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Full text of "Dictionnaire général des lettres, des beaux-arts et des sciences morales et politiques .."

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DICTIONNAIRE 


r  r 


GENERAL 


DES  LETTRES,  des  BEAUX-ARTS 


BT    DBS 


SCIENCES  MORALES  ET  POLITIQUES 


II 


A   LA    MÊME   litBtlAIBIfi} 


VOYAGE  AU   CAMBODGE 

L'ARCHITECTURE    KHMER 

Par   L.   DELâPORTE 

Lieutenant  de  vaisseaa,  chef  de  la  Mission  d'exploration  aax  monumenti  khmen. 

Avec  une  carte  en  chromo  el  plus  de  500  gravures  d'après  les  dessins  de  rauteor. 

Grand  in-8  jésus.  Broché 20  fr.    t    Richement  relié,  fers  spéciaux,  tranches  dorées.    28  fr. 

Il  reste  quelques  exemplaires  numérotés  sur  vélin.  Brochés  :  40  fk>« 


LA    MYTHOLOGIE 

DAlrs  L*ART  ANCIEN  Et  MODERNE 

Par  RENÉ  MËNARD,  avec  appendice  par  Eag.  VâRON 

Ouvrage  orné  de  600  gravures  dont  32  hors  texte. 

tJn  beau  vol.  grand  in-8  jésus,  titre  et  couverture  en  deux  couleurs,  broché 25  fr. 

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LE  MONDE  VU  PAR  LES  ARTISTES 

GÉOGRAPHIE  ARTISTIQUE,  par  René  MÉNARD 

Magnifique  ouvrage  orné  de  plas  de  600  gravures  et  de  nombreuses  cartes. 

Un  beau  vol.  gr.  in-8  jésus.  Broché,  25  fr.  :  —  Riche  reliure,  fers  spéciaux,  plats  et  tranches  dorés,  32  fr. 

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LE    LIVRE    DE    LA    FERME 

2  forts  vol.  ET  DES  MAISONS  DE   CAMPAGNE  Prix  des  2  vol. 

grand  in-8  jésus  PaBLié  sous  la  direction  db  M*  P.  JOIGNEAUX  32  francs. 

FORMANT  UNS  VÉRTrABLE  KNCTCLOPéDIB  AGRICOLE  DE  21 60  PAGES  ILLUSTRÉES. 

La  grande  et  la  petite  cullure»  les  meilleures  méthodes  et  les  instruments  en  usage,  les  moyens  d'amé- 
lioralioos,  assainissement  des  terres,  défrichement,  assolement,  engrais  et  fumure,  fourrages  artificiels, 
céréales,  prairies  naturelles,  etc.  Elevage  des  bestiaux,  éducation  des  abeilles  et  des  vers  à  soie,  entretien 
des  basses-cours,  des  volières  et  des  colombiers,  des  étangs,  laiteries  et  laitages,  pisciculture 

LÀ   DBMl-RBUURB   EN   CHAGRIN   DES  2  VOLUMES  BN  PLUS  8  PB. 

EN    SOUSCRIPTION 
NOUVELLE  ÉDITION,  ENTIÈREMENT  REFONDUE,  32  LIVRAISONS  A  1  FR. 


8242-85.  —  CouBiL.  Typ.  et  stér.  CaiTi. 


DICTIONNAIRE 

GÉNÉRAL 


DES 


LETTRES,  DES  BEAUX-ARTS 


ET    DKS 


SCIENCES  MORALES   ET   POLITIQUES 


COSI  PRENANT 


POUR  USS  UBTTBJESS  :  La  Grammaire;  —  la  Linguistique;  —  la  Rhétorioue,  la  Poétique  et  la  Versification;  —  la  Critique; 

la  Théorie  et  l'Histoire  des  diflTérents  goures  de  Littérature  ;  —  1  Histoire  des  Littératures  anciennes 

et  modernes  ;  —  des  Notices  analytiques  sur  les  grandes  œurres  littéraires  ;  —  la  Paléographie  et  la  Diplomatique,  etc. 

POUR  USB   BEAUX» ARTS  :    L'Architecture  :    Constructions    civiles,  relij^ieuses,   hydrauliques,  militaires   et  narales; 
la  Sculpture,  la  Peinture,  la  Musique,  la  Grarure,  avec  leur  histoire  :  —  la  Numismatique  ; 
le  Dessin,  la  Litnographie,  la  Photographie  ;  —  la  Description  des  monuments  fameux  ;  —  les  dirers  arts  et  jeux 

d'agrément,  de  force,  d'adresse  ou  de  combinaison,  etc. 

(y.  B,  Cette  partie  est  ornée  de  figures  dans  le  texte,) 

POUR  UBB  8CISMGE8  K0RAZ<E8  ET  POLITIQUES  :  La  Philosophie  :  Psrcholoffie,  Logique,  Morale,  Métaphysique, 

Théodicée,  Histoire  des  systèmes  phiIosophi(|ues  ;  —  les  Reliions,  les  Cultes  et  la  Lituivie 

~    :  Droit  civil,  politique,  pénal  et  international  ;  Législation  militaire, 


de  tons  les  peuples;  —  la  Jurisprudence  usuelle:  uroit  cîvii,  politique,  p( 

■      "i  Sci 

1 

Pédagogie  et  rB'ducation^ 


maritime,  industrielle,  commerciale  et  agricole;  la  Science  politique;  théorie 

goutemements  ;  ta  Science  de  l'Administration,  et  l^istoire  des  institutions 
administratÎTes.  —  les  Études  Historiques  et  çéoçraphiques ;  —  le  Blason;  —  l'Économie  politique  et  sociale:  Institutions 

rite,  Banques,  Bienfaisance  publi.que,  Hospices,  Salles  d*asUei  —  la  Stattstiqae; 
la  Pédairoffie  et  l'Éducation,  ete. 


de  crédit  et  de  charité, 


PAR 


M.   ThI^BACHELET 


L*un  des  auteurs-directeurs  du  Dictionnaire  de  Biographie  et  <r Histoire,  etc 

ancien  élève  de  l'École  normale  supérieure, 
agrégé  de  l'Université,  professeur  au  lycée  Coctteilie,  de  Rouen. 

UNE  SOCIÉTÉ 

DE  LITTÉRATEURS,   D'ARTISTES,  DE  PUBLIGISTES  ET  DE  SAVANTS 

et  avec  la  collaboration 

DB 

M.  CH.  DEZOBRY 

AufSUH    DB   ROMB   AU    SIÉCLB    d'AUOUSTB 

BT    L*UN    DBS    AUTBURS-OIRBCTBURS 

DtJ    D1CTI0?INAIRB    DB    BIOORAPilIB    BT    D*HI8T0IRB,    BTCé 

DEUXIÈME    PARTIE 


SEPTIÈMB    ÉDITION 
Avec    supplément    rera    et    auffmaDié* 


PARIS 

LIBRAIRIE    CH.    DELAGRAVE 

15,    RUE    SOUPPLOT,    15 


1886 
Tous  droits  réservés. 


TouL  exemplaire  non  revêtu  de  ia  griffe  de  f éditeur  sera  réputé  contrefait. 


L€ 


DICTIONNAIRE 


DES  LETTRES 

DES  BEAUX-ARTS 


BT 


DES  SCIENCES  MORALES  ET  POLITIQUES 


G 


G^  7*  lettre  et  5*  consonne  dans  Talphabet  latin  et  dans 
les  alphabets  qui  en  dérivent.  Le  gamma  des  Grecs  et  les 
caractères  correspondants  des  alphabets  orientaux  oc- 
capent  la  3*  place.  En  français,  le  G  a  deux  valeurs  de 
prononciation  :  il  est  dur  devant  a,  o,  ti,  <,  n,  r  {golt, 
gosier,  guttural^  glu,  gnomon,  gris)^  et  alors  c*est  une 
lettre  gutturale;  il  est  doux,  avec  le  son  du  j,  devant  0, 
h  y  {gémir,  gUet,  gymnase)^  et  il  est  alors  une  lettre 
chuintante.  La  distinction  des  deux  valeurs  du  G  existe 
aussi  en  italien,  en  espagnol,  en  allemand  et  en  an^ais; 
mais  si  le  G  dur  a  une  prononciation  uniforme  dans 
tontes  ces  langues,  il  n*en  est  pas  de  même  du  G  doux, 
qoi  se  prononce  dj  en  italien  et  en  anglais,  ch  en  alle- 
mand (foeg,  wegen)^  et  comme  la  jota  en  espagnol.  En 
allemand,  la.  prononciation  du  g  dur  se  conserve  souvent 
devant  IV  et  Vu  —  A  la  fin  des  mots,  le  G  ne  se  prononce 
pas  en  français,  sauf  quelques  exceptions,  comme  Joug, 
et  à  moins  que  le  mot  suivant  ne  commence  par  une 
voyelle,  et  alors  il  prend  le  son  du  k  {sang  impur,  long 
espoir,  rang  élevé).  Il  est  muet  aussi  quel^efois  au  mi- 
lien  dés  mots,  par  exemple  dans  vingt,  dotgt,  legs. 

Dans  le  passage  d*une  langue  à  une  autre,  certains 
mots  présentent  une  permutation  du  G  avec  G  (Cadix, 
du  latin  Godes;  gras,  de  crassus: —  F.  l'art  sur  la  lettre 
C),  ou  do  G  avec  I  {fuir,  de  fugere;  lire,  de  légère)» 
Beaucoup  de  mots  allemands,  introduits  dans  le  français, 
ont  permuté  W  avec  G  {garde,  de  ward;  gain,  de  u;tfi; 
gwrre,  de  toar;  Guillaume,  de  WUTiem).  La  réciproque 
existe  dans  wallon,  dérivé  de  gaulois.  De  vasco  nous 
avons  fait  gascon. 

L'articulation  gutturo^nasale  gn,  qvd  te  trouve  dans 
beaucoup  de  mots  français  {bagne,  règne,  ligne,  seigneur, 
agneau,  signal,  rogner )<t  existe  aussi  :  1<*  en  italien  {se- 
gno,  signor)  ;  2**  en  anglais,  avec  les  deux  mêmes  lettres 
plac^  en  sens  inverse  {sing)  ;  3^  en  espagnol,  avec  un  n 
surmontée  d'un  trait  {lefio,  Mara/fion).  Les  Italiens  ont 
une  articulation  particulière,  gli,  où  Ton  entend  sucoes- 
iÏTement  notre  l  mouillée  et  l't  voyelle. 

Dans  les  abréviations  des  inscriptions  romaines,  G  est 
pour  GolMS,  Gellius,  gens,  genius,  gratis,  gaudium,  gUh- 
ria,  etc.  D.  G.  veut  dire  Dei  gratia;  S.  G.,  Sa  Grâce  ou 
Sa  Grandeur,  Sur  les  anciennes  monnaies  françaises,  G 
étût  la  marque  de  la  fabrique  de  Poitiers.  —  Gonmie 
lettre  numérale,  le  G  valait  400  chez  les  Romains  :  sur- 
monté d'un  trait  horizontal,  400,000.  Biais,  en  fprec,  y  ' 


lait  3,  et  ^  Y  3,000.  —  Dans  le  comput  ecclésiastique,  G 
est  la  dernière  des  7  lettres  dominicales,  et  marque  sur 
le  calendrier  les  dimanches,  dans  les  années  où  ce  Joor 
tombe  le  7  Janvier.  —  Dans  la  notation  musicale,  G  dé- 
signe le  sol,  qoi  était  la  7*  note  de  la  saipme  ancienne. 
GABÂRE  (dn  bas  latin  cabarus,  ou  de  l'hébreu  haba- 
nh,  bateau  de  passage),  nom  donné  à  deux  espèces  de 
navires  d«  cbai^  :  1*  aux  lourdes  baïquest  pontées  on 


non  pontées,  à  un  seul  m&t,  allant  à  la  voile  et  à  Tavi- 
ron,  et  dont  on  se  sert  dans  les  norts  pour  porter  à  bord 
des  b&timents  en  rado  les  objets  ae  consommation  ;  2*  aux 
grosses  corvettes  de  liOO  à  600  tonneaux,  qui  vont  ravi- 
tailler les  garnisons  des  colonies,  les  escaores  et  les  sta- 
tions !  elles  ont  trois  mAts,  et  portent  de  8  à  12  canons 
ou  caronades;  les  plus  petites  sont  appelées  aabarots, 
et  les  plus  grandes,  gabosses.  Dans  les  ports,  la  marie- 
salope  est  quelquefois  appelée  gabare  à  vase,  B. 

GABARB,  filet  à  mailles  serrées,  soutenu  à  la  surface  de 
Teau  par  des  morceaux  de  liège.  On  en  fait  usage  sur 
nos  côtes  de  l'Océan,  à  l'embouchure  des  rivières. 

GABARIT,  modèle  en  bois  ou  en  fer  sur  lequel  tra- 
vaillent les  ouvriers  des  constructions  navales,  et  qui 
offre  la  forme,  les  contours  et  les  proportions  qu'ils  doi- 
vent reproduire  en  faisant  un  b&timent. 

GABELLE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionn.  de  Biogr, 
et  d* Histoire,  et,  dans  le  présent  ouvragé,  l'art.  Sel  (Im- 
pôt du). 

GABELOU,  nom  donné  Jadis  aux  commis  des  gabelles, 
et  qui  ne  s'emploie  plus  que  dans  le  langage  populaire 
pour  désigner  les  douaniers,  les  employés  de  1  octroi  et 
les  commis  des  contributions  indirectes. 

GABIE  (du  bas  latin  gàbia,  cage,  hotte),  sorte  de  demi- 
hune  en  àdllebotis  appliquée  sur  un  des  côtés  de  la  tète 
des  m&ts  à  antennes. 

GABIER,  nom  que  Ton  donne,  sur  les  grands  bâtiments, 
aux  matelots  qui,  choisis  par  le  commandant  parmi  ceux 
du  service  des  hunes  et  du  beaupré,  ont  la  surveillanoe 
des  gréements,  et  sont  chargés  ay  faire  les  réparations 
nécessaires.  On  les  distingue  d'après  le  mât  auquel  ils 
sont  attadiés  :  gabiers  de  grand^hune,  au  nombre  de  16 
pour  un  valssean,  de  10  à  12  pour  une  frégate  ;  gabiers 
de  misaine,  en  pareil  nombre;  gabiers  d^artimon  et  de 
beaupré,  moins  nombreux.  Le  titre  de  gabier  implique 
un  emploi  et  non  un  grade  t  il  ne  se  porte  pas  à  terre.  Les 
contre-maîtres  sont  choisis  de  préférence  parmi  les  ga- 
biers. Dans  les  nrises  faites  par  les  bâtiments  de  l'État, 
chaque  gabier  a  3  parte  1/29  (arrêté  consulaire  du  0  ven- 
tôse an  IV). 

GABION,  aorte  de  grand  panier  eylindrique,  sans  fond, 
formé  d'un  clayonnage,  et  qu'on  remplit  de  terre  ou  de 
toute  autre  matière.  Il  sert,  dans  les  sièges,  à  garantir 
les  troupes  et  les  travailleurs  contre  la  mousqueterie  de 
la  place.  Les  gabions  de  sape  ou  de  tranchée,  qui  ont 
0<°,80  de  hauteur,  et  0'",65  de  diamètre  extérieur,  sont 
remplis  de  terre  t  placés  debout  les  uns  à  côté  des  autres^ 
ils  forment,  soit  le  parapet  des  sapes,  des  logements,  des 
tranchées,  soit  le  cavalier  qu'on  élève  en  avant  du  che- 
min couvert.  Les  gabions  farcis  ou  roulants  ont  2",30  de 
hauteur,  1™,30  à  t'>*,50  de  diamètre  extérieur,  et  sont  gar- 
nis de  vingt-cinq  à  trente  fascines,  ou  de  laine,  de  bourre, 
de  menus  copeaux  :  on  les  emploie  couchés,  et  on  les 

61 


GAG 


950 


GAî 


ronle  aa  moyen  d*un  crochet  en  avant  des  travailleurs. 

GABLE,  en  Architecture,  couronnement  d'un  mur  de 
façade  dans  les  édifices  des  périodes  romane  et  ogivale.  Il 
dérive  du  fronton  antique,  mais  il  n*en  a  conservé  que  la 
forme  triangulaire.  Il  est  simple  et  uni,  ou  découpé  à  jour 
«t  très-^rné.  Ses  dimensions  ne  sont  assujetties  à  aucunt» 
règle  fixe;  la  hauteur  dépend  souvent  du  comble  que  le 
gable  dans  la  plupart  des  cas  est  appelé  à  masquer.  Dans 
les  monuments  romans,  il  est  ordinairement  surmonté 
d*une  croix,  tandis  qu^à  Tépoque  ogivale  il  se  couronne 
de  bouquets  en  panaches,  y.  Pignon,  Fronton.    E.  L. 

GABLETS,  petits  gables  décorant  les  niches  et  les  dais, 
<{ui  même  dans  le  principe  en  portaient  le  nom. 

GABORD.  K.  BoRDAGB. 

GABURON  ou  JUMELLE,  pièce  de  bois  qui  recouvre 
un  bas-m&t  depuis  sa  naissance  iusqu*au  quart  environ  de 
sa  longueur  au-dessous  de  la  hune,  pour  le  renforcer,  et 
pour  le  garantir  des  frottements  du  m&t  supérieur  qu*on 
monte  ou  qu*on  descend.  Gabwron  est  pour  capwron, 
dérivé  du  latin  ca'pxui^  tète. 

GACHIS  (de  l'allemand  woAchfin^  laver),  mélange  de 
chaux,  de  sable,  de  plâtre  ou  de  ciment  délayé  dans  de 
Teau,  et  propre  à  la  b&tisse.  Gâcher  serré,  c'est  mettre 
du  pl&tre  dans  Teau  ]usqu*à  ce  qu'elle  soit  tout  absor- 
bée; gâcher  lâche,  c'est  mettre  peu  de  pl&tre  et  obtenir 
un  mélange  très-liquide. 

GAÉLIQUE,  nom  que  les  linguistes  donnent  à  la 
branche  des  langues  celtiques  (V,  ce  mot)  c|ui  comprend 
l'idiome  des  montagnards  de  TÉcosse  et  celui  des  paysans 
irlandais.  Cependant  les  écrivains  anglais  appellent  gaé- 
lique la  langue  primitive  de  TÉcosse,  à  l'exclusion  de 
celle  de  l'Irlande.  C'est  à  elle  également  qu'ils  donnent 
les  noms  averse  et  d'albanack,  La  déclinaison  du  gaéli()ue, 
qui  a  6  cas,  se  fait  en  partie  par  flexion  et  en  partie  à 
l'aide  de  prépositions.  Il  n'y  a  pas  de  genre  neutre.  La 
conjugaison,  riche  en  modes,  puisqu'elle  a  un  mode  né- 
gatif, est  pauvre  en  temps,  car  elle  n'a  que  l'imparfait  et 
le  futur;  les  autres  temps  se  forment  par  périphrases. 
Le  passif  se  forme  sans  auxiliaires,  si  ce  n'est  aux  modes 
optatif  et  conjonctif.  A  l'indicatif,  la  terminaison  est 
invariable  pour  les  deux  genres  et  pour  toutes  les  per- 
sonnes, et  le  pronom  personnel  se  place  après  le  verbe. 
Un  certain  nombre  de  particules,  en  se  joignant  à  un 
adjectif,  à  un  substantif  ou  à  un  verbe,  en  modifient  le 
sens.  Dans  la  construction,  l'article,  les  verbes  et  les  pro- 
noms possessifs  se  mettent  avant  le  substantif,  mais  le 
nominatif  ou  le  sujet  est  placé  ordinairement  après  le 
verbe;  les  prépositions  précèdent  leurs  régimes.  Le  gaé- 
lique est  plein  de  sons  gutturaux.  Sans  doute  on  ne 
l'écrivait  pas  avant  Parrivée  des  Romains  dans  la  Grande- 
Bretagne  ;  car  on  n'a  découvert  aucun  manuscrit,  aucun 
monument  épigraphique  antérieur  à  cette  époque.  L'al- 
phabet que  l'on  adopta  dans  la  suite  n'est  autre  que  le 
latin  :  il  se  compose  de  18  lettres,  où  ne  figurent  pas  k, 
q,  V,  Xf  y  et  z.  L'écriture  est  hérissée  de  consonnes,  qui 
cependant  ne  se  prononcent  pas.  La  prononciation  a 
beaucoup  yarié  selon  les  localités,  et  l'orthographe  selon 
les  époques.  On  a  distingué  Jusqu'à  24  rhythmes  dans 
la  yersincation  :  l'emploi  de  la  rime  finale  est  rare,  mais 
on  se  sert  fréquemment  des  assonances,  de  l'allitération 
et  même  de  la  rime  dans  le  corps  du  vers.  Parmi  les 
poètes  dont  on  a  conservé  des  chants  gaéliques,  on  peut 
citer  :  Lacklan-BIhor-Mhuirich-Albinnich,  barde  du  Lord 
des  Iles  au  commencement  du  xv*  siècle;  Alexandre  Mac- 
Donald  et  Jean  Lom  Mac-Donald,  du  xvni*  siècle  ;  Mac- 
Intyre,  dont  les  œuvres  ont  été  publiées  en  1768  ;  Du- 
nald  Buchanan,  en  1770;  Kenneth  Mackensie,  en  1796; 
John  Mac-Gregor,  en  1801  ;  Allan  Mac-Doupl ,  en  1800; 
Robert  Donn,  en  18^29.  V.  Shaw,  Dictionnaire  gaélique  et 
anglais,  Londres,  1780,  2  voL  in-4o;  j.  Kelly,  Gram- 
maire pratique  de  Vancien  gaélique,  Ibid.,  1803,  in-4<*; 
Stewart,  Éléments  de  la  grammaire  paélique,  2*  édit., 
Édlmbourff,  1812;  Armstrong,  Dictionnaire  gaélique, 
Londres,  1825,  in-4i^\  Dictionarium  sootO'Celticum ,  ou 
Dictionnaire  complet  de  la  langue  gaélique,  publié  par 
la  Société  des  Highlands,  Edimbourg,  1828, 2  vol.  in-l». 

GAFFE,  perche  munie  d'un  fer  à  deux  branches  poin- 
taes,  dont  rune  est  droite  et  l'autre  recourbée.  Elle  sert 
à  pousser  une  embarcation  au  large,  ou  à  la  retenir  en 
profitant  d'un  point  d'appui  quelconque. 

GAGE  (de  l'allemand  wage,  balance,  équilibre),  chose 
donnée  comme  sCireté  de  l'exécution  d'une  convention, 
et  contrat  qui  confère  un  droit  sur  cette  chose.  Le  droit 
de  gage  consiste  dans  la  faculté  de  se  faire  payer  sur  la 
chose  donnée  en  gage,  par  privilège  et  préférence  aux 
autres  créanciers  {Code  NapoL,  art.  2073).  Les  droits 


2, 


d*antichrèse ,  de  privilège,  d'hypothèque  {V.  ce  mots)* 
portent  sur  des  gages  :  mais  l'hypothèque  est  un  droit  réel 
et  de  préférence  sur  les  immeubles  ou  leur  usufruit; 
l'antichrèse,  un  droit  de  percevoir  les  fruits  de  l'im- 
meuble; le  privilège,  un  droit  né  de  la  qualité  même  de 
la  créance,  qui  peut  exister  sur  les  meubles  ou  sur  les 
immeubles,  ou  sur  tous  à  la  fois;  le  gage  proprement 
dit,  un  droit  de  préférence  sur  les  meubles  seulement. 
Le  contrat  de  gage  se  forme  par  tradition  de  l'objet  mo- 
bilier ;  le  droit  ne  subsiste  sur  le  gage  qu'autant  que  ce 
gage  a  été  mis  et  est  resté  en  la  possession  de  celui  qui 
a  dû  le  recevoir  {^Code  NapoL,  art.  2076).  Le  gage,  pos- 
sédé à  titre  précaire,  est  imprescriptible  ;  le  créancier  ne 
peut  se  l'approprier  ou  en  disposer,  et  doit  recourir  à  la 
justice  pour  réaliser  ses  droits  ou  pour  se  faire  inde!U- 
niser  des  dépeins  et  pertes  que  le  gage  a  pu  lui  occa- 
sionner. Le  gage  est  indivisible,  et  ne  peut  être  réclamé 
par  portion.  Le  débiteur  peut  exercer  des  recours  pour 
détérioration  de  l'objet  qu'il  a  engagé.  F.  Troplong, 
Commentaire  du  Nantissement,  du  Gage  et  de  VAnti- 
chrèse,  1841,  in-8°. 

GAGE  (Lettre  de).  V.  Lettiib  de  gage. 

GAGERIE  (Saisii^-).  F.  Saisie. 

GAGES,  salaires  des  domestiques  et  des  ouvriers. 
V.  Domestique,  Salaibb. 

CAGES  (Prêt  sur).  F.  Prêt,  et  MoNT-DE-PiÉri. 

GAGEURE.  V.  Pari. 

GAGNE-PAIN ,  nom  donné,  pendant  le  moyen  âge,  à 
ceux  qui  faisaient  profession  de  nettoyer  et  raccommoder 
les  vases  d'étain.  C'est  sans  doute  parce  qu'on  les  payait 
avec  un  morceau  de  pain.  Ils  étaient  exempts  du  service 
du  guet.  On  les  appelait  aussi  gagne-denters  et  gagne- 
maules. 

GAIDON,  un  des  romans  carlovingiens  (F.  ce  mot), 
ui  peut  être  considéré  comme  une  suite  de  la  chanson 
e  Roncevaux.  C'est  le  complément  de  la  vengeance  de  la 
mort  des  douze  pairs.  Gaidon,  duc  d'Angers,  est  fausse- 
ment accusé  par  Thibaut  d'Aspremont,  frère  du  traître 
Ganelon,  d'avoir  voulu  empoisonner  l'empereur.  De  là 
une  guerre  entre  le  vassal  et  le  suzerain.  Charles  est  fait 
prisonnier;  mais  le  vainqueur  se  jette  à  genoux  devant  le 
vaincu,  en  le  suppliant  de  lui  rendre  son  amitié.  La  paix 
est  rétablie;  la  vérité  parait  au  grand  iour:  Thibaut  est 
mis  à  mort,  et  Gaidon  épouse  la  reine  de  Gascogne.  — 
La  chanson  de  Gaidon,  dans  laquelle  Charlemagne  joue 
le  plus  triste  rôle ,  se  trouve  à  la  Bibliothèque  natio- 
nale de  Paris  dans  deux  manuscrits  du  xiu*  siècle 
et  dans  un  du  xv«.  Elle  contient  10,887  vers,  et  a  été 
publiée  par  MM.  Guessard  et  S.  Luce  dans  la  collection 
des  Anciens  poètes  de  la  France,  Paris,  1862,  în-i6. 
F.  V Histoire  littéraire  de  la  France,  tome  xxii;  S.  Luce, 
De  Oaidone,  carminé  gallico  vetustiore,  disquisitio  crv- 
ttca,  Paris,  1860,  in-8°. 

GAILLARDE,  ancienne  .danse,  originaire  d'Italie,  et 
qu'on  appela  d'abord  la  Romanesca  (U  Romaine).  Elle 
s'exécutait  à  3  temps,  d'un  mouvement  vif  et  animé.  Il 
en  est  resté  le  pas  de  gaillarde,  composé  d'un  pas  assem- 
blé, d'un  pas  marché,  d'un  pas  tombé  et  qui  se  fait  en 
avant  et  de  côté. 

GAILLARDE.   F.  CARACTERES  D'iMPRIVERIE. 

GAILLARDS,  parties  du  pont  supérieur  situées  à  Vavant 
et  à  l'ambre  des  grands  b&timënts.  Le  gaillard  d'arrière 
s'étend  depuis  le  couronnement  (haut  de  la  poupe)  jus- 
qu'au grand  m&t;  le  gaillard  d'avant  est  compris  entre 
les  apôtres  (allonges  placées  de  chaque  côté  de  l'étrave) 
et  le  bout  de  l'arrière  du  porte-haubans  de  misaine.  Le 
pont  supérieur,  qui  est  aujourd'hui  de  plain-pied,  réunit 
les  deux  gaillards;  autrefois  ils  communiquaient  par  les 
passavants.  Les  gaillards,  comme  les  autres  ponts, 
portent  des  bouches  à  feu,  mais  d'un  moindre  calibre. 
Le  gaillard  d'arrière  porte  généralement  une  dunette 
(F.  ce  mot).  En  mer  et  dans  la  vie  ordinaire  du  bord, 
les  ofliciers  et  les  passagers  admis  à  leur  table  ont  seuls 
le  privilège  de  se  promener  sur  le  gaillard  d'arrière.  En 
rade  ou  £ins  le  port,  le  côté  de  tribord  du  gaillard  d'ar- 
rière est  la  place  d'honneur,  et,  quand  le  commandant  y 
parait,  tout  le  monde  passe  à  b&bord  s  en  mgr,  c'est  le 
côté  du  vent  qui  est  le  côté  d'honneur. 

GAILLON  (  Ch&teau  de),  à  15  kil.  E.-S.-E.  de  Louviers 
fEure).  Ce  ch&teau,  construit  sous  Louis  xm,  de  1502  à 
1509,  pour  le  cardinal-ministre  Georges  d'Amboise,  non 
par  l'italien  Giocondo,  comme  on  l'a  dit,  mais  par  des 
architectes  français,  et  détruit  en  1792,  fut  une  des  pre- 
mières et  des  plus  belles  productions  de  la  Renaissance 
en  France.  Il  se  composait  de  quatre  corps  de  logis  de 
hauteur  égale,  enveloppant  une  cour  irrégulière,  aa  mi- 


GAL 


951 


GAL 


}ifude UqaeUe  étsAt  une  fontaine  à plusiean  vasques  de 
m<ixl>Te  b'ianc  superposées.  Le  clocheton,  la  dentelure  et 
Voôve  f^othiques  s'y  mariaient  avec  les  pilastres  italiens 
et  it»  arabesques  florentines.  Les  b&timents  étaient  en- 
tourés de  parterres^  terrasses,  pièces  d*eau,  orangeries, 
serres  chaudes,  grottes  et  pavillons  à  l'imitation  des  villas 
de  Vltalie.  Sur  remplacement  du  château,  s'élève  aujour- 
d'hui une  maison  centrale  de  détention,  où  Ton  ne  voit 
plus  des  constructions  premières  qu'un  porche  flanqué 
de  quatre  tourelles,  une  tour  de  la  chapelle,  une  galerie 
et  une  terrasse.  Une  des  façades,  richement  sculptée  et 
ciselée,  a  été  transportée  par  Alexandre  Lenoir  dans  la 
première  cour  du  palais  des  Beaux-Arts  à  Paris,  où  on  la 
connaît  sous  le  nom  d'Arc  de  Gaillon:  elle  est  de  Pierre 
Faio,  architecte  rouennais.  La  fontaine  se  trouve  au 
Louvre,  dans  le  Musée  de  la  sculpture  française.  Les  boi- 
series et  les  stalles  de  la  chapelle  sont  dans  l'église  de 
S'-Denis.  B. 

GAINE,  étui  de  couteau,  de  ciseaux,  de  poignard,  etc. 
On  donnait  autrefois  aussi  ce  nom  aux  fourreaux  de 
labres  et  d'épées,  d'où  vinrent  les  expressions  dégainer^ 
rengainer.  —  En  Architecture,  la  gaine  est  un  support 
s^évasant  de  bas  en  haut  et  servant  à  soutenir  un  buste  : 
le  corps  est  censé  renfermé  dans  la  gaine,  et  les  pieds 
sortent  par  en  bas.  Quand  la  statue  est  ainsi  complétée, 
elle  prend  le  nom  de  terme. 

GAINIER,  ouvrier  qui  fabrique  les  gaines.  Les  galuiers, 
fourreliers  et  ouvriers  en  cuir  bouilli  formaient  autrefois 
à  Paris  un  corps  de  métier,  dont  l'ordonnance  d'établis- 
sement remontait  à  Tannée  1323. 

GAINS  DE  SURVIE,  en  termes  de  Droit,  avantages  sti- 
pulés entre  particuliers  au  profit  du  survivant. 

GAITÉ  (Théâtre  de  la),  le  plus  ancien  des  thé&tres 
du  boulevard  du  Temple  à  Paris.  Fondé  par  Nicolet  en 
1760,  sous  le  titre  de  Théâtre  des  grands  danseurs  du 
roi,  on  y  donna  des  danses  funambulesques,  des  panto- 
mimes et  de  petites  comédies  bouffonnes,  dont  l'acteur 
Taconnet  eut  longtemps  la  fourniture.  En  1792,  il  reçut 
le  nom  de  Théâtre  d'Emuiation,  et,  bientôt  après,  celui 
de  Théâtre  de  la  Gailé,  Vers  1800,  on  y  joua  les  premiers 
mélodrames,  puis  la  célèbre  féerie  du  Pied  de  Mouton. 
Les  vaudevilles  de  Brazier  et  les  drames  de  Pixérécourt 
lui  donnèrent  une  grande  vogue.  En  1835,  un  incendie 
consuma  tout  l'intérieur  et  le  matériel  de  la  salle,  qui  fut 
reconstruite  la  môme  année.  Le  théâtre  de  la  Gaîté  a 
eu  quelques  succès  prodigieux,  parmi  lesquels  il  faut 
citer  le  Sonneur  de  Saint-Paul,  la  Grâce  de  Dieu,  et  les 
Cosaques,  V.  lo  Supplément,  B. 

GALA,  ancien  mot  qui  signifiait  un  vêtement  riche  et 
somptueux  «  dont  les  nobles  se  paraient  pour  les  fêtes  et 
les  festins  de  cour.  11  ne  subsiste  plus  que  pour  désigner 
un  festin. 

GALANDRE,  navire.  V.  Chalande. 

GALANTERIE,  mot  qui  désigne  les  actes  d'empresse- 
ment, d'égards  et  de  protection  de  l'homme  envers  la 
femme  dans  les  pays  civilisés.  Un  homme  galant  est  celui 
qui  montre  auprès  des  femmes  cette  assiduité,  cet  esprit 
de  condescendance;  l'expression  de  galant  homme  ex- 
prime une  tout  autre  idée,  celle  d'un  homme  dont  la 
conduite  est  probe,  loyale  et  digne  d'estime  ;  appliquée  à 
la  femme,  l'épithète  de  galante  est  toujours  prise  en 
mauvaise  part,  et  exprime  d'une  manière  à  peu  près  hon- 
nête une  idée  qui  ne  l'est  pas.  La  galanterie  est  un  sen- 
timent moderne,  et  particulièrement  français.  Elle  a  eu 
un  âge  florissant  à  l'époque  de  la  chevalerie.  Impossible 
en  dehors  des  hommes  bien  élevés  et  polis,  elle  a  dégé- 
néré souvent  en  abus  et  en  scandales,  même  à  la  cour, 
où  la  dignité  semblerait  devoir  la  contenir  dans  de  justes 
bornes  :  on  Ta  vue  licencieuse  au  xvi",  au  xvn*  et  au 
xvm*  siècle,  et  maniérée,  pleine  d'afféterie  au  sortir  de 
la  Révolution. 

GALANTS,  coques  de  rubans  employées  comme  garni- 
tore.  Cétait  un  ornement  de  toilette  au  xvn*  siècle. 

GALAUBAN.  F.  Galhauban. 

GALBE,  (de  l'italien  garbo,  bonne  çrâce),  en  Archi- 
tecture et  en  Sculpture,  contour  arrondi  d'un  objet  quel- 
conque. On  dit  qu*une  colonne  est  galbée,  lorsqu'au  lieu 
d'avoir  un  fût  rectilîgne,  elle  se  renfle  au  milieu  et  di- 
minue dans  les  autres  parties  suivant  des  règles  fixes. 
En  général,  on  appelle  galbe  le  chantournement  d'un 
rase,  d*un  balustre,  d^une  console,  le  profil  d'une  sta- 
tue, etc.  E.  L. 

GALEA,  genre  de  casque  romain,  en  métal  fourbi,  sur- 
monté d'un  petit  anneau,  et  s^attachant  avec  une  jugu- 
laire. Celui  des  officiers  avait  un  cimier  de  plumes  ou  de 
cria.  Le  casque  des  trompettes  était  couvert  d'une  peau 


de  lion  avec  sa  crinière.  Dans  les  jeux  da  Cirque,  les 
cochers  eurent  des  casques  à  ailerons,  symbole  de  lé- 
gèreté. On  voit  au  cabinet  des  antiques,  â  Paris,  un 
casque  romain  fondu  avec  tant  de  délicatesse,  qu'il  n'a 
guère  plus  de  2  millimèt.  d'épaisseur  ei  ne  pèse  qu'un 
kilogr.  B. 

GALÉACE  ou  GALÉASSE  (de  l'italien  galea,  galère], 
gros  navire  à  un  seul  pont,  à  trois  mâts,  et  à  25  ou 
30  bancs  de  rameurs,  employé  dans  l'Adriatique  et  la 
Méditerranée  dans  les  derniers  siècles  du  moyen  âge.  La 
galéace,  étroite  en  proportion  de  sa  longueur,  qui  attei- 
gnit quelquefois  60  met.,  avait  les  mêmes  parties  que  la 
galère,  mais  était  d'un  tiers  plus- longue,  plus  large  et 
plus  haute.  A  la  poupe  et  à  la  proue  étaient  disposées 
deux  grandes  places  pour  les  soldats  et  plus  tard  pour 
l'artillerie  ;  une  espèce  de  rue  ou  coursive,  entourant  le 
navire  à  l'intérieur,  servait  aussi  à  loger  des  soldats,  qui 
pouvaient  tirer  par  des  meurtrières  en  restant  à  l'twri 
des  coups  de  l'ennemi.  La  galéace  figura  pour  la  l***  fois 
dans  la  marine  française  sous  Philippe  le  Bel.         B. 

CALÈCHE.  V.  Cuirasse. 

GALÉE,  terme  de  typographie.  V.  CoMPOsmoif . 

GALÈRE,  navire.  )    V,    notre    IHctionnaire  de 

GALÈRES  (Peine  des).  J       Biographie  et  d'Histoire. 

GALERIE,  pièce  plus  longue  que  large,  parfois  d'une 
très-grande  longueur,  et  qui  sert  dans  les  palais  à  réunir 
plusieurs  appartements.  Comme  ces  galènes  offrent  un 
bel  emplacement  pour  les  fêtes  où  l'on  invite  un  grand 
nombre  de  personnes,  on  y  a  souvent  placé  des  meubles 
de  luxe,  de  belles  tentures,  des  tableaux.  Par  suite,  on 
fit  des  galeries  spécialement  consacrées  aux  objets  d'art, 
et  le  mot  galerie  a  désigné  des  collections  artistiques. 

GALERIE,  nom  qu'on  donne  dans  les  églises  aux  espèces 
de  nefs  pratiauées  au-dessus  des  voûtes  des  bas  côtés,  et 
donnant  sur  la  nef  majeure  par  plusieurs  ouvertures.  II 
n'y  en  a  peut-être  pas  de  plus  remarquables  que  celles 

aui  entourent  le  chœur  et  le  sanctuaire  de  la  cathédrale 
e  Bayeux.  Dans  certaines  églises,  comme  à  Notre-Dame 
de  Cliâlons-sur-Marne  et  à  Notre-Dame  de  Laon,  les  ga- 
leries sont  aussi  larges  que  les  nefs  collatérales  au-dessus 
desquelles  on  les  a  construites.  Les  monuments  des  xiu% 
XIV*  et  XV*  siècles  ne  présentent  généralement  pour  gale- 
ries que  d'étroits  passiages  pratiqués  dans  l'épaisseur  des 
murs.  Quelquefois  les  galeries  sont  seulement  simulées 
par  l'ornementation,  et  ne  font  qu'indiquer  un  étage  au- 
dessus  des  grandes  arcades  et  des  voûtes  des  basses  nefs. 
On  voit  aussi  des  galeries  extérieures  qui  coupent  la  fa- 
çade des  cathédrales  :  les  plus  remarquabl.es  sont  celles 
d'Amiens,  de  Reiras,  et  de  Paris,  Enfin,  d'autres  jzaleries 
extérieures,  placées  au  sommet  des  murailles,  et  souvent 
construites  en  encorbellement,  sont  destinées  adonner 
passage  â  la  base  des  combles  et  des  charpentes. 

GALERIE,  en  termes  de  Fortification,  conduit  souterrain 
servant  â  l'attague  et  à  la  défense  des  places.  La  Galerû 
de  communication  mène  les  assiégés  de  la  place  aux  tra- 
vaux avancés.  La  Gaierie  de  mine  sert  aux  assiégeants 
pour  arriver  au  pied  des  murs  à  l'abri  de  l'artillerie  ; 
elle  a  environ  1  met.  de  largeur  sur  1",30  de  hauteur.  La 
Galerie  de  contre-mine  et  d'écoute  est  destinée  à  contre- 
battire  les  travaux  de  mine  faits  par  les  assiégeants.  Les 
galeries  souterraines  étaient  employées  par  les  Anciens 
comme  moyen  d'attaquer  les  places  :  on  creusait  sous  les 
murs  de  longues  galeries  au'on  étayait  avec  des  pièces 
de  charpente.  Lorsqu'elles  étaient  terminées,  on  y  entas- 
sait des  matières  combustibles;  le  feu,  en  détruisant  les 
supports  en  charpente  des  voûtes,  faisait  crouler  les  murs. 
Les  assiégés,  de  leur  côté,  minaient  les  travaux  d'attaque 
pour  les  renverser  et  les  incendier.  11  se  livrait  sous  terre 
de  terribles  combats,  parce  que  ces  travaux  étaient  alors 
beaucoup  plus  considérables  gue  de  notre  temps.  La  ga- 
lerie d'approche  s'appelait  vinea  (vigne,  treille^,  parce 
qu'elle  était  souvent  faite  à  lour  et  recouverte  d'un  fort 
treillis  en  charpente  qui  la  faisait  ressembler  à  un  ber- 
ceau de  verdure. 

GALERIE,  nom  donné  autrefois,  dans  la  Marine,  à  une 
espèce  de  balcon  établi  à  l'arrière  d*un  navire  et  un  per 
en  saillie  au-dessus  du  gouvernail.  Elle  était  ordinaire- 
ment décorée  d'une  balustrade,  et  servait  de  promenade 
au  capitaine.  Parfois  il  y  en  avait  deux  l'une  au-dessuf 
de  l'autre,  et  on  les  appelait  Jardins^  parce  qu'on  les  em- 
bellissait de  fleurs.  Elles  se  fermaient  avec  des  rideaux^ 
— Aujourd'hui,  la  GcUerie  est  un  couloir  ou  corridor  pra- 
tiqué dans  l'intérieur  d'un  bâtiment  de  guerre  à  la  flot- 
taison, pour  faciliter  les  réparations  de  la  coque  pendant 
le  combat. 

GALERIE,  espèce  de  balcon  construit  aux  divers  étagei 


GAL 


952 


GAL 


d*une  ulle  de  spectacle,  et  destiné  à  recevoir,  sur  des 
ftles  de  banquettes,  un  ou  plusieurs  rangs  de  spectateurs 
en  avant  des  loges. 

GALÉRIEN,  mot  synonyme  de  forçat.  V.  BAGfiB. 

GALERUS.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictiotufoire  de  BiO' 
graphie  et  d'Histoire, 

GAL6ÂL.  V.  Celtiques  (Monuments). 

GALHAUBAN,  la  plus  longue  des  manœuvres  dor- 
mantes d*un  bâtiment,  servant  à  assujettir,  par  le  travers 
et  vers  rarrière,  les  m&ts  de  hune,  de  perroquet,  et  de 
cacatois.  Les  gajbaubans  tiennent  mieux  les  mAta  élevés 
que  les  baubans.  Sur  les  vaisseaux  et  les  frégates,  on  en 
établit  quatre  de  chaque  bord  sur  le  grand  mAt  de  hune, 
autant  sur  le  petit,  trois  au  m&t  de  perroquet  de  fougue 
ou  m&t  de  hune  d'artimon,  trois  aux  m&ts  de  grand  et  de 
petit  perroquet,  deux  ou  trois  au  màt  de  perruche,  un 
'  ou  deux  aux  trois  mâts  de  cacatois. 

GALIBI  (Langue).  V.  CaraIbe. 

GALiaEN  (Dialecte).  C'est  un  idiome  à  part,  presque 
aussi  distinct  du  castillan  que  le  catalan,  sans  ressembler 
cependant  à  ce  dernier,  et  il  présente,  au  contraire, 
beaucoup  d'analogies  avec  le  portugais  ;  mais  il  a  du  cas- 
tillan la  richesse,  la  tendance  aux  contractions,  aux  sup- 
Ëressions  de  certains  mots,  tels  par  exemple  que  Farticle. 
e  galicien  suit  à  peu  prés  le  portugais  dans  les  formes 
de  la  conjugaison.  La  situation  géographique  de  la  Galice 
explique  ces  analogies.  Vers  le  xu*  siècle  et  le  xui*,  le 
portugais  et  le  galicien  ne  formaient  qu'un  seul  idiome. 
Plus  tard,  avec  le  progrès  de  la  nationalité  portugaise  et 
l'établissement  d'une  cour,  la  langue  portu^dse  se  déve- 
loppa, se  polit,  tandis  que  le  galicien  demeura  dans  sa  ru- 
desse primitive,  à  l'état  d'idiome  local.  Il  s'est  formé  anté- 
rieurement au  castillan  :  on  connaît  des  monuments  de 
la  prose  galicienne  qui  datent  de  1150,  et  des  fragments 
de  poésies  (|[ui  remontent  à  l'an  1200.  Vers  la  fin  du  xu« 
siècle,  le  galicien  était  l'idiome  principal  ou  prédominant 
dans  la  péninsule  :  le  roi  de  Castille  Alphonse  X  s'en 
servit  pour  écrire  sa  Chronùme  rimée.  V,  les  Mémoires 
pour  servir  à  Vhistoire  de  la  poésie  espagnole  par  le 
P.  Sarmiento,  et  la  fameuse  Lettre  du  marquis  de  San- 
tillane  au  connétable  de  Portugal.  E.  B. 

GALTEN  RÉTHORE,  c-à-d.  Galien  le  Restauré,  roman 
du  cycle  carlovingien.  Charlemaçne  se  vantant  un  Jour 
de  sa  puissance,  l'impératrice  Im  dit  que  le  plus  grand 
des  princes  est  Hugo,  empereur  de  Gonstantinople.  Il 
veut  s'en  assurer,  et,  accompagné  de  ses  douze  pairs,  va 
faire  ses  dévotions  à  Jérusalem  et  visiter  Hugo  en  pas- 
sant. Les  extravagances  chevaleresques  sont  poussées  à 
xu  tel  excès  pendant  ce  voyage,  que  l'auteur,  selon  quel- 
ques critiques,  aurait  voulu  faire  la  satire  des  composi- 
tions de  son  temps.  On  y  voit,  par  exemple,  Charlemagne 
et  ses  pairs,  assimilés  à  Jésus-Christ  et  aux  Apôtres,  faire 
de  nombreux  miracles.  F.  la  Bibliothèque  des  romans, 
octobre  1778. 

GALIMATIAS,  discours  embrouillé  et  confus,  qui 
semble  dire  quelque  chose  et  ne  dit  rien.  En  voici  un 
en  manière  de  madrigal  que  Collé  fit  par  plaisanterie,  et 
qu'il  lut  un  jour  devant  Fontenelle,  chez  M"'  de  Tencin  : 

Qo*U  est  heureux  de  ae  dtf fendre 
Quand  le  cœur  ne  a'eet  pas  renda  I 
Mais  quMl  est  fftchenx  de  se  rendre, 
Quand  le  bonheur  est  suspendu  l 
pana  un  discours  sans  snito  et  tendre, 
Egares  un  cœur  éperdu  ; 
Souvent  par  un  mal  entendu 
L'amant  adroit  se  &it  entendre. 

Fontenelle,  croyant  comprendre  ce  couplet,  voulut  le  faire 
recommencer.  «  Eh  !  grosse  bête,  lui  dit  M">*  de  Tencin, 
ne  vois-tu  pas  que  ce  n'est  que  du  galimatias!  » 

Huet  croit  que  ce  mot  est  la  réunion  des  deux  mots 
latins  Gain  Mathias,  dont  se  servit  un  avocat,  au  lieu  de 
Gailus  Mathiœ,  au  sujet  d'un  coq  appartenant  à  une  des 
parties  qui  s'appelait  Mathias  :  à  force  de  répéter  ces 
deux  mots,  l'avocat,  s'embrouillant,  en  intervertit  l'ordre; 
et  c'est  depuis  que  ce  mot  galimatias,  qu'on  devrait 
écrire  Galitmathtas,  si  l'anecdote  est  vraie,  a  été  appliqué 
à  tout  assemblage  de  mots  inintelligible.  BoUeau  a  dis- 
tingué le  geUimatias  simple,  que  l'auteur  comprend  et 
que  le  public  ne  comprend  pas,  et  le  galimatias  double, 
que  ne  comprend  ni  le  i>ublic  ni  l'auteur.  G. 

GALION,  ancien  navire  qu'il  ne  faut  pas  confondre 
avec  le  galio  ou  galionus,  petite  galère  ou  galiote  du 
moyen  âge,  et  qui  fut  en  usage  aux  xvi*  et  xvn*  siècles. 
II  tenait  de  la  nef  ou  vaisseau  rond  par  la  forme  géné- 
rale, et  de  la  galère  par  la  longueur.  Le  port  des  plus 


grands  galions  était  de  1,000  à,  1,200  tonneaux.  Dans  les 
flottes  on  voyait  des  galions  à  '3  et  4  ponts,  dont  les  su- 
périeurs portaient  des  canons.  Les  galions  d'un  faible 
tonnage  marcliaient  quelquefois  à  l'aviron;  les  grands 
n'usaient  que  de  la  voile.  La  m&ture  consistait  en  trois 
mâts  verticaux,  le  m&t  de  misaine,  le  grand  m&t,  et  le  mAt 
d'artimon;  parfois  on  en  arborait  un  4'  en  arrière  de 
l'artimon,  le  contre-artimon.  Les  voiles  du  m&t  de  mi- 
saine et  du  grand  m&t  étaient  carrées  et  au  nombre  de 
trois,  la  basse  voile,  le  hunier  et  le  perroquet;  celles  de 
l'artimon  et  du  contre-artimon  étaient  à  la  latine,  c.-&r-d. 
enverguées  sur  des  antennes.  L'Espagne,  voulant  monopo- 
liser le  commerce  avec  le  Nouveau  Monde,  formait  la 
flotte  d*argent,  convoi  de  douze  forts  galions  portant  les 
noms  des  douze  apôtres.  Mais  ces  navires ,  qui  portaient 
tant  de  richesses,  mal  armés,  peu  propres  au  combat, 
devenaient  souvent  la  proie  des  pirates.  B. 

GALIOTE  (de  l'italien  galiotta,  petite  galère),  ancien 
navire  léger,  rapide  &  la  course,  et,  par  conséquent,  tr^- 
favorable  à  la  piraterie.  Sa  construction  et  son  gréement 
étaient  les  mêmes  que  ceux  de  la  felouque.  Il  ne  faut  pas 
confondre  ce  navire,  qui  fût  adopté  par  les  corsaires 
barbaresques,  avec  la  g^iote  hollandaise,  large  et  lourd 
b&timent  destiné  à  porter  le  plus  de  marchandises  pos- 
sible, et  dont  la  marche  est  pénible  et  lente.  On  a  encore 
donné  le  nom  de  galiote  aux  coches  d'eau  qui  servaient 
&  voyager  sur  les  canaux  et  les  rivières. 

GAUOTB  A  BOMBES.   V.  BOMBARDB. 

GALLE  (Tours  de).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogrch 
phie  et  d'Histoire, 

GALLÉE,  nom  que  donnaient  les  Grecs  du  Bas-Empire 
à  un  vaisseau  long  à  éperon  (navis  rostrata)^  allant  à  la 
rame  et  à  la  voile. 

GALUAMBIQUE  (Vers),  espèce  d'hexamètre  latin, 
dont  la  première  partie  ressemble  assez  &  un  vers  ana- 
créontique  (  o  s.-  ou  —  ou  *>  '^  -^  '^  ),  et  dont  les  trois 
derniers  pieds  sont  un  anapeste,  un  tribraque  ou  un 
ïambe,  et  un  ïambe.  La  pièce  63  du  recueil  de  Catulle  est 
écrite  en  galliambiques.  Les  Galles,  prêtres  de  Cybèle, 
faisaient  usage  de  ce  mètre  pour  leurs  danses;  de  là  son 
nom.  P. 

GALLICANE  (Église).  F.  Église  gallicane,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d* Histoire, 

GALLICISME,  idiotisme  de  la  langue  française,  c-èrd. 
manière  de  s'exprimer  particulière  à  cette  langue.  Le 
gallicisme  peut  se  trouver  :  V*  dans  le  sens  d'un  mot 
simple;  ainsi,  le  mot  sentiment,  qui  est  commun  à  plu- 
sieurs langues  modernes,  n'a  qu'en  français  le  sens  d'af- 
fection de  r&me  et  de  passion  amoureuse,  d'où  est  venu  le 
mot  sentimental  ;  *i^  dans  l'association  de  plusieurs  mots  r 
sage-femme,  forte  tête,  mauvaise  grâce ,  etc.  ;  2»  dans 
l'emploi  d'une  figure  :  Comment  vous  portez-^vous?  — 
Rompre  en  visière  à  tout  le  genre  humain;  être  à  bout; 
vous  me  la  baillez  bonne;  une  chose  en  l'air,  etc.;  4<*  dans 
la  construction  de  la  phrase  :  Que  faire  ?Jly  a  deux  ans  ; 
il  n'y  a  pas  jusqu'aux  enfants  qui  ne  s*en  mêlent;  U 
n'est  rien  moins  que  généreux;  vous  avez  beau  dire;  st 
j'étais  que  de  vous,  etc.*,  —  Plus  le  sujet  traité  par  l'écri- 
vain se  rapproche  du  çenre  familier  ou  populaire,  plus 
le  gallicisme  abonde.  Ainsi  on  en  trouve  bien  plus  dans 
les  Lettres  de  M"'  de  Sévigné,  dans  les  Fables  de  La  Fon- 
taine et  dans  les  comédies  de  Molière,  gue  dans  Racine, 
Boileau,  Bossuet  ou  Buffon.  —  Gallicisme  signifie  en- 
core «  faute  commise  par  un  Français  en  parlant  ou  en 
écrivant  dans  une  langue  étrangère,  »  lorsqu'il  donne  aux 
mots  de  cette  langue  un  tour  qui  n'est  correct  ou  usité 

3ue  dans  la  sienne  propre.  Ainsi,  ce  serait  un  gallicisme 
'écrire  en  latin  Venu)  ab  hoc  tibi  dicendo,  et  en  anglais 
Icome  from  saying  it  you,  pour  dire  Je  viens  de  vous  le 
dire,  ce  qui  s'exprime  régulièrement  dans  ces  langues 
par  Hoc  tibi  paullo  ante  dixi,  et  /  hâve  just  saui  it 
you.  P. 

GALLO-BELGE  ou  FLAMANDE  (École),  école  musicale 
célèbre  aux  xv'  et  xvi*  siècles.  Elle  se  développa  sous  la- 
protection  des  ducs  de  Bourgogne,  et  fournit  des  compo- 
siteurs et  des  chanteurs  à  toute  l'Europe.  Jean  Tinctor 
ou  le  Teinturier,  de  Nivelle,  fut  le  plus  savant  théoricien 
du  XV*  siècle,  et  en  même  temps  un  compositeur  habile  : 
les  ouvrages  qu'il  a  écrits  sur  toutes  les  parties  de  la 
musique  prouvent  que  Gaffbrio  et  les  autres  théoriciens 
de  l'Italie  y  puisèrent  leur  science.  Devenu  maître  de 
chapelle  de  Ferdinand  d'Aragon,  roi  de  Naples,  il  fonda 
la  plus  ancienne  école  de  musique  de  l'Italie,  et  l'on 
conserve  ses  messes  et  ses  motets  en  manuscrit  dans  la 
bibliothèque  de  la  chapelle  Sixtine.  A  la  même  épocpie, 
les  musiciens  flamands  les  plus  remarquables  étaient 


GAL 


953 


GAN 


Cilles  ou  Égide  Binchoîs,  Caron,  Brassard,  Régjs,  Guil- 
jaame  Dafay,  Antoine  Busnois,  maître  de  chapelle  de 
Charieale  Téméraire,  Jean  Ockegliem  et  Josquin  Després. 
Au  siècle  suivant  appartiennent  Adrien  Wlllaert,  de  Bru- 
ges, qui  devint  maître  de  la  chapelle  de  S*-llarc  à  Venise, 
et  V  établit  une  école  où  se  forma  Zarlino.  le  plus  savant 
théoricien  de  Tltalie;  Cyprien  Rore,  qui  fut  maître  de 
chapelle  du  duc  de  Ferrare;  Philippe  Yerdelot,  célébré 
par  Rabelais,  et  mentionné  par  Zarhno  comme  un  excel- 
lent maître  ;  Nicolas  Gombert,  Clément  surnommé  non 
^op^9  Pierre  de  la  Rue,  Jacquet  ou  Jacaues  de  Berchem, 
Philippe  de  Mons,  Jacques  de  Kerl,  Honrecht,  Corneille 
Canis,  Josquin  Baston,  Jacques  de  Tumhout,  Thomas 
Crécpiillon,  Dominique  Phinot,  Lupus  Helling,  Arnold 
de  Prug,  Jossen  Junkers,  Jean  Castileti ,  Pierre  Harse- 
nus,  Matté  Lemeistre,  Arcadelt,  Jacob  Vaet,  Jean  Cres- 
pel ,  Sébastien  Hollander,  Eustache  Barbion ,  etc.  Il  est 
généralement  reconnu  que  les  concerts  d$  voix  ont  pris 
naissance  en  Flandre  vers  le  milieu  du  xvi*  siècle,  ouand 
€barles-Quint  établit  sa  cour  à  Bruxelles.  Le  plus  célèbre 
compositeur  de  la  seconde  moitié  de  ce  siècle,  celui  qu*on 
peut  com^er  à  Palestrina  et  qui  mérita  d*ètre  appelé 
comme  lui  te  Prince  des  musiciens,  est  Roland  de  Lassus 
(Oriando  Lasso),  né  à  Mons.  Depuis  le  xvi*  siècle,  Técole 
flamande  cessa  de  produire  de  gprands  musiciens  :  ce  fut 
seulement  au  xvw*  que  les  provinces  belges  virent  naître 
Gossec  et  Grétry.  F.  Bblgiqite  (Beaux-Arts  en).        B. 

GALLOIS  (Idiome),  un  des  idiomes  celtiques,  de  la 
bfanche  kymrique,  appelé  cimraëg  ou  kymraig  par  les 
habitants  du  pays  de  Galles,  et  welsh  par  les  Anglais.  Il 
est  encore  parlé  aujourd'hui  par  les  paysans  gallois,  et 
cultivé  avec  un  zèle  tout  national  par  les  antiquaires  du 
pays.  Ses  monuments  écrits  sont  fort  anciens  et  assez 
nombreux.  VArchéologie  du  pays  de  Galles,  publiée  en 
anglais  en  1801,  en  renferme  une  collection  tres-intéres- 
santé  :  il  y  a  là  des  poésies  qu'on  peut  rapporter,  avec 
assez  de  vraisemblance,  aux  vi",  vu*  et  vin*  siècles.  Le 
gallois  forme  sa  déclinaison  à  la  manière  du  français,  en 
modifiant  Tarticle  ;  il  n*a  que  deux  genres.  Les  substan- 
tifs ont  un  pluriel;  mais  les  a^iectin  ne  varient  jamais 
leur  terminaison,  ni  par  rapport  au  genre,  ni  par  rapport 
au  nombre.  Les  diminutifs  sont  très-nombreux.  La  con- 
jugaison est  riche  en  temps,  qui  se  forment  par  flexion 
comme  dans  le  latin.  On  écrit  le  i;allois  avec  l'alphabet 
latin.  V.  W.  Salisbury,  Dictionnaire  anglais  et  welche, 
Ldondres,  1547,  in-8*;  J.  Davles,  Dictionnaire  gallois, 
1552,  in-fol.;  H.  Perry,  Grammaire  welche,  1595,  in-4*; 
W.  Richards,  Dictionnaire  welchê-anglais,  d^ns  son  An- 
tiqwB  linguœ  britannicœ  thésaurus,  Bristol,  1753,  in-8®; 
IV.  Evans,  Dictionnaire  anglais ^tvelche ,  Carmarthen, 
4771,  in-8*;  W.  Owen,  Dictionnaire  gallois,  Londres, 
4793,  et  Grammaire  galloise,  1804. 

GALLOT,  nom  donné  au  patois  de  la  haute  Bretagne, 
dans  lequel  se  sont  perpétuées  des  expressions  qu'on  ne 
lit  plus  que  dans  les  auteurs  du  xv*  et  du  xvi®  siècle. 

GALOCHES,  souliers  à  semelle  de  bois,  ou  à  semelle 
en  cuir  très-épaisse  et  garnie  de  gros  clous. 

GALON,  bande  étroite  d'un  tissu  fid>riqué  avec  des  ma- 
tières trèsr-di verses,  fil,  laine,  soie,  or,  argent,  etc.  Le 
galon  est  une  des  marques  les  plus  usitées  pour  distin- 
Sner  diverses  conditions  sociales,  depuis  la  livrée  du  va- 
let Jusqu'à  la  toque  du  magistrat  ou  le  riche  habit  du 
fonctionnaire.  L'Église  fait  aussi  un  large  emploi  du  galon 
dans  ses  ornements.  Dans  l'armée,  les  galons  servent  à 
distinguer  les  grades  des  sous-officiers  :  les  caporaux  ont 
deux  galons  de  laine  sur  l'avantr-bras;  les  sergents,  un 
^alon  d*or  ou  d'axvent,  selon  le  corps;  les  sergents-ma- 
jors, deux  galons  d'or  ou  d'argent;  les  fourriers,  un  galon 
d'or  ou  d'argent  sur  le  haut  du  bras.  Les  tambours, 
trompettes  et  musiciens  ont,  au  collet  et  aux  manches, 
des  nions  dont  la  forme  et  le  nombre  ont  beaucoup  va- 
rié. Pour  distinguer  facilement  les  galons  en  or  et  en  ar- 
gent, la  loi  a  voulu,  sous  des  peines  sévères,  que  le  fil 
d'or  et  d'argent  fin  fût  placé  sur  de  la  soie,  et  que  le 
chanvre  ou  le  lin  servit  aux  galons  en  faux.  On  appelle 
ifùhnspleùu  ceux  qui  n'ont  point  d'envers  et  présentent 
des  deux  côtés  ;  galons  figurés,  ceux  qui  ont 


un 

un  envers,  mais  formé  des  mêmes  matières  que  l'en- 
droit; gahns  systèmes,  ceux  dont  le  dessin  et  la  matière 
ne  parassent  que  d'un  côté.  Le  prix  élevé  des  galons  fins 
a  donné  une  grande  extension  à  la  fabrication  des  galons 
eoftoz. 
SALOff,  en  termes  d'Architecture,  bandelette  garnie  de 

perles. 

GALOP,  danse  à  deux  temps ,  d'un  mouvement  vif  et 
oéioe  emporté,  et  originaire  de  U  Hongrie  ou  de  la  Barière. 


Elle  parut  à  Berlin  en  1822,  et  à  Paris  en  1827  dans  le 
ballet  de  la  Neige.  Le  galop  de  l'opéra  de  Gustave  III,  par 
Auber,  est  célèbre.  Le  galop  est  devenu  le  complément 

Eresqoe  obligé  de  la  contredanse,  et  le  finale  de  tous  les 
als. 

GALOUBET  ou  FLUTET  (du  provençal  gai,  Joyeux,  et 
oubet  pour  aubet,  diminutif  de  auboU,  hautbois),  le  plus 
aigu  des  instruments  à  vent,  espèce  de  flageolet  à  oec. 
Plus  élevé  de  deux  octaves  oue  la  flûte  traversière,  et 
d'une  octave  que  la  petite  flûte,  il  est  en  ton  de  ré.  On 
parrient  difficilement  a  en  bien  Jouer;  car  la  main  gauche 
seule  sert  à  le  tenir  et  à  le  mettre  en  Jeu,  afin  d'en  tirer 
avec  trois  trous  deux  octaves  et  un  ton.  La  gamme  se  fait 
de  trois  vents  différents.  Le  galoubet,  instrument  cham- 
pêtre, ne  va  pas  sans  le  tanux)ttrin  IV.cemot)^  sur  le- 
quel l'exécutant  marque  le  rhythme  et  la  mesure  avec  la 
main  droite.  11  est  depuis  longtemps  abandonné  dans  le 
nord  de  la  France,  mais  il  est  encore  très-commun  en 
Provence  s  là  on  trouve  des  gens  qui,  sans  être  musi- 
ciens, exécutent  des  passages  d'une  justesse,  d'une  net- 
teté et  d'une  rivacité  incroyables;  s'ils  sont  en  nombre, 
ils  Jouent  à  deux  parties,  et  quelque  clarinettiste  en 
improvise  une  3'.  A  la  fin  du  siècle  dernier,  J.-N.  Gar- 
bonel,  musicien  de  l'Opéra  de  Paris,  était  parvenu  à 
jouer  du  galoubet  dans  tous  les  tons  sans  cnanger  de 
corps;  il  a  laissé  une  Méthode  pour  cet  instrument. 
Plus  récenunent,  Ghàteauminois  eut  des  succès  sur  le 
galoubet.  B. 

GALVARDINE,  anden  manteau  dont  on  se  couvrait 
pour  se  préserver  de  la  pluie. 

GAMBE,  sorte  de  Jeu  d'orgue  de  forme  cylindrique,  ftdt 
en  étain,  et  ayant  ordinairement  huit  pieds.  La  eambe, 
que  l'on  nomme  aussi  viola  di  gamba,  rentre  Sans  la 
série  des  Jeux  dont  le  «ilapason  est  étroit.  Ce  Jeu  parle 
lentement,  et  imite  le  drottement  de  l'archet  sur  une 
corde  de  violoncelle.  F.  C. 

GAMBÎSON  ou  GAMBESSON  (du  rieux  verbe  gam- 
boiser,  rembourrer),  espèce  de  plastron  en  peau  rem- 
bourrée de  laine,  d'étoupe  ou  de  crin ,  que  les  cavaliers 
du  moyen  âge  mettaient  sous  la  chemise  de  mailles,  et 
qui  descendait  Jusqu'aux  cuisses. 

GAMELLE  (du  latin  camélia,  panier  d'osier  très^-serré), 
grand  vase  de  bois  ou  de  fer-blanc  dans  lequel  étaient 
contenues  la  soupe  et  la  viande  de  8  soldats  dans  l'ai^ 
mée  de  terre,  de  7  matelots  dans  la  marine,  et  où  ils 
mangeaient  autrefois  ensemble.  Une  décision  du  24  dé- 
cembre 1852  a  substitué  dans  l'armée  de  terre  les  ga* 
melles  individuelles  aux  gamelles  conmiunes. 

GAMMA,  nom  donné  par  quelques  auteurs  à  une  es- 
pèce de  crosse  dont  la  tête  a  la  forme  de  la  lettre  grecque 
de  ce  nom. 

GAMME,  nom  de  l'échelle  musicale  moderne,  com- 
posée de  sept  degrés  différents  et  de  la  répétition  du  pre- 
mier degré  qui  s'appelle  alors  octave,  La  gamme,  inventée 
par  Gui  d'Arezzo,  ne  lUt  d'abord  composée  que  de  6  notes, 
ut,  ré,  mi,  fa,  sol,  la;  mais,  par  la  suite,  on  y  ajouta  uno 
7*  note,  le  su  Une  gamme  se  divise  en  tons  et  aemi-4ons, 
dont  le  lieu  dépend  du  mode  dans  lequel  elle  est  éta- 
blie; mais,  dans  chaque  mode,  elle  ne  peut  contenir  en 
totalité,  du  1*'  au  8"  degré,  qu'une  valeur  de  6  tons 
pleins.  On  appelle  gamme  dicttonique  celle  qui  procède 
par  tons  et  demi-tons,  tels  qu'ils  se  trouvent  dans  l'ordre 
naturel  du  ton  et  du  mode  où  l'on  est ,  et  gamme  chro- 
matique celle  qui  n'est  composée  que  de  demi-tons.  Il  y 
a  deux  sortes  de  gammes  diatoniques  :  l'une,  majeure, 
composée  de  5  tons  et  2  demi -tons,  ces  derniers  placés- 
du  3*  au  4*  degré  et  du  7*  au  8*;  l'autre,  mineure,  où  le» 
demi-tons  sont  du  2*  au  3*  degré  et  du  7*  au  8*.  Le  nom 
de  gamme  rient  de  la  lettre  grecque  gamma,  par  laquelle 
Gui  d'Arezzo  désigna  la  note  (sol)  qu'il  aurait  ajoutée, 
dit^n,  au-dessous  de  la  dernière  note  du  système  des 
Grecs.  B. 

GANACHE.  F.  Caquetoibc. 

GAMD  (Église  S*-Bavon,  à).  Cette  église,  une  des  plus 
grandes  et  des  plus  belles  de  la  Belgique,  était  primiti- 
vement consacrée  à  S'  Jean.  Elle  prit  le  nom  de  S*  Bavon 
en  1540,  lorsque  Charles-Quint,  voulant  élever  une  cita- 
delle sur  l'emplacement  de  l'abbaye  de  6*-Bavon,  lai 
donna  pour  chapitre  les  religieux  de  cette  abbaye  suppri- 
mée, et  on  l'éngea  en  cathédrale  en  1559.  C'est  un  mo- 
nument fort  peu  orné  à  l'extérieur:  les  murs,  malgré 
leur  grande  élévation,  ne  sont  renforcés  que  par  de 
minces  contre-forts;  les  portails  sont  d'une  extrême  sim- 
plicité. La  tour,  b&tie  de  1462  à  1534,  est  également  plus 
remarquable  par  la  hardiesse  de  ses  proportions  que  par 
la  richesse  de  ses  ornements  :  quatre  tourelles  d'angles, 


GAR 


954 


GAR 


dégagées  de  la  tour  elle-mômevqai  est  octogone,  la  font 
paraître  carrée.  Cette  tour,  haute  de  90'" ,06,  supportait 
autrefois  une  flèche,  qui  rélevait  jusqu'à  122  met.,  et  que 
le  feu  du  ciel  a  dévorée  en  1603.  La  crypte  qui  s*étend  sous 
le  chœur  fut  bâtie  au  x*  siècle  et  reconstruite  en  1228  ;  le 
rond-point  du  chœur  est  dans  le  style  ogival  du  xiii*  siècle  ; 
le  chœur,  plus  élevé  que  les  nefs,  paraît  n*avoir  été  ter* 
miné  qu'à  la  fin  du  même  siècle;  les  nefs  et  les  tran- 
septs offrent  le  style  ogival  du  xv*  siècle.  Le  plan  général 
de  réglise  de  S*-Bavon  est  celui  de  la  croix  latine  avec 
transepts  et  collatéraux  :  il  y  a,  tout  autour  de  Téglise, 
des  chapelles  ornées  de  précieux  tableaux.  La  chaire, 
sculptée  en  chêne  et  en  marbre  blanc,  est  Tœuvre  de 
Laurent  Delvaux.  Le  chœur  est  revêtu  d'une  décoration 
en  marbres  blanc  et  noir,  dont  le  style  classique  n'est 
pas  en  rapport  avec  celui  de  l'édifice;  on  y  voit  quatre 
mausolées,  dont  le  plus  remarquable  est  celui  de  l'évêque 
Triest  par  Jérôme  Duouesnoy,  de  belles  stalles  sculp- 
tées, et  on  maltre^utel  entouré  de  trois  portes  de  bronze 
an  lieu  de  retable.  V.  Van  Lockeren,  Histoire  de  Vabbaye 
de  S^^Bavon,  1855,  in-8<*. 

GANNES  (Tours  de),    i  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 

GANTELETS,  GANTS.  )      graphie  et  d'Histoire. 

GARAHOND,  ancien  caractère  d'imprimerie,  de  la 
^sseur  du  petit-romain,  et  qui  tirait  son  nom  de  son 
mventeur. 

GARANTIE  (de  l'allemand  U)ahren,  garder),  sûreté 
contre  une  éventualité  quelconque.  On  nomme  garant 
celui  qui  la  donne,  et  garanti  celui  qui  la  reçoit.  Les  co- 
héritiers sont  respectivement  garants  les  uns  envers  les 
autres  des  troubles  et  évictions  soufferts  par  les  biens 
héréditaires  {Code  Napol,^  art.  884).  Le  vendeur  ga- 
rantit à  l'acquéreur  la  possession  paisible  et  durable  de 
l'objet  vendu.  L'existence  d'une  créance,  au  moment  de 
sa  vente,  doit  être  garantie  (art.  1093).  Le  bailleur  doit 
garantir  son  preneur  contre  les  évictions  de  la  chose 
louée  (art.  1721  et  1727).  I^  prêteur  garantit  celui  qu'il 
oblige  contre  les  pertes  que  les  défauts  à  lui  connus  de  sa 
chose  pourraient  occasionner.  Les  voituriers  par  terre  et 
par  eau  (art.  1782  et  suiv.),  les  aubergistes  (art.  19.52  et 
suiv.),  garantissent  les  objets  qu'ils  prennent  en  dépôt. 
L'entrepreneur  est,  pendant  dix  ans,  responsable  des 
vices  de  construction  (art.  1 792  ).  —  La  garantie  est  légale ^ 
quand  la  loi  la  suppose;  conventionnelle,  quand  elle  ré- 
sulte de  l'accofd  des  parties.  Elle  n'est  qu'une  obligation 
accessoire  au  contrat,  car  les  parties  peuvent  convenir 
qu'elles  ne  garantissent  pas  l'objet  du  contrat.  On  nomme 
garantie  de  droit  celle  qui  porte  sur  le  droit  de  la  chose 
ou  sur  ses  qualités  capitales,  essentielles  pour  l'usage 
qu'on  en  veut  faire;  garantie  défait,  celle  qui  regarde  les 
vices  et  les  qualités  non  essentielles  de  la  chose  :  la  pre- 
mière est  de  rigueur,  la  seconde  doit  être  stipulée  pour 
exister.  En  vertu  de  la  garantie  de  droit,  l'acquéreur  a 
recours  contre  le  vendeur,  soit  qu'une  éviction  on  un 
trouble  quelconque  le  prive  d'une  possession  paisible, 
soit  pour  défauts  cachés  de  la  chose  vecdue,  lesquels 
auraient  empêché  le  contrat  ou  en  auraient  modifié  les 
conditions.  Dans  l'ancien  Droit  français,  il  y  avait  une 
garantie  des  faits  du  prince,  c-à-d.  que  si  le  prince 
dépouillait  un  particulier  d'un  bien  acheté,  celui-ci  avait 
recours  contre  son  vendeur  :  cette  garantie,  étant  de  fait 
et  non  de  droit,  devait  être  stipulée.  On  distingue  encore 
la  garantie  formelle,  qui  oblige  le  garant  à  prendre  le 
fait  et  cause  du  garanti  à  qui  l'on  intente  une  action 
réelle  ou  hypothécaire,  si  celui-ci  le  requiert  avant  le 
Jugement  {Code  de  Procéd.  civ,,  art.  182);  et  la  garantie 
simple,  en  vertu  de  laquelle  le  garant  peut  intervenir  si 
le  ^iranti  est  inquiété  par  une  action  personnelle,  mais 
sans  se  substituer  à  lui  (/ôûi.,  art.  183).  —  Le  délai  pour 
appeler  en  garantie  est  de  huitaine  (/ôid.,  art.  175), 
délai  augmenté  selon  les  besoins  des  distances  ou  du 
nombre  des  garants. 

Dans  les  sociétés  politiques,  il  existe  des  garanties  in- 
dividuelles,  nées  des  droits  de  chacun  (  telles  sont  la  liberté 
des  cultes,  celle  de  la  presse,  l'institution  du  Jury,  l'in- 
amovibilité des  Juges),  et  des  garanties  constitution- 
nelles, attachées  à  certaines  positions,  à  certaines  fonc* 
tions,  telles  .que  l'inviolabilité  du  roi ,  des  pairs  et  des 
députés  établie  par  les  Chartes  de  1814  et  de  1830.  De 
même,  les  fonctionnaires  publics  ne  peuvent  être  traduits 
en  Justice,  pour  abus  de  pouvoir  ou  pour  délit  commis 
dans  l'exercice  de  leurs  fonctions,  qu'en  vertu  d'une  au- 
torisation (Loi  du  22  frimaire  an  viii).  V.  Daunou,  Essai 
sur  les  garanties  individuelles,  in-8<^;  Cherbuliez,  Théorie 
des  garanties  constitutionnelles,  1838, 2  vol.  in-8^ 

«ARAMTiK  DBS  MATIÈRES  d'or  Kt  d'arcent,  administra- 


tion dépendant  du  ministère  des  finances,  et  dont  la 
fonction  est  d'examiner  et  de  marc[uer  les  matières  d'or 
et  d'argent  converties  en  orfèvrerie  ou  bijouterie,  afin 
d'indiquer  leur  degré  de  pureté  pour  la  garantie  des  ache- 
teurs. Ce  contrôle  public  et  obligatoire  remonte  à  l'origine 
de  la  corporation  des  orfèvres.  Les  règlements  d'Etienne 
Boileau,  du  temps  de  Louis  IX^  rappelaient  que,  dans  nul 
pays,  l'or  n'était  d'aussi  bon  aloi  qu'en  France,  et  recom- 
mandaient aux  fabricants  de  maintenir  cette  supériorité. 
Les  orfèvres  de  Paris  portaient  leurs  ouvrages  à  la  Mai^ 
son  commune ,  où  ils  étaient  essayés  et  poinçonnés  sous 
la  surveillance  des  gardes  du  métier.  Au  xvi"  et  au 
xvu*  siècle,  le  fisc  intervint,  et  perçut  un  droit  sur  les  ma- 
tières d'or  et  d'argent  :  ce  droit,  fixé  d'abord  (déclaration 
du  31  mars  1672}  à  20  sous  par  marc  d'argent  et  à  30  sous 
par  once  d'or,  s'était  élevé  en  1789,  par  des  augmentations 
successives,  à  6  livres  6  sous  par  once  d'or  et  à  10  sous 
6  deniers  par  once  d'argent  (l'or  paye  aujourd'hui  à  peu 
près  le  même  droit;  l'argent  paye  un  tiers  en  moins). 
Tout  droit  sur  les  matières  d'or  et  d'argent  fut  aboli  en 
1791.  La  loi  du  19  brumaire  an  vi  (9  nov.  1797}  rétablit 
le  centrale  et  le  droit  de  garantie.  Des  bureaux  oe  garan- 
tie sont  établis  sous  l'autorité  du  ministre  des  finances 
dans  presque  tous  les  départements,  et  composés  d'un  es- 
sayeur, d'un  receveur  et  d'un  contrôleur.  L'essayeur  es^ 
nommé  par  le  préfet;  le  contrôleur  et  le  receveur  sont 
des  agents  de  l'administration  des  contributions  indi- 
rectes. Les  bijoutiers  et  les  orfèvres  v  portent  leurs  ouvra- 
ges, qui  sont  essayés,  soit  à  la  coupelle,  soit  aux  touchaux, 
coupés  s'ils  sont  au-dessous  de  tout  titre  légal,  et,  s'ils 
sont  reconnus  bons,  acceptés  et  revêtus  d'un  poinçon  dif- 
férent selon  le  titre.  L'orfèvrerie  française  paye  pour  le 
seul  droit  de  marque  et  par  hectogramme  :  sur  les  ou- 
vrages d'or,  22  fr.,  et  sur  ceux  d'argent,  1  fr.  10  c;  pour 
(^  droit  d'essai  à  la  coupelle,  3  fr.  par  120  grammes  d'or, 
^  centimes  par  2  kilogr.  d'argent;  pour  le  droit  d'essai 
au  touchau,  9  centimes  par  décagramme  d'or,  9  centimes 
par  hectogramme  d'argent.  L'orfèvrerie  exportée  a  droit 
à  la  restitution  des  deux  tiers  du  droit  de  marque,  et 
dans  certains  cas  à  la  totalité.  Les  orfèvres  srvnt  tenus  de 
porter  tous  leurs  ouvrages  sans  exception  au  bureau  de 
garantie,  et  d'inscrire  sur  un  livre  coté  et  parafé  toutes 
les  matières  d'or  et  d'argent  qui  entrent  chez  eux.  Les 
employés  du  bureau,  accompagnés  d'un  officier  de  police, 
font  des  visites  chez  les  orfèvres,  vérifient  les  livres,  pé- 
nètrent dans  l'atelier,  se  font  présenter  les  marchandises, 
saisissent  toutes  celles  qui  sont  terminées  sans  avoir  été 
revêtues  de  la  marque,  et  dressent  procès-verbal.  L'or- 
fèvre est  condamné  à  une  amende,  et,  après  trois  contra- 
ventions, défense  lui  est  faite  d'exercer  le  métier.  Malgré 
cette  surveillance  et  ces  rigueurs  de  la  loi ,  plus  du  tiers 
des  ouvrages  d'or  et  d'argent  échappent  à  la  marque  et 
au  droit.  —  Les  lingots  ne  sont  pas  soumis  aux  mêmes 
règles  que  les  ouvrages  fabriqués  et  destinés  à  être  ven- 
dus aux  particuliers;  ils  sont  essayés  par  les  essayeurs 
particuliers  du  commerce,  dont  la  rémunération  n'est 
pas  fixée  par  un  tarif.  Le  maximum  du  prix  qu'ils  pren- 
nent est  do  1  fr.  pour  un  essai  de  matière  d'or,  et  de 
75  centimes  pour  un  essai  de  matière  d'argent.  Les  lin- 
gots portent,  outre  la  marque  de  l'essayeur,  le  chiffre 
des  millièmes  de  fin,  et  il  se  vend  sur  cette  garantie,  dont 
répond  l'essayeur.  V.  Raibaud,  Traité  de  la  garantie  des 
matières  et  ouvrages  d*or  et  d'argent,  Paris,  1825,  in-8°; 
Chaudet,  VArt  de  Vessayeur,  Paris,  1 835  ;  Lachèze,  iVou- 
veau  Manuel  simplifié  de  la  garantie  des  matières  et 
ouvrages  d^or  et  d'argent,  Paris,  1838,  in-18.  L. 

GARCETTES,  en  termes  de  Marine,  cordes  qui  servent 
à  prendre  des  ris,  ou  à  attacher  le  tournevire  au  câble 
quand  on  lève  l'ancre.  Les  garcettes  des  ris  sont  plus 
grosses  au  milieu  qu'aux  deux  bouts;  celles  du  tourne- 
vire sont  d^égale  grosseur  partout.  La  garcctte  était  au- 
trefois l'instrument  de  discipline  avec  lequel  on  frappait 
sur  le  dos  nu  des  matelots  coupables  de  quelques  méfaits. 

GARD  (Pont  du).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

GARDE  (de  l'allemand  ti;a/ir6n ,  garder),  nom  donné, 
1*^  à  une  réunion  de  soldats  ou  autres  agents  de  la  force 
publique,  désignés  pour  veiller,  pendant  un  temps  déter- 
miné, au  maintien  du  bon  ordre,  à  la  conservation  d'un 
monument,  à  la  sûreté  d'un  poste,  etc.;  2<^  au  service  que 
ce  détachement  armé  accomplit.  Monter  la  garde,  c'est 
faire  partie  de  la  garde  qui  prend  le  service;  relever  la 
garde,  c'est  remplacer  par  une  nouvelle  earde  celle  dont 
le  service  est  expiré;  aescendre  la  garde,  c'est  rentrer 
au  quartier  ou  au  logement  quand  la  garde  a  été  relevée. 
Battre  la  garde,  c'est  exécuter  la  batterie  de  tambour  qui 


GAR 


!)55 


GAR 


appelle  les  hommes  à  la  garde.  On  nomme  grand*garde 
uii  corps  assez  considérable  de  cavalerie  placé  à  la  tête 
d'an  camp,  pour  empocher  toute  tentative  de  Tennemi  ; 
Va  grand*garde  est  protégée  elle-même  par  une  garde 
avancée,  —  En  beaucoup  de  cas,  garde  a  le  sens  do  gar- 
dien, de  surveillant,  de  conservateur. 

GâXDE ,  partie  saillante  entre  la  poignée  d*une  épée  ou 
d*nn  sabre,  et  qui  sert  h.  protéger  la  main. 

GAKDc-cATiAL,  agent  chargé  de  veiller  à  la  conservation 
des  canaux,  et  même  des  propriétés  qui  en  dépendent,  de 
constater  les  infractions  faites  aux  règlements,  ainsi  que 
les  délits  de  pèche,  et  d*en  dresser  procès- verbal.  Ces 
agents  sont  placés  sous  les  ordres  des  ingénieurs  et  des 
conducteurs  des  ponts  et  chaussées. 

GARDE  cHAMPâriiE,  sgcut  préposé  à  la  garde  des  champs. 
On  rappelait  autrefois  messier  (du  latin  messis,  moisson  ; 
ou  du  celtique  messoer^  gardeur  de  bêtes),  bangard  en 
Lorraine,  gastier  en  Auvergne,  bannerot  dans  le  pays 
Messin,  et,  dans  diverses  provinces,  bannard,  sergent  de 
verdure,  vigner  ou  garde  des  vignes,  etc.  D'après  Tancien 
Droit  français,  les  messiers  devaient  être  idoines  (ca- 
pables de  remplir  leurs  fonctions),  âgés  de  i8  à  22  ans 
selon  les  localités,  et  prêter  serment  devant  le  Juge,  ou , 
à  son  défaut,  devant  l'officier  de  police  (Édit  de  nov. 
1706).  Une  déclaration  du  11  juin  1709  ordonna  qu'il 
serait  nommé  dans  chaque  paroisse  un  nombre  de  mes- 
siers proportionné  à  retendue  du  territoire.  Les  messiers, 
oonunés  pour  un  an ,  et  même  pour  la  seule  saison  des 
firuits,  n'étaient  pas  tenus  d'écrire  leurs  procès-verbaux, 
mais  faisaient  seulement  des  rapports  verbaux  au  gref- 
fier, qui  les  inscrivait,  et  ces  rapports,  affirmés  véri- 
tables, faisaient  foi  en  justice.  La  loi  du  28  sept.  1791 
exige  que  les  gardes  champêtres  soient  âgés  de  25  ans  au 
moins  et  reconnus  pour  gens  de  bonnes  mœurs,  et  qu'ils 
prêtent  le  serment  de  «  veiller  à  la  conservation  do  toutes 
les  propriétés  qui  sont  sous  la  foi  publique,  et  ôe  toutes 
celles  dont  la  garde  leur  aura  été  confiée  par  l'acte  de 
leur  Domination.  »  Celle  du  20  messidor  an  m  (8  juillet 
1795)  ordonne  qu'il  y  en  ait  dans  toutes  les  communes. 
Un   arrêté  du  25  fructidor  an  ix  décide  qu'ils  seront 
choisis  parmi  les  vétérans  dont  les  préfets  auront  dû 
dresser  une  liste,  et  que  le  choix,  confié  au  maire,  con- 
trôlé par  le  conseil  municipal ,  sera  admis  par  le  sous- 
gréfet ,  lequel  délivre  la  commission.  Depuis  le  décret  du 
-5  mars  1852,  les  gardes  champêtres  sont  nommés  par 
les  préfets  sur  la  présentation  des  maires.  Ils  sont  agents 
de  la  force  publique,  et  doivent  prêter  main-forte  quand 
ils  en  sont  requis  :  tout  excès  commis  contre  eux  dans 
Texercice  de  leurs  fonctions  est  de  la  compétence  de  la 
Coar d'assises  {Code  pénal,  art.  228,  2.'^).  Ils  sont,  de 
plas,  officiers  de  police  judiciaire,  auxiliaires  du  procu- 
reur impérial,  sous  la  surveillance  duquel  ils  sont  placés 
(Cddff  ainsir.  crtm.,  art.  17),  et  jouissent,  à  ce  titre,  des 
privilèges  et  garanties  des  membres  de  l'ordre  judiciaire. 
ijBUTB  fonctions  ne  sont  pas  annuelles  comme  celles  des 
messiers,  mais  d*une  durée  illimitée;  leur  salaire  est 
préleré  sur  les  revenus  de  la  commune,  et  complété  au 
oesoln  par  des  centimes  additionnels  à  la  contribution 
fonciàpe  assise  sur  les  biens  ruraux. 

Incompétents  hors  du  territoire  pour  lequel  ils  sont 
assermenté,  les  gardes  champêtres  parcourent  ce  terri- 
toire, porteurs  d'armes  autorisées  par  le  préfet ,  et  munis 
d'une  plaque  de  métal  ou  d'étoffe,  placée  en  endroit 
apparent  et  sur  laquelle  sont  écrits  leur  nom,  celui  de  la 
commune,  et  le  titre  de  la  loi.  Ils  constatent  les  délits  et 
cootraventions  qui  portent  atteinte  aux  propriétés  ru- 
rales, et  leur  procès-verbal  {V.  ce  mot)  doit  être  remis 
dans  le  délai  de  trois  jours,  y  compris  celui  du  délit ,  au 
commissaire  de  police,  ou,  à  son  défaut,  au  maire  ou  ad- 
joint, devant  lequel  il  faut  encore  qu'il  soit  affirmé  véri- 
t^le.  Puis  la  Juridiction  compétente  est  saisie  dans  le 
délai  de  8  Jours;  si  la  poursuite  n'est  pas  ensuite  entre- 
prise dans  le  délai  d'un  mois  par  la  partie  lésée  ou  le 
ministère  public,  il  n'y  a  plus  heu  à  poursuivre  (Loi  du 
S  sept  1791  ).  Les  gardes  champêtres  sont  responsables 
des  dâits  qu'ils  auraient  négli^  de  faire  connaître.  Si  le 
délinquant  pris  en  flagrant  délit  peut  encourir,  vu  la  grar- 
vitéda  cas,  la  peine  de  l'emprisonnement,  ou  si  c'est  un 
indÎTida  dénoncé  par  la  clameur  publique,  ils  peuvent 
rarrdter  pour  le  conduire  devant  le  juge  de  paix  ou  le 
nuàre   et  à  cet  effet  se  faire  prêter  main-forte.  Si  les 
dioces  enlevées  ont  été  transportées  dans  des  lieux  clos, 
ib  ont  le  droit  de  les  saisir  pour  les  mettre  en  séquestre, 
Donrni  ou'îls  soient  accompagnés  du  commissaire  de  po- 
fiM.  dn  iuiEe  de  paix,  du  maire  ou  d'un  adjoint,  qui 
•  oe  àïon  ie  procôa-verbal.  —  D'après  un  décret  du 


Il  juin  180G,  les  gardes  champêtres  font  connaître  leuf 
installation  aux  officiers  ou  sous-offîcicrs  de  gendarmerie 
de  leur  canton  :  ceux-ci  surveillent  leur  conduite  et  la 
font  connaître  au  sous-préfet ,  peuvent  les  mettre  en  ré- 
quisition pour  les  cas  qui  intéressent  la  tranquillité  pu- 
blique, et  leur  transmettent  le  signalement  des  divers 
individus  qu'ils  ont  ordre  d'arrêter.  Réciproquement, 
les  gardes  champêtres  informent  les  maires  de  ce  qu'ils 
ont  découvert  de  contraire  au  maintien  de  Tordre,  et  les 
maires  en  donnent  avis  aux  officiers  de  la  gendarmerie. 
V.  Du  four.  Manuel  pratique  des  gardes  champêtres,  des 
gardes  forestiers  et  des  gardes-pêche,  2«  édit.,  Paris, 
1824;  Rondonneau,  Nouveau  Manuel  théorique  et  pra- 
tique des  gardes  champêtres,  forestiers  et  gardes-pêche, 
1829,  in-i8;  Boyard,  Nouveau  Manuel  complet  des  gardes 
champêtres,  communaux  ou  partici^liers,  1844,  in-i2; 
Sorbet,  Petit  guide  des  gardes  champêtres,  1851 ,  în-18; 
Larade,  Guide  et  formulaire  des  gardes  champêtres ^  1858, 
in-18;  Crinon  et  Vasserot,  Le  Forestier  praticien ,  ou 
Guide  des  gardes  champêtres,  1852,  in-18;  Marc  Def- 
faux,  Guide-Manuel  général  du  garde  champêtre  et  du 
messier,  1852,  in-12;  Gère,  Nouveau  Manuei  du  garde 
champêtre,  forestier  et  particulier,  1853,  in-18;  Dubarry, 
Nouveau  Manuel  des  gardes  champêtres,  des  gardes  fo- 
restiers, etc.,  1850,  in-12. 

GARDE-CHASSE.  Dans  l'ancienne  monarchie  française, 
rimportance  (pie  les  seigneurs  attachaient  à  leurs  droits 
de  chasse  avait  fait  créer  une  vaste  organisation  pour 
veiller  à  la  conservation  de  ces  droits.  Au  sommet  était 
un  grand  veneur,  dont  la  charge,  longtemps  confon- 
due avec  celle  du  grand  maître  des  eaux  et  forêts,  en 
fut  séparée  sous  Charles  YI,  puis  fut  démembrée  elle- 
même  par  l'institution  du  grand  fauconnier.  Le  grand 
veneur,  officier  de  la  maison  du  roi,  avait  la  haute  main 
sur  tous  les  officiers  de  la  vénerie,  auxquels  il  conférait 
les  provisions  et  les  emplois.  Au-dessous  du  grand  ve- 
neur, il  y  avait  :  1°  les  capitaineries,  composées  d'un  tri- 
bunal instruisant  et  jugeant  les  délits  de  chasse,  d'un 
capitaine,  de  lieutenants  et  de  gardes,  chargés  de  la  sur- 
veillance et  de  la  conservation  des  droits  de  chasse; 
2'  les  capitaineries  des  maisons  royales,  qui  connais- 
saient exclusivement  des  délits  commis  dans  un  rayon  de 
trois  lieues  autour  des  maisons  du  roi,  même  par  les 
particuliers  sur  leurs  terres,  où  ils  ne  pouvaient  chasser 
sans  permission.  Les  maîtrises  des  eaux  et  forêts  veil- 
laient aussi  à  la  conservation  du  gibier.  Les  gardes-chasse 
n'avaient  d'autre  arme  qu'un  pistolet,  et  il  leur  était  in- 
terdit de  chasser.  La  Révolution  détruisit  toute  cette 
organisation,  et  une  loi  du  3  nov.  1789  permit  aux  pro- 
priétaires de  détruire  comme  ils  l'entendraient  le  gibier 
sur  leurs  terres.  Mais  une  loi  du  30  août  1790  rétablit  la 
police  de  la  chasse,  et  la  confia  aux  gardes  champêtres, 
aux  gardes  forestiers  et  à  la  gendarmerie.  La  loi  du  3  mai 
1843  régit  aujourd'hui  la  matière  :  les  officiers  qui  peu- 
vent dresser  des  procès-verbaux  pour  délits  de  chasse 
sont  les  maires  et  adjoints ,  les  officiers ,  maréchaux  des 
logis  et  brigadiers  de  gendarmerie,  les  simples  gen- 
darmes, les  gardes  forestiers,  les  gardes-pêche,  les  gardes 
champêtres  et  les  gardes  assermentés  des  particuliers. 
Ces  divers  agents  ne  peuvent  avoir  un  permis  de  chasse, 
et,  en  cas  de  contravention,  le  maximum  de  la  peine  leur 
est  appliqué.  Les  délinquants  ne  peuvent  être  saisis  ni 
désarmés;  mais,  s'ils  sont  déguisés  ou  masqués,  s'ils 
refusent  de  faire  connaître  leur  nom,  ou  s'ils  n'ont  pas 
de  domicile  connu,  ils  sont  immédiatement  conduits  de- 
vant le  maire  ou  le  juge  de  paix,  pour  que  leur  indivi- 
dualité soit  constatée.  Les  auteurs  des  procès -verbaux 
contre  les  délits  de  chasse  ont  droit  à  une  gratification. 

GARDE  DU  COVMERCB.    V.  COMMERCE. 

GARDE  DBS  SCEAUX.  V,  notro  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d* Histoire. 

GARDE-CÔTE.  K.  06  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d'Histoire. 

GARDE  FORESTIER ,  agent  préposé  à  la  garde  des  bois  et 
forêts.  L'organisation  des  agents  de  la  police  forestière 
remonte  très-haut  dans  l'histoire  de  la  monarchie  fran- 
çaise. Une  ordonnance  de  novembre  1219  nous  apprend 
qu'il  existait,  sous  la  haute  main  des  premières  autorités, 
un  conseil  des  gardes,  qui  connaissait  des  délits  commis 
dans  les  forêts  ;  puis  venait  un  maître  garde,  exerçant 
une  espèce  de  garde  générale,  et  ayant  sous  ses  ordres 
deux  classes  de  gardes,  les  sergents  traversiers,  qui  fai- 
saient des  visites  extraordinaires  de  forêt  en  forêt,  et  les 
simples  sergents  des  forêts,  subordonnés  aux  précédents. 
L'ordonnance  de  1669  supprima  tous  ces  fonctionnaires' 
et  créa  une  hiérarchie  nouvelle,  ainsi  composée  :  les  set  » 


GAR 


956 


GAR 


$ent8  à  garde  ou  gardes  à  pied,  sardes  d'an  canton  cir- 
conscrit ;  les  gardes  généraux  a  cheval ,  qui  devaient 
iorreiller  les  précédents  ;  les  mattres  particuliers,  dont 
les  soins  s'étendaient  sur  une  maîtrise  ou  groupe  de  can- 
.  tons  ;  les  grands  mattres,  chargés  d*un  vaste  départe- 
ment forestier.  Les  gardes  forestiers  devaient  être  catho- 
liques, connus  comme  gens  de  bonne  vie  et  mœurs, 
savoir  lire  et  écrire,  répondre  à  un  interrogatoire  sur  tout 
ce  qui  était  relatif  à  leur  état,  déposer  un  cautionnement 
de  300  livres,  payer  12  livres  pour  leur  réception,  et  prêter 
serment  devant  un  maître  particulier.  Il  leur  était  dé- 
fendu de  boire  avec  les  délinquants,  et  de  tenir  cabaret. 
Hs  consignaient  sur  un  registre,  parafé  par  le  maître 
particulier  et  par  le  procureur  du  roi,  leurs  visites,  leurs 
procès-verbaux,  et  tout  ce  qu'ils  avaient  pu  découvrir. 
Les  gardes  à  pied  portaient  des  pistolets,  mais  ne  pou- 
vaient s'en  servir  pour  la  chasse;  les  gardes  généraux 
avaient  le  privilège  de  porter  un  fusil,  et  devaient,  en 
faisant  leurs  tournées,  être  porteurs  d'une  bandoulière, 
insigne  de  leur  dignité.  Ils  ne  pouvaient  pousser  leurs 
perquisitions  dans  rintérieur  des  enclos  que  s*ils  étaient 
accompagnés  d*un  maître,  du  Juge  de  Tendroit,  du  maire 
ou  d*un  échevin.  Leurs  procâ-verbaux,  légalement  faits 
et  affirmés,  faisaient  foi  en  justice,  jusqu'à  inscription 
de  faux.  En  1689,  les  places  de  gardes  furent  érigées  en 
titres  d'offices  ;  mais  les  prévarications  de  ceux  qui  occu- 
pèrent les  charges  mises  en  vente  amenèrent  la  suppres- 
'  ftion  de  ces  charges  par  arrêt  du  Conseil  en  1719.  —  De- 
puis le  Code  forestier  de  1827,  la  France  est  divisée  en 
Conservations  forestières  :  sous  la  dépendance  Immé- 
diate du  ministre  des  finances  est  un  directeur,  assisté 
de  3  sous-directeurs ;  il  y  a,  dans  chaque  conservation, 
un  conservateur^  des  inspecteurs  et  sou^- inspecteurs 
correspondant  à  des  subdivisions  de  la  conservation,  des 
gardes  généraux,  des  arpenteurs,  des  gardes  à  cheval, 
et  des  gardes  d  pied.  Le  directeur  nomme  les  agents 
inférieurs  Jusqu'au  grade  de  garde  général  exclusivement; 
ils  prêtent  serment  devant  le  tribunal  de  l**  instance  do 
leur  résidence.  F.  le  Supplément, 

Les  gardes  forestiers  ne  peuvent  exercer  d'autres  fonc- 
tions, soit  administratives,  soit  judiciaires,  ni  faire  com- 
merce de  bois  ou  exercer  un  métier  où  le  bois  soit  em- 
ployé. Leur  uniforme  se  compose  d'un  habit,  d'un  gilet 
et  d'un  pantalon  de  drap  vert,  avec  bandoulière  chamois 
à  bandes  de  drap  vert  et  à  plaque  de  métal  blanc  por- 
tant ces  mots  :  «  Forêts  de  l'État.  »  Le  collet  de  l'habit 
des  gardes  à  cheval  est  orné  d'un  rameau  de  chêne  brodé 
en  argent.  Tous  les  gardes  peuvent  porter  un  fusil 
simple.  Ils  sont  responsables  des  dégâts  qu'ils  auraient 
négligé  de  constater.  Ils  arrêtent  le  coupable  pris  en  fla- 
grant délit,  et  peuvent  reauérir  main-forte  ;  pour  péné- 
trer dans  un  lieu  clos,  ils  doivent  être  accompagnés  d'un 
représentant  de  l'autorité  municipale.  Les  procès-ver- 
baux des  gardes  à  pied,  écrits  de  leur  propre  main,  doi- 
vent être  affirmés  devant  le  Juge  de  paix,  formalité  à 
laquelle  ne  sont  pas  soumis  ceux  des  gardes  à  cheval  et 
des  gardes  généraux  :  ces  procès -verbaux,  signés  par 
deux  gardes,  font  foi  Jusqu'à  inscription  de  faux;  signés 
par  un  seul ,  ils  n'ont  la  même  force  que  pour  les  con- 
traventions n'entraînant  pas  une  condamnation  à  plus 
de  100  fr.  d'amende  et  de  dommages-intérêts  réunis.  Les 
agents  forestiers  ont  qualité  pour  faire  les  citations  et 
significations  dans  les  poursuites  exercées  au  nom  de 
l'administration  forestière  ;  ils  taxent  ces  actes  comme 
les  huissiers  des  juges  de  paix.  Ils  exposent  l'affaire  et 
«ont  entendus  dans  leurs  conclusions  devant  les  tribu- 
naux correctionnels,  seuls  compétents  pour  ces  matières. 
Comme  agents  d'une  administration  putiiq^iu,  les  gardes 
forestiers  ne  peuvent  être  poursuivis  qu'après  autorisar- 
tion;  en  quahté  d'officiers  de  police  Judiciaire,  ils  ont 
le  privilège  de  n'être  luges  que  par  une  Cour  d'appel. 

GARDB  iHPteiALB.  Y.  ce  mot  daus  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

GARDE-iNPANT,  ospèco  de  vertugadîus  ou  de  paniers  dont 
la  mode  vint  d'Espagne  en  France  au  commencement  du 
xvn*  siècle. 

GAEDB-MEOBLES ,  édifice  OÙ  l'ou  garde  les  meubles  de 
l'Etat  ou  du  prince.  Avant  la  Révolution,  le  garde-meu- 
bles de  la  couronne  de  France  était  le  côté  oriental  du 
monument  bâti  par  Gabriel  sur  la  place  Louis  XV  ^auj. 
place  de  la  Concorde),  et  occupé  maintenant  par  le  mi- 
nistère de  la  marine.  Toutes  les  résidences  royales 
avaient  leur  garde-meubles  ;  un  officier  qui  portait  le 
même  nom  en  avait  la  surveillance.  Aujourd'hui,  le 
Çtrde- meubles  de  la  couronne,  placé  dans  les  attribu- 
tions du  ministre  de  la  maison  ae  l'empereur,  se  trouve 


dans  l'Ile  des  Cygnes,  près  du  pont  d'Iéna,  soas  la  sui^ 
veillancc  d'un  directeur  et  d'un  inspecteur. 

GARDE -vmES,  autrefois  conducteur  des  mines,  nom 
donné  à  des  agents  auxiliaires  des  ingénieurs  des  mines 
pour  la  surveillance  et  la  police  des  exploitations,  les 
levées  et  les  copies  de  plans.  Les  gardes- mines  sont 
nommés  par  le  ministre  de  l'agriculture,  du  commerce  et 
des  travaux  publics;  ils  doivent  avoir  subi  un  examen, 
et  être  ftgés  de  21  ans  au  moins,  de  30  ans  au  plus  (35  ans 
pour  les  anciens  militaires).  On  en  distingue  5  classes, 

?ui  ne  diffèrent  que  par  le  traitement  (900,  1,200, 1,5U0 
,800,  et  2,000  fr.)  et  les  frais  de  tournée. 
GARDE  NATIONALE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

GARDE  PARTicouER,  garde  qu'un  particulier  peut  établir 
pour  veiller  sur  ses  propriétés  rurales.  Autrefois  les  sei- 
gneurs seuls  possédaient  le  droit  d'en  avoir.  Ces  gardes, 
reçus  au  siège  de  la  maîtrise  forestière  du*  ressort,  ou 
simplement  à  la  justice  des  seigneurs,  pouvaient  porter 
le  fusil,  mais  seulement  comme  chasseurs  de  leur  maître 
et  sous  condition  d'une  commission  enregistrée  au  greffe. 
La  loi  du  20  messidor  an  m  a  autorisé  tout  propriétaire 
à  avoir  des  gardes  ;  les  fermiers  eux-mêmes  peuvent  en 
nommer  pour  la  conservation  de  leurs  récoltes.  Les 
gardes  particuliers,  pourvus  d'une  commission  sur  papier 
timbré,  agréés  par  le  sous-préfet,  prêtent  serment  devant 
le  tribunal  de  l**  instance  :  ils  peuvent  alors  verbaliser, 
comme  les  gardes  champêtres,  pour  délits  de  chasse,  de 
pêche,  etc.,  et  leurs  procès-verbaux  font  foi  Jusqu'à 

{>reuve  contraire.  Le  propriétaire  qui  a  un  garde  particu- 
ier  n'en  contribue  pas  moins  au  payement  du  garde 
champêtre  de  sa  commune  ;  car  celui-ci  veille  sur  les 
propriétés  protégées  par  un  garde  spécial  aussi  bien  que 
sur  les  autres. 

GARDE-PÊCHE,  agent  chargé  de  veiller  à  Texécutlon  des 
lois  sur  la  police  des  eaux,  fleuves  et  rivières  relative- 
ment à  la  pêche,  et  de  plus  à  la  navigation.  Aussi  lui 
donne-t-on  en  certains  endroits  le  nom  de  garde-civière. 
Les  garde»-pêche  appartiennent  à  l'administration  fores- 
tière; leur  condition  et  leurs  droits,  semblables  d'ail- 
leurs à  ceux  des  gardes  forestiers (V,  plus  haut)^  sont 
déterminés  par  la  loi  du  15  avril  1829  sur  la  pêche  flu- 
viale. Ils  sont  autorisés  à  saisir  les  instruments  de 
pêche  prohibés  et  le  poisson  péché  en  délit.  Les  éclu- 
siers,  les  officiers  de  police  Judiciaire,  les  cardes  cham- 
pêtres, les  gardes  assermentés  des  particuliers,  peuvent 
aussi  dresser  procès-verbal  des  délits  de  pêche. 

GARDE-PORT,  Rgout  établi  pour  la  police  des  porta  sur 
les  rivières  navigables  ou  flottables.  D'après  le  décret  du 
Si  août  1852,  les  çardes-ports  sont  nommés  et  commis- 
sionnés  par  le  ministre  de  l'agriculture,  du  commerce  et 
des  travaux  publics;  ils  prêtent  serment  devant  le  tri- 
bunal de  l'*  instance  du  lieu  de  leur  résidence.  Tout 
commerce  et  toute  autre  fonction  salariée  leur  sont  inter- 
dits. Ils  surveillent  l'amarrage,  le  garage,  le  tirant  d'eau 
des  bateaux  ou  trains,  le  temps  qu'ils  doivent  rester  le 
long  des  quais,  assurent  la  conservation  des  marchan- 
dises pendant  et  après  le  débarquement,  ainsi  que  dans 
les  dépôts  où  elles  séjournent,  et  ont  la  police  du  service 
général  des  quais.  Leurs  procès -verbaux  doivent  être 
affirmés  par^dfevant  le  luge  de  paix,  le  maire  ou  Ta^joint. 
Ils  sont  responsables  des  délite  cru'ils  n'ont  pas  consta- 
tés, et  passibles  des  amendes  qui  eussent  été  encourues 
par  les  délinquante  ;  les  pcrtos  ou  avaries  provenant  de 
leur  négligence  peuvent  donner  lieu  contre  eux  à  une 
action  en  indemnité.  Ils  sont  sous  les  ordres  des  inspec- 
teurs des  porte  et  des  ingénieurs  chargés  du  service  de 
la  navigation.  Leur  rémunération  consiste  en  rétributions 
dues  par  l'expéditeur  lors  de  l'arrivage  des  marchandises, 
et  par  le  destinataire  lors  do  leur  enlèvement,  conformé- 
ment à  un  tarif. 

GARDE-VENTE,  Rgeut  que  tout  a4|udicateire  des  coupes 
de  bois  et  forête  doit  nommer  pour  consteter  les  délite 
commis  dans  sa  vente  et  autour  de  cette  vente,  jusqu'5 
Toufe  de  la  cognée.  Il  prête  serment  devant  le  Juge  de 
paix,  inscrit  Jour  pa*  Jour,  sur  un  registre  timbré,  coté 
et  parafé  par  les  sous  -  inspecteurs  de  l'administration 
forestière,  les  bois  di'^iiités,  le  nom  des  personnes  qui  les 
ont  achetés  et  leur  de»p:ieure,  et  veille  à  ce  que  les  ou- 
vriers exploitente  sp  soumettent  aux  prescriptions  et  pro- 
hibitions que  les  loM  «t  ordonnances  leur  imposent. 

GARDERIE,  nom  qu'on  donne  quelquefois  aux  ciïchcs 
{V,ce  mot). 

GARDES  (Cent-).  T.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d* Histoire^  au  Supplément. 

GARDIEN  JUDICIAIRE ,  celui  que  la  Justice  commet  à 


GAR 


957 


GAR 


b  c^rde  d'objets  saisis  ou  mis  soos  les  scellés,  moyen- 
nant des  frais  fixés  par  la  loi.  Il  en  répond  s'ils  sont  dé- 
trmts,  perdus  ou  endommagés,  à  moins  qu'il  ne  prouve 
\e  cas  loriuit.   Pour  négligence,  la  peine  varie  selon  la 
nature  des  choses  mises  sous  scellé  ;  mais  si  le  gardien 
commet  le  crime  prémédité  de  bris  do  scellés ,  il  est  puni 
de  i  à  5  ans  d'emprisonnement,  et  queI<|uefois  plus. 

GARE ,  petit  bassin  naturel  ou  artificiel,  qui  sert  de 
port  dans  les  rivières.  Des  estacades  le  préservent  des 
giaœs  et  d'un  courant  trop  rapide.  —  On  donne  encore 
le  nom  de  gare  aux  stations  de  chemins  de  fer,  aux  em- 
placements destinés  au  chargement  et  au  déchargement 
des  marchandises,  et,  par  extension,  aux  salles  réservées 
aux  voyageurs. 

GARENNE  (de  l'anglais  toarren,  dérivé  de  toard, 
garde),  lieu  entouré  de  fossés  et  de  murailles  ou  detreil- 
lacpes,  pour  élever  des  lapins ,  et,  par  extension ,  tout 
bms  ou  bruyère  où  abonde  le  lapin.  Une  garenne  ne 
peut  être  établie  sans  l'autorisation  du  sous -préfet  et 
sans  l'avis  conforme  du  conseil  municipal,  ni  à  moins  de 
300  met.  des  propriétés  d'autrui  ;  le  propriétaire  est  res- 
ponsable des  dés&ts  causés  par  les  lapins.  Le  droit  de 
garwiw  d^eau  consistait  autrefois  à  interdire  la  pèche 
dans  les  étangs,  rivières  ou  fleuves.  L'art.  524  du  Code 
tlapoléon  fait  des  lapins  de  gaienne  un  immeuble  par 


GARGANTUA,  roman  satirique  en  5  livres  composé  par 
Rabebds.  Le  1*'  parut  en  1533,1e  4*  eni552,  le  5*  en  1558 
seulement.  Le  principal  personnage  n'était  pas  une  in- 
vention de  l'auteur  :  les  contes  populaires  parlaient  du 
géant  Gargantua,  et,  dans  une  foule  de  localités,  on  ap- 
pliquait son  nom  à  des  monuments  celtiques  {V.  ce  mot). 
En  1532,  on  imprima  un  opuscule  intitulé  :  Les  grandes  et 
inestimables  cronicqties  du  grant  et  énorme  géant  Gargai^ 
tua^  contenant  la  généalogie^  la  grandeur  et  force  de  son 
corps,  aussi  les  merveilleux  fakts  d'armes  qu*il  ^t  pour 
le  roi  Artus,  Un  grand  nombre  de  passages,  spécialement 
les  prologues  du  l*'  et  du  3*  livre,  montrent  en  termes  tan- 
tôt clairs,  tantôt  enveloppés,  quelle  a  été  la  pensée  de  Ra- 
belais en  écrivant  son  ouvrage  :  non-seulement  Gargan^ 
tua,  ainsi  one  Pantagrud  qui  lui  fait  suite,  contient 
quantité  d'allusions  et.  d'allégories  aux  hommes  et  aux 
choses  de  l'époque,  mais  il  a  été  composé  dans  ce  but; 
Rabelais  s'est  plu  à  construire  une  fable  extravagante 
qui  lui  permit  d'amener  sur  la  scène,  sous  le  voile  des 
plus  foUes  fictions,  toutes  les  conditions  de  la  vie  et  tous 
les  ordres  de  l'État  Mais  il  ne  faudrait  pas  applicpier  à 
son  œuvre  un  système  régulier  et  suivi  d'interprétation 
historique,  inscrire,  par  exemple,  sous  le  nom  de  chacun 
des  personnages  du  roman,  celui  de  quelque  personnage 
réel,  et  voir,  dans  chacune  de  leurs  aventures,  le  traves- 
tissement d'un  événement  contemporain.  Certains  com- 
mentateurs reconnaissent  Louis  Xll  dans  Grandgousier, 
François  l*'  dans  Gargantua,  ht  reine  Claude  dans  Bade- 
t>ec,  Henri  II  dans  Pantagruel,  le  cardinal  Du  Bellay  dans 
Jean  des  Entommeures,  le  cardinal  de  Lorraine  dans  Pa- 
nai^, Maximilien  Sforza  dans  Picrochole,  Anne  de 
Bretagne  dans  Gargamelle,  la  duchesse  d'Êtampes  ou 
Diane  de  Poitiers  dans  la  Jument  de  Gargantua,  Charles- 
Quint  dans  Bringuenarilles,  Jules  II  dans  le  grand  domp- 
teur des  Cimbres,  etc.  :  rien  n'est  plus  douteux  que  la 
réalité  de  ces  explications.  Ce  qui  est  vraisemblable,  c'est 
que  la  majeure  partie  des  personnages  de  Rabelais  ne 
sont  point,  à  proprement  parler,  des  personnajges  allégo- 
riques, mais  des  personnages  imaginaires,  destinés  seule- 
ment à  devenir  roccasion  et  le  centre  d'allusions  soit  aux 
hommes,  soit  aux  choses  sur  lesquelles  l'auteur  voulait 
8*eq>liquer,  et,  par  conséquent,  susceptibles  d'être  dans  un 
moment  donné  la  rqsrésentation  d'un  individu  réel.  Le 
mérite  éminent  de  Rabelais  est  d'allier  au  même  degré 
une  extrême  folie  et  une  extrême  sagesse  ;  une  extrême 
folie  quand  il  invente,  une  extrême  sagesse  quand  il  ju^. 
«  Rabelais,  dit  un  critique,  n'est  à  la  surface  qu'un  rail- 
leur trop  souvent  cynique;  au  fond,  c'est  un  esprit  s^ 
rieux,  indigné  des  travers  dont  il  rit,  jaloux  de  déraciner 
les  abus  dont  il  se  moque.  Le  travestissement  qp\  le  dé- 
guise le  protège  en  même  temps  ;  c'est  une  cuirasse,  et 
aossi  un  bouclier  derrière  lequel  il  se  retranche  pour 
•anœr  Impunément  des  traits  qui  portent  coup.  » 

GARGOUILLIS,  dégorgeoirs  saillants  en  pierre,  placés 
sa  moyen  âge  le  long  des  gouttières  élevées,  et  servant  à 
jeter  les  eaux  loin  des  murailles.  Les  artistes  leur  ont 
donné  la  forme  qrmboliqne  d'un  dragon  volant,  souvent 
i  face  humaine  et  grimaçante.  Les  archéologues  y  volent 
rimÈge  du  démon  ;  en  peuplant  les  goottièra  et  les  ga- 
kritf  aérieniMS  de  monstres  infernaux,  on  rappelait  aux 


fidèles  qu'ils  devaient  toujours  se  mettre  eu  garde  contre 
le  démon,  le  tenir  esclave  et  enchaîné,  comme  l'avait 
fait  l'artiste,  qui  le  forçait  à  préserver  l'église  des  eaux 
pluviales  en  les  écartant  de  la  muraille.  Quelquefois  les 
gargouilles  n'étaient  mises  que  comme  ornementation  et 
pour  compléter  les  façades.  Aujourd'hui  on  ne  les  con^ 
serve  également  que  comme  décor,  parce  qu'on  a  reconns 
l'inconvénient  qu'il  y  a  de  laisser  tomber  les  eaux  tout 
autour  d'un  édifice,  dont  les  fondations  se  trouvent  dé- 
gradées et  les  abords  difficiles  en  temps  de  pluie.  On 
donne  de  nos  Jours  le  nom  de  gargouille  à  toute  tête  de 
gouttière  plus  ou  moins  saillante.  —  Du  temps  de  Dago- 
bert,  suivant  une  vieille  légende,  un  dragon  horrible  était 
né  du  limon  des  eaux  à  la  suite  d'un  long  débordement 
de  la  Seine.  Ce  dragon,  qui  désolait  la  contrée,  et  que 
l'évêque  S*  Romain  tua,  s^appelait  la  Gargouille.  Voilà, 
vraisemblablement,  l'origine  du  nom  donné  à  ces  figures 
monstrueuses  et  fantastiques  que  les  sculpteurs-imi^;iers 
représentèrent  dans  les  gouttières  des  ^ises  dites  go- 
thiques. E.  L. 

GARGOUSSE,  autrefois  GARGOOCHE  et  GARGOUGE, 
tube  en  papier  ou  en  parchemin,  rempli  de  poudre,  pour 
la  charge  d'un  canon  ou  d'un  mortier.  Son  poids  est  le 
tiers  de  celui  du  boulet.  Le  papier  fort  est  préférable  au 
parchemin;  car  celui-ci  laisse  dans  l'âme  de  la  pièce  des 
fragments  enflammés,  qui,  à  la  recharge,  causent  de 
graves  accidents.  Dans  l'origine,  on  introduisait  la  poudre 
à  nu  avec  une  grande  cuiller  appelée  lanterne;  nôais  les' 
fréquents  accidents  qui  résultaient  de  ce  mode  de  charge 
le  firent  abandonner.  Lors  de  la  Révolution,  on  fit  des 
gargousses  avec  les  parchemins  des  familles  nobles  et  des 
^établissements  publics  ou  religieux  :  on  détruisit  ainsi 
des  titres  précieux  pour  l'histoire.  M.  de  Laborde  a  re- 
trouvé dans  les  ma^sins  de  Yincennes  un  nombre  con- 
sidérable de  gargousses  fabriquées  de  cette  façon,  et  en  a 
tiré  d'intéressants  documents  nationaux. 

GARGOUSSIER,  boite  cylindrique  dans  laquelle  on 
place  la  gargousse  pour  l'apporter  dans  la  batterie  au 

{premier  servant  chargé  de  l'introduire  dans  la  pièce.  On 
a  nomme  aussi  garde-feu. 

GARIN  DE  MONTGLANE,  l^*  branche  de  la  chanson 
de  GuUlaume-au^ourt^Nex*  Garin  arrive  à  la  cour  de 
Charlemagne,  et  inspire  une  vive  passion  à  la  reine. 
Charles  irrité  le  défie  aux  échecs  :  «  Si  Je  perds,  lui 
dit-il,  vous  recevrez  tel  don  qu'il  vous  plaira,  même 
celui  de  ma  couronne  et  de  ma  femme;  si  je  gagne.  Je 
vous  lais  aussitôt  trancher  la  tête.  »  La  partie  s'engage; 
Garin  est  vainqueur,  et  demande  le  fief  de  Montglane 
(Glanum,  près  de  Tarascon?),  alors  occupé  par  un  vassal 
rebelle.  Il  en  fait  la  conquête,  et  épouse  Mabile,  sœur  du 
comte  de  Limoges.  —  Un  morceau  curieux  de  cette  chan- 
son est  la  description  de  l'échiquier  de  Charlemagne, 
dont  la  Bibliotlièque  nationale  de  Paris  possède  une 
pièce;  c'est  un  aufin  ou  éléphant,  le  fou  du  Jeu  moderne. 
L'histoire  de  Garin  de  Montglane  est  conservée  à  la  même 
Bibliothèque  dans  deux  manuscrits,  l'un  du  xiv*  siècle, 
l'autre  du  xv«  ;  à  bi  Bibliothèque  de  l'Arsenal,  dans  un 
manuscrit  du  xiv*;  au  Musée  Britannique,  dans  un  ma- 
nuscrit du  xui*;  enfin  au  Vatican,  dans  un  manuscrit 
daté  de  1324.  Une  histoire  en  prose  du  Preux  chevalier 
Guérin  de  Montglave  a  été  imprimée  plusieurs  fois  au 
XV*  siècle  et  au  xvi*;  le  titre  de  cet  ouvrage  est  men- 
songer ;  car  il  ne  raconte  que  les  aventures  d^  enfants  de 
Gann.  V.  l'ffist.  titt.  de  la  France,  tome  xxii.      H.  D. 

GARIN  LE  LOHÉRAIN  (le  Lorrain),  2«  partie  de  la 
chanson  des  Lohérains,  faisant  suite  au  roman  de  Hervts 
(7.  ce  mot).  Les  Vandales  ont  envahi  la  France;  Charles- 
Maurtel  les  bat,  mais  succombe  à  ses  blessures.  Pépin, 
son  fils,  est  appelé  au  secours  de  Thierry,  roi  de  Mau- 
rienne  ou  de  bavoie,  qu'attaquent  quatre  princes  sarrap- 
sins;  il  tombe  malade,  et  Garin  le  Lohérain  est  chargé 
du  commandement  des  troupes.  A  la  vue  des  infidèles, 
les  Gascons  ont  peur  et  idiandonnent  Garin,  qui,  aidé  de 
son  frère  Bégon  de  Belin,  défait  les  Sarrasins.  Thierry, 
qui  a  été  blessé  mortellement,  lui  ayant  confié  sa  fille 
Blanchefleur,  il  revient  en  France,  et  demande  au  roi 
la  permisûon  d'épouser  la  princesse,  filais  Froment,  au- 
quel Pépin  avait  promis  le  premier  fief  vacant  dans  son 
empire,  récUime  Blanchefleur  avec  la  Haurienne.  Garin 
provoque  Froment,  et  le  combat  s'eneage.  Ici  finit  la  pre- 
mière chanson  de  Garin.  —  Une  véritable  bataille  est 
livrée,  dans  le  palais  même  de  Pépin,  entre  les  Gascons 
sous  les  ordres  de  Froment,  et  les  Lorrains  commandés 
par  Garin;  les  derniers  sont  vainqueurs;  cependant  la 
guerre  continue  pendimt  plusieurs  années  ;  enfin  on  con- 
vient de  s'en  remettre  au  Jugement  du  roi*  Pépin  ordonna 


UAR 


958 


GAU 


que  Blanchefleur  épouse  Garin  :  mais  Tarehevêque  de 
Reims  lui  représente  qu*il  ferait  mieux  de  l'épouser 
lui-même,  et,  au  moment  où  Tunion  de  Blanchefleur 
avec  Garin  va  être  célébrée,  quatre  moines  viennent 
jurer  sur  les  reliques  que  les  deux  futurs  sont  cou- 
sins et  ne  peuvent  se  marier.  Pépin  épouse  Blanche- 
fleur, et  fait  de  Garin  son  échanson.  Le  Gascon  Bernard 
insulte  Garin  à  la  table  du  roi  :  une  lutte  s'engage  entre 
les  Gascons  et  les  Lorrains;  Bégon,  chef  des  cuisines, 
vient  au  secours  de  Garin,  avec  tous  ses  marmitons 
armés  de  broches  et  de  crochets.  La  victoire  reste  aux 
Lorrains,  et,  après  des  alternatives  de  victoires  et  de  dé- 
faites, les  Gascons  sont  réduits  à  demander  la  paix.  Ici 
finit  la  deuxième  chanson  de  Garin.  —  La  paix  fut  ob- 
servée pendant  sept  années.  Bégon,  dans  son  château  de 
Belin  (près  de  Bordeaux),  est  tourmenté  du  désir  de 
revoir  son  frère  :  malgré  les  prières  et  les  pressentiments 
de  sa  femme  Béatrix,  il  se  met  en  route,  et  tue  un  san- 
glier sur  le  domaine  de  son  ancien  ennemi  Froment. 
Egaré  dans  la  forôt  pendant  la  nuit,  il  sonne  du  cor  pour 
appeler  ses  compagnons;  les  forestiers  de  Fromont  accou- 
rent, et  le  somment  de  se  rendre;  il  refuse,  et  succombe 
dans  une  lutte  inégale.  Fromont  reconnaît  avec  effroi 
Bégon,  lui  fait  des  funérailles  honorables,  et  offre  de  li- 
vrer à  Garin  ceux  qui  ont  commis  le  meurtre.  Ses  pro- 
positions ne  sont  pas  acceptées;  la  guerre  va  recommen- 
cer. Telle  est  U  troisième  et  dernière  chanson  de  Garin 
le  Lohérain. 

Le  roman  de  Garin,  publié  par  M.  Paulin  Paris,  et 
dont  Tinvention  primitive  est  attribuée  par  Dom  Calmet 
à  Hugues  Métellus,  chanoine  régulier  de  S*-Léon  de 
Toul  au  XII*  siècle,  se  compose  d'environ  (Quinze  mille 
vers  de  dix  syllabes  ;  les  trois  chansons  qu'il  comprend 
ne  sont  peut-être  pas  l'œuvre  d'un  seul  auteur.  LÀ  1*^, 
telle  qu'elle  existe  aujourd'hui,  paraît  être  moins  an- 
cienne que  les  autres  ;  on  y  trouve  moins  de  poésie,  d'in- 
térêt et  de  vraisemblance.  L'auteur  fait  une  singulière 
confusion  des  événements  historiques;  il  place  auprès  de 
Charles  Martel  S^  Loup  et  S^  Nicaise,  qui  vivaient  au 
iv«  siècle;  et,  au  lieu  du  roi  des  Wisigoths,  c'est  Charles 
Martel  qui  périt  dans  la  bataille.  La  3*  chanson  est  bien 
supérieure  aux  deux  précédentes  :  les  derniers  instants 
de  Bégon  et  le  récit  des  vengeances  ({ue  sa  mort  occa- 
sionne sont  des  morceaux  vraiment  épiques.  Nous  savons 
par  les  manuscrits  que  c'est  l'œuvre  de  Jehan  de  Flagy, 
qui  vivait  au  commencement  du  xd*  siècle.  On  suppose 
qu'il  était  Champenois.  H.  D. 

GARNACHE,  nom  d'une  tunique  à  collet  et  à  demi- 
manches  larges  et  pendantes,  qu'on  portait  au  xiu*  siècle. 
C'était  une  sorte  de  robe  de  chambre. 

GARNI  (Hôtel).  V.  Maisons  garnies. 

GARNISAIRES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  4e 
Biographie  et  d^ Histoire, 

GARNISON  (  du  vieux  mot  toami,  wamesture)y  dési- 
gnait dans  le  principe  les  munitions  et  les  vivres  d'un 
eorps  de  troupes.  Dans  le  bas  latin ,  gamisio  a  la  même 
signification.  Au  xv*  siècle,  le  mot  aamison  commence  à 
être  synonyme  d'établies  on  estaolies;.  puis  il  finit  par 
signifier  à  la  fois  le  lieu  consacré  au  logement  des 
troupes  et  le  corps  de  troupes  lui-même.  Ce  fut  Charles  VU 
qui  accoutuma  les  villes  à  recevoir  de  petites  garnisons 
royales;  c'était  la  conséc^uence  forcée  de  la  formation  des 
troupes  régulières.  Les  villes  votèrent  pour  l'entretien  des 
garnisons  un  impôt  qu'on  appela  taille  des  gendarmes; 
mais  elles  exigèrent  que  la  garnison  ne  dépassât  pas 
30  hommes^  et  que  le  maire  seul  eût  le  droit  de  les  passer 
en  revue.  Louis  XI  grossit  les  garnisons,  et  Louis  XII 
enleva  aux  maires  le  droit  de  surveillance.  Machiavel 
nous  apprend  que  les  garnisons  françaises  de  son  temps 
étaient  pendant  la  paix  divisées  en  quatre  grands  corps, 
répartis  en  Guienne,  Picardie,  Boulogne  et  Provence; 
les  municipalités  se  réservaient  la  fonte  et  la  garde  des 
bouches  à  feu,  pour  imposer  aux  compagnies  dans  le  cas 
où  elles  viendraient  à  abuser  de  leur  force.  Sous  Henri  IV, 
les  garnisons  furent  de  petits  corps  de  troupes  portant  le 
nom  de  leurs  chefs,  isolés  des  régiments,  et  changeant 
souvent  de  lieu.  Il  y  eut  aussi  les  mortes-payes,  vieux 
soldats  rassemblés  par  des  gouverneurs,  dont  ils  for- 
maient comme  la  défense  et  les  gardes  du  corps  :  ces 
troupes  irrégulières,  n'obéissant  qu'au  chef  qui  les  payait, 
étaient  un  danger  et  un  sujet  continuel  de  troubles; 
Louis  XIV  les  abolit.  Aujourd'hui  les  garnisons  s'éta- 
blissent régulièrement  dans  les  villes  aux  frais  de  l'État 
et  des  communes. 

GARROTTE,  f  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

GARUM.         S     de  Biographie  et  d'Histoire, 


GASQDET  (do  casque\  espèce  de  fez  (V.  ce  mot). 

GASCON.   V.  le  Supplément. 

GASTRONOMIE  (du  grec  gastér,  estomac,  et  nomos, 
loi),  science  du  manger.  C'est,  selon  la  définition  de 
Brillat^Savarin,  a  la  connaissance  raison  née  de  tout  ce 
qui  a  rapport  à  l'homme  en  tant  qu'il  se  nourrit.  »  Le 
gourmet  ne  sait  qu'apprécier;  le  gastronome  remonte  des 
eflets  aux  causes,  analyse  les  substances  alimentaires, 
recherche  la  meilleure  nourriture  possible  au  point  de 
vue  de  la  conservation  des  individus,  et  la  veut  aussi 
hygiénique  qu'agréable.  Il  vit  dignement,  et  doit  être 
doué  de  sens  sûrs,  de  jugement,  et  de  fortune.  Berchoux 
a  publié,  en  1800,  un  petit  poème  descriptif  sur  la  gas- 
tronomie; l'ouvrage  le  plus  agréable  sur  cette  matière  est 
la  Physiologie  du  goût  de  Brillât-Savarin. 

GATE,  nom  donné  pendant  le  moyen  âge  à  une  grosse 
galère  à  cent  rames. 

GATTE,  partie  d'un  vaisseau  très-rapprochée  des  écu- 
biers,  et  qui  est  séparée  du  reste  du  bâtiment  par  une 
forte  cloison  élevée  à  quelques  pieds  au-dessus  du  pont 
de  la  batterie  basse.  Cette  cloison  retient  l'eau  qui  pé- 
nètre par  les  écubiers,  et  dont  on  facilite  ensuite  l'écou- 
lement par  des  dalots  percés  dans  la  gatte. 

GAUCOURTE ,  robe  courte,  en  usage  dans  certaines 
parties  de  la  France  au  moyen  âge. 

GAUDES,  en  latin  gaudia,  nom  donné,  dans  certaines 
localités  dtt  la  Provence,  à  des  cantiques  de  Joie,  à  des 
espèces  de  noêls  qu'on  chante  en  l'honneur  de  la  S** 
Vierge  depuis  la  Nativité  Jusqu'à  la  Purification. 

GAUDRON  ou  GODRON,  ornement  creux  ou  saillant, 
circulaire  ou  ovale,  et  arrondi  comme  une  amande. 
Lorsque  le  gaudron  est  taillé  en  creux,  il  est  souvent 
bordé  d'un  filet  et  orné  d'une  petite  rose.  La  période 
romano-byzantine  eh  plaça  quelquefois  sur  les  chapiteaux. 
La  Renaissance  italienne  en  orna  fréquemment  les  objets 
d'orfèvrerie.  Dans  la  bijouterie,  on  nomme  aussi  gath- 
drons  des  ornements  ciselés,  consistant  surtout  en  rayons 

3ui  partent  du  centre  du  bijou.  Au  xvi**  siècle,  les  gou- 
rons étaient  les  plis  ronds  qu'on  faisait  aux  fraises. 
GAUFRAGE ,  opération  à  l'aide  de  laquelle  on  obtient 
des  gaufrures  ou  dessins  en  relief  sur  du  papier,  des 
étoffes  et  des  peaux.  On  se  sert  de  fers  chauds  qu'on 
appelle  gaufroirs,  et  qui  se  composent  de  deux  parties  : 
la  i'*,  de  cuivre,  est  en  creux  ;  la  2*,  qui  en  est  la  contre- 
partie, est  en  relief,  et  de  carton.  Des  chevilles  de  re- 
père servent  à  appliquer  ces  deux  pièces  exactement 
l'une  sur  l'autre  :  le  papier  humecté  se  place  au  milieu, 
et  le  gaufroir  métallique  échauffé  lui  fait  prendre  sa 
forme.  On  ne  retire  la  pièce  gaufrée  qu'après  le  refroi- 
dissement. Ce  procédé,  bon  pour  les  papiers  légers,  ne 
suffirait  pas  pour  les» cartons  et  les  peaux;  le  gaufrage  se 
fait  alors  au  cylindre  combiné  avec  le  système  du  calan- 
drage. 

GAUFREY,  chanson  de  geste  qui  appartient  au  cycle 
des  romans  carlovingiens  (F.  co  mot)^  et  paraît  avoir  été 
composée  vers  le  milieu  du  xiii*  siècle.  Le  sujet  en  est 
assez  complexe  :  c'est  l'histoire  des  douze  fils  de  Doon 
de  Majrence,  mais  surtout  de  l'atné,  Gaufrey.  Il  s'en  faut 
toutefois  que  l'intérêt  se  concentre  sur  cette  famille,  à 
laquelle,  par  un  manque  d'unité  dans  la  composition, 
une  foule  d'autres  personnages  font  ombre  :  tels  sont 
Doon  lui-même,  déjà  célébré  dans  un  autre  poCme 
(V.  DooN  DK  Mayencb),  Garin  de  Montglane,  qui  est  aussi 
le  chef  d'une  famille  héroïque  (K.  Garin  de  Montclanb), 
son  serviteur  Robastre,  fils  du  génie  Malabron,  Berart 
de  Montdidier,  l'un  des  douze  purs  de  Charlemagne,  etc. 
L'auteur  inconnu  du  poème  de  Gaufrey  a  imaginé  la 
fable  suivante  :  assiégé  dans  son  château  de  Montglane 
par  Gloriant,  roi  des  Sarrasins,  le  vieux  Garin  implore 
le  secours  de  Doon  de  Mayence,  dont  les  12  fils  sont  â 
la  veille  d'aller  guerroyer  en  Syrie.  Ceux-ci  mettent  en 
fuite  les  Sarrasins,  qui  cependant,  au  milieu  de  leur  dé- 
faite, emmènent  prisonniers  Doon  et  Garin.  La  captivité 
des  deux  vieillards  dure  sept  années,  pendant  lesquelles 
Gaufrey  et  ses  frères  font  les  conquêtes  qu'ils  projetaient 
au  début  du  poème.  Chacun  d'eux  se  marie,  et,  tandis 
que  Grifon,  le  seul  des  fils  de  l)oon  qui  ait  forligné  et 
failli  à  l'honneur,  donne  le  Jour  au  traître  Ganelon,  si 
fameux  dans  la  légende  de  Charlemagne,  Gaufrey  épouse 
la  belle  Passerose,  dont  il  a  Ogier  le  Danois,  Vun  des 
héros  les  plus  fameux  de  l'épopée  carlovingienne,  celui 
dont  nos  Jeux  de  cartes  perpétuent  encore  le  nom  et  le 
souvenir.  Les  fils  de  Doon,  Joints  à  ceux  de  Garin,  son- 
gent enfin  à  délivrer  les  héros  captifs.  Robastre  tue  Glo- 
riant, et  hérite  à  la  fois  de  sa  couronne  et  de  sa  veuve 
Mandagloire,  préalablement  bapUsée.  —  La  chanson  de 


GEN 


959 


GEN 


Gaatrev,  dont  il  n*existe  qu*un  seul  manuscrit,  du 
xiv<  siècle,  conservé  à  la  bibliothèque  de  la  Faculté  de 
médecine  de  Montpellier,  a  été  publiée,  dans  la  collection 
des  Andms  poëtes  de  la  France^  par  MBL  Guessard  et 
ChabaiUe,  Paris,  1850,  in-i6.  B. 

GAULOIS  (Art).  V.  Gbltiqobs  (Monuments). 

GAULOISE  (Langue).  V.  Cbltiqdbs  (Langues). 

6ADL01SB  (Religion).  7.  DaoïDES,  dans  notre  Diction- 
nain  â/$  Biographie  et  d* Histoire, 

saoijOisbs  (Monnaies).  V,  Françaisbs. 

GAUR  (Langue).  V.  Bengau. 

GAUSAPB.  7  K.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

GAVOTTE.  \      Biographie  et  d'Histoire, 

r,AYno\    V.  Gmdon. 

GAZETTE.  F.  Journal,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

GEMARa.  V,  Talmdo,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

GÉMINtk,  se  dit,  en  Architecture,  de  deux  baies,  de 
denx  fenêtres,  de  deux  arcades  réunies  par  une  mou- 
lure commune,  de  deux  colonnes  ayant  un  chapiteau 
commun,etdedeuxcbapiteaux  ayant  un  abaque  commun. 
—  Dans  les  inscriptions  et  les  médailles,  les  lettres  gé- 
minées marauent  deux  personnes,  comme  dans  COSSet 
IMPP^  qui  désignent  deux  consuls  et  deux  empereurs.  En 
Irançais,  MM.  (Messieurs^,  LL.  MM.  (Leurs  Majestés), 
LL.  AA,  (Leurs  Altesses),  sont  des  lettres  géminées. 

GEMME  (du  latîn  gemma)^  mot  que  les  archéologues 
emploient  comme  synonyme  de  pierre  fine  soumise  à 
l'action  de  la  taille. 

GÉMONIES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire. 

GENDARMERIE.  Ge  nom,  qui  a  désigné  autrefois  di- 
ven  corps  de  troupes  (F.  Gendarmerie,  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire)^  ne  s*applique  plus 
qu'à  une  milice  établie  pour  veiller  au  maintien  de  l'ordre, 
à  la  sûreté  publique,  et  pour  assurer  l'exécution  des  lois 
et  des  arrdts  judiciaires.  Les  attributions  de  la  gendar- 
merie ont  été  fixées  par  la  loi  du  28  germinal  an  vi 
(17  ayril  1798).  Elle  a  été  réorganisée  par  décrets  des 
n  décembre  1851,19  février  1852,  et  l*'  mars  1854.  Les 
corps  qui  la  composèrent  alors  furent  :  1°  un  riment  à 
2  bataillons  de  gendarmerie  de  la  garde  impériale,  anc. 
gendarmerie  mobile  ou  gendarmerie  (f  élite  (supprim.  en 
1860);  3**  un  escadron  de  gendarmerie  d  cheval  de  la 
garde  impériale  ;  3»  la  garde  de  Parts,  précédemment  ap- 
pelée garde  réptiblicaine  et  garde  municipale,  composée 
de  2  bataillons  et  de  2  escadrons;  4P  la  gendarmene  dé- 
partementale; 5*  la  gendarmerie  colomalef  comprenant 
4  compagnies  pour  la  Martinique,  la  Guadeloupe,  la 
Réunion,  la  Guyane,  et  3  brigades  aux  lies  S^-Pierre  et 
Miqoelon;  &*  une  compagnie  de  gendarmes  vétérans; 
7*  les  voltigeurs  corses.  Un  Comité  de  la  gendarmerie 
est  cliargé  d'examiner  toutes  les  questions  intéressant 
l'arme. 

La  gendarmerie  départementale  forme  26  légions,  qui 
iR  composent  chacune  de  plusieurs  compagnies,  et  dont 
le  tableau  suit  : 


UgUnu.    ClufsAùux. 
i~..   Paris 

2*. .  •  Rouen 

3«...  Lille 

4*...  Gh&lons.... 
d*. ..  Nancy 

7*...  Besançon... 

8*...  Lvon 

^...  Marseille... 
1(K...  Montpellier. 
11*...  Perpignan.  « 

12*...  Toulouse... 

IS'...  Bayonne.... 

14*...  Bordeaux... 

15^...  Nantes. •... 

iC«...  Rennes...» 
17*.. .  Bastia 


Dépertentents. 

Seine ,    Seine-et-Oise ,    Selne-«t- 
Matne,  Oise. 

Seine-Inférieure,  Eure,  Calvados. 
Orne. 

Nord,  Pas-de-Calais,  Somme. 

Marne,  Aisne,  Ardennes. 

Meurthe-et-Moselle,  Meuse,  Vos- 
ges. 

Doubs,  Jura,  Haute-Marne,  Haute- 
Saône. 

Rhône,  Loire,  Drôme,  Ardëche. 

Bouches-du-Rhône,  Vaucluse. 

Hérault,  Aveyron,  Lozère,  Gard. 

Pyrénées  -  Orientales ,      Ariége 
Aude. 

Haute-Garonne,  Tarn-et-Garonne 
Lot,  Tarn. 

Basses-Pyrénées ,   Landes ,    Gers 
Hautes- Pyrénées. 

Gironde ,     Charente  -  Inférieure 
Dordogne,  Loi-ei-Garonne. 

Loire-In férieure ,    Maine-et-Loire 
Deux-Sèvres,  Vendée. 

lUe-et-Vilaine,  Manche,  Mayenne. 
Corso. 


18*...  Tours Indre-et-Loire,  Loir-et-Cher,  Sar* 

the.  Vienne. 

19*...  Bourges Cher,  Nièvre,  Allier,  Indre. 

20*. . .  Clermont. . .  Puy-de-Dôme,  Haute-Loire,  Cantal. 

21*...  Limoges....  Haute- Vienne ,   Creuse,    Corrèze, 

Charente. 

22*. . .  Grenobk. . .  Isère,  Hautes^Alpes,  Savoie,  Haute- 
Savoie. 

23*...  Orléaui* Loiret,     Aube,     Eure-et-Loir, 

Yonne. 

24*. . .  Dijon.. .....  Côte-d'Or,  Saône-et^Loire,  Ain. 

25«...  Nice Alpes  -  Maritimes  ,  Var,  Basses- 
Alpes. 

2G«...  Brest. Finistère,   Morbihan,    Côtes-du- 

^0^d. 

Chaque  légion  se  compose  de  29  officiers,  83  maréchaux 
des  logis,  102  brigadiers,  et  760  gendarmes;  ensemble, 
974  hommes,  dont  70  à  pied  et  875  à  cheval.  Le  chef 
d'une  légion  est  colonel  ou  lieutenant-colonel  ;  le  service 
d'un  département  forme  une  compagnie,  et  est  com- 
mandé par  un  chef  d'escadron;  celui  d'un  arrondisse- 
ment est  dirigé  par  un  capitaine  ou  un  lieutenant.  Les 
compagnies  sont  divisées  en  brigades;  la  brigade  à  pied 
est  de  5  hommes,  commandés  par  un  brigadier  ou  un 
maréchal  des  logis  ;  la  brigade  à  cheval  est  commandée 
par  un  bri^ier,  si  elle  compte  5  hommes,  par  un  ma- 
réchal des  logis  si  elle  en  compte  6. 

Les  simples  ^ndarmes  ont  rang  de  brigadiers;  ils  se 
montent,  s'équipent  et  s'habillent  à  leurs  frais.  L'arme- 
ment  seul  est  fourni  par  TÉtat*  il  consiste,  pour  le  ^n- 
darme  à  cheval,  en  un  sabre  de  cavalerie  de  li'çne,  pisto- 
lets et  mousqueton ,  et,  pour  le  gendarme  à  pied,  en  un 
fusil  à  baïonnette  et  un  sabre-briquet.  L'uniforme  est  : 
habit  de  dnp  bleu,  avec  collet  et  parements  bleus,  revers 
et  retrouBsis  écarlate  ;  pantalon  de  drap  bleu  f  blanc  en 
grande  tenue)  ;  chapeau  à  cornes  (shako  en  Corse);  aiguil- 
lettes et  trèfles  en  fil  blanc;  buffleterie  Jaune,  bordée  en 
galon  de  fil  blanc;  bottes  demi-fortes  pour  la  cavalerie, 
guêtres  pour  l'infanterie.  Les  ofiiciers  portent  l'épaulette 
d'argent.  —  La  garde  de  Paris  a  pour  uniforme  l'habit 
de  drap  bleu,  avec  collet  bleu,  parements  bleus  à  patte 
blanche,  revers  blancs  et  retroussis  en  drap  écarlate, 
boutons  Jaunes  aux  armes  de  la  ville  :  l'infanterie  porte 
le  pantalon  en  drap  blou,  les  épaulettes  en  laine  rouge, 
le  shako  orné  d'un  galon  aurore,  et  Taigrette  rouge;  la 
cavalerie  a  le  pantalon  de  peau  blanc,  les  contre  népau- 
lettes  et  aiguillettes  en  laine  aurore,  et  le  casque  à  la 
dragonne,  orné  d'un  plumet  rouge.  Les  officiers  portent 
l'épaulette  en  or.  —  Les  voltigeurs  corses  ont  rhid)it 
court,  de  drap  bleu,  boutonné  droit  sur  la  poitrine,  avec 
retroussis,  collet  et  parements  de  drap  bleu,  passe-poils 
Jonquille,  trèfles  en  laine  Jonquille,  le  pantalon  de  drap 
gris-bleu  en  hiver  et  de  coutil  bleu  en  été,  les  guêtres 
noires  ou  bleues,  le  shako. 

La  Gendarmerie  se  recrute,  soit  au  moyen  de  soldats 
gradés  qui  rendent  leurs  galons  pour  y  entrer,  et  qui  sont 
désignés,  aux  inspections  générales,  parmi  les  hommes 
ayant  encore  deux  ans  de  service  à  faire,  soit  au  moyen 
d'anciens  militaires  qui  en  ont  fait  la  demande.  Les  gen- 
darmes qui  ont  accompli  le  temps  de  service  imposé  par 
la  loi  de  recrutement  sont  libres  de  se  retirer  en  donnant 
leur  démission,  leur  séjour  dans  l'arme  étant  dès  lors 
complètement  volontaire.  Jusqu'au  grade  de  lieutenant 
inclusivement,  l'avancement  est  réservé  aux  militaires  de 
l'arme;  un  certain  nombre  d'emplois  dans  les  grades  su- 
périeurs est  attribué  aux  officiers  de  l'armée  du  grade 
correspondant.  Les  gendarmes  ne  reçoivent  des  mariai ns 
de  l'État  aucune  prestation  en  nature,  si  ce  n'est  quand 
ils  sont  détachés  aux  armées  pour  y  constituer  la  force 
publique  :  dans  leur  situation  normale,  ils  se  nouirissent 
à  leurs  frais  et  comme  ils  l'entendent,  au  moyen  de  la 
solde  qui  leur  est  attribuée.  V.  Cochet  de  Savigny,  Mé- 
morial complet  dé  la  gendarmerie,  2*  édit.,  1851,  3  vol. 
in-8*  ;  Perrève  et  Cochet  de  Savigny,  Formulaire  général 
et  annoté  à  l'usage  de  tous  les  militaires  de  la  gendar- 
merie départementale,  1853,  3*  édit.;  Rouillard,  Manuel 
de  la  gendarmerie,  1853,  in-12;  Cochet  de  Savigny,  Dto- 
tionnaire  de  la  gendarmerie,  5*  édit.,  1853,  in-l8. 

GÉNÉALOGIE  fdu  grec  génos^  race,  et  logos,  disooors], 
exposition  de  la  filiation  d'un  individu  ou  du  développe- 
ment d'une  fifmille,  tableau  de  ses  parentés  et  de  ses 
alliances.  Les  Orientaux  ont  attaché  de  tout  temps  une 
grande  importance  aux  généalogies,  par  lesquelles  peut 
s'établir  l'ancienneté  des  familles  :  aussi  en  voitron  des 
exemples  dans  le  PentaJteuque;  le  Nouveau  Testamenl 


GÊN 


960 


GÉN 


nous  donne  la  généalogie  de  J.-C  Les  Romains  de  dis- 
sinction  conserraient  avec  soin  leurs  généalogies,  et  il 
en  fut  de  même  an  moyen  âge,  où  il  fallut  souvent,  pour 
occaper  certains  emplois,  prouver  sa  noblesse  ou  au 
moins  un  certain  nombre  d*aleux.  Au]ourd*bui  même,  la 
généalogie  est  une  affaire  sérieuse,  par  exemple  pour  les 
questions  de  succession. 

GÉNKALOGIQUE  (Arbre).  V.  Aasas. 

GÉNÉALOGISTE.  {  F.  ces  mots  dans  notre  DietUm- 

GÉNÉRAL.  r    fiotr»  d$  Bhoraphie  et  S  Histoire. 

GÉNÉRALE,  batterie  de  tambour  par  laquelle  on  donne 
Tjilarme  aux  troupes.  Dans  les  places  de  guerre  et  les 
camps,  dès  qu'on  bat  la  générale,  tous  les  tambours  doi- 
vent la  répéter  à  Tinstant  en  parcourant  les  rues  et  les 
2uartiers,  accompagnés  de  deux  hoqimes  srmés.  Un  ordre 
u  Jour  indique  aux  troupes  les  positions  qu^elles  doi- 
vent occaper  en  ce  cas.  La  générale  est  battue  dans  les 
villes  en  cas  d*incendie  ou  de  révolte,  et  à  Tannée  en  cas 
de  surprise.  Les  chefs  de  corps  peuvent  faire  battre  la  gé- 
nérale à  rimproviste,  pour  ]u{^  de  Texécution  plus  ou 
moins  rapide  de  leurs  ordres  et  tenir  les  troupes  en  ha- 
leine. Le  soldat  c[ui,  au  son  de  la  générale,  ne  se  rend 
pas  immédiatement  à  son  poste,  encourt  un  emprisonne- 
ment d*un  mois,  et  la  récidive  est  punie  de  six  mois  de 
prison,  puis  de  deux  ans  de  boulet  ;  l'offider  peut  perdre 
son  graae.  n  y  a  aussi  des  peines  sévères  contre  ceux  aui 
feraient  battre  la  générale  sans  autorisation. 

GiNÉsALB  (Proposition),  proposition  dont  les  termes  ne 
s'appliquent  pas  à  une  pâraonne  ou  à  une  chose  plutM 
qu^à  une  autre,  on  sont  applicables  à  un  très -grand 
nombre  de  personnes  ou  de  choses  :  «  Les  princes  g&tés 

{>ar  la  flatterie  trouvent  sec  et  austère  tout  ce  qui  est 
ibre  et  ingénu  (FAieloii).  '—  QuMmporte  de  posséder 
une  grande  étendue  de  terre  et  de  commander  à  un  plus 
grand  nombre  d'hommes?  On  n'en  a  que  plus  d'emiiar- 
ras  et  moins  de  liberté.  »  (In.  )  P. 

GÉNÉRALIFE,  c-è-d.  en  arabe  McMcn  des  fêtês,  sorte 
de  maison  de  plaisance  bâtie  par  les  Arabes  sur  une  émi- 
nence  voisine  de  Grenade.  L'extérieur  en  est  fort  simple, 
comme  toutes  les  constructions  orientales,  et  ne  présente 
que  de  grandes  murailles  sans  fenêtres,  surmontées  d'une 
terrasse  avec  une  galerie  en  arcades,  le  tout  coiffé  d'un 
petit  belvédère  moderne.  Les  délicates  sculptures  de  Tin- 
térieur  ont  été  emp&tées  par  le  badigeon  des  modernes.' 
Une  des  salles  contient  ta  suite  des  portraits  des  rois 
d*Espagne.  Le  véritable  charme  du  Génâralife,  ce  sont  ses 
iDrdms  et  ses  eaux. 

GÉNÉRALISATION,  opération  de  Fesprlt  oui  consiste 
t  dégager  le  général  du  particulier,  à  ren  séparer,  ailn 
de  le  voir  siparémsni,  La  Généralisation  est  de  deux 
sortes,  médiate  et  immi^aU,  Dans  le  premier  cas,  l'es- 
prit part  des  notions  concrètes  et  individuelles  des  êtres 
ou  des  faits;  puis,  par  l'Abstraction  et  la  Comparaison 
volontaire,  il  forme  les  notions  générales  é' espèce,  de 
genre,  de  dasse,  etc.  Les  modes  et  les  rapports  générali- 
sés, et  reconnus  comme  les  mêmes  ou  comme  divers,  de- 
viennent des  caractères  communs  ou  dififérents.  La  pré- 
sence de  caractères  communs  dans  plusieun  objets  fait 
réunir  ces  objets  en  un  groupe,  auquel  nous  joutons 
par  la  pensée  tous  ceux  que  nous  supposons  avoir  les 
mêmes  caractères;  nous  appliquons  à  cet  ensemble  la 
notion  d'unité,  et  nous  avons  une  espèce.  De  même,  en 
saisissant  les  caractères  communs  entre  plusieun  espèces, 
et  appliquant  à  l'ensemble  la  notion  d'unité,  on  obtient 
un  genre,  et  ainsi  de  suite.  Dans  cette  opération  il  y  a 
deux  choses  à  observer  :  la  compréhension  et  Vétendue, 
La  première  renferme  le  nombre  de  qualités  communes 
aux  individus  contenus  dans  une  classe;  la  seconde,  le 
nombre  de  ces  individus.  La  Généralisation  immédiate  ne 
résulte  pas  de  la  comparaison  ;  elle  ne  doit  rien  à  la  vo- 
lonté. C'est  une  opération  de  la  Raison  qui  consiste  à 
s'élever  au  nécessaire  et  à  l'absolu,  au  moyen  du  contin- 
gent et  du  relatif  :  ainsi,  à  l'occasion  de  l'idée  d'un  temps 
limité,  nous  concevons  nécessairement  l'idée  du  temps 
sans  limite.  Cette  sorte  de  Générailsation  donne  un  ré* 
sultat  tout  différent  de  la  première.  Par  celle-ci  on  ob- 
tient des  principes  qui  résultent  de  recherches  volon- 
taires, longues  et  laborieuses  ;  dans  le  second  cas,  certains 
principes  nous  apparaissent  d'eux-mêmes  et  comme  mal- 
gré nous;  ils  ont  pour  caractères  d'être  spontanés,  né' 
cessaires,  fsniversels.  Ce  ne  sont  plus  des  idées  générales, 
mais  universelles.  V»  Inès.  R. 

GÉNÉRALISSIHE.  j  F.  ces  mots  dans  notre  Dictiof^ 
GÉNÉRALITÉ.         I      naire  de  Biogr,  et  d*ffistoire, 
GÊNES  (Monuments  de).  Parmi  les  édifices  religieux 
de  la  ville  de  Gênes,  un  des  plus  remarauables  est  la 


cathédrale  S^^Laurent,  construite  an  oommencemeni  <iu 
XI*  siècle,  et  restaurée  au  xvi*  par  Galéas  Alessi.  A  l'exté- 
rieur, elle  est  revêtue  de  marbres  blanc  et  noir,  disposés 
en  aûlBes  alternatives  ;  une  seule  des  deux  toun  qui  de- 
vaient surmonter  l'édifice  a  été  exécutée.  L'intérieur,  où 
l'on  est  frappé  d'un  singulier  mélange  de  styles  arohitec- 
toniques,  contient  beaucoup  de  statues,  de  bas-reliefs  et 
de  tableaux  précieux.  La  chapelle  de  Smean-Baptiste  est 
particulièrement  ornée  avec  richesse  :  la  châsse  du  saint, 
toute  en  argent,  a  été  faite  au  xv*  siècle.  La  belle  mar- 
queterie des  stalles  du  chœur  est  l'œuvre  de  Zabello,  ar- 
tiste de  Bergame.  On  conserve  dans  la  sacristie  le  Sacro 
Catino  (F.  ce  mot). — L'église  de  VAnnunziata,  bâtie  aux 
frais  de  la  famille  des  Lomellini,  sur  les  dessins  de  Scop- 
ticone  et  de  Jacques  della  Porta,  est  d'une  magnificence 
peu  commune.  Sans  parler  des  œuvres  d'art  oui  la  déco- 
rent, elle  a  été  presque  complètement  dorée  il  y  a  quel- 
(fues  années.  La  façade,  revêtue  de  marbre  blanc,  est 
inachevée.  —  L'église  de  S^MariC'de'Carignan  ou  de 
Y  Assomption,  située  sur  une  hauteur  d'où  l'on  domine  la 
ville,  a  été  construite  par  Galéas  Alessi,  de  1552  à  1600, 
aux  frais  de  la  famille  Sauli.  C'est  un  édifice  complet, 
bien  ordonné,  et  d'une  parfaite  unité  :  il  forme  un  carré 
régulier  de  50  met.,  sans  compter  l'abside,  et  est  divisé 
en  trois  nefs;  quatre  pilîen  supportent  une  grande  cou- 
pole centrale,  et  d'autres  coupoles  plus  petites  s'élèvent 
aux  quatre  angles  de  la  croix.  L'oi^e  passe  pour  être  un 
des  premiers  d'Italie.  —  An  nombre  des  monuments  ci- 
vils on  distingue  :  VUniversité,  splendide  bâtiment,  con- 
stmit  au  x\ii*8ièclesur  les  dessins  de  Bartolommeo  Blancos 
le  Palais  ducal  ou  ddla  Citta,  ancienne  résidence  des 
do^,  rebâti  au  xvi*  siècle  par  Andréa  Vannone  ;  le  Pki- 
lais  Doria,  csuvre  de  Perino  del  Vaga  et  de  Hontorsoli; 
le  Palais  Royal  on  Palais  Durazzo,  élevé  au  xvn*  siècle 
par  Faicone  et  Cantone;  le  Palais  Brignole^Sale,  dît  le 
Palais  rouge  â  cause  de  la  couleur  de  sa  façade,  et  conte- 
nant une  belle  collection  de  tableaux  ;  le  Palais  Balbi, 
dont  Bianco  et  Gorradi  furent  les  architectes;  le  Palais 
Pallavicini,  où  se  trouve  une  célèbre  galerie  de  ta- 
bleaux, etc.  V,  Gauthier,  Les  plus  beaux  édifices  de 
Gênes,  Paris,  1800,  S  vol.  in-fol. 

GENÈSE.  I  V.  ces  mots  dans  notre  Dtcfl(m- 

GENETHUAQUE.  (      naire  de  Biogr,  et  ^FHistoire. 

GENEVIÈVE  (Bibliothèque  S*«-),  à  Paris.  Elle  date  de 
1624  :  le  cardinal  de  La  Rochefoucauld,  les  savante  Gé- 
novéfains  Fronteau  et  Lallemand  en  sont  les  fondateun  ; 
Dumoulinet,  numismate  distingué,  Pingre,  et  Mercier, 
abbé  de  S^-Léger,  contribuèrent  â  son  agrandissement. 
L'archevêque  de  Reims,  Le  Tellier,  lui  léeua  16,000  volu- 
mes. Elle  fut  placée  dans  l'étue  supérieur  du  couven* 
des  Génovéfains  (aujourd'hui  le  lycée  Henri  IV),  for- 
mant une  galerie  en  croix  latine.  Une  perspective,  peinte 
par  Lafon,  à  l'extrémité  du  petit  bras,  lui  donnait  l'as- 
pect d'une  croix  grecque.  Dans  une  coupole,  au  croise- 
ment des  bras,  Restoul  peignit,  en  1730,  le  triomphe  de 
S  ^Augustin.  Avant  la  Révolution,  la  bibliothèque  S^*-Ge- 
rieviève  passait  pour  la  mieux  installée  des  bibliothèques 
de  France.  Le  local  en  existe  encore,  mais  il  est  consacré 
au  service  du  lycée  Henri  IV.  En  1850,  la  bibliothèque  a 
été  transférée  dans  un  bâtiment  de  la  place  du  Panthéon, 
construit  spécialement  pour  la  recevoir,  sur  l'emplace- 
ment de  l'ancien  collège  Montaigu,  qui  servait  de  prison 
militaire.  Elle  se  compose  de  160,000  volumes  et  de 
3,500  manuscrits.  On  y  peut  travailler  tous  les  joun  de 
10  heures  à  3  heures,  et  le  soir  do  G  à  10  heures. 

GBiEvifcvs  (Ej^ise  S**-).  F.  PAirrafon,  dans  notre  DiC' 
tionnaire  de  Biographie  et  â^ Histoire, 

GÉNIE.  Ce  mot  avait ,  au  xvn*  siècle,  un  sens  plus  gé- 
néral que  de  nos  Joun  :  il  s'entendait  ordinairement  de 
l'esprit  et  du  caractère;  11  exprimait  surtout  l'intelligence 
active  et  dirigée  par  la  volonté.  Bossuet  dit  de  la  prin- 
cesse Palatine,  que  «  son  génie  se  trouva  également  propre 
aux  divertissements  et  aux  affaires.  »  H  va  même,  dans 
rOndson  funèbre  du  srand  Condé,  Jusqu'à  faira  du  génie 
une  faculté  de  rintelligence  :  «  Vivacité,  pénétration, 
grandeur  et  sublimité  dn  sénie,  voilà  pour  l'esprit.  > 
Cependant,  Boileau,  dans  sa  belle  épttfe  à  Radne  (Ep.  7), 

f»rend  déjà  ce  mot  dans  le  sens  où  nous  le  prenons  au- 
ourd'hui ,  et  l'applique  à  Molière  et  à  Comcdlle  aussi 
>ien  qu'à  son  ami  : 

Mais  par  les  envieux  un  génie  excité 
Au  eomble  de  ton  art  eat  mille  fois  nonttf. 

Les  écrivains  du  xviii*  siècle  n'ont  guère  vu  dans  le 
génie  que  le  talent  porté  à  un  degré  supérieur.  Voltaire  a 
dit  quelque  part  :  «  Au  fond»  le  génie  est-il  autre  chose 


GÉN 


9C1 


6ÉN 


«oe  le  tmlenit  Qa*est-oe  que  le  talent,  sinoo  la  dleposi- 
«on  à  réussir  dans  un  art?  »  Dans  le  Temple  d»  (kût^  Il 
en  fait  un  synonyme  de  Timagination  : 

De  fimz  brillants,  trop  de  génie 
Uettent  le  Tmm  un  cran  plut  tas; 
ftUls  que  ne  perdonne-t-on  pas 
Pour  Armide  et  pour  HermliiieT 

Ces  nuances  avaient  cependant  été  indiquées  nettement 
par  La  Bruyère,  dans  cette  réflexion  qu'il  laisse  échapper 
en  passant  :  «  Talent,  goût,  esprit,  génie,  choses  diné- 
rentes,  non  incompatibles  »  (Ch.  1*',  Dei  ùvivragBS  dé 
l'esprit  )•  Aujourd'hui ,  le  mot  génie  s*entend  dans  une  ac- 
ception particulière,  et  représente  une  idée  plus  grande, 
celle  des  vastes  et  hautes  conceptions  de  rmtellTgence; 
dans  les  arts,  l'idée  de  création  sublime;  dans  la  vie  et 
dans  le  çouYemcment,  l'idée  d'une  énei^e  de  caractère 
nui  domme  les  hommes  et  les  maîtrise,  les  entraîne  par 
1  admiration,  les  soumet  par  Tétonnement  et  quelquefois 
même  par  la  crainte.  U  y  a  le  génie  de  la  politique  et  de^ 
la  guerre,  le  génie  des  alfoires  et  de  Tadministration , 
œmme  le  génie  des  sciences  et  des  lettres.  Il  nous 
semble  que,  d'ordinaire,  le  génie  se  reconnaît  à  sa  puis- 
sance ,  c  esi-à-dlre  à  ses  osuvres  et  à  ses  résultats.  Le 
talent,  plus  facile  à  définir,  n'est  qu'une  disposition  heu- 
reuse de  la  nature,  une  supériorité  relatlTe.  Quelquefois 
même  on  appelle  de  ce  nom,  dans  les  arts  ou  dans  les 
aflkires,  l*habileté  de  l'exécution  ;  il  ne  s'arit  plus  alors 
que  d'une  aptitude  acquise.  Le  génie  ne  s^aoquiert  pas, 
et  il  est  bien  au-dessus  de  l'aptitude  et  de  l'habileté  ;  son 
caractère  essentiel  est  la  grandeur  dans  l'originalité;  le 
talent,  même  supérieur,  ne  s'élève  pas  an-dessus  de  la 
distinction,  et  n'atteint  Jamais  au  génie.  Aussi  a-t-il  pour 
effet  de  satisfoire,  d'int&esser,  de  séduire  même  ;  le  génie 
éblouit  et  enlève  les  hommes,  leur  ète  la  râlexion  ou  en 
rend  l'usage  inutile;  le  talent  ne  leur  cause  que  du  plai- 
sir. U  y  a  donc  une  Àroite  parenté  entre  le  génie  et  le  su- 
blime. Dans  la  politique  comme  dans  les  arts,  le  génie 
conçoit  et  exécute  les  grandes  choses  :  il  est  essentifelle- 
'  ment  créateur.  Il  y  a  encore  une  liaison  naturelle  entre 
le  génie  et  l'immortalité,  qui  est  le  privil^  et  le  prix 
des  actions  et  des  ouvrages  sublimes.  Toutefois,  dans  les 
œuvres  des  arts,  et  surtout  de  l'esprit,  l'immortalité,  la 
léputation  même  ne  s'attachent  pss  toujours  dès  l'abord 
nx  vues  ni  aux  créations  de  génie.  On  ferait  une  liste 
bien  longue  des  inventeurs,  des  savants,  des  artistes,  des 
poètes  qui  ont  vu  leurs  conceptions  méconnues,  mépri- 
sées, livrées  au  ridicule  par  les  connaisseurs  atûsi  bien 
Se  par  les  imorants.  Les  calculs  de  Christophe  Colomb 
dent  des  chimères,  la  découverte  de  la  vapeur  une 
folie,  U  Paradis  perdu  et  Athalie  des  écrits  ennuyeux , 
Jusqu'au  Jour  où  la  Providence  a  réformé  les  Jugements 
du  public,  et  fait  rendre  an  génie  Thonneur  qui  lui  était 
dû.  Ce  serait  donc  une  mesure  incertaine  et  sujette  à 
l'erreur  que  d'estimer  le  génie  par  ses  résultats  immé- 
diats; le  sublime  n'est  pas  toujours  reconnu,  et  l'immor- 
talité se  fait  attendre  ;  mais  elle  ne  fait  Jamais  défaut  à  la 
vnde  grandeur.  La  popularité  d'ailleurs  se  trompe  quel- 
quefois, et  s'attache  aux  ouvrages  et  aux  hommes  mé- 
dioeres.  Pompée  était  l'idole  des  Romains  quand  César 
commençait  à  grandir.  Les  savants  et  le  public  du 
XVI*  siède  décernèrent  à  Ronsard  des  honneurs  divins. 
On  sait  comment  la  postérité  se  duurge  de  redresser  de 
pareilles  erreurs,  ausu  bien  qu'elle  corrige  les  injustices. 
Ce  serait  encore  une  mesure  inexacte  que  d'estimer  les 
créations  d'un  homme  de  génie,  qui  pâivent  n'être  que 
des  ébauches,  d'après  les  œuvres  perfectionnées  et  pohes 
de  ses  imitateurs.  Voltaire  n'échappe  pas  à  ce  défaut 
ipand  il  fait  bon  marché  de  l'invention  comparée  à  l'uti- 
lité, et  qu'il  écrit  :  «  Tous  les  acheteurs  vous  diront  : 
«  Jinroue  que  llnventeor  de  la  navette  avait  plus  de  génie 
«oue  le  manufacturier  qui  fait  mon  drap;  mais  mon 
«  dr^»  vaut  mieux  que  celid  de  llnventeur...  Enfin , 
«  chacun  avouera,  pour  peu  qu'on  ait  de  conscience,  que 
«  nous  recpectons  les  génies  qui  ont  ébauché  les  arts,  et 
«  que  les  esprits  qui  les  ont  perfectionnés  sont  plus  à 
«  notre  usage.  >  Or,  la  Justice  veut  que  nous  fassions 
honneur  au  génie  des  progrès  dont  il  est  le  premier  au- 
teur. Il  nous  faut  moins  de  quinze  jours  pour  aller  sûre- 
ment et  commodément  en  Amérique;  mais  c'est  Colomb 
qui  a  trouvé  le  chemin. 

Céme  de  la  politiaite  et  de  la  guerre.  —  Les  politiques 
et  les  militaires  ne  sont  guère  exposés  à  ce  genre  de  mé- 
eomptea,  parce  qu'ils  produisent  des  résultats  positifs, 
immédlsits,  où  Ton  reconnaît  qu'ils  ont  la  force,  à  laquelle 
les  hommes  résistant  rarement.  Depuis  Périclès  Jusqu'à 


JUchelien,  depuis  Alexandre  et  César  Jusqu'à  Napoléon, 
l'on  a'est  accordé  à  reconnaître  tous  les  caractères  du 
génie  dans  ces  âmes  vastes  et  puissantes,  en  qui  se  per- 
sonnifient l'intelligence,  les  volontés  et  les  passions  de 
l'humanité,  et  qui  CEMcinent  les  hommes  par  la  magie  de 
la  gloire,  ou  les  subjuguent  par  hi  supériorité  des  la- 
miâ-es  et  de  l'énergie,  ici  même,  hi  Providence  a  donné 
an  génie  ce  singulier  privilège  d'être  loué  des  hommes  à 
proportion  de  ce  qu'il  leur  coûte,  parce  que  la  postérité 
reconnaît  sa  grandeur  dans  les  coups  mêmes  qu'il  a 
fnœpés,  et  que,  pour  emprunter  le  langage  de  Bossuet, 
«  s  il  n'a  pas  les  cœurs,  il  force  l'admiration.  »  Montes- 
quieu a  ingénieusement  analysé  cette  remarquable  loi  des 
choses  humaines  dans  le  Dialogue  de  Sylla  et  d^Euerale; 
lorsque  le  philosophe  dit  à  ce  redoutable  politique,  cou- 
vert de  sang  plus  que  de  gloire  :  «  Je  voyais  bien  que  votre 
àme  était  haute,  mais  Je  ne  soupçonnais  pss  qu'elle  fût 
grande.  »  Cela  veut  dire  :  «  J'avais  ignoré  Jusqu^à  présent 
que  vous  fussiez  un  homme  de  génie.  »  C'est  un  senti- 
ment analogue  qui  a  fait  dhne  à  M.  de  Lamartine  (iVbiH 
velles  Méditations,  vu)  : 

Et  vous,  fléaux  de  Dlen ,  qui  islt  si  le  génie 
ITest  pas  une  de  voe  Yertns? 

Génie  des  sciences  et  des  arts.  ^  Le  génie  des  sciences, 
des  lettres  et  des  arts  est  peut-être  moins  exposé  à  ces 
reproches,  quoiqu'il  y  ait  de  déplorables  exemples  des 
abus  auxquels  il  se  prête  :  l'esprit  prodigieux  que  Voltaire 
a  dépensé  en  impiétés  et  en  bouffonneries,  l'ardente  ima- 
gination et  la  prestigieuse  éloquence  de  Rousseau,  em- 
plovées  à  mêler  perpétuellement  le  sophisme  et  la  vé- 
rité, tout  ce  qiU  fausse  le  Jusement,  flétrit  l'ftme  ou 
étourdit  la  conscience,  mérite-t-il  encore  le  nom  de  génie? 
Le  mot  seul  semble  exclure  l'idée  du  mal  et  de  l'immora- 
lité, n  faudrait  ne  pas  accorder  plus  que  le  talent  à  des 
écarts  déplorables,  et,  quoique  la  langue  ait  consacré  les 
termes  de  génie  malfaisant  et  dé  génie  de  la  destruction, 
elle  devrait  réserver  la  désignation  glorieuse  d'écrivains 
de  génie  aux  maîtres  irréprochables  qui  ne  se  sont  Jamais 
servis  de  la  parole  et  des  arts  que  pour  le  beau  et  le  bien. 
Nous  n'essayerons  pss  d'en  faire  une  revue  qui  serait  né- 
cessairement incomplète,  et  uni,  à  l'honneur  de  l'huma- 
nité,  serait  pour  ainsi  dire  innnie.  Il  faudrait  commencer 
par  Homère,  père  de  toutes  les  sciences  dans  l'antiquité,  et 
parcourir  trente  siècles  pour  s'arrêter  où?  aux  découvertes 
de  Cuvier  ou  bien  aux  Méditations  de  Lamartine?  Ce 
n'est  pas  non  plus  le  lieu  de  cheroher  quel  caractère  le 
génie  a  pris  dans  les  écrivains  chrétiens,  ni  d'étudier  au 
point  de  vue  littéraire  l'étonnante  simplicité  de  S^  Paul. 
Il  vaut  mieux  s'arrêter  à  notre  xvii*  siècle,  qui  nous  offre 
l'expression  la  plus  parfaite  et  la  plus  pure  du  génie  des 
lettres,  c-à-d.  de  l'humanité,  et  saluer  dans  le  xix*  les 
conquêtes  magnifiques  du  génie  des  sciences,  qui  déter- 
mine la  place  des  astres  sans  les  voir,  endort  la  douleur, 
fixe  la  lumière,  et  fkit  voler  hi  pensée  humaine  aussi  vite 
que  la  foudre.  Remarquons  seulement  que  les  décou- 
vertes de  la  science  n'assurent  pas  à  leun  inventeura  la 
même  gloire  que  les  créations  de  l'éloquence  et  de  la 
poésie.  Buffon  en  a  donné  la  raison,  quand  il  a  dit  :  «  La 
«  quantité  des  connaissances,  la  singularité  des  faits,  la 
«  nouveauté  même  des  découvertes,  ne  sont  pas  de  sûrs 
«  garants  de  l'immortalité,  parce  que  les  connaissances, 
«  les  faits  et  les  découvertes  s'enlèvent  et  se  transportent 
«  aisément...  Ces  choses  sont  bon  de  l'homme  ;  le  style, 
«  c'est  l'homme  même.  »  {Discours  de  réosption,)  Nous 
dirons  également  :  le  génie,  c'est  l'homme  même,  et  ses 
œuvres  les  plus  durables  sont  celles  qu'il  tire  de  son 
propre  fonds,  c-à^^  de  son  àme,  parce  qu'elles  traduisent 
en  termes  immortels  des  vérités  qui  sont  de  tous  les 
temps  et  intéressent  tous  les  hommes.  Cest  la  gloire  des 
Anciens,  et  le  secret  de  ces  chefs-d'œuvre  qui  ont  immor- 
talisé tant  de  petites  dtés  de  la  Grèce,  et  ajouté  un  tel 
éclat  à  la  grandeur  des  Romains.  Ce  caractère  de  vérité 
neuve  et  puissante  estl'origine  d'une  expression  consacrée, 
le  génie  ancien,  que  l'on  compare  et  que  l'on  oppose  sou* 
vent  au  génie  moderne.  Il  ne  suflBt  pas  d'entendre  par  là, 
comme  Voltaire,  «  le  caractère,  les  mcBun,  les  talents 
«  principaux,  les  vices  même  qui  distinguent  un  peuple 
«  d'un  autre.  »  Cette  explication  ne  regarde  oue  le  carac- 
tère d'une  nation,  et  il  y  a  dans  le  mot  génie  quelque 
chose  de  plus,  une  idée  de  supériorité,  de  qualités  per- 
sonnelles et  élevées  par  où  excelle  un  peuple  ou  une 
civilisation.  Noua  disons  le  génie  ancien  et  le  génie  mo- 
derne, le  génie  espagnol  et  le  génie  anglais,  pour  exprimer 
plus  qu'une  singularité,  c.-à-d.  une  ârigiaaUté  aooomps» 

61 


6  EN 


962 


GÊN 


gnée  do  grandeor,  ce  qui  est  le  tni  sens  du  mot  génie.» 
n  y  a  bien  des  nuances  dans  une  question  si  générale, 
et  qui  touche  à  tant  d'antres  :  on  peut  distinguer  encore, 
surtout  dans  la  conduite  des  choses  humaines,  le  génie 
de  conception  et  le  génie  d'exécution,  dont  la  différence 
est  peut-^Mre  plus  sensible  dans  la  politique  et  dans  la 

Soerre.  Un  page  de  GustaTo-Adolphe,  Torstenson,  à  la  Tue 
'une  mancBUTre  inattendue  des  ennemis,  change,  de  sa 
propre  inspiration,  un  ordre  du  roi ,  qu'il  était  cbaigé  de 
transmettre,  et  le  roi  le  féUdte  de  cette  désobéissance  de 
génie.  Il  y  a  des  génies  incomplets  ;  c'est  l'effet  d'une  loi 
dÎTine,  qui  condamne  la  sagesse  et  la  grandeur  humaines 
à  être,  comme  dit  Bossnet,  «  toujours  courtes  par  quelque 
endroit.  »  Les  critiques  du  xvm*  siècle  faisaient  même  de 
l'incomplet  une  condition  ou  un  caractère  particulier  du 
génie.  Marmontel  disait  :  «  Le  génie  est  une  sorte  dinspi- 
«  ration  fréquente,  mais  passagère  ;...  les  interralles  du 
«  génie  sont  occupés  par  le  talent;  quand  l'un  s'endort, 
«  f antre  veille;  quand  l'un  s'est  négligé,  l'antre  vient 
«  après  lui  et  perfectionne  son  ouvrage.  »  L'exemple  fa- 
jon  du  temps  à  l'appui  de  cette  théorie ,  outre  bhaks- 
peare,  que  Ton  ne  comprenait  pas,  cMtait  Corneille,  que 
la  mode  sacrifiait  à  Racine,  comme  si  Polyeucte  et  Cinna 
étaient  le  fruit  d'une  inspiration  par  accès  et  d'un  génie 
intermittent.  Nous  sommes  revenus  de  cette  erreur,  que 
Voltaire  avait  autorisée  le  premier  par  ses  jugements,  et 
nous  croyons  avec  admiration  à  l'édité  du  génie  de  Cor- 
neille. Quoiqu'il  ait  subi  cette  loi  fatale  de  la  décadence 
attachée  presque  toi^ours  à  la  vieillesse,  ce  n'est  pas  chez 
lui  qu'il  faut  chercher  l'exemple  d'un  génie  incomplet , 
non  plus  que  chez  Boileau ,  si  ridiculement  attaqué  de 
nos  jours.  En  effet ,  le  génie  incomplet  n'est  pas  celui  qui 
ne  suffît  pas  à  tout,  et  qui  n'a  pas  eu  toutes  les  qualités, 
même  celles  dont  il  n'avait  pas  besoin  ;  c'est  celui  qui  pou- 
vait arriver  à  la  grandeur  et  à  la  perfection  dans  le  genre 
qui  lui  convenait,  ode,  drame,  histoire,  éloquence,  et 
qui ,  faute  de  vérité  ou  de  goût,  s'est  arrêté  en  chemin. 
Il  se  rencontre  d'ordinaire  aux  époques  de  déc^enoe.  On 
a  souvent  et  justement  cité  à  ce  propos  le  nom  de  Sé- 
nèque  :  les  temps  modernes,  et  notre  siècle  peut-être 

ϻlus  que  d'autres,  fourniraient  plus  d'un  exemple  ana- 
ogue.  Nous  avons  vu  des  hommes  doués  de  qualités 
supérieures,  et  nés  pour  le  sublime,  s'interdire  volontai- 
rement de  l'atteindre,  parce  qu'ils  manquaient  de  sincé- 
rité et  de  bonne  foi ,  ou  qu'ils  méprisaient  la  critique  et 
lacriflaient  tout  à  l'idolâtrie  d'eux-mêmes  et  à  l'engoue- 
ment du  public  ;  ou  bien  encore  parce  qu'ils  ne  respec- 
taient pas  plus  leur  personne  que  leur  talent  Ce  titre  de 
génie  incomplet  sera  en  même  temps  leur  récompense  et 
leur  condamnation  ;  car  la  vraie  beauté  et  la  vraie  gran- 
deur, quoique  soumises  aux  imperfections  inévitables  de 
l'humanité ,  n'existent  pas  sans  l'ensemble  et  sans  l'har- 
monie. — Il  ne  faut  pas  confondre  avec  ces  génies  incom- 
plets par  leur  faute  ceux  que  le  malheur  a  empêchés  de 
parvenir  au  degré  où  ils  étaient  appelés  :  André  Chénier 
en  est  le  plus  triste  et  le  plus  glorieux  exemple  ;  il  a  com- 
posé des  vers  impérissables  :  V Aveugle  et  la  Jeune  cap- 
Hoe  sont  des  oauvres  de  génie;  et  cependant,  le  regret 
amer  qui  lui  échappa  en  présence  de  la  mort  exprimait, 
avec  la  conscience  de  ce  qu'il  pouvait  faire,  la  douleur  de 
perdre  si  cruellement  ses  droits  à  l'immortalité.  C'est,  au 
reste,  un  des  traits  supérieurs  du  génie,  et  l'un  des  plus 
aimables,  que  cette  défiance  de  soi  -même  que  Chénier 
portait  jusque  sur  Téchafaud,  et  que  Molière  avouait  no- 
blement à  Boileau,  quand  il  s'appliquait  à  lui-même  ce 
vers  du  satirique  (Sot.  2  )  : 

n  platt  à  toat  le  monde,  et  ne  saanit  le  plaire. 

En  effet,  l'écrivain  de  génie,  les  yeux  attachés  sur  cet 
idéal  qui  recule  toi^ours,  est  souvent  d'autant  pl|is  près 
de  la  perfection  qu'il  se  croit  plus  incomplet. 

Génie  dês  arts,  —  On  comprend  aisément  que  les  lois 
du  génie  sont  les  mêmes  dans  les  arts  ;  celui  du  sculp- 
teur, du  peintre,  du  compositeur,  se  reconnaît  aux  émo- 
tions qu'ils  font  naître,  à  l'admiration  qu'ils  inspirent. 
Un  artiste  de  talent  fait  plaisir  ;  mais  il  v  a  plus  que  du 
plaisir  dans  les  impressions  que  produisent  les  chefs- 
d'oBuvre  de  Phidias  et  de  Raphafil,  de  Gluck,  de  Mozart,  de 
Beethoven,  et  de  Rossini  ;  là,  comme  dans  les  lettres,  les 
conditions  et  les  caractères  du  génie  sont  la  vérité,  l'ori- 
^nalité,  la  simplicité  dans  la  puissance,  la  sensibilité 
qui  passe  de  l'àme  de  l'artiste  dans  celle  du  public  Sans 
doute,  les  œuvres  des  arts  n'échappent  pas  aux  caprices 
de  la  mode  et  aux  erreurs  du  goût  (F.  ce  mot).  La  mo- 
que même  est  peut-être  plus  exposée  aux  méprises  que 


les  arts  dn  dessin,  aoit  parce  qu'elle  vieillit  vite,  soit 
parce  qu'elle  parie  aux  sens,  et  que  la  beauté  de  la  voix 
et  l'habileté  de  l'exécution  exercent  une  séduction  qui 
profite  assez  souvent  à  des  œuvres  ordinaires  ou  même 
médiocres.  Mais  ces  jugements  de  passage  se  réforment 
comme  tous  les  antres,  et,  dans  un  art  si  mobile  et  si 
fugitif,  c'est  le  génie  seul  qui  ne  vieillit  pas.       A.  D. 

oÉKa  CIVIL,  dénomination  sous  laquelle  on  comprend 
les  corps  des  ingénieurs  des  mines  et  des  ponts  et  cnans* 
Bées,  r .  M«ES,  Ponts  bt  CHAOsséss. 

QiKa  MAaimn.  Ce  corps,  dont  nous  avons  retracé 
l'historique  dans  notre  Dtetûmnaire  de  Biographie  et 
(F Histoire,  est  organisé  de  la  manière  suivante  t 

Grades.  Assimilation. 

i  Inspecteur  général  .  .  .    Contre-amiral, 
il  Directeurs  des  construc- 
tions navales  (l**  et  2* 

classes) Après  les  contre^amiraux. 

38  Ingénieurs    {V*  et   2* 

classes) Capitaines  de  vaisseau  et 

de  frégate. 
14  Soua-ingénieurs  (1»,  2« 

et  3*  classes) Lieutenants  de  vaisseau  et 

de  frégate. 

Et  le  nombre  d'élèves  nécessaire  au  service.  Les  traite- 
ments sont  ainsi  fixés  :  inspecteur  général,  12,000  fr.  ; 
directeurs,  10,000  et  S,000  fr.  ;  iiménieurs,  5,000  et 
4,000  fr.;  sous-ingénieurs,  3,000,  2,400  et  2,000  fir.; 
élèves,  1,200  fr. 

oiNiB  MiuTAnuL  Co  coips,  dout  nous  avons  indiqué  les 
vicissitudes  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
éP  Histoire  f  a  un  état^mijor,  qu'*2ne  ordonnance  du  31  oc- 
tobre 1845,  modifiée  en  quelques  points  en  1860,  fixa 
ainsi  qu'il  suit  :  5  généraux  de  division,  8  généraux  de 
brigade,  29  colonels,  20  lieutenants-colonels,  108  chefs 
de  batainon,  150  capitaines  de  1'*  classe,  150  capitaines 
de  2  classe  et  lieutenants;  en  tout,  470  officiers.  Il  y  eut, 
dans  ta  garde  impériale,  une  division  du  génie,  composée 
de  2  compagnies.  Le  corps  du  Génie  est  de  7,000  hommes 
environ,  formant  3  régiments,  plus  2  compagnies  d'ou- 
vriers. L'armement  consiste  dans  le  fusil  à  baïonnette  et 
le  sabre-poignard.  L'uniforme  est  ainsi  réglé  :  habit  bleu, 
à  revers  non  adhérents,  avec  collet,  revers,  parements 
et  pattes  de  parements  en  velours  noir,  et  passe-poil 
écarlate;  doublure  du  collet  et  des  revers,  brides  d'épau- 
lottes,  grenades  d'ornement  des  retroussis,  en  drap  bleu, 
retroussis  et  épaulettes  écarlate;  boutons  jaunes,  em 
prcdnts  d'une  cuirasse  avec  casque  au-dessus;  pantalon 
bleu,  avec  bandes  et  passe-poils  écarlate  ;  shako  en  tissu 
de  coton  noir,  avec  pourtour  supérieur  en  galon  écarlate; 
plaque  à  aigle,  ayant  pour  empreinte,  dans  l'écusson^ 
une  cuirasse  surmontée  d'un  casque  et  placée  au-dessus 
d'une  bombe  ;  pompon  sphérique  à  flamme  écarlate  ;  buf* 
fleterie  blanche.  Les  officiers  portent  l'épaulette  d'or.  Un 
corps  d'employés,  chargé  des  détails  du  service  des  places 
fortes,  des  bâtiments  et  établissements  militaires,  est 
composé  de  73  gardes  principaux  du  génie,  de  1 80  gardes 
du  génie  de  l'*  classe,  et  332  de  2*.  Les  établissements 
du  génie  sont  :  le  dépôt  des  fortifications,  à  Paris  ;  l'ar- 
senal du  génie,  à  Versailles;  les  écoles  régimentaires  de 
Versailles,  Arras  et  Montpellier,  places  spécialement 
affectées  comme  lieu  de  garnison  aux  trois  régiments. 

GÊNrnF,  flexion  particulière  aux  noms,  pronoms  et 
partidpes  des  lansues  à  déclinaisons  (gr^  latin,  alle- 
mand). Cestl'un  des  cas  obliques  (F.  Cas).  Il  exprime 
proprement  un  rapport  de  possession,  de  propriété,  d*ap- 
psrtenance,  comme  les  prépositions  os  et  d  en  français  t 
ainsi,  «  la  maison  de  Paul;  cette  maison  est  à  Paul  ;  Oo- 
mus  Pauli;  Hœc  domus  Pauli  est.  »  Il  détermine  la 
qualité  d'une  personne  ou  d'une  chose  :  «  Puer  optimie 
tndoliSf  enfant  d'un  excellent  naturel;  »  —  la  ouantité  : 
«  Claasis  LXX  natTtum,  flotte  de  70  navires;  »  —le  poids  : 
«  Corona  parvi  ponderu,  couronne  d'un  faible  poids;  » 
—  la  forme  :  «  Navis  inusitat»  magnitudinis ,  navire 
(Tune  grandeur  extraordinaire  ;  »  —  la  valeur  :  «  Vestis 
magni  pretii,  un  vêtement  d'un  grand  prix.  »  Il  sert  de 
complément  :  1°  aux  superlatifs  et  aux  mots  qui  expri- 
ment la  partie  d'un  tout  :  «  Dimidium  temporis,  la  moitié 
du  temps  ;  AUissima  arborum,  le  plus  élevé  des  arbres  ;  » 
9?  aux  adjectifs  qui  expriment  les  idées  de  désir  ou  d'in- 
différence, de  sécurité  ou  d'inouiétude,  de  savoir  ou 
d'ignorance,  de  mémoire  ou  d'oubli,  de  piartidpation  ou 
de  non-participation,  d'abondance  ou  de  disette,  de  fécon- 
dité ou  de  stérilité,  etc.  ;  3«  avec  un  certain  nombre  de 


6EN 


983 


GEN 


pwtldpeH  pris  a4|c€tiveiuent,  comme  sctêns;  4*  avec  di- 

ten  moto  «iprimant  des  idées  de  poursuite  Jadic^aire, 

de  qmdMniwfction^  d*acquitteinent,  de  culpabilité,  dMnno- 

ce&ee^  etc  :  Proditionis  insimulatus,  accusé  de  trahi- 

Mn.  »  lA  grec  et  le  latin  ont  ces  divers  points  de  repsem- 

blance  :  mais,  sur  d'autres,  ils  se  s^Mvent.  Ainsi,  maintes 

fois  le  otoitif  grec  répond  à  l'ablatif  latin  :  par  exemple, 

lofsqa*il  s'agit  d'exprimer  le  temps,  le  complément  d'un 

oomparatif  ou  de  tout  mot  marquant  supériorité,  infé- 

ric-ùà,  diflérence,  idée  de  départ,  de  sortie,  d'extraction, 

de  SMlière,  enfin  le  complément  circonstanciel  connu 

MMB  le  nom  de  génitif  absolu.  Il  a  très-souvent  la  force 

de  DM  locations  quant  à,  par  rapport  à,  eu  é^ard  à,  etc. 

n  s'emploie  dans  certaines  exclamations,  et  peut  résulter 

anaal  d  une  ellipse.  Il  exprime  l*idée  partitive  absolument 

comme  fait  dé  en  français  dans  «  donnez-moi  du  pain.  » 

—  Le  rapport  marqué  par  le  génitif  est  souvent  équi- 

vo<iQe  ;  ainsi,  Amar  Dn  peut  signifier,  ou  activement, 

ramour  de  Dieu  pour  les  hommes,  ou  passivement, 

ramour  dont  Dieu  est  Tolriet. 

La  flexion  casuelle  n'inmouant  pas  toi^ours  assez  nev- 
temeot  le  n^port  d'un  nom  a  un  autre  mot,  on  a  souvent 
leeonrs  aux  prépositions;  mais  l'emploi  de  cette  partie 
du  dieooars  avec  le  génitif  est  particulier  à  la  langue 
grecque.  Lorsque  l'une  de  ces  prépositions  entre  dans  la 
composition  d'un  verbe,  le  complément  ne  se  met  au  gé- 
oitif  que  si,  sans  rien  changer  au  sens  du  verbe,  on  peut 
en  dâacher  la  préposition  et  la  placer  immédiatement 
devant  son  cas.  Souvent  l'emploi  du  génitif  dépend  du 
sens  même  du  verbe  et  non  de  la  préposition.         P. 

GÉNOIS  (Dialecte),  un  des  dialectes  italiens,  celui  qui 
■e  rapproche  le  plus  du  provençal.  Il  est  en  outre  remar- 
quable par  la  fréquente  substitution  de  Yr  à  1'^,  et  par  la 
wésence  d'un  certain  nombre  de  sons  rauques  et  singu- 
liers, qui  semblent  provenir  du  contact  des  Génois  avec 
lea  autres  peuples  dans  leurs  anciennes  courses  mari- 
times. I>uite  reprochât  au  dialecte  génois  de  son  temps 
que,  si  on  lui  enlevait  la  lettre  Zf  il  resterait  muet  :  au- 
jourd'hui il  n'a  aucun  mot  ayant  le  s  toscan.  Une  pro- 
priété qui  le  distingue  des  autres  dialectes  italiens,  le 
vénitien  excepté,  c'est  la  suppression,  dans  certaines  con- 
ditions, des  lettres  /,  t,  v  :  dnsi,  nolo  devient  noo;  dito, 
dio;  nave,  imm.  La  lettre  l  se  supprime  quand  elle  est 
suivie  de  d  ou  de  t.  Le  génois  possède  les  sons  eu  et  u 
tençals;  il  a,  comme  le  piémontais,  les  sons  an^  in,  on, 
m»;  Il  ^opprime  la  voyelle  à  la  fin  des  mots  terminés  par 
ne,  iM,  no,  et  prononce  bastion  pour  bastùme,  manjponr 
manu  II  a  reçu  beaucoup  de  mots  des  Arabes,  des  Espa- 
gnole, des  Grecs  et  des  Français.  Un  recueil  de  poésies 
en  dlâleetB  génois  a  été  publié  sous  le  nom  de  Çittara 
sumeis9,  par  Gian-Jacopo  Cavalli. 

GÉNOISE  (École),  une  des  écoles  italiennes  de  pein- 
ture. Le  plus  ancien  artiste  qui  la  représente  est  Fran- 
ÎdIs  d'Oberto,  dont  on  a  un  tableau  portant  la  date  de 
368,  dans  l'église  de  S^-Dominique,  à  Gènes.  On  con- 
naît anssi  quelques  tableaux  peints  au  xv*  siècle  par  Jao- 
qnea  Ifarone,  Galeotto  Nebea,  Jean  Massone  et  Tucdo 
d'AAdria.  A  la  fin  de  ce  siècle,  Louis  Brea  fonda  une  école 
d'oA  sortirent  Charles  de  Blantegna,  Aurel  Robertelli, 
Nicolas  Corso,  André  Morellino,  Fr.-Laurent  Moreno  et 
Fr.  Simon  de  Camnii.  Le  sac  de  Rome  par  les  Allemands 
amena  à  Gènes,  en  15^,  Perino  del  Vaga,  élève  de  Ra- 
phaël :  linfluence  ^e  ce  peintre  modifia  le  ^le  de  l'école 
génoise,  à  laquelle  appartiennent,  dans  sa  nouvelle  phase, 
Augustin  Calvi,  ses  fils  Lazare  et  Pantaléon,  Lucas  Cam- 
biaso  dit  Cangiage,  Benoît  Castiglione,  Bernardin  Ca^ 
telle  et  J.-B.  Paggi.  Ce  dernier  eut  à  son  tour  un  grand 
nombre  d'élèves,  dont  les  voyages  par  toute  l'Italie  firent 
perdre  à  l'école  génoise  son  ouiictere  spécial,  et  parmi 
lesquels  on  distingue  Valerio  Castello,  Dominique  Piola, 
J,-i.  Carlone,  Bernard  Strozzi  dit  le  Capucin,  et  Raphaôl 
Soprani.  Depuis  le  milieu  du  xvii*  siècle,  la  réputation 
des  artistes  génois  ne  s'est  plus  répandue  en  dehors  de 
leorpays. 

GENOUILLERE,  pièce  de  l'armure  au  moyen  âge,  con- 
viant le  genou,  et  reunissant  les  grèves  ou  Jambi^es  aux 
coiisarda.  Parfois  elle  était  terminée  sur  le  devant  par  un 
emement  conique,  et  portait  sur  le  côté  extérieur  une 
pointe  longue  et  forte,  pour  préserver  le  cavalier  d'être 
terré  de  près  par  d'autres  cavaliers,  dont  les  chevaux  se 
seraient  blessés  contre  ces  pointes.  —  De  nos  Jours,  on 
nomme  gmouiUère  le  revêtement  intérieur  d'une  batterie 
à  embrasures  ;  sa  hantenr  est  de  i'",i9  pour  les  batteries 
deplein  fooet,  et  de  i",33  pour  celles  à  ricochet. 

(jENRE,  le  premier  des  cinq  universaux  de  l'École; 
Idée  collective  qui  s'étend  à  d'autres  idées  encore  oniver- 


jKlles.  Telle  est  la  substance  par  rapport  au  corps  et  à 
Vesprit,  Yanimal  par  rapport  à  Vhomme  et  aux  autres 
espèces,  le  quadrUatàre  par  rapport  au  parallélogramme 
et  au  trapèze.  En  soi  le  genre  est  la  collection  des  espèces 
qui  se  ressemblent  plus  entre  elles  qu'elles  ne  ressem- 
blent à  quelque  espèce  que  ce  soit  d'un  autre  genre. 
Ainsi ,  diuis  le  genre  animal,  les  espèces  les  moins  sem- 
blables entre  elles,  les  mammifères  et  les  mollusques,  se 
ressemblent  plus  entre  elles  qu'elles  ne  ressemblent 
l'une  ou  l'antre  à  quelque  espèce  que  ce  soit  d'un  autre 
genre,  par  exemple  à  une  espèce  v^^^ale.  La  notion  des 
genres,  à  ses  différents  degrés.  Joue  un  grand  rôle  dans 
toutes  les  sciences,  les  rapports  et  les  vérités  dont  on 
s'efforce  d'acquérir  la  connaissance  étant  des  vérités  el 
des  rapports  généraux.  V.  Universadx.  B— b. 

GKNas,  en  Musique,  manière  d'assembler  successive- 
ment par  tons  a  par  demi-tons  les  degrés  de  l'échelle  et 
d'en  former  des  mélodies.  Il  y  a  trois  genres,  le  dto^o- 
nique,  le  chromatique  et  Venharmonique  (V.  ces  mots), 

pENas,  forme  particulière  que  prennent  les  noms,  les 
adjectifs  et  les  pronoms,  suivant  le  genre  des  êtres 
dont  on  parle.  Naturellement  tous  les  noms  qui  convien- 
nent à  l'homme  seul  ou  aux  animaux  mâles  doivent  être 
du  genre  masculin  :  Paul ,  père,  fUs,  frère,  lùm,  cheval. 
Tous  ceux  oui  conriennent  à  la  femme  seule  ou  aux  ani- 
maux femelles  doivent  être  du  genre  féminin  :  Pauline, 
mère,  fUU,  sœur,  lionne ,  jument ,  cavale,  La  langue 
françidse  ne  reconnaît  dans  les  noms  que  les  deux  genres 
dont  nous  venons  de  parler  :  il  en  est  de  même  de  J'ita- 
lien  et  de  l'espagnol.  Le  grec,  le  latin,  l'allemand  et  l'an- 
glais en  admettent  un  troisième ,  sous  lequel  on  devrait 
ranger  les  noms  qui  ne  sont  naturellement  ni  masculins 
ni  féminins  :  c'est  le  genre  neutre  (du  latin  neutrum,  ni 
l'un  ni  l'autre).  Mais  on  trouve  à  cet  égard  infiniment  de 
caprice  dans  toutes  ces  langues  :  ainsi ,  en  grec,  le  cœur 
est  exprimé  par  deux  mots,  dont  l'un  est  neutre  et  l'autre 
fcminm;  de  même  en  latin,  mens,  animus,  ingenium, 
<i  esprit  »,  expriment  la  même  idée  avec  trois  genres  dif- 
férents. Certains  noms  de  femmes  de  bas  étage  prenaient 
dans  ces  deux  langues  la  forme  du  neutre,  en  restant  fé- 
minins. En  français,  en  italien,  en* espagnol,  en  all^ 
mand ,  môme  caprice  dans  l'application  du  féminin  ou 
du  masculin  aux  êtres  qui  ne  sont  pas  naturellemmit  d« 
l'un  de  ces  deux  genres  :  ainsi  arhre  est  du  masculin, 
branche  est  du  féminin;  racine  est  du  féminin  ainsi  que 
fige,  tronc  est  masculin  ;  mont  et  vallon  sont  dn  mas- 
culin, montagne  et  vallée  du  féminin,  etc.  Aussi  les 
genres  sont-ils  loin  de  se  correspondre  dans  les  diverses 
langues  :  le  mot  poitrine,  féminin  en  français,  a  pour 
correspondant  en  grec  un  nom  masculin,  en  latin  un  nom 
neutre.  —  La  langue  anglaise  est  celle  qui  offre  le  moins 
d'anomalies  à  cet  égard;  elle  a  cela  de  particulier,  qu'elle 
fait  neutres  tous  les  noms  d'animaux.  P. 

GBifaB  (  Peinture  de),  nom  sous  lequel  on  comprend  la 
bambochade  (  V.  ce  mot)^  les  scènes  de  la  vie  qui  n'ont 
pas  le  caractère  du  style  assigné  à  la  peinture  d'histoire, 
la  représentation  des  animaux  considérés  isolément  et 
non  comme  accessoires  du  paysage  ou  du  tableau  d^his- 
toire,  les  vues  d'édifices  pris  aussi  isolément,  les  inté- 
rieurs, les  fleurs ,  les  instruments ,  les  ustensiles  et  tout 
ce  qu'on  appelle  la  nature  morte.  Aux  tableaux  de  cette 
dernière  espèce  on  réservait  autrefois  la  dénomination 
de  tableaux  de  genre;  les  autres  s'appelaient  tableaux  de 
chevalet.  En  général,  les  tableaux  de  genre  sont  de  pe- 
tites ou  médiocres  proportions. 

GENRES  d'éloquence,  DE  UTTéBATCaB.  V.  ÉLOQUENCE, 
LiTTéRATDRE. 

GENS  (Droit  des).  V.  Daorr  des  gens. 

GENS  DE  LETTRES,  qualification  de  ceux  qui  se  li- 
vrent à  la  littérature  et  en  font  profession;  elle  est  d'ori- 
gine romaine.  Les  premiers  boni  mes  de  lettres  chez  les  Ro- 
mains furent  des  Grecs,  des  esclaves  ou  des  affranchis;  on 
les  appelait  rhéteurs  (  1^.  ce  mot).  Mais  des  gens  de  lettres 
proprement  dits,  cultivant  tous  les  genres  de  littérature, 
il  n'y  en  eut  à  Rome  qu'à  dater  de  la  fin  de  la  république 
et  surtout  de  l'époque  des  empereurs  ;  du  temps  d'Au- 
guste, leur  condition  fut  assez  digne  :  on  sortait  des  guerres 
civiles,  le  pouvoir  absolu  avait  à  se  faire  pardonner  son 
origine,  et  l'empereur  voulait  ne  paraître  que  le  premier 
magistrat  de  la  république.  Aussi ,  Virgile,  Horace,  Tucca, 
Vanus  et  d'autres  furent  autant  les  amis  que  les  protégés 
d'Auguste  et  de  Mécène.  Plus  tard,  particulièrement  sous 
les  mauvais  empereurs,  les  gens  de  lettres,  en  générale 
n'étaient  guère  plus  mie  des  parasites.  V.  sur  ce  sujet  les 
Études  de  mosurs  et  àe  critique  sur  les  poètes  latins  de  là 
décadence,  par  M.  D.  Nisard,  2«  édjt.,  Paris,  1 840, 2  v.  in-8*. 


G  EN 


961 


GEN 


En  Grèce,  sauf  quelques  exceptions  pour  de  srands 
Ments  ou  de  gprands  Kénies,  la  profenion  des  lettres 
s'exerçait  dans  la  patne  ou  m6me  à  Tétranger;  c'était 
particulièrement  de  l'enseignement  de  la  rhétorique  que 
les  lettrés  viraient.  Les  Uttératears  sérieux  cultivaient 
les  lettres  pour  la  gloire,  pour  plaire  an  peuple,  qui  quel- 
ooefois  les  en  récompensait  par  une  gratification  prise 
«ans  le  trésor  de  TÉtat;  ainsi  Hérodote  ayant  la  aox 
Athéniens  les  morceaux  de  son  Histoire  qui  devaient 
particulièrement  les  intéresser,  le  peuple  lui  fit  don  de 
10  talents  (  &5,000  fr.  environ  ).  Le  même  peuple  voulut 
que  Ton  comptât  au  poète  Cherilus  un  philippe  d'or  (34 
i  35  fr.)  pour  chaque  vers  d'une  pièce  où  il  avait  célébré 
la  victoire  des  Grecs  sur  Xerxès. 

Dans  le  nouveau  monde  chrétien ,  les  gens  de  lettres, 
mêlés  au  clergé,  servirent  la  cause  de  la  civilisation,  tout 
en  perpétuant  la  tradition  des  sophistes.  Pendant  le 
moyen  âge,  aucun  écrivain  ne  compta  dans  l'ordre  social , 
s'il  ne  faisait  partie  du  clergé,  et  alors  la  considération 
dont  il  Jouissait  venait  du  corps  dont  il  était  membre,  et 
non  de  son  propre  mérite.  En  dehors  de  l'Église,  il  n'y 
eut  que  des  poètes  et  dea  chroniqueurs  asses  misérables, 
qui  faisaient  profession  d'amuser  les  loisirs  des  seigneurs 
et  des  princes. 

La  période  de  la  Renaissance  parut  être  comme  an  âge 
d'or  pour  la  littérature  ;  Charles-Quint  rendait  les  plus 
grands  honneurs  â  Gnichardin,  qui  était,  il  est  vrai ,  en 
même  temps  qu'écrivain,  homme  d'État  et  guerrier.  On 
faisait  de  riches  présents  aux  gens  de  lettres,  on  leur 
donnait  les  revenus  de  riches  abbayes,  on  les  chargeait 
de  missions  diplomatiques.  Hais  ces  faveurs  étaient  pour 
ceux  qui  Joignaient  l'esprit  des  affaires  à  la  culture  des 
lettres  :  ceux  qui  n'étaient  que  littérateurs  ou  poètes 
étaient  flattés  et  négligés;  l'Arioste,  par  exemple,  se  plaint 
de  ce  qu'après  l'avoir  embrassé  sur  les  deux  Joues,  le 

{)ape  Léon  X  le  laissait  dans  la  misère.  Les  cens  de 
ettres  purement  lettrés,  et  mieux  avisés,  traitaient  ces 
singuliers  protecteurs  comme  ils  le  méritaient;  ainsi 
Paul  Jove  disait  avoir  deux  plumes,  l'une  d'or  et  l'autre 
d'argent,  afin  de  proportionner  la  louange  aux  dons,  et 
tous,  en  général ,  pensaient  comme  le  sculpteur  Cellini  : 
«  Je  sers  qui  me  paye.  » 

La  domesticité  des  gens  de  lettres  étidt  comme  une  tra- 
dition qui  passa  d'Italie  en  France.  Les  littérateurs,  les 
poètes  ne  pouvaient  guère  être  que  les  complaisants  et  les 
flatteurs  des  princes  :  cela  faisait,  en  quelque  sorte,  partie 
de  leur  profession.  Le  cardinal  de  Richelieu  leur  imposa 
son  Joug  avec  dureté  :  de  la  même  main  qu'il  brisait  le 
protestantisme,  il  fit  son  empire  de  la  republique  des 
lettres. 

Louis  XIV  rendit  la  position  des  lettrés  plus  éclatante, 
mais  non  plus  sûre  :  «  L'intelligence,  a  dit  Colbert,  prêta 
hommage-lige  au  monarque.  »  Nous  serons  plus  explicite 
et  plus  vrai  en  ajoutant  qae  les  gens  de  lettres  prêtaient 
leur  hommage  à  tous  les  grands  seigneurs  qui  pouvaient  les 
protéger.  Dans  ce  temps,  où  la  noblesse  de  race  avait  une 
^  haute  valeur  et  possédait  de  si  grands  biens,  nul  auteur 
ne  publiait  un  ouvrage  sans  nne  dédicace  à  quelque  puis- 
sant du  jour  ;  voyez  celles  de  Corneille  et  de  Racine,  pour 
ne  parler  que  des  illustres  :  elles  sentent  la  domesticité. 
Rappelons-nous  qne  Richelieu  tenait  à  sa  solde  nne  foule 
de  gens  de  lettres,  et  que  Fouquet,  longtemps  auprès, 
avait  aussi  nombre  de  pensionnaires  de  cette  sorte,  parmi 
lesquels  on  comptait  La  Fontaine,  qui  fut  si  Adèle  au  sur- 
intendant malheureux. 

Les  auteurs  bien  accueillis  du  public  trouvaient  une 
rémunération  raisonnable  de  leure  travaux  :  P.  Corneille 
tira  2,000  livres  de  chacune  de  ses  tragédies  à'AttUa  et 
de  Bérénice;  Molière  en  reçut  autant  pour  son  Festin  de 
Pierre,  1,100  pour  ses  Fâcheux  et  1,000  pour  ses  Femmes 
savantes;  les  premières  représentations  d*Êsope  d  ta 
cour,  comédie  de  Boursault,  lui  valurent  tout  près  de 
3,000  livres.  Rappelons-nous  qu'alors  l'argent  avait  en- 
viron 6  fois  plus  de  valeur  qu'aujourd'hui  {V,  Monhaib), 
et  les  sommes  ci-dessus  devront  se  traduire,  en  chiffres 
actuels,  par  13,000  fir.,  6,600  fr.,  6,000  fr.,  et  18,000  fr. 
—  Les  manuscrits  des  livres  se  vendaient  un  peu  moins 
cher,  car  Boilean  ne  reçut  ponr  son  Lutrin  que  600  liv. 
(soit  3,600  fr.),  et  Racine  céda  le  manuscrit  d^Andro- 
moque  pour  »)0  liv.  (soit  1,200  fr.);  on  voit  que  ces 
prix  sont  assez  équitables,  Roileau  était  dans  tout  Féclat 
de  sa  réputation,  et  Radne  conmiencait  la  sienne.  — 
Les  pensions  royales,  distribuées  en  1663  aux  gens  de 
lettres,  étaient  fixées  avec  une  vraie  magnificence  :  Méze- 
rai ,  historiographe  de  France,  en  avait  une  de  4,000  liv. 
(24,000  tr»)i  Chapelain,  alon  «  le  premier  poète  dn 


monde  pour  l'héroïque  »,  d{saltH>n,  recevait  3,O0U  liv. 
(18,000  fr.);  P.  Corneille,  2,000  Uv.  (12,000  fr.);  Bense- 
rade,  1,500  liv.  (0,000  fr.)  ;  Molière,  qui  n'avait  encore 
donné  que  l'Êeolê  des  Femmes,  sa  première  bonne  comé- 
die, 1,W)0  liv.  (6,000  fr.);  et  Racine,  qui  en  était  à  la 
Thibifde,  800  Itv.  (4,800  fr.). 

La  position  sociale  des  gens  de  lettres  s'améliora  pen- 
dant le  xvm*  siècle  :  la  hante  société,  reconnaissant  leur 
supériorité  intellectuelle,  vivait  avec  eux  presque  sur  le 
pied  d'égalité  ;  les  srands  seigneurs,  tout  en  demeurant 
des  protecteurs,  recherchaient  les  lettrés,  les  admettaient 
dans  les  Jouissances  de  l'existence  la  plus  opulente. 
Néanmoins,  au  fond,  ils  gardaient  vis-àp-vis  de  ces  privi- 
légiés de  l'intelligence  la  morgue  aristocratique.  Ils  ne 
faisaient  rien  pour  eux  :  les  récompenses  les  plus  effectives 
qu'on  leur  accordait  étaient  des  places  près  des  ministres, 
des  surintendants  ou  des  princes,  et  des  privilèges  de 
Joumanx.  Il  y  avait  ausd  des  pensions,  mais  la  plupart 
du  temps  le  Trésor  ne  les  payait  p«i.  L'accueil  et  les  gra- 
cieusetés du  grand  monde  devenaient  une  charge  pour 
les  gens  de  lettres  mal  rentes,  et  beauconp  fuyaient  cette 
chax^  en  se  réfugiant  dans  la  retraite.  Chamfort  a  bien 
peint ,  et  sans  doute  éprouvé  leur  condition,  lorsqu'il  s 
dit ,  avec  son  acrimonie  habituelle  :  «  Les  gens  de  lettres, 
surtout  les  poètes,  sont  comme  les  paons,  à  qui  on  Jette 
mesquinement  quelques  graines  dans  leur  loge,  et  cpi'on 
en  tire  quelquefois  ponr  les  voir  étaler  leur  qneue  ;  tandis 
que  les  coqs,  les  poules,  les  canards  et  les  dindons  se 

f>romènent  librement  dans  la  basse-cour  et  remplissent 
eur  Jabot  tout  à  leur  aise.  » 

Les  gens  de  lettres,  en  voyant  lonre  écrits,  leura  opi- 
nions attirer  l'attention  de  la  France  et  de  l'Europe,  sup- 
portaient difficilement  cette  position  inférieure  :  Us  se 
sentaient  propres  â  tout,  et  la  constitution  de  la  société 
en  faisait  une  espèce  de  classe  d'inutiles,  à  laquelle  au- 
cune carrière  ne  s'ouvrait  dans  l'administration  on  le 
puvemement  de  l'État.  Aussi ,  quand  vint  la  Révolution, 
ils  prirent ,  de  l'autorité  du  talent ,  la  i 


place  qu'on  leur 
fusait  depuis  trois  siècles,  et,  après  n'avoir  été  rien  dans 
l'État,  ils  y  furent  tout  par  la  presse  quotidienne  on  pé- 
riodique, et  quelques-uns  par  la  tribune.  Lonqne  le  pays 
tomba  à  la  merci  de  la  Terreur,  ce  gouvernement  consi- 
déra les  gens  de  lettres  comme  ses  ennemis,  et  en  immola 
beaucoup;  d'autres  purent  braver  les  tyrank,  et  mon- 
trèrent le  plus  noble  courage  :  Chénier,  en  faisant  ap- 
plaudir en  plein  théâtre,  dans  la  tragédie  de  Coius  GraC" 
chus,  ces  mots  qui  étaient  une  réclamation  et  une 
accusation  contre  les  détenteura  du  pouvoir  :  «  Des  lois, 
et  non  du  sang;  »  Delille,  en  composant,  contre  Robes- 
pierre tout-puissant,  son  dithyrambe  sur  l'immortalité 
de  Tême;  Laya,  en  donnant  sa  comédie  de  VAmi  des 
lois,  qui  n'était  pas  un  bon  ouvrage,  comme  il  le  disait 
lui-même  30  ans  après,  mais  qui  était  une  bonne  action. 
Les  gens  de  lettres  (et  l'on  pourrait  en  citer  bien  d'antres 
encore)  se  firent  alon  les  vengeun  de  la  morale  pu- 
blique, de  la  liberté  et  de  l'hnmanité  indignement  foo- 
lées  aux  pieds  par  les  plus  scélérats  comme  les  plus 
ignobles  de  tous  les  tyrans. 

Ix>r8que  le  Consulat  eut  rétabli  l'ordre  dans  le  gouverne* 
mentd'aboid,  puis  dans  les  esprits;  quand  ensuite  l'Em- 
pire eut  tout  pacifié  à  l'intérieur,  les  gens  de  lettres  en 
général,  voyant  l'égalité  établie  et  les  oroits  des  citoyens 
assurés,  d&abusés  un  peu  de  la  liberté  par  les  excès  de 
la  licence  et  de  la  tyrannie  qne  la  France  venait  de  subir, 
se  rallièrent  sousl'&ide  du  gouvernement  rtoarateur  d'un 
homme  du  plus  puissant  génie;  ils  se  prêtèrent  de  nou- 
veau à  Jouer  devant  le  souverain  le  rôle  des  poètes  et  des 
littérateure  du  temps  de  Louis  XTV.  Ce  rêle  leur  semblait 
d'autant  plus  séduisant,  que  les  preroien  d'entre  eux 
étaient  admis  aux  places,  dignités  et  grands  honneura 
politiques  du  nouvel  Empire.  Les  antres  recevaient  des 
pensions,  ou,  dans  les  administrations,  des  plaoBS  pen 
assujettissantes  ;  Français  de  Nantes,  par  exemple,  direc^ 
teur  général  de  la  régie  des  Droits  réunis,  avait  dans  son 
personnel' beaucoup  de  poètes  et  de  littérateurs,  qui  ne 
venaient  guère  qu'une  fois  par  mois  à  leur  bureau,  pour 
V  toucher  les  honoraires  d'une  place  donnée  comme  un 
bénéfice  n'obligeant  pas  à  résidence. 

La  Restauration  continua  ces  errements  en  faveur  de 
ses  partisans;  on  se  souvient  que  le  poète  Désaugien  fut 
pendant  longtemps  investi  du  titre  officiel  de  chansonnier 
de  la  ville  de  Paris,  aux  appointements  de  6,000  fr.  par 
an.  Dans  le  même  temps,  a  peu  près,  Roger,  poète  co- 
mique, qui  a  laissé  2  ou  3  jolis  ouvrages,  fut  directeur 
général  des  postes;  plus  tard,  M.  de  Barante,  l'historien^ 
occupa  la  place  de  directeur  général  des  contributions 


GÉN 


965 


GÉO 


Indiraelat:  Copier  fat  conseiller  d'Stkt  et  commissaire 
da  Tol  devant  les  chambres  l^slatives  ;  Chateaubriand 
fut  ambassadeor  et  ministre;  SL  Guizot  et  M.  Thiers  en- 
trèrent dans  la  hante  administration,  et  bien  d*autres 
eena  de  lettres  prirent  rang  après  eux,  conséquence  de 
la  Rèrolution,  qui  arait  ouvert  toutes  les  carrières  à 
toutes  les  intelligences. 

La  prene  périodique  olTrit  un  attrait  et  un  refbge  aux 
écriTUDs  plus  indépendants,  et  quelquefois  servit  de 
mardiepied  pour  arriver  à  une  foule  de  places,  et  même 
à  de  hauts  emplois  publics;  M.  de  Bourqueney,  par 
exemple,  qui  occupa  successivement  avec  distinction  les 
deux  graindes  ambassades  de  Constantinople  et  de  Vienne, 
sortit  de  la  rédaction  du  Journal  des  Débats,  et,  pendant 
Its  dernières  années  de  la  Restauration,  Chateaubriand 
fut  un  des  rédacteurs  les  plus  assidus  de  la  même  feuille. 
Le  droit  de  publier  ses  pensées,  sous  quelque  forme  que 
ce  fût,  concédé,  ou  plutôt  renouvelé  par  la  Charte  de 
Louis  XVni,  créa  une  carrière  nouvelle  pour  les  gens  de 
lettres  :  4>n  mit  tout  en  Journal  ou  en  revue,  depuis  la 
littératare  savante  ou  sûrieuse  Jusqu'à  hi  littérature  lé- 
gère et  Jusqu'aux  romans  :  en  un  mot,  le  livre  se  fit 
foomal,  et  les  écrivains  d'un  talent  véritable  trouvèrent 
là  une  Juste  et  souvent  très-libérale  rémunération  de 
leurs  travaux.  Cette  combinaison  de  la  presse  périodique 
assura  l'indépendance  de  Thomme  de  lettres,  et  le  classa 
dans  la  société,  non  plus,  comme  sous  l'ancien  régime, 
par  sa  profession,  inais  suivant  son  plus  ou  moins  de 
mérite. 

Yoîlà  quel  est  aujourd'hui  l'état,  la  position,  la  condi- 
tion des  gens  de  lettres.  Comme  partout  dans  notre  so- 
ciécé,  lia  sont  enfants  de  leurs  œuvres,  se  classent  par 
leur  mérite,  et  peuvent,  dans  les  cas  de  talents  distin- 
gués  ma  de  génie,  prétendre  aux  premiers  rangs  non- 
seulement  dans  le  monde,  mais  dans  nos  grands  corps 
politiques  et  dans  les  conseils  du  souverain. 

Mous  parlons  ici  des  gens  de  lettres  vraiment  doués 
pMmr  exercer  cette  noble  profession,  et  des  chances  pos- 
sibles iMur  eux  d'arriver,  par  beaucoup  de  travail,  à 
conquérir  une  position  dans  le  monde.  Biais  outre  que 
les  chances  heureuses  ne  sont  pas  pour  tous,  le  talent 
seul,  sans  certaines  qualités  du  caractère,  peut  vous 
laisser  dans  une  obscurité  misérable.  Une  autre  cause  de 
non-réu^ite,  c'est  de  prendre  un  goût,  une  passion 
même,  si  l'on  veut,  pour  une  vocation  ;  dans  ce  cas,  la 
profeMion  des  lettres  est  la  plus  décevante,  sous  tous  les 
rapports  :  ordinairement,  elle  vous  attire  le  mépris  des 
IjBtts  sensés,  ou  qnel^efois,  à  grand'peine  et  par  exoep- 
tîoD,  ane  froide  et  mmce  estime  toi;4onrs  mêlée  de  pitié. 
Ge  que  nous  disons  là  existe  :  comme  nous  ne  fiusons 
pas  des  portraits,  plus  de  détails  seraient  délacés  ici  ; 
mais  nous  avons  dû  constater  un  fkit,  qui  est  comme  une 
ombre  appartenant  à  notre  tableau. 

An  milieu  de  ces  deux  extrêmes  de  gloire  et  de  mi- 
aère,  la  condition  des  hommes  de  lettres,  en  général,  a 
progressé  avec  celle  des  autres  classes  de  la  société  :  elle 
est,  en  mcijrenne,  meilleure  Qu'autrefois.  —  A  Paris,  ils 
■e  sont  constitués  en  Société;  ainsi,  il  y  a  une  Société 
des  auteurs  dranêotiques  (  V.  Aotboss),  et  une  Société  des 
gems  de  lettres:  cette  dernière  est  composée,  en  grande 
partie,  d'écrivains  de  la  presse  périodioue  littéraire  :  elle 
a  poor  objet  de  veiller  aux  intérêts  ae  tous  ses  mem- 
hfèa,  dont  le  nombre  est  illimité,  de  leur  faciliter  les 
nMjfsns  de  tirer  tout  le  parti  possible  de  leurs  ceuvres, 
de  maintenir  intacte  leur  propriété  littéraire,  enfin  de 
secourir  ceux  qui  sont  dans  le  besoin.  L'État  a  reconnu 
cette  Société,  ^et,  depuis  1857,  lui  accorde  une  subven* 
tion  annuelle *de  5,000  fr.  Le  principal  revenu  de  la  So- 
ciété vient  de  ses  memlnres  :  il  consiste  en  cotisations 
qu'un  comité  d'administration  fixe  suivant  les  besoins, 
mais  qui,  dans  aucun  cas,  ne  peut  dépasser  %  fr.  par 
mois.  En  outre,  tout  membre  nouveau  doit,  à  son  en- 
trée dana  la  Société,  verser  à  la  caisse  une  somme  de 
»  Jh C  D-tT. 

GÉRUFLEXION,  acte  de  respect  et  d'humilité  qui  se 
ftdt  en  fléchissant  le  genou.  Il  en  est  fait  plusieurs  fois 
mention  dans  l'Anden  Testament,  et  l'usage  en  exista 
de  bonne  heure  parmi  les  chrétiens  pendant  leurs  prières. 
De  Piques  à  la  Pentecôte  on  fsisait  toutes  les  prières  de- 
hont,  en  mémoire  de  U  résurrection  de  J.-C  Les  Abys- 
sins, les  Russes  et  les  Juifs  ne  s'agenouillent  pas.  Au 
vm*  siècle,  la  secte  des  Affonydites  regardait  la  génu- 
fiedon  comme  une  superstition.  Plusieurs  rois  exigèrent 
qn'on  fléchit  le  genoa  en  leur  parlant.  Autrefois  les  dé- 
potés do  tien  état  parlaient  à  genoux  an  roi  de  France. 
tn  vassanz  rendaient  de  même  hommage  aux  seigneurs. 


GEOFFROI  rr  Bi\(]NlSSËNDE ,  roman  provençal  da 
cycle  d'Arthur.  Geo(!h>i  vient  d'être  armé  chevalier  par 
le  roi  en  personne,  quand  un  inconnu  entre  dans  la  salle 
du  festin  et  tue  un  des  convives  d'Arthur.  Geoflh)i  obf 
tient  la  permission  de  poursuivre  cet  insolent  chevalier t 
à  travers  mille  aventures  il  l'atteint,  et  le  défait  en 
combat  ringulier.  Le  prix  de  sa  victoire  est  la  belle  Bru- 
nissende,  dont  il  a  délivré  le  père.  —  Ce  roman,  d'un 
auteur  inconnu,  a  été  publié  par  Raynouard,  d'après 
deux  manuscrits  du  xin*  siècle.  V*  Histoire  littéraire  de 
la  France,  t.  XXII.  H.  D. 

GÉOGRAPHES  (Ingénieurs).  V.  iNGAfima. 

GÉOGRAPHIE  ou  DESCRIPTION  DE  LA  TERRE  (dtt 
grec  ghè,  terre,  et  graphéin,  décrire).  Elle  touche  aux 
sciences  mathématiques,  physiques  et  historiques,  sui- 
vant que  l'on  considère  le  globe  dans  ses  rapports  avec  le 
reste  de  l'univers,  dans  sa  structure  intérieure  ou  exté- 
rieure, enfin  dans  la  manière  dont  sa  surface  a  été  ou  est 
encore  partagée  entre  les  différents  peuples.  De  là  trois 
grandes  avisions  :  Géogrc^hie  mathématique,  physique 
et  politique.  —  La  Terre  n'étant  qu'un  des  moindres 
globes  de  l'univers,  on  ne  peut  en  aborder  l'étude  sans 
connaître  quelles  attractions  réciproques  l'unissent  aux 
autres  planètes  oui  composent  avec  elle  le  système  so- 
laire, combien  durent  sa  révolution  autour  du  soleil 
et  sa  rotation  sur  elle-même,  d'où  naissent  la  différence 
des  saisons  et  celle  des  Jours  et  des  nuits;  il  faut  con- 
naître aussi  sa  forme,  ses  dimensions,  son  volume,  ses 
rapports  avec  la  lune,  son  satetlite,  dont  les  mouvements 
déterminent  sur  la  terre  les  phénomènes  des  marées, 
toutes  choses  qui  rentrent  dans  le  domaine  des  mathé- 
matiques et  de  l'astronomie.  Aux  mêmes  sciences  appar- 
tient la  construction  des  cartes  et  des  globes  représen- 
tant Ui  Terre,  puisqu'il  est  impossible  déplacer  exactement 
les  différents  lieux  du  globe  sans  y  avoir  tracé  préalable- 
ment les  cercles  de  longitude  et  de  latitude.  La  géom- 
phie  touche  aux  sciences  physiques  psr  les  reiattoni 
étroites  des  phénomènes  de  Talr  et  des  eaux  avec  les 
climats  et  les  productions  du  globe,  par  la  nécessité  de 
connaître  les  divers  terrains  qui  composent  la  croûte  ter- 
restre, d'étudier  les  végétaux  qui  la  parent  et  les  animaux 
qui  l'habitent.  A  ne  considérer  même  que  les  formes  de 
la  surface  du  globe,  on  dîrise  encore  la  géographie  phy- 
sique en  orographie  ou  étude  des  parties  solides,  et  ày- 
drographie  on  science  des  éléments  liquides.  Enfin,  si, 
au-dessus  des  végétaux  et  des  animaux,  on  examine 
l'homme,  c'est  l'histoire  qui  apprend  les  migrations  des 
races  humaines,  les  déplacements  des  peuples,  et  quelle 
partie  de  la  Terre  chacun  a  possédée  ou  possède  encore. 
De  là  encore  deux  parties  distinctes  :  la  géographie  po^ 
litique,  enseignant  les  limites  et  les  divisions  intérieures 
des  États  d'aujourd'hui,  et  la  géographie  historique,  celles 
des  États  çiui  ne  sont  plus. 

Les  trois  psrties  de  la  géographie  sont  si  intimement 
liées,  que  la  science  n'a  véritablement  commencé  d'être 
(Tu'apres  les  premiers  développements  de  Tastronomie  et 
des  sciences  d'observation ,  et  avec  l'établissement  des 
grands  empires  civilisés;  mais  ces  trois  parties  n'ont 
point  marché  d'un  pss  égal  ;  c'est  par  des  travaux  com- 
mencés seulement  au  si&Ie  dernier  que  l'on  a  connu  la 
forme  exacte  et  les  véritables  dimensions  de  la  planète  i 
c'est  seulement  de  nos  Jours,  après  les  grandes  déeoo* 
vertes  en  chimie,  en  physique  et  en  géolone,  c[u'on  a  pn 
formuler  les  lois  générales  de  la  géographie  physique.  Et 
cependant  il  existe  encore,  après  tant  de  navigations  et  de 
voyages,  des  contrées  fermées  à  notre  curiosité  :  sani 
parler  des  deux  pèles,  peut-être  à  Jamais  inacoessibles9 
personne  n'a  risité  encore  le  centre  de  l'Afrique  et  de 
l'Australie.  Dans  la  géographie  politioue  seule,  les  An- 
ciens nous  ont  laissé,  chez  le  géograpne  Strabon  et  ches 
les  grands  historiens  grecs  et  launs,  des  modèles  qne 
notre  siècle  n'a  pas  surpassés. 

Histoire  de  la  géographie  dans  l'antiquité,  —  A  rori- 
gine,  la  gé^^phle  est  toute  ethnographie.  Le  cha- 
pitre X  de  la  Genèse  n'est  qu'une  liste  généalogique  des 
peuples  connus  des  Hébreux.  Il  en  est  de  même  de  la 
géographie  d'Homère,  qui  n'a  fait  autre  chose  que  peindre 
par  quelques  épithètes  les  contrées  bien  connues  des 
G3Eecs  et  entourer  de  légendes  les  pays  les  plus  éloignés  t 
il  fiuit  un  reste  de  la  dévotion  superstitieuse  dont  quel» 
ques  anciens  honoraient  leur  pcistO}  pour  trouver  un 
système  géographique  dans  la  descnpuon  du  bouclier 
d'Achille.  Cest  seulement  au  milieu  du  vi*  siècle  que 
commence  la  science  géographique ,  avec  les  découvertes 
astronomiques  et  mathématiques  de  Pythagore  qui  en- 
seigne Ul  sphéricité  de  la  Terre,'  avec  les  voyages  du  8ap 


GÉO 


966 


GËO 


mien  GoIctUi  dans  rEspagne  méridionale  et  au  delà  da 
dâtxxiit  de  Gadès,  avec  les  recherches  des  philosophes 
ioniens ,  entre  antres  d*Anaximandre,  qui  chercha  à  dé- 
terminer la  grandeur  de  la  Terre,  enfin  avec  la  fondation 
de  Tempire  des  Perses,  maîtres  des  trois  contrées  où 
s'étaient  développées  d*ahord  les  sciences  mathématiques 
et  nautiques,  la  Chaldée,  rÉ|^pte  et  la  Phénicie.  L'ex- 
tension de  cet  empire  vers  rOnent,  la  fondation  des  co- 
lonies grecques  sur  les  bords  de  la  mer  Noire  et  leur 
commerce  avec  les  tribus  septentrionales,  permirent  à 
Hérodote  de  donner  le  premier  une  idée  précise  de  la 
Terre  connue  de  son  temps.  Hérodote  est  le  père  de  la 
géographie  comme  de  Thistoire.  S'il  commet  des  erreurs 
tor  l'étendue  reUtive  de  l'Europe,  de  l'Asie  et  de  la 
Libye,  il  connaît  bien  le  bassin  de  la  Méditerranée,  prin- 
cipalement dans  sa  partie  orientale;  il  décrit  parfaite- 
ment la  mer  Noire  et  les  fleuves  qu'elle  reçoit;  il  a  vu 
r^^te  et  la  plus  grande  partie  de  l'Asie  occidentale;  il 
tait  d^à  (ce  qui  a  été  contesté  encore  pendant  cinq 
dècles)  oue  la  Caspienne  est  une  mer  isolée;  les  tradi- 
tions qu'il  a  recueillies  sur  l'Inde,  sur  la  circumnaviga- 
tion des  Phéniciens  autour  de  l'Afrique,  sur  le  voyage 
des  Nasamons  au  centre  de  ce  continent,  ont  fourni  de 
précieux  renseignements  lli  la  critique  moderne;  il  men- 
tionne avec  soin  le  climat  et  les  productions  des  diverses 
contrées,  note  le  caractère  de  leurs  habitants,  enrichit 
ses  descriptions  des  traditions  historiques  des  différents 
peuples,  analyse  leurs  gqpvemements,  et  fait  connaître 
les  sources  et  l'étendue  de  leurs  richesses.  La  géographie 
est  encore  mêlée  à  l'histoire,  mais  elle  existe  déjà  comme 
science.  C'est  aussi  l'époque  où  naît  la  Cartographie, 
dont  les  premiers  éléments  paraissent  avoir  été  em- 
pruntés par  les  Grecs  aux  Êgvptiens  et  aux  Phéniciens. 
Anaximandre  dressa  la  première  mappemonde  connue, 
où  il  donnait  à  la  Terre  la  forme  d'un  cylindre  convexe 
\  sa  partie  supérieure  et  ayant  un  diamètre  trois  fois  plus 
considérable  oue  sa  hauteur.  Un  peu  plus  tard,  Aruta- 
goras,  ^yran  oe  Bfilet ,  apporte  au  roi  de  Sparte,  Gléo- 
mène,  pour  le  décider  à  soutenir  les  Ioniens  contre  les 
Perses  et  à  aller  attaquer  le  grand  roi  Jusqu'au  cœur  de 
ses  États,  une  planche  de  ciuvre  où  étaient  représentés 
les  contours  de  la  Terre,  les  mers  et  les  rivières,  les 
noms  et  l'emplacement  des  peuples  établis  entre  la  Grèce 
et  le  centre  de  l'empire  persan.  Hérodote,  après  avoir 
parlé  de  cette  carte,  donne  la  description  d'un  Itinéraire, 
véritable  livre  de  postes,  indiquant,  par  journées  de  routes 
et  par  parasanges,  la  distance  d'Épnèse  à  Suze. 

Entre  la  fondation  de  l'empire  des  Perses  et  celle  de 
fempire  d'Alexandre,  qui  maûrque  la  seconde  époque  de 
la  géographie  ancienne,  se  placent  plusieurs  voyages 
qui  étendent  les  limites  du  monde  connu ,  et  bientôt 
Aristote,  ses  disciples  et  toute  l'école  d'Alexandrie,  re- 
cueillant ces  connaissances,  donnent  à  la  science  un  im- 
mense développement.  Ainsi,  deux  Carthaginois  s'avan- 
cent bien  au  delà  des  Colonnes  d'Hercule,  Hannon  sur 
les  côtes  occidentales  d'Afrique,  Himilcon  sur  celles  d'Eu*  * 
rope,  où  il  est  suivi,  un  siècle  après,  par  Pythéas,  qui 

Fenêtre  Jusqu'au  nord  de  la  Grande-Bretagne  et  iusqu'à 
entrée  de  fa  Baltique.  Alexandre  le  Grand  étendit  les 
connaissances  des  urecs  dans  l'Inde,  fit  relever  par  ses 
bématistes  ou  ingénieurs-géographes,  Diognète  et  Béton , 
les  marches  Journalières  de  son  armée,  et  explorer  les 
côtes  de  la  mer  Erythrée  par  ses  amiraux  Néarque  et 
Onésicrite  :  cette  expédition  créa  donc  la  topographie  mi" 
lUaire  et  Vhydrographie  maritime,  branches  importantes 
de  la  cartographie.  Il  ne  manouaft  aux  Grecs  que  des 
connaissances  mathématiques  plus  étendues;  déjà  cepen- 
dant Eudoxe  de  Cnide  avait  essayé  d'assi^'ettir  la  géogra- 
{>hie  à  des  observations  astronomiques,  et  Pythéas,  à 
'aide  du  gnomon,  avait  déterminé  presque  exactement  la 
latitude  de  Marseille,  sa  patrie.  Biais  par  l'expédition 
d'Alexandre,  les  nombreuses  observations  des  Égyptiens 
et  des  Chaldéens  devinrent  accessibles  aux  Grecs  et  leur 
fournirent  des  données  nouvelles.  Aussi  voyons -nous 
presque  aussitôt  Aristote  enseigner  la  sphéricité  de  la 
Terre,  en  évaluer  la  circonférence  presaue  aussi  exacte- 
ment que  l'ont  fait  les  modernes,  et  deviner  le  Nouveau 
Monde.  Son  disciple  Dicéarque  chercha  à  déterminer  les 
Keux  situés  sous  le  parallèle  de  Rhodes;  enfin  un  biblio- 
thécaire d'Alexandrie,  Ératosthène,  unissant  aux  re- 
cherches antérieures  ses  propres  observations,  créa  un 
système  complet  de  géographie  et  de  cartographie  crui 
resta  classique  pendant  quatre  siècles.  Quoique  connais- 
sant la  sphéricité  de  la  Terre,  il  crut ,  comme  tous  les 
géographes  de  l'antiquité,  que  la  partie  habitable  du 
gloM  B'oœupait  qu'une  surface  assez  restreinte  de  l'hé- 


misphère boréal,  entre  l'équateur  et  le  pôle,  et  qu'on 
pouvait,  sans  grande  erreur,  considérer  cette  portion 
étroite  <te  la  sphère  comme  une  surface  plane.  De  là  une 
double  erreur  :  d'abord  la  projection  de  sa  carte,  où  les 
méridiens,  comme  les  parallèles,  étaient  des  lignes 
droites,  était  une  projection  plate  par  développement  cy- 
lindrique qui  défigurait  les  contrées  septenoionales;  eUe 
était  ensuite  beaucoup  plus  allongée  de  l'E.  à  1*0.  que  do 
N.  au  S.  De  là  le  nom  de  longitude  ou  longueur  donné 
par  les  Anciens  à  l'étendue  de  la  Terre,  mesurée  d'Orient 
en  Occident,  et  celui  de  latitude  ou  largeur,  du  Nord  au 
Sud,  noms  conservés  par  les  modernes,  bien  ou'ils  ne 
représentent  plus  aujourd'hui  qu'une  idée  fausse.  D'autres 
erreurs  venaient  encore  de  la  fausse  direction  du  prind- 
pal  méridien  et  du  principal  parallèle.  Ce  dernier  était 
celui  de  Rhodes,  appelé  aussi  diaphragme  de  Dicéarque, 
parce  que  cet  astronome,  d'après  des  observations  erro- 
nées, avait  placé  sous  ce  parallèle  de  Rhodes  les  points 
principaux  du  bassin  de  la  Méditerranée,  les  Colonnes 
d'Hercule,  le  détroit  de  Sicile,  le  cap  Sunium,'lBsas,  et 
une  longue  chaîne  de  montages  appelée  du  nom  gtodral 
de  Taurus,  et  mi'il  supposait  s'étendre  en  ligne  droite  à 
travers  toute  l'Asie.  Le  principal  méridien  était  celui 
d'Alexandrie,  sous  lequel  Ératosthène,  trompé  par  les  in- 
dications toujours  inexactes  du  gnomon ,  avait  placé  au 
Sud  Syène  et  Méroé,  au  Nord  Rhodes,  Byzance  et  l'em- 
bouchure du  Borysthène.  Enfin,  refusant  de  croire  à  l'as- 
sertion d'Hérodote  sur  l'isolement  de  la  Caspienne,  il 
faisait  de  cette  mer  un  golfe  de  l'Océan  septentrional , 
conformément  à  ses  idées  systématiques  sur  la  connexité 
de  toutes  les  men  du  dobe.  Malgré  ses  erreurs,  le  sys- 
tème d'Ératosthène  prévalut  pendant  quatre  siècles  sur 
celui  de  l'astronome  Hipparque,  beaucoup  plus  mathéma- 
tique. Hipparque  démontra  qu'on  ne  pouvait  déterminer 
exactement  les  positions  respiectives  des  lieux,  qu'en  par- 
tageant le  globe  en  cercles  correspondants  et  semblables 
à  ceux  de  la  sphère  céleste;  il  voulut  déterminer  les  U^ 
titudes  et  les  longitudes  au  moyen  d'instruments  in- 
ventés par  lui  ou  dont  il  fit  le  premier  un  fréquent 
usage,  I  astrolabe  et  la  dioptre;  U  sui»titua  à  la  projection 
plate  d'Ératosthène  un  châssis  à  méridiens  convergents, 
en  tenant  compte  du  décroissement  des  degrés  de  longi- 
tude proportionnellement  à  l'élévation  des  latitudes, 
c.-à-d.  qu'il  inventa  la  projection  penpective  stéréogra- 
phique. 

Les  empires  de  Cyrus  et  d'Alexandre  avaient  principa- 
lement étendu  ven  l'Orient  le  domaine  de  la  géographie  : 
la  domination  romaine,  qui  forme  la  troisième  gj^uade 
époque  de  la  géographie  ancienne,  fit  principalement  con- 
naître l'Occident  et  le  centre  de  l'Europe.  L'Afrique  car- 
thaginoise tut  décrite  par  Polybe  à  la  suite  des  guerres 
puniques  :  les  conquêtes  de  César  dans  la  Gaule  et  les 
expéditions  de  ses  successeun  dans  la  Grande-Bretagne 
et  la  Germanie  doublèrent  presque  l'étendue  du  monde 
ancien.  Mais  la  géographie  mathématiqpe  semble  oubliée 
pendant  deax  siècles,  et  la  science  se  nome  à  la  géogra- 
phie descriptive  et  aux  itinéraires,  comme  le  prouvent  les 
ouvrages  de  César  lui-même,  de  Strabon,  oe  Pline,  de 
Pomponius  Mêla,  de  Tadte,  les  Périples  de  Denys  le  Pé- 
riégète  et  d'Arrien,  et  les  Stathmes  Piurthiques  (stations 
des  routes)  d'Isidore  de  Charax  :  ces  ouvrages  étaient 
sans  doute  accompagnés  de  cartes  itinéraires.  César,  et, 
après  lui,  Auguste,  avaient  ordonné  à  trois  géomètres 
grecs,  Théodote,  Zénodote  et  Polvdète,  de  mesurer  la 
surface  de  l'empire  romain,  et  le  gendre  d'Auguste, 
Agrippa,  avait  exposé  à  Rome  une  carte  du  monde  dont 
Pline  fait  souvent  mention.  C'est  sans  doute  de  cette 
carte  que  les  Romains  avaient  extrait  les  itinéraires  dont 
quelques-uns  sont  parvenus  Jusqu'à  nous  (T.  Imé- 
RAïass).  L'ouvrage  de  Strabon  représente  l'état  de  la 
science  au  commencement  de  l'are  chrétienne.  Cet  au- 
teur oriente  mal  l'Europe  occidentale  et  les  côtes  méri- 
dionales de  l'Asie  :  ainsi,  il  pense  que  les  Pyrénées  se 
dirigent  du  N.  au  S.,  et  que  le  Rhin  leur  est  parallèle  ; 
que  la  Grande-Bretagne  a  une  forme  triangulaire,  et  qua 
rirlande  est  située  entièrement  an  N.  de  la  grande  lie.  U 
ne  connidt  rien  au  delà  de  l'Elbe,  et,  dans  la  Méditer- 
ranée même,  il  donne  à  l'Italie  une  direction  presque 
entièrement  de  1*0.  à  l'E.  Gomme  Ératosthène,  il  fait  da 
la  Caspienne  un  golfe  de  l'océan  septentrional,  et,  dans 
sa  pensée,  la  côte  de  l'Inde  depuis  l'indus  Jusqu'en  cap 
Comorin  se  dirige  tout  entière  ven  l'Orient.  Mais  la 
Grèce  et  la  plus  grande  partie  de  l'Asie  sont  riches  de 
descriptions  exactes  et  de  détails  historiques  du  plus 
haut  intérêt,  et  l'ouvrage  de  Strabon  est  le  modèle  la 
plus  parfait  de  la  géographie  politique*  Dans  le  second 


GÉO 


967 


GÉO 


ilède  do  rèie  elirôtieime,  la  géographie  mathématique 
«■t  tiiée  ds  roubU  par  deux  Grecs,  lialin  de  l^et  Pto- 
lémée.  Marin  lenoaTela  le  système  des  cartes  plates 
d*EratoatbèQe ;  mais  ses  cartes,  comme  ses  ouvrages, 
tout  perdoes,  et  Ptoiémée  seul  nous  fait  comialtre  les 
unes  0t  les  motres.  L*onvTage  de  Ptolômée  est  le  résumé 
de  toute  la  adenoo  géographique  de  Tantiquité,  à  Tépoquo 
ds  la  plus  grande  extension  de  Tempire  romain.  E^lé- 
mée  oriento  bien  plus  exactement  que  Strabon  TEspagne, 
l'Italie,  la  Gaule  et  les  lies  Britanniques;  il  connaît, 
quoique  on  peu  confusément,  le  S.  de  la  Baltique  iusque 
vers  m  58^  de  latitude;  en  Afrique,  ses  connaissances 
sur  le  Niger  et  principalement  sur  le  Nil  supérieur  sont 
faites  pour  nous  étonner  encore  aujourd'hui  ;  en  Asie,  il 
revient  à  risolement  de  la  Caspienne,  tout  en  donnant  à 
cette  mer  une  fausse  extension  de  TE.  à  rO.  ;  une  partie 
de  TAsie  centrale  est  désignée  sous  le  nom  de  Sérique, 
et  l'Inde  an  delà  du  Gange  assez  bien  décrite  Jusqu'au 
Grand  Golfe  (  de  Martaban }.  Mais,  à  côté  de  ces  mérites, 
on  renoontre  l'hypothèse  étrange  d'une  terre  continue 
allant  de  la  c6te  de  l'Inde  à  celle  de  l'Afrique,  et  faisant 
de  la  mer  des  Indes  une  immense  Caspienne,  hypothèse 
qui  s'est  perpétuée  pendant  une  partie  du  moyen  âge,  et 
a  longtemps  lait  croire  aux  Européens  qu'il  éuit  impos- 
sible d'arriver  aux  Indes  en  contournant  l'Afrique.  11  ne 
fallait  rien  moins  que  l'expédition  de  Vasco  de  Gama 
pour  détruire  cette  erreur.  Dans  ses  cartes,  Ptoiémée 
sobstîtiia  aux  nrojecdons  d'Ératosthène  et  d'Hipparque 
la  frqjêeUon  âdimydcfidê  (c-à-d.  ayant  la  forme  dHm 
manteau),  projection  par  développement  conique  modi- 
fiée, et  qui  se  rapproche  beaucoup  de  celle  que  nous  ap- 
pelons axjourd'hni  projection  de  Flamsteed  corrigée.  Les 
parallèlee  y  sont  paiement  formés  d'arcs  de  cercle  con- 
centriques et  équidistants,  et  les  méridiens  conservent 
leur  espacement  réel  sur  tous  les  parallèles.  Ptoiémée 
donne,  an  dernier  livre  de  sa  Géographie,  la  description 
des  26  cartes  (10  d'Europe,  4  d'Afrique,  13  d'Asie)  qui 
accompagnent  son  ouvrage  dans  les  manuscrits  que  nous 
avons  conservés  de  lui  ;  mais  on  pense  oue  ces  cartes 
sont,  pour  le  dessin,  l'osuvre  d'un  artiste  Alexandrin  du 
IV*  siècle,  Agathodœmon,  qui  les  construisit  d'après  les 
calculs  de  Ptoiémée,  et  qu^elles  ont  été  plus  ou  moins 
fidèlement  reproduites  par  les  copistes  du  moyen  âge. 
Les  latitudes  et  les  longitudes  de  Ptoiémée  sont  loin 
d'être  toijours  exactes,  et,  par  suite,  ses  cartes  nous 
étonnent  par  la  configuration  souvent  bizarre  des  pays 
qu'elles  r^résentent  :  alnd,  ses  longitudes  renferment 
principalement  des  erreurs  énormes  vers  l'Orient,  où  il 
donne  à  la  Méditerranée  une  étendue  de  20  degrés  de 
plus  qu'elle  n'en  peut  avoir,  erreur  qui  a  persisté  )us- 
qu'anx  cartes  de  Delisle  au  commencement  du  xvm"  siècle. 
11  recule  les  bouches  du  Gange  de  plus  de  46  degrés  au 
delà  de  leur  véritable  position;  mais  c'est  par  cette  hy- 
pothèse de  l'extension  exagérée  de  l'Asie  vers  l'Orient  et 
du  peu  de  distance  auquel  elle  devait  se  trouver  de  l'Es- 
pagne par  l'Ouest,  que  Colomb  a  été  amené  à  chercher - 
vers  rOcddent  la  route  des  Indes,  et  a  découvert  un 
Nouveau  Monde  qu'il  prit  pour  une  partie  de  l'Asie. 
Dans  l'occident  de  la  Méditerranée,  les  latitudes  et  les 
longitudes  de  Ptoiémée  sont  beaucoup  plus  exactes,  et, 
par  suite,  le  dessin  de  ses  cartes,  comme  leur  graduation, 
s'éloigne  beaucoup  moins  du  dessin  et  de  la  graduation 
modernes. 

Géogra^hiB  du  Moyen  Age,  —  A  partir  du  v*  siècle  et 
pendant  près  de  1,000  ans,  les  travaux  géographiques  de 
i'aatiqoité  semblent  n'avoir  pas  existé.  Les  secs  abrégés 
d'Agathémère  et  de  Marden  d'Héraclée,  le  poème  confus 
de  Festos  Aviénus,  les  Notices  des  provinces  ou  de  l'Em- 
pire, les  Dictionnaires  géographiques  de  Vibius  Sequester 
et  d'EnsèbOt  voilà  les  dernières  productions  de  l'âge  ro- 
main. Un  moine  égyptien  du  vi*  siècle,  Cosmas  Indico- 
Çleosiès,  représente,  dans  sa  Topographie  chrétienne,  la 
erre  comme  une  vaste  surface  plane  entourée  d'une 
mursilie;  11  ne  peut  comprendre  la  sph^dté  de  la  Terre, 
et  cette  opinion  lui  semble  une  héréde  et  un  reste  de 
paganisme*  Le  dessin  Joint  à  son  ouvrage  est  la  plus  an- 
cienne mappemonde  du  moyen  âge.  Au  vn*  siède  appar- 
tient une  géographie  en  latin  barbare,  composée  par  un 
anonyme  appelé  le  Géographe  de  Ravenne,  et  qui  ne  sert 
presooe  qu'à  nous  (jdre  regretter  tous  les  ouvraces  an* 
ourd'hui  perdus  qu'il  a  consultés.  Les  cartes  de  cette 
époque,  oeUe  de  l'abbaye  de  SMSall  an  vn*  dècle,  et  la 
mappemonde  en  argent  que  possédait  Gharlemagne ,  n'é- 
taient pas  sans  doute  moins  barbares  que  les  livres, 
ai  l'on  en  loge  par  odle  qui  accompagne  un  manuscrit 
ée  VjlpoeeuypM  conservé  à  la  Bibtioâièque  royale  de 


Turin.  Cette  mappemonde  parait  être  du  jx*  dècle  i  la 
Méditerranée,  qui  y  est  représentée  par  tfn  parallélo- 
gramme régulier,  s'étend  Jusqu'au  miheu  de  la  carte,  où 
elle  est  rejointe  à  angle  droit  par  une  masse  d'eau  sépa- 
rant l'Europe  de  l'Asie,  et  se  réunissant  à  l'Océan  qui 
entoure  la  Terre;  le  Nil  y  est  ausd  large  que  la  Méditer- 
ranée, et  toutes  les  lies  sont  de  forme  carrée  et  d'une 
étendue  à  peu  près  égde.  —  Pendant  que  l'Europe  occi- 
dentale était  ploneée  dans  l'ignorance,  les  Arabes  recueil* 
laient  l'héritage  de  la  sdence  grecque.  Au  ix*  siède ,  le 
calife  Al-Mamoun  fit  mesurer  un  degré  du  méridien  dans 
le  désert  de  Syrie,  entre  Rakka  et  Palmyre,  et  traduire 
en  arabe  la  géographie  de  Ptoiémée.  C'est  surtout  vers  le 
centre  et  l'orient  de  l'Ade ,  et  vers  les  côtes  orientales 
de  l'Afirique  que  la  domination  arabe  étendit  les  limites  du 
monde  connu.  La  conquête  du  bassin  de  i'Indus  mit  les 
Arabes  en  rdation  avec  l'Asie  centrale  et  même  avec  la 
Chine,  où  ils  se  rendaient  par  deux  routes,  celle  de  terre 
qui  leur  fit  connaître  le  Thibet,  le  Turkestan  diinois  et 
la  Chine  méridionale,  et  celle  de  mer  qui  les  mena  à  Gey- 
lan,  à  Sumatra  et  à  toutes  les  lies  de  la  Malaisie.  En 
Afrique,  ils  étendirent  leur  religion  jusqu'à  Sofala,  et 
colonisèrent  Madagascar,  qu'ils  appelaient  Phanbalon. 
De  ce  mouvement  de  découvertes  naquit  une  riche  litté- 
rature géographique;  parmi  les  géographes  Arabes,  on 
dte  Ma^udi  et  ibn-Haukal  au  x*  dède,  Edrid  au  xu*. 
Ibn-d  -  Ooardy ,  HamdouUah ,  Aboul-  Feda ,  El  - Bakoni 
au  xiv%  et,  au  xv*,  Léon  l'Africain,  qui  appartient  presque 
à  la  géographie  moderne.  Mais  les  cartes  de  ces  géogia- 

{>hes  sont  inférieures  à  ce  (fue  pouvaient  faire  espérer 
eurs  ouvrages.  Les  plus  curieuses  sont  cdles,  au  nombre 
de  60,  qui  accompagnent  l'ouvrage  d'Edrid,  et  dont  trds 
enrichissent  la  traduction  qu'en  a  donnée  M.  Jaubert 
(Paris,  1836).  — Les  pirateries  des  Scandinaves  firant 
connaître  l'Europe  septentrionale  et  même  un  nouveau 
monde  trop  tôt  oublié.  Le  roi  saxon  Alfred  le  Grand 
nous  a  conservé  les  relations  de  deux  Normands,  Other 
et  WulfÎBtan,  qui,  dans  le  ix*  siède,  explorèrent,  lo  pre- 
mier les  côtes  de  l'Océan  Gladal  et  de  la  mer  Blanche, 
le  second  cdles  de  la  Bdtique.  D'autres  naviguent  an 
N.-O.,  découvrent  les  lies  Féroé  en  861,  et  en  872  lis- 
lande,  d'où  Erik  Rauda  s'élance  en  982  pour  aborder  au 
Groenland,  bientôt  assez  peuplé  pour  être  divisé  en  deux 
cantons  et  recevoir  un  évêque.  En  1002,  Ldf,  fils  d'Erik, 
et  Biôm  cinglent  au  S.-0.,  découvrent  une  tle  rocheuse 
qu'ils  appellent  Uelleland,  puis  une  terre  basse.  Mark" 
land,  et  un  pays  couvert  de  vignes  sauvages  qui  lui  m^ 
ritent  le  nom  de  Vtniond.  Le  jour  le  plus  court  y  ayant 
été  observé  de  8  heures,  on  ne  peut  méconnaître  que  les 
Scandinaves  ont  découvert  les  côtes  du  Canada  actud  et 
des  États-lkiis  jusque  vers  le  42*  degré,  et,  par  consé- 
quent, trouvé  rAmérique  avant  Colomb.  Ces  contréoi 
inrent  révélées  à  l'Europe  par  deux  Vénitiens,  les  frères 
Zeni,  qui  y  firent  une  expiédition  en  1381  :  la  carte  oui 
accompagna  la  relation  de  leur  voyage,  imprimée  seule» 
ment  en  1558,  représente  assez  exactement  les  côtes  do 
Danemark  et  de  Norvège,  l'Idande,  et  d'autres  contrées 
dont  le  nom  apparaît  pour  la  première  fois  dans  la  carto* 
graphie,  la  Fnslande  (éans  doute  les  Féroè),  le  Groen- 
land, enfin  Estotiland  et  Drocoo,  voisins  du  Vinland,  et 
qui  paraissent  être  Terre-Neuve  et  la  Nouvelle-Éoosoe. 
Mais  l'invadon  d'une  flotte  ennemie,  en  141 8,  détruisit  ces 
colonies  normandes  de  l'Amérique,  et  le  monopoledu  com- 
merce avec  l'Islande  et  le  Groenland  que  s  était  arrogé 
la  couronne  de  Norvège  enleva  à  l'Europe  la  connaisaanee 
de  ces  découvertes  ;  il  est  probable  que  Colomb,  dans  soa 
voyage  en  Islande,  en  l477,  n'en  eut  aucune  connais 
sauce,  puisque,  au  lieu  de  se  diriger  vers  le  N.-0.,  où 
il  eût  été  certdn  de  trouver  des  terres,  il  dla  au  Sud 
jusqu'aux  Canaries,  et  de  là  vers  le  S.-O.,  dans  les  para^ 
îèles  de  l'Inde,  dont  il  se  flattdt  de  toucher  les  extréniités» 
—  Après  les  Scandinaves,  deux  autres  peuples  firent  fsirs 
à  la  géographie  des  progrès  dont  les  iniits  ne  fùreat 
point  perdus  pour  la  sdence;  ce  sont  les  Italiens  et  les 
marins  de  la  côte  orientale  d'Espagne,  Catalans  et  M^|or- 
quins.  Les  Croisades  rapprocheront  les  Européens  des 
Orientaux,  et  l'invasion  dies  Mongols,  qui,  dans  le  ooo- 
rant  du  xm*  dède,  soumirent  la  plus  snuide  partie  de 
l'Ade  et  détruisûrent  l'empire  des  Califes,  détermina 
les  pi^Ms  et  les  rois  européens,  entre  autres  S*  Louis,  à 
envoyer  des  ambassadeurs  à  ces  ennemis  des  Musul- 
mans. Delà  les  voyages  de  Nicolas  Ascelin,  de  Jean  dm 
Plan-Carpin,  de  Rubruquis  (1245-1295],  qui  firent  asB« 
fidèlement  connaître  la  Rusue  et  l'Ade  centrde.  Us  eoal 
tous  surpassés  par  le  Vénitien  Marco  Polo,  qui  pareomt 
de  1271  à  1205  toute  l'Asie  centrde,  la  Chine  qnm 


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appelle  Cathay,  visite  le  Japon,  qo*il  nomme  Zipangou, 
■ekninie  à  Sumatra,  et  revient  par  le  8ad  de  l'Asie  et 
TAÂiqae.  Sa  relation,  sans  cesse  dtée  par  Colomb,  le 
confirma  dans  la  confiance  qu'il  accordait  aux  longitudes 
erronées  de  Ptolémée,  et  le  poussa  plus  fortement  encore 
à  chercher  la  route  des  Indes  par  TOcddent.  Les  Croi- 
ttdes  donnèrent  encore  l'essor  aux  marines  de  Venise, 
de  Gdnes  et  de  Pise,  et  firent  faire  de  rapides  progrès  à 
U  cartographie  de  la  Méditerranée.  Les  neuf  cartes  ma- 
rines du  Génois  Visconti,  datées  de  1318,  et  conservées  à 
la  Bibliothèque  impériale  de  Vienne,  donnent,  avec  des 
formes  assez  justes  et  des  proportions  généralement  ob- 
servées, la  Méditerranée,  le  Pont-Euxin  et  l'O.  de  TEu- 
rope.  Le  Vénitien  Sanuto,  proposant,  en  1321,  une  croi- 
sade commerciale  pour  arracher  le  commerce  des  Indes 
au  Soudan  d'Égjrpte,  accompagna  son  livre  ^Sicrsta  Pi" 
ddium  Crucis)  d'une  carte  qui  faisait  connaître  les  pays 
dont  il  purlait  ;  elle  a  été  reproduite  par  Bongars  dans  ses 
Gesta  Ùei  per  Francos.  Ce  sont  encore  des  Vénitiens,  les 
firères  Pidgauli,  qui  publièrent  en  1367  une  grande 
mappemonde  (anj.  à  Parme),  où  les  formes  sont  déjà 
exactes,  les  détails  nombreux  et  disposés  avec  sagacité. 
De  leur  côté,  les  Bfajorquins  avaient  inventé,  à  la  fin  du 
xm*  siècle,  les  cartes  planes,  et  les  Catalans  le  disputè- 
rent bientôt  en  hardiesse  et  en  science  nautiques  aux 
républiques  italiennes.  Aucune  carte  de  cette  épooue  n'a 
une  plus  haute  valeur  que  VAAom  Catalan  de  1375  (à  la 
Bibliothèque  impériale  de  Paris  )  ;  l'Europe  y  est  Téptê- 
sentée  avec  détaib,  particulièrement  dans  le  S.-0.  ;  le 
lac  Issikoul,  dans  l'Asie  centrale,  y  est  figuré;  mais  ce 
qui  est  surtout  curieux,  c'est  la  représentation  des  côtes 
occidentales  d'Afrique,  où  l'on  trouve  le  cap  Bojador,  les 
Açores,  Madère  sous  le  nom  analogue  d'Isola  di  Legname 
(lie  des  forêts),  et  les  Canaries,  longtemps  avant  les 
voyages  des  Portu^s  et  de  Béthencourt,  à  <jul  l'on  attri- 
bue ces  découvertes  :  la  gloire  en  doit  revenir  aux  Mi^or- 
quins  et  aux  Catalans.  —  Le  xv*  siècle  est  une  époque 
mémorable  dans  l'histoire  de  la  séographle.  Le  Normand 
Béthencourt  oooquiert  les  Canaries  pour  la  couronne  de 
Gastille,  et,  depuis  1415,  les  Portugids,  sous  l'impulsion 
de  l'infant  D.  Benri,  dépassant  les  caps  et  les  aiîchipeis 
visités  par  les  Catalans,  voient  avec  surprise,  après  avoir 
doublé  le  cap  Vert ,  que  la  côte  d'Afnque,  an  lieu  de 
s'étendre  à  l'ocddent  comme  l'ensei^ait  Ptolémée,  se 
repliait  vers  l'est.  Ce  premier  démenti  donné  par  l'expé- 
rience aux  hypotlièses  anciennes  fut  suivi  d'un  second, 
quand  on  eut  traversé  en  1472  la  région  équatoriale,  que 
les  géographes  représentaient  comme  inaccessible  à  cause 
de  la  c&aleur.  En  148G,  Barthélémy  Diaz  parvint  an  cap 
des  Tourmentes,  dont  le  roi  Juan  il  changea  le  nom  de 
nianvais  augiire  en  celui  de  cap  de  Bonn#-Espârance  ; 
pen  après,  les  relations  de  Govilham  et  de  Paiva,  envoyés 
anx  Indes  par  l'Afrique  et  la  mer  Rouge,  firent  connaître 
'la  forme  ae  l'Afrique  orientale  et  la  possibilité  d'arriver 
par  mer  aux  côtes  de  l'Asie,  contrairement  à  l'hypothèse 
de  Ptolémée  sur  la  terre  continue  s'étendant  de  la  mer 
Ronge  au  pays  des  Sines.  Enfin  Vasco  de  Gama  doubla 
le  cap  de  Bonne-Espérance  en  1497,  et  arriva,  l'année 
tnivante,  à  Calicut.  Cétait  presque  un  nouveau  monde 
révélé  à  l'Europe,  séparée  depuis  tant  de  siècles  de  l'Asie 
méridionale.  &i  môme  temps  l'Espagne  marchait  sur  les 
tnœa  du  Portugal,  et  le  génie  de  Colomb  révélait  véri- 
tablement à  l'anden  monde  un  nouveau  continent  (1402). 
Un  si  prodigieux  mouvement  de  découvertes  devait  in- 
floer  sur  la  cartographie.  Aussi  les  globes  et  les  cartes 
du  XV*  siècle  sont-ils  bien  supérieurs  à  ceux  de  l'âge 
précédent;  il  suffit  de  citer  la  mappemonde  d'Andréa 
Bianco  de  1436 (à  laBibliot.  St  Marc  de  Venise),  celle 
dn  Vénitien  Fra  Mauro  de  1450  (Bibliot.  de  Murano,  près 
de  Venise),  le  fameux  globe  de  l'Allemand  Martin  Be- 
balm,  compagnon  du  Portugais  D.  Cam,  en  1484,  globe 
eonstruit  en  1492  (anj.  à  Nuremberg),  enfin  la  prédouse 
mappemonde  que  Juan  de  la  Cosa,  pilote  de  Christophe 
Colomb  dans  son  2*  voyage,  composa  en  1500  :  die  est  à 
la  Bibliot.  royale  de  Madrid  ;  mais  un  fac-similé  de  4  do 
ses  parties  se  trouve  dans  VHutoire  de  la  GéoffraphU  du 
Nouiveau  ConUnerU  d'Al.  de  Uumboldt,  t.  V. 

Histoire  de  la  Géographie  dans  les  temps  modernes. 
—  A  la  fin  du  xv*  siècle,  la  route  des  Indes  et  celle  de 
FAmérique  étaient  trouvées;  Tosuvre  des  siècles  sui^uits 
tôt  de  compléter  ces  deux  découvertes  par  la  reconnais- 
sanoe  de  toutes  les  terres  et  des  océans  qui  séparaient 
Jaa  deux  pays.  Tous  les  peuples  de  l'occident  de  l'Eu- 
•eptae  jetèrent  dans  cette  voie  avec  une  égale  ardeur; 
Mis  oTest  encore  anx  Portugais  et  aux  Espagnols  qu'ap« 
yartient  la  gloire  principale  an  xvi*  siècle.  Les  sueces*  I 


seurs  de  Vasco  de  Gama,  Alméida,  Albaquerque,  Juan  dt 
Castro,  découvrent  Madagascar,  Geylan  (1506),  Malacca, 
les  lies  de  la  Sonde  et  les  Moluques  (1511),  fondent  Bfacao 
sur  les  côtes  de  Chine  (1517),  pénètrent  jusqu'au  Japon, 
et  fondent  un  immense  empire  colonial,  absorbé  à  la  fin 
du  siècle  dans  la  monarchie  espagnole.  En  Amérique,  un 
de  leurs  marins,  Cabrai,  avait  découvert  en  1500  le  Bré* 
ail  ou  Terre  de  S^*-Croix  ;  mais  sur  ce  continent  la  prin« 
dpale  gloire  rerient  aux  Espagnols.  Après  Colomb,  qul^ 
dans  son  3*  voyage  (1498),  avait  longe  la  côte  du  conti- 
nent méridional  jusqu'à  POrénoque,  Pinson  et  Vespuoe 
s'étaient  avancés  au  Midi  jusqu'au  delà  de  l'Equateur 
(1490-4500),  et  Diaz  de  Solis  Jusqu'à  l'embouchure  du 
Rio  de  la  Plata  (1516).  Mais  déjà  le  grand  isthme  central 
avait  été  traversé,  et  le  Grand  Océan  aperçu  et  touché 
par  Balboa  (1513).  De  là  l'entreprise  hardie  d'un  Portu- 
gais au  service  de  l'Espagne,  Magellan,  qui,  cherdiant 
au  sud  du  continent  nouveau  un  passage  eno^  les  deox 
océans,  traverse  en  1520  le  détroit  qui  porte  son  nom, 
franchit  le  vaste  océan  auquel  il  donna  le  nom  de  Paci- 
fique, et  découvre  les  archipels  des  Mariannes  et  des  Phi- 
lippines, où  il  est  tué.  Cano,  son  successeur,  arrive  par 
U  route  de  l'ouest  aux  Moluques,  que  les  Portugais 
avaient  atteintes  par  l'orient,  rerient  en  Espagne  par  le 
cap  de  Bonne-Espérance,  démontrant  ainsi  la  sphéricité 
de  la  Terre  enseignée  par  Pvthagore  et  Ariatote,  et  ayant 
accompli  le  premier,  en  1,124  jours,  le  tour  du  monde. 
Bientôt  la  conquête  du  Mexique  par  Gortez,  du  Pérou  par 
Pizarre,  du  Chili  par  Almagro  et  Valdivia  (1510-41),  l'ex- 

Iiloration  du  fleuve  des  Amazones  par  Orellana  (1541),  de 
a  Plata  par  Mendoza,  U  reconnaissance  des  côtes  de 
la  Californie  par  Ulloa  (1539-40)  et  par  Cabrillo  (1542), 
donnent  à  l'Espaene  les  vastes  contrées  situées  entre 
l'équateor  et  le  44r  de  latitude  nord  et  sud.  —  Cet  im- 
mense empire,  dont  Philippe  n  avait  voulu  presgue  in- 
terdire l'entrée  aux  autres  peuples  européens,  est  forcé  et 
démembré  an  xvn*  siècle  par  les  trois  grands  ennemis  de 
l'Espagne,  la  France,  l'Angleterre  et  la  Hollande,  qui  se 
disputent  la  souveraineté  des  mers  abandonnée  par  l'Es- 
pagne en  décadence.  Déjà,  dès  le  xvi*  siècle,  par  l'ordre 
de  François  I*',  Verazzani  en  1524,  Jacq.  Cartier  en  1534, 
avaient  révélé  à  l'Europe  l'ancien  Vinland  des  Scandi- 
naves, et  remonté  le  S^-Laurent  ;  au  xvu*,Champlain  par 
la  colonisation  du  Canada  (1606-8),  Cavalier  de  La  Salle 
par  l'exploration  du  bassin  du  Mississipi,  qu'il  appelle 
Louisiane  (1670-82;,  semblent  Justifier  le  nom  présomp- 
tueux de  nouvelle-France  donné  à  presque  toute  l'Amé- 
rique septentrionale. 

Les  Anglais  et  les  Hollandais  nariguent  intrépidement 
vers  le  pôle  nord,  cherchant  de  ce  côté  le  détroit  entre 
l'Atlantique  et  le  Pacifique,  que  Magellan  avait  trouvé 
dans  l'hémisphère  opposé.  Ainsi,  dès  1553,  l'Anglais 
Willoughby,  renouvelant  la  navigation  du  Scandinave 
Otber,  double  le  cap  Nord,  et  parrient  au  port  russe 
d'Arkhangel  au  fond  de  la  mer  Blanche.  En  1596-7,  les 
Hollandais  Barentz  et  Hemskerk  pénètrent  jusqu'au  nord 
de  la  Sibérie,  hivernent  à  la  Nouvelle-Zemble  et  au  Spitz- 
berg,  par  80*  de  latitude  nord.  Repousses  au  nord-est^ 
les  marins  anglais  cherchent  vers  le  nord-ouest  ce  pas- 
sage que  leurs  successeurs  ont  trouvé  seulement  de  nos 
jours.  Hudson  découvre  le  détroit  et  la  mer  qui  portent 
son  nom,  et  meurt  abandonné  par  son  équipage  (1610^, 
et  Baffin  s'avance  inutilement  jusqu'à  plus  de  70*  vers  le 
pôle  nord.  Mais  c*est  principalement  aux  Hollandais 
qu'appartient,  au  xvii*  siècle,  la  plohre  des  grandes  dé- 
couvertes maritimes  et  des  plus  importantea  conquêtes 
coloniales.  Lemaire  et  Schouten  découvrent  au  sud  de  la 
Terre  du  Feu  le  cap  Hom  (1616),  route  plus  abrégée  que 
le  détroit  de  Magellan,  sinon  plus  sôre,  pour  pénéâw 
dans  le  Pacifique.  Ils  forcent  l'entrée  de  ce  mystârienx 
empire  colonial  que  la  jalousie  espagnole  avait  voulu  dé- 
robor  à  la  convoitise  de  ses  rivaux.  Les  Hollandais,  y 
pénétrant  d'un  autre  côté  par  la  route  du  cap  de  Bonne- 
Espérance,  s'emparent  des  lies  de  la  Sonde,  des  Moluques, 
fondent  Bataria  (1618),  et,  jusqu'en  1644,  ]&  Papouasie, 
les  côtes  de  la  |;rande  terre  appelée  bientôt  Nouvelle- 
Hollande,  déjà  visitées  par  les  Portugais  et  les  Espagnols 
de  1511  à  1540,  sont  explorées  par  Dirck  Nardighs,  Car- 
penter,  Nnytz,  et  surtout  Tasman,  qui,  s'Avançant  le  plus 
loin  de  tous  vers  le  sud  et  l'est,  découvre  la  Terre  de 
Van-Diémen  et  la  Nouvelle-Zélande  (1642).  Mais  par  suite 
do  la  forme  défectueuse  donnée  dana  les  cartes  hoUan- 


xviii*  siècle  et  aux  navigateurs  anglais  et  français,  Car* 


CfiO 


969 


GÉO 


MM,  Gook,  BoagaîiiTllIe  et  La  Peyrouse,  qu'appartient 
la  gloire  d'ayoir  véritablement  fait  connaître  la  cinquième 
partie  du  monde.  Pendant  oos  deux  aiècles,  la  géographie 
politique  et  la  géographie  mathématique  marchent  d*  un 
pai  qsal  à  ce  rapide  mouvement  de  découvertes.  Les 
principaux  recueils  sont  :  le  Théâtre  de  l'Univert  d'Or- 
teihis  (1570),  VAtlas  de  Hercator  (1595),  auquel  on  doit 
la  projection  plaie  corrigée  qui  porte  son  nom,  V Atlas 
Mmor  et  VAtlas  Major  de  Hondius,  qui  commence  à  ré- 
duire les  dimensions  exagérées  données  par  Ptolémée  à 
TAsie  orientale,  les  Cartes  t^ographiques  des  Blaeu, 
desSanson,  des  Duval,  des  Jaillot,  les  Essais  de  géogra» 
phi0  eomjHsrée  d*Adrien  de  Valois  et  de  Quverius,  enfin 
le  Globe  et  les  Cartes  de  G.  Delisle,  qui,  s*éclatrant 
des  découvertes  astronomiques  du  premier  Cassini,  ré- 
forma toute  la  géographie  mathématique,  et  corrigea  les 
erreurs  persistantes  dans  les  dimensions  de  TAsie  et  de 
la  Méditerranée  orientale. 

Au  xviu*  siècle,  c'est  vers  la  géographie  du  Nord-Est 
4e  TAsie,  du  Nord-Ouest  de  VAménque  et  de  TOcéanie 
centrale  que  se  ]>ortèrent  les  efforts  des  marines  russe, 
anglaiae  et  française.  Les  Russes,  maîtres  de  la  Sibérie 
oeddeotale  depuis  la  fin  du  xvi«  siècle,  s'étaient  avancés 
Jusqn*au  fleuve  Amour  et  à  l'océan  Pacifique  à  la  fin  du 
XTi^  ;  mais  rien  n'était  plus  confus^  même  dans  les  cartes 
de  Delisle,  que  les  contrées  limitrophes  du  Japon  et  des 
extrémités  septentrionales  des  deux  continents.  Ce  furent 
deux  Danois  au  service  de  la  Russie,  Spangenberg  et 
Behring,  qui  reconnurent  les  lies  Kouriles,  la  mer  et  le 
détroit  de  Behring,  les  lies  Aléoutiennes,  la  presqu'île 
d*AlB8chka,  et  les  rivages  de  l'Amérique  Jusqu'au  mont 
S*-Élie.  Mais  les  contours  de  ces  pavs  ne  furent  parfaite- 
ment déterminés  que  par  Cook  et  La  Peyrouse  ;  le  pre- 
mier, dans  son  3*  voyaîge,  parcourut  toute  la  côte  améri- 
caine depuis  111e  de  Sitkha  jusqu'au  cap  Glacé,  par  70* 
bL  nord;  le  second  découvrit  le  détroit  qui  porte  son 
nom  entre  les  lies  lézo  et  Tairakal,  et  la  Manche  de  Tar- 
tarie,  entre  Tarrakai  et  le  continent  (1787).  Un  an  aupa- 
ravant, La  Peyrouse  avait  également  parcouru  la  côte  de 
FAmérique  du  Nord,  au  sud  du  S'-Élie,  risitée  après  lui 
par  Dixon  (1787),  Vancouver  (170S-94),  Brougnton  et 
Gray,  qui  explorèrent  la  Colombia  ou  (hr^n  (1792).  On 
•iierchait  déjà  à  relier  ces  découvertes,  par  des  explora- 
tions sur  terre,  aux  colonies  anglaises  de  la  Nouvelle- 
Bretagne.  De  là  les  voyages  d'Hearne  (1771)  aux  bords  de 
la  Coppermine,  et  de  Mackensie  (1789-93)  sur  le  fleuve 
qui  porte  son  nom.  Dans  TOcéanie,  Dampier  découvrit 
tai  Nouvelle-Bretagne  (1704),  Wallis  le  sud  de  l'archipel 
vaoL  et  Otahiti  déjà  entrevu  par  Quiros  en  1606, 
i  la  Nouvelle-Irlande  (1707);  Bougainville  (1708), 
avoir  touché  à  Otahiti,  découvrit  l'archipel  diss  Na- 
nrs  et  celui  de  la  Louisiade;  Cook,  dans  trois 
voyi^ges  (1769-70),  s'avança  jusqu'aux  banquises  du 
>  antarctioue,  découvrit  le  détroit  qui  porte  son  nom 
les  lies  oe  la  Nouvelle-Zélande,  la  Nouvelle-Call- 
explora  la  côte  orientale  de  la  Nouvelle-Hollande, 
les  lloQvelles- Hébrides,  appelées  lies  du  S^- Esprit  par 
Qnim  (1606)  et  Grandes -Gyclades  jjieT  Bougainville 
(1768),  enfin  découvrit  l'archipel  Sandwich,  où  il  trouva 
la  mort.  La  Peyrouse,  après  son  expédition  en  Amérique 
et  en  Asie,  parcourut  aussi  la  plus  grande  partie  de  cet 
areliipel,  et  périt  à  Vanikoro  (1788).  D'Entrecasteaux, 
envoyé  vainement  à  sa  recherdie,  explora  mieux  qu'on 
ne  Pavait  fait  jusqu'alors  la  Papouasie  et  les  lies  vol- 
aines.  —  Ce  siècle  fut  aussi  très-fécond  pour  la  géogra- 
phie mathématique  et  politioue,  par  suite  du  grand  dé- 
Téteppenaent  des  sdences  mathématiques  et  économiques. 
Les  voyages  de  Maupertuis  au  cercle  polaire  et  de  La  Ëon- 
damineà  l'Equateur  (1736),  pour  mesurer  des  arcs  du 
méridien,  commencèrent  à  faire  connaître  la  forme  vé- 
ritable et  les  dimensions  exactes  de  la  terre  s  Cassini  de 
Tliury  entreprit  et  Jacques-Dom.  Cassini  acheva  la  grande 
carte  de  France  en  183  feuilles,  modèle  de  tous  les  travaux 
de  œ  genre  exécutés  depuis  par  les  gouvernements.  D' An- 
ville  perfectionna  les  xnéthodes  de  iSelisle,  devina  souvent 
par  la  foite  de  son  esprit  ce  que  les  observations  et  les 
voyages  ne  démontrèrent  que  longtemps  après,  et  ne  pu- 
blia pu  moins  de  311  cartes  et  de  78  Hémoires  plans 
d'émditioa  êot  tous  les  si^ets  de  géosraphle  ancienne, 
da  ffloyen  Ige  et  moderne.  Gossellin  édain  beaucoup  de 
pofiits  otoeors  de  la  géographie  mathématique  des  An- 
dèna,  et  enrfebit  de  cartes  savantes  la  traduction  de 
Staboo*  Non  moins  Importants  sont  les  travaux  et  les 
cartes  de  ilennell  aar  la  géographie  d'Hérodote,  celle  de 
flaàoasÈen  et  lee  courants  de  la  mer.  La  statistique  fut 
oééa  mr  Èe  ^ëograp^  allemand  Btlaching,  et  la  déve- 


loppement  de  cette  science  produisit  un  grand  nombre 
de  cartes  détaillées  dans  tous  les  États  de  l'Europe  :  la 
carte  de  Belgique  par  Ferrari  en  25  feuilles,  en  Alle- 
magne celles  de  Homann  et  de  Sotsmann ,  de  Cary  en 
Angleterre,  de  Rizzi-Zannoni  en  Italie,  de  Buache,  de» 
deux  Robert  de  Yaugondy  et  de  Bonne  en  France. 

Les  guerres  de  la  Révolution  et  de  l'Empire  interrom- 
pirent pour  25  ans  les  grands  voyages  de  découvertes. 
On  ne  cite  guère  pendant  cette  période  que  quelques 
voyages  scientifiques  dans  des  contrées  déjà  explorées,  et 
un  grand  développement  de  la  cartographie  militaire. 
Parmi  les  premiers,  on  remarque  le  grand  voyage  d'Al. 
de  Humboldt  et  de  Bonpland  dans  l'Amérique  espagnole 
M799^804),  ceux  de  Flindera  et  de  Baudin  sur  les  côtes 
méridionales  et  ocddentales  de  la  Nouvelle- Hollande 
(1801-3);  parmi  les  cartes  de  cette  époque,  VAtlas  nch 
tùmai,  en  85  feuilles,  de  Gianlaire  ;  les  cartes  de  Hen- 
telle;  la  belle  carte  d'Italie  de  Bâcler  d'Albe  pour  les 
campagnes  de  Bonaparte,  en  30  feuilles  ;  celles  d'Éjgypte 
et  de  Syrie,  dont  Jacotin  enrichit  la  Grande  description 
de  VEgypte  due  aux  savants  qui  avaient  accompagné 
l'expédition  française.  —  Avec  la  paix  générale  recom- 
mencèrent les  grands  voyages  de  découvertes,  qui,  pour- 
suiris  jusqu'à  nos  jonra,  ont  eu  pour  principaux  objets 
les  deux  pôles  et  le  centre  des  deux  continents  d'Afrique 
et  d'Océanie.  Le  pôle  nord  fût  attaqué  le  premier,  dans 
l'espoir  de  découvrir  le  fameux  passage  nord-ouest,  oublié 
depuis  Hudson  et  Baffin  ;  les  Anglais  eurent  presque  seuls 
l'honnear  de  ces  découvertes.  John  Ross  (1818  et  1829) 
découvrit  les  Highlands  arctiques  sur  la  côte  occidentale 
du  Grotoland,  et  la  terre  Boothia,  la  plus  septentrionale 
du  continent  américain.  Parry,  dans  quatre  voyages  suo- 
cessib  (1819, 1821,  1824,  1827),  franchit  le  détroit  dei 
Lancastre  où  s'était  arrêté  Ross,  découvre  ceux  de  Bar- 
row  et  de  |lelrille,  l'immense  archipel  Parry,  et,  plus  aw 
sud,  le  détroit  de  Fury  et  Hekia,  l'Ile  Cockbum  et  la» 
presqu'île  Helville;  puis,  s'élevant  directement  ven  le 
pôle  an  nord  du  Spitibeif;,  11  parvient  jusqu'à  82°  45'  de 
latitude.  Ces  grands  résultats  ne  furent  égalés  que  dans 
les  voyages  de  Franklin  en  1818  au  N.-O.  du  Spitzberg 
jttsau'à  80°  34'  de  latitude;  dans  ses  expéditions  par  terre 
(1819, 1835),  où  il  reconnut  Ih  plus  grande  partie  de  la 
côte  du  continent,  alon  totalement  inconnue,  à  TE.  et 
à  rO.  des  fleuves  Coppermine  et  Mackensie;  enfin  dans 
son  4"  voyage  (1845),  où  il  périt  en  1847,  mais  après 
avoir,  comme  on  le  sut  seulement  en  1859,  exploré  l'ar- 
chipel Parry  et  atteint  presque  ven  le  sud  le  point  où  il 
était  parvenu  dans  ses  précédents  voyages  par  terre. 
Dix-huit  expéditions  entreprises  pour  retrouver  ses  traces 
ont  étendu  conshlérablement  le  domaine  de  la  géogra- 
phie. Enfin,  en  1853,  Hac-CIure,  venant  par  les  détroits 
de  Behring,  de  Banks  et  de  Melrille,  et  Inglefleld  par 
ceux  de  Davis,  de  Lancastre  et  de  Barrow,  ont  résolu  le 
problème  du  passage  Nord-Ouest.  En  môme  temps  l'Amé- 
ricain Kane,  naviguant  directement  au  nord  de  lis  baie  de 
Baffin,  franchit  le  détroit  de  Smith ,  le  canal  Kennedy, 
et,  pénétrant  jusqu'au  82*,  découvrit  une  mer  libre  de 

?  laces  qui  seniole  ouvrir  le  chemin  ven  le  pôle  arctique 
1853-1855  )•  —  Les  découvertes  furent  moins  considé- 
rables ven  le  pôle  austral.  Au  sud  de  l'Amérique,  les 
marines  anglaise,  française  et  russe  rivalisèrent  d'ardeur» 
Smith  (1819),  Powell  (1821)  etBisooé  (1832)  découvrirent 
les  Shetland,  les  Orcades  du  sud  et  la  terre  de  Graham  f 
DumontHd*Drrille,  les  terres  Louis-Philippe  et  Joinville 
(1838);  Bellinghausen,  les  Iles  Alexandre  l*'  et  Pierre  I*'. 
Au  sud  de  rAustraliê,  Dumont-d'Urville  signala  les  côtes 
Clarie  et  Adélie  (1840);  mais  l'expédition  la  plus  mémo- 
rable est  celle  de  James  Clarke  Ross,  neveu  de  l'explora- 
teur des  terres  arctiques,  qui,  franchissant  enfin  le  cercle 
polaire  austral,  trouva  une  mer  libre  de  banquises,  dé-> 
couvrit  la  terre  Victoria,  et  releva  une  immense  étendue 
de  côtes  du  10^  au  78*  de  latitude,  où  la  découverte  des 
volcans-glacien  Erebus  et  Terror  signala  dignement  le 
terme  de  ses  travaux  et  la  limite  actuelle  du  monde  an- 
tarctique. —  L'Afrique,  presque  oubliée  jusqu'à  la  fin  do 
xvm*  siècle,  a  été,  depuis  cette  époque,  le  théâtre  de 
nombreuses  explorations.  Le  voyage  de  Bruce  (17G9-73), 
qui  découvrit  les  sources  du  Nil  Bleu,  et  surtout  la  fon- 
oation,  en  Angleterre,  de  l'Association  africaine  en  1788, 
ramenèrent  l'attention  sur  cette  partie  du  monde.  Les 
explorations  furent  glorieusement  inaugurées  par  le  double 
voyage  de  Hungo-Park  (1795,  1803),  qui  découvrit  le 
ooon  supérieur  et  moyen  du  Niger.  Il  fut  snlri  par 
Denham  et  Clapperton,  qui  trouvent  le  lac  Tchad  M8Û)| 
les  Maee  Lander,  qui  explorent  les  bouches  du  Niger  i 
Gaillié,  le  premier  voyageur  qui  revint  de  Tomboudo» 


GÉO 


970 


GÊO 


(4828-30}  ;  Becroft  et  Laird.,  qai  explorèrent  le  grand 
iffluent  au  Nig^,  la  Tchadda  ou  Benouè,  pendant  que 
de  Tripoli  partait,  en  1850,  la  grande  expédition  de  Ri- 
chardson,  Overweg,  Barth  et  Vogel,  qui  explorèrent  toat 
le  pays  entre  la  Méditerranée  et  la  Tchadda,  entre  Tom- 
bonctoa  et  le  Ouaday.  A  Test,  des  expéditions  mémorables, 
mais  jusqu'à  présent  inrructoeuses,  étaient  tentées  pour 
trouTer  les  sources  du  Nil.  MéhéîaietrAli,  envoya  deux 
expéditions  (1839-1841  ),  qui,  commandées  par  BL  d'Ar- 
naud, remontèrent  le  Nil  Blanc  jusqu'à  4*42'  latitude 
nord;  le  missionnaire  allemand  Knoblecher  poursuivit 
ces  recherches  jusqu'à  4<*  0',  Brun-Pollet  jusqu'à  3^  Anj;. 
Vineo  jusqu'à  2*;  et  aujourd'hui  de  nouveaux  voyageurs, 
ritidien  liiani,  le  Français  Lejean  et  l'Allemand  Hen^lin 
continuent  ces  recherches.  A  ces  découvertes  se  relient 
celles  qui  sont  entreprises  à  Test  de  l'Afrique  par  les 
missionnaires  et  les  officiers  anglais  partis  de  Mombaxa. 
Parmi  les  premiers,  Krapf  et  Rebmann  découvrirent  en 
1849  les  glaciers- volcans  Kenia  et  Kiliman4iaio ,  et 
Erhardt  recueillit  de  précieux  renseignements  sur  l'exis- 
tence de  grands  lacs  intérieurs,  iqwrçus  enfin  en  1857 
par  Speke  et  Burton,  et  appelés  par  eux  Ui^Ji  et  Ukérévé. 
En  même  temps,  au  S.  de  l'Aftique.  le  missionnaire  an- 
ghûs  liringstone,  après  avoir,  en  1849,  découvert  le  lac 
Ngami  et  les  rivières  qu'il  reçoit,  explora  tout  le  cours 
du  Zambèie,  et,  le  premier  des  Européens,  traversa  toute 
l'Afrioue  australe,  de  l'embouAhure  de  ce  fleuve  à  8^ 
Paul  de  Loanda  sur  la  côte  occidentale.  Andersen,  Gai- 
ton,  Ladislas  Magyar,  ont  poursuiri  ces  exploration!,  et 
il  n'y  a  plus  aulourd*htti  que  le  centre  de  l'Afrique,  des 
•deux  cotés  de  rÊquateur,  qui  se  dérobe  encore  à  notre 
curiosité.  —  La  dernière  découverte  parmi  les  cinq  par- 
ties du  monde,  l'Australie,  a  été  aussi  la  dernière  explo- 
rée, et,  jusqu'en  1815,  on  ne  connaissait  que  la  ligne  des 
«ôtes  situées  entre  le  Pacifique  et  les  Hontagnes-Blenes. 
En  1815,  Macquarie  rranchlt  ces  montagnes  et  découvrit 
le  fleuve  qui  porte  son  nom  ;  Oxley  explora  le  Laehian 
(1817  )  ;  Sturt,  le  Darling  et  le  Hurrumbridge  (1829-30). 
Au  nord  du  continent,  Mitchell  et  Leichards  recon- 
nurent la  côte  et  l'intérieur  entre  Sidney  et  le  golfe  de 
Carpentarie.  Les  frères  Grégoiy,  déjà  connus  par  leurs 
«xploratioiis  dans  l'ouest,  remontèrent  la  rivière  Victoria, 
découvrirent  la  chaîne  de  partage  entre  les  eaux  de  la 
côte  et  celles  de  l'intérieur  (1855\  et,  l'année  suivante, 
traversèrent  tout  le  nord  pour  arriver  à  Brisbane,  sur  la 
côte  orientale.  Au  midi,  Eyre  découvrit,  en  1842,  le  vaste 
lac  Torrens.  Sturt  en  1844^  Babban  en  1856,  Grégory  en 
1858,  Mac-Dougal  Stuart  en  1800,  parvinrent  presque 
Jusqu'au  centre  du  continent,  mais  sans  pouvoir  encore, 
en  partant  du  sud,  arriver  jusqu'à  la  côte  septentrionale. 
Dans  des  voyages  maritimes  ou  terrestres,  sans  ftdre 
de  découvertes  nouvelles,  on  a  recueilli  d'innombrables 
•bservations  sur  tous  les  points  de  la  géographie  mathé- 
matique, physique  et  politique,  et  sur  les  sciences  qui 
s'y  rattachent,  météorologie,  histoire  naturelle,  ethno- 
graphie, linguistique.  Parmi  les  premiers,  nous  dterohs 
•ceux  de  Frmrcinei,  en  1817  ;  de  Duperrey,  sur  la  Co- 
«uti/tf,  en  1822;  de  Dumont-d'Urville,  sur  V Astrolabe, 
en  1820;  de  Wrangell  et  LQtke,  qui  explorèrent  les  côtes 
de  la  Sibérie  et  de  la  Nouvelle-Zemble  (1820-23)  ;  de 
La  Place,  sur  la  Fawritë  (1830)  et  l'ArUmisê  (1837)  ;  de 
Dupetit-Thouars,  sur  la  Vénus  (1837-30);  enfin  de  la 
frégate  autrichienne  Novara  en  1857.  Parmi  les  seconds, 
•on  distingue  ceux  de  Léopold  de  Buch  dans  la  Scandi- 
iiavie,  d'Al.  de  Humboldt  dans  la  Sibérie  occidentale 
(1829),  de  Gastren  dans  l'Altaï,  de  Middendorf  (1844-55), 
•de  Mourawiew  (1854),  de  Maak  sur  l'Amour,  de  Khani- 
kow  dans  la  région  de  F  Aral,  et  plus  récemment  (1858) 
dans  le  Khorassan  ;  de  Texier  et  de  Tchihatchew  dans 
l'Asie-Hlneure;  de  Laborde,  Lepsius,  Berton,  Lynch,  de 
'Saulcy,  Tobler  dans  la  Syrie,  la  Palestine  et  l'Arabie;  de^ 
Botta,  Fresnel,  Layard,  Rawlinson,  Oppert  dans  l'an- 
> donne  Mésopotamie,  la  Babylonie  et  la  Perse;  de  Jacqu»- 
mont  (1828-30),  Everest,  Hooker  et  des  frères  Schlagint- 
welt  dans  l'Hlndoustan.  Dans  l'Amérique  du  Nord,  les 
explorations  de  Lewis  et  Clarke  sur  le  cours  supérieur 
de  rorégon  (1804),  de  Pike  (1805)  et  Long  (181(^  entre 
le  Missiasipi  et  les  montagnes  Rocheuses,  de  Frémont 
entre  ces  montagnes  et  la  Californie  (1842-45);  dans 
l'Amérique  du  Sud,  les  voyages  d'Alcide  d'Orbigny  (1826), 
Aug.  de  Saint-Hilaire,  Gastelnau,  Pentland  et  Bowring; 
"Ceox  de  Squier,  de  Hellert  et  de  GareUa  dans  l'Amérioue 
centrale,  a  Toocasion  des  projets  de  communication  in- 
terocéanique. —  A  tous  ces  éléments  de  connaissance 
-Tiennent  se  Joindre  les  relevés  de  terrains  ou  de  côtes 
•entrepris  par  les  gouremeoieati  pour  les  besoins  de  l*ad- 


ministration  ou  de  la  défense,  et  publiés  par  les  états- 
m^ors  des  armées  et  les  hydrographes  de  la  marine. 
Tels  sont,  en  France,  les  Dépôts  de  la  marine  et  de  la 
guerre;  en  Angleterre,  les  cartes  de  l'Amirauté;  en  AU^ 
magne,  les  publications  des  états- majors  autrichiens, 
prussiens,  bavarois,  etc.  ;  les  Dépôts  topographiques  de 
Naples  et  de  S'-Pétersbourg;  la  Direction  hydrographique 
de  Madrid;  TÉtat-Mi^or  général  hollandais;  le  Dépôt  de 
la  marine  à  Copenhague;  le  Bureau  topographique  fé- 
déral de  Suisse;  VHyirophical  office  des  Etats- unis  et 
les  belles  cartes  de  F.  Biaury.  Parmi  les  grandes  opéra- 
tions géodésiques,  il  faut  citer  la  mesure  de  l'arc  de 
cercle  entre  Dunkerque  et  Fermentera,  commencée  sous 
le  l*'  Empire  par  les  savants  français  Delambm.,  Mé- 
cbain,  Biot  et  Arago  ;  celui  de  l'Hindoustan,  entre  THy- 
malaya  et  le  cap  Comorin,  par  le  colonel  Everest,  et  celui 
que  les  savants  russes  Struve  et  Woldstett  ont  récem- 
ment mesuré  du  om  Nord  aux  bouches  du  Danube.  — 
Tous  ces  travaux  et  les  innombrables  productions  de  sta- 
tistique faites  par  les  gouvernements  ou  les  particuliers, 
l'enseignement  si  fécond,  en  Allemagne,  du  célèbre  Rit- 
ter,  ont  fait  aujourd'hui  de  la  géographie,  naguère  encore 
simple  annexe  de  l'histoire,  une  sdence  particulière. 
L'Allemagne  et  l'Angleterre  marchent  actueUement  à  la 
tète  des  nations  européennes  dans  les  sciences  géogra- 
phiques, encore  peu  r^Muidues  et  peu  goûtées  en  France, 
bien  que  notre  pays  ait  fondé  la  premiâre  Société  géogra- 
phique à  Paris  en  1821  :  depuis  se  sont  établies  celles 
de  Beriin  en  1827,  de  Londres  en  1830,  de  Bombay  en 
1831 ,  de  Fhmcfort-sur-le-Mein  en  1830,  de  Darmstadt 
et  de  S^Pétersbourg  en  1845,  de  New-York  en  1851,  de 
Vienne  et  de  (Senève  en  1858.  Toutes  ces  aodétés  pu- 
blient des  Bulletins  et  des  Mémoires.  Il  faut  y  ajouter 
trois  établissements  particuliers  importants  :  l'institut 
géographique  de  Weimar,  VÊtablissemmt  géographique 
de  Vander^Moêlen  à  Bruxelles,  et  celui  de  Perthes  à  Go- 
tha, qui  publie  un  important  recueil,  les  MUthêiluttgênf 
dirigé  par  Petermann.  Non  moins  important  est  le  re- 
cueil des  Annales  des  Voyages,  fondé  à  Paris  en  1808  par 
Malte-Brun,  et  continué  aujourd'hui  par  son  fils.     C.  P. 

