jacques des Ligneris, homme sage et de grand
savoir, était alors l'un des ambassadeurs pour le roi
au concile de Trente. Son père, René des Ligueris,
échanson de la reine de Navarre, sœur de François I«',
avait fait b&tir le célèbre château d'Azay-le-Rideau
en Touraine . Jacques , qui tenait ainsi de famille
le goût des arts, s'adressa, pour construire son hôtel
de la culture Sainte-Catherine aux premiers artistes de
son temps. Pierre Lescot, architecte du roi , fut cliargé
d'en dresser les plans, et Jean Goujon de décorer les
façades. Les dessins de Jean Marot, antérieurs à la
grande restauration de Mansart, nous donnent une
idée exacte et assez complète de l'édifice dans son
éiat primitif. Suivant la coutume empreinte encore
des usages féodaux, les dehors restèrent simples et
sévères; c*était le côté qui regardait l'ennemi on tout
au moins l'étranger. Les façades intérieures, au con-
traire, exposées aux regards du maître et de ses
hôtes, devaient être richement ornées ; elles présen-
taient de gracieux arceaux, de fines sculptures, en
un mot toutes les séductions de cette architecture
française italianisée que le seizième siècle vit éclore,
s'épanouir, et qui s'éteignit avec lui sous la lourde
influence du goût bourbonien .
La façade sur la rue se composait d'un corps cen-
tral flanqué de deux pavillons. Au milieu, se détachait
le portail ouvert d'une large baie, en plein ceintre,
dont la clef de voûte fut décorée d'une admirable
figurine , VAbondancef ciselé par Jean Goujon, qui
sculpta au-dessous, dans le tympan semi-circulaire de
la porte, un écusson armorié soutenu par deux petits
génies portant des palmes, accompagnés d'élégants
trophées. Cette sobre et charmante décoration s'est
conservée intacte, à cela près que le globe sur lequel
s'appuyait la statuette de l'Abondance a été trans-
formé plus tard en masque de carnaval, par allusion
au nom des Carnavalet, les seconds propriétaires de
l'hôtel.
Ce bâtiment surlaruene comportait qu'un seulétage,
de sept croisées de face. Les fenêtres cintrées et couron-
nées de frontons arqués dépassaient la naissance des
combles dont elles coupaient la ligne en se détachant à
moitié sur la toiture. Cette disposition d'un rez-de-
chaussée surmonté de Incarnes en saillie sur les toits
se répétait sur trois faces à l'intérieur de la cour et fai-
sait valoir le corps de logis principal, plus élevé d'un
étage, couronné d'une balustrade, derrière laquelle
s'élançait une haute couverture d'ardoise, surmontée
d'épis flenronnés. De chaque côté, deux pavillons avan-
cés contenaient les escaliers et vestibules. On y accé-
dait par deux portes élevées de quelques marches et
décorées d'entablements sculptés. A ces pavillons se
rattachaient deux ailes en arcades dont les clefs furent
ornées d'admirables mascarons par maître Ponce. Ces
arcades, ouvertes du côté des communs (aile droite),
éclairaient de l'autre côté, un promenoir couvert.
Elles étaient fermées, à hauteur d'appui, par de larges
balustrades monolithes, taillées à môme le bloc, tra-
vail singulier qui fit longtemps l'admiration des gens
de l'art, ainsi que les pilastres accouplés, également
monolithes, qui portent cette galerie.
Sur le quatrième côté de la cour, du côté de l'en-
trée, faisant face aux appartements, Jean Goujon
exécuta une décoration emblématique fort ingénieuse
et qui peut être considérée comme l'un de ses plus
purs chefs-d'œuvre : à la clef de voûte de la grande
porte, VAutoritéf figurine ailée, tenant un sceptre et
un joug ; dans les tympans, deux victoires, et, de
chaque côté, au-dessus des petites portes latérales,
deux lions soumis foulant des trophées d'armes. C'est
le symbole de la force, soumise à l'autorité morale de
la justice; emblème admirablement approprié à la
demeure d'un magistrat. Ce symbole incompris a été
maladroitement altéré, plus tard, par le transport des
deux lions à la façade extérieure, sur la rue. Félici-
tons-nous cependant qu'ils aient été conservés ainsi
que toute la décoration de cet admirable portail, par
les soins do Mansart, qui eut le très grand mérite,
plus rare encore de son temps que de nos jours, d'ap-
précier et do respecter l'œuvre magistrale de ses de-
vanciers.
En 1546, Pierre Lescot et Jean Goujon abandon-
naient l'hôtel des Ligueris pour le Louvre, dont
François I*' leur confia la restauration. C'est alors
3ue Jean Bullant, qui venait de terminer le château
'Écouen, prit la conduite des travaux. Il acheva le
bâtiment principal entre cour et jardin; et des élèves
de Goujon exécutèrent, d'après les dessins du maître,
les quatre saisons sculptées entre les fenêtres du pre-
mier étage.
Il n'est pas permis, en effet, d'attribuer à Jean
Goujon lui-même, ce» grands bas-reliefs, composés
dans sa manière caractéristique, mais que déparent
des incorrections évidentes. La part dé^à fort consi-
dérable du grand artiste doit être restreinte à la déco-
ration du portail sur la cour et sur la rue, et de la
porte du vestibule de l'aile gauche à l'entrée du grand
escalier. Celle de l'aile droite est une imitation toute
moderne.
Le président des Ligneris mourut en 1556, laissant
son hôtel à son fils, Théodore des Ligneris; capitaine
de cinquante hommes d'armes, qui le coi)serva jus-
qu'à son mariage avec Françoise de Billy. Dès l'année
suivante, 1578, il le vendit à Françoise de la Heaume,
veuve de François de Carnavalet — Kernevenoy de son
vrai nom breton. Ce seigneur, qui avait été Tun des
favoris de Henri II, et gouverneur du duc d'Anjou,
alors régnant sous le nom de Henri III.
La dame de Carnavalet, qui devait laisser définiti-
vement son nom à cet hôtel, ne le conserva que vingt-
quatre ans. Elle le revendit en 1602 à Florent d'Ar-
gouges, trésorier de la reine Marie de Médicis. C'est
sous la désignation d'hôtel d'Argouges que Jean Marot
en publia les plan, coupe et élévation vers 164G, alors
(|ue Jean Androuet, le dernier des Ducerceau, fils de
l'architecte du Pont-neuf, venait d'y ajouter, dans
l'aile droite, un magnifique escalier à VitcUienne, dont
il n'existe plus de trace.
L'hôtel Carnavalet resta dans la famille d'Argouges
jnsqu'en 1654. « La dame d'Argouges >» le vendit à
Claude Boislëve, l'un des intendants de Fouquet,
financier véreux, alors à l'apogée de sa trop rapide
fortune. Celui-ci le fit remanier de fond en comble
par François Mansart, qui transforma l'élégant manoir
Renaissance en un somptueux hôtel Louis XIV, en y
ajoutant un étage en aile et sur la rue, surmonté d'un
comble mansardé. Il obtenait ainsi, au premier, une
belle suite de pièces de réception, faisant le tour de
l'hôtel. Du même coup disnarurent l'escalier à l'ita-
lienne de Ducerceau et l'escalier à vis du xvi* siècle,
sur remplacement duquel le nouvel architecte cons-
truisit son grand escalier, celui qui existe encore
aujourd'hui, et qui donne accès à la bibliothèque.
Mansart, nous l'avons dit, respecta autant que pos-
sible l'œuvre décorative de Jean Goujon ; mais pour
conserver la symétrie, il dut faire sculpter entre les
fenêtres du nouvel étage, en ailes sur la cour, pour
faire suite aux saisons du bâtiment principal» huit
CAR
— 1814 —
CAR
flgares de môme proportion : à ganclie, les quatre élé-
ments, à droite, quatre déesses qui sont loin de valoir
les bas-reliefs de la Renaissance. Ces deux suites
furent confiées à deux sculpteurs dont un seul nous
est connu, VanObstal, membre de l'Académie royale,
auteur des figures de Taile droite qui ne lui font pas
honneur. Celles de l'aile gauche, les quatre éléments,
sont incomparablement meilleures. C'est aussi à Van
Obstai que l'on attribue les figures décoratives du
premier éta^e sur la rue. la Vigilance et la Fermeté,
et le basrelief allégorique en retour, à l'angle de la
rue des Francs-Bourgeois^ oui fait allusion au mariage
du roi et à la paix des Pyrénées conclus en 1660.
Bfansart venait de terminer cette restauration et
d'en signer la date, 1661, sur le stylobate de la statue
de Minerve qui couronne l'édifice, quand Boislève.
entraîné dans la chute de son puissant patron le surin-
tendant Fouquet, eut à rendre ses comptes à la
Chambre de justice. Son hôtel, saisi par arrêt du
18 Juillet 1662, fut vendu, le 19 novembre 1666, et
adjugé au roi, au prix de cent mille livres.
Le domaine le céda, en 1667, à Gaspard de Gillier,
conseiller au Parlement, en remboursement du prix
d'une augmentation de gages révoquée par édit de
1664.
Gillier, protestant converti, et, comme tel, très
bien en cour, n'habita pas l'hôtel Carnavalet, où il eut
successivement comme locataires madame de Lille-
bonne et madame de Sévigné.
La spirituelle marquise est la grande illustration,
l'auréole de l'hôtel Carnavalet, qu'elle habita pendant
20 ans, de 1677 à I696. Madame de Sévigné, dont la
fortune avait été gravement compromise par les pro-
digalités do son mari, n'occupait pas seule l'hôtel
Carnavalet; toute la famille s'en partageait le loyer
qui pourtant ne dépassait pas cinq à six mille livres.
La marquise et sa fille occupaient le grand apparte-
ment du premier an fond de la cour; le comte de Gri-
gnan, dans ses courts voyages à Paris, le réz-de-
chaussée, au-dessous; le marquis de Sévigné fils, le
premier sur la rue, et l'abbé de Coulanges, le bien bon,
l'aile droite.
La galerie de l'aile gauche et le grand salon d'angle
sur la rue était réservés aux réceptions, aux visites de
cérémonie ; c'est la seule pièce qui conserve encore
aujourd'hui la décoration du temps. On en a fait la
salle publique des estampes.
Nous ne pouvons mieux faire que de citer quelques
extraits des lettres de madame de Sévigné, relatives à
son installation dans cette chère Carnavalette^ dont
la position, en vigie sur le chemin de la Place-Royale,
des Minimes et des Grands-Jésuites, convenait si bien
à ses instincts de curieuse et de chroniqueuse de la
haute vie du grand siècle, ainsi que le témoigne ce
cri du cœur adressé à sa fille, le 4 octobre 1677 :
tt Ah! quel bon air nous avons dans cette Carnava-
letle, au prix de la Courtaude! » Et, que l'on ne s'y
trompe pas, il ne s'agit pas du bon air respirable de
la culture Sainte-Catherine, comparé à celui de la
rue Court-au- Vilain, que quittait la marquise, il s'agit
du bel air^ de l'air à la mode : a Dieu merci, nous
avons l'hôtel Carnavalet, ajoute-t-elle, dans la lettre
du 7, c'est une affaire admirable ; nous aurons le bel
air.., une belle cour, un beau jardin, un beau quar-
tier ».
La lettre du 12 octobre est pariiculièrement inté-
ressante en ce qu'elle nous indique, par le menu,
les aménagements de la famille : « Ma bonne, nous
avons une contestation, d'Hacqueville et moi : il veut
que vous soyez avec moi dans le bel appartement;
mol je voulais que vous fussiez en bas, au-dessous
de moi, où il y a toutes les mômes pièces, afin d'être
moins cotisues et moins près de moi. Voici ses raisons
contre les miennes. Il dit que le haut est bien plus
clair et plus propre que le bas; il a raison. Il y a une
grande salle commune que je meublerai, puis un
passage, puis une grande chambre : c'est la vôtre. De
cette chambre, on passe dans celle de madame de
Llllebonne : c'est la mienne; et de cette grande
chambre on va dans une petite que vous ne con-
naissez pas, et qui est votre panier , votre grippe^
minaudf que je vous meublerai et où vous coucherez
si vous voulez. Cette petite chambre est jolie. Il dit
que les personnages qui nous viendront voir toutes
deux ne vous feront pas grand mal de passer dans
votre grande chambre; celles que je voudrais vous ôter,
pour écumer votre pot, viendront par un degré dé-
gagé assez raisonnable tout droit dans ma petite
chambre. Ce sera aussi le degré dv matin pour mes
gens, pour mes ouvriers, pour mes créanciers. Il y a,
près à*i ce deg^é, deux chambres pour mes filles; vous
avez aussi de quoi mettre les vôtres, et Monigobert en
haut, avec mesdemoiselles de Grignan, où il y a présen-
tement deux princesses, les deux filles de madame de
Llllebonne) : cela s'appelle la chambre des princesses.
M. de Grignan sera au bout de la salle (le grand
salon), mon fils en bas, le bien bon sur une petite aile
fort jolie... » Ces dispositions furent quelque peu
modifiées : M. de Grignan prit, comme nous l'avons
dit, l'appartement du rez-de-chaussée, et le marquis
de Sévigné le premier sur la rue « au bout de la
salle p.
Le 20 octobre, on est en plein déménagement, et
la marquise écrit à sa fille : « Je reçois mille visites
en l'air des Rochefoucaud, des Tarente; c'est quel-
quefois dans la cour de Carnavalet, sur le timon de
mon carrosse. Je suis dans le chaos : vous trouverez le
démêlement du monde et des éléments n.
Malgré cet enthousiasme de la première heure, on
faillit résilier le bail après la première période de
trois ans. Madame de Sévigné n'était pas anUqoaire,
il restait dans l'hôtel Carnavalet des aménagements
Renaisssance qui n'étalent point de son goût et aux-
quels elle eût préféré les parquets et les petites che-
minées à la moderne. Elle s'en plaignait déjà aa
début : « Comme on ne peut pas tout avoir, il faut se
passer des parquets et des petites cheminées à la
mode. » Plus tard, elle exige que les vieilles chemi-
nées Henri II disparaissent. « II est est surveau lont
à propos un fort honnête hoihme à qui nous avons
affaire en l'absence de M. d'Agourry (représentant do
propriétaire) ; il demande seulement le temps d'écrire
pour avoir la permission d'attaquer la vieille anti-
quaille de cheminée, dont il ne doute point ; et cela
étant, il n'y aura rien de mieux ni de plus tôt fait, b
Madame de Sévigné a pris possession de l'hôtel Car-
navalet, elle y trônera vingt ans au milieu de cette
société d'élite dont ses lettres réfléchissent Tesprit
raffiné et nous ont transmis les noms éblouissants :
Retz, La Rochefoucauld, Séguier, Condé, Turenne,
Bourdaloue, Mascaron et tant d'autres. Elle ne le
quitta que pour aller mourir au château de Grignan,
entre les bras de sa fille adorée, le 17 avril 1696.
Après l'illustre marquise, le reste ne vaut plus que
l'honneur d'être nommé. Le 10 août 1694, avant l'expi-
ration du bail Sévigné, Brunet de Rancy, receveur
des financeSi achetait de Gaspard de Gillier l'hôtel
Carnavalet qu'il vint habiter dès qu'il put en disposer,
après l'avoir fort embelli au dedans, mais sans rien
changer à l'extérieur. En 1717, il le donna à sa fille,
mariée depuis 1703 à M. de la Briffe, intendant de
Bourgogne. Madame de la Briffe y mourut le 13 mai
1747, le laissant à son fils aîné, intendant de la gé-
néralité de Caen. L'hôtel Carnavalet resta dans cette
famille jusqu'en 1777, loué par ses propriétaires, qui
ne l'habitèrent pas, non plus que M. Bellanger. con-
seiller d'État, et son neveu Dopré de Saint- Maur, oon-
seillor au Parlement, derniers possesseurs avant la
Révolution.
A cette époque commence la décadence, l'invasion
administrative. L'hôtel Carnavalet abrite successive-
ment la direction delà librairie, puis l'École des ponts
et chaussées qui n'en sortit qu'en 1830. Deux pen-
sions s'y succédèrent ensuite sous la direction de
M. Liévyns et de M. Verdot. C'est à ce dernier que
la ville de Paris acheta l'hôtel Carnavalet en 1866 pour
y créer le musée historique dont nous allons parler.
Sous le règne du baron Haussmann, la première
idée avait été de fonder k Thôtel Carnavalet, un musée
des mœurs et usages de nos ancêtres. Idée va^ue et
mal définie qui entraîna d'abord l'administration dans
d'énormes dépenses à côté; car, par suite de la vie
intense de cette ville, dont le présent dévore sans
cesse le passée on se vit obligé, à défaut d'objets pcrri-
sienSf de recueillir tonte espèce de bibelots d'origine
provinciale et même étrangère. Le musée Carnavalet
menaçait de devenir le réceptable de toutes les épaves
du bric-à-brac européen. "Tout cela s'empilait dans
un vieil hôtel du quai de Béthunc, sous la direction
de MM. Charles Read et Gailharbaud, tandis qu'un
jeune architecte, M. Parmentier, travaillait à rendre
à l'hôtel Carnavalet sa physionomie primitive et à
CAR
~ 1815 —
CAR
oflacer les traces des dortoirs et des classes qui avaient
succédé aux briUaots appartements des grands sei-
gneurs d'autrerois. Les désastres de 1870, l'incendie
de THôtel de ville en 1871, vinrent suspendre les
travaux et arrêter les collections. Le règlement fut
difficile, si difflcile même, que le nouveau conseil
municipal décida de mettre un terme aux errements
primitifs, en liquidant le passé et et en ramenant le
musée projeté à sa vraie destination, la conservation
des souvenirs du vieux Paris et des documents relatifs
à rbistoire de Paris et de la Révolution française.
L'ancienne bibliothèque de la ville avait été anéantie
dans l'incendie; on résolut de la reconstituer dans le
même sens spécial et de la réunir au musée qui en
formait le complément naturel. M. Jules Cousin^ an-
cien bibliothécaire de l'Arsenal, fut chargé de cette
réorganisation définitivement ordonnée par un arrêté
de M. Hérold. préfet de la Seine, du 29 février 1830.
Le conseil municipal avait insisté pour qu'un musée
révolutionnaire, consacré aux souvenirs du grand
mouvement de 1789 fut annexé au musée parisien.
Il se trouva précisément un généreux donateur, M. A.
de Liesville, qui offrit à la ville sa précieuse collec-
tion des documents relatifs à l*histoire de la Révolu-
tion française qu'il recueillait depuis 30 ans. Cette
offre fut acceptée, et M. de Liesville devint conserva-
teur adjoint du nouveau musée. Gr&ce aux efforts
combinés des deux conservateurs et aux libéralités
du conseil municipal qui a largement doté le nouvel
établissement, cette institution si récente est déjà
des plus florissantes, et rond journellement de grands
services aux travailleurs et au public.
La bibliothèque ne compte pas moins de soixante-
dix mille volumes soigneusement catalogués et ré-
partis en douze grandes divisions : 1. Bibliographie
— 2. Histoire physique, géologie et hydrographie pari-
siennes. — 3. Histoires et descriptions do Paris. —
4. Révolution française. — 5. Topographie. — 6. His-
toire religieuse, églises et communautés. — 7. Histoire
artistique et littéraire. — 8. Histoire des mœurs et
ubleaux de Paris. — 9. Fêtes et divertissements,
comprenant le théâtre. — 10. Histoire civile et admi-
nistrative. — U. — Police et histoire judiciaire. —
12. Environs de Paris dans le ressort de Tancienne
prévôté.
Cinquante mille estampes, un millier de plans an-
ciens, vingt mille monnaies et médailles complètent
les collections de la bibliothèque proprement dite.
Le musée comprend d'abord les collections lapi-
daires et céramiques provenant des fouilles et des
démolitions parisiennes, qui occupent tout le rez-de-
chaussée de l'hôtel. On y remarque les débris d'un
magnifique monument triomphal gallo-romain, dé-
couverts sur l'emplacement du nouvel Hôtel-Dieu;
une belle bérie de sarcophages, provenant des cime-
tières mérovingiens de Saint-Marcel, do Sainl-Ger-
main-des-Prés etc. ; de précieux vestiges du vieux
Louvre, de la basilique chrétienne qui a précédé
Notre-Dame, et de nombreux édifices parisiens du
moyen âge et de la Renaissance; une série de vases
funéraires et objets diver:*, provenant d'un cimetière
gallo-romain, découvert en 1878, rue Nicole; une
statuette équestre de Charlemagne, de l'époque car-
lovingienne; une grande quantité d'inscriptions funé-
raires, provenant des anciennes' églises de Paris, etc.
Dans l'ancien hôtel du syndicat des drapiers, rap-
porté de la rue des déchargeurs, et érigé au fond du
jardin encore inachevé, est exposée une collection
d'anciennes vues de Paris : incendie de la Chambre
des comptes, 14737. — Inauguration de l'Ecole de
chirurgie, 1774. par Gab. de Saint-Aubin. — Ruines
de l'Hôtel-Dieu et voûte du quai de (iêvres, par Hu-
bert-Robert. — Vues de l'Hôtel de ville, de l'Arche-
vêché, du pont Notre-Dame, des Tuileries, du Pont-
Neuf, de Chaillot^ de TIle-Saint^Louis, de Tincendie d*^
l'Hôtel-Dieu, par Roguenet, 1750 à 1772. — Vues gé-
nérales de Paris en avant de la tour de Nesie, vers
1660, etc., etc.
Au rez-de-chaussée de ce même bâtiment, une salle
contient un curieux modèle en relief des galeries du
Palais-Royal, avec toutes boutiques garnies de leurs
enseignes et de leurs marchandises ; une belle collec-
tion parisienne des médailllons de David d'Angers et
diverses autres vues du vieux Paris, parmi lesquelles
un grand profil du populaire boulevard du Temple,
peint en 1860, par MarUal Potémont; un curieux inté-
rieur du cabaret de Ramponneau au xviiie siècle, et
une promenade de Longchamp en 1801, dessin de
Carie Vernet. Dans les escaliers et vestibules ont été
disposées quantité de vieilles eneignesetde plaques
de cheminées, provenant de démolitions,
La partie la plus complète du musée est celle qui
se rapporte à l'époque révolutionnaire de 1789 à 1804.
Elle occupe une grande salle et une longue galerie
coupéo par un charmant salon Louis XV, rapporté du
l'hôtel des Stuart, rue Saint-Hyacinthe. Les objets de
toute nature, marques au cachet du plus bouillant
patriotisme, y sont accumulés et ressucitent pour
aiusi dire la vie journalière de ces temps agités et
enthousiastes. Voici les Bastilles du capitaine Palloy,
les papiers de tentures aux rubans tricolores, les
tables des Droits de Thomme et de la Constitution,
les bonnets de liberté, les écharpes municipales, les
bagues en l'honneur des martyrs Marat et Le Pelle-
tier, un petit reliquaire, contenant des poils de la
veste de Chalier, des boites, des médaillons à por-
traits et à emblèmes républicains, des armes d'hon-
neur, des piques, des sabres parmi lesqueU on re-
marque celui des vainqueurs de la Bastille. Voici des
lettres de cachet, des cartes de club, des cartes à
jouer purgées des figures monarchiques^ remplacées
par des génies, des libertés et des égalités, des fers
de reliure, avec le niveau et le bonnet, des montres
et pendules décimales* des cuillères patriotioues por-
tant l'inscription : « Vivre libre ou mourir! » Voici
des calendriers, des tableaux, de belles armoires de
mariage avec la prise de la Bastille, le serment ci-
vique et les emblèmes des trois ordres, sculptés sur
les panneaux à la place des colombes et des guir-
landes de fleurs traditionnelles. Dans la galerie, une
incomparable collection de céramique et de numis-
matique. Toutes les médailles et monnaies frappées
de 1709 à 1803; les insignes des magistrats et fonc-
tionnaires publics de 1792 et la suite complète des
faïences patriotiques, depuis les premières assiettes
décorées de la bêche, de l'épée et de la crosse soute-
nant la couronne avec l'inscription : W la ration,
jusqu'à l'assiette de la Carmagnole :
Madame Veto avait promis
De faire égorger tout Paris.
Deux vitrines contiennent les pièces de Sèvres,
exécutées par les artistes de la ci-devant manufacture
royale qui, aux fleurs de Us, substituaient alors le
bonnet rouge, le triangle égalitaire, et les cocardes
tricolores. Une ta^sse en porcelaiiie de Berlin repré-
sente l'exécution du roi et de la reine ; en face un
petit bénitier apparaît, décoré de l'arbre et du bonnet
de liberté. Il ne nous est pas possible de détailler
les innombrables pièces do haute curiosité que ren-
ferme cette collection. N'oublions pus, pourtant, les
éventails de circonstance, fêtes publiques, mariage
républicain, sujets satiriques, etc., et une splendide
garniture de cheminée : pendule décimale, à trois
cadrans en émail et bronze doré, flambeaux à médail-
lons de Louis XVI, Bailly et Lafayette^ et va»es de
Sèvres pâte tendre, exécutés en mémoire de la fête de
l'Être suprême, décorés des figures de la Liberté et
de la Raison qui portent, en manière de collier, les
dix chifi'res du système décimal.
Un assez grand nombre de portraits des person-
nages de la révolution, provenant en majeure partie
de la collection Saint- Albin, semblent revivre au mi-
lieu de ces accessoires du drame dont ils furent les
héros. Il est à regretter que le défaut de place em-
pêche d'exposer quelques-unes des belles estampes
qui en reproduisent les principaux événements.
Car le musée Carnavalet ne peut montrer qu'une
partie de ses richesses. Les constructions prévues
dès l'origine restent suspendues depuis plusieurs
années, sans qu'on puisse s'en expliquer la cause, les
plans sont prêts, la place est libre, l'argent ne
manque pas, et le zèle des conservateurs mdriterait
d'être mieux secondé par les architectes.
M. de Liesville est mort au commencement de
cette année (1885), au moment où il achevait d'ins-
taller ses collections révolutionnaires à l'hôtel Carna-
valet. Quelques grands donateurs ont contribué avec
lui et M. Jules Cousin au rapide développement de la
bibliothèque et du musée historique de la ville. Ce
sont MM. Amédée Berger, président à la Cour des
comptes, fils de l'ancien préfet de U Seine» le doc-
CHA
— 1816
GHR
leur Besançon, Charles Brouty, architecte, Damoalin
et Cosse Marchai, libraires.
Espérons que dans la riche et nombreuse famille
des collectionneurs sur Paris, quelques autres se son*
viendront qu^ils ont en ce musée ou héritier naturel,
un dépôt public, où ils peuvent perpétuer, par une
libéralité intelligenie, au profit de leurs coreligion-
naires, et ad majorem patrije gloriam Thonneur de
leur nom et de leurs chères collections. J. C. — in.
CARRICK, espèce de casaque, munie de plusieurs
collets tombants superposés pour garantir les épaules
de la pluie. Les carricks forent à la mode dans les
premières années de notre siècle.
CARTOUCHE, mot employé autrefois dans l'armée
comme synonyme de congé. Sur papier blanc, elle
était délivrée aux libérés des travaux publics; sur
papier jaune, aux soldats dégradés, passés par les
verges, ou renvoyés du corps comme indignes.
CAUTIONNEMENT DES JOURNAUX. La chute du
second Empire amena des^modiflcations dans la presse.
Ear décret du 10 octobre I87o, le gouvernement de la
éfense nationale supprima le cautionnement des jour-
naux et écrits périodiques. Une loi rendue par TAssem-
biée nationale, le 11 juillet 1871, établit un nouveau
cautionnement : dans le département de la Seine,
4,0(J0 fr. étaient versés par le journal ou écrit pério-
dique paraissant plus de trois fois par semaine, et
18,000 fr. si la publication avait lieu trois fois et moins ;
dans les autres départements, si la ville comptait
50,000 &mes et plus, le journal qui paraissait plus de
trois fois versait 12,000 fr., et tout autre 6,000 fr.,
la somme étant réduite à moitié dans les villes moins
importantes. Quand un journal avait été définitive-
ment frappé d'une condamnation à l'amende et k des
réparations civiles affectant son cautionnement, un
délai de quinze jours lui était accordé pour reconsti-
tuer ce cautionnement: sinon, il ne lui était plus per-
mis de le publier; la loi du 29 juillet 1881 a supprimé
le cautionnement. (V. Loi sur la Presse.)
CÉSAR (Juuos], roman du xiii<» siècle, qui se ratta-
che au cycle de l'antiquité grecque et romaine. L'ac-
tion, qui suit de très près celle de la Pharsale de Lu-
cain, est conduite jusqu'à l'entrée triomphale de César
dans Rome. Ce roman n'est pas écrit en vers de hui-
syllabes, comme les autres imitations des épopées an-
tiques, mais en alexandrins formant des couplets mo-
norimes, comme ceux des chansons de geste. Le ma-
nuscrit de Julius César, qui dato de 1280, porte le
nom d*un Jacques de Forez, qui, dit-il, n'a mis que
quatre mois à le faire. (V. A. Joly, Revue contempo-
raine, 15 mai 1870.)
CHAINE. Terme employé dans la fabrication des
tapisseries, pour désigner la rangée de fils blancs sur
laquelle le tapissier lissera les fils de couleur. La
chaîne est formée de coton (autrefois de laine, parfois
aussi de soie) ; quand la chaîne est horizontale, tous
le fils de la trame se trouvent dans la ligne horizon-
tale, et ia tapisserie est dite de basse lice, ou lisse.
Si au contraire la chaîne est verticale, les fils de lajtrame
forment un plan vertical, et la tapisserie est dite de
haute lisse, (V. Lisse Supplément.)
CHALCOTYPIE, procédé de gravure en relief sur
cuivre, inventé, en 1851, par Reims, deBerlin.On exé-
cute les dessin par les moyens ordinaires de las gravure
à l'eau-forte, et onimprimeà la presse typographique.
CHAMBRE CIjVIRE, en latin Caméra tucida, appa-
reil d'obtique à l'aide duquel on obtient, sur un écran
ou sur du papier blanc, l'image des objets de la nature
dans tout i éclat de leurs couleurs et suivant les lois de
la perspective. On peut ensuite marquer au crayon ou
à la plume les traits et les contours des images proje-
tées, et même appliquer les couleurs exactes aux en-
droits où elles sont reproduites. La chambre claire
reproduit également les gravures et les tableaux. Ima-
ginée au xvii« siècle par l'Anglais Robert Hook, per-
fectionnée par Woliaston, en 1803, et par Amici, vers
1814, elle fut introduite à Paris, en 1815, par Charles
et Vincent Chevalier, ingénieurs-opticiens, qui l'ont
encore améliorée. — La chambre obscure ou chambre
noire, qui sert aux mêmes usages, mais dont la cons-
truction est différente, a été inventée par Léonard de
Vinci ; il en est question dans les notes de la traduc-
tion de Vitruve par Césariano (Côme, 1521). Léo
Alberti paraît être un des premiers qui s'en servirent
pour en obtenir des dessins réduits de tableaux ou de
paysages. Ch. Chevalier a donné une £;randc perfection
à l'appareil, qui est devenu très important depuis l'in-
vention de la photographie.
CHAPEAUX. Jusqu'au oiiliea du xviii* siècle, on ne
fit guère que des chapeaux de feutre. L'industrie des
chapeaux de soie naquit alors à Florence ; elle fut in-
troauite peu de temps après en France. Le plus ancien
chapeau de castor dont on fasse mention fut porté par
Charles VII en 1438. Les chapeaux pliants ou mécani-
ques paraissent avoir été inventés en Angleterre, eo
1824, par Robert Lloyd et James Rowbashaw; le cha-
pelier Gibus les importa à Paris en 1834, et, dix ans
après, Duchène y adapta un ressort qui permit de les
ouvrir et de les fermer par une très légère pression. Les
chapeavx de paille les plus beaux se fabriquent en
Toscane avec la paille d'une variété de froment qne
Ton coupe en vert ; ceux de paille de riz viennent sur-
tout des environs de modène. Les chf/peaux dits de
Panama, sans doute parce que les premiers furent
apportés de ce port en Europe, se font au Pérou, dans
la NouTelle- Grenade et dans l'Equateur, avec les
feuilles du bombanax, plante-arbuste de U famille des
palmiers.
CHAPINS, chaussure en usage chez les dames espa-
gnoles au xvii» siècle. C'étaient des espèces de sanda-
les où l'on passait le soulier et qui grandissaient po-
digieusement ; mais on ne pouvait marclier avec qu'en
s'appuyant sur deux personnes.
CHARGEMENT, en terme de marine, tout ce qui
est chargé sur un b&timent. Sur un vaisseau de guerre,
ce sont les armes, les munitions et les vivres ; sur un
navire de commerce, ce sont les marchandises. On ne
peut charger un navire dans un port que le jour et
avec un permis délivré par les agents de la douane,
sous peine de confiscation des marchandises et de
100 fr. d'amende.
CHARLES LE CHAUVE, titre d'une chanson de gestes
du XIV* siècle. Celte œuvre, de peu de valeur, n'offre
aucun intérêt historique ; il ne s'agit que d'aventures
avec les Sarrasins. Le manuscrit est conservé à la
Bibliothèque nationale. {V, Histoire littéraire de la
France, t. XXVI.)
CHAUFFERETTES ou CHAUFFE- PIEDS. On a
trouvé, dans des tombeaux mérovingiens, des chauffe-
rettes en terre cuite, semblables à celles dont se ser-
vent encore aujourd'hui les femmes pauvres. Pendant
plusieurs siècles, on fit très peu de chose pour les
améliorer. A la fin, les élégantes se servirent, non
d'un vase de terre, mais d'une boite de bois, où était
enfermé un récipient rempli de braise ou de cendres
chaudes. En 1814, une dame Augustine Chambon de
Mentaux imagina de remplacer labraise par une petite
lampe à huile, au-dessus de laquelle était un bassin
de tôle rempli de sable : les chauffe-pieds de ce genre
furent appelés auguttines. Puis on substitua à la
lampe à huile une lampe à esprit-de-vio. Enfin on a
supprimé tout combustible) et fait des chaufferettes
avec de l'eau chaude.
CHEMINS DE FER. Les voies ferrées que l'on con-
struit pour mettre en rapport les différents quartiers
d'une grande ville ont reçu d'abord le nom de chemins
américains, parce que ce sont les ingénieurs des Éuts-
Unis qui les ont imaginés. Elles se composent de rails
en forme d'ornière, et les voitures y sont traînées par
des chevaux. Le plus ancien ciiemin de ce genre fut
construit à Nevr-York en 1845. Pendant longtemps,
I^ris n'en posséda qu'un qui commence à la place de
la Concorde ; dans ces dernières années, ce système
s'est considérablement développé à rintérieur de Paris
et dans toutes les grandes villes : les voitures prennent
le nom de tramways : les tramways, plus rapides, plus
vastes et plus confortables que les omnibus, tendent à
les remplacer. — En Angleterre, il existe, pour le
service de l'agriculture, des chemins de fer portatifs.
Ils sont formés de longrines garnies de bandes de fer
réunies par des traverses, et constituant des cadres
que deux hommes peuvent déplacer et installer; ces
cadres se réunissent les uns aux autres d'une manière
très simple, et l'on établit ainsi une Toie où de petits
wagons attelés d'un cheval transportent des engrais
et autres choses pesantes.
CHROMOTYPIE ou TYPOCHROMIB, art d'imprimer
les dessins ou plusieurs couleurs par les procédéis ordi-
naires de la typographie. On trouve dans le psautier
exécuté en 1427 par Pierre Schœffer, un B rouge et
bleu, qui a été produit d'un seul coup de presse, au
moyen de bois gravés h part et rentrant Tan dans
GLU
— 1817 —
GLU
-raotre «près avoir été encrés séparément. Le procédé,
retrouvé vers 1621 par rAnglais Congreve, et introduit
«n France par Firmin Didot et Gauchard, est une im-
pression ptLT juxtaposition. Vers le roôme temps, un
•autre Anglais, William Salvage, employa le système
par supet-positioUt qui donne de meilleurs résultats;
son procédé a été perfectionné par Haas, à Prague,
et par Silbermann, à Strasbourg. En combinant un
ipetit nombre de planches imprimées l'une après Tautre
on obtient toutes les nuances de la peinture.
GIBIENT. lÀ ciment de Portland, inventé, en 182B,
par un maçon anglais de Leeds, et ainsi nommé parce
que sa couleur est à peu près celle de la pierre de
Portland employée dans les constructions de Londres,
s'obtient soit par un mélange artificiel d*argile avec de
la craie ou des calcaires marneux, soit à Taide de mar-
nés naturelles renfermant environ 20 pour 100 d*argile.
— Le ciment Scott, qui porte le nom d'un capiuine
anglais du génie, s*obtient en faisant arriver de Tacide
salfurique sur la chaux vive chauffée. — M. Kuhl-
mann, de Lille, prépare un ciment en mélangeant à
froid le marc de la fabrication de la soude artificielle
avec le résidu laissé par la pyrite de fer après qu'elle
a été grillée et lessivée. — Il existe plusieurs ciments \
métaUiques» Celui des Ghenot est préparé avec des
minerais ou des battitures de fer; on en forme des en-
duits et dos moulages très durables et très économi-
ques. Celui de Sorel s'obtient en délayant de Toxyde
de zinc dans un chlorure liquide de même base; il
sert aux mômes usages que le précédent, et peut en-
core être employé à la place des peintures à Thuile
pour la conservation des boiseries.
CLUNY {Musée de), appelé aussi musée des Thermes
(voir Dictionnaire a'histoire et de géographie) et de
4'hôtel de Cluny (V. Dictionnaire) ^ a été créé à Paris
par une loi du 24 Juillet 1848, en vertu de laquelle
l*Etat se rendait propriétaire de la collection du
Sommerard et de Vhôtel de Cluny. En 1833 M. du
Sommerard, amateur infatigable des monuments des
aiècles passés, avait fait choix de ce vieux manoir
pour servir d*abri aux précieuses collections d*objets
d*art du moyen âge et la Renaissance réunis par ses
-soins penduit quarante années de recherches et d'é-
tudes. A la mort du célèbre antiquaire, survenue
en août 1842, la commission des monuments histori-
ques émit le vœu que la collection du Sommerard fût
achetée par la ville. M. Dnchâtel, ministre de Tinté-
rieur, présenta le projet de loi dont l'exposé des mo-
tifs fut lu dans la séance du 26 mai 1843. La loi fut
votée le 24 juillet suivant à une majorité considérable
«ur le rapport de l'illustre Arago, député des Pyrénées-
Orientales. Ce rapport, présenté dans la séance du
Tl mai, démontrait avec une grande élévation d'idées
les avantages que devait présenter la fondation de ce
nouveau musée, tant au point de vue de l'étude des
monuments de notre art national, qu'au point de vue
plus prati(^ue encore de Téducation de nos artistes et
de nos artisans, éducation dont c elle devait être le
magnifique complément ». La somme que proposait
le gouvernement français pour l'achat de cette pré-
cieuse collection était de beaucoup inférieure aux
offres nombreuses venues de Tétranger. Poussés
par un sentiment généreux, les héritiers de M. du
Sommerard préférèrent à la certitude d'un prix plus
élevé la certitude de conservera la France l'œuvre ad-
mirable de leur père. Dès la première ouverture qui
lui fut faite par le ministre de Tintérieur, M. E. du
Sommerard fils, mort récemment, qui en présence des
offres pressantes de l'Angleterre avait dû se rendre à
Londres, rompit toute négociation avec l'étranger pour
rentrer immédiatement à Paris. On traita pour la
somme modique de *200,000 francs. Madame veuve du
-Sommerard donna son complet consentement sur l'en-
gagement formel pris iiérativement par le ministre
que la collection du Sommerard serait conservée en
bloc et non disséminée dans les autres collections
publiques, et que la direction en serait confiée, sous
l'autorité de lacommisMon des monuments historiques
et sa vie durant, au fils du fondateur, collaborateur
depuis de nombreuses années des travaux de son père.
De part et d'autre ces engagements ont été stricte-
ment remplis, à ce point même, qu'à l'époque de la
fondation du musée des souverains sous l'empire,
fondation qui a atteint toutes les collections publiques,
l'intégralité de la collection du Sommerard a été scru-
puleusement respectée. D'autre part le contrôle de la
commission des monuments historiques a produit les
meilleurs résultats. C'est par les travaux, par les
missions* par les fouilles dont sont chargés les ins-
pecteurs dos monuments historiques, c'est aussi sur
les fonds dont ils disposent qu'indépendamment des
nombreux dons qui lui sont faits, s'alimente le musée
de Cluny. Depuis la fondation, la direction du musée
n'a laissé échapper aucune occasion d'enrichir les
collections qui lui sont confiées. Dans le rapport
qu'il adressa au ministre de l'instruction publique et
des beanx-aru en 1881, le directeur d'alors, M. E.
du Sommerard, donnait ces chiffres éloquents : « En
décembre 1852, l'inventaire du musée comprenait
deux mille cinq cents numéros ; il atteint aujourd'hui
le chiflire de dix mille huit cents ; et il faut ajouter
que ce chiffre est bien loin de représenter le nombre
exact des objets d'art existant au musée, car des
séries tout entières d'origine ou do provenance ana-
logue ont dûse trouver fréauemment inscrites sous un
mime numéro d'ordre. » Le catalogue de ce musée,
unique au monde, et dont la France a le devoir d'être
fière, comprend 20 séries Intéressant i P la sgulptubb,
pierre, marbre, bois, plâtre, ivoire, bronze, fonte,
cire; 20 I'ambdblbhbnt civil et religieux, bahuts, cré-
dences, bancs d'œuvre, etc. ; Z^ la pbintdrb, sur en**
duit, panneau, toile, vélin, manuscrits : 4° la peinturb
SUR vbrbb, vitraux français, allemands, italiens, suisses ;
5<^ la CÉRAMIQUE, poteries de l'antiquité, du moyen Age
et de la Renaissance, porcelaines, terres éniaiUées et
vernissées d'Italie, d'Espagne et des diverses provinces
de la France; faïences italiennes, françaises, hollan-
daises, allemandes, pei*sane8, hlspano- mauresques,
etc. ; 6« l'ÉMAtLLBRiB, los émsux incrustés, champlevés,
cloisonnés, en taille d'épargne, les émaux peints,
les mosaïques; 7* la vbrrbrib, antique, arabe, véni-
tienne > fhmçaise, allemande, etc.; 8» l'oRpivRERiB,
civile, religieuse, pièces de bijouterie, etc. ; 9^ I'hor-
LOGBRiB, pendules, montres des différentes fabriques
d'Augsbourg, de Nuremberg, de Paris et Londres et de
Dieppe; 10^ I'armurbrib, pièces d'arquebuserle de
toutes espèces, armes offensives, et défensives ; IP la
SBRRURBBIB ; 12» la DiNANDERiE, objots usuols de cutvre,
bronze, métal de cloche ; 1 3» la tapisser», tapis de haute
et basse lisse ou brodés au point, tentures; 14<» les tis-
sus de soie, de lin, costumes, étendards, chaussures
brodées; 15* la carrossbrib, 16<> les instruments ob
musique; 17* les instruments db pbécision, astronomie,
géométrie ; I8<* les ustensiles de table, de toilette et de
travail ; 19» les sceaux, monnaies ; 20<* les objets prove-
nant de fouilles, collections préhistoriques.
Dans cet ensemble il est quelques pièces tout à fait
uniques, ou tout à fait hors de prix, dont l'énnmération
ne saurait trouver place ici. Toutes sont classées avec
une méthode et suivant un plan qu'il est bon de faire
connaître. D'après la description qu'en a donnée fou
M. Ë. du Sommerard, le conservateur mort récemment,
et remplacé par M. Darcel, l'ancien directeur de la
manufacture nationale des Gobelins, u le classement
adopté pour l'installation des collections était tout in-
diqué par Tépoque à laquelle appartiennent les deux
édifices qui en forment le cadre. Sous les voûtes du
vieux palais romain de Paris sont disposés tous les
monuments en pierre et en marbre de l'antiquité, de
l'ère gallo-romaine et des siècles suivants. . . : les
autels romains élevés à Jupiter par les mariniers de
Paris sous le règne de Tibère, les colonnes en marbre
près du temple sur les ruines duquel a été construite
l'église Motre-Dame de Paris, les statues du grand
portail, les chapiteaux, bas-reliefs, sculptures et frag-
ments de toute nature provenant de Saint-Germain
des Prés, de Saint-Jean de Latran, de Saint-Benoit,
de la collégiale de Cluny et de tous les anciens édi-
fices de Paris, se trouvent rassemblés dans le palais
romain avec les nombreux monuments de l'ère gau-
loise qui ont été rapportés par M. E. du Sommerard
des divers points de la France. Dans les galeries de
l'hôtel de Cluny, d'un autre cêté, sont les monuments
du moyen âge et de la Renaissance, les sculptures on
pierre, en bois, en ivoire, les émaux, les verreries,
les faïences, l'orfèvrerie, les armes, etc., qui occu-
paient le rez-de-chaussée et le premier étage de l'édi-
fice b&ti -par Jacques d'Amboise. »
Le musée de Cluny est très fréquenté par un pu-
blic composé en grande partie d'artisans et de tra-
vailleurs.
Ce musée s'accroît tous les jours encore. 11 a rendu
ii5
CON
— 1818 —
DÉL
de gnnds senrices k TinduBtrie et aux arta modernea,
en initiant noa artisana et noa artistea qui ne eon*
naiasaient guère que la Henaisaance italienne, aux
grand ea et aainea traditiona de l'art national.
J. B-z.
COALITIONS. Uloi du 25 mai 1864 aur les coalU
Uona a modifié le Code pénal. Eat puni d'un emprison*
nement de 6 jours à 3 ans et d'une amende de 16 fr.
à 3,000 fr., ou de Tune de cea deux peines aeulement,
quiconque, à laide de Tlolencea, voies de fait» menacée
ou manœuvres frauduleuses, a amené ou maintenu,
tenté d*amener ou de maintenir une ceasation concertée
de travail, dans le but de forcer la hausse des salairea
ou de porter atteinte au libre exercice de l'industrie
ou du travail. S'il y a eu plan concerté, lea coupables
{>euvent être mis en outre sous la aurveillance de
a haute police pendant 2 ana au moina et 5 ana au
plus. Sont punis d'un emprisonnement de 6 Jours à 3
mois et d'une amende de 16 fr. à 300 fr., ou de l'une
de ces deux peines seulement, tous ouvriers, patrons
et entrepreneurs d'ouvragea qui, à l'aide d'amendes,
défenses, proscriptions, interdictions prononcées par
suite d'un plan concerté, ont porté atteinte au libre
exercice de l'industrie ou du travail. — Ces disposi-
tions sont applicablea aux propriétaires et fermiers,
ainsi qu'aux moissonneurs, domestiques et ouvriers
de la campagne.
COLONIAL (Régime). — Un aénatus-consulte du
10 Juillet 1866 a permis aux coloniea de prendre une
part active au règlement de leurs propres affaires. Le
conseil général atatue aur les acquisitions, aliénationa
et échanges des propriétés de la colonie qui ne aont
paa affectées à un service public, sur leur changement
dedeatinationott d'affectation, sur Innr mode de ges-
tion, sur les baux de biens donnés ou pria à ferme ou à
loyer, sur lea actlona à intenter ou à soutenir an nom
de la colonie, aur l'acceptation ou le refus des dons et
legs, sur le claaaement, la direction et le déclassement
des routes, aur les conceasions de travaux d'intérêt
colonial, sur la part contributive de la colonie dans la
dépense dea travaux à exécuter par l'État, sur les assu-
rances des propriétés de la colonie . Il vote les taxes et
contributions de toute nature néceasairea pour l'ac-
quittement dea dépensée, lea tarifs d'octroi de mer et
les tarifs de douane aur lea objets de toute prove-
nance étrangère. Il délibère aur lea emprunts à con-
tracter, sur le mode de recrutement et de protection
des immigrants, sur le mode d'aaslette et les règles de
perception des contributions et taxes, sur les fraiades
services de la Justice, des cultes, de l'instruction pu-
blique, de la police et dea prisons, aur l'établlasemeut,
le changement ou la auppression des foires et mar^
chés. Il donne son avis sur les changementa de cir-
conscription des arrondissements, des cantona et des
communes, et sur la désignation des chefa-lleux. Après
la chute de l'Empire (1870-1871), lea coloniea ont re-
couvré le droit d'envoyer des députés à l'Assemblée
nationale.
COMTE DE POITIERS (Le), roman d'aventurea du
XIII* siècle, composé de 1 ,700 vers où l'on renconnalt
beaucoup d'emprunts faite à la Violette {V. ce mot).
11 comprend deux suites, qui n'ont aucun lien : dauala
première, le comte de Poitiers triomphe du duc de
Normandie dans une rivalité amoureuse; dans la ae-
conde, l'empereur Noiron (Néron), tranaformé en
prince chrétien, eat délivré des mains des infidèles.
Fr. Michel a publié le Comte de Poitiers^ Paria, 1881,
in-8«. {\. Histoire littéraire de la France, t. XXII.)
CONGRÉGATIONS REUGIEUSES. L'article 11 delà
loi organique du concordat du 18 germinal an X, con-
firmé par l'article 4 du décret-loi du 3 messidor an
XII, déclare qu'aucune congrégation religieuse, d'hom-
mea ou de femmes, ne peut se former aana l'autori-
aation du gouvernement. Néanmoins, un grand nombre
de congrégationa se formèrent sans autorisation, sur-
tout aous le second empire et après les événements de
1870. Un recensement opéré en 1877 constata l'exia-
tence de 500 congrégations non autorlaées, compre-
nant prèa de 22,000 religieux des deux sexes. Les
Souvoira publics, tantôt tolérèrent, tantôt cherchèrent
faire ceascr cet état de choaes, selon l'état do l'es-
prit public. En 1845, une interpellation de M. Thiera,
votée à la preaque unanimité, invita le gouvernement
à appliquer la loi. A la suite de la part prépondérante
attribuée par l'opinion aux influences occultes du
parti religieux dans la politique réactionnaire de 1870
et dea annéea snivantea, la Chambre dea députée vota
le 16 mara 1880, à une immenae majorité, un ordre
du jour faisant appel à la fermeté du gouvernement
pour appliquer lea lois relatives aux congr^ationa
non autorisées. En conséquence, un décret du S mara
1880 invita lea congrégationa non reconnues à pré-
aenter, dans un délai de trois mois, leur* atatuta et
réglementa et à solliciter la reconnaiaaance lépale qui
leur aérait accordée, a'il y avait lieu, par une loi. Cellea
qui ne feraient paa lea diligences à cet effet devaient
subir l'application dealoia en vigueur et se dissoudre.
Une aeule congrégation était exclue du droit de de-
mander rautoriaation et était aupprimée aans plus
ample enquête : c'est la congr^ation dea jéanitea,
qui a été interdite à plusieurs reprisée par lea pou-
voira publica (arrêt du parlement du 6 août 1762, édit
de novembre 1764, arrêt du parlement dn 9 mai 1767,
édit de mai de 1777 ; arrêt de la Cour de Paris du
18 août 1826; pétition renvoyée par la Chambre le
2 1 juin 1 828 ; ordre du Jour du 3 mai 1 845 ; ordre dn jour
du 16 mara 1880) et contre laquelle le aentiment na-
tional a'est toujours prononcé. Un délaide troia moia
lui fut donné pour ae diaaoudre, délai prolongé de
deux moia pour les établisaementa d'enseignement.
Aucune dea congrégationa non autonaéea n'ayant
fait les démarches nécessaires pour obtenir l'autorisa-
tion, lea décréta furent appliqués à toutea.
COOPÉRATION, en terme d'économie politique,
aaaociation des efforts de plosieurs individus pour
atteindre un même but. C'eat une dea lois du travail.
Un seul homme, s'il voulait fabriquer une montre»
aérait obligé d'abord d'extraire du aol et de préparer
lea matièrea premièrea dont se sert l'horlogerie (or,
argent, cuivre, fer), puis de lea fondre, de fabriquer
iea ressorte, etc. Que de temps serait néceaaaire! et
quelle serait l'imperfection du produit! De même,
1 élevage des moutons, le lavage et la préparation de
la laine, la filature, le tiaaage, la teinture, aont des
opérationa qui aboutiaaent à un produit dernier, le
vêtement, et qu'un aeul travailleur ne ponrrail effec-
tuer. — On appelle sociétés coopératives lea associa-
tions d'ouvriers qui unissent leurs braa, leurs épargnes,
leur intelligence, pour exercer une industrie de la
même façon qu'un patron individuel. Ces aodétéa
achètent lea matières premières, les façonnent et les
vendent ; les bénéfices et les pertes se partagent sui-
vant l'intérêt et le travail de chacun dana Tasaociation.
(V. Association, dans le Dictionnaire,)
COQUET, nom d'une petite chaloupe au moyen
COQUETIER, ustensile de Uble dont l'usage fat
longtemps inconnu. Jusqu'au xv^ siècle, on l'appela
engin à mettre et asseoir tœuff ou encore chose d'ar-
gent à mettre lœuf.
D
DÉBOUCHÉS, en économie politique, moyens d'ef-
fectuer rechange des produits fabriquée, et lieux où
l'on en peut trouver l'écoulement. Le mot eat à peu
près synonyme de marchés.
DÉLAIS. Le Corps législatif a voté, le 25 mars 1882,
une loi portant modification des délais en matière ci-
vile et commerciale. En voici les dis|>ositlona :
« Si celui qui est assigné demeure hors de la France
continentale, le délai aéra : 1* pour ceux ^ui demeu-
rent en Corae, en Algérie, dans les Iles-Britanniques,
en Italie, dans le royaume des Paya-Bas, et dans les
Etata ou Confédérations limitrophes de la France, d'un
mois ; 2" pour ceux qui demeurent dana les autres
Etata soit de l'Europe, aoit du littoral de la Méditer-
ranée et de celui de la mer Noire, de deux mois;
30 pour ceux qui demeurent hors d'Europe, on deçà,
des détroits de Malacca et de la Sonde, et en deçà du
cap Horn, de cin() mois; 4<> pour ceux qui demeurent
au delà des détroits de Malacca et de la Sonde et au
delà du cap Uorn, de huit mois. — Lea délais ci-des-
sus seront doublés pour les pays d'outre- mer en cas
de guerre maritime.
« Le délai pour interjeter appel sera de denx mois.
Il courra, pour les jugements contradictoirea, du Jour
de la signification à personne ou à domicile; pour
les Jugements par défaut, du Jour où l'opposition ne
DÉL
— 4819 —
BEL
sera plus recevable. L'intimé pourra néanmolnt inter-
jeter appel incidemment, en toat état de cause, quand
même il aurait signifié le Jugement sans protestation.
Ceux qui demeurent liors de la France continenule
auront, pour interjeter appel, outre le déiai de deux
mois depuis la signification du jugement, le délai des
ajournements réglé ci-dessus. Ceux qui sont absents
du territoire européen de l'empire ou du territoire de
l'Algérie pour cause de service public auront, pour
interjeter appel, outre le délai cle deux mois depuis
la signification du jugement, le délai de huit mois. Il
en sera de même en faveur des gens de mer absents
pour cause de navigation.
«f La requête civile sera signifiée avec assignation
dans le délai de deux mois à Tégard des majeurs, à
compter du jour de la signification du jugement atta-
qué à personne on à domicile. Le délai de deux mois
ne courra contre les mineurs que du jour de la signi-
fication du jugement, faite depuis leur majorité, à
personne ou à domicile. Lorsque le demandeur sera
absent du territoire européen de Tempire ou du ter-
ritoire de TAlgérie pour cause de service public, il
aura, outre le délai ordinaire de deux mois depuis la
signification du jugement, le délai de huit mois. 11 en
sera de môme en faveur des gens de mer absents
pour cause de navigation. Ceux qui demeurent hors de
la France continentale auront, outre le délai de deux
mois depuis la signification du jugement, le délai des
ajournements réglés ci-dessus.
a Le jour de la signification et celui de Téchéance
ne sont point comptés dans le délai général fixé pour
les ajournements, les citations, sommations et autres
actes faits à la personne ou à domicile. Ce délai sera
augmenté d'un jour à raison de 5 myriamètres de dis-
tance. Il en sera de même dans tous les cas prévus,
en matière civile et commerciale, lorsqu'on vertu de
lois, décrets ou ordonnances, il y a lieu d'augmenter
un délai à raison des distances. Les fractions de moins
de 4 myriamètres ne seront pas comptées ; les Tractions
de 4 myriamètres et au-dessus augmenteront ie délai
d'un jour entier. Si le dernier jour du délai est un
jour fér é, le délai sera prorogé au lendemain.
tt Le porteur d'une lettre de change tirée du conti-
nent et des lies de l'Europe ou de l'Algérie, et payable
dans les possessions européennes de la France, ou
dans l'Algérie, soit à vue, soit à un ou plusieurs Jours,
mois ou usances de vue, doit en exiger le payement ou
l'acceptation dans les trois mois de sa date, sous peine
de perdre son recours sur les endosseurs, et môme
sur le tireur, si celui-ci a fait provision. Le délai est
de quatre mois pour les lettres de change tirées des
États du littoral de la Méditerranée ou du littoral de
la mer Noire sur les possessions européennes de la
France, et réciproauement du continent et des îles
de TEurope sur les établissements français de la Médi-
terranée et de la mer Noire. Le délai est de six mois
pour les lettres de change tirées des Ëtats d'Afrique
en deçà du cap de Bonne-Espérance, et des États d'Amé-
rique en deçà du cap Uorn, sur les possessions euro-
péennes de la France, et réciproquement du continent
et des lies de l'Europe sur les possessions françaises
ou établissements français dans les Éuts d'Afrique en
deçà du cap de Bonne- Espérance, et dans les États
d'Amérique en deçà du cap Horn. Le délai est d'un an
pour les lettres de change tirées de toute autre partie
du monde sur les possessions européennes de la France,
et réciproquement du continent et des lies de l'Europe
sur les possessions françaises et les établissements
français, dans toute autre partie du monde. La même
dédiéanee aura lieu contre le porteur d'une lettre de
change à vue, à un ou plusieurs jours, mois ou usances
de vue, tirée de la France, des possessions ou éta-
blissements français et payable dans les pays étran-
gers, qui n'en exii^era pas le payement ou l'accepta*
tien dans les délais ci- dessus prescrits pour chacune
des distances respectives. Les délais ci-dessus seront
doublés en temps de g^uerre maritime pour les pays
d'outre-mer. Les dispositions ci-dessus ne préjudicient
néanmoins pas aux stipulations contraires qui pour-
raient intervenir entre le preneur, le tireur et même
les endosseurs. — Les lettres de change tirées de
France et payables hors du territoire continental de
la France en Europe étant protestées, les tireurs et
endosseurs résidant en France seront poursuivis dans
les délais ci-après : d'un mois pour celles qui éuient
payables en Corse, en Algérie, dans les Iles-Britanni-
ques, en Italie, dans le royaume des Pays-Bas, et dans
les Etats ou confédérations limitrophes de la France ;
de deux mois pour celles qui étaient payables dans les
autres États, soit de l'Europe, soit du littoral de la
Méditerranée et de celui de la mer Noire ; de cinq mois
pour celles qui étaient payables hors d'Europe, en
deçà des détroits de Malacca et de la Sonde, et en
deçà du cap Horn ; de huit mois pour celles qui étaient
payables au delà des détroits de Malacca et de la Sonde,
et au delà du cap Horn. Ces délais seront observés
dans les mêmes proportions pour le recours à exercer
contre les tireurs et endosseurs résidant dans les pos«
sessions françaises hors de la France continentale. Les
délais ci-dessus seront doublés, pour les pays d'outre-
mer, en cas de guerre maritime.