GEOLE,  logement  des  gardiens  de  prison,  et  autrefois, 
par  extension,  la  prison  même.  Jadis  le  geôlier,  chargé 
de  la  garde  des  prisonniers,  percevait  sur  eux  un  geôlage 
{ V,  ce  mot  dans  notre  Oicitotmatr»  de  Biographie  et 
d^Histoire)»  Depuis  la  Révolution,  on  a  établi  un  traite- 
ment fixe  pour  tous  les  employés  de  l'administration  det 
prisons,  mais  le  geôlier  perçoit  encore  des  bénéfices  dans 
les  fournitures  qu'il  est  autorisé  à  fi^re  aux  prisonniers. 

GÉOPONIQUES  (du  çrec  ghè,  terre,  et  ponos,  travail), 
nom  donné  par  les  anciens  Grecs  à  la  sdence  de  Tagri- 
culture.  Cest  aussi  le  titre  d'un  recueil  d'écrits  en 
langue  grecque,  relatifs  à  cette  sdence,  recueil  formé  an 
IV*  siècle  par  (^assianus  Bassus.  La  meilleure  édition 
srecque-laane  est  celle  de  Leipzig,  1781, 4  vol.  in-4o  ;  les 
uéoponiques  ont  été  trad.  en  français  par  Pierre  de  Nar- 
bonne,  1545-50,  in-12. 

GÊORAMA  (du  erec  gè,  terre,  orama,  spectade),  spec- 
tacle imaginé  en  1823  par  Ddanglard.  Le  spectateur  se 
pla^t  au  centre  d'une  sphère  de  plus  de  30  met.  de  cir- 
coniérence,  en  toile  vernissée,  sur  laquelle  on  avait  figuré 
toutes  les  terres  du  globe;  il  pouvait  ainsi  tout  embrasser 
d'un  seul  coup  d'onl,  tandis  qu'avec  de  grands  glob^ 
vus  extérieurement,  on  n'aperçoit  à  la  fols  qu'une  petite 
portion  de  la  terre.  Un  nouveau  (xéorama  fut  ouvert  en 
1844  par  Ch.-Aug.  Guérin  aux  Champs-Elysées,  à  Paris. 
—  On  donne  aussi  le  nom  de  Géorama  à  une  représen- 
tation en  relief,  sur  une  échelle  plus  ou  moins  grande, 
de  l'ensemble  ou  d'une  psrtle  de  la  terre. 

GEORGES-DB-BOCHÉRVILLE  (Église  de  Sararw). 
Cette  église,  bfttie  pour  un  collège  de  chanoines  par  Raoul 
de  Tancanrille,  chambellan  du  duc  de  Normandie,  Guil- 
laume le  Bâtard,  entre  les  années  1050  et  1000,  et  érigée 
en  abbaye  en  1114,  s'élève  sur  le  côté  ocddental  d'une 
haute  colline,  à  8  kll.  S.-O.  de  Rouen.  C'est  un  monu- 
ment roman,  que  l'achèvement  de  la  construction,  l'unité 
du  style  et  le  développement  du  plan  rendent  un  des 
plus  complets  qui  existent.  La  fa^e  occidentale  offine 
une  porte  à  arcade  pldn  dntre,  dont  les  voussoirs  sont 
décorés  de  zigzags,  de  bâtons  rompus,  de  dents  de  ade, 
de  pointes  de  diamant,  etc.,  et  surmontée  de  deux  rangs 
de  trois  arcades,  le  tout  couronné  par  un  haut  pignon 
sans  ornements.  Elle  est  circonscrite  par  deux  tourellee 
carrées,  qui  portent  à  leur  sommet  des  campaniles  dans 
le  style  du  zm*  siècle,  et  accotées  d'ailes  basses  et  étroitea 
correspondant  aux  bas  côtés  de  l'édifice.  L'église  a ,  qq 
effet,  trois  ne&t  terminées  cJiaeune  par  une  abside  drcn- 


6É0 


971 


GÉR 


Un.  A  nntenection  des  traniepts  s'élève  une  lanterne, 
fonnaat  mi  dehors  on  étage  carré  de  11  met  de  côté  et 
de4  met.  de  hauteur  pour  les  cloches  :  cet  étage  est 
eoilTé  d'une  flèche  en  charpente  recouverte  d'ardoise, 
liinta  de  fl  met.,  et  passant  du  carré  à  l'octogone  au 
nojrendeooy&ttx  sur  les  diagonales.  L'intérieur  de  l'église 
s's  qu'une  ornementation  fort  simple,  analogue  à  celle 
Al  portail  ;  des  feuillages  et  quelques  figures  se  montrent 
lax  chapiteaux  des  piliers,  monuments  de  la  sculpture 
du  XII*  ûède  dans  sa  naïveté  barbare.  On  remarque  à 
l'extrémité  de  chaque  transept  une  sorte  de  tribune  sou- 
tenue par  deuiL  arâides  qui  se  réunissent  sur  une  même 
colonne  massive.  —  Près  du  flanc  septentrional  de  l'église 
est  une  belle  salle  ciq)itulaire  ohlongue,  construite  à  la 
fia  da  Tin*  siècle  ou  au  commencement  du  xiii*  :  elle  est 
^dairée  par  de  hautes  fenêtres  en  lancette,  au-dessous 
desquelles  règinent,  du  côté  de  l'entrée,  trois  arcades  à 
plein  antre.  Ce  mélange  de  formes  circulaires  et  de 
tonnes  ogivales  révèle  le  style  de  transition.  V.  Deville, 
Bs9tti  historique  nur  Véglise  et  l'abbaye  de  S^-Georges- 
de-BoehervUU,  Rouen,  1827,  in-4o,  B. 

GÉORGIENNE  (langue),  une  des  langues  caucasiennes 
(F.  os  mot),  rattachée  généralement  aux  langues  indo- 
earopéenne»,  bien  que,  selon  les  Géorgiens,  elle  en  soit, 
par  l'ét^mologie,  complètement  indépendante.  Elle  tient 
au  sanscrit  par  l'intermédiaire  des  antiques  idiomes  de 
la  Perse.  Legécirgien  est  riche  en  flexions  grammaticales. 
La  déclinabon  est  la  même  pour  les  substantifs,  les  ad- 
fectifis  et  les  pronoms.  Ces  mots  n'ont  qu'un  seul  genre. 
La  langue  admet  beaucoup  de  mots  dérivés  et  compo- 
sés; ellB  ne  connaît  point  Tusage  de  l'article.  Dans  le 
verbe,  les  personnes  ont  chacune  leur  caractéristique 
particidière  ;  les  temps  de  l'indicatif  sont  au  nombre  de 
sept,  dont  trois  passés  et  trois  futurs;  certaines  parti- 
cues  servent  à  convertir  l'indicatif  en  conditionnel.  Le 
sobjonctîf  n'existe  pas.  Le  passif  se  forme  par  des  verbes 
aoxiUsires.  Les  prépositions  sont  jointes  à  la  fin  du  nom 
qu'elles  régissent.  On  distingue  dans  le  géorgien  5  dia- 
lectes, ceux  du  Karthli,  da  Kakhéti,  d'Imeréthie,  de 
ICngrâie  et  du  Gouria  ;  les  Russes  lui  donnent  le  nom 
de  ffrounen  ou  grousinien.  Un  certain  nombre  de  mots 
persans,  arméniens  et  turcs ,  sont  souvent  employés  à  la 
place  de  leurs  synonymes  dans  cet  idiome  ;  on  trouve 
même  des  mots  latins  et  français,  venus  pour  la  plupart 

rla  voie  de  la  Russie.  La  prononciation  est  rude,  à  cause 
raocumuladon  des  consonnes.  —  Les  Géorgiens  ont 
deax  alphabets  :  le  mUgaire  ou  mUilaire,  dont  ils  font 
remonter  l'usage  ]usqu*à  Alexandre  le  Grand,  en  faisant 
honneur  de  son  introduction  à  Phamavaz,  leur  l*'  roi; 
et  VeedéMiastique,  inventé  par  l'Arménien  Mesrob.  Ce 
dernier  a  aujourd'hui  une  double  forme,  se  composant 
de  no^juscules  et  de  minuscules.  Les  philologues  re- 
oaxient  l'alphabet  vulgaire  comme  une  transformation 
de  reodésiastique ,  et  croient  qu'il  n'a  été  fixé  qu'au 
inr*  siècle. 

Les  Géorgiens  ont  une  littérature.  Selon  Tarchiman- 

drite  Engénius  {Tableau  historique  de  la  Géorgie)^  la 

jirosodie  est  fondée  sur  les  tons  ou  accents;  Brosset 

prétend,  an  contraire,  que  le  nombre  des  syllabes,  avec 

ta  rime  finale  qui  a  été  empruntée  du  turc,  est  la  règle 

de  la  versification.  Le  j>lus  ancien  livre  ^rgien  que  Ton 

poosMe  est  la  traduction  de  la  Bible,  faite  au  viii*  siècle 

par  S^  Enpbémius  on  Eutiiymius.  Un  général  Roustewel 

a  compoeé  nn  poème  que  quelques  critiques  pensent 

aTOÎr  &é  en  partie  tiré  de  sources  persanes,  L homme 

i  ^WÊê  peau  de  tigre,  ou  Amours  de  Tarid  et  de  iVe»- 

Daredian,  On  peut  encore  citer,  parmi  les  monn- 

its  de  la  littérature  géorgienne,  un  poème  héroïque, 

la  Tamariani,  éloge  de  la  reine  Thamar  par  Tsachru- 
daadsé;  deux  romans  en  prose,  le  Visramiam  par  Sarg 
de  Tluno^wi,  et  le  Dare^anianx  par  Mosé  de  Khoni  ;  le 
Datgyithi€mù  recueil  de  poésies  de  David  Gouramis  Chvili; 
les  satfres  de  Beasarion  Gabas  Chvili  ;  un  recueil  d'hymnes 
relipenx  et  nationaux  formé  au  tvm*  siècle  par  le  pa- 
triarche Antoni  ;  le  Code  du  roi  Wakhtang,  et  la  Chro-' 
«asQ«i#  qui  porte  le  nom  de  ce  prince.  K.  Maggi,  Syntag- 
wmala  tmsn*arum  orientalimn  qua  in  Georgiœ  regwnibus 
€sidhmtur,  Rome,  1643,  in-fol.  ;  Klaproth,  Vocabulaire 
IféorgimÊr-fremçais  elt  français-géorpien,  Paris,  1827,  in-S*; 
~  '^  Alter,  Sur  la  littérature  géorgienne,  en  allemand, 
1798,  in-8«;  Brosset,  Rscherches  sur  la  poésie 


géorgiÊÊsnê,  dans  le  Journal  asiatique  d'avril  1830;  le 
m^^^  jfémoires  relatifs  à  la  langue  et  à  la  littérature 
sdbrmffMMf.  Paris,  1833;  la  môme,  éléments  de  la  langue 

géomtenme,  Pâr^  ip^.  i"-»*. 
GBORGIQDfiS  (du  grec  gé^  terre,  et  ergon^  travail  >• 


poème  didactique  composé  par  Virgile,  à  la  prière  da 
Mécène,  son  protecteur,  entre  les  année»  717  et  lih  de 
Rome  (36  et  29  av.  J.-C.},  dans  le  but  de  remettre  en 
honneur  parmi  les  Romains  l'sgriculture  aJt>andonnée 
pendant  les  guerres  civiles,  et  de  les  ramener  à  la  sim- 
plicité des  mœurs  de  leurs  ancêtres.  Ce  poème  se  com- 
pose de  quatre  chants,  dont  les  s^jets  sont  :  la  culture 
de  la  terre,  celle  des  arbres  et  de  la  vigne,  le  soin  des 
troupeaux,  et  l'élève  des  abeilles.  Des  invocations,  des 
préceptes  sur  le  sujet  spécial  de  chacun  des  chants,  des 
épisodes  destinés  à  prévenir  la  monotonie  d'une  exposi- 
tion continuellement  didactique,  telle  est  la  marche  con- 
stante de  Virgile.  On  lui  a  reproché  le  manque  d'ordre  : 
mais,  si  la  méthode  n'est  pas  complètement  rigoureuse, 
elle  est  suffisamment  nette  et  claire,  et  on  ne  peut  pas 
exiger  d'un  poème  la  même  rigueur  que  d'un  traité  ré- 
gulier en  prose.  Virgile  n'a  pas  épuisé  tout  son  sujet; 
mais  s'il  a  omis  plus  d'un  point  important,  par  exemple, 
la  culture  des  ju^ns,  c'est  volontairement  et  déterminé 
par  son  goût  de  poète,  ou  bien  parce  que  ces  parties  de 
l'a^culture  étaient  étrangères  au  but  qu'il  se  proposait, 
l'utile,  et  non  l'agréable.  —  Virgile  (n,  175)  semble  se 
donner  comme  un  imitateur  d'Hésiode;  cependant  le 
poème  les  OEuvres  elles  Jours  n'a  presque  rien  de  com- 
mun avec  les  Géorgiques  que  la  similitude  du  genre. 
L'auteur  latin  a  beaucoup  moins  emprunté  aux  Grecs 
qu'à  Varron  et  à  Caton  :  son  ouvrage  n'est  pas  seulement 
un  résumé  de  la  science  antique;  il  contient  aussi  les 
résultats  de  sa  propre  expérience,  et  il  est  devenu  une 
autorité  pour  les  Anciens,  puisque  Pline  et  Colnmelle  le 
citent  fréquemment.  Les  (Uorgtques  sont  un  parfait  mo- 
dèle de  l'art  de  relever  et  d'embellir  les  détails  les  plus 
communs  de  la  vie  rustique  :  la  variété  des  tons,  la  ra- 
pidité de  la  marche,  le  charme  continu  du  style,  tout 
concourt  à  en  faire  un  poème  rempli  de  beautés  supé- 
rieures, plein  d'imagination  et  de  goût,  production  d'un 
génie  élevé,  qui  avait  atteint  toute  sa  vigueur  et  sa  matu« 
rite.  Virgile  a  eu  des  continuateurs  ou  des  imitateurs, 
mais  jamais  de  rivaux.  Colnmelle  a  traité  en  vers  des  Jar- 
dins, dans  le  10"  livre  de  son  Traité  De  re  riÂStica;  le 
P.  Vanière  a  donné  le  Prœdium  rusticum,  en  XVI  chants  ; 
le  P.  Rapin,  Hortorum  libri  IV;  l'Anglais  Thompson,  les 
Saisons^  en  IV  chants,  imitées  chez  nous  dans  les  Soi" 
sons  de  Saint-Lambert  et  les  Mois  de  Roucher;  Rosset 
a  composé  V Agriculture^  en  IX  chants.  Les  Géorgiques 
ont  été  traduites  en  vers  français  par  l'abbé  Marolles, 
Segrais,  Martin,  Le  Franc  de  Pompignan,  et  enfin  De- 
mie, qui  les  a  fait  oublier  tous  et  a  composé  lui-même 
les  Trois  règnes  en  VIII  chants,  les  Jardins  en  IV  chants, 
l'Homme  des  champs  en  IV  chants.  Toutes  ces  œuvres 
complémentaires,  toutes  ces  traductions,  ne  servent  qu'à 
faire  sentir  plus  profondément  la  désespérante  perfection 
de  Virgile.  V.  dans  le  tome  II  du  Génie  de  Virgile  par 
Malfll&tre,  des  Réflexions  sur  les  Géorgiques,  des  ana- 
lyses, de  nombreuses  traductions  et  imitations  en  vers  ; 
le  Discours  préitminaire  en  tète  de  la  traduction  de 
Delille;  les  Notices  historiques,  arguments  et  appré- 
dations  littéraires  de  l'édition  de  Virgile,  par  H.  Bou- 
chot 1860.  F.  B. 

GÉRANT  (du  latin  gerere,  administrer),  celui  qui  ad- 
ministre les  affaires  d'autrui,  soit  d'un  particulier,  soit 
d*une  société  civile  ou  commerciale.  Dans  les  sociétés  en 
commandite,  lee  commandités  seuls  peuvent  être  gé- 
rants. Un  gérant  volontaire  est  tenu  des  obligations  qui 
résulteraient  d'un  mandat  exprès  {Code  Napoléon ,  W' 
ticle  1372).  —  Les  lois  du  11  juillet  1828  et  du. 9  sep- 
tembre 1835  astreignent  les  sociétés  qui  publient  un 
journal  à  avoir  un  gérant  responsable,  propriétaire  d'une 
part  ou  action  dans  ce  journal  et  d'un  tiers  du  caution- 
nement, pour  signer  la  feuille  de  chaque  jour  et  répondre 
de  son  contenu. 

GÉRARD  DE  NEVERS  (Roman  de).  F.  Violette  (La). 

GÉRARD  D£  ROUSSILLON,  poème  provençal  sur  lea 
démêlés  du  duc  Gérard  avec  Charles  le  Chauve,  que 
l'auteur  confond  avec  Charles-Hartel.  Gérard,  vaincu  et 
proscrit,  est  réduit  à  errer  avec  sa  femme  de  forêt  en 
Ibrèt,  d'ermitaoe  en  ermitage  ;  bref,  il  se  fait  charbon- 
nier, et  la  ducnesse  devient  couturière.  Enfin,  il  obtient 
son  pardon,  ^pAce  aux  prières  de  la  reine.  Le  Gérard  du 
roman  n'est  pas  un  personnage  imaginaire  ;  il  fut  réelle 
ment,  au  ix*  siècle,  comte  de  RousaUlon  (près  de  Châtil- 
lon-sur-Seine)  et  duc  de  Bourgogne.  Élevé  dans  le  palaii 
de  Louis  le  Débonnaire,  il  fut  toujours  fidèle  à  ce  prince, 
et  reçut  de  lui  le  comté  de  Pans.  Mais,  ayant  suivi  le 
parti  de  Lothaire,  il  fut  dépouillé  de  ce  comté  par  Charles 
le  Chauve.  Lothaire,  avant  de  mourir,  déaigna  Gérard 


GER 


972 


GER 


Sar  être  le  tuteur  du  roi  de  Provence,  l'un  de  ses  fils. 
I  fut  taon  aue  Gérard  s'établit  à  Vienne,  d'où  il  fit  plu- 
sieurs expéditions  contre  les  Sarrasins  établis  dans  le 
delta  du  Rhône.  En  863,  le  royaume  de  Provence  fut 
conquis  par  Charles  le  Chauve;  alors  Gérard  se  retira 
dans  son  ch&teau  de  Roussillon,  où  il  mourut  en  878. 
n  avait  fondé  plusieurs  abbayes,  dont  la  plus  célèbre  est 
eelle  de  Vézelai.  Le  poSme  de  Gérard  de  RoussUlon  parait 
avoir  été  composé  au  xn*  siècle;  il  existe  manuscnt  à  la 
Bibliothèque  nationale  de  Paris.  —  Un  poSme  en  langue 
d'oil  sur  le  même  sujet  a  été  publié  en  1858  par  M.  Mi- 
(;nard,  qui  le  rapporte  à  l'année  1316.  F.  Histoire  HUé- 
raire  de  la  France,  tome  XXII.  H.  D. 

GÉRARD  DE  VIÂNE,  2*  branche  de  la  chanson  de 
Guillaume  au  court  nez.  Gérard,  fils  de  Garin  de  Mont- 
glane,  obtient  de  l'empereur  le  fief  de  Vienne;  mais,  in- 
sulté par  la  reine,  il  prend  les  armes  contre  son  souve- 
rain. Assiégé  dans  Vienne,  il  résiste  pendant  sept  ans. 
Cest  à  ce  siège  que  Roland  rencontre  Olivier,  et  est 
fiancé  à  la  nelle  Aude.  —  Cette  chanson,  imitation  du 
roman  provençal  Gérard  de  RoussUlon,  est  attribuée  à  on 
certain  Bertrand,  de  Bar-sur-Aube.  La  Bibliothèque  na- 
tionale en  possède  deux  manuscrits  du  xiu*  siècle  ;  le 
Musée  Britannique  en  a  également  deux  du  xni*  siècle 
et  un  du  xiv*.  Une  partie  de  ce  roman  a  été  publiée  par 
J.  Bekkcr  à  Berlin,  1829,  en  tête  du  Fierahrat  proven- 
çtd.  Le  texte  complet  a  été  publié  par  Tarbé,  Reims, 
1820,  in-8«.  V.  VËTisL  litt.  de  la  France,  U  XXD.    H.  D. 

GERMAIN  (du  laUn  germanus)^  se  dit  des  frères  et 
des  sœurs  nés  du  même  père  et  de  la  même  mère,  par 
opposition  aux  comanguins  et  aux  utérim,  V.  Cousin. 

GERMAIN -L'AUXERROIS  (Église  SM,  une  des  plus 
anciennes  églises  de  Paris.  Fondée  par  Ghilpéric  sous  le 
nom  de  S^ermam4e~Rond  (à  cause  de  sa  forme),  elle 
fut,  lors  des  invasions  des  Normands,  prise  par  les  pi- 
rates, qui,  l'entourant  d'un  fossé,  la  changèrent  en  for- 
teresse, puis  y  mirent  le  feu  en  l'abandonnant.  Le  roi 
Robert  le  Pieux  la  rebâtit  en  1010.  Il  ne  reste  rien  de 
cet  ancien  édifice.  Le  grand  portail  actuel  parait  dater 
de  Philippe  le  Bel  ;  le  pignon  qui  le  surmonte  supporte 
une  statue  de  l'ange  du  Jugement  dernier,  exécutée  de 
nos  Jours  par  M.  Marochetti.  Le  porche  à  triple  arcade 
qui  fait  saillie  sur  ce  portail  date  de  1429.  Lorsque  les 
rois  habitèrent  le  Louvre,  Téglise  S^Germain-l'Auxerrois 
fut  adoptée  comme  paroisse  de  la  cour,  et  subit  de  no- 
tables changements  :  les  piliers  gothiques  prirent  une 
forme  moderne  ;  on  démolit  le  Jubé  qui  masquait  rentrée 
du  chœur,  et  on  le  remplaça  par  la  grille  de  fer  poli  et 
doré  qu'on  voit  aujourd'hui,  et  qui  est,  d'ûlleurs,  un  bel 
ouvrage  de  serrurerie;  le  banc  d'œuvre  a  été  sculpté 
d'après  les  dessins  de  Perrault  et  de  Lebrun  ;  c'est  peut- 
être  le  plus  remarquable  de  ceux  des  églises  de  Paris. 
En  1831,  l'église  fut  saccagée  par  une  émeute  populaire, 
et  on  la  ferma  Jusau'en  le37  :  alors  elle  fut  restaurée, 
sous  la  direction  ae  Laàsus,  et  rendue  au  culte.  Le 
portic^ue  fut  alors  décoré  de  peintures  murales,  exécutées 
a  la  cire,  par  M.  Mettez,  à  l'instar  de  beaucoup  d'églises 
d'Italie.  La  pensée  était  heureuse,  mais  l'humidité  de 
notre  climat  s'y  prêta  mal,  et  ai^ourd'hul  ces  peintures 
sont  déjà  un  peu  passées.  On  remarque,  à  l'intérieur, 
une  fort  belle  chapelle  de  la  Vierge,  et  des  peintures  à  la 
cire  exécutées  par  MM.  Amaury  Duval,  Jean  Gigoux  et 
Couderc;  des  vitraux  par  M.  Maréchal  (de  Metz);  dans  la 
croisée,  un  bénitier  tnnitaire  en  marbre,  par  M.  Joufi'roy, 
et  surtout  les  sculptures  en  bois  de  la  chapelle  de  la 
Passion.  S*-Germain-rAuxerrois  est  un  des  plus  curieux 
et  des  plus  gracieux  monuments  religieux  du  xiv"  et  du 
zv*  siècle.  En  1860-61,  on  a  élevé  au  Nord,  à  l'aligne- 
ment du  porche,  et  y  touchant  presque,  un  élégant  cam- 
panile (K.  GaiiPAinLB),  beaucoup  plus  élevé  que  celui 
qui  existe  au  Sud,  près  du  transept,  et  du  haut  duquel, 
en  1572,  partit  le  signal  du  massacre  de  la  S^Barthé- 
lemy.  B. 

GERMAIN-DES-PRÊS  (Êçlise  S*-^,  le  plus  ancien  des 
monuments  religieux  de  Pans.  Childebert  I*'  la  fonda  en 
543,  sur  l'emplacement  d'un  temple  consacré  à  Isis,  pour 
y  placer  la  tunique  de  S^^Vincent  et  une  croix  qu'il  avait 
rapportées  de  sa  campagne  au  delà  des  Pyrénées  contre 
les  Wisigoths,  et  la  dédicace  fut  faite  par  l'évêque  S* 
Germain  en  558.  Ce  prélat  fit  bâtir,  au  midi  de  l'édifice, 
un  oratoire  sous  rinvocation  de  S^ymphorien,  où  plus 
tard  lui-même  fut  inhumé.  Dans  plusieurs  actes  des  vn* 
et  VIII*  siècles,  l'église  est  désignée  sous  le  nom  de  S^-Ger- 
main  et  S^Vincent.  Elle  était  alors  décorée  de  mosaïques 
d'or,  et  sa  couverture  était  en  métal.  En  754,  le  corps  de 
S*  Germain,  exhumé  de  l'oratoire,  fut  déposé  dans  l'église, 


gui  bientôt  ne  fut  plus  désignée  que  sous  le  seul  nom  de 
S'-Germain.  Ravagée  par  les  Normands  en  845, 856  et  861, 
reconstruite  par  l'abbé  Gozlin,puis  encore  livrée  en  proie 
aux  pirates,  elle  ne  se  releva  de  ses  ruines  qu'aux  xi*  et 
xu*  siècles,  et  le  pape  Alexandre  III,  qui  la  consacra  ea 
1163,  déclara  au'elle  ne  relèverait  que  du  saint-siége. 
L'architecture  de  l'Oise  S^Germain-des-Prés  marque 
une  époque  fort  intéressante  dans  l'histoire  de  l'art,  celle 
où,  à  côté  du  plein  cintre  roman,  commence  à  poindra 
l'ogive.  L'édifice  est  en  forme  de  croix  ;  l'extrémité  orien- 
tale est  circulaire,  et  autour  du  rond-point  rayonneni 
cinq  chapelles  également  circulaires.  Les  transepts,  qui 
sont  fort  courts,  datent  du  xni*  siècle.  Les  piliers  de  la 
nef  sont  carrés,  et  flanqués,  sur  chaque  face,  d'une  co* 
lonne  engagée;  les  arcades  en  plein  cintre  qui  les  unis- 
sent sont  ornées  d'un  tore  élégant  sur  Tarête.  Sur  les 
chapiteaux,  d*un  travail  assez  bvbare,  on  a  représenté  des 
figures  entières,  des  monstres  et  des  plantes  exotiques. 
Cette  partie-là  est  évidemment  la  plus  ancienne.  Dans  le 
chœur,  les  fenêtres  de  la  claire-voie  sont  à  ogives;  les 
colonnes  de  la  galerie  du  premier  étage  sont  couronnées 
par  un  entablement  horizontal;  les  colonnes  du  rond- 
point  supportent  des  ogives,  tandis  que  les  autres  arcades 
du  chœur  présentent  des  pleins  cintres.  L'édifice  fut  ré- 

f)arâ  en  1653  :  ce  fut  alors  qu'on  pratiqua  des  ailes  sur 
es  deux  côtés,  et  qu'une  voûte  remplaça  le  vieux  lam- 
bris qui  couvrait  les  murs.  De  nos  Jours,  l'église  S*-Ger- 
main-des-Prés  a  subi  une  nouvelle  et  entière  restaura- 
tion :  M.  Flandrin  a  peint  à  la  dre  divers  sujets  sur  les 
murailles  du  chœur  ;  les  piliers  et  les  voûtes  ont  reça 
une  peinture  polychrome,  qui  rappelle  la  décoration  de 
la  S^'^hapelle;  la  flèche  a  été  reconstruite  en  entier; 
enfin  on  a  repris  en  sous-œuvre  la  tour,  que  les  archéo- 
logues regardent  comme  un  débris  de  l'édifice  élevé  du 
temps  de  Childebert.  F.  Bouillard,  Histoire  de  Vabbaye 
royale  de  S^-Germain-des-Prés,  Paris,  1724,  in-fol.      B. 

GERMAIN -EN- LA YE  (Chàteau  de  S^-).  En  1124, 
Louis  Yl  le  Gros  fit  bâtir  à  S^-Germain  un  ch&teau  fort, 
où  ses  successeurs  séjournèrent  fréquemment,  et  qui  fut 
incendié  par  les  Anglais  en  1346.  Les  travaux  de  reédifi- 
cation furent  commencés  par  ordre  de  Charles  V,  en 
1367.  François  I",  non  content  de  les  achever,  fit  élever 
l'édifice  d'un  étage,  et  le  décora  de  toutes  sortes  d'orne- 
ments, tels  que  chiffres,  armes,  salamandres,  F  cou- 
ronnés, et  autres  fantaisies  élégantes  dont  les  artistes  de 
la  Renaissance  étaient  prodigues.  Comme  le  château  avait 
néanmoins  conservé  l'aspect  d'une  forteresse ,  Henri  IV 
voulut  avoir  une  résidence  rovale  plus  moderne,  et  fit 
construire,  à  une  distance  de  130  met.  environ,  par  son 
architecte  Marchand,  un  CliâUau  neuf,  dans  le  style  de 
la  Renaissance.  Il  était  sur  le  bord  de  la  colline  au-dessus 
de  la  Seine,  vers  laquelle  les  Jardins  descendaient  en 
terrasses  soutenues  par  des  maçonneries;  et,  sous  ces 
terrasses,  on  ménagea  des  grottes  garnies  de  coquillages 
et  de  figures  automates,  ouvrage  du  mécanicien  florentin 
Francini.  Louis  XIV,  qui  naquit  dans  ce  château,  dépensa 
plus  de  6  millions  pour  l'embellir,  puis  l'abandonna  après 
la  construction  de  Versailles.  Quand  le  roi  Jacques  II 
vint  chercher  un  refuge  en  France,  Louis  XIV  le  logea  au 
vieux  chjlteîui  de  S^ermain.  Pendant  la  Révolution,  on 
fit  une  prison  do  ce  chùteau  sombre  et  triste.  Sous  le 
1*'  Empire,  on  y  installa  une  école  de  cavalerie;  la  Res- 
tauration en  fit  une  caserne  de  gardes  du  corps  ;  après 
1830,  on  le  transforma  en  pénitencier  militaire  ;  Napo- 
léon III  l'a  consacré,  en  1862,  à  un  musée  celtique  et 
romain.  Le  château  neuf  fut  abandonné  pendant  la  mi- 
norité de  Louis  XIV,  et  il  n'en  reste  aujourd'hui  que 
quelques  terrasses  et  un  pavillon  improprement  appelé 
Pavillon  de  Henri  IV ^  ancienne  chapelle  transformée  en 
restaurant.  Le  vieux  château,  de  forme  pentagonale,  est 
de  briques  et  de  pierres,  et  couvre  une  supeirficie  d*un 
hectare  55  ares.  Les  cinq  pros  pavillons  d'angle,  bâtis 
par  Mansard,en  1687,  ont  été  remplacés  de  nos  jours.  La 
chapelle  ogivale,  située  du  côté  de  la  place  du  Théâtre, 
fut  peinte,  au  temps  de  Louis  XIII,  par  Vouet  et  Lesueur . 
Autour  du  château,  François  I*^  avait  fait  planter  un  jar- 
din, qui  fut  agrandi  sous  Louis  XIV  et  dessiné  à  nou- 
veau par  Le  Nôtre;  les  bassins  et  !es  Jets  d'eau  furent 
comblés  en  1750.  La  terrasse,  une  des  plus  magnifiques 
promenades  de  l'Europe  pour  l'étendue  du  parcours  et 
du  point  de  vue,  fut  construite  par  Le  Nôtre  en  1676  : 
elle  a* près  de  2,400  met.  de  longueur,  35  met.  de  lar- 
geur, et  est  soutenue  par  un  mur  élevé,  avec  cordon  et 
uiblette  de  pierre.  K.  le  Supplément. 

GERMAINS  (Religion  des).  V.  notre  Dictionntnrê  d9 
Biographie  et  d'Risloire,  page  1176,  col.  1. 


GER 


973 


GES 


GERMANIQUE  (Droit).  K.  Bauavcs  (Lois  des). 

GERMANIQOES  (Langues),  mape  de  langues appar- 
Isnaat  à  la  famille  des  langues  indo-européennes  (V.  os 
moi),  et  comprenant  le  gothique,  Tislandais,  le  suédois, 
te  danois,  Tanglo-saxon,  Panglais,  le  bas  allemand  (au- 
quel se  rattachent  le  frison,  le  hollandais,  le  flamand),  et 
le  haut  allemand  (allemand,  souabe  ou  alémanique,  etc.). 
Jacques  Grimm  leur  assigne  quatre  caractères  fondamen- 
tKix  :  1*  la  propriété  qu'a  la  voyelle  de  s'adoucir  en  se 
prononçant,  pour  indiquer  une  modification  dans  la  si- 
gnifleadon  ou  remploi  du  mot;  2*  la  métathèse,  c-à-d. 
h  tranaUormatlon  a'une  consonne  en  une  consonne  de  la 
mémeclasse,  maisqui  s'en  distingue  par  une  prononciation 
plus  forte,  on  moins  forte,  ou  plus  aspirée;  3**  Tezistence 
de  oonjo^sons  forte»  et  faibles,  c-à-d.  de  conjugaisons 
dans  leatraelles  la  Toyetle  radicale  change  d'après  certaines 
lois,  et  de  conjugaisons  dans  lesquelles  elle  demeure  in- 
variable; A*  des  déclinaisons  faibles  pour  les  substantifs 
et  les  adjectifs,  c-4-d.  ôt»  déclinaisons  dans  lesquelles  la 
foyelle  radicale  demeure  la  même  aux  diflérents  cas,  ces 
cas  ne  se  distinguant  que  par  les  terminaisons.  Des  per- 
aratations  de  leàres  s'opèrent  non-seulement  entre  les  di- 
rerses  formes  d'un  mdme  mot,  ou  en  passant  du  mot 
.*adical  ao  mot  composé,  mais  entre  les  mots  des  difFé- 
lents  «fialectes.  Les  langues  germaniques,  très-riches  sous 
le  rapport  du  vocabulidre,  sont  assez  pauvres  quant  aux 
temps  des  verbes  :  elles  n'avaient  originairement  que 
deux  temps,  le  présent  et  le  passé,  et  elles  ont  dû  recou- 
rir à  des  verba  auxiliaires  pour  exprimer  d'autres  temps 
dont  les  progrès  de  la  pensée  rendaient  la  distinction 


GERMANISME,  façon  de  parler  propre  à  la  langue  alle- 
mande, ou  encore  empruntée  à  cette  langue  et  trans- 
portée dans  un  autre  idiome. 

GERMER  (Église  de  S^),  à  28  Ulom.  O.  de  Beanvais 
(Oise).  Cette  église,  commencée  vers  1030,  est  un  re- 
msrqoable  monument  du  style  de  transition  entre  le 
roman  et  le  gothique.  Elle  a  67  met.  de  longueur,  et 
18  met.  de  Uu^ur.  A  l'extérieur,  on  la  dirait  entière- 
ment romane  :  les  fenêtres  sont  à  plein  cintre,  sauf  au 
^d,  où  il  y  en  a  quelques-unes  en  ogive.  La  façade  est 
moderne;  les  piliers  qui  paraissent  au  dehors  et  ceux  de 
U  première  travée  soutenaient  ladis  deux  clochers,  qui 
forent  minés  par  les  Bourguignons  vers  1400.  La  neî  est 
composée  de  7  travées  à  arcades  ogivales,  séparées  par 
des  piliers  chargés  de  5  fllts  engagés,  non  compris  les 
etdonnes  latérales  :  au-dessus  de  ces  arcades  est  un  ordre 
tfarcades  bouchées,  en  plein  cintre  surbaissé,  tenant  la 
place  du  triforium,  puis  un  autre  ordre  de  petites  fe- 
nêtres carrées  bouchées,  une  galerie  étroite  portant  sur 
une  oonriche  à  consoles,  et  enfin  la  claire-voie  à  7  fo- 
Bêtrea  romanes  étroites,  inscrites  dans  des  arcs  ogives. 
Les  voûtes,  qui  avaient  été  détruites  par  la  chute  des 
clocfaers,  ont  été  rétablies  en  bois  vers  1754.  Les  tran- 
septs sont,  comme  la  nef,  ogivaux  au  rez-de-chaussée,  et 
romaus  dans  les  ordres  supérieurs,  sauf  Quelques  chan- 
gemeats  causés  par  des  réparations.  Le  chosur  présente 
7  arcades  à  archivoltes  découpées  en  rigzag;  le  triforium 
a  des  arcades  romanes  pareilles  à  celles  des  transepts, 
sanf  les  extrêmes  latérales  qui  sont  tripartites;  la  galerie 
à  consoles  et  la  daire-voie  sont  en  tout  semblables  aux 
isêmes  parties  de  la  nef  ;  les  voûtes  oflOrent  pour  nervures 
de  gros  boudins  chargés  de  bâtons  croisés,  de  rubans,  de 
feu  i  lies  encadrées,  et  d'autres  ornements  d'un  effet  bi- 
zarre. Les  collatéraux  sont  étroits,  bas,  d'un  aspect  lourd, 
à  arcades  en  fer  à  cheval  ;  ils  sont  continués  par  une  ga- 
lerie  garnie  de  chapelles,  qui  forment  autant  d'arcs  de 
oerde  sur  l'abside.  —  Par  une  allée  pratiquée  aux  dépens 
de  Tascade  centrale  de  l'abside,  on  arrive  à  une  seconde 
^iae,  longue  de  34  met.,  large  de  9,  et  éclairée  par 
i5  fenêtres,  dont  5  à  l'abside  sont  géminées,  tandis  que 
cbacane  des  antres  embrasse  quatre  petites  ogives  réunies 
L  groupes.  Du  côté  de  l'entrée  est  une  magnifique 
dé  7",22  de  diamètre.  De  superbes  vitraux  aes 
et  \n*  siècles  représentaient  l'histoire  de  S' Germer. 
mors  étalent  primitivement  peints  à  fresque;  ils 
ont  été  recouverts  de  badigeon.  Uautel  portait  un  beau 
letableen  pierre  peinte,  chef-d'osuvre  de  la  statuaire  de 
Tépoque,  oéposé  aujourd'hui  dans  le  musée  de  Cluny 
à  Pans.  Cette  ^Ise,  chef-d'œuvre  de  grftce  et  de  !&• 
gl^reté,  dans  le  style  de  la  meilleure  époque  ogivale,  n'est 
pas  sans  analogie  avec  la  S*«-Chapelle  de  Paris.  Les  fo- 
oêtres  sont  soimontées  extérieurement  de  frontons,  dont 
OD  a  tnmqné  le  sommet.  Des  contre-forts  à  clochetons, 
«TDÀ  d'alcades  simulées ,  s*appuient  an  comble.  Sur  le 
cùcë  méridional  s'dlère  ane  tourelle  hexagone,  à  arcades 


ogivales  simulées,  supportant  une  balustrade  à  Jour* 
GÉRONDIF,  en  latin  Gertmdittm;  forme  particulière 
de  la  conjugaison  latine,  et  oui  n'est  autre  chose  que  la 
déclinaison  de  l'infinitif  :  uns!  amandi  est  le  génitif, 
amando  le  datif  et  l'ablatif  de  amare;  amemdum  en  est 
raccusatif  employé  comme  complément  direct  avec  di- 
verses prépositions.  Le  gérondif  se  met  là  où  on  mettrait 
un  nom  de  radical  ou  de  sens  analogue,  à  un  cas  expri- 
mant un  régime  indirect  :  ainsi  tempus  scribendi  (le 
temps  d'écriro)  est  pour  tempus  scriptionis,  aptus  seri" 
benao  ou  ad  tcrioendum  (apte  à  écrire)  pour  aptus 
fcrtp^tont  on  ad  scriptionem,  fessus  scribendo  (fatigué 
d'écrire)  pour  fessus  scrjptûme.  Les  poètes  nég^gent  sou- 
vent l'emploi  du  gérondif,  et  le  remplacent  par  l'infinitif: 
cantare  peritus,  au  lieu  de  cantandu  Le  gérondif  a  donné 
naissance  aux  participes  présents  des  langues  néo-latines: 
la  preuve  en  est  dans  l'emploi  tr^videux  du  gérondif 
endok  l'époque  de  la  décadence  du  latin  et  surtout  après 
les  invasions  des  Barbares.  Ce  système  est  toutefois  un 
peu  contrarié  en  français  par  la  variabilité  qui  caractéri- 
sait autrefois  notre  participe  présent  quant  au  genre  et 
au  nombre.  V.  Participe.  P. 

GÊRONTE  (du  grec  gérân,  gérontos ,  ancien,  vlml- 
lard),  nom  que  les  anciens  auteurs  comicpies  francs  ont 
donné  au  père,  au  peraonna^^  grave  de  leurs  pièces.  Les 
Gérontes  n'eurent  d'abord  nen  de  ridicule  ;  puis  on  les 
fit  durs,  avares,  entêtés,  simples  et  crédules.  Rotrou,  dans 
sa  comédie  de  La  S<Bur  (1647),  a  introduit  un  Gérante  ve- 
nant de  Constantinople,  sous  If*  costume  turc  Ce  person- 
nage a  reçu  de  Molière  son  caractère  véritable,  dans  le  Mé' 
decin  malgré  lui  et  les  Fourberies  de  Scapin,  1660-1671 1 
puis,  Regnard  remploya  dans  le  Joueur,  le  Retour  tm- 
prévu  et  surtout  le  Légataire  vnioersét, 

GERYAIS  (Église  Saint-),  à  Paris.  Commencée  en 
1212  et  dédiée  en  1480,  cette  église  de  style  ogival  a  un 

f>ortall  d'un  caractère  tout  dlfiérent ,  élevé  en  1616  sur 
es  plans  et  sous  la  direction  de  Jacques  Debrosses.  Ce 
portail  réunit  les  trois  ordres  grecs  d^architecture  superpo- 
sés ;  sa  masse  imposante,  mus  lourde  et  sans  grftce,  forme 
contraste  avec  les  proportions  délicates  du  gothique.  On 
y  a  placé  de  nos  jours  les  statues  de  S^  Genrais  et  de 
S*  Protais,  dues  au  dseau  de  Préault  et  de  lioyne.  L'église 
S*-Gervais  a  été  dépouillée  de  ses  anciennes  richesses  :  le 
musée  du  Louvre  lui  a  enlevé  ses  tableaux  de  Philippe 
de  Champagne,  de  Lesueur,  de  Sébastien  Bourdon;  les 
vitraux  de  Jean  Cousin  ont  presque  complètement  péri. 
On  montre  cependant  encore  un  Père  étemel ,  attribué 
au  Pérugin,  et  un  tableau  sur  bois,  représentant  en  neuf 
compartiments  neuf  scènes  de  la  Passion,  et  qu'on  dit 
être  d'Albert  Durer.  La  chapelle  de  la  S^*  Vierge  a  été 
richement  peinte  et  ornementée;  on  y  voit  une  curieuse 
clef  pendante,  exécutée  par  Jacquet  au  xv*  siècle.  Préault 
a  exécuté  pour  la  chapelle  des  fonts  baptismaux  un 
Christ  d'un  effet  saisissant.  B. 

GÈSE,  arme.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire. 

GESTÂ  ROMÂNORUH,  titre  d'une  collection  latine  de 
récits  généralement  apocryphes  et  empruntés  à  l'histoire 
des  Romains  célèbres,  formée  pour  offrir  aux  moines  une 
instruction  intéressante,  et  où  l'on  faisait  des  lectures 
dans  les  réfectoires  aux  heures  des  repas.  Chaoue  cha- 
pitre contient  une  histoire,  qui  s'appuie  sur  rautorité 
d'un  écrivain  de  l'antiquité,  et  d'ordinaire  on  ne  trouve 
dans  cet  auteur  rien  qui  s'y  rapporte.  Les  personnages 
historiques  sont  présentés  sous  des  traits  tout  autres 
que  ceux  qu'on  leur  connaît.  Cette  collection,  où  11  y  a  de 
la  naïveté,  une  simplicité  parfois  puérile  et  un  peu  de 
mystidsme,  est  attribuée  à  un  bénédictin  du  xm*  siècle, 
Bertheur,  mort  prieur  de  l'abbaye  de  S^Éloi,  à  Paris. 
Elle  obtint  une  vogue  immense  pendant  deux  siècles  i 
les  prédicateurs  la  citaient  dans  leun  sermons;  plusieurs 
conteurs  italiens  et  Shakspeare  lui-même  lui  ont  fait  des 
emprunts.  Oubliée  depuis  la  Renaissance,  elle  a  attiré 
l'attention  des  érudits  de  nos  jours  :  Douce  et  Swan  Tont 
fait  connaître  à  l'Angleterre;  Gresse,  qui  en  a  publié  une 
traduction  allemande  avec  ample  commentaire  (Dresde, 
1843),  croit,  en  raison  des  cermanismes  et  des  angli- 
cismes qui  V  fourmillent,  qirelle  est  Tosuvre  d'un  cer- 
tain Elinandus,  moine  allemand  ou  anglais.  A.  Keller  a 
donné  une  édition  du  texte  latin  à  Tubingne,  en  1844. 
H.  Brunet  en  a  publié  une  vieille  traduction  française, 
qui  porte  le  titre  bixarre  de  Vto^ter  des  histoires  it>- 
maines»  B. 

GESTE,  nom  donné  au  langage  d^action,  aux  mouve- 
ments du  corps,  soit  naturels,  soit  artificiels,  qui  aident  à 
traduixi  nos  sentiments  et  nos  pensées.  11  comprend,  par 


GES 


974 


GIL 


«MMéquent,  reipression  de  la  physionomie,  la  poio  du 
corps,  le»  moavements  dei  bras  et  des  mains.  Uart  du 
geste  est  une  partie  importante  de  l'action  oratoire  et  du 
feu  théâtral  (K.  ÂcnoH,  DaAMATiQoa-Art ,  Mimique,  Pan- 
tovoib).  Dans  Téloquence  de  la  ciuûre,  il  eat  plus  néoea- 
saire  qu'ailleurs  de  modérer,  de  régler  les  sestes;  le 
P.  Sanlecqne,  dans  on  petit  poème  sur  la  Déclamation, 
a  caractérisé  d'une  manière  assex  heureuse  les  dé&iuts 
aniquels  on  se  laisse  trop  souvent  aller  : 

Songeons  k  ce  doeteur  dont  U  toIx  péâanteiqae 
Donne  un  atr  de  relief  k  ion  air  soldatesqne. 
Veut  le  Toyes,  campé  comme  an  gladiateur, 
Le  poing  toi^oon  fermé  nargner  ton  aoditear  : 
On  dirait,  quand  11  veut  pousier  an  syllogieiil^ 
Qa*i]  appelle  en  dael  toat  le  chrietlanitnie  ; 
On  qae  de  sa  foreur  noua  prenant  pour  témoins, 
D  Teuille  défier  le  diable  k  coups  de  poings.... 
Snrtout  n*imitez  pas  cet  homme  ridicule 
Dont  le  bras  nonchalant  fait  toujours  le  pendoto; 
Au  travers  de  tos  doigts  ne  tous  fUtes  point  Toir, 
Et  ne  nous  prêches  pas  comme  on  parle  an  parloir. 
Clies  les  nouTeauz  aetears  e*est  un  geste  à  la  mode 
Que  de  nager  au  bout  de  chaque  période. 
Ches  d'aatres  apprentis.  Ton  passe  pour  galant 
Lorsqu'on  écrit  en  Tatr  et  qn*on  peint  en  parlant. 
L*nn  semble  d'une  main  encenser  rassemblée. 
L'antre  à  ses  doigts  crochus  parait  aroir  l'onglée; 
Oelni-«i  prend  plaisir  k  montrer  ses  bras  nos, 
Gélul-lii  flslt  semblant  de  compter  ses  éeas. 
Id ,  le  bras  manchot  Jamais  ne  se  déploie; 
Là,  les  doigts  écartés  font  une  patte  d*ole. 
Souvent,  charmé  du  sens  dont  mes  diaoonn  sont  pleins, 
Je  m*applandls  mot-mème  et  fais  claquer  mea  mains. 
SouTent  Je  ne  veos  pas  qoe  ma  phrase  finisse 
▲▼mat  qoe,  poor  signal ,  Je  ne  firappe  ma  cuisse. 
Tantôt,  quand  mon  esprit  n'Imagine  plus  rien, 
J*enfonee  mon  bonnet  qui  tenait  déjà  bien. 
Qnâqnefols,  en  poussant  ane  voix  de  tonnerre, 
Je  flûs  le  timbalier  sur  les  bords  de  ma  chaire. 

La  science  du  geste  est  très-importante  pour  ceux  qui 
se  liTrent  aux  beiuiz-arts  ;  caril  n*est  pas,  pour  le  sculp- 
tenr  et  le  peintre,  de  moyen  d'expression  plus  puissant 
que  le  geste.  Il  n*est  pas  étonnant  que  les  Anciens  aient 
rôprésenté  si  souvent  leurs  personnages  nus  on  presque 
nus  :  en  effet,  il  existe  une  grande  différenee  entre  la 
force  de  signification  d'une  figure  drapée  et  celle  d*une 
figure  nue,  dont  tontes  les  parties  mettent  en  évidence 
tant  de  signes  caractéristiques  et  correspondante,  qui  tous 
concourent  à  Tunité  de  l'expression.  B. 

GESTES  (Chansons  de),  nom  donné  aux  romans  de  che- 
valerie, où  Ton  célébrait  les  actions  (en  latin  mta),  les 
exploite  des  héros.  Les  Chansons  de  gestes,  mvisées  en 
eonplets  monorimes,  étaient  faites  pour  être  chanté», 
comme  les  rapsodies  des  anciens  Grecs,  avec  accompa- 
gnement d'instrumente.  Fanriel  avait  émis,  à  leur  si^et, 
plusieurs  opinions  que  H.  Paulin  Paris  a  combattues 
avec  succès  :  ainsi ,  il  leur  donnait  à  toutes  le  nom  de 
fomofif  caHovingiems,  tendis  qu'un  grand  nombre  ne  se 
rapportent  ni  à  Charlemagne  ou  à  sa  famille,  ni  à  ses 
contemporains;  il  les  regardait,  non  comme  des  osnvres 
originales,  mais  comme  des  imitetions  d*épopées  proven- 
çales aujourd'hui  perdues,  ce  qui  est  dénué  de  preuves 
sérieuses,  car  il  est  avéré,  d'une  part,  que  Gmxurd  ds 
RoussUlon  et  FUrabrag  sont  les  seuls  romans  que  l'on 
possède  en  provençal ,  et ,  de  l'autre,  que  les  manuscrite 
provençaux  ne  remontent  pas  an  delà  du  xiv*  siècle  ou 
tout  au  plus  à  la  fin  du  xni*  ;  il  ne  croyait  pas  qu'elles 
fassent  antérieures  au  xii«  siècle,  oubliant  que  les  Trou- 
vères de  ce  siècle  en  citent  les  héros,  que  l'on  entonna 
une  de  ces  Chansons  à  la  bataille  d'Hastinn  (1066),  et 
qn'à  la  même  époque  Robert  Guiscard  se  faisait  chanter 
les  vers  de  la  Chanson  de  Guillaume  au  court  ms; 
enfin,  psr  la  raison  qu'elles  étaient  trop  longues,  il  ne 
croyait  psa  qu'on  les  eût  Jamais  chantées,  comme  si  l'on 
n'avait  pas  récité  dans  l'antiquité  Vlliade  et  ses  34,000 
vers,  non  pas  chaque  fois  en  entier,  mais  en  prenant 
isolément  un  récit,  ane  description  de  combat,  ete.  Il 
est  aujourd'hui  hors  de  doute  que  les  Chansons  de  gestes 
ont  pris  naissance  chex  les  Trouvères,  dans  le  domaine 
de  la  langue  d'oïl.  Elles  furent  vraisemblablement  l'am- 
plification des  chante  guerriers  qu'on  appelait  cantUènes 
dans  les  siècles  antérieurs,  et  dont  on  trouve  des  échan- 
tillons dans  le  recueil  de  poésies  populaires  latines  pu- 
blié par  H.  Edelestend  du  Méril  :  c'est  ce  one  permet  de 
supposer  un  fragment  d'une  épopée  intitulée  Gomumd  H 
Isembard,  laquelle  est  b&tie  sur  le  chant  composé  en 
mémoire  de  la  victoire  de  Louis  m  sur  les  Normands  en 
882.  V.  Wolf ,  Sur  les  poëmes  épiquês  dês  anciens  Frai^ 
çoM,  en  allem..  Vienne,  1838,  in-8«;  Paulin  Paris,  les 


Chansons  ée  çosts,  Paris^  1899,  broch.  ln-8*;  Ch.  d'H6- 
ricault,  Essa%  sur  Vorigtne  de  Vépapée  française  et  sur 
son  histoire  au  moyen  âge,  Paris,  1860,  in-8*.       B. 

GHAZ&L.  F.  Cassidè. 

GHEEZ  ou  GEUZ.  V.  ÉTHionsmiBS  (Langues)» 

GHIOLOF  (Idiome).  V.  Wolop. 

GHIRIF ,  sorte  de  petite  flûte  chez  les  Turcs. 

GIRAULT  ou  GIRBE,  arme  offensive  du  moyen  àge^ 
massue  selon  les  uns,  fronde  selon  les  autres. 

GIRECIÈRE,  espèce  de  sac  ou  de  bourse  qu'on  portait 
autrefois  à  la  ceinture.  Elle  se  rapprochait  de  l'aumO^ 
nière.  Aujourd'hui  c'est  la  poche  on  cuir  et  à  filet  où  les 
chasseurs  placent  leurs  ustensiles  de  chasse  et  leur 
gibier,  et  on  U  nomme  aussi  camier  ou  comosnérs.  On 
appelle  encore  gibecière  le  sac  de  toile  ou  de  cuir  que  les 
escamoteurs  portent  devant  eux  à  la  ceinture,  et  qui ,  di- 
visé à  rinténeur  en  plusieurs  poches  où  se  placent  des 
muscades  et  des  boules  de  toute  grosseur,  sert,  avec  les 
gobelete,  à  exécuter  les  tours  dite  de  qibedère, 

GIBERNE.  V,  ce  mot  dans  notre  Ih^kmnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d'Histoire. 

GIBET,  instrument  qui  sert  au  supplice  de  la  pendai- 
son. On  pense  que  son  nom  vient  de  Tarabe  gibet  (mon- 
tagne), ^rce  qu'on  dressait  toujours  le  gibet  sur  un  lieu 
élevé.  Gibet  est  synonyme  de  potence  et  de  fourches  pa- 
tibulaires, 

GIG  ou  GUIGUE,  canot  très-léger,  long  de  7  à  8  met., 
profond  d'environ  00  centimètres,  à  fond  plst,  les  deax 
boute  en  pointe,  et  marchant  au  moyen  de  6  avirons  et 
d'une  voile  légère  que  porte  un  m&t  très-court. 

GIGANTÉJA,  c-èrd.  Tour  des  Géants^  édifice  construit, 
dit-on,  par  des  Phéniciens  dans  111e  de  Gozzo.  Il  se  com- 
pose de  deux  temples  hypèthres,  placés  parallèlement  l'un 
à  côté  de  l'autre,  et  composés  de  cinq  absides  à  peu  près 
circulaires,  rangîftes  autour  d'une  nef  étroite  :  leur  façade 
commune,  tournée  vers  l'orient,  est  percée  de  deux 
portes  par  lesquelles  on  pénètre  dans  Tintérieur.  Le  plus 
considérable  des  deux  temples  a  26  met.  de  longueur,  et 
23  met.  dans  sa  plus  grande  largeur.  Les  murailles  sont 
en  blocs  de  pierre  énormes,  placés  alternativement  debout 
et  dans  le  sens  de  leur  longueur;  les  interstices  eont 
remplis  de  pierres  plus  petites.  Ces  constructions  ont  une 
grande  analogie  avec  celles  des  Pélasges. 

GIGUE,  danse  et  air  dont  la«mesure  est  à  six-huit  et 
d'un  mouvement  vif  et  çai.  Les  gigues  de  Corelli  ont  eu 
beaucoup  de  succès  ;  mais  airs  ei  danse  sont  entièrement 
passés  de  mode,  excepté  en  Angleterre.  Les  danseurs  de 
corde  donnent  le  nom  de  gtgue  à  un  de  leurs  pas.  —  Les 
anciens  auteurs  français  parlent  d'un  instrument  de  mu- 
sique nommé  giçue,  inventé  en  Allemagne,  où  on  l'appe- 
lait geige  ou  getqen.  D'une  forme  analogue  à  celle  d'une 
gigue  ou  cuisse  de  chevreuil ,  il  ressemblait  à  la  mando- 
fine  moderne  :  le  corps  était  bombé  et  à  côtes,  la  table 
percée  de  deux  ouïes,  et  le  manche  garni  de  trois  cordes. 
C'est  de  cet  instrument  que  la  danse  tira  son  nom. 

GIL-BLAS,  célèbre  roman  de  mosurs,  publié  en  trois 
parties  par  Lesage  (1715, 1724  et  1735).  L'action,  laiige- 
ment  dessinée,  commence  vers  la  fin  du  xvi*  siècle,  et  se 
poursuit  pendant  la  première  moitié  du  xvn*  t  elle  se 
passe  en  Espagne,  mais  les  personnages  n'ont  d'espagnol 

Se  le  nom  et  le  costume,  leurs  mosurs  sont  françaises, 
supériorité  de  l'œuvre  consiste  moins  dans  le  mérite 
de  la  conception  que  dans  la  vérité  fn4)pante  des  détails 
et  l'habileté  de  la  mise  de  la  scène;  un  esprit  vif,  enjoué 
et  satirique  l'anime  d'un  bont  à  l'autre  ;  le  s^le  est  un 
modèle  ae  correction,  d'aisance  et  de  clarté.  Gil-Blas,  le 
doeteur  Sangrado,  rarehevèque  de  Grenade,  sont  restés 
populaires  ;  et  il  s'en  faut  de  beaucoup  que  tous  les  per- 
sonnages soient  de  pure  invention  :  lors  de  l'apparition 
du  ronum ,  on  cmt  reconnaître  les  originaux  d'une  foule 
de  portraite,  et  l'on  publia  une  def,  aujourd'hui  perdue. 
Les  gecs  de  théâtre,  les  médecins  et  leurs  querelles,  la 
prostitution  des  faveurs  de  l'autorité,  les  désordres  et  les 
gaspillages  des  grandes  maisons,  les  bureaux  d'esprit,  Le- 
sage avait  tout  sous  les  youx,  sans  avoir  besoin  de  rien 
emprunter  à  l'Espagne.  On  lui  a  reproché  à  tort  d'avoir 
calomnié  de  parti  pris  l'humanite  :  il  n'y  a  en  lui  rien  du 
misanthrope,  du  moraliste  sévère,  du  satirique  acrimo- 
nieux ;  il  a  simplement  montré  ce  qu'il  avût  vu,  sans  en 
charger  les  couleurs,  et  son  ironie  est  plutôt  indulgente 
qu'amère  et  passionnée.  —  Du  vivant  même  de  Lesage, 
on  nia  l'originalité  de  son  roman ,  et  l'on  prétendit  qu'il 
l'avait  tiré  de  l'espagnol.  Il  en  est  résulté  une  controverse 
qui  a  duré  iusqu^à  nos  Jours.  Bruzen  de  La  Hardnière, 
dans  son  Nouveau  Portefeuille  historique,  poétique  et 
littéraire  (2«  édit.,  1757),  disait  de  Lesage  à  la  fin  de 


6IR 


975 


GIS 


nelqnosTéfleHoossiirson  DiabUboiUuœ:  «  Coït  sa  ma- 
nère  d'embelUr  extrêmement  tout  ce  qu'il  emprunte  des 
Bapagnols;  c'est  ainsi  qu'il  en  a  usé  envers  GU-Blas,  dont 
lia  Hait  un  chef-d'œuvre  inimitable.  »  Voltaire  alla  plus 
k^:  ne  pardonnant  pas  à  Lesage  de  Tavoîr  désigné 
(Uy.  X,  châp.  4  )  sous  le  nom  du  po^  Triaquero  (  mot 

ri  Teut  dire  en  espagnol  charlatan,  vendmir  a  orviétan), 
raccosa,  dans  son  SUcU  d»  Louis  XIV,  d'avoir  tout 
emprunté  à  l'ouvrage  intitulé  la  Vida  del  escudero  Don 
Marcot  éCObregon.  Biais,  s'il  avait  réellement  connu  cet 
MTrage,  publié  par  Vicente  Eq>inel  à  Madrid  en  1618,  il 
aanit  va  que  Leôage  avait  tout  au  plus  arrangé  avec  tact 
■ne  dizaine  de  passages,  et  que,  malgré  cette  retouche 
habile,  ce  n'étaient  pas  les  meilleurs  de  GU-Blas.  L'ac- 
cassâon  de  plagiat  fut  renouvelée  en  1787  dans  un 
livre  publié  à  Madrid  sous  le  nom  du  P.  bla ,  bien  que 
ce  savant  fût  mort  depuis  1781  :  on  y  soutient  que  Lesage 
reçut  d'un  Andalou,  nommé  Constantin!,  le  manuscrit  de 
Gâ-Blas,  qui  n'aurait  pu  être  publié  sans  danger  en  Es- 
pagne, pour  qu'il  le  traduisit  en  françûs  et  le  fit  im- 
{ffimer  à  Paris.  Ces  assertions  ont  été  victorieusement 
réfutées  par  François  de  Neufch&teau,  dans  une  Disser- 
tation lue  en  1818  à  l'Académie  française.  En  1880,  un 
savant  espagnol,  Llorente,  dans  des  Observations  cri- 
tiques sur  le  roman  de  GU-Blas,  prétendit  que  le  véri- 
table auteur  de  ce  livre  était  Don  Antonio  de  Solis  y 
Ribadeneira,  mort  en  1686 ,  allégation  qui  fut  l'objet  d'un 
nouveau  travail  de  François  de  Neufco&teau,  et  que  re- 
poussa également  Audiffret  dans  sa  Notice  historique  sur 
Lesage (1821).  Un  professeur  de  l'université  de  Berlin, 
Frédéric  Franceson,  dans  un  Essai  sur  Vorigtnalité  de 
QH-'BUu^  a  récemment  dressé  une  liste  exacte  et  sûre  des 
emprunts  de  Lesage,  et  il  conclut  que  GH-Blas  lui  appai^ 
tient  iMen  en  propre,  et  que,  s'il  a  imité,  c'est  à  la  ma- 
nière de  Shakspeîffe,  de  Molière  et  de  La  Fontaine.  Outre 
la  Vie  de  Vécuyer  don  Marcos  de  Obregon,  Lesage  a  mis 
à  contribution  diverses  pièces  du  thé&tre  espagnol ,  Plaire 
et  ne  pas  auner  de  Calderon,  les  Embarras  du  mensonge 
de  Mendoza,  le  Mariage  par  vengeance  de  Rojas,  Tout  est 
pége  en  amour  de  Diego  de  Cordova,  etc.  P— s. 

GILLE,  personnage  de  comédie,  le  niais  des  tréteaux 
et  de  Ja  parade.  Il  est  entièrement  vêtu  de  blanc,  et  porte 
de  longues  manches  pendantes.  Rival  d'Arlequin  pres  de 
Colombine,  il  sert  de  plastron  aux  deux  amants.  Son  nom 
rient  pent-ôtre  d'un  oouifon  qui  aurait  créé  ou  fait  va- 
loir remploi. 
GTNGRAS.  F.  Covos. 

GTNGRÊE,  flûte  des  funérailles  chez  les  Anciens. 
GIPPON,  vêtement  en  usage  en  France  au  commence- 
ment du  XV*  riècle.  C'était  une  sorte  de  gilet  rond  à 
manches,  ou  veste  de  dessous. 

GIRALDA  (La),  célèbre  tour  carrée  construite  à  Sérille 
par  les  Mores  Jmîqu'aux  trois  quarts  de  sa  hauteur  ;  les 
chrétiens  ont  ajouté  le  couronnement.  Le  tout  est  sur- 
monté par  une  statue  de  la  Foi.  La  partie  qui  est  Tou- 
vnge  des  Mores  est  décorée  de  sculptures  d'un  genre 
beaucoup  plus  simple  que  celles  de  leurs  autres  édiflces. 
Dans  l'intérieur  de  la  tour,  il  y  a  un  escalier  tournant 
sans  marches;  il  est  si  large  et  la  pente  en  est  si  douce, 
que  pinceurs  hommes  à  cheval  peuvent  y  monter  de 
Dont ,  jusqu'à  la  hauteur  où  commencent  les  travaux  des 
chrétiens  :  à  cet  endroit  l'escalier  devient  plus  rapide  et 
■e  compose  de  degrés.  B. 

GIRANDOLE,  assemblage  de  tuyaux  formant  une 
figure  quelconque  par  leurs  jets  d'eau  ;  —  chandelier  à 
plaaieors  branches,  qui  sert  à  l'ornement  des  salons  et 
des  galeries  de  fête;  —  espèce  de  boucles  d'oreille  for- 
mées de  grappes  de  pierres  fines. 
GIRARD.  K.  GÉRARD. 

GIRBERT  DE  METZ,  roman  de  chevalerie  qui  fait 
suite  à  Garin  le  Lohérain  (F.  ce  mot).  Girbert,  fils  de 
Garin,  entreprend  de  venger  la  mort  de  son  père.  Il  y 
est  aidé  par  l'empereur  Pépin.  Les  Bordelais  sont  vaincus 
et  demandent  la  |Mdx:  Fromondin,  fils  de  Froment,  est 
rétabli  dans  Bordeaux;  sa  sœur  Ludie  est  mariée  à  Her- 
nant ,  cousin  de  Girbert.  Cette  paix  ayant  été  rompue  par 
une  trahison  de  Fromondin,  Girbert  enlève  du  cercueil  le 
crfcne  de  Froment,  le  fait  monter  en  forme  de  coupe,  et 
y  fait  boire  Fh>mondin.  La  guerre  recommence  plus  ter- 
rible entre  les  deux  familles  :  Fromondin  vaincu  se  re- 
tire en  Espagne  dans  un  ermitage.  Le  hasard  fait  que  Gir- 
bert, allant  en  pèlerinage  à  S^-Jacques  de  Compostelle, 
s*adicsse  à  Fromondin  pour  se  confesser;  le  Bordelais 
reconnaît  son  ennemi  et  cherche  à  l'assassiner  ;  mais  il 
tombe  Joi-môme  sous  le  fer  de  Girbert.  —  C'est  ici  que 
flnit  la  Chanson  dss  Lohéraias  dans  la  plupart  des  ma- 


nuacrits.  Cette  branche,  qui  n'a  pas  été  publiée,  est  con- 
servée à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris  dans  dnq 
manuscrits  du  xn"  siècle,  du  xui*  et  du  xiv*.  Une  traduo* 
tion  en  prose  en  a  été  faite  au  xvi«  siècle  par  Philippe  de 


GIRGENn  (Ruines  de).  V.  Agrigentb. 

GIRON,  en  termes  de  Blason,  une  des  pièces  hono- 
rables de  l'écu.  Il  est  de  forme  triangulaire;  sa  base  a 
pour  Urgeur  la  moitié  de  celle  de  l'écu,  au  centre  duquel 
atteint  son  sommet. 

GIRON  LE  COURTOIS,  uu  dos  romans  de  la  Table  ronde 
(  F.  C0  mot),  l'un  des  plus  intéressants,  et  celui  où  la 
morale  est  la  plus  pure.  Giron ,  dont  le  grand-père  fut 
dépouillé  du  royaume  des  Gaules  par  Pharamond  et  les 
Francs,  rit  sous  les  règnes  d'Cter  Pandragon  et  d'Ar- 
thur. Pour  ne  pas  tomber  dans  les  pièges  de  la  dame  de 
Maloanc,  mariée  à  son  ami  Danayn  le  Roux,  il  s'éloigne, 
se  lance  dans  la  carrière  des  aventures,  et  est  grièvement 
blessé  en  défendant  une  demoiselle  Bloye,  attaquée  par 
des  chevaliers  félons.  Soigné  par  elle,  il  se  soustrait  aux 
élans  de  sa  reconnaissance,  et  va  faire  de  nouvelles 
prouesses.  A  ]&  suite  d'un  tournoi  où  il  s'est  distingué 
incognito  sous  les  yeux  de  sa  dame,  il  apprend  qu'un 
chevalier  l'a  enlevée;  il  la  délivre  en  tuant  le  ravisseur 
au  milieu  d'une  forât.  Là,  il  va  céder  à  sa  pas^n,  quand 
son  épée,  que  lui  avait  léguée  en  mourant  son  tuteur 
Hector  le  Brun,  sort  du  fourreau ,  et  il  lit  sur  la  lame 
cette  derise  :  Loyauté  est  au-dessus  de  tout,  fausseté 
honnit  tout.  Honteux  de  la  trahison  qu'il  allait  commettre 
envers  Danajrn,  il  se  jette  sur  la  pointe  de  son  épée,  et  se 
fait  une  horrible  blessure.  Danayn  surrient,  et  Giron  lui 
apprend  ce  qui  s'est  passé.  A  peine  rentrée  chez  elle,  la 
dame  de  Maloanc  est  prise  d'une  fièvre  qui  l'emporte  au 
tombeau.  —  Le  roman  de  Giron  le  Courtois  se  disUngue 
des  autres  du  même  cycle,  en  ce  qu'on  n'y  voit  ni  fées  ni 
géants;  le  S^  Graal  n'y  exerce  non  plus  aucune  influence 
religieuse.  Il  fut  composé  vers  le  milieu  du  xui*  siècle 
par  Luce  du  Gast.  Nous  en  possédons  une  version  en 
prose,  oubliée  en  1510  à  Paris.  B. 

GIRÔNNÉ,  en  termes  de  Blason,  se  dit  d'un  écu  diriséen 
6,  8,10, 12  et  même  16  girons,  de  deux  émaux  alternés. 

GIROUETTE  (du  rieux  français  gtrer,  virer),  feuille 
métallique  placée  de  champ  au  sommet  des  édifices,  et 
disposée  sur  une  tige  de  manière  à  pouvoir  tourner  libre- 
ment autour  de  celle-ci  au  moindre  vent.  Pour  juger 
de  la  direction  des  courants  d'air,  on  place^  au-dessous 
de  la  girouette,  des  lettres  fixes  qui  désignent  les  quatre 
points  cardinaux  et  quelquefois  les  positions  intermé- 
diaires. Cependant  ces  signes  indicatifs  ne  suffiraient  pas 
pour  les  ODservations  météorologiques  ;  on  se  sert,  dans 
ce  cas,  d'un  grand  cercle  dirisé  en  degrés  ;  et  comme  on 
ne  pourrait  atteindre  jusqu'à  la  girouette  pour  constater 
la  direction  précise  du  vent  et  la  marquer  en  degrés,  on 
obtient  par  une  transmission  de  mouvement  la  maïque 
des  courants  sur  un  cercle  inférieur.  On  constate  aussi 
avec  une  machine  particulière  appelée  anémomètre  la 
force  et  la  ritesse  du  vent.  L'idée  de  la  girouette  est  fort 
ancienne.  On  raconte  qu'Andronic  de  Gyrrha  fit  élever  è 
Athènes  la  Tour  des  vents,  et  graver,  i^ur  les  côtés,  des 
figures  qui  représentaient  les  huit  vents  principaux  :  un 
tnton  d'airain ,  tournant  sur  un  pivot  au  sonmiet  de  la 
tour,  posait  une  baguette  qu'il  tenait  à  la  main  sur  le 
vent  qui  soufflait.  La  girouette  était,  au  moyen  âge,  un 
attribut  du  seigneur,  et  ne  pouvait  être  placée  que  sur 
les  châteaux  féodaux  :  figurée  en  pennon,  elle  annonçait 
la  demeure  d'un  simple  chevalier  ;  taillée  en  bannière , 
celle  d'un  banneret.  —  Dans  la  Marine,  on  nomme  gt- 
rouette  une  bande  de  toile,  blanche,  bleue  ou  rouge,  pla- 
cée aii  sommet  du  grand  m&t.  Dans  les  escadres  elle  sert 
de  signe  distinctif  pour  les  difi'ërents  narires. 

GISORS  (Château  de).  Ce  château,  b&ti  de  1088  à  1097 
par  Guillaume  le  Roux,  duc  de  Normandie,  pour  son  vas* 
sal  Robert  de  Bellesme,  et  augmenté  par  Henri  I*'  Beau-< 
clerc,  est  un  des  plus  vastes  et  des  mieux  conservés  du 
moyen  &ge.  Il  pouvait,  dit-on,  loger  10,000  hommes.  Il 
se  composait  de  deux  enceintes,  avec  un  donjon  au  milieu 
de  la  seconde.  Ses  ruines  imposantes  couvrent  une  col- 
line située  à  l'extrémité  de  la  rille,  près  de  la  ririère  do 
l'Epte.  Les  fossés  et  les  remparts  ont  été  transformés  en 
belles  promenades,  et  quelques  constructions  servent  de 
halle  :  mais  on  voit  toujours,  outre  le  donjon,  flanqué 
d'une  tourelle  qui  contenait  l'escalier ,  une  grosse  tour 
dite  de  St-Thomas,  parce  que  Thomas  Becket  y  trouva  un 
asile,  et  une  tour  de  la  Passion  ou  du  Prisonnier,  ainsi 


GLA 


976 


GLa 


ippeléc  de  ce  que,  dans  une  de  ses  salles  basses,  les  mn- 
railles  sont  couvertes  de  sculptures  où  un  prisonnier  dont 
la  légende  n*a  pas  conservé  le  nom  a  représenté,  incor- 
rectement mais  avec  naïveté ,  au  moyen  d*un  clou  ar- 
raché à  la  porte  de  son  cachot,  plnsieurs  scènes  de  la 
Passion  de  J.-G.  et  de  la  vie  des  Saints.  B. 

cisoES  (Église  S'-GeavAis-Ei^^-PaoTAis,  à).  Cet  édifice 
est  de  plusieurs  styles.  Le  chosur  (ùt  bâti  au  un*  siècle; 
on  construisit  ensuite  les  nefs;  le  portail  du  Nord,  très- 
richement  orné,  date  du  iv*  siècle.  La  façade  occidentale 
appartient  à  Tàge  de  la  Renaissance  :  c*est  le  plus  pré- 
cieux monument  de  cette  époaue  oui  soit  en  Normandie; 
Tordonnance  en  est  belle,  les  détails  et  les  Usures  sont  de 
récole  de  Jean  Goufon,  et  presque  dignes  de  lui.  Cette 
façade  est  flanquée,  à  gauche,  d*an  clocher  terminé,  et,  à 
^ite,  d*un  autre  clocher  de  forme  difTérente,  dont  il 
n*existe  que  la  base,  mais  cependant  remarquable  comme 
oeuvre  de  la  Renaissance.  L*église  est  à  5  nefs,  disposition 
trte-rare,  et  dans  le  pourtour  sont  23  chapelles.  43  pi- 
liers de  styles  divers  soutiennent  les  voûtes.  Des  vitraux 
du  XVI*  siècle  ornent  les  deux  étages  de  fenêtres.  Parmi 
les  cmriosités,  sont  :  la  tribune  des  orgues,  un  Arbre  de 
JêiU  sculpté  dans  la  chapelle  du  Rosaire,  de  nombreux 
panneaux  peints  à  Thuile,  et  un  pavage  parsemé  d'épita- 
phes  gothiques.  V,  Tavlor,  Voyagn  ptttoreviu»M  dans 
Vancienne  France,  pi.  100  à  121.  B. 

GITÂ-GOVINDA,  on  le  Chant  du  Pastêur,  poème  sans- 
crit dont  le  principal  héros  est  Krishna,  désigné  sous  le 
nom  de  Gâvinda,  qui  signifie  berger.  Cet  ouvrage  a  pour 
autenr  Jayadèva,  et  pour  s^Jet  apparent  les  aventures 
amoureuses  de  Krishna  avec  les  bergères  nommées  Gôpis. 
Ce  n*eet  pas  une  épopée,  ni  même  à  proprement  parler 
une  oeuvre  épique,  bien  que  cette  forme  ait  été  donnée 
par  les  poètes  indiens  à  un  grand  nombre  d'écrits.  Son 
sqjdt  semblerait  devoir  le  ranger  parmi  les  œuvres  de 
poésie  erotique;  mais  il  est  incontestable  que  Fauteur  a 
voulu  composer  un  poème  symbolique  et  mystique,  où  les 
personnages  et  les  aventures  les  plus  romanesques  ne 
sont  que  des  figures  recouvrant  nne  doctrine  religieuse 
et  métaphysique.  Du  reste,  à  le  prendre  tel  quMl  est,  ce 
poème  renferme  souvent  les  analyses  les  plus  délicates 
des  sentiments  intimes  du  cœur  humain.  Quant  à  sa 
date,  il  est  difficile  de  la  fixer  d'une  manière  historique  ; 
mais  on  peut  dire  ou'il  appartient  à  une  époque  avancée 
de  la  littérature  inaienne,  et,  d'un  autre  cèté,  au  temps 
où  le  culte  de  Krishna ,  l'un  des  derniers  venus  de  la 
religion  brahmanique,  était  dans  toute  sa  vigueur.  Em.  B. 

GIVRK,  en  termes  de  Blason ,  nosse  couleuvre,  vipère 
«a  serpent  à  queue  ondulante.  Quand  elle  est  en  fasce, 
OD  la  dit  rampante;  droite,  on  la  dit  en  pal, 

GIVRÉE ,  nom  qu'on  donnait ,  dans  la  seconde  moitié 
du  xvm*  siècle,  à  des  surtouts  de  table  imacinés  par  un 
Suisse  nommé  Soleure,  et  qui,  au  moyen  d'une  poudre 
de  verre  blanc  semée  sur  des  endroits  gommés,  figuraient 
le  gkfre  de  l'hiver. 

GIZEH  (Pyramides  de).  V,  Pyramides. 

GLACES.  La  fabrication  des  glaces  date  du  moyen  ftge, 
«I  les  Vénitiens  en  eurent  longtemps  le  monopole.  Les 
l^aoea  de  Venise  étaient  légèrement  violacées,  on  plutôt 
rwéet.  et  prêtaient  ainsi  au  teint  une  nuance  agréable. 
En  1634.  Euatache  Grandmont  et  Jean-Ant.  d'Autonneuil 
obtinrent,  pour  la  fabrication  des  glaces  à  Paris,  un  pri- 
vilège de  iO  années,  qu'ils  cédèrent,  0  ans  après,  à  Ra- 
phafil  de  La  Planche,  trésorier  génàal  des  bUiments  du 
roi.  En  1665,  Colbert  érieea  en  manufacture  royale  ce 
premier  établissement  qui  languissait,  et  fit  construire, 
dans  la  me  de  Reuilly,  des  b&tlments  destinés  à  faire 
des  essais.  Une  manunicture  fut  fondée  à  Tour-la-Ville, 
près  de  Cherbourg,  où  elle  n'a  cessé  d'exister  qu'en  4808. 
Ce  fut  en  i688  (m'Abraham  Thévart,  ou,  selon  quelques- 
uns,  Lucas  de  Néhon,  imagina,  au  lieu  des  glaces  souf- 
flées d'après  les  anciens  procédés,  les  glaces  coulées  ou 
laminées  :  les  premiers  travaux  en  ce  genre  furent  faits 
dans  les  ateliers  de  la  rue  de  Reuilly,  vers  1604,  mais 
on  dut  les  abandonner  à  cause  de  la  cherté  de  la  main- 
d'œuvre  et  du  bois,  et  ils  ne  furent  repris  qu'un  peu  plus 
tard  à  S^Gobain.  La  méthode  du  polissage  a  été  inven- 
tée par  Dufresny.  Les  deux  compagnies  de  Tour-)a-ViIle 
et  de  SMjobain,  réunies  en  une  seule,  se  virent  enlever 
leur  privilège  en  1701,  à  cause  du  mauvais  éti^  de  leurs 
affaires;  en  1702,  le  privilège  fut  accordé  à  une  compa- 
gnie dirigée  par  Antome  d'^ncourt,  qui  porta  la  fabri- 
ration  à  un  haut  degré  de  perfection.  On  continua  de 
souffler  les  glaces  à  Tour-la-Vil}e,  et  de  les  couler  à  S*-Go- 
bain  :  les  glaces  des  deux  manufactures  étaient  envoyées 
i  Paris,  et  c'est  dans  la  rue  de  Reuilly  qu'elles  étaient 


polies,  étamèes  et  mises  en  vente.  Plus  tard,  les  atèMen 
de  polissage  furent  transférés  à  Channy,  et  l'étamage 
seul  fut  exécuté  à  Paris.  L'industrie  des  glaces  tomba, 
durant  la  Révolution,  dans  un  complet  allanguisaement  : 
on  la  vit  renaître  sous  le  i*'  Empire,  et  une  mannfacture 
du  fànboura  S'-Antoino  à  Paris,  dépendance  de  l'établis- 
sement de  SMfObain,  envoya  à  l'Exposition  de  1806  une 
glace  de  3*,08  sur  1"*,62.  Ce  fut  à  peu  près  vers  ce  temp? 
que  les  verreries  de  SMJuirin  et  de  Cirey  (Henrthe)  firent 
concurrence  à  SMSobain;  en  1830.  un  accord  sur  lei 
prix  mit  fin  à  cette  rivalité,  et  dès  lors  les  deux  compa- 
gnies n'ont  eu  qu'un  seul  tarif  et  qu'un  seul  dépôt  à 
Paris;  en  1830  aussi,  les  bâtiments  de  la  rue  de  Reuilly 
furent  convertis  en  caserne.  On  a  vu  à  l'Exposition  uni- 
verselle de  1855  une  glace  de  S*-Gobain  qui  mesurait 
18",04  de  supofide.  une  manufacture  fondée  depuis 
quelques  années  à  llontluçon  a  pris  un  rapide  dévelop- 
pement. Il  en  existe  d'importantes  à  Aniche  (Nord),  à 
Blackwall  près  de  Londres,  à  Oignies  et  à  Floreflîe  en  BeU 
gique  :  on  en  a  aréé  une  à  Aix-la-Chapelle  en  185.1. 

Ce  fut  peu  de  temps  après  la  mort  de  Henri  IV  qu'on 
applimia  aux  carrosses  des  fermetures  en  glace,  selon  le 
modèle  importé  d'Italie  par  Bassompierre.  Des  dernières 
années  de  Louis  XIV  date  l'usage  de  mettre  des  glaces  sur 
les  cheminées  d'appartement,  au  lieu  des  tableaux,  bas- 
reliefs  ou  grands  ôûendriers  qu'on  y  plaçait  auparavant  : 
l'idée  en  vint  à  Robert  de  Cotte,  ou  à  François  Mansard. 
De  là  vint  la  mode  des  appartements  tapissés  de  glaces 
du  haut  jusqu'en  bas,  ainsi  qu'on  le  voit  dans  les  poésies 
de  Régnier-Desmarais;  raffinement  de  luxe  imité  de  l'an* 
tiquité,  et  dont  parle  Sénëque  (  Ep,  86).  B. 

GLACBS  ET  NEiGBs.  Los  propriétaires  et  locataires  sont 
tenus  de  faire  casser  la  glace,  balayer  et  relever  les  neiges 
qui  se  trouvent  devant  leurs  maisons,  cours  et  Jardins, 
jusqu'au  milieu  de  la  rue,  et  de  les  mettre  en  tas  le  long 
des  ruisseaux,  s'il  y  a  des  trottoirs,  et,  s'il  n'y  en  a  pas, 
près  des  bornes.  Ils  doivent  tenir  libres  le  ruisseau  et  les 
bouches  d'égouts.  En  cas  de  verglas,  il  faut  semer  du 
sable,  de  la  cendre,  etc.  L'amende  infligée  aux  contreve- 
nants est  de  1  fr.  à  5  nr. 

GLACIÈRE,  cavité  ordinairement  souterraine  où  l'on 
conserve  de  la  glace.  Elle  a  la/orme  d'un  tronc  de  cône 
renversé,  et  se  termine  à  sa  partie  inférieure  par  un  pui- 
sard recouvert  d'une  grille,  ou  s'écoule  l'eau  qui  se  forme 
par  la  fusion  de  la  glace,  bien  que  la  température  des  gla- 
cières soit  à  peu  près  à  0**.  Elle  a  des  parois  en  maçonne- 
rie, qui  supportent  une  charpente  placée  au-dessus  du  sol, 
recouverte  d'une  épaisse  couverture  en  chaume,  et  dis- 
posée de  manière  à  donner  accès  du  dehors  an  dedans 
de  la  glacière  an  moyen  d'un  corridor;  celui-ci,  recouvert 
également  en  chaume,  se  ferme  hermétiquement  par  pln- 
sieurs portes  successives.  La  glace  doit  être  arrangée  et 
tassée  avec  soin,  lUin  que  l'air  circule  difficilement  entre 
les  morceaux.  On  place  ordinaL*ement  les  glacières  sur 
le  flanc  d'un  coteau  qui  regarde  le  nord  ;  on  les  entoure 
d'arbres  touffus,  qui  les  garantissent  de  l'ardeur  du  soleil. 
Aux  États-Unis,  lies  glacières  sont  au-dessus  du  sol  et  se 
composent  de  plusieurs  b&timents  concentriques,  dont 
les  murs,  trè»-épais,  sont  munis  d'épais  paillassons.  — 
En  183...  on  a  construit  à  S'-Ouen ,  près  Paris,  une 
ffladère  souterraine  qui  peut  contenir  8  millions  de  ki- 
logr.  de  glace,  et  en  1859,  la  ville  de  Paris  en  a  établi, 
dans  le  Bois  de  Boulogne,  vers  la  Mare  d'Auteuil,  une 
dont  la  capacité  est  de  10  millions  de  kilogr.  Il  existe  en- 
core une  glacière  dans  I^ris,  au  quartier  de  la  Villette,  et 
40  autres,  environ,  dans  la  banlieue;  les  principales  sont 
à  S'-Ouen,  au  N.  ;  Bobigny,  au  N.-E.  ;  Gentilly,  Vanves, 
Issy,  au  S.  ;  Chaville  au  S.-0.,  etc.  Elles  tiennent  en- 
semble plus  de  20  millions  de  kilogr.  V*  au  SupplémerU. 

GLACIS,  pente  de  terre  ordinairement  recouverte  de 
pzon.  Le  glacis  joue  un  grand  r61e  dans  la  fortification; 
il  sert  à  couvrir  et  à  masquer  les  ouvrages.  Le  glads  le 
plus  avancé  est  celui  qui  relie  la  contrescarpe  à  la  cam- 
pagne; il  se  prolonge  en  pente  douce  sur  une  grande 
longueur.  Cest  dans  les  glacis  que  l'assiégeant  établit  les 
cheminements  d'approche  et  les  batteries  de  brèche.  ~- 
En  Peinture,  on  donne  le  nom  de  glacii  à  de  léeères 
couches  de  couleurs  que  les  peintres  appliquent  sur  leurs 
tableaux  pour  leur  donner  de  la  transparence  et  de  l'éclat. 

GLAÇURE,  nom  donné,  dans  les  arts  céramiques,  à 
une  sorte  de  couverte  légère.  V,  CouvBan. 

GLADUTEURS.  F.  notre  DietUmnair^  de  Biographie 
$t  dr Histoire. 

GLAGOUTIQUE  (du  slave  glagol,  iwrole,  discours), 
nom  donné  à  un  alpnabet  slave,  complètement  difiérent 
du  cyrillien  (F.  ce  moty^^  et  employé  par  le  clergé  cath^ 


GLO 


977 


GLO 


I1|M  de  Dttlmtttie  pour  écrire  le  Tieax  8la?on  oo  langue 
eeclédaatique.  Gerudns  savants  ont  attribué,  nial«  contre 
tente  n«isembl&nce,  Talphabet  glagolitique  à  S*  Jérôme, 
et  le  nomment  hiéronyfnique;\e  saint  raurait  inventé 
pour  traduire  en  illyrîen  la  litui^e  du  rit  latin.  D'autres 
prétendent  que  c'est  simplement  le  cyrillien ,  altéré  à 
ieanin  pour  préserver  les  Slaves  de  rinfluence  du  rit 
crée,  crae  les  évèques  de  ce  culte  cherchaient  à  intro- 
duire. Dobrowski  a  soutenu,  dans  ses  Glagolitica  (Prague, 
1807),  qa^il  jeremontait  pas  au  delà  du  xui*  siècle;  mais 
KoDitar  a  publié  à  Vienne,  en  1846,  sous  le  titre  de  Glc^ 
goiUa  Clozianus,  un  manuscrit  glagolitique  du  xi*  siècle, 
appartenaDt  an  comte  Kloz.  Jacob  Grimm  attribue  aux 
caractères  glagolitiques  une  bien  plus  haute  antiquité, 
parce  qo'il  v  trouve  reproduits  quelques  caractères  ru- 
niqoes.  Ce  fut  en  lettres  glagolitiques  qu'on  imprima  le 
pranier  ouvrage  slavbn.  E^  Fragments  glagoliiujues  ont 
été  publiés  par  Uofler  et  Schafarik,  Prague,  1857,  in-8^ 

GLAIVE,  en  latin  gladiut,  nom  qui  n'est  plus  usité 
Qu'au  figuré  et  en  poésie.  C'était,  chez  les  Anciens,  une 
tpét  à  lame  courte,  large  et  à  deux  tranchants,  assez 
lemUable  an  sabre-poignard  de  notre  infanterie.  Au 
mojen  âge,  on  appela  glaive  une  lance  mince,  armée 
(Tune  pointe  longue  et  aigué. 

GUÙf  AGE,  acte  de  ramasser  à  la  main  les  épis  restés 
isolément  dans  les  champs,  après  la  mise  en  bottes  dans 
certains  pays,  et  seulement  q>rès  l'enlèvement  des  gerbes 
dans  d'antres.  La  loi  de  Moïse  prescrivit  aux  Hébreux  de 
laisser  le  pauvre,  la  veuve,  l'orphelin  et  l'étranger  glaner 
dans  les  champs.  Chez  nous,  les  lois  du  3  et  du  8  sep- 
tembre 1701,  celles  du  23  thermidor  an  iv  et  du  S8  avril 
1S32,  ont  réglementé  le  glanage.  Les  femmes,  vieillards, 
enfants  et  infirmes  hors  d'état  d'aider  à  la  récolte  ont 
seuls  le  droit  de  glaner;  le  glanage  n'est  permis  que  dans 
les  champs  ouverts  et  quand  le  soleil  est  sur  l'horizon  ;  il 
est  accordé  2  Jours  pour  le  glanase,  et  le  propriétaire  ou 
ramier  ne  peut,  avant  la  fin  du  2«  Jour,  envoyer  son  bé- 
tail dans  les  champs  moissonnés;  nul  ne  peut  vendre  le 
droit  de  glaner,  ni  s'opposer  au  glanage  par  violence  ou 
autrement.  Le  Code  pénal  (art  471)  punit  d'une  amende 
de  1  à  5  Cr.  ceux  qui  glanent  dans  des  champs  non  en- 
llèrenMDt  moissonnés,  ou  avant  le  lever  et  après  le  coo- 
cher  âa  soleil  ;  un  emprisonnement  de  3  Jours  au  pins 
peat  encore  être  prononcé  selon  les  circonstances. 
.  GL^NDÉE  (Droit  de),  droit  de  mettre  les  porcs  dans  les 
bois  et  forêts  pour  leur  faire  consommer  des  glands.  11 
appartient  aux  habitants  des  communes  voisines,  on  est 
concédé  annuellement  à  des  adjudicataires. 

GLAS  (du  grec  JUaid,  pleurer,  ou  klaxô,  faire  an  bruit 
perçant;  ou  dn  latin  ctango)y  en  latin  du  moyen  âge 
classicum,  tintement  lugubre,  lent  et  mesuré  d'une  clo- 
che, qui  annonce  l'agonie  ou  la  mort  d'une  personne.  Au- 
trefois glas  signifiait  le  branle  simultané  de  toutes  les 
cloches  d'un  clocher.  —  Le  même  nom  a  été  étendu  aux 
coupe  de  canon  tirés  à  intervalles  réguliers  dans  les  céré- 
monies de  deuil,  aux  batteries  sourdes  de  tambour,  au 
Jeo  des  instruments  exécutant  des  airs  funèbres. 

GLASS-CORD,  instrument  de  musique  inventé  par 
Franklin.  Cest  une  espèce  de  piano  dans  lequel  les  cordes 
noétalliques  sont  remplacées  par  des  lames  de  verre,  que 
soutiennent  des  chevalets  libres  à  l'extrémité,  et  qoe  firap- 
pent  des  marteaux  soulevés  par  les  touches. 

GLÈBE  (du  latin  globus,  motte  de  terre).  Ce  mot,  par 
extension,  a  servi  à  désigner  un  fonds  de  terre.  Chez  les 
Romains,  les  esclaves  attachés  à  on  domaine  s'appelaient 
servi  glétxB  adscriptiiii,  Vxusgfi  de  transmettre  les 
«achives  scnc  la  terre  passa  du  Droit  romain  dans  le  nètre. 
n  a  dùqMsru  à  la  Révolution;  mais  il  existe  encore  en 
Russie  et  aux  États-Unis. 

GLEE ,  chant  joyeux  particulier  à  Angleterre.  H  est  à 
^  3,  4  oa  5  voix  uniques,  sans  accompagnement,  et  ne 
doit  lanuds  être  chanté  en  chœur.  IHirmi  les  compositeurs 
de  gUes,  on  dte  Danby,  Harrington,  Cooke,  Webbe,  Cal- 
cott,  Stevens,  Beale,  etc. 

GLOBE,  manœuvre  militaire.  (  F.  notre  IHetionnaire 

6L0BI,  embltoie  de  souverai-  \  de  Biographie  et 
neté.  (       d*nisUnre, 

CLOBB  DB  coMPSESSioii,  foumeau  de  mine  inventé  en 
1732  par  l'ingénieur  Bélidor  pour  les  attaoues  de  places. 
n  sert  à  crever  les  contre-mines  de  l'assiégé,  ou  a  faire 
sauter  la  contrescarpe  et  combler  ainsi  le  fossé  qui  dé- 
fend l'approche  de  l'escarpe. 

CLOBB  naaesTRE,  représentation  de  la  Terre  avec  ses 
meri,  ses  continents,  les  divers  accidents  du  sol,  les  villes 
principales,  enfin  les  cercles  mathématiques  qui  servent 
a  déterminer  les  rapports  de  la  terre  avec  les  astres  ou 


des  lieux  terrestres  entre  eux.  C'est  la  seule  image  exaele 
de  notre  monde  et  la  seule  qui  donne  la  véritable  po^ 
tion  des  lieux,  puisque,  une  sphère  n'étant  pas  dévelop- 
pable  sur  un  plan,  les  cartes  planes  ne  peuvent  Januua 
offrir  qu'une  figure  et  des  positions  approximatives.  Un 
globe  terrestre  se  compose  de  deux  parties  distinctes,  le 
globe  lui-même,  et  les  différentes  pièces  qui  le  supportent 
et  l'entourent.  Celles-ci  sont,  dans  les  globes  les  plus 
simples,  su  nombre  de  quatre  :  1°  le  pied,  qui  porte  tout 
l'appareil;  2<^  un  grand  cercle  de  métal  appelé  méridien 
général,  sur  lequd  on  marque  les  degrés  de  latitude,  et 
même,  dans  les  grands  globes,  les  minutes  et  les  se- 
condes; 3*  un  second  grand  cercle  de  métal,  perpendicu- 
laire au  précédent,  qu'il  coupe  en  deux  parties  égales; 
c'est  l'Aortson  rationnel:  4*  un  quart  de  cercle,  lame  de 
cuivre  fixée  au  méridien  général  et  à  l'horizon,  divisée  en 
90  degrés,  et  tenant  lieu  de  compas  pour  mesurer  les 
distances.  Le  globe  lui-même,  ordinairement  en  ir.étal, 
tient  au  méridien  général  ijar  des  poinçons  fixés  à  ses 
deux  pèles;  mais  il  est  mobile  sur  un  axe  dont  ces  poin* 
çons  sont  les  extrémités,  et  incliné  de  06<*  32'  sur  Thori- 
zon.  Il  porte  toutes  les  mêmes  lignes  que  les  cartes, 
équateur,  parallèles,  tropiques,  cercles  polaires,  méri- 
diens, etc.,  et  c'est  après  avoir  tracé  tous  ces  cercles  que 
Ton  dessine  sur  le  globe  lui-même  la  figure  de  la  terre. 
Mais  cette  dernière  méthode  étant  longue  et  coûteuse,  on 
applique  le  plus  souvent,  sur  la  boule  destinée  à  devenir 
un  elobe  terrestre,  une  carte  générale  du  monde,  con- 
struite exprès,  et  divisée  en  segments  sphériques  appelés 
fuseaux. 

Le  plus  ancien  globe  terrestre  dont  il  soit  fait  mention 
est  le  globe  en  argent  que  possédait  Roger  II,  roi  des 
Deux-Siciles,  et  pour  l'explication  du'ruel  Edrisi  composa 
sa  Géographie  en  1154.  Hais  ce  glot)e  a  disparu,  et  le 

glus  ancien  que  l'on  ait  conservé  est  celui  que  Martin 
ehaim  construisit  en  1492,  et  que  l'on  conserve  à  la  Bi- 
bliothèque de  Nuremberg  :  U  ofiïe  les  découvertes  des 
Portugais  sur  les  côtes  d'Afrique  Jusqu'au  cap  Negro,  où 
aborda  en  1485  Diego  Cam,  que  Behaim  accompagnait; 
le  cap  de  Bonne-Espérance,  découvert  par  B.  Diaz  en 
1486,  y  est  marqué,  mais  non  pas  à  sa  véritable  place,  et 
tout  près,  au  contnure,  du  cap  Negro.  Un  autre  globe  de 
la  même  époque,  mais  dont  l'auteur  est  inconnu,  a  étâ 
récemment  trouvé  à  Laon  :  M.  d'Avezac  en  a  donné  Isi 
description  et  le  fac-Bimi!e  dans  le  Bulletin  de  la  Sociétk 
de  Géographie  (nov.-déc.  1860).  Il  porte  au  sud  d( 
l'Alrioue  la  date  de  1493;  mais  le  point  auquel  elle 
s'applique  n'est  autre  que  le  cap  Ne^,  comme  dans  le 
globe  de  Behaim.  On  connaît,  de  la  première  moitié  du 
XVI*  siècle,  cinq  globes  importants  pour  l'histoire  des  dé- 
couvertes en  Amérique  :  le  plus  ancien ,  conservé  à  la 
Bibliothèque  de  Nuremberg,  fut  exécuté  par  Jean  Schœner 
&  Bajtnberg  en  1520;  un  autre,  de  la  même  époque  envi- 
ron, sans  date  ni  nom  d'auteur,  se  trouve  à  FYancfort- 
sur-le-Mein  ;  des  trois  autres,  postérieurs  à  1524,  puis- 
ou'ils  représentent,  sous  le  nom  de  Terra  Francesca^  les 
découvertes  que  fit  Verazzano  en  Amérique  par  les  ordres 
de  François  i*',  l'un  est  à  la  Bibliothèque  impériale  de 
Paris,  l'autre  à  celle  de  Nancy,  et  le  dernier,  construit  à 
Rouen,  sans  doute  par  quelque  navigateur  rouennais  ou 
dieppois  resté  inconnu  comme  les  auteurs  des  deux  pré- 
cédents, se  distingue  par  la  coi^ecture  hardie  du  détroit 
(découvert  200  ans  plus  tard  par  Behring)  qui  sépare 
l'Amérique  de  l'Asie.  Ces  globes  sont  en  métal,  la  plupart 
en  cuivre  doré,  et  gravés  en  creux.  Cependant,  dès  le 
commencement  du  siècle,  existait  l'art,  attribué  à  Albert 
Dflrer,  de  dessiner  et  de  graver  des  fuseaux  destinés  à 
être  colIÀ  sur  une  boule;  ainsi  était  composé  le  globe 
qui  accompagnait,  en  1530,  la  Cosmographie  de  Gemme 
Frison.  Les  plus  célèbres  globes  depuis  le  xvi*  sièclf 
sont  :  les  deux  globes  en  cuivre  construits  par  L'Hôte  er 
1618,  placés  aujourd'hui  à  la  bibliothèque  de  l'Institut 
et  remarquables  par  la  beauté  de  l'exécution  ;  le  globe  dit 
de  Gottorp,  œuvre  d'OIéarius,  en  1664,  et  qui  se  trouve 
actuellement  à  S*-Pétersbourg;  les  deux  beaux  globes,  de 
4  met.  de  diamètre,  qui  ornent  l'une  des  salles  de  la  Bi-* 
bliothèque  impériale  à  Paris,  et  qui  furent  terminés  par 
Coronelli  en  1683;  celui  de  Cambridge,  qui  a  6  met. 
de  diamètre;  enfin  les  deux  beaux  globes  manuscrits 
de  Poirson,  dessina  sur  la  boule  même  avec  tme  grande 
exactitude;  l'un,  construit  pour  l'éducation  du  roi  de 
Rome,  a  i",07  de  diamètre;  l'autre,  de  0*,65,  orne,  an 
Louvre,  la  nierie  du  Musée  de  marine.  C.  P. 

GLOCESTER.  F.  Glooccstbs. 

GLOCKENSPTEL.  V.  Clochettes  (Jeu  de). 

GLOIRE»  mot  9nufioyé  comme  synonyme  d^awéole 

61 


GLO 


97S 


6LY 


(F.  00  mot)^  et  qui  ft*applique  également,  1*  à  toute  pein- 
ture représentant  le  ciel  ouvert,  avec  lee  trois  personnes 
de  la  Trinité  entourées  d*angBS  et  de  saints;  2*  à  ces 
rayonnements  en  bois  doré  dont  on  décore  quelquefois  le 
fond  du  sanctuaire,  comme  à  la  cathédrale  d*Amiens  et  à 
Téglise  S*-Roch,  à  Paris;  3*  à  une  machine  de  thé&tre, 
composée  d'un  siège  et  de  nuages  qui  Tenveloppent,  et 
sur  laquelle  un  personnage  est  emporté  Ters  les  deux  ou 
descend  sur  la  aicène. 

GLORU  m  BXCELSIS,  hymne  de  la  liturgie  catho- 
lique, dans  laquelle  il  entra  vers  le  vu*  siècle.  lies  pre- 
mières paroles  sont  celles  que  les  Anges,  dans  l*ÉvangiIe 
selon  S^  Luc,  adressèrent  aux  bergers  en  leur  annon^t 
la  naissance  de  Jésus.  On  ne  sait  qui  composa  la  suite. 
Le  Ghria  in  eoDcelsit ,  qu*on  appelle  aussi  r/i^mne  an- 
gHiquê,  M  chante  à  la  messe  i^près  le  Kyrie;  on  le  sup- 
prime dans  PAvent  et  depuis  la  Septuagésime  Jusqu'au 
bamedi  saint,  ainsi  qu'aux  messes  des  morts. 

GLORIA  PATRl,  verset  par  lequel  on  termine  le  chant 
ou  la  récitation  de  chaque  psaume.  On  croit  que  ce  fut  le 
pape  Damase  qui  ordonna,  en  368,  de  Vj  placer,  bien  que 
BsjTonius  prétende  qu'il  était  en  usage  du  temps  des  apô- 
tres. Philostor^,  écrivain  du  rv*  siècle,  donne  ces  trois 
formules  :  Ghire  au  Pèrt,  au  Fils  et  au  S^ Esprit;  Gloire 
Ou  Père  par  le  Fils  dans  le  S^-Esprit;  Gloire  au  Père 
dans  le  FUs  et  le  S^- Esprit,  Sozomène  et  Nicépbore  disent 
aussi  :  Gloire  au  Père  et  au  Fils  dans  le  S^Esprit,  La 
1**  formule  est  en  usa^  dans  les  églises  d'Occident;  les 
trois  autres  sont  d'origine  arienne.  Le  4*  concile  de  To- 
lède, en  533,  ajouta  au  mot  gloria  le  mot  honor,  et  sup- 
prima les  paroles  Sicut  erat  m  principio  et  nune  et 
semper.  L'Eglise  grecque  se  servit  quelque  temps  de  la 
formule  catholique,  et,  plus  tard,  supprima  les  mots 
Séoul  erat  m  prtncqno,  qui  d'ailleurs  n'étaient  ^  encore 
universellement  adoptés  au  vi*  siècle  en  Occident.  V, 
DoxoLOGiB,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire, 

GLOSE,  explication  de  queloues  mots  oiMcurs,  ou  su- 
rannés, ou  techniques  d'une  langue  par  d'autres  plus 
intelligibles  de  la  même  langue.  Ce  genre  d'explication 
fut  d'abord  appliqué  chei  les  Grecs  aux  mots  d*origine 
étrangère  :  la  note  était  écrite  à  la  marge  du  manuscrit. 
Plus  tard  la  glose  fut  une  explication  détaillée,  mais  lit- 
térale, du  texte  d'un  auteur,  soit  dans  sa  langue,  soit 
dans  la  langue  du  slossateur  si  celui-ci  était  étranger.  De 
ce  genre  sont  les  Gloses  sur  le  Droit  romain,  et  en  par- 
ticulier la  Grande  Glose  ou  Glose  continue  d^Accurse 
(xv*etxvi*  siècles). — Le  mot  glose  est  Taltération  du  grec 
qlôssa,  qui,  outre  sa  signification  générale  de  langue, 
langage,  désignait  aussi  un  terme  particidier  d  un  art, 
ou  introduit  par  des  usages  nouveaux,  surtout  lorsque 
ceux-ci  venaient  de  l'étranger.  Ce  terme  avait  pour  sy- 
nonyme glôsséma^  adopté  par  les  grammairiens  latins. 
Les  recueils  de  gloses  s'appelaient  Lexiques  chez  les 
Grecs  :  le  mot  glossaire  a  été  créé  par  les  Romains. 
Quant  au  mot  glossatewr  {eMXeur  d'une  glose),  il  est 
moderne.  —  Quelques  écrivains  anciens  sur  la  musi- 
que appellent  glose  tout  ornement  vicieux  et  de  nuiuvais 
goût.  P. 

GLOSSAIRE  (du  grec  glôua,  langue).  Dictionnaire  ou 
Lexique  servant  à  expliquer  les  mots  d'une  langue  qui 
ont  vieilli  ou  changé  d'acception.  Ce  genre  de  livres  est 
né  en  Grèce  (  V.  Glosb).  Il  y  a  des  Glossaires  généraux 
qui  expliquent  les  vieux  mots  d'une  langue,  et  des  Glos- 
saires particuliers  ou  spéciaux  qui  expliquent  les  termes 
vieillis  d'un  seul  auteur.  Les  plus  estimés  parmi  les  pre- 
miers chez  les  modernes  sont  :  le  Glossartum  archœolo- 
gicum  de  Spielmann,  Londres,  i  664-87,  in-fol.  ;  le  Glos- 
sarium  ad  scriptores  meduB  et  infimœ  grcsdtatis  de 
Du  Cange^  loron,  1688,  2  vol.  in-fol.  ;  le  Glossartum  ad 
scriptores  midiœ  et  infimœ  lattnit€Uis  du  même  auteur, 
6  vol.  in-fol.,  augmenté  du  Glossarium  novum  de  Car- 
pentler,  Paris,  1766, 4  vol.  in-fol.;  le  Glossaire  roman 
de  Roquefort;  le  Lexique  roman  de  Rajrnouard;  le  GloS' 
sarium  germanicum  de  Wachter,  Leipzig,  1737  ;  le  Glos- 
sarium ad  scriptores  linguœ  francicœ  et  alemanûsœ  de 
Schiller,  Ulm,  1727  ;  le  Glossarium  germanicum  medii 
œvi  de  J.-G.  Scherz,  annoté  par  Oberlin,  Strasbourg, 
1781-84, 3  vol.  in-fol.  On  peut  citer  comme  exemples  de 
Glossaires  particuliers  les  Lexiques  d'Homère,  de  Pin- 
dare,  de  Sophocle,  de  Thucydide,  etc.,  dans  lesquels  on 
trouve  seulement  les  mots  qui  figurent  dans  ces  auteurs, 
avec  les  sens  qu'ils  y  ont  attachés.  Les  recueils  de  locu- 
tions techniques  s'appellent  aussi  Glossaires. 

GLOUCESTER  (Cathédrale  de).  Cette  é^^ise,  ancienne 
abbi^e  de  S^Piem,  est  une  des  plus  belles  de  l'An- 


gleterre. Fondée  en  1080,  elle  ne  fût  terminée  qu'au 
xui*  siècle.  Son  plan  est  en  fo^me  de  croix  :  la  longueur 
extérieure  est  de  140  met.,  celle  du  transept  de  48  met.  ; 
la  voûte  de  la  nef  dans  œuvre  s'élève  à  28  met.,  celle  des 
collatéraux  à  13  met.  L'extérieur  de  l'édifice  n*a  rien  de 
très-remarquable,  sauf  la  tour  centrale;  le  portail  est 
fort  simple.  Tous  les  piliers  de  la  nef  sont  ronds.  Les 
fenêtres,  larges  et  hautes,  sont  traversées  de  meneau  t 
perpendiculaires.  Les  voûtes  sont  chargées  de  moulnru 
qui  s'entre-croisent  dans  tous  les  sens.  Parmi  les  tom- 
beaux on  remaraoe  ceux  de  deux  fils  de  Guillaume  le 
Conquérant,  d'Edouard  II,  de  l'évêque  Warburton,  de 
Jenner.  La  chapelle  de  la  S**-Vierge,  dont  l'entrée  est 
surmontée  d'une  espèce  de  tribune  très-omée,  et  dont 
chaque  côté  est  flamiué  de  deux  chapelles  absidales  à 
cinq  pans,  forme  une  petite  ^lise  à  cinq  travées,  avec 
transept  et  sanctuaire.  A  la  cathédrale  de  Glouoester  est 
attenant  un  beau  cloître  carré,  de  48  met.  de  c6té,  birge 
et  haut  de  6  met. 

GLOZA,  sorte  de  composition  particulière  aux  Espa- 
gnols, et  que  l'on  pourrait  comparer  aux  variations  de  la 
musique  sur  un  air  donné.  Ils  prennent  un  vers  et  en 
étendent  la  paraphrase  en  plusieurs  stances,  de  manière 
que  la  même  pensée  se  reproduise  dans  chacune,  en  fai- 
sant même  revenir  les  expressions  du  vers  fondaimental, 
et  finir  chaque  stance  par  sa  reproduction  partielle  et 
totale. 

GLOCKISTES  et  PICONNISTES.  V,  Fsancb  (lln- 
sique  en). 

GLYCONIQUE  (Vers),  espèce  de  vers  lyrique  chez  les 
Anciens,  composé  d'un  trochée,  d'un  dactyle,  d'un  dactyle 
ou  d'un  crétique.  Il  se  trouve  fréquemment  en  système, 
avec  un  phérécratien  pour  clausule.  Le  1*'  pied  peut  être 
un  spondée.  11  en  est  de  même  du  2*  ;  mais  alors  les  Grecs 
terminaient  par  un  choriambe.  Ils  remplaçaient  quelque- 
fois le  spondée  du  2*  pied  par  un  tnbraaue,  rarement 
par  un  anapeste,  plus  souvent  par  un  trochée.  Quelque- 
rois,  même  lorsqu'il  y  a  un  tribraque  au  2*  pied,  le  3* 
renferme  deux  tribraques  :  c'est  que  chaque  longue  du 
choriambe  a  été  résolue  en  deux  brèves.  On  trouve  des 
exemples  de  tribraque  au  i*'  pied,  avec  un  dacQrle  aux 
deux  antres.  D'autres  fois  le  glyconique  se  compose  d'un 
spondée  ou  d'un  trochée  entre  deux  dactyles,  dont  le 
dernier  peut  être  un  crétique.  Chez  les  tragiques,  les  gly- 
coniques  de  différentes  espèces  peuvent  se  correspondre 
de  la  strophe  à  l'antistrophe.  Dans  les  systèmes,  on  insé- 
rait fréquemment  des  vers  de  diverses  espèces,  par- 
ticulièrement de  ceux  qui  se  rattachent  au  système 
trochaique,  ou  choriambique,  ou  dactylique.  Quelquefois 
ces  vers  ne  sont  que  des  fragments  de  glyconiques,  ou  des 
glyconiques  hypermètres.  Parmi  les  poètes  latins,  Ho- 
race n'emploie  jamais  le  elyconique  en  système  continu; 
il  l'unit  à  l'asclépiade.  r.  Hermann,  Épitome  doctrines 
metricm,  p.  200-208.  P. 

GLYPHE  (du  grec  gluphéin,  graver),  ornement  architec- 
tural; canal  creusé  en  portion  de  cercle  ou  en  angle.  Il 
sert  par  ses  combinaisons  à  tracer  une  inscription,  à 
graver  une  effigie  ou  des  ornements  sur  une  pierre  tu- 
mulaire. 

GLYPTIQUE  (du  grec  gluphéin,  graver )|  mot  qui  si- 
gnifie art  de  graver,  mais  que  l'on  emploie  seulement 
dans  le  sens  restreint  de  gravure  sur  pierres.  Avant  de 
graver  une  pierre,  on  la  taille  en  rond  ou  en  ovale,  et  on 
en  polit  la  surface;  si  cette  surface  est  bombée,  la  pierre 
se  nomme  cabochon  (V,  ce  mot).  Pour  graver,  on  se  sert 
d'un  touret,  espèce  oe  tour  auquel  est  fixée  une  bouU' 
rolle  ou  tarière  :  ce  petit  morceau  de  fer  ou  de  cuivre, 
que  le  touret  met  en  mouvement,  use  et  entame  la  pierre, 
et,  pour  aider  son  action,  on  emploie  des  poudres  et  des 
liquides.  Les  Anciens  se  servirent  du  naxmm,  poussière 
de  grès  du  Levant,  puis  du  schiste  d'Arménie,  et  enfin 
de  Vémeri,  qui  est  aujourd'hui  en  usage;  on  polissait  les 
pierres  avec  Vostradte  ou  os  de  seiche,  et  avec  la  poudre 
de  diamant,  qui  a  prévalu  chez  les  llodemes.  Lespiem» 
gravées  en  creux  s'appellent  entailles^  et  les  pierres  gra- 
vées en  relief,  camées  {V,  ces  mots).  Toutes  sortes  de 
pierres  ont  été  employées  par  les  graveurs  :  les  tendres 
ou  communes  ont  ordinairement  été  travaillées  par  des 
artistes  vulgaires,  les  plus  dures  et  les  plus  précieuses 
par  des  artistes  habiles.  On  a  surtout  choisi  Vaméthyste, 
Vaigue^marine.  Vagate,  U  cornaline,  la  sarioine,  les 
jaspes,  etc.  (  V,  ces  mots).  Quand  une  gravure  est  ter- 
minée, on  la  polit  avec  du  tripoli,  et  au  moyen  de  petits 
instruments  de  bois  ou  d'une  brosse;  mais  il  ne  faut  pas 
un  poli  trop  brilh^it,  dont  les  reflets  nuiraient  à  l'eflet 
du  travail.  Les  œuvres  de  la  glyptique  sont  précieui 


GLT 


979 


GLT 


M<4eulement  par  la  matière  qu'emploient  les  artistes, 
niôs  eneore  par  la  difficulté  du  travail  :  il  faatiin  grand 
ut  fKMir  obtenir  la  perfe^on  des  contours,  et  pour  con- 
terrer  les  proportions  dans  les  formes  du  relief. 

La  connaissance  des  pierres  gravées  fournit  d'utiles 
nnaelgnements  à  l'archéologie  :  souvent  celles  de  TAnti- 
qQité  représentent  des  épisodes  mythologiques  ou  histo- 
riques qui  ont  rapport  à  des  passages  des  poètes  i  ou  bien 
eues  reproduisent  des  statues  et  des  basHrelieft  célèbres, 
dont  elliBs  nous  conservent  seules  le  souvenir;  elles  peu- 
vent servir  à  restaurer  des  statues  mutilées  ou  privées 
de  leurs  attributs,  en  ofirant  les  mômes  sujets  (^ans  leur 
ensemble,  avec  tous  les  accessoires  ;  elles  ont  conservé 
les  noms  de  plusieurs  habiles  graveurs,  et  peuvent  aider 
ainsi  à  déterminer  l'époque  à  laquelle  i^partiennent  quel- 
ques ouvrages  de  l'art.  Pour  réunir  une  suite  de  pierres 
gravées,  il  faut  d'heureux  hasards,  des  recherches  lon- 
gues et  persévérantes,  et  beaucoup  d'argent;  il  n*v  a 
guère  que  les  souverains  qui  aient  pu  former  des  collec- 
tions considérables,  liais,  par  le  moyen  des  empreintes 
(F.  cemot)^  on  a  mis,  pour  ainsi  dire,  les  pierres  gravées 
en  la  possMsion  de  tous  ceux  qui  attachent  moins  de 
prix  à  la  matière  elle-même  qu'aux  renseignements  don- 
nés par  ces  pierres  :  une  collection  d'empremtes  a  l'avan- 
tage de  réunir  les  si^ets  épars  dans  les  divers  cabinets. 

A  part  quelques  traits  disséminés  dans  les  œuvres  de 
Pline  le  naturaliste,  on  ne  trouve  pas,  dans  les  écrits  des 
Anciens,  de  détails  sur  leurs  procédés  de  glyptique.  S'il 
est  présumable  que  nos  procédés  d'exécution  mécanique 
sont  plus  parfaits,  en  revanche  les  meilleurs  gruveurs 
modernes  n'ont  pas  encore  atteint  la  perfection  artîstioue 
des  Cbrecs.  Les  pierres  gravées  ne  servirent  pas  seule- 
ment aux  Anciens  pour  leurs  anneaux  et  leurs  cachets, 
Ua  en  firent  des  objets  de  toilette  et  de  luxe  :  les  femmes 
en  om^ent  leurs  coiffures,  leurs  bracelets,  leurs  cein- 
tores,  leurs  agrafes,  la  bordure  de  leure  robes  ;  les  vases 
et  les  meubles  pr^eux  en  furent  enrichis. 

la  glyptique  psralt  avoir  pris  naissance  chez  les  Égyp- 
tiens. Les  plus  anciennes  pierres  gravées  sont  les  scores 
béeSf  ainsi  nonmiées  parce  qu'elles  ont  la  figure  de  cet 
insecte,  oui  était  sacré  en  Égrpte  :  on  y  voit  le  plus  sou- 
vent des  niéro^yphes  gravés  en  creux,  ou  des  images  et 
attributs  de  divinités.  Les  Éthiopiens  gravaient  aussi  des 
cachets.  Le  rtUùmal  du  grand-prètre  des  Hébreux  était 
orné  de  12  pierres,  sur  lesquelles  étaient  gravés  les  noms 
des  tribus.  Comme  monuments  de  la  ^yptique  ches  les 
Babyloniens,  nous  possédons  un  certain  nombre  de  cy- 
ImdirBs  (  F.  ce  mot),  Alexandre  le  Grand  scella  des  actes 
avec  le  cachet  du  roi  de  Perse  Darius  ni.  —  Les  Étrus- 
ques pratiquèrent  de  bonne  heure  la  glyptique.  Leurs 
pierres  gravées  se  reconnaissent  :  1*  à  la  forme  de  sca- 
rabée, qui  leur  est  assez  ordinaire,  et  qu'ils  ont  sans 
doute  empruntée  à  r£gypta  ;  2«  à  un  grènetis  formé  de 
points  en  ereux  qui  cernent  le  champ  de  la  pierre;  3<*  aux 
inscriptions  tracées  ^néralement  de  droite  à  gauche. 
Elles  sont  toutes  perotes  de  part  en  part  dans  le  sens  de 
leur  longueur,  sans  doute  parce  qu'on  les  montait  sur 
anneaux,  ou  qu'on  les  employait  à  des  colliers  et  comme 
amulettes.  Les  sujets  qu'elles  représentent  sont,  pour  la 
plupart,  empruntés  à  la  religion  ou  à  l'histoire  héroloue 
des  Grecs.  Les  foussaires  ont  beaucoup  contrefait  les 
pierres  étrusques.  —  C'est  aux  Grecs  qu'appartiennent 
les  couvres  les  plus  remarquables  de  la  glyptique,  parce 
qu'ils  ont  en  le  goût  le  plus  pur.  On  ne  saurait  dire  à 
quelle  époque  ils  commencèrent  à  cultiver  cet  art  ;  mais 
n  pins  ancienne  pierre  gravée,  de  travail  grec,  qui  nous 
soit  parvenue,  est  une  cornaline  du  cabinet  de  Berlin,  où 
est  représentée  la  mort  du  héros  Spartiate  Othryadès, 
événement  du  vi*  siècle  av.  J.-C.  Les  pierres  grecques 
sont,  en  général,  de  forme  ovale  et  de  peu  d'épaisseur. 
Pour  lea  dioisir  on  s'attachait  à  certains  rapports  de  leur 
ooulenr  apec  le  sujet  à  graver  ;  ainsi,  on  mvait  une 
flgmne  de  FroMrpinê  sur  une  pierre  noire,  iVisp^un^  et 
les  TWtont  sur  de  l'aigue-marine,  Bacchus  sur  une  amé- 
thyste, Marsyas  écorché  sur  du  Jaspe  rouge,  etc.  Un 
nom  gravé  sur  une  pierre  grecque  doit  être  généralement 
oonaidéré  comme  oâui  dei'artiste  qui  l'a  exécuté,  tandis 
que,  sur  les  pierres  romaines,  c'est  plutôt  celui  du  pro- 
priétaire. On  n'a  recueilli  le  nom  d'aucun  des  artistes 
^ypliens  ou  étrusques,  mais  on  connaît  bon  nombre  de 
greveors  grecs,  entre  autres  Théodore  de  Samos,  Apollo- 
nfde,  SoloB^  Polyclôte  de  Sicyone,  Pyrgotèle,  Dioscoride. 
Jb  préUMwit  le  nu  aux  figures  drapées,  et  les  sujets 
fflvâologigaes  oa  héroïques  à  ceux  de  l'histoire  contem- 
oondne^-^  I^  '^'y  ^"^  P^  d'école  romaine  de  glyptique; 
HP  niflRW  gmTâee  à  Borne  par  les  artistes  grecs  qu'on  y 


attira  appartiennent  à  l'école  grecque,  mais  représentam 
surtout  des  figures  romaines.  Toutefois ,  quelques  Ro- 
mains s'exercèrent  à  la  glyptique,  tels  que  Quintillus, 
Aquilas,  Rufus,  Félix  (qu'on  croit  avoir  été  un  affranchi 
de  Cornélius  Sévérus).  La  glyptique  survécut  aux  autres 
arts  dans  le  Bas-Empire,  parce  qu'elle  était  inséparable 
de  l'art  de  sraver  les  coins  pour  les  monnaies. 

En  Oecident,  après  la  chute  de  l'Empire  romain,  le 
goût  des  pierres  gravées  s'effaça.  Heureusement,  les  Tiré* 
sors  des  églises  conservèrent  pendant  le  moyen  âge  qxu» 
ques  œuvres  précieuses,  dans  lesquelles  une  piété  pea 
éclairée  voyait  des  objets  de  dévotion  (F.  CAMés); 
d'autres  servirent  d'ornements  aux  châsses,  aux  reïi^ 
quaires,  aux  vêtements  sacerdotaux.  Depuis  la  Renais* 
sance  dias  arts,  le  godt  de  la  glyptique  s'est  ranimé,  les 
pierres  antiques  ont  été  recherchées  avec  empressement^ 
et  les  artistes  ont  essayé  de  marcher  sur  les  traces  des 
Andens.  Au  xvi*  siècle  on  remarque  surtout  Jean  et  Do- 
minique, que  leur  habileté,  l'un  dans  la  gravure  en 
creux,  l'autre  dans  la  gravure  en  relief^  fit  appeler  Jean 
des  Cornalines  et  Dominique  des  Camées.  Sur  leurs  tra- 
ces marchèrent  Michelino,  Blarie  di  Pescia,  Castel  Bolo- 
gaese,  Valerio  Vicentino  ou  Valérie  Belli,  Alessandro 
esari  dit  il  Greco,  etc.  L'Italie  a  encore  produit,  an 
xvn*  siècle,  André  dit  U  Borgognone,  et,  an  xvm*,  Sir- 
leti,  les  Costanzi,  Ghinghi,  les  Torriccelli,  Pichler.  Resa. 
La  glyptique  fut  importée  en  France  par  Ifatteo  del  Na- 
saro,  sous  François  I*'*  et,  dès  le  règne  de  Louis  Xm, 
Julien  de  Fontenay,  dit  Coldori,  s'y  distingua.  Les  Siriès, 
qui  se  sont  succédé  de  père  en  fils  comme  graveurs  de  la 
galerie  et  à  l'École  des  neaux-arts  de  Florence,  sont  ori- 
ginaires de  Figeac  (Lot).  Parmi  les  artistes  français  qui 
se  sont  fait  un  nom  dans  la  glyptique,  on  remarque  : 
Ifaurioe,  originaire  du  Milanais,  mort  en  1732  ;  Baiîier, 
mort  en  174fi;  Jacoues  Gua^,  de  Bfarsellle;  et,  au  xix* 
siècle,  Jeuffroy,  Desoœufs,  Domard,  Faugînet,  Mongeot, 
Hewite,  Simon,  Tiolier.  Un  prix  de  gravure  en  pierres 
fines  et  en  médailles  a  été  institué,  en  1805,  à  l'École 
des  beaux- arts  de  Paris.  En  Allemagne,  la  {pnavure  en 
pierres  fines  remonte  an  xvi*  siècle,  et  les  srtistes  de  ce 
pays  prétendent  au  premier  rang  après  les  Italiens  :  ils 
font  encore  beaucoup  d'armoiries  sur  pierres  dures.  Les 
plus  remarquables  ont  été  Lucas  Kilian,  les  Dorsch, 
Laurent  Natter.  L'Angleterre  cite  aussi  quelques  bons 
graveurs  :  au  premier  rang,  Thomas  Simon,  qui  grava 
le  portrait  de  CromwelU 

Certains  caractères  servent  à  distinguer  les  pierres 
gravées  antiques  des  modernes.  D'abord,  il  faut  examiner 
si  la  matière  de  la  pierre  a  été  connue  et  travaillée  par 
les  Anciens,  si  elle  provient  d'un  gisement  d'où  ils  auront 

Su  la  tirer,  si  les  bons  artistes  l'ont  employée.  Puis,  le 
ni  du  trevail,  la  fidélité  du  costume,  le  poli  du  fond  de 
la  mvure,  sont  encore  des  Indices  assez  certains  d'anti- 
quité. L'entente  de  la  perspective  peut  rendre  une  pierre 
suspecte,  parce  que  les  Anciens  ont  ignoré  Jusqu'à  un 
certain  point  cet  art.  Les  faussaires  ayant  souvent  inscrit 
des  noms  de  graveurs  célèbres  sur  des  œuvres  médiocres 
ou  modernes,  on  doit  examiner  si  la  beauté  du  travail 
répond  à  la  réputation  de  l'artiste,  et  le  comparer  aux 
autres  ouvrages  connus  de  cet  artiste.  La  manière  dont 
les  lettres  des  inscriptions  ont  été  gravées  peut  être  aussi 
un  bon  indice  :  les  grands  artistes  inscrivaient  leur  nom 
eux-mêmes  avec  beaucoup  de  soin;  quelques  graveurs 
modernes,  tels  que  Pichler  et  Natter,  se  sont  servis  de  ca- 
ractères grecs. 

V,  Rossi,  Gemme  antiche  figurate,  Rome,  1707,  4  vol. 
in-i**;  Gori,  Thésaurus  gemmarum  antviuarum,  Flo- 
rence, 1750,  3  vol.  in-4<>;  Uariette,  Traité  des  pierret 
gravées,  Paris,  1750,  2  vol.  in-fol.;  Natter,  Traité  de  la 
gravure  en  pierres  fines,  Londres,  1754;  Winckelmann, 
Description  des  pierres  gravées  du  baron  de  Stock,  Flo- 
rence, 1760,  in-ibl.;  Lachau  et  Leblond,  Description  des 
pierres  gravées  du  duc  d'Orléans,  Paris,  1780,  2  vol. 
in-fol.;  Eckhel,  Pierres  gravées  ou  Cabinet  impérial. 
Vienne,  1788,  in-fol.;  Millin,  Introduction  à  Vétude  des 
pterres gravées,  Paris,  1797,  et  Pierres  gravées'inédites, 
1817,  in-8«;  Dubois,  Choix  de  pierres  gravées  anttques, 
égyptiennes  et  persanes,  Paris,  1817,  in-4<*;  Lenormant, 
Trésor  de  numismatique  et  de  glvptiqtiê.  B. 

GLYPTOGRAPHIE  (du  ginc  glupta,  choses  gravées,  et 
graphéin,  décrire),  description  des  pierres  gravées. 

GLYPTOTHÈQUE  (du  grec  glupta,  choses  gravées,  et 
thèkè^  dépôt),  collection  de  pierres  gravées.  Marcus  Scau- 
rus,  beau-fils  de  SyUa,  fut  le  premier  qui  forma  une  col- 
lection de  ce  genre.  Pompée  suivit  son  exemple.  César 
exposa  dans  le  temple  de  Vénus  Génitrix  les  pierres  qu'il 


60B 


980 


GOD 


vnlx  enlevées  à  Mithridate,  et  Marcellus,  fils  d'Octavie, 
Saissa  le  publie  Jouir  de  la  collection  qu*il  avait  formée 
dana  le  temple  a*Âpollon  Palatin.  Au  xvi*  siècle,  les  Hé- 
dids  réunirent  des  pierres  gravées,  et  tronvèrent  bientût 
des  imitateurs  dans  le  reste  de  TEurope.  Parmi  les  col- 
lections publiques,  on  distingue  celles  de  la  Bibliothèque 
impériale  à  Paris,  du  Vatican  à  Rome,  de  Berlin,  de 
Vienne,  de  Dresde,  de  Munich,  de  Copenhague,  de  Saint- 
Pétersbourg.  Au  nombre  des  cabinets  appartenant  à  des 
particuliers,  on  cite  ceux  de  Strozzi  et  de  Ludovlci  à 
Rome,  de  Poniatowski  en  Russie,  des  ducs  deDevonshire, 
de  Carlîsle,  de  Bedford  et  de  Ifarlborough  en  Angleterre, 
du  duc  de  Blacas,  du  comte  Pourtalès  et  du  baron  Roger 
à  Paris. 

GNOIDQUE  (Poésie),  c.-à-d«  sentencieuse;  du  grec 
m&mè,  sentence  morale.  Elle  consistait,  chez  les  Grecs, 
à  exprimer  en  vers  précis,  et  dans  un  style  élégant  et 
naturel,  les  vérité  morales  les  plus  importantes,  qui  se 
gravaient  ainsi  plus  aisément  dans  la  mémoire.  Phoçylide 
de  llilet,  Théognis  de  Mégare,  au  vi*  siècle  avant  J.-C, 
sont  les  poètes  goomiques  les  plus  célèbres;  mais  nous 
n'avons  que  des  fragments  de  leurs  œuvres.  V,  les  re- 
cueils de  Brunck  (1784),  de  Bekker  (iS15),  et  les  tra- 
ductions françaises  de  Lévesque  et  de  Coupé. — Chez  les 
modernes,  on  peut  compter  parmi  les  pofites  gnomiques 
Dnfaur  de  Pibrac  (xvi*  siècle),  dont  les  Quatrains  mo- 
raux ont  été  longtemps  célèbres,  et  Pierre  Matthieu, 
mort  sous  Louis  XIII.  Quant  aux  Sentences  de  Publius 
Syrus,  contemporain  de  Jules  César,  ce  ne  sont  que  des 
vers  isolés  extraits  de  ses  Mimes,  et  qui  n'appartiennent 
pas  proprement  à  la  poésie  gnomique.  P. 

GNOMON.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

GNOSnCISME,  du  grec  gn&sis,  connaissance.  On  en- 
tend par  là  Tensemble  des  doctrines  philosophiques  et 
religieuses,  basées  sur  une  prétendue  connaissance  su- 
périeure et  mystérieuse.  Le  gnosticisme  se  montra  dès 
les  premières  années  de  Tère  chrétienne.  II  eut  des  ori- 
gines diverses,  et  il  comprenait  un  grand  nombre  de 
sectes;  mais  il  y  avait  entre  elles  quelques  principes 
communs  :  toutes  expliquaient  Torigine  des  êtres  spiri- 
tuels par  émanation  du  sein  de  Dieu  (  V»  Éons)  ;  à  me- 
sure que  ces  êtres  s'éloignaient  du  foyer  divin,  ils  dégé- 
néraient et  tendaient  à  se  matérialiser.  Jusqu'au  retour 
de  tous  au  |>oint  de  départ  et  au  rétablissement  de  Thar- 
monie  primitive.  A  ces  données  générales  les  gnostiques 
ajoutaient  quelques  doçnes  secondaires,  qui  variaient 
selon  les  écoles,  mais  qui  revenaient  à  dire  oue  la  gnose 
était  une  tradition  réservée  à  une  race  privil^ée,  et  que 
le  gnosticisme  pouvait  seul  conduire  à  la  perfection. 
Tout  le  gnosticisme  se  divise  en  cinq  groupes  principaux, 
qui  eux-mêmes  se  subdirisent  en  des  rameaux  nombreux. 
Ces  dnq  groupes  sont  :  !•  le  groupe  palestinien,  qui  a 
pour  fondateur  principal  Simon  le  Magicien  ;  2*  le  groupe 
syriaque,  qui  se  rattache  au  précédent  par  son  fondateur 
Saturnin;  3*  le  groupe  égyptien^  qui  comprend  trois 
écoles:  la  première  eut  pour  chef  Basilide;  la  seconde, 
Yalentin;  la  troisième,  sortie  de  la  précédente,  était  celle 
des  Ophites,  ainsi  nommés  du  rôle  que  le  serpent  Jouait 
dans  leurs  cérémonies;  elle  comprenait  les  Caiinites,  qui 
regardaient  Jéhovah  comme  un  mauvais  génie  et  la  race 
de  Cain  comme  celle  des  'élus,  et  les  SSthiens,  qui  se 
rattachaient  au  Judaïsme  ;  4*  le  groupe  sporadique,  com- 
posé de  petites  fractions  détachées  du  groupe  éf^tien; 
5^  le  groupe  asiatique,  dont  les  principaux  organes  furent 
Gerdon  en  Syrie,  et  Blarcion  en  Asie  Mineure.  Ce  groupe 
fût  celui  qui  causa  à  l'Église  les  plus  vives  inquiâudes. 
Cependant  l'influence  du  gnosticisme  fut  bornée;  com- 
battu par  les  Pères  de  l'Église  et  surtout  par  S^  Irénée, 
poursuivi  avec  rigueur  par  les  empereurs  grecs,  il  dispa- 
rut peu  à  peu,  mais  non  sans  laisser  de  traces,  car  on  le 
retrouve  en  Orient  chez  les  Manichéens,  les  Paullciens, 
les  Bogomites;  en  Occident  chez  les  Cathares,  les  Albi- 
geois, et  chez  d'autres  sectes  qui  se  rattachaient  à  ces 
dernières.  V.  Matter,  Histoire  critique  du  Gnosticisme  et 
de  son  tnfiuence  sur  tes  sectes  religieuses  et  philoso- 
phiques des  six  premiers  siècles  de  Vére  chrétienne,  3  vol. 
in-8».  R. 

GOBELET  (du  bas  breton  goh?)^  vase  à  boire  dont  on 
.  se  servait  généralement  autrefois.  Chez  les  princes  et  les 
,  grands  seigneurs,  il  était  d'or,  couvert  de  riches  clse- 
i  lures,  et  pariois  enrichi  de  pierres  fines;  chez  les  bour- 
geois, il  était  d'argent,  et  d'étain  ou  de  bois  dans  la  classe 
pauvre.  La  forme  des  gobelets  a  varié  souvent;  l'une  des 
pins  communes  s'est  perpétuée  Jusqu'à  nos  jours  dans 
les  igobelets  dont  se  aenrent  sur  les  places  publiques  les  j 


marchands  de  coco;  ils  sont  évasés  du  haut,  et  soutenus 
par  une  base  large  et  peu  élevée.  Les  verres  ont  détrôné 
les  gobelets.  Des  gobelets  de  fer-blanc  servent  aux  esca- 
moteurs pour  exécuter  leurs  tours  de  glbeci^bv.  Parmi  les 
senrices  des  maisons  royales  de  France  avant  la  Révolu- 
tion, il  y  avait  celui  du  gobelet,  oui  se  divisait  en  deu> 
parties  :  la  pann^mie^Hiuche  et  Véchansonnerie-boiuche. 
Le  chef  de  ce  senrice  se  nommait  chef  du  gobelet,  et  ser- 
vait le  roi  l'épée  au  côté  ;  il  devait,  en  présence  du  premier 
valet  de  chambre,  goûter  de  tout  ce  oui  était  servi. 

GOBEUNS  (Manufacture  des),  célèbre  manufacture  de 
tapisseries  et  de  tapis,  entretenue  à  Paris  aux  frais  de 
l'État.  François  I*',  au  lieu  d'acheter  ses  tapisseries  aux 
marchands  de  Paris  ou  de  Flandre,  établit  au  château  de 
Fontainebleau  un  atelier  royal,  placé  sous  la  direction  du 
surintendant  des  bâtiments  Babou  de  La  Bourdaisière  et 
du  peintre  Sébastien  Serlio,  et  oui,  sous  Henri  H,  fut 
confié  à  Philibert  Delorme.  Henri  IV  installa  des  tapia- 
series  de  haute  lisse  à  Paris,  dans  la  maison  des  Jésuites, 
qui  venaient  d'être  chassés  de  France;  après  le  rappel  de 
cette  compagnie,  il  les  transféra  dans  les  galeries  du 
Louvre.  Des  tapissiers  flamands,  appelés  par  le  roi  en 
1601,  furent  placés  dans  quelques  restes  du  palais  des 
Toumelles,  puis  au  faubourg  S'-Marcel,  dans  une  maison 
dépendant  des  ateliers  de  teinture  de  la  famille  Gobelin. 
Ils  eurent  pour  chefs  Marc  de  Comans  et  François  de 
La  Planche,  dont  les  fils,  Charles  de  Comans  et  Raphaël 
de  La  Plancïie,  se  séparèrent  en  1633,  le  premier  restant 
aux  Gobelins,  le  second  allant  s'établir  au  faubouiig  S*- 
Germain,  dans  une  rue  qui  porta  son  nom,  là  où  passe 
aujourd'hui  la  rue  de  Varennes.  Les  deux  fabriques 
furent  subventionnées  par  le  roi.  En  1662,  les  ateliers 
du  Louvre  et  de  la  rue  de  La  Planche  furent  annexés  à 
celui  des  Gobelins,  où  Colbert  réunit  des  peintres,  des 
sculpteurs,  des  graveurs,  des  orfèvres,  des  fondeurs,  des 
lapidaires,  des  ébénistes,  des  teinturiers,  etc.  :  le  tout 
constitua  la  Manufacture  des  meubles  de  la  Couronne^ 
sous  la  direction  de  Lebrun,  peintre  de  Louis  XIV.  Tou- 
tefois cette  organisation  ne  fut  complète  qu'en  1667.  La 
manufacture  embrassa  dans  ses  travaux  tout  ce  qui  se 
rapportait  à  l'ameublement,  et  acquit  bientôt  un  grand 
renom  pour  la  beauté  et  l'excellence  de  ses  produits.  Les 
malheurs  de  la  fin  du  xvii*  siècle  lui  furent  funestes,  et, 
en  1694,  pendant  la  direction  de  Pierre  Mijpard,  on  con- 
gédia une  partie  des  ouvriers;  mais,  en  1609,  J.-H.  Man- 
sard,  surintendant  des  bâtiments,  arts  et  manufactures 
du  royaume,  lui  rendit  sa  première  organisation,  et  en 
donna  la  direction  à  Robert  de  Cotte.  L'établissement  des 
Gobelins  se  maintint,  avec  des  alternatives  de  succès 
plus  ou  moins  grands,  Jusqu'à  la  Révolution.  On  avait 
d'abord,  pour  Cure  la  tapisserie,  coupé  les  tableaux  par 
bandes,  ou'on  plaçait  près  de  la  chaîne  :  en  1747,  on 
imagina  ae  prendre  sur  du  papier  transparent  tous  les 
traits  du  tableau,  et  d'appliquer  ce  papier  sur  la  chaîne, 
comme  on  le  faisait  auparavant  du  tableau  même.  En 
1759,  Vaucanson  introduisit  encore  de  nouvelles  amélio- 
rations, ^n  1790,  an  salaire  fixe  pour  les  artistes  et  les 
ouvriers  fut  substitué  au  salaire  à  la  tâche.  A  partir  du 
1"  Empire,  la  manufacture  fut  comprise  dans  la  dotation 
de  la  couronne,  dont  elle  n'a  été  distraite  que  ds  1848  à 
1852.  En  1826,  la  manufacture  de  la  Savonnerie  {V,  ce 
mot)  lui  fut  annexée;  il  en  fut  de  même  de  celle  de  Beau- 
vais,  de  1848  à  1850.  —  Les  tapisseries  des  Gobelins  sont 
remarquables  par  la  perfection  des  procédés,  l'excellence 
de  la  teinture  des  laines,  la  beauté  de  l'exécution;  elles 
reproduisent  avec  une  surprenante  exactitude  les  tid>leaax 
des  peintres.  La  manufacture  comprend  une  galerie  d'ex- 
position, une  école  de  dessin ,  et  une  école  spédale  de 
tapisserie.  B. 

GOBETIS,  nom  qu'on  donne  quelquefois  au  crépt 
(K.  ce  mot), 

GODEBERT,  partie  du  vêtement  au  .xiv<>  siècle.  Selon 
les  uns,  c'était  une  tunique  qui  recouvrait  l'annore; 
selon  les  autres,  une  forme  particulière  de  camail. 

GODEFROI  DE  BOUILLON  (Les  Enfances  de),  cin- 
ouième  branche  du  Chevalier  au  Cygne,  Hélias  n^tablit 
dans  ses  domaines  la  duchesse  de  Bouillon  chassée  par 
un  usurpateur;  il  épouse  Béatrix,  fille  de  la  duchesse,  et 
lui  impose  la  condition  de  ne  Jamais  chercher  à  savoir 
son  nom  ni  son  pays.  Après  sept  ans  de  mariage,  elle 
oublie  son  serment;  Hélias  la  quit<(*  aussitôt.  Sa  fille  Ida 
est  mariée  au  comte  de  Boulogne;  elle  donne  le  Jour  à 
Godefroi,  qui,  encore  enfant,  se  distingue  par  tant  de 
prouesses,  que  sa  renommée  va  troubler  dans  La  Mecque 
le  Soudan  Gomumaran.  Ce  chef  vient  en  France  pour 
connaître  par  lai-même  le  mérite  de  GodeSroi,  et^  plein 


GON 


981 


fiOD 


ffadminsion.  Il  le  déclare  digne  de  Tempireda  monde.— 
n  existe  deui  leçons  manusoltes  des  Enfances  dv  Godé* 
frot  :  la  plus  ancienne  est  sans  nom  d'auteur;  Tautre,  qui 
ett  une  amplification  maladroite  de  la  première,  est  Ton- 
v^^se  d*an  certain  Renaut,  gui  écriTit  dans  les  premières 
«nnées  da  xiu*  siècle.  V.  Histoire  littéraire  de  la  France, 
t  XXII.  H.  D. 

GODILLE,  aviron  qa*on  place  dans  une  entaille  arron- 
£e  sur  Tarrière  d'une  barque,  et  au*un  seul  homme 
manie  en  imitant  les  mouvements  de  la  queue  d'un  pois- 
son. Faire  ayancer  la  barque  par  ce  moyen,  c'est  gO' 
diller.  ^      *— 

GODRON.  F.  Gacdron. 

GOD  SAVE  THE  KING,  c.-à-d.  en  anglais  Diau  sauve 
te  roi!  Cest  le  refrain  et  le  titre  d'un  chant  national 
anglais.  Ce  cliant,  d'un  caractère  grave  et  d'un  puissant 
eflfett  n*a  pas  d'auteur  cenain.  Les  uns  prétendent  qu'il 
Alt  compoisé  et  exécuté  pour  la  première  fois  sur  Forgue 
en  4607  par  un  certain  John  Bull,  organiste  de  la  cha- 
pelle  de  Jacques  I*'.  D'autres  disent  que  les  paroles 
étaient  :  God  save  great  James,  our  king  ?  que  Dieu  con- 
serve le  grand  Jacques,  notre  roi!);  qu^n  les  mit  en 
musique  pour  la  chapelle  catholique  de  Jacques  II  ;  qu'on 
n*06a  plus  les  chanter  après  la  chute  de  ce  prince,  et 
qu'au  hout  de  soixante  ans,  après  les  avoir  quelque  peu 
modifiées,  on  s'en  servit  pour  les  rois  de  la  nudson  de 
Hanovre.  D'après  une  autre  tradition,  l'hymne  et  la  mé- 
lodie auraient  du  poète  Harry  Carrey,  qui  aurait  fait 
corriger  et  compléter  son  œuvre  au  point  de  vue  de  la 
composition  muûcale  par  le  célèbre  Handel.  On  a  même 
dit  que  l'air  du  God  save  the  Jàng  avait  été  tiré  par 
Handel  d'une  InvoccUion  aux  Dieux  mise  en  musique  par 
Lulli  sur  des  paroles  de  Quinault;  on  qu'on  l'avait  pris 
d'un  Domine  salvum  écrit  par  le  même  compositeur 
pour  les  demoiselles  de  SM^yr,  et  transporté  à  la  cour 
de  Jacques  II.  Ce  c[u'il  y  a  de  certain,  c*est  que  l'hymne 
national  fut  imprimé  en  i745  dans  le  Gentteman's  Ma* 
gasine,  et  qu'il  devint  immédiatement  populaire.      B. 

GOELETTE  (de  goëland?),  petit  et  élégant  b&timent  à 
deux  m&ts  inclinés  vers  l'arriâne,  portant  depuis  30  Jus- 
qu'à 150  tonneaux.  Les  voiles  inférieures  sont  trapé- 
zoïdal^, et  du  genre  de  celles  qu'on  nonmie  latines; 
celles  de  l'avant  ou  focs  sont  triangulaires;  celles  qu'on 
hisse  au  haut  des  mâts  sont  carrées  comme  les  humers, 

Quelquefois  triangulaires  et  à  antennes.  La  goélette  est 
ne  voilière  et  bonne  marcheuse;  mais,  surprise  par  un 
grain,  elle  s'incline,  chavire  et  sombre  aisément  sous  ses 
voiles  démesurées.  Aux  États-Unis,  où  l'on  a  inventé  ce 
genre  de  bâtiments,  on  les  nomme  pUots-boats  (bateaux- 
pilotes).  En  Europe,  on  a  armé  des  goélettes  en  guerre; 
elles  portent  de  0  à  8  câronades.  Les  Anglais  appellent 
ces  bâtiments  scliooners,  —  On  appelle  goëlette-orick  ou 
brick-noëlette  un  b&timent  dont  le  prand  m&t  porte  une 
voilure  de  goélette,  et  le  m&t  de  misaine  une  voilure  de 

brick.     

GOMRErrE  (Loi).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d^ Histoire. 

GONDOLE,  embarcation  de  passage  et  d'agrément 
dont  on  se  sert  à  Venise.  Elle  est  à  fond  plat,  et  peinte 
en  noir;  son  bau  n'est  pas  grand  en  raison  de  sa  lon- 
goeor,  qui  est  de  il  met.  environ;  l'étrave  et  l'étambot 
(pièces  de  bois  faisant  suite  à  la  quille,  à  l'avant  et  à 
rarrière)  sont  prolongés  à  une  certaine  hauteur,  et  les 
bouts  finissent  en  volute  recourbée  au  dehors;  une  ca- 
bine pour  les  passagers  occupe  le  milieu.  Deux  hommes^ 
S  lacés  aux  extrémités,  suffisent  pour  mener  une  gon- 
ole  ;  ils  sont  debout,  et  rament  en  poussant  devant  eux. 
Comines  dit  que,  lorsqu'il  alla  à  Venise,  on  y  comptait 
30,000  gondoles;  au  commencement  du  xix*  siècle,  il  v 
en  avait  6,500  ;  ai^ourd'hui  on  en  trouverait  à  peine  70(1. 
—  Des  omnibus  et  des  diligences  ont  aussi  reçu  le  nom 
de  gondoles.  A  la  bataille  de  Fontenoy  (1745),  le  maré- 
chal de  Saxe,  qui  ne  pouvait  se  tenir  à  chevd,  se  fit 
porter  dans  une  gondoh  d'osier. 

GONFALON.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  dP Histoire. 

GONG,  instrument  de  musique  en  usage  chez  les  Chi- 
nois. Sa  forme  approche  de  celle  d'une  corne,  et  il  est 
composé  d'un  alliage  d'argent,  de  cuivre  et  de  plomb.  Cet 
instrument,  dont  le  son  est  aigu  et  retentissant,  s'em- 
ploie pour  éveiller  l'attention  des  auditeurs.  Dans  les 
châteaux  du  nord  de  l'Europe,  on  se  sert  d'instru- 
ments semblables,  au  lieu  de  cloches,  pour  appeler  les 
Invités  aux  repas  ;  —  on  s'en  sert  également  mamtenant 
les  lignes  de  chemins  de  fer. 

«G.   V.  T41I-TAM. 


sur 
oomo 


GONGORISME.  V.  Espagrolb  (Littérature). 

GONNE,  nom  d*cm  vêtement  de  dessous  à  Tosage  âc« 
hommes  et  des  fenmies  vers  le  xiii*  siècle.  On  appela 
Gonnel  le  petit  sayon  des  paysans. 

GORAH ,  instrument  de  musique  des  Hottentots.  Il  se 
compose  d'une  baguette  tendue  en  forme  d'arc  au  moyen 
d'une  corde  à  boyau.  A  l'une  des  extrémités  de  cetto 
corde  est  fixé  un  tuyau  de  plume  d'autruche.  Ce  tuyau 
étant  placé  entre  les  lèvres  et  soumis  au  souffle  du  joueur, 
la  corde  vibre,  et  l'on  peut  lui  faire  produire  toutes  les 
notes  d'un  accord  parfait. 

(K)RGE,  moulurv»  concave  qui  représente  dans  son 
profil  un  talon  renversé  ou  une  courbe  variable.  L'archl* 
tecture  ogivale  dans  sa  3*  période  fit  un  grand  usape  des 
moulures  creusées  en  gorge.  La  Renaissance  en  tira  un 
merveilleux  parti  pour  les  corniches  des  plafonds  inté- 
rieurs des  appartements.  Les  corniches  à  grandes  mou- 
lures creuses  se  perpétuèrent  Jusqu'au  siède  dernier,  et 
on  semble  vouloir  y  revenir  de  nos  Jours. 

GORGE,  terme  de  Fortification.  V.  Rastion. 

GORGERETTE  ou  GORGIÈRE,  nom  donné  an  ziv*  siè- 
cle à  un  collet  de  mailles,  attaché  le  plus  souvent  aa 
haubert,  et  qui  faisait  l'office  de  cravate  par-dessous  le 
camail. 

GORGERIN,  partie  cylindrique  et  légèrement  concave 
du  chapiteau  dorique ,  comprise  entre  l'astragale  et  les 
filets,  et  ornée  quelquefois  de  fleurons  et  de  cannelures. 

GOEOERDi,  pièce  d'armure.  V.  notre  Dictiotxncàre  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

GORGHEGGIO,  mot  italien  par  lequel  on  désigne  un 
passage  rapide  exécuté  avec  la  voix,  et  une  vocalise, 

GORMONT  ET  ISEMBART.  V.  le  Supplément. 

GOTHIQUE  (Architecture).  V.  Ogivalb  (Architecture). 

GOTHiQDB  f  Écriture).  V.  ÉcarruRB. 

GOTBiQCB  (Langue,  Littérature).  V.  AtLEMANOE. 

GOTHS  (Art  des).  V.  Espagnb,  Itaub. 

GOUACHE,  autrefois  Guazxe  (de  l'italien  guaat») ^ 
flaque  d'eau),  sorte  de  peinture  en  détrempe  dans  la- 
quelle on  emploie  des  couleurs  broyées  et  délayées  à 
Teau  gonunée.  Elle  diffère  de  l'aquarelle  (K.  ce  mot)  en 
ce  que  les  couleurs  sont  en  p&te  et  se  posent  par  couches 
successives  comme  dans  la  peinture  à  l'huile.  Très- 
propre  à  peindre  le  paysage  d'après  nature,  elle  sert  aussi 
a  faire  des  esquisses  pour  de  srandes  compositions.  On 
l'emploie  pour  les  décorations  de  théfttre,  pour  celles  des 
fêtes  publiques,  pour  des  perspectives.  (îette  manière  de 
peindre,  prompte  et  expéditive,  a  de  l'éclat.  Il  ne  faut  pas 
oublier,  en  la  pratiquant,  que  les  couleurs  sèbhent  promp- 
toment,  qu'il  est  impossiole  de  les  fondre  autant  qu'on 
pourrait  le  souhaiter,  et  que  les  retouches  sont  à  peu 
près  impossibles.  En  Î839,  à  l'Exposition  de  peinture  de 
Pïuis,  on  vit  des  essais  de  gouache  vernie,  qui  a  pour 
but  de  remédier  à  cet  inconvénient.  —  Cest  la  gouache 
que  les  mpines  du  moyen  âge  employèrent  pour  orner  les 
manuscrits  de  si^ets  empruntés  à  la  Bible.  I>arml  les 
peintres  modernes  qui  excellèrent  dans  ce  genre  de  pein- 
ture, on  remarque  :  le  Corrége,  dont  le  Musée  du  Louvre 
possède  deux  beaux  tableaux  allégoriques  {la  Vertu  vie* 
torieuse  des  Vices,  et  VHomme  sensuel  attaché  au  Plaisir 
par  V Habitude);  J.-G.  Bawr,  de  Strasbourg,  habile  dans 
le  paysage,  la  perspective  et  l'architecture,  et  dont  le 
même  Musée  renferme  une  Cavalcade  du  pape  et  une 
Marche  du  Grandr^eigneur;  Baudoin,  gendre  de  Bou- 
cher, et  auteur  d'une  suite  de  tableaux  dans  le  genre 
libre  et  familier,  entre  autres  le  Coucher  de  la  mariée; 
Noël,  dont  on  a  des  marines  très-estimées.  Les  Persans, 
les  Chinois  et  les  Indiens  ont  parfaitement  réussi  dans 
la  gouache  :  on  voit  à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris 
une  série  de  portraits  en  pied  et  bBaucoup  de  sujets  tur 
miliers,  dessinés  et  peints  avec  une  grande  finesse,     B« 

GOUDJERATE  (Idiome).  V.  GozEftATB. 

GOUILLARDS.  V.  Clercs-Ribacds. 

(jOUJAT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bto» 
graphie  et  d  Histoire. 

GOULET,  canal  étroit  qui  sert  d'entrée  à  une  rade  ou 
à  un  port. 

GOULETTE,  nom  donné,  dans  les  cascades,  à  un  petit 
canal  en  pente  douce  taillé  sur  des  tablettes  de  pierre  ou 
de  marbre,  et  interrompu  d'espace  en  espace  par  de 
petits  bassins  en  coquille  d'où  sortent  des  bouillons  d'eau* 

GOUM.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'His* 
toire, 

GOUPILLON,  aspersoir  en  usage  dans  l'Église  catho» 
lique.  Cest  un  petit  b&ton  portant  une  tète  garnie  de 
soies  de  porc.  Le  mot  vient  du  vieux  français  goupil 
(renard),  parce  que  c'était  avec  une  queue  de  renard  que 


GOU 


982 


GOU 


ie  lUsaient  anciennement  les  aspersions.  Le  goupillon 
est  quelquefois  tout  en  métal,  et  alors  la  tôte  est  formée 
d*ane  boule  creuse  retenant  Tean  bénite,  mats  percée  de 
petits  trous  qui  permettent  d^asper^^er  les  fidèles. 

GOURABE  ou  GOURABLE,  gprande  barque  à  trois  mâts 
employée  sur  la  mer  des  Indes,  et  remarquable  par  un 
gréement  très-élancé,  par  la  grosseur  et  Télévation  exa- 
gérée de  la  poupe. 

GOURBIL.  )  K .  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

GOURDE.   ]  Biographie  et  d* Histoire. 

GOURMANDISE,  amour  déréglé  du  boire  et  du  man- 
ger. C'est  le  4*  des  pécbés  capitaux. 

GOURMETTE,  en  termes  de  Marine,  garde  qu*on  met 
sur  un  nayire  pour  veiller  aux  marchandises.  —  Les  Pro- 
vençaux donnent  le  môme  nom  à  un  valet  de  bord 
char^  surtout  du  nettoyage  du  b&tlment  et  du  service  de 
Téquipage. 

GOUSSE ,  ornement  architectursl  en  forme  de  gousse 
Tégétide.  On  le  trouve  principalement  dans  le  chapiteau 
•unique,  mais  il  s*écarte  souvent  de  la  forme  naturelle 
pour  en  adopter  d'autres  variables. 

GOUSSET,  partie  des  anciennes  armures,  qui  avait  la 
forme  d'un  mangle,  et  qui  garantissait  le  dessous  du 
bras.  —  Dans  le  Blason,  on  donnait  le  même  nom  à 
l'une  des  pièces  honorables  de  l'écu ,  prenant  en  haut 
des  deux  angles  et  se  terminant  en  pal  à  la  pointe. 

GOUT.  Le  goût  est  plus  facile  à  définir  que  l'esprit  ou 
môme  le  génie  ;  et  Voltaire,  qui  en  avait  tant ,  est  un  des 
écrivains  qui  en  ont  le  mieux  déterminé  les  caractères. 
«  En  n&néral ,  dit-il ,  le  goût  fin  et  sûr  consiste  dans  le 
«  sentiment  prompt  d'une  beauté  parmi  des  défauts,  et 
«  d'un  dêTaut  parmi  des  beautés.  »  Il  a  écrit  encore,  dans 
le  Siècle  de  Lows  X!V  :  «  Le  goût  n'est  que  la  suite  d*un 
«  sens  dvoit,  et  le  sentiment  prompt  d'un  esprit  bien 
«  fait.  »  ije  goût ,  en  effet,  se  compose  de  deux  âéments, 
rintelligenoe  et  la  sensibilité.  L'un  sert  à  discerner  le 
vrai  du  faux,  le  spécieux  du  solide,  à  distinguer  les 
nuances,  à  pénétrer  les  secrets  et  les  règles  du  beau  :  on 
rappelle  également  sem  aritûiue.  L'autre  est  frappé  spon- 
tanément des  défauts  et  des  beautés,  remplace  le  Juge- 
ment par  l'émotion,  et  adopte  ou  repousse  avec  une  é^ue 
vivacité  ce  qui  lui  plaît  et  ce  qui  lui  répugne.  Nous  avons 
indiqué  ailleurs  (r.  CaniQUB)  le  n^port  et  la  propor- 
tion de  ces  deux  facultés.  Il  semble  cependant  que  le  goût 
doit  être  essentiellement  critioue,  et  saisir  particulière- 
ment les  défauts.  Au  reste,  réduit  à  l'intelligence,  il  de- 
viendrait sec^  froid;  réduit  à  la  sensibilité,  il  tournerait 
en  panégyriques  enthousiastes  ou  en  boutades  d'impa- 
tience, et  serait  exposé  à  de  fréquentes  erreurs.  On  en 
foit  la  preuve  dans  les  Jugements  des  connaisseurs  et  du 
public  ;  les  premiers,  plus  éclairés  et  plus  difficiles,  rai- 
sonnent leurs  impressions,  les  discutent,  les  soumettent 
à  l'analyse,  au  lieu  de  s'y  livrer  fhinchement  lorsqu'elles 
•ont  (ustes  et  vraies.  C'est  pour  eux  que  La  Bruyère  a  i 
écrit  :  «  Le  plaisir  de  la  critique  nous  ôte  celui  d'être 
^  vivement  touchés  des  belles  choses.  »  Le  peuple,  qui 
Abandonne  tout  entier  aux  choses  qui  le  frappent,  se  ! 
laisse  souvent  prendre  à  la  déclamation,  à  la  fausse  cha-  j 
leur,  aux  artifices  grossiers;  il  vaut  mieux,  avec  lui, 
frapper  fort  que  frapper  juste.  De  ces  deux  manières  de 
Jpger,  laquelle  est  préférable?  Au  milieu  du  xvm*  siècle 
Dalembert  écrivait  t  «  L'impression  est  le  Juge  naturel 
«  du  premier  moment,  la  discussion  l'est  du  second.  Dans 
«  les  personnes  qui  Joignent  à  la  finesse  et  à  la  prompti- 
«  tude  du  tact  la  netteté  et  la  Justesse  de  l'espnt,  le  se- 
«  cond  Juge  ne  fera  pour  rordinaire  que  confirmer  les 
«  arrêts  rendus  par  le  premier.  »  Et  il  ^joutait ,  à  propos 
de  cet  esprit  d'examen  et  d'analyse,  devenu  celui  de 
r^oque  sous  le  nom  &esprit  philosophique,  et  dont  il 
était  lui-même  un  des  représentants  les  plus  autorisés  : 
«  Tel  est  le  malheur  de  la  condition  humaine.  Nous  n'ao- 
«  quérons  guère  de  connaissances  nouvelles  que  pour 
«  nous  désaJ[>u86r  de  quelque  illusion,  et  nos  lumières 
«  sont  presque  toujours  aux  dépens  de  nos  plaisirs...  Si 
«  ces  lumières  peuvent  diminuer  nos  plaisirs,  elles  flattent 
«  en  même  temps  notre  vanité.  On  s  applaudit  d'être  de- 
«  venu  difficile  ;  oq  croit  avoir  acquis  par  là  un  degré  de 
«  mérite.  »  Ces  lignes,  écrites  en  1757,  ne  semblent-elles 
pas  faites  pour  nous?  La  métaphysique  allemande  a,  de 
nos  Jours,  remplacé  celle  de  l'Encyclopédie  :  elle  a  déve- 
loppé et  porté  plus  loin  encore  l'esprit  d'examen  appliqué 
aux  œuvres  des  arts^  et  profondément  altéré  ce  qui  pou- 
vait nous  rester  d'émotions  simples  et  naïves.  Il  est  im- 
possible de  revenir  en  arrière;  mais  on  peut  au  moins 
s'arrêter  sur  la  pente,  et  profiter  des  lumières  acquises, 
pour  mieux  sentir  des  beautés  qui  n'ont  pas  toujours  été 


bien  saisies.  Nous  avons  appris  à  aimer  de  grands  esprits 
et  des  chefs-d'œuvre  ii^ustement  condamnés  avant  nous 
(V,  Critiqoe,  GâiiB);  c'est  un  progrès  du  goût  qui  doit 
nous  consoler  de  l'aSbus  de  l'analyse.  Nous  n'avons  pas 
besoin  de  nous  égarer  dans  les  subtilités  de  Vesthétique; 
et ,  pour  nous  en  tenir  au  siècle  de  Voltaire,  un  de  ses 
contemporains  les  plus  sensés  et  les  plus  aimables,  Vau- 
venareues,  a  dit  sur  cette  question  le  mot  des  esprits  dis- 
tinfp&  et  des  honnêtes  gens  :  «  Il  faut  de  l'&me  pour 
avour  du  goût.  »  C'est  en  effet  l'&me,  c-à-d.  le  sentiment 

I>as8ionné  du  vrai ,  qui  place  si  haut  la  beauté  idéale  et 
a  perfection ,  qui  la  cherchait  avec  Platon  au  sein  même 
de  la  divinité  \V,  le  Banquet)^  et  qui,  avec  Fénelon,  la 
ramène  tout  entière  à  la  vérité  et  à  la  vertu.  —  A  cette 
hauteur,  le  goût  est  le  privilège  d'un  petit  nombre  d'es- 
prits trèi-supérieurs  ;  mais,  à  tous  les  degrés,  le  goût  est 
toujours  un  privilège.  Il  n'est  pas,  à  beaucoup  prâ,  aussi 
répandu  ni  aussi  partagé  que  le  bon  sens;  et,  en  effet,  il 
n'est  pas  aussi  nécessaire;  on  peut  vivre  sans  avoir  du 
goût.  C'est  ce  qui  faisait  dire  à  Voiture  :  «  On  est  affligé 
«  quand  on  considère  cette  foule  prodigieuse  d'hommes 
«  qui  n'ont  pas  la  moindre  étincelle  de  goût,  qui  n'ai- 
«  ment  aucun  des  beaux-arts,  qui  ne  lisent  Jamais,  et 
«  dont  quelques-uns  feuillettent  tout  au  plus  un  Journal 
«  pour  être  au  courant,  et  pour  se  mettre  en  état  de 
«  parler  au  hasard  des  choses  dont  ils  ne  peuvent  avoir 
«  que  des  idées  confuses.  Le  goût  est  inconnu  aux  familles 
«  bourgeoises,  où  l'on  est  continuellement  occupé  du 
«  soin  de  sa  fortune,  des  détails  domestiques,  et  d*nne 
«  grossière  oisiveté,  amusée  par  une  partie  de  Jeu.  J'a! 
«  connu  un  commis  des  bureaux  de  Versailles,  né  avec 
«  beaocoup  d'esprit ,  qui  disait  :  «t,  Je  suis  bien  malheu- 
«  reox;  Je  n*ai  pas  le  temps  d'avoir  du  goût.  »  Toutefois^ 
nous  matons  ce  reproche  neaucoup  moins  que  nos  pères. 
Les  Journaux  et  l'enseignement  public,  sans  parler  da 
thé&tre,  se  sont  chargés  de  nous  éclairer;  et  il  serait  trop 
sévère  de  répéter  après  Voltaire,  «  qu'il  n'y  a  pas  dans 
«  Paris  trois  mille  personnes  qui  aient  le  goût  des  beaux- 
«  arts  ;  »  car  le  progrès  de  l'éducation  l'a  rendu  plus  g6- 
léral  et  plus  populaire. 

Le  goût  peut  donc  s'acquérir  :  il  se  forme,  se  déve- 
loppe, se  rectifie  même  quelquefois,  du  moins  chez  les 
esprits  droits  et  sensés  ;  car,  dans  les  esprits  faux  et  mal 
faits,  le  goût  ne  se  redresse  pas  plus  que  le  Jugement. 
Les  modèles  y  contribuent  plus  encore  aue  les  leçons, 
une  fois  que  nous  avons  appris  à  les  apprécier;  et,  d'ail- 
leurs, l'enseignement  des  maîtres,  dans  les  arts  comme 
dans  les  lettres,  doit  s'appuyer  sur  les  chefs-d'œuvre.  Les 
peuples  apprennent  et  s'instruisent  comme  les  individus  ; 
leurs  impressions  et  leurs  admirations  premières  sont 
confuses,  grossières,  irréfléchies;  la  civilisation  leur  ap- 
porte la  délicatesse  avec  la  critique.  Les  Grecs  seuls, 
merveilleusement  doués  pour  tous  les  arts,  atteignirent 
d'abord  la  perfection;  et  si  leur  goût  s'est  altère  plus 
tard,  dans  la  poésie  et  dans  l'éloquence,  si  leur  caractère 
propre  s'est  ^té  par  les  côtés  mêmes  où  il  était  original, 
si  les  défauts  enfin  ont  prévalu  sur  les  qualités,  Tarclii- 
tecture  et  la  sculpture  ont  échappé  à  cette  décadence,  et, 
sous  l'Empire  romain,  ont  produit  des  œuvres  compar 
rables  à  celles  de  Phidias,  ou  du  moins  de  Praxitèle. 
Mais  les  Romains  et  les  nations  modernes  ont  dû  faire 
l'éducation  de  leur  goût,  et  la  faire  à  l'école  de  leurs  pré- 
décesseurs. Horace  a  spirituellement  raconté  la  conquête 
pacifique  qui  soumit  a  la  Grèce  vaincue  ses  farouches 
vainqueurs.  Le  monde  moderne  a  subi  le  même  ascen- 
dant, et  pris  des  leçons  de  goût  des  peuples  ou'il  avait 
remplacés.  Cette  éducation  ne  se  fait  pas  en  un  Jour  dans 
les  société  non  plus  que  chez  les  hommes.  Les  délica* 
tesses  des  arts  ne  sont  pas  populaires;  elles  ne  se  laissent 
pas  pénétrer  et  manier  indiscrètement;  ce  sont  l'habi- 
tude et  la  réflexion,  aidées  de  leçons  intelligentes,  qui 
nous  apprennent  à  goûter  les  lettres,  la  peinture,  la  mu- 
sique, chose  à  laquelle  ne  suffisent  pas  les  dispositions 
naturelles,  à  moins  d'être  singulièrement  heureuses.  Une 
oreille  Juste,  mais  qui  n'est  pas  exercée,  ne  distinguera 
pas  les  détails  et  les  effets  de  l'harmonie  :  l'œil  n'est  pas 
frappé  tout  d'abord,  dans  un  tableau,  de  la  pureté  du 
dessin,  de  la  richesse  du  coloris,  de  la  perspective  et  de 
la  lumière  ;  l'intelligence  même  et  le  sentiment  ne  dé- 
mêlent pas  à  première  vue,  dans  la  poésie  ou  l'éloquence, 
toutes  les  beautés  de  la  composition,  de  l'unité,  de  l'in- 
térêt. Le  goût,  d'ailleurs,  n'est  pas  universel,  et  le  beau, 
dans  sa  variété  infinie,  ne  révèle  pas  tous  ses  secrets  à 
tout  le  monde.  On  trouvera  des  écrivains  supérieurs  par- 
faitement incapables  d'apprécier  les  beaux-arts  ;  un  artiste 
n'entendra  rien  à  la  littérature.  Peut^^tre  se  feront-ils 


GOU 


983 


GOU 


Imr  édnmtioo  Vna  h  Tautret  et  bo  commaniqiieroiit-iU 
tel  fmrties  de  ^ùt  qui  leur  manquent;  peat-ètre  aussi 
n*y  réuartront-ils  Jamais,  parce  que  leur  nature  s*y  sera 
oMpément  reruaée.  Faire  naître  et  former  le  goût  des 
tettres  et  dea  arta,  c'est  multiplier  les  jouissances  les  plus 
nobles  et  lea  plua  délicates;  pour  y  réussir,  il  faut  prendre 
MB  à  peu  Teaprit  des  bons  artistes  et  des  bons  auteurs. 
On  acquiert,  dana  ce  commerce,  des  idées  saines  et 
iostaa;  on  apprend  à  se  défier  de  ces  surprises  des  sens  et 
de  Ternit  qiu  peuvent  égarer  le  goût;  on  apprend  encore 
à  ae  tanir  eo  ^ude  contre  le  raffinement  et  la  subtilité, 
délaiita  ordinairea  des  époques  et  des  intelligences  trop 
caltivées.  La  pente  est  facile  de  la  délicatesse  à  Taffectar 
tion,  et  le  goût  se  g&te  avec  auuint  de  rapidité  quMi  a  mia 
de  lenteur  à  se  former.  «  Ce  malheur,  dit  encore  Voltaire, 
«  arrive  d'ordinaire  après  les  siècles  de  perfection  ;  les 

•  artiatea,  craignant  d'être  imitateurs,  cherchent  des 
a  routes  écartées;  ils  s'éloignent  de  la  belle  nature  que 
m  leurs  prédécttsenra  ont  saisie.  Il  y  a  du  mérite  dans 

•  leuzB  efforts;  ce  mérite  couvre  leurs  défauts;  le  public, 
m  amoureux  des  nonveautéa,  court  après  eux  ;  il  s'en  dè- 
■  goûte  bientôt,  et  il  en  parait  d'autres  qui  font  de  nou- 

•  veaux  efferta  pour  plaire;  ils  s*éloignent  de  la  nature 
«  encore  plus  que  les  premiers.  Le  ^ût  se  perd;  on  est 

•  entouré  de  nouveautés  qui  sont  rapidement  efiiscées  les 

•  iinea  par  les  autres.  Le  public  ne  sait  plus  où  il  en  est, 

•  et  fl  regrette  en  vain  le  siècle  du  bon  goût  qui  ne  peut 
«  ploa  revenir;  c'est  un  dépût  que  quelquea  bons  esprits 
«  conservent  ajora  loin  de  la  foule.  »  Les  bons  esprits 
ressemblent  à  cea  sagea  dont  parle  le  poète  Lucrèce,  crai 
se  passent,  comme  les  coureurs  athéniens  dans  le  stade, 
le  flambeau  de  la  vie  et  de  la  civilisation.  Nous  n'avons 
pas  à  redouter  ai^ourd'hui  que  le  flambeau  des  sciences 
s'éteigne;  nous  pourrions  craindre  plutôt  pour  celui  des 
lettrée;  car,  dans  une  société  très-raffinée  comme  la 
Ddtre,  le  goût  se  fatigue  et  se  lasse;  et  les  auteurs  ne  se 
font  paa  faute  de  le  réveiller,  comme  on  excite  les  palais 
blasés  par  des  mets  épicés  et  des  liqueurs  fortes.  Le  seul 
remède  à  cette  disposition  maladive  et  dangereuse  se 
trouTe  encore  dans  les  œuvres  des  grands  maîtres  et  dans 
lea  livrée  dea  bons  critiques;  là  sont  les  destinées  et 
Tavenir  du  goût. 

Dm  variations  du  goût  m  France.  —  Le  goût  des  arts, 
dana  notre  pays,  a  précédé  le  goût  littéraire.  Du  xu*  au 
XIV*  siècle,  Tarchitecture  avait  produit  dea  monuments 
admirables,  quand  la  langue  et  la  littérature  en  étaient  à 
leurs  premiers  essais.  Sous  le  règne  des  Valois,  les  élé- 
eanta  édifices  de  la  Renaissance  s'élevèrent  à  côté  des 
ejglîsee  gothiques,  pendant  que  nos  écrivains  cherchaient 
encore  la  forme  la  mieux  appropriée  à  l'esprit  francs. 
On  connaît  les  fortunes  singulières  que  cet  art  a  subies 
diea  nous,  et  comment  l'architecture  gothiaue,  si  dure- 
ment traitée  par  Fénelon,  fit  place,  avec  celle  de  la  Re- 
naissance^ à  la  simplicité  tour  à  tour  sévère  et  imposante 
du  XVII"  siècle  et  aux  pesantes  copies  de  l'antique,  œuvres 
du  siècle  suivant  et  du  premier  Empire,  pour  reprendre 
faveur  à  notre  époque.  Il  a  fallu  bien  des  études,  bien 
d»  discussions  et  bien  des  progrès  pour  arriver  à  l'équité 
dea  jugements,  et  à  cette  admiration  intelligente  de 
toutes,  les  formes  du  beau  que  l'on  a  décorée  du  nom  un 
peu  prétentieux  d'éclectisme.  La  peinture  a  eu  de  même 
aea  faYeors  et  ses  retours,  depuis  le  Poussin,  Lesueur 
et  Mignard  jusqu'à  l'école  dite  impériale;  il  faut  chercher 
dana  les  auteurs  compétents  l'histoire  des  différentes 
éoolea,  de  leur  populanté  et  de  leur  décadence.  Nous  no 
paiiona  paa  des  modes.  Volttiire,  que  l'on  cite  toi^ours 
avec  pbuair  en  matière  de  goût,  a  dit  :  «  Le  goût  est  ar- 
»  bitraire  dans  plusieurs  choses,  comme  dans  les  étoffes, 
«  dana  les  parurea,  dans  les  équipages,  dans  ce  qui  n'est 
«  paa  au  ran^  des  beaux-arts;  alors  il  mérite  plutôt  le  nom 
m  de  fatUaisie.  Cest  U  fantaisie,  plutôt  que  le  goût,  qui 
«  produit  tant  de  modes  nouvelles.  »  —  Quant  au  goût 
littéraire,  c'est  un  antre  champ  de  bataille, où  nous  avons 
vu,  comme  dana  lea  arta,  des  luttes  acharnées  entre  les 
dasngiMf  et  les  romantiques,  ainsi  que  les  deux  camps 
ennemis  s'appelaient  eux-mêmes  vers  4830.  L'histoire  du 
goût  en  France,  comme  dans  tous  les  pays,  est  plutôt 
l'histoire  de  la  littérsM^  et  des  arta  que  celle  de  la  cri- 
tique. Lea  écrivains  suivent  les  idées  en  vogue  au  moins 
autant  qu'ila  les  dirigent,  et  il  faut  une  grande  force  de 
bon  sens  et  de  courage  pour  corriger  des  erreurs  accrédi- 
tées et  applaudies.  Ce  bon  sens  courageux  a  été  une  partie 
de  la  gloire  de  noa  grands  écrivains  au  xvn*  siècle  ;  mais, 
do  reste,  la  perfection  de  leur  génie  n'exclut  nullement 
les  béantes  dea  autres  époques  ni  dea  autres  littératures. 
Li  RenaiMance  eut  dans  toute  l'Europe  le  tort  de  con- 


fondre le  goût  et  le  génie  avec  l'érudition.  Elle  admirait 
l'antiquité  tout  entière,  sans  choix  ni  réserve,  et  saluait 
avec  enthousiasme  les  auteurs  du  temps  crui,  comme 
Ronsard  ou  Jodelle,  essayaient  de  la  traduire  littérale- 
ment ,  au  lieu  de  s'en  inspirer.  Les  guerres,  les  affaires 
politiques,  les  relations  continuelles  avec  l'Italie  et  l'Es- 
pagne mirent  à  la  mode  le  goût  des  deux  pays,  c-à-d. 
l'emphase  espagnole  et  l'affectation  italienne,  et  la  cour 
d'Elisabeth  tint  en  grande  faveur  la  recherche,  les  pointes 
et  les  ieux  de  mots,  sous  le  nom  A^euphuisme,  Ni  le  génie 
de  Rabelais  et  de  Montaigne ,  si  profonds  érudits  d'ail- 
leurs, ni  celui  de  Shakspeare,  qui  ne  baissait  pas  non 
plus  le  langage  à  la  mode,  ne  corrigèrent  le  goût  de  leurs 
nations;  aussi ,  pendant  le  siècle  suivant,  furent-ils  en- 
veloppés dans  une  condamnation  générale,  qui  s'étencUt 
à  toute  la  Renaissance.  La  première  moitié  du  xvn*  siècle 
se  ressent  du  mauvais  goût  étranger,  malgré  les  efforts  de 
Malherbe  et  ses  colères  contre  Ronsard.  Ce  n'est  pas  seu- 
lement dans  Théophile  ou  dans  Voiture  que  l'on  trouve 
les  pointes  et  l'abus  du  faux  esprit  :  Corneille  paya  tribut 
à  la  mode,  et,  malgré  la  puissance  de  son  bon  sens  et  de 
son  génie,  ne  l'affranchit  jamais  complètement  de  cette 
servitude  de  sa  Jeunesse.  La  grande  société  de  l'Hôtel  de 
Rambouillet  n'était  pas  faite  pour  le  corriger  :  le  goût 
des  Précieuses  avait  lait  de  la  recherche  et  de  la  fausse  élé- 
gance une  loi  suprême  du  beau  langage  ;  le  grand  fin,  le 
fin  du  fin  régnait  en  dépit  de  la  raison  de  Descartes  et  de 
Pascal.  L'esprit  fhmçais,  si  net  et  si  droit  de  sa  nature, 
pour  revenir  et  s'arrêter  au  vrai,  au  simple  et  au  grand, 
eut  besoin  de  la  critique  incisive  et  mordante  de  Boileau 
et  de  Molière,  du  bon  sens  de  Louis  XIV,  à  qui  Voltaire 
fait  trop  complètement  honneur  du  goût  général,  et  de 
cette  admirable  réunion  de  grands  écrivains,  d'excellents 
esprits  et  d'honnêtes  gens  qui  formèrent,  pendant  qua- 
rante annéea,  la  société  la  plus  polie  que  le  monde  ait 
Jamais  vue.  On  peut  seulement  regretter  que  le  goût  du 
grand  siècle  ait  été  trop  discret  à  l'endroit  des  grands  au- 
teurs contemporains,  qu'une  sorte  de  pudeur  empêchait 
souvent  de  louer,  et  trop  insouciant  des  qualités  qu'il  au- 
rait trouvées  dans  les  littératures  étrangères  :  mais  lea 
imitateurs  de  l'Italie  et  de  l'Espagne  avaient,  par  leur 
faux  goût,  ramené  le  public  au  culte  des  modèles  an- 
ciens. —  Le  xvin*  siècle,  dont  Voltaire  fut  l'expression  la 
plus  complète,  et  dont  l'esprit  demeura  notre  règle  Jus- 
qu'à la  fin  du  premier  Empire,  conserva  pieusement  la 
tradition  littéraire  du  siècle  de  Louis  XIV,  tandis  qu'il 
détruisait  toutes  les  autres.  Il  la  rendit  étroite  et  exclu- 
sive :  le  Jour  où  Shakspeare  pénétra  en  France,  Voltaire 
demanda  sa  proscription  en  pleine  Académie.  Le  goût 
français  faisait  également  loi  chez  lea  étrangers,  et  l'Al- 
lemagne ne  connaissait  plus  d'autres  modèles  que  les 
imitateurs  de  Voltaire,  Jusqu'au  Jour  où  Lessing,  Schlegel 
et  Schiller  rendirent  au  génie  allemand  son  véritable  ca- 
ractère et  sa  liberté.  Ils  eurent  en  France  une  élève  glo- 
rieuse, M*"* 'de  Staél,  dont  les  ouvrages  exercèrent,  avec 
ceux  de  Chateaubriand,  une  puissante  influence  sur  le 
goût  du  public  Bientôt,  la  ResUuration  vit  l'école  ap- 
pelée romantique  venger  les  littératures  anglaise  et  alle- 
mande d'un  mépris  long  et  injuste,  nier  les  principes  et 
les  règles,  étemelles  ou  secondaires,  indifféremment, 
émanciper  la  fantaisie,  proclamer  la  théorie  de  Vart  pour 
Vart,  faire  enfin  du  mot  classique  le  synonyme  de  rou- 
tine, d'aveuglement  et  d'inepUe.  On  put  craindre  que  le 
goût  ne  vint  à  périr  parmi  ces  ridicules  écarts,  dont  il 
reste  ai^Jourd'hui  un  souvenir  plaisant  et  des  traces  mal- 
heureuses. Mais  la  vérité  ne  change  paa.  L'esprit  français 
est  de  race  latine,  et  non  de  race  germanique  ;  il  s'est 
formé  de  cette  langue  et  de  cette  littérature  si  fortes  des 
Ronmins,  qui  ont  laissé  dans  l'univers  des  empreintes 
ineffables  (  V,  Lattob  —  Langue).  Là,  plus  encore  qut 
dans  le  génie  grec,  est  le  fonds  de  notre  goût,  c-àrd.  la 
vérité  généralA  et  universelle;  les  étrangers  ne  nous  ap- 
portent que  des  vérités  secondaires.  Au  reste,  les  peuples 
du  Midi  n'ont  guère  d'influence  ai^ourd'hui  sur  notre 
littérature  ;  elle  a  plutôt  besoin  d'être  préservée  de  la 
bizarrerie  anglaise  et  de.  l'emphase  nébuleuse  des  Alle- 
mands. A  chaque  peuple  convient  son  goût,  qui  est  une 
partie  de  son  caractère  national;  et,  quoique  les  diffé- 
rences de  race  et  de  langue  soient  peutrêtre  destinées  à 
s'efliscer  un  Jour,  dans  ce  mouvement  de  chemins  de  fer, 
d'intérêts  et  d'idées  qui  tend  à  confondre  tous  les  neuples 
de  l'Europe,  les  gens  de  goût  doivent  en  défendre  le  dépôt 
contre  l'invasion  étrangère  et  contre  l'invasion  dômes* 
tique,  toutes  deux  également  barbares 

Goût  musical.  —  La  musique,  comme  tous  les  autres 
arts,  est  l'expression  du  goût  d'un  peuple  «  nuda  toutes  les 


GOIT 


984 


GRA 


Bitkons  De  sont  pas  également  organisées  ponr  Taimer  et 
la  cultiver.  Il  en  est  même  qui  n*y  arriveront  Jamais  ; 
et,  ches  celles  qui  sont  ou  se  prétendent  musiciennes, 
elle  est  particulièrement  soumise  à  Fempire  de  la  mode 
et  de  la  fantaisie.  Notre  éducation,  à  nous,  a  été  longue 
et  difficile.  La  lettre  de  J.-J.  Rousseau  Sur  VOpéra  fran- 
cais  souleva  des  tempCtes;  et  cependant,  avec  beaucoup 
de  verve  mocrueuse,  elle  ne  disait  que  la  vérité.  Les  Itar 
liens  et  les  Allemands,  musiciens  par  excellence,  ont  eu 
bien  de  la  peine  à  former  les  oraMes  françaises;  et  Tltalie 
comptait  déjà  deux  siècles  de  compositeurs,  que  la  France 
en  était  encore  k  Rameau.  Rousseau  a  beaucoup  contribué 
à  rendre  popuUùre  le  plaisir  de  la  musique;  et,  dans  la 
première  moitié  de  ce  siècle,  le  goût  a  trouvé,  pour  se 

{produire  et  s*éclairer,  des  talents  et  des  ouvrages  excel- 
ents.  On  peut  seulement  être  surpris  de  la  mobilité  du 
goût  musical.  Le  ^nie  de  quelquq^  maîtres,  la  beauté  de 
quelques  compositions  résistent  seuls  à  Taction  rapide 
et  destructive  de  la  vieillesse.  Encore  Tesprit  de  révolu- 
tion, qui  n'épargne  pas  les  beaux-arts,  a-t-il  menacé  de 
substituer  aux  œuvres  consacrées  par  une  admiration 
universelle  ce  quMl  appelle  la  musique  de  Vavenir,  Biais 
le  goût  musical ,  comme  le  goût  littéraire,  trouve  une  dé- 
fense dans  Tennui  que  causent  les  mauvais  ouvrages; 
son  influence  est  inévitable,  irrésistible,  et  n*est  inipuis- 
sante  que  sur  le  talent  et  le  génie.  A.  D. 

GOUTTEREAU  (M^r),  nom  donné  par  quelques  écri- 
vains à  la  muraille  d'église  dans  laquelle  est  percée  la 
claire-voie. 

liOUTrES ,  petits  cônes  saillants  qui  ornent  le  soffite 
du  mutule  de  la  corniche  dorique,  ou  qui  régnent  sous 
les  triglyphes  de  la  frise  sur  Tarchitrave. 

GOUTTIÈRE,  conduit  ou  canal  de  forme  et  de  matière 
variables  oui  reçoit  les  eaux  d*un  toit  à  sa  base,  où  un 
tuyau  de  oeacente  les  mène  |usqu*à  terre.  Au  moyen  âge, 
les  couvertures  ne  portaient  pas  de  gouttières,  ou  bien 
on  les  terminait  par  des  gargouilles  (V.  ce  mot).  De  nos 
fours,  la  police  exige  que  tout  toit  ait  sa  gouttière,  pro- 
scrit Pusage  des  gargouilles,  et  ordonne  qu'elles  soient 
remplacées  par  des  tuvanx  de  descente. 

GOUVERNAIL  (du  latin  gubernaculum)^  machine  en 
bois,  placée  à  Tarrière  des  navires,  mobile  autour  d*un 
axe,  et  que  Ton  fait  mouvoir,  soit  à  Taide  d'une  barre  ou 
timon  qu'on  pousse  à  la  main ,  soit  au  moyen  d'une  roue 
ou  treuil.  Il  est  aux  navires  ce  qu'est  la  queue  aux  pois- 
sons, et  sert  à  les  amener  et  à  les  maintenir  dans  telle 
direction  que  l'on  veut.  On  lui  donne  ordinairement,  par 
en  bas,  le  12*  de  la  plus  grande  largeur  du  bâtiment,  et, 
par  en  haut,  c-àrd.  au-dessus  de  la  ligne  de  flottaison, 
les  trois  quarts  de  la  dimension  inférieure.  La  barre  du 
gouvernail,  qui  est  horizontale,  est  établie  au-dessus  du 
pont  inférieur  des  vaisseaux,  du  faux-pont  des  frégates, 
et  du  pont  unique  des  b&timents  qui  n'en  ont  qu'un  seul. 
La  perte  du  gouvernail  à  la  mer  est  un  accident  très- 
grave;  car,  outre  l'impossibilité  où  se  trouve  le  navire 
de  suivre  aucune  direction  voulue  et  d'éviter  les  écueils, 
il  présente  constamment  le  travers  au  vent  et  aux  lames 
pendant  les  tem|)êtes.  —  Le  gouvernail  n'était  primiti- 
vement qu'un  aviron  attaché  au  flanc  du  navire;  puis  on 
en  mit  un  k  droite  et  à  gauche.  On  ne  sait  à  quelle  époque 
il  fut  placé  à  l'arrière. 

En  Numismatique,  un  gouvernail  posé  sur  un  globe 
accompagné  de  faisceaux  marque  la.  puissance  souve- 
raine. 

GOUVERNEMENT,  autorité  qui  exerce  la  souveraineté 
dans  un  État  (V,  ce  mot).  Le  Gouvernement  ordonne, 
l'Administration  exécute.  Il  y  a  trois  formes  principales 
de  gouvernement ,  la  Jlfonarc^M,  V Aristocratie  ^  la  Dé~ 
mocratie  (  V.  ces  mots)^  toutes  ég^ement  légitimes, 
pourvu  qu'elles  soient  appropriées  aux  besoins,  aux 
mœurs,  à  l'état  de  civilisation  des  peuples.  Un  gouver- 
nement peut  être  absolu,  despotique  (V.  Absoldtisiir, 
Despotisme),  ou  constitutionnel,  c-ànl.  réglé  dans  ses 
actes  par  une  Constitution.  Ce  dernier  est  dit  aussi  re- 
présentcUif  et  parlementaire.  Le  gouvernement  a  eu  pour 
principe,  selon  les  temps  :  1*  la  supériorité  des  qualités 
personnelles;  î,^  la  supériorité  de  l'ftge  ;  3*  la  supériorité 
de  la  naissance  ;  4<*  la  supériorité  de  la  fortune.  Tout 
gouvernement  n'a  que  trois  fonctions  simples ,  mais  im- 
portantes, à  remplir  :  protéger  la  société  contre  les  atta- 
ques ou  les  violences  des  autres  nations  indépendantes  ; 
garantir  chaque  membre  de  la  société  contre  les  effets 
de  la  malveillance  et  de  rin|ustioe  de  tout  autre  membre  ; 
enfin  ériger  et  entretenir  certains  établissements  utiles 
an  public,  qu'il  n'est  iamais  dans  l'intérêt  d'un  individu 
cm  d'un  petit  nombre  d'individus  de  créer  et  d'entretenir 


pour  leur  compte,  par  la  raison  que  les  dépenses  occ»- 
sionnées  par  ces  établissements  surpasseraient  les  avan- 
tages que  pourraient  en  tirer  les  particuliers  qui  les 
soutiendraient  à  leurs  frais.  Une  des  règles  les  plus  géné- 
rales de  l'Économie  politique,  c'est  que  les  gouverne- 
ments ne  doivent  Jamais  diriger  le  capital  et  nndnstrie 
des  particuliers  ;  ils  doivent,  au  contraire,  laisser  à  cha- 
cun, tant  qu'il  se  conforme  aux  lois,  le  soin  de  surveiller 
ses  propres  intérêts  d'après  ses  vues  personnelles.  L'exé- 
cution de  cette  maxime  offre  la  garantie  la  plus  sûre 
qu'on  obtiendra  des  produits  constants  et  uniformes 
pour  les  booins  de  la  nation.  Dans  les  sociétés  antiques, 
et  même  à  l'origine  des  socillés  modernes,  alors  que 
l'esprit  d'assodauon  n'avait  point  encore  pris  son  essor, 
le  gduvernement  seul  pouvait  exécuter  les  grands  travaux 
d'utilité  publique  :  c'est  ainsi  que  s'est  établi  le  principe 
d'après  lequel  l'État  doit  rendre  k  la  société  les  services 
collectifs  dont  l'industrie  particulière  ne  se  chargerait 
pas,  et  qui  sont  cependant  considérés  comme  indispen- 
sables au  bien-être  de  la  société.  Aujourd'hui  encore, 
dans  presque  tous  les  pays  du  monde,  à  l'exception  de 
l'Angleterre,  de  la  Suisse  et  des  États-Unis  d'Amérique, 
le  gouvernement  est  chargé  de  rendre  à  la  société  un 
grand  nombre  de  services  collectifs,  en  concurrence  ou 
non  avec  l'industrie  privée.  Lorsque  le  gouvernement 
intervient  dans  ce  qui  peut  être  laissé  à  l'initiative  de 
l'individu,  il  empiète  sur  la  responsabilité  des  citoyens  ; 
il  dénie  à  ceux-ci  la  capacité  de  Juger  eux-mêmes  (^ 
l'étendue  et  de  la  nature  de  leurs  besoins,  en  leur  étant 
le  choix  des  moyens  de  les  satisfaire,  et  il  prend  sur  lui 
une  responsabilité  correspondante  à  toute  la  somme  de 
libertés  individuelles  qu'il  anéantit,  et  eette  responsa- 
bilité, devenue  énorme  pour  tous  les  gouvernements  in- 
terventionistes,  est  aujourd'hui  une  des  causes  princi- 
pales de  leur  instabilité  et  des  fréquentes  révolutions 
qu'ils  subissent.  Il  en  résulte  aussi  que  ces  gouverne- 
ments, pour  se  prémunir  contre  ces  dangen,  s'entourent 
d'appareils  et  de  mesures  de  sûreté,  les  uns  très-coû- 
teux, les  autres  très-oppressifs,  pour  les  nations  ainsi 
gouvernées.  A.  L. 

GRAAL  ou  GRÉAL  {Le  Saint),  du  vieux  français 
graali,  gréai  on  grasal,  signifiant  un  vase  en  forme  de 
plat.  Cétait,  dans  les  traditions  du  moyen  ftge,  un  vase 
miraculeux,  fait  d'une  seule  pierre  précieuse,  apporté  dq 
ciel  sur  la  terre,  gardé  d'abord  par  des  anges,  puis  par 
des  hommes  d'une  pureté  angélique,  dans  un  temple 
fortifié  sur  le  Mont  Salvage  {mons  salvatumis).  Le  poète 

Çrovençal  Guyot  ou  Kyot,  qu'on  suppose  avoir  vécu  entre 
160  et  1180,  fit  un  poème  avec  cette  légende,  qu'il  disait 
avoir  puisée  dans  un  manuscrit  arabe  d'un  More  appelé 
Flegetanis,  et  dans  une  chronique  latine  de  I*AnJou. 
Après  lui,  Chrestien  de  Troyes  et  d'autres  Trouvères 
étendirent  la  légende  en  y  rattachant  celles  du  roi  Arthur 
et  de  la  Table  ronde  :  ils  confondirent  san  greal  (saint 
vase)  avec  sang  real  (sang  royal,  sang  du  Seigneur  )  ;  ils 
imaginèrent  que  Joseph  d'Anmathie,  apètre  des  Celtes, 
avait  recueilli  dans  le  Graal ,  qui  avait  déjà  servi  à  la 
Cène,  le  sang  de  Jésus  crucifié,  et  que,  ce  vase  ayant  été 
perdu  après  lui,  plusieun  chevaliera  se  mirent  a  sa  re- 
cherehe.  Le  Livre  du  saint  Graal  et  de  la  TaUe  ronde 
comprend  trois  parties  considérables ,  le  roman  du  Seùnt 
Gram,  le  roman  de  Merlin,  et  le  roman  de  Lancdot;  ce 
dernier  subdivisé  en  cinq  parties,  Gallehot,  la  Charrette, 
Agravain ,  la  Quête  du  Graal  et  la  Mort  d^ Arthur.  Les 
romans  du  Saint  Graal  et  de  Merlin  ont  été  rédigés  par 
Robert  de  Borron,  chevalier  attaché  au  service  du  comte 
de  Montbéliard,  et  Gasse  le  Blond,  parent  du  roi  Henri  II 
Plantagenet;  un  chapelain  de  ce  monaroue  est  auteur  de 
tout  le  roman  de  Lancdot.  Au  xni*  siècle,  le  poète  alle- 
mand Wolfram  d'Eschenbach  tira  de  la  iégenoe  du  Saint 
Graal  deux  romans  épiques ,  Parcival  et  Titurel  (  K. 
ces  mots). 

Le  Livre  du  Samt  Graal  et  de  la  Table  ronde  s*ouvre 
par  un  prologue  destiné  à  apprendre  au  lecteur  comment 
cette  histoire  est  parvenue  à  la  connaissance  des  hommes. 
En  l'an  417  de  l'ère  chrétienne,  dans  un  lieu  écarté  et 
sauvage  de  la  Bretagne,  l'ermite  Nascien  a  une  vision  : 
un  personnage  d'une  beauté  surhumaine  et  entouré  d'une 
éblouissante  clarté,  Jésus-Christ  lui-même ,  lui  apporte 
un  petit  livre  où  est  contenu  ce  qui  va  suivre,  et  dont  il 
prend  copie.  Le  romancier  n'a  pas  craint  de  donner  ainsi 
a  son  œuxrre  le  caractère  d'une  révélation.  Puis  com- 
mence la  l'*  partie  de  cette  csuvre,  la  seule  dont  nous 
nous  occupons  ici,  le  Roman  du  Saint  Graal.  Le  décn- 
rion  Joseph  d'ArimaUiie,  s'étant  assuré  la  possession  du 
vase  dont  Jésus  avait  fait  usa^e  en  célébrant  la  Pique 


GRA 


985 


GRA 


ivec  te»  apôtres  chez  Simon,  obtient  de  Pilate  le  dbrps 
du  San^ear  crucillé,  recueille  les  gouttes  de  sang  qui 
9oaIent  encore  des  plates  divines,  et  met  le  cadavre  au 
tombewDi.  Les  Juifs  irrités  s*emparent  de  lui,  et  reromô- 
nent  dans  un  chftteaa  da  grand  prêtre  Caîphe  :  là,  il  re- 
çoit, de  Jésus  qui  lui  apparaît,  le  graal  caché  dans  un  coin 
de  sa  maison.  Après  40  anq^  de  captivité  qui  se  sont 
écoulées  sans  quMl  en  sentit  le  poids,  il  est  dfélivré  lors 
de  la  prise  de  Jérusalem  par  Titus.  Emmenant  ses  pa- 
rents chrétiens  et  quelques  autres  fidèles ,  il  se  dirige 
vers  l*£uphnue,  et  arrive  dans  la  capitale  d*un  Empire 
ippelé  Sarras,  hercean  des  peuples  sarrasins,  où  son  flls 
Josèphe  est  ordonné  prêtre  et  évêque  par  un  ange.  Le 
rofl^cier  nous  raconte  ensuite  la  propsgation  de  l'Évan- 
gile cbex  les  Arabes;  le  roi  de  ce  peuple  résiste  long- 
temps; mais  quand  il  a  reçu,  avec  le  baptême,  le  nom 
de  Mordrain ,  il  fait  construire  pour  le  graal  un  palais 
splendide ,  oui  est  appelé  le  PcUais  spirituel.  Toutefois, 
le  vase  sacré  ne  doit  pas  demeurer  en  Asie;  Josèphe  re- 
çoit Tordre  de  remporter  en  Occident.  Arrivé  an  Dord  de 
m  mer,  U  Ate  sa  chemise ,  Tétend  sur  Teau,  et  ce  radeau 
merveilleux  remporte  avec  ses  compagnons  Jusqu*en 
Grande-Bretagne.  La  conversion  de  ce  pays  s'accomplit 
rapidement,  mais  non  pas  sans  danger,  et  il  faut  que  Mor- 
dndn  vienne  de  TOrient  avec  une  armée  au  secours  de 
Josèphe.  La  fin  du  roman  montre  comment  le  graal  s'est 
transmis  de  génération  en  génération.  L*évêque  Josèphe 
le  confie  à  un  cousin  germain,  Alain,  Tun  des  12  flls  de 
Bion,  qui  était  beau-lrère  de  Joseph  d*Arimathie.  Alain 
transporte  le  pr^eui  vase  duis  le  royaume  de  la  Terre 
foraine,  dont  les  habitants  se  convertissent;  il  le  lègue 
en  mourant  à  Josué,  Tun  de  ses  frères,  dont  les  succes- 
seurs font  construire,  pour  le  conserver,  le  ch&teau  de 
Gorbenic  A  l'extinction  de  la  postérité  d'Alain,  le  graal 
passe  aux  descendants  de  Nascien,  beau-frère  de  Mor- 
drain, qui  émigrent  dans  la  Bretagne  armoricaine,  et 
desquels  est  issu  Lancelot.  Quant  à  Mordrain,  il  vit  pen- 
dant 3U0  ans ,  comme  un  témoin  irrécusable  de  tant  de 
mervmlles.  —  Dans  le  Roman  du  Saint  Graal,  l'élément 
chevaleresque  occupe  peu  de  place;  il  n'y  a  presque  pas 
de  combats,  de  prouesses,  de  srands  coups  d'épée  ;  ce 
qui  j  domine,  ce  sont  les  miracles,  les  songes  prophéti- 
ques, les  conversions,  les  ch&timents  des  chrétiens  indi- 
gnes ou  des  païens  endurcis.  Ce  roman  a  été  publié 
diaprés  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  nationale  de 
de  Paris  par  M.  Francisque  Michel,  1841,  in«13.       6. 

GRABATAIRES»  mot  de  même  sens  que  Clintques 
{V,ce  mot), 

GRACE ,  mot  qui,  dans  le  langage  de  la  Théologie , 
signifie  toute  faveur  que  Dieu  accorde  aux  hommes.  On 
distingue  :  les  Ikveurs  ou  grâcee  naturelles,  que  nous 
recevons  de  Dieu  par  rapport  à  la  vie  présente  (comme 
la  vie,  les  qualités  intellectuelles  ou  morales,  la  science, 
les  richesses,  etc.),  faveurs  purement  gratuites,  puis- 
qu'il ne  les  doit  à  personne  ;  et  les  grâces  surnaturelles, 
qui  se  rapportent  directement  à  la  vie  future,  au  salut. 
Parmi  ces  oemières,  les  unes  sont  extérieures,  telles  que 
l'Incarnation  du  Fils  de  Dieu,  ses  miracles,  ses  prédica- 
tions, la  Rédemption,  les  bons  exemples  dont  nous 
sommes  témoins,  les  instructions  que  nous  entendons, 
toutes  choses  qui  déterminent  notre  volonté  à  la  pra- 
tique des  vertus  chrétiennes  et  nous  font  avancer  unsi 
vers  nos  destinées  surnaturelles,  mais  qui  cependant  ne 
peuvent  6tre  pour  nous  un  principe  efficace  de  Justifi- 
cation, de  sanctification,  de  salut  ;  les  autres  sont  mté' 
rieures,  et  se  résument  en  une  sorte  d'infusion  de  l'Es- 
prit Saint,  qui  nous  identifie  à  Jésus-Christ ,  nous  fait 
agir  et  mériter  en  lui.  La  grftce  intérieure  est  dite  ao- 
tuelU,  quand  elle  est  un  secours  accordé  par  Dieu  pour 
connaître  et  pratiquer  le  bien  en  telle  ou  telle  occasion  ; 
habiiudle,  quand  elle  est  un  état  permanent  de  Justice, 
résultant,  pour  l'Ame,  de  la  pratique  de  la  prière  et  de  la 
fréquentation  des  sacrements.  Veiïet  de  la  grftce  habi- 
tuelle est  de  sanctifier  l'homme,  de  le  rendre  Juste  et 
agréable  à  Dieu  :  aussi  cette  grâce  est- elle  appelée  juxti- 
fianteon  sanctifiante, 

L*É^îse  enseigne  que  l'homme,  dans  son  état  actuel  et 
Telativement  au  salut,  a  besoin  de  la  grftce  ou  du  secours 
de  Dieu.  Depuis  q^e  le  péché  orimnel  l'a  fait  déchoir  de 
rétat  primitif  dans  lequel  il  avait  été  créé,  il  faut  qu'il 
trouve  en  dehors  de  lui,  en  Dieu,  un  secours  qui  éclaire 
ion  intelligence  et  porte  au  bien  sa  volonté  entraînée  par 
ose  inclination  violente  vers  le  mal.  Mais  la  nécessité  de 
b  grftœ  est-elle  condliable  avec  l'existence  du  libre  ar- 
bitre T  L*action  de  Dieu  sur  l'intelligence  et  la  volonté 
iefboiBiiie  est-elle  à  ce  point  déterminante,  que  l'homme 


son  réduit  a  l'état  de  machine  en  ne  fonctionnant  que  par 
une  impulsion  étrangère,  oubienconserve-t-il  sa  libertél 
Ce  problème  a  été  fréc^emment  discuté.  Au  v*  siècle,  le 
moine  breton  Pelage  ma  la  nécMsité  de  la  grftce,  et  sou- 
tint que  l'homme  avait  en  lui-même  assez  de  force  pour 
faire  toute  espèce  de  bien  et  arriver  au  saluU  Sa  doc- 
trine, condamnée  par  le  pape  Innocent  I*'  et  par  les  évê» 
ques  d'Afrique,  est  connue  sous  le  nom  de  Pétagianisme. 
Elle  fut  propaj^  en  Italie  par  Célestius,  et  présentée 
avec  tant  d'habileté,  qu'elle  trompa  momentantoient  le 
pape  Zosime.  Mais  S*  Augustin  lui  porta  les  derniers 
coups  :  ce  Père  affirme  VeffU:acUé  de  la  grftce;  il  enseigne 
que  le  libre  arbitre ,  survivant  sans  doute  dans  son  es- 
sence au  péché  originel,  n'a  conservé  son  énexigle  que 
pour  le  mal,  et  que  la  grftce,  en  lui  rendant  son  activité 
pour  le  bien,  le  restaure,  le  rétablit,  et,  comme  dît 
S^  Paul,  le  recrée  dans  les  bonnes  oeuvres.  Loin  donc 
que  le  secours  divin  gêne  l'action  de  l'homme,  l'homme 
privé  de  la  grftce  est  captif  dans  les  liens  du  mal  et  n'a 
plus  assez  de  liberté  pour  agir.  Quelques  auteurs,  entre 
autres  le  P.  Sirmond,  ont  accusé  des  disciples  peu  intel- 
ligents de  S'  Augustin  d'avoir  dénaturé  sa  doctrine  en 
l'exagérant,  et  supprimé  complètement  hi  liberté  ds 
l'homme;  ils  les  Qualifient  de  Prédestinatiem ,  c-èrd. 
partisans  de  la  Prédestination,  et  attribuent  la  même  er- 
reur à  Gothescalk,  moine  du  ix*  siècle.  Mais  leur  asser* 
tion  ne  repose  que  sur  des  monuments  historiques  dont 
l'authenticité  ou  la  valeur  est  suspecte  ;  les  savants  de 
Port-Ro3ral  ont  pensé  que  les  prétendus  Prédestinatiens 
du  V*  siècle  n'ont  été  que  des  disciples  de  S*  Augustin 
auxquels  les  Pélagiens  auraient  Imputé  faussement  une 
doctrine  condamnable. 

Pelage  eut  des  disciples  mitigés,  qu'on  nomma  Semi" 
Pélagiens,  Tels  furent  Cassien  et  les  moines  de  S*  Victor 
de  Marseille,  peutrêtre  aussi  quelques  moines  de  Lérins 
et  plusieurs  évêques  de  la  Gaule  méridionale.  Ils  admet- 
taient la  nécessité  de  la  grftce  pour  le  salut,  mais  affir- 
maient en  même  temps  que  la  première  grâce  n'était 
accordée  par  Dieu  qu'à  l'homme  qui  Tavait  méritée,  et 
oue  l'efficacité  de  la  grftce  dépendait  de  l'adhésion  libre 
de  la  volonté  humaine.  Ce  système  est  incohérent  et  hé- 
térodoxe. Si  l'homme  peut  mériter  la  première  grftce,  11 
peut  les  mériter  toutes;  s'il  peut  les  mériter,  son  action 
est  bonne  en  dehors  de  la  nrftce,  il  peut  pur  lui-même 
faire  le  bien,  la  grftce  ne  lui  est  pins  nécessaire.  S'il 
donne  à  la  grftce  son  efficacité  par  la  libre  adh^on  de 
sa  volonté,  u  peut  npr  librement  pour  le  bien  sans  la 
grftce;  le  péché  originel  ne  lui  a  pas  imprimé  une  im- 

f)nlsion  déterminante  pour  le  mal;  il  Jouit  de  toute  sa 
iberté  pour  agir  dans  un  sens  ou  dans  un  autre.  Le 
Semi-Pélagianisme  ftit  condamné  par  le  2*  condle 
d'Orange. 

On  le  vit  reparsltre  au  commencement  du  xvn"  siècle 
dans  le  Molinisme,  adopté  par  une  grande  partie  de  la 
Compagnie  de  Jésus.  Molina  n'admettait  pas  de  ^rdct 
efficace  proprement  dite;  il  soutenait  que  Dieu  donne  à 
tous  les  hommes  des  grâces  suffisantes^  qui  deviennent 
efficaces  par  l'adhésion  libre  de  la  volonté.  iUnsi,  ce  n'est 
pas  Dieu  qui  opère  par  sa  grftce  sur  le  cosur  de  l'homme, 
c'est  l'homme  qui,  par  son  adhésion,  donne  à  la  grftce  sa 
véritable  valeur.  Cela  revient  à  dhne  que  la  grftce  n'existe 
pas  réellement,  qu'elle  n'est  pas  nécessaire,  que  l'homme 
agit  sans  elle  pour  le  bien  avec  la  plus  ennère  liborté. 
Ce  Alt  pour  dissimuler  ce  que  le  Molinisme  avait  de  trop 
hétérodoxe,  que  certains  Jésuites  imadnèrent  le  Con- 
gruisme  {Y,  ce  mot)  :  maïs,  au  fond,  le  système  est  le 
même.  Les  docteurs  dominicains,  disciples  de  S*  Thomas, 
et  partisans  de  la  grftce  efficace,  ont  admis  les  grftcet 
suffisantes,  mais  sans  attacher  à  cette  expression  le 
même  sens  que  les  Molinistes  :  pour  eux,  les  grftces  suf- 
fisantes sont  des  grftces  qui  ne  suffisent  pas,  qui  n'ont 
pas  leur  effet,  et  ils  se  refusent  à  admettre  que  la  volonté 
de  l'homme  donne  ft  la  grftce  son  efficacité.  L'école  de 
Port-Royal,  qui  combattit  vigoureusement  le  Molinisme, 
fut  accusée  par  ses  adversures  de  n'admettre  que  des 
grâces  efficaces  obtenant  toulours  nécessairement  leur 
effet,  et,  par  conséquent,  de  rejeter  le  libre  «rbitre.  C'était 
une  erreur  :  non-seulement  les  savants  de  Port-Royal 
ont  poursuivi  dans  les  ouvrages  des  calvinistes  Jusqu'aux 
moindres  traces  de  la  doctrine  prédestinatienne,  mais  ils 
ont  admis  avec  S*  Augustin  des  grâces  eoDcitantes,  dont 
l'effet  est  souvent  nul  à  cause  des  mauvaises  inclinations 
de  l'homme  et  de  l'abus  qu'il  peut  faire  de  sa  liberté  ;  si 
l'homme  correspond  à  ces  giicet  excitantes,  Dieu  l'en 
récompense,  disent-ils,  en  loi  accordant  des  grâces  effi^ 
caces,  et  son  libre  arbitre  en  reçoit  une  telle  force,  qu'il 


GRà 


986 


6RA 


opère ,  non  pas  nicessakremmt ,  mais  certamemmU  le 
bien. 

La  grâce  est-éUe  ai  abaolament  nécessaire,  que,  sans 
elle,  on  ne  puisse  faire  aucun  bient  A  considérer  le  bien 
en  Ini-mème,  relatlYement  à  son  objet,  il  est  certain  que 
rhomme,  sans  un  secours  surnaturel ,  et  par  Teffet  de 
qualités  morales  purement  naturelles,  peut  faire  le  bien , 
par  exemple,  respecter  ses  parente,  donner  Taumène,  etc. 
Biais  ce  bien,  relativement  à  notre  action,  est  défectueux, 
en  tant  qu'il  est  produit  par  un  être  dégénéré.  Il  n'y  a 
d'acte  réellement  parfait,  que  celui  qui  est  fait  sous  l'im- 
pulsion de  Dieu,  sous  l'inspiration  de  la  grâce. 

Quant  à  la  distribution  des  gr&ces.  Dieu  en  aocorde-t-il 
aux  uns  de  tellement  efficaces,  qu'ils  pratiquent  aisément 
la  Tertut  Pourquoi  n'en  accorde-t-il  pas  à  d'autrest  Com- 
ment se  fait-il  qu'il  laisse  tant  d'hommes  dans  l'idoia- 
trie,  l'hérésie  ou  le  schisme?  Comment  les  laisse-t-il 
mourir  sans  qu'ils  aient  été  régénérés  par  le  baptômet 
Ce  sont  des  questions  dont  S^  Augustin  a  Jugé  la  solution 
impossible,  des  mystères  que  la  raison  ne  peut  et  ne  doit 
pas  sonder. 

ORACB  (Délai  de).  F.  Dâju. 

rîîr! /î^Ï!lL*^5h  l  V.  notre  Dictionnaire  de  Bwgror 
oH^Ssterotsî:  î     Pki^^^<^ Histoire. 

GRACES  EXPECTATIVES.  V,  EXPECTATIVES,  dSUS  nOtTODiC- 

tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

GRACES  (Jeu  des),  jeu  qui  ressemble  à  celui  du  Tolant. 
On  se  sert  de  bâtonnets  ou  petites  baguettes,  que  l'on 
croise  un  peu  pour  lancer  un  petit  cerceau  ;  l'autre  joueur 
doit  le  recevoir  et  le  lancer  de  même. 

GRACIOSO,  personnage  comique  du  théâtre  espagnol. 
Son  nom  indique  que  la  grâce,  la  douceur,  l'amabilité  et 
la  légèreté  doiTent  être  les  caractères  distinctifo  de  son 
Jeu.  Ainsi  conçu ,  le  Gradoso  a  presque  entièrement  dis- 
paru de  la  scène  t  on  l'a  transformé  en  boutfon  loquace, 
poltron,  gauche  ou  déplacé  dans  ses  plaisanteries. 

GRADATION  (du  latin  gradus,  degré).  Cest,  en  Litté- 
rature, un  arrangement  d'idées  tel  que  l'effet  va  en  aug- 
mentant sans  cesse  et  comme  par  degrés.  Ainsi ,  un  ora- 
teur dispose  ses  preuves  en  rt^servant  les  plus  fortes  pour 
les  dernières.  Dans  une  œuvre  dramatique,  dans  un 
roman ,  les  scènes  et  les  tableaux  se  succèdent  de  ma- 
nière â  produire,  chez  le  spectateur,  des  émotions  de  plus 
en  plus  vives  et  profondes.  —  Dans  la  Rhétorique,  la  gra- 
dation est  une  figure  de  pensée,  que  les  Grecs  nommaient 
cHimax,  c-àrd.  échelle,  et  qui  consiste  â  présenter  une 
suite  d'idées,  d'images,  de  sentiments  qui  enchérissent 
les  uns  sur  les  autres.  Elle  est  dite  eucendante,  comme 
dans  cet  exemple  :  Va,  cours,  vole  !  On  appelle  gradation 
descendante  une  diminution  successive  et  graduelle. 

Le  mot  Gradation  s'emploie  aussi  dans  les  beaux-arts. 
Eo  Peinture,  il  indique  le  passage  insensible  d'une  cou- 
leur â  une  autre.  Les  peintres  et  les  sculpteurs  appellent 
encore  Gradation  l'arnflce  de  composition  qui  consiste  â 
grouper  les  personnages  de  manière  que  les  principaux 
soient  en  relief  et  que  les  autres  s'affaiblissent  gra- 
duellement quant  â  l'expression  et  au  Jeu  de  la  lumim. 
«  H  y  a,  dit  Quatremère  de  Quinçy,  gradation  dans  le 
système  des  ordres  de  l'architecture,  lorsqu'on  les  consi- 
dère, toit  sous  le  rapport  des  proportions,  soit  sous  celui 
des  ornements.  Le  oorique,  qui  est  le  plus  fort  et  le  plus 
simple,  est  suivi  de  l'ionique,  plus  élégant  et  plus  varié, 
après  lequel  vient  le  corinthien,  plus  svelte  encore  et 
plus  riche.  »  B. 

GpADE  (du  latin  gradue,  degré),  nom  donné,  dans 
le  langage  militaire,  aux  degrés  par  lesquels  on  monte 
l'échefie  de  l'avancement.  On  en  distingue  onze  dans 
l'armée  française  :  caporal  et  brigadier,  sergent  et  nuy- 
réchal  des  Iciis,  souS'4ietUenant,  lieutenant ,  capitaine, 
chef  de  bataulon  ou  à^escadron,  lieutenant^olonel ,  colo^ 
fiel  jfénéral  de  brigade,  général  de  division,  et  mcâréch/od 
de  France.  Les  titres  de  fourrier,  sergent-major,  maré- 
chal des  logis  chef,  adjudant ,  cidjudant-major,  officier 
payeur,  quartier-inattre,  trésorier,  major,  désignent  des 
offices,  et  ne  sont  ras  des  grades,  puisqu'on  peut  avancer 
■ans  les  recevoir.  Dans  l'armée  de  mer,  les  grades  sont  : 
quartier^maitre,  maitre,  aspirant,  enseigne  de  vaisseau, 
timUenant  de  vaisseau,  capitaine  de  frégate,  capitaine  de 
fxnsseau,  contre-amiral,  «fce-amtrol,  et  amiral.  Depuis 
la  loi  de  1832,  les  grades  sont  donnés,  soit  â  l'ancienneté, 
soit  an  choix  (V.  âvancbment).  L'emploi  est  distinct  du 
grade  :  la  disponibilité  et  la  retraite  enlèvent  l'emploi,  et 
non  le  grade,  qui  ne  se  perd  que  par  la  dégradation.  — 
Dans  le  clergé,  grade  se  dit  de  la  prêtrise  et  des  deçrés 
flua  élevés,  même  de  l'épiscopat. — Dans  les  Univerattés 


et  les  Facultés,  on  confère  les  grades  de  frocMisr,  de 
licencié  et  de  diocteur. 

GRADINS,  degrés,  marches  ou  bancs  disposés  graduel- 
lement les  uns  au-dessus  des  autres  en  forme  d'escaliers. 
Les  Grecs  creusaient  les  gradins  de  leiu«  théâtres  sur  le 
flanc  d'une  colline,  et  formaient  ainsi  des  sièges  natu- 
rels; les  Romains  construisirent  ces  magnifiques  édiflcea 
isolés,  où  d'immenses  et  solides  (pndins  recevaient  des 
milliers  de  spectateurs. 

GRADUEL,  répons  oui  se  dit  ou  se  chante  â  la  messe, 
immédiatement  après  rÉpltre.  Le  nom  vient  de  ce  qu'on 
le  chantait  sur  les  degrés  {gradue)  du  sanctuaire  ou  pen- 
dant que  le  diacre  qui  allait  dire  l'Évangile  montait  les 
degrés  de  l'ambon.  L'usage  du  Graduel  remonte  aux 
papes  S^  Gélestin  ou  S*  Grégoire.  —  On  appelle  aussi 
Graduel  le  livre  de  lutrin  qui  contient  les  messes  notées. 
Il  est  divisé,  comme  l'Antiphonaire,  en  Propre  du  temps 
et  Commun  des  Saints. 

GRADUÉS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d'Histoire. 

GRADUS  AD  PARNASSUM,  c.-â-d.  degré  pour  at- 
teindre  au  Parnasse,  titre  sous  lequel  on  connaît  dans 
nos  écoles  secondaires  le  Dictionnaire  poétique  latin, 
donnant  la  quantité  de  chaque  mot,  ses  synonymes,  les 
périphrases  a  l'aide  desquelles  on  peut  le  remplacer,  les 
épithètes  qu'on  peut  lui  adljoindre ,  le  tout  à  l'usage  de 
ceux  qui  s'essayent  aux  vers  latins.  Ce  fut  le  P.  Aler  qui 
imagina  ce  titre  de  Gradue,  adopté  plus  tard  par  le  P.  Va- 
nière  pour  la  seconde  édition  de  son  Dictionarium  poe~ 
ticum.  Sous  le  premier  Empire  français,  Noèl  s'appro- 
pria, au  moyen  de  quelques  modifications ,  l'œuvre  da 
P.  Vanière,  et  son  Gradus  est  encore  en  usage  dans  les 
écoles. 

GRiECOSTASE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d  Histoire. 

GRAIN,  effet  ({ue  produisent  les  tailles  de  la  gravura 
diversement  croisées  entre  elles. 

GRAINS  (Commerce  des).  V.  Césléaias. 

GRAHMAIRE,  terme  formé  d'un  mot  de  la  basse  lati- 
nité, mais  qui  remonte  au  mot  grec  gramma  (lettre, 
écrit).  La  Grammaire  est  l'art  de  parler  et  d'écrire  cor- 
rectement, c-à-U.  conformément  à  l'usage  des  personnes 
qui  parlent  bien  et  des  meilleurs  écrivains.  Les  Gram^ 
maires  particulières  traitent  de  telle  ou  telle  langue  dé- 
terminée et  considérée  isolément;  elles  exposent  les  prin- 
cipes de  la  déclinaison  et  de  la  conjugaison,  de  la  varia- 
bilité on  non-variabilité  des  diverses  parties  du  discours, 
les  principes  de  dérivation,  de  composition,  les  r^les  de 
construction,  de  syntaxe,  et  rendent  compte  des  anoma- 
lies, c-à-d.  des  déviations  de  la  forme  reçue  pour  telle 
classe  de  mots,  des  irrégularités  de  syntaxe  et  de  con- 
struction sur  lesquelles  reposent  les  principales  figures 
de  grammaire  et  de  mots  et  la  plupart  des  idiotismes. 
Les  Grfxmmaires  comparées  s'occupent  de  montrer  les 
ressemblances  et  les  différences  des  mots,  des  formes 
grammaticales,  de  la  construction  et  de  la  syntaxe  en 
usage  dans  deux  ou  plusieurs  langues.  Les  procédés 
grammaticaux  d'une  langue  peuvent  être  comparés  iso- 
lément avec  ceux  d*une  autre  langue,  par  exemple  le 
latin  et  le  français,  l'anglais  et  l'allemand.  On  peut  aussi 
établir  la  comparaison  entre  un  groupe  de  langues  analo- 
gues et  un  groupe  d'autres  langues  ayant  entre  elles  aussi 
certaines  affinités  :  ainsi,  comparer  les  procédés  généraux 
des  langues  sémitiques  (chaldéen,  syriaque,  hébreu, 
arabe,  etc.),  avec  ceux  des  langues  indo-européennes 
(sanskrit,  grec,  latin,  tudesque,  etc.).  On  peut  comparer 
les  procédés  des  langues  synthétiques,  comme  le  sans- 
krit, le  grec,  le  latin,  avec  ceux  des  langues  analytiques, 
telles  que  le  français,  l'italien,  l'espagnol,  le  portu^^,  le 
grec  moderne  ou  romalque,  et  exposer,  comme  conclusion 
de  cette  étude,  le  tableau  résumé  des  avantages  et  des 
inconvénients  attachés  â  chacun  de  ces  systèmes.  L'Ê^- 
molope  (F.  ce  mot)  est  une  branche  importante  de  la 
Grammaire  comparée,  lorsqu'on  étudie  deux  ou  plusieurs 
langues  issues  d  une  souche  commune,  telles  que  Titalien, 
le  français  et  l'espagnol ,  idiomes  formte  simultanément 
de  la  dissolution  du  latin  aprte  les  invaaions  barbares  aux 
V*  et  VI*  siècles.  Elle  est  aussi  d'un  secours  puissant  pour 
l'étude  approfondie  de  l'anglais,  idiome  formé  principsr 
lement  du  saxon ,  mais  avec  des  emprunts  considérables 
â  la  langue  française  du  moyen  âge  importée  par  la  con- 
quête normande.  La  Grammaire  générale  et  raisotméê 
ou  philosophique  embrasse  ce  qu'il  y  a  de  commun,  d'es- 
sentiel, d'invariable  dans  le  langage  de  toutes  les  na- 
tions, et  cherche,  dans  la  nature  de  l'intelligence  hu- 
mainoi  la  raison  des  faits  qui  se  tnNivent  partout  les 


6RA 


987 


6RA 


DMOMS  aa  miliea  d»  la  plus  grando  diyonlté;  car  il  y  a 
d»  principes  fondamentaux  commons,  et,  on  peut  le 
dire,  antérieure  à  toute  langue  qiédale,  immuaUea  et 
aDhersela,  comme  tenant  à  la  nature  de  la  pensée  même. 
La  Grammaire^  dont  les  basea  ont  été  posées  par  les 
lodena  Grecs,  est  d*origine  relativement  récente  :  les 
premièrsa  recherches  sur  les  procédés  du  langage  se 
trouTent  éparees  dans  le  Cratylê  de  Platon  et  dans  le 


Une  de  VInierprékUion  (de  la  pensée)  par  Aristote  (iv* 
siècle  vr.  J.-C.).  Les  saTants  d'Alexandrie  firent  faire, 


dès  le  aiède  suivant,  de  notables  progrès  à  la  grammaire. 
L*Qn  des  plus  distingués  est  Apollonius  I>yscole  (n*  siècle 
de  J«-C),  qui,  le  premier,  a  rtduit  la  grammaire  en  sys- 
tëoie.  Chez  les  Romains,  il  faut  citer  principalement 
Varren,  contemporain  de  César,  et  I>riscien  (  vi*  siècle  de 
notre  &re).  Chex  les  modernes,  Sanchez  (Sanctius),  Vos- 
nos,  Amanld  et  Lancelot  {Grammaire  d»  Port^Aoual)^ 
DomAnais,  Gondillac,  Beauzée,  Harris,  De  Brosses,  Court 
de  Gébdin,  Sylvestre  de  Sacy,  Destutt  de  Tracy,  de  Gé- 
rando.  Clément,  Charma,  de  Humboldt,  etc.,  sont  au- 
teurs de  Gromifiatreir  générales.  Comme  Grammaires 
eomparén,  on  connaît  l'ouvrage  de  l'abbé  Dangeau 
(xvu*  siècle)  sur  les  Conjugaisons  dês  langues  anctmnet 
comparées  oti»  modernes,  le  Traité  d'Henri  Estienne 
f  XVI*  siècle)  sur  la  ConfomUté  du  langage  grec  a/oec  le 
langage  français ,  et  les  Notions  de  Grammaire  compc^ 
rés  de  M.  Egger,  i852.  Pour  les  auteurs  de  Grammasres 
fariiculiàreSj  V.  les  artides  consacrés  à  chaque  langue. 
Ghes  les  Anciens,  le  mot  grammaire,  et,  par  suite,  le 
mot  grammairien,  n'avaient  pas  le  même  sens  que  chez 
nous  :  la  grammaire,  ou,  comme  ils  disaient,  la  gram- 
matique,  embrassait  l'interprétation  philologique,  litté- 
raira»  mythologique,  critique,  historique  des  principaux 
pofte*,  à  rétode  desquels  on  passait  aussitôt  qu'on  poa- 
iédaît  les  notions  fondamentales  sur  la  langue  grecque 
on  sur  la  langue  ladne  :  c'était  comme  le  deuxiraie  dfr- 
gré  de  l'ensei^iement.  Zénodote  d'Ephèse,  Aristophane 
de  Byiance,  Aristarqoe  de  Samothrace,  se  distinguèrent, 
le  dernier  surtout,  par  leurs  études  de  toutes  sortes  sur 
les  poésies  homéri<fues,  et  leurs  travaux  servirent  de  base 
à  œox  qui  se  pubUèrent  bientôt  sur  la  grammaire  pro- 
prement dite,  ainsi  qu'aux  Lexiques  et  Glossaires,  qui 
souvent  ne  se  componient  que  d  extraits  de  ces  grands 
conunentateurs.  Au  moyen  âge,  les  grammairiens  grecs 
prirent  le  nom  de  scoliastes.  Les  andeos  Romains  dési- 

fiaient  aussi  ces  savants  par  le  nom  de  litterati.  Quant 
Tétude  des  grands  prosotenrr,  elle  faisait  partie  de  la 
iUléionquey  k  cause  de  Ilmportanœ  toute  particulière 
que  le  talent  de  la  parole  et  l'étude  de  ses  procédés 
eurent  pendant  longtemps  dans  la  république  athénienne 
et  dans  la  république  romaine.  Apres  la  chute  de  la  li- 
berté, ^  entraîna  celle  de  l'éloquence,  la  même  division 
fut  maintenne  dans  les  écoles.  Au  moj^n  Aj^e,  la  Gram- 
maire était  au  premier  rang  des  Arts  libéraux.  Peu  à 
peu  elle  se  sépara  de  la  philologie  et  de  la  critique  litté- 
raire. —  Le  maître  oui  se  chargesit  d'enseigner  les  pre^ 
miers  éléments  de  la  langue  s'appelait,  chex  les  Giècs, 
grasnmaisstef  et,  chez  les  Romains,  lUterator  :  il  corres- 
pond à  pen  prèa  à  notre  instituteur  primaire,  maître 
élémentaire,  professeur  de  gmmmaire;  nos  professeurs 
i*hnmanitéa,  de  rhétorique  et  de  Faculté,  ne  sont  pas 
sans  analogie  avec  le  grammaikiue  ou  lettré  et  le  rM- 
ieur  de  l'antiquité,  considérés  coomie  hommes  d'ensei* 
gnement.  P. 

GRANDESSE.  )  F.  ces  mots  dans  notre  Dicttonaatrs  de 

GRANDEUR,  j     Biographie  ^  é^Ristwre^ 

GRAND'GARDE.  V.  Gardb. 

GRAKD-UVRE.  V.  CoMPTABiuré  covmsrciali,  et,  dans 
aocre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire,  Livai  ob 
la  Demi  posuqok. 

GR^^JOuSf:        i  ^-  "^P^J^"^^  ^^ 
GRANDS  OFFiaERS.  S     oraphut  et  d^ffutoire. 

GRANELLESCHI  (Société  des),  sorte  d'Académie  qui 

«e  forma  à  Venise  vers  1740,  pour  s'opposer  au  mauvais 

goût  de  l'époque,*  moins  encore  par  des  ouvrages  sérieux 

qu'au  moyen  de  productions  satiriques  et  m>uffonnes. 

ha  italien,  un  grandli  est  un  sot,  un  niais,  un  imbédle. 

GRANGE,  b&timent  destiné  à  conserver  les  grains  en 

Gerbes  et  les  pailles,  dans  une  exploitation  rurale.  On 

doit  en  éloigner  toutes  les  causes  d'incendie.  Phas  une 

grange  se  raporocbe  du  cube  par  sa  forme,  mieux  elle 

répond  à  m  destination,  oui  est  de  renfermer  autant 

îTespaca  que  possibld;  si  l'on  donne  à  la  toiture  une 

Krande  hMtenr,  on  augmente  ainsi  la  quantité  de  «erbes  , 

qu  00  peot  mottre  A  Tabri.  Le  sol  de  la  grange  doit  être  I 


surélevé  par  rapport  au  terrain  envlronDant.  et  tonaé  de 
matériaux  secs.  Si  l'égrenage  se  fidt  an  fléau.  Taire  à 
battre  doit  être  bien  dressée,  sans  trous  ni  fissures  où  le 
grain  pourrait  se  perdre,  et  bien  ferme  pour  rédster  aax 
chocs  du  fléau  :  on  en  fait,  soit  avec  de  la  terre  firanche 
un  peu  aïKileuse,  dont  on  a  extrait  avec  soin  les  corps 
étrangers,  et  à  laquelle  on  mêle  de  la  fiente  de  bétes  à 
cornes,  ou  du  marc  d'olive  ou  du  tan,  ou  de  la  bourre, 
ou  du  blanc  de  salpêtre,  soit  avec  du  bois,  ou  de  l'as^ 
jphalte.  Dans  le  midi  de  la  France,  en  Espagne  et  en  Italie, 
où  le  battage  se  fait  en  plein  air  immédiatement  après  la 
récolte,  il  n'existe  pas  de  granges.  V.  Morel  de  Vindé, 
Essai  sur  les  constructions  rurales,  1824. 

GRANJA  (La),  château  de  plaisance  des  rois  d'Espagne, 
bâti  an  villa^  de  S^Ddefonse,  à  8  kilom.  de  Ségovie,  par 
ordre  de  Philippe  V,  qui  voulait  imiter  le  Venailles  de 
son  aïeul  Louis  XIV.  Il  thre  son  nom  d'une  ferme  ou  mé* 
tairie  {granja  en  espagnol}  qui  appartenait  aux  Hiéro* 
nymites  de  Ségovie,  et  sur  l'emplacement  de  lamielle  on 
le  construisit  Les  travaux  durèrent  de  1710  à  1746 1  Jo- 
bara,  Sachetti,  Procaccini,  Sani,  Firmin,  Thierry  et  Do- 
mandré,  y  (tirent  employés.  La  Granja  occupe  la  partie  hi 
plus  élevée  d'une  place  en  pente,  où  elle  oflre  une  façade 
peu  remarquable,  limitée  par  deux  tours  à  flêdies  al- 
gues, et  au  centre  de  laquelle  se  trouve  l'abside  de  la 
chapelle.  La  façade  prindpale  est  du  cêté  des  Jardins  t 
des  pilastres  et  des  demi-colonnes  encadrent  les  fenêtres 
du  rez-de-chaussée  et  de  l'étage,  que  couronnent  des 
Arotttons  de  forme  baroque,  et  une  corniche  ornée  de 
vases  ;  au  centre  s'élève  un  attique  soutenu  par  quatre 
cariatides.  Les  appartements  intérieurs  sont  remarquables 
par  leur  grandeur  et  leur  richesse,  mais  présentent  une 
monotone  uniformité.  On  voit  dans  les  salles  basses  une 
collection  d'antiquités  formée  à  Rome  par  l'ex-reine 
Christine  de  Suède,  et  achetée  plus  tard  par  Philippe  V; 
les  pièces  supérieures  sont  ganiies  de  belles  peintures. 
La  chapelle,  ornée  avec  peu  de  goût,  contient  le  tombeau 
élevé  par  Ferdinand  VI  à  la  mémoire  de  son  père.  Ce 
qu'il  y  a  de  plus  beau  à  la  Granja,  ce  sont  les  Jardins  et 
leurs  eaux,  dont  certains  Jets  atteignent  40  à  45  met.  de 
hauteur.  Les  plus  belles  fontaines  portent  les  noms  de 
Bains  de  Diane  et  de  Fontaine  de  Neptune.  B. 

GRAPHIUM.  7.  ce  mot  dans  notre  Dictufnnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

GRAPPIN,  petite  ancre  à  pattes  on  griflte  recourbées, 
attachée  par  un  anneau  à  l'extrémité  d'une  corde  ;  elle 
sert  aux  embarcations  légères,  n  y  a  des  grappins  d^abor» 
dage,  qui  se  lancent  dans  les  haubans  des  navires  qu'on 
veut  accrocher.  Les  grappins  de  brûlots,  placés  au  bas 
des  basses  vergues,  sont  quelque  peu  différents  de  forme. 

GRASSEYEMENT,  vice  de  pronondation  qui  porte  sur 
la  consonne  r,  don\  il  dénature  et  atténue  le  son.  Il  ré>^ 
suite  d'une  mauvaise  direction  donnée  à  la  langue,  qui, 
au  lieu  d'être  portée  vers  le  palais  pour  v  ribrer  au  pas- 
sage de  l'air  poussé  au  dehors,  est  abaissée  vers  les  dents 
Intérieures.  Le  son  de  Vr  est  quelquefois  même  supprimé, 
ainsi  que  le  ftûsaient  à  dessein  les  Incroyables  et  les 
Jfs-fwulstwM  du  Directoire.  La  grasseyement  choque  peu^ 
quand  il  n'est  pas  trop  prononoift,  et  il  a  même  une  cer- 
taine grâce  efféminée. 

GRATIFICATION,  libéralité  faite  anx  employés  de  cen- 
taines administrations  publiques  et  particulières,  à  raison 
des  étrennes  ou  de  tout  autre  événement. 

GRAU,  petit  canal  entre  un  étang  et  la  mer. 

GRAVE,  qualification  de  certains  sons  musicaux,  par 
nmport  à  d'autres  qui  sont  aigus  (  V.  Aion).  Plus  les 
viorations  du  corps  sonore  sont  lentes,  plus  le  son  est 
grave.  La  araf  ite  des  sons  dépend  de  la  grosseur  des 
cordes  ou  des  tuyaux,  de  la  longueur,  du  diamètre,  et 
en  général  du  volume  et  de  la  masse  du  corps  sonore.  — 
GrSoe  est  ansd  le  nom  d'un  mouvement  un  peu  plus 
rapide  que  le  largo,  mais  plus  lent  que  l'addaîo. 

GRAVILLE  (Abbaye  de),  au  Havre.  La  construction^ 
commencée  à  la  fin  du  xi*  siècle,  ne  fut  achevée  qu'an 
un*;  elle  est  de  sQrle  roman,  sauf  le  chœur,  où  se  trou- 
vent des  arcades  ogivales.  L'abbaye  de  Graville  est  en 
forme  de  croix  latine.  A  la  gauche  de  l'entrée  ocddentalt 
est  une  grosse  tour  carrée  en  ruine.  Une  autre  tour 
earrée,  de  peu  de  hauteur,  et  surmontée  d'une  pvramidt 
en  ardoise,  s'élève  à  l'intersection  des  transepts.  Les  cha- 

f liteaux  des  piliers  qui  supportent  la  voûte  en  bois  de 
'édifice,  et  les  parois  extérieures  du  transept  septen- 
trional, ont  reçu  une  ornementation  grosdère,  mais  inté- 
ressante pour  l'histoire  de  la  sculpture.  —  Le  dmetière 
attenant  a  l'abbaye  contient  une  croix  de  pierre  aases 
ornée,  qui  porte  d'un  cèté  l'image  du  Christ,  de  l'autrs 


GRA 


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GRA 


mXI»  de  la  Viem,  et  qui  repoM  sur  an  socle  octogonal  : 
cette  croix  lervit  de  modèle  pour  celle  qui  figura  primi- 
àvement  à  rOpéra  de  Paris  dans  le  3*  acte  de  Robwt  le 
Diable. 

ORAVURB  (du  grec  graphém,  écrire,  tracer),  art  de 
tiaoer  on  dessin  sur  une  matière  dure.  Après  n*avoir 
offert  pendant  longtemps  qu*un  intérêt  secondaire,  cet 
art  a  pris  tout  d'un  coup  une  grande  importance,  lors- 
qu'on eut  appris  à  tirer  des  planches  gravées,  par  le 
moyen  de  Timpression,  un  nomiire  indôflni  d*épreuvee  oi\ 
etkunpeSf  auxquelles  on  donne  également  le  nom  de  gra- 
vurei.  Toutes  les  espèces  de  gravure  se  ramènent  à  trois  : 
la  Gravure  en  creux,  la  Gravure  en  relief,  et  la  Gravure 
en  bae^elief, 

I.  Gravdrb  en  cbbox.  La  matière  employée  est  toujours 
un  métal.  On  prit,  à  Torigine,  de  petites  plaques  d*ar- 
jgent,  quelquefois  d*or,  parce  que  la  gravure  ne  servait 
qu'à  orner  des  bijoox.  Mais,  lorsque  luao  Finiguerra  eut 
trouvé,  en  1452,  te  moyen  de  tirer  épreuve  dlune  plaque 
au*il  avait  gravée  pour  Tégllse  Saint-Jean  ^  Florence 
V,  Nielle),  Mantegna,  BaodoBaldini,  Botticelli,  Antoine 
Pollajuolo,  Frauda,  et  d'antres  ardâtes  gravèrent  sur 
des  planches  plus  grandes,  avec  Tintention  de  tirer  des 
épreuves  :  depuis  ce  moment,  on  fit  usage  d'un  métal 


en  manière  de  crayon,  en  mezzoiinte,  au  lavis;  il  faut 
ijouter  la  gravure  ae  musiqtie,  la  gravure  mécanique,  la 
gravure  en  typographie,  et  la  gravure  héliograpkique, 

La  Gravure  au  buHn  ou  taille-douce  est  la  pins  ancienne 
et  celle  dont  on  obtient  les  plus  beaux  résultats.  11  est  rare 
qu'on  emploie  le  burin  seul  ;  ordinairement  on  se  contente 
de  terminer  avec  cet  instrument  le  travail  préparé  avec 
rean-forte,  et  les  linges,  les  plumes,  les  parties  les  plus 
délicates  des  chairs  sont  terminées  avec  fa  pointe  sèche. 
Les  tailles  sont  généralement  croisées,  excepté  dans  les 
parties  qui  approchent  des  lumières;  graver  avec  un  seul 
rang  de  tailles  est  une  singularité  ou  un  tour  de  force. 
La  manière  dont  les  tailles  sont  croisées  n'est  pas  indif- 
férente :  elles  sont  en  carré  pour  les  pierres  et  antres 
objets  inflexibles,  en  losange  pour  les  chairs  ou  les  dra- 
peries. Avec  les  tailles  croisées,  on  doit  tâcher  d'en  avoir 
une  principale  qui  soit  placée  dans  le  sens  des  muscles 
si  c'est  des  chairs  qu'on  grave,  dans  le  sens  des  plis  si  ce 
sont  des  draperies,  et,  si  c'est  un  terrain  ou  un  monu- 
ment, dans  le  sens  de  sa  plus  grande  longueur  et  suivant 
la  perspective.  On  ne  multiplie  le  croisement  des  tailles 
que  dans  les  fonds  et  quelques  parties  d'ombre.  Elles  no 
sont  pas  toujours  de  même  force,  mais  on  les  fait  plus 
fines  et  plus  déliées  dans  les  fonds  et  dans  les  demi- 
teintes,  et  souvent  môme,  en  approchant  des  lumières, 
^  on  les  termine  par  quelques  points  qui  ont  l'air  de  pro- 
'  longer  la  taille,  bans  lea  premiers  plans,  les  travaux  doi- 
vent être  plus  larges;  mais  il  faut  éviter  d*y  placer  des 
taillea  qui  choquent  l'œil  par  leur  épaisseur  et  qui  laissent 
des  blancs  entre  elles.  —  Aujourd'hui  les  graveura  prépa- 
ient et  avancent  beaucoup  leurs  travaux  à  l'aide  de  l'eau- 
forte  (  K.  à  la  col,  suio.)  :  mais,  au  xv*  siècle,  ce  moyen 
était  inconnu;  on  en  faisait  encore  peu  d'usage  au  xvi*,  et, 
dans  le  xvii*,  on  trouve  encore  de  très-belles  gravures  exé- 
cutées seulement  au  burin.  —  L'école  française  de  gra- 
vure a  commencé  dans  la  seconde  moitié  du  xvi*  siècle, 
avec  Jean  Duvet,  Etienne  Delaulne,  Noél  Garnier^  Nicolas 
Béatrltet,  P.  Voeiriot,  Jacques  Périsin,  Tortorel  et  René 
Boivin.  Sous  Henri  IV  fleurirent  Léonard  Gaultier,  An- 
drouet  Ducerceau,  Etienne  Dupérac,  Philippe  Thomassin 
et  Thomas  de  Leu.  An  temps  de  Louis  XllI,  Callot,  La- 
belle.  Chaperon,  Pérelle,  brillèrent  d'un  vif  éclat.  Pendant 
le  règne  de  Louis  XIV,  notre  école  devint  la  première  de 
l'Europe,  avec  Poilly,  Etienne  Baudet,  Pesne,  Guill.  ChAr- 
teau,  Claudine  Stella,  Gérard,  Audran,  Ëdelinck,  Nan- 
teuil,  Masson,  Van  Schuppen,  etc.  Sous  Louis  XV,  Benoit 
ei  Jean  Audran,  Nicolas  Dorigny,  Charles  et  Louis  Simo- 
neau,  Gaspard  Duchange,  Nie- H.  Tardieu,  Alexis  Loir,* 
Louis  Desplaces,  soutinrent  la  gloire  de  l'école,  et  après 
eux  vinrent  les  deux  Dupuis,  Laurent  Cars,  Phihppe 
Lebas,  les  Drevet  et  les  Balechou.  Les  étrangers  venaient 
alors  en  France  apprendre  à  manier  le  burin,  par  exem- 
ple, les  allemands  Wagner,  Preisler,  Schmidt  et  Wille, 
les  anglais  Strange,  Ingram  et  Ryland  :  l'Angleterre  nous 
enleva  même  Aliamet,  Lempereur  et  Vivarais.  M"*  de 
pompadour  donna  l'exemple  d'abandonner  les  principes 
sévères  de  l'école,  pour  ISàire  du  Joli  et  de  l'effet;  mais 
AnI.  Trouvain,  les  deux  Chéreau,  DauUé,  Larmessin, 
coBservèrent  les  bonnes  traditions.  A  la  fin  du  xvui*  siè- 


cle, SainUAobln,  Avril,  Duplessis-Bertauz  et  Boissles 
nous  amènent  Jusqu'à  la  grande  école  du  xix%  formée 
d'après  les  inspirations  de  David,  et  qui  a  pour  représen- 
tants Bervic,  Desnoyers,  Massart,  Richomme,  Henriquei 
Dupont,  Sixdeniers,  Lemaltre,  Martinet,  François,  Blan- 
chard, etc.  A  notre  époque  on  peut  aussi  mentionner 
Toschi,  Anderloni,  Garavaglia  et  Mercuri  eu  Italie,  Sharp, 
WoUett,  Earlom  et  Green  en  Angleterre. 

Pour  la  Gravure  à  Veau-forte,  on  prend  une  planche 
de  cuivre  ou  d'acier,  on  la  couvre  d'un  vernis  inatta- 
quable aux  acidea,  et,  avec  une  pointe,  on  dessine  eo 
enlevant  oe  vernis,  qu'on  a  eu  soin  de  noircir  à  la  fumée 
d'un  flambeau.  Parmi  les  artistes,  les  uns  prennent  une 
pointe  fine,  les  autres  une  échoppe  ou  grosse  pointe,  dont 
le  bout,  en  forme  de  triangle  irrégulier,  sert  à  faire  des 
pleins  ou  des  déliés,  suivant  la  manière  de  tenir  l'instru- 
ment. Il  en  est  qui  varient  la  grosseur  de  leur  pointe, 
d'après  la  nature  du  travail  qu'ils  veulent  faire.  Le  tra- 
vail de  la  pointe  étant  terminé,  il  reste  à  faire  mordre, 
ce  qui  consiste  à  verser  sur  la  planche  de  l'eau-forte  on 
adde  nitrique  mélangé  d'eau,  qui  entame  le  métal  aux 
endroits  ou  la  pointe  l'a  mis  a  découvert.  On  nomme 
eauoD-fortes  de  peintre  les  planches  gravées  ainsi  d'une 
manière  définitive,  et  eauaS^ortes  de  graveur  oeilea  où 
l'on  a  seulement  préparé  un  travail  qui  doit  être  terminé 
an  burin.  Pour  graver  sur  verre,  on  emploie  l'adde  fluo- 
rique  an  lieu  d'eau-forte.  —  Les  Italiens  ont  attribué  à 
François  Iftazzuoli,  dit  le  Parmesan,  l'invention  de  la 
gravure  à  l'eau-forte;  cet  artiste  est  seulement  le  pre- 
mier qui  ait  pratiqué  cet  art  en  Italie  (1530).  Les  Alle- 
mands ont  revendiqué  la  découverte  pour  Albert  Dorer 
(1510).  Biais  il  existe  au  Musée  britannique  de  Londres 
une  gravure  allégorique  et  satirioue  de  Wenceslas  d'Ol- 
mûtz,  où  l'on  trouve  la  date  de  14te,  et  qui  est,  par  con- 
séquent ,  antérieure  aux  compositions  de  Darer  et  de 
lliàzuoli.  Un  certain  nombre  de  peintres  ont  gravé  à 
l'eau-forte,  entre  autres,  Berghem,  Paul  Potter,  Swane- 
velt,  Everdingen,  Henri  Roos,  Rembrandt,  Annibal 
Carrache,  le  Guide,  Salvator  fUna,  Castiglione,  Claude 
Lorrain,  Bourdon ,  Coypel.  Parmi  les  graveun  qui  em- 
ployèrent à  la  fois  le  burin  et  l'eau-forte,  on  remarque 
Gérard  Audran ,  qui  a  porté  ce  procédé  à  la  perfection, 
Chasteau,  HoUar,  Desplaces,  Duchange,  Le  Bas,  Vivarais, 
Marc^Antoine  Raimondi,  les  Ghisi,  Longhi,  Bartolozzi. 
Quelques-uns  ne  se  sont  servis  du  burin  que  pour  r^ 
pren(tare  des  parties  qui  n'avaient  pas  mordu  à  l'eau- 
forte;  tela  sont  Bartoli,  La  Belle,  Callot,  Abraham  Bosse, 
Sylvestre,  Chauveau,  Le  Potre,  Lederc,  Morin,  Pérelle, 
Périer,  Wagner.  Le  meilleur  graveur  à  l'eau-forte  de 
notre  temps  est  Charles  Jacque. 

La  Gravure  au  pointillé  n'emploie  pas  les  taillea,  mais 
des  points  disposés  par  séries.  On  lea  obtient  par  l'eau- 
forte;  le  burin  donne  ensuite  l'empâtement  nécessaire 
aux  ombres  et  aux  demi-teintes,  et  la  roulette  fond  ces 
dernières  avec  les  lumières.  Les  plus  anciennes  estampes 
au  pointillé,  d'origine  hollandaise,  datent  du  commence- 
ment du  xvn*  si&le,  et  présentent  un  assemblage  de 
pointa  ordinairement  triangulaires  et  d'une  grosseur  iné- 
gale, llorin  et  Boulanger  ont  arevé  de  cette  manière 
plusieura  portraits  et  des  sujets  historioues.  A  la  fin  do 
xvm*  siècle,  Bartoloszi  mit  le  pointillé  à  la  mode,  parti- 
culièrement en  Angleterre,  et  l'on  vit  se  répanchre  une 
énorme  quantité  de  mauvais  ouvrages,  surtout  des  scènes 
domestiques  et  sentimentales.  Au  xix*  siècle,  Hopwood 
a  fait  des  portraits  d'un  beau  fini  et  d'un  Joli  ea&L,  — 
La  Gravure  au  maillet  est  une  variété  de  la  gravure  an 
pointillé  :  les  pointes  avec  lesquelles  on  fait  les  points 
sont  enfoncées  dans  le  métal  à  l'aide  d'un  petit  maillet. 
Lutma  est  presque  le  seul  artiste  qui  ait  opéré  ainsi,  et 
il  n'a  laissé  que  quatre  tètes  ou  portraits  dans  ce  genre. 

La  Gravure  en  manière  de  crayon  a  été  inventée  en 
1756  par  François  et  Demarteau,  graveun  parisiens. 
Pour  imiter  l'irrégularité  d'un  crayon  passé  sur  lea  grains 
du  papier,  on  -prend  une  planche  de  cuivre  vernie  ;  on 
emploie,  au  lieu  de  la  pointe  ordinaire,  une  pointe  di- 
visée en  plusieura  parties  inégales,  et  on  trace  ainsi  les 
contoure;  puis  on  imite  les  hachures  soit  avec  ces  pointesi 
soit  avec  des  roulettes  qui  présentent  également  à  leuf 
circonférence  des  aspérités  inégales.  Cette  manière  de 
graver,  qui  était  surtout  en  usage  pour  l'exécution  des 
modèles  destinés  an^  écoles  de  dessin,  est  remplacée  au- 
jourd'hui avec  avantage  par  la  lithognq)hie. 

La  Gravure  en  mezzotinte  on  à  ta  manière  noire,  dont 
l'invention  est,  à  tort,  généralement  attribuée  à  Louis 
Siegen,  lieutenant-colonel  an  service  du  landgrave  de 
Uesse-Caasel,  ven  1643,  remonte  à  1601,  et  appartient  à 


?RA 


11 


989 


GRA 


PVioQois  Aspruck,  graTeur  tout  à  fait  inconnu,  et  dont  il 
«xisiB  à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris  plusieurs 
pUochea  datées.  Lea  procédés  en  ont  été  bien  perfeo- 
UooQéa  depoîa.  Oa  prend  un  cuivre  ordinairement 
iftaoe,  plaoé  avec  grand  soin;  on  y  fait  faire  le  grain 
psr  on  oaYiier  au  moyen  d'un  h€rc9au,  large  ciseau 
dont  le  bout,  fait  en  portion  de  cercle,  est  stné  et  pré- 
sente des  pointes  tiés-aigués.  L'ouvrier,  en  berçant  sa 
main,  fait  entrer  ces  pointes  dans  la  planche.  Il  passe  le 
bereean  sncoesaiTement  par  bandes  parallèles  sur  la  hau- 
teur, pais  sur  la  largeur,  et  ensuite  par  chaque  diago- 
osle,  en  recommençant  Jusqu'à  vingt  fois  de  chaaue  côté. 
L'épreaTO  qu'on  tire  alors  donne  un  noir  parfait.  Puis, 
le  graveor,  ayant  décalqué  son  dessin  sur  le  cuivre,  prend 
on  radoér,  lame  aiguisée  des  deux  cètés,  avec  laquelle  il 
abat  Je  pfain  de  la  planche,  d'abord  en  entier  dans  toutes 
les  pcrtiee  claixea,  ensuite  plus  légèrement  dans  les  demi- 
teintes  et  les  parties  plus  ou  moins  ombrées.  On  emploie 
aoni ,  an  Ueu  du  radoir,  un  ébarboir,  barreau  d'acier  à 
trois  OQ  quatre  faces,  dont  les  angles  moins  aigus  font  un 
travail  plus  doux.  Maia,  en  tout  cas,  le  racloir  ne  suffit 
pas  dans  les  clairs  purs,  parce  qu'il  peut  occasionner 
queli^oes  lécères  rayures;  on  les  efface  au  moyen  du 
t^rum%s8oir^  instrument  d'acier  très-poli.  Cette  manière 
d'opérer  est  le  contraire  de  la  gravure  ordinaire  :  car  la 
pointe  on  le  burin  semble  faire  l'effet  d'un  cnuron  noir 
sur  un  papier  blanc,  tandis  q[ue  le  racloir  produit  celui 
dun  crayon  blanc  sur  du  papier  de  couleur.  La  gravure 
à  la  manière  noire  est  plus  orompte  et  plus  expédltive 
que  Teau-forte  et  le  bunn  ;  eue  est  susceptible  de  grands 
effets  à  cause  de  l'obscurité  qu'elle  laisse  dans  les  niasses  ; 
mais  elle  manque  de  fermeté  et  de  hardiesse,  ainsi  que 
de  finesse,  par  suite  de  l'espèce  de  velouté  produit  par  le 
grain.  Vaillant  est  à  peu  pres  le  seul  artiste  français  qui 
ait  employé  la  gravure  à  la  manière  noire  sous  le  règne 
de  Louis  XIV;  on  trouve  ensuite  Leblond  sous  Louis  XV, 
et,  de  nos  Jours,  JazeL  Les  Anglais  y  excellent  :  il  n'est 
pas  de  graTeur  plus  remarquable  que  Blartin  et  Thomas 
Landaeer,  nos  contemporains. 

<a  Graowr€  au  lavis  ou  aquchtitUa  imite  les  dessins  au 
lavis  faits  à  Fencre  de  Chine,  au  bistre  ou  à  la  sépia.  Elle 
produit  à  peu  près  les  mêmes  effets  que  la  mezzo-tinto  ; 
mais,  comme  la  gravure  à  l'eau-forte,  elle  s'exécute  au 
moyen  d'une  action  chimique  :  on  grave  d'abord  à  l'eau- 
fone  les  contours  de  la  figure;  on  couvre  ensuite  d'un 
vernis  noir  impénétrable  à  l'acide  nitricjue  les  parties  de 
la  planche  où  il  ne  doit  y  avoir  ni  trait  ni  ombre.  Puis 
:q  saupoudre  la  planche  de  colophane  réduite  en  poudre 
très-fine,  et  on  l'expose  à  une  chaleur  ardente  jusqu'à  ce 
qae  la  résine  soit  fondue.  Par  ce  moyen,  il  se  forme, 
entre  lea  molécules  de  la  colophane,  de  petits  espaces 
-^r  lesquels  radde  nitrique  peut  s'insinuer  et  mordre. 
L  adde  est  alors  versé  sur  la  planche,  et  on  l'y  laisse 
doq  minutes,  temps  suffisant  pour  les  ombres  faibles. 
On  oouTre  ces  ombres  faibles  avec  du  vernis,  et  on  fait 
agir  racide  une  seconde  fois,  et  ainsi  de  suite  Jusqu'à  ce 
que  les  ombres  les  plus  fortes  soient  tracées  à  leur  tour. 
Telle  est  la  méthode  pour  les  sujets  d'histoire  et  d'archi- 
tecture. Pour  le  paysage,  on  emploie  un  autre  procédé, 
qui  consiste  à  étendre  sur  la  planche  un  bon  vernis  de 
graveur;  puis  on  recouvre  au  pinceau  toutes  les  parties 

2ui  doivent  être  gravées^,  avec  un  mélange  d'huile  d'olive, 
l'essence  de  térébenthine  et  de  noir  de  fumée.  Ce  mé- 
lange amollit  le  vernis,  qui  peut  être  enlevé  avec  un  linge 
tn^  en  laissant  paraître  sur  le  cuivre  les  marques  faites 
avec  le  pinceau.  Alors  on  agit ,  comme  dans  le  premier 
procédé,  à  l'aide  de  la  colophane,  et  on  répète  l'opération 
plusieurs  fois,  suivant  qu'on  veut  obtenir  des  teintes  plus 
on  moins  foncées.  —  La  gravure  an  lavis  a  été  inventée 
en  1660  par  Hercule  Zeghars,  ou  en  i762  par  Fr.-Phil. 
Charpentier,  graveur  de  Paris.  D'antres  l'attribuent  à  Le- 
prince. 

La  Gravure  sur  pisrrs  s'exécute  sur  pierre  lithogra- 
phique; elle  a  été  imaginée  vers  18  ;  c^est  un  procédé 
qui  a  son  avantage  pour  la  facilité  du  travail,  mais  il  ne 
réussit  bien  que  pour  le  dessin  au  trait,  ou  le  dessin  to- 
pographique on  géographique  ;  il  ne  souffre  pas  de  mé- 
dîMrité;  aussi,  en  général,  ce  genre  de  gravure  est  sec  et 
froid,  comparé  à  la  gravure  sur  cuivre  ou  sur  acier. 

Pour  la  Gravurs  de  musique,  on  a'est  servi  d'abord  de 
planchas  en  cuivre,  puis  en  étain  et  en  sine.  Bien  qu'on 
efnpkne  le  burin  pour  quelques  parties,  presoue  tout  le 
travail  se  Mi  au  moyen  de  poinçons  quon  frappe  avec 
an  marteau.  S'il  y  a  des  paroles  à  graver,  c'est  par  là 
que  Ton  commence,  et  c'est  l'aflaire  du  graveur  en  taille- 
wan.  C'est  an  conmienoeaient  du  xvm*  siècle  qu'on  se 


mit  à  graver  la  musique,  qui  était  précédemment  impri* 
mée.  L'idée  en  est  attribuée  au  compositeur  allemand 
G.-Ph.  Telemann. 

On  a  imaginé,  de  nos  Jours,  diverses  Machines  à  gra» 
ver.  Celle  de  Conté  sert  à  faire  avec  une  très-grande  x^ 
gularité  des  séries  de  lignes  parallèles,  également  espa- 
cées, comme  cela  est  nécMsaire  pour  les  dâs  des  grandes 
navurea.  Elle  se  compose  essentiellement  d'une  règle  ou 
d'un  cylindre  portant  des  ondulations  que  l'on  fait  mon- 
voir  au  moyen  d'une  vis  de  rappel  parfaitement  r^Utos, 
et  d'une  pointe  qui  trace  une  ligne  le  long  de  cette  règle 
ou  de  ce  cylindre.  La  machine  de  Collas  sert  à  repro- 
duire, gravés  en  taille-douce,  sur  une  planche  d'ader  on 
de  cuivre,  les  effets  de  relief  ou  d'enfoncement  d'une 
médaille,  d'un  basrrelief. 

La  Gravure  en  typographie  comprend  toutes  les  opé- 
rations à  l'aide  desquelles  se  font  les  poinçons  d'ader 
servant  à  frapper  les  matrices  employées  pour  couler  les 
caractères  d'imprimerie.  Elle  est  très-importante;  car  de 
la  bonté  et  de  la  beauté  de  ce  qu'elle  produit  dépendent 
les  succès  du  fondeur  et  de  l'imprimeur. 

La  Gravure  hMiographique,  qui  s'exécute  sur  ader  et 
sur  verre,  n'a  pas  encore  atteint  une  grande  perfection. 
Après  avoir  obtoiu,  sur  une  plaque  enduite  d'un  vernis 
de  benrine,  d'essence  de  zeste  de  dtron  et  de  bitume  de 
Judée,  une  bonne  image  à  l'aide  de  la  chambre  obscure, 
on  la  place  dans  une  boite  semblable  à  celle  qui  sert  à 
paaser  la  plaque  daguerrienne  au  mercure.  Dans  le  fond 
de  cette  boite,  que  l'on  ferme  hermétiquement,  est  une 
c^isule  de  porcelaine  contenant  de  l'essence  de  spic  pure, 
que  l'on  chauffe  très-fort  avec  une  lampe  à  alcool.  La 
plaque  étant  bien  séchée  à  l'air,  on  la  nit  mordre  par 
l'ean-forte. 

11.  Gaawaa  en  sbuep.  Cette  manière  de  graver,  plus 
lonpe  et  plus  difficile  que  la  gravure  en  creux,  est  aussi 
moins  ancienne  ;  on  rroit  que  les  Chinois  la  pratiquaient 
dana  le  xi*  siècle,  liais,  comme  l'impression  en  est  plus 
simple  et  plus  fadle,  c'est  d'elle  qu'on  a  tiré  des  épreuves 
en  premier.  La  gravure  en  relief  s'exécute  ordinairement 
sur  du  bois,  mus  aussi  quelquefois  sur  cuivre  Jaune  et 
sur  ader.  An  xm*  dède  on  exécutait  en  Allemagne  des 
cartes  géographiques  gravées  en  relief  sur  bois;  Il  en 
existe  des  exemplaires  à  la  Bibliothèque  impériale  de 
Paris. 

La  gravure  en  relief  sur  cuivre  et  sur  ader  sert  à  ex^ 
cuter  les  estampilles,  les  poinçons,  les  vignettes  em- 
ployées dans  la  fabrication  des  actions  des  compagnies 
industrielles,  les  ornements  que  les  relieurs  placent  sur 
le  dos  ou  le  plat  des  livres,  etc. 

On  grave  sur  bois  à  une  ou  à  plusieurs  taUles.  Pour 
graver  à  une  seule  taille,  le  buis  est  le  plus  généralement 
employé.  On  prend  aussi  du  poirier  pour  les  si^ets  de 
grande  dimension,  ou  quand  le  travail  n'exige  aucune  « 
finesse,  comme  pour  la  fabrication  de  l'indienne  ou  du 
papier  pdnt.  Lorsque  la  plandie  est  bien  dressée  et 
polie,  on  la  couvre  d'une  légère  couche  de  blanc  de  cé- 
ruse  ou  de  zinc  délayée  avec  de  l'eau  gommée  et  un  peu 
d'alun  :  le  dessinateur  trace  alors  avec  un  crayon  dur  la 
composition  qu'il  veut  publier,  et  tout  le  travail  du  sra- 
veur  se  borne  à  enlever  les  partiea  du  bols  restées  blan- 
ches, et  à  laisser  en  saillie  les  traits  et  les  hachures  que 
l'artiste  a  dessinés  et  qui  deviennent  alors  autant  de 
tailles.  Dans  la  gravure  en  creux,  le  sillon  du  burin  ou 
de  la  pointe  doit  être  rempli  d'encre  et  produirai^ traits 
aperçus  sur  l'épreuve;  dans  la  gravure  en  relief,  ce  qu'on 
enlève  est  la  partie  qui  ne  doit  pas  laisser  de  trace  sur 
le  papier,  et  on  épargne  les  tailles  qui  doivent  marquer  à 
l'impression  :  de  là  vient  le  nom  de  gravure  en  taille 
d'épargne  que  Ton  donne  à  la  gravure  en  relief.  — Autre- 
fois, les  graveurs  sur  bois  étaient  appelés  tailleurs  de 
bois,  et  on  donnait  le  nom  de  taille  à  \a  planche  taillée  ou 
gravée.  Aussi,  quand  on  parle  de  gravure  à  plusieurs 
tailles,  il  ne  s'agit  pas  du  nombre  des  hachures,  ni  de 
leur  croisement,  mais  des  tailles  ou  planches  diverses 
qu'on  emploie  pour  graver  en  couleur.  La  gravure  à  plu- 
sieurs tailles  est  aussi  connue  sous  les  dénominauons 
de  gravure  en  camaieu  et  de  gravure  en  clair^chscur 
{V,  Camaïeu). 

La  gravure  sur  bois  offrit  à  peine,  à  l'orighie,  les  fn^ 
ractères  d'un  art:  elle  servit  à  tailler  des  sceaux  écono* 
miques,  des  lettres  en  relief,  dont  les  scribes  et  enlo- 
mineurs  faisaient  usage  pour  imprimer  les  minuscules. 
On  a  des  preuves  que  cette  coutume  s'établit  dès  le 
XII*  siècle.  La  plus  andenne  mention  d'un  graveur  en 
bois  que  l'on  ait  découverte  Jusqu'id  se  trouve  dans  un 
obituaire  dea  Frandscains,  à  Nordlingen,  lequel  s'arrête 


GRA 


990 


GRA 


an  cammeDcement  du  xv«  siècle  :  œ  grafenr  se  nommait 
Fr.-H.  Loger,  et  était  lalmie.  Par  conséquent,  les  Alle- 
mands sont  aussi  peu  fondés  à  réclamer  iHnvention  dç  la 
gravure  sur  bois  pour  Ulrich  Vilgrim  que  les  italiens 
pour  Ugo  da  Qupi.  Au  xv*  siède,  l'art  de  tailler  le  bois 
pour  en  obtenir  des  estampes  se  répandit  des  monastères 
dans  le  monde  séculier  :  de  nombreux  ateliers  fonction- 
nèrent à  Ulm,  Nuremberg,  Augsbourg,  etc.,  et  four- 
Bfarent  dlmages  Tltalie,  la  France  et  les  Pays-Bas.  Bn 
même  temps  que  rimprimerie  substituait  les  livres  aux 
manuscrits,  la  gravure  se  substituait  à  la  pdntore  en 
miniature.  Dans  les  estampes  de  ee  temps,  les  figures, 
aussi  bien  que  les  fonds,  les  terrains,  les  arbres,  les  édi- 
fices, sont  encore  faits  au  trait,  à  peine  ombrés  de  quel- 
ques hachures,  et  propres  à  recevoir  une  enluminure  s 
e^est  Part  dans  son  enfance,  avec  sa  naïveté,  sa  pàce 
quelquefois,  mais  aussi  avec  ses  incorrections,  son  igno- 
rance de  la  perspective  et  du  clair-obscur,  son  peu  d'ha- 
bileté mécanique.  Mais  le  perfectionnement  de  Texéeu- 
don  artistique  ne  tarda  pas  à  être  sensible  t  pendant 
tout  le  XV*  siècle,  Tart  de  graver  sur  bols  fit  des  progrès 
continus;  Albert  Durer  et  ses  élèves  lui  donnèrent  le 
plus  grand  éclat  qu'il  ait  Jamais  atteint  avec  Tancienne 
école.  Parmi  les  graveurs  français,  on  dte  Tollat,  Raefé, 
Pierre  Voeiriot,  Noôl  Gamier,  Bernard  Salomon  dit  1$ 
Petit  Bernard,  Jean  Le  Hattre,  Moni ,  Georges  Biathieu, 
Cruche,  et  le  célèbre  Jean  Cousin.  Puis,  la  gravure  en 
rdief  pencha  peu  k  peu  vers  son  déclin,  en  Jetant  sur  les 
Pays-Bas,  pendant  la  seconde  moitié  du  xvi*  siècle,  les 
derniers  rayons  de  sa  splendeur.  On  remarqua,  sous 
Henri  IV,  Leclerc  et  Pierre  Rochienne,  et,  sous  Louis  XIII, 
Etienne  Duval  et  Palliot.  La  décadence,  un  moment  sus- 
pendue par  Rubens,  devint  plus  rapide  ajirès  la  mort  de 
cet  illustre  artiste,  et,  pendant  le  xvm*  siècle,  ce  fut  un 
art  presque  abandonné.  La  France  seule  le  cultiva  d'une 
manière  aases  brillante  pour  prouver  qu'il  ne  périrait 
point  :  deux  familles  se  distinguèrent  principakônent  à 
cette  époque,  les  Piq>illon  et  les  Lesueur;  auprès  d'elles 
une  foule  d'artistes  secondaires  ornèrent  les  livres  de 
flrontisplceS',  de  vignettes,  de  fleurons,  et  même  exécu- 
tèrent de  grandes  planches.  A  la  fin  du  siècle,  si  l'on  ex- 
cepte Go<kupd  d'AIençon,  l'école  française  faiblit  à  son 
tour.  Mais  l'œuvre  fut  alors  reprise  et  continuée  par  l'An- 
gleterre, dont  les  artistes,  de  4800  à  1825,  furent  les  seuls 
en  Europe  capables  de  graver  avec  goût:  on  doit  men- 
tionner Thomas  Bewick,  Th.  Hood,  Harv^,  Sears,  Ta- 
bagg,  Branstone,  Clennell,  Nesbitt,  Thompson,  etc.  Us 
substituèrent  la  gravure  sur  bois  debout  et  au  burin  à  la 
gravure  sur  bois  de  fil  et  au  canif.  En  France,  la  gra- 
vure sur  bois  ne  s'était  conservée  ^'en  province,  à 
Épinal ,  par  exemple,  où  on  l'employait  pour  illustrer  de 
rades  empreintes  les  livres  populaires,  et  confectionner 
ces  images  grossières  qui  tapissaient  les  cabarets  et  les 
chanmiores.  A  Paris,  ouelques  fleurons  et  culs-de-lampe 
étaient  exécutés  pour  les  publications  de  luxe  par  Best, 
Andrew,  Leloir  et  Brevière.  Le  succès  que  le  Penny  Jfa- 
gcuinê,  le  Saturday  Maganne  et  autres  recueils  illustrés, 
vendus  à  bas  prix,  obtenaient  en  Angleterre,  donna  l'idée 
de  créer  en  France  le  Magasin  jnUomque  en  1833.  Les 
fondateurs  de  l'entreprise,  Charton  et  Lachevardière, 
s'associèrent  Best,  Andrew  et  Leloir;  une  nombreuse 
école  de  graveurs  se  forma  sous  leur  direction,  et,  après 
quelques  années  laborieuses  et  pénibles,  le  Magasin  ptt- 
toresims  a  publié  de  véritables  cnefs-d'œuvre  de  gravure, 
bien  Apérieurs  à  tout  ce  qui  se  fait  en  Angleterre.  Rurmi 
les  artistes  qui  se  firent  un  nom,  on  distingue  Belhatte, 
Gherrier,  Chevauchet,  les  deux  Lacoste,  Maurisset,  Por- 
ret.  Rouget,  Tellier.  VFUustration  et  le  Monde  Ulustré 
donnent  aqjourd'hui,  avec  une  étonnante  rapidité,  des 
gravures  considérables  comme  étendue  et  comme  valeur. 
Nous  citerons  encore  V  Histoire  des  peintres  de  toutes  les 
écoles,  publiée  par  Charles  Blanc,  et  pour  laquelle  Du- 
Jardin,  Gusman,  Carbonneau,  Dupré,  Gauchard,  Trichon, 
Ligny,  Quartiey,  Timms,  Whitehead,  Pannemaker,  etc., 
ont  gravé  les  tableaux  des  grands  maîtres,  d'après  les 
dessins  de  Cabasson,  Pftquier,  Hadamard,  Bocourt,  nree- 
man,  Beaucé,  Gagniet,  Marvy,  Daubigny,  etc.  V Histoire 
de  la  Touraine^  publiée  par  Mame,  les  tkderves  de  l'Eu- 
ro^, V Imitation  de  Jésus-Christ,  rivalisent  avec  V His- 
toire des  peintres. 

m.  Gravure  en  bas-reuep.  C'est  moins  un  genre  de 
gravure  qu'une  espèce  particulière  de  ciselure  et  de 
sculpture.  Elle  comprend  la  gravure  de  médailles  et  la 
gramêre  sur  pierres  fines  (7.  Gltphqob,  Médaillbs). 


iCOLXS    DE    «iRAVORB* 

ÊeoU  française,  —  Elle  est  originaire  d'Italie,  ainsi 
qu'on  le  verra  plus  bas.  Nous  ne  dirons  qu'un  mot  de 
Noél  Gamier  et  de  Jean  Duvet,  malgré  le  mérite  de  ce 
dernier;  mais  on  ne  saurait  reconnaître  dans  Dnvet, 
dessinateur  fougueux  et  confus  de  VApoealypsef  le  génio 
caractéristique  de  la  nation.  Etienne  de  Laulne,  An- 
drouet  du  Cerceau,  sont  de  véritables  dessinateurs  fran- 
çais :  l'un  et  l'autre  ont  eu  le  génie  de  la  gr&oe.  Rien  de 
curieux  pour  l'histoire  du  temps,  pour  en  connaître  les 
nuBurs  et  les  traits  caractéristiques,  comme  le  recueil  de 
pièces  historiques  dû  à  Tortorel  et  à  Périssim ,  et  les 
estampes  de  Wo&iot,  de  Thomas  de  Leu,  de  Léonard 
Gaultier.  Dans  ce  premier  Age  de  la  gravure  française, 
qui  a'étend  jusqu'au  commencement  du  xvn*  siècle, 
Testampe  se  recommande  moins  par  le  mérite  de  l'artiste 
que  par  l'intérêt  du  sujet.  Cette  observation  est  encore 
vraie  appliquée  à  Abraham  Bosse;  son  œuvre  si  vaste 
renferme  sur  l'époque  de  Louis  XIII,  la  vie  domestique 
du  temps,  mœurs,  habillement,  meubles,  etc.,  des  do- 
cuments pleins  d'intérêt.  Callot  a  une  place  à  part;  bien 
que  né  k  Nancy,  il  n'en  est  pas  moins  le  premier  grand 
graveur  français,  par  l'esprit,  l'entrain,  la  sagacité  mor- 
dante, le  bon  sens  sceptique  et  gouailleur,  qui  caracté- 
risent nos  auteurs,  artistes  et  écrivains,  les  plus  popu- 
laires. Il  a  manié  la  pointe  avec  une  dextérité  inimitable. 
Une  eau-forte  de  Callot  se  reconnaît  au  prunier  coup 
d'œil  entre  toutes  les  gravures  du  monde.  Mais  Callot  est 
une  individualité  plus  remarquable  par  sa  propre  origi- 
nalité que  par  son  influence  sur  la  marche  et  les  desti- 
nées de  l'art.  En  France  cette  influence  fût  peu  sensible. 
En  Italie  elle  fit  naître  quelques  imitateurs,  tels  que 
Canto  Gallina,  Cantarini,  Délia  Bella  (La  Belle).  Cepen- 
dant la  France,  le  pays  des  artistes,  penseurs  et  philo- 
sophes, un  pays  où  l'art  n'est  pas  pittoresque,  où  les 
peintres  mettent  dans  leurs  productions  plus  d'idées  que 
de  dessin,  et  plus  de  dessin  que  de  couleur,  devait  voir 
tôt  ou  tard  la  gravure  briller  d'un  vif  et  durable  éclat. 


très-remarquable.  Btiénne  Baudet, 
laume  Château,  les  SteUa,  Jean  Pesne  surtout,  sans 
égaler  comme  éclat  de  burin,  comme  science  de  l'outil , 
les  interprètes  de  Kubens,  ne  leur  sont  pas  inférieurs 
sous  le  rapport  de  la  fidélité  et  du  sentiment. 

Nous  entrons  alors  dans  le  second  àçe  de  la  gravure 
française.  Les  ^illy,  Edelinck,  Nanteuil,  Masson,  Van 
Schuppen,  élève  de  Nanteuil,  Pierre  Drevet,  élève  de  Ma»- 
son,  portent  l'art  à  une  hauteur  dont  le  nom  de  Gérard 
Audran  marque  le  point  extrême.  On  ne  se  hisse  pas 
d'admirer  dans  les  portraits  et  les  e^ds  sujets  traités 
par  ces  maîtres  la  correction  du  dessin,  l'habile  distribu- 
tion de  la  lumière,  l'adresse  avec  toquelle  le  même 
instrument  fait  reconnaître  l'éclat  du  métal,  la  fermeté 
des  chairs,  le  scintillement  de  l'eau,  la  transparence  de 
la  dentelle,  hi  douceur  de  l'hermine  -et  le  degré  de  ve- 
louté et  de  finesse  d'une  étoff'e.  A  Le  Brun  revient  une 
bonne  part  dans  ce  progrès.  En  possession  de  la  direction 
de  toutes  les  branches  de  l'art,  il  n'épsrgna  pas  les  con- 
seils à  Gérard  Audran,  et  celui-ci  les  mit  à  profit  avec 
tant  d'intelligence,  qu*ett  interprétant  Le  Brun  il  sut 
régler,  et  rendre  quelquefois  même  sa  traduction  supé- 
rieure à  l'original.  Les  Batailles  d! Alexandre,  les  pla- 
fonds de  Versailles,  presque  toutes  les  pièces  gravées 
pour  le  Cabinet  du  Boi,  se  recommandent  par  la  fermeté 
brillante  de  l'exécution  et  la  largeur  du  style. 

A  partir  de  Gérard  Audran,  le  sceptre  de  la  gravure 
appartient  à  la  France.  Ce  sont  d'abord  les  élèves  de  Gé* 
rard  :  Benoist  et  Jean  Audran,  Nicolas  Dorigny,  Charles 
et  Louis  Simoneau,  Gaspard  Duchange,  Alexis  U>ir,  Louis 
Desplaces,  Nicolas-Henri  Tardieu  ;  viennent  ensuite  les 
élèves  de  Tardieu,  Laurent  Cars  et  Philippe  Le  Bas  ;  ceux 
de  Le  Bas,  Alliamet,  Cochin,  Wille,  et  puis  Bervic, 
l'élève  de  Wille;  Boucher-Desnoyers,  l'élève  de  Bervic; 
Alexandre  Tardieu,  M.  Henriquel-Dupont,  élèves  de  De^ 
noyers.  Ainsi,  de  Gérard  Audran  Jusqu'à  nos  Jours,  les 
saines  doctrines,  par  leur  transmission,  en  maintenant 
la  supériorité  de  la  France,  lui  ont  assuré  le  glorieux  pa- 
tronage qu'elle  continue  à  exercer  auprès  des  Écoles 
étrangères.  On  a  re<^rché  dans  leur  temps,  et  on  re- 
cherche encore,  les  productions  de  Bernard  Picard,  de 
Larmessin,  de  Dupuis,  de  Daullé,  de  Beauvarlet,  de  Le- 
prince,  de  Balechou,  de  Flipart,  de  Ficquet,  de  Sainte 
Aubin,  etc.,  avec  autant  d'empressement  que  celles  des 
graveurs  que  nous  avons  précédemment  nommés.  Par 


GRA 


991 


GRE 


tiq^  par  ces  maltreB  habiles^  Tart  da  xvni*  siècle  Pat 
ttqifiiné  avec  ses  qualités  séduisantes  et  ses  défauts.  La 
Stsmre  arrive  Ters  la  fin  du  siècle  à  une  véritable  oriç- 
aalité  dans  la  vignette  ;  l*artiste  préfère  souvent  le  burin 
u  pinceau.  Mais  Tait,  dans  ce  badinage,  perd  chaque 
|oar  sooa  le  rapport  de  la  force  et  du  stvle. 

Avec  le  peintre  David,  il  se  relève  enfin  ;  on  entze  dans 
vne  manière  large  et  sévère.  Toutefois,  il  ne  faudrait  pas 
attribuer  à  David  une  action  directe  sur  la  gravure;  nn- 
flnence  fut  tout  à  fait  indirecte.  L*art  ramené  h  d*autres 
Idées  y  ramena  naturellement  le  goût  et  la  pens^  des 
fraveiira.  Bervic  devint  un  admirateur  passionné  d«ai  bas- 
rdiefa  du  Panhénon.  On  pouvait  lui  reprocher,  ainsi 
qu*à  son  maître  Wille,  Texagératlon  du  procédé,  Taffec- 
tatiott  de  la  science  et  de  la  dextérité  de  Toutil;  une 
étude  dea  graveurs  du  xvu*  siècle,  alors  plus  assidue  que 
celle  des  maîtres  dont  ils  avaient  à  interpréter  Toeuvre. 
Leurs  élèves,  avec  moins  de  talent  quelquefois,  ont  fait 
preuve  de  plus  de  modération  consciencieuse.  MM.  Tar- 
dieu,  Boucber-Desnoyers,  ont  laissé  un  grand  nombre  de 
productions  très-distinguées,  et  quelques-unes  capables 
de  supporter  la  comparaison  avec  les  chefs-d^œuvre  de 
Vbix  qôi  les  avalent  devancés.  Nous  avons  encore  aujour- 
dlml  de  dignes  héritiers  de  levrs  doctrines,  et  la  main 
moaraDts  de  Desnoyers  a  passé  à  M.  Henriquel-Dupont 
ce  sceptre  de  la  gravure  dont  la  France  est  en  possession 
depuis  deux  cents  ans. 

ECOLES    éTKANGÈRBS. 

Êcoh  aUemandê.  —  Son  caractère  peut  se  résumer  en 
deux  mots  :  Idéal  et  matérialisme.  Le  sentiment  exquis 
de  la  beauté  manque  au  vieux  génie  allemand.  Albert 
Dorer  est  la  personnification  la  plus  complète  de  Tart  de 
son  pays;  toute  l'école  allemande  procède  de  lui,  puti- 
cuUàrement  Aldegrever  et  Hans  ScheufDsden.  Bientôt 
l'école  d'Allemagne  fut  absorbée  par  celle  d'Italie,  et  ne 
compta  plus,  au  xvi*  siècle,  que  des  imitateurs  de  Marc- 
Antoine  Raimondi.  De  nos  Jours,  TÉcole  allemande  s'est 
attachée  à  rendre  la  pureté  des  contours  et  la  ligne,  plus 
que  l'efTet  pittoresque.  On  cite  parmi  ses  graveurs  les 
plus  distingués  Merz,  Felsing,  Steinla,  Joseph  et  Fran- 
çois Zeller.  Le  dernier  a  obtenu  la  médaille  d'or  à  l'Ex- 
position des  beaux-arts,  en  1859,  pour  une  belle  planche 
de  la  Dispute  du  S^Sacrementf  d'après  Raphaél. 

ÊcoU  anglaise.  —  Les  graveurs  ont  commencé  par 
marcher  dans  la  voie  de  tout  le  monde,  aux  xvi*  et 
XVII*  siècles  :  Strange  imita  Laurent  ptrs;  Vivarès  et 
Woolet  prennent  la  manière  de  Le  Bas  ;  mais  les  uns  et 
les  antres  surpassent  leurs  maîtres,  et  Woolet,  dans  le 
maniement  de  l'outil,  a  fait  de  vrais  tours  de  force.  Les 
Anglais  ont,  en  général,  perfectionné  les  procédés  et  pro- 
duit des  oeuvres  remarquables,  surtout  dans  la  gravure 
en  manière  noire.  Un  de  leurs  perfectionnements,  dû  à 
Conaôl,  est  l'alliance  de  la  manière  noire  et  de  la  taille 
douce.  Néanmoins  on  compte  aussi  chez  eux  d'excellents 
burinistes,  et  Raynbach,  entré  antres,  s'est  fait  une  Juste 
réputation  par  ses  tiùlles-douces,  d'après  Willcie,  surtout 
le  Cnlin'MaiUlard,  L'École  anelaise  réussit  beaucoup 
daos  les  gravures  d^imaux,  etles  planches  de  Landseer 
sont,  ea  ce  genre,  des  chefs-d'ceuvre.  Le  grand  style  ne 
s'accorde  pas  avec  la  nature  des  Anglais;  ils  tombent 
alors  dans  le  rolde  et  le  théâtral. 

Èeols  Ualimne,  —  Les  premiers  paveurs  Italiens  fu- 
rent des  dessinateurs  originaux,  qui  reproduisaient  par 
le  burin  leurs  propres  conceptions,  tels  que  Boticelli,  An- 
ÉréÊL  Biantegna,  Pollajuolo;  ils  le  firent  avec  une  correc-' 
Jon  et  une  fermeté  de  dessin  admirables.  Mais  à  partir 
de  Maro-Aotoine  iUdmondi,  l'école  des  graveurs  sur  mé- 
tal se  consacre  à  populariser  les  œuvres  des  grands 
peintres,  ce  qui  la  mit  dans  une  excellente  condition  de 
progrès.  Raimondi,  élève  de  Raphafil,  a  reproduit,  sons 
sa  dîrectioii,  les  dessins  des  cartons  de  son  maître,  et  a 
contribué  à  les  populariser,  n  est  demeuré  chef  d'école, 
et  a  laissé  de  nombreux  élèves,  Augustia  de  Venise,  Marc 
de  Bavemie,  Vioo  de  l'arme,  Buonaaone  de  Bologne,  les 
Ghiai,  etc.,  reoiarquablea  par  un  dessin  généralement 
«errect,  un  burin  précis,  serré,  nuls  sec.  Ugo  da  Carpi 
parvint  à  donner  trois  et  cruatre  tons  à  la  gravure  en 
eamafen,  Volpato,  Raphaël  Morghen,  malgré  leur  repu- 
tttion,  forant  des  graveui's  monotones,  qui  ne  surent  pas 
prendre  le  caractère  de  leurs  modèles,  et  portèrent  par- 
tiBt  une  manière  brillante  et  molle,  la  même  pour  tra- 
énlre  le  Grarége  et  le  Poussin.  Ils  ont  dû  leurs  succès  à 
nteurenx  choix  des  modèles  d'après  lesquels  ils  ont  tra* 
viillé.  Lea  MoJIer,  malgré  leur  origine  germanique,  ap« 


rrtfennent  à  l'École  Italienne  ;  la  Vierge  à  la  chaise  de 
Godard  MuUer,  et  la  Vierge  de  Sixte  V  de  Guillaume 
MuUer,  sont  des  œuvres  estimables.  —  Aujourd'hui, 
l'École  italienne  suit  les  traditions  de  l'École  française  : 
elle  en  a  U  facilité  et  le  brillant  Nous  citerons,  parmi 
ses  graveurs  les  plus  remarquables,  M.  Toschi,  auteur  de 
Vmtrie  d* Henri  IV  à  Paru,  d'après  Gérard;  Mercurl, 
à  qui  l'on  doit  les  Moissonneurs  dans  les  marais  Pan- 
tins, d'après  Léopold  Robert;  M.  Calamatta,  qui  a  gravé 
le  Vœu  de  Louis  XFII,  d'après  M.  Ingres,  etc. 

J^cole  des  Pays-Bas,  —  Le  créateur  de  cette  école  est 
Lucas  de  Lqrde.  Il  mit  dans  les  estampes  te  clair-obscnr 
et  la  couleur  an  moyen  d'une  distribution  profondément 
sentie  de  la  lumière.  Les  antres  graveurs  de  cette  école 
ont  plus  de  métier  qnie  de  goût  et  dinvention  :  Gomdlle 
Cort,  interprète  du  'Titien,  manque  de  sentiment,  et  Jean 
Muller,  Henri  Goltzins  et  toute  son  école,  ainsi  que  celle 
des  Sadeler,  se  distinguent  par  la  vigueur  et  la  hardiesse 
du  burin,  bien  plus  que  p«r  un  vru  sentiment  de  l'art. 
—  Rubens  a  créé  une  véritable  école  de  gravure  :  il 
forma  lui-même  des  graveurs,  les  dirigea,  leur  apprit  à 
s'inspirer,  avant  tout,  de  l'œuvre  qu'ils  devaient  repro- 
duire par  leur  burin,  et  à  mettre  de  la  couleur  dans  leur 
travail  ;  aussi ,  aucun  œuvre  n'a  été  mieux  gravé  que  le 
sien.  Ses  élèves,  Vosterman,  Pierre  Souteman,  Pontius, 
Bolswert,  ont  été  d*éminents  graveurs,  et  jamais  le  burin 
n'a  eu  plus  d'éclat,  ni  rencontré  plus  de  ressources.  — 
Cependant  Rembrandt  fut  un  homme  à  part;  il  illustra 
un  procédé  de  gravure  à  l'eau-forte,  qui  lui  est  particu- 
lier, et  où  il  est  resté  supérieur  à  tous  ses  imitateurs. 
Nul  n'a  mieux  compris,  m  mieux  rendu  les  oppositions 
d'ombre  et  de  lumière.  Ses  défauts  sont  la  vulgarité  Jus- 
qu'au trivial,  et  l'absence  absolue  du  sentiment  de  la 
OMiuté.  Néanmoins,  il  est  resté  le  plus  grand  coloriste  de 
l'École  flamande,  qui,  depuis  lui,  n'a  pas  prodoit  un  gra- 
veur digne  de  prendre  rang  parmi  les  maîtres. 

F.  Humbert,  Abrégé  historique  de  Vorigine  et  des  jpro- 
grès  de  la  gravure  et  des  estampes  en  bois  et  en  ttsHle- 
douce,  Berlin,  1 752,  in-8o  ;  Fonmier,  I>issertation  sur  Tort- 
gine  et  les  progrès  de  fart  de  graver  en  bois,  Paris,  1 758, 
m-8<>;  Abr.  Bosse,  Traité  de  lagravure  à  Veau-forte  et  au 
burin,  Paris,  1758  ;  Traité  de  la  gravure  en  bois  par  Pa- 
pillon, Paris,  i  760,  et  par  Jackson,  Londres^  1830  ;  Jansen, 
lEssai  sur  l'origine  de  la  gravure  en  bots  et  en  taUle-' 
douce,  Paris,  1808,  2  vol.  in-8*;  Deleschamps,  Des  mor- 
dants, des  vernis  et  des  planches  dans  fart  du  graveur, 
ou  Traité  complet  de  la  gravure,  1836,  in-S^*;  Léon  de 
Laborde,  Histoire  de  la  gravure  en  manière  noire,  1839, 
in-8®  ;  J.  Renouvier,  Des  types  et  des  manières  des  maitres 
^.graveurs,  pour  servir  à  l'histoire  de  ta  gravure,  Mont- 
pellier, 1856,  in-4*;  Passavant,  Le  peintre-graveur,  con- 
tenant Vhistoire  de  la  gravure  sur  bois,  sur  métal  et  au 
burin,  jusque  vers  la  fin  du  xvi*  siècle,  Leipzig,  1860, 
2  vol.  in-8*;  J.  Renouvier,  Histoire  de  l'origine  et  des 
progrès  de  la  gravure  dans  les  Pays-Bas  et  en  Alle- 
.magne  jusqu'à  la  fin  du  xv*  siècle,  Bruxelles,  1860,  in-8®; 
Enciclovedia  metodica  délie  belle  arit,  par  l'abbé  Pierre 
Zani,  Parme,  1819  (la  première  partie,  donnant  la  table 
des  noms  propres,  renferme  19  volumes  in-8*;  la  se- 
conde, inachevée,  présentant  la  liste  des  sqjets)  est  en 
9  vol.  ln-8*;  Kiinstler  Lexieon,  par  Nagler,  Munich, 
1835,  22  vol.  in-8»;  le  Peintre  graveur,  par  Bartsch, 
Vienne,  1818,  21  vol.  in-8»;  le  Supplément,  par  Veigel , 
1  vol.  in-8o;  le  Dictionnaire  des  Graveurs,  de  Strutt,  en 
anglais,  Londres,  1785,  2  vol.  in-4«;  le  DicHonnaire  des 
monogrammes,  par  Brulliot,  3  vol.  in-4«,  Munich,  1832- 
33-34;  le  Manuel  des  curieux  et  des  amateurs  de  l'art, 
ou  Notice  des  graveurs  et  de  leurs  principaux  ouvrages, 
Zurich,  1797-1808,  9  vol.  ln-8»,  par  Huber  et  Rost,  etc.  ; 
le  Peinire  graveur  français  y  par  M.  Robert  Duménil, 
8  vol.  in-8»,  1835-1850;  V Histoire  de  la  gravure  fran- 
çaise, de  M.  Georges  Duplessis,  ouvrage  couronné  par 
l'Académie  des  beaux-arts,  en  1861, 1  vol.  in-8<»,  etc.; 
le  Discours  historique  sur  la  gravure,  d'Émeric  David; 
les  excellents  articles  sur  l'Histoire  de  la  gravure,  pu- 
bliés par  M.  Henri  Delaborde  dans  la  Revue  des  Deux 
Mondes,  sont  précieux  à  consulter  :  conçus  à  un  point 
de  vue  élevé,  ils  abondent  en  vues  Ingénieuses  et  pro- 
fondes. B. 

CRÉAL  (Le  Saint-).  V.  Gsaal. 

GRECQUE ,  ornement  d'Architecture.  V.  Frrtb. 

oascQDB  (Église).  V.  Égusb  oascQui,  dans  notre  Dio- 
tionnaire  de  Biographie  et  d^HisUnre,  page  898,  col.  2. 

ORECQDE  (Langue),  une  des  langues  aryennes  ou  indo- 
enropéennes,  la  plus  analytique  de  toutes  celles  du 
groupe  m^dional.  Le  ré^me  dea  castes,  auquel  les 


GRE 


992 


GRE 


Anrens  d'Asie  farent  soumlB,  ayant  été  inoonna  dans  la 
Grece ,  on  en  peut  conclure  que  les  Aiyens  oui  s'établi- 
rent dans  oe  pays  n'y  trouvèrent  déjà  installées  ni  races 
iaunes,  ni  races  noires,  comme  cela  avait  eu  lieu  en  Asie. 
Issu  du  fond  védique,  mais  déjà  modifié  sur  sa  route, 
ridiome  qui  devint  plus  tard  le  grec  fut  donc  une  langue 
populah«^,la  langue  de  tous,  et  se  forma  en  quelque 
sorte  démocratiquement  par  le  travail  commun  de  tout 
un  peuple.  Les  antiques  hymnes  orphiques,  autant  qu'on 
en  peut  Juger  par  les  imitations  alexandrines,  ressem- 
blaient singulièrement  aux  hymnes  du  Véda,  et  remon- 
taient peut-être  aussi  haut  dans  le  passé.*  Mais  la  période 
épique  des  aèdes  nous  montre  une  langue  se  formant 
librement  dans  la  bouche  même  du  peuple  et  de  ses 
chanteurs.  Cette  formation  de  la  langue  grecque  con- 
traste avec  celle  du  sanscrit,  qui  fût  l'œuvre  des  brah- 
manes, c.-4-d.  de  prêtres  philosophes  et  grammairiens, 
plus  occupés  de  saijdr  rensemble  et  les  rapports  des 
choses  pour  en  tirer  une  théorie,  que  de  les  examiner 
en  partioilier  et  en  détail  pour  les  faire  tourner  ensuite 
à  leurs  usages.  Il  est  résulté  de  ces  circonstances  si  op- 
posées, que  le  sanscrit  est  devenu  une  langue  synth^ 
tique  et  le  grec  une  hmgue  éminemment  propre  à  l'ana- 
lyse; le  sanscrit  est  fait  pour  la  contemplation,  et  le  grec 
pour  l'action.  Toutefois,  encore  voisin  de  son  oriçine , 
le  grec  conserva  les  avantages  des  langues  synthétiques 
dans  sa  grammaire,  analogue  à  la  grammaire  sanscrite, 
et  dans  la  facilité  qu'il  a  de  composer  des  mots  ou  de 
les  dériver  les  uns  des  autres  ;  11  demeura  donc  tout  h  ùài 
propre  à  la  poésie,  comme  il  Tétait  à  la  science  et  aux 
affaires. 

Les  anciens  Grecs  ne  nous  ont  rien  appris  sur  l'origine 
de  leur  langue  ;  un  préjugé  invincible  élevait  dans  leur 
esprit  une  barrière  infranchissable  entre  eux  et  les  au- 
tres peuples,  ou'ils  appelaient  des  Barbares,  et  ils  n'eus- 
sent pas  imaginé  pouvoir  trouver  au  delà  des  limites  de 
la  Gieœ  la  racine  d'un  mot  grec  Platon  seul  avoue  qu'il 
fiuidrait  recomir  aux  langues  étrangères,  pour  découvrir 
les  sources  où  ses  eompatriotes  avaient  puisé  la  leur  ; 
mais  aucun  travail  de  ce  genre  ne  fut  tenté.  Hérodote 
prétend  que  les  Pélasges,  habitants  primitif^  de  la  Grèce, 
parlaient  un  idiome  spécial,  éteint  de  son  temps;  mais 
on  n'avait  fait  alors  aucune  étude  comparative  des  lan- 
gues, de  manière  à  reconnaître  les  radicaux  sous  leurs 
transformations  diverses:  et  il  n'est  pas  douteux  aijour- 
d'hui  que  l'idiome  des  Hellènes  provenait  de  la  même 
source  que  celui  des  Pélasges,  dont  il  se  distingua  seule- 
ment par  un  vocabulaire  plus  riche  et  un  mécanisme 
plus  parfkit.  -«Le  grec,  avant  d'arriver  à  l'état  sous  lequel 
nous  le  connaissons,  a  subi  de  grandes  modifications. 
Dès  les  premiers  temps  de  l'occupation  hellénique,  on 
distingua  trois  tribus  |)rincipales ,  la  tribu  éolisnne ,  la 
tribu  doriennê,  et  la  tribu  ionienne  :  de  là  trois  formes 
principales  de  U  langue  commune,  c-à-d.  trois  dialectes. 
Les  différences  qui  séparaient  ces  dialectes  furent  sans 
doute  peu  tranchées  d  abord,  à  cause  des  relations  à  peu 
près  constantes  des  peuples  grecs  entre  eux  dans  les  pre- 
miers temps  de  leur  histoire»  relations  attestées  par  les 
exploits  légendaires  de  Thésée,  d'Hercule  et  autres  héros, 
ainsi  que  par  l'expédition  des  Argonautes,  la  guerre  de 
Thèbes,  et  surtout  la  guerre  de  Troie.  Les  révolutions 
qui  suivirent  les  temps  héroïques,  les  émigrations  nom- 
breuses des  peuples  du  xu*  au  x*  siècle  av.  J.-C,  ne 
permirent  pas  à  la  langue  de  prendre  un  caractère 
d'unité ,  et,  à  l'époque  d'Homère,  c.-à-d.  vers  la  fin  du 
X*  siècle,  elle  ne  présente  pas  encore  une  parfaite  uni- 
formité t  l'ionien,  sans  doute,  domine  dans  ses  poésies  ; 
mais  d'autres  formes  en  assez  grand  nombre  y  sont  mé- 
langées, les  unes  éoliennes,  quelques  autres  doriennes, 
d'autres  dont  il  est  impossil>le  maintenant  d'assigner  le 
caractère.  Au  slède  suivant,  où  fleurit  Hésiode,  la  langue 
poétique,  la  seule  usitée  dans  les  œuvres  littéraires,  dif- 
fère peu  de  celle  de  Vlliade  et  de  VOdysséê.  Mais,  du 
n*  au  VI*  siècle,  on  voit  se  dessiner  nettement  chacun 
des  trois  dialectes  oui  Jusque-là  n'avaient  pas  en  de 
forme  bien  arrêtée  :  rionien  apparaît  plus  net  dans  Ar- 
chiloque,  Callinus,  Tyrtée,  Mimnerme,  Anacréon;  le 
dorien  semble  se  fixer  avec  Alcman  ;  Téolien  est  porté  à 
sa  perfection  par  Alcée,  Sappho,  Érinne.  Enfin,  au 
Ti*  siècle,  l'idiome  athénien,  modification  du  dialecte 
ionique,  se  montre  avec  des  caractères  bien  distincts 
dans  les  poésies  de  Selon.  Au  v*  siècle,  l'éolien  est  en 
décadence  comme  langue  littéraire,  et,  se  fondant  avec 
le  dorien,  donne  naissance  au  dialecte  éolo-dorien  des 
poésies  de  Pindare,  de  manière  toutefois  que  l'élément 
oorien  domine;  on  voit  se  fixer  la  prose  ionienne,  dont 


les  osuyres  d'Hérodote  et  d'Hippocrate  sont  les  plus  il- 
lustres'monuments,  tandis  que  la  prose  et  la  poésie  a  tti- 
Îues  sont  portées  à  leur  perfection,  l'une  par  Antiphon, 
ndocide,  Lysias  et  Thucydide,  l'autre  par  les  grands 
poètes  dramatiques.  La  suprématie  littéraire  et  intellec- 
tuelle conquise  dans  ce  siècle  par  Athènes  donne  à  sa 
langue,  désormais  fixée,  une  prépondérance  marquée  sur 
tous  les  dialectes,  dont  elle  s'est  assimila  quelques 
formes,  surtout  dans  la  poésie  ;  Téolien  semble  dispa- 
raître définitivement  de  ut  littérature  ;  l'ionien  homéri- 
que devient  de  plus  en  plus  une  langue  savante,  à 
l'usage  des  poètes,  et  qui  n'est  plus  guère  comprise  que 
dans  les  écoles  et  par  les  gens  instruits  ;  l'iomen  cesse 
peu  à  peu  de  s'écrire  Après  Démocrite  et  Ctésiaa;  la 
Grèce  a  enfin  une  langue  littéraire  uniforme,  qui  est 
celle  de  Lysias,  de  Xénophon,  de  Platon,  d'Iscorate,  et 
de  DémosUiène.  Cette  langue  se  répand  dans  tout  l'Orient 
après  les  conquêtes  d'Alexandre  le  Grand;  mais  cette 
diffusion  même  en  altéra  promptement  la  pureté;  et 
l'influence  toute-puissante  de  la  Macédoine  au  lu*  siècle 
en  Grèce,  en  Egypte  et  dans  l'Asie  occidentale,  amena 
dans  le  dialecte  attique  des  modifications  sensibles, 
contre  lesquelles  on  sut  réagir  à  Athènes  et  dans  les 
principales  écoles  des  rhéteurs  et  des  sophistes,  mais  qui 
furent  irrévocables  en  Asie,  à  Alexandrie,  et  même  dans 
certaines  parties  de  la  Grèce  européenne,  puisque  nous 
voyons  Polybe  écrire  dans  une  langue  qui  se  rapproche 
beaucoup  plus  de  l'alexandrin  oue  de  l'élégance  et  de  la 
pureté  attiques.  L'alexandrin  subsista  Jusqu'au  vu*  siècle 
de  l'ère  chrétienne  sans  subir  de  modifications  bien  re- 
marouables  :  à  cette  époque  il  est  définitivement  rem- 
placé par  le  byzantin,  qui  s'est  formé  dès  le  v*  siècle 
après  J.-C,  et  qui,  dégénérant  peu  à  peu,  devait  aboutir 
au  romalque  ou  grec  moderne,  r .  Alexandrin,  Attiqcb. 
DoBisR,  ËouBN,  lomxN,  MacÉDONiER  (Dialecte),  Byzah- 
TncB  (Langue^. 

Dans  les  plus  anciens  monuments  de  la  langue  grec- 
que (Vlliade  et  VOdy$sée)j  on  trouve  déjà  tous  les  ca- 
ractms  essentiels  qu'on  lui  voit  conserver  dans  les  temps 
postérieurs  :  une  aéclinaison  et  une  conjugaison  très- 
variées  et  très-riches;  une  syntaxe  éminemment  mrnthé- 
tique;  l'usage  très-fréquent  des  ellipses,  des  syUepses, 
des  attractions,  des  anacoluthes  ;  l'usage  habituel  de  l'in- 
version, dans  la  prose  comme  dans  les  vers.  Considérée 
au  point  de  vue  littéraire,  elle  est  poétique  et  pittoresque 
entre  toutes  les  langues,  en  même  temps  que  mdve  et 
simple.  Elle  excelle  à  exprimer,  à  l'aide  de  ses  nom- 
breuses particules,  des  nuances  fines  et  délicates  ;  ce  qui 
contribue  à  lui  donner  une  précision  que  les  autres  lan- 
gues ne  sauraient  atteindre  au  même  degré,  et  qui  fait  le 
désespoir  des  traducteurs.  Sa  syntaxe  est  d'une  merveil- 
leuse flexibilité,  image  de  la  mobilité  et  de  la  puissance 
d'imagination  des  grands  écrivains. 

L'étude  de  la  langue  grecque,  très  -  répandue  dans 
l'Orient,  où  elle  se  maintint  Jusqu'à  la  conquête  otto- 
mane, s'introduisit  à  Rome  au  ii*  siècle  avant  l'ère  chré- 
tienne ,  et  ne  tarda  pas  à  y  prendre  un  grand  dévelop- 
pement :  sous  les  empereurs  surtout ,  elle  fut  populaire 
dans  les  classes  aristocratiques,  et  il  fut  souvent  de  mode 
à  la  cour  de  parler  grec  De  Rome  elle  pénétra  dans  la 
Gaule  Cisalpine,  puis  dans  la  Transalpine,  où  elle  était 
parlée  depuis  longtemps  sur  la  c6te  S.-E.,  par  Marseille 
et  ses  colonies,  puis  enfin  dans  l'Espagne.  Elle  parait 
même  avoir  été  cultivée  à  Carthage,  puisque  Annibal 
savait  non-seulement  la  parler,  mais  récrire;  au  temps 
de  César  et  d'Auguste,  le  roi  de  Mauritanie  Juba  H  com- 
posa en  langue  grecque  une  sorte  d'Encyclopédie  âont 
nous  avons  quelques  fragments.  L'invasion  des  Barbares 
du  Nord  porta  à  l'étude  du  grec  un  coup  mortel  dans 
toutes  les  contrées  où  la  langue  n'était  pas  celle  des  peu- 
ples; quelques  écrits  d'Aristote  et  de  Galion,  traduits  en 
latin  d'après  des  traductions  arabes  des  viîi*  et  ix*  siè- 
cles, furent,  au  moyen  âge,  les  seuls  débris  connus, 
ftarmi  nous,  de  cette  lit<éra*»re,  qui  ne  reparut  dans 
'Occident  sous  sa  forme  originale  qu'à  la  fin  du  xv*  siôde. 
Cultivée  en  France  avec  ardeur  par  les  savants  du  xn*, 
et  enseignée  an  Collège  ïioyal,  elle  pénétra  dès  cette 
époque  dans  les  écoles  de  l'Université  de  Paris  et  des 
Jésiutes;  interrompue  par  les  guerres  religieuses^  cette 
étude  reprit  quelque  éclat  au  xvu*  siècle.  L'esprit  nova- 
teur du  xvm*  affecta  de  la  mépriser,  sans  s'inquiéter  de 
connaître  les  orignaux,  et  lui  fit  perdre  sa  faveur.  Res- 
taurée sous  le  I*'  Empire,  lors  de  la  constitution  de 
l'Université  actuelle,  elle  a  continué  d'occuper  dans  les 
études  secondaires  et  supérieures  la  place  importante 
Qu'elle  mârite  à  cêté  du  hitin  et  du  français.  Mais  nullâ 


r.RE 


993 


GAE 


put  elle  ii*a  été  ealtlTée  avec  autant  de  patteoce  et  d*ar- 
dnir  qa^en  Allemagne,  où  cependant  le  point  de  yue 
aa<pel  on  Tétudie  est  plutdt  critique  et  philologique  que 
vraiment  littéraire.  —  Considérée  par  rapport  à  Tutilité 
pntîqae ,  Tétude  de  la  langue  grecque  est  dans  tous  les 
pays  un  aecoors  précieux  pour  Fintelligence  prompte  et 
nette  des  nombreux  termes  de  sciences,  d^arts  et  dMn- 
dustrie  qu'on  en  a  tirés  directement  ou  que  Ton  a  com- 
posés à  Paide  d'éléments  et  de  radicaux  isolés,  que  les 
Anciens  n'ont  pu  songer  à  associer;  aussi  quelques-uns 
sont-ils  combinés  d'une  manière  plus  conforme  à  l'eu- 
phonie telle  crue  la  réclament  nos  oreilles  françaises, 
qu'aux  Yéritabies  principes  de  la  composition  des  mots 
mes.  Étndiée  plus  à  fond,  et  à  un  point  de  vue  plus 
eleré,  la  langue  grecque  nous  réYèle  le  secret  merydlleux 
d'une  alliance  intime  entre  le  naïf  et  le  sublime  (Ho- 
mère), entre  le  ton  familier  et  la  noblesse  du  stj^le 
(Platon  et  Sophocle);  elle  nous  montre  une  simplicité 
élégante  unie  au  pathétique  chez  Euripide,  la  finesse  gra- 
eieose  à  une  certaine  nudité  de  style  chez  Xénophon,  et, 
dans  1>émoathène,  tout  à  la  fois  la  gravité,  la  véhémence 
et  le  naturel.  V.  AinasMB. 

FrononciatUm  du  grec  ancUn.  —  La  prononciation  du 
grec  ancien  est  à  peu  près  inconnue;  et  celle  qu'on  a 
adoptée  dans  l'Occident,  le  Nord  et  le  Midi  de  l'Europe, 
est  arbitraire  et  barbare,  chaque  peuple  prononçant  le 
grec  d'après  les  règles  usitée»  pour  sa  propre  langue.  Au 
XV*  siède,  les  Grecs  réfugiés  de  Gonstanunople  évident 
Importé  en  Italie,  en  Allemagne  et  en  France  la  pronon- 
ciadon  usitée  de  leur  temps;  mais  des  savants  ayant 
démontré  oue  cette  prononciation  ne  pouvait,  dans  un 
gnmd  nombre  de  cas,  s'appliquer  à  la  langue  de  l'anti- 
quité, et  ne  concordait  pas  avec  les  observations  éparses 
dans  les  critiques  ou  autres  écrivains,  avec  l'orthographe 
de  certaioes  inscriptions,  ni  avec  celle  que  les  Grecs 
avaient  adoptée  pour  reproduire  dans  leur  langue  des 
mots  de  la  langue  ladne,  ni  avec  la  manière  dont  les  La- 
tins écrivaient  certains  mots  grecs  en  caractères  romains, 
elle  fut  peu  à  peu  abandonnée,  et  l'on  prit  le  parti  de 
prononcer  comme  on  fait  aujourd'hui.  Toutefois,  on  ne 
saurait  nier  que,  tout  altérée  que  doit  être,  chez  les  Grecs 
modernes,  la  prononciation  de  leurs  ancêtres,  sur  beau- 
coup de  points  ils  se  rapprochent  plus  que  nous  de  la 
▼enté.  Le  débat  entre  les  partisans  de  la  prononciation 
byzantine,  représentés  par  Renchlin,  et  ceux  de  la  pro- 
nonciation arbitraire,  représentés  par  Érasme,  roulait 
prindpalement  sur  certaines  voyelles  et  diphthongues  : 
^,  V,  i,  et,  01,  devaient-ils  se  prononcer  uniformément 
comme  t  ?  eni  se  prononçait-il  af  ou  ou,  su  «fou  017?  Telle 
est,  en  effet,  la  prononciation  des  Grecs  modernes. 

Les  consonnes  présentent  beaucoup  moins  de  difficultés 
que  les  voyelles  et  les  diphthongues  ;  et  le  système  des 
partisans  de  la  prononciation  moderne  est  plus  solide  sur 
ce  nouveau  tenrain.  Ainsi,  il  est  à  peu  près  certain  que 
B  avait  un  son  demi-aspiré  approchant  de  notre  v  :  aussi 
voiv<»n  le  mot  latin  s^rvus  écrit  en  grec  aioSoç.  Les 
lettres  0,  f ,  %  ont  dû  être  des  signes  d'aspiration  forte, 
et  sont  à  peu  pores  exactement  représentées  par  le  th  an- 
glais, notre  A  et  le  dk  allemand. 

Bibliograjiiiû,  —  Un  certain  nombre  de  Traités  gram- 
maticaux de  la  langue  grecque  nous  ont  été  laiss&  par 
les  Anciens;  on  peut  consulter  :  les  Fragments  d'Aristo- 
phane de  Byzance,  publiés  par  Nanck,  Halle,  i848^n-8*; 
•ceux  de  Philémon,  édités  par  Osann,  Berlin,  i^i;  le 
Traité  d'Apollonius  Dyscole.  Dé  constructions  orationis 
{édlu  de  Bekkec,  Berlin,  iSi7),  et  celui  De  pronomine 
nbîd.,  1813);  la  Grammaire  de  Théodose  d'Alexandrie, 
éditée  par  Gœttling,  Leîpz.,  1822,  in-8*;  et  les  Gramma- 
Hci  grwci  de  G.  Dindorf,  Leipz.,  1823,  in-8*.  Nous  avons 
aussi  des  Lexiques  par  Hésychius,  Suidas,  Photius,  et 
Zonaras;  un  Onomastioon  de  Pollux,  et  un  autre  d^Orion 
de  Thèbes.  —  Parmi  les  auteurs  modernes  de  Gram- 
maires du  grec  ancien,  nous  mentionnerons  :  Constantin 
lascaiis,  Grœnmaire  grecque^  en  f^rec,  Milan,  147G;  Aide 
Manuce,  Grammaticœ  grœcœ  instiiuliofnBSy  Venise,  1515, 
-in-4*;  Théodore  GtoA^lniroductiom  grammaticœ  lib.JV, 
Paris,  1589;  G.  Bodé,  Commentarii  linguœ  çreecœ,  Paris, 
1548,  in-fol.  ;  J.  Camerarius,  Commentarii  hnguœ  grœcœ, 
Bftie,  1551  ;  W.  Camden,  Grammaticœ  qrœcœ  institutio, 
Londres,  1501,  in-8*;  Lancelot,  Nouvelle  méthode  pour 
'  apprendre  la  langue  grecque,  dite  Grammaire  grecque 
de  Port-Boyal,  Puis,  1655,  in-8**;  Weller,  Grammatica 
■  liraca,  Leipz»^  1781  ;  J.-F.  Fischer,  Animadversiones  in 
*  Velleri  grammaticam  qrcecam,  Leipz.,  1798-1801,  4  vol. 
'  tD-è*;  G.  Hennann,  De  emendanaa  ratione  gramma- 
MctB  grœem,  Leipz-t  1S91,  in-8»;  Viger,  De  prcecipuis 


qrmcœ  Itnguœ  tdiottsmis,  4«édit.,  1834;  Maittafafe,  Greeem 
linguœ  duUecti^  édit.  de  Sturz,  Leipz.,  1807;  Ahrens,  De 
dialectis  grœcis,  Gœttineue,  1843,  2  vol.  ;  J.-L.  Bumouf, 
Méthode  pour  étudier  la  langue  grecque,  Paris,  1813,  trte- 
souyent  réimprimée;  Ph.  Buttmann,  Grammaire  greC' 
que,  en  allem.,  édit.  de  Lobeck,  Berlin,  1830-39,  2  vol.; 
Aug.  HatthisB,  Grammaire  grecque,  trad.  en  français  par 
Gail  et  Loogueville,  Paris,  1831-42, 4  vol.  in-S»;  Thiersch, 
Grammaire  grecque,  1826;  KQhner,  Grammaire  grecque, 
1835;  Rost,  Gramm(ùre  grecque,  en  allem.,  GcBttingue, 
1841,  etc.  —  Les  principaux  Dictionnaires  crées  mo- 
dernes sont  ceux  de  :  H.  Estienne,  Thésaurus  linguœ 
grœcœ,  Paris,  1572,  in-foI.,  réédité  de  nos  jours  chez 

F.  Didot;  J.  Scapula,  LeaÂcon  grœco-latinum ,  1580; 
Schrevelius,  Lexicon  manuale  grœcO'-kUinum,  L0yde, 
1045,  in-8<*  ;  llcderich,  Ijexicon  manuale  grœco-latinum 
et  latinO'grcecwn.  édit.  do  Pinzger  et  Passow,  Leipz., 
1825-1827,  3  vol.  in-8<>;  J.  Planche,  Dictionnaire  grec- 
français,  Paris,  1809,  in -S*,  amélioré  plus  tard  par 
Vendel-Ueyl  et  Pillon;  Alexandre,  Dictionnaire  fran^ 
çais-gree  et  Dictiotmaire  gi'ec- français ,  2  vol.  in-8». 
J.-G.  Schneider,  Rost,  Passow,  W.  Pape,  ont  donné  pour 
les  Allemands  des  Dictionnaires  grecs  estimés.  Benfqr 
a  publié  un  Dictionnaire  des  racines  grecques,  Ber- 
lin, 1839;  Goetttfng  a  écrit  sur  l'accentuation  grecque, 
Spitzner  sur  la  prosodie,  Leusch  sur  la  métnque.  — 
Quant  à  l'histoire  de  la  langue,  on  consultera  avec  fruit  : 

G.  Burton,  Historia  linguœ  grœcœ,  Londres,  1657,  in-8*i 
Ingewald  Elingius,  Historia  linguœ  grœcœ,  Leipz.,  1691  ; 
L.  Reinhard,  Historia  grœcœ  lingtuB  eriticoAitteraria, 
ibid.,  1728,  in-8<*  ;  Harles,  Introductio  in  historiam  linguœ 
grœcœ,  Altenbourg,  1778,  3  toI.  in-8*.  P. 

GBEGQUB  (Littérature).  Les  œuvres  littéraires  de  l'an- 
cienne Grèce,  lues  dans  l'ordre  où  elles  ont  été  compo- 
sées, nous  offrent  un  tableau  complet  et  animé  des 
doctrines  religieuses  et  philosophiques,  des  conditions  de 
la  vie  sociale  et  de  la  vie  privée,  des  relations  politiques 
des  cités  entre  elles,  de  l'histoire,  des  arts,  en  un  mot  de 
tous  les  éléments  de  la  civilisation  d'un  grand  peuple,  et 
cela  pour  une  période  qui  ne  comprend  pas  moins  de 
dix  siècles.  En  poursuivant  cette  étude  Jusque  dans  les 
siècles  oui  ont   suivi   l'introduction  du  christianisme 
en  Occiaent,  on  voit  la  littérature  grecque  renaître  au  , 
souffle  de  cette  religion  nouvelle,  produire  les  grandes  . 
œuvres  des  Pères  de  l'Église  d'Orient,  et  se  continuer  de  ' 
siècle  en  siècle  jusqu'à  nos  Jours. 

Un  fait  domine  l'histoire  de  la  littérature  hellénique, 
et  la  distingue  de  toutes  les  littératures  anciennes  et  mo- 
dernes, à  l'exception  de  celle  de  l'Inde  :  c'est  son  origi- 
nalité. Les  Grecs  n'ont  point  eu  de  maîtres  :  si,  dans  tes 
temps  les  plus  anciens,  ils  ont  eu  des  relations  de  pa- 
renté avec  les  races  aryennes  de  l'Asie  centrale,  et  s'ils 
ont  apporté  avec  eux,  dans  leurs  migrations  vers  l'ouest, 
les  chants,  la  langue  et  les  traditions  de  leurs  aïeux,  il 
n'en  est  pas  moins  certain  que,  une  fois  fixés  sur  le  sol 
hellénique,  ils  s'y  sont  développés  par  eux-mêmes,  ont 
tiré  de  leur  propre  fonds  leurs  œuvres  de  littérature  et 
d'art,  ont  créé  les  genres,  les  ont  développés  et  perfec- 
tionnés par  un  travail  qui  a  été  le  leur  et  sous  lai  seule 
inspiration  de  leur  génie.  L'originalité  et  la  perfection  de 
leurs  ouvrages  en  tout  genre  a  fait  d'eux  les  précepteurs 
et  les  modèles  des  peuples  qui  sont  venus  plus  tard. 
Ceux-ci  n'ont  donc  pu,  par  la  force  des  choses,  que  re- 
faire, dans  des  conditions  et  à  des  points  de  vue  différents, 
ce  que  les  Grecs  évident  fait  avant  eux  :  les  efforts  des 
écoles  appelées  romantiques  n'ont  pas  introduit,  dans  la 
littérature^  des  genres  nouveaux,  oes  formes  nouvelles; 
prenant,  comme  les  écoles  classiques,  les  formes  que  les 
Grecs  avaient  créées,  les  romantiques  des  différents  pays 
de  l'Europe  ont  moins  innové  dans  l'art  d'écrire  propre- 
ment dit  que  dans  l'esprit  même  auquel  ils  ont  demandé 
leurs  inspirations.  On  pourrait  même  dire  que  plusieurs 
genres  créés  par  les  Grecs  et  portés  par  eux  à  une  su- 
prême perfection  ont  été  d'abord  dénaturés  par  les  Ro- 
mains, puis  détournés  de  nouveau  de  leur  origine  et  de 
leurs  conditions  essentielles  par  les  peuples  modernes 
qui  les  avaient  reçus  de  l'Itahe;  de  sorte  que  ces  genres 
n'ont  plus  été  représentés  dans  les  temps  modernes,  et 
demeurent,  au  moins  dans  leurs  formes  complètes.  Tapa- , 
nage  de  la  Grèce  antique.  Telle  est,  par  exemple,  l'ode 
pindarique;  telles  sont  aussi,  à  bien  des  égards,  la  tra- 
gédie et  l'épopée. 

Les  œuvres  littéraires  de  la  Grèce,  et  principalement  , 
la  poésie,  plus  étroitement  liée  à  l'art  que  la  prose,  ont  v 
toi^ours,  pendant  une  période  de  huit  ou  dix  siècles, 
emprunté  à  la  religion  ses  traditions,  ses  figures  et  ses 

63 


Gne 


994 


GRE 


qrmtwles.  Il  y  a  une  alliance  constante  entre  les  lettres 
Krecques  et  la  mythologie.  La  première  condition  pour 
bien  comprendre  et  sentir  les  œurres  du  génie  grec,  c*est 
de  se  pénétrer  des  croyances  religieuses  de  ces  anciens 
temps.  Mais  il  ne  suffit  pas  ici  de  se  donner  une  teinture 
de  science  mythologi({ne,  et  de  savoir  que  Jupiter  est  flls 
de  Saturne;  il  est  indispensable  de  se  rendre  compte  de 
la  valeur  de  ces  conceptions  symboliques,  et  de  saisir 
leur  signification;  car  c'est  toujours  avec  leur  valeur 
représentative  que  les  dieux  et  les  déesses  paraissent  dans 

.la  poésie  et  dans  l'art;  les  actions  qu'ils  y  accomplissent, 
les  attributs  qu'ils  y  reçoivent,  ou  sont  consacrés  par  la 
tradition  religieuse,  ou  ne  sont  inventés  par  le  poète  et 
l'artiste  que  conformément  au  symbole  piimitifet  fonda- 
mental. Ainsi  entendue,  la  portion  mythologique  des 
œuvres  littéraires  de  la  Grèce  s'anime  d'une  vie  nouvelle, 
et  tout  l'art  antique  devient  intelligible.  Cette  union 

.  d'une  mythologie  symbolique  et  des  conceptions  du  génie 
individuel  est  si  étroite  en  Grèce,  et  en  même  temps  si 
nécessaire,  que  Ton  peut  dater  la  décadence  de  la  litté- 
rature et  des  arts,  dans  cette  contrée,  du  jour  où  les 
symboles,  perdant  leur  dgnification  et  leur  empire,  ont 
cessé  d'être  respectés  par  les  poètes  et  les  sculpteurs. 
Jusque-là,  en  effet,  dans  chaque  c^nre,  le  génie  propre 
de  cnaque  auteur  s'appliquait  moins  à  créer  des  tvçes 
nouveaux  qu'à  perfectionner,  à  polir,  à  rendre  plus  claire 
et  plus  saisissable  à  tous  l'œuvre  créée  par  ses  devan- 
ciers. Le  mouvement  général  qui  portait  l'esprit  grec  vers 
la  perfection  en  toutes  choees  se  produisait  donc  de 
mènie  dans  chaque  genre  particulier  :  il  s'agissait  moins 
de  faire  du  nouveau  que  de  faire  mieux.  C'est  ce  qui 
explique  pourquoi  la  Grèce  ancienne  a  rempli  nos  bi- 
bliothèques et  nos  musées  des  mêmes  sujets  mille  fois 
répétés.  Mais  on  doit  observer  que  le  fonds  de  la  mytho- 
logie et  de  l'histoire  héroïque  est  d'une  abondance  et 
d'une  richesse  excessives,  et  offre  des  sujets  d'une  variété 
infinie.  Lorsque  la  perfection  eut  été  atteinte  dans  chaque 
genre,  c-à-d.  lorsque  l'on  eut  fait  dire  au  symbole  tout 
ce  qu'il  contenait,  les  poètes  et  les  artistes  se  trouvèrent 
forcés  ou  de  copier  exactement  l'œuvre  des  derniers 

«  maîtres,  ou  de  dénaturer  les  types  pour  faire  du  non- 

.  veau.  On  prit  ce  dernier  parti.  Mais  c'était  là  une  rup- 
ture ouverte  avec  la  tradition;  c'était  aussi  une  dé- 
gradation véritable  de  conceptions  excellentes,  que  Ton 
changeait,  mais  qui,  ne  pouvant  plus  être  perfectionnées, 
n'étaient  modifiées  ou'à  leur  détriment.  On  peut  dater 
de  l'époque  d'Euripide,  vers  la  fin  du  v*  siècle  et  le  com- 

,  mencement  du  nr*  av.  J.-C,  cette  sorte  de  révolte  contre 
le  passé,  et  cette  tentative  d'introduire  dans  la  poésie  et 
les  arts  des  formes  nouvelles  et  un  esprit  nouveau.  Cest 
donc  pendant  la  période  qui  précède  immédiatement  ce 
poète,  et  à  laquelle  il  appartient  lui-même  en  partie, 
qu'il  faut  placer  le  point  de  maturité  et  de  perfection  des 
œuvres  du  génie  grec.  Cest  de  ce  temps  qu'il  faut  dater 
la  décadence,  lente  d'abord  et  presque  insensible,  mais 

3ui  ne  tardera  pas  à  se  précipiter.  La  fantaisie  s'intro- 
uit  alors  dans  les  conceptions  de  l'esprit  individuel  ;  on 
s'affranchit  par  degrés  de  la  tradition  ;  les  grands  genres 
s'épqlsent;  l'art  et  la  poésie  ne  sont  plus  qu'un  jeu,  et 
leurs  œuvres  des  ob)ets  de  luxe  payés  par  les  princes  et 
par  les  riches  particuliers. 

L'originalité,  Jointe  au  respect  de  la  tradition  natio- 
nale, a  fait  qu'en  Grèce  les  genres  littéraires  se  sont 
succédé  les  uns  aux  autres  dans  leur  ordre  naturel,  et 
sont  arrivés  à  leur  temps  et,  pour  ainsi  dire,  à  terme. 
C'est  la  seule  littérature  qui,  en  Occident,  présente  ce 
caractère.  En  effet,  les  peuples  oui  sont  venus  après  ont 
eu  pour  modèles,  et  tous  à  Hi  lois,  ces  ouvrages  qui  ne 
&*étaient  produits  en  Grèce  que  successivement  et  en 
vertu  d'un  développement  libre  et  spontané.  A  la  Renais- 
sance des  lettres,  soit  à  Rome  du  temps  des  Scipions, 
soit  chez  les  Modernes  à  diverses  époques,  les  lettrés  et 
les  poètes  ont  choisi  parmi  ces  modèles  ceux  qui  leur 
agréaient  le  plus,  et  les  ont  imités  sans  se  soucier  de 
l'opportunité  des  temps  ni  des  conditions  extérieures  des 
genres.  On  a  vu  à  Rome  et  chez  les  Modernes  l'épopée 
se  produire  après  les  ouvrages  du  théâtre,  et  les  poésies 
lé^rcs  naître  au  même  moment  que  l'épopée.  Il  en  est 
résulté  des  littératures  en  partie  artificielles,  et  des 
OBuvres  oui,  malgré  leur  excellence,  ne  tiennent  pas  au 
fond  des  idéee  nationales  et  couvent  n'intéressent  que  les 
hommes  instruits  ou  spéciaux.  La  popularité,  au  con- 
traire, s'attachait  en  Grèce  à  des  ouvTajges  nés  du  cœur 
même  du  peuple  et  composés  pour  lui. 

Les  Bymnêi  sont  la  première  forme  qu'ait  revêtue  la 
pensée  grecque  durant  une  période  antérieure  à  Phls- 


toire,  antérieure  même  aux  temps  héroïques,  et  dont  ii 
est  impossible  de  fixer  les  limites.  Les  noms  d*Orphée, 
de  Musée,  de  Linus,  sont  parvenus  jusqu'à  nous,  mais 
non  leurs  chants;  encore  ces  noms  sont-ils  entourés  de 
légendes  fabuleuses,  qui  font  de  ces  personnages  des 
êtres  presque  mythologiques.  Les  poésies  connues  sous 
le  nom  d'Orphiquei  n'ont  aucun  caractère  d'authenticité; 
ce  sont  des  productions  des  derniers  temps  de  la  Grèce; 
la  langue  parlée  au  temps  des  Argonautes,  dont  Orphée 
était  le  chiantre  sacré,  ne  ressemblait  certainement  que 
de  fort  loin  à  celle  des  poésies  Orphiques.  Quant  au 
fond  même  de  ces  poésies,  il  n'est  ni  pélasgique,  ni  hel-* 
lénique  ;  on  y  reconnaît  de  la  manière  la  plus  claire>  à 
oêté  de  traditions  grecques  conservées  dans  les  sanc- 
tuaires, des  idées  et  des  noms  empruntés  à  l'Orient  et 
particulièrement  à  l'Inde;  de  sorte  qu'il  est  à  peu  près 
hors  de  doute  que  les  poésies  Orphiques  ont  été  compo- 
sa en  Egypte,  et  probablement  à  Alexandrie,  à  l'époque 
où  les  enfances  de  l'Orient  et  les  idées  philosophiques 
et  religieuses  de  la  Grèce  tentaient  de  se  combiner  et  de 
s'unir.  Ces  poésies  ne  peuvent  donc  nous  donner  qu'une 
notion  très-imparfaite  et  même  fausse  de  ce  que  furent 
dans  les  plus  anciens  temps  les  chants  sacres  connus 
sous  le  nom  d'Hymnes.  C'est  d'ailleurs  que  peut  nous 
venir  sur  ce  point  quelque  lumière.  En  effet,  les  vieilles 
traditions  helléniques,  les  légendes  relatives  à  ces  poètes 
primitifs  les  rattachent  de  très-près  au  centre  asiatique 
d'où  les  populations  grecques  étaient  venues;  le  nom 
même  d'Orphée  n'a  nen  de  prec,  ainsi  que  beaucoup 
d'autres  du  même  temps,  et  il  a,  ainsi  que  plus  d'une 
légende,  son  explication  naturelle  dans  les  poésies  asia- 
tiques conservées  par  les  peuples  de  l'Inde.  Ces  poésies, 
ces  hjrmnes,  nous  en  possiédons  de  volumineux  recueils 
connus  sous  le  nom  de  Védas  {V.  c$  mot).  C'est  donc 
dans  les  chants  des  Védas,  et  plus  spécialement  du 
RiO^Véia,  qu'il  faudrait  chercher  le  type  primitif  et  ori- 
ginal des  hymnes  Orphiques.  Car  le  Véaa  n'appartient 
pas  plus  à  rOrient  qu^à  l'Occident  ;  il  est  la  source  com- 
mune des  croyances  religieuses,  de  la  poésie,  de  la 
langue,  en  un  mot  de  la  civilisation  de  l'Inde  et  de  la 
Perse,  de  la  Grèce,  de  l'Italie,  de  la  Germanie  et  des 
peuples  du  Nord  appartenant  à  notre  race.  Il  est  donc 
vraisemblable  que  les  poésies  Orphiques,  la  langue  dans 
laquelle  elles  étaient  composées,  les  circonstances  de  la 
vie  publique  ou  privée  où  elles  étaient  chantées,  se  vap- 

Srocbaient  beaucoup  de  l'étot  où  noua  les  voyons  dans  le 
fig-Wa. 

Les  Épopées  sont  venues  après  les  Hymnes.  Les  popu- 
lations helléniques  étaient  depuis  longtemps  fixé^  sur 
le  sol  de  la  Grèce,  des  Iles  et  des  rivages  de  l'Asie 
Mineure,  lorsque  les  chants  épiques  parridrent  à  la 
forme  littéraire  qu'ils  ont  dans  Homère.  Cétait  le  temps 
de  ces  royautés  féodales  entre  lesquelles  le  monde  hel- 
lénique fut  longtemps  partagé.  Chaque  coin  de  terre, 
chaque  colline  dominant  la  plaine  ou  la  mer,  avait  son 

f (rince  héréditaire,  à  la  fois  général,  administrateur, 
^slateur  et  Juge.  Les  aèdes  (  V.  ce  mot)  chantaient 
dans  les  festins  de  ces  hommes  puissants  et  riches,  les 
uns  attachés,  comme  Phémius  dans  VOdi'Ssée.  à  la  cour 
dM  princes,  d'autres  voyageant  de  ville  en  rille  et  chan- 
tant ,  la  phorminx  à  la  main ,  dans  les  assemblées  des 
hommes  et  des  femmes.  Les  sujets  de  ces  chants  inter- 
rompus étaient  d'ordinaire  empruntés  aux  légendes  hé- 
roïques de  la  Grèce,  aux  exploits  des  guerriers  de  Fàge 
précédent,  ou  même  aux  expéditions  contemporaines. 
La  grande  expédition  de  Troie,  avec  f»  antécédents  et 
ses  lointaines  conséquences,  forma  le  cvcle  épique  par 
excellence,  et  la  source  inépuisable  d'où  découla  la 
grande  épopée  des  temps  homériques.  Ce  serait  une  er- 
reur de  i^Sduire  ces  œuvres  de  la  poésie  épique  des  Grecs 
à  oe  qui  nous  est  parvenu  aous  le  nom  d'Homère  :  Ho- 
mère a  été  le  plus  grand  des  aèdes;  mais  tout  le  monde 
alors,  Achille  lui-même,  était  chantre  de  récits  hérol* 

Sues,  et  chacun  contribuait  pour  sa  part  à  l'immense 
éveloppement  que  prit  dans  cette  période  le  genre  de 
l'Épopée.  VIliaas  n^Bst  qu'un  épisode  de  la  guerre  de 
Troie;  VOdyssée  en  est  un  autre  emprunté  au  même 
cycle  héroïque.  Il  est  hors  de  doute  que  les  autres  évé- 
nements du  cycle  troyen  avaient  été  chantés  en  vers 
dans  tout  le  monde  apnec ,  et  que,  si  le  recueil  de  ces 
chanta  avait  pu  se  faire  avant  l'époque  de  Pisistrate, 
nous  posséderions  des  épopées  grecques  rivalisant  d'éten- 
due avec  celles  de  l'Inde  et  les  dressant  peut-être.  — 
Les  aèdes  épiques  n'avaient  plus  nen  de  commun  avec 
les  chantres  de  la  période  des  Hymnes  :  ceux-ci  étaient 
des  prêtres  plus  encore  que  des  poètes,  et  leurs  œuvres. 


GRE 


995 


GHE 


mnim.  ses  dans  les  familles  et  dans  les  sanctuaires,  ont 
composé  la  litur^pe  sacrée;  rien  de  semblable  pour  Ho- 
mère. Les  aèdes  de  son  temps  et  lui-môme  n'ont  au- 
cune autorité  publique  «  et  ne  psraissent  dans  les  céré- 
monies cjoe  comme  simples  psrticuliers  ;  leurs  œuvres 
sont  donc  pour  ainsi  dire  laïques ,  leur  poésie  est  libre 
et  sécularisée;  leur  génie  seul  donne  toute  leur  valeur  à 
leurs  chants.  On  retenait,  on  redisait  les  meilleurs  i 
leur  nombre  allsit  grossissant ,  et  à  la  fin,  tous  les  évé- 
nements du  grand  cycle  troyen  se  trouvant  exprimés  en 
vers  dans  la  mémoire  des  hommes,  il  fut  possible  d*en 
rassembler  les  fragments  épsrs  et  de  composer  de  véri- 
tables épopées.  Las  Rapsodes  sont  venus  presque  en 
même  temps  que  les  aèdes  ;  mais  il  y  en  a  eu  longtemps 
après  que  la  poésie  épique  se  fut  éteinte.  Cest  grâce  à 
ces  couseurs  ae  chants  que  les  œuvres  épiques  du  temps 
d'Homère  se  sont  conservées,  puisqu'il  est  à  peu  pies 
certain  qn*à  l'époque  de  ce  grand  poète  les  Grecs  ne  con- 
naissaient pss  l'écriture.  Les  Diascévastês  ou  distribu- 
teurs, qui,  au  temps  de  Pisistrate,  donnèrent  de  Vlliads 
et  de  YOdysséê  une  première  édition  complète,  ne  firent 
qae  placer  dans  leur  ordre  naturel  les  pièces  détachées 
one  lem>  fournirent  les  rapsodes.  Cette  appsrition  tar- 
oive  des  épopées  sous  une  forme  systématique  a  sou- 
levé dans  l'antiquité  deux  questions  sur  lesquelles  les 
modernes  sont  encore  partagés  :  Homère  a-t-il  existé,  ou 
ce  nom  n'est-il  qu'un  symbole,  une  personnification  du 
génie  épique?  S'il  a  existé,  est-il  également  l'auteur  de 
Viliade  et  de  YOdysséê?  Il  n'y  a  aucune  raison  sérieuse 
de  douter  qu'il  y  ait  eu  un  grand  poète  du  nom  d'Ho- 
mère, conune  il  y  a  eu  un  SOmund  pour  VEdda,  un  Vàl- 
mlki  pour  le  lAmàyana.  Biais  il  est  permis  de  croire 
qu'il  n'avait  pas  composé  les  épopées  homériques  avec 
la  forme  qu'elles  ont  ai:^ourd'hui,  puisque  cette  forme 
leur  fut  donnée  an  temps  de  Pisistrate.  On  ne  saurait 
^'appuyer  sur  l'unité  de  chacune  d'elles,  puisque  les  évé- 
nements eux-mêmes  donnent  l'unité  à  l'épopée,  et  que 
cette  unité  n'est  ou'un  cadre  d'une  grandeur  indéfinie  où 
l'on  peut  intercaler  à  volonté  les  épisodes.  C'est  ainsi 
qu'a  été  composé,  on  le  sait,  le  Mahdbhârata,  Enfin  il 
est  permis  de  croire  que  \  Iliade  et  VOdyssée  ne  sont 
Pœuvre  ni  d'un  même  Jbomme,  ni  d'un  même  temps,  ni 
d'un  même  pays.  —  Ls  langue  des  épopées  homériques 
n'est  pas  la  langue  grecque  usuelle ,  il  n'y  avait  pas  à 
cette  époque  une  langue  commune;  chaque  province  ou 
platdt  chaque  race  avait  son  dialecte,  ueux  des  cètes 
d'Asie  étaient  mieux  compris  et  plus  perfectionnés  que 
ceux  du  continent,  à  cause  de  leur  contact  Journalier 
avec  les  peuples  civilisés  de  l'Asie.  C'est  l'ionien  qui  do- 
mine dans  Homère,  principalement  dans  Ylliade;  mais 
ee  dialecte  est  loin  de  s'y  présenter  avec  la  même  pureté 
eue  dans  Hérodote,  qui  vindtcinq  siècles  plus  tard;  d'où 
Ton  pent  conclure  que  les  épopées  sont  l'œuvre  d'un 
homme  ou  de  plusieurs  hommes  ayant  ajourné  dans 
<fiverses  parties  de  la  Grèce  et  ne  parlant  plus  rigoureu- 
sement leur  langue  maternelle.  Cette  diversité  des  lieux 
et  peut-être  des  temps  se  remarque  aussi  dans  la  grande 
épopée  indienne. 

Les  épopées  homériques,  admirables  comme  œuvres 
littéraires,  ont  été  le  modèle  primitif  imité  par  les  poètes 
épiques  des  temps  postérieurs.  Mais  ce  oui  leur  donne 
une  supériorité  Incontestable,  c'est  qu'elles  n'ont  rien 
d^utillciel  dans  aocune  de  leurs  parties,  dans  aucun 
récit,  dans  aucun  tableau,  et  qu'elles  sont  l'œuvre  de  la 
nature  dans  toute  sa  spontanéité.  Elles  nous  offrent  de 
plus  un  tableau  fidèle  de  la  société  hellénique  du  temps, 
avec  ses  croyances  religieuses,  ses  symboles,  sa  vie  pri- 
vée, ses  souvenirs  guerriers,  ses  courses  aventureuses. 
tJn  puissant  intérêt  s'attache  à  leur  lecture,  parce  que , 
outre  cette  curiosité  continuellement  éveillée  en  nous  et 
i  chaque  instant  satisfaite,  elles  nous  offrent  l'expression 
naïve  et  vraie  des  sentiments  les  plus  variés  ne  notre 
natore.  Le  nombre  si  grand  des  personnages  et  des  situa- 
tions ne  laisse  endiHini  en  nous  aucun  de  nos  instincts  ; 
tous  se  développent  et  parlent  à  leur  tour,  et  cela  avec 
une  convenance  et  un  naturel  qui  n'ont  Jamais  été  snr- 


Cest  à  cette  même  période  épique  qu'appartient  Hé- 
riode,  dont  les  csuvres  ont  un  caractère  de  personnalité 
incontestable  :  sa  Théogonie  est  une  tentative  hardie  de 
systématiser  les  croyances  religieuses  de  son  temps  ; 
mais  il  ne  semble  pas  que  cette  osnvre  ait  eu  les  consé- 
quences qne  le  poâe  semblait  eo  attendre,  car  le  prin- 
cipe oppMéà  celui  cruMl  admettait  a  prévain  dans  presque 
tOQte  la  Grèce,  et  ron  a  continué  a  regarder  le  monde 
comme  Issa  d*an  principe  masculin  et  non  d'nn  principe 


femelle.  Le  fond  d'idées  contenu  dans  les  deux  poèmes 
d'Hésiode  est  peu  favorable  à  la  poésie,  et  explique  suffi- 
samment leur  brièveté. 

Un  espace  de  temps  considérable  s'écoula  entre  l'époque 
homérique  proprement  dite  et  IJapparition  des  grands 
^nres  qui  devaient  succéder  à  VÈpopée.  Une  transition 
msensible  s'opère  durant  cette  période  entre  l'état  féo- 
dal et  la  constitution  des  cités  oligarchiques  ou  démo- 
cratiques. La  poésie  se  développe  dans  des  genres  secon- 
daires sur  toute  la  surface  du  monde  grec.  En  même  temps 
que  l'on  continue  à  chanter  ces  fragments  épiques  connus 
sous  le  nom  ^Hymnes  d'Homère  et  à  célébrer  sous  cette 
même  forme  les  autres  événements  des  temps  hârolques,- 
Betours  des  héros,  Thébaides,  Héracléides,  on  voit  naltri 
l'antique  ÈlégiSf  caractérisée  par  le  vers  de  cinq  pieds 
nommé  élégos,  et  dans  lamielle  brillèrent  Callinus  et 
Tyrtée  au  vu*  siècle  av.  J.-C.  Vers  le  même  temps  flo- 
rissait  aussi  la  poésie  ïambique,  qui  fut  la  satire  des 
Grecs,  et  à  laquelle  Archiloque  a  attaché  son  nom.  La 
poésie  s'exerçait  même  dès  lors  et  dans  le  siècle  suivant 
sur  des  sujets  purement  moraux  et  philosophiques  :  Mim- 
nerme.  Selon,  Phocylide,  Théognis  sont  demeurés  célè- 
bres dans  ce  genre.  Mais  ce  sont  là  des  genres  inférieurs, 
et  qui  le  cèdent  à  l'ode  et  à  la  poésie  dramatique. 

La  poésie  lyrique  est  tout  entière  dans  VOde,  C'est  à 
Lesbos,  lie  éolienne,  que  l'ode  reçut  au  vn*  siècle  une 
forme  définitive  ;  elle  est,  comme  les  autres  genres,  une 
création  du  génie  grec,  et  rien  n'indique  qu'elle  ait  été 
conçue  à  limitation  des  chants  hébraïques,  qui  n'ont 
avec  l'ode  aucun  point  commun.  L'ode  est  née  en  Grèce 
avec  la  musique,  et  a  toujours  eu  avec  elle  une  union  in-^ 
dissoluble  ;  c'est  de  ce  rapport  étroit  qu'est  venu  à  ce 
genre  le  nom  de  poésie  lynaue,  et  les  Grecs  sont  le  seul 
peuple  littéraire  qui  ait  cultivé  la  poésie  lyrique  dans 
toute  sa  pureté.  L^ode  grecque  est  caractérisée  par  l'ab- 
sence de  vers  ;  la  mesure  y  est  remplacée  par  le  rhythme, 
et  par  ce  mot  les  Grecs  entendaient  ce  que  nous  appe- 
lons un  atr.  Il  est  aussi  impossible  de  concevoir  une  ode 
grecque  sans  musique,  qu'un  opéra  réduit  aux  paroles. 
La  pensée  lyrique  se  présentait  à  l'auteur  sous  la  double 
forme  d'une  prose  rhythmée  et  d'une  mélodie.  Telle  es* 
l'essence  de  l'ode  grecque.  L'ode  ne  fut  constituée  que 
par  l'invention  de  l'heptacorde,  qui,  donnant  tonte  la 
série  des  notes,  permit  d'exprimer  tous  les  sentiments 
dans  les  modes  musicaux  qui  leur  étaient  le  mieux  ap- 
propriés. Chaque  dialecte  eut  ses  poètes  lyriques  dans 
un  temps  où  il  n'y  avait  pas  encore  une  langue  com- 
mune; à  chaque  dialecte  correspondait  naturellement  un 
mode  musical  déterminé;  le  plus  musical  de  tous  était 
le  dialecte  dorien,  comme  le  mode  dorien  est  le  plus 
poétique  des  modes.  —  Les  Ijrriques  éoliens  se  ratta- 
chent à  Orphée  par  les  traditions  de  l'école  d'Antissa,  et 
aux  provinces  de  Phrygie  et  de  Lydie  par  la  nature  des 
modes  musicaux  dont  ils  faisaient  usaige.  Terpandre  fat 
considéré  par  les  Grecs  comme  le  père  de  la  po^e 
lyrique  ;  mais  il  appartient  à  peine  à  l'histoire.  Alcée  de 
Mitylène  mit  la  Ivre  au  service  de  la  politique  duis  un 
temps  de  discordfe,  et  de  la  volupté  dans  Vile  la  plus 
dissolue  des  rivages  d'Asie  ;  c'est  à  lui  qu'appartient  le 
rhythme  idcalque ,  si  souvent  imité  par  Horace.  Sous  la 
direction  enthousiaste  de  Sapho,  de  Lesbos,  l'école  d'An- 
tissa se  dédoubla  en  quelque  sorte;  Sapho  institua  des 
chœurs  de  leunes  filles,  dont  les  chants  lyriques  eurent 
un  écho  dans  toute  la  Grèce.  —  A  cette  époque  le  génie 
dorien  ajoutait  au  lyrisme  des  rivages  de  l'Asie  l'eu- 
rythmie et  la  sévénté  des  formes;  Alcman  à  Sparte, 
Stésichore  en  Sicile,  constituaient  le  chœur  dithyram- 
bique, créé  par  Arion ,  et  le  complétaient  par  l'épode.  ^ 
Les  Ioniens  donnèrent  ensuite  an  fond  même  de  l'ode  ce 
qui  lui  manquait  encore,  une  entière  liberté  d'allure. 
Cette  raoe  pnvil^ée  produisait  à  la  fois  le  Joyeux  et  po- 
pulaire Anacréon,  le  savant  et  mélancolioue  Simonide. 
Cest  l'époque  des  grandes  théories  musicales,  nées  sous 
l'influence  de  l'école  pythagoricienne,  et  (jui  mirent  entre 
les  mains  des  poètes  lyriques  et  dramatiques  une  puis- 
sance toute  nouvelle.  A  ce  siècle  (52(M00)  appartient  le 
plus  grand  lyrique  de  tous  les  temps,  Pindare.  L'ode 
triomphale,  créée  par  Simonide,  était  chantée  soit  en 
séance  après  les  Jeux,  soit  en  marche,  soit  même  avec 
danse  dans  la  demeure  des  vainqueurs.  Elle  a  un  carac- 
tère essentielleinent  national  et  populaire;  elle  peut  être 
écrite  dans  tons  les  dialectes,  et  chantée  sur  tous  les 
modes.  Elle  est  héroïque  et  calme,  elle  ne  procède  pas 
de  la  passion  ;  mais  eue  passe  aisément  des  événements 
ordinaires  anx  réflœdons  sublimes.  Elle  est  religieuse, 
comme  l'occasion  qui  l'a  fait  naître  :  Pindare  compose 


6RE 


996 


GRE 


dftns  les  mêmes  conditions  que  Phidias.  En  somme,  l^ode 
triompliale,  dans  sa  perfection  pindaric[ue,  est  un  ensei- 
gnement moral  appuyé  sur  les  traditions,  ajrant  pour 
motif  une  victoire  aux  grands  Jeux  de  la  Grèce,  adressé 
aux  hommes  assemblés,  et  se  fortifiant  par  le  sentiment 
musical. 

La  poésie  dranuUique  parvint  à  sa  |)erfection  pres- 
que en  même  temps  que  Tode;  la  Tragédie  vint  la  pre- 
mière; la  Comédie  se  forma  sur  son  modèle.  Cest  vers 
le  temps  de  Pisistrate  aue  le  chant  en  Thonneur  de  Bac- 
chus,  appelé  Dithyrambe  (V.  ce  mot)^  se  transforma  par 
degrés  en  tragédie,  lorsque  le  poète,  qui  récitait  ou  chan- 
tait les  aventures  du  Dieu,  admit  un  interlocuteur,  et 
mit  son  récit  en  action.  Peu  à  peu  le  dialogue  se  sé- 
para du  chant,  et  ce  dernier  constitua  le  chœur  (  V.  ce 
«not),  lequel  continua  ses  évolutions  autour  de  Tautel. 
Thespis  contribua  plus  que  les  autres  poètes  à  cette  trans- 
formation du  chant  bachique  en  tragédie;  il  n*admît 
qu*un  seul  personnage,  qu*un  seul  acteur,  lequel  était 
toujours  en  scène  pendant  la  représentation,  et  ne  se  re- 
posait que  dans  les  moments  remplis  par  les  chants  du 
chœur.  Au  temps  d*Eschyle,  on  faisait  encore  des  tra- 
gédies ayant  cette  extrême  simplicité,  offrant  des  chœurs 
très-développés,  un  dialogue  assez  court  et  une  action 
presque  nulle.  Eschyle  donna  à  la  tragédie  sa  forme 
définitive,  et  nous  avons  de  lui  la  plus  grande  œuvre 
dramatique  qui  existe,  la  trilogie  nommée  Orestie  (F.  ce 
mot),  A  cette  époque  Bacchus  avait  cessé  d'être  le 
personnage  obligé  de  la  tragédie  ;  les  sujets  étaient  d'or- 
dinaire empruntés  à  l'histoire  héroïque  de  la  Grèce,  sur- 
tout aux  landes  troyennes  et  thébaines;  mais  Eschyle 
mettait  aussi  sur  la  scène  des  sc^ets  purement  mytho- 
logiques, comme  son  Prométhée,  ou  purement  histo- 
riques et  contemporains,  comme  ses  Perses,  U  n'y  avait 
point  d'entr'actes;  les  chants  du  chœur  en  tenaient 
lieu.  Tous  les  personnages  portaient  le  masque  et  le 
cothurne,  le  premier,  parce  que  les  conditions  et  l'esprit 
de  l'art  grec  n'eussent  pas  permis  qu'un  acteur  avec  sa 
figure  représentât  Jupiter,  Minerve  ou  Agamemnon  ;  le 
second,  parce  que,  le  masque  étant  admis,  il  fallait 
rétablir  les  proportions  du  corps  de  l'acteur  en  relevant* 
sa  taille.  Ces  deux  parties  essentielles  du  costume  tra- 
gique étaient,  du  reste,  favorables  à  l'effet  général  dans 
les  immenses  théâtres  de  la  Grèce.  Le  chœur  tragique 
ne  put  parvenir  k  sa  perfection  qu'au  temps  d'Eschyle, 
lorsque  tous  les  modes  musicaux  eurent  été  réunis  dans 
une  vaste  synthèse,  et  que  les  poètes  lyriques  eurent  conçu 
cet  admirable  ensemble  mélodique  connu  sous  le  nom  de 
strophe^  antistrophe  et  épode,  —  La  tragédie  grecque 
n'a  Jamais  eu  plus  de  puissance  et  d'audace  que  dans 
Eschyle.  Sophocle  y  ajouta  cette  justesse  des  proportions, 
cette  grâce  et  cette  sensibilité  exquise,  cette  action  con- 
tinue et  progressive  qui,  sans  nuire  à  la  force  et  à  la 
simplicité,  ont  fait  de  ses  tragédies  des  modèles  pour  la 
postérité.  L'art  à  cette  époque  atteignait  en  toutes  choses 
a  sa  perfection  ;  tout  ce  qu'il  y  &^<^^  ^^  ^^^  ^°^  ^^ 
œuvres  des  précédentes  générations  disparaissait.  C'était 
ce  siècle,  ou,  pour  mieux  dire,  cette  période  de  Périclès, 
od  la  civilisation  hellénique  avait  encore  toutes  les  vertus 
du  passé,  sans  avoir  les  vices  et  les  défauto  des  temps 
postérieurs.  Pindare,  Sophocle,  Phidias,  Périclès  lui- 
même,  Hérodote,  puis  Thucydide  et  un  grand  nombre 
d'hommes  d'un  génie  supérieur  ont  forme  dans  les  arts 
et  les  lettres  à  la  fois  un  ensemble  qui  ne  se  présente 
aussi  complet  à  aucune  autre  époque  de  l'histoire.  — 
Euripide  n'est  point  un  auteur  de  décadence ,  il  est 

Îiresque  contemporain  de  Sophocle;  mais,  concevant 
'art  d'une  autre  manière,  il  y  introduisit  des  usages 
nouveaux  oui  contribuèrent  à  l'altérer  et  à  le  perdre.  La 
tradition  nW  plus  respectée  au  même  degré;  les  dieux 
et  les  héros  sont  amoindris,  pour  être  rendus  plus  hu- 
mains ;  la  dignité  du  langage  n*est  plus  observée  comme 
dans  Eschyle  et  Sophocle;  on  s'adresse  moins  à  l'intelli- 
gence du  spectateur  qu'à  ses  passions  ;  on  cherche  le 
tragique  et  le  pathétique,  au  lieu  de  ce  odme  et  de  cette 
majesté  que  les  personnages  conservaient  Jusque  dans 
leurs  violences.  Nul  auteur  tragique  ne  remue  plus  pro- 
fondément le  cœur  humain  qu'Euripide;  c'est  lui  surtout 
qui  servait  de  modèle  à  notre  Racine,  qui  a  traduit  du 
grec  quelc^es-unes  de  ses  scènes  les  plus  émouvantes. 
La  tragédie  devient  de  plus  en  plus  humaine;  mais  le 
niveau  de  l'art  s'abaisse  à  chaque  pas  qu'elle  fait  en  ce 
sens.  —  Nous  ne  citons  id  que  les  plus  grands  écri- 
vains. Mais  l'histoire  nous  a  conservé  les  noms  de  beau- 
coup d'antres,  et  nous  montre  que,  dans  la  tragédie, 
comme  dans  les  autres  parties  de  la  littérature,  le  génie 


Ca  été  d'une  extrême  fécondité.  On  fit  des  tragédies 
^temps  après  Euripide,  et  l'on  en  (Usait  encore  lorsque 
la  Grèce,  devenue  province  romaine,  n'était  plus  que 
l'ombre  d'elle-même.  Mais  la  sophistique  se  mêla  de  plus 
en  plus  à  la  tragédie  ;  les  sentiments  et  les  idées,  trop 
subtilement  analysés,  nuisirent  à  l'action  ;  les  grandes 
pensées  disparurent  avec  la  foi  religieuse  et  politique,  et 
avec  les  bonnes  mœurs;  on  peut  dire  qu'au  temps 
d'Alexandre  la  bonne  tragédie  était  morte  et  ne  devait 
pas  renaître. 

La  comédie  grecque  naquit  aussi  dans  les  fêtes  de 
Bacchus,  mais  de  cette  partie  de  la  fête  que  l'on  appelait 
comos ,  et  que  caractérisaient  les  ris,  les  chants  joyeux 
et  l'ivresse.  Il  n'y  avait  donc  aucune  tendance  possible  à 
unir  la  comédie  et  la  tragédie,  et  à  composer  ces  œuvres 
mixtes  que  les  modernes  appellent  drames.  Née  presque 
en  même  temps  que  la  tragédie ,  la  comédie  grecque  ne 
tarda  pas  à  prendre  un  caractère  politique,  et  à  devenir 
une  satire  personnelle  des  hommes  du  jour.  Telle  fut 
certainement  la  comédie  entre  les  mains  de  Cratinos  et 
d'EupoIis,  qui,  avec  Aristophane,  sont  les  poètes  de  Van- 
cienne  comédie  athénienne.  Une  licence  extrême  la  ca- 
ractérise, non-seulement  dans  la  critique  des  actions  et 
des  mœurs  des  particuliers,  mais  dans  l'invention  des 
personnages  et  des  situations;  une  fantaisie  sans  limite, 

3ue  les  romantiques  modernes  et  les  auteurs  d'opéras  et 
e  pièces  à  illusion  n'ont  pas  égalée,  anime  les  pièces 
d'Aristophane  ;  c'est  là  que  s'étale  dans  toute  sa  gaieté 
licencieuse  la  vie  exubérante  des  peuples  du  Midi.  Mais 
les  poètes  prirent  parti  dans  les  événements  politiques, 
et  le  grand  nombre  des  spectateurs  auxquels  ils  s'adres- 
saient leur  donnant  une  influence  démesurée,  le  gou- 
vernement d'Athènes  supprima,  en  l'année  404,  la  paro" 
t>ase  {V.  ce  mot),  discours  direct  du  poète  aux  spectateurs, 
et  défendit  qu'aucune  personne  vivante  fût  mise  sur  la 
scène.  Ce  décret  des  trente  tyrans  ne  tut  jamais  rap- 
porté. Sous  l'influence  de  ces  conditions  nouvelles  et  de 
la  philosophie  socratique  qui  se  développait  alors,  la  co- 
médie chercha  quelque  temps  une  voie  nouvelle,  et 
devint  à  sa  renaissance  une  critique  générale  des  mœurs 
et  des  travers  de  l'humanité  ou  de  la  société  du  temps. 
Telle  fut  déjà  la  comédie  moyenne  d'Antiphane  et  d'Alexis, 
dans  ses  incertitudes  ;  telle  fut  certainement  la  nouvelle 
comédie,  qui,  à  la  fin  du  iv*  et  au  commencement  du 
ni*  siècle,  jeta,  avec  Ménandre  et  Philémon,  le  plus  vif 
éclat.  Les  siècles  postérieurs,  soit  à  Rome,  soit  chez  les 
modernes,  imitèrent,  non  Aristophane,  qui  est  à  peine 
imitable,  mais  les  poètes  de  la  comédie  nouvelle,  grands 
peintres  de  mœurs  et  de  caractères,  sachant  faire  naître 
une  action  et  une  intrigue  des  sentimente  et  des  situa- 
tions initiales  des  personnages. 

La  prose  grecque,  avant  Alexandre,  comprend  surtout 
l'histoire,  1  éloquence  et  la  philosophie.  VHistoire, 
comme  la  poésie ,  naquit  sur  les  rivages  de  l'Asie  Mi- 
neure :  Cadmos,  Hécatée,  sont  de  Milet  ;  Hellanicbs  est 
de  Mitylène,  Hérodote  d'Halicamasse;  c'est  ce  dernier 
qui  donna  le  premier  une  forme  littéraire  à  l'histoire,  et 
qui  créa  le  genre.  Il  lui  donna  la  forme  d'une  épopée , 
prenant  pour  sujet  dominant  la  grande  lutte  de  la  Grèce 
et  de  la  Perse  qui  dépassa  de  beaucoup  la  guerre  de 
Troie,  et  amenant  les  histoires  particulières  des  peuples 
de  Grèce  et  d'Asie  jusqu'au  moment  où  Ils  se  trouvent 
partagés  entre  les  deux  camps.  Cette  forme  donnée  à 
l'histoire  est  moins  humaine,  moins  politique  que  la 
forme  chronologique;  mais  elle  est  certainement  plus 
grandiose  et  plus  littéraire;  elle  fait  d'un  livre  d'histoire 
une  véritable  œuvre  d'art;  ;  celle  d'Hérodote  est,  du  reste, 
sous  l'invocation  des  neuf  Muses,  et  elle  fut  présentée 
aux  Grecs  dans  le  grand  concours  des  arts  et  de  la  po<teie, 
aux  jeux  Olympiques.  Cette  forme  était  parfaitement 
appropriée  aux  événements  qu'elle  revêtaJt,  lesquels 
n  ont  rien  de  politique  et  sont  les  péripéties  d'une  lutte 
internationale,  d'une  guerre  des  deux  mondes.  L'his- 
toire grecque  se  présente  tout  d'abord  avec  le  caractère 
de  véracité  qui  4a  distingue  des  œuvres  d'imagination; 
les  accusations  longtemps  portées  contre  la  bonne  foi 
d'Hérodote  tombent  tour  à  tour  devant  les  découvertes 
modernes.  —  Les  faits  qui  suivirent  la  guerre  médlqoe 
sont  d'une  nature  politique  ;  la  guerre  du  Péloponèse  a 
ce  caractère,  puisqu'il  s'agissait  là  d'un  conflit  entre 
deux  constitutions,  l'oligarchie  de  Sparte  et  la  démo- 
cratie d'Athène.  L'histoire  qui  la  raconte  est  une  his- 
toire politique;  les  récits  ae  Tliucydide  ne  sont  plus 
groupes  sous  une  forme  poétique;  ils  se  développent  sui- 
vant l'ordre  des  années  et  des  fiiits ,  comme  un  drame 
où  les  acteurs  sont  des  hommes  réels^  et  où  les  soènet 


GRE 


9  ri 


r.RE 


pncMeftt  des  caractères  de  chacun  deux  et  des  condi- 
tions générales  où  ils  sont  placés.  L*œuvre  de  Thucydide 
n*a  été  égalée  par  aucun  historien  des  temps  postérieurs  ; 
car  Jamais  des  formes  oligarchiques  et  démocratiques 
aussi  pures  ii*ont  été  aux  prises,  et  n*ont  trouvé  un 
homme  qui  ait  su  les  approfondir  et  en  exposer  la  lutte 
avec  autant  de  génie  que  Tliucydide.  Cet  auteur  marque 
le  point  de  perfection  de  Thistoire  chez  les  Grecs.  — 
Xénopbon,  qui  le  conUnue,  est  loin  de  régaler  :  This- 
toire  entre  ses  mains  est  ou  une  simple  narration,  à  la 
férité  fort  intéressante,  ou  des  mémoires,  ou  des  récits 
mêlés  de  fantaisie  et  destinés  à  soutenir  un  système  de 
philosophie  politique.  —  Nous  n'avons  aucun  des  ou- 
vrages historiques  composés  dans  le  iv*  siède,  et  qui 
faisaient  suite  à  Thucvoide  et  à  Xénophon.  ^histoire  du 
genre  ne  peut  être  faite  pour  cette  période  que  par  con- 
jecture :  Ctésias,  Théopompe,  Éphore  ne  nous  sont  con- 
nus que  par  des  citations  et  des  témoigna^  ;  Tesprit 
de  l*histoire  se  perd  durant  ce  siècle ,  la  fantaisie  se  mêle 
à  la  réalité.  11  faut  descendre  Jusqu'à  Polybe.  Mais  ici 
inûstoire  change  de  caractère  et  de  matière.  Rome  a  con- 
quis une  grande  partie  de  l'ancien  monde  ;  c'est  à  dé- 
mêler les  causes  et  les  procédés  de  cet  agrandissement 
que  rhistoire  s'applique  ;  elle  devient  donc  plus  générale 
et  en  quelque  façon  j>lus  philosophique  et  plus  instruc- 
tive pour  les  races  futures  :  la  vârité  a  repris  tous  ses 
droits  ;  elle  exige  de  l'écrivain  le  savoir,  la  pratique  des 
aflaîres,  la  clarté  des  déductions ,  la  Justesse  des  Juge- 
ments et  leur  impartialité.  Polybe  est  demeuré  dans  ce 
genre  le  modèle  des  historiens  modernes  ;  mais  il  est 
moins  politique  que  Thucydide.  —  U  y  a  une  grande 
décadence  de  ce  genre  de  Polybe  à  Denys  d'Halicamasse 
et  à  Diodore  de  Sicile.  A  cette  époque  les  Grecs  étaient 
répandus  sur  toute  la  surface  du  monde  romain.  —  Plu- 
tarqne,  au  l*'  siècle  de  notre  ère,  écrivait  en  grec  dans  un 
genre  qu'il  semble  avoir  orée ,  la  biographie.  Les  Vies 
aes  hommes  illustres  sont  en  histoire  ce  qu'en  peinture 
est  le  genre  du  portrait;  c'est  l'histoire  réduite  à  ses  plus 
petites  proportions.  Il  u*y  a  point  d'art  dans  les  Vies  de 
Plutarque  ;  l'histoire  mente  à  peine  sous  cette  forme  de 
compter  dans  la  littérature;  elle  est  à  la  portée  des  moins 
hahUes;  c'est  l'extrême  décadence  du  genre  inauguré  par 
Hérodote.  Cependant  l'on  continua  toujours  à  écrire  l'his- 
toire en  langue  grecque  sous  l'Empire  romain  et  à  Con- 
stantinopie;  et  c'est,  de  toutes  les  formes  littéraires^  celle 
qui  a  montré  le  plus  de  persistance. 

UÊloQuencê  grôcqne  a  deux  grandes  époques,  Péridès 
et  Démosthène.  Cest  de  tous  les  genres  littéraires  celui 
qui  appartient  le  plus  évidemment  aux  temps  histori- 
ques; en  Grèce  elle  est  née  avec  eux ,  elle  a  grandi  avec 
rart  oratoire;  elle  s'est  montrée  essentiellement  poli- 
tique ou  judiciaire;  les  Grecs  n'ont  point  connu  l'élo- 
quence sacrée,  parce  ou'il  n'y  avait  pas  en  Grèce  d'ensei- 
gnement religieux  ni  de  chaires.  L'éloquence  grecque 
est  liée  avec  la  démocratie,  et  c'est  dans  Athènes  que 
Tune  et   l'antre  atteignent  tout  leur  développement. 
L'nnité  monarchique  de  Philippe  et  d'Alexandre  met  fin 
k  réloquence.  —  Thémistocle  peut  être  regardé  comme 
le  premier  orateur  qui  ait  paru  en  Grèce;  en  lui  se  per- 
sonnifia l'esprit  athénien;  après  la  guerre  médique,  il  fut 
déclaré  que,  par  l'art  de  la  parole,  il  avait  sauvé  la  na- 
tion. Perfectionnée  rapidement  pendant  ce  siècle,  l'élo- 
quence parvient  à  sa  plus  haute  expression  dans  la  per- 
sonne de  Péridès,   dont  la  parole  gouverna  Athènes 
pendant  quarante  ans.  Cest  l'éloquence  sans  passion , 
sans  gestes,  sans  action  apparente,  forte  d'idées,  maî- 
tresse d'elle-même,  impersonnelle,  sans  artifices,  bdle 
et  calme  oomme  une  statue  de  Phidias.  Deux  fléaux 
cbanoent  alors  l'esprit  public,  la  peste  nui  démoralise 
la  viUe,  la  guerre  aérienne  oui  n'avait  plus  le  génie  de 
Péridès  pour  la  diriger.  La  oémagogie  est  maltresse  de 
la  place  publique;  elle  est  armée  de  tous  les  moyens 
fomnls  par  la  sophistique  et  la  rhétorique  ;  Cléon,  Alci- 
biade  du  cM  des  démocrates,  Antiphon  à  la  ville,  Phry- 
nidios  à  l'armée  du  cèté  de  l'olig^u^chie,  soulèvent  des 
tempêtes  et  détournent  l'éloquence  de  son  but  légitime  ; 
c'est  le  règne  de  la  terreur  et  de  la  violence.  La  victoire 
de  Lysanore  et  l'établissement  des  Trente  et  des  har- 
moales  rendirent  silendeuses  toutes  les  tribunes  en 
Grèce.  Quand  on  fut  sorti  de  cet  état  violent,  on  vit 
Bsltre  râoqaence  de  cabinet  :  Lysias,  qui  la  représente, 
fat  os  onteur  judiciaire  ;  mais  comme  il  n'y  avait  dans 
Athèoes  ni  avocats ,  ni  ministère  public ,  il  ne  parut 
qn'ooe  tàiê  an  tribunal ,  et  tons  ses  discours  ont  été 
composés  pour  d'autres  personnes  et  prononcés  par 
UkL  Cett  Je  plus  pur  attidsme  qui  s'y  fait  remarquer; 


les  règles  de  la  rhétorique  y  sont  scrupuleusement  sui» 
vies.  —  Le  professeur  Isocrate  n'a  jamais  prononcé  un 
discours;  il  a  écrit  pour  d'autres,  comme  Lysias;  il  a 
aussi  composé  des  plaidoyers  pour  des  personnages  hé- 
roiques  ou  pour  des  causes  imaginaires.  Cependant  il 
était  regardé  comme  le  plus  grand  orateur  de  son  temps  { 
il  est  donc  évident  pour  nous  qu'à  cette  époque  élo- 
quence et  rhétorique  étaient  confondues.  Les  trois  grandes 
œuvres  oratoires  d'Isocrate  ne  sont  pas  des  discours  et 
n'auraient  pu  être  prononcées;  ce  sont  des  brochures  ou 
pamphlets  politiques.  —  La  grande  éloquence  se  ranima 
sur  les  questions  du  temps  :  la  plus  importante ,  celle 
que  les  guerres  médiques  avaient  soulevée,  qu'avaient 
élaborée  les  Dix-mille  et  Agésilas,  était  la  question  de 
Perse  ou  d'Orient.  Elle  se  compliqua,  vers  le  milieu  du 
IV*  siècle ,  de  la  question  du  Mord  ou  de  Macédoine.  Les 
projets  de  Philippe  partagèrent  les  orateurs  en  deux 
camps:  d'une  part  Isocrate,  Eubule,  Eschine,  usant  d'ha- 
bileté et  de  sophismes;  de  l'autre  Lycurgue,  Hypéride, 
Hégésippe,  Démostliène,  s'appuyant  sur  le  sentiment  de 
l'indépendance  nationale  et  luttant  contre  Philippe  avec 
une  âoquence  qui  croissait  comme  le  danger.  La  dé- 
faite de  Chéronée  et  le  triomphe  de  la  Macédoine  mirent 
fin  à  l'éloquence  grecque,  à  la  démocratie  et  à  l'indé- 
pendance. 

La  Philosophie  produisit  le  dernier  venu  des  genres  lit- 
téraires de  la  Grèce.  Elle  parla  d'abord  en  vers,  au  temps 
où,  se  confondant  avec  les  sciences  particuli^ies,  eUe 
cherchait  elle-même  sa  voie.  BAais  l'enseignement  socra- 
tique chaneea  ses  habitudes,  et  lui  fit  adopter  la  prose 
comme  sa  langue  naturelle;  toutefois,  avant  Socrate, 
les  derniers  philosophes  des  aViciennes  écoles,  Heraclite, 
Anaxagore,  avaient  composé  des  traités  en  prose,  dont  il 
reste  des  fragments.  A  cette  même  époque  écrivait  Hip> 
pocrate,  que  l'on  peut  nommer  le  philosophe  de  la  mé^ 
decine,  et  qui  fit  dans  cet  art  une  réforme  analogue  à 
celle  de  Soarate  dans  la  philosophie.  De  l'école  de  Socrate 
sortit  toute  une  phalange  d'écrivains  philosophes,  dont 
les  plus  illustres  ont  été  Xénophon  et  Platon.  La  vie 
aventureuse  du  premier  ne  lui  donna  pas  le  loisir  de  se 
livrer  tout  entier  à  la  composition  d'ouvrages  purement 
philosophiques;  cependant  plusieurs  de  ses  écrits  en  ce 
genre  sont  demeurés  célèbres,  et  offrent  cette  clarté  de 
style  et  cet  agrément  dans  la  forme  qui  sont  le  caractère 
de  cette  école.  Platon,  l'un  des  plus  féconds  écrivains  de 
la  Grèce,  adopta,  pour  exposer  ses  idées  philosophiques, 
la  forme  du  dialogue,  empruntée  au  thé&tre,  et  mit  en 
scène  dans  ses  écrits  les  hommes  les  plus  distingués  de 
son  temps.  Il* n'y  a  pas  moins  d'art  dans  la  composition 
de  ces  dialogues  que  dans  les  comédies  du  temps.  Quelque 
grave  que  soit  le  sujet,  il  y  s  un  charme  infini  dans  ces 
ouvrages ,  et  ce  charme  vient  uniquement  de  la  forme 
dont  l'art  grec,  qui  vit  tout  entier  dans  Platon,  a  su  les 
revêtir.  Les  dialogues  de  Platon  ont  servi  de  modèles  à 
un  grand  nombre  d'écrivains  philosophes,  soit  à  Rome, 
soit  chez  les  modernes;  mais  nul  d'entre  eux  n'a  pu  les 
égaler  ;  car  cette  forme  du  dialogue  n'est  admissible  qu'à 
la  condition  que  les  interlocuteurs  ne  soient  pas  des  per* 
sonnages  abstraits,  et  qu'ils  aient  autant  de  réalité  que 
ceux  de  la  scène.  —  L'œuvre  de  Platon  est  d'une  diver- 
sité infinie;  celle  d'Aristote,  son  disciple  et  son  rival, 
l'est  également.  Mais  les  écrits  d'Aristote  se  présentent 
sous  la  forme  de  traités,  sous  la  forme  didactique,  la- 
queUe  est  beaucoup  moins  littéraire  que  celle  du  dia* 
logue.  Si  le  style  des  œuvres  d'Aristote  était  bien  celui 
de  la  littérature  philosophique  de  son  temps,  la  chuta 
que  ce  genre  aurait  faite  ne  serait  pas  moins  profonde 
que  rapide;  mais  on  a  lieu  de  croire  que  ce  philosophe 
avait  rédigé  fort  peu  d'écrits ,  et  que  ceux  qui  nous  sont 
venus  sous  son  nom  n'étaient  que  des  notes  du  profes- 
seur et  peut-être  même  de  ses  élèves.  —  Son  successeur 
fut  Théophraste,  plus  célèbre  comme  botaniste  que 
comme  philosophe  ;  il  est  difficile  de  juger  de  la  valeur  de 
ses  écrits  d'après  les  CarMtères  qui. nous  restent  de  lui; 
car  ce  ne  sont  que  des  fragments  épars  d'un  grand  ou* 
vrage  perdu  ;  il  y  a  dans  ces  morceaux  plus  de  verve  que 
d'art  ;  ils  ont  eu  le  mérite  d'être  le  point  de  départ  de 
La  Bruyère.  —  A  partir  de  cette  époque  les  écoles  phi« 
losophioues  ont  suoordonné  la  théorie  à  la  pratique,  et 
ont  proauit  un  assez  grand  nombre  de  traita  de  morale, 
presque  entièrement  perdus.  Épicure,  Zenon,  Qéanthe^ 
ont  été  les  modèles  imités  par  les  philosophes  latins. 
Après  eux  la  Grèce  n'a  pas  cessé  de  produire  des  écrits 
philosophiques;  mais,  sprès  le  règne  d'Alexandre,  un 
esprit  nouveau  se  mêle  a  toutes  ses  productious  ;  c*wt 
l'esprit  oriental.  (  V,  A^jbjjmbue  —  Ëoole  d'«) 


GHB 


998 


GRE 


H  nous  reste  à  dire  quelques  mots  d*un  genre  secon- 
daire qui  a  Jeté  en  Grèce  un  certain  éclat.  La  littérature 
sicilienne  a  produit  Vldylle,  dont  les  formes,  dans  Théo- 
crite  même  qui  en  est  le  créateur,  itont  d*une  Yariété 
très-grande.  Quoiaue  venue  dans  un  temps  de  déca- 
dence et  lorsque  les  idées  de  TOrient  transformaient 
déjà  les  lettres  grecques,  Tidylle,  dans  Théocrite,  a  le 
charme  et  la  gr&ce  d'un  tableau  de  çenre,  d*un  vase  bien 
dselé,  ou  d*un  bas-relief  de  petites  dimensions,  mais  d*un 
travail  fini.  Bien  et  Moschos ,  ses  successeurs,  n*ont  rien 
i^outé  aux  qualités  du  genre,  et  le  petit  recueil  de  Théo- 
crite, bien  supérieur  aux  Éçlogues  de  Virgile ,  demeure 
encore  le  modèle  de  la  poésie  pastorale  et  bucolique. 

Le  génie  grec  était  alors  dispersé  dans  tout  le  monde 
tntique  ;  il  avait  ses  centres  partout,  principalement  à 
Alexandrie.  Là  se  donnaient  rendez-vous  toutes  les  idées, 
toutes  les  doctrines,  toutes  les  religions,  toutes  les  lan- 
gues. La  critique  et  Térudition  naquirent  dans  cette  ville, 
où  les  Ptolémées  s*en  firent  les  protecteurs  et  les  propa- 
«iteurs.  Le  Musée ,  inspiré  par  Démélrius  de  Phalèrê  à 
Ptolémée  Soter,  vers  Tan  306,  réunit  des  savants  et  des 
professeurs  de  tout  ordre.  La  flatterie  inspira  à  des  poètes 
des  œuvres  de  nulle  valeur,  comme  les  anagrammes  à 
Lycophron,  les  apothéoses  de  princes  vivants  à  Calli- 
maque.  Le  poème  des  Argonautiques,  qui  est  une  œuvre 
d*érudition,  et  non  une  épopée,  donne  la  mesure  de  ce 
qui  86  produisait  alors  en  poésie. 

Il  faut  fhmchir  le  commencement  de  Tére  chrétienne 
pour  trouver  encore  de  véritables  écrivains  grecs,  liais 
dès  lors  un  monde  nouveau  commence  à  naître  :  c*est 
Rome  avec  sa  puissante  organisation ,  c'est  l'Inde  et  la 
Perse  avec  leur  panthéisme  symbolique,  c'est  la  Judée, 
la  Phénicie  et  l'Égvpte,  et  bientôt  c'est  le  christianisme, 
qui ,  luttant  avec  les  idées  grecques  proprement  dites, 
ou  leur  donnant  par  le  mélange  une  nouvelle  fécondité, 
suscitent  dans  un  monde  décrépit  des  tentatives  litté- 
raires animées  d'un  esprit  nouveau.  F.  Byzantine. 

V.  Fàbricius ,  Bibliotheca  grmca ,  s$u  notUia  xcrtpto- 
fum  veterum  grmcorum,  4705-28, 14  vol.  în-4%  ouvrage 
réédité,  mais  sans  avoir  été  achevé,  par  Harless,  Ham- 
bourg, 1790-1809, 13  vol.  in-S*";  Schœll,  Histoire  de  la 
liitértUure  grecque  profane,  Paris,  1813-1825,  8  vol. 
in-8<»;  C-O.  MQller,  Histoire  de  la  littérature  grecque 
jusqu'au  siècle  d*Alexandref  en  allem.,  Breslau,  1841, 
2  vol.  in-8»;  Bernhardy,  Esquisse  âje  la  littérature 
grecquk»,  en  allem..  Halle,  1838-1845,  2  vol.  in-8»;  Bode, 
aistoire  de  la  poésie  grecque,  en  allem.,  Leipzig,  1838- 
1840,  5  voL  in-e*;  A.  Pierron,  Histoire  die  la  littérature 
arecque,  1850,  in-12;  Munk,  Histoire  critique  de  la 
langue  et  de  la  littérature  de  Vancienne  Grèce,  en  an- 
imais, Londres,  1850;  C-O.  MOller,  G. -G.  Lewis  et  D'  Do- 
naldson.  Histoire  de  la  littérature  de  l'ancienne  Grèce^ 
en  anglais,  1858,  8  vol.  in-8<».  Ev.  B. 

GRECQUB  (Philosophie).  La  philosophie  grecque  com- 
mence environ  600  ans  av.  I.-G,,  et  finit  dans  le  vi*  siècle 
de  notre  ère.  Antérieurement  on  avait  eu  les  Sentences 
des  Gnomiques,  mais  sans  aucun  caractère  spéculatif. 
Dans  son  développement  de  1200  ans,  la  philosophie 
grecque  se  divise  en  trois  grandes  périodes  :  1*  depuis 
Thaïes  jusqu'à  Socrate;  2«  depuis  Socrate  Jusqu'à  l'école 
d'Alexandrie;  3^  la  philosophie  néoplatonicienne.  La  jpre- 
mière  période  s'ouvre  avec  les  écoles  Ionienne  et  Italtque, 
Les  Ioniens  ont  pour  chef  Thaïes  de  Milet;  après  lui  on 
dte  Anaximandre,  Anaximène,  et  d'autres  moins  célè- 
bres. Le  principal  caractère  de  cette  école  est  d'avoir 
conçu  le  premier  prindpe  uniquement  comme  matériel , 
sans  tenir  aucun  compte  des  choses  incorporelles,  et  de 
n'avoir  pas  déterminé  le  principe  du  mouvement.  Ne 
s'attachant  qu'aux  phénomènes,  elle  n'admettait  que 
l'évidence  donnée  par  les  sens,  et  conduisait  au  fatalisme 
(y.  loNiBNHB  —  École).  Anaxagore  se  distingue  des  phi- 
losophes précédents  en  ce  qu'il  introduit  l'intelligence 
comme  principe  d'ordre,  sans  toutefois  ôter  à  l'école  son 
caractère  sensualiste.  L'école  italique,  au  contraire,  au 
lieu  de  s'arrêter  aux  phénomènes,  ne  considère  que  leurs 
rapports;  de  là  son  double  caractère  mathématique  et 
astro'nomique.  Aussi  fut-elle  entièrement  spiritualiste. 
Pour  elle  les  nombres  étaient  les  principes  des  choses, 
c.-à-d.  des  causes.  D  est  probable,  car  il  ne  reste  rien 
des  premiers  philosophes  de  l'école,  qu'en  disant  que  le 
monde  s'était  formé  à  l'imitation  des  nombres,  les  Pytha- 
goriciens voulaient  dire  que  tout  est  sorti  de  la  substance 
primitive  comme  les  nombres  naissent  de  l'unité  en 
s'i^oatant  sans  cesse  à  elle-même.  Dieu  étant  l'unité,  la 
pearfectiott  consiste  à  s*en  rapproche^;  aussi  l'àme  est  un 
nombre,  elle  est  immortelle  et  soumise  à  la  métempsy- 


cose. L'école  d'Italie  est  de  beaucoup  supérieure  à  celle 
d'Ionie  par  sa  manière  d'expliquer  le  système  du  monde 
(elle  admettait  que  le  soleil  est  fixe  au  milieu  des  pla- 
nètes), et  par  sa  morale,  qui  suppose  une  sanction  après 
cette  vie(K.  PyruAGoaiGiBivnE — Ecole).  Elle  eut  pour  fon- 
dateur Pythagore;  les  plus  renommés  après  lui  furent 
Empédode,  qui ,  le  premier,  admit  plusieurs  éléments  ; 
Épicharme;  Archytas  de  Tarente,  célèbre  comme  mathé- 
matiden.  Gette  école  trouva  son  dernier  développement 
dans  celle  d'Élée;  en  effet,  Xénophane,  et  surtout  Par- 
ménide  et  Zenon  d'Élée,  en  vinrent  à  nier  toute  réalité 
matérielle,  toute  variété,  et  à  ne  plus  admettre  que  l'unité 
absolue  (k.  Él^tiqub  —  École).  Cet  excès,  opposé  à 
celui  des  Ioniens  qui  n'admetudent  que  la  pluralité, 
donna  naissance  à  une  secte  qui  fut  celle  des  Sophistes 
{V,ce  mot),  Geux-ci,  prenant  les  systèmes,  démêlant 
avec  sagacité  leurs  côtés  négatifs  et  leurs  endroits  faibles, 
les  opposant  l'un  à  l'autre,  arrivèrent  par  la  confusion  et 
la  contradiction  à  une  sorte  de  négation  universelle.  Une 
des  conséquences  de  ce  procédé  était  de  porter  atteinte  à 
la  morale;  la  philosophie  était  menacée  dans  son  avenir, 
il  lui  fallait  un  sauveur;  ce  fut  Socrate. 

Avec  lui  commence  la  deuxième  période.  Il  détourna 
les  esprits  des  hypothèses  phvsiques  et  astronomiques, 
matérialistes  et  idéalistes  de  l'ftge  précédent.  Il  assigna 
pour  point  de  départ  à  la  philosophie  la  connaissance  de 
soi-même  ;  de  là  le  caractère  essentidlement  moral  et 
humain  de  sa  doctrine.  Il  fut  le  premier  moraliste,  en  ce 
sens  que,  le  premier,  il  enseigna  une  moralité  qui  con- 
siste à  faire  son  devoir  pour  le  devoir.  Enfin  A  donna 
une  méthode  à  la  philosophie,  et  prépara  ainsi  son  bril- 
lant avenir.  On  vu  naître  après  Im  plusieurs  écoles  : 
cdle  de  Mégare,  qui  se  borna  à  déterminer  le  bien  en 
général ,  et  à  montrer  que  le  fini  ne  pouvait  être  le  vrai; 
cdle  de  Cjrrène,  qui  se  rattache  à  l'épicuréisme,  et  celle 
des  Cyniques,  qui  alla  se  fondre  dans  celle  du  Portique 
{V.  MéGARiENNE,  CyrénaIque,  Ctnique).  Mals  les  véri- 
tables écoles  socratiques  furent  celles  de  Platon  et  d'Aris- 
tote.  Platon,  fondateur  de  l'Académie,  embrassa  à  la 
fois  la  dialectique,  la  physique  et  la  morale,  en  s'atta- 
chant  surtout  aux  données  de  la  raison.  Les  notions  par- 
ticulières ne  sont  pour  lui  qu'un  point  de  départ  d'où  il 
s'élève,  par  la  dialectique  Jusqu'aux  idées  en  elles-mêmes, 
types  éternds  dont  la  réalité  en  ce  monde  n'est  qu'une 
infidèle  image.  Ces  tdées  ont  leur  raison  d'être  en  Dieu, 
en  sorte  que  Platon  considère  la  philosophie  comme  la 
connaissance  des  choses  quant  à  leur  notion  essentielle, 
c-à-d.  (niant  à  leur  véritaole  existence  en  Dieu ,  comme 
dans  l'onjet  infini  et  universel  des  conceptions  de  la 
raison.  Au  contraire,  les  notions  que  nous  avons  des 
choses  d'après  la  perception  sensible  et  les  simples  phé- 
nomènes de  l'expérience  sont  des  notions  trompeuses. 
Cette  théorie,  appuyée  sur  la  réminiscence  (V.  ce  mot), 
supposait  une  vie  antérieure  où  l'àme  avait  vu  de  plus 
près  ces  exemplaires  en  Dieu.  Comme  pour  Socrate,  Dieu 
est  une  Providence,  organisateur  et  roi  du  monde;  mais 
Pjaton  ne  va  pas  Jusqu'à  l'unité  absolue  des  Éléates.  S'il 
est  moins  hardi  sous  ce  rapport,  il  est  plus  moral  ;  il  in- 
troduit dans  la  philosophie  grecque  des  idées  qui  ont  fait 
dire  à  S^  Augustin  :  «  Si  Platon  et  ses  amis  revendent  au 
monde,  ils  n'auraient  à  changer  que  bien  peu  de  chose  à 
leur  doctrine  pour  être  chréaens  »  {V.  Platonicieniib  — 
École).  Platon  n'est  pas  idéaliste;  mais  ses  successeurs 
immédiats  Speudppe,  Xénocrate,  Polémon,  Gratès  et 
Cranter  conduisent  l'Académie  à  l'idéalisme  et  au  pytha- 
gorisme.  Après  eux,  Arcésilas,  développant  les  germes  de 
sceptidsme  cachés  dans  la  doctrine  platonicienne,  fonda 
la  Moyenne  Accuiémie,  dont  le  principe  était  que  la  vé« 
rite  ne  doit  être  considérée  que  comme  une  simple  con- 
viction personndle,  une  vraisemblance,  en  sorte  que 
l'homme  est  pour  ainsi  dire  condamné  à  ne  rien  savoir. 
Carnéade,  en  mitigeant  un  peu  cette  proposition,  pré- 
tendit qu'il  n'y  a  aucun  critérium  de  la  venté  ;  la  pensée, 
modifiant  l'objet,  ne  le  laisse  pas  arriver  Jusqu'à  nous 
tel  qu'il  esL  Carnéade  fût  le  chef  de  la  Nouvelle  Acek- 
demie.  On  en  compte  une  quatrième,  sous  la  condT:dte 
de  Clitomaque,-  qui  proclama  hautement  l'impuissance  de 
rien  comprendre.  Bientôt  après,  sons  Philon  et  Antio- 
dius,  elle  revint  au  dogmatisme  (V.  AcAoéifiB). 

Avec  Maton ,  la  philosophie  grecque  avait  fût  dim- 
menses  progrès,  surtout  au  point  de  vue  moral  ;  il  en  ftit 
de  même  avec  le  fondateur  du  Lycée,  sous  le  rapport 
sdentifique.  Si  Aristote  est  un  grand  métaphysiden,  il 
est  aussi  un  grand  physicien  ;  avec  lui  l'esprit  humain 
trouve  et  formule  les  lois  du  raisonnement  déductif.  Il 
en  est  de  même  de  la  poétique  de  l'éloquence  et  de  la 


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GRE 


poUtkme.  AToe  loi  la  philosophie  devient  réellemeiil  la 
sdoQoe  des  canaes  et  des  premiers  principes.  L*îdée  quil 
B*est  faite  de  la  philosophie  suffit  pour  montrer  qu'il 
n'est  pas  aensualiste.  Elle  est  surtout  la  science  de  res- 
sence,  la  oonnaiasance  du  but  ou  de  la  fin ,  et  ce  but, 
c'est  le  meilleur  en  chaque  choee  ;  mais  pour  lui  ce  même 
but  est  quelque  chose  de  réel ,  de  concret,  par  opposition 
k  Vidée  de  Platon.  Dieu  est  la  cause,  le  pnndpe,  mais  il 
n'est  pas  Providence.  Du  reste,  Aristote  paraît  ne  s'oc- 
cuper que  de  choses  particulières  et  ne  traiter  de  Dieu  ou 
de  rabsolu  qu*à  son  tour,  tout  en  reconnaissant  qu'il  est 
œ  qu'il  y  a  de  meilleur  (V.  PéaiPATÉnciBNNB  —  École). 
Aristote  n*est  pas  sensualista;  mais  son  Dieu  sans  Provi- 
dence, Tàme  dont  la  personnalité  ne  survit  pas  au  corps, 
la  préféreace  qu'il  donne  au  particulier  et  au  contingent, 
devaient  conduira  au  sensualisme;  c'est  ce  qu'on  vit  chez 
ses  disciples  Théophraste,  Dicéarque,  Aristoxène,  Straton 
surnommé  le  Physicien.  Avec  eux,  comme  avec  les  de»- 
ceudants  de  Platon ,  les  grands  systèmes  dînèrent  et 
font  place  à  l'Êpciuréisme  et  au  Stoïcisme  {V\  ces  moU)^ 
environ  300  ans  av.  J.-C.  Le  premier,  avec  la  physique 
atomistique  de  Démocrite  et  d'Épicure,  et  sa  morale  de 
l'intérêt  et  du  plaisir,  conduisait  à  l'athéisme  en  méta- 
physique et  à  l'égolsme  en  morale.  Le  second ,  avec  sa 
morale  rigide,  fut  l'expression  de.  l'héroïsme  moral  du 
caractère  socratique  ;  il  subordonna  l'intérêt  au  devoir  ; 
mais,  en  commandant  à  l'homme  de  vivre  selon  la  na- 
ture, il  méconnut  les  droits  de  la  sensibilité.  Ces  deux 
écoles,  environ  un  siècle  avant  notre  ère,  introduisent  la 
philosophie  erecque  à  Rome  ;  Cicéron  y  représenta  l'Aca- 
démie, Lucrèce  1  Épicuréisme,  et  Sénèique  le  Portique  ;  à 
Rome,  la  philosophie  fut  classique  comme  la  littérature. 
Quand  la  philosophie  semble  s'éloigner  de  la  Grèce, 
c'est  à  Alexandrie  qu'U  faut  la  suivre.  Mais,  avant  ^'ello 
s*^  montrât  avec  un  nouveau  caractère,  le  scepticisme 
apparaît  comme  un  résultat  du  conflit  des  systèmes  an- 
térieurs. IM^à  il  s'était  annoncé  avec  Pyrrhon  (340  av. 
J.-  C),  mais  c'était  trop  tôt.  Le  vrai  scepticisme  s'établit 
avec  toute  sa  puissance  dans  la  personne  d'QEnésidème, 
qui  en  fit  un  système  régulier,  es  lui  donnant  des  prin- 
cipes et  une  méthode.  Par  là  il  mit  en  question  toute 
crojrance  et  toute  réalité.  Ce  système  fut  continué  par 
A^ippa  et  Sextus  Empiricus.  Le  procédé  général  de 
l'école  consistait  à  opposer  les  idées  sensibles  aux  con- 
o^tioDs  de  la  raison,  pour  arriver  au  doute  par  la  contra- 
diction. De  là  cette  formule  qui  résume  tout  le  scepticisme 
pratique  de  l'antiquité:  «  Pas  plus  i'un  qu^  l'autre,  ovdcv 
itôXXow.  • 

Tel  était,  deux  siècles  après  J.-C,  l'état  de  la  philoso- 
phie grecque.  Alexandrie  avait  succédé  à  Athènes;  elle 
était  devenue  le  foyer  des  sciences  et  des  lettres.  Les  dif- 
férents systèmes  de  philosophie  s'y  rencontrèrent  et  de- 
vinrent une  cause  de  scepticisme  ;  mais  ce  dernier  sys- 
tème ne  pouvait  pas  satisfaire  l'esprit  humain  ;  de  là  na- 
quit l'école  d'Alexandrie;  son   premier  caractère  fut 
réclectisme,  ou  plutôt  le  syncrétisme.  Elle  voulut  en 
efiet  tenter  la  conciliation  entre  les  différents  systèmes, 
et  surtout  entre  Platon  et  Aristote;  mais,  çr&ce  à  l'in- 
fluence de  l'Orient  et  des  idées  religieuses  qui  occupaient 
alors  les  esprits,  un  second  caractère  vint  dominer  le 
premier,  ce  fut  le  mysticisme.  Expliquer  la  nature  di- 
vine et  la  manière  dont  elle  se  manifeste,  s'élever  par 
Textaae  au-dessus  des  données  de  la  raison,  t^  était 
l'objet  principal  de  la  nouvelle  école,  qu'on  appela  aussi 
NéopUUamcienne.  Avec  Plotin  et  Porphyre  elle  reste 
dans  les  limites  d'un  mysticisme  qui  n^  rien  d'extrava- 
gant; mais  avec  Jamblique  et  ceux  qui  viennent  après 
lui,  elle  tombe  du  mysticisme  dans  la  théurgie,  elle  pra- 
tique révocation,  elle  lait  des  miracles.  Avant  de  perdre 
le  droit  de  narler  au  nom  du  paganisme,  la  philosophie 
grecque  revint  aux  lieux  où  elle  avait  longtemps  bnllé, 
et  jeta  un  vif  et  dernier  éclat  à  Athènes  dans  la  personne 
de  Ftodns.  Bientôt  k»  portes  de  l'école  furent  fermées 
par  un  édit  de  Justiniea,  en  529  (F*.  Alixanosib -* 
École  d'}. 

Cçtte  philosophie,  qui  se  développa  dans  un  si  long 
espace  de  temps,  survécut  à  la  nationalité  grecque,  sur- 
tout les  doctrines  de  Platon  et  d'Aristote,  qui  se  mon- 
trèrent dans  la  civilisation  arabe,  et  qui  exercèrent  une 
influence  incontestable  et  souvent  utile  sur  la  civilisation 
moderne.  Outre  les  historiens  de  la  philosophie,  Brucker, 
Hedemann,  Stanley,  Tennemann,  Degérando,  Bitter, 
F.  Bedurehes  sur  tes  opmioiu,  la  théologie  ei  la  pfctJo- 
Mpàfs  dês  plus  anciens  peuples,  et  surtout  des  Grecs, 
jusqu'au  temps  d^ Aristote  (aUem.),  in-8%  Elbing,  1785; 
AoéenoOt  us  philosophie  de  VaincwMe  Grèce  (angL), 


in-8%  Londres,  1701  ;  Sacchi ,  Storia  délia  fUosofia  grecé, 
4  vol.  in-«°,  Pavie,  1818-1820.  B. 

GRECQUE  (Beligion).  L'étude  dé  la  religion  des  anciens 
Grecs  présente  de  graves  difficultés,  et  les  savants  n'ont 
pu  se  mettre  d'accord  sur  les  questions  qu'elle  soulève. 
La  Grèce  n'eut  Jamais  de  livre  sacré,  de  symbole,  de  sa- 
cerdoce organisé  pour  la  conservation  des  dogmes  ;  les 
poètes  et  lia  artistes  furent  les  véritables  théologiens,  et, 
la  notion  des  divinités  étant  à  peu  près  livrée  à  la  concep- 
tion arbitraire  de  chacun,  la  religion  n'eut  Jamais  de 
traits  précis  et  arrêtés.  Pourtant  Hésiode,  dans  sa  Théfh 
gonie,  a  systématisé  les  principales  idées  éparses  dans  la 
Grèce,  et  âabli  un  ordre  chronologique  dans  la  succession 
des  dieux. 

Les  dieux  et  les  déesses,  qu'on  adorait  en  nombre 
presque  infini,  ne  seraient,  d'après  une  o|Mnion  repré- 
sentée déjà  dans  l'antiquité  par  Évhémère,  que  des  êtres 
ht: mains  déifiés  après  leur  mort  à  cause  de  leurs  exploita 
ou  de  leurs  vertus,  et  il  ne  faudrait  voir  dans  les  mythes 
que  des  faits  historiques  altérés  par  l'ignorance  populaire 
et  embellis  par  la  fantaisie  des  poètes.  D'autres  mytho- 
logues, et  c'est  le  plus  grand  nombre,  regardent  les  dieux 
de  la  Grèce  comme  la  personnification  des  éléments,  des 
agents  physiques,  et  croient  découvrir  sous  le  voile  de  la 
Fable  l'expression  figurée  du  rôle  que  les  phénomènes 
naturels  Jouent  dans  l'univera.  Divisés  quant  aux  idéet 
dont  les  divinités  grecques  étaient  l'expression,  les  sa- 
vants le  sont  également  sur  la  question  de  l'origine  ou  de 
la  provenance  de  ces  divinités  :  naquirentpelles  sur  le  sol 
de  la  Grèce,  ou  n'ont-elles  été  que  des  transformations  ds 
divinités  apportées  soit  de  l'Asie  occidentale,  soit  de 
l'Egypte?  L'impossibilité  de  distinguer  les  traditions  po- 
sitives d'avec  les  créations  de  l'imagination  poétique,  les 
contradictions  fréquentes  qui  existent  entre  les  mythes, 
les  modifications  que  ces  mythes  ont  dô  subir  suivant 
les  temps  et  les  lieux,  tout  concourt  à  jeter  de  l'obscurité 
sur  cette  matière. 

Un  fait  incontestable,  c'est  que  les  divinités  grecques 
peuvent  se  ramener  à  deux  classes:  i<^  celles  qui,  d\)ri- 
gine  pélasgique ,  et  suivant  toute  vraisemblance,  appor- 
tées de  l'Asie,  furent  reconnues  et  honorées  dans  toute  la 
Grèce  ;  2«  celles  qui  natpiirent  des  idées  et  des  croyances 
particulières  à  telle  ou  telle  peuplade,  et  dont  le  culte, 
primitivement  propre  à  certains  cantons,  se  répandit  de 
proche  en  proche  dans  les  autres,  par  suite  des  rapporta 
fréquents  qui  existèrent  entre  les  habitants  de  la  Grèce  ; 
oda  explique  la  variété  c|u'on  rencontre  dans  les  carac- 
tères des  diverses  dirinités,  dont  on  confondit  souvent 
tes  attributs ,  et  dans  les  cérémonies  célébrées  en  leur 
honneur. 

Les  plus  anciens  habitants  de  U  Grèce,  les  Pélasges, 
que  l'ethnologie  rattache  à  la  race  indo-européenne, 
et  qui  rinrent  d'Asie  en  Europe  à  une  épooue  très- 
reculée,  eurent  un  certain  nombre  de  grandes  divi- 
nités, qui  se  placèrent  plus  tard  à  la  tète  du  panthéon 
hellénique,  Zeus  (Jupiter),  Hèra  ( Junon),  Ares  (Alan), 
Vesta  ou  Hestia,  Bermès  (Mercure),  Patios  ou  Athéné 
(  Bfinerve).  Le  culte  de  Zeus  conserva  longtemps  son  im- 
portance à  Dodone  en  Épire.  Celui  d'Hermès  fut  surtout 
en  vigueur  chez  les  Arcadiens.  En  Crète  et  à  Samothraoe, 
la  religion  demeura  dans  un  rapport  étroit  avec  celles  dé 
l'Asie  occidentale,  de  la  Phénicie,  de  la  Syrie.  Hérodote 
prétend  que  les  Pélasges  ne  donnaient  d'abord  ancnn 
nom  à  leun  divinités;  des  colonies  égyptiennes  leur 
auraient  apporté  les  dieux  qu'ils  adorèrent  plus  tard  el 
et  qu'ils  transmirent  aux  Hellènes.  Mais  aucun  fait  po- 
sitif n'établit  qu'il  y  ait  eu ,  dans  ces  temps  reculés,  des 
relations  entre  l'É^te  et  la  Grèce;  les  noms  des  cÛeux 
pélasgiques  n'existent  pas  dans  le  panthéon  égyptien ,  et 
les  ressemblances  d'attributs  qu'on  pourrait  trouver  entra 
ces  dieux  et  certaines  divinités  égyptiennes  s'expliquent 
par  l'identité  du  principe  sur  lequel  reposaient  les  an** 
tiques  religions,  la  personnification  des  forces  de  la  na- 
ture. Le  berceau  des.  dirinités  pélasgiques  doit  plutôt  être 
placé  dans  l'Asie  occidentale,  ou  du  moins  quelques-uns 
de»  mythes  dont  se  composait  leur  histohre  autdnt  été 
empruntés  aux  dieux  de  ce  pays. 

Aux  éléments  pélasgiques  de  la  religion  grecque  s'i^oup 
tèrent  deux  autres  ordres  de  dirinités.  D'abora,  des  «► 
lonies  venues  de  Phénicie,  de  Syrie,  de  Phrvgie,  etc., 
apportèrent  directement  leure  dieux,  qui  se  mêlèrent  pen 
à  peu  à  ceux  des  anciens  habitants  de  la  Grèce.  Ensmte, 
la  religion  se  développa  de  bonne  heure  conforméniont 
au  génie  particulier  de  diaque  contrée  et  de  chaque 
tribu  hellénique  :  des  cultes  et  des  rites  locaux  se  for- 
mèrent en  Thessalie,  en  Béotie,  à  Samoa,  à  Bhodes,  eto.. 


URE 


1000 


GRE 


et  c*est  là  principalement  qu'il  faut  chercher  les  origines 
da  polythéisme  çrec. 

Le  culte  des  héros  acheva  d'imprimer  à  ce  polythéisme 
une  physionomie  distincte.  Sous  ce  nom  de  héros  on  com- 

S  rit  les  individus  nés  d'un  dieu  et  d'une  mortelle,  comme 
ercule,  ou  d'un  mortel  et  d'une  déesse,  comme  Achille, 
et  tous  les  personnages  des  temps  fabuleux,  chefs  de 
races  on  de  migrations,  fondateurs  de  villes,  protecteurs 
de  cités  et  de  familles,  vainqueurs  de  bètes  féroces,  bien- 
faiteurs de  leurs  semblables.  Des  mythologues  ont  vu  à 
tort  dans  quelques-uns  de  ces  héros,  tels  qu'Hercule, 
Persée,  Jason,  etc.,  des  divinités  de  l'Orient  défigurées 
par  le  génie  grec  :  si  Ton  a  transporté  sur  leur  tète  cer- 
tains mythes  relatifs  à  des  dieux  asiatiques,  ces  emprunts 
furent  tardifs. 

Vanthropomorphisme  (F.  ce  mot)  a  été  enfin  un  des 
caractères  essentiels  du  polythéisme.  Les  Grecs  finirent 
par  déifier  tous  leurs  penchants*  bons  ou  mauvais  ;  en 
sorte  qu'en  adorant  leurs  dieux,  ils  adorèrent  leur  propre 
humanité.  Les  appétits  grossiers,  l'amour  des  combats,  la 
vengeance,  eurent,  dans  l'Olympe,  des  représentants 
aussi  bien  que  la  justice  et  la  piété.  Les  simulacres 
mêmes  des  dieux  furent  faits  à  l'image  de  l'homme,  et 
les  artistes  cherchèrent  à  leur  donner  l'idéale  perfection 
du  corps  humain.  Dès  le  temps  d'Homère,  les  dieux  ne 
le  distinguaient  des  hommes  que  par  des  organes  plus 
parfaits,  une  plus  haute  stature,  une  voix  plus  puis- 
sante ;  une  nourriture  diviqe  éternisait  leur  vigueur  et 
leur  Jeunesse  ;  ils  avaient  en  outre  la  faculté  de  revêtir 
à  leur  gré  toutes  les  formes  imaginables,  depuis  le  cor|>8 
subtil  et  impalpable  des  météores  Jusqu'à  celui  des  ani- 
maux. 

Cest  du  VII*  et  du  vi*  siècle  avant  l'ère  chrétienne  que 
date  l'importation  des  dogmes  étrangers,  qui  a  dénaturé 
le  polythéisme  hellénique.  Les  relations  avec  l'Asie  de- 
vinrent fréquentes;  les  écoles  pythagoricienne  et  platoni- 
cienne essayèrent  tour  à  tour  d'assimiler  entre  eux  les 
dieux  honorte  chez  les  afférents  peuples,  afin  de  réunir 
les  éléments  vraiment  religieux  qui  existaient  dans  ces 
cultes  divers;  le  peuple  grec  attribua  les  noms  de  ses  di- 
vinités aux  divinités  étrangères  qui  avaient  avec  elles 
quelque  ressemblance,  et  ml*  sur  16  compte  de  ses  propres 
dieux  les  fables  dont  les  dieux  étrangers  étaient  l'objet. 
€e  syncrétisme  atteignit  ses  derniers  développements  à 
l'époque  de  l'école  d'Alexandrie,  qui  voulut  opérer  une 
fusion  complète  entre  les  religions  de  l'Asie,  de  l'Egypte 
et  de  la  Grèce.  Alors  aussi  on  prétendit  donner  aux 
m^es  paiens  un  sens  et  une  portée  qu'ils  n'avaient  cer- 
tainement pas;  on  fit  de  ces  mythes  autant  d'expressions 
figurées  des  phénomènes  naturels,  des  révolutions  astro- 
nomiques. Le  polvthéisme  fut  ainsi  totalement  dénatmré, 
et  ceAui  qui  le  jugerait  d'après  les  derniers  éorivains 
greca  s'en  ferait  l'idée  la  plus  fausse.  Au  temps  des 
Alexandrins,  le  polythéisme  n'avait  plus  de  rapport  avec 
la  religion  d'Homère,  d'Hésiode  et  de  Pindare;  les  fables 
anciennes  n'étaient  plus  que  des  allégories;  les  rites 
seuls  étaient  conservés,  parce  qu'ils  constituaient  géné- 
ralement pour  le  peuple  toute  la  religion,  et  que  les  phi- 
losophes cherchaient  à  s'appuyer  sur  la  tradition  pour 
disaimuler  la  nouveauté  de  leurs  idées;  la  religion  n'était 
plua  qu'un  attachement  routinier  et  inintelligent  à  des 
oMmonies  ridicules  ou  surannées. 

Au  reste,  en  défigurant  le  polythéisme,  la  philosophie 
en  teura  la  doctrine.  Le  culte  de  divinités  conçues  comme 
de  amples  et  imparfaites  créatures,  l'emploi  de  simu- 
lacres qui  faisaient  confondre  l'être  adoré  et  le  signe 
sensible  destiné  à  réveiller  son  souvenir,  engendraient  la 
superstition,  et,  chez  le  peuple  du  moins,  le  polythéisme 
*  dégénérait  en  idolâtrie.  Aucun  dogme  précis,  aucune 
liturgie  réglée  par  un  corps  sacerdotal,  aucun  enseigne- 
ment moral,  ne  réprimaient  les  dérèglements  auxquels 
lonnaient  lieu,  par  exemple,  les  fêtes  de  Vénus,  d'Ado- 
nis, de  Bacchus;  les  Mystères  eux-mêmes,  institués  sans 
doute  pour  l'instruction  des  initiés,  dégénéraient  en  cé- 
rémonies licencieuses,  dont  le  secret  ne  faisait  qu'as- 
■mer  l'impunité.  En  un  mot,  le  polythéisme  avait  des 
excitations  pour  tous  les  penchants  vicieux  ;  il  livrait 
l'homme  à  toutes  ses  passions.  La  philosophie  essaya  de 
corriger  les  croyances  dépravantes  par  un  enseignement 
capable  de  soustraire  l'homme  à  leur  Joug;  elle  repré- 
senta comme  des  fables  les  actions  criminelles  ou  obscènes 
une  Ton  mettait  sur  le  compte  des  dieux,  ou  leur  donna 
des  Interprétations  qui  en  faisaient  disparaître  l'immora- 
lité et  l'indécence. 

V.  Woslcker,  Sur  la  tnythologte  des  peuples  [apéttques, 
tr.  allem^  Glessen,  i824,  in-lf  ;  Fréd.  Greuzer,  Symbo- 


lique des  religions  de  VantiquUé,  trad.  en  français  par 
M.  Guigniaut;  O.  MQller,  Prolégomènes  d*une  Mythologie 
scientifique^  en  allem.,  1825  ;  Lobeck,  Âglaophamus,  sive 
de  theologiœ  mysticœ  Grœcorum  causis,  Kœnigsberg, 
1829,  2  vol.  in-8<*;  Ph.  Suttmann,  Le  Mythologue,  ou 
Recueil  d'études  sur  les  croyances  des  Anciens,  en  allem., 
Berlin,  1829,  2  vol.  in-8«;  Bœttiger,  Idées  sur  la  Mytho- 
logis  de  l'Art,  en  allemand,  Dresde,  1836,  2  vol.  in-8*; 
E.  Jacobi ,  Dictionnaire  de  la  mythologie  grecque  et  ro^ 
maine,  en  allem.,  Leipzig,  1847,2  vol.  in-8®;  Alfred 
Maury,  Histoire  des  religions  de  la  Grèce  antique,  1857  et 
suiv.,  3  vol.  in-8**. 

GRECQDB  (Architecture).  De  tous  les  arts  du  dessin 
pratiqués  et  perfectionnés  par  les  Grecs,  l'architecture  a 
été  le  plus  idéal,  c-iMl.  celui  qui  s'est  le  plus  détaché 
des  conditions  de  la  matière  et  des  passions  qu'elle  sug- 
gère. Née  de  l'utile,  elle  s'en  est  bientôt  détachée  ;  opé- 
rant avec  le  bois  et  la  pierre,  elle  les  a  peu  à  peu  cachés, 
au  point  de  les  faire  disparaître  aux  yeux  du  spectateur 
pour  ne  lui  présenter  que  des  formes  pures  et  immaté- 
rielles. Dans  la  période  de  sa  décadence,  cet  art  n'a 
Jamais  fait  reparaître  la  matière  dont  il  s'é^t  affranchi , 
et  c'est  plutôt  par  l'abus  de  la  forme  qu'il  s'est  éloigné 
de  sa  propre  perfection. 

Cest  une  opinion  exa^rée  et  exclusive  de  faire  dériver 
toute  l'architecture  des  Grecs  de  primitives  constructions 
en  bois,  et  de  l'opposer  par  ce  cèté  seul  à  celle  des  Égyp- 
tiens, qui  n'ont  pas,  eux  non  plus,  emprunté  leun  mo- 
dèles uniquement  à  d'antiques  maisons  en  pierres.  La 
voûte  telle  que  les  Grecs  l'ont  pratiquée,  à  une  époque 
fort  ancienne,  ne  dérive  nullement  d'un  échafaudage  de 
bois,  non  plus  que  les  murs  des  villes,  dont  les  formes 
les  plus  antiques  existent  encore  et  ne  supposent  que  la 
pierre.  Toutefois,  les  plus  beaux  édifices  de  la  Grèce,  ses 
temples,  ses  thé&tres,  ses  portiques,  ses  odéons présentent 
des  formes  évidemment  issues  de  la  maison  ae  bois,  de 
même  qu'en  Egypte  les  édifices  d'un  genre  analogue  ne 
supposent  l'emploi  de  cette  matière  que  dans  quelques- 
unes  de  leurs  parties  accessoires. 

De  bonne  heure  l'architecture,  dont  les  conceptions 
sont  géométriques,  s'annexa  deux  arts  qui  lui  sont  natu- 
rellement étrangen,  mais  qui  peuvent  ajouter  beaucoup 
à  l'effet  idéal  des  édifices,  la  sculpture  et  la  peinture. 
Mais,  jusque  dans  les  dernière  temps,  les  sculpteure  et 
les  peintres  subordonnèrent  leur  conception  et  leur  tra- 
vail à  l'œuvre  de  l'architecte;  et  les  ouvrages  d'un  goût 
médiocre  que  produisit  l'âge  de  la  décadence  conservèrent 
ainsi  leur  unité  et  leur  ensemble.  Ce  principe  se  retrouve 
appliqué  avec  rigueur  dans  l'art  grec  tout  entier,  qui  sut 
toujoura  subordonner  la  partie  décorative  d'une  œuvre  à 
l'osuvre  elle-même. 

Les  plus  anciens  monuments  que  la  Grèce  nous  ait 
laissés  se  rapportent  à  l'art  de  la  guerre  :  ce  sont  des 
mure  pour  encelndre  des  villes  ou  fermer  des  isthmes 
et  des  défilés  ;  ils  sont  connus  sous  le  nom  de  murs  cy- 
clopéens.  Ces  constructions  sont  l'œuvre  des  Pélasges,  la 
plus  ancienne  migration  asiatique  dont  l'histoire  grecque 
fasse  mention.  L'Arcadie  et  TÉpire,  moins  mêlées  que 
d'autres  provinces  aux  guerres  ultérieures,  en  conservent 
de  grands  exemples  ;  mais  le  sol  de  la  Grèce,  dans  toutes 
ses  parties,  est  couvert  de  ruines  pélasgiques;  l'Asie  Mi- 
neure en  renferme  un  grand  nombre;  l'Italie,  la  Sicile, 
le  Sud  de  la  France,  les  lies  de  la  Méditerranée  en  offrent 
assez  pour  que  l'on  puisse  constater  le  grand  développe- 
ment de  la  race  pélasgique  autour  de  cette  mer,  sur  les 
rivages  du  Nord.  Les  mure  cyclopéens  sont  formés  de 
blocs  de  pierre  énormes,  entassés  les  uns  au-dessus  des 
autres,  sans  ordre  apparent,  sans  liaison.  Les  plus  an- 
ciens ne  portent  aucune  trace  de  travail  humain;  les 
angles  des  pierres  y  ont  leun  formes  naturelles  et  pri- 
mitives ;  ces  fornies  seules,  en  s'adaptant  grossièrement 
les  unes  dans  les  autres,  ont  déterminé  la  place  que  le» 
constructeun  leur  ont  donnée.  Tels  sont  les  mura  de  Ti- 
rynthe  en  Argolide,  le  mur  qui  fermait  l'isthme  de  Go- 
nnthe,  etc.  Plus  tard,  les  arehitectes  pélasges  firent 
tailler  avec  soin  les  angles  de  ces  pierres  colossales,  de 
manière  qu'elles  ne  laissassent  point  de  vide  dans  leura 
Jointures;  c'est  ce  que  l'on  nomme  des  constructions  po- 
lygonales. Tels  étaient  les  mure  cyclopéens  de  Mycènes.  Il 
ne  semble  pas,  du  reste,  que  ces  deux  manières  de  con- 
struire se  soient  positivement  succédé  l'une  à  l'antre  ; 
lorsque  Ton  taillait  les  blocs  dans  certaines  parties  du 
monde  pélasgique,  on  bâtissait  encore  en  pierres  brutes 
dans  certaines  autres.  Mais  doit-on  aussi  attribuer  aux 
Pélasges,  à  cet  ftge  primitif  de  l'architecture  antique,  les 
constructions  où  les  pierres  sont  carrées  et  dia^posées  ei> 


GRE 


1001 


GRE 


ittim?  Nous  ne  le  pensons  pas;  et  cest  de  cette  con- 
itniction  régaliëre  que  nous  datons  Tarcbitecture  hellé-' 
niqite,  La  majeure  partie  des  ruines  de  Mycènes  appar- 
tifsnt  à  cet  âge,  où  Ton  trouve  déjà  les  portes  en  trapèze 
et  la  sculpture  unie  à  Tart  de  b&tir  (Porté  dês  Lions).  La 
période  des  temps  héroïques  est  la  première  en  ce  genre; 
elle  a  laissé  de  tr^beaux  monuments  dont  plusieurs 
sobsistent  encore;  le  Trésor  des  Atrides,  ap[>elé  aussi 
Tombeau  d^Agamemnon,  k  Mycènes,  est  le  mieux  con- 
servé de  tous.  Cet  édifice  souterrain  est  formé  d'assises 
drcnlaires  superposées  et  de  plus  en  plus  étroites;  de 
aorte  qu*il  a  la  forme  d'une  voûte,  mais  sans  clef;  c'est 
l'eaoK'bellement  proprement  dit.  A  cette  époque  se  rap- 
portent les  descriptions  architectoniques  données  par 
Homère;  le  sol  occupé  jadis  par  les  Grecs  en  offre  encore 
de  nomlMPeux  débris. 

On  ne  peut  fixer  la  date  deVapparition  des  ordres  dans 
le  monde  grec;  on  peut  dire  seulement  qu'ils  se  sont 
succédé,  et  que  le  plus  ancien  est  Vordre  doriqtte.  Le 
temple  dorique  est  manifestement  conçu  à  Timage  de  la 
maison  de  bois,  dont  il  reproduit  toutes  les  parties  dans 
leurs  moindres  détails.  Le  vaoç,  en  effet,  est  la  maison  de 
la  divinité,  dont  la  statue  y  est  conservée,  et  qu'elle- 
même  Tient  quelquefois  habiter  en  personne  ;  le  peuple 
D'y  pénètre  pas;  les  serviteurs  du  dieu  seuls  y  sont  ad- 
mis. Les  premiers  temples  doriques  ont  encore  la  lour- 
deur des  anciens  temps  :  colonnes  courtes  et  massives, 
souvent  monolithes,  chapiteaux  saillants,  énormes  ar- 
chitraves. Mais  les  éléments  essentiels  de  l'architecture 
hellénique  s'r  trouvent  déjà  :  simplicité  des  rapports 
entre  les  parties,  nombre  restreint  des  membres,  grandes 
lignes  plus  ou  moins  infléchies  autour  d'un  axe  vertical 
ou  dans  le  sens  de  la  courbure  de  la  terre,  portes  hautes 
en  trapèze,  colonnades  détachées  des  murs,  longues  per- 
spectÎTes  adoucies,  cannelures  larges  et  en  petit  nombre, 
peinture  plate  sur  toutes  les  parties  de  l'édifice,  orne- 
ments courants,  sculptures  aux  frontons,  aux  métopes,  et 
en  frises  continues  au  haut  des  murs,  caissons  profonds 
et  om6s  sous  les  colonnades  et  à  l'intérieur  du  temple. 
A  cet  Age  appartiennent  le  temple  de  Némésis  à  Rham- 
nonte  et  celui  de  Corinthe;  celui  de  Junon  à  Olympie 
était  de  la  même  époque,  mids  il  est  détruit. 

\Àordrt  tonique  parut  à  une  époque  qu'il  est  impossible 
de  fixer,  mais  qui  est  certainement  antérieure  à  l'année 
580  av.  J.-C  Les  colonnes  à  bases,  avec  volutes  au  char 
pitean,  le  distinguent  de  Tordre  dorique;  mais  cette  pre- 
mière différence,  unie  à  la  légèreté  du  fût,  en  entraîne 
d'antres  dans  toutes  les  parties  de  l'édifice.  L'élégance 
ornée  caractérise  cet  ordre,  moins  essentiellement  grec 
que  le  précédent,  et  qui  ne  prit  un  grand  développement 

rdans  les  temps  postérieurs.  Nous  voyons  toutefois  que, 
s  les  édifices  fort  anciens,  l'ordre  ionique  était  em- 
ployé à  l'intérieur,  même  avec  de  grandes  dimensions. 
Le  temple  de  Diane  k  Éphèso  était. entièrement  ionique, 
et  ne  date  cependant  que  du  commencement  du  vi*  siècle  ; 
l'art  de  tailler  la  pierre  et  la  science  des  formes  étaient 
donc  déjà  fort  avancés  à  cette  époque  {V,  Grecque  — 
Sculpture).  —  La  seconde  moitié  du  vi*  siècle  et  la  pre- 
mièiê  du  v*  ont  été  marquées  par  un  progrès  rapide  de 
tous  les  arts,  des  lettres,  et  en  général  do  la  civilisation 
b^^iqne.  Toutes  les  formes  architecturales  se  perfec- 
tionnent, deviennent  plus  élégantes,  plus  gracieuses  ;  le 
iond  reste  le  même  et  constitue  la  tradition,  mais  la  lour- 
deur disparaît  sans  que  la  force  diminue;  l'harmonie, 
reurythmie,  sont  l'objet  d'études  savantes,  soutenues 
par  un  goût  de  plus  en  plus  épuré.  Quand  on  mesure  la 
distance  qui  sépare  les  édifices  de  Sélinonte,  d'Agrigente, 
^Êgine,  de  Pœstum  et  d'Assos,  des  commencements  du 
siècle  de  Périclès,  on  comprend  le  chemin  parcouru  par 
les  architectes  et  les  sculpteurs  dorant  cette  période. 
Cest  de  ce  temps  que  semblent  dater  les  colonnades  in- 
lérioires,  soit  simples,  soit  superposées,  et  la  grande 
ouverture  centrale  des  temples  hypèthres.  Tonte  la  Grèce 
est  couverte  de  ruines  appartenant  à  cette  période.  Les 
édifices  étaient  de  pierre;  mais  cette  matière  disparaissait 
sous  un  stnc  janne  d*une  finesse  et  d'un  éclat  incompa- 
rables. Cest  alors  que  la  matière  disparaît  entièrement  à 
rœil,  et  ne  laisse  plus  au  spectateur  que  l'impression  des 
formes  les  plus  splendides  et  les  plus  harmonieuses.  Les 
édifices  saoés,  le  plus  cuvent  élevés  au  sommet  des 
coUines,  se  détÎM^haiênt  au  soleil  sur  le  fond  lumineux  du 
dd  bleu,  et  présentaient  vraiment  aux  fidèles  l'image  de 
la  demaure  des  dieux.  Cest  durant  cette  période  aussi 
que  commencèrent  à  s'élever  des  édifices  utiles,  comme 
les  canaux  et  tes  aqueducs.  Les  th^tres  sont  de  la  pé- 
riode suivante.  •—  I/invasion  des  Perses  causa  dans  la 


Grèce  une  sorte  de  révolution,  qui  se  fit  sentir  aussi  bien 
dans  les  arts  que  dans  la  politique;  la  dévastation  des 
cités  détruisit  un  grand  nombre  d'édifices  religieux  ou 
militaires  d'une  date  souvent  assez  récente  et  qu'il  fallut 
relever.  Le  développement  politioue  et  maritime  d'Athènes 
fit  affluer  dans  cette  rille  les  ricnesses  du  monde  grec,  et 
lui  permirent  de  sortir  de  ses  cendies  avec  une  magnifia 
cence  inconnue  aux  temps  postérieurs.  L'art  était  alors 
dans  toute  sa  force  et  touchait  à  sa  maturité.  On  refit  en 
marbre,  avec  une  perfection  k  peine  croyable  pour  nous, 
les  édifices  de  pierre  dévastés.  Les  temples,  les  théâtres, 
les  Odéons,  les  Propylées,  les  portiques  ont  été  construits 
dans  toute  leur  beauté  noble,  granoiose  et  élégante,  avec 
toutes  les  ressources  des  arts  accessoires,  à  partir  de 
l'administration  de  Cimon,  et  jusqu'à  la  prise  d'Athènes 
par  Lysandre  en  404.  Les  quarante  années  de  l'adminis- 
tration de  Périclès  ont  vu  l'architecture  s'élever  à  son 
idéal  le  plus  par&it.  De  Cimon  date  le  temple  de  Thésée 
à  Athènes,  ouvrage  d'une  rare  élé^ce.  Mais  un  homme 
d'un  génie  supérieur,  Phidias,  imprima  à  toutes  les 
œuvres  architecturales  de  ce  temps  un  caractère  de 
beauté  qui  n'a  point  été  égalé  depuis  :  la  force  sans 
lourdeur,  l'élégance  sans  affectation,  l'idéal  soutenu  par 
une  incroyable  science  de  la  statique  et  des  proportions. 
Les  lignes  droites  ont  entièrement  disparu;  il  n'y  a  plus, 
dans  ces  édifices  qui  semblent  carrés,  aucune  surface  ho- 
rizontale ou  verticale  sur  laquelle  une  ligne  droite  puisse 
s'appliquer;  tout  est  courbe,  du  pavé  au  faite;  les  murs, 
les  colonnes,  sont  inclina  avec  une  science  infinie; 
l'effet  risuel  est  calculé  dans  ses  plus,  petits  détails.  La 
solidité  n'a  jamais  été  ménagée  avec  autant  d'art  que  dans 
les  œuvres  de  ce  temps.  Sous  la  direction  de  Phidias,  le- 
tinos  éleva  le  Parthénon,  Mnésiclès  les  Propylées.  Toutes 
les  constructions  de  ce  temps  nous  montrent  l'art  de 
b&tir  dans  sa  perfection  :  grands  blocs  de  marbre  égaux 
ou  symétriques,  reproduisant  pour  leur  part  les  courbes 
et  les  inclinaisons  dans  lesquelles  ils  sont  compris  ;  nul^ 
ciment  pour  les  Joindre  ;  surfaces  polies  s'adaptant  au 

{>oint  de  devenir  indiscermd>les;  nul  glissement  possible, 
es  courbm  et  les  pentes  étant  combinées  en  vue  de  la 
solidarité  des  parties  et  de  l'unité  compacte  du  tout.  Ces 
beaux  temples  de  marbre  blanc  n'en  étaient  pas  moins 
couverts  du  stuc  orangé  traditionnel;  car,  pour  être  le 
plus  parfait  des  matériaux,  le  marbre  n'en  est  pas  moins 
une  matière,  que  l'art  tout  idéal  des  Grecs  devait  s'atta- 
cher à  faire  disparaître.  La  sculpture,  dont  Phidias  est  à 
cette  époque  le  plus  illustre  représentant,  apporta  son 
concours  à  la  décoration  des  temples  :  les  frises  du  Par- 
thénon sont  les  plus  grandes  œuvres  de  sculpture  que 
nous  ait  laissées  l'antiquité;  mais  elles  étident  de  beau- 
coup surpassées  par  la  statue  même  de  la  déesse,  toute 
d'ivoire  et  d'or,  œuvre  de  Phidias.  Sous  l'impulsion  don- 
née par  cet  artiste  et  par  Périclès,  la  Grèce  se  couvrit 
d'ouvrages  d'architecture  d'un  caractère  grandiose  et 
d'une  richesse  tout  idéale.  On  n'éleva  pas  seulement 
des  temples,  mais  aussi  des  théâtres  de  pierre  contenant 
Jusqu'à  150,000  spectateurs,  des  portiques  ou  galeries 
couvertes  ornées  de  colonnes  et  de  peintures,  des  salles- 
de  musique,  des  hippodromes  à  gradins,  divers  ouvrages- 
d'utilité  publique. 

La  guerre  au  Péloponèse,  le  règne  de  l'oligarchie,  la 
prise  d'Athènes  par  Lysandre,  la  tyrannie  des  Trente, 
ruinèrent  une  ville  dont  la  peste  avait  déjà  démoralisé 
les  habitants.  L'esprit  public  se  détourna  de  rintérèt  de< 
l'État  vers  les  jouissances  individuelles.  L'architecture  se 
mit,  ainsi  que  les  autres  arts,  au  service  des  particuliers, 
et  leur  éleva  des  midsons  qui  rivalisaient  avec  les  temples 
des  dieux.  On  construisit  fort  peu  d'édifices  publics  de- 
puis 404  jusqu'à  la  bataille  de  Chéronée;  mais  les  villes- 
étalèrent  un  luxe  inconnu  aux  temps  antérieurs;  non*- 
seulement  on  abattit  les  maisons  anciennes  pour  en 
élever  de  nouvdles,  mais  les  rues  devinrent  plus  larges- 
et  plus  régulières.  Le  Pirée  fut  rebâti  de  la  sorte,  ainsi 
queSybans  ou  Thurii  et  d'autres  cités,  soit  en  Grèce, 
soit  dans  les  colonies. 

La  battue  de  Chéronée  introduint  dans  le  monde* 
grec  l'esprit  macédonien,  positif  et  pratique,  et  A'envîsa- 
geant  l'art  et  Ja  littérature  que  comme  ornements  d'un 
règne  ou  moyens  de  gouvernement.  Mais  l'extension  de  la 
civilisation  hellénique  vers  l'Orient  à  la  suite  d'Alexandre 
le  Grand,  et  la  fonoation  des  royaumes  grecs  de  l'Asie  et 
de  l'Egypte,  ouvrirent  un  champ  immense  à  l'actirité  des 
artistes.  Des  édifices  grecs,  temples,  palais,  villes  en-^ 
tièrps,  fiirent  élevés  par  des  arcnitcctes  venus  pour  la 
plupart  d'Athènes,  ou  du  moins  inspirés  par  l'art  athé^ 
nien.  La  réaction  de  l'Oriont  sur  cet  an  fut  à  oeine  aen- 


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dble;  car  le  goût  de  la  magnificence  existait,  comme  le 
eonatate  Démoathène,  avant  môme  la  bataille  de  Chéronée. 
Mais  les  ricbesaes  de  VAsie,  rabondance  et  la  variété  des 
matériaux,  le  travail  peu  coûteux  de  masses  popolaires  ha- 
liitaées  à  une  obéissance  passive,  mirent  entre  les  mains 
des  princes  et  des  artistes  des  moyens  d'une  puissance 
Jusque-là  inconnue.  On  doit  ajouter  aussi  que  le  progrès 
npide  des  sciences,  sous  Tinfluence  de  Tesprit  nouveau, 
créa  des  méthodes  et  des  Instruments  perfectionnés  pour 
élever  rapidement  et  à  moins  de  frais  d'immenses  édi- 
fices. Les  Séleucides,  les  rois  de  Pergame,  les  Ptolémées, 
rivalisèrent  de  sèle  et  de  magnificence  ;  mais  les  exigences 
personnelles  de  maîtres  enivrés  par  leur  opulence  n'exer- 
cèrent pas  toujours  une  influence  favorable  sur  Tart  des 
architectes;  on  sacrifia  beaucoup  aux  commodités  d'une 
▼ie  pleine  de  mollesse.  C'est  sous  ces  influences  combi- 
nées que  s'éleva  de  toutes  pièces  la  ville  d'Alexandrie, 
dessinée  et  construite  par  Dinocrate,  et  qui  fut  un  mo- 
dèle pour  les  temps  postérieurs.  Antioche  ne  le  céda  en 
rien  à  Alexandrie  pour  la  régularité  de  son  plan  et  la 
splendeur  des  habitations  particulières.  A  cet  extérieur 
magnifique  répondait  une  décoration  intérieure  pleine  de 

5 oui  et  d'élégance,  en  même  temps  <}ue  de  richesse  et 
'éclat.  Toutefois,  cette  profusion  venait  en  grande  partie 
-d'une  passion  souvent  désordonnée  pour  le  luxe  et  les 
plaisirs,  et  d'une  ostentation  plus  uivorable  aux  archi- 
tectes qu'à  l'architecture  :  car  les  grands  hommes  qui 
■avaient  élevé  le  Parthénon  et  décoré  les  Propylées  ne  re- 
cevaient qu'une  rétribution  minime  pour  leur  travail; 
eeux,  au  contraire,  qui  travaillaient  à  satisfaire  le  poflt 
des  princes  et  de»  particuliers  s'enrichissaient;  mais  le 
•caractère  idéal  de  leurs  couvres  s'abaissent  avec  le  but  à 
atteindre,  ils  ont  élevé  en  majeure  partie  des  édifices 
■sans  nom. — Cest  pendant  cette  période  que  se  développa 
dans  toute  sa  richesse  l'ordrv  corinthien,  moins  élésant, 
mais  plus  somptueux  que  l'ionique.  C'est  lui  qui  fut 
adopté  de  préférence  dans  les  siècles  qui  suivirent. 
.  lÀ  conquête  de  la  Grèce  par  les  Romains  et  la  soumis- 
sion de  l'Asie  et  de  l'Afrique  concentrèrent  dans  Rome 
la  puissance  politique  et  les  trésors  de  ces  riches  contrées; 
sous  cette  autorité  nouvelle,  les  arts  de  la  Grèce  conti- 
nuèrent à  régner  exclusivement.  L'originalité  puissante 
•de  l'architecture  hellénique  avait  soumis  l'esprit  macédo- 
nien, résisté  aux  influences  dissolvantes  de  l'Asie,  dressé 
*des  dtte  grecques  en  Égjrpte  à  côté  de  villes  bâties  sur 
un  tout  autre  modèle;  elle  soumit  encore  l'esprit  romain, 
en  se  mettant  à  son  service.  Cest  donc  encore  son  hte- 
toire  qui  se  continue.  Jusqu'à  la  fin  de  l'Empire,  où  elle 
devient  l'architecture  byzantine.  L'utile,  soit  dans  la  vie 
privée,  soit  dans  la  vie  publique,  domine  l'architecture 
au  temps  des  Romains;  mais  ce  principe  est  appliqué 
d'une  manière  grandiose  et  qui  ne  souffre  rien  de  mes- 
quin; quoique  l'art  de  bâtir  n'ait  Jamais  produit  sous  les 
empereurs  rien  de  comparable  au  Parthénon,  cependant 
les  constructeurs  grecs  employés  par  eux  ont  laissé  des 
édifices  très-solides  et  parfois  d'un  grand  caractère.  L'ar- 
•cade  avait  à  peine  paru  dans  les  édifices  grecs  des  temps 
antérieurs  ;  elle  prend  une  importance  majeure  dans  cette 
dernière  période;  elle  a  pour  conséquence  naturelle  la 
voûte  et  le  dôme,  et  pour  complément  les  piliers  rempla- 
•^ant  les  colonnes.  L'addition  ne  colonnes,  soit  détachées, 
eoit  engafldes,  à  l'extérieur  de  ces  édifices,  produisit  un 
mélange  de  formes  dont  le  goût  du  temps  de  Périclès 
n'eût  pas  été  satisfait  :  mais  ce  mélange  provenait  du  be- 
aoin  de  rendre  plus  légères  en  apparence  les  formes 
Itmrdes  d'arcades  portées  sur  d'énormes  piliers.  C'est  ce 
même  besoin  qui  lit  naître  le  chapiteau  composite,  mé^ 
lange  plus  riche  encore  que  le  corinthien ,  mais  d'qne 
eempositioa  toi^ours  difficile  et  rarement  heureuse.  Les 
jprandes  dimensions  des  édifices,  composés  de  plusieurs 
^Stages,  suggérèrent  l'idée  de  placer  les  ordres  les  uns  au- 
dessus  des  autres,  en  commençant  par  le  plus  simple; 
mais  à  l'ordre  donque,qui  n'a  point  de  base,  fut  substitué 
I9  toscan,  plus  en  harmonie  avec  le  genre  des  nouvelles 
•constructions.  Tels  sont  les  membres  principaux  auxquels 
se  reconnaissent  les  ouvrages  nés  sous  l'influence  du 
génie  romain.  On  en  éleva  dans  tout  l'Empire,  depuis 
Tépoque  de  la  conquête,  et  principalement  sous  Auguste 
•secondé  par  Agrippa,  sous  les  FUviens  et  sous  les  Anto- 
nins.  Les  constructions  romaines,  que  les  Grecs  d'autre^ 
Ibis  avaient  à  peine  pratiquées  ou  même  entièrement 
ignorées,  sont  surtout  les  thermes,  les  aqueducs,  les  arcs 
•de  triomphe»  les  amphithéâtres,  les  basiliques.  La  sran- 
'daur  de  ces  constructions  n'eût  pas  permis  d'y  appliquer 
r«rt  infini  du  Parthénon  ;  il  fallut  donc  recourir  à  des 
4Boyena  plus  économiques  :  de  là  l'usage  universel  alors 


de  la  brique  ou  des  petites  pierres  carrées  à  l'extérieur 
des  murs  comme  revêtement,  et  du  mortier  Jeté  à  l'inté- 
rieur avec  des  débris  de  toute  forme  et  se  prenant  en  une 
masse  unique  et  presque  indestructible;  de  là  aussi  l'em- 
ploi de  pierres  de  taille  dont  l'extérieur  n'est  que  dégrossL 
—  Quant  à  la  valeur  architecturale  des  constructions  de 
l'Empire,  elle  est  en  général  tr^petite  1  les  membres, 
empruntés  aux  ordres  grecs,  ne  servent  plus  <(u'à  dissi- 
muler la  lourdeur  des  formes  réelles  des  édifices;  ces 
membres,  on  les  modifie,  on  les  accouple,  on  les  engage, 
on  les  superpose,  ou  bien  on  s'en  sert  commode  points 
d'attache  à  des  ornements  étrangers,  de  manière  qu'ils 
perdent  entièrement  leur  signification  et  leur  valeur  ar- 
chitectonique.  Par  cet  abus  qui  prodigue  la  variété  sous 
tant  de  formes,  on  tombe  réellement  dans  une  déplo- 
rable uniformité.  Cest  par  ce  mélange  arbitraire  de  toutes 
les  conceptions  antiques  que  finit  l'architecture  grecque. 
Elle  avait  commencé  par  dos  formes  herculéennes;  sous 
Périclès,  elle  avait  atteint  son  point  de  maturité,  forte, 
gracieuse,  naturelle,  idéale  ;  elle  périssait  sous  le  poids 
de  la  richesse,  du  bien-être  et  du  luxe,  accablée  par  ses 
ornements. 

K.  J.-D.  Leroy,  Les  ruines  des  plia  beaux  monumenti 
de  la  Grèce,  Paris,  1753  et  1770,  in-fol.;  Hugues  dit 
d'Hancarville,  Recherches  sur  les  arts  de  la  Grèce,  Lon- 
drea,  1785,  3  vol.  in-8*  ;  Stieglitz,  L'Architecture  des  Ati" 
ciens,  en  allem.,  Leipzig,  1706,  in-^;  le  même,  Archéo- 
logie de  l'architecture  des  Grecs  et  des  Romains,  Weiniar, 
1801,  3  vol.  in-80  ;  Meiners,  Histoire  des  arts  de  la  Grèce, 
Paris,  1798,  5  vol.  in-8*;  Winckelmann,  Histoire  de 
l'art  dans  l'antiquité,  Paris,  1802, 3  vol.  in-4«;  J.  Stuart 
et  N.  Revett,  Antiquités  d^ Athènes,  ouvrage  traduit  de 
l'anglais  par  Feuillet,  Paris,  1808-1822,  4  vol.  in-fol.  ; 
Lebrun ,  Théorie  de  l'architecture  grecque  et  romaine , 
Paris,  1807,  in-fol.;  J.-G.  Legrand,  Monuments  de  la 
Grèce,  Paris,  1808,  in-fol.  ;  Aikin ,  Essai  sur  l'ordre  do» 
rique,  en  anglais,  Londres,  1810,  in-fol.  ;  HQbsch  ,  Sur 
l'architecture  grecque,  en  allem.,  2*  édit.,  Heidelberg, 
1824,  in-4®  ;  Rosenthal,  Sur  l'origine  et  le  sens  des  formes 
architectoniques  des  Grecs,  en  allem.,  Berlin,  1830,  in-4o  ; 
Bôtticher,  L'Architecture  des  Hellènes,  en  allem.,  I^ts- 
dam,  1842-52,  3  vol.  in-4*  et  atlas  in-fol.  ;  Forchhammer, 
Sur  les  murs  cyclopéens  de  la  Grèce,  en  allem.,  Kiel, 
1847;  Brunn,  Histoire  des  artistes  grecs ,  en  allem., 
Brunswick,  1850-59,  2  vol.  in-8*;  Leake,  La  Topographie 
d'Athènes,  avec  des  remarques  sur  ses  antiquités,  en  an-  ! 
glais,  Londres,  1821  et  1841,  2  voL  in-8«;  Papworth,. 
Essas  sur  l'architecture  grecque ,  en  anglais  (  en  tète  de 
son  édition  des  Œuvres  de  l'architecte  W.  Chambers), 
Londres,  1820,  in-4*;  E.  Dodwell,  Vues  et  descriptions 
des  constructions  pélasgiqites  ou  cudopéennes  en  Grèce 
et  en  Italie,  en  anglais,  Londres,  1834,  in-fol.;  Expé" 
dition  scientifique  en  Morée,  ordonnée  par  le  gouverne-' 
ment  français ^  Paris,  1835,  3  vol.  in-fol.;  De  Clarac, 
Manuel  de  l'histoire  de  l'art  chex  les  Anciens,  1847, 2  vol. 
in-12;  Penrose,  Recherche  des  principes  de  l'architecture 
athénienne^  en  anglais,  Londres,  1851,  in-fol.      En,  B. 

GSBGQDB  (I^inture).  Les  œuvres  des  peintres  grecs 
sont  perdues  :  il  ne  nous  reste,  pour  en  faire  l'histoire, 
que  les  Jugements  des  Anciens,  les  traditions  et  les  pein- 
tures d'époques  relativement  modernes  et  d'artistes  se- 
condaires retrouvées  dans  les  villes  du  Vésuve.  Mais  cet 
ensemble  de  documents  est  considérable.  Il  est  difficile  de 
fixer  une  date  aux  commencements  de  la  peinture  ;  car 
cet  art  se  borna  longtemps  à  colorier  les  statues,  les  bas- 
reliefs  et  les  temples,  et  à  fournir  des  sujets  de  broderies 
aux  femmes  de  la  Grèce  et  de  l'Asie  Mineure.  Les  tradi- 
tions la  font  naître  à  Corinthe  et  à  Sicyone,  villes  de  po- 
tiers qui  employaient  des  coloristes  pour  orner  les  vases 
de  dessins  en  teintes  plates  ;  nous  avons  quelques-uns 
de  ces  anciens  vases.  On  ne  voit  pas  qu'avant  la  guerre 
médique,  la  peinture  se  soit,  comme  srt,  rendue  indé- 
pendante de  la  sculpture,  de  l'architecture  et  de  la  céra- 
mique. Mais  cette  guerre  contribua  à  donner  aux  Grecs 
la  conscience  de  leur  génie,  et  donna  un  élan  singulier  à 
tous  les  arts.  Cependant  la  peinture  conserva  longtemps 
encore  et  peut-être  toi^ours  l'habitude  de  modeler  ses 
conceptions  d'après  celles  de  la  sculpture,  et  de  disposer 
les  personnages  comme  dans  des  bas-reliefs.  Le  dessin  la 
préoccupa  plus  que  la  couleur^  et  celle-ci  ne  parvint  à 
toute  sa  perfection  qu'au  temps  d'Alexandre.  Jusque-là 
les  figures  sont  en  petit  nombre,  séparées  les  unes  des 
autres  de  façon  à  ne  pas  se  couvrir  mutuellement;  le  co- 
loris est  clair,  transparent,  peu  modelé,  les  raccourcis 
évités  comme  dans  les  bss-reliefs,  la  perspective  presque 
nulle.  -T-  La  asinture  fit  un  grand  pas  vers  llnd^iendanoe 


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tonque,  se  détachant  des  temples  et  des  vases,  elle  com- 
posa libremeiit  sur  des  tables  de  bois  ou  sur  des  surfaces 
étendues  préparées  eiprès.  Polygnote,  qui  Tirait  an 
temps  de  Cimon  et  sous  Pôriclès,  trouTS  rsrt  de  peindre 
presque  dans  Tenfance,  et  en  ftt  un  rirai  de  l'art  de  Phi- 
dias. On  nepeut  douter  que  les  peintures  dont  il  orna  le 
temple  de  Thésée  et  plus  ttuil  les  temples  de  Delphes,  de 
ixiatôe,  et  la  Pinacothèque  d'Athènes,  n'aient  été  de 
ifanples  ornements  courants  ou  des  tableaux  de  dievalet. 
Hais  ce  grand  peintre  avait  décoré  les  murs  de  la  Lesché 
à  Gnide  et  du  Pœcile  à  Athènes  :  dans  le  premier  il  avait 
rq)résenté  la  prise  de  Troie,  le  départ  des  Grecs,  et  l'évo- 
cation des  morts  par  Ulvsse;  dans  l'autre,  la  lutte  des 
Grecs  et  des  Perses.  A  l'exécution  de  ces  derniers  ou- 
vrages travaillèrent  aussi  Mîcon  et  Panoanus.  Dans  le 
même  portique  étaient  encore  représentés  plusieurs  su- 
jets de  l'histoire  d'Athènes.  On  voit  donc  qu'à  l'époque 
de  P^clès  et  même  de  Thémistocle  on  pratiquait  déjà  la 
peinture  historique  sur  de  grandes  dimensions;  et  cela, 
Don-seulement  avec  une  erande  pureté  de  dessin,  oui  n'a 
rien  de  surprenant  dans  Te  pays  des  sculpteurs  et  des  ar- 
chitectes, mais  avec  un  coloris  approprié  aux  person- 
na^ss,  et  nne  expression  en  harmonie  avec  les  caractères 
et  les  situations. 

Si  la  sculpture  contribua  à  la  perfection  du  dessin, 
fart  des  décorations  scéniques  contribua  à  celle  de  la 
perspective,  c-à-d.  surtout  à  la  distribution  des  ombres 
et  de  la  lumière.  ApoUodore  fit  en  cela  une  véritable  ré- 
volution, dont  profita  largement  Zèuxis.  C'est  donc  d'Apol« 
lodore  que  l'on  doit  dater  la  seconde  période  de  la  pein- 
toTB  ;  car  e^est  plus  encore  par  l'art  ces  ombres  que  par 
eelui  du  coloris  ou  même  du  dessin ,  c^ue  l'on  donne  à  un 
tal^ean  cette  magie  qui  produit  l'illusion  et  charme  l'es- 
prit. —  Les  descriptions  oue  lès  auteurs  anciens  nous 
ont  laissées  des  tableaux  de  ce  temps  (v*  siècle)  mon- 
trent aue  la  peinture  était,  quant  à  l'expression,  dans 
nne  voie  tout  autre  que  la  sculpture  :  celle-ci ,  dans  le 
grand  art  de  Phidias  et  de  Poiyclète,  évitait  de  repré- 
senter les  passions  et  de  tourmenter  les  traits  du  visage; 
an  contraire,  les  plus  grands  peintres  d'alon,  Zeuxis, 
Parriiasius,  Timanthe,  recherchaient  ce  que  les  mo- 
dernes appellent  l'expression,  ressource  dont  la  plastique 
n'a  pas  besoin.  Ce  n'est  donc  pas  seulement  la  majesté 
divine  de  Jupiter  et  la  grâce  ftaiinine  d'Hélène,  rendues 
par  une  expression  générale,  que  l'on  recherchait  en 
peinture;  c'était  ou  la  gradation  de  la  douleur  paternelle 
dans  Agamemnon,  ou  cette  variété  des  qualités  et  des 
défauts  du  peuple  même,  que  l'on  s'étudiait  à  exprimer 
par  la  disposition  habile  des  traits  du  visage,  du  geste,  de 
la  pose  et  des  draperies. 

Sur  la  fin  de  ce  siècle,  les  peintres  grecs  fbrmaient  des 
éoolef  rivales  :  celle  dlonie,  dont  Zeuxis  et  Parrhasius 
étaient  les  chefs;  l'école  de  Sicyon»^  sous  Pamphyle; 
réoole  Mlénique  ou  attique,  qui  finissait  alors  et  ne 
povrut  plus  rivaliser  avec  la  science  nouvelle.  De  toutes 
ces  éooles,  celle  de  Simone,  venue  la  dernière,  fut  celle 
qui  porta  le  plus  loin  l'art  de  peindre;  elle  s'étend  sur 
tout  le  siècle  suivant,  et  produit  des  hommes  d'un  génie 
et  d'une  habileté  supérieure.  Leur  premier  maître  fut 
Pamph]^e<,  qui  enseigna  dans  Sicyone  pendant  de  lon- 
gues années;  il  commençait  son  enseignement  par  les 
mathématiques,  c-àpd.  par  le  dessin  linéaire,  la  per- 
spective et  la  projection  des  ombres;  le  raccourci  était 
on  objet  d'étuds  tout  particulier;  la  pureté  du  dessin  la 
plus  sévère  était  exigée  ;  le  coloris  venait  ensuite  :  rendre 
les  caractères  et  les  passions  ne  pouvut  être  enseigné 
dans  l'école  que  d'une  manière  générale;  mais  on  sait 
avec  quelle  Justesse  l'art  de  l'expression ,  soit  générale, 
soit  même  indiridudle  et  locale,  fht  pratiqué  dans  l'école 
de  Siqfone.  Paosias,  Euphrenor,  Échion,  Bfélantbius, 
IGeias,  Théon  de  Samos,  Arisdde  de  Thèbes,  appartien- 
nent à  cette  époque,  sans  compter  une  foule  d'autres  ar- 
fistes  renommés  dont  l'histoire  a  gardé  les  noms.  Hais 
deux  sortont  se  distingnent  dans  ce  iv*  siècle,  Protocènes 
et  Apeile.  Geltd-ci,  âève  de  Pamphvle,  fut  considéré 
par  les  Andens  comme  le  plus  grand  peintre  de  l'anti- 
quité; Il  serait  jnste  peut-être  de  distinguer  dans  ces 
âoges  la  part  qui  revient  de  droit  à  l'art  de  peindre,  et 
celle  qnl  se  rapporte  au  choix  même  des  sc^ets  et  au 
earactère  idéal  des  csuvres.  11  est  incontestable  que  l'art 
était  pins  parfait  et  avait  plus  de  ressources  au  temps 
d'Apdleqne  dans  le  siècle  précédent;  qu'Apelle  tira  des 
fÊSis  excellents  de  ces  moyens,  et  porta  plus  loin  que  ses 
prédécesseurs  la  grioe  des  lignes,  du  dessin,  du  coloris, 

de  

ml, 


la  composition,  rédat  de  la  Jeunesse,  le  charme  sen- 
el,  la  vérité  de  l'expression  et  d<«  ki  représentation. 


Mais,  dans  la  liste  de  ses  œuvres,  on  voit  dominer,  comme 
dans  tout  l'art  de  cette  période,  les  formes  adoucies,  les 
figures  de  femmes,  les  héros  et  les  dieux  dont  la  Jeunesse 
a  quelque  chose  de  féminin  et  de  sensuel  :  la  Vénus  Anc^ 
dyomène  fut  le  chef-d'œuvre  de  ce  grand  peintre.  Proto- 
gènes se  forma  lui-même  et  sans  maître,  ne  sinspirant 
aue  de  la  nature  ;  mais  il  est  érident  qu'il  était  sous 
rinfluence  directe,  non-<6eulement  des  idées  du  temps, 
mais  encore  des  écoles  dominantes  et  particulièrement 
d'Apelle  dont  il  était  l'ami  ;  car  il  ne  faisait  aucun  con- 
traste avec  lui  et  peignait  dans  le  même  genre.  —  C'est 
aussi  pendant  cette  période  du  iv  siècle  que  se  déve- 
loppa la  représentation  individuelle  des  personnes  ou  le 
portrait.  Le  v*  siècle  n'en  faisait  pas,  eu  du  moins  ne 
s'attachait  pas  à  la  ressemblance  matérielle  ;  l'école  de 
Sicyone,  au  contraire,  conçut  le  portrait  à  la  façon  des 
modernes,  c-à-d.  comme  la  reproduction  du  caractère 
physique  et  moral  de  la  personne.  Apeile  excella  dans 
ce  genre.  —  Quant  à  ces  tableaux  de  la  nature  qae 
nous  appelons  paysagei,  il  ne  semble  pas  que  les  Grecs 
les  aient,  à  ancune  époque,  conçus  à  notre  manière; 
si  parfois  la  mer,  les  montagnes,  les  champs  furent 
mis  par  eux  en  peinture,  le  paysage  ne  fbt  qu'un  fond 
de  tableau  où  le  sujet  principal  était  une  action  hu- 
maine ou  une  scène  de  mythologie,  ou  un  détail  em- 
prunté à  la  vie  des  animaux.  Mais  il  ne  parait  pas 
qu'avant  le  siècle  d'Auguste  on  ait  Jamais  représenté  un 
paysage  pour  lui-même  et  par  amour  pour  le  site;  il  n'y 
avait  pas  même  en  grec  de  mot  pour  désigner  ce  genre 
de  peinture. 

Vencaustique,  c.-à-d.  la  couleur  broyée  et  mêlée  à  la 
cire,  et  appliquée  à  chaud  sur  le  substratum.  sorte  d'en- 
duit poli,  puis  recouverte  d'une  couche  de  cne  transpa- 
rente ,  fondue  avec  le  cauterium,  en  manière  de  vernis  t 
telle  fut  la  façon  ordinaire  de  peindre  de  toute  l'antiquité 
gréco-romaine;  mais  l'application  de  la  couleur  sur  une 
surface  murale  encore  mouillée,  c.-^-d.  la  fresque,  fat 
également  pratiquée  par  les  Anciens.  Toutefois  la  véri- 
table peinture,  suivant  les  Grecs,  fut  la  peinture  de  die- 
valet à  l'encaustique. 

La  période  c^ui  suivit  Alexandre  le  Grand  est  marquée 
par  nne  diffusion  générale  de  l'art  de  peindre,  en  Asie, 
on  É^te,  en  Italie.  La  construction  des  grandes  villes 
de  rOnent,  composées  de  palais  et  de  maisons  somp- 
tueuses, employa  un  nombre  étonnant  d'artistes.  Mids  la 
satisfaction  du  goAt  et  du  caprice  individuel  des  riches 
pour  lesquels  ils  travaillaient  fit  déchoir  rapidement  la 
perfection  matérielle  et  morale  de  leun  œuvres.  Cette 
période  ne  peut  opposer  aucun  nom  aux  grands  peintres 
de  la  période  précédente  :  les  scènes  amusantes,  ou  vive- 
ment écUdrées,  les  dieux  représentés  par  leur  côté  co- 
mique, souvent  des  images  d'une  grossière  sensualité, 
tels  sont  les  sqjets  ordinairement  traités  dans  ces  temps 
de  décadence  politique  et  morale.  Les  décorations  inté- 
rieures des  maisons  prennent  une  importance  mineure 
dans  la  peinture  :  les  arabesques,  les  encadrements  de 
panneaux  sur  le  fond  desquels  se  détache  ou  une  scène, 
ou  un  personnage  ou  un  animal  ;  les  tableaux  de  genre 
empruntés  à  la  vie  domestique  et  pdnts  sur  les  mun  des 
appartements;  les  guirlandes  de  fleura  aux  plafonds;  les 

eerapectives  architecturales  prolongeant  à  l'œil  les  cham- 
res  et  les  galeries;  td  est  l'emploi  ordinaire  de  l'art  de 
peindre.  Cest  durant  cette  période  qw  naquit  la  mO' 
saujue,  appliquée  d'abord  à  terre  sur  le  sol,  puis  verti- 
calement contre  les  mure,  où  elle  rividisa  avec  la  pein- 
ture même  dans  la  représentation  des  sujets  les  plus 
complexes  et  les  plus  passionnés.  On  peut  rapporter  k 
cette  époque  la  ^nde  mosaïque  de  Pompéi,  connue  sons 
le  nom  de  Bataille  ^Arbelles. 

La  conquête  des  pays  grecs  par  Rome  fit  passer  en 
Italie  beaucoup  de  peintures  de  dievalet  des  meilleures 
écoles.  La  vue  des  cités  luxueuses  de  Y  Asie  et  de  TÉgypte 
poussa  lés  Romains  dans  la  même  voie  qu'elles,  et  dès 
lore  les  pdntres  grecs  travsillèrent  pour  leun  maîtres  et 
se  soumirent  à  leun  exigence.  Les  sujets  les  plus  tra- 
giques de  l'histoire  héroïque  et  les  portraits,  voilà  pour  la 
peinture  de  chevalet;  la  décoration  des  maisons  et  des 
villas  suivant  le  goût  du  temps,  voilà  pour  le  plus  grand 
nombre  des  artistes.  La  peinture  murale  reçut  donc  un 
nouveau  développement  durant  la  période  ImpMale; 
cette  scénographie  intérieure  donna  naissance  à  la  véri- 
table peinture  de  paysage,  dont  la  création  remonte  à  Lu- 
dius,  sous  le  règne  d'Octave;  toutefois  le  paysage  était 
plutôt  emprunté  à  la  campagne,  telle  que  les  Romidns 
l'avaient  faite,  qu'à  la  nature  libre  des  fleuves,  des  mon- 
tagnes et  de  la  mer  :  des  villas,  des  Jardins,  animés  par 


GRE 


1004 


GRE 


des  scènes  d'uno  gaieté  comique,  tels  étaieat  les  si^ets  de 
Ludittfl. 

Cette  lonsae  période  de  TEmpire  est  marquée  par  une 
décadence  de  plus  en  plus  rapide  de  la  pdnture  :  pas  un 
nom  Y  pas  un  ouvrage  qui  mérite  d'être  signalé,  à  moins 
que  Ton  ne  dte,  sous  Adrien ,  iEtion  et  son  tableau  de 
Èoxanê  et  Aleacandre,  Alais  du  Jour  où  les  esclaves  furent 
chargés  do  peindre  pour  leurs  maîtres  et  que  Fart  fut 
tombé  dans  ce  discrédit,  on  peut  dire  que  la  peinture 
avait  cessé  d'être.  Réfugias  dans  l'empire  d*Orient  et  re- 
cueillie par  les  chrétiens  ainsi  que  ta  mosaïque,  elle  y 
devint  la  peinture  byzantine,  d*où  la  peinture  moderne 
est  sortie. 

V,  Junius,  De  picturâ  veterum^  Rotterdam,  1674, 
in-fol.;  Durand,  Histoire  de  la  peinture  ancienne,  Lon- 
dres, 1725  (c'est  une  traduction  du  35"  liv.  de  Pline); 
Grunde,  Essat  sur  la  peinture  des  Grecs,  en  allem., 
Dresde.  1811,  in-8°;  C.-A.  Bœttiger,  Essai  sur  Varchéo- 
logie  de  la  peinture,  principalement  chez  les  Grecs, 
Dresde,  1811,  2  vol.  in-8°;  Raoul  Rochette,  Peintures 
antiques  inédites.  Paris,  1836,  in-4*^;  Letronne,  Lettres 
(Ttifi  antiqtuùre  a  un  artiste  sur  Vemploi  de  la  peinture 
historique  murale,  1835,  et  un  Appendice,  1837,  in-8®; 
O.  MQller,  Manud  d'archéologie,  traduit  en  français,  Pa- 
ris, 1842,  3  vol.  in-18  ;  De  Clarac,  Manuel  de  Vhistoire  de 
Vart  chez  les  Anciens,  1847,  2  vol.  in-12.         En.  B. 

GRBCQDB  (Sculpture).  La  vie  intellectuelle  exprimée  au 
dehors  par  des  formes  sensibles,  et  cela  dans  sa  généralité 
et  sa  simplicité  la  plus  grande ,  tel  est  le  caractère  do- 
minant de  la  sculpture  grecque  ;  il  s*est  montré  dès  les 
origines  de  cet  art,  et  il  s'est  maintenu  Jusqu'à  la  fin.  La 
sculpture  s'est  trouvée  engagée  dans  cette  voie,  non-seu- 
lement par  la  nature  même  du  génie  hellénique  à  la  fois 
réfléchi  et  plein  d'expansion ,  miûs  aussi  par  la  poésie 
qui  elle-même  chantait  sous  l'inspiration  des  croyances 
religieuses.  En  effet,  la  religion  des  anciens  Grecs  avait 
l'avantage  d'offrir  à  rrmagination  des  symboles  en  nombre 
presque  infini,  et  d'une  signification  assez  précise  pour 
être  représentés  aux  yeux  dans  touto  leur  diversité.  Toute 
l'antiquité  s'accorde  à  dire  que  les  Grecs  n'eurent  long- 
temps d'autres  statues  que  celles  des  <Ueux.  Ces  statues 
étaient  des  idoles,  mot  qui  signifie  image,  représentation 
figurée;  on  les  conservait,  soit  dans  des  constructions 
sacrées  qui  étaient  la  demeure  des  dieux  (  votoç  ),  soit  dans 
des  encântes  {temenos)  circoubcrites  et  inaccessibles  au 
vulgaire.  Les  dieux,  conçus  comme  des  puissances  ayant 
chacune  son  domaine  parmi  les  phénomènes  naturels, 
reçurent  des  attributs  en  rapport  avec  ces  phénomènes 
eux-mêmes  :  ainsi  Jupiter,  dieu  qui  préside  aux  mé- 
téores, eut  le  foudre  et  l'aigle,  oiseau  des  airs  ;  Neptune 
eut  le  trident,  c.-4-d.  le  harpon,  arme  des  navigateurs; 
Apollon,  dieu  qui  a  son  trône  dans  le  soleil,  eut  l'arc  et  la 
flèche,  symbole  des  rayons  pénétrants  du  Jour.  Ces  attri- 
buts essentiels  passèrent  des  sanauaires  dans  les  ateliers 
des  sculpteurs,  avec  leur  valeur  significative.  A  mesure 
aue  l'art  de  tailler  la  pierre  et  le  bois  ou  de  modeler 
1  arçile  se  perfectionna,  les  formes  des  dieux  et  de  leurs 
attributs  acquirent  plus  de  netteté  et  de  précision.  Les 
corps  divins  ne  durent  plus  sembler  faits  sur  un  modèle 
unique  ;  il  fallut  que,  par  les  proportions  de  leurs  mem- 
bres, par  leurs  gestes,  par  l'action  où  on  les  représentait, 
ils  exprimassent  la  nature  même  des  phénomènes  dont 
ils  étaient  les  régulateurs.  En  effet  le  symbole  n'est  autre 
chose  que  la  représentation,  sous  une  forme  sensible, 
d'idées  abstraites  qui  n'ont  en  soi  rien  de  matériel  ni  de 
figuré.  IjSl  s}rmbolique  contient  donc  l'explication  de  la 
statuaire  antiaue,  laquelle  reste  sans  elle  une  énigme  in- 
déchiffrable; ta  première  condition  pour  comprendre  et 
sentir  les  œuvres  de  la  sculpture  des  Grecs,  c'est  d'ap- 
profondir leur  mythologie.  Ainsi  entendue  dans  son  vrai 
sens,  la  plastique  ancienne  est  l'art  spiritualiste  par  ex- 
cellence, puisque,  loin  de  donner  aux  passions  nées  de  la 
matière  une  expression  qui  émeut  l'àme  de  sentiments 
bas,  elle  écarte  d'abord  ces  sentiments  eux-mêmes,  et  ne 
se  sert  des  formes  corporelles  que  pour  exprimer  et 
rendre  saisissables  au  vulgaire  les  conceptions  les  plus 
immatérielles  de  l'esprit.  Telle  est  aussi  la  cause  et  l'ori- 
gine de  ce  caractère  dominant  des  œuvres  antiques,  le 
calme  du  visage,  la  sérénité  d'&me  des  personnages 
divins. 

Toutefois,  après  le  grand  siècle  de  Périclès,  lorsoue  la 
majesté  des  dieux  eut  été  rendue  dans  son  expression  la 
plus  sublime,  et  que  l'esprit  public,  devenu  plus  philo- 
sophique et  moins  croyant,  eut  commencé  à  faire  avec 
Socrato  un  retour  sur  lui-même ,  les  sculpteurs  intro- 
duisirent peu  à  peu  la  passion  dans  les  conceptions  de 


la  plastique,  et  accrurent  ce  que  les  modernes  appellent 
l'expression  (  ta  pathè)  ;  comme  les  sujets  donnés  par 
la  religion  étaient  trop  symboliques  pour  comporter  la 
variété  et  la  violence  des  passions  humaines,  ils  en  vin» 
rent  à  représenter  celles-ci  directement,  et  à  reproduire 
non-seulement  des  sujets  humidns,  mais  encore  des  per- 
sonnes réelles  et  vivantes.  L'usage  des  portraits-statues 
et  des  bustes  se  répandit  promptement  au  temps  des  rois 
macédoniens,  et  devint  universel  sous  la  domination  ro- 
maine. Les  Anciens  excellèrent  dans  ce  genre,  comme  ils 
avaient  excellé  dans  la  sculpture  symbolique;  mais, 

auelle  qu'ait  été  leur  habileté  à  rendre  la  ressemblance 
es  personnes,  même  idéalisées,  on  doit  reconnaître  que 
l'usage  d'élever  des  statues  à  tout  venant  marque  un 
abaissement  de  l'art  antique. 

L'art  du  sculpteur  comprenait  dans  l'antiquité,  non- 
seulement  la  statuaire  proprement  dite,  dont  les  matièrea 
ordinaires  étaient  le  bois,  la  pierre,  et,  bientôt  après,  les 
métaux,  mais  encore  le  bas-relief,  qui  tient  le  milieu 
entre  la  statuaire  et  la  peinture ,  la  toreutique  ou  l'art  de 
ciseler  et  do  repousser  les  métaux ,  la  céramique  même, 
dans  une  certaine  mesure,  et  enfin  l'art  d'orner  les  con* 
structions  de  formes  en  relief  empruntées  soit  à  la  géo- 
métrie, soit  à  la  végétation,  soit  même  au  r^e  animal. 
Les  modernes  ont  suivi  en  cela  les  usages  des  Grecs,  et 
cultivent  d'après  les  mêmes  principes  ces  différentes 
branches  de  L'art  du  sculpteur. 

On  peut  diviser  en  cinq  périodes  l'histoire  de  la  sculp- 
ture cnez  les  Grecs  :  les  temps  primitifs  ou  la  scul|>ture 
hiératique,  la  période  des  guerres  médianes,  le  siècle 
de  Périclès,  la  période  macédonienne,  et  la  période  ro* 
mai  ne. 

/■'■  Période,  —  Les  servantes  d'or  de  Vulcain  et  le  bou- 
clier d'Achille,  dans  Homère,  ne  peuvent  être  considérés 
comme  faisant  partie  de  l'histoire  de  la  sculpture,  et 
prouvent  tout  au  plus  que  les  Grecs  de  cette  époque 
avaient  déjà  des  notions  de  la  plastique.  Il  n'en  est  pas 
de  même  des  lions  de  Mycènes,  le  plus  ancien  ouvrage 
de  sculpture  qui  nous  soit  venu  de  ces  temps  héroïques, 
conception  symbolique  analogue  sans  doute  aux  tètes  de 
gorgone  et  aux  images  de  dragon  décrites  par  les  anciens 
auteurs;  ce  sont  là  des  sculptures  adhérentes  ou  bas- 
reliefs,  liais  ce  qui  caractérise  la  plus  ancienne  statuaire» 
c'est  l'usa^,  très-général  alors,  des  Çôova  ou  statues  en 
bois  des  divinités.  C'étaient  de  v^tables  idoles,  conser- 
vées, soit  dans  des  temples,  soit  dans  des  grottes,  comme 
le  Palladium  de  Troie  et  la  Cérès  de  Phigalie  ;  ces  idoles 
étaient  souvent  monstrueuses,  parce  que  l'art,  ne  distin- 

Suant  pas  encore  les  doctrines  vraiment  symboliques 
'avec  celles  qui  doivent  rester  à  l'état  de  mystères, 
faute  de  pouvoir  être  représentées  aux  veux,  chargeait  ces 
statues  de  formes  bizarrement  assemblées  et  multipliées. 
Ces  idoles  de  bois  étaient  de  toute  grandeur,  depuis  la 
taille  humaine  Jusqu'à  celle  d'une  simple  poupée;  elles 
demeurèrent,  comme  objets  de  vénération,  longtemps 
après  que  l'art,  dégagé  des  entraves  du  culte,  eut  donné 
des  mêmes  divinités  des  images  plus  belles,  et  en  réalité 
plus  Justes.  La  roideur,  l'immobilité»  les  Jambes  réunies 
comme  celles  des  statues  égyptiennes,  les  yeux  à  peine 
modelés  ou  d'une  fixité  singulière,  l'adhérence  des  mains 
et  des  bras,  tels  étaient  les  traits  ordinaires  de  ces  anti- 
ques ébauches,  auxquelles  on  rendait  dans  les  sanctuaires 
les  mêmes  soins  qu'à  des  personnes  vivantes,  soins  qui 
du  reste  furent  rendus  dans  la  suite  aux  grandes  œuvres 
des  sculpteurs,  conservées  dans  les  plus  beaux  temples 
et  aux  époques  les  moins  crédules.  La  famille  Cretoise  de 
Dédale,  établie  en  Attique,  celle  de  Smilis  à  Eglne,  furent 
de  véritables  écoles,  ou  la  sculpture,  acquérant  plus  de 
liberté,  fut  enfin  un  art  Dédale  ouvrit  les  yeux  aes  sta- 
tues, détacha  du  corps  les  bras  et  les  Jambes,  ce  oui  fit 
dire  qu'il  les  anima.  Sicyone  et  l'île  de  Rhodes  furent 
aussi  des  centres  où  se  perfectionnèrent  dès  cette  époque 
les  représentations  symboliques  des  dieux.  En  outre,  sur 
la  fin  de  cette  période  hiératique,  parait  l'art  de  repré- 
senter en  métal  battu,  c'est-à-oire  repoussé  au  marteau, 
non-seulement  des  scènes'  mythologiques  de  petites  di- 
mensions, mais  des  divinités  de  la  taille  d'un  homme. 
Les  potiers  modelaient  en  petit  des  sigets  analogues,  et 
Ton  trouve  souvent  encore  dans  l'Attique  des  terres  cuites 
de  ces  anciens  temps. 

//"  Période.  —  Le  développement  de  la  poésie ,  qui 
d'épique  devient  lyrique  et  dramatique,  c'est-à-dire  plus 
humaine  et  plus  passionnée  ;  les  relations  de  plus  en  plus 
suivies  des  Grecs  avec  l'Asie  ridie  et  civilisée;  le  perTeo- 
tionnement  des  métiere  et  surtout  du  travail  des  métaux 
dont  les  outils  sont  fabriqués  ;  en  un  mot  le  progrès  de 


GRE 


1005 


ORE 


reipfit  public  en  toutes  choses  :  telles  sont  les  causes  de 
rtctirité  féconde  déployée  dans  la  sculpture  au  temps  des 
|Qerres  médiques.  Cette  période  de  puis  d*un  siècle  (de 
570  k  450  environ  )  n'est  pas  encore  celle  de  la  perfec- 
tion; mids  elle  est  marquée  par  un  effort  puissant  du 
génie  grec  pour  échapper  aux  formes  hiératiques,  et, 
sans  perdre  la  tradition,  atteindre  le  naturel  et  Texpres- 
'don  de  la  rie  dans  sa  plénitude  et  sa  liberté.  L*art  en 
.  même  temps  se  Tulganse,  et  passionne  non-seulement 
.  des  individus  on  des  familles  crartistest  mais  des  cités  et 
'  des  peuples  entiers  ;  les  États  consacrent  à  des  œuvres 
d*aiichitectnre  et  de  sculpture  une  partie  notable  de  leurs 
rerenuB.  La  plastique,  sous  toutes  ses  formes,  sort  des 
sanctuaires,  et  devient  partie  intégrante  de  la  vie  pu- 
blioue  et  privée.  En  même  temps  Te  style,  encore  tout 
archaïque  an  commencement  de  cette  période,  devient 
de  plus  en  plus  naturel  en  se  sécularisant;  Tusage  des 
Jeux  {aoônês)  et  des  luttes  athlétiques,  devenu  eénéral, 
offre  aux  yeux  des  sculpteurs  les  formes  du  corps  humain 
dans  ce  qu'elles  ont  ae  plus  dégagé  et  de  plus  mobile; 
les  pompies  sacrées,  les  théories,  les  chœurs  d'hommes 
et  de  femmes,  les  montrent  dans  Teurythmie  et  la  dé- 
cence la  plus  complète  :  de  aorte  qu'ii  la  fin  de  cette  pé- 
riode, la  roidenr  antique,  la  dureté  du  dessin,  la  lourdeur 
des  proportions,  le  manque  de  rhvthme  dans  les  gestes 
et  de  caractère  [Hhos)  dans  les  figures,  ont  en  grande 
partie  disparu.  —  Il  nous  reste  un  assez  grand  nombre 
d'ouvrages  de  cette  période,  peu  de  statues,  beaucoup  de 
bas-reliefe  et  de  terres  cuites.  En  effet,  l'usage  du  Dois 
diqMndt  dans  le  milieu  du  vi* siècle;  l'or  et  les  matières 
précieuses  sont  employés  pour  les  statues  isolées  des 
dieux,  et  en  préparent  ia  spoliation  et  la  destruction  ;  les 
bas-reliefs  des  temples,  par  leur  position  élevée,  et  les 
Uxres  cuites,  par  leur  peu  de  valeur  matérielle,  échappent 
mieux  an  ravage.  Dipœnus  et  Scyllis  de  l'école  de  Dé- 
dale, Gitiadas  de  Lacédémone,  Canachus  de  Simone, 
torentiden  et  fondeur,  Agéladas  d'Argos,  fondeur,  Critias 
dTAthènes,  Onatas  d'Égine  :  tels  sont  les  noms  les  plus 
célèbres  de  cette  période,  où  l'art  se  répand  dans  toutes 
les  parties  de  la  Grèce.  L'emploi  de  la  pierre  et  bientôt 
du  marbre,  qui  font  ressortir  par  leur  couleur  même  la 
pureté  des  lignes,  contribue  au  perfectionnement  du  bas- 
relief;  celui-ci  est  alors  pratiqué  en  grand  et  dans  tout 
le  monde  hellénique,  depuis  la  Sicile  jusqu'en  Asie  Mi- 
neure; on  en  décore  des  autels,  des  bases  de  statues,  et 
surtout  des  temples,  qui  le  reçoivent  sur  quatre  de  leurs 
parties  extérieures,  le  fronton,  les  métopes,  la  frise,  et 
les  acrotères.  Voici  les  principaux  ouvrages  qui  nous 
restent  de  cette  période:  les  bas-reliefs  de  Sélinonte  et 
ceux  d^Asaos,  la  rssfa  Giustiniani  aux  draperies  presque 
cannelées,  YatUd  dês  douze  dieux  (au  Louvre),  ouvrage 
plein  d'élégance,  les  sculptures  d'Égine,  œuvre  considé- 
rable conservée  dans  la  Glyptothèque  de  Munich. 

IIJ^  Période,  —  La  prépondérance  d'Athènes,  devenue 
le  centre  du  monde  grec  par  son  génie  démocratique,  se 
hàx  sentir  dans  les  arts  depuis  le  commencement  de 
cette  période.  On  avait  placé  vers  la  fin  le  point  culmi- 
nant  de  l'art  chez  les  Grecs;  une  plus  Juste  appréciation 
des  oBuvres  antiques  l'a  fait  descendre  au  commence- 
ment ;  aojourd'hui,  c'est  aux  temps  qui  ont  immédiate- 
ment précédé  la  guerre  du  Péloponnèse  que  l'on  attribue 
les  plus  beaux  ouvrages  de  la  sculpture  grecque.  Les 
formes  hiératiques  ont  entièrement  disparu,  pour  faire 
place  su  naturel  le  plus  libre  et  le  plus  vrai  ;  mais  la 
sensualité  n'est  pour  rien  encore  dans  les  conceptions 
des  sculpteurs;  le  nu  est  traité  avec  un  sentiment  idéal 

£1  exdut  toute  passion,  toute  idée  chamelle  :  le  calme 
os  la  dignité,  la  modération  dans  la  puissance,  la  sa- 
gesse avec  la  raison  supérieure,  caractérisent  ces  person- 
nages divins  de  l'époque  de  Périclès,  uniquement  occupés 
de  leurs  fonctions  surnaturelles,  et  n'épousant  les  pas- 
sions humaines  que  dans  une  mesure  compatible  avec 
leur  majesté.  A  aucune  époaue  de  l'histoire,  la  sculpture 
if  a  atteint  à  une  aussi  granae  hauteur  idéale.  —  Mais  la 
guerre  du  Péloponnèse,  accompagnée  de  fléaux,  de  revers 
et  dQ  crimes,  porta  un  coup  k.  l'esprit  public  et  le  fit  d^ 
choir:  on  songea  davantage  h  Jouir  de  la  vie;  et  les 
Bcolptears,  dont  les  moyens  pratiques  se  perfectionnaient 
disque  Jour,  lurent  entraînés  vers  des  sujets  où  les  pas- 
nons  humaines  et  la  sensualité  pussent  trouver  niace 
(Yoy.,  sur  cette  transformation  de  l'esprit  public  les  ar- 
ticles, UUératwre  et  Architecture  grecques).  On  cessa  de 
représenter  les  divinités  d'un  caractère  tout  k  fait  m&le, 
d*an  âge  mûr  ou  d'une  nature  impassible,  et  Ton  choisit 
de  préférence  celles  dont  les  formes  Juvéniles  avaient 
^oeiqoe  chose  de  féminin,  comme  Bacchus,  Apollon, 


l'Amour;  il  en  fut  de  même  des  déesses,  et  tandis  que 
Minerve  est  le  grand  modèle  de  l'époque  de  Périclès, 
celui  des  années  postérieures  est  Vénus.  La  grâce  et  le 
charme  des  formes  féminines,  parfois  même  avec  un 
certain  mélange  de  sensualité,  remplacent  vers  le  milieu 
de  cette  période  la  puissance  idéale,  la  beauté  sévère  et 
toute  spirituelle  du  grand  art  antérieur.  —  La  première 
époque  nous  offre  les  noms  de  Phidias  et  de  Polyclète, 
qui  représentent,  le  premier  l'école  athénienne,  le  se- 
cond récole  de  Sicyone  et  d'Argos.  Autour  do  ces  grands 
noms  se  groupent  ceux  de  Polygnote,  peintre  et  sculp- 
teur, de  Myron,  élève  d' Agéladas,  de  Callîmaque,  toreu- 
ticien  et  fondeur,  du  grand  Alcamènes,  élève  et  rival  de 
Phidias,  d'Agoracrite,  de  Socrate  le  philosophe,  et  d'une 
foule  d'artistes  de  renom  que  nous  ne  pouvons  citer  ici. 
Les  grandes  œuvres  de  cette  époque  si  féconde,  œuvres 
dont  une  partie  nous  est  parvenue,  sont  :  la  Pallas  du 
Parthénon,  grande  statue  a'or  et  d'ivoire  par  Phidias;  le 
Jupiter  d'Olympie,  où  toute  la  majesté  du  dieu  était 
rendue;  la  grande  Polios  promacnos  de  la  citadelle 
d'Athènes;  Y  Aphrodite  des  Jardins,  par  Alcamènes;  le 
Doryphore  de  Polyclète,  devenu  le  canon  des  propor- 
tions du  corps  humain  ;  sa  Junon  d'Argos,  son  Atiuuone: 
la  vache  de  Myron  ;  et  ces  innombrables  sculptures  qui  \ 
ornèrent  les  temples  grecs  relevés  à  cette  époque,  et  dont 
nous  possédons  de  si  beaux  débris  dans  les  reliefs  du 
Parthénon,  de  Phigalie,  et  dans  les  caryatides  de  l'Érech* 
theion  d'Athènes.  —  La  seconde  époque  est  celle  de  Ly* 
sippe  et  de  Praxitèle.  Il  n'y  a  pas  de  transition  entre  la 
manière  de  Phidias  et  la  leur  :  le  contraste  est  frappant; 
ils  créent  un  ordre  de  beauté  toute  nouvelle,  et  font  dire 
au  marbre  tout  ce  que  la  forme  humaine  peut  avoir 
d'élégance,  de  grilce,  d'harmonie,  de  souplesse  et  de 
charme  voluptueux.  Scopas  de  Paros  entra  le  premier 
dans  cette  voie,  où  il  fut  suivi  par  toute  la  nouvelle  gé- 
nération d'artistes:  Polyclès,  Léocharès,  Euphranor  le 
peintre,  Praxitèle,  Timothée,  Lysippe,  Silanion,  etc. 
Leurs  œuvres  furent  estimées  à  une  incroyable  valeur, 
qui  s'accrut  encore  dans  les  siècles  suivants.  Voici  les 
plus  célèbres  :  V Apollon  citharède  de  Scopas,  son  groupe 
d* Achille,  sa  Vénus  populaire,  k  Élis  ;  les  Niobides,  que 
nous  possédons  encore  et  qui  sont  l'œuvre  ou  de  Scopas 
ou  de  Praxitèle  ;  de  ce  dernier,  le  Satyre  periboètos^  que 
nous  possédons  peut-être  sous  te  nom  de  Faune,  VAmour 
de  Thespies  consacré  par  Phryné,  la  Vénus  de  Cnide 
dont  celle  de  Médicis  semble  être  une  imitation  impar- 
faite; le  Sauroctone  du  Louvre;  V Hercule  Famèse,  imité 
de  Lysippe  par  Glaucon  ;  la  statue  d'Alexandre  par  Ly- 
sippe, dont  une  copie  (la  tète  seule)  existe  au  Louvre. 

tV*  Période, —  La  période  macédonienne  est  marquée 
par  un  développement  du  génie  grec  dans  les  pays  con- 
quis par  Alexandre  le  Grand,  et  par  une  réaction  de  ces 
pays  eux-mêmes  sur  le  génie  grec.  La  construction  de 
villes  entières  en  Asie  et  en  Egypte  par  des  artistes  grecs 
augmenta  le  nombre  de  ces  derniers,  en  même  temps  que 
les  richesses  de  l'Orient,  dont  les  conquérants  avaient  le 
maniement  et  dirigeaient  l'emploi,  mettaient  aux  mains 
des  sculpteurs,  des  architectes  et  des  peintres,  des  res- 
sources presque  infinies.  L'hifluence  ue  l'Orient  sur  la 
sculpture  grecque  se  remarque  surtout  dans  le  goût  de 
la  magnificence  et  des  proportions  grandioses;  maison 
même  temps  que  le  goût  des  beaux-arts  se  répand  chez 
les  particuliers,  les  besoins  du  luxe  et  d'une  vie  sensuelle 
font  pénétrer  la  sculpture  Jusque  dans  les  appartements 
privés,  et  l'on  voit  se  produire  alors,  k  côté  des  œuvres 
colossales  faites  pour  le  public,  une  multitude  innom- 
brable de  petits  ouvrages  de  sculpture,  soit  de  marbre, 
soit  de  métal,  soit  de  pUttre  moulé,  qui  transforment  les 
maisons  en  musées.  Les  autres  arts  fournissent  aussi 
leur  contingent  à  ces  décorations  intérieures,  lUtes  du 
reste  avec  un  goût  exquis  et  une  grande  élégance.  Il  est 
bien  remarquable  que,  dans  cet  immense  développement 
oue  reçoit  le  génie  artiste  de  la  Grèce,  il  n'y  a  pour  ainsi 
dire  aucun  nom  qui  ait  surnagé  et  que  l'on  puisse  rap- 
procher des  grands  noms  des  temps  antérieurs.  Cepen- 
dant l'étude  de  la  nature  physique  et  morale  de  l'homme 
étut  poussée  beaucoup  plus  loin,  et  avait  atteint  ce  degré 
d'analyse  que  la  sculpture  ne  peut  pss  dépasser  sans 
devenir  une  dissection  anatomique  on  un  traité  de  psy- 
chologie: mais  ces  connaissances  scientifioues,  par  l'excès 
même  de  leur  précision,  nuisaient  à  l'inspiration  et 
étouffaient  l'idée  de  l'ensemble  ;  de  plus  elles  mettaient 
la  sculpture  à  la  portée  de  iout  le  monde,  et  faisaient  que 
les  artistes  semblaient  tous  également  habiles.  L'art, 
durant  cette  période,  gagne  donc  en  étendue  ce  qu'il 
pod  en  inspiration  :  il  s'est  vulgarisé,  mais  en  mêms 


ORE 


1006 


GRE 


temps  11  est  devenu  plus  vulgaire  ;  ses  œuvres  sont  moins 
recherchées  pour  leur  beauté  idtele  que  comme  des  or- 
nements de  luxe;  et  ce  besoin  du  luxe,  auquel  la  sculp- 
ture répond  alors  pour  sa  part,  n'est  pas  moins  recon- 
naissable  dans  les  ouvrages  publics  que  dans  ceux  que 
commandent  les  riches  particuliers.  — L'étude  analytique 
des  formes  et  des  passions  conduisit  Fart  vers  Texpres- 
sion  de  l'individuel,  où  la  tendance  de  la  période  anté- 
rieure le  conduisait  naturellement.  Les  rois  macédoniens, 
les  grands  personnages,  les  riches  particuliers,  les 
hommes  célèbres,  commencèrent  à  voir  leurs  traits  re- 
présentés en  marbre  ou  en  bronze;  et  pour  laisser  encore 
à  ces  figures  privées  d*idéal  quelque  chose  qui  sembl&t 
les  relever  an-dessus  de  la  nature  individuelle;  on  repré- 
senta fîréquemment  ces  hommes  du  jour  revêtus  d*onie- 
ments  et  d'attributs  divins  appropriés  à  leur  caractère.  — 
Quelques  ouvrages  eidstants  permettent  d'étudier  l'art  de 
cette  époque  dans  ce  qu'il  a  fait  de  meilleur  :  citons  le 
Laocoony  comme  expression  détaillée  d'un  sentiment 
complexe  et  multiple  merveilleusement  étudié  ;  le  GlaMa- 
Uur  d'Agasias  (au  Louvre),  comme  étude  admirable  des 
formes  anatomioues  ;  le  taureau  Pamè$ê,  reconnu  infé- 
rieur à  son  anaenne  renommée;  le  CoIossê  d»  Rhodes, 
œuvre  de  Charès,  élève  de  Lysippe. 

V*  Période.  —  Les  principaux  centres  de  sculpture 
avaient  été  en  Asie  pendant  la  période  macédonienne  i 
Rhodes,  Pergame,  Éphèse,  riches  cités,  avaient  vu  fleurir 
des  écoles  demeurées  célèbres.  La  conouète  romaine  eut 
pour  suite  le  pillage  de  la  Grèce  et  de  l'Asie,  qui  virent 
transporter  à  Rome  leurs  plus  beaux  ouvrages  de  sculp- 
ture. Cette  nouvelle  capitale  devint  comme  un  musée  où 
se  trouvèrent  réunies  des  œuvres  de  toutes  les  époques 
et  de  toutes  les  écoles;  les  artistes  grecs  y  furent  attirés, 
et  par  ces  modèles  nombreux,  et  par  les  travaux  que 
les  riches  patriciens  de  l'école  des  Sdpiont  leur  firent 
exécuter.  Les  villes  élégantes  de  l'Asie  Mineure  et  de 
l'Egypte  devinrent  les  modèles  sur  lesquels  se  formait  la 
nouvelle  cité  romaine;  et  de  plus,  les  habitudes  agricoles 
des  Romains  et  les  progrès  ne  la  grande  propriéîiâ  peu- 
plèrent les  campâmes  de  villas  somptueuses,  qu'il  fallut 
orner  des  dépouilles  du  monde  grec  et  des  œuvres  d'ar- 
tistes contemporains;  les  villes  municipales  d'Italie  ne 
tardèrent  pas  à  imiter  la  grande  ville;  et  ainsi  le  monde 
des  artistes  grecs  émigra  pour  ainsi  dire  tout  entier  dans 
eette  nouvelle  patrie.  Biais  il  fallut  travailler  vite,  et  se 
conformer  souvent  aux  exigences  de  maîtres  dont  le  génie 
n'a  Jamais  eu  la  finesse  et  la  délicatesse  exquises  du  génie 
des  Hellènes.  La  cinquième  période  est  donc  celle  de  la 
décadence  :  plus  d'inspiration  pour  des  artistes  travail- 
lant par  ordre;  plus  d'élévation  dans  les  idées;  le  luxe  et 
la  mollesse,  l'amour  des  plaisirs  et  l'ostentation,  se  sont 
mis  à  la  place  des  grandes  pensées  religieuses  ou  des  tra- 
ditions de  gloire  nationale  qui  avaient  inspiré  les  siècles 
de  liberté.  Il  est  digne  de  remarque  cependant  que  les 
moyens  matériels  dont  la  sculpture  disposait  se  perfection- 
naient chaque  Jour  :  le  grand  colosse  de  Nérôn ,  statue 
d'airain  fondue  par  Zénodore,  n'avait  pas  moins  de  36  met. 
de  haut,  et  dépassait  le  colosse  de  Rhodes.  L'art  de  repré^ 
senter  les  personnes  vivantes  se  r^nd  de  plus  en  plus 
et  devient  véritablement  l'art  de  la  période  romaine,  soit 
qu'on  les  revête  d'ornements  divins  comme  dans  la  pé- 
riode macédonienne,  soit  qu'on  les  reproduise  au  natu- 
rel. Cette  même  tendance,  désormais  invincible,  se 
retrouve  dans  la  reproduction  sculpturale  des  scènes  his- 
toriques, où  tout  est  fait  d'après  nature  et  sans  idéal  :  tels 
sont  les  baa-reliefs  des  arcs  de  triomphe  à  Rome.  Le 
nombre  des  portraits,  soit  en  pied,  soit  en  buste,  qui  nous 
restent  du  temps  des  Empereurs,  est  considérable  :  ils 
remplissent  tous  les  musées  de  TEurope  ;  les  femmes  y  sont 
en  grand  nonobre,  représentées  avec  leur  costume  et  leur 
coiflVire  orielnale,  rarement  disgracieuse.  —  Quant  aux 
sculptures  des  édifices  pnblica,  elles  sont  généralement 
lourdes  et  négligées,  souvent  grossières  et  presque  bar- 
bares; cette  remarque  s'applique  également  aux  orne- 
ments sculptés  des  temples  et  des  autres  édifices  romains, 
dont  la  laideur  est  choquante  si  l'on  rient  à  les  comparer 
aux  ornements  analogues  des  édifices  grecs.  —  L'époque 
de  Trajan  et  d'Adrien  produisit  plusieurs  OBuvres  pour  les- 
quelles la  critique  peut  faire  quelques  réserves  ;  nous-clte- 
rons  la  colonne  Trajane,  la  statue  de  Nerva  au  Vatican, 
celle  de  lfaro-i4ttré<e  aujourd'hui  sur  la  place  du  Capitole, 
ouvrages  estimables.  Mais  les  efforts  des  Antonins  ne  pu- 
rent relever  un  art  marchant  vers  sa  décadence,  et  qui, 
après  avoir  perdu  l'inspiration  et  l'idéal,  avait  fini  par 
oublier  le  naturel,  la  grftce  des  formes,  et  Jusqu'à  la  Jus- 
tesse dfli  proportions.  Le  dessin  devenait  incorrect  et  de 


convention.  Après  l'invasion  des  idées  panthélsdqœa  dt 
l'Orient  dénaturées  et  amoindries,  les  figures  des  dieux 
se  transforment  pour  s'accommoder  à  un  idéal  indéds,  à 
une  conception  mystique  et  nécessairement  informe.  Lbs 
premières  osovres  chrétiennes  sont  sèches  et  maigres,  et 
d'ailleurs  appartiennent  plus  souvent  k  la  peinture  «ra'à 
la  sculpture.  Les  invasions  des  Rarbares  portent  le  der- 
nier coup  à  un  art  qoi  n'avait  pas  duré  moins  de  qua- 
tone  siècles.  V*  H.  Meyer,  Histoire  tes  arts  pUutiques 
çhes.  les  Grecs  et  les  Romains,  en  allem.,  Dresde,  1824-36, 
3  vol.  in-8<»  ;  Thiersch,  Sur  les  époques  des  arts  plas^ 
tiques  chez  les  Grecs,  en  allem.,  Munich,  2*  édiu,  1S20, 
in-8<»  ;  Hirt,  Histoire  des  arts  plastiques  chen  les  Anciens, 
en  allem.,  Rerlin,  1833,  in*^.  Eu.  R. 

GRECQUE  (Musique).  Le  système  musical  des  Greca 
s'est  développé  peu  à  peu  depuis  les  temps  les  plua 
anciens  de  leur  hisloire  héroïque  Jusqu'au  v*  siècle  av. 
J.-C,  époque  où,  sous  l'influence  directe  de  l'École  py- 
thagoricienne, il  se  présenta  dans  son  ensemble  et  avee 
tons  ses  moyens.  Les  instruments  se  sont  aussi  perfec- 
tionnés par  degrés  :  depuis  la  simple  flûte  de  Pan  et 
l'instrument  fait  d'une  écaille  de  tortue  Jusqu'à  la  ma- 
gadis  à  ringt  cordes,  il  y  a  une  série  de  changements 
dans  la  théorie  et  dans  la  pratique  musicales;  et  ces  chan- 
gements accompagnent  le  développement  parallèle  de  la 
poésie  lyrique  Jusqu'au  Jour  où  l'instrumentation  s'est 
séparée  du  chant,  et  a  produit  dans  les  Odéons  et  les 
concours  musicaux  des  œuvres  plus  compliquées.  Comme 
le  système  musical  des  Anciens  diffère  notablement  du 
nùtre,  nous  allons  l'exposer  en  noua  plaçant  au  point  de 
vue  des  Grecs  eux-mêmes. 

Les  sons  forment  une  série  continue  de  l'aigu  au  grave; 
on  l'obtient  en  faisant  glisser  le  doigt  sur  une  corde 
tendue  et  ribrante;  dans  cette  série  l'on  ne  distingue 
aucune  note  particulière.  Mais,  en  arrêtant  le  doigt  à 
certaines  places  et  en  supprimant  le  glissement  intermé- 
diaire, on  obtient  des  sons  distincts  ou  notes.  Des  lois 
mathématiques  président  à  la  distribution  des  intervalles 
de  ces  notes  et  en  règlent  la  longueur.  L'oreille  observe 
dès  lors  que  les  sons  s'appellent  les  uns  les  antres  et  for- 
ment des  consonnances  mélodiques.  Toutefois,  ces  con- 
sonnances  peuvent  être  établies  sur  une  partie  quelconque 
de  la  corde,  c-à-d.  de  la  série  indistincte  des  sons.  On 
peut  prenibre  pour  point  de  départ  de  la  série  conson- 
nante  soit  la  note  aiguë,  soit  la  gprave  ;  on  lui  donne  alors 
le  nom  de  note  du  ton  (tovoç,  tension  de  la  corde)  :  les 
Grecs  prenaient  pour  note  du  ton  la  note  la  plus  aiguë  de 
la  série,  et  solfiaient  en  descendant. 

Il  n'eixiste  dans  la  série  consonnaste  que  quatre  notes 
fixes,  formant  trois  intervalles  :  oe  sont  celles  que  nous 
nommons  la  première,  la  seconde,  la  quinte  et  l'octave. 
Mais  l'octave  n'est  que  la  répétition  de  la  première,  soit 
à  l'aigu,  soit  au  grave;  de  sorte  que,  si  l'on  continue  dans 
ces  deux  sens  à  faire  résonner  ces  notes  fondamentales 
dans  toute  la  portée  de  l'oreille  humaine,  on  obtient  tou- 
fours  cette  même  série  se  répétant  elle-même.  Les  An- 
ciens ont  nommé  ton  rintervalle  oui  s^Mure  la  première 
de  la  seconde;  de  la  seconde  à  la  cinquième,  et  de  la 
cinquième  à  l'octave.  Il  y  a  deux  intervalles  de  quarte. 
Le  ton,  partagé  en  deux,  forme  des  demi-Ums;  les  demi- 
tons,  partage  en  deux,  forment  des  quarts  de  ton, 
auand  les  cordes  sont  entre  elles  comme  80  et  81,  la 
ifiérence  est  appelée  oomma;  et  le  comma  exprime  aussi 
la  différence  du  demi-ton  maieur  et  du  demi-ton  mineur. 
Les  intervalles  de  quarte,  aans  la  série  fondamenude, 
peuvent  être  dirisés  par  des  notes  dont  la  place  n'a  rien 
de  Axe  par  elle-même,  et  les  intervalles  plus  petits  qui 
en  résultent  peuvent  offrir  des  demi -tons,  des  tiers  de 
ton,  des  quarts  de  ton,  ou  des  espaces  exprimés  par 
d'antres  fractions.  Tel  est  le  point  de  départ  de  la  mu- 
sique antique  et  l'origine  des  écoles  musicales  ches  les 
Grecs. 

L'intervalle  de  quarte  est  conunun  à  toutes  les  mu- 
siques humaines,  parce  qu'il  exprime  un  rapport  numé- 
rique très-simple  et  quil  fait  partie  des  consonnances 
fondamentales.  Les  musiciens  gréco-asiatiques  de  Phrygie, 
de  Lydie,  etc.,  ont  observé  de  bonne  heure  que  les  mêmes 
séries  oonsonnantes  ou  mélodiques  se  reproduisent  sur 
l'échelle  des  sons,  offrant  la  même  combinahon  de  ton|i 
et  de  demi-tons  :  do  ré  mi  fa  —  sol  la  si  do;  ou  bien 
ré  mi  fa  sol  —  la  si  do  ri:  ou  encore  mi  fa  sol  la  —  si 
do  ré  mi,  etc.  Telle  est  l'origine  du  tétracords  ou  série  de 
quatre  notes,  qui  est  le  fondement  de  toute  la  théorie 
musicale  des  Anciens.  Ces  tétracordes,  comparés  entre 
eux,  par  exemple  celui  de  do  avec  celui  de  ré  ou  de  mi, 
diffèrent  uniquement  par  U  place  du  demi-ton,  qui  est 


SRR 


J007 


GRE 


en  effel  à  raiga,  au  milieu  ou  au  grave.  Pendant  ploslean 
tiocllfia,  toa  plus  anciens  Grecs  ne  connurent  que  le  té- 
traooTda,  al  conapoa^rent  leurs  chanta  dans  quelqu*une 
de  ces  comtes  sénés  mélodiques.  Mais  on  finit  par  s'aper- 
cevoir qu'en  mettant  à  la  suite  Tun  de  Tautre  deux  té- 
tncordes  semblables,  les  deux  notes  extrêmes  sont  à 
Toctave  l'une  de  l'autre,  et  qu*un  ton  sépare  ces  deax 
tétiacordea  Tun'de  l'autre.  Toutefois,  ce  ton  complémen- 
taire peut  se  trouver  soit  au  milieu  de  l'octave,  comme 
d-deasus  soit  au  grave,  comme  dans  la  double  série  n- 
wûf  mi-la,  soit  à  l*aiga,  comme  la  série  k^ré,  ré-sol.  De 
tonte  manière  l'octave  étant  ainsi  complétée,  l'instru- 
ment peut  rendre  toute  la  série  musicale  par  une  simple 
r^étition  des  notes  de  l'octave,  et  faire  entendre  ainsi 
toute  la  gamme.  Réunir  deux  tétracordes  semblables, 
avec  leur  ton  cimiplémentaire,  s'appela  t  mettxB  sept 
cordes  à  la  lyre. 

Les  modet  (en  grec  amnonia)  étaient  primitivement  de 
rimples  tétraooidM,  que  llnvention  de  l'octave  transforma 
en  vrais  pentacordes.  Le  mode  est  déterminé  par  la  place  du 
demi-toQ  dans  le  tétracorde,  et  il  se  solfie  en  descendant; 
l'air  on  mélodie  doit  toujours  finir  sur  la  note  extrême 
du  mode,  soit  à  raig;u,  soit  au  grave.  Les  modes  primitifs 
étaient  le  dorien  (mt  ré  do  si  la),  le  phruoi^n  (ré  do  si  la 
sol),  et  le  lydisi»  {do  si  la  sol  fa).  Ils  eurent  tipis  modes 
subordonna,  complétant  l'octave  k  l'aigu/:  Vhypodorien 
(la  sol  fa  mi  ré),  Yhypophaygien  {sol  fa  mi  ré  do),  et 
rhupfriydien  {fa  mi  ré  do  si).  Enfin  nn  septième  mode 
appelé  mixolydien  reposait  sur  le  si  grave  de  l'hjrpoly- 
dien,  et  produisait  si  ta  sol  fa  mi.  On  doit  observer  que 
ce  système,  le  seul  complet  dont  l'histoire  fasse  mention, 
permettait  de  faire  reposer  une  mélodie  sur  nne  note 
cpicdoonque  de  la  gamme,  et  produisait  des  airs  essen- 
tieilement  difTérents  entre  eux  et  d'une  grande  expres- 
sion. Le  plain-chant,  qui,  n'ayant  ni  rhythme  ni  mesure, 
n'est  pas  proprement  de  la  musique,  tire  encore  de 
beaux  effets  de  ces  débris  de  la  musique  grecque  dont  il 
est  composé. 

Nous  avons  dit  qu'il  n'y  a  de  fixe  parmi  les  notes  que 
la  1'*,  la  2*,  la  5*  et  l'octave;  les  antres  peuvent  ôtre 
abaissées  de  quantités  variables  à  volonté,  sans  que  la 
mélodie  soit  troublée.  Quand  les  intervalles  obtenus  sont 
tous  des  tons  et  des  demi-tons,  l'octave  est  appelée  dto- 
(oni^tM,  et,  par  une  légère  variation,  l'on  obtient  le  dia- 
tonûiuemou,  dur  ou  moi/en.  Biais  si  la  qnantité  dont  les 
notes  variables  sont  abaissées  dépasse  i/3  de  ton,  le  genre 
est  cliangé  :  si,  par  exemple,  on  arrive  à  des  intervalles 
de  i/2  ton  à  côté  d'autres  qui  soient  de  i  ton  lyS,  c'est 
le  genre  chromatique.  Voici,  comme  modèle,  le  mode  do- 
rien et  bypodorien  chromatisé  :  mi,  ré  b,  do,  <i,  la,  sol  b, 
fa,  mi,  ri.  Ce  qui  donne  de  la  eoideur  à  cette  gamme, 
laquelle  n'admet  aucune  autre  note  que  celles-là,  c'est 
que  l'accord  sur  une  note  y  est  à  volonté  m^eur  ou  mi- 
neor.  Chaque  mode  a  son  genre  chromatique.  —  Le 
genre  enharmonique,  entièrement  perdu  pour  nous,  fut 
ajouté  aux  deux  autres  par  Olympe  le  Vieux.  Composé 
par  la  même  méthode  que  le  chromatique,  il  n'admet 
que  des  Intervalles  de  2  tons,  1  ton  et  1/4  do  ton.  Voici 
le  dorien  enharmonique,  en  descendant  :  la,  fa,  fa  1/4, 
mi,,  do,  do  1/4,  si,  (a.  Que  l'on  tente  avec  le  violon 
d^exécutcr  cette  simple  gamme, on  verra  qu'elle  agit  de  la 
façon  la  plus  puissante  sur  la  sensibilité,  lussant  loin  der- 
rière elle  les  modes  diatoniques  ou  chromatiques  les  plus 
émouvants.  Platon  proscrivait  le  genre  enharmonique. 

n  y  aurait  de  belles  et  curieuses  recherches  k  faire  sur 
Texécution  musicale  chez  les  Anciens,  sur  leurs  instru- 
ments (Aristote  seul  en  nomme  33  à  venQ,  sur  les  chœurs 
tragiques  et  comiques,  sur  le  chant  de  la  scène,  sur  les 
odes,  sur  les  Odéons  ou  Conservatoires,  sur  les  concerts 
privés  et  les  grands  concours  de  musique  de  l'antiquité. 
Tons  œs  sujets  sont  à  peine  effleurés  psr  la  critique  mo- 
derne. F.  Burette,  Ac,  des  fnse,,  XVII;  Vincent,  Notice 
sur  divers  manuse,  grecs,  etc.,  1847;  Tiron,  Études  sur 
la  musiq%ie  grecque,  le  plain-chant  et  la  tonalité  mo- 
derne, Paris,  18C6.  £m.  B. 

GRECS  MODERNES  (Langue  des).  Cette  langue,  qu'on 
q>pela  aussi  romcOque  parce  que  les  Turcs  du  xv*  siècle 
eonndârèrent  comme  romaine  toute  la  population  de 
l'empire  grec  qui  était  étrangère  à  leur  race,  dérive  du 
grec  ancien.  Celui  des  antioues  dialectes  avec  Iec[uel  elle 
a  le  plus  de  rapport,  c'est  l'ionien,  ou  plutôt  l'attique.  On 
la  parle  dans  le  royaume  de  Grèce,  en  Albanie,  en  Thes- 
Mue,  en  Roumélie,  dans  une  partie  de  l'Anatolie,  dans 
les  lleB  de  l'Archipel,  à  Chypre,  à  Candie,  et  dans  les  lies 
Ioniennes.  Quelques  cantons  de  l'intérieur  de  la  Grèce, 
is  pavs  de  Mégare,  les  tles  les  moins  fréquentées  de  l'Ar- 


chipel,  sont  les  lieux  où  elle  a  conservé  le  plus  de  pureté  t 
dans  les  provinces  septentrionales,  elle  est  mélangi^ 
d'albanais;  des  éléments  italiens  s'y  sont  introduits  dans 
les  lies  Ioniennes,  à  Athènes  et  en  Morée.  Il  y  a  telles 
localités  écartées,  où  l'on  a  conservé  des  mots,  des  locu- 
tions, des  pbï'ases  de  l'ancien  grec,  dont  on  ne  trouve 
plus  trace  dans  les  villes,  telles  expressions  qui  appar- 
tiennent au  temps  d'Homère,  et  qui  ont  disparu  des 
auteurs  postérieurs;  tantôt  les  mots  de  la  langue  çla^ 
sique  ont  subi,  dans  le  pec  moderne,  des  contractions, 
des  suppressions  de  désinence,  qui  les  défigurent;  tantôt 
les  mots,  en  gardant  plus  ou  moins  fidèlement  la  forme 
primitive,  ont  changé  de  signification.  En  ce  qui  concerne 
la  grammaire,  le  çrec  moderne  se  distingue  du  grec  an- 
cien par  les  particularités  suivantes  :  le  nombre  duel 
n'existe  pas;  le  datif  a  disparu  de  la  déclinaison,  et  est 
remplacé  par  le  génitif  ou  par  une  préposition  qui  régit 
l'accusatif;  le  premier  nom  de  nombre  sert  d'article  ind^ 
fini  :  les  degrés  de  comparaison  se  forment  à  l'aide  de 
particules,  et  plusieurs  temps  du  verbe  au  moyen  d'auxi- 
liaires; le  verbe  avoir  Çt^tù)  sert,  comme  dans  les  langues 
néolatines,  à  la  formation  des  temps  du  passé,  et  le 
verbe  vouloir  (6£>a>),  joint  à  une  forme  dérivée  de  l'an- 
cien infinitif,  sert  à  composer,  comme  en  allemand  et  en 
anglais,  le  futur  et  le  conditionnel;  l'infinitif,  devenu 
hors  d'usage,  est  remplacé  par  une  périphrase  dans 
laquelle  le  verbe  se  met  au  subjonctif;  la  voix  moyenne 
a  été  supprimée  ;  enfin  la  construction  est  beaucoup  moins 
transpositive.  Le  grec  moderne  a  de&  dialectes,  dont  la 
plupart  ne  sont  que  des  patois  produits  par  une  pronon- 
ciation altérée  et  par  des  idiotismes  venus  de  l'étranger. 
On  distingue  surtout  le  roma^ue  propre,  avec  les  sous- 
dialectes  de  Constantinople  ou  des  Fanariotes,de  S^onill, 
de  Janina,  d'Athènes  et  d'Hydra;  et  Véolo-niorien,  com- 
prenant le  mcUnote{k  Sparte),  le  candiote  et  le  cypriote, 
V,  Martin  Crusius,  Turco-Grœcia,  B&le,  1584;  J.-M.  Lan- 
gius,  Philologia  barbaro-grœca,  Nuremberg,  1708,  in-4*; 
Ananias  d'Antiparos,  Grammatica  grœoa  vulgans,  Ve- 
nise, 1784,  in-^**;  Aibanase  Christopoulos,  ùrammaire 
grecque  moderne,  en  erec.  Vienne,  1805;  Jules  David, 
Méthode  pour  étudier  la  langue  grecque  moderne,  Paris, 
1821,  in-8%  et  Parallèle  des  langues  grecques  ancienne 
et  moderne,  en  grec,  Paris,  1820,  in-^**;  G.  Kutuffîn,  Corn-- 
pendio  di  grammatica  délia  lingua  greca  moderna,  Li- 
voume,  1885,  in-8*  ;  Lûdemann ,  Grammaire  du  grec 
moderne,  en  allemand,  Leipzig,  1826  ;  Blinolde  Minasi 
Théorie  de  la  Grammaire  de  la  langue  grecque,  Paris, 
1827,  in-8*4  Michel  Schinas,  Grammaire  élémmtaire  du 
grec  moderne,  Paris,  1829,  in-8<*;  Theocharopoulos, 
Grammaire  grecque  universelle,  Paris,  1830,  in-8<^;  — 
J.  Meursius,  Glossarium  grœco-barbarum,  Leyde,  1614, 
in-4<^;  Ducange,  Glossarium  ad  scriptores  mediœ  et  in^ 
fimœ  grcBcitatis,  Lyon,  1688,  2  vol.  in-fol.  ;  Zalyk,  Dùi" 
tionnaire  français-grec  moderne,  Paris,  1809,  in-8*t 
Dehèque,  Dictionnaire  grec  moderne  français,  Paris, 
1825,  in-16;  Coumas,  Dictionnaire  grec  moderne,  en 
grec.  Vienne,  1826,  in-^**;  Daviers,  Dictionnaire  français 
et  grec  vulgaire,  Paris,  1830;  Scarlatès  de  Byzance, 
Lexique  grec  moderne,  Athènes,  1857  ;  —  MuUach,  Gram* 
mcÀre  de  la  langue  vulgaire  des  Grecs  dans  son  évolution 
historique,  en  allem.,  Berlin,  1856. 

GAECS  noDBSNBS  (UttératuTO  des).  Les  plus  anciens  mo- 
numents de  la  littérature  grecque  moderne  sont,  au 
XI*  siècle,  une  Chronique  de  Siméon  Séthos,  qui  fut  pro- 
tovestiaire à  la  cour  d'Alexis  l**"  Gomnène,  et,  au  xn*,  les 
poésies  de  Théodore  Prodromos.  Il  faut  descendre  en- 
suite Jusqu'au  xvi*  siècle,  où  l'on  trouve  les  ceuvres  de 
grammaire  de  Chrysoloras  et  de  Lascaris,  et  les  Annales 
universelles  de  Dosithée.  Au  xvii*  appartiennent  l'froto- 
crite,  roman  de  chevalerie  de  Vincent  Comaro,  et  r£ro- 
phile,  tragédie  de  Georges  Chortatzi.  Pendant  le  xvui*,  les 
Grecs  ont  fait  de  nonibreux  emprunts  aux  littératures 
étrsngères  :  de  cette  époque  datent  les  traductions  de 
VHistoire  ancienne  de  Rollin  et  du  Télémaque  de  Féne- 
Ion.  Eugène  Bulgaris,  archevêque  de  Kherson,  traduit  les 
Géorgiques  et  V Enéide  de  Virçle.  Parmi  les  auteurs  d'ou- 
vrages originaux,  on  doit  citer  :  Mélétios,  archevêque 
d'Athènes,  qui  recueillit  les  légendes  de  l'Archipel  ;  Pho- 
tinos,  dont  on  a  une  Histoire  ae  la  Thrace  et  de  la  Tran^ 
sylvante;  le  moine  Grto>ire  de  Dodone,  qui  a  publié  la 
Biographie  des  patriarches  de  Jérusalem. 

Un  mouvement  littéraire  assez  important  s'est  déclaré 
au  XIX*  siècle;  sans  parler  d'un  grand  nombre  de  livres 
de  morale  et  d'éducation  traduits  de  l'italien,  du  fhmçais, 
de  l'anglais,  et  de  l'allemand,  il  fout  mentionner  les  trslr* 
tés  de  rhétorique  et  de  philosophie  d'QEkonomos  et  de 


GRE 


lOOS 


GRE 


▼ambas,  les  oavnns  théologiquet  de  Theoclitos  Parmaki- 
tis«  lea  écrita  polinqaes  de  Minaa,  de  Polysoidte^  de  PalG»- 
logoa  et  de  8pyri<Uon  Vallettas,  lea  traTaiiz  philoiogiquea 
de  Oony^  de  Néophytes  Dukaa,  de  Darbaria,  d*Aaopios,  de 
VaDTaa,  de  Zenooioa  Pop.  Dans  le  genre  historique  Per- 
neboa  a  donné  une  Histoire  de  Souli  (i8i5J  et  des  Afe- 
moir^s  sur  la  gwrre  de  Vindipsndanee  de  I8t0  (1830); 
Philippidis,  une  Histoire  de  ta  Roumanie,  1816  ;  Risoa  Né* 
roules,  une  Histoire  de  ta  Grèce  moderne,  1828  ;  A.  Sout- 
•oa,  une  Histoire  de  la  révolution  grecque,  1829:  Sonr- 
mélia,  une  Histoire  d^ Athènes  à  Vêpoque  de  ta  guerre  de 
Vindàpendance,  1834;  K.-D.  Schinaa,  une  Histoire  des 
anciens  peuples^  1845;  Risos  RangaTia,  des  Antiquités 
hdténiques,  1842,  etc.  —  La  Grèce  moderne  possède  une 
poésie  populaire,  dans  laquelle  on  remarque  surtout  les 
chanta  dea  KJephtes  et  ceux  qui  se  rattachent  à  la  çuerro 
de  rind^ndance;  des  recueils  en  ont  été  publiés  en 
ihmçala  par  Fauriel  (1825,  2  vol.)  et  par  le  comte  de 
llarcellus  (1860,  in-12).  Mais  elle  a  auasi  une  poésie  sar 
Tante  qui  s*est  essayée  dans  plusieurs  genres.  Rigas,  Kal- 
Tos,  SalomoB,  Angelica  Pâli,  Karatchoutachaa,  ont  com- 
posé dea  hymnes  de  guerre  et  de  liberté.  Les  deux  Soutzos 
et  Orphanidia  ont  cultivé  la  satire.  Christopouloa  s'est 
exerce  dans  Tode  anacréontîque;  Risos  Néroulos,  Pikko- 
loa,  Zampelios,  les  deux  Soutzos,  dana  le  genre  drama- 
tique. Panagoa  Soutzoa  est  auasi  auteur  d*nn  poème 
épique  et  didactique,  le  Messie,  et  Alexandre  Souuos 
d^un  poème  fort  estimé,  te  Vagabond.  Rangavis  a  chanté, 
dana  le  Séducteur  des  peuples,  le  moine  monténégrin 
Stéphanos ,  l'un  des  faux  Pierre  UI  qui  parurent  sous 
la  czarine  Catherine  n.  Zalakostas  a  publié  en  1851  un 
poème  sur  le  siège  de  Bflssolonghi,  et«  en  1853,  un  poème 
Intitulé  Armatoles  et  Klephtes. 

GRÉEMENT  (du  vieux  mot  gréer,  pour  agréer,  qui 
signifiait  approprier),  totalité  dea  voilea,  dea  pouliea  et 
des  cordages  propres  an  service  des  vergues  et  des  mâts 
d*un  navire. 

GREENWICH  (Hôpital  de),  magniflaue  établissement 
fondé  en  1696,  k  la  place  où  était  un  palais  des  rois  d*An- 
fleterre,  pour  recevoir  les  marins  invalidée.  Il  peut  loger 
4,000  personnea.  L'aspect  en  est  surtout  majestueux 
qoand  on  y  arrive  par  la  Tamise,  sur  les  bords  de  laquelle 
est  un  flrand  square  oCi  s'élève  la  atatue  de  Geoi^^e  II 
par  Rysbrack.  L'hospice  se  compose  de  dnq  oon>s  de 
Bâtiments  :  1*  celui  oit  du  roi  Charles,  surmonta  d'un 
dôme  avec  belvédère ,  œuvre  de  Christophe  Wren ,  et 
contenant  la  bibliothèque  affectée  à  l'usage  des  pension- 
nairea;  2<»  celui  de  la  reine  Anne^  3°  celui  du  roi  Gutî- 
laume;  4*  celui  de  la  reine  Marte,  où  se  trouve  la  cha- 
pelle; 5*  V Asile  on  École,  Au  point  de  vue  de  l'art,  la 
chapelle  est  fort  Intéressante  :  les  statues  de  la  Foi,  de 
l'Espérance,  de  la  Charité,  et  de  la  Modestie,  en  ornent  le 
Tesubule;  le  portail  richement  sculpté,  les  portes  d'aca- 
jou maaaif,  la  décoration  intérieure,  composent  un  en- 
aemble  qui  n*a  pas  d'égal  en  Angleterre;  sur  l'autel  est 
on  trôs-bean  tableau  de  West,  représentant  S*  Paul 
échappé  du  naufrage.  On  remarque  aussi  la  Galerie  no- 
ffale,  formée  en  1823;  elle  comprend  t  1*  nn  vestibule, 
où  sont  les  statuea  de  Nelson,  de  Duncan,  de  S^  Vincent, 
et  de  Howe,  plusieurs  peintures  de  Tumer  et  de  Louther- 
bourg,  un  portiaitde  Van  Tromp-,  2*  une  grande  salle 
ornée  de  portraits  d'amiraux  anglais  qui  étaient  autre- 
fois à  Windsor  et  à  Hampton-Gourt,  et  a'autrea  peintures 
de  marine;  3*  une  autre  salle  renfermant  dea  objets  cu- 
rieux, dea  modèles  de  vaisseaux,  etc. 

GREFFE  (du  grec  graphéin,  écrire),  dépôt  où  aont 
classés  et  conserva  les  registres  et  les  actes  des  parties, 
pour  ou'on  puisse  y  recourir  lorsqu'on  veut  en  avoir  des 
expéditions.  Cest  là  aussi  que  s'acquittent  les  droits  de 
Instioe  et  les  amendes.  Dans  les  greffes  des  tribunaux  de 
l**  instance  sont  également  déposés  les  doubles  des  re- 
gistres de  l'état  civil  dé  chaque  arrondissement. 

GREFFIER  (du  grec  graphmu,  écrivain),  fonction- 
naire établi  prea  des  Cours  et  tribunaux  pour  écrire  lea 
arrêts,  sentences,  Jugements  et  autres  actea  prononcée 
on  dictée  par  les  Juges,  en  «arder  les  minutes,  et  en  déli- 
vrer des  expéditions  à  qui  il  appartient.  Les  greffiers  des 
Juatioea  de  paix  et  dea  tribunaux  de  l'*  instance  et  de 
commerce  doivent  être  &géa  de  85  ana  au  moine;  ceux 
dea  Cours  impériales,  de  27  ans.  On  demande  qu'ils 
aoient  licenciés  en  Droit  et  aient  suivi  le  barreau  pen- 
dant 2  ans.  Une  Justice  de  paix  n'a  d'ordinaire  qu'un  gref- 
fier; lea  tribunaux  de  1'*  instance  et  de  commerce  ont 
nn  on  plualeura  greffiers-^^djoints  ;  le  nombre  de  cea 
demlera  est  plus  considérable  dans  les  Cours  impériales, 
^ù  le  premier  des  greffiers  a  le  titre  de  greffier  en  chef* 


Ce  fonetionn^re  est  aaaujetti  à  un  cautionnement,  dont 
le  chiffre  varie  en  raison  de  la  population  et  du  ressort 
du  tribunal,  n  est  soumis  k  la  surveillance  du  préaiderit 
et  du  ministère  public.  Outre  un  traitement  fixe,  qui  est 
médiocre,  11  touche,  pour  les  rôles  d'expéditions  qu'il  dé- 
livre, un  droit  qui,  dans  certaines  localitéa,  rend  aon 
poste  très^lucratif.  Le  traitement  fixe  des  greffiers  est  de 
600  ii  800  fr.  pour  les  JusUces  de  paix,  d^  600  à  1,200  fr. 

rmr  les  tribunaux  de  police  (6,000  fr.  à  Paria),  de  800 
1,800  fr.  pour  lea  tribunaux  de  commerce,  de  1,000  à 
2,400  fr.  pour  lea  tribunaux  de  1**  instance  (6,000  fr.i 
Paris),  dft  2.000  à  4,000  fr.  pour  les  Cours  d'appel 
(8,000  fr.  à  Paris).  Les  droits  de  greffe  aont  fixés  par  les 
tarifs  du  16  février  1807  et  du  18  Juin  1811,  par  ordon-  ' 
nance  du  0  octobre  1825,  par  arrêt  du  8  avril  1848,  et  par 
décret  du  24  mai  1854.  Le  groffier  de  la  Cour  de  cassa- 
tion a  un  traitement  fixe  de  46,000  fr.,  snr  lequel  il  paye 
4  commis  et  les  fournitures  du  greffe.  Lea  greffiers  ont  la 
qualité  de  membres  des  Cours  ou  tribunaux  auxquels  ils 
sont  attadiéa,  et  prennent  rang  i^rès  lee  officiers  du  mi- 
nistère public.  La  loi  du  28  avril  1816  les  autorise  à  pré- 
senter leurs  successeurs.  Ils  ne  peuvent  être  parents  ni 
alliés.  Jusqu'au  degré  d'onde  ou  de  neveu  inclusivement, 
d'un  membre  de  la  Cour  ou  du  Tribunal,  et  dea  dispenses 
ne  aont  accordées  que  dans  les  tribunaux  composés  de 
8  Juges  an  moins  (Loi  du  20  avril  1810).  Leurs  fonctions 
sont  incompatibles  avec  toute  autre  fonction  publique  aa- 
lariée  et  avec  tout  office.  Lk  où  il  n'y  a  pas  de  commis- 
saires-priseurs,  les  greffiers  des  Justices  ne  paix  peuvent 
procéder  aux  ventes  publiques  de  meubles,  et  ausal  des 
récoltes  pendant  par  racines.  V.  GeEPPisa,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

GRÉGORIEN  (Chant).  Le  chant  grégorien,  nommé 
aussi  ptain^chant  ou  chant  romain,  est  le  chant  ecclé* 
élastique  en  usage  dans  presque  toutes  les  églises  de  l'Oc- 
cident, n  fut  r&lé  à  la  fin  du  vi*  siècle. par  le  pape 
S^  Grégoire  le  Urand,  qui,  aux  quatre  modes  authen' 
tiques  (F.  ce  mot)  établis  par  S^  Ambroise,  et  formant 
la  base  du  chant  ambrosien  (K.  ce  mot  ),  afouta  les  quatre 
modes  plagaux  {V.ce  mot).  Le  chant  grégorien  a  subi 
piusieura  modifications  dans  le  cours  de  son  existence  : 
la  plua  importante  et  la  plus  autorisée  a  eu  lieu  an 
XVI*  aiède,  à  la  suite  du  concile  de  Trente  et  par  l'ordre 
du  pape  Grégoire  XIII.  Il  existe  un  grand  nombre  d'édi- 
tions du  chant  gr^rien,  et,  ouoiqu'elles  aient  un  fonds 
commun,  elles  offrent  entre  elles  de  notables  différencea 
{V.  Plaim-Chant).  V,  Nivers,  Dissertation  sur  le  chant 
grégorien,  Paris,  1683,  in-8*;  Th.  Nisard,  Études  sur  la 
restauration  du  chant  grégorien,  Paris,  1855,  in-8*.  F.  C 

eafooaiBN  (Rit),  rit  réglé  par  le  pape  S^  Grégoire  le 
Grand.  Le  pape  Gélase  avait  réuni,  dana  un  Sacramen- 
taire  qui  porte  son  nom,  les  prières  conservées  par  la 
tradition  ;  S'  Grégoire  les  mit  dans  un  meilleur  ordre, 
précisa  lea  cérémoniea  du  culte,  et  composa  ainsi  un  nou- 
veau Sacramentaire,  Il  fit,  d'ailleurs,  peu  de  change- 
ments dans  la  liturgie,  abrégeant  surtout  celle  de  GéUàe. 

GRÈGUES.  F.  BaAiBS. 

GRÊLIER,  nom  qu'on  donnait  Jadia  à  une  aorte  de 
trompe  de  chasse. 

GRÉMIAL  (du  latin  gremium,  giron),  linge  on  mor- 
ceau d'étoffe  que  l'on  place  sur  les  genoux  de  Tévèque 
officiant,  loraqu'il  est  assis,  pour  garantir  la  chaauble. 

GRENADE  (Cathédrale  de).  Cet  édifice,  commencé  en 
1529  sur  les  plans  de  Diego  de  Siloé,  et  inauguré  en 
1560,  meaure  119  met.  de  longueur  sur  70  de  largeur.  Sa 
façade  à  trois  portes  est  ornée  de  stittues  et  de  bas-relieis. 
Il  est  distribué  en  cinq  nefs,  soutenues  par  d'énormea 
pillera  en  colonnes  groupées.  Les  nefs  latérales  sont  gar- 
nies de  chapelles,  dont  les  retables  et  les  peintures  ont 
généralement  beaucoup  de  valeur.  La  Grande  chapMe. 
qui  occupe  la  largeur  de  trois  nefs  (32  met.),  est  une  dea 
œuvres  lea  plua  somptueuses  de  l'Espagne  :  ornée  de  ma- 
gnifiques peintures  par  Alonzo  Cano  et  ses  élèves,  éclairée 
par  ne  bôtnx  vitraux  où  l'on  a  représenté  la  Passion, 
elle  est  recouwte  d'une  coupole  Jadis  peinte  en  bleu  et 
semée  d'étoiles  d'or,  et  dont  la  clef  est  à  47  met.  au* 
dessus  du  sol.  La  Chapelle  royale  contient  deux  très-  \ 
beaux  mausolées,  qui  recouvrent,  l'un  les  restes  de  Fer-  { 
dinand  te  Catholique  et  de  sa  femme,  l'autre  ceux  de  ' 
Jeanne  la  Folle  et  de  son  mari  Philippe  le  Beau.  La  tour 
de  la  cathédrale  de  Grenade  a  56  met.  d'élévation  :  do- 
rique au  l""  étage,  ionique  au  2*,  corinthienne  au  3*, 
elle  devait  avoir  un  4*  étage  toscan. 

caBNADB  (l*alhambra  de).  F.  Alhambra. 

oaENADB,  projectile.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biogreh 
vhie  et  d* Histoire» 


GRE 


1009 


GRI 


GRENADIERS ,  soldats  d^élite  qui  forment  une  com- 
(Agnie  dans  chaque  bataillon  d'infanterie  de  ligne.  Us 
■ont  choisis  par  le  colonel ,  sur  la  présentation  dâi  cbefo 
de  IxktaiUon ,  parmi  les  hommes  de  hante  taille,  ayant  an 
moins  six  mois  de  service  (une  belle  conduite  à  la 
gaerre  dispense  de  cette  condition),  et  réunissant  les 
qualités  qm  font  le  bon  militaire.  Ils  ont  une  solde  plus 
forte  que  celle  des  Aisiliers,  sont  exempts  des  corrées  oui 
roulent  sur  le  régiment  ou  le  bataillon,  psrtagent  avec  les 
roHifleurs  la  garde  du  drapeau,  et  portent  le  sabre,  les 
épauTettea  rouges,  et  une  grenade  brodée  sur  Tuniforme. 
Jadis  ils  avaient  le  bonnet  à  poil,  qui  fut  encore  en 
sBsgB  pour  les  grenadiers  de  la  garde  impériale.  V.  Ga»- 
Ràonas,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d*Bist, 
GRENAT,  pierre  précieuse,  de  couleur  yineusOi  qu'on 
emploie  dans  la  byouterie.  Le  symbolisme  chrétien  en  a 
fait  un  des  emblèmes  de  la  charité. 

GRENEUJi  (Puits  de).  V,  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
ffraphie  et  d^Histoire. 
caafBLLB  (Fontaine  de).  V,  Fontaoie,  page  901. 
GRÈNETIS,  bordure  de  petits  grains  qui  entoure  le 
type  d'une  médaille. 

GRENIER  (du  latin  granarium,  dérivé  de  granum, 
grain) ,  magasin  où  Ton  cooserre  les  grains  battus,  no- 
tamment les  céréales.  Il  est  bon  que,  dans  une  ferme,  le 
nenier  soit  à  proximité  des  granges  ou  de  la  machine  à 
battre,  et,  pour  éviter  Tinceume,  dans  un  bâtiment  isolé. 
On  ne  doit  le  placer  ni  an  rez-de-chaussée,  car  la  pre- 
mière condition  d'un  bon  grenier  est  d'être  parfaitement 
8ec«  ni  an-dessus  des  étsbles  et  des  écuries,  d'où  s'exhale 
n:i  air  chaud  et  humide,  nuisible  à  la  conservation  du 
grain.  L'emplacement  le  plus  convenable  est  au-dessus 
des  hangars  et  des  remises,  ou  dans  le  coxps  de  logis  du 
coltivateur.  Un  grenier  n'a  pas  besoin  d'avoir  plus  de 
S  à  3  mèL  de  hauteur,  parce  que  le  blé  entassé  sur  une 
trop  grande  épaisseur  tend  k  s'échauffer  et  que  son  poids 
sor  le  plancher  est  considérable;  mais  on  peut  super- 
poser plusieurs  étages  de  greniers.  Le  toit  doit  être  assez 
saillant,  pour  que  Pintérieur  du  grenier  soit  mieux  pro- 
tégé contre  les  eaux  pluviales;  des  ouvertures  percées  en 
pâit  nombre,  an  nord  et  au  midi,  établissent  an  besoin 
un  ooorant  qui  renouvelle  l'air  intérieur,  et  on  les  tient 
exactement  fermées  à  l'aide  de  volets,  afin  d'empédier  la 
dnleiir  d'y  pénétrer.  S'il  y  a  plusieurs  greniers  super- 
posés, une  ventilation  énergique  s'établit  au  moyen  de 
trappes  ouvertes  dans  leurs  planchers,  et  qui  servent 
tont  à  la  fois  au  montage  ou  à  la  descente  des  grains,  et 
à  la  formadon  d'un  courant  d'air  de  bas  en  haut.  Au- 
dessus  d'une  écurie  ou  d'une  étable,  le  mieux  est  de  car- 
reler le  grenier;  partout  ailleurs  un  plancher  en  bols  est 
préférable,  pourvu  qu'avant  dlntroduire  les  grains  on 
Tait  nettoyé  et  brossé  pour  enlever  la  poussière  et  les 
insectes.  Il  est  également  profitable  de  blanchir  chaque 
année  les  murs  avec  un  lait  de  chaux,  qui  atteint  les  in- 
sectes dans  les  plus  petites  fissures  ;  à  plus  forte  raison 
doit-on  boncher  tous  les  trous  qui  pourraient  servir  de 
gHe  aux  animaux  rongeurs. 

camna,  en  termes  de  Marine,  lit  de  pièces  de  bois  ou 
de  galets,  préparé  dans  le  fond  de  la  cale  d'un  navire,  à 
la  hauteur  d'un  demi-mètre  environ,  pour  recevoir  des 
ballota,  qui,  sans  cette  précaution,  seraient  atteints  psr 
rhumidité. 

«aoiiias  d'abordaiici.  V,  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  ^Histoire. 

GRÈS ,  un  des  matériaux  employés  à  différentes 
époques  dans  la  construction,  surtout  pour  les  édifices 
coondérables.  Le  temple  de  Jupiter  Panhellénien  à  Êgine 
étsit  en  grès  Jaune,  et  le  tombeau  de  Hidas  en  ^rès  rouge. 
Les  Égyptiens  élevèrent  en  grès  la  mineure  psrtie  de 
leurs  temples,  et  taillèrent  leurs  statues  dans  une  pierre 
de  grès  très^n. 

GRÈVE,  bord  de  la  mer  ou  des  rivières  que  les  basses 
eaox  laissent  à  découvert  en  y  abandonnant  du  gramier 
ou  des  galets.  On  donna  longtemps  à  Paris  le  nom  de 
grèioe  à  la  portion  du  rivage  de  la  Seine  qui  avoisine 
rHèiBl  de  me,  et  c'est  sur  la  Place  de  Grève  wm  se 
firent  les  exécutions  capitales  Jusqu'en  1890.  Gomme 
c'est  là  que  les  ouvrière  en  bâtiment  se  réunissent  le 
mstitt,  dqrais  un  temps  immémorial ,  pour  se  renseigner 
mutoeUement  sur  les  travaux  en  cours  d'exécution  et  se 
fliire  eorèkv  par  les  entrepreneurs,  comme  ils  y  sont 
plus  nombfvnx  lorsqu'il  y  a  des  interruptions  de  tnvail, 
^assn  s'est  établi  d'appeler  arève  toute  suspension  de 
travaupar  suite  de  coalition.  Y,  GoAunon. 

GRÈVES,  nièce  d'armure.  7.  notre  Dieiiùnnaiire  de 
Bkgra^km  gi  SHitUÀre. 


I  GRIEANE,  petit  navire  de  50  à  60  tonneaux,  en  usage 
sur  les  côtes  de  la  Hanche.  La  gribane  porte  deux  mâts 
très-courts  et  un  beaupré  ;  lorsqu'il  y  a  un  hunier  an 
grand  mât,  on  met  un  mât  de  hune  volant. 

GRIEFS,  en  latin  graioamina,  atteintes  ou  lésions 
graves  contre  lesouelles  on  réclame,  soit  en  politique, 
soit  devant  la  justice. 

GRIFFE,  empreinte  destinée  à  tenir  lieu  de  signature, 
dont  elle  est  le  fao-simile,  et  instrument  qui  sert  à  la 
faire.  Comme  une  griffe  peut  être  facilement  imitée,  ou 
apposée  par  un  autre  que  celui  qui  signe,  il  est  interdit 
aux  fonctionnaires  publics  d'en  faire  ussge.  La  griffe  des 
commerçants,  mise  sur  effets  de  commerce  rendus  à 
leure  débiteun,  vaut  libéretion,  à  moins  que  ces  derniers 
ne  soient  convaincus  de  l'avoir  appliquée  eux-mêmes. 

GRIFFES,  ornement  d'architecture  de  toutes  les  épo- 

2ues.  A  l'époque  romano-byzantine,  la  base  attique  s'orne 
e  griffes,  de  pattes  ou  de  feuillages  enroula  sur  les 
angles  du  soubassement;  c'est  un  de  ses  caractères  par- 
ticuliers. On  rencontre  des  sriffes  dans  un  grand  nombre 
de  meubles  antiques  et  modernes. 

GRIFFON,  animal  fabuleux,  Uon  ailé  â  tète  d'aigle, 
et  qui  se  trouve  dans  l'ornementation  des  monuments  à 
toutes  les  époques.  On  le  voit  aussi  sur  des  médailles  an- 
tiques. 

GRIGNOTIS,  tailles  de  gravure  courtes,  vagues  et 
tremblotées ,  interrompues  par  des  points  de  toutes  les 
formes.  Ils  conviennent  principalement  pour  les  feuilles, 
les  troncs  d'arbres,  les  temins,  les  vieilles  murailles, 
les  chaumières,  les  étoffes  grossières  et  velues. 

GRIL,  espèce  de  chantier  établi  â  proximité  d'un  quai 
pour  réparer  les  navires.  11  consiste  en  une  plate-forme 
composée  de  pièces  de  bois  disposées  en  grillai^  On  y 
laisse  échouer  le  bâtiment  soumis  à  des  répsntions  que 
Ton  ne  peut  exécuter  que  pendant  les  basses  men. 

GRILLE ,  assemblage  de  pièces  de  bois  ou  de  fer  qui 
sert  à  fermer  une  enceinte.  Les  grilles  en  bois  sont  d'un 
grand  usage;  parfois  très-riches,  comme  on  en  voit  à 
l'intérieur  de  certaines  édises,  parfois  très- simples, 
conune  celles  qui  ferment  les  vrâgers  et  les  enclos,  elles 
ont  suivi  dans  leur  construction  le  goût  des  différentes 
époques,  sans  présenter  des  particularités  aussi  remar- 
quables que  les  grilles  en  fer.  On  a  déplové  dans  celles-ci, 
surtout  â  psrtir  du  xv*  siècle,  lorsqu'elles  étaient  desti- 
nées â  des  intérieurs  d'émises  ou  à  des  entrées  de  palais 
et  de  châteaux,  un  luxe  inouï,  qui  en  fait  des  chefs- 
d'œuvre  de  serrurerie.  La  place  Royale  à  Psris  était  au- 
trefois entourée  d'une  fort  belle  grille,  qui,  sous  Louis* 
Philippe,  a.été  remplacée  par  une  grille  moderne  sans 
caractère  ;  le  Palais  de  Justice  est  Justement  renommé 
pour  la  grille  de  sa  cour  d'honneur. 

GIULLET ,  dans  le  Rlason,  grelot  qui  parait  en  quel- 

2ues  écus,  et  plus  flréquemment  aux  jamoes  des  oiseaux 
e  proie. 

GRIMBKLTNS,  banquiers  qui,  an  xvn*  siècle,  servaient 
d'intermédiaires  entre  les  mîffcbands  de  bestiaux  et  les 
bouchon. 

GRIME,  emploi  de  théâtre.  5e  gnmer,  c'est  donner 
à  sa  physionomie  certaines  modifications,  à  l'aide. de 
moyens  artificiels.  Les  grimée  sont  les  vieillards  ridicules 
ou  comiques. 

GRINgOLÉ,  en  termes  de  Blsson,  se  dit  des  croix, 
sautoin,  meubles,  dont  les  extrémités  se  terminent  en 
tètes  de  serpent. 

GRIPHE,  en  grec  griphoe,  énigme  que,  chez  les  An- 
ciens, les  convives  se  proposaient  mutuellement  pendant 
le  repas.  Le  mot  signifie  ^et  ou  reie  d»  pécheur,  propre  â 
prendre  des  poissons. 

GRIPSHOLM  (Château  de).  7.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire, 

GRISAIULES,  pdntores  formées  en  quelque  sorte 
d'une  seule  couleur  blanche  ou  grise  passant  par  tous  les 
tons  du  blanc  an  noir  ;  c'eat  une  espèce  de  camaïeu  (V,ce 
mot).  On  peut  citer  comme  des  modèles  de  grisailles  les 
magnifiques  imiti^ons  de  bas^reliefs  qui  décorent  la 
voûte  de  la  grande  salle  de  la  Bourse  a  Paris,  et  dues 
â  MiEQrnier  et  Abel  de  Pojol.  —  On  dit  que  des'vitranx 
sont  peinuen  grissille,  lorsqu'on  ne  s'est  servi  pour  les 
sujets  et  ornements  que  de  la  seule  teinte  grise,  lis  appa- 
rslssent  dte  le  xm*  siècle.  Quelques-uns  de  ces  vitraux 
ne  sont  composés  que  de  lacis  et  d'ornements,  parfois 
rehaussés  de  touches  en  couleur  qui  leur  donnent  une 
grande  vivacité.  Dans  les  hautes  Tarières  des  nefs  et  du 
haut  chœur,  les  grands  personnages  se  détachent  son- 
vent,  comme  à  Reims,  à  Amiens  et  à  Tournai  «  sur  un 
fond  en  gruaille.  Les  égUaes  de  Bourges,  de  Rouen,  de 

64 


&M 


1010 


6R0 


Mboorg,  ele.«  en  présentent  auni  des  exemples.  Au 
iiv*  siècle,  aonrès  la  découverte  du  Jaune  d*amnt,  les 
peintres  ▼emers  exécutèrent  entièrement  dee  ntranx  en 
grisaille  et  or.  Au  xy*  et  à  Tépoque  de  la  Renaissance, 
~aTec  le  perfectionnement  de  Tart  do  dessin,  surgissent 
des  yitraux  à  grands  sujets-  entièrement  en  grisaille  : 
bien  oue  la  facture  en  soit  souvent  admirable,  on  doit  re- 
connaître qulls  sont  naturellement  froids  ;  les  grisailles 
offirent  un  JEfel  aspect  pour  les  ornements,  lorsqu'elles  sont 
légèrement  rehaussées  de  couleurs.  E.  L. 

GRIS-GRIS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtctwnnain  dt  Bio- 
graphie et  d*  Histoire. 

GRIVOIS,  nom  qu*on  donnait,  au  xvn*  siècle,  aux  sol- 
dats pillards  qui  ulaient  partout  maraudant  et  se  ^r- 
rut  de  butin ,  comme  les  grives  qui  s*enivrent  de  raisin 
s  les  vignes.  Par  suite,  on  remploya  pour  désigner 
tout  homme  d*humeur  éveillée  et  hardie,  souvent  en  dé- 
bauche. En  passant  dans  la  Littérature,  le  mot  grivois 
s'est  appliqué  aux  chansons  Joyeuses  et  avinées. 

caivois  ,  nom  donné  sous  Louis  XTV  à  une  sorte  de 
tabatière,  munie  d'une  r&pe  à  tabac. 

GROAT,  monnaie  d'argent  d'Angleterre,  valant  4  penny 
(42  centimes  ). 

GROENLANDAIS  (Idiome  ),  le  mieux  connu  des  idiomes 
eskimaux  (7.  ce  mot).  Il  diffère  assex  notablement  des 
antres,  pour  que  les  tribus  qui  habitent  au  S.  du  détroit 
de  Davis  et  de  la  mer  de  Bamn  ne  le  comprennent  qo*avec 
difficulté  :  on  en  peut  signaler,  entre  autres  motifs,  la 
présence  d'une  assez  grande  quantité  de  termes  dérivés 
du  norvégien  et  que  les  anciens  colons  Scandinaves  y  ont 
introduits.  Le  groônlandais  manque  des  articulations  d, 
f,  hf  X  et  SI  ;  on  n'y  rencontre  jamais  b,  g,  l  eiv  comme 
initiales.  H  est  rare  que,  dans  le  corps  des  mots,  deux 
consonnes  soient  placées  de  suite;  mais  l'emploi  domi- 
nant des  lettres  t,  k  etr  donne  à  la  prononciation  une 
Sande  dureté.  Le  çxsénlandais  est  une  langue  polysyn- 
étique  on  d'a^utînation,  où  l'on  trouve  (tes  composés 
d*une  excessive  longueur;  toutefois,  lés  règles  fixes  qui 
président  à  la  formaUon  des  mots  et  à  la  syntaxe  donnent 
de  la  clarté  k  cette  langue,  malgré  son  apparente  compli- 
cation. Il  n'y  a  pas  de  genre  dans  ies  noms  ;  les  cas  so 
forment  par  des  suffixes  ou  désinences.  Ce  sont  aussi  des 
changements  de  désinence  qui  expriment  les  degrés  de 
comparaison.  On  ne  connaît  que  les  cinq  premiers  noms 
de  nombre  ;  an  delà,  et  Jusqu'il  20,  on  s'aide,  pour  comp- 
ter, des  noms  des  doigts  des  pieds  et  des  mains;  puis. 
Jusqu'à  100,  on  emploie  le  mot  signifiant  personne  pour 
exprimer  20,  et  Ton  dit,  par  exemple,  trois  personnes 
pour  le  nombre  60.  La  dédinaison  et  la  conjugaison  ont 
les  trois  nombres  singulier,  pluriel  et  duel.  La  xni^ngai- 
son,  très-riche  en  modes,  n'a  que  trois  temps  :  le  présent, 
qui  sert  à  exprimer  le  présent  et  un  temps  passé  depuis 
peu;  le  prétérit;  et  le  futur,  qui  a  deux  formes  pour  le 
futur  indéfini  et  pour  un  futur  peu  éloigné.  Il  y  a  une 
forme  particulière  pour  la  conjugaison  négative.  La  voix 
passive  des  verbes  ne  diffère  de  l'active  que  par  une  légère 
addition  à  la  racine.  Les  conjonctions  s'attachent  au  verbe, 
les  prépositions  au  nom,  et  les  adverbes  à  l'adjectif,  sous 
forme  de  désinences.  Les  moindres  nuances  d'une  action 
s'expriment  par  des  termes  distincts  :  ainsi ,  l'idée  de 
pêcher  se  traduit  par  autant  de  verbes  différents  qu'il  y  a 
désertes  de  poissons.  On  dit  que  les  femmes  n'ont  pas  un 
vocabulaire  identique  à  celui  des  hommes,  phénom&equl 
%  été  remarqué  aussi  chez  les  Caraïbes  et  les  Guaranis,  et 
qn'on  explique  par  la  disparition  d'une  population  m&Ie 
primitive,  dont  les  femmes  auraient  été  épargnées  par  de 
nouveaux  venus.  Balbi  distingue  dans  le  groénlandais 
tanoit  dialectes ,  celui  du  Nora  ou  d'Upemavick,  appelé 
hamouk  ou  kamouH;  cekd  du  milieu,  parlé  dans  l'Ile  de 
Disco  et  sur  la cète  occidentale;  celui  du  Sud  ou  de  Julia- 
neshaab.  V.  Barthollnns,  De  Groënlandorum  Unguà 
(dans  les  Tiransactions  de  médecine  et  de  philosophie  de 
Copenhague),  1675;  Egède,  Dictionartum  groëtUandicO' 
danico-lcUinwn^  Copenhague,  1750,  in-8**,  et  Grammor 
tica  groènlandico-éanico^atina,  1760,  in-8<^;  Thorhal- 
lesen.  Schéma  verbi  grammatid,  Copenhague,  1776; 
Othon  Fabridus,  Dictionnaire  groënlandais.  ibid.,  1804, 
in-8^  ;  Kleinschmidt,  Grammaire  groënlawÈeûse,  Berlin , 
1851. 

GROLLE,  ancien  vase,  en  forme  de  flacon,  avec  xme 
poignée. 

GROS,  monnaie  de  France.  Vi  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire. 

GROS,  monnaie  allemande.  Dans  les  États  de  la  Confé- 
dération germanique,  les  bons  gros  {gute  groschen) 
valent  12  pfennige,  et  sont  le  24«  du  thaler,  qui  vaut 


4  fir.  En  Rrusie,  le  gros  émargent  {sUbergrosehm)  ne 
vaut  que  le  30*  du  tfaaler  prussien  de  3  fir.  75  c.  En  Saxe» 
le  noîÊwau  gros  (nengroschm)  vautlOprenfii^t. 

GROS  FA.  y.  Fâ. 

GROSSE,  nom  donné  aux  expéditions  des  actes  nota- 
riés et  des  Jugements  qui  sont  prises  sur  Toriglnal  et  dé- 
livrées en  la  forme  exécutoire.  Cest  la  forme  exécutoire 
qui  distingue  la  grosse  de  toute  antre  expédition,  et  ellH 
donne  le  droit  d'agir  directement  sans  recourir  aux  tri- 
bunaux. Une  grosse  est  ainri  appelée,  parce  qu'on  la 
copie  ordinairement  d'une  écriture  laige  et  grosse.  Ell<» 
fait  foi  dans  le  cas  où  l'original  viendrait  à  se  perdre.  Les 
notaires  et  les  greffiers  des  tribunaux  peuvent  seuls  dé- 
livrer des  grosses  :  chacune  des  parties  intéressées  peut 
en  obtenir  une  ;  mais  tout  notaire  ou  greffier  qui  lui  en 
délivrerait  une  seconde,  sans  une  ordonnance  du  prési- 
dent du  tribunal ,  encourrait  la  destitution.  Les  grosses 
des  contrats  de  mariage  qui  ont  subi  quelques  change- 
ments par  des  contre -lettres  ne  peuvent  être  délivrées 
sans  la  mention  de  ces  changements. 

eaossB ,  en  termes  de  Commerce,  désigne  on  compte  de 
12  douzaines  d'objets;  c'est  comme  qui  dirait  une  groase 
balle  (ballot). 

oaossE  (Contrat  à  la).  V.  PrAt  a  la  oaossi. 

GROSSERIE ,  nom  sur  lequel  on  comprend,  en  termes 
d'Orfèvrerie,  la  vaisselle  de  table  et  les  vases  destinés 
aux  églises. 

GROSSESSE  (Déclaration  de).  En  Droit,  la  veuve  qui 
reste  enceinte  doit  faire  sa  déchuration  de  grossesse,  et  il 
lui  est  donné  un  cuirateur  au  ventre  pour  prévenir  toute 
supposition  de  part  (  V.  es  mot). — La  femme  condamnée 
à  mort  suspend  l'exécution  en  déclarant  une  grossesse. 

GROSSO,  ancienne  monnaie  de  compte  de  Venise,  va^ 
lait  2  centimes  1/2.  Le  Grossetto  en  était  la  12*  partie, 
tandis  qu'en  Dalmatie  c'est  ai^ourd'hui  la  40"  partie  d'un 
ducat ,  environ  9  centimes  1/2. 

GROTE,  monnaie  de  Brème,  valant  5  centimes. 

(^OTESQUE,  mot  qui  signifia  originairement  une  de 
ces  figures  de  caprice,  de  fantaisie,  que  l'on  nomma  aussi 
arabesques  {V.  ce  mot).  Du  temps  d'Auguste,  le  genre, 
dit  arabesque  par  les  modernes,  était  déjà  en  grande  fa- 
veur à  Rome  dans  la  peinture  décorative  ;  Vitruve  le  blâme 
en  s'appujrant  sur  une  fh>ide  logique,  un  rigide  bon 
sens  qui  ne  tient  compte  ni  de  l'ingénieux,  ni  du  gra- 
cieux dont  brillent  habituellement  les  bonnes  composi- 
tions de  ce  genre.  Au  xvi*  siècle,  les  mines  souterraines  de 
quelques  monuments  antiques,  notamment  des  Thermes 
de  Titus,  à  Rome,  offrirent  beaucoup  de  fragments  de  ces 
ci4>ricieuses  compositions;  les  Italiens  les  nommèrent 
grotesques,  de  grotta,  «  grotte,  »  mot  par  lequel  ils  dé- 
signent tout  lien  souterrain.  —  Après  les  gens  de  goût, 
c.-à-d.  les  Anciens ,  vinrent  les  exagérateurs  :  outrant 
une  idée  qui  était  déjà  un  abus,  mais  que  les  inventeurs 
se  faisaient  pardonner  à  force  d'élégance,  d'imagimoion 
fine,  spirituelle,  et  de  correction,  ils  tombèrent  dans  le 
vulgaire,  firent  de  la  caricature,  et  gâtèrent  la  chose  et  le 
mot.  Sous  leur  lourd  crayon  et  leur  imagination  triviale, 
les  grotesques  devinrent  des  figures  grimaçantes,  où  tout 
est  tourné  en  défauts,  antipodes  du  gracieux  et  de  Télé- 
gant,  autant  que  du  sérieux  et  du  correct,  enfin  où  l'art 
véritable  du  dessin  n'entre  plus  pour  rien.  A  l'époque  de 
la  Renaissance,  des  graveurs  s'attachèrent  à  produire  des 
scènes  imaginidres  comiques  ou  hideuses,  ne  chordiant 
dans  la  nature  humaine  que  des  types  défioctueux,  dont 
ils  exagéraient  encore  les  défauts.  Les  artistes  du  moyen 
&ge  cultivèrent  ce  genre  avec  prédilection  ;  ils  en  firent 
abus  dans  la  sculpture  décorative,  en  attachant  aux 
églises  les  figures  les  plus  monstrueuses,  et  sculptant,  sur 
les  boiseries  d'intérieur  de  ces  monuments,  sur  des  stalles 
de  chœur,  les  scènes  les  plus  scandaleuses  et  les  person- 
nages les  plus  propres  à  appeler  la  dérision.    G.  D— t. 

GROnCH,  monnaie  d'argent  d'Egypte,  vahint  30  cen- 
times. 

GROUP,  en  termes  de  factage  et  de  messagerie,  sac 
plein  de  numéraire  et  cacheté,  qui  doit  être  transporté 
d'un  endroit  à  un  autre. 

GROUPE,  en  termes  de  Beaux-Arts,  ensemble  de 
figures  réunies  dans  une  action  commune  et  disposées  de 
manière  que  l'csil  peut  les  embrasser  d'un  seul  coup. 
L'art  de  grouper  les  personnages  fût  porté  à  son  degré  le 
plus  élevé  dans  l'antiquité,  mais  disparut  avec  la  civili- 
sation romaine,  et  ne  fiit  nullement  compris  pendant  le 
moyen  ftge.  Alors  on  rangea  les  personnages  à  la  file,  on 
leur  donna  des  poses  forcées  et  qui  pouvaient  prêter  à 
rire,  môme  dans  les  sujets  les  plus  graves.  Les  peintres 
de  la  Renaissance,  abandonnant  la  routine,  mirent  dans 


GTIA 


1011 


GUB 


kxn  grovpoB  da  penonnagM  le  jea  de  la  nature  et  Tex- 
pveMlon  réelle  de  Taction.  Ce  progrès,  préparé  par  les 
pebiSraB  da  xv*  riècle,  fui  surtout  réalisé  par  Miobel- 
AngiB,  qui ,  en  mettant  au  Jour  son  fameux  carton  de  la 
faerre  de  Piae»  montra  aox  artistea  la  voie  véritablOé  II 
n'est  pas  poaaible  de  donner  des  règles  pour  Tart  de 
poaper;  les  modèles  qii*ofire  la  natora  sont  en  nombre 
mflni,  et  c*est  à  raruate  de  soine  son  inspiration  en 
dwrehant  tov^oars  les  combinaisons  les  plus  naturelles 
et  les  plus  parlantes.  Mengs,  en  voulant  éteblir  des  règles 
basées  sur  le  nombre  impair,  s'est  perdu  dans  des  rai- 
aonnements  diiltis  et  inutiles.  Pour  la  sculpture,  l*aati- 

rité  nous  a  laissé  des  groupes  très-heureux,  le  Laocoon, 
Tanrean  Flamèse,  les  Dioecures,  les  Lutteurs  de  Flo- 
nnoe,  etc.  B.  L« 

aacMirs,  en  italien  grupetto,  assemblage  de  trois  ou 
^inatre  petites  notes  de  musique,  dont  la  valeur  se  prend 
en  avant  de  la  note  qui  en  est  alfBctée,  et  qui  s'exécutent 
avec  rapidité. 

GRUE  (La),  danse  des  Anciens,  instituée,  dit-on,  par 
Thésée,  en  mémoire  de  sa  délivrance  par  Ariane,  et  qn*il 
exécuta  avec  les  Jeunes  Athéniens  tirés  du  Ud>yrintbe. 
Celui  <(ni  menait  cette  danse  faisidt  et  défaisait  le  cercle, 
pour  simuler  les  tours  et  détours  du  Labyrinthe,  et  les 
autres  danseurs  le  suivaient,  à  l'imitation  des  grues  qui 
en  suivent  toujours  une  quand  elles  volent  en  troupe. 

GRUBRIË.  K.  ce  mot  dans  notre  DictUmnaiirB  de  RiO' 
ifraphie  et  d*  Histoire, 

GRYLLES,  nom  que  les  Anciens  donnaient  aux  objets 
d'art  représentant  des  sujets  grotesques.  V.  GAaiOLiVRs, 
dans  le  Supplément. 

GRYMPE,  voile  des  femmes  au  ix«  siècle. 

GRYPHE.  V.  GaiPHB. 

GUACAS  ou  HUACAS,  lieux  consacrés  à  la  sépulture 
chez  les  anciens  Péruviens. 

GCADALAJARA  (Palais  de),  palais  des  ducs  de  Tln- 
Guitado,  dans  la  Nouvelle-Gastille.  C'est  un  monument 
de  transition  entre  le  style  architectural  du  moyen  âge 
et  celui  de  la  Renaissance.  La  construction  en  fut  com- 
mencée en  1461  par  le  marquis  Hurtado  de  Blendoza.  La 
façade  principale,  d'un  développement  considérable,  est 
semée  de  pointes  de  diamant  qui  marquent  la  jonction 
des  pierres,  percée  de  fenêtres  de  diverses  dimensions, 
et  couronnée  d'une  galerie  saillante  à  mâchicoulis.  Un 
srand  écasson  aux  armes  de  la  famille,  tenu  par  deux 
Satyres,  est  au-dessus  de  la  porte,  qu'encadrent  deux 
tourelles.  Cette  porte,  ainsi  que  dans  toutes  les  maisons 
de  raristocratie  espsgnole  antérieures  au  xvm*  siècle, 
ne  se  trouve  paa  an  milieu  de  la  façade,  parce  que,  dit- 
oo,  le  droit  d'avoir  la  porte  au  milieu  du  manoir  était 
jadis  un  privilège  de  la  souveraineté  en  Espagne.  La  dis- 
tribution intérieure  du  monument  a  subi,  depuis  l'ori- 
gine, toutes  sortes  de  modifications  qui  ont  mélangé  les 
stf  k».  La  cour  est  entourée  de  deux  galeries  superposées, 
soutenues,  sur  chaque  côté,  par  six  colonnes  :  les  co- 
lonnes de  la  galerie  inférieure  sont  rondes,  en  pierre,  et 
d^ordre  dorique,  et  supportent  des  espèces  d'arcs  mo- 
resques dont  les  tympans  sont  garnis  de  lions  sculptés; 
celles  de  la  galerie  supérieure  sont  torses,  et  les  tym- 
pans ornés  oe  griffons;  on  retrouve  à  Tentablement  le 
style  grec  le  plus  pur.  Dans  les  appartements,  on  admire 
la  soubassements  en  azuléjos  (V.  ce  mot)^  les  plafonds 
k  caftsons  décorés  de  peintures,  les  cheminées  vastes  et 
richement  sculptées.  La  Saile  des  races,  ainsi  appelée  à 
cause  de  ses  peintures  qui  représentaient  les  armoiries 
de  la  plupart  des  familles  nobles  d'Espagne,  a  été  cé- 
lèbre par  la  magnificence  de  ses  dorures,  qui  la  firent 
nommer  un  brasier  d'or;  on  la  laisse  dans  un  complet 
abandon. 

GU ANCHES  (Idiome  des).  On  ne  possède  qu'un  mil- 
lier de  mots  environ  de  l'idiome  des  Guanches  ou  indi- 
gènes de  l'archipel  des  Canaries.  InsuflSsants  pour  servir 
de  base  à  une  étude  approfondie  de  cet  idiome,  ils  per- 
mettent néanmoins  de  le  rattacher  an  berbère  {r,  ce 
mot).  Cette  filiation,  indiquée  dès  le  commencement  du 
xv«  siècle  par  les  chapelains  qui  firent  partie  de  l'expédi- 
tion de  Béthencourt  aux  Canaries,  ne  résulte  pas  seule- 
ment de  l'abeence  des  copulativea  qu'on  signale  chez  les 
Guanches  et  les  Berbères,  ni  de  leur  prononciation  égale- 
ment dure  et  gutturale,  mais  aussi  de  la  nature  des  mots. 
V,  S^n-Beruielot,  Jf  Anotrsi  swr  les  Guatwhes  (dans  les 
tomes  ï  et  3  des  Mémoires  de  la  Société  ethnologique  de 
Paris)  ;  Da  Costa  de  Blacedo,  Remarques  ethnographiques 
sur  la  langue  origmaU  des  (les  Canaries  (dans  le  Journal 
4$  la  Société  de  géographie  de  Londres^  1841  ). 

G0ABAMIS  (Idiomes),  Idiomes  parlés  par  les  Guaranis 


du  Brésil  (F.  ce  moi).  Les  principaux  sont  le  liipt  el  le 
fftioront  propre.  Ils  diflèrent,  selon  Balbi,  de  toutes  les 
langues  ne  rAmérique.  On  y  remarque  une  multituds  ds 
particules,  qui  souvent  n'ont  pas  de  signification  par 
elles-mêmes,  mais  qui,  en  se  groupant,  forment  des. 
termes  d'un  sens  précis.  Le  guarani  manque  des  oom»* 
sonnes  fet  l;  11  snbsiisue  4  cette  dernière,  dans  les  noms 
étrangers,  la  lettre  r.  L'aspiratiott  de  l'A  y  est  fMqnents, 
mais  très-adoucie;  il  a  trois  articulations  correspondant 
au  ch  allemand,  à  notre  gutturo-nasale  gn,  et  à  notre  i 
mouillée.  La  déclinaison  n'a  qu'une  seule  forme  ;  le  gé* 
nitif  et  l'accusatif  lui  manquent  :  le  pluriel  s'indique  par 
le  sens  de  la  phrase,  ou  à  l'aide  d'un  mot  à  part  dési- 
gnant la  pluralité.  Les  quatre  premiers  noms  de  nombre 
seuls  existent  en  guarani  ;  pour  les  autres,  les  Guaranis 
se  servent  ai^oord'hui  des  termes  espaignols.  Il  n'y  a  pas 
de  verbe  substantif.  Les  verbes  ordinaires  se  conjuguent 
au  moyen  de  préfixes  indiquant  les  personnes,  les  temps 
et  les  modes.  Un  nom  peut  devenir  verbe  par  l'a^oncdon 
du  pronom  personnel.  On  dit  que,  comme  dans  le  ca- 
raïbe et  le  groénlandais,  le  vocanulaire  des  femmes  n'est 
pas  identique  avec  celui  des  hommes.  V,  Ruiz  de  Mon» 
toya,  Tesoro  de  la  Itnptia  guarani,  Madrid,  1639,  in-4*t 
Bandini ,  Arte  de  la  Ungua  guarani ,  avec  notes  de  Res* 
tivo,  1724,  in-4». 

GUARIVE  (Dialecte).  V,  CabaIbb  (Langue). 

GDARRAZAR  (Couronnes  de},  couronnes  d'or  troiH 
vées  en  1858  à  Guarrazar,  dans  la  province  de  Tolède,  et 
achetées  au  prix  de  100,000  fr.  par  le  gouvernement 
fhmçais,  qui  les  a  placées  au  musée  de  Quny.  Elles  sont 
an  nombre  de  huit,  enrichies  de  pierreries,  garnies  de 
chaînes  d'or  destinées  à  les  suspendre,  et  oméà  de  pen- 
deloques à  l'intérieur  et  à  la  circonférence.  De  grandes 
lettres  d'or  suspendues  à  la  plus  importante  de  ces  ooi^ 
ronnes  forment  le  nom  de  Hecceswntkus ,  roi  des  Wis!- 
goths  d'Espagne  à  la  fin  du  vn*  siècle;  l'inscription  d'une 
croix  pendante  au  milieu  d'une  autre  couronne  porte  le 
nom  de  Sonnica,  qui  est  peut-être  celui  de  la  femme  du 
même  prince ,  et  nous  apprend  que  cette  couronne  fut 
ofierte  à  la  Vieroe  de  Sonaces.  Les  couronnes  de  Guar- 
razar ftxrent  probablement  enfouies  lors  de  l'invasion  des 
Arabes,  et  elles  se  sont  conservées  intactes. 

GUDAK,  violon  à  trois  cordes  des  Rosses. 

GUDRUN.  K.  le  SuppUmmU. 

GUEDRONS.  \  V.  notre  Dictionnaire  de  Btographm 

GUÉRILLAS.  )     et  d'Histoire. 

GUÉGARIA  ou  GUÈG13E  (Dialecte).  F.  Albanais 

GUÉRITE,  petite  loge  ordinairement  en  bois,  quelque- 
fois en  maçonnerie,  servant  d'abri  anx  militaires  en  fac- 
tion. Dans  les  édifices  du  moyen  âge,  on  construisait  les 
guérites  k  toute  hauteur  et  souvent  en  saillie  ;  après  la 
découverte  de  la  poudre  à  canon,  on  fut  obligé  d'y  re- 
noncer, parce  qu'elles  servaient  de  point  de  mire  aux 
boulets,  qui  les  démolissaient  en  peu  de  temps.  Les  gué- 
rites sont  maintenant  établies  dans  les  murailles  épaisses, 
en  façon  de  niche  architecturale. 

GUERRE ,  lutte  de  deux  peuples  ou  États  cpi  tendent 
à  se  limiter,  à  se  subordonner  ou  à  se  détruure.  Tantôt 
elle  a  pour  but  la  conquête,  tantôt  elle  est  un  moyen  de 
contrainte  pour  obtenir  l'exécution  d'une  promesse  ou  le 
redressement  d'un  grief.  Elle  décide  les  différends  des 
princes  plus  souvent  que  ceux  des  nations.  La  guerre  est 
défensive,  lorsqu'elle  est  résistance  à  l'attaque  ;  offenswe, 
lorsqu'elle  est  m vasion  sur  le  territoire  ennemi.  La  guerre 
qui  se  poursuit  entre  deux  armées  manoravrant  l'une 
contre  rautre  est  qualifiée  de  guerre  de  campagne,  par 
opposition  à  la  guerre  de  siège.  Une  guerre  qm  a  pour  but 
la  réalisation  d'une  idée  est  une  guerre  de  principe, 
celle  qui  n'est  que  la  satisfaction  d'une  passion  est  nne 
guerre  dintérét  :  ces  deux  caractères  sont  rarement  sé- 
parés, parce  qu'on  invoque  toi^ours  une  idée,  un  prin- 
cipe, pour  excuser  l'emploi  de  la  violence.  Les  guerres 
essentiellement  politiques  sont  préférables  aux  guerres 
religieuses  et  aux  guerres  nationales,  parce  qu'elles  sont 
en  général  plus  courtes  et  moins  acharnées;  elles  am^ 
vivent  peu  a  la  pensée  politique  qui  leur  a  donné  nais- 
sance. On  a  beaucoup  discuté  sur  la  Jusdce  ou  l'i^Justlcs 
de  la  guerre:  en  fait,  il  est  presque  toujours  impoaaibis 
de  démêler  de  .quel  cûté  se  trouve  le  bon  droit,  à  sop» 
poser  qu'il  existe  dans  l'un  des  deux;  certaines  confia 
nances,  l'orgueil  blessé,  de  mauvaises  raisons  plaidéas 
avec  plus  ou  moins  d'art,  déterminent  souvent  les  hosti- 
lités. Il  n'y  a  qu'un  seul  cas  où  la  guerre  se  justifie  aux 
yeux  de  la  raison  et  de  la  Justice  s  c'est  celui  où  un  peuple 
défend  son  tonitoire,  ses  lois,  ses  croyances.  Plus  d'une 
fois  la  guerre  a  été  un  moyen  de  civilisation,  et  peut-être 


GUE 


1012 


GUI 


était-eUe  dans  les  lois  de  la  ProTÎdence  :  tout  dépend  de 
savoir  si  le  penple  envahissant  était  plus  civilise  que  le 
peuple  envahi,  et  si  la  conquête  eut  pour  but  et  réelle- 
ment pour  effet  la  civilisation.  Les  causes  qui  donnent 
naissance  aux  guerres  entre  États  peuvent  aussi  produire 
la  guerre  entre  les  membres  d'une  même  société  poli- 
tique :  c*est  alors  une  gu9rr$  cwUe  ;  là  encore,  celui-là 
teid  a  raison  qui  défend  contre  une  oppression  violente 
sa  vie,  sa  famiue,  sa  liberté,  ses  croyances,  les  produits  de 
son  travail. 
aonon  (Art  delà).  V,  IfiuTAiRE  (Art). 
GVBUus  (Ck)nseil  de^,  tribunal  chargé  de  Juger  les  dé- 
lits et  crimes  des  militaires.  La  loi  du  13  brumaire  an  v 
(8  nov.  1795)  en  a  créé  un  par  corps  d'armée  ou  divi- 
sion militaire  de  Tintérieur.  Il  se  compose  d'un  colonel, 
Snteident;  d'un  ofBder  supérieur,  de  deux  capitaines, 
*nn  lieutenant,  d'un  sous-lieutenant,  et  d'un  sous-offi- 
cier. Juges;  d'un  rapporteur,  en  même  temps  Juge  d'in* 
strucâon;  et  d'un  commissaire  du  gouT.  taisant  les  fonc- 
tions du  ministère  public.  Ces  deux  derniers  magistrats 
sont  pris  parmi  les  chefs  de  bataillon  ou  d'escadron,  ou 
les  capitaines  et  les  adjoints  de  1**  et  de  2*  classe  de  l'In- 
tendante militaire  :  ils  ont  des  substituts  du  grade  de  ca- 
Sitaine  ou  de  lieutenant.  Les  greffiers  sont  adjudants 
'administration  ou  officiers  d'administration  ;  les  com- 
mis-greffiers sont  «yudants  sous-officiers.  Les  débats 
sont  publics.  Trois  suffrages  favorables  entraînent  l'ab- 
Bolution  ;  il  en  faut  cinq  contraires  pour  appliquer  une 
peine.  Le  Jugement  est  rendu  sans  désemparer;  il  est 
exécutoire  24  heures  après  que  la  lecture  en  a  été  don- 
née au  condamné,  s'il  n'y  a  pas  eu  pourvoi  en  révision  ; 
et,  s'il  y  a  eu  pourvoi  suivi  de  confirmation ,  dans  les 
S4  heures  du  renvoi  des  pièces  au  Conseil.  Les  délits 
commis  par  des  militaires  éloignés  de  leurs  drapeaux 
sont  JugM  par  les  tribunaux  ordinaires,  tandis  que  les 
individus  à  la  suite  de  l'armée  sont  soumis  aux  Con- 
seils de  guerre.  Dans  les  places  assiégées,  le  commandant 
choisit  les  membres  du  Conseil  de  guerre,  dont  les  pou- 
voirs finissent  avec  l'état  de  siège,  et  duquel  tous  les 
citoyens  sont  Justiciables.  Une  loi  du  18  vendémiaire 
an  VI  a  établi  dans  chaque  division  militaire  un  Conseil 
de  révision  (F.  ce  mot)^  et  un  second  Conseil  de  guerre 
chargé  de  connaîtra  des  jugements  que  celui-d  a  réfor- 
més. -*  Dans  la  Marine,  il  y  a  deux  espèces  de  Conseils 
de  guerre  :  les  uns,  siégeant  à  bord  des  bâtiments  de 
l'État,  ont  pour  Justiciables  tons  les  individus  embar- 
qués ;  les  autres,  placés  dans  les  chefe-lieux  des  préfec- 
tures maritimes,  étendent  leur  compétence  à  tous  les 
officiers  ou  assimilés,  ainsi  qu'aux  individus  embarqués, 
lorsque  leur  bâtiment  est  dans  l'enceinte  de  l'arsenal , 
et  Jugent  les  faits  de  perte  ou  de  prise  de  bâtiments 
de  rËtat.  —  On  appelle  encore  Conseil  de  guerre, 
Boit  à  l'armée ,  soit  dans  une  place  de  guerre,  une  réu- 
nion d'officiers  tenue  pour  donner  un  avis  sur  le  parti 
à  prendre  dans  quelques  cas  difficiles.  7.  Uiutaibb 
(Justice). 

GUBBRB  (Dédme  de),  imposition  extraordinaire  d'un 
décime  par  firanc  en  sus  des  droits  d'enregistrement,  de 
timbre,  d'hypothèque,  de  çraffe,  de  voitures  publiques,  de 
garantie  sur  les  mati^:es  d'or  et  d'argent,  de  douane,  etc., 
ainsi  crue  sur  les  amendes  et  condamnations  pécuniaires. 
Cette  imposition ,  établie  pour  une  année  par  la  loi  du 
6  prairial  an  vn  (25  mai  1799),  à  titre  de  subvention  de 
guerre,  s'est  maintenue  d'année  en  année  jusqu'à  pr^nt. 
u  y  a  même  eu  quelquefois  le  doubU  décnn$  de  guerre. 

GUEPRB  (Déclaration  de).  Chez  les  Romains,  la  déda- 
radon  de  guerre  s'appelait  elarigatio,  paroe  que  c'était 
une  publication  à  haute  voix  {clarà  voce)^  faite  par  les 
PédaJs,  personnages  sacerdotaux  qui  Jetaient  en  outre 
une  Javeune  sur  le  territoire  du  peuple  déclaré  ennemi. 
Jusqu'au  milieu  du  xvn*  siècle,  on  conserva  cet  usage  de 
tUre  déclarer  la  guerre  par  des  hérauts  d'armes  :  au 
moyen  Age,  le  héraut  envoyé  an  chef  ennemi  Jetait  à  ses 
pieds  un  gantelet  en  signe  de  défi  ;  ou  bien,  il  sonnait  du 
cor  sur  la  ligne  de  démarcation  des  parties  belligérantes, 
et  lisait  à  haute  voix  le  cartel  ;  ou  encore  il  l'affichait  sur 
quelque  arbre  voisin  de  la  frontière.  Ai^o^*^!^  ou  pro- 
clame l'état  de  guerre  par  des  manifestes  rendus  publics 
et  qu'on  se  notifie  de  part  et  d'autre;  on  rappelle  les  am- 
bassadeurs, chargés  d'affaires  et  consuls,  qui,  avant  de 
prendre  leurs  passe-ports,  déposent  les  intérêts  de  leun 
commettants  entre  les  mdns  des  agents  de  quelque  na- 
<tion  amie  ;  on  rappelle  ceux  des  sc^ets  qui  sont  au  scorvice 
<militidre  ou  dvil  de  l'ennemi,  et  même  ceux  qui  se 
trouvent  sans  fonctions  sur  son  territoire;  on  interdit 
toute  relation  de  oommeroe. 


GDERRB  (Dépôt  de  la).  V.  Dépôt  ob  la  GoasaB,  dans 
notre  Dicttonnair9  de  Biographie  et  dk  Histoire, 

GUBRRB  (Bfinistère  de  la).  V.  MmisràsB  db  la  cuEaaB, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Histoire. 

onEaRB  (Petite),  simulacre  <to  guerre  dans  lequel  des 
corps  de  troupes  manœuvrent  et  feignent  de  combattre 
les  uns  contre  les  autres,  en  tirant  seulement  à  poudre. 

GDBsaBS  (Commissaires  des),  officiers  qui  avaient  autre- 
fois pour  attributions  de  veiller  aux  besoins  des  troupes, 
de  pourvoir  aux  vivres  et  aux  i4>provisionnements  de 
toute  sorte.  Les  sénéchaux  et  les  btuilis  remplissaient  ces 
fonctions  dans  les  limites  de  leurs  bailliages,  lorsqu'on 
1855  on  créa  un  corps  d'administrateurs  militaires  sous 
le  titre  de  conducteurs  des  gens  de  guerre;  on  en  compta 
12  pour  toute  l'armée.  Une  ordonnance  db  t373  autorisa 
les  connétables,  les  maréchaux,  les  maîtres  des  arbalé- 
triers, à  nommer,  pour  les  gens  gui  étaient  sous  leurs 
ordres,  des  commis  ou  commissavres  des  guerres.  Cet 
essai  d'administration  militaire  fut  abandonné  au  com- 
mencement du  règne  de  Charles  VII.  Les  commissaires 
des  guerres  furent  rétablis  en  1514,  sous  la  dépendance 
du  ministre  de  la  gueire,  et  une  ordonnance  de  1553  leur 
accorda  le  droit  de  siéger  au  parlement  ;  on  leur  donna 
pour  chef,  en  1614,  un  commissaire  général  ^  qui  fut 
rempUcé  en  1635  par  des  commissaires  ordonnateurs. 
Leur  solde  avait  été  fixée  à  480  livres  en  1514  :  un  arrêt 
du  Conseil ,  de  l'année  1693,  donna  à  ceux  qui  avaient 
payé  50,000  liv.  pour  la  finance  de  leur  charge,  2,200  liv. 
de  gages  et  3,000  Ûv.  d'appointements;  à  ceux  qui  avaient 
payé  40,000  liv.^  1,600  liv.  de  gages  et  3,000  liv.  d'ap- 

romtements;  à  ceux  qui  n'avalent  financé  que  30,000  liv., 
,320  liv.  de  gsges,  sans  appointements.  Pendant  le  mi- 
nistère du  comte  de  Saint-Germain,  il  y  eut  18  commis- 
saires ordonnateurs,  assimilés  aux  colonels,  avec  6,000  liv. 
de  solde;  16  conmilssaires  principaux,  SO  commissaires 
de  1**  classe,  96  de  2*,  tous  assimilés  aux  capitaines,  avec 
5,000,  4,000  et  3.000  liv.  de  solde.  En  1788,  la  finance 
fut  portée  à  55,000  liv.  Un  décret  du  20  sept.  1791  établit 
une  organisation  nouvelle,  qui  dura  Jusqu'au  29  Janv. 
1800,  époque  où  les  fonctions  attribuées  Jusque-là  aux 
commissaires  des  guerres  furent  partagées  entre  deux 
sortes  de  fonctionnaires,  les  inspecteurs  aux  revues  et 
les  commissaires  des  guerres.  Ces  derniers  comprirent 
35  commissaires  ordonnateura,  120  commissaires  de 
l'*  classe,  120  de  2*,  et  35  adjoints  ;  supprimés  par  or- 
donnance du  29  juillet  1817^  ils  furent  remplacés  par  le 
corps  de  Vlntendance  miiitatre,  B. 

GUET.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire. 

GUET-APENS  (c.-à-d.  guet  appensé,  prémédité),  ac- 
tion d'attendre  un  individu  pour  lui  donner  la  mort  ou 
exercer  sur  lui  quelques  violences.  Le  guet-apens  dénote 
la  préméditation,  et  est  une  circonstance  acêiravante  du 
crime  ou  délit  auquel  il  s'applique. 

GUÊTRE,  pièce  de  cuir  ou  d'étoffe  qui  couvre  tout  ou 
partie  de  la  jambe  et  le  dessus  du  pied,  et  qui  se  boutonne 
ou  se  boucle  sur  le  côté.  Les  Anciens  connurent  les 
guêtres  sous  le  nom  de  tibiaiia.  Dans  l'armée  firançaise^ 
les  guêtres  furent,  à  partir  du  premier  Empire,  une  pièce 
importante  du  vêtement  :  l'infanterie  de  ligne  et  les  dra- 
gons à  pied  les  portaient  montantes  au-dessus  du  genou  ; 
celles  de  l*infanterie  légère  n'allaient  qu'à  mi-jambe,  et 
étaient  coupées  en  cœur  sur  le  devant ,  avec  un  gland 
et  une  houppe  de  couleur.  En  1810,  les  guêtres  de  l'in- 
fanterie de  ligne  descendirent  au-dessous  du  genou.  Au- 
jourd'hui l'infanterie  française  porte  des  guêtres  de  cuir 
pendantl*hiver,  et  de  toile  grise  pendant  l'été. 

GUETTE,  nom  qu'on  donnait  quelquefois  à  la  tour  la 
plus  élevée  d*an  château,  parce  qu'elle  servait  à  faire  le 
guet. 

GUEULE,  mot  employé  comme  synonyme  de  Cymatse- 
(V.cemoÇj, 

GUEULES  (de  l'arabe  gui ,  rose),  en  termes  de  Bla- 
son, désiçae  la  couleur  rouge.  C'était  la  plus  honorable  ; 
elle  n'était  portée  que  par  les  princes  ou  ceux  auxquc^ 
la  permission  en  avait  été  octroyée,  et  exprimait  la  Jus- 
tice, l'amour  de  Dieu,  la  vaillanœ.  la  magnanimité. 
L'émail  de  gueules  est  figuré  par  des  nachures  verticales 
sur  le  fond  de  l'écu. 

GUI  ou  BOHE.  grande  vergue  en  arc-boutant  qui  sert 
à  étendre  la  partie  inférieure  de  la  brigantine.  Le  gui 
tient  par  un  bout  au  mât  d'artimon,  sur  lequel  il  tourne 
comme  sur  un  centre  ;  par  l'autre,  il  sort  d'un  quart  de 
sa  longueur  en  dehon  du  bâtiment.  Placé  trè»-près  dv 
pont,  u  y  cause  un  encombrement  regrettable. 

GUI  DE  BOURGOGNE,  chanson  de  geste  qui  appartiea* 


GUI 


1013 


GUI 


«1  cyde  des  romaus  carlovingieiis  (F.  ce  mot)^  et  qai,  à 
«n  Joger  par  la  langue  et  par  certains  détûia  de  moeurs  et 
de  costume,  dut  être  composée  à  la  fin  du  xii*  siècle  ou 
au  commencement  du  xm*.  Le  sujet  se  rapporte  à  la  con- 
^ète  faboleose  de  TEspagne  par  Gharlemagne.  Il  y  a  déjà 
tï  ans  qae  la  guerre  est  commencée,  lorsque  de  Jeunes 
cavaliers,  dont  les  pères  servent  sous  Tempereur,  dé- 
cernent la  royauté  k  Tun  d*entre  eux.  Gui  de  Bourgogne, 
personnage  qui  n'a  rien  de  commun  avec  celui  que  les  lé- 
gendes font  figurer  parmi  les  paladins  de  Gharlemagne 
et  que  Ton  trouve  dans  la  chanson  de  Fierabrcu  (V^ee 
mot).  Gui,  au  lieu  de  gouverner  paisiblement  la  France, 
enjoint  à  ses  compagnons,  après  avoir  reçu  leur  serment 
de  foi  et  d'hommage,  de  le  suivre  en  Espagne,  où, 
^près  de  brillants  exploits,  il  va  se  soumettre  à  Gharle- 
magne, et  l'aide  h  prendre  la  ville  de  Luiseme,  vaine- 
ment assiégée  depuis  sept  ans.  —  Le  Trouvère  qui  a  écrit 
Gui  de  Bourgogne  est  inconnu  ;  il  possède  sur  ses  con- 
tempondns  une  supériorité  évidente  dans  les  scènes  dia- 
loguées.  Son  poëme  n'a  été  conservé  que  dans  deux 
manuscrits  du  xm*  siècle  :  l'un,  conservé  au  Musée  bri- 
tannique de  Londres,  a  fait  partie  de  la  bibliothèque  Har- 
léienne  ;  Fantre,  qui  est  le  meilleur,  provenant  du  mo- 
nastère de  Harmoutiers,  et  conservé  à  la  bibliothèque  de 
Tours,  est  celui  qu'ont  publié  BiM.  Guessard  et  BAichelant 
dans  la  collection  des  Anciens  poëUi  de  la  France,  Paris, 
1850,  ÛM6.  B. 

GUI  DE  NAMTEUIL,  chanson  de  geste  qui  se  rat- 
tache an  cycle  des  romans  carlovingiens  (F.  ce  mot)»  Gui 
de  Nanteuil  est  flls  de  Gamier  de  Nanteuil  et  d'Aye  d'Avi- 
gnon; n  a  pour  aïeul  Boon  de  Nanteuil,  le  second  des 
douze  fils  de  Doon  de  Mayence.  S'étant  rendu  k  une  cour 
plénière  tenue  par  €3iarlemagne»  il  reçoit  de  ce  prince  la 
faveur  de  porter  l'oriflamme.  La  famille  de  Ganelon  en 
est  Jalouse  :  Hervieu  de  Lyon,  fils  du  fameux  traître  Ma- 
caîre  et  neveu  de  Ganelon,  qui  a  récemment  fait  à  l'em- 
pereur un  riche  présent  pour  obtenir  la  main  de  la  belle 
Églantine  de  Gascogne,  accuse  Gui  d'un  meurtre.  Celui-ci 
demande  le  combat,  et  Hervieu  n'échappe  à  la  mort  que 
par  une  lâche  intervention  des  siens.  Pendant  la  mêlée, 
Goi  a  frappé  le  Jeune  Hardré,  l'une  des  espérances  de  la 
famille  de  Ganelon  :  poursuivi  jusque  sous  les  murs  de 
Nanteuil  par  Gharlemagne  et  Hervieu,  il  voit  arriver  à 
son  aide  une  armée  de  100,000  hommes,  sous  les  ordres 
de  Ganor,  le  second  époux  d'Aye.  La  victoire  n'est  plus 
un  instant  douteuse;  Hervieu  périt  sous  les  coups  de  son 
rival  ^  et  l'empereur,  couvert  de  honte  et  de  ridicule,  est 
réduit  à  demander  la  paix.  Églantine  épouse  Gui  de  Nan- 
teuil. —  Ce  roman,  de  3,000  vers  environ,  fait  suite 
immédiatement  à  celui  ^Aye  (F.  ce  mot);  il  est  l'œuvre 
d'un  trouTère  inconnu,  et  semble  avoir  etk  composé  à  la 
fin  du  xu*  siècle.  On  n'en  connaît  aujourd'hui  que  deux 
manuscrits  ;  l'un,  appartenant  à  la  hibliothèque  de  la 
Faculté  de  Médecine  de  Montpellier;  l'autre,  en  fran- 
çais fortement  italianisé,  conservé  dans  la  bibliothèque 
de  S^Marc,  à  Venise.  Ils  ont  servi  pour  la  publication 
du  (rw  de  Nanteuil  de  P.  Meyer,  lequel  fait  partie  de  la 
collection  des  Anctens  poëiês  de  la  France,  Paris>  1861. 

GUI  DE  WARWYKE.  V.  le  Supplément. 

GUIBERT  D'ANBRENAS,  9*  branche  de  la  chanson  de 
GuiUaumê  au  court  nez.  Aimeri  de  Narbonne,  chargé  de 
gloire  et  d'années,  n'a  plus  qu'un  flls  à  pourvoir.  Il  lui 
donne  la  cité  d'Andrenas,  en  Espagne,  qu'il  possédera 

rmd  il  en  aura  chassé  les  mécréaiats.  Il  part  à  la  tête 
tous  ses  parents  et  amis  pour  mettre  le  siège  devant 
Andrenas.  Cette  ville  est  livrée  par  la  belle  Guète  ou  Au- 
^ète,  qui  reçoit  le  baptême  et  épouse  Guibert.  —  Cette 
chanson  existe  à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris  dans 
un  seul  manuscrit  du  xnr*  siècle.  V.  Histoire  littéraire 
de  la  France,  tome  XJUI.  H.  D. 

GOIBRE,  en  termes  de  Marine,  synonyme  d'^p«ron 
{V.  ce  mot), 

GUICHET,  petite  porte  de  service  pratiquée  dans  une 
grande,  pour  éviter  l'embarras  ou  l'inconvénient  d'ou- 
vrir les  grands  battants.  On  en  voit  aux  portes  des  pri- 
sons, des  châteaux,  des  édifices  publics.  A  Paris,  on  donne 
le  nom  de  ffuiehete  du  Louvre  aux  arcades  de  ce  monu- 
ment sons  lesquelles  passent  les  voitures  et  les  piétons.  On 
appelle  aussi  guichets  de  petites  ouvertures  pratiquée» 
dans  les  fendtres  ou  les  portes,  comme  aux  prisons  et  aux 
couvents,  pour  pouvoir  parler  du  dedans  au  dehors  sans 
être  obligé  d'ouvrir  la  porte.  De  là  est  venu  le  nom 
de  ffuiehetiers  donné  aux  geôliers  de  prison.  —  En  Hy- 
dnnlique,  les  guichets  sont  de  petites  portes  pratiquées 
dus  les  grandes  portes  d'écluses  ;  elles  servent  à  Itusser 
l'ean  en  ^foantité  moindre  et  avec  moins  de  vio- 


lence ;  on  les  manoeuvre  au  moyen  de  crics  et  de  roues 
dentées  fixées  sur  la  tête  des  grandes  vannes. 

GUIDE  (La),  en  termes  de  Musique,  partie  qui  entre 
la  première  dans  une  fugue,  et  annonce  le  sujet. 

Goms,  nom  que  prennent  les  sous-officlers  sur  lesquels, 
dans  les  évolutions,  les  hommes  d'une  troupe  doivent 
régler  leurs  alignements  et  leurs  mouvements. 

GUIDE-ACCORD.  V.  au  Supplément. 
.GUIDES,  un  des  r^ments  de  cavalerie  de  la  garde 
impériale  en  France.  Un  décret  du  10  mai  1852  leur  a 
donné  pour  uniforme  un  dolman  et  une  veste  de  drap 
vert,  avec  brandebourgs  de  laine  jaune,  un  pantalon  ga^ 
rance,  un  colback  avec  flamme  garance  et  aigrette  en 
crins  blancs.  V.  Goidbs,  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

GUIDON,  mot  qui,  après  avoir  désigné  une  espèce 
particulière  d'étendard  (  V,  notre  Dictionnaire  de  Biogra^ 
phie  et  d^Histoire)jt  ne  s'applique  plus,  dans  l'armée  de 
terre,  qu'à  un  petit  drapeau  carré  dont  le  manche  peut 
entrer  dans  le  canon  du  fusil ,  et  qui  sert  aux  aligne- 
ments. Dans  la  Marine,  le  guidon ,  plus  court  et  plus 
large  que  la  flamme  (K.  ce  mot),  est  employé  pour  les 
signaux.  —  Dans  le  Plain-chant,  on  nomme  ^tion  un 
petit  signe  qu'on  place  au  bout  de  chaque  portée,  pour 
indiquer  la  place  qu'occupe  la  1**  note  de  la  portée 
suivante. 

GUIGUE.  V.  GiG. 

GUILDER.  V.  GoLD. 

GUILDHALL,  c-hré.  en  anglais  Salle  de  la  corportt» 
tion,  nom  donaé  à  l'Hôtel  de  Ville  de  Londres.  Ce  mo- 
nument, construit  en  1411,  brûlé  presque  entièrement 
en  1669,  et  aussitôt  réédiflé,  n'a  eu  sa  façade  terminée 
qu'en  1789.  A  l'entrée  se  trouvent  les  deux  célèbres  sta- 
tues de  Gog  et  de  Maeog.  La  grande  salle,  qui  a  51  met 
de  longueur  sur  16",33  de  largeur  et  18'»,66  d'élévation, 
peut  contenir  de  6  à  7,000  personnes  :  c'est  là  qu'ont  lieu 
les  élections  parlementaires  et  munidptdes,  les  réunions 
autorisées  par  le  corps  des  aldermen,  les  repas,  fêtes  et 
bals  donnés  par  la  ville  de  Londres. 

GUILLAUME,  monnaie  d'or  de  Hollande,  valant 
20  fr.  70  c. 

GoiLLAVHE  (Les  Enfauccs),  4*  branche  de  la  chanson 
de  Guillaume  au  court  nez.  Aimeri  de  Narbonne  envoie 
son  fils  à  la  cour  de  l'empereur  Charles.  Le  Jeune  homme 
rencontre  en  chemin  une  troupe  de  Sarrasins  ;  il  les  met 
en  déroute ,  et  fait  savoir  à  la  belle  Orable,  fille  du  roi 
d'Oran^,  qu'il  prétend  l'épouser  un  jour.  II  arrive  à 
S^Denis  pour  le  couronnement  de  l'empereur,  et  y  montre 
tant  de  bravoure  et  d'adresse,  que  Charles  l'arme  cheva- 
lier. La  vie  de  Guillaume  est  ensuite  remplie  par  une 
long^ue  série  d'exploits,  tels  que  le  Couronnement  du  rot 
Louis,  le  Charroi  de  Nismes,  la  Prise  d'Orange,  la  So- 
taUle  d^Aleschans.  Enfin  Guillaume,  devenu  vieux,  songe 
à  son  salut  éternel,  et  alors  commence  son  Moniage,  qui 
est  la  13*  branche  de  la  chanson.  Il  construit  le  monas- 
tère de  Gellone,  non  loin  d'Aniane.  Chassé  bientôt  par 
les  moines  d'Aniane,  qui  redoutaient  sa  force  et  sa  vio- 
lence, il  construit  dans  «une  forêt  aux  environs  de  Mont- 
pellier la  fameuse  cellule  de^S^-Guilhem-du-Désert  Enfin 
il  est  appelé  par  l'empereur  pour  défendre  Paris  assiégé 
par  les  Infldèles.  Reçu  d'abord  dans  la  maison  de  Ber- 
nard du  Fossé  (  maison  devenue  historique  et  qui  est  en- 
core mentionnée  comme  telle  au  xv*  siècle),  il  délivre 
Paris  en  tuant  le  géant  Isoré.  L'endroit  où  eu^  lieu  le 
combat  s'appelle  encore  Tombe  fsoùre;  c'est  la  principale 
entrée  des  catacombes  au  delà  de  l'anc.  barrière  d'ArcueU. 
Guillaume  retourne  dans  son  ermitage,  où  son  dernier 
exploit  est  une  lutte  corps  à  corps  avec  le  Diable.  H  meurt 
en  odeur  de  sainteté.  —  Ce  Guillaume  n  est  point  un  per* 
sonnage  imaginaire.  Gharlemagne  l'avait  nommé  gouver- 
neur de  Toulouse,  et,  à  ce  atre,  il  soutint  de  longues 
guerres  contre  les  Gascons,  qui  prétendaient  conserver 
leur  indépendance.  La  tradition,  en  se  transmettant  d'&àe 
en  à^  se  transforma  et  s'agrandit  ;  Guillaume  devint  le 
vainqueur  des  Sarrasins,  le  conquérant  de  l'Italie  ;  on  lui 
attribua  les  exploits  des  Normands.  Quant  à  la  sainteté 
de  sa  vie  monastique,  elle  est  attestée  par  un  témoin 
oculaire,  le  moine  Ardon,  qui  écrivit  en  822  la  vie  de 
S^  Benoit.  Les  Enfances  Cruillaume  sont  conservées  à  Ia 
Bibliothèque  nationale  de  Paris  dans  quatre  manuscrits  i  : 
le  Moniage  se  trouve  aussi  dans  ouatre  manuscrits  in«.  ^ 
complets,  dont  un  appartient  à  la  oibliothèque  de  l'Ar-  « 
seual.  V.  Histoire  littéraire  de  la  France,  t.  XXH.  H.  D.    ^ 

GDiLL&oiiE  AU  coDST  NEZ,  srande  chanson  de  geste  sur 
les  exploits  d' Aimeri  de  Narbonne,  de  ses  enfants  et  pe- 
tits-enfants. Cette  chanson  prend  le  nom  du  plus  célèbre 


) 


GUI 


1014 


GUI 


des  enCuits  d*Aimeri ,  Gnillanme  aa  eonrt  nei,  antroment 
dit  GaiUaome  d'Oranee,  GoilIaaiDe  Fierebrace,  SMaoîl- 
laume  de  Gellone.  Elle  se  compose  d*environ  120,000 
Ten,  et  on  la  divise  en  18  branches,  savoir  : 


I.  Garin  de  Montglane; 

n.  Gérard  de  Viane; 
m.  Aimeri  de  Narbonne; 
IV.  Les    Enfances    Guil- 
laume ; 

V.  Le  Couronnement  du 

roi  Louis; 

VI.  Le  Charroi  de  Nismes; 
Vn.  La  prise  d'Orange; 

VIII.  Beuve  de  Comarchis; 
IX.  Guibert  d'Andemas; 
X.  La  mort  d'Aimeri  de 
Narbonne; 


XI.  Les  Enfances  Vivien  ; 
XII.  La  chevalerie  Vivien 
etlabataiUed'Ales- 
chans; 
Xm.  Le   moinlage   Guil- 
laume; 
XIV.  Raînouart; 
XV.  La  bataille  de  Loqui- 

fer; 
XVI.  Le    moiniage    Rai- 

nouart; 
XVn.  Renier; 
XVni.  Foulque  de  Candie. 