« Le délaissement doit être fait aux assureurs dans
le terme de six mois à partir du jour de la réception
de la nouvelle de la perte arrivée aux ports ou côtes
d'Europe, ou sur celles d'Asie et d'Afrique, dans la
Méditerranée, ou bien, en cas de prise, do la réception
de celle de la conduite du navire dans l'un des ports
ou lieux situés aux côtes ci-dessus mentionnées ; dans
le délai d'un an après la réception de la nouvelle ou
de la perte arrivée ou delà prise conduite en Afrique en
deçà du cap de Bonne-fispérance, ou en Amérique en
deçà du cap Horn ; dans le délai de dix-huit mois après
la nouvelle des pertes arrivées ou des prises conduites
dans toutes les autres parties du monde ; et ces délais
passés, les assurés ne seront plus recevables à faire le
délaissement. — Si, après six mois expirés, à compter
du jour du départ du navire ou du jour auquel se rap-
portent les dernières nouvelles reçues pour les voyages
ordinaires, après un an pour les voyages de long
cours, l'assuré déclare n'avoir reçu aucune nouvelle do
son navire, il peut faire le délaissement à l'assureur
et demander le payement do l'assurance, sans qu'il
soit besoin d'attesution de la perte. Après l'expiration
des six mois ou de l'an, l'assuré a peur agir les délais
établis ci-dessus.
« Le délai pour interjeter appel des jugements des
tribunaux de commerce sera de deux mois, à compter
du Jour de la signification du jugement pour ceux qui
auront été rendus contradictoirement, et du jour de
l'expiration du délai de l'opposition pour ceux qui au-
ront été rendus par défaut; l'appel pourra être inter-
jeté du Jour même du jugement.
« Le délai des ajournements devant les tribunaux
d'Algérie pour les personnes domiciliées en France sera
d'un mois. »
Une autre loi, en date du 9 mai 1862, a réglé les dé-
lais des pourvois en matière civile devant Ta Cour de
cassation. En voici la teneur :
« Le délai pour se pourvoir en cassation sera de deux
mois, à compter du jour où la signification de la déci-
sion, objet au pourvoi, aura été faite à personne ou à
domicile. A l'égard des jugements et arrêts par défaut
qui pourront être déférés à la Cour de cassation, ce
délai ne courra qu'à compter du jour où l'opposition
ne sera plus recevable. Le demandeur en cassation est
tenu de signifier l'arrêt d'admission à la personne ou à
domicile, dans les deux mois après sa date; sinon, il
est déchu de son pourvoi envers ceux des défendeurs à
qui la signification aurait dû être faite. Le délai pour
comparaître sera d'un mois à partir de la signification
de l'arrêt d'admission faite à la personne ou au domi-
cile des défendeurs. Les délais fixés relativement au
pourvoi en cassation et à la comparution des défendeurs
seront augmentés de huit mois en faveur des deman-
deurs ou défendeurs absents du territoire français de
l'Europe ou de l'Algérie pour cause de service public,
et en faveur des gens de mer absents de ce même ter-
ritoire pour cause de navigation. Il est ajouté au délai
ordinaire du pourvoi, lorsque le demandeur sera domi-
cilié en Corse, en Algérie, dans les Iles-Britanniques,
en Italie, dans le royaume des Pays-Bas, et dans les
États ou confédérations limitrophes de la France con-
tinentale, un mois; s'il est domicilié dans les autres
États, soit de l'Europe, soit du littoral de la Méditer*
ranée et de celui de la mer Noire, deux mois ; s'il est
domicilié hors d'Europe, en deçà des détroits de Ma-
lacca et de la Sonde, ou en deçà du cap Horn, cinq
mois ; s'il est domicilié au delà des détroits de Malacca
et de la Sonde, ou au delà du cap Horn, huit mois.
Les délais ci-dessous seront doublés pour les pays
d'outre-mer en cas de guerre maritime. »
DELIT, terme de construction. La plupart des pier-
DEM
— 1820 —
DÉM
r€S ont été formées dans les carrières par des dépôts
successifs qui, en prenant de la consistance, sont deve-
■us des couches on des Hts superposés d'épaisseur et
de dureté variables. Si donc une pierre est posée dans
un sens contraire à celui où elle se trouvait dans la
carrière, et que les tranches soient verticales au lieu
d'être horizontales, elle perd de sa force et peut se
délite^ ou s'ouvrir.
DEMOGRAPHIE, terme didactique (de If^^u peuple,
Ypsf eiv, écrire) servant à désigner la science de This-
toiro naturelle des peuples quant à la population con-
sidérée suivant les âges, les professions, les demeures
etc..«, l'état civil et social. La démographie est à pro-
prement parler la statistique appliquée à la connais-
sance de l'homme. Comme l'a fortbiendit le D' A. Ber-
tillon, cette branche de la statistique, qui consisie à
connaître les sociétés humaines et à les gouverner, est
la mise en pratique de l'adage socratique, connais-toi
tai-méme.
Le rameau démographique s'est greffé tout naturel-
lementsur lo tronc de la statistique. Des esprits attentifs
tl philanthropes ont reconnu que les lois naturelles
qui règlent le cours des choses et le sort des indi-
vidus doivent régler avec autant de force et pent-ètre
aussi avec plus de constance les collectivités hu-
maines. Ils ont pensé que les investigations pratiquées
avec succès dans le domaine des sciences économiques
et administratives (voir Statistique, Zh'c/. et Supp.) pou-
vaient fournir des renseignements non moins précieux
et non moins exacts sur les questions qui intéressent
le plus vivement les hommes, à savoir : la vie et la
mort, la santé et la maladie, la moralité, Tinstruction,
la famille, le bien-être, en un mot tout ce qui cons-
titue l'état civil de l'homme en société. La méthode
scientifique moderne a péremptoirement établi que
ce n'est plus avec des idéalités subjectives que nous
peuvons réaliser ces connaissances. Gomme toute
Mience digne de ce nom dans sa moderne acception,
la science des existences collectives est un édifice
qui a pour matériaux indispensables les faits objectifs,
les faite sociaux. La raison humaine est le ciment oui^
en reliant entre eux ces faits divers ou semblables,
permet d'asseoir les conclusions sur des bases d'au-
tant plus solides que les faits recueillis sont enx-
fliAmes plus nombreux et mieux ordonnés, phéno-
mènes collectifs dont l'intensité et la fréquence sont
représentées par des nombres. « C'est une condition
d'exlMance pour chaque nation, a dit le D' A. Bertillon,
dans la préface de son Atlas démographique, d'égaler
an moins les nations voisines par le nombre, la vi-
nenr, l'Intelligence des Jeunes générations. Et cepen-
dant les hommes auxquels sont remis les destins des
peuples ne s'enquièrent ni du nombre des familles qui
fournissent ces générations, ni des conditions qui
augmentent ou paralysent leur fécondité, ni des causes
multiples et variées qui déciment cette Jeunesse, ni du
taux annuel do ces pertes, ni de leur proportion crois-
sante ou décroissante, et encore moins des raisons qui
président à tous ces mouvements. Si ces gouver-
nements viennent à présumer, nonobstant les enseigne-
ments ecclésiastiques, que le mariage est meilleur que
le célibat, que l'instruction vaut mieux que l'ignorance,
ile ne savent ni dans quelle mesure ni dans quelles
conditions; ils manquent de preuves à opposer aux
adversaires obstinés des voies modernes, et ils sont
sans force pour préparer les applications que la pra-
tique réclame. Il est donc certain que pour constituer
enfin les vraies sciences sociales, pour obtenir une
législation appuyée sur la connaissance des phéno-
mènes sociaux, une administration éclairée dans ses
agissements, et pour réformer nos mœurs publiques
et privées^ il faut que les hommes studieux, touchés
de l'amour de l'humanité, acquièrent de solides no-
tions de Tanatomie du corps social, de son fonction-
nement physique, intellectuel et moral, c'est-à-dire
de sa physiologie et de sa psychologie générales. »
C'est de ce manque de connaissance précise des faits
sociaux qu'est née la statistique humaine. C'est de la
nécessité de combler cette lacune immense qui entra-
vait fatalement le développement des sciences huma-
nitaires en les livrant sans défense aux métaphysiciens,
qu'est né le projet de Jeter de nouvelles assises au
grand monument que notre siècle élève aux sciences
biologiques. A une science nouvelle il fallait un nom
nouveau. Le docteur Ëngel de Berlin avait appelé cette 1
connaissance des peuples : démologie. En France et I
avant loi, M. Gaillard avait trouvé la dénomination
plus simple de : démographie, oui fut adoptée en
France comme à l'étranger. Nous donnons un résumé
des résultats obtenus par la démographie appliquée à
l'étude du mariage, des naissances, et à la mortalité.
Mariages. — La fréquence des mariages ou nup-
tialité est tn France de 8 mariages annuels par lOQO
habitants de tout Age (ou, suivant une méthode pins
exacte, de 28 mariages pour lOOObabiunts non mariés
et en âge de Tètre : de 15 à 60 ans). Cette proportion
est assez satisfaisante. Pourtant, l'Angleterre dépasse
la France sous ce rapport (32 mariages au lieu de -8);
elle a sur nous un avantage plus précieux : c'est que
les Anglais se marient plus Jeunes que les Français ;
Age moyen des garçons : 25 ans en Angleterre, 28 en
France; Age moyen des filles : 24 ans au lieu de 25.
De plus les mariages disproportionnés sont plus rares
chez eux que chez nous. Mais la grande supériorité des
époux anglais, celle qui assure dans l'avenir la gran-
deur de leur patrie, c'est qu'ils ont plus d'enfants que
les Français. C'est un point sur lequel nous aurons
à revenir.
On a observé que la fréquence des mariages aug-
mente quelque peu dès que les affaires (industrielles,
mais surtout agricoles) sont prospères. Au contraire,
elie diminue si la récolte est mauvaise ou si quelque
crise pèse sur le pavs ; msis les fiancés dont une mau-
vaise année a retardé le mariage le concluent généra-
ralement l'année suivante : aussi trouve-t-on que les
années qui suivent une mauvaise récolte sont géné-
ralement remarquables par une forte nuptialité.
Les pays pauvres (Bretagne-Gévennes-Alpes) comp-
tent généralement peu de mariages ; il en est de même
du Nord et de la Normandie.
Influence du mariage sur la santé physique et mo-
rale, — La démographie établit entre l'homme marié,
le célibataire et le veuf de profondes différences, qui
sans elie ne pourraient être soupçonnées ; les hommes
mariés meurent moins vite que les célibataires, et
ceux-ci meurent moins que les veufs. Et cette diffé-
rence est tellement forte qu'on calcule que les céliba-
taires de 25 ans meurent dans les mêmes proportions
que les gens mariés de 45 ansi Les veufs sont encore
plus mal partagés que les garçons, et l'on peut bien
dire, en thèse générale, qu'ils meurent deux fois plus
que les gens mariés du même âge. Dans ce qui pré-
cède, nous ne considérons que les hommes. Pour les
femmes, les mêmes lois se vérifient, mais avec moins
de notteté.
Il est pourtant un Age où le mariage, loin d*être
favorable, est nuisible : c'est pour les très Jeunes gens.
Un homme de 18 à 20 ans n'est apparemment pas
assez développé pour se marier; s'il commet cette
erreur, il décuple sa mortalité ; les Jeunes veuCs (ils
sont rares heureusement) sont encore plus frappés.
Dire que les célibataires sont plus exposés à la mort,
c'est indiquer qu'ils sont plus exposés à la maladie.
C'est en effet ce qui résulte des chiffres assez rares
qu'on a sur ce sujet.
L'Influence du mariage sur le moral de l'homme est
encore plus grande que sur la mort. La folie est plus
fréquente chez les célibataires, et surtout chez les
veufs, que chez les époux. De même pour le crime;
M. Bertillon père, à qui sont dus la plupart de ces
calculs, a prouvé plus encore : les époux <^ul ont des
enfants commettent moins de crimes (18 crimes en un
an pour 100,000 époux avec enfants) que ceux qui n'en
ont pas {tS crimes). De même, les veufs qui ont des
enfants sont moins portés aux idées criminelles que
ceux qui n'en ont pas. Quel enseignement moral
ressort de ces chiffres et qu'ils démontrent a.vec évi-
dence la sainteté de la famille!
Les femmes commettent toujours moins de crimes
que les hommes. Mais, parmi elles aussi, on observe
les différences que nous venons de noter pour les
hommes.
Un document suédois permet d'étudier l'influence
de la famille sur la tendance au suicide : tandis que
l'envie de se tuer reste un phénomène rare chez les
gens mariés, elle augmente avec TAge chez les céli-
bataires et les veufs, et finit chez eux par être une
cause de mort assez fréquente; les différences devien-
nent prodigieuses à la fin de la vie (19 suicides en un
an sur 100,000 époux, 333 pour les non-mariés I). La
présence des enfants a sur la tendance au suicide la
même influence salutaire que sur le crime. Mêmes
DÉM
— 1821
DEM
différences pour les femmes, qui d*ailleurs ont moins
de tendances au suicide que les liommes .
Ainsi nous Toyons que le célibataire parait être le
plus souvent un être malheureux, plus exposé à la
mort, à la maladie et aux tentations mauvaises,
l/homme (et ia femme Jusqu'à un certain degré) gagne
considérablement au mariage. Si les individus y ga-
gnent, la nation y gagne plus encore.
Conditions individuelles qui favorisent le mariage,
— Ces conditions sont nombreuses et elles sont encore
assez mal connues au point de vue statistique. Nou«
n'en mentionnerons qu'une : c'est que les veufs (et
jusqu'à un certain point les divorcés) se marient beau-
coup plus volontiers que ceux qui ne connaissent pas
le mariage par expérience. (Pour les femmes, le fait se
vérifie, mais moins exactement. Il semble que les
veufs sentent eux-mêmes qu'ils sont dans une condi-
tion mauvaise, ainsi que nous l'avons montré tout à
l'heure ; leur second mariage se fait généralement très
peu de temps après la mort de la première femme.
Différents documents étrangers montrent, -en outre,
que les divorcés se remarient à vrai dire peu de temps
après la dissolution du premier mariage, mais non
pas plus vite que les veufs.
NâissAivcBS. — Les naissances ne sont pas assez
nombreuses en France. Elles sont plus rares qu'en
aucun pays de l'Europe : 1000 femmes mariées pro-
créent par an : 136 enfants en Angleterre, 130 environ
en Belgique, en Hollandi^,' etc., 150 en Prusse et 102
seulement en France l On compte souvent la natalité
(proportion des naissances) en comparant le nombre
àeB enfants à la population totale ,* cette méthode,
moins exacte que la précédente, donne d'ailleurs des
résultats analogues à ceux qu'on vient de lire : 36 nais-
sances en France et 38 en Prusse pour 1000 habiunts.
Au siècle dernier, la natalité française était d'environ
40 pour 1000 habitants, à peu près ce qu'elle est en
Prusse aujourd'hui. Depuis le commencement du
siècle, elle n'a fait que décliner, en sorte que la po-
pulation française ne s'accroît presque plus (3,5 habi-
tants pour 1000 et par an) .
Le département le plus fécond de France est le dé-
partement du Nord (135 naissances pour 1000 femmes de
15 à 50 ans); mais il est le seul dont la natalité res-
semble à celle des autres pays de l'Europe. La rareté
des naissances estun mal répandu à peu près dans toute
la France. Cestsoriouten Normandie et dans la vallée
de la Garonne (Lot-et-Garonne, Gers, etc.) qu'on l'ob-
serve. Au contraire, la Bretagne, certaines parties des
Gévennes, l'Alsace, présentent un nombre plus grand
de naissances.
M. Bertillon père a observé que les départements
dans lesquels la propriété est le plus divisée sont, en
général, plus inféconds que les autres, ce qui confirme
l'opinion que Tobservation individuelle a suggérée à
beaucoup d'auteurs : c'est que cette infécondité est en
rapport avec le désir qu'ont beaucoup de familles d'évi-
ter le partage de leur héritage. Ce qui prouve que la
rareté des naissances n'est pas, chez les Français, un
attribut de leur race, c'est leur fécondité au siècle
passé, c*est aussi ce fait que, transportés dans un
pays moins rempli que le n6tre, tel que le Canada, ou
même que l'Algérie, leur fécondité devient beaucoup
plus grande.
Si l'on considère la natalité à un point de vue plus
général, on voit que ce qui règle le nombre des nais-
sances, c'est (Jusqu'à un certain point) la quantité de
vivres disponibles : « Là où naît un pain, naît un
homme. » Et inversement, hélas : u Là où disparaît un
pain, disparaît un homme. » Telle est la formule
générale de Véquation des subsistances. C'est donc avec
raison qu'on a comparé la société à un banquet où
aucune place ne reste Jamais vide : dès qu'un convive
disparaît, par la mort ou par l'émigration^ sa place est
prise, soit par un immigrant, soit par un nouveau-né.
Par exemple, si une mauvaise récolte, ou une épidé-
démie, ou une guerre a fait périr un grand nombre
d'hMames, on peut être sur que pendant les années
suivantes la natalité augmentera et l'immigration aussi,
en sorte que les places qu'ils ont laissées vacantes
seront occupées très rapidement. De même, si une
bonne récolte, une année industrielle prospère, aug-
mente le nombre des places disponibles au banquet
de la vie, elle sera toujours marquée par une augmen-
tation do naissances.
Du même principe résulte que, si un pays fournit
beaucoup d'émigrants (tels sont l'Angleterre, l'Alle-
magne, et, depuis peu, les pays Scandinaves), les
places que ces émîgrants laissent vacantes seront rapi-
dement occupées au moyen de naissances plus nom-
breuses ; et c'est en effet ce qu'on obserye. Au con-
traire, si on pays jusqne là migrateur censé subitement
d'envoyer au loin des émigrants, sa natalité ne tardera
pas à baisser (ce qu'on a observé en Suisse).
Si un pays, jusque-là stérile, devient productif,
aussitôt il se peuple, soit parce que des colons vont
s'y établir, soit* parce que sa natalité augmente, et le
plus souvent par les deux procédés simultanément.
Tel est, pir exemple, le Canada, où de nombreux
colons anglais vont s'établir chaque année, et où la
fécondité est en outre très considérable.
Exceptions au principe de Véqtuition des subsistant
ces, — S'il en est ainsi au Canada, c'est que le Canada est
un pays salubre pour notre race. Mais en Inde ou e»
Cocbinchine, les subsistances disponibles auront beau
être abondantes, la natalité des hommes de notre race
n'en sera pas accrue, parce que ces climats sont pour
nous rapidement mortels. L'Algérie a beau être un
pays fertile, les hommes du midi de TËnrope (Proven-
çaux, Italiens, Espagnols) sont les seuls qui y aient
beaucoup d'enfants, tandis que les Allemandes y ont
une natalité inférieure à celle de leur pays et n'y élè-
vent pas le peu d'enfants qu'ils y ont, parce que le sel
africain ne convient pas à leur race. Ainsi le climat a
sur la natalité une influence plus grande que l'abon-
dance des subsistances.
La quantité de subsistances nécessaire à l'entretien
d'une population varie d'ailleurs avec le climat, avec
la race, avec le degré de culture de la population qu'on
étudie : par exemple, la Sicile nourrit une population
très abondante, quoiqu'elle soit moins riche que U
France, mais aussi faut-il très peu de chose pour
nourrir un Sicilien, paresseux et inactif; au contraire,
un paysan ou un ouvrier normand consomme beau-
coup plus : il est vrai qu'il travaille beaucoup pins
aussi.
En résumé, on peut dire que le nombre ^es hommes
dépend de la quantité de substances alimentaires qu'ils
savent tirer da 9ol : Tindu^rie r^gle moins le nombre
des hommes que leur répartition sur la surface du sol
(ils tendent naturellement- à se masser dans les ré-
gions Industrielles). En général, la population dans un
climat salubre, et toutes choses égales d'ailleurs, tend
à se propoi^ionner aux subsistances disponibles.
Proportion des sexes. — Il naît un peu plus de gar-
çons que de filles (106.6 garçons pour 100 filles), et
cela est fort heureux, car les garçons meurent beau-
coup plus que les filles dans les premières années^ en
sorte que l'équilibre entre les deux sexes s'établit
dans le cours de la vie. Parmi les naissances illégi-
times, la proportion des garçons est toujours un peu
moins considérable (104). La position sociale des
parents, leur ige, leurs mœurs, modifient ce rapport
d'une façon curieuse, mais que nous ne pouvons étudier
ici. En général plus le père est fort et bien portant,
plus la naissance d'un garçon parait probable.
Natalité illégitime, — En France lOOo filles et veuves
de 15 à 50 ans produisent chaque année 18 naissances
illégitimes : c'est une proportion qui n'est pas très
considérable (elle est plus forte dans les villes, plus
faible dans les campagnes), et qui, contrairement à ce
qu'on écrit souvent, est inférieure à celle qu'on ren-
contre en Allemagne, même dans l'Allemagne du Nord
(Prusse, 35). L'Allemagne du Sud et surtout l'Autriche
propre sont les pays d'Europe où les naissances illé-
gitimes sont le plus nombreuses. Dans beaucoup de
villes autrichiennes, la moitié des naissances est
illégitime (à Paris le quart seulement, soit 55 naissan-
ces pour 1000 femmes non mariées de 15 à 50 ans).
Les naissances illégitimes sont beaucoup plus fré-
quentes dans le Nord et l'Est de la France (25 à 30 nais-
sances pour 1000 filles) que dans le Midi (5 à 10 nais-
sances). On remarque que les régions où les naissances
illégitimes sont les plus nombreuses sont aussi celles
où les légitimations sont les plus fréquentes par rap-
port aux naissances illégitimes.
La naulité illégitime est plus forte dans les villes
que dans les campagnes; plus forte dans les pays
industriels que dans les contrées agricoles; plus forte
chez les catholiques et les protesunts allemands que
chez les Juifs, etc. On ne Ta malheureusement pas étu-
diée suivant les conditions sociales et les professions.
DÉM
1822 —
DEM
MoBT-Nit, on appelle leur joroportion par rapport
auK naisBances morli-natalité. Dana ces calcols, il con-
vient d'éliminer les faux mort-nés» ou enfants morts
après raccoucbement, mais avant Tinscription sar le
registre des naissances. On observe en France les
chiffres solvants :
Mort-né» iur 1000 naûtoncei.
Parmi les légitimes
i Gareoi
.. \ Filles
( Deux
Ds 37
26
sexes 32
i Garçons 68
Parmi les illégitimes. ] Filles 57
f Deux sexes....... 62
On voit que le fait d*ètre illégitime double en France
la chance d'être mort-né (raggravation est plus forte
pour les filles). En tout pays, Tillégitimité augmente
la mortalité, mais nulle part dans des proportions
aussi élevées. Quand l'accouchement a lien à Tbôpital
(où la mère est surveillée), les illégitimes cessent
d'avoir ce privilège. Cette circonstance et plusieurs
autres sur lesquelles nous ne pouvons insister ici ont
fait penser que ces prétendus mort-nés illégitimes
sont dus tout simplement à des Infanticides. Le fait
est incontestable, au moins pour une grande partie
d'entre eux. Ce qui le prouve, c'est que la fermeture
des derniers tours a augmenté du tiers la proportion
des mort-nés illégitimes.
HoRTALiTÂ, on devrait ne jamais étudier la mortalité
générale sans distinction d'&ges. Cette mesure (sur 100
hab., combien de décès) est trompeuse, et le plus sou-
vent inutile.
C'est par âges que doit être étudiée la mortalité
d'un peuple quand on veut prendre idée dos; condi-
tions de salubrité dans lesquelles il se trouve. C'est
un point de méthode élémentaire qui pourunt a
trompé beaucoup d'auteurs ; mais nous ne pouvons le
prouver ici. Le tableau suivant donne les principaux
éléments de la mortalité des Français :
Sur iOOO vivants de chaque âge et de chaque sexe
combien de décès par an.
Ans. ]f«ic. Fém.
Oà 1 236,0 197,0.
1 à 5 34,8
5 à 15 6,8
15 à 30 8,7
30 à 60 13,1
60 à la mort.. 67,8
34,5.
7,6.
8.6.
12.7.
68.4.
Deux Mxet.
. 215,0
. 34,0
. 7,2
8,6
. 12,9
. 68,2
Mortalité des enfant* de 0 à 4 an, -^ Ia mortalité à
cet ige est sans doute très considérable, puisqu'un
enfant qui vient de naître a autant de chances de
mourir qu'un vieillard de 88 ans. Cependant, il faut
reconnaître que, chez la plupart des nations étrangè-
res, la mortalité à cet âge est plus forte encore que
dans notre pays. Dans plusieurs parties de l'Allemagne,
près du tiers des enfants meurent dans la première
année de la vie. Au contraire, les pays Scandinaves en
perdent beaucoup moins que nous.
Parmi les causes qui aggravent la mortalité des
Jeunes enfants, il faut citer l'industrie des nourrices,
mercenaires surtout.
Les aliments solides leur sont encore plus funestes.
Le lait de vache est impropre à nourrir les enfants,
parce qu'il contient trop de caséine, il est donc néces-
saire de le couper d'eau ; le lait d'ànesse leur convient
mieux.
C'est pour surveiller les nourrices et étudier la mor-
talité des Jeunes enfants qu'a été votée la loi du
23 déc. ISlé (loi Th. Roussel). C'est surtout autour de
Paris, en Normandie, en Champagne, en Bourgogne,
que s'exerce cette funeste industrie; aussi la morta-
•lité y est-elle énorme, tandis qu'elle est faible dans la
Basse-Normandie, dans quelques départements au
centre et dans la vallée de la Garonne.
Notre tableau montre que les petits garçons sont
beaucoup plus exposés à la mort que les petites filles.
Il est assez singulier que ce soit Justement à l'âge où
le sexe est moins apparent que son influence sur la
maladie soit le plus forte. C'est surtout la diarrhée et
la méningite (dont les convulsions sont souvent les
symptômes) qui font périr les Jeunes enfants. Ces
maladies sont surtout fréquentes en été. En hiver, la
pneumonie fait mourir beaucoup d'enfants. Mais cette
maladie est moins redoutable que les deux premières.
Aussi la mortalité est double en Juillet de ce Qu'elle est
en décembre» et l'on peut dire que les enfants à la
mamelle craignent deux fois plus la chaleur que le
froid ; ce q^ui est contraire au préjugé public.
SI, au heu de considérer la mortalité de l'année
entière, ou étudie avec plus de détails Tige des enfants,
ou trouve qu'ils meurent d'autant moins que leur
âge est plus avancé. Il semble que la naissance soit une
opération critique dont ils se rétablissent progresnve-
ment.
La mortalité des enfants Illégitimes est double
de celle des légitimes. La mortalité de ces enfanu
malheureux est surtout énorme dans lèi premières
semaines qui suivent la naissance, et principalement
pendant la seconde semaine. Cette circonstance et
quelques autres encore font penser que c^est la
faim qui les fait périr. Est-ce au contraire volontai-
rement que les filles mères manquent souvent h nour-
rir leurs enfants? Il serait délicat de se prononcer sur
ce point. Quelle que soit la solution, l'enfant n'en
meurt pas moins, et la cause première de sa mort est
toujours la misère.
Mortalité de 4 à-S ans, —Les enfants de cet âge meu-
rent dans des proportions effrayantes autour de la
Méditerranée; tandis que leur mortalité est de 20
à 26 p. \00 dans le reste de la France, elle atteint
autour de cette mer les chiffres inouïs jde SO, 60 et
même 801 « Il semble, dit M. Bertillon, que de cette
mer d'azur s'élève Je ne sais quelle vapeur funeste
qui répand la mort autour d'elle, et tue l'enfant à
son ige le plus gracieux et le plus charmant. » Mais
ce n'est là qu'une figure de rhétorique. Quelle est
la cause qui décime ainsi la population infantile de la
Provence et du Languedoc? On n'en sait absolument
rien. Elle coûte chaque année 1500 Jeunes enfants à
notre pays (non compris ceux dont la morlaliié nor-
male faisait prévoir la mort).
Mortalité de S à \S ans, — Cest à l'Age de 10 à
lô ans que la mortalité atteint son minimum.
Mortalité de 15 à 80 ans, ^ La mortalité à cet âge
est plus forte en France que dans la plupart des autres
{>ays de l'Europe. C'est à la mortalité des jeunes
lommes de 20 à 2S ans que cette funeste aggrava-
tion est due. On ne sait comment expliquer cette
mortalité si anormale. Elle est plus forte encore
parmi les militaires que parmi les autres. La phtisie
est à cet âge la principale cause de mort.
Mortalité de 30 à 60 ans, — La mortalité à cet âge
est plus faible en France que dans la plupart des
pays de l'Europe. Plus nous avançons en âge et plus
nous l'emportons sur nos voisins. C'est surtout en
Champagne, en Bourgogne, en Normandie, dans le
bassin de la Garonne, que la mortalité est faible. Elle
est considérable au contraire en Bretagne, dans le
Centre, dans les Alpes et dans la Provence. Les sai-
sons n'ont sur la morlaliié des âges adultes qu'une
action peu prononcée.
Mortaitté de 60 ans à la fin de la vie. -» A cet
Age la mortalité est moindre en France oue dans au-
cun autre pays (la Norwège exceptée), ôe sont sur-
tout la Champagne et la Bourgogne qui se font remar-
quer par leur faible mortalité. Les vieillards meurent
surtout par les maladies des or|;ane8 respiratoires :
aussi est-ce particulièrement l'hiver qui leur est fu-
neste : plus ils sont vieux et plus le froid leur est
nuisible.
Migrations. — De tous les pays, ce sont les Iles-
Britanniques et l'Allemagne qui fournissent la plus
forte proportion d'émigrants. Chaque année 250,000 An-
glais et 100,000 Allemands (ces nombres sont d'ail-
leurs très variables) quittent leur pays pour aller
chorcher fortune au loin. Les Allemands, n'ayant pas
encore beaucoup de colonies à eux, sont obligés d'aller
chez les autres, et là ils oublient généralement assez
vite leur langue et leur patrie. Il n*en est pas de
même des Anglais.
GrAce à la loi de l'équation des subsistances expli-
3uée plus haut: !<> l'émigration anglaise a pour effet
e stimuler la natalité des Iles-Britanniques : 2« ar-
rivés dans leur nouvelle patrie (Amérique ou Austra-
lie), les colons, trouvant devant eux d'Immenses
ressources naturelles non exploitées, ont une fécondité
souvent prodijgieuse. ,
Ain.si 1 émigration ne diminue pas la population de la
mère patrie (sauf en Irlande, mais l'Irlande est dans
une position particulièrement malheureuse), et accroît
énormément celle des colonies. On compte aujourd'hai
dans les cinq parties du monde 80 millions d'indiridus
DET
— 1823 —
DOU
parlant anglais» mais il est impossible de deviner
combien il y en aura dans un siècle. On peut seu-
lement assurer que ce nombre sera énorme. Au com-
mencement du siècle, cette langue n*était parlée
que par 15 millions d'hommes environ.
L'accroissement de notre nationalité est malheu-
reusement loin d*ètre aussi rapide. Nous étions 26 à
27 millions au commencement du siècle, et nous
sommes 31 millions aujourd'hui : cela constitue une
bien faible augmentation ; notre population qui for-
mait alon 27 pour 100 de la population des grandes
puissances ne compte aujourd liui que dans la propor-
tion de 14 pour 100. Tel est le résultat lamentable de
la faible natalité que nous signalions plus haut.
Le grand malheur de notre nation, c'est de ne tirer
aucun parti de notre grande colonie algérienne, où
près de la moitié des immigrants sont des étrangers.
Si ce beau pays était le but d'un courant colonisateur
sérieux, on peut espérer que notre natalité se relève-
rait, et que le nombre de nos concitoyens augmen-
terait de manière à assurer à la France la puissance
militaire, la puissance économique, et surtout la puis-
sance intellectuelle dont elle a disposé Jusqu'à ce jour.
J. B— ON.
DETTE PUBLIQUE, nom qui désigne les engage-
ments financiers d'un Etat. Ils sont de trois sortes :
temporaires, viagers ou perpétuels. En France, on
nomme les premiers dette flottante ; les seconds, dette
viagère; les troisièmes, dette inscrite ou perpétuelle
(V. Emprunts publics) . La dette dite perpétuelle se com-
pose de rentes à servir pour emprunts faits ; néanmoins
sa perpétuité, obligatoire pour les créanciers, est facul-
tative pour l'Etat, qui peut se libérer soit en amortis-
sant sa dette par des rachats successifs sur le marché
de la rente, soit même en offrant le remboursement
direct k ses créanciers, par application du principe
qu*un débiteur est toujours en droit de se libérer
quand il lui plaît, à moins de conventions contraires ;
FEtatn'en prend pas ordinairement do ce genre ; mais
lorsqu'il en existe, on a vu des gouvernements les faire
annuler par une loi, lorsque cela paraissait de l'intérêt
public. Des économistes regardent une dette comme
une plaie pour un Etat ; d'autres prétendent qu'elle
leur donne du ressort et peut créer incessamment un
capital presque inépuisatSle. De nos Jours, Alexandre
Hamilton, un des secrétaires de la trésorerie des
Etats-Unis d'Amérique, disait à ses concitoyens : « Il y
a une espèce de capital existant qui exclut toute inquié-
tude sur le manque décapitai, c'est la dette fondée. »
tJne espèce de capital n'est pas un capital ; mais Ha-
milion voulait dire que tout gouvernement qui remplit
«es engagements avec fidélité, quelle que soit sa dette,
trouve toujours à emprunter. L'emprunt est en effet
une ressource précieuse pour les gouvernements dans
•certaines circonstances graves ; il les met à même de
-soutenir une guerre imprévue, d'entreprendre une
expédition lointaine pour sauvegarder rhonneur ou
l'indépendance de la nation ; car dans de tels moments
il est toujours difficile, et souvent impossible d'aus-
menter les impôts, parce qu'à la veille ou par la simple
menace de pareils événements les sources naturelles
du revenu public diminuent, le crédit particulier, qui
alimente l'industrie, se resserre ou se tarit, et il y a
gêne ou pénurie pour les gouvernés ; leur demander
alors un surcroît de sacrifices, ce serait, comme disait
Turgot, vouloir faucher plus que l'herbe. Tout gouver-
nement qui travaille pour le présent, préparant ou
assurant aussi l'avenir, il n'est pas injuste que l'ave-
nir supporte une partie des charges qui auront assuré
sa sécurité, sa prospérité, quelquefois même son exis-
ience. Les emprunts publics sont donc une habile et
ealutaire invention que l'antiquité n'a point connue,
et qui sauve aux gouvernements bien des mesures ini-
ques, arbitraires, et par conséquent immorales et
tyranniques. La chose difficile, c'est de n'en point
abuser, comme on l'a fait assez souvent dans les temps
modernes, depuis et avant Louis XIV Jusqu'à nos Jours.
Certains économistes ont prétendu qu'un Etat devait
toujours avoir une dette, que c'était un signe de force
et de prospérité. Cela peut être vrai, mais dans une
mesure restreinte. La fortune des Etats, qui sont des
êtres immortels, ne se règle pas comme celle des par-
ticuliers ; un Etat qui se crée une dette a des siècles,
s'il veut, pour la rembourser; un particulier n'a que
peu d'années, et s'il transmet à ses héritiers des
•dettes un peu considérables, il a fait acte de mauvaise
gestion. Ensuite l'Etat, en empruntant Judicieusement,
accomplit un devoir et crée, en outre, des intérêts qui
se rattachent directement aux siens, ce qui ajoute à sa
force morale. Mais, nous le répétons, il faut que des
circonstances impérieuses nécessitent l'emprunt.
Parmi ces circonstances, des économistes ront entrer
l'exécution de travaux publics extraordinaires pour le
développement de la richesse du sol ou de l'indu strie
du pays ; d'autres nient la nécessité pour l'État de se
charger d'une dette dans ce cas ; ils veulent que de
telles entreprises soient abandonnées à l'industrie pri-
vée. Peut-être ont-ils raison, mais ils n'éviteront pa^;
la création d'une dette publique; car ces travaux ne
pouvant se faire que par des associations de capitaux,
c'est, en fait, et sous une autre forme, une dette pu-
blique ; et d'autant ptus, pour citer dos exemples do
nos Jours, que, pour des entreprises telles que des
chemins de fer, on réclame souvent l'intervention du
gouvernement comme caution d'un certain taux d'in-
térêt à payer aux actionnaires.
Nous avons fait l'historique de la dette publique de
France au mot Emprunt.
En Angleterre, la dette publique date de 1694 et
débuta par un prêt de 1^200,000 liv. sterl.{30,252,0u0fr.)
fait par la Banque au gouvernement. Dans ce pays,
comme sous Louis XIV, une fois la voie ouverte, on
usa largement de cette ressource; ainsi, en 1772, la
dette éuit déjà de 3 milliards 500,000 fr. ;de 5 milliards
passés en 1784, et après la grande lutte avec la Révo-
lution française, et surtout avec Napoléon !«', elle s*é-
levait, en 1815, à 28 milliards de fr.; aujourd'hui elle
est encore de 20 milliards, et son service absorbe une
somme équivalente environ à celui de tout le revenu
foncier de l'Angleterre.
Les sommes payées pour intérêt de dette publique,
cette décharge du présent sur Tavenir, mais non dé>
charse absolue, grèvent le présent d'une manière assez
sensible; en France, les intérêts de la dette, fournis
par l'impôt, comme partout, absorbent presque le quart
du revenu public; en Angleterre, près de la moitié;
en Espaçne, les deux tiers environ ; en Autriche, les
trois huitièmes; en Prusse, le quart; en Russie, le
dixième.
Le baron Louis, ministre des finances après la Ré-
volution de 1830^ disait à ses collègues : « Gouvernez
bien, et vous ne dépenserez Jamais autant d'argent que
Je pourrai vous en donner. » Cela prouve que la dette
publique vient moins souvent des nécessités poliiiciuen
que de l'inhabileté ou de l'Imprudence des gouverne-
ments. Les nombreux engagements dont tous les États,
à peu près, sont grevés aujourd'hui montrent encore
une chose : c'est qu'en matière de dette publique, les
vrais principes de la science économique sont trop peu
connus ou trop souvent méconnus. C. D— Y.
DOCTEUR (le) ou le pédant, un des personnages de
la comédie italienne, un des masques de la commedia
delVarte, Ce personnage, originaire de Bologne, por-
tant le vêtement noir des docteurs de l'Université de
cette ville, était un savant, un Jurisconsulte ou un mé-
decin ; il prétendait babiller sans fin et proférait des
sentences sans discontinuer. Le Docteur, transporté à
Paris avec une troupe italienne en 16(i3, modifia son
costume : il prit une culotte courte, une grande fraise
molle et une veste à la Louis XIV. Il fut remarquable,
plus qu'en Italie, par le pédantisme. Dans les co-
médies françaises, le personnage du Pédant apparut
glouton, malpropre, et tint un langage burlesque; on
en trouve la preuve dans les pièces de Larrivey, de
Cyrano de Bergerac, de Scarron, etc.
DOUANES. Par suite des lois publiées en 1872 et
1873 sur le recrutement et sur l'organisation de l'armée,
un décret relatif aux douaniers a été rendu le 8 avril
1875. Le personnel du service actif des douanes entre
dans la composition des forces militaires du pays.
Chaque inspeciion des douanes formo, pour la mo-
bilisation, un bataillon de douanes ayant un nombre
de compagnies généralement égal à celui des capi-
taineries de l'inspection. Dans chaque bataillon, les
compagnies formées pour la mobilisation sont divisées
en deux catégories : les unes, contenant des hommes
propres au service de campagne, seconderont les opé-
rations de l'armée active ; les autres, comprenant tous
les préposés valides, seront appelées à concourir au
service de l'armée territoriale. Les officiers peuvent
être pris dans l'armée; ils sont nommés par le pré-
sident de la république, sur la présentation du ml-
ELE
— 18i4 —
EMA
nittre de la guerre, et diaprés les propositions du
ministre des finances. A dater du jour de l'appel à
l'activité, les bataillons de douanes jouissent des
mômes droits, honneurs et récompenses que les corps
de Tarmée
DOU-YÂZAN, roman arabe qui porte aussi les titres
suivants : S*iyf zouH-yeten^ Seyf el-yesen et Seyf el-
yesel. Il a pour sujet lès aventures d*un roi du Yémen,
Seyf, fils de Dou-Yazan, qui vivait dans le vi« siècle
de notre ère. Il n'a pas été imprimé et forme deux
volumes manuscrits, qui sont rares. Il est connu en
Egypte ; mais on le lit surtout en Afrique, dans la
régence de Tunis et en Algérie. Le style s*est conservé
asseï correct.
DROIT (Facultés de). Depuis le l*Manvier 1876, les
rétributions éventuelles qu on avait allouées aux pro-
fesseurs et aux agrégés, à titre de droit de présence
aux examens, ont été supprimées. Le traitement est
fixé ainsi qu'il suit : professeurs à Paris, 15,000 fr. ;
professeurs dans les départements, de 6,000 fr. &
11,000 fr.; agrégés à Paris, 7,000 fr.; agrégés dans les
départements, de 3,000 fr. à 3,500 fr.
E
ECTYPOGRAPHIE, procédé d'impression au moyen
duquel on produit des livres dont les lettres ressor-
tent en relief sur le papier, de manière à pouvoir ôire
lues au toucher par les aveugles. L'ectypographie a
été inventée, en 1784, par Valentin HafVy, directeur
de l'instituiion des Jeunes aveugles de Paris. De» per-
fectionnemenu y furent apportés ensuite par GuUlé
et Dufau.
ÉLECTRICITÉ. (Applications nouvelles.) (Voir notre
Dictionnaire des sciences et des arts appiiaués. Pour
les savants et les ingénieurs qui se sont voues exclusi-
vement à rétude des phénomènes électriques, ce fut
un étonnement profond et une révélation que l'expo-
sition internationale d'électricité organisée, en 1881, au
palais de l'Industrie, à Paris. Même pour des acadé-
miciens, des professeurs, des physiciens, c'éult une
science nouvelle, constituée de tontes pièces, avec ses
lois déjà étudiées, qui faisait son appariuon, accompa-
gnée d'un cortège nombreux d'applications les plus
variées.
Parmi ces applications, les plus récontes sont :
l'éclairage électrique, la transmission de l'énergie à
distance, les accumulateurs, la transmission des signaux
de chemins de fer, le pesage des rations de chevaux
à la compagnie des Petites Voitures, etc. Nous allons
dire quelques mots sur chacun de ces sujets, renvoyant
aux articles spéciaux pour la télégraphie, le téléphone,
la galvanoplastie et autres découvertes plus anciennes.
I « Eclairage électrique. — En 1 8 10, H . Davy ,1e célèbre
chimiste anglais, fit passer un courant électrique très
énergique entre deux morceaux de charbon, conduc-
teurs de l'électricité ; il obtint une lumière éblouissante
formée par un arc lumineux que l'on a appelé l'arc
voUaique. C'est la découverte de la lumière électrique.
Cependant du temps de Davy on ne trouvait pas
dans l'industrie le charbon nécessaire. De plus les
deux charbons brûlent et s'usent irrégulièrement. Il
faut donc les rapprocher l'un de l'autre au moyen d'un
régulateur, et ce n'est qu'en 1840 que le problème fut
résolu par Foucault. Depuis, on a créé une infinité de
régulateurs.
Vers 1877, une révolution se fit dans l'éclairage élec-
trique, et l'on peut dire que la bougie Jabloskoff est
le véritable auteur du développement pris par la lu-
mière électrique. M. Jabloskoff eut l'idée de placer
les deux charbons à côté l'un de l'autre, en les sépa-
rant par une matière inerte ; de cette façon, la lumière
se produisant à la pointe des charbons, ceux-ci n'avaient
pas besoin d'être rapprochés par un régulateur. Pour
éviter l'usure inégale des charbons, on lait passer dans
chacun d'eux un courant alternativement positif et
négatif,tel que le fournissent les machines dynsmo-élec-
triques ordinaires. Divers systèmes de bougie ont
été essayés après la réussite de ces belles expériences.
Dsns les méthodes précédentes les charbons s'usent.
Trois Américains, Maxim, Edison, Swan, ont eu pres-
que en même temps l'idée de faire rougir le charbon
par le courant électrique dans uae sorte de petite
fiole de verre où l'on aurait préalablement fait le
vide. Le charbon ne brûle pas dans le vide« et pro-
duit néanmoins, sans se consumer, une vive lumière.
C'est le principe des lampes à incandescencCy qui
sont appelées à un brillant avenir.
Dans ces lampes, le charbon a la forme d'un fil; il
est fabriqué avec du coton, du bristoU on d'autres ma-
tières.
2<> Transmission du travail par C électricité. — ' Il y a
bien longtemps déjà qu'on a esssyé de transmettre du
travail, de la force, par un fil électrique, comme on
transmet une dépèche. Hais ce problème est irès com-
pliqué et la transmission ne se fait qu'aux dépens d'une
grande partie de la force à transmettre. Il faut de plus
des fils conducteurs spéciaux et des machines particu-
lières, pour remplir cet office.
Néanmoins, à part ces observstion s et lorsqu'on a de
la force en excès, on réussit à transmeure l'énergie au
moyen de Téleciricité. Le moteur, quel qu'il soit, fait
mouvoir une machine dynamo-électrique ; celle-ci pro-
duit un courant et ce courant, à l'autre extrémité do»
fil, pénètre dans une autre machine dynamo-électrique
semblable à la première. La machine réceptrice est
dune mise en mouvement par le courant que le mou*
vement de la première machine a fait naître.
On peut citer comme exemples : le labourage à
l'électricité pratiqué à la ferme de Sermalze; Téclai-
rage des chutes du Niagara par l'électridté qu'elles pro-
duisent, les chemins de fer électriques constamment
reliés par un fil à la gare du départ qui leur transmet
la force, etc.
3° Accumulateurs. — Dsns les piles ordinaires. Use-
produit à la longue, par suite du dépôt des gaz sur lfts>
extrémités des fils des courants secondaires dirigés en
sons contraire du courant de la pile. Cette électricité,
en s'accumulant, finit par former des courants secon-
daires aussi puissants que le courant primitif, mais
directement opposés. M. Planté a eu l'idée de recueil-
lir ces courants et de constituer des piles secondaires
en chargeant lentement des piles spéciales, au moyen
de l'électricité des piles ordinaires II a réussi à em-
magasiner, à accumuler dans ces piles secondaires de
réiectricité qu'on peut ainsi transporter comme dans
une boite, et dépenser comme on le désire.
C'est là le principe des accumulateuVs, quel que
soit le nom du système en usage.
4* Transmission des signaux pour chemin d^ fer. -»
C'est une des applications les plus précieuses de réiec-
tricité que la transmission rapide des signaux pour la
marche des trains. Nous ne signalerons que les pédales-
qui font que le train annonce lui-même son arrivée,
la manœuvre des disques. L'électricité est surtout
excellente pour contrôler des appareils, effacer des
signaux, etc.
6° Pesée des rations de chevaux. — La compagnie des
Petites Voitures possède 10,0o0 chevaux, faisant quatre
repas par' )our. Chaque repas comporte du msis, des
fèves, de la paille, de l'avoine, du foin et des tourteaux.
Pour donner exactement à cliaque cheval la quantité
fixée, c'est donc 240,000 pesées à faire chaque jour.
Ces pesées se font électriquement. Les matières tom-
bent sur une balance ; lorsque le poids est complet, un
courant ferme la trappe, et on recommence toujours
ainsi.
Les autres applications nouvelles de l'électricité,
transmission de signaux, avertisseurs d'incendies, ap-
pareils médicaux, sont également très nombreuses et
très intéressantes. F.L— t.
ÉLIE DE SAINT-GILLES, chanson de geste du
xiiio siècle, d'environ 2,700 vers, d'un style vif et net.
Élie, fils du comte Julien de Saintr-Gilles, est enlevé
des msins des Sarrasins par son père, par l'empereur
Louis et par Aimeri de Narbonne. Il ne peut épouser
Rosamonde, fille de l'amiral sarrasin Macabre, lui
ayant servi de parrsin quand elle a embrassé le chris-
tianisme. L'empereur lui donne en mariage sa sœur
Avise, avec les fiefs d'Orléans et de Bourges. Aux
événements de cette histoire est mêlé un personnage
qui figure dans d'autres chansons de geste, le messa-
ger Galopin, alerte, subtil, sorcier et ivrogne. ÏJt Bi-
bliothèque nationale possède le manuscrit de la chanson
d'Élie de Saint-Gilles ; il a été publié par H. Raynaud^
dans la Collection des Anciens textes français^ Paris,
1879. (F. Histoire littéraire de la France, t. XXII.)
ÉMAIL. L'Asie a été le berceau de l'émaillerie. De
l'Inde, l'art de faire des émaux cloisonnés passa dans
EMB
1825 —
END
TÀBie inférieure, puis de l'Asie en Egypte. Le musée
du LouTre, à Paris, possède deux bijoux égyptiens dé>
corés an moyen de ce procédé : un petit épervier et
un bracelet. On ne sait si les Grecs ont pratiqué cet
art ; parmi les ornements et bijoux qui ont été dé-
couverts en Grèce, il n'y a pas aëmanx. Peut-ètre le
goi^t des grandes choses, traitées avec tant de déli>
caiesse dans ce pays, ât-il rejeter un art imparfait
alors, et qui ne pouvait supporter la comparaison avec
les pierres gravées. Quant aux Romains, ils avaient
perdu tout souvenir des bijoux émaillés avant le siècle
d'Auguste, et Pline n'en touclie pas un mot. C'est alors
qu'apparut dans la Gaule celtique la champlevée ; mais
cette indostrie fut bientôt abandonnée, car elle n'était
plus en usage du temps de Glovis. L'émaillorie, dé-
laissée pendant quelque temps en Burope, était tou-
jours en faveur en Orient, et c'est là que les Byzantins
en reprirent le secret ; au ix« siècle, elle avait un haut
degré de perfection à Constantinople, et c'est à cette
époque que les Grecs commencèrent à faire le com-
merce de leurs émaux avec l'Occident. En 1069, Didier,
abbé du Mont-Cassin, qui devint pape sous le nom
de Victor III, lit venir des émailleurs de Gonsianti-
nople, et éublit sous leur direction, dans son mo-
nastère, des écoles d'où sortirent vraisemblablement
les artistes qui répandirent en Italie la pratique de
cet art. Les émailleurs italiens ne fabriquèrent que
des émaux cloisonnés Jusqu'à la fin du xiii« siècle;
mais, dès la fin du x% des artistes grecs, attirés en
Allemagne par les empereurs de la maison de Ssxe,
avaient faitconnaltrerémaillerle sorciseiure en relief,
et ce fut plus tard de la Lotharingie (Lorraine) que
Suger fit venir des émailleurs pour la décoration de
l'église de Saini-Denis. On pense que c'est d'après les
modèles laissés par ces artisans que se forma l'école
de Limoges (K. ce mot dans le l}ieiionnav*e), dont les
productions firent oublier celles des Allemands et des
Italiens. Au xiv« siècle, l'adoption des émaux trans-
lucides fit passer le goût de rémaillerie par incrus-
tation ; puis, un siècle après, la découverte de la pein-
ture en couleurs vitrifiées sur émailruina les procédés
antérieurs. Le plus intéressant de tous les vieux émaux,
par son antiquité comme par son exécution, est la
paia doro, retable de l'autel de Saint-Marc de Venise.
— Depuis que les émailleurs sont devenus des pein-
tres, leur art a produit un très grand nombre d'ou-
vrages. Ceux de la Renaissance sont particulièrement
remarquables pour le dessin et le clair-obscur. Les
artistes fançais les plus célèbres dans les siècles sui-
vants sont : Jean Toutin, orfèvre de Châieandnn
(1660); Gribelin, Dubié, Moriière, Vauquer (1670);
Pierre Cliartier, de Blois, peintre de fleurs très habile ;
Jean Petitot, mort en 1691, dont les portraits sont des
chefs-d'œuvre, et son beau-frère Bordier. La peinture
sur émail tomba en décadence et fut abandonnée dans
la seconde moitié du xviii« siècle. Elle s'est relevée de
nos jours. La peinture en émail sur lave, inventée par
Mortelèque, a été employée à rornementation des
édifices ; on peut citer, à Paris, l'autel de l'église
Sainte-Elisabeth par Abel de Pujol, une peinture de
Perlet dans l'église Saint-Leu, les médaillons de Per-
rin, d'Orsel et d'Êtex qui ornent les cours du palais
den Beaux- Arts. D'autres ensais ont été faits par Jo-
livet au porche de l'église Saint- Vincent-de-Paul. (F.
iAhdJ\%y Recherches sur la Peinture en émail dans fan-
tiquitiet au moyen doe, 1865, in-4o.)
EVIBLÊMBS. Les différents Ëutsont adopté des em-
blèmes, dont voici quelques exemples :
Perse ancienne : une aigle d'or portée sur un char;
— Egypte ancienne : un épervier ; — Empire romain :
une aigle tenant la foudre dans ses serres (remplacée,
à partir de Constantin, par le labarum) ; -» Repu-
àitque française ; un bonnet phrygien ; — Irlande :
une harpe d'or; — Franc fori-sur-le-Mein .*une aigle
éployée; — Luàeck: une aigle à deux têtes; — Ham-
bourg : une forteresse ; — Hanovre : un cheval ; —
Suisse : une croix blanche; Brème : une clef posée en
bande; — Moldavie : une tôte de bœuf; — - Venise : un
lion ; Rostock : une chimère vomissant des flammes ;
— Malte : une croix rouge ; — Iles Ioniennes : une
croix byzantine ; — Riga : cïqU en sautoir ; — Cour^
lande : une aigle blancne ; — Perse moderne : un lion
couché; — Stam : un éléphant blanc; — Empire
Birman : un paon faisant la roue ; -^ Chine : un dra-
gon à 5 griffes; — Surate : une pleine lune entourée
de 3 croissants; Mahrattes : un croissant; — > Pérou:
un lama ; — Haïti : un palmier vert ; — République de
l'Éouateur, Bolivie, Costa-Rica, Guatemala : une
montagne; — Uruguay, Buenos- Aures, un soleil;-^
Chili : une étoile blanche ; — Etats-Unis : autant
d'étoiles qu'il y a d'États dans la confédération; —
Tunis : un croissant et une étoile.
ÉMIGRETTB, jeu à la mode en France à la fin du
xviii<> siècle. Il consiste en un disque de bois, d'ivoire
ou d'écaillé, creusé dans son pourtour à une certaine
profondeur, et traversé par un cordon (^u'un double
mouvement successif, un peu sec et vertical, d'abais-
sement et d'élévation, fait enrouler autour de la rai-
nure, de sorte que le disque remonto le long du
cordon.
ENDIGUEMENT. Nous avons parié des endigue-
mnnts au point de vue législatif et administratif; ici,
nous allons en parler au point de vue de l'art, et comme
grands travaux d'utilité publique. Il y en a de deux
sortes, les fluviaux et les maritimes. L'endiguement
des grands fleuves consiste ordinairement à leur tracer
un lit majeur, la plupart du temps à sec, mais ca-
pable de contenir leurs crues les plus grandes; quel-
quefois, à resserrer leur lit dans certains endroits,
pour le rendre plus navigable. L'endiguement mari-
time a pour but de protéger des terrains bas contre
l'invasion de la mer. Nous citerons des exemples de
ces trois sortes d'endtguements pour le Pô, la Loire,
la basse Seine et les cotes de la Hollande.
Kndiguements da Pô, — Ce fleuve, le plus grand
de l'Italie, a parmi ses affluents une foule de torrents
qui donnent à ses eaux un accroissement subit et sou-
vent considérable; aussi estril un de ceux pour les-
quels on a exécuté le plus de travaux d'endiguement.
Depuis Turin jusqu'à l'Adriaque, le Pô traverse d'im-
menses plaines, qu'il peut submerger dans une lon-
gueur de 260 kil., en ligne droite, sur une largeur
variant de 10 kil. jusqu'à 40 et 60; c'est pour s'opposer
à ces submersions que l'on a établi un vaste système
d'endiguement, étendu à tous ses affluents, torrents
ou rivières. Les ingénieurs ont adopté le mode si
rationnel d'un lit majeur. La largeur de ce lit est, en
la plupart des endroits, de 2,000 à 4,000 mètres, et,
sur deux points, de 6,000 et de 6,700 mètres. C'est
dans la région moyenne du fleuve, au point où tom-
bent ses plus forts affluents, que l'on a ménagé ces
grandes largeurs; elles forment comme des réservoirs
qui exercent sur les crues une action régulatrice si
bien calculée et si sensible, qu'elle leur permet de
s'écouler par un lit qui finit par n'avoir plus que 30O
mètres de large, tandis qu'aux environs de Pavie il en
a un de 5,000 mètres au moins dans une longueur de
50 kilum. environ, et un semblable et même plus long
en aval de Crémone.
Le lit majeur, préparé pour les crues maxima, est
néanmoins cultivé sur les deux rives naturelles du
fleuve. On donne à ces champs le nom de golénes^
comme qui dirait terrains de gorge. Pour les garantir
des crues moyennes, il y a, partout où cela est néces-
saire, des digues secondaires dites de golénes, élevées
sur les rives mômes du fleuve. Ces antres, appelées
maltresses digues, tantôt touchent au fleuve, tantôt
s'éloignent de l'une ou de l'autre de ses rives à des
distances parfois de 5 kilom. Elles sont en bonne terre,
épaisses do 6 à 8 mètres an sommet, gaxonnées dans
les talus éloignés, et plantées d'oseraies dans les parties
plus habituellement atteintes par les eaux. Leur hau-
teur est de 8 à 9 mètres au-dessus des plus basses
eaux de l'étiage, et de Ob,75 et O^^gO au-dessus des
plus hautes crues. Ces digues maîtresses sont continues
de Pavie à la mer, et leur surveillance est très bien
organisée en temps de crue. L'État les entretient.
Celles des affluents sont à la charge des communes,
et celles de golènes à la charge des particuliers, et
construites par les riverains. M. Comoy, inspecteur
général des ponts et chaussées, qui a étudié avec
autant de soin que de lumière les endig^ements dont
nous venons de parler, s'exprime ainsi : « La vallée
du Pô appelait les endiguements par la disposition et
l'étendue des terrains exposés à la submersion ; mais
c'est en plaçant les digues des deux rives à de grandes
distances l'une de l'autre, et laissant ainsi des largeurs
considérables aux lits majeurs du fleuve et de ses-
affluents, que l'on a pu rendre les endiguements aussi
efficaces qu'ils le sont. » ( V, Annales des ponts et
chaussées, 1868, novembre et décembre.)
Endiguement de la Loire, — La Loire est un des
END
— 1826 —
END
fleuves les pins inconstants de France. Non seulement
il est sujet à des crues rapides, mais roulant presque
partout sur un lit de sables mouvants, son chenal
change souvent de place d*un Jour à l'autre : de là une
largeur considérable qui va de 300 à 400 mètres, avec
peu, d*eau une navigation dirflcile, qui ne peut se faire
par halage, ainsi qu*elle se pratique sur presque tous
les grands fleuves» mais seulement à la voie, et que
les basses eaux suspendent pendant 4 et 5 mois de
Tannée. L'endigoement de la Loire, soit pour la rendre
plus navigable, soit pour combattre ses débordements,
a occupé les ingénieurs depuis plus de dix siècles.
Toute U rive droite du fleuve, de Blois à Angers, sur
une longueur de 160 kilom., est munie d'une digue
qu'on appelle la Levée, et dont l'origine remonte à
Charlemagne et à Louis le Débonnaire. Elle a été sur-
tout perfectionnée vers la fin du xvii« siècle ; sa base
a de 25 à 7S met. sur 6 à 12 à son sommet, et son talus
est revêtu d'un empierrement buté sur deux rangs de
{âloUs. A partir du Bec d'Allier, au confluent de
'Allier et de la Loire, il y a des digues dans une mul-
titude d'endroits, Jusqu*k Nantes et au delà; mais on
s'est contenté de réunir des lies, de faire des barrages,
sans chercher à obtenir un lit régulier ; il en est résulté
qu'à de grandes largeurs ont succédé d'étroits passages
et réciproquement, ce qui devait de toute nécessité
rendre à peu près nuls les travaux entrepris ; la Levée,
une des digues les mieux construites, Ait rompue
vingt-sept fois de 1496 à 1711. Il faudrait appliquer à
la Loire le système qui a si bien réussi pour le P6,
un lit majeur, avec des digues longitudinales, et un
lit mineur pour la navigation en temps ordinaire.
Endiguement de la basse Seine. — La basse Seine
ressemble un peu à la Loire, en ce qu'elle est aussi
une rivière folle, à une vingtaine de kilomètres au-
dessous de Rouen, et que c'est son état habituel. Le
problème à résoudre était inverse de celui du Pô : car
on trouve un thalweg ou lit naturel majeur, et beau-
coup trop majeur. En efliet^à la Maillerayo, à 1 1 kilomèt.
au-desous de Rouen, et 61 en suivant les sinuosités du
fleuve, le thalweg mesure de bÙO à 600 met.; à
U kilomèt. plus bas, il a déjà 1,100 met.; à Quille-
bœuf, 3,000 ; et sur d'autres points Jusqu'à S,3S0 ; au
droit de Berville, à 8 kilom. en aval du point précédent
5,0(10; enfin à Ronfleur, 10,000 mètres. R fallait
réduire ce thalweg à des proportions telles que la
navigation en fût rendue plus facile, moins périlleuse,
et qu'en même temps la section réduite offrit encore
d'assez larges débouchés aux grandes eaux, i e projet
des ingénieurs fut celui-ci : endiguer les deux rives
du fleuve depuis la Mail! eraye Jusqu'au Havre, sur une
longueur de 52,350 met., pour les deux rives; donner
au thalweg 500 met. de largeur à Quillebœuf, 800 met.
à Benrille, 1,000 à Ronfleur ; rejeter le fleuve tout de
ce côté, et endiguer, sur la rive droite, toute la partie
de la baie de U Seine à partir de Tancarville Jusqu'au
Havre, en laissant encore de Ronfleur au Havre une
très vaste embouchure. — Ce projet, dont l'enquête
commença en 1844, fut accepté en partie, à la suite
de longs débats, et les travaux commencèrent en 1847.
Après trois ans, presque tous les endiguements étaient
élevés depuis la Mailleraye Jusqu'à Tancarville. Un des
effets de ce grand travail fut de diminuer sensiblement
une barre qui existe près de Quillebœuf, et qui devra
disparaître grâce à cet ingénieux procédé qui fait tra-
vailler le fleuve, en comprimant ses eaux, à fouiller
lui-môme son lit dans les endroits où il a des hauts-
fonds; en outre, le chenal fut très sensiblement
approfondi dans ce parcours. Les digues sont en terre
et revêtues de pierrées du côté du fleuve. — Cette
opération n'est pas moins remarquable au point de
vue économique et commercial : on a calculé que la
navigation et le commerce en retiraient déjà une
économie annuelle de plus de 3 millions de francs;
en outre, toute les parties conquises sur un thalweg dé-
mesurément large ont fait retour à l'agriculture. Dans la
portion déjà exécutée, on a trouvé déjà 5,000 hectares
d'excellentes prairies évaluées 8 à 10 millions de francs,
et dont les riverains ont payé à l'État, aux termes de la
loi du 16 sept 1807, une plus-value de 2,800,000 francs
environ. Le travail s'arrêtait en 1862 à la pointe de la
Roque, sur la rive gauche du fleuve, à 4,200 met. en
aval de Tancarville, sur la rive droite. Si le tracé pro-
posé de là au Havre s'exécute, on retrouvera encore
15,000 hectares environ de bonnes terres à prairies,
outre de nouveaux avantages pour la navigation. —
Les projets de ce magnifique travail ont été faits par
MM. les ingénieurs en chef Bleschamp et Doyat; ce
dernier en a commencé l'exécution en 1847; la pour-
suite en fut ensuite confiée à M. Baulien, puis à
M. Énery.
De quelques endiguements fluviaux dans le Roifaume-
Uni de la Grande^retagne, » U y a deux cenu ans
environ que l'on demande et que Ton discute l'endi-
guement de la Seine. En Angleterre, où les travaux
publics qui intéressent la navigation et le commerce
obtiennent en général une prompte faveur, U existait
déjà, avant l'entreprise de l'endiguement de la basse
Seine, des rivières à marées considérablement amélio-
rées, c'est-à-dire approfondies par des endiguemenu
longitudinaux qui ont fait disparaître Jusqu'à des
barres formées à leur embouchure ; nous citerons entre
autres la Glyde, en Ecosse, à Glascow, endiguée depuis
1768 et surtout 1844; en Angleterre, le Witham, à
Boston, et le Welland, à Spalding, depuis 1837; la
Nene, à Wiesbeach, depuis 1848 ; la Sevem^à Glocester
et Worcester, depuis 1840 et 1843. Dans la Glyde, les
digues sont en enrochements, et, dans les autres
localités citées, en fascines, dont chaque couche est
séparée de la précédente par un lit d'argile, genre de
construction qui résiste très bien, môme aux effons
de la mer. — Ces travaux sont beaucoup moins con-
sidérables que ceux de la basse Seine.
Digues maritimes de la Hollande, — Sur la mer du
Nord' depuis l'embouchure de l'Escaut jusqu'à la
pointe du Helder, au détroit de Texel, sur une longueur
de 200 kilomètres, les côtes de la Hollande sont défen-
dues par quatre digues remarquables, que séparent et
continuent des dunes, faisant l'office de digues natu-
relles. La première protège l'embouchure de l'Escaut
occidental, sur la nve gauche du fleuve. — La seconde,
appelée Digue de Westcapelle^ et qui date du iz« siècle,
enveloppe toute la partie extérieure de llie de Wal-
cheren, sur 4,000 met. de développement* et munit
la rive droite de l'embouchure de l'Escaut occidental.
— La troisième, nommé Digue de Petten^ ferme, sur
une longueur de 3,200 met. la partie de la côte où
débouchait autrefois une des branches septentrionales
du Rhin. C'est un des endroits les plus périlleux de
cette vaste défense. Enfin la Digue au Helder défend
la pointe de cette langue de terre. Construite en 1774
pour arrêter les envahissements de la mer, elle a
4,575 met. de longueur, 30 met. de profondeur et
15 hectares de superficie. Elle est en pierree sèches
et défendue par des enrochements et des épis. — La
même précaution est prif>e pour les autres dignes, qui
sont de sable couvert d*one couche d'argile épaisse
d'un mètre, et armées de rangées de gros pieux for-
mant des brise-lames. Le pied est, en outre, défendu
par des couches de fascines entremêlées d'argile, ou
simplement par de grands tapis en fascines, construit»
à terre et échoués à leur pied. Le talus des digue'*
est considérable du côté de la mer (15 à 16 mètr. de
base sur un de hauteur), afin que, les vagues venant
rouler dessus, leur choc s'en trouve amorti. — Quant
aux dunes, leur partie hors de l'eau est défendue de
l'action des vents et fixée par des plantations de
l'herbe marine appelée helm; et, dans les cas urgents,
à défaut d'helm, par de petits faisceaux de paiU« de
(t",15 de diamère, longs de 1,50, ployés en deux, et
plantés, à l'angle en bas, à des intervalles de 0",52.
L'intérieur de la Hollande est rempli de dignes :
car depuis la fin du xiv« siècle tous ses fleuves sont
endigués; la plupart des digues, même maritimes,
construites en fascines» posées les unes en long, les
autres en travers, avec couche d'argile entre chaque
assise, et, au sommet, une charge de pierres apportées
de Norvège, ou de grandes briques d'Arnheim, dans
la Gueldre, pour augmenter la stabilité de la cons-
truction. Très souvent, ce sommet sert de chemin, et
même de route. C'est en Hollande que Ton admire
surtout le génie et la patience de l'homme en lutte
perpétuelle contre U nature : dans les tempêtes, à la
moindre apparence de danger, le tocsin sonne, le cri
d'alarme retentit, et toute la population accourt sur le
point menacé. R y » toujours, de place en place,
d'immenses quantités de fascines, de roseaux, d'argile,
de paille, de bois, de pierre, pour parer aux brèches
qui peuvent se déclarer. L'entretien des digues coûte
fort cher (environ 20 millions de francs par an), mais
c'est à ce prix que la Hollande existe ; d'une autre part,
la vente des Schorres (V. ce mot plus bas) vient, pour
ENP
— 1827 —
ENP
rfitat, en allégement de ces dépenses. (F. Annales des
ponts et chaussées^ année 1846, sept, et cet.; Essai
sur Vhist. hydraulique delaNéerlandef par M. Lacroix.)
C. D— Y.
ENDUITS HYDROFUGES, mélanse de cire, de
résine, de corps gras, d'hnile de îln cuite, qu'on
emploie pour rendre imperméable Tintérieur des cons-
tructions, en les faisant pénétrer dans les murs au
moyen d*une chaleur très intense. Us préservent les
murs de l'humidité, arrêtent la formation du salpêtre
et empochent la détérioration des peintures. Thénard
et d'Arcet inventèrent les enduits hydrofugesen 1813;
on a pu garantir de Tinflltratlon des eaux pluviales la
coupole du Panthéon de Paris, et préserver les pein-
tures du baron Gros. — On emploie souvent, surtout
pour les rez-de-chaussée, des mélanges bitumineux.
On obtient aussi de bons résultats, dans les apparte-
ments, en recouvrant les murs de feuilles de plomb
fixées avec des clous de cuivre et sur lesquelles on
colle le papier de tenture : on peut remplacer le
plomb par l'étain dit paillon de Cooke, ou par un
alliage de plomb, étain, bismuth et zinc, imaginé par
Rousseau et Poisson.
ENFANTS (Travail des). L'assemblée nationale a
voté (19 mai-juin 1874) une loi sur le travail des enfants
et des filles mineures employés dans l'industrie. Ils
ne peuvent èire admis dans les manufactures, usines,
ateliers ou chantiers avant l'Age de douze ans révolus,
«t employés plus de doruze heures par Jour, divisées
par des repos. Si une commission administrative per-
met d'emplover des enfants Agés de dix ans révolus,
on ne peut les assujettir à une durée de travail de
plus de 6 heures par Jour^ divisées par un repos. Les
enfants ne peuvent être employés k aucun travail de
nuit jusqu'à l'Age de seize ans révolus. La même inter-
diction est appliquée à l'emploi des filles de seize à
vingt et un ans, mais seulement dans les usines et
manufactures. Les enfants de moins de seize ans et
les filles de moins de vingt et un ans ne peuvent être
employés k aucun travail, par leurs patrons, les diman-
ches et fêtes reconnues par la loi. Dans les usines à
feu continu, les enfants peuvent être employés la nuit
ou les dimanches et Jours fériés ; on leur assure le
temps et la liberté nécessaires pour l'accomplissament
des devoirs religieux. Aucune fille n'est admise dans
les travaux souterrains des mines, minières et car-
rières. Nul enfant ayant moins de douze ans révolus
ne peut être employé p4r un patron qu'autant que ses
parents ou tuteurs Justifient qu'il fréquente une école
publique ou privée. Tout eufant admis avant douze ans
dans un atelier doit, Jusqu'à cet Age, suivre les classes
d'une école pendant le temps libre du travail ; il doit
recevoir l'instruction pendant deux heures au moins,
si une école spéciale est attachée à l'établissement
industriel. Aucun enfant ne peut, avant l'Age de quinze
ans accomplis, être admis à travailler plus de 6 heures
psr Jour, s'il ne justifie qu'il a acquis l'instruction
primaire élémentaire. Sur la demande du maire, les
chefs d'industrie ou patrons ont un registre pour les
enfants, leur font connaître et appliquer les conditions
de la loi, leur interdisent certains travaux insalubres,
et tiennent les ateliers dans un état constant de pro-
preté et convenablement ventilés. L'Etat désigne des
inspecteurs pour le travail des enfants. Les manu-
lacieurs, directeurs ou gérants d'établissements
industriels et les patrons qui ont contrevenu aux
prescriptions de la loi et des règlements de l'adminis-
tration sont poursuivis devant le tribunal correction-
nel, et punis d'une amende de 16 à 60 fr. chaque
fois, et pouvant aller Jusqu'à SOO fr.
ENFANTS DE TROUPE (V. Dictionnaire). Avant
la révolution, les conditions qui réglaient le recrute-
ment de l'armée française étaient loin d'être les mê-
mes qu'à notre époque. Etait soldat celui qui n'avait pas
d'autre métier et qui embrassait la profession dos
armes soit par goût, soit, le plus souvent, par misère.
Il résultait de cet état de choses que les régiments
comptaient dans leur effectif bon nombre de soldats
mariés dont les enfants naissaient pour ainsi dire à
l'ombre du drapeau, quelquefois entre deux batailles.
De là le nom d'enfants de troupe. Il n'est donc pas sur-
prenant que i'attenUon des gouvernants se soit portée
sur ces Jeunes déshérités du sort. La première régle-
mentation qui les concerne apparaît dans l'ordonnance
du 14 avril 1771 relative aux gardes-françaises et qui
attachait à chaque dépôt trois enfants de troupe par
compagnie. On ne sait si, dans l'application, cette
première ordonnance donna des résultats satisfai-
sants. Quoi qu'il en soit, le ministre Saint-Germain,
prenant pour point de départ l'ordonnance de 1771,
voulut aller plus loin en créant une sono de privilège
au profit des enfants de troupe. D'après son projet,
les enfanu nés dans les corps devaient être élevés
aux frais de l'Etat. Malheureusement ce projet, qui
fut réalisé dans d'autres milices étrangères, n'eut pas
de suites en France. Le ministre qui avait voulu
créer un privilège en faveur des enfants des soldats
et en même temps réduire notablement les dépenses
occasionnées par d'autres privilèges dont Jouissaieiit
les nobles qui servaient dans la garde du roi, pré-
para sa propre perte et dut se retirer.
Il faut admettre que l'institution des enfants de
troupe préoccupa constamment l'autorité militaire : car,
à partir de la Révolution, on voit apparaître successi-
vement une foule de règlements concernant la matière.
En 1791, on croit simplifier les choses en abolissant
les enfants de troupe et en leur octroyant seulement
quelques secours. L'arrêté du 7 thermidor an Vlll ré-
tablit deux places d'enfant de troupe par compagnie,
à la condition d'être nés d'un légitime mariage et
d'être agréés par l'inspecteur aux revues, sur la |>ré-
sentation du colonel. Cette réglementation subsista
jusqu'en 1832, époque à laquelle les enfants de troupe
furent astreints à l'engagement militaire; toutefois,
en 1837, on les admit au nombre des vingt-sept mu-
siciens que comportait chaque régiment ; ainsi que
cela s'était déjà pratiqué sous le premier Empire et
sous la Restauration.
Ces diverses réglementations avalent le tort de
limiter à un chiffre déterminé le nombre d'enfants de
troupe à admettre par régiment ou par compagnie. En
effet, tel régiment n'avait pas le nombre voulu d'en-
fants do troupe, tandis que tel autre n'en pouvait
plus admettre faute de vacances. Si en accordant
protection aux enfants des soldats, on avait l'intention
d'encourager le mariage dans l'armée, il est certain
que par cette mesquine réglementation on man-
quait le but cherché.
Des décisions ministérielles ont réglé également la
solde et les allocations è attribuer aux enfants de
troupe ainsi quA l'instruction qu'ils doivent recevoir.
Conformément à l'arrêté du 7 thermidor an YIII, l'é-
ducation des Jeunes enfants était confiée à des offi-
ciers ou à des sous-officiers de chaque corps qui
devaient leur enseigner les éléments des lettres et
de l'art militaire, ainsi que la course et la natation. Le
22 mai 1858, parut un décret qui modifia de nou-
veau les admissions des enfants de troupe. D'après ce
décret, chaque compagnie d'infanterie comptait trn
enfant de troupe : les compagnies, escadrons ou bat-
teries de cavalerie, d'artillerie, du train des équipa-
ges ainsi que les sections d'ouvriers d'administration
en comptaient deux. Les fils légitimes de soldats et
d'officiers, Jusqu'au grade de capiuine, éuieni seuls
admis. En cas de. mobilisation, les enfants Agés de
moins de quatorze ans restaient au dépôt. Aussitôt
qu'ils avaient atteint leur quatorzième année ils
étaient tenus, suivant leurs aptitudes, de servir
comme tambour, trompette ou musicien ou de tra-
vailler dans les bureaux ou les ateliers du corps. A
dix-sept ans il leur éuit loisible de contracter l'enga-
gement volontaire. Cette réglementation ne devait pas
être la dernière. Lors de l'élaboration de la loi du
13 mars 1875, relative à la constitution des cadres et
des effectifs de l'armée, le législateur se préoccupa
des enfants de troupe et l'article 28 de ladite loi
porta, en principe, la création d'écoles d'enfants de
troupe. L'application de cette même loi amena un
décret du 24 avril 1875, instituant à Paris une école
d'essai qui devait être installée dans les bâtiments de
l'hôtel des Invalides. D'après ce décret, l'effectif maxi-
mum des élèves à entretenir à l'école d'essai était fixé
à six cents, répartis en trois divisions formant cha-
cune deux compagnies. Les enfants de la première
division étaient armés. Tous les élèves avaient droit
à une solde de 50 centimes par jour et à une
prime Journalière d'entretien de 10 centimes. Un
aumônier était chargé du culte catholique et de l'ins-
^uction religieuse.
L'école d'essai des enfants de troupe fut réellement
installée non pas aux Invalides, mais à Rambouillet.
Un règlement ministériel du 4 septembre 1875 fixa les
ENS
— 1828 —
ESP
conditiont d'admission et le fonetionnement intérieur
de l'école qui comprit non seulement les enfants de
troupe immatriculés dans les corps de troupe, mais
encore un certain nombre d'enfants issus de familles
militaires et qui pouvaient y être admis comme pen-
sionnaires. Le prix de la pension était fixé à 400 francs
et celui du trousseau à 450 francs. Douze sœurs de
Saint-Vincent de Paul étaient chargées des détails de
rinflrmerie. de Thabillement et de la nourriture des
élètes. Enfin, le 8 mars 188S, parut un nouveau dé-
cret portant exécution de la loi du 19 Juillet 1884
ayant pour objet la suppression des enfants de troupe
dans les régiments et la création des six écoles mili-
taires préparatoires. D'après ce décret, l'école d'essai
de Rambouillet est constituée à titre définitif comme
école préparatoire d'infanterie et il est créé cinq autres
écoles militaires préparatoires : trois pour Tinfanterle
i Saint-Hippolyte (Gard), aux Andelys (Eure), â Mon-
treoil-sur-BliBr (Pas-de-Calais) ; une pour la cavalerie
et la gendarmerie, à Autun (Saône-et-Lolre), une
pour l'artillerie, le génie et le train, k Blllons (Puy-
de Dôme). L'effectif maximum de chaque école est
fixé h 500 élèves nt les enfants qui entrent dans ces
établissements doivent y rester Jusqu'au jour de leur
engagement.
ENSEIGNEMENT PRIMAIRE. La loi du 16 juin 1881
a établi la gratuité absolue de l'enseignement primaire.
Pour subvenir aux frais, elle rend obligatoires les
4 centimes spéciaux créés par les lois de 1850 et
1875, sauf le droit pour les communes de s'exonérer
en inscrivant au budget, pour la môme destination,
une somme égale au produit des centimes supprimés.
En cas d'insuffisance des produits, l'État fournit une
subvention. Une loi de la môme date assure la com-
pétence des maîtres en exigeant le brevet de capacité
f»our l'enseignement primaire et jBupprimant toutes
es équivalences établies par la loi ae 1850 (lettre
d'obédience de révoque). Les personnes exerçant sans
ce titre devaient passer l'examen dans le cours d'un an
à partir de la loi ; en cas d'échec, le dernier délai était
le mois d'octobre 1884.
Une loi votée a la môme époque rend renseigne-
ment primaire obligatoire pour les enfants des deux
sexes âgés de six ans révolus à treize ans révolus.
Chaque année le maire dresse, d'accord avec la com-
mission municipale scolaire, la liste des enfants de
six à treize ans et avise les personnes qui ont la charge
de ces enfants de la rentrée des classes ; cette personne
fait savoir au maire si elle entend faire donner l'en-
seigpiement à l'enfant dans la famille ou à l'école et
désigne l'école; en cas de non-déi*.laration, le maire
choisit d'office l'école. Si l'enfant manque l'école
quatre fols en un mois, sans excuse valable, la per-
sonne responsable est mandée devant la commission
scolaire qui lui rappelle le texte de la loi ; en cas de
récidive dans les douze mois, la commission ordonne
l'inscription pendant quinze jours on un mois, à la
λorto de la mairie, des nom, prénoms et qualités de
t personne responsable, avec indication du fait-relevé
contre elle. En cas de nouvelle récidive, on applique
Tartlcle 463 du code pénal. Un certificat d'études
primaires est décerné, après examen public ; l'enfant
peut s'y présenter dès l'âge de onzH ans. Ceux qui
ont obtenu à cet âse le certificat sont dispensés des
deux dernières années.
ENSEIGNEMEiST SECONDAIRE DES FILLES. Une
loi votée le 21 décembre 1880 a créé en France rensei-
gnement secondaire des filles oui n'y existait pas.
Elle décide qu'il sera fondé par l'État, avec le concours
des départements et des communes, des externats
destinés & l'enseignement secondaire des filles. Des
internats pourront y être annexés sur la demande des
conseils municipaux et après entente avec l'État. Des
bourses seront fondées au profit des internes et demi-
pensionnaires. L'enseignement comprend l'enseigne-
ment moral, le français et une langue vivante au
moins; les littératures ancienne et moderne; la
géographie et la cosmographie ; l'histoire nationale et
un aperçu de l'histoire générale; l'arithmétique, les
éléments de la géométrie, de la chimie, de la physi-
3ue et de l'histoire naturelle; Thygiône; l'économie
omestique ; les travaux à l'aiguille ; des notions de
droit usuel; le dessin; la musique; la gymnastique.
L'enseignement religieux sera donné sur la demande
des parenu par des ministres du culte, en dehors
de heures de classe. Il sera, à la sortie des
conrs, délivré un diplôme à la suite d'an examen.
Une loi du 26 juillet 1881 a fondé une école normale
dlnternes, destinée à recruter des professeurs femmes
pour ces écoles secondaires. Les élèves sont admises
au concours et entretenues gratuitement par l'État.
Cette école normale a été établie à Sèvres et ouverte
en novembre 1881 : elle contient 40 élèves.
ÉGLI(X)HDE, instrument à vent et à clavier, inventé
à Paris, en 1835, par le facteur Isoard. Le ton y est
produit au moyen d'un courant d'air dirigé par une
embouchure sur une corde de piano.
ESCAUFAILUS, chaufferette à main en usage depuis
le zii!« siècle Jusqu'à la fin du xvxe. C'était une boule
creuse de métal, au centre de laquelle on plaçait un
panier rempli de braise, disposé de manière à ne pou-
voir se renverser, quels que fussent les mouvements
de l'appareil.
ESPRIT, mot de sens très variés qu'emploient les
savants, les moralistes, les critiques et le vulgaire, et
qui se prête à l'expression des choses les plus diverses.
La science étudie dans l'homme l'effet des esprits
animaux ou vitaux; la psychologie note Vesprit de
corps parmi nos faiblesses, et range Vesprit de con-
servation au nombre des penchants qui nous distin-
guent des autres êtres; enfin la critique dogmatique
ou simplement les entretiens polis des honnêtes gens
mettent sous le mot esprit une foule de significations
différentes. Et d'abord il veut dire le tour d'esprit
particulier à chaque écrivain : c'est ainsi qa*on pein-
dra Vesprit de Bossnet et Vesprit de Fénelon par les
qualités respectives qui constituent l'originalité pro-
pre de ces deux génies. Il exprime aussi les habitudes
d'esprit qui finissent par établir entre les écrivains
comme des catégories distinctes : Pascal l'entendait es
ce sens quand il écrivait Vesprit géométrique par
opposition à Vesprit de finesse; et c'est confoncément
à la môme signification que nous distinguons l'etprif
littéraire de Vesprit philosophique. Ces distinctions
sont légitimes et fondées sur la réalité; il est mani-
feste que le liitérateur lira les Méditations de Oescartes
avec d'autres yeux que le philosophe. — Ailleurs,
Vesprit signifiera le caractère^ et les plus ignorants
comprennent quand on dit que Vesprit anglais n'est
pas Vesprit français; que Napoléon I*^ avait Vesprit
grand, mais emporté; qu'un enfant a Vesprit mdie et
ferme, ou doux et docile. D'autres fois, il s'applique
au raisonnement : quiconque raisonne bien a i esprit
droit et juste; quiconque raisonne mal a Vesprit faux
et de travers. Pourquoi rencontre-t-on souvent des
esprits, assez Justes d'ailleurs, qui sont absolument
faux sur des choses importantes ? Par faiblease natu-
relle, par vanité, par présomption, par un effet de
notre éducation, de notre entourage, de notre vie.
Tant d'influences du dedans et du dehors obscurcissent
la lumière naturelle, déjà si faible, si bornée par elle-
même! Les philosophes signalent avec raison deux
grandes manières d avoir l'esprit faux : c'est d'abord
de déduire hardiment les conséquences d'un principe,
svant d'avoir examiné si le principe lui-même est vrai,
(f Les ignorants sont des sots ; or vous êtes un ignorant»
donc vous êtes un sot » ; un homme qui nous tiendrait
ce langage serait non seulement un être grossier, mais
encore nu esprit faux, quoique son raisonnement fàt
irréprochable ; il partirait, en effet, d'un principe faux,
car l'ignorance et la sottise ne sont pas des termes
synonymes. C'est ensuite de tirer des conséquence»
fausses d'un principe vrai : ainsi ferait un Juge qui.
parce que l'homicide est défendu, condamnerait on
homme qui tue son assassin.
Enfin, il y a Vesprit proprement dit, cette chose
que tout le monde voudrait avoir, et dont la nature se
montre si peu libérale. Ils sont rares, en effet, les
hommes qui savent trouver les idées ingénieuses, les
comparaisons neuves, les allusions fines, les traits
imprévus, mômes les Jeux de mots; qui ont l'art de
dire des choses communes d'une façon nouvelle et
piquante, de substituer l'image saisissante et la méta-
phore singulière à l'expression propre ou vulgaire,
bref, qui sont hommes desprit. Il ne faut pas confondre
Vhomme d'esprit et le tel esprit : l'un tient de l'autre,
il est vrai; seulement le premier terme ne se prend
jsmais en mauvaise part, et le second est quelquefois
prononcé ironiquement. La raison de cette différence,
dit Voltaire, c'est qu'homme d'esprit ne signifie pas
esprit supérieur, ulent marqué, tandis que bel esprit
le signifie; homme d^esprit n'annonce point de pré-
FOL
— 1829 -
FOL
tion, et bei tsitrit est une affiche; c'est une espèce
profession, et cela même expose à Tenvie et au
tention,
de
ridicule. — L'esprit n'est pas dé mise partout et ne
saurait tenir lieu de tout le reste. Il y a longtemps
qu'on a dit que les grandes pensées viennent du cœur;
•ce qui signifie que l'esprit peut inspirer les pensées
agréables, mais ce n'est pas la source des sentiments
élevés. D'où il suit que de Tliomme d'esprit à l'homme
de cœur la distance n'est pas médiocre. Et si nous
considérons les écrits, que d'œuvrestoù l'esprit Joue
le moindre rôle, où même il disparaît sous peine
d'ôtre un défaut I Le sublime et le simple, voilà ce
qui fait la vraie beauté des grands ouvrages dont le
but est d'instruire et de toucher. On ne conçoit guère
une tragédie proprement spirituelle, parce que les
personnages tragiques sont sous le joug d'une passion»
et que la passion ne court point après l'esprit. Cher-
ches les fautes de goût qu'a laissé échapper Corneille:
beaucoup proviennent de ce que l'auteur s'est substitué
an moment à ses héros, et leur a prêté des propos
recherchés, des mots d'esprit à contre-sens. Pourquoi
Voltaire a-t-il échoué dans la comédie? Parce qu'il
avait tant d'esprit, qu'il ne pouvait s'empêcher d'en
donner à tous ses personnages, et leur était ainsi leur
il est vrai que resprit a ses inconvénients
et ses périls! A. H.
naturel. Tant
ESSIMER, terme de fauconnerie. Amaigrir un oiseau
pour le rendre moins lourd au vol. On dit aussi esseimer,
^SORANT, terme de blason ; se dit d'un oiseau
représenté les ailes à demi ouvertes et l'œil regardant
le ciel.
ESSORÉ, en blason, se dit de la partie supérieure
d'une tour, d'une église, d'un château ou d'une maison
dont l'émail est différent de celui du corps de la cons-
truction. Par exemple : tour d'argent essorée d'asur.
L'expression est ici employée dans son sens étymolo-
gique. Essorer^ vent dire mettre k l'air, s'élancer dans
les airs, du bas-latin exaurare, prendre le vent. Son
application au vocabulaire héraldique s'explique ainsi
que de toutes les parties du bâtiment il y en a pas
de plus exposées à l'air que la couverture.
ëOLALIE (Gantilène de sainte), le poème le plus
ancien de notre langue, écrit au ix« ou au x» siècle.
Elle a été découverte en 1837, par M. Hoffounn de
Fallersleben, dans un manuscrit de la bibliothèque de
Yalenciennes : elle a souvent été publiée et com-
mentée : M. Gaston Paris en a donné un fac-similé
dans sa reproduction des plus anciens monuments de
la langue française. Elle contient 23 vers rimes deux
à deux ; le nombre de syllabes varie pour chaque dis-
tique de neuf à onze. Le sujet est une- complainte sur
le martyre de sainte Eulalie, brûlée par l'empereur
Maximien.
F
FAGTITIVË (Forme) ou causale ^ forme particulière
de la conjugaison dans les langues aryennes et sémiti-
ques, par laquelle on rend actif un verbe neutre, et
tnédiaïe une action simple. En hébreu, la lettre h est
le signe caractéristique de cette forme; le AipAi/ repré-
sente le mode factitif actif, et le hophalle passif; on les
distingue par la différence des points voyelles. Ex. :
yatal, il a tué; hiktil^ il a fait tuer; hoktat^ il a été
tué sur l'ordre de quelqu'un ; iochab^ il était assis ;
hochibf il fit asseoir. — Parmi les langues modernes,
les langues germaniques sont les seules qui aient
conservé des spécimens de cette forme à l'aide de
l'inflexion de la voyelle du radical, ou du changement
de la consonne : trinken, boire ; trûnken^ faire boire,
abreuver ; sitzen^ être assis ; setzent asseoir ; steften,
être debout; steUen^ placer debout; anglais di-ink et
drench^ sit et set; lie, être couché ; iay, coucher,
poser. Le dialecte des Allemands méridionaux a seul
conservé cette forme dans un grand nombre de verbes
que TAUemagne septentrionale a eu le tort de négliger.
FOLK-LORE, mot composé anglais signifiant au
sens littéral : savoir populaire (do folk, peuple ; lare,
savoir, leçon). Folk-lore est un terme de convention
qui sert à designer d'une façon générale et absolue
l'étude comparée des traditions et des littératures
populaires. En France, si la chose est ancienne, comme
nous le verrons plus loin, l'usage de ce mot est d'ail-
leurs assex nouveau. Folk-lore avait été usité dans
son sens actuel ponr la première fois en Angleterre,
dans le numéro de VAthinoium portant la date du
22 août 18&8. Chez nous l'adjectif /îo/Âr/om^e ne remonte
guère au delà de quatre années, et il ne fut pas
adopté sans une certaine résistance. On le conserve
faute de mieux; on peut dire que ce qui a fait sa for-
tune, c'est son élasticité. Ne voulant pas dire grand
chose de précis, au sens littéral, on a pu l'appliquer
à une collection de connaissances, dont quelques
branches suffiraient à elles seules par constituer une
science. Au début folk-lore ne s'appliquait guère
qu'aux contes, aux légendes, «ux chants populaires,
aux proverbes, aux devinettes, aux petites formules
du langage courant, aux axiomes du sens commun, en
un mot a cet ensemble qu'on peut appeler du nom
collectif de littérature orale. Avec assez de raison on
y a ajouté la linguistique, étant donné qu'il est
des mots qui supposent des croyances, ou des tra-
ditions. Puis est venue Tethnograpliie traditionnelle,
expliquée par l'étude comparative des coutumes,
croyances, superstitions, costumes, instruments^
bijoux, etc. Dans cette science nouvelle des litté-
ratures populaires, des traditions locales, il faut
savoir tenir com|)te des répercussions nombreuses
dans le cours des siècles et des modes abandonnées ou
reprises. Les compositions naïves et parfois môme
grossières dans l'expression que les lettrés empruntent
au peuple pour les revêtir d'une forme élégante, sont
susceptibles de retourner un jour à leur point d'o-
rigine, dépouillées de tout revêtement artistique, et
redeviennent ainsi populaires. C'est pour cette raison
qu'on a rangé sous la dénomination de folk-lore cer-
tains livres de colportage, l'imagerie populaire, parfois
même l'iconographie monumentale en raison des sym-
boles traditionnels qu'elle résume ou représente. On
peut donc dire qu'en ce moment, sous le vocable
folk-lore,, en raison de sa forme élastique, il est i>er-
mis de ranger tout l'ensemble des choses populaires
à des degrés ou & des titres différents, qui jusou'à
présent avaient été négligées, oubliées ou non clas-
sées. En Angleterre, le pays de Walter Scott, le
folk-lorisme est d'un usage plus ancien qu'en France.
Avant Walter Scott, AUan Ramsay, Pepys et le duc de
Roseburgh avaient dès la fin du siècle dernier collec-
tionné de vieilles ballades. En Allemagne, dès 1786,
MuBseus avait publié des contes directement recueillis
de la tradition orale. Après lui, Herder écrivit tout un
volume sur les chants populaires des divers peuples.
Les frères Grimm, Wolf, Liebrecht, Keller, firent des
recherches passionnées dans ce sens. Le mouvement
s'étendit d'Allemagne en Bohême, en Suède, en Dane-
mark. On n'ignore pas que Wagner emprunta beau-
coup de ses livrets aux légendes Scandinaves et ger-
maniques des Niebelungen.
Les Bddas tiennent une grande place dans la
littérature Scandinave moderne et aussi dans la cons-
truction de certains monuments qui ornent les places
publiques de Stockholm. En Hongrie les recherches
du musicien Listz ont ouvert une source abondante
de documents populaires. Les bulletins de l'Académie
royale de Belgique publièrent en 1851 un très cu-
rieux rapport du compositeur Gevaert sur la situai ion
de la musique en Espagne, rapport oue les folk-loristes
doivent considérer comme un précieux spécimen des
traditions chantées du peuple espagnol. A l'heure
qu'il est le foik-iore compte une armée d'érudits
dans le monde entier. La Russie, la Hollande, l'Italie,
le Portugal, la Serbie, la Roumanie, l'Albanie, la
Grèce, ajoutent leurs travaux à ceux des pays qui avec
l'Angleterre, l'Allemagne et la France, ont préparé
le renouvellement des légendes primitives. En France
une vraie science s'est constituée autour de ces recher-
ches. Des érudits d'esprit curieux autant que critique
comme MM. Gliampfleury, Wekerlin, Gaidoz, Paul Se-
billot, le comte de i'uymaigre avec M. Renan, lui aussi,
écrivant l'admirable histoire de son Broyeur de lin et
discourant au Diner celtique sur le caractère des gens
de l'extrême Occident, ont contribué à mettre la
France au premier rang des pays qui s'occupent des
vieux souvenirs populaires et veulent étendre sur tous
les esprits cultivés l'influence naïve et délicieuse des
traditions locales. Que la chose exprimée par ce mot
nouveau soit ancienne en France, cela ne saurait faire
de doute. Voilà de longs siècles que des écrivains
français font des folk-lore sans le savoir. Etienne de
Bourbon, contemporain de saint Louis, auteur d'histo-
FUS
— 1830 —
GAR
ridttet publiées récemment, en même temps ({a*i1 cons-
tate l'âction de la littérature écrite sur la littérature
orale, prouve que plusieurs contes recueillis de nos
Jours oe la bouche du peuple étaient connus dès le
xni* siècle et servaient aux lettrés d'exemple pour étayer
des moralités. Sans parler des forts et viffourenx con-
teurs des xvi« etxvii« siècles, il est bon de savoir que
dès 1783, avant l'allemand Husseus et trente ans avant
Grimm, Restif de la Bretonne avait publié dans ses
Contemporains par gradation cinq contes recueillis
avec un souci de la forme populaire qu'on ne retrouve
de nos Jours que chez les meilleurs collecteurs. Peu
après, la Révolution et l'Empire firent une enquête
sur les patois et les statistiques des départements qui
renferment un grand nombre de documents intéres-
sants, et qui ont sérieusement préparé le mouvement
littéraire auquel président aujourd'hui avec une pers-
picacité et une conscience admirables des savants comme
HM. Paul Sebillot, Gaidoz et de Puymalgre. L'énumé-
ration des ouvrages sur le folk-lore est considérable.
Les llTTesou les revues dont voici rénumération peu-
vent suffire à conduire aux sources les esprits curieux
d'accomplir tme excursion plus complète dans ce
domaine de la traditioa populaire, où les origines de
l'esprit français tiennent »ne si large place : Fofk-
Lare, par H. le comte de Puymaigre; le Dieu gaulois
du soleil et le symbolisme de la race, par M. H. Gai-
doz ; Mythologie et Folk^Lore, par M. Chantepie êm 1&
Saussaye ; Cuslom and myth, par M. Lan g; Folk-Lore
journal, revue anglaise ; voir aussi la Revue Celtique,
Melusine, revue de mythologie et de folk-lore rédigée
par Bill. Gaidoz et Rolland ; voir encore les différents
articles de MU. Gaidoz et Paul Sebillot dans la Revue
archéologique, la Revue ethnographique, et la Revue
de l histoire des religions. (Y. au Supplément les mots
Places, Presses, Hoté, Hussudx, Lits clos.)
F. L.
FONDATIONS. Le système des fondations tubu-
laires est originaire de l'Inde, d'où les Anelais l'ont
apporté. Les Indiens creusent le sol jusqirà la ren-
contre de l'eau, placent alors une couronne de bois,
construisent au-dessus un tube en maçonnerie de
briques, et font ensuite descendre ce dernier par
dragage intérieur et chargé de poids. Us établissent
plusieurs files de tubes semblables ; puis, quand ils
sont parvenus au terrain solide, ils les remplissent
de béton, et assoient sur leur sommet les premières
assises de l'édifice. Brunel paraît avoir, le premier en
Europe, employé en grand le système des fondations
tubulaires en 1825, pour éublir à Botherite le puits
qui donne accès an tunnel de la Tamise. En 1839, les
AnK:lais remplacèrent les pniis en maçonnerie par des
tubes en fonte : dans le principe, on fit descendre ces
tubes par le procédé indien; mais, en 1843, Potts
imagina de les enfoncer en faisant le vide; en 1845,
l'ingénieur français Triger créa la méthode par l'air
comprimé, qui est suivie aujourd'hui.
FORMAT DES LIVRES. Les plus anciens livres
imprimés sont in-folio. Le plus ancien in-4* connu est
le Vocabularium, publié en 1467, à Etwil, près de
Mayence. Aide Manuce employa pour la première fois
rtn-8o, en 1500, pour une édition de Virgile. L'tn-12
paraît avoir été connu dès 1472; il fut réservé d'abord
aux livres de piété. Le plus ancien tn-S2 est VOf/ice
de la sainte Vierge imprimé à Venise en 1473 par
Nie. Jenson. Les Elzévlers ont mis à la modertn-18et
rtn-24 du xvi* siècle.
FORMES DE RADOUB. Avant llnvention de ce
genre de bassin en maçonnerie, on était obligé, pour
radouber un navire, de l'abattre en carène ou ae le
haler sur une cale. Les plus anciennes formes de
radoub ont été établies en Angleterre an milieu du
xviii* siècle. La première qu'on ait eue en France a
été faite à Brest. Les docks flottants se rattachent, par
leur destination, aux formes de radoub. Ce sont de
Sandes caisses qu'on remplit d'eau de manière à les
ire enfoncer assez pour qu*il soit possible d'amener
au-dessus le navire à réparer; après quoi on les vide,
ce qui leur permet de soulever le bâtiment et de
l'amener à la surface : ce sont des appareils indispen-
sables pour la réparation des navires en fer.
FUSIL. En 1809, un armurier de Paris, Pauli^, exé-
cuta le premier fusil se chargeant par la culasse, ce
qui simplifie le chargement et permet un tir plus
rapide ; mais son invention n'eut pas de succès, il en
fut de même du système présenté en 1813 par
Julien Leroitj, dans lequel le canon se rabat sur le
cdté gauche, parallèlement à lui-même, en tournant
autour d'un axe horizontal parallèle an canon ; le fusil
manquait de solidité. Le système Lefaucheux est
impropre aux armes de guerre, parce que le canon
s*y brise au tonnerre et que le soldat doit toujours
pouvoir se servir de la baïonnette. Dans le système
Robert, la tranche poslérieure du tonnerre se découvre
au moyen d'un levier à poignée qui fait l'office de
culasse : le soldat introduit la charge qal est une
cartouche munie d'une amorce fulminante, et referme
la culasse ; lorsqu'on presse la détente, le chien vient
écraser Tamorce sur une sorte d'enclume intérieure,
et le coup part. Dans le système Treuille de Beaulieu,
qui fut appliqué au mousqueton des ceut-gardes,
le tonnerre se découvre en abaissant une culasse
moblle« au moyen de la sous-garde elle-même qui
forme ressort; ce ressort. Jouant le rôle du chien
lorsqu'on presse sur la détente, vient choquer une
petite tige métallique reposant sur la capsule, qui est
B lacée verticalement dans le culot de la cartouche,
ans le système Chassepot, le canon se termine posté-
rieurement en un manchon où vient s*engager une
pièce mobile, munie d'une poignée et d'un s^tème
obturateur; cette culasse mobile sert à oavnr on à
fermer le canon, en glissant dans le manchon. Le
système Monceaux a pour culasse mobile un cylindre
creux, aux extrémités duquel sont fixés, d*ttn c6té,
rapoareil obturateur, et, de l'autre, une poignée à
l'aide éà laquelle on peut démasquer l'entrée du
canon. Le fosil Spencer se charge par la culasse. Il
est à deux cane»» superposés : le canon inférieur
contient 6 charges eft réserve, venant nne à une
prendre la place de la 7*^ eartonche, qui ae trouve
dans le canon supérieur. L» canon-réservoir est
plus légèrement établi que le véritaMe canon ; néan-
moins l'arme est lourde, incommode à manier, et
se détériore facilement en campagne. Le ftett Gras,
qui a été adopté pour l'armée française en 1879» est
à culasse mobile, à percussion centrale ; le percateur
est mû par un ressort |i boudin : il pèse 4 kilog. 350,
porte à 1,200 mètres et tire 12 coups à la minute. —
Un armurier d'Erfurth, Dreyse, qui avait travaillé à
Paris, chez Pauly, inventa, en 1827, le fUsil à aiguille
ou fusii prussien. Du côté droit du canon à la place
du chien, il v a une clef, bout de fer haut de 0*05,
et de 0",02 de diamètre; en frappant un petit coup
sec du creux de la main droite contre cette cief,
elle se déplace, et le canon s'ouvre sar nne lon-
gueur de 5 ou 6 centimètres ; on dépose la cartouche
dans la cavité, on donne un léger coup à la def en
sens inverse, et le canon se ferme hermétiquement.
A l'extrémité du canon, au-dessus de la crosse, se
trouve on bouton en fer terminé par un anneau ; en
le tirant d'un mouvement du pouce, on comprime an
ressort en spirale auquel est atuchée une aiguille
d'acier. Quand on presse la détente, le ressort devient
libre, lance l'aiguille dans la matière fulminante dont
le bas de la cartouche est^arni, et produit Texpiosion.
Le premier fusil de Dreyse se chargeait par la bouche
du canon et Taiguille partait de l'intérieur de la culasse ;
c'est en 1836 que le chargement par la culasse fut
essayé. Après divers perfectionnements un modèle
fut adopté, en 1841, par l'armée prussienne.
G
GAITÉ (Théâtre de la). Ce théâtre fut démoli, sons
le second Empire, en 1864, pour le percement du bou-
levard du Prince-Engène. Une nouvelle scène fut
alors bâtie sur le square des Arts-et-MétIers. En 1869,
l'acteur Ballande tenta d'y donner, le dimanche, des
représentations de Jour, généralement oonsacréss à
des ouvrages classiques ; chaque pièce était précédée
d'une conférence qui exposait le sujet et en faisait
valoir les beautés.
GARDES FORESTIERS. Un décret du président de
la République, en date du 8 avril 1885, a donné nne
organisation militaire au corps forestier. A l'ordre de
mobilisation, les agents et préposés sont organisés,
par conservation des forêts, en compagnies ou sections
de chasseurs forestiers, les unes actives, les autres
GOR
— 1831 —
GRA
terrUariales. Ses règlements sont les m6moft que pour
les douaniers. (K. plus haut Douanes.)
GASCON (Dialecte), une d,es variétés de la langue
d'Oc, entre Bordeaux et Toulouse. L'agénois (V. ce mot)
en est le type prindpal. On peut juger du gascon par
les chansons imprimés : Pey de Garros, Poesia gnsco-
nas, Toulouse, 1667, ln-4*; G. Bedout, lou Parterre
gatcoun, Bordeaux, 164), in-4® ; Recueil des poètes
gasconSj Amsterdam, 1700» 2 fol. in-8*; Cénac-Mon-
caut, Littérature populaire de ta Gascogne^ Paris, 1868,
in-18. Ce dernier a aussi publié un dictionnaire gascon
du département du Gers, Paris, 1863, in-8o. V. Lu-
chaire, ies Idiomes pyrénéens, 1879, Paris.
GERHAIN-EN-LAYl!: (Château de Saint-). Le musée
gallo-romain de ce château, dont la formation fut
décrétée en 1802, a éié ouvert en 1867. La première
salle contient les objets trouvés dans les alluvions qua-
ternaires, c'est-à-dire à lasuite des grands déluges; ce
sont les silex grossièrement travaillés que l'on a trou-
vés môléaà des ossements d'animaux dont l'espèce est
éteinte {elephas primigenius^ rhinocéros & narines
cloisonnées, grand hippopotame, cerf d'Islande, ours
des cavernes, etc.) ; les brèches osslfères des cavernes
de la Dordo^ne, avec les débris du renne, de l'auroch,
du bouquetin ; les ossements ciselés, gravés, creusés,
façonnés aux usages domestiques ou hiératiques ; une
collection d'armes en silex donnée par le roi de Dane-
mark; les résultats des fouilles pratiquées dans les
sablières du bassin de U Seine ; les objets découverte
dans la Somme par Boucher de Perthes. — La deuxième
salle est consacrée aux monuments sépulcraux méga-
lithiques, aux dolmens et anx menhirs. Ici l'industrie
de l'homme se développe ; déjà il sait polir la pierre
et ébranler les masses rochensea; il taille le silex, et,
on l'ajusuht dans un bois de cerf fendu, s'en fait une
arme ; il fait sécher l'argile au soleil et invente l'art
du potier; il aiguise des os, et d'une arôte de poisson
su nbrique une aiguille. — Le grand tumulus-dolmen
de Gavrinis occupe à lui seul, quoique en réduction,
la troisième salle. — Dans la quatrième salle sont
réunion les inscriptions et les médailles gauloises.
Au Hf^cond étage, où l'on monte par l'escalier de
François l«',Be trouvent d'abord les objets appartenant
à l'époque lacustre, qui a vu la Un de l'âge de pierre
et le commencement de l'ère de bronxe. Ce sont des
haches de silex, des dards, des couteaux, des outils,
des instruments en os, en écaille, en arête, en bois
dur à moitié dégrossi ; des vases en terre ou en bronxe,
si hermétiquement clos, que des grains de céréales
et des glands s'y sont conservés Jusqu'à nous. — La
galerie voisine est consacrée à l'âge de bronze. La
pierre rède le pas au métal : les épées, les lances, les
haches creuses, à gaine, à oreillettes, à un ou deux
tranchants, les marteaux, les poignards ont succédé
aux armes de Jet et au casse-tète du sauvage. Avec
Tairain se présentent les ustensiles de la vie domes-
tique, les fragments de tissus, les engins de pêche et
de chasse, les menus objets de toilette féminine,
colliers, bracelets, épingles à cheveux, agrafes, etc.
— Une salle est consacrée à la Gaule de Brennus. On
ne se contente plus du bronie : on travaille aussi le
fer, l'or et l'argent. Il y a là encore des échantillons
de poteries : ce n'est que de la terre cuite, sans cou-
verte et sans émail.
GLACIÈRE. L'usage des glacières est de temps
immémorial dans plusieurs parties de l'Asie. Les Grecs
et les Romains l'empruntèrent aux Orientaux ; ils les
disposaient à peu près de la môme manière qu'on le
fait aujourd'hui. En France, on ne connaissait pas
encore les glacières, lorsqu'on 1553 le médecin natu-
raliste Pierre Bodon décrivit celles ou'il avait vues en
Turquie. Quelques années plus tard, on en établit à
Paris. Le mot glacière ne figurait pas encore dans les
ditionnaires en 1636.
GORMONT ET ISEMBART, chanson de geste du
xn« siècle, dont le chroniqueur du xiii« siècle, Phi-
lippe Mouskes. nous a conservé l'analyse, et dont un
fragment de 600 vers a été retrouvé de nos Jours et
publié par M. de ReiiTenberg dans son édition de la
Chronique rimée de Ph. Mouskes, Bruxelles, 1 883, in-4*.
Le sujet se rapporte à la bataille de Saucourt. Gor-
mont, chef normand, envahit le Ponthieu, accompa-
gné d'Isembart, seigneur de la Ferté, exilé pour ses
crimes, et qui compte sur les Normands pour recon-
quérir son domaine et so venger du roi Louis III,
son onde. Ici les Normands sont changés en Sarra-
sins. C'est l'épopée dont le Chant de Louis est la
cantilène.
GRAPHIQUES [nouveaux procédés d'arts). — Le
caractère distinctif de nos éditions françaises en cette
fin du XIX* siècle est certainement la multiplicité et
la variété des vignettes et des gravures oui s'y marient
au texte ; dans les œuvres sorties des pierres des im-
primeurs renommés, aux siècles précédents, on ne
trouve pas cette môme recherche ae l'ornementation,
ce même souci du pittoresque par la couleur; il
semble que les Aide et les Ëstienne avaient tout à
fait oublié que les habiles copistes de manuscrits se
plaisaient avant eux aux enluminures brillantes :
quelques lettres inliiales tirées en noir et rouge,
quelques filets et culs-de-lampe, rouges également,
sont les seules traces de fantaisie décorative que
l'on rencontre dans les belles éditions, correctes et
froides, des xvi*, xvu« et xviii* siècles. Tout au plus,
vers 1750, voit-on apparaître des tentatives en vue
d'égayer le livre : un éditeur nommé Caracloli publia»
à Paris, plusieurs volumes Imprimés en diverses cou-
leurs ; mais il s'en tint là et d'ailleurs, mourut dans
la ruine : le public ne s'engouait pas pour ces pro-
ductions d'un art Jadis si fort prisé.
U nous faut arriver Jusqu'en ces trente dernières
années pour voir l'impression illustrée et surtout
Vimpression en couleurs^ prendre un développement
extraordinaire. On la doit à la découverte de la pho'
tographie. Antérieurement, on ne connaissait, dans
ce genre, — sans parler des procédés de taille^douce
— que les impressions de Silbermann (1835) ; elles
étaient faites typographiquemeni, sur des planches
gravées, en nombre égal à celui des couleurs que
l'on voulait 'obtenir; Silbermann produisait surtout
ainsi de grandes pages d'album, des compositions
allégoriques, imprimées hors texte et des affiches.
Bientôt ces essais attirèrent l'attention des praticiens
et, toujours en typographie directe, c'est-à-dire on
osant des moyens t^rpographiques ordinaires : lettres
et ornements en matière, vignettes à « rentrures » don-
nant d'abord los fonds, puis esquissant les traits par
des tirages successifs. Plusieurs imprimeurs, parmi
lesquels Pion (de Paris) et Danel (de Lille), exécu-
tèrent ce que Ton appela les aquarelles typogra-
phiques : elles eurent un grand succès de curiosité,
à l'exposition universelle de 1867 : désormais, l'édition
ilustrée allait acquérir, en France, une grande impor-
tance. Cette importance, il faut l'imputer entièrement
anx commodités nouvelles que donnent les applications
multiples de la photooraphie : ce dernier procédé
supprime un intermédiaire, le graveur; 11 facilite
ainsi le travail, en doublant sa rapidité d'exécution;
en outre, il permet de diminuer ou de grandir, à
volonté, la composition originale ; on peut l'étendre
Jusqu'aux proportions considérables d'une grande
f>lai)che ornementale ou la réduire de façon à en faire
'en-tête d'un chapitre. La déconverte de la photo-
graphie est donc le véritable point de départ de la
révolution introduite dans les industries de livre.
C'est à un graveur nommé Gillot qu'il convient de
reporter tout l'honneur de cette application de la
photographie à la production des œuvres d'art;
M. Gillot s'avisa, au moyen de certaines manipula-
tions chimiques, de reporter sur xtnc les composi-
tions des dessinateurs en obtenant des pleins et des
creux à l'aide de morsures répétées d'acides, et il ob-
tenait ces reports à toile ou telle dimension voulue,
au tiers, au quart, au sixième; ces plaques de xinc
ayant un relief très faible, mais suffisant, étaient alors
intercalées dans le texte des volumes, puis placées sur
la machine typographique ordinaire, et le tirage se
faisait comme il a lieu pour les bois gravés en relief.
Telle est, en termes très généraux, et dans ses
très grandes lignes, l'invention de M. Gillot. On la
connut d'abord sous le nom de paniconographie, puis
sous celui de gillottage (qui s'applique peut-être
plus exactement à un antre procédé dérivatif) ; enfin,
on place les différents moyens de reproduction artis-
tique ayant ce caractère de rapidité et de fidélité
tout à la fois sous le terme générique de zincographie.
Cette zincographie a donc, en supplantant la gra-
vure sur bois, rénové l'imprimerie moderne. On s'i-
magine aisément comment elle a décuplé le nombre
des « illustrations en noir» ; — elle a eu aussi la plus
grande influence sur les impressions en couleurs;
les tt Annales typographiques >», que Pion tirait vers
GUD
— 1832 —
HYA
1865f ne sont deYenues vniment dignes de ce nom
qu*à dater da Jonr où elles ont été faites avec des
clichés zincografihiqu^s.
Cette innovation remonte à !*année 1875 enTÏron ;
le fils da graveur Giliot sut perfectionner la branche
noQTelle d'industrie graphique créée par son père et,
h son tonr, il créa la chromotypographie (V. Supplé-
ment); autrement dit la reproduction directe, typo-
graphiqne^ avec couleurs exactes, des aquarelles.
L opération se fait ainsi : L'artiste remet Ron
œuvre, tout achevée, au chromotypographe ; celui-ci
la décompose, autrement dit reconnaît que pour tant
de couleurs employées, tant de « plaques de zinc »
sont nécessaires (cinq ou six en général) ; puis les
zincs sont confiés à Timprimeur qui les tire sans plus
de peine que s*il s*agissait de tous antres clichés; il
faut que chaque couleur tombe bien à sa place et
s'encastre bien dans les traits. Depuis quelque temps
môme, on exécute des impressions simultanées en
deux couleurs: le constructeur mécanicien Âlauzet
(de Paris) a Ait, dans ce but, d'excellentes machines
qui portent ce nom.
A Paris, les premiers essais de ehromotypographie
proprement dite ont été tentés chez Timprimeur
A. Lahure qui, avec Giliot, a atuché son nom à cet
art nouveau; A. Lahure a produit le merveilleux
Yolume le Conte de C Archer^ qui obtint le prix
unique du Livre & l'exposition des Arts décoratifs
de 1818; puis il fonda un Journal mensuel, le Paris
illustré^ et bientôt, étendant à sa clientèle commer-
ciale ces procédés tout d'abord réservés à des éditions
artistiques, il put tirer en grand nombre des cartes
de fféographie, des prospectus de nouveautés ; de son
côté, Giliot exécuta TalDum des Quatre fils Aymon^
et après eux, MM. Onsinger, Jules Crété, A. Quantin
(avec son Gulliver illustré) entrèrent dans cette voie
habilement tracée : en ce moment la ehromotypogra-
phie tend à remplacer la chromolithographie, son
aînée, dont Vinvention date de Tapparition même de
la lithographie; Senelfelder^ dès ses débuts, imprimait
sur pierre aussi bien en couleur qu'en noir; les
éditeurs parisiens demandent tous à la chromotypogra-
phie l'heureux appoint de ses innombrables ressources
pour les albums d'instruction enfantine, entre autres,
pour les alphabets, les petits livres de classes ; cette
Invention est précieuse, et les maisons d'édition sco-
laire, les éditeurs Delagrave et Hachette, possèdent,
dans ce genre, des collections très complètes, d'un
godt parfait, car c'est le propre de cette ehromotypo-
graphie, si justement appréciée auiourd'hui, de s'é-
carter également de la fade et piate lithographie,
et de la brutale enluminure d'Epi nsA. Il faut bien le
reconnaître, les albums anglais eurent une grande
influence sur les travaux qui s'accomplissaient en
France dans cet ordre dHdées. Et actuellement, l'im-
pression en couleurs est une industrie prospère parmi
nous. Chaque année voit naître un systèmo nouveau,
qui se décore d'une appellation nouvelle. Tous ne sont
que des modifications plus ou moins heureuses d'une
tndtutne qui a pour base la photographie et une
savante combinaison de produits chimiques.