V.  les  articles  consacrés  à  ces  divers  romans.      H.  D. 

GUILLEBfETS,  signe  typographique  qui  ae  place  avant 
et  après  une  citation.  Il  est  ainsi  figuré  :  «  ».  L*usa^ 
■'en  introduisit  pour  la  première  fois  dans  l'imprimene 
en  1546,  et  Ton  croit  qu'un  certain  Guillemet  en  fut  Tin- 
yenteur. 

GUILIXXIHIS,  ornement  en  forme  de  réseau  ou  de 
lignes  ondulées,  dont  on  embellit  les  pièces  d'orfèvrerie. 
Il  se  pratique  au  moyen  d'une  machine  appelée  tour  à 
guillocher,  —  En  Sculpture,  guUlochig  est  synonyme  de 
grecqu»  et  de  bàtoiu  rompus, 

GUILLOTINE,  instrument  de  décapitation  usité  surtout 
en  France.  Cest  un  pesant  couteau  d'ader,  à  tranchant 
oblioue,  suspendu  entre  deux  poteaux,  abaissé  ou  relevé 
par  le  simple  Jeu  d'une  corde,  et  qui  tombe  sur  le  cou 
du  condamné  garrotté  horizontalement  sur  une  planche. 
La  guillotine  est  ainsi  appelée  d'un  médecin  nommé  Guil- 
lotin,  député  à  l'Assemblée  constituante  de  1780;  non 
qu'il  en  soit  l'inventeur,  mais  parce  qu'il  l'indiqua  comme 
moyen  uniforme  d'infliger  la  mort,  sans  distmction  de 
noblesse  ou  de  roture,  et  comme  le  procédé  le  plus 
intMnpt,  le  plus  sûr  et  le  plus  doux;  Antoine  Louis,  se- 
crétaire de  l'Académie  de  Médecine,  et  le  mécanicien 
Schmidt,  venaient  de  la  perfectionner.  Elle  porta  quelque 
temps  le  nom  de  la  proùt  Louwm^  la  pettU  Loution  ou 
Louueit9^  par  allusion  au  docteur  Louis.  Des  machines 
analogues  existaient  antérieurement  :  Jean  d'Auton  (  His- 
toire  ae  Louis  Xll)  mentionne  en  1507  la  mamnaja  em- 
ployée à  Gènes;  Robertson  parle  d'un  instrument  iH[>pelé 
moàdsn  en  Ecosse  pour  le  supplice  des  nobles.  D'an- 
dennes  gravures  allemandes  de  Pents,  de  H.  Aldegrever 
et  de  Lucas  Cranach  offrent  l'image  de  pareils  instru- 
nenta  de  supplice,  ainsi  que  l'ouvrage  publié  en  1555 

r  Achille  Bocchi  sous  le  ntre  de  SymboUcœ  quœsiianes 
u»to«rfo  gensrs.  On  voit  dans  les  Mémoires  de  Puy- 
■égur  que  le  maréchal  de  Montmorency  fut  décapité  à 
Toulouse,  en  163S,  au  moyen  d'une  àolwrs  glissant  entre 
deux  poutres.  Avant  la  Révolution,  on  Jouait  à  Paris,  sur 
le  thé&tre  d'Audinot,  une  pantomime  des  QwUrs  fUs 
Aymon,  où  l'un  des  personnages  était  exécuté  de  cette 
flBJçon.  V.  Dubois,  Recherches  historiques  et  physiolo- 
guiues  sur  la  guillotine,  Paris,  1843,  et  un  article  de  la 
moue  britannuiue,  décembre  1846.  B. 

GUIMBARDE ,  instrument  ou  plutôt  i^pareil  vibratoire 
en  fer,  très-commun  en  Allemagne  et  dans  les  Pays-Bas. 
Ite  forme  à  peu  près  ovale,  comme  l'anse  ou  poignée  des 
anciens  tire-bouchons,  il  oifre  au  milieu  une  languette  de 
même  métal ,  élastique,  scellée  par  un  bout  au  haut  du 
eorps  de  Tinstrument ,  et  dont  rautre  bout  est  recourbé 
pour  que  le  doigt  puisse  aisément  l'accrocher.  On  ap- 
plique la  guimbarde  contre  les  dents,  et  on  l'y  assiOetut 
par  la  pression  des  lèvres.  Pour  en  jouer,  on  agite  la  lan- 
guette avec  le  doigt  ;  en  vibrant  elle  produit  un  son ,  qui 
vénérait  monotone  n  ses  intonations  n'étaient  modifiées 
par  Télargissement  et  le  rétrécissement  des  lèvres.  Les 
enfanta  font  de  la  guimbarde  un  Jouet  plutôt  qu'un  in- 
strument ;  mais  il  rest  trouvé  des  artistes  qui  en  ont  tiré 
de  prodi^eux  effets,  entre  antres  Koch,  Eulenstein,  Ku- 
nert,  Deichmflller,  Scheibler,  an  point  de  se  ftdre  ad- 
mirer dans  les  concerta.  Ces  artistes,  pour  exécuter  des 
morceaux  compliqués  et  passer  dans  divers  tons,  se  ser^ 
talent  successivement  de  plusieurs  guimbardes,  et  les 
échangeaient  sans  interrompre  le  cours  de  la  phrase  mu- 
iicale.  Scheibler  avait  façonné,  sous  le  nom  d*iliira,  un 
instrument  composé  de  douie  guimbardes,  pour  lequel  il 
écrivit  une  Méthode.  B. 

GDimàaDB,  grand  chariot  à  S  ou  4  roues,  servant  au 
transport  des  marchandiBesi  ou  des  récoltes  des  champa« 


GuniBAani  (Jeu  de).  V.  BUaiéa  (Jeu  de  la). 

GUIMPE  (de  l'allemand  wùnpel,  voile),  morceau  de 
toile  qui  couvre  le  cou  et  la  poitrine  des  relif^eusas,  et 
qui  quelquefois  encadre  aussi  le  visage.  Le  vieux  verbe 
guimper  signifiait  se  faire  religieuse.  Les  femmes  do 
monde  portent  aussi  des  collerettes  en  forme  de  guimpe. 

GUDlDER,  en  termes  de  Marine,  hisser  sur  les  bea- 
màts  les  mâts  de  pexroquet  et  de  cacatois.  On  noncme 
ffuindaiU  la  plus  grande  hauteur  à  laquelle  on  puisse 
élever  une  voile;  ffuindal ,  une  machine  à  hisser  les  fa^ 
deaux  (^u'on  doit  embarquer  sur  les  navires  ;  guindectu , 
un  treuil  à  axe  horixontal  qui  sert  à  retenir  les  c&bles  et 
à  lever  les  ancres. 

GUII9ÉE^  monnaie.  T.  notre  DKtvmnaxre  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire. 

GUINGUETTE  (du  vieux  mot  guinguet ,  petit  vin  ;  dé- 
rivé lui-même  de  gwnguet,  petit,  mince,  étroit),  cabaret 
hors  de  la  ville,  par  delà  les  barrières,  où  le  peuple  va 
boire  et  danser.  —  On  donnait  autrefois  le  même  nom 
à  une  voiture  découverte  à  deux  roues,  qui  fut  ensuite 
appelée  PhaéUm, 

GUIRLANDE  DE  JULIE  (La),  recueil  de  madrisaux, 
que  le  duc  de  Montausier  fit  composer  par  les  beaux 
esprits  du  temps,  et  dont  il  composa  une  partie,  en  l'hon- 
neur de  M^*  Julie-Ludne  d'Angennes  de  Rambouillet, 
dont  il  était  épris  depuis  10  ans.  C'est  un  volume  manu- 
scrit sur  vélin,  de  00  feuillets  in-folio  ;  29  contiennent 
chacun  une  fleur  peinte  en  miniature,  et  les  autres  un  ou 
plusieurs  madrigaux ,  au  nombre  total  de  63,  se  rappoi^ 
tant  à  chaque  fleur.  Après  trois  feuillets  de  garde,  on 
trouve  le  faux-titre,  composé  d'une  çuirlande  de  fleurs  au 
milieu  de  laquelle  on  lit  :  La  Guirlande  de  Julie,  Après 
trois  autres  feuillets  blancs,  on  rencontre  encore  une  mi- 
niature rel^résentant,  au  milieu  d*un  nuage.  Zéphyr 
tenant  une  rose  à  la  main  droite,  et,  de  la  gauche,  une 
guiriande  de  29  fleurs  qu'il  souffle  légèrement  sur  la 
terre.  Le  volume,  relié  en  maroquin  rouge,  avec  des  J.  L. 
enlacés  (Julie-Ludne  ),  fut  envoyé,  en  1641 ,  à  M^  de 
Rambouillet,  le  jour  de  sa  fête,  comme  un  bouquet  plus 
délicat  et  plus  durable  ^ue  celui  de  véritables  fleurs. 

Les  beaux-esprits  qui  assistèrent  Montausier  dans  sa 
galanterie  lurent  :  Antoine  Amauld,  Amauld  d'Andilly, 
Amauld  de  Briotte  marquis  de  Pomponne,  Chapelain, 
Colletet,  Conrart,  CorbeviUe,  Desmarets  de  Saint-Sorlin, 
l'abbé  Habert,  le  capitaine  Habert,  Malleville,  Martin, 
Monmort,  Racan,  Scudéry,  et  Tallemant  des  Réaux.  D 
n'y  a  pas  de  bien  grands  poôtea  dans  cette  eapèce  de 

Eléiade,  et  l'ouvrage  s'en  ressent  :  c'est  de  l'esprit  alam- 
iqué  et  vulgaire,  fade  et  froid,  tourné  dans  des  vers  ex- 
trêmement médiocres.  Les  deux  madrigaux  les  plus  passa- 
bles sont  le  quatrain  suivant  de  Desmareta  sur  la  violette  ' 

Modeste  en  ma  eonlenr,  modeste  en  moa  i^oUf 
Franche  d*ambition,  je  me  eache  eou  Therbe; 
Mal»  ei  enr  TOtre  firont  Je  imie  me  roir  nn  joor, 
La  plQ»  httmble  des  fleurs  sera  la  plus  superbe. 

et  trois  stances  do  Tallemant  des  Réaux  sur  le  li$ 

Devant  Tons  Je  perds  la  victoire 
Que  ma  blanchenr  me  fit  donner» 
Kt  ne  prétends  pins  d'antre  gloire 
Qne  odle  de  tous  oonronner. 

Le  del ,  par  nn  bonheur  Insigne» 
Fit  choix  de  mol  seul  autrefois. 
Comme  de  la  fleur  la  pins  digne 
Pour  fsire  présent  k  nos  rois. 

Mais  si  J^obtenals  ma  requftte. 
Mon  sort  serait  {Ans  glorieux 
D'être  monté  sur  Totre  tôte 
Que  d'être  deecendn  des  deux. 

Montausier  composa  16  pièces  dans  la  Guirlande  de  sa 
chère  Julie  :  mais  s'il  tat  inspiré  par  l'amour,  il  ne  le  fut 
guère  par  Apollon.  L'écriture  seule  de  ce  recueil ,  en  belle 
ronde,  de  la  main  de  Jarry,  noteur  de  la  chapelle  du  roi , 
est  Irréprochable;  les  miniatures,  peintes  par  Robertet* 
artiste  célèbre  alors,  ne  valent  guère  mieux  que  la  poésie. 
Néanmoins,  ce  cadeau  ai  galant  exdta  une  admiration  gé* 
nérale;  il  avança  un  peu  les  ailUres  de  Montausier,  qin« 
quatre  ans  après,  obtint  enfin  la  nudn  de  Julie.  —  La  di>» 
cbesse  conserva  toii^ours  précieusement  ce  livre;  lor^ 
qu'elle  mourut,  en  1671,  le  duc  le  recueillit.  Après 
Montausier,  la  Guirlande  passa  à  la  duchease  de  Gruinol 
dlJzès  et  à  aes  héritiers,  puis  au  duc  de  La  Vallière;  ud 
Anglais  l'acheta  14,510  livrée;  en  dernier  lien,  elle  appaiw 
tenait  à  M"**  de  ChAtillon.  Une  copie  du  texte  a  été  im* 
primée,  Paris,  1784,  petit  in-S»,  et  1818,  in-18.    G.  D— T. 

GUISARBiE,  lança  dont  le  fer  avait  la  famé  d'an» 


GUL 


1015 


<rH2 


hache  à  deux  tranchants,  ou  hache  qnl  portait  un  dard  au 
uuunet  de  s»  douille. 

GUITARB  (dà  grec  kUhara),  instrament  de  musique 
k  cordet.  I^  corps  en  est  forme  de  deux  tables  parallèles, 
l'une  en  ssqtin ,  rautre  en  érable  ou  en  acajou,  assemblées 
par  une  édiaêe  de  8  à  10  centimètres  de  hauteur.  Il 
oAre  deux  dépreasions  latérales,  comme  le  riolon ,  avec 
cette  différence  qu*il  n'y  a  point  d*ang^es,  tout  étant 
arrondi.  Le  manche,  divisé  par  des  kmchis  sur  lesquelles 
so  pose  les  doigta  de  la  main  gauche,  et  placées  de  façon 
à  correspondre  à  autant  de  demi-tons,  est  terminé  par  un 
tiUet,  et  garni  de  chevilles  qui  servent  à  monter  ou  à  des- 
cendre les  cordes  de  Tinstrument,  fixées  par  l'autre  ex- 
trémité sur  on  chevalet  fort  bas.  H  n'v  eut  d*abord  que 
4  cordes,  puis  5;  en  1773,  Vanfaek,  de  l'Académie  royale 
de  musique  de  Paris,  imagina  des  guitares  à  12  cordes. 
Aujourd'hui  on  en  met  six.  De  ces  cordes,  les  trois 
plus  graves,  dites  bourdons,  sont  en  sole  revêtue  de  lai- 
ton, et  les  trois  autres  en  boyau.* On  les  accorde  par 
quartes  Justes  en  montant,  excepté  la  4*  et  la  5*,  entre 
lesquelles  il  n'y  a  qu'une  tierce  majeure  :  on  obtient 
ainsi ,  du  grave  à  l'aSgu,  les  notes  mt,  la,  ré,  sol,  si,  mi. 
La  mnsiqoe  pour  guitare  s'écrit  en  clef  de  sol;  mais  les 
soQs  donnent  l'octave  basse  des  notes  cpii  les  repré- 
seotent.  On  les  produit  en  pinçant  les  cordes  avec  la  main 
«Iroite.  An  milieu  de  la  tMe  supérieure  est  pratiquée 
une  roêoee  on  rosette,  grand  trou  circulaire  au  moyen 
duquel  les  sons  vont  retentir  dans  la  caisse,  d'où  ils  sor- 
tent «mpUfléa.  La  guitare  est  un  instrument  de  peu  de 
ressoorceB;  les  sons  en  sont  voilés  et  les  arpèges  mono- 
tones. Elle  ne  peut  guère  servir  qu'à  accompagner  la  voix. 
En  ofatre,  il  n'est  pas  facile  de  Jouer  sur  tous  les  tons  : 
aussi  art-on  souvent  recours  à  un  petit  mécanisme  qui , 
s'adaptant  an  manche,  hausse  tout  le  système  d'un  ton  et 
demi  ,  oo  à  la  scordatura  (désaccordage),  qui  n*élève  les 
sons  Cfoe  d'un  demi-ton.  —  La  guitare  a  existé  dès  les 
temps  anciens  :  on  en  trouve  la  figure  sur  les  monuments 
de  rÉgypte.  Les  Arabes  l'apportèrent  en  Espagne,  où  elle 
n'a  pas  cessé  d'être  en  vogue.  En  France,  elle  fut  connue 
depuis  le  xi*  siècle  sous  le  nom  de  guttariM.  Dans  notre 
siècle,  Sor,  Aguado,  Huerta,  Meissonnier,  Carcassi,  Ga^ 
mUi ,  ont  été  assez  habiles  sur  la  guitare  pour  en  foire 
un  instrument  de  concert;  ils  ont  laissé  des  Méthodes. 
—  Kn  1823,  Staufer,  luthier  de  Vienne,  inventa  une 
çuitare  d^amour,  plus  grande  que  les  guitares  ordinaires, 
avec  fond  bombé,  et  montée  de  7  cordes.  Les  sons  aigus 
ont  de  la  ressemblance  avec  ceux  du  hautbois,  et  les  sons 
grares  arec  ceux  du  corps  de  basset.  Un  autre  Allemand 
a  imaginé  à  Londres  la  guitare  à  piano  :  le  doigté  pour  la 
main  gauche  est  le  même  que  dans  la  guitare  ordinaire  ; 
mais  la  main  droite  Joue  sur  un  clavier  à  six  touches 
adapté  à  la  partie  droite  et  inférieure  de  la  table  d'har- 
monie, et  qui  fait  sor^r  du  trou  de  résonnance  autant  de 
petits  marteaux  pour  fîrapper  les  cordes.  B« 

GDITERNE.  K.  GurrASB. 
GUIVRE.  V.  Givaa. 
CUIVRÉ,  Î^.ToRB. 

GUIZANDO  (Taureaux  de).  V.  Espagrb  (Architec- 
ture en  ). 

GULDEN  ou  GUILDER,  monnaie  d'Allemagne,  dont  la 
valeur  n'est  pas  partout  la  même  :  le  guld  de  Manheim 
Tant  2  fir.  85  c  D^ns  le  Brunswick,  on  distingue  le  guld 
de  1784  (2  fr.  89  c),  le  guld  commun  (2  fr.  59  c),  et 
le  guld  de  1795  (2  fr.  89  c).  Toutes  ces  monnaies  sont 
d'argent.  Dans  la  Hesse-Dsrmstadt,  le  guld  n'est  qu'une 
monnaie  de  compte,,  qui  vaut  2  fr.  16  c.  Le  guld  d'or  de 
Hanovre  vaut  8  fr.  70  c. 

GULLIVER  (Les  Voyages  de),  célèbre  ouvrage  de  Swift, 
publié  en  1726.  Il  est  <Uvisé  en  quatre  parties,  dont  on 
lit  principalement  les  deux  premières  :  ce  sont  les  voya^ 
dans  Tempire  de  LUlijnU  et  dans  le  royaume  de  Broàdm^ 
gnag.  L'auteur  disait  dans  une  lettre  qu'il  adressait  à 
l^pe,  un  an  avant  Timpression  de  son  livre  :  «  Le  principal 
bot  qae  je  me  propose  dans  tous  mes  travaux  est  de  vexer 
le  monde  plutùt  que  de  le  divertir...  Voilà  la  grande  base 
de  misan&ropie  sur  laquelle  J*ai  élevé  tout  l'édifice  de 
mes  Voyages.  »  Cest,  en  eflét,  la  faiblesse,  la  vanité  de 
ses  8em]>lâ>les  que  SwUt  a  voulu  faire  ressortir  dans  une 
fiction  aussi  ingénieuse  aue  hardie;  en  conduisant  suc- 
cessivement son  héros  des  un  peuple  de  pygmées  et 
chez  un  peapJe  de  géants,  il  le  place  dans  des  situations 
et  des  embarras  où  la  misère  humaine  apparaît  sous  le 
Jour  le  plus  ridicnle,  et  il  fait  Jaillir  de  cette  combinaison 
une  foule  de  contrastes  inattendus  et  de  comiques  effets. 
•  Le  voyage  à  Lillfput ,  a  dit  Walter  Scott ,  est  une  allu- 
doo  à  la  OMir  et  à  1»  politique  de  l'Angleterre;  sir  Robert 


Walpole  est  peint  dans  le  caractère  du  premier  mlnistie 
Flimnap.  Les  factions  des  tories  et  des  whigs  sont  déai* 
gnées  par  les  factions  des  talons  hauts  et  des  talons 
plats  ;  les  petits  boutiens  et  les  gros  boutiens  sont  les  pa^ 
pistes  et  les  protestants.  Le  prince  de  Galles,  qui  traitait 
également  bien  les  whigs  et  les  tories,  est  peint  dans  le 
personnage  de  l'héritier  présomptif,  qui  porte  un  talop 
haut  et  un  talon  plat.  Bléfuscu  est  la  France,  où  Ormond 
et  Bolingbroke  avaient  été  obligés  de  se  réfugier.  Dans  le 
voyage  à  Brobdingnag,  la  satire  est  d'une  application  plus 
géniale  :  c'est  un  jugement  des  actions  et  des  senti« 
ments  des  hommes  porté  par  des  êtres  d'une  force  im- 
mense, et  en  même  temps  d'un  caractère  froid,  réfléchi 
et  philosophique.  Les  mêmes  idées  reviennent  nécessai- 
rement; mais,  comme  elles  sont  renversées  dans  le  rêle 
que  Joue  le  narrateur,  c'est  plutôt  un  développement 
qu'une  répétition.  On  ne  saurait  trop  louer  l'art  infini 
avec  lequel  les  actions  humaines  sont  partagées  entre  ces 
deux  races  d'êtres  imaginaires  pour  rendre  la  satire  plus 
mordante;  à  Lilliput,  les  intrigues  et  les  tracasseries  po- 
litiques, qui  sont  les  principales  occupations  des  gens  de 
cour  en  Europe,  transportées  dans  une  cour  de  petites 
créatures  de  six  pouces  de  haut,  deviennent  un  objet  de 
ridicule,  tandis  que  la  légèreté  des  femmes  et  les  folies 
des  courtisans,  que  l'auteur  met  sur  le  compte  des  per- 
sonnages de  la  cour  de  Brobdingnag,  deviennent  mons- 
trueuses et  repoussantes  chez  une  nation  d'une  stature 
effrayante.  »  Les  deux  dernières  parties  des  Voyages  dt 
Gulliver  offrent  plus  de  désordre  et  de  négligence  que  les 
premières  ;  les  fictions  y  sont  encore  plus  hardies,  mais 
moins  heureuses.  Toutefois ,  c'est  la  même  verve  sati- 
rique. Dans  le  voyage  à  Laputa,  Swift  tourne  en  ridicule 
les  géomètres,  les  astronomes,  les  philosophes  contemplar 
tiCi,.]es  amateurs  des  sciences  abstraites,  et  les  faiseurs 
de  projets.  S'il  évoque,  à  propos  de  l'Ile  des  Magiciens, 
4es  ombres  de  plusieurs  personnages  illustres  de  l'anti- 

2uité,  c'est  encore  pour  faire  des  nlvélations  malignes  et 
es  sidllies  de  scepticisme  historique.  Chez  les  Houyhnms, 
il  pousse  le  sarcasme  Jusqu'à  la  violence,  et  le  dédain  des 
bienséances  jusqu'au  cynisme,  pour  sctisfaire  sa  haine 
contre  la  société  et  contre  l'humanité.  En  somme,  les 
Vouoges  de  CMlwer,  écrits  d'ailleurs  avec  un  naturel 
parfoit,  avec  une  simplicité  de  langage  inimitable,  avec 
une  fécondité  dlmasination  qui  les  fait  lire  par  les  en* 
fants  comme  de  véritables  contes  de  fées^  sont  pour  les 
hommes  faits  une  triste  et  amère  ironie.  Les  tableaux  de 
Swift  découragent  et  ne  corrigent  pas  :  ce  n'est  point  aux 
vices  et  aux  travers,  mais  à  la  nature  même  de  l'homme 
qu'il  fait  le  procès,  et  l'homme  trouve  en  lui  un  accusa^ 
teur  passionné.  Sa  philosophie  est  encore  plus  chagrine, 
plus  désolante  que  celle  de  La  Rochefoucauld,  en  oui , 
disait-il ,  il  reconnaissait  son  caractère  tout  entier  ;  et  L'on 
ne  peut  s'étonner  que  Voltaire,  qui  le  rencontra  souvent 
dans  la  société  de  Pope  et  de  Bolingbreke,  ait  professé 
pour  lui  une  grande  admiration,  car  ils  avaient  tous 
deux  la  même  insouciance  en  morale,  le  même  mélange 
de  malice  et  de  gaieté,  le  même  art  d'exprimer  avec  bon* 
homie  les  idées  les  plus  fines  et  les  plus  piquantes.    B. 

GUSU ,  instrument  de  musique  russe.  C*est  une  sorla 
de  harpe  horizontale,  montée  de  cordes  en  métal. 

GUTTURALES,  lettres  qui  se  prononcent  du  gosier  (en 
latin  guttur)  i  telles  sont,  en  français,  les  consonnea 
g  dur,  c  dur,  k,  q  (gale,  cale,  kilo,  quand).  Plusieurs 
grammairiens  i^pellent  ces  consonnes  palatales.  En  grec^ 
les  gutturales  y^  x,  y*  sont  quelquefois  aussi  appelées  po» 
totales,  fin  allemand,  on  compte  comme  gutturales  e,  g, 
cA,  œ.  En  espagnol ,  o)  et  i  ont  nn  son  guttural  tout  par^ 
ticulier.  P. 

GUTTUS,  petit  vase  de  libations  pour  les  sacrifices^ 
chea  les  anciens  Romains.  Il  ne  laissut  couler  la  liqueur 
que  goutte  à  goutte. 

GUYOT  (Bible).  T.  Bdlb. 

GUZERATE  ou  GOUDJERATE  (Dialecte),  dialecte  ia» 
dien,  parlé  non-seulement  dans  la  presqu'île  de  Guzerate, 
mais  duis  plusieurs  provinces  arrosées  par  la  Nerbuddha^ 
parmi  les  Parais  attachés  à  la  religion  de  Zoroastre;  VL 
est  fi^  voisin  de  l'hindoustani  (  F.  iNDnNifBS^  Langues); 
c'est  la  même  simplicité  de  déclinaison  et  de  conJugai<i 
son;  les  règles  de  la  qrntaxe  sont  à  peu  pfès  identiques 
aussi  dans  les  deux  idiomes.  Le  guierate  a  été  assez  itit** 
tement  modîfié  par  l'invasion  musulmane.  Son  écriture 
se  distingue  par  l'absence  de  U  barre  horiaontale  qoi^ 
dans  d'autres  écritures  de  l'Inde,  réunit  la  partie  aupé* 
rieere  des  canctères.  K.  Drummond,  niwtraiions  of 
the  ifrmmnatieal  parts  of  the  GuMeruttee,  Makratta  and 
English  langmgss,  Bombay,  1808. 


GYM 


lOU 


GYN 


GUZLA,  instrument  de  musique  des  Hljnriens.  Cest 
une  sorte  de  violon  très-simple,  puisqu'il  n'y  a  qu'une 
seule  corde  de  crins  tressés.  On  en  Joue  avec  un  archet. 

GYBINASE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO" 
graphie  et  d^  Histoire, 

GYMNASB  DRAMATIQUE,  Pun  dcs  thé&tres  de  Paris,  ouvert 
en  1820,  sur  le  boulevard  Bonne-Nouvelle.  Il  ne  devait 
6tre  qu'une  espèce  de  succursale  du  Conservatoire,  un 
thé&tre  d'essai,  où  des  élèves  se  seraient  exercés  dans  des 
fragments  de  pièces,  tout  au  plus  dans  des  comédies  en 
un  acte.  Mais,  9^  à  la  protection  de  la  duchesse  de 
Berry,  en  l'honneur  de  laquelle  il  prit  le  nom  de  Théâtre 
de  Madame,  il  étendit  ses  attributions^  et  ce  fut  pour  lui 
que  Scribe  composa  bon  nombre  de  ses  plus  ingénieux 
outrages.  Après  la  Révolution  de  4830,  il  reprit  son  nom 
de  Gymnase.  Les  pièces  de  Scribe,  de  Mélesville,  de 


Bayard,  de  Dumanoir,  lui  donnèrent  une  vogue  durable, 
que  «ut  entretenir  le  talent  d'acteurs  tels  que  Perlet, 
GonUer,  Bouffé,  FerviUe,  Numa,  M-»  AUan,  Léontine 
Fay  (Yolnys),  Jenny  Vertpré,  Rose  Chéri,  etc.  Le  Gym- 
nase a  obtenu  le  droit  de  représenter  des  comédies  de 
genre  en  3  actes,  et  même  en  5  actes,  moyennant  une 
autorisation  spéciale. 


GTWIASB  MJUTAïaK» 
OTMIIASB  MUSICAL. 

GYMNASURQUE. 

GYlfNASTE. 

GYMNASTIQUE. 

GYMNIQUES  (Jeux). 

GYMNOPÉDIE. 

GYMNOSOPHISTES. 

GYNÉCÉE. 


V.  ces  mots  dans  notre  010- 
tionnaire  de  Biographie  «f 
d^Histoire. 


H 


H 


n,  8*  lettre  de  l'alphabet  latin  et  des  alphabets  qui  en 
dérivent.  Sa  forme  vient  de  celle  de  Véta  grec  (H,  t)),  ca- 
ractère qui  remplaça  Vesprit  rude  comme  signe  d'aspira^- 
tion.  Les  Latins  n'employèrent  pas  toujours  la  lettre  H 
dans  tous  les  mots  où  on  la  voit  a^Joiurd'hui,  et  Cicé- 
ron  se  plaint  qu'on  l'ait  introduite  :  toutefois,  comme  le 
latin  n'avait  pas  de  signes  simples  équivalents  du  9  et 
du  X  des  Grecs,  il  fut  avantageux  de  se  servir  de  TH  corn- 
binSs  avec  le  P  et  le  G  pour  Ta  transcription  de  ces  carac- 
tères. On  y  trouve  même  l'H  employée  pour  le  ^  (halo, 
de  xoXàoi  ;  hortus,  de  T^ç^^i)* — En  français,  on  distingue 
Vh  muette  et  Vh  aspirée.  Cependant  il  n'y  a  véritable- 
ment pas  d*h  aspirée  :  auUur  et  hauteur  se  prononcent 
de  même.  La  seule  valeur  oue  présente,  au  commence- 
ment d'un  mot,  l'H  dite  aspira,  est  celle  du  tréma  :  son 
effet  est  d'em'pècher  !a  liaison  de  la  consonne  finale  du 
mot  précédent  avec  la  voyelle  qui  suit  l'H  {les  hasards)^ 
ou  l'élision  de  certaines  voyelles  qui  aurait  lieu  autre- 
ment {le  hautf  la  hame).  Quant  à  la  manière  de  recon- 
naître les  deux  espèces  d*H,  l'abbé  d'Olivet  dit  que  l'H 
doit  s'aspirer  dans  les  mots  d'origine  non  latine  {la 
hanche,  le  hasard)  \  que,  pour  les  mots  qui  ont  une  étjr- 
mologie  latine,  l'H  s'aspire  anand  le  primitif  latin  s'écrit 
sans  H  {le  haut,  dérivé  d'altus;  il  hurle,  dérivé  d'u/u- 
lare)^  et  ne  s'aspire  pas  quand  le  primitif  s'écrit  avec 
une  H  {Vhomme,  l'hutoire,  dérivés  de  homo,  historia). 
Ce  ne  sont  pas  là  des  règles  absolues  :  ainsi,  héros  et  hé- 
rdUme,  formés  d'un  même  radical,  ont,  le  premier  l'A 
aspirée,  et  le  second  l'A  muette.  Les  Anglais  et  les  Alle- 
mands aspirent  l'H  au  commencement  des  mots  bien  plus 
fortement  que  les  Français;  les  premiers  ont  des  mots 
qui  commencent  par  une  H  muette,  les  seconds  n'ont  ce 
genre  de  lettre  qu'au  milieu  des  roots.  En  allemand,  l'H 
placée  après  une  voyelle  et  devant  une  consonne  (  ehre, 
tkn,  wohl)  ne  s'aspire  pas,  mais  indique  qu'il  faut  allon- 
ger le  son  de  la  voyelle  qui  la  précède.  Dans  L'ancienne 
orthographe  des  idiomes  germaniques,  l'H  placée  au  com- 
mencement des  mots  devant  une  consonne  (Hlodwig,  Hlo- 
thmr)  indiquait  une  articulation  gutturale.  Dans  le  pas- 
sage du  latin  au  germidn,  H  a  quelquefois  remplacé  le  x 
ffree  ou  le  c  latin  {hom,  de  xlpo;  ou  de  cornu;  hlinian, 
de  xXCvw  ou  de  clino,  Je  penche).  —  En  espagnol,  H  ne  se 

}>rononce  que  devant  les  diphthongues  ta  et  ue  (hierro^ 
ér;  huevo,  œuf).  Il  n'y  a  pas  d'H  aspirée  en  italien.  — 
La  lettre  H  manque  dans  les  alphabets  lithuanien  et 
russe;  mais,  dans  certaines  expressions  tirées  du  vieux 
tlaron,  les  Russes  donnent  la  valeur  de  l'H  à  leur  G  ou 
gamma.  Au  contraire,  en  wende  et  en  bohème,  l'H  Ini- 
tiale se  prononce  comme  G. 

n  y  a  eu  souvent,  dans  le  passage  d'une  langue  à  une 
autre,  permutation  de  l'F  et  de  l'H  :  ainsi,  les  Latins  ont 
écrit  quelquefois  forreum  pour  horreum  (grenier)  ;  les 
Espagnols  ont  fait  hmo  du  latin  fenum,  hartna  de  farina, 
haolar  de  falmlari,  etc. 

L'H  entre  dans  la  composition  de  plusieurs  lettres 
doubles  des  alphabets  modernes.  En  français,  on  trouve  : 
le  groupe  CH,  dont  il  a  été  parlé  ailleun  {V.  C);  le 


HAB 

groupe  PH,  qui  a  le  son  de  l'F,  et  qui  remplace  soit  le 
phi  (9)  des  Grecs,  comme  dans  physique,  philosophe,  soit 
le  pAé  des  Hébreux,  comme  dans  séraphin;  le  groupe 
RH,  représentant  l'esprit  rude  qui  affectait  l'initiale 
rho  (p)  en  grec,  comme  dans  rhume^  rhéteur;  le  groupe 
TH,  qui  équivaut  au  thêta  (6,  0)  des  Grecs,  et  qui  ne 
se  prononce  que  comme  T,  dans  théâtre,  thermes, 
thyrse,  etc.,  ce  qui  explique  pourquoi  on  a  surprimé  l'H 
dans  certains  mots  du  même  genre,  comme  trâne,  trésor. 
—  En  anglais,  le  groupe  TH  représente  deux  articula- 
tions, celle  du  thêta  grec  (dans  think)^  et  celle  du  aêta 
(dans  that,  this,  etc.). 

Comme  abréviation  sur  les  monuments  antiques,  H  a 
siçniflé  ^fTio,  hœres,  hora,  héros.  Hercules,  Hadrianus, 
Hispania,  HostUius,  hâve  (vieille  forme  du  mot  ave), 
hic,  honor,  habet,  etc.;  HS  (pour  LLS,  libra  libra  semis) 
voulait  dire  sestertius,  HL  hoc  loco,  HE  hoc  est,  HA  Au- 
jus  anni,  HOS  hostis  ou  hospes.  Sur  d'anciennes  mon- 
naies de  France,  H  était  la  marque  de  La  Rochelle,  Nous 
écrivons  S.  H.  pour  Sa  Hautesse. 

Dans  la  numération  des  Grecs,  H  désigna  primitive 
ment  le  nombre  100,  comme  esprit  rude  du  mot  ekaton 
(cent)  ;  plus  tard,  ce  fut  seulement  8,  à  cause  du  rang 
que  Véta  occupa  dans  l'alphabet.  —  Chez  les  Romains, 
l'H  valut  200  ;  surmontée  d'un  trait  horizontal,  elle  va- 
lait 200,000. 

Dans  la  notation  musicale  des  Allemands,  H  repré- 
sente le  si  naturel.  B. 

HABEAS  CORPUS.  V.  notre  Dictûmnavre  de  Biogrik- 
phie  et  d'Histoire. 

HABILLEMENT.  V.  Gostcmb. 

HABIT,  mot  qui,  dans  son  acception  générale,  signifie 
un  vêtement  quelconque.  En  un  sens  spécial,  comme 
(^uand  on  dit  prendre  l'habit,  c'est  le  costume  ecclésias- 
tique ou  monacal.  Vhabit  habUlé  ou  frac  est  ce  vêtement 
d'homme  qui  couvre  les  bras  et  le  buste,  a  un  collet  ra- 
battu, est  ouvert  par  devant,  et  se  termine  derrière  par 
des  pans  ou  basques  plus  ou  moins  ajnples  :  fait  en  drap 
noir,  il  est  le  costume  civil  de  cérémonie.  H  ne  date  que 
du  xviu*  siècle.  Vhabit  à  la  française,  dont  il  dérive, 
parut  au  temps  de  Louis  XIV  :  il  avait  alors  le  collet  droit 
(ce  qui  a  été  conservé),  les  basques  assez  larges  pour 
qu'on  les  repli&t  en  arrière,  et  des  parements  détachés  de 
la  manche,  tandis  que  l'on  se  contente  aujourd'hui  de 
les  figurer;  on  le  faisait  en  drap,  en  vdours,  en  soie,  en 
bouracan,  etc.  Cest  cet  habit  que  l'on  porte  encore 
comme  costume  de  cour,  et  dont  la  forme  a  été  conser- 
vée pour  le  costume  des  fonctionnaires  civils,  qui  a,  de 
Elus,  ainsi  que  les  habits  de  l'ancienne  noblesse,  une 
roderie  plus  ou  moins  riche  de  soie,  d'argent  ou  d'or  au 
collet,  aux  parements  et  aux  basques.  On  fait  en  draps 
de  couleur,  ou  en  étoffe  plus  légère,  des  habits  dits  de 
chasse,  de  campagne,  etc.  L'habit  militaire  à  basques  a 
été  remplacé,  vers  1830,  par  la  tunique  dans  toute 
l'infanterie  de  ligne,  et  de  nos  jours,  en  1858  par  une 
veste  à  basqnines;  il  subsiste  encore  chez  les  grenadiers 
et  les  voltigeurs  de  la  gsrde  impérialOi  dans  Tes  armes 


HAC 


1017 


HAC 


da  génie  et  de  raitillerie,  dans  les  eorps  des  sapears- 
pompion  et  des  sergents  de  ville.  B. 

HÀBITACLB,  caisse  on  annoire  destinée  à  renfermer  la 
boonole  dans  un  navire.  L'habitacle  se  trouve  au  milieu 
da  gaillard  d*arrière,  près  de  la  barre  du  eouvemail,  à 
lavoe  da  timonier;  une  lumière  Téclaire la  nuit.  Les 
planches  en  sont  assemblées  à  chevilles  et  sans  dous, 
pour  qu*aQcane  pièce  de  fer  n'agisse  mal  à  propos  sur 
rakaille  almantM. 
HABITATIONS.  V.  Uaisons. 

HABITUDE  (du  latin  haber€,  posséder),  pouvoir  que 
BOUS  avdlis  de  reproduire,  sans  rSflexion  et  sans  le  vou- 
loir, certains  fidts  que  nous  avons  produits  plusieurs  fois. 
L'habitnde  supprime  l'effort;  elle  est  affranchie  de  toute 
gène;  de  là  son  nom.  Ce  que  IMnstinct  nous  a  fait  faire 
primitiTementy  nous  le  faisons  ensuite  par  habitude,  et 
cette  loi  s*éiend  soi  actes  qyà  ont  été  d'abord  volontidres  ; 
la  réitéralion  les  rend  habihtels,  et  développe  en  nous  la 
même  facUité  et  la  même  inclination  :  elle  devient  une 
sfcoïKis  nature.  Soit  que  l'habitude  succède  à  l'instinct  ou 
à  la  volonté,  elle  produit  les  effets  les  plus  remarquAles. 
Au  point  de  vue  phyrique,  elle  facilite  nos  mouvements, 
donne  de  redresse  à  la  nuin«  de  U  Justesse  au  coup  d'ooil, 
et  nous  aide  à  eqvrimer  nos  pensées  par  le  geste,  les  sons 
et  récritore.  Elle  agit  de  même  sur  nos  facultés  :  un  de 
ses  premiers  effets  est  de  diminuer  notre  sensibilité  phy- 
iiqaÎB,  car  une  foule  de  sensations  dont  nous  n'avons  plus 
coDsdenoe  ont  d'abord  été  pour  nous  une  source  de 
plaisir  ou  de  douleur;  il  en  est  d'autres,  au  contraire,  qui 
eodgent  le  concours  de  la  volonté  et  de  l'intelligence,  et 
qae  Iliabitade  rend  plus  vives,  plus  délicates,  telles  ôue 
les  sensations  de  l'ouïe,  de  la  vue  et  du  tact.  Vintelli- 
gence  ne  doit  pas  moins  à  l'habitude;  ses  facultés  et  ses 
opérations  gagnent  à  un  exercice  suivi.  Ainsi ,  quelle  fa- 
cilité ne  donne-t-elle  pas  pour  reproduire  Ul  pensée  au 
moyen  de  tant  de  sisnes  conventionnels?  C'est  au  point 
de  Tae  moral  et  sur  la  volonté  que  l'habitude  a  le  plus 
d'Importance.  L*éducation,  qui  développe  dans  l'homme 
les  bcnltés  physiques,  Intellectuelles  et  morales  en  vue 
de  In  pratique  du  bien,  n'est  que  l'ensemble  et  le  résul- 
tat dû  habitudes  qnil  a  contractées  dans  sa  jeunesse  et 
même  dans  son  enfance.  Bonnes  et  vertueuses,  elles 
relèvent  à  ses  yeux  et  dans  l'estime  des  autres;  mau- 
vaises et  vicieuses,  elles  le  dégradent  et  l'avilissent,  et 
prennent  sur  lui  un  empire  que  sa  volonté  est  souvent 
unpoiaasnte  à  détruire.  lies  effets  de  l'habitude  se  mon- 
trent aossl  chez  les  animaux,  dont  plusieurs  sont  suscep- 
tibles d'une  espèce  d'éducation.   On  remarque  même 
quelque  chose  de  semblable  dans  certaines  plantes,  qui 
s'accumatent  et  s'habituent  à  un  nouveau  sol  ;  mais  on  ne 
voit  rien  d'analogue  dans  la  matière  inorganique.  Cette 
considération  conduit  à  penser  que  la  force  de  l'habitude 
n'a  rien  de  matériel.  F.  Reid,  Essais  sur  les  facultés  ac- 
^ees.  Essai  3^  ch.  m;  Dugald-Stewart,  PhUosophie  de 
TesprU  humam,  u  I",  ch.  u;  Maine  de  Biran,  Influence 
de  rhabUud»  sur  la  faciUté  de  penser^  in-8<*,  Paris,  an  xi  ; 
Del'habiHide^  thèse  de  M.  Ravaisson,  in-8o,  Paris,  i838; 
Hahn ,  De  consuetudine,  Leyde,  1701,  in-4«  ;  Wetzel ,  De 
eonsuetudine  circa  rerum  non  naturalium  usu,  B&le, 
1730,  in-4*  ;  Jung,  De  consuetudinis  ef/icacià  generali  in 
mctilms  vitalibus.  Halle,  1705,  in-4o  ;  Junsnickel,  De  Con- 
snelfêdmê  altéra  natura^  in-4®^  Wittemberg,  1787  ;  de 
Ctfdaillac,  Études  de  phÛosophte,  section  3,  ch.  iv  et  v  ; 
Datrochet,  Théorie  de  l'habitude,  Paris,  1810,  in-8*.    R. 
HABORN-SIP,  sorte  de  fifre  ou  chalumeau,  excessive- 
ment criard,  aux  sons  duquel  on  danse  dans  quelques 
districts  de  la  Hongrie.  Autrefois,  U  servait  à  appeler  les 
montagnards  à  une  levée  en  masse,  et,  comme  le  prince 
Ragotzki  l'emplojra  en  faisant  campagne,  on  le  nomme 
Ure  de  Bagotzki. 

HACHE,  instrument  de  fer  tranchant,  muni  d'un 
manche,  et  servant  à  divers  usages  militaires  ou  domes- 
tiques. Dans  l'antiquité,  la  bipenne  ou  hache  à  deux  têtes, 
dont  l'une  était  tranchante  et  l'autre  aiguë,  ou  qui  étaient 
tontes  deux  tranchantes,  est  déjà  citée  par  Homère,  qui 
la  nomme  axinè.  Quoiqu'elle  semble  appartenir  plutôt  aux 
peuples  du  Nord,  on  la  voit  quelquefois  dans  la  main  des 
nétOÊ  grecs.  Sur  le  fronton  du  temple  d'OIympie,  sculpté 
par  Alcamènes,  on  voyait,  dit  Pausanias,  Thésée  com- 
battant avec  une  hache  les  ravisseurs  de  la  femme  de 
RritboQs.  Suivant  Plutarque,  les  Amazones  se  servaient 
4  delà  hache  avant  le  temps  d'Hercule;  celle  avec  laquelle 
ee  héros  tua  Hippolyte  fut  donnée  à  Omphale,  et,  après 
avoir  pissé  de  ses  successeurs  aux  rois  de  Carie,  fut  dé- 
posée dans  un  temple  de  Jupiter  Labradien  (du  carien 
hbm,  hache).  On  voit  la  bipenne  sur  des  médailles  de 


Mylassa  en  Carie,  de  Thyatira  en  Lydie«  sur  un  antel  de 
Jupiter  conservé  parmi  les  marbres  d'Oxford,  et  sur 
quelques  médailles  égyptiennes.  Plusieurs  figures  de  la 
mythologie  étrusque  sont  aussi  caractérisées  par  cette 
arme.  L^  Romains  se  servirent  de  haches  pour  les  sa- 
crifices, les  combats  sur  mer  et  les  travaux  de  charpente  i 
ils  en  avaient  placé  aux  faisceaux  des  licteurs. 

On  donne  le  nom  de  haches  celtiques  à  des  instruments 
en  silex  et  en  bronze  qui  ont  servi  aux  premiers  habi^ 
tants  de  l'Occident,  et  dont  l'emploi  a  dû  être  très-varié. 
On  a  trouvé  des  haches  de  silex  au  pied  des  monuments 
druidiques ,  quelquefois  mêlées  à  des  ossements  à  demi 
brûlés;  dans  les  tumulus,  sous  la  tête  des  guerriers  ou  à 
leurs  pieds;  d'autres  fols,  au  milieu  de  débris  sanglants 
des  sacrifices.  En  certains  endroits,  qui  ont  pu  être  des 
centres  de  fabrication,  il  s'en  est  rencontré  un  assez  grand 
nombre  dont  les  unes  étaient  achevées,  et  les  autres  a  dif- 
férents degrés  de  travail.  Le  nord  et  le  centre  de  l'Europe 
en  ont  fourni  une  quantité  considérable,  qui  ornent  les 
collections  publiques  et  privées,  et  qui  présentent  plu- 
sieurs types.  Dans  les  unes,  le  tranchant  taillé  régulière- 
ment suit  une  ligne  arrondie  qui  se  termine  par  derrière 
en  une  pointe  aiguë;  les  antres  sont  à  deux  tranchants, 
mais  d'une  forme  souvent  irrégulière  et  moins  gradeose; 
d'autres  sont  à  tranchant  d'un  côté  et  à  pointe  mousse 
da  l'autre.  Les  haches  en  bronze,  sans  être  aussi  multi- 
pliées que  celles  en  silex,  sont  cependant  nombreuses, 
et  se  trouvent  aux  mêmes  endroits.  On  a  découvert  en 
Allemagne,  en  France  et  en  Angleterre,  d'anciennes  fon- 
deries de  ces  instruments,  des  moules  en  ar^le  et  en 
bronze,  des  scories,  des  débris  de  fonte  et  de  cuivre.  En 
1821,  les  restes  d'un  établissement  de  ce  genre  ont  été 
retrouvés  dans  le  département  de  la  Hanche  par  IL  de 
Gerville. 

La  hache  fut  une  des  armes  principales  des  Francs  i 
c'est  ce  oui  lui  fit  donner  le  nom  de  francisque  par 
Grégoire  ne  Tours.  Les  peuples  du  moyen  âge,  U  modi- 
fiant légèrement,  en  firent  la  hache  d'armes,  dont  les 
musées  conservent  un  grand  nombre  de  spécimens.  Tantôt 
cette  hache  avait  deux  tranchants  opposés  dos  à  dos, 
tantôt  un  tranchant  d'un  côté  et  une  sorte  de  marteau 
de  l'autre.  La  hache  des  compagnies  d'ordonnance  de 
Cliarles  VII  n'avait  pas  de  marteau,  mais  la  douille  du 
fer  se  prolongeait  en  pointe  aiguë  su  delà  du  tranchant. 
Il  y  eut  enfin  des  haches  dont  le  marteau  fut  remplacé  par 
un  dard  ou  par  un  croissant  à  deux  pointes.  Les  muré- 
chaux  de  France  accotaient  leur  écusson  d'nne  hache 
d'armes,  comme  insigne  de  leur  dignité. 

Lorsque  la  poudre  a  canon  fut  inventée,  on  essm  de 
faire  des  hacnes  munies  de  pistolets,  mais  on  réussit 
peu  !  le  Musée  d'artillerie  de  Paris  en  possède  ouelques- 
unes.  Sous  liouis  XIV,  les  grenadiers  portèrent  la  hache  i 
mais  quand  on  leur  fit  abandonner  la  grenade  pour  le 
fusil,  on  ne  laissa  la  hache  qu'à  quelques  hommes  par 
compagnie;  ce  fut  là  l'ori^ne  des  sapeurs,  dont  la  mis- 
sion est  de  briser  à  coups  de  hache  tout  obstacle  qui 
arrêterait  les  soldats.  Les  cavaliers  et  les  soldats  du  génie 
portent  ai^ourd'hui  de  petites  haches  qui  leur  servent  à 
dresser  le  campement.  Les  marins  ont  la  hache  d^àbor* 
daoe^  qui  oorte,  à  l'opposite  du  tranchant,  une  forte 
pointe  de  fer.  desthiée  à  pénétrer  dans  les  bordages  du 
navire  ennenu  et  à  faciliter  l'abordage. 

HACHÉES  (Moulures),  nom  donné  qae£quefoîs  aux 
Dents  de  scie  (V,ce  mot), 

HACHEREAU,  petite  hache  d*armes,  courte,  1  '.gère  et 
sans  marteau. 

HACHURES,  lignes  parallèles  on  croisées  qui  forment, 
dans  un  dessin  ou  dans  une  gravure,  soit  un  fond,  soit  des 
ombres  nuancées.  Les  peintres  verriers  ont  fréquemment 
employé  les  hachures  à  angles  droits  pour  les  fonds  ou  les 
ornements;  elles  furent  remplscées  au  xv*  siècle  par  des 
fleurs  et  des  fleurons,  puis  vinrent  les  teintes  fondues. 
Cependant,  au  xvn*  siècle,  quelques  peintres  à  la  main 
hardie  reprirent  les  hachures  pour  les  ombres,  et  ob- 
tinrent ainsi  des  effets  très-heureux  et  très-énergiques. 
—  Dans  la  science  héraldique,  les  hachures  sont  des 
lignes  conventionnelles  dont  le  sens  indique  une  cou- 
leur :  on  marque  Vazur  par  des  lignes  horizontales,  le 
gueules  ou  rouge  par  des  verticales,  le  sable  ou  noir  par 
des  hachures  croisées  à  angle  droit,  le  sinople  ou  vert 
par  des  diagonales  de  droite  à  gauche,  et  le  riolet  ou  le 
pourpre  par  des  diagonales  de  gauche  à  droite.  Ce  pro- 
cédé commode  pour  expliquer  le  Blason  ne  date  que  dn 
XVII*  siècle. 

HACQUËBUTE,  HAQUEBUTE  ou  HAQUEBUSB,  rieillii 
formes  du  mot  arquebuse  au  xiv*  siècle. 


HàL 


1018 


HâM 


BADRIANÉBS.  V.  AoBUNéBS* 

HiEMATINON,  matière  vitreuse  d'an  beaa  ronfle  foncée 
opaque,  plos  nuancée  que  le  Terre,  susceptible  d  un  très- 
grand  poli,  et  dont  les  Anciens  se  servaient  pour  mo- 
saïques, vases  d'apparat,  etc.  On  la  rencontre  souvent  à 
Pompéi. 

HAGIOGRAPHE  (du  grec  haipo$,  saint,  et  graphOnt 
écrire),  qualification  donnée  primitivement  aux  auteurs 
de  TAndeo  Testament  autres  oue  Moïse  et  les  Prophètes, 
puis  aux  biographes  et  légenoaires  qui  ont  écrit  sur  la 
vie  et  les  actions  des  Saints.  V Hagiographie  est  la  science 
des  écrits  de  ce  genre. 

HAGIOSIDÈRE  (do  grec  hagtos,  saint,  et  sidèros,  fer), 
fer  sacré,  large  de  quatre  doigts  environ  et  long  de  seize, 
attaché  par  le  milieu  à  une  corde  à  Taîde  de  laquelle  on 
le  tient  suspendu,  et  sur  lequel  on  frappe  avec  un  mar- 
teau. Cet  instrument  remplace  les  cloches,  interdites 
chez  les  Grecs  soumis  aux  Turcs.  Lorsqu*on  porte  le 
viatique  à  un  malade,  le  clerc  ou  remployé  qui  marche 
devtint  le  prêtre  frappe  trois  fois  de  temps  à  autre  sur  un 
hafdosidère. 

HAHA,  ouverture  pratiquée  dans  un  mur  de  jardin 
ou  de  parc,  afin  de  laisser  la  vue  libre,  et  qui  est  dé- 
fendue par  un  fossé  extérieur. 

HAICANE  ou  HAICIENNE  (Langue).  V.  ARMéiciEiiNB 
(Langue), 

HAIE,  clôture  naturelle  ou  artificielle  des  jardins,  des 
champs,  des  vignes,  etc.  On  distingue  la  hâte  vive,  faite 
d^arbres  ou  arbustes,  ordinairement  épineux,  et  la  haie 
morte,  formée  de  pieux  ou  de  planches.  Toute  haie  séfM- 
rant  deux  propriétés  closes,  ou  dont  aucune  ne  Test,  est 
réputée  mitoyenne;  les  arbres  qui  se  trouvent  dans  la 
haie  sont  également  mitoyens.  Les  haies  vives,  ou  les 
arbres  de  basse  tige  pouvant  servir  à  les  former,  ne 
doivent  pas  être  plantées  à  une  distance  moindre  d'un 
demi^mètre  de  la  ligne  séparative  des  deux  héritages;  si 
les  branches  se  développent  trop,  le  propriétaire  voisin 
peut  contraindre  k  les  couper.  Quiconque  détruit  une 
naie,  en  tout  ou  en  partie,  est  puni  d*un  emprisonnement 
d*un  mois  à  un  an,  et  d*une  amende  égale  au  quart  des 
restitutions  et  dommages-intérêts. 

HAIK,  pièce  d'étoffe  de  laine  blanche,  que  les  Arabes 
portent  drapée  autour  du  corps  et  attachée  sur  la  tête  par 
quelques  tours  d'un  cordon  de  laine  brune.  Les  femmes, 
quand  elles  sortent,  s'en  enveloppent  complètement,  ne 
laissant  apercevoir  que  leurs  yeux. 

HAINE,  passion  qui  naît  à  la  suite  d'un  mal  dont  la 
cause  nous  irrite  parce  que  nous  y  voyons  de  l'inten- 
tion, n  y  a,  par  suite,  un  état  de  râction  qui  va  jusqu'à 
la  répulsion  contre  la  cause  qui  nous  blesse.  La  haine 
devient  alors  une  colère  réfléchie  et  méditée  qui  prend 
plusieurs  formes,  telles  que  la  colère  et  la  vengeance. 
Aussi,  ce  qui  la  fait  naître  en  nous  ne  sort  pas  de  Tordre 
physique,  mais  de  l'ordre  moral.  Le  crime,  l'orgueil, 
l'oppression,  peuvent  nous  inspirer  de  la  haine,  et,  dans 
tous  les  cas  de  même  nature,  elle  est  légitime,  mais  à  la 
condition  de  ne  tomber  que  sur  le  vice  ou  le  crime,  et 
non  sur  les  personnes.  Dans  ce  dernier  cas,  c'est  la  plaie 
la  plus  funeste  à  l'homme.  La  haine  enracinée  dans  le 
cœur  devient  une  source  d'iniquités;  c'est  elle  qui  fit  de 
Gain  l'assassin  de  son  frère.  R. 

HAIRE.  V,  CiucB,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra^ 
phie  et  d'Histoire. 

HALAGE  (Chemin  de),  espace  de  7*", 79  de  large  oue 
les  propriétaires  sont  obligés  de  laisser  libre,  sur  Ta  nve 
des  cours  d'eau  qui  a  le  plus  de  profondeur,  pour  le  pas- 

Sl^  des  chevaux  qui  traînent  les  navires,  sans  que  tou- 
oii  le  terrain  cesse  de  leur  appartenir.  On  ne  peut  ni 
bâtir,  ni  planter,  ni  tenir  clôture  plus  près  que  9'",7S, 
sous^ine  de  confiscation,  de  réparation,  et  d'une  amende 
de5W)ft'.  L'obligation  résulte  d*une  ordonnance  de  1669, 
d'un  arrêt  du  Conseil  en  date  du  24  juin  1777,  et  des 
art.  5M  et  650  du  Code  Napoléon. 

HALECRET ,  sorte  de  cuirasse.  V.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  ^Histoire. 

HALER,  en  termes  de  Marine,  tirer  et  roidir  un  cor- 
dage pour  amener  horizontalement  une  manœuvre ,  un 
m&t,  un  (krdeau,  une  chaloupe,  etc.  On  nomme  hale^ 
bord  un  petit  cordage  employé  à  haler  dans  un  bâtiment 
tout  objet  extérieur;  haie-bis,  une  petite  manœuvre  qui 
sert  à  amener  les  voiles,  pavillons  et  guidons  ;  hale-breu, 
un  petit  cordage  qui  passe  dans  une  poulie  et  sert  â 
élever  les  voiles;  haie-dedans,  un  cot^ijge  â  l'aide  du- 
quel on  haie  en  dedans  certaines  voUes. 

HAUEimQUES  (du  grec  halimUikè,  pèche],  nom 
donné,  chez  les  anciens  Grecs,  aux  ouvrages  didactiques 


sur  la  pêche.  Nous  avons  sur  ce  sujet  un  pofime  d'Op- 
pien,  et  quelaues  fragments  d'un  autre  d'Ovide. 

HALLALI,  fanfare  sonnée  par  la  trompe  de  chasse  pour 
rassembler  les  chasseurs  au  moment  où  le  cerf  aux  abois 
va  devenir  la  cqrée  des  chiens.  Cette  fanfare,  dont  l'au- 
teur est  inconnu,  a  été  placée  par  Philidor  dans  la  chassa 
de  Tom  Jones,  par  Ménul  à  la  fin  de  son  ouverture  du 
Jeune  Henri,  et  par  Haydn  dans  la  chasse  de  son  oratorio 
des  Saisons. 

HALLEBARDE.  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  S  Histoire. 

HALLECRET.  V.  Cuihassb. 

HALLES  (de  l'allemand  hall,  salle) ,  édifices  où  l'on 
concentre  et  expose,  pour  la  vente  en  gros  â  certains 
jours,  les  vivres,  comestibles  et  autres  objets  de  consom- 
mation usuelle.  Cm  établissements  d'utilité  publique 
exigent  une  architecture  simple,  une  ventilation  facile 
et  permanente ,  des  couvertures  qui  protègent  les  mar- 
chandises contre  les  grandes  chaleurs  et  les  nands  froids, 
des  abords  et  des  dégagements  vastes,  la  libre  disposi- 
tion d'eaux  abondantes. 

HALLES  DE  PARIS.  V,  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire» 

HALUER  ou  TRÊMAIL,  filet  perpendiculaire  qu'on 
emploie  pour  la  chasse  aux  perdrix,  aux  cailles,  aux  fû- 
sans  et  aux  canards. 

HALLUaNATION.  Il  y  a  des  cas  où  l'âme,  sans  être 
excitée  par  le  monde  extéjieur,  croit  éprouver  des  sen- 
fiations,  où  elle  croit  voir,  entendre,  toucher  des  objets 
qui  n'existent  pas  réellement;  rballucination  est  cette 
sensation  fausse,  qui  donne  â  l'esprit  l'idée  d'un  corps 
adssant  actuellement  sur  les  organes,  quoique  ce  corps 
n^existe  pas.  Il  y  a  cependant  cette  différence  entre  Thallth 
ciné  et  le  /ou,  que  le  premier  peut  avoir  conscience  de  son 
état  et  faire  effort  pour  en  sortir  ;  il  se  possède  encore,  il 
accuse  ses  organes  de  mensonge,  à  Texception  de  certains 
cas,  tels  que  l'extase  (  V,  ce  mot)  ;  le  fou,  au  contraire, 
a  perdu  tout  empire  sur  lui-même.  L'halluciné  est  dans 
l'erreur  {hallitcinari,  se  tromper),  mais  il  est  en  même 
temps  sur  le  chemin  de  la  folie;  plus  il  cède  à  rballuci- 
nation, plus  il  approche  du  moment  où  il  perdra  sa  raison 
et  sa  volonté.  Il  y  a  certaines  hallucinations  qui  semblent 
être  des  intermédiaires  entre  la  vision  et  Thalluci  nation 
du  maniaque  ;  elles  ne  se  produisent  que  peu  de  fois,  et 
disparaissent  ensuite  pour  toi^omrs,  sans  doute  avec  le 
trouble  passager  du  cerveau  qui  les  avait  produites. 
L'hallucination  accompagne  souvent  la  folie,  l'ivresse,  le 
délire  fébrile,  et  particulièrement  l'extase;  ses  causes 
sont  ordinairement  celles  qui  mènent  à  la  folie,  mais  fl 
faut  citer  en  particulier  une  invagination  maladive,  qui 
conduit  â  la  perception  imaginaire  des  phénomènes  sen- 
sibles. V,  Rrière  de  Boismont,  Traité  des  halluânutions, 
1845  et  1852.  R. 

HALTÈRES,  masses  de  pierre  ou  de  plomb,  destinées, 
chez  les  Anciens,  à  développer  la  force  musculaire  dans 
les  exercices  du  gymnase.  On  les  tenait  dans  chaque 
main  en  sautant,  courant,  dansant,  etc. 

HAMAC,  lit  suspendu  dont  font  usage  la  plupart  des 
tribus  aborigènes  de  l'Amérique.  II  est  formé  d'un  mor^ 
ceau  d'étoffe  de  cOton,  long  de  3  met.,  large  de  2,  de 
chaque  côté  duquel  pendent  des  cordelettes  qui  servent 
à  le  suspendre  à  des  tiges  de  bambou.  Les  femmes  riches 
des  colonies  européennes  voyagent  étendues  dans  leurs 
hamacs,  que  portent  deux  ou  quatre  nègres.  Dans  les  na- 
vires, on.  suspend  des  hamacs  aux  plafonds  des  entre- 
ponts pour  le  coucher  des  matelots  :  on  évite  ainsi  te 
désagrément  du  roulis.  Les  Anglais  garnissent  le  fond  des 
hamacs  d'un  rectangle  de  bois,  i>our  oue  la  personne 
couchée  conserve  la  position  horizontale.  Les  Anciens 
connaissaient  l'usage  au  hamac,  qu'ils  appelaient  lectus 
pensilis,  «  lit  suspendu.  » 

HAMAÇA  (EL),  anthologie  arabe,  ainsi  appelée  parce 
le  l*'  chapitre  comprend  des  vers  sur  le  courage  guer- 
rier (hamâça).  Elle  ftit  faite  par  Abou-Tammàm-Habi)>- 
Ibn-Ans,  le  Tayyte,  poète  célèbre,  vers  Tan  835  de  notre 
ère,  et  commentée  par  Tabrizi.  Abou-Tâmmâm  a  distribué 
son  choix  de  morceaux  en  dix  chapitres,  dont  le  1^  tient 
plus  de  la  moitié  de  l'ouvrage,  et  traite  des  ikits  valeu- 
reux et  des  mœurs  guerrières  des  Arabes  antérieurs  à 
Mahomet;  les  autres  comprennent  des  élégies,  des  sen- 
tences morales,  des  vers  amoureux,  des  sabres,  des 
descriptions,  des  récits  de  voyages,  des  facéties,  etc.  Le 
Hamâça  est  une  source  précieuse  pour,  l'étude  de  la 
langue  et  de  l'état  social  des  Arabes  avant  l'Islam.  Lo 
texte,  accompagné  d'un  commentaire  de  Tabrizi,  d'une 
traduction  hitine  et  de  notes,  a  été  publié  par  BI.  Frev- 
tag,  à  Bonn,  1828-51.  Nous  avons  donné  des  extraits  du 


HAR 


1019 


HAR 


Butte  dans  le  Jommal  AiioUquê  (aTril  4855).    G.  D. 
HâMEIDES^  en  termes  de  Blaaoo,  pièces  qai  repré- 
Motent  trois  chantiers  de  cave,  appelés  homes  en  fla- 
maDd« 

HAMPE,  manche  de  pinceau;  —  tige  ou  manche  d*ane 
vme  quelconcTue,  d'un  dra^peau,  etc. 

HAMPTON-COURT,  une  des  résidences  royales  d*Ân- 
^etnre,  dans  le  comté  de  lliddlesex.  On  y  arrive  après 
«voir  trayeraé  la  Tamise  sur  un  beau  pont.  Le  palais  fut 
ooostroit  par  le  cardinal  Wolsey,  qui  en  fit  don  pins  tard 


agrandit  les  Jardins, 
les  appartements  contiennent  une  galerie  de  tableaux, 
9t  Ton  voit,  à  cèté  d*un  grand  nombre  de  toiles  insigni- 
fiantes, les  célèbres  cartons  de  Raphaél  (Y,  Cartons)  et 
Selqaes  bons  ourrages  de  Mantegna.  On  remarque  à 
mpton-€ourt  une  treille  plantée  en  1768  :  son  unique 
CBD  a  près  de  80  centimètres  de  tour  à  1  met.  du  sol  ;  elle 
a  35  met.  de  longueur,  et  produit  jusqu'à  2,500  grappes, 
dont  le  raisin  est  réservé  pour  la  table  royale. 

BANAP.  1^  ce  mot  dans  notre  Dtctionuaire  d»  Btogra- 
fftis  «t  crflûtotrs. 

HANCHE,  en  termes  de  Marine,  partle.de  Tanière  d'un 
b&timent  qoi  est  entre  la  poupe  et  les  haubans  du  grand 
mit. 

HANDICAP,  mot  anglais  adopté  dans  les  coorses,  et 
qnl  indique  la  charge  proportionnelle  et  variable  dconée 
anx  jockeys,  et  par  suite  aux  chevaux,  suivant  la  force 
présumée  de  chaque  animaL 

HANGAR  (du  celtique  han,  maison,  et  gard,  garde), 
emplacement  couvert,  mais  non  clôturé  sur  tous  les 
^t^  Dans  une  ferme,  on  y  met  provisoirement  à  Tabri 
les  fdns,  les  pailles,  les  gerbes  même;  on  y  remise 
ansri  les  chariots,  brouettes  et  charrues,  les  vieux  fûts, 
les  paniers,  les  équipages  de  parc,  etc.  Dans  les  ports  et 
arsenaux,  on  conserve  sous  des  hangars  des  bois  de  con- 
struction, les  mâts,  les  ancres,  etc. 

HAN-LIN,  c-à-d.  en  chinois  forêt  de  pinceaux^  Acadé- 
mie politique  et  littéraire  fondée  h  Pékin,  au  vn*  siècle 
de  notre  ère,  par  Tempereur  Hiouan-Tsong.  Son  nom 
vient  des  pinceaux  qui,  en  Chine,  servent  k  écrire.  Ses 
membres  ne  publient  que  des  ouvrages  collectifs,  qui 
sont  imprimés  par  le  gouvernement,  et  distribués  aux  ni- 
bliothèques  des  villes  et  aux  principaux  fonctionnaires. 

HANNAQ13E  (Dialecte).  V.  Bohème. 

HANOUARDS,  nom  qu'on  donnait  autrefois  anx  por- 
teurs de  sel  et  de  poisson  de  mer.  Ils  étaient  attachés  aux 
greniers  à  sel,  et  avaient  le  privilège  de  porter  les  corps 
des  rois  défunts. 

HANS,  espèces  d*auberges  à  Tusage  des  ifrançals  qui 
trafiquaient  autrefois  dans  le  Levant. 

HANSE.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Dtctionna$re 

HA7«SW€RST.  I      de  Biographie  et  iF Histoire, 

HAOUSSA  (Idiome),  idiome  parlé  dans  le  Soudan.  Sa 
eottstraction  directe  le  rapproche  des  idiomes  du  bassin 
dn  Niger  et  du  Nil,  et  son  système  vocal  rappelle  la 
langue  des  Tlbbous,  race  intermédiaire  entre  les  Nègres 
et  les  Touaregs.  D*un  autre  côté,  le  haoussa,  par  sa  ten- 
dance an  monosyllabisme,  offre  de  l'analogie  avec  les 
idiomes  de  la  Guinée. 

HAQUEBUTE.  K.  Hacquebotb. 

HAQUENÊE  (du  latin  equina,  dérivé  d'sgtMM,  cheval), 
nom  donné,  pendant  le  moyen  &ge,  à  tout  cheval  d'allure 
donce,  facile  a  monter,  et  allant  ordinairement  à  l'amble. 
Cétait  la  monture  des  dames  et  des  ecclésiastiques.  La 
kaquenée  du  gobelet  était  le  cheval  oui  portait  le  couvert 
et  le  dîner  des  rois  de  France  dans  leurs  petits  voyages. 
Jusqu'au  xvni*  siècle,  l'ambassadeur  du  roi  de  Naples  à 
Rome  offrit  tous  les  ans  au  pape,  à  la  veille  de  la  S** 
Pienre,  nne  baquenée  blanche,  en  ligne  de  vassalité. 

HAQDET,  sorte  de  charrette,  longue,  étroite  et  sans 
tididles,  composée  de  deux  pièces  de  bois  liées  horizon- 
talemeat  par  des  barreaux,  et  à  oui  une  articulation 
plaofle  près  des  brancards  permet  ne  faire  bascule.  Les 
Brdeinx  qn*on  y  dépose  sont  retenus  par  deux  cordes  pa- 
rallèles, enroulées  à  la  tète  de  la  charrette  par  le  moyen 
d^ni  moulinet.  On  attribue  l'invention  du  baquet  à  Pascal. 

HARANGDEt  allocution,  discours  qa*on  adresse  à  une 
awmblée,  à  des  troupes,  ou  qu'un  écrivain,  soit  poète, 
soit  historien,  met  dans  la  bouche  de  ses  personnages. 
Htmère  s  prêté  à  ses  héros  d'admirables  harangues.  Les 
hàUtades  oratoires  de  la  vie  publique  ches  les  Grecs  et 
les  Romains  expliquent  la  présence  des  harangues  qui  se, 
oÉleot  fréquemment  au  récit  dans  les  historiens  de  l'an- 
tkpdté  :  Laden  a  m6me  donné  des  r^es  sur  la  manière 


de  les  écrire.  Parmi  les  modernes,  Vossius,  La  Mothe 
Le  Vayer,  le  P.  Lemoyne,  Laharpe,  Blarmontel,  Mably, 
Vertot,  ont  regardé  les  harangues  comme  utiles  et  d'un 
heureux  effet  dans  l'histoire,  tandis  que  le  P.  Rapin  et 
Dalembert  les  repoussent.  Il  y  a  quelque  chose  d'étrange 
à  faire  parler  des  personnages  qui  ont  gardé  le  silence, 
à  rapporter  des  discours  tenus  en  secret  et  dont  toute  ré- 
vélation était  impossible;  en  pareil  cas,  l'historien  ne  fait 
évidemment  que  mettre  en  scène  ses  propres  pensées, 
son  esprit  et  son  éloquence.  On  ne  saurait  douter  que  les 
historiens  de  l'antiquité  môme  aient  presque  toujours 
supposé  le  fond  ou  façonné  la  forme  de  leurs  harangues, 
et  placé  des  morceaux  oratoires  là  où  il  n'y  en  eut  pas  : 
plus  du  cinquième  du  livre  de  Thucydide  est  en  dis- 
coomr;  quatre  auteurs  ont  mis  dans  la  oouche  de  Véturie 
parlant  à  Coriolan  quatre  discours  dissemblables;  les 
tables  de  bronze  retrouvées  en  1529  k  Lyon  porteot  les 
propres  paroles  que  l'empereur  Claude  prononça  dans  le 
Sénat  romain  au  sujet  d'une  demande  des  Ckiulois,  et 
elles  sont  tout  autres  me  celles  qu'on  lit  dans  Tacite. 
Toutefois,  ce  serait  aller  trop  loin  que  de  condamner 
absolument  les  harangues  dans  l'histoire  ;  car  elles  don- 
nent de  la  variété  et  du  mourement  à  la  narration,  et 
sup|)Iéent  à  son  insuffisance.  Ce  qu'on  est  en  droit 
d'exiger,  c'est  que  l'écrivain  n'introduise  pas  de  discours 
hors  de  propos,  quand  il  n'en  tut  pas  prononcé,  et  dans 
la  bouche  d'un  personnage  qui  n^a  point  parié  :  ain^ 
Méaeraî  a  blessé  toutes  les  convenances  de  l'histoire  en 
mettant  une  harangue  dans  la  bouche  de  Jeanne  Dut 
au  moment  de  son  supplice.  Quant  anx  discours  qui  ont 
été  réellement  prononcés,  mais  dont  on  n'a  pas  conservé 
le  texte,  l'historien  doit  se  borner  h  ce  qu'il  sait  positi- 
vement sur  l'idée  générale,*  le  caractère  et  le  but  de  ces 
discours  :  on  trouve  un  exemple  contemporain  de  re- 
constitution de  ce  genre  dans  certaines  parties  de  l'iSri»- 
^otrs  de  Napoléon  et  de  la  grande  armée  en  484%  de 
Ph.  de  Ségur,  et  dans  V Histoire  des'  Girondins  de  II.  de  ' 
Lamartine.  —  Aujourd'hui  on  ne  donne  plus  guère  le 
nom  de  harangites  qu'à  des  compliments  adressés  de 
vive  voix  par  les  autorités  anx  souverains  et  aux  princes* 
HARAS  (du  latin  hara,  étable),  établissement  où  l'en 
élève  et  enmëent  des  étalons  et  des  Juments  pour  pro* 
pager  et  améliorer  la  race.  On  distingoe  les  haras  «ou» 
vages,  vastes  espaces  où  les  chevaux  vivent  en  liberté, 
comme  en  Russie,  en  Arabie  et  en  Amérique  ;  les  haras 
domestiiiuês  omjfrivéSf  accessoires  aux  domaines  ruraux; 
les  haras  parqués^  p&turages  enclos  et  gardés,  ainsi  qu'il 
y  en  a  beaucoup  en  Allemagne,  en  Hongrie,  en  Italie  ^tea 
l!lspagne.  Depuis  Louis  XIII,  tous  les  gouvernements  en 
France  ont  attaché  la  plus  grande  importance  au  perfee- 
tionnement  des  races  cheviuines,  et  B]iécialement  dé  c^es 
qui  servent  à  la  remonte  de  la  cavalerie.  Cestde  ce  règne 
que  date  le  premier  essai  £ait  ponr  fonder  des  haras  aux 
frais  de  l'État,  mais  cet  essai,  ne  fut  pas  heureux.  En  1665^ 
Çolbert  établit  une  organisation  desharasquirepOMit  sur 
ie  concours  de  l'industrie  privée,  encouragée  et  soutenue 
par  l'État,  llalgré  les  avantages  économiques  de  ce  sy»^ 
tèrae  administratif,  l'Assemblée  oonstitoante  le  supprima. 
Si  le  mode  d'encouragement  avait  été  maintenu  tel  qu'il 
existait  avant  1789,  on  aurait  fait  des  économies  cottsl- 
dérables;  en  même  temps,  les  chevaux  firançais  se  se* 
raient  an  moins  conservés  avec  les  qualités  qu'ils  avaient 
pour  la  guerre,  et  les  anciennes  espèees  légères  n'auraienf 
pas  été  dégradées  on  détruites  par  linfluenoe  malheu- 
reuse des  croisements,  qui  n'ont  pas  donné  les  résultatii 
qu'on  en  espérait.  Cette  ancienne  organisation  des  haras 
n'était  pas  onéreuse  pour  l'État,  et  ^e  offrait  de  grandes 
ressources  h  l'armée  comme  au  commerce.  L'État,  en 
effet,  n'avait  pas  à  sa  charge,  oomme  aii^onrd'hui,  de 
nombreux  étanlissements  d'étalons  avec  tout  le  person» 
nel  indispensable;  l'industrie  privée  entretenait  la  plus 
grande  partie  des  tjrpes  reproducteurs^  moyennant  quel»' 
gués  privilèges  ou  des  primes  qui  s'élevaient  environ  à 
3Ô0  ik*.  par  tète  de  cheval,  tandis  qu'avec  le  système  a»* 
tuel  l'entretien  de  chaque  étalon  ne  coûte  paa  moins  de 
1,000  à  1,S00  fr.  à  l'État.  Cette  faible  prime  suffisait  anx 
agriculteurs  pour  élever  des  étalons  auxquels  on  dut  os» 
races  françaues  qui  avaient  une  grande  réputation  et  qui 
offrirent  tant  de  ressources  aux  années  de  la  République 
et  de  r£mpire  pendant  les  lattes  que  ces  deux  gouverne^ 
monta  eurent  à  soutenir  contre  rEorope  coalisée.  Lav 
haras  de  Pompadonr  et  du  Pin,  établis  sous  Louis  XVv 
supprimés  en  1790,  furent  reconstitués  par  Napoléon  l*f 
en  18Ô5;  Louis  XVm  en  i^eola  on  3*,  celai  de  RosièNS 
(Meurthe).  Louis-Philippe  en  créa  dent  à  9-Cloud  et  à 
Headon«'où  Ton  conservait  sovleut  les  élaloiis  de 


HAR 


1020 


IIAR 


«nbe;  ilft  ont  été  désorgimisés  après  1848.  Un  décret  da 
SI  Juin  1852  n*a  conservé  qu*un  seul  haras,  celui  de 
Pompadour.  On  compte  S2  dépôts  cPétahns,  k  Angers, 
Ânnecvi  Aurillac,  Besançon,  Blois,  Braisne,  Cluny, 
HenneooDt,  Lamballe,  Libourae,  Montier-en-Der,  Pau, 
Perpignan,  le  Pin,  Pompadour,  La  Roche-sur- Yon, 
Rhodez,  Rosières,  Saint-L6,  Saintes,  Tarbes  et  ViUe- 
neuve-sur-Lot.  Après  sToir  été  placé  dans  les  attributions 
du  ministre  du  commerce,  le  senrice  des  haras  a  été 
constitué  en  direction  générale  dans  le  ministère  d'État 
par  décret  du  19  décenobre  1860.  On  administrateur  cen- 
tralise, sous  les  ordres  du  directeur  général,  les  détails  du 
personnel  de  l'administration  et  da  matériel  du  service. 
Le  personnel  du  senrice  actif  comprend  8  inspecteurs  gé- 
nénux,  26  directeurs  de  dépôts  d'étalons,  26  sous-direc- 
teurs agents  comptables,  10  surveillants,  26  vétérinaires, 
des  brigadiers  et  des  palefreniers  en  nombre  proportionné 
aux  besoins  du  service.  Le  directeur  a  10,000  tr,  de  trai- 
tement, les  inspecteurs  généraux  8,000,  les  directeurs  de 
détoôt  de  3,500  à  5,000,  les  agents  comptables  de  2,000  à 
2,600,  lea  vétérinaires  de  1,000  à  2,000.  Il  y  a,  aapièi  du 
gouvernement,  un  Conseil  tupérisur  dst  haras,  compre*  • 
aant,  indépendamment  du  directeur  général  et  de  Tad- 
ministrateur,  10  membres  choisis  par  le  ministre  parmi 
les  sénateurs,  les  doutés  au  Corps  législatif,  les  membres 
du  Conseil  d'État,  les  officiers  généraux  de  Tarmée,  et  les 
pmonnes  versées  dans  les  matières  hippiques;  et  un  Co- 
mité  eariiuUatif  des  harcu,  formé  des  inspecteurs  géné- 
raux, ious  la  présidence  du  directeur  général.        B. 

HARASSE,  oouclier  de  près  de  2  met.  de  hauteur,  dont 
•e  servaient  autrefois  les  vilains  ou  roturiers  dans  le 
combat  Judiciaire,  n  couvrait  tout  le  corps,  et  avait  deux 
trous  pratiqués  à  la  hauteur  des  yeux.  Comme  il  était 
très-lourd,  on  a  tiré  de  son  nom  le  mot  harassé,  qui  se 
dit  d'un  homme  accablé  de  fatigue. 

HARDI,  monnaie  de  billon  friippée  en  Guienne  parles 
Anglais  au  xiv*  et  au  xv*  siècle.  Elle  valait  le  quart  du 
•ou,  c-ènL  trois  deniers.  Le  type  des  Hardis  représente 
an  buste  de  (Isce,  couronné,  et  armé  du  sceptre  et  de 
l'épée;  au  revers  est  une  croix,  avec  diverses  figures  et 
inscriptions.  Louis  XI,  Charles  Vm  et  Louis  XH  firent 
fhipper  aussi  des  Hardis  ;  an  temps  de  François  f,  on  les 
confondit  avec  lea  liards. 

HAREM.  K.  ce  mot  dans  notre  Dtctiormairê  de  Biogra- 
phie et  d^ Histoire. 

HARENGERS,  corporation  des  marchands  de  harengs, 
formée  dès  Iol  xii*  siècle.  Un  règlement  de  Louis  IX,  en 
1254,  distingua  les  Poissomniers,  qui  vendaient  le  pois- 
son fhda,  et  les  Barengers,  qui  ne  conservaient  que  la 
▼ente  du  poisson  saur  et  salé. 

HARIVANÇA,  poôme  indien,  en  langue  sanscrite,  dont 
le  titre  veut  dire  généalogie  de  Bari,  c-à-d.  de  Vishnu. 
C'est,  soas  une  forme  épique,  une  compilation  très-dé- 
▼eloppée  de  récits  antérieurs,  racontés  soit  par  écrit,  soit 
dans  la  tradition  populaire  de  l'Inde,  et  relatifs  à  ce  dieu, 
incarné  dans  Krishna.  A  ce  titre,  il  a  pour  pendant  et 
pour  complément  naturel  les  Purànas  (  K.  ce  mot%  prin- 
cipalement dans  les  parties  de  ces  légendes  qui  se  rap- 
portent à  Vishnu.  Hais,  pour  qui  étudie  et  compare  ces  lé- 
gendes sous  les  formes  diverses  où  la  poésie  indienne  nous 
les  présente,  le  ffarivança  est  antmeur  aux  Purànas, 
et  a  même  été  connu  de  leurs  aatears.  D'un  autre  côté, 
one  comparaison  analogue  place  le  Barivança  après  le 
Mahdbhârata,  auquel  on  le  rattache  ordinairement.  Si 
l'on  poursuit  les  recherches  au  delà  de  la  grande  épopée, 
trn  arrive  aa  Râmâyana,  qui  présente  sous  lear  forme  la 
plus  antique  les  légendes  de  Vishnu.  Enfin,  le  (Hta-^Sô- 
vinda  {V,ee  moi)  semble  être  d'une  date  plus  récente  en- 
core que  les  Purànas,  et  se  rapprocher  des  temps  moder- 
nes. L'intérêt  du  Harivança  consiste  surtout  en  ce' qu'il 
marque  une  des  étapes  où  s'est  arrêté  le  culte  de  Vishnu  : 
11  n'y  a  dans  le  Ràmàyana  aucune  tendance  marcruée  vers 
ce  culte  en  particulier;  cette  tendance  est  sensible  dans 
le  Mahàbhàrata;  le  Barivança  appartient  à  la  secte  de 
Vishnu  d'une  façon  évidente ,  mais  sans  s'arrêter  néan- 
moins d'une  manière  exclusive  à  quelqu'une  de  ses  in- 
carnations; les  Purànas  viennent  Immédiatement  après; 
et  enfin  le  chant  lyrique  du  GUarGâvinda  célèbre  exclu- 
sivement Krishna  et  Hàdh&  sa  maltresse,  en  donnant  à 
leurs  aventures  cette  valeur  mystique  et  symbolique  qui 
caractérise  une  époque  avancée  de  l'histoire.  Le  /fon- 
vança  a  été  traduit  en  français  par  M.  Lang^ois,  1835, 
S  vol.  in-4».  En.  B. 

HARMABIAXA,  voiture  ou  litière  des  Anciens,  couverte 
par-dessus,  fermée  par  des  rideaux  sur  les  côtés,  et  ser- 
vant spécialement  à  transporter  les  femmes  et  les  enfants. 


UARMAUQDE.  V.  Nomb. 

HARMONICA,  instrument  de  musique,  auquel  on  a 
donné  différentes  formes.  C'était  d'abora  un  assemblage 
de  verres  inégalement  remplis  d'eau,  accordés  par  demi- 
tons,  et  placés  dans  une  caisse  longue  d'un  mètre  :  après 
avoir  humecté  le  bord  de  ces  verres  avec  une  éponge 
mouillée,  on  trempait  les  doigts  dans  l'eau,  et,  en  les 
passant  légèrement  sur  les  bords  des  verres,  il  résultait 
de  ce  frottement  certains  sons.  Un  Irlandais,  nommé 
Puckeridge,  est  regardé  comme  l'inventeur  de  cet  instru- 
ment. En  1760,  le  célèbre  Franklin  modifia  l'harmonica  : 
il  fit  fixer  de  petites  coupes  de  verre,  contenant  de  l'eau 
et  accordées  par  demi -tons  comme  précédemment,  sur 
un  axe  commun,  que  faisait  tourner  horizontalement  une 
roue  mise  en  mouvement  par  une  corde  attachée  au  pied 
du  Joueur  i  la  manière  d'en  tirer  des  sons  n'était  pas 
changée;  seulement  la  main  droite  donnait  la  mélodie, 
et  la  gauche  l'accompagnement.  M*''*  Davies  firent  en- 
tendre cet  instrument  à  Paris  en  1765.  L'abbé  Mazucchi 
imagina  en  1776  d'employer,  au  Heu  des  doigts,  un  archet 
enduit  de  poix,  de  térébenthine,  de  cire  ou  de  savon.  Les 
harmonicas  à  clavier  de  Rœllig  et  de  Klein  furent  im»> 
ginés  pour  éviter  le  contact  des  doigts  et  da  Terre,  r^ 
sultat  obtenu  au  moyen  de  touches  ganiies  et  disposées  en 
conséquence.  Une  Méthode  d'harmonica  fut  publiée  par 
Huiler,  Leipzig,  1788.  Le  cUvicylindre  (T.  es  mot)  de 
Chladni  est  une  espèce  d'harmonica.  Le»  sons  des  in- 
struments de  ce  genre  sont  doux  et  purs,  mais  agissent 
avec  énergie  sur  Te  système  nerveux.  Ce  fût  pour  rem^ 
dier  h  cet  inconvénient  que  Rœllig,  k  Vienne,  imagina 
Vharmonica  à  clavecin,  dans  lequel,  à  l'harmonica  ordi- 
naire, était  Joint  un  clavier  qui  produisait,  au  moyen 
d'un  levier,  les  sons  par  des  tuyaux.  —  L'harmonica  de 
Lenormand,  dont  on  voit  des  imitations  grossières  entre 
les  mains  des  enfants,  se  compose  de  lames  de  verre 
d'inégale  longueur,  formant  des  séries  diatoniques,  et  re- 
tenues entre  des  fils  qui  leur  laissent  toute  liberté  de  vi- 
bration :  on  les  frappe  avec  un  petit  marteau  de  liège.  B. 

HABMomcA,  jeu  très- doux  qu'on  place  ordinairement 
au  3*  clavier  dans  les  orgues  d'Allemagne,  et  qui  est  des- 
tiné à  produire  des  effets  d'écho.  Il  est,  en  général,  fait 
avec  du  bois  de  chêne  ou  d'érable. 

BABHomcA  A  coaDBS,  uom  donné  par  Stein,  organiste 
d'Augsbourg,  en  1788,  à  un  instrument  de  musique  qui 
offrait  la  combinaison  d'un  piano  et  d'une  épinette,  ac- 
cordés à  l'unisson,  et  qu'on  pouvait  Jouer  ensemble  ou 
séparément. 

HARMONICON,  harmonica  perfectionné  par  G.-C.  Mal- 
1er,  directeur  de  musique  à  Brème,  qui  y  avait  ajouté 
trois  registres  de  flûte  et  un  de  hautbois. 

HARMONICORDE,  instrument  de  musique  inventé  par 
Kauffinann,  k  Dresde.  C'était  un  piano  à  queue,  et  per- 
pendiculaire, accompagné  d'un  mécanisme  que  le  pied 
mettait  en  mouvement,  et  dont  le  son  était  semblable  à 
celui  d'un  harmonica. 

HARMONIE,  heureux  accord  des  parties  d'un  touL 
Ainsi,  V Harmonie  de  Vunivers  résulte  de  ce  divin  esprit 
d'ordre  qui  a  mis  toutes  les  œuvres  de  la  création  à  la 
place  prédbe  qui  convient  à  chacune  d'elles,  et  les  a  en- 
chaînées les  unes  aux  autres  par  des  lois  Immuables. 
Bernardin  de  Saint-Pierre  a  décrit  les  Harmonies  de  la 
ncUure,  c-àrd.  les  rapports  extérieurs  des  êtres  entre 
eux.  Pour  les  philosophes  de  l'antiquité,  le  mot  harmo- 
nie, appliqué  à  l'ordre  général  du  monde,  rappelait  une 
idée  de  musique,  et,  réciproquement,  hi  musique  s'ex- 
pliquait pour  eux  par  des  lois  numériques,  empruntées 
aux  rapports  des  corps  célestes.  Ils  appelaient  harmonie 
céleste  ou  harmonie  des  sphères  une  sorte  de  musique 
qu'ils  supposaient  produite  par  les  mouvements  des  pla- 
nètes et  des  étoiles,  et  par  les  impressions  de  ces  corps 
célestes  les  uns  sur  les  autres;  différents  sons  devaient 
résulter  de  la  diversité  des  mouvements.  Dans  les  Arts  du 
dessin,  la  symétrie  des  proportions,  la  perfection  des 
formes,  le  rapprochement  hid)ile  des  ombres  et  de  la  lu* 
mière,  l'accord  entre  les  couleurs,  la  fusion  des  teintes, 
le  ton  général  et  les  contrastes,  l'unité  d'action,  de  mou- 
vement, de  sentiment,  produisent  Vharmonie.         B. 

HAaMONiB,  terme  de  Musique.  On  dit  qu'une  voix  est 
harmonieuse,  que  des  sons  sont  harmonieux^t  lorsque 
l'émission,  le  timbre  et  la  succession  des  sons  ont  quel* 
que  chose  qui  flatte  l'oreille.  Mais,  indépendamment  de 
cette  accepâon  générale  et  vulgaire,  le  mot  Harmonie  a 
deux  sens  spéciaux  eh  musique;  il  désigne  :  1*  un  corps 
dlnstruments  à  rent,  ou  la  masse  de  ces  instruments  qui 
entre  dans  la  composition  d'un  orchestre;  2*  la  science 
des  accords.  Cette  science,  dont  le  but  est  l'accompagne- 


HAR 


t02f 


HAR 


meot  de  la  mélodi»  (  V.  ce  mot)^  comprend  deux  parties, 
h  théorie  des  accords  isolés  (  V.  Accord),  et  la  théorie  de 
h  SQocession  et  de  renchatnement  des  accords.  L'harmo- 
nie entière»  dans  un  ton  donné,  se  rédait  à  l*empIoi  suc- 
resrif  de  deax  accords,  Taccord  parfait  sur  la  tonique  et 
Vacrord  de  dominante,  soit  dans  lear  état  naturel,  soit 
modifiés  |iar  le  retwersement,  la  substitution,  les  aitérch 
tions,  VantùsvpaHon,  le  retard^  et  ausd  par  les  notes  de 
pouoge,  les  pédales  et  les  jnrogressions,  et  à  Tobservation, 
Miir  les  accords  dissonants ,  de  la  prépcuraiion  et  de  la  réso^ 
mion  (F.  ces  mots).  Pour  changer  de  ton,  on  a  recours  à 
la  fliodiitaltofi  {V.ee  mot),  L*emplo!  des  trois  mouvements 
£rect,  contraire,  et  oblique,  et  celui  du  contre -point 
(V,  ce  mai)^  font  aussi  partie  de  Tharmonie.  On  appelle 
Hwnnome  appliquée  Fart  d'assortir  telle  ou  telle  variété 
d*kccords  à  on  morceau  d*une  couleur  particulière;  on  y 
frit  rentrer,  entre  la  détennination  des  styles,  l'art  de 
Yaecompagnmnent  et  celui  de  Vinstrumentation  {V,  ces 
mois).  Lluamonie  est  dite  directe  quand  la  base  est  fon- 
damentale, et  que  les  parties  supérieures  conservent 
Tordre  direct  entre  elles  et  avec  cette  basse  ;  renversée 
<{nand  le  son  fondamental  estjdans  ouelqu'une  des  par- 
ties supérieures,  et  qn*un  autre  son  de  l'accord  est  trans- 
porté à  la  basse  au-dessous  des  autres;  figurée  lorsqu'on 
fiait  passer  plusieurs  notes  sous  un  accord. 

Liiabituae  d'entendre  des  accords  dès  notre  en&nce 
nous  fidt  de  l'harmonie  un  besoin  dans  la  musique.  Mais 
il  est  des  peuples,  comme  les  Turcs,  les  Aralrâs  et  les 
Chinois,  qai,  môme  de  nos  Jours,  ne  sont  pas  initiés  à 
rharmonie  telle  que  nous  l'entendons,  et  à  qui  les  effets 
de  notre  mosioue  en  accords  sont  importuns,  bien  qu'ils 
reposent  sur  aes  phénomènes  acoustiques  naturels.  B 
n'est  donc  pas  incroyable  <pie  los  Grecs  et  les  Romains, 
mal^  le  développement  de  leur  civilisation,  n'aient  point 
eonnn  l'harmonie,  et  se  soient  bornés  aux  unissons  et  aux 
octaves.  Bien  qu'on  ait  beaucoup  écrit  pour*  établir  le 
contraire  (Gaffono,  Zarlino,  Doni,  Meibomius,  Isaac  Vos- 
sins,  l'ahbô  Fraguier),  on  ne  trouve  dans  les  Traités  à 
mosiqae  d'Arlstoxène,  d'Aristide  Quintilien,  d'Âlypius, 
de  Ptolémée,  de  Boéce,  aucune  expression  équivalente  de 
notre  mot  harmonie,  et  les  consonnances  de  quarte,  de 
quinte  et  d'octave,  dont  il  est  fait  mention,  n'étaient  pas 
employées  simultanément,  mais  par  successions  mélo- 
diques. Les  fhi^ents  peu  nombreux  que  l'on  a  con- 
servés de  l'ancienne  musique  grecque  n'offirent  aucun 
vestige  d'accord.  Enfin  la  forme  des  lyres  et  des  ci- 
thares, le  pedt  nombre  de  leurs  cordes,  qui  ne  pouvaient 
être  modifiées  conune  sur  nos  instruments  à  manche,  don- 
nent beancoup  de  probabilité  à  l'opinion  de  ceux  qui  ne 
croient  pas  à  l'existence  de  l'harmonie  dans  la  mtuique 
des  Anciens,  entre  autres,  Glaréanus,  Artusi,  Mersenne, 
Kireher,  Burette,  Martini,  Marpurg,  Forkél,  etc.  —  Les 
i**"  notions  de  l'harmonie  se  trouvent  au  moyen  Age,  dans 
un  écrivain  du  vn*  siècle,  Isidore  de  SéviUe,  et  elles  ont 
été  sans  donte  le  résultat  de  l'introduction  de  l'orgue,  sur 
lequel  on  a  expérimenté  la  simultanéité  des  sons;  mais 
rharmonie  resta  dans  la  barbarie  Jusque  vers  le  milieu 
du  xnF«  (F.  DupHoms,  D^chântJ.  Des  musiciens  italiens 
commenoèrent  à  lui  donner  des  formes  plus  douces  :  tels 
forent  Francesco  Landino,  dit  Cieco  (l'aveugle)  ou  Pran- 
eesco  degli  organi  (à  cause  de  son  habileté  sur  l'oreue], 
Jacopo  de  Bologne,  Nicolo  del  Proposto  et  plusieurs 
autres.  Les  plus  anciens  écrivains  qui  .traitèrent  de  l'har- 
monie fiirent  Hucbald  de  Saint-Amand  (x*  siècle).  Gui 
d'Arène  et  Francon  de  Cologne  (xi*),  llarchetto  ae  Pa- 
doae  et  Jean  de  Mûris  (xm*).  L'harmonie  se  perfec- 
tionna ensuite,  grftce  aux  talents  de  deux  musidens 
français,  Guillaume  Dufay  et  Gilles  Binchois,  et  d'un 
Anglais,  John  Dunstaple,  qui  vivaient  dajis  la  première 
moraô  dn  xv*  siècle.  Leurs  élèves,  Jean  Tinctor,  Gafo- 
rio,  etc.,  ijoutèrent  à  leurs  découvertes,  et,  depuis  lors, 
rharmonie  s'est  continuellement  enrichie  d'effets  nou- 
veaux;. Joaon'à  la  fin  du  xvi*  siècle,  on  ne  fit  usage 
que  dTaccoras  consonnants  et  de  quelques  prolongations 
qol  produisaient  des  dissonances  préparées  :  vers  1590, 
le  Vénitien  Glande  Monteverde  employa,  le  premier,  les 
aceords  dissonants  naturels  et  les  substitutions.  Au  com- 
mencement dn  dèele  suivant,  Louis  ^adana,  maître 
de  chapelle  de  la  cathédrale  de  Mantoue,  ima^a,  dit- 
on,  de  représenter  l'harmonie  par  des  chiifires  placés 
au-dessus  des  notes  de  la  basse  (  r .  Basse  cmFFEiB).  En 
1699,  le  géomètre  Ihmçais  Sauveur,  reprenant  une  expé- 
rience dn  P.  Mersenne  sur  la  résonnance  d'une  corde 
métalHqne,  distinc^oa  le  «oii  fondamental,  donné  par 
Isi  vibrations  de  la  totalité  de  la  corde,  et  les  sons  dé- 
nois  (octave  de  la  quinte  du  son  fondamental  et  double 


octave  de  sa  tierce),  provenant  de  vibrations  partiellea. 
S'emparant  de  ce  résultat.  Rameau  chercha  les  bases 
de  la  science  des  accords  dans  les  lois  de  l'aconstiouei 
et  fit  connaître,  en  1722,  son  système  de  la  basse  foi^ 
damentale  {V.  ce  mot)^  qui  eut  une  vogue  prodigieuse; 
mais  il  ne  pouvait  rendre  compte  de  l'accorq  parfait  mi- 
neur que  par  des  hypothèses.  Du  moins,  c'enit  la  pre- 
mière fois  qu'on  mettait  un  ordre  rigoureux  dans  les 
phénomènes  harmoniques,  et  Rameau  avait  été  aussi  le 
premier  à  apercevoir  le  mécanisme  du  renversement  des 
accords.  Vers  le  même  temps,  le  violoniste  italien  Tartini 
proposait  un  autre  système,  également  fondé  sur  une 
expérience  de  résonnance.  Il  andt  observé  que  deux  sons 
aigus  qu'on  faisait  entendre  à  la  tierce  faisaient  réson- 
ner au  grave  un  3*  son,  également  à  la  tierce  du  son 
inférieur,  ce  qui  donnait  encore  l'accord  parfait.  Mais 
la  théorie  obscure  qu'il  établit,  et  qui  fût  vantée  par 
J.-J.  Rousseau,  n'eut  Jamais  de  succès.  Les  systèmes 
d'harmonie  étaient  devenus  une  mode  au  xvm*  siècle  :  la 
France  vit  édore  ceux  de  Serre,  d*Estève,  de  Balllière,  de 
Jamard,  de  l'abbé  Roussier,  aujourd'hui  Justement  on- 
bliés;  en  Allemagne,  Klmberger  déoouvnt,  en  1773,  la 
théorie  des  prolongations,  que  Catel  reproduisit  plus  tard 
chez  nous  avec  plus  de  simplicité  et  de  clarté.  De  nos 
Jours,  M.  Fétis  a  explioué  le  mécanisme  de  U  substitu- 
tion, et  la  combinaison  de  cette  substitution  avec  les  pxo» 
longations  et  les  altérations. 

K.  Catel,  Traité  éPharmonie,  1802,  in-4«$  Choron^ 
PrtnctpM  de  conwosition  des  écoles  d^Italie,  1809, 3  vol. 
in-fol.;  Berton,  Traité  dPharmonie,  1815;  Rdcfaa,  TVoîU 
complet  et  rauonné  Sliarmonie^  Paris,  1819,  in-fol.; 
Peme,  Cours  élémentaire  d'harmonie  et  éPaccompagne' 
ment,  1822,  2  vol.  in-fol.  ;  Selvagd,  Trattato  éParmonia, 
Naples,  1823,  in-8«;  Fétis,  Méthode  élémentaire  et  abré" 
gée  dPharmonie  et  d^aecompagnement^  Paris,  1823,  in-4*  ; 
Doisrlen,  Principes  enharmonie,  1824;  Jelensperaer, 
l'Harmonie  au  commencement  du  xix*  siècle,  IfôO; 
J.-G.  Wemer,  Essai  d^une  méthode  facile  et  claire  cTAor- 
monte,  en  allem.,  Leipzig,  1832,  2  vol.  in-4«;  J)auvillier8, 
Traité  de  composition  élémentaire  des  accords,  1834; 
Gérard,  Traité  méthodique  d'harmonie,  1834;  Choron  et 
Adrien  de  Lafage,  Manuel  complet  de  musique,  1836-38, 
G  vol.  in-18;  De  Goussemaker,  Histoire  de  l'harmonie  a» 
moyen  âge,  1852,  ln-4**.  B. 

HARMONiB  (Table  d').  V.  Harpe,  Piano. 

nARMOHix  AU  STTLB,  combiiuâson  de  sons  qui  plaisent 
à  l'oreille,  soit  par  leur  accord  entre  eux,  soit  par  leur 
rapport  avec  les  idées  et  les  sentiments  qu'ils  expriment. 
De  là  deux  sortes  d*harmonie,  Vharmonie  m^contigfiM  et 
Vharmonie  imitative.  Toutes  deux  ont  une  grande  Im- 
portance :  selon  Cicéron ,  c'est  l'harmonie  qui  distingue 
l'orateur  habile  du  parieur  ignorant  et  vulgaire,  et 
l'oreille,  suivant  l'expression  de  Quintilien,  est  «  le  die- 
min  du  cœur.  » 

V Harmonie  mécanique,  qui  consiste  dans  l'accord  des 
sons  que  l'on  emploie,  est,  à  proprement  parier,  l'supAo- 
nie  ou  la  mélodie  du  s^le.  Elle  résulte  :  \^  du  cAoto;  des 
mots,  dans  lesquels  il  faut  chercher,  autant  que  possible, 
un  heureux  mélange  de  voyelles  et  de  consonnes,  de 
brèves  et  de  longues;  2*  de  YarrangemmU  des  mots,  où 
l'on  doit  éviter  l'hiatus  (F.  ce  mot),  la  répétition  des 
mêmes  consonnances,  toute  série  de  mots  d'égale  dimen- 
sion, toute  accumulation  de  monosvllabes  ou  de  mots 
d'une  longueur  démesurée,  les  assemblages  où  dominent 
les  consonnes  fortes  et  les  qrllabes  rudes,  etc.  ;  3*  de  la 
construction  des  phrases,  auxoueUes  on  s'attache  è 
donner  du  nombre  et  de  la  période  (V.  ces  mots). 

L'harmonie  imitatioe  est  un  artifice  de  s^le  qui  con- 
siste à  pdn^bre  les  choses  par  les  sons  des  mots  ou  par 
l'habile  arrangement  de  U  phrase,  qui  tantùt  est  douce 
et  coulante,  tantôt  rude  et  saccadée,  tantôt  sourde  et 
tantôt  sonore,  tantôt  se  précipite  alerte  et  rapide,  tantôt 
se  déroule  avec  lenteur  on  se  développe  majestueuse- 
ment, selon  la  nature  des  idées  et  des  sentiments  expri- 
més. Ainsi,  Boileau  (Sat  3,  le  Repas  ridiûM)  nous  fait 
entendre  le  bruit  d'une  assiette  lancée  à  la  tète  de  quel- 
qu'un, et  qui  revient  après  avoir  manqué  son  but  s 

L*aiitro  eaqulT*  la  eonp,  et  raittotte  ToUat 
S'en  va  frapper  le  mur  et  rerlent  en  roahat. 

La  Fontaine  nous  met  sous  les  yeux  l'inquiétude  d'an 

avare  t 

n  entaeialt  to^Joan; 

Il  paieait  lea  nnlti  et  lee  Jonri 
A  compter,  calcaler,  supputer  laiie  relâche. 
Calculant,  lappntant,  comptant  oonmie  )t  la  tieha. 
La  Fominn.  xn,  s,  cfu  Thisawiuw  ei  eu  Smge, 


ITAR  1022 


HAR 


n  nepoaviit  pat  mieux  peindre  Borée,  qui,  dil-H  t 

8ê  gorg*  de  Tspeiin,  i^eiii«  eoimM  va  teUon, 

Fait  an  Tsesme  d«  dénen, 
Blfito,  loaiBe,  twipêt*,.... 

La.  Fovtazkb,  Pkélnu  U  Ban§,  yi,  t. 

Badne  fdt  dire  h  Orette  en  proie  eux  Foriee  {Anâro- 
moque,  V,  5)  : 

Fùnr  qui  loiit  cm  lerpenif  qui  •tfflent  wax  tos  tAtctf 

n  peint  an  monstre  en  ces  mots  (Phèdre,  V,  6)  t 

ladompttbte  tadreftn,  dragon  impdtnénZf 
Sa  «ronpe  se  reoonrbe  «n  replia  tortueux. 

La  prose  peut  recourir,  eomme  la  poésie,  à  l'harmonie 
imitaaTe,  ann  de  peindre  les  objets  par  les  sons.  Ainsi, 
Ghateavdiriand  a  dit  :  «  Le  rauque  son  de  la  trompette  du 
Tarlare  appelle  les  habitants  des  omlires  étemelles;  les 
soiras  casernes  en  sont  ébranlées,  el  le  bruit,  d'abîme 
en  abîme,  roule  et  retombe.  » 

L'harmonie  imitatire  ne  doit  Jamais  être  cherchée  pour 
élle-mdme  ni  sentir  reffort;  et,  ches  les  écriTsins  de  pre- 
mier ordre,  elle  Jaillit  touiours  de  l'inspiration;  il  en  est 
de  cette  qualité  comme  de  la  Justesse  de  l'expresiion, 
qui,  chez  eux,  suit  toujours  la  Justesse  de  la  pensée. 

HARMONIE  paééTABUi,  svstéme  à  l'aide  duquel  Leibnis 
.  prétendait  expliquer  l'action  de  l'&me  sur  le  corps  et  du 
eorps  sur  l'âme.  En  réalité,  il  n'admettait  pas  Tinflaence 
réciproaue  dés  deux  substances  l'une  sur  l'autre  :  car 
il  imaginait  <{ue  le  Créateur,  en  les  réunissant  dans 
l'homme,  ayait  établi  entre  elles  une  harmonie  parfaite, 
de  telle  laçon  que,  bien  que  cliacune  se  développât  sui- 
vant des  lois  propres,  les  modifications  qu'elle  éprouvât 
eorrespottdaient  exactement  à  des  modihcattons  éprou- 
vées par  l'autre;  telles  seraient  deux  horloges  bien  re- 
nées, qui  marqueraient  toujours  les  m^es  heures, 
quoicme  obéissant  à  des  mécanismes  distincts. 

HARMONIES  DES  ÉVANGILES,  titre  d'ouvrages  des- 
tinés à  montrer  l'accord  des  doctrines  et  des  faits  dans 
les  livres  des  quatre  Évangélistes.  Les  plus  anciens  de 
ces  ouvrages  sont  attribués  h  Tatien  et  k  Théophile  d'An- 
tioche.  Eusèiie  dressa  ensuite  un  tableau  synoptique  des 
Evangiles.  Nous  avons  de  S^  Augustin  un  livre  De  con^ 
jsnstt  EvangelitUtrum,  Pierre  Lombard,  S^  Thomas 
d'Aquin  et  Gerson  au  moyen  âge,  Oaiander,  Jean  Buisson, 
Calvin,  Paulos  et  Clausen  chez  les  modernes,  se  sont 
anssi oœupés  de  laooncordance  (F.  ce  mat)  deeÉvansilei» 

HARMONIFLDTE.  K.  au  St^lémefU.  *^ 

HAUMONIPHON,  instrument  â  vent  et  â  clavier,  long 
de  0«,42  sur  0«»,12  de  large  et  0",8  de  haut,  qui  s'in- 
suffle an  moyen  d'un  tube  élastique,  et  qui  produit  si- 
multanément plusieurs  sons ,  analogues  à  ceux  du  haut- 
bois, n  a  été  inventé  en  1837  par  M.  Paris,  de  Dijon. 

HARMONIQUE  (Division).  F.  AsnHMéTiQOB. 

HARMONIQUES  (Sons)  ou  sons  flûtes,  sons  tirés  de 
eertains  instruments  à  cordes,  tels  que  le  violon  et  le 
violoncelle,  par  un  mouvement  particulier  de  l'archet, 
qn'on  approche  davantage  du  chevalet,  et  en  posant  lé- 
gèrement le  doigt  sur  la  corde.  Ils  diffèrent  des  sons  du 
Jeu  ordinaire  par  le  timbre,  qui  est  beaucoup  pins  doux, 
et  par  le  ton.  On  attribue  l'invention  des  sons  harmo- 
niques à  on  élève  de  Tartini,  Domenico  Ferrari,  de  Ci^ 
mone,  au  milieu  du  xvm*  siècle.  —  Od  donne  encore  le 
nom  ^harmoniques  aux  sons  concomitants  ou  accessoires 
qui,  par  le  principe  de  la  résonnanoe,  accompagnent  un 
ton  quelconque.  Toutes  les  aliquotes  d'une  corde  sonore 
en  donnent  les  harmoniques. 

HARMONIUM.  F.  Orgue  expressif. 

HARPAGON,  machine  de  guerre.  V,  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

HARPALYCE.  V.  Chanson. 

HARPASTUM.  V.  Balle  (Jeux  de),  dans  notre  Diotton- 
noire  de  Bioffraphie  et  d'Histoire. 

HARPE,  instrument  de  musique  de  grande  dimension 
et  de  forme  triangulaire,  monté  de  cordes  de  boyau  et  de 
cordes  de  soie  filées  en  laiton,  disposées  verticalement,  et 
qu'on  pince  avec  les  deux  mains  pour  en  tirer  des  sons. 
La  lia^  se  compose  de  trois  pièces  principales  assem- 
blées en  triangle,  la  console,  la  cotonne,  et  le  corps 
sonore;  les  deux  dernières  sont  réunies  dans  leur  partie 
inférieure  par  une  quatrième  pièce,  la  cuvette,  qui  forme 
la  baae  de  linstnunent.  Le  eorps  sonore  est  one  caisse 


convexe  en  érable,  plus  lance  â  la  base  qu'an  sommet,  et 
recouverte  d'une  table  d'Harmonie,  planche  de  sapin  sur 
laquelle  sont  fixés  les  boutons  qui  servent  à  attacher  le» 
cordes.  La  console,  partie  supérieure  de  l'instrument,  est 
une  bande  légèrement  courbée  en  forme  d's,  et  garnie  de 
chevilles  à  l'aide  desquelles  on  monte  les  cordes  fixées 
sur  la  table  d'harmonie.  La  colonne  est  le  montant  qui 
sert  à  l'assemblage  des  deux  pièces  précédentes.  La  mu- 
sique de  harpe  s'écrit  à  deux  parties  comme  celle  de 
Eiano  :  on  emploie  la  clef  de  sm  pour  la  l'*  partie,  et 
i  clef  de  fa  4*  ligne  pour  la  ^.  —  La  harpe  fut  connue 
des  Anciens;  mais  elle  a  dû  s'éloigner  notablement  des 
proportions  modernes,  s'il  est  vrai  que  ce  soit  avec  une 
oÈi^  que  David  dansa  devant  rArche  (  V.  Kinnor).  La 
harpe  est  figurée  souvent  sur  les  monuments  de  l'an- 
cienne Égvpte,  et  l'on  en  voit  une  de  ce  pavs  au  Muses 
égyptien  oe  Paris.  Les  harpes  égvptiennes  n^avaient  pas 
de  console,  et  étaient  en  forme  ?arc;  on  en  Jouait  dans 
les  processions  tout  en  marchant,  le  bois  de  l'instrament 
pose  sur  l'épaule  et  les  cordes  tournées  vers  le  ciel.  L'in- 
strument triangulaire  que  les  Grecs  appelaient  trigoM,  et 
que  quelques  auteurs  croient  être  le  même  que  h  sain- 
bwiue,  correspond  à  la  harpe  moderne.  Les  Romains  ne 
paraissent  guère  en  avoir  fait  usage,  car  on  n'en  a  trouvé 
qu'une  seule  figure  dans  les  peintures  d'Herculanum.  Les 
peuples  du  Nord,  Scandinaves,  Celtes,  et  Germains,  firoit 
grand  usage  de  la  harpe.  On  la  trouve  mentionnée  pour 
la  première  fois,  avec  son  nom  actuel,  dans  une  pièce  de 
ven  de  l'évèque  Fortunat  au  vi*  siècle.  An  moyen  te,  elle 
fut  l'instrument  des  troubadoun  et  des  ménestrel  On  sait 
que  le  nombre  des  cordes  varia  alore  de  6  à  25.  Le  plus 
souvent  la  harpe  n'avait  pas  de  colonne  de  soutien  sur  le 
devant;  le  triangle  était  ouvert.  Comme  les  cordes  étaient 
accordées  selon  l'ordre  naturel  de  la  gamme  diatonique, 
elles  ne  pouvaient  donner  les  dièses  et  les  bémols,  et 
toute  modulation  était  interdite.  Les  habitants  du  pays  de 
Galles  ont  une  harpe  i  triple  rang  de  cordes  :  les  deux 
rangs  extérieure  sont  montés  à  l'unisson,  le  rang  inté- 
rieur est  celui  des  notes  diésées  ou  bémoUsées.  Cette 
disposition  offre  de  grandes  difficultés  pour  l'exécution. 
En  Irlande  on  inventa  la  ^rpe  double  (à  2  rangs  de 
cordes),  afin  d'augmenter  la  force  du  son.  Luc-Antoine 
Eustacne,  gentilhomme  napolitain  et  chambellan  du  pape 
Pie  V,  imagina,  pour  obtenir  tous  les  demi-tons  de 
l'échelle,  de  mettre  à  la  harpe  78  cordes  disposées  sur 
3  rangs  :  le  i^  comprenait  cpiatre  octaves,  le  2*  faisait  les 
demi-tons,  le  troisième  était  à  l'octave  du  premier.  Les 
difficultés  de  l'exécution  firent  abandonner  cet  instrument 
compliqué.  Vere  1660,  un  'Tyrolien  ajouta  aur  la  con- 
sole dans  l'instrument  simple,  des  crochets  on  sabots  qui, 
correspondant  aux  cordes  et  mus  avec  la  main ,  accrois- 
saient la  tension ,  et  donnaient  ainsi  le  demi-ton  supé- 
rieur. Mais,  tandis  qu'une  main  de  l'instrumentiste  se 
portait  aux  crochets,  il  n'en  restait  qu'une  pour  pincer 
les  cordes  ;  en  1720,  Hochbrucker,  luthier  de  Donawerth, 
remédia  k  cet  inconvénient  par  l'invention  de  la  pédale  ^ 
mécanisme  qui,  pressé  par  le  pied  de  l'exécutant,  et  pas- 
sant an  milieu  de  la  colonne,  met  les  crochets  en  mou- 
vement. Ce  mécanisme,  qu'on  a  attribué  à  tort  à  Jean- 
Paul  Vetter ,  d'Anspach ,  fut  perfectionné  k  Paris  par 
Nadermann,  depuis  lequel  il  y  a  7  pédales,  une  pour 
chaque  note  de  la  gamme ,  quatre  k  droite  et  trois  à 
gauche  de  la  cuvette.  En  cet  état,  la  harpe  est  dite  à 
simple  mouvement  :  elle  est  montée  de  43  cordes ,  ac- 
cordées en  mi  bimol,  et  comprend  6  octaves.  Si  le  mor- 
ceau est  dans  un  autre  ton,  l'exécutant  dispose  ses 
pédales  d'avance.  En  1782,  Cousineau  inventa  le  méca^ 
nisme  à  bàquUles^  qui,  avec  un  double  rang  de  pé- 
dales, foisait  produire  à  la  même  corde  le  dièse  et  le 
bémol  h  volonté.  En  1787,  .Sébastien  Érard  imagina  de 
remplacer  les  crochets  par  des  fourchettes  k  double  bas- 
cule, qui  pincent  les  cordes  an  lieu  de  les  tirer  hors  de 
la  li^e  perpendiculaire.  Chaque  corde  peut  alora  re- 
cevoir trois  intonations,  le  bémol,  le  bécarre,  et  le  dièse; 
les  pédales,  toujoun  au  nombre  de  7,  peuvent  se  mou- 
voir de  deux  manières,  et  se  fixer  à  volonté  dans  des  crans 
pratiqués  à  la  cuvette.  La  harpe  d'Érard,  dite  à  double 
mouvement,  et  dans  laquelle  chaque  pédale  fait  une 
double  fonction  pour  élever  à  la  volonis  chaque  corde 
d'un  demi-ton  ou  d'nn  ton,  date  de  1811,  et  est  accordée 
en  si  naturel;  elle  est  presque  seule  employée  aujour- 
d'hui. Bothe,  de  BcHrlin,  a  disposé  dans  sa  norp^  chro» 
maiujue,  inventée  en  1787,  et  reproduite  en  1804  par 
Pfranger,  toutes  les  cordes  par  demi-tons  (12  pour  une 
gamme),  en  donnant  aux  cordes  additionnelles  une  cou- 
leur qui  les  distingue  I  mais  l'instrument  est  devenu  trop 


BAS 


t»Z3 


HAO 


ptndf  les  cordes  aont  trop  nombreuses  et  trop  serrées , 
st  le  doig;té  n^eet  plus  le  même.  —  L»  harpe^  fort  en  fa- 
isor  à  la  fin  dâ  xvm"  siècle  et  an  commencement  du  xix% 
y  <te  nos  JouiB^  presque  absjidonnée.  Cet  abandon  a 
«oomienoé  à  la  suite  des  perfectionnements  de  méca- 
niimei  qai  ont  rendu  Tinstrument  plus  difficile  a  Jouer. 
On  raccorde,  comme  le  piano,  par  tempérament  {V.  ce 
SMt).  Entre  les  doigts  d'un  habile  exécutant,  elle  rend 
des  sons  purs  et  doux  ;  mais  il  est  difficile  d'éviter  la 
monotonie,  et  d*arriver  à  quelque  énergie  dans  Texpres- 
^on.  M"**  Krumpholz,  M.  de  Marin,  Dizi,  Baôcker, 
Bochsa,  Pollet,  et.  de  nos  Jours,  Labarre  et  Godefroid  ont 
été  les  harpistes  les  plus  brillants.  La  harpe  s'emploie 
4Ml<mefoia  à  Torchestre,  où  elle  produit  d'heureux  effets, 
m  fùaon  surtout  de  la  différence  de  son  timbre.     B. 

■ABPB  A   CLAVBCm.    V,  CLAVICrrHKRIUM. 

BAapB-DCTALE,  petite  harpe  imaginée  vers  4834  par  le 
tetaar  Pfeiffer.  C'est  un  instrument,  non  d'exécution, 
mils  d'accompagnement.  Le  mécanisme  au  moyen  du- 
quel on  élève  chaque  corde  d'un  demi-ton  se  meut  par  la 
pression  du  doigt,  et  non  par  celle  du  pied  comme  dans 
la  haipe  ordinaire.  Les  dimensions  de  la  harpe-ditale  la 
mettent  à  la  portée  des  enfants. 

HASPB  AuJENNB,  OU  horp^  météorologiqitê,  appareil  mu- 
sical plus  curieux  qu'utile,  destiné  à  produire  des  sons 
harmonieux  par  la  seule  action  du  vent.  Cest  une  boite 
de  sapin,  de  i  mètre  sur  20  à  30  centimètre»,  contenant 
ans  table  d'harmonie,  sur  laquelle  sont  tendues  des 
CQvdes  en  boyau.  En  exposant  ces  cordes  à  un  courant 
d'air  assez  fort,  elles  résonnent  d'une  façon  agréable, 
bien  que  la  succession  et  la  combinaison  de  leurs  sons  se 
lassent  sans  ordre  et  sans  règle.  On  ivttribue  l'invention 
de  la  harpe  éolienne  au  P.  Kircher.  En  4785,  l'abbé  Gat- 
toni ,  à  Côme,  construisit  dans  un  Jardin  une  harpe  éo- 
Benne  gigantesque  :  elle  se  composait  de  45  fils  de  fer, 
longs  de  100  met.,  tendus  à  l'aide  de  cylindres,  (Uspo- 
sés  dans  la  direction  du  Nord  au  Sud ,  et  inclinés  de 
nmnière  à  former  un  angle  de  20  à  30  degrés  avec  l'hori- 
son.  Sous  l'impulsion  du  vent,  elle  rendait  des  sons  trës- 
puûsants.  V.  AnéMocoROE. 

HARPE  HaRHoifico-FORTB,  hsrpo  luventéo  vers  4800  par 
Keya^*.  Cest  une  harpe  ordinaire  à  laauelle  on  a  ajouté 
34  cordes  de  laiton,  accordées  deux  à  deux,  qui  forment 
une  espèce  de  contre-basse  de  47  demi-tons,  et  qu'on  fait 
vésonner  avec  le  pied  par  le  moyen  de  47  touches  corres- 
pondant à  autant  de  marteaux  qui  frappent  les  cordes. 

HARPES.  V.  Atteïitb  (Pierres  d')  et  Herse. 

HARPIN ,  ancienne  arme,  qui.  se  composait  d'un  croc 
adapté  à  un  long  manche. 

HARPO-LYRE ,  instrument  de  musique  inventé  à  Be- 
nnçon,  en  1829,  par  un  musicien  appelé  Salomon.  Il  a 
la  forme  d'une  1^  antique,  et  est  monté  de  24  cordes 
r^nrties  sur  trois  manches.  Les  cOTdes  du  manche  du 
milieo  sont  les  mêmes  que  celles  de  la  guitare  à  6  cordes, 
et  sont  accordées  de  môme.  L'ensemble  de  l'instrument 
a  4  octaves  et  demie. 

HARPON,  large  et  solide  fer  de  flèche  fixé  à  l'extrémité 
dNm  manche  en  bois  de  2  met.  de  longueur,  auauel  tient 
une  longae  corde.  Cet  instrument  sert  à  la  pècne  de  la 
baleine  et  autres  cétacés.  L'animal  frappé  emporte  le  har- 
pon; mais,  quand  il  a  succombé,  la  corde  le  ramène. 

HART  (Supplice  de  hi).  F.  notre  Dictionnaire  d$  Bio- 
graphie H  d^  Histoire. 

HASARD.  L'idée  du  hasard  est  la  nésation  de  toute 
cause  et  de  toute  loi  dans  la  production  des  phénomènes 
et  des  êtres;  c'était  la  nation  du  Destin  chez  les  An- 
dens,  chez  les  modernes  c'est  celle  de  Dieu  et  de  la  Pro- 
lîdence.  Pris  dans  un  sens  positif,  le  hasard  est  donc  une 
absurdité  et  un  non-sens,  puisque  tout  ce  qui  commence 
est  nécessairement  produit  gar  une  cause  et  selon  cer- 
taines conditions.  D  y  eut  cependant  une  école  qui  voulut 
élever  Tidée  du  hasard  au  rang  de  système  scientifique; 
ce  fut  celle  d'Épicure.  En  expliquant  l'univers  et  tous  les 
êtres  par  le  choc  accidentel  des  atomes,  Êpicure  livrait 
tout  au  hasard,  et  méconnaissait  l'idée  de  loi.  Ce  gros- 
sier fatalisme  était  en  contradiction  avec  les  plus  simples 
données  de  la  raison;  celui  des  Stoïciens  reconnaissait 
an  moins  la  nécessité  d'un  ordre  étemel  et  immuable.  Le 
hasard,  s'il  était  quelque  chose,  ne  serait  qu'un  principe 
de  désonfre;  il  soflSt  de  promener  ses  regards  sur  la 
terre,  <fe  lever  les  sreuz  au  ciel,  pour  y  voir  des  marques 
constantes  d'ordre  et  d'harmonie.  Pour  celui  qui  l'em- 
pkne,  le  mot  hasard  veut  dire  :  Je  ne  sais  pas.  L'ieno- 
nmt  en  cristallographie  peut  aâribuer  au  hasard  la 
formation  des  cristaux,  HaQy  Fexplique  par  une  loi  ma- 
thématique d'une  grande  simplicité.  Le  hasard  perd  de 


son  empire  à  mesure  que  la  science  fait  des  progrêtt  ta 
science  ramène  à  l'idée  de  Dieu<en  montrant  ignorance  el 
la  folie  de  ceux  qui  prétendaient  pouvoir  s'en  passer.   R. 

HAST  (Armes  d'].  (  V,  notre  Dictionnaire  de  BiogrO' 

HASTATS.  i     phie  et  d*Bistoire. 

HASUR,  instrument  de  musique.  V,  Ascior. 

HATn-CHÊRYF,  T.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d*ffistoire, 

HAUBANS,  gros  cordages  destinés  à  consolider  la  tète 
des  m&ts,  qui  pourraient  se  rompre  par  l'action  directe 
des  voiles  ou  par  les  ébranlements  du  navire  pendant  les 
tempêtes.  Des  moufles  permettent  de  les  roidir  à  vo- 
lonté. Le  nombre  des  haubans  vane  selon  la  force  du 
bâtiment  et  la  résistance  des  m&ts.  Plus  les  haubans  sont 
attachés  loin  du  pied  des  mâts,  plus  ils  ont  de  force;  c'est 
^  pourquoi,  lorsque  vint  l'usage  de  construire  les  navires 
à  murailles  rentrantes,  on  y  adapta  des  arcs-boutants 
saillants  ou  des  plates-formes  saillantes,  qui  prirent  le 
nom  de  porte-haubans  et  qui  servent  à  attacher  ces  cor^ 
dages.  On  a  voulu  remplacer  les  haubans  en  cordes  par 
des  flls  de  fer  et  des  chaînes;  mais  cette  Innovation, 
qui  substituait  à  un  ssrstème  élastique  un  système  in- 
flexible, supprimant  toute  vibration  et  causant  de  fré- 
quentes ruptures,  dut  être  abandonné.  Toutefois  une  Idée 
lui  survécut  :  ce  fut  de  se  senrir,  pour  le  pied  des  hau- 
bans, de  crémaillères  en  fer  et  de  chaînes  oui,  au  moyen 
d'un  mécanisme,  permettent  de  roidir  à  volonté  les  lîau- 
bans,  en  laissant  à  leur  partie  supérieure  leur  élasticité  ; 
en  outre,  leur  partie  inférieure  est  à  l'abri  de  l'incendie. 

HADBERGEON,  cotte  ou  chemise  de  mailles,  ftdte  de 
petits  anneaux  de  fer,  et  plus  tard  de  lames  articulées. 
C'était  le  haubert  des  écuyers,  moins  riche  que  celui  des 
chevaliers. 

HAOBERT.  (  K.  notre  Dtrftonnairs  de  Biographie  et 

HACNET.     t     d:Histoire. 

HAUSSE.  V.  Baisse. 

HAUSSE-COL.  Cémit  autrefois  la  paille  supérieure  de 
la  cuirasse  de  fer  plein  qui  entourait  le  cou  et  recouvrait 
le  gorgerin  ;  ou  bien,  quand  le  casque  n'avait  pas  de  gor- 
gerin,  un  col  ou  collet  en  fer  dont  on  entourait  la  gorge. 
Aujourd'hui  le  hausse-col  est  un  ornement  de  cuivre  ou 
d'ar^nt  doré,  en  forme  de  croissant  et  bombé,  que  les 
officiers  d'infanterie  portent,  lorsqu'ils  sont  de  service  ou 
en  grande  tenue,  fixé  au-dessous  du  cou  sur  le  haut  de 
la  poitrine  par  deux  cordonnets  qui  s'attachent  aux  boa- 
tons  des  épaulettes. 

HAUTBOIS,  en  italien  chœ,  instrument  de  musique  i 
vent  et  à  anche,  ainsi  nommé  parce  (^e,  dans  l'anden 
système  d'orchestration,  sa  partie  était  habituellement 


toite  plus  haut  que  celles  des  violons,  ou  parce  qu'il 
vait  à  renforcer  leurs  sons  aigus.  Long  de  0",60  environ, 
et  fait  en  cèdre,  en  ébène,  en  buis,  ou  en  grenadille.  Il  se 
compose  de  trois  corps  ou  pièces,  qui  s'ajustent  bout  à 
bout,  et  qui  forment  un  tuoe  graduellement  évasé,  ter- 
miné par  un  petit  panillon  en  entonnoir.  L'anche  est  for- 
mée de  deux  lames  de  roseau.  Parfois  on  adapte  au  corps 
supérieur  une  pompe  :  ce  sont  deux  tubes  de  cuivre  rou- 
lant l'un  sur  IHiutre  et  augmentant  de  2  centimètres  la 
longueur  du  tube.  L«  diapason  du  hautiwis  s'étend  depuis 
Vut  grave  du  violon  Jusqu'au  soi  suraigu  :  en  allouant  le 
tube,  Brod  l'a  fait  descendre  Jusqu'au  ta.  Le  hautl>ois  a  des 
sons  champêtres  et  doux,  avec  plus  d'accent  et  de  variété 

3 ne  ceux  de  la  flûte;  malgré. sa  petitesse,  il  a  beaucoup 
e  puissance,  et  perce  au  milieu  des  masses  les  plus 
formidables.  On  l'emploie  également  bien  pour  les  effets 
d'orchestre  et  pour  les  solos.  La  difficulté  la  plus  oonii- 
dârable  de  son  Jeu  consiste  dans  l'acte  de  retenir  le 
souffle  pour  adoudr  le  son,  et  pour  éviter  les  couacs,  qui 
ont  lieu  quand  l'anche  seule  entre  en  vibration,  sans 
faire  sortir  le  son  de  l'instrument.  Il  y  a  aussi  des  pré- 
cautions à  prendre  lorsou'on  joue  avec  beaucoup  de  aou- 
ceur,  parce  que  le  hautbois  peut  octanier,  c-à-d.  faire 
entendre  l'octave  aigué  du  son  qu'on  veut  produire.  Dans 
un  orchestre,  le  hautbois  se  divise  en  4 '^  et  2*  ;  il  a  pour 
alto  le  cor  anglais  et  pour  basse  le  bcuson  {V,  ces  mots), 
La  musique  qu'il  exécute  est  écrite  sur  la  clef  de  sol.  11 
est  lé  plus  Juste  des  instruments  à  vent.  Quand  on  em- 
ploie le  hautbois  comme  instrument  de  solo,  les  tons  les 
plus  favorables  k  son  doigté  sont  ceux  d'ut,  de  fa,  de  sol, 
de  la  mineur,  de  ré  mineur,  et  de  mi  mineur.  Les  traits 
rapides  sont  difficiles  dans  les  tons  où  il  y  a  beaucoup  de 
dièses  ou  de  bémols. 

Le  hautbois  était  déjà  en  usage  en  France  vers  la  fin 
du  xv«  siècle  :  mais  alors  c'était  un  instrument  grossier, 
d'un  son  dur  et  rauque,  et  qui  n'avait  que  8  trous,  sans 
clefs.  Il  dérivait  sans  doute  de  l'instrument  rustique  ap- 


HAD 


1^24 


HEB 


pelé  hautbois  d»  Poitau*  Son  étendue  était  d*une  octave 
et  d*ane  sixte,  depuis  tU  Jusqu'à  ki.  On  distinguait  le 
premier  et  le  ucSnd  deuui  d»  hautbois.  La  hauU^ontre 
de  hauibois  ou  hautbou  d^amour  descendait  une  tierce 


environ,  et  son  étendue  de  fa  (au-dessous  du  sol  grave 
du  violon)  Jusqu'à  ut.  La  basse  de  hautbois,  longue  de 


5  pieds  environ,  était  percée  de  onze  trous,  dont  quatre 
se  bouchaient  avec  des  clefs,  et  se  Jouait  avec  un  bocal 
en  cuivre  courbé,  conune  le  basson;  le  son  le  plus  grave 
était  le  fa  grave  de  la  voix  de  basse.  Le  fagot  et  le  corve- 
ku  (F.  ces  mots)  se  rapportaient  à  la  basse  de  hautbois. 
Le  hautbois  de  forêt  (en  italien  oboë piccolo)^  oui  existe 
encore  aqjourd*hui,  mais  qu'on  n'admet  plus  dans  l'or- 
chestre, sonne  l'octave  aigué  du  hautbois  moderne.  Le 
premier  hautboïste  habile  que  mentionne  l'histoire  de  la 
musique  est  Filidori,  de  Sienne,  fort  applaudi  à  la  cour 
de  Louis  Xin.  Ce  prince,  entendant,  quelques  années 
après,  le  Français  Danican  sur  le  même  instrument,  s'é- 
cria :  «  Tai  retrouvé  un  autre  Philidor.  »  Telle  est  l'oriçine 
du  nom  de  Philidor  que  prirent  les  Danican,  musiciens 
distingués.  Les  Besoza,  originaires  de  Parme,  perfection- 
nèrent la  fabrication  du  hautbois,  et  se  produisirent  avec 
grand  succès  comme  exécutants  en  Italie,  en  Allemagne  et 
en  FïaQce,  sans  rencontrer  d'autre  rival  sérieux  qu'un 
Allemand  nommé  Fischer.  L'un  d'eux,  Jérôme  Besozzi , 
oui  entra  au  service  de  Louis  XV  en  1769,  fonda  une 
école,  d'où  sortirent  Gamier,  Michel,  et  Sallantin.  A  cette 
époque,  un  luthier  de  Paris,  Délasse,  fabriijua  des  haut- 
bois que  l'on  recherche  encore  aujourd'hui,  malgré  les 
additions  de  clefs  que  l'on  a  faites  pour  ajouter  à  la  Jus- 
tesse de  l'instrument  et  dont  le  nombre  s'est  élevé  Jus- 
qu'à 14.  De  nos  Jours,  Vogt,  Brod,  Gilles,  Venoust  aîné, 
triebert,  ont  brillamment  représenté  l'école  française 
de  hautbois ,  et  Sellner  l'école  allemande.  L'Espagne  a 
pradui^  de  nos  Jours  aussi,  un  hautboïste  distingué^  Soler, 
—  Il  existe  des  Méthodes  pour  le  hautbois  par  Schickart , 
Amsterdam,  1730;  par  Vanderhagen  et  par  Garnier, 
Paris,  1798  et  1800;  par  SeUner,  Vienne,  1824;  par  Gh&- 
lon,  Paris,  1826  ;  par  Brod,  ibid.,  1828,  etc.  B. 

HAUTBOIS  (Jeu  de),  un  des  Jeux  d'anche  de  l'orgue.  C'est 
un  jeu  de  forme  conique,  fait  en  étain  fin,  et  qui  sonne 
à  l'unisson  des  dessus  de  trompette.  Il  se  place  au  récit 
et  au  positif,  et  il  en  a  toute  l'étendue;  son  harmonie  est 
gracieuse,  et  imite  assez  bien  l'instrument  dont  il  porte 
le  nom.  F.  G. 

HAUT-BORD.  F.  Bord. 

HAUT  DE  CASSE.  V.  Casse. 

HAUT-DE-CHAUSSES.  V.  Chausses,  dans  notre  Die- 
tionnaire  de  Biographie  et  d^ histoire. 

HAUTECOBiBE,  ancienne  abbaye  de  l'ordre  de  Ctteaux, 
sur  la  rive  occidentale  du  lac  du  Bourget,  en  Savoie.  Elle 
Alt  fondée  en  ,11 25  par  Amédée  III,  comte  de  Savoie,  pour 
servir  de  lieu  de  sépulture  aux  membres  de  sa  famille. 
Fort  maltraitée  pendant  la  guerre  de  la  succession  d'Au« 
triche  et  à  l'époque  de  la  Révolution  française,  elle  a  été 
reconstruite  en  style  gothique ,  en  1824,  par  ordre  de 
Charles-Félix,  roi  de  Sardaigne  ;  les  tombes  ont  été  au- 
tant que  possible  restaurées. 

HAUTE-CONTRE,  la  plus  aigué  des  voix  d'homme, 
plus  élevée  que  celle  du  ténor,  et  ainsi  appelée  par  oppo- 
sition à  la  basse-contre  (  V.  Basse).  Les  voix  de  haute- 
contre,  très-rares  aujourd'hui,  se  trouvaient  principale- 
ment dans  le  midi  de  la  France,  étaient  cultivées  dans  les 
maîtrises  des  cathédrales,  et  exécutaient  la  partie  d*alto 
(F.  ce  mot).  Cette  partie  est  trop  barae  pour  la  voix  de 
contralto,  et  trop^  élevée  pour  celle  de  ténor;  aussi  l'exé- 
cution de  la  musique  écrite  pour  la  haute-contre  présente 
maintenant  des  difficultés  presque  insurmontables. 

HAUTE-Goirnui,  ancien  instrument  de  musique,  variété 
de  la  viole  (V.ce  mot). 

HAUTE  COUR  DE  JUSTICE,  tribunal  dont  l'institution 
remonte  à  la  Révolution  française  (F*  notre  Diction- 
naire de  Bwgrcmhie  et  d^ Histoire,  page  692 ,  col.  2),  et 
qui  est  chargé  de  Jucer  les  crimes  politiques  et  les  atten- 
tats à  la  sûreté  de  l'ÉtaL  Conservé  par  la  Constitution 
de  1852,  il  a  reçu  quelques  modifications  par  le  sénatus- 
consulte  organique  du  13  luillet  de  la  même  année.  Les 
juges,  pris  parmi  les  menibres  de  la  Cour  de  cassation , 
formaient  une  Chambre  de  mise  en  accusation  et  une 
Chambre  de  jugement,  toutes  deux  composées  de  5  Juges 
et  de  2  suppléants.  Le  jury  se  composait  de  36  mem- 
bres des  Conseils  généraux.  La  haute  cour  ne  pouvait 
être  saisie  que  par  un  décret  de  l'Empereur. 


HAUTE-USSE.  F.  Lisse. 

HAUTE  POLICE.  F.  Subveillanci. 

HAUT-RELIEF.  F.  Bas-relief. 

HAUTS-FONDS.  F,  Bas-fonds. 

HAVAGE.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  ai 

HAVET.    S     Biographie  et  d'Histoire. 

HAVRE  (du  celtique  Oder,  ou  de  l'allemand  AoT^m),  nom 
qu'on  donnait  anciennement  à  tout  port  de  mer,  naturel 
ou  creusé  par  les  hommes,  et  qui  ne  s'applique  plus  qu'à 
certains  ports  situés  à  l'embouchure  d'une  riiaère.  Dd 
lutvre  naturel  s'appelle  crique. 

HAVRE-SAC,  de  l'allemand  hafersack,  sac  à  avoine,  sac 
à  provisions.  Les  soldats  ont  de  tout  temps  porté  avec 
eux  une  besace  ou  un  sac,  où  étident  renfermai  leurs  vê- 
tements et  leurs  vivres.  Jusqu'au  temps  de  Turenne,  ce 
sac  fut  appelé  canapsa  (de  l'allemand  Icnapp-sack)^  et  se 
porta  en  ^becière  sur  le  côté.  Sous  le  ministre  Choiseul, 
la  peau  garnie  de  poils  remplaça  la  toile  pour  les  sacs  de 
l'infanterie.  Le  ministre  Saint-Germfdn  fit  prendre,  au 
lieu  de  la  simple  courroie,  une  bretelle  double  pour  les 
porter.  Gouvion  Saint-Cyr  autorisa ,  à  l'instar  des  An- 
glais, le  havre-sac  en  toile  cirée,  qui  ne  plut  pas  à  l'ar- 
mée. La  garde  royale  de  la  Restauration  transforma,  par 
une  addition  de  planchettes,  le  sac  en  une  espèce  de 
petijte  malle  quadrangulaire  méplate,  dont  l'usage  est 
resté  général. 

HEAUME.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire. 

HEBDOBIADIER  (du  grec  hebdomas,  semaine),  nom 
donné,  dans  un  couvent  ou  dans  un  chapitre  de  cha- 
noines, à  celui  qui  est  de  semaine  pour  dire  les  oraisons 
de  l'office  et  y  présider. 

HÉBERGE.   V.  IflTOYERlIET^. 

Hébraïque  (An).  —  I.  Architecture.  H  est  à  peu  près 
impossible  d'apprécier  les  caractères  et  les  yicissitodes 
de  l'art  de  bâtir  chez  les  Hébreux,  leurs  monuments 
ayant  été  complètement  détruits,  et  les  détails  que  donne 
la  Bible  sur  diverses  constructions  ne  suffisant  pas  tou- 
jours pour  s'en  former  une  idée  précise.  VArche  d^al' 
tiance,  le  Tabernacle,  le  célèbre  Temple  de  Salomon  {V. 
ces  mots)^  les  divers  palais  «élevés  par  ce  prince,  ne  pea- 
vent  être  aujourd'hui  connus  que  par  les  descriptions 
des  livres  saints.  Certains  écrivains  ont  pensé  oue  la  civi- 
lisation hébraïque  ne  fut  qu'un  p&le  reflet  de  la  civilisa- 
tion des  Égyptiens,  et  qu'en  matière  de  beaux-arts  les 
Juifs  se  bornèrent  à  imiter  leurs  voisins.  Jl  est  cependant 
naturel  de  penser  qu'ils  communiquèrent  à  leurs  édi- 
fices publics  un  caractère  spécial,  en  rapport  avec  leurs 
croyances  et  avec  leurs  mœurs.  A  propos  de  la  descrip- 
tion du  Temple,  Millin  a  exprimé  l'opinion  que  la  dispo- 
sition de  l'ensemble,  la  construction  pyramidale  des 
murs,  l'espèce  de  gnmde  porte  qui  précédait  la  façade 
antérieure,  étaient  imitées  des  Égyptiens,  tandis  que  la 
toiture  en  bois  et  les  lambris  également  en  bois  dont 
l'intérieur  était  entièrement  revêtu  rappelaient  plutôt 
l'architecture  phénicienne,  ainsi  que  les  colonnes  en  bois 
du  palais  d'été  de  Salomon  ;  que,  dans  les  ornements,  les 
Hébreux  avaient  montré  le  même  goût  de  la  magnifi- 
cence qui  caractérisait  les  Égyptiens  et  les  Phéniciens. 
F.  De  Saulçy,  Histoire  de  l'art  jtêdaique ,  Paris,  1858, 
in-80. 

n.  Sculpture.  —  On  voit  dans  l'Écriture  que  la  sculp- 
ture et  la  ciselure  étaient  cultivées  très-anciennement  par 
les  Hébreux.  Rachel  emporte  les  petites  idoles  de  son 
père  Laban  ;  les  Hébreux  dans  le  désert  fondent  un  Veau 
d'or;  des  chérubins,  des  vases,  des  candélabres  en  bronze, 
ouvrages  de  Bézéléel,  décorent  l'Arche  d'alliance.  Mais 
la  loi  de  Moïse  interdisait  toute  représentation  de  Dieu 
sous  une  image  visible. 

III.  Peinture.  —  Il  n'v  a  de  traces  de  la  peinture  que 
dans  le  livre  d'Ezéchiel  (vm,  10;  xxin,  li),  et  encore 
ce  livre  ertAl  été  écrit  dans  le  pavs  des  Chaldéens. 

IV.  Musique.  —  La  musique  fut  le  seul  art  cultivé 
avec  quelque  succès  par  les  Hébreux;  ils  en  faisaient 
même  remonter  l'origine  avant  le  déluge,  et  attribuaient 
l'invention  des  instruments  à  un  fils  de  Caln.  Mais,  bien 

S  l'on  ait  écrit  de  nombreux  ouvrages  sur  cette  mstière^ 
le  est  loin  d'être  élucidée.  Les  instruments,  par  exem* 
pie,  dont  il  est  fait  mention  dans  la  Bible,  ne  nous  sont 
pas  connus  parfaitement  :  au  nombre  des  instruments  à 
cordes,  on  renuurque  le  kinnor  et  le  nébel,  et,  parmi  les 
instruments  à  vent,  Vougab  (F.  ces  mots),  sans  parler 
des  flûtes,  des  trompettes,  des  tambourins,  des  cym- 
bales, etc.  Un  des  historiens  de  la  musique,  Forkel,  s 
prétendu  que  toute  la  musique  des  Hébreux  consista 
dans  une  espèce  de  récitatif  monotone,  analogue  auv 


IIEB 


1025 


HËB 


pnlmodieB  des  synagogues  et  des  églises  modernes  : 
mais,  outre  que  cette  assertion  est  dénuée  de  preuves , 
00  ne  voit  pas  pourquoi  la  mélodie,  qui  est  chose  natu- 
relle, aurait  été  refusée  à  un  peuple  d*une  civilisation 
dsseï  avancée  ;  on  ne  comprendrait  pas  TefTet  merveilleux 
de  la  mnsiciue  sur  SaQl  eu  démence,  et  tout  ce  que  la 
Bible  rapporte  des  chants  des  prophètes.  D'ailleurs,  il  est 
rapporté  que  David  forma,  pour  rehausser  la  splendeur 
da  culte,  un  corps  de  4,000  Lévites  musiciens,  divisés 
«0  pluaieoTS  chœurs,  dont  chacun  avait  un  orchestre  et 
an  penonnage  dirigeant,  chargé  aussi  de  chanter  ou  de 
ioaer  les  aolos.  Ajoutons,  toutefois,  que  la  simplicité  des 
chants  et  des  instruments  chez  tous  les  peuples  de  Tan- 
tiouité,  et  q^ialement  Tabsence  de  toute  écriture  musi- 
cale chez  les  Hébreux,  ne  permettent  pas  de  supposer 
rieo  d'analogue  à  ce  ofue  les  modernes  appellent  Thar- 
monie.  F.  Ugolino ,  Thésaurus  antiquUcUum  sacrarum, 
L  XXXn,  où  se  trouvent  une  quarantaine  de  traités  spé- 
ciaux SOT  la  musique  et  les  instruments  des  Hébreux; 
Porkel,  Histoire  de  la  musique,  chap.  m;  PfeifTer,  Sur 
ia  musique  des  anciens  Hébreux,  en  allem.,  1779;  Con- 
tant de  ht  Molette.  Essai  sur  la  poésie  et  la  musique  des 
H&freux ,  Paris,  1781  ;  des  Dissertations  de  Saalschûtz , 
Berlin,  1829,  et  de  P.^.  Schneider,  Bonn,  1834,  etc.    B. 

HteAlQOB  (Langue),  une  des  langues  sémitiques  {V.  ce 
mot),  celle  qui  est  arrivée  la  première  à  son  complet  dé- 
veloppement, puisau'elle  possédait  déjà  une  littérature 
lorsôue  les  antres  étaient  encore  dans  renfanoe.  Ce  phé- 
nonràne  n'autorise  pas  cependant  à  la  regarder,  avec 
qcelqaes  hébralsants,  comme  la  langue  mère  univer- 
selle, ni  comme  la  plus  ancienne  des  langues,  encore 
moins  comme  celle  qui  aurait  été  parlée  dans  le  Paradis 
terrestre.  L'hébreu  tient  le  milieu  entre  les  idiomes  ara- 
méens  et  l'arabe  :  s'il  se  rapproche  des  premiers  par  ses 
radnes,  il  a  plus  d'analogie  avec  le  second  pour  la  ri- 
chesse des  formes  grammaticales;  les  radicaux  hébraï- 
ques se  rapprochent  davantage  par  leurs  voyelles  des 
radicaux  araméens  correspondants,  mais  ils  sont  plus  ana- 
logues aux  termes  arabes  par  leurs  consonnes. 

Selon  la  plupart  des  hébralsants ,  '«s  racines  hébraï- 
ques se  composent,  en  général,  de  trois  lettres  et  de  deux 
sfllabea,  et  il  n'y  aurait  qu'un  petit  nombre  de  mots 
mono^Ilabioues  trilittères  et  de  mots  bilittères.  Si  ce 
caractère  polysyllabique  des  racines  était  réel,  il  serait 
une  exception  h  la  règle  qu'on  observe  partout  ailleurs  : 
U  difficulté  de  ramener  aujourd'hui  les  mots  hébreux  à 
des  radicaux  monosyllabiques  est  l'indice  que  la  langue, 
i.  Tétai  où  nous  la  connaissons,  s'était  déjà  éloignée  de 
la  f<»ine  primitive.  Le  nombre  des  racines  trilittères  est 
de  3,000  environ  ;  celui  des  radicaux  bilittères  auxquels 
Xenmann  croyait  pouvoir  rigoureusement  les  réduire 
lerait  à  peine  de  cinq  cents.  Rumelin,  à  l'aide  de  la  trans- 
position et  de  la  permutation  des  lettres,  réduisit  à  quinze 
ladnes  tons  les  mots  hébreux.  Il  y  a  en  hébreu  deux 
genres,  le  masculin  et  le  féminin,  et  trois  nombres,  le 
sngulier,  le  pluriel  et  le  duel  :  ce  dernier  ne  s'emploie 
qne  pour  désigner  des  objets  qui  sont  doubles  par  leur 
nature.  On  reconnaît  le  genre,  tantôt  à  la  signification , 
tantôt  à  la  désinence  des  mots.  Dans  chaque  genre  le 
pluriel  se  forme  d'une  manière  particulière.  Les  substan- 
tifs ne  se  déclinent  pas  ;  les  cas  sont  indiqués  par  l'article 
sons  forme  de  préfixe ,  et  par  des  prépositions  insépa- 
rables, n  n'y  a  ni  augmentatifs,  ni  diminutifs  :  on  sup- 
]riée  aux  premiers  par  certaines  locutions,  telles  que  le 
saint  des  saints,  le  cantique  des  cantiques.  Lorsque  deux 
substantife  qui  se  suivent  expriment  un  rapport  de  pos- 
seaaion,  c'est  le  mot  régissant  seul  qui  affecte  une  forme 
spéciale;  il  rejette,  en  outre,  l'article  préfixe  :  on  a  donné 


rôle)  qui  a  subi  une  modification.  Si  les  deux  substantifs 
qui  se  trouvent  à  l'état  construit  n'expriment  qu'une 
seule  Idée,  l'article,  s'il  doit  y  en  avoir  un,  se  met  devant 
le  mot  cooiplémentaire;  ainsi  l'on  dit  ange  du  Dieu  pour 
Vttoge  de  Dieu,  hommes  de  la  guerre  pour  les  hommes  de 
guerre, — A  la  place  des  a4iectif8,qui  sont  en  petit  nombre, 
on  emploie  des  substantifs,  et  les  deux  noms  se  mettent  h 
Vétat  construit  :  homme  de  Dieu  pour  homme  vertueux, 
fUs  ds  perdition  pour  homme  perdu.  L'hébreu  ne  possède 
pas  d'adjectifs  dérivés  de  substantifs,  comme  sont  nos 
nota  dkm,  humain^  terrestre.  Le  comparatif  se  forme  au 
moyen  de  préfixes,  et  le  superlatif  absolu  par  l&  répétition 
da  même  mot  :  très-^aint  se  dit  saùU,  saint,  saint.  Tan- 
tôt lea  adjectifs  déterminatifs  et  les  pronoms  sont  séparés, 
tutôt  Os  se  présentent  sous  la  forme  d'affixes  et  de  suf- 
fixes s  Us  s'ajoutent  comme  suffixes  aux  substantifs,  aux 


prépositions,  et  aux  verbes  employés  au  parfait,  et  comme 
préfixes  au  futur.  —  Les  noms  de  nombre  plaoâs  après  te 
substantif  se  mettent  au  singulier;  les  noms  placés  i^rès 
les  disaînea  à  partir  de  la  seconde  rejettent  ht  marque  dn 
pluriel,  n  y  a  môme  des  sulratantifs  qui,  exprimant  une 
mesure,  comme  jour,  homr/ie,  armée^  restent  invariables. 
—  Le  verbe  admet,  aux  2*  et  3*  personnes,  la  distinction 
des  genres.  Il  n'y  a  que  deux  temps  :  le  prétérit,  qui  sert 
pour  l'imparfait,  le  parfait,  le  plus-que-parfait  et  môme 
le  présent  ;  et  le  futur,  qui  répond  tantôt  au  futur  simple, 
tantôt  au  futur  antérieur,  tantôt  encore  au  présent.  Par 
l'adjonction  d'une  lettre  préfixe,  le  futur  se  convertit  en 
prétérit;  au  moyen  de  certains  retranchements  et  de  cer- 
taines additions  à  la  finale  de  ce  temps,  il  aomiiert  la 
valeur  du  subjonctif,  du  conditionnel  et  de  l'optatif.  L'Im- 
pératif n'a  que  la  2*  personne.  L'infinitif  et  le  participe 
peuvent  être  considérés  comme  de  véritables  noms.  Ce 
n'est  ni  par  l'infinitif  comme  les  Latins,  ni  par  la  l'*  per- 
sonne du  présent  comme  les  Grecs,  que  les  Hébreux 
nomment  un  verbe,  mais  par  la  3*  personne  du  prétérit, 
dans  laquelle  ils  voient  la  racine  verbale  à  l'état  le  plus 
pur.  L'hébreu  n'a  qu'une  conjugaison  :  mais  le  verbe  est 
susceptible  de  revêtir  sept  formes  ou  voix,  qui  modifient 
le  sens  primitif  par  l'Idée  de  circonstances  nouvelles,  et 
expriment  un  sens  passif,  un  sens  causatif,  un  sens  fré- 
quentatif, etc.  A  l'aide  de  ces  verbes  dérivés,  la  conju- 
ealson  acquiert  une  certaine  richesse.  —  Les  adverbes  et 
let  prépositions,  dont  le  nombre  estt  fort  restreint,  peu- 
vent, dans  certains  cas,  prendre  les  signes  des  genres,  et 
être  traités  comme  de  véritables  noms. 

La  plupart  des  règles  de  la  syntaxe  hébraïque  sont 
conformes  à  celles  des  autres  langues  ;  la  construction  est 
directe,  et  ne  présente  aucune  difficulté.  Seulement  la 
confusion  des  temps  des  verbes,  le  peu  de  distinction  qui 
existe  entre  les  manières  de  parler  conditionnelles  et  lea 
manières  id>solues,  entre  les  propositions  secondaires  et 
les  propositions  principales,  la  facilité  avec  laquelle  on 
passe  do  singulier  au  pluriel,  du  masculin  au  féminin, 
ôtent  au  style  la  précision  désirable. 

La  Palestine  avait  trop  peu  d'étendue  pour  que  pln- 
sieun  dialectes  pussent  s'y  former.  On  sait  seulement 
qu'il  y  avait,  d'u^  Heu  à  l'autre,  des  difiérences  de  pro«) 
nonciatlon  :  aJ^sl,  les  habitants  du  royaume  d'Israël,' 
notamment  les  Galiléens,  altéraient  les  consonnes  guttu- 
rales, et,  dans  la  tribu  d'Éphralm,  on  changeait  l'ar- 
ticulation chuintante  eu  nfflante.  On  peut  custinguer . 
dans  l'histoire  de  la  langue  hébraloue  deux  périodes  :  ' 
la  première,  qu'on  appelle  Vâge  aor^  s'étend  depuis 
l'ongine  de  la  langue  Jusqu'à  la  captivité  de  Babylone;  * 
la  seconde,  ou  âge  d^argent,  qui  commence  à  la  captivité 
et  finit  à  l'époque  des  Macchabées,  se  disthague  par  les 
nombreux  emprunts  que  les  écrivains  font  au  dialecte 
chaldéen,  auquel  les  Juifs,  pendant  leur  s^our  à  Babv« 
lone,  s'habituèrent  avec  d'autant  plus  de  facilité  quil 
avait  une  grande  affinité  avec  la  langue  hébraïque.  Ils 
continuèrent  à  le  parler  après  leur  retour,  et,  de  la  Umgue 
parlée,  il  passa  insensiblement  dans  la  langue  écrite,  où, 
ven  l'avénement  de  J.-C,  il  avait  à  peu  près  remplacé 
l'ancien  hébreu.  Après  la  dynastie  asmonéenne,  la  langue 
hébraïque  pure  devint  une  langue  morte,  et  le  dialecte 
hébreu-chaidéen  ou  syro-chaldéen  fut  seul  employé.  Pa- . 
rallèlement  à  ce  dialecte  s'était  développé,  depuis  le 
VII*  siècle  av.  J.-C,  l'idiome  samaritain  (y,  ce  mot).  Un 
hébreu  moderne,  dit  ràbbinique,  s'est  rormé  depuis  le 
X*  siècle  de  l'ère  chrétienne  chez  les  Juifs  de  l'Espagne  : 
tout  en  affectant  de  se  rapprocher  de  l'ancien  hébreu  par 
sa  structure  générale,  il  conserva  les  formes  chaldalques, 
et,  de  plus,  emprunta  à  l'arabe,  au  grec,  au  latin,  et  aux 
langues  des  pays  où  s'étaient  réfugiés  les  restes  du 
peuple  de  Dieu,  un  grand  nombre  d'expressions.  Les 
Juifs  modernes,  surtout  en  Allemagne,  ont  conservé  le 
ràbbinique  comme  langue  scientifique;  quant  à  l'ancien 
hébreu,  qui  est  la  langue  liturgique,  ils  ne  le  compren- 
nent généralement  guère  mieux  que  les  catholiques  de 
tous  pays  ne  comprennent  le  latin.  ^ 

Parmi  les  ouvrages  très-nombreux  qui  ont  été  oublié.^ 
sur  la  langue  hébraïque,  nous  citerons  t  J.  Reuchlin,  D,: 
rudimentis  hebraXcis  libri  III^  Tubingue,  1506,  in-fol.  \ 
Buxtorf,  Thésaurus  grammcUicus  Itngufs  sanctœ,  B&Ic, 
1609,  ln-8**;  Bellarmin,  Institutiones  linguœ  hehraXcœ, 
Rome,  1622,  in-8<>;  Louis  de  Dieu,  Grammatica  linguarum 
Hebrœorum,  Chaldœorunjk  et  Syrorum  inter  se  collata" 
rum,  Leyde,  1628;  Hottinger,  GrammtUica  quatuor  lin* 
guarum,  hebraltca,  chaldaxca,  syriaca  et  arabica,  harmo- 
nica, Heidelberg,  1658;  Guarin,  Grammatica  hebraUca 
etchaldaMca,  Paris,  1724,  in-4«;  Masclef,  frammatict: 

6o 


HÉB 


1026 


HËB 


hÊhrtâea,  Paris,  i731.iii-lS;  Schultens,  InstUnUumn  ad 
hu»dammUa  Imguœ  AebroMi,  Leytle,  1737,  in-é*;  Mi- 
cfaaelis.  Grammaire  h^tnOquê,  en  allem..  Halle,  1745; 
SchroBder,  InstihtUonss  ad  fïmdamênta  Itnguœ  kebraicm 
ncticognoscemim,  Groningue,  1766,  m*^^';  RoberUon, 
Grammatka  hO^raXca,  2«  édit.,  Edimbourg,  1783;  Wil- 
•on,  ÊUmaUs  d»  la  Grammaire  hébraiquê,  en  anglais, 
S*  édit.,  4788;  Vater,  Grammaire  héhrOUnte,  en  aile- 
Band,  Leipzig,  1798,  ln-8*;  Fabre  d'Olivet,  ta  Langue 
hUfraiquê  restUiêée,  Paria,  1816,  in-4o;  Geaeniua,  Gram- 
maire critique  de  la  langue  hebraMque,  en  allem.,  Leipdg, 
1817,  in-8o;  Volney,  l'Bif>reu  simplifié  par  la  méthode 
alphabétique,  Paris,  1826;  Cohen,  Cours  de  lecture  hé- 
brtOquef  1824,  in-8*;  Ewald,  Grammaire  critique  de  la 
langue  hébraique,  en  allem.,  Leipzig,  1827,  in-S";  Glaire, 
Prmdpes  de  grammaire  hébraXque  et  chaldaXque^  Paris, 
1832,  in-8o;  Sarchi,  Grammaire  hibraUque  raisonnée, 
Paris.  1844,  in-8*;  Latoache,  Études  hOtraXques,  Paris, 
1836,  3  Tol.  in-8«;  £.  Slaoghter  et  J.  Michaelis,  Gram-^ 
m€Uica  hebraica,  édition  donnée  par  V.  Castellini, 
i8M ,  in-8^  ;  —  Pagoinus ,  Thésaurus  linguœ  sanctœ , 
Lyon,  1577,  in-fol.;  Forster,  Dictionarium  hebraicum, 
Bàle,  1557,  in-fol.  ;  Buxtorf,  Lexicon  hfbraHewm  et  chal^ 
daicum,  Bàle,  1631,  in-8*,  et  Lexicon  chaldaicum,  thaï- 
mudicum  et  rabbinicum^  1639,  in-8*;  J.  Cocoeji,  Lexicon 
A«&rakcttm,  1669  ;  G.  Robertson,  Thesaurusiinguœ  sanctœ, 
Londres,  1680,  in-4<>;  Thomassin,  Glossarium  universale 
hebraMcum,  Paris,  1697,  in -fol.;  Bouget,  Lexicon  he^ 
braicum  et  chaldojtco^biblicum,  Rome,  1737,  in-fol.  ; 
Guarin,  Lexicon  hebraicum  et  chaldaico^iblicum,  Paris, 
1746,2  vol.  in-4'';  J.  Simonis,  Lexicon  manuale  hebrœum 
etckaldcBum,  Hall,  1752,  in-8*;  Michaelis,  Supplementa 
ad  lexica  hebraica,  Gœttingue,  170S,  G  vol.  in-4<^;  Din- 
dorf,  Novum  lexicon  linguœ  hebroMco-chaldaicœ,  Leipzig, 
1802,  2  vol.  in-S'';  Gesenius,  Thésaurus  philologicus  et 
criticus  linguœ  h^aicœ,  Leipzig,  1829,  in-4*  ;  Glaire, 
Leasicon  maamale  hebrastcum  et  chaldaicum,  Paris,  1830, 
ln-8<^;  Latoucbe,  Dictionnaire  hébraique  raisonné,  Ren- 
nes, 1845;  —  Postel,  De  originibus  seu  de  hebraxcœ  Iùp- 
guœ  antiquiUUe,  Paris,  1538,  in-4'';  fiertram.  Parallèle 
de  la  langue  hébraique  et  de  la  lanru^  araméenne,  en 
latin,  GenèTe,  1574,  in-8<*;  Loesdie;,  Décousis  linguœ 
h^csœ,  Francfort,  1706,  in-4<^;  Haupbnann,  Historia 
linfluœ  hebrœœ,  Leipzig,  1750,  in-8°;  Clemm,  Histoire 
critique  de  la  langue  Mbraiquey  en  allem.,  Heidelberg, 
1754,  in-8«  ;  Hezel,  Histoire  de  la  langue  et  de  la  litté- 
rature hébralfques,  en  allemand.  Halle,  1770;  Gesenius, 
Histoire  de  la  langue  et  delà  littérature  hébraiqites,  en 
allem.,  Leipzig,  1815;  Blogg,  Histoire  de  la  langue  et  de 
la  littératurehébratques^  en  allemand,  Hanovre,  1820, 
in-4«.  H. 

BéBRAlQUB  (Écriture).  Les  Hébreux  ont  eu  deux  formes 
d'écriture.  Tune  dite  carrée  ou  chaldéenne,  et  Tautre 
brisée  ou  samaritaine.  Les  hébralsants  ne  sont  pas  d'ac- 
cord sur  la  question  de  savoir  quelle  est  la  plus  ancienne  ; 
quelques-uns  supposent  qu'elles  existèrent  simuluné- 
ment  dans  tous  les  temps,  et  furent  employées,  la  pre- 
mière pour  la  transcription  des  livres  saints  et  les  usages 
religieux,  la  seconde  pour  les  usages  profanes,  la  corres- 
pondance et  les  affaires.  La  Qualification  de  chaldéen 
donnée  au  caractère  carré  semi>le  indiquer  son  origine 
étrangère;  il  aura  été  importé  en  Palestine  au  retour  de 
la  captivité  de  Babylone.  D'un  autre  c6té,  l'identité  pres- 
que complète  de  l'alphabet  samaritain  avec  le  phénicien 
est  une  forte  présomption  de  son  antiquité.  Il  y  a  encore 
nne  écriture  ronde  ou  rabbiniqtu;  elle  est  comparative- 
ment toute  moderne.  —  Sous  chacune  de  sea  formes, 
Talphabet  hébraïque  contient  22  lettres.  Selon  Buxtorf, 
elles  seraient  toutes  consonnes;  Masclef  y  distingue,  au 
contraire,  6  voyelles,  dont  4  brèves  et  2  longues.  D'autres 
p^admettent  que  3  lettres  faisant  fonctions  de  voyelles, 
a,  i,  u;  les  voyelles  «  et  o  ne  sont,  comme  en  grec,  en 
latin  et  dans  les  langues  qui  en  dérivent,  que  des  sons  in- 
termédiaires, des  dfphthongues  qui  résultent  de  la  com- 
binaison de  deux  voyelles  [ai^  é^  de  a  et  t;  au,  o,  de  a  et 
M),  Aussi  a-tron  appelé  les  trois  voyelles  maires  lectio- 
ms,  «  les  mères,  ou  les  bases  de  la  lecture.  »  Mais  ces 
voyelles  mêmes  ne  sont  autre  chose  que  des  consonnes 
faibles,  qu'on  n'employait  comme  voyelles  que  pour  les 
ions  sraves  et  longs  ;  les  brèves  étaient  omises,  et  le  lec- 
teur dut  y  suppléer.  De  là  les  nombreuses  interprétations 
auxquelles  a  donné  lieu  le  texte  sacré  :  car  un  même  mot 
change  de  sens  en  changeant  de  voyelle.  Souvent  aussi 
le  sens  du  mot  dépend  de  l'accent  tonique.  On  comprend 
combien  une  pareille  écriture  dut  être  impsrfaite  et 
équivoque.  Néanmoins,  on  ne  se  servit  pas  d'autres 


voyelles  ni  d'autres  signes  phoniqnes  pendant  tout  I» 
temps  où  11<£ome  hébraïque  fut  une  langue  vivante  ;  avec 
cette  différence,  pourtant,  que  les  derniers  écrivains  mi- 
rent firéquemment  la  voyelle  dans  les  mots  où  elle  avait 
été  omise  antérieurement.  L'habitude  et  la  connaissance 
de  la  langue,  ainsi  qae  cela  se  pratique  encore  de  nos  Jonrs 
chez  les  Arabes  et  les  Perses,  suppléaient  an  défaut  de  la 
vocalisation.  Mais,  à  mesure  que  l'hébreu  devenait  langoe 
morte,  la  véritable  prononciation  ^paraissait  :  aussi 
fut-on  obligé,  pour  remédier  à  cet  inconvénient,  d'in- 
venter des  points  diacritiques  et  des  points -voyelles. 
Suivant  Elias  Lévita,  cette  innovation  ne  date  que  dn 
VI*  ou  vu*  siècle  i^rès  J.-G.  Une  foule  de  modifications, 
telles  que  celles  de  nombre,  de  genre,  de  temps,  etc.,  ne- 
sont  indiquées  que  par  les  points-voyelles.  Ces  points  se 
placent  presque  tous  en  dessus  ou  en  dessous  de  la  liçne 
d'écriture  :  ils  représentent  dix  voyelles  différentes,  anq 
longues  et  cinq  brèves.  Les  points  diacritiques  servent  à 
modifier  la  valeur  de  la  consonne  à  laquelle  ils  sont  atta- 
chés, par  exemple,  à  hi  faire  redoubler  dans  la  pronon- 
ciation, à  faire  disparaître  l'aspiration,  etc.  Â  la  même 
époque  on  inventa  les  signes  de  ponctuation  et  les  ac- 
cents. Les  Juifs  ont  cependant  conservé  par  tradition 
l'antique  coutume  ;  le  Pentateuque  écrit  sur  du  parche- 
min et  dont  ils  se  servent  pour  leur  service  religieux  est 
dépourvu  de  tout  signe  qui  facilite  la  lecture.  V.  Van  Hel- 
mont,  Alphabeti  vere  naturalis  hebraïei  brevissima  de- 
lineatio,  Sulzbach,  1667;  Samuel  Bochart,  Dissertation 
sur  V affinité  des  caractères  samaritains  avec  les  Grecs, 
en  latin,  dans  ses  Œuvres,  Leyde,  1675,  in-fol.         H. 

hébraïque  (Littérature).  Tous  les  monuments  de  l'an- 
cienne littérature  hébraique  qui  sont  parvenus  Jusqu'à 
nous  forment  le  recueil  connu  sous  le  nom  de  BtbU 
(  V.  ce  mot).  Ils  sont  de  différents  genres,  et  souvent 
même,  dans  un  seul  écrit,  on  trouve  mêlées  l'histoire, 
l'éloquence  et  la  poésie. 

Les  ouvrages  historiques  de  la  Bible  sont  :  le  Penta- 
teuque^ qui  contient  1  histoire  de  la  création,  des  pre- 
mières générations  humaines,  et  du  peuple  Juif  jusqu'à 
son  entiie  dans  la  Terre  promise  ;  le  livre  de  Josué  ;  le  livre 
des  Juges,  qui  preâd  le  récit  historique  à  la  mort  de  Jo- 
sué et  le  continue  Jusqu'à  celle  de  Samson  ;  les  4  livrea 
des  Aots,  commençant  à  la  naissance  du  grand-prêtre 
Samuel  et  se  terminant  à  la  destruction  du  royaume  de 
Juda;  les  2  livres  des  Chroniqws  ou  des  Paralipo- 
mènes,  qui  reprennent  la  généalogie  de  la  nation  juive  à 
partir  d'Adam,  répètent  sous  une  forme  très-abrégée  la 
partie  historique  des  livres  précédents,  et  finissent  à 
i'édit  de  Cyrus  en  faveur  des  Juifs;  les  livres  d'Esdras, 
qui  commencent  au  retour  de  la  captivité  de  Babylone,  et 
renferment  un  espace  de  113  ans.  La  série  des  livres  con- 
sacrés à  l'histoire  nationale  est  ensuite  interrompue  par 
des  récits  épisodioues;  ce  sont  les  livres  de  Judith,  de 
Tobie^  de  Jonas,  A'Esther,  de  Daniel.  Enfin  les  livres 
des  Macchabées  contiennent  l'histoire  des  Juirs  depuis 
Alexandre  le  Grand  Jusqu'à  Antlocbus  Nicanor. 

On  trouve  dans  le  PenteUeuque  deux  morceaux  poéd- 
quea^  les  Cantiques  de  Moïse  au  chap.  xv  de  VExode  et 
au  chap.  xxxn  du  DevUéronome.  A  la  poésie  ^partlennent 
aussi  le  Cantique  de  Débora  (Juges,  chap.  v)i  le  livre  de 
Job,  les  Psaumes  de  David,  les  Proverbes,  VEcclésiaste, 
la  Sagesse^  V Ecclésiastique,  le  CarUique  des  cantiques, 
les  discours  des  prophètes,  particulièrement  dlsale,  et 
les  Lamentations  de  Jérémie.  C'est  avec  ces  diverses 
purties  de  la  Bible  qu'on  se  fait  la  plus  Juste  idée  du 
génie  hâi>ralque.  Plus  exempt  qu'aucun  autre  de  toute 
influence  étrangère,  il  s'y  montre  dans  son  originalité 
propre.  Tout,  chez  les  poètes  hébreux,  s'anime  de  bril- 
lantes images  et  de  hardies  métaphores,  et  nul  style  ne 
présente  un  caractère  plus  pittoresque  ;  l'expression,  à  la 
ibis  simple  et  noble,  revêt  une  incroyable  majesté,  et  la 
pensée  s'élève  à  de  sublimes  hauteurs.  Mais  on  peut  re- 
procher aux  écrivains  de  la  Bible  de  manquer  souvent 
d'ordre  et  de  méthode,  et  de  tomber  des  plus  nobles  con- 
ceptions aux  détails  les  plus  vulgaires. 

Plusieurs  écrits  des  anciens  Hébreux  ont  été  perdus. 
Le  livre  des  Nombres  (chap.  xxi,  v.  14)  mentionne  un 
Livre  des  guerres  de  Jéhovah,  c.-à-d.  des  guerres  que  le 
peuple  de  Dieu  eut  à  soutenir  dans  le  désert.  Celui  de 
Josué  (ch.  X,  V.  13)  parle  d'un  Livre  du  juste  ou  des  hé' 
ros.  que  l'on  croit  avoir  été  un  antique  recueil  de  chants 
nationaux.  Les  livres  des  Rois  se  réfèrent  souvent  à  des 
Annales  des  rois  de  Juda  et  d^ Israël.  Divers  écrits  scien- 
tifiques, que  nous  n'avons  plus,  étaient  attribués  à  Sa- 
lomon. 

Indépendamment  de  la  Bible,  les  Juifs  possèdeot  un 


HEB 


1027 


BEL 


Code  de  droH  clTil  etreligienx,  qui  est  pour  eux  la  suite 
et  le  oomidément  ;  c'est  le  Taimud  (  V,  ce  mol  dans  notre 
Oidîonnotre  de  Biographie  et  d^ Histoire).  Ils  ont  auçsi, 
tons  le  nom  de  Targunu^  diverses  paraphrases  cbal- 
dslquee  de  rAncien  Testament.  Au  vi*  siècle  de  notre 
ère  parut,  sous  le  nom  de  Massera  (tradition),  un  tra- 
vail critique  sur  le  texte  de  la  Bible,  destiné  à  fixer  ce 
texte  d'après  les  manuscrits  les  plus  authentiques,  à  arrê- 
ter Torthographe  de  la  langue,  et  indiquant  un  certain 
nombre  de  Tariantes  remarquables. 

n  y  eut  en  Occident,  pendant  le  moyen  âge,  une  litté- 
ratura  rabbinique,  qui  fait  suite  à  celle  des  anciens  Hé- 
breux, et  dont  TEspagne  fut  le  principal  centre.  Brillante 
sortoat  au  xii«  siècle,  elle  prodaisit  le  voyageur  Benjamin 
de  Tudèle,  le  philologue  Anen-Esra,  le  grammairien  lexi- 
cographe David  Kimkhi,  et  le  philosophe  Haimooide.  Au 
xiii*  siècle  appartient  le  po6tc  Charizi  ;  au  xv*,  Abraham 
Zachat,  de  Séville,  publia  le  Juchazin  rùvre  des  familles), 
espèce  d'Histoire  universelle.  Les  rabbins  espagnols  ces- 
sèrent leurs  travaux  à  partir  du  règne  de  Ferdinand  le 
Catholique,  et  trouvèrent  ailleurs  peu  de  continuateurs. 
Cest  seulement  dans  la  2*  moitié  du  xvm*  siècle  que 
deux  rabbins  allemands,  Mendelssohn  etHartwig  Werely, 
firent  renaître  chez  leurs  coreli^onnaires  le  goût  de  la 
littérature  héhraiaue. 

r.  Lowth,  Prœtectiones  academicœ  de  sacra  poesi  Se- 
breBorum,  Oxford,  1732,  in-4<*;  Aurivillius,  De  pœsi  6i- 
l>licà,  Upsal,  1758;  Herder,  Leçons  sur  la  poésie  des 
Hébreux;  Delitsch,  Histoire  de  la  poésie  judaïque,  depuis 
la  ci&hire  du  canon  des  Saintes  Ecritures  jusqu*  à  nos 
jours,  Leipzig,  1836;  Wenrich,  De  poeseos  nebroJLcœ  at- 
que  arabieœ  origine,  indole,  consensu  atque  discrimine, 
Leipzig  ,  1843,  in-8<»;  Beupot,  Les  Juifs  d'Occident , 
Pans,  1824;  Kavserling,  Mémoires  pour  serwr  à  la  lilt- 
térature  et  à  Vhistoire  des  Juifs  portugais,  en  allem., 
Leipzig,  1859.  B. 

■ABaAiQiiB  (Versification).  Selon  Josèphe,  les  cantiques 
de  Mf^se,  au  15*  chap.  de  V Exode  et  au  32*  du  Deutiro- 
nome  y  seraient  en  hexamètres,  et  certains  Psaumes  de 
David  en  pentamètres  et  en  trimètres.  Contrairement  à 
ce  témoignage,  les  rabbins  pensent  que  la  poésie  hébraï- 
que n'a  Jamais  eu  de  mètre  fixe,  et  il  est,  en  effet,  difficile 
d'en  reconnaître  aucun  :  on  ne  voit  pas  de  vers  mesurés 
par  le  nombre  des  syllabes  ou  par  la  quantité  prosodique. 
Ce  qui  distingue  la  poésie,  c'est  d'abord  un  rhythme  ré- 
Bohant  d'une  certaine  symétrie  entre  les  membres  de  la 
phrase,  et  du  parallélisme  des  idées  entre  les  deux  par- 
ties de  la  stance  ou  du  verset;  ce  sont  ensuite  certaines 
formes  du  langage,  les  mots  prenant  des  acceptions  et  les 
phrases  recevant  des  constructions  spéciales.  Le  jy  Lowth 
distingue  trois  espèces  de  parallélisme,  le  synonyme, 
Yantithétique  et  le  synthétique.  Dans  le  parallélisme  qmo- 
oyme,  les  mots  correspondants  des  dâix  membres  sont 
synonymes,  ou  renferment  des  idées  analogues  : 

Ma  doctrine  dlitiUen  oomme  la  pinte, 
lia  parole  dégouttera  eomme  la  rosée  ; 
CoDome  rarerse  enr  la  rerdiire, 
Comme  la  giboulée  tsar  Therbe. 

(ZVuléronoiM,  8S,  t.) 

Dans  le  parallélisme  antithétique,  les  mots  correspon- 
dants offrent  un  sens  opposé  : 

Lea  conpe  de  Taml  sont  fldMes , 
Les  baisers  de  Ténnemi  sont  perfides. 

{ Proverbes,  n,€.  ) 

Le  parallélisme  sjmthétique  n'oBre  qu'une  simple  ana- 
logie dans  Tordre  des  mots  et  dans  les  Idées;  les  mots  ne 
sont  ni  analogues  ni  opposés  les  uns  aux  autres,  et  l'idée 
exprimée  dans  le  premier  membre  est  continuée  dans  le 
second  et  complétée  par  un  nouveau  trait  : 

La  loi  de  Jéhora  est  parlklte, 

Bécréantl'fime; 
L'aTertissement  de  Jéhova  est  fldUe, 

fiendant  sage  le  simple. 

( Ptaumet,  IS,  8  et  shIt.  ) 

HÉBREUX  (Monnaies  des).  Elles  ne  furent,  dans  l*ori- 
ne,  que  des  morceaux  d*argent  d*un  poids  déterminé, 
«qués  d*un  signe  généralement  reconnu  dans  le  com- 
merce {Genèse,  xxm,  16  J  :  les  anciens  livres  de  la  Bible 
ne  parlent  pas  de  monnaies  proprement  dites.  D  y  avait 
des  pièces  d'un  side  (poids  de  274  grains),  des  demi- 
slclea,  des  quarts  de  sicle.  Le  sicle  en  monnaie  pouvait 
valoir  environ  3  fr.  10  c  Ce  fut  seulement  à  l'époque  des 


Macchabées  que  les  Hébreux  frappèrent  des  monq^iea 
réelles  ;  les  légendes  des  sicles  furent  tracées  en  carac- 
tères  samaritains.  Plus  tard,  les  princes  de  la  famille 
d*Hérode  frappèrent  des  espèoBs  bilingues,  à  la  fois  greo-t 
ques  et  hébraïques.  De  nombreuses  pièces  d'argent  et  de 
bronze  sont  parvenues  Jusqu'à  nous,  mais  on  n'en  a  au- 
cune d'or.  Le  monnayage  cessa  lors  de  la  destruction  de 
Jérusalem  par  Titus.  Les  monnaies  hébraïques  n'oflCrant 
aucune  représentation  de  la  figure  humaine,  proscrite  par 
la  loi  de  Moïse;  on  y  voit  la  jusquiame,  qui  faisait  partie 
des  ornements  de  la  couronne  du  grand  prêtre,  la  verse 
d'Aaron,  le  vase  où  la  manne  fut  recueillie,  des  épis  de 
blé,  emblèmes  de  la  religion  Juive,  la  vigne,  souvenir  de 
la  fertilité  de  la  terre  promise,  ou  encore  le  Temple  et 
l'Arche  d'alliance.  B. 

HÉCATONSTYLON.  F.  ce  mot  dans  notre  Diction^ 
naure  de  Biographie  et  d'Histoire, 

HÉDONISME  (du  grec  hédoné,  plaisir),  doctrine  phi- 
losophique qui  considère  le  plaisir  comme  le  principe  de 
l'activité  morale,  comme  le  souverain  bien.  C'est  le  sys- 
tème de  l'école  cyrénalque  et  de  l'épicuréisme  (  F.  ces 
mots). 

HEDYCOMOS.  F.  Comos. 

HÉGÉMONIE,  l  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 

HÉGIRE.  \     et  d'Histoire. 

HEIDELBERG  (Ch&teau  de).  Ce  château,  élevé  de  104 
met.  au-dessus  du  Neckar,  sur  une  colline  appelée  le  Jet- 
tenbuhl ,  est  un  assemblage  de  constructions  de  toutes 
sortes,  qui  l'ont  fait  surnommer  TAlhambra  de  l'Aile- 
magne  :  chaque  électeur  palatin  depuis  le  xv*  siècle  vou* 
lut  ijouter  aux  travaux  de  ses  prédécesseurs.  Cette  col- 
lection de  tours  et  de  palais ,  fort  endommagée  pendant 
la  guerre  de  Trente  Ans,  souiOTrit  encore  les  dévastations 
de  Méhu:  en  1688  et  1693,  et  le  château  est  resté  depuis 
cette  époque  dans  l'état  où  on  le  voit  aii^ourd'bui.  Quand 
on  est  entré  par  la  grande  porte  dans  la  cour  principale^ 
on  a  devant  soi  le  palais  de  Frédéric  IV  (1583-1610), 
dont  la  façade,  surmontée  de  deux  hauts  frontons  trian- 
gulaires, off're  des  entablements  largement  projetés,  et, 
entre  4  rangs  de  fenêtres ,  les  statues  finement  taillées 
de  9  palatins,  de  2  rois,  et  de  5  empereurs  ;  à  gauche,  on 
a  le  palais  gothique  de  Louis  le  Barbu,  profondément 
troué  et  crevassé  ;  à  droite,  le  paljds  construit  sous  Othon- 
Henri,  de  1555  à  1559,  dont  la  façade  exqydse,  en  sQrle 
Renaissance,  ea^  garnie  de  dieux  et  de  demi-dieux  grecs, 
de  héros  hébreux,  de  chimères  et  de  nymphes,  et  de  Cé- 
sars romains;  derrière  soi,  sous  les  ogives  d'un  porche, 
on  a  4  colonnes  de  granit  gris,  données  par  le  pape  à 
Charlemagne,  et  qui  ornèrent  d'abord  le  palais  du  grand 
empereur  à  Ingelheim.  Toute  la  cour  est  obstruée  de  dé- 
bris de  fontaines  et  de  perrons.  Le  pidais  de  Frédéric  IV 
contient  le  musée  Graimberg,  amas  peu  choisi  d'anti- 
quités et  de  tableaux.  Sur  la  partie  orientale  du  ch&teau. 
on  remarque  :  la  Tour  fendue,  construite  en  1450,  et  qui 
contenait  le  magasin  à  poudre  ;  la  Tour  de  la  6t6lto- 
thèque,  bâtie  en  1550,  et  qui  a  ronfermé  la  bibliothèqnie 
palatine  du  Vatican;  la  Tour  octogone  ou  de  la  doàie, 
o&tie  en  1525,  incendiée  par  la  foudre  en  1764.  Du  côté 
occidental  est  la  Grosse  tour,  achevée  en  1533,  et  ruinée 
par  les  Français,  bien  que  ses  murs  aient  une  épaisseur 
de  7  met.  Dans  les  caves  du  château  se  trouve  un  fameux 
tonneau,  qui  présente  l'aspect  d'un  naviro  sous  la  cale  : 
construit  en  1751,  il  a  11  met.  de  longueur,  8  met.  de 
diamètre,  et  peut  contenir  283,000  bouteilles  de  vin  ;  il 
off're  k  sa  partie  supérieure  une  plate-forme ,  où  l'on 
monte  par  deux  escaliers  &  deux  étages.  Le  château  de 
Heidelbers  a  ime  magnifique  terrasse  et  de  charmants 
Jardins.  V.  le  comte  de  Graimberg,  Guide  du  voyageur 
aux  ruines  du  chAtea/u  de  Heidelberg ,  1836.  in-fol.  « 
Pfnor  et  Ramée,  Monographie  du  chàieau  de  Heidet» 
berg,  in-fol.  B. 

HEIDUQUES.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire. 

HELDENBUGH,  c-â-d.  Livre  des  Héros,  nom  d'une 
collection  de  poSmes  aUemands,  composés  dans  le  xm* 
on  le  XIV*  siècle,  et  dont  les  si^ets,  moitié  fabuleux, 
moitié  historiques,  se  rapportent  aux  temps  d'Attila  et 
de  Théodoric,  La  plupart  de  ces  poèmes  ont  été  retra- 
vaillés et  tronqua  au  xv*  siècle  pur  Gaspard  de  Roan« 
dont  le  texte  a  servi  â  toutes  les  émtions  du  Heldei^uch; 
mais  la  forme  primitive  a  été  rétablie  dans  l'édition  don- 
née par  Von  der  Hagen,  Berlin,  1820-24,  2  vol.  in-4^ 
Le  Heldenbuch  comprend  :  les  Aïeux  de  Théodoric  et  sa 
fuite  chex  les  Huns ,  poème  qui  parait  ètro  un  travail  de 
seconde  main  ;  la  Bataille  de  Bavenne,  écrit  prétentieux 
et  d'un  «ntérèt  à  peu  près  nul  ;  la  Mort  d'Alfart,  où  l'on 


HEN 


1028 


HËN 


paraît  avoir  imité  la  lutte  da  AU  d'Attila  avec  Vitigès, 
racontée  dans  le  poëme  précédent;  (Hnit,  poème  dans 
lequel  on  a  trouvé  de  Tanalogie  avec  l*Otieron  de  Wie- 
land  ;  Wolfdieirich,  tableau  de  la  fidélité  mutuelle  que 
se  devaient  les  suzerains  et  les  vassaux  :  le  Gnome  Lau^ 
rm,  Sigenot,  Eck$,  la  Cour  (PAtiiia  à  Wonns,  poèmes 
fleins  de  trivialité,  de  fastidieuses  redites,  et  où  Pon  vit 
ians  le  monde  des  géants  et  des  nains  ;  Théodorie  $t  set 
compagnons,  ouvrage  qui,  avant  d'être  éconrté  par  Gas- 
pard de  Roan,  portait  le  titre  de  Conibctt  aivec  les  dro' 
gons;  le  Jardin  des  roses,  dont  l'auteur  a  visé  aux  effets 
comiques,  et  qui  est  la  meilleure  production  du  recueil. 

HÉLÉPOLE.  V.  ce  mot  dsins  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

HÊLIAS,  4*  branche  du  Chevalier  au  Cygne  par  la  date 
de  la  composition,  mais  la  1"  dans  Tordre  des  idées.  Le 
roi  Lothaire  épouse  la  belle  Élioxe,  qui  meurt  en  donnant 
le  Jour  à  sept  Jumeaux.  Chacun  d'eux  vient  au  monde 
avec  une  chaîne  d'or  au  cou.  La  mère  du  roi,  qu'un  ma- 
nuscrit appelle  la  vieille  Matabrune,  ordonne  de  faire 
périr  ces  enfants.  Sept  ans  plus  tard,  elle  apprend  qu'ils 
ont  été  sauvés,  et  leur  fait  enlever  leun  chaînes  d'or; 
aussitôt  ils  sont  métamorphosés  en  cygnes,  et  vont  ha- 
oiter  dans  les  Jardins  de  Lothaire.  Cependant  la  fille 
d'Élioxe  a  conservé  sa  chaîne  d'or,  et  n'a  pas  été  méta- 
morphosée comme  ses  frères.  Elle  raconte  à  Lothaire  ce 
qui  est  arrivé.  Le  roi  fait  chercher  les  chaînes  pour  les 
rendre  à  ses  enfants.  One  seule  avait  été  fondue  par  l'or- 
fèvre de  Matabrune;  un  seul  des  fils  de  Lothaire  conserve 
la  forme  d'un  cygne  :  Hélias  le  place  à  la  proue  de  son 
vaisseau,  d'où  lui  vient  le  nom  de  Chevalier  au  Cygne, 
Là  Bibliothèque  impériale  de  Paris  po«iède  quatre  ma- 
nuscrits de  la  chanson  d'Hélias.  K*  VBistoire  litt,  de  la 
France,  u  XXII.  H.  D. 

IIÉLICES,en  termes  d'Architecture,  la  même  chose  que 
les  caulicoles  (  V,  ce  mot). 

HÊUCOIDE.  V.  Escalier. 

HÉLICON,  une  des  lyres  des  Anciens,  ainsi  nommée  en 
souvenir  des  Muses  qui  habitaient  sur  le  mont  Hélicon, 
parce  qu'elle  avait  9  cordes. 

UÉLIENNE  (Monnaie),  monnaie  des  comtes  de  Péri- 
gord  ,  ainsi  appelée  du  comte  Héli  au  xi*  siècle. 

HÉLIOGRAPHIB.  V,  Protogbaphib. 

UKLIOPOLIS  (Ruines  d*).  F.  Balbeck. 

HELLÊiNlQUES ,  titre  donné  par  Xénophon  k  l'histoire 
en  "/  livres  qu'il  écrivit  pour  faire  suite  à  l'ouvrage  do 
Thucydide,  et  qui  s'arrête  à  la  bataille  de  Mantlnée. 

HELLÉNISME,  manière  de  s'exprimer  particulière  k  la 
langue  grecque.  C'est  un  hellénisme  de  faire  accorder  en 
cas  le  râatif  complément  direct  d'un  verbe  actif  avec  son 
antécédent,  lorsque  celui-ci  est  au  génitif  et  au  datif.  La 
formule  de  salutation  et  d'adieu,  kaire^  est  propre  aux 
Grecs.  Un  des  héllénismes  les  plus  remarquables  est  fem^ 
ploi  des  particiUes  \U^&tU  mises  en  corrélation.  —  On 
donne  aussi  le  nom  d'héllénismes  k  certaines  tournures 
grecques  introduites  dans  une  langue  étrangère  :  telle  est 
cette  construction  latine  :  Sensit  delapsus  in  hostes,  an 
lieu  de  :  se  delapsum  esse.  Racine  {Athalie^  III,  4),  à 
l'exemple  du  grec,  thaumazô  ei^  a  dit  également  : 

J*admlrais  si  Hatbaa,  dépouillant  l'artifloet  ete. 

Hellénisme  s'appliqruait  aussi  aux  fautes  de  langage  que 
fidsaient  les  Grecs  lorsqu'ils  parlaient  latin  et  qu'ils  em- 
ployaient dans  cette  langue  oes  toun  propres  à  la  leur; 
par  exemple,  il  pouvait  leur  échapper  de  dire  turpium 
9Mtf  parce  qu'on  disait  dans  leur  langue  tân  aiskrân 
estt,  P- 

HÉMICYCLE  (du  grec  hêmi,  demi ,  et  kuklos,  cercle) , 
construction  demi-circulaire.  C'est  la  forme  la  meilleure 
que  l'on  puisse  adopter  pour  placer  un  grand  nombre  de 
spectateun  ou  d'auditeurs. 

HÉMI-DITON,  nom  donné,  dans  la  musique  des  an- 
dens  Grecs,  non  pas  à  la  moitié  du  diton  ou  intervalle 
de  tierce  mideure,  mais  à  cet  intervalle  diminué  d'un 
demi-ton,  êila  tierce  mineure. 

HËMIOLIE,  navire  employé  surtout  par  les  anciens 
pintes  grecs.  La  moitié  des  côtés  était  libre  de  rameurs, 
pour  former  on  pont  sur  lequel  on  put  combattre. 

HÉBIISTIGHE,  da  grec  hêmi,  demi,  et  stikhos,  vers. 
On  appelle  ainsi  en  (hmçais  chacune  des  deux  parties  du 
Yen  alexandrin  séparées  par  le  repos  de  la  césure  i 

Le  moment  oh  je  perle  |  est  d^  loin  de  mol. 

BOILKÂU,  Ép,  3. 

HENDÉGASYLLABE  (du  grec  hendéka  onze) ,  vers  de 


onze  syllabes.  Dans  l'antiquité,  on  donnait  ce  nom  à  trois 
espèces  de  vera  :  au  phaleuce,  à  ValcaXque,  et  au  sf^thique 
{V.  ces  mots).  Dans  les  temps  modernes,  il  a  été  propre 
k  la  poésie  italienne,  dont  il  est  le  grand  ven.  Notre  ven 
ihinçais  de  dix  syllabes,  lorsqu'il  finit  par  une  rime  fémi- 
nine, offre  beaucoup  de  ressemblance  avec  rhendécasyl» 
labe  italien.  —  On  trouve  quelquefois  ce  vere  dans  la 
poésie  anglaise,  mais  seulement  dans  les  pièces  lyri- 
ques. P. 

HENNIN.  V.  CoiPPimB. 

HENRI,  monnaie.  V.  notre  Dietionnaire  de  Biogra- 
phie et  d' Histoire, 

HENRIADE  (La),  poème  de  Voltaire,  en  l'honneur  de 
Henri  lY,  roi  de  France.  Le  sujet  est  le  siège  de  Paris, 
commencé  par  Henri  III,  que  la  Ligue  en  avait  chassé, 
et  par  Henri  de  Navarre,  et  achevé  par  ce  dernier.  Le 
lieu  de  la  scène  ne  s'étend  pas  plus  loin  que  de  Paris  à 
Iviy  (Eure).  Les  événements  sont  :  un  voyage  de  Henri 
de  Navarre  en  Angleterre  pour  demander  des  secoun 
contre  la  Ligue  à  la  reine  Elisabeth  ;  les  vicissitudes  du 
siège,  la  détresse  des  assiégés  et  leur  fanatisme;  l'envoi 
par  eux  d'un  dominicain,  Jacques  Clément,  qui  vient 
assassiner  Henri  III  dans  son  camp  ;  Henri  de  Navarre 
reconnu  roi  sous  le  nom  de  Henri  IV  par  l'armée,  et  re- 
poussé par  la  Ligue  parce  qu'il  est  calviniste;  enfin  Paris 
réduit  à  toute  extrémité,  et  l'abjuration  du  roi,  qui  dé- 
termine enfin  les  révoltés  h  se  soumettre.  —  Le  poème 
est  en  dix  chants  et  en  vera  alexandrins.  Voltaire  a 
cherché  à  Jeter  de  la  variété  dans  cette  action,  d'abord 
par  des  récits  historiques,  oui  sont  comme  l'avantr^cèoe 
de  son  poème,  et  <^'Henri  udt  à  la  reine  Elisabeth,  tels 
que  les  guerres  dviles  entre  les  catholiques  et  les  protes- 
tants, les  massacres  de  la  S'^Barthélemy  (chants  i,  2, 3); 
ensuite  par  du  merveilleux  :  il  fait  intervenir,  comme 
soutien  des  li^eura,  la  Discorde,  qui  va  chercher  la  Po- 
litique au  Vatican,  soulève  la  Sorbonne  et  les  Seize  contre 
le  parlement  de  Paris  (chant  4),  et  pousse  Jacques  Clé- 
ment à  l'assassinat  de  Henri  III  (chant  5);  S*  Louis  des- 
cendant du  ciel  pour  arrêter  la  fureur  de  Henri  IV  au 
moment  où  11  va  faire  brûler  Paris,  et  le  transportant  en- 
suite en  esprit  au  ciel,  aux  enfen,  où  il  lui  fait  voir,  dans 
le  palais  des  Destins,  les  souverains  qui  lui  succéde- 
ront, et  les  grands  hommes  que  la  France  doit  produire 
(chants  6,  7).  —  Les  contemporains  de  Voltaire,  surtout 
lora  de  la  première  publication  de  la  Henriade,  en  1725, 
la  saluèrent  d'épopée  (V.  ce  mot)  ;  mais  ce  poème  est  bien 
loin  de  mériter  un  aussi  beau  titre  :  son  plan  manque 
d'unité,  et  l'action  de  grandeur,  d'intérêt, de  mouvement; 
le  développement  des  faits  n'a  pas  asses  d'ampleur;  les 
caractères  sont  trop  peu  variés,  les  personnages  trop  peu 
agissants.  Il  y  a  de  oelles  descriptions,  d'heureux  épi- 
sodes, des  portraits  pleins  de  vigueur,  mais  il  règne  dans 
l'ensemble  une  froideur  qui  permet  difficilement  da 
suivre  le  poète  sans  interruption  Jusqu'au  bout.  Point  de 
ces  tableaux  de  mœun  locales,  point  de  ces  scènes  de  la 
nature  champêtre,  qui,  dans  Homère  et  dans  Virgile,  dé- 
lassent le  lecteur  animé  des  passions  ou  ému  des  dangers 
de  leura  personnages  :  «  Il  n'y  a  pas  seulement,  disait 
plaisamment  Delille,  d'herbe  pour  nourrir  les  chevaux, 
ni  d'eau  pour  les  désaltérer.  »  Voltaira  commença  la  Hen^ 
riade  à  vingt  ans,  sans  savoir,  ainsi  qu'il  le  dit  lui-même, 
ce  que  c'était  qu'un  poème  épique.  Quant  au  sujet,  il 
était  mal  choisi  :  l'époque  de  la  Ligue,  trop  récente  pour 
avoir  la  penpective  et  le  lointain  poétique,  était  aussi 
trop  connue,  avec  ses  intrigues  et  son  fanatisme  grossier, 
avec  le  cynisme  de  ses  mœurs,  pour  qu'on  yjpùt  aisément 
trouver  des  tableaux  épiques.  Au  fond,  la  aenriade  n'est 
qu'une  Uièse  morale  contre  le  fanatisme  et  en  faveur  de 
la  tolérance.  Le  véritable  merveilleux  de  l'épopée  ne  pou- 
vait y  trouver  place.  Le  christianisme  admet  que  les 
anges  et  les  démons,  substances  incorporelles,  ont  quel- 
quefois revêtu  des  formes  palpables,  et  ont  eu  commerce 
avec  les  hommes,  ceux-là  pour  les  aider  au  bien,  ceux-ci 
pour  les  pousser  au  mal  :  dédaignant  ou  craignant  d'em* 
ployer  ce  merveilleux  fourni  par  la  religion.  Voltaire  eut 
recoure  k  de  froides  allégories  :  il  personnifia,  il  fit  agir 
et  parler  la  Discorde,  le  Fanatisme,  U  Politique,  la  Vé- 
rité, c-àrd.  de  pures  abstractionB.  Malgré  les  efforts  de 
Voltaire,  l'épopée  manque  donc  encore  a  la  France.  Mais 
la  Benriade  sera  toujoure  un  dief-d'œuvre  de  versifica- 
tion  noble,  élégante  et  pure. 

Le  sujet  choisi  par  Voltaire  avait  été  dé[à  traité  avant 
lui  ;  un  auteur  de  la  fin  du  xvi*  siècle,  Chillac,  écrivit 
une  Liliade  françoise,  poème  dont  Henri  IV  est  le  héros. 
On  a  de  Sébastien  Gamler  une  Henriade,  publiée  h 
Blois  en  1593,  et  qu'on  eut  la  bizarre  idée  de  réimprimer 


HEP 


1029 


IIER 


en  1770.  L'Bmricias  deQuillet,  poSme  latin  en  12  chants, 
est  aajourd'hni  perdu.  Un  Énrico  de  J.  Blalmignati 
(Venise,  1023,  in-8«)  paraît  avoir  été  mis  à  contribution 
par  Voltaire  ponr  qnelques  détails  {V*  le  Magasin  êncy- 
çlopiditnu,  5*  année,  t  1*'}.  Un  nommé  Aillaud  n*a  pas 
cnint,  an  xthi*  siècle,  de  refaire  et  de  défigurer  la  Hen-' 
riadê^  qui  a  été  en  outre  parodiée,  presque  vers  par  vers,, 
par  Honhron,  sous  le  titre  de  la  Henriadê  travesHet  aux 
(lipeiu  du  publie,  Berlin,  1758,  in-12.  Il  eiiste  un  Com- 
mentaire mr  la  Henriadê  par  La  Beaumelle  et  Fréron , 
Paris,  1775,  2  vol.  in-8o.  B. 

HEPHTHÉMIMÈRE  (Césure).  V.  Césuas. 

HEPTACORDE  (du  grec  hepta,  sept),  nom  donné  par 
les  anciens  Grecs  à  une  sorte  de  lyre  qui  avait  7  cordes, 
et  à  un  système  musical  formé  de  7  sons,  comme  est 
notre  ommc. 

HEPTAHÉRON  (du  grecAepfa,  sept,  etém^a,  Jour), 
recaeil  de  NouTelles  et  de  Contes  composés  par  Margue- 
rite, reine  de  Navarre,  à  Timitation  du  bécaméron  de  Boc- 
cace.  Ce  devait  être  aussi  un  Décaméron;  mais  la  mort 
empêcha  Marguerite  de  terminer  son  œuvre,  qui  ne  com- 
prrâd  que  sept  Journées  au  lieu  de  dix.  La  scène  se  passe 
anx  Pyrénées;  les  dix  personnages  qui  y  Jouent  un  rôle 
sont  i^unts  dans  une  abbave  où  des  pluies  torrentielles 
les  ont  contraints  de  se  réfugier  :  il  leur  faut  attendre 
qo*on  répare  les  chemins  effondrés  et  que  Ton  construise 
an  pont  sur  le  Gave  ;  pour  passer  ce  temps  sans  ennui , 
Us  conviennent  de  se  rendre  chaque  Jour  dans  une  prairie 
Toistne,  où  chacun  racontera  une  histoire.  Les  récits  de 
XEe^améron  ne  se  distinguent  ni  par  Tintérèt  ni  par 
Part  de  la  composition  ;  mais  le  style  a  de  l'agrément  et 
de  la  finesse.  Les  sujets,  dont  cpielques-uns  se  rapportent 
à  des  personnages  contemporains,  roulent  sur  les  ruses 
et  les  tromperies  de  l'amour  ;  ils  sont  racontés  avec  une 
cradité  de  détails  peu  édifiante,  à  l'appui  d*une  maxime 
contenue  dans  le  prologue  dont  chacun  d'eux  est  précédé, 
et  tendent  à  nne  moralité  qui  est  déduite  dans  l'épilogue; 
mais  cette  moralité  est  souvent  éçiuivoque.  Les  ^ilogues 
sont  des  conversations  entre  les  interlocuteurs  de  Vnep^ 
Uimirtm  sur  rhistoire  qu'ils  viennent  d'entendre;  ils  peu- 
Tent  passer  pour  de  curieux  échantillons  de  la  haute  so- 
ciété de  Tépoque,  et,  à  ce  titre,  ils  relèvent  la  banalité 
des  aventures  auxquelles  ils  tiennent  lieu  de  dénoûment» 
On  trouve  dans  cet  ouvrage  plus  de  loquacité  que  de  sen- 
timent, plus  d'esprit  que  de  tendresse,  et  le  même  carac- 
tère de  subtilité  mystique  qu'on  remarque  dans  les  autres 
écrits  de  Marguerite  de  Navarre.  Elle  le  composa  presque 
entièrement  en  Toyage,  conune  pour  se  délasser,  et  dans 
on  Age  assez  avancé  pour  qu'on  ne  lui  suppose  pas  d*in- 
tentlon  licencieuse,  quand  même  sa  vie  entière  ne  pro- 
testerait pas  contre  cette  imputation.  —  La  l'*  édition  do 
XBe^tamértm^  qui  parut  sans  nom  d'auteur,  était  intitu- 
lée Histoire  dis  amants  for tunez,  dédiés  à  VUlustrsprin'' 
ctssê  JfB*  Marguerite  de  Bourbon,  duchesse  de  Nivemois, 
Paris,  1558.  En  1698,  il  en  pamt  nne  sous  ce  titre  :  Contes 
9t  Nouvelles  de  Marguerite  de  Valois,  mis  en  beau  lan- 
9009,  Amsterdam ,  2  vol.  in-8",  où ,  sous  prétexte  de  ra- 
jeunir le  s^le  de  l'auteur,  on  le  rendit  méconnaissable. 
La  seule  édition  conforme  au  texte  original  est  celle  de 
M.  Leroux  delJncy,  Paris,  1853,  3  vol.  in-8*.      P— s. 

HEPTAMÈTRE  (du  grec  hepta,  sept,  et  ffi^trofi,  me- 
nre),  vers  de  7  piedi.  On  en  trouve  dans  le  système 
dactylique  (  V.  Éouqub — Vers).  Serrius  enciteun  exem- 
ple latin  qui  est  hypercatalecUque  : 

YenlcnllM  tlbllâsctyllICM  oeellnl,  puertoptline|,  quoa  tiA\as. 

Le  vers  dactylico-trochalque  est  un  heptamètre  dont 
les  4  premiers  pieds  appartiennent  à  Tonure  dactylique, 
'es  3  derniers  à  l'ordre  trochalque  : 

SolTltarl  aerU  bllems  gratta  viee|  v«rlt|  tt  Favlonl.      Hoa. 

F.  SErréNAiBE.  P. 

HEPTASYLLABE  (du  grec  hspta,  sept),  vers  français 
de  1  syllabes.  Il  remonte  aux  origines  de  notre  littérature. 
U  est  fréquent  dans  les  chansons.  Dans  les  autres  genres 
iyrioiies,  il  compose  des  dizains  harmonieux,  comme 
celui-d  de  J.-B.  Rousseau  {Odes,  1, 10)  : 

J'ai  TV  maa  triatca  Joaméaa 
Décliner  van  leor  penchant ,  etc. 

Quelquefois  les  6  derniers  vers  du  dizain  sont  en  hep- 
■syllabes,  et  les  4  premiers  en  alexandrins.  D'autres  fois 
rbeptasyllabe  fah  partie  de  strophes  de  différentes  me- 
■arês,  comme  on  le  voit  par  les  chœurs  de  Racine.  Dana 


sa  cantate  de  Dinne.  .t.-B.  Rousseau  a  employé  des  tei^ 
cets  heptasyllabos  : 

Quel  bonheur  I  quelle  victoire  ! 

Quel  triomphe!  quelle  gloire  I  • 

Lea  Amoura  aont  dtfaannéa. 

Certains  vers  métriques  des  Anciens  se  trouvent  être 
heptasyllabes  :  tels  sont  le  dimètre  iambi^ue  catalectiquCt 
le  dimètre  trochalque  catalectique  et  le  dimètre  choriam- 
bique  catalectique;  mais  il  faut  que  ces  vers  soient  purs, 
c-W.  n'admettent  aucun  pied  qui  ne  leur  soit  propre, 
comme  serait  l'anapeste  pour  l'ïambe,  le  dactyle  pour  le 
trochée.  P. 

HKPTÉRIS,  navire  de  guerre  des  Anciens,  à  7  rangs 
de  rames  de  chaque  côté. 

HERi£UM,  nom  des  temples  de  Junon,  en  grec  Héra. 

HÉRALDIQUE  (Art).  V.  Blason. 

HÉRAUDERIE.  >  K .  ces  mots  dans  notre  Dictionwùre 

RÉRAUT.  \      de  Biographie  et  d'Histoire. 

HERBORISTE,  celui  qui  fait  métier  de  vendre  des 
simples  ou  plantes  médicinales.  Dans  les  grandes  villes , 
on  ne  peut  exercer  cette  profession  sans  un  diplôme  de 
capacité,  qui  s'obtient  après  examen  (Lois  du  11  avril  1803 
et  du  13  août  1805).  Il  y  a  dea  diplômes  de  deux  classes, 
dont  le  coût  est  de  100  fr.  et  de  oO  f^.  Les  herboristes 
sont  assujettis  aux  visites  annuelles  de  la  commicudon 
médicale.  Ils  ne  peuvent  vendre  que  des  plantes  indigo 
nés  ;  le  débit  de  toute  substance  exotique  et  de  toute  pré- 
paration pharmaceutique  leur  est  interdit. 

HERCuLANUM,  une  des  trois  villes  englouties  par 
l'éruption  du  Vésuve,  en  Tan  79  après  J.-C.  La  masse  de 
lave  accumulée  encore  sur  elle  par  des  éruptions  moins 
anciennes  a  une  épaisseur  qui  varie  de  21  à  34  met.  ; 
Résina  et  nne  partie  de  Portici  ont  été  bâties  au-dessus. 
Il  paraît  que,  dès  la  fin  du  xvi«  siècle,  on  y  fit  quelques 
fouilles,  bientôt  abandonnées.  En  1713,  Emmanuel  de 
Lorraine,  prince  d'Elbeuf,  ayant  eu  besoin  de  marbres 
pour  une  maison  qu'il  faisait  b&tir  à  Portici,  apprit  qu'on 
en  avait  trouvé  en  creusant  un  puits,  et  fit  continuer  ce 
travail.  On  atteignit  ainsi  un  théâtre  par  la  partie  posté- 
rieure de  la  scène,  et  c'est  encore  par  ce  puits  que  le 
monument  reçoit  aujourd'hui  la  lumière.  Pendant  plu- 
sieurs années,  le  prince  d'Elbeuf  recueillit  des  marbres, 
des  colonnes,  des  statues,  dont  il  dut  restituer  une  partie 
au  gouvernement  napolitain.  Le  roi  Charles  III  interdit 
aux  particuliers  de  faire  des  fouilles,  et  ordonna  lui- 
même  la  reprise  des  travaux  en  diverses  directions  dans 
le  voisinage  du  puits  :  ils  ftirent  poursuiris  de  1738  à 
1770,  mais  avec  peu  d'intelligence,  car  on  remplissait  la 
plupart  des  excavations  après  y  avoir  fidt  des  recherches. 
Une  Académie  des  Herculantens  fut  instituée  pour  pu- 
blier la  description  des  antiquités  qu'on  avait  recueillies. 
A  la  suite  d'une  nouvelle  interruption,  on  travailla  en* 
core  de  1828  à  1837.  —  C'est  à  Résina  qu'on  descend 
dans  la  ville  souterraine,  aui  ne  se  risite  qu'avec  des 
flambeaux.  Les  rues  d'HercuIanum  sont  droites,  avec  des 
espèces  de  trottoirs,  et  pavées  en  lave;  les  maisons,  dis- 
tribnées  comme  à  Pompéi  {V.  ce  mot)y  n'ont  qu'un  seul 
étage,  et  de  nombreuses  peintures  à  fresque  nul  en  or- 
naient l'intérieur  ont  été  enlevées.  Le  théâtre,  le  premier 
et  le  plus  graivl  édifice  qu'on  ait  découvert,  a  78  met.  de 
diamètre,  et  pouvait  contenir  10,000  spectateurs  :  il  est 
composé  de  16  rangs  de  gradins  en  travertin,  et  de  3  rangs 
à  l'amphithé&tre  supérieur;  l'orchestre  est  pavé  de  mar- 
bres anicains.  Ce  thé&tre,  où  l'on  a  trouvé  des  statues  en 
marbre  et  en  bronze,  et  quatre  statues  équestres  en  bronze 
doré,  est  obstrué  par  des  piliers  massifs,  destinés  à 
étayer  les  terres  supérieures.  La  découverte  du  théÀtre 
fut  suivie  de  celle  de  deux  temples,  situés  à  peu  de  dis- 
tance, l'un  de  50  met.  de  longueur  sur  20  met.  de  lar- 
geur, l'autre  de  20  met.  sur  15.  Une  basilique,  longue 
de  76  met.  et  large  de  44,  avec  un  portique  de  42  co- 
lonnes, était  om&  de  statues  et  de  peintures  ;  sur  la 
place  qui  la  précédait,  s'élevaient  les  deux  statues 
équestres  du  fondateur  et  de  son  fils.  De  1750  à  1760,  on 
explora  la  VUla  d'Aristide  ou  des  Papyrus  :  c'est  là  qne 
furent  trouvés  le  Faune  ivre,  le  Faune  dormant,  le  Mer- 
cure, l'Aristide,  la  Minerve  étrusque,  le  groupe  du  Satyre 
et  delà  Chèvre, les  six  danseuses,  une  quantité  de  bustes» 
et  toute  la  bibliothèque  de  papyrus  (près  do  3,000  rou- 
leaux) qu'on  voit  au  Musée  des  études  de  Naples.  Les 
fouilles  de  1828  ont  mis  à  découvert  la  Maison  d^ Argus, 
ainsi  appelée  d'une  peinture  représentant  lo  gardée  par 
Argus,  et  où  l'on  a  trouvé  des  comestibles  :  une  plante 
recueillie  dans  le  iardin  de  cette  maison  a  poussé  de  nou- 
veau et  produit  des  (leurs.  Dans  les  différentes  foulllesi 


HER 


t030 


HER 


on  a  recueilli  un  nombre  considérable  d'instruments  et 
d^ustensiles  de  sacrifices  ou  de  ménage,  en  marbre,  en 
bronze,  en  verre,  tels  que  tables,  candélabres,  lampes, 
bassins,  vases,  flacons,  instruments  de  musique  et  de 
chirurgie,  tablettes  et  stylets  pour  écrire,  colliers,  brace^ 
lets,  bagues,  pendants  d'oreille,  épingles,  dés  à  coudre 
et  à  Jouer,  linge,  chaussures,  filets  de  pêcheur  et  d'oise- 
leur, etc.  Ces  objets  sont,  en  général,  mieux  exécutés  que 
ceux  qu'on  a  tirés  de  Pompéi.  On  peut  croire  <pe  la  po~ 
t>ulation  d*Herculanum  avait  eu  le  temps  de  fuir  lors  de 
rinvasion  de  la  lave,  car  on  n*a  pas  rencontré  de  débris 
humains  :  un  seul  squelette  presque  complet  fut  trouvé 
sous  l'escalier  d'une  maison  ;  il  tenait  dans  une  main  une 
bourse  remplie  de  petites  pièces  de  monnaie  ;  quand  on 
essaya  de  l'enlever,  il  tomba  en  poussière.  V,  Bajardi, 
U  antichità  di  Ercolano,  Naples,  1752-1792,  9  vol. 
in-fol.  ;  VenuU,  Descrvnone  délie  prime  scoperie  délV 
anttc.  città  di  Ercolano,  Venise,  1749,  in-8<>;  Bellicart, 
Observations  sur  les  antiquités  d*Herc%Uajiwm,  Paris, 
1754,  in-12;  Cochin,  Observations  sur  les  antiquités 
d^Hercuianum,  Ibid.,  1757,  in-8°;  Winckelmann,  Lettre 
à  M.  le  comte  de  Briihl  sur  les  découvertes  d^Herculor 
nwn,  Dresde,  1764,  in-4°;  Fougeroux  de  Bondaroy,  Be- 
àherches  sur  les  ruines  d*Herculanum,  Paris,  1770,  in-12  ; 
Cramer,  Notes  pour  servir  à  Vhistoire  des  découvertes 
d^Herculanum^  Halle,  1773,  in-8o;  Piranesi,  Antiquités 
d'Herculanum,  Paris,  1804-1806,  in-4°;  Jorio,  Notizie 
sugli  scavi  di  Ercolano,  Naples,  1827,  in-8^;  Hamilton, 
Relation  des  découvertes  fcUtes  à  Herculanum  et  àPom^ 
péi,  Edimbourg,  1837, 2  vol.  in-4o:  Roux  et  Barré,  Her- 
culanum et  Pompéi,  Paris,  1848,  8  vol.  in-4®;  E.  Breton, 
Pompeta^  suivie  d^une  notice  sur  Herculanum,  Paris^ 
1855,  gr.  in-8\  B. 

HERCULE.  Plusieurs  statues  antiques  de  ce  héros  sont 
arrivées  jusqu'à  nous,  avec  le  nom  de  leurs  auteurs.  Ce 
sont  :  VBercule  au  reposi  admirable  statue  mutilée,  dite 
Torse  du  Belvédère  ou  de  Michel -Ange^  conservéÎB  au 
musée  Pio-Clémentin  de  Rome,  et  œuvre  de  l'Athénien 
Apollonius,  fils  de  Nestor;  V Hercule  Pamèse,  à  Naples, 
statue  par  Glycon  d'Athènes,  dont  le  nom  se  trouve  aussi 
sur  un  autre  Hercule  de  la  collection  Guarnacci;  V Her- 
cule du  palais  Pitti,  à  Florence,  copie  d'une  œuvre  d'un 
Lysippe.  On  ignore  où  se  trouve  actuellement  un  Her- 
cule qui  était  à  Rome  au  xvi"  siècle,  signé  de  deux  frères, 
Diodote  et  Ménodote,  de  Nicomédie.  Les  bas-reliefs  et  les 
vases  peints  de  l'antiquité  reproduisent  une  fouie  de 
scènes  empruntées  à  la  vie  d'Hercule.  Le  héros  est  ordi- 
nairement représenté  sous  les  traits  d'un  homme  vigou- 
reux, appuyé  sur  une  massue,  et  revêtu  de  la  peau  d'un 
lion  :  il  est  tantôt  barbu,  tantôt  sans  barbe,  paîrfois  cou- 
ronné de  peuplier  bkmc,  et  armé  d'un  arc  et  d'un  car- 
quois. 

HÉRÉDITÉ  (du  latin  hœresy  héritier),  mot  qui  se  dit, 
!•  du  droit  de  recueillir  en  totalité  ou  en  partie  les  biens 
qu'une  personne  laisse  après  sa  mort;  2^  de  l'ensemble 
des  droits,  tant  actifs  que  passifs,  qui  composent  une 
succession.  On  nomme  AdUion  d^hérédité  l'acte  par  le- 


qui  se  prétend  héntière  forme  sa  demande^evant  les  tri- 
bunaux, action  qui  se  prescrit  par  30  ans.  La  CM^to» 
éthérédUé  peut  se  présenter  sous  trois  aspects  :  1^  vente 
d'une  hérédité  que  le  cédant  déclare  sienne  et  composée 
de  tels  ou  tels  objets;  dans  le  cas  d'éviction  d'un  de  ces 
objets,  il  y  a  lieu  à  l'action  en  garantie;  2®  vente  d'une 
hérédité  à  laquelle  le  cédant  se  déclare  appelé;  il  n'est 
pnxkl  que  de  l'existence  de  la  qualité  d'héritier,  bonne 
ou  mauvaise  ;  3*  vente  des  droits  que  le  cédant  prétend 
avoir  sur  l'hérédité;  il  n'y  a  lieu  à  garantie  que  s'il  savait, 
m  moment  de  la  cession,  n'avoir  aucun  droit  à  l'hérédité. 
—  Les  Socialistes  ont  nié  la  légitimité  de  l'hérédité.  Il 
eit  vrai  que  l'hérédité  peut  faire  tomber  de  grands  biens 
dans  des  mains  incapables  ou  indignes,  et  qu'elle  est  un 
obstacle  à  Tutople  de  l'égalité  absolue;  mais,  outre 
ca*elle  découle  naturellement  du  droit  de  propriété 
(K.  ce  mot) y  supprimer  l'hérédité,  ce  serait  tout  à  la  fois 
détruire  le  stimulant  le  plus  puissant  du  travail  chez  le 
père  de  famille^  et  imposer  des  embarras  Inextricables  à 
I*État,  chargé,  à  chaque  décès,  de  régler  Templol  des 
biens  et  de  fixer  le  sort  des  survivants. 

HEREFORD  (Cathédrale  de),  en  Angleterre.  Com- 
mencée après  la  conquête  normande,  et  achevée  seule- 
oient  à  la  fin  du  xni*  siècle,  elle  a  les  dimensions  sui- 
vantes :  longueur  dans  œuvre,  105  met.;  largeur  de  la 
Mf  et  des  coUatéraax,  25  met.;  hauteur  des  voûtes, 


22  met.  La  tour  centrale  qui  surmonte  l'édifice  s'élève  a 
47  met.  Le  plan  de  la  cathédrale  de  Hereford  est  en  forme 
de  croix  à  doubles  croisillons  ;  l'abside  se  termine  carré- 
ment, ce  qui  est  fréquent  dans  les  monuments  anglais. 
Les  contre-forts  ne  sont  pas  couronnés  de  clochetons. 
Tous  les  piliers  de  la  nef  sont  ronds.  Les  fenêtres  n'offrent 
point  d'uniformité  :  U  y  en  a  de  style  ogival  primitif,  de 
style  ogival  secondaire,  et  de  style  perpendiculaire.  Au- 
dessous  de  la  chapelle  de  la  Vierge  est  une  crypte,  parta- 
gée en  deux  nefs  par  une  rangée  de  colonnes. 

HÉRÉSIE.  Ce  mot,  d'après  son  étymologie  (en  grec 
airéiny  choisir),  désigne  une  opinion  préférée  à  une  autre, 
un  choix  qui  a  pour  efiét  de  diviser  des  hommes  précé- 
demment unis  par  la  communauté  de  doctrines.  Ainsi, 
chez  les  Anciens,  les  diverses  écoles  de  philosophie  et  de 
médecine  étaient  appelées  hérésies,  ce  qui  n'impliquait 
pour  aucune  d'elles  l'idée  terreur.  Pour  l'Église  catho- 
lique, Vhérésie  est  une  opinion  contraire  à  une  vérité 
qu'elle  présente  comme  révélée,  à  un  article  de  foi  ;  par 
conséquent,  le  mot  est  toujours  pris  en  mauvaise  part  et 
entraîne  nécessairement  l'idée  d^erreur.  Une  hérésie  esl 
formelle,  quand  il  y  a  mauvaise  foi  ou  opini&treté;  mo- 
térietle,  dans  le  cas  contraire.  On  appelle  hérésiarque 
l'inventeur  d'une  hérésie;  hérétique^  celui  aui  en  est  le 
sectateur,  soit  de  son  propre  choix,  soit  pour  l'avoir  reçue 
dès  l'enfance.  Les  passions  de  l'homme  rebelles  à  l'austé- 
rité de  la  morale  évangélique,  l'incompréhensibilité  des 
mystères  humiliante  pour  la  raison ,  l'invariabilité  des 
dogmes  qui  froisse  notre  amour  pour  la  nouveauté,  la 
soumission  absolue  que  l'Église  réclame  pour  ses  déci- 
sions et  qui  blesse  notre  indépendance,  la  nécessité  d'ad- 
mettre les  vérités  révélées  comme  autant  de  faits  indis- 
cutables et  soustraits  à  notre  curiosité,  voilà  les  principales 
sources  de  l'hérésie.  L'Église  prémunit  les  fidèles  contre 
l'hérésie*,  en  la  condamnant  oans  les  conciles  ou  par  la 
voix  des  papes.  Elle  la  punit,  chez  les  clercs,  parla  dépo- 
sition, et,  diez  touÂ,  par  l'excommunication.  Il  fut  un 
temps  où,  de  plus,  elle  livrait  les  hérétiques  au  bras  sé- 
culier, et  les  punissait  de  la  prison,  de  la  mort  même. 
L'abbé  Pluquet  a  publié  un  Dictionnaire  des  hérésies, 
Paris,  1762, 2  vol.  in-8»,  souvent  réimprimé. 

HÉRISSON,  en  latin  Ericius,  ancienne  machine  de 
guerre.  C'était  une  poutre  garnie  de  pointes  de  fer,  et  que 
les  défenseurs  d'une  place  faisaient  couler  sur  les  débris 
de  la  brèche,  pour  empêcher  l'assiégeant  d'v  monter. 

HÉRITAGE,  tout  ce  qui  vient  par  voie  de  sticcession* 
(F.  ce  mot.) 

HÉRITIER,  celui  qui  succède  à  tous  les  droits  actib  et 
passifs  d'un  défunt.  On  nomme  héritier  légitime  ou  ab 
intestat,  celui  qui  succède  en  vertu  des  dispositions  de  la 
loi;  héritier  institué  ou  testamentaire ^  celui  qui  est 
nommé  par  la  volonté  du  défunt;  héritier  présomptif ,  le 
parent  le  plus  proche,  et  gui,  par  cette  raison,  est  pré- 
sumé devoir  hâlter  ;  héritier  pur  et  simple,  celui  qui  a 
accepté  une  succession  purement  et  simplement,  et  qui 
est  tenu  indéfiniment  des  dettes  de  cette  succession  ;  né- 
rtttsr  bénéficiaire,  celui  qui  n'a  accepté  une  succession 
que  sous  bénéfice  d'inventaire  (V,  ce  mot)  et  n'est  tenu 
des  dettes  que  Jusçiu'à  concurrence  de  ce  qu'il  a  recueilli  ; 
héritier  réservatmre,  celui  en  faveur  duquel  la  loi  a  éta- 
bli une  réserve  {V,  ce  mot);  héritier  apparent,  celui 
3ui,  n'étant  pas  héritier  véritable,  s'empare  comme  tel 
'une  succession,  et  en  jouit  ou  en  dispose  comme  si  elle 
lui  appartenait  réellement;  héritier  fiduciaire,  celui  qui 
ne  recueille  une  succession  que  par  fidéicommis  (  F.  œ 
mot).  Pour  être  reconnu  héritier,  il  faut  exister  au  mo- 
gient  de  l'ouverture  de  la  succession  :  l'enfant  qui  n'est 
pas  encore  né,  mais  qui  est  conçu,  est  capable  de  succé- 
der, pourvu  qu'il  naisse  viable.  V,  Exh^rédation . 

HERMATHÈNE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

HERMÉNEUTIQUE,  du  grec  herménéia,  interprétation. 
En  Philosophie,  l'herméneutique  est  l'explication  des 
termes  comme  préparation  nécessaire  à  l'intelUgenoe 
d'une  doctrine ,  telle  aue  V Herménéia  d'Aristote,  qui  « 
pour  objet  l'exactitude  ae  la  proposition,  et  où  il  examine 
la  valeur  des  termes  dont  elle  se  compose.  En  Théologie, 
elle  devient  quelquefois  V Exégèse,  en  Joignant  à  l'inter- 
prétation des  mots  celle  de  la  doctrine,  comme  on  le  voit 
chez  Origène.  En  Jurisprudence,  rherméneutique  recher- 
che et  examine  les  sources  du  Droit  R. 

HERBIÈS ,  statue  de  Mercure  placée  dans  une  espèce 
de  gaine  ou  cippe,  de  telle  sorte  qu'il  n'y  a  que  la  tâte^ 
une  partie  du  buste  et  les  pieds  qui  paraissent,  et  sou- 
vent terminée  simplement  en  gaine.  Chez  les  Anciens 
on  plaça  sur  les  routes  et  dans  les  carrefours  des  her- 


HER 


1031 


IIED 


mes  à  amant  de  tôtes  au*il  y  avait  de  directions  à  mar- 

rsr  :  celai  de  Prodyde  à  Ancjrre  en  avait  trois;  celui 
Télésarchides  dans  le  Céramiaae  en  avait  quatre.  On 
ioflcriTait  sur  ces  statues  les  aistances  itinéraires  ou 
des  sentences  morales.  Bacchus  et  Apollon  furent  aussi 
reprâsentés  en  hennés.  On  çerpétua  sous  forme  d*hermès 
les  images  des  personnages  illustres  :  en  1742,  on  a  trouvé 
Rome  un  hennés  à  deux  têtes,  portant  les  noms  d*Épi- 
core  et  de  Métrodore;  il  en  existe  aussi  qui  réunissent 
Hérodote  et  Thucydide,  Socrate  et  Alcibiade.  —  On  appe- 
lait Harméraelês  les  hermés  oui  réunissaient  les  têtes 
adossées  de  Mercure  et  d*Hercule. 

HERMÉTIQUE  (Philosophie),  corps  de  doctrine  th^ 
des  livm  attribués  à  Hermès  ou  Mercure  T^smégiste, 
nommé  aussi  par  les  Égyptiens  Thaut  ou  Thoth.  Il  est 
démontré  ai:Jotûrd*hui  que  ces  livres  n*ont aucune  authen- 
ticité, surtout  en  ce  qui  concerne  certaines  sciences 
telles  que  la  médecine,  la  chimie,  Thistoire  naturelle.  La 
ptrtie  philosophique  parait  tenir  par  quelques  points  aux 
doctrines  égyptiennes  auxquelles  on  croit  pouvoir  rap- 
porter le  Pœmander^  les  fragments  qui  s*y  rattachent,  et 
VAscUpius,  dialogue  qui  nous  est  parvenu  en  latin  sous 
le  nom  d'Apulée.  Ces  écrits  sont  r^ardés  comme  des  ex- 
traits des  doctrines  secrètes  des  prèfres  de  Mempbis  et  de 
Sais  ;  mais  cette  opinion  n'est  pas  appuyée  sur  d»  preuves 
inoootestables.  Ils  reconnaissent  comme  premier  principe 
rOnité  absolue.  Dieu,  qui  n*est  connu  que  par  rinteln- 
gence.  C'est  le  seul  être  véritable;  la  vie  répandue  dans 
ranirers  émane  de  lui,  est  lui-même.  En  général,  on  re- 
tnmTe  dans  la  philosophie  hermétioue  le  fond  de  la  doo- 
^oe  de  Platon  et  de  Plotin,  mêlé  aux  mystères  des 
Égyptiens,  à  la  mythologie  des  Grecs,  et  même  à  certaines 
traditions  juives  et  chrétiennes.  Tout  ce  qui  concerne 
cette  philosophie  a  été  réuni  par  Marsile  Ficin,  oui  en 
donna  une  traduction  latine  en  1471.  On  peut  consulter  la 
Symbolique  de  Creutzer,  livre  3;  la  dissertation  de  M.  Gui- 
piaot.  De  'Ep^ioû  seu  Mercurii  mythologia,  in-8®,  Paris, 
1S35.  —  La  partie  scientifique  proprement  dite  a  donné 
liea  à  la  prétendue  science  qui  se  donnait  pour  but  la 
traoamotation  des  métaux  et  Part  de  faire  de  Tor,  Le 
PŒtnander  fut  regardé  comme  un  traité  d'Alchimie.  K. 
Uoglet  du  Fresnoy,  HitUÀre  de  la  philosophie  hermé- 
<i9iM,1742,3Tol.  in-12.  R. 

HEAMINB,  nom  d'une  des  deux  fourrures  du  Blason. 
Elle  est,  en  général,  d'argent  pour  le  fond,  et  de  sable 
pour  les  mouchetures. 

HÉROI-GOMIQUE  (Épopée),  sorte  de  narodie  de  l'Épo- 
pée véritable;  pofime  dans  lequel  on  traite  un  sujet  corn- 
mon  et  presque  trivial,  avec  le  ton  et  les  formes  épiques. 
La  dispropoitioQ  des  moyens  avec  la  fin,  le  contraste  du 
foad  et  de  la  forme,  constituent  le  comique  de  ce  genre  de 
composition.  Par  une  raillerie  ingénieuse,  le  poème  hérol- 
comiqne  élève  dans  les  régions  héroïques  oe  qui  est  vul- 
9ùre  par  nature,  et  en  cela  il  se  distingue  du  poème  bur- 
leM|ae  (  V.  ce  tn<^^  qui,  par  le  travestissement  des  mœurs 
et  du  langage,  fait  descendre  les  dieux  et  les  hâros  au 
Bivean  des  personnages  les  plus  vulmires.  La  Batracho- 
myomachie  attribuée  à  Homère,  le  Sceau  enlevé  de  Tas- 
soni,  le  Lutrin  de  Boileau,  la  Boucle  de  cheveux  enlevée 
de  Pope,  sont  des  poèmes  héroi-comiques« 

HÉROIDES,  épltres  en  vers  élégiaques,  composées  par 
Ovide,  sous  le  nom  de  queloues  femmes  célèbres  des 
temps  héroïques,  comme  Bnséîs,  Pénélope,  Médée, 
Phèdre,  Hermione,  D^anire,  Ariane,  Hélène,  etc.  Elles 
écrivent  à  leur  amant,  ou  à  leur  époux  absent  ou  infidèle. 
Ces  élégies,  au  nombre  de  21,  manquent  de  passion  et  de 
naïveté;  le  s^le  en  est  trop  souvent  artificiel  ;  les  déve- 
bppements  des  pensées  et  des  sentiments,  le  tour  des 
TÔâ,  font  paraître  le  talent  de  l'écrivain  et  du  versifica- 
teur, mais  ne  conriennent  presque  Jamais  au  personnage 
qni  écrit,  et  le  font  perdre  de  vue  an  lecteur.  L*unifor- 
mité  et  la  monotonie  de  la  plupart  de  ces  pièces  contri- 
Iment  aussi  à  refroidir  l'intérêt.  La  16*  pièce,  la  18%  ht 
^  aont  supposées  écrites  par  des  héros ,  et  la  15* 
(Sappho  à  Phaon)  n'est  pas  une  véritable  hérolde.  On 
peut  en  dire  autant  de  cdles  de  Didon  à  Énée,  d'Uéro  à 
méandre.  —  Les  modernes  se  sont  aussi  essayés  dans  ce 
pre  créé  par  Ovide  :  dtons  YÊpttre  dPHéloise  à  Aboi- 
Mrd  par  le  poète  anglais  Pope,  infiniment  supérieure  à 
toutes  celles  do  poète  latin,  et  l*hérotde  de  Didim  à  Enée 
par  GilberL  P. 

HÉROÏQUE  (Poème),  sorte  d'épopée  imparfaite,  sans 
fiction  ni  merveilleux,  et  dont  l'action  a  moins  d'impoi^ 
tioce  et  souvent  aussi  moins  de  durée  oue  celle  de  l'épo- 
pée proprement  dite.  Ce  n'est  pour  le  fond  que  de  t'ms- 
toiiemise  en  vert.  Telle  eet  la  Pharsale  de  Lucain. 


HéaolQOBS  (Pieds),  nom  donné  chez  les  Anciens  m 
dac^le,  au  spondée,  à  l'anapeste. 

HBROlQUBS  (Vers),  vers  destinés,  ches  les  Anciens,  à 
célébrer  les  exploits  des  héros  (Hercule,  Jason,  Thésée, 
Achille,  etc.).  C'étaient  les  hexamètres.  En  firançais,  nous 
donnons  aussi  ce  nom  aux  vers  alexandrins  ou  de  dovoê 
syllabes. 

HÉROON ,  nom  donné  chez  les  anciens  Grecs  à  des 
édifices  à  la  fois  funéraires  et  religieux,  de  dimensions 
variables,  élevés  en  l'honneur  des  héros,  et  qui  avaient 
quelquefois,  connue  celui  de  Thésée  à  Athènes,  l'im- 
portance d'un  temple.  On  en  voit  deux  dans  l'Ile  de 
Santorin. 

HÉROS  (Le  livre  des).  V.  Heldenbcch. 

HERSE,  forte  ^Ue  de  fer  placée  derrière  la  porte 
d'entrée  des  ch&teaux  forts  au  moyen  &ge.  Elle  glissait 
dans  une  rainure,  se  baissait  et  se  levut  à  volonté,  et 
servait  de  seconde  clôture.  Il  y  eut,  chez  les  Grecs  et 
les  Romains,  des  clôtures  de  ce  genre  sous  le  nom  de 
portes  catarrhactes;  au  moyen  âge,  on  les  appela  quel- 
quefois sarrasknes,  parce  qu'elles  avaient  été  empruntées 
à  l'Orient,  et  encore  harpes, 

HsasB,  construction  en  bois  ou  en  fer,  ayant  la  fonns 
d'un  triangle  vertical,  armé  de  pointes  pour  supporter 
des  cierges,  et  qu'on  place  autour  du  cercueil  ou  da 
cénotaphe  d'un  mort,  pendant  la  cérémonie  religieuse» 
—  On  donne  le  même  nom  aux  chandeliers  de  forme  ver- 
ticale, à  plusieurs  pointes,  qui  servent  à  faire  brûler 
plusieurs  cierges,  soit  devant  les  autels  ou  à  côté ,  soil 
près  des  tombeaux,  ou  encore  dans  le  chœur  pendant  la 
semaine  sainte,  à  l'oflice  des  Ténèbres.  Les  écrin^ns 
latins  ecclésiastiques  se  servent  du  mot  rastrum  ou  ra»* 
teUum  (r&telier)j^ 

HERVIS  DE  METZ,  un  des  romans  des  douze  Pain^ 
la  première  partie  de  la  chanson  des  Lohérins.  On  n'es 
connaît  pas  l'auteur.  Hervis  est  le  fils  du  bourgeoli 
Thierry,  qui  avait  épousé  la  fille  du  duc  de  Mets.  Gmrgé 
d'étaler  et  de  vendre  des  marchandises  aux  foires  de  Pxo* 
vins,  de  Lagny,  du  Lendit,  mais  ^ant  les  goûts  d'oa 
chendier  et  non  d'un  marchand,  il  offre  banquets  et  fooi^ 
rures  à  tous  ceux  qu'il  rencontre.  Après  bien  des  querellep 
et  des  malheurs,  il  épouse  la  belle  Béatrix,  et  devient 
duc  de  Metz.  Charles-Martel ,  attaqué  par  les  Wandros 
(Vandales)  et. par  Gérard  de  Roussillon,  demande  das 
secours  à  Herns,  qui  convo(pie  ses  compagnons.  Là  s'ar> 
rète  le  poème,  composé  d'environ  dix  mille  vers  et  subdi- 
visé en  plusieurs  chansons.  Tel  ou'il  existe  ac^ourd'hui, 
il  parait  être  moins  ancien  que  le  roman  de  Gorm.  Ob 
en  a  deux  manuscrits  du  xm*  siècle,  Tun  à  la  BiblicH 
thèque  nationale  de  Paris,  l'autre  à  celle  de  TArsenaJ!^ 
V,  VHisUnre  litt^aire  de  la  France,  t.  xxu.       H.  D. 

HÉTËRES,  HÉTÉRIE.  V.  ces  mots  dans  notre  Dictiot^ 
naire  de  Biographie  et  d'Bistotre, 

HÉTÉROCLITE  (du  grec  hétéros,  autre,  et  kliném,  dé- 
cliner), se  dit,  en  Grammaire,  des  noms  grecs  et  latins 
qui  suivent  à  la  fois  deux  déclinaisons;  ainsi,  fames^ 
Çén.  (amis  (3*  déclin.),  abl.  famé  {5^);  jugerum ,  ftén» 
Sugeri  (2*  déclin.),  abl.  jugere,  gén.  plnr.  jugerum ,  dat* 
et  ablat  jugeribus  (3^.  On  pourrait  afouter  à  cette  espèce 
de  noms  ceux  qui  suivent  deux  déclinaisons  parallèles  et 
complètes,  comme  senecta  et  senectus,  materia  et  mate»' 
ries,  juventa  et  juventus, 

HÉTÉRODOXE  (du  grec  hétéros,  autre,  et  doxa,  opi- 
nion), se  dit,  dans  le  catholicisme,  de  toute  opinion  mh 
fânente  de  celle  de  l'Église,  et  de  toute  personne  qui  a 
cette  opinion.  On  ne  peut  pas  être  hérétiti^  sans  être  hé» 
tirodoice:  lûais  on  peut  être  hétérodoxe  sans  être  héré- 
tique,  Vhitérodoasw  étant  une  divergence  d^opinion  sv 
une  règle  de  discipline,  et  non  sur  un  article  de  fol. 

HÉTÉROGÈNE  (du  grec  hétèros ,  autre,  et  génoê^ 
genre  ),  se  dit,  en  Grammaire,  des  noms  irréguliers  om 
sont  drun  genre  au  singulier  et  d'un  autre  genre  au  plu- 
riel ,  eonune  en  latin  locus,  au  plur.  loea,  et  en  français 
délice,  orgue,  otnaur^  etc« 

HËTÉRONOMIE.  V.  AOTORomB. 

HBTÊROSGIENS  (du  grec  hétéros^  antre,  et  sha, 
ombre),  habitants  de  la  terre  dont  l'ombre  ne  se  projette 
que  d'un  seul  cèté.  Ce  sont  ceux  qui  se  trouvent  entre 
les  'nropiqucB  et  les  Cercles  polaires,  et  dont  on  volt 
l'ombre,  par  les  latitudes  septentrionales,  toujours  tour* 
née  vers  le  nord^  ou  bien ,  par  les  latitudes  méridionalet, 
vers  le  sud. 

HEU,  bâtiment  à  fond  plat,  tirant  peu  d^eau,  portaftt 
un  grand  mitt,  une  trinquette,  un  foc  et  an  petit  mât  sur 
son  extrémité  de  derrière.  On  l'emploie  an  cabotage  dans 
la  Muiche  et  dans  la  mer  du  Nord* 


niA 


1032 


nit 


HEUQUES,  Tètement  de  cour,  en  drap  de  couleur  ri- 
chement brodé,  à  Tusage  des  hommes  au  xv*  siècle. 

HEURES,  HEUSES,  HEXACLINOiN.  V.  ces  mots  dans 
r  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

HEXACORDE,  division  de  6  notes  établie  dans  Téchelle 
I  musicale  par  un  musicien  du  xi*  siôcle  dont  le  nom  ne 
nous  est  pas  parvenu,  et  non,  comme  on  Ta  dit,  par 
Gui  d*Arezzo.  Elle  remplaça  la  division  par  tétracordes 
selon  les  Grecs,  et  la  division  par  octaves  du  pape  Gré- 
goire le  Grand.  C*était  une  des  plus  graves  erreurs  ({ue 
ron  pût  introduire  (K.  MdancesJ.  —  tiexacorde  signifie 
aussi  un  instrument  à  6  cordes. 

HEXABIÈTRB  (du  grec  hex,  six,  et  mitron,  mesure), 
nom  des  vers  grecs  et  latins  dont  la  mesure  est  de  6  pieds, 
autrement,  qm  ont  6  mesures.  Les  4  premiers  pieds  sont 
indifféremment  dactyles  ou  spondées;  le  5*  est  toujours, 
du  moins  en  latin,  un  dactyle;  le  6*  est  spondée  ou 
trochée: 

H  lûcry\mâne  Qiàt\tMqu/e  liû\mèctcit\  grândtbûs  \  ôrtt. 

'  Quelquefois  Thexamètre  est  terminé  par  deux  spon- 
déà,  ou  par  un  spondée  et  un  trochée  ;  dans  ce  cas,  le 
4*  pied  doit  être  un  dactyle  (  V.  SpondaIqcb).  Par  une 
exception  infiniment  plus  rare,  le  C*  pied  est  quelquefois 
un  dactyle  (V.  Dacttliqub).  L*Iambe  s*y  rencontre  aussi 
^F.  Mioaos).  L*Iambe  et  le  tribraque  se  trouvent  ouolque  • 
fois  au  1*'  pied  dans  Homère  (V.  Acéphales).  Enfin 
Tanapeste  forme  le  i*'  pied  dans  ce  vers  du  l*'  livre  des 
Céorjfiques  : 

'    PUMôrum  rex  Eridanus,  campoeque  per  omnes,,. 

Les  pofites  grecs  terminent  leurs  hexamètres  par  des 
mots  de  toute  longueur,  depuis  le  monosyllabe  Jusqu*au 
mot  de  7  syllabes  ;  les  portes  latins,  à  partir  du  siècle 
d'Auguste,  étaient  astreints  à  n'employer  à  cette  place 
qn*un  mot  de  deux  ou  de  trois  syllabes  :  ils  ne  s*affran- 
cbissaientde  cette  loi,  nécessitée  par  les  conditions  d'har- 
monie particulières  à  leur  langue,  que  si  le  mot  final  du 
vers  était  un  nom  grec,  soit  propre,  soit  commun ,  ou  si 
le  vers  était  spondalque,  ou  bien  dans  les  sujets  d*un  ton 
moins  élevé  que  l'épopée,  comme  l'épltre  et  la  satire. 
Aussi  les  vers  d*Horaco  et  de  Juvénal  se  rapprochent-ils 
plus,  en  général ,  du  système  grec  que  du  svstème  latin. 
Le  rhythme  de  l'hexamètre  est  le  plus  riche  et  le  plus 
beau  que  l'on  connaisse,  et  les  Grecs  en  ont  attribué  l'In- 
vention  aux  Dieux,  qui  l'avaient,  disait-on,  révélé  à  la 
prêtresse  Phémonoé.  11  avait  le  précieux  avantage  de  con- 
Tenir  à  tous  les  sujets,  aux  familiers  ou  gracieux  comme 
«nx  plus  nobles  et  aux  plus  graves.  On  a  vainement 
essayé  de  le  faire  passer  aans  la  versification  moderne. 
^n  voici  pourtant  un  exemple  asses  remarquable  d'un 
poète  du  xvi<  siècle,  qui  avait  traduit  en  vers  de  cette  me- 
sure VIliade  et  VOdyssée  : 

Obaute,  dé)eu«,  le  \  osor  ftiri|enz  et  1  rire  d*A|clilUte. 
Pemlcl)eaM  qui  |  fat... 

On  donne  quelquefois  improprement  le  nom  d'hexo' 
emètre  an  vers  alexandrin  français,  parce  que  les  syllabes 
M  comptent  deux  par  deux,  ainsi  qu'à  Tlambique  anglais 
de  12  syllabes.  P. 

.  HEXAPLES  ( du  grec  heocaploos,  sextuple),  titre  qu'Ori- 
4^ne  avait  donné  à  un  de  ses  ouvrages,  dans  lequel  il 
Avait  disposé  sur  6  colonnes  le  texte  hébreu  de  la  Bible, 
Je  même  en  caractères  grecs,  la  version  d'Aquila,  celle  de 
Symmaque,  celle  des  Septante,  et  celle  de  Théodotion.  Il 
lie  nous  reste  que  quelques  fragments  de  cet  ouvrage. 

HEXAPTÉRIGË,  c.-à-d.  en  grec  qui  a  six  ailes,  instru- 
ment en  usage  dans  le  culte  grec.  C'est  un  disque,  ordi- 
nairement de  bois  peint  et  doré,  sur  lequel  on  a  repré- 
senté un  séraphin  à  six  ailes,  et  fixé  au  bout  a'un 
manche.  On  en  voit  un  à  chaque  extrémité  de  l'autel. 
Les  hexaptériges  sont  garnis,  tout  autour,  de  petites 
lames  de  métal,  et  on  les  agite  pour  avertir  les  fidèles  do 
s'incliner.  On  Iça  porte  près  du  célébrant  pendant  les 
processions. 

HEXASTYLE,  nom  donné  par  les  Anciens  aux  temples 
.qoï  avaient  un  portique  formé  de  six  colonnes  de  front. 
.    HEXERIS,  navire  de  guerre  des  Anciens,  à  six  rangs 
de  rames  de  chaque  c6té. 

HIATUS,  mot  latin  admis  dans  le  style  de  la  Gram- 
maire et  qui  signifie  bâUlement,  L'hiatus  résulte  de  la 
rencontre  de  la  voyelle  finale  d'un  mot  avoc  la  voyelle 
initiale  du  mot  suivant:  en  effet,  les  lèvres,  restées  ou- 
fertes  en  prononçant  Ifi  dernière  syllabe  du  premier  mot, 


ne  peuvent  se  refermer  pour  prononcer  la  première  (ta 
second.  Par  extension,  le  concours  de  deux  ou  de  plu- 
sieurs voyelles  dans  l'intârieur  d'un  mot  s'appelle  hiaUu, 
Les  écrivains  grecs,  prosateurs  ou  poètes,  tantôt  se 
permettent,  tantôt  évitent  l'hiatus,  et  l'on  ne  saunât 
a  cet  égard  fixer  aucune  règle  :  on  sait  seulement  aa'on 
bl&mait  dans  Isocmte  et  les  écrivains  de  son  école  le 
soin  scrupuleux  qu'ils  mettaient  à  éviter  le  choc  des 
voyelles.  Au  reste ,  les  hiatus  abondent  dans  Homère, 
dans  Hérodote,  dans  Thucydide,  dans  Platon.  On  avait 
trois  moyens  d'éviter  l'hiatus  :  Vélision,  la  contraction, 
la  crase  (V.  ces  mots),  —  En  latin,  îa  rencontre  des 
voyelles  n'était  pas  toujours  désagréable,  comme  le  té- 
moignent Cicéron,  Quintilien  et  Aulu-Gelle.  On  peut 
conclure  d'une  note  d'Aulu-Gelle  {Nuits  attiques,  VII, 
20)  que,  tout  en  faisant  l'élision  dans  les  vers,  on  lais- 
sait entendre  encore  la  voyelle  élidée,  de  manière  à 
rendre  l'hiatus  sensible  à  l'oreille.  —  En  français,  on 
n'évite  l'hiatus  qu'en  vers.  Dans  la  prose  écrite,  et  dans 
la  conversation  surtout,  il  est  assez  fréquent.  Dans  le 
style  soutenu,  on  évite  les  hiatus  de  ce  genre  :  a  Cicéron 
aÙa  à  Athènes;  — y  ai  été  étonné.  »  Souvent  on  fait,  dans 
la  conversation,  des  hiatus  que  ne  justifie  point  l'ortho- 
graphe, mais  qu'on  se  permet  pour  ne  pas  donner  à  son 
langage  un  air  appr^  et  prétentieux.  La  versification 
aussi ,  telle  qu'elle  est  fixée  depuis  la  réforme  de  Mal- 
herbe et  de  Boileau,  admet  l'hiatus  dans  le  corps  des 
mots,  dans  les  mots  composés,  et  dans  certaines  locutions 

Sroverbiales  :  Pré  aux  clercs  ;  suer  sang  et  eau  ;  à  tort  «( 
tromers  {et,  bien  que  finissant  par  une  consonne,  fait 
hiatus,  parce  qu'il  ne  se  lie  Jamau  au  mot  suivant)  : 

Tanl  y  a  qu'il  n^ett  rien  que  TOtre  dilen  ne  prenne. 

Racixs,  Ut  Piaidem,  111, 9. 

Le  Juge  prétendait  qn'd  tort  et  à  trat-en 
On  ne  ■aarait  manquer,  oondamnant  un  penrert, 

La  FoiTTAiVB,  Fab.,  II,  S. 

Elle  l'admet  entre  une  nasale  finale  et  une  voyelle  ini- 
tiale ou  même  une  autre  nasale  :  ainsi  Racine  a  fini  un 
vers  par  Néron  en  colère  ;  et  il  en  commence  un  autre 
par  ces  mots  :  Le  dessein  en  est  pris.  Il  n'y'a  pas  hiatus 
dans  le  cas  où  deux  voyelles  sont  séparées  par  un  e  muet, 
qui  s'élide  sur  la  seconde  : 

Borne  entite'e  noj^  ou  lang  éo  tes  enftmta. 

COBKKiLut,  Cfnno»  I,  S. 

La  même  immunité  existe  pour  la  voyelle  qui  précède 
une  h  aspirée  : 

Un  derc,  pour  quinze  loue,  sans  craindre  te  holà, 

BoiLBAC,  Sat.  IX. 

Voici  encore  des  hiatus  tolérés  : 

Sur  Totre  prisonnier,  huissier,  ayex  les  yeux. 

Racivs,  tet  Plaideurs,  II,  8. 

J'ai  fait  parler  le  loup,  et  répondre  l'agneau. 

La  FosTAxn,  Fables,  II,  1. 

On  évite  certains  hiatus  à  Taide  de  lettres  intercalalrea 
(F.  Euphonie).  V,  aussi  Liaison.  P. 

HIÉRARCHIE  (du  grec  hiéros,  sacré,  et  arkM,  com- 
mandement), mot  qui  signifia  primitivement,  chez  les 
Grecs,  le  pouvoir  des  prêtres,  puis,  dans  le  christianisme, 
l'ensemble  des  pouvoirs  eccl&iastiques  subordonnés  les 
uns  aux  autres,  et  qui  désigne  aujourd'hui  l'ordre  des 
pouvoirs,  de  quelque  nature  qu'ils  soient.  Il  n'y  a  point 
de  société  sans'  hiérarchie.  Dans  les  administrations,  les 
correspondances  doivent  suivre  la  voie  hiérarchique.  La 
hiérarchie  est  la  base  de  la  subordination  militaire  ;  elle 
maintient  la  discipline  et  assure  l'exécution  des  ordres. 

HIÉRATIQUE  (du  grec  hiéros,  sacré),  qualification  que 
reçoit  tout  art  assujetti  à  des  règles  fixes  pour  représenter 
les  personnes  ou  les  choses  saorôes.  Dans  l'Hindoustan  et 
VÈfSfpt&y  ce  fiffent  les  castes  saccordotales  qui  imposèrent 
ces  types  invariables. 

Hi^nATiQUE  (Écriture).  V»  HiéaoGLTPHES. 

HIÉROGLYPHES  (du  grec  iéros,  sacré,  et  gluphém, 
sculpter,  graver),  nom  donné,  dans  un  sens  sénénd,  aux 
caractères  d'écriture  employés  avec  une  valeur  mysté- 
rieuse et  conventionnelle,  et,  dans  un  sens  particulier, 
aux  signes  graphiques  de  l'ancienne  Egypte  sculptés  sur 
les  murailles  des  temples  et  des  palais.  Les  premiers,  que 
l'on  rencontre,  par  exemple,  en  Chine  et  au  Mexique, 
sont  des  imitations  d'objets  matériels,  produisant  des 
tableaux  représenti^  de  la  pensée.  Les  seconda,  dont  la 


HIË 


1033 


niE 


def  n'a  été  tiouTée  que  dans  les  temps  modernes,  offrent 
one  complication  plus  grande  :  on  ne  saurait  dire  qudle 
cn>  été  l'origine,  ni  par  quelles  transfomutticns  succes- 
snes  ils  ont  |>ris  la  forme  et  le  âons  que  nous  leur  con- 
naissons; mais  il  est  certain  que  cette  écriture  est  d'une 
haute  antiquité,  et  que  les  hiéroglyplies  des  monuments 
<nii  remontent  à  plus  de  vingt  siècles  avant  Tère  chré- 
tienne ne  diffèrent  pas  de  ceux  qui  furent  gravés  au 
tempe  d^Auguste. 

L'étrange  des  hiéroglyphes  avait  frappé  les  Anciens, 
oui  cependant  ne  paraissent  pas  avoir  cherché  à  en  son- 
der le  m^rstëre.  Diodore  de  Sicile  et  Ammien  Bfarcellin 
les  croyaient  entièrement  idéographiques,  c-ànd.  expri- 
mant les  idées  par  des  images  ou  des  symboles.  Clément 
d'Alexandrie  parle  de  la  valeur  phonétique  mie  recevaient 
certains  signes,  mais  en  termes  concis  et  onscurs  qui  ne 
permettraient  pas  de  fonder  une  opinion.  Les  Modernes 
ont  fait  de  nombreuses  recherches  avant  d'arriver  à  des 
résoltata  certains.  Le  P.  Kircher,  dans  son  OEdipus 
jEfftfptiacus  (1652),  soutînt  que  les  hiéroglyphes  étaient 
purement  idéographiques.  Au  siècle  suivant,  Zoéga  (De 
angine  et  usu  obeliecorum)^  remarquant  oue  les  sigpies 
relevés  sur  les  monuments  ne  dépassaient  guère  le 
nombre  de  800,  nombre  bien  restreint  pour  une  écriture 
:déognm>hique,  soupçonna  que  quelques-uns  de  ces  signes 
pouraient  avoir  une  valeur  phonétique.  Le  grand  ouvrage 
publié  par  la  Commission  scientifique  de  l'expédition  fran- 
çaise d^gypte  fournit  de  nouveaux  moyens  d'étude.  Sil- 
vestre  de  Sacv  détermina,  sur  l'insmption  de  Rosette 
(K.  09  fno()^  la  place  et  les  limites  des  noms  propres, 
mais  sans  réussir  dans  leur  analyse,  qu'Ackerblad  fit  le 
premier  avec  ouelque  succès.  L'Anus  Yonng  reconnut 
sur  la  même  inscription  que  les  noms  propres  étaient 
renfermés  dans  des  cartouches  on  encadrements,  et,  sur 
12  signes  qu'il  étudia  dans  les  noms  de  Ptolémée  et  de 
Bérénice,  il  détermina  exactement  la  valeur  de  cinq. 
Puis  il  publia  200  groupes  hiéroglyphiques,  et  donna, 
plutôt  en  les  devinant  que  par  une  démonstration  rigou- 
geuse,  le  sens  de  77  de  ces  groupes  :  toutefois,  il  en 
interpréta  faussement  plusieurs,  et  crut  que  les  hiéro- 
glyphes étaient  essentiellement  idéographiques,  excepté 
dans  le  cas  des  noms  propres.  GhampolUon  aborda  l'étude 
des  monuments  grapniques  de  l'Égypto  Avec  une  con- 
naissance approfondie  de  la  langue  copte,  qui  n'est  autre 
Se  l'ancienne  langue  égyptienne  écnte  avec  les  carab- 
es de  l'alphabet  grec;  en  examinant  l'inscription  de 
robélisque  de  Phil»,  dont  la  base  portait  une  inscrip- 
tion grecque  de  la  même  teneur,  il  y  trouva  le  nom  de 
Qéop&tre,  et,  dans  ce  nom,  cinq  lettres  qui  lui  étaient 
communes  avec  celui  de  Ptolémée  précédemment  reconnu 
sur  la  pierre  de  Rosette;  il  put  lire  ensuite  sur  le  temple 
d'Esnen  les  noms  de  Septime-Sévère,  de  Géta,  de  Cara- 
calla;  enfin,  il  découvrit  que  le  système  graphique  égyp- 
tien comprenait  un  certain  nombre  de  figures  purement 
pkonéiktuês,  c-à-d.  représentant,  non  des  idées,  mais 
des  sons,  et  dressa  une  liste  de  260  hiéroglyphes  phoné- 
tiques. Salvolini  étendit  plus  tard  cette  liste  à  303,  mais 
en  confondant  toutes  les  époques  et  toutes  les  valeurs,  et 
en  traitant  comme  signes  simples  des  caractères  qui  ont 
une  valeur  syllabique. 

A  envisager  la  forme  matérielle  des  signes,  il  y  a  lieu 
de  distin^er  trois  sortes  d'écritures  égyptiennes,  qu'on 
i^ipelle  hêéroglyphûtue,  hiératique  et  demotique,  L'écri- 
tore  hiéroglyphique  on  sacrée,  seule  employfo  sur  les 
monuments  publics,  se  compose  de  signes  représra- 
tant  les  objets  du  monde  physique,  à  l'aide  d'un  tracé 
simplement  linéaire  ou  colorié  ;  ces  signes  sont  au  nombre 
de  800  environ.  Comme  on  ne  pouvait  les  employer 
on'avec  la  connaissance  du  dessin,  on  imagina,  en  faveur 
oe  ceux  qui  ne  l'avaient  pas,  l'écriture  hiératique  ou  sa- 
cerdotale, composée  du  même  nombre  de  signes  que 
récriture  hiéroglyphique,  mais  de  signes  ahrégn,  facile- 
ment  exécatables,  et  pourtant  de  même  signification  s 
par  exemple,  au  lieu  de  tracer  la  figure  entière  d'un  lion 
couché,  on  ne  faisait  que  la  silhouette  de  sa  partie  posti^ 
rienre.  Cette  écriture  était  particulièrement  à  l'usage  des 
piètres t  qni  s'en  servaient  pour  tout  ce  qui  dépendait 
de  leurs  attributions  religieuses.  L'écriture  démotique, 
employée  pour  les  usages  ordinaires  de  la  vie,  se  servait 
des  mêmes  signes  que  l'écriture  hiératique^  mais  en 
moi  os  grand  nombre  :  on  la  nommait  encore  écriture  po- 
wuletùre  ou  épietotographique.  Les  trois  sortes  d'écritures 
n^en  formaient  donc  qu'une  seule  en  théorie,  et,  pour  la 
pratîmie  seulement,  on  avait  adopté  une  tachysraphie 
4es  stnes  primitifo.  Clément  d'Alexandrie  dit  qu^Dn  ap« 
ytenan  d*abard  l'écritare  démotique  «  puis  l'écriture 


hiératique,  enfin  l'écrituçe  hiéroglyphique.  Elles  sonl 
souvent  employées  à  la  fois  dans  le  même  manusorit.  — 
Quant  à  leur  valeur,  les  signes  sont  figuratifs,  ou  sym* 
ooltques,  ou  phonétiques.  Les  signes  figuratifs  expriment 
les  idées  par  la  figure  de  leurs  objets  :  pour  exprimer 
l'idée  d'un  cheval,  d'un  obélisque,  d'une  couronne,  on 
les  dessine.  Les  signes  symboliques,  dits  aussi  tropiques 
ou  énigmatiques ,  expriment  les  idées  abstraites  par 
l'image  d'objets  physiques  :  deux  bras  élevés  expriment 
ridée  d'offrande,  un  vase  d'où  l'eau  s'épand  l'idée  de  liba- 
tion, un  cercle  avec  un  point  au  milieu  l'idée  du  so- 
leil, etc.  Les  signes  phonéûques  expriment  les  sons  de  la 
langue  parlée,  et  ont  les  mêmes  fonctions  que  les  lettres 
de  nos  alphabets.  Pour  les  déterminer,  on  décida  que  la 
figure  d'un  objet  dont  le  nom  dans  la  langue  parlée  com- 
mencerait par  l'articulation  b  serait  dans  l'écriture  le  ca- 
ractère 6,  et  ainsi  des  autres.  A  la  différence  des  écritures 
de  l'antiquité  classique  et  des  écritures  modernes,  qui 
n'emploient  que  des  caractères  phonétiques,  l'écriture 
égyptienne  emplosrait  à  la  fois,  dans  le  même  texte,  dans 
la  même  phrase,  quelquefois  dans  le  même  mot,  les  trois 
sortes  de  caractères  figuratifs,  symboliques  et  phoné- 
tiques :  ces  derniers,  dont  le  nombre  ne  s'élevait  guère 
au-dessus  de  cent,  figurent  pour  les  deux  tiers  dans  les 
textes  égyptiens. 

Un  certain  nombre  de  caractères  hiéroglyphiques  (Bun- 
sen en  comptait  70)  ont  une  valeur,  non  point  alphabé- 
tique, mais  syllabique.  M.  Lepsius  croit  qu'il  y  en  avait 
davantage,  et  que  plusieurs  oes  signes  r^ardes  aujour- 
d'hui comme  homophones  différaient  autrefois,  peut-être 
par  quelque  voyelle  qui  leur  était  inhérente.  Les  seules 
voyelles  que  l'on  trouve  aiijourd'hui  dans  les  inscriptions 
sont  initiales  ou  finales  :  le  même  savant  suppose  que  la 
voyelle  principale  d'un  mot,  placée  peut-être  au  milieu 
daiis  la  prononciation,  a  pu  être  reportée  à  la  fin  dans 
l'écriture,  comme  une  sorte  de  déterminatif  phonétique. 
La  suppression  des  voyelles  médiales  établit  un  rapport 
remait[uid>le  entre  l'écriture  égyptienne  et  les  écritures 
sémitiques  :  un  autre  trait  de  ressemblance,  c'est  que 
plusieurs  hiéroglyphes  employés  comme  lettres  initiales 
ont  tantôt  la  valeur  d'une  voyelle,  tantôt  celle  d'un  simple 
signe  d'aspiration.  —  Certains  signes  employés  symbo- 
liquement servent  à  éclaircir  un  groupe  alphabétique,  de 
sorte  qu'on  a  en,  même  temps  la  prononciation  du  mot 
et  une  mét^>horequi  s'y  rapporte.  Ces  signes,  que  Cham- 
pollion  appâa  déterminatifs,  peuvent  indiquer  le  genre, 
le  nombre,  l'espèce;  ils  se  placent  après  le  mot  qu'ils 
sont  destinés  à  éclaircir  ;  ainsi ,  un  bras  armé  a'une 
massue  est  le  déterminatif  des  actions  qui  demandent 
l'emploi  de  la  force,  deux  Jambes  sont  celui  des  verbes 
de  mouvement,  etc.  La  liste  des  caractères  déterminatift, 
enrichie  depuis  la  mort  de  ChampoUion,  en  contient  12(^ 
chez  Bunsen.  —  Beaucoup  de  signes  sont  tout  à  la  fols 
idéographiques  et  phonétiques,  et  présentent  un  sens  et 
un  son  complets,  bien  qu'ils  puissent  être  accompagnés 
néanmoins  de  tout  ou  partie  des  lettres  yû  produisent  le 
même  son.  Une  foule  de  mots,  transcrits  en  caractères 
phonétiques,  conservent  pour  lettre  initiale  leur  signe 
idéographique,  et,  d'un  autre  côté,  le  même  mot  est 
transcrit  phonétiquement,  tantôt  en  toutes  lettres,  tantôt 
au  moyen  de  signes  employés  comme  de  véritables  rébus. 

V,  Langlois  de  Délestât,  Discours  sur  les  hiéroglyphes 


égyptiens,  Paris,  1583,  in- 4»  ;  Westerhovius,  Hiéroglyphes 
des  Égyptiens,  Amst.,  1735,  in-4«;  Warburton,  Essaie 
sur  les  hiéroglyphes  égyptiens,  Paris,  1744,  2  vol.  in-12  ; 
Tandeau  de  Saint -Nicolas,  Dissertation  sur  Vécriture 
htéroglyphique,  1762;  Thomas  Astle,  TOrigme  et  les  pro» 
grès  de  Vécriture  hiéroglyphique,  en  anglais,  1784,  in-4<*; 
De  Guignes,  Essai  sur  les  moyens  de  parvenir  à  la  lec^ 
ture  et  à  l'intelligence  des  hiéroglyphes  (dans  le  1. 1*'  des 
Ménk.  de  VAcad.  des  lnscriptions)\  Langlois,  Discours  des 
hiéroglyphes  égyptietu,  Paris,  1784,  in-4<*;  Bertuch,  Essai 
sur  les  hiéroglyphes,  Weimar,  1804,  in-4°;  Quatremère 


1804;  le  même.  De  Vétude  des  hiéroglyphes,  Paris,  1812^ 
in-12;  Lacour,  Essai  sur  les  hi^i)glyphes  égyptiens, 
1821  ;  Spohn,  De  linguA  et  litteris  veterum  ^ypttorum, 
Leipzifff  1831  ;  Alex.  Lenoir,  Nouveaux  euais  sur  les 
hiéroglyphes,  1822,  in-8*;8eyffarth,iïiidtmMito  Aûro- 
glyphica,  Leipzig,  1825«  in-4*';  ChampoUion,  Précis  du 
système  hiéroglyphique,  Paris,  1824,  et  Grammaire  égyp* 
tienne,  publiée  seulement  en  1836;  Salvolini,  Analyse 
grammatiajde  des  différents  teoites  éqyptiens,  Paris,  1826, 
in-4*;  H.  Sait,  Essai  sur  U  système  dis  hiéroglyphes  pho» 


HIS 


1034 


HIS 


nèh/iues.  trad.  en  franc,  oar  Deyère,  1827  ;  Brown,  Aperçu 
mr  les  hiéroglyphes  S  Egypte,  tnduU  de  Tanelais,  Paris, 
1837  ;  Greppo,  Essai  stur  le  système  hiêrogïypiuque  de 
Ckampollion,  Paris«  18^,  in-8<>;  Klaproth,  Examen  des 
travaux  de  Champollion  sur  les  hiéroglyphes,  1832; 
Yoong,  Rudiments  of  an  EgypUan  dictûmary,  1831; 
Leemans,  Horapollinis  NHoihieroglyphica,  kmsL^  1835; 
Noik,  Essai  sur  les  hiéroglyphes,  en  allem.,  Leipzig,  1837  ; 
Lepaias,  Lettre  à  M*  Rosellini  sur  l'alphabet  htérogly' 
phuiue,  Rome,  1837,  in-8®;  Gh.  Lenormant,  Recherenes 
sur  l'origine^  la  destination  chex  les  Anciens,  et  l*utUité 
actuelle  des  hiéroglyphes  d^Horapollon,  Paris,  1838,  in-4«; 
J.-A.  de  Gonliaooff,  Archéologie  égyptienne,  Leipzig,  1839, 
3  Tol.  in-8®  ;  Ideler,  Hermapûm,  siœ  rudimenta  hiero- 
glyp»  veter»  JEgypt,  litteraturœ,  Leipzig,  1841,  in-4«; 
Bunsen,  La  place  qu'occupe  l'Egypte  dans  Vhistoire  du 
moncle,  en  allem.,  Hambourg,  1845;  Brugsch,  Seriptura 
^uptiorum  demotica,  Berlin,  1848  ;  le  même.  Collection 
de  documents  démotiques,  t.  !«',  1850.  B. 

HIÉRON  (du  grec  iéron,  sacré),  nom  donné  par  les 
anciens  Greca  à  la  totalité  de  Tencelnte  sacrée  qui  ren- 
fermaift  le  temple,  les  terres  et  les  bois  consacrés,  les  ha- 
bitations des  prêtres,  etc. 

HIEROTHBaUM,  sorte  de  reliquaire  renfermant  une 
portion  de  la  vraie  croix. 

HIËROTHYRIDAS  ou  HIEROTHYRIDION,  espèce  de 
«hapelle  portative,  fermée  par  des  volets  ornés  de  pein- 
tures, et  qu'on  peut  ranger  parmi  lea  diptyques  ou  les 
'tripUFques. 

HILARODIE ,  nom  donné,  chez  les  anciens  Grecs,  d'ar- 
bord  à  une  chanson  badine,  puis  à  une  petite  pièce  de 
tbé&tre  tenant  le  milieu  entre  la  comédie  et  la  tragédie. 
Ony  a  vu  Torigine  de  la  parodie  (  K.  ce  mot). 

mLARO-TRAGÉDIE,  nom  que  les  Grecs  donnaient  à 
ce  que  les  modernes  ont  appelé  tragi-comédie,  à  une  trap- 
gédie  dont  le  dénoûment  éteit  heureux.  L'invention  de 
ce  genre  de  pièces  est  attribuée  par  Suidas  à  Hhinton, 

HIMALAYENS  (Idiomes),  nom  donné  à  un  grouçe 
d'idiomes  -monosyllabiquee,  parlés  an  N.-E.  du  bassin 
du  Gange.  Les  principaux  sont  le  6odo  et  le  dhimal, 

HIMYARITE  (Dialecte),  dialecte  parlé  autrefois  dans 
l'Yémen  et  dans  la  région  orientale  de  l'Arabie.  Il  s'écri- 
vait avec  un  caractère  particulier,  désigné  sous  le  nom 
û*Al  Mosnad,  et  qui  était  à  peu  près  toi^bé  en  désuétude 
dès  le  temps  de  Mahomet;  Pococke  a  voulu  voir  dans  ce 
caractère  le  ehaldéen  à  l'état  primitif.  On  lui  a  même 
trouvé  une  ressemblance,  évidemment  fortuite,  avec 
qudquea-nns  des  plus  anciens  alphabets  de  l'Inde,  et 
avec  le  slave  glagolitique.  Selon  quelques  linguistes, 
l'himyarite  aurât  été  assez  rapproché  du  s]rriaque  ;  Gese- 
oins  croit,  ou'il  avait  plus  de  rapport  avec  Téthiopien, 
qu'on  parlait  de  l'autre  côté  de  la  mer  Rouge.  MM.  Ful- 
gsnce  Freanel  et  Th.-J.  Arnaud  ont  recueilli  plusieurs 
niseriptions  himyarites  chez  les  tribus  qui  occupent  Tan- 
den  pays  de  Saba  ;  ils  pensent  que  Vekhkili^  parlé  an- 
lourd  bui  dans  le  Mahra  et  l'Hadramaout,  est  un  reste  de 
l'antique  dialecte.  Le  baron  de  Wrede  a  composé  un  petit 
Vocabulaire  des  mots  himyarites  que  contient  l'arabe  ac- 
toel.  V.  Gesenius,  Sur  la  langue  et  l'écriture  himya^ 
rites,  en  allem.,  1841. 

HINDOUI  ET  HINDOUSTANI  (Langues).  V.  IifnnainvBS 
(Langues). 

HIPPODROBIE.  V,  oe  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

HIPPONAGTIQUE  (Vers).  F.  Chouambe. 

HIPPOPHORBE  (du  grec  ippos,  cheval,  et  phorbiia, 
lanière  de  cuir  que  les  Joueurs  de  flûte  se  mettaient  sur 
la  bonche)>  flûte  libyenne,  qui  rendait  un  son  très-aigu 
et  semblable  an  hennissement  du  cheval.  Elle  était  faite, 
dit  Pollux,  en  laurier  dépouillé  de  son  écorce  et  de  sa 
moelle.  Les  gardiens  de  chevatax  dans  les  pftturages  en 
'fiBùsaient  usage. 

HIRAU  ou  HIRIAU,  ancien  nom  des  Jongleurs  et  des 
ménestrels. 

HIRONDE  (Queue  d').  V,  Qosub  d'hoiondb. 

HISTOIRE  (du  grec  tstoria,  recherche  des  dioses  cu- 
-ffieuses,  exposition  de  oe  que  l'on  a  vu),  un  des  grands 
genres  littéraires  en  prose.  L'hiftolre  raconte  les  faits  ac- 
complis par  les  hommes  réunis  en  sodété;  elle  lea  coor- 
donne, lea  rapporte  a  leurs  causes ,  met  leurs  eiTets  en 
lumière ,  et  prononce  sur  leur  moralité.  Voilà  son  objet 
-et  son  but  :  aussi  Gicéron  rappelle-t-il  le  témoin  des 
temps,  la  lumière  de  la  vérité,  récole  de  la  vie.  Observer 
des  phénomènes  tonionrs  identiques,  qui  se  succèdent 
Invariablement  dans  le  même  ordre  et  suivant  les  mêmes 
Jeia,  oomiM  les  phénomènes  astronomiques  eu  physi- 


ques, c'est  faire  de  la  science  et  non  de  Vhistoire.  Le  na« 
turalist»,  qui  réunit  et  ciasse  les  objets  de  ses  observi^ 
tiens  d'après  des  caractères  communs  aux  êtres  de  toutes 
les  époques  et  de  toutes  les  latitudes,  fait  encore  oeuvra 
de  savant  et  non  d'historien  :  le  nom  d'histoire  naturelle 
est  un  abus  de  termes  qui  vient  de  ce  qu'on  a  confondu 
la  variété  avec  l'irrégularité,  la  multiplicité  avec  la  su^ 
cession  ;  l'histoire  de  la  nature  ne  peut  dater  que  des  dé« 
couvertes  modernes,  qui  ont  révélé  les  révolutions  tra- 
versées par  le  monde  physigue  dan^  ses  premiers  èges. 
Le  domaine  propre  de  l'histoire,  c'est  la  vie  des  hommes, 
c.-ànd.  ce  (jui  est  inconstant,  ce  qui  change  et  se  trans- 
forme capricieusement,  du  moins  en  apparence;  c'est  la 
succession  des  faits  unie  à  la  diversité.  Dieu  ne  peut  être 
l'objet  de  l'histoire,  comme  le  voulait  Jean  Bodin  an 
XVI*  siècle;  car  l'essence  des  choses  divines  est  l'immu- 
tabilité. Dans  l'homme  seul  existe  une  puissance  distincto 
des  éléments  qui  composent  son  corps  et  des  agents  phy- 
siques qui  animent  la  matière  ;  seul  il  a  cette  préroga- 
tive, que  non-seulement  il  peut  dérober  son  âme  aux 
atteintes  du  monde  extérieur,  mais  que,  luttant  sans 
œsse  et  prenant  l'empire  à  son  tour,  il  sait  défendre  son 
corps  même  contre  les  influences  auxquelles  il  semble 
directement  soumis.  S'il  touche  à  la  terre  par  un  oèté  de 
sa  nature,  par  l'autre  il  tient  au  ciel  ;  et  cette  émanation 
de  la  divinité,  c'est  moins  encore  l'intelligence  que  la 
faculté  de  vouloir  :  de  cette  faculté  dérivent  les  actes 
libres,  qui  déconcertent  toutes  les  prévisions,  qui  se  dé- 
robent à  l'analyse,  et  que  l'historien  doit  précisément 
recndllir  et  expliquer.  Les  faits  humains  qui  échappent 
à  la  sdence  sont  proprement  le  domaine  de  l'histoire. 

L'histoire  est  sujette  à  des  transformations  successives. 
Quelle  est  la  loi  de  son  développement?  D'abord,  elle  se 
contente  de  recueillir  les  faits,  plus  ou  moins  altérés  par 
la  fiction,  et  de  les  confier  une  seconde  fois  à  la  mémoire, 
à  l'aide  du  rbythme  poétique,  d  l'écriture  ne  peut  encore 
leur  assurer  une  existence  plus  durable.  L'histoire  ra- 
conte alors  pour  raconter  ;  elle  se  confond  avec  l'épopée. 
Mais  l'esprit  humain  ne  s'arrête  pas  \k  i  qudle  que  soit 
l'irrégularité  des  faits,  l'attention,  à  force  d'observer  la 
génération  des  eiTets  et  des  causes,  finit  par  découvrir  un 
fil  conducteur  ;  die  s'en  saidt,  et  s'efforce  de  retrouver 
l'ordre  dans  ce  désord^  apparent.  De  là  naît  Vhistoire 
pragmatique,  comme  l'ont  appelée  les  Andens,  ou  philo- 
sophique,  sdon  l'expression  des  modernes,  c.-Im1.  le  rédt 
des  faits  humains  avec  leurs  principes  et  leurs  consi^ 
auenoes.  Ge  n'est  pas  encore  le  dernier  mot  de  l'histoire  : 
rhomme,  tourmenté  d'un  besoin  insatiable  de  connaître, 
ne  peut  se  contenter  d'une  explication  incomplète  et  par- 
tielle; il  ne  tend  à  rien  moins  qu'à  trouver  le  secret  de 
toutes  choses,  à  embrasser  d'un  seul  coup  d'œil,  en  par- 
tant d'un  principe  donné,  la  génération  des  idées ,  des 
constitutions,  des  révolutions.  Ge  dernier  progrès,  c'est 
la  Philosophte  de  l'histoire  (V.  ce  mot).  —  Il  est  évident 
que  les  conditions  de  l'histoiro  varient  avec  son  caractère. 
Tant  qu'elle  est  un  simple  rédt,  elle  peut  se  borner  à  un 
peuple,  à  une  ville,  à  un  individu.  Dès  ou'dle  s'élève  ans 
causes  et  aux  effets,  son  horizon  doit  s'étendre  :  l'événe- 
ment est  en  Grèce,  mais  la  cause  peut  êtro  en  Asie. 
L'histoire  philosophique  est  donc  nécessairement  g^6> 
raie,  n  faut  plus  encore,  si  l'historien,  considérant  l'in- 
dividu comme  le  résumé  de  l'espèce,  et  l'espèce  comme 
le  développement  multiple  de  l'individu,  prétend  déter- 
miner la  loi  mil  domine  tous  les  faits  humains,  et  les 
ramener  tous  a  une  théorie  savante.  Rien  alors  ne  doit 
plus  lui  échapper  ;  il  n'a  plus  le  droit  de  choisir  même  les 
grands  peuples  et  les  grands  hommes  qui  représentent  et 
résument  le  mieux  l'esprit  de  l'humanité  ;  il  n'est  pas  de 
fiiit  si  insignifiant  en  apparence  qui  ne  puisse  Jeter  du 
Jour  sur  l'ensemble,  pas  de  contrée  d  lointaine  qu'on  ne 
doive  explorer.  L'histoire,  parvenue  à  ce  degré,  doit  donc 
être  universelle.  Mds  le  génie  de  l'homme  peut-il  jamais 
s'élever  Jusqu'à  l'universalité?  Cette  espérance  n'est-dle 
pas  une  chimère?  Malgré  son  impuissance,  malgré  ses 
nombreux  échecs  dans  la  Philosophie  de  l'histoire,  l'es- 
prit humain  tend  toujours  à  la  généralisation.  Cependant 
il  ne  peut  espérer  d'atteindre  le  but  qu'il  poursuit  :  du 
Jour  où  la  Philosophie  de  l'histoire  aordt  tenu  tout  ce 
qu'dle  promet,  il  n'y  aurait  plus  d'histoire,  il  y  aurait 
une  sdence  ;  et  l'homme,  s'élevsnt  de  de|^  en  degré  Jos* 
qu'à  la  parfaite  intelligence  des  choses  passées,  de  là 
même  Jusqu'à  la  prévision  de  l'atenir,  se  confondrait 
avec  Dieu. 

L'histoire  est  une  création  de  la  Grèce.  On  trouve,  à  la 
vérité,  dans  les  littératures  orientales,  par  exemple  ches 
les  Hébreux,  quelques  livres  dits  lûstoriques)  nudscs 


flIS 


1035 


HIS 


M  lont  que  des  réàti  composés  dans  le  but  tout  à  fait 
pntiqoe  de  conaenrer  le  souTenir  de  certains  fiiits,  qu*il 
srt  essentiel  de  ne  pas  oublier,  et  hors  desquels  récriyain 
B's  rien  Touiu  Toir.  Ce  qui  caractérise,  au  contraire,  les 
historiens  grecs,  c'est  une  curiosité  insatiable,  un  esprit 
d'iDresdgation  générale,  pour  qui  tous  les  faits  ont  une 
(f^e  Tsleor  ;  c*est  la  recherche  de  la  vérité  pour  elle- 
même,  sans  préoccupation  de  remploi  qu'ils  en  pourront 
(Ure;  c'est  l'esprit  de  critique,  qui  n'admet  pas  indistinc- 
tement toutes  les  traditions,  qui  choisit  entre  les  témoi* 
fDiges;  c'est  enfin  l'esprit  philosophique,  qui,  sous  tous 
les  actes  sodanz,  voit  une  manifestation  de  l'esprit  hu- 
main, liais  les  Grecs  ont  en  sur  l'histoire  une  opinion 
particulière,  enseignée  dans  leurs  écoles,  et  que  les  Ro- 
mains ont  ensuite  adoptée  :  ils  confondaient  prescpie 
l'histoire  avec  rélo({uence  :  NihU  est  magis  oratorium 
qnam  fûstûria,  disait  Cicéron.  Cette  confusion,  oaXy^ 
meot  eiprimée  dans  une  préface  d'Éphore,  livra  la  théorie 
même  du  genre  historique  à  l'autorité  des  rhéteurs,  et  la 
confina  dsAS  un  chapitre  de  leurs  traités  sur  l'art  ora- 
toire. Aussi,  trop  préoccupés  du  soin  de  la  forme ,  les 
historiens  de  Tanuquité  cherchèrent  à  intéresser  et  à 
plaire ,  aux  dépens  mftme  de  la  vérité.  Nulle  part  cette 
tendance  ne  se  montre  mieux  à  découvert,  et  nulle  part 
oo  D'en  voit  mieux  les  effets,  que  dans  l'usage  des  haran- 
goe8(K.  ce  mot).  C'est  toujours  l'art  qui  prime  la  science, 
toojoors  rintérét  et  le  plaisir  qui  passent  avant  IMnstruc- 
tioD  et  la  vérité. 

Las  qualités  nécessaires  à  l'historien  sont  nombreuses, 
variées,  presque  eifirayantes.  Pour  la  recherche  des  faits, 
fl  a  besoin  d*une  rare  intelligence  :  non-seulement  il  doit 
lemonter  aux  différentes  sources  de  Thistoire,  traditions 
(Bstes,  inscriptions  monumentales,  médailles,  livres, 
doeufflents  publics  et  privés,  etc.,  et  soumettre  à  une 
critique  attentive,  pénétrante  et  délicate  tout  ce  qa'U 
sors  recueilÛ  ;  il  lui  faut  être  veraé  dans  la  connaissance 
des  lois,  de  la  çuerre,  des  finances,  des  institutions  ad- 
ministratives, des  langues,  et  s'éclairer  par  la  chronologie 
et  la  géographie,  qu'on  a  appelées  les  deux  yeux  de  l'his- 
toira.  —  La  mise  en  oauvre  aes  matériaux  exige  un  nand 
talent  de  composition,  afin  de  produire  l'intérêt  et  d'évi- 
ter l'ennui  ;  dans  le  nombre  infini  des  faits ,  il  importe 
de  choisir  ceux  qui  méritent  de  survivre,  ceux  qui  sont 
dans  un  rapport  essentiel  avec  la  nature  de  l'homme,  et 
dus  un  rapport  anecdotique  avec  la  nature  des  hommes 
à  telle  ou  telle  époque.  —  L'historien  doit  avoir  fortifié, 
agrandi  ses  méditations  solitaires  par  l'expérience  de  la 
rie  active  :  s'il  ne  connaissait  la  société  que  par  les  livres, 
il  serait  exposé  à  la  juger  fort  mal ,  et  se  trouverait 
dans  limpoesibilité  de  la  peindre.  Tous  les  historiens  de 
la  Grèce,  excepté  pentrètre  Hérodote,  furent  des  hommes 
publics,  des  orateurs  et  des  généraux  ;  il  en  fht  de  même 
i  Rome  ;  chez  les  modernes  aussi,  Machiavel,  Guichardin, 
Paolo  SarpI,  De  Thon,  rappellent  l'idée  de  la  vie  active 
mêlée  à  la  spéculation  littéraire.  —  Parmi  les  qualités 
morales  qui  sont  indispensables  à  l'historien,  il  faut  dter 
en  première  ligne  l'amour  dé  la  vérité,  et  par  là  on  en- 
tend, non  pas  seulement  le  besoin  de  cette  vérité  sèche 
6t  morte  qui  n'est  que  l'exactitude,  mais  la  force  de  re- 
trouver, de  sentir  et  de  refiaire  la  vérité  locale  et  contem- 
poraine, de  dessiner  les  physionomies  des  personnages, 
et  de  les  mettre  en  mouvement,  en  leur  rendant  leurs 
passions  et  leurs  costumes.  On  demandera  ensuite  à  l'his- 
torien l'amour  de  l'humanité,  c.-à-d.  que  sa  justice  im- 
partiale ne  doit  pas  être  impassible  :  il  faut  qu'il  ait  une 
passion,  qu'il  souff^  ou  soit  heureux  de  ce  qu'il  raconte, 
«mblable  à  un  témoin  tout  ému  encore  des  faits  qu'il  a 
vos.  Lncien  disait  que  l'historien  doit  être  un  étranger 
nos  patrie,  sans  autels,  et  un  écrivain  du  xvm*  siècle , 
qu'il  doit  n'être  d'aucun  pays,  d'aucun  parti,  d'aucune 
religion  :  de»  rédts  compoeés  dans  de  pareilles  disposi- 
tions, sans  principes,  sans  Idées,  sans  conviction,  ne 
pourraient  avoir  ni  vie  ni  couleur.  Cest  à  l'historien  de 
soutenir,  au  contraire,  le  parti  de  la  justice,  qui  est  de 
tous  les  temps  et  de  tous  les  lieux,  sans  qu'aucun  intérêt 
de  patrie,  de  corps  ou  de  secte  puisse  le  lui  faire  déserter. 

Materé  la  remarque  si  vraie  d'Aristote,  que  la  distinc- 
tion des  genres  ne  repose  pas  sur  la  différence  de  la 
Anne,  il  âni  se  garder  de  croire  que  la  forme  soit  indif- 
férents :  la  pensfe  humaine,  au  contraire,  ne  peut  être 
ompUte  sans  ^e.  n  y  a  donc  un  style  historique, 
epnune  il  y  a  un  style  oratoire.  Ches  les  Anciens,  la  poé- 
rie  et  l'histoire  avaient  été  longtemps  confondues  ;  dans 
les  premiers  âges  des  sociétés,  lliomme  n'est  pas  riche 
en  souvenirs,  et  H  n'a  pas  encore  eu  lé  temps  d'exercer 
IwBnconp  sa  raison;  l'Imagination  augmente  et  embellit 


de  ses  inventions  tous  les  événements  qui  ont  vivement 
agi  sur  elle  et  qu'elle  se  plaît  à  célébrer.  Cest  ainsi  quil 
y  a  de  l'histoire  dans  Homère,  et  de  la  poésie  dans  Héro- 
dote. De  nos  fours  même,  quoique  le  progrès  des  tempe 
ait  démêlé  bien  des  éléments  jusque-là  confondus ,  le 
divorce  n'est  pas  et  ne  saurait  être  complet  entre  la  raison 
et  l'imagination  ;  la  poésie  doit  encore  puiser  ses  données 
dans  l'histoire,  et  l'histoire  emprunter  à  la  poésie  ses 
formes  vives  et  animées.  On  a  prétendu  que  les  deux 
genres  devaient  rester  complètement  indépendants  l'on 
de  l'autre,  et  on  a  voulu  renfermer  l'historien  dans  les 
limites  étroites  de  la  critique.  Mais  les  auteurs  tels  que 
Suétone  sont  de  simples  compilateurs;  s'ils  ont  le  mérite 
de  la  conscience  et  de  l'exactitude,  s'ils  ont  rassemblé 
tous  les  matériaux  de  l'histoire,  l'histoire  est  encore  à 
faire.  Chez  eux,  tout  est  froid  et  décoloré;  au  lieu  de 
tableaux,  ils  n'offrent  que  de  sèches  divisions;  au  lieu  de 
personnages  vivants ,  les  membres  épars  qui  pourraient 
servir  à  les  recomposer.  La  vérité  n'est  pas  tout  entière 
dans  une  simple  juxtaposition  des  faits,  et  une  mémoire 
fidèle,  une  recherche  patiente  ne  sont  ptA  les  seules  ou»* 
lités  qu'on  doive  exiger  de  l'historien  :  la  puissance  de  la 
réflexion  et  de  l'imagination  lui  sont  tout  aussi  nécea* 
ssires.  L'une  sert  à  choisir  entre  les  différents  récits,  à 
discerner  la  vérité  au  milieu  des  contradictions,  quelque* 
fois  même  à  combler  des  lacunes  profondes,  à  restaurer 
des  ruines  et  à  reconstruire  un  vaste  monument;  l'autret 
rtoandant  ses  vives  couleurs  sur  cette  matière  insen* 
sible,  anime  les  descriptions,  caractérise  fortement  le 
génie  des  peuples  et  des  individus,  évoque  pour  ainsi  dire 
les  morts,  et  donne  au  récit  tout  l'intérêt  d'une  action. 
L'historien  doit  éprouver  quelque  chose  de  l'émotion  ree* 
sentie  par  les  penonnagee  quil  met  ea  scène,  et  faire 
passer  ses  sentiments  dans  ses  écrits.  Si  l'histoire  tient  à 
la  fois  à  la  science  et  à  la  poésie,  elle  doit  revêtir  une 
forme  intermédiaire  entre  les  deux  formes  affectées  am 
œuvres  de  l'imagination  et  de  la  raison. 

Eu  égard  à  l'étendue  des  sujets,  l'histoire  est  dite  tmH 
verselle,  si  elle  embrasse  tous  les  peuples  et  tous  les 
siècles;  générale,  quand  elle  s'occupe  d'une  nation,  dont 
elle  montre  l'origine,  les  progrès  et  les  diverses  révolu* 
tiens;  partictUiàre,  lorsqu'elle  se  borne  à  une  période 
isolée,  a  un  événement  spécial,  à  une  province,  à  une 
ville,  à  un  homme  public.  Quand  elle  entre  dans  les  dé* 
tails  de  la  conduite  privée  d'un  personnage,  elle  devient 
une  simple  Vie,  une  Biographie  (F.  ce  mot).  Si  «m  per* 
sonnage  raconte  lui-même  ses  actes  et  les  événements 
dont  il  a  été  témoin,  sa  composition  rentre  dans  la  classe 
des  Autobiographies  et  des  Mémoires  (  V,  ces  mots). — An 
point  de  vue  des  éléments  constitutifs  de  la  société  « 
l'histoire  a  été  divisée  en  deux  grandes  parties,  Ykistoitê 
sacrée  et  Yhistoire  profane.  L'histoire  sacrée,  qui  raconte 
tous  les  faits  relatifs  à  la  religion  depuis  l'origine  dn 
monde  jusqu'à  nos  jours,  se  subdivise  en  histoire  sainte, 
où  l'on  s'occupe  des  faits  antérieurs  an  Christianisme  et 
consifpiés  dans  les  saintes  Écritures ,  et  histoire  êùdé- 
siastujue,  qui  traite  de  l'établissement  de  l'Église  et  de 
son  développement  à  travers  les  siècles.  L'histoire  pro- 
fane embrasse  l'histoire  civile,  politique  et  intellectuelle 
des  différents  peuples.  On  la  partage  en  trois  grandes 
périodes  :  histoire  ancienne,  depuis  l'origîae  des  États  dans 
l'antique  Orient  Jusqu'à  Is  chute  du  monde  romain  à  la  fin 
du  iv*siède  de  l'ère  chrétienne;  histoire  du  moyen  âge, 
depuis  la  ruine  de  l'Empire  romain  jusqu'à  l'établisse- 
ment des  Turcs  Ottomans  à  Constantinople  en  1453; 
^tstotrs  des  tenM>s  modernes,  depuis  le  milieu  du  xv*  siècle 
lusqu'à  nos  leurs.  —  Pour  le  tableau  des  plus  célèbres 
historiens,  V,  les  articles  consacrés  à  l'histoire  des  di- 
verses littératures.  *      B. 

msToms  (Académies  d'),  Sodétés  formées  par  les  sa^ 
vants  de  divers  pays  pour  l'étude  de  l'histoire  nationale. 
La  Société  de  V Histoire  de  France,  fondée  à  Paris  en 
1S33  par  MM.  Guizot,  Thiers,  MoIé,  de  Barante,  A.  Ben- 
gnot ,  Mignet ,  Raynouard ,  Fauriel ,  etc. ,  se  réunit  à  la 
Bibliothèque  impériale,  et  publie,  outre  un  Annuaire  el 
un  Bulletin,  des  ouvrages  et  documents  relatifs  à  Itii»- 
toire  de  la  France.  Au  nombre  des  Sociétés  étrangères,  mi 
remarque  :  V Académie  royale  d'Histoire  portii^aise  de 
Lisbonne,  créée  en  1720  par  Jean  V;  Y  Académie  ropalé 
d'Histoire  de  Madrid,  confirmée  en  1738  par  PhllippeY  : 
Y  Académie  d^Bistoire  et  d*  Antiquités  de  Naples ,  créée 
en  1807  par  Napoléon  l^t  la  Société  historique  analaué^ 
fondée  à  Londres  en  1830  pour  l'étude  et  la  publication 
des  documents  antérieurs  à  Henri  Vni;  la  Société  de 
rhistoire  ancienne  de  l'Allemagne ,  fondée  en  1810  à 
Francfort-sur-le-Mein  par  le  ministre  prusriin  De  Siein 


HOL 


1036 


HOL 


la  SocUté  hutùnqw  de  la  Basse^axe,  fondée  à  Hanovre 
en  1834;  la  SociMé  de  V Histoire  nationale  du  Wurtem- 
berg ,  créée  en  4822  ;  la  Société  historique  et  archéolo» 
guiue  de  Moscou,  créée  en  1836,  etc. 
HiSToïKB  (Peinture  d*),  le  premier  et  la  principal  genre 


ainsi  que  les  compositions  allégoriques.  Il  impiiaue  un 
caractère  noble,  un  stvle  élevé,  et  quelque  beauté  idéale« 

HISTOiaB  AUGUSTE.    V,  AOGUSTB. 

HISTORIÉ,  se  dit  de  toutes  parties  architecturales, 
moulures,  chapiteaux,  etc.,  sur  lesquelles  on  a  sculpté, 

Sdnt  ou  gravé  des  sujets  empruntés  à  l'histoire  ou  a  la 
ble. 

HISTORIOGRAPHE.  (  V.  ces  mots  dans  notre  Dict. 

HISTRION.  }      de  Biog.  et  d'Histoire, 

HITOPADÊÇÂ,c.-à-d.  Instruction  saliUaire,  recueil  de 
|iEd>le8  et  de  contes  en  langue  sanscrite.  Cest  un  abrégé, 
de  date  assez  récente,  d*un  ouvrase  plus  considérable 
et  probablement  beaucoup  pins  ancien,  le  Pantchor-Tan-' 
fra.  Le  Bitâpadéça  renferme  un  extrait  des  trois  pre- 
miers livres  de  ce  poème,  et  d*un  autre  ouvrage  brah- 
manique que  nous  ne  possédons  pas.  On  peut  donc 
considérer  l'histoire  du  Pantcha-  tantra  comme  ren- 
fermant implicitement  celle  du  Hitâpadéça;  car  c'est 
l'histoire  même  de  la  Fable.  Ce  recueil  fut  traduit  en 
pelhvi,  au  vi*  siècle  de  notre  ère,  sous  le  titre  de  Calila 
et  Dimna;  puis,  du  pelhvi  en  arabe,  au  vin*  siècle;  de 
l'arabe  en  hébreu  par  le  rabbin  Joël.  Jean  de  Gapoue  le 
traduisit  de  l'hébreu  en  latin  au  xn*  siècle  sous  le  titre 
de  Direciormn  humanm  oitm,  qui  rend  le  sens  du  mot 
Hitâpadéça,  Au  xv*  et  au  xvi*  siècle  on  en  fit,  sur  le  latin, 
des  versions  espagnole,  italienne  et  française;  en  1579, 
Pierre  de  Larrivev  les  fondit  ensemble  sous  le  nom  de 
Deux  Iwres  de  iUosofie  fabuleuse,  La  Fontaine  vint  im- 
médiatement après.  De  plus,  le  CalUa  et  Dimna  pelhvi  fut 
traduit  en  persan  aux  xii*  et  xin*  siècles  sous  le  titre  de 
AnwaH  SohàUi.  Le  livre  des  Lumières  est  la  traduction 
des  quatre  premiers  livres;  imprimé  sous  le  nom  de 
Fables  de  Ptlpay^  il  a  fourni  plusieurs  beaux  si^ets  à 
notre  grand  fabuliste.  —  Le  nit&padêça,  ainsi  que  le 
Pantchi^Tantra,  sont  attribués  au  brahmane  Vishnu- 
çarma.  Schlegel  et  Lassen  en  ont  donné  une  traduction 
latine,  en  iâl;  Johnson,  une  traduction  andaise,  en 
1848;  M.  Lancereau,  une  française,  en  1855.  Le  PantcAo- 
lanira^  traduit  imparfaitement  par  l'abbé  Dubois  en 
1826,  vient  de  l'être  fidèlement  en  allemand  par  M.  Ben- 
fey.  Ce  dernier  ouvrage  est  d'origine  bràhmanioue;  il  ne 
renferme  aucun  trait  qui  rappelle  le  bouddhisme,  et 
semble,  sinon  antérieur  à  cette  religion,  au  moins  con- 
temporain de  ses  premiers  développements.  Son  style,  la 
langue  dans  laquelle  11  est  écrit,  le  reportent  également 
à  cette  époque,  c.-Ih1.  vers  le  s'  ou  le  m*  siècle  avant 
notre  ère.  Quant  au  Hit^padêça,  il  est  difficile  d'en  fixer 
la  date,  mais  il  ne  semble  pas  pouvoir  être  antérieur  au 
m*  ou  au  IV*  siècle  de  l'ère  chrétienne.  Il  se  peut  aussi 
que  les  écrividns  bouddhiques,  à  l'époque  de  leur  lutte 
contre  les  br&hnumes,  aient  emprunté  à  ces  derniers  une 
forme  littéraire  éminemment  propre  à  l'enseignement 
moral  :  unsi  s'expliaueraient  les  traits  lancés  contre  les 
br&hmanes  dans  rédition  qui  a  servi  de  texte  au  traduc- 
teur arabe,  traits  dont  nos  textes  du  Pantchc^Tantra 
sont  exempts.  Eh.  B. 

HOC  (Jeu  du)    >  V,  Jbox,  dans  notre  Dict,  de  Biogr, 

HOCA  (Jeu  de)  \  et  d'Hist.,  p.  1436,  col.  3. 

HOCHE-PLIS.  K.  au  Supplément. 

HOIR«  ancien  terme  de  Jurisprudence,  synonyme 
^héritier.  Il  se  disait  spécialement  des  enfants  et  petits- 
enfants,  et  s'employait  plutôt  au  pluriel  ^u'au  singulier. 

HOIRIE,  mot  autrefois  svnonyme  tïheritage,  de  suc- 
cession^ dans  la  langue  du  droit.  On  nomme  avancement 
dhoirie  une  donation  en  avance  sur  une  succession  à 
reeneillir.  Ce  qui  est  ainsi  donné  est  retemi  plus  tard 
dans  le  compte  de  la  succession. 

HOLLANDAISE  (École),  Tune  des  grandes  écoles  de 
IMintoxe  diex  les  modernes.  Les  plus  anciens  artistes  de 
cette  école  sont  :  Albert  van  Owater,  de  Harlem ,  qui  vi- 
leh  avant  l'an  1400;  Thierry,  également  de  Harlem,  pos- 
lérfeor  d'un  demi-siècle  an  précédent;  et  Corneille  En- 
glielbrechtsen,  de  Levde,  qui,  le  premier  dans  sa  patrie, 
employa  la  peinture  a  l'huile.  La  peinture  historique  leta 
nn  certain  éclat  dans  le  cours  an  xvi*  siècle,  grâce  à 
Lncas  de  Lejde,  Martin  Hecmskerk,  Octave  Van  Yeen 
(Otto  Venins } ,  Honthorst ,  Ant.  Moro.  L'école  est  dès 
Ions  remarqoaole  par  une  parfaite  intelligence  dn  clair* 


obscur,  une  couleur  aussi  brillante  que  vraie,  et  un  fini 
des  plus  précieux,  sans  arriver  pourtant  à  la  sécheresse. 

Quand  le  protestantisme  se  fut  répandu  dans  les  Pro- 
vinces-Unies, les  tableaux  religieux  furent  bannis  des 
églises.  L'art,  entrant  dans  une  autre  route,  n'exploita 
plus  que  le  paysage  national,  car  l'amour  du  sol  de  la 
patrie  s'augmentait  depuis  qu'on  avait  secoué  le  joug  de 
l'Espagne;  que  la  marine,  car  elle  était  la  défense  et  la 
force  du  nouvel  État  ;  que  le  genre,  car  on  aimait  à  se  re» 
poser,  dans  les  scènes  calmes  d'intérieur,  de  la  lutte  fu- 
rieuse qu*il  avait  fallu  soutenir.  Alors  surgirent  tous  ces 
grands  artistes  qui  ont  rempli  le  xvii*  siéle,  les  paysa- 
gistes Jean  et  André  Both,  Albert  Cuyp,  Ant.  Waterloo* 
Van  Goyen ,  les  deux  Van  der  Neer,  Moucheron,  Swane- 
velt,  Abraham  Bloemaert,  Hobbema,  Ruysdaôl,  Wynants, 
Van  Éverdingen ,  Berghem ,  Pynacker;  les  peintres  de 
genre,  Adrien  Brauwer,  Schalken,  Netscher,  les  deux 
Weenix,  Gérard  Dow,  Terburg,  Pierre  de  Hoogh,  Jean 
Steen,  Poelemburg,  Adrien  et  Isaac  Van  Ostade,  Adrien 
Van  der  Werf,  Van  der  Heyden,  Pierre  de  Laar,  dit  le 
Bamboche,  Corneille  Beça,  les  deux  Koninck,  liieris  et 
Metzu;  les  peintres  d'animaux,  Paul  Potier,  Karel  Dn- 
Jardin,  Hondekoeter  et  Wouwermans;  les  peintres  de 
marine.  Van  Cappellen,  Backhuysen  et  Van  de  Velde; 
les  portraitistes.  Bol,  Van  den  Eeckhout  et  Van  der 
Helst;  les  peintres  de  fleurs,  David  de  Heem  et  Van 
Huysum;  et,  au-dessus  de  tous,  Rembrandt,  le  sublime 
coloriste,  le  peintre  de  l'ombre.  F.  Descamps,  Vies  des 
peintres  flamands,  allemands  et  hollandais,  Paris,  1750, 
5  vol.  in-8». 

HOLLANDAiSB  (Langue),  langue  classée  par  les  linguistes 
dans  la  famille  saxonne  on  dmbrique  des  langues  germa- 
niques, et  formant  avec  la  langue  flamande  (K.  ce  mot) 
le  groupe  néerlandais  (  V,  ce  mot).  Elle  n*a  pris  ce  nom 
que  depuis  que  la  Hollande  s'est  séparée  des  Espagnols, 
et,  comme  cette  province  était  la  plus  inu)ortante  des 
Provinces-Unies ,  son  dialecte  a  été  celui  du  gouverne- 
ment et  de  la  nation.  Le  hollandais  ne  s'employait  guère 
encore  au  xvii*  et  au  xviit*  siècle  que  pour  les  versions  de 
de  la  Bible,  les  sermons,  les  ouvrages  de  théologie  et  de 
controverse  religieuse:  les  meilleurs  auteurs  éorivaient 
en  Latin  ou  en  français.  Le  hollandais  a  les  mêmes  radi- 
caux que  les  autres  langues  du  bas-allemand.  Il  change 
assez  ordinairement  en  p  Vf  des  Allemands,  en  v  leur  h, 
souvent  aussi  en  t  leur  s  et  leur  s,  en  d  leur  t,  et  parfois 
en  k  leur  ch.  Il  évite  les  sons  sifflants  et  les  accumula- 
tions de  consonnes,  mais  traîne  les  voyelles  d'une  façon 
disgracieuse.  Comme  en  allemand,  l'accent  tombe  dans 
chaque  mot  sur  la  syllabe  fondamentale.  Le  hollandais 
est  très-riche  en  expressions  relatives  à  la  mer  et  à  la 
marine;  mais  il  est  obligé  d'empmnter  à  l'allemand  la 

{plupart  des  termes  philosophiques.  Moins  hardi  que  Tal- 
emand  dans  la  composition  des  mots,  il  a  aussi  rejeté  « 
chez  les  auteurs  modernes,  les  longues  périodes  et  les 
pénibles  constructions  de  cette  langue.  L'alphabet  hollan- 
dais a  22,  24  ou  26  lettres,  selon  au'on  admet,  ou  qu*on 
rejette  conune  faisant  double  emploi,  tout  ou  partie  des 
lettres  c,  g,  s  et  y.  La  prononciation,  généralement  sem- 
blable à  celle  de  l'allemand ,  présente  les  particularités 
suivantes  :  la  lettre  u  a  le  son  de  notre  diphtbongue  eu, 
le  son  ou  est  rendu  par  la  vovelle  composée  os,  tandis  que 
les  lettres  ou  forment  une  diphtbongue  qui  se  prononce 
oott;  les  lettres  ij  forment  une  diphthongue  ou!  répond  à 
celle  qu'on  entend  dans  le  mot  français  veille;  le  g  a  le 
son  du  ch  allemand.  Des  différences  de  prononciation  et 
l'introduction  d'un  certain  nombre  de  mots  étrangers  don^ 
nent  naissance  à  des  dialectes  locaux,  dont  les  plus  im- 
portants sont  ceux  de  Zélande,  de  Gueldre,  de  Groningae, 
et  celui  de  la  ville  de  Kampen  ou  de  l'Yssel  supérieur. 
V.  Sewel,  Grammaire  néerlandaise ,  Amst.,  1708,  in-8<*; 
Ph.  Lagrue,  Grammaire  hollandaise,  Amst.,  1785,  in-8«t 
Zeydelaar,  Grammaire  néerlandaise,  Amst..  1791,  in-8^; 
Van  Moerbeck,  Nouvelle  Grammaire  hollanaaise,  en  ail., 
Leipzig,  1791,  in-8*;  P.  Weiland,  Grammaire  néerlan- 
daise, 1805;  Van  der  Pyl,  Grammaire  hollandaise  pror- 
tique,  Dordrecht,  in-8*  ;  W.  Bilderdyk,  Grammaire  néer- 
landaise^ La  Haye,  1826,  in-8*  ;  Winkelman,  Dictionnaire 
français-hoUandais  et  hollandais-français,  Utrecht,  1 783» 
2  vol.  in-8®;  P.  Marin,  Dictionnaire  français  et  hollan^ 
dais,  Amst. ,  1793,  2  vol.  in-4<>;  Van  Moock,  Nouveau  "^ 
Dicttonnaire  français-hollandais  et  hollandais^rançais,  : 
2utphen,  1824, 4  vol.  in-8o;  Olinger,  les  Badnes  de  la 
langue  hoUandaise,  €iccompagnées  aune  Grammaire  sim- 
plifée^  Bruxelles,  1818,  in-ll,  et  Dictionnaire  français- 
hmandais,  2  vol.  in-8  ;  Van  Jaarsveldt,  Sur  les  rapports 
du  hollandais  avec  Vallemand,  Amst.^  1818;  F.  Otto» 


HOL 


t037 


ROL 


Enoà  tMorume  H  pratiqué  sur  la  lanaue  0t  la  lUtératttre 
hoUmâaist,  en  «Uem.,  Erlangen,  1839, 2  toI.  in-8*. 

Boujkifi>AiSB  (Uttératore).  Les  Hollandais  n*ont  eii 
qu'assez  tard  une  littéraftare  nationale.  II  n^est  nulle- 
ment  prouvé  qae  la  Chronique  rimée  qui  porte  le  nom  de 
IQoolas  Kolya  remonte,  comme  on  i*a  prétendu,  jusqu'au 
xn*  nëde.  Celle  dans  laquelle  Melis  Stoke  raconta  rhis- 
toire  des  comtes  de  Hollande  iusqu'à  Guillaume  IH,  est 
da  im*.  Le  xiv«  présente  Guillaume  Van  Hilleggersberg 
eides  espèces  de  TOniTères,  appelés  Sprekers  (orateurs^, 
qui  Tisitaieni  les  eoars  des  princes  et  des  seigneurs,  débi- 
tant des  spreuken  ou  proveroes,  maximes,  morales  en  prose 
et  en  Fers.  Des  traductions  ou  des  imitations  de  poèmes 
carloYineiens,  tels  que  Flor9  et  Blanche fletw,  Renaud  de 
Mcntauoan,  etc.,  furent  faites  en  hollandais,  mais  on 
regarde  les  romans  de  Charles  et  Êlégast  et  des  Enfants 
U  Lânbourg  conune  des  œuvres  originales  de  cette  lit- 
térature. Au  commencement  du  xv*  siècle  on  vit  se  for- 
sier,  dans  les  yilles  importantes,  des  corporations  de 
Bedtrijkers  (rhétoridens)  analogues  aux  MeistersoBngers 
allemands. 

Quand  les  Provinces-Unies  eurent  échappé  à  la  domi- 
nation de  TEspagne,  la  littérature  hollandaise  prit  un 
|das  grand  essor,  et  devint  très-florissante.  Le  xvi*  siècle 
rit  piuraitre  des  poètes  nombreux  et  distingués  :  Koom- 
liert,  qui  combattît,  dans  des  poèmes  didactiques,  les  er- 
reoTB  et  les  préjugés  de  son  temps;  Philippe  de  llamix, 
ami  du  prince  d*Orange,  auteur  de  chants  qui  derinrent 
populaires,  et  d'une  œuvre  satirique  en  prose,  intitulée 
B^^enhorf;  fl.-L.  Spiegel,  Rœmer  Visscner  et  ses  filles 
Anne  et  Blarie,  le  chansonnier  Laurent  Reaal,  Dirks 
tes;  Brederode  et  Koster,  qui  donnèrent  les  premiers 
ane  forme  régulière,  Tun  à  la  comédie,  l'autre  h  la  tra^ 
géfie;  P.  Corn.  Hooft,  bien  supérieur  à  tous  les  précé- 
dents, et  qui  excella  dans  tous  les  genres  ;  lan  Vos,  qui 
fbt  son  rival  dans  les  compositions  dramatiques;  J.  Cats, 
dont  les  csovres  sont  pleines  d'un  aimable  enjouement 
Ia  ville  de  Dordrecht  eut  son  école  poétique  pamculière, 
représentée  par  Kamphuysen,   Hugo  Ôrotius,  Daniel 
lottcktyB^  Daniel  Heinsius,  Jérémie  de  Dekker,  Van  So- 
meran.  La  poésie  fut  portée  au  plus  haut  deeré  de  per- 
fection pendant  le  xvn*  siècle  par  Joost  Van  der  Vondel, 
qui  a  publié  des  traductions  d'auteurs  classiques,  des 
chants  lyriques,  des  sonnets,  des  élégies,  des  héroldes, 
des  épitres,  des  satires,  des  tragédies  et  une  Poétiaue.  On 
peat  dter  aprte  lui  Antonides  Van  der  Goes,  poète  lyrique 
et  tragique  estimé;  Heymann  Dullaert,  Const.  Huyghens, 
Joacbun  Oudaan,  Van  Westerbaen  ;  Reinier  Anslo,  dont 
le  poème  de  la  Peste  de  Naples  est  toujours  estimé  ;  Van 
Fockenbroch,  ou'on  a  surnommé  le  Scarron  hollandais; 
Jean  Six,  Jean  deBrœkhuyaen,  Elisabeth  Koolaert,  J.-B. 
Weilekens,  Rotgans,  Moonen,  Vlamins,  1.  Vollenhove, 
toc  Schermer,  Corn.  Poot,  qui  excella  dans  la  chanson  et 
r^ltre.  —  Hooft  ne  fut  pas  seulement  un  poète,  mais 
on  prosateur  remarquable  t  on  lui  doit  une  Histoire  de 
Henri  IV,  une  Histoire  de  la  maison  de  Médicis  et  une 
Ristoire  de  la  lutte  pour  l'indépendance  des  Pays-Bas, 
Gérard  Brandt  écrivit  une  Vie  de  Ruyter  et  une  Histoire 
de  la  Riformation ,  et  Gérard  Van  Loon  une  Histoire  de 
la  Hollande. 

Lorsque  les  écrivains  français  du  règne  de  Louis  XIV 
eurent  ébloui  l'Burope  de  l'éclat  de  leur  renommée,  on 
semât  à  les  imiter  en  Hollande.  Sybrand  Feitama,  traduc- 
teur du  TMnaque  et  de  la  Henriade,  se  fit  le  chef  de 
récole  nouvelle,  dans  laquelle  on  compte,  entre  autres 
poètes,  Hoogvliet,  W.  Van  Haren,  et  son  frère  Zwier  Van 
Hareo.  La  scène  française  fut  également  prise  pour  mo- 
dèle par  André  Pels,  Buisero,  Huijdecoper,  Langendijk, 
Van  SteenwQk.  Biais  l'imitation  étrenêère  ne  pouvait 
être  durable  :  vers  le  milieu  du  xvm*  siècle,  une  femme, 
Lucr.  Wilh.  Van  Merken,  dont  on  a  des  poèmes  histori- 
que et  didactiques,  ramena  la  littérature  nationale  sur 
son  véritable  terrain,  et,  parmi  ceux  qui  marchèrent  en 
poésie  sur  cette  trace  nouvelle,  on  distingue  BelUuny, 
Feîtb,Rieweriand,  Van  Alphen,  Elisabeth  Bekker  et  Agathe 
Deken.  Le  théâtre  reprit  aussi  ses  libres  allures  avec  Van 
Wînter,Jel8,Nomss,  Haverkom,  Uylenbroek,  Doomik,  et 
la  baronne  de  Lannoy.  Au  nombre  dea  prosateurs,  on  re- 
marque Van  Effen,  fondateur  des  journaux  hebdoma- 
daires te  Misanthrope  et  le  Spectateur,  et  les  historiens 
Jean  Wagenaar,  StijI,  Kluit,  Van  Wijn,  Van  llamelsveld, 
llantingbe,Meermann,  Stuart,  Scheltema,  Kampen,  Bos- 
sciia.  Van  Gapelle,  De  Jonge,  De  Vries,  Groen  Van  Pria- 
aerer,etc 

Le  génie  le  plus  puissant  du  commencement  du  xix*  siè- 
cle a  été  Bilderdijk,  qui  brilla  dans  tous  les  genres  de 


littérature.  Autour  de  lui  se  sont  groupés  les  poètes  lyri* 
ques  Kincker,  Helmen,  Spandaw,  Loots  et  ToIIens,  les 
poètes  élégiaques  Simons  et  Borger,  le  poète  bucoliaue 
Loosjes,  les  poètes  didactiques  Hulshoff,  Hennert,  Vas 
der  Bosch  et  Paulus,  le  satirique  Fokke,  enfin  Lulof,  qui 
cultiva  le  genre  descriptif.  Plus  près  de  nous ,  la  poésie 
hollandaise  a  été  repràentée  par  Isaac  de  Costa,  Van  der 
Hoop,  Ter  Haar,  Van  Lennep,  Bogaerts,  Wieselius,  etc. 
ICantelaar  s'est  fait  une  grande  réputation  comme  pané* 
gyri^  et  Van  der  Palm  comme  orateur  de  la  chaire.  Le 
roman  a  jeté  un  assez  vif  éclat  avec  Maria  Post. 

V.  Noèl  Paçiuot,  Mémoires  pour  servir  à  l'histoùre  lit' 
téraire  des  dix-sept  provinces  des  Pays-Bas,  Liège,  i763 
et  suiv.,  3  vol.  in-fol. ,  ouvrage  inachevé  ;  Siegenbeek, 
iTtstotVs  de  la  littércdure  néerlandaise  y  Harlem,  1826, 
in-8°;  Gravenwert,  Essai  sur  Vhistoire  de  la  littércUure 
néerlandaise,  Amst.,  1830,  in-8*. 

HOLOPHRASTIQUË  (du  grec  holos,  tout,  eXphrazô, 
je  parle),  c.-à-d.  exprimant  Vidée  dans  son  tout;  terme 
dont  se  servent  quelaues  linguistes  par  opposition  à  ana- 
lytique, et  qu'ils  apphquent  aux  langues  polysynthétiques. 

HOLY-CROSS  (Abbaye  d'),  en  Irlande,  dans  le  Muns- 
ter, sur  les  bords  de  la  Suir.  Fondée  en  1182  par  Donald 
O'Brien,  roi  de  Limerick,  pour  recevoir  un  morceau  de 
la  vraie  croix  donnée  par  lo  pape  Pascal  II  (d'où  lui  est 
venu  son  nom,  qui  signifie  Satnte^roix)^  elle  n'olRre 
plus  aujourd'hui  que  des  ruines  imposantes,  4es  plus 
curieuses  que  TUe  possède  en  style  ogival.  L'architecture 
de  la  nef  est  inférieure  à  celle  des  transepts,  du  chœur 
et  de  la  tour.  Celle-d,  carrée  et  d'une  grande  élévation, 
est  supportée  par  quatre  arcades  gracieuses,  et  flanquée 
d'élégants  arcs-boutants  découpés  en  pointe.  Deux  cha- 
pelles divisent  l'aile  du  nord  :  l'une,  qui  contient  les 
fonts  baptismaux  et  un  autel  en  forme  de  tombe,  est 
éclairée  par  une  fenêtre  du  plus  étrange  dessin.  Dans  le 
chœur  s^élèvent  une  sorte  do  mausolée,  avec  écussons 
sculptés  aux  armoiries  des  Fitz-Gerald,  et  un  cénotaphe 
qui  parait  avoir  été  destiné  à  recevoir,  pendant  les  ser- 
vices funèbres,  les  corps  des  défunts. 

HOLY-ROOD  (Palais  et  Abbaye  d'),  à  Edimbourg.  Le 
palais  d'Holy-Rood,  ancienne  résidence  des  souverains 
écossais,  est  un  grand  b&timent  de  forme  quadrangulaure, 
avec  une  cour  centrale  :  chaque  cAté  présente  un  déve- 
loppement de  près  de  80  met.  Les  quatre  toura  crénelées 
qui  garnissent  les  angles  lui  donnent  l'aspect  d'une  for- 
teresse féodale.  Il  a  subi  tant  de  changements  depuis  sa 
construction,  qu'on  ne  saurait  attribuer  une  date  prédse 
à  aucune  de  ses  parties.  Les  toura  du  N.-O.,  b&ties  par 
laccpies  V,  passent  pour  la  partie  la  plus  andenne.  Dé- 
truit par  les  Anglais  en  1544,  le  palais  fut  rebèti  peu  de 
temps  aprte  sur  un  plan  plus  vaste,  et  on  dit  qu'il  ne 
reniermait  pas  moins  de  dnq  cours.  Cromwell  le  démolit 
de  nouveau,  à  l'exception  de  l'angle  du  N.-O.  ;  les  autres 
parties  du  monument  actuel  furent  élevées  sous  le  régne 
de  Charles  H ,  sur  les  plans  de  W.  Bruce.  Au-dessus  de 
la  porte  d'entrée  de  la  façade  ocddentale,  on  voit  encore 
les  armes  royales  de  l'Ecosse  :  de  chaque  cèté  s'élèvent 
deux  colonnes  doriques,  qui  supportent  un  entablement 
surmonté  d'une  coupole  en  forme  de  couronne  impé- 
rialo.  Cette  porte  est  gardée  par  des  soldats  vêtus  de  l'an- 
den  costume  national.  A  l'angle  S.-E.  de  la  cour  inté- 
rieure est  un  grand  escalier  conduisant  aux  appartements 
royaux,  qui  furent  habités  en  1703,  et  de  1830  à  1833 
par  les  Bourbons  exilés  de  France.  Le  côté  septentrional 
du  palais  contient  une  galerie  longue  de  49  met.,  large 
de  8*,50,  haute  de  6",  et  où  se  trouvent  114  médiocres 
portraits  peints  par  le  Hollandais  De  Witt  :  ils  passent 
pour  ceux  des  rois  d'Ecosse,  mais  n'ont  aucune  authen- 
tidté.  La  seule  curiosité  vraiment  intéressante  d'Holy- 
Rood  est  la  chambre  à  coucher  de  Marie  Stuart,  que  l'on 
a  conservée  dans  l'état  où  elle  se  trouvait  au  temps  de 
cette  rdne  :  elle  est  située  à  l'anele  N.-0.  Les  ducs 
d'Hamilton  sont  les  gardiens  héréditaires  du  palais.  — 
Au  N.  du  palais  sont  les  mines  de  l'abbaye  fondée  en 
1128  par  David  I"".  Cet  édifice,  de  style  ogival,  fut  pillé 
en  1332  et  en  partie  détruit  en  1544  par  les  Anglais.  La 
nef  qui  avait  été  préservée  fût  d^uiilée  de  tous  ses  or- 
nements lora  de  la  Réformation.  Charles  I*'  fit  restaurer 
ces  ruines,  qu'il  transforma  en  une  chapelle  royale,  où  il 
fut  couronné  en  1(533.  Pendant  hi  République,  la  popn- 
hice  la  dévasta  de  nouveau.  En  1758,  on  la  recouvrit 
d'un  toit  tellement  lourd,  que,  dix  ans  après,  les  murs 
s'aflàissèreot  en  partie  sous  ce  poids.  Depuis  lors  elle  est 
restée  une  ruine.  On  y  voit  les  restes  de  David  II,  de  Jac- 
ques II ,  de  Jacques  V  et  de  sa  femme,  de  Henri  Dam- 
ley,  etc.,  car  l'intérieur  a  servi  pendant  longtemps  de 


HOM 


1038 


noN 


«fanetière.  F.  Hutoneal  dêscriptîon  of  th»  monasiery 
flfid  ehapel  royal  of  Holyrood-Hoiue^  Edimbourg, 
1819 ,  iD-8«. 

HOMBRE  (Jea  del*).  F.  Jbox,  dans  notre  Diction-' 
nair$  de  Biographie  et  d Histoire,  page  1436,  col.  2. 

HOMÉLIE  (du  grec  homilia,  discours  familier,  conyer- 
Mdon;  en  latin  sermo),  nom  donné  anx  discours  qui  se 
fidsaient  dans  Tégllse ,  pour  montrer  que  ce  n'étaient  pas 
des  harangoes  et  des  diaeoiirs  d'apparat  comme  ceux  des 
orateurs  profanea,  mais  des  entretiens  comme  ceux  d'un 
maître  à  ses  disciples  on  d'un  père  à  ses  enCsnts.  Nous 
«Tons  on  srand  nombre  d'homélies  des  Pères  de  l'Église 
grecqae^  S*  Basile,  8*  Jean  GhrysostAme,  S'  Qpâginre  de 
Nsoianae,  etc.  On  en  troure  chez  les  Pères  latins*  dans 
8'  Augustin  entre  autres ,  sous  le  titre  d'Enamiito. 
L'ancienne  homélie  a  été  remplacée  par  le  Prône  (  V. 
te  mot). 

iriOMÉRIDES.  )  V,  ces  mots  dans  notre 

HOMÉRIQDE    (Guerre)}      Dictionnair»  de  Biogra- 

HOHÉRISTES.  I      phie  et  S  Histoire. 

HOMICIDE  (du  latin  homo,  homme,  et  cesdere,  tuer), 
acte  de  tuer  un  homme,  et  celui  qui  a  commis  cet  acte. 
La  loi  française  distingue  plusieurs  espèces  d'homicidoi  : 
Vassassinat,  le  mmtrtre,  le  régicide,  le  pomctds ,  l'ifi- 
fanticide  (V,  ces  mots),  Vhomidde  par  imprudence 
(puni  d'un  emprisonnement  de  3  mois  à  2  ans,  d'une 
amende  «de  50  à  500  fîr.,  et  donnant  lieu  à  des  dom- 
mages-intérêts), et  Vhomidde  par  légitime  défense  {V. 
ce  mot),  La  loi  prend  en  considération  l'ftge  du  coupable 
(  F.  Discernement  ). 

HGMII^TIQUE ,  nom  donné  par  les  ihéteurs  allemands 
à  la  partie  de  la  Rhétorique  qui  concerne  l'éloquence  de 
la  chaire.  Schmidt,  Ammon,  Schott,  HfliTel,  ont  écrit  des 
traités  d'Homilétique. 

HOMIUAIRE,  recoeil  d'homélies  qui  doraient  être 
lues  le  dimanche  dans  la  primitive  Église. 

HOMMAGE.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Diettonnatns  de 

HOMME.        S      Biographie  et  d'Histoire. 

HOMMES  DE  LETTRES.  F.  Gens  de  lettres. 

HOMOEOGRAPHIË.   V.  LiTHOTTPOoaAPHiE. 

HOMQBOMËRIES ,  particules  similaireB  en  nombre 
Infini,  qui  étaient,  suiTant  Anaxagora,  le  principe  maté- 
riel, lasnbatance  de  toutes  choses  (  F.  Aristote,  Métaph., 
1, 3) .  «  Il  pensait,  nous  dit  Diogène  Laêrce  (  Vie  SAnascor 
«  gore) ,  que  les  principes  des  choses  consistent  en  pe- 
«  tites  parties  toutes  semblables  les  unes  aux  autres..., 
«  et  que  l'unîTen  a  été  formé  de  corpuscules,  de  parties 
«  menues  et  conformes  entre  elles.  »  D'après  cela,  on  se- 
rait tenté  au  premier  abord  d'assimiler  les  homœoméries 
id'Anaxagore  aux  atomes  des  Épicuriens.  Mais  il  faut  noter, 
entre  les  deux  systèmes,  cette  différence  tout  à  l'avantage 
d'Anaxagore,  que  les  atomistes  considéraient  leur  matière 
première  comme  douée  par  elle-même  de  la  propriété  de 
se  mouvoir,  tandis  que  la  cause  du  mouvement  et  de  la 
réunion  des  homoBoméries  est  cette  intelligence,  ce  vouç, 
que  Platon  et  Aristote  louent  Anaxagore  d'avoir  nommée 
pour  la  première  fois  le  principe  de  l'arrangement  et  de 
l'ordre  de  Tonivere.  F.  la  note  c  de  l'article  AnaoBogoras 
dans  le  Dictionnaire  critique  de  Bayle,  et  la  thèse  delL  Zé- 
Tort  Sur  la  vie  et  la  doctrine  d^ Anaxagore.       B— b. 

HOMOEOPTOTE  et  HOMGBOTÉLEUTB  (du  grec 
omoios,  semblable;  ptôtos,  qui  tombe;  tMeuU.  termi- 
naison), terme  de  la  Rhétorique  ancienne,  désiçaant 
une  figure  qui  rapproche  des  mots  dont  les  terminaisons 
sont  semblables.  On  a  an  exemple  de  cet  artifice  dans  les 
fers  Boivants  d'Horace  (Sat.  I,  6.  v.  55)  t 

Unltot  MRp«  vint,  nnllls  majoribos  ortof , 
Et  vixlne  probot,  amplis  et  honortbaa  saotM. 

Dana  ce  retour  périodicpie  des  mêmes  oonsonnances  on 
voit  généralement  l'origine  du  mtème  de  veraificadon 
rimée  qui  fut  souvent  employé  dtms  le  latin  du  moyen 
Age.  La  même  figure  se  trouve  dans  les  dictons  popu- 
laires, parce  qu'elle  indique  bien  le  parallélittne  des 
idées  ;  «  Qui  terre  a ,  guerre  a  ;  — Jeux  de  mains,  Jeux  de 
vilotni;  —  Comparaûon  n'est  pas  raison,  » 

HOMOLOGATION  (du  srec  omologéin,  approuver), 
sanction  donnée  par  l'autonté  Judiciaire  à  un  acte  oui  lui 
est  soumis.  Les  délibérations  des  Conseils  de  famille  sur 
les  intérêts  graves  des  mineurs  et  des  interdits  (Code 
Na^,,  an.  448,  457,  483,  511),  les  licitations  ou  par- 
tages  faits  en  Justice,  doivent  être  homologuées  par  le  tri- 
banal  de  i'*  instance.  Lea  concordats  passés  entre  le  failli 
ot  aea  créanciers  doivent  avoir  l'homolontion  du  tribunal 
de  commerce  Cocia  de  Comm*^  art.  521-529).  Lea  actes 


de  notoriété  tenant  lieu,  en  cas  de  célébration  de  ma* 
riage,  des  actes  de  naissance,  doivent  être  soumis  à 
l'homologation  des  tribunaux  de  i"  instance.  Les  tran^ 
actions  autorisées  par  les  conseils  municipaux  doivent 
être  homologuées  par  le  préfet,  quand  la  somme  ne  dé- 
passe pas  3,000  f^.,  et  psr  l'empereor  si  b  somme  est 
plus  considérable.  Les  tarifr  des  chemins  de  fer  doivent 
être  homologués  psr  le  ministre  de  l'agricoHnie,  du  com- 
merce et  des  travaux  publics. 

HOMOLOGUMÈNES,  nom  que  reçorentan  vr*  siècle 
les  livres  du  Nouveau  Testament  dont  l'authenticité  étsit 
prouvée  et  reconnue  de  tous,  par  opposition  aux  livres 
antHogumènes,  dont  l'authenticité  était  contestée. 

HOMONYME  (du  grec  omof ,  semblable,  et  ONoma, 
nom),  se  dit  des  mots  qui  se  prononcent  de  même,  soh 
en  s'éierivant  difTéremment,  comme  oourt  (Ueu  de  prome- 
nade) et  cour  (eqiace  découvert  enfermé  de  murs),  saint 
(du  latin  sanctus,  pur),  sein  (de  nmif),  sain  (de  samif). 
Ceint  (de  ctnelut)  et  seing  (de  signum)^  mer,  mère  et 
maire;  soit  en  signifiant  des  choses  différentes,  comme 
port  (du  latin  por<tt5),abri  pour  les  vaisseaux,  et  port  (do 
verbe  porter)^  manière  de  se  tenir  en  marchant;  cor,  do- 
rillon  aux  pieda,  et  cor,  instrument  de  musique;  Hen 
fpoids)  et  liore  (qu'on  lit),  ««11^  (chiffire)  et  neuf  (nouvesn). 
On  dit  aussi  mon  homonyme,  votre  Aornonyinc,  en  par- 
lant d'une  personne  portant  le  même  nom  que  ceHe  qui 
psrie  ou  à  qui  l'on  s'adresse,  que  ces  noms  soient  ou  non 
conformes  par  l'orthographe.  Les 'mots  homonymes  sont 
une  source  féconde  de  méprises  et  de  fantea  pour  les 
étrangers,  et  pour  les  nationaux  même  qui  commencent 
à  étumer  leur  propre  langue.  F.  L.  Philippon  de  La  Ha* 
deleine,  Des  Homonymes  français,  3*  éditL,  Psris,  1817. 

HOMONTiiBs  (Rimes).  V,  Rime. 

HOMOPHONIE.  F.  Antiphonie. 

HONCHETS.  F.  Jonchets. 

HONGRELINE;  vêtement  militaire  au  xvii«  siècle. 
Cétait  un  pourpoint  fourré,  ouvert  par  devant,  séné  à 
la  taille,  et  muni  de  basques  assez  longues;  lea  manches, 
assez  larges,  descendaient  à  peine  au-dessoua  du  conde< 
et  étaient  gsmies  par  en  bas  d'un  large  retroussis. 

HONGRIEURS  ou  HONGROYEURS,  nom  donné  au- 
trefois à  des  artisans  qui  préparaient  des  arirs  à  la  ma- 
nière de  Hongrie ,  et  anx  marchands  qui  vendaient  ces 
cuirs. 

HONGROISE  ou  MAGYARE  (Langue),  une  des  langues 
ouralo-finnoises.  Les  Hongrois  ont  longtemps  prétendu 
que  leur  idiome  était  seul  de  son  espèce,  sana  rapport  de 
filiation  ou  de  générsution  avec  aucun  autre.  Tout  ce 
qu'on  peut  leur  accorder,  c'est  qu'il  était  delà  formé  à 
une  époque  où  la  plupart  des  langues  actuelles  de  l'Europe 
n'existaient  psa  ou  n'exerçaient  point  d'influence  dans 
la  Hongrie;  c'est  encore  qu'il  oonlient  des  mots  qui  ne  se 
retrouvent  pas  dans  les  autres  langues  connues. -Beancoiq) 
de  mots  honsprois  e^ont  des  analogifes  en  sanscrit,  en 
persan,  en  hébreu,  en  turc,  en  slave,  en  grec,  en  Istin, 
en  allemand,  en  Scandinave,  etc.,  certuna  linguistes 
n'ont  voulu  voir,  au  contraire,  dans  la  langue  hongroise 
qu'un  mélange  de  tontes  sortes  d'idiomes  :  mais  les  Hon- 
grois ont  toujours  possédé  dans  l'histoire  un  caractère 
trop  tranché,  trop  original,  pour  qu'une  langue  bâtarde 
puisse  leur  être  attribuée,  et  leur  contact  avec  les  peo- 
ples  chez  lesquels  ils  ont  passé,  on  qui  dnt  passé  chez 
eux,  suflit  à  expliquer  la  présence  des  mots  étrangers 
dans  leur  langue.  Adelung,  ne  sachant  à  quel  groupe  la 
rattacher,  la  mit,  avec  l'albanais,  à  part  des  autres  Isd- 

Ses  européennes;  ce  sont  Klaproth  et  Baibi  qui  l'ont 
t  entrer  dans  la  famille  des  langues  ooraliennes  00 
finnoises. 

Le  hongrois  a  des  racines  extrêmement  simples,  qni 
peuvent  usément  se  ramener  à  l'état  ntononrUabique,  et 
que  n'altèrent  jamais  les  flexions  qui  s'y  atteignent.  H 
possède  beaucoup  d'onomatopées,  et  une  grande  facilité 
pour  la  composition  des  mots.  On  y  distingue  des  voyelles 
simples,  a,  e,  t,  0,  u,  ^ui  ont  le  son  sigu,  et  des  voyelles 

auiescentes,  d,  é.  i,  ô,u,  <i,  qui  se  prononcent  en  traînant, 
n'y  a  pas  de  aiphtliongues  proprement  dites.  Le  hon- 
grois a  des  sons  partlculiera,  gy,  ny,  ly,  ty^  où  l'y  ne 
sonne  nullement  comme  nn  t,  mais  comme  an  j  se  con- 
fondant avec  la  consonne.  Il  évite  dans  la  prononciation 
la  rencontre  des  consonnes,  au  point  de  préposer  use 
lettre  euphonique  aux  consonnes  doubles  des  radicaux 
étrangers  (ttlpoia,  du  latin  scota).  Il  ne  distingue  pas  les 
genres,  et  exprime  le  sexe,  quand  oda  est  nécessaire, 
par  un  mot  distinct  H  n*a  pss  de  déclinaisons;  les 
flexions  des  cas  consistent  en  particules  qui  se  Jol^oent 
au  radicalf  et  que  les  anciens  grammairiens  prirent  à 


HOTT 


1039 


HON 


tKt  poor  des  termiiudsona  de  cas.  Les  pronomt  possessifs 
H 1»  prépositions  s'expriment  par  des  suffixes.  L'article 
est  exprimé  par  oz  ou  par  a,  selon  ooe  le  substantif  qu'il 
détermine  commence  par  une  Toyelle  on  par  une  con- 
sonne. L'adlectif  est  invariable  quand  il  précède  le  8al>- 
stantif  qu'il  qualifie;  mais,  s'il  le  suit  et  en  est  séparé  par 
le  verbe  être,  il  prend  les  mômes  flexions  que  loi.  lies 
noms  de  famille  sont  considérés  comme  des  adjectifs,  et, 
poor  œla,  s'énoncent  avant  les  noms  de  baptême  (^o- 
tkory  Gabor,  Gabriel  de  Bathor).  Le  comparatif  se  forme 
an  ijeutant  la  lettre  6  à  la  fin  du  positif.  Dans  le  verbe, 
la  3'  personne  du  prient  est  considérée  comme  le  tlième 
on  radica]  pur.  Le  verbe  substantif  se  sous-entend  le  plus 
souvent.  Le  verbe  avoir  exprimant  la  possession  se  rend 
par  le  verbe  être  ayant  pour  sujet  le  nom  de  l'obje;  pos- 
sédé (un  livre  est  à  moi,  au  heu  de  foi  un  livré),  La 
forme  du  fotnr  dans  les  verbes  ne  diffère  pas  de  celle  du 
présent,  et  le  sens  seul  ou  quelque  particule  fait  distinguer 
les  deux  temps  :  l'emploi  d'un  auxiliaire  pour  exprimer 
le  futur  est  relativement  récent.  Les  verbes  actifs  ont  la 
propriété  d'être  conjugués  de  deux  manières,  selon  qu'on 
les  emploie  dans  un  sus  général  on  dans  un  sens  détei^ 
ndné.  Le  bongrois  a  trois  participes,  un  pour  le  présent, 
on  pour  le  paué,  et  un  pour  le  futur. 

I^  Juste  proportion  des  voyelles  et  des  consonnes,  le 
soin  que  Ton  q>porte  à  bien  articuler  les  syllabes  et  à 
nuancer  exactement  les  sons,  donnent  à  la  langue  hon- 
groise beaucoup  d'harmonie,  en  même  temps  qu'elle  est 
redevable  d'une  singulière  énergie  à  la  variété  de  ses 
formes  et  de  ses  constructions.  La  régularité  des  flexions 
et  des  liaisons  la  rend  claire  et  précise.  La  prosodie  et  le 
rbythme  y  sont  tels,  qu'on  a  pu  y  introduire  avec  succès 
les  mètres  des  Grecs  et  des  Romains.  Malgré  ses  ^alités, 
la  langue  hongroise  est  peu  parlée,  ce  qw  s'exphoue  par 
la  coexistence  en  Hongrie  du  slave,  de  l'allemand  et  du 
ralague,  et  surtout  par  cette  circonstance  que,  durant 
plusieurs  siècles,  elle  a  été  exclue  de  l'Église,  de  l'admi- 
Distradon  publique,  des  écoles,  où  Ton  n'employait  que  le 
latin,  et  de  la  haute  société,  qui  préférait  le  Runçais  ou 
l'allemand.  On  y  distingue  4  dialectes,  diflérendÀ  entre 
eux  par  la  prononciation  :  le  paloczen,  parlé  dans  les  co- 
mitats  de  Hévès,  de  Neograd  et  de  Honth  ;  le  maçrar  d'au 
delà  du  Danube;  le  magyar  des  bords  de  la  Théiss;  et  le 
dialecte  des  Szeklers,  oui  vivent  dans  la  Transylvanie,  la 
Bukowine  et  la  Moldavie. 

Les  Hongrois  ont  eu  une  écriture  nationale,  qui  s'est 
perpétuée  presque  jusqu'à  nos  jours  ches  les  Szeklers  : 
mais  l'alphabet  latin  a  été  adopté  lors  de  la  prédication 
do  christianisme.  Seulement,  comme  la  langue  présente 
sn  moins  31  valeurs  phonétiques,  11  a  fallu  augmenter 
cet  alphabet,  en  multipliant  les  voyelles  au  moyen  de 
trémas  et  d'accents,  et  les  consonnes  en  en  réunissant 
plusieurs  qui  transcrivent  des  articulations  spéciales  {zs, 
^2.  i.  Ç^)'  y»  Molnir,  Grammatica  kungarica,  Hanovre, 
1G10,  ia-S^i  Komaromi,  Grammaire  lumgroiee,  Otrecht, 
1655;  Pereszlenyi,  Grammatica  li$èg%UB  Jûmgarica,  Tyr* 
Dan,  i6S9,  in-8°;  1.  Thomas,  Grammaire  française  et 
hongroise,  QEdenburg,  1763,  in-8®;  Gyarmathi,  Gram- 
maire critique  de  la  langue  hongroise,  Clausenberg,  1704, 
2  voL  in-8°;  Nicolas  Rêvai,  Grammatica  hungarica, 
Pesth,  1809,  9  vol.  in-8®;  Tospler,  Grammaire  théorique 
et  pratùgue  de  la  langue  hongroise,  en  allem.,  Pesth, 
1842  ;  J.  Eiben,  Nouvelle  Grammaire  hongroise,  Lem- 
berg,  1843,  in-8°;  Molnàr,  Dictionarium  latino-hungari' 
eum,  Nurembei^,  1606,  in-S**  ;  Pariz  Papai,  Dictionarium 
laUno-hungaricum,  Leutschau,  1708  ;  Dankowsky,  Mar- 
gyaricœ  linguœ  Lexicon  critico-etymologicumj  Pres- 
boui^g,  1833,  in-^^"  ;  Michel  Kis  et  Ignace  Paradis,  Nouveau 
Dictionnaire  de  poche  français-hongrois  et  hongrois^ra»' 
çais,  Pesth,  1844,  in-12;  Vlrag,  Magyar  prowdia,  Bude, 
1820,  in-8^;  Ortelli,  Harmonia  Imguarum,  speciatim 
humgaricœ  cum  hehrîoBà,  Wittemberg,  1746,  in-8*;  Bere^ 
nazi.  Sur  la  ressenhblance  de  la  langue  hongroise  avec  &s 
îangues  orientales,  en  allem.,  Leipâg,  1706;  Gyarmathi, 
AflUeitas  linguœ  hungaricœ  cum  Itnguis  fennicœ  originis, 
GcBttingue,  1700,  in-8o;  F.  Thomas,  Conjectures  de  ori- 
amœ,  prima  sede  et  linquà  Hungarorum,  Bude,  1806, 
9  voL;  Peringer,  Sur  la  langue  magyare,  en  allem., 
Vienne,  1833,  in-e**  ;  Horvat,  »ur  les  duUectes  de  la  Bon- 
grie,  1821  ;  Fogarasi,  Métaphysique  de  la  langue  Aon- 
groise,  en  allem.,  Pesth,  1834;  Benkovich,  Sur  VoriginM 
des  Bongrois  et  de  leur  langue,  Presbourg,  1836. 

H01I6B0CSB  (Littérature).  Dès  le  xi*  siècle,  la  dvillsatioD 
avait  }eté,  ches  les  Magyares,  d'assez  profondes  racines 
pour  qu*nne  Ûttérature  nationale  pût  se  développer.  Mal- 
oeureosement,  à  la  suite  de  l'établissement  du  christia- 


nisme en  Hongrie,  le  latin  fut  substitué  à  la  laagni 
populaire  pour  Te  culte,  les  procédures  devant  les  triba* 
naux,  la  rédaction  des  documents  authentiquas  et  dH 
actes  légaux.  Nous  ne  perlerons  ni  des  écolea  et  sodétés 
savantes,  fondées  et  entretenues  pendant  plusieurs  siècles 
par  la  munificence  des  souverains;  ni  des  chroniques 
latines  dont  un  grand  nombre  sont  encore  ensevelies  en 
manuscrit  dans  les  archives,  et  dont  beaucoup  d'antret 
ont  péri  au  milieu  des  bouleversements  politiques;  ni  daa 
historiens  Simon  Von  Réza,Calanus,  Thomas  Spalatensifl« 
Rogerius,  Jean  de  Kikellô,  Laurent  de  Monacis,  Bonfinioa, 
Galeotus,  Ranxanns,  Tubéro,  Vérandus,  Ratkai,  Sambn* 
eus,  Istvansi,  etc.;  ni  des  philosophes  et  mathémati* 
dens  Pierre  de  Dade,  Boscovich,  Segner,  Ranch,  Mko* 
vinyi,  etc.;  ni  des  orateurs  et  des  poètes,  comme  Janus 
Pannonius,  Zalkan,  François  Hunyade,  Dobner,  Pal- 
lya,  etc.  Toute  cette  littérature,  qui  employait  une  Ungue 
antipathique  au  génie  national,  resta  le  partage  exdusif 
d'une  classe  privilégiée. 

La  langue  latine  n'étouffa  cependant  pas  complètement 
l'idiome  magyare,  qui  se  conservait  dans  les  rdations  de 
la  vie  commune,  dans  les  camps,  dans  les  fêtes  dome^ 
tiques  ou  populaires,  dans  les  assemblées  politiques.  On 
a  recueilli  des  fragments  d'hymnes  guerriers,  de  chants 
populaires  et  de  sermons  en  bongrois.  Les  annales  de  la 
Hongrie  parlent  du  Cantus  jaculatorum  et  truffatorum, 
La  préface  du  décret  de  Goloman  dans  le  Corpus  juris 
Bungaria  porte  qu'il  a  été  traduit  du  hongrois,  et  on  pré- 
tend que  la  Bulle  d'or  d'André  H  existe  encore  en  ori(dnal 
dans  cette  langue.  Ce  ne  fut  toutefois  qu'au  xiv*  siècle^ 
sous  le  p)uvemement  des  princes  de  la  maison  d'Ai^ou, 
que  la  littérature  nationale  sortit  pour  quelque  temps  de 
son  état  de  proscription  et  prit  un  plus  libre  essor.  On 
rédigea  en  hongrois  des  actes  pubhcs  et  des  lettres  <  de 
cette  époque  date  la  formule  de  serment  en  hongrois,  <|ni 
se  lit  encore  dans  le  Corpus  juris  Bungaria.  La  Bibho- 
thèoue  impériale  de  Vienne  possède  un  manuscrit  de  l'an 
1382,  renfermant  une  traduction  de  plusieurs  livres  de  la 
Bible,  essai  qui  fut  suivi  de  traductions  complètes  des 
Saintes  Écritures  par  Ladislas  Bathori  en  1450  et  par 
Bertalan  en  1508.  Dès  1465,  Janus  Pannonius  composa 
une  Grammaire  hongroise,  qui  ne  nous  est  pas  parvenue. 

Avec  le  XVI*  siècle  s'ouvre  une  période  plus  favorable 
pour  la  littérature  hongroise  :  les  mouvements  politiques 
et  religieux  donnent  aux  esprits  une  rive  impulsion» 
Bien  que  les  princes  de  la  maison  de  Habsbourg  se  soient 
efforcés  de  faire  prédominer  l'allemand,  ou,  à  son  détent, 
le  latin,  Ferdinand  I*'  doit  s'engager  solennellement,  ea 
1526,  à  respecter  la  langue  et  la  nationalité  des  Magyares. 
Pour  instruire  le  peuple,  dans  son  propre  idiome,  des 
destinées  de  ses  ancêtres,  Szék^,  Temesvéri,  Heltd, 
Bartha,  Lisznyal,  écrivent  leur^  âironlgues  bongrolseB. 
Des  traductions  de  la  Bible  sont  publléiBs  par  KomJAti, 
Pesd,  Sylvestre,  Juhész,  Félegyhazi,  Karolvl,  Mdnér, 
Kéldl,  Komàrômi,  Tôtfalusi.  Des  orateurs  éloquents  se 
révèlent  :  Gaal,  lÀvidis,  Kultsàr,  Bomemissa,  Telegdl  et 
Detsi  au  xvi*  siècle,  Paiman,  Ketskemeti,  Zvonariti, 
Koptsanyi,  Margitai  au  xvu*.  Dans  la  poéde  sacrée  se 
distinguent  Batfzi,  Pétsi,  UJfalri,  Skaritzal,  Fabridus, 
Fazékas,  Geld,  Di\|ka,  Megyed«  etc.  Jamais  on  ne  com- 
posa plus  de  chants  destinés  à  rap^er  les  exploits  des 
héros  natkMiaux,  à  raconter  les  vieilles  histoiràs  ou  les 
rieux  contes  :  panni  ceux  qui  brillèrent  dans  ce  genre 
de  littérature,  on  dte,  Gséti,  Tinédi,  Kikonyl,  Tnnàdl, 
Valkai,  Tsàktomy,  Tserényl,  Szegedi,  niesCalTi,  Sztair, 
Balassa,  lUosvai,  Verès,  Enyedi,  SzOllOd,  etc.  La  poéne 
épique  prend  ausd  un  prend  essor  avec  le  comte  Niklas 
Zrinyi,  Ladislas  Ussti,  Christophe  PiskO,  le  comte 
Etienne  Kohair,  et  Etienne  de  Gy5ngyOsi.  Dans  la  poéde 
Ivrique,  Rimai  et  Benitxky  se  sont  filt  un  nom  cdèbce. 
On  publie  une  foule  de  Grammdres,  de  Dictionnaires  et 
d'autres  ouvrages  de  philologie. 

Cette  littérature  hongroise,  d  nleine  de  sève,  d  vi^Mh* 
reuse  dans  ses  développements,  fut  éioullée  an  xvm*  d^ 
de  par  les  winces  autrichiens,  parce  que  la  langue 
nadonde  était  conddérée  comme  la  source  des  hérésies 
et  des  révoltes,  et  le  ladn  rederint  plus  florissant  que 
lamds.  Toutefois,  le  hongrois  fut  encore  employé  dans 
la  poésie  parFaludi,Bessenyei,  Paul  Anyos,  KAlmar.  Bé- 
rotd,  Révd,  etc.  Biais  les  efforts  de  Joseph  II  pour  aoolli 
la  Constitution  hongroise  et  pour  imposer  l'allemand 
comme  langue  des  affaires  publiques  amenèrent  une  réa^ 
don  dolente.  En  1781  Mathieu  Ràth  publia  le  premier 
loumd  en  langue  hongroise.  En  1700,  après  la  mort  de 
Joseph  n,  la  Diète  hongroise  rendit  l'étude  de  cette 
langue  obligatoire  dans  les  écoles^  et  en  prescrivit  l'emploi 


HON 


1040 


HOH 


^buii  tous  les  tctes  pnblic&,  politiqoes  «t  JudidalrM;  des 
théâtres  hongrois  s'ouvrirent  à  Ofen  et  à  Pesth  ;  on  fonda 
des  Revues  purement  littéraires.  Cette  nouvelle  nériode, 
qui  commença  à  la  fin  du  xviu*  siècle,  a  été  féconde. 
fiant  la  poésie  on  remarque  Joseph  Rajinis,  Gabriel 
D^rka»  Kasinczy,  Verseghi,  Csokonai,  Virig,  Jean  Kis, 
Bmienji,  Kisfaludy,  Paul  Szemere,  RAday,  Szeutzobi, 
K51esey,  Witkovics,  Szent-Miklosy,  André  Horv&th,  Er- 
délyl,  kerényi,  lâsznvai,  Jean  Arany,  et  surtout  Giuzcor, 
VOrOsmar^  et  Petoeff.  Parmi  les  prosateurs  nous  cite- 
ions  :  le  bsron  Jésika,  qui  a  pris  pour  modèle  Walter 
Scott  dans  ses  romans;  les  romanciers  Kuthy,  Nagy, 
PA]f^«  Tompa,  Dobsza;  les  historiens  Etienne  et  Michel 
Hormh,  Ssalay,  Jaszay;  les  géographes  Fényes  et  Palu- 
gyai  ;  les  auteurs  dramatiques  Cœtvoes,  Ohemyik,  Gàl, 
BÉaké,  Ladislsa  Teleki,  Szigligeti. 

V.  WaUaszki,  CofuptckM  rBipMkœ  lUUrarim  in 
Ungaria,  Presbourg,  1785,  hi-8*;  BndrOdy,  Histoire  du 
théâtre  hongrois,  Pesth,  1703,  3  vol.  in-8*  ;  Gil,  Théâtre 
du  Hongrois,  Brann,  1820;  Fanveri  et  Toldy,  Manuel 
de  la  poésie  hongroiu,  Pesth,  1828,  2  vol.  in-8*;  John 
Bowring,  Aperçu  de  la  langue  et  de  la  littérature  de  la 
Hongrie  et  de  la  Transylvanie,  en  anglais,  Londr.,  1830, 
ln-8*;  Stettner  et  Schedel,  Manuel  de  la  poésie  hon- 
groise, Vienne,  1836;  Toldy,  Histoire  de  la  littérature 
hongroise,  2*  édit.,  Pesth,  1853,  3  vol. 

HONGROYEURS.  V.  Hongbiburs. 

HONNÊTE.  Uhonnéte  est  pris  ordinairement  comme 
monyme  du  devoir,  psrce  au'il  a  comme  lui  un  carac- 
tère obligpirtoire;  mais  il  semble  entrer  encore  plus  déli- 
catement dans  tontes  les  nuances  de  la  vie  morale,  et 
d'aÛleurs  nous  avons  le  sentiment  de  Thonnète  avant  de 
bien  comprendre  le  devoir  par  la  raison.  Cependant,  s'il 
introduit  en  quelque  sorte  la  loi  morale  Jusoue  dans  les 
bienséances  sociales,  il  subordonne,  comme  le  devoir,  la 
passion  et  Hutérét  à  la  loi  universelle  et  absolue  du  Juste, 
et,  comme  lui  encore,  il  se  distingue  de  VagréaMe  qui 
flatte  la  sensibilité,  et  de  VutUe  qui  n*est  qu'une  affure 
de  calcul  :  il  reste  digne  d'éloge,  dit  Gicéron,  quand 
mâme  il  ne  rapportendt  ni  utilité,  ni  récompense,  ni 
profit.  On  s'accorde  à  reconnaître  quatre  sources  de  l'hon- 
nête :  la  prudmce  on  la  saqesse,  verta  nécessaire  dans 
l'ordre  de  Tintelligence;  la  justice,  qui  n'est  qae  l'hon- 
BéCe  considéré  dans  tontes  les  relations  sociales  \  la  force 
(m  fermeté  de  caractère;  la  tempérance,  qui  comprend  la 
modération  en  toutotchose.  R. 

HONNEUR.  Cest,  dans  le  sens  le  plus  rigoureux,  ce 
qoi  porte  l'homme  à  conformer  sa  conduite  à  Vhonnéte, 
oe  qui  lui  mérite  l'estime  et  parfois  l'admiration  de  ses 
seoiolables,  <piand  il  fait  ce  qui  est  moralement  beau. 
L'honneur,  amsi  entendu ,  est  un  principe  d'action  qui 
porte  à  fidre  ce  qui  distingue,  ce  qui  ennoblit,  ce  qtd  orne 
la  vie.  Il  suppose  le  respect  de  soi-même,  la  décence  et  la 
loyauté  dans  les  restions.  De  là  résulte  un  second  sens 
dn  mot  honneur,  qui  est  la  considération,  la  bonne  répu- 
tation; reflet  prend  le  nom  de  la  cause.  Ce  dernier  sens 
est  le  plus  commun,  et,  par  suite,  Thonneur  dépend  en 
partie  de  Topinion,  qid  peut  le  dénaturer.  De  là  ce  qu'on 
appelle  le  potfit  d'honnsur,  qui  pousse  quelquefois  à  faire 
ce  que  défend  la  loi  morale.  L'honneur  alors  n'?st  plus 
que  le  respect  humain ,  mal  compris.  —  Honnjîirs,  di- 
ffnités,  se  distinguent  de  Vhonnmir  :  «  On  peut  être  à  la 
fois  couvert  d'infamie  et  de  dignités  »,  dit  Montesquieu. 

Dans  certains  jeux,  tels  que  le  whist,  le  boston ,  les 
honneurs  sont  les  figures  et  les  as.  —  On  appelle  encore 
honneurs  certains  présents  qui  se  font  au  sacre  des  rois  et 
des  prélats,  comme,'  en  France,  un  vase  de  vermeil ,  un 
pain  d'or  ou  d'argent,  des  médailles  d'or.  R. 

Homonm,  dieu  allégorique.  (  Y,  notre  Dict,  de 

HomiBiJa  (Chevaliers,  Dames  d').   (     Biogr,  et  d'Hist, 

HONNBua  (Légion  d').  V,  Légion. 

HONORAIIŒS,  mot  qui  s'emplovait  Jadis  pour  dési- 
gner les  traitements  des  fonctionnaires  d'un  ordre  élevé, 
et  qui  ne  désipe  plus  que  la  rétribution  due  aux  services 
et  aux  soins  des  personnes  qui  exercent  certaines  profes- 
dons  libérales,  par  exemple  les  médecins  et  les  avocats. 

HONORAT  (La  Vie  de  S<),  poôme  provençal  où  l'his- 
lohra  du  saint  est  rattachée  à  toutes  les  traditions  de 
l'épopée  cariovingienne.  Cet  ouvrage  est  surtout  curieux 
parce  qu'il  fait  connaître  on  grand  nombre  de  romans  an- 
Joard'hoi  perdus.  Il  fut  composé  vers  la  fin  dn  xm*  siècle 
par  Ramond  Feraud,  moine  de  Lérins.  Il  existe  manus- 
crit àla  RIbliothèque  nationale  de  Paris.  V.  Histoire  lit- 
téraire de  la  France,  tome  XXII;  Sardou ,  la  Vida  de 
Sont  Honorât,  analyse  et  morceaux  choisis,  avec  la  tra- 
duction, Paris,  1858,  gr.  in-8».  H.  D. 


HONVEDS,  c-èrd.  en  hongrois  défenseurs  du  9ay%, 
nom  qu'on  donnait  fadis  en  Hongrie  aux  soldats  indi- 
gènes, et  plus  tard  à  toute  l'armée. 

HOPITAL.       l  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

HOQUETON.  {      de  Biographie  et  d'Histoire. 

HORATIA  (i^lonne).  F.  Coijonhbs  monoveiitales,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire^  page  634, 
col.  1. 

HORION,  casque.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d^Histoire. 

HORLOGE,  instrument  propre  à  mesurer  la  marche  du 
temps.  Les  peuples  de  l'antimiité  n'ont  employé  à  cet 
usage  que  les  sabliers,  les  caonns  solaires  et  les  clep- 
sydros.  On  arriva,  vers  l'époque  du  Ras-Empire,  à  ob- 
tenir des  horloges  d*eau  à  mouvement  continu;  c'étai 
une  horloge  de  ce  genre  que  le  calife  Haroun-al-Raschid 
envoya  en  présent  à  Chariemagne.  L'horloge  exécutée 
au  a*  siècle  par  Pacifions,  archimacre  de  Vérone,  et  qui 
marquait  les  heures,  le  quantième  du  mois,  les  Jours  de 
la  semaine,  le  lever  et  le  coucher  du  soleil,  les  signes  du 
zodiaque,  etc.,  était  mue  également  par  une  force  hy- 
dreuliaue.  Ce  fut  au  x*  siècle  que  les  norioees  purement 
mécaniques  furent  inventées,  et  l'on  a  attribué  cette  dé- 
couverte à  Gerbert  (le  pape  Sylvestre  II).  Le  rouage  de 
la  sonnerie  parut  au  xn*  siècle  :  on  en  trouve  la  première 
mention  dans  les  Usages  de  l'ordre  de  Citeaux^  compilés 
vers  1120.  Au  commencement  du  xiv«  siècle,  on  com- 
mença de  fidre  des  horloges  monumentales  en  Allemagne 
et  en  Italie.  Celle  qui  fut  placée  en  1344  sur  la  tour  da 
palads  de  Padoue  émerveilla  les  contemporains  à  un  tel 
point,  que  l'auteur,  Jacques  de  Dondi,  reçut  le  surnom 
de  Horologius,  porta  aussi  par  ses  descendants.  Un  Alle- 
mand, Henri  de  Vie,  attiré  à  Paris  par  Charles  V,  fit 
l'horloge  de  la  tour  du  Palais  de  Justice,  où  l'on  trouvait 
déjà  les  principes  de  l'horlogerie  moderne,  un  poids 
pour  moteur,  une  pièce  oscillante  pour  régulateur,  et 
l'échappement.  Cette  horloge,  dont  le  cadran  fut  décoré 
par  G^main  Pilon  au  xvi*  siècle,  subit  diverses  modi- 
fications Jusqu'au  xvni*,  époque  où  elle  fut  détruite.  Une 
autre  honose  fut  faite  vera  1380  par  Jean  Jouvence  pour 
le  château  de  Montargis.  On  fit  d'assez  bonne  heure  des 
horioges  très-compliquées  :  tantôt  c'étaient  des  carillons 
qui  indiquaient  le  temps,  tantôt  des  personnages  méca- 
niques qui  venaient  jouer  des  scènes  à  certains  moments. 
Celle  que  Pierre  de  Chalus,  abbé  de  Cluny,  fit  placer 
dans  son  église  vers  le  milieu  du  xiv*  siècle,  portait  un 
calendrier  pei^iétuel,  indiquant  l'année,  le  mois,  la  se- 
maine, le  Jour  et  les  minutes,  et  un  calendrier  ecclésias- 
tique indiquant  les  fêtes  et  les  ofiîces  de  chaque  jour, 
les  positions,  oppositions  et  conjonctions  des  astres,  les 
phases  de  la  lune,  etc.;  chaque  Jour,  dans  une  niche  su- 
périeure ,  se  présentaient  des  personnages  mécaniques 
Jouant  une  scène  religieuse  ;  les  heures  étaient  annoncées 
par  un  coq  qui  battait  de  l'aile  et  chantait  deux  fois  ;  au 
même  moment  un  Ange  ouvrait  une  porte  et  saluait  la 
S^*  Vierge,  le  S^  Esprit  descendait  sur  sa  tête  en  forme 
de  colombe,  le  Père  étemel  la  bénissait;  un  carillon  har- 
monique se  faisait  entendre  ;  on  voyait  s'agiter  des  ani- 
maux fantastiques  qui  remuaient  la  langue  et  les  yeux, 
et  tout  disparaissait  à  la  fois  après  l'heure  sonnée.  Près- 

3ue  toutes  les  églises  et  les  benrois  finirent  par  posséder 
es  horloges  plus  ou  moins  curieuses  ;  on  cite  particulière- 
ment celle  de  Courtrai,  transportée  à  Dijon  par  ordre  du 
duc  Philippe  le  Hardi  (F.  Jacqueuast),  celles  de  Lyon, 
de  Caen,  de  Ulle,  de  Metz,  d'Auxerre,  de  Sens,  de  la  Sa- 
raaritidne  à  Paris,  du  ch&teau  d'Anet  (V,  ce  mot)^  de 
Moulins,  de  Eesançon,  etc.  On  voit  encore  à  Berne  une 
ancienne  horloge  à  jeu  mécanique,  œuvre  de  Gaspard 
Bruner  :  à  toutes  les  heures,  un  coq  chante,  un  fou  frappe 
sur  deux  cloches  avec  de  petits  marteaux;  un  personnage 
assis  sur  un  trône  ouvre  une  large  bouche,  et  baisse  d'une 
main  un  sablier,  de  l'autre  un  sceptre,  autant  de  fois  que 
les  marteaux  frappent;  devant  lui  défilent  de  petits  ours, 
les  uns  à  quatre  pattes,  les  a»tres  à  cheval  ou  debout, 
quelques-uns  couronnés,  ou  cuirassés  et  armés.  L'I^or- 
loge  actuelle  de  la  cathédrale  de  Strasbourg  [V,ce  mot)  \ 
ne  date  que  de  1842.  Aujourd'hui  on  ne  s'attache  pins  ' 
aux  horloges  monumentales  à  pièces  mécaniques;  on  \ 
fait  encore  des  horloges  mécaniques  sous  forme  de  ta-  j 
bleaux  pour  l'ornement  des  appartements.  V.  Berthoud ,  ^ 
Histoire  de  la  mesure  du  temps  par  les  horloges,  Paris, 
1802,  2  vol.  in-4»;  P.  Dubois,  Histoire  et  traité  de  Vhor- 
logerie,  Paris,  1850,  in-4®. 
HOIlLOGERSy  ancienne  corporation,  oui  avait  pour 

Îatron  S'  Éloi.  Les  statuts  qu'elle  reçut  ae  Louis  XI  en 
483  furent  confirmés  par  François  P',  Henri  H,  Cha^ 


HOT  1011 


HUD 


hi  a,  Henri  IV  et  Louis  XIV.  L'apprentlnage  était  de 
San  !  le  brevet  coûtait  54  UTrea,  et  la  maltiiae  900  li- 
Ttei.  Un  airftt  da  Conseil,  en  date  du  8  mai  1043,  aitrei- 
Kirit  toi  horlogers  à  mettre  leur  nom  aux  boites  de 
DMmtni  qnMls  Tendraient. 

HOmi,  chanson  de  geste  qui  est  le  développement 

(fane  ancienne  ballade  qu*on  chante  encore  en  Ecosse. 

Hora  est  aimé  de  Rimel,  fille  du  roi;  fl  est  exilé  ;  mais, 

Btiot  de  partir,  il  fait  promettre  à  sa  fiancée  de  lui  être 

lldte  pendant  sept  ans.  Ce  temps  écoulé,  il  se  prtente, 

dégoiaé  en  mendiant ,  dans  la  salle  du  festin  on  Ton  cé- 

lénait  les  noces  de  lUmel  avec  un  roi.  La  ienne  fille  le 

reconnaît,  et  quitte  son  royal  époux  pour  suivre  le  men- 

diaot;  mais  Hom  était  un  vaillant  chevalier,  et  RÎmel , 

en  partageant  son  sort,  monte  bientôt  sur  un  trône.  — 

Cette  ct5mson  est  conservée  dans  trois  manuaaits  qui 

appartiennent  an  Musée  britannioue,  à  la  bibliothèque 

d'ôiford  et  "h  celle  de  runiversHé  oe  Cambridge.  M.  IVan- 

dwpe  Uichel  a  donné  à  Paris,  en  1845,  un  volume  sous 

ce  titre  :  Hom  H  RimenhUd ,  recueil  de  ce  qui  reste  des 

poèmes  relatifo  à  leurs  aventurée,  composés  en  français, 

ca  an^tais  et  en  écossais,  dans  k»  xm%  xnr*,  xv*  et 

m*  sKclea,  publié  d'après  les  manuscrits  à»  Londres,  de 

Giabridge,  d'Oxford  et  d'Edimbourg.  Gee  morceaux  sont, 

outre  le  poicme  franods  :  Thê  geste  of  kyng  Bom:  Hom 

dMê  amd  maîdefi  RmnMj  YoungHunhom»;  Bynd»' 

hom;  BUttbrahmUi  BadtArani.  V.  BûUrin  littMtre 

de  la  Fnmc€,  tome  xxn.  H.  D. 

HOROLOGION,  livre  de  chant  de  rÉ^Hse  grecque, 
renfermant  les  Heures  (Prime,  Tierce,  SextÎB  et  None;. 

HORS  DE  COUR,  en  termes  de  Jurisprudence,  Juge- 
ment qui  renvoie  les  parties  parce  qu'il  n^  a  pas  siget  de 
Halder.       

HORS-D'OEDVRE,  en  Architecture,  tout  ee  oui  ne  Ikit 
ponit  partie  de  rordonnance  générale  ;  —  en  Littérature, 
tout  ce  qui  aemble  ajouté  apri»  coup  dana  un  ouvrage,  et 
peut  en  être  retranché  sans  nuire  à  l'ensemble. 

HOSANNA ,  mot  dérivé  de  l'hébreu,  où  il  signifie  San^ 
ses,  J0  vous  yrts,  et  qui  est  une  formule  de  bénédiction 
et  dlieareox  souhait.  Les  Juifs  appelaient  Bosawna  les 
prières  ira*i]s  récitaient  le  7*  Jour  oe  la  ftte  des  Tid>er- 
asdes,  ûnA  que  les  branches  de  feuillace  qu'ils  sciaient 
Mdant  cette  fête;  la  fête  elle-même  était  dite  GramA- 
ïotamia.  —  Dana  la  Lituri^e  catholique,  une  hymne  du 
Jeer  dea  Rameaux  a  été  appelée  ffosaniui,  parce  qu'elle 
CMunence  par  ce  mot* 

HOSPICE.  \ 

l^mAUrtf  •  (  î^.  ces  mets  dans  notre  DfcHo». 

BOSPinDM. 
HOSPODAR. 

HUS'nE.  Ce  mot*  qui  avait  un  sens  particulier  pour  \ 
Im  Anciens  (7.  notre  Dictionfiotre  de  Biograiphis  et  éTBis  i 
trir§)^  dé^gne  chei  les  chrétiens  JésusH3irist,  qui  s'er  .  ^ 
iauBolé  pour  les  hommes  comme  une  victime  {en  latf .  . 
Aostio),  et  le  p«dn  desdné  au  sacrifice  eucharistioue. 

H06TnjrnUM.  Cétait,  an  temps  des  Carlovingiens, 
prestation  de  gfaerre  consistant  en  bosufii  et  en  cha- 


fwtrs  de  Biogn^hk  ot  d^Bistoire, 


nrSSSTnnm         l  F.  notre  Diottomiatrs  de  i^îogra- 

H0ÎarD??iLLB,î     Phie^d:BistoirB. 

HOTEL  GARNI ,  maison  meublée,  tenue  par  une  per- 
mme  patentée,  qui  loue  chaooe  chambre  au  Jour  on  au 
Doio.  I/hMéi  garni  a  remplacé  l'AdteUerte  et  Vauberge,  et 
est  eomnis  aux  mêmes  règlements.  F.  Aobergistb. 

HOTTE,  partie  du  tuyau  d'une  cheminée  de  cuisine 
on  de  taJxM^koire,  et  Jadb  de  certains  grands  apparte- 
menta,  qui  commence  ao-deeaos  et  en  retrait  du  man» 
teaiiy  mais  en  saillie  sur  le  mur  de  Pappartement,  et  qui 
monte  en  alnclinanten  airière  Jusqu'au  plafond. 

HOTTENTOTB  (Langue  des),  une  des  langues  de 
rAMqoe.  Elle  a  pirar  caractère  distinctif  une  sorte  de 
doqnement  anslogne  au  petit  bruit  qui  nous  est  familier 
iaaa  ui  oecès  d'impatience,  ou  à  celui  oue  nous  produi- 
•one  poor  ùàn  partir  un  elieval  on  accélérer  ea  marche, 
et  «lof  précède  immédiatement  la  prononciation  de  la  plu- 
part des  mots  et  des  syllabea.  «  Quand  une  demi-dou-* 
saine  de  Botlenlols,  dit  Thunberg,  parient  ensemble,  on 
croirait  entendre  caqueter  dos  oies.  »  La  Isngue  des  Hot- 
aentots  a  de  fortes  aspirationa,  dans  lesquelles  on  entend 
prédominer  des  dipnthongues  prolongées  et  ouvertes, 
tdlesqœ  00,  ooii,aaM,  «m.  Les  lettres  i,f,  v,  «d  man- 
quent ,  afaisl  que  les  sUBsntes;  le  d  et  le  g,  le  6  et  le  d  se 
eoofendent  souvent.  Le  hottentot  est  une  langue  d'affilu- 
11  ne  possède  ni  article,  ni  pronom  relatfi!|  ni 


déclinaisons,  ni  conjugaisons,  ni  jethm  aadHaireB,  el  H 
fant  avoir  égard,  pour  y  auppléer,  au  sens  de  la  phrase, 
à  l'etpreesion  de  la  physionomie,  à  llntonation  et  aux 
gestes.  Les  substantin  ont  deux  genres  an  singulier,  et 
trois  au  pluriel  ;  le  3*  a  une  valeur  collective.  Dans  les 
pronoms,  la  distinction  dee  genres  s'^nd  aux  trois  per< 
sonnes,  msis  le  neutre  n'existe  que  pour  le  singulier. 
L'adiectif  ne  prend  la  marque  ni  du  oenre,  ni  du  nombre. 
On  distingue  quatre  dialectes  dans  u  Isngue  hottentote, 
le  hottentot  proprement  dit,  le  dialecte  dM  Boschimans, 
ceux  des  Namaquas  et  des  Koranas. 

HOUARI  (de  l'anc^aîs  wherry),  bâthnent  de  esbotsge- 
àdeux  mâts  portant  deux  voiles.  Des  votlev  sont  dites 
en  houari ,  quand  ce  sont  des  voiles  triangulaires  dont  la 
ralingue  (cordage  cousu  à  l'entour)  est  élevée  psr  sa 
v^gue  au-dessus  du  màt. 

HOUPELANDE  on  HOUPPELANDE,  nom  donné  au 
XV*  siècle  à  une  sorte  de  robe  de  chambre,  garnie  de  • 
manches  traînant  à  terre,  fendue  par  devant,  assujettie  < 
au  cou  par  un  collet  droit  et  montant,  et  serrée  à  la 
taille  par  une  ceinture.  Après  la  Révolution  fhmçaise, 
on  rappliqua  à  un  vêtement  laige  qu'on  porta  par-dessus 
l'habit  pour  dissimuler  la  carma^ole;  pendiint  l'hiver 
on  en  fit  une  redingote  loncue,  garnie  et  nordée  de  four- 
rures ou  de  velouTi.  L'armée  portait  depuis  longtemps  de 
longs  manteaux  ou  cabans  qu'on  appelait  ansn  houppe- 
landes. La  douillette,  qui  fut,  au  commencement  du  xn* 
siècle,  le  vêtement  de  dessus  des  magittrata,  dea  méde- 
cins et  autres  personnsges  graves,  était  une  sorte  de 
houppelande  I  elle  n'est  plus  portée  que  nar  certains 
ecclésiastiques.  Le  nom  de  houppelande  viendrait,  dit- 
on,  de  ce  que  ce  vêtement  aurait  été  importé  de  llJpland  : 
mais  il  est  bien  peu  probable  qu'une  province  de  la  Suède 
ait  Jamais  influé  sur  les  modes  de  rEurope  occidentale. 
Avant  que  nous  eussions  la  houppelande,  les  Italiens  se 
servaient  d'un  vêtement  appelé  pelando;  les  mots  tl  ps- 
lando  sont  devenus,  ches  les  Provençaux,  lou  peland, 

HOURD  ou  HURDEL,  vieux  mot  désignant  une  galerie 
de  bois  couverte,  posée  en  encorbellement  sur  un  rempart 
et  servant  de  chemin  de  ronde.  Lea  hourds  s'appelaient 
corseras  dana  le  Languedoc. 

HOURDIS,  rempHuage  de  cloison  de  charpente  fait 
avec  dea  briqnetons  et  du  plâtre.  On  se  sert  aussi  du 
hourdis  pour  garnir  l'intervalle  des  solives  d'un  plancher. 

HOURQUE,  en  anglais  howker,  bâtiment  de  transport 
en  usage  dans  le  Nord,  et  prindpalement  en  Hollande. 
La  hoorque  a  le  fond  plat,  ravant  et  l'arrière  arrondis, 
un  màt  au  centre  avec  une  grande  voile  et  un  hunier,  un 
nuire  mftt  à  l'arrière  avec  une  vdle  carrée.  Elle  navigua 
fort  mal. 

HOUSEAUX  on  HOUSES  (de  l'allemand  hosen,  haut* 
de-cbausses),  sortes  de  bottes  destinées  à  garantir  les 
Jambes  contre  la  plaie  et  la  boue. 

HOUSSE,  convertore  qui  se  met  sar  la  croupe  des  che- 
vaux de  selle;  —  recouvrement  en  étoflé  d'un  fauteuU 
on  de  tout  autre  menble. 

HOUSSETTE,  dans  le  Blason^  meuble  représentent  nne 
bottine  autrefois  en  usage  pumi  les  gens  de  guerre. 

HRADSCHIN.  V.  Psagob. 

HUAGAS.  V.  GoACAS. 

HUASTÈQUE  (Idiome).  F.  MEXiCAniBS  ( Langues }• 

RUCHERS  ou  HUCHIER8,  ancienne  corporation  d'ou- 
vriera  qui  fabriquaient  lea  huches,  carnée  et  bahuts. 
Comme  ces  meubles  étaient  ornés  de  sculptures,  le  hu- 
chier  était  le  aculpteur  en  bols.  Au  temps  de  Louis  IX, 
les  huchiers  étaient  compris  dans  la  corporation  des 
chsipentiers,  sous  le  nom  de  cAarpenttsrs  de  la  petitt 
cognée, 

HUCHET,  petite  trompe  de  chasse  qui  sert  à  appelé, 
les  chiens. 

HUDIBRA8,  poème  comique  anglais,  en  9  chants  et  ea 
vers  rimes  de  8  syllabes,  composé  par  Samuel  Rutler.  et 

Éublié  en  4663.  Le  vAet  est  fort  simple  :  le  presbvtérien 
[udibras.  Juge  de  pux  et  militaire,  veut  empêcher  un 
combat  d'ours  et  de  chiens,  et  fait  arrêter  panni  lea  ré-; 
caldtranta  un  ménétrier  boiteux;  mais  la  populace  se. 
soulève,  délivre  le  prisonnier,  et  met  le  Juge  à  sa  place. 
Cest  nne  satire  contre  les  puritains  et  lea  andena  parti- 
aans  de  la  République,  écrite  par  un  auteur  rosraliste  et 
attaché  à  la  refi|^on  anglicane  :  aussi  le  parti  des  Stuarta 
l'accueillit-il  avec  enthousiaame,  et  la  cour  de  Gharlea  II 
éleva  le  nom  de  Entier  bien  au-dessus  de  celui  de  Mil- 
ton.  La  gloire  de  TBudUtras  ae  soutint  Jusqu'au  mlliea 
du  xvm*  siècle;  le  IK  Johnson,  Jacobite  passionné,  con- 
sidérait ce  poème  comme  l'un  des  monuments  de  la  lit- 
térature an^se,  et,  quand  Voltaire  ajourna  en  Angle- 


■UI 


104» 


Hurv 


m»,  oetteofinioD  était  gônénlement  admlie.  n  éerlwt, 
«n  1734  :  «  C'est  Don  Quichotte,  c'est  taotre  Satvr0  Mé- 
niippéê  fondus  ensemble.  C'est,  de  tous  les  livres  <pe  i'ai 
{smais  lus,  celui  où  j'ai  trouTé  le  plus  d'esprit;  mais  c  est 
aussi  le  plus  intraduisible.^  Presque  tout  y  fait  allusion  à 
des  aventures  particulières.  Le  plus  g;rand  ridicule  tombe 
surtout  sur  des  théologiens,  que  peu  de  gens  du  monde 
entendent.  Il  ùuidrait  a  tout  moment  un  commentaire,  et 
la  plaisanterie  expliquée  cesse  d'fttre  plaisanterie.  Tout 
I  conmientateur  de  bons  mots  est  on  sot.  »  At^ourd'hui 
ou'on  ne  se  passionne  plus  pour  Cromwell  ou  pour  les 
'  Dtuarta^  et  ^ue  les  sectes  religieuses  troublent  peu  la 
paiXy  lea  critiques  ne  professent  plus  que  de  l'estime  pour 
le  pofime  de  Butler  :  l'esprit  de  cet  auteur  perd  son  effet 
par  l'obscurité  des  allusions.  Voltaire  a  traduit  ou  plutôt 
imité  le  début  du  l*'  chant  de  VHudibras.  En  1757,  un 
officier  anglais  an  service  de  la  France,  J.  Townley,  tra- 
duisit en  vers  français,  avec  force  notes  explicatives, 
l'ouvrage  tout  entier,  et  on  y  a  Joint,  dans  l'édition  de 
1819,  une  Clef,  qui  est  elle-même  de  médiocre  ressource. 
Hogarth  a  composé  une  série  de  dessins  spirituels,  pour 
illustrer  VUudibroM* 

.  HOEHUETL,  instrument  de  musique  des  anciens  Mexi- 
cains. Cétait  un  cylindre  de  bois,  d'un  mètre  de  hauteur, 
sculpté  et  peint  sur  les  côtés,  et  couvert  d'une  peau  de 
daim  bien  tendue,  sur  laquelle  on  frappait  avec  les 
doigts. 

HUÉLINE  et  ÉGLÂNTINE.  V.  JucnBirr  d'amous  (Le). 

HUESCA  (Cathédrale  de),  en  Espagne,  dans  Tancien 
royaume  d'Aragon.  Cette  ^lise,  bâtie  dans  la  partie  la 
plus  élevée  de  la  ville,  sur  Tun  des  côtés  d'une  vaste  place 
rectangulaire,  est  en  style  ogival  du  xm*  et  du  xiv*  siècle. 
Sa  façade  principale  est  flanquée  d'un  clocher  octogone  à 
lourde  base  carrée;  la  grande  porte  présente  sept  vous- 
sures remplies  de  statuettes,  et  dont  le  bas  est  occupé 
par  de  belles  statues  d'apôtres  et  de  martyrs,  plus  grandes 
que  nature,  et  qu'on  recouvre  de  riches  vêtements  à  cer- 
taines'fêtes.  Le  milieu  du  fh>nton  est  occupé  par  une 
rosace  à  Jour.  L'étage  supérieur  de  cette  façade  est  ré- 
tréci, et  garni,  à  ses  extrémités,  de  tourelles  cannelées, 
sans  style  et  sans  élégance.  L'intérieur  de  l'église,  en 
forme  de  croix  latine,  offre  une  belle  nef  centrale,  d'une 
grande  élévation  ;  mais  les  collatéraux  sont  bas,  étroits  et 
sombres.  Le  maître -autel,  tout  en  albfttre,  est  un  ma- 
gnifique travail  :  Damien  Florent  y  a  sculpté,  de  1.5SM)  à 
1553,  la  Passion  de  J.  C. 

H  l  GUES  CAPET  (Poème  de).  F.  Capbt,  au  Suftplém* 

HUILE  (Peinture  à  V).  On  a  longtemps  atoibué  à 
Jean  Van  Eyck  la  découverte  de  la  peinture  i  Thulle,  et 
l'oD  ttfflrmâit  môme  que  c'était  en  1410  que  cet  artiste 
avait  imafriné  de  dissoudre  les  couleurs  dans  de  rhuile  de 
noix  ou  de  lin.  Bien  qu'il  soit  constant  que  les  Romsins 
se  servuieut  de  la  peinture  à  i'buile  pour  de  grossiers  ou- 
vrages de  décoration,  rien  n'établit  nettement  qu'ils  l'aient 
employée  à  exécuter  de  véritables  tableaux,  ainsi  que  l'a 
prétendu  le  comte  de  Caylus.  Qe  qui  est  plus  certain, 
c'est  que  la  peinture  à  l'huile  est  décrite  dans  l'ouvrage 
Diversarum  arthun  sckedula  do  moine  Théophile,  qui 
vivait,  selon  les  uns  au  x*  ou  xi*  siècle,  selon  les  autres 
au  xin*;  cet  auteur  fait  remarquer  que  l'huile  est  lente  à 
sécher,  et  cet  inconvénient  a  peut-être  empêché  les  ar- 
tistes du  moyen  &ge  d'en  faire  usage.  On  a  retrouvé, 
d'ailleurs,  plusieurs  peintures  à  l'huile  antârieures  à  Van 
l^ck,  et  l'on  sait  que,  dès  1355,  Jean  Costa  peignait  à 
l'huile  en  France.  Van  Eyck  a  seulement  imaginé  de  faire 
cuire  les  huiles  ordinaires  et  d'y  mêler  une  substance  ré- 
■ioeuse,  afin  qu'elles  séchassent  plus  rapidement.  Ses 
procédés  furent  surpris  par  Antonello  de  Messine,  por- 


la  découverte  de  la  peinture  à  l' huile ^  Gœuingue,  1792, 
in-4°.  B. 

HUILES  (Saintes),  nom  donné,  \^  dans  l'Église  catho- 
lique, au  saint  chréne  (  K.  ce  tnol),  à  VhuHe  des  catéchu- 
mènes (F.  ce  mot),  et  à  VhuUe  des  malades  employée 
pour  l'extréme-onction;  ^  dans  TÉglise  grecque,  à  l'ex- 
^me-onction  elle-même. 

HUIS,  vieux  mot  signifiant  porte.  En  matière  judi- 
ciaire, on  dit  qu'une  affaire  est  Jugée  à  huis  clos,  lorsque 
le  public  n'est  pas  admis  aux  débats.  Il  en  était  ainsi  jadis 
ievant  les  Cours  prévôtales,  les  Chambres  ardentes,  et 

Sur  les  Juoementa  au  criminel  :  aujourd'hui  que  la  pu- 
dté  des  débats  est  un  principe  admis,  les  tribunaux  ne 
peuvent  ordonner  le  huis-clos  que  si  les  débats  peuvent 
tnt  rainer  du  scandale  ou  de  g^vea  ipconvénienta  pour 


l'ordre  et  lea  bonnea  moBors  {Code  de  Proeéd.^  art.  87)  t 
le  Jugement  n'en  doit  paa  moins  être  prononcé  pubU* 
quement. 

HUISSERIE,  ensemble  des  poteaux  et  de  U  travena 
dé  menuiserie  qui  forment  la  baie  d'une  porte. 

HUISSIER,  i  K.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaére  de 

UULANS.     S     Biographie  et  ^Histoire. 

HUMANITÉS  (du  latin  humanus,  poli),  mot  par  lequel 
on  déaigne  la  partie  de  l'éducation  universitaire  qui 
s'étend  de  la  classe  de  troisième  h  la  rhétorique,  et  du- 
nunt  laquelle,  avec  une  étude  plus  iqiprofondie  du  grec  et 
du  latin,  on  se  livre  à  la  littérature  et  à  l'histoire,  con- 
naissances qui  font  l'homme,  oui  développent  et  forti- 
fient le  plus  pniisamment  ses  facultés  intellectneUea  et 
morales. 

HUMOUR,  mot  emprunté  à  la  langue  anghdse  pour 
désirer  une  noanoe  ds  caractère,  one  toumuro  d'esprit 
particulière  aux  Anglais,  et  qui  se  reflète  dana  certaines 
de  leurs  oanvres  littéraires.  Il  est  asseï  difficile  de  définir 
l'^tmiotir  :  tantôt  c'est  quelque  chose  d'analogue  à  ce  que 
nous  nommons  la  fantaisie^  tantôt  c'est  une  mélancolie 
souriante,  plus  railleuse  que  pensive,  ou  bien  encore  la 
verve  satkique,  ou  enfin  une  sorte  de  gaieté  flegmatique, 
qui  se  sent  plus  qu'elle  ne  se  voit ,  et  qui  ne  r^ouit  rea- 
prit  que  Jusqu'au  sourire.  On  trouve  Vhumour  sous 
toutes  ses  formes  et  à  tous  les  degrés  ches  Sterne,  Swift, 
Butier,  lord  Byron ,  Walter  Scott,  Lamb  et  Dickena.  Lea 
Allemands  ont  eu  aussi  quelques  humoristes,  conune 
Jean-Paul  Richter  et  Henri  Heine. 

HUNE ,  nom  donné  autrefois  à  la  gabie  ou  cage  placée 
au  Ëoaunel  des  m&ts  des  navirea,  et  où  l'on  mettait  en 
vigie  un  homme,  qui  en  reçut  le  nom  de  gabier,  Dana  les 
temps  modernes,  on  a  modifié  la  forme  des  hunes;  ce 
sont  des  plates-formea  solides  et  épaisses,  mil  servent  à 
relier  le  b-is  mftt  au  second  m&t  ou  mât  de  nune,  et  qui 
en  même  lemps  font  l'office  d'an»-boutanta  autour  dea- 
quels  les  haubana  viennent  se  roidir.  Le  m&t  de  hune 
porte  une  voile  carrée  dite  hunier,  et  qui  s'attache  à  la 
naase  vergue,  nommée  pour  cette  raison  ttergue  de  hune. 
Le  hunier  se  partage  en  plusieurs  bandes  horizontales 
qu'on  nomme  ris,  et  qui,  au  moyen  de  garcettes,  peuvent 
se  replier  sur  la  vergue  pour  mminucr  la  toile  au  vent. 
Le  hunier  du  grand  m&t  est  le  grand  hunier;  celui  du 
m&t  de  misaine,  le  petit  hunier;  le  ^imtsr  d^artûnon  a 
reçu  le  nom  de  perroquet  de  fougue.  Les  hunes,  dans  les 
combats  natals,  se  couvrent  de  gabiers  armés  de  fusils, 
de  tremblons,  etc.,  dont  les  feux  plongeante  aont  d'un 
terrible  effet. 

HUON  DE  BORDEAL^ ,  Chanson  de  geste  qui  fait 
partie  des  romans  cariovingiena  (  V»  os  mot).  Elle  a  été 
composée  par  un  trouvère  dont  on  ne  connaît  ni  le  nom 
ni  le  pays,  vers  la  fin  du  xii*  siècle  ou  le  commencement 
dn  xw*,  à  une  époque  où  la  veine  héroïque  commençait 
&  s'épuiser,  où  les  contes  bretons  s'emparaient  de  la  fa- 
veur Jusque-là  réaervée  aux  œuvrea  françaises,  et  où  les 
poèmes  d'aventures  allaient  remplacer  lea  poèmes  dits 
ulstoriques  ou  Chansons  de  geste.  En  voici  le  sujet. 
Huon  et  Gérard,  fils  de  Séguin,  duc  de  Bordeaux,  sont 
accusés  auprès  de  Charlemagne  par  Amanir  de  la  Tour 
de  Rivier,  qui  convoite  leurs  donoaines,  de  vouloir  se 
soustndre  à  l'hommage.  Mandés  à  la  cour,  ils  sont  traî- 
treusement assaillis  en  chemin  par  Amaury,  qui  s'est  fait 
un  complice  de  Chariot,  fils  de  l'empereur  :  Chariot  blesse 
grièvement  Gérard,  mais  est  tué  par  Huon.  Celui-d 
n'échappe  à  la  mort,  dont  Charlemagne  le  menace,  que 
sur  les  prières  de  son  oncle  le  duc  Naimes  :  mais  il  doit 
accepter  comme  ch&timent  une  mission  lointaine  et  pé- 
rilleuse. Alors  se  déroule  une  série  d'aventures  dont  le 
héros  ne  serait  pas  sorti  par  sa  seule  valeur,  et  où  il  doit 
ses  succès  à  l'appui  du  nain  Oberon,  roi  de  Féerie.  Ré> 
concilié  enfin  aFoc  l'empereur,  il  recouvre  son  fief.  L'au- 
teur de  Huon  de  Bordeaux  a  donc  pris  un  sujet  ou  tout 
au  moins  un  cadre  carlovingien;  U  a  donné  à  son  poème 
la  forme  consacrée  de  la  Chanson  de  geste,  c-à-d.  le 
mètre  de  10  syllabes  et  les  couplets  monorimes,  mais  a 
fait  de  son  héros  un  chercheur  d'aventures,  et  intxt>dult 
dans  son  cBuvre  le  merveilleux  féerique.  Un  savant  alle- 
mand, M.  Ferdinand  Wolf ,  a  pensé  qu'il  avait  existé  un 
poème  plua  ancien,  dont  celuM  ne  serait  qu'on  rema- 
niement; mais  aucun  argument  sans  réplique  n'appuie 
sa  coi^ectnre.  Buon  de  Bordeaux  est  jin  des  meilleurs 
romans  de  chevalerie  oue  nous  possédions,  et  on  peut  le 
préférer  an  poème  allemand  que  Wieland  en  tara  au 
XVIII*  siècle.  Certains  critiques  considèrent  le  personnsge 
d'Oberon  ou  Auberon  comme  un  emprunt  fait  par  le 
trouvère  français  à  la  Germanie:  il  ne  serait  autre  qua 


HTB 


1042 


HTM 


fAIbeifch  des  Nûbdungên,  du  fféldenbuch,  da  poëme 
d* OAitf,  etc.  M.  de  La  ViUemanpié  lui  attriboe,  ao  con- 
tndn^  une  origine  celtique,  et  Tidentifle  avec  on  penon* 
oa^  de  la  féerie  bretonne,  Gwyn-Araun.  Dans  tous  les 
cas,  Tsuteur  de  Buon  de  Bordeaux  a  beaucoup  ajouté  de 
ion  fonds  à  rinveDtion  allemande  ou  celtique.  Ce  pofime 
s  été  continué,  refondu,  rajeuni  plusieurs  fois  dans  les 
âèdes  sttiTaots  :  aa  xrr*  siècle  déjà,  il  s*était  accru  d*une 
suite,  qui  le  portait  de  10,0CO  vers  à  près  de  30,000,  et 
d'une  espèce  de  prologue  intitulé  le  homan  ffAuberon, 
Dus  les  manuscrits  du  xv*  siècle,  on  loi  trouve  une  suite 
différente,  on  bien  la  forme  du  roman  entier  est  rema- 
niée, Talexandrin  ayant  remplacé  le  vers  de  10  syllabes. 
En  1454,  on  en  fit  une  version  en  prose,  imprimée  pour 
is  première  fois  en  1516,  puis  fréquemment  reproduite. 
Uoe  reouète  adressée  au  parlement,  en  1557,  montre  que 
Swm  Je  Bordeaux  fut  aussi  transformé  en  une  pièce  de 
tMItre  ;  elle  n'est  point  parvenue  jusqu'à  nous.  Le  poème 
Jouit  aussi  d'une  gp:iuide  faveur  à  l'étranger  :  il  y  en  eut 
deux  fersions  nârlandaises  en  vers;  Tune,  dont  il  ne 
nateque  des  fragments,  est  de  la  fin  du  xiv*  siècle  ou  du 
coiBfflencement  da  xv*i  l'autre  a  été  imprimée  à  Anvers 
dans  la  première  moitié  do  xvi*.  Vers  le  même  temps, 
parut  sussl  en  Angleterre  une  traduction  en  prose  de 
notre  Chanson  de  geste,  par  sir  John  Bourchier,  lord 
Bernera.  Oberon  figure  dans  le  drame  de  Jacques  IV  par 
Robert  Greene;  Spenser,  dans  sa  Reine  des  fées,  lui  fait 
Qoe  généalogie;  Shakspeare  lui  a  donné  un  rOle  dans  le 
Son0«  d'tiiw  nuit  d'èU,  à  l'époque  où  Ton  jouait  encore 
en  Angleterre  on  drame  de  Huon  de  Bomeaux;  enfin 
Ben  Johnson,  et ,  en  notre  sitele,  Sotheby,  l'ont  mis  en 
leène  dans  ces  pièces  de  fantaisie  que  les  Anglais  nom- 
oeot  masque.  En  Allemagne,  Wieland  prit  le  sujet  de 
ion  poëme  d'Obertm  dans  l'analyse  que  M.  de  Tressan 
avait  faite  de  Huon  de  Bordeaux  pour  la  Bibliothèque 
ia  romains;  il  inspira  à  son  tour  l'opéra  d'Oberon  par 
Weber,  œuvre  gai  date  de  1826,  et  qu'on  n'a  jouée  à 
Paris  qu'en  1857.  lies  manuscrits  du  poème  français  de 
Hwm  de  BordeauoD  sont  an  nombre  de  quatre:  il  y  en  a 
deux  à  la  Bibliothèque  nationale  de  I^ns,  tous  deux  du 
n*  siècle,  et  dont  l'un ,  aux  armes  de  Richelieu,  est  en 
len  de  10  syllabes,  et  l'autre  en  alexandrins  ;  le  3*,  à  la 
bMothèque  de  l'université  de  Turin,  est  du  xiv*  siècle; 
le  4%  provenant  de  l'abbaye  de  Mamioutier  et  conservé  à 
la  bibliothèque  de  Tours,  date  du  xiii*  siècle,  et  est  en 
dialecte  artésien.  Ils  ont  serri  à  la  publication  de  l'édition 
dmnée  dans  la  collection  des  Anciens  poètes  de  la  France 
par  HM.  Guessard  et  Grandmnison,  Paris,  1860,  in-16.  B. 

HOQOE,  vêtement  d'homme  au  xiv«  et  au  xv«  siècle. 
Cétait  une  blouse  courte,  sans  ceinture,  sans  manches, 
OQ  arec  manches  larges  qui  ne  descendaient  pas  plus  bas 
que  le  coude.  Bile  servait  également  de  pardessus  d'été 
OQ  de  cotte  d'annes. 

HUBDBL.  r.  Honm. 

HUKON  (Idiome),  un  des  idiomes  iroquois.  U  n'a  pas 
les  sons  correspondants  aux  lettres  b,  p,  f,  m,  s,  «,  u.  g 
et  r  de  Talphaoet  français,  et  est  rempli  d'aspirations  et 
de  sons  guttoreux.  Selon  le  P.  Gharlevoix,  le  huron  est 
remarquable  autant  par  la  richesse  des  expressions  et  la 
variété  des  tours,  que  par  la  propriété  des  termes  et  par 
sa  grande  régularité.  Les  verbes  simples  y  ont  une  douole 
ooi^agaiaon,  l'nne  absolue,  l'autre  réciproque.  Les  verbes 
actifs  ae  multiplient  autant  de  fois  qu'il  y  a  de  choses 
tombant  sous  leur  action  :  par  exemple,  le  verbe  qui 
«nrespood  à  manger  varie  autant  de  fois  qu'il  v  a  de 
choses  eomestlblea.  L'action  s'exprime  autrement  à  l'égard 
d^ine  personne  et  d*nne  chose  :  ainsi,  wiir  un  homme  et 
enrnne  pierre,  ce  sont  deux  verbes.  Se  servir  d'un  objet 
Appartenant  à  celui  qui  s'en  sert  on  à  celui  à  qui  Von 
perle,  s'exprime  également  par  deux  verbes  différents.  On 
a  poblié  deux  petits  Dictionnaires,  une  Grammaire  et  un 
Catéchisme  de  cette  langue,  dont  le  système  de  numéra- 
tion est  semblable  au  nôtre. 

HUSSARDS.  V»  notre  Dtcttofinatre  de  Biographie  et 
^Histoire. 

HUSTINGS.  V.  notre  Diet.  de  Biogr.  ef  d'Histoire, 

HOTTE.  V.  Babaque. 

HYACINTHE,  pierre  précieuse  dont  la  teinte  bleue 
Approche  de  celle  d*un  ciel  serein.  Dans  la  Symbolique 
chrétienne,  elle  signifie  la  prudence  qui  tempère  le  zèle 
vdent,  U  sérénité  de  la  conscience,  la  paix,  le  désir  des 
choses  du  ciel.  On  en  fait  limage  de  S^Paul. 

HTALOGRAPHIE.  V.  au  Supplément, 

HYBRIDE,  nom  par  leouel  on  désigne,  en  Grammaire, 
ha  mots  composés  dont  les  éléments  sont  empruntés  à 
^tta  laognw  difléientes;  tels  sont,  en  français  choléro' 


morbus,  bigamie,  btireaucrati»,  antisoorîmUque ,  oloi 
Cette  méthode  de  composition  est  vicieuse;  néanmoins 
l'usage  a  consacré  un  grand  nombre  de  moia  semblablea. 

HYDRAULE.  K.  Orgob. 

HYDRAULIQUE  (Architecture).  F.  ABCHtiscnraB» 

HYDROCÊRAMES  (du  grec  udâr,  eau,  et  kéramot, 
terre  à  potier),  vases  fidts  avec  une  urgile  poreuse ,  et 
dans  lesquels  on  met  l'eau  ou  tout  autre  liquide  qu'on 
veut  rafraîchir.  Tels  sont  les  atcaraxas  d'Espagne. 

HYDROGRAPHES  (In^nieurs).  F.  notre  D^ûmnotr» 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

HYDROGRAPHIE,  partie  de  la  Géographie  physlmw 
où  l'on  étudie  les  parties  on  éléments  Uquides  ou  globe. 
Dans  son  domaine  rentrent  toutes  les  recherches  relatives 
tant  aux  eaux  douces  qu'aux  eanx  salées  ;  pour  les  pre- 
mières, la  précipitation  des  vapeurs  atmosphériques  qui 
se  condensent  en  glaciers  sur  les  hautes  montagnes  on 
se  résolvent  en  pluie  dans  les  plaines,  l'examen  des 
sources  apparentes  ou  souterraines,  le  régime  des  lacs  et 
des  fleuves  avec  tous  les  accidents  qui  les  caractérisent; 
pour  les  secondes,  leur  répartition  sur  le  g^obe  et  leurs 
grandes  divisions,  avec  tous  les  phénomènes  qu'elles  pré- 
sentent, différence  de  salure  et  de  température,  ban- 
quises, marées,  courants.  Cette  dernière  partie,  que  l'on 
peut  appeler,  pour  la  distinguer  de  la  première,  fcy- 
drographie  maritime,  a  fait,  depuis  le  commencement 
de  notre  siècle ,  d'immenses  progrès ,  dus  anx  grands 
voyages  maritimes,  aux  nombreuses  opérations  de  son- 
dages faites  pour  la  pose  des  câbles  électriques  sous-m»* 
rins  dans  l'Océan  et  la  Méditerranée,  enfin  aux  belles  re- 
cherches de  l'américain  Maury,  qui,  par  l'étude  attentive 
des  vents  et  des  courants,  a  fait  connaître  an  commerce 
les  routes  les  plus  abrégées  et  les  pins  sûres  de  la  navi- 
gation. L'hydrographie  maritime  forme  une  branche  im- 
portante des  connaissances  navales,  et  elle  est  enseignée 
dans  des  Êcdes  dPhydrographiê,  établies  dans  nos  prin- 
cipaux ports.  C  P. 

HYDROGRAPHIE  (Écolos  d').  V,  ÉcoLBS,  dsHs  Hotre  Dùy 
tUmnaire  de  Biographie  et  d'Histoire,  page  877,  col.  2. 

HYGIÈNE  PUBUQUB  (Conseil  d'i.  V.  Conseil,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  t Histoire,  page  656, 
col.  1. 

HYLOZOISME  (du  grec  ulé,  matière,  et  xôi,  vie),  forme 
générale  des  systèmes  qui  regardent  comme  nécessaire- 
ment unies  la  mnti^re  et  la  vie.  L'hvlosolsme  prit  diffé- 
rentes formes,  selon  qne  l'on  croyait  que  le  monde  était 
le  résultat  d'agrégats  matériels,  d'atomes  animés  et  vi- 
vants^ comme  Strabon  de  Lampsaque,  ou  que  l'oti  voyait 
en  lui  un  seul  et  même  être,  un  animal,  dont  l'âme  du 
monde  était  la  vie*  comme  le  pensaient  les  Stoïciens.  En 
général,  tout  système  qui  suppose  cette  ftme  du  monde, 
sous  quelque  nom  que  ce  soli  tombe  dans  rhvlozolsme  ; 
c'est  ce  qu'on  voit  depuis  les  Stoïciens  jusqu'à  Spinoza. 
Pour  tous  la  réponse  est  la  même  :  la  vie  proprement 
dite  ne  se  montre  que  dans  l'organisme,  et  celui-ci  ne 
se  voit  pas  dans  toutes  les  parties  de  la  matière  ;  d'où  il 
suit  (lue  la  matière  et  la  vie  ne  sont  pas  essentielles 
l'une  a  l'autre.  R. 

HYMÉE.  V.  Chanson. 

HYMÉNÉE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictumnaire  de 
Biographie  et  ^Histoire, 

H YMNAIRE,  Uvre  de  chant  contenant  des  hymnes. 

HYMNE  (du  grec  umnos)^  louange  en  vers  adressée  à 
la  Divinité.  Les  premiers  hjrmnes  eurent  un  caractère 
exclusivement  religieux.  Ceux  d'Orphée  étaient  célèbres 
dans  l'antiquité,  niais  on  n'en  a  rien  conservé.  Les 
Chants  des  Saliens  et  le  Chant  arval,  à  Rome,  étaient 
des  hymnes.  Chez  les  Hébreux,  les  Cantiques  de  Mofse 
et  de  Débon  sont  aussi  de  vérit2id>les  hymnes.  Les  hymneC 
qui  nous  sont  arrivés  sous  le  nom  d'Homère  ne  sont  déjà 
plus  exclusivement  religieux  :  on  y  développe  les  aven- 
tures des  dieux  et  des  déesses  de  l'Olympe.  Chef  Pln- 
dare  et  Callimaque,  ils  prennent  encore  un  carartère 
littéraire  plus  prononcé.  Le  bel  hymne  attribué  au  stoïcien 
Cléanthe  en  l'honneur  de  Jupiter  a  plutôt  un  caractère 
philosophique  que  religieux,  au  sens  que  le  vulgaire 
donne  a  ce  dernier  mot;  sous  le  nom  populaire  de  Jo^ 
piter,  il  chante  la  toute-puissance,  l'inmiensité,  la  provi- 
dence de  Dieu,  tel  que  le  conçoit  la  raison.  Citons  aussi 
Mésonide,  dont  on  a  un  hymne  à  Némésis,  et  Aristide, 
auteur  de  deux  hymnes,  l'un  à  Jupiter,  l'antre  à  Mi- 
nerve. Les  hymnes  recevaient  des  noms  spéciaux  selon 
le  dieu  qu'ils  célébraient  :  c'était  le  Péan  pour  Apollon^ 
le  Dithyrambe  pour  Bacchus,  etc.  F.  Wimfelingius,  As 
hymnorum  auctoribus,  Strasbourg,  1M5,  in-4®;  Kries, 
Ih  hyrnnis  wterwn,    Gcsttingue,  1742,  in-4*;  Sneedorf, 


BTP 


1044 


HTP 


Ar  kymmi  oit«nmi  GrcÊCorum,  Gopenhagoe,  1780,  In-S*»; 
Sonchay,  Sur  Us  kumnêM  dn  Anctens,  dans  les  Mém.  de 
rjc.  dês  Into.  H  BêlUê-UUres,  U  XVniet  XXIV.  —  Les 
cturétiens  ont  donné  aussi  le  nom  d'^fmiM  aux  petits 
poèmes  consacrés  à  la  louange  de  Dieu  ou  des  saints. 
L*liymne  chrétienne  (car  un  usage  bizarre  a  vouln  que 
l6i  hymnes  de  l'Église  lussent  du  féminin,  et  les  hymnes 
antiques  du  masculin)  est  exclusivement  religieuse  et 
morale  :  elle  témoigne  de  la  reconnaissanoOf  de  ramonr 
et  du  respect  des  hommes  pour  les  bienfaits  de  la  Divi- 
nité. Les  hymnes  les  plus  connues  sont  :  eelles  de  S*  Am- 
broise,  Aurora  coAum  pwrpunU,  Conditor  almê  iidêrum, 
Ckristê  redêmptor  omnium,  etc.  ;  celle  de  Prudence  en 
l'honneur  des  Innocents  marQrrs,  Salvete  flores  martw 
mm,  iàspirée  par  une  foi  nalTo,  et  écrite  avec  une  grâce 
charmante;  oelies  de  S^  Grégoire,  Ltielf  CrmOor  opnme, 
Audi  bénigne  conditor,  Te  lueis  ante  tenninum,  etc.;  le 
VeocUla  régis,  de  Fortnnat  ;  le  Ponge  Imgua,  de  Glandien 
Mamert;  le  Veni  ereator,  attribué  à  Gnarlemagne,  ete, 
Sedulius,  Paul  Diacre,  Saint  Thomas,  ont  aussi  composé 
des  hymnes.  Dans  les  temps  modernes  on  a  beaucoup 
fanté  celles  de  Goffin  et  de  Santeul  ;  elles  sont  ingénieuse- 
ment écrites,  mais  le  style  en  est  trop  savant  et  parfois 
maniéré.  —  Dans  les  premiers  siècles,  le  mètre  affecté 
sénéralement  à  l'hymne  était  l'Iambigue  de  quatre  pieds 
(Sàlvètê  florès  môAgrOm;  VêaHlà  régis  prodiûnt,  San- 
teul et  Coffin  ont  employé  une  plus  grande  yariété  de 
métras.  Il  y  a  rarement  plus  de  6  stances  de  4  Ters  dans 
nne  hymne;  la  dernière  est  une  paraphrase  du  Gloria 
patrL  Quant  aux  hymnes  du  moven  ftge,  on  y  tronte  gé- 
néralement la  numération  des  syllabes  et  la  rime  substi- 
toées  à  la  mesure.  P. 

BTimi  AiieéuQen.  F.  Glosia  m  bxcblsis. 

BnoiB  cirtauBiQim.  F.  CHéftOBiQUB. 

HYMNOLOGION,  livre  de  l'Église  grecque,  contenant 
le  recueil  général  des  hymnes. 

HYPAULAGB  (du  grec  upcUlagèf  changement),  sorte  de 
trope  oui  consiste  en  un  renversement  dans  la  corrélation 
des  idéÎBs  t  «  Rendre  Phomme  an  bonheur,  c'est  le  rendre 
à  la  vie.  B  On  dit  la  beauté  de  ces  arbres,  an  lien  de  ces 
beaux  arbres,  L*hypa11age  applique  à  nne  chose  nne 
épithète  q^  ne  convient  qu'à  une  personne.  Virgile  dit 
(jEneid.^  m,  44)  : 

Heal  fiigs  erudeles  terne,  tage  llttns  avarum, 

c-à-d.,  fuis  laThraoe  où  règne  un  roi  cruel  et  avare.  La 
même  figure  fait  accorder  un  adjectif  avec  un  substantif 
qui  ne  semble  pas  lui  convenir  (Id.,  t6td.,  VI,  268)  : 

Itant  ebeemri  eelà  nb  nocte  p«r  luabram, 

■a  lieu  de  ibant  obseurà  stdL.,  G. 

HYPERBATE  (du  grec  uper,  au  délit,  par-dessus,  et 
bainéin,  aller),  transposition  des  pensées  et  des  paroles 
dans  l'ordre  et  la  suite  d'un  discours.  Cest  une  vulété 
de  l'Inversion.  Voici  des  hyperbates  de  pensée  :  «  O  fils 
de  Gambyse,  car  les  dieux  veillent  sur  toi,  autrement  tu 
ne  serais  passrrivé  à  une  si  haute  fortune,  «m0fs- tôt  d'As- 
tyace,  ton  meurtrier  •  (Hérodote).  L'ordre  naturel  était  : 
«  O  fils  de  Gambyse,  venge-toi  d'As^age,  tu  le  peux, 
puisque  les  dieux  veillent  sur  toL  »  Vfrpfle  fait  dire  par 
Junon  au  roi  des  vents  t  «  Éole,  car  le  père  des  dieux  et 
le  roi  des  hommes  t'a  donné  de  calmer  et  de  soulever  les 
Ilots,  «fi  peuple  ennemi  de  Junon  vogue  sur  la  mer  Tyr» 
fhénienne,  portant  en  Italie  Ilion  et  ses  pénates  vaincus  ; 
eh  bien,  dichaine  les  vents,  engloutis  leurs  vaissesux 
iobmergés;  »  an  lieu  de  :  «  Éole,  déehaêne  les  vents  et 
engloutis  les  vaisseaux  des  Troyens,  tu  le  peux,  car  Ju- 
piter t'a  donné  de  calmer  et  de  soulever  les  flots.  »  Ces 
«ortes  d*hyperbates  ne  sont  guère  d'usage  que  dans  les 
langues  anciennes^  Les  hyperoates  de  mots  sont  encore 
nlns  propres  au  grec  et  au  latin.  En  void  un  exemple  de 
ikNsnet  :  «  Le  matin,  elle  fleurissait,  avec  quelles  grâces, 
vous  le  savez.  »  P. 

HYPERBOLE  (du flpreciqMr6ol^,  excès),  figure  de  Rhé- 
torique qui  exagère  les  choses  pour  faire  plus  d'impres- 
sion. Rien  n'est  plus  contraire  au  bon  goût,  rien  ne 
s'éloigne  plus  du  naturel  ^  de  la  vérité  que  l'exagéra- 
tion:  et  cependant  on  trouve  de  beaux  exemples  de  cette 
figure  dans  lea  meilleurs  écrivains;  c'est  qu'alors  elle  est 
employée  à  propos,  et  que  la  grandeur  et  la  mijesté  du 
e^Jet  comportent  le  grandiose  inusité  de  l'expression  et 
de  la  pensée.  On  conçoit,  par  exemple,  que  le  poète 
inqiiré  se  laisse  emporter  à  la  fougue  de  son  imsglnation| 
et  qu'alors  ses  Idées  et  seo  langage  revêtent  pour  idna 


dire  une  forme  surnaturelle.  Ainsi,  Racine  a  dit 
lant  de  l'impie  (Ssthar,  m,  0)  t 

PsraU  an  cèdr«,  U  cachait  dans  lei  deiiz 
Son  front  aadacleiiz. 

Void  une  antre  hyperbole  du  même  poète  {Pbèdre,  V,  9)  i 

L»  dél  avec  borreor  volt  es  momatn  lauvige^ 
La  terre  t'en  émeut,  l*alr  en  cet  tailtoetés 
Le  Ilot  qnl  rapporta  recule  éponrantë. 

Molière  fait  dire  à  Alceste,  à  propos  de  civilités  rendoes 
à  des  gens  presque  inconnus  (Is  Misanthrope^  I«  i  )  s 

Xt  il  par  nn  nulbeor  J'en  sraie  Iktt  autant. 
Je  m'irala,  de  regret,  pendre  tont  k  rinatanL 

On  emploie  même  l'hyperbole  dans  la  conversation» 
quand  on  dit,  par  exemple,  marehsr  comme  une  tortue, 
aUerplus  vite  que  le  vent,  pleuvoir  pour  torrents,  etc. 

HYPERCATALEGTE  ou  HYPERGATALEGTIQUB  (du 
grec  uper,  au  delà,  et  kataUctos,  terminé),  vers  qui  finit 
an  delà  de  sa  mesure  légitime  t 

Jamqne  Iter  emenel,  tnrree  aejtecta  La|tfiionwi 
Ardna  eemebant. 

YmeiLB,  jBndd.,  Vn,  100. 

Dans  le  vers  hexamètre  héroïque  latin,  la  syllabe  surnu- 
méraire est  tof^oors  susceptible  d'élision,  et  le  vers 
suivant  doit  commencer  par  nne  voyelle.  Les  bypercata- 
lectea  sont  infiniment  plus  usit6i  dans  les  vers  lyriques, 
et  y  constituent  des  mesures  régulières.  Ainsi,  le  mo- 
oomètre  et  le  dimètre  lambiqne  sont  souvent  hypercap 
talecteai 

DlierncI)or  anllMt 
Et  dans  Horace  (I,  Od.  9, 19)  t 

Lenei  |  qne  enblnoetem  1  enaoriti» 

De  même  le  monomètre  troclialqne  t 

Deci|dltea»|lo: 

le  dimètre,  le  trimètre  trocfaaique  t 

Sentit  I  orttti,  |  aenelt  |  ocealmt. 
Yldi)mns  ihnn]|ate  |  dona  |  moUe  |  immenlsa. 

Le  vers  adonique  est  un  cboriambique  hypereatalectl  jue  : 

Termit  nrb|»i. 

HonAoa,  I,  Od.  9, 4. 

Le  dimètre  dioriambique  est  souvent  hypercatalecte.  Le 
mètre  dactylique  en  offre  aussi  des  ezemples  t 

PSlTis  et  1  nmbra  Bnm|ia. 

In.,  IV.  Od.  7,  IS 

Tendit  tai  (  estemtaa  l|re  tenelnr|at. 

La  poéde  Italienne  olfre  quelquea  exemples  de  vers  dé- 
casyllsbles  hypercatalectes;  ils  sont  plus  nombreux  en 
allemand,  piuticulièrement  dans  les  lambea  on  dans  lea 
mètres  lyriques  imités  de  ceux  de  l'antiquité  grecque  et 
latine.  P. 

HYPER-DORIEN  ou  HDCO-LYDIEN,  mode  de  la  mu- 
dque  des  andens  Grecs,  duqud  la  fondamentale  on 
tonique  était  une  quarte  au-dessus  de  celle  du  mode 
dorien. 

HYPERDULIE  (du  greeupsr,  an-dessns,  et  douUia, 
hommage),  cnlte  qu'on  rend  à  la  8**  ^erge.  On  le  nonuna 
aind  parce  qnll  est  an-dessus  de  odui  qu'on  rend  anx 
Saints. 

HYPER-ÉOUEN.  un  des  modes  de  la  musique  greo- 
que.  qui  avait  sa  fondamentale  on  tonique  une  quarte 


i-d< 


au-dessus  de  celle  du  mode  éolien. 

HYPER-IONIEN,  mode  de  la  mndque  grecque,  qui 
avait  sa  fondamentale  ou  tonique  une  quarte  an-^tossas 
de  cdie  du  mode  ionien. 

HYPER-LYDIEN,  le  plua  aigu  des  modes  de  la  mn- 
dque grecque,  n  avait  sa  fondamentale  ou  tonique  une 
quinte  an-dessns  de  celle  du  mode  lydien. 

HYPERMËTRE  (du  grec  iiper,  au  ddà,  et  métron, 
mesure),  vers  hexamètre  qui  a  une  syllabe  de  surcroit 
après  le  fi*  pied.  Cette  syllabe  est  toi^ours  susceptible 
d^élision,  et,  dans  ce  cas,  le  vers  suivant  commence  par 
une  viqreUe.  Tel  est  ce  vers  de  Virgile  {Georg^  O»  i42.;  - 


HTP 


1045 


nyp 


In  tnrrls  iMmbramiiiM  f&têxmaqm 
Si  feniu  cqnormiffl... 

Us  mn  terminés  par  un  dactyle  doÎYent  rentrer  dans  la 
Dftme  catégofrie  (Id.,  Georg.^  Û,  69)  : 

laseritnr  Toro  a  fbta  nads  artmtnt  horrlda, 
St  tterilct  platanl... 

Uny  h  point  d'exemples  de  cette  licence  dans  la  yersi- 
fication  greoqoe.  D'ailienTs,  tonte  syllabe  éUdée  y  est  ton- 
Jonn  représentée  par  une  apostrophe,  et  conséqnemment 
neasmnonçait  famais.  P. 

HYFER-PHRYGIEN,  un  des  modes  de  la  musique 
Lneqae,  àroctaye  de  Thypo-dorien.  On  le  nommait  aussi 

HYPERTHESB  (du  grec  uper,  an  delà,  par  dessus,  et 
iMttf,  position),  transposition  de  lettres.  Ex.  t  xiOà>vpour 
Xiwv,  pdU^pootoc  pour  pdroaxoc,  mots  dans  lesquels  les 
aspirées  ont  été  transposées  d*une  syllabe  à  une  autre. 
iB  mot  Hyperthèiê  désignait  aussi  en  ginec  le  denré  de 
copparmiaon  qae  nons  appelons  wiperUUif,  P. 

HYPÈTHRE  (du  grec  tipo,  sous,  et  aithra,  air),  nom 
donné  par  les  architectes  à  tout  édifice  découvert  ou  sans 
toit  Le  grand  temple  de  Paratum  en  offire  un  spécimen 
encore  existant.  Les  temples  de  Jupiter  et  de  lûnerve  à 
Athènes,  de  Gérés  ^  de  Proserpine  à  Eleusis,  de  Jupiter 
Pinhellénien  à  Ëglne,  de  Jupiter  à  Olympie,  etc.,  étaient 
hypèthres.  On  donnait  ainsi  à  Tintérfeur  des  édlBces  un 
•ipect  moins  sombre. 

HYPHEN  (da  grec  upo,  sons,  et  en,  un  seul  ;  sous-nn- 
wil,  c-à-dL  en  un  seul  tout),  terme  de  grammaire 
Deeqoe.  Cétait  une  ligne  en  forme  d*arc  renrersé  que 
roB  traçait  au-dessus  de  la  finale  d*un  mot  et  de  Tinitude 
fjiû  antre,  pour  montrer  qu'ils  ne  devaient  faire  qn*un 
(il  équivaut  alors  à  notre  trait  d'union  ),  ou  pour  indi- 
^aer  nue  crase  non  faite  dans  l'écriture.  P« 

HYPOCAUSTE.  F.  BAms. 

HTPOCRlTIQnE,  c-èrd.  en  grec  qtn  conênfaU,  qui 
mite;  nom  qse  les  Anciens  donnaient  à  l'art  dn  geste, 
pvtie  importante  de  réloquence  et  du  Jea  scémque. 
uétait  Fart  de  toat  exprimer  sans  paroles.  Les  gestes  oue 
dendeat  faire  ks  comédons  et  les  tragédiens  étaient  In- 
clinés par  des  aignes  au-dessus  des  vers,  et  cette  sorte 
de  notation  s'appelait  la  muntiue  hypocritiquB» 

HYPO-DORIEN,  le  plus  grave  des  modes  de  la  mu- 
aqoe  grecone.  Il  avait  sa  fondamentale  ou  tonique  une 
qavte  ao-oeesous  de  celle  du  mode  dorien. 

HYPO-ÊOUEN,  mode  de  la  musique  grecque,  dont  la 
fondamentale  ou  tonique  était  une  quarte  an-dessous  de 
ecUe  du  mode  éolien. 

HYPOGÉE,  r.  ce  mot  dans  notre  Dictîomiatrs  de 
Bioffraphù  $$  d^Hûtcin. 

HYPO-IONIEN,  mode  de  Is  musique  grecque,  dont  la 
tedimentale  oa  toniqoe  était  une  quarte  au-dessous  de 
oDe  dn  mode  ionien; 

HYPO-LTDIEN,  mode  de  la  mnrique  grecque,  dont  la 
ffindamentale  oa  tonique  était  une  quarte  au-dessous  de 
celle  du  mode  Ivdien. 

HYPOPHOfUÎ  (dn  grecpA^r^,  porter,  et  upo,  sous), 
tome  de  la  Rhétorique  ancienne  ;  objection  on  allégation 
<(Qe  Pon  Ait  valoir  pour  Justifier  un  acte  ou  une  préten- 
tion. Tel  est  ce  paaiase  du  commencement  de  la  harangue 
nr  l'Haionèse,  oA  Donostfaéne  rappelle  les  termes  d'une 
Lettre  de  PhiUppe  :  «  Philippe  dit  qu'il  vous  donne  cette 
Ue  oonune  sa  propriété;  que  vous  la  revendiques  injuste- 
■ent;  on'en  effet  elle  n'a  été  à  vous,  ni  quand  il  l'a 
piie,  ni  depois  cfu'il  la  possède  ;  qu'il  l'a  enlevée  aux  pi- 
nm,  et  qu'à  ce  titre  elle  lui  appartient.  »  Aussi  le  rhé- 
toor  Hermosjaie  définit^U  Justement  Thypophore  la  rai" 
«s  dt  rooMnaérv  on  ds  rsnnsnii.  Uhypophore  est 
tiqjovft  iolvie  Immédiatement  d'une  réponse,  oue  les 
rhéteurs  appelaient  Anihypophore,  P. 

HYPO-PÉRYGIEN,  mode  de  la  muriqne  grecque,  dont 
la  fondamentale  on  tonique  était  une  quarte  au-dessous 
de  celle  dn  mode  phrygien. 

HYPORKHÊME ,  pièce  de  poésie  du  genre  lyrique, 
ttmpoiée,  chfls  les  anciens  Grecs,  pour  les  choeurs  de 
{canes  garçons  anx  fêtes  de  Délos.  Dans  l'origine,  le  poète 
Ini-méme,  comme  cela  eut  lieu  plus  tard  pour  la  poésie 
jfMPstique,  apprenait  sa  pièce  aux  danseurs  et  aux  chan- 
^nrs;  if  prescrivait  les  mouvements,  les  figures*  la  ca- 
Attce,  et  veillait  à  ce  que  tout  cela  fiit  l'expression  exacte 
jbsDo  petit  pofime;  en  sorte  quels  donss  {prkhèma)  avait 
neo  proprement  wtmê  (vpo)  l'autorité  du  poète.  L'hypor- 
uème  fut  d'abord,  comme  le  Péan,  exclusivement  grave; 
fiwtird  il  servit  aussi  à  exprimer  des  idées  enjouées  et 


badinee,  et  olIHt  même  queloues  rapports  avec  la  danse 
comique  appelée  Ccrdace,  Xenodame  de  Çythère,  Prati- 
nas  de  Phhonte  et  Pindare  furent  les  principaux  auteurs 
d'hypoiUièmes  :  on  a  quelques  fragments  de  ceux  dn 
poète  thébain.  P. 

HYPOSGENIUM,  nom  oui  signifie  sot»  la  9cèn$,  et  que 
Pollux  donne  an  mur  de  devant  de  la  scène  tourné  vers 
l'orchestre,  dans  les  thé&tres  de  l'antiquité.  On  le  déco* 
rait  de  colonnes  et  de  statues. 

HYPOSTASE.  Ce  mot,  qui  Joue  un  si  grand  rôle  dans 
les  écoles  d'Alexandrie  et  d^Athènes,  depuis  Plotin  Jus- 
qu'à Proclus,  est  l'indication  d'une  doctrine  qui  suppose 
un  Dieu  qui,  sans  sortir  de  lui-môme,  se  transforme  éter* 
neilement  en  une  essence  d'un  ordre  inférieur,  pour  ne 
pas  tomber  dans^  mouvement  nécessaire  an  Dieu  créa- 
teur. Plotin,  pour  expliquer  Dieu  et  le  monde,  s'appuie 
sur  la  nécessité  d'un  intermédiaire  entre  l'absolu  et  le 
mobile.  U  admet  donc  en  Dieu  :  !•  une  hypostase  supé- 
rieure qui  possède  la  perfection  infinie  sans  mélange 
d'action  ni  de  multiplicité  ;  2<^  une  hypostase  inférieure  à 
la  première,  l'intelligence  en  soi;  3*  une  hypostase  ca- 
pable de  produire  le  monde,  mais  mobile  et  inférieure  à 
la  précédente.  Tels  sont  les  trois  principes  en  un  seul 
être,  reconnus  par  toute  l'école  néoplatonicienne,  l'Un, 
ou  le  Bien,  qui  est  le  Père  ;  l'Intelligence,  qui  est  le  Filst 
l'Ame,  qui  est  le  principe  universel  de  la  vie. 

Dans  l'Église,  le  mot  nypostase  fut  employé  avant  celui 
de  j>er9<mne,  en  parlant  de  la  Trinité.  Pour  exprimer  Is 
distinction  de  la  divinité  et  les  attributs  des  trois  per- 
sonnes, on  disait  qu'il  y  avait  en  Dieu  trois  hsrpostases 
en  une  seule  essence.  Le  mot  est  grec  (upostasis  ),  les 
Latins  firent  prévaloir  le  mot  personne.  (F.  Tamrrtf.)   R« 

HYPOTHÈQUE  (du  grec  upotàkè,  gage).  Selon  U  défi- 
nition du  Codé  Napoléon  (art  2114),  l'hypothèque  est  un 
droit  réel  sur  les  immeubles  aifectés  à  l'accpiittement  d'une 
obligation,  c-à-d.  qu'une  personne  qui  a  un  engagement 
péoiniaire  à  remplir  donne  une  garantie  spéciale  sur  un 
ou  plusieurs  de  ses  immeubles;  l'immeuble  devient  ainsi, 
entre  lea  mains  de  celui  qui  est  nanti  de  l'hypothèque,  uns 
espèce  de  gage.  Ce  gage  diffère  cependant  beaucoup  du 
gage  mobiher,  delà  mutshandise  déjxMée  en  nantissement 
chez  le  préteur.  Le  préteur,  s'il  n'est  pas  payé,  peut,  sans 
beaucoup  de  formantes  et  surtout  sans  une  grande  perte 
de  temps,  faire  vendre  les  marchandises  et  recouvrer  le 
montant  de  sa  créance.  L'immeuble  hypothéqué,  au  con- 
traire, ne  peut  être  vendu  qu'avec  beaucoup  de  difficultés 
et  de  finis  ;  les  entraves  dont  la  lépslatlon  a  entouré  la 
saisie  des  immeubles,  dans  la  pensée  d'être  utile  anx  pro- 
priétaires ^  de  mieux  consacrer  le  caractère  de  la  pro- 
priété, nuisent  en  réalité  aux  propriétaires  qui  veulent 
emprunter,  rendent  presque  aléatoire  le  prêt  <{ui  devrait 
être  le  plus  sûr  de  tous,  et  élèvent  d'une  manière  artifi- 
cielle le  taux  du  prêt  hypothécaire;  on  l'évalue  à  6 1/1 
et  7  pour  100.  —  Les  règlements  sur  les  hypothèoues, 
qui  ont  été  fixés  en  France  par  les  ordonnances  de  1539, 
1581. 1006, 1673,  1771,  par  lea  lois  du  0  messidor  an  m, 
dn  11  brumaire  an  vn,  par  le  Code  Napoléon,  ont  été  son- 
vent  attaqués  t  ils  ont  été  modifiés  et  rendus  un  pen 
moins  rigoureux  par  la  loi  de  1841  et  par  le  décret  du 
28  mars  1852  qui  a  institué  le  Crédit  foncier  (F.  es  mot). 
Avant  l'Institution  du  Crédit  foncier,  il  y  avait  eu,  en 
France,  un  établissement  qui  prêtait  sur  hypothèques,  et 
qui  s'appelait  Caisse  hypothécaire;  Il  n'a  pas  pu  se  sou- 
tenir. «  La  caisse  hypothécaire,  dit  M.  Wolowski.  a  suc- 
combé en  grande  partie  par  suite  des  véritables  aénis  de 
Justice  qui  entravaient  vis-à-vis  d'elle  les  formalités  rui- 
neuses ae  l'expropriation.  Une  seule  affaire  de  cette  na- 
ture n'a  pas  duré  moins  de  dix-sept  ans.  Cette  saisie 
monstre  a  donné  lieu  à  près  de  deux  cents  incidents,  et  à 
autant  de  Jugements  et  d'arrêts  ;  la  Cour  de  cassation  m 
été  saisie,  à  cette  occasion ,  de  quatorze  pourvois,  et  les 
Ihds  ne  se  sont  pas  élevés  à  moins  de  400,000  francs  !  »— 
«  Le  sol ,  disait  à  la  Chambre  M.  Dupia  en  1835,  est  ce 
qui  présente  le  plus  de  sûreté  en  apparence,  et  cependant 
c'est  à  ce  gage  qu'on  se  fie  le  moins,  c*e8t  celnl  qu'on  re- 
doute le  plus!  Pourquoi?  Cest  qu'il  y  a  un  contre-sens 
dans  la  législation;  c'est  que  la  loi  des  hypothèques,  qui 
devait  être  faite  pour  assurer  les  créances,  ne  laisse  pat 
les  créanciers  sans  inquiétude  sur  leur  conservation  ;  e* 
la  loi  d'expropriation,  qui  aurait  dA  être  conçue  pour  en 
amurer  le  recouvrement,  agit  en  sens  précisément  con- 
traire, c'est-à-dire  qu'on  semble  avoir  tout  fait,  toutima- 
f^é  contre  le  créancier,  pour  empêcher  ou'il  n'ait  son 
argent  à  l'échéance.  Au  contraire,  le  législateur  semble 
avoir  accumulé  les  précautions  en  faveur  dn  débiteur  « 
pour  favoriser  sa  résistance  et  sa  mauvaise  foL  » 


»Y<P 


1046 


HYP 


n  y  a  trois  fortes  d'hypothèque  :  1"  Thypotbifae  k^ 
etta  on  légale ,  celle  que  dans  certains  cas  la  loi  écrite 
accorde  sans  stipulation  (aux  femmes  mariées,  sur  les 
biens  de  leur  mari;  aux  mineurs  et  interdits,  sur  les 
Idens  de  leur  tuteur;  à  TÉtat,  aux  communes  et  aux  éta- 
blissements publics^  sur  les  biens  des  comptables); 
S*  rhypothèqueittdtctatVtf,  résultant  de  Jugements  qui  ont 
oondamné  un  débiteur  à  payer  :  ces  deux  hypothèaues 
frappent  sur  tous  les  biens  présents  et  à  venir;  3°  rby- 
pothèoue  eonventiannêlle,  consentie  par  un  acte  authen- 
tique [Code  Napoléon,  art.  3,117),  et  qui  n'atteint  que  les 
immeubles  désignés  dans  l'acte.  Les  créanciers  privilégiés 
priment  les  hypothécaires  (V.  PaiviLéca);  par  consé- 
quent, lorsqu'on  veut  plac^  ses  fonds  par  obligation  avec 
hypothèque  sur  des  immeubles,  11  fai^  s'assurer  que  leur 
valeur  est  suffisante  pour  que  l'hyponièque  ait  son  effet 
après  l'acquittement  des  créances  privilégiées.  On  doit 
s'informer  encore  si  l'hypothèque  offerte  ne  serait  pas 

}>rimée  par  les  hypothèques  qui  appartiennent,  soit  aux 
èmmes  pour  leurs  dots  ou  conventions  matrimoniales, 
soit  aux  mineurs  et  aux  interdits  à  raison  de  la  gestion 
de  leur  tuteur,  ces  hypothèques  venant  en  premier  ordre 
aprte  les  créances  pnvilégiées  :  11  est  vrai  que  les  maris 
et  les  tuteurs  sont  tenus  de  rendre  publiques  ces  hypo- 
thèques, sous  peine  d'être  réputés  stelûonataires,  et, 
^mme  tels,  contraignables  par  corps;  mais  si  le  stellio- 
aataire  est  insolvable,  l'argent  prêté  n'en  est  pas  moins 
perdu.  Toute  hjipothèque  est  Indivisible,  c-à-d.  qu'elle 
subsiste  en  entier  sur  tous  les  immeubles  affectés,  sur 
chacun  et  sur  chaque  portion  de  ces  immeubles  :  elle  les 
suit,  dans  quelques  mains  qu'ils  passent.  Les  hypothè- 
ques prennent  rang  du  lour  de  l'inscription  sur  les  re- 
gistres du  conservateur  dans  l'arrondissement  duquel  est 
utué  l'immeuble.  Ces  registres  sont  publics,  et  le  con- 
servateur est  tenu  de  donner  copie  des  actes  à  tous  ceux 
qui  le  requièrent,  ou  un  certificat  qu'il  n'existe  aucune 
^  Inscription.  Si  les  biens  assujettis  à  l'hypotlièque  péris- 
sent, ou  s'ils  éprouvent  des  dégradations  qui  les  rendent 
insuffisants  pour  la  sûreté  du  créancier,  celui-ci  peut  de- 
mander son  remboursement  ou  un  supplément  d'hypo- 
thèque (Cot^iVapo^éon,  art.  2,131).  Les  mscriptions  con- 
servent l'hypothèque  pendant  dix  ans,  et  restent  sans  effet 
si  elles  n'ont  été  renouvelées  avant  l'expiration  de  ce  dé- 
lai (art  2,154).  Néanmoins,  si,  après  le  délai  de  prescrip- 
tion, le  créancier  veut  renouveler  son  hypothèque,  il  le 
peut,  mais  dans  ce  cas  il  ne  prend  rang  qu'après  les  autres 
créanciers,  s'il  y  en  a.  L'hypothèque  prend  fin  :  1°  par  l'ex- 
tinction de  l'obligation,  2°  par  la  renonciation  du  créancier, 
Z^  par  la  prescription  de  la  créance,  4°  par  la  purge  que 
peuvent  opérer  l'acquéreur,  le  donataire,  l'échangiste,  ou 
k  légataire  particulier  des  biens  hypothéqués  {V.  Purgb^. 
—  La  conservation  des  hypothèques  est  confiée  à  l'admi- 
Bistration  de  l'Enregistrement  et  des  Domaines.  Les  droits 

Sayés  aux  bureaux  des  hypothèques  sont  perçus  au  profit 
u  Trésor  public.  La  loi  du  28  avril  1816  prescrit  la  per- 
ception d'un  pour  mille  du  capital  de  la  créance;  le  re- 
nouvellement de  l'inscription  à  l'expiration  du  délai  dé- 
cennal donne  lieu  à  la  même  perception.  Les  frais  des 
inscriptions  sont  à  la  charge  du  débiteur.  Une  remise  sur 
les  droits  perçus  est  accordée  aux  conservateurs;  mais, 
en  outre,  il  doit  leur  être  payé,  pour  les  actes,  copies, 
extraits  ou  certificats  qu'ils  délivrent,  des  salaires  dont  la 
quotité  a  été  fixée  par  décret  du  21  sept.  1810.  Les  con- 
servateurs des  hypothèques  fournissent  deux  cautionne- 
ments, l'un  en  immeubles,  l'autre  en  numéraire.  V.  Gui- 
chard.  Législation  hypothécaire,  Paris,  1810, 3  vol.  in-8o  ; 
Carrier,  Traité  des  hypothèques,  1818,  in-8°;  Cotelle, 
Des  privUéges  et  hypothèques,  1820,  in-8°  ;  Battur,  Traité 
des  privUéies  et  hypothèques^^*  édit., Paris,  1823, 4  vol. 
\d-8* ;  Grenier,  Traité  des  hypothèques,  3*  éditiop,  Cler- 
mont-Ferrand,  1829,  2  vol.  in-i»;  Persil,  Régime  hypo^ 
ihécairs,  4«  édit.,  Paris,1833,2  vol.  in-8<>;  Dufrayer,  Ma- 
nuel du  préteur  nw  hypothèque,  1838,  in-18  ;  Despréaux, 
Dictionnaire  général  des  hypothèques,  1842,  in-8*  ;  Bau- 
dot, Traité  des  formalités  hypothécaires,  1845 ,  2  vol. 


in-8»;  Valette,  Trmté  des  hypothèques,  1836,  iD-8*;  De- 
lamontre.  Traité  du  prêt  sur  hypothèque,  1M7,  in-^*; 
Troplong,  Commentaire  sur  les  privilèges  et  hypoMquet, 
5'  édiu,  1854,  4  vol.  in-8<>  ;  Marcadé  et  Pont,  Commen- 
taire  des  prwUéges  et  hypothèques,  2  vol.  in-8*  ;  Hervieu, 
Bésumé  die  jurisprudence  sur  lespnoUéges  ethypothèques, 
4"  édit.,  1859,  in-4»;  Schilling,  Traité  du  droUde  gage 
et  d'hypothèque  chez  les  Romams,  trad.  de  l'allemand  par 
Pellat,  1840,  in-8<>;  Anthoinede  SaintrJoseph,  Concor^ 
dance  entre  les  lots  hypothécaires  étrangères  et  fran- 
çaises, 1847, 1  vol.  gr.  in-8*;  Allemand,  Examen  du 
régime  hypothécaire  établi  par  le  Code  civil ,  1837,  in-8*; 
Fouet  de  Conflans,  De  la  réforme  hypothécaire,  1848, 
in-8*;  Hauthuille,  De  la  réforme  du  système  kj/j^othé- 
caire,  1843,  in-8*;  Hébert,  De  qwlques  modijiicmtwns  à 
introduire  dans  le  régime  hyjiothécaire ,  1841,  iu-8*; 
Odier,  Des  systèmes  hypothécaires,  1840,  in-12;Saint- 
Nexent,  De  la  réforme  du  régime  hypothécaire ^  1845, 
in-8*. 

HYPOTHÈSE  (du  grec  upothésis,  supposition),  ftdt  on 
principe  admis  sans  preuves,  pour  expliquer  certains 
faits  ;  par  suite ,  on  appelle  méthode  hypothétique  celle 
qui  pose  de  semblables  principes  pour  expliquer  les  faits 
observés.  H  y  a  trois  sortes  d'hypothèses  :  la  première 
suppose  réels  des  faits  non  observés,  pour  en  expliquer 
d'antres  que  l'on  connaît,  mais  dont  la  cause  nous 
échappe;  ainsi  Newton  supposait  dans  l'eau  la  présence 
d'un  corps  combustible,  pour  expliquer  certains  faits  de 
réfraction  ;  la  seconde  sorte  consiste  à  admettre  une  force 
comme  cause  de  certains  effets,  par  exemple,  Télectricité; 
la  troisième  n'est  qu'un  moyen  imaginé  pour  rendre  plus 
facile  l'enseignement  dans  les  sciences;  ainsi,  les  chi- 
mistes supposent  la  matière  divisée  en  atomes,  pour  en 
expliquer  les  combinaisons.  La  première  sorte  est  la  plus 
importante,  et  il  est  indispensable  d'y  avoir  recours  quand 
l'observation,  l'expérimentation,  le  raisonnement  ne  peu- 
vent pas  suffire.  L'hypothèse,  dans  ce  cas,  doit  être  soigneu- 
sement vérifiée,  et  rejetée  si  l'expérience  ne  la  confirme 
pas  :  l'observation  a  confirmé  l'hypothèse  d'Huyghens 
sur  l'anneau  de  Saturne;  celle  de  Laplace  sur  la  folia- 
tion des  planètes,  ne  pouvant  pas  être  vérifiée,  est  inad- 
'«aissible.  L'hypothèse  ne  peut  donc  produire  la  certitude 
q4«c  lorsqu'on  perdant  son  premier  caractère,  elle  passe 
à  l'état  de  fait  évident  et  démontré  ;  hors  de  là  elle  n'est 
qu'un  moyen  souvent  indispensable ,  mais  sans  caractère 
scientifique;  Jusque-là  elle  n'est  qu'une  supposition  qui 
doit  disparaître  cfuand  il  est  prouvé  qu'elle  est  vraie  ou 
fausse  :  vraie,  elle  est  acquise  à  la  science;  fausse,  elle  est 
convaincue  d'erreur  et  rejetée  comme  telle.    -  R. 

HYPOTRACHELIUM,  nom  donné  par  Vitruve  à  ce  que 
nous  appelons  gorgerin  dans  la  colonne. 

HYPOTYPOSE  (du  grec  upo,  sous,  et  tupoô.  Je  figure. 
Je  décris),  figure  de  Rhétorique  qui  peint  l'objet  avec  des 
couleurs  si  vives,  des  images  si  vraies,  qu'elle  le  met  en 
quelque  sorte  sous  les  yeux,  et  que  le  spectateur  ou  l'au- 
diteur, s'identifiant  avec  le  personnage,  s'oublie  au  point 
de  se  croire  témoin  des  faits  qui  lui  sont  racontés.  Ainsi, 
dans  Athalie  (I,  2),  Josabeth  raconte  an  grand  prêtre 
comment  elle  a  arraché  Joas  tout  sanglant  des  mains  de 
ses  meurtriers  : 

HéUs!  Vétat  horrible  oil  le  ciel  me  VolMt 
Revient  à  tout  moment  effregrer  mon  esprit  s 
De  princes  égorgés  la  chambre  était  remplie,  ete» 

Andromaque  (in,8)  nous  fournit  un  autre  exemple 
d'hypotypose  : 

FIgare-tol  Pyrrhus,  les  yeux  tfttncelantB, 
^tatraat  k  la  Ineur  de  nos  palais  brûlants,  etc. 

On  peut  citer  encore  la  peinture  de  la  Mollesse  dans  Ke 
iMtrin  de  Boileau,  la  mort  de  Rocchoris  dans  le  Téléfnaque 
de  Fénelon,  le  sacrifice  d'Eudore  dans  les  Martyrs  da 
Chateaubriand.  G. 


lAM 


1047 


I^M 


I 


1, 9*  lettre  et  3*  ToyeHe  de  Talphabet  latin ,  ainsi  qae 
des  alphabets  des  lances  néolatines  et  des  langnes  ger^ 
maniques.  fin  lalin,  l't  était  à  la  fois  consonne  et  voyelle  : 
csmonne,  lorsqu'il  était  placé  derant  une  royelle  dans 
on  mot  d'origine  Italique  {lanus,  conttcto,  qui  s*écri- 
lirent  tardivement  Jantu,  conjicio)\  voyelle,  dans  les 
mots  d*origine  grecque  {iamlms)  ;  consonne  dans  certains 
mots  d*origine  hébraïque  (Judaus)^  voyelle  dans  certains 
ntres  (iacoàus).  L*t  eut  également  deux  valeurs  en 
fnnce  :  ce  fut  Ramus  qui,  an  xvi*  siècle,  donna  unifor- 
mément la  forme  du  j  à  l'ancien  t  consonne  ;  mais  il  n*y 
i  encore  que  fort  peu  d'années  que  les  chapitres  des 
lettres  I  et  J  ont  ceâié  d'être  confondus  en  un  seul  dans 
les  Dictionnaires.  Les  Latins  substituèrent  quelquefois 
Tu  à  l't  :  Dtcuimui,  MaxumiUf  pour  DecknuSf  Maximtu, 
En  français,  Vi  perd  le  son  qui  lui  est  propre,  en  s'unis- 
Bsnt  à  d'autres  voyelles,  comme  dans  laid,  gam^  sein, 
feim,  rot\  etc.  ;  il  le  reprend  à  l'aide  du  tréma,  conmie 
dans  MtOse,  Bélùisê,  Lais,  etc.  En  anglais,  l't  pcnrd  très- 
wavent  le  son  que  lui  donnent  les  autres  peuples  de  l'Eu- 
rope ;  mais,  en  revanche,  ce  son  est  atmbué  à  d'autres 
caractères,  à  Ve  f  dans  6«,  être),  àas  (dans  sm,  voir),  à 
«a  (dans  têa,  thé).  L'usage  de  mettre  un  point  sur  Tt, 
pour  qu'on  n'en  fasse  pas  un  Jambage  d'une  lettre  voisine, 
ne  date  que  du  xiv*  siècle.  —  Gomme  abréviation  dans 
les  inscriptions  latines,  1  signifie  impmxttor,  invietus,  in~ 
ferû  M»,  justus,  illiutris,  jure,  etc.  Sur  les  monnaies  ro- 
maines, il  représente  l'as,  comme  valeur  et  comme  poids. 
Aatrefois  il  était  la  nuurque  des  monnaies  frappées  à 
Limoges.  — Ikine  la  théorie  du  syllogisme,  I  désignait  une 
proposition  aflBrmative  particulière.  —  Signe  numéral, 
rioto  grec  valait  10.  En  latin,  1  vaut  i,  et  représente  au- 
tant d'unités  cpiMl  est  répété  de  fois  Jusqu'à  quatre  :  mis 
devant  V  et  X,  il  se  retranche  de  ces  nombres  ;  placé  après, 
U  s'y  ajoute  (IV  =4;  IX=9;VI=6;  XI »=  11).  Cepen- 
dant, lie  expriine  200,  HIM  3,000,  etc.  B. 

lALÊNE.  K.  CBAifsOTi. 

lÂHBE,  pied  cle  la  versification  gregpe  et  latine,  com- 
posé d'une  brève  et  d'une  longue  :  atês.  Archiloque  en 
est  réputé  IMnventeur  ;  c'est  du  moins  lui  qui,  le  premier, 
Ta  employé  dans  les  pièces   mordantes  et  satiriques. 

lÂHBÉLÉGlAQUE  (Vers).  Cest  le  renversement  du 
vers  élégiambique,  c-à-d.  ou'il  se  compose  de  2  dipo- 
ties  lambiques  suivies  de  la  2*  penthémimère  élégiaque  ; 
il  est  asynartëte  ;  Horace  a  écrit  (Epod.  13,  v.  10  et  18)  : 

Dêfôrmïs  S\gr^môià[œ  J^diUcïMis  dlWqf^s. 
lèvârè  dS\ris  pëctôrâ  \\  sôlltàttûdXnXlms, 

Ce  vers  passait  pour  avoir  été  Inventé  par  Archiloque, 
ainsi  que  l'élésiambique.  P. 

lAMBIQUE  (Poésie),  nom  donné  chez  les  anciens  Grecs 
à  ce  qui  s'appelle  spécialement  ScUire  chez  les  peuples 
modernes.  Les  diatribes  contre  les  personnes  ou  contre 
les  mœurs  générales  ayant  été  primitivement  composées 
en  ïambes,  le  nom  d^iambùiue  a  été  donné  au  poème 
kii-mème  :  on  disait  vulgairement  des  ïambes,  pour  dire 
3ne  satire  mordante,  une  invective.  Archiloque,  Hippo- 
nax,Timocréoa,  sont  les  représentants  les  plus  connus 
de  ce  i^enre  de  poésie;  mais  nous  ne  saurions  apprécier 
le  mente  de  leurs  oeuvres,  dont  11  ne  nous  est  parvenu 
que  de  trop  courta  fragments.  Nous  n'avons  point  de 
pièce  latine  portant  ce  titre,  bien  ooe  les  poètes  latins  se 
serrent  fréquemment  du  mot  ïambes  pour  désigner  une 
pièce  médisante.  Mais  nous  devons  rattacher  à  ce  genre 
nn  grand  nombre  des  pièces  d'Horace  connues  sous  le 
iMmi  ^épodes ,  et  dont  quelques-unes  sont  d'une  viru- 
lence extrême,  notamment  les  odes  4,  0,  10,  17.  Chez 
nous,  André  Chénier  a  renouvelé  ce  genre,  mais  dans  un 
ml  essai  inachevé,  et,  de  nos  iours,  H.  Auguste  Barbier 
i^est  fait  un  nom  par  ses  ïambes.  Ils  sont  composés  de 
Binds  vers  alternant  avec  un  plus  petit  placé  en  forme 
^épode,  à  rimitation  de  ce  que  nous  voyons  dans  Horace, 
md  lui-même  s*était  modelé  sur  les  iambographes  de  la 


UMBiQUB  (Vers),  vers  composé  d'ïambes,  on  dont  l'IamM 
est  la  base.  En  grec  et  en  latin,  il  y  a  des  lambiques  d« 
2  jusqu'à  8  pieds.  On  les  scande  par  dipodies,  et  chaque 
dipodie  forme  une  mesure  ou  mètre  :  d'où  le  nom  de 
monomètre  donné  au  vers  de  S  pieds,  de  dimètre  au  vers 
de  4  pieds,  de  trimàtre  au  vers  de  6  pieds,  et  de  Utra- 
mètre  à  celui  de  8  pieds. 

I.  Monomètre,  11  est  très-rare.  On  le  trouve  employé 
comme  clausule  dans  on  système  de  dimètres  ou  de  tri- 
mètres.  Pur,  il  a  2  ïambes.  Au  1*'  ïambe  on  substitue 
souvent  un  spondée;  au  2*  un  pyrrhique.  Les  Latins  met* 
tuent  souvent  le  dactyle  au  lieu  du  spondée  au  1"  pied  : 
pèssûmà  m&ni.  U  peut  être  hypercatalectique;  alors,  outre 
la  l'*  substitution,  il  peut  recevoir  un  anapeste  au  2"  pied. 

n.  Dknètre.  11  est  fréquent  chez  les  lyriques,  les  tra- 
giques et  les  comiques.  Alcman  et  Anacréon  paraissent 
l'avoir  employé  les  premiers  dans  un  système {V,  ce  mot)» 
n  y  en  a  3  variétés  :  acatalectique  (4  pieds  J ,  catalectiqu^ 
(3  pieds  et  demi  ),  brachycatalectique  (3  pieds).  La  l '^  com- 
porte l'ïambe,  le  spondée,  le  dactyle  rarement,  du  moina 
en  grec,  au  l**  et  au  5*  pied  ;  l'anapeste  au  l"*"  pied  ne  se 
voit  que  chez  les  comiques.  Dans  la  2«,  le  3*  pied  est  né- 
cessairement un  ïambe,  le  1«  peut  être  un  tribraque.  Dans 
la  3*,  le  3*  pied  est  un  ïambe,  ou  un  pyrrhique,  très-sou- 
vent précédé  d'un  anapeste.  Horace  a  employé  le  tribra- 
Sie  au  2*  pied  du  dimètre  acatalectique.  Dans  les  sys- 
mes  dimétriques,  tel  est  l'étroit  enchaînement  des  vers, 
que  chaque  dernier  pied  se  comporte  comme  s*il  était 
dans  le  corps  du  vers,  c-èrd.  que,  i<^  la  longue  finale 
peut  se  résoudre  en  deux  brèves,  d'où  résulte  un  tri- 
braque; 2?  l'hiatus  est  interdit  d'un  vers  à  l'autre,  aussi 
bien  que  toute  syllabe  douteuse  ;  d'où  il  suit  que  le  di-r 
mètre  peut  être  terminé  par  un  ïambe  ou  un  tribraque^ 
jamais  par  un  pyrrhique  ni  un  anapeste,  et  qu'un  mot 
peut  être  interrompu  et  se  continuer  au  vers  suivant. 
Les  systèmes  de  dimètres  lambiques  sont  habituellement 
terminés  par  un  dimètre  catalectique.  Les  systèmes  de  di-^ 
mètres  catalecticnies  sont  eux-mêmes  fréquents.  Souvent 
un  système  de  dimètres  renferme  les  trois  variétés,  avec 
un  monomètre  hypercatalectique  pour  clausule.  Le  di- 
mètre hypercatalectique  forme  le  3"  vers  de  la  strophe 
al  calque. 

m.  Trimètre.  C'est  le  plus  connu,  le  plus  usité  des 
vers  lambiques.  Pur,  ce  vers  se  compose  oe  6  ïambes,  si 
ce  n'est  que  le  6*  doit  être  remplacé  par  un  pyrrhique. 
Archiloque,  Simonide  et  les  lambocpraphes  en  avaient 
fait  un  fréouent  usage  :  néanmoins  Us  substituaient  par- 
fois à  l'iambe  des  pieds  impairs  le  spondée,  et  introdui- 
saient à  tous  les  pieds,  sauf  le  6*,  l'anapeste,  seulement 
lorsqu'il  fallait  un  nom  propre.  Ces  substitutions  ont  été 
adoptées  par  les  tragiques,  qui,  de  plus,  admettent  le 
tribraque  aux  quatre  premiers  pieds.  Les  trimètres  lam- 
biaues  reçoivent  principalement  la  césure  penthémimère 
et  la  césure  hepbthémimère,  quelquefois  la  césure  trihé- 
mimère;  elle  a  lieu  sur  une  brève  aussi  bien  que  sur 
une  longue.  L'enjambement  se  fait  d'une  manière  à  peu 

Srès  aussi  variée  que  dans  l'hexamètre  héroïque;  le  r^et 
'un  spondée  est  assez  fréquent,  surtout  s'il  ne  temune- 
pas  complètement  le  sens;  cependant  le  sens  peut  s'y 
arrêter,  s'il  en  résulte  un  effet  d'harmonie  imitative. 
Le  drame  satyrique  suivit  les  règles  de  la  versification  des 
tragédies,  quand  le  poète  mettait  en  scène  un  personnage 
héroïque  ;  mais  on  y  prenait  plus  de  licences  métriques  ! 
lorsqu'on  faisait  paner  les  Satyres  et  autres  personnaset: 
burlesques.  C'est  ce  qui  avait  lieu  aussi  dans  la  Vieille 
Comédie.  Le  trimètre  de  la  Nouvelle  Comédie  se  oonfor-  * 
malt  aux  règles  du  trimètre  tragique.  Au  temps  de  Sé- 
nèque,  les  poètes  latins,  en  admettant  le  trimètre,  y  in* 
troduisirent  toutes  sortes  de  licences,  à  tel  point  oue  la 
mesure  de  leurs  vers  est  souvent  confuse.  Horace  s  est  le 
plus  rapproché  de  la  pureté  grecque. 

Certains  trimètres  ont  un  spondée  au  6^  pied  (F.  Gho- 
lumbb).  n  y  a  aussi  des  trimètres  catalectiques  oui  flgn^ 
rent  dans  la  stropne  alcalqne.  Enfin  le  trimètre  nrachy- 
catalectique  est  an  lambique  de  5  pieds,  qui  a  toi^oai»  un 


ICA 


1048 


ICO 


■iiApeste  au  4%  et  dont  le  l*'  ïambe  admet  comme  tnb- 
illtntlon  le  spondée. 

IV.  Tétramètre,  Llambiqatf  de  8  pieds  n*admet  gnAre 
dtetre  tubstitation  «pie  le  spondée.  On  n*en  trouve  an- 
con  exemple  dans  ce  qui  reste  du  théâtre  grec  Chez  les 
Latins,  qui,  an  contraire,  en  ont  fait  un  grand  usage  au 
théâtre.  Il  admet  tous  les  pieds  du  trimètre  libre;  le 
8*  pied  doit  toi^ours  6tre  un  ïambe.  On  le  coupait  après 
la  césure  qui  suit  le  4*  pied  :  quelquefois  il  est  coupé  en 
deux  hémistiches,  c-èrd,  en  deux  dimètres,  et  alors  il 
peut  être  asynartète. 

Les  pofites  de  la  vieille  comeiîe  grecque  ont  fait  un  très- 
nand  usan  du  tétramètre  cataiectique  (7  pieds  et  demi}. 
Le  7*  pied  doit  être  un  ïambe;  mais  on  y  trouve  quel- 
quefois, dans  un  nom  propre,  Tanapeste.  Le  tribraqueest 
inquent^x  i*',  S*  et  6*  pieds  ;  il  est  plus  rare  au  4*, 
qui  reçoit  régulièrement  llMnbe,  le  spondée,  parfois  Tana- 
peste.  Ce  vers  est  la  base  du  vers  polUiqtU,  né  en  Grèce 
an  moven  ftge.  Le  tétramètre  cataiectique  est  également 
fort  unté  dans  la  comédie  latine,  mais  toujours  avec  beau- 
coup plus  de  licences.  Le  dactyle  et  le  procéleusmatique 
▼  sont  admis  an  4*  pied;  au  7*  le  tribraque,  le  spondée, 
le  dactyle,  Tanapeste,  le  procéleusmatique,  ces  deux  der* 
niers  plus  rarement,  ^  à  condition  que  la  première  brève 
m  soft  pas  la  finale  du  mot  précédent,  n  est  asynartète 
chez  les  Latins,  ce  qui  n*a  pas  lieu  chez  les  Grecs.    P. 

lAMBYCB,  instrument  à  cordes  des  Anciens,  men- 
tionné par  Pollux.  On  suppose  que  c*était  une  cithare 
triangulaife  inventée  par  Ibycus. 

IBËRIENNES  (Langues),  nom  des  laneues  parléea 
dans  TEspagne  ancienne,  telles  que  le  turdetan ,  le  can- 
tafare,  le  celtibérien,  et  dont  il  ne  subsiste  plus  qu'une 
seule,  le  basque  (K.  oe  mot). 

IBSABIBOuL  (Temples  d*),  dans  la  Nubie  inférieure, 
sur  la  rive  gaucne  du  Nil.  Ces  temples ,  au  nombre  de 
deux,  découverts  par  Belzoni ,  sont  aussi  remarquables 
que  les  plus  beaux  de  TÊgypte,  et  datent  du  règne  de 
Ramsès  le  Grand  (Sésostris).  Ils  sont  entièrement  taillés 
ians  le  roc  La  fa^e  du  plus  grand,  coupée  à  pic,  a 
iS  met.  de  hauteur  sur  34  de  largeur,  et  offre,  au  centre, 
ue  porte  de  5  met.  sur  1  et  i/S.  Quatre  colosses  assis, 
leprésentant  Ramsès,  annoncent  dignement  rentrée  de 
se  temple  dédié  à  Phré;  dégagés  du  sable  qui  les  re- 
couvre en  nande  partie  aujourd'hui,  ils  n'auraient  pas 
moins  de  Su  met.  oe  hauteur  ;  trois  seulement  subsistent 
dans  un  état  parfait  de  conservation.  L'intérieur  du 
temple  est  une  excavation  toute  de  main  d'homme.  La 
première  salle  ou  pronaos,  qui  a  16  met.  carrés  sur  8 
d'élévation ,  est  soutenue  par  deux  ranp  de  quatre  pi- 
Hers  chacun,  contre  lesquels  sont  adossés  autant  de 
eolosses  debout,  représentant  Osiris  sous  les  traits  de 
Ramsès  ;  les  parois  de  cette  salle  sont  décorées  de  bas- 
reliefs  coloriés,  o&  l'on  a  figuré  les  exploits  de  ce  prince 
en  Asie  et  en  Afrique.  Vient  ensuite  une  seconde  pièce 
ou  naos,  à  peu  près  de  même  caractè  ,  longue  de 
i%  met.;  et  enfin  le  sanctuaire,  où  l'on  voit,  dans  une 
Biehe  très-profonde ,  les  statues  assises,  plus  grandes 
que  nature  et  coloriées,  d'Ammon-Ra,  de  Phré,  de  Phtha 
et  de  Ramsès.  Ce  monument  ne  reçoit  le  Jour  et  l'air  que 
par  l'entrée.  —  Le  petit  temple,  à  ouelque  distance  au 
N.-B.  du  nand,  a  été  dédié  à  la  aéesse  Athor  par  la 
femme  de  namsès.  Moins  élevé  ^  moins  profondément 
creusé,  il  a  une  façade  en  talus,  contre  laquelle  8*ap- 
puient  six  colosses  de  12  met.  de  hauteur,  séparés  les 
uns  des  autres  par  des  contre-forts  couverts  d'niérogly- 
phes.  A  l'intérieur,  on  remsrque  des  piliers  carrés  sur- 
montés de  tètes  de  femmes,  et  des  bas-reliefs  peints, 
d'un  excellent  style,  dont  tous  les  sujets  sont  mytho- 
lodques. 

iGARIB,  nom  donné  par  le  communiste  Cabet  à  la  terre 
imaginaire  où  devaient  se  réaliser  ses  utopies.  Cette  terre 
a  pour  capitale  Icara,  autour  de  laoueile  se  groupent 
100  villes  provinciales  i  chacune  de  celles-ci  est  entourée 
de  10  villes  communales,  placées  au  centre  de  territoires 
égaux.  Tontea  sont  construites  sur  le  même  modèle,  et 
réalisent,  sous  le  rapport  de  la  propreté,  de  la  commo- 
dité et  de  l'élégance,  les  plus  beaux  rêves  de  l'imagi- 
nation.  Les  établissements  agricoles  ne  sont  pas  moins 
parfaits  dans  leur  genre.  Les  Icariens  ne  connaissent  ni 
propriété,  ni  monnaies,  ni  ventes,  ni  achats;  ils  vivent 
en  communauté  de  biens  et  de  travaux.  Cest  la  répu- 
liiique  ou  la  communauté  qui  recueille  les  produits  de 
la  terre  et  de  l'industrie,  et  qui  les  partage  Cément 
entre  les  dtovens  :  elle  les  loge,  les  nourrit,  les  habille 
el  les  instruit.  Le  travail  n'a,  d'ailleurs,  rien  de  ré- 
pugnant; des  machines  très -nombreuses  dispensent 


l'homme  de  tout  effort  pénible,  et,  toutes  les  proressioni 
étant  également  estimées,  chacun  choisit  la  sienne  lai- 
vant  son  goût.  Le  mariage  est  admis  et  renecté.  Jusqu'à 
ce  que,  par  l'efTet  du  pro^te  des  lumières,  la  promiscuité 
des  sexes  n'inspire  plus  de  répugnance;  comme  il  n'y  a 
ni  dots  ni  succôsions,  les  convenances  personnelles  pié- 
sident  seules  aux  unions.  Au  point  de  vue  politique,  une 
assemblée  de  2,000  membres,  élue  par  le  aulErage  nni- 
versel,  est  investie  de  l'autorité  législative  pour  tout  ce 
qui  concerne  l'intérêt  général;  chaque  province  a  aussi 
son  assemblée  particulière  où  l'on  discute  ses  intér^ 
spéciaux,  et,  dans  chaque  commune,  une  assemblée  pri- 
maire ezamine  les  questions  d'intérêt  local  qui  lui  sont 
renvoyéea  par  l'assemblée  génénle.  Il  y  a  un  eaoécutoin 
national  (pouvoir  exécutif),  et  des  eocéctUoires  provta- 
ciaux  et  concr^tmotia?,  dont  les  membres  sont  nonunés 
par  le  peuple.  Aucun  fonctionnaire  ne  reçoit  de  traite- 
ment. On  n'a  pas  besoin  de  force  publique,  parce  qu'en 
Icarie  on  ne  voit  ni  partis  politiques,  ni  complots,  ni 
émeutes,  ni  violences,  ni  larcins.  Le  Journal  national, 
les  Journaux  provinciaux  et  communaux  ne  contiennent 

Sie  des  procès-verbaux  et  des  statistiques,  toute  discos- 
on  leur  étant  interdite  :  la  liberté  de  la  presse  est  rem- 
placée par  le  droit  de  proposition  dans  les  assemblées 
populaires.  Toutes  les  religions  sont  tolérées:  noals  il  est 
mterdit  de  parler  de  reli^on  aux  enfants  avant  qu'ils 
aient  l'ftge  de  16  ou  17  ana.  Suivant  le  catéchisme  icanen, 
Jésus-CSuist  n'est  qu'un  homme,  le  premier  de  tous;  les 
prêtres  sont  de  simples  prédicateurs  de  morale.  On  féli- 
cite ceux  <|ui  croient  à  un  Paradis  pour  les  Justes;  quant 
à  l'Enfer,  il  est  inutile,  parc*  qu'il  n'y  a  pas  de  méchants 
en  Icarie.  B. 

ICHNOGRAPHIB  (du  grec  tcAnot,  trace,  et  graphém, 
écrire),  opération  oui  consiste  à  dessiner  les  contours 
oue  forment  des  objets  sur  un  plan.  Ainsi,  pour  un  édi- 
fice, le  plan  est  la  trace  qu'il  laisserait  sur  le  sol  s'il  étidt 
rasé. 

ICONIQUES  (Statues),  statues  que  les  Anciens  éri- 
geaient aux  athlètes  qui  avaient  remporté  trois  victoires. 
Elles  étaient  l'image  exacte  de  leurs  formes  et  de  leur 
caractère  gymnastique. 

ICONOGRAPBIB  (du  grec  éUsOn,  image,  et  graphém, 
décrire),  description  des  monuments  de  la  statuaire  an- 
tique et  de  celle  du  moyen  âge,  et,  dans  un  sens  plus 
restreint,  description  des  images  des  personnages  cé- 
lèbres, représentés  par  des  statues,  des  bustes,  des  mé- 
dailles, des  pierres  gravées,  des  peintures,  etc.  Les 
principaux  auteurs  qui  ont  fidt  des  recueils  iconogra- 
phiques sont  :  Ifazocchi,  lUuitrium  imagims,  1517, 
in-4**;  Flavio  Orsini,  Illtutrium  imaginés,  Rome,  1509; 
Canini,  iconografia,  Rome,  1609,  et  Amst,  1731  ;  fiel- 
lorio,  Vettrum  Uluttrium  imagines,  Rome,  1685;  Vis- 
conti.  Iconographie  grscqùs^  Paris,  1811,  3  voL  in-4^; 
Mongez,  honografhù  romaine,  Paris,  1817-S6,  4  vol.  ^. 
in-fol.  ;  Delpech, /coROi^ttipAts  dês  contemporains.  Pans, 
1824,  In-fol.;  Didron,  Iconographie  chrétisnnê,  1844, 
in-4*r  l*ebbé  Grosnier,  Iconoffraphk  chrétimnê,  Paris, 
1848,  in-8«;  Guénebault,  DtetUmnairs  iconographuius 
dês  figurss,  Ugsndês  tt  actss  dss  saints,  1846,  gr.  in-S", 

ICONOLATRIE  (du  grec  ^tUpdii,  fanage,  et  latrma,  ado- 
ration), culte  des  images  poussé  Jusqu'à  l'adoration, 
comme  chez  les  païens. 

IGONOLOGIE  (du  grec  éikân.  image,  et  Ugéin,  dire, 
expliquer),  explication  des  emblèmes,  des  figures  allégo- 
riques et  de  leurs  attributs.  Les  auteurs  qui  ont  entrepris 
ce  genre  de  travail  sont  :  J.  Baudouin,  Rscmil  d^em* 
blêmes,  Paris,  1688,  3  vol.  in-8*;  Lacombe  de  Presel, 
Dictionnaire  tconologique,  1755  et  1770,  in-12  ;  J.  Bou 
dard,  Iconologie^de  divers  auteurs,  Parme,  1750,  2  voL 
in-fol.  t  Gh.  Delafosse,  leonologie  histonque.  Paris, 
1768;  Gaucher,  leonologie,  ou  Traité  complet  des  allé- 
gories, emblèmes,  etc.,  Paris,  1706, 4  vol.  in-12;  Gravelof 
et  Cochin  ,  leonologie  par  figures,  1796;  F.  Pistrucd, 
Iconologia,  Milan,  1821. 

ICONOSTASE  (du  nrec  éikân,  imsge,  et  stasis,  pose), 
clôture  du  sanctuaire  dans  les  églises  anciennes.  Elle  était 
ainsi  appelée,  parce  qu'on  y  exposait  de  saintes  images 
à  la  vénération  des  fidèles.  Dans  les  premiers  temps  de 
l'ère  chrétienne,  les  sanctuaires  étaient  exhaussés  de 

Suelques  marches  au-dessus  de  la  nef,  et  fermés  par  une 
lèture  ornée  de  colonnes,  de  mosaïques  et  de  fîresquesi 
une  ou  trois  portes  y  donnaient  accès,  et  permettaient  aux 
fidèles  d'en  apercevoir  une  partie.  Plus  tard,  les  Icono- 
stase furent  remplacées  par  des  tentures  et  des  ^les, 
puis  enfin  portées  à  l'extrémité  du  chœur  et  transformées 
ou  confondues  avec  les  Jubés.  Chez  les  chrétiens  du  rilg 


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me,  on  donne  fb  nom  à^Iconostases  à  des  niches  on  ce<> 
mM  qui  renferment  des  images  saintes,  et  qne  Toile 
uniideaiia 

IGOSI-DRA€HME,  monnaie  d*or  de  20  drachmes,  créée 
en  Grâce  en  1833.  Elle  vatit  17  te.  90  c. 

IDÉAL»  LMdée  exprimée  par  ce  mot  est  celle  d*an  mo- 
dèle parfait,  d*un  type  de  beauté  qui  n'existe  pas  dans  la 
réalitt,  et  que  TarUste  imite  en  cherchant  à  régaler  sans 
jamais  y  iMÛrvenir.  Gicéron  nous  montre  Phidias  copiant 
an  modèle  intérieur  pour  faire  sa  Minerve  ou  son  Jupt- 
ter  (Hymfrien.  Cest  sur  la  théorie  platonîdenne  des  idées 
<nie  repose  la  doctrine  de  Tidéal.  Selon  Platon,  Tesprit 
8  élève  graduellement  et  par  abstraction  Jusqu'aux  idées 
pores,  modèles  parfoits,  tsrpes  étemels  comme  Dieu  en  qui 
Ils  résident.  La  beauté  réalisée  par  Tartlste  n'est  qu'une 
imparfaite  image  de  cette  beauté  parfaite,  exempte  de  tout 
•Iha^.  A  cette  théorie,  qui  repose  sur  le  dogme  de  la  ré- 
imtscenee  (  V.  ce  mot),  on  en  oppose  une  autre,  consistant 

Eor  l'esprit  à  prendre  dans  les  objets  de  même  nature 
I  parties  qui  paraissent  les  plus  belles,  afin  d'en  former 
on  font,  qui  derient  ainsi  le  modèle  idéal  de  l'artiste. 
Dans  les  deux  cas,  ce  modèle  n'est  toujours  qu'une  idée 
àboaelle  Fart  cherche  à  donner  une  réalité;  mais  le  se- 
eond  procédé  est  empirique;  le  premier  relève  surtout  de 
Il  raison,  le  second  de  llmagination,  et  il  peut  conduire 
à  confondre  la  fiction  avec  Vidéal.  Toutefois  celui-ci, 
((Qelle  que  soit  l'ori^ne  qu'on  lui  attribue,  est  le  ratio- 
ialisme  dans  Tart;  il  est  opposé  à  cette  doctrine  qui  ne 
dôme  d'autre  mission  à  l'artiste  que  de  copier  grossière- 
ment la  nature,  et  oui  est  aujourd'hui  le  réeUisme.  V, 
Abt,  Bcaiix-Abts,  Reausve.  R. 

IDÉALISME,  système  qui  a  Joué  un  grand  rôle  dans  la 
philosophie,  surtout  depuis  un  siècle.  Bans  son  sens  le 
pins  Tulgaire,  ce  n'est  ou'une  exagération  du  Spiritua- 
lisme; c'est  Vimmatérialisme,  puisqu'il  prétend  que  les 
sbjets  matériels  n'existent  pas.  Tel  est  l'idéalisme  de  Ber- 
keley. Kant,  par  une  analyse  profonde  de  l'entendement, 
arriva  à  un  iaécUisme  transcmdantal,  qai  diffère  du  prê- 
chent en  ce  qu*il  ne  nie  pas  l'existence  des  objets;  mais 
en  même  temps  il  soutient  que  ces  objets  ne  nous  appa- 
raissent pas  tels  qu'ils  sont  en  soi,  mais  selon  les  formes 
de  notre  sensibilité  et  de  notre  entendement.  De  là  sortit 
Tidielisme  objectif  de  Schellins  et  Vidéalisme  abeotu  de 
Hegel;  dans  ce  dernier,  l'idée  confondue  avec  l'être 
constitue  l'esseace  même  des  choses.  Dans  l'antiquité, 
les  Éléates  andent  ouvert  la  voîe  à  cet  idéalisme  outré , 
qni  conduit  au  panthéisme.  D  y  a  un  idéalisme  moins 
eiuéré,  qui  fait  encore  bien  grande  la  part  de  la  ndson, 
nob  qui  ne  méconnaît  pas  entièrement  les  droits  des 
KDs.  Il  est  basé  sur  la  théorie  platonicienne  des  idées, 
Platon  supposant  que  la  yéritable  réalité  n'est  que  l'idée 
temelle  r^MMant  au  sein  de  l'absolu.  A  cette  doctrine  se 
rattachent,  à  des  degrés  différents,  Desoirtes,  Male- 
bnnche,  Boesaet,  Fénelon,  Leibniz.  R. 

IDÉE.  L*idée  ne  peut  pas  être  définie;  c^est  un  fait 
tfanple  de  rîntelligrâce,  la  rue  isolée  d'un  objet;  elle  se 
distingue  par  là  du  jugement^  qui  contient  l'affirmation. 
Les  idées  se  classent  t  1*  d'après  leurs  objets,  en  idée» 
de  modest  litres  et  de  rapports;  S*  selon  qu'dles  se 
rapnortent  à  des  objets  réels,  en  idées  concrètes,  indivi" 
émles,  rdaiives,  contingentes,  et  en  idées  nécessaires  et 
absolues;  toutes  ces  sortes  d'idées  donnent  lieu  à  la 
question  d'origine;  celles  à  objets  non  réels  sont  les 
me  abstraites,  générales  et  fictives;  elles  donnent  lieu 
à  rechercher,  non  leur  origine,  mais  leur  formation; 
3*  sa  point  de  Tue  de  la  qualité,  elles  sont  vraies,  exactes, 
précises,  claires,  distinctes,  ou  fausses,  tneacactes,  va- 
oves,  cbscures^  confuses,  4*  au  point  de  rue  logique,  on 
les  <fistingae  en  idées  simples,  complexes,  composées, 
coOeetioes.  Descartes  les  divisait  toutes  en  idées  adven- 
tiots,  facHcet  et  innées,  les  premières  acquises  par  l'ex- 
périttce,  les  secondes  par  le  travail  de  llmaginadon  : 
qnant  aux  idées  innées,  ce  sont  celles  qui  sont  naturelle- 
ment dans  l'esprit  et  que  la  raison  conçoit.  La  question  de 
formation  pour  certidnes  idées  ne  donne  Heu  à  aucune 
difficulté,  c^est  un  fait  libre  de  l'intelligence  :  il  n'en  est 
pas  de  même  de  la  question  d'origine;  c'est  par  la  na- 
ture des  idées  qu'on  peut  la  résoudre.  Les  idées  tmfi- 
viduelles  et  contingentes  (sensibles)  viennent  des  sens 
ea  de  la  conscience  ;  les  idées  nécessaires  et  (ù)solues 
{nUdUctuelUs  ou  morales)  sont  des  conceptions  de  la 
Taison,  ce  sont  les  idées  de  Platon  {V,  InéAt),  et  celles 
<pt  Descartes  appelle  innées.  Les  atmbuer  toutes,  sans 
distiLction,  à  rexpérienoe,  c'est  nier  les  idées  néces' 
moires  de  cause,  de  temps,  d'espace,  etc.  ';  c'est  rayer  la 
laisso  da  nombre  des  facultés  Intellectaellet.  Cette 


erreur  des  sensualtstes  vient  de  ce  qu'on  est  porté  à 
confondre  les  idées  qu'on  obtient  au  début  de  la  eon» 
naissance  avec  celles  qu'on  obtient  ensuite  à  l'occasion 
des  premières.  L'erreur  contraire,  en  rapportant  tout 
à  U  raison  •  conduit  à  Vidéalisme.  Pour  être  dans  le 
vrai,  il  faut  reconnaître  :  1*>  que  les  sens  nous  don- 
nent la  connaissance  des  phénomènes  du  monde  exte» 
rieur  physique;  2*  que  la  coiMCtefics  nous  donne  la  con- 
naissance des  faits  du  monde  intérieur,  ou  du  moi; 
3^  uue  la  raison  nous  fait  concevoir  la  réalité  substan- 
tielle  du  monde  physique,  et  la  réalité  substantielle  du 
mot;  4»  que  la  même  raison  nous  révèle  immédiatement, 
hors  de  nous,  une  autre  réalité  objectioe,  un  eon-mof 
immatériel  dont  le  caractère  est  absolu  ^  nécessaire,  et 
qvA  nous  apparaît  comme  la  condition  du  monde  pky^ 
siaue  et  du  mot;  en  un  mot.  Dieu.  R. 

IDÉES  (Association  des).  V.  AssocrATioir. 

u>ÉB»-iMAGBs  (Théorie  des),  théorie  philosophique  dans 
laquelle  les  idées  sont  considérées,  suivant  le  sens  éty« 
mologique  de  leur  nom  (en  grec  éidos^t  idéa,  forme, 
image),  conmie  de  véritables  imaffes  des  objets,  et  comme 
étant  elles-mêmes  l'objet  immédiat  auquel  l'esprit  s'ap- 
plique dans  le  phénomtoe  de  la  perception.'  La  théorie 
des  Idées-images,  on,  comme  l'on  dit  encore,  des  Idées 
représentatives,  semble  avoir  eu  pour  orij^e  l'impossi- 
bilité de  donner  une  explication  posititive  de  la  percep- 
tion ;  mais,  en  substituant  la  perception  de  l'idée  à  ceue 
de  la  chose  même,  on  ne  faisait  que  déplacer  la  difficulté, 
si  même  on  ne  la  compliquait.  Cest  dans  la  philosophie 
atomistique  qu'il  semble  avoir  été  fedt  pour  U  première 
fois  mention  des  idées.  Démocrite  supposait  que  ce  que 
nous  appelons  la  perception  est  produit  par  certaines 
émanations  des  corps,  qui  pénètrent  Jusqu'à  l'&me  et 
viennent  s'y  imprimer,  en  passant  par  les  organes  des 
sens.  Ces  émanations  ou  effluves  sont  des  figures  sem- 
bhibles  aux  corps  dont  elles  se  détachent.  Telle  fut  aussi 
la  doctrine  d'Épicure;  Lucrèce,  qui  nous  l'a  transmise, 
donne  aux  émanations  les  noms  de  vestigia,  simulacra 
(traces,  images),  et  enseigne  expressément  que  c'est  ainsi 
que  nous  connaissons  non -seulement  les  formes,  mais 
les  odeurs,  les  saveurs,  les  sons,  en  un  mot  toutes  les 
propriétés  des  corps.  Telle  est  la  théorie  des  Idées-images 
sous  sa  forme  la  plus  naïve,  la  plus  grossière  sans  doute, 
mais  la  plus  intelligible  encore  et  la  moins  illogique* 
Car,  quelques  objecuons  oue  soulèvent  toutes  les  parties 
du  système,  à  ne  le  prendre  que  dans  son  principe,  on 
comprend  Jusqu'à  un  certain  point  que  des  images  ma» 
térielles  fiissent  impression  sur  une  ftme  matérielle,  foiw 
mée,  comme  tout  le  reste,  d'atomes  agr^^  liais  que 
penser  de  l'inconséauence  des  philosophes  qid  reconnais- 
sent la  spiritualité  de  l'àme  et  conaervent  néanmoins  l'hy* 
pothèse  des  Idées-images?  Aristote,  ses  disciples,  presque 
toute  la  philosophie  scolastique,  Locke  enfin,  ont  mérité 
ce  reproche.  Le  premier  pensait  que  Time  ne  reçoit  la 
notion  des  objets  extérieurs  eue  par  un  intermédiaire, 
celui-là  même  qu'il  appelle  formes  ou  idées  seeuibles  • 
«  Le  sens,  dit-il,  est  ce  qui  est  capable  de  recevoir  ces 
idées  sans  en  recevoir  U  matière.  »  Bt  tons  les  efforts  de 
l'école  tendent  effectivement  à  expliquer  comment  les 
idées  se  spiritualisent,  pour  ainsi  dire,  en  passant  da 
dehors  au  dedans.  On  peut  prendre  une  notion  som- 
maire, mais  assez  exacte,  des  artifices  et  des  subtilités 
de  pensée  et  de  langage  auxquelles  le  pâripatétisme  a  en 
recours  pour  atteindre  oe  but,  en  lisant  le  cbapitre  qoe 
Halebranche  (Recherche  de  la  vérité,  1.  m,  n^  parue, 
ch.  2)  a  consacré  à  la  critique  de  ce  système.  Quel  qu'il 
en  soit,  les  doctrines  d'Aristote,  transportées  presque  de 
toutes  pièces  dans  la  scolastique,  y  perpétuèrent  la  tra- 
dition des  Idées-images,  sous  le  nom  d* Espèces  (F.  Bs- 
ptee);  et,  malgré  les  rares  protestations  de  quelques 
esprits  plus  indépendants,  tels  que  Duns  Scot,  qui  trou- 
vait avec  raison  que  l'idée  ainsi  comprise  n'est  qu'un 
embajus  de  plus,  on  continua  de  croire  et  d'enseigner 
que  la  perception  des  objets  n'est  possible  que  par  rin- 
termédiaire  des  idées,  et  que  celles-ci  sont  les  images 
des  choses.  La  phUosophle  cartésienne  finit,  il  est  vni, 
par  entendre  les  idées  dans  un  tout  autre  sens;  mais 
Locke  conserva  l'ancienne  théorie  :  «  Il  est  évident,  dit- 
«  il,  que  l'esprit  ne  connaît  pas  les  choses  immédiate- 
«  ment,  mais  seulement  par  l'intermédiaire  des  idées 
«  qu'il  en  s,  et,  par  conséquent,  notre  connaissance  n'est 
«  vraie  qu'autant  qu'il  y  a  de  la  conformité  entre  nos 
«  idées  et  leurs  objets.  »  Or,  ou  ces  paroles  ne  signifient 
rien,  ou  l'idée  ne  peut  être  conforme  à  l'objet  qirautant 

Îu'elle  en  est  la  copie,  c-à-d.  l'image  ;  et  id  se  repro- 
uisent  avec  toute  leur  force  les  objections  qu'on  aurait 


lUE 


1050 


IGK 


pn  également  élever  contre  les  itnwlaera  des  Êpienxiens, 
contre  les  formes  ou  idées  péripatéticiennes,  et  contre  les 
MpécM  scolâstiqnes.  Si  Timage  est  matérielle,  en  qnoi  la 
perception  de  cette  matière  est-elle  plus  explicable  que 
celle  de  la  matière  des  corps  eux-mêmes?  Et  que  ùàtron 
antre  chose  que  de  doubler  la  difficulté  ou  de  la  dépla- 
cer? En  ontre,  comment  concevoir  ces  images  circulant  à 
travers  Tespace,  s^  croisant,  8*y  heurtant,  ces  milliers 
d'images  semblables  ou  différentes,  émises  simultané- 
ment par  un  objet  oue  perçoivent  des  milliers  de  specta- 
teurs? Et  si,  avec  beaucoup  de  bonne  volonté,  on  peut 
admettre  un  instant  que  les  images  des  choses  visibles 
ftosent  impression  sur  une  Ame  matérielle,  à  la  façon  du 
cachet  sur  la  cire,  que  sera-ce  lorsqull  s'agira  des  images 
du  son,  de  la  résistance,  etc.,  et  de  l'impression  faite 
par  ces  images  matérielles  sur  une  Ame  immatérielle? 
Buppose-t-on  des  images  immatérielles?  Ce  sont  d'autres 
contradictions  :  que  peut-on  entendre  par  des  images  im- 
matérielles de  la  matière?  Gomment  procèdent-elles  des 
corps,  et  comment  agissentr-elles  sur  T&me?  Enfin,  de 
quelque  côté  qu'on  prenne  la  théorie  des  Idées-images, 
quelques  modifications  qu'on  lui  fasse  subir,  elle  aboutit 
toujours  à  un  ensemble  de  résultats  absurdes,  dont  le 
plna  curieux  peut-être  est  celui  aue  Berkeley  et  Hume 
ont  très-logiquement  déduit  de  la  doctrine  de  Locke,  sa- 
voir, que  les  corps  n*existent  pas,  ou,  ce  qui  revient  au 
même  pour  nous,  que  nous  ne  savons  absolument  rien 
de  leur  existence,  puisque,  oe  les  connaissant  que  par  les 
idées  et  n'ayant  aucun  moyen  de  comparer  celles-ci  à 
leurs  prétendus  originaux,  nous  ne  savons,  à  proprement 
parler,  ni  si  elles  leur  ressemblent,  ni  si  ces  originaux 
existent  réellement.  Ainsi,  le  scepticisme  le  plus  complet, 
ou,  si  l'on  se  décide  résolument  pour  la  négative,  le  ni* 
hilisme,  telle  est  la  conséquence  forcée  du  système  des 
Idées-images.  B — b. 

IDENTITÉ  (du  latin  idem,  le  même),  propriété  qui  ne 
peut  appartenir  qu*à  la  substance  et  jamais  au  pnéno- 
mène.  Par  elle  un  être  est  toujours  et  invariablement  le 
même,  mais  elle  ne  peut  pas  être  attribuée  inctifférem- 
ment  à  toute  espèce  aêtres.  Dans  les  corps  inorganiques 
l'identité  n'est  qu'apparente,  parce  que  les  molécules  ma- 
térielles dont  ils  se  composent  sont  soumises  au  change- 
ment. Chez  les  êtres  vivants,  la  partie  matérielle,  se 
renouvelant  sans  cesse,  ne  comporte  pas  l'identité;  celle- 
ci  ne  consiste  pour  eux  que  dans  la  persistance  du  type 
de  chaque  espèce;  elle  dépend  par  conséquent  de  la  con- 
tinuité dans  l'ordre  et  dans  le  mouvement.  iMais  la  véri- 
table identité  n'est  pas  encore  là;  elle  ne  peut  se  trouver 
que  dans  un  être  un  et  simple,  comme  l'&me.  L'identité 
est  donc  l'unité  continue  de  l'être  qui  n'éprouve  aucune 
altération  dans  sa  substance,  dans  un  être  spirituel  qui 
pense,  qui  veut,  et  qui  à  toutes  les  époques  de  sa  vie  peut 
se  retrouver  tel  qu'il  était  antérieurement.  Une  telle  iden- 
tité, qui  est  celle  du  mot,  est  prouvée  par  la  conscience 
et  la  mémoire  ;  elle  est  une  garantie  de  la  responsabi- 
lité morale,  et,  par  suite,  de  l'immortalité  de  notre  &me 
(V,  Amm\.  -—  On  donne  quelquefois  le  nom  de  Principe 
tidentiii  au  principe  ae  contradiction  {V,ce  mot),  — 
La  doctrine  de  Videntité  absolue  est  le  svstème  de  Schel- 
Ung,  qui  regarde  comme  absolument  identiques  le  sv^et 
et  l'objet,  le  moi  et  le  nota-mot,  tous  les  êtres  étant  con- 
fondus en  un  seul  être  unique,  répandu  partout,  dans 
l'espace  et  dans  le  temps,  étranger  à  lui-même,  et  s'agi« 
tant  sans  cesse  dans  une  évolution  indéfinie. 
•  L'identité  se  constate,  dans  les  affaires  civiles  d'un 
murticulier,  par  la  production  des  actes  de  l'état  civil,  ou, 
a  défaut,  d'un  acte  de  notoriété.  Celle  d'un  fonctionnaire 
public  dont  on  invoque  un  acte  dans  un  lieu  étranger  à 
ion  ressort,  se  prouve  par  U  légalisation  de  sa  signature. 
La  personne  qui  demande  un  passe-port  doit ,  al  elle 
n'est  pas  connue  de  celui  qui  le  délivre,  ou  si  elle  ne 
produit  un  autre  passe-port  non  encore  périmé,  faire 
attester  son  identité  par  aeux  témoins  devant  le  commis* 
■aire  de  nolice.  V.  InnivmoALrriL  R. 

IDÉOGRAPHIQUE  (Écriture).  V.  ÉcairuEB. 

IDÉOLOGIE  (du  grec  idea,  idée,  et  logos,  étude),  nom 
que  prit  le  oondillacisme  à  la  fin  du  xvni*  siècle.  Con* 
dillac  avait  particulièrement  porté  ion  attention  sur  deux 
points  :  l'origine  de  nos  connaissances,  et  la  puissance  des 
signes.  L'idéologie  s'attacha  à  ces  deux  points  presque 
exclusivement,  en  traitant  de  l'analjrse  de  l'entendement 
et  de  l'origine  du  langage,  y  compris  quelques  vues  re- 
marquables sur  la  grammaire  générale.  Garât,  enseignant 
f  idéologie  à  l'École  normale,  était  professeur  d'onâyia. 
Cette  Mialyse  n'était  autre  que  celle  de  la  sensation,  re- 
gardée comme  la  source  de  toutea  nos  idées,  an  mord  I 


comme  an  physiqne.  La  science  de  fAme  était  réduite  à 
n*être  qu'une  partie  de  celle  dn  corps,  et  la  peycbologie 
une  branche  de  la  physiologie.  Le  développcânent  oom* 
plet  de  l'esprit  humain  devant  sortir  de  la  même  sonroe, 
Destutt  de  Tracy,  à  la  suite  de  Condillac,  fait  venir  la 
parole  du  gloussement,  du  cri  animal.  Ce  point  de  départ 
admis.  Il  développe  avec  un  grand  talent  d'analyse  *a 
manière  dont  les  langues  ont  dû  se  former,  et  per- 
sonne n'a  précisé  avec  plus  de  netteté  le  rèle  des  parties 
du  discours.  L'association  des  idées,  dans  ses  rapports 
avec  les  signes,  occupe  aussi  une  grande  place  dam 
Vidéologie,  La  morale  nSpond  entièrement  à  son  principe. 
L'unique  but  de  l'homme  est  de  se  conserver;  le  bien, 
c'est  ce  qui  conserve  et  perfectionne  l'organisme;  le  mal, 
ce  qui  le  détériore  ou  le  détruit.  Volney,  dans  son  Coté" 
chisme  de  la  loi  nahirelle^  développe  cette  morale,  qui 
n'est  qu'un  affligeant  égoîsme. 

Outre  les  idéologues  dont  les  noms  précèdent,  il  y  en 
eut  d'autres  également  recommandables  par  leur  carac- 
tère et  leur  talent  ;  tels  furent  Cabanis,  Chénier,  Daunou, 
Ginguené.  Ils  firent  pour  la  plupart  une  opposition  au 
gouvernement  d'alors,  ce  qui  leur  attira  l'antipathie 
et  les  saroasmes  de  l'empereur  Napoléon  I*',  antipa» 
thie  qui  alla  jusqu'à  lui  faire  supprimer  l'Académie  des 
Sciences  mondes  et  politiques,  qu'il  regardait  comme  le 
foyer  de  Vidéologie.  Elle  vé<»it  encore  <{uel^e  temps 
dans  la  petite  société  d'Auteuil,  pour  mounr  bientôt  mo- 
difiée et  ensuite  abandonnée  iMr  Laromiguière,  Degé- 
rando,  et  Maine  de  Biran.  R. 

IDIOME  (du  grec  idtdma,  chose  propre,  particularité). 
Appliqué  aux  langues,  ce  mot  désigne  une  langue  propre 
à  une  nation,  et,  par  extension,  le  langage  particulier  à 
une  province.  F.  Langub,  Dialecte,  Patois.  P. 

IDIOTISME  (du  grec  idios,  propre,  particulier),  mot 
qui  signifie  proprement  «  locution  particulière  A  une  lan- 
gue. »  L'idiotisme  consiste,  soit  dans  l'ompioi  des  mots, 
comme  en  français  aller,  se  porter,  dans  le  sens  de  être 
dans  tel  ou  tel  état  de  santé  ;  soit  dans  la  manière  de  les 
arranger,  comme  :  si  j'étais  que  de  txms,  construction 
oui  n'est  conforme  aux  règles  d'aucune  langue,  mais  <|ue 
1  usage  a  consacrée  dans  la  nôtre.  Lorsqu'on  veut  distin- 
guer les  idiotismes  propres  à  une  langue  en  particulier, 
on  leur  donne  un  nom  analogue  A  celui  de  cette  langue: 
les  idiotismes  de  la  langue  française  s'appellent  galli^ 
cismes ,  ceux  du  grec  Mllénismes ,  ceux  du  latin  lati- 
nismes, ceux  de  l'anglais  anglicismes,  ceux  de  rallemaod 
germanismes,  etc...  P. 

IDOLATRIE  (du  grec  éidôlon,  efligie,  image,  et  latréia, 
adoration  ),  culte  des  idoles  ou  images  de  la  Divinité 
prises  pour  la  Divinité  elle-même.  Le  fétichisme ,  le  sa- 
Déisme ,  le  polythéisme,  sont  des  formes  de  TidolAtrie. 

IDYLLE  (du  grec  eidullion,  diminutif  de  eidos,  petite 
pièce,  morceau  détaché).  Ce  mot,  chez  les  Anciens,  s'ap- 
pliquait A  tous  les  petits  poème»  dont  le  si^et  était  une 
description,  un  tableau.  Ainsi  Théocrite  a  donné  le  nom 
d'idylles  A  ses  poèmes,  qui  roulent  les  uns  sur  des  sujets 
champêtres,  les  autres  sur  des  sujets  erotiques,  ou  dra- 
matiques, ou  même  épiques ,  etc.  Ausone  a  fait  de  même 
pour  ses  poésies  détachées,  où  l'on  trouve  des  vers  sur 
la  PAque,  un  éloge  funèbre  de  son  père,  une  description 
de  sa  petite  campagne,  etc.  —  Chez  les  modernes,  l'idyUe 
est  une  variété  du  gente  pastoral.  Elle  diffère  de  l'églogne 
en  ce  qu'elle  est  «toHJours  un  récit  ou  une  description, 
qu'elle  ne  prend  point  la  forme  du  dialogue,  et  qu'elle  est 
moins  animée.  V.  Églogob,  Pastorale  (Poésie).       P. 

IF,  petit  échafaudage  de  forme  pyramidale,  destiné  à 
recevoir  des  lampions  pour  les  illuminations. 

IGEL  (Monument  romain  d'),  dans  la  Prusse  rhénane, 
près  de  Trêves.  C'est  une  sorte  de  tour  carrée  de  près  de 
5  met.  de  côté,  haute  de  U  met,  terminée  dans  sa  partie 
supérieure  en  pyramide,  et  surmontée  d'un  globe  ter- 
restre sur  lequel  un  aigle  semble  prendre  son  essor. 
Quelques  savants  lui  attribuent  un  caractère  et  une  des- 
tination funéraires;  d'autres  supposent  qu*il  fut  élevé 
pour  célébrer,  soit  la  naissance  de  Caligula,  soit  le  ma- 
riage de  Constance  Chlore  avec  Hélène.  Cette  dernière 
conjecture  expliquerait  un  bas-relief  de  ce  monument^ 
représentant  un  homme  et  une  femme  se  donnant  la 
main  :  on  y  remarque  aussi  un  repas  de  famille,  des  at- 
tributs de  commerce,  un  berger  PAris,  des  scènes  de 
danse  et  de  jeu.  Une  inscription  fruste  semble  indiquer 

Sue  la  tour  fut  élevée  A  la  mémoire  du  marchand  Seôin- 
Inus  Secorus,  fondateur  d'Igel. 
IGNORANCE  DU  SUJET,  Ignoratio  eIsncAt,  sophisme 
qui  consiste  A  s'écsrter  du  sujet ,  A  prouver  autre  chose 
que  ce  qui  est  en  question  ou  ce  que  personDS  ns  cou* 


ILI 


lOSl 


ILI 


teste,  à  prêter  à  Tadvenaire  dm  opinion  qni  n*e8t  i»s  la 
■tenue.  Ce  sophisme  est  le  vice  habitael  des  discussions: 
pva  l^éfiter,  il  faut  s'attacher  an  point  précis  de  la  qnes- 
neo,  bien  définir  le  sujet,  et  fixer  le  sens  des  termes. 
Dsns  YHoracê  (acte,  iv,  se.  2  )  de  Corneille,  il  y  a  igno- 
nmùB  d^  tuiet^  et,  par  suite,  méprise,  entre  le  vieil  Ho- 
iKe,  qui  croit  que  son  fils  a  fui  par  peur  devant  les 
Curiaces,  et  Valère,  qui  ne  parle  que  d*une  fuite  simulée 
pour  mieux  assurer  la  victoire.  L'argumentation  de  J.-J. 
Rousseau  contre  Molière,  dans  sa  Lettre  sur  lerspêctade», 
repose  sur  un  sophisme  du  même  genre. 

IHRÂM,  manteau  de  pénitence  dont  se  couvre  le  pè- 
lerin musulman  en  approchant  de  la  Mecque.  11  est  com- 
posé de  deux  pièces  de  laine  blanches,  sans  coutures. 

ILDEFONSB  (Château  de  Saint-).  V.  Graiua  (U). 

ILIADE,  Tune  des  deux  grandes  épopées  grecques, 
psTTenues  Jusqu'à  nous  sous  le  nom  d'Homère.  Selon 
Hérodote,  aie  a  dû  être  composée  400  ans  avant  cet  his- 
torien, c-j^.  au  DL*  ou  au  x*  siècle  av.  J.-C;  les  faits 
qu'elle  raconte  appartiennent  au  xu*  ou  an  xiii*,  de 
lorte  qu'entre  ces  faits  et  le  pofime  il  s'est  écoulé  plu- 
sieurs siècles  :  mais,  comme,  dans  les  temps  antérieurs  à 
rhistoire,  la  civilisation  ne  se  transforme  que  lentement, 
on  peut  regarder  Vfliade  comme  une  peinture  des  moeurs 
des  temps  héroiques  en  ^néral,  et,  à  ce  titre,  c'est  une 
eeovre  précieuse  a  consulter  quand  on  veut  refaire  l'hie- 
toire  des  dges  primitifs  de  la  Grèce.  Toutefois,  dans  l'in- 
tervalle de  temps  qui  s'est  écoulé  entre  l'/ltode  et 
YOdysséêf  les  usages,  les  idées,  les  croyances  ont  subi 
des  diangements  assez  considénd>les,  pour  que  la  plupart 
des  savants  aient  cessé  d'attribuer  ces  deux  épopées  k  un 
même  poète,  et  se  soient  rangés  à  l'opinion  antique  des 
ChorizotUes  (V,  ce  fnot)^  qui  reconnaissaient  deux  Ho- 
mères.  Quant  à  V Iliade  elle-même,  l'étude  des  œuvres  du 
même  genre  produites  d'une  manière  originale  et  sans 
modèles  antérieurs  par  d'autres  nations,  soit  en  Occi- 
dent, soit  surtout  dans  llnde,  a  montré  la  façon  dont 
elle  a  dû  être  composée  par  son  auteur.  On  sait  par  Ho- 
mère lui-même  qu'au  temps  de  la  guerre  de  Troie,  et 
SQssi  dans  les  siècles  qui  suivirent,  les  actions  célèbres 
des  guerriers,  les  histoires  divines,  les  traditions,  étaient 
chantées  dans  les  réunions  des  hommes  par  des  aèdes  ou 
improvisateurs,  qui  accompaf^iaient  leurs  récits  du  son 
continu  et  peu  varié  d'un  instrument  (  V,  Aànss)  ;  on  a 
£ea  de  croire  aussi  que  les  Grecs  de  ces  temps  anciens 
ne  pratiqutdent  pas  encore  l'écriture  :  c'est  donc  le 
rhythme  et  la  mesure  qui  soutenaient  la  mémoire  des 
sèdes  ^  perpétuaient  le  souvenir  de  leurs  chants.  11  se 
forma,  dans  la  Grèce  asiatique  et  dans  les  lies,  de  véri- 
tables écoles  d'aèdes,  dont  l'unique  occupation  fut  de 
répéter  les  chants  de  leurs  maîtres  et  d'y  ajouter  leurs 
propres  rédts.  Homère  fut  le  plus  célèbre  d'entre  eux. 
Les  clumtres  épiques  des  temps  postérieurs  se  rattachèrent 
à  loi ,  complétant  son  œuvre,  y  mêlèrent  des  récits  qui 
forent  répétés  comme  des  fragments  du  maître,  et  for- 
mèrent idnsi  la  génération  des  rapsodes  hùmérides;  il 
eo  existait  encore  au  temps  de  Platon,  et  probablement 
longtemps  après  lui.  On  ne  peut  guère  douter  que,  lors- 
que Solon  entreprit  de  réunir  en  un  corps  les  œuvres 
d'Homère,  il  n'ait  rassemblé  à  la  fois  des  firâgments  écrits 
et  de  simples  chants  récités.  Le  travail  de  Pisistrate, 
Deaucoup  plus  complet,  fit  regarder  cet  homme  politique 
comme  le  y^tabie  restaurateur  d'Homère;  en  effet, 
Ttsuvre  des  Diascéoastes  (V.  ce  mot)  ou  arrangeurs  ne 
fut  pas  une  simple  compilation,  mais  l'unification  de 
morceaux  dispersés  et  souvent  incohérents,  dont  il  leur 
Mut  rejeter  un  grand  nombre.  Les  éditeurs  qui  vinrent 
après  continuèrent  le  travail  de  Pisistrate;  l'édition  de  la 
Cassette,  composée  par  Aiistote  pour  Alexandre,  prépara 
le  minutieux  et  savant  examen  des  critiques  d'Alexan- 
drie. C'est  après  ces  remaniements  successifs  crue  fut 
enfin  arrêtée  la  forme  sous  laquelle  Vlliade  et  VOdyssie 
sont  parvenues  jusqu'à  nous. 

L'unité  de  VlUade  est-^le  l'œuvre  de  Solon  el  de  Pisis- 
trtte,  ou  bien  »-t-elle  été  conçue  par  Homère  lui-même? 
Le  grand  événement  historique  raconté  dans  les  poèmes 
i'HomèrB  suffit  à  donner  à  une  épopée  son  unité  de  com- 
position; Tunité  épique  est  en  elle-même  une  chose 
ligne,  et  ns  constitue  qu'un  cadre,  dont  la  grandeur 
peut  s'étenÂre  ou  te  rétrécir  à  volonté,  et  où  viennent  se 
plieer,  sans  fin  et  sans  difficulté,  des  épisodes  plus  ou 
moins  dépendants  du  sujet  principal  et  au  milieu  des- 
quels œ  sujet  se  développe  sans  se  perdre.  Tel  est  le 
plan  de  VOdyssée;  tel  est  même  celui  de  l'/ltode,  et,  en 
iênénd,  de  tons  les  poèmes  épiques,  anciens  et  mo- 
dines.  On  doit  observer  que  riltods  n'a  point  pour  sH|«t 


la  guerre  de  Troie,  mais  la  colère  d'Achille,  e.«4-d«  idi 
accès  de  passion  humaine,  dont  on  suit  la  naissance,  le 
développement,  les  effets  et  la  terminaison;  c'est  là  une 
unité  toute  morale,  et  dont  la  conception  ne  peut  appar- 
tenir qu'à  un  seul  homme.  On  ne  peut  donc  ôter  à  Ho- 
mère que  des  fragments  plus  ou  moins  secondaires,  inter- 
calés par  des  rapsodes.  —  Un  nombre  très -grand  de 
personnages  paraissent  dans  VHiad»,  hommes,  femmes, 
déesses  et  dieux.  Leurs  caractères  lèvent  certainement 
établis  par  la  tradition  longtemps  avant  Homère;  ils  loi 
étaient  donnés  tout  tracés.  Mais  il  restait  à  les  mettre  en 
œuvre  et  à  les  conserver  semblables  à  eux-mêmes  pen- 
dant toute  la  durée  d'un  grand  poème.  Cette  unité  mo- 
rale et  poétique  des  caractères  dans  Vlliad»  prouve  encore 
qu'un  seul  homme  est  l'auteur  du  poëme. 

Voici  en  abrégé  le  contenu  de  VHiade.  Une  querelle 
s'élève  entre  Achille  et  Agamemnon  au  sulet  de  la  cm- 
tive  Chryséis.  Achille  invoque  Jupiter,  qm  se  range  ou 
côté  du  héros.  Agamemnon  aveuglé  livre,  en  l'absence 
d'Achille,  le  combat  aux  Troyens  :  mais  dès  ce  moment 
les  Grecs,  auparavant  victorieux ,  sont  repoussés  par  de- 
grés loin  de  Troie,  et  ramenés  Jusque  dans  leur  camp.  Ils 
comprennent  que  la  retraite  d'Achille  est  la  cause  de 
leurs  maux  :  une  députation  lui  est  envoyée  ;  Achille  est 
inexorable.  Le  combat  reprend  ;  Hector  et  les  lYoyens 
emportent  le  camp  des  Grecs,  qui  abandonnent  la  terre 
de  Troade  et  se  renferment  sur  leurs  vaisseaux.  Après 
diverses  péripéties  de  la  lutte,  dont  Adiille  est  instruit 
par  Patrocle,  son  ami,  celui-ci  obtient  d'aller  combattre  ? 
il  est  tué  par  Hector,  et  sa  mort  amène  le  dénoûment. 
Achille  s'enflamme  du  feu  de  la  vengeance,  oublie  son 
ressentiment  contre  Agamemnon  et  les  Grecs,  court  au 
combat,  met  les  Troyens  en  déroute,  et  tue  Hector.  Les 
funérailles  de  Patrocle,  la  scène  attendrissante  où  le 
vieux  roi  Priam  vient  redemander  le  corps  de  son  fils  et 
baiser  la  main  qui  l'a  tué,  enfin  les  funérailles  d'Hector  et 
les  lamentations  des  femmes,  terminent  de  la  fa^n  la 
plus  grandiose  cette  épopée  d'une  composition  si  simple 
ot  d'une  si  parfaite  unité.  —  Des  épisodes  de  toute  lon- 
gueur et  en  nombre  infini  peuvent  se  loger  dans  ce 
cadre;  il  y  en  a  beaucoup  dans  V Iliade  :  mais  leur 
nombre  et  leurs  proportions  ont  été  calculés,  soit  par 
le  poète,  soit  par  ceux  qui ,  aux  temps  de  Solon  et  de 
Pisistrate,  ont  édité  le  poème,  de  façon  à  ne  pas  nuire  à 
l'ensemble  et  à  l'intérêu  Cette  conception  de  l'harmonie 
et  des  proportions  des  parties  et  du  tout  n'a  rien  qui 
doive  nous  surprendre ,  car  elle  est  un  des  caractères 
propres  du  génie  grec  à  toutes  les  époques  de  son  histoire. 

V Iliade  a  Joué  un  grand  rôle  dans  le  développement  de 
la  littérature  ancienne  et  moderne.  Comme  elle  renfer- 
mait les  légendes  d'un  grand  nombre  de  dieux,  de  héros 
et  de  peuples,  qui  intéressaient  le  monde  grec,  elle  a  été 
pour  les  siècles  postérieurs  une  sorte  de  trâor  où  presque 
tous  les  auteurs  grecs  ont  puisé.  Non-seulement  elle  s 
été  répétée  par  fragmente  dans  toute  la  Grèce  par  le^ 
rapsodes,  et  cela  pendant  plusieurs  siècles ,  fournissant 
ainsi  à  la  poésie  populaire  comme  aux  hommes  lettrés 
la  matière  de  leurs  chants,  mais  elle  a  été  un  modèle 
d'après  lequel  d'autres  poètes  épiques  chantèrent  à  leur 
tour  les  héros  de  cette  guerre  de  Troie,  dont  Homère 
n'avait  pris  qu'un  court  épisode  (F.  Grecque  —  Littéra» 
ture).  Les  épiques  modernes  ont  eu  pour  guide  Virgile, 
et,  par  Virgile,  Homère.  En  dehors  de  l'épopée,  V Iliade  a 
fourni  des  matériaux  à  presque  toute  la  poésie  grecque  : 
les  faits  qu'elle  raconte  souvent  en  un  court  résumé,  re- 
pris par  le  drame  ou  chantés  sur  la  lyre,  ont  reçu  sous 
ces  formes  nouvelles  un  plus  grand  développement.  Les 
dieux  ont  été  acceptés  parles  poètes  des  siècles  suivants, 
tels  que  VIliade  les  avait  dépeints  ;  seulement  leur  ca- 
ractère et  leurs  actions  ont  reçu  les  lentes  modifications 
qu'une  civilisation  plus  avancée  devait  leur  faire  subir. 
De  la  Grèce,  ces  dieux  ont  passé  dans  la  poésie  latine  ;  ils 
sont  dans  Virgile  à  peu  près  ce  qu'ils  sont  dans  Homère; 
et  enfin,  d'Homère  et  de  Virgile,  ils  sont  venus  Jusqu'à 
nous,  ayant  presque  perdu  leur  signification  çymbolique, 
mais  aytpst  encore  leur  figure  et  leurs  attributs.  Nous  en 
dirons  autant  des  héros  et  des  scènes  de  VIliade  :  n'ont- 
ils  pas  rempli  la  poésie  ancienne  et  moderne! Enfin  les 
arts  du  dessin  ont  puisé  sans  relâche  à  cette  source  iné- 
puisable :  non-seulement  les  sculpteurs  et  les  peintres 
grecs  cherchèrent  là  leurs  inspirations,  et  en  tirèrent  un 
grand  nombre  d'œuvres  adtnirables,  mids  les  artistes 
modernes,  nos  écoles  de  peinture  et  de  sculpture,  ne 
trouvent  nulle  part  idUeurs  de  sujets  plus  élevés  ou  plua 
pathétiques.  On  pent  donc  dire  que,  de  toutes  les  œuvres 
de  poésie,  il  n'en  est  ancone  qui  ait  une  importanoe  "^^'^ 


ILL 


I0S2 


ILL 


Murable  à  Vlluidê,  dans  rbistoire  des  lettres  et  des  arts 
de  rOcddenu  F.  It  Wood,  On  Uis  origifuU  Gmiw  ofB<H 
«MT,  1769;  Wolf,  ProlegomênaadHomerumfil^iPajo» 
Knigfat,  Nouoeaux  ProUgomena  ad  Bamerwn,  1814; 
Doffu-Hontbel,  Histoire  dis  poésies  homériques.    En .  B. 

lUAQUE  (Table),  bas-relief  ea  slac,  découvert  au 
xvn*  siècle  dans  les  mines  d'un  temple  sur  la  voie  Ap- 
pienne,  et  ainsi  appelé  parce  qu*on  y  voit  représentés  les 
principîaux  sc^ets  de  la  guerre  d*llion  ou  Troie.  Les  pas- 
sages des  poètes  dont  les  si\]ets  ont  été  tirés  sont  gravés 
en  deux  colonnes  qui  divisent  la  Table  en  trois  grandes 
parties.  On  suppose  que  ce  monument  servait  aux  gram- 
mairiens pour  mieux  faire  comprendre  aux  Jeunes  gens 
les  événements  racontés  par  Homère.  La  table  Iliaque  est 
conservée  à  Rome,  au  Capitole. 

ILLAPS ,  en  termes  de  Théologie,  celui  qui  se  trouve 
dans  une  sorte  d*extase  contemplative. 

ILLINOIS  (Idiome).  V.  Miami. 

ILLUHINATIONS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictiomnatre 
d$  Biographie  et  d* Histoire, 

ILLUMÔnSME,  sorte  de  mysticisme  vulgaire,  dont  le 
caractère  essentiel  est,  chez  les  adeptes,  la  prétention  de 
s*élever  à  la  connaissance  du  surnaturel ,  surtout  en  ma- 
tière religieuse.  D'après  son  principe,  énoncé  par  Swen- 
denborp,  que  TEntendement  est  le  réceptacle  de  la  lumière, 
ruinminisme  doit  mettre  rhonune  en  communication 
avec  le  monde  spirituel,  en  commerce  avec  les  esprits,  et 
lui  découvrir  les  mystères  les  plus  obscurs.  C'est  moins 
une  doctrine  qu*un  état  de  Tàme  contagieux  et  suscep- 
tible de  revêtir  des  formes  différentes.  U  tient  à  la  théur- 
gie  chez  les  derniers  Alexandrins ,  au  gnosticisme  dans 
les  premiers  siècles  de  Tère  chrétienne  ;  comme  le  gnos- 
tique,  ruiuminé  ne  contemple  pas  ce  qu*il  voit,  mius  ce 
qu'il  ne  voit  pas.  Aux  xui*  et  ziv*  riècles,  les  sectes  qui 
se  rattachent  au  Joachimisme  s'en  rapprochent  plut  ou 
moins.  En  Allemagne,  les  Beg^urds  donnent  au  ioachi- 
misme  une  teinte  métaphysique  qui  annonce  l'illumi- 
nisme  de  Jacob  Bœhm.  Celui -ci  devint  un  des  plus 
célèbres  représentants  de  la  secte  :  son  ignorance  le  ren- 
dait plus  propre  à  recevoir  la  lumière  d'en  haut,  et  ce  ne 
fut  qu*a|>rès  trois  visions  qu'il  prit  la  plume.  Avec  lui 
Tilluminisme  devint  un  obscur  système  de  métaphysique 
et  de  panthéisme.  La  secte  des  Rose-Croix  le  plaça  sur 
le  terrain  de  la  chimie,  ou  plutèt  de  l'alchimie,  en  pré- 
tendant découvrir  les  mvstëres  de  la  nature.  Dans  les 
nombreux  écrits  du  Suédois  Svedenborg,  rilluminisme 
embrasse  l'univers  entier,  le  ciel,  la  terre  et  même  l'en- 
fer (K.  ZHi  Ciel  et  de.VEnfer,  Londres,  1788,  in-4*;  Des 
terres  australes  el  ptatnétaires ,  et  de  leurs  habita$Us, 
Londres,  1758  ).  Vers  1754,  Uartines  Pasqualis  affilia  l'ii- 
luminisme  à  quelques  loges  maçonniques,  et  lui  donna 
on  caractère  cababstique,  prétendant  à  des  manifesta- 
tions visibles  au  moyen  d'évocations  théufgiques.  Saint- 
IfarUn,  initié  par  Martinez,  renonça  à  cette  foUe  pour 
l'enfermer  dans  la  théosophie  pure.  L*illuminisme  de 
Saint-Martin  se  montra  chez  guelquea  personnages  de  la 
Révolution,  et  ce  philosophe  inconnu  fut  enveloppé  dans 
les  poursuites  dirigées  contre  Catherine  Théot,  Dom  Gerle 
et  plusieurs  autres.  Mais  le  véritable  illuminisme  poli- 
tique, au  xviit*  siècle,  remonte  au  Bavarois  Weishanpl , 
oui  le  répandit  par  toute  l'Allemagne  et  même  en  France  ; 
il  no  se  proposait  rien  moins  que  l'abolition  de  la  pro- 
priété ,  de  l'autorité  sociale  et  de  la  nationalité  ;  il  aspi- 
rait à  faire  du  ^nre  humain  une  seule  et  heureuse  famille, 
arrivant  ainsi  aux  rêveries  d'un  utopisme  extravagant. 
F.  Illumdiés,  dans  notre  Di^ionnaire  de  Biographie  et 
SBistoire,  R« 

ILLUSION,  erreur  des  sens  qui  nous  fait  percevoir  les 
objets  autrement  qu'ils  ne  sont  en  effet,  ou  oui  nous  fait 

Ï»rendre  l'image,  c-à-d.  les  apparences  de  l'objet,  pour 
a  réalité.  Cette  dernière  sorte  d'illusion  est  partioulière- 
ment  celle  que  peuvent  produire  les  œuvres  dramatiques 
et  les  œuvres  de  la  peihture.  Selon  la  remarque  de  Mar- 
montel,  l'illusion,  dans  la  tragédie,  ne  peut  pas  être 
complète,  parce  qu'il  nous  est  impossible  de  faire  abs- 
traction du  lieu  réel  de  la  représenution ,  des  invrai- 
semblances forcées  du  spectacle  qui  se  déroule  sous  nos 
yeux,  du  jugement  oue  nous  portons  et  sur  l'csuvre  sou* 
mise  à  notre  apprédation  et  sur  les  scteurs  qui  en  sont 
les  interprètes.  L'illusion  ne  doit  même  pas  être  com- 

Slète,  car  alors  elle  serait  révoltante  et  péniblement 
oulonreuse;  il  faut  qu'une  réflexion  tadte  nous  aver- 
tisse, par  exemple,  que  le  meurtre  de  Camille  ou  de 
Zaïre,  les  convulsions  d'Inès  empoisonnée,  ne  sont  que 
des  fictions,  et  modère  par  là  l'impression  de  la  terrour 
et  de  la  pitié.  Dans  le  comique,  rien  ne  répugne  à  une 


pleine  illusion,  et  limpresdon  du  ridicule  n%  pas  besoin 
d'être  tempérée  comme  celle  du  pathétique  :  toutefois* 
des  pièces  comme  le  Misanthrope  ou  l'Avare  sont,  dans 
les  détsils  et  dans  l'ensemble,  dans  le  caractère  et  dans 
l'intrigue,  des  compositions  plus  achevées  qu'on  n'en 
peut  voir  dans  la  nature;  et  l'illusion  théâtrale,  si  elle 
était  complète ,  empêcherait  de  voir  cette  perfection  «ui 
décèle  un  art  suprême,  et  dont  le  sentiment  est  un  des 
plaisirs  du  spectacle.  —  L'illusion  semble  aux  esprits 
grossiers  le  principal  ou  même  l'unique  but  de  la  pein- 
ture. Mais  l'imitation  exacte  de  l'objet,  U  reproduction 
identique  des  appsrences  est  fort  loin  d'être  la  perfection 
de  l'ait,  soit  <|ue  l'on  considère  dans  une  œuvre  la  diffi- 
culté d'exécution,  ou  les  effets  qu'elle  produit.  Que  l'on 
cite  les  raisins  de  Zeuris,  becquetés  ]Nur  les  oiseaux,  et 
le  rideau  de  Parrfaasius,  qui  trompa  Zeuxis  lui-même  : 
cela  prouve  le  peu  de  fondement  de  certaines  admira- 
tions, et  la  dispontion  qu'on  a  eue  de  tout  temps  à  s'en- 
thousiaamer  pour  les  puérilités  de  Part  Qui  né  sait  à 

aaels  leurres  grossiers  les  animaux  se  laissent  prendre  ? 
n'est  point  de  grissille,  point  de  peinture  de  décor 
quelque  peu  soifpée,  qui  ne  fssse  illusion,  même  aux 
gens  les  mieux  instruits  des  procédés  et  des  effets  de 
l'art.  D'un  autre  côté,  cette  imitation  exacte  d'où  résulte 
l'illusion  des  sens,  par  cela  seul  qu'elle  exdut  le  beau 
idéal  et  tout  idéal,  ne  saurait  exercer  sur  l'esprit  qu'un 
charme  très-borné.  Si  une  symphonie  oui  imite  un  orage 
était  prise  pour  un  orage  véritable,  elle  n'exciterait  au- 
cune admiration  pour  le  musicien  et  pourrait  même  faire 
naître  un  sentiment  désagréable;  si,  dans  un  passage  de 
musique  qui  imite  le  brait  de  marteaux  tombant  sur 
l'enclume ,  l'illusion  était  telle  qu'on  crût  entendre  de 
véritables  manteaux,  on  ne  s'aviserait  pas  d'applaudir,  et 
l'on  éprouverait  tout  aussi  peu  de  plaisir  que  lorsqu'on 
passe  devant  l'atelier  d'un  forgeron.  De  même,  en  pein- 
ture, quelle  femme  soutiendrait  le  spectacle  du  massacre 
des  Innocents,  si  le  tableau  lui  causait  une  entière  illu- 
sion ?  Quel  homme  verrait  sans  horreur  Judith  tenant 
la  tête  sanglante  d'Holopherne?  Si  l'imitation  pouvait  et 
devait  être  portée  jusqu'à  l'illusion  complète,  on  firémi- 
rait  au  lieu  d'éprouver  du  plaisir.  Si  liUusion  était  la 
première  partie  de  la  peinture,  les  premien  peintres 
seraient  ceux  qui  ne  traitent  que  les  plus  petits  détails 
de  la  nature,  et  le  dernier  de  tous  les  genres  serait  celoi 
de  l'histoire,  parce  qu'il  se  refuse  plus  que  les  autres  à 
la  parfaite  illusion.  Des  objets  de  peu  de  saillie,  tels  que 
des  moulures  et  des  bas-feliefs,  parfois  aussi  des  fleun 
et  des  fruits,  pourront  tromper  les  sens,  an  point  de 
mettre  les  spectateun  dans  la  nécessité  de  recourir  au 
toucher  pour  s'assurer  de  la  vérité  :  mais  l'illusion  s'af- 
fsiblit  à  mesure  que  les  objets  sont  plut  «rands,  et  11  est 
sans  exemple  qu'un  tableau  composé  de  plusieun  figures 
ait  jamais  fait  croire  au  spectateur  qu'il  voyait  des 
hommes  véritables.  L'illusion,  qui  ne  ns!t  souvent  que 
de  l'inattention  et  de  la  surprise,  peut  être  produite  par 
les  plus  mauvais  ouvrages,  ^  ce  n'est  point  l'illusIoD 
causée  par  les  ouvrages  de  Raphaël  ou  de  Michel-Ange 
qui  leur  a  obtenu  l'admiration  des  siècles.  Les  coloristes 
sont,  parmi  les  peintres,  ceux  qui  arrivent  le  plus  aisé- 
ment a  produire  l'illusion,  et  cependant  on  ne  leur  donne 
pas  le  premier  rang  parmi  les  artistes.  L'imitation  la 
plus  prochsine  de  la  réalité  n'est  pas  le  seul  but  de  la 
peinture  :  il  y  a  des  beautés  d'un  genre  différent  et  supé- 
rieur ,  oui  font  la  grandeur  de  1  w,  telles  que  l'abon- 
dance» l'originalité  et  la  hauteur  des  conceptions,  le 
choix  des  attitudes,  l'agencement  ingénieux  des  groupes. 
La  seule  illusion  que  Fart  doive  toi:4ours  se  proposer 
d'atteindre,  c'est  que  !•  tableau  puisse  rappeler  si  bien 
le  vrai  par  la  justesse  de  ses  formes,  par  la  combinaison 
de  ses  tons  de  couleur  et  de  ses  effets,  que  l'image  fasse 
tout  le  plsisir  qu'on  peut  attendre  d'une  imitation  de  la 
vérité. 

ILLUSTRATIONS,  nom  mi'on  donnait  jadis  aux  orne- 
ments colœiés  des  manuscnts,  et  qui  s'applique  si^our* 
d'hui  aux  gravures  sur  bois  interôalées  dans  un  texte 
imprimé,  vée  illustrations  bien  conçues  et  bien  faites 
sjoutent  à  la  clsrté  du  texte,  lui  donnent  plus  de  lumière 
(du  latin  lux\  d'où  le  mot  a  été  formé. 

ILLYRIEN  (Idiome).  L'idiome  des  anciens  Rlyriens  sa 
rattachait  à  la  souche  thrace.  Aujourd'hui  on  appelle 
Jllyriens  les  idiomes  slaves  de  ta  ^unille  orientale, 
c'est-à-dire  le  croate,  le  v)ende,  et  le  servien  on  serbe. 
Dans  un  sens  restreint,  l'illyrien  moderne  n'est  autre  que 
le  dalmate{V,  ce  mot),  V.  Dolci,  De  iUyricœ  lingum 
vetÊUtate  et  amçlitudime,  Venise,  1754,  in-8«  ;  B.  Cassius, 
Institutionum  lingum  iUyricœ  lib.  b,  Roms,  lfi04,  iii-8*t 


IMA 


1053 


IMI 


MeaUa,  Grammattea  Imguœ  Ulyncœ,  Lorette,  1649  « 
iiH8^,et  Thésaurus  Imguœ  Ulyricœ,  ibid.  ;  WuianouBky, 
Qnmnatiea  âlyrtona.  177^,  in-^  ;  Appendini ,  Gnim- 
flutrt  de  la  langue  uljfrwnne,  en  itiu.,  1812,  in-^; 
BeUoBztenecx ,  GoMophylacium  ItUino^Ulyricorum  ono* 
matum,  1140,  in -4*;  Stolli,  Lesmcon  /otitio-tfa/ico- 
«lyrtctim,  Bade,  1801,  S  vol.  in-4^,et  Dic^onarwm 
iUynco-toimo-ifaliciim,  Raguse,  1806,  2  vol.  in^^ 

DIAGE,  en  latin  imago  (dérivé d'tmttan,  imiter),  imi- 
tidon  d'un  objet  naturel  qui  vient  à  frapper  nos  yeux, 
quand,  pnr  nempie,  eet  objet  le  réfléchit  sur  une  surface 
IwUe,  sor  on  miroir,  ou  à  fa  surface  de  l'eau.  Par  exten- 
ik»,  le  mot  tmogs  est  devenu  synonyme  de  fortrtâJl  ou 
Hçwn  :  seulement,  il  est  aujourd'hui  réservé  pour  des 
penonnages  vénérés,  comme  linsqu'on  dit  les  images  de 
Dieu,  de  la  S^  Vierge  et  des  Saints,  et,  tandis  que,  chez 
les aodens  Grecs,  le  mot  éUum  (image)  servait  à  désigner 
les  productions  des  beaux-arts,  nous  n'appliquons  plus 
la  qualification  d'images  qu'à  des  œuvres  grossières. 
AiMVs  se  dit  encore  de  l'effigie  en  relief  qui  se  voit  sur 
las  monnaies  et  les  médailles.  —  En  Littérature,  Vùnage 
est  une  expression  qui,  pour  donner  de  la  couleur  à  une 
pensée,  pour  rendre  sensible  l'objet  de  cette  pensée,  le 
peint  aous  des  traita  qui  ne  sont  pas  les  siens,  mais  ceux 
oTon  objet  analogue.  Ce  n'est  ni  un  tableau,  ni  une  des- 
~']ytioii  achevée,  mais  un  coup  de  pinceau  vif  et  rapide, 

I,  sans  pdndre  les  détails,  laisse  à  l'esprit  le  plaisir 

les  deviner,  n  y  a  image  dans  chacun  des  vers  sui- 

Ktst 

Xt  monté  tvr  U  fiUie,  U  atplre  k  deteendr§. 

CouniLLB,  Cinna,  U,  1. 

Lb  taosfitf  tombe,  rhomme  resta. 

J.^  BooisBAU,  Ode$,  n»  k  la  Fortmifl. 

Le  nettar  que  Ton  $ert  au  mettre  du  tonnerre, 
Xt  dont  nom  tnhronM  tons  lei  dlenx  de  le  terre, 
Ceet  la  êoyang».  Iris..... 

La  FonTAira,  Fabtn,  X,  1. 

lA  vie  eet  vu  tombât  dont  la  pelme  eet  aux  cienx. 

C.  DSLATXOn. 

La  prose  comporte  les  images,  aussi  bien  oue  la  poésie. 
Boaanet,  au  lieu  de  dire  que  les  hommes  devenaient  de 
foor  eo  Jour  |^us  méchante,  dît  qu'tJs  aUaÀmt  e^enfim- 
fmmt  dans  TtnaguiM.  Toute  inuge  suppose  une  ressem- 
blaiice,  et  renferme  une  comparaison;  de  la  Justesse  de 
eette  comparaison  dépend  la  clarté ,  U  transparence  de 


IMAGE  (Droit  d').  V,  notre  />icttoiwiatr0  de  Biographie 
gt  dHistoire. 

IMAGIERS,  nom  donné  pendant  le  moyen  Age  aux  ar^ 
tiates  occupés  à  peindre,  sculpter  ou  graver  les  images. 
Us  formaient  deux  corporations.  La  première,  dans  1»- 
maelle  étaient  des  artistes  sortis  de  toutes  les  classes  de 
m  société,  même  des  plus  élevées,  ne  travaillatt  que  pour 
FÊ^Sae  ;  on  y  sculpta  aussi  des  manches  de  couteau,  mais 
CB  travail  fut  abandonné  comme  profane.  La  deuxième 
corporation  travaillait  plutôt  en  relief  qu'en  statuaire  ; 
tile  ptignait,  argentait,  dorait  et  travaillait  pour  tout  le 
monde. 

IMAGINATION,  Faculté  par  laquelle  l'esprit  se  forme 
des  idées  qui  n'ont  pas  d'objets  réels.  La  nature  de  ces 
idées  montre  qu'il  y  a  deux  sortes  dlmagination;!»  «pon- 
lanét,  2<*  réfiécM»  on  po^t^ua.  La  prenuère  consiste  à  se 
leprésenter  vivement  les  idées  ou  images  relatives  an 
■tonde  sensible  :  la  passion ,  la  rêverie,  la  peur,  iddent 
an  dévetoppement  de  cette  sorte  dlnu^dnittion.  Dans  oer* 
tsdns  états  de  l'ftme,  tels  que  le  rêve,  le  sommeil,  le  dé- 
lire, elle  substitue  ses  hallucinations  aux  véritables  per- 
ceptions des  sens  ;  elle  peut  conduire  an  soomambnliûne» 
Càta  sorte  dlmagination  est  commune  aux  hommes  et 
■nx  animaux.  La  seconde  sorte  est  hi  seule  qui  mérite  le 
nom  de  faeuM  eréaJtricê,  parce  que  seule,  à  raide  de  ma- 
tériaux fournis  par  la  perception,  conservés  par  la  mé- 
mobe,  s^MTéa  par  TabstracUon,  elle  crée  des  formes  qui 
n'ont  que  la  vie  qu'elle  leur  donne,  et  qui  sont  plus  on 
moins  la  manifeàation  de  l'idée.  Pour  en  venir  là,  elle 
est  soumise  à  certaines  conditions  dont  l'ensemble  forme 
la  sdeace  do  beau  {V,  BsTHériQVB).  La  première  de  ces 
conditions  est  un  idéal ,  un  type  parfait  conçu  par  la 
laison  I  fl  Cuit,  en  outre ,  que  la  combinaison  des  élé- 
ments soit  ordonnée  par  le  goût,  sous  peine  de  tomber 
dans  le  monstrueux  ,  le  bizarre  ou  le  grotesque;  c'est 
aloit  que  Malébranche  a  pu  l'appeler  la  folle  du  logis. 
Limagination  est  la  ikculté  estnétique  par  excellence , 
poiaqu'elle  a  pour  but  d'aider  Tart  a  représenter  l'idéal 


par  le  réel;  mais  son  action  se  fait  sentir  aussi  dans  lit 
sdences,  où  elle  peut  conduire  l'homme  aux  plus  heu- 
reuses découvertes  comme  aux  plus  folles  hypotiiëses. 
Dans  la  pratique  de  la  vie,  elle  peut  beaucoup  pour  le 
bonheur  ou  le  malheur  de  l'homme,  selon  qui!  se  forme 
de  la  vie  une  image  plus  ou  moins  conforme  à  la  rtelitéi 
c'est  alors  que  les  déceptions  ont  parfois  de  cruelles  con* 
séquences.  —  L'Imagination  ne  doit  pas  être  confondue 
avec  la  Mémoire;  elle  ne  s'en  rapproche  que  lorsqu'elle 
rappelle  les  objets  sensibles  avec  une  grande  vivacité;  on 
l'a  ^>pelée,  dans  ce  cas,  tma^tnaiton  reproductive  ;  mali 
il  ne  faut  pas  oublier  que  l'objet  du  souvenir  est  donné 
comme  absent,  c'est  le  contraire  pour  l'Imagination.  Celle- 
ci  diffère  aussi  de  la  conception^  qui  a  un  objet  réel,  non 
perceptible  par  les  sens,  mais  q^^  nous  atteignons  par  la 
raison.  F.  Descsrtes,  Des  Passums  do  Vâme;  Maleoran* 
che,  Rschorche  de  la  fférUé,  Entr^iens  sur  la  morale;  le 
P.  André,  Essai  sur  le  beau;  Voltaire,  Encyclopédie, 
art.  Imagination;  Muratori,  Délia  forza  délia  Fantasia 
umana,  Venise,  1745  et  1766,  in-8«;  Bonstetten,  Rechat' 
ches  sur  la  fiaturs  et  les  lois  de  Vlmaginatum,  Genève, 
1807;Astnic,  Disputatiode  Phantasiaet  Imaginations, 
Mon^Uier,  1723,  in-8<»;  Meister,  Sur  l'Imagination^  en 
allemand,  Berne,  1778,  in-8<^;  Lévesque  de  Pouilly, 
Théorie  de  l'Imagination,  1803,  in-8*.  Âkenside  et  De- 
mie ont  composé  des  pofimes  sur  rima^nation.     R. 

IMAM.      (  V.  ces  mots  dans  notre  DicttofifiatrvdsIKtH 

IMARET.  (      graphie  et  d'Histoire. 

IMBLOGATION,  nom  donné  quelquefois  à  la  sépultnie 
des  excommuniés,  dont  les  corps.  Jetés  à  la  voirie,  étaient 
recouverts  d'un  monceau  de  terre  ou  de  pierres. 

IMBRICATIONS,  ornement  d'Architecture  particulier 
au  moyen  âge.  Il  affecte  la  forme  d'écaillés  oe  poisson 
rangées  les  unes  an-dessus  des  autres,  à  la  manière  dm 
tuiles  (en  latin  tmMcas)  sur  un  toit.  Il  sert  à  décorer  les 
clochers,  les  ihmtons  et  15P  frises.  Complètement  arrondi 
k  l'époque  romane,  cet  ornement  devient  ensuite  ogival 
et  polyiobé.  E.  L. 

IMBROGLIO,  mot  d'origine  italienne,  qui  signifie  dci- 
ofKirs,  confusion.  On  l'emploie  en  Littérature  pour  dèd- 
gner  une  csuvie  d'imagination ,  surtout  une  compositlott 
dramatique,  qui  présente  une  intrigue  compliouée,  eoH 
brouillée,  et  aont  il  est  diflicile  de  suivre  le  fil.  VHérOf 
cittM  de  Corneille  est  un  Imbroglio  trasiqne,  et  le  Mariage 
de  Figaro  de  Beaumarchais  un  spirituel  imbroglio,  w 
eiige  de  l'imbroglio,  qu'en  oflirant  une  sorte  d'énigme  il 
ne  la  rende  pas  tellement  obscure,  qu'il  soit  Impossible 
ou  même  trop  pénible  de  la  deviner.  G. 

IMITATION.  Le  penchant  à  l'imitation,  dont  on  trouva 
des  traces  ches  les  animaux  de  l'ordre  le  plus  élevé,  sur* 
tout  ches  le  singe,  est  un  des  penchants  prlmltift  et  e^ 
sentiels  de  l'homme.  Cest  lui  qui  enaenmre  l'émulation  ; 
c'est  sur  loi  que  repose  toute  réducabilité.  Même  quand 
l'cBuvre  de  Téducation  est  achevée ,  il  continue  de  Jouer 
un  rôle  important  dans  la  vie  humaine,  et  il  peut  seul 
expliquer  l'empire  des  bons  îX  des  mauvais  exemples. 
Anstote  a  été  Jusqu'à  dire  oue  l'homme  ne  diffère  des 
autrea  animaux  qu^en  ce  qu'A  est  imitateur  à  un  plus 
haut  degré. 

niTTATioif  UTTéaaiaB.  Diderot,  qui  était  bon  Juge  des  arts, 
adéfini  l'imitation,  larspréstmtatum  arti/lcime  d^un  ohjet, 
et  rattaché  à  cette  définition  celle  dn  discours  oratohre  ou 
poétique,  qu'il  appelle  imitation  par  des  voix  articulées; 
de  la  musique,  qu'il  appelle  imitation  par  des  sons;  de 
la  peinture,  qu'il  appelle  imitation  par  des  couleurs,  etc. 
Il  pouvait  dire  plus  simplement  <rae  l'imitation  est  la 
reproduction  instinctive  ou  raisonnée  des  objets  de  notre 
connaissance,  et  qu'elle  est  l'origine  et  le  principe  de 
tous  les  arts.  L'enfant  contrefait  les  gestes  et  répète  les 
paroles;  l'homme  copie  d'abord  la  nature,  avec  plus  on 
moins  d'adresse,  et  plus  tard  en  reproduit  les  Images 
mêmes  qu'il  a  tracées.  Lindtation  est  donc  le  rapport 
perpétuel  de  la  nature  et  de  l'art,  depuis  les  ébauches 
informes  et  grossières  Jusqu'aux  chefs-d'oravre.  Ses  pro- 
cédés et  ses  règles  se  multiplient  à  IHnflni ,  parce  qne  lei 
applications  de  l'intelligence  sont  infinies.  La  sdence 
découvre  et  démontre;  elle  nlmite  qu'à  mesure  qu'elle 
se  rapproche  de  la  pratique  et  de  l'art,  comme  dans  la 
médecine  et  la  chirurgie,  où  11  t  a  beaucoup  d'écoles , 
c-èrd.  d'imitateurs.  L'industrie  invente  souvent,  et  sur- 
tout perfectionne;  mais  elle  vit  d'imitations,  si  bien  que 
la  loi  a  dû  prendre  les  inventeurs  sons  sa  protection,  les 
instituer  propriétaires,  et  les  garantir  de  cette  imitation 
dél<^e  qui  s'appelle  contrefaçon.  Le  Jour  où  le  brevet 
expire ,  l'invention  tombe  dans  le  domaine  public .  et 
appartient  à  tous  les  imitateurs.  —  Dans  les  arts  aiiial 


IM^ 


1054 


IMI 


fw  dans  les  lettnt,  rimitation  est  de  droit  ;  car  œa  belles 
Qocupatioiis  de  Tesprit  humaio  n*eiistent  que  grioe  anx 
modèles,  pris  dans  la  nature  on  dans  les  œurres  des  mal* 
très.  ■  Ceux  qui  ont  créé  Part,  dit  également  Diderot , 
]i*ont  eu  de  modèle  que  la  nature;  ceux  qui  Tont  perfe&- 
tionné  n*ont  été,  à  les  Juger  à  la  rigueur,  que  les  imita- 
teurs des  premiers  ;  ce  qui  ne  leor  a  point  Mé  le  titre 
d*bommes  de  génie,  parce  que  nous  apprécions  moins  le 
mérite  des  ouTrsges  par  la  première  invention  et  la  dif- 
ficulté des  obfltaciea  surmontés  que  par  le  degré  de  per- 
fection et  Teffet.....  Celui  qui  invente  on  genre  d'imita- 
tion est  un  homme  de  génie  ;  celui  qui  perfectionne  un 
genre  d*imittrtioD  inventé  ou  qui  y  excelle  est  anasi  un 
nomme  de  génie.»  Ainsi,  la  vérité  et  la  beauté,  pour  être 
originales,  n*ont  pas  besoin  d*en  être  à  leur  apparition 

rmière.  Uhomme  et  la  nature  ne  changent  pas  ;  et,  si 
moade  extérieur  nous  révèle  tous  les  Jours  et  nous 
réserve  encore  des  mystères  longtemps  interdits  à  notre 
curiosité,  il  y  a  longtemps  que  le  monde  intérieur,  c-à-d. 
les  passions  et  les  caractères,  ne  nous  offrent  plus  de 
découvertes  k  faire.  La  nouveauté  dans  les  arts  dépend 
donc  en  général  de  la  forme  que  le  talent  sait  donner  à 
des  sujets  déjà  traités,  à  des  idées  et  à  des  sentioisnts 
exprimés  mille  fois.  Cette  forme  originale  vient  de  rime, 
de  rinspiration  personnelle;  Thomme  s*y  révèle,  non 
Tartiste  ou  l'écrivain  (K.  Gémx).  U  faut  chercher  dans 
les  grands  maîtres  les  exemples  et  les  secrets  de  cette 
Imitation  féconde,  qui  est  tantèt  éloquente  et  sublime, 
tantdt  ingénieuse  et  délicate.  Elle  est  bien  différente  de 
limitation  timide.et  servile,  ou  purement  artificielle,  qui 
ne  volt  dans  les  créations  dn  talent  et  du  génie  qu'une 
iWe  du  oenre  on  plutôt  un  procédé  dn  mâier.  Des  es- 
prits supérieurs  et  indépendants,  comme  Chateaubriand, 
<mt  cependant  adopté  de  bonne  fol  cette  tradition  des 
Imitationa  obligées,  ce  bagage  de  machines  épiques  on 
tragiques,  telles  que  les  songes,  les  récita,  les  voyages, 
les  combats  des  hommes  et  des  dieux.  Chapelain  se 
croyait  un  poète  épique,  parce  qu'il  avait  semé  dans  sa 
Pvidle  les  discours,  les  descriptions,  les  batailles,  le  del 
et  les  démons,  à  la  manière  de  V Iliade  et  de  V  Enéide, 
Voltaire  eut  la  même  illusion,  du  moins  dans  sa  Jeunesse, 
et  la  fit  partager  k  ses  contemporains,  qui  n'eurent  pas 
Assez  de  goQt  ou  de  hardiesse  pour  dénonoer  dans  ta 
Hênriade  des  imitations  aussi  froides  et  aussi  pénibles 
que  le  récit  de  Henry  de  Bourboa  on  ses  amours  avec  Ga- 
brielle.  Au  reste,  Ib  auraient  tous  deux  invoqué  pour 
leur  Justification  rautorilé  de  Virgile  on  du  lisse.  Ne 
pouvaient-ils  pas  dire,  eux  et  tous  les  faiseurs  d'épopée, 
qui  sont  imitateurs  par  excellence  :  «  Virgile  a  trouvé 
«  dans  VOdyttée  le  modèle  du  récit  d'Éoée;  il  a  em« 
«  pronté  à  Appolonios  de  Rhodes  les  plaintes  et  les  fo- 
c  renrs  de  Didoo.  Le  Taaae  a  pris  à  Virgile  l'idée  de  son 
«  Enfer  et  quantité  d'épisodes,  celui  de  i^amille,  devenue 
«  Glorinde ,  celui  de  Soliman,  caché  dans  un  nuage,  et 
«  paraissant  subitement  devant  le  roi  de  Jénualem 
«  comme  Énée  devant  la  reine  de  Carthage.  Nous  avons 
«  droit  de  faire  comme  nos  maîtres.  •  Et  vndment  Ils 
avaient  ce  droit,  commun  à  tous  les  écrivains  et  à  tous 
les  artistes.  Cétait  de  plus  une  loi  pour  eux,  une  nécessité 
Inévitable;  car  ils  se  trouvaient  imitateurs  même  malgré 
eux,  puisqu'ils  étaient  prévenus  dans  tous  les  genres, 
et  forôès  de  dire  de  leurs  glorieux  devanciers  ce  que  dit 

Ëlaisaounent  le  métromane  de  Piron  (la  Métromanie, 
a,  7), 

Ds  noua  ont  déi^Ma,  dérobons  nos  nerenz. 

On  rencontre  si  peu  d'esprits  créateurs  ou  originaux, 
que  rien  n'est  plus  ordinaire,  en  littérature,  que  les  imi- 
tations qui  défigurent  l'original,  et  ne  sont  que  des  cbu- 
fres  médiocres,  telles  que,  par  exemple,  les  tragédies  de 
Duels  Imitées  de  Shakspeare.  L'imitation  ne  mérite 
l'attention  des  bons  Jugea  que  dans  deux  cas,  lorsqu'elle 
est  très-fidèle ,  bien  sentie  et  bien  écrite,  ou  lorsqu'elle 
est  à  peine  une  Imitation,  au  point  de  ressembler  à  une 
seconde  Invention.  Hors  de  là,  imiter  est  le  grand  chemin 
par  où  l'on  court  à  l'oubli. 

L'histoire  des  lettres  et  des  arts  ne  présente  que  deux 
grandes  sources  d'invention ,  le  génie  grec  et  le  christia- 
nisme; l'antiquité  tout  entière  s'est  inspirée  du  premier, 
les  temps  modernes  de  l'un  et  de  Tautre.  Les  Grecs 
eurent  le  privilège  d'être  un  peuple  créateur,  privilège, 
U  est  vrai,  partagé  sur  quelques  points,  au  moins  avec 
les  Hébreux  pour  la  poésie  lyrique.  Mais  les  modèles  des 
antres  genres  poétiques,  de  la  philosophie,  de  l'élo- 
qUMice,  de  rhlatoirei  leor  appartiennent  en  propre,  au 


même  titre  que  ceux  dea  beaux-orts.  Leur  merveDleat 
génie  fut  tout  ensemble  inventeur  et  imitateur.  Après 
s'être  Inspiré  de  la  nature  et  de  lui-même ,  il  imitait  ses 
propres  ouvrages.  Cest  ainsi  qu*il  tira  le  drame  de  Tépo- 
pée  unie  à  hi  poésie  lyrique ,  et  transporta  sur  la  scène 
ces  héros  et  ces  récita  d'Homère  et  dea  poètes  cycliques, 
destinés  à  défrayer  tant  de  tragédies  Jusqu'au  siècle 
d'Horace  (  V,  VEpltre  aux  Pitons  )  et  Jusqu'à  nos  Joun. 
Cependant,  les  véritables  modèles  de  la  grande  et  féconde 
imitation  doivent  se  chercher  plutêt  cbes  les  Romaine 
(V.  Latins — Littérature).  Ennius,  Plante,  Téftnœ  avaient 
traduit  ou  Imité,  non  sans  gloire,  les  poêles  grecs,  et 
principalement  les  comiques.  Les  grands  hommes  qni 
vinrent  après  eux  demandèrent  à  la  Grèce  d'édairer  et 
de  guider  leur  génie.  Lucrèce  emprunte  anx  Alexan- 
drins, Cicéron  à  Démosthène  et  à  Platon,  Horace  aux 
poètes  lyriques,  Virgile  à  Homère  et  même  à  Apollonius 
de  Rhodes.  Par  une  succession  naturelle,  qui  est  l'efiét 
dn  temps  et  des  transformations  sociales ,  après  la  révo- 
lution la  plus  profonde  qui  ait  remué  l'univers,  ces  ad- 
mirables élèves  des  Grecs  deviennent  des  maîtres  à  leur 
tour.  Le  génie  moderne.  Quoique  soumis  à  la  toute-puia- 
sante  influence  de  la  religion  chrétienne,  n'échappe  pas 
à  Tascendant  inévitable  des  chefit-d'csuvre ,  et  pense 
tout  d'abord  à  les  imiter.  Cest  même  à  l'alliance  du  goût 
antique  et  de  l'esprit  nouveau  qu'il  devra  son  originalité 
et  les  beautéa  nouvelles  qu'il  ajoutera  aux  immortels 
monuments  de  ses  devandera. 

Comment  donc  imitaient  Virgile,  Horace  et  Cicéron? 
Comment  les  grands  écrivains  modernes  ont-Ils  Imité  leurs 
illustres  prédécesseun?  Nos  classiques  du  xvu*  siède 
sont-ils  imitateun  et  originaux  an  même  titre  que  Dante 
et  Hilton  7  La  réponse  à  cette  question  a  été  faite  d'avance 
par  l'un  des  meilleun  critiques  andens,  qui  écrivait,  il 
est  vrai,  dans  la  décadence  du  monde  grec  et  romain, 
mais  après  des  merveilles  qu'il  était  digne  de  comprendre: 
Longin  a  éloquemment  exprimé  les  caractères  de  l'imita- 
tion, telle  que  l'entendent  et  la  pratiquent' les  hommes  de 
génie.  «  Celui-là  seul  est  digne  d'imiter  les  grands  modèles, 
que  l'esprit  d'autrui  ravit  hora  de  lui-même.  Ces  grandes 
beautés  que  nous  remarquons  dans  les  ouvrages  des  an- 
ciens sont  comme  autant  de  sources  sacrées,  d'où  s'élè- 
vent dea  vapeura  bienCaisantes  qui  se  répandent  dans 
l'àme  de  leun  imitateun  ;  si  bien  que,  dans  ce  moment, 
ils  sont  comme  ravis  et  emportés  de  l'enthousiasme  d'au- 
trui. »  Or,  à  qui  ces  grandes  images  s'^ipliquent-elles 
mieux  qu'à  nos  grands  orateun  et  à  nos  grands  poètes? 
Le  plus  hardi,  le  plus  impétueux  de  tous,  Bossuet,  s'est 
fsit^  de  l'Écriture  sainte  et  des  Pères,  mêlés  au  goût  de 
l'antiquité  et  à  son  propre  génie,  une  éloquence  toute  à  lui. 
Ces  paroles  ardentes  qui  Jaillissent  de  son  Ame  ne  sont 
souvent  que  des  imitations,  soit  qu'il  prenne  à  S'  Jean 
Chrysostome  le  fameux  mot  sur  Jérémie,  ssn/  capable 
d'égaUr  les  lamentations  aux  oaiamités;  soit  qu'il  simite 
lui-même  et  remanie  ses  propres  inspirations,  en  ap- 
pliqjuant  à  la  duchesse  d'Orléans  ce  qu'il  avait  dit  dea 
vanités  humaines  dans  l'Oraison  funèbre  de  Henri  de 
Gomay.  Fénelon  est  encore  un  des  imitateun  les  plus 
extraordinaires  que  nous  présentent  la  poésie  et  rélo- 
quence  :  il  emprunte  à  Sophocle  les  traits  les  plus  tou- 
chante de  son  PhHoctète;  et  les  vere  du  tragique  grec, 
traduite  littéralement  par  l'écrivain  chrétien,  prennent 
son  accent  et  deviennent  son  langage  propre.  S'il  conduit 
Télémaque  aux  Enfers,  et  qu'il  fasse  repasser  son  héros 
et  son  lecteur  par  cette  route  si  familière  aux  poètes  épi- 
ques depuis  Ulysse,  le  voyageur  par  excellence,  il  fait 
d'une  Imitation  dassique  et  d'un  heu  commun  de  l'épo- 
pée une  création  divine  ;  le  sentiment  moral  et  la  foi  lui 
inspirent,  dans  la  peinture  des  Champs-Elysées,  dea  ac- 
cents qu'aucune  voix  humaine  n'a  surpassés.  A  cette 
hauteur,  l'imitation  est  égale  aux  créations  les  plus 
sublimes.  U  faut  qu'on  nous  avertisse  de  ce  que  le  génie 
doit  à  l'Écriture  et  à  S^  Paul,  à  Homère  et  à  Platon  ;  nous 
n'avons  entendu  que  Bossuet  et  Fénelon.  Passons  des 
orateun  aux  poètes  :  nous  trouverons  une  égale  origi- 
nalité, puisée  aux  mêmes  sources.  Corneille  transporte 
dans  son  héroïque  dialogue  les  sauvages  fiertés  des  héros 
espagnols;  avec  ouelques  lignes  de  Tite-Uve  il  fait  le 
plaidoyer  du  vleu  Horace;  avec  une  page  de  Sénèque, 
traduite  mot  à  mot,  le  discoun  d'Auguste  à  Cinna;  avec 
un  fïragment  de  Lucain ,  les  ven  les  plus  fien  et  les  plus 
mâles  qu'on  ait  mis  dans  la  bouche  de  César.  Racine, 
qui  n'avoue  pas  toujoun  ce  qu'il  doit  à  autrui  (car  il  n'a 
pas  dit  un  mot  de  la  Phèdre  de  Sénèque},  imite  Euripide 
à  la  manière  de  Fénelon ,  et  la  Bible  à  la  mani^  de 
Bossuet.  Avec  la  souplesse  admirable  de  son  génie,  il 


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uK  tels  on  bârnMMiieax  ensemble  la  ptafllon  de  Phèdre 
fltcflUedê  IKâon,  éclalréet  da  sentUnent  chrétleii ;  et, 
tH  lait  parler  Dieia  lui-même  par  la  bouche  de  Joad,  les 
Unet  de  Molle,  lea  Pianmes  et  les  Prophètes  Tiennent 
M  Ibndre  dans  les  plus  sublimes  élans  de  la  poésie  ly- 
iii|ae  et  de  réioqaenoe.  Tous  ces  grsnds  écrivains  se 
neonnaiseent  imitateurs,  et  proclament  les  Anciens  leurs 
attitrés.  Boileau  trouve  ches  Horace  les  modèles  de  la 
adre,  de  Tépltre,  de  la  poétique  ;  il  use  sans  scrupule 
des  dèpomiUês  du  poète  httin,  et  y  mêle  rhorreur  des 
méchants  écrits,  le  bon  sens  profond  et  la  rare  droiture 
de  ion  esprit.  La  Fontaine,  inimitable  par  le  style,  met  à 
eontribution,  pour  les  sujets  de  ses  Ikbles,  Ésope,  Phèdre, 
Bidpal,  les  fahliaiii, coaune  un  dnmaiBe  oommun  <toele 
droit  drimitadon  poétique  a  mis  à  sa  discrétion.  On  sait 
le  mot  de  Molière  :  «  Je  prends  mon  bien  où  Je  le  trouve.  » 
Aussi  un  critique  célèbre  d* Allemagne  qui  a*est  acharné 
inr  lui,  Schleael,  lui  reproche-t41  aigrement  que  si  tous 
les  comiques  italiens  lui  reprenaient  ce  au'il  leur  doit , 
ils  le  laisseraient  nu  comme  la  corneille  d^Horaoe.  H  faut 
rire  d'une  assertion  pareille,  et  Ton  renverrait  Schlegel 
m  Mûanthrope  et  au  Tartufe,  s'il  n'avait  déclaré  qu'il 
leur  préfère  U  Médêcm  malffr^  ^u*'  Ce  qui  résulte  de 
rkveu  de  Molière  et  de  cette  attaque  puérile ,  c'est  que 
Halière  est  imitateur  à  ht  fiftçon  de  tous  les  grands 


On  comprendra  cette  précieuse  alliance  de  l'imitation 
st  de  l'originalité,  si  l'on  se  pénètre  de  ces  écrivains 
wpérieurs,  qu'on  les  compare  a  leurs  modèles,  et  qu'on 
nche  retrouver,  dans  les  beautés  qui  leur  viennent  du 
dehors,  leur  propre  accent  et  le  langage  de  leur  àme. 
On  la  oomprendîra  peut-être  mieux  encore,  si  l'on  re- 
garde an -dessous  d'eux  les  imitateurs  ordinaires,  qui 
o'ont  que  du  talent,  de  l'esprit  ou  de  l'habileté.  Nous  ne 
parlons  pas  des  copistes  ni  des  plagiaires,  senrilê  Urotà- 
]wm  qui  mettait  Horace  en  coléâe,  et  qui  a,  de  temps 
immémorial,  introduit  la  contrefaçon  dans  la  littérature. 
Sans  descendre-  Jusque-là,  nous  trouverons  aisément, 
par  exemple  en  France,  au  xvu*  siècle,  de  nombreux 
exemples  d'imitations  intelligentes  qui  ne  s'élèvent  pas 
Jusqu'à  l'originalité.  Voltaire  écrit  SémiramU  pour  avoir 
son  Athalie,  comme  il  écrit  Y  Essai  sur  les  mœurs,  pour 
sfoir  son  Discours  sur  VMstoùre  universeUe.  Au  reste,  il 
ne  pouvait  rien  imiter  de  Bossuet  que  l'idée  philoso- 
phioue  de  son  ouvrage,  tandis  qu'il  est  nourri  de  Racine, 
quMl  en  a  constamment  les  vers  sur  les  lèvres,  et  qu'a- 
prèa  avoir  découvert  chez  lui  le  nom  si  heureux  de 
Zaïre,  il  fidt  de  Sémiramis  une  réminiscence  conti- 
Doelle  d'AthalîB,  Après  Voltaire  viennent  ses  imitateurs, 
qui  conservent  et  continuent  les  traditions  secondaireB 
de  la  poéaie  et  de  l'éloquence,  mais  en  ont  perdu  la  vé- 
dlable  inspiration.  Voici  une  liste  de  ce  qu'on  pourrait 
appeler  les  illustrations  tragiques  des  dernières  années 
du  xvn*  siècle,  de  tout  le  xvni*,  et  du  commencement 
du  xix%  si  voltairien  encore  en  tout.  Nous  suivrons  l'ordre 
ehronoiogique  des  succès,  car  tous  en  ont  eu,  et  ces  chefs- 
d'œuvre  des  poéiea  que  nous  allons  nommer  se  trouvent 
dans  lea  recueils  appelés  traîtreusement  Répertoin  du 
Tkéâtrm  français  :  Campistron,  Longepierre,  Lafosse, 
Lagrange,  Saurin^  Duché,  Ijunothe,  l^iron.  Le  Franc  de 
Pompignan,  Guymond  de  la  Touche,  Lemierre,  Saurin, 
Defaelloy,  Laharpe,  Chamfort,  Ghénier,  Lemercier,  etc.; 
sous  le  1^  Koapire,  Luce  de  Lancival,  Raynouard ,  Jouy, 
Baour-Lormian,  etc.  ;  sous  la  Restauration,  Soumet,  An- 
oelot,  Guiraud,  etc.  Gela  ne  ressemble-t-il  pas  à  un  né- 
crologe  littéraire  7  Essayez  de  mettre  sous  la  plupart  de 
c«  noms  les  titres  des  chefs-d'œuvre  qui  auraient  dû 
immortaliser  ces  fervents  de  la  tragédie  taillée  sur  le  pa- 
tton  racinien,vou8  serez  peutr^tre  embarrassés  plus  d'une 
Ma  ;  des  littérateurs  de  profession  le  feraient  sans  doute  : 
mais  pour  eux,  comme  pour  tout  le  monde,  ces  tragédies 
SMt  autant  de  livres  qu'on  ne  lit  plus,  sans  presque  en  ex- 
cbpter  celles  de  Voltaire;  comme  œuvre  d'ensemble,  elles 
Bont  si  faibles,  que  les  plus  grands  acteurs  s'en  détour- 
nent parce  qu'elles  offirent  trop  peu  de  prise  à  leur  talent, 
tandis  qu'il  trouve  toujours  à  se  développer  dans  les  pièces 
de  Gomeille  et  de  Racine. 

l'armi  ces  imitateurs,  le  plus  curieux  par  la  peine  qu'il 
se  donne  pour  ijouter  à  ses  titres  de  gloire  celui  d'écri- 
fain  et  de  poflte  français  est  le  roi  de  Prusse,  Frédéric 
le  Grand.  Chez  lui,  et  même  chez  d'autres,  limitation 
tourne  involontairement  à  la  parodie  de  bonne  fol;  mais, 
d  nous  revenons  à  des  écrivains  sérieux,  nous  trouve- 
nns,  daoa  flmitatioa,  d'autres  caractères  et  d'autres  dé- 
finis. L'un  dea  plus  ordinaires  et  des  plus  difficiles  à 
éiiter,  c'est  le  pasticbe,  qui  n'es»  point  le  nlagiat,  mais 


un  emprant  honnèle,  adroitement  ^os^t  ^  lês  idées 
d'autmi  s'encadrent  parmi  celles  qiu  appartiennent  à 
l'auteur.  Le  Tasse,  c^ue  nous  citions  tout  à  l'heure,  cède 
souvent  à  cette  tentation,  et  Chateaubriand  beaucoup  plus 
encore,  dans  son  roman  poétique  des  Martyrs,  Le  lecteur 
y  trouve  le  sacré  et  le  profane,  TertuUien  et  Virgile,  in- 
dustrieusement  assemblés  par  fragments ,  et,  à  cèté  de 
ce  placage,  des  beautés  neuves  et  saisissantes  comm<i( 
l'épisode  de  Velléda ,  qui,  cependant,  n'est  encore  qu'une 
réminiscence  de  Médée,  die  Didon,  et  de  toutes  les  amantes 
Jalouses  et  abandonnées. 

De  ces  nombreux  exemples,  il  est  facile  de  conclure  com- 
ment l'imitation  peut  et  doit  être  originale,  à  celles  condi- 
tions elle  est  permise  et  légitime,  et  àquel  pomt  le  talent  y 
peut  réussir.  On  voit  en  effet  comment  un  esprit  faeureiH 
sèment  doué  se  pénètre  des  grands  modèles,  et  chercha 
à  s'approprier,  dans  la  mesure  de  ses  forces,  ce  oui  fait 
la  supériorité  de  leur  génie  et  de  leur  style,  ou  ae  leur 
moiitdrs,  s'il  s'amt  des  beaux-arts.  —  Pour  que  l'imitar- 
tion  littéraire  soit  féconde,  il  est  bon  ou'elle  ne  se  dia- 
perse  pas  sur  un  trop  grand  nombre  d'objets.  Les  Ro- 
mains disaient  qu*ii  fallaU  craindre  Vhomme  qui  ne  saii 
qu'un  liwe  {timeo  hominem  unius  libri).  Cela  voulait 
dire  que  l'intelligence  d'un  homme,  concentrée  sur  un 
maître  tel  que  Platon  ou  Tacite,  Pascal  ou  Bossuet,  ac- 
quiert, dans  ce  commerce  long  et  intime ,  un  degré  de 
pénétration,  de  vigueur  et  de  puissance  où  il  semblait 
qu'dle  ne  dût  Jamais  atteindre.  Cest  alors  que  l'on  peut 
essayer  d'écrire,  si  l'on  a  des  idées.  Non  qu'il  soit  facile 
ou  même  possible  d'imiter  le  style  des  maîtres.  L'un 
d'eux  a  dit  que  le  style  ne  peut  ni  se  transporter,  ni  s'cU" 
térer,  et  il  ne  s'est  pas  trouvé  Jusqu'à  présent  d'imitateur 
assez  habile  pour  donner  sur  ce  point  un  démenti  à 
Buffon.  On  peut  s'inspirer  de  Tacite,  de  Bossuet,  de  Cor- 
neille; on  n'imite  pomt  leur  magnifique  langage,  parce 
qu'il  ne  s'apprend  pas  comme  le  maniement  d'un  pin- 
ceau ou  le  mécanisme  d'un  instrument  de  musique. 
Mais  on  puise,  dans  l'étude  approfondie  de  leur  pensée 
et  de  leur  expression ,  les  qualités  essentielles  et  géné- 
rales qui  leur  sont  communes  avec  tous  les  bons  auteurs, 
et  qu'ils  ont  possédées  au  plus  haut  degré.  Justesse,  pré- 
cision, rivacité,  noblesse,  naturel ,  etc.  Les  imitations  et 
les  emprunts  de  détail  conviennent  aux  écoliers,  parce 
qu'ils  n'ont  pas  encore  d'idées ,  et  qu'ils  ont  besoin  de 
prendre  dans  les  modèles  les  pensées  et  les  termes  qui 
leur  manquent;  quant  aux  écrivains,  ils  doivent  se  les 
interdire,  parce  qu'une  mémoire  trop  fidèle  accuse  la 
stérilité  d'invention.  Pour  quelques  emprunts  heureux, 
qui  peuvent  réussir  surtout  dans  les  vers,  il  y  a  trop  de  i 
réminiscences  qui  déplaisent  et  fatiguent.  Le  même  dan- 
ger se  rencontre  dans  la  musique,  où  les  compositeurs  | 
ne  se  font  souvent  pas  faute  de  formules  communes  et 
de  phrases  employées  d^à ,  qu'ils  déguisent  de  leur 
mieux  ;  l'ennui  du  public  en  fait  promptement  Justice. 
—  n  y  a  encore  dans  le  style  des  imitations  minutieuses 
et  presque  mécaniques ,  destinées  aux  connaisseurs  et 

Suelquefois  goûtées  du  public.  Elles  causent  en  général 
e  la  surprise  plutôt  qu'un  plaisir  véritable  ;  elles  res- 
semblent à  ces  peintures  qu'on  appelle  des  trompê-4'œil, 
et  qui  font  l'admiration  du  vulgaire.  A  ce  genre  appar- 
tient Vharmonie  imitative ,  trop  vantée  des  rhéteurs ,  et 
qui,  chez  les  excellents  écrivains,  natt  souvent  toute  seule 
d'un  choix  heureux  des  mots  propres  et  expressifs.  Ces 
mots  ont  leur  musique,  et  Imitent  par  le  son  la  nature 
même  des  objets  :  on  les  appelle  des  onomatopées.  C'est 
là  que  se  trouve  souvent  le  secret  de  cette  harmonie  tel- 
lement sensible  dans  Virgile,  dans  La  Fontaine  et  même 
dans  Boileau.  Il  faut  laisser  parmi  les  curiosités  litté- 
raires du  XVI*  siècle  ces  imitations  puériles  par  les- 
quelles Ronsurd  et  ses  élèves  prétendaient  reproduire 
Jusqu'au  chant  et  au  vol  de  l'alouette  : 

Elle  eat  guindée  du  séphlre, 
SubUme  eu  Vêir  vire  et  rerire. 
Et  7  dëollqne  nn  joli  cri 
Qui  rit,  guérit,  et  tire  Tire 
Dee  eqprita  mieux  qne  Je  n'écri. 

Hais  ce  danger  de  l'harmonie  imitative  n'est  que  se- 
condaire t  il  y  an  a  de  plus  sérieux  dans  le  choix  des 
modèles  et  dans  l'usage  qu'on  en  fait.  Le  poût  est  la  règle 
de  l'imitation ,  à  laquelle  il  doit  en  partie  sa  naiasiuice. 
Nous  en  avons  indiqué  les  caractères  et  les  lois  (  V,  ce 
mot)  ;  c'est  lui  qui  Juge  les  écoles  ;  ce  n'est  pas  toujours 
lui  qui  les  fait.  On  a  nu  remarquer  dans  Horaee  la  folie 
de  ces  disciples  du  philosophe  Porcins  Latro,  qui,  à  force 
de  boire  du  cumin,  s'étaient  rendus  pâles  comme  leur 


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I  maître  •  et  croyaient  avoir  acquis  sa  sdenoe.  Leur  his- 
toire n*est-elle  pas  celle  des  artistes  et  des  poètes  éche- 
velés  de  notre  siècle?  Oiez  les  esprits  communs,  Timitar 
tîon  s'attache  aux  caractères  extérieurs,  aux  sInguUurités 
et  môme  aux  ridicules,  par  exemple  en  matière  d*art  ou 
de  modes.  Nous  l'avons  vu  mille  fois ,  dans  ce  siècle  qui 
■emble  avoir  épuisé  à  la  fois  tous  les  genres  d'originalité 
et  d'imitation.  Du  reste,  on  a  reproché  aux  Français 
d'être  imitateurs  par  excellence,  et  de  courir  volontiers 
après  les  inventions,  les  idées  et  même  les  extravagances 
des  autres  peuples.  Peut-être  ce  reproche  est-il  mérité  ; 
cependant,  au  fond,  il  s'appli<iue  plus  ou  moins  à  l'hu- 
manité tout  entière.  11  y  a  si  peu  de  caractères  et  d'es- 
1>rits  originaux  I  Après  tout,  dans  les  arts  comme  dans  les 
ettres,  u  n*y  a  qu'un  objet  et  qu'un  but.  Que  le  peintre 
fiasse  des  portraits,  des  paysages  ou  des  tableaux  d'his- 
toire; que  le  musicien  traduise  dans  sa  langue  le  senti- 
ment et  la  passion  ;  qu'il  imite  même  cerudns  phéno- 
mènes qui  sont  du  domaine  des  sons  ;  que  l'auteur  exprime 
dans  son  style  les  mouvements  et  les  nuances  infinies  de 
la  vie  et  de  l'àme  humaines;  l'objet  est  toujours  l'homme 
et  la  nature,  et  le  but  est  l'idéal.  Le  moyen  est  l'imita- 
tion, qui  s'appelle  également  l'art,  et  qui  doit  toujours 
proposer  aux  yeux  et  à  la  main  de  l'écrivain  et  de  l'artiste 
oe  type  de  beauté  sublime  si  éloquemment  recommandé 
par  Ûcéron.  (V.  le  commencement  de  l'Orateur»)  A.  D. 

oRTATioii,  en  termes  de  Musique ,  reproduction,  dans 
un  même  morceau,  d'un  motif  déjà  entendu.  Tantôt  c'est 
ime  simple  répétition ,  tantôt  une  transposition  ou  tout 
antre  arrangement  du  premier  motif,  qui  passe,  par  exem* 
pie,  alternativement  d  un  instrument  ou  d'une  voix  k  une 
antre.  L'imitation  est  libre,  quand  le  ^ût  du  compositeur 
en  règle  l'emploi;  elle  peut  être  obltgée  et  méthodique, 
comme  dans  le  canon,  où  elle  est  continue,  et  dans  la 
ftague,  où  elle  est  périodique  (F.  Caron,  Fogvb), 

niiTATioif  (Dessin  d*  ).  K.  Dbssoi  mBosmiBL. 

iMiTATioif  DB  lésus-CBRiST,  «  lo  plus  bosu  llvre,  dit 
Tontenelle,  qui  soit  sorti  de  la  main  des  hommes*  puis- 
que VÊvangtle  n'en  vient  pas.  »  VlmitaHon  est  divisée 
en  4  livres  :  le  1",  intitulé:  Affis  utile  pour  la  vie  «ptri- 
kêelle,  engase  à  imiter  J.- G.  et  à  mépriser  les  vanités  du 
monde,  parle  de  Thumble  sentiment  qu'on  doit  avoir  de 
loi-même,  du  bonheur  qu'on  éprouve  dans  l'obéissance 
et  la  soumission  à  un  supérieur,  des  avantages  de  l'ad- 
fersité,  et,  arrivant  à  la  Vie  religieuse,  vante  l'amour  de 
lai^traite et  du  silence. — Le  V  a  pour  titre:  Avts propret 
àconduire  à  la  vie  intérieure;  c'est  une  sorte  de  conver- 
sation intérieure,  de  familiarité  intime  avec  J.-G.  —  Dans 
le 3*,  intitulé:  De  la  Consolation  intérieure,  J.-G.  exhorte 
le  fidèle  à  renoncer  à  soi-même,  à  mépriser  le  monde,  à 
ne  chercher  de  vraie  consolation  ({n'en  Dieu.  —  Le  4* 
traite  du  Saerement  de  l'EucKari$tte;  ce  sont  des  exhor- 
tations à  s*^>procher  de  la  communion,  et  à  s'unir  inti- 
mement avec  J.-G.  —  Tout  l'ouvrage  est  fondé  sur  une 
grofonde  humilité  qui  porte  à  substituer  la  volonté  de 
ieu,  des  supérieurs  et  même  du  prochain  à  la  sienne,  à 
dédaigner  les  vanités  du  monde,  à  supporter  avec  pa- 
tience les  misères  de  cette  vie,  et  k  n'espérer  de  paix  et 
de  bonheur  que  dans  la  vie  étemelle.  11  a  été  quelquefois 
et  Justement  appelé  le  Livre  de  la  Coneolation,  Gomposé 
en  latin,  on  l'a  traduit  dans  toutes  les  langues  :  on  n'en 
eompte  pas  moins  de  80  versions  firançaises  en  prose,  plu- 
■leurs  en  vers,  dont  la  plus  célèbre  est  de  P.  Gomeille,  le 
tout  ensemble  formant  at^.  (1861)  plus  de  1500  éditions  1 

Quel  est  l'auteur  de  Vlmttation?  U  n'est  pas  de  pro- 
blteae  qui  ait  été  plus  fréquemment  agité  ;  car,  en  France 
feulement ,  depuis  le  commencement  du  xvn*  riècle,  près 
de  SOC  dissertations  ont  été  publiées  pour  le  résoudre.  En 
laissant  de  côté  l'opinion  qui  attribue  ce  livre  à  S^  Ber- 
nard,  et  quelques  autres  récUmations  aussi  difficiles  à 
j  nstifleTt  on  ne  trouve  que  trois  prétendants  sérieux  :  un 
certain  Jean  Gesen,  uessen  ou  Gersen,  oui  aurait  été 
abbé  du  monastère  de  S^Étienne  à  Verceil  pendant  le 
xn^^siècle;  Thomas  de  Kempen  ou  A  Kempis,  chanoine 
do  diocèse  de  Cologne;  et  Jean  Gerson,  chancelier  de 
L*IBlfver8ité  de  Paris. 

Les  Italiens,  les  Jésuites  piémontais,  le  bénédictin  Ga- 
lélan,  et,  de  nos  lours,  Grégory  et  Paravia,  ont  pris  le 
parti  de  Gersen.  Si  Vlmitation  datait  du  xm*  siècle,  com- 
ment se  ferait-il  qu'un  ouvrage  destiné  à  une  tA  grande 
popularité,  et  dont  les  copies  ont  été  si  nombreuses  au 
XV*  siècle,  fût  resté  inconnii  pendant  près  de  deux  renu 
ans,  et  aû'll  n'en  eût  existe  qu'an  seul  manuscrit?  Ce 
manuscrit,  d'aillenrs,  trouve  a  Arona,  ne  saurait  être,  au 
iuMOient  des  melllears  paléographes,  antérieur  à  l'an 
léOÛ.  On  aUégue  un  Journal  de  la  famille  des  Avogadri, 


où  U  est  parié  de  Vlmttation  k  la  date  de  1340:  mab  8 
serait  prouvé  seulement  qu'en  1340  il  y  avait  des  limtOf 
lions  en  drcuhrtion,  et  il  n'en  résulterait  rien  quant  an 
texte  que  nous  donnent  les  manuscrits  du  xv*  siècle.  Les 
italianismes  signalés  dans  Vlmitation  ne  prouvent  rien; 
ce  sont  tout  aiusi  bien  des  gallicismes.  Il  n'est  même  pas 
établi  qu'un  Gersen  ait  existé  k  Verceil  :  les  manuscrits 
anciens  où  se  trouve  son  nom  ne  l'appellent  Jamais  Mi 
de  Verceil,  et  ceux  qui  portent  cette  qualification  oAreôl 
peu  de  certitude;  plusieurs  manuscrits  ajoutent  à  son 
nom  le  titre  de  chancelier  de  Paris,  ce  qui  peut  (iifae 
supposer  une  substitution  de  1*0  à  Vo  par  quelque  eneor 
des  copistes,  qui  auraient  écrit  Gersen  au  heu  de  Gervm, 
Il  n'est  pas  Improbable  qu'on  aura  exploité  en  Italie  celta 
méprise,  en  haine  du  chancelier  de  l'Université  qui  s'ébdt 
déclaré  l'adversaire  de  l'infaillibilité  papale. 

Thomas  A  Kempis  a  pour  lui  le  témoignage  des  cha- 
noines réguliers  de  S^-Augustin,  des  Jésuites  flamaads, 
des  Bollandistes,  un  arrêt  du  parlement  de  Paris  eo 
1652,  l'autorité  du  chanoine  Eusèbe  Amort  au  xvm*  siècle, 
et,  de  nos  Jours,  Giesder  (Histoire  de  V Eglise)^  Gh. 
Schmidt,  MS'  lialou,  etc.  On  cite  un  manuscrit  de  sa 
main,  daté  de  1441,  et  se  terminant  par  ces  mots  :  FiniUu 
et  comidetus  per  manus  fratris  Tnomœ  à  Kempis,  Biais 
cela  signifie  que  Thomas  A  Kempis  est  l'auteur  de  U  co- 

Eie,  et  nullement  l'auteur  du  livre  :  or,  on  sait  qu'il  était 
abile  calligraphe,  et  qu'il  employa  sa  vie  à  copier  des 
manuscrits.  De  plus,  le  manuscrit  de  1441  ne  peut  être 
un  originai,  puisqu'on  en  a  d'autres  de  1437  et  de  1431  : 
c'est  une  simple  copie,  et  elle  est  défectueuse,  car  l'ordre 
des  quatre  parties  de  Vlmitation  y  est  maladroitement  in- 
terverti. Pour  admettre  que  Thomas  A  Kempia,  qui  mou- 
rut en  1471,  est  l'auteur  de  Vlmitation,  Il  faudrait  sop- 
poser,  avec  la  date  de  i4Sl,  qu'il  la  composa  fort  Jeune, 
et  encore  est-il  certain  que  le  livre  était  dqà  trèa^'épanda 
eo  Europe  au  commencement  du  xv*  siècle.  L'auteur  de 
Vlmitatum  demande  à  n'être  point  connu  :  il  ne  pouvait 
donc  pas  signer  son  ouvrage,  sans  se  mettre  en  contra- 
diction avec  lui-même.  Qu'fi  y  ait,  dans  r/i»itattoii, cer- 
taines expressions  qui  se  traduisent  mieux  en  flamand 
qu'en  italien  ou  en  nrançais,  on  peut  l'accepter  ;  mais  cela 
tient  k  ce  que  le  flamand,  resté  à  l'état  de  patois,  est  an- 
Jourd'hui  plus  sembUble  à  ce  qu'il  était  an  moyen  âge. 
Enfin  11  n'y  a  qu'à  lire  Reloue  opuscule  du  dianoine  de 
Cologne  pour  s'apercevoir  quil  n'était  pas  c^Mible  d'écrire 
le  livre  qu'on  veut  lui  attribuer. 

Quant  à  Gerson ,  sans  énumérer  ses  anciens  partisans, 
on  peut  citer  dans  notre  siècle  Gence,  Onéslme  Leroy, 
Baroier,  Thomassy,  Faugère,  le  chevalier  Vert,  comme 
ayant  soutenu  le  plus  vigouron^ement  sa  cause.  Ils  s'ap- 
puient sur  ce  que  les  plus  ancieits  et  les  meilleurs  ma- 
noscrits  de  Vlmitation^  ainsi  que  les  premières  éditions 
imprimées,  portent  le  nom  du  chMicelier  de  Paris;  ils 
mentionnent  surtout  un  manuscrit  avant  appartenu  an 
neveu  de  Gerson,  portant  le  nom  et  la  miniature  de  ce 
dernier,  et  contenant  aussi  un  sermon  sur  la  Passion, 
qui  est  assurément  de  lui.  On  leur  objecte  que  l'/mto- 
tûm  ne  figure  paa  dans  la  liste  des  écrits  du  chancelier 
dressée  par  son  firère  lui-même  :  mais  l'auteur  du  Irire 
ne  voulant  pas  être  connu,  son  frère  peut  bien  avoir  res- 
pecté ce  vœu;  d'ailleurs  U  liste  au'Il  a  dressée  porte  un 
recneil  de  pensées  courtes  et  utfles,  sans  «n  donner  le 
titre,  et  ce  recueil  ne  serait-Il  paa  Vlmitation  elle-mêmet 
Lee  partisans  de  Gerson  disent  que  l'InittaNoii  lût  écrite 
à  l'abbave  de  Mœlk  en  Autriche,  où  11  a'était  réfugié  après 
le  condle  de  Constance,  et  où  l'on  a  trouvé  23  manuscrits 
de  son  livre  ;  que  les  Idiotismes  étrangers  qui  s'y  ren- 
contrent, s*ils  ne  sont  pas  dus  aux  copUMs,  s'expliauent 
par  le  s^our  du  chancelier  en  AUemasne,  en  Ranope  et 
en  Italie;  oue  l'on  retrouve,  dans  les  diflérentes  oonvrai 
de  Gerson,  le  même  hitin,  les  mêmes  tournures  de  phrases, 
les  mêmes  mots  forgés  que  dans  Vlmitation,  SI  ce  livre 
était  italien  ou  allemand,  ijoutent-Us,  d'où  vient  que  c'est 
en  Franoequ'il  a  eu  le  plus  d'éditions  et  de  traductions,  et 

S  l'on  en  trouve  le  plus  de  manuscrits?  Pouniooi  l'Italie 
le-même.  Jusqu'au  xvi*  siècle,  Imprima-t-eile  Vlmita* 
tion  sous  le  nom  de  Gerson? 

A  vrai  dire,  la  critioue,  malgré  tant  de  dlacoaslons,  est 
encore  réduite  aujourd'hui  à  opposer  les  unes  aux  antres 
les  coqiectnres  et  les  probabilités.  Chacun  démontre  pé- 
remptoirement que  ses  adversaires  sont  dana  l'enenr, 
mais  n'apporte  aucune  preuve  qui  lève  tous  les  doutas  :  la 
polémique  n'a  que  des  résultats  négatife.  Peut-on  dn 
moins  dire  dans  quel  pays  est  né  le  livre  de  17m«(atioiif 
M.  Renan  croit  qu'il  est  originaire  dltaUe  x  il  en  a, 
dit^il,  le  génie  peu  profond,  mais  limpide,  éloigné  des 


V 


IMI 


1057 


IMM 


«péeaiatfoiw  àbstrmite»,  mais  merfeilleuterocut  propre 
inx  recherches  de  la  philosophie  pratique.  Selon  le 
même  écriTaIn,  les  Pays-Bas  et  les  provinces  du  Rhin 
étaient  comme  prédestinés,  par  la  tranc(uille  mysticité 
^Mb  inspirent ,  à  devenir  JH>ar  Vlmttatum  comme  une 
seconde  patrie.  Quant  à  la  France,  il  repouue  nettement 
ses  prétentions.  H.  Michelet  est  d'nn  avis  tout  différent  : 
«  Ce  livre  n*a  ni  Télan  pétrarcheste  des  mystiques  ita- 
liens, encore  moins  les  fleurs  bizarres  des  Allemands, 
leur  profondear  sous  des  formes  puériles,  leur  dange- 
reuse mollesse  de  cœur.  Dans  VlmttatUm  ii  Y  a  plus  de 
sentiments  que  damages;  cela  est  français.  »  C'était  aussi 
ropinlon  de  Corneille.  BL  Victor  Leclerc,  dans  la  préface 
Vil  a  mise  à  Tédition  in-folio  de  Y  Imitation  (1855),  a 
relevé  éuts  le  latin  de  ce  livre  un  certain  nombre  de  lo- 
cutions essentiellement  françaises.  On  peut  lyonter  que 
bi  manière  dont  Tesprit  fran^is  a  su  s'approprier  17mt- 
tation 
voe 

primitive. 

4ê  Vmumellê  consolacion,  est  une  présomption  que  cette 
<ceuvTe  était  foncièrement  sienne. 

One  opinion  qui  a  pris  crédit  de  nos  Jours,  c*est  que 
Tlmitatum  est  une  œuvre  impersonnelle,  née  dans  le 
moyen  &ge  à  une  date  qu'on  ne  saurait  fixer  avec  préci- 
sion, et  arrivée  par  des  développements  successifs  à  la 
/orme  où    nous  la  trouvons  au  milieu   du  xv*  siècle. 
<  Qui  sait»  a  dit  M.  Michelet,  si  Vfmitation  n'a  pas  été 
^épopée  intérieure  de  la  vie  monastique,  si  elle  ne  s'est 
pas  formée  peu  à  peu,  si  elle  n'a  pas  été  suspendue  et 
reprise,  si  elle  n'a  pas  été  enfin  l'œuvre  collective  que  le 
monachîsme  du  moyen  âge  nous  a  léguée  comme  sa  pen- 
sée la  plus  profonde  et  son  monument  le  plus  glorieux?  » 
M.  Victor  Leclerc  regarde  le  1*'  livre  comme  fort  anté- 
rieur aux  trois  autres  :  «  Le  langage  humble  et  calme  du 
premier  livre  paraîtrait  difficilement  l'œuvre  de  cet  esprit 
pins  hardi,  plus  familiarisé  avec  l'antiquité  profane,  et 
qui  se  plaît  aux  erandes  images  et  aux  amples  développe- 
ments du  troisième  livre,  et  ni  l'une  ni  l'autre  de  ces 
deux  parties  n'a  le  moindre  rapport  avec  la  théologie  sa- 
vante et  subUle  dont  le  quatrième  livre  est  rempli.  »  Il 
est  ceruin  que,  môme  au  xv*  siècle,  les  manuscrits  ne 
sont  pas  identiques  :  tantôt  il  n'y  a  qu'un  seul  livre  de 
Thnitalion,  tantèt  deux,  souvent  trois,  quelquefois  quatre, 
réunis  sous  un  titre  général  ou  présentés  comme  des 
traités  distincte.  Le  travail  de  composition  de  VlmUation 
snra  commencé  vraisemblablement  au  xii*  siècle  :  le  1*' 
et  le  ^  livre  gardent  l'empreinte  de  cette  grande  époque 
du  mysticisme.  Il  y  eut  là,  dans  le  principe,  Quelque  re- 
cueil de  préceptes  monastiques  livré  aux  méditations  des 
lefîgieux,  commenté  journellement,  et  auquel  chaoue  gé- 
nération aura  apporté  sa  pensée.  Le  3*  livre  semble  ap- 
liartenir  plus  particulièrement  au  xiii*  siècle,  par  l'inspi- 
ration plus   hardie,  par  le  mouvement  plus  rif  de  la 
praaée  et  du  style;  la  théologie  du  4*  livre  rappelle,  au 
contraire,  le  xiv*  siècle  et  ses  grandes  controverses.  Sans 
doute  Touvrage  fait  corps,  il  est  coordonné  dans  son  en- 
semble :  nuiis  la  rie  pâ*manente  qui  animait  ce  manuel 
monutique  aura  eflicé  les  disparates  trop   saillantes, 
fondu  tes  couleurs  et  harmonisé  l'ensemble.  Le  même 
sujet  est  pliuieurs  fois  repris  ;  on  sent  la  redondance  un 
peu  confuse  des  interpolations  successives.  La  liaison 
n'existe  que  dans  le  fond  des  choses,  nullement  dans  la 
forme  ;  car  chaque  tivre  est  un  tout,  chaque  chapitre  une 
instruction  complète,  et  chaque  verset  a  un  sens  par  lui- 
même.  VImUatton  oifre  le  caractère  d'un  centon  :  or,  un 
homme  ne  saurait  écrire  ainsi;  c'est  un  travail  collectif 
et  sécnlaîre  dont  la  rédaction  dernière,  œuvre  d'un  au- 
leor  inconnu,  de  Gerson  peutrètre,  appartient  à  la  fin  du 
nv*  siècle  on  au  commencement  du  xv*.  Ce  mode  de 
production  littéraire  n*a  rien  qui  doive  surprendre  :  c'est 
ainsi  qne  se  sont  formées  les  grandes  épopées  de  l'Inde 
et  celles  d'Homère.  Au  moyen  &ge  même,  de  courtes  can- 
tilènes  guerrières  des  temps  Carloringiens  sont  devenues 
cfasttsons  de  gestes,  puis  poèmes  épiques,  puis  romans 
d'aventures.  —  Cependant  cette  opinion  a  des  contradic- 
teurs très  autorisés  qui,  au  lieu  de  difiérences  caractéris- 
tiqoes  dûs  l'ouvrage ,  n'en  voient  que  d'accideo telles , 
produites  par  la  nature  diverse  des  sujets  traités.  V.  G. 
de  Grégory,  Mimokn  sur  U  véritable  auUw  âm  l'Imita^ 
tkm  de  J^C,  Paris,  1827,  in-i2;  Pararia,  IhU'  autor$ 
dd  libro  âê  InUtatumê  Christi,  Turin,  1K53;  Lécuy, 
Essai  svrlatriedêJ.  Gerson,  Paris,  1832,  t  vol.  in-8»; 
Ch.  Schmidt,  Essai  sur  Jean  Gerson,  Straisbonrg,  1839; 
W  Maloa ,  Recherches  historiques  et  crtiufws  sur  le 
.'ériiabie  auteur  du  livre  de  VFmtation  de  J,-C.,  Paris, 


1858,  in-8*;  Gence,  Nouvelles  considérations  sur  Vam» 
teur  et  le  livre  de  Vlmitation  de  A-C,  1826  ;  un  article  de 
Daunou  dans  le  Journal  des  Savants  de  décembre  1827  ) 
Thomassy,  Jean  Gerson,  Paris,  1843;  Vert,  Études  his- 
toriques et  critiques  de  VlmUation,  Toulouse,  1856;  ilsi^ 
nales  de  philosophie  chréliennSy  année  1861  ;  Manôeart, 
Béponse  de  la  Franc9  à  la  Belgique  relativement  àTlmi- 
tatUmde  y.-C.,  Paris,  186S.br.  in-8\ 

DOIANENT,  en  termes  d'Ecole,  ce  oui  reste  en  dedans 
(manere  m)  d'une  chose  ou  d'une  idée,  et  n'en  sort  Ja- 
mais. Spinoa  appelait  Dieu  la  catiss  immanente  du 
monde,  pour  faire  comprendre  que,  par  son  essence,  il 
ne  difière  point  du  monde.  Kant  parle  d'un  emploi  ttnma- 
nent  de  la  raison  ;  il  entend  par  là  un  emploi  ue  la  raison 
qui  ne  dépasse  pas  les  limites  du  monde  risible,  par  op- 
position à  un  emploi  transcendant  de  la  raison,  dépassant 
ces  limites.  Une  méthode  immanente  est  celle  qu'on  peut 
déterminer  par  l'objet  même  de  la  recherche.  Un  savoir 
immanent  est  un  savoir  qui  est  approfondi  dans  le  si^et 
même.  En  Théologie,  un  acte  immanent  est  celui  qui  de- 
meure dans  la  personne  oui  agit,  sans  avoir  d'effet  an 
dehors  :  Dieu  a  engendré  le  Fils  et  le  S^  Esprit  par  des 
actions  immanentes,  tandis  qu'il  a  créé  le  monde  par  une 
action  transitoirt. 

naiATf!:RIALITÉ.  V,  SpiBiTDALiTé. 

IMMATRICULATION ,  action  d'inscrire  sur  un  registre 
public,  dit  matricule  (K.  ce  mot). 

IMMENSITÉ.  V.  DiBU. 

IMMEUBLES  (du  latin  tmmoftt^û,  immobile),  biens 
qui  ne  peuvent  être  considéra  comme  meubles,  c-à-d. 
<^u'on  ne  peut  transporter,  cacher  ni  détourner.  On  dis- 
tingue :  1"  les  Immeubles  par  nature^  comme  les  biens- 
fonds,  terres,  b&timents,  etc.,  les  récoltes  pendantes  par 
leurs  racines,  les  fruits  des  arbres  non  encore  recueillis  ; 
2*  les  Immeubles  par  destination ,  choses  qui ,  mobi- 
lières par  leur  nature,  sont  incorporées  dans  un  immeuble 
pour  en  faire  partie  intégrante,  de  sorte  qu'on  ne  puisse 
les  détacher  sans  détérioration,  ou  qui  sont  affectées  an 
service  de  l'immeuble  par  le  propriétaire,  comme  les  ani- 
maux attachés  à  la  culture,  les  ustensiles  aratoires ,  les 
semences  données  aux  fermiers,  les  pigeons  des  colom- 
biers, les  lapins  des  garennes,  les  ruches  k  miel,  les 
poissons  des  étangs,  les  pressoirs,  chaudières,  cuves  et 
tonnes,  les  pailles,  les  engrais,  les  ustensiles  nécessaires 
à  l'exploitation  d'une  forge  ou  d'une  usine ,  les  objets 
scellés  dans  les  murs,  les  glaces  faisant  corps  avec  la 
boiserie,  les  statues  placées  dans  des  niches  ;  3®  les  /m^ 
meubles  par  fiction,  par  la  loi,  par  coutume^  comme 
les  offices,  les  rentes  constituées ,  etc.  L'usufruit  des 
choses  immobilières,  les  serritudes  foncières  et  les  actions 
oui  tendent  à  revendiquer  ces  immeubles,  sont  consi- 
aérés  comme  immeubles  par  Vobjet  ougtM/  Us  «'ap- 
pliquent.  Les  immeubles  ne  peuvent  Jamais  être  consi- 
dérés  comme  marchandises,  ni  les  spéculations  dont  ils 
sont  l'objet  être  rangées  parmi  les  actes  de  commerce. 

IBOIOLATION.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^Histoure. 

lAIMONDIGES.  Quiconque  Jette  involontairement  des 
immondioes  sur  autrui  encourt  une  amende  de  1  à  5  fr., 
outre  la  réparation  du  dommage  causé.  Si  le  fait  a  été 
volontaire,  l'amende  est  de  6  à  15  fr.,  et  un  emprisonne- 
ment de  1  à  3  tours  peut  être  prononcé  {Coàe  pénale 
art.  471,  475  et  476).  V.  Bodbs,  Balayaob. 

IMMORTALITÉ  DE  L'AME.  La  croyance  à  l'immorta- 
lité de  l'ftme  est  aussi  profondément  gravée  dans  le  cœur 
de  l'homme  oue  celle  à  l'existence  de  Dieu.  L'homme  y 
croit  instinctivement  d'abord,  et  la  réflerion  rient  con- 
firmer sa  croyance.  La  foi  et  la  raison,  la  religion  et  la 
philosophie  sont  d'accord  pour  la  proclamer,  et  les 
preuves  ne  manquent  pas  pour  la  confirmer.  La  première 
est  dans  les  faits  de  conscience.  L'homme  a  en  lui  la  no- 
tion et  le  désir  de  l'immortalité;  il  la  cherche  pour  ses 
ouvrages,  pour  son  nom,  pour  lui-même,  et,  dans  ses 
rêves  d'espérance,  il  pt^nd  sans  cesse  possession  d*nn 
avenir  indéfini  :  sans  cesse  il  tend  à  la  connaissance  dn 
vrai,  à  la  représentation  de  l'idéal ,  à  la  réalisation  du 
bien,  sans  y  parvenir;  l'induction  nous  porte  déjà  à  con- 
clure qu'après  cette  rie  il  y  en  a  une  autre  où  l'Ame  con- 
tinue de  marcher  vers  le  même  but,  et  d'accomplir  sa 
destinée.  La  nature  du  principe  pensant  ijoute  une  nou- 
velle force  à  ces  considérations.  Le  mot  est  un ,  simple, 
indirisible,  identique;  par  conséquent,  il  ne  peut  pas 
périr,  comme  les  corps,  par  décomposition,  et  son  imma* 
térialité  derient  une  garantie  de  son  immortalité.  Cepen- 
dant, simple  ou  non,  l'&me  pourrait  être  anéantie  par  la 
cause  qui  lui  a  donné  l'être;  cette  seconde  preuve  n'est 

67 


IMP 


1058 


IMP 


pas  encore  soffisante.  D'aiUean,  en  admettant  qa*elle  ga* 
imntiBse  rimmortalité  de  la  substance  pensante,  elle  ne 
montre  pas  suffisamment  la  persistance  de  la  personna- 
Ifté  humaine,  et  c'est  en  celle-d  que  consiste  la  véritable 
immortalité.  Une  troisième  sorte  de  preuve  lève  tous  les 
doutes  :  elle  est  fondée  sur  la  loi  du  mérite  et  du  démé- 
rite, complément  nécessaire  et  inséparable  de  la  loi  du 
devoirs  elle 'montre  que  la  justice  de  Dieu  s'oppose  à 
Fanâuitissement  de  la  personnalité  humaine,  et  par  con- 
séquent de  i'àme,  parce  que  la  loi  morale  doit  avoir  sa 
sanction.  Le  droit  qu'a  l'homme  de  bien  au  bonheur,  en 
le  conformant  à  la  loi  du  devoir,  est  inaliénable  et  im- 
prescriptible; de  même,  le  coupable  encourt  un  châti- 
ment auquel  il  ne  doit  pas  pouvoir  se  soustraire.  Si, 
dans  ce  monde,  les  biens  et  les  maux  sont  distribués  selon 
ja  règle  et  l'exacte  proportion  que  veut  la  justice  divine, 
si  la  vertu  y  trouve  la  récompense  qu'elle  mérite,  si  le 
vice  et  le  cnme  y  sont  toujours  punis  comme  ils  le  mé- 
ritent, l'immortalité  n'a  pas  de  raison  d'être;  sinon,  il 
faut  qu'elle  soit,  elle  est  nécmsaire  comme  Dieu  lui- 
même.  Or,  l'histoire  entière  de  l'humanité  et  l'expérience 
de  chaque  Jour  montrent  que  l'harmonie  entre  la  loi  du 
devoir  et  celle  du  mérite  et  du  démérite  n'existe  pas  sur 
cette  terre,  et  que  la  loi  morale  n'v  trouve  pas  sa  sanc- 
tion ;  il  faut  donc  que  cette  sanction  ait  lieu  dans  une 
autre  vie.  Dans  tous  les  temps  et  chez  tous  les  peuples 
cette  vérité  a  été  reconnue  et  proclamée,  et  la  diversité 
d'opinions  sur  la  manière  d'expliquer  et  d'appliauer  le 
dogme  de  l'immortalité  de  l'âme  prouve  l'universalité  du 
principe.  Les  sectateurs  de  la  religion  d'Odin  en  parlident 
autrement  que  les  Grecs,  Homère  autrement  qu'Ossian  ; 
le  dogme  de  la  métempsycose  diffère  du  spuîtnalisme 
chrétien;  mais  tous  sont  d'accord  sur  le  point  capital, 
rimmortalité  de  l'âme.  Quant  aux  systèmes  qui  tendent 
à  la  nier  ouvertement  ou  implicitement,  comme  le  ma- 
térialisme et  le  panthéisme,  la  réfutation  de  leurs  prin- 
cipes montre  en  même  temps  l'erreur  où  ils  tombent  sur 
cette  question  capitale.  R. 