P. B.
• GODRUN, poème allemand de la fin du xii*> siècle,
l'épopée la plus complète de la littérature germanique
après les Niebeiunqenf une sorte d'Odyssée à côté
d une autre Iliade. En voici le sujet : Hagen, fils d'un
roi d'Irlande, enlevé par un griffon, a été sauvé mira-
culeusement et nourri par trois filles d'autres rois oui
ont eu le même sort. De retour dans sa patrie et de-
venu roi, il épouse une de ses compagnes, Hilde, dont
ii a une fille qui porte le même nom. Hagen fait tuer
plusieurs seigneurs prétendant à la main de cette
enfant, mais périt dans cette lutte, et Hettel, roi de
Hegelingen, épouse la jeune Hilde. De cette union natt
l'hérofne du poème, Gudrun. C'est une suite de com-
bats livrés à Hettei par les rois Siegfrid, du pays des
Maures, Hartmut, de Normandie, Herwig, de Seeland ;
et après sa mort ses soldats continuent la lutte. Gu-
drun prend pour protecteur l'un des rivaux, Herwig,
dont elle devient enfin la femme. Les diverses scènes
se passent en Allemagne, en Frise, en Danemark, en
Normandie, en Irlande, etc.
Le poème de Gudt^n l'emporte sur les Niehelun-
gen par ia richesse des pensées, l'éciat jdes images,
l'originalité des caractères et des situations, la déli-
catesse d'expression, qui semble trahir un remanie-
ment postérieur. 11 semble être lo travail d'un seul
auteur, et non un assemblage de vieux chants. 11 a
été publié pour la première fois dans le Heldenbuch
(livre des héros), par Hagen, Berlin, I8?8, puis à part
dans les Classiques allemands du moyen d^e, par
Bartsch, Leipzig, 1865, 2 vol.
GUI DE WAKWYKE, roman d'aventures, supposé
du xiii* siècle. Un jeune varlet anglais, Gui, est épris
de la filie de son seigneur. Pour la mériter, il se dis-
tingue dans des tournois et va rendre dea services
à Tompereur d'Allemagne, au roi du Constantinople
contre le Soudan de Babylone, etc. Ce poème, quoi-
que peu intéressant, a été trèa répandu en Angleterre.
Le manuscrit, contenant 11,230 vers, est i la Bi-
bliothèque nationale de Paris. (K. Histoire littéraire
de la France, t. XXII.)
GUIDE-ACCOBD on SONOTYPE. appareil inventé
vers 1853, par Dclsarte, pour faciliter l'accord des
instruments à cordes à clavier. Il simplifie le travail
de l'accordeur, et permet même de ne pas recourir
à lui.
H
HARMONIFLUTE, sorte d'accordéon perfectionné
par Busson. Outre qu'il est d'un maniement plus fa-
cile que l'accordéon ordinaire, les sons qu*il donne se
rapprochent beaucoup de ceux de la flftte. On peut
y adapter un clavier chromatique analogue à celai des
orgues et des pianos.
HILDEBRAND ETHADEBRAND, fragment d'épopée
tudesque retrouvé en 1812 dans la courertare duo
manuscrit de Fulde et que les paléographes ont Jugé
écrit au viii* ou an n* siècle. C'est an des textes les
plus anciens de la langue allemande. Ce fragment
appartient au cycle des Niebelungen; il décrit le com-
bat d'an père et d'un fils qui se rencontrent sans se
reconnaître : thème souvent traité par la poésie (com-
bat de Rusten et de Sohrab dans le Livre des Rois de
Firdonsi; combat de D'Ailly avec aon flls dans la
Hehriadé). Hildebrand, vieux compagnon da roi Tbéo-
doric le Grand, revient d'Italie après de longues
guerres et rencontre son fils Hadebrand qull avait
quitté tout enfant. Les deux guerriers s'interpellent
et se. provoquent : Hildebrand demande à Hadebrand
quel est son père, et sur sa réponse qn'il se nomme
Hildebrand, celui-ci lui offre la paix et des présents :
Hadebrand, qui craint une trahison, refuse et le force
à combattre. Le dénouement manque. On croit que
le poème, inspiré par les événements du v* siècle, a
été composé au viii*. Voir la traduction complète
dans Léon Gautier, V Epopée française ^ lr« éd., t. I.
HOCHE-PLIS, nom qu'on donnait, au xvi* siècle,
aux cerceaux de fer, de bois ou de baleine, qui aoate-
naieut les robes des femmes. C'est ce qu*on appela
plus tard paniers et vertugadins.
HOQUET, en latin du moyen &ge Hochetus ou Hoce-
sut, terme de l'ancienne muaique, désignant une
certaine manière d'attaquer les notes isolément, en
les séparant de celles qui les précèdent et de celles
qui les suivent par des pauses ou des soupirs, ou
bien d'entrecouper et interrompre les notes par des
silences. On avait ainsi un chant brisé (truncatus) et
non lié (eopulattui),
HOTE, nom qui sert à désicner dans les fermes de
la Haute-Bretagne la portion du bâtiment où habitent
les gens. L'hôté n'a ordinairement qu'une fenêtre;
on rappelle aussi la maison de demeuranee; on y
accède par une porte qui est généralement percée
tout près du mur de refend qui sépare rhabltatloo
des gens, de l'étable, de l'écurie ou du cellier.
nUSSIAUX, petites portes glissant sur des rainu-
res qui servent à fermer ce qu'on appelle en Bretagne
les lits-clos. (Y. ce mot. Supplément). Les hus^iaux
ont dans leur partie supérieure un quart de cercle
à jour, orné de barreaux tournés, rayonnant autour
d'un ornement rond. Lorsque le lit n'a qu'une porte
unique, le haut de Vhussé est ajouré au demi-cercle;
du bas partent des barreaux tournés.
HYALOGRAPHIB, art de graver sur verre. Les an-
ciens, comme les modernes, exécutaient des dessins
sur le verre au moyen du sable et de l'émeri appli-
qués sur une petite roue qui, en tournant, traçait des
lignes creuses d'uno légère profondeur. On croit qa'ils
INT
— 1833 —
JAP
te servaient qaelquerois du diamant. Vers 1670,
Henri Schwanhard, de Nuremberg, grava sur verre
des dessins en creux et en relief au moyen d*un cor-
rosif dont on ignore la nature. En 1725, Mathieu
Pauli. de Dresde, attaqua le verre avec un mélange
d'acide nitrique et d'émeraude verte de Boh6me ou
fluate de chaux. En 1790, l'acide fluorhydrique, ré-
cemment découvert par Scheele, fut employé à Leip-
zig par Kliiidworth et à Strasbourg par Renard pour
exécuter les échelles des thermomètres; en 18 lO, le
peintre LendoUe en fit usage pour graver des glaces,
undis que Gay-Lussac et Thénard perfeciionnalent le
procédé. On ne grave guère le verre aujourd'hui que
par Tacide fluorhydrique.
I
INSCRIPTIONS SÉMITIQUES [Corpus des). L'im-
mense développement de l'épigrapie sémiiique dans
les trente dernières années a rendu possible et néces-
saire la formation d'un Corpus semiticorum inscnp-
tionurn^ analogue au Corpus latin de l'Académie de
Berlin et au Corpus grec de Bœckh. L'Académie des
inscriptions et belles- lettres a pris l'initiative de ce
monument scientifique le 35 Janvier 18(i7. Ce recueil
doit contenir tous les textes anciens en langues sémi-
tiques (ce qui exclut les inscriptions cunéiformes des-
tinées à former un jour un recueil spécial). La limite
où l'on s'arrête est en général l'apparition de Tlsla-
mlsme qui marque dans l'histoire des langues et des
écritures sémitiques une époque tout à fait tranchée;
on admet néanmoins quelques monuments postérieurs,
ceux de l'épigraphie mendaîte par exemple, qui vien-
nent tous après Thégire, mais ne sauraient pourtant
être mis dans un tableau de la paléographie sémiti-
que; de même les monuments arabes des premiers
temps de l'hégire qui sont d'une iniportance capitale
pour la paléographie comparée du Hauran, du Sloa!
et de l'Iraq.
Les inscriptions sont divisées en quatre classes
d'après la langue : !<> phénicien^ comprenant toutes
les inscriptions phéniciennes de toutes les époques
puniques, néopuniques; — 2» hébreu, comprenant
toutes les inscriptions en caractère carré jusque vers
le v« ou le vi« siècle de notre ère; — 3° araméen,
comprenant tous les restes d'ancienne écriture sémi-
tique trouvés en Assyrie, Inscriptions palmyréniennes,
nabatéennes, hauraniennes, sinaîtlques, araméennes
d'Egypte, estranghils; — 4» arahfy renfermant les
ioscriptions de Safa et celles du même genre qui se
trouvent ailleurs, les inscriptions himyarites et éthio-
piennes, et les plus anciens spécimens de neskhi.
On admet dans le corpus , outre les inscriptions pro-
prement dites» les gemmes, sceaux, papyrus, toutes
les pièces enfin dont la nature est d'être uniques et
n'avoir point de double.
Après quatorze années de travail préparatoire a
paru en 18K1 le premier fascicule du Corpus, com-
prenant les inscriptions phéniciennes trouvées en
Phénicie et dans l'Ile de Chypre. Pour chaque ins-
cription Ton donne un fac-similé héliographique,
une reproduction gravée de l'inscription, une trans-
cription en caractères hébraïques, une bibliographie
complète des travaux auxquels chaque inscription a
donné lieu, enfin une traduction et un commentaire
en latin.
INTERMÉDIAIRES, en terme d'économie politique,
agents qui se placent entre les producteurs et les
consommateurs. Ce sont les commerçants, et leurs
services sont Indispensables : sans eux, on serait
exposé à être trompé sur les qualités, à prendre des
marchandises qui ne conviendraient pas tout k fait;
il faudrait faire des provisions, avoir des locaux pour
les contenir, et il y aurait chance de pertes par ava-
ries. Le bénéfice qu'on paye au commerçant est un
léger salaire dû à son expérience, à ses soins, et la
compensation des risques qu'il court.
INTERNATIONALE (Société), association dont les ba-
ses furent jetées àl'Exposion internationale de Londres
en 1862 par les délégués des corps d'états français, qui
avait pour principe l'annulation dns nationalités, et
pour but l'union des travailleurs de tous pays contre
le capital qui les exploite, la défense des salaires, les
intérêts divers des corporations. Un nombre plus ou
moins considérable d'associés, groupés ensemble
parce qu'ils appartenaient à un même corps de mé-
tier, ou parce qu'ils habitaient la même ville ou le
mémo quartier, formait section. Certaines sections
ou groupes élémentaires, par suite de circonstances
parliculières, restaient isolés; mais, d'ordinaire, les
sections d'une même région formaient une féd^fration.
Toutes les fédérations d'un même pays constituaient
une branche. L'ensemble de toutes les sections, de
toutes les fédérations, de toutes les branches, formait
ï Association internationale des iravuHiews. Les
membres de chaque section choisissaient parmi eux
des délégués qui les représentaient, les uns au Con-
seil fédéral, les autres au Con^r^5 annuel. Le Congrès,
à son tour, élisait les membres du Conseil général,
qui gouvernait l'associai ion entière. — Les meneurs
qui étaient parvenus à composer une section ou une
fédération étaient k peu près certains d'en rester les
délégués; officiellement, leur autorité venait d'elle;
en réalité, c'est elle qui n'avait d'existence que par
eux. Les associés étaient conduits par un petit nom*
bre de chefs qui disposaient de la caisse où étaient
versées les cotisations, qui suscitaient ou soutenaient
les grèves d'ouvriers; ils pouvaient être poussés au
combat dans un but et pour des intérêts qu ils igno-
raient. L'Internationale devint rapidement une des
forces constituées les plus redoutables de la société
européenne : elle joua un grand rêle dans la Com-
mune de 1871; les deux tiers des membres étaient
affiliés. Une loi, votée le 14 mars 1872, a supprimé
la société et édicté un emprisonnement de trois mois
k deux ans, et une amende do 5U à 1,000 fr. contre
toute personne s'affiliant à la société.
INTERPELLATION. Le droit d'interpellation, que
la Constitution de 1852 refusait au Corps législatif et
au Sénat, leur fut donné par décret du 19 janvier 18()7.
Toute demande d'interpellation devait être signée par
cinq membres au moins; cette demande, indiquant
sommairement l'objet des interpellations, était remise
au président, qui la comumniquait au ministre d'État
et la renvoyait k l'examen des bureaux. Deux bureaux
au Sénat et quatre au Corps législatif devaient auto-
riser l'interpellation, pour qu'elle pût avoir lieu.
JACQUELINES, pots de grès en usage dans les
Pays-Bas, et dans le nord de la France. Le nom en
serait emprunté, dit-on, k Jacqueline, comtesse de
Hollande, dans les preiuières années du xv* siècle,
parce qu'au milieu de ses parties de chasse elle se
faisait porter k boira dans dos pots de grès, qu'on
abandonnait ensuite.
JAPONAIS (Art). Il serait imprudent, dans l'état
actuel de nos connaissances sur l'histoire des civili-
sations dans TExtrême-Orient, d'tjssayer un histo-
rique un peu précis de l'art japonais. Nous devons
nous en tenir k dos jugements sur l'esiliéiique qui
le caractérise jusqu'au moment où nous saurons plus
clairement quelles sont sos origines autochtones,
quelles Influences étrangères il a subies, ce qu'il a
^ardé et ce qu'il a éliminé. Ce pays rendu si original
par le charme de ses paysages, le brillant passé de
son aristocratie, la politesse de sos habitants, l'ingé-
niosité et l'éducation technique de ses artistes et de
ses artisans ; cette lie qui avait su résisti r jusqu'à
ces dernières années au contact absorbant de la civi-
lisation occidentale, qui opéra sur place et avec ses
ports fermés rigoureusement l'évolution inhérente
aux socléics comme aux individus de l'état primitif à
l'état policé ; cette race qui a eu, dès le via* siècle,
des poètes exquis, des héros batailleurs, des hommes
d'État sortis du rang du peuple et accaparant le
pouvoir, des sculpteurs, des bronzlers, des laqueurs,
des céramistes, des forgeurs d'armes incomparables,
n'ont conquis en France que quelques amateurs et
quelques critiques. Les académies, les musées natio-
naux, les lettrés, les savants, sont demeurés sur
la réserve, et n'ont coopéré ni k des travaux histori-
ques, ni k des collections triées, ni à des traductions.
Sur tous ces points, nous sommes en ce moment
dépassés par l'Angleterre. Les rayons pourpres de co
a soleil levant », l'emblème glorieux peint sur le dra-
116
JAP
— 1834 —
JAP
peau national, n'ont pas encore fondu notre glace
académique.
C'est dans les Transactions de la Société asiatique
du Japon (laquelle ai*a fait Thonneur de me compter
parmi ses membres), c'est dans le Guide au Japon de
M. Ernest Satow, dans V Histoire de la peinture de
M. Anderson, dans les traductions de M. t'r. V. Dic-
kins, dans diverses relations de touristes que rou
rencontre le plus de documents.
Mais il ne faut point être injuste envers notre pavs.
M. le professeur L. de Rosny a déjà donné des
preuves d une érudition trop peu productive, mais
sûre. M. Louis Gonse a publié sous ce titre: VArt
japonais j un livre fort bien appuyé que commentent
des gravures nombreuses et des photogravures d'après
des objets choisis. A ses lectures, à, ses vues person-
nelles, M. Louis Gonse, qui a réuni une colleciion
considérable, a pu joindre des renseignements inédits,
fournis par des experts japonais, des lectures de
noms et de dates qui autorisent les classifications par
écoles et par succession.
On n'a point encore percé l'obscurité dont s'enve-
loppent les origines du peuple japonais. Ses annales
rapportent, après une succession fabuleuse de dieux
et de demi-dieux, l'arrivée et l'établissement dans la
province montagneuse de Yamato, d'un conquérant
nommé Zin-Mou. Que ce fait se soit passé cinq ou
six cents ans avant l'ère des chrétiens, cette date n'a
d'importance que pour établir que la nationalité japo-
naise ne se reconnaît point pour très antique, com-
parée à la famille chinoise, par exemple. Ce qui,
dans l'espèce, nous importerait, serait d'avoir quelques
vestiges de ses arts. Nous ne connaissons que des
armes en pierre polie, des colliers en pierres dures,
analogues aux spécimens de* autres peuples. Nous
savons que Zin-Muu et ses compagnons — il n'est point
impossible qu'ils provinscnt de TOcéanie — refoulèrent
vers le nord une race occupant déj^ les côtes des
Ainos, mais non sans s'èire alliés aux flUes de leurs
chefs, ces Ainos que nous rencontrons encore dans les
lies du nord du Nippon. Leurs femmes se tatuuent.
La pèche les absorbe. Leur habillement, leurs armes
sont ornées de dessins géométriques, ainsi qu'on les
rencontre à l'aube de toutes les civilisations et au-
jourd'hui encore chez les attardés. 11 est difficile, au
moins d'après ce qu'on peut voir, notamment au musée
ethnographique du Trocad^^ro, de conclure à ce qu'ils
auraient pu imposer aux Japonais conquérants en
fait d'art.
On a retrouvé des vases en terre dans des tom-
beaux de très anciens princes du Japon. Ce sont, en
général, des tasses à ouverture évasée. Dans un
fourneau — le fait a peut-ètru une importance que
l'avenir établira — on retrouve une ressemblance
étroite avec des objets similaires mexicains.
Le fait acquis, puisqu'il est donné par tous les his-
toriens japonais, c'est l'influence de la Corée, pays
mal connu par les Européens, mais qui semble avoir
perdu ju!>qu'aux derniers reflets d'une civilisation
artistique très rafinée. Los poteries coréennes sont
incontestables. Non pas qu'on les rencontre en
Corée, mais chez les amateurs japonais, les tcha-jins,
ces R compagnons du thé », qui par leur recherche
de l'idéal, leur stricte obéissance aux règles, leur
sentiment profond du patriotisme, ont été les gardiens
de la flamme subtile qui, au vu* siècle, s'était allumée
au grand foyer chinois.
On ne peut mettre en doute que la Corée ait
fourni au Japon des maîtres potiers et des fondeurs
de bronze. Mais cette poterie était rudimentaire,
quoique singulièrement pittoresque et variée. La
Chine apporta la porcelaine, matière tout autrement
délicate, en môme temps que la peinture, la littéra-
ure, le calendrier, le vêtement, les classifications
politiques, etc. Tout cela s'adapte aussi exacte-
ment que chez nous, à la fin du moyen âge, l'in-
fluence de la mode italienne. Là-bas^ comme ici, le
peuple fut indemne de l'engouement des hautes
classes, et là encore comme ici une réaction s'est
marquée contre l'enseignement académique en faveur
d'un retour au génie national. Mais l'ett'et des pre-
miers rapports avec la Chine avait été foudroyant.
Si nous ouvrons le Genji Monogatari , délicieux roman
de mœurs, écrit au x' siècle par une dame de la
cour du mikado, Murasaki Sikibou, nous rencontrons
à maintes pages les traces, chez les hautes classes.
de cette influence. Tout un chapitre roule sur une
discussion à propos du style de peintres chinois, et
l'on déroule, à l'appui, des kakémonos précieux. La
soie vint de l'Empire du milieu, et ayec elle l'art d*)
la broder, et avec cet art, pratiqué par les hommes
et non par les femmes, ces robes somptueuses que
portaient les bonzes dans les cérémonies et les
kugliés (les nobles) dans les réceptions, et ces fou-
kusas, qui servaient d'enveloppe aux cadeaux échan-
gés de maison à maison, et sur lesquels on rencontre,
brodés en or et en soies diverses, de véritables ta-
bleaux de maîtres.
Puisque nous nous bornons à des indications géné-
rales, notons l'impression profonde qu'avait produite
la prédication bouddhique, apportée de la Corée dès le
VIlo siècle par l'apôtre Dharma, un des successeurs
de Çakia-Muni dans la propagation de la Bonne-Loi.
Le bouddhisme introduisit le style indien, le mobilier
ecclésiastique dans la forme des temples, dans les
statues de Çakia et des saints, dans les fleures orne-
mentales, gardiens du ciel, déesses de Fô, etc. Ces
formes ont subsisté jusqu'à nos jours, à peu près
inaltérées.
Dans une série de conférences, faites en 1884, dans
les salles de V Union centrale des Arts décoratifs^
nous avons signalé avec quelque insistance des traces
visibles de i'ormentation persane sur des objets en
céramique ou en métal. Nous avons, depuis, recueilli
dans les récits de voyages anciens, des citations qui
appuient les motifs qui nous avaient été suggérés
par l'étude de certaines formes et certains décors.
Le Japon ancien, pour avoir fermé et barricadé sa
porte devant les jésuites, dont la prédication avait
menacé la constitution même du pays, bien plus que ses
dogmes religieux, n'a point été clos aussi rigoureose-
meni pour ses voisins de l'Extrôme-Orient. iJu xii*
au XVI* siècle, le peuple s'est tiré assez de sang, dans les
guerres féodales incessantes et cruelles, entre maisons
rivales, pour ne point épronver le besoin d'essaimer.
H n'était point navigateur, mais pécheur sur les côtes,
bûcheron sur les pentes et cultivateur dans les plaines.
Il ne bravait pas la mer souvent irritée qui bat ses ri-
vages, mais il ne repoussait point les navires baut-
pontés des Chinois, qui lui apportaient des émaux, des
porcelaines, des ivoires sculptés, des peintures, des
gravures sur bois que l'on imitait de son mieux
d'abord et que l'on surpassa ensuite en verve, en
souplesse, en couleur, il y eut donc aussi, cela est
établi par des textes et par des monuments, des com-
munications directes soit avec des ambassadeurs
persans, Hoit avec des produits de la Perse. L'art d'in-
cruster le fer de dessins d'or et d'argent y acquit
ou tout au moins y puisa des éléments de gricc
habile et de solidité souple.
Tout ce que nous venons d'exposer n'est fait en
rien pour diminuer l'Art japonais, ni dans sa qualité
personnelle ni dans ses déductions pratiques. De
même que l'art français où une analyse chimico-cri-
tique constate des traces d'art romain, d'art iu-
lien, etc., il est lui-même dans le résultat, et n'a fait
servir ces éléments étrangers qu'à l'épanouissement
de son idéal intime. On peut se rendre compte par
ce qu'ont recueilli des chefs-d'œuvre de ses maî-
tres quelques cabinets parisiens, ce qu'il offre d'at-
trayant, de logique et de suggestif. On peut cons-
tater combien il est fâcheux que l'Etat soit demeuré
indifl'érent dans cette enquête et n'ait point ouvert à
ces manifestations rares et précieuses à divers titres
les vitrines de nos musées. Sèvres même, intéressé si
directement dans le rajeunissement incessant de nos
produits nationaux supérieurs, n'aurait rien en céra-
mique ancienne du Japon sans le don d'un amateur
parisien, M. Vial.
La grosse objection contre les arts de l'Extrême-
Orient, c'est qu'ils ofi'rent un rendu de la personne
humaine tout différent de celui que la Grèce a fixé
avec nue précision et une beauté qui feront l'étemelle
admiration des siècles. Le fait n'est pas niable sur
le domaine de l'enseignement. 11 est certain que
l'étude du modèle humain et surtout du canon ré-
glé par quelques œuvres du siècle de Périciës est
une étude d'après ce que la nature ou Tart offrent de
plus harmonique, et que les sens de l'élève doivent
s'imprégner du sentiment des rapports exacts et des
lois de l'équilibre. En développant le sentiment du
jugement, les races occidentales obéissent à ce qui
JAP
— 1838 —
JAP
établit également lenr supériorité dans l'ordre dos
sciences. Tous les maîtres s'y sont plies, de Michel-
Ange à Rembrandt, de Yelasquez à Eugène Delacroix,
mais en m6nie temps ils ne méprisaient point, ils
o'écariaient point, de parti pris, ces autres éléments
constitutifs de la peinture et de la sculpture, la cou-
leur et le mouvement, Tobservation du sentiment et
de la nature.
Les Orientaux raffinent moins. Quand on connaîtra
mieux, d'ailleurs, la peinture des maîtres chinois ei
des maîtres Japonais, — le British Muséum en possède
un historique complet dans la collection acquise de
M. Andersen et Paris an a applaudi quelques échan-
tillons, en 1883, à une exposition, rue do Sèze, — on
sera pris de plus de respect pour des écoles qui ont
vu la nature, TéterncUe et changeante beauté, sous
un angle autre, mais non moins noble que les nôtres.
Ce n'est point dans la forme nue qu'ils se sont can-
tonnés. Ils ne l'observaient que sur les gens de
classes inférieures. Les seigneurs, les lettrés, les
prêtres dépositaires du pouvoir sur le corps, sur
l'esprit ou sur l'imagination, ne se révèlent que vêtus
de costumes, drapés de plis qui répondent à la richesse
des palais, au recueillement complet, à la pompe reli-
gieuse. Ils ont fait de cette manifesuiion extérieure
un usage aussi sensé qu'adroit. Rien de plus imposant
dans son g^ste de doux prédicateur, que la statue co-
lossale du Bouddha-Cakia-Muni, l'honneur de l'incom-
parable collection de bronzes de M. Henri Cernuschi;
et rien de plus vivant que ces amusants petits ivoires
sculptés que l'on appelle des netjukés.
Les écoles ont suivi, sur place, les mômes phases
que dans nos pays et elles ont suivi les mêmes évo-
lutions que la société. A ne prendre que les laques
qui sont, par parenthèse, le produit le plus riche, le
plus délicat et le plus solide de la main humaine
dans aucun pays, on les voit simples par les mo-
tifs et résistantes, du xi° au xvi« siècle; plus
somptueuses quand la cour des shogouns, s'oppo-
sant & U cour séculaire des mikados, veut rallier
l'opinion populaire par son faste; plus fines et plus
gentilles au xviii^ siècle, comme si le souffle du
Tococo français avait passé par-dessus les mers.
L'école des laqueurs va en se maniérant Jusqu'aux
premières années de ce siècle, et dans la seconde
moitié perd à peu près tout son caractère de race.
Nous avons écarté les noms d'artistes et les classi-
fications d'écoles. On ne pourrait qu'entrer dans des
subdivisions peu compréhensibles pour le lecteur qui
ne peut vérifier ni par des originaux, ni par des
fac-similés. Mais il est un nom qui aujourd'hui
s'imprime souvent, celui de Hokusai, un maître dessi-
nateur qui naquit dans le second tiers du xviii« siè-
clo et qui mourut plus qu'octogénaire en 1849. Il a
accompli un œuvre considérable, illustrant de gra-
vures les historiens chinois, les romanciers, les poètes
japonais, composant des sujets pour les recueils que
les tcha-Jins à la fin de Tannée font de leurs propres
poésies, fournissant aux diverses industries des mo-
dèles d'une fertilité prodigieuse, composant des ency-
clopédies où tous les corps de métiers sont en action,
reproduisant en couleurs les cent aspects de la
montagne Fouzi, aux courbes harmonieuses, aux
sommets neigeux, notant les modes, croquant d'un
pinceau agile les ridicules, et imprégnant de la poésie
la plus émouvante les choses et les êtres. Certes, ils
n'est point tout l'art du dessin Japonnais, comme on
l'a décrit faute d'études, mais il marque dans l'art
Japonais une évolution radicale, et il peut prendre
place aux côtés d'un de nos maîtres les plus intensifs,
aux côtés de Rembrandt. Il n'eut rien de classique,
quoique visiblement respectueux des maîtres anciens.
Son nom est aujourd'hui, parmi les collectionneurs
corrects, la pierre de scandale. Mais pour les critiques
détachés, il est un des observateurs de la nature les
plus instructifs et les plus sincères. Le recueil de
ses œuvres, le Mangwa en dix cahiers publiés en
des espaces de temps capricieux, a été gravé sur des
beis qui ont survécu jusqu'à ce temps^ et fournissent
des tirages usés mais qui parlent encore assez élo-
quemmcnt pour que nos jeunes artistes se les dis-
putent et les consultent avec fruit.
C'est moins l'école du dessin que l'école du croquis,
mais on sait que le croquis, qui chez nous est un
essai, chez les Japonais est un résultat. Un artiste doit
avoir son sujet peint k l'avance sur le voile de son cer-
veau : il saisit son pinceau, qu'il tient à pleine main
la pointe en bas^ le trempe dans l'encre de Chine, et
ëcrii sa pensée sur le papier ou sur la gaze fine
comme nous le faisons avec notre plume. Il ne doit
point revenir pour reprendre son trait, que l'admi-
rable instrument qu'il conduit a fait, au gré de son
imagination et de son souvenir, ou fin comme un
cheveu d'enfant, ou large et gras comme un coup
de la brosso d'un décorateur. Tracé sur une feuille
de papier, au ton riche et soyeux de matière, le
dessin, parfois aquarelle, est tendu entre des étoffes
anciennes, aux mélanges assouplis ; deux rouleaux
do bois le maintiennent tendu quand on l'accroche
au mur : c'est le kakémono^ dont le prix peut monter
aussi haut chez nous que celui de nos peintres, selon
la signature, l'ancienneté, la rareté, le style en vogue.
Si le dessin est destiné à être gravé, il est tracé sur
un papier extrêmement mince qui se colle sur un
bloc de cerisier, moins compact que notre buis, et
il est entaillé au canif, comme on fait pour nos n ca-
nards ». Les graveurs sur bois sont en général d'une
habileté et d'une conscience qui réservent aux inten-
tions du maître toute leur autorité dans le trait, la
couleur, les valeurs.
Le Japon a eu aussi des gravures imprimées en
couleur, avec de la gouache, qui dépassent en limpi-
dité et en accent colorant, en dégradés comme en
tons rompus tout ce quo notre chromolithographie a
réalisé de plus parfait.
En résumé Tart Japonais n'est point un art tran-
quille. Il est vraiment vif, remuant comme le sont
les arbres, les fleurs, les oiseaux. Une vibration en
fait partie, comme l'est celle de la lumière. Il pro-
cède d'une observation constante de la nature dans
tout ce qui relève de l'ornementation ou des sujets
familiers. Il a tiré, dans les temps anciens, un parti
très décoratif des combinaisons géométriques, mais
en les dissimulant, comme les Arabes ou les Persans,
sous le charme des tons assoriiâ pour se faire valoir.
Il élimine tout ce qui ne concourt pas à l'expression
nette, tout ce qui fatiguerait inutilement le regard :
par exemple, dans une vue panoramique, — les paysa-
ges sont presque toujours vus de haut, les plans s'éta-
géant, — dès qu'un morceau est insignifiant, le
paysagiste le dérobe derrière une vapeur trans-
versale.
L'Art japonais se révèle par une extrême délica-
tesse dans les profils. Il est surtout appréciable ou
vainqueur dans les petits objets : les gardes de sabre
en divers métaux, les étofl€s brodées, les laques, les
porcelaines, les terres de setsuma, les ivoires sculptés...
Maxime miranda in minimis,,, V. Ambassade mé-
morable de ta Compagnie des Indes- Orientales des
Pf'ovinces-Uniei vers les Empereurs du Japon^ con-
tenant plusieurs choses remarquables arrivées pen-
dant le voyage des Ambassadeurs, et de plus la
description des villes, bourgs, châteaux, fortereses,
temples et autres bâtiments ; des animaux, plantes,
montagnes, rivières, fontaines; des mœurs, coutumes
et habillements des Japonais; comme aussi leurs ex-
ploits de guerre et les révolutions tant anciennes que
modernes que ces peuples ont essuyées. Le tout en-
richi de figures dessinées sur les lieux et tirées des
Mémoires des Ambassadeura de la Compagnie. Amster-
dam. 1680. L'ouvrage du père Charlevoix, Histoire et
descnplion générale du Japon,,, Paris 17;i6, est en-
tièrement à négliger; il ne renferme que des docu-
ments de seconde main. — Kaempfer,ff»totV« naturelle
civile et ecclésiastique de l'empire du Japon^ com-
posée en allemand par Ëngelbert Kaempfer, et tra-
duite en français sur la version anglaise de J.-G.
Scheuchzer, La Haye, 1729; 2 vol. in-folio. Ouvrage
aussi intéressant à lire qu'utile à consulter. On y voit
vivre tout ce qu'un Européen intelligent et sérieux
pouvait recueillir sur cette société et sa nature. ^ His-
toire de la Religion chrétienne au Japon ^ par M. Léon
Pages, 1869, 2 vol. in-8o. On y trouve la bibliographie
de loute-i les relations des missionnaires avant et
pendant les événements qui les firent expulser à la
fin du xvi« siècle. — Taies of Old Japon j by A. B.
Mittford. London 1871. 2 vol. in-s*. — Kwen-KO'Dxu'
Selsu. Notve historique et descriptive sur les Arts et
les Industries du Japon, par M. Minagawe Noritané
Tokio, 1876-1818. La partie relative à l'art céramique
et de la parure a été traduite en français, avec des
planches à l'appui. •— Catalogue of a collection of
JUR
— 1836 —
LAT
onental porcelaine and pottery^ by A. Fraoks. Lon-
don. 187^. Excellent travail avec marques et mono-
grammes. — VArt japonais^ parL. Gonse, 2 vol in-
folio. 1883. Renseignements basés sur dos notes four-
nies par des indigènes; excellentes gravures. — Tnm-
sactions of the Asiatic society of Japon, Yokoama,
tomes I à XlII. — VEmpire japonais^ par Léon
MentchnikoflT, 1 vol. avec gravures, Genève, 1877. —
Nous même avons donné plusieurs articles sur les arts
et les industries du Japon au journal CArt.
Ph. B.
JEHAN DE PARIS, roman populaire, dont Tauteur
inconnu vécut vers le milieu du xvi" siècle. Jean, fils
d'un roi de France, se rend en Espagne pour réclamer
une infante qui lui a éié fiancée. Il voyage inco-
gnito, comme llls d'un bourgeois de Paris, en compa-
gnie avec le roi d'Angleterre, le bafoue tout le long
du chemin, et lui enlève la princesse à laquelle il
prétendait. Le roman est inspiré par riiistoire du
mariage de Charles VIII avec Anne de Bretagne, qu'il
euleva à son fiancé, Maximilten d'Allemagne. Le ro-
man de Jehan de Paris, d'un ton plaisant et d'une
lecture agréable, fut d'abord publié en abrégé dans la
Bibliothèque bleue Des éditions complètes furent
ensuite données par Em. Mabile, dans la collection
de Jannet, Paris, 1855, in-18, et par A. de Uontaiglon,
18(i7, in-l«i.
JURY. Les articles 3S1 et suiv. du Gode d'instruc-
tion criminelle de 1808 organisèrent le Jury en France,
en indiquant les conditions d'aptitude et en désignant
les classes dans lesquelles devaient être pris les ju-
rés. Les préfets formaient une liste 60 jurés toutes
les fois qu'ils en étaient requis par les présidents des
cours d'assises; cette liste était réduite à 36 par les
présidents pour chaque session. La loi du 2 mai 1827
déclara que les jurés devaient être pris parmi les
membres des collèges électoraux et certaines caté-
gories de personnes. Elle chargea aussi les préfets de
dresser les listes; mais, au lieu d'une liste spéciale
pour chaque session, ils devaient dresser une lii>te
générale pour le service d'une année, et, sur cette
liste, le premier président de la Cour royale tirait au
sort 36 jurés pour chaque session. L'A ««semblée na-
tionale de 1848 institua une commission chargée de
dresser la liste annuelle dans chaque département;
mais celte loi du 7 août 1848 fut abrogée par celle
du 4 juin 1853. Celle ci, n'admettant pas pour base
la qualité d'électeur, confia à une commission canto-
nale le soin de dresser pour chaque canton une liste
préparatoire ; elle créa une seconde commission qui
se réunit ao chef-lieu de Tarrondiasement et qui
choisit sur les listes préparatoires le nombre de jurés
nécessaire pour former la liste d'arrondissement;
enlin elle donna au préfet la mission de dresser la
liste annuelle du département sur les listes d'arron-
dissement, et ce fut sur cette litte que s'opéra, par
le président de la Cour impériale, le tirage au sort
des 36 jurés formant la liste de chaque session. Un
décret du 14 octobre 1870 abrogea cette loi de 1853
et remit en vigueur celle de 1848.
Une nouvelle loi fut promulguée le H novembre 1872.
Nul ne peut être juré s'il n'a 30 ans accomplis, et
s'il ne Jouit des droits politiques, civils et de famille.
Sont incapables d'être lurés : les individus qui ont
été condamnés, soit à des peines afflictives et infa-
mantes, soit à des peines infamantes seulement ; les
condamnés à des peines correctionnelles pour des
faits qualifiés crimes par la loi; les condamnés à un
emprisonnement de trois mois au moins; les con-
damnés à l'amende ou à Temprisonnement, quelle
qu'en soit la durée, pour vol, escroquerie, abus d*i
confiance, soustraction commise par des dépositaires
publics, attentats aux mœurs, délit d'usure, outrage
à la morale publique et religieuse, atuque contre le
principe de la propriété et les droits ae la famille,
vagabondage ou mendicité; ceux qui sont en état
d'accusation ou de contumace ; les notaires, greffiers
ou officiers ministériels destitués; les faillis non réha-
bilités ; ceux qui sunt sous mandat d'arrôt ou de dé-
pôt; les interdits, les individus pourvus de conseils
judiciaires ; ceux qui sont placés dans un établisse-
ment public d'aliénés. Les fonctions de juré sont
incompatibles avec celles de député, ministre, conseil-
ler d'Éiat, membre de la Cour des comptes, sous-se-
crétaire d'Ëiat ou secrétaire général d'un ministère,
préfet et sous-préfet, secrétaire général et conseiller
d'! préfecture, membre de la Cour de CASsation ou
des Cours d'appel, juge titulaire ou suppléant des
tribunaux civils et des tribunaux de commerce, offi-
cier du ministère public près les tribunaux. Juge de
paix, commissaire de police, ministre d'un culte,
militaire ou marin en activité de service et pourvu
d'emploi, fonctionnaire ou préposé du service actif des
douanes, des contributions indirectes, des forêts et des
télégraphes, instituteur primaire communal. Ne peu-
vent être jurés : les domestiques et serviteurs à ga-
ges, ceux qui ne sivent pas lire et écrire. Sont dis-
pensés des fonctions do jurés les septuagénaires,
ceux qui ont besoin pour vivre de leur travail manuel
et journalier, ceux qui ont rempli lesdites fonctions
pendant l'année courante ou l'année précédente. La
liste annuelle du jury comprend, pour le département
de la Seine, 8,000 jurés, et, pour les autres départe-
ment, 1 juré par 500 habitants, sans que toutefiis le
nombre des jurés puisse être inférieur à 400 et supé-
rieur k 600. Le préfet les répartit par arrondissement
et par canton, proportionnellement à la population.
Une commission composée, dans chaque canton, du
Jnge de paix, de ses suppléants et des maires des
communes (du maire et do deux conseillers désignés
par le conseil municipal, si le canton est formé d'une
seule commune), dresse une liste préparatoire de la
liste annuelle, contenant un nombre de noms double
de celui fixé pour le contingent du canton. La li^te
annuelle est dressée, pour chaque arrondissement,
par une commission composée du président du tribu-
nal civil, des Juges de paix et des conseillers généraux;
cette commission peut porter sur la liste les noms de
personnes non inscrites sur les listes cantonales, en
n^excédant pas le quart de la liste; la liste d*i l'arron-
dissement est transmise au greffe de la cour ou du
tribunal chargé de la tenue des assises. La commis-
sion de l'arrondissement où se tiennent les assises
dresse une liste spéciale de jurés suppléants (300 pour
Paris, 50 pour chaque département), pris parmi les
jurés de la ville des assises. Le premier président du
tribunal chef-lieu d'assises dresse la liste annuelle
du département, conformément aux listes d'arrondis-
sement, et la liste spéciale des jurés suppléants. Il
tire au sort, en audience publique, sur la liste an-
nuelle, les noms des 36 Jurés qui forment la liste de
chaque session, et ceux de 4 jurés suppléants.
LACUSTRES (Habitations), nom donné par les archéo-
logues à des cabanes bâties sur pilotis an bord ou au
milieu des lacs, dans les temps très reculés. Elles
furent découvertes d'abord en Irlande. En 1853, ou en
trouva sous la tourbe au bord des lacs de la Suisse. Les
habitations lacustres ont fourni beaucoup de monu-
ments de fdge de pierre, {V, ce mot dans le Suy
plétnent),
LATINE MODERNE (Littérature). Lorsque les Bai^
bares entrèrent dans l'empire romain, la décadence
avait commencé depuis longtemps pour la littérature
latine : tous les genres, en prose ainsi qu'en poésie,
étaient épuisés, et la langue n'avait plus qu'à achever
de se corrompre et à disparaître, du moins comme
langue vivante et parlée. Tel est le spectacle auquel
on assiste à partir du iv<^ siècle Jusque vers l'époque
des croisades. Cet intervalle peut se diviser en deux
périodes, que sépare le règne de Charlemagne. Ce
prince réagit, en effi^, contre le courant qui entraînait
à sa ruine toute la littérature romaine ; mais, après
lui, l'Occident tomba dans des ténèbres de plus en plus
épaisses jusqu'au jour où le monde, qui s'était cru un
moment condamné à périr avec l'an 1000^ sembla vou-
loir sortir enfin de son long sommeil et revivre aussi
deJa vie de l'esprit. De là date l'œuvre des littératures
modernes; mais la littérature latine ne devait pas sur-
vivre au naufrage de l'ancien monde. — Toutefois une
distinction est ici nécessaire. Rien n'égale, il est vrai,
la stérilité dont sont frappées, à l'époque des invasions
barbares, les lettres païennes ou pro'^anes ; mais le
christianisme, surtout au iv« et au v<^ siècle, entretient
encore dans les intelligences le mouvement et la vie.
La langue latitie, déj^ corrompue par les hordes ger-
maniques, se travestit encore par la nécessité d'expri.
LAT
— 1837 —
LAT
mer toutes sortes dMdées pour lesquelles elle n'avait
pas été faite ; mais dans ces œuvres, où Térudit
chercherait en vain le vieil idiome romain (saint Jé-
rôme, saint Ambroise, saint Augustin), sont agités avpc
éclat les problèmes do Tordre le plus élevé (V. dans
ce dictionnaire l'art. Pèrbs de L*Eglise). Au vi« siècle,
malheureusement, et dans les âges qui suivent, cetto
agitation féconde va de plus en plus s'affaiblissant; les
malheurs des temps ôtent le goût ou le loisir de s'ins-
truire, et le nombre des lettrés diminue progressive-
ment dans les rangs des clercs non moins que parmi
les laïques ; ce sera un mérite, au ix** siècle, do savoir
encore lire et écrire. — Au reste, dès le iv* siècle, la
critique renonce à séparer la prose de la poésie et à
suivre isolément leurs destinées. Toutes deux, d^abord,
ne vivent plus que par leurs productions inférinures :
l'une a tout au plus des grammairiens, des rhéteurs,
quelques panégyristes et beaucoup de chroniqueurs ;
l'autre n'a que des épitaphes, des élégies, des mor-
ceaux descriptifs de courte haleine», d'autres qu'on ne
sait à quelle* catégorie rattacher. Ensuite il n est pas
rare de voir le même auteur cultiver à la fois les deux
genres, composer aujourd'hui un chant de noces, écrire
demain une légende, ou mieux encore, pour prêter
Fans doute à la prose les charmes de la poésie, rédiger
en vers l'histoire merveilleuse d un saint dont les ver-
tus ont frappé vivement les imaginations contempo-
raines. Aussi n'avons-nous pas ici des œuvres à ana-
lyser, mais des noms à énumérer.
A première vue, le iv^ siècle ferait encore quelque
illusion. Il se présente, en eflTet, à la critiqua avec Au-
sone et Glaudien, versificateurs au demeurant assez
estimables; avec l'orateur Symmaque, cet autre Pline
le Jeune, comme disaient ses contemporains trop pré-
venus en sa faveur; avec les historiens Ammicn-Mar-
cellin, Ëutrope et Sulpice Sévère, le Salluste chrétien ;
enfin avec un cortège preque imposant de grammai-
riens et de rétheurs, parmi lesquels brillent : Donat,
moins connu par son Commentaire de Térence que
pour avoir été le maître de saint Jérôme; Népotien,
ami d'Ausone, lequel dutà sa réputation d'ôtre nommé
gouverneur d'une province; Mamertin, panégyriste
attitré des empereurs, fils d'un antre Mamertin qui fut
le premier décoré de ce titre ; Delphide de Bordeaux,
dont saint Jérôme a écrit qu'en prose et en vers il
avait illustré toutes les Gaules par son génie, etc. Mais
quand on y regarde d'un peu plus près, l'illusion se
dissipe, et l'on est forcé de reconnaître que, de toutes
ces œuvres qui firent en leur temps plus ou moins de
bruit, pas une n'offre la trace d'une inspiration origi-
nale et ne mérite une considération sérieuse.
Le v* siècle ne pàiit pas trop d'abord à côté de l'âge
précédent. A Ausone et à Glaudien il oppose Rutilius
Numatianus et Sidoine Apollinaire. Rutilius, qui
naquit à Poitiers ou peut-être à Toulouse, était préfet
de Rome lorsque l'invasion barbare vint couvrir de
ruines son pays natal. Il conçut alors le désir de revoir
la Gaule, se mit en route, et, chemin faisant, raconte
en vers élégiaques son voyage. Ce poème, connu sous
le nom d'Ilinerarium ^ et dont il ne reste que le
H' chant et une partie du 2^ a été sauvé de l'oubli
par quelques descripiions gracieuses. Sidoine Apol-
linaire, originaire de Lyon, fut plus fécond, quoique
beaucoup moins pur. Dans ses œuvres fort diverses on
compte des épithalames, des panégyri(|ues, un éloge
de Bacchus, un autre du monastère de Lérins, et neuf
livres de lettres en vers. De même, si le iv* siècle s'est
glorifié de ses rhéteurs et de ses grammairiens, s'il se
vante d'avoir produit un Symmaque, le v« répond par
les noms de Mamert Glaudien, de Marcien Capella, de
Macrobe et de l*riscien . Mamert Glaudien écrivit un
traité sur la nature de Tâme qui a survécu jusqu'à nos
jours, comme pour montrer qu'il y avait encore à cette
époque des esprits capables de métaphysique. Marcien
Capella, qui naquit à Madaure, près de Carthage, com-
posa un Satiricon en neuf livres, mêlés de vers et de
prose; c'est une sorte d'encyclopédie qui commence
par une allégorie bizarre, l'apothéose de la philologie
et son mariage avec Mercure, et qui se termine par un
traité des septs arts libéraux, tels que les étudia le
moyen âge (la grammaire, la dialectique et la rhéto-
rique, matière du trivium;\K géométrie, l'arithmétique,
l'astronomie, la musique, sujet du qundrivium). Ma-
crobe a laissé un commentaire sur le Songe de Scipion^
de Cicéron, avec une exposition platonicienne du sys-
tème du monde, et un recueil de conversations intitulé
les Saturnales^ ouvrage en sept livres, doot quatre
sont consacrés à l'examen critioue des poésies de Vir-
gile, et les autres traitent des fêtes, du calendrier, de
la vie privée des Romains, etc. Enfin Priscien, qui na-
quit à Césarée et tint une école fameuse à Constanti-
nopie, entre antres œuvres, composa une grammaire
que mirent souvent à contribution les grammairiens du
moyen âge. — Toutefois, dans cette comparaison entre
les deux siècles, le v* a nn désavantage considérable
aux yeux de la critique littéraire : c'est que la langue
qu'il parle est beaucoup plus incorrecte. I^es Barbares
contribuèrent à corrompre de tontes manières l'idiome
des vaincus. Ils apportaient avec eux des idées incon-
nues aux Romains, surtout dans les relations de la so-
ciété : la langue latine manquant de termes pour les
rendru. il fallut avoir recours aux mpts des vainqueurs
qu'on latinif^a. Quelquefois les Barbares apprirent tels
ou tols mots latins pour exprimer les choses de la vie
usuelle : mais ils les apprirent mal et les rendirent
dénaturés aux Romains, qui, soit insouciance, soit né-
cessité, les adoptèrent en cet état : c'est ainsi qu'on
disait antistis pour antistes^ contemptOy fructo pour
contemptu^ fructu. Les règles de la grammaire furent
altérées : on employa des masculins pour des féml-
nins; les verbes qui gouvernaient l'accusatif gouver-
nèrent l'ablaiif, et ainsi du reste. Souvent aussi le
Barbare voulut s'éviter la peine d'apprendre le mot
latin, et y substitua le mot de sa langue.
Ajoutez que les bouleversements qui signalèrent la
conquête barbare réduisirent singulièrement le nombre
des gens lettrés, et que, dès 460, Mamert faisait ainsi
CEpitaphe des sciences : a. On néglige la langue latine;
on méprise la grammaire ; on a peur de la dialectique;
on redoute la musique, la géométrie, l'arithmétique. »
11 y avait encore cependant de paisibles asiles où les
œuvres de l'esprit étaient en honneur, et où les lettre^
devaient trouver leur dernier refuge ; ce sont les mo«
nastères, au fond desquels s'accomplissent des travaux
de trois genres diff'érents : ici se copient et se conser-
vent les chefs-d'œuvres de l'antiquité; là s'élaborent
des chroniques naives, qui partent souvent de îa créa-
tion du monde et sont conduites jusqu'à l'année même
qui les voit éclore ; ailleurs, des méditations obstinées
enfantent des œuvres où la philosophie marche de pair
avec la théologie et l'histoire. Voilà comment, au
v* siècle, la littérature religieuse présente encore
qiielqnes noms considérables. Salvien, moine de Lérins,
puis prêire de Marseille, surnommé par ses contem-
porains le guide des évoques, fait paraître, en 455, un
Traité de la Providence, dans lequel il attribue aux
crimes des Romains les désastres de l'empire. Gassien,
de Marseille, voulant atténuer l'opinion de Pelage sur
les rapports de la grâce et de la liberté, prétend s'in-
terposer entre les partisans exclusifs de la grâce ou
Prédestinatiens et ceux de la liberté ou Pélagiens,
fonde ainsi h*, semi-pélagianisme et soulève dans l'E-
glise des débats auxquels prennent part, d'un côté,
Fauste de Riez, abbé du monastère de Lérins, Arnobe
le Jeune et Vincent de Lérins; de l'autre, saint Hilaire
d'Arles, saint Prosper d'Aquitaine et saint Augustin.
Ces démêlés ob la littérature en elle-même n'a rien
à voir ont inspiré toutefois à saint Prosper son poème
sur les Ingrats (ingrati, qui repoussent la grâce).
Enfin Paul Orose TÈspagnol compose, à la demande
de saint Augustin, une histoire du monde {PauU
Orosii Mœsta mundi), ouvrage moitié moral, moitié
historique sur les calamités dont la terre a été affligée
depuis la création; réponse aux païens qui rendaient
la religion chrétienne responsable de la ruine de l'em-
pire romain.
Gassiodore et Boèce font la transition du v« au
VI* siècle, c'est-à-dire de la décadence profonde à la
véritable barbarie. Gassiodore, après avoir été mi-
nistre de Théodoric le Grand et de ses premiers suc-
cesseurs, se retira dans ses domaines en 538. Là il
fonda un ordre monacal consacré surtout à la copie des
manuscrfts anciens, et composa lui-même la plupart
des ouvrages qui ont fait sa réputation littéraire : les
Institut ions aux lettres divines, programme de l'ensei-
gnement tel qu'on le suivit au moyen âge ; un Traité
de l'âme; des livres de grammaire, de mathématiques,
de musique. 11 avait écrit ru douze livres une Histoire
des GothSj qui s'est perdue, et dont l'on n'a qu'un
abrégé par le Goih Jornandès; plus une Chronique
universelle parlant du déluge et finissant à l'an
59 après J.-C. Mais son œuvre la plus importante, bien
LAT
— 1838 —
LAT
Sue sans caractère ni prétention littéraire, est le recueil
es réécrits et ordonoances qa*il arait rédigés dans
son administration ; ce sont douze lirres [variorum
libri XII) remplis de détails minutieux et curieux sur
le gouvernement de l'Italie, sur la constitution disci-
Elinaire de TEglise et sur l'Etat intellectuel du pays,
oèce, ministre de Théodoric, comme Cassiodore.
composa, pendant les tristes loisirs de la captivité qui
précéda sa mort, un livre De la Consolation de la phi-
losopfiie, dialogue en prose et en vers où l'auteur,
parlant de la Providence, s'élève à une grande hauteur
de pensées et de sentiments. On a aussi de lui plu*
sieurs compositions philosophiquos et des traductions
avec commentaires des traités de dialectique d'Aristote,
ouvrages qui ont été longtemps suivis pour l'enseigne-
ment scolastique ^ moyen &ge.
Après ces deux personnages encore illustres, Tâge
des ténèbres commence; des écoles se ferment; le
clergé lui-même voit ses rangs envahis par des Bar-
bares que tentent le titre d'évèquo et les richesses
épiscopales, et dont Tignorance brutale fait un triste
contraste avec la science de leurs prédécesseurs.
Saint Grégoire, évèque de Tours, est auteur d'une
Histoire ecclésastique des Francs, qui n'a d'intértH que
pour les historiens. Fortunat, Italien, devenu évèque
de Poitiers, a laissé une Vie de saint Martin en vers,
et une Vie de sainte Radegonde, des hymnes, des
{»oèmes sur des violettes, sur des châtaignes, sur du
ait, etc. Saint Césaire, évèque d'Arles, versé dans la
connaissance de l'Ectiture et des Pères, porta le der-
nier coup au semUpélagianisme dans le concile d'O-
range. Saint Aviie, évèque de Vienne (Dauphiné),
écrivit divers traités contre les hérétiques de son
temps, une homélie sur les Rogations et un poème
sur la Création, dont plusieurs morceaux ont pu sou-
tenir la comparaison avec des passages correspondants
de Milton. Saint Gildas, dit le Sage, né dans le pays
de Galles, et qui passa une partie do sa vie au monas-
tère de Glastonbury, est auteur d'une lettre {Liàer que-
rulus de excidio Britannix) où il donne un précis de
l'histoire de la Grande-Bretagne depuis l'invasion des
Romains Jusou'à son tpmps.
Au VII* siècle, l'affaissement des esprits est plus
triste encore. La contagion de l'ignorance a gagné de
proche en proche toutes les classes; la langue s'est
corrompue au point que les mots en sont devenus
méconnaissables et rhisiorien Frédt^gaire annonce dans
une préfaça qu'il n'usera pas de tout son savoir, et
qu'il parlera moins purement qu'il ne pourrait le faire,
« de peur de n'être pas compris de tout le monde ».
Aussi quelques hommes seulement de crrtte époque
ont une sorte de notoriété; encore est-co comme hie-
toriens et non point comme littérateurs qu'ils l'ont
acquise. Le moine Marculfe a rédigé un recueil en deux
livres des formules usitées dans les actes qui se pas-
saient : |o au nom du roi; 2*^ entre les particuliers.
Fréiiégaire a continué Grégoire de Tours dans une
sorte d'histoir» universelle poussée depuis Adam Jus-
qu'à la quatrième année du règne de Clovis II: Saint
Columban, missionnaire d'Irlande, a laissé plusieurs
ouvrages religieux tels qu'une Règle monastique^ un
Pénitentiely etc., et trois petits poèmes ascétiques, avec
une épigramme sur la comparaison d'Eve et de la sainte
Vierge. Bède le Vénérable mit à profit sa grande éru-
dition dans une Chronique qui commence avec l'ori-
Sine du monde et finit avec 1 an 730 après J. -G. Enfin,
'Isidore de Séville il y a une Chronique qui va jus-
qu'en 615 après J.-C., et deux Abrégés histotnques sur
les Barbares qui occupèrent l'Espagne (les Visigoths,
les Suèves et les Vandales).
Après le triomphe des Austrasiens, les évèchés et les
abbayes tombèrent aux mains des compagnons de
Charles Martel, qui se soucièrent fort peu d'y conser-
ver les écoles, et l'on vit les bibliothèques devenues
inutiles, habitées, comme à Fontenelle (Saint-Wan-
drille), par les chiens du seigneur.
Tel était l'état des choses lorsque parut Gharlemagne
qui forma le dessein d'arracher son siècle à l'ignorance ;
et il y réussit au moins pour un moment. Il contribua
au réveil des études par ses lois et par son exemple. A
titre de monarque, il établit à sa cour l'école dite pa-
latine, renouvelée peui-ètre d'une école analogue qui
avait existé naguère à Trêves dans le palais des empt^*
reurs romains; il restaura les écoles épiscopales et
celles des monastères, honora les savants, et l'on sait
les menaces qu'il fit aux enfants des seigneurs qui ne
purent répondre à ses questions, jurant que les places
et les bénéfices iraient trouver les enfants des pauvres
s'ils étaient plus savants qu'eux. Gomme homme avide
de science ou comme auteur, 11 se mit sur les bancs,
il épela des lettres, il s'exerça à bien écrire; il apprit
les langues, l'astronomie; il étudia la grammaire, l'or-
thographe, la rhétorique, la dialectique ; s'il ne rédigea
pas tous ses Capitulaires, il n'en reste pas moins con-
stant que c'cftt son génie qui les a dictés, et qu'il fut
rame de tout ce qui se composait sous ses yeux; il
écrivit des lettres au pape, aux évêques, aux rois des
autres nations, aux empereurs de Gonstantinople ;
activité prodigieuse et qui eût été digne de produire
des faits plus durables.
Charlemagne apparaît dans l'histoire environné d'un
brillant cortège de savants qu'il attira de tous les pays
d'Europe à sa cour, et qui, joignant leurs efforts à
ceux du maître, tirèrent les esprits de leur létliargie*
Les principaux ouvriers de cette première Renaissance,
éphémère parce qu'elle était prématurée, furent Alcuin,
Esinhard, Angilbert, Théodulfe, Leidrade. Agobard,
Paulin d'Aquilée, Pierre de Pise et Paul Warnefried.
Les œuvres d' Alcuin, considérée» au point de vue lit-
téraire, sont au-dessous de leur réputation, car elles
sont plutôt d'un Père de. 1 É;;lise que d'an homme de
lettres. Elles n'en ont pas moins exercé en leur temps
une influence considérable. Les unes concernent rÉcri-
ture sainte, h^s autres sont des traités de théologie ;
celles-ci ont pour objet de combattre les hérésies du
temps; celles-là regardent la liturgie: d'autres enfin
se rapportent plus particulièrement aux sept arts libé-
raux ; joignez-y des poésies de différentes sortes, et vous
aurez une idée de la fécondité de ce puissant esprit. —
La belle œuvre d'Éginhard, celle à laquelle il est rede-
vable de.sa réputation, est la Vie de Charlemagne, qui
est restév^ comme la grande autorité de cette époque. —
Angilbert n'a laissé que quelques poésies insignifiantes;
sa gloire est d'avoir été l'un des membres de l'école
palatine, et d'avoir servi pour sa part les desseins de
son roi. — Théodulfe, appelé dltalie par Charlemagne
k l'évêché d'Orléans, fonda dans son dincèse qnaire
grandes écoles, et recommanda à tous ses prêtres et cu-
rés d'ouvrir dans chaque bourg une école où les enfants
des pauvres seraient gratuitement enseignés. Il compo-
sa, d'autre part, des poésies diverses qui lui firent une
grande réputation, bien qu'elles n*offrent aujourd'hui
que peu d'intérêt. — Leidrade,né dans le Noriquo, passa
aussi les Alpes à la voix de Charlemagne pour diriger
l'archevêché de Lyon. Ecrivain peu fécond, il aime
mieux propager les lettres en multipliant les écoles dans
son diocèse qu'en composant de longs et nombreux
ouvrages. Agobard, son disciple et son successeur, a
laissé, au contraire, une trentaine d'écrits parmi les-
quels on distingue un Traité contre le duel judiciaire
qu'il fit abolir par le fils et successeur de Charlemagne.
— Paulin d'Aquilée, dont le grand empereur se plaisait
aussi à consulter les lumières de l'expérience, n'écrivit
rien qui marque une préoccupation purement littéraire;
mais son ardeur épiscopale lui inspira des ouvrages de
polémique religieuf^e et de morale qui tiennent une
place honorable parmi les productions contemporaines.
— Pierre de Pise enseignait à l'école de Pavie lorsque
Charlemagne vint assiéger cette ville et mettre fin à la
monarchie lombarde : il fut emmené en France par le
vainqueur pour y continuer sos leçons, et fut regardé
commi*. la part la plus précieuse du butin. — Enfin
Paul Warnefried, dit /e Diacre, auteur d'une histoire
dns Lombards (De gestis Longobardorum libri sex),
reçut de l'empereur la mission de composer différents
ouvrages pour le cl<^rgé de France et, entre autres, un
recueil d'homélies tirées des saints Pères, lequel fut en-
voyé à tous les lecteurs des Eglises. On lui doit égale-
ment une histoire des évêques de Mets.
Tels sont les hommes les plus remarquables du règne
de Charlemagne, ceux dont les écrits et les actes inspi-
rés, récompensés, commandés quelquefois par leur
illustre protecteur, suspendirent environ pendant un
quart de siècle Ja décadence de la littérature latine. Il
ne devait rien rester de cette glorieuse tentative, et
quand ces instruments d'une grande pensée eurent dis-
paru avec le maître qui s'en était servi, la barbare ne
tarda pas à reconqu<^rir le terrain qu'elle avait perdu.
Les invasions normandes ne pouvaient qu'acélérer son
triomphe. Le ix<» siècle, à la vérité, se ressent encore
des vigoureux efforts du viii^, et produit quelques uums
dignes de souvenir; tels sont Ermoldus Nigeilus,
LAT
— 1839 —
LIS
poète ; Thégan, l'astronome ; Ai mon et Fréculfo, histo-
riens; Walafrid-Strabon et Florus,thôologiens et poètes;
Raban Maur, autre théologien non moins renommé que
les deux précédents ; Jean Scot, précurseur de la sco-
lastique: Uincmar, homme d'écrit et d'action, qui donne
k la fois (les leçons aux papes et aux princes ; puis
bien au-dessous de ce grand personnage, le poète Mi-
lon et les théologiens Tatramne et Paschase-Eladbert,
de Corbie ; Loup, abbé de Ferrières, et Qothescalc,
moine de l'abbaye de Fulde. Mais le x^ siècle compte h
peine deux ou trois représentants fort médiocres, tels
que Flodoard, auteur d une histoire de l'église de Reims
et d'une chronique plus générale, précieuse par quel-
ques faits dont la mention no se retrouve point ailleurs,
et Abbon qui raconta le siège de Paris par les Normands
et diit une certaine célébrité à la triste popularité de
son suiet. N'oublionc cependant pas, en Allemagne,
la célèbre abbesse de Gandersheim, Hroswita, auteur
de plusieurs drames imités de Térence, qu'on avait
beaucoup vantés jusqu'ici, mais dont Tauthontici té vient
d'être attaquée par un critique très distingué de l'Al-
lemagne même, M. Joseph Aschbag (Gazette (VAugs-
bourfff 14 septembre 1867). Ainsi, abstraction faite des
discussions théologiques, voilà donc les sujets dans
lesquels est maintenant confinée la langue latine : des
poèmes de tout genre et de toute dimension, qui n*ont
guère d'autre mérite que d'avoir été lus en leur temps
et d'attester le réveil de l'esprit humain après les
terreurs de l'an 1000, et des chroniques ou des bio*
graphies.
Parmi les poètes du xi« siècle se distinguent Hugues,
évèque de Langres; Guy, évèque d'Amien«, et Odon,
évoque de Cambrai. Un distique du premier, adressé
à Guillaume le Conquérant, excita une admiration gé-
nérale ; nous le citons, aûn que par cet échantillon
on puisse juger du reste :
Si quis in ante videt qui te circuaspicit, ex te
Golligit, aute cornes, rex modo Cœsareris.
Guy d'Amiens écrivit un poèmo sur la conquête de
l'Angleterre par les Normands ; et Odôn de Cambrai,
rebroussant vers un passé qui semblait oublié, chanta
les vieux héros de la guerre de Troie. Les chroniqueurs
principaux de la même époque sont : Raoul Glaber du
monastère de Gluny; Guillaume de Pouille, Geoffroy
de Malaterra, Aimon, Gérard, Bernon, Raoul Tortaire,
ces quatre derniers sortis du monastère de Fleury ;
Guibert de Nogent, Milon Crespint de l'abbaye du
Bec, etc.
Mais nous voici venus aux croisades. Au moment où
elles commencent^ les idiomes modernes ont déjà une
existence, une physionomie disiincte, et ils ne tarde-
ront pas à produire eux-mêmes leurs œuvres durables
et vraiment littéraires : témoin le récit de la quatrième
croisade par Willehardouin, bientôt suivi des mémoi-
res du sire de Jolnville. Le latin pourtant ne périt pas;
on continue et on continuera de le parler et de le dé-
naturer, bruyamment ou sHoncieusement, dans les
églises et dans les écoles de la scolastique, Jusqu'à ce
que la Renaissance remette en honneur la vieille lan-
gue romaine. (Voyez Rbnaissancb.) C'est alors qu'ap-
paraissent, en Italie d'abord, puis en France et dans
toute l'Europe, ces savants qui se piquent d'écrire aussi
purement le latin que Cicéron lui-même et ses con-
temporains et dont quelques-uns cultivent à la fois les
vers et la prose (Poggio, Laurent, Budé, Valla, Erasme,
Sadolet, Bembo, les Scaliger, Robert Estienne, Paul
Manuce, Muret, Casaubon, etc.). D'autres cependant
s'exercent plus particulièrement è la poésie, et l'on
voit ainsi se transmettre d'âge en âge, comme une
tradition, et en dehors des écoles, le culte du vers la-
tin; au xvo siècle brillent Pétrarque et Ange Politien;
le xvi^ plus fécond, présente, non sans orgueil, San-
nazar, Vida, Bembo, Bèze, Du Bellay, Muret, Joseph
Scaliger, Passeratil'Hospital, Sainte-Marthe {Sammar-
tanus) et I'EcosshIs George Buchanan. Ceux-ci à leur
tour ont, au xvit^ siècle, leurs succosseurs : en Hol-
lande, Heinsius et Gaspard BarlaBus; en Pologne, Snr-
bievius; en Ecosse, Arthur Johnston; en Angleterre,
Owen, May et le grand Milton ; en Italie, le P. Ceva,
Segardi,et Strozzi ; en France, Claude Quillet, Ménagn,
Rapin, Comniire, Santcuil. Le xviii*, qui laisse affai-
blir sensiblement l'étude de l'antiquité, est encore re-
présenté par Desbilluns, Vani^re, Lebeau, Rollin. Mais
au xix^ il n'y a plus un seul nom vraiment digne d'être
cité. Le vers latin survivra -t-il à l'engouement dont
la génération présente est saisie pour les sciences et
au discrédit dont sont frappées les études classiques?
C'est le secret do l'avenir A. H.
LEGER (Saint), un des plus anciens poèmes de no-
tre langue, en dialecte bourguignon. Il comprend
50 stophes, de six vers rimant deux à deux; c'est un
poème en l'honneur de saint Léger, le rival politique
d'Ebroîn. Il a été composé vers le milieu du x<^ siècle,
probablement à Autun dont saint Léger était évèque
et où son souvenir était resté populaire. La valeur
poétique du poème est nulle; m^iis il est important
pour rhistoire littéraire, en ce qu'il montre la versi-
fication française constituée dès le x* siècle, et sur-
tout pour l'histoire de la langue. Le manuscrit,
conservé à la bibliothèque de Clermont, a été publié
avec commentaire par M. Gaston Paris dans la Roma»
nia, 1S72.
LETTRES (Facultés des). A dater du 1" janv. 1876,
toutes les rétributions éventuelles qu'on attribuait aux
professeurs et agrégés furent suprimées. Le traite-
ment fut fixé ainsi qu'il suit : professeurs à Paris,
15,^)00 fr. ; professeurs dans les départements, de
6,000 à 11,000 fr. ; agrégés à Paris et dans les dépar-
tements, 2,000 fr.
LIBERTE PROVISOIRE. La loi du 14 juillet 1865
décide qu'en toute matière le juge d'instruction peut,
sur la demande de l'inculpé et sur les conclusions du
procureur impérial, ordonner que l'inculpé sera mis
provisoirement en liberté. En matière correctionnelle,
la mise en liberté est de droit, cinq jours après l'in-
terrogatoire, quand le maximum de la peine prononcée
par la loi sera inférieur à deux ans d'emprisonnement.
Cela ne s'applique ni aux prévenus déjà condamnés
pour crime, ni à ceux déjà condamnés à un emprison-
nement de plus d'une année. Si, après avoir obtenu sa
liberté provisoire, l'inculpé ne comparait pas, on peut
décorner contre lui un mandat d'arrêt ou de dépôt, ou
une ordonnance de prise de corps.
LION DE BOURGES, chanson de geste du xiii* siè-
cle, faisant partie du cycle carlovingien. Herpin de
Bourges, duc de pure invention, s'était enfui en Italie
pour avoir frappé Clarion, chevalier de la race de Ga-
nelon, dont la félonie n'était pas encore connue. Il lui
na(|uit un enfant qu'il dut abandonner forcément, et
qu'une lionne éleva dans une forêt. Le roman raconte
l'^s aventures du jeune Lion, son mariage avec la fille
du roi de Sicile, ses victoires sur les Sarrasins ; enfin
Lion se rend à Bourges, où les héritiers de Herpin
l'acceptent comme duc. La Bibliothèque nationale
possède Lion de Bourges qui n'a pas moins de 20,000
vers alexandrins en tirades monorlmes, imité de plus
en 40,0')0 vers de huit syllabos.
LISSE (Haute et basse) ou lice, terme de manufac-
ture servant à distingu'^r les tapisseries d'après le
technique de leur fabrication. Les tapisseries se divi-
sent selon le mode d'exécution en tapisseries de haute
et en tapisseries de basse lisse. (V. le mot Lisse au
Dictionnaire.) Ces définitions constituent un vocable
de mé lier plutôt qu'elles n'impliquent une valeur mar-
chande. On peut seulement affirmer que la basse
lissa coûte sensiblement moins cher à établir que la
haute lisse, et que si elle présente quelques infério-
rités de style, la nuance n'est perceptible que pour
les yeux très exercés. Nous allons exposer en quel-
ques traits généreux les caractères qui distinguent
ces deux procédés de fabrication, pour montrer en-
suite les difi'éronces matérielles qui permettent à
l'amateur de ne point les confondre.
Pour fabriquer la haute lisse la chaîne (V. ce mot,
Supplément) est tendue verticalement. Le métier se
compose de deux montants en bois ou en fonte sup-
portant deux cylindres mobiles, les « ensouples »,
placés l'une dans la partie supérieure, l'autre dans
la parti^ inférieure. Ces cylindres servent à retenir
les extrémités de la chaîne et à la tendre selon les
besoin». Pour la haute lisse l'ouvrier s'installe non
pas devant mais derrière son métier. Son travail doit
être fait à l'envers. Avant de tisser sa trame, le haute-
lissier doit procéder au décalcage de son modèle.
Lorsqu'il a préparé sa chaîne par l'ourdissage, il la
fixe sur le métier, puis s'aidant d'un calque fait
sur du papier végétal qu'il applique sur sa chaîne,
il marque à la pierre noire ou à l'encre les princi>
paux traits de son carton. Le contour n'est en somme
qu'une suite de points noirs marqués sur autant de
LIS
— 1840 —
LIS
fils séparés. Ces points ne sont que des reprises, le
dessin n'est reproduit qu*à peu près, et pour le rec-
tifier il importe que le tapissier soit rompu à toutes
les subiilités de Tart du dessin, sans compter la
profonde connaissance des couleurs qu'exigera tout
à l'heure l'application de la trame sur la chaîne.
L'opération du décollage terminée, le hantc-iissier
arrîTe au tissage qui commence par le bas. Nous avons
vu que l'ouvrier est placé derrière son métier. Bien
plus, c'est derrière lui qu'est placé son modèle. Il
devra se retourner pour le voir. Au moment où sui-
vant les points noirs tracés sur la chaîne, le tapissier
prend une broche chargée de la couleur convenable
et arrête son fil de routeur sur un des fils do la
chaîne, celle-ci est divisée en deux nappes parallèles,
séparées par un tube de verre dit ôâion de croisure.
Ces deux nappes sont formées chacune d'une moitié
des fils do la chaîne. La nappe antérieure contient
les fils pairs; la nappe postérieure les fils impairs.
Ces fils sont pris dans les cordeleites en forme d'an-
neaux appelés lisses. Celles-ci sont fixées d'un côté
à tous les fils de la nappe de devant, et de l'autre h
une perche placée en dehors de la chaîne, au-dessus
de la tète du hante lissier. Le fil de la trame est en-
roulé sur des espèces de fus^'aux appelés broches.
Pour fabriquer le tissu, il faut d'abord passer la
broche de droite à gauche entre les fils d'arrière et
les fils d'avant. La trame ainsi passée couvre les fils
d'arrière. Un fil de la chaîne sur deux est recouvert
de fils de couleur; cela s*appelle une demi-passée.
Puis si le tapissier attirant à lui au moyen des lisses
une poignée des fils d'arrière, il fait passer la bro-
che entre les deux napprs, cette fois en sens inverse,
il rouvre les fils de devant. A ce moment les deux
fils pairs et impairs de la chaîne sont recouverts ;
cela s'appelle une duite. Ce croisement de gauche h
droite et de droite à gauche est indispensable pour
la formation du tissu, car si dans la f<ibrication de la
toile, la chaîne n'est couverte que de deux en deux
fils, dans la tapisserie il importe que la chaîne soit
entièrement cachée par l'exacte superposition des
fils de la trame, de telle sorte que, le travail fini, la
trame seule paraisse à l'endroit comme à l'envers.
Pour assurer la solidité de son ouvrage, le tapissier
tasse chaque duite avec un lourd peigne d'ivoire. Ces
duites prennent place les unes à côié des autres, ou
les unes au-dessous des autres suivant l'étendue
que doit occuper la nuance dont la broche est chargée.
L'artiste veut-il passer à une autre nuance, il change
de broche et recouvre les passées et les duites comme
nous venons de le montrer. Plusieurs tapissiers peu-
vent travailler simultanément au même ouvrage. Aux
Gobelins on voit parfois jusqu'à sept ou huit haute-
lissiers occupés au même métier. Le travail de la
haute lisse est minutieux et lent. Aux Gobelins un
liaute-lissier ne produit en moyenne que 28 centi-
mètres carrés par jour, soit un peu plus de 8/10 de
mètre carré pour 300 jours de travail. Chaque mètre
carré revient à peu plus de 2000 francs pour la main-
d'œuvre seule. Le travail le plus difficile dans la
fabrication de la tapisserie est le choix des nuances.
C'est là que l'artiste doit reprendre toute sa personna-
lité, car c'est là que le rôle d'interprète commence véri-
tablement. Avant tout il importe que l'ouvrier ait des
notions très précises sur les lois de la couleur. En-
suite il doit tenir compte de la contextnre mère du
tissu dont il se sert. Chaque fil de la chaîne forme
autant de cylindres coupés enco'-e par les stries de la
trame. Il s'ensuit que chaque fil de chaîne produit
une petite ombre grise dans la mince cannelure qui
qui le sépare du fil voisin. Cette ombre multipliée
par le nombre des fils de la chaîne rend légèrement
grise la surface générale de la tapisserie. L'artiste
doit donc monter résolument ses tons pour racheter
l'aff'aiblissement de couleur qui résulte de la canne-
lure. Le tissu retrouvera ainsi par un redoublement
de lumière dans les parties saillantes ce qu'il perd
d'éclat pour la somme des autres logées dans les
parties creuses. L'art consiste ici dans le passage
d'un ton à un autre, dans la transition de la lumière
aux ombres. L'artiste se sert à cet effet de couleurs
moyennes dont il dispose en forme de hachures, 9fin
d'éviter Tefl'et de mosaïque, qui résulterait d'une
simple juxtaposition. Cest par la pénétration réci-
f croque des tons voisins qu'on arrive à lier entre elles
es nuances au point qu'un œil exercé peut seul
reconnaître Tendroit où Tua commence où l'autre
finit. Les anciens tapissiers n'employaient que des
hachures à une nuance. Le système des hachures à
deux nuances, aujourd'hui seul en honneur, fut in-
venté sous le premier empire par DeyroUe. Il sert à
augmenter la vibration des tons intermédiaires.
Pour la BASSE lisse le métier diffère sur beaucoup
de points. La chaîne est horizontale. Les lisses au
lieu d'être à la portée des mains de l'ouvrier sont
mises en mouvement au moyen de pédales ou mar-
ches. Le modèle n'est plus derrière le tapissier;
il est filé sur la chaîne. Avec ce système, on aug-
mente la rapidité de la main-d'œuvre, et on écono-
mise un tiers du temps nécessaire à un travail de
haute lisse. Dans celle-ci l'ouvrier ne peut travailler
que de la main droite, la gauche lui servant à recher-
cher, séparer et croiser les fils. Dans la basse lisse
l'ouvrier a ses deux mains pour passer dans la chaîne
les tt flûtes » chargées des fils de couleur. Un des
inconvénients du métier de basse lisse, c'est que
l'ouvrier ne voyant que très imparfaitement ce qu'il
fait, ne peut juger de son travail qu'une fois la tapis-
serie terminée, c'est-à-dire trop tard pour remédier
aux défauts. D'autre part, le carton étant placé sur
la chaîne ne reçoit la lumière que par l'intervalle des
fils de cette chaîne. La tapisserie n'est plus qu'une
contre-épreuve du tableau. L'effet en est affaibli.
Vaucanson introduisit quelques perfectionnements
dans la fabrication de la basse lisse. En 1757 Ncilson,
surnommé le Champion de la basse lisse, organisa nn
concours où ses productions firent croire un moment
que la haute lisse était vaincue. Elle conservait mal-
gré tout l'avantage grâce à son style plus pur. Existe-
t-il pour un amatour de connaissances moyennes des
différences matérielles qui lut permettent de distin-
guer la haute lisse de la basse lisse? L'interversion
du modèle, sa reproduction en contre-partie serait
à la rigueur l'unique trait permettant de constater
qu'on a devant soi une tenture de basse-lisse, si la
comparaison avec le carton était une chose toujours
possible. Pourtant une inscription renversée perme-
d'assurer qu'on a affaire à un tissu de basse lisse.
M. A. Darcel qui a écrit sur cette matière des cha-
pitres qui font autorité, affirme que les hommes du
métier retrouvent parfois à l'envers d'une pièce quf*l-
ques diffirences dans la « liure » des fils de couleur,
différences qui, il faut bien le dire, n'influent en rien
sur le résultat ni sur l'effet produit.
Le métier de haute lisse remonte à une antiquité
très lointaine. Les peintures de Thypogée du Beni-
Hassan, antérieures de 3,000 ans à notre ère, repré-
sentent un métier à chaînes verticales, avec bâton de
croisure et peigne qui se rapproche singulièrement de
notre métier de haute lisse aujourd'hui en U6ag<^. Le
métier de Pénélope tel que nous le montre un dessin
postérieur de quelques centaines d'années seulement
rappelle par sa disposition, à quelques variantes
près, le métier employé aujourd'hui aux Gobelins.
En 1302 à Paris, le prévôt Pierre Le Jumeau incor-
pora dans la maîtrise des tapissiers sarrasinois « une
autre manière de tapissiers, que l'on appelle ouvriers
de haute lisse ». Les nouveaux venus étaient au
nombre de dix. Or on sait aujourd'hui qu'il existait en
Europe des ouvrages comme la tapisserie du musée
de Lyon, les tentures du dôme de Halbersudt et
celles de l'abbaye de Quediimbourg qui sont de
beaucoup antérieures à cette date. Les dernières
cioisades en mettant l'Europe en contact direct avec
l'Orient durent favoriser le développement de cet art
qui chez les Orientaux n'a jamais cessé d'être en
honneur. Au xiv* siècle les haute-lissiers de Paris
sont avec ceux d'Arras les plus renommés. C'est
Colin Bataille, tapissier fameux, citoyen de Paris, qui
reçoit les commandes du comte Amédée de Savoie
en 1376. Quelques années plus tard, en 139), Fran-
çois Gonzague, capitaine dM Manloue, s'adresse aux
haute-lissiers parisiens pour faire substituer sur une
tenture les armoiries de la Bohême à celles des Vis-
conti. On ne trouve de métiers de haute lisse en
Italie qu'après que de 1420 à 150>) des ouvriers ou
tapissiers originaires d'Arras, de Lille, do Bruges, de
Tournai passèrent les Alpins. A Rome, à cette épo-
que, on trouva un tapissier parisien. Au xvi« siècle
Kraiiçois l'i* et Henri II fondent à Fontainebleau et à
Paris, hôpital de la Trln'té. des manufactures dont
l'histoire est peu connue, mais où il y avait des mé-
LIT
— 1844 —
LLO
tiers de hante-IiBse. Au xvii« siècle les Gobelins soDt
fondés h. Paris.
Le terme de basse lisse parait dans le vocabulaire
vers la fin du zvi« ou le commencement du xviio siècle.
Il est pourtant universellement admis aujourd'hui que
dès le ziv« sièrie on fabriquait des tapisseries ainsi.
On les appelait alors « tapisseries à la marche »,
c'est-à-dire faites au moyen d*un métier qu'une pé-
dale mettait en mouvement. En 1607 Henri IV, qui
favorisa grandement Tindustrie et l'art des tapisse-
ries, outre les nombreux métiers de haute-lisse qu'il
installa au Taubourg Saint-Antoine et au Louvre,
installa aux Tournelles, sous la direction de François
de la Planche et de Marc Coomans, des métiers de
basse lisse qui passèrent ensuite dans le faubourg
Saint-Marceau. Louis XIV fonda plus tard les manu-
factures de Beauvais, d'Aubusson et rattacha à l'État
les ateliers de Felletin où fonctionnent des métiers
de basse lisse. Aujourd'hui des métiers de basse lîpse
sont exclusivement employés à Beauvais et à Aubus-
son. Les Gobelins ont conservé le privilège de ne
travailler qu'à l'aide de métiers de haute lisse. (V. Gh.
Blanc, Grammaire fies nrts fUcoratifs, Paris, 188*2;
J. Gniffrey ^Tapisseries françaises^ Paris ; — Dai*cel, les
Tapisseries décoratives du garde-meuble ; — Pinchart,
Histoire générn le de la Tapisserie; — Gastel, les Tapis-
seneSf Bibliothèque des merveilles^ Paris, 1876; — Eu-
gène MOntz, Tapisseries italiennes^ et la Tapisserie j
Bibliothèque de l'enseignement des beaux-arts.)
J. IJ.-z.
LITS-CLOS. Boites fermées dans lesquelles cou-
chent les paysans bretons, et dont l'usage remonte
dans ce pays à une époque assez éloignée. Les lits-
clos sont de deux espèces. Tantôt ils sont fermés par
des rideaux de cotonnade, tantôt par de petites portes
on hussiaux^ (V. ce mot. Supplément.) Il y en a qui
ont deux étages, parfois, mais plus rarement, trois.
Ces étages sont d'une faible hauteur. (leux de ces lits
qui sont vraiment anciens sont en général jolis. Les
boiseries en sont d'une ornementation soignée; aux
environs de Rennes, dans les ménages d'une petite
aisance, beaucoup de ces lits sont à colonnes, tour-
nées en quenouille, surmontées parfois d'un balda-
quin en étoffe ou en papier peint. Le bois de ces lits
n'est pas plud élevé de terre que celui de nos lits or-
dinaires. La planche qui fait face à la porte, haute
d'environ quarante centimètres, est ornée de moulures
et dé sculptures, souvent d'un bon style. Une échan-
crure ménagée au milieu permet à un homme de s'y
asseoir pour se vôtir. Presque toujours le lit-clos fait
partie de la dot de la femme. C'est elle qui l'apporte,
ce qui lui donne le droit, si le mari lui fait un reproche,
do répondre qu'elle est couchée dans son lit à elle.
L'ouverture qui permet d'entrer dans ces lits me-
sure entre 1 mètre carré et 1™50. Une huche ou met
placée devant sert à y monter. J. B-z
LITTÉRATURE. Ce mot, dans son acception la plus
abstraite et la plus étendue, s'applique tantôt à la
théorie générale, tantôt à l'histoire des œuvres de
l'esprit humain, tantôt à l'une et l'autre en môme temps.
Ainsi l'on dit qu'un homme a de la littérature quand
il a pris quelque tf^inture des ouvrages qu'un pays a
produits en ses différents âges, et que l'étude l'a rendu
capable d'apprécier un livre avec goût, et selon les
règles assignées par l'art et la critique aux genres lit-
téraires. Telle est, en effet, la variété qui règne entre
le» diverses productions des belles-lettres, qu'on les a
soumises, comme celles de la nature, aux procédés
de la classification. D'abord on a distingué la prose et
la poésie', on a défini l'une la langue de la raison, l'au-
tre celle de l'imagination et du sentiment, et l'on a
établi les caractères propres qui conviennent à cha-
cune d'elles. Ce n'est pas que la raison soit ou puisse
être sacrifiée dans les œuvres poétiques, et que l'ima-
gination et le sentiment n'apparaissent point dans les
œuvres de la prose; mais il demeure vrai que la rai-
son domine dans celles-ci, comme dans celles-là
les mouvements passionnés, l'éclat et la vivacité des
peintures. — A leur tour, la poésie et la prose se sont
divi8<^es en plusieurs genres. La première a produit,
iM>mme genres principaux, la poésie li/rigue, la poésie
épique^ la poésie dramatique et la poéne dUactiqua;
comme genres secondaires, la satire, la poésie pasto-
r lie, VapologU9y Célégie et,à un degré inférieur encore,
les poésies légèi-es, La seconde comprend trois grands
genres : \* éloquence, V histoire, la philosophie et trois
genres secondaires : le genre épistolaire, la critique et
le roman. De sorte qu'un cours complet de littérature
serait celui qui passerait successivement en revue,
dans toutes leur variétés, toutes les œuvres de l'esprit,
avec leurs divisions et subdivisions, pour en marquer
l'origine, les caractères, les règles et Thistoire.
Au sens historique, le mot littérature sert à dési-
gner dans leur ensemble les ouvrages d'esprit qui se
produisent d'âge en âge chez les différents peuples, et
qui constituent comme leur patrimoine littéraire. Sous
ce rapport, les nations ne sont pas également parta-
gées; tandis que la Grèce et Rome aux temps antiques,
et la France dans les temps modernes, brillent au pre-
mier rang par la riche variété de leurs chefs-d'œuvre,
combien de peuples semblent aujourd'hui déshérités
de la gloire des lettres, les uns après avoir jeté jadis
un plus ou moins vif éclat, les autres attendant en-
core, ce semble, l'heure marquée par la Providence !
Qu'est devenue, depuis le Camoëns, la littérature por-
tugaise, et, depuis Cervantes, la littérature espagnole?
Quand est-ce que la littérature américaine prendra
véritablement son essor? Cette inégalité à ses causes :
lecli:Dat, la situation et la configuration géographique,
la vie politique d'un peuple, l'époque enfin où il vient
remplir son rôle sur la scène de l'histoire, sont autant
de circonstances qui exercent une action puissante,
décisive môme, sur le développement de sa littérature.
Les mômes causes influent sur l'âme et l'imagination
des écrivains et impriment à leurs écrits un caractère
particulier qui détermine ce qu'on appelle Tesprit de
la nation. Chaque auteur a beau conserver son origi-
nalité; vainement un La Fontaine, un Molière, un Cor-
neille, un Racine, un Boileau ont eu leur génie distinct :
la critique ne retrouve pas moins entre eux comme
un air de famille^ qu'ils tiennent dn leur origine com-
mune et de ce qu'on est convenu do nommer l'esprit
français. (V. ce mot.) Tout peuple a son esprit, qu'il
répand dans ses livres, s'y peignant à son insu en traits
expressifA et ineffaçables. Les Nuits d'Youog peignent
aussi fidèlement par un certain côté les Anglais, que
les comédies d'Aristophane peignaient les Athéniens ;
et s'il nous est donné de nous mirer dans certains con-
tes do Voltaire, les Allemands ont également le pri-
vilège de se reconnaître dans les élucubrations de
leurs métaphysiciens.
On s'est plu à reconnaître dans le développement des
littératures trois époques : l'enfance^ l'âge d'or et la
décadence. L'histoire de la Grèce et de Rome ne con-
tredit pas cette division : il serait aisé de déterminer
chez les deux peuples le commencement et la fin des
trois périodes. Nous conviendrons même que cette divi-
sion a quelque chose de fondé : n'est-il pas naturel que
la vie littéraire d'une nation se ressente des vicissitudes
de sa vie politique, et que l'une se développe parallèle-
ment à l'autre? N'est-ce pas le spectacle que nous offre
l'histoire de notre pays? Depuis ses origines jusqu'au
règne de Louis XIV, ne semble-t-il pas que la langue
et la nationalité françaises se forment, progressent et se
constituent, pour ainsi dire, ensemble, et que les des-
tinées de l'une soient les destinées de l'autre ? Cepen-
dant, à dire vrai, plus d'une littérature moderne nous
parait se plier difficilement, sinon résister à l'applica-
tion de cette théorie. La nôtre même y répugne, La
langue proprement dite, telle que l'ont parlée les con-
temporains de Louis XIV, s'est altérée dès le xyiii» siè-
cle; l'invasion de littératures étrangères, le mélange
systématique du vocabulaire des sciences avec celui
des lettres, les passio'is politiques qui ont falsifié le
sens de bien des termes, enfin les habitudes peu scru-
puleuses du journalisme l'ont gâtée davantage encore
de notre temps. Mais, d'autre part, on ne peut nier
que l'école dite romantique n'ait renouvelé les sour-
ces de la poésie ; que les enseignements de la Révo-
lution française n'aient fait naître une méthode beau-
coup plus philosophique et jusqu'ici inconnue d'étudier,
d'interpréter et d'écrire l'histoire, que la critique en-
fin, s'affranchissant de toute règle qui relevait moins
du bon sens que de la convention, n'ait trouvé le
secret de porter, sur les œuvrer* de l'esprit, des juge-
ments approfondis, des appréciations originales, au
point que plusieurs de ces livres dont eux-mômes des
monuments. Nous refusera-t-on le droit d'en conclure
que la littérature française a subi depuis le xviii<> siè-
cle, non pas une véritable décadence, comme on l'a
préien'iu. mais plutôt une transformation? — A. U.
LLOYD, grand établissement de Londres, qui a son
LOG
— 4842 —
MAG
administration centrale dans les bâtiments delà Bourse.
C'est tout à la fois une compagnie d^assurances mari-
times et une agence de correspondance fournissant
tous les renseignements possibles sur les b&timents
en cours de navigation dans toutes les parties du
globe. Il a plus de mille sociétaires divisés en trois
classes : 1<* celle des assureurs, en leur propre nom ;
^^ les agents des compagnies d^assurances maritimes;
3* les courtiers de navires. Quiconque veut devenir
sociétaire de Tune des deux premières classes paye
95 livres sterling (625 fr ) lors de son admission, et,
de plus, une cotisation annuelle de 4 livres (100 fr.);
ceux de la 3* classe ne payent que la cotisation an-
nuelle. Les affaires de la société sont dirigées par un
comité de 25 membres. — Le Lloyd entretient dans
tous les ports de quelque importance des agents spé-
ciaux qui lui transmettent toutes les informations aussi
promptement et aussi régulièrement que possible. Le
secréuire du comité reçoit leur correspondance, dont
la teneur est transcrite et classée très méthodique-
ment sur des registres ouverts à tous les membres so-
ciétaires, avec renvoi à un livre principal qui contient
les renseignements détaillés sur les points où le na-
vire a touché à telles dates, les rencontres qu*il a faites
en ronte, les sinistres qu'il a essuyés, etc. — Cest
vers la fin du xvii<' siècle que le Lloyd prit naissance
à Londres, dans les environs de la Bourse : son ber-
ceau fut un petit café tenu par un nommé Lloyd dans
Lombard street. Là se réunissaient des armateurs, des
assureurs do navires, des courtiers, qui finirent par se
constituer en société, avoir un local à eux, puis s'instal-
lèrent dans la Bourse même, vers 1727. Le Lloyd fut le
premier établissement do ce genre, et c*est à son exem-
ple qu*il s'en établit d'autres dans ds grandes villes de
commerce anglaises, françaises, allemandes, etc. — Le
plus célèbre après le Lloyd britannique est le Lloyd au-
trichien^ qni a pris à peu près les mêmes attributions,
dans un cercle moins vaste, et qui, de plus, e^t une
grande compagnie de navigation à vapeur pour la Médi-
terranée, et surtout l'Adriatique et l'Orient. Il est éta-
bli à Trieste, où il fut fondé en 1833, et se divise en
trois départements : celui des assurances maritimes, qui
date de l'origine de la société; celui de la navigation à
vapeur créé en 1836, celui dit littéraire et artistique,
institué en 1850, et dont les attributions sont tout ce
qui concerne la publicité de l'éublissement, les livres.
Journaux, cartes, plans, dessins, etc. Chaque déparie-
nient a un directoin^, et les trois directoires relèvent de
l'autorité supérieure d'un conseil de délégués. — H y
a encore le Lloyd de l'Allemagne septentrionale^ fondé
à Brème en 1857, société qui fait la navigation à vapeur
transatlantique, celle du Weser, le remorquage fluvial
et les assurances maritimes. Il a des succursales pour
les assurances à Marseille, à Hambourg, à Amsterdam et
à Rotterdam. — Une puissante compagnie russe, dont le
siège est à Odessa, y fut fondée en 1856, sous le nom
de Société de commerce et de navigation ; on l'appelle
aussi, par analogie, Lloyd nuse. Elle a pour but de
développer le commerce de la Russie méridionale au
moyen d'une véritable flotte à vapeur desservant un
grand nombre de lignes, non seulement sur le littoral
de la mer Noire et de la mer d'Azof, mais encore dans
la Méditerranée et l'Adriatique, avec stations à Trieste
et à Marseille. En 1860, elle avait déjà en service plus
de 40 bâtiments à vapeur. CD — y.
LOCOMOTIVE, machine de traction sur les chemins
de fer. Le travail produit par une locomotive s'élève
de 250 h 300 chevaux-vapeur, dont 15U seulement uti-
lisés pour le remorquage des voitures. Un cheval-
vapeur équivalant à peu près à 3 chevaux ordinaires,
un train est donc comme emporté par 450 chevaux.
Construites pour traîner peu et aller vite, les machinfs
à voyageurs marchent avec une vitesse minima de
40 kilom. à l'heure, traînant 15 voitures; elles peu-
vent atteindre une vitesse de 60, 80 et mémo 100 kilom.,
mais alors elles ne peuvent remorquer que 8 ou
même 6 wagons : ce qu'on gagne en vitesse, on le
perd en force. Les machines à marchandises vont plus
lentement et remorquent davantage ; leur vitesse ne
dépasse pas 30 kilom. Les machines mixtes, qui ser-
vent à deux fins, marchent à des vitesses comprises
entre 35 et 50 kilom. Arrêts compris, un train omni-
bus fait 30 kilom. à l'heure. Un express fait 40 à 50
kilom. L'express dire(^t entre Londres et Paris marche
avec une vitesse plus grande, ainsi que le train de
la malle des Indes, dont la rapidité de marche approche
de 100 kilom. — Une locomotive Crampton, remor-
quant 12 wagons, consomme 8 kilogr. de coke par
kilom. en été, et 8 li2 en hiver. Une locomotive
mixte, avec 18 voitures, dépense autant. Une fingerth
à marchandises consomme 16 kilogr. de houille en
été et 18 en hiver. Somme faite des dépenses en com-
bustible, huile, graisse, suif, chiffons, éclairage, eau,
entretien personnel, le parcours kilométrique coûte
en moyenne 93 centimes. — Les machines s'usent
assez vite ; après un parcours moyen de 300,000 kilom.,
il faut les reconstruire, ce qui coûte environ 40,000 fr.
Par an, une machine fait de 30 à 25,000 kilom.; la vie
d'une locomotive est donc de dix ans. Une locomotive
munie de son fonder revient en moyenne à 60,000 fr.
Les Engerth coûtent près du double. — Une machine
Crampton chargée, avec tender approvisionné, pèse
45,000 kilogr. ; une machine mixte, 35,000 kilogr. ; une
Engerth, 6t,000 kilogr. Ces poids énormes expliquent
pourquoi peu à peu il a fallu consolider les rails et
leur donner, par mètre courant, jusqu'à 30 et 38 kilog.
LORRAINE (faIbncrs db). Les fabriques de Loi^
raine tiennent une place notable dans l'histoire de la
céramique; celles de Niderviller, Lonéville, Bellevue,
Toul et Vaucouleurs, entre autres, se distinguent tout
spécialement par l'importance de leur production, autant
que par l'habileté de leurs artistes. Au xvni* siècle ces
fabriques sont en très grand nombre. Les produits des
fabriques de Lorraine dont quelques-unes existent
encore, se distinguent par la finesse et la légèreté de
la matière et la variété des couleurs. Les émaux en
sont très beaux, le dessin élégant et la forme très re-
cherchée. Lorsque des rehauts d'or viennent compléter
la composition, ils sont. en général très discrets, et les
reliefs y sont modelés avec un soin minutieux.
LOUIS (Chant de), en allemand Ludwigslied, mo-
nument de l'ancienne poésie allemande, qu'on croit
avoir été écrit par un ecclésiastique en 882. C'est un
chant de grâces sur la victoire remportée en cette
année par le roi de France Louis III, sur les Normands,
à Saucourt, en Picardie. Il est divisé en strophes de
4 et de 6 vers. Longtemps perdu, il a été retrouvé par
Mabillon et publié avec commentaire et traduction
par Hoffmann de Fallersleben (1837). (V. L. Gautier,
les Épopées françaises^ Paris, 2« édit. 1878, gr. in-8'.
tom« I«'.)
LUNETTES Les anciens connaissaient l'effet des
verres concaves pour éclaircir la vue des myopes, et
Pline rapporte que Néron se servait d'une émciïude
ainsi taillée pour mieux voir les combats des gladia-
teurs. Mais si l'on employa, à Rome, le monocle ou
lorgnon à seul verre, il ne parait pas qu'on ait eu
l'idée d'ajuster deux verres lenticulaires dans une
même monture pour former des besicles^ ou lunettes
proprement dites. Cet instrument était, au contraire,
connu des Chinois de temps immémorial. On ne sait à
quelle époque les lunettes ont paru en Europe, ni
par qui elles forent inventées : du Cange ayant prouvé
qu'elles existaient en 1150, leur invention n'est due,
comme on l'a prétendu, ni à Roger B^con ni au Flo-
rentin Salvino degli Âmati, son contemporain, et en-
core moins à Alexandre de Spina. moine dominicain
du xiv* siècle, ou au Napolitain J-B. Porta. On fixa
d'abord les lunettes au moyen d'un bandeau quon
attachait derrière la tète ; plus tard on imagina de
réunir les deux verres à l'aide d'un ressort, ce qui
produisit les pince-nez. C'est à une époque tout à fait
moderne qu'on adapta des branches au ressort.
LU NÉ VIL LE (paIbnces db). Cette fabrique fut fon-
dée sous le duc de Lorraine Léopold (mort en 1729)
par un sieur Jacques Chambrette.
Elle atteignit sa plus grande prospérité vers 1737.
Elle prit à ce moment le titre de manufacture du roi
de Pologne. En dehors d'un grand nombre de produits
d'ordre supérieur, c'est à elle qu'on doit ces repro*
ductions d'animaux, tels que lions couchés, qui ont
décoré pendant longtemps les piliers de nos maisons
de campagne.
M
MAGHOL ou MAGHUL, instrument de musique des
Hébreux. Le P. Kircher croit que c'était une sorte de
viole. Forkel lui suppose la forme d'un violon, dont les
dépressions latérales n'offriraient pas d'angle dans la
ME6
— 4843 —
MOU
partie moyenne. D^autres pensent que c'était un lulh
a huit cordes, ou bien un instrument à percussion
comme le sistre.
MARSEILLE (Faïbncbs db). On trouve en 1607, à
Marseille, dans le quariier Saint«Jsan-du-Désert, un
faïencier du nom de Clérlssy, parent des Glérissy établis
h Mousiiers (F. ce nom) : la pharmacie de Thôpilal de
Narbonne est garnie de pots façonnés et peints chez lui.
En 1709, Jean Delaresse fut un des premiers céramistes
en faïence blanche, qui remplaça les faiences brunes
d'Avignon très élégantes de forme, mais rentrant par
leiur couverte dans le domaine de la poterie proprement
dite. En 1749, Honoré Savy introduisit la faïence à dé-
cors polychromes, qui remplaça Tancienne faïence à
camaïeu bleu et violet. Les faïenceries de Marseille
étaient nombreuses et prospères, lorsqu'un grand nom-
bre d'ouvriers, à la suite de contestations avec leurs
patrons, émigrèrcnfc à Gônes, et, quand vint la Révo-
lution, la concurrence des produits génois avait fait
tomber presque toutes les fabriques marseillaises. Dès
1784, Savy avaitcherché un dédommagement en créant
une manufacture de porcelaines.
Vers le milieu du xviii« siècle les fabriques de
faïence établies à Marseille, hors des portes et à la
Joliette étaient au nombre de dix, et leur produc-
tion était considérable. L'abbé d'Ëxpilly prétend que
pendant la seule année 1 7 H(( l'exportation marseillaise
se serait élevée à 105 000 livres de faïence. De
toutes ces fabriques la plus célèbre a été celle d'Ho-
noré Savy, qui prit en 1777, lors de la visiie à Mar-
seille de Monsieur, comte de Provence, le titre de Ma-
nufacture de Monsieur frère du roi. Vinrent ensuite
la fabrique do Joseph-Gaspard-Kobert, dont les faïences
sont souvent rehaussées d'or et portent quelquefois à
leur revers les initiales du fabricant; puis la fabrique
de la veuve Perrin dont les produits sont fréquemment
marqués du monogrammme de la lettre V accouplée à
un P. Tout en présentant ouehiues points de res-
semblance avec les produits de Moustiers, les faiences
de Marseille ont un caractère propre qu'elles doivent
moins à leurs formes rocailleuses un peu semblables
aux formes de la fabrique de Strasbourg, qu'à l'emploi
de certaines couleurs, telles que le vert dit vert Savy,
et l'alliage du manganèse au bleu de cobalt. C'est à
tort qu'on a cru un moment que la fleur de lis qu'on
rencontra fréquemment au revers des pièces niarseil-
laises du xviiie siècle était la marque exclusive de Mar-
seille. La flëur de lis accompagne des produits d'origines
bien différentes. Il est probable qu'elle était l'apanage
de toutes les manufactures munies d'un privilège
royal. (V. Davillier, Histoire des faïences et des porce*
laines de Moutiets^ Marseille, etc., 1863.)
MATÉRIAUX. En construction, on emploie un cer-
tnin nombre de matériaux artificiels. Les Romains,
comme les modernes, obtenaient des blocs en moulant
des bétons dans les caisses de bois. Les matériaux de
ce genre furent oubliés pendant le moyen âge. En 1776,
l'ingénieur italien Calamatta s'en servit, mais sans suc-
cès, pour consolider le môle de Civiia-Yecchia. On
ne réussit pas mieuxon France, quelques années après,
pour la digue de Cherbourg et les Jetées de Saint-Jean-
de-Luz. Mais les grands travaux de Vicat sur les chaux
hydrauliques résolurent le problème en 1823. Poirel en
fit la première application heureuse, après 1830, pour
défendre le môle d'Alger contre l'action destructive de
la mer. Avec les mortiers et ciments de Vicat on fait,
par le moulage, des dalles pour trottoir, des seuils et
marelles d'escalier, des carrelages, des conduites pour
l'eau et le gaz, des voûtes, des vases, des colonies, des
statues, des bas-reliefs, des ponts, et jusqu'à des mai-
sons entières. A* Bérar.l a proposé, pour les travaux à
la mer, des matériaux formés, par la fusion, avec les
scories de forges. Dumesnil en a imaginé qui s'obtien-
nent avec dos mélanges de plâtre aluné, de chaux, de
sable et d'ocre jaune. Le grès factice de Durand (1845)
s'obtient en mélangeant à chaud du sable, de la chaux
ou de la craie. La pierre artificielle de Ransome se pri^-
pare avec du sable, de l'argrle pulvérisée, de la craie
et du silicate de soude liquide, le tout mélangé à froid,
puis plongé pans une dissolution de chlorure de cal-
cium.
MATIÈRES PREMIÈRES, en terme d'économie poli-
tique, tout ce que la production doit transformer. Elles
fout partie du capital circulant ou mobile.
MÉGALITHIQUES (Monuments), nom donné aux mo-
numents des âges très reculés, consistant en grosses
pierres non taillées par l'industrie humaine, mais telles
que la nature les donnait.
MÉGASGOPE, instrument d'optique au moyen du-
quel les objets opaques sont représentés en grand do
la môme manière que les objets transparents le sont
dans la lanterne magique, et qui sert à obtenir des
copies amplifiées de statuettes, de bas-reliefs, de ta-
bleaux, de gravures. On en attribue rinvention au phy-
sicien (otaries eu 1780. "Lf^mégascope réfracteur achro»
matique, inventé en 1838 par l'opticien Charles Che-
valier, puis amélioré par son fils Arthur, sert pour
agrandir les épreuves photographiques.
MÉLOPHONE, instrument de musique à vent et à
anches libres, extérieurement semblable à une grande
vielle. L'air est Introduit dans les tuyaux par un souf-
flet à double vent que l'exécutant manœuvre aven la
main droite, tandis que de la main gauche il attaque
de petites saillies servant do touches. Le mélophone
fut inventé par Lecterc, horloger parisien, en 1839.
MÉTAUX PRÉCIEUX, nom qu'en économie politique
on donne aux dHux métaux qui servent à faire de la
monnaie, l'or et Varge7ii {V. ces mots dans le Diction^
naire.) En tant que monnaie, ce senties types auxquels
on rapporte la valeur de toutes choses (K. Monnaie);
leur abondance ou leur rareté exerce de l'influence sur
les transactions, sur la distribution de la richesse, et
occasionne des perturbations quelquefois profondes. La
production considérable de l'or dans notre siècle parait
dfivoir amener la baisse de ce métal : toutefois cette
baisse est amoindrie par plusieurs causes, telles que
l'augmentation de la population appelant une extension
correspondante de la monnaie, la naissance d'États
nouveaux dans df*s régions jusqu'alors vouées à la soli-
tude (Australie, Étais-Unis), le retour de pays déchus
à une civilisation avancée (Turquie), le mouvement qui
porte les peuples vers les Jouissances du luxe, et par
conséquent vers un emploi de plus en plus grand des
métaux précieux, l'activité de l'Industrie et du com-
merce, qui augmente la somme des monnaies circu-
lantes, etc. L'Espagne et la Belgique, craignant que la
valeur relative de la monnaie d'or et de tout(*s choses
ne fût bouleversée, ont pris des mesures pour dimi-
nuer la circulation de cette monnaie, (^ue la Hollande
supprima môme quelque temps. Une baisse de l'argent
se produira peut-être par l'exploitation de gisements
qui n'ont pas encore été touchés en Amérique, et par
un meilleur mode d'exploitation des anciens. — Il n'est
pas vrai que l'or et l'argent soient Tunique richesse
ou la richesse par excellence ; le système mercantile
(K. ce mot) était fondé sur cette erreur. (K. aussi
Ralancb du commerce.)
MINE. L'usage des mines de guerre remonte à une
époquKreculéf*. Enée, le tacticien qui vivait au iv« siècle
avant Jésus-Christ, en parle comme d'une chose déJ'X
très ancienne. Les mines étaient alors des galeries sou-
terraines au moyen desquelles l'assiégeant cherchait à
pénétrer dans la place. Quelquefois il les arrêtait sous
les remparts, dont il démolissait les premières assises
sur une certaine étendue, mais en les étançonnant ;
puis, en mettant le feu aux étais, il faisait écrouler la
muraille et ouvrait une brèche pour l'assaut. Depuis le
zv*' siècle de notre ère, on charge les mines avec de la
poudre. L'idée d'employer l'électricité ponr enflammer
la charge remonte aux travaux de Franklin, en 1751 ;
mais elle n'est devenue praticable qu'après l'invention
de l'appareil de Rliumkorff^, en 1853, et ce progrès
est dû principalement aux expériences de Gregorio
Verdu, lieutenant-colonel du génie en Espagne.
MOINEAUX, espèces de guérites qu'on établissait
au xvi« siècle, dans les fossés des places fortes, pour
en défendre le passage. On leur donnait aussi le nom
de casematety qui prit ensuite une autre signification.
MOUSTIERS (Faïences de), en Provence. Ces faiences,
longtemps attribuées à Rouen, à Saint-Cloud, à Mar-
seille, remontent au commencement du zvii« siècle. On
fabriquait d'abord de la poterie ordinaire ; un sieur Jean
Clérissy. mort en 1689, travaillait la terre dans un
goût analogue anx travaux de Palissy. On voit un
Antoine Clérissy fondera Fontainebleau, en 1641, une
fabrique de terre sigillée. Un autre Antoine Clérissy,
fils présumé du précédent, établi à Moustiers, parait
avoir appris d'un moine servite, venu des lies de
Lérius, le secret de l'émail blanc, qu'il décora d'orne-
ments bleus; l'essor de son industrie fut encouragé
par les ordonnances do Louis XIV, qui, dans les mo-
ments de crise, contraignit ses sujets à porter leur
NAV
— 4844 —
NEV
argenterie à la Monnaie et k la remplacer par de la
vaisselle de faieuce et de terre. Pierre Clérissy, fils
d'Antoine, anobli par Louis XV en 1743» adopta comme
décoration des sujets mythologiques : ses œuvres
consistent en plats, bassins, pots de pharmacie, fon-
taines, hanaps, encriers, vases de Jardin, décorés de
camaïeux bleus, avec sujets copiés sur des gravures
connues du temps. Au milieu du xviii» siècle, le ca-
maieti bleu ne fut plus Is seul procédé des Clérissy,
car on sait que Mme de Pompadour commanda à leur
fabrique un service orné d'une décoration polychrome.
La donnée décoraiive changea en même temps : on
entra dans Tère des écosson s d'armoiries, des entrelacs
et des Amours, des balda(|uiiis abritant des Vénus
marines et des Neptunes. Joseph Olery fut le prin-
cipal représentant de cette école nouvelle. La Révo-
lution engloutit les faïenceries de Moustiers, comme
celles de Nevers et de Rouen. (V. Davillier, Histoire
des faïences et des porcelaines de Moutiers^ de Afur-
selle, etc., 1863.)
MUSEROLLE. Sorte de panier en fer forgé décoré
d*ornements estampés ou ciselés, découpés en ajours,
dont on se servait au moyen-âge pour museler les
haquenées ou les mules montées par les femmes.
Lorsque les chevaux des cavaliers portaient des muse-
rolles c'était en général dans les tournois, dans les fcies
et les cérémonies pour ajouter à Téclat du caparaçon-
nage. Quclqufts muserolles de fabrique allemande,
italienne ou française, dont rornementation est très
riche, sont devenues de très belles pièces de collection.
MUSICOGRAPHE, appareil destiné à écrire la mu-
sique à mesure qu'on la compose. Les musicographes
présentésjusqu'à présent n'ont guère réussi. ( K. Piano.)
Dans celui du vicomte Dumoncel (1854), qu'il appelle
Enregistreur électrique des ioi provisa tiens musicales^
réleciricité rend le piano libre de tout mécanisme en-
combrant ; l'appareil peut être placé en tel endroit
que l'on veut. Il est construit de manière à faire réa-
gir électriquement les touches du piano sur un petit
clavier composé d'aiguilles de fer et mis à portée d'un
mécanisme enregistreur élcctro-chimique.
N
NATDRAUSATION. Une loi de 1867 décide que
l'étranger qui, après l'âge de vingt et un ans accom-
plis, aura obtenu l'autorisation d'établir son domicile
en France et y aura résidé pendant trois années, peut
être admis à Jouir de tous les droits de citoyen fran-
çais; que le séjour en pays étranger pour l'exercice
d^iine fonction conférée par le gouvernement français
est assimilé à la résidence on France.
NAVALES (Gonstruclions). Dès 1805, les Anglais
cherchèrent à utiliser le fer dans les constructions
navales, s(ât pour augmenter la vitesse en raison de la
diminution du poids de la coque, soit ponr augmenter
la quantité du fret utile en diminuant le poids mort.
Les bateaux en fer apparurent alors sur les canaux. En
1821, Napier flr. construire à Horniey le premier bateau
en fer, qui, muni d'une machine à vapeur, se rendit de
Londres au Havre, et remonta la Seine jusqu'à Paris.
En 1822, la maison Gavé, en France, entreprit à son
tour des navirrs en fer. C'est seulement en 1838 que
VIronsidfi fut construit en Angleterre pour la naviga-
tion de mer; depuis ce temps, on a fait des bâtiments
en fer de 2 à 3,000 tonneaux. Outre Tavantage de la
durée et de la légèreté qu'ils ont sur les navires en
bois, les passagers et les marchandises y trouvent plus
de garanties de sécurité, soit contre l'incendie, Hoit
contre les voies d'eau, soit contre les causes de dislo-
cation.
Notre époque voit s'opérer dans les constructions
navales, pour la marine militaire, une révolution très
importante ; c'est non seulement la fin prochaine des
bâtiments à vuile, remplacés par les bâtiments à va-
peur, mais la création des navires cuirassés, A l'époque
de la guerre de Grimée (1854-1856), on voulut procurer
aux murailles des navires de guerre une force de ré-
sistance au canon plus considérable que le bois ne pou-
vait leur en donner. L'idée n'était pas nouvelle ; elle
germait dans l'esprit des constructeurs depuis près d'un
siècU', et, sous le règne de Louis- Philippe, le général
Paixhans proposa et préconisa Teroploi du fer. Mais le
premier essai n*en fut fait qu'en 1855 : la France en*
voya, pour réduire Kinburn, trois batteries flottantes,
vilains bâtiments au point de vue pittoresque, très peu
faits pour tenir la mer, mais tirant peu d'eau, et por-
tant une artillerie considérable par le nottibre et le ca-
libre, sous la protection d'une cuirasse de fer impé-
nétrable aux coups de l'ennemi. Il fut démontré qu'on
arriverait ainsi à détruire lea plus redoutables fortifi-
cations. Les Anglais suivirent cet exemple, mais en
appliquant le système de la cuirasse plutôt à des ca-
nonnières qu'à des batteries flottantes. C'est encore à
un Français, M. Dupuy de Lôme, qu'appartient l'in-
vention dos frégates cuirassées : ia frégate cuirassée
la Gloire fut mise en chantier à Toulon en 1858, et
ce fut seulement Tannée suivante, quand on allait la
mettre à l'eau, que les Anglais, se décidant à rimit^r,
commencèrent la construction du WoiTtoi*. Depu's
cette époque, les frégates cuirassées se multiplient
dans les deux pays, bien que l'on ne soit pas encore
complètement fixé sur le système qu*il faut préférer :
on essaye le fer seul, le bois et le fer réunis, une com-
binaison de fer et de caoutchouc, ou de Al de fer et de
chanvre, etc. Le procédé le plus général consiste à
blinder les frégates avec des plaques de fer, épaisses
de 3 pouces à 4 pouces 1/2. On a pu se convainere
immédiatement de l'invulnérabilité de ces navires par
l'a'hcienne artillerie : aussi les ingénieurs se sont-ils
appliqués à donner aux projectiles la force nécessaire
pour percer les cuirasses. Des expériences qui ont été
faites en Angleterre et en France, il n'est résulté rien
de très concluant : il a été constaté toutefois que ce
n'est point avec des bouches à feu d'un énorme calibre,
avec des boulets d'un volume extraordinaire, qu'on
peut arriver à percer les plaques, mais qu'il faut avant
tout se préoccuper de la vitesse du projectile au mo-
ment où il atteint le but. Comme les gouvernements
gardent, au sujet de leurs essais, un secret qu'il est
difficile de percer, on ne saurait dire s'il existe, en ce
moment, des pièces d'artillerie, canons rayés ou au-
tres, qui donnent aux projectiles une impulsion as«ez
vigoureuse, ni des boulets d'une nature et d'une forme
particulières, qui aient une force de pénétration suf-
fisante. D'ailleurs, aucun combat de frégates cuirassées
n'a indiqué Jusqu'ici comment ces frégates se compor-
tent. Dans la guerre qui a éclaté entre les Américains
des Etats-Unis en 1861, on a vu employer deux bâti-
ments de formes nouvelles, le Merrimae et le Moni'
tor, bientôt imités par les constructeurs : on fait des
navires rasés autant que possible sur l'eau, presque
immergés, pourvus d'une artillerie peu nombreuse
mais de fort calibre, cuirassés sur le pont comme au-
tour de la coque, et présentant l'aspect d'une vaste
carapace de fer, percés seulement d'étroits sabords
pour laisser passer les canons. On donne aussi à ta
carapace une extrême déclivité, do façon que le boulet
rencontre toujours une surface fuyante et ne puisse
battre de plein fouet. Les Américains ont imaginé
aussi d'armer d'un fort éperon l'avant des navires cui-
rassés, afin de percer et de couler l'ennemi par un
choc à toute vapeur. Ils élèvent enfin sur le navire
une tour cuirassée mouvante, d'où l'on peut tourner
des canons dans toutes les directions, ce qui permet de
l)alu>er le pont s'il était envahi à l'abordage. L«s ra-
vages exercés par le Merrimae dans la flotte de bois
des Etals du Nord ont prouvé d'une manière effrayante
les avantages des navires cuirassés. On avait contesté
longtemps que les frégates cuirassées pussent bit^n
tenir la mer : la Gloire est sortie victorieuse d^s tem-
pêtes de la Méditerranée. Sa vitesse est, en outre, an
moms égale ^ celle des meilleurs marcheurs. Enfin
l'envoi de la Normandie au Mexique, en 1862, a établi
que les nouveaux navires ne sont point impropres aux
plus longues navigations. B.