IMMUNITÉ  (du  latin  m  marquant  privation,  et  mumi», 
charge),  exemption  de  quelque  chai^,  devoir  ou  impo- 
sition. Chez  la  plupart  des  peuples  de  l'antiquité,  les 
λrêtres,  ainsi  que  certains  lieux  consacrés  aux  dieux, 
urent  exempts  de  toute  espèce  d'impôts  et  charges. 
A  Rome,  quelques  fonctions  donnaient  (froit  à  des  immu- 
nités. Au  moyen  âge,  en  France,  le  mot  tfiimiifitMs  a  été 
souvent  employé  pour  franchises,  libertés,  jHrimiégês: 
chaque  ordre  de  l'État  avait  ses  immunités  particuliâes; 
il  en  était  d'autres  spéciales  aux  habitants  de  telle  ou 
telle  localité,  â  telle  ou  telle  profession.  La  Révolution  de 
17S9  a  fait  dispaoraltre  toutes  les  immunités,  en  déclarant 
tous  les  citoyens  égaux  devant  la  loi. 

IMMUTÂBIUTÉ.  V.  Dieu. 

IMPANATION.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

IMPARFAIT,  temps  des  verbes,  qui  s'appelle  aussi  passé 
simultané;  en  effet,  il  exprime  un  état  ou  une  action 
passés  maintenant ,  mais  présents  par  rapport  à  un  autre 
état  ou  une  autre  action  également  passés  :  «  Je  lisais 
comme  vous  entrâtes  ;  il  était  là  quand  Je  suis  venu.  ■ 
L'imparfait  existe  en  français  et  en  latin  à  l'indicatif  et 
au  subjonctif.  A  l'infinitif  et  au  participe  il  se  confond 
avec  le  présent  pour  la  forme;  ainsi ,  «  Un  coq  cherchant 
de  la  nourriture  trouva  une  perle,  »  équivaut  à  :  «  Un 
coq  qui  cherchait.,.  ■  L'imparfait  indicatif  français  est 
qne  altération  ,de  l'imparfait  latin  :  «  J'aimaù,  tu  ai- 
ma», il  tAmait,  n  viennent  de  amabom.  amabos,  amabot 
(l'ancienne  langue  ne  hiettait  pas  à* s  a  la  i**  personne, 
ce  qui  était  plus  conforme  â  l'ét^ologie).  Celui  du  sub- 
jonctif est  dérivé,  non  pas  de  l'imparfait ,  mais  du  plus- 
qu^parfait  du  subjonctif  latin  :  ainsi ,  «  que  J'aimais», 
que  tu  aimasses,  qu'il  aimdt,  »  viennent  de  amoM^m, 
tanasses,  tanasset,  et  non  pas  de  amarem.  Les  deux 
autres  lances  néolatines  forment  les  deux  imparfaits 
d'une  manière  analogue  au  français.  En-  grec,  l'imparfait 
a  pour  caractéristique  la  terminaison  ov,  souvent  modifiée 
en  ovv  et  en  a>v  dans  les  verbes  contractes;  il  est  en  tiv 
dans  les  verbes  en  \u.  Il  a,  de  plus,  l'augment ,  qui  est 
constant  chez  les  Attiques,  en  vers  comme  en  prose. 
L'impariUt  du   subjonctif  n'existe  pas  à  proprement 

Îiarler  ;  mais  le  présent  de  l'optatif  en  a  tout  â  fait  la  va- 
eur  :  Aderam  ik  loquerer^  irapYJv  tva  XÉ^ot^iu  P. 

IMPARFAITS  (Droits).  V.  DRorr. 
IMPARFAITS  (Tons),  uom  donné,  dans  le  plain-chant, 
aux  tons  qui  n'atteignent  pas  les  deux  notes  extrêmes  de 
leur  échelle  diatonique.  Le  ton  authentique  est  imparfait, 
f'ii  ne  s'élève  pas  Jusqu'à  l'octave  de  sa  finale;  le  piagal 


est  imparfait,  sHl  ne  descend  pas  â  la  quarte  au-dessous 
de  sa  finale.  F.  C. 

IMPARISYLLABIQUE  (Nom),  nom  (substantif  ou  ad- 
jectif) qui  a,  au  génitif  et  aux  cas  qui  en  dérivent,  une 
Srllabis  de  plus  qu'au  nominatif.  Les  substantifs  de  cette 
asse  comprennent  la  3*  déclinaison  grecque,  la  3*,  la 
4*  et  la  5*  au  latin.  Ceux  qui  se  rattachent  à  ces  déclinai- 
sons, sans  avoir  plus  de  syllabes  aux  cas  indirects  qu'au 
cas  direct,  ne  sont  parisyllabiques  qu'en  apparence,  ces 
cas  ayant  subi  une  contraction  ou  une  syncope  ;  ainsi , 
en  latin,  manûs,  génit.  sing.  et  nomin.  et  accus,  pluriel 
de  manûs,  est  pour  manûïs,  manHes,  Un  certain  nombre 
de  noms  grecs  en  vç  et  en  ic  sont  parisyllabiques  à  l'ac- 
cusatif singulier,  par  exemple:  icôXtç,  icôXiv.  Dans  la 
langue  grecque,  telle  que  nous  la  montrent  les  poésies 
d'Homère,  le  caractère  imparisyllabique  se  remarque  par- 
tiellement aux  deux  premières  déclinaisons;  ainsi ,  le  gé- 
nitif singulier  (propre  aux  Éoliens)  est  souvent  en  ôo; 
celui  du  pluriel  est  fréquemment  en  àoyv  à  la  i'*,  le  gé- 
nitif singul.  en  oio  à  la  2*;  le  datif  plur.  de  la  i'*  est  en 
^<Tt ,  de  la  2*  en  oto-i  ;  ti^i  marque  quelquefois  le  génitif 
et  le  datif  des  deux  nombres  de  la  i**  décl.,  091  ces  mêmes 
cas  dans  la  2*.  Le  latin,  dans  sa  forme  primitive,  avait  le 
génitif  singulier  de  la  l'*  décl.  en  ai,  le  datif  plur.  en 
abus,  et  celui  de  la  2*  en  obus.  Ces  deux  déclmaisoDs  sont 
constamment  imparisyllabiques  au  génitif  pluriel  :  rosa 
rosarum,  dominus  dominorum.  Réciproquement,  la  3* 
contient  un  grand  nombre  de  noms  parisyllabiques, 
comme  collis,  nubes^  senex,  altare,  cubUe;  mais  aucun 
ne  l'est  au  datif  pluriel  qui  est  toujoura  en  ibusj  un  très- 
petit  nombre  le  sont  au  génitif  pluriel ,  comme  juvenum , 
senum,  canum,  opium;  les  autres  ont  une  terminaison 
dissyllabique  :  cdlium ,  nulnum ,  altarium ,  etc.      P. 

IMPASTATION,  mélange  de  plusieun  matières,  de 
couleurs  et  de  consistances  différentes,  unies  et  liées  par 
quelque  ciment  ou  mastic  qui  durcit  au  feu  ou  à  l'air  : 
tels  sont  les  ouvrages  de  poterie,  de  porcelaine,  les  mar- 
bres peints,  le  stuc,  le  carton-pierre. 

IMPENSES  (du  latin  impensa,  dépense),  en  termes  de 
Droit,  dépenses  faites  sur  un  immeuble  qui  appartient 
à  autrui  ou  qui  ne  nous  appartient  qu'en  parUe.  Elles 
sont  dites  nécessaires,  quand  la  conservation  du  bien  en 
dépend;  utiles,  quand  elles  l'améliorent  simplement; 
votuptuaires,  c-ând.  de  pur  agrément ,  quand  elles  Tem- 
bellissent  sans  en  accroître  la  valeur.  Un  donataire  qui 
fait  rapport  à  une  succession,  et  un  possesseur  de  bonne 
foi  qui  est  soumis  â  l'éviction  {V.  ce  mot)^  sont  indem- 
nisés des  impenses  nécessaires  et  utiles,  mais  non  des 
voluptuaires  (Code  Napd.,  art  861,  862, 1634, 1635). 

IMPÉRATIF,  mode  des  verbes  qui  sert  à  exprimer  le 
commandement  (en  latin  imperium,  d'où  le  verbe  impé- 
rare)  ;  «  Viens  ici;  —  faites  ce  que  je  vous  dis;  — 
n'allez  pas  lâchas.  »  Souvent  aussi  il  marque  simplement 
prière,  exhortation,  invitation.  Quelquefois,  dans  les 
phrases  vives,  il  s'emploie  improprement  pour  un  autre 
mode  avec  une  conjonction, comme  lorsqu'on  dit:  «  Faites- 
le,  ne  le  faites  pas,  Je  ne  m'en  soucie  point,  »  pour  dire  : 
«  Je  ne  me  soucie  pas  que  vous  le  fassiez  ou  que  vous  ne 
le  fassiez  pas.  »  En  fîrançais,  l'impératif  n'a  qu'une  forme 
temporelle,  celle  du  présent;  il  est  défectif  quant  aux 
personnes,  n'ayant  que  la  2*  du  sing.  et  du  pluriel  et  la 
i"  du  pluriel.  En  latin,  l'impératif  a  deux  formes,  dont 
l'une,  terminée  en  a,  en  s,  en  t,  suivant  la  conjugaison, 
correspond  à  notre  impératif,  et  dont  l'autre,  terminée 
en  cUo,  eto,  ito,  marque  plutôt  le  futur  que  le  présent,  et 
s'emploie  surtout  là  où  nous  exprimons  un  commande- 
ment par  le  futur  indicatif,  par  exemple  dans  le  style 
des  lois  et  des  édits  i  •  dn  se  réunira  sur  la  place, 
Coeunto  in  foro;  — quiconque  franchira  cette  limite  sera 
déclaré  ennemi  public,  adjudicatus  esto  hostis,  »  —  En 
grec,  l'impératif  a  trois  formes  temporelles,  le  présent, 
l'aoriste,  le  parfait.  Le  présent  s'emploie  lorsque  la  chose 
commandée  doit  avoir  de  la  durée;  l'aoriste,  lorsqu'on 
ne  considère  que  l'instant  même  où  elle  sera  exécutée; 
le  parfait  correspond  à  cette  tournure  française:  Ayes 
fini  quand  famoerai.  C'est  surtout  au  passif  que  ce 
temps  grec  s'emploie.  L'impératif  grec  n'a  pas  de  l***  per- 
sonne, non  plus  que  le  latin  :  on  y  supplée,  comme  en 
latin,  par  la  personne  correspondante  du  subjonctif  prô- 
.  sent.  P. 

m péRATip  CATéooRiQOB ,  nom  BOUS  lequel  Kant  désigne 
la  loi  morale,  pour  exprimer  le  caractère  obligatoire  des 
devoin  qu'elle  impose. 

IMPÉRIALE ,  Jeu  qui  se  Joue  à  deux,  et  avec  32  cartes. 
Chaque  joueur  reçoit  12  cartes;  la  25"  est  retournée,  et 
constitue  l'atout.  Celui  qui  donne  marque  un  point  s'il  a 


IMP 


1059 


IMP 


ntomé  une  des  canes  marquantes  (  roi ,  dama,  valet,  as 
6twpt),  Le  premier  en  cartes  annonce  son  plus  haut 
point  en  une  oonleor;  si  ce  point  est  supérieur,  ou  seule- 
ment ég»l  à  celui  de  VadTereaire,  il  marque  un  point. 
^Qwhe,  on  montre  les  impériales,  oui  sont  les  4  rois,  ou 
««dunes,  ou  les  4  valets,  ou  les 4  as,  ou  les  4  sept,  ou 
eoHn  une  <|uatrième  majeure.  Il  v  a  aussi  Timpériale  de 
cartes  blanches.  Chaque  impériale  oblige  l'adversaire  à 
démanger  les  jetons  qu'il  a  déjjà  acquis.  A  chaque  carte 
loaée,  il  faut  fournir  ou  couper.  Les  cartes  marquantes 
Jmâes  sans  être  prises  par  l'adversaire  comptent  chacune 
on  point,  ainsi  que  celles  qu'on  lui  enlève  par  supério- 
rité de  figure.  Il  en  est  de  même  de  chaque  levée  faite  en 
plos.  Chaque  fois  qu'on  atteint  6  points,  on  marque  une 
impériale.  Le  capot  vaut  aussi  une  impériale.  La  partie 
se  joue  en  un  nombre  d'impériales  convenu  d'avance. 
L'impériale  tire,  dit-on,  son  nom  de  l'empereur  Charles- 
Quint,  qui  l'aimait  beaucoup. 

ntpéauLB,  monnaie  russe.  V.  ce  mot  dans  notre  Dio- 
tifmnaire  de  Biographie  et  d^Histoire, 

mvtMiALE ,  partie  supérieure  d'une  diligence  ou  d'une 
voiture  de  ▼ovage. 
iMP^BiALB  (Bibliothèque).  F.  BmuoTHiQOB  rationalb. 
IMPERIALE  (Chambre).   V.  Chambre  impériale,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

nrp^iALB  (Cour),  au).  d'APPEL,  Juridiction  de  1"*  ordre 
en  France,  ayant  pour  attribution  de  connaître  souverai- 
nement, en  matière  dvile,des  appels  de  jugements  rendus 
par  les  tribunaux  de  1**  instance  et  de  commerce,  et,  en 
matière  criminelle,  des  appels  de  police  correctionnelle. 
Elle  statue,  en  outre,  sur  les  mises  en  accusation  des 
prévenus  contre  lesquels  les  Chambres  du  conseil  des 
tribunaux  de  1"  instance  ont  rendu  des  ordonnances  de 
prises  de  corps.  11  y  a  ^  Cours  d'appel  {V.  notre  Die- 
Oonnaire  de  Biographie  et  d'Histoire,  p.  1084,  col.  2). 
Les  magistrats  qui  les  composent  ont  le  titre  de  Con* 
ieillers  :  leur  nombre  varie  selon  l'importance  du  res- 
sort. Chaque  Cour  a  un  l"'  président,  el  autant  de  pré- 
sidents qu'elle  a  de  Chambres  :  elle  a  une  ou  plusieurs 
Chambres  civiles,  une  Chambre  d'appels  de  police  cor- 
rectionnelle, et  une  Chambre  d'accusation.  Une  Chambre 
des  Tscations  est  chargée  de  iuger,  pendant  les  vacances, 
leB  affaires  urgentes.  Les  Chambres  civiles  ne  peuvent 
statuer  qu'au  nombre  de  7  conseillers  au  moins,  et  les 
Chambres  correctionnelles  et  d'accusation  qu'au  nombre 
de  5  au  moins.  Les  Cours  d'appel  exercent  un  droit 
<le  snrreîilaQce  sur  les  tribunaux  civils  de  leur  ressort; 
elles  reçoivent  le  serment  des  présidents  et  Juges  de  ces 
tribunaux  et  des  tribunaux  de  commerce,  comme  aussi 
des  membres  du  ministère  public  près  les  tribunaux 
ôrils.  Le  ministère  public  près  une  Cour  d'appel  se 
eomfpoae  d*un  proeorear  génml ,  d'avocats  généraux,  et 
de  substituls  on  procureur  général.  Il  y  a  un  greflSer  en 
ciief  et  des  commis  greffiers  assermentés  pour  le  s^rice 
de  la  Cour.  Des  avoués  et  des  huissiers  en  nombre  fixe 
ont  seuls  le  droit  de  postuler  et  d'instrumenter  près 
d*éUe. 

ncrtaiALs  (Garde).  Y.  Garde  mpâiuLs,  dans  notre 
Dietiotmaire  de  Bio^aphie  et  d'Histoire, 

xHPÉaiAui  (Injpnmerie).  F.  Improierib,  dans  notre 
Dictionnaire  ae  Biographie  et  ^Histoire, 

DfpÉaiALES,  nom  que  les  numismates  donnent  aux  mé- 
dailles frappées  sous  les  empereurs  romains.  Ces  mé- 
dailles commencent  avec  J.  César,  et  par  celles  où  sa  tête 
est  représentée.  Quel  que  soit  le  métal  employé,  les  têtes 
des  empereurs  ont  une  grande  valeur  artistique,  parce 
«ine  les  coins  forent  grava  d'après  de  bons  portraits.  Les 
médailles  des  impératrices  sont  parfois  diffiales  à  classer, 
parce  qu*on  y  trouve  des  noms  corrompus  ou  omis  dans 
rnistofre. 

I]IIPERSOI*VNEL,  nom  que  Ton  donne  aux  verbes  qui 
n*ont  <|u'une  seule  personne,  à  savoir  la  3*,  et  qui ,  par- 
tant, sont  considérés  comme  étant  dépourvus  de  cette  in- 
flexion. Tels  sont,  en  français,  il  faut,  il  pleut ,  U  neige, 
ii  lofms.  On  distingue  les  verbes  essentidlement  imper- 
sommeis,  c-A-d.  ani  ne  peuvent  Jamais  avoir  que  cette 
forme  de  oonjuguson,  comme  ceux  cités  plus  haut,  et 
les  verties  accidentellement  impersonnels,  c-à-d.  ceux 
qui,  ayant  toutes  leurs  personnes,  sont  employés  dans 
certains  cas,  comme  des  verbes  impersonnels  ;  tels  sont  : 
U  importe,  il  arrive.  Cela  a  lieu  lorsque  le  sujet  de 
ces  verbes  n'est  point  le  nom  d'une  personne  ou  d'une 
chose  déterminée.  —  Tous  les  verbes  grecs  et  latins  de 
forme  active  peuvent  devenir  impersonnels  à  la  3*  per- 
sonne du  singulier  du  passif,  pns  dans  un  sens  vague; 
ainsi,  dicUÊÊ/Tf  fX  est  dit,  on  dit;  curritur,  on  court i 


ventum  est,  on  est  venu.  Les  verbes  neutres  ne  sont  pasi 
susceptibles  de  cette  forme  en  grec.  P. 

IMPÉTRANT  (du  latin  impetrare,  obtenhr),  en  termes 
de  Droit  et  d'Administration,  celui  qui  a  obtenu  l'objet 
de  sa  demande. 

IMPLUVIATA,  nom  donné  par  les  anciens  Romains  à 
un  vêtement  de  couleur  brune,  robe  carrée  à  4  côtés, 
comme  Vimpluvium  d'une  maison.  N'était-ce  pas  aussi 
un  manteau  contre  la  pluie? 

IMPLUVIUM.  V.  Atrium. 

IMPORTATION.  V,  Comhbrcb. 

IMPORTATION  (Brevets  d').  V,  Brevets  n'invraiTioif. 

IMPOSITION,  en  termes  de  Finances,  mot  synonyme 
de  Contribution  {V.  ce  mot), 

IMPOSITION,  en  termes  de  Typographie,  arrangement 
méthodique  des  pages  dont  se  compose  une  feuille  d'im- 
pression. Il  doit  être  tel  que,  la  feuille  étant  imprimée  et 
pliée,  toutes  les  pa^  se  trouvent  dans  l'ordre  où  eller 
sont  lues.  L'imposition  est  confiée  au  metteur  en  pages, 

isiPOSrnoN  dbs  mains,  cérémonie  en  usage  chez  les  Hé- 
breux et  les  Chrétiens.  Les  premiers,  quand  ils  priaient 
pour  quelmi'un,  mettaient  leurs  mains  sur  sa  tête,  en 
adressant  leurs  voeux  à  Dieu.  Jésus-Christ  imposa  de 
même  les  mains  aux  enfants  qu'il  voulait  bénir  et  aux 
malades  qu'il  guérissait;  ses  Apôtres  les  imposèrent  aux 
hommes  qu'ils  recevaient  dans  la  foi  ou  auxquels  ils  con- 
féraient un  ministère  spirituel.  Dans  l'Église  catholique, 
les  sacrements  de  la  Confirmation  et  de  l'Ordre  se  con- 
fèrent par  l'imposition  des  mains. 

IMPOSTE  (du  bas  latin  impostare,  reposer  sur),  cou- 
ronnement orné  de  moulures,  qui  forme  la  tête  d'un 
pilier  ou  pied-droit  à  la  naissance  de  la  partie  cintrée 
d'une  arcade,  et  qui,  par  conséquent,  sert  de  base  à  l'arc. 
On  donne  le  même  nom  à  la  moulure  qui  orne  le  contour 
d'une  arcade  ou  simplement  d'une  baie  de  fenêtre,  ainsi 
qu'à  la  partie  supérieure  et  dormante  d'un  chftssis  de 
porte  ou  de  fenêtre. 

IMPOSTEURS  (Le  livre  Dbs  trois),  petit  livre  latin, 
dirigé  contre  les  religions  de  Moïse,  de  Jésus -Christ,  et 
de  Mahomet,  et  dans  lequel  Tauteur  s'attache  même  à 
démontrer  que  toutes  les  preuves  de  l'existence  de  Dieu 
sont  fausses  ou  ridicules.  On  a  commencé  à  parler  d'un 
livre  de  ce  titre  au  commencement  du  xvii*  âècle,  sans 

2u'on  en  eût  jamais  vu  un  seul  exemplaire,  et  la  reine 
hristine  de  Suède  offrit  en  vain  30,000  livres  à  qui  le 
lui  procurerait.  Il  fut  attribué  à  l'empereur  Frédéric  II 
ou  à  son  chancelier  Pierre  des  Vignes,  qui  s'en  seraient 
fait  une  arme  contre  le  Saint-Siége  vers  la  fin  de  la 

gierre  du  Sacerdoce  et  de  l'Empire,  à  Campanella,  à 
uill.  Postel,  à  Machiavel,  à  Rabelais,  à  Erasme,  à 
Etienne  Dolet ,  au  Poggio ,  à  Ochino ,  à  Muret ,  à  Pom- 
ponace,  à  Cardan,  à  Ramus,  à  Jordano  Bruno,  à  Va- 
nini ,  etc.  Le  fait  est  que  le  livre  n'existait  pas  :  telle 
était  l'opinion  de  La  Monnove,  de  Richard  Simon,  de 
Grotsus,  du  P.  Mersenne,  et  de  Bayle.  On  ne  saurait  dire 
par  quelle  méprise  la  réalité  du  traité  De  tribus  impos- 
toribtAS  fut  acceptée  :  mais  il  est  admis  généralement 
aujourd'hui  qu'un  penseur  à  la  fois  audacieux  et  prudent 
l'écrivit  au  xvm*  siècle,  en  imitant  avec  assez  d*art  la 
latinité  du  moyen  &ge,  et  que  Straub,  libraire  de  Vienne, 
en  fut  le  premier  éditeur  en  1753.  La  Bibliothèque  na- 
tion^e  de  Paris  en  possède  un  exemplaire  qui  a  appar- 
tenu au  duc  de  La  Vallière,  et  où  on  lit  la  date  de  1598 , 
date  évidemment  fausse,  car  le  livre  parle  des  Védcu  de 
l'Inde  avec  une  connaissance  que  l'on  ne  possédait  pas 
au  XVI*  siècle.  D'autres  éditions  du  livre  Des  trois  im- 
posteurs ont  été  publiées  en  1702, 1833, 1846,  et  1861. 

IBfPOT.  L'impôt  est  la  portion  du  revenu  de  chacun 
que  demande  tout  gouvernement,  pour  subvenir  aux  dé- 
penses des  services  publics.  Il  est  nécessaire,  il  est  légi- 
time, et,  dans  bien  des  cas  même,  il  constitue  pour  la 
société  un  emploi  lucratif  de  ses  fonds.  La  richesse  ne  ae 
forme  dans  un  pays  que  grftce  à  la  sécurité  dont  jouissent 
les  individus,  et  cette  sécurité  ne  s'obtient  ou'au  moyen 
d'une  bonne  et  vigilante  administration,  qu'if  faut  payer. 
Aussi  quelques-uns,  prenant  le  mot  dans  une  acception 
un  peu  trop  étroite,  ont-ils  appelé  IMmpdt  une  prime 
d'asstêrance.  Voici,  selon  M.  Passy,  les  conditions  néces- 
saires pour  qu'un  impôt  soit  légitime  :  1°  il  doit  être 
proportionnel,  c.-à-d.  réparti  de  façon  à  n'exiger  de 
chaque  contribuable  qu'une  quote-part  proportionnée  au 
chiffre  total  de  son  revenu  particulier;  2<*  la  quote-part 
d'impôt,  ainsi  que  l'époque  et  la  forme  du  payement,  doit 
être  suffisamment  connue  de  tous,  pour  exclure  toute  ' 
contestation  et  toute  décision  arbitraire;  3**  la  perception 
doit  être  faite  aux  époques  et  sous  les  formes  les  mohis 


IMP 


1060 


IMP 


Incommodes  pour  les  redevables;  A^  l'impôt  doit  être  or- 

Snisé  de  manière  à  n'entraîner  que  les  moindres  frais 
perception  possibles. 

Ûimpot,  n'étant  qu'une  part  du  rerenu  de  chacun  pré- 
levée dans  l'intérêt  du  service  de  tous,  doit  toiijours  se 
proportionner  au  revenu  des  citoyens  et  aux  besoins  de 
l'État,  il  ne  faut  Jamais  exiger  des  contribuables  plus 
qu'ils  ne  peuvent  raisonnablement  donner,  c.-à-d.  ne 
Jamais  leur  prendre  une  partie  de  leur  revenu  assez  con- 
sidérable pour  leur  enlever  les  moyens  de  vivre  ou  le 
désir  de  travailler  à  acquérir  ce  revenu  :  c'est  la  première 
loi.  Mais  cette  limite  que  l'impôt  ne  doit  franchir  en 
aucun  cas,  il  ne  doit  pas  non  plus  l'atteindre  toujours. 
Dès  que  l'État  a  pourvu  aux  services  utiles  à  la  société, 
il  doit  s'arrêter,  et  ne  pas  s'autoriser  du  superflu  de  ses 
recettes  pour  se  permettre  un  superflu  de  dépenses; 
l'économie  doit  présider  à  tous  les  actes  d'un  gouverne- 
ment en  matière  d'impôt,  parce  qu'il  doit  se  souvenir 
sans  cesse  que  les  particuliers  savent  faire  un  meilleur 
osage  <^ue  lui  de  la  fortune  publique  :  c'est  la  seconde  loi. 

Les  impôts  sont  nombreux  et  divers  (K.  Comnuu- 
TiONs)?  Une  des  formes  de  l'impôt  qui  a  le  plus  préoccupé 
rÉconomie  politique,  est  Vnnpôt  stur  le  revenu  :  il  serait 
l'impôt  par  excellence,  et  même  devrait  être  l'unique  im- 
pôt, s'il  était  praticable;  car  il  atteint  directement  la 
matière  imposable  tout  entière,  le  revenu.  Les  Anglais  le 
pratiquent  en  partie  sous  le  nom  d^mcome-ttMX  ;  les 
Français  l'ont  tenté  plusieurs  fois  sous  le  nom  de  taille 
personnelle,  de  capUation,  de  dixième  et  de  vingtième  ; 
mais  ces  impôts,  établis  sous  l'ancienne  monarchie, 
étaient  entachés  de  l'esprit  de  privilège  du  temps.  L'im- 
pôt sur  le  revenu  ne  peut  pas  être  complètement  et  sin- 
cèrement établi,  parce  que  le  revenu  des  particuliers,  se 
composant  de  mille  éléments  divers,  ne  peut  être  évalué 
que  d'une  manière  très-imparfaite,  cas  où  l'imperfection 
est  une  grosse  iniquité,  et,  d'une  autre  part,  parce  que  le 
contribuable,  qui  seul  connaît  l'étendue  véritable  de  ses 
revenus,  a  intérêt  à  les  dissimuler  :  un  bon  impôt  ne 
doit  porter  que  sur  des  objets  d'une  nature  et  d'une  va^ 
leur  nettement  définies,  et  sur  lesquels  il  n'y  a  pas  de 
contestation  possible. 

Le  chiffre  des  impôts  que  supportent  les  citoyens  n*est 
pas  le  même  dans  tous  les  pays;  il  est  relatif  &  la  fortune 
des  habitants  ,  à  la  nature  du  gouvernement,  et  s'élève 
en  général  avec  la  richesse  des  contribuables  et  l'impor- 
tance des  services  publics. 

La  comparaison  entre  divers  pays  ne  peut  pas  être  très- 
rigoureuse,  parce  que  l'incidence  des  impôts  et  le  mode 
de  perception  modifient  beaucoup  les  charges.  Voici  ce- 
pendant un  tableau  qui  donne,  pour  les  principaux  États 
de  l'Europe,  le  chiffre  des  recettes  et  la  part  de  charge 
qui  incombe  à  chaque  individu  : 


BudgeU  de  4857-4858. 


Angleterre* 

France. 

Pays-Bas. 

Wurtemberg. 

Espagne. 

Belgique. 

États  Sardes. 

Prusse. 

États  Romains. 

Bade. 

Suède. 

flanovre. 

Autriche. 

Danemark. 

Bavière. 

Toscane. 

Russie. 

Saxe. 

Deux-Siciles. 

Portugal* 

Grèce. 

Norvège. 

Suisse. 


2,058,075,000 

1,790,2^25,838 

157,185,000 

80,000,000 

400,410,478 

139,604,990 

135,567,300 

446,090,000 

76,505,700 

32,467,768 

80,838,000 

36,847,000 

710,211,917 

46,180,000 

83,154,000 

31,960,000 

1,101,880,000 

33.541,000 

134,726.000 

89,343,000 

14,712,000 

20,289,000 

16,540,000 


r AE  Tftn. 
fir.    «• 

74  50 
49  84 
45  87 
44  80 
35  13 
30  30 
27  59 
25  91 
24  50 
23  89 
22  21 
20  12 
19  » 
18  65 
18  99 
17  75 
16  90 
16  45 
14  87 
14  45 
14  11 
13  05 
7  91 


F.  le  marquis  de  Mirabeau,  Théorie  de  Vtmpôt,  Paris, 
1760;  Grasiin,  Essai  anaiytiqw  sur  la  richesse  et  sur 
Vfmpdt,  Londres,  1767,  in-8<>  ;  Hume,  Essai  surUsim- 
v6U,tnd.  de  l'anglais,  1706  et  1767,  ln-i2;  Letrosne, 
EssM  analytique  sur  la  richesse  et  sur  l'impôt,  Paris, 


i:07,  in-8'';  Gorani,  Traité  de  r impôt,  1772,  in-8';Duiw 
ban.  Traité  de  l'impôt,  an  vi  (i797j,  in-8«  ;  Guiraudet, 
Doctrine  sur  Vimpôt,  an  vm  (1800),  in-8«;  Broggia, 
Traité  des  impôts,  en  italien.  Milan,  1803;  Bailleol, 
De  la  richesse  et  de  Vimpôt,  Paris,  1816;  Ricardo,  Des 
principes  de  V Économie  politique  et  de  Vimpôt,  trad.  de 
l'anglais,  1818  et  1846,  2  vol.  in-8«;  Ém.  de  Girardln, 
Vimpôt,  1851,  in-8*.  V.  aussi  notre  article  Finances.  L. 
IMPÔT  pROPORTionviBL  et  IMPÔT  paoGABSsiP.  —  L'impôt 
proportionnel  est  celui  qui  est  réparti  entre  les  citoyens 

{iroportionnelleraent  aux  revenus  dont  ils  Jouissent  sous 
a  protection  de  TÉtat,  protection  qui  sert  de  base  à 
l'obligation  de  concourir  aux  charges  publiques.  La  pro- 

fiortionnalité  exacte  entre  la  contribution  individuelle  et 
e  bénéfice  retiré  de  l'ordre  social ,  peut  être  considérée 
comme  représentant,  en  matière  de  taxation,  cette  Jus- 
tice stricte  qui  est  d'abord  impraticable,  et  serait  ensuite 
par  elle-même  si  sourent  voisine  de  la  suprême  injus- 
tice. L'application  de  la  règle  de  proportionnalité  a  pour 
première  conséquence  la  suppression  des  exemptions  de 
personnes  ou  de  biens,  et  la  condamnation  de  faveurs 
accordées  aux  fortunes  élevées  par  rapport  aux  fortunes 
très-inférieures,  telles  que,  par  exemple,  en  Angleterre , 
les  droits  de  succession.  Elle  repousse  tout  système 
d'impôt  progressif,  soit  sur  le  capital,  soit  sur  le  reveno. 
La  théorie  de  nmpôt  progressif  naît  de  l'idée  aue  la 
société  doit,  par  l'impôt,  chercher  à  réaliser  une  égalité 
de  situation  absolue  pour  chaque  citoyen ,  et  non  re- 
lative à  la  masse  des  biens  et  aux  propriétés  acquises. 
Les  besoins  réels  de  chaque  homme  étant  à  peu  près 
identiques,  les  partisans  de  l'impôt  progressif  voudraient 
que  l'Etat  retranch&t  de  tout  ce  qui  excède  la  somme 
nécessaire  pour  la  satisfaction  de  ces  besoins,  en  un 
mot  enloTàt  le  superflu.  Avec  ce  système  de  taxe,  on 
demande  par  exemple,  séro  à  un  revenu  de  500  fr.  ou 
tout  autre  minimum,  un  faible  tantième  à  un  revenu 
de  600  fr.  ;  ce  tantième ,  et  ce  qu'on  appelle  la  rai- 
son en  arithmétique,  à  un  revenu  de  700  fr.  ;  ce  tan- 
tième plus  deux  fois  la  raison,  à  un  revenu  de 800  fr.,  etc. 
L'impôt  progressif  a  un  vice  radical  :  11  sévit  contre  les 
qualités  mêmes  quil  importe  le  plus  de  propager  au 
sein  des  populations,  et,  s'il  lui  était  donné  d'atteindre 
pleinement  son  but,  11  en  résulterait  la  stagnation  de  la 
richesse  et  de  l'industrie.  Cette  taxe,  par  sa  nature,  dé- 
tourne du  travail  ;  se  haussant  à  mesure  que  la  richesse 
s'accumule,  elle  punit  le  succès,  et  semble  une  prime 
offerte  à  la  paresse  et  à  la  dissipation.  La  république  de 
Florence  a  pratiqué  l'impôt  progressif  avec  passion  ;  quel- 
ques Étais  de  l'Allemagne  en  usent  modéiïment  et  rm- 
come-tax  anglais  en  a  été  une  application  restreinte  et 
éphémère.  L'Assemblée  Constituante  de  1789  avait  éta- 
bli, par  la  loi  du  18  Janvier  1791,  l'impôt  personnel  sur 
le  loyer,  d'après  la  théorie  suivante  :  Un  loyer  de  200 
livres  dénotait  l'existence  d'un  revenu  à  peu  près  double, 
et  cette  proportion  s'augmentait  à  mesure  que  le  loyer 
croissait,  de  telle  sorte,  par  exemple,  qu*nn  loyer  de 
12,000  livres  passait  pour  le  signe  d'un  revenu  douze 
fois  plus  fort.  L'application  de  ce  système,  sans  être 
maintenue  d'une  manière  (rànérale,  a  été  longtemps  to- 
lérée indirectement  avant  la  loi  du  21  avril  183$,  par 
l'autorisation  donnée  à  quelques  villes,  Paris  entre  au- 
tres, de  répartir,  suivant  une  échelle  progreralve,  le  con- 
tingent d'impôt  mobilier  dont  une  part  est  supportée  par 
une  addition  à  l'octroi.  V.  J.  Gamler,  Éléments  de 
finances,  Paris,  1859,  in-18;  Dictionnaire  de  l'économie 
politique,  A.  L. 

IMPRÉCATION  (du  latin  imprecoHo).  Ce  mot  ex- 
prime l'idée  d'une  malédiction  prononcée  au  nom  des 
Dieux.  L'Imprécation,  expression  de  la  fureur  et  du  dé- 
sespoir, est  une  figure  de  Rhétorique  ihSquemment  em- 
ployée dans  toutes  les  littératures.  En  ce  qui  concerne  la 
poésie  dramatique,  on  connaît  les  imprécations  d'GEdipe 
contre  les  meurtriers  de  Laïus  dans  VOEdipe  roi  de  So- 


sainte  en  offre  des  exemples  également  célèbres;  telles 
sont  les  Imprécations  de  Balaam  contre  les  Hébreux,  et 
d'Elisée  contre  des  enfants  moqueurs.  On  troure  au 
l*'  chant  de  VIliade  d'Homère  l'imprécation  de  Chryaès 
contre  Agamemnon,  et,  au  4*  chant  de  VÊnéidc  de  "ar- 
gile, les  imprécations  de  Didon  mourante.  —  Les  Anciens 
portaient  des  sentences  ou  décrets  d'imprécation  contre 
ceux  qu'ils  regardaient  comme  impies  ou  sacrilèges  : 
c'est  le  plus  souvent  aux  Furies  et  aux  diyinltés  infer- 
nales qu^on  vouait  le  coupable.  Ainsi  Aldbiade  fut  ma»- 


IMP 


lOCl 


IMP 


dH  publiquement  pour  avoir  profané  les  mystères  de 
Gérés  et  mutilé  les  statues  de  Mercure.  —  Le  respect 
qu'on  avait  pour  les  tombeaux  donnait  lieu  à  des  impré- 
cstioos  d*uD  genre  dlilérent  :  les  tombeaux  étaient  chargés 
de  fonnales  qui  vouaient  le  profanateur  à  la  colère  et  à 
la  vengeance  divines,  et  des  inscriptions  sépulcrales  re- 
cueillies par  les  antiquaires  prouvent  que  cet  usage  se 
perpétua  dies  les  chrétiens  des  premiers  siècles.  Au 
moyen  âge,  les  diartes  relatives  aux  privilèges  du  clergé 
et  aux  donatioDs  qui  lui  sont  faites  se  terminent  par  des 
malédictione  da  même  genre.  G. 

IMPRESARIO,  nom  qu*on  donne  en  Italie  à  tout  di- 
recteur d*une  troupe  de  comédiens  ou  entrepreneur  de 
tbéfttre.  Ce  mot,  qui  est  presque  passé  dans  la  langue 
liaoçaise,  vient  de  Titalien  impresa,  entreprise* 
IMPRESSES  (Espèces).  V.  Espèce. 
IMPIŒSSION,  action  matérielle  des  corps  sur  TorgSr 
oisme,  et  principalement  sur  le  système  nerveux  :  c*est 
DDDhénomënepn^^ique^i  devient  l'antécédent  indispen- 
sable de  la  sensation.  L'impression,  à  ce  titre,  est  triple  : 
VcrffWM  reçoit  le  premier  raction  et  la  communique  aux 
nmfs,  qui  la  transmettent  an  cerveau.  Cette  impression 
arganique,  nerveuse  et  eéréhrtUe  ne  doit  donc  pas  être 
amfondoe  avec  la  sensation,  qui  est  un  fait  purement 
psychologique  résultant  du  premier  :  supprimez  l'im- 
inssion,  ta  sensation  est  impossible.  L'analope  qui 
oiste  entre  l'impression  proprement  dite  et  certains  faits 
psychologiques  a  fsit  donner  son  nom  à  ces  derniers  : 
OD  dit  des  impressicne  morales,  religietues,  etc.  ;  c'est  un 
bogige  que  l'usage  autorise  et  dont  on  ne  peut  guère  se 
ptsser,  mais  il  ne  faut  pss  oublier  qu'il  est  métapho- 
rique, et  qu'il  n'aatorise  pas  à  confondre  le  monde  ma- 
Iviel  avec  le  monde  spirituel.  R. 

mpsBssiON,  action  d'imprimer.  VimpressUm  typogra- 
yUgiM  s^exécute  à  l'aide  d'une  presse  iiue  fait  mouvoir 
la  ouvrier  on  une  machine.  On  applique  la  feuille  de 
pipier  sur  la  forme  encrée  convenablement,  et  on  presse 
de  façon  qae  roail  du  caractère,  entrant  dans  cette 
foiille,  y  dépose  l'encre  dont  il  est  couvert.  Quand  on  se 
sert  d'une  presse  à  bras,  la  feuille  ne  s'imprime  nue  d'un 
cAté,  et  il  faut  recommencer  sur  l'autre,  après  avoir 
changé  la  forme  :  avec  la  presse  mécanique,  les  deux 
cMés  s'impriment  encore  successivement,  mais  dans  une 
même  opération.  On  fait  aussi  des  impressions  avec  des 
pluches  à  Jour,  par  exemple,  les  aflfîcnes  peintes.  L'tm- 
prttsto»  de  la  gravure  sur  bois  s'efTectue  comme  l'im- 
pression typognqihique,  parce  qu'il  s'agit  encore  ici  de 
reproduire  un  type  qui  est  en  relief.  Il  en  est  autrement 
prâr  l'tmprssstcm  de  la  gravure  en  creux  ou  en  taille- 
dmo0  :  là  on  ne  laisse  de  l'encre  oue  dans  les  creux;  on 
fidt  passer  la  feuille  de  papier  sur  la  planche  entre  deux 
rooleaux  reooaTeits  de  langea  qui  font  entrer  le  papier 
dsas  les  creux  de  la  gravure.  Les  creux  et  les  reliefs  ne 
suit  pour  rien  dans  Yimpression  lithographique  :  l'encre 
oe  preaid  que  aor  les  parties  dessinées  sur  la  pierre  avec 
Bo  crayon  gras  ;  une  sorte  de  r&tean  fortement  fixé  sur 
la  presse,  et  sous  lequel  passent  la  pierre  et  le  papier, 
dit  décharger  Tencre  sur  le  papier.  L'imprsMtoa  des  pa- 
piers peints  s'opère  ordinairement  au  moyen  de  planches 
de  bois  gravées  en  rc^ef  :  on  emploie  autant  de  planches 
qu'il  y  a  de  couleurs  dans  le  dessin,  et  on  applique  bien 
exactement  les  repères  les  uns  sur  les  autres. 

nn«Essioii  (  Peinture  d'),  couche  de  couleur  posée,  soit 
ter  one  toile  ou  une  muraille  pour  recevoir  une  pein- 
lore,  soit  sur  un  mur,  une  boiserie,  un  ouvrage  de  ser- 
rurerie, pour  les  préserver  des  eifeta  de  l'humidité.  Ap- 
pliquée sur  des  ouvrages  de  sculpture,  elle  efface  toutes 
les  ftnesses  du  travail. 

IMPRIMERIE,  art  de  reproduire  les  écrits,  au  moyec 
ée  caractérea  en  métal  fondus  et  assemblés.  Cet  art  se 
compose  de  deux  parties,  la  composition  et  le  tiragt 
{V.  ces  mots).  Sur  l'histoire  de  l'imprimerie,  V,  notre 
ÙicHtmnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire. 

IMPRIMÉS  (Taxe  des).  Les  imi^imés  transportés  par 
Is  poste  étalent,  avant  la  réforme  de  1878,  divisés  en 
)  cfarnes  :  la  -f**  comprenait  les  Journaux  et  ouvrages 
pàiodiques  traitant  de  matières  politiques  ou  d'écono- 
Bi«  sociale,  taxés  à  0  fr.  U4  par  chaque  exemplaire  du 
poids  de  40  gr.  et  au-dessous,  et  à  0  fr.  Ui  en  plus  par 
chaqoe  10  gr.  ou  fraction  de  10  gr.  au-dessus;  —  la  2* 
comprenait  les  Journaux,  recueils,  bulletins,  etc.,  consa- 
crés aux  lettres,  aux  sdences,  aux  arts,  à  l'agricultnro  et 
à  llndustrie,  et  dont  le  port  est  de  2  cent,  par  chaque 
Sieriiplairedu  loidsde'iOgr.  etau-desAous,  et  de  1  cent,  en 
^ns  pourcliM|oe  tO  gr.ou  Traction  do  10  gr.en  sus; — la 
r  comprenait  les  avis,  circulaires,  prospectus,  prix  cou- 


rants avec  Qu  sans  échantillons,  livres,  gravures,  litho- 
graphies, .tutographies,  épreuves  d'impression  avec  les 
corrections  et  len  manuscrits  (sous  condition  d'une  auto- 
risation préalable  du  directeur  général  des  postes)  :  le 
port  étaii  de  \  cent,  par  paquet  ou  exemplaire  isolé  du 

goidsde5gr.etau-dessous,etdei  cent,  en  ptusparchaque 
gr.  jusqu'à  50;  de  10  cent,  depuis  50  gr.  jusqu'à  iOO, et 
1  cent,  de  plus  par  chaque  10  gr.  ou  fraction  de  10  gr. 
au-dessus.  Les  imprimés  de  la  3*  classe  pouvaient  être 
expédiés  sous  forme  de  lettres,  pourvu  qu'ils  fussent 
plies  de  manière  que  les  deux  extrémités  restent  ou- 
vertes, ou  sous  enveloppe  non  cachetée  ;  ils  payaient  alors 
10  cent,  chacun,  circulant  de  bureau  à  bureau,  et  5  cent, 
dans  la  circonscription  d'no  même  bureau  (10  et  5  cent, 
en  plus  par  chaque  10  gr.  ou  fraction  de  10  gr.,  s'ils 
pesaient  plus  de  10  gr.).  Toute  insertion  de  lettre,  ou 
môme  de  note  ayant  caractère  de  correspondance,  en- 
traîne, aujourd'hui  encore,  une  pénalité  (V.  Poste).  Les 
imprimés  ne  circulent  aux  prix  précédents  qu'autant  qu'ils 
ont  été  affranchis  au  départ  :  autrement  ils  sont  taxés 
d'après  le  tarif  des  lettres.  S'ils  ont  été  affranchis  en  tim- 
bres-poste et  que  l'affranchissement  soit  insuffisant,  ils 
sont  frappés,  en  sus,  d'une  taxe  égale  au  triple  de  l'insuffi- 
sance, taxe  qui,  en  cas  de  refus  du  destinataire,  est  payée 
par  l'expéditeur.  Les  imprimés  doivent  être  expédiés 
sous  bandes  mobiles,  couvrant  au  plus  le  tien  de  la  sui^ 
face,  ou  sous  une  forme  qui  permette  d'en  vérifier  faci- 
lement le  contenu.  Les  cartes,  plans  et  gravures  peuvent 
être  expédiés  sur  rouleau  ou  entre  cartons  maintenus 
extérieurement  par  des  ficelles  faciles  à  dénouer.  Le 
poids  des  bandes,  enveloppes  et  ficelles  est  compris  dans 
Ut  taxe.  Les  paquets  ne  doivent  pas  dépasser  un  poids 
de  3  kilog.,  ni  avoir  sur  aucune  de  leure  faces  une  dimen- 
sion supérieure  à  0<",45.  V.  le  Supplément. 

IMPRIMEUR.  Des  lettres  patentes,  données  en  mars 
1488  par  Charles  VIII,  accordaient  aux  imprimeurs- 
libraires  les  privilèges  et  prérogatives  de  l'université. 
Ces  privilèges,  confirmés  le  9  avril  1513,  furent  souvent 
renouvelés  depuis,  notamment  le  28  février  1723.  Nul  ne 
pouvait  être  imprimeur  sans  une  autorisation  du  gouver- 
nement. La  profession  devint  libre  à  la  Révolution  ;  mais 
un  décret  du  5  février  1810  replaça  l'imprimerie  sous  la 
surveillance  du  gouvernement.  La  loi  du  21  octobre  1814 
décide  que  nul  ne  peut  être  imprimeur  s'il  n'a  obtenu  un 
brevet  ou  autorisation  du  ministre  de  l'intérieur,  qui 
peut  to^Joun  le  retirer.  L'ordonnance  du  24  octobre  1814 
oblige  les  imprimeun  à  faire,  à  la  direction  de  la  librairie 
pour  Paris,  au  secrétariat  de  la  préfecture  pour  les  dé- 
partements, la  déclaration  des  ouvrages  qu'ils  se  propo- 
sent de  publier,  et  à  en  déposer  deux  exemplaires  :  le 
défaut  de  déclaration  aiiant  le  dépôt,  et  le  défaut  de  di^pôt 
avant  la  publication,  sont  punis  d'une  amende  de  1,000  fr.« 
2,000  pour  la  récidive.  Indépendamment  du  dépôt  légal, 
tous  écrits  traitant  de  matières  politiaues  ou  d'économie 
sociale  et  ayant  moins  de  10  feuilles  dimpression,  autres 
que  les  Journaux  ou  écrits  périodiques,  doivent,  aux 
termes  de  la  loi  du  29  Juillet  18i9,  être  déposés  par 
l'imprimeur  au  parquet  du  procureur  impérial,  soqs 
peine  d'une  amende  de  100  à  500  tr.  Chaque  exemplaire 
d'ouvrage  doit  porter  l'indication  du  nom  et  de  la  de» 
meure  de  l'imprimeur,  à  peine  d'une  amende  de  3,000  fr., 
et  de  6,000  fr.  si  cette  indication  est  fausse,  sans  préju- 
dice de  l'emprisonnement.  Les  imprimeun  sont  tenus 
d'avoir  un  livre  coté  et  parafé  par  le  maire,  et  d'y 
inscrire,  par  ordre  de  dates  et  avec  une  série  de  numéros, 
le  titre  aes  ouvrages  qu'ils  impriment,  le  nombre  des 
feuilles,  des  volumes  et  des  exemplaires,  et  le  format  de 
l'édition.  Un  imprimeur  peut  présenter  son  successeur  à 
l'agrément  du  ministre.  Tout  possesseur  ou  dépositaire 
d'une  imprimerie  clandestine  est  puni  d'une  amende  de 
10,000  fr.,  et  d'un  emprisonnement  de  6  mois.  V.  Pic, 
Code  des  imprimeurs n  libraires,  etc.,  Paris,  1827,  in-8*; 
Grimont ,  Manuel-Annuaire  de  Vimprimerie,  de  la  li* 
brairiê  et  de  la  presse^  Paris,  1855,  ln-12. 

IMPROMPTU  (du  latin  m  promptu,  sur-le-champ). 
Ce  mot  désigne  une  épigramme,  un  madrigal,  ou  une 
autre  petite  pièce  de  poésie,  faite  sur-le-champ,  sans  avoir 
été  préméditée,  préparée.  L'impromptu  demande,  avant 
tout,  de  la  facilité,  de  la  vivacité,  du  piquant  ou  du  gra- 
cieux. En  voici  un  que  fit  M"'  d^Houdetot  sur  M"*  la  du- 
chesse de  La  Vallière,  qui,  à  50  ans,  était  encore  fort 
belle  ; 

La  nature  prudente  et  wege 
Force  le  tempe  à  respecter 
Lea  diarmea  de  ce  beau  vliage 
i^'eUe  n*siinlt  pa  répéter. 


IMP 


1062 


TNÂ 


IMPROVISATION.  En  littérature,  c*est  Pacte  d'expri- 
mer ses  pensées  et  ses  sentimeats  sans  préparation,  sans 
labeur  préliminaire  {ex  improvtso)^  dans  l'ordre  et  sous 
la  forme  que  leur  donnent  ordinairement  la  réflexion  et 
le  travail.  On  appelle  aussi  ImproviscUion  le  produit  de 
cette  composition  immédiate.  Converser  et  causer,  même 
avec  finesse,  avec  esprit,  c'est  sans  doute  composer  en 
parlant,  mais  non  pas  improviser.  L'improvisation  im- 
plique une  forme  littéraire,  une  certaine  élévation,  qui  la 
distinguent  du  discours  usuel  :  elle  ne  peut  être  qu'oro- 
tour$  ou  poéliqtte. 

Pour  un  orateur,  l'improvisation  consiste,  soit  à  parler 
dans  une  circonstance  imprévue,  soit  à  prononcer  un 
discours  dont  il  aura  préparé  le  fond  et  disposé  les  prin- 
cipales pensées.  Dans  le  premier  cas,  il  ne  peut  puiser 
ses  idées  que  dans  une  connaissance  précédemment  ac- 
quise du  suiet,  et  demander  ses  mouvements  qu'à  son 
émotion  subite.  Dans  le  second,  il  a  en  quelque  sorte 
parlé  déjà  en  lui-même  presque  tout  son  discours,  pré- 
paré ses  preuves  et  calculé  ses  effets.  En  tout  état  de 
cause,  l'orateur  qui  improvise  parlera  avec  plus  ou  moins 
d'éloquence,  selon  qu'il  aura  plus  ou  moins  d'habitude 
et  de  facilité  pour  la  parole,  et  qu'il  sera  plus  ou  moins 
fortement  ému,  tout  en  restant  maître  de  son  émotion. 
La  faculté  d'improviser,  disait  Quintilien,  est  le  plus 
beau  fruit  de  l'étude  et  la  plus  ample  récompense  d'un 
long  travail  :  c'est  qu'en  effet,  si  l'on  ne  s'est  familiarisé 
par  l'étude  de  l'art  oratoire  avec  tous  les  éléments  qui 
doivent  entrer  dans  U  composition  d'un  discours,  si  l'on 
n'a  commencé  par  écrire  et  si  l'on  n'a  beaucoup  écrit,  on 
ne  parviendra  Jamais  à  posséder  un  vrai  talent  d'impro- 
visation sur  lequel  on  puisse  compter.  L'éloquence  de  la 
chaire,  ne  s'exerçant  au'à  des  intervalles  assez  longs,  qui 
laissent  toute  liberté  a  la  composition  écrite,  et  traitant 
généralement  des  sujets  qui  nécessitent  des  méditations 
préparatoires,  foiupit  de  rares  occasions  et  peu  d'exem- 
ples d'improvisation.  Cependant  Bossuet  ne  traçait  qu'une 
aorte  de  canevas  de  ses  discours.  Fénelon,  dans  ses  Dia- 
i  lo(fU€S  sur  Véloqumce,  ne  se  montre  pas  favorable  à  la 
préparation  écrite  et  à  la  récitation  des  sermons  :  «  S^  Au- 
gustin dit  que  les  prédicateurs  doivent  parler  d'une  m&- 
niôre  encore  plus  claire  et  plus  sensible  que  les  autres 
orateurs,  parce  que  la  coutume  et  la  bienséance  ne  per- 
mettent pas  de  les  interroger.  Ils  doivent  craindre  de  ne 
pas  se  proportionner  assez  à  leurs  auditeurs.  C'est  pour- 
quoi, dit-il,  ceux  qui  apprennent  leurs  sermons  mot  à 
mot,  et  qui  ne  peuvent  répéter  et  éclaircir  une  vérité 
Jusqu'à  ce  qu'ils  aient  remarqué  qu'on  les  comprenne,  se 

S  rivent  d'un  grand  avantage.  Vous  vovez  bien  par  là  que 
^  Augustin  se  contentait  &  préparer  les  choses  dans  son 
esprit,  sans  mettre  dans  sa  mémoire  toutes  les  paroles 
de  ses  sermons.  Quand  même  les  règles  de  la  vraie  élo- 
ffuence  demanderaient  quelque  chose  de  plus,  celles  du 
ministère  évangélique  ne  permettraient  pas  d'aller  plus 
loin.  Pendant  qu'il  y  a  tant  de  besoins  pressants  dans 
le  christianisme,  pendant  que  le  prêtre,  qui  doit  être 
l'homme  de  Dieu,  préparé  à  toute  bonne  œuvre,  devrait 
■e  hâter  de  déraciner  l'ignorance  et  les  scandales  du 
champ  de  l'Église,  Je  trouve  qu'il  est  fort  indique  de  lui 
qp'il  passe  sa  vie  dans  son  cabinet  à  arrondir  des  pé- 
riodes, à  retoucher  des  portraits  et  à  inventer  des  divi- 
sions. Car,  dès  que  l'on  s'est  mis  sur  le  pied  de  ces  sortes 
de  prédications,  on  n'a  plus  le  temps  de  faire  autre  chose; 
pn  ne  fait  plus  d'autre  étude,  ni  d'autre  travail  ;  encore 
même,  pour  se  soulager,  se  réduit -on  souvent  à  redire 
loï^ours  les  mêmes  sermons.  Quelle  éloquence  que  celle 
d'an  homme  dont  l'auditeur  sait  d'avance  toutes  les 
«xpressions  et  tous  les  disconn!  >  Toi^ours  est-il  que 
l'improvisation  exige  un  labeur  profond  et  étendu;  car, 
mieux  vaut  prononcer  un  discours  suivi  et  sensé,  préparé 
.de  longue  main,  que  de  débiter  des  idées  incohérentes 
.an  un  style  plat,  ou  de  rester  court  de  pensées  et  d'ex- 
pressions. —  L'improvisation  est  bien  autrement  nécM- 
.saire  dans  les  débats  Judiciaires  et  dans  les  discussions 
politiques.  Utile  pour  l'attaque,  indispensable  à  la  dé- 
fense, provoquée  par  la  contradiction,  par  les  objections 
inattenduea,  elle  est  la  pierre  de  touche  du  véritable  ora- 
.teur.  Mais  il  est  Juste  d*observer  qu'au  barreau  et  à  la 
■tribune  l'éloauence  n'est  pas  tout  entière  dans  les  mots, 
dans  les  sailues  de  l'imadnation,  dans  les  grands  mou- 
vements qui  naissent  de  Tà-proposet  de  l'inspiration  du 
moment,  mais  bien  aussi  dans  les  intonations,  dans  le 
geste  et  la  physionomie;  et  c'est  la  parfaite  harmonie 
entre  la  mimique  et  la  parole  qui  double,  dans  l'impro- 
visation, l'effet  produit  par  l'orateur. 
L'improvisation  poétique  remonte  à  nne  haute  anti» 


miité,  et  Ton  peut  même  dire  au'à  l'origine  tonte  poésie 
dut  être  improvisée.  La  simplicité  des  rhythmes  pnmitifi 
laissait  à  l'inspiration  des  poètes  un  libre  cours,  liais 
quand  les  langues  eurent  pris  des  formes  plus  rigoureaies 
et  plus  variées,  la  poésie,  distincte  désormais  du  langage 
vulgaire,  se  soumit  à  des  règles  :  il  fallut  un  travail  par- 
ticulier, une  certaine  science  acquise,  pour  tnulmn; 
l'inspiration  poétique,  et,  dans  ces  con<Ution8,  l'improvi- 
sation devint  une  faculté  exceptionnelle,  partage  de 
quelques  intelligences  privilégiées.  Les  Orientaux  et  les 
peuples  du  midi  de  l'Europe,  les  Italiens  surtout,  ont 
une  grande  facilité  à  improviser  des  vera.  Ce  talent  est 
même  si  commun  en  Italie,  que  les  improvisateurs  s'éta- 
blissent en  plein  air,  et,  prenant  leur  auditoire  dans  la 
rue,  font  de  leur  art  un  véritable  métier.  Serafino  d'Aqoila 
et  Bernardo  Âccolti  dit  l'IThtco  Aretino  au  xv*  siècle,  Ha- 
rone,  Quercio  et  Silvio  Antonlano  au  xvi*,  Perfetti,  Zucoo, 
la  Corilla  et  Métastase  au  xvui*,  Sgrioci,  Cicconi,  Bindocd, 
Sestini,  Gianni  et  Rosa  Taddei  au  xix*,  ont  été  doués,  au 
suprême  degré,  de  ce  talent  d'improvisation  poétique.  En 
France,  l'improvisation  s'est  presque  toii^ours  bornée  à  la 
production  de  quelques  bouts-rimés,  impromptus  et  ma- 
drigaux, où  la  mémoire  est  principalement  en  jeu,  et 
dont  le  mérite  consiste  bien  plus  dans  l'à-propos  que 
dans  la  valeur  intrinsèoue  de  la  poésie.  Encore  la  sou- 
daineté de  ces  compositions,  où  se  distinguèrent  les  Voi- 
ture, les  Boufflers,  les  Neufchàteau,  est-elle  bien  établie? 
De  nos  Joura,  Eugène  de  Pradel  a  Joui  d'une  grande 
réputation  comme  improvisateur  d'ouvrages.  On  dte 
écrément  De  Clercq  en  Hollande,  Wolf  d'AItona  et  Lan* 
genschwarz  en  Allemagne. 

On  doit  encore  ranger  dans  la  catégorie  de  l'improvisap 
tion  poétique  certaines  pièces,  d'une  étendue  médiocre, 
provoquées  à  l'improviste,  composées  en  une  heure  ou 
deux,  et  qui  sont  quelquefois  des  œuvres  que  leur  mérite 
fera  vivre  ;  nous  citerons,  dans  ce  genre,  la  Réponse  à 
NénUsis^  par  M.  de  Lamartine,  qui  l'improvisa  pen- 
dant l'agitation  d'un  scrutin  pour  son  élection  à  la  dé- 
putation ,  en  1831 ,  et  le  Rhin  allemand,  par  Alfred  de 
Musset,  pièce  écrite  en  peu  d'instants,  à  côté  d'un  salon 
où  l'on  venait  de  lire  la  chanson  allemande  de  Becker, 
publiée  en  1840,  sous  ce  même  titre,  que  Musset  lui 
emprunta. 

n  existe  aussi  une  improvisation  musicale,  principale- 
ment sur  l'orgue  et  le  piano  ;  elle  est  beaucoup  plus  ré- 
pandue en  Italie  et  en  France  qu'en  Allemagne.  Pour  y 
réussir,  il  ne  suffit  pas  de  posséder  une  grande  habileté 
d'exécution,  des  réminiscences  plus  ou  moins  abondantes. 
Improviser,  c'est  lire,  en  quelque  sorte,  à  livre  ouvert 
dans  son  imagination  ;  c'est  y  déchiffrer  une  idée  nettOf 
complète,  bien  conformée,  ayant  tous  ses  membres,  avec 
le  mouvement  et  la  vie;  c'est  concevoir  et  produire  in- 
stantanément nne  mélodie  régulière,  soutenue  par  une 
bonne  harmonie,  assujettie  à  la  mesure  et  au  rhythme. 
Improviser,  ce  n'est  pas  exprimer  des  idées  incohéraites 
et  banales,  contrairement  à  toutes  les  réglée  de  l'art  et 
du  goût. 

IMPUTATION,  en  termes  de  Droit,  action  d'attribuer  à 
quelqu'un  une  chose  digne  de  blâme.  L'imputation  pu- 
blique d'un  fait  qui  porte  atteinte  à  l'honneur  ou  à  la 
considération  constitue  une  diffcancUion  (  V.  ce  mot).  ^ 
On  nomme  tmputatton  de  payement  l'indication  que  le 
pavement  fait  par  le  débiteur  s'applique  à  Tune  de  ses 
obligations.  Celui  qui  a  plusieurs  dettes  a  le  droit  de  dé- 
clarer, lorsqu'il  paye,  laquelle  il  entend  acquitter.  Lorsque 
la  dette  porte  intérêt,  le  payement  qui  n'est  pas  intégral 
s'impute  d'abord  sur  les  intérêts,  à  moins  que  le  créan- 
cier ne  consente  à  ce  quUl  en  soit  autrement. 

INALlÉNABIUTË  (au  latin  m  privatif,  et  aiienus,  au- 
trui), état  d'un  bien,  d'un  droit,  d'une  chose  quelconque, 
qui  ne  peut  être  transféré  à  autrui.  Ainsi,  les  biens  des 
mineurs,  des  interdits,  des  femmes  mariées  sous  le  ré- 
gime dotal,  des  communes  et  des  établissements  pubb'cs, 
les  biens  frappés  de  substitutions  on  érigés  en  majorats, 
les  pensions  militaires  et  celles  de  la  L^on  d'honneiff, 
les  domaines  de  l*Êtat,  etc.,  sont  Inaliénables.  Certains 
droits  naturels,  comme  la  liberté,  sont  inaliénable»,  et  le 
Code  Napoléon  (art.  1780)  dit  qu'on  ne  peut  engager  ses 
services  qu'à  temps  ou  pour  une  entreprise  détoiminée. 

INAMOVIBILITÉ  (du  latin  tfi  privatif,  et  amoMPi,  être 
détourné),  caractère  donné  par  la  loi  à  toute  fonction 
publique  dont  le  titulaire  ne  peut  être  dépossédé  sans  son 
consentement,  à  moins  d'excès  d'âge,  de  forfaiture  ou  de 
mort  civile.  Sont  inamovibles,  en  France,  les  Sénateurs,  les 
membres  de  la  Cour  de  cassation,  de  la  Cour  des  comptes, 
des  Cours  impériales  et  des  Tribunaux  de  1**  iBstaneet 


INC 


1063 


INC 


^iBMlé  tes  magistrats  du  ministère  public.  LMnamoribi- 
tttédes  Juges,  coDcôdée  par  un  édit  de  Louis  XI  en  date 
4a  ï\  octobre  1467,  fut  abolie  par  la  Constitution  de 
1791,  rétablie  par  la  Constitution  de  Tan  viu,  détruite  de 
nouTsau  par  un  arrâté  du  gouTernement  provisoire  de 
1848,  mais  consacrée  encore  par  l'Assemblée  consti- 
toute  de  la  même  année. 

INADGURATION,  cérémonie  qui  avait  lieu  chez  les 
SDciens  Romains  quand  un  citoyen  était  appelé  à  faire 
partie  d'un  collège  de  prêtres,  ou  lorsqu'il  s'agissait  de 
choisir  un  emplacement  pour  y  élever  un  temple,  une 
ville,  un  théâtre,  etc.  Le  nom  venait  de  ce  que  Ton  con- 
sultait les  augures  sur  la  bonté  du  choix.  —  Pour  les 
Modernes,  le  mot  Inauguration  ne  s'applique  avec  Jus- 
tesse qu'à  la  cérémonie  qui  consacre  les  monuments 
dvils  (colonnes,  statues,  ooélisques,  fontaines,  etc.),  la 

rmière  fois  qu'ils  sont  livrés  aux  regards  ou  à  l'usage 
public 
INCAPACITÉ,  en  Droit,  défaut  de  qualité  pour  faire 
quelque  acte  civil  ou  autre  prescrit  par  la  loi.  Les  inca- 
pacités dérivent  de  la  nature,  ou  sont  fondées  sur  l'inté- 
rêt général  de  la  société;  dans  tous  les  cas,  la  loi  les 
détermine,  parce  qu'en  principe  toute  personne  est  car- 
pable.  Elles  cessent  avec  les  causes  çui  les  avaient  pro- 
duites. On  distingue  l'incapactté  cwUe  et  rtncapoctt^ 
foliiiquB,  L'ineapadté  civile  peut  résulter  de  la  faiblesse 
de  Vâge^  de  VmterdictUM,  de  la  qualité  de  femme  mariée, 
de  la  mort  civUe  (  K.  ces  mots).  En  matière  de  droits  po- 
litiques, les  femmes,  marié»  ou  non  mariées,  sont  inca- 
pames;  les  causes  d'inci^acité  pour  les  hommes  sont  les 
mômes  ou'en  matière  civile,  et  il  y  en  a,  en  outre,  qui 
sont  spéaales,  telles  que  la  dégradation  civique  etcertaines 
condamnations.  Pour  les  fonctions  publiques,  l'incapacité 
résulte  soit  de  l'absence  des  conditions  requises  pour 
exercer  ces  fonctions,  soit  de  certaines  incompatibilités 
(V.  ce  oioQ. — Les  liens  de  parenté  sont,  en  certains  cas, 
une  cause  d'inciq)acité.  Ainsi,  les  parents  et  alliés,  Jus- 
qu'au degjcé  d'onde  et  neveu  incltûivement,  ne  peuvent 
être  simultanément  membres  d'un  même  tribunal  ou 
d'une  même  Cour,  sans  une  dispense  de  l'Empereur  (Loi 
du  80  avril  1810).  Il  y  a  des  incapacités  du  même  genre 
les  fonctions  de  conseiller  municipal  (Loi  du  5  mai 


INCARNATION.  F.  ce  mot  dans  notre  Z)tcttonnatr0  de 
Biographie  et  (V Histoire. 

INCENDIE.  La  loi  des  Francs  Saliens  condamnait  Tin- 
cendiaiie  d'une  maison  habitée  à  paver  62  sons  et  demi 
au  propriétaire,  100  sous  à  chacun  de  ceux  qui  avaient 
échappé  à  l'incendie,  200  sous  aux  parents  de  chaque 
mort,  et  à  restituer  ce  qui  avait  été  détruit.  D'après  les 
Étabiissements  de  Louis  IX ,  la  peine  était  la  perte  des 
yeux.  Plus  tard,  un  incendiaire  de  noble  origine  était 
décapité,  si  le  dommage  avait  été  considérable,  et,  dans  le 
cas  contraire,  banni  à  perpétuité;  pour  le  roturier,  la 
peine  était  le  feu  ou  le  bannissement,  selon  la  gravité  du 
mal.  — lA  loi  française  actuelle  punit  de  mort  celui  qui  a 
mis  volontairement  le  feu  à  des  lieux  d'habitation,  ou 
dont  le  crime  a  causé  la  mort  d'une  ou  plusieurs  per- 
sonnesft  ^e  édicté  les  travaux  forcés  à  perpétuité,  s'il 
s'agit  de  lieux  non  habités,  de  forêts,  de  bois  taillis,  de 
récoltes  sur  pied,  les  travaux  forcés  à  temps;  pour  les 
bois  et  récoltes  abattus.  Celui  qui  met  le  feu  à  des  bâti- 
ments et  antres  objets  à  lui  appartenant  est  passible  de  la 
réclusion,  et,  s'il  en  résulte  pr^udice  pour  autrui ,  des 
travaux  forcés  à  temps.  La  menace  écrite  d'incendie  en- 
traîne un  emprisonnement  de  2  à  5  ans,  et  une  amende 
de  100  k  600  fir.  Si  elle  est  accompagnée  d'injonction  ou 
condiâon  quelconque,  elle  est  punie  des  travaux  forcés 
à  t^mps.  Si  elle  a  été  simplement  verbale,  avec  ou  sans 
condition,  la  peine  est  un  emprisonnement  de  6  mois  à 
9  ans  et  une  amende  de  25  à  300  fir.  L'incendie  par  im- 
prudence ou  par  négligence  n'est  pas  un  crime,  mais  un 
délit  :  il  entraîne  des  dommages-intérêts,  et  une  amende 
de  50  à  500  f^.  (Code  pénal,  art.  434475).  L'autorité  mu- 
nicipale prend  les  mesures  nécessaires  pour  prévenir  les 
incendies  (Arrêté  du  5  brumaire  an  ix),  et  les  contraven- 
tions à  ses  arrêtés  sont  punies  des  peines  de  simple  police; 
elle  peut  faire  abattre,  pour  circonscrire  un  foyer  d'in- 
cendie, les  édiiices  qui  en  sont  voisins,  sauf  indemnité 
payable  par  la  commune,  ou  par  toutes  autres  personnes 
responsables.  Quiconque  est  requis  de  prêter  secours  en 
cas  d'incendie,  et  s*^  refuse,  est  passible  d'une  amende 
de  6  à  10  fr.  L'autorité  peut  faire  prendre  Peau  des  puits 
et  dtemes,  malgré  les  propriétaires. 

INCERTUM  OPUS.  V.Appabbil. 

DICESSIBLBy  qui  ne  peut  être  cédé  on  tniuporté. 


Sont  incessibles  :  les  choses  déclarées  insaisissables  par 
la  loi  ;  les  droits  exclusivement  attachés  à  une  personne, 
tels  que  les  droits  d'usage  et  d'habitation,  le  droit  de  pré^ 
sentation  pour  un  office,  etc. 

INCESTE  (du  latin  in  né^tif,  et  castus,  chaste),  union 
illicite  des  sexes  entre  ascendants  et  descendants  légi* 
times,  naturels  ou  par  alliance,  parents  au  premier  de- 
gré, et  entre  frères  et  sœurs,  parents  au  second  degré, 
La  morale  inspire  une  vive  répulsion  pour  ces  sortes 
d'unions  :  cependant,  les  mariages  entre  frères  et  sœurs 
se  sont  longtemps  maintenus  chez  les  anciens  Asiatiques. 
Notre  Code  pénal  n'a  pas  compris  l'inceste  parmi  les 
crimes  qualifiés.  V,  Mariage. 

INCHOATIFS  (Verbes),  verbes  latins  qui  marquent 
l'action  dans  son  commencement  {flHnchoare,  commen- 
cer). Ils  sont  ordinairement  terminés  en  sco,  toujours 
neutres,  et  ne  peuvent  prendre  en  aucune  manière  la 
forme  passive.  Ceux  qui  dérivent  de  verbes  se  forment  de 
la  2*  personne  du  primitif  :  u  dormio,  dormir,  dormisco; 
tremo,  is,  tremisco  ;  ardeo,  es,  ardesco;  augeo,  es,  augesco; 
labo,  as,  labasco.  Cependant  coalesco  vient  de  alo,  alir» 
Ceux  qui  dérivent  d'un  nom  ou  d'un  adjectif  intercalent 
entre  le  radical  du  primitif  et  la  terminaison  inchoative 
la  voyelle  aou  e  :  «  puer,  repuerosco;  Juven-û,  Juven- 
esco;  senex,  sen-ù,  ien-esco;  œger,  sgr-t,  cegr-esco,- 
grav-»,  ingrav-esco.  »  Ces  verbes  ne  se  conjuguent  sous 
cette  forme  allongée  qu'aux  temps  qui  marquent  l'action 
non  accomplie  (présent,  imparfait,  futur);  le  parfait  et 
ses  dérivés  sont  terminés  en  ui,  ueram,  uero,  etc.,  comme 
s'ils  Tenaient  de  formes  plus  simples  :  senm,  conoaiui, 
indurui,  etc.  Beaucoup  manquent  de  cette  seconde  série 
de  temps.  —  On  peut  donner  le  nom  é'InchocUifs  k  cet* 
tains  verbes  grecs  en  aoxu,  comme  i^Sdoxu,  juvenesco; 
mpounuD,  senesco;  —  et  aux  verbes  français  en  tr  qui 
expriment  un  commencement  d'action  :  vieillir,  rajeu» 
nir^  s'endormir^  verdir,  jaunir;  mais  c'est  plutôt  par  le 
sens  que  par  la  forme  qu'ils  sont  incnoatifs.  —  Certains 
verbes  latins  en  scOy  comme  disco^  nosco,  etc.,  n'appar* 
tiennent  pas  k  cette  catégorie.  P. 

INCIDENT,  en  Littérature,  événement  fortuit  qui  sur» 
vient  au  milieu  d'une  action.  Boileau  a  dit  avec  raison 
{Art  poét,,  ch.  m)  : 

ITofltos  point  sn  n^et  d'incidents  trop  chargé. 

En  termes  de  Palais,  on  nomme  Inctdent  une  contesta- 
tion accessoire  qui  s'élève  dans  le  cours  d'un  procès.  Les 
demandes  incidentes  se  forment  par  un  simple  acte,  ren- 
fermant les  moyens  et  les  conclusions  ;  elles  sont  Jugées 
immédiatement  et  au  préalable,  ou  bien,  si  le.  fond  est  en 
état  de  recevoir  Jugement,  il  est  statué  sur  le  tout  à  la 
fois  {Code  de  Proced.,  art  337-341). 

INCIDENTE  (Phrase),  proposiuon  subordonnée  en- 
clavée entre  les  termes  de  la  proposition  dont  elle  dé- 
pend. Ex.  :  «  La  terre ,  qui  tout  à  Vkeure  n*était  qu'un 
chaos,  est  un  séjour  délicieux  où  régnent  le  calme  et 
l'harmonie.  »  —  «  Le  ton  de  l'orateur  et  du  poète,  dès  qu$ 
le  sujet  est  grand,  doit  toi^ours  être  sublime.  • 

Geint  quimetun  frein  d  la  fiartwr  des  flots 
BsAt  aunl  des  méchants  arrêter  lea  complota. 

L.  liAcm,  la  Religion,  dl.  !• 

La  phrase  incidente  est  ou  explicative^  comme  dans 
les  deux  premiers  exemples,  ou  détermmativey  comme 
dans  le  second.  Incidente  parait  venir  du  verbe  latin  te* 
cidere,  couper.  V,  Incise.  P. 

INCINÉRATION  (du  latin  tn,  en,  dans,  etctnti,oendre)f 
réduction  en  cendres.  Le  mot  se  dit  spécialement  de  l'acte 
de  brûler  les  corps  humains  après  la  mort;  on  emplie 
aussi  celui  de  cnrauitton.  La  coutume  de  brûler  les  corns, 
au  lieu  de  les  inhumer ,  fut  presque  générale  chez  les 
Grecs  et  les  Romains  (K.  Buoier);  on  croit  qu'elle  cesse 
à  Rome  sous  l'empire  des  Antonins.  César  nous  apprend 

Se  l'incinérstion  était  également  pratiquée  dans  It 
nie.  Il  en  fût  de  même  chez  les  Scythes  et  dans  l'Index 
Chez  les  modernes,  l'inhumation  {v.  ce  mot)  a  prévalu^ 
sauf  pour  des  motifs  particuliers,  tels  que  le  besoin 
d'échapper  à  des  épidémies  que  la  putréfaction  des  ca- 
davres aurait  pu  augmenter,  ou  la  difficulté  de  creuser  lar 
terre  pour  y  déposer  les  corps.  Dans  les  années  1856  ei 
1857,  on  a  proposé  de  revenir  k  l'usage  de  la  destructioa 
des  corps  par  le  feu,  en  faisant  surtout  valoir  l'encom» 
brement  des  cimetières  dans  les  grandes  villes  et  le  daa« 
ger  que  fait  subir  à  la  santé  publique  le  remaniement 
iréquent  d'un  sol  imprégné  de  matières  putrides.  Hais 
l'incinéntion  des  morts  répugne  à  nos  instincts  et  à  noe 


INC 


1064 


INC 


mœurs;  elle  présenterait  d*ailleurB  des  dURcaltés  insur- 
montables. V.  Jamieson,  De  l'origine  de  la  crémation^ 
trad.  de  Tanglais  par  Boulard,  Paris,  182U 

INCISE  (du  latin  tnctnis,  coupé),  petite  phrase  qui 
forme  un  sens  partiel,  et  qui  entre  dans  le  sens  total  de 
la  période  ou  d'un  membrô  de  la  période.  Le  plus  sou- 
Tent,  rincise  n*e8t  pas  indispensable  dans  une  phrase; 
mais  elle  la  rend  plus  pleine,  en  y  introduisant  une  nou- 
velle idée  accessoire.  On  doit  éviter  de  multiplier  les 
incises  :  elles  peuvent  gêner  la  marche  de  la  période  et 
la  rendre  obscure.  11  y  a  deux  incises  dans  les  vers  sui- 
vants de  Racine  {Iphigénie,  iv,  6)  s 

Asaes  d'aatres  viendront,  d  noB  ordres  êoumis. 
Se  couvrir  dea  lanrlers  qui  vous  furent  promit. 
Et,  par  d'heiireux  exploits  forçant  la  destinée. 
Trouveront  d'IHon  la  fatale  journée.  P. 

INCOLAT  (Droit  d*),  nom  donné,  dans  quelaues  États 
modernes,  au  droit  que  le  souverain  accorde  à  certains 
étrangers  de  Jouir  des  mêmes  prérogatives  civiles  et  po- 
litiques que  les  indigènes  {incolœ), 

INCOME-TAX.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  d» 
Biographie  et  d* Histoire. 

mœMPÂTlBIUTÉ,  impossibilité  ou*il  y  a,  suivant  les 
lois,  à  ce  que  certaines  fonctions  puissent  être  exercées 
«n  même  temps  par  un  même  individu.  Par  suite  de  la 
distinction  des  pouvoirs  dans  TÉtat,  il  y  a  incompatibi- 
lité entre  les  fonctions  militaires  et  les  fonctions  admi- 
nistratives, entre  celles-ci  et  les  fonctions  Judiciaires  ; 
entre  le  service  de  la  garde  nationale  et  les  fonctions  des 
magistrats  qui  ont  le  droit  de  requérir  la  force  publique  ; 
antre  les  fonctions  Judiciaires  entre  elles,  et  entre  les 
fonctions  administratives  entre  elles  (loi  du  24  vendé- 
miaire an  ui).  D'autres  incompatibilités  sont  fondées  sur 
la  hiérarchie  des  fonctions,  sur  l'impossibilité  de  suffire 
à  deux  emplois,  et  sur  des  raisons  de  convenance  :  ainsi, 
des  fonctions  de  Jure  sont  incompatibles  avec  celles  de 
•ministre,  de  sénateur,  de  conseiller  d'État,  de  préfet,  de 

gius-préfet,  de  juge,  de  procureur  général,  de  procureur 
npérial,  de  substitut,  de  ministre  d'un  culte  {Code 
instruction  crim,,  art.  383  ;  loi  du  4Juin  1853)  ;  la  pro- 
fession d'avocat  est  incompatible  avec  les  fonctions  de 
Tordre  Judiciaire,  avec  celles  de  préfet,  de  sous-pré- 
fet, etc.,  avec  toute  espèce  de  négoce;  les  fonctions  de 
1u^  sont  incompatibles  avec  les  professions  d'avoué  et 
d*huissier,  et  avec  le  commerce  ;  un  avoué  ne  peut  être 
conseiller  de  préfecture  (avis  du  Conseil,  5  août  1800); 
les  fonctions  de  notaire  sont  incompatibles  avec  celles  de 
Juges,  de  procureurs,  de  substituts,  de  greffiers,  d'avoués, 
d*hui8siers,  de  commissaires  de  police  (loi  du  25  ventôse 
an  xi).  Les  comptables  de  deniers  communaux,  les  agents 
salariés  des  communes,  les  entrepreneurs  de  services 
communaux,  les  domestiques  attachés  à  la  personne,  les 
individus  dispensa  de  concourir  aux  charges  commu- 
nales, ceux  qui  sont  secourus  par  les  bureaux  de  bien- 
fidsance,  ne  peuvent  être  conseillers  municipaux  (loi  du 
5  mai  1855);  les  agents  salariés  du  maire  ne  peuvent 
être  ses  adjoints.  Les  conseillers  d'État  en  service  ordi- 
naire et  les  maîtres  des  requêtes  ne  peuvent  être  séna^ 
tenrs,  ni  députés  au  Corps  législatif,  et  leurs  fonctions 
sont  également  incompatibles  avec  toutes  autres  fonctions 
publiques  salariées  (décret  du  25  Janvier  1852).  Les  mi- 
nistres et  tous  autres  fonctionnaires  publics  rétribués  ne 
peuvent  être  membres  du  Corps  législatif.  La  loi  du  22  Juin 
1833  désigne  un  certain  nombre  de  fonctionnaires  qui  ne 

Seuvent  faire  partie  d'un  Conseil  ^néral  ou  d'un  Conseil 
'arrondissement.  Le  caractère  spirituel  du  ministère 
•oclésiastique  le  rend  incompatible  avec  les  fonctions 
administratives  ou  Judiciaires. 

INCOMPÉTENCE,  état  du  Juge  qui  n'a  pas  pouvoir  de 
•onnaltre  d'une  contestation.  L'incompétence  est  maté' 
rielle,  si  le  Juge  connaît  d'une  matière  attribuée  à  un 
antre  Juge  ;  personnelle,  s'il  prononce  entre  des  personnes 

Sd  ne  sont  pas  ses  Justiciables.  —  Relativement  à  un 
nctionnaire  de  Tordre  administratif,  l'incompétence  est 
la  négation  du  pouvoir  de  faire  tel  ou  tel  acte  qui  n'est 
pts  de  son  ressort.  V.  CoMPéreMCE,  Conput. 

INCOMPLEXE,  c-à-d.  qui  n*a  pas  de  complément, 
s^oppose  à  complexe.  Le  sujet  et  l'attribut  sont  incom- 
plexes dans  cette  proposition  :  «  La  rose  est  odorante;  • 
an  lieu  que  le  sii^et  est  complexe  dans  celle-ci  :  «  Le 
parfum  des  roses  est  doux.  >  L'attribut  le  deviendrait, 
•*il  y  avait  :  «  Il  m'est  doux,  le  parfum  des  roses,  »  ou  : 
«  Qu'il  est  doux !  »  P. 

Inconnu  (Le  Bel),  roman  de  la  Table  ronde.  Le  si]^et 
4e  la  délivrance  de  la  tille  du  roi  Gringars,  la  blonde 


Esmerée,  qu'un  enchanteur  a  changée  en  une  golvie 
(couleuvre^  monstrueuse,  et  fait  garder  par  deux  cheva- 
liers et  mille  Jongleurs  dans  un  immense  chAteau  en- 
chanté, au  milieu  de  la  Cité  Gastée  (ruinée).  Cette  déli- 
vrance ne  peut  être  accomplie  que  par  un  seul  chevalier. 
Le  Bel  Inconnu,  ainsi  nomme  de  ce  qu'il  ignorait  son 
propre  nom,  obtient  du  roi  Arthur  la  permission  de 
tenter  l'entreprise,  se  rend  au  ch&teau,  brave  tous  les 
enchantements,  combat  tour  à  tour  les  deux  chevaliers, 
met  l'un  en  fuite  et  tue  l'autre.  La  guivre  se  montre 
alors,  s'approche,  le  fascine  de  son  brillant  regard, 
s'élance  sur  lui,  le  baise  à  la  bouche,  et  ce  baiser  détruit 
le  charme.  Elle  redevient  une  belle  Jeune  fille,  se  fait 
connaître  à  son  libérateur  comme  reine  du  pays  de  Galles, 
et  lui  oflï'e  son  royaume  et  sa  main.  Le  Bel  Inconnu  ao 
cepte,  après  qu'une  voix  mystérieuse  lui  a  révélé  qu'il  se 
nomme  Giglain,  fils  du  chevalier  Gauvain  et  de  la  fée  aux 
Blanches  Mains.  —  Ce  roman  forme  plus  de  6,0U0  vers 
de  8  syllabes,  dont  2,000  environ  racontent  l'aventure 
principale  :  le  reste  se  compose  de  récits  épisodiques  de 
combats  contre  des  chevaliers  ou  des  géants,  que  le  Bel 
Inconnu  rencontre,  et  qu'il  tue  ou  soumet,  pendant  son 
voyage  pour  se  rendre  à  la  Cité  Gastée.  Parmi  ces  épisodes, 
remarquables  par  une  imagination  heureuse,  et  souvent 
l'art  et  la  vivacité  de  la  narration,  il  y  en  a  un,  la  Fée  de 
Vtle  d^or,  pour  laquelle  le  Bel  Inconnu  se  prend  d*une 
vive  passion,  qui  parait  évidemment  le  tjrpe  de  celui 
d^Armide  et  Benaua^  de  la  Jérusalem  délivrée  :  le  nœud, 
les  détails,  et  Jusqu'au  dénoûment,  sont  les  mêmes,  car 
le  Bel  Inconnu  n'est  arraché  à  son  enivrement  que  par 
l'annonce  d'un  tournoi  où  le  ni  Arthur  convoque  tous 
les  chevaliers. 

Le  roman  du  Bel  Inconnu  (ou  It  Biaus  Desconnus)  est 
de  Renauld  de  Beaujeu,  poète  du  xiu*  siècle;  il  Jouissait 
d'une  grande  vogue  au  moyen  âge,  et  fut  traduit  en  plu- 
sieurs langues,  notamment  en  anglais;  mais  l'original 
était  perdu  depuis  des  siècles,  lorsque  le  hasard  l'a  fait 
retrouver  en  1855,  dans  un  vieux  manuscrit  de  la  bi- 
bliothèque du  duc  d'Aumale,  àTwickentaam.  M.  Hippeau, 
qui  fit  cette  intéressante  découverte,  obtint  du  prince  la 
permission  de  publier  ce  roman,  dont  i!  donna  l'édition 
princeps^  suivie  de  la  traduction  anglaise  et  d'un  glos- 
saire, Paris,  1800 ,  petit  in-8*',  dans  une  collection  de 
portes  finançais  du  moyen  âge.  C.  D— t. 

incorporation,  en  termes  de  Droit,  mode  d'acquérir 
la  propriété  par  accession  {V,  ce  mot).  Tout  ce  qui  s'unit 
et  s'incorpore  à  la  chose  principale  appartient  au  proprié- 
taire. 

INCROYABLES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d*  Histoire. 

INCRUSTATION,  ouvrage  d'architecture,  de  sculpture 
ou  d'ornementation,  composé  de  plusieurs  matières  dont 
les  unes  forment  des  dessins  dans  les  autres.  Dès  les 
temps  les  plus  reculés,  les  incrustations  ont  été  en  usage: 
ainsi ,  on  appliquait  des  yeux  de  verre  et  des  vêtements 
ou  ornements  de  couleur  à  quelques  statues.  Les  émaux 
incrustés  sont  regardés  comme  les  plus  anciens.  Le  moyen 
ftge  nous  a  laissé  des  pierres  tombales  dont  les  incrusta- 
tions en  métal  pour  les  vêtements  offrent  une  grande 
finesse  de  détails.  V,  MAHQOBTaaiB,  Damasquinorb,  Niellk, 
Émail,  MosaIqdb. 

INCULPATION.  V.  Accusation. 

INCUNABLES,  nom  que  l'on  donne  aux  livres  qui 
sont  regardés  comme  sortis  du  berceau  (incunabula)  de 
l'imprimerie,  c-à-d.  ceux  qui  ont  été  imprimés  dans  les 
premières  années  de  l'introduction  de  cet  art  dans  chaque 
ville.  Jusqu'à  l'année  1500,  et  même  1520  pour  quelques 
ouvrages.  Pour  les  incunables  xylographiques  ou  tabel' 
laires,  c-à-d.  obtenus  au  moyen  de  planches  de  bois  so- 
lides et  d'une  seule  pièce,  on  ne  saurait  assigner  aucune 
date  certaine;  mais  la  Bible  des  pauvres  et  le  Donat 
{V.  ces  mots)  passent  pour  antérieurs  à  1440.  Parmi  les 
incunables  typographiques  ou  composés  en  caractères 
mobiles,  les  plus  anciens  sont  >  la  Bible  Mazarine,  qui 
est  de  1450  à  1455;  la  Bible  de  Sch^horn,  de  1461  au 

{dus  tard,  et  que  plusieurs  bibliographes  regardent  comme 
'œuvre  de  Gutenberg  lui-même;  la  Bulle  d'indulgences 
de  Nicolas  V,  1454;  le  Psaulief  de  1457;  le  Bationale 
dvoinorum  offieiorum  de  Durand,  1459,  V.  Haittaire,  An- 
nales typographici,  La  Hâve,  1719;  Meermann,  Origines 
typographicœ,  La  Haye,  1765,  2  vol.  in-4«;  Panser,  An- 
nales typographici,  Nuremberg,  1793^830, 11  vol.  in-4"; 
Audiffredi,  Catalogus  editûmum  seculi  XV,  Rome,  1783, 
in-4**;  Uain,  Bepertorium  bibliographicum,  Stuttgard^ 
1826-38, 2  vol.  in-4«. 
INCUSKS  (du  latin  m,  dans«  et  euder^,  frapper),  c- 


IND 


1065 


IND 


fn^tpées  m  creux;  nom  donn^à  des  médailles  dont  le 

^jrpe  est  en  creux  d^un  c6té  et  en  relief  de  Tantre,  le  plus 

soarent  par  IMnadrertance  du  monnayeur  pour  les  mé* 

ëailles  romaines,  et  caiact&re  de  haute  andcpiité  pour  les 

médailles  grecques. 
INDÉCLINABLE,  en  termes  de  Grammaire,  se  dit  des 

■KMs  qui  Esrdent  une  forme  immuable  parce  que  l'idée 
qails  expriment  conserve  toujours  et  partout  le  même 
aspect  Ce  sont  les  prépositions,  les  adverbes,  les  conjonc- 
tions et  les  interjections. 

DfDÊFECnBILlTÉ,  caractère  que  possède  rÊglise  ca- 
tholique de  ne  pouToir  périr  ou  tomoer  en  ruine.  L*in- 
dtfectibilité  repose  sur  ces  paroles  de  J.-G.  à  ses  apôtres  : 
•Je  serai  avec  vous  Jusqu*à  la  consommation  des  siècles.» 
(S*  Matthieu,  xxviii.) 

INDÉFINI,  se  dît  des  mots  qui  expriment  une  idée 
lague  ou  générale,  qu*on  n'applique  point  à  un  objet  par- 
ticulier et  défini.  (M,  rien,  personne ^  autrui,  qui,  que, 
qm  interrogatifs,  sont  des  noms  indéfinis;  chacun, 
^qu'un,  run.  Vautre,  quiconque,  sont  des  pronoms 
faidéfinis  ;  chaque,  quelque,  aucun,  nul ,  tout,  quel ,  quel- 
conque, sont  des  adjectifs  indéfinis.  Celui  et  tel ,  suivis 
(Tan  relatif,  sont  très-souvent  employés  dans  un  sens 
ragae  ;  ils  doirent  être  classés  alors  parmi  les  pronoms 
indéfinis.  Les  locutions  quoi  que,  qu%  que  ce  soit,  quoi 
que  ce  soit ,  peuvent  être  rangées  au  nombre  des  noms 
indéfinis.  Dains  la  conjtigaison  française ,  le  mot  indéfini 
Implique  au  iKusé  ou  prétérit  formé  à  Taide  du  préMnt 
de  Tauxiliaire  é^re  ou  avoir  (fai  aimé,  U  est  tombé), 
parce  que  cette  forme  verbale  marque  une  action  faite  à 
one  époque  entièrement  pauée,  qui  très-souvent  n*est 
PM  déterminée,  ou  dans  une  période  de  temps  qui  n'est 
pas  entièrement  écoulée  et  que  Ton  considère  comme 
plus  ou  moins  ysigue  ;  ainsi  :  «  Les  fraits  de  la  terre  ont 
été  la  première  nourriture  des  bommes.  —  J'ai  eu  la 
fièvre  cette  année,  ce  printemps,  ai:^ottrd'hui ,  etc.  »  Dans 
eme  aoceptioD,  le  passé  indéfini  correspond  tout  à  fait  à 
IWiste  des  Grecs.  Mais  souvent  notre  prétérit  indéfini 
indique  une  action  récemment  terminée,  ou  du  moins 
dont  les  résultats,  qi^elque  éloignée  que  soit  cette  action, 
nbsistent  encore  au  moment  où  l'on  parle  :  «  J'ai  fini  ma 
lettre,  ma  tftdie  ;  —  J'ai  envoyé  tout  ce  que  tous  m'avez 
(fit;  —  je  me  suis  mis  dans  une  bien  fâcheuse  position  ; 
—  la  longueur  de  cette  guerre  nous  a  réduits  a  de  tels 
malheurs.  »  Alors  il  correspond  au  parfait  des  Grecs. 
Dans  la  vivacité  de  Texpression,  le  prétérit  indéfini  rem- 
place quelquefois  le  futur  antérieur,  de  même  que  le 
présent  remplace  le  futur;  ainsi,  de  même  qu'on  dit  : 
àtteadez,je  viens,  poarje  mendrai  daeis  un  instant,  de 
Bâne  on  dit  :  Attendez,  j'ai  fni  daeis  un  moment,  pour 
i'oMraî  fini ,  je  vais  avoir  fini.  Avex-vous  bientôt  fait,  dit 
avec  vivacité  ce  oui  s'exprime  d'ordinaire  ainsi  :  Aurex' 
vous  bientôt  fait  r  —  Enfin  le  mot  indéfini  s'applique  à 
des  phrases  entières  lorsqu'elles  ont  quelque  chose  de 
vague,  qu'elles  ne  présentent  rien  de  fixe  à  l'esprit, 
(pi'eUes  n'expriment  qu'une  pensée  générale,  une  pensée 
^  ne  tombe  sur  aucun  objet  particulier,  déterminé.  On 
(fit  alors  que  la  phrase  a  un  sens  indéfini.  Ex.  :  ■  Croitpon 
avoir  satisfait  à  tous  les  devoirs  du  chrétien,  quand  on 
l'a  rendu  senrice  à  personne?  >  P. 

INDEMNITÉ  «  ce  oui  est  accordé  à  titre  de  réparation 
dHm  dommage  (en  latin  damnum)  causé  par  une  per- 
sonne à  une  autre  (K.  DoMiiAGES-iiimftTs).  bans  certîdns 
cas,  l'État  ou  les  communes  doivent  des  indemnités,  par 
exemple,  au  propriétaire  exproprié  pour  cause  d'utilité 
publique  (K.  Expropriation),  à  celui  qui  a  été  pillé  dans 
«ne  émeute,  etc.  En  1840,  on  a  indemnisé  les  proprié- 
t^res  des  colonies  françaises  dont  les  esclaves  venaient 
(Têtre  affranchis.  On  nomme  encore  indemnité  le  recours 
accordé  à  la  femme  sur  les  biens  du  mari,  pour  les  obli- 
gations auxquelles  elle  s'est  engagée  avec  lui  ;  elle  doit 
être  indemnisée  entièrement  par  les  héritiers  du  mari 
^and  elle  renonce  à  la  communauté  ;  mais  quand  die 
Taccepte,  elle  n'a  son  recours  que  pour  la  moitié. 

nDsmvnrA  oe  boute»  F«  notre  Dictionnaire  de  Biogra^ 
Vhie  et  d^Histoire, 

INDÉPENDANCE.  LMndépendaoce  réelle  n'appartient 
qu'à  Têtre  absolu,  à  Dieu,  car  Dieu  seul  ne  dépend  d'au- 
ean  autre  être.  Pour  l'homme  il  ne  peut  y  avoir  d'indé- 
pendance absolue;  il  dépend  non-seulement  des  lois 
onrales  quo  Dieu  lui  a  imposées,  mais  aussi  des  faite 
résultant  de  sa  nature  spirituelle  et  matérielle,  et  des 
oonditions  métaphysiques  et  physiques  du  monde  où  il 
est  placé.  L'indépendance  à  laouelle  peuvent  aspirer  les 
booimes  n'est  que  relative  au  Droit  des  gens,  aux  rela- 
tions internationales.  L'un  des  premiers  droits  qui,  pour 


un  État,  découlent  de  la  souveraineté,  c'est  l'indépen- 
dance k  l'égard  des  autres  États,  et,  pour  les  nanona 
asservies  par  un  conquérant,  le  premier  nut  est  de  recou- 
vrer leur  indépendance.  Mais  si  les  sociétés  politiques 
sont  de  droit  indépendantes  entre  elles,  les  inmvidtts  an 
sein  de  chaque  société  sont  nécessairement  dépendants; 
ils  dépendent  des  lois  et  de  l'autorité  publique.  L'état 
social  lui-même  suppose  le  sacrifice  de  l'indépendance 
individuelle  aux  nécessités  de  l'ordre.  Dans  la  sxJété* 
donc  l'individu  a  droit  à  la  liberté,  non  à  Vindépendance, 

INDÉTERMINÉ ,  terme  de  Grammaire.  V,  InnénNi. 

INDEX ,  nom  donné,  en  Bibliographie,  à  la  tiible  alpha- 
bétique des  matières  des  livres  grecs  et  latins.  Souvent 
dans  cette  table  se  trouvent  indiqués  tous  les  passages  où 
un  même  mot  est  emplové.  Quand  les  travaux  de  ce  genre 
sont  publiés  à  part  ae  rouvrage  auquel  ils  se  rapportent, 
ils  forment  des  lexiques  spéciaux.  V.  Lbxiqub. 

nuDfix  (Gongr^tion  de  1').  F.  notre  Dictionnaire  de- 
Biographie  et  (JP Histoire, 

INDICATIF,  mode  des  verbes  qui  exprime  l'état  ou  l'aiv- 
tion  d'une  manière  positive,  certaine  et  absolue.  U  reçoit, 
en  ihmçaisj  8  modifications  :  le  présent  faime,  l'impar- 
fait j'aimats,  le  passé  défini  j'aimai,  le  passé  indéfini- 
j'ai  aimé,  le  passé  antérieur  i'et»  aimé,  le  plus-que-par- 
fait j'avais  aimé,  le  futur  j'aimerai ,  le  futur  antérieur 
i'otfnit  aimé.  —  En  latin,  ces  modifications  se  réduisent 
à  6  ;  amo,  amabam ,  amavi,  amaveram ,  amabo,  ama- 
vero.  Elles  sont  en  prec  au  nombre  de  7 :  91X&,  l^>ouv, 
91X^9»,  ifOa^ti^  ica^CXirpia,  èice^tX'^cv,  nsoiXvxwc  io^»- 
ftat.  Mais  elles  peuvent  s'élever  jusqu'à  10,  à  l'actif: 
ainsi  le  verbe  tuicrso,  outre  l'aoriste  itv4«»  a  un  second 
aoriste  irvicov,  et,  outre  le  parfait  et  le  plua-que-pufait 
técv^o,  irsTOfecv,  un  secona  parfait  et  plus-que-parfait 
tétuno,  èmOicaiv.  —  Dans  beaucoup  de  cas,  l'emploi  syn- 
taxique de  l'indicatif  n'est  pas  le  même  en  ftançais,  en 
latin,  en  grec  ;  ainsi ,  en  innçais  et  en  grec,  on  dit  avec 
l'indicatif:  ■  Dites-moi  ^t  vous  êtes,  ok  vous  allez,  st 
vous  viendrez,  etc.  >  Il  faut,  dans  ce  cas,  le  subjonctif  en 
latin.  Les  Grecs  disent  :  «  Envoyea-moi  quelqu'un  qui- 
est  capable  de  me  rendre  ce  service;  >  dans  ce  cas,  le 
latin  et  le  français  emploient  le  suljonctif.  Les  Grecs- 
disent  :  «  Faites  en  sorte  que  vous  serez  digne  de  l'estime 
publique  ;  >  les  Français  et  les  lAtins  disent  «  que  vous 
soyez,  »  L'indicatif  accompagne  souvent  les  conjonctions 
grecques  et  latines  signifiant  avant  que;  cela  est  tout  à 
fait  contraire  k  l'usage  de  notre  langue.  Mais  un  fait  re- 
marouable  commun  aux  trois  langues,  c'est  l'emploi  de 
l'indicatif  à  la  place  du  conditionnel.  Ainsi,  Voltaire  dit: 
■  Stanislas  étant  pordn,  s'il  restait ,  »  pour  dire  «  eût  été- 
perdu,  s'il  fidt...  >  On  dit  dans  les  trois  langues  «  U  faU 
lait,  oportébai  ou  oportuit,  C&i,  Ixpnv  >  dans  le  sens 
conditionnel  ;  et  l'on  dit  indistinctement  «  je  yuis  citer 
on  Je  powrrais  dter.  Je  potimitf  ou  J'ottroM  pu  d* 
ter  etc.  v  P 

INDICnON.  F.  ce  mot  dans  notre  DictUmnaère  dm 
Biographie  et  df  Histoire, 

INDIEN  (Art).  I.  Architecture.  —  Les  monuments  re- 
ligieux de  l'Inde  se  divisent  en  trois  classes,  les  templer 
souterrains,  les  rochers  taillés  et  sculptés,  et  les  pagodes 
en  matériaux  raopor^.  Ce  sont  trois  périodes  distinctes 
et  successives  de  l'art;  mais  aucune  construction  ao* 
tuelle  ne  parait  remonter  plus  haut  que  le  vni*  siècle  de- 
notre  ère.  Les  temples  souterrains  se  développent  sous  des»^ 
montagnes  de  porphyre  dans  une  étendue  de  plusieurs 
lieues;  les  plus  célèmes  sont  aux  environs  de  Bombay  et 
dans  nie  de  Geyian.  Ceux  d'Ellora  (F.  ce  mot)  passent 
pour  les  plus  curieux.  On  volt  encore  de  nomnreuses* 
grottes  sacrées  sur  la  cùte  de  Goromandel ,  non  loin  de- 
Madras,  dans  l'antigue  ville  de  Mahabalipour,  dans  l'ile- 
de  Salsette,  à  Karii  (entre  Bombay  et  Ponnah),  dans* 
l'Île  Éléphanta  (K.  ce  mot),  etc.  Le  plus  ordinairement 
ces  grottes  sont  carrées,  reposent  sur  de  nombreux  piliers, 
et  s'ouvrent  sur  un  péristyle  k  colonnades.  Au  fond ,  et* 
entouré  d'un  espace  libre,  se  trouve  le  sanctuaire,  mé» 
nagé  dans  une  espèce  de  niche.  Les  piliers  sont  pour  la 
plupart  quadrangulaires  jusqu'à  une  grande  hauteur,  et- 
se  terminent  en  forme  de  colonnes  cannelées,  supportant 
comme  chapitean  une  espèce  de  coussin  déprimé  qne^ 
surmonte  un  abaque  cubique  avec  des  consoles.  Les 
temples  taillés  à  ciel  ouvert  dans  les  rochers  n'offrent  pas 
un  travail  moins  étonnant.  On  en  a  également  élevé- 
dans  les  villes  et  dans  les  résidences  des  souverains.  Les^ 
forteresses,  comme  dans  les  antres  contrées  de  l'Asie, 
renfermaient  le  palais  des  rois  et  le  temple  des  dieux,  et 
elles  occupaient  un  espace  considérable.  Le  palais  de* 
Madourèh  n'a  pas  moins  d'un  mille  de  drcult ,  et  il  eo»- 


IND 


1066 


IND 


tient  dans  sdn  enceinte  des  bois,  des  étangs,  des  Jardins, 
des  galeries,  des  maisons,  et  une  magnifique  pagode, 
dont  ie  soubieissement  est  en  pierres  de  taille  et  la  partie 
•apérieure  en  briques  vernissées;  cette  pagode  a  37  met. 
de  largeur  à  sa  base  et  50  met.  de  hauteur.  La  pagode  de 
Tbqjaour  a  70  met.  de  hauteur,  et  12  étages;  celles  de 
Ben^Bilore,  de  Tritchinapaly,  de  Burramahl  et  de  Bfalssour 
se  sont  pas  moins  importantes.  Biais  une  des  plos  com- 
plet» est  celle  de  Chalembroum,  sur  la  côte  de  Goroman- 
del.  Les  pagodes  ou  temples  en  plein  air  se  terminent  par 
one  coupole  renflée  sur  les  eûtes,  ou  par  un  dôme  écrasé; 
elles  ont  des  plafonds  yoûtés  et  des  façades  fermées  ;  le  ca- 
price a  présidé  à  leur  construction  :  on  en  voit  qui  repo- 
sent sur  le  dos  de  gigantesques  éléphants.  —  Les  palais 
se  composent  ordinairement  de  petites  cours  entourées 
de  b&timents,  quelquefois  découvertes,  mais  le  plus  sou- 
vent  plantées  d*arores  :  une  colonnade  en  forme  de 
eloltre  rè^ne  autour  de  chaque  cour.  Les  b&dments,  de 
construction  solide,  ont  des  toits  plats  en  terrasse,  et  Ton 
peut  toi^oors  superposer  des  étages  avec  régularité.  Les 
escaliers,  étroits  et  roides,  sont  pris  dans  Tépaissenr  des 
murs.  Les  maisons  particulières  sont  construites  d'après 
les  mêmes  principes.  Quelques-unes  ont  des  murs  en 
«tue  blanc,  d*autres  sont  peintes  en  rouge  foncé;  à  Tinté- 
rieur,  elles  sont  couvertes  de  peintures  représentant  des 
ari>res  ou  des  sujets  mythologiques.  La  coutume  de  bâtir 
des  tours  aux  portes  des  villes  ou  des  grands  monuments 
existe  dans  l'Inde  comme  dans  Tancienne  Égvpte  t  mais 
les  Hindous  n'en  élèvent  qu'une,  au-dessus  de  la  porte, 
tandis  que  les  Égyptiens  en  plaçaient  deux,  une  de  chaque 
eôté.  Les  plus  grands  de  tous  les  travaux  des  Hindous,  ce 
■ont  peut-être  leurs  réservoirs  :  les  uns,  creusés  dans  le 
sol  et  près  des  villes,  servent  aux  bains  et  à  Tirrigation; 
les  autres  sont  formés  par  des  vallées  dont  on  a  comblé 
les  issues  par  des  digues  immenses.  Il  y  a  encore  dans 
l'Inde  une  espèce  de  puits  d'une  profondeur  considérable 
et  d'une  grande  largeur,  ronds  ou  carrés,  entourés  de  ga- 
leries Jusqu'au  niveau  de  l'eau,  et  où  Ton  descend  par 
de  larges  aegrés.  Il  faut  enfin  compter,  parmi  les  monu- 
ments de  l'architecture  indienne,  des  colonnes  et  des  arcs 
de  triomphe  carrés,  élevés  en  l'honneur  des  héros  victo- 
rieux, et  des  ponts  dont  les  piles,  formées  d'énormes 
blocs,  sont  Jointes  les  unes  aux  autres  par  des  pierres  de 
taille  d'un  seul  morceau.  —  Dans  l'Afghanistan  se  rencon- 
trent des  monuments  funéraires  d'une  construction  parti- 
culière, et  que  l'on  nomme  topês  ou  stupas.  On  en  a  fouillé 
quelques-uns,  et  on  ne  peut  douter  que  les  salles  qui  s'y 
trouvent  n'aient  renfermé  des  restes  humains.  Le»  Dago- 
^hoi,  monuments  funéraires  de  l'Ile  de  Geylan,  affectent 
iine  forme  et  une  construction  un  peu  différentes  :  ce  sont 
des  espèces  de  tumulus  recouverts  d'une  pyramide.  —  Il 
«erait  difBdle  de  déterminer  les  bases  de  l'architecture 
Indienne  :  les  rèales  imposées  par  les  lois  religieuses  aux 
architectes  leur  Indiquaient  plutôt  la  disposition  et  l'im- 
portance des  édifices  que  leur  forme.  On  les  trouve  dans 
les  chap.  xxvi  et  xxvn  du  McUsya,  le  plus  important  des 
Paurancu.  Quant  à  l'ornementation,  elle  devait  être  exclu- 
sivement hiératique,  et  frapper  sans  cesse  Hmafrination 
•ardente  et  désordonnée  de  peuples  restés  statiennaires 
dans  leur  civilisation.  Les  musulmans  vinrent  au  moyen 
•âge  imposer  à  ces  nations  leur  religion,  leurs  usages  et  leur 
goût  dans  les  arts.  Alors  on  vit  les  mosquées  et  les  minar 
reta  remplacer  les  temples  antiques  de  rinde.  Les  princes 
leldjoukides ,  mongols  et  persans  élevèrent  un  grand 
nombre  de  mosquées  et  des  palais  d'une  splendeur  sans 
égale.  Enfin  sont  venus  les  dominateurs  chrétiens,  qui 
•ont  bâti  leurs  chétifs  et  maigres  monuments  dans  le 
goût  classioue,  étrange  contraste  avec  les  colossales  con- 
structinns  des  temps  antérieurs.  Madras,  Bombay,  Cal- 
cutta, THiandeniagor,  semblent  autant  de  villes  grecques, 
n.  Sculpture,  —  Les  règles  de  l'architecture  indienne 
étaient  tracées  dans  les  livres  sacrés,  et  les  architectea, 
Tevêtus  d'un  caractère  semi-saoerdotal,  ne  pouvaient  s'en 
écarter.  Les  sculpteurs  avaient  une  latitude  plus  grande; 
leur  art  avait  aussi  ses  règles  et  ses  principes,  ses  types 
pour  les  divinités,  mais  ils  avaient  toute  liberté  pour 
inspirer  le  respect  et  VeXtioi  aux  Hiodous,en  donnant  aux 
parties  architectoniques  et  aux  décorations  les  formes  les 
plus  bizarres  et  les  plus  capricieuses.  Les  Hindous  trou- 
vaient, dans  leur  mythologie,  des  si^ets  inépuisables  ;  mais 
la  symbolique  arbitraire  qu'y  rattachaient  les  idées  popu* 
laires  rendait  très-difficile  une  exécution  artistique.  L^ar- 
tbte,  condamné  à  représenter  des  divinités  à  trois  têtes, 
;à  Quatre  et  Jusqu'à  douie  bras,  ne  pouvait  arriver  k  pro* 
-duire  des  oauvres  vraiment  belles.  Les  sculpteurs  indiens 
«tmi  tndté  le  bas  relief  aussi  bien  que  la  rondebosM  et  to 


statuaire.  Si  quelques-unes  de  leurs  œuvres  ont  de  l'ei- 
pression,  toutes  attestent  une  grande  inhabileté  dans  la 
composition,  et  une  ignorance  complète  de  l'anatomie  et 
des  proportions.  lisent  mieux  réussi  dans  les  arabesaues. 

111.  Peinture.  —  La  peinture  est  encore  dans  l'enJance 
chez  les  Hindous.  Les  murailles  des  palais  et  des  mai- 
sons offrent  des  sujets  peints  avec  des  couleurs  à  l'eau, 
quelquefois  à  l'huile,  et  représentant  des  scènes  mytho- 
lo^ques,  des  batailles,  des  processions,  des  luttes,  des 
animaux,  etc.  Tout  cela  est  fort  grossier.  Les  miniatoioi 
de  l'Inde  conservées  dans  les  manuscrits  possèdent  une 
certaine  grêce,  quand  elles  représentent  des  scènes  de 
la  vie  ordinaire,  et,  pour  la  facilité  du  dessin  et  l'expres- 
sion, elles  l'emportent  infiniment  sur  les  miniatures  chi- 
noises. On  peut  voir  à  la  Bibliothèque  impériale  de  Paris 
une  belle  collection  d'œuvres  du  xvi*  siècle,  rapporta 
par  Manucci,  et,  en  manuscrit,  une  Histoire  des  Radjahs 
de  VHindoustan,  que  le  colonel  Gentil  écrivit  en  1772  et 
fit  orner  de  miniatures  par  un  artiste  indien. 

lY.  Miuique,  —   La  musique  des  Hindous  compte 
84  modes,  dont  on  n'emploie  ordinairement  que  3G,  et 
qui  ont  diacun  une  expression  particulière  destinée  à  agir 
sur  tel  sentiment  ou  telle  affection.  Ces  modes  emprun- 
tent leurs  noms  aux  saisons  de  l'année,  aux  heures  du 
Jour  et  de  la  nuit,  et  sont  censés  posséder  chacun  quel- 
que (qualité  appropriée  au  temps  d'où  il  a  pris  son  nom. 
Les  airs  hindous  se  ressemblent  presoue  tous,  et  sont  r&- 
marquablement  doux  et  plaintifs  :  l'exécution  la  plus 
favorable  est  celle  à  une  seule  voix,  accompagnée  par  la 
vtna,  instrument  qu'on  appelle  la  lyre  indienne  ;  mais  le 
plus   souvent  on  accompagne  avec  de»  instruments  à 
cordes  et  des  tambours,  et  les  chanteurs  ne  dominent 
tout  ce  bruit  qu'en  poussant  des  cris  déchirants  pour  des 
oreilles  européennes.  La  gamme  des  Hindous  procède 
par  octaves,  comme  la  nôtre;  mais  ils  ne  connaissent  pas 
notre  harmonie.  Parmi  les  instruments  qui  leur  sont  par* 
ticuliers,  nous  citerons  :  le  song,  buccin  dans  lequel  les 
Brahmanea  soufflent  de  toutes  leurs  forces  pour  appeler 
le  peuple;  le  gautha,  petite  cloche  de  bronze,  oroée 
d'une  tête  et  de  deux  ailes,  qu'ils  sonnent  soir  et  mstla 
dans  les  vestibules  des  temples  avant  de  commencer  les 
sacrifices  ;  le  capliu  ou  bin,  composé  de  deux  calebasses 
d'inégale  grosseur.  Jointes  par  un  long  tube  de  bois  sur 
leauel  sont  tendues  plusieurs  cordes  de  fil  de  coton  gom- 
mées et  deux  cordes  d'acier;  le  tamboura,  dont  le  corps 
est  formé  d'une  gourde  avec  un  long  manche,  et  qui  est 
monté  de  trois  cordes  qu'on  frappe  avec  un  plectre;  le 
sartmgui^t  qm  a  du  rapport  avec  notre  violoncelle,  bien 
que  plus  petit  et  monté  d'un  plus  grand  nombre  de  cordes; 
le  sarindaf  violon  grossier  dont  les  cordes  sont  en  coton; 
Vomerti,  espèce  de  timbale  formée  d'une  noix  de  coco 
qu'on  a  recouverte  d'une  pe&u  très-mince,  et  sur  laquelle 
sont  tendues  quelques  cordes;  Ttimt,  instrument  du 
même  genre,  mais  à  une  seule  corde;  le  hauk,  énorme 
tambour  orné  de  plumes  et  de  crin,  dont  on  fait  usage 
dans  certaines  fêtes,  moyennant  une  permission  de  l'au- 
torité, et  le  payement  d'une  certaine  somme;  l'Iiuia, tam- 
bour plus  petit  dont  on  bat  avec  la  main;  le  mirdeng  ou 
khole,  tambour  dont  le  corps  est  en  terre  cuite  ;  le  domp, 
grand  tambour  de  forme  octogone;  le  thobla,  composé  de 
deux  tambours,  l'un  de  terre  et  l'autre  de  bois;  le  tikom, 
formé  aussi  de  deux  tambours,  mais  d'inéeale  grandeur; 
le  Hugo  ou  djumpa,  cylindre  de  terre  cuite,  sur  lequel 
on  a  tendu  une  peau,  et  dont  on  tire  une  espèce  de  bour- 
donnement par  le  frottement  d'un  archet  sur  cette  peau; 
le  surmongtah,  formé  de  longs  morceaux  de  iMunhou  unis 
par  de  petites  cordes  qui  les  traversent;  le  ramsingOp 
grande  trompette  composée  de  quatre  tubes  de  métal 
très-mince  qui  entrent  les  uns  dans  les  autres;  le  batunk, 
qu'on  peut  comparer  à  notre  trompette  pour  la  forme  et 
pour  la  qualité  du  son  ;  le  sunaraé,  sorte  de  clarinette  ; 
le  tabri,  qui  ressemble  à  la  cornemuse;  le  bansy,  flûts 
k  bec,  et  le  crishma,  sorte  de  flageolet,  qu'on  insufile 
avec  le  nez. 

V*  Langlès,  Monuments  anciens  et  modernes  de  l'Hin- 
doustauy  Paris,  1810-13, 2  vol.  in-fol.;  Rammoboun-Roy, 
Essay  on  thê  architecture  of  the  Bindus,  Londres,  1834; 
Kittoe,  Fllustrations  of  Indian  arcfUtecture ,  Calcutta, 
1843, 17  part,  in-fol.;  Lassen,  Antiquités  de  l'Inde^  Bonn. 
1844^2.  E.  L. 

INDIENNE  (  Littérature).  L'Inde  eat,  avec  la  Grèce  et 
l'Italie,  la  contrée  du  monde  ancien  qui  a  produit  le  ^us 
d'œuvres  littéraires  :  sa  fécondité  en  ouvragée  de  tous 
genres  a  été  immense.  L'Europe  ne  possède  pas,  à  beau* 
coup  près,  tous  les  livres  composés  dans  l'Inde  ancienne 
et  moderne  ;  et  cependant  ceux  qu'elle  a  édités  ou  donl 


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iDe  1  tes  mamiBcrito  ou  les  textes  Imprimés  en  Orient, 
tonnent  déjà  une  grande  bibliothèque.  Ces  onvrages,  dont 
pliuieors  sont  fort  étendus,  ne  sont  venus  entre  nos 
mains  que  depuis  la  fin  du  dernier  siècle  ;  la  plupart  ne 
oont  pas  encore  traduits  dans  les  langues  de  TEurope  ; 
l'Allemagne  et  TAngleterre  ont  fait  la  mijeure  partie  de 
ces  traductions,  el  la  France,  à  présent  entrée  dans  cette 
Toie,  commence  à  pouvoir  prendre  connaissance  de 
l'Orient  sans  recourir  à  ses  Toisins.  Les  œuvres  qui  com- 
poeent  la  littérature  de  Tlnde  ne  se  sont  point  produites 
en  on  petit  nombre  d'années  ni  même  de  siècles  :  ses 
pins  anciennes  poésies  sont  antérieures  à  tout  ce  qui 
reste  des  plus  anciens  monuments  littéraires  de  la  race 
âiyenne,  et  Ton  ne  peut  pas  même  dire  que  la  littérature 
inscrite  soit  terminée,  puisque,  si  la  langue  des  anciens 
lirihmanes  est  une  langue  morte,  cependant  plusieurs 
brahmanes  de  nos  Jours  composent  encore  en  sanscrit,  et 
considërent  cette  langue  comme  leur  véritable  idiome 
littéraire.  Ainsi ,  la  littérature  de  Tlnde  est  grande  par  sa 
darôe  comme  par  la  variété  de  ses  monuments.  Mais  elle 
est,  an  moins  dans  sa  partie  classique,  restreinte,  quant 
an  territoire  où  les  livres  ont  été  composte,  à  un  espace 
de  pays  assez  lx>rné;  en  effet ,  si  Ton  excepte  le  Véda,  qui 
est  le  livre  primitif  de  notre  race  tout  entière  et  qui  n'ap- 
partient pas  exclusivement  à  l'Inde,  et  plusieurs  ou- 
vrages bouddhiques  qui  peuvent  avoir  été  éoits  môme 
en  pays  étranger  par  des  Indiens,  l'immense  majorité  des 
flBuvres  sanscrites  ont  été  composées  sur  les  bords  du 
Gange  et  de  la  Yamuni,  et ,  plus  spécialement  encore, 
non  loin  du  confluent  sacré  de  ces  deux  fleuves.  On  sait , 
notamment  par  le  premier  livre  des  lois  de  Manou,  que 
la  caste  des  briihmanes,  qui  presque  seule  cultivait  les 
lettres,  avait  pour  devoir  de  ne  pas  f^nanchir  une  certaine 
limite  territoriale  comprenant  la  vallée  moyenne  et  supé- 
rieure du  Gange  avec  ses  affluents.  C'est  là  que  s'éle- 
vèrent les  dtés  d'Aonde,  de  Delhi,  de  Bénarès,  etc.,  non 
moins  célèbres  par  la  g^deur  de  leur  civilisation  mo- 
rale et  littéraire  que  par  leur  richesse  et  le  bien-être  de 
leors  habitants. 

Au  sortir  de  l'époque  védique,  l'Inde  était  en  possession 
dTane  idée  qui  n'a  paru  que  tard  chez  les  Grecs,  et  en- 
core dans  les  écrits  de  quelques  philosophes,  l'idée  de 
Fonité  de  Dieu.  Dieu  fut  conçu  dès  ces  temps  reculés, 
non-seulement  dans  ce  qu'il  peut  avoir  en  lui  d'actif 
comme  principe  créateur,  nuds  dans  son  abstraction  la 
ph»  hante  comme  principe  neutre  et  indirisible.  La  no- 
tion panthéistique  de  Br&hma  anime  toute  la  littérature 
indienne  Jusqu'au  moment  où  le  bouddhisme  s'en  dé- 
tache, et  oeloi-d  même  ne  l'exclut  pas,  mais  la  fait  ren- 
trer dans  un  ensemble  nouveau  d'idées  et  de  doctrines. 
De  la  conception  première  de  l'unité  de  Dieu  et  de  l'unité 
sabatantieUe  de  tous  k»  êtres,  découle  une  morale  aus- 
tère, dont  les  éléments  essentiels  furent  établis  dès  les 
pins  anciens  temps.  Le  panthéisme  fut  comme  le  régula^ 
teor  de  la  vie  pratique  et  de  la  pensée  à  la  fois;  aussi  se 
retrouT^-t-il  constamment  dans  les  œuvres  dont  l'en- 
semble forme  la  littérature  indienne,  de  même  que  le 
polythéisme  est  partout  dans  les  productions  du  génie 
grée;  mais  la  morale  qui  ressort  du  panthéisme  rempor- 
tant de  beaucoup  sur  celle  du  polythéisme  des  Hellènes, 
le  milicn  moral  où  se  meuvent  les  personnages  et  où 
écrÎTent  les  anteon  des  livres  indiens  est  très-supérieur 
à  oelai  que  nous  effarent  les  Grecs.  Ajoutons  que,  dans  la 
pvntiqae,  il  n'y  a  pas  une  grande  différence  entre  la  mo- 
mie pantbèistimie  et  celle  qui  se  fonde  sur  le  dogme  de 
la  création  :  il  en  résulte  pour  nous  cette  impression 
étrange  d'une  civiliaation  constituée  au  rebours  de  la 
Mtre  et  d'un  ensemble  de  sentiments  moraux  que  l'on 
croirait  chrétiens.  Ces  sentiments  s'élèvent  souvent  à  une 
Ittoteor  que  n'ont  point  dépassée  les  littératures  mo- 
dernes de  l'Europe,  et  parviennent  à  une  délicatesse  ex- 
^olne  dont  les  anciens  Grecs  n'ont  point  approché.  —  Ce 
Dièaie  système  panthéistique  a  placé  les  Indiens  vis-è^ 
▼ia  de  la  natnre  dans  une  situation  d'esprit  toute  diffé- 
reme  des  Grecs.  Geoz-d  n'ont  va  en  elle  qu'un  théâtre 
de  ractivité  humaine,  dans  les  choses  inanimées  et  la  vie 
végétative  qu'un  ensemble  de  matériaux,  dans  les  bêtes 
Que  des  ennemis  ou  des  auxiliaires  qu'il  fallait  d'abord 
dompter:  ce  que  hm  modernes  appellent  le  sentimeni  de 
<a  nahure,  qui  n'est  antre  chose  4^0  la  conception  de  la 
vie  oniveraeile  dans  ce  qu'elle  a  de  poétique  et  de  sympa- 
thique, n'existe  pas  chez  les  Grecs.  Il  est  partout  et  à 
toutes  les  époques  dans  les  écrits  des  brahmanes.  On  a 
«Bt  que  la  natnre  écrase  l'homme  dans  ces  grandes  val- 
lées, et  que,  dans  les  ouvrages  indiens,  l'homme  dism^ 
mit  et  s'anéantit  devant  la  nature  tonte-pnissanle  :  <reat 


une  erreur,  (fue  la  lecture  d'un  poème  quelconque  de 
l'Inde  peut  dissiper;  au  contraire,  (Ums  aucune  littérature 
antique  la  force  morale  de  l'homme  ne  se  déploie  avec 
autant  de  grandeur  et  de  pouvoir.  Cette  puissance  de  la 
science  et  de  la  vertu,  les  Indiens  l'ont  même  exagérée 
outre  mesure  dans  certaines  doctrines  religieuses,  et  lui 
donnent  parfois  trop  d'importance  dans  leurs  poëmes. 

La  connaissance  de  la  littérature  de  l'Inde  est  devenue 
pour  l'Europe  un  intérêt  majeur.  Non-seulement  le  Véda 
est  le  plus  ancien  monument  écrit  des  peuples  indo-eu- 
ropéens, mais  il  renferme  les  formes  les  plus  complètes 
et  les  plus  significatives  de  leur  langue  commune,  et  doit 
être  considéré  comme  donnant  la  clef  de  leura  langues 
particulières.  On  ne  peut  donc  faire  aucun  progrès  réel 
dans  l'étude  de  ces  langues,  sans  la  connaissance  de 
l'idiome  vêdiaue,  à  laquelle  on  arrive  par  celle  du  sans- 
crit. De  plus,  les  livres  de  l'Inde,  et  surtout  le  Véda,  con- 
tiennent les  mythes  primitifs  qui  ont  servi  de  point  de 
départ  à  toutes  les  mythologies  occidentales,  depuis  la 
Perse ,  l'Asie  Mineure  et  la  Grèce  antique  Jusqu'à  l'Ir- 
lande et  jusqu'au  Portugal  ;  plus  tard ,  les  missionnaires 
du  bouddhisme  propagèrent  dans  une  grande  partie  du 
monde  ancien  des  doctrines  dont  l'écho  retentit  Jusque 
dans  la  Grèce  civilisée.  Au  temps  des  rois  macédoniens 
en  Egypte,  le  monde  grec,  dont  la  civilisation  se  concen- 
trait dans  Alexandrie,  entendit  prêcher  et  professer  dans 
le  Musée  les  doctrines  de  l'Inae  quil  s'assimila  :  on  a 
conjecturé  de  là  qu'elles  fiicilitèrent  un  peu  en  Orient  la 
diffusion  du  christianisme,  et  qu'elles  eurent  quelque 
iufluence  sur  la  théologie  alexandrine.  A  d'autres  épo- 
ques, les  idées  indiennes  ont  envahi  la  Chine,  le  Thibet, 
Geylan ,  la  presqu'île  au  delà  du  Gange,  et  un  grand 
nombre  dtles  des  archipels  de  l'Orient.  Or,  nos  relations 
avec  ces  contrées,  que  la  science,  l'industrie  et  le  com- 
merce rapprochent  de  nous  chaque  Jour,  donnent  un 
puissant  attrait  à  l'étude  des  livres  originaux  où  sont 
déposées  toutes  ces  doctrines,  et  la  rendent  même  néces- 
saire. Enfin  elle  est  l'unique  moven  d'action  dont  dis- 
posent ceux  qui  sont  chargés  de  défendre  ou  de  propager 
en  Orient  les  idées  chrétiennes. 

L'étude  de  llnde  dans  sa  littérature  est  difficile,  par 
l'absence  de  chronologie,  et  par  la  presque  impossibilité 
de  déterminer  la  date  des  principaux  ouvrages  sanscrits  : 
plusieura  échappent  jusqu'à  ce  Jour  à  toute  classification 
chronologique  ;  leur  date  peut  varier  quelquefois  dans  un 
intertradle  de  plus  de  mille  ans.  Néanmoins  les  travaux 
des  demie»  indianistes,  surtout  ceux  de  Lassen  et  d'Ëug. 
Bumouf,  ont  montré  que  l'examen  critique  et  comparatif 
des  doctrines  qu'ils  renferment  permet  d'arriver  à  des 
dates  au  moins  relatives  pour  un  certain  nombre  d'ou- 
vrages essentiels.  En  outre,  le  bouddhisme  a  commencé 
dans  l'Inde  la  période  historicpio;  il  a  une  chronologie, 
conservée  dans  pluf.ieun  parties  du  monde  oriental ,  et 

2ui  offre  avec  les  voyages  et  les  histoires  des  Grecs,  des 
hinois  et  des  peuples  du  midi  de  l'Asie,  des  synchro- 
nisraes  précieux.  Enfin ,  la  nature  des  dogmes  védiques, 
les  caractères  de  la  langue  védique  permettent  d'affirmer 
que  beaucoup  d'hymnes  dans  le  Rig-  Véda  sont  antérieurs 
à  ce  que  l'Occident  nous  oWn  de  plus  ancien  dans  le 
même  genre,  c.-à-d.  à  Homère  et  à  Zoroastre.  Sans  arriver 
à  des  dates  fixes  et  précises,  on  peut  donc  déterminer 
approximativement  certaines  époques,  entre  lesquelles 
s'opèrent  les  grands  développements  des  idées  et  de  la 
civilisation  de  l'Inde,  et  se  produisent  les  ouvrages  où  ils 
sont  contenus. 

Trois  mouvements  religieux  se  remarquent  dans  la  lit- 
térature indienne,  et  donnent  Ueu  à  trois  grandes  caté- 
Sries  d'ouvrages  :  la  religion  primitive  contenue  dans 
I  Védas;  le  brahmanisme,  qui  inspire  à  lui  seul  la 
grande  littérature  classique  de  l'Inde;  et  le  bouddhisme, 
dont  les  doctrines  ont  fait  naître  dans  l'Inde  et  au  d^ 
bon  un  grand  nombre  d'ouvrages  composés  soit  en  sans- 
crit, soit  dans  des  idiomes  qui  en  sont  dérivés  immédia- 
tement. La  période  védique  commence  avec  les  plus 
andens  hymnes  du  Vida,  dont  la  date  ne  peut  guère 
être  rapprochée  de  nous  au  delà  du  xiv*  ou  du  xv*  siècle 
av.  J.-C.,  mais  peut  être  reculée  davantage  dans  le  passé. 
Elle  se  continue  encore  Jusque  dans  la  période  suivante, 
parce  que  les  livres  relatifs  au  Véda,  composés  ultérieure- 
ment par  des  brahmanes,  étaient  écrits  par  eux  en  langue 
védique;  de  sorte  qu'il  n'est  pas  possible  de  fixer  pré- 
sentement la  date  du  dernier  livre  écrit  dans  cette 
langue,  et  c^u'il  est  certain  d'autre  part  que  ces  derniera 
écrits  témoignent  de  doctrines  brahmaniques  déjà  très* 
avancées.  11  est  donc  possible  que  la  période  védique, 
non  celle  où  furent  faits  les  l^ymnes,  mais  celle  des  corn- 


IND 


106S 


IND 


mentairas,  se  prolonge  jusque  dans  le  ¥01810890  de  Tère 
chrétienne.  —  La  pénode  brahmanique  commence  avec 
les  plus  anciens  chants  épiques  des  aèdes  indiens  ;  elle 
répond  à  rétablissement  définitif  de  la  société  Aryenne 
dans  les  vallées  du  Gange;  elle  est  postérieure  par  ses 
commencements  aux  grandes  guerres  des  fils  de  Kum, 
relatées  dans  le  MahAohânUa,  et  à  l'expédition  de  R&ma 
Ters  le  sud.  Ces  événements,  qui  sont  peut-être  contem- 
porains des  guerres  héroïques  des  Grecs,  ont  été  pour  les 
indiens  ce  que  furent  pour  les  aèdes  helléniques  Texpé- 
ditlon  des  Argonautes  et  la  guerre  de  Troie.  Cest  alors 
oue  le  régime  des  castes,  issu  de  la  conquête,  s'organise 
naos  rinde,  et  que  passent  dans  les  écrits  des  poètes  les 
doctrines  panthéistiçiues,  dont  les  réunions  des  prêtres 
avaient  fait  un  enseignement  officiel  dès  les  plus  anciens 
temps.  Il  n'y  a  pas  eu  dlnterruption  dans  le  développe- 
ment de  la  littérature  br&hmanique  depuis  lors  Jusiqu'à 
nos  jours;  on  peut  dire  qu'elle  dure  encore.  C'est  elle  qui 
porte  le  nom  de  littérature  sanscrite,  par  lequel  on  l'op- 
pose à  la  littérature  védique,  celle-ci  nous  offrant  une 
langue  dont  les  règles  et  les  formes  sont  encore  flot- 
tantes, tandis  que  la  langue  sanscrite  est  pour  ainsi  dire 
faite  de  toutes  pièces,  d'après  un  id^  grammatical  fixé  à 
Pavance.  —  Le  bouddhisme  n'a  pas  interrompu  ce  déve- 
loppement régulier  et  prolongé.  Né  dans  l'Indb,  il  n'a  pu 
l'y  maintenir  ;  exilé,  il  a  emporté  avec  lui  ses  idées  et  ses 
livres;  de  sorte  qu'il  semble  avoir  traversé  le  grand  sy»* 
tème  brahmanique  comme  une  comète  traverM  le  sya- 
tème  solaire,  sans  le  troubler.  Toutefois,  comme  le 
bouddhisme  lui-même  n'est  pas  arrivé  à  l'improviste, 
mais  se  rattache  étroitement  au  développement  philoso- 
phique de  rinde,  les  livres  composés  avant  son  apparition 
rannoncent  en  quelque  sorte  et  prennent  date  à  cause  de 
lui  ;  il  en  est  de  même,  à  plus  forte  raison,  de  ceux  qui 
l'attaquent  ou  qui  en  font  seulement  mention  comme 
d'une  chose  existante.  Enfin  il  y  a  un  certain  nombre 
d'écrits  contenant  des  allusions  £  des  faits  que  les  Grecs 
ou  les  Chinois  ont  eux-mêmes  connus  et  dont  ils  nous 
ont  donné  la  date  précise.  On  voit  donc  que,  par  l'examen 
intrinsèque  des  livres  sanscrits,  et  par  le  moyen  des  syn- 
chronismes,  il  est  possible,  dans  une  certaine  mesure,  de 
rétablir  l'ordre  chronologique  dans  cet  immense  dédale 
de  la  littérature  indienne. 

Période  védique.  —  Il  est  question  ailleurs  des  Védas 
(  F.  ce  mot).  Disons  seulement  ici  que  les  origines  de  la 
période  littéraire  qui  se  rattache  au  Véda  ne  sont  pas 
dans  l'Hindoustan,  mais  dans  la  région  des  Qnq-Fleuves 
ou  Penjàb  ;  c'est  ce  que  montre  la  lecture  des  hymnes  du 
Véda,  où  ces  rivières,  affluents  de  l'Indus,  sont  désignées 
par  les  noms  mêmes  aue  les  Grecs  ont  reproduits  dans 
leur  langue  en  les  défigurant.  Il  est  même  à  croire  gue 
plusieurs  de  ces  chants  sont  antérieurs  à  l'époque  fort 
reculée  où  les  Aryens  émigrants  vinrent  s*établir  dans  la 
Pentapotamie.  Quoi  qu'il  en  soit,  ce  aue  nous  devons 
constater  ici,  c'est  que  la  forme  primitive  que  revêt  la 
la  pensée  est  celle  du  vers,  et  que  le  premier  genre  poé- 
tique est  l'hymne  :  l'ode,  qui  est  la  forme  lyrique  par 
excellence,  constitue  un  genre  d'une  date  postérieure. 
Dans  les  littératures  d'imitation,  les  mêmes  hommes  qui 
font  des  odes  peuvent  aussi  composer  des  hymnes,  mais 
U  n'en  est  pas  ainsi  dans  les  littératures  originales, 
c.-à-d.  dans  l'Inde  et  dans  la  Grèce.  Tous  les  hymnes  des 
quatre  Védas  pris  ensemble  forment  à  eux  seuls  une  pé- 
riode littéraire  d'assez  longue  durée  ;  car,  si  les  plus  an- 
ciens ont  ét4  composés  hors  du  PenJ&b,  les  derniers  l'ont 
été  certainement  dans  les  vallées  du  Gange;  or,  il  n'est 
pas  douteux  que  les  Aryens,  avant  de  descendre  dans  ces 
vallées,  n'aient  séjourné  longtemps  sur  les  Cinq-Rivières, 
n'y  aient  fondé  des  établissements,  n'en  aient  repouué 
les  habitants  primitifs  vers  les  montagnes  environnantes 
où  on  les  voit  encore,  et  n'aient  composé  dans  ce  séjour 
la  majeure  partie  de  leurs  chants  sacrés.  Selon  nous,  c'est 
cette  période  primitive  qui  constitue  la  vraie  période  vé- 
dique :  car,  du  moment  où  la  langue  aryenne  est  devenue 
le  sanscrit  (  or  elle  l'est  dans  la  partie  la  plus  antique  de 
iTépopée  brahmanique),  l'idiome  védique  n'est  plus  la 
S  langue  vraie  de  la  poésie;  elle  n'existe  dès  lors  que  par 
tradition ,  et  c'est  en  vertu  d'une  sorte  de  règle  ou  d'un 
I  usage  religieux  qu'elle  sert  aux  écrivains.  Cotte  considé- 
^  xation«  qu^appuie  et  ce  qui  s'est  passé  en  Grèce  pour  les 
I  poésies  orphiques,  et  surtout  ce  que  nous  voyons  pour  le 
t  btln  dans  l'Église  catholique,  nous  fait  comprendre  com- 
fr  bien  a  pu  être  prolongée  et  ancienne  la  coexistence  du 
^  lanscrit  dans  l'épopée  et  de  l'idiome  primitif  dans  les  ou- 
Trages  relatifs  au  Véda.  Voici  les  noms  et  la  nature  de 
ouvrages  t 


Les  Bràfwnanas  servent  de  complément  et  d'explica- 
tion aux  Védas;  iU  ont  été  composés  pour  la  plupart 
dans  la  période  qui  sépare  les  hymnes  de  l'épopée  brah- 
manique. Ils  renferment  des  recueils  d'observations  expli- 
catives transmises  dans  les  familles  de  prêtres,  et  dif- 
férant entre  eux  selon  les  idées  philosophiques  de  cet 
familles  et  selon  le  Véda  auquel  ils  se  rapportenL  Beaa- 
ooop  d'entre  eux  ou  sont  peûrdus  ou  sont  encore  cachés 
pour  nous  ;  mais  les  principaux  sont  entre  nos  mains.  Ces 
commentaires  sont  précieux  pour  l'interprétation  des 
Védas.  —  Les  Sûtras  continuent  les  Brâfmanas,  et  sont 
aussi  des  commentaires  des  Védas;  leurs  explications 
semblent  s'abréger  à  mesure  qu'elles  sont  plus  nom- 
breuses, et  cette  concision  augmente  de  plus  en  plus  leur 
obscurité.  Les  Sûtras  sont  souvent  moins  clairs  que  le 
Véda  lui-même;  ils  sont,  pour  la  plupart,  d'une  époque 
où  la  société  br&hmanique  existait  avec  sa  division  régu- 
lière en  quatre  castes;  les  Brâhmanas  indi€|uent  tout  an 
plus  que  ce  régime  était  en  voie  de  s'établir.  C'est  pen- 
dant ce  moyen  âge  héroïque  que  le  texte  des  hymnes  fat 
fixé  définitivement  et  pour  totjours  dans  les  écoles  des 
br&hmanes,  et  depuis  Ion  il  n'a  reçu  aucune  altération  ; 
la  grammaire,  la  prononciation,  la  métrique  et  la  canti- 
lène  des  hymnes  furent  établies  dans  des  traités  qui  sont 
entre  nos  mains  et  oui  remontent  à  cette  époque.  Les 
nombreux  travanx  relatifs  à  la  grammaire  et  le  soin  de 
fixer  le  sens  des  mots  védiques  prouvent  que  cet  idiome 
n'était  déjà  plus  en  vigueur,  et  était  remplacé  par  la 
langue  sanscrite,  dont  les  règles  furent  consignées  par 
Pànini.  —  Les  Upani^iads,  qui  sont  d'époques  probable- 
ment fort  différentes,  sont  aussi  des  Gompléiments  dogma- 
tiques du  Véda;  elles  rentrent  en  nu^eure  partie  parmi 
les  Brâhmanas,  mais  plusieurs  aussi  ont  une  existence 
et  une  valeur  indépendantes;  ces  dernières  surtout  ne 
sont  souvent  que  l'écho  de  spéculations  philosophiques 
propres  k  telle  ou  telle  école  brahmanique  :  du  reste,  les 
savants  ne  les  ont  pas  encore  classées  à  ce  point  de  vue 
historique. 

Période  brahmanique.  —  Cette  période  est  de  beaucoup 
la  plus  longue,  et  celle  où  se  sont  produits  les  ouvrages 
les  plus  variés.  Elle  constitue  proprement  la  période 
sanscrite,  non  que  la  langue  daÂs  laquelle  sont  écrits 
ces  ouvrages  soit  essentiellement  différente  de  Im  langue 
du  VédA,  mais  cette  dernière  est  le  fonds  commun  de 
tous  les  peuples  de  langue  aryenne,  tandis  que  le  sanscrit 
est  la  langue  classique  de  l'Inde.  On  ne  peut  guère  douter 
qu'elle  n'ait  existé  dans  œ  pays  concurrenmient  avec  la 
langue  védique;  le  fait  est  certain  pour  la  période  des 
Sûtras  brahmaniques;  il  est  probable  pour  une  partie  au 
moins  de  la  période  des  Bràkmanas,  L'épopée,  ou,  pour 
mieux  dire,  le  genre  épique,  embrasse  les  premiers  temps 
de  cette  période;  les  autres  genres  viennent  après,  aussi 
bien  qu'en  Grèce;  et,  comme  dans  ce  dernier  pays,  le 
genre  épique  ne  cesse  pas  d'être  cultivé  pendant  que  les 
autres  se  développent,  et  reprend,  aux  époques  de  déca- 
dence, une  sorte  d'énergie  nouvelle  :  de  manière  que,  si 
les  deux  grandes  épopées  indiennes  se  rapportent,  comme 
VHiade  et  VOdysue,  aux  anciens  temps  de  la  littérature 
classique,  les  Purânas,  ainsi  que  les  Argonautiques,  sont 
d'une  époque  bien  postérieure  et  même  récente.  Entre 
ces  époques  extrêmes  de  la  période  classique  se  placent 
les  autres  genres  littéraires,  le  drame,  le  genre  lyrique, 
la  poésie  I^re,  etc.  Pendant  que  le  sanscrit  (ou  langue 
parfaite)  est  employé  à  la  composition  des  ouvrages  sa- 
vants par  les  br&bmanes,  l'ancienne  langue  continue 
d'être  usitée  dans  les  classes  inférieures  du  peuple  et  va 
s'y  altérant  de  plus  en  plus  t  elle  prend  le  nom  de  pr4- 
crit,  et  parait  k  son  tour  dans  les  œuVrea  littéraires  où 
l'on  fait  parler  d»  hommes  de  basse  condition,  comme 
les  drames.  La  séparation  grammaticale  de  ces  deux 
langues  est  de  beaucoup  postérieure  aux  épopées  primi- 
tives. II  faut  donc  admettre  que  dans  l'Inae  existèrent  à 
la  fois  Vidiome  védique  comme  langue  liturgique,  le 
sanscrit  comme  langue  savante  mais  libre,  et  le  prdcrit 
comme  langue  populaire.  Le  prient  tient  peu  de  place 
dans  la  littérature  brahmanique  ou  classique  ;  il  en  tient 
une  grande  dans  les  ouvrages  bouddhiques. 

Le  Mahàbhârata  semble  être,  dans  sa  partie  essentielle, 
la  plus  antique  des  épopées  indiennes.  Déjà  lea  aèdes 
indiens  racontaient  depuis  longtemps  en  vers,  et  en  s'ao- 
compagnant  de  la  vlna,  les  exploits  des  dieux  et  des  héros, 
lorsque  la  grande  guerre  de  deux  familles  Aryennes  dans 
le  nord  de  l'Inde,  les  Gourous  et  les  Pàndous»  devint  le 
s^Jet  principal  des  chants  épiques.  Il  n*est  pas  douteux 
que  cette  guerre  ne  fût  terminée  depuis  longtemps,  lors- 
que le  premier  auteur  du  Mahàbhârata  la  pnt  pour  aujet; 


IND 


1069 


IND 


nais  il  n*est  pas  Traisemblable  que  cette  épopée  doire  se  | 
fhcer  entre  Dion  CHirysostome  et  Hégastnène,  puisque 
•ei  navig&teurs  grecs  antérieurs  à  ce  dernier  la  trouTèrent 
dQà  dans  le  sad  de  THindoustan.  Nous  la  considérons 
aussi  cooime  antérieure  à  Pànini,  parce  que,  dans  sa 
partie  la  pins  antique,  les  règles  de  la  langue  sont  moins 
ilies  que  dans  ce  grammairien.  Mais  il  est  évident, 
d'un  autre  côté^  oue  la  majeure  partie  de  ce  poème  de 
%0,000  Ters,  est  a*époques  fort  diverses  et  relativement 
rtcentes,  et  qne  son  fonds  primitif  n*avait  guère  que  le 
dotmième  de  cette  étendue.  Les  recensions  successives 
dn  MahâhhArata  l'ont  agrandi  chaque  fois,  et  en  ont  fait 
VD ouvrage  sans  unité  de  laneue  ni  de  doctrine,  apparte- 
ittnt  à  des  civilisations,  à  des  croyances  sensiblement 
différentes  les  unes  des  autres.  Dans  le  fonds  primitif,  tout 
porte  à  croire  que  les  hétos  humains  n'avaient  pas  en- 
core revêtu  le  caractère  mystique  quMIs  présentent  dans 
le  grand  poCme,  que  c'étaient  des  rois  &ryens  et  non  des 
inaunstions  divines,  et  que  les  dieux  ne  participaient  aux 
érénements  que  dans  la  mesure   où  ils  y  participent 
dus  Homère.  Rédoit  à  cette  dimension,  le  MtihAbhàftUa 
peat  se  classer  avec  quelque  raison  parmi  les  plus  an- 
dens  ouvrages  de  lan|ue  sanscrite,  et  remonter  aux  temps 
bérolques  <fe  Tlnde.  Or,  ces  temps  eux-mêmes  sont  anté- 
rieurs anx  Sûtras  védiques  et  à  plusieurs  Brâhmancu; 
Û  est  donc  légitime  de  regarder  Tœnvre  du  grand  aède, 
looonna  peot-ètre,qul  composa  le  pnmiet  MAdbhârata, 
comme  os  beaucoup  antérieure  à  ravénement  du  Boud- 
dha, c-èr-d.  au  VI*  siècle  av.  J.-C,  et  comme  ne  pouvant 
guère  descendre  plus  bas  que  le  temps  d*Homère  lui- 
nsème.  Quant  anx  additions  successives  qu*a  reçues  le 
Màk^Màrata  primitif,  il  n*est  pas  possible,  dans  Tétat 
présent  de  la  science,  d*en  fixer  exactement  les  époques. 
On  peut  dire  seulement  qu'on  y  trouve  Técho  des  diverses 
docnines  religieuses  ou  philosophicmes  auxquelles  Tlnde 
a  donné  naissance.  Il  y  a  même  telle  partie  <{ui  forme  à 
elle  seule  on  véritable  poème,  et  dont  le  lien  avec  la 
grande   épopée  est  purement  artificiel  :  telle  est  par 
eiemple  la  Bhâgavaa^Uâ  {V.  ce  mot).  Enfin  la  rédac- 
tion définitive  du  poème,  telle  que  nous  la  possédons, 
c-è-d.  dans  toute  son  étendue,  doit  être  considérée 
comme  postérieure  à  Tère  chrétienne.  On  voit  que  le 
MahâbMrata  a  eu  dans  Tlnde  un  sort  semblable  à  celui 
d*Homère  chex  les  Grecs;  seulement  ce  dernier  a  été  sou- 
mis par  les  Alexandrins  à  un  travail  de  critique  qui  a 
manqué  ao  ifahdbhàrata(V,  ce  mot). 

Le  Bdmâyana,  d'une  étendue  moins  grande,  ofRre  cette 
uolté  de  langue  et  de  doctrine  qui  caractérise  l'œuvre 
d"an  seul  homme  ;  d'un  autre  côté,  Vyàsa  est  dans  l'Inde 
on  personnage  presque  fabuleux,  tandis  que  Vàlmtld  a 
toajoors  été  regjirdé  comme  un  homme  ayant  réellement 
véoL  Ce  seul  fait,  ajouté  à  la  perfection  littéraire  du 
poème,  montrerait  que  le  Ràmâyana  est  postérieur  au 
Makâbhârata.  En  outre,  le  sujet  du  poème  nous  présente 
la  conqoète  ànrenne  de  l'Hindoustan  dans  sa  dernière 
péflode,  poisqu  il  la  conduit  Jusoue  dans  l'Ile  de  Geyian. 
Bnfin,  le  caractère  allégorioue  des  personnages  indique 
one  époqoe  plus  avancée  du  développement  panthâs- 
tiqoe  de  llnde.  Toutefois,  il  est  difficile  de  ne  pas  ad- 
mettre qoe  cette  épopée,  comme  la  précédente,  repose 
sor  on  fond  de  traditions  réellement  historiques,  et  que 
Râma  fut  véritablement  le  conquérant  et  le  dvilisatenr 
da  Sad.  Cette  œuvre  était  accomplie,  et  le  poème  de  Vàl- 
mlki  existait  selon  toute  vraisemblance,  lorsque  les  an- 
ciens navigateurs  grecs,  antérieurs  à  Alexandre,  par- 
coomreot  les  cètes  de  la  mer  Erythrée  et  connurent  les 
Inifieos  sanscrits.  Le  Hâmàyana  pourrait  donc  se  placer 
entre  cette  époque  et  celle  d'Homère;  car  11  ne  laisse 
soupçonner  aucunement  l'existence  de  la  religion  boud- 
dhique, fût  an  moins  singulier  dans  un  poème  tout  my- 
diolog^que  et  all^rique,  si  l'auteur  de  ce  poème  était 
postérieur  an  Bouddha.  Les  critiques  européens  ont,  du 
reste,  relativement  à  ce  poème,  à  vérifier,  comme  pour  la 
grande  épopée,  les  parties  réellement  antiques  et  origi- 
nales; car  il  est  évident  que  plusieurs  fragments  et  tout 
ce  c^ni  concerne  l'Incamation  de  Vishnu  en  Ràma  sont 
des  interpolations.  Remarquons  id  qu'autant  les  Indiens 
ont  été  respectueux  à  regard  des  textes  du  Vida,  autant 
Qs  se  sont  montrés  libres  a  l'égard  des  é^pées  :  c'est  de  là 
que  naissent  la  mineure  partie  des  difficultés  chronolo- 
^ques  que  nous  rencontrons  avjourd'hui  en  cette  ma» 
tim.  V,  Ramavana. 

An  genre  épique  se  rattachent  les  Purànas  et  quelques 
entres  poèmes  d'une  moindre  importance,  n  existait, 
^ms  les  anciens  temps,  des  œuvres  poétiques  nommées 
t,  qui  ont  été  perdues  on  dont  nous  n*avons  pas 


les  textes  :  ces  œuvres,  qui  remontaient  peut-être  an 
temps  des  grandes  épopées,  ont  servi  de  point  de  départ 
aux  Purâiuu  actuels.  Ceux-d,  dont  nous  possédons  les 
deux  plus  importants  (K.  i>caARAS),  sont  d'une  époque 
qu'il  est  difficile  de  fixer,  mais  certainement  beaucoup 
plus  récente  que  les  épopées,  et  postérieure  de  plusieurs 
sièdes  sans  doute  à  l'ère  chrétienne.  Ils  se  rattachent, 
quant  à  la  forme,  aux  épopées,  et,  quant  au  fond,  à  la 
tradition  religieuse.  La  nature  des  doctrines  qui  y  sont 
développées  prouve  l'ftge  moderne  de  leur  composition  : 
en  eflët,  ils  se  rapportent  tous  au  culte  et  aux  incarna- 
tions de  Vishnu  et  de  Çiva,c.-à-d.  aux  deux  plus  récentes 
religions  de  l'Inde. 

On  peut  ranger  aussi  dans  l'ancienne  littérature  sans- 
crite les  Lois  de  Manou,  dont  le  texte  que  nous  possédons 
diffère  probablement  assez  peu  de  sa  plus  ancienne  ré- 
daction. Il  est  difficile  de  dire  si  celle-ci  est  antérieure  au 
Bouddha,  bien  ou'elle  ne  renferme  aucune  allusion  à  ses 
doctrines;  mais  la  nature  des  prescriptions  que  renferme 
ce  code,  et  le  degré  où  en  est  parvenue  la  métaphysique, 
dénotent  une  époque  fort  ancienne.  Il  n'en  est  pas  de 
même  du  code  de  YàinaixUkya,  dont  la  composition  est 
évidemment  très -moderne,  sans  pouvoir  toutefois  des- 
cendre plus  bas  que  le  vi*  siècle  de  notre  ère.  —  Les 
ouvrages  relatifs  à  la  législation  et  appelés  dharmaçâ^ 
Iras  sont  en  grand  nombre  dans  la  littérature  sanscrite; 
nous  sommes  loin  de  les  posséder  tous,  et,  dans  l'Inde 
même,  beaucoup  d'entre  eux  sans  doute  sont  perdus,  n 
en  a  été  composé  à  toutes  les  époques,  depuis  les  divers 
codes  qui  ont  porté  le  nom  de  Manou  Jusqu'à  nos  jours. 
A  ces  ouvrages  d'une  portée  générale,  il  faut  sjouter  les 
traités  spéciaux  où  sont  contenues  les  prescriptions  et  les 
règles  propres  à  chaque  fonction,  à  chaque  exercice,  à 
chaque  métier.  Ces  traités  sont  en  très- grand  nombre 
dans  rinde. 

liO  drame  indien  (en  pràcrit  nota)  est  issu  de  la  danse. 
Cest  ainsi  que  des  fêtes  de  Bacchus  est  sorti  le  choeur, 

2ui  formait  presque  à  lui  seul  les  drames  primitifs  de  la 
Irèce.  La  danse  elle-même  parait  être  issue  des  cérémo- 
nies védiques,  ce  qui  explique  pourquoi  les  Indiens  attri- 
buent au  drame  une  origine  divine,  et  supposent  un 
poète  dramatique  et  une  troupe  d'acteurs  divins  donnant 
des  représentations  à  la  cour  céleste  d'Indra.  Toutefois, 
le  drame  ne  naquit  dans  l'Inde  qu'à  une  époque  où  la 
danse  était  entièrement  sécularisée  :  parmi  les  drames 
que  nous  possédons,  les  plus  modernes  ont  seuls  un  but 
et  un  sens  religieux  ;  les  plus  anciens  empruntent  leurs 
sujets  et  leurs  personnages  à  la  vie  ordinaire.  Ce  fait, 
après  tout,  ne  prouve  rien  quant  à  l'origine  du  drame 
indien,  puisque  nous  sommes  loin  de  posséder  les  pre- 
miers essais  qui  aient  été  faits  en  ce  genre  :  si  le  Chariot 
d*argUe  du  roi  Sudraka  est  le  plus  anden  que  nous 
ayons,  il  montre  au  contiaire  par  sa  perfection  que  le 
drame  était  cultivé  depuis  longtemps  dans  l'Inde  lorsqu'il 
parut  au  Jour.  Rien  n'indique  que  le  drame  ait  fait  partie 
des  cérémonies  sacrées  au  temps  du  roi  Sudraka;  s'il 
était  Joué  aux  Jours  des  sacrifices,  il  n'était  offert  aux 
assistants  qoe  comme  un  amusement  royal  :  ce  caractère 
de  frivolité  qui  semblait  s'attacher  aux  drames,  malgré  le 
travail  sérieux  de  leurs  auteurs,  explique  peut-être  pour- 
quoi, d'une  part,  les  anciens  drames  sont  perdus,  pour- 
quoi, de  l'autre,  ce  genre  s'est  perpétué  si  longtemps  et 
même  Jusqu'à  nos  Jours.  Les  traités  spéciaux  et  les  usages 
traditionnels  expliquent  de  même  pourquoi  la  forme  des 
drames  a  si  peu  changé  :  en  offet,  à  partir  d'une  époque 
fort  anden  ne,  les  drames  ont  fait  partie  du  cérémonial  à 
la  cour  des  rois  indiens.  On  ne  peut  guère  contester  que 
le  Chariot  d^argUe  ne  soit  antérieur  à  Kàlidftsa,  le  plus 
célèbre  poète  dnnuitique  de  l'Inde,  que  l'opinion  com- 
mune fait  vivre  à  la  cour  de  Vikramàditya,  56  ans  avant 
J.-G.  Le  pràcrit  est  en  usage  dans  les  drames  quand  on  y 
fait  parler  des  gens  du  peuple  ;  ce  langage  est  très-cor- 
rompu  dans  le  Chariot  d^argUe;  Il  l'est  moins  dans  les 
drames  attribués  à  IC&lid&sa;  mais  cela  ne  saurait  rien 
prouver  quant  à  leur  âge  relatif,  puisque,  dès  que  Ton 
sort  du  sanscrit,  la  langue  usuelle  n'a  plus  de  règles 
fixes,  et  l'usage  qu'en  fut  le  poète  est  arbitraire.  D*ail- 
leurs,  dans  plusieurs  des  meilleurs  drames  indiens,  il  y  a 
des  personnages  bouddhistes,  et,  quoique  les  drames 
soient  essentiellement  brahmaniques,  les  bouddhistes  y 
sont  traités  avec  déférence,  avec  respect  :  ces  drames 
sont  donc  au  moins  de  l'époque  où  le  bouddhisme  vivait 
dans  rinde,  et  paisiblement,  à  côté  de  la  religion  qui  de- 
vait plus  ttfd  l*en  bannir  ;  tels  sont  les  beaux  drames  de 
Bhavabhùti.  —  Les  sujets  des  drames  indiens  sont  pai^ 
fois  empruntés  à  la  vie  ordinaire;  mais  le  plus  souvent 


IND 


1070 


JND 


Us  sont  pris  dans  la  tradition  ôpiqœ  du  MahâbhArata 
ou  du  Râmdyana;  quelques-uns  prennent  leurs  sujets 
dans  le  Véda  lui-même;  d'autres,  enfin,  dans  la  légende 
de  Krishna.  La  manière  dont  ces  si^ets  sont  traités  ne 
irappelle  en  rien  le  thé&tre  erec  :  ici,  en  efTet,  il  n'v  a  que 
les  tragédies  et  des  comédies;  le  genre  mixte  des  Mo- 
ternes,  appelé  spécialement  drcane,  ne  se  rencontre  que 
chez  les  Romains  (par  exemple,  les  Captifs  de  Plante), 
et  encore  accidentellement,  confondu  avec  la  comédie. 
L*Tnde  n*a  point  de  tragédies  :  une  représentation  est 
dans  ce  pays  un  amusement  royal,  et,  à  ce  titre,  doit 
toujours  finir  bien  ;  la  yertu  doit  y  être  récompensée,  et 
le  pécheur  y  recevoir  son  pardon.  Le  chœur  n'y  tient  pas 
la  même  place  que  dans  les  pièces  grecques;  la  longueur 
des  représentations,  le  nombre  des  personnages,  la  com- 
plication do  rintrigue,  sont  poussés  beaucoup  plus  loin 
ici  que  dans  Ménandre  ou  Philémon.  Il  n*y  a  donc  aucun 
élément  commun  entre  ces  deux  thé&tres;  et,  d'autre 
part,  il  n*y  a  aucun  fait  historique  d'après  leqael  on 
puisse  dire  que  les  Indiens  aient  tiré  l'idée  du  drame 
des  théâtres  grecs  de  la  Bactriane  ou  du  PenJ&b.  »  Du 
reste ,  les  drames  anciens  de  l'Inde  sont  ou  mythologi- 
ques, comme  Vikrama  et  Urvaçi,  ou  d'intrigue  et  de 
caractère,  comme  le  Chariot  d'argile  et  le  Mudrà  Ràocasa 
(l'Anneau  du  ministre).  11  n'y  avait  point  de  théâtres  pu- 
blics; le  public  se  composait  de  la  cour  et  des  invités; 
les  acteurs,  qui  étaient  des  deux  sexes,  ne  formaient 
point  une  classe  méprisée.  Une  mise  en  scène  habile  et 
variée  représentait  les  objets  fantastiques  comme  les  ob- 
jets naturels;  il  y  avait  des  scènes  à  grand  spectacle, 
faites  surtout  pour  le  plaisir  des  yeux.  Lot  règle  des  trois 
unités  se  réduisait  à  l'unité  d'action  :  le  drame  lui-même 
était  romantique,  sans  être  né  d'un  art  matérialiste,  et 
sans  s'écarter  outre  mesure  du  naturel  et  du  bon  sens. 
Un  fait  singulier  nous  est  offert  par  le  thé&tre  indien  :  il 
y  avait  des  pièces  entièrement  métaphysiques,  où  les 

ÇBrsonnages  étaient  des  idées  :  tel  est  le  Prcibôdha- 
'chandrodaya  (Lever  de  la  Lune  de  l'Intelligence)  ;  ce 
fait  suppose  un  public  comme  aucun  thé&tre  de  l'Europe 
ancienne  ou  moderne  n'en  a  Jamais  contenu,  et  caracté- 
rise la  société  distinguée  de  l'Inde. 

La  poésie  lyrique  et  les  genres  légers  comptent  dans 
llnde  un  assez  (prand  nombre  d'écrits.  Nous  citerons  les 
deux  plus  célèbres  :  le  Nuage-Messager  ou  Mêghadûta, 
attribué  à  K&lid&sa,  et  qui  a  été  le  modèle  de  beaucoup 
d'ouvrages  semblables,  et  le  GUa^^iôvinda  {V.ce  mot% 
chant  d'amour  mystique  et  symbolique,  dont  l'auteur  est 
Jayadêva.  Cette  poésie  romanesque,  &  l'exception  de  ce 
dernier  poème,  est  d'un  style  souvent  affecté  et  d'un  ca- 
ractère sensualiste  parfois  très-dissolu  :  elle  date,  en  gé- 
néral, des  temps  ou  ont  été  dans  leur  videur  les  cultes 
de  Çiva  et  de  Krishna,  et  s'étend  depuis  le  commence- 
ment de  l'ère  chrétienne  Jusque  durant  la  domination 
musulmane.  —  La  fable  et  le  conte  sont  représentés  dans 
rinde  par  plusieurs  ouvrages  importants,  dont  l'existence 
se  lie  à  l'histoire  des  mêmes  genres  en  Occident.  Le  plus 
ancien  d'entre  eux  est  le  Pantchatantrat  dont  il  est  dif- 
ficile de  fixer  la  date,  mais  qui  certainement  n'est  pas  le 
premier  " 
c' 


de  rlnde  rapprochait  l'homme  des  animaux,  et  la  vie 
commune  (qu'ils  menaient  avec  les  hommes  invitait  ces 
derniers  à  tirer  de  leurs  habitudes  instinctives  des  règles 
de  conduite  pour  eux-mêmes.  Il  n'est  donc  nullement 
nécessaire  de  supposer  que  les  Indiens  aient  imité  les 
fables  grecques  :  mais  celles-ci  peuvent  bien  aussi  s'être 
développées  sans  l'influence  de  l'Inde;  on  sait  toutefois 
que  la  fable  est  venue  d'Asie  avec  Ésope  le  Phrygien  ;  ce 
personna^,  presque  mythologique,  Tavait-il  inventée  on 
la  tenait-il  lui-même  des  Orientaux? 

Nous  ne  pouvons  traiter  en  détail  ici  de  la  littérature 
scientifique,  qui  forme  en  sanscrit  toute  une  bibliothèque. 
Parmi  les  ouvrages  qui  la  composent,  la  philosophie  se 
place  au  premier  rang,  soit  par  son  importance  a!DsoIue, 
soit  par  son  ancienneté  et  son  long  développement  histo- 
rique (  V.  Iudibnne  —  Philosophie).  La  période  védique 
avait  déjà  discuté  ou  abordé  la  plupart  des  questions  de 
métaphysique  et  de  cosmologie,  avant  que  ces  mêmes 
problèmes  fussent  traités  en  langue  sanscrite.  Il  n'y  a  pas 
eu  d'interruption  dans  ce  mouvement  d'idées,  non  plus 
que  dans  l'usage  des  deux  langues,  puisque  celles-ci  ont 
coexisté  pendant  plusieurs  idècles.  (Test  donc  dans  le  Véda 
et  dans  les  plus  anciens  Bràhmanas  qu'il  faut  chercher 
l'ori^ne  de  toute  la  littérature  philosophique  de  llnde. 
Quant  aui  écrits  philosophiques  que  nous  possédons, 


Texistenoe  d*andennes  écoles  demeurées  célèbres  pnm?e 
cni'ils  ont  été  précédés  de  beaucoup  d'autres,  dont  plu- 
sieurs sans  doute  existent  encore  dans  le  pays.  La 
traités  de  philosophie  portent  le  nom  de  Sûtras,  fil,  en- 
chaînement d'idées.  Les  plus  anciens  eurent  pour  auteur 
Kapila,  qui  fut  plus  tara  divinisé,  et  que  l'on  considèFe 
comme  le  fondateur  du  système  sànkhya.  Cet  auteur  est 
antérieur  au  bouddhisme,  dont  la  métaphysique  est 
étroitement  liée  avec  celle  de  ce  système,  et  dont  les  lé- 
gendes le  donnent  comme  de  beaucoup  antérieur  au 
Bouddha.  Or  l'époque  de  ce  réformateur  est  ai^ourd'hui 
fixée  au  vi*  siècle  av.  J.-G«;  Kapila  semble  donc  remon- 
ter à  la  prenoière  pâriode  de  la  langue  sanscrite.  Patan- 
lali,  et  plus  tard  Y&lnavalkya,  fondèrent  et  appliquèrent 
a  la  vie  pratique  la  doctrine  du  Yoga;  ces  auteurs  sont 
représentés  comme  bouddhistes,  ou  du  moins  comme 
ayant  prêté  leur  concours  aux  ascètes  de  cette  religion 
dans  un  temps  où  elle  n'était  probablement  encore  re- 
gardée que  comme  un  système  de  philosopLiie  morale; 
il  y  a  donc  une  relation  étroite  entre  les  livres  qui  trai- 
tent du  système  sànkhya  et  ceux  qui  exposent  le  yoga  oo 
la  doctrine  de  l'Union  mystique.  Parmi  ces  derniers  od 
doit  remarquer,  outre  le  XII*  livre  du  MahAbhàrata,  la 
Bhagavadrùità,  qui  rattache  la  doctrine  du  yoga  au  cuits 
populaire  de  Krishna.  Ce  dernier  fait  semble  indiquer 
que  ce  poème  n'est  pas  d'une  date  très-ancienne  ;  plu- 
sieurs passages  font  penser  qu'il  est  contemporain  de  la 
prédication  bouddhiste  dans  l'Inde,  laquelle  comprend 
elle-même  une  longue  série  d'années.  (Test  donc  à  cette 
époque,  voisine  de  fière  du  Christ,  que  l'on  peut  le  mieux 

{uacer  le  plus  beau  développement  de  cette  partie  de  la 
ittérature  philosophique  chez  les  Indiens,  -r  A  côté  de 
cette  école,  et  un  peu  après  elle,  florissait  la  philosophie 
contenue  dans  les  Mtmansà-^ûtras  ;  l'auteur  du  plus  an- 
cien d'entre  ces  livres  est  Jaimini,  que  l'on  donne  comme 
le  révélateur  du  Sâma-Vêda;  le  Sûtra  de  Bàdar&yana 
représente  le  second  développement  de  la  même  doctrine; 
et  toutefois  l'authenticité  de  ces  deux  écrits  est  loin  d'être 
prouvée;  on  peut  seulement  dire  qu'ils  remontent  à  une 
période  assez  reculée.  Citons  encore  le  Brâhmor-sûtra, 
dont  le  but  est  d'établir  que  les  différents  systèmes  phi- 
losophiques sont  plus  ou  moins  erronés,  que  le  monde 
n'a  pas  de  réalité  substantielle,  et  que  Dieu  seul  existe 
dans  son  unité  aiisolue.  Cet  ouvrage  est  d'une  date  pos- 
térieure aux  précédents,  mais  ancienne.  —  La  logique 
est  représentée  en  sanscrit  par  une  longue  suite  d'ou- 
vrages, appelés  également  Sûtras,  qui  se  rattachent  aux 
différents  systèmes  de  philosophie  et  de  métaphysique. 
Les  recherches  logiques  ont  occupé  les  plus  anciens 
br&hmanes;  il  en  est  déjà  question  dans  Manou.  Hais  les 
anciens  traités  de  logique  sont  perdus  ou  ne  sont  pas 
entre  nos  mains;  les  autres,  qui  sont  plus  récents,  sont  ' 
réunis  sous  les  noms  de  Kan&da  et  de  Gôtama,  auteurs 
d'une  époque  incertaine. 

Dans  la  littérature  brahmanique  se  rangent  encore  les 
ouvrages  de  grammaire.  P&nini ,  considéra  comme  le  lé- 
gislateur de  Ta  langue  sanscrite ,  est  d'une  époque  fort 
ancienne,  bien  qu'il  dte  les  Yavanas  (Ioniens  ou  Grecs), 
puisque  ce  nom  désigne  peut-être  les  Occidentaux  en  gé- 
néral. Sa  grammidre  est  un  livre  d'une  grande  valeur, 
et  que  les  Indiens  ont  souvent  enrichi  de  commentaires. 
Citons  aussi  le  Vocabulaire  d'Amarasinha,  auteur  cité 
comme  contemporain  de  K&lid&sa;  les  traités  de  Rhéto- 
rique, de  Poétique,  de  Métrique  composés  à  différentes 
époques,  mais  dont  les  principes  remontent  trè&-haut 
dans  rhistoire  et  se  rattachent  a  la  période  antique  des 
Vêdas.  —  L'Astronomie  a  produit  dans  l'Inde  un  assez 
grand  nombre  d'ouvrages,  dont  plusieurs  ont  une  impor- 
tance réelle  pour  Thistoire  de  cette  science.  Ce  sont  les 
Indiens,  en  effet ,  qui  ont  inyenté  les  chiffres  décimaux, 
l'ariûimétique  et  ralgèbre,  transmises  à  l'Occident  par 
rintermédiaire  des  Anbes,  et  plus  tard  reportées  par  eux 
aux  bidiens  eux-mêmes  avec  l'astronomie.  —  La  méde» 
cine  a  eu  dans  l'Inde  un  développement  orignal  :  les 
traités  qui  existent  ont  un  intérêt  particulier,  soit  en  eux- 
mêmes,  soit  au  point  de  vue  de  l'histoire  de  cet  art.  ^ 
Enfin  nous  indiquons  seulement  en  passant  les  traités 
relatifs  à  la  peinture,  à  la  sculpture,  à  l'art  de  bl^r,  à 
l'art  militaire,  etc.,  pour  faire  sentir  combien  est  riche  la 
mine  que  la  littérature  sanscrite  offre  à  l'Occident. 

Littérature  bouddhique,  —  Le  Bouddha  parut  dans  le 
VI*  siècle  av.  J.-C;  il  prêcha,  sans  rien  écrire.  Ses  pré- 
dications s'adressaient  tantôt  aux  br&hmanes,  tantôt  an 
peuple  :  au  point  de  vue  métaphysique,  elles  se  rattachaient 
au  système  sânkhyaf  et  n'apportaient  rien  de  nouTeau; 
mais  elles  tendaient  à  faire  une  réforme  dans  les  mœurs 


INB 


1071 


IND 


nia  vie  religieiiBe,  et  proToquaient,  par  le  principe  de 
réputé  des  hommes  devant  la  Loi,  l'abolition  des  castea 
et  par  conséquent  une  révolution  politique  (  V.  Booo- 
Dusm).  Cette  tendance  démocratique  de  la  réforme  se 
fut  sentir  dans  tonte  la  littérature  bouddhique.  Il  en 
rtsolte,  en  effet,  que,  s'adressant  aux  masse&populairea, 
les  prédicateurs  et  les  moralistes  nouveaux  sont  obligés 
(fempioyer  leurs  expressions,  leur  langage,  leurs  figures 
de  s^le ,  et  de  s^écarter  par  conséquent,  non-seulement 
des  regles  de  P&nini,  mais  des  habitudes  grammaticales 
de  la  société  distinguée  de  leur  temps.  Dans  la  littérature 
briLhmaniquei  le  pr&crit  n'apparaît  qu'accidentellement 
dans  les  drames;  dans  la  littérature  nouddhique,  il  est 
partout.  En  outre,  les  nécessités  mêmes  de  renseigne- 
ment populaire  forcent  le  maître  à  développer  longue- 
ment  ses  idées,  à  les  reprendre  sous  diverses  formes ,  à 
les  appuyer  par  des  exemples  ou  des  figures  :  de  là  la 
diffusion  qui  règne  dans  beaucoup  d'ouvrages  bouddhi- 
ques, les  répétitions,  les  redondances;  de  là  aussi  des 
récits  pleins  d'intérôt ,  et  des  paraboles  d'un  sentiment 
profond  et  exquis.  Le  sentiment  moral,  la  charité,  forme 
ea  effet  le  fond  le  plus  ordinaire  des  éôits  bouddhiçiues, 
10  moins  des  plus  sndens;  les  doctrines  métaphysiques 
et  les  règles  hiérarchiques  ne  furent  exposées  que  plus 
tard  dans  des  ouvrages  spéciaux.  Néanmoins,  selon  la 
tradition,  le  premier  concile,  qui  se  réunit  dans  le  Mag- 
hada  immédiatement  après  la  mort  de  Çàlcya-muni, 
divisa  déjà  les  écrits  sacrés  en  trois  séries,  comprises  en- 
semble sous  le  nom  de  Tripitaka  ou  les  Trois-GorbeiUes 
on  Recueils  ;  la  première  contenait  la  doctrine  du  Boud- 
dba  lui-même  sous  le  nom  de  SiUr<is,  la  seconde  les 
règles  de  discipline  ou  le  Vinaya,  la  troisième  la  méta- 
physique ou  lAbhidharma.  Cette  division  primordiale 
s*est  perpétuée  dans  les  pays  bouddhistes  du  Nord  et  du 
Sud.  En  dehors  de  ce  premier  corps  de  livres  bouddhi- 
ques, furent  composés  un  grand  nombre  de  discours, 
surtout  à  partir  du  règne  d'Açôka,  le  grand  propagateur 
de  la  foi  nouvelle;  car  le  concile  qui  fut  tenu  sous  son 
règne  décida  qu'elle  serait  prèchée  en  tous  lieux  par  des 
missionnairea,  ce  qui  eut  lieu  en  effet.  La  collection  des 
livres  sacrés  fut  faite  une  dernière  fois  dans  le  Nord  sons 
le  règne  de  Kanishka  (Kanerki  ),  quatre  cents  ans  après 
la  mort  du  Bouddha  :  ces  livres  existent  encore;  une 
partie  considérable  est  entre  nos  mains,  réunie  récem- 
ment dans  le  Népal  par  M.  Hodgson  ;  nous  en  possédons 
en  outre  la  traducàon  tibétaine  complète  en  cent  vo- 
lumes sous  le  nom  de  Kah-gyur,  et  différentes  autres 
traductions  étrangères  à  l'Inde.  Apportés  dans  Tlle  de 
Ceylan  par  l'apètre  Blahèndra  au  milieu  du  ul*  siècle 
tv.  J.-C,  ils  s'y  conservèrent,  et  ne  furent  traduits  en 
pili  qa'an  commencement  du  v*  siècle  de  notre  ère: 
c'est  sous  cette  forme  qu'ils  existent  encore  à  Ceylan , 
ainsi  que  dans  le  royaume  de  Siam.  Nous  possédons  en 
pâli  de  Ceylan  le  McMvança,  composé  à  la  fin  du 
V*  siècle  de  notre  ère.  Les  Sûtras  sanscrits  du  Népal , 
comme  Ta  établi  £ug.  Burnouf ,  sont  de  deux  époques 
différentes  et  se  divisent  en  deux  catégories  :  les  Sûtras 
simples  et  les  grands  Sûtras;  ceux-ci,  postérieurs  pour 
la  langue ,  la  forme  et  la  doctrine ,  ne  sont  que  le  déve- 
loppement des  premiers ,  et  montrent  la  personne  du 
maitre  au  milieu  d'un  cortège  de  dieux  et  de  personnages 
fantastiques  dont  les  Sûtras  simples  sont  exempta  ;  les 
récits  de  ces  derniers  et  leurs  pcuraboles  s'y  retrouvent , 
mais  amplifiés  et  délayés  avec  une  abondance  excessive, 
^antériorité  des  Sûtras  simples  par  rapport  aux  autres 
est  démontrée  par  leur  simplicité  relative ,  mais  surtout 
par  le  point  de  développement  où  la  doctrine  est  parve- 
nue dans  les  uns  et  d^ns  les  autres;  quant  aux  grands 
Sûtras,  ils  existaient  déjà  au  temps  du  voyageur  chinois 
Fa-Hian ,  vers  la  fin  du  iv^  siècle  et  le  commencement 
du  V*,  épo^e  où  l'on  doit  conséquemment  penser  que  le 
culte  de  Çiva  était  déjà  ancien  dans  l'Inde  brahmanique. 
Ce  fait ,  Approché  de  beaucoup  d'autres,  montre  la  pos- 
tériorité du  bouddhisme  par  rapport  à  la  religion  des 
brUimanes,  et  que  ces  deux  reliions  sont  issues  l'une 
de  Taatre  et  n'ont  pas  puisé  simultanément  à  une  source 
commune.  Le  panthéon  brahmanique  a  passé  presque 
toot  entier  dans  le  bouddhisme  ;  mais  les  Sûtras ,  sur- 
tout les  derniers  en  date,  l'ont  accru  d'une  hiérarchie 
d*esprits  supérieurs,  dont  le  dernier  degré  est  celui  de 
Bouddha  parfaitement  accompli;  l'antique  Br&hma  s'j 
trouve,  mais  dédoublé  et  placé  à  un  rang  inférieur.  Mais 
les  dieox  brahmaniques  sont  plutôt  des  conceptions  poé- 
tiques et  des  personnifications  littéraires  des  forces  ne  la 
nature  que  des  êtres  dont  l'existence  ait  une  valeur  réel- 
iemeot  philoaopbiqae  :  pour  devenir  tels  et  entrer  dans 


une  doctrine  où  Ton  tient  à  peine  compte  de  la  notion  de 
Dieu ,  il  a  donc  fallu  que  ces  antiques  conceptions  vôdi« 
ques  eussent  dépouillé  en  grande  partie  leur  caractère 
primitif  pour  devenir  des  notions  philosophiques  et  dé- 
signer des  degrés  dans  la  hiérarchie  céleste.  Cette  re* 
marque  porte  sur  toute  la  littérature  védique,  à  l'excep- 
tion peut-être  des  plus  anciens  Sûtras,  et  sur  la  majeure 
et  la  meilleure  partie  de  la  littérature  brahmanique.  En 
effet ,  celle-ci ,  principalement  dans  l'épopée ,  nous  pré- 
sente les  dieux  sous  la  figure  d'êtres  poétiques  et  symp 
boliques,  en  tout  semblables  aux  dieux  de  la  Grèce.  Les 
parties  où  ils  n'ont  pas  ce  caractère  sont  pour  cela  même 
regardées  conmie  des  interpolations  et  rangées  parmi  les 
écrits  relativement  modernes;  le  reste,  c.-à-d.  le  fond 
primitif  de  ces  poèmes ,  doit  donc  être  considéré  coouna 
antérieur  de  beaucoup  d'années  à  la  naissance  du  boud- 
dhisme, c-à-d.  au  VI*  siècle  av.  J.-C.  Enfin,  les  plus 
anciens  Sûtras  bouddhiques,  ceux  qui  remontent  au 
dernier  concile,  nous  offrent  le  tableau  d'une  société  mo- 
ralement et  matériellement  tojzibée  très-bas  par  l'excès 
môme  de  sa  civilisation  ;  cela  seul  peut  expliquer  le 
grand  succès  de  la  prédication  du  Bouddha ,  non-seule- 
ment dans  le  bas  peuple ,  mais  dans  toutes  les  castes  de 
l'Inde.  Or,  cette  civilisation  excessive,  ces  vices,  ces 
misères,  ne  se  montrent  nullement  dsLUs  les  épopées, 
comme  ils  se  font  sentir  par  exemple  dans  Virgile,  et 
comme  ils  se  voient  dans  les  drames  indiens.  Ces  consi- 
dérations essentielles  marquent  dans  quelle  phase  litté- 
raire de  rindeon  doit  placer  cette  littéi^ure  bouddhique, 
qui  n'jT  a  fait  pour  ainsi  dire  qu'une  apparition  de  quel- 
ques siècles,  et  qui  s'en  est  exilée  avec  la  doctrine  eUe- 
même  et  ses  représentants. 

On  doit  considérer  comme  postérieurs  à  la  collection 
du  TripikUoa  les  nombreux  ouvrages  connus  sous  le  nom 
de  Tantras,  Ce  titre  désignait  déjà  des  écrits  brahmani- 
ques d'une  période  littéraire  plus  ancienne;  les  Tantras 
bouddhiques ,  qui  sont  au  point  de  vue  litténdre  d'une 
extrême  pauvreté,  offrent  cet  intérêt,  qu'ils  marquent 
une  phase  du  développement  des  idées  bouddhistes  dans 
l'Inde.  Ils  portent  généralement  la  marque  d'une  influence 
des  cultes  brahmaniques  sur  la  nouvelle  religion,  et  d'une 
sorte  de  retour  de  celle-ci  vers  l'ancienne.  Pleins  de  for- 
mulée de  superstition  et  de  magie,  les  Tantras  bouddhi- 
ques semblent  être  le  produit  d'une  alliance  entre  le 
culte  du  Bouddha  et  celui  de  Çiva;  de  sorte  que  ce  der- 
nier, qui  est  encore  en  vigueur  dans  l'Inde,  se  trouve, 
par  le  tait  de  son  union  avec  le  bouddhisme,  rangé 
parmi  les  derniers  développements  des  idées  brahma- 
niques. 

L'étude  détùUée  de  la  littérature  bouddhique  doit  être 
d'un  grand  secours  pour  résoudre  plusieurs  questions  de 
chronologie  dans  les  lettres  sanscrites.  En  effet,  celles-d 
n'ont  point  de  dates;  la  religion  nouvelle  en  a  plusieurs, 
qui,  par  la  comparaison  prudente  des  traditions  du  Sud 
et  du  Nord  avec  les  données  des  Chinois  et  des  Grecs , 
peuvent  se  déterminer  à  peu  d'années  près.  Quand  un 
ordre  définitif  sera  étabh  entre  les  ouvrages  bouddhi- 
ques, et  la  date  de  chacun  d'eux  assurée,  le  rapproche- 
ment des  doctrines  philosophiques  et  religieuses,  de 
l'état  social,  politique,  moral,  littéraire,  matâiel  même, 
auquel  donnera  lieu  chacun  des  ouvrages  brahmaniques, 
pourra  indiquer,  au  moins  approximativement,  l'époque, 
sinon  la  date  de  ces  derniers,  et  établir  une  aorte  de 
chronolo^e  dans  cet  amoncellement  prodigieux  de  la  lit- 
térature indienne.  On  devra  aussi  ne  pas  perdre  de  vne 
que  llnde  a  eu  son  développement  littéiâire  original , 
qu'elle  n'a  imité  aucun  peuple  antérieur,  qu'à  cet  égard 
elle  s*est  trouvée  dans  les  mêmes  conditions  que  la  Grèce 
ancienne  :  par  conséquent,  tout  porte  à  croire  que  les 
genres  littéraires  sont  venus  chez  le»  Indiens  dans  le 
même  ordre  que  chez  les  Grecs;  ce  n'est  là  qu'une  don- 
née à  priori ,  mais  que  les  études  faites  Jusqu'à  présent 
tendent  à  confirmer  de  plus  en  plus.  L'ordre  que  non^ 
avons  dû  suivre  nous-même  dans  cet  exposé  n'est  pas 
fondé  sur  des  résultata  toujours  certains  ;  il  ne  peut  que 
représenter  les  probabilités  où  est  parvenue  la  critique 
en  ce  moment;  or,  son  œuvre  est  loin  d'être  finie.  Il  fau- 
drait, pour  qu'elle  se  fit  désormais  avec  quelque  certi- 
tude ,  que  la  majeure  partie  des  textes  sanscrits  fût  non- 
seulement  publiée,  et  elle  ne  Test  pas,  mais  traduite,  et 
elle  est  fort  loin  de  l'être.  L'état  des  études  sanscrites  en 
Europe  a  fait  quelques  progrès ,  puisque  ces  études  se 
répandent  de  plus  en  plus  ;  m^s  elles  sont  encore  tout  à 
fait  individuelles  en  France,  et,  malgré  une  chaire  de 
sanscrit  au  Collège  de  France,  elles  ne  reçoivent  à  pea 
près  aacuD  encouragement.  Toutefois  il  y  a  Ûeu  dépenser 


IND 


1072 


IND 


OQfti  Ml  réiatlom  tenc  rOrient  s*accroi8aaiit  chaque  ]oar, 
rintMi  fera  ce  qae  D*ont  pu  faire  Taaioar  de  la  science 
et  le  déiir  éclairé  de  préparer  ravenir. 

V.  Golebrooke,  Essai  sur  Us  Védas,  en  anglais,  dans 
les  R9eh9rch9S  AsicUiques  de  Calcutta  ;  Ward,  Aperçu  de 
VhiMtaire,  de  la  littérature  et  delà  mythologie  des  /n- 
diens,  Serampour,  1818,  S  roi.  in-4*;  Roth,  Sur  la  lit- 
UraUere  et  f histoire  des  Vidas,  en  allemand,  1846; 
MèTe,  Études  sur  les  hymnes  du  Rig-Véda,  Lauvain, 
184i,  in-8*;  Gardn  de  Tassy,  ffistolre  de  la  littérature 
hindoue  et  hindoustani,  1837-47,  %  toI.  grand  in-8'  ;  Lan- 
slois.  Monuments  littéraires  de  l'inde,  ou  Mélanges  de 
Uttérature  sanscrite,  contenant  une  eocposition  raptde  de 
e^te  littérature,  etc.,  Paris,  18^7,  in-8<>;  Che(S'd:asuwe 
du  théâtre  indien,  traduits  de  Voriginal  sanscrit  en  an- 
glais ,  par  Wilson,  et  de  Vanglais  en  français  par  Lan- 
giois,  1828,  2  vol.  !n-8^;  Weber,  Études  indiennes,  en 
allemand,  1850-51  ;  le  même,  Histoife  de  la  littérature 
indienne,  traduite  de  l'allemand,  inr  Sadous,  in-8%  1859; 
Eue.  Bumouf,  introduction  à  Vhistoire  du  Bouddhisme, 
in-4*,  1844;  LDiseleur-Desloagcham|iSf  Essai  sur  les  Fa^ 
Ues  indiennes,  1838;  Soupe,  Esstù,  critique  sur  la  littérO" 
îure  indienne,  1856,  in-12;  Eichboff,  Poésie  hérotquedes 
indiens  comparée  d  V épopée  grecque  et  romaine,  PaiU, 
1860 ,  in-8*>  ;  Hsberlin ,  Anthologie  sanscrite ,  Calcutta , 
I847y  recueil  de  poésies  lyriques  indiennes  ;  Gildemeister, 
Bildtothecœ  sanscritm  spécimen ,  catalogue  des  ouvrages 
lanscrits  imprimés,  Bonn,  1847.  Em.  B. 

mniBimB  (Philosophie).  La  philosophie  remonte  aux 
plus  anciens  temps  de  la  race  indienne.  Elle  est  anté- 
rieure, dans  ses  premières  spéculations,  à  Tépoque  où 
les  Aryens  descendirent  dans  les  vallées  du  Gange  et  de 
la  Yamun&  :  en  effet,  les  hymnes  du  Vida  ont  pour  la 
plupart  été  composés  dans  le  Pei^àn  ;  plusieurs  semblent 
remonter  au  temps  où  les  Aryens  faisaient  encore  partie 
de  ce  noyau  central  de  populations  bactriennes  qui  a 
produit  toutes  les  branches  de  la  famille  indo-euro- 
péenne. Or,  c*est  dans  ces  hymnes  que  Ton  doit  chercher 
bs  premiers  essais  de  la  pensée  philosophique  :  les  doc- 
trines métaphysiques  ne  sont  pas  nées  toutes  faites  à 
certaines  époques  déterminées  de  nos  histoires  ;  elles  se 
•ont  dégagées  par  degrés  de  conceptions  obscures,  dont 
la  forme  primitive  et  presque  complète  se  trouve  dans 
le  Véda»  Lee  écrits  composés  ultérieurement  par  les 
BrUimanes,  soit  en  langue  védique,  soit  en  sanscrit, 
et  dont  plusieurs  sont  évidemment  modernes,  portent 
louvent  la  trace  de  systèmes  philosophiques  tout  faits  et 
auxquels  les  auteurs  du  Véda  n*avaient  nullement  songé. 
A  ce  titre,  la  plupart  des  Brâiimanas,  les  Sûtrae,  Tes 
Upanishads  {Y.  Iudibnui—  Littérature),  sont  plutdt  faits 
pour  égarer  la  critique  historique  que  pour  la  guider 
dans  rétude  des  temps  primitifs. 

Le  Véda,  considéré  dans  ses  plus  anciens  hymnes,  ne 
porte  la  trace  d*aucune  philosophie,  d*aucune  doctrine 
religieuse  ayant  existé  antérieurement.  Le  spectacle  de 
la  nature  avec  ses  phénomènes  réguliers  et  périodiques, 
puis  un  retour  sur  la  pensée  elle-même,  inspirèrent  aux 
Aiyens  Tidée  que  ces  grands  mouvements  étaient  pro- 
duits el  dirigés  par  des  puissances  invisibles,  auxquelles 
ils  donnèrent  des  noms;  les  astres,  les  vents,  les  nuages, 
la  foudre,  les  eaux,  le  feu ,  f^ppèrent  surtout  ces  âmes 
méditatives  d*une  admiration  toute  philosophique;  ces 
objets  étant  pour  les  hommes  la  source  visible  de  tous 
les  biens,*elles  i^outèrent  à  Tétonnement  un  sentiment 
d'amour  mêlé  quelquefois  de  crainte,  et,  la  pensite  phi- 
losophique prenant  un  tour  religieux,  on  adora  les  dieux. 
La  première  conception  philosophique  fût  donc  le  poly- 
théisme pur,  sans  aucune  trace  de  monothéisme  et  dans 
on  temps  où  Ton  était  loin  encore  de  Tidée  de  crâation 
et  de  créateur.  Plus  tard  les  chefs  de  famille,  qui  étaient 
les  prêtres,  se  réunissant  pour  conférer  sur  les  matières 
religieuses,  les  cultes  se  rapprochèrent,  se  groupèrent; 
certains  dieux  furent  placés  avant  les  autres  dans  la 
hiérarchie  céleste;  mais  aucun  d'eux  ne  se  transfigura  au 

£oint  de  devenir  Dieu  lui-même;  leur  réalité  corporelle 
»  retint  toi]^ours  à  un  niveau  inférieur,  et  les  empêcha 
de  devenir  des  êtres  purement  métaphysiques.  Dieu 
n'existe  pas  dans  le  Panthéon  védique,  non  plus  que 
dans  celui  des  Grecs,  des  Romains  et  des  peuples  du 
Nord  de  l'Europe.  Ces  rameaux  se  sont  séparés  du  tronc 
commun  avant  le  grand  hymne  de  Dirghatama,  où  Tunité 
de  Dieu  apparaît  pour  la  première  fois  dans  toute  son 
élévation  métaphysique.  A  partir  de  cet  hymne,  la  phi- 
losophie indienne  a  trouve  sa  voie,  le  panthéisme  est 
fondé.  Le  développement  des  doctrines  Indiennes,  depuis 
loor  origine  Jusqu'à  nos  Jours,  a  constamment  été  do* 


miné  par  la  pensée  védique,  c-àrd.  par  le  panthéisme. 
Ceux  des  systèmes  ultérieurs  qui  se  rapprochent  soit  de 
l'athéisme  et  du  matérialisme,  soit  du  dogme  de  la  créa- 
tion, n'échappent  pas  néanmoins  à  la  pensée  commune 
d'un  dieu  impersonnel,  et  rentrent  par  quelque  côté  dans 
la  croyance  universelle  de  l'Orient  ftryen  ;  les  sectes  reli- 
gieuses, issues  de  doctrines  philosophiques  plus  on  moins 
hétérodoxes,  sont  néanmoins  panthéistes  dans  le  fond  de 
leurs  dogmes. 

Les  oeuvres  qui  ont  trait  à  la  vie  physique  ayant  été 
confiées  dans  rinde  aux  castes  inférieures,  la  vie  intel- 
lectuelle fut  l'apanage  des  deux  premières  castes,  et  plus 
particulièrement  des  Brahmanes,  puisque  les  Xatriyaa, 

3uoique  instruits  dans  le  Vida  et  dans  la  connaissance 
e  la  loi,  avaient  pour  fonction  essentielle  la  guerre  et 
le  gouvernement  des  États.  Le  développement  de  la 
science,  le^  recherches  philosophiques  et  la  méditation  « 
furent  le  lot  des  mêmes  hommes  que  la  constitution  des 
castes  chargeait  des  cMmonies  du  culte,  de  la  conserva- 
tion et  de  l'interprétation  des  saintes  Écritures.  Les  phi- 
losophes indiens  sont  donc  presque  tous  des  Brahmanes; 
le  Bouddhisme  seul,  en  ouvrant  à  tous  la  caste  des  brah- 
manes, sécularisait  la  philosophie  et  la  théologie  à  la  fois  ; 
mais,  chassé  de  l'Inde,  il  ne  put  recevoir  qu'au  dehore 
ses  grands  développements.  —  L'indépendance  primitive 
des  familles  aryennes  eut  pour  conséquence  l'égalité  des 
brihmanes  entre  eux,  et  l'Impossibilité  d'établir  on 
centra  religieux  où  l'unité  de  dogme  fût  conservée.  L'in- 
terprétation du  Véda  fut  donc  livrée  à  la  raison  indivi- 
duelle de  chacun  des  prêtres,  ou  tout  an  plus  à  certains 
collèges  de  brahmanes ,  dont  l'autorité  ne  put  Jamais 
être  assez  grande  pour  s'imposer  à  la  caste  entière  :  les 
brahmanes,  maîtres  de  ce  texte  où  aucun  dogme  n'est 
énoncé  sous  une  forme  définitive,  indépendants  du  pou- 
voir dvil  et  politique,  qui  leur  était  subordonné,  indé- 
pendants spirituellement  les  uns  k  l'égard  des  autres , 
Jouirent  de  la  plus  grande  liberté  philosophique  dont 
l'histoire  fasse  mention.  Les  systèmes  purent  donc  se 
développer  sans  réticences;  la  sécurité  était  assurée  à 
leurs  auteurs  :  ceux  même  qui  créèrent  les  doctrines  à 
nos  yeux  les  moins  acceptables  n'en  étaient  pas  moins 
considérés,  puisque,  tout  en  se  trompant,  ils  avalent  fait 
preuve  d'une  haute  intelligence  et  développé  certaines 
parties  de  U  science;  on  attaouait  la  doctrine,  mais  la 
personne  était  respectée.  —  Quant  à  l'apparition  suc- 
cessive des  systèmes,  il  n'est  pas  aisé  a'en  suivre  la 
marche.  Leurs  auteurs,  ayant  été  l'objet  de  l'admiration 
universelle,  ont  été  pour  la  plupart  reportés  à  des  dates 
trop  anciennes,  et  toi^ours  Indéterminées,  parles  In- 
diens des  temps  postérieurs.  Les  livres  où  ces  systèmes 
sont  exposés  n'ont  point  de  date:  leur  époque  ne  peut 
être  assignée  que  par  Fétude  détaillée  de  chacun  d'eux, 
et  par  la  comparaison  toujoun  difficile  des  doctrines  ou 
des  faits  qu'ils  contiennent.  L'apparition  du  Bouddhisme 
dans  le  courant  du  vi*  siècle  av.  J.-C.  est  la  première 
date  à  peu  près  certaine  que  l'on  rencontre,  et  c'est  de  là 
qu'il  faut  partir  pour  rétablir  la  succession  chronologique 
des  doctrines.  Or,  Jusqu'à  présent,  rien  ne  prouve, 
comme  on  l'a  avancé  dans  la  dernière  école  française, 
que  cette  succession  ait  obéi  à  la  même  loi  que  celle  des 
philosophies  de  la  Grèce  :  au  contraire.  Il  est  à  peu  près 
incont^table  que  le  panthéisme,  avec  le  mvsticisme 
théorique  et  pratique,  a  régné  dans  llnde  dès  les  temps 
les  plus  reculés,  et  que  les  autres  systèmes  se  sont  pro- 
duits plus  tard ,  tandis  qu'en  Grèce  ils  étaient  venus  les 
premiers.  Le  panthéisme,  c-à-d.  l'unité  absolue  de  l'être, 
était  une  doctrine  védique  avant  d'être  le  fondement  de 
la  société  brahmanique,  et  ainsi  toute  la  philosophie  in- 
dienne est  postérieure  à  cette  idée;  tandis  qu'en  Grèce 
cette  même  idée,  indiquée  peut-être  par  Platon,  qui  avait 
quelque  connaissance  des  doctrines  orientales  enseignées 
par  les  Pythagoriciens,  n'est  devenue  le  fondement  d'un 
grand  système  que  dans  l'école  d'Alexandrie,  à  U  fin  du 
développement  des  Idées  grecques,  et  dans  une  ville  où 
depuis  plusieurs  siècles  l'Onent  et  l'Occident  se  don- 
naient chaque  Joor  la  main.  Il  faut  donc  se  garder  de 
reconstruire  à  priori  la  chronologie  philosophique  de 
l'Inde  en  la  calquant  sur  celle  de  la  Grèce  t  lire  les  textes, 
les  comparer,  s'éclairer  par  les  sjmchronismes  grecs, 
arabes,  chinois,  etc.,  telle  est  la  seule  manière  de  ré- 
soudre cet  immense  problème,  non  encore  résolu*  La 
tradition  brahmanique  doit  aussi  être  mise  en  compte, 
malgré  ses  exagérations;  car,  si  les  brahmanes ,  dans 
leur  enseignement  traditionnel,  ont  peu  à  peu  outié  l'an- 
tiquité de  leurs  auteurs,  11  est  probable  n&nmoins  qu'ils 
ont  conservé  leurs  dates  relatives ,  dates  qu'une  critique 


IN9 


107} 


INP 


pmdente  peat  rdCablir  appioximallvenieat  dans  la  chr»- 
Dolo^  onifenelle. . 

On  peat  conaidérer  toute  la  philosophie  indienne 
oomme  lUsant  parde  du  Brahmanisme.  Issu  de  la  philo- 
lophie  nommée  SànMya,  le  Bouddhisme  n'a  pas  apporté 
une  métaphystoue  nouvelle  ;  il  n*a  fait  que  développer  et 
appliquer  les  doctrines  enseignées  depuis  longtemps. 
TtMitefoîs,  à  partir  du  Jour  où  il  prit  dans  Tlnde  une  im- 
portance menaçante  pour  le  rédme  des  castes,  il  se  sé- 
pan  métaphysiquement  du  Brahmanisme,  comme  il  s*en 
était  séparé  socialement,  et  11  eut  son  développement 
propre  en  matière  de  philosophie. 

Ecoles  bràkmamquet, — Îa  durée  de  ces  écoles  n*a  pas 
été  limitée  par  les  antres  :  de  beaucoup  antérieures  au 
Bouddhisme,  ellea  ont  reçu  encore  de  nouveaux  déve> 
loppements  après  lui.  Le  VédAnta,  qui  porte  aussi  le 
Dom  de  Uttara^mimàniâ,  contient,  avec  la  fHlrva-m»- 
mÔMâ  (ancienne  MimânsA)^  les  premières  spéculations 
br&hmaniquea.  Cependant  plusieurs  critiques  considè- 
nat  le  qfstème  SAn^ù^fa  comme  plus  ancien  encore, 
qQoiquIl  s'éloisne  davantage  de  Torthodozie  fondée  sur 
le  Vida.  Hais  II  semble  que  les  doctrines  de  ce  dernier 
système  aient  quelque  chose  de  plus  moderne,  et  aient 
été  en  partie  développées  par  opposition  avec  les  spécu- 
btioas  fondées  exclusivement  sur  les  Livres  saints.  En 
effet,  ce  qui  caractérise  le  plus  profondément  ces  deux 
kUes,  c'est  que  les  Mimânm  sont  essentiellement  théo- 
loçques  tandis  que  le  Sânkhya  contient  l'effort  indivi- 
diKl  fait  par  sea  auteurs  pour  séculariser  les  spéculations 
philosophiques  et  les  soustraire  k  la  tyrannie  du  texte  du 
Tida,  C'est  œ  texte  que  les  Vèdàntlstes  opposent  aux  doc- 
trioes  libres  du  Sânkhya^  comme  c'était  aussi  sur  des 
textes  védiques  que  les  auteurs  de  la  première  Mimànsâ 
appuyaient  leurs  doctrines.  Le  SànlAya,  au  contraire, 
ae  fonde  d'ordinaire  sur  la  libre  autorité  de  la  raison,  et 
ne  tire  des  textes  du  Véda  que  les  conséquences  con- 
formes à  sa  doctrine;  plus  tard  les  Yôgls  en  vinrent  Jus- 
qu'à rejeter  l'autorité  du  Véda  lui-même,  sous  prétexte 
que  l'on  trouver  tout  ce  aue  l'on  veut  dans  le  Véday  et 
que  ce  recueil  est  semblable  à  un  puits  qui  déborde  de 
tous  c6tés  ;  enfin  la  tentative  du  bouddha  G&kya-Muni 
prenait  son  point  de  départ  dans  le  Sânkhya,  oomme 
dans  le  système  le  plus  libre  et  le  plus  propre  à  fonder 
on  noovêl  ordre  de  choses.  Or,  Il  est  naturel  que  la  doc- 
trine précède  la  réforme,  et  que  l'autorité  soit  antérieure 
à  Teflort  que  l'on  fait  |>our  sy  soustraire.  Cette  autorité, 
qoi  du  reste  ne  réussit  lamais  à  s'établir  dans  l'Inde, 
c'est  celle  qui  s'appuyait  sur  le  Livre  saint,  en  commen- 
tait le  texte  et  en  conservait  la  lettre.  Si  le  VédAnta  (ou 
seconde  MimAnsà)  est  postérieur  au  système  Sânkhya^ 
il  est  donc  au  moins  vraisemblable  que  la  Pûrvarmi- 
siéatd  l'a  précédé.  Ce  dernier  mot  signifie  simplement 
tpécuhtion;  il  est  employé  dans  les  BrAhmamu,  ainsi 
qœ  le  mot  SàMiya,  mais  tous  deux  probablement  dans 
leur  aena  général ,  et  non  pour  désigner  des  systèmes 
phiknophiquea,  qui  sont  postérieurs  aux  Brdhmanas,  du 
moins  aux  plus  anciens.  La  PùrwMntmànsA  est  à  peine 
on  système;  elle  porte  aussi  le  nom  àeKarma^mnnAnsA, 
OQ  doctrine  des  œuvres;  elle  n'apporte  aucun  développe- 
ment métaphysique  réel  aux  spéculations  contenues  dans 
le  Vida  ;  et  cette  mtmdiwd  tout  entière  ne  vaut  peut- 
être  pas,  comme  philosophie,  le  seul  hymne  de  Dlrgha- 
tama.  Elle  est  purement  théologique  et  surtout  pratique; 
son  but  est  de  mettre  d'accord  les  textes  contenus  dans 
les  commentaires  védiques  et  d'en  donner  le  véritable 
KQs;  mais  son  prindiMil  objet  est  de  formuler  des  pré- 
ceptes pour  raccomplissement  des  œuvres.  Le  sûtra 
biihfflaoique  où  est  exposée  Fancienne  Mimànsâ  est 
ftttribuéà  Jaimittî,  oui  plus  tard,  ayant  reçu  les  hon- 
neurs d'une  sorte  d  apothéose,  fût  considéré  comme  le 
ré?âateor  du  SAnuMféda,  Hais  ce  sûtra  nomme  Bàda- 
rtyana,  auteur  de  la  seconde  Mmânsâ  :  toutefois,  comme 
Is  réciproque  a  lieu  également,  on  n'en  saurait  conclure 
que  Fandenne  Mimànsâ  soit  postérieure  &  la  seconde. 
Ces  noms  ont  pu  être  Intercalés  par  la  suite  dans  ces 
anciens  écrita.  Les  doctrines  philosophiques  admises 
dans  l'andenne  Mùnânsâ  y  sont  touiours  subordonnées 
à  la  tradition  religieuse  (c-à-d.  au  Véda)^  qui  est  pour 
ns  théologiens  la  principale  source  de  la  connaissance 
en  matière  de  science  et  la  seule  en  matière  de  moraleu 
Ua  procédés  philosophiques,  appliqués  par  eux  au  déve- 
loppement et  à  l'interprétation  des  textes  sacrés,  sont 
d*aoe  uniformité  tout  htératique,  et  nous  montrent,  dans 
li  période  06  cette  théologie  s'est  produite,  une  sorte  de 
moyen  lige  assez  semblable  au  uètre.  Comme  lui  aussi, 
la  théologie  de  l'andenne  Mimâmâ  s'est  n^ue,  ches 


les  commentateurs  des  siècles  suivants,  dans  une  véfi* 
table  casuistique.  Du  reste,  elle  est  intimement  liée  avocj 
le  développement  des  questions  de  logique  pure  et  ap- 
pliquée, de  grammaire  et  de  rhétorique;  elle  a  abordé,, 
sinon  poulevé,  la  question  de  l'origine  du  langage  et  de 
ses  rapports  avec  la  pensée  :  fondée  sur  un  principe 
panth«istique,  elle  a  été  conduite  k  admettre  l'éternité 
du  largage  (Xôyoc)  comme  expression  de  la  pensée  conçue, 
el^-mème  comme  étemelle;  cette  expression,  dont  la 
VI  "ité  est  nécessairement  absolue ,  c  est  le  Véda  lui- 
même,  source  de  toute  sdence.  j 
Le  Sànidiya  (doctrine  rationnelle,  rationalisme)  n'est 
guère  moins  ancien  que  la  Mimànsâ;  mais  il  en  diffère 
essentiellement  par  son  point  de  départ  ;  en  effet,  il  n'est 
au  fond  qu'une  réaction  contre  l'andenne  doctrine ,  de-- 
venue  formaliste  et  en  quelque  sorte  pharisaique.  Kapila, 
auteur  du  Sânkkya  primitif,  parait  avoir  attaqué  dans  ses. 
procédés,  dans  ses  résultats  et  dans  ses  dogmes  la  doc- 
trine des  théologiens.  Cest  lui  qui  fit  cette  première 
tentative  d'émancipation,  au  nom  de  la  raison  humaine;, 
mais  sa  raison ,  non  encore  dirigée  par  des  méthodes 
bien  conçues,  se  porta  tout  d'abord  aux  dernier»  excès 
de  la  négation.  Selon  Kapila,  c'est  d'une  substance  pri- 
mitive (atfyaktcun)  que  le  monde  est  sorti,  et  non  d'une 
émanation  de  Br&hma  ;  et  c'est  aussi  de  ce  prindpe  in- 
saisissable qu'est  issue  l'&me,  soit  sous  sa  forme  univer-^ 
selle,  soit  dans  les  individus.  L'&me  est  le  véritable  objet 
de  la  sdence,  étude  pour  laquelle  le  Véda  est  d'une 
médiocre  utilité;  en  effet,  ce  nfesi  point  par  une  révéla- 
tion antique,  mais  par  une  étude  personnelle  et  libre^ 
que  l'on  peut  arriver  à  la  connaissance  de  l'âme,  de  son 
origine,  de  sa  destinée  ;  au  contraire,  celui  qui  connaît 
l'ème  et  sa  nuurche,  c-èrd.  sa  destinée,  est  non-seule- 
ment savant ,  mais  plus  réellement  pieux  que  ceux  qui 
lisent  le  Véda  et  accomplissent  les  cérémonies  sacrées. 
On  voit  quel  genre  de  révolution  fut  tenté  par  Kapila 
dans  les  idées  philosophiques  de  son  temps,  et  combien 
il  s'écartait  des  théologiens  et  de  leur  méthode.  Vold 
quels  sont  les  traits  les  plus  essentiels  de  sa  philosophie, 
telle  qu'elle  est  contenue  dans  le  Sânkhya-karika,  Ce 

3ul  n'est  pas  ne  peut  être,  et  ce  qui  est  ne  peut  cesser 
'être;  il  faut  donc  admettre  que,  sous  les  apparences 
continuellement  variées  que  nous  atteignons  par  nos 
divers  moyens  de  connaissance.  Il  existe  un  principe 
immuable  et  invariable  d'où  ces  choses  dérivent  et  qui 
est  lui-même  imperceptible  aux  sens.  Cet  Indirisible  ne 
pouvant  pas  ne  pas  être,  pi:dsqu'il  est,  est  doué  d'une 
vertu  productive,  puisque  c'est  de  lui  que  naissent 
toutes  choses.  Cette  vertu  porte  le  nom  de  jnrakriti  (en 
latin  procreatio)  ou  wUure.  Envisa^  au  point  de  vue 
psychologique  et  moral,  la  prakriti  engendre  les  trois 
qualités,  qui  sont  la  bonté  avec  la  sdence,  la  passion,  et 
Vobscurilé  avec  l'ignorance  et  l'erreur.  L'&me  elle-même, 
qui  est  le  fond  sur  lequel  se  manifestent  tous  les  phéno- 
mènes de  la  pensée,  est  impérissable,  et  différente  pour 
chaque  individu  ;  c'est  ce  que  montre  l'expérience.  Elle 
existe  donc  au  même  titre  que  la  nature.  Le  second 
Sânkkya,  celui  de  Patanjali,  qui  semble  avoir  paru  anté- 
rieurement au  Bouddhisme  et  lui  avoir  senri  de  fonde- 
ment, poussa  beaucoup  plus  loin  cette  doctrine  de  l'&me, 
et  fit  apercevoir  qu'en  raisonnant  sur  le  même  fonde- 
ment, il  fallait  admettre  une  &me  universelle  (  mahât- 
man)  comme  on  admettait  une  prakriH,  et, ne  voir  dans 
les  &mes  Indiriduelles  que  des  formes  particulières  de 
cette  grande  &me.  Dès  lors  l'existence  de  l'indiridu  s'ex- 
pliquait par  l'union  de  l'&me  et  de  la  matière,  produite 
dans  le  fait  de  la  génération;  la  grande  &me  volt  par  là 
sa  consdence  suprême,  son  mol  (ahamkâra)^  se  mviser 
et  s'amoindrir,  et  tomber  sous  la  condition  des  trois  qua- 
lités; la  proportion  relative  de  ces  qualités  Ait  la  diffé- 
rence des  natures  individuelles.  En  même  temps  que  le 
5dn/chya  recevait  ces  développements  pqrchologiques.  Il 
se  rapprochait  métaphysiquement  de  randenne  doctrine 
védique,  en  présentant  la  prakriti  conune  une  simple 
condition  abstraite  des  être^  une  simple  loi  qui  se  dé- 
double en  deux  antres,  rémanatlon  (pramritti)  et  le 
retour  {nioriUi)  ;  dès  lors,  en  effet,  l'&me  reste  le  seul 
élément  substantiel  du  monde,  et  c'est  en  elle  que  réside 
toute  la  perfection  et  la  réalité.  Mais,  si  l'&me  Indiriduelle 
n'est  qu'une  forme  de  la  grande  &me,  celle-d  &  son  tour 
n'est  pas  la  forme  primitive  du  souvcôraln  être,  elle  n'est 
pas  Dieu.  Par  un  désagement  progresdf  des  con<Utlons 
qu'elle  subit,  le  Sânkhya  parrient  à  cette  définition  % 
•  Dieu  est  le  inrindpe  neutre .  étemel  et  Indirisible.  s 
Br&hma  lid-même  est  appelé  la  matrice  où  s'engendre 
cet  Invisible,  que  la  pensa  ne  peut  comprendre.  Alndt 

68 


IRV 


1074 


IND 


nr  néanùer  pati  le  Sânkkya  imnrave  le  principe  môme 
wArttunfiiâuiie  et  le  dépane. 

On  i(àl  eomfalM  celte  doetrinar  a  fateé  loin  derrière 
iHe  la  théologie.  Gdlie-ef  néanmoina  sut  se  défendre;  et 
^Mt  dana  cette  lotte  ifoe  aend^  êCfe  née  la  seconde 
Èflmântà,  appelée  anaai  le  Vidamta  on  Brâhmorm^ 
wiânsâ,  A  quéHe  époqne  se  prodaint  cette  nouTelle  théo* 
iDgIa  f^édiqneT  On  ne  peot  le  dite  exactement  ;  maie  les 
eircoairtanoes  eft  éBe  parait  tf'tee  déveleppée,  et  le  nom 
Iraditionoel,  qnoiqne  mytiiologiqtie,  de  son  abteur,  Vyàsa, 
Indiquent  qu*eUe  est  antârtenre  an  Bouddhisme,  bien 
q«*eiie  ait  oontinné  à  régner  longtempa  après  et  (m*eUe 
toit  encore  admise  acdoeonfhm  par  la  plupart  des  Drfth* 
mnnes.  L'opposition  an  rationalistes  força  les  tbéolo- 
riens  à  aortn*  de  rfnterprétaidon  littérale  et  étroite  du 
rida,  el  à  fonder  aor  le  Utre  saint  une  Téritable  philo* 
■ophie,  dont  yold  lee  prlneipenx  traits.  Brfthma  ou  Dieu 
existant  par  lui-même,  infini  a^on  Tespaoe  et  le  temps, 
«aique,  éternel,  in<&Tisihle,  n*a  rfen  an-dessus  de  lui; 
9tre  des  ènres.  Il  est  la  seule  Téritable  substance,  dont 
Ibb  êtres  divers,  depuia  les  (fieux  Jusqu'aux  atomes  de  la 
matière,  sont  les  manifostationa  ou  plutôt  les  émana- 
tions ;  80U8  le  nom  masculin  de  Brfthma ,  Dieu  est  le 
producteur  et  le  père  des  êtres  viTants.  Tous  ces  êtres,  à 
partir  de  Br&hma,  aont  soumis  à  la  loi  de  la  périodicité, 
que  les  Indiens  diésignent  par  ces  mots  :  «  le  Jour  et  la 
anit  de  Brêbma,  la  veille  et  le  sommeil  de  Bràhma.  » 
Gomment  cette  production  est-elle  rendue  possible,  Dieu 
étant  ImfiTisibn  et  toujours  le  même?  En  vertu  d'un 
principe  métaphysique,  que  la  philosophie  poétique  des 
mhmanes  a  quelquefois  personnifié,  et  qu*elle  désigne 
sons  le  nom  de  maya.  Cette  màyà  est  souvent  Tillusion, 
la  magie  trompeuse  des  objets  sensibles;  mais  elle  est, 
avant  tout,  te  principe  de  la  mesure  (ma,  mesurer),  la 
pessiUIité  du  plus  et  du  moins,  ce  que  Platon  appelle 
h  grand  9t  lé  petit,  en  un  mot  La  nouon  métaphysique 
<fe  matière,  mot  dont  la  racine  eat  aussi  ma,  mesurer. 
La  màyà  Joue  un  ttle  trèa-important  dans  le  panthéisme 
biAhmanione;  elle  n'est  point  Ténergie  créatrice,  la- 
ie seule  appartient  au  principe  substantiel  masculin 
itt/ki),  mus  elle  rend  possible  la  production  des 
;  eDe  est,  comme  dans  Platon,  la  matrice,  la  mère 
dn  monde.  H  n'y  a  ici  aucune  trace  de  dualisme,  puia- 
qn'au  fond  la  màyà  n*est  rien,  et  n'est  qu'une  condition 
tout  abstraite  de  l'existence  des  choses,  condition  qu'il 
est  impossible  de  ne  pas  admettre.  Cest  ici  que  trouve 
aa  place,  dans  la  théologie  orthodoxe,  le  panthéon  indien 
avec  toute  sa  hiérarchie  de  dieux  et  de  déesses,  dont  les 
trois  premiers  formèrent  la  divine  trinité  {trimurti)\ 
mais  cette  dernière  conception  appartient  aux  temps  pos- 
térieurs. Ces  dieux  sont  eux-^nêmes ,  ainsi  que  les 
mondes ,  soumis  à  la  loi  de  périodicité,  et  n'ont  qu'une 
existence  limitée,  dans  les  conditions  du  monde  présent. 
Les  hommes ,  comme  les  dieux,  sont  des  émanations  de 
Bràhma,  et  ont  aussi  leur  màyà  :  ce  principe  abstrait 
descend  à  tous  les  degrés  de  Fémanation,  et  s*y  manifeste 
de  plus  en  plus  h  mesure  que  Ton  s'éloigne  du  premier 
principe  ;  les  choses  matérielles  sont  donc  celles  où  la 
màyà  a  le  plus  d'empire  ;  elle  prend  en  elles  une  telle 
taiportance,  que  Télément  divin  ne  s'y  rencontre  presque 
pins,  aux  yeux  de  certains  philosophes,  et  que,  pour  eux, 
ce  monde  sensible  est  tel  qu'un  rêve  et  une  illusion.  — 
Les  Vêdàntistes,  comme  les  rationalistes,  admettent  les 
trois  (Tualités,  bonté,  passion,  obscurité.  La  bonté  do- 
mine dans  les  émanations  supérieures,  qui  sont  les  dieux  ; 
et  ceux-ci  même  ne  sont  pas  exempts  de  tonte  passion 
et  de  toute  ignorance,  puisqu'ils  ne  peuvent  saisir  entiè- 
rement rétemel  dans  son  unité  infinie.  Les  êtres  infé- 
rieurs sont  au  dernier  degré  de  l'obscurité ,  puisqu'ils 
•ont  entièrement  privée  d'intelligence.  Entre  deux  sont 
les  hommes,  qui  eux-mêmes  ne  sont  pas  tous  au  même 
dei^,  et  sont  liés  dans  des  proportions  trèa-diverses  aux 
trois  qualités.  On  voit  Ici  comment  la  psychologie  brah- 
manique se  rattache  à  la  métaphysique,  et  combien  ce 
mnd  système  ressemble  à  celui  de  Spinoza  et  des  pan- 
théistes modernes.  La  rèele  des  œuvres,  ce  que  nous  ap- 
Kdons  la  morale,  s'ensuit  naturellement,  et  consiste  au 
nd  dans  la  loi  du  retour,  qui  fait  partie  essentielle  de 
tonte  doctrine  panthéistlque.  Seulement  la  loi  du  retour 
cet  beaucoup  plus  étendue  que  la  loi  morale,  puisqu'elle 
embrasse  le  monde  entier,  depuis  la  mati^  inerte  Jus- 
qu'aux dieux  les  pins  élevés  :  c'est  en  vertu  de  cette 
loi  que  les  mondes  retournent  à  Bràhma,  lorsque  son 
four  est  fini  et  que  la  période  du  sommeil  s'avance.  La 
loi  morale  ne  s'applique  qu'aux  êtres  intelligents  ;  simple 
•B  elle-même  f  elle  se  di versifie  smvant  la  nature  de 


chacun  d'eux.  Le  devoir,  en  eiTet,  conilate  à  ae  dégagei 
autant  qu'il  est  possible  de  la  màyà ,  ou,  ce  qui  rerient 
au  même,  à  développer  en  sot  la  bontés  et  à  se  rapprocher 
ainsi  de  l'easence  divine.  Or,  on  y  arrive  par  la  adeooe 
et  par  la  vertu  ;  la  jpremière  noua  fidt  éclmpper  à  l'oba- 
curité,  c-èrd.  à  l'ignorance  et  à  Terreur;  la  seconde 
nous  rend  maltree  de  la  pasaton.  Par  cette  donble  voie 
l'on  parvient  à  la  délivranoe  (mdaNi)*  Ici  ae  placent, 
dans  la  doctrine  briHimaniqne ,  la  morale  pratiqae  des 
hommes,  lea  Ida  oommunea  à  toua,  et  lea  loia  ph>prea  à 
chaque  caste,  à  chaque  condition,  lois  qui  ae  réaument 
dana  cette  formule  générale  i  «  Il  vaat  mieux  tuivre  aa 
loi,  même  mohia  parfoite,  que  celle  d'antrol,  même 
meilleure.  »  La  phlloaophie  morale  dea  bràhmanea,  ad- 
mirée par  tonte  l'antiquité  depuis  le  Jour  où  elle  a  com- 
mencé à  l'entrevoir,  a  répandu  dana  leurs  œuvres  litté- 
raires un  esprit  de  douceur,  d'aménité,  de  décence,  de 
pureté  touchante,  qu'aucune  autre  Uttéfmture  n'a  é^é. 
La  lutte  dea  paaaiona  contre  l'homme  qai  cherche  à  les 
aoumettre  ou  à  a'y  aoustraire  est  rendue  avec  un  aens 
moral  d'une  singulière  profondeur,  aoit  dans  iea  œuTrea 
épiquea,  aoit  même  dans  lea  dramea  dea  tempe  posté- 
neura.  En  effet,  l'austérité  {tapât)  et  la  diàsteté  sont  lea 
deux  vertna  sana  oesae  reoommandéea  par  la  morale  dea 
brahmanes,  comme  la  science  de  l'àme  et  du  principe 
suprême  est  à  leurs  yeux  la  première  dea  sciences.  Ce 
double  caractère  se  rencontre  sans  oeese  dans  lea  prea- 
criptions  écrites  aux  livres  de  la  loi^  et  dans  les  héroe 

Présentés  par  lea  poêtea  pour  servir  de  modèles  aux 
ommes.  Telle  est  l'essence  de  la  morale  dans  tontes  lea 
écoles  panthéiaies  anciennea  et  modernes,  bien  que  lea 
écoles  et  lea  théologiea  rivalea  aient  tiré  des  mêmea  prin« 
cipes  de  tout  autrea  conséquences. 

Du  reste,  ces  conséquences  ont  été  tirées  par  quelqœs 
bràhmanea,  et  mises  en  pratique  par  dea  àroea  ardentea 
et  passionnées.  Hj»  mysucnies  n'ont  paa  été  plus  rarea 
dana  l'Inde  que  dana  l'Occident,  et  les  règles  pratiquée 
dont  raccomplissement  procure  Id-baa  la  vision  divine 
et  la  béatitude  ont  été  données  en  aanscilt  de  la  manière 
la  plus  détaillée.  Mais  ces  pratiques  ne  aont  pas  la  règle 
commune  dea  bràhmanea,  ne  l'ont  jamais  été,  et  les 
hommes  qui  s'y  sont  livrés  ont  toiqours  été  présentés 
par  eux  comme  dea  exceptiona.  D  en  a  été  ainsi  cfaea  lea 
chrétiens;  dana  l'Inde  comme  ches  eux,  un  caractère  de 
sainteté  a  été  d'ordinaire  attribué  à  ces  pieux  pénitents. 
C'est  à  cette  tendance  vers  le  mysticisme  que  ae  rattache 
le  Yoga.  Ce  mot  signifie  union  avec  Dieu,  communion 
spirituelle  ;  et  ceux  qui  suivent  cette  docnrine  sont  les 
yogis.  Le  Yoga  se  rattache  al  étroitement  an  tànkhyan 
que  Patanjall  en  est  souvent  désigné  comme  l'auteur,  et 
que  l'on  trouve  perpétuellement  réunis  les  mots  sành- 
nyayôga.  Cette  doctrine  mystique,  dont  Yàfnavalkya  est 
la  principale  autorité  connue,  et  dont  la  Bnagavcàrgità 
oftcQ  la  plus  belle  expression,  est  certainement  antérieure 
au  Bouddhisme,  et  a  continué  d'exister  dans  l'Inde  et 
d'y  être  suirie  Jusqu'à  nos  Jours.  Il  semble  qu'elle  ait 
fleuri  surtout  à  l'époque  où  les  prédications  bouddhiques 
commençaient  à  émouvoir  les  masses  populaires  et  à  les 
détourner  des  fonctions  que  la  loi  leur  avait  assiçiéoB  ; 
car  il  est  fait  à  cela  même  une  allusion  presque  évidente 
dans  la  Bhagavad-gttà,  Le  Yâga  n'apportait  aucune 
doctrine  métaphysique  nouvelle  ;  mais,  adoptant  celle  de 
Patanjall,  tout  en  se  rattachant  à  l'antique  aystème  de 
Kapila,  il  se  rapprochait  beaucoup  de  la  philosophie 
brahmanique,  soit  pour  la  métaphysique,  soit  pour  la 
monde.  Le  but  du  Yoga  est  de  conduire  l'homme  à  la 
délivrance,  en  le  soustrayant  d'abord  à  l'ignorance  et  au 
péché,  puis  en  lui  donnant  les  moyens  de  s'Identifier 
dès  cette  rie  avec  le  principe  suprême.  C'est  d'abord  par 
la  purification  que  doit  se  préparer  l'àme  du  yôgl;  la  pu- 
rification s'obtient  par  la  pénitence,  et  se  complète  par 
la  science.  La  science  elle-même  s'obtient  par  la  médi- 
tation ,  non  point  par  une  contemplation  errante  et  par 
une  sorte  de  rêverie,  mais  par  une  suite  d'idées  claires 
et  de  vérités  bien  enchaînées.  Celui  qui  dirige  ainsi  son 
intelligence  ne  tarde  pas  à  s'apercevoir  que  les  diffé- 
rences passagères  des  êtres  s'effîacent  d'elles-mêmes,  et 
2u'il  y  a  en  eux  tous  un  principe,  un  fond  identique, 
èncevant  l'identité,  le  yêgl,  dont  la  raison  s'affranchit 
par  degrés  des  liens  et  dea  illusions  de  la  màyà,  ae  seni 
vivre  de  U  vie  de  tous  les  êtres,  et  atteint  la  grande  àme^ 
quil  reconnaît  en  lui-même  et  dans  tous  les  rivants.  Sa 
nison  a  pu  le  conduire  jusque-là  ;  le  donier  degré  de  la 
science  est  un  mystère  suprême  qui  ne  se  dévoile  qu'à 
un  petit  nombre  d'élus,  et  cela  peur  une  grâce  toute  par- 
ticulière s  celui  qui  a  pu  le  pénétrer  voit  Dieu,  non  plus 


IND 


1075 


IND 


Mulement  flica  à  fiue,  mais  eo  flol-mAme*  comme  le  pre- 
mier principe,  neutre  et  indivlBible,  dans  lequel  tous  les 
ë&ax  et  les  mondes  sont  éternellement  contenus.  Cette 
TUS  le  remplit  à  la  fois  de  terreur  et  d*amonr,  et  le  sou- 
venir qu'il  en  conaenre  lui  est  une  source  intarissable  de 
Joie.  Cette  marche  progressive  et  ré^ée  de  Tintelligenoe 
rtn  le  premier  principe  conduit  Thomme  à  la  béatitude, 
li  poiifie  de  ses  souillures,  et  l'illumine  d'une  science 
qaVucttne  autre  ne  peut  é^er  ;  le  faisant  édiapper  aux 
DOIS  de  la  matière,  cdle  le  conduit  à  la  délivrance.  La 
Bka(fœoad~gUàf  où  est  eiposée  cette  doctrine  avec  sa 
oéthode,  se  donne  elleHOnème  pour  un  livre  consolateur, 
et  produit,  en  effet,  cette  impression  sur  les  âmes  bien 
préparées  :  car  telle  eet  la  vertu  du  mysticisme,  quand  il 
oe  s'écarte  pas  trop  des  rèsles  ordinaires  de  la  raison. 
Le  eueoès  de  la  philosophie  du  Yoga  fut  très-grand  dans 
Itnde,  non-eenlement  parce  qu'il  était  en  lui-même 
d'âne  grande  élévation  métaphysique  et  morale,  mais 
ioiii  parce  que,  se  fondant  sur  le  SarMiya,  il  conduisait 
\»  hommes  au  même  but  que  le  Védânta,  mais  libre* 
meot  et  sans  les  astreindre  à  des  pratiques  religieuses 
détenues  pour  ainsi  dire  tyranniques  en  même  temps 
surannées.  Chez  les  modernes,  les  yôgls  ne  sont  le 
Iqs  souvent  que  des  mystiques  outrés  et  des  dévots 
"un  ascétisme  parfois  ridicule. 
Les  Sûtras  logiques  de  Kanàda  et  de  Gôtama,  tels  que 
D0Q8  les  possédons,  sont  vraisemblablement  d'une  époque 
trè»-réoente.  liaia  les  systèmes  qu'ils  renferment  n'en 
sont  pas  moins  d'une  assez  haute  antiquité,  fin  effist,  les 
anciens  sûtras  brahmaniques  commencent  presque  tou-> 
jours  par  des  considérations  logiques,  au  moyen  des- 
ooelles  les  auteurs  de  ces  traités  se  dirigent  eux-mêmes 
OBDS  leurs  raisonnements.  Les  études  de  logique  pure 
et  appliquée  remontent  donc  à  une  époque  ancienne  de 
Pbistoîre  philosophique  de  l'Inde.  Mais  la  formation  po- 
litive  d'écoles  de  logique,  et  notamment  des  deux  écoles 
dont  nous  venons  de  nommer  les  fondateurs,  semble 
avoir  en  lieu  à  des  époques  plus  rapprochées  de  nous. 
Ob  daix  écoles  et  les  traités  qu'elles  ont  produits  ne  sont 
pas  seulement  logiques;  ces  ouvrages  renferment  de  vé- 
ritables systèmes  de  philosophie;  mais  l'élément  logique 
7  domine.  Ce  sont  les  écoles  atomistes  de  l'Inde,  en  ce 
ms  que,  dans  les  doctrines  de  Kani^  et  de  Gôtama,  le 
monde  est  originairement  composé  d'atomes;  mais  bien 
(fiflfireotes  des  doctrines  d'Épicure  et  de  Démocrite,  elles 
admettent  l'inertie  absolue  de  ces  atomes,  et  rapportent 
ieor  mouvemeiat  initial,  leur  oi^ganisation  et  leurs  lois  à 
Qo  principe  supérieur  et  intelligent,  qui  est  Dieu.  Les 
doctrines  de  Kanàda  forment  un  s;ptème  connu  sous  le 
Bom  de  Vaçéshika^  du  mot  sanscrit  mçésha  qui  signifie 
différence,  parce  que  la  théorie  des  atomes  est  surtout 
appayée  par  Kanftda  sur  la  catégorie  logique  qui  porte  ce 
QODL  On  appelle  Nyâya  le  système  logique  de  Gêtama. 
n  n'est  pas  fsunle  de  dire  lequel  des  deux  a  précédé 
Tautre.  Toutefois,  comme  le  système  de  Kanàda  est  l'oblet 
de  réfutations  dans  le  VédântaSiUra,  tandis  que  cdui 
<le  Gôtoma  n'y  est  pas  mentionné,  on  en  pourrait  induire 
que  Kanàda  est  antérieur  à  ce  Sùtra,  et  que.Gêtama  lui 
est  postérieur  ;  mais  comme  ce  Sûtra  lui-même  est  pro- 
bablement très-récent,  il  y  a  lieu  de  croire  que  ces  oeux 
anteors  vivaient  longteaaps  peut-être  avant  qu'il  fût  com- 
posé. Si  la  data  de  la  Bhagaioad^(tA  est  celle  que  nous 
avons  indiquée  approximativement,  le  V<Bçéshim  lut  se- 
rait même  antérieur;  car  il  y  a  dans  ce  célèbre  dialogue 
certaines  paroles  de  dédain  pour  la  science  qui  s'occupe 
des  différences,  au  lieu  de  chercher  tout  de  suite  le  gé- 
néral. Quoi  qu'il  en  soit,  l'œuvre  principale  de  ces  deux 
^pstèmes,  et  oe  qui  fait  encore  ai^jourd'hui  leur  réputa- 
tion dans  llnde,  est  d'avoir  classé  les  idées  dans  des  caté- 
gories logiques  ;  en  effet,  l'établissement  de  ces  catégories 
est  une  otes  premières  conditions  pour  arriver  sûrement 
à  la  science,  et  par  elle  au  but  de  la  vie,  qui  est  la  déli- 
vrance ou  le  repos.  La  question  des  méthodes  et  des  pro- 
cédés naturels  de  l'intelligence  pour  arriver  à  la  connais- 
aance  de  la  vérité  a  donc  préoccupé  particulièrement  les 
écoles  logiques;  de  sorte  que  leurs  fondateurs  se  rappro- 
chent, par  plusieurs  côtés,  d'Aristote,  de  Bacon  et  de 
Descartes.  &  qui  concerne  la  certitude  et  l'éridence,  le 
raisonnement  et  la  preuve  d'une  part,  et  d'autre  part  la 
perception  sensible,  l'induction,  la  comparaison,  l'ana- 
logie et  le  témoignage,  forme  l'objet  d'analyses  longues 
et  intéressantes,  n  en  est  de  même  des  pnncipes  de  la 
laisoa  et  des  diverses  sortes  de  causes.  Les  résultats  aux- 
qnels  sont  arrivés  les  logiciens  de  l'Inde  ofltent  une 
analo^e  frappante  avec  ceux  que  les  Grecs  et  les  Mo- 
tenea  ont  obtenus  :  le  seul  point  peut-être  sur  lequel  ils 


diffèrent  profondément,  c'est  la  cause  efficiente,  puisque 
personne  dans  l'Inde  ne  semble  avoir  admis  ni  conça 
ridée  de  création,  telle  qu'elle  se  présente  à  Tesprit  des 
Modernes  ;  ils  ne  conçoivent  pas,  en  effet,  que  quelque 
chose  puisse  être  fait  de  rien,  ni  par  conséquent  qu'il 
existe  des  causes  réellement  efficientes  :  l'effet,  selon  eux, 
ne  saurait  s'étendre  Jusqu'à  la  substajwse,  laquelle  est  une 
et  étemelle  ;  il  est  nécessairement  borné  au  phénomtoe 
et  aux  relations  des  phénomènes  entre  eux.  La  cause 
effidentB  se  réduit  ainsi  à  la  cause  formelle^  qui  est  en 
même  temps  ordonnatrice.  Las  logiciens  sanscrits  ont 
aussi  analysé  avec  sagacité  ce  qui  concerne  les  arguments 
et  les  discussions,  les  sophismes  et  les  causes  logiquei 
de  nos  erreurs  :  dans  ces  analyses  et  dans  l'ânumératioii' 
des  fausses  preuves^  ils  n'ont  pas  même  été  surpassée  eh 
subtilité  par  nos  logiciens  du  moyen  âge. 

Jaco^  héréUquês  ou  Mtérodoxes.  —  Las  divers  sys* 
tèmes  dont  nous  venons  de  parler  se  rattachent  tous  piui 
ou  moins  directement  au  Brahmanisme,  ou  du  moins 
étaient  considérés  par  les  brahmanes  comme  des  déve- 
loppements divers  de  la  science,  admissibles  dans  une 
certaine  mesure  et  à  des  titres  différents.  A  côté  de  ces 
systèmes  s'élevèrent,  soit  dans  le  sein  même  du  Brahma- 
nisme, soit  à  côté  de  lui,  des  sectes  moitié  religieuses, 
moitié  philosophiques,  en  opposition  réelle  avec  ses  doc- 
trines fondamentales.  La  plus  célèbre  de  toutes,  surtout 
à  cause  de  la  lutte  qu'elle  a  soutenue  dans  l'Inde  et  de 
l'immense  développement  qu'elle  a  pris  au  dehors,  est 
celle  des  Bouddhistes.  N*ai>portant  pas  une  métaphysique 
nouvelle,  et  se  fondant  principalement  sur  le  Sànkhya, 
elle  tentait  particulièrement  une  réformation  morale  dans 
la  société  (V.  Bodddhismb).  Ibis  une  fois  constitués,  les 
sectateurs  du  Bouddha  durent  s'occuper  de  fixer  pour 
ainsi  dire  le  dogme,  et  d'énoncer  le  système  mét2q>hy- 
sique  auquel  il  convenait  de  s'arrêter.  Cela  était  d'autant 
plus  nécèuaire,  que  la  prédication  s'adressait  non-seule- 
ment aux  brahmanes,  mais  encore  à  des  castes  que  leur 
éducation  n'avait  pas  préparées  à  recevoir  et  à  com- 
prendre un  enchaînement  de  notions  philosophiques.  Le 
corps  de  la  métaphysique  bouddhique  est  compris  dans  ■ 
la  troisième  partie  du  Tripitaka  (K.  limiEimB,  —  litté- 
rature], connue  sous  le  nom  é*Abkidharma.  Bien  que  la 
rédaction  des  ouvrages  de  ce  recueil  soit  de  beaucoup 
postérieure  au  vi*  siècle  av.  J.-C,  il  n'en  est  pas  moins 
certain  que  le  Bouddha  connaissait  à  fond  les  doctrines 
philosophiques  de  son  tem[»s,  que  ses  prédications  rou- 
laient souvent  sur  des  matières  de  ce  genre,  et  que,  s'il 
s'arrêta  au  qrstème  sânkhya,  ce  ne  fut  point  par  un  effet 
du  hasard  et  sans  qu'il  eût  conscience  de  son  choix. 
Cest  dans  les  sûtras  les  moins  développés  que  l'on  doit 
chercher  les  doctrines  les  plus  rapprochées  die  celles  qu'il 
admettait.  Dans  la  suite,  chacun  des  docteurs  bouddhistes 
voulut  avoir  sa  doctrine  philosophique,  et  l'église  se  par- 
tagea entre  un  grand  nombre,  d'opinions,  toutes  fondées 
sur  les  paroles  du  maître,  mais  comprenant  des  consé- 
quences auxquelles  il  n'avait  Jamais  songé.  Le  SAnkhya, 
au  point  où  il  était  parvenu  à  l'époque  du  Bouddha, 
n'était  point  un  système  athée;  mais  donnant  d^à  nais- 
sance au  Yoga,  il  admettait  comme  principe  absolu  des 
choses  un  objet  tellement  métaphysique,  qu'à  peine  pou- 
vait-on dire  s'il  était  un  être  ou  non.  Cette  conception 
n'était  point  accessible  à  la  foule,  et  ne  pouvait  offrir  à 
personne  un  objet  d'adoration  et  de  culte.  Hais  la  doctrine 
tx>uddhique  admettait,  comme  celle  des  brahmanes,  avec 
quelquea  différences,  la  grande  hiérarchie  des  êtres  de- 
puis les  dieux  supérieurs  Jusqu'aux  derniers  objets  phy- 
siques. Elle  admettsit  aussi  la  mâyà^  principe  abstrait 
du  mal,  personnifié  dans  la  suite  sous  le  nom  de  Màra^ 
le  tentateur.  Le  point  de  la  métaphysique  bouddhique  qui 
a  soulevé  de  nos  jours  les  plus  graves  discussions  est  la 
question  de  la  personnalité,  qui,  dans  la  philosophie 
sâtUskya,  comme  en  général  dans  le  panthéisme,  est  ré- 
solue tout  autrement  que  chez  les  chrétiens.  En  effet, 
chez  ces  derniers,  la  personnalité  est  considérée  comme 
une  perfection,  et  donnée  à  Dieu  comme  un  de  ses  attributa 
les  plus  incontestables  :  il  en  est  tout  autrement  dans  lea 
systèmes  orientaux.  Id  la  différence  des  êtres  est  considérée 
comme  provenant  du  même  prindpe  que  leurs  imperfeo* 
tiens,  c-àrd.  de  là  mAyA;  les  êtres  raisonnables,  qui  sont 
identiques  dans  la  partie  la  plus  élevée  de  leur  intelli- 
gence, la  raison,  ne  diffèrent  entre  eux  que  par  les  rap- 
ports divers  qu'ils  ont  avec  les  choses  finies,  rapports 
dont  la  mAyA  est  la  condition  essentieUe  :  or,  c'est  cette 
diversité  des  rapports  qui  constitue  la  personnalité;  elle 
est  donc  elle-même  une  imperfection,  un  mal  ;  elle  est 
l'origine  de  rignorance«  de  l'erreur  et  du  péché.  A  me- 


IND 


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IND 


•are  que  par  la  edence  et  par  la  verta  on  ee  floastrait  de 
plus  en  plus  à  la  magie  des  contacts,  e.-à-d.  aux  vérités 
contingentes  et  aux  objets  sensibles,  on  sent  à  la  fois  la 
▼ie  de  l'intelligence  s*agrandir  en  se  concentrant  et  la 
personnalité  se  restreindre.  Que  par  un  effort  suprême 
on  parvienne  à  briser  la  dernière  relation,  on  éteint  par 
cela  môme  la  personnalité,  on  se  perd  dans  le  principe 
absolu  des  choses;  c'est  à  la  fois  la  délivrance  (mdoMi)  et 
Textinction  (ntrvdna).  Les  chrétiens  disent  :  c'est  l'anéan- 
titsement  complet;  les  philosophes  bouddhistes  disent  : 
c'est  l'anéantiasement  complet  des  conditions  de  l'exis- 
tence. Telle  est  la  nature  au  nirvana,  laquelle  ne  peut 
être  comprise  si  l'on  se  place  au  point  de  vue  d'un  dieu 
personnel  et  créateur.  On  voit  ou'en  définitive  il  n'y 
a  pas  id  une  doctrine  essentiellement  différente  du 
Sànkhya-Yôga,  et  qu'après  tout  la  philosophie  religieuse 
des  Bouddhistes  n'est  pas  le  nihilisme.  D'ailleurs,  une 

Êhilosophie  qui  prêcherait  le  néant  et  promettrait  comme 
ut  de  la  science,  et,  comme  récompense  des  vertus  les 
plus  hautes  et  les  plus  pénibles  à  acquérir,  l'anéantisse- 
ment final  et  alraolu,  ne  deviendrait  Jamais  la  religion  de 
Slusieurs  centaines  de  millions  d'bonmies  et  n'eût  pas 
uré  déjà  vingt-quatre  siècles. 

Nous  ne  pouvons  entrer  dans  l'exposé  des  doctrines 
propres  à  chacune  des  sectes  bouddhistes.  Disons  seule- 
ment que,  dans  la  suite  des  siècles,  la  conception  du 
Bouddha  se  généralisa,  eut  sa  place  dans  la  hiérarchie 
métaphysique  des  êtres,  et  devint  le  type  de  la  perfec- 
tion, au  point  que  le  principe  absolu  des  êtres  fut  daigné 
•ous  le  nom  de  Bouadha  suprême  ou  primordial,  Adhi- 
bouddha.  Enfin  ce  fut  par  des  incarnations  successives  de 
ce  Bouddha  primitif  que  fut  expliauée  l'existence  des 
hommes  supérieurs,  des  sages  {b<ntadkas)  qui  viennent 
tour  k  tour  enseigner  au  monde  la  doctrine  du  salut.  Ces 
explications  n'étaient  pas  une  nouveauté  dans  l'Inde, 

{puisque  l'unité  absolue  de  la  substance,  admise  généra- 
ement  dans  la  philosophie  comme  dans  la  théologie 
indienne,  a  pour  conséquence  que  les  êtres  sont  substan- 
tiellement contenus  en  Dieu,  et  ne  sont  individuellement 
nue  ses  émanations;  émanations  d'autant  plus  voisines 
de  leur  source,  qu'elles  portent  davantage  le  double  signe 
de  la  perfection,  la  science  et  la  vertu. 

Si  nous  jetons  un  coup  d'œil  sur  les  effets  de  la  philo- 
sophie bouddhique,  nous  reconnaîtrons  que  son  principal 
mérite  fut  d*avoir  appelé  tous  les  hommes  à  la  participa- 
tion de  sa  lumière,  en  d'autres  termes  d'avoir  vulgarisé 
la  science  en  remplaçant  la  petite  caste  des  brahmanes 
par  une  église  véritablement  universelle  {sangga)^  c-àr-d. 
libre  et  ouverte  à  tous.  En  ce  sens,  le  Bouddhisme  a  ac- 
compli dans  l'Asie,  quoique  banni  de  l'Inde  centrale,  la 
sécularisation  que  Kapila  avait  tentée  an  sein  du  Brah- 
manisme :  c'est  là  l'œuvre  philosophique  du  Bouddha. 
En  second  lieu,  la  conviction  personnelle,  la  foi  libre 
(ortMhà)  étant  substituée- à  l'autorité  brahmanique  du 
Védaf  la  morale  fut  fondée  pratiquement  sur  l'effort  in- 
dividuel et  non  plus  sur  la  pratique  de  cérémonies  tradi- 
tionnelles dont  le  sens  était  perdu,  métaphysiquement  sur 
l'unité  de  la  substance  qui  engendre  l'universalité  de  la 
loi  et  la  fraternité  des  hommes  :  la  charité  devint  donc 
la  forme  la  plus  essentielle  de  la  morale  sociale,  et  la 
régulatrice  de  toutes  les  relations  des  hommes  entre 
eux.  C'est  là  l'œuvre  religieuse  de  la  philosophie  boud- 
dhique. 

La  doctrine  philosophique  des  Jainas,  qui  dans  l'Inde 
semblent  avoir  succéaé  aux  Bouddhistes  bannis,  est  en- 
core peu  connue;  ils  se  rattachent  aussi  au  svstème  an- 
tique de  Kapila.  Biais  ils  paraissent  aussi  avoir  une  ten- 
dance prononcée  vers  la  théorie  des. atomes,  qui  est  en 
grande  partie  matérialiste.  En  effet,  les  br&hmanes  mo- 
dernes, qui  s'appuient  sur  le  Védànta,  opposent  aux 
Jainas  que  la  matière,  de  (pielque  façon  mi'elle  soit  com- 
binée, ne  peut  produire  l'intelligence  ni  rendre  raison 
des  facultés  et  des  opérations  de  l'esprit.  Si  l'athéisme 
est  au  bout  de  cette  doctrine  hétârodoxe,  les  mêmes 
brahmanes  lui  opposent  la  nécessité  d'un  principe  orga- 
nisateur de  la  matière,  principe  que  la  matière  elle- 
même  ne  saurait  ni  contenir  ni  constituer.  Du  reste,  la 
secte  des  Jainas  est  plutêt  religieuse  que  philosophique; 
et  l'on  doit  observer  que  c'a  été  la  destinée  commune 
des  divers  systèmes  philosophicrues  de  l'Inde  d'être 
d'abord  purement  spéculatifs,  puis  de  développer  leurs 
conséquences  morales,  et  enfin  d'aboutir  à  la  simple 
pratique  et  de  passer  ainri  à  l'état  de  sectes  religieuses. 
Les  Jainaa  sont  peu  nombreux  dans  l'Inde,  surtout  dans 
la  partie  de  cette  contrée  qui  est  sous  l'influence  pré- 
pondérante doi  bràhmanfla  orthodoxes  ;  et  il  ne  parait  pas 


que  cette  secte  ait  jamais  reçu  un  très-grand  développe- 
ment. 

Nous  en  devons  dire  autant  de  plusieurs  autres  sys- 
tèmes hétérodoxes  ou  hérétiques,  tels  aue  ceux  des  BlÂs- 
haspatyas,  desTchftrvàkas,  des  Lôk&yatikas.  Nous  n'avons 
en  Europe  aucun  des  ouvrages  composés  par  ces  sectes, 
et  nous  ne  pouvons  connaître  leurs  idées  que  par  les  d- 
tations  assez  rares  et  les  réfutations  accidentelles  conte* 
nues  dans  les  ouvrages  de  philosophie  orthodoxe. 

Enfin,  dans  les  derniers  siècles,  la  majeure  partie  des 
dissidents,  soit  qu'ils  se  rattachent  à  un  nom  connu  et 
forment  une  secte,  soit  qu'ils  aient  eu  des  idées  à  eux, 
se  sont  élevés  beaucoup  moins  haut  en  matière  de  phi- 
losophie que  les  anciens  auteurs.  Le  milieu  dans  lequel 
ils  vivaient  allait  s'abaissant  d'année  en  année;  l'antiqtie 
panthébme,  dont  le  développement,  unique  dans  l'his- 
toire, avait  produit  de  si  giands  effets,  dégénérait  en  des 
cultes  particuliers  et  véritablement  polythéistes  et  idolà- 
triques,  les  seuls  qui  subsistent  aujourd'hui  de  Tandenne 
religion  fondée  sur  le  Véda,  Bfalgré  l'attachement  des 
brahmanes,  nos  contemporains,  à  leurs  dogmes  philoso- 
phiques, malgré  la  vénération  qu'ils  professent  pour 
leurs  anciens  auteurs,  on  peut  dire  que  l'esprit  de  Ka- 
pila, comme  celui  de  Vyàsa,  de  Patanjali  et  de  Yàjna- 
valkya,  les  a  quittés,  et  que  les  systèmes  philosophiques 
de  l'Inde  ont  dit  leur  dernier  mot. 

Le  développement  de  la  philosophie  indienne  a  été 
original  pendant  toute  sa  durée.  Les  Grecs  ne  semblent 
pas  avoir  exercé  une  influence  sensible  sur  elle  :  on  a  lien 
de  croire,  au  contraire,  qu'à  l'époque  où  les  andens  philo- 
sophes de  la  Grèce  rapportèrent  les  premiers  éléments  de 
la  sagesse  de  leurs  lointains  voyages  en  Orient,  l'Inde  avait 
déjà  vu  paraître  ses  premiers  grands  systèmes  de  philo- 
sophie védique ,  la  réaction  libérale  qui  amena  la  tenta- 
tive de  Kapila,  et  la  profonde  fermentation  d'idées  d'où 
sortit  le  Bouddhisme.  En  effet,  le  Bouddha  Ç&kya-Muni 
vivait  au  vi*  siècle  avant  notre  ère,  et,  à  cette  époque,  la 
Grèce  en  était  encore  aux  tâtonnements  des  philosophes 
de  rionie  et  de  la  Grande- Grèce;  le  Bouddha,  au  con- 
traire, avait  été  précédé  par  la  doctrine  du  Sànmya,  ré- 
forme rationaliste  qui  suppose  un  long  développement 
antérieur  de  la  théologie.  Plus  tard,  lorsque  se  fondèrent 
en  Orient  les  royaumes  grecs  des  successeurs  d'Alexandre, 
ni  le  Bouddhisme  alors  florissant,  ni  le  Brahmanisme 
n'avaient  rien  à  demander  à  Platon,  ni  à  Âristote,  à  plus 
forte  raison  aux  écoles  de  philosophie  morale,  que  ces 
deux  religions  laissaient  bien  loin  derrière  elles.  Les 
mêmes  considérations  s'appliquent  aux  influences  exté- 
rieures que  l'Inde  aurait  pu  subir  dans  des  siècles  moins 
reculés,  soit  à  l'époque  des  premiers  voyages  des  apêtres 
chrétiens  vers  l'Orient,  voyages  qui  ne  laissèrent  après 
eux  aucun  prosélyte,  soit  plus  tard  à  l'époque  des  mis- 
sions chrétiennes  :  en  effet,  dans  l'état  de  décadence  où 
sont  tombée  les  croyances  indiennes  et  la  philosophie 
avec  elles,  la  civilisation  de  nos  jours,  avec  toutes  les 
forces  dont  elle  dispose,  trouve  une  résistance  invincible 
dans  les  doctrines  panthéistiques  des  brahmanes,  et  ne 

{parvient  à  rattacher  au  christianisme  aucun  d'entre  eux. 
1  y  a  donc  dans  les  hommes  de  cette  race  une  grande 
force  de  croyance,  et  par  conséquent  une  grande  origi- 
nalité. 

V.  Colebrooke,  On  the  Vedas,  dans  les  Asiatic  As- 
searches;  le  même.  Essai  sur  la  philosophie  des  Hindous, 
traduit  par  Pauthier,  1833,  in-8<»;  le  même,  Thê  csDpoH- 
tion  of  the  Vedanta  philosophy,  dans  le  Asiatic  Journal, 
1835;  Windischmann ,  Sankara.sêu  de  the(^ogumenu 
Vedanticorum,  1833,  in-8<>;  Rig-Védat  trad.  en  français 
par  Langlois,  A  vol.  in-8°;  Lois  de  Manou,  trad.  par 
Loiseleur-Deslongchamps,  2  vol.  in-8^  ;  Bhogavad^GUà, 
trad.  par  £m.  Bumouf,  in-8%  1861  ;  Sànkhya  Karika, 
trad.  par  Colebrooke,  1837,  in-4o;  A.  Blazure,  Essai  sur 
la  langue  et  la  philosophie  des  Indiens,  Paris,  1837, 
in-8°  ;  Mémoire  sur  le  Sànkhya,  par  Barthélémy  Saint- 
Hilaire,  dans  les  Mém,  de  VAcad,  des  Scimces  morales 
et  politiques;  Introduction  à  Vhistoire  du  Bouddhisme. 
par  Eus.  Burnouf,  Paris,  1844,  in-4<';Bird,  Historical 
researcnes  on  the  origine  of  the  Bouddha  and  Jaina  re* 
Itgion,  Bombay,  1847,  in-fol.  En.  B. 

INDIENNES  (Langues).  La  langue  que  les  Brahmanes 
apportèrent  dans  l'Inde  à  une  époque  inconnue,  et  que 
l'on  désigne  par  le  nom  de  sanscrit  {V,  ce  mot  ),  a  été  la 
langue  dominante  pendant  pludeurs  siècles,  ainsi  que  le 
prouvent  les  traces  qu'elle  a  laissées  dans  presque  tons  les 
dialectes  postérieurs.  Vers  le  m*  siècle  avant  l'ère  chré- 
tienne, elle  fit  place,  comme  langue  vulgaire,  au  prâkrit 
idirivif  inférinêr,  imparfaU)^  en  qui  certains  Kngnislai 


IND 


1077 


IND 


foient  le  reste  d*«iitiqu«i  idiome»  parlés  dans  la.  pteln- 
lole  avant  rarrlTée  de  la  race  brahmanique ,  mais  dont 
J*opinion  générala  fait  un  sanscrit  négligé  et  corrompa 
(F.  Psakiit),  et  oe  sunrécat  plus  que  comme  langue  sa- 
vante dans  les  écoles  et  dans  la  littérature.  D*ua  dialecte 
prtJoit  naquit»  Ters  le  vi*  siècle  de  notre  ère,  le  poli  (F. 
c$  mot),  que  les  Bouddhistes  employèrent  pour  la  rédac- 
tion de  leurs  livres  sacrés,  et  qu'ils  transportèrent  à  Gey- 
iao  et  dans  Tlnde  transgangétique.  Dès  avant  le  x*  siècle, 
une  autre  langue  dérivée  du  sanscrit,  et  écrite  comme  lui 
avec  l'alphabet  dévanagarù  la  langue  hindouiê,  se  répan- 
dt  dans  tout  le  Nord  de  l'Inde  :  on  la  retrouve  encore 
aajoard'htti,  sous  le  nom  de  braj-^àhakhat  dans  le  p^ys 
de  Bai  (Bondelkund).  L'hindoui,  modernisé  par  les 
Hindous  euz-^ndmes,  mais  conservant  encore  d'ordinaire 
Je  dévanagari,  porte  le  nom  d*hindi;  il  est  de  préférence 
la  langue  littéraire  des  peuples  iion  musulmans  de  l'Inde, 
et  on  lui  donne,  dans  le  pays  d'Agpra  et  de  Dehll,  le  nom 
de  làiàri  Mi  (langue  pure).  Depuis  le.xii*  siècle,  les 
Hindous  musulmans  emploient  Vhmdoùstani,  qui  est 
fflèlé  de  mots  arabes  et  persans,  et  dans  lequel  on  dis- 
tiogoe  deux  dialectes  principaux,  Vourdou  (langue  des 
camps],  parlé  dans  le  Nord ,  et  le  dakhni,  parié  dans  le 
Sod.  L^hindouatani,  adopté  à  la  cour  des  Grands-Biogols, 
compris  dans  presque  toutes  les  grandes  villes,  est  resté, 
MUS  la  domination  anglaise,  la  langue  de  la  diplomatie , 
de  l'administration  et  du  commerce.  La  grammaire  de 
lliindoustani,  dit  M.  Vaisse,  est  beaucoup  plus  simple 

rie  celle  du  sanscrit  :  on  n'y  compte  oue  2  genres, 
nombres  et  6  cas  pour  les  noms,  les  adjectifs  et  les 
pronoms.  Dans  plusieurs  temps  de  la  co^Ju^edson,  on  fait 
osage  de  deux  auxiliaires,  dont  l'un,  qui  s'emploie  avec 
la  Toix  neutre  et  la  voix  active,  signifie  être  ou  oeventr,  et 
l'autre,  qui  s'emploie  avec  la  voix  passive,  signifie  aller. 
Chaque  voix  se  conjugue  sur  un  seul  paradigme;  mais 
les  verties  composés  peuvent,  d'après  la  forme  particu- 
lière que  leur  donnent  certaines  modifications  apportées 
10  sens  primitif,  être  partagea  en  10  classes  (nominaux 
ea  adverbiaux ,  intensitifs,  potentiels,  oomplétifo,  in- 
choaûfs,  permissifs,  scquisitifs,  désidératifa,  fréquenta- 
tif, condnaatifs).  Les  voyageurs  donnent  le  nom  de 
moonk  une  forme  corrompue  de  l'hindoustani,  patois 
plein  de  termes  empruntés  a  toutes  les  nations  avec  les- 
queUea  la  popalation  des  côtes  s'est  trouvée  en  rapport, 
principalement  aux  Portugais.  Enfin,  il  existe  dans  l'Inde 
certains  dialectes  provinciaux,  dérivés  du  sanscrit  :  les 
principaux  sont  le  bengali  ou  gaw,  Vorissa,  le  mahratU^t 
limaerate,  le  eindhi,  le pendjabi^  le  cingalais,  le  kawi 
{Y.  cet  mots).  —  Indépendamment  des  idiomes  de  la 
soQche  brahmanique,  on  parle  dans  le  Dékan  plusieurs 
dialectes  qui  ne  leur  sont  paa  apparentés,  le  tamoul  ou 
malabar,  le  kanara  ou  kamalutuê,  de  malayàla,  etc. 
F.  DaAvimEHNBS  (Langues). 

V.  Schults,  Grammatica  hmdostanica.  Halle,  4745, 
ia4*;  Fergusson,  Dictionary  ofthe  Hindostan  language, 
Londres,  1753  ;  J.  Gilchrist,  Dictionary  English  and  Htn^ 
doostane$^  Calcutta,  1787, 3  vol.  in-4<»,  et  Hindoastane» 
fhUology  (Dictionnaire  hindoustani),  Edimbourg,  1810, 
io4«;  Harris,  A  Dictionary  English  and  Hindostany,  lla- 
dras,  1700,  in-4»;  J.  Taylor  et  W.  Hunter,  Dictionary 
BMuitam and  Engluh,  Calcutta ,  1808,  2  vol.  in-4*  ; 
J.  Shakespear,  A  Grammar  of  th»  Hinduttani  language , 
Londres,  1818,  in-4<» ,  et  Dictionary  Hindustani  and  En- 
lM»  5*  édiC,  1846,  in-4«;  W.  Price,  Grammar  of  the 
Bindoostemêê  kmguage,  Londres,  1827,  in-4»  ;  W.  Yates, 
IntrodmcUon  to  the  Bindooitanea  languaqa,  Calcutta, 
1827,  in^;  Sandford  Amot,  Hinduitam  grammar, 
Londres,  1831,  in-««;  Gardn  de  Tassy,  Rudiments  de  la 
Umgue  hindoustam,  Paris,  1833,  in4%  et  Rudiments  de 
lalanguehmdauXe,  Paris,  1847,  in-8o;  Dunkan  Forbes, 
A  grammar  of  the  Hindustani  language,  Londres,  1848, 
in-8*;  Baliantjrne,  Eléments  of  Hindt  and  BraH>hakha 
grammar,  Londres,  1839,  in-4*;  Thompson,  Diction^ 
noire  hindi,  G.  Hadley.  CompsiuitotM  grammar  of  the 
jargon  of  Indoostan  caUed  moors,  Londres,  1804,  in-8*. 

laDUHiiBs  (Religions).  V,  Véda,  Bsahiianisiib,  BIanou 
(Lois  de),  Booddusmb. 

INDIGENCE  (Certificat  d'),  acte  qui  a  pour  objet  de 
constater  Tétai  indigent  d'un  individu.  Les  maires,  les 
commissaires  de  police,  les  bureaux  de  bienfaisance,  dé- 
Hvrent  des  certificats  de  cette  nature  à  ceux  qui  en  ont 
besoin,  soit  pour  obtenir  des  secours,  ou  un  passe-port 
gratuit,  soit  pour  entrer  dans  certaines  maisons  de  re- 
^.  Le  certificat  d'indigence  peut  donner  lieu  à  l'exemp- 
tioQ  des  droits  d'enregistrement  et  de  succession .  h  h\ 
vttnise  ou  modération  des  impôte,  à  la  déUvxancd  g!AF> 


tuite  des  actes  de  l'état  civil,  à  la  dispense  de  ooBa%nir 
l'amende  en  cas  de  pourvoi  en  caasation ,  au  bénéfice  de 
l'assistance  Judiciaire,  à  l'inhumation  sans  frais,  etc. 
INDIGENTS  (Secours  aux).  V,  Assistance  pusuQoai 

BoaiAUX  DB  BUBNFAISANCB,  CHARTré  LÉGALE,  PABPéRISMB. 

INDIGNE,  en  termes  de  Droit,  celui  que  la  loi  prive 
d'une  succession  ou  d'une  libéralité  exercée  en  sa  faveur, 
pour  avoir  manqué  à  un  devoir  essentiel  envers  la  per- 
sonne à  laquelle  il  devait  succéder  ou  envers  l'auteur  de 
la  libéralité.  L'indignité  doit  être  prononcée  par  les  tri- 
bunaux. Le  Code  déclare  indignes  :  1*  celui  qui  aurait 
été  condamné  pour  avoir  donné  ou  tenté  de  donner  la 
mort  au  défunt  ;  %*  celui  qui  a  porté  contre  le  défunt  une 
accusation  capitale  jugée  calomnieuse  ;  3«  l'héritier  ma* 
jeur  qui,  instruit  du  meurtre  du  défunt,  ne  l'aura  pas 
dénoncé  à  la  Justice  (  ce  défaut  de  dénonciation  ne  peut 
être  opposé  aux  ascendants  et  descendants  du  meurtrier^ 
ni  à  ses  alliés  au  même  degré,  ni  à  son  époux  ou  épouse, 
ni  à  ses  frères  et  sœurs,  ni  à  ses  oncles  et  tantes,  ni  à 
ses  neveux  et  nièces).  Les  enfknts  de  l'indigne  qui  vien- 
nent à  la  succession  de  leur  chef,  et  sans  le  secours  de 
la  représentation ,  ne  sont  pas  exclus  par  la  faute  de 
leur  père. 

DiDlVIDUAUTÉ  (du  latin  indioiduum,  chose  qui  ne 
peut  être  divisée),  ensemble  des  propriétés  qui  distin- 
guent un  être  de  tous  les  êtres  de  son  espèce.  Le  mot  m- 
aividuel  désiçne  ce  oui  appartient  à  un  objet  d'une  ma- 
nière indivisible  et  inséparable,  de  telle  sorte  qu'on  ne 
peut  l'en  détacher  sans  détruire  sa  nature  en  tant  qu'être 

f particulier.  Vindividuel  ne  peut  être  reconnu  que  par 
'observation,  tandis  que  le  générai  se  détermine  par  la 
comparaison  et  la  réflexion. 

monriDDAUTé  (Certificat  d')  ou  d'iDErniré,  acte  délivré 
par  un  notaire,  par  le.  maire  ou  un  Juge  de  paix  à  une 
personne,  pour  attester  d'une  manière  authentique  ses 
nom,  prénoms,  êge,  qualité  et  demeure.  Le  créancier 
d'une  rente  publique  non  viagère  est  tenu  de  le  produire 
au  payeur  du  Trésor,  pour  en  obtenir  le  payement  (Dé- 
cret du  34  août  1793).  Les  agents  de  change  l'exigent, 
lorsqu'ils  ont  à  opérer  le  transfert  d'une  rente  appartenant 
k  un  individu  qui  leur  est  inconnu. 

INDIVISION ,  état  des  biens  tndwis,  c-à-d.  possédés 
en  commun  par  plusieurs  personnes,  et  dont  elles  se  par- 
tagent seulement  les  fruits.  Nul  ne  peut  être  contraint  à 
rester  dans  l'indivision ,  et  le  partage  peut  toi^ours  être 
provoqué ,  nonobstant  prohibitions  et  convenâons  con- 
traires {Code  Napol.^  art.  815). 

INDO-EUROPEENNES  (Langues),  une  des  grandes  fa- 
milles de  langues,  à  laquelle  M.  Lassen  a  donné  le  nom 
d'drysiMief ,  généralement  adopté  aujourd'hui  par  les  sa- 
vants. Quelaues-uns  opposent  ce  nom  à  celui  d'iro- 
metmes,  qu'ils  donnent  aux  langues  dont  le  send  est  la 
souche ,  réservant  celui  ^aryennes  aux  langues  qui  se 
rattachent  directement  au  sanscrit  :  cette  custinction  , 
historiquement  inexacte,  a  l'inconvénient  d'exclure  en 
oueloue  sorte  de  la  fiuniUe  plusieurs  langues  de  rEurope, 
dont  Vorigine  doit  pourtant  être  cherchée  dans  l'Asie  cen- 
trale. —  Le  sanscrit  n'est  pas  la  source  d'où  découlent 
les  langues  êiyennes  ;  il  nW  lui-même  qu'une  de  ces 
lanpies,  plus  semblable  peutrêtre  que  les  autres  à 
l'idiome  primitivement  parié  dans  le  centre  géographique 
de  la  race  lapétique,  niais  non  plus  ancienne  que  cei^ 
tainee  de  ces  langues.  Toutefois ,  comme  il  a  été  formé 
plus  régulièrement,  et  que,  dans  la  période  où  il  s'est 
développé  pour  parvenir  à  sa  perfection,  il  a  subi  moins 
d'altérations  et  reçu  moins  d'exceptions  aue  la  plupart 
des  langues  êiyennes,  il  peut  être  considéré  comme  le 
type  le  plus  pur  de  toute  la  famille.  Plus  une  langue  de 
famille  &ryenne  se  rapproche  du  sanscrit,  plus  elle  se 
rapproche  des  formes  primitives  de  l'idiome  commun.  Le 
berceau  de  cet  idiome  comprenait  l'Arie,  laSogdiane  et  la 
Bsctriane,  c'est-à-dire  les  prorinces  d'Hérat,  de  Balk  et  de 
Samarkande  ;  les  Aryas  occupaient  donc  les  vallées  ds 
l'Hindou-Khè  ou  Caucase  indien ,  tant  an  Nord  qu'an 
Sud ,  et  les  plaines  dominées  par  cette  chaîne  de  mont»- 

Saes.  C'est  de  là  qu'ils  se  répandirent  dans  plusieurs 
irections  et  s'établirent  dans  des  contrées  séparées,  oft 
ils  formèrent  des  peuples  indépendants  et  ignofés  les 
uns  des  autres.  Une  portion  notable  du  Véda,  nous  poui^ 
rions  même  dire  le  Rig-Véda  presque  entier  (  F.  Mtbk\ 
existait  déjà  avant  que  la  migration  orientale  ou  brftb- 
manique  fût  arrivée  daua  l'Inde;  les  dogmes  encore  flot- 
tants et  vagues  contenus  dans  ces  hymnes,  ont  été  éga- 
lement le  point  de  départ  du  magisme  contenu  dans 
VAvesla  (F.  Zerd-avesta)  ;  et  quand  on  veut  se  rendre 
I  ttA  compte  exact  de  la  plupart  des  traditions  grecques. 


IND 


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IND 


'Mses^  sermftiiiiiMft,  slaves  et  scandinftfMf  e'est  encore 
an  Véda  qa'il  faut  avoir  reeoon.  Le  Vida  est  donc  un 
monnmeot  commun  de  tons  les  peuples  Aiyens,  et  la 
Umau9  védùguê  la  soacbe  commune  de  leurs  langues , 
ridiome  central  autour  duquel  les  langues  indonraro- 
péennea  ont  rayonné  en  s'en  détachant.  Quand  les  peu- 
ples de  race  aryenne  se  furent  éloignés  de  leur  demeure 
primitiTev  ils  ne  consenrèrent  de  relations  suivies,  ni 
entre  eux,  ni  avec  leur  berceau  %  leurs  idiomes  prirent 
des  développements  divers  et  des  formes  variées,  nées  de 
la  variété  oes  besoins,  et  n'eurent  plus  de  commun  entre 
eux  que  les  racines  des  mots  ;  de  oes  racines  elles-mêmes 
fifaiaiears  ontpa  s'oublier  et  se  perdre,  comme  aussi 
quelques  racines  nouvelles  ont  pu  être  inventées;  mais 
le  fond  de  oes  langnee  est  demeuré  le  m6me,  et  c'est  en 
les  comparant  que  nous  retrouvons  aujourd'hui  leur 
.parenté. 

On  peut  partager  en  deux  grandes  classes  les  langues 
de  famille  Aryenne  ;  i**  celles  du  midi,  formant  trois 
groupes,  les  langues  $antentiqws,  les  langues  tro- 
niênnês,  et  les  langues. p^eu^iQiMs;  2*  celles  du  Nord, 
-formant  aussi  trois  groupes,  les  langues  slams,  les  lan- 
gues gtrmaniqtus ,  et  les  langues  celtiques.  Les  temps 
modernes,  conunençant  à  la  conquête  romaine  et  se  con- 
tinuant après  l'invasion  des  Barbares,  ont  vu  naître  des 
Idiomes  nouveaux  du  mélange  et  de  l'action  mutuelle 
des  langues  anciennes  de  l'Europe;  un  fiidt  analogue  s'est 
-  produit  en  Asie  après  la  conquête  des  contrées  méridio- 
nales par  les  Aryas  de  l'Inde  et  par  lee  Iraniens ,  et,  plus 
tard,  après  le  conquête  musulmane,  qui  a  introduit  un 
.élément  sémitique  dans  des  idiomes  pnmitivement  issus 
de  la  souche  védique. 

I.  Lanoubs  no  Mmi.  —  Les  Aryas,  partis  de  l'ffindou- 
Kbô,  qrant  pris  leur  direction  vers  l'Est,  traversèrent 
rindus  entre  Attok  et  Badakchan ,  et,  tenant  à  leur  gauche 
les  Himâlayas,  descendirent  dans  les  hautes  vallées  du 
Gange,  où  ils  s'établirent.  La  langue  védique,  dont  ils 
emportaient  avec  eux  les  monuments  sacrés,  se  trane- 
.formant  peu  à  peu,  devint  le  sanscrU  (V.  et  mot),  — 
Le  sanscrit  pur  était  surtout  la  langue  des  Brahmanes, 
c'est-à-dire  de  la  caste  supérieure ,  qui  possédait  le  do- 
maine de  la  religion,  de  la  science  et  de  la  poésie.  En 
contact  perpétuel  avec  lee  races  Jaunes  et  noires  qui  peu- 
.|>laient  la  presqu'île  indienne  avant  l'arrivée  des  Ai^as, 
'les  Brahmanes  ne  parvinrent  à  conserver  leur  langue 
•qu'en  établissant  entre  eux  et  ces  races  la  barrière  in- 
Iranchissable  des  castes  ;  et  c'est  à  cette  institution  qu'est 
due  la  conservation  de  la  race  blanche  dans  l'Inde,  de  sa 
religion,  de  ses  productions  littéraires,  et  enfin  de  l'idiome 
•sanscrit,  devenu  la  langue  sacrée.  Toutefois,  malgré  la 
défense  formelle  de  la  là  de  Hanou,  le  mélange  s'accom- 
plit par  degrés  surtout  entre  les  castes  inférieures,  moins 
éclairées  que  les  autres  et  qui  recherchaient  l'alliance 
•des  purs  Aryas  autant  que  ceux-ci  fuyaient  la  leur.  Le 
sanscrit  se  corrompit,  particulièrement  dans  le  bas  peu- 
ple, dont  il  n'était  pss  la  langue  primitive  et  naturelle. 
Ainsi  se  forma  le  pràcrit,  qui  n'est  pas  une  langue  dé- 
rivée, mais  une  langue  altérée  :  le  peuple  parlait  ainsi  au 
temps  du  roi  Vikramftditya,  qui  commença  à  régner  56 
.ans  av.  J.-G.  —  Le  ^t  est  dérivé  du  sanscrit  h  peu  près 
an  même  titre  crue  l'italien  l'est  du  latin.  Cest  la  langue 
-des  livres  boudohiques,  et  celle  qui,  avec  eux,  s'est  le 
•plus  répandue  hors  de  l'Inde;  elle  est  en  usage,  au  moins 
comme  langue  sacrée,  dans  beaucoup  de  pays  où  le  boud- 
dhisme est  en  vigueur,  à  Geylan,  chez  les  Birmans  et  les 
Siamois.  —  Nous  ne  donnerons  oas  ici  la  liste  des  nom- 
breux idiomes  nés  du  sanscrit  plus  ou  moins  intimement 
combiné  avec  les  idiomes  barbares  des  peuples  du  Sud, 
lesquels  ne  fbnt  point  partie  de  la  race  aryenne.  Biais 
nous  ne  pouvons  passer  sous  silence  les  langues  hindiê 
ethindawê,  qui  ont  succédé  au  sanscrit,  et  qui  sont 
pvrlées  et  écrites  dans  la  majeure  partie  de  llnde  cen- 

Le  Mnd  est  la  souche  des  langues  iraniennes,  et  la 
plus  Importante  d'entre  eUes.  VAvetta,  le  seul  monu- 
ment écrit  qui  nous  en  reste,  énonce  clairement  l'origine 
des  peuples  de  l'Iran  t  le  lien  d'où  ils  sont  venus  est  la 
Sogdifuae.  Cette  tradition,  conservée  dans  le  livre  de 
Soroastre,  et  puisée  à  sa  source  première,  établit  la  pa- 
.renté  des  peuples  iraniens  avec  ceux  de  l'Inde,  et  les  rat- 
tache comme  eux  à  des  origines  védiques.  Les  hommes 
oui,  partis  des  vallées  de  li>xus,  principal  fleuve  de  la 
•Bogdiane,  formèrent  cette  branche  de  la  race  ftrvenne, 

tirent  aussi  pour  eux  le  nom  d'Ams,  commun  a  toute 
race,  et  qui  demeura  celui  de  l'Arie  et  de  la  ville  d'Hé- 
lat,  sa  capitale;  c'est  ce  nom  qui,  par  une  modification 


légère,  est  devenu  celui  de  l'Asie  entière ,  eostrée  dss 
Aryas,  et  que  les  modernes  donnent  encore  à  la  Perse« 
nommée  par  eux  Iran.  La  langue  iranienne,  probable 
ment  avec  des  dialectes  variés,  se  répandit  alosl  vers  le 
Sud  ;  et  nous  savons  par  les  livres  lends  qu'elle  était 
admise  dans  toute  l'Ane  centrale,  depuis  la  chaîne  ({ni 
borde  llndus  à  l'Occident  Jusqu'aux  confins  de  la  Hédie. 
Faut-il  considérer  la  lansue  zend  comme  identique  an 
perse  de  la  période  acheménideT  Non,  si  l'on  en  Juge 
d'après  les  inscriptions  cunéiformes  dePersépolie,  où  s'est 
révélée  une  langue  très-voisine  du  lend,  mais  non  abso- 
lument la  même.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  seod  Ait,  sans 
contredit,  la  langue  sacrée  du  vaste  empire  des  Perses, 
et,  par  cela  même,  plus  ancienne  que  la  langue  vulgaire. 
Par  le  fait,  elle  se  rattache  de  très-près  à  la  langue  du 
Véda,  et  prfaente  des  caractères  qm  ne  permettent  pas 
de  la  considérer  comme  plus  Jeune  que  le  sanscrit  et 
comme  tirant  de  lui  son  origine.  On  peut  diviseren  quatre 
groupes  les  racines  de  la  langue  zende  :  1*  celles  fpû 
appartiennent  également  au  sanscrit,  an  grec,  au  latin, 
au  slave,  au  celtique  et  à  l'allemand;  ce  sont  de  beaucoup 
les  plus  nombreuses;  3*  celles  qui  ne  se  retrouvent  pu 
dans  le  sanscrit  classique,  mais  qui  sont  mentionnées 
dans  les  vo<abulaires  indiens  comme  lui  ayant  primitive- 
ment appartenu  ;  3*  celles  qui  appartiennent  exclusive- 
ment à  ridiome  du  Véda,  rares  en  latin  et  en  grec,  plus 
communes  dans  les  langues  germaniques;  4*eiân,  celles 
qui  n'appartiennent  ou'an  zend  et  au  persan  moderne. 
Ces  faits  prouvent  à  la  fois  l'origine  vêdiqae  du  lend  et 
sa  hante  antiquité,  puisqu'une  portion  de  cet  idiome  se 
trouve  contemporaine  du  TAIa.  Telle  racine  qui,  en  sans» 
oit,  est  demeurée  solitaire,  a  eu,  dans  le  zend,  une  f)i- 
mille  de  mots  ;  telle  antre  n*a  reçu  que  ses  premiers 
développements,  tandis  qu'elle  a  sa  famille  complète  dans 
une  des  langues  de  l'Europe.  Cela  établit  simultanément 
la  parenté  et  l'indépendance  de  ces  langues.  —  Il  ne  nous 
reste  des  langues  parlées  fadis  dans  1  Asie  Ifinenre  que 
des  noms,  souvenirs  à  la  vérité  très-persistants  du  séjorn* 
des  peuples  dans  une  contrée,  mais  qui  ne  suffisent  pas 
à  refaire  une  langue  perdue  ;  toutefois  ces  noms  de  mon- 
tagnes, de  fleuves,  de  pays,  de  villes.  Joints  aux  tradi- 
tions de  cette  presqu'île  conservées  par  les  auteurs  grecs, 
prouvent  oue  l'influence  iranienne  s'était  étendue  fort 
loin  vers  rOcddent  longtemps  avant  les  expéditiona  de 
Darius  et  de  Gvrus  lui-même.  —  Entre  le  zend  et  le  per- 
san moderne  les  deux  principaux  chaînons  de  l'idrame 
antioue  transformé  sont  le  perte  et  le  parsi,  le  premier 
parlé  dans  les  temps  historiques  les  plus  andens  du 
royaume  médo-pmique,  le  second  parié  avant  l'époque 
des  Sassanides.  Le  persan  date  de  cette  époque,  et  a  subi 
Iiû-même,  au  milieu  des  révolutions  de  l'Asie  centrale, 
des  modifications  successives.  Cette  langue ,  encore  en 
usaee  dans  la  contrée  qui  s'étend  de  la  mer  Caspienne 
au  détroit  d'Ormuz,  s'est  assez  bien  conservée  dans  les 
livres  et  dans  la  société  instruite,  mais  s'est  profondé- 
ment dénaturée  dans  la  bouche  du  peuple;  elle  a  fourni, 
do  reste,  une  abondante  littérature.  —  Les  idiomes  parlés 
dans  l'Afghanistan,  le  Kurdistan  et  le  Béloutchistan , 
idiomes  privés  de  littérature,  parce  que,  depuis  leur  for- 
mation, les  peuples  de  oes  pays  n'ont  pu  parvenhr  à  une 
civilisation  suffisante,  se  rattachent  directement  à  la 
langue  zende,  au  même  titre  que  le  persan.  — Varmé- 
ntsn  ne  tire  pas  son  origine  du  zend  par  la  même  vole 
que  le  persan  ;  il  parait  en  venir  plus  directement,  et  11 
est  au  moins  l'égal  de  ce  dernier  en  ancienneté.  Cest  à 
l'arménien,  et  peut-être  même  immédiatement  au  zend , 

2ae  se  rattachent  aussi  les  dialectes  parlés  au  pied  du 
aucase  russe,  vers  le  Midi.  Gomme  l'ont  prouvé  les  tra- 
vaux ftdts  de  nos  Jours,  les  populations  de  oes  contrées 
parlaient  une  langue  éminemment  àiyenne  :  tel  était 
ridiome  de  la  Colchide.  —  Il  nous  reste  à  citer  encore  le 
péMvi  {pahaloM  ),  langue  dont  nous  ne  possédons  qu'un 
seul  monument,  le  Binn^ni^iêch  (F.  ee  mot),  dont  la 
rédaction  n'est  peut-être  pas  antérieure  an  vn*  siècle  de 
notre  ènre.  Il  paraît  avoir  été  parié  dans  la  Biédie  dès  le 
milieu  du  m*  siècle,  au  temps  d'Ardeschir.  Ce  diidecte 

Présente  ce  fait  remarquable  dans  l'histoire  des  langues, 
'être  aryen  par  la  plupart  de  ses  racines,  et  sémitique 
Î>ar  sa  grammaire;  aussi,  quand  on  aborde  l'étude  des 
ivres  contenus  dans  VAvesta,  est-on  fnppé  de  trouver 
plus  de  ressemblance  entre  le  zend  et  le  pman  moderne 
ou'entre  le  pêhlvi  du  Ikmn^hech  et  le  zend  du  Vend»» 
aad'Sadé, 

Le  nom  de  pélasgiqfus  a  été  donné  en  commim  à  deux 
langues  qui  dlfl%rent  en  beaucoup  de  points  Tune  de 
Tantre,  mais  qui  se  rattachent  également  à  TAsie  centrale 


IND 


1079 


IND 


par  les  tnditloiis  relstÎTes  aux  PélasfeB  t  oe  sont  le  grdo 
etleloim. 

Us  origines  de  la  langue  greoqae  sont  diverses.  Un 
premier  fond  fat  apporté  d^Asie  par  les  Pélasges,  partis, 
probablement  en  mâme  temps  que  les  Iraniens,  de  la 
chstaie  de  rHiadoii*ICh6.  Les  populations  de  la  Grèce  qui 
sneoédèreni  anx  Pélasges  ne  parlaient  pas  une  langue 
différente  de  la  leur  qusnt  an  fond;  mais,  comme  elles 
paraissent  a'dtre  avancées  de  proche  en  proche  par  TAsie 
Mineure  et  aToir  longtemps  séjourné  dans  la  Phrygie  et 
sur  les  rivagee  ocddentanx  de  la  presquMle,  elles  furent 
pendant  ce  temps  en  contact  avec  les  peuples  iraniens 
déjà  dviliaée  ,  et,  à  leur  arrivée  dans  la  Grèce,  ces  nou- 
veilea  migrations  se  trouvèrent  mieux  policées  et  plus 
savantes  que  l'antique  génération  des  Pélasges.  H  en  ré- 
sulta que  la  langue  encore  rudimentaire  de  ces  derniers 
fit  place  presque  partout  aux  dialectes  venus  d'Asie  tout 
fiftrméa  et  presque  parfaits,  Téolien,  le  dorien  et  l'ionien. 
D'un  autre  o6té,  la  plupart  des  grandes  familles  de  la 
Grèce  prétendaient  se  rattacher  à  la  Crète,  paya  où  revi- 
vaient des  traditions  presque  brahmaniques.  Une  partie 
de  la  langue  grecque  tira  également  son  origine  de  cette 
Ue,  dont  la  population,  partagée  en  castes  sons  les  lois  de 
HinoB  (llanou)et  de  son  Irare  Rhadamanthe  (Dharma- 
r&ja,  le  m^me  ({ue  Yama  et  oue  le  Djem-schid  d»rAvêsta), 
venait  de  l'Asie  par  Carpathos  et  le  pa^s  des  Cariens.  Ge 
qui  nous  reste  de  ce  courant  méridional  des  langues 
gréoo-asiatiqiies  établit  en  partie  la  transition  entre  le 
grec  et  l'idiome  de  l'Asie  centrale;  et  s'il  est  vrai  que  le 
nom  même  des  Crêtes ,  des  Cariens  et  de  plusieura  peu- 
plades et  vUles  du  Péloponnèse  soit  venu  de  la  Cannante, 
contrée  kryenaià  sur  les  frontières  de  la  Perse,  on  aura 
roue  des  sources  de  la  langue  grecque,  source  qui  n'est 
nullement  pélasgique.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  grec,  consi- 
déré en  lui-même,  se  rapproche  du  zend  beaucoup  plus 
que  du  sanskrit,  et  nous  dit  en  quelque  sorte  quil  est 
veao,  comme  la  langue  des  anciens  Perses,  d'une  migra- 
tion occidentale  des  Aryas.  —  Il  est  remarqui^le  que  le 
grec  n'a  engendré  aucune  langue,  et  que  le  grec  moderne 
ne  diffère  presque  pas  de  l'ancien. 

L'histoire  de  la  formation  du  latfn  est  encore  pleine 
d'obscurités;  mais  son  origine  asiatique  ne  laisse  aucun 
dente.  On  ne  saurait  dire  quelle  part  ont  eue  dans  le 
déretoppement  primitif  de  œtte  langue  les  Pélasges-I^r- 
fliôuiens,  ni  ce  jiu'ont  i^fouté  au  fond  venu  d'eux  les 
migrations  postérieures  et  les  colonies  asiatiques ,  dont  la 
plus  prdblânatique  est  celle  des  Tlroyens.  Le  fait  le  plus 
uappant  est  la  ressemblance  de  racmes  «  de  grammaire 
et  de  génie,  que  le  latin  présente  avec  le  sanskrit.  Cette 
parenté  est  cependant  moins  prochaine  que  celle  du  grec 
avec  lesend«  Quoique  le  latin  ne  soit  pas  la  langue  de  Rome 
seulement,  mais  celle  d'une  portiou  considérable  de  l'Ita- 
lie, le  génie  i^stique,  Cv-IhI.  politique  et  militaire  des 
Bomains,  a  exercé  sur  son  développement  une  influence 
prépondérante,  jusqu'au  jour  (vers  240  av.  J.-C.  )  où  la 
ottératore  grecque  commença  h  le  modifier.  -*  Le  latin 
fut  porté  par  la  conquête  romaine  dans  une  grande  partie 
de  l'Europe,  en  expulsa  presqae  entièrement  les  idiomes 
locauXf  ou  se  combina  avec  eux  et  produisit  les  langues 
méolatmea.  Dans  chacune  de  ces  langues,  on  retrouve,  à 
des  degréa  diven,  ces  anciens  idiomes  mêlés  au  fond  néo- 
latin. L'f£a/tf»  reproduit  le  latin'  presque  pur  dans  ki 
Toscane  et  les  États  du  Pape,  quoique  là  même  il  con- 
tienne un  certain  nombre  de  mots  ostrogothiques  ou  lom- 
bards; mais  le  provençal,  le  génois,  le  napolitain  ren- 
ferment de  nombreux  vestiges  du  grec,  sans  compter  les 
expreasioïis  empruntées  aux  idiomes  des  Barbares;  le 
vémiiwn  est  à  peine  de  l'italien.  Le  portugais  et  surtout 
f espagnol ,  latms  en  majeure  partie,  rappellent  souvent 
aoasi  l'arabe,  et  même  l'antique  ibérien,  langues  étran- 
gères à  la  famille  ftiyrane.  —  Le  français  ne  contient 
guère  moins  de  mots  latins  que  l'italienv  et  ne  présente 
qiae  de  loin  en  loin  des  mots  celtiques,  niliques  ou  ger- 
aasa^pies.  Hais  la  modification  ou  plutôt  la  destruction  de 
la  grammaire  latine  a  été  beaucoup  plus  complète  dans 
notre  langue  que  dans  eelles  du  Midi.  La  suppression  de 
l'accent  tonique  a  entraîné  une  extrême  confusion  entre 
les  sons  des  voyelles  et  des  diphthongues  et  la  dliparition 
fréquente  de  «yllabes  entières.  Si  nous  ne  possédions  des 
monomenta  de  presque  tonales  Ages  de  notre  langue,  l'ori- 
giae  d'une  foule  de  mots  serait  méconnaissable,  ce  qui  se 
voit  aussi  parfois  dans  l'espagnol.  L'influence  latine  s'est 
ADcore  propage  dans  la  (kwde-Bretagne  et  la  Germa- 
■ie^  msia  avec  moins  d'empire.  Le  valaquê  n'est  pas 
■MMns  latin  qoe  le  français.  Valbanau  rappelle  aussi  les 
langnes  Haliqnest  toMàê^  an  llei» d'être  venu  du  latin,  il 


semble  tenir  d'aussi  près  oue  lui,  de  alus  pues  pentlMli 
à  l'idiome  des  antiques  raasgea-T^rniéBiiena. 

n.  Lansdis  no  Deaa.  — *  A  mesura  que  l'on  s'élolgee  dit 
foyer  natal  des  Aiyaa,  lea  laajsnes  issues  de  leur  idiome 
primitif  sont  de  nîains  en  moins  littéraires,  et  s'éveiUsét 
de  plus  en  plus  tard  à  la  civilisation.  QuelquesHmas 
n'ont  jamais  pu  la  voir  ;  les  autres  n'ont  fait  que  la  rees- 
voir  des  Latins,  qui  eux-mêmes  la  tenaient  des  Grem; 
de  sorte  que  le  foyer  de  la  civilisation  ooddentale  a  dié 
la  Grèce,  et  auriout  Athènes,  comme  llnde  a  été  œlui 
lie  l'Asie  orientale  et  la  Perse  celui  de  l'Asie  centrale. 

Le  celtique,  comprenant  ridiome  des  Cirabres  ou  Ere- 
tons,  et  celui  des  Gaulois  ou  Gaôls,  est  encore  parié, 
mais  fortement  impr^né  de  latin,  dans  les  pônimmles 
les  plus  occidentales  de  la  France  et  de  l'Angleterre;  il 
a  été  la  langue  de  l'andenae  Gaule  et  d'une  portion  coo» 
sidérable  de  la  Grande-Bretagne;  mais,  si  l'on  en  exoeoÉe 
certains  chants  ixiadadsis  en  gaéUqne,  il  n'a  pu,  dans  las 
temps  modernes,  devenir  autre  oiose  qu'un  patois.  Oe 
qui  nous  en  reste,  surtout  en  Irlande,  «appelle  très* 
clairement  l'Arie  et  la  Bactriane,  le  nom  même  de  ostli 
lie  (Érin)  n'étant  peut-être  que  celui  des  Aryas.  Le 
cimlnre  occupait  une  asses  vaste  étendue  de  p^jrs  sur 
l'Océan  septentrional,  et  comprenant,  avec  le  Daneoaail: 
actuel,  la  Belgique  (BaU:T)  et  le  sud  de  l'Angleterre. 

La  branche  slaloe^  surtout  dans  quelques-uns  de  sas 
rameaux,  le  lithmamten  par  exemple,  offre  ce  fait  singu- 
lièrement frappant  d'une  lannie  reproduisant  l'idiome 
védique  presque  pur,  à  tel  pomt  que  beaucoup  de  nmts 
lithuaniens  sont  en  même  temps  sanacrita.  Si  l'on  prend 
cette  langue  pour  terme  de  comparaison  entre  les  idiomes 
slaves,  c  est  elle  qui  établit  le  mieux  leur  parenté  avec 
la  langue  du  Véda,  et  qui  montre  le  mieux  de  quel  lien 
du  monde  sont  venues  ces  pç^ulations  du  Nord.  Le  li- 
thuanien, parlé  aajoordlmi  par  pkia  d'un  million 
d'hommes  en  Prusse  et  en  Rus^  est  une  langue  tout  à 
fait  antique,  égale  peut-être  en  durée  au  latin,  au  grae, 
au  send  et  au  sanscrit.  Le  lithuanien  a  donné  naiasanaB 
à  l'ancien  pnaiM»,  mû  a  été  en  grande  juurtie  remplacé 
par  l'allem&nd  :  touluoîs  la  CamiUe  alave  est  celle  dont  la 
lan^e  offre  le  plus  d'uniformité  et  le  moins  de  dialeolBa, 
quoiqu'elle  soit  pariée  par  on  grand  nombre  d'hommes . 
Parmi  ces  différents  dialectea,  aens  ne  dterons  que  le 
russe,  la  langue  qui,  en  Eumpe,  posaède  le  plus  gmod 
nomme  de  sons  et  la  plus  parAdte  euphonie.  Elle  est,  de 
nos  jours,  de  plus  en  pins  pénétrée  par  l'influence  gréoH 
latine,  à  la<|uelle  elle  flnira  par  céder  entièrement. 

Vislandau,  qui  est  llancienae  langue  des  Scandinaves 
ou  Normands,  avant  d'avoir  produit  le  suédois  et  le  dth 
nois,  pouvait  être  considéré  comme  le  ^rpe  des  lan^is 
germaniquea.  Toats&iis  il  était  lui-même  issu  da  goiksqu^ 
langue  fort  ancienne  et  nqnelaat  de  trèa  près  eelles  de 
l'Asie  centrale.  Ge  dernier ,  dont  ISphilas  nous  a  légué  un 
monument  fort  canaux,  est  donc  la  plus  ancienne  fimne 
que  nous  ayons  d'une  langue  germani^pm  :  il  est  du 
même  ordre  qoe  le  lithnanien  dans  la  philologie.  — ^  H  y 
a  déjà  loin  du  gothique  au  mewûD  sassom,  qui  constitue  «n 
grande  partie  la  langue  des  Clandres;  Buda  Vamgkhsaxon, 
qui  a  produit  Vanflais,  s'en  éloigne  encore  davuitaga; 
et,  dans  cette  dernière  langue,  M  seule  du  groupe  oui 
ait  donné  lieu  à  une  grande  littérature,  un  nombre  très- 
grand  de  mota  viennent  du  latin  et  sMt  empruntée  au 
français.  —  Sans  faire  acception  des  dialectes  divers  de 
l'Allemagne,  le  drinfanè  on  Isirfonitns,  que  noua  nom- 
mons en  général  roilsnMmd,  est,  entre  les  langues  litté- 
raires de  l'Europe  contemporaine,  ceHe  qui  a  n  plus  las 
caractères  d'une  langue  antique.  Mais  on  ne  doit  pas 
exagérer  ici  la  vérité;  car  les  fennea  gramaiaticalea  de 
cette  langue  sont  paavrea,  et  rappellent  que  l'idiome  d'eu 


le  deutsch  est  sorti  a  travesaé  une  longue  période  de 
barie.  L'anden  haut  sHsmimd  tient  la  milwn  entre  l^alie- 
mand  moderne  et  lea  langnm  de  l'Asie  centrale,  eifonn 
ici  la  véritable  transition  ;  tomefoia,  eomme  les  mena- 
ments  écrits  de  l'tecian  haut  alleniand  ne  ramoalent  pas 
à  uneépoque  reculée.  Il  y  a  lieu  de  croire  qu'entre  lui 
et  l'idiome  primitif  conservé  dana  le  Véda  il  s^eat  écoulé 
un  grand  nombre  de  liAcloi,  pendant  lesquels  a  au  lise 
U  transformatien  de  cet  idisme  Im-mêma. 

V.  Adelung,  MiOtHdaUs,  Berièn,  iSM-IT,  Asol.  in^^ 
Vater,  roMsaufl?4Miwipwa<ii^*  dat  grammumm  àes  Imnanêi 
de  VBuropest  detMiê,  Salle,  iâ2S  ;  A^monaod,  LeeSqm 
roman ,  on  Dkaomnaùm  4e  m  iaaoïis  dee  tnmkaàûmtts 
comparée  meus  autres  iaetgmm  de  r Europe iaUney  Paris, 
1838-44,  6  soU  gc.  ;in4^;  JfcuBaQr,  llttiDfy  of  As  i?iii(a- 
pean  lonpvagsa,  or  MeeeéenAm  mto  As  «ifllattiBs  ^  tfts 
Tfliifnnir.  fflnssir,  CUIml  S^mwnic 


IND 


1080 


IND 


fidlmb.,  18S3,  9  Tol.  in-8**;  F.  Bopp,  GrafMnaén  com- 
parée du  sanikrU,  du  Mnd,  du  gnc,  etc.,  en  allemand, 
Berlin,  3  vol.  in-4^  et  ObnrwUùmt  nr  cêtU  grammaire, 
par  Ea«.  Bumoof  (/oum.  dêi  Savants,  4833)  ;  Pott,  Ety- 
mologw!hê  ForMchungen,  Lemgo,  1833,  in-8*;  Ghavée, 
Lsxicolooi9md(heuropéennê.  Paris,  1849,  in-8^;  Eichhoff, 
ParaUiU  dês  lançun  de  VEwrope  et  de  l'Inde,  Paris , 
1836,  in-4®;  Pictet,  Les  Origines  indo-européennes, 
Genève  et  Paris,  1859.  Ev.  B. 

INDUCTION,  opération  de  Tintelligence  qui  consiste  à 
étendre  naturellement  et  spontanément  une  croyance, 
dans  le  temps  et  dans  Tespace,  à  tous  les  êtres  et  à  tons 
les  faits  d*une  même  classe,  iinsi,  lorsque  nous  perce- 
vons un  mode  dans  un  com,  nous  croyons  que  ce  mode 
y  enste  actuellement;  mais,  de  plus,  nous  croyons  na- 
turellement que  ce  mode  était  dans  ce  corps  avant  la 
perception,  et  qu'il  continuera  d*y  être  quand  celle-ci 
tara  cMsé.  La  croyance,  en  s*étendant  à  la  fois  dans  le 
passé  et  dans  Tavenir,  érige  en  qualité  on  en  propriété 
permanente  le  mode  qui  a  été  perçu  comme  instantané. 
L'enfant -qui  s'est  une  fois  brûlé  en  touchant  an  feu,  croit 
qu'il  se  brCUera  de  nouveau  s*il  y  touche.  Ce  raisonnement 
uiductif  que  l'esprit  fait  pour  le  temps,  il  le  fait  aussi  pour 
Tespace,  et  les  modes  oiMervés  deviennent  des  propnétés 
non-seulement  permanentes,  mais  encore  générues,  et 
les  rapports  conçus  comme  constants  et  généraux  de- 
viennent des  lots.  Ainsi,  par  l'Induction,  l'esprit  s'élève 
du  particulier  au  général,  des  faits  aux  lois,  des  effets 
aux  causes.  —  L'Induction  est  légitime  dans  deux  cas  : 
1*  quand  elle  conclut  de  l'universalité  des  parties  au 
tout,  en  s'appuyant  sur  l'idée  môme  du  tout;  une  énu- 
mération  complète  est  la  condition  indispenûble  de  sa 
légitimité;  S*  quand  de  quelques  parties  seulement  ob- 
servées, elle  conclut  à  un  tout  idéal  collectif,  espèce, 
genre,  classe,  etc.,  dont  toutes  les  parties  sent  réputées 
semblables  et  soumises  aux  mêmes  lois,  ce  qui  suppose 
la  croyance  primitive  à  la  fixité  des  espèces  et  des  genres, 
à  la  stabilité  et  à  la  généralité  des  lois  de  l'univers.  Cette 
dernière  sorte  d'induction  est  supérieure  à  la  précédente, 
et  la  seule  que  Bacon  admette  comme  réellement  scien- 
tifique. Les  règles  à  suivre  dans  l'induction  ont  été  don- 
nées par  Newton  dans  ses  Begulœ  philosophandi,  et  par 
Bacon  dans  son  Nopum  Organum.  L'Induction  est  un 
procédé  naturel  à  l'esprit  humain  ;  le  philosophe  anglais 
eut  le  mérite  d'appeler  l'attention  sur  une  méthode  jus- 
qu'alors trop  négligée,  et  d'en  faire  sentir  la  néoesdté  : 
à  partir  de  ce  moment,  les  sciences  d'observation  et 
d'expérimentation  firent  de  rapides  progrès.  Cependant  il 
&ut  remarquer  que  toute  connaissance  inductive  n'est, 
à  parier  rigoureusement,  qu'une  probabilité  souvent  très- 
grande,  et  qui  peut  inA&flniment  approcher  de  la  ceorti- 
Inde,  sans  y  airiver  jamais,  parce  que  le  progrès  des 
idenoes  d'observation  et  d'expérimentation  consiste  à 
remplacer  les  théorise  par  des  théories  plus  exactea  et 
plus  complètes,  à  faire  rentrer  une  loi  générale  dans  une 
«utre  plus  générale  encore.  F.  Bacon,  Novum  Organum, 
liv.  I,  S  105  et  suiv.,  et  liv.  II;  Port-Royal,  Logique, 
4^  partie;  Coumot,  Essai  sur  les  fondements  de  nos  con- 
uausanees,  ch.  iv.  R. 

INDULGENCES,  i  V.  ces  mots  dana  notre  Dietionn. 

INDULT.  i      de  Biographie  et  d'Hisloire. 

INDUSlUBi,  nom  de  la  tunique  des  femmes  ches  les 
anciens  Romains. 

INDUSTRIE.  Dans  le  langage  ordinaire,  l'industrie  est 
opposée  au  commerce  et  à  l'agriculture,  et  désigne  le 
travail  de  l'atelier.  Dans  la  langue  de  l'Économie  poli- 
tique, le  mot  industrie  a  une  acception  plus  générale  : 
c'est  l'activité  humaine  appliquée  a  la  matière,  et  l'ap- 
propriant aux  besoins  de  la  société.  L'industrie  existe  à 
peine  dans  une  société  naissante;  elle  se  développe,  au 
contraire,  dans  une  société  civilisée;  elle  derient  le  lien 
des  hommes  et  des  nations,  qu'elle  tient  plus  éUDite- 
ment  unis  que  ne  peuvent  le  faire  les  institutions  et  les 
alliances  politiques.  Un  individu  quelconque  peut  livrer 
les  Aruits  de  son  travail  à  ses  voisins,  et,  pourvu  qu'il  les 
ait  fait  agréer  par  eux,  s'en  faire  restituer  l'équivalent 
dans  toute  autre  partie  du  monde  que  celle  qu'il  habite 
lui-même.  Il  a  travaillé  pour  des  Français,  des  Alle- 
mands, des  Russes;  il  peut  se  faire  rendre  le  prix  de  son 
travail  par  des  Américains,  des  Indiens  ou  des  Chinois. 
Tous  les  peuples  se  prêtent  mutuellement  assistance  par 
l'industrie.  La  laine  des  troupeaux  nourris  par  lea  Aus- 
.traliens  est  apportée  en  Europe  par  des  navigateun  an- 
-glais;  elle  est  versée  par  des  négociants  anglais  sur  le 
continent  européen;  là,  convertie  en  fils  et  lainages  par 
des  travailleurs  allemanda,  belges  .on  licançais,  teinte  à 


l'aide  de  mattèrea  fournies  par  les  Américains  du  centre^ 
elle  est  transportée  de  nouveau,  à  l'état  de  drap  confec- 
tionné, par  des  navigateun  de  tous  les  pays,  dans  toutes 
les  paraes  du  monde.  L'industrie  constitue  donc  une 
grande  organisation  sociale,  qui  a  pour  principe  l'intérêt 
personnel,  pour  objet  fondamental  la  production,  pour 
régulateur  \h  concurrence,  pour  moyens  d'action  Véchange 
et  la  division  du  travail  (  V.  ces  mots).  L. 

Dans  les  temps  antérieurs  h  la  conquête  romaine,  I*ln- 
dusUie  de  ht  Gaule  fut  sans  importance  et  sans  activité  : 
elle  ne  commença  à  se  développer  qu'après  J.  César, 
lorwjue  les  besoins  d'une  civilisation  nouvelle  firent 
sentir  la  nécessité  de  la  production.  Dea  manufactures 
s'établirent  dans  les  grands  centres  créés  par  l'adminis- 
tration romaine  :  Arras,  entre  autres  viUea,  eut  dea  fia- 
briques  de  draps  qui  ne  le  cédaient  en  beauté  et  en 
finesse,  (Kt  S^  Jérôme,  qu'aux  étoffes  de  sole.  Lea  boule- 
versements dont  fut  accompagnée  l'invasion  des  Bar- 
bares réduisirent  l'industrie  a  quelques  produits  grossiers 
et  aux  arta  de  première  nécessité.  Pendant  lea  temps  mé- 
rovingiens, la  fabrication  de  la  draperie,  des  cuira  et  des 
armes  eut  seule  quelque  importance,  et,  dana  dea  ate- 
lien  ouverte  par  les  moines  au  milieu  de  leura  couvents 
et  par  les  rois  sur  leun  grandes  métairies,  ouelquea  fa- 
milles gauloises,  ainsi  que  les  lètes  venus  de  la  Germanie 
avec  lea  conquérants,  cardèrent  le  lin  et  le  chanvre,  tis- 
sèrent la  toile,  ou  firent  un  peu  de  broderie  en  soie  et  en 
or.  Gharlemagne  essaya  d'activer  l'industrie  par  de  sages 
règlements  ;  on  voit  dans  son  Capltulaire  De  viUis  qu'on 
employait  la  garance  et  le  pastel  pour  teindre  les  étoffes  : 
mus,  d'un  autre  côté,  il  restreignit  la  libre  production 
par  des  lois  somptuaires.  Après  lui,  les  invasions  des 
Normands,  et  l'établissement  du  système  féodal  retar- 
dèrent les  progrès  industriels  de  la  France.  Le  droit 
d'exercer  une  industrie,  d'ouvrir  un  atdier,  s'acheta  des 
seigneurs,  et  encore  l'ouvrier  n'était-il  pas  toujours  ga- 
ranti contre  les  violences  de  ces  maîtres  qui  prenaient 
tout  ce  qui  était  à  leur  convenance.  Aucune  législation 
précise,  aucun  pouvoir  supérieur  et  respecté  ne  protégeait 
les  producteun. 

Ce  fut  seulement  aux  xn*  et  xm*  siècles,  à  l'époque  où 
s'orcanisèrent  les  Communes  et  les  corporations  d'arts  et 
mènera,  que  l'industrie  put  renaître  {V,  Aats  bt  Mé- 
Tiaas),  et  les  Croisades  contribuèrent  à  lui  donner  une 

nue  impulsion  en  rendant  les  communicationa  plna 
es  et  les  marchés  plus  nombreux.  On  peut  voir  oans 
le  Umre  des  métiers ,  rédigé  au  temps  de  Louis  IX,  par 
Etienne  Boileau ,  quelles  étaient  alon  lea  corporations  in- 
dttstri^es,  les  conditions  de  l'admission  k  l'apprentissage 
et  sa  durée,  les  conditions  de  la  maîtrise,  les  procédés 
de  fabrication,  etc.  Les  classes  industrielles  comptèrent 
désormab  dans  l'État,  non-seulement  comme  associations 
laborieuaes,  mais  aussi  comme  corps  politiques,  puis- 
qu'elles interrinrent  dans  les  élections  municipales  et 
purent  prétendre  aux  magistratures  de  la  cité,  et  comme 
corps  militaires,  puisqu'elles  entrèrent  dans  les  milices 
bourgeoises.  Avec  cette  organisation,  les  pregrte  de  l'in- 
dustrie forent  sensibles  :  des  halles  s  ouvrirent  dans 
toutes  les  villes  pour  la  vente  des  produits;  des  fabriq^nes 
de  coton  s'étaburent  en  Provence,  et  des  fabriques  de 
soieries  à  Lyon,  Nîmes,  et  Beaucaire;  Provins  eut  jusqu'à 
3,S00  métien  battants  pour  la  confection  des  draps,  et 
1,700  ouvrière  coutelien.  Montpellier  derint  célèbre  par 
l'habileté  de  ses  énudlleun,  Reims  par  ses  toiles,  les  viUes 
du  nord  par  leun  tanneries,  leun  teintureries,  et  leurs 
tapisseries.  Cambrai  par  son  orfèvrerie,  etc.  Toutefois, 
la  guerre  de  Cent  Ans  fut  encore  un  obstacle  à  l'indus- 
trie, qui  ne  se  releva  qu'après  l'expulsion  des  Anglais, 
surtout  sous  le  règne  de  Louis  XI.  Ce  prince  établit ,  aux 
enrirons  de  Toun,  des  plantations  de  mûriere  et  des  fa» 
briques  de  soieries,  et  encouragea  l'industrie  minière. 

Les  guerres  d'Italie  donnèrent  aux  Français  le  goût  du 
luxe,  et  l'industrie  dut  se  faire  plus  savante,  plus  délicate 
dans  ses  procédés.  François  I**  attira  des  ouvriera  itallena 
habiles  dans  la  fabrication  des  soieries,  qui,  à  la  fin  de 
son  règne,  occupait  8,000  métiera  en  Touraine  seulement  ; 
pour  encourager  les  producteun  nationaux,  il  firappa  de 

j  droits  considérablea  les  draps  étrangère  et  les  étoffes  d'or 
et  d'argent  Sous  Henri  II,  Mutio  de  Bologne  introduisit 
en  France  les  verreries  vénitiennes.  A  la  même  époque, 
l'ébénisterie  produisait  des  meubles  encore  admirite  au- 
jourd'hui. Bien  que  l'industrie  ait  eu  beaucoup  à  souffrir 
des  guerres  de  religion,  le  gouvernement  n'en  oublia  pas 
complètement  les  Intérêts  :  ainsi,  un  édit  de  janvier  IS7S 
prohiba  l'exportation  des  matières  premières  et  l'impor- 

I  talion  des  matièrea  ouvrées  ;  dix  ana  plus  tard,  CatlmiM 


IND 


1081 


INF 


de  Médias  entr^rit  de  fonder  à  Orléans  des  manufac- 
tures de  soieries  et  de  tapisseries.  Après  le  rétablisse* 
ment  de  la  paix  intérieure,  Henri  Iv  relera  Tindustrie 
Isngaisaante,  et  favorisa,  malgré  la  résistance  de  Sully, 
la  production  des  objets  de  luxe  :  un  tanneur  nommé 
Roze  alla  dérober  aux  Hongrois  leurs  secrets  de  prépa- 
ntion  des  cuirs;  le  célèbre  établissement  des  Gobelms 
{V,ce  mot)  s*ouTrit;  la  production  des  soieries  devint 
telle,  qu*0D  en  exporta  en  2  ans  pour  48  millions,  mon- 
naie du  temps;  on  fonda  des  manufactures  pour  filer  For, 
sder  et  marteler  le  fer,  fabriquer  des  bas  de  soie,  des 
tentures  en  cuir  doré,  des  vases  de  cristal,  etc.  Les 
États-(>énéraQx  de  4614  formulèrent  des  vœux  en  faveur 
de  rîndustrie,  demandant  spécialement  qu'on  la  protè- 
ge&t  jpar  la  prohibition  des  produits  étrangers.  Pendant 
radministration  de  Richelieu  et  de  llazarin,  les  dissen- 
lioDs  intestines  et  les  guerres  extérieures  arrêtèrent  Tes- 
•or  de  rindustrie,  qui  ne  se  ranima,  mais  avec  un  grand 
éclat,  que  sous  le  ministère  de  Colbert. 

Golbert  voulut  affranchir  rindustrie  française  de  toute 
iépendance  par  rapport  à  l'étranger,  et  créer  les  genres 
de  fabrication  que  l'on  ne  possédait  pas  encore.  Dà  ma- 
Dolacturea  de  glaces,  étulies  à  Tour-la-Ville  près  de 
Gherbours,  et  à  S^-Gobain  en  Picardie,  donnèrent  des 
produits  égaux  à  ceux  de  Murano  et  de  Venise.  La  culture 
des  mûriers  prit  assez  d'extension  pour  ou'on  pût  se 
passer  des  soies  étnuigères,  et  le  produit  des  manufao- 
tores  de  soieries  s'éleva  à  plus  de  50  millions.  Des  ate* 
Vers  pour  la  fabrication  des  dentelles  forent  formés  au 
Quesnpy,  à  Arras,  Reims,  Sedan,  Chàteau-Thieny,  Alen- 
çon,  Londun ,  Aurillac,  etc.  Les  tapis  de  Turquie  et  de 
Perse  forent  surpassés  par  ceux  de  la  Savonnerie  (F.  ce 
fliol),  et  les  tapisseries  de  Flandre  par  celles  des  Gobe- 
lins  ;  d'antres  manufactures  de  tapis  furent  créées  à  Beau- 
vais  et  à  Aubusson.  Abbeville,  Sedan,  Louviers,  fabri- 
Qoèrent  les  draps  fins,  qu'on  était  auparavant  obligé  de 
oonander  à  l'Angleterre  et  à  la  Hollande.  Louis  XIV 
avançait  aux  manufacturiers  en  lainages  2,000  livres  par 
chaque  métier  battant:  aussi ,  dès  1666,  on  en  comptsit 
44,200  dans  le  royaume.  Les  porcelaines  sorties  des  ate- 
liers de  Sèvres  n'eurent  pas  de  rivales  en  Europe.  Gol- 
bert, tout  en  développant  les  industries  de  luxe,  fut  loin 
de  négliger  la  production  des  objets  de  première  néces- 
sité :  il  établit  des  fabriques  de  bas  d'estame,  de  toiles  à 
nrile,  et  de  savon  blanc,  appela  en  France  des  ouvriers 
suédois  pour  enseigner  à  extraire  des  pins  les  matières 
résineoses  et  à  Cure  du  eoudron,  fit  venir  également 
d'Allemaçne  des  ouvriers  ferblantiers,  et  déroba  à  l'An- 
gleterre Te  secret  de  la  trempe  de  l'acier.  Il  multiplia 
enfin,  pour  favoriser  l'indusme  nationale,  les  mesures 
prohibitives,  cpi'on  regardait  alors  comme  indispensables 
(F.  PsoBiamoii,  pRorscTEca  —  Sjrstème). 

La  mort  de  Colbert,  et  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes, 
qoi  fit  sortir  de  France  des  milliers  de  familles  indus- 
trieuses, portèrent  aux  manufactures  un  coup  dont  elles 
se  ressentirent  pendant  plus  d'un  siècle.  Les  Hémoires 
que  les  intendants  des  généralités  furent  chargés  de  rédi- 
ger, en  1008,  prouvent,  par  exemple,  que  déjà  la  fabri- 
cation des  soicôries,  oui  avait  occupé  en  Touraine  S0,000 
ouvriers,  et  un  nomore  double  de  femmes  et  d'enfants, 
n'employait  plus  que  4,000  ouvriers  des  deux  sexes,  et  que 
Lyon,  ou  Ton  comptait  naguère  18,000  métiers,  en  avait 
perdu  plus  des  trots  quarts.  Le  xvm*  siècle  fut  moins  re- 
marquable par  les  progrès  de  l'industrie  que  par  les  de- 
mandes de  réforme  dans  le  svstème  des  corporations  : 
les  économistes  réclamèrent  la  liberté  du  travail ,  et, 
après  une  suppression  momentanée  des  maîtrises  et  des 
jurandes  pendant  le  ministère  de  Turgot,  elles  dispa- 
rurent tout  à  fait  iMir  décret  de  l'Assemblée  constituante 
en  date  du  43  février  1791.  L'essor  que  la  libre  concur- 
rence n'aurait  pas  manqué  d'imprimer  à  lindustrie  fut 
mslheureusement  arrêté  par  les  guerres  dviles  et  exté- 
rieures qui  signalèrent  les  premières  années  de  la  Rteu- 
hlique  :  cependant,  à  cette  époque  appartient  la  créauon 
du  Gonsenratoire  des  arts  et  métiers,  destiné  à  collec- 
tionner les  modèles  de  toutes  les  machines  industrielles, 
et  auquel  furent  a4ioints ,  à  partir  de  1819 ,  difTérents 
eoois  publics  d'enseignement.  De  la  République  date 
éçdement  la  législation  relative  aux  brevets  d'invention, 
pour  garantir  aux  inventeurs  les  profits,  au  moins  tem- 
pondrea,  de  leurs  découvertes.  A  partir  de  1798,  l'indus- 
trie se  releva  :  cette  année-là  môme,  il  y  eut  une  Exposi- 
tioa  de  ses  produits  à  Paris,  et  les  solennités  de  ce  genre 
revinrent  plus  tard  à  des  épooues  périodiques.  La  SodéU 
émamragmiMU,  fondée  le  9  brumaire  an  x,  exerça  sur 
le  développement  de  l'industrie  la  plus  heureuse  in- 


fluence, par  les  prix  qu'elle  distribua  chaque  année,  et 
qui  s'élèvent  aujourd'hui  à  plus  de  200,000  ît.  Sous  le 
4"  Empire,  la  production  de  la  laine  et  de  la  soie,  la  fa- 
brication des  lainases,  des  cotonnades,  des  fers,  des 
cristaux,  de  la  coutellerie,  de  l'horlogerie,  fit  d'immenses 
progrès;  les  casimirs,  les  couvertures,  la  ganterie,  les 
nanxins  de  Rouen,  lurent  surtout  remarqua;  la  Fktmce 
se  trouva  afihinchie  du  tribut  qu'elle  payait  à  l'étranger 
pour  un  grand  nombre  d'objets,  tels  que  les  aciers,  les 
faux,  les  limes.  Lors  du  blocus  continental,  l'industrie 
fhmçaise  fit  des  effbrts  prodigieux  pour  suffire  à  la  con- 
sommation de  l'Europe  privée  des  produits  anglais.  Les' 
primes  et  les  encouragements  furent  multiplia  par  Na- 
poléon I"',  surtout  pour  la  fabrication  du  sucre  de  bette- 
rave. Un  décret  du  7  mai  1810  promit  un  million  de  firancs 
à  celui  qui  construirait  une  machine  à  filer  le  lin,  et  les 
malheurs  de  la  fin  de  l'Empire  empêchèrent  seuls  de  ré- 
compenser Philippe  de  Girard ,  l'auteur  de  cette  inven- 
tion. Depuis  la  Restauration,  les  perfectionnements  de 
l'industne  ont  été  nombreux  et  rapides  :  ils  n'ont  eu  que 
deux  temps  d'arrêt ,  produits  par  le  malaise  général  qui 
suivit  les  révolutions  de  1830  et  de  1848.  Au  commence- 
ment du  XIX*  siècle,  il  existait  à  peine  quelques  mar 
chines  à  vapeur;  on  les  compte  ai^ourd'hui  par  milliers. 
La  filature  du  coton,  de  la  laine  et  du  lin  se  fait  sur  une 
grande  échelle;  les  draps,  les  stoffs  brochés,  les  châles, 
ont  atteint  une  perfection  qu'il  semble  impossible  de  sur- 
passer; l'application  du  métier  à  la  Jacquart  a  permis 
aux  manufacturiers  de  l'Alsace  de  fabriquer  des  percales 
et  des  Jaconas  dignes  de  rivaliser  avec  les  produits  an- 
glais de  ce  genre;  les  machines  à  papier  continu  ont  été 
créées  ;  la  bougie  stéarique  et  le  bleu  de  Prusse  ont  aussi 
pris  place  dans  l'industrie;  les  progrès  de  la  fabrication 
des  alguillea  ont  rendu  moins  fréquentes  les  importations 
de  l'Angleterre;  nos  soieries,  nos  cuirs  vernis,  nos  maro- 
ouins,  notre  parfumerie,  nos  instruments  de  chirurgie, 
de  mathématiques  et  de  physique,  nos  meubles,  nos 
bronzes,  notre  byoutèrie,  nos  modes,  etc.,  obtiennent 
une  préférence  marquée  sur  tous  les  marcha.  Aussi,  les 
inquiétudes  éveillées  par  une  extension  de  la  liberté  des 
échanges  internationaux  à  partir  de  1861  n'ont-elles  pas 
été  généralement  Justifiées  :  un  abaissement  prudent  et 
nécessairement  progresdf  des  droits  qui  frappât  les  mar 
tières  premières,  la  réduction  des  fnus  de  transport,  un 
outillage  plus  parfait  qui  permette  une  production  plus 
rapide,  plus  abondante  et  moins  coûteuse,  enfin  la  con- 
viction qu'on  ne  doit  ni  s'engourdir  dans  la  routine,  ni 
compter  sur  l'État  ou  sur  personne  autre  que  soi-même, 
telles  sont  les  conditions  de  succès  dans  une  lutte  in- 
ternationale dont  le  but  final  doit  être  l'avantage  des  con« 
sommateurs.  L. 

mnosTS»  (^.positions  de).  |    *!  5^5^*Î2^SS! 
mDDSTRiB((Jidsder).       I     ^wgraphu^tdHw 

INDUSTRIEL  (Dessin).  V.  Dessin. 

iNDusraïKL  (Enseienement).  Get  enseignement  n*exis- 
tait  pas  en  France  ni  en  Europe  avant  1789  :  les  gens  de 
métier  suivaient  des  usages  établis,  acceptaient  Sm  pro- 
cédés introduits  dans  la  pratique,  et  faisaient  tout  ce 
qu'ils  avaient  vu  faire,  sans  chercher  à  innover.  Depuis 
la  Révolution,  on  s'est  préoccupé  de  l'instruction  profes- 
sionnelle; les  Écoles  primaires  supérieures,  Ubres  on 
annexées  à  des  collèges,  les  Écoles  d'arts  et  métierii 
l'École  centrale  des  arta  et  manufactures,  le  Conserva- 
toire des  arts  et  métiers,  forment  at^ourd*hui  un  en- 
semble d'enseignement  industriel  qui  semble  ne  laisser 
rien  à  désirer. 

INDUSTRIELLE  (École),  nom  donné  au  groupe  d'éco- 
nomistes qui  proclament  que  la  première  source  de  la 
richesse  est  le  travail.  Adam  Smitn  a  été  le  fondateur  de 
cette  école 
.    INDUSllUELS  (Arts).  V.  Arts  et  Mtfnsas. 

INDUT  fdu  hitin  mdulm,  habillé,  revêtu),  nom  donné, 
dans  certaines  églises,  à  des  clercs  revêtus  d'une  aube  et 
d'une  tunique,  qui,  dans  les  messes  solennelles,  M»ifft^nt 
le  prêtre,  le  diacre,  et  le  sous-diacre  à  l'autd. 

INFAILLIBILITE,  privilège  de  ne  pouvoir  ni  ee  tromper 
soi-même,  ni  tromper  les  autres  en  les  enseignant.  Lln- 
faillibilité  de  l'Église  n'est  autre  chose,  comme  le  fait  ob* 
server  Bossuet,  que  «  la  certitude  invincible  du  témoignage 
qu'elle  rend  de  sa  doctrine,  et  l'obligation  dans  laauelie 
est  chaque  fidèle  d'acquiescer  et  de  croire  à  ce  témoi- 
gnage.  »  Elle  a  pour  base  les  promesses  de  son  fondateur. 
«  Je  suis  tous  les  jours  avec  vous  Jusqu'à  la  consommsf 
tion  des  siècles  (s^  Hathleu,  xxvu),  »  dit  Jésus  aux  pas- 
teurs de  l'Église  en  U  personne  des  Apôtres,  c.-4hL  qu'A 


lut 


1082 


INF 


est  »Fec  eai  pour  les  prteerrer  dt  rerrenr.  H  dit  encore  : 
«  Celui  qui  vous  écoute  m*éooute  (S' Luc,  x)  ;  »  or,  serait- 
ce  écouter  Jésue-Christ  que  d*écouter  l*errear,  si  l'Êslise 
▼enait  à  l'écouter?  On  lit  enfin  dans  S*  Jean  (uv)  :  «  Mon 
Père  vous  donnera  un  autre  Paraclet,  afin  qu'il  demeure 
'avec  vous  pour  toi^ours  ;  c'est  Tesprit  de  vérité.  »  Chaque 
évôgue  en  particulier  n'est  pas  infaillible  ;  il  n'a  part  à 
l'iniaillibilité  qu'autant  qu'il  concourt  au  témoignage  una- 
nime^ qui  est  la  marque  de  la  vérité.  Les  théologiens 
d'Italie  soutiennent  que  le  pape  est  infaillible,  même 
sans  le  reste  des  pasteurs.  Ce  qui  est  avoué  de  tout  le 
monde,  c'est  que  l'Église  universelle  est  infaillible  dans 
ses  décisions  dogmatiques  ou  morales,  et  que  les  Juge- 
ments du  pape  ont  la  même  infaillibilité  que  les  déc&iotts 
des  conciles  dès  qu'ils  sont  appuyés  du  consentement  des 
pasteurs  de  TÉglise. 

INFAMANTE  (Peine).  V.  Pewk. 

INFANT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dietionnaire  de  BiO' 
graphie  Bt  d* Histoire, 

INFANTERIE  (de  l'italien  fantef  homme  de  pied),  nom 
générique  des  troupes  combattant  à  pied.  Linfanterie, 
chez  les  Grecs  ot  les  Romains,  fut  la  pnurtie  principale  des 
armées;  au  moyen  âge,  elle  céda  le  pas  à  la  cavalerie, 
pour  reprendre  toute  son  importance  après  l'invention 
de  la  poudre  à  canon.  De  même  qu'on  distinguait  chex 
les  Anciens  diffârents  corps  d'infanterie  (F.  AaiiéB),  on  a 
séparé  chez  les  Modernes  Vinfanterie  de  ligne  et  réifan- 
forts  Ugère  :  mais  on  était  arrivé,  en  France,  à  ne  plus 
les  distinguer  que  par  la  couleur  du  collet  et  des  bou- 
tons, l'hahillement,  l'armement,  l'organisation,  l'instruc- 
tion et  le  service  étant  Identiques;  c'est  seulement  en 
i854  qu'on  a  supprimé  la  distinction  des  deux  infanteries. 
La  véritable  infanterie  légère  se  compose  aujourd'hui  des 
chasseurs  à  pied,  dits  chasseurs  de  Vincennes.  L'infan- 
terie française  est  distribuée  par  régiments,  subdivisés 
en  batailhns,  et  ceux-ci  en  compagnies  :  on  forme  des 
brigades  avec  les  régiments,  et  des  divisions  avec  les  bri- 
gades (F.  ces  mots).  Vinfanterie  légère  d^ Afrique  n'a  rien 
dans  son  organisation,  ni  dans  son  service,  de  ce  ffii  con- 
stitue une  troupe  légère;  cette  qualification  conviendrait 
beaucoup  mieux  aux  r^ments  de  zouaves.  On  nomme 
infanterie  de  marine  un  corps  chargé  de  défendre  les  co- 
lonies, de  garder  les  ports  et  les  arsenaux,  de  faire  toutes 
les  expéditions  de  guerre  maritime,  et  d'accroître  la  force 
militure  des  vaisseaux. 

INFANTICIDE  (du  latin  infans,  enfknt,  et  cœdere,  tuer], 
meurtre  d'un  enfiuit  nouveau-né,  commis  par  le  père  ou 
la  mère.  Il  est  lidte  en  Chine,  et  beaucoup  de  peuples 
anciens  ne  l'ont  pas  considéré  davantage  comme  un 
crime.  Notre  Code  pénal  (art.  300-302]  le  punit  de  mort; 
la  loi  du  25  Juin  1824,  qui  avait  réduit  la  peine  pour  la 
mère  à  celle  des  travaux  forcés  à  perpétuité,  a  été  abrogée 

rir  celle  du  ^  avril  4832,  qui  autorise,  du  reste,  le  Jury 
admettre  des  circonstances  atténuantes.  Lenomibre  des 
infanticides  a  continuellement  et  progressivement  aug- 
menté en  France;  cela  tient  peut-être  aux  mesures  prises 
pour  rendre  plus  difiicile  l'admission  aux  hospices  d'en- 
fants trouvés,  ou  tout  simplement  à  ce  que  la  constata- 
tion des  crimes  se  ftdt  avec  plus  de  soin  et  de  certitude. 

INFÉODATION.  )  K  ces  mots  dans  notre  Dtch'ofinoîrs 

INFÉRIES.  (     de  Biographie  et  d'Histoire. 

INFIDÈLE,  en  termes  de  Théologie,  celui  qui  n'a  pas 
reçu  la  foi  chrétienne,  ou  qui,  l'ayant  reçue,  l'arepousside. 
Dûis  le  premier  cas,  c'est  un  infidèle  négatif;  dans  le 
second,  c'est  un  infidèle  positif, 

INFINL  y.  Ftiti. 

INFINITIF,  mode  des  verbes  marouant  l'état  ou  l'ac- 
tion d'une  nianière  indéfinie,  et,  dès  lors,  sans  aucun 
rapport  exprimé  de  nombre  ni  de  personne  :  être,  aïooir, 
aimer.  En  français,  l'infinitif  est  susceptible  des  trois 
temps  à  l'actif  et  au  passif  :  présent,  frapper,  être  frappé; 
passé,  avoir  frappé,  avoir  été  frappé:  futur,  devoir  frap- 
per (peu  nsité,  surtout  au  passif}.  En  latin,  il  a,  de 
plus,  le  futur  passé,  mais  à  l'actif  seulement.  En  srec, 
}l  a  le  présent,  le  futur,  l'aoriste,  le  parfait,  et  le  futur 
liasse  aux  trois  voix. 

.  Dans  les  trois  langues,  rinflàitif  lUt  fonction  ou  de 
tajetouderéghne,  soit  direct,  soit  indirect;  mais,  en  grec 
'et  en  français  seulement,  on  peut  le  faire  précéder  d'une 
^préposition.  En  grec,  cela  est  toujours  possible,  pourvu 
quil  y  ait  un  article;  en  français,  seulement  avec  quel- 

3ues  prépositions  :  ainsi,  dans,  en,  sur,  contre,  à  cause 
$,  etc.,  ne  peuvent  aller  devant  un  infinitif;  à,  00,  pour, 
*iafit,  sont  les  plus  usitées.  Cette  faculté  de  mettre  une 
uréposition  devant  lifinnitif  est  suppléée  en  latin  par 
Pusage  du  gérondif  {V*ce  mot).  Néanmoins  les  poètes, 


fort  rarement  les  prosateurs,  emploient  rinflnitif  à  la 
place  du  gérondif;  ils  l'emploient  aussi  là  où  l'usage  gé- 
néral de  la  langue  demandisit  un  supin  en  trni  ou  en  u  : 
«  Quod  si  tantus  amor  casus  cognoscere  nostros,  »  au 
lieu  de  cognoscendi;  —  «  Non  ferro  Libycas  poimiafs 
pénates  Venimns,  »  au  lieu  de  populatum  ;  —  «  Niveus 
videri,  »  pour  vtsti. 

Dans  les  trois  langues,  surtout  en  grec,  l'infhiitif  de^ 
vient  quelquefois  un  véritable  substantif  ;  le  savoir,  le 
devoir,  le  pouvoir,  le  vivre,  le  dormir,  le  manger,  le 
boire,  le  rire;  td  est  son  dire; 

Arec  9om  mardur  lent  quand  arrivermit-eU«? 

La,  TowtàXtrK,  PtAiêê,  XII,  11. 

On  platftt  que  ne  pnle-je,  an  doux  tomber  du  jour.m 

Lamaktimk. 

Perse  a  dit  scure  tuum;  nostru/m  istud  vivere.  Ces  ob- 
servations s'api^quent  généralement  aussi  aux  langues 
modernes,  comme  ritalien,  l'espagnol ,  l'allemand,  Pan- 
glais  :  seulement  ces'deux  dernières  langues  offrent  cette 
particularité  que,  dans  l'une,  l'infinitif  est  précédé  de  la 
particule  su,  et,  dans  l'autre,  de  la  particule  to.  Autre- 
fois notre  langue  fiûsait  un  usa^  plus  hardi  de  l'infinitif 
employé  comme  complément  soit  avec,  soit  sans  l'article; 
les  auteurs  du  xvi*  siècle  en  offrent  des  exemples  remsr- 
quables,  ceux-d  entre  autres  :  «  Gardant  ses  gens  d^étre 
oisifs, »  c-èpd.  de  l'oisiveté;  «  Fuyant  Vitre  souvent  vus 
du  peuple,  »  etc.  Ce  sont  des  héllénismes  qu'on  cher- 
chait à  introduire  dans  la  langue,  mais  auxquels  on  a 
renoncé,  parce  qu'ils  ont  quelque  chose  d'étrange  et  de 
contraint. 

En  grec,  en  latin,  en  français,  l'infinitif  employé 
comme  complément  Joue  le  rOle  d'une  proposition  com- 
plétive précédée  de  ort,  quod,  que.  En  français,  cela  a 
lieu  seulement  lorsque  le  sujet  des  deux  propositions  est 
le  môme  :  «  Crésus  croyait  être  le  plus  heureux  des 
mortels,  »  c-à-d.  Crésus  croyait  qu^U  était.  En  grec,  les 
deux  syntaxes  étaient  facultatives  et  ont  toujours  existé 
simultanément,  excepté  avec  les  verbes  BouXo|iai,5e7,  xp^i, 
et  quelques  autres  analogues.  En  latin,  rinfinitif  fut  long- 
temps seul  admis  :  «  Cnssus  se  esse  felicissimum  omnium 
puuubtat;  »  l'usage  de  quod,  remplacé  quelquefois  par 
quia,  quoniatn,  ne  devint  général  qu'au  v*  siècle  après 
J.-C.  :  «  Crœsus  putabat  quod  esset  felicissimus.  »  Ce 
tour  eût  semblé  barbare  au  siècle  d'Auguste.  En  firançala 
et  dans  toutes  les  langues  modernes,  l'infinitif  a  été  gé- 
néralement remplacé  par  l'emploi  de  la  coi^onction  que 
et  de  celles  qui  y  correspondent. 

Un  usage  remarquable  de  l'infinitif  en  français,  c'est  de 
suppléer  quelquefois  l'impénitif  ;  nous  disons  :  Bêcher-^ 
cher  les  origines  de  tdle  institution;  au  lieu  de  :  qu'on 
recherche,  ou  on  recherchera.  Il  en  est  de  même  en  grec 

L'Infinitif  présent  s'emploie  très-souvent  en  latin  à  la 
place  du  présent  et  de  l'imparfait  de  llndicatif  dans  le 
style  de  l'histoire  et  dans  les  narrations  de  tout  genre  t 
c'était  une  manière  de  donner  plus  de  rapidité  et  d'entrsin 
au  style.  Le  sujet  est  toujours  au  nominatif  :  «  Numidm, 
alH  postremos  cadere,  pars  a  sinistra  ac  dextera  ten^ 
tare.  »  Cette  syntaxe,  inconnue  aux  Grecs,  a  passé  en 
français,  mais  seulement  dans  le  style  familier;  rinfinitif, 
en  ce  cas,  est  toujours  précédé  de  la  préposition  de  • 

Rats  en  campagne  anaeitOti 
EtUettadindedtr§: 
Aehevona  font  notre  rSt 

Ié4  Foutaiics,  Pab.  I,  9. 

Cette  préposition  de  s'employait  fréquemment  aatrefda 
lorsque  l'infinitif,  jouant  le  rôle  de  sujet,  commoaçait  la 
phrase;  ainsi  l'on  disait  :  «  De  mentir,  c'est  bien  hon- 
teux, a  comme  nous  disons  encore  ai^ourd'hul  :  «  Il  est 
bien  honteux  de  mentir.  »  On  lit  dans  Boileau  : 

Mala  de  blâmer  dea  vera  on  dnra  on  langnlManta, 
De  ehogver  nn  «ntenr  qnl  «hoqne  le  bon  lens. 
De  rmUr  nn  plaisant  qni  ne  aatt  paa  nona  plaire, 
Cett  ee  que  tont  lectenr  ont  toc^oars  droit  de  foire; 

LMnfinitif  s'emploie  dans 'tontes  les  langues  pour  mar- 
quer rétonnement,  l'indignation  t 

ifo<,  le  foire  emperenr  !  Ingrat,  ravea-Tona  emf 

BAOon,  BrUannieus,  rv,  t. 

...  Mené  laeepto  deststere  Tictani« 

▼iB«iLB,  ÉnMe,  U  éU 

LMnfinitif  s'emploie  très-souvent  en  français  après  les 
mots  interrontifs,  que  la  phrase  soit  directe  ou  indirecte  : 
Que  faire?  Pourquoi  rester?  Comment  sortir?  Rs  m 


INI 


1083 


INS 


fwmi  (tu»  Irociwr,  comment  ^y  prmdn,  oU  aUer  ?  etc. 
En  grec  et  en  latin,  l'infinitif  8*empIoyait  aussi,  mais 
du»  on  cas  diflérent,  après  les  interrogatlfs  et  les  exdà- 
ipstiffl;  c'était  dans  les  disconrs  indirects.  P. 

INFIRMERIE,  local  spécialement  affe(^  an  traitement 
des  malades  dans  tout  établissement  où  Tivent  en  com- 
mon  on  certain  nomlire  d*indiTidns,  par  exemple  dans 
les  coarents,  séminaires,  collège,  prisons,  etc. 

INFIRMIERS,  préposés  à  la  garde  et  au  service  des  ma- 
lades dans  les  bôpitanx.  Ce  sont  des  soldats  organisés  par 
eompamies  et  par  escouades,  soumis  aux  r^es  de  la 
hiénrchie  et  de  la  discipline,  qui  remplissent  ces  fono- 
doos  dans  les  hÔ|>itaux  militaires  :  leurs  caporaux  et  ser- 
pits,  dits  infirmier^^majors,  sont  placés  sous  les  ordres 
immédiats  des  officiers  d*administration  comptables. 

INFLEXION  ou  FLEXION,  propriété  que  possèdent  les 
mots  déclinables  de  sHnfiéehir,  ae  se  modifier  selon  les 
lapports  qui  modifient  ridée  même  exprimée  par  le  mot. 
Cette  propriété  est  d'autant  plus  commune  dans  une 
langue,  que  cette  langue  est  plus  apte  à  recevoir  une 
grande  variété  de  terminaisons  :  telles  sont  les  deux 
bagnes  anciennes  et  la  langue  allemande.  Ainsi,  dans  ces 
trois  langues,  selon  qu'un  nom  ou  pronom  est  sujet,  ou 
eomplément  soit  d'un  nom,  soit  d'un  adjectif,  soit  d'un 
TerhB,  aoit  d'une  préposition,  et  selon  ou'un  verbe  a 
rapport  à  un  ou  à  plusieurs  sujets,  ou  à  rune  des  trois 
personnes,  la  désinoice  ou  terminaison  de  ce  nom,  pro- 
nom ou  verbe,  est  modifiée  d'une  manière  i^éciale. 
Ainsi  !  «  PaultM  mnat  Petrum;  Pault  frater  a  Petro 
amotur;  Ego  Ulos  amo;  tu  me  cum  summo  studio  di- 
iigif  ;  nos  sumua  lllts  carissimt,  etc.  »  Les  langues  néo- 
iatines  et  la  laneue  anglaise  sont  beaucoup  moms  ricbes 
à  cet  égard  que  le  grec  et  le  latin  ;  et  l'allemand  forme 
eomme  une  sorte  d'intermédiaire,  se  rapprochant  plus, 
Déanmoina,  de  la  pauvreté  des  langues  modernes.     P. 

INFORMATION.  F.  Enqdétb. 

INFRACTION  (du  latin  frangere,  briser),  toute  viola- 
tion d'une  loi,  d'un  traité.  Les  infractions  aux  lois  se 
divisent  en  contraventions ,  délits  et  crimes  (V,  ces  mots). 

INFULE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
fraphie  et  d:  Histoire. 

INGÉNIEUR,  autrefois  en^egnour,  ingegnour  (de  l'italien 
M^^l^,  engin,  machine),  savant  qui  conduit  et  dirige  les 
ttïïnxa  d'art  à  l'aide  aes  sciences  appliquées.  On  dis- 
tingoe,  en  France,  les  Ingénieiurs  de  lÊtat,  chargés  de 
serrices  publics,  et  les  Ingénieurs  doUs,  employés  par 
les  particuliers  ou  par  les  villes.  Les  premiers  compren- 
nent :  1<*  les  Ingénieurs  des  eattx  et  forêts,  chai^  de  la 
eonservation  des  bois  et  forêts,  de  la  construction  et  de 
Tentretien  des  rives,  canaux,  aqueducs,  etc.  ;  ^  les  Ingé- 
ei»ers-{kographes,  institués  sous  Louis  XV  pour  drerâer 
des  cartes  civiles  et  militaires,  lever  les  plans  des  champs 
de  bataille,  etc.;  ils  sont,  depuis  1831,  réunis  au  corps 
de  l'État-maJor  ;  3*  les  Ingénteurs-Bpdrographes {V»  Hy- 
noGaaPHBS,  dams  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
iBist.);  4f*  les  Ingénieurs  de  la  marine  {V.  GâviE  UAja- 
nxE);  5<>  les  Ingénieurs  militaires  (  V,  GtmE  miutaihe; 
^  les  Ingénieurs  des  mines  (V.  Mines)  ;  1^  les  ingénieurs 
étt  ponts  rt  cAatwa^  (F.  Poirrs  et  Cbaqssébs). 

INGÉNUE,  emploi  de  tbé&tre,  celui  où  l'on  représente 
les  Jeunes  filles  naïves.  L'Agnès  de  VÊcole  des  Femmes 
de  MoHère  est  le  type  des  rôles  d'ingénues.  M*^  Gaus- 
nn,  Mars,  Anab,  et  Plessy  ont  été  les  actrices  les  plus 
renommées  dans  cet  emploi. 

INGRÈS,  terme  de  Droit  canonique,  désigne  le  droit  en 
lertQ  duquel  celui  qui  a  résigné,  avec  ràpulation  de  re- 
toor,  on  bénéfice  dont  11  n'a  pas  pris  possession,  peut 
raitrer  dans  ce  bénéfice  (ingredi  m  beneficium)  au  cas 
ponr  lequel  le  retour  a  été  stipulé. 

INHUMATION.  V.  ce  mot  dans  notre  IKcttofiitatrs  de 
Biographie  et  d^ Histoire, 

INTriALB  (do  latin  mttttim,  commencement),  lettre 
noonençant  on  mot.  Elle  doit  totdours  être  minuscule 
la  conunencement  d'une  phrase,  et  oans  les  noms  propres 
Mt  dans  les  nonos  communs  personnifiés.  En  allemand, 
tous  les  substantife  et  adjectira  pris  substantivement  re- 
pùnat  une  initiale  ma|uscule;  Une  lettre  initiale  sert 
soQTent  k  désigner  un  nom,  soit  propre,  soit  conmmn, 
<ine  Ton  ne  veut  pas  laisser  connaître  de  tout  le  monde, 
SQ  qa'on  ne  veut  pas  écrire  en  entier  pour  des  motifs  de 
l'ieûé&nce.  La  plupart  du  temps,  les  prénoms  se  mar- 
JKot  par  une  mmple  initale  :  J.  Racine  (Jean  Racine), 
r.  Gomeine  (Pierre  Corneille).  —  Les  lettres  initiales 
>OQt  aossi  employé»  comme  abréviations.  V,  Abr<via- 
tions,  Majuscol»,  et  le  i**"  article  de  chacune  des  lettres 
^l'alphabet  dans  ce  Dictionnaire. 


INITIATION,  cérémonie  par  laquelle  on  était  admis, 
chez  les  Anciens,  à  la  connaissance  et  à  la  participation 
de  certiUns  mystères  de  la  religion.  Les  Modernes  em- 
ploient le  même  mot  pour  désigner  l'admission  dans  une 
société  secrète. 

INITIATIVE,  en  Droit  politique,  pouvoir  de  proposer 
des  lois.  La  Constitution  de  1791  l'attribua  à  l'Assemblée 
l^slative;  celle  de  l'an  m  le  réserva  au  Conseil  des 
Cinq-Cents,  mais  le  Directoire  avait  le  droit  de  provo- 

Siier  par  un  messa^  l'action  de  la  puissance  législative, 
'apiès  la  Constitution  de  l'an  vm  et  sous  le  premier  Em- 
fùre,  l'initiative  des  lois  appartint  au  gouvernement.  Soqs 
e  régime  de  la  Charte  de  1814,  le  roi  seul  proposait  les 
lois  ;  mais  les  Chambres  pouvaient  le  suppUèr  de  fidre 
présenter  tel  ou  tel  projet,  et  indiquer  ce  qu'il  devait 
contenir.  D'après  la  Charte  de  1830,  la  proposition  des 
lois  appartint  au  roi,  à  la  Chambre  des  pairs  et  à  la 
Chamm  des  députés.  Sous  la  Constitution  de  1&48,  le 
président  de  la  République  partagea  l'initiative  avec  l' As- 
semblée nationale;  do%<tô9d»o70  elle  fut  réservée  an 
fouvemement. 

'  INJURE  (du  latin  m,  contre,  et  3us,  droit),  expression 
d'outrage  ou  de  mépris  adressée  à  autrui.  Vinjure  quo- 
lifiée  est  celle  qui  a  été  proférée  dans  un  lieu  public  t  elle 
est  punie  correctionneliement  d'une  amende  de  16  fr.  ^ 
500  fr.  Si  l'injure  n'a  pas  été  proférée  publiquement,  elle 
se  poursuit  devant  les  tribunaux  de  simple  police,  et  est 
punie  d'une  amende  de  1  à  5  fr.  ;  la  contravention  dis- 
paraît même  s'il  y  a  eu  provocation  préalable  {Code  pénal, 
art.  471).  Les  injures  proférées  à  l'audience  d'un  tribu- 
nal peuvent  être  Jugées  immédiatement.  L'injure  contre 
l'Empereur  prend  le  nom  d*offense  (V.  ce  mot)  ;  celles 
contre  les  grânds  corps  de  l'État,  les  officiers  ministériels 
et  les  fonctionnaires  publics  se  nomment  outrages  {V,  ce 
mot).  En  matière  de  Presse,  l'injure  est  toute  invective 
ne  renfermant  l'imputation  d'aucun  fait  déterminé,  ce  en 
quoi  elle  diffère  de  la  diffamation  (V,  ce  mot), 

INKRAN  (Idiome).  V.  Agsa. 

INONDATION,  débordement  des  eaux  qui  sortent  de 
leur  lit.  Quand  elle  est  l'effet  d'une  force  majeure,  per- 
sonne n'en  est  responsable  ;  mais  si  elle  résulte  d^ou» 
vrages  pratiqués  dans  une  propriété,  celui  qui  a  fait 
exécuter  ces  ouvrages  est  responsable  du  dommage  qu'il 
a  causé  à  autrui.  Les  propriétaires,  fermiers  ou  autres, 
jouissant  de  moulins,  usines  ou  étangs,  et  qui,  par  l'élé- 
vation du  déversoir  de  leurs  eaux  au-dessus  de  la  hau- 
teur déterminée  par  l'autorité,  ont  produit  une  inondation, 
sont  passibles  d'une  amende  de  50  fr.  an  moins  (Code 
p^MU,  art  457);  si  cette  inondation  a  fait  quelques  dé- 
gradations, la  peine  est  augmentée  d'un  emprisonnement 
de  6  Jours  à  1  mois. 

IN  PACE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bù^ 
graphie  et  d^ Histoire.' 

INSAISISSABLE.  Le  Code  de  Procédure  (art  580-502) 
déclare  insaisissables:  1®  les  provisions  alimentaires; 
2®  les  sommes  et  objets  disponibles  déclarés  insaisis- 
sables par  le  testateur;  3<^  les  choses  déclarées  insaisis- 
sables par  la  loi,  comme  le  coucher  des  saisis,  les  habits 
dont  ia  sont  vêtus,  les  livres,  instruments  ou  outils  né- 
cessaires à  leur  profession;  une  vache,  deux  chèvres  ou 
trois  brebis,  an  choix  du  saisi  ;  4^  les  immeubles  par  des- 
tination {V.  ImiBUBLES).  Les  rentes  sur  l'État  sont  insai- 
sissables ;  les  traitements  et  pensions  dus  par  l'État  ne 
peuvent  être  saisis  que  pour  une  portion  (F.  Appointa- 
MENTs).  Ia  solde  des  militaires  inférieure  à  600  fr.  est 
insaisissable;  elle  n'est  saisissable  que  pour  un  5'  lors- 
qu'elle dépasse  cette  somme. 

INSCRIi^ON ,  en  grec  épigramma,  épigraphe,  en  latin 
inscriptio,  tikUus,  se  dit  de  tout  texte  gravé  ou  peint  sur 
le  marbre,  la  pierre  ou  les  métaux.  On  joint  aux  mono- 
ments  de  ce  genre  les  papyrus  de  l'Egypte.  La  science 
des  inscriptions  se  nomme  Vépigraphie,  et  celui  qui  s'en 
occupe,  épigraphiste.  Les  notions  que  fournissent  les  in- 
scriptions peuvent  être  incomplètes;  mais  ces  inscrip- 
tions, génmlement  contemporaines  des  événements  et 
des  hommes  dont  elles  ont  perpétué  la  mémoire,  expo- 
sées pendant  des  siècles  au  milieu  de  populations  qui 
pouvaient  les  contredire  si  elles  étaient  mensongères, 
ofErent  ^un  caractère  d'authenticité  et  de  certitude  que 
ne  possèdent  pas  toujours  les  relations  des  historiens» 
L'épigraphie  rend  des  services  importants  à  la  linguis- 
tique :  cW  par  les  inscriptions  cunéiformes  (F.  ce  mot) 
que  les  savants  de  nos  jours  ont  retrouvé  l'idiome  des 
anciens  habitants  de  la  Babylonle,  de  laMédie,  et  de 
la  Perse;  les  inscriptions  leur  ont  également  permis  de 
reconstituer  celui  de  la  vieille  Egypte  (V.  HiiaoGLTPHBs}; 


INS 


1084 


ÎNS 


Dont  leur  derons  enfin  tout  oe  que  nous  savons  des 
langues  parlées  par  les  Lyciens,  les  Lybiens,  les  Êtrus- 

Îaes,  les  Oaques,  les  anciens  Scandinaves  {V.  Rorbs). 
"utilité  des  études  épigraphiques  pour  rhistoire  an- 
cienne est  de  toute  évidence  :  les  Marbres  de  Paros  pour 
la  Grèce,  les  Fastes  consulaires  pour  Rome,  ont  assuré 
et  complété  la  chronologie  ;  la  Colonne  de  Dwlius  a  con- 
servé le  souvenir  de  la  première  victoire  navale  des  Ro- 
mains; le  Monument  d^Ancyre  est  une  des  sources  les 
plus  précieuses  de  Thistoire  de  l*empereur  Auguste.  Les 
inscriptions  confirment  le  témoignage  des  historiens,  ou 
suppléent  aux  lacunes  que  le  temps  a  faites  dans  leurs 
ouvrages.  La  science  du  Droit  romain  a  tiré  des  inscrip- 
tions une  foule  de  textes,  de  formules,  avec  leurs  appii- 
o^ns;  enfin  ce  n*est  que  par  les  inscriptions  recueil- 
lies dans  notre  conquête  de  l'Algérie,  que  l'on  a  connu 
toute  rétendue  des  possessions  romaines  dans  ce  pays. 
Malgré  tant  de  faits,  que  nul  ne  conteste,  les  Bfodemes 
font  à  peine  usage  des  inscriptions  pour  eux-mêmes  :  ils 
semblent  croire,  bien  à  tort,  que  l'imprimerie  et  la  gra- 
vure doivent  tout  éterniser.  V,  MaflTei,  Ars  crilica  lapida^' 
ria  (dans  le  Supplément  au  Thésaurus  de  Biuratori); 
Oudendorp,  De  veteribus  inscriptùmihus  et  monument 
torum  usu,  Leyde,  1745,  in-4°;  Zaccaria,  Istituzione 
antiquariO'laptaaria ,  Rome,  1770,  in-8<^;  Sportono, 
Trattato  dell*  arte  epigrafica,  Savone,  4813,  2  vol.  in-8<»; 
Sainte-Croix,  Essai  sttr  les  inscriptions  antiques,  dans 
le  Magasin  enqfclopédique,  2*  année ,  t.  V;  Le  Ras,  Sur 
l'utilité  qu'on  peut  tirer  de  Vépigraphie  pour  Vintelli" 
aence  des  auteurs  anciens ,  Paris,  1829,  in-4<*;  Riseu- 
hardt,  00  auctoritate  et  tuu  inscripttonum  m  jure, 
Helmstadt,  1740,  in-4<*;  Vunderlich,  De  tuu  inscriptU)- 
fMifn...  in  jure,  1750,  in-4^ 

Dans  l'antiquité  même,  sans  parler  des  historiens  qui, 
comme  Hérodote  et  Pausanias,  ont  inséré  des  inscriptions 
dans  leurs  ouvrages,  il  y  eut  des  collecteurs  grecs  d'épi- 
grammes;  mais  aucun  de  leurs  recueils,  à  l'exception  de 
YAntholoqie,  ne  nous  est  parvenu.  Il  ne  parait  pas  que 
les  Romains  se  soient  liviés  à  ce  genre  de  recherches. 
Mais,  chez  les  modernes,  les  collections  épigraphiques 
sont  nombreuses.  Parmi  les  savants  oui  les  ont  formées, 
nous  citerons  :  Gyriaque  Pizzicoli,  dit  Cyriaque  d'An- 
cône,  Inscriptiones  et  epigrammata  grcsca  et  latina, 
Rome,  1747,  in-fol.  (l'auteur  appartient  à  la  fin  du 
ivi«  siècle);  Gruter,  Inscriptiones  antiques  totius  orbis 
romani,  Heidelbeig,  1602,  In-fol.,  ouvrage  réédité  à 
Amsterdam  (1707,  4  vol.  in-fol.)  par  Grsvius,  qui  y  com- 
prit les  collections  publiées  par  Reinesius  (Leipzig, 
1082),  Spon  (Lyon,  1685)  et  Fabretti  (Rome,  1600); 
Gori,  Inscriptiones  antiqtue  m  Etruriœ  urbUms  exstantes, 
Florence,  1726,  3  vol.  in-fol.;  Marquard  Gude,  Antiques 
inscriptiones,  Loeuwarden,  1731,  in-fol.;  Pococke  et 
Milles,  Inscr^tiones  grescœ  et  UUinœ,  Londres,  1752, 
In-fol.,  Doni,  Inscriptiones  antiques ,  Florence,  1781, 
In-foi.  ;  Blaffei ,  Galtiœ  antiquiteites  selectœ  ,  Vérone , 
1731,  in-fol.,  et  Muséum  Veronense,  ibid.,  1749,  in-fol.; 
Muratori ,  rfovus  Thésaurus  veterum  inscriptionum , 
Milan,  1737,  4  vol.  in-fol.;  Passionei,  Iscrizioni  antiche 
disposte  per  ordine  di  varie  classe,  Lucques,  1760,  in-fol.; 
Ghandler,  Inscriptiones  antiques,  Oxford,  1774,  in-fol.; 
Donati,  Ad  wwum  Thesaurum  MurcUorii  supplément 
tiffn .  Lucques^  1765-75,  2  vol.  in-foL;  Guasco ,  Musei 
CapÙolini  antujuœ  inscriptiones ,  Rome,  1775,  3  vol. 
in-fol.;  Torremuzza,  SiciluB  et  objacentium  insularum 
veterum  inscriptionum  nova  collectio^  Païenne,  1784,  In- 
fol.;  Biagi,  Monumenta  grœca  et  latina,  Rome,  1787, 
in-4*;  Boeckh  et  Franx,  Corpus  inscriptionum  gresca- 
rum,  Berlin,  1828-51, 3  vol.;  Orelli,  Inscriptùmwm  loti" 
nar%mi  selectarum  amplissUna  coUectio,  Zurich,  1828, 
S  vol.  gr.  in-8^,  et  supplément,  par  Henzen,  Zurich, 
1856,  gr.  in-8<*;  Osann,  Sylloge  inscriptionum,  léna, 
1832;  Welcker,  Sylloge  eptgrammeUum,  Bonn,  1828; 
Franz,  Elementa  Epigraphices  grœcœ,  Berlin,  1841; 
Baille,  Inscriptions  asieUiques^  Londres,  1844-46,  2  vol. 
in-8*;  De  Wal,  Mythologiœ  septentrUmeUis  monumenta 
epigraphka  latina,  TJtrecht,  1847,  in-S*»  ;  L.  Renier,  In- 
scriptions romaines  de  l'Algérie,  Paris,  1855  et  suiv. 
«  vol.  in-4o. 

INSCRIPTION,  en  termes  de  Droit  et  d'Administration , 
enregistrement  d'un  nom,  d'une  qualité,  d'un  droit  ou  de 

Îuelque  autre  chose  sur  des  registres  établis  à  cet  effet. 
In  étudiant  prend  ses  inscriptions  en  se  faisant  inscrire, 
BU  commencement  de  chaque  trimestre,  sur  le  registre 
de  la  Faculté  dans  laquelle  il  étudie  pour  obtenir  des 
grades.  Il  faut  12  inscriptions  pour  être  admis  à  l'examen 
as  licencié  en  Droit,  et  16  pour  le  doctorat,  soit  en 


Droit»  soit  en  médecine.  Les  inscriptions  de  Droit  eoAtSBt 
chacune  15  fr.;  celles  de  médecine,  50  lîr.;  celles  des  Flih 
cultes  de  Lettres,  3  fr. 

mscaiPTioN  DB  FADX ,  scto  psT  lequol  on  soutient  en 
justice  qu'une  pièce  produite  dans  un  procès  est  faune 
ou  falsifiée.  Les  tribunaux  de  commerce  et  les  Juges  de 
paix  ne  sont  pas  compétents  pour  admettre  ou  rejeter  les 
inscriptions  de  faux.  La  Cour  de  cassation  peut  les  ad- 
mettre ou  les  rejeter;  une  fois  admises,  elle  ne  peut 
statuer  sur  elles,  et  doit  renvoyer  aux  tribunaux  oi^ 
dinaires. 

INSCRIPTION  DB  asNTB,  titre  délivré  par  l'État  et  inscrit 
sur  le  Grand-Livre  de  la  dette  publique,  qui  constate  la 
propriété  d'une  rente  perpétuelle  due  par  le  Trésor.  Ce 
titre  peut  être  nominatif  ou  au  porteur.  H  est  insaisisp 
sable.  En  cas  de  perte  d'un  titre,  le  propriétaire  doit  en 
faire  la  déclaration  devant  le  maire  de  la  localité,  en  se 
faisant  accompagner  de  deux  témoins  qui  attestent  son 
individualité  :  le  remplacement  du  titre  a  lieu  dans  le 
semestre  qui  suit  celui  de  la  déclaration. 

INSCBIPTION  FONéRAlBB.    F.  ClHBTlèSE. 

iNscaiPTioN  HYPomécAiRB.  F.  Htpothèqdb. 

iNscaiPTiON  MAaiTiME.  K.  co  mot  dans  notre  Dtctum' 
noire  de  Biographie  et  d^Histoirâ. 

INSCRIPTIONS  ET  BEU.ES  -  LETTRES  (Académie 
des  ).  Établie  t>ar  Golbert  en  1663,  elle  reçut  de  Louis  XIV 
le  nom  de  Petite  Académie,  soit  narce  qu'elle  ne  comprit 
d'abord  que  quatre  membres  (Charpentier,  Quinault, 
l'abbé  Tallemant,  et  Félibien  le  père),  pris  dans  TAcadé* 
mie  française,  soit  à  cause  du  peu  d'importance  de  ses  pre- 
miers travaux,  qui  se  bornaient,  en  effet,  aux  inscriptions 
pour  les  monuments  publics,  aux  dessins  des  tapisseries 
du  roi ,  aux  devises  des  jetons  du  Trésor,  à  l'examen  des 
projets  d'embellissement  de  Versailles,  etc.  On  la  char- 
gea ensuite  de  retracer  l'histoire  de  Louis  XIV  à  l'aide  de 
médailles,  et,  sous  le  ministère  de  Pontchartrain,  elle 
reçut  le  nom  d'Académie  des  Inscr^tions  et  des  M^ 
dailles.  Elle  était  arrivée  progressivement  à  10  membres, 
lorsqu'un  règlement  du  16  juillet  1701  la  composa  de 
40  membres,  dont  10  vétérans,  10  honoraires,  10  pen^ 
sUmnaires  et  10  élèves  ;  un  local  lui  fut  assigné  an  Louvre 
pour  ses  séances,  qui  s'étaient  tenues  primitivement  chez 
Colbert,  puis  chez  Louvois;  on  lui  accorda  des  armoiries 
et  des  jetons  de  prince.  Des  lettres  patentes  de  février 
1712  confirmèrent  son  établissement.  En  1715,  on  } 
admit  pour  la  première  fois,  comme  honoraires,  trois  sa- 
vants étrangers.  Un  arrêt  du  Conseil  d'État,  du  4  Jan  viei 
1716,  donna  à  la  Société  le  nom  assez  vsgue  d'Aôtdémie 
des  Inscriptions  et  Belles-Lettres,  supprima  la  classe  des 
élèves,  et  porta  à  20  le  nombre  des  associés;  bientôt 
après,  on  rédidsit  le  nombre  des  vétérans.  Plus  tard, 
l'Académie  fût  augmentée  d'une  classe  d'Académiciens 
libres,  qu'on  divisa  depuis  en  résidents  et  non^résidmUs, 
et  le  nombre  des  pensionnaires  fut  porté  à  20.  Un  senti* 
ment  de  Jalousie  avait  fait  décider  que  les  membres  qui 
se  présenteraient  à  l'Académie  française  seraient  exclus 
de  la  compagnie;  Louis  XV  annula  cette  délibération.  Un 
décret  de  la  Convention,  en  date  du  8  août  1703,  sup- 
prima l'Académie  des  Inscriptions,  ainsi  que  toutes  les 
autres  :  lors  de  la  création  de  l'Institut  en  1705,  elle  fut 
comprise  dans  la  2*  classe,  dite  des  Sciences  morales  et 
politiques;  sous  le  Consulat,  en  1803,  elle  devint  la 
3*  classe,  dite  d'Histoire  et  de  littérature  anciennes,  et 
se  composa  de  40  membres  (pensionnés  à  raison  de 
1,500  fr.  par  an),  de  8  associés  étrangers,  et  de  60  corre^ 

fondants.  En  vertu  de  Tordonnance  royale  du  21  mars 
816,  elle  devint  2*  classe  de  l'Institut,  reprit  son  ancien 
titre,  et  conserva  sa  même  orranisation,  sauf  la  création 
de  10  places  d'académiciens  libres.  En  1823,  le  nombre 
des  membres  pensionnaires  fut  réduit  à  30«  pour  au|^ 
menter  leur  traitement:  mais,  en  1831,  le  chiffre  de^ 
fut  rétabli.  Depuis  1717,  l'Académie  des  Inscriptions  et 
Belles-Lettres  publie  des  Hémoires  tré»-estimâ  sur  les 
matières  d'érudition ,  d'antiquités  nationales  et  étran- 
gères, de  langues  anciennes  et  orientales.  Sa  collection  se 
compose  de  51  vol.  in-4%  dits  ancienne  série,  1701-1 844, 
et  de  25  vol.  in-4*^,  dits  nouvelle  série,  dont  le  premier 
est  de  1800.  Une  Table  générale  et  méthodùiue  a  été  pu- 
bliée par  de  l'Averdy,  en  1701,  et  revue,  corrigée,  aug* 
mentée  de  l'index  des  mémoires  depuis  l'or^ne  de  I*  Aca- 
démie jusques  et  y  compris  1850,  par  MM.  de  Rorière  et 
Chàtel,  Paris,  1856,  1  vol.  in-4*.  H  y  a  une  édic  in-18 
de  ces  Mémoires,  La  Haye  et  Paris,  1719-81,  mais  qui 
ne  va  oue  jusqu'à  1776,  et  ne  représente  que  41  voL 
in-4*.  L  Académie  est  aujourd'hui  divisée  en  commissions 
qui  dirigent  des  publications  importantes,  telles  que 


INS 


1085 


INS 


NaUces  et  Extraits  des  manuscrits,  les  Historietu  des 
GauUs  et  de  la  France,  les  Historiens  des  Croisades, 
VHistoire  Uttirairê  de  la  France,  etc.  Elle  décerne  des 
prix  chaque  année.  B. 

INSERTDM  OPU8.  F.  Appakbiu 

INSIGNE,  qualification  donnée  autrefois  à  certaines 
églises  collégiales,  supérieures  aux  autres  par  le  nombre 
des  eodésiastîques  qui  les  composaient  ou  par  la  gran- 
deur de  leurs  revenus.  Ces  élises  sTaient  dans  les  pro- 
cessions  et  les  cérémonies  une  bannière  spMale  comme 
marque  de  leur  insignité,  et  leur  chapitre  prenait  le  pas 
Kir  les  autres. 

INSIGNES ,  signes  extérieurs  de  puissance  et  de  di- 
pité.  De  tout  temps,  les  hommes  placés  à  la  tète  de 
lenrs  semblables  ont  porté  des  marques  çlus  ou  moins 
apparentes  de  leur  puissance.  Ghex  les  nations  de  l'Asie, 
le  souverain 'se  distingue  de  ses  sujets  surtout  par  la 
splendeur  de  ses  vêtements.  Les  insignes  royaux  chez  les 
Romains  étaient  la  couronne  d*or,  le  siège  divoire,  et  les 
douze  lictaors  que  les  consuls  conservèrent.  Ceux  des 
empereurs  d^Allemagne  étaient  la  couronne  d*or,  le  sceptre 
et  la  boule  impériale,  Fépée  de  Charlemagne,  celle  de 
S' Mauricet  les  éperons  d'or,  la  dalmatique,  et  de  riches 
1h]'ouz,  dont  une  partie  se  trouve  encore  dans  le  Trésor 
d'Aix-la-Chapelle.  Les  chevaliers  du  moyen  âge  avaient 
le  casque  et  Técu.  Les  évoques  portent  le  paltium,  la 
mitre,  la  crosse  et  l'anneau.  Les  souverains  actuels  ont 
la  couronne,  le  sceptre,  la  main  de  Justice,  l'épée,  etc.; 
les  maréchaux  de  France,  le  bâton  ;  les  nachas  turcs, 
trois  queues  de  cheval;  les  mandarins  chinois,  des  plumes 
de  paon,  etc.  Les  costumes,  décorations,  médailles,  etc., 
sont  des  insignes. 

INSINUATION.  C'était,  chez  les  Romains,  le  dépôt, 
dans  les  archives  publiques,  des  actes  que  Ton  voulait 
rendre  authentiqu».  Dans  l'ancien  Droit  français,  Vlnsi- 
muatian  était  ce  que  nous  appelons  enregistrement  et 
transcription  (V,  ces  mots).  En  Droit  canon,  Vlnstnaa- 
tion  était  la  déclaration  de  leurs  noms  et  surnoms  que 
les  gradués  devaient  faire  tous  les  ans  h  leurs  collateurs. 

INSOLVABILITÉ  (du  latin  tn  négatif,  et  solvere, 
payer),  état  de  celui  qui  ne  peut  payer  ses  dettes.  Toute 
personne  insolvable  et  poursuivie  pour  dettes  est  déclarée 
en  faillite,  si  elle  est  commerçante,  et  en  déconfiture,  si 
•Ue  ne  Test  pas  (K  Failutb,  D^confiturb),  Les  per- 
sonnes notoirement  insolvables  ne  peuvent  devenir  adju- 
dicataires {Code de  Procédure,  art,  li3).  Les  cohéritiers 
sont  tenus  de  payer  la  part  de  celui  d  entre  eux  qui  est 
insolvable,  lorsqu'il  s'agit  d'une  dette  hypothécaire  (  Code 
Napol.,,  art.  876).  H  en  est  de  môme  dans  le  cas  ou  l'un 
des  codébiteurs  d'une  dette  solidaire  se  trouve  insol- 
vable {Ibid.,  art.  1214).  Si  un  mari  était  insolvable  lors- 
que le  père  a  constitué  une  dot  à  sa  fille,  celle-ci  n'est 
tenue  de  rapporter  à  la  succession  du  père  que  l'action 
qu'elle  a  contre  celle  de  son  mari  ;  si  le  mari  n'est  de- 
venu insolvable  que  depuis  le  mariage,  la  perte  de  la 
dot  tombe  uniquement  sur  la  femme  (  art.  1573  ). 

INSOUHISSlON,  état  du  Jeune  soldat  qui  n'a  pas  ré- 
pondu à  l'appel  sous  les  drapeaux.  Celui  qui  a  reçu  un 
ordre  de  route  et  n'est  pas  arrivé  à  sa  destination  doit 
être,  après  un  mois  de  délai,  traduit  devant  un  Conseil 
de  guerre,  et,  hors  le  cas  de  force  majeure,  puni,  comme 
insoumis,  d'un  emprisonnement  d'un  mois  à  un  an.  Le 
temps  pendant  lequel  il  a  été  insoumis  ne  peut  compter 
en  déduction  des  années  de  service  exigées. 

INSPECTEUR  (du  latin  inspieere^  examiner),  fonc- 
tionnaire ayant  pour  mission  de  surveiller,  d'examiner 
les  actes  de  fonctionnaires  subalternes,  et  d'en  rendre 
compte  à  une  autorité  supérieure.  H  y  a  des  inspecteurs 
des  finances,  de  l'enregistrement  et  des  domaines,  des 
forets,  des  postes,  des  contributions  directes  et  indi- 
rectes, de  Tagriculture,  de  la  navigation,  de  la  marine, 
des  ponts  et  chaussées,  des  mines,  des  prisons,  des  mai- 
sons centrales  de  force  et  de  correction,  des  établisse- 
ments de  bienfaisance,  du  travail  des  enfants  dans  les 
manufactures,  des  poids  et  mesures,  des  poudres  et  sal- 
pêtres, des  tabacs,  des  théâtres,  des  fortifications,  des 
barss,  des  écoles  vétérinaires  et  des  bergeries  impériales, 
des  eaux  minérales,  de  la  voirie,  des  bAtiments  civils  et 
monuments  publics,  des  beaux-arts,  des  monuments  his- 
toriques et  antiquités  nationales,  des  halles  et  marchés, 
des  chemins  de  fer,  etc.  Les  inspecteurs  généraux  et  spé- 
cbux  de  police,  créés  par  décret  du  30  Janv.  1852,  ont  été 
tappriméi  par  décret  du  5  mars  1853.  —  L'Université  a 
des  mspecteurs  généraux  de  renseignement  supérieur 
ri2.000  ir.  de  trâiement),  de  l'enseignement  secondaire 
(10^000  £r.),  et  de  l'enseignement  primaire  (8,000  fr.\ 


des  inspecteurs  d'académie  (6,000,  5,500  et  5,000  fir.),  «t 
des  inspecteurs  de  l'instruction  priîmaire  (trois  classes 
à  2,400  fr.,  2,000  fir.  et  1,000  fir.  de  traitement).  —  Dans 
l'armée,  il  y>eut,  au  temps  du  Consulat  et  du  raemier 
Empire,  des  Inspecteurs  aux  revues,  chargés  de  l'em- 
brigadement, de  l'incorporation,  de  la  levée  et  du  licen- 
ciement des  hommes,  de  l'organisation,  de  la  solde  et  de 
la  comptabilité  des  corps,  de  la  tenue  des  contrôles  et  des 
revues;  ils  ont  été  remplacés  par  les  Intendants  mUi-^ 
taires.  Aujourd'hui,  les  inspections  des  troupes  sont 
faites  chaque  année  par  des  sénéraux  de  division,  dont  U 
mission  est  toujours  temporaire. 

INSPIRATION  ,  en  termes  de  Théologie ,  état  des 
hommes  qui  agissent  sous  l'influence  de  l'Esprit  divin , 
par  une  communication  immédiate  et  surnaturelle  avec 
Dieu.  Mofse,  les  prophètes,  les  apôtres,  ont  été  inspirés 
de  Dieu.  Tous  les  fondateurs  de  religions  ont  prétendu 
avoir  été  instruits  immédiatement  par  la  divinité.  Une 
idée  universellement  répandue  dans  l'antiquité  païenne, 
c'est  que  les  sages,  les  poètes,  les  artistes,  tenaient  de 
quelque  dieu  le  don  de  mieux  parler  que  leurs  sem- 
blables :  dans  la  littérature  et  dans  les  beaux-arts,  être  in- 
spiré, c'est  inventer,  disposer  et  exécuter  une  osuvre  en 
quelmie  sorte  tout  d'un  trait ,  c'est  trouver  d'abondance 
les  idées,  les  images,  les  expressions,  les  mouvements 
magnifiques.  Cette  inspiration,  essentielle  au  génie,  est 
un  don  de  nature;  on  la  reçoit,  mais  on  ne  l'acquiert  pas. 

INSPRUCK  (Cathédrale  d').  Cette  église,  dite  des  Fran^ 
ciscains,  ou  de  la  Cour,  ou  de  la  S^^rotx,  fut  con- 
struite de  1553  à  1563  par  Ferdinand  I**".  Si  elle  n'a  rien 
de  bien  remarquable  au  point  de  vue  architectural,  les 
œuvres  d'art  qu'elle  renferme  en  font  une  des  églises  les 


beau,  qui  ne  contient  pas  les  restes  du  mort,  est  entouré 
d'une  grille  de  fer,  et  repose  sur  trois  degrés  de  marbre. 
H  est  haut  de  2  met.,  long  de  10,  surmonté  d'une  statue 
en  bronze  de  Maximilien  agenouillé,  et  orné  aux  angles 
des  statues  éndement  en  bronze  de  la  Justice,  de  la  Pru- 
dence, de  la  Force,  et  de  la  Modération,  fondues  par  Lu- 
dovico  délia  Duca,  artiste  sicilien.  Les  quatre  pans 
latéraux  sont  décorés  de  24  bas-reliefs  en  marbre  de 
Carrare,  que  séparent  16  pilastres  de  marbre  nohr;  20 
de  ces  bas-reliefs  ont  été  exécutés  par  Alexandre  Colin , 
de  Ifalines ,  et  les  4  autres  par  les  frères  Bemhard  et 
Arnold  Abel,  de  Cologne.  Ils  représentent  les  princi- 
paux événements  de  la  vie  de  Maximilien,  et  l'exécution 
en  est  admirable  :  les  nombreux  personnages  qu'ils  con- 
tiennent, et  dont  les  tètes  sont  quelquefois  des  portraits, 
sont  très-bien  groupés ,  et  les  vues  ues  villes  et  des  chA- 
teaux  sont  rendues  avec  un  rare  bonheur.  Autour  de  ce 
magnifique  mausolée  se  tiennent,  comme  pour  veiller 
sur  le  monarque  endormi,  28  statues  en  bronze ,  plus 
grandes  que  nature,  représentant  des  hommes  et  des 
femmes  de  maisons  princières,  surtout  de  la  maison  de 
Habsbourg,  et  quelques  héros  qui  excitaient  l'admiration 
de  Maximilien  (Cloris ,  Théodoric  le  Grand,  le  roi  Ar- 
thur, Godefiroi  de  Bouillon  ).  Les  personnages  des  bas- 
relieb  et  les  statues  portent  les  costumes  et  les  armes 
du  temps,  ce  qui  leur  donne  une  grande  valeur  histo- 
rique. Indépendamment  du  tombeau  de  Maximilien  I*',  la 
cathédrale  dlnspruck  contient  :  à  eauche,  le  monument 
et  la  statue  d'André  Hofer,  par  Schaller;  à  droite,  la 
Chapelle  d'argent,  ainsi  nommée  d'une  Vierge  en  argent 
et  d'un  bas-relief  de  même  métal  qui  en  ornent  l'autel , 
et  contenant,  entre  les  tombeaux  de  l'archiduc  Ferdinand 
et  de  sa  femme  Philippine ,  23  statuettes  de  bronze  de 
saints,  princes  ou  nobles,  fondues,  comme  les  grandes 
statues  de  la  nef,  de  1563  à  1583,  par  les  frères  Etienne 
et  Melchior  Godl,  Grégoire  Lceffler  et  Hans  Landen- 
streich,  et  qui  appartenaient  aussi  Jadis  au  ton^beau  de 
liaximilien. 

INSTALLATION  (du  latin  in,  dans,  et  stAilum,  siège, 
chaire  ),  action  de  placer  quelau'un  sur  le  siège  qu'il  doit 
occuper,  de  le  mettre  solennellement  en  poes^sion  d'une 
place,  d'un  emploi,  d'une  dignité. 

INSTANCE  (  du  latin  store  in  judicio,  être  en  Juge- 
ment), action  intentée  ou  poursuite  portée  devant  un 
tribunal  quelconque.  On  nomme  Demande  introductive 
d^instance  celle  qui  saisit  le  Juge  d'une  cause.  Une  in- 
stance peut  être  uéclarée  périmée,  si  le  demandeur  laisse 
s'écouler  trois  années  sans  faire  aucun  acte  de  procédure; 
mais  tant  que  la  péremption  n'aura  pas  été  réclamée,  le 
demandeur  peut  raviver  son  action  en  assignant  l'adver- 
saire en  reprise  d^tnstancs.  L'instance  est  prescrne  par 


INS 


1086 


INS 


M  ans.  —  La  mot  tn$tamo$  dérigne  ansal  la  Jaridlctloii. 
mn  en  prmmikw  kutance,  c*est  plaider  devant  le  tri- 
banal  du  premier  depré  :  les  trihanaux  d¥Us  sont  dits  d$ 
pnmière  mstane$,  meo  qu'ils  prononcent  souvent  par 
appel  sur  les  décisions  de  la  Justlee  de  paix.  Dans  les 
BÔatièrea  administratives,  le  Conseil  de  préfecture  est  Ju^ 
de  i**  instance  reladTement  an  Conseil  d'État.  La  Juri- 
diction du  second  degré  est  la  seconde  mstancê;  mais,  au 
Ben  de  cette  eiqireasion,  on  emploie  le  mot  appri. 

msTÉMca  M  CABoiBr.  V,  Cauiht. 

mSTOSIGT,  en  latin  mstmctus  (du  grec  mutîMÔ,  piquer, 
eicIftBr  à  rintérieur  ),  principe  d'action  que  l'on  trouve 
ehes  Ffaomme,  ckes  raBimal ,  et  jusqu'à  un  certain  point 
4ans  la  plante,  et  dont  les  diflérentea  yariétés  détennl- 
aant  cbes  les  êtres,  suivant  leur  nature  et  leurs  besoins, 
et  pour  la  satisfaction  de  ces  demiera,  des  mouvements 
auxquels  IHnlelligence  et  la  volonté  sont  éCrangtoea;  mou- 
f  ements  proprement  dits,  lorsqu'il  s'agit  de  beaoins  phy- 
siques i  développements  de  l'activité  morale,  lorsque  e^est 
TAme  qui  est  en  cause. 

Des  végétaux,  qui,  pour  se  développer,  ont  besoin 
d'air  et  de  lumière,  sont  placés  dans  une  cave  où  l'air  et 
la  lumière  ne  pénétrait  que  par  un  soupirail;  sils  sent 
d'ailleurs  de  nature  à  ne  pas  succomber  immédiatement, 
on  verra  leurs  tiges  s'allonger  dans  la  direction  du  jour, 
^oili,  dans  un  être  dépourvu  d'intelligence  et  de  volonté, 
un  mouvement  dont  le  but  évident  est  de  replacer  la 
plante  dans  les  conditions  les  plus  favorables  à  la  satis- 
Mctîon  d'un  besoin  de  sa  nature,  n  en  est  de  même  du 
mouvement  des  radnee  pour  chercher  le  sol  qui  leur  est 
le  plus  favorable  et  v  prendre  la  diiectlon  am  leur  con- 
vient le  mieux,  et  de  la  facilité  avec  laquelle  certaines 
fleurs  tournent  sur  leurs  tiges  pour  suivre  pendant  toute 
la  loumée  le  mouvement  du  soleil.  Il  en  est  de  même, 
pourrait-on  dire,  de  toutes  les  fonctions  de  l'existence  vé- 
It^tale;  seulement  noua  remarquona  mieux  celles  qui 
téxécnient  dans  des  circonstances  exceptionnelles  et 
anomales. 

Dans  l'animal,  l'instinct  se  dessine  bien  plus  nette- 
ment :  il  produit,  chez  les  espèces  inférieures,  où  l'intel- 
ligenoe  et,  par  suite,  la  perfectibilité  font  le  plus  com- 
plètement défaut,  les  merveilles,  tant  de  fois  décrites, 
des  ruches,  des  fourmilières,  etc.  Tout  en  présentant  une 
apparence  moins  mécanique,  l'instinct  n'est  ni  moins 
q>ontané  ni  moins  sur  diez  les  espèces  supérieures.  Les 
besoins  de  l'alimentation,  de  la  conservation ,  de  la  re- 

Ïiroduction,  de  l'éducation  de  la  famille,  font  exécuter  k 
'animal  une  foule  d'actes  qui  ne  sont,  bien  évidemment, 
ni  réfléchis,  ni  voulus;  de  là  les  émigrations  périodiques 
ou  accidentelles,  la  construction  des  mds,  des  terriers,  les 
mille  artifices,  les  mille  ruses  (si  l'on  peut  appoler  ainsi 
ce  dont  Tintelligence  est  absente)  que  les  animaux  em- 
ploient pour  assurer  leur  sécurité,  leur  subsistance  et 
celle  de  leurs  pedts.  Ainsi,  les  besoins  de  la  nature  ani- 
male se  manifestent  par  autant  d'impulsions  aveuglea  et 
spontanées ,  et  ces  impulsions  sont  les  instincts  des 
animaux. 

Des  principes  analoguea  existent  aussi  chex  l'homme  : 
Fenfant  <{ui  va  chercher  au  sein  de  sa  nourrice  la  nour- 
riture qui  lui  convient  ne  met ,  dans  cet  acte,  ni  plus  de 
réflexion^  ni  plus  de  volonté  que  l'agneau.  Plus  tard,  lors- 

au'au  nulieu  des  occupations,  des  peines  et  des  plaisirs 
e  la  vie,  la  faim  vient  impérieusement  rappeler  à 
rhomme  la  nécessité  de  satisfaire  le  besoin  naturel  d'ali- 
mentation, sans  doute  l'instinct  n*aj;it  plus  seul;  il  sub- 
siste cependant,  et  se  laisse  assex  facilement  distinguer 
de  la  connaissance,  acquise  par  nous,  de  la  nécessité  de 
prendre  des  aliments,  et  de  la  volonté  d'en  prendre. 
Ainsi  se  manifestent  chez  l'homme  tous  les  besoins  pu- 
rement physiques.  Mais  l'homme  ne  vit  pas  seulement 
de  la  vie  animale,  et  il  y  a  lieu  de  se  demander  si  c'est 
aussi  par  des  instincts  que  se  manifestent  primitivement 
chez  lui  les  besoins  de  la  vie  intellectuelle  et  morale; 
besoins  réels,  car  l'esprit  ne  peut  pas  pins  se  passer  de 
connaissances  ou  son  cœur  d'aff'eetions  que  son  corps 
d'aliments.  Or,  sur  ce  point  les  auteurs  diffèrent  d'avis, 
dans  la  forme  peut-être  plus  que  dans  le  fond,  mais 
isses  enfin  pour  que  la  ouestion  mérite  d'être  examinée. 
Cest  abuser  des  mots,  disent  les  uns,  que  d'appliquer  le 
nom  d'instinct  à  ces  affections  spontanément  ressenties, 
mais  acceptées  par  l'âme  en  toute  conscience  et  en  toute 
liberté.  Hais  esUil  bien  certain  que  ce  soit  en  toute  con- 
sdenoe  et  en  toute  liberté?  Qu'y  a-t-il  de  réfléchi  et  de 
volontaire  dans  l'amour  qu'une  jeune  mère  éprouve  pour 
son  enfant  nouveau-né?  Ce  n'est  pas  un  devoir  qu'elle 
rsmplit;  c'est  un  besoin  de  son  coMir  qu'elle  sattsfait* 


c'est  une  impolsion  à  laquelle  elle  cède.  Que,  chei  elle, 
ce  besoin,  œtte  impuldon  revêtent  des  caractères  plus 
touchants  et  plus  nobles  que  ches  l'animal,  parce  que, 
après  tout,  il  s'agit  d'un  être  en  qui  lea  fhonltéa  marales 
ne  sont  pas  séparables  des  tendances  primitives  et  ne 
tardent  paa  à  les  modifier  et  à  en  changer  la  physio- 
nomie, cela  est  vrai  t  mais,  au  fond,  les  premiers  mou- 
vements de  l'amour  maternel  sont  chez  la  femme  ce 
qu'ils  sont  chez  la  femelle  de  tout  animal,  le  réaultat  d'on 
instinct.  Affirmer  qu'il  en  est  ainsi ,  ce  n'est  rien  ra- 
baisser, rien  diminuer  ;  car  c'est  rspporter  à  la  Providence 
la  première  impulsion  donnée  à  toutes  nos  facultés,  à 
l'intelligenoe,  à  la  volonté  elle-même.  La  personnalité  et 
la  liberté  de  l'homme  n'en  souffrent  d'ailleurs  aucune 
atteinte;  car  cet  état  est  éminemment  transitoire,  et 
l'homme,  saisissant,  à  mesure  qu'il  se  développe,  la  di- 
rection de  ses  facultés,  substitue  en  lui-même  le  règne 
de  la  raison  et  de  la  liberté  à  celui  dea  instincts.  Il  con- 
vient donc  d'étendre  le  nom  d'instinct  ansri  bien  aux 
tendances  primitives  de  l'intelligence  et  du  coeur  qu'aux 
impulsions  de  la  vie  phjrrique  et  animale,  et  noua  oonai- 
dérona  comme  une  classifiôition  exacte  des  instincts  celle 
qu'en  ont  ftute  lea  psvchologwBS  de  l'école  écossaise,  Reid 
et  Dugald  Stewart  :  1*  AppmU,  reladfii  an  corps,  oom- 
muns  a  l'homme  et  aux  animaux;  2^  Disin  ou  penchants 
de  l'intelligence;  3*  AffectUm$,  principes  sociaux,  impli- 
ouant  une  certaine  expansion  de  la  bienveillance  à  l'é^uti 
des  êtres  qui  en  sont  l'objet.  V.  nos  articles  Appert, 
Désia,  Affectioii).  V.  l'art.  Iiumcrdu  Dictionnain  dn 
tcimces  phUosopniques,  t,  III,  Paria,  4847;  Bossuet, 
Connaissatuie  de  Dieu  et  de  arirmime,  S^  partie;  Fénelon, 
Existence  de  Dieu,  1"  partie;  Reid,  Essais smr  Us  far 
cultes  actives  ;  Dugald  Stewart,  Esquisses  de  pkUosopkië 
morale,  et  Philosophie  des  faàdtés  actives  et  morales; 
Ad.  Garnier,  Précis  ^un  cours  de  psya^kxAooie:  Réanmor, 
Mémoires  pour  seroir  à  Vhistoire  ntUurem  des  insectes; 
Hilne  Edwards,  Cours  de  zoologie  élémentaire.  De  Vin- 
telligence  et  de  V instinct;  qucSques  pagea  charmantes 
de  Chateaubriand,  Génie  du  christianisme,  1"  partie, 
liv.  V.  B— B. 

INSITTA.  V,  ce  mot  dans  notre  Dtctionnotrs  de  0to- 
graphie  et  d'Histoire. 

INSTITUT  (du  latin  tnstitutwn,  établissement),  mot 
qui,  dans  son  acception  première,  signifia  règle,  consH" 
tution,  particulièrement  en  parlant  de  certains  ordres 
monastiques,  et  qui  s'est  ensuite  appliqué  à  toute  soctélé 
d'hommes  suivant  une  même  règle. 

msTrnrr  agsoiiomiqob.  V.  Agriculturb  (Écoles  d'). 

IRSTRUT    DB    GOaRBSPONDANCB    ARCHfoLOGIQDB  ,   Société 

libre  d'archéologues,  d'antiquaires,  et  d'amateurs  de  tous 
les  pays,  qui  s'occupe  de  recherohes  et  d'études  sur  l'an- 
tiquité.  Elle  siège  à  Rome  :  un  comité  de  6  membres  et 
deux  secrétaires  président  à  ses  travaux.  Chaque  année 
elle  publie  1  vol.  m-8^  d  Annales ,  composé  de  mémoirea 
et  de  dissertations,  avec  un  atlas  in-fol.  de  planches 
d'objets  inédits;  et  en  outre,  un  Bulletin  mensuel,  pour 
les  procès-verbaux  de  ses  séances,  les  nouvelles  di- 
verses, et  les  découvertes  arehéologiques  les  plus  ré- 
centes. Ces  deux  recueils  ont  paru  régiilièrement  depuis 
la  fondation  de  la  société.  Les  pièces  en  sont  écrites  en 
italien ,  et  quelquefois  en  latin  ou  en  français.  Jamais  en 
d'autres  langues.  —  Une  colonie  d'antiquaires  prussiens, 
Gerhard,  Bunsen,  PanoCka,  Millengen,  auxquels  se  Joignit 
le  duc  de  Luynes,  fonda  l'Institut  de  correspondance  ar- 
chéologique, en  4829.  Le  roi  de  Prusse,  Guillaume  IV, 
alors  prince  royal,  fut  et  est  demeuré  le  protecteur  de 
cette  Société,  qui  tient  ses  séances  au  mont  Capitolin , 
dans  une  belle  salle  située  derrière  le  palais  des  Conser- 
vateurs. C.  D — ¥. 

msTiTirr  db  psarcb,  corps  institué  par  l'art.  298  de  la 
Constitution  de  l'an  m  (1794),  sous  le  nom  d*Institut  na- 
tional, pour  remplacer  les  anciennes  Académies  sup- 
primées par  la  Convention  en  1793.  Il  devait  être  chargé 
«  de  recueillir  les  découvertes,  de  perfectionner  les  arts 
et  les  sciences,  n  La  loi  sur  l'instruction  publique,  dé- 
crétée le  3  brumaire  an  iv  (25  oct.  1795),  décida  crue  l'In- 
stitut serait  composé  de  144  membres  résidant  à  Paris, 
d'un  pareil  nomnre  d'associés  dans  les  départements,  et 
de  24  associés  étrangers;  qu'il  formerait  trois  classes  : 
l**  Sciences  physûtues  et  mathématiques,  comprenam 
10  sections  (60  membres  résidants,  et  60  dans  les  dépar- 
tements); 2^  Sciences  morales  et  politique,  comprenant 
6  sections  (36  membres  résidants,  et  36  dans  les  dépar- 
tements;; 3<*  Littérature  et  BeauX'Arts,  comprenant 
8  sections  (48  membres  résidants,  48  dans  les  départe- 
ments). Aucun  membre  ne  pouvait  appartenir  à  deux 


INS 


10S7 


INS 


Mettons  dMèrantM;  ma!»  chacun  poaYait  aaslstar  aax 
léiacw  «I. concourir  aux  traTaux  des  autres  classes.  Les 
NaMns  éoBicliMea  étaient  temporaires.  Pour  la  pre- 
mièfe  formation ,  le  Pireolsiio  (M  oof.  1796)  nomma 
48  membres,  qoi  élorent  les  06  autres,  et  lea  144 
rfonis  choisirent  les  associés.  Une  fois  organisé,  rinstitut 
poonrat  senl  au  places  tacantes,  sur  une  liste  au  moins 
triple,  présentée  par  la  classe  où  il  y  avait  une  vacance, 
n  fat  installé  an  Louvre. — En  1803,  la  classe  des  Sciences 
morales  et  politiques  fut  supprimée,  et  l'Institut  fut  par- 
tagé en  4  classes,  Scimces  phyiiqws  $t  mathémaHoun, 
Ijimgm  tt  litténùure  françcùsn.  Histoire  9t  liUéraiwr$ 
OHcmuèes,  B€aiua>'Arts,  A  la  1**  on  ajouta  une  section  do 
SéograplMe  et  de  navigation ,  ce  qui  porta  le  nombre  des 
membrea  réridants  à  o3  ;  la  3*  fût  composée  de  40  mem- 
bres; !•  3*,  d'un  pareil  nombre,  put  avoir  8  associés 
ètranisani  et  60  correspondants;  la  4*,  divisée  en  5  seo- 
tioDs,  comprit  S8  membres  résidants,  8  associés  étran- 
gars,  et  38  correspondants.  Chaque  classe  eut  un  sécré- 
tera perpétuel.  La  traitement  des  membres  de  rinstitut 
était  de  1,500  tr.  En  1806,  YlnstUtU  national  prit, 
dans  son  Annuaire,  le  titre  d'Institut  de  Fnmce,  et 
reçut,  dans  TAlmanacb  impérial,  celui  d'Institut  des 
Sei9mcê$,  Lettres  et  Arts.  En  1811.  il  devint  Institut  tm- 
périai,  et,  en  1814,  Institut  roycU.  En  1816,  l'Institut, 
conservé  avec  son  titre,  cessa  d'exister  comme  corps  or- 
ganisé tel  que  l'avaient  compris  ses  fondateurs  :  le  lien 
qui  existait  entre  les  classes  fut  rompu,  et  leurs  dénomi- 
aaiions  fiirent  rem|>lacées  par  les  noms  des  anciennes 
Académies,  Académie  francaisef  Académie  des  Inscrip- 
tions et  BeUeS' Lettres,  Académie  des  Beaux^Arts,  et 
^cad^ts  dês  SdMices.  Des  membres  libres  remplacèrent 
les  anciens  Académiciens  honoraires.  Ce  fut  seulement 
en  1833  qu'on  rétablit  V Académie  des  Sciences  morales 
et  politiques.  Les  H&noires  de  l'Institut  fusqu'en  1816 
forment  25  vol.  in-4<*,  dont  14  pour  les  Sciences,  5  pour 
tes  Sciences  morales,  5  pour  la  Littérature  et  les  Beaux- 
Arts,  3  pour  le  système  métrique,  et  2  pour  les  savants 
étrangers.  Les  cinq  classes  de  lînstltnt  ont  tenu  an- 
nuellement one  séance  publique  (au  15  août.  Jour  de  la 
S^Napoléon,  d'après  un  décret  du  14  avril  1855),  où 
l'on  faisait  des  lectures  et  décernait  des  prix.     B. 

mmruT  db  fsance  (Palais  de  V).  V,  notre  Otcttonnotr» 
ds  Biographie  et  d*Htstoire, 

msirroT  d'égtptb,  corps  formé  par  le  général  Bona- 
parte an  Caire,  en  1798,  avec  les  savants  et  les  artistes 
qu'il  avait  amenés  de  France.  Les  uns  devaient  s'occuper 
à  bîre  une  description  exacte  de  TÉgypte,  et  à  en  dresser 
la  carte;  les  autres  étaient  chargés  d'en  étudier  les 
ruines,  et  de  fournir  de  nouvelles  lumières  à  l'histoire  : 
ceux-ci  avaient  à  examiner  les  productions,  à  faire  les 
observations  utiles  à  la  physique,  à  l'astronomie,  à  l'his- 
toire natarelle;  ceux-là  devaient  rechercher  les  améliora- 
tions qu'on  pouvait  iq>porter  à  l'existence  des  habitants 
par  é»  machines,  des  canaux,  des  travaux  sur  le  Nil. 
Monge  foi  le  président  de  l'Institut  d'Egypte.  La  Décade 
égyptienne ,  imprimée  au  Caire  en  3  vol.  in-4<*,  contient 
les  prindpanx  Mémoires  lus  dans  les  séances.  En  1803, 
Bonaparte  ordonna  l'exécution  d'un  ouvra^  renfermant 
toutes  les  observations  de  l'Institut;  il  est  intitulé  :  Des- 
eription  de  l'Egypte  ou  Recueil  des  observations  qui  ont 
été  faites  en  Egypte  pendant  l'expédition  de  Varmée  fran- 
çaise, Paris,  impr.  impériale,  1809-13,  et  impr.  royale, 
181&-28s  10  vol.  in-fol.  de  texte,  avec  31  pi.,  et  12  vol. 
in-lbl.,  atlas  de  894  pi.  —  Le  même  ouvrage,  2^  édit., 
PariB,  Panckoucke,  1820-30, 24  tomes  en  26  vol.  in-8%  et 
12  vol.  in-fol.  de  planches. 
msirruT  des  provinces.  V,  GoNCRte. 
oiSTinJT  msTORiQUB,  société  savante  fondée  h  Paris 
OB  là3  par  M.  de  Honglave  et  plusieurs  autres  per- 


et  (TBistoire, 

INSTITUTEUH,  mot  qui,  dans  sa  plus  grande  extension, 
désigne  quiconoue  s'applique  à  l'enseignement  ou  tient 
une  maison  d'éaucation.  Un  décret  de  la  Convention,  du 
mois  de  décembre  1792 ,  a  appliané  aux  maîtres  d'école, 
ehaargés  de  Tinstruction  du  premier  degré  ou  instruction 
wfnnire,  le  titre  officiel  d'Instituteurs  primaires.  V, 
Bcous  paniAmBS,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
pk»e  et  S  Histoire, 

INSTITUTION  (du  latin  statuere  tn,  établir  sur),  toute 
dioee  fondée  dans  un  intérêt  public.  Les  Caisses  d'épar- 
gne, la  Banque,  l'Université,  etc.,  sont  des  institutions, 

nsimmoii,  maison  particulière  d'instruction  secon- 


3 


daire.  Pour  qu'elle  reçût  ce  titre,  il  fallait  autrefois  qoa 
le  chef  fût  bachelier  es  lettres  et  bachelier  es  sciences, 
tandis  que  le  baccalauréat  es  lettres  suffisait  pour  être 
maitre  de  pension  :  cette  distinction  n'a  pas  été  main- 
tenue par  1»  loi  du  15  mars  1850.  Les  institutions  pe 
pouvaient  élever  leur  enseignement  au-dessus  des  huma- 
nités, les  ^usions  au-dessus  des  classes  de  graminalft  • 
dans  les  villes  où  existait  un  lycée  ou  un  collège,  éOm 
étaient  tenues  d'en  faire  suivre  les  cours  par  leurs  âèvea» 
Une  institution  était  dite  deplein  exercice,  quand  elle  don- 
nait le  même  enseignement  que  les  lycées  et  les  collégeai 
et  conduisait  les  élèves  an  terme  des  études  classiques  s 
mais  on  n'autorisait  d'établissements  de  ce  genre  que 
dans  les  localités  dépourvues  de  lycées  ou  de  collèges. 
Les  chefs  d'institution  étaient  soumis  à  un  droit  annuel 
de  150  fr.  à  Paris,  100  fr.  dans  les  départements;  les 
maîtres  de  pension,  à  un  droit  de  75  fr.  et  50  fr.  :  de  plus, 
ils  devaient  la  rétribution  universitaire,  fixée  au  20*  du 
prix  de  la  pension  de  chaque  élève.  Toute  institution 
peut  aujourd'hui  se  suffire  à  elle-même,  ou  bien  envoyer 
ses  élèves  au  lycée  ou  au  collège  de  l'endroit,  faire  dors 
la  répétition  de  toutes  les  classes,  et  borner  les  leçons  de 
rintérieur  aux  matières  qui  ne  font  pas  partie  de  l'en- 
seignement public.  On  peut  même  ne  s'y  occuper  que 
de  ce  oui  convient  particulièrement  aux  professions  in- 
dustrielles. D'après  l»  loi  du  15  mars  1850,  pour  avoir  le 
droit  de  tenir  un  établissement  d'instruction  secondaire, 
il  faut  être  âgé  de  25  ans  au  moins ,  être  bachelier  es 
lettres  ou  es  sciences,  ou  pourvu  d'un  brevet  de  capacité 
que  délivre  dans  chaque  département  une  commission 
instituée  à  cet  effet,  et  avoir  fait  un  stage  d'au  moins 
5  ans  comme  professeur  ou  surveillant  dans  un  établisse- 
ment public  ou  libre.  Ld  ministre  de  l'Instruction  pu- 
blique peut  accorder  dispense  du  stage.  L'inspecteur 
d'académie  a  droit  de  surveillance  sur  les  institutions, 
seulement  en  ce  qui  concerne  l'hygiène  et  la  salubrité, 
et  pour  s'assurer  qu'on  n'enseigne  rien  de  contraire  à  la 
morale,  à  la  constitution  et  aux  lois.  Le  chef  d'institution 
ui  se  refuserait  à  ces  inspections  encourrait  une  amende 
e  100  fr.  à  1,000  fr.,  et,  pour  U  récidive,  de  500  à 
3,000  fr.  Deux  condamnations  dans  une  même  année  en- 
traînent la  fermeture  de  l'établissement.  Pour  inconduite, 
immoralité,  etc.,  tout  chef  d'institution  peut  être  traduit 
devant  le  Conseil  académique,  et  encourir  la  réprimande, 
la  censure,  l'interdiction  temporaire  ou  définitive,  sans 
préjudice  des  peines  encourues  pour  crimes  et  délits  pré- 
vus par  le  Code  pénal.  La  loi  de  1850  détermine  les  inca- 
pacités qui  empêchent  de  tenir  un  établissement  d'in- 
struction publique.  B. 

iNSTiTcnoN  CANONIQUE,  missiou  que  les  supérieurs  ec- 
clésiastiques donnent  à  ceux  qui  sont  pourvus  de  bénéfices 
ou  de  titres,  en  leur  accordant  le  visa  ou  les  provisions. 
En  France,  où  il  n'y  a  plus  de  bénéfices ,  tout  ecclésias- 
tique nommé  évêque  par  le  gouvernement  doit  obtenir 
l'institution  du  pape  (Loi  du  18  germinal  an  x).  Les  évê- 
ques  nomment  les  curés,  mais  ne  leur  confèrent  pas 
l'institution  avant  que  la  nomination  ait  été  agréée  par  le 
chef  de  l'État. 

INSTITUTION  CONTRACTUELLE ,  donatiou  faite  par  contrat 
de  mariage  aux  époux  et  aux  enfants  qui  naîtront  d'eux, 
des  biens  existant  au  moment  du  décès  du  donateur.  Elle 
est  irrévocable  comme  la  donation  entre-vifs. 

iNSTrruTiON  d'héritier,  disposition  par  laquelle,  dans 
nos  anciens  pays  de  Droit  écrit,  un  testateur  nommait 
son  héritier.  Elle  constituait,  comme  dans  le  Droit  ro- 
main, l'essence  du  testament,  qui.  sans  elle,  était  frappé 
de  nullité.  Dans  les  pays  de  Droit  coutumier,  l'Institu- 
tion d'héritier  n'était  nas  nécessaire  pour  la  validité  du 
testament.  D'après  le  CbdsiVispoi^on;  toute  personne  peut 
disposer  par  testament,  soit  sous  le  titre  d'institution 
d'héritier,  soit  sous  le  titre  de  legs,  soit  sous  toute  autre 
dénomination  propre  à  manifester  sa  volonté. 

INSTRUCTEUR,  officier  ou  sous-officier  champé  d'ensei- 
gner aux  soldats  l'exerdce  et  le  maniement  des  armes. 

INSTRUCTION  (du  latin  struere  in^  construire  inté- 
rieurement ),  mot  qui  s'entend  du  savoir  acquis  par  l'é- 
tude, de  la  culture  de  l'esprit.  Vinstruction  diffère  de 
Véducation,  en  ce  que  celle-ci  emporte  l'idée  d'un  bon 
usage  de  celle-là  :  on  peut  avoir  de  l'instruction  et  une 
mauvaise  éducation. 

m STROCTioN ,  petite  allocution  religieuse.  Quand  elle 
est  faite  par  demandes  et  par  réponses,  elle  prend  le  nom 
de  catéchisme, 

msTRocTioN  CRimmLLB,  ensemble  des  procédures  et 
formalité  qui  précèdent,  accompagnent  et  suivent  les 
jugements  criminels  et  correctionnds.  Cest  le  Ministère 


INS 


IQit 


INS 


public  et  le  jug9  é^instmction  (K.  ces  mots)  qai  en  ont 
été  chargés  par  la  loi.  Ils  constatent  le  corps  an  délit  et 
tous  les  vestiges  que  le  crime  a  laissés  ;  ils  recueillent 
les  écrits ,  pièces  et  documents  qui  y  ont  rapport ,  les 
déposiUons ,  réponses  et  explications  contradictoires  des 
témoins  et  parties  intéressées,  en  un  mot,  tout  ce  qui 
peut  être  produit  devant  les  Juges  comme  élément  de 
conviction  (K.  PaëvEirrioii,  AccnsA-non).  —  Dans  Tan- 
cienne  Rome,  il  ny  avait  ni  instruction  écrite,  ni  mise 
en  prévention  ;  Faction  publique  pouvait  être  exercée  par 
nn  citoyen  quelconque,  à  ses  frais  et  risques,  sans  qu'il 
eût  été  personnellement  lésé,  mais  pour  signaler  son 
patriotisme.  An  moyen  âge,  chez  les  peuples  d'origine 

SBrmaniqne,  les  épreuves  judiciaires ,  et,  plus  tard,  le 
i4«l  ou  comixtl  Sudicicùre  (K.  ces  mots  dans  notre  Dtc- 
tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire)^  tinrent  lieu  de 
rinstruction  criminelle  :  c'était  employer ,  selon  la  re- 
marque de  Montesquieu ,  des  preuves  qui  ne  prouvaient 
point,  et  qui  n'étaient  liées  ni  avec  Tinnocence,  ni  avec 
le  crime.  En  France,  avant  1789,  les  officiers  chargés 
exclusivement  de  poursuivre,  au  nom  du  souverain,  la 
répression  des  crimes.  Jouissaient  d'une  grande  indé- 
pendance; car  ils  tenaient  leur  charge  à  titre  d*office,  ce 
3ui  les  rendait  Inamovibles.  Aujourahui  ils  ne  sont  que 
e  simples  fonctionnaires,  nommés  par  un  ministre,  et 
révocables.  V»  Bourguignon,  Manuel  d^ Instruction  cri~ 
minelle,  3'  édit.,  1811,  2  vol.  in-S^";  Daubenton,  Traité 
pratique  du  Code  S  Instruction  criminelle,  1809,  ln-8°; 
Camot,  De  l'Instruction  criminelle,  Paris,  1829-35, 
4  vol.  in-4<*;  Mangin,  Traité  de  l'action  publtque  et  de 
l'action  civile  en  matière  criminelle,  2*  édit.,  1844, 2  vol. 
ln-8<*,  et  De  l'instruction  écrite  et  du  règlement  de  la  com- 
pétence en  matière  criminelle,  1847,  2  vol.  in-8^  ;  Trébu- 
tien.  Cours  élémentaire  de  Droit  criminel,  1854,  2  vol. 
in-8®;  Faustin  Hélie,  Traité  de  l'Instruction  criminelle, 
i845-(H),  9  vol.  in-8». 

Notre  Code  d'Instruction  cnmtnelle  fut  promulgué  le 
27  novembre  1808.  Il  se  compose  de  deux  livres,  pré- 
cédés de  dispositions  relatives  à  Texercice  des  actions 
Eublique  et  civile  en  général,  et  contient  643  articles. 
e  1^  livre  traite  de  la  Police  Judiciaire,  c-àni.  de  la 
recherche  et  de  la  constatation  des  crimes,  délits  et  con- 
traventions, et  des  officiers  qui  l'exercent.  Le  2'  s'occupe 
du  mode  de  procéder  devant  les  tribunaux  correctionnels 
et  de  police  et  devant  la  Cour  d'assises;  de  l'exécution 
des  Jugements  criminels;  des  demandes  en  cassation,  en 
révision,  en  renvoi,  ou  en  règlement  de  Juges;  de  la  pro- 
cédure en  matière  de  faux  et  de  contumace;  des  infrac^ 
tions  commises  par  certains  fonctionnaires  ou  contre  leur 
autorité;  des  dépositions  des  princes  et  fonctionnaires; 
des  prisons,  maisons  d'arrêt  et  de  justice;  des  détentions 
lUé^Ies;  de  la  réhabilitation  et  de  la  prescription.  Dès 
1815,  le  titre  vi  de  ce  Gode,  relatif  aux  Cours  spéciales, 
disparut  avec  ces  Cours.  Plusieurs  modifications  de  dé- 
tail furent  ensuite  introduites  par  les  lois  du  10  déc.  1830 
sur  les  Juges  auditeurs,  du  4  mars  1831  sur  les  Cours 
d*assises,  du  28  avril  1832,  qui  a  changé  les  art.  206, 339, 
340,  341,  345,  347,  368,  372,  399  et  619,  et  du  10  avril 
1834  sur  les  associations  ;  par  les  décrets  du  25  fév.  1852 
sur  les  délits  politiques  et  de  presse,  du  1"  mars  1852 
sur  les  juges  d'instruction,  des  28  mars  1852, 17  Janv. 
et  5  mars  1853  sur  les  commissariats  de  police;  par  les 
lois  des  9  et  10  Juin  1853  sur  le  jury,  du  3  Juillet  1852 
sur  les  réhabilitations,  du  4  avril  1855  sur  la  liberté  pro- 
visoire, les  mandats  de  dépôt  et  d'arrêt,  etc.  F.  Duver- 
fier,  Code  d'instruction  criminelle  et  Code  pénai  annotés, 
833,  in-8*  ;  Benoid,  Traité  et  Manuel  synthétique  et  pra- 
tique des  Codes  pénal  et  ^instruction  criminelle,  1845, 
in-8®;  Bonnin,  Commentaire  du  Code  d'instruction  cri^ 
minelle,  1845,  in-8<»:  Rosron,  Codes  d'instruction  crt- 
minelle  et  pénal  ecopliqués.  A"  édit.  1849,  2  vol.  ;  Berriat 
Saint-Prix,  Traité  de  la  procédure  des  tribunaïUD  crimi- 
nels, 1851-54,  3  vol.  in-80;  GraUier,  Code  d'instruction 
crimmelle  et  Code  pénal  expliqués,  1854,  in-8°  ;  Boitard 
8t  Colmet  d*Aage,  Leçons  sur  les  Codes  d^instruction  cri-' 
ninelle  et  pénale,  7*  édit.,  1856 ,  in-S». 

DfSTRDCTiON  PUBUQUB«  enseignement  donné  ou  sur- 
feillé  par  l'État.  La  surveillance  et  la  direction  des  étsr 
blissements  d'instruction  forment,  dans  la  plupart  des 
pays  modernes,  une  des  principales  branches  de  l'admi- 
nistration. On  peut  voir,  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  â^ Histoire ,  aux  articles  Êcolbs  chez  les  an- 
QENS,  Écoles  MiimaPALBs  ou  iMPéniALBS,  Écoles  CATHé- 

DEALBS,   ÉCOLES    MONASTIQUES,  UlflVERSmiS,    CO  qu*a  été 

rinstruction  publique  Jusqu'à  noslours,  et,  à  l'art.  France 
(page  1085),  quelle  en  est  l'organisation  actuelle.  V,  aussi 


les  articles  consacrés  à  chaque  genre  d'établiaMOMOls 
d'instruction,  et  Enseignement* 

INSTRUCTION  puBUQUE  (Conseil  Supérieur  de  H.  F.  Cou- 
SEIL,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 
page  656,  col.  1. 

INSTRUCTION  PUBUQUE  (  Ministère  de  I*  )  bl  des  cultes 
V.  HiNisTiniB,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire,  page  180i,  col.  2. 

INSTRUCTIONS,  explications  écrites  ou  verbales  qu'on 
donne  à  une  personne  pour  la  conduite  de  quelque  affaire. 

INSTRUMENT,  mot  qui  signifiait  autrefois  charte  et 
acte.  Dans  la  langue  du  Droit,  il  s'applique  encore, 
quoiq^ue  assez  rarement,  à  tout  acte  destiné  à  constater 
un  fait  ou  une  convention. 

INSTRUMENTAL  (Cas),  terminaison  spéciale  des  noms 
de  cwtaines  langues  pour  marquer  l'instrument,  et,  par 
extension,  le  moyen,  la  manière.  Dans  le  sanscrit,  cette 
désinence  est  A  au  singulier,  bhis  au  pluriel.  En  grec, 
certaines  désinences  adverbiales,  comme  i\  dans  uqcvtt) 
(  de  toute  façon)^  comme  cpi  ou  91c  dans  If  i  (par  la  force, 
avec  force)y  et  Xixpiçtc  (obliquement)^  comme  n  dans 
à{Awif2t(  {en  se  défenaant%  comme  et  ou  i  dans  meveOveC 
{en  masse)  et  icocvoixC  {en  employant  toute  la  maison)^ 
peuvent  bien  être  des  restes  d'une  ancienne  déclinaison. 
Les  désinences  adverbiales  a^  i^  u|,  dans  les  mots  68aC 
{avec  les  dents\  xoupiÇ  {par  les  dieveux)^  nu^  {à  cot^ 
de  poing  )^  expriment  aussi  l'instrument,  et  se  rattachent 
à  la  classe  des  mots  précédemment  cités.  P. 

INSTRUMENTATION,  art  d'exprimer  la  musique  par 
des  instruments,  et,  dans  une  acception  moins  étendue, 
art  de  distribuer  dans  une  partition  les  divers  instru- 
ments de  manière  à  produire  toutes  sortes  d'effets  par  le 
choix  et  la  combinaison  des  timbres.  Cet  art  suppose 
non-seulement  une  science  profonde  de  l'harmonie,  mais 
la  connaissance  de  tous  les  instruments  orui  composent 
un  orchestre,  de  leur  portée,  de  leur  étendue  respective, 
de  leurs  différentes  qualité  de  son,  des  tons  qui  leur  sont 
favorables,  des  traits  qu'ils  peuvent  exécuter  facilement. 
«  Les  aocompaffnements  d'une  musique  bien  faite,  dit 
M.  Fétia.  ne  se  bornent  point  à  soutenir  le  chant  par  une 
harmonie  plaquée;  souvent  on  y  remarque  un  ou  deux 
dessins  qui  semblent  au  premier  abord  devoir  contrarier 
la  mélodie  principale,  mais  qui,  dans  la  réalité,  concou- 
rent à  former  avec  elle  un  tout  plus  ou  moins  satisfai- 
sant. Ces  systèmes  d'accompagnements  flçurés  peuvent 
importuner  une  oreille  peu  exercée,  mais  ils  complètent 
le  plaisir  des  musiciens  instruits  et  des  amateurs  éclai- 
rés. Quelquefois  ils  deviennent  la  partie  la  plus  impor- 
tante du  morceau,  et  les  voix  leur  servent  en  quelque 
sorte  d'accompagnement  :  dans  ces  circonstances,  il  est 
nécessaire  que  les  formes  de  l'accompagnement  soient 
gracieuses  et  chantantes,  ou  sémillantes  et  vives.  »  L'in- 
strumentation est  de  création  moderne.  Jusqu'au  milieu 
du  xvui*  siècle,  les  compositeurs  se  sont  presque  tou* 
Jours  bornés  dans  leurs  accompagnements  à  soutenir  les 
voix  ;  le  petit  nombre  et  rimp^riection  des  instnuneiits 
étaient  un  obstacle  presque  insurmontable  au  progrès. 
Les  opéras  du  xvu*  siècle  n'étaient  accompagnés  que  par 
des  violons,  des  violes  et  des  basses  de  viole;  au  corn* 
mencement  du  xviii%  on  ajouta  des  flûtes  et  des  hautboia. 
Puis,  les  ressources  augmentant  successivement,  Pinstra- 
mentation  prit  un  essor  rapide  avec  Handel,  Gluck, 
Hajrdn,  Cimarosa,  Mozart,  Paisiello,  et  elle  se  développa 
encore  entre  les  mains  de  Méfaul,  de  Cherubinl,  de 
Beethoven  et  de  Rossini.  L'abus  n'a  point  tardé  à  Boivre; 
aujourd'hui,  toutes  les  richesses  de  l'orchestre  sont  em- 
ployées pour  produire  de  l'efifet,  quel  que  soit  le  carac- 
tère des  morceaux,  et  cette  profusion  de  moyens  a  pour 
conséquence  de  fatiguer,  d'enduroir  l'oreille,  oui  ne 
trouve  plus,  dans  ce  qui  en  est  dépourvu,  que  faiblesse 
et  pauvreté.  V.  Gafun,  De  harmonta  musicorum  metru" 
mentorum.  Milan,  1518,  in-fol.  ;  Agricola,  Musica  instru- 
mentalis,  Wittemberg,  1529,  in-S**  ;  Galilei,  Dialogo  topra 
Varte  del  bene  intavolare  e  rettamente  suonare  la  mu" 
sica  negli  instrumenti,  Venise,  1569  ou  1584,  in-fol.; 
Th.  Merck,  Éléments  de  musique  instrumentale,  en  alle- 
mand, Augsbourg,  1695;  Francœur,  DiajHUon  général  de 
tous  les  instruments  à  vent  et  Observations  sur  chacun 
d^eux,  Paris,  1772,  in-fol.;  Vandenbrook,  Traité  de  tous 
les  instruments  à  vent,  à  l'usage  des  compositeurs, 
G.  Kastner,  Traité  d'instrumentation,  Paris,  1836,  et 
Cours  d'instrumentation,  1837  ;  Berlioz,  Traité  d'orches* 
tratUm  et  d^instrumentation,  in-fol.  B. 

INSTRUMENTER,  en  termes  de  Pratique,  faire  on  acte 
destiné  à  constater  un  fait,  à  fixer  les  termes  d'une  con- 
yention,  tel  que  procès-verbal,  contrat,  etc.  Cela  ae  dh 


INT 


1089 


INT 


sfftoulées  notaires  et  des  hulsaien,  eonsidérés  comme 
lu  mttniment^  de  la  loi. 
INSTRUMENTS  DE  MUSIQUE.  D  y  a  trow  manières 
de  prodaire  des  sons  :  1*  par  les  vibrations  des  cordes; 
î*  pir  les  vibrations  de  l'air  dans  les  tubes;  3*  par  les 
vibrations  de  certains  corps  élastiques  en  formes  ae  pla- 
qaes,  de  lamea  ou  de  tiges.  De  là  trois  familles  d'instru- 
ffleots  :  les  instrwnenU  à  cordes,  les  instruments  à  vent 
et  les  mstrwmênts  de  percussion.  Chaque  famille  offlre 
bieo  des  subdivisions.  Parmi  les  instruments  à  cordes,  il 
es  est  dont  les  cordes  résonnent  librement  dans  Tair, 
eomme  la  lyr»  et  les  anciennes  harpes,  tandis  que,  dans 
d*iatres,  conune  le  vioUm  et  le  piano,  les  cordes  sont  dis- 
posées au-dessus  d'une  caisse  de  résonnance  qui  renvoie  et 
reoforce  le  son.  Tantôt  on  pince  les  cordes  avec  les  doigts 
(guUare,  harpe)  ;  tantôt  elles  sont  frottées  par  une  roue 
(vieUe)  on  par  un  archet  (iriolon,  alto,  viole  â^amour, 
mUmcelU,  contre-basse)  ;  ou  bien  on  les  attaque  par  un 
petit  instrument  tenu  dans  les  doigts  (lep(ecirutn  de  la 
lyre  antique),  par  un  mécanisme  qui  lui  est  analogue 
(ofoiMctfi),  par  un  système  demartelets  qui  correspondent 
à  un  davier  (piano).  —  Les  instruments  à  vent  sont  de 
différentes  sortes  :  l<*  ceux  qui  se  composent  de  simples 
tayam  dansleeouels  on  soume  de  Tair  {ûiUe,fiflre,chalyF' 
9»eau,svrinxU  2*  ceux  à  anche  simple  (clarinette,  cor  de 
bas$9t,9aaDopnone)  ;  3<*  ceux  à  anche  double  {hautbois^  cor 
an(fiai$,  basson  )i  4«  ceux  à  embouchure  (cor,  trompette, 
cornet,  trombone,  ophieléide,  serpent,  basson  russe); 
5»  ceux  à  clavier  et  qui  reçoivent  le  vent,  non  plus  par 
la  bouche  de  Thomme,  mais  au  moyen  d'un  soumet 
{orgue,  harmonium,  accordéon,  concertina).  —  Les  in- 
struments de  percussion  sont  de  deux  espèces  :  1®  à  son 
Aie  et  appréciable  {timbales,  timbres,  cloches,  harmo- 
9ke^\  %•  à  résonnances  indéterminables  (caiese,  tam- 
bour de  basque,  cymbales,  triangle,  chcq^eau  chinois, 
tam-tam,  castagnettes).  Ghes  les  anciens  Asiatiques,  les 
Grecs,  les  Romains  et  les  peuples  du  Nord,  les  instru- 
ments à  cordes  pincées  ont  tenu  la  première  place:  dans 
la  moaiqQe  modteme,  ils  ont  perdu  la  prééminence,  parce 
qu'ils  sont  bornés  dans  leurs  moyens  et  peu  propres  à 
suivre  les  progrès  de  Tart.  V.  Maupertuis,  Mémoire  sur 
la  forme  des  tnstruments  de  musique,  dans  les  Mémoires 
àeV Académie  des  Sciences,  1724;  Bianchini,  De  tribus 
99MrÔms  instrumentorum  mususœ  veterum  organicm, 
Rome,  1742,  in-4<>;  Bonanni,  Descrieption  des  instruments 
kamimiquês  en  tout  genre,  en  ital.  et  en  franc.,  Rome, 
lllft,  gr.  in-4*;  Bottée  de  Toulmon,  Dissert€Uion  sur  les 
hutniments  de  musique  employés  au  moyen  âge,  dans  le 
t  XVn  des  Mém.  ds  la  Soc.  des  Antiquaires  de  France, 
1844;  B.  de  Gouasemaker,  Essai  sur  les  instruments  de 
wmk!ue  au  moyen  âge,  dans  les  t.  lU,  IV,  V,  VII  et  IX 
des  Amèoles  archéologiques.  V.  aussi,  dans  le  présent 
«mage,  les  articles  consacrés  à  chaque  instrument.    B. 
INSUBORDINATION,  dans  le  langage  militaire,  acte 
d'faidlsdpline,  de  désobéissance,  de  désordre.  C'est  un 
délit  qui  a  plus  ou  moins  de  gravité  selon  les  temps,  les 
bsbitodes  reconnues,  le  grade,  etc.  V.  Disapuna. 
niSULTB.  V.  IiuuBB. 

INTAIIXE  (de  l'italien  intaglio,  dselure),  pierre  fine 
gravée  en  creux.  Parmi  les  intaiUea  célèbres,  on  peut 
citer  le  Mnosthène,  VIo,  le  Persée  et  le  Mercure  de  IMos- 
coride,  la  Méduse  âid  Selon,  Ih  Julie  d'Évodus,  la  coma- 
Inw  dite  cachet  de  MicheUAnge.  Les  intailles,  que  les 
Anciens  appelaient  diaglyphes,  servaient  de  sceaux  et  de 
Qcbets,  et  on  les  montait  ordinairement  en  bague. 

INTELUGENCB,  l'une  des  trois  facultés  générales  dont 
reosemble  constitue  la  nature  de  l'homme  (de  intellir 
9fre,  comprendre  par  Pattention  ;  légère  inter,  choisir, 
disoemer).  Cest,  a  proprement  parler,  le  mentis  acies 
des  Ladns;  de  là  vient  qu'on  la  nomme  aussi  raison, 
Buds  oeDe-d  n'est  que  la  faculté  de  connaître  par  excel- 


en  activité,  intellect  agent.  Cette  faculté  est  le  mot  pen- 
iBot  et  prenant  connaissance  des  objets,  et  son  véritable 
ab|et,  c'est  la  réalité;  elle  a  pour  but  et  pour  résultat  la 
aMtf.  La  réalité  se  montre  sous  différentes  formes;  de 
^  <Sverm  modes  de  Tintelligence  auxquels  on  donne  le 
BQOi  de  facultés  intellectuetles,  et  qui  ne  sont  oue  l'in- 
tsQlgeiice  elle-même.  Ainsi,  elle  est  la  faculté  ae  perc^ 
^  extérieurement  par  les  sens,  intérieurement  par  la 
^o^seience;  puis  le  jugement,  quand  on  affirme  un  rap- 
port; rînîucfton,  quand  l'esprit  s'élève  du  particulier  au 
Salerai  ;  la  d^iuctum,  quand  il  descend  du  général  au 
Mnicuiier;  la  raisùn,  Vexpression  la  plus  haute  et  la 


plus  noble  de  rintelligence,  et  par  laquelle  Tesprît  a 
çoit  le  nécessaire  et  l'absolu.  A  cesfatktltés  dites  d^acqui» 
sition  se  Joignent  cellee  dites  de  conservation,  la  m^otra 
et  Vassoâation  des  idées;  enfin  Vimagination,  faculté 
créatrice.  L'intelligence  entre  en  exercice  d'abord  d'une 
manière  fatale,  l'àme  pense  et  ne  peut  pas  ne  pas  penser; 
ensuite  elle  devient  une  faculté  à  un  titre  plus  élevé  que 
la  sensibilité,  par  l'intervention  de  la  volonté,  ce  qui 
constitue  Vattention.  De  là  une  différence  entre  voir  et 
regarder;  dans  le  premier  cas  l'esprit  est  passif,  dans  le 
second  il  est  actif  :  en  réduisant  ces  deux  faits  au  pre* 
mier,  on  arrive  à  une  théorie  de  l'entendement  passif, 
comme  celle  de  Bialebranche,  qui  a  le  tort  de  méconnaître 
le  rôle  de  l'activité  dans  Fintelligence.  Celle-ci  se  dis- 
tingue :  1°  de  la  sensibilité,  d'abord  par  son  double  ca- 
ractère d'objectivité  et  d'impersonnalité,  ensuite  par  son 
but  oui  est  le  vrai  et  le  beau;  2®  de  la  volonté,  en  ce 
ou'elle  est  fatale,  l'esprit  ne  pouvant  se  refuser  à  recevoir 
des  notions  relatives  à  la  nature  des  objets  de  la  connais- 
sance. Mais  comme  l'intelligence  se  confond  avec  les  deux 
autrea  facultés  dans  l'unité  du  moiy  il  en  résulte  une 
influence  réciproque,  et  qui  a  pour  l'intelligence  une 
florande  importance.  V,  Aristote,  Essai  sur  Vâme;  Locke, 
Essai  sur  l'entendement  /lumam,- Leibniz,  Nouveaux 
essais  sur  Ventendement;  Condillac,  Essai  sur  Vorigine 
des  connaissances  humaines;  Ad.  Gamier,  Traité  des 
facultés  de  Vâme;  Cbauvet,  Des  théories  de  Ventendement 
humain  dans  l'antiquité,  1855,  in-8*.  R. 

INTENDANCE,  INTENDANTS.  F.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

INTENTION,  acte  de  la  volonté  par  lequel  le  moi  se 
tourne  vers  un  but  qu'il  se  propose  d'atteindre.  L'inten- 
tion  est  par  là  une  condition  indispensable  de  la  mora- 
lité :  on  peut  être  coupable  devant  Dieu,  sans  avoir  con- 
sommé un  crime  prémédité,  de  même  qu'on  peut  être 
innocent  tout  en  manquant  aux  prescriptions  de  la  loi. 
C'est  une  distinction  que  les  tnbunaux  ont  soin  d'ad- 
mettre (V.  DiscBBNEiiEirr  et  PaâiéorrATiON),  et  d'aprèa 
laquelle  chacun  se  Ju^  soi-même;  aussi  la  Morale  s'oc- 
cupe plus  de  Vintentton  que  de  Vaction^  celle-ci  relève 
plus  particulièrement  du  Droit.  R. 

INTERCALATION,  insertion  d'un  ou  de  plusieurs  mots 
ou  même  d'un  passage  plus  ou  moins  étendu  dans  le 
texte  d'un  auteur  (  V.  Interpolation,  et  Interugne. ^  — 
Insertion  d'une  lettre  au  milieu  d'un  mot.  F.  Épbnthbsb. 

INTERCIDENGE.  F.  Diaptosb. 

INTERCOURSE,  mot  d'origine  anglaise,  désignant  la 
droit  réciproque  à  la  libre  pratique  des  ports  dans  l'en- 
semble  des  relationa  commerciales  d'un  pays  avec  un 
autre. 

INTERDICTION,  en  Droit,  état  de  prohibition  dans 
lequel  une  personne  est  placée  à  l'égard  de  certains 
actes.  Le  Code  Napoléon  déclare  que  celui  qui  est  dans 
le  cas  d'imbécillité  ou  dans  l'état  habituel  de  démence 
ou  de  fureur  doit  être  interdit,  même  lorsqu'il  y  a,  des 
intervalles  luddes.  Les  parents,  qu'on  est  en  droit  de 
considérer  comme  affectionnés,  peuvent  seuls  provo- 
quer l'interdiction  :  toutes  autres  personnes  ne  peuvent 
qu'adresser  un  avis  ou  une  sollidtation  à  l'autorité  com- 

I détente,  laquelle  peut  Juger  convenable  de  demander 
'interdiction,  et  le  doit  même  dans  le  cas  de  fureur. 
L'interdiction  est  prononcée  par  le  tribunal  de  l'*  in- 
stance, sur  le  rapport  d'un  Juge  commis  à  cet  effet,  et 
après  avis  du  Conseil  de  famille,  interrogatoire  et  audi- 
tion des  parties;  on  peut  en  appeler  de  sa  sentence.  Le 
Jugement  d'interdiction  est  signifié  à  partie,  affiché  dans 
rauditoire  du  tribunal  et  dans  les  études  de  notaires. 
L'effet  de  rinterdiction  est  d'assimiler  l'interdit  au  mi- 
neur pour  sa  personne  et  ses  biens  :  11  n'a  plus  la  dis- 
{ position  ni  l'administration  de  ses  biens,  et  les  lois  sur 
a  tutelle  des  mineurs  lui  sont  applicables.  L'interdiction 
peut  n'être  pas  complète,  mais  partielle,  c-à-d.  ne  por- 
ter que  sur  certains  actes  déterminés,  comme  ceux  de 
{>la{der,  de  transiger,  d'emprunter.  A  proprement  parler, 
e  prodigue  n'est  pas  interdit;  il  est  (usisté  d'un  Conseu 
jwticiaire  (F.  ce  mot).  L'interdiction  cesse  avec  les  causes 
qui  l'ont  motivée;  mais  la  mainlevée  ne  peut  être  pro- 
noncée que  par  un  Jugement  (Code  Napol.^  art.  489-512). 
—  On  nomme  interdiction  légale  la  privation  totale  ou 
partielle  des  droits  civiques,  dvils  ou  de  famille;  cette 
interdiction  n*est  plus,  comme  la  précédente,  une  protec- 
tion donnée  à  l'interdit  contre  la  faiblesse  de  son  esprit, 
c'est  une  peine  qui  résulte  de  la  condamnation  aux  tra- 
vaux forcM,  à  la  détention,  à  la  redusion,  ou  qui  est 
prononcée  par  les  tribunaux  correctionnels  {Code  pénal, 
art.  29-31,  142, 143).  —  Quelquefois  l'interdiction  eil 

69 


INT 


1090 


TNT 


QM  peine  Infligée  à  un  fonctionnaire  :  le  mot,  dans  ce 
cas,  a  le  sens  de  suspension  ou  de  dêstUtUion. 

INTERDIT.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d^ Histoire, 

INTÉRÊT,  profit  que  I*on  retire  d*une  somme  d*ar|pBnt 
prMée  pour  on  temps  déterminé.  Le  pr6t  k  intârât  existe 
depuis  qu*il  y  a  entre  les  liommes  des  relations  commer- 
ciales, et  le  taux  de  Tintérôt  a  Tsrié  avec  l'abondance 
des  capitaux,  la  sécurité  des  prêteurs,  les  facilités  ou  les 
restrictions  apportées  à  ce  genre  de  commerce  par  les 
lois  et  les  mœurs.  Ghex  les  Athéniens,  la  loi  ne  déter- 
minait pas  le  taux  de  Tintérêt,  et,  depuis  que  Selon  eut 
réduit  les  dettes  et  dégrevé  les  terres,  Januûs  il  n*y  eut  de 

{ilaintes  sérieuses  ni  d*émeutes  populaires  au  si^et  de 
'usure.  —  A  Rome,  la  loi  des  Douxe  Tables  avait  établi 
l'intérêt  légal  à  8  l/2  p.  100;  plus  tard,  U  fut  réduit  à 
4  1/2;  mais  ces  lois  étaient  mal  observées,  et  le  taux  de 
rintérôt  s^élevait  en  réalité  beaucoup  plus  haut.  La  ques- 
tion de  l'usure  agita  pendant  plusieurs  siècles  la  Répu- 
blique romaine,  et  uit  le  grand  moyen  dont  le  parti 
démocratique  se  servit  pour  soulever  les  plébéiens  contre 
les  patriciens  :  Brutus,  celui  qui  prit  part  à  Tassassinat 
de  César,  prêtait  à  48  p.  100.  Sous  l'Empire,  l'intérêt 
était  de  i%  p.  100;  la  loi  parait  avoir  été  mieux  observée 
que  sous  la  République,  et  les  plaintes  cessent  de  se 
faire  entendre.  —  Le  moyen  Age  proscrivit  absolument 
le  prêt  à  intérêt.  Aristote  {PoKtique,  I,  4),  confondant 
svec  l'usure  l'intérêt  légitime  que  peut  rapporter  un 
capital  en  numéraire,  l'avait  condamné;  les  docteurs 
acceptèrent  cette  condamnation  comme  un  acte  de  foi, 
et  s^armèrent  de  l'interprétation  de  quelques  passades 
de  l'Écriture,  et  d'un  sentiment  exagéré  de  charité.  L'in- 
terdiction psssa  de  la  loi  ecclésiastique  dans  la  loi  ci- 
file.  Le  capitulaire  d'Aix-la-Chapelle  (789)  proscrivit 
formellement  l'intà^t,  et  il  resta  ainsi  condamné  jus- 

ri'à  17^.  Ce  n'est  pas  k  dire  que  pendant  mille  ans 
n'y  ait  pas  eu  d'argent  prêté  :  si  la  loi  ne  reconnais- 
sait pas  le  prêt  direct,  elle  admettait  la  lettre  de  change, 
la  constitution  de  rentes;  les  prêteurs  se  servaient  de 
ces  moyens  détournés,  et  faisaient  payer  cher  aux  em- 
prunteurs les  risques  et  les  embarras  de  leur  position. 
Calvin  est  un  des  premiers  gui  aient  proclamé  haute- 
ment la  légitimité  et  l'utilité  du  prêt  à  intérêt,  et  sa  doc- 
trine, adoptée  dans  tous  les  États  calvinistes,  n'est  peut- 
être  pas  étrangère  au  rapide  développement  industriel  et 
commercial  de  ces  États.  Les  écrivains  du  xvni*  siècle, 
entre  autres  Montesquieu  et  Turgot,  protestèrent  contre 
l'injuste  proscription  du  prêt  à  intérêt.  L'Assemblée 
oonstituanteleva  enfin  l'interdiction  psr  la  loi  du  IS  oc- 
tobre 1789,'portant  :  «  Tous  particuliers,  corps,  comma- 
nantés  et  gens  de  mainmorte  pourront  à  l'avenir  prêter 
l'argent  à  terme  fixe,  avec  stipulation  d'intérêts  suivant 
le  taux  déterminé  par  la  loi.  »  La  loi  du  3  septembre  1807 
a  fixé  l'intérêt  de  l'argent  en  matière  civile  à  5  p.  100, 
et  en  matière  de  commerce  à  6  p.  100.  On  a  bl&mé  cette 
limitation  du  taux  de  l'intérêt,  qui  gêne  la  liberté  des 
transactions,  et  à  laquelle  échappent  Tes  prêteurs  à  l'aide 
des  commissions  et  des  droits  divers  qu'ils  exigent.  Quel- 
ques années  auparavant,  à  l'époque  du  Consulat,  l'ar- 
moat  variait  de  12  à  20  p.  100  sur  la  place  de  Paris.  En 
Angleterre,  l'intérêt  de  l'argent  n'est  limité  (à  5  p.  100) 

Siepour  les  prêts  hypothécaires  et  les  prêts  mobiliers 
férieurs  à  10  livres  sterling  :  or,  l'argent  est  moins  cher 
en  Angleterre  que  dans  les  pavs  où  la  loi  fixe  un  maxi- 
mum. La  Banque  de  France  a  été  affranchie,  depuis  1857, 
de  la  limite  d'intérêt,  et  cette  concession  doit  un  Jour, 
sans  doute,  devenir  générale.  V,  l'abbé  Blignot,  iVaUé 
des  prêts,  ou  del'inUrét  légitime  et  illégitime,  1738; 
Turgot,  Mémoire  sur  les  prêts  d'argent;  Laforest,  Traité 
de  Vusure  et  des  intérêts,  1769;  J.-L.  Gouttes,  Théorie 
de  IHntérêt,  1780;  A.  Rendu^  Considérations  sur  le  prêt 
à  intérêt,  1806;  Meyer,  Essai  sur  le  principe  fondamen- 
tal de  Vintérêt,  Amst.,  1809;  le  cardinal  de  La  Luzerne, 
Dissertation  sur  le  prêt  du  commerce,  Dijon,  1823;  Ba- 
connière.  Du  taux  de  Vintérêt,  1824;  Cotelle,  Traité  des 
intérêts,  1826.  V,  aussi,  dans  le  présent  ouvrage,  les 
articles  Anatocishb,  Escompte.  L. 

INTÉRÊT.  En  Morale,  l'intérêt  est  un  principe  d'action 
qui  s'accorde  quelquefois  avec  le  devoir,  mais  qui  le  plua 
souvent  s'y  oppose,  et  qui,  en  aucun  cas,  ne  peut  le  rem- 
placer, n  n'en  a  pas  le  csractère  obligatoire;  il  n'est  pas, 
comme  lui,  universel,  immuable,  d&intérrâsé.  En  pui- 
sant ses  motifs  d'action  dans  les  divers  ju^ments  d'uti- 
lité, dans  celui  du  mérite  et  du  démérite,  il  nous  fournit 
les  deux  règles  de  l'intérêt  bien  entendu,  qui  se  rapporte 
au  bien-être  de  l'individu  ou  à  celui  des  masses  :  de  là 


Vintérêt  personnel  et  Vintérêt  général.  Le  premier,  se  d^ 
naturant  facilement,  conduit  à  l'amour  du  plsisir  «t  à 
l'égolsme  :  Aristippe  et  Épicure  chez  les  Andens,  chet 
les  Modernes  Hobbes,  Bentliam,  et,  en  génèrsl,  toute  docp 
trine  qui  met  en  doute  la  réalité  d'une  autre  vie,  loot 
des  organes  de  l'intérêt  personnel.  L'intérêt  générsl,avec 
un  canctère  plus  noble,  puisqu'il  se  rattache  an  principe 
d'expansion,  ne  peut  pas  davantage  remplacer  la  morale 
du  devoir,  comme  le  prouvent  le  système  de  la  fymp»> 
ihie  d'Adam  Smith,  cdui  de  la  bienveillance  de  Ferguaon, 
et  encore  bien  plus  le  svstème  de  l'intarA  politviw  ou 
salus  populi  suprema  (ex.  Si  ces  doctrines  ne  penvent 
pas  être  la  base  de  la  Morale,  elles  aident  cependant  à 
l'accomplissement  des  devoirs  sociaux,  et  à  diévelopper 
chez  l'individu  l'amour  de  ses  semblables.  R. 

INTÉRÊT,  en  termes  de  Littérature,  attrait  qni  attache 
le  spectateur  à  ce  qu'il  Toit,  le  lecteur  à  ce  qa'il  Ut, 
l'auditeur  à  ce  qu'il  entend.  Nous  prenons  plaisir  à  être 
émus  de  curiosité,  d'inquiétude,  de  crainte,  de  pitié, 
d'admiration ,  etc.  L'intérêt  peut  résulter  de  divers  élé- 
ments, par  exemple,  de  csractères  bien  tracés,  de  situa- 
tions fortes,  de  scènes  habilement  conduites.  11  peut  être 
dans  l'exécution  comme  dans  le  plan ,  dans  k  forme 
comme  dans  le  fond ,  ainsi  que  le  prouve  la  poésie,  qoi 
réussit  à  charmer  l'esprit  et  les  oreilles  par  son  harmo- 
nie, même  quand  sous  cette  harmonie  ne  se  cache  au- 
cune idée  grande  et  sérieuse  :  toutefois,  l'intérêt  qu'excite 
l'art  de  l'écrivain  n'est  guère  durable ,  s'il  n'est  soutens 
par  l'intérêt  du  sujet. 

INTÉRIEUR  (Ministère  de  1').  F.  Mnnsrftai,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  éT Histoire, 

INTÉRIM ,  mot  latin  signifiant  en  attendant ,  prm- 
soirement ,  et  qui  dMgne  l'espace  de  temps  pmdant  le- 
quel une  fonction  est  accidentellement  remplie  psr  un 
autre  que  le  titulaire. 

INTERJECTION,  partie  du  discours,  introduite  dsM 
la  Grammaire  par  les  Romains  :  les  Grecs  la  faisaieot 
rentrer  dans  l'adverbe.  Cest  principalement  un  son,  on 
cri  arraché  par  la  douleur,  la  Joie,  la  crainte,  le  méprii, 
la  dérision,  l'admiration,  la  surprise,  etc.  Ce  cri  étant 
d'ordinaire  jeté  au  mUieu  d'une  phrase  (jactus,  vUer)^ 
le  mot  qui  l'exprime  a  été  appelé  interjection.  L'inter- 
jection la  plus  fréquente,  celle  qui  s'applique  au  plos 
grand  nombre  d'afiections  subites  de  l'&me,  est  l'excla- 
mation ah  l  ha  t  Où  considère  encore  comme  interjec- 
tions certains  mots  qui  servent  à  encourager,  à  avertir, 
à  imposer  silence,  et  <rai  appartiennent  à  d'autres  partiel 
du  discours  :  ainsi.  Allons  !  Voyons!  Paix!  Tout  beaut 
Bon  Dieu!  Corbleu  !  etc.  Certaines  intexjections  sont  sui- 
vies d'un  cas  indirect ,  comme  en  latin  Bei  mihi!  0  ms 
miserwn!  Mais  alors  on  suppose  l'ellipse  d'un  mot  gou- 
vernant ce  cas,  qui  n'est  qu'en  apparence  dépendant  de 
l'interjection.  P. 

INTERLIGNE  (du  totin  nUer,  entre,  et  lénea^  ligne), 
espace  entre  deux  lignes  écrites  ou  imprimées.  DanÎB  les 
actes  notariés,  il  ne  doit  y  avoir  ni  interligne  ni  addi- 
tion ,  et  les  mots  interiignés  sont  nuls  (  Loi  du  25  ven- 
tôse an  XI)  ;  le  notaire  contrevenant  est  passible  d'une 
amende  de  10  fr.,  et,  Vil  y  a  eu  fraude,  de  dommsges- 
intérêts,  et  même  de  destitution.  L'amende  pour  les  con- 
servateurs des  hypothèques  est  de  1,000  à  2,000  fr.,  sans 
préjudice  des  dommages -intérêts  des  parties.  Les  autres 
officiers  ministériels  ne  doivent  non  plus  rien  écrire 
entre  les  lignes  de  leurs  actes.  Dans  un  acte  sous  seing 
privé,  les  mots  interlignés  ne  sont  pas  nuls,  (fuoique  non 
approuvés,  s'il  est  établi  (pi'ils  sont  de  là  même  maio 
que  le  corps  de  l'acte.  Les  livres  des  agenta  de  chan^  et 
aes  courtiers  ne  doivent  pas  contenir  d'interii^es  (  Cods 
de  Comm.,  art.  84).  —  En  Typographie,  les  interl^fn»t 
sont  des  lames  de  métal,  moins  hautes  que  le  caractère, 
qu'on  place  entre  les  lignes  pour  les  sépmr  et  les  main- 
tenir.   

INTERLOCUTOIRE  (Jueement),  décision  Judidairs 
qui  ordonne,  avant  faire  droit  au  fond^  que  préalable- 
ment il  sera  fait  une  production  de  pièces,  une  vérifics- 
tlon,  une  preuve,  une  instruction,  ou  tout  autre  scte 
Jugé  nécessaire  pour  l'éclaircissement  de  la  cause.  Il  peut 
être  fait  appel  d'un  Jugement  interlocutoire  avant  le  Ju- 
gement définitif  {Code  de  Procéd,^  art.  4M-473). 

INTERLOPE,  mot  anglais  qui  signifie  mtnis,  et  qu'on 
applique  comme  qualification  :  1*  à  tout  navire  qui  tra- 
fique en  fraude;  r  aux  hommes  qui  font  ce  oommeros 
Arauduleux  ;  3®  à  ce  commerce  lui-même. 

INTERLUDE,  nom  qu'on  donne  :  1«  à  la  partie  de  la 
fugue  appelée  aussi  divertissement;  2*  à  tout  ^isode 
qu  dans  une  pièce  quelconque  de  musique,  ne  tient  ps^ 


INT 


1091 


INT 


mentieUemeiit  au  si:det;  3<*  aax  petite  morceaux  d*orgue 
<IQe  Ton  joue  entre  les  strophes  d*une  hymne,  ou  entre 
on  psaume  et  un  autre. 

INTERMÈDE,  courte  composition  dramatique,  musi- 
cale on  chorégraphique,  placée  entre  deux  grandes  pièces 
oa  entre  les  actes  d^une  pièce  de  longue  haleine.  Les 
duBUTB  des  tragédies  antiques ,  ceux  d*Esih»r  et  dMtAo- 
Im,  sont  de  véritables  intermèdes.  Molière  a  placé  des 
intermèdes  burlesques  dans  le  Bourgeois  gentilhomme , 
et  dans  U  Malade  imaginaire.  Au  xvin*  siècle,  les  petite 
opéFM  en  on  acte  étaient  qualifiés  d'intermèdes  :  telle 
est  la  Servapadrona  de  Peiîsolèse. 

INTERMÉDIAIRES.  V.  le  Supplément. 

INTERNATIONAL  (  Droit).  K.  Daorr  des  obis. 

INTERNE,  élève  qui  habite  dans  un  établissement 
(Tinstniction.  —  On  donne  le  même  nom  aux  étudiante 
en  médecine  attachés  an  service  des  hôpiteux  civils,  et 
qni  y  font  leur  demeure.  Reçus  par  concours,  ils  montent 
tour  k  tour  la  garde,  font  les  pansements,  pratiauent  les 
opéntions  chirurgicales  les  plus  simples,  et  suivent  les 
visites  des  médecins  et  chirur^ens,  dont  ils  enregistrent 
les  prescriptions.  L'internat  dure  4  années* 

INTERNEBiENT.  V.  Sorveillangb. 

INTERNONCE.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d^  Histoire, 

INTERPELLATION,  dans  le  langage  parlementaire, 
question  adressée  dans  une  Chambre  à  un  ministre  sur 
on  point  ordinairement  en  dehors  de  la  discussion  des 
lois,  mais  touchant  U  situation  intérieure  ou  extérieure 
du  pays,  Texécution  des  lois,  etc.  En  général,  Tobjet  de 
l'interpellation  e^^  inc^qué  d'avance,  et  l'Assemblée  fixe 
on  Jour  pour  en  étendre  le  développement.  Les  inter- 
pellations sont  f récentes  dans  lé"  Parlement  anglais.  V. 
le  SupplémenS, 

INTERPOLATION  Mu  latin  tn^erpolare,  rajeunir  du 
TÏeai  en  y  mêlant  du  neuf),  se  dit  spécialement,  dans  le 
langage  de  la  critiqua  littâraire,  de  tout  passage  qui  a 
été,  soit  par  fraude,  soit  par  ignorance,  inséré  dans  le 
texte  d^un  écrivain.  Il  n'est  point  d'ouvrages  où  les  inter- 
MlatioDs  aient  été  plus  nombreuses  que  dans  VIliade  et 
YOilfSsée  d'Homère,  poèmes  qui,  pendant  plusieurs  siè- 
cles, ne  se  sont  conserva  que  par  la  tradition  orale,  et  où 
le  rapsodes  durent  souvent  introduire  des  vers  ou  des 
déreloppementa ,  soit  pour  les  mettre  en  harmonie  avec 
le  goût  et  les  idées  de  leur  temps  ou  avec  l'esprit  de  telle 
w telle  cité,  soit  pour  flatter  quelque  famille  puissante 
00  inaérer  quelque  tradition  mytholo^que  inconnue  aux 
temps  anténeora,  soit  enfin  par  défaillance  de  leur  mé- 
iBoire.  Lorsque  les  poésies  homériques  furent  écrites , 
dos  d'une  interpolation  dut  se  glisser  encore  par  le  fait 
des  copistea  ou  des  diascâvastes  (F.  ce  mos).  Dès  le 
n*  siècle  avant  J.-C,  mais  surtout  à  partir  du  m*,  la 
critique  grecfiae  nota  de  signes  convenus  bon  nombre  de 
ces  interpolations.  Plusieurs  interpolations  doivent  être 
toasi  imputées  aux  grammairiens  d'Alexandrie  eux- 
mêmes  :  ainsi,  lorsque  fut  établie  la  division  en  24  rap- 
sodes, on  inséra  souvent,  pour  éviter  une  fin.  ou  un 
commencement  trop  brusque,  un  ou  plusieurs  vers,  tou- 
jours assez  communs,  et  souvent  empruntés  au  poète 
îtti-fflème. 

Une  autre  source  d'interpolation,  plus  ft^uente  chez 
les  prosateurs  que  chez  les  poètes,  ce  sont  les  gloses 
qoe  œrtaina  copistes,  ou  lecteurs,  ou  critiques,  mel^ 
talent  à  la  marge  du  manuscrit,  et  ou'un  autre  copiste 
inattentif  ou  ignorant  transportait  oans  le  texte,  soit 
comme  addition,  soit  comme  substitution.  Dans  les 
écoles  de  l'antiquité,  ces  insertions  de  gloses  étaient  in- 
di<}uées  soigneusement  aux  auditeurs,  et  les  bonnes 
éditions  en  purgeaient  toi:jours  le  texte  ;  malheureuse- 
ment, les  manuscrite  qui  nous  sont  parvenus  en  sont 
remplis,  parce  qu'ils  remontent  à  une  époque  relative- 
ment peu  éloignée  de  nous,  et  où  les  bons  copistes  de- 
venaient de  plus  en  plus  rares,  c-jmI.  au  milieu  du 
moyen  âge.  Les  critiques  modernes  en  ont  rdevé  un 
grand  nombre  dès  le  xvi*  siècle  ;  mais  il  ne  leur  a  pas 
été  aussi  facile  de  prononcer  avec  certitude  et  autorité 
sur  la  véritable  expression  originale;  de  là  tant  de  cor- 
rections par  conjectures.  Les  érudite  qui  ont  porté  le  pins 
de  lumières  daîis  cette  partie  de  la  critique  des  textes 
sont,  au  XVI*  siècle,  Henri  Estienne  ;  au  xvn*,  Saumaise  et 
Caaanbon  ;  plus  tard,  Bentley,  Porson,  Hermann,  Heyne, 
Jseobs,  Reiske,  Brunck,  Boedch,  Bekker,  Coray,  Hase, 
BoisBonade,  etc. 

Des  interpolations  importantes  ont  été  signalées  éga- 
lement dans  les  Livres  sainte.  F.  Bole,  Apocryphes. 

Llnvention  de  l'imprimerie  n'a  pu  préserver  de  toute 


interpolation  les  ouvrages  modernes  eux-mêmes;  c'est 
prinapalement  dans  les  œuvres  dramatiques  qu'elles  ont 
été  remarquées  ;  et  elles  doivent  la  plupart  du  temps  être 
attribuées  aux  acteurs.  Shakspeare  chez  les  Anglais  et 
Molière  en  France  ont  dû  être  de  bonne  heure  l'objet 
d'études  critiques ,  gr&ce  auxquelles  nous  possédons  au- 
jourd'hui trèe-purs  les  textes  de  ces  deux  grands  écri* 
vains.  P. 

INTERPOSITION  DE  PERSONNE,  acte  de  celui  qui 
prête  son  nom  à  quelqu'un ,  pour  lui  faciliter  des  avan- 
tages qu'il  ne  pourrait  obtenir  directement.  Toute  dona- 
tion faite  à  des  personnes  interposées  est  nulle.  Sont 
réputés  interposés  les  père  et  mère ,  les  enfante  et  des* 
cendante,  et  Vépoux  de  la  personne  incapable  {Code  iVa- 
poUon,  art.  911, 1099, 1100). 

INTERPRÉTATION,  traduction  accompagnée  d'expli- 
cations. Elle  prend  les  noms  d'Ea>égèse  et  aHerménevt» 
tique  (F.  ces  mots)  s'il  s'agit  de  livres  sacrés.  V.  Hnet, 
De  interpretatione  libri  II,  Paris,  1661,  in-4<^;  Beck,  De 
interpretatione  veterum  scriptorum,  Leipzig,  1798,  in-i«; 
G.  Meyer,  Essai  dune  Herméneutique  générale^  en  al- 
lem..  Halle,  1756,  in-S»;  Rosenmûller,  Historia  inter- 
pretationis  librorum  sacrorum,  Leipzig,  1795-1814; 
W.  Meyer,  Histoire  de  V Herméneutique  sacrée,  en  allem., 
ibid.,  1802-1808;  J.-A.  Emesti,  Instttutio  interpretis 
Novi  Testamenti,  édit.  d'Ammon,  1809.  —  L'interpré- 
tation d'une  loi  dont  le  texte  est  obscur  ou  équivoque 
est  donnée  par  les  Juges  chargés  de  rappllq[uer;  ils  se 
guident  tantôt  par  les  règles  que  la  lé^slation  a  elle- 
même  fixées  (analogie  des  lois,  principes  naturels  du 
Droit,  etc.  ),  tantôt  par  l'autorité  des  Jurisconsultes  qui 
ont  écrit  sur  la  matière,  ou  encore  par  les  décisions 
qu'ont  rendues  les  Cours  supérieures.  Quand  l'obscurité 
est  telle  qu'on  ne  peut  déterminer  la  véritable  intendon 
du  législateur,  et  que  les  divers  tribunaux  prononcent 
chacun  d'une  manière  différente,  une  interprétation  au- 
thentique  est  donnée  par  la  Cour  de  cassation.  —  L'inter- 

i)rétetion  des  conventions  appartient  aux  tribunaux,  et 
e  Code  Napoléon  (art.  1156-66)  en  a  tracé  les  règles. 
V.  Clause;  Mailher  de  Chassât,  Traité  de  Vmterprétation 
des  lois,  1845,  in-8«;  Delisle,  Principes  de  l'interpr^ation 
des  lois,  des  actes  et  des  conventions,  1852,  2  voL  in-8«* 

INTERPRÈTE,  celui  qui  traduit  d'une  langue  dans  une 
autre.  Des  interprètes  organisés  militairement  sont  attar 
chés  aux  troupes  françaises  d'Aloérie.  Les  interprètes  des 
ambassades  en  Orient,  appelés  drogmans,  sont  des  fonc- 
tionnaires d'une  certaine  importance.  Les  nUerprètet 
jurés  ou  treiducteurs  assermentés  près  les  Cours  ou  tri« 
bunaux  sont  choisis  par  le  président,  doivent  être  &gés 
de  21  ans  au  moins,  et  prêter  serment  de  traduire  avec 
fidélité  ;  on  ne  peut  les  prendre,  ni  parmi  les  juges,  ni 
parmi  les  jurés,  ni  parmi  les  témoins  (Code  ff Instruction 
criminelle^  art  332  et  333).  Us  sont  sujete  k  récusation* 
Pour  les  actes  de  commerce  déférés  aux  tribunaux,  il  y  a 
des  courtiers  interprètes,  V,  Courtiers. 

INTERRÈGNE ,  temps  pendant  lequel  un  royaume  se 
trouve  sans  roi,  un  empire  sans  chef. 

INTERROGATIF  (Mot),  ac^ectif,  pronom  ou  adverbe 
servant  à  marguer  une  interrogation.  Tels  sont,  en  fran- 
çais, qui?  quel?  lequel  ?  quoi?  que?  quand  ?  commetU? 
où?  combien?  Ajoutons  la  périphrase  interrog^tive  et^ 
ce  que?  Le  latin  et  le  grec  sont  plus  riches  en  particules 
interrogatives.  P. 

iNTBRaoGATip  (Tour),  tour  de  phrase  servant  à  indi- 

3uer  l'interrogation.  Telle  est,  en  français,  l'inversion 
u  si^et,  lorsque  ce  sujet  est  un  pronom  :  Viendrex-ixms  ? 
Sommes-nous  prêts  ?  Ont-Us  éU  avertis  ?  Si  le  sii^et  est 
un  substantif,  l'inversion  ne  peut  avoir  lieu  en  français  | 
mais,  après  le  verbe,  on  exprime  pléonastiquement  le 
pronom  t  Votre  frère  «st-tl  parti?  Mes  soeurs  resteront' 
elles  0090  nous?  Le  tour  interroçatif  est  souvent  em» 
ployé  pour  remplacer  la  conjonction  si ,  quand  même , 
quoique,  Ex.  :  «  ArchélaUs  estpuissant?  Peu  m'importe, 
s'il  n'est  vertueux.  —  Eussiex-vous  d'ailleurs  cent  celles  / 
oualités,  si  vous  n'êtes  aimable,  vous  ne  trouverez  qu'in- 
différence. »  Le  tour  interrogatlf  est  très-fréquent  dans  '^' 
la  conversation ,  lorsqu'on  veut  exprimer  vivement  une 
affirmation  ou  une  négation  : 

Comment  peat-on  Jnger  d'une  pi^,  en  effet, 
An  tintamarre  aArenz  qu'an  parterre  on  a  ftiitf 

PiROH,  la  Métromanie,  V,  2. 

c-à-d.  on  ne  peut  pas  juger,  etc. 

ITett-ce  pae  )t  tob  yeux  un  tpectaele  asaei  dou 
Que  la  veuve  d^Heetor  pleurant  h  ros  genoux? 

BAOïn,  Andronaqitê,  III,  4» 


ÎNT 


1092 


INT 


Ce  tOQ?  8BÎ  d'en  grand  usage  dans  les  discours;  de  là  le 
nom  de  Umr  oraUnm  que  les  rhôteura  lui  ont  donné.  P. 

INTERhOGATION,  proposition  tournée  de  manière 
qu*elle  indioue  Tignorance  ou  Tinoertitude  de  celui  qui 
parle,  et  le  aésir  qu'il  a  d'être  instruit  ou  fixé  sur  tel  ou 
tel  point  :  «  Qui  a  créé  le  monde?  Comment  la  terre  se 
soutient-elle  dans  l'espace?  Quel  est  votre  avis?  Quel 
parti  prendre?  »  On  voit  que  l'interrogation,  peut  porter 
sur  le  sujet,  l'attribut,  ou  l'un  de  ses  compléments. 

L'interrogation  est  souvent  une  Figure  de  pensée,  qui 
consiste  à  prendre  le  tour  interrogstif,  non  pourmaitiuer 
un  doute  réel ,  car  l'expression  serait  alors  toute  simple 
et  sans  figure,  mais  pour  exprimer  une  persuasion  plus 
grande  par  l'espèce  de  défi  que  l'on  parait  fairç  à  l'au- 
diteur de  nier  ce  qu'on  avance  ;  pour  réveiller  l'attention 
par  cette  espèce  de  vivacité;  pour  marquer  la  surprise, 
la  crainte,  la  douleur,  l'indignation,  et  autres  mouve- 
ments de  r&me;  quelquefois  pour  presser,  convaincre, 
confondre  ceux  à  qui  on  adresse  la  parole.  C'est  la  figure 
la  plus  fréquente  peut-être  dans  le  langage  familier  et 
dans  le  langage  populaire.  Aussi  en  rencontre-t-on  de 
nombreux  exemples  chez  les  poètes  et  les  orateurs,  les 
deux  classes  d'écrivains  qui  ont  le  plus  d'occasions  de 
recourir  aux  mouvements  passionnés  du  style.  Quelque- 
fois l'interrogation  et  la  réponse  se  font  tout  à  la  fois,  ce 
qui  est  un  moyen  d'éveiller  l'attention  et  de  la  fixer  sur 
la  réponse  qui  suit  immédiatement.  Lorsque  la  réponse 
n'est  pas  faite,  si  elle  doit  être  négative,  l'interrogation 
se  fait  purement  et  simplement  : 

La  fol  qni  n'agit  point,  est-ce  nne  fol  8lnob«? 

Raoimb,  AthaUe^  I,  t. 

Si  la  réponse  doit  être  affirmative,  Tinterrogation  prend 
un  tour  négatif  :  «  Ne  vous  avais-Je  pas  fait  toutes  les 
recommandations  nécessaires?  n  Les  interrogations  accu- 
mulées sont  l'expression  de  la  véhémence  des  sentiments 
et  des  passions.  P. 

nvTBRROGATioN  (Méthodo  d'),  procédé  qui  consiste  à 
poser  des  questions  à  ceux  qu'on  veut  instruire,  pour  les 
amener  à  cherclier  eux-mêmes  ce  qu'ils  ont  besoin  de 
savoir.  C'était  la  méthode  que  Socrate  employait  avec  les 
sophistes  et  avec  ses  disciples  :  avec  les  premiers,  pour 
les  confondre  et  les  forcer  à  avouer  ou'ils  ignoraient  ce 
qu'ils  prétendaient  enseigner  ;  c'était  rtronta  socratktae 

r promeut  dite;  avec  les  seconds,  pour  les  mettre  sur 
voie  et  les  conduire ,  par  l'analyse,  à  envisager  une 
idée  ou  une  question  sous  toutes  ses  faces,  et  à  se  rendre 
compte  de  leurs  pensées.  Socrate  se  disait  pour  cette 
raison  Vaccoucheur  des  esprits.  Cette  méthode,  appelée 
aussi  ditUectique,  est  préférable,  quand  elle  est  pratiad)le, 
à  la  méthode  exclusivement  dognîatique.  R. 

I1ITBRRO6ATI0N  (Poiut  d').    K.  PONGTOATION. 

IMERROGATOIRE ,  ensemble  des  questions  qu'a- 
dresse un  magistrat  et  dos  réponses  que  fait  celui  qui  est 
interrogé.  En  matière  criminelle,  l'interrogatoire  est  un 
des  actes  les  plus  importants  de  Vinstruction  (V,  ce  mot)  ; 
la  manière  dy  procéder  est  réglée  par  le  Code  d^instruc- 
tion  crimindiB,  Dans  le  cas  de  flagrant  délit,  le  coupable 
doit  être  interrogé  sur-le-champ  par  le  procureur  impé- 
rial et  les  officiers  auxiliaires,  et  le  procès-verbal,  rédigé 
en  présence  du  commissaire  de  police,  du  maire  ou  d'un 
adjoint,  ou  de  deux  citoyens  aomiciliés  dans  la  com- 
mune, est  revêtu  de  leur  signature  fart.  40}.  Tout  in- 
culpé doit  être  interrogé  par  le  Juge  d'instruction,  sur-le- 
champ  en  cas  de  mandat  de  comparution,  dans  les 
S4  heures  en  cas  de  mandat  d'amener  (art.  93)  ;  le  pro- 
cès-verbal ,  rédigé  par  le  greffier,  doit  être  signé  du  pré^ 
venu,  et,  en  cas  de  refus  ou  d'impossibilité,  il  doit  en  être 
feit  mention.  Le  juge  d'instruction  peut  renouveler  ses 
interrogatoires  autant  de  fois  qu'il  le  croit  utile  à  la  dé- 
couverte de  la  vérité.  Si  le  prévenu  doit  être  ti^uit  de- 
vant le  tribunal  correctionnel ,  il  n'a  plus,  en  sortant  des 
mains  du  ]uge  d'instruction,  qu'à  être  interrogé  à  l'au- 
dience. Mais,  s'il  est  renvoyé  devant  la  Cour  d'assises,  le 
président  de  cette  Cour,  ou  un  juge  commis  par  lui,  l'in- 
terroge de  nouveau,  24  heures  au  plus  tard  après  la  re- 
mise des  pièces  au  grefi'e  et  l'arrivée  de  l'accusé  dans  la 
maison  de  justice  (art.  293)  ;  cet  interrogatoire  a  lieu  en 
l'absence  du  conseil  de  l'accusé  (art.  302  et  574);  procès- 
verbal  en  est  dressé  par  le  greffier  et  signé  par  l'accusé. 
Quand  les  débats  sont  ouverts,  le  président  procède  pu- 
bliquement et  en  présence  du  jury  à  un  dernier  interro- 
gatoire, pendant  lequel  l'accusé  est  assisté  de  son  conseil, 
qui  peut  s'opposer  a  ce  que  certaines  questions  lui  soient 
posées.  Des  questions  peuvent  être  adressées  par  les 


juges,  le  procurer. r  g>SnéraI  et  les  jurés,  en  passant  par 
la  bouche  du  plaident. — En  Ani^eterre,  la  loi  ne  permet 

{>as  qu'on  interroge  les  prévenus,  ni  qu'on  se  prévale  de 
eurs  aveux;  le  magistrat  se  borne  à  leur  demander  s'ils 
sont  coupables  ou  non. 

En  matière  civile,  le  mot  Interrogatoire  ne  s'emploie 
seul  que  pour  daigner  les  questions  faites  par  le  juge  à 
une  piersonne  dont  l'interdiction  est  pqursmvie.  En  tout 
autre  cas,  on  dit  Interrogatoire  sur  faits  et  articles  :  les 
parties  peuvent,  en  toute  matière  et  en  tout  état  de 
cause,  demander  de  se  faire  interroger  respectivement, 
sans  retard  de  l'instruction  ni  du  Jugement  (F.  le  Code 
de  Procédure  dmle,  liv.  II,  tit.  15). 

INTERVALLE,  en  termes  de  Musique,  distance  qui  sé- 
pare deux  sons  dans  l'éclielle  de  la  gamme.  Une  note 
étant  donnée,  celle  qui  la  suit  immédiatement  au-dessos 
est  à  l'intervalle  de  seconde;  un  degré  encore  plus  haut, 
c'est  la  tierce,  et  successivement  la  quarte,  la  quinte^  la 
sixte,  la  septième,  Voctave,  la  neumème,  la  dixième,  etc. 
En  mélodie,  les  intervalles  sont  successifs;  en  harmo- 
nie, ils  sont  sfêccessifs  dans  les  parties  et  simultanés 
par  l'accord  des  parties  entre  elles.  Dans  la  pratique  de 
l'harmonie,  on  est  convenu  de  conserver  aux  intervalles 
qui  excèdent  la  distance  d'une  neuvième  les  dénomina- 
tions de  tierce,  quarte,  quinte,  sixte,  etc.,  parce  qu'ils 
ne  sont,  à  proprement  parler,  que  les  doubles  de  ces  der- 
nières. Les  intervalles  sont  dits  simples^  quand  ils  ne  dé- 
f lassent  pas  l'octave,  et  multiples  ou  composés^  quand 
Is  dépassent  cette  étendue.  Suivant  l'efi'et  qu'ils  prodai- 
sent  sur  nos  sens,  les  intervalles  simples  sont  conson- 
nants  ou  dissonants  (V.  Consonnance,  Dissorarcb).  La 
quarte,  la  quinte  et  l'octave  sont  des  consonnances  par- 
faites,  parce  qu'elles  ne  peuvent  être  modifiées  ;  la  tierce 
et  la  sixte  sont  dites  imparfaites,  parce  qu'elles  i>euvent 
varier  d'un  demi-ton,  et  être,  par  conséquent,  mineures 
ou  majeures.  Les  dissonances  de  seconde  et  de  septième 
peuvent  aussi  être  majeures  ou  mineures.  Un  intervalle 
quelconque  est  dit  superflu  ou  augmenté,  quand  il  est 
augmenté  d'un  demi-ton  ;  diminué,  quand  on  le  diminue 
d'autant  :  dans  les  deux  cas  il  est  altéré.  Autrefois  on  se 
servait  des  qualifications  de  juste  et  de  faux  pour  les 
variétés  d'extension  de  la  quarte  et  de  la  quinte;  mais, 
ce  qui  est  faux  ne  pouvant  trouver  place  en  harmonie, 
on  a  renoncé  à  ces  mauvaises  expressions.  Un  intervalle 
est  didUonique  quand  il  a  lieu  sur  les  tons  naturels  de  la 
gamme;  ctû^omatique  quand  il  a  lieu  d'un  ton  à  un  demi- 
ton;  enharmonique  çruand  il  est  produit  sur  le  même 
degré  par  un  dièse.  V,  Scheibe,  Sur  les  intervalles  et  les 
genres  en  musique^  en  allem.,  Hambourg,  1739,  in-S**; 
Riedt,  Essai  sur  les  intervalles  en  musique,  en  allem., 
Berlin,  1753,  in-4'>;  Rœllig,  Essai  d'une  table  d^inter- 
valles  musicaux,  en  allem.,  Leipz.,  1789 ,  in-fol.;  Dau- 
prat.  Nouveau  Traité  théorique  et  pratique  des  accords, 
Paris  1857  in-4**.  B. 

INTERVENTION,  en  termes  de  Droit,  action  par  la- 
quelle un  tiers  s'introduit  dans  une  instance  civile,  afin 
de  participer  aux  débats  et  de  faire  prononcer  par  le 
même  Jugement  sur  l'intérêt  qu'il  a  dans  l'affaire.  L'in- 
tervention^oit  être  formée  par  simple  requête  et  conclu- 
sions motivées,  sans  aucun  développement  {Code  de 
Procéd,,  art.  339).  Elle  est  dispensée  du  préliminaire  de 
conciliation  (art.  49).  Elle  ne  peut  retarder  le  jugement 
de  la  cause  principale,  si  cette  cause  était  en  état  d'être 
jugée.  Une  intervention  n'est  reçue  sur  l'appel  que  de  la 
part  de  ceux  qui  auraient  le  droit  de  former  tierce  oppo- 
sition (F.  ce  mot),  —  En  Droit  commercial,  il  peut  y 
avoir  intervention  lors  du  protêt  d'une  lettre  de  change  on 
d'un  billet,  si  quelqu'un  se  présente  pour  faire  honneor 
à  l'une  des  si^atures  de  cet  effet  :  l'intervention  et  le 
paiement  sont  constata  dans  l'acte  de  protêt  ou  à  la 
suite. 

Dans  le  Droit  politique,  on  nomme  Intervention  l'acte 
d'un  État  qui  prend  parti  dans  la  querelle  de  deux  autres, 
ou  dans  les  dissensions  civiles  d'un  pays  étranger.  Cetto 
intervention  peut  s'effectuer,  soit  en  fournissant  des 
armes  et  des  subsides  à  l'un  des  belligérantSf  soit  par  des 
conseils  et  des  menaces,  soit  par  la  force  ouverte  ;  elle  est 
donc  tantôt  officieuse  ou  pacifique,  tantôt  armée.  Elle 
peut  être  spontanée,  ou  résulter  d'engagements  anté- 
rieurs, ou  être  provoquée  par  la  demande  de  l'une  des 
puissances  en  lutte.  L'intervention  déterminée  par  des 
motifs  d'ambition  personnelle,  exécutée  en  vue  d'une 
conquête,  est  une  hypocrisie  et  un  crime.  C'est  égale- 
ment un  crime  pour  un  gouvernement  d'intervenir  dans 
un  pays  étranger  pour  implanter  par  la  force  des  institu- 
tions et  des  hommes  dont  ce  pays  ne  vent  pas.  Une  in» 


INT 


1093 


ixr 


tarrentlon  dans  la  querelle  de  deux  peuples  n*a  de  raison 
d'être  pour  un  autre  peuple,  que  s*il  lui  faut  pounroir  à 
tt  propre  aécorité,  défendre  son  principe  ou  tout  autre 
gnûid  intérêt  national. 

Sous  la  Restauration,  il  y  eut  en  Europe  abus  de  Tinter- 
vention  année  :  c^était  une  des  conséquences  du  principe 
ie  celte  ligue  appelée  du  trop  beau  nom  de  Sainte-Alliance, 
et  qui  fut  un  prétexte  aux  étrangers  pour  envahir  notre 
pays  en  1815;  aussi ,  la  première  chose  que  fit  la  France, 
sprës  sa  RéTolution  de  1830,  fut  de  proclamer  le  principe 
de  Don-intervention  pour  elle-même  et  pour  les  autres. 
Par  cette  déclaration  aussi  hardie  que  flère,  elle  se  donna 
uso  force  morale  de  plus,  et  se  fit  respecter  de  TEurope. 
Le  parti^  ultra-libéral  voulut  appli<}uer  ce  principe  avec  la 
même  rigoeur  absolue  doux  la  Sainte-Alliance  avait  fait 
.preuve  k  regard  du  principe  contraire  pour  réprimer  les 
'tentatives  d'émancipation  politique  :  ainsi,  en  1831,  les 
Romagnes  a*étant  insurgées,  les  Autrichiens  marchent 
pour  les  fiiire  rentrer  sous  Tautorité  légitime.  Alors  l'oppo- 
lition  demande  ^e  la  France  intervienne  à  main  armée, 
puisque  les  Autrichiens  violaient  le  principe  de  non-inter- 
TCQtion.  Biais,  en  Politique,  il  ne  peut  y  avoir  de  principe 
absolu,  parce  que  le  premier  principe  comme  le  premier 
devoir  d*un  gouvernement  est  de  songer  à  Tintérêt  de  son 
propre  pays.  Washington,  Tun  des  fondateurs  de  Tindé- 
pendanco  américaine,  a  toujours  proclamé  et  pratiqué 
cette  doctrine,  même  vis-à-vis  de  la  France.  Casimir  Pé- 
rier,  président  du  conseil  des  ministres  au  moment  de 
rinsnrrection  des  Romagnes,  répondit  à  ceux  (jvlï  vou- 
laient qa'ane  armée  française  fût  envoyée  en  Italie  :  «  Un 
principe  est  pratiqué,  est  professé  par  nous  ;  est-ce  à  dire 
que  noua  porterons  nos  armes  partout  où  ce  principe  ne 
sera  paa  respecté?  Ce  serait  une  intervention  d*un  autre 
genre.  Le  droit  de  non-intervention  idnsi  entendu  servi- 
rait de  masque  à  Tesprit  de  conquête.  LMntérêt  et  Thon- 
neur  de  la  Fiance  pourront  seuls  nous  faire  prendre  les 
armes  ;  le  san^  français  n'appartient  qu*à  la  France.  »  Le 
bon  sens  public  applaudit  à  ces  paroles,  et  Tiotervention 
année  n'eut  pas  heu.  B.  et  G.  D— t. 

INTESTAT  (Ab).  V.  Ab  Intestat. 
INTIMATION  (du  hitin  intimare,  enjoindre),  assigna- 
tion que  rappelant  d*un  Jugement  donne  k  la  partie  oui 
a  obteaa  gain  de  cause,  pour  qu'elle  ait  à  comparaître  oe- 
vant  de  nouveaux  Juges.  Vmtimé  est  le  défendeur  en 
appel,  y.  DéPEiiDEim. 

INTINCnON,  en  termes  de  Liturgie,  mélange  qui  se 
fait  à  la  Messe,  entre  la  consécration  et  la  communion, 
d^one  petite  partie  de  Thostie  consacrée  avec  le  sang 

d8j..a 

INTOLÉRANCE.  F.  Tolérance. 
INTONATION ,  manière  de  donner  à  ce  qu'on  lit  ou  ré- 
cite le  ton  convenable,  en  pliant  la  voix  aux  diverses  in- 
flexions qui  expriment,  selon  la  nature  des  pensées  et  des 
sentiments,  la  force  ou  la  douceur,  la  gaieté  ou  la  pas- 
sion. Les  nuances  de  l'intonation  consistent  dans  le  plus 
on  moins  d'élévation,  dans  le  plus  ou  moins  de  lenteur  ou 
de  brièveté  des  sons.  Au  milieu  de  la  conversation  même, 
il  est  rare  que  l'idée  instantanément  conçue  n'emprunte 
pas,  pour  se  présenter  au  dehors,  le  ton  le  plus  naturel 
et  le  plus  vrai.  Dans  le  débit  oratoire  ou  thé&tral ,  les  in- 
tonations fausses  résultent  de  l'ignorance,  de  l'insensi- 
Mlité  ou  du  mauvais  goût.  —  En  Musique,  VlnUmation 
est  l'acte  d'émettre  le  son.  Sa  Justesse  dépend  de  la  voix 
et  de  l'oreille  ;  sa  netteté  s'acquiert  par  l'exercice.  Les 
clefs  et  leur  armature  sont  dites  signes  d'intonation.  — 
Dans  le  Plain-chant ,  V Intonation  est  la  manière  de  com- 
mencer le  chant  ^u  premier  verset  d'un  psaume.  Il  y  a 
trois  espèces  d'intonations  :  1<*  les  intonations  solennelles, 
qui  servent  à  chanter  le  verset  du  psaume  qui  suit  l'in- 
troït, et  les  deux  versets  de  la  doxologie;  elles  ne  sont 
d'usage  qu'à  l'introït  de  la  messe  ;  2°  les  intonations  fes- 
tfroies,  qui  sont  celles  des  psaumes  et  des  cantiques  des 
Matines, liiudes,  ou  Vêpres;  on  ne  les  emploie  que  les  di- 
maoches  et  les  Jours  de  fête  ;  3»  les  intonations  fériales, 

Sd  sont  appliquées  aux  mêmes  parties  de  l'office  que  les 
looations  précédentes,  mais  dont  on  se  sert  aux  fêtes 
simples  et  aux  Jours  fériés. 

INTRADOS ,  en  termes  de  Construction ,  partie  inté- 
rieure et  concave  d'un  arc,  d'une  voûte.  Vextrados  en 
est  le  parement  extérieur.  On  dit  aussi  douelle  intériewre 
et  douelle  eaOénewre. 

INTRANSmF,  se  dit  des  verbes  exprimant  un  état  ou 
une  action  ne  sortant  pas  du  snjet  :  tels  sont,  en  français, 
bianckir  (dans  le  sens  neutre),  dtner,  souper,  marcher, 
parler,  fleurir,  dormir,  etc.  'Tous  les  verbes  intransitifs 
•it  neutres;  mais  tous  les  neutres  ne  sont  pas  intran- 


sitifs  :  ainsi  venir,  aller,  entrer,  sortir.  V,  Nbdtkb.      P. 

INTRIGUE  (du  latin  intricare,  embamuser,  em- 
brouiller). Cest,  en  Littérature,  l'ensemble  des  moyens 
par  lesquels  est  développé  le  sujet  d'une  tragédie,  d'^^une 
comédie  ou  d'un  drame. 

Dans  les  littératures  grecque  et  latine,  les  intrigues  de 
tragédie  sont  extrêmement  nmples,  et  sacrifiées  ordinal- 
rement  aux  développements  des  caractères  principaux.  Le 
personnage  collectif  qu'on  appelle  le  chœur  y  prend  une 
part  importante,  et  qui  fait  ressembler,  en  plusieurs 
points,  la  tragédie  antique  k  nos  grands  opéras. 

L'intrigue  de  la  comédie  grecque  était  encore  plus 
simple,  puisque  Térence,  en  imitant  Ménandre,  prenait 
deux  de  ses  comédies  pour  en  composer  une  seule,  ce  qui 
le  fit  appeler  demi-Ménandre.  La  construction  même  des 
thé&tres  des  Anciens,  leur  immensité,  était  une  des  causes 

Î[ui  imposaient  aux  poètes  une  composition  simple,  si  dif- 
érente  de  nos  intngues  dramatiques ,  représentées  de- 
vant un  auditoire  douze  ou  quinze  fois  moins  nombreux, 
et  dans  des  salles  où  tout  est  arrangé  pour  l'illusion  à» 
la  scène.  Je  m'imagine  que,  chez  les  Grecs  et  chez  les 
Romains,  le  public  n'était  attentif  qu'à  ceartaines  scènef 
capitales  d'un  ouvrage,  et  n'écoutait  guère  le  reste,  à  peu 
près  comme,  en  Italie,  on  écoute  les  opéras  italiens.  L'in- 
trigue tragique  étant  toujours  un  fait  de  l'histoire  ou  de 
la  religion  nationale,  le  titre  seul  de  la  pièce  suffisait  pour 
mettre  les  spectateurs  au  courant  du  sujet  traité  ;  mais 
l'intrigue  comique  n'offrant  pas  la  même  ressource,  et, 
d'ailleurs,  étant  un  peu  plus  compliquée,  les  poètes 
l'expliquaient  tout  au  long  dans  un  prologue^  On  voit, 
par  ce  fait  seul,  que  le  principal  intérêt  des  pièces  devait 
être  dans  certaines  mènes,  dans  certains  rôles,  dans  le  Jeu 
des  acteurs,  et  que  l'intrigue  n'occupait  qu'un  rang  très- 
secondaire.  Chez  les  Modernes,  le  thé&tre  comique  prend 
ou  cherche  ses  types  dans  la  société,  parmi  les  spectateurs 
même,  pour  ainsi  dire;  chez  les  Anciens,  les  types  de  la 
comédie  sont  des  esclaves,  des  aifranchis,  des  maqui- 
gnons ,  en  un  mot ,  l'image  d'un  monde  de  bas  étage,  de 
gen%  de  mauvais  lieu,  et  qui  n'étaient  Jamais  admis  dtians 
la  société  civile,  ni  surtout  dans  celle  des  femmes  hon- 
nêtes. Il  était  interdit  aux  poètes  de  mettre  sur  le  théâtre 
aucune  imitation  de  la  vie  de  famille.  On  voit  combien 
ces  différences  si  tranchées,  dans  le  choix  possible  des 
si^ets,  dans  la  construction  des  thé&tres,  et  dans  la  na- 
ture des  spectateurs,  ont  dû  en  mettre  dans  la  composi- 
tion des  intrigues,  surtout  pour  la  comédie. 

Chez  nous,  où  la  tragédie  n'est  qu'une  imitation  plus 
ou  moins  perfectionnée  de  celle  des  Anciens,  elle  a 
aussi ,  presque  toujours,  pour  point  de  départ  une  donnée 
historique,  sur  laquelle  le  poète  dispose  des  incidents, 
bien  liés  les  uns  aux  autres,  bien  combinés  pour  exciter 
la  terreur  ou  la  pitié,  et  qui  conduisent  à  un  dénoûment 
souvent  aussi  donné  par  l'histoire.  Horace,  Cinna,  la 
Mort  de  Pompée,  de  P.  Corneille,  sont  des  sujets  dont  le 
dénoûment  est  forcément  historique.  Nous  dirons  la 
même  chose  d'Esiher,  é^Athalie,  de  Britannicus,  de  Ra- 
cine, et  même  de  toutes  nos  tragédies,  puisque,  depuis 
l'origine  de  notre  thé&tre,  les  poètes  semblent  avoir 
admis,  comme  règle  inriolable,  <{ue  le  s^jet  d'un  poème 
tragique  doit  être  pris  dans  l'histoire,  la  légende  ou  la 
fable. 

L'intrigue  de  comédie  est  de  deux  sortes  :  celle  de  la 
comédie  de  caractère  et  celle  de  la  comédie  d'intrigue;  on 
donne  à  la  première  moins  d'importance,  afin  de  laisser 
plus  de  place  au  développement  du  caractère,  comme 
dans  le  Misanthrope  de  Molière  ;  la  seconde  est  plus  forte, 
plus  compliquée,  parce  que  les  événements  mêmes  de  la 
pièce  en  font  le  principal  intérêt. 

Les  ouvrages  de  théâtre  étant  essentiellement  fidts  pour 
être  représentés  plutôt  que  lus,  une  intrigue  bien  conçue, 
bien  tissue,  bien  composée,  en  un  mot  intéressante,  tou- 
chante ou  comique,  est  presque  toujours  un  puissant 
élément  de  succès.  Si  l'on  Juge  une  tragédie  ou  une  co- 
médie au  point  de  vue  purement  littéraire,  l'intrigue  bien 
faite  est  sans  aucun  doute  un  mérite  ;  mais  si  l'exécution 
ensuite  est  faible  ou  médiocre,  c'est  un  genne  de  mort 
pour  l'ouvrage.  On  a,  dans  l'histoire  du  thé&tre,  des 
exemples  de  trè»-grands  succès  dus  à  une  intrigue  inté- 
ressante, et,  néanmoins,  comme  les  pièces  étaient  faible- 
ment exécutées,  elles  sont  tombées  dans  l'oubli,  dès 
qu'elles  ont  pu  être  Jugées  de  sang-froid.  Thomas  Cor- 
neille a  été  plusieurs  fois  dans  ce  cas,  par  exemple  pour 
ses  tragédies  de  Timocrate,  de  StUicon,  de  Ùamma^ 
d* Ariane,  qui  obtinrent  un  succès  de  cent  représentations 
consécutives,  et  que  personne  ne  connaît  plus  depuis 
deux  siècles.  Les  intrigues  des  tragédies  de  Pradon  ^ 


INT 


1094 


INV 


t»nt  pas  beanooap  inférieures  à  celles  de  Racine;  mais 
tezécution  a  tout  tué. 

Dans  la  comédie,  surtout  la  comédie  en  prose,  Texécu- 
tion  a  moins  d'influence  parce  qu'elle  est  oeaucoup  plus 
bcile  ;  aussi ,  avec  un  sujet  heureux ,  habilement  (Ûsposé 
et  composé,  un  auteur  peut  espérer  le  succès.  Molière  et 
Regnard  ont  laissé,  dans  la  plupart  de  leurs  comédies, 
des  modèles  dMntri^es.  Parmi  les  auteurs  secondaires, 
Beaumarchais,  Sedaine,  Picard,  Alex.  DuTal,-et,  de  nos 
Jours,  Casimir  Delavigne,  Scribe,  ont  beaucoup  de  comé- 
dies bien  intriguées;  nous  citerons  de  Beaumarchais,  le 
Barbier  de  Séville  et  le  Mariage  de  Figaro;  de  Sedaine, 
U  Philosophe  sans  le  savoir j  le  Déserteur,  Richard  Coeur 
de  Lion;  de  Picard,  le  Collatéral ,  Du  Hautcours,  les  Ma- 
rionnetteSf  le  Conteur,  les  Deux  Philibert,  les  Trois 
auartiers;  d'Alexandre  Duval,  la  Jeunesse  d'Henri  V,  le 
Turan  domestique ^  Edouard  en  Ecosse;  de  G.  Delavigne, 
Marino  Faliero,  Louis  XI,  les  Enfants  d^Êdouard,  tra- 
gédies; VÊcoledes  Vieillards,  Don  Juan  d'Autriche,  co- 
médies; de  Scribe,  la  Camaraderie,  les  Mariages  aar^ 
aent,  Une  Chaîne,  Bertrand  et  Raton,  comédies,  la  Dame 
blanche,  VAmbassadrice,  le  Maçon,  te  Domino  noir,  Fra 
Diondlo,  la  Sirène,  les  Diamants  de  la  couronne,  Haydèe, 
la  Part  du  Diable,  etc.,  opéras-comiques.  Une  œuvre 
dramatique  bien  écrite  et  mal  composée,  ou  bien  com- 
posée et  mal  écrite,  ont  Tune  et  l'autre  chance  certaine 
de  naufrage  devant  les  spectateurs  ou  devant  les  lecteurs. 
L'intrigue  fait  donc  partie  intégrante  de  la  composition 
e*  de  l'exécution,  et  ce  n'est  qu'en  réunissant  ces  deux 

aualités  qu'un  ouvrage  approche  de  cette  perfection  rela- 
ve, qui  lui  assigne  un  rang  durable  parmi  les  produc- 
tions littéraires.  Entrer  dans  les  éléments  de  l'mtrigue 
tragique  ou  comique  serait  subtiliser  sur  la  question  ;  nous 
tenons  pour  bon  l'axiome  que  : 

Toua  les  genres  sont  bons  hors  le  genre  oinnxeiix. 

Peu  importe  dor^  qu'il  y  ait  dans  presque  toutes  les  in^ 
trigues  dnunatiqi  J  une  passion  d'amour  plus  ou  mdlns 
importante.  Noub  noterons  seulement  qu'au  xvii*  et  au 
xvin*  siècle  on  en  a  fait  abus  dans  le  tragique,  comme 
dans  le  comique;  et  que  cette  passion,  ayant  le  but  hon- 
nête du  mariage,  est  le  fond  de  toutes  les  intrigues  co- 
miques des  deux  derniers  siècles.  Les  auteurs  de  nos 
Jours,  en  voulant  sortir  du  chemin  battu,  ont  pris  le 
contre-pied,  et  mis  en  scène  des  amours  malhonnêtes,  ce 
qui  fit  plus  d'une  fois  du  théâtre  une  école  de  mauvaises 
mœurs.  Néanmoins,  comme  de  tout  effort  de  l'esprit  il 
sort  presque  toujours  un  progrès  à  côté  d'un  abus,  le  ma- 
riage n'est  plus  maintenant  le  pivot  unique  ou  principal 
Bar  lequel  tournent  toutes  les  comédies  ;  le  sujet  et  les 
intrigues  sont  pris  plus  dans  le  vrai  de  la  vie,  et  c'est  en 
cela  que  le  théâtre  du  xix*  siècle  se  distingue  de  ses  de- 
▼anders,  de  même  que  tout  le  théâtre  moderne,  depuis 
le  xvu*  siècle  surtout,  est  très-supérieur  à  celui  des  An- 
ciens, sous  le  rapport  de  l'intrigue.  G.  D— y. 

INTRODUGTEURS  DES  AMBASSADEURS.  V.  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

INTRODUCTION,  espèce  de  discours  préliminaire  mis 
an  devant  d'un  ouvrage  littéraire  ou  scientifique;  il  est 
destiné  à  faire  entrer  Te  lecteur  dans  l'esprit  qui  a  pré- 
•idé  à  la  composition  du  livre,  ou  à  lui  présenter  un  ta- 
bleau général  soit  de  l'état  antérieur  de  la  science,  soit 
des  faits  historiques,  litt^jraires  ou  autres,  dont  la  con- 
naissance préalable  lui  peut  être  utile  ou  indispenssd)le 
E'ur  bien  saisir  l'ouvraée  offert  à  sa  curiosité.  Certaines 
troductions  forment  un  véritable  livre  qui  peut  se  dé- 
tacher de  l'ouvrage  principal  :  telle  est  celle  que  Voltaire 
a  mise  en  tète  de  son  Essai  ^ur  les  moeurs  et  qu'il  a  in- 
titulée Philosophie  de  l'histoire,  et  celle  dont  Robertson 
a  fait  précéder  son  histoire  du  règne  de  Charles-Quint, 
beau  tableau  de  l'histoire  générale  de  la  civilisation  euro- 
péenne depuis  la  destruction  de  l'Empire  romain  Jusqu'au 
xvT  siècle.  —  Certains  ouvrages  isolés  ont  reçu  de  leur 
anteur  le  titre  d'Introduction;  telle  est  V Introduction  à 
la  vie  dévote,  de  S*  François  de  Sales.  P. 

niTRODucnoN,  morceau  de  musique  d'un  mouvement 
grave,  composé  d'un  petit  nombre  de  phrases,  souvent 
même  de  quelques  mesures  ou  de  quelques  accords,  et 
qni  annonce  le  premier  allegro  d'une  pièce  instrumen- 
tele.  Ainsi  9  l'ouverture  de  la  Flûte  enchantée  de  Mozart 
commence  par  une  introduction.  Quelques  compositeurs, 
donnant  plus  d'extension  et  de  mouvement  k  ce  morceau, 
loi  ont  fait  tenir  la  place  de  l'ouverture;  le  Robert  le 
Diable  de  Meyerbeer  en  fournit  un  bel  exemple.  On 
dono    aussi  le  nom  d^ Introduction  aux  morceaux  ds 


chant  qui  viennent  immédiatement  après  l'ouvertore  et 
où  se  trouve  l'exposition  du  drame  musical  :  les  Nocet 
de  Figaro  et  le  Don  Juan  de  Mozart,  la  Dame  blanche  de 
Boieldieu,  la  Gazza  ladra^  Sémiramis,  la  Cenerentola  et 
Guillaume  Tell  de  Rossini,  offrent  des  modèles  de  ces  in- 
troductions scéniques.  B. 

INTROÏT  (du  latin  introihu,  entrée),  début  de  la 
Messe,  comprenant  :  i*  un  dialogue  entre  le  célébrant  et 
le  servant  au  bas  des  degrés  de  l'autel,  dialogue  dont  les 
premiers  mots  sont  :  IntrtiKbo  ad  altare  Dei;  ^  une  an- 
tienne avec  verset  que  le  prêtre  récite  à  l'autel,  du  côté 
droit,  et  qui  annonce  le  si^et  du  mystère  et  de  la  fête 
qu'on  va  célébrer.  Dans  les  grandes  messes,  le  chœur 
chante  en  même  temps  cette  antienne,  qui  a  aussi  le 
nom  d'IntrcHt;  elle  précède  le  Kyrie»  Il  ny  a  pas  d'In- 
troït le  Samedi  saint  ni  la  veille  de  la  Pentecête,  parce 
crue,  ces  Jours-là,  dans  l'ancienne  Église,  le  peuple  était 
déjà  assemblé  depuis  longtemps  pour  le  baptême  des  ca- 
téchumènes. Pendant  longtemps  on  ne  distingua  chaque 
dimanche  de  l'année  que  par  le  premier  mot  de  llntroit 
de  ce  ]our  :  le  dimanche  de  Lœtare,  d'Oculi,  de  Quasi- 
modo^  etc.  L'usage  d'une  antienne  à  l'Introit  remonte  an 
pape  Célestin. 

INTRONATI  (Académie  des),  c-ènl.  des  hébétés,  des 
imbéciles.  Société  formée  à  Sienne  vers  1450,  dans  le  but 
de  cultiver  la  langue  italienne.  Leur  nom  était  une  anti- 
phrase, ou  marquait  le  peu  de  prétention  qu'ils  avaient 
à  l'esprit.  Il  y  eut  une  Académie  du  même  nom  à  Naples. 

INTRONISATION,  nom  donné  à  l'installation  d'un 
évêque,  parce  qu'on  le  fait  asseoir  sur  la  chaire  en  forme 
de  trône  qu'il  doit  occuper. 

INTRUSION,  en  termes  de  Droit  canoni({ue,  action 
d'usurper  une  dignité  ou  un  ollice  ecclésiastique.  Celui 
qui  s'en  rend  coupable  est  qualifié  d'intrus.  On  distingue 
trois  sortes  d'intrusion  :  la  1'*  consiste  à  se  mettre  en 
possession  d'un  bénéfice  ou  office,  sans  avoir  ni  demandé 
ni  obtenu  aucun  titre;  la  2*  à  se  mettre  en  possession 
avec  un  titre  vicieux  et  nul  ;  la  3*  à  prendre  possession 
avant  d'avoir  reçu  les  lettres  de  visa  de  l'ordinaire.  L'in- 
trusion emporte  une  incapacité  perpétuelle  de  posséder 
le  bénéfice  usurpé.  On  a  quelquefois  donné  le  nom  d'm- 
trtu,  mais  improprement,  au  bénéficier  gardant  son  bé- 
néfice après  en  avoir  encouru  la  privation. 

INTUITION  (du  latin  intueri,  regarder).  Ce  mot  eut 
d'abord  un  sens  exclusivement  religieux  :  la  théologie 
entendait  par  là  une  vue  immédiate  et  surnaturelle,  ac- 
cordée soit  aux  élus  dans  le  ciel,  soit  à  quelques  privi- 
l^és  id-bas;  c'était  un  des  effets  de  l'extase.  La  philo- 
sophie a  pris  le  même  mot  en  modifiant  sa  signification. 
Kant  nomme  intuition  }b.  perception  par  les  sens,  et  il 
distingue  les  mtuitions  pures,  comprenant  le  tem]»  et 
l'espace ,  et  les  intuitions  empiriques  ou  représentations 
sensibles.  Toute  connaissance  qui  résulte  d'une  intuition 
est  dite  intuitive,  tandis  que  celle  qui  résulte  d'un  rap- 


ligence  saisit  l'absolu.  Les  écoles  écossaise  et  français 
appellent  intuitifs  tout  Jugement  et  toute  croyance  qui  se 
présentent  spontanément  à  l'esprit,  en  appliquant  cette 
appellation  aux  résultats  donnés  par  les  sens  et  à  ceux 
produits  par  la  Raison.  R. 

INTUSIATA,  sorte  de  robe  que  les  femmes  de  Tan- 
cienne  Rome  mettaient  dans  l'intérieur  de  la  maison. 

INVALIDES,  y.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d*Histoire, 

INVENTAIRE.  Tout  commerçant  est  tenu  [Code  de  com- 
merce, art.  9)  de  faire  tous  les  ans  son  inventaire,  c-èrd. 
le  relevé  exact  de  toutes  ses  dettes  et  de  toutes  ses 
créances,  de  son  passif  et  de  son  actif,  et  d'établir  nette- 
ment par  la  balance  sa  situation  commerciale.  Il  doit 
écrire  cet  inventaire  sur  un  livre  spécial,  signé  et  para- 
phé. Il  en  est  beaucoup  qui  négligent  cette  prescription  de 
la  loi;  et  c'est  un  grand  tort,  puisque,  en  cas  de  faillite, 
des  livres  tenus  irrégulièrement  peuvent  entraîner  la 
bancperoute  simple,  et  que  l'absence  des  livres  exigés  par 
la  loi  peut  entraîner  la  banqueroute  frauduleuse  (  K.  Ban- 
queroute). L'inventaire  ne  contient  qu'un  abr^  som- 
maire de  chacun  des  chapitres  de  l'actif  et  du  passif: 
les  détails  se  trouvent  sur  les  livres.  —  On  nomme  en- 
core Inventaire  l'état  des  biens,  meubles,  titres,  papiers 
d'une  personne  ou  d'une  société.  Le  Code  Napoléon 
(art.  1414  et  suiv.)  trace  les  règles  qui  concernent  l'in- 
ventaire par  rapport  au  mariage;  le  Code  de  procédure 
(art.  928, 941-944),  celles  à  suivre  ponr  dresser  un  inven- 
taire après  décès.  Un  inventaire  est  exigé  de  la  part  de 
ceux  qui  sont  envoyés  en  possession  provisoire  des  bieot 


INV 


1,095 


ION 


^im  absent;  de  la  part  du  tuteur  à  son  entrée  en  fonc- 
tions; de  rhéritier  qui  veut  accepter  une  succession  sous 
bénéfice  dMnventaîre  ;  du  curateur  à  une  succession  va- 
cante ;  d«  Texécuteur  testamentaire  lorsquMl  y  a  des  hé- 
ritiers mineurs,  interdits  ou  absents;  de  celui  qui  est 
grevé  de  restitution  ;  de  Tusufruitier  à  son   entrée  en 
jouissance;  de  celui  qui  a  un  droit  d'usage  ou  d^babita- 
tion  à  exercer  ;  du  mari,  lorsqu'il  survient  une  succession 
aux  èpoQX  vivant  en  communauté  ;  de  la  veuve  commune 
en  bâsns  et  survivant,  qui  veut  conserver  la  faculté  de 
renoneer  k  la  communauté  ;  et  des  époux  qui  se  marient 
sans  communauté.  L'inventaire  peut  être  dressé  par  acte 
sous  seing  privé;  mais  celui  après  décès  doit  être  fait 
devant  notaire.  Les  frais  se  prélèvent  sur  les  biens  in- 
ventoriés. V.  De  Madré,  Formulais  pour  inventaires, 
1852,  in-4«. 
ofVE^rrAniB  (Bénéfice  d*}.  F.  Bâiéncs  d'inventaire. 
INVENTION,  première  partie  de  la  Rhétorique.  Elle 
eoDsiste,  dit  Cicéron,  dans  la  recherche  des  raisons  vraies 
on  vraisemblables  qui  peuvent  appuyer  la  cause.  Elle 
a  donc  pour  objet  de  trouver  les  moyens  de  convaincre  et 
de  persuader.  L'orateur  doit  chercher  d'abord  les  moyens 
de  convaincre  ;  car  il  lui  faut,  avant  tout,  établir  la  vérité 
de  son  discours  :  quand  une  fois  la  conviction  sera  passée 
dans  l'esprit  des  auditeurs,  il  s'efforcera  de  les  émouvoir,  et 
U  leur  persuadera  de  faire  ce  dont  il  les  aura  convaincus.  Il 
est  nécessaire  que  la  persuasion  repose  sur  la  conviction  ; 
car,  le  premier  entraînement  une  fois  passé,  elle  pourrait 
tomber  d'elle-même,  faute  d'un  fondement  solide,  ou 
être  détruite  par  un  discours  plus  convaincant  de  l'ad- 
fersaire.  Instruire  et  toucher  sont  donc  les  premiers  de- 
voirs de  l'orateur;  mais,  cour  y  réussir,  il  faut  qu'il 
plaise  et  ^'il  sache  se  concilier  la  confiance,  l'estime  et 
la  bienveillance  des  auditeurs.  A  ces  trois  points  :  ins- 
truire, plaire,  Umcher,  correspondent  trois  parties  de 
VlnvenUon.  On  instruit  par  les  preuves,  on  plaît  par  les 
nweurs,  on  touche  par  les  passions.  Il  nous  reste  de  Ci- 
céron deux  livres  De  VInvention. 

Les  Anciens  étudiaient  llnvention  surtout  en  vue  de 
Fart  oratoire,  et  tous  leurs  Traités  de  rhétorique  ne 
s'adressent  qu'à  l'orateur.  Mais  le  poète,  l'historien,  le 
philosophe,  tous  ceux  en  un  mot  qui  veulent  écrire,  sont 
obligés  aussi  de  chercher  d'abord  le  sujet  qu'ils  veulent 
tiiiter,  et  ensuite  la  manière  la  plus  convenable  de  com- 
moniquer  leurs  idées  à  autrui.  H.  D. 

avnrnoN  (Brevets  d'^.  V»  Brevets  d'invention. 
INV'ERSION,  disposition  des  termes  de  la  proposition, 
ou  des  membres  de  la  phrase,  dans  un  ordre  différent  de 
cdoi  qui  a  été  consacré  par  l'usage  général.  Ainsi,  en 
français,  où  il  est  de  principe  que  le  sujet  se  place 
d'abord,  puis  le  verbe,  puis  l'attribut,  et  que  la  proposi- 
tion principale  soit  suivie  des  propositions  qui  lui  sont 
subordonnées  logiquement,  il  y  aura  inversion  toutes  les 
fois  qu'il  sera  dérogé  à  cet  ordre.  C'est  en  ce  sens  que 
nous  disons  que  les  langues  anciennes  sont  des  langues 
à  inversion,  parce  que  généralement  le  verbe  y  est  placé 
h  la  fin  ;  que  les  adjectifs,  soit  attributs,  soit  qualifica- 
tifs, y  sont  plus  généralement  placés  avant  les  substan- 
tifs, et  que  les  compléments  d'un  substantif  ou  d'un 
adjectif  le  précèdent  ordinairement  au  lieu  de  le  suivre. 
Ce  n'est  pas  cependant  que  notre  langue,  surtout  en 
poésie,  ne  puisse  user  de  cette  ressource  souvent  pré- 
cieuse; ainsi  Racine  a  dit  {AthcUie,  II,  5)  : 

Dans  le  temple  des  Jtilfs  un  Instinct  in*a  pcusiie. 
Et  d'opoijer  leur  Dien  j*ai  conçn  la  pensée. 

Bans  nntf  petite  pièce  de  poésie  légère  (le  Mondam)^ 
Vohaire  a  employé  l'inversion  d'une  manière  heureuse 
pour  un  effet  imitatif  ;  voulant  parler  d'un  gourmand 
mort  d'indigestion,  il  a  dit  : 

Oppressé  fut  d'une  indigestion 


à  l'harmonie  de  la  phrase,  ou  même  à  la  clarté.  «  Restait 
cette  redoutable  infanterie  d'Espagne,  »  a  dit  Bossuet, 
qai  ailleurs  dit  encore  :  «  Aussi  vifs  étaient  les  regards, 
ausst  vite  et  impétueuse  était  l'attoflue,  ausst  fortes  et 
inîvilables  étaient  les  mains  du  prince  de  Condé.  «  — 
c  Avec  le  mot  de  gloire,  on  obtenait  tout  de  lui,  »  dit 
Voltaire  en  parlant  de  Charles  XII.  L'inversion  est  sou- 
vent commandée  dans  notre  langue  par  l'usage  :  «  Que 
mûes-^vous?  Ne  me  Vavez-^vous  pas  fait  connaître?  »  — 
Plos  une  langue  est  riche  en  inflexions  grammaticales. 


plus  elle  a  une  tendance  synthétique,  plus  aussi  elle 
peut  librement  user  de  l'inversion.  Voilà  pourquoi  le 
grec  et  le  latin  sont  des  langues  essentiellement  transpO' 
sitives.  De  là  cette  variété  presque  infinie  de  leurs  con- 
structions ;  de  là  cette  faculté  de  suivre,  dans  la  disposition 
des  éléments  de  la  phrase,  soit  l'ordre  logioue  de  la  pen- 
sée, soit  l'ordre  capricieux  de  la  passion  ;  ae  là  ces  c^ets 
merveilleux  de  style  que  nos  langues  modernes  sont 
presque  touiours  impuissantes  à  reproduire.  Mais  ce  sont 
là  surtout  des  ressources  précieuses  pour  la  poésie  et 
l'éloquence.  P. 

INVESTIGATION  (Méthode  d').  F.  Analyse. 

INVESTISSEMENT,  opération  de  siige  consistant  à  en- 
velopper de  troupes  une  place  attaquée. 

INVESTITURE.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire. 

INVIOLABILITÉ,  privilège  ou  droit  d'être  à  l'abri  de 
toute  action  violente.  Le  premier  droit  de  la  souverai- 
neté est  d'être  inviolable  ;  ce  principe  est  fondé ,  dans  les 
gouvernements  absolus,  sur  l'idée  que  le  roi  est  le  repré- 
sentant de  Dieu  sur  la  terre.  Dans  les  monarchies  consti- 
tutionnelles, l'inviolabilité  du  roi  repose  sur  ces  maximes 
d'ordre  public,  que  «  le  roi  ne  peut  mal  faire,  »  que  «  le 
roi  règne  et  ne  gouverne  pas  ;  »  mais  elle  implique  comme 
corollaire  indispensable  la  responsabilité  des  ministres. 
La  représentation  nationale  est  inviolable  au  même  titre 
que  la  souveraineté  du  peuple  :  chaque  député ,  manda- 
taire de  la  nation,  est  inviolable,  ou  du  moins  aucune 
poursuite  ne  peut  être  exercée  contre  lui ,  même  en  cas 
de  culpabilité ,  sans  l'autorisation  de  l'assemblée  dont  il 
fait  partie.  Les  ambassadeurs  sont  inviolables  de  par  le 
Droit  des  gens.  A  la  guerre,  la  personne  des  parlemen- 
taires est  inviolable.  L'inviolabilité  du  domicile  des  ci- 
toyens est  une  des  garanties  de  la  liberté  individuelle  ; 
l'autorité  publique  ne  peut  y  pénétrer  qu'après  l'accom- 
plissement des  formalités  l^ales.  L'inviolabilité  des  let- 
tres et  de  la  correspondance  privée  est  un  devoir  pour  les 
gouvernements. 

INVITATOIRE,  nom  de  l'antienne  par  laquelle  on  ré- 
pond, dans  l'Église  romaine,  au  psaume  des  Matines 
Venite  exultemus,  qui  est  une  invtUUion  à  chanter  les 
louanges  de  Dieu. 

INVOCATION  (du  latin  in,  dans,  eivocare,  appeler), 
appel  que  l'homme  adresse  à  la  divinité  ou  à  toute  autre 
puissance  supérieure.  L'Invocation  était  en  usage  chez 
les  Anciens  aans  leurs  mystères,  leurs  sacrifices,  leurs 
hymnes,  et  jusque  dans  leurs  chœurs  dramatiques.  Les 
devins  invoouaient  les  démons.  Chez  les  cnrétiens,  l'In- 
vocation de  la  S**  Vierge  et  des  Saints  est  aussi  andenne 
que  l'Église.  Dans  la  liturgie  grecque  et  orientale,  aprèe 
que  le  prêtre  a  rapporté,  dans  le  sacrifice  de  la  messe, 
les  paroles  de  J.-(!.,  il  prononce  une  prière  dite  invoca- 
tion du  S^-Esprit ,  et  que  l'on  croit  essentielle  à  la  con- 
sécration. 

INVOCATION ,  partie  du  début  d'un  poème  épique  où  le 
poète  appelle  une  divinité  qui  l'inspire.  Au  commence- 
ment de  V Iliade,  Homère  invoque  simplement  la  Muse; 
il  en  est  de  même  de  Virgile  dans  VÊnéide,  On  trouve 
de  belles  invocations  dans  les  Georgiqt^s  du  même  poète 
(à  Bacchus,  à  Cérès,  à  Neptune,  à  Minerve,  etc.),  dans 
le  poëme  De  la  nature  des  choses  par  Lucrèce  (à  Vénus), 
dans  les  Métamorphoses  d'Ovide,  etc.  On  les  comprend 
quand  on  se  rappelle  les  habitudes  de  la  religion  païenne; 
mais,  chez  les  poètes  modernes,  toutes  les  invocations  de 
ce  genre  sont  factices. 

INVOCATION ,  terme  de  Diplomatique.  F.  Diplôme. 

lOLOF  (Idiome).  F.  Wolop. 

IONIEN  (Dialecte),  un  des  quatre  principaux  dialectes 
de  l'ancienne  Grèce.  On  le  parlait  surtout  dans  les  colo- 
nies de  l'Asie  Mineure  et  les  lies  de  l'Archipel.  Il  se  divise 
en  ancien  et  en  nouveau.  Homère  et  Hésiode  ont,  en  géné- 
ral, écrit  dans  le  premier  des  deux,  qui  originairement  dif- 
férait peu  ou  point  de  l'ancien  attique.  La  mollesse  plus 
récente  de  ce  dialecte  prit  naissance  lorsque  les  Ioniens 
commencèrent  à  se  mêler  avec  d'autres  peuples  par  le 
commerce,  et  à  envoyer  des  colons  au  dehors.  Ana- 
créon,  Hécatée,  Hérodote,  Hippocrate,  Phérécyde,  Dé- 
mocrite,  en  ont  fait  usage.  Le  dialecte  ionien  était  le 
plus  doux  de  tous  les  dialectes  grecs,  à  cause  de  la  f^ 
guente  rencontre  des  voyelles,  et  de  l'absence  non  moins 
fréquente  des  aspirations.  F.  Guill.  Dindorf ,  Comment 
tat%o  de  dialecto  Berodoti  cum  dialecto  attica  vetmi 
comparata  (dans  l'Hérodote  grec -latin  de  Diflc^ 
Heyne ,  Observations  sur  V Iliade,  Raps.  vnf ,  vers  226 
et  suiv.,  Sur  la  différence  du  dialecte  ionien  ions  Homère 
et  dans  Hérodote.  P. 


ION 


1096 


IRL 


MNiiEN  (Mode) ,  un  des  modes  de  la  musique  des  an- 
dens  Grecs,  le  plus  efféminé  de  tous.  Il  était  placé  entre 
le  dorien  et  le  pjirygien.  Il  convenait  aux  fôtes  et  aux 
danses  voluptueuses.  Dans  la  suite ,  le  aystème  musical 
s*étant  étendu  k  l'aigu  et  au  grave,  il  y  eut  un  mode  Ay- 
per-ionien,  c-à-d.  ionien  aigu. 

IONIENNE  (École),  école  de  philosophie  grecque,  ainsi 
nommée  parce  que  la  plupart  des  philosophes  qui  en  fai- 
•aient  partie  étaient  nés  en  lonie.  Cette  école  chercha  à 


Ainsi,  Thaïes,  son  fondateur,  né  en  040  av.  J.-C,  partant 
d*une  observation  insuCBsante,  regarda  Teau  comme  Télé- 
ment  dont  toutes  choses  étaient  faites;  pour  Anaxi- 


se  séparant  à  beaucoup  d*égards  des  précédents,  il  faut 
dter  Heraclite,  qui  attribuait  au  feu  le  rôle  de  principe 
élémentaire.  Anaxagore,  reprenant  un  siéde  plus  tard 
l'hypothèse  d'Anaximandre,  y  ajouta  un  esprit  supérieur, 
distinct  du  chaos,  auquel  il  communiquait  te  mouvement 
et  rharmonie;  il  proclamait  ainsi  une  intelligence  di- 
vine, et  faisait  entrer  TÉcole  dans  une  voie  nouvdle.  Les 
systèmes  panthéistes  des  autres  Ioniens  étaient  indépen- 
dants des  croyances  populaires ,  sans  les  exclure  ;  celui 
d'Ânaxagore  leur  parut  hostile  ;  il  fut  poursuivi.  Peu  de 
temps  ayant  lui  avait  paru  Hermotime  de  Glazomène, 

3ui  porta  son  attention  sur  le  principe  pensant.  Les  deux 
erniers  philosophes  de  TÉcoIe  furent  Diogène  d^Apol- 
lonie,  qui  suivit  les  traces  d'Anaxagore,  et  ArchélaOs  de 
Milet,  qui  fut  un  des  maîtres  de  Socrate.  En  prenant  le 
monde  physique  pour  l'unique  objet  de  ses  spéculations, 
l'École  ionienne  s'attacha  spédalement  à  la  certitude  des 
sens;  elle  fut,  pour  cette  raison,  regardée  comme  la  pre- 
mière école  sensualiste.  V.  Tiedemann,  Premiers  pnUo- 
sophes  de  la  Grèce,  in-8S  Leipzig,  1780  (en  ail.);  Bou- 
terweck,  De  primis  phUosophorum  grœcorum  aecrelis 
physicis,  dans  les  Comtnentaires  de  la  Société  de  Gœt- 
Ungue,  1811;  Henri  Ritter,  Histoire  dj  la  philosophie 
ionienne^  in-8S  Berlin,  1821  (en  alL);  Mallet,  Histoire 
de  la  philosophie  ionienne,  in-8<*,  Paris,  1842.        R. 

IONIQUE  (Ordre),  un  des  ordres  de  l'architecture 
tf  icque.  Entre  la  mi^esté  un  peu  pesante  de  l'ordre 
ûdrique  et  rextrème  richesse  de  Tordre  corinthien.  Il 
représente  les  qualités  intermédiaires ,  la  gr&ce  et  l'élé- 
gance. Son  nom  n'implique  pas  qu'il  ait  été  inventé  en 
lonie  (on  ne  sait  qui  s'en  servit  le  premier),  mais  qu'il 
fut  particulièrement  en  faveur  dans  ce  pays.  On  en  cite 
peu  d'exemples  dans  la  Grèce  proprement  dite.  Le»  Ro- 
mains ne  l'employèrent  qu'accidentellement,  par  exemple 
au  temple  de  la  Fortune  Virile,  au  thé&tre  de  Blarcellus, 
et  aux  thermes  de  Dioclétien.  Des  savants  ont  soutenu 
que,  dans  l'origine,  l'ordre  ionique  servit  exclusivement 
pour  les  monuments  funéraires.  V,  Colonhb,  Base,  Or- 
dres, ARCHnnAVR,  Corniche. 

IONIQUE  (Pied),  pied  de  la  versification  grecque  et  la- 
tine ,  composé  de  six  temps ,  soit  deux  longues  et  deux 
brèves  (c'est  l'ionique  majeur)^  soit  deux  brèves  suivies 
de  deux  longues  (c'est  l'ionique  mineur). 

IONIQUE  (Vers),  vers  grec  et  latin,  dont  l'invention  est 
attribuée  au  poôte  Ion,  de  Chios,  et  qui  était  composé, 
en  tout  ou  en  partie,  de  pieds  ioniques,  soit  mineurs, 
soit  mineurs.  La  forme  la  plus  usitée  de  Vionique  ma- 
jeur parait  avoir  été  le  tétramètre  catalectique,  de  trois 
ionimies  et  d'un  trochée  ou  spondée  final,  la  àxsnûèm 
qrllaoe  étant  indifférente  : 

Pansa  optime,  \  divos  cole  |  si  vis  bonus  \  esse. 

Le  3*  pied  est  fréquemment  un  dichorée  ou  ditrochée  : 

Ter  corripui  terribi  \  lem  mUnû  bï  \  pennem. 

Pbtboss. 

L*ttne  des  longues,  particulièrement  la  2«  de  chaque  pied, 
le  résout  fréquemment  en  deux  brèves  : 

^sè  difmXniP  \  diuès  Hpèrïs  \  et  laboris  |  expers. 

Pladtb. 

Dans  l*ionique  suivant,  c'est  la  i'*  qui  soufl^  la  so- 
lution: 

Bèmmtà  rû  \  des  qua  puer  \  os  docent  mag  \  tstru 


On  voit  au  3*  pied  an  épitrite  second,  dans  ce  vers  d'En- 
niuB  : 

Nam  qui  lepid  \  e  postulat  \  âltèriim  frùttr  \  aru 

Le  ditrochée  se  rencontre  quelquefois  au  l*'  pied.  Planta 
a  substitué  le  molosse  à  Tionique  ou  au  ditrochée  initial. 

Quô  facto  âut  I  dicto  adest  op  |  us  quietus  \  nesiL 

Le  3*  pied  de  ce  vers  peut  être  considéré^  soit  comme 
épitrite,  soit,  en  supprimant  s  final  de  qmetus,  comme 
ditrochée.  —  On  voit  que  l'ionique  majeur  tétramètre  a 
souvent,  après  le  2*  ou  le  1*'  pied,  une  césure,  qui  pa- 
rait toutefois  n'avoir  pas  été  indispensable,  car  il  n'est 
pas  rare  de  la  voir  négligée. 

Dans  le  vers  ionique  mineur,  le  ditrochée  est  remplacé 
par  le  diiambe  (^~^~'),  qui  s'introduit  en  se  partageant 
entre  deux  pieds  consécutifs,  c-à-d.  que  si  la  derniers 
syllabe  d'un  pied  devient  ïambe,  le  pied  suivant  perd 
une  brève,  de  sorte  que  les  deux  pieds  réunis  équivalent 
effectivement  à  deux  ioniques  mineurs  purs;  en  effet, 
w  w  —  V  V  —  a  pour  équivalent  w  w  -  w  -  ^  — .  Autr^ 
ment  dit ,  lorsque  la  substitution  lambique  a  lieu,  le 
1*'  pied  devient  un  péon  3*,  et  le  suivant  un  épitrite  se- 
cond. Cette  particularité  métrique  de  l'ionique  s'appdait 
anacliue,  c-à-d.  réfraction,  repli.  On  n'en  trouve  pas 
d'exemples  dans  ce  qui  nous  reste  d'ioniques  latins.  Les 
lyriques  éoliens  paraissent  avoir  affectionné  les  ioniques 
mineurs  purs  ;  les  lyriques  d'Ionie,  ïanaclcue  iambiquf' 
les  tragiques  d'Athènes  se  rapprochent  davantage  des 
Êoliens,  les  comiques  des  lomens.  Il  y  a  des  ioniques 
mineurs  de  différentes  mesures  :  i**  des  dimètres  acata- 
lectiques  ;  2*  des  dimètres  catalectiques;  3<*  des  trimètres 
acatalectiques  et  catalectiques  ;  4**  des  tétramètres  acata- 
lectiques  et  catalectiques.  Le  dernier  pied  des  différents 
catalectiques  est  l'anapeste.  On  trouve,  mais  seulement 
dans  les  pièces  b^ntines,  lecholiambe  substitué  au 
l*'  ionique  des  tnmètres.  Les  solutions  de  longues  en 
brèves,  ou  les  contractions  des  deux  brèves  en  une  lon- 
gue, sont  bcHUicoup  moins  fréquentes  que  dans  l'ionique 
majeur.  —  Il  nous  reste  peu  de  pièces  composées  entiè- 
rement d'ioniques  mineurs.  Celle  qu'on  trouve  duis  le 
3*  Uv.  des  Odes  d'Horace  est  en  tétramètres  mêlés  de 
quelques  ^mètres.  On  trouve  chez  les  tragiques  grecs 
un  assez  grand  nombre  de  vers  ioniques  mineurs  dis- 
posés en  systèmes;  ce  sont  des  dimètres,  des  trimètres 
et  des  tétramètres  entremêlés  :  on  peut  citer  comme 
exemple  le  dernier  chœur  des  Suppliantes  d'Eschyle,  de- 
puis le  V.  1015  Jusqu'au  v.  1050.  P 

IRANIENNES  (Langues).  V.  Indo-Europ<eiines. 

IRLANDAIS  (Idiome),  un  des  idiomes  celtiques  (K.  ce 
mot)^  de  la  branche  nélique,  appelé  ErinacK  par  ceux 
qui  le  parlent,  et  Irish  par  les  Anglais.  Il  est  rempli  de 
sons  gutturaux ,  et  on  trouve  peu  de  langues  dont  l'or- 
thographe s'éloigne  autant  de  la  prononciation.  On  dit 
qu'autrefois  les  Druides  du  pajrs  l'écrivaient  au  moyen 
d'une  sorte  de  runes  qui  portait  le  nom  d'ogom,  et  se 
composait  de  petites  lignes  tracées  perpendiculairement 
ou  obliquement  à  une  longue  ligne  horizontale  qui  les 
réunissait.  Dans  les  plus  anciens  manuscrits  qui  nous 
sont  parvenus,  il  est  écrit  au  moyen  d'une  variété  parti- 
culière de  l'alphabet  latin,  dont  l'invention  est  attribua 
à  S^  Patrice.  V.  BfacCurtin,  Eléments  of  the  Irish  lan- 
guage,  Louvain,  1728,  in-S",  et  Enalish^irish  Dictùmary, 
Paris,  1732,  in-4«  ;  O'Brien ,  Irish-English  Dictionary, 
Paris,  1768,  in-4*,  et  Irish  Orammar,  Dublin  ,  1809, 
in-8®;  Vallencey,  An  Essayon  the  antiquUy  of  the  Irish 
lanauage,J)nb\in<,  1772,  et  Grammar  of  the  Ibemo-Celtie 
or  Irish lanquage,  ibid.,1782,in-8<*;  J.-J.  Marcel,  i4/p^ 
bet  irlandais^  précédé  d*une  Notice  historique,  Paris, 
1801,  in-8o  ;  O'Reilly,  Irish-English  Dictionary,  to  which 
is  anneaoed  an  Irisn  Grammar,  Dublin,  1817-22  ;  O'Do- 
novan,  Grammar  of  the  Irish  language,  Dublin,  1845. 

IRLANDAISE  (Uttérature}.  La  littérature  irlandaise 
comprend  deux  classes  distinctes  de  compositions,  les 
vieux  chants  des  bardes  païens  que  nous  a  conservés  la  . 
tradition,  et  les  œuvres  chrétiennes  des  anciens  moines. 
Quelques  chants  irlandais  remontent  trè»-probablemeat 
aux  vu*  et  vi*  siècles  ;  on  les  trouve  réunis  dans  l'impor- 
tant ouvrage  publié  par  le  D*"  O'Connor  sous  le  titre  de  : 
Rerum  hibemicarum  scriplores  veteres,  4  vol.  in-i*. 
Du  v<  au  vm*  siècle,  période  pendant  laquelle  les  pays 
du  continent  tombèrent  dans  la  barbarie ,  la  tradition 
des  lettres  latines  et  grecques  se  conserva  en  Irlande  :  il 
y  eut  à  Hy,  Lismore,  Bangor,  CHonfert,  Clonard,  Ar« 
magh,  etc.,  des  écoles  où  Ton  allait  étudier  de  toutes  lei 


IRR 


1097 


ISA 


filgloi»  Tobliies.  Les  maîtres  irlandais  se  répandirent  à 
kor  tour  lur  le  continent  :  parmi  eux  on  distingue,  aux 
n^  et  vn*  siècles,  S^  Golomban,  qui  Yisita  la  Gaule,  la 
Saine  et  la  Lombardie  ;  S^  Gall,  son  disciple;  S^  Roding, 
fondatetir  de  Beaulieu  en  Argonne;  S^  Furcy,  fondateur 
de  Lagnjr  ;  S*  Uvin,  qrni  prêcha  la  foi  chrétienne  aux  Gan- 
tois; —  au  vin*,  S^  Virgile,  qui  fut  évoque  de  Salzbourg, 
et  ses  compagnons  de  prédication  en  Bavière,  S^  Declan 
et  S*  Alto;  Dobdan,  dit  le  Grec,  évoque  de  Chiemsée;  les 
(fimmairiens  Colchut  ou  Coelchu  le  Sage,  Cruindmelus 
et  Halnchanus;  —  au  n*,  Clément,  qui  fut  appelé  à  la 
ooor  de  Charlemagne  ;  le  moine  Dicuil ,  auteur  du  De 
flWMura  orbis  terrée ,  publié  par  Walckenaér  en  1807  ; 
Qaade,  gui  a  laissé  des  gloses  sur  presque  tous  les  livres 
de  l'Écnture  sainte;  Dungal,  chargé  par  Charlema^e 
dlostmire  la  Jeunesse  de  Pavie;  Mannon  et  Jean  Scot 
Erigëoe,  qui  vinrent  en  Fhmce  à  Tépoque  de  Charles  le 
Chauve,  etc. 

IRON  (Idiome).  K.  Oss^tb. 

IRONIE  (du  grec  eironiia^  ironie  et  interrogation), 
Igore  de  Rhétorique  oui  cache  un  sens  opposé  au  sens 
propre  et  littéral,  et  qui  n^est  qu'une  contre-vérité,  comme 
dans  ces  vers  de  Gilbert  (Le  dix-huitième  siècle  )  : 

ITflbord  eomme  on  prodige  on  le  prftne  partont  : 
Il  nous  Tante  t  en  effet ,  c*e«t  nn  homme  de  goût  : 
Son  chef-d'œnTre  est  toc^oars  récrit  qnl  doit  éclore; 
On  réeite  déjà  lee  vers  qa*il  fait  encore. 

On  distingue  deux  sortes  dironie  :  Tune,  enjouée,  légère, 
qui  plaisante  avec  finesse;  l'autre,  aigre,  mordante,  qui 
répand  ramertume  et  le  fieL  En  voici  un  exemple,  pris 
de  Chamfort,  qui,  en  ce  genre,  avait  Tesprit  et  le  cœur 
mez  riches.  Il  parle  de  la  France  du  temps  de  Louis  XV  : 
■  n  y  aurait  une  manière  plaisante  de  prouver  qu'en 
France  les  philosophes  sont  les  plus  mauvais  citoyens 
âanu)nde;  la  preuve,  la  voici  :  c*est  qu'ayant  imprimé 
une  ptinde  quantité  de  vérités  importantes  dans  1  ordre 
politique  et  économique,  ayant  donné  plusieurs  conseils 
utiles,  consignés  dans  leurs  livres ,  ces  conseils  ont  été 
niTis  par  presque  tous  les  souverains  de  l'Europe, 
presque  partout,  hors  en  France;  d'où  il  suit  que  la 
prospérité  des  étrangers  augmentant  leur  puissance, 
tands  que  la  France  reste  aux  mêmes  termes,  conserve 
tes  abus,  etc.,  elle  finira  par  être  dans  l'état  d'infério- 
rité, relativement  aux  autres  puissances;  et  c'est  évidem- 
meot  la  foute  des  philosophes.  » 

Quelquefois  Tironie  est  la  dernière  ressource  de  \&  fu- 
leor  et  du  désespoir.  Oreste  apprend  qu'Hermione  n'a 
a  survivre  à  Pyrrhus,  qu'il  vient  lui-même  d'immoler  ; 

s'écrie  {Androenaque,  V,  5)  : 

Moe  anx  dleoz,  mon  malbeor  pasie  mon  eepërancet 
Oui,  Je  te  loue,  0  Ciel  I  de  ta  pcruévéranoe  1 

Et  0  termine  cette  affreuse  ironie  par  un  vers  qui  y  met 
la  comble: 

Bi  Men!  Je  meurs  content,  et  mon  lort  est  remplit 

Cest  le  sublime  de  la  rage.  —  Les  pamphlétaires  affec- 
tioDDent  particulièrement  l'ironie,  dont  ils  tirent  de 
poinants  effets  ;  mais  c'est  là  un  genre  de  mérite  qui  ne 
dénote  le  plus  souvent  qu'un  esprit  envieux ,  médisant 
et  satirique,  et  que,  sous  ce  rapport,  tout  écrivain  sérieux 
doit  généralement  sMnterdirc.  V.  Antiphrase,  Astéishe, 
CiuuesmsuE,  Cbleuasme,  Mmàse.  G.  D—y. 

laoRiB  socKATiQOE.  F.  Intkrrogatioiv  (Méthode  d'). 


e 


etp  manquent  à  ces  idiomes. 

IRRÉGUIJER ,  en  termes  de  Grammaire,  se  dît  de  ce 
qui  n'est  pas  conforme  aux  règles  établies  et  consacrées. 
Ainsi ,  en  français ,  un  nom  est  irrégulier  quant  au 
nombre,  lorsque  son  pluriel  est  terminé  par  un  x^  au 
Heu  d'un  s,  oui  est  le  véritable  signe  du  pluriel.  Il  y  a 
irrégularité  dans  la  formation  du  féminin  de  l'adjectif 
(ierf,  qui  fait  tierce  au  lieu  de  tierse,  que  demande  1  ana- 
logie. L'orthographe  du  mot  absous,  formé  du  latin  abso- 
'tUitf ,  est  irr^gulière  au  point  de  vue  de  Tétymologie  aussi 
bien  ^'aii  point  de  vue  de  l'analogie  avec  le  féminin, 
qui  fait  ahsfntte  (^abeoluta)  ;  il  en  est  de  même  de  favori . 
<iiii  devrait  s'écrire  par  un  ^.  —  La  conjugaison  française 
est  remplie  de  formes  irrégulières  :  aïod  Je  suis,  nous 
sommes,  je  sertU,  appartiennent  au  verbe  être  ;i* enverrai 
est  formé  de  envoyer.  Je  tiendrai  vient  de  tenir.  Je  c***^"^ 
rieot  do  cueMw ,  on  dit  je  Aati,  tandis  qu'on  dit  nous 


haussons  et haXr;  j'ai,  tu  as,  il  a.  Je  wsu  (autrefois  ]e 
tMu),  tu  vas,  il  va,  ne  peuvent  se  rattacher  à  aucun  para- 
digme ;  yassieds,  nous  asseyons,  assis,  ont  peu  de  rap- 
port avec  l'infinitif  asseoir,  et  le  participe  de  celui-ci  fait 
asseyant ,  lorsque  le  simple  fait  séant;  Je  puis,  tu  peux, 
Je  pourrai,  ne  rappellent  guère  au  premier  abord  1  infi« 
nitîfpotttxnr;  Je  sais  et  sachant  appartiennent  à  savoir; 
quatre  verbes,  ils  ont^  ils  sont,  ils  font,  ils  vont,  s'écar* 
tent  de  la  forme  générale  des  troisièmes  personnes  du 
pluriel ,  qui  est  ent,  Naitre  fait  né  au  participe  passé,  et 
naquis  au  passé  défini;  vivre  fit  longtemps  véquis,  auj. 
remplacé  par  vécus,  non  moins  irnîgulier,  etc.  Nous 
avons  des  pass^  définis  terminés  tantôt  en  ù,  tantôt  en 
ins,  tau  tôt  en  us,  et  des  participes  passés  sans  analogie 
avec  le  passé  défini ,  comme  Je  vins  et  venu ,  je  mounu 
et  mort.  Beaucoup  de  ces  irrégularités  s'expliquent  par 
l'existence  de  formes  anciennes,  que  le  temps  a  fait 
disparaître  :  ainsi ,  Je  cueille  suppose  une  ancienne  con- 
jugaison cueiller,  usitée  encore  dans  les  campagnes. 
D'autres  se  Justifient  étymologiquement  :  par  exemple, 
vous  faites j  vous  dites,  sont  analogues  aux  formes  la- 
tines facitts,  dicitis.  Les  irrégularités  dans  la  décli- 
naison et  dans  la  conjugaison  latines  s'expliquent  aussi , 
pour  la  plupart ,  par  des  archaïsmes  oui  se  sont  mêlés 
aux  déclinaisons  et  aux  conjugaisons  de  la  langue  une  fois 
formée,  quelquefois  par  des  syncopes  ou  des  contractions, 
par  des  permutations  de  lettres,  etc.  La  coqjugaison 
grecque,  bien  que  très-compliquée,  est  plus  régulière  et 
plus  méthodi^e. 

Quant  aux  irrégularités  de  syntaxe  et  de  construction , 
la  plupart  doivent  être  rangées  parmi  les  figures  de  gram- 
maire, telles  que  la  syllepse,  le  pléonasme,  Yellipse,  l'tti- 
version  ou  Vhyperbate,  la  suspension,  Vanacolulhe,  Vat' 
traction  (F.  ces  mots).  —  La  prosodie  et  la  versification 
sont  soumises  à  des  règles  fixes  établies  d'après  l'usage 
des  meilleurs  poètes;  les  irrégularités  qui  consistent  à 
s'en  écarter  sont  généralement  comprises  sous  le  nom  de 
licences  poétiques  (F.  Leceiige}.  —  En  général,  toute 
irrégularité  cesse  d'être  bl&maole  si  elle  contribue  à  la 
brièveté,  à  la  concision,  à  la  rapidité,  à  l'énergie  de  l'ex- 
pression ou  à  l'euphonie,  sans  répandre  sur  le  style  au- 
cune obscurité  ou  un  air  d'affectation;  ce  qui  suppose 
toujours  une  connaissance  approfondie  des  ressources  et 
du  vrai  génie  de  la  langue  dans  laquelle  on  écrit,    P. 

iRRéGuuERS  (Tons).  On  nomme  ainsi,  dans  le  plain- 
chant,  les  tons  qui  ne  se  terminent  pas  par  leur  note 
finfUe  régulière.  On  range  aussi  quelquefois  parmi  les 
tons  irréguliers  des  morceaux  de  plaln-chant  qui  ont  dû 
être  transposés  par  suite  de  la  réduction  des  douze  modes 
à  huit.  G'est'à  tort;  car,  lorsque  la  finale  se  rapporte  ré- 
gulièrement à  la  quarte  ou  k  la  quinte  normales  de  ces 
tons,  ils  ne  présentent  aucune  particularité  qui  puisse  les 
faire  classer  dans  les  tons  irréguliers.  La  transposition , 
qui  reproduit,  dans  une  autre  partie  de  l'échelle  des 
tons,  un  morceau  bien  composé ,  ne  peut  être  regardée 
comme  une  irrégularité  constitutionnelle.  F.  C. 

IRRIGATIONS.  F.  Coors  d'eao. 

ISAGOGE  (du  grec  éis,  dans,  et  agôgè,  action  de  con- 
duire), mot  d*un  emploi  assez  rare,  et  synonyme  d*/rt£ro- 
duction.  Il  a  été  appliqué  aux  interprétations  des  écrits 
logiques  d'Aristote,  particulièrement  de  VOrganon  et  des 
Catégories,  et  alors  il  signifie  éclaircissement,  com^ 
mentaire, 

ISAIE  LE  TRISTE,  un  des  romans  de  la  Table  ronde, 
composé  sans  doute  après  celui  de  Tristan  (  F.  ce  mot)^ 
auquel  il  fait  suite.  Le  nom  d'Isale  le  Triste  rappelle  ceux 
de  sa  mère  Iseult  et  de  son  père  Tristan.  Confié  après  sa 
naissance  aux  soins  d'un  saint  ermite,  Isale  est  protégé, 
au  sortir  de  l'enfance,  par  quatre  fées,  dans  lesquelles  il 
est  facile  de  reconnaître  les  quatre  vertus  morales,  la 
Prudence,  la  Force,  la  Tempérance  et  la  Justice.  Ces  fées 
lui  donnent  pour  écuyer  le  nain  Tronc,  qui  n'est  autre 
qu'Obéron,  condamné,  pour  quelques  fautes  qu'il  a  com- 
mises, à  passer  un  certain  temps  sur  la  terre  sous  une 
laide  enveloppe  :  Tronc  sera  fustigé  et  puni  toutes  les 
fois  que  son  maître  fera  une  sottise,  et  cette  invention 
donne  lieu  à  des  scènes  comiques  fort  originales.  Isale  se 
rend  à  la  cour  du  roi  Irion  :  après  avoir  séduit  la  fille  de 
ce  prince,  Bfarthe,  qui  met  au  monde  un  fils  nommé 
Marc,  il  part ,  avec  l'idée  de  faire  des  chrétiens,  mais 
fait  périr  sous  ses  coups  beaucoup  plus  d'hommes  qu'il 
n'en  baptise.  Il  a  couru  déjà  les  aventures  pendant  plu- 
sieurs années,  lorsque  50,000  Sarrasins,  embarqués  sur 
une  flotte  commandée  par  l'amiral  de  Perse,  descendent 
C-  Cr::nde-Bretagne.  Marc  taille  en  pièces  le  corps  d'In- 
I  fidèles  qui  reste  près  de  hi  flotte  pour  la  garder;  Isale  dé« 


TSL 


1098 


ISO 


Uvre  de  rinvasion  le  royaume  dlrion,  pais  il  épouse 
Marthe,  et  Tronc  reprend  sa  forme  et  sa  qualité  d'Obéron. 
ISCHIORROGIQUE  (Vers),  c-à-d.  dégingandé,  d^ 
hanche,  nom  donné  par  les  anciens  Grecs  au  cho- 
liambe  (F.  ce  mot)^  tel  gue  Templova  le  poète  Ânanius. 
D*après  les  règles  ordinaires,  les  pieds  impairs  pouvaient 
être  indifféremment  des  spondées  ou  des  iambtt  ;  Ana- 
nius se  fit  une  loi  de  mettre  partout  on  spondée  au 
l^pied. 
ISIAQUE  (Tsble).  i  V,  ces  mots  dans  notre  Diction- 
ISIS.  S    notre  de  Biographie  et  d'Histoire, 

ISLAMISME  (de  Tarabe  islam,  résignation  à  la  volonté 
de  Dieu),  nom  donné  à  la  religion  de  Mahomet.  V.  Co- 
■AN,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 
ISLANDAISE  (Lan^e),  une  des  lances  Scandinaves 

iV,  ce  mot)^  celle  qui  a  conservé  le  oueux  jusqu'à  nos 
ours  ridiome  parlé  primitivement  dans  les  trois  royaumes 
du  Nord,  et  appelé  pour  cette  raison  ancien  scai^inaioe 
ou  langue  du  Nord.  La  parenté  de  cette  langue  avec  le 
gothique  est  si  étroite»  que  les  radicaux  de  môme  signifia 
cation  présentent  le  plus  souvent  les  mêmes  consonnes, 
et  ne  diffèrent  guère  que  par  leurs  voyelles.  L'évéque 
suédois  Troll,  dans  ses  Lettres  sur  l Islande,  dit  que 
l'islandais  était  divisé  en  4  dialectes,  qui  se  distinguaient 
seulement  par  certaines  nuances  de  prononciation.  L'or- 
thographe n'était  pas  encore  bien  fixée  aux  xn*  et 
XIII*  siècles,  comme  le  prouvent  les  différences  notables 
qui  existent  dans  les  manuscrits  de  cette  époque.  Après 
la  réunion  de  l'Islande  au  Danemark  dans  les  dernières 
années  du  xiv*  siècle,  bien  des  mots  et  des  formes  du  da- 
nois pénétrèrent  dans  l'islandais,  auquel  vinrent  ensuite 
se  mêler,  par  l'effet  des  relations  commerciales  ou  intel- 
lectuelles, un  certain  nombre  de  termes  hollandais,  an- 
glais et  même  français.  Toutefois,  ces  altérations  n'ont 
guère  atteint  que  le  langage  de  la  population  des  côtes, 
et  la  vieille  langue  s'est  maintenue  presque  intacte  dans 
les  cantons  de  l'intérieur.  —  On  ne  rencontre  dans  l'is- 
landais ni  les  rudes  gutturales  de  l'allemand,  ni  les  nom- 
breuses sifflantes  de  l'anglais;  son  articulation  la  plus 
dure  est  une  h  fortement  aspirée.  Aussi  la  prononcia- 
tion est-elle  douce  et  sonore.  L'islandais  admet  les  combi- 
naisons grammaticales  les  plus  compliquées  et  de  nom- 
breuses modifications  de  mots,  ce  qui  lui  donne  une  grande 
ressemblance  avec  l'allemand.  Il  a  3  genres,  et  des  décli- 
naisons pour  les  noms  et  les  pronoms.  L'article  défini  se 
place  à  la  fin  des  substantifs.  Les  verbes  forts  ou  primitifs 
forment  leur  prétérit  par  un  changement  dans  la  voyelle  du 
radical,  et  les  verbes  faibles  ou  dérivés  par  l'addition  du 
suffixe  ta.  La  syntaxe  est  simple,  et  les  phrases  fort  courtes. 
Quand  l'introduction  du  christianisme  en  Islande,  vers 
l'an  iOOO,  y  fit  connaître  la  langue  latine,  celle-ci  donna 
bien  son  écriture  à  la  langue  nationale,  qui  Jusqu'alors  en 
avait  été  dépourvue,  mais  elle  ne  put  point  exercer  une  in- 
fluence perturbatrice  sur  un  idiome  à  qui  une  riche  litté- 
rature avait  déjà  imprimé  un  caractère  distinctif,  ni  même 
en  restreindre  l'usage.  V,  Runolph  Jona,  Grammaticœ 
islandicœ  rudimenta,  Copenhague,  1651,  iii^<*;  Gudmund 
Andréa,  Lexicon  islandicum,  publié  par  P.  Resen,  ibid., 
1683,  in-4o;  Magnus  Olafsen,  Dictionnaire  islandais^  pu- 
blié par  Ole  Vorm,  1683;  Ole  Verelius,  Dictionnaire 
islandais,  publié  par  Rudbeck,  1691  ;  Rask,  Introduction 
à  la  langue  islandaise,  en  danois,  1811,  in-8<*;  BjOm 
HaldorsOn,  Lexicon  islandicoAaiino-danicum^\%\i^  2  vol. 
tn-8*> ;  L.-€h.  MQller,  Grammaire  islandaise,  Copen- 
hague^ 1837,  in-8°;  Holmboe,  Sur  la  tangua  du  Nord, 
Vienne,  1852. 

iSLANDAisB  (Littérature).  La  poésie  fût  très-ancienne- 
ment cultivée  par  les  Islandais.  Leur  versification  repose 
tour  à  tour  sur  l'allitération,  l'assonance  et  la  rime. 
L'allitération  est  la  règle  la  plus  ancienne  et  de  l'emploi 
le  plus  fréquent  :  elle  se  fait  au  moven  de  trois  mots  com- 
mençant par  la  même  lettre,  et  oont  deux  se  trouvent 
dans  le  premier  vers  du  distique,  l'autre  conunence  le 
second  vers.  Les  anciens  Traités  de  versification  comptent 
136  variétés  de  vers,  qui  reçurent  des  noms  particuliers  ; 
mais  Rask  les  réduit  à  trois  principales,  selon  qu'on  se 
isert  de  l'allitération  seule,  ou  de  l'allitération  et  de  Taa- 
«onance,  ou  de  l'allitération  et  de  la  rime.  Dès  le  vii*  siècle, 
les  Skaldes,  poètes  guerriers  comme  étaient  les  Bardes 
ches  les  notions  celtiques,  célébraient  les  dieux  et  les 
héros  :  leurs  chants,  transmis  de  bouche  en  bouche,  ne 
Airent  fixés  par  l'écriture  qu'au  xi*  siècle,  après  la  con- 
version de  l'Islande  au  christianisme.  Bien  que  ce  soit 
principalement  aux  Islandais  que  l'on  doive  ce  qu'on  sait 
sur  les  Runes  (F.  ce  mot),  il  ne  parait  pas  que  les  inscrip- 
tions coniques  de  leur  lie  nous  aient  transmis  des  produc- 


tions de  portes.  Les  poèmes  les  plus  anciens  sont  ceux 
que  recueillit,  dit-on,  Semund  Sigfusson  au  xii*  siècle, 
et  dont  se  compose  l'ancienne  Edda(V,  ce  mot  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  &  Histoire)  :  ils  font 
bien  comprendre  tout  ce  ^u'il  y  avait  de  haute  inspira* 
tion  et  de  puissante  énerae  dans  les  anciens  temps  de  la 
Scandinavie.  Parmi  les  Skaldes  antérieurs  à  la  prédica- 
tion de  l'Évangile,  on  cite  Thorwald  Hialteson,  Inguna 
Seimund,  Erpur  Luitand,  Brage,  Thiodolf  de  Hvin,  Tbor- 
bi&m  Homklofi,  Einar  Skalagmann,  Thorluf,  Egill  Ska- 
lagrimsson,  et  Eyvind,  surnommé  SkaldaspiUr  (des- 
tructeur drâ  Skaldes,  parce  qu'il  les  surpassa  tous).  A 
partir  du  xi*  siècle,  la  poésie  dé^néra  pour  le  fond  et 
pour  la  forme  :  la  simplicité  antique  fit  place  à  la  re- 
cherche ;  les  Skaldes  mirent  leur  gloire  à  vaincre  dans  la 
versification  les  plus  grandes  difficultés  possibles;  ils 
visèrent  à  un  style  pompeux,  et  ne  produisirent  plus  que 
des  compositions  ampoulées  ;  au  lieu  de  chants  épiques 
ou  religieux,  on  eut  surtout  des  œuvres  gnomiques,  des 
proverbes  et  des  sentences.  Il  en  fut  ainsi  jusqu'au  milieu 
du  xm*  siècle,  époque  où  les  Skaldes,  cessant  d*être  prê- 
tées et  favorisés  comme  poètes  de  cour,  ne  tardèrent 
pas  à  disparaître.  Ce  fut  le  temps  où  Snorre  Sturleson 
recueillit  les  légendes  historiques  en  prose,  les  traités  de 
grammaire,  de  rhétorique  et  de  poésie,  qui  composent  la 
seconde  Edda,  et  où  commença  une  poésie  ecclésiastique 
et  chrétienne,  consistant  en  hymnes  et  en  imitations 
d'histoires  bibliques  et  de  légendes  de  Saints. 

La  prose  date  en  Islande  du  commencement  du  xn*  siècle. 
Ari  le  Sage  écrivit  alors  VIslendigabok  (  livre  des  Islaa 
dais),  histoire  rapide  du  pays,  qui  s'arrête  vers  l'an  1120, 
et  commença  le  Landnamabok  (livre  de  la  prise  de  posses- 
sion du  pays),  ouvrage  plus  complet ,  terminé  dans  la  se- 
conde moitié  du  xin*  siècle  par  Sturle  Thordsson.  Au  xn* 
appartiennent  également  :  1^  le  Konungsskuggssaia  (Sfi- 
roir  du  roi  ),  collection  de  notices  relatives  à  l'histoire 
naturelle  et  à  la  géographie,  et  de  règles  pour  vivre  à  la 
cour  ;  2°  le  code  connu  sous  le  nom  de  Gragas,  formé  avec 
les  tiisditions  du  Droit  ancien ,  à  la  demande  du  légiste 
Bergthor,  et  dont  on  a  une  édition  par  SveinbJOmsen  en 
1829;  Z^  le  Kristinrettr,  qui  est  le  Droit  canon  chrétien, 
composé  par  l'évêque  Thorlak  en  1123,  et  publié  par 
Thorkelin  en  1755.  Une  source  non  moins  précieuse  de 
l'ancienne  histoire  de  la  Scandinavie,  ce  sont  les  Sagas 
(traditions  verbales),  récits  en  vers  ou  en  prose,  com- 
posés aux  xm*,  xiv«  et  xv*  siècles,  et  dans  lesquels  sont 
célébra  les  faits  d'armes  des  antiques  héros,  les  exploits 
des  rois  et  des  familles  illustres.  Enfin,  indépendamment 
des  traditions  indigènes,  la  littérature  islandaise  s'enri- 
chit, par  des  traductions  ou  des  imitations,  d'un  grand 
nombre  de  légendes  des  pays  méridionaux,  telles  que 
celles  d'Arthur,  de  Merlin,  de  Tristan,  d'Alexandre,  de 
Charlemagne,  etc. 

Depuis  la  réunion  de  l'Islande  an  Danemark  en  1397, 
l'esprit  littéraire  s'est  affaibli.  La  première  traduction 
islandaise  de  la  Bible  a  été  l'ouvrage  d'un  évêaue  d'Hol- 
lum ,  Gudbrand  ThorlaksOn,  qui  l'acheva  oq  1584.  Hai- 
çrim  PeterssSn  rima  des  Psaumes,  qui  sont  devenus  la 
lecture  habituelle  du  peuple.  Au  xvin*  siècle,  Torfeos 
s'est  fait  une  réputation  européenne  par  sa  Chrontque  de 
Norvège  et  sa  Chronologie  des  rois  de  Daïiemark;  Ame 
Magnussen  a  révélé  au  monde  littéraire  les  anciens  mo- 
numents poétiques  et  historiques  de  son  pays;  Finnsen  s 
écrit  son  Histoire  ecclésiastique  d'Islande,  Psrmi  les 
œuvres  poéticnies  du  même  siècle,  on  peut  dter  des  tra- 
ductions de  VOdyssée  par  SveinbJOrn  EgilssOn,du  Paradis 
perdu  et  de  la  Messuxde  par  le  curé  ThorlaksSn ,  et  on 
poème  sur  la  vie  champêtre  (  Bunadarbalkr)  par  Eggert 
OlafsOn.  De  nos  Jours,  Bénédict  GrOndall  et  Thorareoseo 
se  sont  montrés  véritablement  poètes.  V,  Halfdan  Einard- 
sOn,  Histoire  littéraire  de  VIslande,  Leipzig,  1786;  Lind- 
fors.  Essai  sur  la  littérature  islandaise,  Lund,  1824, 
in-8°;  Legis,  Mines  du  Nord  ancien,  en  allem.,  Leipzig, 
1829  ;  Bersmann,  Poëmes  islandais,  Paris,  1838  ;  Schlozer, 
Histoire  de  la  littérature  islandaîse,  en  allem.;  Grsberg 
de  HensO,  Essai  sur  les  Skaldes;  Edélestand  du  Méril, 
Prolégomènes  à  Vhistoire  de  la  poésie  Scandinave,  Paris, 
1839;  Marmier,  Lettres  sur  VIslande, 

ISOCHROMIE  (du  grec  isos,  égal,  et  chroma,  couleur)» 
mot  employé  quelquefois  comme  synonyme  de  lithochro» 
mie  (V,  ce  mot). 

ISODOMON.  V.  Appasbil. 

ISOGRAPHIE  (du  grec  isos.  égal ,  pareil ,  et  graphéiïï, 
écrire),  se  dit,  1**  de  la  reproduction  des  écritures,  2^  de 
tout  recueil  de  fac-similé  ou  d'autographes. 

ISON  (Chant  en).  V.  Chant  gv  ison. 


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BOBÊ  LE  SAUVAGE,  roman  carloyingien  attribué  à 
Jtto  de  BapttQiae.  Isorô  est  un  fidèle  et  habile  conseiller 
mie  Gbarleoiagne  a  placé  auprès  de  son  neveu  Anséis  de 
CirthagB,  roi  d'Espagne.  Obliigé  de  faire  un  vojrage  loin- 
tun  pour  le  senrice  de  son  maître,  il  lui  fait  jurer  de  res- 
pecter sa  fille  pendant  son  absence  :  Anséis  viole  son  ser- 
ment sans  le  savoir,  et  Isoré  se  venge  en  appelant  les 
Haies  en  Espagne.  Les  chrétiens,  tant6t  vainqueurs, 
tiirtôt  vaincas,  finissent  par  exterminer  les  ennemis, 
ptoe  à  lintervention  de  Gharlemagne.  Anséis  épousa 
Gndiae ,  fille  du  roi  des  Mores.  —  La  Bibliothèque  na- 
uanale  de  Paris  possède  deux  manuscrits  de  ce  poème, 
l'on  de  Jean  du  Ryer,  Tautre  de  Jean  Le  Chat  de  Bo- 
logne. F.  Histoire  littéraire  de  la  France,  tom.  xn.  H.  D. 

ISSANT,  en  termes  de  Blason,  se  dit  d*un  animai  dont 
on  ne  voit  que  la  partie  supérieure,  qui  semble  issir  ou 
sortir  d^une  pièce  de  Técu. 

ISSOUŒ  (Église  d*),  département  du  Puy-de-Dôme, 
an  des  plua  beaux  exemples  du  style  roman  qu*il  y  ait  en 
fnoce.  Cette  église,  qui  faisait  partie  du  monastère  de 
S*-Au8tremoine,  date  du  commencement  du  x*  siècle, 
sauf  les  voAtes  de  la  grande  nef,  qui  sont  ogivales  et 
appartiennent  an  xn*  siècle.  La  construction  est  très-ré- 
gnllère  à  l'extéiieur  ;  mais  le  travail  intérieur  présente  de 
grandes  négligences:  ainsi,  les  colonnes  ont  des  dia- 
mètres différents  et  sont  d'in^Ies  hauteurs.  Les  pare- 
ments sont  apparents,  et  les  Joints,  garnis,  accusent  net- 
tement la  forme  du  moellon.  Les  matériaux  employés 
sont  le  grès  à  gros  grain  pour  les  masses,  et  le  grés  cal- 
caire pour  les  ornements  ;  les  mosaïques  de  Textérieur 
sont  fiiitea  avec  des  scories  rouges  et  noires.  L^édifice  a 
nne  ciypte  qui  présente  un  modèle  curieux  de  chapelles 
rayonnantes.  V.  Taylor,  Voyages  pittoresq^es  en  France: 
Maliej,  Essai  sur  l'architecture  des  églises  romanes  et 
nmumo-t>ysantines  du  Puy-de-Dâme,  in-fol. 

ISTHMIQUES,  titre  de  Tun  des  quatre  livres  d*odes 
triomphales  que  Pindare  nous  a  laissées.  Les  Istkmiqiies 
chantent  les  vainqueurs  des  Jeux  célébrés  en  Fhonneur 
àe  Neptune  sur  Tisthme  de  Corinthe. 

ITALIANISME,  manière  de  parler  propre  à  la  langue 
italienne;  tour  italien,  expression  italienne  transportée 
dans  une  autre  langue. 

ITALIE  (  Architecture  en  ].  L*art  italien  ne  date  que  de 
la  fin  dn  iv*  siècle  de  Tère  chrétienne  :  c*est  le  moment 
où  s'écroule  la  puissance  romaine,  et  où  le  christianisme, 
devenu  la  religion  dominante,  ouvre  aux  artistes  des 
seorces  nouvelles  d*inspiration.  Les  monuments  de  Tan- 
tiqnité  sont  encore  debout,  comme  autant  d'exemples 
vivants,  et  lea  traditions  de  Tart  païen  se  perpétuent  tou- 
jours dans  lea  écoles  :  mais  le  goût,  perverti  par  un  long 
commeroe  arec  TOrient,  méconnaît  les  règles  sévères  du 
ample  et  du  beau;  on  travaille  hâtivement  en  vue  du 
lucre,  sans  études  lentes  et  profondes;  les  exigences  du 
Inxe,  aussi  bien  que  le  dérèglement  des  imaginations, 
prodtoisent  une  exubérance  de  détails  et  d'ornements 
soos  lesc^els  les  grandes  formes  disparaissent.  Les  mo- 
dèlea  antiques  vont  périr,  en  même  temps  que  les  vrais 
principea.  Déjà,  au  temps  de  Théodose,  il  ne  reste  plus  à 
Rome  que  le  naptistère  de  SMean-de-Latran  et  le  mau- 
solée de  S^*  Constance  qui  remontent  k  Constantin;  il 
faudrait  réédifier  la  plupart  des  monuments,  dégradés  ou 
abattus;  mais  les  premiers  empereurs  chrétiens,  non 
moins  que  les  Barbares  venus  de  la  Germanie  au  v*  siècle, 
pooranivent  l'œuvre  de  destruction  :  Constantin,  Théo- 
dose,  Honorius,  ferment  ou  ruinent  les  édifices  consa- 
crés au  paganisme. 

Sortie  des  Catacombes,  où  la  persécution  l'avait  con- 
trainte de  chercher  un  asile,  la  religion  nouvelle  ne  pou- 
vait d*an  seul  coup  enfanter  un  art  nouveau.  Elle  com- 
mença par  approprier  à  ses  besoins  quelques-uns  des 
monuments  encore  existants  :  les  basiliaues  romaines 
furent  converties  en  temples  chrétiens  (  K.  Basiuqdb), 
et,  jmqu'au  dl*  siècle,  ce  fut  leur  plan  qu'on  adopta  pour 
la  construction  de  toutes  les  églises  de  TOcddent.  Con- 
stantin avait  fait  élever  à  Rome,  avec  les  colonnes  et  les 
dâiris  d»  monuments  païens,  les  basiliques  du  Sauveur 
on  de  SWean-de-Latran,  de  S*-Pierre,  de  S^-Paul-hors- 
les^murs,  de  S^-Groix,  de  S'-André,  de  S*"-Açnès,  de 
6^-Laurent,  des  SS.-Marcellin-et-Pierre;  ces  églises  pri- 
mitives, oeuvres  h&tives  d'un  art  fort  imparfait,  durent 
être  reconstruites  par  Théodose  ou  par  les  papes  des  v< 
et  v]«  siècles.  Puis  on  bAtit  S**-Biarie-Majeure,  S'*-Agathe, 
S**-Bibiane,  S^Pierre-ès-liens,  S^-Pancrace,  S^"-Puden- 
tienne,  S<«-Sabine,  S*«-Praxède,  S'-Sylvestre,  S**-Blarie- 
Araceli ,  S**-Marie-in-Gosmedin«  S^*-Marie-in-Trastevere, 
Smiéoieat ,  toutes  imitations  de  la  basilique.  Sous  Va- 


lentinien  III ,  la  ville  de  Ravenne,  où  résidèrent  la  plu- 
part des  empereurs  d'Occident,  vit  s'élever  la  basilique 
Mineure,  S^'-Anithe,  S^-François,  S^-Jean,  la  chapelle  sé- 
pulcrale des  SS.-Nazaire-et-Celse.  Les  seules  modifica- 
tions graves  que  l'on  apporta  au  style  de  l'architecture 
furent:  1<»  la  substitution  de  l'arcade  à  l'architrave  qui 
régnait  précédemment  sur  les  colonnes  ;  2^  l'allongement 
de  la  partie  transversale  de  la  basilique,  de  manière  à 
figurer  la  croix;  3°  hi  construction,  en  dehors  et  tout 
près  de  la  basilique,  d'un  baptistère  (F.  ce  mot)  où  l'on 
conféra  le  baptême. 

Les  mêmes  règles  architecturales  furent  suivies  pen- 
dant la  domination  des  Ostrogoths.  Le  grand  Théodoric, 
élevé  à  Byzance,  où  il  avait  pris  le  goût  des  arts,  fit  b&tir 
à  Ravenne  la  basilique  de  S^-Apollinaire,  celle  d'Hercule, 
S^-Théodore,  le  baj^stère  de  Santar-liaria-in-Cosmedin, 
un  palais,  et  un  mausolée  dont  la  coupole  était  creusée 
dans  une  seule  pierre  d'Istrie,  et  qui  parait  être  aujour- 
d'hui l'église  de  Santa-Maria-della-Rotonda.  Symmaqua 
nous  a  conservé  le  nom  de  l'architecte  Daniel ,  qui  con- 
struisit ces  monuments.  Un  autre  architecte,  Alolsius, 
fut  chargé  de  restaurer  les  édifices  de  Rome.  Beaucoup 
d'églises,  de  palais,  de  bains,  s'élevèrent  à  Pavie,  à  Monza, 
à  Naples.  Lorsque  Cassiodore,  l'un  des  ministres  de  Théo- 
doric, se  retira  du  monde,  il  fonda  la  célèbre  abbaye  du 
Mont-Cassin.  Amalasonthe,  fille  de  Théodoric,  continua 
à  orner  Ravenne  :  à  son  règne  appartiennent  l'église  de 
S*-Vital  et  le  baptistère  de  S*-Jean,  construits  duis  le 
style  byzantin  {JT,  ce  mot\  dont  ils  sont  les  seuls  monu- 
ments purs  en  Italie,  car  la  basilique  latine  resta  le  type 
universellement  adopté.  Toutefois  la  coupole  byzantine 
(  y.  Coupole)  demeura  accpise  à  réalise  chrétienne,  et 
s'éleva,  dans  la  suite,  du  milieu  de  la  nasilique. 

Bien  qu'on  emploie  dans  l'histoire  des  arts  la  dénomi- 
nation de  style  lombard,  les  Lombards,  qui  occupèrent 
l'Italie  septentrionale  de  568  à  774,  n'eurent  pas  un  style 
d'architecture  qui  leur  fût  propre.  Venus  des  forêts  de  la 
Germanie,  ignorant  les  premiers  éléments  de  la  con- 
struction, ils  ne  purent  qu'adopter  l'art  des  vaincus, 
c.-JMi.  l'art  romain  dégénéré.  Les  monuments,  d'ailleurs 
assez  rares,  de  cette  période  se  reconnaissent  à  leurs 
formes  courtes  et  trapues,  aux  colonnes  basses  reposant 
sur  un  simple  bloc  de  pierre,  aux  chapiteaux  coniques  et 
ornés  de  feuillages  ou  d'animaux,  aux  voûtes  en  maçon- 
nerie remplaçant  les  toits  de  charpente,  à  une  grossière 
ornementation  de  colonnades  et  d'arcs  engagés  dans  le 
mur,  aux  cordons  qui  marquent  extérieurement  les  étages, 
aux  fenêtres  étroites  comme  des  meurtrières.  On  voit 
dans  les  lois  lombardes  que  la  ville  de  Côme  fournit 
alors  les  meilleurs  architectes  et  tailleurs  de  pierre. 

Jusqu'au  xi*  siècle,  soit  effet  de  l'habitude,  soit  ini- 
mitié contre  les  Grecs,  soit  rigidité  des  papes  à  ne  pas 
laisser  altérer  sensiblement  le  type  primitif  de  la  basi- 
lique, les  Italiens  s'en  étaient  tenus  au  st^le  latin.  Mais 
les  relations  commerciales  d'Amalfi,  de  Pise,  de  Gènes, 
d' Aucune  et  de  Venise  avec  l'empire  d'Orient  amenèrent 
une  alliance  de  l'élément  latin  et  de  l'élément  byzantin, 
d'où  rteulta  un  nouveau  style,  appelé  roman^  romanO' 
byzantin,  et  quelquefois  lombard  de  la  seconde  époque» 
Par  le  contact  de  l'Europe  avec  l'Asie  pendant  les  Croi- 
sades, le  nouveau  style,  surtout  à  Venise  et  en  Sicile,  reçut 
l'empreinte  du  fantastique  et  du  merveilleux  oriental, 
visible  principalement  dans  l'ornementation.  Entre  autres 
changements  survenus  dans  l'architecture,  on  prolongea 
de  plus  en  plus  la  partie  transversale  qui  formait  la  croix 
latine,  et  on  en  garnit  de  chapelles  les  extrémités;  l'ab- 
side fut  agrandie,  et  le  chœur  plus  ou  moins  exhaussé 
au-dessus  de  l'élise;  la  crypte  ou  confession,  dans  la- 
quelle on  déposait  les  reliques,  s'agrandit  et  devint  une 
{>etite  ^lise  souterraine  ;  lea  ailes  de  la  basilique,  pro- 
ongées  au  delà  du  transept,  prirent  la  forme  absidale; 
une  coupole  s'éleva  au  point  d'intersection  de  la  nef  prin- 
cipale et  des  transepts;  les  plafonds  en  solives  horizon- 
tales firent  place  aux  plafonds  voûtés  en  bois  ou  à  des 
voûtes  d'arête;  des  piliers,  souvent  avec  des  colonnettes 
engagées,  se  substituèrent  généralement  aux  colonnes; 
les  formes  de  leurs  chapiteaux  varièrent  à  l'infini ,  et  les 
socles  s'élevèrent  sensiblement  ;  on  fit  les  fenêtres  plus 
nombreuses,  plus  ouvertes,  et  souvent  géminées;  les 
portes  furent  décorées  de  sculptures,  et  précédées  de 
porches  à  Jour;  des  clochers  surmontèrent  les  édifices  de 
moindbre  importance,  tandis  que  les  dômes  ou  cathédrales 
conservèrent,  comme  par  le  passé,  des  campaniles  isolés; 
les  arcatures  ou  arcades  simulées  ne  servirent  plus  seu- 
lement à  marquer  les  étages  sur  les  murs  extérieurs,  on 
les  prodigua  sans  raison  ;  la  façade  principale  s'orna  d'une 


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rose  ou  roue,  yaste  fenêtre  dicalaire;  les  égUses  prenant 
de  jour  en  ]our  plus  d^élévation,  on  en  soutint  les  mu- 
railles par  des  contre-forts  extérieurs;  les  pierres  de  dif- 
Cérentes  couleurs  employées  dans  la  construction,  le  mé- 
lange et  les  combinaisons  de  la  pierre  et  de  la  bricme, 
Srésentèrent  à  l*œil  une  diversité  agréable.  Au  nombre 
es  monuments  de  cette  période ,  qui  s*étend  jusqu'au 
xin* siècle,  on  peut  citer  S'-Ambroise  de  Milan,  S'-Zénon, 
5^-Fermo,  et  S^Antoine  de  Vérone,  S^-Étienne  de  Bologne, 
S*-Giriaque  et  S^«-Marie  d'Ancône,  S^*-Marie  de  Monza, 
les  Dômes  de  Parme,  de  Plaisance,  de  Modène,  de  Gôme, 
de  Mantoue,  de  Crémone,  de  Ferrare,  de  Pise,  etc.,  les 
Eremitani  de  Padoue,  S^Michel  de  Pavie,  S^-Michel  de 
Florence,  S^«-Marie  de  Bergame,  les  éslises  S^«-Marie- 
Uajeure,  SWean  et  S*-Paul,  S^*-Françoise  à  Rome,  etc. 
--^s  doltres  annexés  aux  monastères  datent  aussi  do 
cette  époque.  Les  plus  remarquables  sont  ceux  de  S^ean 
de  Latran  et  de  S'-Paul  à  Rome,  de  S^Zénon  à  Vérone, 
de  Subiaco,  etc. 

L'architecture  civile  suivit  le  mouvement  de  Tarehitec- 
lure  relideuse.  Dans  toutes  les  villes  s'élevèrent  des  pa- 
lais publics,  dans  lesquels  on  retrouve  des  principes  com- 
muns de  construction  :  c'est  un  carré  enveloppant  une 
cour  intérieure,  et  dont  un  portique  forme  le  rez-de- 
chaussée;  au-dessus  sont  les  salles  aassemblée,  éclairées 
par  de  vastes  fenêtres  ;  des  statues  ornent  ordinairement 
les  façades.  Les  rivalités  des  villes  entre  elles  ou  des 
partis  dans  une  même  ville  engendrant  des  luttes  fîré- 
qruentes,  les  édifices  municipaux  et  même  les  hôtels  des 
nches  citoyens  sont  fortifiés,  crénelés,  de  manière  à  pou- 
voir soutenir  un  siège.  Tels  sont  les  vieux  palais  de  Flo- 
rence, de  Vérone,  de  Vicence,  le  palais  ducal  de  Ferrare, 
le  palais  d'Eccelin  à  Padoue,  le  ch&teau  Délie  Torri  à 
Turin. 

Malgré  la  multitude  des  monuments  élevés  en  Italie 
pendant  la  période  romane,  c'est  à  peine  si  quelques 
noms  d'arohitectes  sont  arrivés  jusqu'à  nous.  A  Inse, 
Buschêtto  fit  le  Dôme,  DiotiscUvi  le  baptistère,  Bonanno 
la  Tour  penchée  ;  Nicolas  et  André  b&tirent  S^-Bfichel- 
in-Borgo,  le  Campo-Santo,  et  le  campanile  de  S*-Nicolas. 
On  doit  encore  à  Nicolas  le  palais  des  Anziani  à  Pise,  la 
Trinité  à  Florence,  et  S*-Antoine  de  Padoue.  Giudêtto 
éleva  la  façade  de  S*-Martin  à  Lucques;  Marchione 
SAresso,  les  cathédrales  de  Pistoia  et  de  Volterra,  la 
Pièvc  d'Arezzo,  et  la  tour  des  Conti  à  Rome  ;  Egidio  de 
Milan,  le  palais  d'Eccelin  ;  Leonardo  Boccalecca,  le  Sa- 
loue  ou  palais  communal  de  Padoue  ;  Lorenzo  Mastani , 
le  Dôme  d'Orvieto;  Augustin  et  Agnolo  de  Sienne,  le  pa- 
lais de  cette  ville;  frère  Ristoro  de  Cambio,  l'église 
S^«-Marie-Nouvelle  à  Florence;  Amolfo  d%  Lapo,  la  ca- 
thédrale, et  frère  Jean,  le  pont  de  la  Carraja,  dans  la 
même  ville.  A  Rome,  on  remarqua  la  famille  des  CoS' 
mates,  ainsi  appelés  de  leur  chef  Cosma,  et  qui ,  très-ha- 
biles dans  l'art  des  incrustations  en  mosaïque,  furent 
aussi  les  architectes  des  ambons  de  S*-Laurent,  de  S^*- 
Marie-Araceli  et  de  S*-Gésaire,  du  cloître  de  Subiaco,  et 
du  portique  de  la  cathédrale  de  Civita-Castellana.  Deux 
de  leurs  élèves,  Pierre  et  Jean,  construisirent  les  cloîtres 
de  S'-Jean  de  Latran  et  de  S*-Paul  à  Rome. 

A  partir  de  la  fin  du  xiii*  siècle,  on  voit  paraître  un 
nouveau  style,  le  style  ogival ,  que  les  Italiens  appelèrent 
gothique  ou  allemand,  et  même  barbare,  parce  qu'il  fut 
importé  chez  eux  par  des  Allemands,  liais  il  est  plutôt 
employé  comme  ornementation  que  comme  système  ar^ 
chitectural.  Tandis  que  les  façades  et  les  portails  afiTectent 
la  forme  ogivale  et  s'ornent  ouelquefois  de  clochetons,  on 
conserve  à  l'intérieur  des  églises  l'are  à  plein  cintre,  les 
voûtes  d'arête,  les  colonnes  rondes,  les  chapiteaux,  les 
corniches,  etc.;  la  coupole  octogone  ne  se  laisse  pas  sup- 
planter par  le  clocher  et  la  flèche.  Les  architectes  italiens 
repoussent  cette  exubérance  d'aiguilles  et  d'ornements  à 
Jour,  qui  plaisaient  aux  artistes  des  autres  pays;  en  em- 
ployant les  formes  ogivales,  ils  cèdent  à  une  mode  pas- 
sagère, à  un  goût  étranger.  Deux  édifices  seulement  ont 
été  conçus  et  exécutés  dans  le  style  purement  ogival, 
l'église  supérieure  de  S^François  à  Assise  et  le  Dôme  de 
Milan  ;  et  tous  deux  sont  attribués  à  des  architectes  alle- 
mands, maître  Jacob  et  Henri  de  Galmodia.  On  trouve  le 
«tyle  ogival  simplement  mélangé  avec  le  style  roman  h 
S'-Pétrone  de  Bologne,  au  Campo-Santo  et  a  S^-Marie- 
deilu-Spina  de  Pise,  à  S^'-Anastasie  et  au  Dôme  de  Vé- 
rone, à  S*-Antoine  de  Padoue,  aux  Dômes  de  Florence, 
d'Arezzo,  de  Sienne  et  d'Orvieto,  à  SWean  de  Napies,  etc. 
Giotto,  plus  connu  comme  peintre,  éleva  le  campanile  de 
Florence  ;  André  Orcagna  fut  l'arehitecte  de  la  Loggia  dei 
tanii  de  la  même  ville. 


Avec  le  xv«  siècle  commence  un  âge  nouveau  pour  l'ait 
italien,  qui  rompt  les  entraves  dans  lesquelles  récole  ro- 
mano-byzantine  tendait  à  l'immobiliser.  Les  modèles  an- 
tiques échappés  aux  ravages  des  hommes  et  du  temps 
sont  étudiés  avec  passion.  Dans  cette  période  qui  a  reçu 
te  nom  de  Renaissance,  on  ne  pouvait  adopter  les  divi- 
sions, les  dispositions  architectoniques  des  édifices  gréoo- 
romains,  puisque  le  plan  des  monuments  modernes  était 
résulté  de  besoins  inconnus  aux  sociétés  pafennes  ;  mail 
on  revint  à  l'antiquité  pour  les  proportions,  les  profils  et 
la  d^ration.  Le  style  de  la  Renaissance  fut  moins  un 
système  nouveau  d'architecture  qu'un  mode  de  revête- 
ment et  d'ornementation.  Brunelleschi ,  de  Florence,  en 
fut  le  promoteur;  on  lui  doit  la  coupole  de  la  cathé- 
drale de  Florence,  les  églises  du  S*-Esprit  et  de  S^Lau- 
rent,  le  palais  Pitti,  dans  la  même  ville.  L'alliance  de 
l'art  antique  et  du  style  roman ,  quelquefois  aussi  de 
l'ogive,  qui  distingue  les  œuvres  de  ce  fjnné  architecte, 
caractérise  aussi  les  travaux  de  ses  élèves  et  de  ses  imi- 
tateurs :  tels  sont  les  palais  Ricardi ,  Tomabuoni  et  Gafa- 
reçsi  à  Florence,  et  le  ch&teau  de  la  Faggiuola,  par 
Michelozzo  Michelozzi  ;  le  palais  Strozzi  à  Florence,  par 
Benoit  Majano  et  Gronaca;  les  palais  élevés  à  Sienne  et  à 
(Irbin  par  François  di  Giorgio  et  par  Rosellini  ;  les  églises 
de  S*-Aueustin  et  de  S^'-Mariendu-Peuple  à  Rome,  par 
Pintelli  ;  les  portiques  intérieure  du  palais  dit  de  Venue, 
dans  la  même  ville,  par  Julien  Majano;  le  grand  hôpital 
de  Milan ,  par  Antoine  Filarète.  Miéds  l'arrivée  des  Grecs 
fugitifo  de  Gonstantinople,  en  1453,  donna  une  nouvelle 
force  au  goût  de  l'antique,  et  l'on  ne  tarda  pas  à  voir  dis- 
paraître les  dernières  traces  des  styles  du  moyen  àg% 
Vers  la  même  époque  on  retrouva  les  livres  de  Vitruve, 
oui,  étudiés  et  commentés,  derinrent  l'unique  code  de 
1  arohitecture.  Albert!  écrivit  son  grand  ouvrage  De  re 
œdificatoriâ,  d'après  les  préceptes  de  l'auteur  latin,  qnH 
mit  en  pratique  dans  le  palais  Ruccellai  et  le  chœur  de 
l'Annonciade  à  Florence,  dans  les  églises  de  S^-André  à 
Mantoue  et  de  S*-François  à  Rimini. 

De  la  Toscane  le  style  de  la  Renaissance  se  répandit 
partout.  A  Venise,  où  les  monuments  de  style  byzantin 
s'étaient  couverts  d'ornements  dans  le  goût  oriental ,  ' 'ait 
antique  ne  put  pas  conserver  non  plus  la  simplicité  et  la 
pureté  de  ses  lignes,  et  les  œuvres  conçues  d'après  ses 
principes  ofirirent  éealement  une  grande  richesse  déco- 
rative. L'imitation  de  l'antique,  qui  n'était  pas  encore 
très- sensible  et  n'étouffait  pas  l'originalité  dans  les 
œuvres  de  Giov.  Giocondo,  est  manifeste  dans  les  con- 
structions dirigé^  par  une  célèbre  famille  d'architectes, 
les  Lombard!  :  Pierre  Lombardi  élève  S^"-Marie-des-Hi- 
racles,  S^*-Marie-Mère-de-Dieu ,  les  palais  Contarini, 
Vendramin  et  Corner,  les  monuments  Zeno  et  Mocenigo; 
Martin  Lombardi  fait  la  scuola  de  S^-Marc  et  la  façade 
de  S*-Zacharie;  More  Lombardi,  l'église  S^Michel  de 
Murano.  A  la  même  école  appartiennent  Barthélémy 
Buono,  qui  éleva  les  Procurattes  vieilles;  Bergamasco, 
architecte  de  la  chapelle  Émilienne  et  du  palais  des  Ca- 
merlingues; Riccio,  qui  fit  l'escalier  des  Géants,  et  la  fa- 
çade intérieure  du  palais  des  Doges;  Scarpagnino,  auteur 
de  la  façade  de  l'école  S^Roch.  —  Une  protestation  vive 
contre  ce  luxe  d'ornementation  de  l'arehitecture  véni- 
tienne partit  de  la  Lombardie,  et  eut  pour  organe  prin- 
cipal Lazzari  Bramante.  Aux  églises  S^*-Marie-des-Anges, 
S^-Satire  et  S'-Eustorge,  au  cloître  de  S^Ambroise,  ao 
Lazaret,  au  palais  Castiglioni,  oue  cet  architecte  bfttit  à 
Milan,  on  trouve  encore  un  mélange  du  style  roman  et 
du  style  de  la  Renaissance  ;  mais  les  monuments  qu'il  fit 
à  Rome,  le  palais  de  la  Chancellerie,  le  pakdt  Giraud,  la 
cour  du  Vatican  dans  sa  forme  primitive,  l'Oise  de 
S*-Pierre  telle  qu'il  la  conçut,  sont  l'expression  la  ploi 
parfaite  du  style  classique  italien  dans  sa  sobriété  et  ta 
beauté.  Parmi  les  élèves  ou  les  émules  de  Bramante,  on 
compte  Peruzzi,  qui  éleva  à  Rome  la  Famenna,  les  pa- 
lais Chigi  et  Massimo  ;  Raphaël ,  dont  on  possède  à  Rome 
les  palais  Berti  et  Vidoni ,  à  Florence  les  palais  Gan* 
dolfini  et  Uguccioni  ;  Sangallo,  qui  fit  à  Rome  le  palais 
Farnèse;  Ligorio,  arehitecte  de  la  villa  Pia  dans  la  même 
ville  ;  Serlio,  qui  alla  en  France  travailler  aux  pidais  do 
Louvre  et  de  Fontainebleau. 

Cependant,  un  élément  nouveau,  le  pittoresque,  allait 
s'introduire  dans  l'arehitecture,  et  en  altérer  la  pureté. 
Jusques-là  les  édifices,  créés  dans  un  but  d'utilité  oq 
pour  une  destination  sérieuse,  avaient  été  grands  et 
simples:  maintenant,  dans  le  dessein  de  satisfaire  le 
goût  des  princes  et  des  seigneurs  pour  le  luie,  les  archi* 
tectes  vont  se  livrer  à  la  recherehe  de  formes,  d'arrange- 
ments et  d'effets  qui  i>laisent  à  la  vue.  Michel-Ange,  avec 


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toau  i'aatoiitô  de  son  génie,  consacra  cette  introdaction 
de  réiément  pittoresque  dont  les  artistes  vénitiens  avaient 
déjà  donné  Texemple  :  S'-Pierre  de  Rome  et  son  imnoense 
eoapole,  la  déccvation  extârieure  du  Capitole,  le  doltre  de 
S^-Xarie-des-Anges,  la  bibliothèque  Laurentienne  à  flo- 
RDce,  sont  ses  pnncipaux  ouvrages.  Après  lui ,  quelques 
talents  supérieurs,  Jules  Romain  à  Mantoue,  Fontana  à 
Borne,  Sansovino,  Scamozzi  et  Da  Ponte  à  Venise,  sou- 
tinrent le  système  pittoresque,  qui,  cependant,  privé  du 
lOQiBe  puissant  dont  Hichel-Ange  Favait  animé,  laissait 
déjà  entrevoir  ane  prochaine  décadence.  Vainement  Vi- 
gnole,  Alessi,  Ammanati,  San-filicheli ,  Palladio,  s*en 
tenant  aux  préceptes  antiques  et  à  Técole  de  Bramante, 
protestèrent  contre  Fenvahissement  du  pittoresque  :  on 
en  Tint,  pendant  le  xvii*  siècle,  à  ne  plus  se  préoccuper 
({ae  de  la  .pompe  et  de  la  richesse.  On  fit  de  la  décora- 
tion qui  étonnait  les  yeux  ;  de  là  ce  que  les  critiques  ita^ 
fiens  ont  appelé  le  style  des  machinisUs.  En  voulant  con- 
stamment renchérir  sur  ce  qui  existait ,  l'art  tomba  dans 
Teitravagance  ;  on  eut  le  style  baroque.  Les  cannelures 
des  colonnes  furent  ornées;  les  chapiteaux,  les  archi- 
tnTes,  les  corniches,  les  frises,  se  chargèrent  de  volutes, 
de  rinceaux,  de  guirlandes,  de  chapelets  et  d*oves,  sous 
lesquels  disparut  la  ligne  droite.  Carlo  Uademo,  qui 
•cfaeva  S^-Pierre  de  Rome,  fut  un  des  promoteurs  de  cette 
architecture  corrompue.  Lorenzo  Bemini ,  dit  le  Bemin, 

ÏQÎ  éleva  la  colonnade,  le  baldaquin  et  la  chaire  de 
^Pierre  de  Rome,  le  grand  escalier  du  Vatican ,  le  pa- 
his  Barberini ,  fit  encore  davantage  du  grandiose  et  de  la 
décoration.  Ponzio  et  Ramaldi  à  Robie,  Buontalenti ,  Pa- 
riai y  Nigetti  et  Silvani  à  Florence,  Meda  et  Mangoni  à 
Milan,  Vittorim  et  Gampagna  à  Venise,  suivirent  la  même 
voie.  Mais  ils  forent  tous  surpassés,  pour  le  dévergondage 
da  goût,  par  Borromini ,  sur  les  traces  duquel  mar- 
dtèieot  Guarini  à  Turin,  Sardi,  Pozzi,  Roaâ  et  Lon- 
gbena  à  Venise. 

Ce  qu*a  produit  le  xvui*  siècle  ne  mérite  guère  le  nom 
d'art  :  les  artistes  italiens  ne  font  qu'imiter  les  étian- 
gen.  Ivara  et  Vanvitelli,  l'architecte  du  ch&teau  de  Ca- 
serte,  s'efforcent,  mais  en  vain,  de  ramener  l'architecture 
mi  vrais  principes.  Piranesi  et  Milizia  furent  plus  heu- 
reax  plus  tard,  et  alors  se  forma  une  école  meilleure, 
celle  du  marquis  Gagnera,  de  Simonetti ,  de  Campesi  et 
de  Stem,  à  qui  Bfilan,  Rome  et  Naples  sont  redevables 
de  lears  plus  récents  édifices. 

7.  Samelli,  Antica  basilicoçirafta ,  Naples,  1702; 
l.  Blaeo,  Nouveau  Théâtre  d^Italte,  en  holl.,  Amsterdam, 
1704,  A  vol.  in-fol.;  Burmann,  Thesaunu  antiquUatum 
Italks;  Séroux  d*Agincourt,  Histoire  de  Vart  par  les 
mmmmts,  Paris,  1809-23, 6  vol.  in-foL;  Cordero,  MIa 
itdiana  ArMtetiura  durante  la  domhuuionê  Icngo' 
haria,  Brescia,  iS29;  Knight,  l'Architecture  ecclésias' 
t¥t*u  de  V Italie,  en  anglais;  L.  Taylor  et  D.  Cresy,  Ar- 
dâitcture  du  moyen  âge  en  Italie^  en  anglais,  Londres, 
iS29,  iih4«  ;  Selvatico,  Délia  ArchiUttura  et  delta  Scultura 
di  Venexia,  Venise,  1847;  Letarouilly,  Les  Édifices  de 
Borne  moderne,  Paris,  1840-S5, 3  vol.  in-fol.  de  planches, 
et  1  vol.  in-4*  de  texte. 

iTAUB  (Sculpture  en).  Au  dernier  siècle  de  l'Empire 
romain,  la  sculpture,  même  quand  elle  rappelait  la  com- 
position, l'ajustement,  la  pose  et  l'expression  des  œuvres 
plos  anciennes,  trahissait  une  grande  ignorance  dans 
Texécation  :  les  bas-reliefs  de  Tare  de  Constantin  à  Rome, 
les  larcophages  de  l'impératrice  Hélène,  de  S^-Constance, 
de  Jonins  Bassos,  de  Probns  Anicius  et  d'Olvbrius,  et 
les  antres  monuments  du  même  genre  que  l'on  a  re- 
coeiliis  au  musée  du  Vatican,  montrent  que  l'habileté 
{ffitique  manquait  aux  artistes.  Le  christianisme  était 
encore  trop  jeune  pour  créer  des  types  nouveaux  :  aprèi 
avoir  renvené  beaucoup  d'idoles  du  paganisme,  les  chré- 
tiens qui  se  livrèrent  aux  beaux-arts  se  bornèrent  à 
imiter  les  modèles  échappés  à  la  destruction;  seulement, 
«os  l'influence  d'idées  morales  plus  austères,  le  nu  lût 
▼oilé  et  les  formes  plus  enveloppées.  La  sculpture  fut 
onployée  de  bonne  heure  à  décorer  les  basiliques  chré- 
tiennes. La  plupart  des  statues  étaient  alon  en  métaux 
précieux,  et  faites  au  repoussé  :  le  bibliothécaire  Ana»- 
taae  en  mentionne  un  très-grand  nombre  qui  furent  don- 
nées par  les  empereun  aux  papes  ou  exécutées  aux  frais 
<fe  ces  demien,  mais  pas  une  n'est  arrivée  jusqu'à  nous; 
^a  ont  disparu  dans  les  pillages  de  Rome  par  les  Bar- 
oares, n  en  est  de  même  des  croix,  patènes,  vasM  sacrés, 
cooeosoirs,  chandelien  et  lampes,  que  l'on  faîsiut  égale- 
oieat  au  repoussé,  avec  ornements  et  figures;  quelques 
nres  débris  en  ont  été  conservés  dans  le  Trésor  de  Rome. 
Us  statues  équestres  de  Théodorie  le  Grand,  fondues  à 


Rome,  à  Bavenne,  à  Naples,  à  Pavie,  pronrest  que  l'an 
du  fondeur  n'était  pas  encore  perdu  au  n*  siècle,  ou  du 
moins  qu'il  avait-  repris  ({uelque  activité  pendimt  la  do* 
mination  des  Goths.  liais  les  œuvres  les  plus  remar- 
ouables  de  ces  premiers  siècles  de  l'Italie  chrétienne  ont 
été  faites  en  ivoire  :  ce  sont  des  diptyques,  des  tableaux 
d'autel,  des  crosses  et  des  sièges  épiscopaux,  des  cou« 
vertures  d'évangéliaires,  des  autels  portatifs,  des  reli- 
quaires, etc. 

Jusqu'à  l'époque  de  l'invasion  lombarde,  la  sculpture 
n'avait  guère  franchi  l'intérieur  des  basiliques,  soit  para 
que  les  statues  en  matières  précieuses  ne  pouvaient  être 
exposées  au  dehon,  soit  pour  ne  point  rappeler  à  la  foule 
à  peine  convertie  le  culte  des  idoles.  Sous  les  Lombards, 
les  portails  commencèrent  à  se  décorer  de  sculptures  : 
les  statues  de  Roland  et  d'Olivier,  qu'on  voit  encore  an* 
jourd'hui  à  la  cathédrale  de  Vérone,  datent  de  cette 
époque  ;  elles  attestent  la  barbarie  des  artistes,  aussi  bien 
que  les  bas-reliefs  de  la  Porte  Romaine  à  Milan,  qui  leur 
sont  cependant  postérieun  de  deux  siècles.  Ce  fut  seule- 
ment sous  l'influenee  du  goût  byzantin  que  la  sculpture 
entra  dans  une  voie  de  progrès.  Dès  la  fin  du  ix*  siècle, 
un  artiste  lombard,  Voivinus,  exécuta  en  orfèvrerie  au 
repoussé  le  célèbre  revêtement  d'autel  de  l'église  S^Am- 
broise  à  Milan.  Au  xi%  les  portes  de  bronze  sculptées , 
qu'on  apporta  de  Grèce  pour  décorer  les  portails  <k8 
^lises  de  S^Marc  à  Venise ,  de  S*-i%ul  à  Rome,  et  du 
Dôme  de  Naples,  serrirent  de  modèles  aux  portes  des  ca- 
thédrales d'Amalfl  et  de  Bénévent,  plus  tiurd  à  celle  de 
Pise,  coulée  en  1180  psr  Bonanno,  et  à  celle  du  bwtis- 
tère  de  S*-Jean-de-Latran,  à  Rome,  exécutée  en  1203  par 
Pierre  et  Hubert  de  Plaisance.  Les  noms  de  quelques 
autres  artistes  du  xii*  siècle  nous  ont  été  conserva  ;  ce 
sont  :  Guillaume,  qui  fit  les  bas-reliefs  du  D6me  de  Mo- 
dëne;  Nicolas  de  Ficarolo,  qui  décora  S^-Zénon  de  Vé- 
rone et  le  Dôme  de  Ferrare;  Antelami,  qui  travailla  à 
Parme,  Robert  à  Pise,  Biduino  à  Lucques,  Gruamonti  à 
Pistoia.  Leun  œuvres  offrent  une  certaine  élévation  de 
conception,  mais  l'exécution  est  encore  barbare. 

Au  xm*  siècle,  Nicolas  de  Pise,  sculpteur  en  môme 
temps  qu'architecte,  donna  une  nouvelle  direction  -aox 
études.  Élève  de  maîtres  grecs  qui  travaillaient  au  Dôme 
de  sa  patrie,  il  suivit  d'abord  leur  manière  :  mais,  firappé 
de  la  beauté  de  certaines  sculptures  antioues  oui  avaient 
été  rapportées  de  Grèce  par  les  Pisans,  il  médita  sur  ces 
modèles,  suivit  les  principes  on'ils  enseignent,  et  ramena 
l'art  à  l'étude  de  la  nature.  Les  sculptures  des  chaires 
de  Pise  et  de  Sienne,  celles  du  tombeau  de  S^  Dominique 
à  Bologne,,  attestent  les  progrès  au'il  accomplit.  Au 
siècle  suivant,  André  de  Pise  fit  l'une  des  portes  du 
baptistère  de  Florence;  parmi  ses  élèves  ou  imitateurs, 
André  Orcagna  sculpta  l'autel  d'Or  San  Michèle,  Massudo 
les  tombeaux  du  roi  Robert  et  de  la  reine  Sanche  à  Na- 
ples, Alberto  di  Amoldo  la  madone  du  Bigallo  à  Florenoe, 
Lamberti  celle  de  la  Miséricorde  à  Aràzo,  Lanfrani  le 
tomb^ui  des  Pepoli  à  Bologne,  Bononi  da  Campione  le 
tombeau  de  Gan  délia  Scala  à  Vérone,  Balducdo  celui  de 
S*  Pierre  martyr  à  Milan,  Galendario  les  chuiiteaux  ornés 
de  statues  du  palais  ducal  à  Venise,  etc.  Dans  le  même 
temps,  Qone,  père  d'Orcagna,  son  élève  Léonard,  Pierre 
de  Florence,  Giglio  de  Pise,  Jacob  d'Ognabène,  faisaient 
l'autel  de  la  cathédrale  de  Pistoia  et  câui  du  baptistère 
de  Florence,  deux  couvres  remarquables  d'orfèvrerie. 