NE VERS (Faïences de). L'autorisation d'établir uite
faïencerie à Nevers fut accordée par Henri 111, en lo'îS,
à Dominique de Gonrade^ gentilhomme d'Albissola,
près de Savone, et la fabrication se développa sous la
protection desGonzague, ducsde Nivernais. Les faïences
furent une imitation presque servi le des majoliques
italiennes: sur un fond bleu oudé se détachent des
<iieux marins^ avec des tons viol«ts de manganèse et,
au XVII* siècle, avec des tons jaunes tirant sur l'orangé.
Après Dominique de Gonrade, son fiis Antoine fit pros-
pérer cette industrie ; puis un autre Dominique, fils
d'Antoine, retourna en Italie en 1651. Huis la f»ien-
cerie nivernaise n'en continua pas moina ses travaux,
OIR
— 4845 —
OPE
80US la direction de six générations de Custode. Dans
ce second &ge, l'imitation italienne disparu!, et le goût
persan éclata on bouquets de fleurs et en oiseaux exo-
tiques, peints en jaunoec en blanc sur fond bleu lapis
applique par immersion. On mit aussi à contribution
les figures et les motifs des modèles chinois, mais sans
leurs fraîches et chaudes nuances: c'est toujours du
bleu, du blanc, du Jaune sèchement découpés l'un sur
l'autre, et du vert quelquefois, produit par un mélange
de ce juune et de ce bleu. Au milieu de ce xvii* siècle,
une statuaire grotesque sortit des ateliers de Nevers,
pour Tornement des Jardins, et Ton imita maladroite-
ment les faïences de >loustiers et de Rouen. {V, ces
mots). Knfin la faïencerie nivernaise mourut pendant la
Bévoluiion, dont elle mitlesemblèmessurses dernières
pièces, toutes pesantes et d'un galbe disgracieux.
A Niivers comme k Rouen les signatures font presque
toujours défaut. Lessiglesetles monogrammes sont fré-
quents, mais sauf quelques exceptions, la plupart sont
encore inexpliqués. La fabricution nivernaise «e divise
en trois époques bien distinctes: 1* Tinflueiice italienne.
A celle-ci se rattache toutes les pièces dont la forme
et le décor rappellent la tradition de l'école d'Urbino
du XVI* siècle; 2* prépondérance du style orientai as-
socié à l'art italien. Les belles pièces k fond bleu vio-
lacé connues sous le nom de 6/tfu</ePer«e appartien-
nent à la deuxième époque ; 3* époque dite franco-
tiivernaise, qui ouvre l'ère des faïences usuelles. L'art
n'y tient plus la première place. Les pièces qui datent
dé celte dernière époque doivent plutôt être attribuées
à la fabrique de la Chariié-sur-Loire qu'à celle de Ne-
vers proprement dite, qui comptait encore onze ate-
liers à la Révolution trançaise. C'est à la Charité-sur-
Loire, fabrique voisine de Nevers, et aux fabriques des
environs, dépendantes de Nevers, que furent exécutées
toutes les pièces connues comme faïences nivernaiscs
des basses époques. (V. Du Broc de Sagange, les
Faïenciers et Us émailteurs nivernais^ 18<i3 in 4«, et
Albert Jacquemart, les Merveilles de la Céramique).
MDERVILLER (Faîbncbs Dk). Cette fabrique date des
environs de 1754. On en attribue la fondation à Jean
Louis de Beyerlé, conseiller du roi, seigneur de Ni-
derviller. A quelques années de là elle devint la pro-
priété du comte de Custine. Le directeur y recevait
cinq cents livres par an. Les appointements du con-
trôleur ne dépassaiant pas trente sols par Jour. Les
artistes y étaient payés à la Journée. Leurs gages va-
riaient de douze à vingt-quatre sols, a sans qu ils Jouis-
sent d'autres facultés et revenus que de leurs ouvrages
et mains-d'œuvre, et ne participent à aucun avantage
de la communauté. » Les pièces de cette fabrique sont
renommées pour la perfection de leur imitation de
gravures, de lavis de paysages sur un fond simulant
le bois de sapin. L'art du trompe-l'œil y a été poussé
à un grand degré d'imitation, et témoigne de la rare
habileté des artistes peintres de Niderviller. Les faïences
de la fabrique du comte de Custine sont souvent
marquées de deux Cadossés^ et quelquefois surmon-
tées d'une couronne héraldique.
NINFALI, ancien instrument de musique italien. Il
parait avoir été un petit psaltérion ou un petit tym-
panon à touche.
0
OIRON (FaIences d'), faïences fabriquées à Oiron,
près de Thouars en Poitou, et dont on connaît seule-
ment 67 pièces disséminées dans diverses collections.
Quelques-unes portent le monogramme H. C, signi-
fiant Henri II et Catherine de Médicis : de là le nom
de faïences de Henri 11^ donné improprement à toute
la collection. La fabrique d'Oiron fut fondée, après
1524, par Hélène de Hangest, veuve d'Artus Gouffier,
sire de Boisy, précepteur de François 1*', et placée
sous la direction d'un habile potier, François Cher-
pentior; protégée par les Gouffier Jusqu'en 1568, elle
fut ensuite soutenue par l'industrie privée Jusque sous
le règne do Hcmri lll. Le caractère propre de la faïence
d'Oiron était l'incrustation des parties colorantes dans
les parties concaves réservées à cet effet : on les rem-
plissait, et on cuisait sous vernis. Les plus anciences
pièces ont des ornements incrustés d'une seule cou-
leur, ou un petit nombre de parties coloriées autre-
ment qu'en brun noir, en brun plus clair ou en rouge
d'œillet : elles sont au nombre de 13. Dans quarante
autres, plus compliquées de détails, on trouve des mo-
nogrammes apocryphes (H couronnés, éeussons à fleurs
de lis, croissants), ajoutés pour en augmenter la va-
leur vénale ; l'influence de Palissy se fait sentir par
l'emploi encore timide d'animaux en haut-relief comme
motifs de décors. Pour les 14 dernières pièces, les
anciens procédés ont été abandonnés pour ceux de la
plupart des manufactures contemporaines. (V. Fillon,
iArt de terre chez les Poitevins ^ 18C3). Les docu-
ments retrouvés par M. Benjamin Fillon ont permis
de ressaisir l'histoire très précise de cette poterie fa-
meuse. Hélène d'Angest, dame de Boisy, veuve
d'Artus Gouffier, mère du grand écuyer et ancienne
gouvernante du roi Henri II, habitait pendant l'été sou
château d'Oiron qu'elle embellit avec le concours de
son fils Claude. Une partie de cette habitation avait
été convertie en ateliers de poteries. On sait qu'en
1539 elle fit don de la maison et du verger où étaient
éublis les fours des ateliers à Cherpentier, et à
Jehan Bernart, gardien delà librairie d Oiron. Jehan
Bernart avait en outre une fonction spéciale et non
sans importance. Il était chargé, sous l'inspiration de
la dame de Boisy, du choix dos dessins^ chiffres,
armoiries et emblèmes qui décorent les terres ver-
nissées d'Oiron.
Ces faïences n'ont Jamais été fabriquées dans on
but mercantile. C'était le passe-temps de luxe d'une
femme de goût, versée dans l'étude des arts, qui fai-
sait confectionner sur son pré et sous ses yeux des
vases destinés à être offerts en présent à son roi, à
ses amis, à ses voisins ou à ses tenanciers. C'est ainsi
que s'explique la variéié des armes, chiffres et em-
blèmes qui décorent ces objets dont aucun ne porte
une marque de fabrique.. La dame de Boisy mourut
en 1537. Son fils Claude continua la tradition ma-
ternelle. C'est à lui qu'on fait remonter la plupart des
ouvrages venus Jusqu'à nous, et entre autres le célèbre
carrelage de la chapelle d'Oiron, à la devise des
Gouffier, portant le monogramme du roi Henri II et
de Claude, avec l'écusson des Montmorency et des
Hangest-tientis. Ce pavage fut composé et dessiné par
Jehan Bernart. On en voit plusieurs beaux échantillons
au musée de Cluny.
Il existe au même musée une grande miniature
aux armes, chiffres et devise des Gouffier : Hic ter»
minus hxret. Outre sa valeur artistique, elle présente
cette particularité très précieuse que c'est elle qui
amena M. Benjamin Fillon à faire de minutieuses
recherches h. Oiron, où il retrouva les traces de l'exis-
tence do la fameuse usine de faïences. Cette miniature
est une feuille du calendrier du livre d'heures de
Claude Gouffier. £lle figura à l'exposition de 1867,
après quoi M. Benjamin Fillon la donna au musée de
Cluny. Elle représente une scène de moissonneurs.
Klle a pour titre : Le mois d'août. L'un des moisson-
neurs porte à sa bouche une bouteille aux armes des
Gouffier. Or cette bouteille avec sa teinte claire
ivoirée, avec ses dessins bruns sur une faïence fine,
ne laisse aucun doute sur son origine. Elle est un
spécimen authentique de ces faïences connues Jus-
qu'alors sous le nom de faïences Henri II, dont le lieu
de fabrication resta ignoré Jusqu'au Jour où M. B. Fil-
lon, prenant texte de ce document peint, réussit à re-
constituer riiisiorique de la fabrique d'Oiron. La pro-
duction de ces ateliers fondés par la dame de Boisy,
productions toutes de luxe, purement décoratives, et
sans application possible aux besoins usuels, demeure
un fait isolé, sans précédent, sans suite. C'est un
accident dans l'histoire de la céramique. J. B.-z.
OPÉRA DB Paris. La façade de ce monument, éclai-
rée par quatre grands candélabres en bronze, est éle-
vée sur un perron de pierre. Elle offre un soubasse-
ment percé de sept arcades à plein cintre, dont les
doux extrêmes sont en avant-corps. Entre les arcades
centrales sont quatre statues du Drame, du Chant, de
\ Idylle et de la Cantate, surmontées de médaillons
représentant les profils de Bach^ Haydn, Pergolèse et
Cimarosa, Aux avant-corps on a placé quatre groupes :
la Musique, la Poésie lyrique, le Draoïe lyrique et la
Danse. Les arcades paraissent un peu étroites et con-
trastent p:ir leur aspect sombre avec la pompe du grand
étage supérieur. Le rez-de-chaussée sert à l'entrée des
piétons.
L'éiage se compose d'un ordre corinthien de colonne^
OPE
— 1846 —
OPE
accouplées, monoUthrs, de lGm,?0 de hauteur, s«^pa-
rant sept grandes baies, et formant ce qu'un appelle
en Italie une loggia. Deux frontons s'arrondissant sur
Tentablement dea avant-corps rompent heureusement
riioi'izontalité de la ligne. Sous un climat plus clément
qne le nôtre» la colo.inade eût pu rester ouverte;
mais il a fallu fermer les baies par lesquelles le vent
et la pluie se fussent engouffrés. Le vide a été comblé
de la façon la pins ingénieuse. Entre les colonnes ac-
coupléOv'*, dont la blancheur se détache d'un fond en
marbre du Jura, s*encadre un petit ordre formé de
deux colonnes en marbre jaspé, aux chapiteaux dorés;
au-dessus de la frise qu'il supporte s'ouvre, entre
deux consoles, richement ornées et terminées par des
masques de théâtre dans un champ de marbre de cou-
leur, un grand œil-de-bœuf ajouré, encadrant le buste en
bronze doré d'un compositeur célèbre. Chaque buste
pose sur un piédouche bla sonné des armes d'une ville ;
sur une plaque en marbre vert de Corse , incrustée
dans la friae, figure le nom du musicien en lettres
gravées et dorées. Un balcon en encorbellement, dont
les balustres sont en marbre vert de Suède, achève de
remplir la travée, et sa projection est assex forte pour
permettre, en se penchant un peu, de jouir du profil de
l'édifice. Cette disposition se ri'pëte dans tous les en-
trc-colonnements. Dans le tympan du fronton droit,
on voit deux figures adossées à un écusson portant ces
mots : Peinture, Sculpture ^ et accompagnées de petits
génies. Le tympan du fronton gauche est rempli par
un motif analogue; l'écusson a pour inscription : Ar-
cftilecture, Industrie. Les frises d'inscriptions dans
Teniablement de l'ordre sont en marbre de Cannes,
dit rouge antique, et présentent ces mots en lettres
gravées et dorées : au centre. Académie nationale de
musiaue; h droite. Poésie lyrique; à gauche, Choré-
graphie. (Jn cordon de bronze richement orné arrête
la ligne extérieure de l'entablement.
L'ordre corinthien supporte un attiqne. Li, au-des-
sus de chaque groupe de colonnes accouplées de la
façade, s'élève un groupe de deux femmes et d'un enfant
qui soutiennent un médaillon-couronné, en porphyre
do Finlande, historié du monogramme impérial. Entre
les groupes, sur le champ de l'attique, des bas-reliefs,
représentant des enfants presque en ronde bosse, qui
se détachent d'un fond, en mosaïque d'or, ont pour con-
tre des disques en marbre vi-rt de Suède, marqués
akernativement aux initiales N et E. Des bander de
marbre de couleurs variées forment des cadres à ces
bas-reliefs. Un cordon de masques tragiques et comi-
ques, en bronze doré, termine l'édifice sur la ligne du
ciel. A chaque angle de la façade, entre deux trépieds
dorés, se dresse un groupe de trois figures également
dorées, de 7 mètres de hauteur, les ailes comprises :
l'un de ces groupes représente V Harmonie, l'autre la
Poésie, accompagnées de deux Renommées. Les grou-
pes sont de Gumery; les femmes et les enfants sup-
portant dea médaillons, de Maillet; les masques tragi-
ques et comiques, de Klagmann ; les sculptures d'or-
nement, de Villemint.
L'impression première de la façade de TOpéra est
surtout un effet de couleur; c'est comme un grand
panneau de pierre sur lequel un artiste aurait peint
dos décorations. L'architecte a voulu éviter la pâleur
froide des monuments monochromes, et chercher la co-
loration par la variété des matériaux gardant leurs
nuances naturelles. Tandis que les parties essentielles
d'architecture sont en pierre blanche, il a employé
pour l'ornement et les constructions plus légères les
ressources des marbres diversement colorés, des
-bronzes et des ors. Cette diversité des tons est en har-
monie avec l'édifice : un Opéra est un monument de
luxe et de joie; il doit exprimer une idée de fôte, et,
dès sa façade, enchanter les yeux ; des lignes dures,
des profils austères, une coloration grise défigureraient
sa physionomie. Mais il y a une mesure à garder. On
reproche à la façade de l'Opéra une ordonnance com-
pliquée^ à l'excès, une ornementation fatigante par la
multiplicité des reliers et la trop grande variété des
couleurs; on blâme les disques verts de l'attique, qu'on
a appelés des « boutons de livrée »; la dorure des
bustes, qui brouille les contours et altère la ressem-
blance, l'encadrement qui donne aux œils-de-bœuf un
air d'étagère en bois découpé, la prodigalité des ins-
criptions, les bordures de bronze, qui doivent maculer
la pierre de traînées d'oxyde.
En regardant de loin la façade, on voit que les
grandes divisions de l'édifice sont annoncées et mi^es
en relief par la construction extérieure. Une coupole,
portée par des pilastres et percée de fenêtres rond* s,
accuse et recouvre la salle; son coaroiinement est re-
vêtu de bronze orné de sobres dorures. Plus loin, on
comble gigantesque annonce remplacement d*i la
scène ; le grand pignon de ce comble est terminé de
chaque côté par un Pégase, œuvre de Lequeane, et
dominé par un groupe de Millet, représentant Apollon
qui lève sa lyre d'or. Cea parties si diverses sont rac-
cordées entre elles avec beaucoup «l'art et d'habileté.
Sur les côtés de l'édifice, Tenceinte périmétrique est
déterminée par une balustrade en pierre polie, avec ba-
lustre en marbre bleu pâle. Cette balustrade est cou-
pée par onze entrées de grilles ; elle est snmioniée de
22 statues-lampadaires en bronze et de huit colonnes
en marbre bleu foncé qui portent chacune trois lan-
ternes. Les façades latérales sont d'une ornementation
plus sobre que la façade principale. L'emploi des mar-
bres y est plus rare. Deux pavillons en rotonde mar-
quent, l'un, sur la façade du nord, la loge du i hef de
l'État, et, l'autre, sur la façade du sud, l'entrée et la
sortie du public venu en voiture. Le premier, précédé
de deux colonnes rostrales porte-lanternea en granit
d'Ecosse, est muni d'une double rampe douce, qui
permet aux voitures de s'arrêter dans un vestibule
clos et couvert; le second, percé à jour par de hautes
arcades, offre une descente à couvert aux voitures.
Les couronnements de ces pavillons, formés d'aigles
aux ailes éployées et de galères aux rames dressées,
ne sont pas d'un effet heureux. Au-desaus des fenêtres
des fitçades sont des bustes de musiciens placés dans
des niches circulaires. Ces bustes, auxquels on a donné
des dimensions colossales parce qu'ils sont placés très
haut, font paraître, par comparaison, les fenêtres plus
petites qu'elles ne sont réellement. Aux extrémités
des façades, les frontons sont oriiés de figures qui
personniftent la Comédie et le Drame, la Science et
ï'Art, le Chant et la Poésie, la Musique et la Danse.
La partie postérieure de l'Opéra est formée par les
bâtiments de l'administration où sont installés les ser-
vices du théâtre, les bureaux, une partie des loges
d'artistes et des magasins. Ils sont adossés à la scène,
dont le mur se termine par un fronton triangulaire
portant à chaque coin une sorte de pyramide funé-
raire. On n'avait pas besoin ici d'une riche ornementa-
tion ; l'architecte s'est appliqué surtout à bien aérer
cette partie des constructions. La cour placée en avant
des bâtiments e^t fermée par un mur circulaire: une
grande porte monumentale et deux grilles servent à
l'entrée et à la sortie des chariots de décors.
Pour pénétrer dans l'intérieur du théâtre^ après avoir
franchi les grilles qui ferment les arcades de la façade,
on se trouve dans un vestibule éclairé par quatre
groupes de lanternes reposant sur dea gaines de mar-
bre, et orné des statues assises de Lulli, Rameau, Gluck
et Uœndel. Dix marches donnent ensuite accès à uu
second vestibule destiné au service du contrôle, et
orné de gracieux candélabres et de huit paimeaux
sculptés. Puis on arrive au grand escalier, de chaque
côté duquel des escaliers secondaires condoiaent à tous
les étages de la salle, et auquel le public entré par le
pavillon du sud accède en traversant un vestibule cir-
culaire placé au-dessous de la salle. Le grand escalier,
dont la décoration est une merveille d'élégance et de
richesse, mène entre le foyer et la salle. Après un
avant-foyer, dont la voûte est revêtue de mosaïque,
le foyer, séparé de la loggia par cinq portes vitrées,
se déploie sur une longueur de 54 mètres; il a 13 mè-
tres de largeur et 18 mètres de hauteur. La tonalité
générale de ce foyer est l'or vieux. Il est orné de
20 colonnes accouplées, que surmontent 30 statues, de
splendides tentures en »oie couleur d'or, de glaces de
Saint-Gobain hautes de 7 mètres, ainsi que de beaux
lustres dorés. Au-dessus de la corniche s'épanouissent
les compartiments qui entourent les peintures de
Paul Baudry. Aux extrémitts du foyer sont de grands
salons octogones, dont on admire les cheminées monu-
mentales. •
La salle proprement dite, qu'entourent de vastes
couloirs, est bien coupée, et de toutes les places on en
peut voir l'ensemble. Elle contient 2»156 places. Le
plafond, sorte de coupole de cuivie, sur laquelle Le-
nepveu a peint les heures du jour et de la nuit, repose
sur un couronnement composé de 12 œils-de-bœaf
grillés et de 12 panneaux également â Jour. L'entable-
PAL
— 1847 —
PEP
ment qui soutient ce conronneoient est garni de globes
éclairés au gaz; dans les frises, des médaillons à Jour
sont rempli:) de pierres que le gaz fait briller comme
des topazes et des émeraudes. Le lustre central a 340 lu-
mières. Huit grandes colonnes, dorées en divers points,
supportent la partie supérieure dé la salle. La couleur
générale des loges est rouge et or. La scène est la plus
grande qui existe en largeur et en hauteur; on peut
en augmenter la profondeur, en prenant le couloir de
fond, qui a î mètres de large, puis le foyer de la danse,
de manière k obtenir près de 50 mètres. Les dessous
du théâtre, où peuvent descendre les décors, n*ont pas
loin de 20 mètres. Le foyer de la danse, dont le mur
de fond est formé de trois glaces, a un lusire de 104 lu-
mières ; on y a p^int, dans des médaillons, 20 portraits
de danseuses célèbres. Le foyer du chant est égale-
ment orné de portraits d'artisies. Quatre «vingts loges
réparties dans retendue de deux étages sont destinées
aux sujets du chant et de la danse. Il existe aussi de
grandes loges pour les différentes sortes de choristes
et de comparses, un foyer pour les répétitions, des
magasins de costumes et d'accessoires, des salles de
couture et de coiffure, des archives, une bibliothèque
musicale, une bibliothèque dramatique, etc.
Tel est l'ensemble de l'Opéra de Paris, édifié par
Gh. Garnier de 1861 à 1K74. et décoré sous sa direction
par un grand nombre d'artistes. {Peintres : Barrias,
Benouville, Boulanger, Delaunay, Harpignies, PiU;
Sculpteurs : Carpeaux, Clubaud, Carrier-Belleuse, Ca-
velier, Denéchaux, Dubray, Falguière, Guillaume, Gu-
mery, Jacquemard, JoufTroy, Perraud, etc.) Quand on
creusa les fondations, on rencontra une nappe d'eau
de 5 mètres; et il ne fallut pas moins de 8 pompes à
vapeur pour opérer le dessèchement du terrain. L'en-
semble des conduites de gaz représente une longueur
de 26 kilom.j elles sont en communication avoc 10
compteurs, d une capacité totale de 9,200 becs. Une
partie des sous- sots est occupée par 14 calorifères à
l'eau chaude ou à l'air chaud, consommant tous en*
semble 10,000 kilogr. de charbon de terre par jour;
en outre, ou biûle du bois dans 450 cheminées. Les
conduits de chauffage ont un développement de près
de 5 kilomètres, et le jeu de 650 bouches de chaleur
permet de régler la température. La ventilation de la
salle s'opère au moyen de prises d'air placées au-dessus
et autour de la coupole. La canalisation de Teau em-
ploie 0,918 mètres de tuyaux; 0 réservoirs et 2 tonnes
permettent de tenir en réserve 150,000 litres d'eau,
qui serviraient en cas d'incendie. L'Opéra occupe
une superficie de 11,237™,70; il a environ I5,0i)0 mè-
tres de toiture. La longueur, du bas du perron à la
grande porte de radmiuistration, est de 172™,70; la
largeur de la façade principale, de 70 mètres, et sa
liauteur, de 32™. 12; la hauteur, depuis le sol jusqu'à
la terrasse supérieure du comble do la scène, de
55".97.
OURDISSAGE, terme technique pour désigner la
préparation de la chaîne (K. ce mot, Supf>L) d'un mé-
tier de tapisserie. Se dit aussi de l'action d'entrelacer
les cordons de paille pour faire une natte.
PALISSY (Faïences db). La vue d'une coupe en ma-
jolique de Kerrare éveilla le génie de Bernard Palissy,
qui avait été d'abord étranger à l'art céramique. Les
Înêces rustiques qu'il fabriqua furent destinées & orner
es crédences et armoires du siècle des Valois; ce sont
(les vasf s et des plats chargés de végétaux, de coquil-
les, de poissons, etc., moulés sur nature; il en est
bien peu de défectueux, parce que fauteur brisait ses
rebuts. On doit à Palissy des formes et des ornements
einpreints du beau style de la Renaissance; mais ces
couleurs sont plus criardes que fraîches, et le sombre
y domino. Il n'y a pas de lut une seule pièce d'un
blanc pur ; le brun de manganèse, le VQi't de cuivr^),
un bleu pussable^ deux tons de jaune, un gris dérivé
du bleu, voilà le cercle dans lequel il tourne. Lps
fHïences de Palissy furent contrefaites : ou recoimalt
les imitaiiuns uu brun marron des dessous ou revers,
tandis que les mômes parties^ dans les pièces origi-
nales, sont jaspées de jaune et de bleu; la pâte de la
faïence de Palissy, qui est de la terre de pipe, est aussi
plus blanche et surtout plus dure. Beaucoup de par-
ties de son émail sont cra'inelées : c'est un accident de
fournée, et non, comm*) dans la porcelaine de Chine,
une imperfactton avouée et utilisée. Palissy voulut gar-
der ses secrets de fabrication, et ses écrits ne nous
apprennent, en effet, rien de très positif ; mais les pièces
qu'il a laissées et les recherches de la chimie moderne
ont permis de retrouver tous ses procédés, et, de nos
jours, des imitations de Palissy, celles d'Avi^seau no-
tamment, ont surpassé les modèles. (K. A. Oumesnil,
Bernard Palissy, Paris, 1851, in-lK; G. Ouplessis,
ÉluiJe sur Palissy, \S\b ; H. Morlay, The lifeof B. Pa-
lissy, his lab'.urs and discoveries in art and science,
Londres, 185'î, 2 vol. in-8o.)
PARISIENS (Slusées), voir Carnavalet, Cldnt, Sup-
plémffnt.
PÉNITENCIER. Indépendamment des pénitenciers
militaires, il y a des pénitenciers pour les jeunes dé-
tenus à Petit-Bourg, à Clteau'x, à Toulouse, et trois
pénitenciers agricoles en Corse (Casabianca, Chiavari
et Casiellnrcio).
PliPLOS D'ATHÉNÈ (V. Dictionnaire), Ce mot ne
désigne pas seulement ce tissu de lain«, emblème du
tissu du monde que les Erréphores brodaient de leurs
mains virginales, et que tous les quatre ans on re-
nouvelait autour de la statue d'Aihéuè, statue en bois
d'olivier conservée au temple de Poséidon Érechms.
D'après un récent ouvragé de M. L. de Ronchaud, la
Tapisserie dans l'Antiquité, on doit entendre aussi
par cette dénomination Péplos d'Athénè, cotte dispo-
sition de tapisseries historiées à fond de safran qui,
dit l'auteur de cette curieuse reconstitution, < enve-
loppait si chastement le sanctuaire d'Athénè, multi-
pliait les voiles autour de la Divinité, adoucissait la
lumière qui tombait sur son casque et sur sa lance
d'or, et la faisait mourir à ses pieds dans une ombre
transparente, pleine de religieuses pensées». Les textes
grecs et latins nous disent que la tapisserie jouait un
grand rôle dans l'ornementation des b&tisses grecques
depuis la tente jusqu'aux temples et aux palais. On
sait que lorsque Phidias eut terminé sa grande sta-
tue d'or et d'ivoire, on l'entoura d'un peplos. M. de
Ronchaud, curieux de reconstituer la décoration in-
térieure de cette partie du Parthénon, s'autorisa d'un
passage de Vlon d'Euripide pour arriver à son ingé-
nieuse resta. iration. Les vers 1132-1165 de cette tra-
gédie contiennent en effet la description détaillée
d'une tente que le jeune Ion élève dans le temple de
Delphes avant un sacrifice en l'honneur d'Apollon.
M. de Ronchaud vit là une allusion précise à l'orne-
mentation intérieure du Parthénon, d'autant que la
tragédie d'Ion essentiellement nationale est un véri-
table hymne à la louange d'Athènes. L'hypothèse était
séduisante pour nn savant désireux de faii*e revivre
dans toute sa splendeur religieuse le temple antique,
et surtout celte chambre formée de riches draperies
suspendues entre les colonnes au milieu desquelles la
Minerve chryséléphantine resplendissait aux yeux de
ses adorateurs.
Ne savons-nous pas par Plutarque que Phidias pour
compléter la décoration du monument dont il était le
grand ordonnateur, eut recours à la tapisserie, et que
dans la légion d'artistes travaillant sous ses ordres,
on comptait des tapissiers? Sans doute on peut faire
et on a fait de savantes objections contre les vrai-
semblances proposées par M. de Ronchaud. Mais
n'oublions pas que les dessins mêmes figurés sur les
tapisseries décrites par Euripide dans le temple de
Delphes, sont tous, comme la bataille de Salamine ou
l'histoire de Cécrops et de ses fllles, des compositions
d'inspiration évidemment attique et qui convenaient
infiniment mieux à Athènes qu'à Delphes.
L'auteur du savant traité de la Tapisserie dans C An-
tiquité n'a point, tant s'en faut, la prétention d'avoir
trouvé là-dessu9 la vérité définitive, mais il parait
qu'il s'en est fort approché. Aussi bien croyons-nous
qu'on peut penser avec lui que les fameuses tentures
décrites par Euripide sont, selon toute apparence,
celles qui ornaient la chambre de la Vierge, ce sanc-
tuaire du Parthénon, ouvert du côté du ciel, mais
entouré de voiles, d'où la divinité d'Athènes régnait
sur son temple et sur son peuple. De ces tapisseries
les une«, verticales, étaient suspendues aux colonnes
du naos, comme celles qu'on voit dans les mosaïques
de Ravenne; elles représentaient des sujets de l'his-
toire athénienne. Les autres qui représentaient le
PHA
— 1848 —
PIA
ciel avec ses constellations étaient atiacliées au toit,
mais ne pouvaient être tendues horizontalement au-
dessus du sanctuaire, puisque la statue de la déesse
dépassait de la tète la iiauteur des portiques et des
toiis latéraux. Aussi Al. de Ronchaud esi-il d'avis que
ces tapisseries devaient ôire drapées sur une char-
pente eu forme de tente, par les côtés de laquelle
la lumière pénétrait dans la cella et dont le dôme pro-
tégeait le sanctuaire contre le» influences aimosphé-
ri(|ue8. Les intempéries de Tiiir sont assez peu dan-
gereuses en GrècK pour qu'une tente forméo de riches
étoffes ait pu sufflie à protéger Ipstrésori arcuniuiés
aux pieds de Minerve, surtout lorsqu'on sait que ce
voile était renouvelé tous les quatre ans.
J.-B-z.
PERSE (Faïences de lk). Ces fjiîpnces ont été long-
temps conTondues avec les porcelaines de la Chine et
du Japon. La Tabricatiou en remonte très haut, puis-
qu*on trouve des terres émaillées, des revêtements cé-
ramiques Jusque dans les ruines de Babylone. Ceux
de la mosquée de Tabriz (xv« siècle) en sont un des
plus anciens monuments restes debout. L'&ge le plus
florissant des faïences persanes s'étend de Tarènenient
des Sofls à la mort de Schah Abbas (1502-1628); les
mosaïques et peintures en faïence du palais et de la
mosquée d'Abbas à Ispahan, les dômes dorés du tom-
beau des enfants d'Ali, les fai^^nces à reliefs peints qui
décorent le tombeau de Mahomet I*', les revêtements
du minaret et de la mosquée de Nicée, le tombeau de
Koda Honda à Sultanieh, sont de beaux spéciniens de
cet &ge. Les faïences anciennes les plus connues sont
à fond bleu, avec dessins blancs en relief; il ont
vraisemblable que les potiers italiens, nivernais et
rouennais en connurent des échantillons, mais ils
n'égalèrent Jamais la pureté et la beauté de leur émail.
Une autre sorte de faïence, que sun tfspect rapproche
de la porcelaine tendre, a des reliefs bleus, rouges et
verts alternés. Il y a aussi une porcelaine émail, dont
la p&te translucide ne semble appartenir eu rien à la
faïence, et où il ne se trouve pourtant pas de kaolin;
c'est presque du verre. Enfin, la Perse a produit une
quantité de vaisselle d'une composition ambiguë,
qu'une translucidité naissante rattacherait aux porco-
laines, si elle n'eût été produite uniquement par un
excès de cuisson qui a fait naître la vitriflcaiion : Té-
mail est blanc et profond ; les couleurs sont fraîches,
glacées; les émaux sont chatoyants, notamment un
cuivre chaud de ton, rival de Tor bruni, et dont l'effet
est admirable sur les fonds de couleurs, tels que le
lapis-lazuli. La faïencerie per>ane est tombée dans une
complète décadence depuis deux siècles. B.
PHARES, il existe sur les côtes du iloyaume-Uni de
la Grande-Bretagne et d'Irlande 40& phares, dont 213
en Angleterre, 114 en Ecosse et 78 en Irlande.
L'aduûnistraiion des phares est conflée à quatre cor-
porations distinctes: 1» le Bureau du commerce, dé-
partement ministériel dont le chef change avec le ca-
binet, et dont les membres ne sont pas choisis en
raison de leurs connaissances spéciales dans le service
des phares ; 2^ la corporation de Trinity-House, qui a
la suiveillance et la direction de tous les phares, feux
flottants et balises du l'Angleterre, du pays de Galles,
des lies du détroit de Gibraltar et de Héligoland, à
l'exception de ceux qui sont placés sous la surveillance
des autorités locales ; 3» les commissaires du nord sou-
mis en quelques circonstances au contrôle de Trinity-
House et à l'approbation du Bureau du commerce ;
ils ont dans l'ËcoâSC et l'Ile de Man l'administration des
phares et bahses, sauf ceux placés sous la surveillance
des autorités locales; 4» le Bureau de ballast de Du-
blin, qui Jouit en Irlande des mômes droits, sous les
mêmes réserves et restrictions. Enfin, un ceruin nom-
bre de feux sont placés sous la direction de corpora-
tions locales.
Aux États-Unis, les phares sont placés sous la direc-
tion d'un bureau central organisé en 1852 et composé
d'un membre du gouvernement, d'ingénieurs, d'ofH-
clers de l'armée et de la marine, et de personnages
scientifiques.
En Suède, h'S phares sont sous la dépendance de
Tamirauié, et administrés par un directeur, des offi-
ciers de l'armée et des ingénieurs; les côtes pont divi-
sées en districts et sous-districts répartis entre ces
fonctionnai! es. — En Norvège, le service relève de la
marine royale, avec un directeur et des employés.
En Turquie, le service dépend de l'amirauté.
Dans le Hanovre, le service est confié à la direction
générale des eaux ; les bouées sont placé«>s par les
pilotes, et les phares et balises sont visités par les in-
specteurs du service des eaux.
A Hambourg, les phares dépendent de la commission
des pons et de la navigation, et sont placés sous U
direction du commandant et de l'inspeciear du pilo-
tage. — En Espagne, le régime est le môme qu'ea
France; les phares, les feux, etc., sont du ressoitd»
travaux publics, et dirigés par une commission per-
manente composée d'ingénieurs des ponts et chaussées
et d'officiers de marine. — Dans le Danemark, le ser-
vice dépend du ministère de la marine, et est confié
à un ingénieur des phares et à deux inspeeieurs des
balises, qui reçoivent des instructions pour leur ser-
vice respectif.
En Russie, la direction est confiée au département
hydrographique. — En Hollande, l'administration des
phares et balises ressortit au ministère de la marine,
qui a sous ses ordres un inspecteur général et sept
inspecteurs.
En Belgique, la construction des phares regarde lo
ministère des travaux publics; mais, une fuis con-
struits, les phares sont remis à la direction générale
de la marine, qui dépend des affaires étrangères. Les
phares, ainsi que les feux flottants et les balises, sont
sous la surveillance des inspecteurs de pilotage.
En Autriche, la haute direction des phares et bali-
ses appartient à l'amirauté. Les députés de la Bourse
de Trieste s'occupent de l'exécution des phares, de
leur administration, de la perception des droits, etc.
Le service du balisage rentre dans les attributions des
employés inférieurs de la marine.
On voit donc quo partout, à l'étranger, le service de
l'éclairage des côtes, vu son importance et les connais-
sances spéciales qu'il exiffe, est centralisé par le gou-
vernement, et confié à des personnes au courant de
ces questions. En Angleterre, au contraire, la pratique
semble avoir été de confier l'éclairage des phares à
des personnes qui, par leur position, ne semblent pas
avoir des connaissances spéciales à ce sujet.
PHOTOSCULPTURE, procédé de sculpture mécani-
qui iufenté à Paris, en 1M63, par François Willème,
et au moyen duquel on obtient un nombre de repro-
ductions sculpturales d'un même type, en opérant sur
des photographies de ce type. On place la personne ou
l'objet au milieu d'une salle autour de laquelle sont
braqués 24 objectifs ; on obtient donc, au même
moment, 24 silhouettes du même modèle. Chacune de
ces images, grandie par un procédé d'optique, se re-
flète ensuite sur une glace dépolie, derrière laquelle
un promène l'une des branches d'un pantographe;
l'autre branche, armée d'un ébauclioir, dégrossit ma-
thématiquement une masse de terre glaise qui, à la
suite du vingt-quatrième dégrossissenieiit, se trouve
avoir suivi les 24 silhouettes de l'individu et reproduit
exactement sa statuette ou son buste.
PIANO. La fabrication des pianos, introduite aux
États-Unis en 1823, y a pris, dans la maison Chicke-
ring, à Boston, un développement considérable. II
s'agissait de construire des instruments capables de
résister aux brusques variations du climat; après des
essais infructueux de divers facteurs, Jouas Chicke-
ring résolut le problème en 1838, par l'application d'un
bai rage de fonte dans l'intérieur du piano, qui, miin-
tenu, protégé par cette armature robuste, put défier
les températures extrêmes et les longs voyages. Chi-
ckoring a encore inventé le plan ciradatre, o'est-k-dire
la répartition, sur une ligne courbe, des marteaux des
notes du clavier; on obtenait ainsi l'égalité et la puis-
sance nettement graduée des registres. En 1837, en
ajoutant au cadre ou barrage de fonte une barre de
Tonte faisant partie de ce barrage et sur laquelle les
agrafes sont vissées, la maison Chickenng a enfin dé-
cuplé la solidité des pianos et leur a donné une fixité
d'accord extraordinaire. Ces divers perfectionnements
ont fait la supériorité des pianos américains de l'Expo-
sition universelle de 1867.
L'idée de donner aux instruments k clavier la pro-
priété de soutenir les sons pendant un certain temps
est plus ancienne qu'on ne le croit d'ordinaire; elle a
été appliquée, dès 1600, aux clavecins de Jean Heyden,
facteur à Nuremberg. De nos jours, les frères Boissclut,
à Marseille, ont fabriqué des pianos à sons soiUejms
(1843). — Lesi>ta/(OS organisés réunissent les effeu du
piano à ceux de l'orgue; ils se composent d'un piano
t>Rb:
— 1849 —
PRÉ
ordinaire et d*un jeu d'orgue à anches libres, et leur
mécanisme permet de jouer des deux instruments à la
foiSf ou seulement de l'un d'eux. Tels sont le Piano-
mélodium d'Alexandre et VHarmonicorde ou Harmo-
nium de Debain. Les deux espèces d'organes peuvent
se soutenir et se corriger l'une par Tautre, la corde
suppléant à la faiblesse d'attaque de la lame vibrante,
et celle-ci voilant Teffet mourant de la première. Dans
le piano à prolongement d'Alexandre, les deux sons
n'en forment qu'nn au moment de l'attaque; la vibra-
tion de la corde venant à diminuer d'intensité pour
cesser bienlôt complètement; le son de l'anche libre,
qui se prolonge seul, est tellement identique avec celui
de la corde, qu'il est impossible de supposer que ce
prolongement ne soit pas dû à la corde elle-même. B.
PIERRE DE PROVENCE kt la belle Maguelonb,
ancien roman populaire, qui montre Pierre, héritier du
comté de Provonce, so faisant aimer de Maguelono,
fille du roi de Naples, et, après de nombreuses aven-
tures, arrivant à l'épouser. Selon V. Leclerc, ce roman
aurait été composé par le chanoine Bernard de Triviez,
et écrit en provençal ou en latin au xiv» siècle. Fauriel
ne l'attibuait qu'à la littérature provençale. Ce qui est
certain, c'est que la première rédaciion n'en est pas
antérieure au xv® siècle; Pierre de Provence a été re-
fait par le comte de Tressa n pour entrer dans sa Ât-
bliothèque des romans (1779); mais on a publié des
éditions plus fidèles, non seulement en français, mais
en flamand, en allemand, en danois, en espagnol et
même nn vers grecs.
PLACE. ~ En langue populaire, nom donné en Bre-
tagne au sol du rez-de-chaussée de l'habitation. La
place est formée de terre débarrassée avec soin de
toutes les pierres qui pouvaient s'y trouver. Comme
il arrivera que ce sol intérieur sera arrosé par les eaux
ménagères, ou mouillé par la pluie, il importe de lui
donner une certaine consistance. Pour cela on le pré-
pare. D'où un usage très ancien qu'on peut mettre au
rang des danses locales. On fait pour la place de l'ha-
bitation ce qu'on fait pour Vaire ou espace de terrain
qui borde la façade de l'habitation. Les ^ens de la mai-
son, leurs voisins et les amis, se réunissent, la journée
finie, et.dausent jusque vers minuit. Cela s'appelle les
fouleries de place ou les piieries d'aire. Celui ou celle
à qui appartient la place a fait venir un violon, et dis-
tribue généreusement des pichets de cidre aux dan-
seurs qui s'échauffent promptement à cet exercice, car
chacun danse de son mieux pour durcir et niveler le
sol. Le clergé s'est attaché h, détruire l'usage des fou-
leries de place, comme toutes les autres danses. Mais
elles ont lieu quand même, la nuit, sans trop de bruit.
PRESSE. — Une loi du 9 mars 1868 supprima l'au-
torisation préalable ; pour publier un journal ou écrit
périodique, il suffit de faire, à Paria à la préfecture
de police, et dans les départements à la préfecture^
quinze jours au moins avant la publication, une décla-
ration contenant le titre du journal, les époques de sa
publication, le nom, la demeure et les droits des pro-
f>riétaires antres que les commanditaires, le nom et
a demeure du gérant, l'indication de l'imprimerie. Le
droit de timbre fut réduit. ^V. Timbre.) Aucun journal
ou écrit périodique ne put être signé par un membre
du Sénat ou du Corps législatif en qualité de gérant
responsable : en cas de contravention, le journal était
considéré comme non signé, et l'amende de 500 à
3,0(10 fr. prononcée contre les imprimeurs et proprié-
taires. Toute publication d'un fuit de la vie privée con-
stitua une contravention, punie d'une amende de 500 fr.,
si la partie intéressée portait plainte. Une condamna-
tion pour crime commis par la voie de la presse en-
traîna de plein droit la suppression du journal. Dans
le cas de récidive pendant deux années après une con-
damnation pour délits de presse autres que ceux com-
mis contre les particuliers, les tribunaux purent, en
réprimant le nouveau délit, prononcer une suspen-
sion du Journal de 15 jours à 2 mois. Une suspension
de 2 à G mois put être prononcée pour une troisième
cojidamnation dans lo même délai; elle put l'être éga-
lement par un premier jugement, si la condamnation
était encourue pour provocation à l'un des crimes pré-
vus par les art. K6, 87 et 91 du Code pénal, ou pour
délit prévu par l'art. 0 de la loi du 17 mai 1819. Les
gérants de journaux furent autorisés à établir une im-
primerie exclusivement destinée à l'impression du
journal.
PRESSE (Liberté delà). — La loi du 29 juillet 1881 a
définitivement établi en France la liberté de la pressd.
L'imprimerie et la librairie sont déclarées libres. Tout
Français peut publier un journal sans autorisation
préalable et sans dépôt de cautionnement, sous la seule
condition d'une déclaration préalable, contenant le
titre du journal et son mode de publication, le nom et
la demeure du gérant, l'indication de l'imprimerie.
Los crimes commis par la voie de la presse sont jugés
en cour d'assises et par le jury. La pruvuration au
meurtre, au pillage, à l'incendié ou à l'un des crimes
contre la sûreté de 1 État prévus par les articles 75 à
101 du Code pénal, est punie, si la provocation n'a
pas été suivie d'effet, de 3 mois à 2 ans d'emprisonne-
ment et de 100 fr. à H,000 fr. d'amende. L'offense au
président de la République est punie de 3 mois à un
an et de 100 fr. à 3,000; les fausses nouvelles de 50 fr.
à 1,000, et d'un mois à un an ; l'outrage aux mœurs,
d'un mois à deux ans et de 16 fr. à 2,000; la diffama-
tion contre un fonctionnaire ou un corps constitué, de
8 jours à un an, de 100 fr. à 3,000; contre un parti-
culier, de 6 jours à 3 mois et de 18 à 500 fr. La preuve
de la diffamation est autorisée contre les fonctionnai-
res et les corps constitués. La poursuite a lieu contre
le gérant ou l'éditeur; à son défaut, contre l'auteur; à
défaut de l'auteur, contre l'imprimeur; à défaut de
l'imprimeur, contre les vendeurs, distributeurs ou
afficheurs. Les propriétaires des journaux sont respon-
sables des condamnations pécuniaires prononcées au
profit des tiers.
PRESSES. — Nom breton des armoires où l'habitant
met son linge, ses hardes, son argent, ses souvenirs,
en un mot tout co qu'il regarde comme réservé pour
son usage particulier. Dans les fermes et dans les
petits ménages, les presses sont en assez grand nom-
bre. Chacun des habitants a la sienne propre. La
presso du maître est la plus rapprochée de son lit.
Dans les presses des femmes, le linge et les vête-
ments sont rangés symétriquement : entre les piles de
draps de lits ou de chemises, on voit pendre des cha-
pelets et des rubans de noce : le livre et le bouquet
de mariage sont en parade sur \ê devant, et sont sou*
vent en compagnie d'une statuette de la Vierge.
Les presses n'occupent point une place indifférente
dans l'ordonnance de la chambre. La plupart des mat-
sons de Bretagne, entre autres auxenvironsdeRennes,
de Dinan, de Loudéac et de Saint-Brieuc, ont leur
façade au midi. Le mur, qui est le derrière de la mai-
son, est au nord. Il est rare qu'il y ait parla une ou-
verture, et cela pour éviter tout accès à ce vent glacial.
C'est le long de ce mur, qui fait face aux ouvertures,
portes et fenêtres, que sont rangées les armoires, se
tenant généralement avec les lits (V. lits-clos, SuppL).
Elles forment ainsi une boiserie continue, très caracté-
ristique. Dans nombre d'habitations cette façade de
boiseries ouvragées est la grande coquetterie des mé-
nagères, bien cirée, bien frottée. C'est le dimanche,
pendant la grand'messe ou les vêpres, qu'on procède à
cet astiquage.
PR.TS DE L'ENFANCE (Société des) ou société
de bienfaisance créée en France en 18G2, et placée
à l'origine sous le patronage du Prince impérial.
Elle avait pour but de faire des avances aux classes
laborieuses pour l'achat des instruments de' travail.
Son fonds fut constitué k l'aide de souscriptions vo-
lontaires, consistant en fondations de 100 fr. et on dons
quelconques. La Société était dirigée par un Conseil
supérieur et une Commission permanente. Des comi-
tés locaux étaient placés dans les villes et même dans
les cantons ruraux où les besoins des populations agri-
coles et manufacturières les rendaient nécessaires.
Chacun d'eux comprenait le maire ou un adjoint, pré-
sident ; le curé, et là où l'un des cultes reconnus par
l'État est publiquement exercé, un ministre de ce culte;
un nombre déterminé de membres, tirés des diverses
communes du canton. Des dames patronnesses étaient
chargées de recevoir les cotisations. La Société n'exi-
geant aucune autre garantie que celle de l'honneur du
débiteur et de sa famille, les prêts ne pouvaient être
faits qu'aux personnes d'une conduite régulière et
d'une moralité justifiée. Toute personne qui se pré-
sentait pour emprunter devait se faire assister de deux
témoins, qui attestaient son identité, ses besoins et
sa moralité. Les deux témoins devaient être domi-
ciliés dans la même commune que l'emprunteur, être
choisis parmi les personnes que leur profession ou
leurs occupations mettaient en relations habituelles
117
REC
— 1830 —
REC
Afec Temprunteur, et savoir écrire. Leur responsabilité
était purement morale : leur témoignage ne pouvait
donner ouverture à aucune action civile contre eux.
N'étaient pas admis au bénéfice des prôts les enfants
d'un emprunteur qui avait manqué à ses ungagemenls,
les héritiers d'un débiteur mort sans avoir soldé sa
dette, sauf le cas où les uns et les autres avaient eux-
mêmes acquitté la dette de leur auteur. Tout emprun-
teur devait justifier d'un séjour non interrompu d'un
an au moins dans la commune où il formait demande.
La durée des prôis ne pouvait dépasser trois ans. En
cas de maladie, d'appel au service militaire ou de tout
autre cause grave régulièrement Justifiée, il pouvait
être accordé un renouvellement. Les prôts étaient
remboursables, soit en totalité à une échéance déter-
minée, soit par fractions à des époques successives.
Les intérêts étaient payables par semestre, sauf con-
vention contraire. La Société avait le droit de surveiller
l'emploi des fonds prêtés. La dette devenait immédia-
tement exigible, si le débiteur manquait de satisfaire
k une de ses échéances» soit de capital, soit d'intérêts ;
s'il changeait de domicile, sans en avoir préalablement
donné avi^ au comité local et lui avoir fait connaître
son nouveau domicile ; enfin, s'il quittait ie territoire
français. Les comités locaux ne pouvaient admettre à
l'instruction les demandes de prêts pour une somme
supérieure à 500 francs. Ils pouvaient faire directement
l'échelle; la peine accessoire a été snecessivement,
dans les Codes français^ depuis la Révolution, la trans-
portation, la surveillance de la haute police et la réié-
gation. La transportation à Madagascar était prononcée
dans le Code de l'an II contre tous ies malfaiteurs
réputés incorrigibles ; l'organisation de la transporu-
tion des récidivistes devait, dans la pensée des légis-
lateurs de la Convention, être analogue à l'interne-
ment des convicts anglais en Australie. Abandonnée
par le Code pénal de l'empire, c'est cette théorie qui
a été reprise dans la loi du 27 mai 1885 sur la
relégation perpétuelle des récidivistes dans les colo
nies. Les statistiques du ministère de la justice ayant
démontré que près de la moitié des délits et plus de
moitié des crimes étaient le fait des repris de justice,
Gambetta avait inscrit la transportation des récidi-
vistes dans son programme électoral de 1881. Déve-
loppée par M. Joseph Reinach dans son livre les Réci-
divisteSf cette idée fit rapidement son chemin dans
l'opinion, et un projet de loi fut dépo>é (janvier 1882}
par M. Waldeck- Rousseau, ministre de l'intérieur du
cabinet Gambetta. Ce projet, modifié par plu'^ieurs
amendements, est devenu la loi actuelle. — La reié-
gation^ selon le terme proposé par AI. Reinach, se
distingue de la trnnsportation en ce qu'elle est tou-
jours une peine accessoire* tandis que la transportation
est une peine principale ; la relégation est obligatoire,
les prêts qui n'excédaient pas la somme de 200 francs, c'est-à-dire qu'elle est la conséquence forcée de la
Le taux de l'intérêt était fixé à 2 1/2 pour 100. B.
PUPILLES DE LA MARINE (Les). — Êublissement
créé à Brest par un décret du 15 novembre 1863. Il est
destiné à recevoir : 1** les orphelins de père et de mère,
fils d'officiers mariniers et de marins morts au service,
ou morts en jouissance d'une pension de retraite ou
d*une pension dite demi-solde ; 2* les enfants des offi-
ciers mariniers et des marins mentionnés au para-
graphe ci-dessus, dont les mères existent encore ; 3" les
enfanta qui ont perdu leurà mères et dont les pères,
officiers mariniers ou .marins, sont en activité de ser-
vice; 40 les orphelins ou enfanu de marins victimes
d'événements de mer à bord de navires de commerce
ou de bateaux de pêche.
Les orphelins de père et de mère peuvent être admis
à l'établissement des pupilles dès l'âge de sept ans;
les enfants compris dans les autres catégories ci-dessus
indiquées ne sont reçus qu'à partir de neuf ans révo-
lus. Les pupilles de la marine, dès qu'ils ont atteint
l'âge de treize an», sont admis à l'École des mousses
avec les autres enfants de marins. Sunt rayés des con-
trôles des pupilles de la marine et rendus à leurs fa-
milles : les enfanis qui ne sont pas Justes aptes au
service de la marine, ou qui, âgés de treize ans révo-
lus, refusent d'entrer à l'École des mousses. Le mode
d'admission à l'établissement des pupilles de la marine
est déterminé par un arrêté du ministre de la marine
et des colonies.
PYROSTÉRÉOTYPIE, procédé d'impression typo-
graphique de la musique inventé en 1861 à Tlmpri-
merie nationale de Paris. On grave en creux sur bois
avec la machine à brûler usitée dans l'indiennerie; en
versant du métal en fusion dans ce moule-matrice, on
obtient des planches solides fondues d'un seul Jet, au
moyen desquelles on effectue le tirage à la presse typo-
graphique. La pyrostéréotypie peut également servir
pour l'impression de toutes les figures au trait, à lignes
courbes ou diagonales.
R
tlÉCIDlVlStiùS. — On désigne sous Ce nom, en droit
criminel, les hommes qui ont subi deux ou plusieurs
condamnations pour crime ou délit. On distingue les
récidivistes de crime à crime, de crime à délit, de délit
à délit et de délit à crime. — Les criminalistes anciens
et modernes ont toujours considéré que le fait de la
récidive augmente ie délit et la peine. L'habitude du
délit ou du crime est, en effet, l'indice d'une nature
rebelle contre laquelle la société est on droit de prendre
des mesures de précaution plus sévères; la récidive
peut donc avoir une double conséquence : élévation de
fa peine principale et addition d'une peine accessoire.
La peine principale est alors soit le maximum de la
p«ine, soit la peine im'Dédiatement supérieure dans
condamnation ; elle est perpétuelle à moins d'un décret
de grâce ; elle s'accomplit dans une colonie, la Guyane
ou la Nouvelle-Calédonie. La relégation des récidivistes
•!'a pas seulement pour objet la défense de la société;
elle doit encore, dans la pensée des auteurs de la loi,
donner au condamné la possibilité de se réhabiUter
par le travail ; elle peut devenir pour la France, comme
l'internement des convicts l'a été pour l'Angleterre,
l'instrument de colonisations prospères ou durables.
La loi qui établit la relégation supprime la surveillance
de la haute police.
RECRUTEMENT. — Allemagne. — Tout sujet de
l'empire allemand est soumis au service militaire per-
sonnel ; il y a exception pour celui que les infirmités
rendent impropre et pour celui qui s'est rendu indigne
de la qualité de citoyen. — L'obligation dure de 17 à
42 ans; de 17 à 20 ans, le jeune homme est inscrit sur
les contrôles du landstnrm ou levée en masse ; de 20 à
23 ans, il est présent sous les drapeaux; de 23 à 27 ans,
il fait partie de la réserve de Tarmée active ; de 27 à
32 ans, il est compris dans la landwehr; de 32 à
42 ans, il est placé dans le landsturm. — Le nombre
desjennes gens atteignant annuellement l'âge de 17 ans
est de 350,000 environ ; sur ce nombre 180,000 sont
jugés bons et disponibles pour le service de Tarmée
active, quand ils ont l'âge de 20 ans ; il n'y en a pas
plus de 120,000 qui, désignés par le sort, passent sous
les drapeaux. Ce nombre est fixé de façon à maintenir,
dans la proportion de 1 % de la population, l'effectif
de l'année permanente; le reste constitue une réserve
de recrutement. — Chacun des 17 corps d'armée se
recrute sur l'étendue du territoire qu'il occupe : la
circonscription du corps d'armée se divise en 4 dépar-
tements de brigade d'infanterie ; chaque département
de brigade comprend 4 districts de bataillon de land-
wehr : chacun de ceux-ci est partagé on 4 districts
de compagnie. Chaque régiment dMnfanterie se recrute
toujours dans les deux mêmes districts de bataillon de
landwehr; les régiments de dragons et de hussards se
recrutent toujours dans le même département de bri-
gade d'infanterie ; les bataillons de chasseurs à pied,
les régiments de fusiliers, les régiments de cuirassiers
et de uhlans, les régiments d'artillerie, les bataillons de
pionniers et les bataillons du train se recrutent dans
toute l'étendue de la même circonscription de corps
dlarmée ; la garde se recrute sur le territoire de la
monarchie prussienne.
Angleterre, — L'armée de la Grande-Bretagne est la
seule de l'Europe qui se recrute exclusivement par
l'enrôlement volontaire. — Dans l'armée permanente,
l'engagement volontaire est contracté pour 12 ans, et il
peut être renouvelé pour 9 années; le nombre annuel
des engagés volontaires est de 23,000. — La réserve se
compose de deux classes distincte» : la l^e classe com-
prend (ies hommes de l'armée permanente qui, après
être restés 3 ans sous les drapeaux, consentent à faire
partie de la réserve, à condition d'y rester deux années
pour chaque année de service à faire encore dans
REC
— 1881 —
tlËC
l'armée permanente, et des miliciens qai reçoivent une
indemnité pécuniaire en échange de rengagement con-
tracté par eux d^ôtre incorporés dans l'armée active en
cas de besoin : cette classe de la réserve est destinée à
compléter l'efTectif des troupes de campagne lors de la
mise sur le pied de guerre. l.a 2« classe doit toujours
rester à Tintérieur ; elle comprend des militaires retrai-
tés après 21 ans de service, et des militaires rengagés
après 12 ans de service, mais consentant à rester 18 ans
dans la réserve au lieu de 9 dans l'armée permanente.
— La milice se compose d'tiommes engagés pour 5 ans,
moyennant une prime d'argent. — Le corps des volon-
taires se compose d'tiommes ne prenant d'autre enga-
gement que d assister à des exercices annuels ; les com-
pagnies, troops et batteries qu'ils forment n'ont d'exis-
tence légale et n'ont droit à une indemnité que si les
unités d'organisation atteignent un eflectif déterminé.
— L'armée des Indes est composée d'une partie de
l'armée active et de cipayes, troupes Indigènea dont le
recrutement se fait par les appels et les enrôlements
volontaires.
Autriche;- Hongrie. — Tout sujet de l'empire austro-
hongrois est astreint au service militaire pour 12 an-
nées, dès qu'il a atteint l'âge de 20 ans. Il y a cepen-
dant des cas de dispense, comme en Allemagne et en
France, tant dans l'iniérôt général de TÉtat que dans
l'intérêt particulier des familles ; mais les Jeunes gens
qui sont dispensés ou libérés par anticipation sont te-
nus de verser, à la caisse des Invalides, une somme
proportionnée à leur fortune, et ils restent, pendant
12 ans, prêts à répondre au premier appel pour remplir
un emploi spécial en cas de besoin. — Le contingent
annuel est fixé pour une période de 10 ans, de façon k
fournir un effectif disponible de 800,000 hommes sur
le pied de guerre : ce contingent est de 95,474
dans l'armée et de 9,576 dans la réserve de remplace-
ment ; il est prélevé sur un nombre de 300,000 inscrits,
dont 150,000 sont reconnus bons au service. Les Jeu-
nes gens qui font partie du contingent affecté à l'ar-
mée permanente servent pendant 3 ans sous les dra-
peaux, 7 ans dans la réserve et 2 ans dans la landwehr ;
quant aux jeunes gens qui sont placés dans la réserve
de remplacement, ils y comptent pendant 10 ans, puis
lis restent 2 ans dans la landwehr. La dernière partie
de la classe, forte de 45,000 hommes environ, est direc-
tement versée dans la landwehr, où elle compte pendant
12 ans. — Le landsturm, ou levée en masse, n'est pas
organisé; il doit, en cas de besoin, se former par dus
engagements volontaires; cependant, dans le Tyrol et
le Yorarlberg, le landsturm existe en tout temps; il se
compose de deux bans : le 1^' ban comprend tous les
hommes de 18 à 39 ans; dans le 2^ ban sont les
hommes de 39 à 45 ans. — Le territoire de la monar-
chie austro- hongroise est partagé en 81 cercles de re-
crutement, à raison de 1 par régiment d'infanterie à
5 bataillons.
Belgique, — L'armée belge est recrutée par des ap-
pels annuels : le service militaire n'y est pas obligatoire.
Tous les Jeunes gens âgés de 20 ans tirent au sort :
ceux qui n'ont aucun motif de dispense on d'exemption
et que le sort a désignés pour faire partie de l'armée
active peuvent se faire remplacer soit directement, soit
en payant une prime à l'État. Le nombre des inscrits
est annuellement de 45,000 environ ; celui des appelés
est de 12,000. La durée du service est fixée à 8 années,
mais les soldats ne restent que de 2 ans 1/2 à 4 ans sous
les drapeaux, selon les armes auxquelles ils appartien-
nent ; pendant leur séjour dans l'armée permanente,
ils ont, en outre, droit à un congé de 6 semaines pur
année de service.
Danemark. — Tout sujet danois doit le service mili-
taire obligatoire et personnel; il est inscrit sur les
rôles de recrutement à l'âge de 16 ans, mais il n'est
contraint au service qu'à 22 ans. Le nombre des ap
pelés est de 2,650 environ. La durée du service est de
16 ans, dont 5 ans dans l'armée permanente, 3 ans dans la
réserve, 8 ans dans le renfort. En fait, la présence
effective sous les drapeaux n'est pas continue; dès que
les Jeunes soldats ont été instruits, ils sont presque
tous licenciés, puis ils sont rappelés chaque année
pour les manœuvres, de sorte que le soldat d'infan-
terie reste, par exemple, environ 10 mois 1/2 sous les
drapeaux.
Espagne. — Le service militaire personnel n'eH pas
obligatoire en Espagne, car tout jeune homme appelé
par le sort à faire partie de Tarmee peut s'exonérer en
versant une indemnité dans les caisses de Tl^tat. Ce
principe de remplacement a été conservé dans les di-
verses lois et décrets concernant l'armée et rendus de-
puis le 29 mars 1870 jusqu'au 10 février 1875. — D'après
la loi du 29 mars 1870, la durée du service éuit de
6 ans dans l'armée active et de 2 ans dans la 1'» ré-
serve ; l'armée devait être entretenue par un contingent
annuel, qui fut de 25,000 hommes en 1870, de 35,000
en 1881 et de 40,000 en 1872 : le reste de la classe for-
mait une 2* réserve, od le service était de 6 ans. — La
loi du 17 février 1873 décida que l'armée ne compren-
drait plus que des volontaires s'engageant à servir
pendant deux ans au moins et que le contingent annuel
des inscrits âgés de 26 ans formerait une réserve où
le service durerait trois ans, mais que l'on pourrait
mobiliser. — Le décret du 18 juillet 1874 appela sous
les armes tous les célibataires ou veufs sans enfants
âgés de 22 à 35 ans, qui conservaient le droit de s'exo-
nérer; sinon ils devaient servir pendant toute la durée
de la guerre civile. — Le 10 février 1875, un décret a
appelé sous les drapeaux tous les jeunes gens âgés de
19 ans qui ne pourraient s'exonérer : ils doivent servir
4 ans dans l'armée permanente et 2 ans dans la ré-
serve. Il n'y a donc en Espagne aucune disposition for-
melle sur le service militaire; il faudrait de la stabilité
dans les esprits pour que les institutions militaires
soient établies conformément aux idées qui sont ad-
mises dans la plupart des grands Éuts européens.
France, — La loi du 27 juillet 1872 a introduit en
France le principe du service militaire obligatoire et
personnel. Le contingent annuel est prélevé sur le
nombre de 296,504 hommes qui ont atteint l'âge de
20 ans dans le courant de l'année précédente. Sur ce
nombre, en 1874, 25,659 Jeunes gens ont été reconnus
impropres à tout service actif ou auxiliaire dans l'ar-
mée ; 42,033 ont été dispensés du service d'activité en
temps de paix ; savoir : 2;336, comme aînés d'orphe-
lins de père et de mère; 18,7n5, comme fils uniques ou
aînés de fils, ou, à défaut de fils ou de gendre, petits-
fils uniques ou aînés des petits-fils d'une femme actuel-
lement veuve ou d'une femme dont le mari a été léga-
lement déclaré absent, ou d'un père aveugle ou entré
dans sa soixante-dixième année ; 258 comme aînés de
deux frères appelés à faire partie du môme tirage;
15,983, comme frères de militaires dans l'armée active;
5,651, comme frères de militaires morts en activité de
service, ou réformés, ou admis à la retraite pour bles-
sures ou pour infirmités contractées dans les armées de
terre et de mer. — 21,355 jeunes gens ont été ajour-
nés à un nouvel examen du conseil do revision, savoir :
7,022, pour taille inférieure à 1^,54; 14,333, pour fai-
blesse de complexion. — 22,387 ont été annotes sur lea
listes comme présents sous les drapeaux, savoir :
168 élèves de l'École polytechnique et de l'École fores-
tière; 7,348 engagés conditionnels d'un an; 11,391,
comme servant en vertu d'un engagement volontaire do
cinq ans, d'un brevet ou d'une commission ; 3,490 in-
scrits maritimes. — 4,313 ont été dispensés du service
militaire à titre conditionnel, savoir : 2,359, commet
destinant à l'enseignement ou y étant déjà employés ;
1,949, comme se vouant au ministère dans les cultes
salariés par l'État. — 179.852 sont donc susceptibles
d'être appelés sur-le-champ, dont 152,425, pour le ser-
vice armé et 27, 427 pour les services auxiliaires. Les
152,426 jeunes gens aisponibles pour le service armé
sont partagés en deux portions : la K^ portion, qui doit
rester pendant cinq ans sous les drapeaux, lournit
6,056 hommes à l'armée de mer, dont le contingent
annuel de 7,700 hommes est complété par 1,644 enga-
gés volontaires, et 95,086 hommes à l'armée de terre ;
la 2^ portion, susceptible d'être renvoyée après un an
ou six mois de service, est forte de 57,339 hommes. —
L'effectif de la 1'^ portion da contingent est diminué
de 5,485 Jeunes gens reconnus comme soutiens indis-
pensables de famille et de 337 jeunes gens maintenus
en sursis d'appel; il est augmenté de 6,797, ajournés
l'année précédente et reconnus ensuite propres au ser-
vice actif, de 16,000 engagés volontaires et de 7,748 ren-
gagés. — L'armée permanente comprend, en outre des
troupes recrutées par des étrangers ou des indigènes
des colonies, dans lesquelles le principe du service mi-
litaire personnel n'a pas été rendu obligatoire, le nom-
bre annuel de ces volontaires est de 1,739. La durée
du service est de 20 ans, dont 5 en activité ou en
disponibilité, 4 ans dans la réserve de l'armée active
5 ans dans l'armée territoriale, 6 ans dans la réserve
hEG
— I85â —
REG
de l'armée territoriale. — Les jeunes gens dispensés du
s Tvice d'activité en temps de paix, les jeunes gens dis-
pi nsés à titre de soutiens de famille et les jeunes gens
maintenus en sursis d'appel sont astreints à certains
exercices ; ils sont soumis à toutes les obligations de leur
classe quand les causes de leurs dispenses cessent; ils
sont appelés en cas de guerre, comme les hommes de
leur classe. — Au point de vue de la répartition des
forces sur le territoire, la France est partagée en 18 ré-
gions de corps d'armée; chacune de celles-ci comprend
8 subdivisions, à raison d'une par régiment d'infan-
terie d'armée territoriale; il convient d'ajouter en outre
8 subdivisions pour les départements de Seine«Seine-
et-Oiso, Rhône, qui appartiennent au territoire de plu-
sieurs corps d'armée. Les hommes qui sont appelés
sous les drapeaux peuvent être et sont presque toujours
incorporés dans des troupes ne résidant pas dans la
région où les hommes ont été inscrits et examinés par
les conseils de révision; les hommes de la disponi-
bilité et de la réserve sont appelés au service actif
d'après le même principe ; en un mot, les troupes de
campagne ne se recrutent pas sur le territoire où elles
tiennent garnison. L'armée territoriale, qui est orga-
nisée en tout temps, et la réserve de l'armée territo-
riale, qui ne serait organisée qu'en cas de danger, sont,
au contraire, recrutées et reconstituées par subdivision
de région ou par région, selon les armes. Le service
militaire compte à partir du l«r juillet de l'année du
tirage au sort; les libérations successives ont lieu
le 30 juin ; les soldats peuvent se roarior dès qu'ils ont
quitté le service actif, mais ils sont soumis aux obli-
gations de service imposées à la classe dont ils font
partie ; toutefois ceux qui sont pères de quatre enfants
sont placés de droit dans l'armée territoriale.
Grèce. — L'armée grecque se recrute par des appels,
avec faculté de remplacement; le service militaire obli-
gatoire et personnel n'y est pas connu.
Hollande, — L'armée hollandaise se recrute par des
appeb. avec faculté de remplacement; le principe du
service militaire obligatoire et personnel n'a pas encore
élé admis dans ce pays. L'armée des Indes hollandai-
ses contient un grand nombre d'Européens de tous
pays, qui sont des engag^^s volontaires.
halte, — L'armée italienne se recrute parun système
qui participe à la fois des appels avec remplacement et
du service militaire obligatoire et personnel. Le nombre
des jeunes gens atteignant annuellement l'âge de vingt
ans est de 240.000. Sur ce nombre, 120,000 sont dispo-
nibles pour le. service ; ils sont partagés en 2 catégories.
La V^ catégorie, forte de 66,000 hommes, constitue
le contingent budgétaire ; elle doit le service pendant
12 ans, sauf dans la cavalerie, où la durée n'est que
de 9 ans; les soldats restent 4 ou 5 ans sous les dra-
peaux, 4 ou 5 ans en congé limité, c'est-à-dire en ré-
serve, et 4 ans dans la milice provinciale. La 2^ catégo-
rie sert pendant 9 ans, dont 4 ou a ans en congé illimité
et 4 ou S ans dans la milice provinciale. Les jeunes
gens qui sont désignés par le sort pour faire partie
de la 1^0 catégorie peuvent permuter avec d'autres
jeunes gens de la même classe, désignés par le sort
pour faire partie de la 2* catégorie. Le territoire italien
est partagé en 62 districts pour les opérations de recru-
tement; la milice seule est organisée par districts; les
hommes sous les drapeaux et en congé illimité sont
incorporés dans toutes les troupes du royaume indis-
tinctement.
Portugal, — Le principe du service militaire obli-
gatoire et personnel n'est pas admis en Portugal, où
Tarniée se recrute par le système des appels, avec
faculté de remplacement.
Roumanie . — L'armée de Roumanie se recrute d'a-
près le principe.du service militaire obligatoire et per-
sonnel. Tout Roumain doit le service de 26 à 50 ans ;
pendant 8 ans, il est sous les drapeaux ou à la disposi-
tion de l'armée active ; si le tirage au sort l'a désigné,
il reste ensuite pendant 8 ans dans la réserve ; si le
sort ne l'a pas appelé au service actif, il compte dans
la milice. De 36 à 50 ans, il fait partie de la garde
urbaine, s'il est habitant d'une ville, et de la garde
rurale s'il habite la campagne.
Russie. — L'armée de l'empire moscovite se recrute
d'après le principe du service militaire obligatoire et
personnel ; celle armée comprend des troupes russes,
cosaques, asiatiques. — Les troupes russes disposent
annuellement de 600,000 jeunes gens âgés de 20 ans;
ceux-ci sont désignés par le sort pour faire partie de
l'armée permanente ou de la milice. Le service dans
l'armée permanente dure 15 ans, dont 6 sont sous les
drapeaux et 9 ans dans la réserve. — La milice com-
prend toute la population masculine valide, de 20 à 40
ans. Le 1*' ban de la milice, composée des 4 dernières
classes, est appelé à compléter les vides de l'armée
active, en cas de guerre; le 2* ban forme des corps
auxiliaires. — Les troupes cosaques sont astreintes à
un service de 22 ans, dont 15 ans au service extérieur
à leur province et 7 ans au service intérieur dans leur
province; mais Tincorporation effective n'a lieu que
pour le tiers environ des inscrits, et le service exté-
rieur ne dure généralement pas plus de 3 ans ; toute-
fois, tous les Cosaques doivent répondre à Tappel en
cas de guerre. — Quant aux troupes asiatiques, elles
ont le caractère d'une milice permanente.
Serbie, — L'armée de la principauté serbe se re-
crute d'après un système analogue à celui de Tarmée
roumaine, c'est-à-dire par l'application du principe du
service militaire personnel.
Suède et Norvège. — L'armée suédoise se composa
de 3 portions distinctes : la vseerfvade, armée perma-
nente, se compose de volontaires recevant une indem-
nité d'engagement; l'indelta, sorte de troupe de fron-
tière, est formée de volontaires entretenus par les
propriétaires de biens ruraux ; la bevaering, sorte de
réserve, comprend tous les jeunes gens de 20 à 2.S ans
qui ne font pas partie des deux premières catégories
et tous ceux qui, âgés de moins de 40 ans, ont été
libérés du service. — En Norvège, l'armée se recrute
par des appels, avec faculté de remplacement; la durée
totale du service est de 10 ans, dont 7 sous les drapeaux
ou dans la réserve et 3 ans dans la landwsem, sauf
pour les cavaliers, qui servent seulement pendant
7 ans.
Suisse. — En Suisse, le service militaire est obliga-
toire et personnel; il est dû pendant 24 ans, dont
12 ans dans l'élite et 12 ans dans la landwehr. — Les
forces militaires de la République helvétique n'ont pas
le caractère permanent ; elles constituent, à la vérité,
une sorte de milice qui se réunit annuellement pour
des exercices ; ces cours d'instruction et de répétition
ne concernent même que l'eliie, la landwehr n'étant
pas du tout organisée : on peut estimer que leur durée
moyenne est de l'iO à 200 jours pour tout homme
ayant servi de 20 à 32 ans dans l'élite. Quant à la land-
wehr, elle est réunie au moins une fois pendant un
jour dans le courant de chaque année, et les hommes
qui en font partie sont astreints à un exercice de tir
annuel.
Turquie. — Le service militaire est obligatoire dans
l'empire ottoman pour tout sujet musulman. Les
hommes qui ne pratiquent pas la religion de Mahomet
sont exclus de l'armée. La durée du service esi de 20
années, c'est-à-dire de 20 à 40 ans d'âge, savoir : 4 ou
5 ans dans lo nizam, ou armée active ; 2 ou 1 an dans
l'ikhtiat, ou disponibilité de l'armée active ; 3 ans dans
le l*r ban de la réserve; 3 ans dans le 2* ban de cette
réserve, à laquelle on donne le nom de rédif; 8 ans
dans la levée en masse, moustafiz. Le tirage au sort
désigne les jeunes gens appelés au service et dont le
nombre annuel est de 25,000 environ ; mais les exemp-
tions et les dispenses sont nombreuses, outre que le
jeune soldat appelé peut se faire remplacer ou se ra-
cheter moyennant indemnité payée à l'ÊtaU
RÉGLEMENTATION, ensemble de législation par
lequel l'autorité publique s'attribue la mission de diri-
ger plus ou moins entièrement un grand nombre de
travaux et de transactions qui sont du domaine de
l'activité privée. Elle est une gêne plutôt qu'un se-
cours. Kii général, on peut s'en rapporter à l'intérêt
privé du soin do faire ce qui est opportun, et le seul
soin que devrait prendre le gouvernement serait d'em-
pêcher que l'intérêt des uns ne porte préjudice aux
droits des autres ou du public. Cependant il est des
cas où la réglementation est nécessaire. Par exemple,
il est dans les attributions de l'autorité publique d'as-
surer la conservation des bois des montagnes, d'en
régler l'exploitation, parce que le défrichement de ces
bois entraînerait la dévastation des plaines; elle a le
droit de réglementer la pêche et d'interdire certains
procédés qui dépeupleraient tes eaux ; de régler l'usage
des cours d'eau de manière à empêcher qu'il n'en ré-
sulte un dommage public, -et à leur donner la plus
grande utilité possible; de veiller sur la construction
des bâtiments bordant la voie publique, sur le nettoie-
RÉU
— 4853 —
ROM
ment de cette voie, sar U tenae des lieax ouyerts au
public, etc.
RENGAGEMENT. — La loi militaire de 1872 «n
France décida qu'il n*y aurait dans les troupes ni
prime en argent ni prime quelconque d'engagement.
Mais, d'après une loi votée en 1878, un rengagement
peut être contracté par les sous-officiers seuls. Il esl
alloué pour la première période de cinq ans : 1» une
mise d'entretien de 600 fr., payée en totalité ou en
partie après la signature de l'acte d'engagement, soit
en espèces, soit en livret de la caisse d'épargne ;
2<> une indemnité de 2,000 fr. dont le capital est payé à
l'expiration de l'engagement et dont l'intérêt est s^ervi
par trimestre au taux de 5o/o. Cette somme de 2,000 fr.
est acquise intégralement au sous-officier rengagé qui
est réformé pour blessures reçues dans un service
commandé; en cas de décès, elle est réversible sur sa
veuve non séparée de corps, ou, à défaut de veuve, sur
les héritiers. Un deuxième rengagement de cinq ans
donne droit : P à une seconde mise d'entretien de
600 francs, payable comme la première ; 2« à une pen-
sion de retraite de 365 francs après quinxe ans de ser-
vices, en outre des 2,000 francs dus pour la première
période. Cette pension peut être cumulée avec le trai-
tement afférent & un emploi civil. Après dix ans de
services, un sous-officier peut demander un emploi de
l'Ëtat en satisfaisant d'ailleurs aux examens prescrits,
et il participe à tous les avantages stipulés par la loi
spéciale du 34 Juillet 1873. Enfin, à partir du jour où
compte son rengagement effectif, le rengagé a droit à
une haute paye journalière de 0,30 cent., qui sera aug-
mentée de 0,20 cent, par jour pour une seconde pé-
riode de cinq ans, c'est-à-dire après dix ans de ser-
vice.
RENNES (PâlENCBS de). — Cette fabrique paraît avoir
existé vers la seconde moitié du xviio siècle, mais le
premier document qui en reconnaît l'existence date de
1748. Ses produits reppellent ceux de la fabrique
marseillaise. Ils s'en distinguent ! par une coloration
spéciale dans laquelle domine le manganèse. C'est
cet aspect grisâtre, propre aussi aux faiences de Quim-
per, qui permet de ne pas les confondre avec les
fai<*nces de Rouen.
RETRAlTl!: (Pensions de).— Le chiffre des pensions de
retraite dans l'armée a été élevé par une loi de juin 1878.
Le tableau suivant présente la situation précédente ot
la situation actuelle :
Antérieurement Actuellement
Général de dÎTisioD de 5,200 fr. à 7,800.. de 6.600 ir. à 10.000
Général de brigade de 4,000 fr. à 5,i00.. de 5,800 fr. à 7,500
Colonel de 3,120 fr. à 3,900. . de 4,500 fr. à 6.000
Lieutenant-colonel de 2.340 fr. & 3,lâ0.. de 3.700 Tr. k 4,000
Chef de bataillon.de 1,950 fr. à 2,500.. de 3,000 fr. à 5,000
Capitaine de 1,500 fr. à 2,400.. de 2,400 fr. à 3,300
Lieutenant de 1,120 fr. à 1,680.. de 1,700 fr. à 2,500
Sou8-lieuteuant . . do 840 fr. à 1,400.. de 1,570 fr. à 2,300
Les assimilés profitent de la même augmentation.
La retenue qui sert à constituer le fonds de retraite
est élevée de 2 à 4 pour cent. La veuve d'un officier
touche le tiers de la retraite à laquelle l'officier a eu
droit.
RÉUNIONS PUBLIQUES. — Une loi du 25 mars 1868,
modifiant la législation antérieure {V. Association,
dans le Dictionnaire) ^ a décidé que les réunions n'ayant
Î)as pour objet de traiter de matières politiques et re-
igieuses peuvent avoir lieu sans autorisation préala-
ble. Il suffit de déposer à la préfecture de police à
Paris, à la préfecture dans les départi^ments, une dé-
claration signée par sept personnes domiciliées dans la
commune, avec indication de l'objet de la réunion, du
lieu, du jour et de l'heure où elle doit avoir lieu. Trois
jours francs doivent s'écouler entre la délivrance du
récépissé de cette déclaratiou et la séance. Toute réu-
nion doit être tenue dans un local clos et couvert. Un
fonctionnaire de l'ordre judiciaire ou administratif,
délégué par l'administration, peut y assister, il prend
une place à son choix; il a le droit de dissoudre l'as-
semblée, si le bureau laisse mettre en discussion un
sujet étranger à l'objet de la réunion, ou si la séance
devient tumultueuse. Des réunions électorales peuvent
avoir lieu à partir de la promulgation du décret de
convocation d'un collège pour l'éleciiori d'un député,
jusqu'au cinquième jour avant celui fixé pour l'ouver-
ture du scrutin; un jour doit s'être écoulé depuis la
délivrance du récépissé de la déclaration ; ne peuvent
assister à ces réunions que les électeurs de la circon-
scription et les candidats c^ui ont rempli les formalités
requises. Toute contravention est punie d*une amende
de 100 fr. à 3,000 fr. et d'un emprisonnementde6jourB
à 6 mois. Pour résistance k Tordre de se disperser,
Tamende est de 800 fr. à 6,000 fr. etTemprisonnement
de 15 jours à 1 an, sans préjudice des peines portées
par le Code pénal. Le port d'armes apparentes ou ca-
chées dans uneréunion est puni d'un emprisonnement
d'un mois à un an et d'une amende de 300 fr. à
10,000 fr. Toute réunion qui paraîtrait de nature à
troubler l'ordre ou à compromettre la sécurité publi-
que peut être ajournée par les préfets et interdite par
le ministre de l'intérieur.
Une loi sur la liberté de réunion, votée le 30 juin
1881, a établi et régularisé en France la liberté de
réunion. Toule réunion publique peut .«e tenir sans
autorisation préalable, sous la condition d'une décla-
ration indiquant le lieu, le jour et l'heure de la
réunion, signée de deux personnes au moins, dont
l'une domiciliée dans la commune où la réunion doit
avoir lieu. Cette déclaration est faite, à Paris, au
préfet de police; dans les chefs-lieux de département,
au préfet ; dans les chefs-lieux d'arrondissement, au
sous-préfet; dans les autres communes, au maire. En-
tre la déclaration et la réunion, il doit s'écouler un
délai de 24 heures, délai réduit à deux heures pour
les réunions delà période électorale; s'il s'agit d'élec-
tions comportant plusieurs tours de scrutin, la réunion
peut suivre immédiatement la déclaration. Chaque
réunion a un bureau, composé au moins de trois per-
sonnes et chargé de maintenir l'ordre, d'empêcher les
infraciions aux lois, d'interdire tout discours sédi-
tieux. Un fonctiounaire de l'ordre administratif ou
judiciaire peut être délégué parle préfet, le sous-préfet
ou le maire, suivant les localités, pour assister à la
réunion; mais il n'a le droit de dissoudre la réunion
3ue s'il en est requis par le bureau ou s'il se produit
es voies de fait. Les crimes ou délits commis par la
parole, en réunion publique, sont punis des mêmes
peines que ceux qui sont commis par la voie de la
presse. Les clubs restent interdits.
ROMANISTES.— Nom donné en histoire de l'art, aux
peintres qui firent décidément triompher dans les
Flandres les principes de la Renaissance ilalienne.
Les confréries de romanistes se composaient de per-
sonnes ayant fait le voyage de Rome. Celle d'Anvers,
établie en 1.S72 subsista jusqu'en 1785.
ROME(écoLB PRANÇAisB de). — Installée au palais Far-
nèse en 1873, celte école porta d'abord le nom d'E-
cole d'archéologie. Ce titrn trop spécial et qui sem-
blait enfermer dans des limites trop exclusives les
travaux de ses membres, fut bientôt ramené à la dé-
nomination actuelle plus conforme à sop but. L'École
française de Rome est absolument distincte de la villa
Médicls. Elle eut pour objet la préparation pratique des
membres de l'École d'Athènes (V. Dict. d*histoirtf), aux
travaux d'archéologie, de philologie, d'histoire, de
philosophie, d'art antique ou moderne, qu'ils doivent
faire pendant leur séjour en Grèce ou en Orient. Le
règlement de l'École d'Athènes imposait aux membres
de l'École d'Athènes l'obligation de passer trois mois
à Rome pour s'initier par l'étude de l'antiquité ro-
maine, plus voisine de nous, à l'intelligence de l'anti-
quité* grecque. Ce terme de trois mois fut bientôt
reconnu insuffisant. On retendit à un an. Les élèves
étaient placés sous la direction d'un savant autorisé
qui prit, le 25 mars 1873, le titre de sous-directeur de
rÉcole d'Athènes, chargé de la succursale de Rome.
Le 26 novembre 1874, un nouveau décret donnait à
la section romaine de l'École d'Athènes le titre d'É-
cole archéologique de Rome, tout en laissant à son
directeur le titre de sous-directeur de l'école d'A-
thènes. Enfin, le 20 novembre 1875 l'école recevait son
organisation définitive. Elle devenait l'École française
de Rome, placée, comme son aînée d'Athènes, sous le
haut patronnage de l'Académie des Inscriptions et
Belles-Lettres. Ses membres devaient être au nom-
bre de six, nommés d'abord pour un an, et pouvant
successivement obtenir une prolongation d'une et de
deux années. Les places devaient être attribuées, soit
à des candidats présentés par l'École normale supé-
rieure, soit par l'Ecole dos Chartes et par la section
ij'hisioire et de philologie de l'École des Hautes-Études,
soit à des docteurs reçus avec distinction, ou à des
jeunes gens signalés par leurs travaux. En somme la
ROU
— 1854 —
RUS
liberté la plus absolae assurée au recrutement, pas
d'examen d'entrée, et toutes les facilités données aux
Jeunes gens qui ne seraient pas sortis des grandes
écoles de l'État. Ainsi constituée, la nouvelle école
avait son homogénéité, son but propre, ayant à côté
de ses Athéniens d'un an ses membres distincts ne
relevant que d'elle seule. C'est à H. Albert Dumont,
mort en 1884, directeur de renseignement supérieur,
qu'est due l'initiative de la création nouvelle. Il en
fut le premier directeur. En ISlh M. Geffroy lui suc<
céda dans ces dé'icates et savantes fonctions. Le di-
recteur actuel est M. Le Blant, membre de l'Institut.
Le directeur est nommé par décret, sur une double
liste de deux candidats présentés par l'Académie des
Inscriptions et Bnlies-Leitres, et par la section de l'en-
seignement supérieur du Comité consultatif. L'École
française de Rome a un budget qui doit pourvoir à
tous les frais d'entretien et d'études. La pension al-
louée à chaque membre a été portée de 3,500 à
4,000 francs.
Sur son budget Técole a réussi h entreprendre trois
grandes publications : 1** la Hiblioihèque des Ecoles
françaises cC Athènes et de Rome, où paraissent les
mémoires des membres de l'école ^ 3o Mélanges d'ar-
chéologie et dhisloire^ recueil périodique^ accom-
pagné de planches explicatives, qui comprend chaque
année au moins vingt-cinq mille feuilles d'impres-
sion ; S*" les Registres des Papes, grande collection
in-4<^ qui a eu un grand retentissement dsns le
monde savant, et a mis au jour les innombrables vo-
lumes conservés dans les archives Eecrètes du Vati-
can, contenant les minutes des bulles de chaque pon-
tificat. On doit aussi compter à l'actif de l'École
française de Rome les nombreux travaux personnels
publiés sur l'art, Tarcliéologie et la philologie par di-
vers membres de l'école, MM. Eugène MUntz, Maxi-
me CoUignon, Martha, Pottier, Lafaye, Homolle, Paul
Girard, de la Blanchère, Mabille.au, Antoine Tho-
mas, etc... L'École française de Rome est destinée à
rendre d'innombrables services.
ROUEN (FaIkncbs de). — Dès le temps de FrançoisI»',
on fabriquait des revêtements de faience à Rouen ; car,
à cAté de ceux de Girolamo délia Robbia, il y avait au
château de Madrid (près de Paris) des carreaux qua-
drangulaires d'un potier rouennais.'Maclou Abaquesne.
Lés couleurs, enluminant des motifs italiens de la Re-
naissance, en sont vives et variées ; l'émail est pur et
glacé. Cette belle industrie s'éteignit. Un siècle plus
tard, un (.'ustode de Neversvint initier la Normandie
aux procédés nivernais. En 1673, Edme Potlierat, sieur
de Saint-Étienne, s'abriunt sous le nom de Nicolas
Poirel, huissier de la Chambre de la reine, installa
définitivement à Rouen la manufacture royale de faïen-
ces, dont il mourut directeur en 1687. Le mode de
décoration propre aux faïenciers rouennais consistait
à faire rayonner autour du centre des pièces plates, et
à peindre sur la panse des vases des bordures bleues sur
blanc, travaillées àjour, au lieu d'orner d'émaux blancs
des fonds bleus. Rouen eut aussi sa statuaire cérami-
que, bien supérieure à celle de Nevers, dans la pre-
mière moitié du xviii* siècle. A la môme époque, inter-
prétant avec liberté les porcelaines de Chine, les potiers
en tirèrent ces paysages fantastiques et à oiseaux, dra-
gons, marines, fabriques, etc., qui ornent les spéci-
mens quelquefois énormes de l'art normand. Aux
approchi^s de la Révolution française, la faïence de
Rouen périt frappée par les accroissements de la por-
celaine et pir la concurrence des produits anglais. B.
ROULEAUX DES MORTS, bandes de parchemin
roulées autour d'un cylindre (d'où le nom de rotuli)^
que les moines s'envoyaient d'un couvent à un autre,
pour annoncer la mort d'un frère ou bienfaiteur el
demander quelques prières. L'usage en exista dès le
viii* siècle et jusqu'au xiv(>On distingua truis espèces
de rouleaux des morts : P les rouleaux perpétuels,
portant les noms de tous les morts d'une abbaye,
qu'on lisait une fois devant les fidèles ; 2* les i^ou-
leaux annuels y où figuraient !• s morts que des églises
associées recommandaient aux prières chaque année;
Z^ les rouleaux individuels^ envoyés après la mort de
chaque personnage important, et qui contenaient son
bisioire, ses vertus, son éloge. Ces derniers rouleaux
étaient augmentés, chez les moin'es qui les avaient
reçus, de certaines réponses ou additions à l'éloge fu-
nèbre, qu'on appelait dt'S litres, Ain»i, on compte 178
til*es écrits sur le rouleau de saint Bruno, V06 sur
celui de saint Vital, fondateur du couvent deSavigny,
et 250 sur le rouleau de Mathilde, abbease de Gaen.
Les rouleaux contenaient parfois des vers et des Jeux
de mots. (K. Histoire littéraire de la France, t. IX, et
XXIV; Léopold Delisle. Bibliothèque de fEcole des
Chartes, 2« série, vol. III.)
ROUPILLE, large surtout, brodé d'une croix blan-
che, que portaient autefroisles rocantins. (F. ce mot
dan^ ie Dictionnaire,) Leurs chausses, qui renfer
maient toute la jambe, se nommaient rabach (du cel-
tiqiie rabe, jambe).
RUSSE (littérature). — Avant Pierre I»' (1632), la
Russie encore toute proche de la vie primitive ne
possède qu'une littérature religieuse : lea chants, les
traditions et les livres du christianisme byzantin.
Les tentatives originales des Petits-Russiens, plus
ardents et plus rêveurs que les autres Slaves, n'ont
pas le temps d'aboutir. Les Mongols enTahiasent la
Russie. Et, sous l'influence de cette culture conqué-
rante, la vie russe abandonne sa direction nationale.
Les rares monuments littéraires de ces époques sont
des mandements d'évèques et des controverses de
moines au sujet des hérésies. Vers le xvii« siècle la
Russie, unifiée par l'autocratie des tsars, devient plos
accessible à l'influence européenne, qui s'infiltre peu
à peu dans l'esprit de la nation. Pierre I«' (1632),
trouvant que cette assimilation ne s'accomplissait pas
assez vite, eut recours aux ukases et aux amendes,
pour forcer ses sujets à « %* européaniser ». Cathe-
rine II consolida son œuvre, et la littérature, éman-
cipée de la religion, chercha à entrer dans l'éTolution
de la pensée européenne. De cette tentative sortit une
littérature d'imitation, pseudo-classique, qui fut en
faveur jusqu'au commencement du xix* siècle ; on peut
dire qu'elle eut d'heureux résultats, puisqu'elle assou-
plit et enrichit la langue russe. Mais c'est le roman-
tisme qui afTranchit la littérature russe. Toutes les
audaces de couleur, de pittoresque d'expression et
d'analyse que les romantiques mettaient à la mode
en Occident, les Russes les possédaient de naissance.
En devenant romantiques, c'était proprement à leur
génie national quMls retournaient. De là (de 1820 à
1840) l'épanouissement subit de leur littérature, avec
Pouchkine, Lermoniof, Gogol, Biélinsky etc.
Après eux, avec Tourguenefl*, Pisemsky, Dostoievsky,
la littérature russe exprima toutes les souffrances et
toutes les aspirations de la société. L'école naturelle
protesta de tout son pouvoir contre la situation sociale.
Et, gr&ce à cet esprit d'indépendance, le règne de
Nicolas, qui pesa si durement sur la Russie, fut une
période glorieuse pour la littérature slave. Les réformes
de 1861 créèrent une nouvelle société. Des besoins nou-
veaux attirèrent l'attention publique sur des idées
nouvelles. — Frappée de la misère générale, de
l'inefficacité des réformes, du chaos des idées et de
la vaine agitation des hommes, l'école naturelle ne
voulut voir dans le mouvement que l'avortement
des espérances, les côtés négatifs et repoussants.
De cette conception pessimiste de la vie sortit la
nouvelle école qui, renonçant à l'héritage idéaliste des
ancêtres, déclara qu'elle serait l'école du réalisme
populaire, une littérature de moujiks.
Cette transformation subite s'explique par les qua>
lités d'esprit sérieuses et positives du Grand-Russien
et par l'influence prépondérante qu'ont exercée sur la
litlérature russe moderne les littératures allemande
et anglaise. Quel que soit le succès apparent du roman
et du théâtre français en Russie, ni l'un ni l'autre n'y
sont imités. On les considère comme de pures œuvres
d'art, des modèles de forme et de composition ; mais
on regrette de n'y point rencontrer de conclusions
pratique;!. En effet, comme l'esprit anglais et Tesprit
allemand, l'esprit russe est préoccupé d'utilité et de
science. Il se sent entraîné vers tous les problèmes
philosophiques et sociaux. Le roman russe instruit,
moralise, développe une thèse ; quanta la comédie et
au drame, ils n'ont aucun souci de l'intrigue et des
coups de théâtre, uniquement préoccupés du dévelop>
pement psychologique des caractères.
En présence de la révolution historique qui se pré-
pare en Russie, il est malaisé de prévoir les destinées
môme toutes prochaines de la littérature russe. Toute-
foi», bien qun l'action ait succéJé aux excitations des
livres à tewtance, et, mal p;ré l'apparente barbarie des
mœurs nihilistes et terroristes, il est certain quK nous
sommes en présence d'un réveil des instincts idéalistes
RUS
— 1855 —
SAL
et mystiques du peuple russe. La première manifes-
tation de cette renaissance a été un mouvement social,
le terrorisme. Il parait certain, aujourd'hui, que,
après l'agitation sociale, un mouvement littéraire
idéaliste se produira.
Donnons maintenant quelques renseignements com-
plémentaires sur la période moderne et sur la période
contemporaine de cette littérature aujourd'hui à
Juste titre si fort prisée.
Littérature modernb. — Première Période^ 1820
à 1848. — Les noms les plus remarquables de cette
époque sont : Griboledof, auteur d'une comédie sa-
tirique : le Malheur d'avoir de Veaprit ; le célèbre
Pouchkine, poète et romancier comme le byronien
Lermontof; Gogol, le grand conteur, surtout connu en
France par son roman les Ames mortes, les critiques
Polevoî et Biélinsky.
Tous ces auteurs appartiennent à la période roman-
tique.
Deuxième période ^ 1840 à la guerre de Crimée. »
Une certaine lassitude de Teiagération romantique dans
le choix des situations et l'analyse des caractères
provoque un commencement de réaction. Le goût des
auteurs va aux sujets simples, aux caractères moyens,
finement observés. Ils apportent le même souci dans
la peinture des cadres, intérieurs et paysages, où
vivent leurs personnages. Cette tendance naissante
de réalisme est très sensible dans le livre d'Uerzen
A qui la faute? dans Une histoire ordinaire de
Gontcharof, et le Tarautass de Sollokoub.
Elle s'accentue encore avec les écrivains de l'école
naturelle, Grigorovitch, auteur des Emigrants, avec
les Mémoires d'un chasseur Qt Moumou de Tourgueneff,
le Lieschi et le Pélersbourgeois de Pisemsky, les
Pauvres gens de Dostoïevsky. Le réalisme triomphe
même au théâtre, où Ostrowski met en scène des pe-
tits bourgeois et des marchands de Moscou, dans des
comédies de situations uniformes, d'intrigues banales
ou mal conduites, qui ne valent que par la fidélité
de l'observation. (Entre tious nous nous arrangerons;
Chacun doit i-ester à sa place ; Pauvreté n'est pas
vice,'' etc.)
LiTTÉRATORB coNTBiiPORAiNE. — Première Période^
de la guerre de Crimée à l'abolition du servage, — La
guerre de Crimée porta un coup mortel au vieil édifice
social qui avait été si péniblement élevé pendant des
siècles. La Russie comprit son infériorité réelle et se
mit courageusement aux réformes. Les idées purement
théoriques et abstraites dont elle s'était nourrie jus-
qu'alors ne pouvaient plus lui suffire. La presse profita
de la liberté momentanément accordée pour discuter
les questions du jour. La littérature avait devancé ce
mouvement général de l'esprit russe. Elle avait peint
la misère du moujik, les souffrances des petites gens ;
maintenant elle allait prendre à partie les « classes
dirigeantes », démontrer l'impuissance de la généra-
tion de 1840, en présence de la vie et des idées nou-
velles, porter les derniers coups k la vieille société
dps « féodaux « en faisant ressortir ses vices et ses
faiblesses. C'est à cette période littéraire qu'appar-
tiennent la Nichée de gentishommes^ Dimitri Roudine,
et A la veille de Tourgueneff, le roman satirique de
Pisemsky, Mille âmes, les Esquisses de province de
Stchédrine, Humiliés et offensés de Dostoïevsky,
Oblomof, de Gontcharof, et, au théâtre, VEmploi lu-
C7*/)/t/d'Ostrowsky, ainsi que VEmployé, de Sollukouk.
Deuxième période, depuis Vabolition du servage jus»
qu'à nos jnurs. — Le l«' février 1861 l'empereur
Alexandre II rendit la liberté à 24,000,000 de serfs.
Cette révolution sociale agita profondément la nation.
Les rétrogrades et les conservateurs regrettaient
l'ancien ordre de choses, les socialistes trouvaient que
l'on n'avait pas assez fait. Tout le monde se jeta dans
l'arène; ce fut comme un renouveau de la vie intel-
lectuelle. Les sujets, les questions abondaient, les
types se produisaient plus nombreux et plus variés. Le
roman commença à s'occuper d'une nouvelle théorie
sociale qui faisait son apparition, le nihilisme.
Comme il fallait s'y attendre, ce furent les côtés
purement théoriques et les exagérations du nihilisme
qui frappèrent surtout les écrivains de l'école natu-
relle. En 1840 ils avaient attaqué le servage, après la
guerre de Crimée ils avaient couvert de ridicule le
parti de la vieille cour, ils ne virent dans la société
actuelle que des nihilistes. Au lieu de peindre les luttes
et les aspirations de la génération contemporaine, ils
ne l'envisagèrent qu'au point de vue du pessimisme.
Cette critique paruale de la révolution russe se mani-
feste surtout dans les derniers romans de Tourgueneff:
Terres vierges, Pères et enfants. Fumée, dans la Mer
agitée et le Tourbillon de Pisemsky, dans Crimée et
châtiment et les Possédés de Dostoïevsky, dans le
Précipice, de Gontcharof.
Le pessimisme russe a revêtu une forme particuliè-
rement originale dans l'œuvre du comte Léon Tolstoï,
dont le chef-d'œuvre incontesté, /« Guerre et ta Paix,
a été traduit dans toutes les langues et avidement lu
en Europe. Le cadre de ce roman est immense, les
personnages innombrables. On n'y compte pas moins
de trois empereurs, avec leurs ministres, leurs maré-
chaux, leurs soldats, des nobles et des paysans. Ces
l'histoire de la campagne de Russie et de la retraite
de Napoléon. Le comte Tolstoï est fataliste. Le pessi-
misme suppose encore quelque souci de l'industrie,
le regret de voir les choses tourner mal quand elles
pourraient aller à bien. Mais dans la conception fata-
liste de Tolstoï il n'y a pas de place pour un vœu, un
choix ou un regret. Les choses ne vont ni à bien ni
à mal, elles vont au hasard. L'admiration est aussi
ridicule que l'indignation, puisque l'action est fatale.
Il n'y a pas un point déterminable où l'initiative de la
volonté nnit, et se heurte à la destinée. Il n'y a qu'une
cause confuse et unique de tout.
Si nous avons analysé ici un peu longuement le fata-
lisme de Tolstoï, c'est qu'il nous apparaît comme le
trait d'union qni relie le pessimisme de l'école natu-
relle à l'idéalisme imminent de la Jeune génération.
Les lecteurs de Ma Religion oseraient-ils affirmer que
ce mouvement n'est pas déjà commencé ?
V. C. Courrière, Histoire de la littérature contem-
poraine en Rusne. — E. Dupuy, les Grands maîtres
de la littéi'fiture ri«w.— Stepniak. La Russie souter-
raine.—Melch'xov de \oga^. Revue des Deux-Mondes,
15 janvier et 15 novembre 1885. H. L. R.
SAINTES (paIence de). — On trouve dans cette ville
dès les premières années du seizième siècle une im-
portante fabrique de terres vernissées. C'est 1& que
Bernard Palissy fit ses premiers essais. Vt^rs la fin du
dix- septième siècle. Saintes se transforma par la fa-
brication de la faïence blanche rehaussée de dessins
en couleurs. En 1788, on comptait à Saintes quatre
usines se livrant à cette industrie.
SAISONS (Les), poème descriptif anglais, publié en
1730 par James Thomson. C'est la réunion, sous un
titre commun, de quatre poèmes qui avaient paru suc-
cessivement, VHiver en 1726, VEté en 1728, le Prin-
temvs en 1729, V Automne en 1730. On peut reprocher
à Thomson du vague, de l'emphase, le luxe des orne-
ments, la profusion des couleurs. Mais il a de l'inspira*
lion, de l'originalité dans les pensées et dans le style;
ses descriptions sont remarquables tout à la fois
d'exactitude et de magnificence. A de nombreux ta-
bleaux on voit qu'il sent et aime la campagne. Il est
arrivé au pathétique et au sublime dans la peinture
de l'hiver au milieu des contrées hyperboréennes, et
des souffrances de l'homme égaré parmi les neiges et
les glaces. Thomson a semé son poème d'épisodes
bien liés avec le sujet, tantôt touchants et gracieux,
comme celui de Musidore surprise au bain, tantôt ani-
més du plus ardent enthousiasme, quand il chante les
grandes renommées de la vertu et de la liberté anti-
ques ou les héros de l'Angleterre. La littérature fran-
çiiise a aussi son poème des Saisons, par Saint-Lam-
bert (1750). Ce poème, que Voltaire trouvait supérieur
à celui de Thomson, et qui fut loué avec la même par-
tialité par la Harpe, ouvrit â l'auteur les portes de
l'Académie française. Mais il trouva aussi les plus vio-
lentes critiques de la part de Clément et de M"' du
Deffant. Le fait est que les Saisons de Saint-Lambert
sont une œuvre froide et monotone. B.
Le plus ancien poème des Saisons connu est le At-
tusanbara (cycle des saisons), poème sanscrit du grand
po('te c1n8si(|ue de l'Inde, Katidasa.
SALIÈRE, ustensile de table qui, jusqu'au xvi* siècle,
ne se trouva guère que chez les rois. C'était presque
toujours une pièce remarquable d'c«*fèvrerie. Dans les
SGR
— 1856 —
SCU
fesUns qui n'étalent pas royaux, la salière était un
morceau de pain creusé pour recevoir le sel et que
chaque convive plaçait à côté de son assiette.
SANA (taésor de). —On désigne sous ce nom un lot
de deux cents monnaies d'argent trouvé sous le sou-
bassement d'une des portes de la ville de Sana, dans
le Yémen, et dont la découverte fait époque dans This-
toire de la numismatique himyariie. Ces monnaies^
que Ton rapporte en général à la deuxième moitié du
ii« siècle avant J.-C, jettent un jour nouveau sur
l'histoire des rapports commerciaux entre la Grèce et
l'Orient, car ces monnaies sont imitées du monnayage
d'Athènes. Le droit des monnaies porte des lêtes
royales dont le style et la physionnomie donnent la
base d'un arrangement chronologique, tant pour le re-
vers des pièces arabes que pour les pièces qu'elles
imitent. (V, G. Schlumberger, le Trésor de Sana^
Paris, 1880.)
SCEAUX (PAÎBNCB de). — Fabriquefondée vers le mi-
lieu du dix-huiiième siècle par Jacques Chapelle. On
en goûte aujourd'hui beaucoup les produits à cause de
leur élégance et du charme de leur décoration. La
pâte est d'une grande finesse et l'émail d'une limpi-
dité parfaite. Les formes sont d'une grande re-
cherche et les figures encadrées dans des motifs de
paysage, des rinceaux relevés d'or traités de mains
de maiire, reflètent le goût précieux et les séductions
charmantes de l'art français au dix-huitième siècle.
I^ fabrique de Sceaux a rarement marqué ses pro-
duits. Lorsqu'elle passa sous le patronage du duc de
Penihièvre, grand amiral de France^ elle prit pour
marque une ancre de marine. Mais cette époque est
le commencement de sa décadence. Les pièces d'art
font place aux produits du commerce. La décoration
devient banale, et no rappelle en rien les premières
fantaisies de Jacques Chapelle. Les faïences de Sceaux
sont représentées au musée de Cluny par des spéci-
mens importants qui donnent une idée eyacte des
soins qui présidaient à la fabrication et au choix des
artistes attachés à l'usine de Jacques Chapelle.
SCHORRËS. — On nomme ainsi, dans la Nécriande,
les alluvions produites dans la mer par certains cou-
rants, le long des côtes, et qui appartiennent à TKtat.
Un srhorre est mûr quand il dépasse un peu le niveau
des hautes marées et commence à se couvrir d'herbes
fines. Alors l'Etat le vend ou concède à une compagnie
particulière, qui commence par l'endiguer pour le met-
tre en valeur. L'Etat prescrit et surveille i'endigue-
ment. Un schorre n'est livré à la spéculation qu'après
que l'on a reconnu par un sondage que son sol ren-
ferme l'argile et le sable nécessairf's à son endigue-
ment. La province de Zélande, particulièrement, s'a-
grandit de temps en temps par des conquêtes de ce
genre, dont l'installation est coordonnée suivant un
{>lan d'ensemble. Il se forme aussi des schorres dans
e Zuyderzée. C.D— t.
SCIENCES (Faculté des). ~ A partir de 1876, le traite-
ment a été fixé : professeurs, à Paris, 13,000 fr, ; par-
tout ailleurs, de 6,000 à 10,000 fr. ; agrégés, en tous
lieux, 2,000 fr.
SCRUTIN (d'arrondissement, de liste). — Le scrutin
dit d'arrondissement est le scrutin uninominal : l'en-
semble du territoire est divisé en circonscriptions
électorales, qui répondent pour la plupart à des arron-
dissements, et chaque circonscription nomme un dé-
puté. Au scrutin de liste, chaque électeur inscrit sur
son bulletin autant de noms que la commune a de
conseillers municipaux, le département de sénateurs
et de déf^utés à nommer. Le scrutin de liste a toujours
fonctioimé en France, sauf à Paris, pour les élections
communales; il a été établi pour les élections sénato-
riales par la loi constitutionnelle de 1875; il a alterné
avec In scrutin uninominal pour les élections à la
Chambre des députés. C'est ainsi que les assemblées
de la première et de la deuxième république ont été
élues au scrutin de liste; les corps législatifs du
gremier et du second Kmpire, les chambres de la
restauration et de la monarchie de Juillet, ont
au contraire été nommés au scrutin dit d'arron-
dissement. Abrogé au coup d'État du 2 décembre par
Louis-Napoléon, le scrutin de liste fut rétabli pour les
élections à l'Assemblée nationale de 1871 parun décret
du gouvernement de la défense nationale; il resta
en usage jusqu'en 1875 où il fut de nouveau remplacé
par le scrutin d'arrondissement, malgré les efforts du
parti répubUcain et de Gambetla. Faire rétablir le
scrutin de liste, qu'il considérait comme le seul scru-
tin politique et l'expression sincère du suffrage
universel, fut dès lors une des pensées constantes
du grand orateur et Tun des premiers articles de son
programme. Proposée par M. Bardoux en 1880, la ré-
forme électorale fut votée par la Chambre, aprè^ un
discours de Gambetta (19 mai 1881) ; mais le Sénat la
repoussa ; les ennemis du président de la Chambre pré-
tendaient que le scrutin de liste serait entre ses mains
un instrument de dictature. Gambetta,devenu président
du conseil des ministres le 14 novembre 1881, proposa
alors d'inscrire dans la loi constitutionnelle, dont la
revision était demandée, le principe du scruUn de
liste : le suffrage universel aurait ainsi quatre années
pour se préparer à cette grande réforme ; mais là en-
core Gambetta fut vaincu par une coalition, et le scrutin
de liste ne fut voté qu'à la fin de la législature, trois
ans après la mort du chef répubUcain qui eût été ca-
pable de l'organiser, et quelques semaines seulement
avant la séparation des Chambres. La nouvelle appli-
cation du scrutin de liste n'a pas été, à sa première
épreuve, favorable au parti républicain. — Les argu-
ments pour et contre le scrutin de liste ont été sou-
vent développés dan^ des discours et des articles :
pour : Gambetta, Ricard (l'Assemblée nationale) ; Bar-
doux, Waldeclc -Rousseau (Chambre des députés);
Edouard Millaud (Sénat); Joseph Reinach, (brochure
1880; contre : Dufaure, Antonin Lefebvrc-Ponulis
(Assemblée nationale) ; Roger, Hémon (Chambre d^
députés); Waddington (Sénat) ; duc de Broglie {Vues
sur le gouvernement de ta France), D'après les par-
tisans du scrutin de liste, ce mode de votation est le
scrutin politique ; il ne laisse pas de place aux in-
fluences locales, il rend impossible la corruption et
l'intimidation; il favorise l'esprit de transaciion; il
permet aux mandataires qui en sont issus de voiries
classes de plus haut et de ne pas subordonner Tinté-
rèt national à des préoccupations de clocher. Les ad-
versaires du scrutin de liste prétendent au contraire
que ce mode de votation favorise à l'excès les grands
courants, conduit nécessairement à de trop brusques
et trop fréquents changements, supprime les in-
fluences légitimes de personnalités nouvellement con-
nues abandonne la confections des listes à des co-
mités généralement improvisés et dont les membres,
politiciens de profession, ne représentent pas la
moyenne de l'opinion. — Le scrutin de liste a été
établi pour les élections législatives en Italie par une
loi de 1881 ; le scrutin d'arrondissement est le mode
de votation adopté pour les élections dans
tous les autres pays parlementaires de l'Europe.
J. R.
SCULPTURE COMPARER (musée db). — Le musée de
sculpture comparée du Trocadéro a été commencé le
4 novembre 1879. Il a été terminé dans ses grandes
lignes le 4 novembre 1885. La pensée de créer un
musée des monuments français date de la Révolu-
tion. C'est Alexandre Lenoir qui entreprit dès 1790 de
réaliser cette pensée. Les pouvoirs publics lui prêtè-
rent une énergique assistance, et c'est tout à fait à
tort que dans le mémoire qu'il adressa ati roi en 18 IS
et qu'il reproduisit en tète de son catalogue, Alexan-
dre Lenoir dit « que dans les temps désastreux de la
Révolution il empêcha au péril de sa vie nombre de
monuments d'être la proie d'un vandalisme destruc-
teur. » Cette assertion est si peu vraie que non seu-
lement les mini'itres de l'intérieur de la République,
mais encore les administrateurs des départements firent
de larges sacrifices pour enrichir le musée des monu-
ments français. « Alexandre Lenoir avait disposé son
musée dans huit salles consacrées aux xni*, xiv<^, xve,
xvio, xvii^etxviii® siècles. Ces salles étaient précédées
d'un vestibule qui renfermait des monuments de tous
les siècles. Une dernière salle enfin avait reçu le
monument élevé à la mémoire de François I«' et exé-
cuté sur les dessins de Philibert Delorme. Dans la
première cour s'élevait la façade du château d'Anet
bàii par Philibert Delorme pour Diane de Poitiers,
dans la seconde un fï*agment du cliàteau de Gaillon
bâti par Jean Joconde, architecte de Louis XU, tenait
la place principale. Enfin la troisième cour devait
présenter aux artistes Tensenible d'un édifice gothi-
que construit avec les débris d'une basilique que
Pierre de Montereau avait construite pour saint
Louis. »
Une ordonnance royale en date du 18 décembre
scu
— 1857 —
SCtJ
1816 supprima le musée des monuments français. Le
baron de Guilhermy, dans les Annales archéologiguesy
a tracé un tableau de Teiécution de l'ordonnance ile
1816: « Au lien de réunir sons un abri commun les
sculptures qui n'étaient pas appelées à reprendre leurs
anciennes places, l'architecte chargé des travaux de
la nouvelle Kcole des Beanx-Arts fit jeter hors des
salles et entasser en plein air, dans une cour humide,
une énorme quantité de statues et de bas-reliefs qui
demeurèrent ainsi exposés à toutes les intempéries
du ciel, jusqu'à l'époque de la création des galeries
de Versailles, c'est-à-dire pendant près d'un quart de
siècle. J'avais quatorze ou quinze ans, quand un jour
mon père qui portait un grand amour aux monuments
de notre histoire nationale, me conduisit dans les
cours désolées des Petits-Augustins. Il me semble
voir encore le sol tout jonché de débris de sculptures
coloriées, de bustes de marbre empilés comme des
bûches les uns sur les autres, de fragments de
faïences, de pavés historiés et de vitraux dispersés de
tous côtés; les sculptures les plus délicates de (îail-
lon étaient rangées comme des moellons. Je consi-
dérais de loin avec une respectueuse curiosité, à tra-
vers les fentes des palissades, de grandes figures
agenouillées, revêtues de manteaux fleurdelisés que
que j'ai reconnues depuis à Versailles. Ce triste spec-
tacle ne s'est point effacé de ma mémoire. Les monu-
ments ainsi traités subirent d'irréparables dégrada-
tions dont les traces ne sont encore que trop apparentes
sur ceux qui ont survécu à tant de vicissitudes. »
Dans la monographie de Saint Denis, M. de Gui-
Ihermy dit que fordonnance de 1816 avait eu cepen-
dant « un côté moral, la décence publique réclamant
le rétablissement de tombeaux profanés pendant la
Révolution y>. La vérité est que la dispersion du mu-
sée des monuments français et les destructions qui en
résultèrent ont été dues non seulement à l'esprit clé-
rical de la Restauration, mais encore à la haine que
l'Ecole des Beaux-Artg, exclusivement éprise de l'anti-
que, avait vouée à tout ce qui était français. M. de
Guilhermy constate en effet que les professeurs de
l'Ecole des beaux-Arts se montraient tout à fait in-
différents à l'odieux spectacle qu'ils avaient chaque
jour sous les yeux en allant donner leui-s leçons. On
peut juger par l'acle de 181H combien il sied d'ail-
leurs aux hommes de la Restauration de parler du
vandalisme révolutionnaire qui avait sauvé des mo-
numents qu'ils ont pris à lâche de détruire ou de lais-
ser perdre.
Le projet de créer un musée des monuments fran-
çais fut repris à la date du 21 mars 1851 par M. Léon
de Laborde.
Plus tard, au mois de juin 1855, la commission des
monuments historiques demanda que les moulages
faits par les soins de ses architectes, particulièrement
à Paris, fussent réunis et exposés à l'Ecole des Beaux-
Arts. En 1860, au moment de la réorganisation de
l'Ecole des Beaux- Arts, la proposition fut reprise, mais
sans plus de succès. En 1876, M. Antonin Proust fit
au conseil sapérieur des Beaux-Arts la proposition de
créer un musée des moulages français en procédant
avec les départements par voie d'échange et en do-
tant ainsi chacun des chefs-lieux de départements de
quelques-unes des reproductions qui prendraient place
à Paris dans le musée central projeté. Cette proposi-
tion ne fut pas acceptée, et en lh79, lorsque M. An-
tonin Proust fut appelé à la vice-présidence de la
commission des monuments historiques, il renouvela
sa proposition en demandant qu'une somme fût pré-
levée sur la dotation annuelle du service des monu-
ments historiques pour la création des moulages
français. M. Viollet-Ie-Duc rappela dans cette séance
qu'il avait proposé antérieurement de placer à l'Ecole
des Beaux-Arts la série des mou'ages faits d'après les
monuments français, ce qui permettrait d'établir des
comparaisons avec des sculptures étrangères. M. Viol-
let-le-Duc, invité à présenter un rapport sur une créa-
tion qui serait indépendante de l'Ecole desBeaux-Arts^
formula ainsi le programme.
|o Helations entre les sculptures appartenant à
différentes époques et civilisations :
3(> Pour la France, divisions par écoles aux diffé-
rentes époques.
30 Application de la sculpture suivant le système
d'architecture employé.
Chez les peuples qui ont atteint un haut degré de
civilisation, disait M. Vlollet-le-Duc dans son rapport.
Fart de la sculpture se divise en trois périodes :
Imitation de la nature suivant une interprétation
plus ou moins délicate et intelligente. Epoque archaï-
que pendant laquelle on prétend fixer les types. Epo-
que d'émancipation et de recherche du vrai dans le
détail et perfectionnement des moyens d'observation
et d'exécution.
Tous les peuples ne remplissent pas la totalité de
ce programme. Les uns parcourent les trois phases
de ce développement de l'art, d'autres n'accomplis-
sent que les deux premières et ne dépassent pas la
période hiératique. Tels ont été la plupart des peu-
ples orientaux, les Egyptiens de l'antiquité et les By-
zantins.
Mais, où que l'on prenne la civilisation à laquelle
appartient l'art de la sculpture, il y a une analogie
frappante avec les produits de chacune de ces pé-
riodes.
Ainsi l'époque dite éginétique ou archaïque chez
les Grecs présente avec l*époque archaïque du xii<^ siè-
cle en France les rapports les plus intimes. De môme
entre le développement de l'art sculptural chez les
Grecs de l'antiquité, à dater de Périclès, et en France,
à dater du xiii* siècle, trouve-t-on des analogies très
intéressantes à constater.
Donc, des moulages empruntés à des sculptures
égyptiennes de l'époque sincèrement archaïque, c'est-
à-dire comprises entre les sixième et dix- huitième
dynasties, on des sculptures grecques éginétiques,et
à des œuvres de la statuaire française du xii« siècle
mis en regard avec méthode, montreraient com-
ment ces trois expressions de l'art, si éloignées qu'elles
soient entre elles par le temps et les conditions so-
ciales, procèdent d'un môme principe et produisent
des résultats à peu près identiques.
Il est telle statue du portail royal de la cathédrale
de Chartres qui, placée près de certaines figures hié-
ratiques grecques, semblerait se rattacher à une môme
école par la façon d'interpréter la nature, de concevoir
les types et parle faire. Il en serait de môme pour les
sculptures datant de l'afiTranchissement de l'hiératisme
entre l'art grec depuis Phidias et l'art français des
xiii® et xive siècles.
Ces grands principes rois en lumière et rendus in-
telligibles pour tous, au moyen d'un choix assez res-
treint de moulages, il s'agirait de donner une idée
complète de notre sculpture française.
Un musée de moulages do la sculpture française
devrait être chronologiquement classé en raison des
écoles diverses qui ont dominé sur le territoire réuni
aujourd'hui en un seul faisceau.
Au point de vue de l'architecture, les écoles fran-
çaises se divisent au xii^ siècle en écoles cluni-
sienne ou bourguignonne, provençale, périgourdine^
languedocienne, auvergnate, poitevine et saintongeoise,
de l'Ile-de-France, champenoise, normande et picarde.
En tout onze écoles parfaitement distinctes en ce qui
touche le système de construction adopté, la manière
de remplir les programmes donnés, la forme appa-
rente et l'ornementation.
Il n'en est pas tout à fait ainsi de la sculpture sta-
tuaire.
Certaines parmi ces écoles dominent sur plusieurs
contrées. La statuaire du xii*) siècle de TIle-de-France,
de la Champagne, est supérieure, comme style et faire,
à celle des autres provinces, et compose un groupe
très puissant. Celle de Cluny ou bourguigonne s'étend
fort loin et fait sentir son influence juS(|u'en Auver-
gne, dans la Haute-Marne et sur les bords du Rhône
jusqu'à la hauteur de Vienne.
L'école provençale se confond souvent avec celle du
Languedoc, qui jette un vif éclat au xii^ siècle et
s'ét< nd aux bords de la Gironde et dans le Péri-
gord.
Sous le rapport de la statuaire, l'école poitevine et
saintongeoise est la moins remarquable comme style
et comme exécution, bien qu'elle ait énormément pro-
duit.
Quand l'hiératisme est abandonné vers la fin du
XI* siècle, par suite du développement que prennent
les écoles laïques en France, et quand l'architecture
délaisse les traditions romanes monastiques pour
inaugurer un art établi sur des principes nouveaux,
de môme les sculpteurs laissent de côté l'archaïsme
qui dominait dans les œuvres antérieures, pour re-
scu
— 1858 —
SCU
courir k l'étude de la nature et procéder comme, avant
eux, avaient procédé les Grecs.
Ces écoles disséminées tendent k se fondre on,
pour parler plus exactement, les provinces qui se met-
tent k la tête du mouvement architectonique instal-
lent des écoles de statuaire qui étouffent les derniers
restes des écoles romanes et qui même pourraient
être confondues en une seule. Toutefois, on distingue
encore trois noyaux, qui sont : l'Ile-de-France, la
Champagne et la Bourgogne.
A partir du iiv* siècle, il n'y a plus que deux écoles
de statuaire en France, Técole bourguignonne, péné-
trée d'éléments flamands, et Técole française propre-
ment dite.
Mais au xvi* siècle se développent de nouveau trois
écoles de statuaire : l'école de l'Ile- de-France, Técole
bourguignonne et Técole languedocienne, lesquelles
ont produit chacune des œuvres vraiment originales
et d'une valeur incontestable.
Il convient donc de classer, comme nous l'avons dit,
les œuvres de la statuaire française par écoles, en
suivant un ordro chronologique. De cette classification,
on peut affirmer qu'il naîtra un enseignement des plus
fnictueux : car il n'est nullement indifférent pour les
artistes de savoir comment se sont développées les
belles écoles, quelle voie elles ont suivie, en abandon-
nant l'hiératisme pour s'attachera l'observation atten-
tive de la nature et quelle influence les traditions
archaïques ont pu avoir sur ce développement.
Il restera k composer le musée de la sculpture d'or-
nement ou décorative, appliquée avec divers styles
d'architecture, et ces collections ne seront ni les moins
instructives ni les moins intéressantes.
Savoir pourquoi et comment tel procédé de sculp-
ture d'ornement a été appliqué k telle architecture
est certainement une connaissance qui nous fait abso-
lument défaut.
Constater dans quels cas, par exemple, la sculpture
fait pour ainsi dire corps avec l'arrhitecture, dans
quels cas elle semble une décoration d'emprunt appli-
quée, pour ne parler que des principes très généraux,
c'est ceruinement posséder les éléments de l'art dé-
coratif sculptural.
Mais dans un musée de sculpture d'ornement com-
parée, nos artistes trouveraient bien d'autres ensei-
gnements. Us y verraient comment la sculpture déco-
rative passe de même par la période hiératique k
certaines époques, et comment elle s'en affranchit;
comment la flore et la faune ont élé interprétées d'une
façon conventionnelle pendant cette période d'hiéra-
tisme, et comment de leur étude attentive sur la na-
ture datent les belles époques de l'art, aussi bien dans
l'antiquitéque pendant le moyen âge et la renaissance.
Mais pour qu'uD semblable musée soit complet et
réellement insullé pour l'étude, ii faudrait que des
vues ou relevés partiels des monuments d'où seraient
tirées ces sculptures fussent exposés près d'elles; ce
qui serait facile grâce aux archives des monuments
historiques et k la possibilité de se procurer des pho-
to (traphies de ces édifices ou portions d'édifices.
Ces trois sections distinctes du musée de la sculp-
ture comparée 'demanderaient, pour être convenable-
ment exposées, d'assez vastes locaux ; toutefois, en se
limiunt, par suite d'un choix très sérieux des types,
aux seuls exemples qui peuvent être considérés comme
des documents nécessaires k l'étude, nous ne pensons
pas que cette exhibition dût occuper une place telle
qu'on ne pût la trouver sans trop de peine, si on veut
rîécUement obtenir cette installation.
Nous avons dit qu'il y avait intérêt k montrer les
analogies qui existent entre des œuvres de sculpture
dues k l'antiquité, notamment des époques dites hié-
ratiques et celles appartenant k la période archaïque
du moyen âge.
Une salle serait consacrée k faite ressortir ces rap-
ports :
r« salle, — Il conviendrait d'y réunir quelques types
égyptiens appartenant aux premières dynasties.
Des types assyriens;
Des types grecs de l'époque dite éginétique ;
Des types de notre école de statuaire française de
la fin du ii« siècle au milieu du xii*.
Il ne serait pas besoin d'un grand nombre d'exem-
ples pour faire ressortir les rapports qui existent en-
tre ces diverses expressions de la statuaire aux époques
archaïques. .
t« salle, — Une deuxième aalle montrerait comment
l'art de la statuaire a rompu avec les types hiératiques
pour recourir k l'étude attentive de la natare, soit
chex les Grecs k dater de Phidiaa, soit chez nous k
dater du xiii* siècle.
Cette comparaison entre ces deux écoles séparées
par des siècles, présenterait un intérêt des plus sérieux :
car bien que les expressions d'art soient différentes et
que les objets représentés n'aient aucune relation en-
tre eux, les procédés sont identiques, la manière d'In-
terpréter la nature est k très peu près la môme et, au
point de vue du style, U supériorité est apparente
dans les denx écoles.
C'est k la limite de ce premier développement
qu'apparaît chez les Grecs comme chez noua le por-
trait (la reproduction de l'individualité humaine).
Exemples k mettre en regard.
3* salle, — L'art de la sUtuaire adopte bientôt des
canons chez les Grecs de l'antiquité comme chez nous
vers la fin du xiii' siècle.
La maniét^e apparaît. Il s'établit dans l'une comme
dans l'autre école un beau de convention. L'exécution
atteint alors un haut degré de perfection. Alors Tltalie,
l'Allemagne entrent en scène et leurs écoles les dis-
tinguent de celles de la France pendant la durée du
xiv« siècle et pendant le xv« siècle.
On voit comment au xv« siècle Tinfloence de l'école
des bords du Rhin et des Flandres envahit la Bour-
gogne, comment la manière atteint les demièrea li-
mites, mais comment aussi l'école de l'Ile-de France
et celle de la Champagne résistent k cette invasion.
i^ salle. — Serait consacrée k la Renaissance et fe-
rait voir les écarts considérables qui existent entre la
sUtoaire italienne de cette époque et la statuaire
française; comment les Flandres échappent k peine
aux influences antérieures, et comment l'Espagne pos-
sède une belle école de statuaire pendant la première
moitié du XVI* siècle.
5« salle. — Contiendrait les continuateurs de la Re-
naissance, Michel- Ange et son écolOrqui rapidement
tombe dans l'exagération, undia que la France con-
serve encore, et Jusqu'au xviii* siècle, une bonne école
de statuaire.
6* salle, ^ Cette salie serait destinée k contenir des
fragmenu d'ornementation sculptée appliquée à l'ar-
chitecture, divisés par écoles. Des photographies des
édifices auxquels seraient empruntés ces fragmenu
devraient être exposées dans leur voisinage.
Une commission fut constituée par les soins du
service des monuments historiques, composée de
MM. Antonin Proust, président; Quicherat, directeur
de l'école des Chartes, Bœswillwald, Lisch, Ruprich-
Robert, inspecteurs généraux des monuments histo-
riques, de Baudot, inspecteur des édifices diocésains,
Castagnary, conseiller d'État, Gustave Dreyfus, Gan-
tier, contrôleur des travaux; Geoffroy -Dechanroe,
SUtuaire ; Robert de Lasteyrie, professeur k l'École
des Chartes ; Poulin, directeur des bâtiments civils ;
du Sommerard, directeur du mu&én de Cluny ; Steinheil,
peintre, et Tétreau, conseiller d'État.
Cette commission rechercha tout d'abord un local
dans lequel pourrait être placé le nouveau musée. Le
palais du Trocadéro présentait de bonnea conditions
non seulement pour 1 installation des moulages, mais
encore pour celle des ateliers de reproduction et des
magasins destinés k la conservation dea moules. La
commission fit choix de l'aile du palais du Trocadéro,
placée du côté de Paris, mais cette aile étant d<^jk
occupée par le musée d'ethnographie, il fallut obtenir
le transfert de ce musée au premier étage du palais,
puis demander aux Chambres les crédits nécessaires
pour le chauffage du musée. L'appui que le président
de la commission rencontra auprès de M.Jules Ferry,
ministre de l'instruction publique ; auprès de M. l'a-
miral Jauréguiberry, ministre de la marine, qui fit
transporter le musée ethnographique par une escouade
de marins, et enfin auprès de M. Sadi-Carnot, soos-
secrétaire d'État au ministère des travaux publics, per-
mit de mettre rapidement l'aile du Trocadéro en état
de recevoir le musée. La commission décida de se
réunir chaque semaine au Trocadéro et grâce au zèle
de ses membres et h l'activité de M. du Sommerard,
de M. Geoffroy-Dechaunie et de M. Poizadoux, qui,
k des titres divers, ont été ses agents d'exécution, les
galeries du Trocadéro purent être ouvertes en partie
au public dès le mois de mai 1882.
SIE
— 1859 —
SOL
Conformément aux indications données par Viollet-
le-Dac, que la mort enleva an moment où la commis-
sion commençait ses travaux, des termes de compa-
raison empruntés aux modèles de sculpture étrangère
ont été placés dans les salles du musée du Trocadéro.
Mais le musée de sculpture comparée est ayant tout,
pour le public qui lui a fait grand accueil, le musée
des monuments français. Il est un premier hommage
rendu à Tart national, qui aura bientôt, il faut l'espé-
rer, dans le musée du Louvre la place qui lui est due
et qui verra dans la série dns industries d'art se
créer ces collections d'art décoratif que les travail-
leurs attendent depuis si longtemps. A. P.
SERVICE MILITAIRE. — France, — D'après la loi de
1868, la durée du service pour les Jeunes gens incor-
porés à l*armée active était de 5 ans, à l'expiration
desquels ils devaient servir 4 ans dans la réserve; la
durée du service pour les jeunes gens laissés dans la
réserve était de Sans. Suivant la loi du 17 Juillet 1872,
tout Français qui n'est pas déclaré impropre à tout
service militaire peut être appelé depuis r&s;e de 20 ans
Jusqu'à 40. Il fait partie de Parmée active pendant
5 ans, de la réserve de l'armée active pendant 4 ans,
de l'armée territoriale pendant 5 ans et de la réserve
de Tarmée territoriale pendant 6 ans. La durée du
service compte du 1»^ Juillet de l'année du tirage au
sort. Le ministre de la guerre fixe chaque année le
chiffre des hommes appelés au service actif, lesquels
sont pris par ordre de numéros sur la liste du recru-
tement; les autres, auxquels on ne fait faire qu'une
année de service, et même 6 mois s'ils prennent une
instruction sufKante, restent dans leurs foyers, mais
toujours à la disposition du goovernementjusqu'à l'ex-
piration de S ans. Les hommes en disponibilité de l'ar-
mée active et les hommes de la réserve peuvent se
marier, tout en restant soumis aux obligations de ser-
vice imposées à leur classe; il n'y a que les pères de
quatre enfants qui passent de droit duns l'armée ter-
ritoriale. Le militaire de l'armée active qui ne devait
rester qu'un an sous les drapeaux est retenu une
seconde année, s'il ne sait pas lire et écrire, et s'il
ne satisfait pas aux examens de ses chefs. — En Hol-
lande^ la durée du service nominale en temps de
paix est fixée à 5 ans ; une loi, qui doit être votée
annuellement, peut prolonger cette durée. Le service
effectif n'est que de 8 mois par an. — En Delgiqu^y la
durée du service exigible est de 8 années ; mais les
soldats ne restent que 2 ans et demi sous les arme»,
puis passent dons la réserve. (K. Armés, dans le Dic-
tionnaire et au Supplément,)
SIEGE (Etat de). — Cette situation anormale d'un
pays a été régie par une loi du 3 avril 1878, ainsi
qu il suit :
Art. ]*'. — L'état de siège ne peut être déclaré
qu'en cas de péril imnminent, résulunt d'une guerre
étrangère ou d'une insurrection à main armée.
Une loi seule peut déclarer l'état de siège : cette loi
désigne les communes, les arrondissements ou dépar-
tements auquOiS il s'applique. Elle fixe le temps de
sa durée. A l'expiration de ce temps, l'état de siège
cesse de plein droit, à moins qu'une loi nouvelle n'en
prolonge les effets.
Art. 2. — En cas d'ajournement des Chambres, le
président de la République peut déclarer l'état de
siège, de l'avis du conseil des ministres, mais alors
les Chambres se réunissent de plein droit, deux jours
après.
Art. 3. — En cas de dissolution de la Chambre des
députés, et jusqu'à l'accomplissement entier des opé-
rations électorales, l'état de siège ne pourra, même
provisoirement, ôire déclaré par le président de la
République.
Néanmoins, s'il y avait guerre étrangère, le prési-
dent, de l'avis du conseil des ministres, pourrait décla-
rer l'état de siège dans les territoires menacés par
l'ennemi, à la condition de convoquer les collèges
électoraux et de réunir les Chambres dans le plus bref
délai possible.
Art. 4. — Dans le cas où les communications seraient
interrompues avec l'AIgt^rie, le gouverneur pourra dé-
clarer tout ou partie de l'Algérie en état de siège, dans
les conditions de la présente loi.
Art. 5. — Dans les cas prévus parles articles 2 et 3,
les Chambres, dès qu'elles sont réunies, maintiennent
ou lèvent l'état de siège. En cas de dissentiment entre
elles, l'état de siège est levé de plein droit.
Art. 6. — Les articles 4 et 5 de la loi du 9 août 1849
sont maintenus, ainsi que les dispositions de ses autres
articles non contraires à la présente loi.
SINCENY (FAlENCBS de). — La fabrique de Slnceny
(Aisne) date de la première moitié du dix-septième
siècle. Elle fut fondée par M. de Fayard, seigneur de
Sinceny. Ses produits rappellent beaucoup ceux de
Rouen. Souvent ils sont marqués d'un S. Cette fa-
brique fut très imporunte. Aux diverses époques de
sa prospérité elle appela des artistes de Rouen, de
Strasbourg et de Lorraine. Son premier directeur
s'appelait Pierre Pellevé.
SLANG, mot que les Gypsies oi Zingari anglais em-
ploient comme synonyme de rommany, langue bohème.
Il désigne la langue changeante et capricieuse des fa-
miliarités à la mode, ce qu'on appelle de nos jours à
Paris la longue verte et que les Anglais nommaient
autrefois flash. Le slang diffère du cànt (V. ce mot) :
il a un fond plus homogène, plus national; les expres-
sions archaïques, adaptées aux besoins nouveaux, s'y
combinent avec les nouveautés les plus hasardeuses ;
les affluents étrangers s'y font moins sentir. C'est es-
sentiellement le langage du jour, non celui de la veille
ou du lendemain ; il n'a ni emploi sérieux ni raison
d'ôtre ; il est produit par le heurt continuel des cause-
ries familières, par le choc des répliques improvisées ;
il se forme de mots empruntés de toutes parts, fabri-
qués de tonte main, ou détournés de leur sens; il varie
selon les classes qui le parlent, et il se renouvelle pour
chaque génération. Le slang de VHudribras de Butler
n'est plus intelligible pour nous; Smtt, Arbuthnot, les
auteurs comiques ont employé le slang des époques où
ils vivaient, et ils n'eussent point compris celui que
forgent aujourd'hui, pour les besoins de chaque se-
maine, les rédacteurs du Punch, La chaire, le théâtre,
le monde politique, le public des courses, les gens de
loi, les étudiants, la finance, la classe ouvrière, tout a
son siang.
SOCIETES COM M RRCI ALES. — On nomme Sociétés à
responsabilité limitée celles dans lesquelles aucun des
associés n'est tenu au delà de sa mise. D'après la loi
du 23 mai 18B3 qui les organisa, les administrateurs
devaient ôtre propriétaires d'un nombre d'actions dé-
terminé par les sututs : ces actions nominatives, ina-
liénables et déposées dans la caisse sociale, éuient
affectées à la garanties des actes de la gestion. Il était
tenu, cha')ue annéf) au moins, une assemblée générale ;
elle devait être composée d'un nombre d'actionnaires
représentant le quart au moins du capital social. Elle
nommait un ou plusieurs commissaires, associés ou
non, pour faire un rapport sur la situation de la So-
ciété, sur le bilan et les comptes présentés par les
administrateurs ; à son défaut, le président du tribunal
de commerce procédait à cette nomination, sur la re-
quête de tout intéressé. Toute société devait dresser,
chaque semestre, un état résumant sa situation active
et passive, et, chaque année, un inventaire. Il était fait
sur les bénéfices nets un prélèvement d'un vingtième
au moins, affecté à la formation d'un fonds de réserve ;
ce prélèvement cessait d'ôtre obligatoire lorsque le
fonds de réserve avait atteint le dixième du capital
social. En cas de perte des trois quaru du capital
social, les administrateurs réunissaient l'assemblée
générale pour faire décider s'il y avait lieu de faire
prononcer la dissolution de la Société. A leur défaut,
tout intéressé pouvait demander la dissolution devant
les tribunaux. La dissolution pouvait être prononcée
sur la demande de tout intéressé, lorsque le nombre
des associés avait été, depuis un an, réduit à moins
de sept. Des associés représentant le vingtième au
moins du capital social pouvaient, dans un intérêt
commun, intenter une action contre ses administra-
teurs, sans préjudice de celle que chaque associé pou-
vait intenter en son nom personnel. La nullité pro-
noncée contre des actes de la société ne pouvait être
opposée aux tiers par les associés : les fondateurs
auxquels elle était imputable et les adminitrateurs en
fonction au moment où elle avait été encourue étaient
responsables envers les tiers, sans préjudice des droits
des actionnaires. La loi sur les sociétés à responsa-
lité limité a été abolie en 1807, et ces sociétés ont été
converties en Sociétés anonumes^ auxquelles s'appli-
quent les dispositions précédentes.
S0> DE. — Les tarifs de solde pour l'armée ont été
revisés par décret du président de la République, en
date du 25 décembre 1873. En voici le tableau :
sou
— 1860 —
STA
État-major générai.
Maréchal de France
Général de division (pied de paix)
Général de dÎTision (pied de ^errc)
Général de brigade (pied de paix)
Général de brigade (pied de guerre)
Corps (Tétat^major,
Colonel
Lieutenant-colonel ....
Chef d'escadron
Capitaine de !■• classe.
Capit&ine de 2* classe. ,
Lieutenant
Sous-lieutenant.
Intendance militaire.
Intendant général inspecteur (pied de paix. . . .
Intendant général inspecteur (pied de guerre)
Intendant fpied de paix)
Intendant (pied de guerre)
Sous-intendant de i*** classe
Sous-intendant de 2* classe
Adjoint de 1'* classe
AdQuint de 2* classe
Infanterie
Colonel
Lieutenant-colonel
Chef de bataillon et major
Médecin-major de 1" classe
Médecin-major de 2* classe
Médecin aide-nugor de l'* classe
Médecin aide-major do 2* classe.
Capitaine de 1 ** classe
Capitaine de i* classe
Lieutenant de i '• classe
Lieutenant de 2* classe
Sous-lieutenant
Cavalerie
Colonel
Lieutenant-colonel
Chef d'escadron et major
Capitaine de l** classe. . .
Capitaine de 2* classe . . .
Lieutenant de 1 '* classe. .
Lieutenant de 2* classe . .
Sous-lieutenant
Artillerie et Génie,
Colonel
Lieutenant-colonel
Chef d'escadron
Capitaine de 1'* classe..
Capitaine de 2* classe . . .
Lieutenant de l" classe
Lieutenant do 2* classo.
Gendarmerie dêpartenwntale.
Colonel
Lieutenant-colouel
Chef d'escadrons
Capitaine de compagnie et capitaine-trésorier.
Capitaine d'arrondissement
Lieutenant-trésorier
Sous-lieutenant-lrésorier
Lieutenant d'arrondissement
Sous-lieutenant d'arrondissement
30,122 45
19,839 93
21,755 31
13.224 49
14,510 20
9,073 t7
7,457 15
6,281 63
3,783 76
3,379 73
2.681 63
2,499 95
19,836 03
21.765 31
13,224 40
14,510 20
9,073 47
7,457 15
6,284 73
5,783 67
7,897 69
6,134 69
5,253 06
6,281 63
3 983 67
2,681 63
2,608 16
3.600 89
3.396 12
2'597 95
2,534 69
2,314 29
8.485 71
6,557 14
5,528 57
3,746 93
3,361 22
2,644 89
2,547 49
2,424 49
9,883 47
6,557 14
6.287 63
3,783 67
3,376 50
2,681 63
2,681 61
8,779 59
7,787 75
5,840 81
3,783 67
3,487 80
3,122 45
2,828 57
2,718 37
2,424 49
SONNETTES, tintinnabula. — Ces instruments
étaient connus des anciens et servaient aui mômes usa-
ges qu*aiijourd'hui.(V. Clochettes. )Les sonnettes mises
en mouvement dans les maisons au moyen de fils de
fer ne datent que des dernières années de Louis XIV.
Depuis rinveniion du télégraphe électrique, on les a
remplacées, dans les grands établissements, par des
timbres sur lesquels frappent des marteaux mis en
mouvement par l'électriciié : ces nouveaux appareils,
dus à Bréguet, sont appelés Sonneries électriques,
SONOTYPE. V. Gdidb-accobd.
SOU PFLET.— Cette appareil consista originairement
en un simple tuyau de bois ou de métal, dans lequel
on injectait Pair avec la bouche. Plus tard est venu le
soufflet à main, dont on a attribué l'invention an Scythe
Anacharsis, mais qui est mentionné dans Homère. Des
soufflets semblables aux nôtres sont représentés sur les
monuments grecs et romains; ils sont tous à un s-enl
vent. C'est à la An du xvP siècle ou au commencement
du xviP qu'on a imaginé les soufflets à deux vents.
Les modernes ont fabriqué toutes sortea de machines
soufflantes pour lancer l'air nécessaire à PalimentAtion
des reux dans les établissements métallurgiques, ou k
Taérage des mines, des édifices publics, etc.
STATISTIQUE {V. Dicftonwaire). — Appliquée à l'é
tudedes collectivités humaines, la statistique prend le
nom de Démographie (V. Supplément). Il n*est guère de
science qui ne puisse utiliser la méthode statistique.
Voici les principes essentiels de ses branches princi-
pales :
Statistique météorologique. — L*idée première en
a été conçue par notre f^rand Lavoisier; il distribua,
en vue d'en établir les éléments, un certain nombre
de thermomètres et de baromètres dans différents
points de la France; son idée fut si bien comprise
que, même au plus fort de la Révolution, on s'en sou-
venait encore, et que le député Rom me y fit allusion
dans le rapport qu'il présenu sur réubliss«>ment du
télégraphe aérien de Chappe. Toutefois, il ne fut donné
suite en France au projet de LAvoisier que dans la
seconde moitié de ce siècle.
C'est à l'Américain Maury que revient l'honneur
d'avoir sérieusement établi les statistiques niétéoro-
iogiques. Cet homme opiniâtre, patient, sagace, com-
mença ses premiers travaux en 183t. Kn 1842, il obtint
du Commodore Crâne une circulaire prescrivant aux
capitaines de la marine américaine de relever sur
leurs journaux de bord certaines observations météo-
rologiques. Cet appel resta sans réponse, les marins
jugeant ce travail inutile et trop compliqué. Maury ne
se découragea pas ; il profita des données encore in-
certaines qui lui furent transmises, pour établir la
statistique des vents et courants existant le plus sou-
vent entre Baltimore et Rio de Janeiro. Il put ainsi
tracer une voie maritime qui réduisit la dui^ée de ce
voyage de 41 jours à 24 jours.
A peine ce résultat, si péniblement acquis, fut-il
connu que les statistiques météorologiques se malii-
plièrent. Maun*, pour avoir un plus grand nombre
d'observations facilement comparables, provoqua en
1853 une conférence internationale qui se réunit à
Bruxelles sous la présidence de l'illustre statisticien
Quételet. Là, furent rédigées les formules des ques-
tions posées dans les journaux de burd; elles étaient
au nombre de 19, et il était prescrit d'y répondre trois
fois par jour. Le mode de dépouillement de ces jour-
naux fut également arrêté par la conférence.
Les documents furent de plus en plus nombreux.
Maury dressa alors ses célèbres cartes statistiques, et
traça les routes nautiques qui en étaient la consé-
quence. Voici quelques-uns des résultats qu'il obtint :
le voyage de Baltimore à Rio, déjà cité, fut réduit
non seulement de 41 jours à 24, mais ensuite à 18
seulement; la traversée des États-Unis à la Californie
fut réduite de 180 à 100 jours; celle d'Angleterre à
Sydney (aller et retour)'fut réduite de 250 à 125
jours, etc. On a évalué à plus de 100 millions de francs
la somme annuelle que les travaux de Maury ont fait
économiser aux différentes marines du globe; cette
somme a certainement augmenté depuis l'époque où
cette évaluation a été faite.
Outre leur intérêt pratique, les statistiques météo-
rologiques de Maury ont une portée scientifique con*
sidérable. Elles ont conduit notamment à la découverte
de la loi des tempêtes. Ces résultats sont d'autant
plus remarquables, qu'ils sont été obtenus à l'aide de
documents qui, au début surtout, étaient fort mé-
diocres.
Statistique judiciaire. — On distingue la statistique
de la justice criminelle et elle de la justice civile
et commerciale. La meilleure statistique judiciaire
est jusqu'à présent celle de France.
Justice criminelle. — Le nombre des affaires jugées
par les cours d'assises est resté station naire en France
de 1826 à IS'iS. S'il a diminué depuis cette époque
jusqu'en 1881^ c'est seulement parce qu'un cenaio
nombre d'affaires, autrefois traduites devant le jury,
ont été depuis 1848 traduites en police correctionnelle.
Cette correctionnalisation de ceruines affaires a été
en se généralisant de plus en plus. — Dans cette
longue période, les années 1840, 1847, 1854, sont celles
où les crimes ont été les plus nombreux ; ce sont celles
aussi où l'hectolitre de froment a été le plus cher.
Les années où les crimes ont été le moins nombreux
sont 1830, 1848, 1810, années de troubles politiques ou
militaires; cette diminution est due en partie au moins
STA
— 1861 —
SYN
à ce que la poursuite des crimes se faisait avec moins
de vÏKiiance. En moyenne, pendant la période 1826-55,
le nombre des affaires criminelles s'esl élevé à 5,346,
chiffre dont il ne s'est Jamais beaucoup éloigné. De-
puis il s'est progressivement abaissé à 3,446 (1876-80).
Quelques genres de crimes doivent attirer Tatten-
tiou. Malgré la correctionualisalion, il en est quelques-
uns dont le nombre augmente sans cesse. Tels sont
les crimes contre la morale, et surtout les viols et at-
tentats contre les enfants, dont la fréquence a sextu-
plé, s'élevant progressivement de 136 (18:^6-30) à 791
(1876-80). il est vrai que la loi de 1863 permet do
poursuivre quelques crimes jusqu'alors impunis, mais
raugmen talion qui en résulte est peu importante.
Ces crimes abominables sont un peu pluç fréquents
dans le Nord (14 par an et pour 100,000 hab.) et
dans le Nord-Ouest (11) que dans le Centre (8) ou
dans le Midi (lO). Ils sont plus fréquents dans les
grandes villes et dans les pays industriels.
La fréquence des infanticides poursuivis va aussi en
augmentant, surtout depuis la période 1851-55, énoque
où commença la suppression des tours ; cependant il
est certain qu'un grand nombre de ces crimes ont été
correctionnalisés, surtout depuis 1863.
Les assassinats ont été au nombre de 197 (1876-80)
et se sont peu éloignés de ce chiffre pendant les pé-
riodes antérieures. La diminution du nombre des
meurtres qui de 229 (1826-30) descendent à 143(1876-
80) n'est qu'apparente et tient à la correctionnalisa-
tion. Voici la fréquence des causes qui occasionnent
ces deux crimes (1876-80).
letrtrca. isuisiut.
Cupidité 14 i5
Adultères 2 »
Dissensions domestiques 21 22
Amour contrarié 2 4
Débauche, concubinage t. ... 7 10
Haine, vengeance 20 22
Querelles de cabaret, de jeu, elc 34 12
Totaux 100 100
Les meurtres et assassinats sont surtout fréquents
dans la Corse, qui l'emporte de beaucoup sur les autres
départements, puis les Alpes-Maritimes, les Bouches-
du-Rhône, etc. Ensuite viennent les départements dn
Nord, du Nord-b^t. Les assassinats et meurtres sont
plus rares en Bretagne et dans le Centre. — Il faut
ajouter qu'en Corse un grand progrès s'est fait. Il y
a 30 ans, il y avait 65 assassinats pour 100,000 habi-
tants, et aujourd'hui il n'y en a plus que 13; il n'y en
a que 1 à Paris, beaucoup moins encore dans le reste
de la France.
Les empoisonnement» sont sept fois sur dix commis
par des femmes ; la moitié d'entre eux ont pour cause
des dissensions domestiques. Leur fréquence diminue
beaucoup ; il n'y en a plus que 14 par an (1876-80).
Incenaies. — Leur nombre s'est élevé lorsque les com-
pagnies d'assurances se sont multipliées. Puis, ce
nombro s'est progressivement abaissé (sans que la
correctionnalisation y contribuât) : les chiffres sui-
vants marquent les points extrêmes de l'oscillation
que nous venons d'indiquer :
Nombre des incendies criminels : 118 en 1831-35;
244 en 1851-55; 180 en 1876-80.
Délits, — Le nombre des délits a doublé depuis
1826-30, sans que la correctionnalisation puisse être
invoquée pour expliquer le fait (moyennes annuelles :
13,656 prévenus en 1826-30, et 24,334 en 1876-80. Les
autres chiffres sont intermédiaires. Le vol, l'escro-
querie, l'abus de confiance ont augmenté plus encore.
Vols: moyennes annuelles: 12,576 prévenus en 1826-30
et 41,522 en 1876-80).
Justice civile, — Nous serons plus bref sur ce cha-
pitre. En moyenne on compte en France 33 procès
civils par an pour 10,000 habitants. Les départements
montagneux, dans lesquels les héritages sont très di-
visée, tels que l'Aveyron, les deux Savoies, les Alpes-
Maritimes, etc. en comptent bien davantage (de 53 à
57). De môme presque tous les départements des Cé-
vennes, des Alpes, des Pyrénées, du Jura, comptent
beaucoup de procès. Le département de la Seine doit
à son commerce très actif d'en présenter plus encore
que ceux dont nous venons de parler. Ëntln les Nor-
mands, connus par leur esprit de chicane, ne démen-
tent pas leur réputation. Au contraire, les procès sont
rares sur les bords de la Garonne, plus rares encore
dans le bassin delà Loire, et plus rares encore en Bre-
tagne, où l'on n'en compte que 13 à 7 par an et par
10,000 habiunts.
Statistique pénitentiaire. — Aa 31 décembre 1880, la
population des prisons était la suivante :
H. F. TOTAL."]
24 maisons pénitentiaires (dont 6 de
femmes).... «3,928 2,729 16,637
Dépôt des forçats de Saint-Martin
deRé 284 « 284
68 maisons d'éducation correction-
nelle (dont 23 de filles) 7,216 1,7d« 8,973
3,034 chambrer et dépôts de sûreté 38 4 42
382 maisons d'arrêt, de justice et de
correction lî».332 4,327 23.659
40,797 8,818 49,615
Ces chiffres diffèrent assez peu de la population
moyenne de ces diverses classes d'établissements. Il
convient d'ajouter que sur le nombre de ces prison-
niers, 5,929 étaient seulement prévenus, accusés ou
condamnés en appel ou en pourvoi. '
Le total des frais nécessités par cette population a
été de 21,036,129 francs dont 4,949,141 ont été recou-
vrés gr&ce au travail des condamnés (sur cette somme*
4,547,349 francs ont été produiu par les maisons cen-
trales). La dépense nette s'élève donc à 16,086,988 fr.
En outre le nombre des déportés était :
H.
A la Guvnnne 3,443
A la Nouvelle-Calédonie. . 8.009
F.
110
155
TOTAL.
3,562
8,164
Totaux 11,451 274 11,726
Sur ce nombre, 9,261 seulement étaient de race
blanche. 1,661 forçats étaient Arabes, 719 nègres, 85
Asiatiques ou Océaniens. J. B. — on
SYMPHONISTA, sorte d'harmonium inventé vers
1850 par Guichené. curé de Mont-de-Marsan, pour ac-
compagner le chant d'église. Le davier ordinaire fait
résonner un jeu d'anches, mis en mouvement par une
soufflerie. Au-dessous est un autre clavier, dont les
larges touches en bois portent le nom des notes. En
posant le doigt sur la touche de ce second clavier,
dont le nom correspond à la note du chant, on fait
entendre une harmonie complète et redoublée dans
plusieurs octaves.
SYNDICATS PROFESSIONNELS. —On désigne sous
cette dénomination générale les associations formées
par des personnes exerçant la même profession, afin
de pourvoir collectivement à leurs intérêts profession-
nels. Leur constitution et leur fonctionnement sont
réglés par la loi du 21 mars 1884, en tète de laquelle
figure l'abrogation des mesures prohibitives et de leur
sanction générale. Cette loi contient en outre des dis-
positions concernant : 1° l'existence légale des syn-
dicats professionnels, leur composition, leur objet;
2» les formalités imposées aux syndicats, le dépôt des
sUtuts, l'obligation pour les administrateurs et direc-
teurs d'être de nationalité française; S» les unions
entre syndicats ; 4° la personnalité civile reconnue aux
syndicats, les limites des facultés concédées par la
loi, la liberté garantie à chaque membre de se retirer
de l'association; 5° les sanctions civiles et pénales
des prescriptions de la loi ; 6^ l'application de la loi
en Algérie et dans les colonies (Guadeloupe, Marti-
nique, Réunion). . j i i •
L'article 2 indique en ces termes l'esprit de la loi
« Les syndicats ou associations profeisionnelles,
même de plus de vingt personnes, exerçant la môme
profession, des métiers similaires ou des professions
connexes concourant à l'établissement de produits
déterminés, pourront se constituer librement, sans l'au-
torisation du gouvernement. » L'institution est ainsi
définie par l'article 3 : « Les syndicats professionnels
ont exclusivement pour objet l'étude et la défense des
intérêts économiques, industriels, commerciaux et agri-
coles. » Les syndicats ont la faculté de se concerter
et de s'unir entre eux; mais ces unions ne peuvent
posséder aucun immeuble, ni ester en justice (art. 5),
ce droit étant réservé à chaque syndicat de patrons
ou d'ouvriers (art. 6). Le seul tempérament apporté
au principe de liberté consiste dann l'obligation pour
les fondateurs de tout syndicat professionnel do dé-
poser à la mairie les sUtuis et les noms de ceui qui,
TAX
— 1862 -
TEL
à un titre quelconque, sont chargés de l'administra-
tion ou de la direction.
La loi du 21 mars 1884 est restée plus de trois ans
sur le chantier, sans parler de la propc-ition de M. de
Marcère (1876) et de celle dn M. Lockroy (1818). Un
premier projet fut présenté à la Chambie des députés
par M. Cazot, garde des sceaux,et par M. Tirard, mi-
nistre de l'agriculture et du commerce, le 22 novem-
bre 1880. Ce projet, rapporté par M. Allai n-Targé,
le 15 mars 1881, occupa six séances, du 16 mai au
9 juin, et fut transmis, le 21, au sénat qui le discuta
du l** Juillet au 1*' août 1882, sur lu rapport de
M. Marcel Bartbe. Le maintien de Tarticle 416 du
Code pénal, interdisant le concert entre patrons et
ouvriers en vue d'une suspension de travail, la sup-
pression de la faculté d'union entre syndicats, faddi-
tion de pénalités rigoureuses, dénaturaient foncière-
ment le texte voté par la Chambre. A la suite d'une
nouvelle délibération (12-19 juin 1883), celle-ci refusa
d'adhérer à ces modiHcations, et dans un débat dé-
cisif (15 janvier-23 février 1884), où M. Tolain, rap-
porteur, et M. Waldeck- Rousseau, ministre de l'inté-
rieur, prirent une part très active, elle obtint gain de
cause devant le Sénat sur les points principaux. Elle
crut devoir céder sur quelques détails secondaires,
aRn, comme le déclarait M. Lagrange dans son der-
nier rapport, de ne pas décourager par une attente
indéfinie la classe nombreuse des travailleurs, patrons
ou ouvriers, que la lui intéressait.
Telle qu'elle est, en effet, et quelques critiques
qu'elle comporte, cette loi du 21 mars 1884 peut être
considérée comme un des grands progrès économiques
de notre époque. Ce qui la caractérise avant tout, c'est
qu'elle substitue la liberté à l'arbitraire, qu'elle con-
sacre légalement l'existence des associations syndi-
cales qui, auparavent ne se créaient et ne fonction-
naient en fait qu'en vertu d'une tolérance incompa-
tible avec la dignité des travailleurs et avec le respect
des lois antérieurement en vigueur (lois des 2-14
mars, 14-17 juin 1791; articles 291, 292, 293, 294 et
416 du Code pénal , loi du 10 avril ]8it4)-, c*est enfin
qu'ellereconnalt et garantit Texercice d'un droit là où
les régimes précédents semblaient n'admettre qu'une
concession toujours révocable faite à des mineurs.
« En droit, suivant l'expresssion de M. Tolain, les sa-
lariés sont déclarés majeurs i, et la conviction de
l'honorable sénateur, si expert en ces matières, est
que toutes les importantes questions économiques qui
intéressent la gloire et la prospérité do nos industries
s'élaboreront désormais dans les chambres syndicales,
patronales et ouvrières. Si les intentions et les prévi-
sions, du législateur se réalisent, la loi de 1 81:^4 est
donc destinée à faire cesser l'antagonisme entre le
capital et le travail et à rendre de plus en plus rare
l'expédient des grèves. E. F.
TAMBOURIN, ancien instrument de musique, en
bois. Il étj'it fait en triangle et fort long, monté d'une
seule corde qu'on frappait avec un petit bâton.
TATIERSALL, établissement de Londres qui est à
la fois un marché où les éleveurs de chevaux de pur
sang adressent leurs produits, et une sorte de Bourse
où se règlent les prix des courses. Il date de 1780 et
tire son nom de Richard Tattersall, son fondateur.
TAXE DBS LETTRES. — En 187?, dans Tespoir d'aug-
menter le revenu de l'Etat, on releva la taxe de la lettre
comme avant 1848. L'affranchissement fut de 0 fr. 25
jusqu'à 15 grammes inclusivement ; 0 fr. 50 c, au-des-
sus de 15 grammes jusqu'à 30 grammes inclusivement;
0 fr. 75 c, au-dessus de 30 grammes jusqu'à 50 gram-
mes inclusivement ; 0 fr. 50 c, au-dessus de 60 gram-
mes, augmentant par 50 grammes ou fragment de
50 grammes. La lettre non affranchie payait, selon le
poids, 40 c, 80 c, 1 fr. 20. — D'après la loi sur la
réforme postale de 1878, en commençant le 1*' mai, la
taxe des lettres affranchies est fixée à 0 fr. là c. par
15 grammes ou fraction de 15 grammes ; celle des let-
tres non affranchies, à 0 fr. 30 c, pour toute la France
et l'Algérie. En dehors de ces pays, les taxes des let-
tres affranchies sont de 25 et de 35 c, selon la dis-
tance ; les lettres non affranchies payent 50 et 60 cent.
Désormais aussi, la carte postale est abaissée pour
toute' la France à 0 fr. 10, et la carte de visite non
cachetée à 5 c^nt.
Taxe des dépêches TÉLécRAPHiQUCS. — Depuis le
1** mai 1 878, toute dépèche pour Tintérieur de la France
n'est taxée que 5 centimes par mot, à la seule condition
que la dépèche ne contienne pas moins de 10 mots.
TÉL1^GRAPHIE OPTIQUE. — Tout signal fait à dis-
tance, de Jour ou de nuit, constitue la télégraphie op-
tique. Mais depuis quelques années on a trouvé moyen
d'échanger, à de longues distances, non plus des si-
gnaux, mais des phrases entières, et la télégraphie
optique est alors devenue une science complète. Le
principe consiste à projeter à distance un faisceau de
rayons lumineux et a produire sur ce f«isc«an, au
moyen d'un écran, des interruptions correspondant
aux points et aux traits de l'alphabet télégraphique de
Morse.
La source lumineuse employée peut être te soleil,
1 électricité ou une lampe à pétrole à mèche plate.
Les appareils optiques pour produire les rayons lu*
mineux sont de plusieurs systèmes. Ceux qui sont
employés dans la télégraphie optique militaire résul-
tent des travaux de M. Maurat et de MH. les colonels
Laussedat et Mangin.
Lorsqu'une communication est établie entre deux
postes, celui qui désire communiquer fait les attaques
réglementaires de l'alphabet Morse. La manipulation
doit être lente et saccadée. Les intervallea entre les
mots doivent être exagérés. Si une lettre échappe,
le télégraphiste récepteur coupe son correspondant en
envoyant un rayon lumineux. Le télégraphiste du poste
transmetteur, ayant l'œil à la lunette, s'interrompt et
répète le dernier mot transmis.
Ce sont des règles faciles à suivre, et la télégraphie
optique serait parfaite si, d'une part, les brouillaîrds,
la fumée, ne coupaient les communications, et si,
d'autre part, les dépèches s'inscrivaient elles-mêmes
comme on cherche à le réaliser, au lieu de disparaître
à mesure Qu'elles sont lues.
Telle qu elle est, la télégraphie optique a déjà ren-
du de grands services. On s'en est servi avec fruit
dans les campagnes de Tunisie et du Tonkin. Il est
question d'installer dans les sémaphores des postes
de télégraphie optique pour communiquer avec les
navires. Mais les deux applications les plus importantes
qui en aient été faites jusqu'à présent sont d'abord
celles de M. le colonel Perrier, qui a pu relier la côte
d'Espagne au Maroc pour le prolongement de l'arc da
méridien, et ensuite la communication établie entre
rtle Maurice et l'Ile de la Réunion, à 215 kilomètres
de distance, avec des appareils cédés par le départe-
ment de la guerre.
F L. — T
TÉLÉPHONE (V. Dict., Téléphonie et notre Dic-
tioimaire des Sciences et des Arts appliqués). — L'ins
venteur du téléphone actuellement en usage est
l'Américain Graham Bell. Son appareil, qui n'emploie
pas l'électricité de la pile, est fondé sur le principe
suivant: une plaque de cuivre est placée devant on
aimant, et au bout de cet aimant est enroulé un fil mé-
tallique. Lorsque l'on parle sur la plaque ou la fait
vibrer, ces vibrations la rapprochent et l'éloigneut ra-
pidement de l'aimant, et par suite augmentent et di-
minuent rapidement la puissance de ce dernier. Ces
variations produisent dans le fil métallique des cou-
rants électriques. Ces courants entrent, à l'autre
extrémité du fil, dans un appareil semblable an pre-
mier, augmentent et diminuent la puissance da second
aimant, et ces variations, en faisant vibrer la plaque du
second appareil, lui font reproduire les sons émis dans
le premier.
Ce téléphone est généralement trop faible. Les nou-
veaux appareils sont fondés snr ce principe, décou-
vert par Edison : si on fait passer un courant élec-
trique dans du cliarbon, il paftse d'autant plus d'é-
lectricité que le charbon est plus comprimé. Donc en
parlant au dessus d'une plaque sous laquelle est un
morceau de charbon, les vibrations de la plaque pro-
duiront des variations de pression, et le courant élec-
trique qui passe dans ce charbon aura des intensités
variées. Ces variations d^intensité reproduiront dans
le récepteur les vibrations et les sons qui ont prodoit
les premières compressions.
C'est là le principe de tous les téléphonea actuels,
quelles que soient leurs formes. Au-dessus des charbons
TOM
— 4863 —
TOR
II. Ader » ea l'idée de placer aue lame de bois sur
laquelle on parle pour augmenter la sonorité. Gr&ce à
cet appareil on fait entendre à de grandes distances
les tons les pins légers, comme le tic-tac d'une mon-
tre parexemple. Le nombre de systèmes téléphoniques
est déjà très grand.
Les communications téléphoniques sont établies
entre chaque abonné et le bureau cenral par des fils
généralement logés dans les égouts. Ou arrife aujour-
d'hui à faire communiquer les villes entre elles à des
distances considérables, chaque abonné d'une compa-
gnie téléphonique peut communiquer avec tous les
autres abonnés de la môme compagnie.
Le perfectionnement du téléphone est soumis à des
recherches constantes. Un ingénieur américain a fait
breveter en Allemagne un dispositif qui a pour objet
de transmettre au téléphone la voix humaine seule à
Texclusion de tout autre bruit. Une pièce élargie en
forme de cloche est appuyée contre le gosier ou con-
tre une autre partie du cou, qui prend part aux vibra-
tions produites par la voix ; elle est reliée au téléphone
par un tube élastique ou rigide renfermant uu volume
d*air dont les ondulations frappent le diaphragme à
l'exclusion de tout bruit étranger. Un des perfection-
nements des plus importants est l'emploi de la télé-
phonie k grande distance. Des communications fonc-
tionnent déjà entre Paris et Reims, Paris, Rouen et le
Hivre. F. L, — t.
THÉOLOGIE (Facultés de). — Depuis le mois d'août
1884, les facultés de théologie catholique ont été sup-
primées. Les deux facultés de théologie protestante
eut été maintenues en vertu des lois organiques du
Concordat par lesquelles l'État s'engageait à conserver
des acatlimies protestantes. Les professeurs de théo-
logie protestante reçoivent de 4,500 à 6,500 francs.
TIMBRK. — La loi du 9 mars 1868 réduisit le timbre
des journaux à cinq centimes dans les départements
de la Seine et de Seine-et-Oise, et à deux partout
ailleurs ; celui des écrits périodiques ne dépassant pas
six feuilles d'impression, à quatre centimes par feuille.
Elle assujettit an timbre, aussi bien que le Journal,
les feuilles d'annonces qui y sont annexées ou qui leur
servent de couverture, et n'en dispensa les supplé-
ments qu'autant qu'ils ner comprennent aucune an-
nonce. Furent affranchies du timbre les affiches élec-
torales d'un candidat contenant sa profession de foi,
une circulaire signée de lui, ou seulement de son
nom. Le timbre a été aboli à la révolution de 1870.
TOM JONES, célèbre roman anglais, publié par
Fielding en 1750. L'auteur a accumulé sur son héros
tous les genres d'infortunes, pour faire ressortir les
dangers de l'imprudence, et c'est là la conclusion
morale de l'ouvrage. La fable est bien conçue et réel-
lement attachante, les personnages et les aventures
habilement diversifiés, les épisodfes choisis avec art,
et, à Texception d'un seul, celui de l'Homme de la
montagne, rattachés naturellement au sujet. L'action
se développe sans embarras, et l'intérôt augmente
Jirogressivement. Une étude sérieuse des caractères
ait de Tom Jones le premier modèle du roman de
mœurs en Angleterre : Tom Jones est un jeune homme
franc, généreux, brave, mais inconsidéré, sévèrement
puni de ses étourderies par de nombreuses disgrâces;
il semble que Fielding ait voulu prouver qu on ne
doit pas se fier aux apparences en fait d'éducation,
et qu'un caractère ouvert et loyal, quoique passionné,
est préférable chez les Jeunes gens à un caractère
prudent, mais froid et hypocrite. Le personnage de
Sophie Western est un modèle de douceur et de
gr&ce, de bon sens et de modestie ; sensible, mais
chaste; respectueuse et soumise, mais capable de
résolution; il ne lui manque qu'un peu plus de déli-
catesse morale. Un excellent caractère est aussi celui
du sir Allworthy, type des vertus sociales, véritable
philosophe chrétien, bienfaisant sans ostentation,
indulgent sans faiblesse, vertueux sans aucun excès.
Blifll est un fourbe dont la duplicité, l'égolsme et
l'avarice font ressortir la franchise et la générosité
de Tom Jones. On voit encore, par le personnage de
lady Bellaston, que Fielding excellait à peindre les
femmes du grand monde. Sir Western, père de Sophie,
brutal. Cynique et lâche; sa sœur, d'humeur flegma-
tique et d'habitudes cérémonieuses; Honora, suivante
et confidente de Sophie; Patridge, valet et compa-
gnon de Tom Jones aans toutes ses aventures, destiné
à égayer le roman par se poltronnerie, sa naiveté et
ses balourdises, mais trop souvent babillard et pé-
dant : voilà autant de caractères d'une vérité et d un
naturel généralement soutenus. On peut reprocher à
Fielding de se montrer trop à découvert, de prodi-
guer sur la conduite de ses personnages les explica-
tions et les conjeetnres qui enlèvent au lecteur la
satisfaction de réfléchir et de Juger, de multiplier les
conversations vulgaires et leâ dialogues de bas comi-
que, de ne point raconter avec assez de sobriété les
âuerelles de taverne et les scènes de pugilat, enfin
'affecter parfois dans son style les images poétiques,
les périphrases et les comparaisons ambitieuses. Les
différents livres de Tom Jones sont précédés de dis-
sertations morales ou littéraires, qui n'ont point été
reproduites dans toutes les éditions : ces digressions
coupent, en effet, le récit et ralentissent l'action; elles
sont néanmoins intéressantes, et, selon la remarque
de Walter Scott, ce sont peut-être les chapitres qui
plaisent le plus à une seconde lecture. B.
TORPILLE. — La torpille est un poisson de la fa-
mille des raies, armée par la nature d'un organisme
spécial qui lui permet de transmettre des commo-
tions électriques aux corps qui l'environnent. Par ex-
tension, on a donné le nom de torpille à un appareil,
surtout destiné à la guerre navale, qui peut produire
des commotions assez violentes pour détruire les navi-
res ou les fortifications maritimes. C'est pour cette
dernière désignation que le mot torpille est le plus
souvent employé. La torpille est l'arme de guerre la
plus terrible que l'on ait encore inventée. Elle peut
immobiliser les flottes les plus puissantes, et comme
elle est & la disposition des États les plus pauvres, il
est probable qu'elle mettra un terme aux horreurs des
batailles navales.
La torpille a été inventée par Fulton, qui lui donna
le nom de torpédo. Mais ces premiers essais furent
oubliés, et la torpille ne prit guère sa place dans l'art
militaire qu'au mument de la guerre de Crimée, lors-
que les Russes en firent usage pour défendre le port
de Cronstadt. Plus tard, lors de la guerre do la Sé-
cession, les deux partis américains en adoptèrent lar-
gement l'emploi. Depuis cette époque toutes les puis-
sances sont munies de services complets de torpilles et
de torpilleurs (Voir ce mot. Supplément),
Primitivement les torpilles étaient des boites métal-
liques séparées, par une cloison, en deux comparti-
ments : Tun pour contenir la matière explosible ; l'au-
tre, Tair qui devait lui permettre de flotter au-dessous
de la surface de l'eau. Le choc d'un navire contre
l'appareil provoquait la chute d'une petite tige de fer,
qui enflammait une capsule, et produisait l'explosion.
Aujourd'hui on fait les torpilles de plusieurs façons,
suivant le mode d'emploi auquel elles sont destinées.
Ce sont toujours, à proprement parler, des cartou-
ches métalliques de forme et de dimensions particu-
lières, mais on les charge tantôt avec de la poudre,
tantôt avec du fulmicoton, tantôt avec de la dynamite.
L'explosion par le choc des navires est bien toujours
employée, mais le plus souvent on se sert de 1 élec-
tricité pour provoquer l'inflammation du mélange dé-
tonant. Grâce à cette méthode, le navire qui fait usage
des torpilles peut ne les faire partir que lorsqu'il est
àTabridu choc, et dans un port, défendu par les tor-
pilles, on peut de terre les faire sauter, à coup sûr,
lorsqu'un navire ennemi passe au-dessus du point où
elles sont immergées.
L'invention la plus récente est celle que l'on a ap-
pelée Whitehead fish. Ce&i une torpille en forme de
poisson. A l'avant et à l'arrière se trouvent deux petits
réservoirs d'air qui la font flotter entre deux eaux.
Au centre se trouve la matière explosible, et une pe-
tite machine, mue par de l'air co;nprimé emmagasiné
dans la torpille, et qui fait mouvoir une hélice placée
à l'arrière. La torpille Wliitehead, lancée par un navire,
peut parcourir plus de 1 000 mètres sous l'eau et aller
frapper, invisible, le vaisseau ou les fortifications à
détruire, sans que le torpilleur qui l'a envoyée coure
aucun risque.
On emploie heureusement les torpilles dans d'au-
tres circonstances que dans les guerres. On s'en sert
aussi très avantageusement pour l'exploitation des
carrières, la destruction des roches sous-marines ou
à la surface du sol, le percement des souterrains, l'en-
lèvement des épaves gênant le mouvement des ports,
et pour tous les travaux qui exigent le développement
instantané d'une grande énergie. F. L. — t.
TRI
— 1864 —
TRO
TORPILLEURS. — Les torpillenrs sont les ouvriers
qui manœurrent les torpilles. Mais on désigne sur-
tout par ce nom les bateaux qui sont armés de tor-
pilles.
Primitivement les torpilleurs étaient desimpies ca-
nots à vapeur. A Tavant de ces canots était attachée
une longue perche dont la pointe plongeait sous Teau.
L'extrémité qui se trouvait ainsi au-dessous de la sur-
face de la mer portait la torpille. Le canot se lançait
sur les fortifications ou les navires à détruire, le choc
faisait éclater .la torpille sans que le canot courût au-
cun risque, grâce à la longueur de la perche.
Pins tard, ces canots furent perfectionnés. Outre
la perche porte-torpille, ils sont munis à Tavant d'un
tampon qui renvoie le canot en arrière après le choc.
Un blindage en lôle met les matelots k l'abri des
coups de fusil. Enfin et surtout leur vitesse a été
augmentée. Pour obtenir ce dernier résultat, la ma-
chine marine ordinaire a été modifiée, et Ton s'est
rapproché du type de la locomotive.
Gei bateaux, très solidement construits, et ayant
jusqu'à 26 mètres de longueur, étaient embarqués &
bord des gros navires qui les mettaient à la mer au
point où ils devaient opérer. Mais depuis quelques an-
nées on semble avoir adopté un système difi'érent. On
n^embarque'plus abord des gros vaisseaux de guerre
que de petits canots porte-torpilles. Les cuirassés
eux-mêmes sont munis d'un appareil à lancer les tor-
pilles Whitehead. — Enfin on a créé un nouveau
type que l'on appela torpilleur de haute mer.
Ces derniers bateaux ont ordinairement 37 à 40 mè-
tres de longueur. Ils sont munis d'une puissante ma-
chine qui pent leur donner une vitesse de 18 nœuds,
et sont capables de tenir longtemps la mer. Les uns
sont munis de la perche port e-tor pille, les autres de
tubes à lancer les torpilles Whitehead. Ces bateaux
peuvent jouer le rôle de croiseurs et de garde-côtes.
Leur faible tirant d'eau leur permet de remonter dans
beauc