Quand  vint  la  Renaissance,  la  sculpture  se  développa 
rapidement  par  l'étude  de  l'antiquité,  et  acquit  cette 
haLoUeté  d'exécution  pratique  qui  manquait  à  l'âge  préc^ 
dent.  Une  école  se  forma  à  Sienne,  sous  la  direction  de 
Jacopo  délia  Querda,  surnommé  délia  Fonte  à  cause  de 
la  fontaine  Gaja  (charmante)  qu'il  y  exécuta,  et  dont  on 
voit  aussi  de  beaux  ouvrages  à  Lucques  et  à  Bologne  x 
elle  compta  d'excellents  artistes,  Mathieu  de  Lucques, 
Nicolas  de  l'Arca,  Vecchietto,  Nicolas  di  Piero,  etc.* Hais 
Florence  produisit  des  sculpteun  plus  remarquables  en- 
core. Laurent  Ghiberti  fit  ses  deux  célèbres  portes  en 
bronze  du  Baptistère,  dans  les  bas-reliefs  desquelles  il 
sut  allier  à  la  simplicité  et  à  l'élévation  de  la  conception 
la  noblesse  de  l'ajustement,  la  beauté  de  la  forme,  la  pii> 
reté  de  l'exécution  et  l'effet  pittoresque,  n  fit  encore  pln« 
sieun  statues  en  bronze  pour  l'telise  d'Or  San  Michèle,  les 
tombeaux  de  S^Zénobius  et  de  S*  Protus,  des  bas-reliefii 
pour  l'église  Smean  de  Sienne,  diven  ouvrages  d'orfè- 
vrerie aujourd'hui  perdus,  mais  dont  Vasari  vante  le  goût 
et  la  délicatesse.  Dooato  ou  Donatello  fut  celui  qui  im* 
prima  le  mieux  à  l'école  florentine,  et  même  à  toute  la 
sculpture  italienne,  le  caractère  de  naturalisme  qu'elle  a 
to^jours  conservé  depuis.  Exdusivement  préoccupé  de  la 


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fértté  et  de  rimltation  exacte,  oubliant  que  la  beauté  est 
une  des  conditions  Tîtales  de  Fart,  il  descendit  Jusqu'au 
réalisme.  Ses  csuTres  se  distinguent  moins  par  la  force 
et  la  noblesse  de  la  pensée  que  par  l'expression  profonde 
des  formes  t  dies  révèlent  une  grande  science  anatomi- 
foe,  ane  rare  habileté  d'exécution,  et  la  connaissance  des 
lAla  des  passions  de  l'toie  sur  le  corps.  Ses  principaux 
oonages  sont,  à  Florence,  les  statues  de  S*  Pierre,  de 
S>  Marc,  de  S»  Geerges,  de  Judith,  de  David,  et  divers  bas- 
reliefs  à  S<>Laureot  et  dans  le  Dôme;  à  Padoue,  des  bas- 
reliefs  dans  la  cathédrale,  et  la  statue  équestre  de  Gatt»- 
melata.  On  doit  une  place  à  part  h  Lucas  délia  Robbia 
pour  ses  sculptures  en  terre  cuite  et  vernissée,  où  la  pu- 
reté dn  goût  et  un  s^le  presque  antique  s'unissent  à  la 
naïveté  du  moven  âge.  A  la  suite  de  Gniberti,  de  Donato 
et  de  Lucas  délia  Robbia,  citons  l'architecte  Bruneltes- 
chi,  dont  on  voit  un  beau  crucifix  de  bois  à  S"-Haria- 
Novella  ;  FUarete,  qui  sculpta  les  portes  de  S*-Pierre  de 
Rome;  Antoine  Rossellini,  auteur  des  tombeaux  du  car- 
dinal de  iH>rtugal  à  San-Miniato  et  de  Marie  d'Aragon  à 
Naples;  Bernard  Rossellini,  son  frère,  qui  fit  le  mausolée 
de  Marsuppini  à  S*M>oix  de  Florence;  Benoit  Majano, 
dont  on  a  le  mausolée  Stroszi  à  Florence;  André  Verro- 
chk),  dont  Venise  possède  la  statue  deCoIleoni,  coulée 
en  bronxe  après  sa  mort  par  Alexandre  Leopardi  ;  André 
Sansovino,  dont  le  groupe  de  5^*  Anne,  la  Vierge  et  Ven- 
tant Jésus  à  StF-Augustin  de  Rome  est  la  plus  belle  pro- 
duction; Vellano,  Jean  de  Pise,  Bertoldo,Nanni  di  Banco, 
élèves  de  Donatello;  Désiré  de  Settignano,  Augustin  de 
Gnodo,  Minio  de  Fiesole,  les  frères  délia  Robbia,  qui 
suivirent  plutôt  ht  manière  de  Ghil>erti;  enfin  Rusticci, 
Bacdo  de  Montelnpo,  Benoit  de  Rovezzano,  etc.  —  A 
Rome  s'illustra  Paolo  Romano,  qui  fit  les  statues  en  ar- 
gent des  Apôtres,  fondues  par  les  Allemands  lors  du  sac 
âe  la  ville  en  1527. —  A  Naples  parurent  André  Giccione, 
auteur  du  tombeau  de  Ladislas,  et  Aniello  Flore,  dont 
Téglise  Si-Dominique  renferme  les  ouvrages.  —  Les  pro- 
grès de  la  sculpture  furent  plus  lents  dans  l'Italie  septen- 
monale,  presque  entièrement  dépourvue  de  monuments 
antiques  ;  cependuit  on  peut  citer  à  Venise  deux  familles 
de  sculpteurs,  celle  des  Bon  (Jean,  Pantaléon  et  Barthé- 
lémy^, dont  le  faire  naïf  rappelle  encore  les  traditions  de 
Pécole  byxantine,  et  celle  des  Lombard!,  célèbres  aussi 
eomme  architectes,  et  qui  ont  subi  davantage  l'influence 
des  modèles  antiques.  —  La  sculpture  d'ornement  est 
devenue  une  branche  importante  de  l'art.  Là  encore  il 
fant  cher  Ghiberti,  Brunelleschi,  Lucas  délia  Robbia,  qui 
avalent  commencé  par  être  orfèvres,  et  les  Lombardî.  Au 
nombre  des  ornemanistes  célèbres  figurent  aussi  Riccio 
BrioBoo,  qui  fit  le  candélabre  de  S*^Antoine  de  Padoue; 
Alexandre  Leopardi,  auteur  de»  piédestaux  en  bronze  de 
la  place  S^Marc  à  Venise  ;  Basti,  Bamb^a,  Brambilla, 
Agrate,  qui  travaillèrent  à  la  Chartreuse  de  Pavie. — L'or- 
fèvrerie a  pris  aussi  un  développement  considérable  : 
Leonardo  di  Ser  Giovanni,  Bartoiuccio  Ghiberti,  Verro- 
<dilo,  GenninI,  PoUij^oIo,  et  surtout  Benvenuto  Cellini, 
la  portèrent  à  un  haut  degré  de  perfection.  Le  dernier  a 
laissé  aussi  des  oouvres  de  statuaire,  telles  que  le  Persée 
de  la  Loggia  des  Land,  k  Florence,  et  la  Nymphe  de  Fon- 
taineblean. 

Gomme  il  avait  foit  pour  les  formes  architectoniques, 
Michel-Ange  se  mit  presque  toi^ours  au-dessus  des  règles 
de  la  sculpture,  et  employa  la  forme  humaine  à  des 
créations  colossales,  dans  lesquelles  le  style  et  l'expres- 
don  ont  un  caractère  en  quelque  sorte  surhumain.  Ses 
principales  oravres  sont  :  les  statues  du  Matin,  du  Midi, 
du  Soir  et  de  la  Nuit,  au  tombeau  des  Médicis  ;  la  statue 
de  Laurent  de  Médicis,  connue  sous  le  nom  de  Pensiero; 
le  Mcfise  du  tombeau  de  Jules  II  à  Rome;  les  deux  figures 
d'esclaves  que  possède  le  Musée  du  Louvre.  Le  Baechus 
et  le  Dama  de  Florence,  la  Pitié  à  S'-Pierre  de  Rome, 
le  Christ  de  l'église  de  la  Minerve,  VAnge  qu'on  voit  à 
l'église  de  S^-Dominioue  de  Boloene,  tous  ouvrages  de 
la  jeunesse  de  Michel-Ange,  n'ornent  pas  la  même  re- 
cherche du  grandiose,  et  ont  une  vérité  plus  humaine. 
Les  élèves  les  plus  illustres  de  Michel-Ange  furent  x 
MontoTBoli,  Montelnpo,  Guillaume  délia  Porta,  auteur 
dn  tombeau  de  Pie  m  à  S^-Pierre  de  Rome;  Ammanati, 
qui  fit  la  fontaine  de  la  place  du  Grand-Duc  à  Flo- 
rence; Danti,  Bandini,  etc.  Il  eut  aussi  un  rival,  Baccio 
BandlnelU,  qui  décora  de  statues  et  de  bas-reliefs  le 
dMBur  de  ht  cathédrale  de  Florence,  et  dont  la  fausse 
grandeur,  l'exagération,  le  mauvais  goût,  contribuèrent 
puissamment  à  la  décadence  de  la  sculpture  italienne. 

A  partir  du  xvn*  siècle,  en  effet,  les  sculpteurs  re- 
dierchent,  non  plus  la  beauté  de  la  ligne,  mais  l'expres- 


sion et  l'effet  pittoresque.  Le  Bemin  eut  le  carsetèrs 
théâtral  et  alTecté  en  sculpture  comme  en  architecture  : 
rien  de  plus  pompeux  que  les  statues  de  Constantin  et 
de  Lonsin  à  S>-Pierre  de  Rome,  de  plus  expressif  que  It 
figure  oe  S**  Bibiane,  de  plus  sensuel  que  celle  de  S** 
fl^érèse  à  l'église  de  la  Victoire.  On  voulait  donner  alon 
au  marbre  la  souplesse  de  la  chair  et  des  étoffes.  Moochi, 
Raggi,  Bolei,  Ferrata,  Aspetti,  Baratta,  Fansaga,  Algsrdi 
(tombeau  dfe  Léon  XI,  sculptures  de  la  villa  Pamfili,  etc.), 
prirent  le  Bernin  pour  modèle.  Cioli,  Foggini ,  Mosca, 
Scalza,  Lorenzetto,  sacrifièrent  moins  à  l'extravagance. 
Les  œuvres  de  Jean  de  Bologne  sont  également  conçues 
et  exécutées  dans  un  meilleur  style  que  celles  du  même 
temps-:  il  suffit  de  citer  V Enlèvement  des  Sabines  à  Flo- 
rence, le  Mercure  de  Bologne,  la  fontaine  de  Boboli. 
Stefano  Mademo  est  aussi  l'un  des  artistes  qui  protes- 
tèrent, mais  à  peu  près  en  vain,  contre  les  erreurs  de 
l'art. —  La  décadence  a  continué  pendant  le  xvui*  siècle, 
où  Rusconi  et  Pompeo  Battoni  sont  les  seuls  sculpteon 
(pli  méritent  une  mention.  Veirs  la  fin  du  siècle,  le  Véni- 
tien Canova  entreprit  de  ré^nérer  la  statuaire,  en  la 
ramenant  vers  l'étude  de  l*aatiauité  :  mais  ses  œuvres  i 
lui-même  ne  sont  que  des  Imitations  asses  pâles,  sans 
énergie,  où  la  gr&ce  remplace  la  véritable  beauté.  Parmi 
ses  élèves  on  peut  citer  :  Antonio  d'Bste,  célèbre  par  ses 
bustes  et  ses  reliefs;  Giuseppe  de  Fabrls,  auteur  des  mo- 
numents du  Tasse  et  de  Léon  X;  C.  Tadollni,  G.  Finelli, 
les  deux  Ferrari,  et  surtout  Bartolini  et  Pompeo  Marche», 
les  premiers  de  tous.  En  dehors  de  cette  école,  Gaélano 
Monti,  B.  ComoUi,  Sangiorgio,  Putti,  Pampaloni,  Persico, 
ont  acquis  une  certaine  réputation.  Enfin,  le  Danois 
Thorwaldsen,  pendant  son  séfour  en  Italie,  a  formé  quel- 

Sues  disciples,  Galli,  Benzoni,  Tenerani,  etc.  V,  Cicognara, 
toria  delta  Scultura,  Florence,  1813-18,  3  vol.  in-fol. 
RAui  (Peinture  en).  C'est  dans  les  Catacombes  de 
Rome  que  se  trouvent  les  plus  anciens  monuments  de  Is 
peinture  chrétienne;  mais  rien  n'autorise  à  affirmer 
qu'aucun  de  ces  monuments  soit  antérieur  au  v*  siècle. 
Nul  écrivain  des  ftges  précédents  ne  parie  de  peintures 
existant  dans  les  Catacombes,  et  le  poète  Prudence,  qui,( 
le  premier,  mentionne  une  représentation  du  martyre  de 
S*  Hippolyte,  n'indique  pas  le  lieu  où  elle  était  placée. 
On  voit  dans  une  lettre  d'Adrien  I*'  à  Charlemagne  qae 
le  pape  Célestin  I*'  (424-43S  )  fit  orner  de  peintures  le 
cimetière  de  S**-Priscille.  C'est  donc  vraisemblablement 
après  le  triomphe  du  christianisme  que  l'on  décora  les 
lieux  où  avaient  été  enterrés  ses  premiers  saints  et  ses 
martyrs.  Dans  les  Catacombes  des  Ss.  Marcel  lin  et  Piene, 
de  S' Calixte,  de  S**  Agnès,  réputées  les  plus  anciennes, 
les  artistes  chrétiens  ont  peint  le  Christ  sous  les  figures 
symboliques  d'Orphée,  de  Moïse,  de  Tobie,  de  Daniel,  de 
Jonas,  du  Bon  Pasteur;  on  y  voit  aussi  des  images  des 
martyrs  entourées  de  couronnes  de  laurier,  Jésus  an  mi- 
lieu de  ses  apôtres,  la  Vierge  et  le  Christ,  les  repas  des 
agapes,  les  Jeunes  Hébreux  dans  la  fournaise,  et  antres 
scènes  de  l'Ancien  Testament.  Le  style  de  ces  œuvres  e^t 
barbare,  bien  qu'il  atteste  une  imitation  des  modèles  de 
l'antiquité  païenne.  Au  reste,  les  peintures  décoratives 
des  uitacombes  ont  été  faites  à  diverses  époques,  et 
probablement  Jusqu'à  la  fin  du  viii*  siècle:  celles  de 
S^  Pontien  et  de  S' Valentin  présentent  des  figures  moins 
païennes,  des  ajustements  plus  austères  et  des  sujets 
d'invention  plus  récente,  tels  que  le  Baptême  du  Christ, 
leOrucifiement,  de  saints  ermites  couronnés  par  Dieu,  etc. 
—  Des  peintures  furent  également  exécutées  dans  les 
églises.  Prudence  parle  d'une  peinture  de  S*  Cassien  dans 
l'église  d'Imola;  S*  Paulin,  évêque  de  Noie,  orna  de  pein- 
tures la  basilique  de  S^-Félix;  le  pape  Symmaque  fit 
peindre  la  confession  de  S*  Pierre,  et  Léon  I**^  les  por^ 
traits  des  46  premiers  papes  dans  la  basilique  de  S^PauL 
Les  peintures  dont  on  couvrit  les  murs  des  édifices  sa- 
crés  et  des  palais  ont  presque  toutes  péri  :  celles  qui 
exhtent  dans  l'église  des  S^*-Nazaire  et  Gelse  à  Vérone 
sont  du  vn*  ou  du  vm*  siècle. 

Durant  la  même  période,  la  mosaïque  fut  souvent  pré- 
férée à  la  peinture  proprement  dite  :  outre  qu'elle  avait 
plus  de  solidité  et  pou^nEdt  braver  les  intempénes,  elle  plar 
çait  ses  figures  sur  fonds  d*or  qui  ajoutaient  à  la  richesse 
du  travail,  et  exigeait  moins  d'étude  pour  l'exécution. 
Les  mosaïques  de  S^Marie-MaJeure  et  du  baptistère  do 
SWean-de-Latran  au  v*  siècle,  des  S**-Cosme  et  Damien, 
de  S^Pjidentîenne  au  vi*,  sont  exécutées  dans  le  style 
latin,  dont  elles  repiMuisent  les  formes  courtes  et  rudes, 
mais  mouvementées  ;  elles  sont  sans  doute  l'œuvre  de 
maîtres  italiens.  Mais  les  violences  des  iconoclastes  dans 
l'Empire  d'Orient  firent  refluer  en  Italie  une  foule  d'ar- 


ITÂ 


1103 


TTA 


Inmatins  x  on  reconnaît  leur  style  plus  calme,  plus 
Mbce  de  gestes,  moins  expressif  peut-être,  mais  plus 
âancé  dft  fociiies,  dans  les  mosaïques  de  S**-AgnAs^  de 
S"M>mède,  de  S*^ément  à  Roma»  de  S^^ViUl  à  Ra- 
▼enno,  de  S^Blarc  k  Venise,  de  S^Ambroise  à  Milan,  de 
S^Pierre  à  Pavie,  de  S'-Étienne  à  Naples,  exécutées  du 
vn*  an  xi*  siècle.  —  La  peinture  sur  manuscrits  a  laissé 
anasi  quelques  œuvres.  Le  VirgiU  du  v*  siècle,  que  pos- 
eàde  la  bimiothèque  du  Vatican,  contient  des  miniatures 
dont  la  ressemblance  avec  les  peintures  des  Catacombes 
est  firappante.  Dans  le  Térmce  du  ix*  siècle  que  conserve 
la  mfime  collection,  Timitadon  de  Tantique  est  beaucoup 
noins  sensible,  et  le  dessin  plus  barbare. 

Les  bouleversements  politiques  de  Tltalie,  Tinsuffi- 
aanee  des  artistes  et  de  leurs  procédés,  la  sévérité  de 
Farchitecture  romane,  qui  se  prêtait  moins  que  la  basi- 
lique primitive  à  la  décoration  picturale,  avaient  fait 
tomber  la  peinture  dans  la  barbarie,  lorsqu'au  xi*  siècle 
8*opéra  une  véritable  Renaissance,  sous  Tinfluence  de 
Tart  b^rzantin.  Une  école  grecque  s^établit  alors  à  Rome; 
les  peintures  du  cloître  de  S^Urbain  et  de  celui  de  Sn- 
btaoo  lui  appartiennent  sans  doute.  Désiré,  abbé  du 
M ont^^Iassii^  fit  venir  de  Gonstantinople  des  artistes  ha- 
biles dana  la  mosaïque,  et  l'on  croit  pouvoir  leur  attri- 
buer les  mosaïques  de  S'^-Harie-in-Trastevere  et  de  S*^ 
Grégoire  à  Rome,  de  San-Miniato  près  de  Florence,  et  de 
Toroello  près  de  Venise.  Héraclius  Romain  au  xi*  siècle, 
TbéophUe  Lombard  au  xn*,  écrivirent  sur  la  peinture, 
et,  an  xm*,  Venise  appela  Théophanes  de  Gonstanti- 
nople pour  ouvrir  une  école.  Un  certain  nombre  d'ar- 
tistes ne  Sienne  suivirent  les  pratiques  de  l'art  byxantin, 
mais  en  modifièrent  l'austénté  par  la  gr&ce;  ce  furent 
Guido,  Parabuoi  et  Diotisalvi.  Mino  de  Turrita,  égale- 
ment originaire  de  Sienne,  décora  à  Rome  quelques  par- 
ties de  S^*-Blarie-BCaJeure  et  restaura  la  mosaïque  de  St- 
Jean-de-Latran.  Gaddo  Gaddi,  habile  mosaïste,  travailla 
à  Florence  et  k  Rome,  et  ses  œuvres,  comme  celles  de 
Hino,  olErent  le  mélange  de  la  manière  grecque  et  du 
style  latin.  Margaritone  d'Arezzo,  au  contraire,  suivit  la 
manière  grecque  sans  modification  ni  progrès.  Giunta  de 
Pise  fat  celui  qui,  pendant  le  xni*  siècle,  donna  le  mieux 
à  ses  figures  l'expression  humaine. 

Cétait  aussi  sous  la  direction  d'Apollonius,  Tun  des 
maîtres  étrangers  qui  ornaient  de  mosaïques  l'église  S*- 
Marc  de  Venise,  et  qui  fut  amené  k  Florence  par  André 
Tsfi,  que  Gimabué  avait  foit  ses  premières  études.  Hais 
l'exemple  de  Nicolas  de  Pise,  qui  régénérait  la  sculpture 
par  l'étude  et  l'interprétation  de  la  nature,  le  fit  sortir 
des  voies  traditionnelles.  Les  progrès  qu'il  fit  faire  à  l'art 
excitèrent  l'admiration  des  contemporains,  et  sa  Madone 
de  S^VIfaria-Novella,  regardée  comme  la  merveille  du 
temps,  fut  portée  procesuonnellement  par  les  Florentins. 
Quelques-unes  de  ses  peintures  existent  aussi  à  Assise. 
Si  l'exifcutioo  en  est  imparfaite,  la  conception  ne  manque 
pas  d'originalité  et  de  gpmdeur.  Avec  Gimabué  commen- 
cent le  véritable  stvle  italien  et  Vécole  fiomUine  (F.  ce 
mot),  Giotto,  son  élève,  le  surpassa  en  gr&ce  :  l'expression 
devint  chez  lui  plus  humaine,  plus  vraie;  les  formes  de- 
vinrent plus  correctes,  les  drsperies  plus  naturelles,  et 
les  raccofirds  commencèrent  k  être  étudiés.  Il  y  eut  pen- 
duit  le  ;ziv*  siècle  une  école  giotteeque,  composée  deè 
âèves  de  Giotto,  Stefano  de  Florence,  Taddeo  Gaddi, 
Simon 'Memmi,  Cavallini,  Capanna,  Lanrati,  Giottino, 
Simon  de  Naples,  Jean  de  Milan,  Menabuoi  de  Padoue, 
Goillanme  de  Forli,  Antoine  de  Venise,  Angiolo  Gaddi,  etc. 
D^auoes  artistes,  tels  que  Buffalmacco,  les  Orcagna, 
TMni,  furent  plus  fidèles  à  l'ancien  style,  dont  ils  con- 
servèrent les  traditions  typiques.  Les  artistes  des  deux 
écoles  rivales  déployèrent  k  l'envi  leurs  talents  dans  la 
décoration  du  Campo-Santo  {V.  ce  mot)  k  Pise,  monu- 
ment unique  de  la  peinture  k  fresque.  —  L'école  de 
Giotto  ne  prospéra  pss  seulement  en  Toscane  :  elle  se  ré- 
pandit en  Lombaidie,  où  elle  compta  parmi  ses  membres 
^tefisno  et  Jacques  de  Vérone,  Giusto,  Jean  Ifiietto,  Al- 
tîcfalero,  Jacques  Avanzi.  Là  encore,  son  influence  fut 
combattue  perdes  peintres  qui  firent  briller  d'un  dernier 
éclat  l'ancienne  école,  Guanente,  Jean  et  Antoine  de  Pa- 
doue,  Laurent  de  Venise,  Semitecolo,  etc.  —  A  la  même 
fooque,  récole  de  Sienne,  représentée  psr  Simone  de 
lurtlno,  continuait  de  se  distinguer  psr  la  douceur  de 
son  style,  qui  devait  dégénérer  assez  vite  en  faiblesse  et 
en  épuisement  :  les  peintres  auxquels  on  à  donné  le  nom 
de  mmiaiuristes ,  et  parmi  lesquels  figurent  Oderid 
d'Agnbbio,  Franco  de  Bologne,  Vitale  délie  Madone,  <a- 
nnello,  IJppo  Dalmasio,  Gentile  da  Fabriano,  Guido 
Mmerocci,  Fia  Angelico  de  Flesole,  se  sont  inspirés  de 


son  esprit;  c'est  la  même  façon  de  peindre  en  teintes 
plates,  le  même  soin  à  éviter  tout  accent  trop  marqué  da 
la  vie  réelle  et  k  spiritusiiser  la  nature  humaine. 

Avec  le  xv*  siècle  se  manifesta,  dana  la  peinture  ita- 
lienne, une  tendance  de  ]our  en  jour  plus  forte  à.  re- 
produire la  nature  dans  toute  sa  vérité,  k  secouer  les 
entraves  imposées  jusqu'alors  k  l'art  par  les  exigences  du 
style  reli^eux,  et  à  embrasser  avec  une  li^rté  illi- 
mitée les  sujets  profanes  comme  les  sujets  sacrés.  Le 
domaine  de  rart  va  s'agrandir  :  forme,  expression,  dis- 
position, ajustement,  modelé,  claÛM>bscur,  coloris,  tout 
sera  étudié  et  calculé.  Trois  peintres  de  l'école  floren- 
tine ont  eu  la  plus  grande  influence  sur  ce  développe-^ 
ment  de  la  peinture  dans  la  voie  du  naturalisme  :  Paolo 
Uccello,  ^ui  appliqua  k  son  art  les  principes  de  la  per- 
spective hnéaire;  Biasolino,  avec  qui  l'exécution  pratique 
fit  de  grands  progrès;  et  surtout  Masaccio,  qui  se  dégages 
des  derniers  vestiges  de  l'art  traditionnel,  et  inaugura  ce 
qu'on  pourrait  appeler  le  style  dramatique.  A  leur  suite 
on  peut  mentionner  Filippo  Ûçpi,  qui  plaça  le  premiei 
des  paysages  d'une  certaine  importance  dans  les  ta- 
bleaux, Botticelli,  Baldovinetti,  André  del  Castagne,  Be- 
nozzo  Gozzoli,  Roselli,  Ghirlandsjo,  Polla]uolo,  dont  les 
peintures  se  distinguent  par  la  science  anatomique,  Luca 
Signorelli,  Fra  Bartolomeo  délia  Porta,  etc.  Un  caractère 
commun  à  tous  ces  peintres,  c'est  l'introduction  des  por- 
traits de  contempondns  dans  leurs  œuvres. —  Le  natura- 
lisme fut  également  praticrué  dans  la  Lombardie  :  si  on 
ne  le  trouve  pas  encore  oans  l'école  dont  font  partie 
Foppa,  Giverchio,  Bevilacqua,  Fossano  et  Montoriano,  il 
inspira  l'école  de  Padoue,  (ondée  par  Souarçione  et 
André  Montegna;  de  là  il  se  répandit  dans  les  États  vé- 
nitiens avec  Parentino,  Pizzolo  et  Buono,  à  Bologne  avec 
Lorenzo  Gosta,  en  Ombrie  avec  FiorenrdO  di  Lorenzo,  k 
Parme  avec  les  frères  Mazzuoli,  à  Lodi  avec  les  frères 
Piazza,  à  Milan  avec  Bramantino  et  Borgognone.  —  Ge- 
pendant  il  y  eut  en  Ombrie,  particulièrement  à  Pérouse, 
une  école  qui,  tout  en  adoptant  les  progrès  que  faisait  la 
peinture  dans  l'exécution  pratic[ue,  conserva  les  tradi- 
tions du  style  pieux,  sans  les  laisser  s'altérer  au  contact 
des  idées  antiques  et  païennes,  et  que  l'on  peut  regarder 
comme  issue  de  l'école  de  Sienne  et  des  miniaturistes  du 
XIV*  siècle.  Après  avoir  compté  parmi  ses  maîtres  Taddeo 
Bartolo  de  Sienne,  Martinelli,  Antoine  de  Foligno,  Buon- 
Agli,  Nicolas  Alunno,  elle  jeta  un  vif  éclat  avec  Pintu- 
ricchio  et  Pierre  Vanuoci,  dit  le  Pérugin;  ce  dernier  eut 
à  son  tour  pour  élèves  Luigi  l'Ingegno,  Manni,  San- 
Giorgio,  Paccniarotto,  et  enfin  Raphaël  Sanzio,  destiné  à 
les  éclipser  tous.  Bologne  avait  aussi  dans  Francesco 
Francia  un  chef  d'école,  qui  se  rapprochait  des  artistes 
de  Pérouse  par  le  sentiment  pieux  et  par  la  finesse  de 
Texécution. 

Outre  les  progrès  du  naturalisme  dans  l'art,  le  xv*  siècle 
vit  s'opérer  une  autre  révolution,  dont  le  signal  fût  donné 
par  Vécole  vénitienne  (  K  ce  mot)^  attachée  plus  long- 
temps que  les  autres  à  la  peinture  byzantine.  Antonello 
de  Mesnne,  en  possession  du  secret  par  lequel  Jean  de 
Bruçes  avait  rendu  plus  facile  l'emploi  de  la  peinture  à 
l'huile  (  F.  ce  mot)^  le  porta  k  Venise  vers  1450,  tandis 
que  Dominique  le  fit  connaître  k  Florence.  Partout  ce 
genre  de  peinture  fût  adopté  pour  les  tableaux  de  cheva- 
let; mais  les  artistes  vénitiens  s'en  servirent  les  premiers 
pour  remplacer  la  fresque  dans  les  grandes  compositions. 
Jean  Bellini,  et  son  frère  moins  illustre  Gentile  Bellini, 
donnèrent  k  l'école  vénitienne  cette  supériorité  de  coloris 
qui  l'a  toii^ours  distinguée.  Parmi  leurs  élèves  ou  leurs 
émules,  on  doit  citer  Gima  de  Conegliano,  Basaiti,  Buon- 
consiglio,  Msrescalco,  Previtali,  i^nacchi,  Catena,  Bis- 
solo,  Santa-Groce,  Rocco  Marcone,  Jean  d'Udine,  Cariano 
de  Bergame,  Pellegrino  de  San-Daniele,  Garpaccio,  Man- 
sueti,  Lazzaro  Sebastiani,  Libérale,  Francesco  Morone, 
Girolamo  dal  Libri,  Montagna  de  Vicence,  etc. 

Qud  que  fût  le  mérite  de  tous  les  peintres  précédents, 
ils  furent  tous  surpassés  par  des  artistes  qui  portèrent 
l'art  an  point  extrême  de  la  perfection,  Léonard  de  Vinci, 
Michel-Ange,  Raphaôl,  le  Giorgion,  le  Titien  et  le  Gor- 
rége.  Parce  qu'ils  naquirent  vers  la  fin  du  xv*  siècle,  on 
les  désigna,  eux  et  leurs  élèves,  sous  le  nom  de  Cinque- 
centislû  Léonard  de  Vinci,  après  avoir  étudié  k  Florence 
sous  Verrochio ,  alla  porter  k  Vécole  milanaiee  une  vie 
nouvelle  et  féconde  :  aucun  artiste  ne  réalisa  si  complè- 
tement l'idée  qu'on  se  fait  delà  peinture  antique,  science 
de  la  perspective  et  de  la  lumière,  étude  minutieuse  de 
la  forme,  art  du  modelé,  laj^ur  du  dessin ,  profondeur 
de  Texoression  ;  il  ne  lui  a  manqué  que  le  génie  créateur  de 
Mich^-  Ange  ou  de  Raphafil  pour  être  le  plus  grand  peintre 


ITA 


1104 


ITA 


ées  temps  modernes.  Sans  parler  de  la  fameuse  Cène  de 
de  Itilan,  fresque  aujourd'hui  fort  altérée,  on  peiii  dter 
deux  toiles  que  possède  le  Musée  du  Louvre,  la  Vierge, 
VEnfant  Jésue  et  S^*  Annef  et  cette  Joconde^  peinte^  se- 
lon les  expressions  de  Vasari,  «  de  manière  à  faire  trem- 
bler tout  artiste  robuste.  »  Après  Léonard  de  Vinci, 
l'école  milanaise  fut  représentée,  au  xvi*  siècle,  par 
Bemardino  Luini,  Helzi,  Salidno,  Marco  d'Oggione,  Ci- 
gare da  Cesto,  Salarie,  Beltraffio,  Gaudenzio  Ferrari, 
Raud  dit  le  Sodoma,  Beccafumi,  etc.  —  Michel-Ange  se 
flraya  une  voie  indépendante.  Il  n'a  guère  laissé  qu'une 
OBuvre  en  peinture,  la  célèbre  fresque  du  Jtêgement  der^ 
nier,  ui  orne  la  voûte  de  la  chapelle  Sixtineà  Rome; 
car  le  tableaux  qu'on  lui  attribue  furent  exécutés  par 
(  élèves  d'après  ses  dessins.  Sa  chaleur  de  composition, 
connaissance  profonde  de  Tanatomie,  la  hardiesse  de 
contours  et  de  ses  raccourcis,  lui  donnent,  comme 
dans  l'architecture  et  la  sculpture,  une  originalité  puis- 
sante, qui  devint  de  l'exagération  duis  ses  imitateurs.  Si 
l'on  excepte  Daniel  de  Yolterre  et  Sébastien  del  Piombo, 
trop  éminents  pour  reproduire  les  défauts  du  maître,  il  n'y 
a  plus,  après  lui,  que  des  peintres  qui  tombent  dans  le 
faux  et  l'efiflure  en  cherchant  l'efTet,  Yasari,  Rossi,  Nal- 
dini,  les  Zuccari,  Vanni,  le  chevalier  d'Arpino,  Fontana, 
Gesi,  Semini,  Cambiaso,  etc.  Dans  la  peinture  de  portrait, 
Angelo  Allori  dit  Bronzinoet  son  neveu  Alessandro  appar- 
tiennent à  la  même  école.  Il  faut  faire  exception  pour 
André  del  Sarto,  dont  la  peinture  se  rattache  à  l'école  na- 
turaliste, mais  tempérée  par  une  grande  naïveté  et  une 
grande  finesse  de  dessin  et  d'expression,  et  qui  eut  pour 
élèves  Frandabigio,  le  Pontormo,  le  Rosso.  Vers  la  fin  du 
XVI*  siècle,  Ludovico  Qgoli  et  Gresorio  Pagani  revinrent 
à  la  nature  et  à  un  goût  meilleur  dans  l'emploi  du  clair- 
obscur.  —  Raphaël  Sanzio,  dit  le  Divin,  est  le  chef  de 
Vécole  romaine.  Il  a  réuni  les  qualités  des  autres  maîtres, 
non  pas  au  même  degré  de  perfection  ou  de  puissance, 
mais  dans  une  mesure  qui  fait  de  lui  le  premier  des 

Seintres  :  élève  du  Pérugin,  il  puisa  dans  l'école  om- 
rienne  cette  expression  pieuse,  cette  grâce  et  cette  dou- 
ceur qui  convenaient  à  sa  nature;  plus  tard  il  étudia  la 
perfection  dassique  de  Léonard  de  Vinci,  la  couleur  ma- 
gistrale de  Fra  Bartolomeo,  le  naturalisme  des  andens 
Florentins,  l'antiquité  dans  les  collections  de  Rome,  et, 
de  tous  les  caractères  qu'il  sut  s'assimiler  et  transformer 
à  son  image,  résulta  le  plus  harmonieux,  le  plus  mervdl- 
leux  ensemble.  Raphafil  a  eu  la  plus  sublime  conception 
de  la  noblesse  idéale  de  la  nature  humaine,  et  son  génie, 
sans  Jamais  faiblir,  apparaît  dans  toutes  ses  œuvres  avec 
la  môme  beauté  chaste  et  solennelle.  Il  suffit  de  dter  la 
la  DisptUe  du  S^-Sacrement,  V École  d^ Athènes^  la  Trans- 
figuration, les  Sibylles,  le  Triomphe  de  Galathée,  les 
Noces  de  Psyché,  la  décoration  des  Loges  du  Vatican,  la 
Bataille  de  Constantin,  la  Vierge  de  Foligno,  la  Madone 
de  Sixte-Quint,  la  5**  Famille  du  Louvre,  les  portraits 
de  Jules  u  et  de  la  Pomarina,  Les  meilleurB  maîtres  de 
l'école  romaine  après  Raphaél  ont  été  Jules  Romain,  le 
Primatice,  Niccolo  dell'  Abbate,  François  Penni,  Perino 
del  Vaga,  Polydore  de  Caravage,  André  Sabbatini,  Pelle- 
grino,  Benvenuto  Tisi  dit  U  Garofalo,  Giacomone  de 
Faenza,  Timoteo  Viti,  les  Camp^,  etc.  —  Le  Giorgione  et 
le  Titien,  élèves  de  Jean  Bellini,  ont  donné  à  Vécole  véni- 
tienne tout  son  éclat.  Les  portraits  de  l'un  sont  remar- 
quables par  leur  chaleur  et  leur  vérité.  L'autre,  admi- 
rable comme  peintre  d'histoire  et  de  portraits,  et  le 
premier  grand  maître  que  le  paysage  ait  compté,  posséda 
au  suprême  degré  la  puissance  et  l'harmonie  de  la  cou- 
leur, qui  est  le  caractère  distinctif  de  l'école.  Après  eux 
linrent  Palma  le  Vieux,  Bonifado,  Lorenso  Lotto,  Schia, 
vone,  Paris  Bordone,  Pordenone,  Moroni,  Romanino- 
Maganza,  Brusasorci,  Moro,  Moretto,  Farinata,  Gampa- 
gnola,  Zelotti,  Savoldo,  enfin  le  Tintoret  et  Paul  Véro- 
nèse,  ce  dernier,  maître  à  son  tour  de  Cagliari,  de  Palma 
le  Jeune  et  des  Bassan.  —  Quant  au  Gorrége,  s'il  pèche 
au  point  de  vue  de  la  pureté  et  de  la  gravité  du  style,  il 
excelle  par  la  largeur  du  modelé,  la  distribution  de  la 
lumière  et  des  ombres,  la  qualité  du  ton,  le  bel  emp&te- 
;ment  et  la  solidité  de  la  peinture.  Ses  mérites  étaient  le 
■produit  d'un  instinct  et  d'un  sentiment  particuliers,  et  ne 
pouvaient  se  formuler  en  doctrine  :  aussi  n'ouvrit-il  pas 
d'école.  Son  seul  élève  fut  peut-être  Rondani,  car  il  n'a 

eks  môme  instruit  son  propre  fils,  Pomponio  .Allegri. 
ais  comme  ses  œuvres  excitèrent  un  engouement  gé- 
néral, il  eut  beaucoup  d'imitateurs,  tels  que  François 
Maxzuoli  dit  U  Parmegiantno,  et  Schidone  de  Modène, 
chez  qui  la  douceur  dégénéra  en  mollasse,  le  sentiment 
m  affectation,  la  facilité  en  licence. 


Après  cet  âge  glorieux  de  la  peinture  italienne,  la  d^ 
cadence  commença  au  xvu*  siècle.  Trois  frères,  Louis, 
Annibal  et  Augustin  Garrache,  essayèrent  de  l'arrêter,  et 
se  firent  chefs  d'une  école  dite  éclectuiue,  dans  laquelle 
on  chercha  à  réunir  comme  en  un  faisceau  les  qualités 
distinctives  des  maîtres  précédents.  De  cette  école  sor- 
tirent Tiarini,  Gavedoni,  Spada,  Massari,  Salvi  dit  Sasso- 
ferrato,  éclipsés  bientôt  par  des  condisciples  qui  eurent 
à  leur  tour  des  élèves  aistingués  :  le  Guide,  maître  de 
Gagnacd,  de  Semenza,  de  Ganuti,  d'Elisabeth  Sirani; 
Barbieri,  dit  le  Guerchin  (le  borgne);  Domenico  Zazn- 
pieri,  dit  le  Dominiquin;  l'Albane,  maître  de  Mola  et 
d'André  Sacchi.  Louis  Cardi  dit  Gigoli  et  Ghristofano 
Allori  suivirent  l'école  de  plus  loin.  —  Malgré  les  efforts 
des  Garrache,  les  peintres  adoptèrent  de  plus  en  plus  le 
style  décoratif  et  théâtral  qui  leur  a  valu  le  surnom  de 
machinistes,  et  prirent  souvent  pour  modèle  la  nature  la 
plus  vulgaire.  A  leur  tête  était  BÎichel-Ange  de  Garavage, 
qui  eut  pour  prindpaux  disdples  ou  imitateurs  Lanfranoo, 
Pierre  do  Gortone,  Garlo  liaratta,  Antonio  Ganaletto,  et 
Garlo  Gignani.  Les  mêmes  principes  furent  appliqués  dan» 
Vécole  napolitaine,  qui,  jusqu'à  l'arrivée  de  Penni  et  de 
Polydore  de  Garavage,  n'avait  produit  que  Golantonio  del 
Fiore  et  Antonio  Salario  dit  2e  Zingaro  :  Ribeira  dit  VEs- 
pc^fnolet,  Preti  dit  il  Calabrese,  Salvator  Rosa,  Luca  Gior- 
dano  et  Solimena  en  furent  les  plus  fameux  représentant». 
Le  style  des  machinistes  fut  enfin  porté  à  Venise  par 
Turchi  et  Bassetti,  à  Vérone  par  Salmeggia,  Tiepolo  et 
Ricci.  Un  autre  peintre,  le  Baroche,  mit  à  la  mode  la 
grâce  mignarde  et  le  sentimentalisme,  qui  furent  auasi 
les  caractères  de  Garlo  Dolci. 

Pendant  le  xvm*  siède,  l'Italie  n'a  guère  produit  que 
Pompeo  Battoni,  qui  se  rattache  à  l'école  éclectique,  et 
dont  l'influence  fut  à  peu  près  nulle.  Depuis  cette  époque, 
AppianiàMilan,Benvenuti  à  Florence,  Ounuccini  à  Rome, 
subissant  plus  ou  moins  l'influence  de  l'école  française  de 
David,  n'ont  pu  être  rattachés,  par  leurs  grandes  décora- 
tions à  fresque,  qu'à  l'école  des  machinistes.  On  dte  en- 
core le  peintre  français  Fabre,  fixé  à  Florence,  et  dont  les 
paysages  ne  sont  pas  moins  remarquables  que  ses  tableaux 
historiques  ;  Hayez  et  Pelagio  Palage,  pdntres  d'histoire 
à  Milan;  Migliara,  peintre  d'architecture;  Ermini,  <iui  a 
exécuté  à  Florence  de  Jolies  miniatures;  Sabbatini,  qui 
jouit  d'une  grande  réputation  pour  ses  dessins  à  la  plume. 

F.  Vasari,  La  Vita  de*  pittori,  Florence,  1550,  in-fol., 
trad.  en  français  par  Jeanron  et  Lédanché,  Paris,  1840, 
10  vol.  in-8o;  Lanzi,  Histoire  de  la  peinture  en  Italie, 
trad.  en  français  par  M**  Dieudé,  Paris,  1824,  5  vol. 
in-8«;  Artaud,  Considérations  sur  l'état  de  la  peinture 
en  Italie,  dans  les  quatre  siècles  qui  ont  précédé  celui  de 
Raphaël,  Paris,  1808  et  1812,  in-8o  ;  Andy,  Histoire  de  la 
peinture  en  Italie,  Paris,  1817,  in-12;  Bourbet,  Histoire 
de  la  peinture  en  Italie,  Paris,  1817;  G.-T.  James,  The 
Italian  schools  ofpainttng,  Londres,  1820,  ln-8*;  W.Ott- 
ley.  Histoire  de  la  peinture  en  Italie,  en  anglais,  in-fol.  ; 
Huard,  Histoire  de  la  peinture  italienne,  Paris,  1834, 
in-8<*;  Rosini,  Storia  delta  pittura  italiana,  Pise,  1840; 
J.  Goindet,  Histoire  de  la  peinture  en  Italie,  Paris,  1  vol. 
in-12  ;  De  Stendhal,  Histoire  de  la  peinture  en  Italie, 
nouvelle  édition,  Paris,  1860,  in-i2.  B. 

rrAUB  (Musique  en).  Dans  les  premiers  sièdes  qui  sui- 
virent la  chute  de  l'Empire  romain,  la  musique  ne  fut 
autre  chose  que  le  plain-chant,  avec  ses  deux  formes  suc- 
cessives qu'on  nomme  le  chant  ambrosien  et  le  chant 
.grégorien  {V,  PLAi2«-CHAirr,  Ahbrosisn,  GaicomiEN)  ;  son 
échdle,  imparfaite  et  restreinte,  servait  également  pour 
les  compositions  du  genre  profane.  Il  est  impossible 
de  déterminer  dans  qudle  proportion  l'art  dirétien  em- 
ploya les  éléments  de  la  musique  hébraïque  et  de  la  mu- 
sique grecque.  On  ne  saurait  dire  avec  plus  d'exactitude 
l'époque  à  ifi({uelle  les  instruments  furent  introduits  dans 
le  service  divin  :  sdon  l'opinion  générale,  on  commença  à 
se  servir  de  l'orgue  dans  l'ÊKlise  romaine  sous  le  pape 
VitaUen,  vera  Tan  670.  Puis,  jusqu'au  xi*  siècle,  les  faits 
rehitifs  à  l*histoire  de  la  mudque  en  Italie  sont  très-nres  t 
un  prêtre  vénitien,  nommé  George,  se  rend,  en  836, 
auprès  de  Louis  le  Débonnaire,  qui  lui  fait  construire  uo 
orgue  hydraulique  à  Aix-la-Ghapelle;  le  pape  Silvestre  II, 
mort  en  1003,  Jouit  d'une  grande  réputation  comme  mu- 
sicien, et  scoute  quelaues  perfectionnements  à  l'orgue. 

On  a  attribué  à  Gui  d'Arezzo,  moine  bénédictin,  mort 
en  1050,  de  grandes  réformes  dans  le  système  musical  :  il 
aurait,  dit-on,  créé  la  gamme  moderne  en  convertissant  les 
tétracordes  des  Grecs  en  un  hexacorde,  donné  aux  notes 
les  noms  qu'elles  portent  encore  aujourd'hui,  imaginé  la 
portée,  établi  l'usage  et  la  distinction  ^es  clefs,  etc. 


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iofkfll  a  oombatta  cette  tradition  aTee  saceès;  mais  il  n'en 
mte  paa  moine  aYéré  que  Gai  d*Areito  recueillit  lee  pré- 
cqNes  de  musique,  peu  répmdus  alors,  de  ses  prédéces- 
tmat  et  de  ses  contemporains,  et  qu*il  introduisit  une  nou- 
relie  méthode  pour  renseignement  du  chant.  Les  guerres 
dont  ritalie  fût  le  théâtre  pendant  tout  le  moyen  âge  arrê- 
tèrent les  progrès  de  Tart  musical,  et  il  faut  arriver  Jus- 
qu'à la  fia  da  xiii*  siècle  pour  trouver  de  nouveaux 
renseignements.  Dante,  dans  sa  Dnm»  Comédie,  célèbre 
an  màmcien  <da  nom  de  Casella,  dont  il  ne  reste  aucun 
sntie  souvenir,  et  un  ami* du  même  poète,  Scocchetti, 
met  en  musique  quelques-uns  de  ses  vers.  Vers  le  même 
temps,  Harchetto  de  Padoue,  commentateur  de  Francon 
de  Colore,  écrivait  un  LiuHdariutn  musicœplanm  et  un 
Nmeammh  musiem  mênsuratœ^  insérés  par  Gerbert  dans 
tt  collection  des  Scriptons  ecclesitutici  de  musieà  eacrà 
(L  m). — ^Au  XIV*  siècle,  un  Florentin,  Francesco  Landino, 
mmommé  Gieco  O'aveugle),  fut  célèbre  comme  composi- 
teur et  comme  organiste  ;  quelques-unes  de  ses  œuvres  se 
trouvent  dans  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  impériale 
de  Psris.  En  4310,  une  société  de  musiciens  exécuta  à 
Florence  des  Laudi  spiritualû  Boccace  nous  représente 
les  personnages  de  son  Décaméron  Jouant  de  la  viole  et 
du  luth,  chantant  et  dansant;  on  peut  en  conclure  que  la 
musique  était  alors  cultivée  par  les  gens  du  monde.  Il 
parie  aussi  d'un  certain  Minuccio  d'Arezzo,  excellent 
joueur  de  viole  et  chanteur  parfait.  On  signale  enfin  une 
bulle  du  pape  Jean  XXII,  en  1322,  pour  interdire  les 
umi4>rèves,  les  minimes^  les  harmonies  barbares  (7.  Dé- 
auRT,  DiAPHoma),  et  tous  les  ornements  qui  avaient 
altéré  la  pureté  primitive  du  chant  ecclésiastique. 

Pendant  le  xv*  siècle,  ce  furent  des  srtistes  de  Técole 
gslio-belge  (K.  ce  mot)  qui  vinrent  donner  Timpulsion 
au  génie  Italien.  La  chapelle  du  pape  et  celles  des  autres 
cours  de  Tltalie  recrutèrent  des  compositeurs  et  des  chan- 
teurs flamands,  français,  espagnols,  allemands  même. 
Jean  Tinctor  vint  de  Bel^que  fonder  une  école  à  Naples 
vers  1450.  Un  Allemand,  Henri  Isaak,  fut  le  premier  qui, 
vers  1475,  écrivit  à  Florence  des  chants  camavaleeques 
(K.  ce  mot).  Parmi  les  Italiens  dont  Texemple  des  étran- 
gers exdta  l'émulation,  on  dte  un  fameux  organiste  de 
noieoee,  Antonio  degli  orgmU.  Le  peintre  Léonard  de 
Vlnd  Alt  mnaicien,  et  Joua  de  divers  instruments.  Une 
éeole  publique  de  musique  fut  créée  à  Milan,  en  1483, 
^ar  le  duc  Loois  Sfona.  Hais  ce  Hit  principalement  des 
théoriciens  qae  produisit  lltalie  :  Jean  de  Hantone,  dit 
le  Carthuaiem  (le  Chaotreux),  né  à  Namur  et  élevé  en 
Italie;  Proedocimo  de  Beldemandis,  né  à  Padoue,  auteur 
de  Traités  sur  la  musique  mesurée  et  sur  le  contre-point; 
F^anchino  Gaforio,  de  Lodi,  oui  ouvrit  des  cours  publics 
sur  la  musique  à  Mantoue,  a  Vérone,  à  Milan,  et  dans 
les  ouvrages  duquel  le  svstème  musical  de  Tépoque  est 
complètement  exposé  {Theorica  musica,  Milan,  1402; 
Praciéca  musieœ,  1406;  De  hormonia  musicorum  imtru- 
vuntorum,  1518). 

Avec  le  xvi*  siècle  commence  une  période  brillante 
pour  Fart  italien.  En  1503,  Ocuve  Petrucd  de  Fossom- 
omie  invente  les  caractères  pour  l'impression  de  la  mu- 
sique, et  désormais  les  ouvrages  des  compositeurs  vont 
avoir  un  moyen  de  propagation.  Des  écoles  sont  établies 
kfi9p]^SanUirMariadr Loretta  en  1537,  to  Pieto  déi 
Tfârchmi  et  Sant^  Onofrio  en  1583,  /  poveri  di  Giesu 
Christo  en  1580.  D'autres  établissements  du  même  genro 
ilearissent  à  Rome,  à  Florence,  à  Venise,  à  Milan.  Les 
genres  de  composition  se  distineuent  les  uns  des  autres, 
et  sont  tous  cultivés  avec  succès.  Palestrina,  élève  du 
Français  Goudimel,  et  successeur  d'Animuccla  comme 
maltie  de  chapelle  de  S^Pierre  de  Rome,  a  été  sur- 
nommé le  créateur  de  la  musique  d^église  moderne.  Si 
cjompodtions  manquent  parfois  de  mélodie,  elles  se 


pent  par  la  clarté  et  la  mi^esté  du  style,  la  vérité 
de  l'expreMion,  la  simplicité  dans  la  modulation,  l'ob- 
servatioa  sévère  dea  règles  de  l'harmonie.  Chef  de  l'école 
Tmmdne,  il  a  eu  pour  disciples  ou  imitateurs  les  frères 
Jean-Marie  et  Bernard  Nanini,  Felice  Anerio,  Antonio 
Gilim,  Rngpero  GiovaneUi.  L'éDole  lombarde  devint  égi^ 
lemeot  cmtoe  :  après  son  chef  Costanzo  Porta,  on  y 
compte  Pietro  POnzio  de  Parme,  Orazio  Vecchi  de  Milan, 
l^lo  Cima.  Rooco  Rodio  fut  la  principale  gloire  de 
Vioolle  napolitaine.  L'école  vénitienne,  fondée  par  le  Fia- 
mmd  WiUaert,  eut  pour  représentants  Giovanni  Croce, 
Giovanid  Fereiti,  Matteo  Atola,  Andréa  Gabrieli,  son 
wven  Giovanni  Gahrieli,  Antonio  Sartorio,  etc.  Une  nou- 
lelle  forme  de  composition  sacrée,  l'Orotorto  (F.  ce 
•oC),  date  du  même  siècle. 
lA  vnsique  profane  prit  son  essor  en  même  temps 


que  la  musique  sacrée.  Les  mélodies  (topnlairea  napoll» 
taines,  connues  sous  les  noms  d'oris,  de  canMonette,  de 
vUlanelle ,  furent  à  la  mode  dans  toute  l'Europe,  comme 
l'avaient  été,  au  moyen  âge,  les  chants  des  Troubadours. 
Des  sociétés  d'amateurs  exécutèrent  des  madrigaux  (F* 
ce  mot),  composés  à  plusieurs  voix  et  dans  un  style  lii- 
gué,  sur  des  vers  de  Pétrarque,  d'Arioste  ou  du  Tssse, 
par  Animuccia,  Palestrina  et  Luca  Marenzio  de  l'éoole 
romaine,  le  prince  Gesuaido  de  l'école  napolitaine,  Joseph 
Caimo  et  Giacomo  Gastoldi  de  l'école  lombarde,  Cos- 
tanzo Festa  et  Ant.  Biffi  de  l'école  vénitienne.  Vers  1583, 
une  nouvelle  espèce  de  musique,  la  musique  concertante, 
prit  naissance  à  la  cour  des  ducs  de  Ferrare  et  à  Venise  x 
on  en  attribue  l'introduction  à  un  compositeur  de  l'école 
romaine,  Annibale  Melone.  Enfin,  le  système  de  l'har- 
monie fut  considérablement  perfectionné  en  1500  par 
Claude  Monteverde,  de  l'école  vénitienne,  qui  le  premier 
osa  se  servir  des  dissonances  (F.  ce  mot),  et  l'emploi  de 
la  basse  chiffrée ,  d'autres  disent  de  la  basse  continue 
(F.  ces  mots),  fut  imaginé,  queloues  années  après,  par 
Louis  Viadana,  maître  de  chapelle  à  Mantoue.  —  Pln- 
sieurs  écrivains  contribuèrent  aux  progrès  de  l'art,  par* 
ticulièrement  Pierre  Aaron,  Louis  Fogliani,  Jean-Marie 
Lanfranco.  le  P.  Ange  de  Piciton,  Nicolas  Vicentino, 
l'abbé  Aiguino,  Zarlino,  qui  est  le  plus  remarquable  de 
tous,  Jean-Bfarie  Artusi,  Vincent  Galilée  (père  du  ma- 
thématicien), Orazio  Tigrini,  Hercule  Bottrigari,  le 
P.  Valérie  Bona,  le  P.  Ludovioo  Zacconi. 

Le  XVI*  siècle  a  vu  les  débuts  d'un  genre  nouveau,  le 
genre  dramatique,  destiné  à  prendre,  mms  les  âges  Mil- 
vants,  une  supériorité  incontestable.  L'application  de  la 
musique  à  des  drames  était  sans  doute  plus  ancienne  : 
car  une  Conversion  de  S^  Paul,  avec  musique  de  Fran- 
çois Baverini,  fut  représentée  à  Rome,  selon  les  uns 
en  1440,  selon  les  autres  en  1480 ,  et  on  Joua  de  même 
un  drame  d'Ange  Politien,  Orfeo,  en  1475;  on  dit  même 
que,  dès  l'année  1300,  on  récitait  en  vers  les  belles  ac- 
tions des  grands  capitaines,  en  y  Joignant  de  la  musique. 
Ce  n'étaient  là  que  des  essais  informes.  Alfonso  dtfla 
Viola,  maître  de  chapelle  à  Ferrare,  passe  pour  avoûr,  le 
premier,  uni  le  chant  avec  la  déclamation  dans  les  re- 
présentaydons  scéniques  :  il  est  certain  que  la  plus  an- 
cienne pièce  ayant  forme  d'opéra  est  VOrbioche  de  Giraldi 


Qnthio,  tragédie  dont  il  écrivit  la  musique,  et  qui  parut 
à  Ferrare  en  1541.  Claudio  Menda,  Oraao  Vecchi  et  Emi- 
lie del  Cavaliers,  firent  quelques  tentadves  du  même 
genre.  Ce  n'étaient  encore  que  des  espèces  de  monolo- 
gues composés  dans  le  style  des  madrigaux,  et  chantés 
par  plusieurs  voix,  faute  d'instruments  pour  accompa- 
gner. On  fit  un  pas  avec  la  Dafne  de  Péri,  représentée  à 
Florence  en  1507,  et  dans  laquelle  le  récitattf  ou  décU^ 
madon  lyrique  remplaça  la  déclamation  parlée.  Le  succès 
de  cette  innovation  fut  consacré  par  r^ifridtoa  de  Péri  et 
de  Julio  Caccini ,  représentée  k  Florence  en  1600  à  l'oc- 
casion du  mariage  de  Henri  IV  avec  Marie  de  Médids, 
par  l'ilrtodns  et  VOrfeo  de  Monteverde  (1607).  On  com- 
mençait en  même  temps  à  employer  quelques  instru- 
ments d'orchestre. 

Le  drame  lyrique  demeura  stationnaire  pendant  les 
premières  années  du  xvu*  siècle.  Puis,  Francesco  Ca- 
valli,  maître  de  chapelle  à  Venise,  chercha,  dans  son 
opéra  de  Jason  (1640),  à  mettre  l'expression  de  ses  airs 
en  rapport  avec  la  situation  des  personnages.  Carissimi 
donna  plus  de  grêce  au  récitatif,  plus  de  mouvement,  de 
variété  et  d'élégance  aux  accompagnements  de  basse, 
donna  aux  oratorios  une  forme  plus  régulière,  et  intro- 
duisit les  instruments  d'orchestre  dans  la  musique 
d'alise.  Aleiandre  Scarlatti  dégagea  du  récitatif  l'air 
qui  se  confondait  trop  souvent  avec  lui,  et  crédi  Vouver- 
ture.  La  construcdon  de  théâtres  permanents  et  publics 
permit  de  multiplier  les  '.'eprésentations,  qui  avaient 
eu  lieu  Jusque-là  dans  des  salons  particuliers.  Domi* 
nique  Mazzocchi,  musicien  de  l'école  romaine,  se  distin- 
gua dans  la  composition  des  madrigaux,  Gregorio  Allegri, 
Valentini,  Bemabei,  Benevoli,  Pertl  et  Steffani  dans  la 
musique  sacrée.  Colonne  dans  l'oratorio.  Horace  Bene- 
voli, mettre  de  chapelle  du  Vatican,  perfectionna  la 
science  du  contre-point.  La  cantate {V,  ce  mot),  destinée 
à  remplacer  bientêt  le  madriml,  fût  cultivée  par  Caris- 
simi, Stradella,  Scarlatti,  Cesti,  Ludovico  Rossi,  Bassani^ 
Gasparini,  Lotti,  etc.  —  La  musique  instrumentale  mar>* 
chait  de  pair  avec  la  musique  vocale.  Deux  familles  de 
luthiers  oe  Crémone,  les  Amatl  et  les  Stradivari,  portè- 
rent au  plus  haut  point  de  perfection  la  fabrication  dea 
violons.  Une  école  de  violon,  fondée  par  Gorelli,  produi- 
sit» entre  antres  exécatanu  distiogo^  Flraneesco  Geuu 

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1106 


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les  fipàrai  Somis  de  Tarin,  Albinoni  de  Venise, 
Joseph  ToreUi  de  Vérone,  Joseph  Vaientini,  Bfarietto  de 
Maples,  Pierre  LocateUi  de  Bergame,  Veracini  de  Flo- 
TCDce.  Un  c^èbre  musicien  de  Ferrare,  FMscobaldi , 
organiste  du  Vatican,  inventa  une  nouvelle  maniène  de 
Jouer  de  Torgue,  qui  consistait  à  lier  et  à  soutenir  les 
■ons,  à  proposer  et  à  reproduire  alternativement  quel- 
ques sujets  dlmitation.  La  ville  de  Bologne  se  distingua 
•atre  toutes  par  ses  institutions  musicales  :  trois  sociétés 
■Pt  formèrent,  celle  des  FUmdi,  fondto  en  1615  par 
Adrien  Banchieri,  celle  des  Filomusi  et  des  Filoscnici 
établies  par  Jérôme  Giacobbi  en  1G22  et  1633,  et  toutes 
làrent  absorbées  par  V Académie  philharmoniqve ,  insti* 
tuée  en  1666  par  Vincent  Carrati.  Parmi  les  auteurs 
d'ouvrages  théoriques,  nous  mentionnerons  Lemme  Rossi, 
Lorenzo  Penna,  Scipion  Ceretto,  Etienne  Bernard!,  Ca- 
mille Angleria,  Jean -Marie  Buononcini,  Angelo  Berardi, 
le  P.  Daniel  Bartoli,  et  surtout  J.-B.  Doni. 

Le  xvm*  siècle  a  été,  sans  contredit,  l'époque  la  plus 
lemarquable  et  la  plus  féconde  de  la  musique  italienne. 
Des  maîtres  renommés  ont  tenu  des  écoles  d'où  sont 
sortis  de  grands  talents  en  tous  genres,  les  Fedi  et  Ama- 
dori  à  Rome,  Pistocchi  à  Bologne,  Redi  à  Florence,  Bri- 
Tio  à  Milan,  Peli  à  Modène,  Gizzi,  Porpora,  Léo,  Du- 
rante, Feo,  Sala,  Fenaroli  et  Tritto  à  Naples.  Dans  aucun 
temps  on  ne  vit  Fart  du  chant  pratiqué  avec  un  tel 
éclat  :  l'école  romaine  donna  Bemaccm,  Pasi,  Fabri, 
Guarducci,  Ansani,  Gicognani,  Pacchiarotti,  Grescen- 
tini,  la  Gabrielli ,  la  Gatalani  ;  l'école  napolitaine  fut  il- 
lustrée par  Farinelli,  Caffiffelli,  Gizdelli,  Millico,  Aprile, 
Mattucci,  la  Mingotti;  à  l'école  lombarde  se  rattachent 
Appiano,  Salimbeni,  Monticelli,  Guadagni,  Giov.  Paita, 
Carlo  Scalzi,  Aug.  Fontana,  Ottani,  I&vid,  Marohesi, 
Viganoni ,  la  Viscontina ,  la  Grassini  ;  le  Porporino  et  la 
Bordoni  se  formèrent  à  Venise,  Manzuoli  et  la  Tramon- 
tin!  à  Florence.  Les  écrits  théoriques  se  multiplièrent  : 
il  suffit  de  citer,  parmi  ceux  qui  en  furent  les  auteurs, 
Zacharie  Tevo,  le  P.  Bfartini,  le  P.  Sacchi,  le  comte  Algar 
rotti,  le  P.  Paolucci,  le  chevalier  Planelli,  SignoreTli, 
J.-B.  Mandni,  Manfredini,  le  P.  Valottl,  le  chanoine 
Belii,  le  P.  Sabbatini. 

Les  ressources  se  multipliant,  le  travail  de  la  compo- 
sition devient  plus  abondut  et  plus  riche.  La  musique 
sacrée,  qui  ne  cède  que  peu  à  peu  le  premier  rang, 
compte  parmi  ses  trésors  les  œuvres  d*Ottavio  Pittoni , 
de  Porpora,  de  Léo,  de  Durante ,  les  Stabat  de  I^ergolèse 
et  de  Boccherini,  les  Psaumet  de  Marcello,  une  foule  de 
morceaux  écrits  par  Fioroni ,  Salulini ,  Mei ,  San-Mar- 
tini,  Santarelli,  Bertoni,  Casali,  les  PP.  Martini  et  Va- 
lotti,  Zanotti,  Vignoli,  Ottani,  Orsoni,  etc.  —  La  poésie 
du  drame  Ivrique,  portée  à  une  rare  perfection  par  Mé- 
tastase, était  de  nature  à  provoquer  l'inspiration  des  mu- 
siciens. Trois  générations  de  compositeurs  dramatiques, 
en  progrès  l'une  sur  l'autre,  se  succédèrent  dans  le  cours 
d'un  même  siècle.  A  la  première  appartiennent  :  Por- 
pora; Leonardo  Vind,  qui  sut  donner  aux  airs  plus  de 
développement  et  une  forme  régulière  ;  Pergolèse,  dit  le 
Divin,  dont  les  mélodies  pleines  d'expression,  mais  peu 
goûtées  de  son  vivant,  excitèrent,  après  sa  mort  préma- 
turée, le  plus  vif  enthousiasme  ;  Logroscino ,  que  les  Na- 
politains surnommèrent  le  Dieu  de  l'opéra  bouffe;  Buo- 
noncini, qu'un  parti  ne  craignit  pas  d'opposer  à  Handel  ; 
DunI,  qui  alla  écrire  ses  opéras-comioues  à  Paris;  Pisto- 
rini,  dont  le  talent  dans  les  intermèdes  et  l'opéra  bouffe 
était  plein  de  gr&ce  et  de  flexibilité;  Galuppi,  un  des 
meilleurs  compositeurs  pour  l'opéra  comique.  La  seconde 
génération  comi^rend  :  Jommelli,  dont  la  musique  de 
chambre  et  d'église,  aossi  bien  que  les  œuvres  thé&trales, 
«e  distingue  par  l'originalité  des  idées,  la  simplicité 
touchante  des  mélodies,  et  la  richesse  de  l'harmonie  ; 
Piccinni,  musicien  d'une  rare  abondance,  qui  Intro- 
duisit dans  l'opéra  les  morceaux  d'ensemble,  détermina 
ia  juste  forme  du  dao,  et,  pendant  quelques  années  de 
séjour  en  France,  se  posa  comme  le  rival  de  Glu^  (  V, 
FiUNCB —  Musique  en);  Sarti,  qui  manqua  de  profon- 
deur, mais  dont  les  mélodies  et  la  facture  générale 
étaient  d'une  élégance  remarquable;  Sacchini,  que  la 
l?Vance  put  louer  pour  la  pureté  et  l'expression  de  ses 
chants,  pour  la  facilité  et  la  richesse  de  ses  accompagne- 
ments. Enfin,  trois  maîtres  ont  encore  surpassé  leurs 
prédécesseurs,  Guglielmi,  Paisiello,  et  Qmarosa,  dont  les 
ouvrages  sont  des  chefs-d'œuvre  de  chant,  de  grftce, 
d'esprit  et  d'originalité.  —  D'autres  compositeurs  drama- 
4ques  parurent  encore  au  xvm*  siècle,  mais  sans  atteindre 
ku  premier  rang  :  tels  furent  Orlandini,  Polarolo,  Cal- 
Wa,  Vivaldi,  Porta,  Giacomeili,  Bertoni,  Trafitta,  etc. 


Dans  la  musique  instrumentale,  le  xvui*  siècle  a  pro* 
duit  aussi  des  artistes  très-distingués.  Joseph  Tartinl,. 
célèbre  par  l'invention  d'un  système  d'harmonie,  forma 
une  école  de  violon,  dans  laquelle  il  enseigna  la  nouvelle 
manière  de  condidre  l'archet  que  lui  avait  apprise  ioq 
maître  Veracini.  Il  eut  pour  élèves  Nsrdini,  Morigi,  Fer- 
rari, C^inxTJ,  Celestini,  et  Pugnani ,  maître  à  son  tour 
de  Viotâ  et  de  Bruni.  Alexandre  Rolla  se  fit  connaître 
par  son  talent  sur  la  viole  et  sur  le  violon.  Antoine 
Lolli,  de  Bergame,  figure  aussi  parmi  les  violonistes. 
Les  finères  Alexandre  et  Jérôme  Besozzi  eurent  une  grande 
réputation,  l'un  sur  le  basson,  l'autre  sur  le  hautbois. 

Les  dernières  années  du  xvm*  riècle  et  les  premières 
du  XIX*  forment  une  période  intermédiaire,  qui  se  pro- 
longe Jusqu'à  l'avènement  de  Rossini,  et  durant  laquelle 
les  oompositeun  se  sont  bornés  à  imiter  les  modèles  de 
l'âge  précédent,  à  perfectionner  les  procédés,  sans  qu'il 
y  ait  de  progrès  bien  sensibles  au  point  de  vue  de  l'in- 
vention. Les  uns  allèrent  s'établir  et  faire  Jouer  leurs 
oBuvres  à  l'étranger;  ce  sont  Salieri  et  Righini  en  Alle- 
magne, Bernardo  Mengozzi,  Bemardo  Porta,  Délia  Maria, 
Spontini,  Cherubini,  Paér  et  Carafa  en  Fnnce;  ceux 
d'entre  eux  qui  vécurent  assez  longtemps  reçurent  le 
contre-coup  de  la  révolution  opérée  par  Rossini,  et  mo- 
difièrent leur  style  dans  leurs  derniers  ouvrages.  Les 
autres,  qui  demeurèrent  en  Italie,  n'eurent  qu'une  vogue 
momentanée,  à  laquelle  le  nouveau  compositeur  mit  fin 
d'un  seul  coup  ;  ce  sont  :  Nazolini,  musicien  gracieux , 
mais  dépourvu  de  force  ;  Vincenio  Federici,  qui  écrivit 
pour  les  théâtres  de  Londres  et  de  l'Italie;  François 
Mosca,  d'un  savoir  très-borné,  et  à  qui  l'on  attribue  le 
premier  emploi  du  crescendo  (V.  ce  mot)%  François 
Gneoco,  dont  le  stvle  est  lèche,  tririal  et  incorrect;  ZSn- 
garelli ,  directeur  du  Conservatoire  à  Naples  ;  Simon  Hsyr 
ou  Mayer,  originaire  de  la  Bavière,  et  imitateur  de  Mo- 
zart; rioravanti,  qui  prit  pour  modèle  la  manière  de 
Guglielmi,  et  abandonna  le  théâtre,  où  il  avait  eu  quel- 
ques succès  dans  le  genre  bouffe,  pour  remplir  les  fonc- 
tions de  maître  de  chapelle  à  Rome;  Jos^h  Farinelli, 
imitateur  de  Cimarosa  ;  Joseph  Niccolini,  plus  nerveux, 
mais  inégal  ;  les  frères  Orgitano,  qui  eurent  qoelaue 
originalité  dans  la  forme  des  cantilènes  et  la  coupe  des 
morceaux  ;  Generali,  doué  d'un  génie  heureux,  que  les 
excès  d'une  vie  de  désordre  ne  tardèrent  pas  à  étouffer; 
François  Moriacd^,  musicien  assez  fécond  et  estimable; 
Charles  Cocda,  longtemps  directeur  de  l'opéra  italien  à 
Lisbonne  et  à  Londres.  —  Dans  cette  période  se  place  la 
fondation  du  Lycée  muncal  de  Bologne  (1805),  où  en- 
seigna le  P.  Mattei,  et,  en  1801,  celle  du  Gonserratoire 
de  Milan,  dont  Asioli  fut  le  premier  directeur. 

La  gloire  de  l'Italie  pendant  le  xix"  siècle  rédde  dans 
le  génie  de  Rossini ,  dont  les  chefs-d'œuvre  ont  eu  un 
prodigieux  succès  dans  le  monde  entier.  Il  suffira  de 
citer  Tancrède  et  Vltaiienne  à  Alger  (1813),  le  BarbUr 
de  Séville  et  Otello  (1816),  la  Gazsa  ladra  et  la  Cène- 
rentola  (1811),  Moee  m  EgiUo  (1818),  la  Donna  dd  Lago 
(1810),  Sémiramis  (1824),  U  Siège  de  CoruUhe  (1821], 
qui  n'est  qu'un  Maometto  retond  pour  la  scène  fran- 
çaise, le  Cornu  Ory  (1828),  et  GuOlamne  Tell  (18S9).  U 
popularité  de  cette  musique  ne  peut  être  comparée  à  sn- 
cune  antre  :  il  y  a  là  une  quantité  prodigieuse  de  chsnts 
heureux  et  d'inspirations  dramatiques,  d*élégantcs  mé- 
lodies qui  plaisent  à  l'oreille  et  au  cœur.  Les  opéras  des 
anciens  maîtres  contenaient  trop  de  récitatifs,  d'aira  et 
de  duos,  et  pas  assez  de  morceaux  d'ensemble  :  Rossini 
mit  peu  de  récitatifs  dans  ses  oauvres,  les  soutint  par  de 
riches  dessins  d'orehestre,  donna  plus  de  mouvement  à 
l'action,  plus  d'importance  aux  masses  chorales,  et  ne 
laissa  pas  l'intérêt  faiblir  dans  l'intervalle  des  morceaux. 
Tous  les  moyens  matériels  dont  les  compoMteurs  précé- 
dents avaient  usé,  tels  que  les  différents  rhythmes,  les 
coupes  des  aire,  duos  et  morceaux  d'ensemble ,  le  en»' 
eenaOf  les  canons,  les  divers  genres  de  modulations  et 
d'accompapements,  Rossini  a  su  se  les  aporoprier;  ces 
moyens ,  improductifs  entre  les  mains  des  hommes  mé- 
diocres, il  leur  a  donné  la  vie  par  la  fécondité,  la  grâce 
et  la  chsleur  de  ses  inspirations.  On  lui  a  reproché'  une 
certaine  monotonie  dans  les  termes  de  ses  morceaux,  et 
un  style  de  chant  beaucoup  trop  orné  ;  ce  dernier  cano* 
tère  a  pu  être  l'efTet  de  la  médiocrité  des  chanteurs,  qui, 
incapables  d'embellir  avec  goût,  comme  on  le  faisait  au- 
trefois, les  mélodies  des  compositeun,  avaient  besoin 
qu'on  leur  écrivit  tous  les  agréments  du  chant.  Rossini 
a  cependant  trouvé  des  inteiprètes  habiles,  Velutl,  Robi- 
ni,  Nozzari,  Galli,  Lablache,  A.  Nourrit,  Duprez,  M"*«  Pi- 
saroni  et  Pasta.  —  Les  autres  compositeun  italiens  du 


ITA 


1107 


ITA 


ux*  dède  ont  suivi  la  voie  tracée  par  Rossini^i  dont  ils 
Q^ont  guère  folt  qu'imiter  les  chants,  les  formes  et  Tin- 
itmmentacîoii  :  tels  sont  Pacini ,  Vacci^,  Valentini ,  Per- 
siani,  Balducd,  Aspa,  Petrelli,  Ricci,  Raimondi,  Bon- 
flchi,  Sapienza,  Coppola,  Gostamagna,  Negri,  Nini,  Lillo, 
Caaamorala.  Au-dessus  d*eux  on  doit  placer  trois  maîtres 
aosal  couDUB  à  Tétranger  cni*en  Italie,  Mercadante,  Bel- 
liai,  et  Donizetti.  Aujoura*hui,  le  compositeur  drama- 
tique le  plus  renommé  est  Verdi,  qui  a  su  donner  un 
grand  intérêt  au  travail  de  rorchestrê,  mais  qui  ne  pos- 
sède pas  une  veine  mélodique  fort  abondante  ;  en  outre, 
on  doit  le  bl&mer  de  donner  au  chant  et  à  Tinstrumenta- 
tion  un  excès  de  sonorité. 

la  musique  d*église  n*occupe  plus  un  rang  aussi  élevé 
que  par  le  passé.  Si  Ton  exécute  encore  avec  talent  les 
compositions  des  anciens  maîtres,  on  ne  produit  plus 
d*aaQvre8  appartenant  au  style  véritablement  religieux,  et 
les  formules  rossiniennes  ont  pénétré  presque  partout.  II 
n*est  guère  permis  de  citer  que  Fabbé  Baini,  compositeur 
et  chanteur  de  la  chapelle  pontificale,  Terziani,  maître  de 
chapelle  de  S^ean-de-Latran,  et  Guidi,  maître  de  cha- 
pelle de  S^'-Marie-in-Trastevere.  —  Dans  la  musique 
instrumentale,  on  distingue  Torganiste  Parisi,  et  les  vio- 
lonistes PoUedro  et  RoveUi,  que  le  merveilleux  talent  de 
Paganfni  fit  oublier,  puis  Bazzini,  Sivori,  etc.       B. 

rrauE  (Gravure  en).  V,  Gravcrb. 

ITALIENNE  (Comédie).  V.  notre  Dictumnaire  d$  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

iTAUBiiifB  (Langue),  une  des  langues  néolatines  (F.  ce 
mot).  Elle  doit  être  considérée,  dans  sa  plus  haute  ori- 
gine, comme  une  deuxième  forme  de  Tancien  latin.  En 
effet,  le  ladn  primitif,  suivant  une  loi  générale  des  lan- 
gues, alla  toujours  en  perdant  les  formes  compliquées  de 
ses  déclinaisons  et  de  ses  conjugaisons,  pour  en  adopter 
de  plus  claires,  de  plus  analytiques;  à  côté  donc  du 
latin  littéraire,  fixé  par  les  éoivains  de  génie,  et  parlé 
par  les  classes  cultivées  de  la  société  romaine,  se  trou- 
vait une  langue  moins  correcte,  mais  aussi  logique,  dite 
langue  rustique  et  langue  des  camps,  celle  des  paysans, 
de  la  plèbe,  et  des  soldats.  On  rencontre  des  traces  de 
cette  langue  dès  le  n*  siècle  de  J.-G.,  dans  les  inscrip- 
tions des  catacombes,  où  Ton  voit  déjà  un  des  princi- 
paux caractères  de  ce  qui  deviendra  un  Jour  Titalien,  la 
suppression  des  déclinaisons,  et  la  tendance  vers  une 
terminaison  unique  des  substantifs.  Avec  le  temps,  et 
sous  l'influence  des  événements,  cette  langue  populaire 
finit  par  se  substituer  à  Tancien  latin  dans  le  langage  or- 
dinaire. Le  premier  monument  connu  de  cette  langue 
nouvelle,  que  Ton  peut  déià  appeler  italien,  date  de  iiS5  ; 
c'est  une  inscription  en  vers,  gravée  sur  une  pierre  de  la 
voûle  de  la  cathédrale  de  Ferrare  :  mais,  dès  le  ix*  et 
mèoie  le  vni*  siècle,  on  trouve  des  vestiges  de  la  nouvelle 
lanoie  dans  les  noms  propres  d*hommes  et  de  lieux  que 
renferment  les  actes  priva  ou  publics.  Les  caractères  de 
cet  ancien  Italien,  qui  sont  restés  ceux  de  Titalien  mo- 
deme,  consistent  :  1*  dans  une  terminaison  invariable 
ou  presque  invariable,  substituée  aux  désinences  variées 
de  ui  dédinaiaon  latine,  et  qui  fut,  généralement,  celle  de 
Fahlatlf  latin  singulier.  Ainsi,  on  dit  0^"^*^^»  domino, 
su  Heu  de  genitoris,  geiUtorem,  domini,  aominum; 
9»  ntalien  décomposa  les  formes  compliquées  par  les^ 
quelles  Tancien  laan  marquait  les  divers  temps  du  verbe, 
au  moyen  de  verbes  auxiliaires,  comme  Are,  aootr,  faire, 
aller,  ffemr;  3<*  la  suppression  des  cas  qui  marquaient 
les  rapports  sous  lesquels  Tesprit  conçoit  les  objets  ext^ 
rieurs  amena  Tusage  de  mots  particuliers  (prépositions) 
pour  continuer  à  marquer  ces  mêmes  rapports  :  liber 
Pétri  devint  U  libro  di  Pietro;  A»  Tancien  Adjectif  latin 
Ule,  Ula^  employé  déjà  même  par  Qcéron  avec  le  génitif 
dHine  façon  déierminative ,  devint  l'accompagnement 
oblifçâ  du  substantif,  et  forma  Tespèce  particulière  de 
mots  appelée  article  :  il,  lo,  la,  igli, 

La  gnmde  masse  des  mots  de  la  langue  italienne  est 
lœontestablement  d'origine  latine  ;  néanmoins  l'Italie  a 
été  si  longtemps  bouleversée  par  les  invasions,  qu'on  peut 
dbe  que  sa  langue  a  une  physionomie  moins  latine  que 
iTespagnol.  L'italivsn  a  conservé  un  grand  nombre  de  mots 
appartenant  aux  langues  des  peuplades  qui  précédèrent 
ns  Latins,  telles  que  l'ibérien,  l'étrusque,  l'ombrien, 
fosqne,  le  sabin.  H  a  emprunté  quelques  expressions  aux 
nées  conquérantes.  Gaulois,  (îermains,  Slaves.  Il  en  a 
reçu  quelques  autres  des  Sarrasins  et  des  possesseurs 
grecs  de  la  basse  Italie. 

Plus  harmonieux ,  mais  moins  sonore  que  l'espagnol , 
ntafien  en  a  l'abondance  et  la  naïveté  :  sa  naïveté  tient 
à  Torigine  démocratique  de  la  langue,  qui  se  forma  dans 


I  les  fortes  républiques  de  Pise,  de  Florence,  de  Pavie,  etc. 
D'ailleurs,  le  grand  nombre  de  génies  divers  qui  ont  écrit 
dans  cette  belle  langue  l'ont  pliée  à  tous  les  tons,  depuis 
les  plus  simples  Jusqu'aux  plus  sublimes.  On  peut  y 
noter  les  différentes  phases  de  la  vie  politique  de  lltalie  : 
simple,  concise  et  en  progrès  tant  aue  le  peuple  de  ces 
républiques,  en  déployant  son  énergie,  conserve  dans  ses 
mœurs  la  rudesse  et  la  simplicité,  la  langue  italienne 
s'effémine  et  s'amollit  aussitôt  que  les  mœurs  se  cor- 
rompent et  que  la  nation  ne  sait  plus  défendre  son  indé- 
pendance. 

L'italien  est  loin  d'être  parié  avec  la  même  pureté  dans 
toute  la  Péninsule  :  il  existe  un  grand  nombre  de  dia^ 
lectes,  fort  éloignés  de  l'italien  classique,  et  qui  ont  leur 
origine  dans  l'invasion  et  la  conquête.  Les  plus  incorrects 
sont  le  lombard,  le  vénitien,  et  surtout  le  napolitain  des 
Calabres  et  des  Abnizzes.  Le  toscan  de  Florence  passe 
pour  l'italien  le  plus  pur  et  le  plus  harmonieux.  Dans  la 
bouche  des  Romains,  il  prend  un  accent  particulier  de 
noblesse.  Il  semblerait  donc  que  l'italien  classique  ne 
soit  que  le  dialecte  toscan,  élevé  par  la  culture  et  par  la 
destinée  au  rang  d'idiome  national.  Toutefois  il  est  une 
opinion  qui  regarde  l'italien  littéraire  comme  formé  ni- 
distinctement  de  tous  les  dialectes  italiens,  en  conser- 
vant de  chacun  ce  qu'il  avait  de  plus  parfait.  Cette  opi- 
nion, qui  est  celle  de  Dante,  a  pris  récemment  un  certain 
crédit  en  Italie. 

V,  Accarisio,  Grammatica  ix>lgare,  Bologne,  i53G, 
in-8**;  De  Mesmes,  Grammaire  italienne  composée  en 
françoys,  Paris,  i548,  in-8°;  Scipio  Lentulus,  Italicœ 
grammaticœ  prœcepta  ac  ratio,  Naples,  i5C8,  in-8**; 
Nouvelle  méthode  de  MM.  de  Port-Royal  pour  apprendre 
la  langue  italienne,  Paris,  1660;  Yeneroni,  Le  maître 
italien  ^  Amst.,  1691;  Corticelli,  Regole  ed  osservassioni 
délia  Itngua  toscana  ridotta  a  metodo,  Bolocpe,  1745, 
in-8°;  Soave,  Grammatica  ragionata  délia  Itngua  ita- 
liana,  Parme,  1772,  in-8°;  Luneau  de  Boisgermain, 
Cours  de  langue  italienne,  Paris,  1783,  3  vol.  in-iS^  ;  Bar- 
beri ,  Grammaire  des  grammaires  italiennes,  Paris,  ISlt 

2  vol.  in-S^'  ;  Martelli,  Grammaire  italienne  élémentaire, 
Paris,  1826;  les  Grammaires  de  Yeneroni,  de  Biagioli,  et 
de  Yergani  ;  Cerutti ,  Grammatica  /Uosofica  délia  lingua 
italiana,  Rome,  1839  ;  — Accarisio,  Vocabolario  ed  orto- 
grafla  delta  lingua  volpare,  Cento,  1543,  in-4<^  ;  Il  Vocor 
bolario  degli  academtci  aella  Crusca,  Yenise,  1612, 
in-fol.;  Antonini,  Dizionario  italiano,  latino  e  francese, 
1735, 2  vol.  in-4^;  Alberti  di  Yillanova,  Dictionnaire  itor 
lien-français,  Nice,  1778,  2  vol.  in-4^,  et  Diiùmario 
unioerscUe,  critico,  enciclopedico  délia  lingua  itiUiana, 
Lucques,  1797,  6  vol.  in-4**;  Barberi^  Dictionnaire  itt^ 
lien-français,  Paris,  1825,  2  vol.  in-4*;  Bonavilla,  Vbco- 
bolario  etimologico,  Blilan,  1825,  5  vol.;  Tomaseo,  Nuaoo 
dizionario  dei  sinonimi  ddla  lingua  italiana,  Florence, 
1830;  Morlino  et  de  Roujoux,  Dictionnaire  classique  tto- 
lien-français  et  français-italien,  Paris,  1832, 2  vol.  in-8®  ; 
Dizionario  délia  lingua  italiana,  Bologne,  1819^26,  7  vol.; 
Vocabolario  universale  italiano,  Naples,  1829-40, 2  vol.; 
—  Fr.  Alunno,  Le  richezze  délia  lingua  italiana,  Yenise, 
1543,  in-foL;  Giambullari,  Il  Gello,  cioè  ragionamentt 
délia  prima  origine  deUa  toscana  lingua^  Florence,  1540, 
in-4^;  Persio,  Discorso  intomo  alla  conformita  ddla 
(in^ua  italiana  con  la  greca,  Bologne,  1592,  in-8®;  Buon- 
mattei ,  Deila  ling%êa  toscana  liSri  II,  Florence,  1643, 
in-4<^  ;  F.  de  Diano,  Fiume  delV  origine  délia  lingua  ita~ 
liana  e  lalina,  Yenise,  16S6,  in-8^  ;  Oct.  Ferrari ,  Origines 
linguœ  italicœ,  Paris,  1676,  in-fol.;  Cesarotti,  Saggio 
sopra  la  lingma  ttajtona.  Ylcenoe,  1788,  in-8<»;  Galeani, 
DelV  uso  ede^  pregi  délia  lingua  italiana,  Turin,  1791, 

3  vol.  in-8";  TozzeUi  Mazzoni,  Origine  délia  lingua  itO' 
liana,  Bolofne,  1831  ;  Romani.  Opère  sopra  la  lingua 
italiana,  Mflan,  1825, 8  vol.  in-80(  Castlglia,  Studiisulla 
lingua  italiana.  Païenne,  1836.  E.  B. 

rrALiEifivB  (Littérature).  L'histoire  de  cette  littératurt 
peut  se  diviser  en  dnq  périodes.  La  l'*,  oui  s'étend  Jus- 
qu'au XIV*  siècle,  comprend  le  réveil  des  lettres  en  Italie 
après  l'invasion  des  Barbares,  et  les  premiers  essais  des 
poètes  sous  l'influence  des  modèles  provençaux  ;  la  2*  est 
dominée  par  trois  grands  noms,  Dante,  Pétrarque,  et  Boo- 
cace;  la  3*,  comprenant  la  seconde  moitié  du  xv*  siècle 
et  tout  le  XVI*,  est  l'âge  de  la  Renaissance,  et  renferme  ce 
qu'on  appelle  le  siècle  de  Léon  X;  la  4*  se  compose  du 
XVII*  siècle,  pendant  lequel  l'Italie,  malgré  sa  décadence, 
agit  encore  sur  les  littératures  voisines,  et  du  xvm*,  où 
elle  subit  l'influence  française;  la  5*  est  l'âge  contem- 
porain. 

Première  période, —  La  littérature  italienne  ne  procède 


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!•»!«  immédiatement  de  la  littérature  latine  :  les  lettres 
ro  maines,  tombées  en  décadence  dès  Tépoque  des  empe- 
reurs, allèrent  en  déclinant  Jusqu'à  Constantin,  qui ,  en 
délaissant  Rome  pour  Byzance,  donna  le  coup  mortel  aux 
lettres  et  aux  arts  en  Italie.  A  dater  au  triomphe  de  la 
religion  chrétienne  sous  cet  empereur,  la  littérature 
ecclésiastique  seule  fournit  des  ouvrages  remarquables. 
Mais  bientôt  Tinvasion  des  Barbares  anéantit  toute  cul- 
tare  morale,  et,  si  elle  introduisit  un  élément  nouveau 
dans  le  sol  épuisé  de  la  vieille  Italie ,  elle  ne  Ten  rendit 
pas  moins  pour  longtemps  stérile.  Touterois,  Tétat  de 
ritalie  sous  les  rois  goths  et  lombards  ne  fut  pas  aussi 
aiR^ux  qu'on  serait  tenté  de  le  croire  :  les  vunqueurs 
prirent  quelque  chose  de  la  civilisation  des  peuples  con- 
quis, et  il  suffit  de  citer  Théodoric  pour  prouver  que  les 
rois  goths  tinrent  à  honneur  de  protéger  les  lettres.  A 
répoque  de  Charlemagne,  Tltalie  étal;  plus  civilisée  que 
les  autres  contrées  de  l'Europe  ;  on  voit  ce  prince  attirer 
à  sa  cour  des  littérateurs  et  des  artistes  italiens,  entre 
autres  Théodulfe,  Goth  d'origine,  au'il  fit  évêque  d'Or- 
léans. Sous  les  successeurs  de  Charlemagne,  les  ténèbres 
vont  s'épaississant  de  plus  en  plus  :  les  seules  études  de 
ces  &ges  reculés  sont  la  jurisprudence  et  la  théologie  ;  et 
encore  de  misérables  disputes  d'école  absorbent-elles  le 
petit  nombre  d'esprits  qui  se  préoccupent  encore  de  ces 
sdences.  Les  mots  se  substituent  aux  idées  ;  la  subtilité 
et  le  sophisme  prennent  la  place  de  la  simplicité  des 

Le  pontificat  de  Grégoire  Vn  (1073-1085)  vit  apparaître 
les  premières  laeurs  de  la  renaissance  des  lettres  en 
Italie.  Ce  pape  donna  ordre  aux  évèques  d'entretenir 
chacun  prik  de  son  église  une  école  pour  l'enseignement 
des  lettres.  Dans  le  même  temps,  la  comtesse  lAathilde 
fondait  l'université  de  Bologne,  où  l'on  se  mit  à  étudier 
le  Code  Justinien.  Tous  les  grands  hommes  de  cette 
époque  sont  des  hommes  d'église,  et  les  deux  plus  cé- 
lèbres, nés  en  Italie,  passèrent  leur  vie  loin  de  leur  pays; 
ce  sont  :  Lanfranc,  de  l^vie,  qui  fit  de  l'abbaye  du  Bec, 
en  Normandie,  une  école  fameuse,  et  combattit  l'hérésie 
<le  Béranger  ;  et  S^  Anselme  d'Aoste,  son  disciple,  comme 
lui  abbé  du  Bec  et  archevêque  de  Cantorbéry.  Leur  plus 
grand  titre  de  gloire  est  l'admiration  de  leur  siècle  ;  leurs 
ouvrages  sont  oubliés ,  comme  les  disputes  théologiauea 
qui  y  avaient  donné  lieu.  —  Le  xii*  siècle  fit  entrer  clans 
la  dvilisation  européenne  un  élément  nouveau  :  les  Croi- 
sades établirent  des  communications  entre  Constantinople 
et  l'Italie ,  et  les  évêques  italiens  fréquemment  envoyés 
en  ambassade  dans  l'empire  d'Orient  s'initièrent  à  la 
connaissance  de  la  langue  et  de  la  littérature  des  Grecs. 
Halheureusement,  l'Église  et  l'Italie  étaient  souvent  trou- 
blées :  les  élections  des  papes  amenaient  des  conflits  dont 
les  empereurs  d'Allemagne  décidaient;  plusieurs  anti- 
papes provoquaient  des  schismes;  Arnaud  de  Brescû 
cherchait  à  établir  à  Rome  une  république,  que  le  pape 
Adrien  IV  ne  renversa  an'avec  l'aide  de  l'empereur  rre- 
déric  Barberousse.  Pendant  ces  troubles,  les  lettres  lan- 
guissaient, et  l'Italie  ne  fournissait  d'autre  homme  cé- 
lèbre que  Pierre  Lombard,  {0  maitrB  des  sentences,  qui 
alla  tenir  école  à  Paris.  Cétait  l'époque  de  la  grande  au- 
torité d'Aristote.  Les  lettres  se  réduisaient  à  la  grammaire 
et  à  la  dialectique.  La  querelle  des  Réalistes  et  des  Nomi- 
naux envahissait  les  écoles.  LMtalien  n'existait  pas  en- 
core, ou,  si  une  lan^e  vulgaire  se  parlait  communé- 
ment ,  elle  ne  s'écrivait  pas.  Le  latin,  déjà  passé  à  l'état 
de  langue  morte,  était  la  langue  des  auteurs,  et  il  avait 
bien  perdu  de  sa  pareté  sous  leur  plume.  Ce  qu'il  y  a  de 

1>1us  intéressant  à  cette  époque,  ce  sont  les  Chroniques 
ocales,  qui  abondent,  et  dont  Huratori  a  fait  l'analyse. 
Pise,  Gènes,  Bfilan,  avaient  leur  historien  officiel,  ra- 
contant les  événements  dont  il  avait  été  témoin,  avec 
partialité  sans  doute,  mais  non  sans  intérêt. 

Biais  pendant  que  la  langue  italienne  s'élaborait  len- 
tement et  obscurément ,  il  existait  déjà  dans  le  midi  de 
la  France  une  langue  toute  formée  et  une  école  de  poésie 
florissante.  Les  Troubadours,  appelés  en  Italie,  ne  pou- 
vaient manquer  d'y  avoir  des  imitateurs.  Le  premier  Ita- 
lien signalé  comme  poète  provençal  est  Alberto  llala- 
spina,  qui  florissait  à  la  fin  du  xii*  siècle.  On  cite  encore 
Sordello  de  Mantoue,  auquel  Dante  a  consacré,  dans  le 
Putrgatoiref  quelques-uns  de  ses  plus  beaux  vers  ;  ^lan- 
ftranco  Cicala  deuènes,  Bartolomeo  Zorri  de  Venise,  Lam- 
bertini  de  Bologne,  Laofranchl  de  Pise,  etc.  —  Mais  Tin- 
fluence  des  Troubadours  ne  produisit  pas  seulement  des 
poètes  provençaux  en  Italie,  elle  fit  naître  les  premiers 
poètes  Italiens  qui  se  servirent  de  la  langue  de  leur  pays. 
A  partir  de  l'année  1220,  Frédéric  II  tint  en  Sicile  une 


cour  brillante,  où  Ton  cultiva  U  poésie  nationale,  et  cette 
école  fut  si  célèbre,  qu'au  dire  de  Dante  on  donnait  de  son 
temps  à  tout  ouvrage  en  vers  le  nom  de  SkUien,  Entre 
autres  poètes,  l'école  sicilienne  compta  Ciullo  d'Alcamo, 
Frédéric  U  lui-même,  son  chancelier  Pierre  des  Vignes, 
Jacopo  da  Lentino,  les  deux  Colonna  fGuido  et  Odo),  Ra- 
niert  et  Ruggiere  de  Païenne.  De  1250  à  1270,  II  se  forma 
à  Bologne  une  nouvelle  école  de  poésie,  dont  le  chef  Tut 
Guido  Guinicelli.  Quand  on  compare  les  œuvres  de  cet 
aatear  à  celles  de  ses  devanciers,  on  y  trouve  plus  de 
suite  et  plus  d'art  dans  l'ensemble,  plus  d'imagination  et 
de  traits  ingénieux  dans  les  détails ,  plus  d'élévation  de 
sentiments  et  d'idées,  une  langue  plus  souple,  plus  polie, 
plus  originale;  mais,  à  peu  d'exceptions  près,  les  pièces 
de  Guido  sont  aussi  dans  le  goût  et  le  système  proven- 
çal ;  elles  roulent  sur  l'amour  chevaleresque.  A  l'école 
de  Bologne  appartient  aussi  Guidotto,  remarquable  par 
une  exquise  sensibilité.  Puis  fleurirent  en  Toscane  ou 
dans  les  pays  voisins  un  assez  nand  nombre  de  poètes 
qui  l'avaient,  à  ce  qu'il  semble,  reconnu  pour  leur 
maître  :  le  plus  célèbre  fut  Guittone  d*Arezxo,  qui  com- 
posa non -seulement  des  canzone,  mais  des  Litres  es 
prose  remarquables  par  l'énergie  et  la  chaleur  du  sen- 
timent. Citons  encore  le  franciscain  Jacopo  da  Todi, 
Buonagiunta  de  Lacqaes,  Guido  Lapo  de  Mantoue,  Fol- 
calchiero  de  Sienne,  et,  à  Florence,  Ugolino  Dbaldiol 
et  Dante  da  Majano.  Vint  ensuite  Brunetto  Latini,  le 
maître  de  Dante,  qui  fit  quelques  vers  amoureux ,  parce 
qu'il  fallait  en  faire  pour  être  réputé  un  homme  bien  né 
et  de  belles  manières  ;  mais  il  n'y  avait  en  lui  rien  de 
bien  poétique.  La  science,  la  philosophie  et  la  littérature 
ancienne  furent  ce  qu'il  cultiva  de  préférence.  Il  traduisit, 
dit-on,  en  italien  la  Rhétorique  et  divers  fragments  des 
harangues  de  Cicéron,  et  répMsndit  de  la  sorte  des  prin- 
cipes de  goût  et  de  composition  littéraire  plus  généraux 
et  plus  relevés  que  ceux  qui  avaient  Jusque-là  dominé. 
Le  principal  ouvrage  de  Brunetto,  intitulé  le  Trésor,  est 
le  résumé  de  toute  la  science  de  son  temps,  qu'il  avait 
recueillie  dans  de  nombreux  voyages.  Par  le  double  effet 
des  préceptes  et  des  exemples  de  Brunetto  Latini ,  la  ten- 
dance vers  les  études  et  les  spéculations  philosophiques 
se  fortifia  ;  elle  se  fit  sentir  Jusque  dans  la  nouvelle  école 
de  poésie  qui  venait  de  se  former  à  Florence,  et  où  l'on 
se  piqua  moins  d'exprimer  l'amour  que  de  le  définir 
subtilement  dans  le  sens  des  opinions  d'Aristote.  Guido 
Cavalcanti,  le  poète  de  cette  école  qui,  grâce  aux  éloges 
de  Dante,  en  est  ^néralement  regardé  comme  le  chef, 
est  du  moins  celui  qui  en  représente  le  mieux  le  côté  sa- 
vant, abstrait,  philosophique  :  11  composa  des  ballades 
et  des  canxones,  où  il  introduisit  assez  mal  à  propos  ses 
dissertations  4>hiloaophiques  et  ses  souvenirs  de  l'anti- 
quité. 

Deuxième  période,  —  Dante  inaugure  magnifiquement 
une  civilisation  nouvelle.  Outre  le  poème  ^ique  par  le- 

3uel  il  est  surtout  connu  {V,  Divras  comédib),  il  a  laissé 
'antres  ouvrages  importants.  Le  premier  est  la  Vita 
nuova  (Vie  nouvelle),  qu'il  écrivit  en  1291,  à  l'âge  de 
21  ans.  n  y  réunit  tontes  les  pièces  de  poésie  qu'il  avait 
faites  pour  Béatrix,  morte  depuis  un  ou  deux  ans,  et  les 
lia  entre  elles  par  un  commentaire  historique  ou  psycho- 
logique, dans  lequel  entra  tout  ce  que  sa  mémoire  lai 
rappelait  des  motifs  qui  l'avaient  porté  à  composer  ces 
poésies,  et  des  impressions  au  milieu  desquelles  il  les 
avait  écrites.  —  Le  traité  latin  De  Eloquio  vtUgcuri  (De 
la  langue  et  de  l'éloquence  vulgaire)  est  divisé  en  deux 
parties.  La  première  est  consacrée  à  l'histoire  des  dii^ 
iectes  italiens.  Dante  les  classe  avec  méthode,  et  de  ma- 
nière à  rattacher  leun  rapports  intrinsèques  à  leur  posi- 
tion géographique;  il  donne  de  plcusleun des échantilloos 
curieux.  Selon  lui,  le  dialecte  dans  lequel  éorivaient 
les  poètes  du  xm*  siècle  n'est  le  dialecte  particulier 
d'aucune  des  provinces  ni  des  villes  de  l'Italie ,  mais  un 
dialecte  de  cour,  un  dialecte  idéal,  modèle,  formé  indis- 
tinctement de  ce  qu'il  y  avait  de  plus  parfait  dans  les 
dialectes  locaux,  et  il  lui  donne  le  nom  de  dialecte  cat' 
dinal  ou  illustre.  Dans  la  deuxième  partie  du  Traité  de 
l'éloquence  vulgaire,  Dante  a  posé  les  principes  d'une 
théorie  de  la  poésie.  Après  avoir  parlé  de  la  poésie  en 
général,  il  traite  de  sa  forme,  et  de  ses  divers  styles,  qui 
sont  le  tragique,  le  comùiue  et  V^iaque,-  mais  il  prend 
ces  termes  dans  un  sens  tout  différent  de  leur  sens  clas- 
sique et  convenu.  Par  tragique,  il  entend  le  style  noble 
et  élevé  ;  par  comique,  le  style  bas  et  médiocre  ;  par  élé- 
daque,  le  style  bas  à  l'exclusion  de  tout  autre.  Il  n'entre 
dans  aucune  explication  particulière  relativement  aui 
styles  élégiaque  «I  comique;  qnant  au  tragique,  il  ne 


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troirre  que  trois  snjets  auxquels  il  condeone,  la  bravoure 

Serrière,  Tamour,  la  vertu.  —  Un  troisième  ouvrage  de 
Lote,  le  Banquet  {Il  contnto),  est  un  commentaire 
identiflque  et  philosophique  de  14  canzones  des  plus 
belles  qu'il  eût  faites  Jusqu'alors.  Enfin  on  a  de  lui  un 
traité  latin  De  monarchia,  écrit  pour  soutenir  le  parti 
de  fempereur  Henri  Vn.  Dans  cet  ouvrase  divisé  en  trois 
li«Tes,  Dante  examine  :  1*  si  la  monarchie  universelle  est 
nécessaire  au  bonheur  du  monde  ;  2°  si  le  peuple  romain 
avait  eu  le  droit  d'exercer  cette  monarchie  ;  3^  si  l'auto- 
rité dn  monarque  dépend  de  Dieu  ou  d*un  autre,  mi- 
nistre ou  Ticaire  de  Dieu.  H  résout  affirmativement  les 
deux  premières  questions  ;  Il  s'attache ,  surtout  dans  la 
li*  partie ,  à  démontrer  que  l'empereur  est  indépendant 
du  pouvoir  du  pape,  soutient  que  les  souverains  dépen- 
dent directement  de  Dieu,  et  tend  à  ne  reconnaître  l'au- 
torité du  pape  qu'en  matière  spirituelle. 

La  renommée  de  Dante  domine  son  siècle;  mais  ce 
serait  une  intustice  que  de  ne  pas  noter  le  mouvement 
littéraire  oui  se  proauisait  en  même  temps.  C'était 
répoque  ou  Robert  d'Anjou ,  roi  de  Naples  et  comte  de 
Provence,  protégeidt  les  savants  et  môme  avait  la  noble 
émulation  de  les  égaler.  La  plupart  des  princes  de  l'Ita- 
lie, et,  à  leur  exemple,  les  riches  citoyens,  se  faisaient 
une  gloire  de  protéger  les  écrivains  et  les  artistes,  à  qui 
l'on  ne  donna  peut-être  Jamais  plus  d'encouragements  et 
d'honneurs.  Les  Unlveraités  de  Bologne  et  de  Padouo 
contribuèrent  à  propager  et  à  étendre  le  goût  des  lettres 
en  Italie  :  leurs  professeurs  étaient,  pour  la  plupart,  des 
hommes  de  grand  talent,  tels  que  Pierre  d'Aibano  et 
Cecco  d'AscoTl.  Ci  no  da  Pîstoia,  professeur  de  Jurispru- 
dence, était  également  connu  comme  poète,  et  Pétrarque 
lui  fit  l'honneur  de  l'imiter.  Giovanni  d'Andréa,  de  Bolo- 
gne, était  un  canoniste  célèbre,  et  sa  fille  Novella  était 
assez  savante  pour  le  suppléer  souvent.  L'Histoire,  genre 
dans  lequel  les  Italiens  se  sont  le  plus  distingués,  com- 
mençait à  avoir  des  Interprètes,  qui  font  autorité  pour  la 
langue  et  pour  les  faits.  Dino  Compaeni,  florentin,  écrivit 
nue  Chroniguê  qui  s'étend  de  1280  à  1312.  Jean  Villani 
rédigea  aussi,  mais  avec  plus  d'étendue  et  de  talent,  avec 
une  sorte  de  dignité,  quoique  dans  un  style  naïf  et 
simple,  une  Histoire  de  Florence  depuis  sa  fondation 
Jusqu'à  l'an  1348,  ouvrage  que  Matteo  Villani,  son  frère, 
et  Philippe,  fils  de  Matteo,  continuèrent  Jusqu'à  l'an  1364, 
rt  qui  est  rangé  parmi  les  classiaues  italiens.  Venise  eut 
aussi  son  historien,  le  doge  André  Dandolo,  dont  le  livre, 
écrit  en  latin,  comprend  depuis  les  premières  années  de 
l'ère  chrétienne  Jusqu'à  l'an  1342.  Albertino  Hussato, 
de  Padoue,  fut  historien  et  poète.  Il  a  laissé  une  histoire 
floos  le  titre  d'Augtuta,  parce  qu'elle  contient  en  16  li- 
vres la  Tie  de  l'empereur  Henri  vn.  Dans  8  autres  livres. 
Il  raconte  les  événements  (fui  suivirent  la  mort  de  ce 
pHnoe,  lusqu'en  1317;  3  livres  en  vers  hérolaues  ont 
pour  sujet  le  siège  de  Padoue  par  Can  Grande  de  la 
Scala,  et,  dans  un  dernier  livre  en  pose,  Mussato  décrit 
les  troubles  qui  déchirèrent  cette  ville  et  la  firent  passer 
sous  la  domination  des  seigneurs  de  Vérone.  Les  frâésies 
de  Mussato,  épltres,  élèves,  églogues,  sont  en  latin,  d'un 
style  abondant  et  facile.  Il  composa  aussi  deux  tragédies 
latines,  les  premières  oui  aient  été  écrites  en  Italie  : 
l'une,  Eccerinus,  dont  le  fameux  Ezzelino  est  le  héros  ; 
Tautre,  Achilles^  qui  a  pour  sujet  la  mort  d'Achille. 

Pétrarque  partage  avec  Dante  l'honneur  d'avoir  formé 
la  poésie  itahenne.  Ses  osuvres  latines,  sur  lesquelles  il 
fondait  tout  l'espoir  de  sa  renommée,  et  qu'on  a  complè- 
tement oubliées,  ne  sont  pas  sans  mérite  :  il  sontit,  le 
premier,  qu'il  fallait  œ^ller  le  langage  barbare  de  l'école, 
et  remonter  à  Qcéron  et  à  Vh^le.  Ce  furent  les  deux 
modèles  qu'il  se  proposa  dans  sa  prose  et  dans  ses  vers. 
Lm  principaux  de  ces  ouvrages  sont  :  un  Traité  d$ 
Vunê  §t  de  Vautre  fortune^  où  lia  développé  l'idée  philo- 
sophique ,  qu'il  est  souvent  plus  difficile  de  soutenir  la 
bonne  que  la  mauvaise  fortune;  des  Traités  De  la  vie 
joittotr»,  et  Sur  le  Unsir  des  religieux;  un  Traité  Du 
wiipris  du  monde,  en  forme  de  dialogue  entre  l'auteur  et 
8*  Augustin  ;  un  écrit  singulièrement  original,  intitulé  : 
De  9a  propre  ignorance  et  de  celle  de  beaucoup  d' autres, 
«1  r^nse  à  des  Jeunes  gens  qui  l'avaient  traité  d'igno- 
lant  parce  qu'il  ne  parta^ndt  pas  leur  exclusive  admiration 
pour  Aristote  ;  un  poème  inachevé,  V Afrique,  en  l'hon- 
mnr  de  Sdpion  l'Africain  ;  douze  églogues ,  dont  quel- 
qoes-unes  sont  de  vraies  satires  contre  les  papes  et  les 
•DOS  de  rÉglîse  ;  une  Correspondance  avec  tous  les  grands 
bommes  d'alors,  où  l'on  retrouve  l'histoire  politique  et 
littéraire  de  l'époque.  —  Le  Canzoniere,  recueil  de  poè- 
te ta  langue  Tulgaire,  et  que  pour  cette  raison  Pé- 


trarque regardait  presque  comme  une  erreur  de  son 
génie,  est  cependant  ce  qui  a  fait  de  lui  un  des  premiers 
poètes  de  l'Italie.  Un  seul  objet  remplit  cette  suite  de 
petits  poèmes,  la  passion  toute  platonique  de  Pétraroue 
pour  Laure  de  Sades,  dame  vertueuse  autant  que  belle  ; 
mais  la  monotonie  <}u  sujet  est  rachetée  par  le  coloris  de 
l'imagination  et  la  magie  du  style.  La  rudesse  sublime 
de  Dante  n'existe  plus;  tout  est  châtié,  élé^nt,  correct; 
la  langue  poétique  vulgaire  est  fixée  en  Italie,  et  restera 
ce  que  Ta  faite  Pétrarque. 

Boccace  fut  pour  la  prose  ce  que  Dante  et  Pétrarque 
furent  pour  la  poésie;  ses  écrits  sont  le  type  du  langage 
correct  et  élégant;  son  style  pittoresque  et  gracieux, 
libre  dans  ses  allures,  mais  toujours  ch&tié  dans  ses 
termes,  est  demeuré  le  modèle  des  prosateurs  italiens. 
L'œuvre  principale  de  Boccace,  le  Dhavi\éron,  a  été  ap- 
préciée ailleurs  {V,  DécAMéaoïij.  Parmi  ses  ouvra^  la^ 
tins,  nous  citerons  :  un  Traité  de  la  généalogie  des  Dieux^ 
où  il  a  réuni  tout  ce  que  ses  études  lui  avaient  appris 
sur  le  système  mythologique  des  Anciens;  un  petit  Traité 
sur  les  montagnes,  les  forêts,  les  fontaines,  les  lacs,  les 
fleuves,  les  étangs  et  les  différents  noms  de  la  mer,  le- 
quel put  être  alors  très-utile  pour  l'étude  de  la  géogra- 
phie ancienne,  dont  les  notions  étaient  aussi  confuses 
aue  celles  de  la  mythologie;  un  Traité  des  infortunes 
des  hommes  et  des  femmes  illustres;  un  livre  Des  femmes 
célèbres;  16  églogues,  roulant  presque  toutes  sur  des 
faits  qui  lui  sont  particuliers  ou  des  traits  de  l'histoire 
de  son  temps,  ce  qui.  Joint  à  la  dureté  et  à  l'obscurité 
du  style ,  les  rend  souvent  difficiles  à  entendre.  Boc- 
cace avait  composé  des  sonnets  et  des  poésies  amou- 
reuses en  langue  vulgaire  :  il  les  brûla  quand  il  connut  les 
vers  de  Pétraroue,  mais  il  conserva  les  grands  poèmes; 
il  en  retira  la  gloire  d'avoir  inventé  Vottawi  rima,  forme 
poétique  si  heureuse,  qu'un  seul  poète  excepté  (  le  Tri»- 
sin  ),  elle  fut  ensuite  adoptée  par  tous  les  épiques  iti^ 
liens.  La  Théséide  fut  le  premier  poème  où,  renonçant 
aux  fictions  et  aux  songes,  qui  étaient  devenus  comme 
un  cadre  universel ,  Boccace ,  à  l'exemple  des  anciens 
poètes,  imagina  une  action  bien  tissue  et  intéressante. 
Le  PUostrato,  poème  en  dix  parties,  a  pour  sujet  l'a- 
mour de  Trolle,  fils  de  Priam,  pour  Curyséis,  la  tra- 
hison de  celle-ci,  et  le  désespoir  de  l'amant  trompé; 
l'Académie  de  la  Crusca  a  mis  ce  poème  au  nombre  des 
ouvrages  qui  font  autorité  pour  la  langue  italienne.  Le 
Ninfale  fùsolano  est  un  petit  poème  sans  division  de 
chants,  où  sont  racontées  los  amours  du  berger  Africo 
et  de  la  nymphe  Mcnsola.  VAmorosa  visions,  selon 
l'usage  alors  très-commun,  est  écrite  en  tercets,  et  forme 
un  grand  acrostiche  :  en  prenant  la  première  lettre  du 
1*'  vers  de  chaque  tercet,  depuis  le  commencement  Jiu^ 
qu'à  la  fin,  on  en  compose  deux  sonnets  et  une  canzone, 
en  vers  très-réguliers,  que  le  poète  adresse  à  sa  mal- 
tresse ,  et  dans  lesquels  se  trouvent  cachés  leurs  deux 
noms,  Madama  Maria  et  Giovanni  di  Boccacio  da  Cer^ 
laldo;  Boccace  avait  pris  cette  singulière  Idée  aux  Pro- 
vençaux. Le  FUocopo  parait  être  son  premier  ouvrage  en 
prose  italienne  ;  c'est  un  roman  de  chevalerie  avec  tontes 
les  aventures  et  les  invraisemblances  d'usage.  La  Ftom- 
metta,  autre  roman  divisé  en  7  livres,  est  d'un  style 

8 lus  naturel  ;  l'héroïne,  qui  n'est  autre  que  la  princesse 
iarie  de  Naples,  y  raconte  ses  amours  avec  Pamphile, 
qui  représente  Boccace.  Le  Corbaccio  ou  Ijiberinto  d'à-- 
more  est  une  satire  violente  et  souvent  cynique  contre 
une  veuve  dont  Boccace  était  devenu  amoureux,  et  dont 
il  avait  été  dédaigné.  Citons  enfin  VAmeto  ou  Admète, 
pastorale  mêlée  de  prose  et  de  vers,  premier  essai  d'une 
invention  nouvelle,  et  VUrbano^  court  roman  dont  l'em-. 
pereur  Frédéric  Barberousse  est  le  héros.  —  L'habitude 
d'écrire  des  romans  fit  qu'en  composant  son  Origine, 
vita  e  costumi  di  Dante  Alighieri ,  Boccace  en  fit  plutôt 
un  roman  ou'une  histoire  :  il  passe  légèrement  sur  les 
actions,  les  infortunes  et  les  ouvrages  du  grand  homme, 
et  parle  fort  au  long  de  ses  amours.  Les  leçons  gue  Boc- 
cace donna  dans  ses  dernières  années  sur  la  Dwine  eo- 
médie  sont  beaucoup  plus  estimées;  Imprimées  seule- 
ment en  1724,  elles  ne  s'étendent  que  Jusqu'au  17*  chant 
de  V Enfer;  c'est  le  premier  modèle  Italien  de  la  prose 
didactique. 

La  seconde  moitié  du  xiv*  siècle  se  ressentit  de  Tim- 
pulsion  donnée  par  Dante,  Pétrarque  et  Boccace  ;  ce  fàt 
une  époque  de  grande  activité  intellectuelle.  Les  Univers 
sites  roumissalent  des  hommes  remanruables  dans  toutes 
les  branches  du  savoir.  Louis  Marsidi,  Louis  Donato  et 
bcAucoup  d'autres  occupaient  avec  honneur  les  chaires 
de  th^logie.  L*astrologie,  science  chimérique,  mais  chère 


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au  moyen  ftge,  était  cultivée  par  Andolone  del  Nero, 
Génois,  et  par  Thomas  de  Pisan,  que  sa  renommée  fit 
appeler  en  France  par  Charles  V,  et  dont  le  plus  beau 
titre  est  d'être  le  père  de  notre  Christine  de  Pisan.  Paul 
le  géomètre  ne  se  borna  pas,  comme  l'indique  son  sur- 
nom ,  aux  raines  recherches  de  Tastrologie.  Pierre  Cres- 
cenzio  écrivit  sur  Tagriculture.  La  jurisprudence,  cultivée 
de  tout  temps  avec  succès  dans  l'Université  de  Bologne, 
reçut  un  nouveau  lustre  des  ouvrages  et  de  l'enseigne- 
ment de  Bartole,  auteur  des  Traités  De$  Guelfes  et  des 
Gibelins,  De  l'administrcUion  de  la  république,  De  la 
tyrannie,  etc.,  et  dont  Balde,  son  élève,  partagea  la  ré- 
putation. Pierre  Villanl  écrivit  les  Vies  des  hommes 
Illustres  de  Florence,  et  eut  la  gloire  d'être  choisi  en  1401 
pour  remplacer  Boccace  dans  l'interprétation  de  la  Di- 
vine comédie,  que  commentait  vers  le  même  temps 
Benvenuto  da  Imola,  auteur  d'une  Histoire  des  Empe- 
reurs. Biarino  Sanuto,  noble  Vénitien,  écrivit  une  rela- 
tion remarquable  de  ses  voyages  en  Orient.  —  Pétrarque 
se  plaignait  d'avoir  créé  une  foule  de  poètes  qui  l'acca- 
blaient de  leurs  poésies  latines  :  l'exemple  d'un  grand 
poète  et  le  goût  du  temps  avaient  causé  cette  épidémie. 
Un  poète  aujourd'hui  oublié ,  Zanoli  da  Strada,  n'en  ob- 
tint pas  niioihs  les  honneurs  du  triomphe.  Landino, 
poète  et  musicien,  laissa  des  poésies  latines  qui  égalent 
celles  de  Pétrarque.  Enfin  Coluccio  Salutato  écrivit  en 
vers  et  en  prose ,  et  ses  contemporains  le  comparent  à 
Cicéron  et  à  Virgile.  Le  nombre  des  versificateurs  en 
langue  vulgaire  était  encore  plus  grand,  et  parmi  eux  on 
compte  des  femmes  :  S^  Catherine  de  Sienne  est  restée 
célèbre  par  la  pureté  et  la  vivacité  de  son  style,  et  fait 
autorité  pour  la  langue.  Federigo  Freui  voulut  imiter , 
dans  son  Quadriregio  owQuadriregnOy  la  Divine  Comédie 
de  Dante  ;  Fazio  degli  Uoerti  fut  moins  heureux  encore 
dans  le  Dttia  Mondo  (Dicta  Mundi),  Buonacorso  de  Mon- 
temagno  égala  presque  Pétrarque  dans  ses  poésies,  et  ce 
même  poète  eut  encore  pour  imitateurs  Antonio  da  Fer- 
rara,  Francesco  d^i  Albizzi,  Sennuccio  del  Bene,  Ze- 
none  de'  Zenoni.  mnco  Sacchetti  fut  en  même  temps 
poète  et  prosateur  :  il  a  laissé  des  Nouvelles  dans  le 
genre  du  Décameron,  moins  l'immoralité.  En  1378  parut 
un  autre  recueil  de  contes  supérieurs  à  ceux  de  Sac- 
chetti, et  que  l'on  peut  placer  à  cèté  de  ceux  de  Boccace  : 
c'est  //  Pecorone  (la  Pécore);  l'auteur  est  Giovanni  Fio- 
rentino.  De  ce  recueil,  connu  dans  toute  l'Europe  du 
moyen  &ge,  Shakspeare  a  tiré  plusieurs  détails  de  ses 
ouvrages,  en  particulier  l'histoire  du  Marchand  de  Ve- 
nise, On  a  enfin  d'Antonio  Pucci  un  capitdo  satiriqne 
(F.  Capitolo  )  sur  Florence,  où,  prenant  tour  à  tour  le 
style  comique  et  le  style  grave,  il  signale  les  abus  de  son 
temps  avec  force  et  avec  esprit. 

Troisième  période,  —  Nous  voici  arrivés  au  siècle  de 
rérudition.  Encouragés  par  des  princes  qui,  pour  la  plu- 
part, cultivaient  eux-mêmes  les  lettres,  surtout  par  les 
llédicis,  les  savants  entreprirent  de  faire  revivre  l'anti- 
quité :  les  manuscrits  des  anciens  furent  découverts; 
ceux  que  l'on  avait  déjà  furent  expliqués.  La  plupart 
des  grands  hommes  qui  ont  illustré  cette  période  sortirent 
des  écoles  de  deux  grammairiens  célèbres,  Jean  de  Ra- 
venue  et  le  savant  grec  Emmanuel  Chrysoloras.  Guarino 
de  Vérone,  élève  de  Jean  de  Ravenne,  se  rendit  à  Con- 
stantinople  uniquement  pour  apprendre  le  grec  à  l'école 
de  Chrysoloras.  De  retour  de  ses  voyages,  ou  il  avait  re- 
cueilli des  manuscrits  précieux,  il  professa  à  Vérone,  à 
Padoue,  à  Bologne,  à  Venise  et  à  Ferrare.  Ses  principaux 
ouvrages  sont  des  traductions  latines  de  plusieurs  Vies 
et  de  quelques  OEuvres  morales  de  Plutarque,  et  sur- 
tout de  la  Géographie  de  Strabon.  Il  écrivit  aussi  la  vie 
d*Aristote,  celle  de  Platon,  et  composa  une  grammaire 
Ocecque  et  une  grammaire  latine.  Son  meilleur  titre  de 
âoire  est  d'avoir  découvert  les  poésies  de  Catulle.  —  Jean 
Aurispa  professa  aussi  dans  les  principales  villes  d'Italie, 
alla  à  Gonstantinople  étudier  le  grec,  en  rapporta  les 
poésies  de  Callimaque,  de  Pindare,  d'Oppien,  lès  cBuvres 
de  Platon,  de  Plotin,  de  Xénophon,  etc.,  les  expliqua  et 
«D  multiplia  les  copies.  —  Ambrog^o  le  Camaldule  ne 
professa  point,  mais,  par  ses  relations,  ses  correspon- 
dances et  ses  travaux,  il  entretint  le  goût  des  bonnes 
études,  que  de  célèbres  professeurs,  ses  amis,  répan- 
daient par  leurs  leçons.  —  Leonardo  Bruni,  élève  de 
Jean  de  Ravenne,  secrétaire  apostolique,  et  plus  tard 
chancelier  de  la  république  de  Florence,  a  laissé  un 
nand  nombre  de  traductions  des  auteurs  grecs  et  des 
Pères  de  l'Église,  et  une  Histoire  de  Florence,  depuis 
Toriffine  de  cette  ville  Jusqu'à  l'an  1401.  Il  a  aussi  écrit 
des  Mémowes  ou  Commentaires  sur  les  événements  pu- 


blics de  son  temps,  et  les  biographies  de  Dante  et  de  Pé- 
trarque, toutes  deux  en  italien.  —  Poggio  Bracdolino, 
connu  en  France  sous  le  nom  du  Pogge,  principalement 
comme  auteur  d'un  recueil  de  bons  nurts  et  de  facéties 
licencieuses,  fut  un  personnage  très-grave,  d'une  grande 
autorité  dans  les  lettres,  et  l'un  de  ceux  qui  leur  ren- 
dirent à  cette  époque  les  services  les  plus  signalés,  n  re- 
trouva un  grand  nombre  de  manuscrits  dans  les  monas- 
tères de  France  et  d'Allemagne,  entre  autres  Quintilien, 
Vitruve,  un  ouvrage  de  Lactance,  et  quelques  Discours 
de  Cicéron.  Il  a  composé  plusieurs  traités  philosophiques 
remarquables.  Du  malheur  des  princes^  Des  vicissitudes 
de  la  Fortune,  De  Vhypocrisie;  un  dialo^e  Sur  le  mal- 
heur de  la  destinée  humaine;  une  Bistotre  de  Florence, 
depuis  1350  Jusqu'en  1455.  Poggio  eut  de  grandes  que- 
relles avec  les  érudits  contemporains  :  le  plus  célèbre  de 
ses  adversaires  fut  Filelfo,  qui  étudia  à  Gonstantinople, 

{professa  à  Bolog^ne  et  à  Florence,  laissa  des  traductions 
atines  de  la  Rhétorique  d'Ariatote,  de  deux  traités  d'Hip- 
pocrate,  de  plusieurs  Vies  de  Plutarque,  de  la  Cyropédie 
de  Xénophon,  et  composa  plusieurs  traités  philoso- 
phiques, des  Dialogues  sur  le  modèle  du  Banquet  de 
Platon,  des  poésies  latines  qui  lui  valurent  la  couronne 
poétique  des  mains  du  roi  de  Naples,  des  satires  et  des 
épitres  curieuses  pour  l'histoire  de  son  siècle.  —  Laurent 
Valla  succéda  à  FiIelfo  dans  la  réputation  du  plus  savant 
professeur  de  son  temps.  On  a  de  lui  une  Histoire  de  Fer- 
dinand d'Aragon  et  quelques  traités  de  linguistique. 

Le  XV*  siècle  vit  le  commencement  de  cette  émigration 
des  Grecs  en  Italie,  qui  contribua  si  puissamment  à  la  re- 
naissance des  lettres.  Hais  s'ils  mirent  à  la  mode  la 
science,  ils  inaujgurërent  aussi  ces  disputes  souvent 
oiseuses  qui  passionnaient  les  esprits.  Ce  fut  le  temps 
des  querelles  sur  Aristote  et  Platon.  Deux  Grecs,  nommés 
tous  deux  Georges  de  Trébizonde,  écrivirent  Pun  pour, 
Tautre  contre  Platon.  Après  eux,  le  cardinal  Bessarion 

t»rit  parti  pour  Platon,  et  le  GrecThéodore  Gaza  de  Thessa- 
onique  pour  Aristote.  Cosme  de  Hédicis  fonda  à  Florence 
une  Académie  platonicienne,  consacrée  à  l'explication  et 
à  l'étude  du  philosophe  dont  elle  portait  le  nom.  Les 
principaux  membres  furent  :  Marsile  Ficln,  qui  écri- 
vait à  23  ans  ses  quatre  livres  des  Institutions  p/otont- 
ciennes,  traduisit  Platon,  et  l'expliqua  publiquement;  Pic 
de  La  Bfirandole,  le  type  de  l'étude  et  au  savoir  précoces, 
beau  génie  fourvoyé  par  les  subtilités  de  Técole,  auteur 
d'une  thèse  De  omni  re  scibili,qm  est  un  prodise  de  talent 
mal  employé,  et  d'un  livre  intitulé  Heptapte,  où  la  Genèse 
est  expliquée  par  les  allégories  de  Platon;  Christophe 
Landino,  qui  fut  le  maître  de  Laurent  de  Hédicis. 

On  ne  se  borna  pas  dans  ce  siècle  d'érudition  à  la  re- 
cherche des  anciens,  à  l'étude  de  leurs  langues,  à  l'intei^ 
prétation  de  leurs  chefs-d'œuvre;  on  y  Joignit  la  re- 
cherche des  antiquités,  des  médailles,  des  monuments  de 
toute  sorte  ;  on  en  formait  des  collections,  on  expliquait 
les  inscriptions,  on  s'en  servait  pour  l'intelligence  des 
auteurs,  qui  aidaient  à  leur  tour  a  expliquer  les  monu- 
ments. L'un  des  premiers  qui  employa  cette  méthode  fat 
Flavio  Biondo;  dans  deux  ouvrages  de  Rome  renouvelée 
et  Rome  triomphante,  écrits  en  latin,  il  montra  une  éru- 
dition prodigieuse  pour  le  temps.  Pomponius  Leto  on 
Letus  explora  les  antiquités  de  Rome  avec  succès  ;  il  a 
laissé  divers  traités  sur  les  lois  et  les  moeurs  des  anciens 
Romains,  et  une  histoire  des  empereurs.  —  Son  ami  Pla- 
tina  est  surtout  connu  par  une  nistoire  des  Papes,  écrite 
avec  élégance  et  impartialité.  —  Mais  le  plus  célèbre  his- 
torien de  ce  temps  fut  iEneas  Sylvius  Piccolomlni,  qui 
devint  pape  sous  le  nom  de  Pie  II.  Il  a  écrit  des  Com" 
mentaires  en  12  livres  sur  les  événements  arrivés  de  son 
temps  en  Italie,  divers  opuscules  philosophiques,  des 
traités  de  grammaire  et  de  philologie. 

La  littérature  italienne  est  très-riche  en  historiens;  le 
morcellement  du  territoire  a  pu  favoriser  ces  histoires 
particulières.  Au  xv*  siècle,  Sambellico  et  Bemardo  Gius- 
tiniani  écrivirent  l'histoire  de  Venise;  Verserio,  celle  des 
princes  de  Carrare;  Jean  SimoneUa,  celle  de  François 
Sforza  ;  Bernardine  Corio,  celle  de  Milan  ;  Giorgio  Stella, 
celle  de  Gênes.  Il  n'v  eut  pas  de  petit  prince  qui  n'eût 
son  historiographe,  le  plus  sourent  partial,  parce  qull 
était  dépendant.  La  plupart  de  ces  ouvrages  étuent  écrits, 
en  Utin.  Cependant  Pandolfo  Colienucao  écrivit  l'his- 
toire de  Naples  en  langue  italienne. 

Le  débordement  des  poètes  latins  fut  encore  plus  foi^. 
que  dans  le  siècle  précédent.  Il  est  inutile  de  faire  l'éno- 
mération  de  compositions  presque  toutes  sans  talent,  ec 
complètement  oubliées.  Cest  aussi  dans  ce  siècle  qu'ap- 
paraissent les  improvisateurs  :  plusieurs  excitèrent  l'ad- 


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fflintion  de  leurs  contemporains;  mais  il  en  est  des  im- 
■profisaleiirB  comme  des  grands  acteurs,  ils  meurent  tout 
«nders,  laissant  à  peine  un  nom.  On  cultivait  la  poésie 
latine  ayec  plus  de  succès  à  Naples  que  dans  le  reste  de 
ritalie  :  Pontano  fit  des  rers  aussi  semblables  pour  Télé- 
gance  et  la  grftce  à  ceux  du  siècle  d*Auguste  quMI  était 
possible  à  des  modernes  de  le  faire;  Beccadelli,  sur- 
nommé Palermita  (de  Païenne^,  a  laissé  des  tragédies, 
des  élégies  et  autres  poésies  latines  remarquables,  mais 
d*ime  liberté  par  trop  antique. 

Ia  poésie  italienne  n'était  pourtant  pas  abandonnée. 
L'exemple  de  Laurent  de  Médicis  devait  stimuler  les 
portes  :  ce  prince  a  laissé  des  canzones,  des  é^ogues, 
des  poésies  morales»  remarquables  par  Télégance  du  style 
et  la  force  des  pensées;  le  premier  il  écrivit  pour  le 
peuple  :  on  a  de  lui  des  cantiques,  un  Mystère  de  S^  Jean 
et  S^  Paul ,  quMl  Qt  représenter  au  mariage  d*un  de  ses 
eniants,  enfin  des  chansons  restées  populaires,  pleines 
d^esprit  et  de  gaieté.  —  Auprès  de  lui  se  place  Politien , 
savant  universel ,  philosophe  pour  obéir  au  goût  de  son 
temps,  mais  poète  par  nature.  Dès  Tàge  de  15  ans,  il  pu- 
blia des  épltres  et  des  épîgrammes.  Il  célébra  Julien  de 
Médicis  dans  un  poème  qu'il  dédia  à  Laurent,  composa 
des  chants  populaires  ou  canzoni  a  ballo ,  d*un  tour 
spirituel  et  él^ant ,  reprit  et  perfectionna  Vottava  rima, 
Ibventée  par  Boccace,  et  donna,  dans  la  Fawla  di  Orfeo^ 
le  modèle  de  la  première  composition  dramatique  mo- 
derne. —  Sannazar  exprima  ses  sentiments  patriotiques 
dans  des  sonnets  harmonieux.  Sa  pastorale  de  VArcadie, 
malgré  la  pauvreté  du  si:ûe^  ent,  dans  le  xvi*  siècle  seule- 
ment, 60  éditions.  —  Les  autres  poètes  italiens  de  l'époque 
sont  restés  bien  au-dessous  des  précédents.  Giusto  da 
Conti  imita  servilement  Pétrarque  dans  des  canzones  qui 
ont  presque  toutes  pour  su^et  la  belle  main  de  sa  dame. 
BuTchiello,  poète  populaire,  écrivit  des  poésies  presque 
toafours  incohérentes,  mais  qui  ne  manquent  ni  de 
verre,  ni  d'originalité.  Les  trois  frères  Pulci,  Bemardo, 
Lacca  et  Lnigi,  écririrent  des  élégies,  des  églogues  et  des 
poèmes  en  Thonneur  de  Julien  et  de  Laurent  de  Médicis. 
Serafino  Aquilano  fut  le  plus  célèbre  de  tons  ces  poètes  ; 
on  régalait  à  Pétrarque;  mais  sa  réputation  ne  lui  sur- 
Técot  que  d*un  siècle.  Il  est  juste  aussi  de  tirer  de  la 
foule  Matteo  Palmieri,  dont  la  Città  di  Vitd  est  un  der- 
nier écho  de  la  poésie  de  Dante,  Feo  Belcari,  Francesco 
Cei,  et  enfin  Girolamo  Benivieni;  il  y  a  dans  ses  poésies 
«me  darté,  un  naturel  et  une  pureté  de  goût,  qui  sem- 
blent les  qualités  distinctives  de  Técole  de  Florence. 

Les  femmes  ne  restèrent  pas  en  arrière  dans  le  mouve- 
meai  littéraire  de  ce  siècle.  On  en  vit  un  grand  nombre 
écrire  des  vers  agréables,  soit  en  langue  vulgaire,  soit  en 
latin  et  même  en  grec,  haranguer  en  latin,  comme  la 
jeune  Hippolyte  Sforce,  le  p^)e  Pie  n,  ou,  comme  Cas- 
âandra  Fedele,  se  distinguer  dans  l'étude  des  belles- 
lettres  et  de  la  philosophie,  discuter  contre  les  plus  sa- 
vants, et  mériter  les  éloges  de  Politien. 

Le  XVI*  siècle  est  la  grande  époque  de  la  littérature  ita- 
lienne. Les  énidits  du  xv*  avaient  préparé  des  matériaux 
Immenses  à  la  génération  suivante,  et  les  héritiers  se 
trouvèrent  dignes  de  recueillir  la  succession  de  leurs  de- 
vanciers. L'épopée  chevaleresque,  qui  a  fourni  plusieurs 
chefs-d'œuvre,  s'est  inspirée  de  la  Chronique  de  Charle- 
magne  et  des  douze  pairs,  attribuée  à  l'archevêque  Tur- 
pin.  Mais,  tout  en  se  servant  du  nom  de  Turpin  pour  faire 
passer  bien  des  histoires  incroyables,  chaque  auteur  in- 
troduit sans  scrupule  les  inventions  et  les  caractères  que 
son  imagination  lui  fournit  :  la  famille  de  Gharlemagne 
se  modifie  au  gré  de  chacun ,  et  presque  toujours  le  naif 
auteur  trouve  moyen  de  rattacher  au  grand  empereur  la 
famille  du  petit  prince  italien  qui  le  protège.  Tous  ces 
poèmes  ont  un  air  de  famille  par  l'incohérence  dans  le 
style,  la  profusion  des  détails  et  tes  mêmes  formules  :  Tau* 
teor  commence  chacjue  chant  par  une  prière,  et  la  finit  en 
interpellant  ses  auditeurs,  le  plus  souvent  en  vue  de  pro- 

nner  leur  générosité.  Il  serait  donc  Inutile  de  s'arrêter 
es  compositions  comme  Buwo  d^Antona,  I  reali  di 
Praneia,  VAncrûia,  la  Spagna,  etc.,  qui  n'ont  guère  fait 
qoe  fournir  l'idée  dej>oèmes  restés  célèbres.  Le  premier 
qui  mérite  une  mention  particulière  est  celui  de  Pulci , 
intitulé  :  MorganU  U  Grand  (F.  ce  mot).  Puis,  un  poète 
connu  sous  le  nom  de  V Aveugle  de  Ferrarey  mais  dont 
le  nom  de  famille  était  Belle,  tira  aussi  des  vieux  romans 
carlovingiens  un  sujet  qu'il  traita  d'une  manière  origi- 
nale, et  sans  s'astreindre,  comme  le  Pulci,  à  toutes  les 
formes  établies  par  les  romanciers  populaires.  Son  poème, 
îstitulé  Mambrumo,  a  pour  héros  Mamljrin,  roi  de  Bithy- 
nla,  qui,  dans  le  but  de  venger  la  mort  de  son  oncle,  part 


pour  aller  défier  Renaud  de  Montauban,  fait  naufrage  dam 
nie  de  la  fée  Cuiradine,  et  assiège  Montauban,  défendu 
par  les  quatre  fils  Aymon  et  leur  soeur  Bradamante.  Ce 
poème  n'a  pas  été  achevé.  Vinrent  ensuite  le  Roland 
amoureux  (V.  ce  mot)  du  comte  Bojardo,  refait  plus  tard 
par  le  Bemi,  et  le  Roland  furieua>  (V.  es  mot)  dt 
l'Arioste,  inimitable  modèle  de  l'épopée  héroï-comique. 
—  Louis  Dolce  composa  cinq  ou  six  romans  épiques^ 
dont  le  plus  connu  a  pour  sujet  l'enfance  de  Roland  et 
ses  premiers  exploits;  quelques  incidents  de  ce  poème  ne 
manquent  pas  d'agrément.  —  Citons  encore  VAng^Ujm 
amoureuse  de  Vicenzo  Brusantini ,  et  la  tentative  médio- 
crement heureuse  d'une  femme,  TuUie  Aragon,  qui  éoi- 
vit  II  Meschino  o  il  Guerino ,  dans  la  louable  intention 
de  remplacer  par  un  ouvrage  honnête  les  productions 
généralement  immorales  de  ses  devanciers. 

Après  les  poèmes  de  Gharlemagne  et  des  douze  pairs, 
vinrent  ceux  tirés  de  sujets  antiques,  surtout  de  V Iliade  et 
de  VOdyssée,  Tels  sont  la  Destruction  de  Troie,  VActUllê, 
VEnea  et  V Ulysse  de  Dolce,  toutes  froides  imitations 
d'Homère.  Il  y  eut  aussi  des  romans  de  la  Table  rondOi 
Lancelot  du  Lac,  Tristan  de  Léonois,  connus  de  très- 
bonne  heure  en  Italie  par  des  traductions  en  prose  de  nos 
vieux  ouvrages  français.  Le  plus  célèbre  des  romans  de 
cette  famille  fut  Giron  le  Courtois,^  dont  l'auteur,  Luigl 
Alamanni ,  reçut  le  sujet  de  François  I^,  et  qui  est  con* 
duit  avec  art.  Le  même  auteur  a  laissé  une  Avarchid$ 
(le  siège  de  Bourges,  en  latin  Avaricum)^  calquée  sur 
VIliade.  On  a  du  Trissin  une  Italie  déliffrée  des  Goih»^ 
Bernardo  Tasso,  père  du  Tasse,  envoyé  en  Espagne 
en  1535  par  Ferrante  Sanseverino,  prince  de  Saleme« 
y  connut  VAmadis  de  Gaule  de  Montalvo ,  et  composa 
sur  les  principaux  épisodes  de  ce  roman  un  poème 
d^Amadigi  di  Francia  :  c'est  une  imitation  libre  de 
l'original ,  sans  autre  modification  importante  que  l'ad- 
dition de  deux  personnages,  Alidor,  frère  d'Oriane, 
et  Mirinda,  sœur  d'Amadis;  mais  le  style  est  très-eoigné« 
la  versification  pure,  noble  et  agréable.  Aussi  ce  poèOM 
oocupe-^il  le  second  rang  de  l'épopée  romanesque  sa 
Italie;  il  ne  le  cède  qu'au  Roland  furieux. 

Nous  n'avons  à  parler  ici  que  des  moindres  ouvragot 
de  Torquato  Tasso,  dit  le  Tasse,  des  articles  particulieit 
étant  consacrés  à  la  Jérusalem  délivrée  et  à  VAminte,  Le 
Tasse  composa  à  18  ans  un  poème  épique  en  19  chanta^ 
dont  le  héros  est  Renaud,  fils  d' Aymon  et  cousih  de  Ro* 
land  ;  son  amour  pour  la  belle  Clarisse,  ses  premiers  faits 
d'armes  entrepris  pour  l'obtenir,  les  obstacles  qui  les  sé- 
parent ,  et  enfin  leur  union,  en  sont  le  sujet,  le  nosud  et 
le  dénoûment  ;  ce  poème  est  peu  lu ,  et  mérite  peu  ds 
l'être.  Le  Tasse,  vers  la  fin  de  sa  vie,  refondit  la  Ji^m- 
scUem  délivrée  dans  un  second  poème,  Jérusalem  coh^ 
quise ,  qu'il  préférait  au  premier,  jugement  que  les  gens 
de  goût  n'ont  pas  ratifié.  Vers  la  même  époque,  son  es- 
prit étant  de  plus  en  plus  tourné  aux  idées  religieuses,  il 
écrivit  les  Sept  journées,  poème  sur  la  création  du  monde; 
il  en  prit  peut-être  l'idée  dans  un  poème  français  pom- 
peusement ridicule,  la  Semaine,  de  Du  Bartas  ;  c'est  une 
œuvre  inachevée,  où  se  trouvent  néanmoins  des  mor- 
ceaux d'une  grande  beauté. 

La  gloire  du  Tasse  éclipsa  celle  de  tous  les  autres 
poètes  de  son  temps  ;  lui  seul  fit  l'éloge  de  V Amant  fidUê 
de  Gurzio  Gonzaga;  les  contemporains  n'y  prirent  pas 
garde.  Le  Nouveau  Monde  de  Giorgini ,  la  Maltéide  de 
Fratta,  la  Jérusalem  détruite  de  Potenzano,  VAngeleida 
de  Valvasone,  n'ont  pas  vécu  plus  longtemps.  Les  Larmes 
de  S^  Pierre  par  Tansillo  eurent  un  plus  grand  suc- 
cès. Le  temps  de  l'épopée  chevalerœque  était  passé, 
et,  comme  toujours,  après  le  sérieux  vint  la  parodie.  Par 
une  tendance  déplorable  du  caractère  italien,  on  vit  de 
toutes  parts  paraître  des  railleries  de  la  valeur  guerrière^ 
Merlin  Coccajo,  pseudonyme  de  Teofilo  Foleneo,  tnventa 
le  style  macaronique,  mélange  burlesque  de  latin  et 
d'italien,  et  écrivit  dans  ce  style  VOrlantUno,  poème 
extravagant,  où,  donnant  un  libre  essor  à  son  caprice,  il 
a  su  exprimer  d'une  manière  vive  et  pittoresc^e  toutes 
les  folies  de  son  cerveau.  —  Antonio  Graznni,  plus 
connu  sous  le  nom  de  I^uca,  écrivit  des  poésies  badines^ 
et  fut  le  premier  fondateur  de  l'Académie  de  la  GruscSé 
Il  composa  aussi  un  petit  poème  intitulé  :  la  Guerra  d/i 
Mostri,  On  lui  attnbue  un  autre  ouvrage  du  même 
genre,  la  Nanea,  composé  pour  se  moquer  d'un  poèms 
de  Benedetto  Arrighi,  intitulé  :  Gigantea  ou  Guerre  dsi 
Géants.  Ces  inventions,  la  plupart  plus  grotesques  que  snl* 
rituelles,  ne  méritèrent  pas  d'obtenir  une  renommée  an* 
rable.  —  L'épopée  hérol-comique  fut  créée  par  Tassonl^ 
dont  le  poème,  la  Secchia  rapHa,  raconte  une  gnem 


ITA 


1112 


!TA 


t 


des  habitants  de  Modène  et  de  Bologne  au  sujet  d*un  seau 
de  bois.  Lalli  travestit  V Enéide,  et  BraccioUni  persifla 
les  dieux  du  paganisme. 

L*art  dramatique  se  forma  en  Italie  plus  tôt  que  dans  les 
autres  pays  de  TEurope.  Dès  le  xiv*  siècle,  lorsque  nous 
en  étions  encore  aux  Mystères  et  aux  Confrères  de  la 
Passion,  les  Italiens  avaient  des  tragédies  régulières. 
Âtt  XV*  on  citait  la  Catinia  de  Polentone ,  V Amphitryon 
et  le  Joseph  de  Gollenucdo.  Au  xvi*,  les  représenta- 
tions drainatiqnes  formèrent  le  principal  divertissement 
de  toutes  les  cours,  sans  en  excepter  celle  de  Rome. 
Léon  X  fit  représenter  à  ses  frais  la  tragédie  de  Sopho^ 
nisbe  que  le  Trissin  lui  avait  dédiée.  Ce  poète  se  dis- 
tingua par  une  imitation  servile  du  thé&tre  grec  ;  ceux 
oui  vinrent  après  lui  Timitèrent  à  leur  tour.  On  lui 
doit  d*avoir  affranchi  le  théâtre  italien  du  Joug  de  la 
lime  :  les  vers  libres  qu*il  employa  étaient  cependant 
mêlés  avec  (quelques  vers  rimes.  Sophonisbe  marque  un 
progrès  sensible  dans  la  tragédie  italienne,  et  dénote  un 
grand  talent  ;  aussi  le  succès  de  cette  pièce  fut^-il  général , 
non-seulement  en  Italie,  mais  en  France,  où  elle  fut  plu- 
sieurs fois  traduite.  —  L'exemple  du  Trissin  fut  promp- 
tement  suivi  par  le  Florentin  Ruccellal  :  pour  sa  première 
pièce,  intitulée  :  Hosemonde ,  il  choisit  un  sujet  histo- 
rique, et  le  disposa  à  la  manière  des  Grecs,  employant 
les  chœurs,  et  les  vers  libres  pour  le  dialogue.  Son 
Oreste  n*est  autre  chose  que  Viphiginie  en  Tauride, 
imitée  et  même  le  plus  souvent  traduite  d'Euripide.  — 
Ifartelli,  auteur  de  Tultia,  prit  son  sujet  dans  Tite-Uve  : 
malsré  le  caractère  odieux  de  rhéroine  et  les  défauts  de 
la  pièce,  les  Italiens  accordent  à  la  TuUia  un  des  pre- 
miers rangs  parmi  les  tragédies  qui  signalèrent  chez  eux 
la  renaissance  de  Tart.  —  Alamanni,  qui  figure  dé|à  dans 
Tépopée,  se  distingua  aussi  dans  la  tragédie;  mais  il  se 
I,  contenta  de  faire  passer  dans  sa  langue  les  beautés  de 
•■  VAntigone  de  Sophocle.  —  Nous  ne  parlerons  que  pour 
1  mémoire  des  neuf  tragédies  de  Giraldi  Cinthio,  de  celles 
!  de  Louis  Doloe,  et  même  de  la  Canace  de  Sperone  Spe- 
*roDi.  Le  Tasse  composa  à  deux  reprises  différentes  une 
tngédie  de  Torismond,  pièce  toute  d'invention  et  mise  à 
I  la  mode  par  Giraldi.  Les  Italiens  la  comptent  au  nombre 
'  des  plus  Délies  du  xvt«  siècle  :  on  y  remarque  de  nom- 
breuses imitations  de  VOEdipe  roi  de  Sophocle.  Ce  chef- 
d'oBuvre  grec  fut  traduit  quelque  temps  après  avec  talent 
par  Anguillanu  Citons  aussi  comme  sujets  empruntés  à 
i'antiqmté  celui  de  Mérope,  traité  pour  la  première  fois 
par  le  prince  Torelli.  Nous  finirons  cette  nomenclature 
par  une  pièce  où  se  trouve  un  singulier  contraste  entre 
ranteur  et  le  sujet,  VHorace  de  Pierre  Arétin.  Ce  poète, 

Sii  ajoutidt  sa  propre  licence  aux  sujets  les  plus  licen- 
eux,  traita  dans  toute  son  austérité  ce  grand  sujet;  il 
fkit  aussi  fidèle  à  l'histoire  qu'il  est  possible  de  l'être  en 
la  transportant  sur  le  thé&tre  ;  et,  dans  ce  qu'il  ajouta  au 
récit  de  Tite-Live,  il  fit  voir  beaucoup  de  connaissance 
des  usages  civils  et  religieux  de  l'ancienne  Rome. 

La  comédie  n'avait  existé  en  Italie,  avant  le  xvi*  siècle, 
qn'à  l'état  de  farce  ou  de  pantomime.  A  cotte  époque  de 
renaissance,  on  commença  à  revenir  aux  moaèles  an- 
tiques. Les  comédies  de  Plante  et  de  Térence  furent  étu- 
diées, et  même  représentées,  soit  traduites,  soit  même  en 
latin  :  à  cette  école  se  forma  une  pléiade  d'auteurs  co- 
miques, aussi  remarquables  par  le  talent  que  par  l'im- 
moralité. Le  premier  fut  le  cardinal  Bibbiena,  qui  fit  re- 
présenter devant  Léon  X  sa  Calandria,  dont  nous  ne 
pouvons  pas  même  indiquer  le  sujet.  L'Arioste,  dès  sa 

S  lus  grande  Jeunesse,  s'exerça  à  écrire  des  comédies 
'aprte  Plante  et  Térence  :  la  Cassaria,  I  Suppositi,  la 
Lena,  Il  Negromantey  et  la  ScoUutica,  restée  imparfaite. 
Ces  pièces,  moins  libres  dana  l'expression  que  la  Calan^ 
iria,  n'en  sont  pas  moins  immorales;  mais,  ces  réserves 
faites,  on  ne  peut  trop  louer  le  style  de  l'auteur,  qui, 
pour  l'aisance  et  la  clarté,  n'a  pas  d'égal  dans  tonte  la 
poésie  italienne;  peu  d'écrivains  ont  eu  au  même  degré 
que  i'Arioste  le  don  de  peindre  les  caractères,  les  vices  et 
les  ridicules  des  hommes.  —  Une  comédie  plus  connue  en 
France  est  la  Mandragore  de  Machiavel,  traduite  par 
J.-B.  Rousseau  :  rien  de  plus  vif  et  de  plus  libre  que  le 
Ion  de  cette  comédie;  Léon  X  voulut  qu'elle  fût  jouée  de- 
vant sa  cour,  ce  qui  semble  d'autant  plus  étonnant  que, 
outre  la  licence  du  sujet  et  des  détails,  elle  renferme 
une  satiro  violente  contre  le  clergé  et  la  relieion.  Ma- 
chiavel composa  encore  la  Clithia,  comédie  imitée  de  la 
Casina  de  Plante,  également  fort  libre,  et  une  traduction 
de  VAndr%enne  de  Térence.  —  Nommer  l'Arétin,  c'est 
dire  à  quoi  l'on  doit  s'attendre  :  ses  prindpales 
sont  :  le  Maréchal,  la  Courtisane,  V Hypocrite,  la 


pièces 


Taranta  et  le  Philosophe;  on  y  remarque  en  général 
assez  peu  dinvention,  mais  des  détails  piquants  qui  font 
connaître  les  mœurs  du  temps.  —  Jean-Marie  Gecchi  fut 
l'un  des  meilleurs  et  le  ptos  fécond  des  auteurs  comic^uea 
de  son  siècle;  on  a  de  lui  10  comédies  imprimées,  qui  ne 
sont  que  la  moindre  partie  de  ce  qu'il  avait  écrit;  la  plu- 
part sont  tirées  de  Plante  et  de  Térence.  La  plus  co- 
mique, mais  aussi  la  plus  libre,  est  VAsiuolo,  —  Le 
Lasca,  auteur  de  Nouvelles  dans  le  genre  de  celles  de  Boc- 
cace,  le  fut  aussi  de  comédies  moins  piquantes,  mais 
moins  libres  que  celles  de  Cecchi.  —  Louis  Dolce,  poète 
fécond  et  plus  laborieux  que  brillant,  écrivit  cinq  comé- 
dies, les  unes  en  vers,  les  autres  en  prose  ;  la  plupart  ont 
pour  sujet  des  aventures  contemporaines.  —  Les  trois 
pièces  composées  par  Francesco  d' Ambra  sont  des  chefs- 
d'œuvre  dans  le  genre  alors  le  plus  en  vogue,  la  comédie 
d'intrigue;  l'Académie  de  la  Crusca  les  compte  au  nombre 
des  autorités  pour  la  langue.  —  Nous  trouvons  presque 
tous  les  noms  illustres  de  l'époque  sur  la  liste  des  au- 
teurs comiques  :  Annibal  Caro,  le  célèbre  traducteur  de 
Y  Enéide;  Guarini ,  l'auteur  du  drame  pastoral  /{  Pastor 
fido  (7.  ce  fnot)\  le  Bemi,  Firenzuola,  Caporali,  Tan- 
sillo,  qui  marchèrent  sur  les  traces  de  l'Arétin  ;  Gelli  et 
Beolco ,  dit  Ruzzante ,  qui  acquirent  de  la  célébrité  par 
leurs  farces  de  carnaval. 

Ce  fut  encore  Bemi  qui  créa  un  genre  de  poésie  rail- 
leuse, appelé  de  son  nom  poésie  bernesque,  et,  où  il  eut 
pour  imitateurs  et  rivaux  Caporali,  lAauro,  Molza,  Gio- 
vanni della  Casa,  etc.  Dans  la  satire  savante  se  distin- 
guèrent Vinciguerra  et  Ercole  Bentivoglio.  —  La  poésie 
didactique,  pour  laquelle  Virgile  servit  toujours  de  mo- 
dèle, peut  citer  le  poème  de  V Agriculture  par  Alamanni, 
celui  des  Abeilles  par  Ruccellal,  d'autres  sur  la  Naviga- 
tion par  Baldi,  sur  la  Chasse  par  Scandianese  et  par 
Valvasone.  —  Quelques  femmes  du  xvi*  siècle  ont  acquis 
une  certaine  réputation  dans  la  poésie,  telles  que  Vit- 
toria  Colonna,  Veronica  Gambara  ,  Gaspara  Stampa  « 
Laura  Terracina,  etc. 

Le  XVI*  siècle  vit  naître  l'hérésie  de  Luther  et  celle  de 
Calvin  ;  aucun  thà)logien  ne  se  crut  dispensé  de  les  com- 
battre selon  ses  forces;  plusieurs  le  firent  avec  grand  ta- 
lent; mais  les  plus  remarquables  furent  les  cardinaux 
Bellarmin  et  Baronius.  Le  premier  composa  des  ouvrages 
de  controverse  proprement  dite,  et  les  protestants,  qui  ne 
pouvaient  refuser  leur  admiration  à  ce  redoutable  aidver- 
saire,  fondèrent  des  chaires  dont  les  professeurs  n'avaient 
point  d'autre  emploi  que  de  le  réfuter.  Le  second  con- 
sacra sa  laborieuse  carrière  à  écrire  les  Annaies  ecclé- 
siastiques, travail  immense  et  d'un  grand  talent,  pour 
lequel  il  a  fallu  des  recherches  vraiment  prodi^euses. 

Au  XVI*  siècle,  les  Universités  continuèrent  d'être 
florissantes.  Les  princes  se  disputaient  les  savants  pro- 
fesseurs qui,  comme  les  deux  Béroalde,  Amaseo  Battista, 
Egnazio,  élevaient  la  jeunesse  dans  l'amour  des  lettres. 
Le  Droit  civil  et  le  Droit  canon,  études  favorites  du  moyen 
ftge,  n'avaient  pas  été  délaissés  :  Alciat  et  ses  succes- 
seurs les  avaient  tirés  de  la  barbarie,  et  Joignaient  à  la 
science  les  ornements  littéraires  oui  avaient  trop  manqué 
à  leurs  devanciers.  L'étude  des  langues  anciennes  était 
plus  répandue  que  jamais.  De  magnifiques  imprimeries 
multipliaient  les  chefs-d'œuvre  de  l'antiquité  :  les  Aides 
no  se  contentaient  pas  de  donner  i>endant  trois  généra- 
tions leurs  soins  assidus  aux  éditions  qui  sortaient  de 
leurs  presses,  ils  annotaient  eux-mêmes  les  textes  an- 
ciens, et  s'entouraient  d'érudits  pour  les  aider  dans  leurs 
travaux.  Les  langues  orientales,  surtout  l'hébreu,  étaient 
étudiées  comme  le  grec  et  le  latin  :  une  imprimerie 
pourvue  de  caractères  orientaux  fût  établie  à  Rome.  On 
ne  se  contentait  plus  d'étudier  les  mœurs  des  Anciens 
dans  les  livres;  les  antiquités  étaient  consultées,  les 
inscripUons  reproduites  ;  et  de  savants  antic^uaires, comme 
Sigonius,  Panrinio  Valériane,  interro^ient  les  monu^ 
ments  romains,  grecs  et  égyptiens.  Ils  furent  yérita- 
blement  les  fondateurs  de  cette  branche  de  la  science 
historioue.  —  La  langue  latine  était  toujours  celle  de 
l'érudition.  La  plupart  des  savants  dédaignaient  d'écrire 
en  italien.  Toutefois,  sous  ce  rapport,  il  se  fit  une  révo- 
lution dans  les  esprits  :  on  commença  à  soupçonner  les 
beautés  de  la  langue  vulgaire,  et  à  écrire  des  traités  pour 
en  faire  connaître  la  richesse  et  en  fixer  les  règles.  Le  plus 
célèbre  de  ces  ouvrages  est  le  Prose  de  Bembo.  Il  mérite 
le  succès  universel  dont  il  a  joui.  L'auteur  y  apprécie  avec 
Justesse  1&  langue  elle-même  et  les  plus  grands  écrivains. 
Il  assaisonne  toujours  de  réflexions  utiles  ses  discussions 
et  ses  jugements.  Les  OhserwUions  de  Dolce  sont  restées 
au  nombre  des  li\Tcs  utiles  sur  la  langue  itaUenne.  Ri- 


ITA 


1113 


ITA 


uddo  Corso,  aateur  des  FondametUt  dd  parlar  toscano, 
le  (fistîngaa  dans  la  foule  des  grammainenB  contempo- 
ralDS  par  son  savoir  et  Télégance  de  son  style. 

U  guerre  que  le  dècle  précédent  avait  vu  s^allumer 
entre  les  philosophies  d*Aristote  et  de  Platon  parut  ter- 
minée parla  défaite  de  la  première.  Le  cardinal  Bessarion 
et  rAcadémie  platonicienne  de  Florence  avaient  donné 
unt  d'autorité  à  Platon,  qu*il  semblait  devoir  régner  seul 
dans  les  écoles  ;  mais  au  xvi*  siècle  Aristote  reprit  le 
dessus,  et  cette  dispute  oiseuse  recommença  de  plus 
belle.  Parmi  les  aristotéliciens  était  Pomponace,  qui  pro- 
fessa avec  grand  succès  à  Padoue  et  à  Bologne.  Il  eut 
pour  disdple  Simone  Perzio,  plus  savant  que  lui  dans 
les  langues  anciennes.  Parmi  les  plus  célèbres  platoni- 
ciens, on  trouve  Jacopo  Zabarelli,  les  deux  Piccolomini, 
Chirio,  Strozzi,  Patrie.  —  D'autres  hommes  distingués 
écrivirent  des  traita  philosophiques  sans  se  soucier  des 
ouerelles  d*école;  tels  furent  Télésio,  Cardan,  et  le  comte 
de  Castiglione,  auteur  d*un  traité  Du  Courtisan,  dans  le- 
quel il  trace  les  devoirs  du  courtisan  honnête  homme  et 
professe  la  morale  la  plus  élevée.  On  peut  aussi  ranger 
le  Tasse  parmi  les  philosophes  :  ses  Dialogues,  où  il  prit 
Platon  pour  modèle,  furent  composés  aux  Jours  les  plus 
malheureux  de  sa  rie;  il  y  traite  les  sujets  les  plus  divers 
avec  un  rare  talent,  et  chez  lui  le  philosophe  ne  fait  pas 
disparaître  le  poète.  Un  des  charmes  de  ce  remarquaÎDle 
écrit  est  dans  les  allusions  qu*y  fait  le  Tasse  à  ses  mal- 
hears. 

BAachiavel  est  le  plus  grand  écrivain  politiqye  de  son 
siècle.  Mêlé  aux  affaires  de  Florence,  sa  patiie,  envoyé, 
comme  négociateur,  en  France,  à  César  Borgia,  à  Tempe- 
reur  d'Allemagne,  il  mit  dans  ses  écrits  l'expérience  de 
sa  vie.  On  lui  a  reproché,  surtout  dans  le  fameux  traité 
du  Prince,  d'avoir  émis  des  principes  corrupteurs.  En 
^et,  mettant  à  part  l'intérêt  des  peuples,  dont  il  ne  parle 
pa%  Machiavel  n'a  pour  objet  que  celui  du  prince,  et  ne 
considère  encore  cet  intérêt  que  relativement  à  l'acqui- 
sition, à  la  durée  et  à  la  stabilité  du  pouvoir.  Les  con- 
seils qu*il  donne  pour  parvenir  à  ce  but  sont  uniquement 
politiques,  c-à-d.  plus  grossièrement  intéressés  qu'hon- 
nêtes. S'il  eut  une  excuse,  ce  fut  la  corruption  du  temps 
où  il  vécut  et  des  hommes  qu'il  fréquenta.  Mais  on  ne 
lui  pardonne  pas  de  raconter  sans  la  moindre  indignation 
1»  meurtres  de  César  Borgia.  Machiavel  écrivit  aussi 
une  Histoire  de  Florence,  et  des  discours  sur  VArt  de  la 
quare  et  sur  Tite-Live,  Après  les  réserves  que  nous 
avons  faites,  on  ne  peut  trop  admirer  la  profondeur  des 
vues,  le  style  nerveux  et  élégant,  qui  feront  durer  ces  ou- 
vrages autant  que  la  langue  italienne.  —  La  réputation 
de  Mschiavel  a  tellement  éclipsé  celle  des  autres  écrivains 
politiques  de  son  temps,  qu'on  connaît  à  peine  les  noms 
de  Gianotto,  de  Gontarini,  et  même  du  Vénitien  Pamta  : 
des  Discours  politiqiues^  formant  deux  livres,  lui  assurent 
cependant  nn  rang  distingué  parmi  les  publlcistes  ita- 
liens. 

L'histoire  fut  nn  des  genres  les  plus  cultivés  au 
XVI*  siècle.  Le  plus  connu  peut-être  des  écrivains  qui 
traitèrent  de  l'histoire  générale  est  Paul  Jove.  VBistoire 
de  mon  temps  est  le  premier  ouvrage  ou'il  entreprit,  et  le 
dernier  qu'il  publia  ;  c'est  celui  qui  lui  a  valu  le  plus 
réloges  et  de  critiques.  Tout  en  louant  la  clarté,  la  raci- 
âté  et  l'abondance  de  son  style,  on  doit  bl&mer  la  par- 
tialité avec  laquelle  il  a  loué  ses  protecteurs  et  dénigré 
les  hommes  qui  s'étaient  montrés  moins  généreux  à  son 
égard.  Outre  son  Histoire,  Paul  Jove  écrivit  les  Vies 
if  Alphonse  I*',  duc  de  Ferrare,  de  Gonzalve  de  Cordoue, 
de  Léon  X,  du  marquis  de  Pescaire,  du  cardinal  Pompée 
Golonna;  une  description  de  la  Grande-Bretagne,  de  la 
Moscovie.  Tous  ses  ouvrages  sont  en  latin,  à  1  exception 
d'un  commentidre  sur  la  guerre  des  Turcs.  —  La  même 
période  de  temps  que  Paul  Jove  avait  parcourue  dans  sa 
grande  histoire  latine  le  fut  en  italien  par  Guichardin, 
historien  qui  n'a  pas  moins  de  renommée,  et  qui  mérite 
plus  d'estime;  mais  il  se  renferma  dans  les  fwmes  de 
ritalie,  an  lieu  de  s'étendre,  comme  Paul  Jove,  aux  évé- 
r.'^ments  dn  monde  entier.  On  reproche  à  cette  histoire 
des  harangues  et  des  réflexions  trop  longues,  et  le  style 
manque  de  clarté.  L'histoire  d'Adriani,  qui  embrasse  de 
1536  à  1574,  est  regardée  comme  la  suite  de  celle  de 
Guichardin.  —  Machiavel,  par  sa  belle  Histoire  de  Flo^ 
rence,  avait  appelé  sur  lui  trop  d'éclat  pour  n'être  pas 
imité.  Le  premier  qui  suirit  son  exemple  fut  Jacopo 
Nardi,qui  appartenait  au  parti  républicain  vaincu  par  les 
Médids  :  son  Histoire,  composée  dans  l'exil,  porte  en  soi 
le  caractère  de  tous  les  ouvrages  de  parti,  et  a  peut-être 
«oms  contribué  à  sa  renommée  littéraire  que  sa  belle 


traduction  de  Tite-Uve.  —  Le  sénateur  Philippe  Nerlt 
écririt  des  Mémoires  sur  ce  qui  s'était  passé  dans  sa  pa- 
trie depuis  1215  jusqu'en  1537;  tout  dévoué  aux  Médias, 
il  se  montra  partial,  comme  Nardi,  mais  dans  le  sens  con- 
traire. —  V Histoire  de  Florence  de  Bemardo  Segni,  qoe 
l'auteur  s'abstint  de  publier  de  son  rivant  pour  ne  com- 
promettre ni  les  intérêts  de  la  vérité,  ni  sa  propre  sft- 
reté,  est  écrite  avec  sagesse  et  impartialité. — Varchi,  lit- 
térateur, poète  et  même  mathématicien,  est  auteur  d'une 
Histoire  de  Florence  qui  va  de  1527  à  1538  t  malgré  la 
diffusion  du  style,  elle  est  écrite  avec  beaucoup  d'exacti- 
tude et  de  sagesse.  —  Le  Vénitien  Bruto  écrivit  en  latin 
une  Histoire  de  Florence^  remarquable  par  la  liberté  de 
ses  Jugements  sur  les  Médicis.  —  Sdpione  Ammirato,  né 
dans  Te  royaume  de  Naples,  est  regardé  comme  plus 
exact  que  les  historiens  de  Florence  qâ  l'avaient  précédé» 

Venise  a  eu  aussi  ses  historiens  t  le  cardinal  Pierre 
Bembo,  célèbre  à  tant  de  titres,  fut  nommé,  en  1529, 
historiographe  de  cette  république.  Son  Histoire,  œuvre 
de  sa  rieillesse,  est  en  12  livres,  qui  se  terminent  à 
l'année  1522,  et  ne  comprennent  qu'un  espace  de  25  ans  t 
elle  parut  d'abord  en  latin;  mais  Bembo  en  avait  fait  vm» 
version  italienne  qui  fut  ensuite  publiée.  Le  mérite  de 
cette  Histoire  est  plutôt  dans  le  style  que  dans  la  manière 
dont  les  faits  sont  exposés  et  Jugés.  —  Le  plus  célèbre 
historien  de  Venise  est  Paul  Paruta.  Sa  profonde  connais» 
sance  des  affaires  publiques  et  des  relations  extérieures  de 
son  pays  donnent  à  son  Histoire  une  grande  autorité  el 
un  puissant  intérêt.  —  Paruta  fut  imité  par  J.-B.  Naoi. 
—  Paul  Sarpi,  sénie  encyclopédique,  traita  un  sujet  dont 
l'actualité  faisait  une  bonne  partie  de  l'intérêt  ;  il  écririt 
V  Histoire  du  Concile  de  Trente.  —  Le  cardinal  Pallavl- 
cini  traita  le  même  sujet;  mais  s'il  surpasse  Sarpi  par 
la  correction  du  style,  il  est  loin  d'avoir  sa  manière  ori- 
ginale d'exposer  et  de  Juger  les  faits.*—  Catarino  Davila, 
tout  Italien  qu'il  était,  publia  une  Histoire  dès  guerres 
civiles  de  France,  aussi  correcte  que  sincère  et  précise* 
— ^^Le  cardinal  Guido  Bentivoglio  composa  aussi  une  ffû- 
toire  des  guerres  de  Flandre^  très -supérieure  par  ses 
vues  politiques  à  celle  que  publia  en  latin  sur  le  même 
sujet  le  P.  Strada,  iésuite.  Au  xvi*  siècle,  où  les  lumières 
de  l'Italie  surpassaient  de  beaucoup  celles  des  autres  na- 
tions, les  Italiens  se  fdsaient  les  historioçaphes  des 
peuples  étrangers.  Appelé  en  France  par  Louis  XH,  Paul 
Emile  récompensa  l'hospitalité  du  roi  en  écrivant  une 
Histoire  de  France  qui  excita  l'enrie  et  l'admiration  des 
savants  français.  Polydore  Virale  écririt  aussi  rfftftotrt 
d'Angleterre,  Davanzatî  Bostichi  VHistoire  du  schisme 
d^Afigleterre ,  et  Luclo  Bfarineo  VHistoire  d^Espagne. 

Dans  le  genre  de  la  Nouvelle,  nous  retrouvons  eneoro 
Machiavel,  dont  le  Belphégor  est  une  satire  des  femmes 
en  général,  et  de  la  sienne,  dit-on,  en  particulier.  Gomme 
toutes  ses  œuvres,  elle  est  écrite  d'un  style  vif  et  bril* 
lant,  et  avec  une  élégance  qui  Ta  fait  mettre  au  nombre 
des  textes  de  la  langue.  —  Flrenzuola  et  le  Lasca  écri- 
virent aussi  des  Contes  charmants,  remarquables  par 
l'originalité  de  l'invention  et  la  pureté  du  style.  —  Les 
nombreuses  Nouvelles  de  Straparola  eurent  plus  de  vogue, 
quoique  avec  moins  d'élégance;  la  licence  et  la  bizarrerie 
leur  tiennent  souvent  lieu  de  mérite.  —  On  en  peut  dire 
autant  de  quelques  Nouvelles  de  l'Arétin.  —  Cinthio  Gi- 
raldi  et  Sébastien  Erizzo  cherchèrent  à  modérer  par  leur 
exemple  la  licence  de  la  plupart  de  ces  conteurs;  mais  ils 
eurent  peu  de  succès  au  milieu  de  la  corruption  géné- 
rale. L»  seules  Nouvelles  qui  fussent  exemptes  de  cette 
tache  étaient  celles  du  genre  tragique.  De  ce  nombre  est 
Homéo  et  Juliette  de  Luig^  da  Porta,  imitée  et  développée 
depuis  par  Bandello,  et  immortalisée  par  Shakspeare. 
Bandello  a  écrit  un  très-grand  nombre  de  Nouvelles,  dans 
lesquelles,  à  défaut  de  puretâ  et  d'élégance,  on  retrouve 
les  usages,  les  mœurs  et  les  aventures  du  temps,  ainsi 
que  les  csractères  des  personnages  qui  y  florissaient.  Il 
faut  ajouter  à  la  louange  de  cet  auteur  que,  s'il  est  son* 
vent  libre  et  grossier.  Il  n'est  Jamais  immoral,  et  prend 
toujours  le  parti  de  la  vertu  et  de  la  religion. 

Les  Romains,  qui  sont  en  quelque  sorte  des  nouvelles 
très-étendues,  furent  aussi  rares  qu'auparavant.  On  re- 
marque à  peine  durant  cette  période  la  Finela  de  Ni- 
colas Franco.  —  On  peut  également  citer  les  inventions 
fantastiques  de  quelques  auteurs,  moins  élégants  que  bi- 
zarres: tels  sont  les  Discours  des  Animaux  {Discorsi  de^ 
gli  Animali)  de  Firenzuola,  les  Caprices  du  Tonnelier,  et 
la  Circé  de  J.-B.  Gelli. 

Presque  tous  les  ouvrages  didactiques  de  ce  siècle 
firent  écrits  en  forme  de  dialogue;  tels  sont  les  Asàlant 
de  Bembo,  et  VErcolano  de  Varchi,  sor  la  langue  *-ul- 


ITA 


nu 


ITA 


gre;  mais  plus  célèbres  encore  forent  les  Dialogues  de 
arone  Speroni,  et  le  Courtisan  de  Castlglione.  On  doit 
à  TArétin  le  premier  recueil  de  Lettres;  il  en  publia  sur 
Iflft  sujets  les  plus  divers,  qu'il  traita  avec  sa  licence  ac- 
coutumée. Son  exemple  fut  bientôt  suivi,  et  Tltalie  se  vit 
inondée  d'épitres.  Les  plus  fameux  recueils  sont  les 
Lettres  de  Garo,  de  Tolomel,  de  Fracastor,  et  surtout  de 
Bonfadio. 

Quatrième  période»  —  Avec  le  xvn*  siècle,  la  décadence 
est  sensible.  Dans  la  poésie  lyrique,  on  doit  mentionner 
d'abord  Gabriel  Ghiabrera,  qui,  abandonnant  les  traces 
de  Pétrarque,  entreprit  d'imiter  les  Grecs,  et  surtout 
Pindare  et  Anacréon.  Il  le  fit  quelquefois  avec  bonheur 
et  toujours  avec  grftce.  Cependant  on  reproche  à  son  style 
on  peu  trop  d'art  et  de  recherche.  —  J.-B.  Alarini,  le 
grand  corrupteur  de  la  poésie  italienne,  acquit  une  im- 
mense réputation ,  non-seulement  en  France,  mais  dans 
toute  l'Europe,  où  il  répandit  son  déplorable  système 
poétique.  Doué  de  talents  réels  et  d'une  facilité  merveil- 
leuse, il  mit  une  versification  heureuse,  un  style  vif  et 
pittoresque  au  service  d'une  imagination  sans  frein  ;  et 
les  contemporains  finirent  par  croire  après  lui  que  plus 
on  s'éloignait  du  naturel,  plus  on  était  poète.  Les  con- 
eeUi  de  Marini  eurent  surtout  des  admirateurs  en  France, 
où  la  langue  était  à  peine  formée,  parce  onie  rien  ne  sé- 
duit plus  les  peuples  qui  sortent  de  la  barbarie  que  la 
recherche  et  l'abus  de  l'esprit.  Outre  un  grand  nombre 
de  madrigaux  et  de  sonnets,  Marini  écrivit  VAdone,  qui 
lui  valut  la  plus  grande  part  de  sa  célébrité,  et  qui  est 
un  résumé  des  qualités  et  des  défauts  de  l'auteur.  —  Le 
succès  de  Marini  suscita  un  grand  nombre  d'imitateurs. 
Quelques  poètes,  tels  que  Fulvio  Testi,  Benoit  Menzini, 
Francis  Redi,  conservèrent  cependant  les  traditions  du 
bon  goût  et  de  la  simplicité.  Mais  la  poésie  lyrique  fut 
portée  au  plus  hau#  degré  d'élévation  par  Vincent  Fili- 
caja,  le  plus  noble,  le  plus  moral  et  le  plus  patriotique 
des  poètes  italiens.  Beaucoup  de  ses  pièces  ont  pour  sujet 
l'Italie  déchue  de  son  ancienne  splendeur.  Il  fit  plusieurs 
eanzones  pour  célébrer  les  victoires  des  chrétiens  sur  les 
Turcs  qui  avaient  assiégé  Vienne  :  on  admire  principale- 
aient  celle  qu'il  composa  pour  Jean  Sobieski,  roi  de 
Pologne.  —  Guidi  déploya  encore  plus  de  liberté  et  de 
hardiesse  que  Filicaja,  et,  sans  imiter  Pindare,  dont  il 
ignorait  le  langage,  il  s'éleva  à  la  même  hauteur  dans  ses 
âes,  où,  dédaignant  toute  règle,  il  tire  de  cette  liberté 
de  grandes  richesses  d'harmonie  et  d'invention. — On  doit 
àMarchetti,outre  la  traduction  de  Lucrèce  et  d'Anacréon, 
des  sonnets  d'un  caractère  grave. 

Dans  la  poésie  didactique,  Baldi,  savant  mathémati- 
den,  auteur  de  quelques  églogues  imitées  de  Virale, 
composa  en  vers  sciolti  un  poème  de  la  Naingation, 
semé  d'épisodes  intéressants;  le  style  en  est  vif  et  coloré. 
—  On  peut  placer  ici  U  Séréide  d'Alexandre  Tesauro, 
poème  sur  le  vers  à  soie  ;  le  poème  latin  de  Benoit  Ro- 
gacd,  où,  sous  le  titre  d'Euthymie,  il  traite  de  la  philo- 
sophie morale;  mais  surtout  VArt  poétique  de  Menzini, 
émt  en  tersa  rima,  et  où  l'auteur  traite  principalement 
de  la  langue  et  de  la  versification  italiennes. 

A  la  fin  du  xvi*  siècle.  Caporal!  avait  donné  l'exemple 
-dvL  Style  satirique  dans  son  Voyage  au  Parnasse,  H  fut 
imité  par  Chiabrera  dans  ses  Sermoni,  où  l'auteur  se 
propose  Horace  pour  modèle.  Ludovico  Adimari  exploita 
le  sujet  toujours  si  fécond  de  la  critique  des  femmes. 
Enfin  Salvator  Rosa,  peintre  et  poète,  composa  des  satires 
devenues  populaires,  où  il  fronde  avec  grande  liberté  les 
vices  de  son  temps. 

Dans  la  comédie,  J.-B.  Porta,  Napolitain ,  disciple  de 
Plante  et  de  Térence,  Joignit  à  une  grande  richesse  d'in- 
vention an  style  noble,  pathétique  ou  plaisant,  suivant 
les  situations  où  il  place  les  personnages.  Ses  principales 
comédies  sont  l'Emportée^  la  Cinthia.les  Frères  rivaux, 
la  Sceur,  et  le  Maure,  —  Buonarotti  le  Jeune,  neveu  du 
grand  Michel-Ange,  tenta  la  singularité  de  donner  cinq 
comédies  de  suite  sur  le  même  plan.  Cet  ouvrage  porte 
pour  titre  la  Foiref  dure  cinq  Jours,  et  chaque  Journée 
•comprend  cinq  actes.  Le  mérite  principal  de  cette  pièce 
consiste  dans  la  pureté  du  langage.  Mais  la  comédie  qui 
Ht  le  plus  d'honneur  au  jeune  Buonarotti  est  la  Temxa, 
•écrite  en  ottana  rima,  dans  la  langue  des  paysans  de 
Toscane.  Cet  essai  d'introduire  les  dialectes  italiens  au 
théâtre  eut  plusieurs  imitateurs.  —  Les  Troubles  du 
Parnasse  de  Sdpion  Ericeo  consistent  surtout  en  un 
•cadre  ingénieux  où  Tauteur  a  placé  la  critique  souvent 
Juste  et  piquante  des  premiers  poètes  de  son  temps* 

C'est  au  commencement  du  xvn*  siècle  que  date  Fin- 
^ention  du  drame  en  musique  nommé  opâra*  Le  pre- 


mier, Daphné,  fut  représenté  en  1594,  à  Florence.  Rlnuo* 
cini  améliora  ce  nouveau  genre,  et  fit  repr^enter,  à 
Florence  aussi,  VEurydice,  h  Mantoue  V Ariane.  L'intro- 
duction de  l'opéra  contribua  h  exiler  du  théâtre  italien 
la  vraie  tragédie.  La  vogue  des  Comédies  de  Vart^  espèce 
d'impromptu  sur  lequel  chaque  acteur  brodait  à  son  gré, 
et  qui  fut  une  importation  de  l'Espagne,  acheva  d'éloi- 
gner les  auteurs  des  compositions  sérieuses.  C'est  à  ce 
genre  faux  ^ue  nous  sommes  redevables  de  Polichinelle. 

Au  XVII*  siècle  appartiennent,  dans  le  genre  historique, 
VHistoire  de  Naples,  par  Capecelatro,  et  les  nombreux, 
mais  peu  solides  ouvrages  de  Gregorio  Leti. 

La  littérature  italienne  avait  eu  une  grande  influence 
en  France  au  xvn*  siècle;  ce  fut,  au  contraire,  l'influence 
française  ^ui  prédomina  en  Italie  au  xviii*,  et  y  intro- 
duisit les  idées  philosophiques,  qui  alors  occupaient  tous 
les  esprits.  Déjà  les  Italiens  avaient  cherché  à  réagir 
contre  l'école  de  Marini,  et  à  ramener  la  langue  à  une 
élégante  simplicité;  dans  ce  but,  on  avait  fondé  à  Rome 
V  Académie  des  Arcades  {V.  ce  mot)^  qui  recruta  bientôt 
des  membres  dans  toute  l'Italie.  Les  chefs  de  cette  Acadé- 
mie furent  Gravinaet  Crescembeni.  Les  Arcadiens  prirent 
pour  modèles  Théocrite,  Virgile  et  Sannazar,  et  inondè- 
rent l'Italie  de  sonnets  pastoraux,  liais  leurs  principaux 
titres  de  gloire  sont  les  travaux  de  critique  qu'ils  firent 
sur  la  langue  italienne.  Gravina  écrivit  La  raison  poé» 
tique  et  un  Traité  de  la  tragédie  ;  Crescimbeni ,  un 
Traité  sur  la  beauté  de  la  poésie  italienne,  La  Biblio- 
thèque de  l'éloqiience  italienne,  de  Mf^  Fontanini,  les 
divers  écrits  d'ApostoIo  Zeno  et  du  marquis  MafTei,  la 
Parfaite  poésie  de  Muratori,  sont  des  guides  d'une  grande 
utilité  pour  l'étude  de  la  littérature  italienne. 

L'influence  de  l'école  philosophique  se  fit  sentir  non- 
seulement  dans  les  idées,  mais  encore  dans  le  style; 
les  auteurs  italiens  prirent  à  l'école  de  Voltaire  cette  élé- 
gante précision,  ce  tour  vif  et  heureux  de  l'école  du 
xvni*  siède,  et  cette  imitation  alla  jusqu'au  néologisme. 
Joseph  Baretti,  qui  avait  longtemps  voyagé  en  France, 
et  surtout  en  Angleterre,  fut  un  des  premiers  propaga- 
teurs des  idées  nouvelles.  Vico  fonda  en  Italie  la  philo- 
sophie de  l'histoire.  L'abbé  Genovesi,  qui  suivit  et  éclair- 
cit  à  la  fois  \fis  théories  de  Vico,  t&cha  de  mettre  sa 
nation  au  niveau  de  celles  qui  venaient  de  la  précéder 
dans  la  carrière  scientifique  :  il  publia  des  Méaitations 
philosophiques  imitées  de  celles  de  Descartes,  et  des 
Leçons  de  commères  justement  estimées.  —  César  Bec- 
caria,  célèbre  surtout  par  les  services  qu'il  rendit  à  la 
législation  criminelle  ,  entreprit  d'exposer  la  théorie 
philosophique  du  style.  —  LÀ  jésuite  Xavier  BettinelU 
se  fit  le  disdple  ardent  de  Voltaire.  —  Melchiore  Cesa- 
rotti  rendit  un  ^and  service  aux  lettres  en  publiant  un 
Essai  sur  la  philosophie  des  langues.  —  Enfin  François 
d'Alberti  m^te  d'être  cité  pour  l'immense  entreprise 
du  Dictionnaire  universel ,  critique,  encyclopédique. 

Les  idées  philosophiques  firent  aussi  leur  révolution 
dans  l'histoire,  et  y  introduisirent  un  esprit  de  critique 
plus  sévère.  Pierre  Giannone ,  dans  une  Histoire  du 
royaume  de  Naples,  ouvrage  plus  savant  qu'élégant,  se 
fit  remarquer  par  la  hardiesse  de  ses  recherches  et  de 
ses  vues.  —  Louis-Antoine  Muratori ,  avec  un  style  plus 
simple  et  plus  correct,  rédigea  les  Annales  ^Italie,  où 
il  a  fondu  les  résultats  de  ses  nombreuses  recherches 
critiques.  —  Charles  Denina  fit,  dans  un  style  noble  et 
correct,  le  Tableau  des  révolutions  d'Italie,  suivi  du  TO" 
bleau  des  révoltUions  d'Allemagne.  —  Enfin  Pierre  Verri 
composa  une  instructive  Histoire  de  Milan,  sa  patrie. 

Les  Italiens  ont  toujours  plus  brillé  dans  l'histoire 
littéraire  qile  dans  l'histoire  civile ,  au  xviu*  siècle.  Le 
P.  Benoit  Bacchini,  Apostolo  Zeno,  et  le  marquis  Maf- 
fei,  donnèrent  l'exemple  des  premiers  Journaux  litté- 
raires :  on  consulte  et  on  cite  encore  le  Journal  des 
hommes  de  lettres  de  V Italie,  et  les  Observations  lit' 
téraires*  L'Histoire  littéraire  d'Italie  est  vraiment  rede- 
vable de  ses  progrès  à  trois  écrivains,  Bettinelli,  Decina, 
et  Tiraboschi  ;  ce  dernier  embrassa  toute  l'histoire  de  la 
littérature  italienne,  et  son  ouvrage  fait  autorité. 

Les  essais  midheureux,  tentés  depuis  l'Arioste  et  le 
Tasse  dans  le  penre  épique,  ne  découragèrent  pas  les 
Italiens.  Antonio  Caracdo  publia  un  poème  épique  sous 
le  titre  de  l*Empire  vengé,  où  il  célèbre  les  pnnces  d'Oo 
cident  qui  s'allièrent  pour  relever  l'Empire  d'Orient;  il 
se  montre  faible  imitateur  du  Tasse.  —  Les  traducteurs 
furent  plus  heureux  :  la  traduction  de  VÊnéide  de  Beve- 
rini  est  supérieure  à  celle  d'Annibal  Caro;  Cornélius 
Bentivoglio  publia  la  traduction  de  la  Thébaïde  de  Staoe, 
et  l'abbé  Cesarotti  donna  une  version  des  poèmes  attri- 


ITA 


1115 


ITA 


boés  à  Oasian,  généralement  regardée  comme  un  chef- 
d'cBavre^  et  une  tradaction  moins  heureuse  de  Ylliade. 
L'époDée  hérof-comique  fil  quelque  progrès  pendant  cette 
pèrifioe  :  le  Biceîarcktto  de  Nicolas  Forteguerra  est  une 
pbiauite  parodie  de  TArioste. 

Uopéra,  composé  de  drame  et  de  musique,  était  par 
xla  même  trajet  à  dégénérer.  En  effet,  au  commence- 
ment du  ïvm*  siècle,  la  musique  atait  tellement  dominé, 
qoe  la  partie   littéraire  était  complètement  sacrifiée; 
Apostoto  Zeno  entreprit  une  réforme  devenue  nécessaire, 
fidmirateur  des  Grecs  et  de  la  tragédie  française,  il  traita 
des  sujets  grecs  d*après  la  méthode  classique  de  nos 
grands  tragiques.  Le  résultat  fut  que  le  li^retto  reprit 
tellement  Te  dessus  dans  Topera,  oue  la  musique  fut 
ncrifiée  à  son  tour.  Cependant  la  réforme  de  Zeno  pro- 
fita ail  théâtre,  et  à  Métastase,  oui  devait  le  plus  illustrer 
ce  genre  de  composition.  Disciple  de  Zeno,  il  évita  les 
défauts  de  son  maître;  tout  en  restant  fidèle  aux  tradi- 
tions françaises  et  aux  sujets  tirés  de  Thistoire  grecque, 
il  mit  plus  de  goût  et  de  sentiment  musical  dans  ses 
compositions.  Cest  ce  qui  explique  ses  défauts  et  ses 
qualités.  En  effet,  les  mélodrames  de  Métastase  sont 
écrits  dans  un  style  coulant,  harmonieux;  le  rhythme 
des  vers  est  varié  et  propre  à  faire  éclater  tous  les  res- 
sorts de  la  mélodie  ;  mais  les  caractères  manquent  de 
pn^ondeoT,  les  situations  de  développements  :  malgré 
cela,   VArtaxercê^  l'Olympiade,  le  Démophoon,  etc., 
prodaisirent  ane  immense  sensation  en  Italie,  et  y  sont 
€Dcore  Justement  appréciés. 

Ia  tragédie,  abandonnée  pour  Topera,  fit  de  courageux 
«ffortB  pour  se  relever.  Les  premiers  écrivains  qui  repri- 
rent cette  route  abandonnés  furent  Delfino  MÛtelli,  et 
le  marquis  Me^ei ,  dont  la  Mérope  causa  une  révolution 
dans  Itart  dramatique.  L'auteur  entreprit  dans  cette  pièce 
dlntéreaser  ses  compatriotes  par  une  nouvelle  tragédie 
qui  réunit  à  la  fois  le  naturel  et  le  pathéti<]ue  des  Grecs, 
le  moaTement  et  la  régularité  des  Français,  sans  autre 
mobile  d'intérêt  que  Tamour  maternel.  Le  succès  de 
Èférope  lut  immense  en  Italie,  et  même  en  France,  où 
Voltaire,  après  Tavoir  critiquée,  lui  rendit  Justice  en 
liaiitant.  —  Entre  Blaffei  et  Alfieri,  il  y  eut  quel(][ue8 
essais   tiagiques  :  les  tragédies  chrétiennes  d'Anmbal 
Marchese  et  du  P.  Bîanchi;  celles  assez  remarquables 
vue  Xavier  Pansuti  tira  de  Thistoire  romaine  {Brutus , 
VirohM,  Sophonisbé)  ;  enfin  les  pièces  d'Antoine  Conti, 
écrites  dans  un  s^le  sévère  et  avec  un  vrai  sentiment  de 
Tantiquiié.  Gigli  et  Fagiuoll  firent  aussi  tous  leurs  efforts 
pour  inspirer  aux  Italiens  le  coût  Vie  la  simplicité  et  de 
la  roulante  des  pièces  françaises. 

Vittorio  Alfieri  entra  dans  la  carrière  littéraire  avec  un 
plan  de  réforme  bien  arrêté  :  son  dessein  fut  de  réagir 
contre  ce  qu'il  appelait  la  corruption  du  théâtre  italien 
et  la  mollesse  de  Métastase.  Son  système  poétique  n'avait 
pas  seulement  pour  but  de  relever  le  goût  littéraire  des 
halieos,  mais  encore  de  leur  rendre  le  sentiment  de  la 
liberté.  Cest  dans  cet  esprit  qu'il  composa  princioale- 
ment  Virginie,  la  Conpiration  des  Pazzi,  le  Timotéonf 
lea  deux  Brutus,  Agis,  Dan  Carlos,  etc.  Alfieri,  écrivant 
poor  la  réforme  morale  et  poétique  de  son  siècle,  avait 
dû  se  faire  tout  an  système  dramatique  ;  il  ramena,  au- 
tant que  possible,  son  style  à  la  simplicité  énergique  de 
Dante,  et,  dans  ses  efforts  vers  le  grand,  ne  sut  pas  tou- 
jours éviter  la  rudesse.  Il  se  créa  une  versification  nette 
et  forte,  nmplifia  Taction  tragique,  et  développa  les  ca- 
ractères aux  dépens  des  événements.  Mais,  tout  en  admi- 
rant la  noblesse  des  sentiments  qu'il  exprime,  on  peut 
loi  reprocher  d'avoir  trop  chargé  les  ombres  de  ses  ta- 
bleau, et   représenté  ses  traîtres  trop  complètement 
maavaja,  ce  qui  est  une  faute  au  point  ae  rue  de  l'art  et 
de  la  connaissance  du  cœur  humain.  —  L'entreprise 
d'Atteri,  d'abord  criti^ée  comme  toute  réforme,  finit 
par  oiMOTir  l'approbation  générale,  et  toute  une  géné- 
ratioD  de  poètes  se  forma  à  son  école.  Le  comte  Alexandre 
PepoU»  tnppé  des  beautés  des  premières  tragédies  d'Aï- 
fien,  eut  le  mérite  rare  de  se  réformer  à  son  exemple. 
n  refit  les  tragédies  qu'il  avait  déjà  publiées,  et  en  com- 
posa de  noarelles.  Dans  quelques-unes  il  reproduisit  les 
mêmes  sujets  qu'Alfieri  avut   déjà  traités;   tels  sont 
VAgamênmùn  et  le  Don  CaHos.  Jean  Pindemonte  fut  en- 
core pins  le  ifiscîple  des  poètes  tragiques  fhmçais  que 
d'Atteri.  n  sacrifiait  souvent  la  profondeur  des  pensées 
à  réclat  de  la  scène.  Ses  principales  pièces  sont  les  Bac- 
€iunaUs,  le  Saut  de  Leucade,  Agrippine,  les  Colons 
de  Cimdie^  Geneviève  d^ Ecosse,  etc. 

La  comédie  avait  été   négligée  au  xvn*  siècle  pour 
repéra,  et  tons  les  littérateurs  du  commencement  du 


xvm*  comprenaient  la  nécessité  de  la  relever  et  de  If 
régulariser.  Dans  ce  but  Jérôme  Gigli  traduisit  le  Tar- 
tufe de  Molière,  les  Plaideurs  de  Racine,  et  donna 
ainsi  le  premier  aux  Italiens  Tidée  de  ce  que  devait  être 
la  bonne  comédie.  —  Le  marquis  Maffei  publia  les  Céré- 
monies  et  le  Raguet;  dans  la  dernière  de  ces  pièces,  11 
tâchait  de  tourner  en  dérision  les  Italiens  qui  dénatu* 
raient  leur  langage,  en  y  introduisant  des  locutions 
françaises.  Ces  comédies  auraient  eu  plus  de  succès,  si 
l'auteur  ne  les  avait  écrites  en  vers.  — Jules-César  Becelli 
attaqua  les  pédants  de  son  temps  dans  les  Faux  savants, 
l'Avocat ,  les  Portes  comiques ,  etc.  —  Riccoboni  essaya 
de  faire  revivre  Tancienne  comédie  nationale;  mais  il 
échoua  pour  avoir  voulu  changer  trop  brusquement  le 
goût  de  son  temps.  —  Les  efforts  du  marquis  de  Liveri 
portèrent  surtout  sur  les  effets  scéniques  :  il  rendit  la 
scène  plus  animée,  disposa  les  personnages  par  groupes, 
et  les  fit  habilement  concourir  à  l'effet  général.  —  Toutes 
ces  réformes  partielles  préparaient  la  voie  à  Goldoni» 
Doué  d'un  esprit  vif  et  original,  d'une  grande  facilité,  il 
composa  150  pièces  où  Ton  rencontre  une  étonnante  va- 
riété d'intrigues,  de  caractères,  et  de  situations.  S'il  n'a 
pas  un  style  très-correct,  et  si  ses  ouvrages  sentent 
quelquefois  la  précipitation,  on  ne  peut  lui  refuser  une 
verve  singulière  et  une  grande  connaissance  du  caractère 
italien.  Ce  mérite  est  surtout  appréciable  dans  son  pays; 
car  les  étrangers  sont  souvent  frappés  du  peu  d'élévation 
des  caractères  qu'il  peint  avec  tant  de  naturel.  Ses  prin- 
cipales comédies  sont  l* Honnête  fille,  la  Bonne  femme, 
le  Café,  le  Chevalier  et  la  Dame,  la  Paméla,  V Amant 
militaire,  VAvocat  vénitien,  et  le  Bourru  bienfaisant, 
cette  dernière  pièce  faite  pour  le  Thé&tre-Français.  — 
Chartes  Gozâ  vint  ravir  à  Goldoni  une  partie  de  sa  popu- 
larité. Plus  habile  érrivain  que  son  rival,  avec  une  ima- 
gination extravagante,  il  se  plut  à  composer  les  pièces 
les  plus  romanesques  et  les  plus  absurdes  i  les  titres  de 
quelques-unes  donneront  une  idée  de  sa  folle  entreprise; 
ce  sont  :  l'Amour  des  trois  oranqes,  le  Roi  cerf,  la  Dame 
serpent,  le  Monstre  bleu  turqmn,  le  Petit  oiseau  d^un 
beau  vert,  etc.  Avec  de  pareils  ouvrages,  il  trouva  néan- 
moins le  moyen  de  plaire,  tant  il  est  vrai  que  l'impor- 
tant est  d'avoir  de  l'esprit  et  de  la  verve  comioue. 

Le  sonnet,  genre  cher  à  TItalie,  fut  cultivé  au  xvm* 
siècle  par  J.-B.  Cotta,  Julien  Camani,  et  Onofrio  Min- 
zoni,  qui  s'appliquèrent  à  perfectionner  ce  petit  poème. 
—  Frugoni  écSrivit  non-seulement  des  sonnets,  mais  en* 
core  des  odes,  des  égfogues,  des  épltres,  des  satires,  etc. 
Dans  ces  divers  genres,  il  montra  une  imagination  très- 
riche.  Jointe  à  une  grande  hardiesse  d'expression.  Ange 
Mazza  fut  le  dernier  poète  lyrique;  il  fit  parier  à  sa 
muse  le  langage  de  la  philosophie.  —  J.-Charles  Passe- 
roni  et  Laurent  Pignotti  s'essayèrent  dans  l'apologue;  le 
Jésuite  Roberti  y  déploya  quelcfue  invention;  Bertola 
surpassa  quelquefois  ses  devanciers  par  la  simplicité  et 
la  gr&ce.  —  P.  RoUi,  outre  de  nombreuses  traductions, 
composa  des  cantates  estimées.  —  On  doit  à  Spolverinl 
un  poème  didactioue  sur  la  Culture  du  riz»  —  Mention- 
nons enfin,  parmi  les  poètes  satiriques,  G.  Casti,  Tauteur 
des  Animaux  parlants. 

Les  Italiens,  si  riches  en  Nouvelles  versifiées,  et  qui, 
au  xvm*  siècle,  comptent  encore  celles  de  Batacchi  et  de 
Costa,  eur^it  de  tout  temps  fort  peu  de  romans  en 
prose;  la  seule  production  de  ce  genre  qui  se  fasse  re- 
marquer est  le  Congrès  de  Cythère  du  comte  Algarottl , 
espèce  de  satire  contre  les  femmes.  Le  comte  Alexandre 
V^ri,  érudit  très-versé  dans  Thistoire  ancienne,  publia 
une  Vie  dÊrostrate  qu'il  disait  avoir  découverte  dans  un 
ancien  manuscrit,  et  les  Aventures  de  Sapho,  où  il  s'attache 
à  imiter  la  simplicité  élégante  des  Grecs.  Mais  l'ouvrage 
auquel  cet  écrivain  dut  principalement  sa  réputation  est 
celui  des  Nuits  RomcUnes  :  ce  sont  divers  entretiens  qu'il 
suppose  avoir  eus  avec  les  ombres  dos  anciens  Romains 
les  plus  illustres,  et  surtout  avec  celle  de  Cicéron  ;  il 
tire  de  ce  sujet  dies  comparaisons  ingénieuses  entre  les 
institutions  de  Tancienne  Rome  et  celles  de  lltalie  mo- 
derne. Ce  qu'il  faut  surtout  remarquer  dans  cet  écrivain, 
c'est  la  gr&ce  et  le  naturel  de  son  style  formé  à  Técole 
des  premiers  prosateurs  italiens. 

Cinquième  période,  —  Les  bouleversements  oue  la 
Révolution  française  produisit  en  Italie,  l'esprit  militaire 
et  les  idées  de  liberté  qu'elle  réveilla,  les  aspirations  à 
l'unité  politique  qui  ea  ont  été  la  suite,  eurent  leur 
contre-coup  dans  la  littérature.  Dans  la  langue,  le  parti 
des  Puristes  eut  une  tendance  prononcée  à  s'affranchir 
des  locutions  fï'ançaises,  à  remonter  à  la  source  nationale 
de  Dante  et  des  autres  écrivains  anciens.  Dans  la  poésie. 


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vne  latte  s'engagea  entre  les  classiques,  qai  restaient 
fidèles  à  la  tradition  mythologique,  et  les  romarUiques, 
à  qui  la  connaissance  des  littératures  anglaise  et  alle- 
mande aTaient  ouvert  des  horizons  nouveaux.  Les  pu- 
ristes ont  triomphé  ;  mais  les  états  successifs  d'oppression 
et  de  révolte,  de  découragement  et  de  surexcitation  poli- 
tique par  lesquels  l'Italie  a  passé  Jusqu'à  nos  Jours, 
n'ont  point  laissé  aux  esprits  assez  de  calme  pour  s'atta- 
cher fortement  aux  qurâtions  littéraires,  et  la  querelle 
des  classiques  et  des  romantiques  n'est  pas  encore  dé- 
cidée. 

A  la  tête  des  Puristes  s'est  placé  Antonio  Gesari ,  qui 
a  poussé  Jusqu'à  raffectation  sa  prédilection  pour  la  langue 
du  XIV*  siècle,  et  dont  le  système  exclusif  a  été  exagéré 
encore  par  Pellegrino  Fsrini.  Vincenzo  Monti  a  été  pu- 
riste et  classique,  mais  avec  plus  de  coût  et  d'esprit, 
ainsi  que  son  gendre  Giullo  Pertican,  profondément 
versé  dans  la  connaissance  des  antiquités  italiennes. 
Sans  se  mêler  aux  luttes  politiques  comme  ces  divers 
écrivains,  Giuseppe  Parini  se  fit,  dans  ses  poésies,  un 
style  énerjpque  et  original.  Ugo  Foscolo  écrivit  des  tra- 
fféidies  imitées  de  celles  d'Alfieri  ;  elles  ont  moins  contri- 
bué à  sa  réputation  que  ses  Ultime  Lettere  di  Jacopo 
Ortts,  imitation  du  Werther  de  Goethe,  et  ses  travaux  sur 
Dante,  Pétrarque  et  Boccace.  Les  œuvres  dramatiques  do 
Silrio Pellico, connu  parle  livre  intitulé  Mesprisons,  celles 
de  Maroncelli,  de  Luigi  Scevola,  de  Cesare  délia  Valle, 
de  Francesco  délia  Valle,  de  Gosenza,  sont  assez  faibles. 
Niccolini  s'est,  au  contraire,  placé  au  premier  rang  des 
classiques  ;  après  avoir  emprunté  ses  sqiets  à  la  mytho- 
logie et  à  l'antiquité,  il  puisa  plus  tard,  avec  un  égal 
bonheur,  dans  l'histoire  du  moyen  âge.  —  Du  côté  des 
romantiques,  il  faut  placer  d'abord  Alexandre  Manzoni, 
qui,  dans  deux  tragédies,  Il  conte  di  Carmagnola,  et 
Adelchi,  ouvrit  des  voies  nouvelles  à  l'art  dramatique 
italien.  Il  eut  pour  imitateun  assez  faibles  Tebaldo  Fores, 
Gristoforis,  Rosini,  Carlo  Marenco,  qui  mirent  à  la  scène 
las  grands  événements  arrivés  au  moyen  âge  dans  leur 
patrie.  D'autres  poètes  donnèrent  modestement  le  nom 
de  drames  à  leurs  tragédies  :  tels  sont  Giuseppe  Révère, 
Antonio  Gigliani,  Felice  Turatti,  Giacinto  Battaglia,  etc. 
Les  Drames  historiques  de  Giov.  Sabbatini  sont  moins 
des  œuvres  dramatiques  que  des  scènes  historiques. 
Dans  la  comédie,  Gberardo  del  Testa  s'est  fait  une  place 
honorable;  Gher.  de'Rossi  est  estimé  par  son  style  sati- 
rique et  mordant;  Albergati  moralise  d'après  Voltaire 
et  Goldoni  ;  Avelloni  s'est  inspiré  de  Beaumarchais,  comme 
Federici  des  Allemands  ;  Alberto  Notaexoellait  parle  dessin 
des  caractères,  et  le  comte  Giraud  par  la  sensibilité.  Au- 
Joard'hui  les  traductions  des  piècâ  ftançaises,  spéciale- 
ment de  celles  de  Soribe,  ont  à  peu  près  tout  envahi. 
Felice  Romani  a  eu  des  succès  dans  l'opKSra. 

On  ne  trouve  plus  d'épopées^  dans  le  sens  antique  at- 
taché à  ce  mot,  mais  un  assez  grand  nombre  de  récits 
épiques.  Le  plus  important  est  celui  de  Tommaso  Grossi, 
lUmbardi  alla  prima  crociata,  en  15  chants.  Florio 
et  Arici  sont  auteurs  d'une  sorte  d'épopée  romantique, 
la  Destructton  de  Jérusalem,  Silrio  Pellico  a  publié  des 
poésies  sous  le  titre  d'Antiche,  Costa  un  poème  sur  la 
découverte  de  l'Amérique,  Domenico  Biord  la  Pace 
d^Adrianopoli,  Giovanni  de  Martine  la  Grecia  rigenerata, 
ces  deux  derniers  poèmes  inspirés  par  l'affinancûssement 
de  la  Grèce.  —  Au  nombre  des  podtes  lyriques  figurent 
Clem.  Bondi,  G.  Fantoni,  A.  Paradisi,  Gher.  de'  Rossi. 
G.  Meli,  Monti,  Silrio  Pellico,  Manzoni,  le  comte  Leo- 
pardi,  Luigi  Carrer,  Giovanni  Berchet,  Amatino  Cagnoli, 
Giov.  Prati ,  Giuseppe  Giusti ,  Broffeiio ,  Giov.  Mar- 
chetti,  etc.  —  Un  Florentin,  Angelo  d'Eld,  a  mérité  par 
■es  satires  le  surnom  de  Juoénal  italien. 

Le  roman  a  pris  une  extension  considérable.  Ici  en- 
core, Manzoni  donna  l'impulsion  par  ses  Promessi  sposi 
(les  Fiancés),  tableau  brillant  des  mœurs  et  de  l'his- 
toire du  xvn*  siècle  dans  le  nord  de  l'Italie.  Vinrent 
ensuite  la  Menaça  di  Monsta  et  Luisa  Strozzi  par  Ro- 
sini, VEttore  Fieramosca,  et  le  Niccolo  de*  Lappiper 
Massimo  d'Azeglio,  le  if orco  Visconti  de  Grossi.  Varese, 
Bazzoni,  Falconetti,  Lansetti,  Guerazzi,  Sacchi,  Blarocco, 
Zorzi,  Vigna,  le  prince  de  Santa-Rosa,  Battaglia,  Ra- 
nieri,  etc.,  sont  aussi  des  romanciers  distingués. 

Vhistoire  est  cultivée  au  xix*  siècle  avec  autant  de  soin 
:iue  de  succès.  Parmi  les  recherches  savantes,  on  doit 
mentionner  en  première  ligpe  celles  de  Micali,  Vltalie 
noant  la  domination  romame,  et  de  Garzetti.  Le  plus 
remarquable  ouvrage  a  été  sans  contredit  V  Histoire  iini- 
mrselle  de  Cesare  Cantù,  à  qui  l'on  doit  encore  une  i7ts- 
toire  des  Italiens,  Cesare  Balbo«  Luigi  J^arti,  Giuseppe 


Compagnon!  et  Ant.  Goppi  se  sont  également  occupés  de 
l'histoire  générale  de  l'Italie.  L'histoire  spéciale  dû  pro- 
rinces et  des  villes  a  été  aussi  l'objet  de  nombreux  tra- 
vaux :  nous  citerons  VHistoire  de  Ncmtes  par  Pagano, 
les  Vêpres  Siciliennes  d'Aman,  les  Tables  càronotogi- 
ques  de  Vhistoire  de  Florence  par  Reumont,  VBistoir$  de 
Toscane  par  Lorenzo  Pignotti,  VHistoire  de  MUanjau 
Pietro  Custodi,  VHistoire  de  Pise  par  Bonaini,  VHih 
toire  de  Gênes  par  Carlo  Varese  et  par  Girolamo  Serra, 
VHistoire  de  la  Sicile  par  Giuseppe  Alessi,  VHistoire  de 
la  réoolution  de  Napfes  par  Cuoco,  VHistoire  moden» 
de  Naples  par  Collette ,  VHistoire  de  la  Sicile  par  Pictrc 
Lanza,  prince  de  Scordia ,  VHistoire  d'Italie  par  Carlo 
Botta,  auteur  également  d'une  Histoire  de  la  guerre  de 
Vindépendance  des  États-Unis  d'Amérique,  Le  comts 
Pompeo  Utta  a  publié  les  FamUles  célèbres  dlUdie, 
L'histoire  des  beaux-arts  a  occupé  Land,  Cicognara, 
Giuseppe  Bossi,  Fumigalli,  Ferrano,  Inghirami,  Rosini 
et  Visconti. 

V,  Alacd,  Poeli  antiche^  Naples,  1661;  Cresdmbeni, 
Storia  délia  vclgar  poesia,  1096;  Muratori,  Délia  per- 
fetta  poësia  iialiana,  Modène,  1726, 2  vol.  in-4*  ;  Quadrio, 
Storia  e  regione  Sogni  poesia,  Bologne,  1739;  Giinma, 
Idea  délia  storia  delV  Italia  letterata,  Naples,  1 72 1, 2  yoL 
in^*;  Mazzuchelli,  Gli  scrUtori  d:" Italia,  Bresda,  1753; 
Tiraboschi,  Storia  délia  letteratura  italiana  fino  aif 
anno  4700,  Modène,  1772-81,  14  vol.  in-4o;  Coroiani, 
/  secoli  ddla  lettenUura  italiana,  Brescia,  1818,  9  vol. 
in-8®,  avec  une  continuation  par  Ticozi,  Milan,  1832-33, 
2  vol.  in-^  ;  G.  Maffei,  Storia  ddla  letteratura  italiana 
fino  al  secolo  xix,  Milan,  1834,  4  vol.  in-8*;  Ugoni,  DeUa 
letteratura  italiana  nella  seconda  meta  dd  secolo  xvui, 
Bresda,  1820-21  .  3  vol.  in-8»;  Ambrosoli,  ManuaU 
ddla  letteratura  italiana.  Milan,  1831-33,  4  vol.  in-8^ 
Levati,  Saggio  sulla  storia  délia  letteratura  italiana 
deiprimi  &  anni  del  secolo  xa.  Milan,  1831  ;  Gingueoé, 
Histoire  de  la  littérature  italienne^  continuée  par  Salfl, 
Paris,  1811  à  1835, 13  vol.  in-8*;  Salfi,  Résumé  de  l'his- 
toire de  la  lUtérature  italienne,  Paris,  1826, 2  vol.  in-18; 
Sismondi,  De  la  lUtérature  du  midi  de  VEurope,  Paris, 
1829,  4  vol.  in-8«:  Ruth,  Histoire  de  la  poésie  italienne, 
en  allem.,  Leipzig,  1844;  Riccoboni,  Histoire  du  théâtre 
italien,  Paris,  1727, 2  vol.  in-8*;  Rannucd, Manuale ddla 
letteratura  dd  primo  secolo,  Florence,  1837  ;  Cimorelii, 
Origine  e  progressi  délie  belle  lettere  italiane.  Milan, 
1845;  Giudid,  Compendio  délia  storia  ddla  letteratura 
italiana,  Florence,  1851  ;  Rathery,  Influence  de  Vltalie 
sur  les  lettres  firançaises,  PariM^  idSA,  \n-%\        E.  B. 

iTAUENiiB  (Versification  ).  Elle  est  fondée  sur  l'accent 
prosodique ,  et  sur  le  nombre  déterminé  des  svllabes. 
La  rime,  simple  accessoire  d'harmonie,  n*est  nullement 
nécessaire;  d'excellents  poèmes,  en  particulier  toutes  les 
poésies  dramatiques,  sont  écrits  en  vere  blancs  ou  non 
rimâi  {versi  sciolti),  La  rime  en  italien  part  de  la  der« 
nière  syllabe  accentuée;  dès  lors  ce  n'est  pas  toujours  la 
dernière  syllabe  qui  la  constitue.  —  On  distingue  chaque 
espèce  de  vere  par  le  nombre  de  syllabes  dont  il  est 
composé,  n  y  a  élidon  lorsqu'une  voyelle  ilnale  se  ren- 
contre avec  une  voyelle  initiale  :  dans  ce  cas,  ces  vovelles 
ne  comptent  que  pour  une  seule  syllabe.  Ainsi,  tel  vers 
dont  les  mots  donnent  seize  syllabes  se  réduit  psr  Téli- 
sion  à  onze.  Il  Ikut  ériter  de  faire  rencontrer,  dans  Téli- 
sion,  des  voyelles  accentuées,  comme  potri  io.  Cest 
aussi  un  défaut  de  compter  l'élision  pour  deux  syllabes 
dans  la  mesure  du  vers.  —  On  appelle  versi  tronchi  les 
vere  qui  sont  terminés  par  un  mot  tronco  {tronqué, 
dont  l'accent  est  sur  la  dernière  syllabe);  versi  piam, 
ceux  qui  sont  terminés  par  an  mot  piano  (doux,  dont 
l'accent  est  sur  la  pénultième)  ;  versi  sdruccioli,  ceui  qui 
sont  terminés  par  un  mot  sdrucciolo  {glissant,  dont 
l'accent  est  sur  l'antépénultième).  Les  vere  de  la  langue 
italienne  sont  considérés  généralement  comme  piam; 
les  autres  vere  se  rapportent  tous  à  cette  dasse.  Donc,  le 
vere  tronco,  par  nppiort  au  vere  ptano,  doit  avoir  une 
syllabe  de  moins,  parce  que  la  dernière  syllabe  d'u» 
mot»  quand  elle  est  accentuée,  est  égale  à  deux  syllabes 
brèves,  ou  à  une  brève  et  à  un  repos  ;  les  ven  sdruO' 
cioli,  par  nmport  aux  vere  piant,  doivent  avoir  une 
syllabe  de  plus,  parce  que  deux  syllabes  brèves  après 
une  syllabe  accentuée  doivent  se  prononcer  avec  b 
même  vitesse  qu'une  seule  syllabe  brève. 

La  langue  italienne  compte  8  espèces  de  vers,  de  on» 
à  quatre  syllabes.  Le  plus  long  ou  endécasyllabe  est  en 
même  temps  le  plus  harmonieux,  le  plus  mijestueux,  et 
le  seul  qu'on  emploie  dans  les  grandes  compositions 
poétiques.  Il  peut  avoir  trois,  quatre,  et  même  dnq  syl- 


•  I 


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libeB  «ecentuéet,  dans  différentes  positions,  os  qui 
donne  liea  à  une  infinité  de  combinaisons,  dont  chacune 
ofte  une  hannonie  ▼ariée,  selon  le  sentiment  que  le 
po^  veut  exprimer.  Après  les  endécas^Uabes,  les  vers 
de  sept  sylIsDes  sont  les  plus  harmomeui  et  les  plus 
asités.  Les  Yera  de  six  syllabes  ne  sont  employés  que 
nrement,  à  cause  de  leur  harmonie  trop  uniforme. 

Panni  les  différentes  combinaisons  de  Ters,  nous  dis- 
tinguerons :  1*  Voltava  rima  ou  strophe  de  huit  vers, 
del*inTenlîon  de  Boccace;  c'est  le  mètre  de  la /^rt*- 
$aUm  délwrée.  Cette  heureuse  division,  qui  oflire  à  Tes- 
prit  d*sgréable8  repos,  a  été  empruntée  aux  Italiens  psr 
les  Espsgnols,  les  Portugais,  les  Allemands  et  les  Au- 
rais; 2*  la  sêstma  ou  strophe  de  six  Yors,  également  de 
création  italienne.  (Test  le  mètre  dans  lequel  s'expri- 
meot  répigramme«  la  satire,  l'ironie,  sous  l'apparence 
de  la  gra?ité  et  du  sérieux  ;  par  exemple  la  Sêcchia  ror 
fUa  &  Tassoni  ;  3*  la  t9r%a  rtma,  couplet  de  trois  yots 
endécasyllabes,  aTec  des  rimes  croisées  qui  s'enchaînent 
d'un  tercet  à  Taatre.  Cest  le  mètre  de  la  /)ivtfM  com^t». 
D  m  ordinafrement  affecté  à  la  poésie  satirique,  bien 
qae  quelques  poètes  aient  écrit  en  terss  rime  des  élé- 
gies, des  égioguas,  des  éplties  et  même  des  odes,  non 
su»  quelque  saociès.  —  La  causons  ou  ode,  les  poésies 
dite»  snaôéontiqnes,  renferment  des  strophes  de  toute 
mesore  et  de  toute  espèce  de  yen,  selon  le  goût  et  l'in- 
testion  du  pofite.  —  Vient  enfin  le  somMi,  rfavthme 
eneotiellemeiit  italien,  qui  a  fait  le  tour  de  rËurepe 
avec  un  succès  prodigieux.  On  croit  que  les  Italiens  l'ont 
emprunté  aux  Troubadours.  Ce  genre  de  poésie  est  insé- 
ptnble  du  nom  de  Pétrarque.  Bunhiello  et  Berni  ont 
breoté  le  sonnet  burlesque  ou  épigrammatique,  et  l'ont 
aileogé  d'une  queue  plus  ou  moins  longue,  selon  la  dose 
de  plaisanterie  qn*ils  avalent  à  exprimer  :  ces  sonnets 
t'appellent  soneUs  colla  coda.  E.  B. 

iTAUBiniB  (  Numismatique).  Après  la  chute  de  l'Empire 
romain  d'Ooddent  en  476,  l'Italie  fut  occupée  par  les 
Héroles.  On  ne  connaît  aucune  monnaie  de  cette  peu- 
plade germanique  :  celles  qu'on  a  touIu  attribuer  à  son 
dief  Odoacre  sont  fausses  ou  ont  été  mal  interprétées. 
Tliéodorie  le  Grand,  I*'  roi  des  Ostrogotlis  en  Italie,  a 
fait  Crapper  des  monnaies  de  tous  métaux.  Sa  monnaie 
d'or  est  calquée  sur  Yaurma  romain,  et  elle  ne  se  dis- 
tingue du  sou  impérial  d'Anastase  que  par  le  mono- 
gFNBme  dn  roi,  caché  à  la  fin  de  ht  légisnde  ;  sur  les 
<iwssir«r,  on  Tolt,  au  droit,  la  tète  de  l'empereur,  et, 
au  isfers,  le  monogramme  de  Théodoric  ;  le  nom  et 
l'effigie  de  ce  prince  figurent  sur  le  bronze.  Les  autres 
nia  oitrogotlis  n*ont  pas  laissé  de  pièces  d'or;  leure  qui- 
sairea  portent  ordinairement  leur  monogramme,  et  quel- 
quefois leur  nom  en  toutes  lettres  ;  leurs  monnaies  de 
mue,  quand  ellee  ont  été  frappées  à  Rome,  portent , 
outre  TefiDgie  royale,  la  louve  et  l'i^le  romaine,  la  Vic- 
toire et  un  guerrier,  avec  la  légende  VICTORIA  PRIN- 
QPVIi,  et,  quand  elles  sortent  de  l'atelier  de  Ravenne, 
nmsge  de  cette  ville  et  la  légende  RAVENNA  FELIX.  — 
la  monnaie  des  Lombards  est  mal  connue.  H  est  certain 
que  le  système  romain  continua  d'être  en  vigueur  ches 
enx  :  le  reven  des  pièces  porta  Tanden  type  de  la  Vlc- 
toîie;  an  droit  on  inscrivit  le  nom  de  l'empereur  Jusqu'à 
Is  fin  dn  n*  siède,  puis  celui  des  rois  lombards. 

Quand  Charlemagne  eut  soumis  l'Italie  septentrionale, 
OD  y  adopta  le  système  monétaire  des  Francs.  Toutefois, 
on  frappa  encore  à  Lncques  quelques  trtsnt  d'or,  avec 
randenne  légende  FLAVIA  LVGA.  Charlemagne  ayant 
socordé  an  jMpe  le  droit  de  battre  monnaie,  les  souve- 
rains pontilee  frappèrent  depuis  cette  époque  des  de- 
niers dans  le  système  franc,  portant  d'un  côté  leur  nom 
ou  le  buste  de  S^  Pierre,  de  l'autre. le  monogramme  de 
l'empereur.  Les  ducs  de  Bénévent  frappèrent  des  espèces 
d'or  et  d'argent  sur  lesquelles  ils  inscrivirent»  avec  leur 
nom,  celui  de  Chariemagne;  mais,  après  la  mort  de  ce 
prince,  ils  firent  disparaître  cette  marque  de  soumission. 
Quant  au  midi  de  l'Italie,  qui  restait  en  la  possession 
dea  Grecs,  on  y  maintint  le  monnayage  byûntin,  et, 

rnd  les  Sarrasins  vinrent  prendre  pied  dans  le  pavs, 
y  apportèrent  leurs  espèces  à  légendes  arabes.  Les 
Normands,  maîtres  de  la  Sidle  et  de  l'Italie  méridionale 
depuis  la  fin  du  xi*siède,  eurent  un  monnayage  bizarre  : 
le  même  prince  lrap]»it  des  pièces  dont  les  types  étaient 
emprunta  aux  empreintes  accréditées  ches  les  Grecs,  les 
Latins  et  les  Arabes,  et  dont  les  légendes  appartenaient  à 
ieon  troia  langues. 

Bès  le  xn"  siède,  la  fabrication  monétaire  était  moins 
lisriMue  en  Italie  que  partout  ailleun  :  Rooer,  duc  de 
fislenie,  fit  alon  frapper  des  oursut,  qui  de  son  titre 


prirent  le  nom  de  dueals.  Au  xui*,  les  otirma  de  FM- 
dériell,  connus  sous  le  nom  ^auquiiaUt,  sont  des 
chefs-d'oBuvre  de  gravure.  Les  républiques  italiennes, 
fières  de  leun  libertés,  inscrivaient  alon  sur  lenn  mon- 
naies leurs  titres  de  gloire  :  Bologne  reppelait ,  par  te 
légende  BONONIA  DOCET,  sa  célèbre  Université;  Man- 
toue  mettait  sur  ses  deniers  le  nom  de  Virgile.  Les  /loHsw 
de  Florence  et  les  ducali  de  Venise  étaient  imités  dans 
toute  TEurope;  à  Chypre  et  en  Morée  on  copiait  les  types 
de  Gènes.  A  Naplea,  la  maison  d'Anjou  introduisit  un 
système  moitié  fhmçais,  moitié  italien;  on  trouve  le 
nom  du  roi  Charles  te  Boiteux,  qui  eut  le  titre  de  séna- 
teur à  Rome,  sur  des  pièces  purement  romaines  et  qui 
portent  la  vieille  légende  ROMA  CAPVT  MVNDI.  —  Au 
XIV*  siède,  quand  les  papes  résidèrent  à  Avignon ,  ils  y 
eurent  un  atelier  monétaire  fort  actif,  où  furent  flrappées 
des  espèces  d'or  et  d'argent.  Au  xv*,  les  types  moné- 
taires de  la  France  ou  de  TEspagne  prévalurent  dans  le 
royaume  de  Naplea ,  suivant  que  la  nudson  d'Anjou  ou 
la  maison  d'Aragon  l'emporta.  Charies  VIII,  pendant  son 
expédition  en  Italie,  fit  frapper  à  Aquila,  en  Calabre,  des 
espèces  avec  cette  légende  QTÉ  DE  L'AIGLE,  tandis 
que  le  duc  d'Orléans,  maître  d'Asti ,  répandait  des  mon- 
naiea  à  titre  de  duc  de  Blilan.  Le  système  fhmçais  était 
adopté,  à  la  même  époque,  psr  les  ducs  de  Savoie,  et 
les  Génois,  selon  la  domination  qu'ils  subissaient,  asso- 
ciaient sur  leurs  pièces  au  nom  de  Conrad  II,  qui  leur 
avait  jadis  accordé  le  droit  de  monnayer,  ceux  de  Ga- 
léas  Sforza,  de  Ludovic  le  More,  de  Louis  XII,  ou  de  Fran- 
çoial**. 

Au  XVI*  dède,  l'Italie,  tout  en  perdant  son  indépen- 
dance, influait  sur  le  reste  de  l'Europe  par  ht  supé- 
riorité de  ses  arta.  Jamais  la  fabrication  monétaire  n'y 
atteignit  une  plus  grande  perfection.  On  peut  dter  comme 
exemples  les  monnaies  d'or  et  d'argent  frappées  par  les 
doca  de  Savoie,  celles  de  Florence,  de  Venise,  de  Fer- 
rare  et  de  Rome,  enfin  les  magnifiques  Uêtom  fabriqués 
à  Milan,  et  qui  portent  d'un  côté  l'efligie  de  Charlee- 
Qnint  ou  de  Philippe  II,  de  l'autre  l'image  de  S^  Am- 
broise.  —  Avec  le  xvn*  nède  la  décadence  de  l'art 
monétaûe  commence.  Si  les  ducs  de  Savoie  continuent 
de  firapper  de  belles  et  bonnes  monnaies,  une  foule  de 
petite  souverains,  comme  ceux  de  Monaco,  de  Mantoue, 
de  Piombino,  de  Massa  et  de  Canare,  se  font  faux-mon- 
nayeurs.  La  Corse  ofl^,  pendant  le  xvni*  siède,  un  fut 
monétaire  curieux  :  c'eat  la  fabrication  de  pièces  au  nom 
de  son  roi  charlatan,  Théodore.  Depuis  la  Révolution 
française  de  1789,  c'est  surtout  au  système  fhmçais  que 
l'Italie  a  fait  des  emprunts  :  non-seulement  on  a  pris 
presque  nartout  pour  osse  le  ^stème  dédmal,  nuis  les 
ateliers  ae  France  ont  souvent  fabriqué  pour  les  princes 
italiens  les  pièces  métalliques,  aussi  bien  que  les  billets 
de  banque.  V.  Carli-Bubbi ,  IMU  mùfMU  e  delV  tftttu- 
stOfM  délie  Z9cch9  d^Italia,  1754-60,  3  vol.  in-8;  Argd- 
lati.  De  monetis  Italiœ  wjuriorum  illuttriwn  mrorum 
diêierkUwnes,  Milan,  1750-59,  6  voL  in-4*;  Zanetti, 
Raccfdta  délie  monete  e  seceke  iltalia ,  Boloône,  1775- 
1789, 5  vol.  in-fol.;  Promis,  Mcnete  dereali  ai  Savoia, 
Turin,  1841, 2  vol.  in-8*. 

iTAUsmiB  (Philosophie).  S'il  lUlait  faire  remonter  la 
philosophie  italienne  jusqu'à  l'époque  où  l'on  vit  pa- 
raître des  philosophes  en  Italie,  on  devrait  partir  de 
Pythagore  et  descendre  jusqu'à  l'époque  romaine  inclu- 
sivement ;  mais  toutes  ces  diverses  périodes  sppartien- 
nent  à  la  philosophie  grecque.  Cest  à  pdne  si  au  moyen 
âge  l'Italie  occupe  une  place  un  peu  marquée  dans  la 
scolastique.  Les  eflbrts  de  quelques  hommes  depuis  Cas- 
dodore  et  Boéce  jusqu'à  Gerbert  n'avaient  pas  été  infruo* 
tueux;  le  monastère  de  Bobbio  était  devenu  l'asile  des 
lettres  dans  l'Italie  septentrionale,  nuiis  tout  se  bornait  à 
sauver  qudquea  débns  du  passé.  Au  xi*  dède,  il  y  avait 
à  Milan  deux  endroits  où  l'on  enseignait  la  philosophie; 
on  cite  Anselme  le  péripatétlden  et  Drogon  son  maître  : 
cependant  il  n'y  avîdt  aucune  école  de  renom  ;  c'était  à 
Paris  qu'Anselme  d'Aoste,  Lanfranc  de  Pavie,  Lotulfe  de 
Lombardie,  Anselme  de  Bamo,  et  tant  d'autres,  parmi 
lesquds  brillèrent  au  i>remi«r  rang  S^  Thomas  et  S^  Bo- 
naventure,  vendent  s'instruire  et  briller.  Mdné  Bru- 
netto  Latini,  Guido  Cavdcanti,  et  leurs  disciples  Dante  et 
Pétrarque,  ce  ne  fat  qu'à  partir  de  la  Rendssance  que 
ritdie  vit  ndtre  ouelques  écoles  dignes  d'être  citées. 
Gémiste  Pléthon  et  le  cardind  Bessarion  y  font  connaître 
Platon  quelques  années  avant  la  chute  de  Constanti- 
nople.  Après  cet  événement,  l'étude  de  l'antiquité  philo- 
sophique donna  naissance,  en  Italie,  à  deux  écoles,  l'une 
platomdenne,  et  l'antre  péripatétidenne.  La  première 


ITA 


1118 


rTI 


eut  pour  ehef  Mvsile  Ficin,  qui  traduisit  Platon,  Plotin^ 
une  partie  des  écrits  de  Porphyre,  de  Jambllqae,  de 
Proclos,  et  qui  laiaaa  ane  ryofogte  plaUmicimnê.  On 
dte  Jean  Pic  et  François  de  la  Hirandole,  Franoesco  Pa- 
trini ,  qnl  tenta  une  conciliation  entre  Platon  et  Aria- 
tote,  et  Jordano  Brono,  le  plus  célèknne  de  cette  écolo 
idéaliste.  Jordano  Bruno  reproduiait  la  doctrine  des 
nomlirea  de  Pythagore,  ce  qui  le  conduisit  à  soutenir  le 
système  de  Goperaic.  —  L'école  péripatéticienne  com- 

5 rend  deux  branches  :  Tune,  dite  alKDandrUtê^  du  nom 
'Alexandre  d'Aphrodîse  qu'elle  prit  pour  guide,  est  sen- 
iualiste  pure;  l'autre,  dite  iMMfroUtê,  d'Averroès,  qu'elle 
âTait  pris  pour  maître,  avait  adopté  un  sensualisme  qui 
conduit  au  panthéisme.  Dans  la  première,  qui  fleurit  sur- 
tout à  Bologne,  on  remarque  P.  Pomponaœ,  Zarabella,  F. 
Piooolomiiu,  et  Cremonini;  dans  la  seconde,  Alexandre 
Achillini,  qui  commence  à  suivre  Averroès,  Zimara,  Gésal- 
pini  d'Arezzo,  et  Julea-Gésar  Vanini,  qui  fut  brûlé  à  Tou- 
louse comme  J.  Bruno  l'avait  été  à  Venise.  La  philosophie 
en  Italie  (xvi*  siècle)  cherche,  avec  Telesio  etCampanella, 
à  secouer  le  Joug  de  Tantiquité,  mais  sans  y  parvenir  : 
Telesio  rappelle  Démocrite  et  Parménide,  il  en  appelle  à 
l'expérience;  Campanella  voulut  entreprendre  une  ré- 
forme de  toutes  les  parties  de  la  philosophie  ;  en  réalité 
il  est  sensualiste  comme  le  précédent.  Au  xvn*  siècle  la 
philosophie  Jette  peu  d'éclat  en  Italie  ;  la  révolotlon  opé- 
rée pir  Descartes  y  trouve  à  peine  quelques  représen- 
tants. Th.  Gomelio  et  Ch.  Majillo  ;  Desôurtes  y  trouva 
un  adversaire  illustre,  Vico,  si  connu  par  sa  théorie  de 
la  ohilosophie  de  l'histoire,  théorie  qu'il  développa  dans 
la  Science  nowMe;  en  outre  il  prétendit  donner  la  so- 
lution du  problème  de  la  certitude  en  plaçant  le  critérium 
de  la  vérité  dans  l'assentiment  unanime  du  genre  hu- 
main; c'était  le  fond  de  son  opposition  au  cartésianisme. 
Malebranche  trouva  un  sectateur  zélé  dans  Fàrdella, 
professeur  i  Padoue;  mais  cet  idéalisme  ne  réussit  pas 
en  Italie,  sortout  au  xvm*  siècle.  L'Économie  politique 
fnt  cultivée  avec  succès,  ainsi  que  le  Droit  de  la  nature 
et  des  gens  par  Filangieri,  Mario  Pagano,  Beccaria  et 
Verri  ;  la  Monde  fut  représentée  par  Muratori  et  Stellini. 
Dana  le  siècle  actuel,  Rosmini  et  GiobertI  se  sont  dis- 
tingués comme  métaphysiciens;  mais,  en  général,  le  pro- 
cédé éclectique  aemole  dominer  entièrement,  avec  une 
tendance  au  spiritualisme,  comme  on  le  voit  chez  Ga- 
Inppi  et  Mamiani,  Tedeschi  et  Mancini.  Ce  qui  a  toujours 
manqué  à  la  philosophie  en  Italie,  c'est  un  canictère 
d'originalité  et  d'indépendance,  que  les  circonstances  ne 
loi  ont  pas  pu:  mis  de  prendre  Jusqu'à  présent.         R. 

rrAUOTBS  (Médailles),  nom  que  l'on  donne  aux  mé- 
daillea  frappées  psr  les  peuples  de  l'ancienne  Italie  autres 
que  les  Romains,  spécialement  par  les  Grecs  de  la  partie 
méridionale.  Les  plus  anciennes  sont  incuses  {V,ce  mot)^ 
«t  paraissent  remonter  Jusqu'à  l'an  620  av.  J.-G.  Une 
particularité  qui  ne  se  rencontre  nulle  autre  part ,  c'est 
oue  le  revers  des  pièces  de  Populonia  est  lisse.  Chez  les 
Grecs,  la  monnaie  véritable  était  l'argent;  ils  regardaient 
Tor  comme  une  marchandise,  et  le  bronze  comme  un 
appoint  :  chez  les  Itallotes,  au  contraire,  le  bronze  senrit 
d^etalon  à  la  monnaie.  On  mettait  d'ordinaire  pour  type 
Pimage  de  la  divinité  principale  honorée  dans  la  ville  où 
la  pièce  était  flnappée  :  ainsi,  à  Tarente,  c'était  Taras,  fon- 
dtteor  de  la  ville;  à  Cumes,  l'amazone  Gymé,  fondatrice 
de  Gyme  en  Éolide,  dont  cette  ville  était  une  colonie;  à 
IHwiaonia,  Neptune  (en  grec  Po^^tddn).  —  Une  clasae 
particulière  de  monnaies  Italiotes  se  compose  de  celtes 
qui  Airent  frappées  pendant  la  Guerre  sociale  (90-88  av. 
J.-C).  On  y  trouve  les  noms  de  plusieurs  des  chefs  qui 
s'y  distinguèrent.  Les  types  r^résentent  ht  tète  de  l'Italie 
personnifiée,  un  groupe  de  guerriers  fSdsant  alliance, 
limage  de  la  Victoire  ou  de  Mars,  le  taureau  italique  ter- 
rassant le  loup  romain,  etc.  V,  MarcM  et  Tessieri,  L'eu 
graioc  de/  museo  KireherianOf  owcro  le  monete  priinitim 
de^  popoli  detV  IkUia  média  ordinate  e  descritte,  Rome, 
1839,  in-4<*  et  atlas  ;  Blilliogen ,  Considérations  sur  la  nu- 
mitmatique  de  l'ancierme  Italie,  Florence,  184i,  in-8*>; 
Avellino,  Italiœ  veteris  numismataf  Naples,  i8(^,  2  vol. 
in-4*  ;  un  travail  de  Raoul  Rochette  sur  la  Numismatique 
tarentine,  dans  le  t.  XIV  des  Mémoires  de  l'Institut, 
4840;  un  travail  de  M.  Mérimée  dans  la  Bévue  numismor- 
tique  de  1845. 

ITAUQUE  (Droit).  7.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  dHistoire, 

irauQDB  (École).  F.  {Pythagoricienne. 

rrAUQDB  (Ordre).  V,  Ordre  de  bataille. 

ITAUQUES  (Caractères).  7.  CaractI^bs  d'imprimerie. 

nàUQOB  (Langues),  nom  sous  lequel  on  comprend  les 


langues  parlées  en  Italie  avant  la  conquête  romaine,  tellei 
que  Vitrusque,  l'omMen,  Vo9q^e,  etc. 

ITÉRATIF,  mot  employé  par  quelques  grammairiens 
latins  et  modernes  pour  fréquentai^  {V,  ce  mot).  En 
grec,  l'optatif  dans  les  propositions  dépendantes,  et  la 
particule  dv  avec  l'imparfait,  l'aoriste  et  le  plus-que-par- 
fait  de  lindicatif ,  dans  une  proposition  principale,  ont 
sonvent  une  valeur  itérative.  Un  sens  itératif  est  égale- 
ment attaché  à  la  terminaison  <ntov  et  <raoxov  des  impar- 
faits et  aoristes  de  la  langue  homérique  et  du  dialecte 
ionien.  L'infinitif  dit  de  narration  s'emploie  de  même  en 
latin,  toutes  les  fois  que  le  sens  indique  l'ellipse  du  verbe 
soleo  (J'ai  coutume)  ou  tout  autre  vûi)e  analoeue.       P. 

ITH08  (  du  grec  éthos,  mœurs,  prononcé  îth>s  par  les 
Grecs  modernes),  nom  que  l'on  donnait  iadis  dans  les 
écoles  à  la  partie  de  la  Rhétorique  qui  traite  des  monirt 
de  l'orateur.  On  l'opposait  à  pathos,  employé  comme  sy- 
nonyme de  pathétique  ou  de  passions.  Molière,  se  servant 
de  ces  termes,  a  dit  dans  les  Femmes  savantes  (III,  5)  : 

Vous  aT6s  le  tour  libre  et  le  beau  choix  des  mots. 
—  On  Tott  partout  ches  toub  Viihos  et  le  pcUkûS. 

ITHYPHALLIQUE,  vers  grec  Cest  le  dimètre  tn>- 
chaique  brachycatalectique,  c-àrd.  de  S  pieds  et  demi. 
Il  sert  de  clansnle  dans  les  moroeaaz  lyriques  du  thé&tre, 
et  d'épode  ehes  les  lyriques  proprement  dits.  Gomme 
substitutions,  il  admet  le  tribraque  aux  deux  premiers 
pieds,  le  spondée  an  3«.  L'ithjfpnallique,  qui  n'est  pas 
très-usité  isolément ,  forme  la  démise  partie  du  gnnd 
archiloquien,  du  phaJécien  et  du  satamien.  P. 

ITINERAIRE  (du  latin  iter,  gén.  iHnaris,  chemin), 
nom  donné  à  des  ouvrages  où  l'on  décrit ,  soit  certaÏDes 
routes,  soit  toutes  les  routes  d'un  pavs  ou  d'un  Éiat  Ces 
sortes  de  livres  sont  précieux  pour  les  géographes,  sur- 
tout ails  se  rapportent  à  Tantiquité.  Il  est  vraisemblable 
que,  dans  rempire  des  Perses,  où  les  routes  militaires  et 
le  service  postal  étaient  l'objet  d'une  attention  toute  par- 
ticulière, le  gouvernement  possédait  des  documents  sur 
la  direction  et  la  longueur  des  routes,  les  localités  qu'elles 
traversaient,  lea  distances  qui  séparaient  les  stations  les 
unes  des  autres.  Ces  documents  ont  dû  être  connus  d'Hé- 
rodote. Nous  avons  quelques  fragments  d'Itinéraires  ré- 
digés par  des  Grecs,  tels  que  les  Statkmes  (stations) 
dAsiê  par  Amyntas,  écrivain  d'une  époque  Inconnue,  les 
Statkmes  de  l  expédition  d*Aleocandre  par  Béton  et  Dio- 
gnète,  et  les  Staùimes  parthiques  rédigés  an  temps  (TAn- 
guste  par  Isidore  de  Charax. 

Lm  Ronwina  eurent  deux  sortes  dldnéraires  :  les  /(t- 
néforta  ptetc*  ou  cartes  routières,  et  les  Itineraria  ser^ 
ou  annotata,  itinéraires  écrits,  donnant  différents  geûes 
de  renseignements.  Agrippa  avait  consigné  dans  ses  Com- 
mentaires  les  résultats  des  opérations  géodédques  décré- 
tées par  tout  l'empire  romain  au  temps  de  J.  César; 
d'après  cet  ouvrage  de  son  ami ,  Auguste  fit  représenter, 
par  la  peinture  ou  en  mosaïque,  sur  les  murs  du  Por- 
tique que  Pola  Vipsania,  sœur  d'Agrippa,  avait  élevé 
dans  le  Ghamp-de-Mars,  un  Orbis  terramm  que  Pline 
l'Ancien  a  certainement  consulté.  On  croit  qu'une  réri- 
rion  de  cet  Orbis  fut  faite  au  temps  d'Alexandre  Sévère, 
et  qu*il  servit  ensuite  pour  l'exécution  de  la  Table  dite  di 
Peutinger  gui  nous  est  parvenue  (7.  PsornnoEa,  dans 
notre  Dictkmnaire  de  Biographie  et  d^Histoire).  Parmi 
les  Itinéraires  écrits,  le  plus  important  est  l'/nnêratr» 
d^Antonin,  divisé  en  deux  parties,  Vitinéraire  des  pro- 
ffincês  et  VHvniraire  morttoné.  Henri  Estlenne,  qui  le 
publia  en  iM2,  l'attribuait  à  Antonin  le  Pieux  ou  à  Uaro- 
Aurèle,  opinion  qui  n'est  pas  adoptée.  Quelques  savants 
ont  prétendu  qu'il  fut  fait  au  temps  de  J.  César  par  trob 
géographes  ou  ingénieurs,  et  reçut  sa  forme  d'Antonio  : 
mais  if  y  a  des  noms  de  villes  qui  n'ont  pu  être  donnés 
que  plus  tKTûj  comme  Dioclétianopolis,  et  d'ailleurs  les 
routes  de  la  Garnie  et  de  la  Grande-Bretagne  s'y  trouvent 
D'autres  supposent  que  Vitinéraire  dAntonm  est  l'ou- 
vrage d'un  géographe  du  m*  ou  dunr*  siècle,  qui  eni- 
prunta  le  nom  de  cet  empereur  pour  lui  donner  crédit, 
ou  qu'il  fut  composé  longtemps  après,  en  exécution  d'un 
projet  conçu  par  lui.  Ce  qu'on  peut  tenir  pour  certain, 
c'est  que  le  premier  fond  de  Vitinéraire  a  été  enrichi  par 
des  additions  successives.  —  Certains  Itinéraires  latins  ne 
donnent  qu'un  seul  routier  :  tels  sont  les  trois  Itinéraires 
de  Cadix  a  Rome,  gravés  sur  trois  vases  d'argent  qu'on  a 
découverts  en  1852  à  Vicareîlo  (près  du  lac  de  Braociano', 
et  Vltinerarium  burdigalense  ou  hierosolymitanum,  qu'un 
pèlerin  composa  en  333  pour  l'usage  des  vovageiirs  qui 
voudraient  se  rendre  de  Bordeaux  à  Jérusalem.  Angelo 


IVO 


1119 


TZK 


MU  %  publié  à  Milan,  ea  1817,  sons  le  titre  d'/ttfMro- 
rium  AUsamdri,  une  courte  deÎKiiption  de  l'expédition 
d'Alexandre  le  Grand  en  Pêne,  oavrage  dédié  par  an  in- 
connu  à  Temperear  Gonatanoe  lorsqu'il  entreprit,  en 
Tan  345,  sa  aeconde  expédition  contre  lea  PerBea. 

Lea  Itmérairet  poétûntes  pourraient  bien  ne  paa  figurer 
atec  grand  firuit  dans  lea  collectlona  utiles  à  la  géogra- 

Bbie.  Sana  parier  de  cotaina  voyages  chantés  par  Luci« 
08,  par  Horace  et  par  Ovide,  on  sait  que  J.  César  avait 
laconté  en  vera  son  voyage  de  Rome  dana  TEapagne  Ulté- 
rieure; que  Perse  composa  dans  sa  Jeunesse  des  oelotpo- 
riea;  que  Lactance  décrivit  également  en  vers  son  voyage 
d'Afrique  à  Nîcomédie.  Nous  avons  Tltinéraire  de  Rome 
en  Gaule  par  Rutiliua  Numatianus  (en  iiO),  et  le  voyage 

Se  fit  à  Limoges  Tbéodulfe,  évéque  d'Orléans  sous 
arlemagne. 

Certaine  voyages  à  la  Terre  Sainte,  écrits  au  moyen 
âge,  portent  le  nom  dltinérairea  ;  tels  sont  :  Itinêranum 
ÏÏ.  AnUmimmart^friSy  vers  Tan  600;  5.  WUlUbaldi  wta 
MU  Hodœporicon,  722;  ^mardt  monaehi  Stvpiêntis 
Itinerarium  ad  loea  sancta,  870;  Itinéraire  de  Benjamin 
de  Tttdèle,  1160  ;  Gerardi  Fridarici  I  m  Mgyptwm  et  Sy- 
riam  ad  Saladinum  tegati  Ittnerariutn,  1175;  Maaistri 
Jhetmari  Uer  ad  Terram  Sanctam,  1217,  publié  par 
T.  Tobler,  Berne,  1851.  —  Les  modernes  ont  quelquefois 
donné  le  nom  d'Itinéraires  à  de  purs  récits  de  voyage;  tel 
est  Vltméraire  de  Pcaris  à  JérusaUm,  par  Chateaubriand. 
IVOIRE.  L'ivoire  a  été  employé  pour  les  objets  de  luxe 


dès  lea  tempa  Jes  pins  reculés.  Certaim  meablea  dn  pa- 
lais de  David  et  le  trône  de  Salomon  étaient  en  ivoire, 
Homère  parle  de  poignées  et  de  fourreaux  d'épée,  de  lits 
et  autres  objets  faits  en  cette  même  matière.  Phidiaa 
sculptait  les  plus  grandea  statues  (V.  CeRTsâLéPHaimini 
—  Sculpture)  en  or  et  en  ivoire.  L'ivoire  servit  à  faire  dea 
incruatâtions  :  on  en  orna  lea  clefs  des  maisons,  les  brides 
des  chevaux,  les  meubles.  La  chaise  curule  des  Romaina, 
les  lyres,  des  tables  même,  étaient  en  ivoire.  Les  tié- 
phanta  étaient  beaucoup  plus  nombreux  dans  l'antiquité 
et  même  au  moyen  Age  que  de  nos  fours,  et,  par  consé- 
quent ,  l'ivoire  plus  abondant.  Les  musées  possèdent  de 
nombreux  diptyques,  triptyquea,  et  autres  objets  en  ivoire 
exécutés  au  moyen  Age.  On  dte  comme  un  habile  sculp- 
teur Jean  Lebraellier,  qui  vivait  sous  Charles  V.  La 
Renaissance  fit  aussi  un  arand  usage  de  l'ivoire  pour 
fabriquer  des  coupes,  des  hanaps,  des  cornes,  des  pou- 
drières, etc.,  qui  sont  de  véritables  chefs-d'œuvre  de 
sculpture.  Au  xvm*  siècle,  Rosset  de  S^-Claude  slUustra 
comme  sculpteur  en  ivoire.  De  nos  Jours,  l'ivoire  devient 
de  plus  en  plus  rare  et  cher  ;  on  ne  l'emploie  guère  que 
pour  des  objets  de  petite  dimension,  tels  mie  statuettes, 
manches  de  couteaux,  cassolettes,  pommes  de  canne,  bra- 
oeleta,  broches,  étuis,  etc.  L'ivoirerie  est  depuis  long- 
temps une  spécialité  de  la  ville  de  Dieppe.  V.  Eug.  Piot, 
Histoire  de  la  sculpture  et  des  sculpteurs  en  ivoire,  dana 
le  Cabinet  de  l'amateur  et  de  Vantiqiuiire,  février  18^ 
IZESCHNÉ.  V.  Yaçna. 


J 


J,  10*  lettre  et  7*  conaonne  de  l'alphabet  français. 
On  l'a  définie ,  tantôt  une  consonne  linguale ,  sifOante 
et  faible,  tantôt  une  palatale  sifOante,  ou  encore  une 
chuintante.  Elle  a  le  son  de  notre  g  doux.  L'articulation 
qu'elle  représente  existe  en  portugais  conune  en  Iran- 
çais.  Elle  parait  avoir  été  inconnue  aux  Celtes,  à  en  Ju«er 
pir  le  dialecte  baa  breton,  où  le  i  ne  figure  que  dans  des 
motA  d'importation  moderne  ;  on  ne  la  trouve  paa  davan- 
tage dans  le  basque  et  Tallemand,  et,  quand  le  j  se  ren- 
eootre  dana  une  langue  étrangère,  lea  Allemands  ont 
peine  à  le  rendre  autrement  que  par  ch  {ehe  ne  chuche 
diamais,  pour  je  ne  juge  jamais).  L'articulation  j  existe 
dans  certains  mots  anglais,  où  elle  est  représentée  gra- 
phiquement par  une  s  {treasure,  measure)  ;  en  polonais 
et  en  bohème,  où  on  l'écrit  par  un  a  accentué;  en  russe, 
eo  serbe,  en  arménien,  en  persan ,  où  l'on  a  également 
des  caractèrea  apéciaux  pour  l'exprimer.  Le  défaut  d'ar- 
ticulation oue  nous  appelons  xézeyement ,  consiste  h 
donner  an  j  le  son  du  s,  ce  que  font  d'ailleurs  beaucoup 
dltaliena  quand  ila  prononcent  nos  mots  commençant 
par  i.  On  pense  généralement  que  la  valeur  phonétique 
doDuée  par  le  français  au  j  n'était  paa  connue  des  Ro- 
mains :  ai  cela  était,  dans  les  mots  latins  que  nous  com- 
mençons par  un  j,  l'i  qui  tenait  la  place  de  cette  lettre 
(dansjom,  Jotna,  etc.)  se  serait  élidé  en  poésie,  et  cepen- 
dant on  ne  voit  paa  quil  en  ait  été  ainsi.  —  Il  est  des 
langues  où  l'articulation  j  se  rencontre  comme  second 
élément  d'une  consonne  double,  dont  le  premier  élément 
est  l'articulation  d.  Cest  ainsi  que  les  Italiens  prononcent 
leur  g  {gia,  gelo)^  et  lea  Anglais  leur  j  (joy),  quelque- 
fois leur  g  {gentle).  Le  même  fait  se  remarque  pour  le 
dja  sanscrit  et  pour  le  djim  arabe. 

Le  caractère^  est  d'invention  relativement  récente.  On 
snM  qu'il  fut  en  usage  chez  les  Romains  avant  la  chute 
de  l'Empire,  et  qu'ilslui  donnaient  la  valeur  phonétlaue 
de  notre  l  okouiUée,  comme  le  font  les  Allemands,  les 
Danois,  les  «ftiiftnHRU  et  les  Flamands.  En  français,  l'ar- 
ticulation i  fut  longtemps  représentée  par  la  lettre  t, 
noomiée  en  œ  cas  t  consonne  :  Jacques  Pelletier  et  Ramus 
forent  les  première,  au  xvi*  siècle,  h  réclamer  l'emploi 
du  j  pour  Tune  dea  deux  valeurs  assumées  Jusqu'alors 
par  l't,  et  ce  n'est  même  qu'à  la  fin  du  xviu*  qu'on  sépara 
dé&nidvemeat  dana  les  Dictionnaires  les  mots  commen- 
çant par  un  i  et  ceux  commençant  par  un  j.  Les  Hollan- 
dais employèrent  les  premiers  le  j  dans  la  typographie, 
et  pour  cette  laison  on  l'appela  longtemps  t  de  Hollande. 


JAC 

Les  Italiens  donnent  au  j  le  nom  d't  longo,  et  ne  l'i 
ploient  qu'à  la  fin  dea  mots  comme  équivalent  de  deux  t 
brefs.  Dans  l'alphabet  eapagnol,  le  j  se  nomme  joto,  et 
représente  une  articulation  gutturale  aspirée,  analogue  an 
ch  allemand. 

Le  J  sert  quelquefois  d'abréviation,  pour  Jean,  ^acqu»^ 
Joseph,  Jules;  J.-J.  veut  dire  Jeannlacques^  J.-B.  Jean- 
Baptiste,  J.-C.  Jésus-Christ.  On  explloue  J.  H.  S.,  mono- 
grûnme  de  Jésus-Christ,  par  Jésus  hominum  salvator 
(Jésus  sauveur  dea  hommes),  ou  comme  étant  les  trois 
premières  lettres  du  nom  de  Jésus  en  grec,  IH£Ori:.  -^ 
Quelques  auteun  ont  fait  du  J  le  aigne  numéral  de  100. 

JABOT,  bande  de  mousseline  ou  de  dentelle  empesée, 

{tlissée  ou  tuyautée,  qu'on  attachait  comme  ornement  è 
'ouverture  de  la  chemiae,  au  devant  de  l'estomac,  et  oui 
faiaait  souvent  saillie  au  delà  de  l'habit,  comme  l'espèce 
de  poche  que  les  oiseaux  ont  sous  la  gorge.  La  mode  en 
vint  à  la  fin  du  xvii*  siècle,  et  s'est  perdue  quelques 
années  après  le  commencement  du  xix*. 

JACENT  (du  latin  jocanj,  étendu  à  terre,  abandonné), 
se  dit,  en  Droit,  d'un  bien  qui  n'a  aucun  propriétaire, 
d'un  héritage  auquel  personne  ne  peut  prétendre. 

JACOBITË  (  Poésie),  nom  que  Ton  donna  en  Angle- 
terre, au  xvui*  siècleî,  aux  chants  composés  contre  la 
dynastie  de  Brunswick  par  les  partisans  de  la  postérité 
de  Jacques  II,  et  qui  eurent  cours  principalement  en 
Ecosse,  où  ils  étaient  comme  une  réclamation  dernière 
en  faveur  de  la  nationalité.  Gilchrist,  James  Hogg  et 
Allan  Cunningbam  ont  recueilli  et  publié  un  assez  grand 
nombre  de  ces  chants. 

JACOTOT  (Méthode).  V.  ENsncNBifBNT. 

JACQUE.  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

JACQUEUNES.  V.  wa  Supplément. 

JACQOEBfART,  grosse  figure  de  fer,  de  pknnb  on  de 
fonte,  qui  représente  un  homme  armé,  et  qu'on  plaçait 
sur  une  tour  pour  frapper  les  heures  avec  tm  marteau  sur 
la  cloche  de  l'horloge.  Il  y  en  a  en  Belgique,  dans  le  nord 
de  la  France,  à  Diion,  à  Moulins,  etc.  Jacquemart,  ou 
mieux  Jacquemard,  vient  de  jacque,  casaque  de  paysan, 
nom  qu'on  a  donné  enauite  à  ceux  qui  la  portaient,  et  de 
la  terminaison  ard^  exprimant  l'excèa,  l'étrangeté,  et  que 
l'on  fait  précéder  de  m  euphonique.  Jacqumlart  signifie 
donc  gros  Jacque. 

JACQUES  DE  COMPOSTELLE  (saurr-).  V.  SairnifiO. 

JACQUES-LA-BOUCHERIE  (Tour  de  S^),  à  Paria. 
V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  dHistoirem 


lAP 


lt20 


JAP 


JACQUET,  terme  du^  Jeu  de  trietnc  F.  Tucnukc 

JACULATOIRE  (Ondaon).  F.  Oiaison. 

JAEN  (Cathédrale  de),  en  Espagne.  Cet  édifice,  qoi  n'a 
élé  acheré  qa*en  1801,  occupe  remplacement  d*nne  moa- 
«uée  anbe,  que  S'  Ferdinand,  auxm*  aiècle,  avait  tran»- 
rormée  en  égiise.  La  façade  principale,  percée  de  trois 
portes,  a  19  met  de  hauteur,  et  32  met.  de  largeur,  non 
compris  les  tours  qui  la  flanquent,  et  qui,  larges  de 
il*  50^  à  la  base,  s*élèvent  en  quatre  étages  JusquJL  une 
hauteur  de  02";  la  corniche  de  cette  nçade  est  sur- 
montée d'une  balustrade  partagée  par  des  piédestaux  sup- 
portant les  statues  de  S'  Ferdmand,  des  Évangélistes,  et 
des  Docteurs  de  la  loi.  Le  plan  de  la  cathédrale  est  une 
croix  laUne.  L*intérieur,  divisé  en  trois  nefs,  a  la  forme 
d'un  parallélogramme  rectangle  de  86"  de  longueur  sur 
44  de  largeur  au  transept.  La  nef  du  milieu  est  pavée  en 
marbre;  les  chapelles  des  collatéraux  sont  ornées  de  ta- 
bleaux et  de  sculptures  estimables  :  l'une  d'elles  contient 
une  précieuse  relique,  la  3**  Face,  imprimée  sur  le  mou- 
dioir  de  S^*  Véronique,  et  que  l'on  prétend  posséder 
aussi  à  Alicante.  Le  chœur  est  décoré  avec  beaucoup  de 
richesse,  et  le  sanctuaire,  surélevé  de  près  d'un  mètre; 
le  maltre-autel,  en  Jaspe  rouge,  est  surmonté  d'un  beau 
tabernacle,  et  couvert  d'une  nappe  exécutée  en  bronze. 

JALOUSIE,  sentiment  pénible  qu'excite  en  nous  la  su- 
périorité d'autrui ,  et  qui  s*aggrave  en  raison  de  notre  va- 
nité. V Encyclopédie  établit  entre  l'envie  et  la  Jalourie  la 
distinction  suivante  :  «  Envieitx  dit  plus  que  jaloux.  Le 
premier  marque  une  disposition  hi^ituelle  du  caractère, 
l'autre  peut  désigner  un  sentiment  passager;  le  premier 
désigne  un  sentiment  actuel  plus  fort  que  le  second.  On 
peut  être  quelquefois  jaloux  sans  être  naturellement  en- 
vieux. La  Jalousie,  surtout  au  premier  mouvement,  est 
un  sentiment  dont  on  a  quelquefois  peine  à  se  défendre; 
l'envie  est  un  sentiment  bas,  oui  ronge  et  tourmente 
eelui  qui  en  est  pénétré.  »  La  Jalousie  et  l'envie  ne  dif- 
fèrent pas  seulement  par  le  deçé,  mais  aussi  par  leur 
nature:  «  La  ialousle,  dit  La  Rochefoucauld,  est,  en 
quelque  manière.  Juste  et  raisonnable,  puisqu'elle  ne 
tend  qu'à  conserver  un  bien  qui  nous  appartient  ou  que 
nous  croyons  nous  appartenir;  au  lieu  que  l'envie  est  une 
ftareur  qui  ne  peut  souflMr  le  bien  des  autres.  »  n  n'y  a 
■nère  que  la  Jalousie  amoureuse  qui  ait  été  traitée  dans 
ws  couvres  dramatiques  t  Molière  a  consacré  toute  une 
pièce  à  la  peindre,  Don  Garci$  dé  Navam;  elle  est 
aossi  le  ressort  principal  de  VOthdlo  de  Shakspeare. 

jAUiosii,  espèce  de  contre-vent  formé  de  planchettes 
de  bois  ou  de  fer  assemblées  parallèlement,  qu'on  incline 
pins  on  moins,  qu'on  remonte  et  qu'on  baisse  à  volonté 
au  moyen  de  poulies  et  de  cordons.  On  peut  voir,  sans 
être  vu,  par  les  interstices  des  planchettes.  Le  nom  de 
cette  espèce  de  fermeture  indique  le  motif  oui  prolMsble- 
ment  l'a  fait  inventer  chex  les  nations  où  l'on  tient  les 
femmes  enfermées.  Les  Jalousies  servent  aussi  à  garantir 
contre  le  soleil  ou  une  lumière  trop  vive. 

JAIIBAGE,  en  termes  de  Construction,  montant  latéral 
d'une  baie  quelconoue  ou  d'une  cheminée.  Les  Jambages 
des  portes  et  des  renètres  sont  susceptibles  de  recevoir 
une  riche  ornementation  et  des  formes  trë^-diverses,  sui- 
vant le  sÇIe  et  le  caractère  de  Tédifice. 

JAMBES  DE  FORCE ,  grosses  pièces  de  bois  an  nombre 
de  deux,  qui,  posées  sur  les  extrémités  de  la  poutre  du 
denier  étage  d'un  bâtiment,  vont  se  Joindre  dans  le 
poinçon  pour  former  le  comble. 

JAMBIERES,  la  même  chose  que  les  Grèves  (F.  ce  mo^. 

JAN.  F.  Trictrac. 

JANGADA,  radeau  léger  du  Brésil,  long  de  7  à  8  met, 
large  de  2'"60,  formé  de  cinq  ou  six  pièces  de  bois  poin- 
tnea  aux  extrémités,  et  réunies  par  quelques  attaches  et 
des  chevilles.  Des  piquets  plantés  sur  les  madriers  exté- 
rieurs supportent  trois  bancs  transversaux  :  celui  de 
l'avant  est  percé  d'un  trou  pour  le  passage  du  m&t,  celui 
du  milieu  sert  de  siège,  et  l'on  pose  sur  celui  de  l'arrière 
la  voile  quand  elle  est  serrée.  L'embarcation  est  gou- 
vernée au  moyen  d'un  grand  aviron  attaché  au  milieu  de 
l'arrière. 

JANISSAIRES.  )  1,  ^     .  ._  n-  *■ 

JANsâ^ISME   l  ^'  ^^  ™o^  <^°3  ^^^^  Dtctwmuurê 
'    JANUS.  V      de  Biographie  et  d^Bistoire. 

JAPON  (Porcelaine  du).  Elle  dérive  de  la  porcelaine 
de  Chine.  D'après  les  chroniques  du  Japon,  la  suite  d'un 
prince  de  Corée  vint  s'établir  dans  ce  pays,  vers  Tan  27 
avant  notre  ère,  et  v  fonda  la  fabrication  de  la  porcelaine. 
.  Cette  branche  d'industrie  se  répandit  avec  lenteur,  et  ne 
,  se  perfectionna  guère.  En  Tan  1211 ,  un  fabricant  Japo« 
uùi,  Katosiro  Ouye-Mon,  se  rendit  en  Chine  pour  étu- 


dier à  fond  les  secrets  du  son  art,  et  les  onvragea  qall 
fabriqua  après  son  retour  furent  très-recherchés.  Toutefois 
la  porcelaine  de  Chine  conserva  sa  supériorité  ;  car,  ver» 
la  fin  du  xvm*  siècle,  des  ouvriers  chinois  ftirent  encore 
appelés  de  la  Corée. 

JAPONAISES  (Langue,  Écriture  et  Littérature).  La 
prétention  qu'ont  les  Japonais  d'avoir  eu  les  mêmes  an- 
cêtres que  les  Chinois  est  démentie  par  la  nature  de  leur 
langue  :  le  chinois,  en  effet,  est  mono^llabique,  tandis 
oue  le  Japonais  est  polysyllabique  et  susceptible  de 
flexions.  Il  forme,  avec  le  coréen,  un  des  groupes  des  lan- 
gues ouralo-altalques  (F.  ce  mot)»  En  Japonais,  on  trouve 
une  variété  extraordinaire  de  termes  :  ainsi ,  les  noms 
des  objets  dépendent  souvent  de  la  position  personnelle  de 
celui  qui  parle,  et  diffèrent  dans  la  bouche  d'un  homme 
et  dans  celle  d'une  femme;  les  particules  postpositives  à 
l'aide  desquelles  se  fait  la  déclinaison  sont  multiples  pour 
chaque  cas,  chacune  s'employant  d'après  des  règles  rela- 
tives à  la  condition  sociale  des  interlocuteurs  ou  à  la  na- 
ture du  sujet  du  discours;  les  noms  de  nombre  diffèrent 
selon  les  objets  que  l'on  énumère;  il  y  a  plusieurs  pro- 
noms pour  chaoue  personne.  La  distinction  des  genres 
grammaticaux  n'existe  pas  en  Japonais;  mais  les  genres 
naturels,  les  sexes,  sont  indiqués,  dans  les  êtres  qui  en 
sont  susceptibles,  le  masculin  par  la  particule  vo,  le  fé- 
minin par  la  particule  me.  Il  n  y  a  pas  d'article.  Le  verbe 
arou  (être),  en  se  Joignant  à  un  nom,  forme  un  grand 
nombre  de  verbes  composés.  Les  temps  et  les  modes  sont 
différenciés  par  des  désinences.  La  construction  est  géné- 
ralement inverse.  La  prononciation  du  Japonais  est  har- 
monieuse, la  plupart  des  mots  finissant  par  des  voyelles; 
les  consonnes  s'articulent  moUemenL  II  faut  distinguer  la 
langue  écrite  et  la  langue  parlée  :  la  première,  plus  an- 
cienne, s'appelle  le  jamato  ;  elle  a  des  terminaisons,  des 
particules  et  des  constructions  inconnues  à  la  seconde,  et 
néanmoins  tout  le  monde  la  comprend  :  elle  se  divise  en 
deux  dialectes,  le  noikim,  employé  pour  les  ouvrages  re- 
ligieux, et  le  gheden,  dont  on  fait  usage  dans  les  compo- 
sitions profanes.  La  langue  parlée  ou  vulgaire  est  forte- 
ment mélangée  de  mots  chmols.  F.  Rodriguez,  Arie  da 
Iwgoa  de  Japam,  Nagasaki,  1604,  in-4^,  dont  un  Abrégé, 
traduit  du  portugais  par  Landresse,  a  été  publié  à  Paris 
sous  le  titre  d* Éléments  de  la  grammatre  japonaise, 
1835  ;  Didaco  Collado,  Ars  grammaUcaiaponicœ  linguœ, 
Romêi  163S,  in-4*,  et  Dictionanum  sive  Thesauri  linguœ 
japonwΠ eompendium,  Rome,  1638,  in-4^;  Oyanguren, 
Arte  de  la  ienguajapona,  Mexico,  1738,  in-4*;  Thun- 
berg,  Observattones  m  lingttam  japonioam,  dans  les  Mé» 
movres  de  la  Société  d'Upsal,  1702;  Siebold,  Epitotne 
iingum  japonieœ,  dans  les  l^ansaelùms  de  la  Soctété  des 
arts  et  des  sciences  de  Batavia,  1820;  Medhurst,  Diction- 
naire anglo^aponais  et  japono-anglais.  Batavia,  1830  ; 
Léon  de  Rosny,  Introdiâction  à  Vétude  de  la  langue  japO" 
notfs,  Paris,  1856,  in-é",  et  Dictionnaire  japoneûs-fran^ 
çais-anglais,  1856,  in-4°. 

Avant  le  m*  siècle  de  notre  ère,  les  Japonais  ne  coih 
naissaient  pas  l'écriture  :  ils  l'empruntèrent  aux  Chinois 
vers  l'an  285.  Biais  leur  système  ne  se  rencontre  chei 
aucun  autre  peuple.  En  effet,  ils  ont,  non  des  signes 
diversement  altéiés,  comme  les  Chinois,  non  des  lettres, 
un  alphabet,  comme  presque  tous  les jpeuples,  mais  des 
caractères  syllabiques,  un  syllabaire.  Ces  caractères  syl- 
labiques  ne  naquirent  pas  de  la  réunion  de  telles  ou  telles 
lettres,  et  n'étaient  pas  décomposables  en  caractères 
alphabétiques;  ils  étaient  syllabaires  à  priori,  d'original 
et  d'emblée,  chacun  d'eux  ayant  été  appliqué  à  un  soiu 
De  ces  signes  chinois  on  tira,  au  a*  siècle ,  par  diverses 
altérations,  deux  autres  syllabaires,  composés  chacun  de 
47  signes  ou  syllabes,  dont  plusieurs  ont  une  double  va- 
leur selon  l'accent  ou  la  prononciation  :  l'un  appelé  k/UO" 
kana,  comprend  les  signes  dont  on  se  sert  pour  les 
inicriptions  et  les  titres  d'ouvrages  ;  l'autre,  le  fUr}-'kana, 
est  composé  des  caractères  courants,  (jui  sont  le  plus  en 
usage.  Il  y  a,  entre  ces  deux  syllabaires,  à  peu  près  le 
même  rapport  qui  existait  en  ^yptien  entre  les  signes 
proprement  hiéroglyphioues  et  l'écriture  démotique.  On 
distingue  encore  le  syllabaire  man-yo-kana,  compté  de 
caractères  chinois  entiers,  mais  auxquels  on  ne  conserve 
qu'une  valeur  purement  phonétique,  et  le  yormato-kana, 
formé  de  caractères  chinois  extrêmement  simplifiés.  Les 
Japonais  écrivent  en  lignes  perpendiculairea,  qui  pro- 
cèdent de  haut  en  bas  et  se  succèdent  de  droite  à  gaudie  : 
l'usage  où  ils  sont  de  mêler  ensemble  les  caradtières  de 
plusieurs  syllabaires,  et  de  les  lier  par  des  traits  oui  leur 
sont  étrangers,  en  rend  la  lecture  très-difficile.  F.  Kla- 
proth,  Mémoire  sur  l'introduction  et  l'usage  des  coroo- 


JAR 


llSl 


JAR 


tint  ckmats  au  Japon,  91  sur  VonoiiM  dêt  âiffénnts 
lyUaboim  iaponais,  Paris,  i8S9. 

UUtténtare  laponaise  eit,  dit^on,  fort  riche,  mais  on 
m  CMiDalt  pea  de  chose  en  Europe.  La  poésie  se  sert  de 
dsn  mètres  principaiix.  Tan  de  cinq  syllabes,  l'autre  de 
Npi;  elle  a  un  grand  nombre  de  Tere  différents,  et  deux 
espèesB  de  poèmes,  les  uns  composés  d*une  suite  de  dis- 
tMJQss,  les  autres  partagés  en  coants  de  100  ou  de  1,000 
m.  B  ▼  a,  dans  les  grandes  Tilles,  des  représenta- 
tiooi  IhAtrales  avec  aeeompaenement  de  musique;  les 
dnmes,  soit  héroïques,  soit  gais,  n'admettent  Jamais  que 
deox  penonnages  à  la  fois  sur  la  scène,  mais  les  danses  et 
leiprâtomimes  s'exécutent  à  beaucoup  de  personnages  et 
ifsc  magniftoenoe.  Les  Japonais  paraissent  s'être  occupés 
spécialement  d'histoire  et  de  séoçraphie  :  il  existe  à  Jeodo 
one  Académie,  chargée  de  rédiger  les  Annales  de  l'Em- 
pire et  PAlmanach  impérial;  d'autres  savants  dressent 
des  cartes  géographiques.  Tout  en  fermant  leur  pays  aux 
étrangers,  ils  se  sont  procuré,  par  l'intermédiaire  des 
Hollandais,  one  foule  de  liyres,  de  revues,  de  Journaux, 
et  ils  connaissent  ee  qui  se  passe  en  Europe  et  dans  les 
autres  parties  du  monde.  Klaproth  a  traduit  en  français, 
sn  183S,aoaa  le  titre  ^Aper^  gMral  du  trois  royaumes, 
on  de  leurs  traités  historiques  et  géographiques;  deux 
ans  après,  il  a  publié  une  Histoire  dss  empereurs  du  Ja- 
pon, traduite  par  le  Hollandais  Isaac  Titsing.  Abel  Re- 
muant a  donné,  dans  le  t.  IX  de  ses  Notices  et  Extraits, 
la  table  des  matières  de  l'Encvclopédie  chinoise  et  Jq)o- 
nsise.  Vn  roman  Japonais,  les  Six  paraoeuts  représentant 
le  pané,  a  été  traduit  en  allemand  par  Pfitzmayer, 
Vienne,  1847.  Enfln  le  Catalogue  des  Iwres  et  manu- 
ecriU  Japonais  recueillis  par  Siebcld  a  été  publié  par 
Hoffmann,  Leyde,  1845,  in-fol. 
JAPOORIA  (Dialecte).  F.  Albanais. 
JAQDE,  JAQOEBtART,  V.  Jacqdb,  jAOQusHAaT. 
JAQUETTE,  vêtement  de  dessus,  descendant  Juaqu*aux 
genoux  ou  plus  bas,  et  qui  était  autrefois  à  l'usage  des 
paysans  et  du  bas  peuple. 

JARDIIffÈRE,  meuble  d'ornement  qui  supporte  une 
caisse  dans  laquelle  on  met  des  fleurs. 

JARDINS  (Art  des).  Nous  avons  peu  de  renseignements 
pour  rhistoire  ées  Jardins  antérieurement  à  l'époque 
romaine.  Les  Orientaux  ont  de  tout  temps  recherché 
rooibre  et  l'eau,  et  tout  Uen  qui  en  était  abondamment 
poonru  s'appelait  paradis  ches  les  Perses.  Les  Anciens 

5 laçaient  an  nombre  des  sept  merveilles  du  monde  les 
ardins  suspendus  de  Babylone  (F.  notre  Dictionnaire 
dm  Biographie  et  â^RisUÀre).  Chez  les  Grecs,  les  descrip- 
timis  des  Jardins  des  Hespârides,  d'AldnoQs,  de  Calypso, 
de  Ifidas,  sont  né»  dans  l'imagination  des  poètes;  mais 
on  vanta  les  Jardins  d'Académus,  de  Gimon,  d'Épicure, 
de  la  eourtisane  Phxyné.  On  dte  aussi  le  Jardin  de 
Cbanon  en  Médie,  visité  par  Alexandre  le  tirand,  les 
lardins  dea  bords  de  TOronte,  dits  de  Daphné,  près 
d'Antiocbe,  décrits  par  Strabon,  et  les  Jardins  de  Qéo- 
pâtre.  —  On  peat  se  faire  dea  idées  nn  peu  plus  arrêtées 
■ur  ce  que  forent  les  Jardins  romains.  Dans  l'&ge  primitif 
de  RodÛb,  Tarquin,  au  témoignage  de  Tite-Live,  posséda 
des  Jardina.  LocuUus,  Pompée,  César,  et  d'autres  riches 
Romaîns,  eurent  de  ^lendides  Jardins  dans  les  fknbourgs 
de  Rome.  A  l'fooqne  d'Auguste,  un  eartain  Matins  intro- 
duisit rusage  de  tailler  les  arbres.  Nous  avons  one  des- 
eripdoD  complète  d'un  Jardin  romain  dans  îa  lettre  que 
Pline  le  Jenne  consacre  à  sa  villa  de  Toscane,  et  dont  les 
détails  sont  confirmés  par  les  peintures  muralea  de  Pom- 
péî  :  les  parterres,  les  plates-bandes,  les  longues  ailées 
d'arbres,  lea  massifs,  les  ifs  et  les  buis  taillés  en  figures 
selon  les  i^es  de  Vars  topiara,  les  serres,  le  potager, 
les  promenades  couvertes,  les  sentiers  coupant  en  tous 
sens  une  place  circulsire,  tout  cehi  montre  que  les  Jar- 
ffins  rooiatns  servirent  de  modtie  aux  Jardins  réguliers 
créés  plus  tard  par  les  Fran^  (F.  Desobrv.  Rome  au 
siècle  d^ Auguste,  lett.  33).  n  se  peut,  toutefois,  que  les 
Jsrfins  de  Néron,  d'Adrien  et  des  empereurs  ultArieurs  se 
soient  rapprochés  davantage  des  paysages  naturels;  on 
«n  verrait  volontiers  la  preuve  dans  la  funeuse  villa 
qu'Adrien  créa  aux  portes  de  Tlbur. 

La  chute  de  l'Empire  romain  entraîna  la  décadence  de 
rhortienitnie,  qui  parait  ne  s'être  relevée  ou'à  partir  dn 
XB*  siède.  Boocaoe  décrit  des  Jardins  qui  ressemblent 
feit  à  des  parcs.  Au  xv«  et  au  xn*  siècle,  du  temps  des 
llédieis,  le  goût  des  grands  et  beaux  Jardins  devint  très- 
répandu  :  ceux  de  B<moli  au  palais  Pitti,  de  Pratolino,  de 
Tivoli,  des  palais  Borjlièae  et  Aldobrandini,  d'Isola- 
Beila,  etc.,  sont  demeuras  Jusqu'à  nous  comme  les  spé- 
de  Fart  décoratif  des  Jardins  pendant  la  Renais- 


sance en  Ttsdfe.  C'est  ce  même  style  épanoui,  fleuri, 
ingéinieux,  riche  et  délicat,  qui  avait  triomphé  dans  les 
autres  arts  :  une  profusion  de  terrasses,  de  temples,  de 
statues,  de  bustes,  de  vases,  de  fontaines,  de  rochers  ar« 
tifldels,  d'étangs  creusés  géométriquement,  d'allées  droites 
et  régulières,  de  charmilles  artificiellement  contenues. 
En  un  mot,  l'architecture  et  la  sculpture  dominaient;  la 
verdure  et  les  arbres  n'étaient  presque  que  les  accessoires. 
Le  style  italien  fût  adopté  dans  les  autres  États  :  aux  xvi* 
et  xvn*  siècles,  en  Allemagne,  pour  les  Jardins  des  ban« 
quiers  Fu|gger  et  de  Wallenstein  ;  en  France,  pour  ceux  de 
S'-Germain  et  de  Fontainebleau,  plus  tard  encore  pour  les 
Tuileries,  le  Luxembourg,  et  S^Ioud,  dont  Claude  Mol- 
let dessina  les  parterres;  en  Angleterre,  pour  ceux  de 
Hampton-Court.  La  direction  que  l'on  suivait  était  telle- 
ment contraire  à  la  nature,  que  le  chancelier  Bacon  l'at- 
taqua avec  rigueur  (1820).  Néanmoins,  ce  fut  seulement 
un  demi-siècle  apr&  que  Le  Nôtre  créa  dans  les  Jardins 
de  Versailles  un  style  un  peu  différent  du  style  italien  t 
des  plantations  régulières  d'arbres,  des  plans  obliques  au 
lieu  de  terrasses,  une  grande  quantité  d'ornements  ar- 
chitectoniques,  des  ouvrages  hydrauliques,  des  haies  et 
des  arbres  bizarrement  taillés,  des  statues  et  des  oran- 
geries, tels  furent  les  caractère  du  style  français.  Appli- 
qué aux  anciens  Jardins  de  Heudon,  de  Vaux,  de  Chan- 
tilly, de  Rueil,  de  Marly,  ce  système  eut  à  son  tour  les 
honneurs  de  l*Unitatioo  :  vers  la  fin  du  xvii«  siècle.  Le 
Notre  le  porta  a  Londres,  où  il  dessina  le  parc  de  Saint- 
James;  vers  le  même  temps,  et  au  xviii*  siècle,  on 
l'adopta  pour  les  lardins  de  Schoenbrann  près  de  Vienne, 
de  Sans-Souci  près  de  Berlin,  de  Nvmphenburg  près  de 
Munich,  de  la  Favorite  près  de  Stuttgard,  etc.  Mais 
nulle  part  on  ne  le  porta  aussi  loin  qu'en  Hollande,  où 
les  Jardins  furent  le  type  db  la  syméuie,  de  l'ordre,  de 
la  régnlaritfi  la  plus  minutieuse  et  la  plus  puérile,  où 
Ton  en  rint  à  avoir  des  Jardins  de  pierres  et  de  coquil- 
lagea,  garnis  de  gros  vases  contenant  dea  fleurs  en  por- 
celaine. 

Une  réaction  s*opéra  au  commencement  du  xvm*  siècle 
en  Angleterre  t  Wise,  lord  Bathurst.  Pope  et  Addison 
attaquèrent  le  style  des  Jardins  français,  et  un  nouvel  art 
fut  créé,  vers  1720,  par  William  Kent  dans  les  parcs  de 
Carlton-House,  de  Glaremont,  d'Essex  et  de  Rousham. 
Les  jardins  dits  angUUs,  reposant  sur  le  même  principe 

3ue  la  peinture  de  paysaae,  firent  une  habile  imitation 
e  la  nature.  Les  procédés  de  l'école  anglaise,  perfec- 
tionnés par  Browne  à  Blenheim,  enseignés  par  Shenstone, 
Uason,  Repton,  Whateley,  Alison,  Hilpin,  H.  Walpole« 
Uvedale  Prioe,  furent  promptement  acceptés  en  Alle- 
magne; on  en  fit  usage  paiticulièrement  à  Wilhelms- 
hœhe  près  de  Cassel,  à  Charlottenbourg  près  de  Ber- 
lin, etc.;  et  Hirschfeld,  professeur  d'esthétique  à  Kiel, 
iugea  utile  de  les  protéger  par  de  nombreux  écrits  contre 
la  corruption  dn  goût.  Aux  Jardins  anglais,  introduits  en 
France  aprèa  i763,  on  essaya  de  substituer  les  jardins 
chinois,  remarquables  surtout  par  la  sinuosité  des  allées 
et  psr  le  caprice  des  détails.  Girardin,  Morel  et  J.-J.  Rous- 
seau oombatûrent  cette  tendance,  tant  en  théorie  qu'en 
pratique,  par  la  crtetion  des  Jardins  d'Ermenonville.  Le 
hameau  de  Chantilly,  le  charmant  Jardin  andais  du 
Petit-Trianon,  à  Versailles,  sont  de  ce  temps,  ainsi  que 

{»1usieurs  beaux  parcs  paysaristes,  tels  que  Casant,  près  de 
'Isio-Adam  (Oise),  Mérérille,  aux  environs  deCorbeil, 
Horfontaine,  près  de  Senlis.  Dans  Paris  même,  la  FoUe- 
Beauion,  aux  Oiamps-Élysées,  le  jardin  Boutin,  dans  la 
rue  de  Clichy,  et  le  parc  de  Monceaux,  an  faubourg  du 
Roule,  eurent  et  méritèrent  leur  célébrité,  comme  Jardins 
de  médiocre  étendue,  mais  disposés  avec  art  et  avec  goût 
Monceaux,  aujourd'hui  Jardin  public,  et  très-diminué, 
n'est  plus  sum  que  l'ombre  de  ce  qu'il  fût.  C'était  alors 
la  mode  des  Jsrdins  imitant  la  nature,  et  c'est  à  cette 
époque,  en  1782,  que  Delille  composa  son  poème  les 
Jarams,  —  L'art  des  Jardins  acquit  quelque  chose  de 
plus  libre,  de  plus  sérieux,  de  plus  élevé,  après  la  nou- 
velle réforme  opârée  par  Sckell  en  Allemagne  i  les  Jardins 
Ïu'il  fit  à  Munidi  et  à  Monb^ou,  ceux  du  prince  de 
uckler-Muskau  à  Muskau  et  à  Branits,  eenx  qui  ont  été 
tracés  psr  A.  de  Hake  à  Hanovre,  W^yhe  à  Duaseldorf. 
Lenné  à  Berlin,  Siebeck  à  Leipzig,  sont  de  véritables  mo- 
dèles, qui  ont  inspiré  Thouin,  Bardy ,  Vlart  et  Lalos  en 
France,  Nash  et  Paxton  en  Angleterre.  Ceshabilea  desai- 
natenrs  ont  cherché  à  produire  des  elTets  naturels,  des 
embellissements  pittoresques  bien  entendus ,  à  grouper 
avec  grftce,  et  h  composer  des  ensembles  harmonieux.  Cet 
art  a  été  appliqué  de  nos  Jours  aux  bois  de  Boulogne  et 
de  Vincennes,  à  la  porte  de  Paris,  convertis  l'on  et 

74 


JAO 


1122 


JEA 


Vwatn  ea  mamiJlqaes  parcs  paysagistes  (i^.  bouuMuiB 
—  Bois  de).  K.  Bacon ,  Essai  sur  Us  jardins^  en  anglais, 
Londres,  1620;  Jacques  Boyleaa,  Traité  wjardmojge 
M^an  les  principes  de  la  nature  et  de  Vart ,  Paris, 
1638,  in-foL  ;  Blason,  Essai  sur  le  dessin  des  Jardins, 
ibid.,  1768;  Whateley,  ObsenxUUms  sur  les  jardins  mo" 
demes,  ibid.,  1770;  Price,  Essais  sur  le  pUtoresque  dans 
lêsjaréUns,  ibid.,  1780;  Hirschfeld,  Théorie  des  jardins, 
en  ailem.,  Leipzig,  1775-80,  5  vol.;  Morel,  VArt  de  dis- 
tribuer les  jardins  suivant  Vusage  des  Chinois,  Paris, 
1757,  et  Théorie  des  jardins,  1116;  Watelet,  Essm  sur 
les  jardins,  1774;  Girardin,  De  la  composition  des  pay- 
sages, Paris,  1777;SiIva,  Art  des  jardins  anglais,  en 
itiU.,  Florence,  1803;  Thoiiin,  Plans  raisonnes  de  toutes 
les  espèces  de  jardins,  3*  édit.,  Paris,  1828,  in -fol.; 
De  Laborde ,  Description  des  nouveaux  jardins  de  la 
France,  Paris,  1808-1814  ;  Viart,  I^  Jardinisle  moderne, 
1827;  Vergnaud,  L'art  de  créer  les  jardins,  1839;  le 
comte  de  Ghoulot,  VArt  des  jardins,  Paris,  1857.       B. 

jaanns  botamocss,  établissements  dans  lesquels  on 
eultive  des  plantes  de  tous  les  pays  et  de  tous  les  cli- 
mats, pour  servir  aux  progrès  de  l*instruction  et  de  la 
science.  Le  premier  ftit  établi  à  Saleme  par  Ifatthieu  Sil- 
vaticus  au  commencement  du  uv**  siècle.  En  1333,  Venise 
créa  un  Jardin  médicinal  public.  Vinrent  ensuite  les  Jardins 
botaniques  de  Ferrare,  de  Padoue  (1533),  de  Pise  (1543), 
et  de  Bologne  (1568).  Celui  de  TUniversitt  de  Leyde  date 
de  1577.  Le  plus  ancien  de  France  est  celui  de  Montpel- 
lier (1597),  et  on  en  établit  un  à  Paris  en  1635  (F.  Jardin 
DBS  Plantes,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d^Bistoire).  L*Angleterre  et  TAUemagne  n*0Qt  créé  de 
Jardins  botaniques  que  depuis  la  fin  du  zvi*  siècle  :  Leip- 
zig en  1580,  Kœni^berg  en  1591,  Breslau  en  1587, 
Heidelberg  en  1593,Geissen  en  1605,  Ratisbonne,  léna 
et  Ulm  en  1029,  GtstUngue  en  1727;  Oxford  en  1640, 
Chelsea  en  1752 ,  Kew  en  1760.  Celui  qu^OIaOs  Rudbeck 
fonda  à  Upsal  en  Suède,  en  1657,  est  le  plus  important 
imrès  celui  de  Paris.  Aujourd'hui  il  n*est  pas  de  grande 
ville  qui  n'en  possède. 

JARGON,  mot  d*une  étymologie  incertaine,  qu'on  ap- 
plique à  tout  langage  corrompu,  factice,  plus  ou  moin  s 
inintelligible.  Le  Jargon  est  particulier  à  telles  ou  telles 
personnes;  en  cela  il  se  distingue  du  patois,  qui  a  ses 
règles  et  est  propre  à  tous  les  gens  d*un  même  pays,  et 
de  Vargot,  qui  est  toujours  un  langage  de  convention. 

JARRE  (de  l'espagnol  yaro,  pot),  vase  en  terre  cuite,  à 
deux  anses  et  à  gros  ventre,  et  qui  sert  à  renfermer  des 
liquides. 

JARRETIÈRE,  oblet  d'habillement,  oui  fut  autrefois 
un  ornement  de  toilette.  Sous  Louis  XIV  et  Louis  XV, 
les  bas  de  soie,  roulite  par  dessus  la  culotte,  étaient  re- 
tenus au-dessus  du  genou  avec  une  Jarretière  de  galon 
d'or  à  boucle  de  diamant.  Les  dames  de  grande  maison 
faisaient  broder  leurs  armoiries  sur  leurs  Jarretières. 

JASERAND,  nom  qui  fut  donné  quelquefois  à  la  cotte 
de  mailles. 

JASPE,  sorte  d'agate  employée  dans  la  Symbolique 
chrétienne  pour  représenter  la  loi.  Son  opacité  est  l'image 
de  l'impénétrabilité  des  mystères;  sa  dureté  exprimera 
fermeté  de  la  foi.  liO  Jaspe  figure  aussi  la  tribu  de  Cad, 
qui  précédait  les  autres  (&ns  la  marche  et  au  combat,  et 
aussi  S^  Pierre,  sur  qui  Jésus  a  fondé  son  Église. 

JAUFRE  (Roman  de),  poôme  de  11,160  vers  de  8  syl- 
labes, écrit  en  -  langue  provençale  du  xii*  siècle,  et  se 
rattachant  au  cvcle  d'Arthur.  Le  Jeune  écuyer  Jaufre  se 
rend  à  la  cour  du  roi  Arthur  :  pendant  un  repas,  un  vas- 
sal de  ce  prince,  Taulat  de  Rugimon,  redouté  pour  sa 
force  et  sa  cruauté,  vient  frapper  mortellement  un  che- 
^ndier.  Personne  n'osant  le  poursuivre,  Jaufre  se  propose, 
et  obtient  d'être  armé  chevalier  sur-le-champ.  Après  une 
série  d'aventures  merveilleuses  et  de  glorieuses  prouesses, 
il  arrive  au  pied  d'une  tour  où  gémit  la  belle  Brunis- 
sende,  dont  le  père  est  retenu  depuis  sept  ans  prisonnier 
par  le  même  Taulat.  Victorieux  de  ce  félon,  il  emmène 
Brunissende,  qu'il  doit  épouser  :  sur  la  route,  attiré  par 
les  cris  d'une  dame  qui  se  noie,  il  se  plonge  au  milieu 
des  eaux,  et  se  trouve  dans  une  contrée  délicieuse  ;  cette 
dame  est  une  fée,  (^ui  réclame  son  secours  contre  un 
oppresseur.  Il  la  déhvre,  remonte  sur  terre,  et  conduit 
Brunissende,  qui  le  cro^t  perdu,  à  la  cour  d'Arthur. 
Leur  .mariage  est  célébré  avec  une  grande  pompe  et  au 
milieu  de  nouveaux  enchantements.  —  Le  roman  de 
Jaufre  offre  des  tableaux  intéressants  de  la  société  féo- 
dale, avec  ses  fictions  chevaleresques  et  ses  féeries  ;  on  y 
reconnaît  l'influence  des  idées  arabes,  qui  s'étaient  r^ 
pandaes  de  l'Espagne  dans  le  midi  de  la  France,  et  Cer- 


vantes parait  lui  avoir  emprunté  plus  tard  quelques-unei 
de  ses  inspirations.  Ce  roman  fut  commencé  par  un  Trou- 
badour qui  en  avait  entendu  raconter  le  sujet  à  la  cour 
d'Aragon,  et  fut  achevé  par  un  autre  poète,  assez  mo- 
deste pour  cacher  son  nom  et  celui  de  son  prédécesseur, 
n  en  existe  deux  manuscrits  à  la  Bibliothèque  natioiiala 
de  Paris.  B. 

JAUGEURS,  officiers  publics  chargés  de  déterminer  la 
capacité  des  navires,  et  de  délivrer,  dans  les  formel 
prescrites  par  les  règlements,  le  certificat  de  Jauge  dont 
tout  bâtiment  français  doit  ôtare  muni.  V,  un  arrêté  con- 
sulaire du  7  brumaire  an  ix  (30  oct.  1800)  et  une  loi  da 
29  floréal  an  x  (19  mai  1802). 

JAVANAISE  (Langue),  une  des  langues  malaises,  dé- 


rivée duJicatot  (K.  ce  mot).  Elle  se  compose  de  trois  dia- 
lectes, ou  plutÀt  de  trois  formes  de  langage,  dont  deux 
ont  une  nomenclature  tout  à  fait  à  part,  mais  qui  ne 
constituent  dans  leur  ensemble  qu'un  seul  et  même 
idiome.  L'usage  de  ces  trois  formes  de  langage,  qui  se 
mêlent  dans  les  ouvrages  de  littérature  aussi  bien  ^ 
dans  la  conversation ,  est  déterminé  par  la  sapérionté, 
l'égalité  ou  l'infâionté  de  rang  social  ou  d'&ge  dans 
laquelle  se  trouve  la  personne  qui  parle  relativement  à 
celle  à  qui  elle  s'adresse;  c'est  une  règle  d'édquette. 
Ainsi,  en  parlant  à  un  soaverain,  à  on  grand,  à  un  vieil- 
lard, on  emploie  le  kromo,  haut  Javanais  ou  langue  de 
cour,  qui  exprime  la  déférence  et  le  respect;  entre  é^ux, 
on  se  sert  du  maâhjo^  sorte  de  langage  intermédiah^; 
en  parlant  à  un  inférieur,  on  teïx  usage  du  nycko  ou  dia- 
lecte populaûe.  Outre  la  difficulté  qui  résulte  de  cette 
triple  forme,  il  en  est  une  autre  provenant  de  ce  que  les 
radicaux,  en  se  groupant  pour  former  des  mots  composés, 
en  se  combinant  avec  les  préfixes  et  les  suffixes  qui  rem- 
placent nos  terminaisons,  subissent,  par  l'eflét  de  per- 
mutations de  lettres,  une  transformation  orthographique 
qui  les  rend  méconnaissables.  Le  Javanais  n'a  ni  article 
ni  genres,  et  seulement  deux  nombres.  La  conjugaison 
ne  distingue  ni  les  nombres  ni  les  personnes,  et,  comme 
dans  tous  les  idiomes  malais,  le  même  mot  peut  être 
verbe  et  substantif.  On  distingue  quelquefois  dans  la 
langue  Javanaise  le  dialecte  de  l'intérieur,  baeardolam^ 
et  le  dialecte  des  côtes,  basa-luar.  Dans  les  montagnes 
de  l'ouest,  on  parle  le  sœnda,  idiome  indépendant  du 
Javanais.  L'alphabet  Javanais  compte  27  lettres,  dont 
5  voyelles.  —  Les  Javanais  aiment  passionnément  le 
thé&tte,  la  danse  et  la  musique.  Tout  dâlang  ou  direc- 
teur de  troupe  est  poète,  et  compose  ;  il  a  le  privilège  de 
parler  dans  les  représentations  ;  les  autres  acteurs ,  tous 
masqués,  ne  font  que  de  la  pantomime.  La  déclamation 
du  dàlang  est  une  sorte  de  mélopée,  que  la  musique 
accompagne.  Les  pièces,  appelées  topeng,  sont  tirées  de 
la  myûiologie  et  de  l'histoire  héroïque  du  pays.  Entre  ces 
pièces,  des  bouffons  grotesquement  costum&  Jouent  des 
espèces  d'intermèdes,  où  ils  imitent  les  idiots,  quelque- 
fois même  des  animaux,  surtout  les  chiens  et  les  singes. 
Les  Javanais  ont  aussi  des  spectacles  de  wayang  ou  om- 
bres chinoises,  et  des  wayang  beber,  exhibitions  de 
papiers  peints  h  personnages,  que  l'on  déroule  tandis 
que  le  dàlang  en  donne  l'explication.  V.  Gottlob  Bruck- 
ner.  Introduction  à  la  grammaire  javanaise,  en  hollan- 
dais, Serampour,  1830,  in-8**;  Gericke,  Premiers  éléments 
de  la  langue  javanaise,  en  hollandais.  Batavia,  1831; 
Cornets  de  Groot,  Grammaire  jatanaise,  en  hollandais. 
Batavia,  1833,  in-8®;  Roorda,  Dictionnaire  néerlandais 
et  javanais  y  Kampen,  1834;  A.  de  Wilde,  Dictionnaire 
néerlandais^  maiais  et  soenda,  Amsterdam,  1841  ;  Du- 
laurier,  Mémoire,  Lettres  et  Rapports  relatifs  au  cours 
de  langues  malaise  et  jovanaise^  Paris,  1843,  in-8^. 
JAVELOT.  (  V.  ces  mots  dans  notre  Die- 

JEAN  (Feu  de  la  S*-).f  tionn.  de  Biogr.  et  d^Histoirt, 
JEAN-DE-LATRAN  (Église  Saqit-),  à  Rome.  Elle  est 
regardée  comme  la  première  église  patriarcale  de  toute  la 
chrétienté,  et  c'est  dans  cette  basilique  que  le  Pape  prend 
solennellement  [)ossession  de  sa  dignité  épiscopale.  L'em- 
pereur Constantin  fonda  S^-Jean-de-Latran  vers  324,  sur 
le  mont  Cœlius,  près  d'un  palais  qui  avait  appartenu  à  un 

?aien  du  nom  de  Plautius  Lateranus  (d'où  vient  le  nom  de 
atran),et  la  donna  h  Silvestre  P',qui  la  dédia  au  Christ 
Sauveur,  parce  que  l'image  du  Sauveur  apparut,  ditron 
sur  les  murs  pendant  qu'il  en  faisait  la  dédicace.  On  l'ap- 
pela aussi  Basilique  Constantinienne.  En  1114,  LuceH 
ayant  attaché  k  cette  église  le  culte  particulier  de  S^  Jean- 
Baptiste  et  de  S^  Jean  l'Êvangéliste,  elle  prit  le  nom  de  5** 
Jean,  L'édifice  de  Constantin  subsista  près  de  mille  ans, 
au  moyen  de  restaurations  successives.  Deux  incendies 
le  détruisirent  presque  entièrement,  en  1308  et  en  1361. 


JEH 


1123 


JfiR 


Qottd  «A  Veut  rétabli,  Sixte- Qoint  fit  jouter  tor  la 
(içad»  septentrionale,  construite  lous  Pie  IV,  an  double 
portkme,  0Ba,yTB  de  D.  Fontana;  puis  Clément  VIQ  cbar- 
pa,  en  i6Û0,.Giaconio  délia  Porta  de  reconstruire  toute 
k  nef  transversale.  Sous  Innocent  X,  Borromini  coniolida 
la  grande  nef  en  enveloppant  de  forts,  piliers  de  granit 
iM  ancieimes  colonnes.  Enfin,  Clément  XII  fit  élever,  en 
1734,  par  Galilei  la  &çade  actuelle.  C'est  une  ordonnance 
àè  dnq  longues  arcades,  emlurassan^  toute  la  hauteur  de 
rédiiice,  et  dont  les  piedandroits  sont  ornés  de  pilastres 
eempoiitea,  i  Texception  de  Tarcade  du  centre,  qui  est 
cantonnée  de  4  colonnes  adossées,  surmontées  d*un  tron* 
ton.  Cn  balcon  rentrant  règne,  ^  moitié  de  la  hauteur  des 
arcades  environ,  dans  toute  la  largeur  de  la  façade;  l'ar- 
cade centrale  forme  une  loge,.  d*où  le  Pape,  à  certains 
Jours,  donne  sa  bénédiction  au  peuple.  Les  statues  colos- 
sales des  13  Apôtres  couronnent  Tédiflce  ;  au  centre,  le 
Christ,  tenant  sa  croix,  domine  toutes  les  autres.  La  ga- 
lerie inférieure,  sous  le  balcon,  est  appelée  atrium;  là 
sont  dnq  portes  qui  donnent  entrée  duos  cinq  nefs, 
composant  Tintérieur  de  Téglise.  La  porte  centrale,  en 
bronze,  vient,  dit-on,  de  Tancienne  basilique  iEmilia, 
sur  le  Forum.  La  dernière  porte,  à  droite,  est  la  porte 
stûnte:  elle  demeure  murée,  et  n*est  ouverte  qu*aux 
époques  du  Jubilé.  —  LMntérieur  de  T^se,  long  de 
119™,  50,  large  de  53'",75,  offre  une  magnifique  per- 
spective :  la  nef  centrale  est  composée  de  5  grandes 
arcades  «à  larges  piliers,  ornés  chacun  de  2  pilastres 
corinthiens  cannelés.  Dans  leurs  intervalles  sont  12  ni- 
ches en  architecture,  contenant  les  statues  colossales 
des  .^>6tres.  Un  riche  plafond  soffite,  sculpté  et  re- 
haussé de  dorures,  couvre  cette  longue  nef.  Le  maître 
autel  ou  autel  papal  est  placé  dans  te  milieu  de  la  nef 
transversale;  il  a  un  tabernacle  d*architeaure  sarrasine, 
Qù  Ton  conserve  les  têtes  de  S^  Pierre  et  de  S'  Paul,  re- 
trouvées en  1307  ;  le  pape  seul  peut  officier  à  cet  autel, 
à  moins  qu'il  n*en  donne  la  pennission  k  quelque  haut 
personnage,  et  seulement  pour  une  fois.  Parmi  les  ri- 
chesses de  la  basilique,  il  faut  mentionner  la  brillante 
chapelle  Gorsini,  que  Gément  XII  fit  ériger  par  Galilei. 
On  y  remarque  un  sarcophage  de  porphyre  pris  au  Pan- 
théon d'Agrippa,  et  Tautel  du  S^-Sacrement,  élevé  sur 
les  dessins  de  P.  Ollvieri.  On  montre  aussi  la  table  où 
Jésus  fit  la  cène,  celle  où  S^  Pierre  et  les  Apôtres  pre- 
naient leurs  r^pas,  la  colonne  du  temple  de  Jérusuem 
qui  se  brisa  à  la  mort  du  Sauveur,  la  pierre  sur  laquelle 
on  joua  ses  vêtements,  les  colonnes  qu* Auguste  fit  mouler 
avec  le  bronze  des  rostres  arrachés  aux  vaisseaux  pris  h 
la  bataille  d'Actium.  On  peut  signaler  dans  Té^se  de 
SWean-de-Latran  beaucoup  de  détails  de  mauvais  goût, 
%da  qoe  des  frises  et  des  architraves  interrompues  ^  des 
cioîsees  mesquines  et  incorrectes,  des  niches  a  frontons 
angaHmi,  arrondis  et  déversés,  ou  bien  les  statues  oo- 
loasales  diss  Apùtres  dans  la  grande  nef. — Le  Baptistère, 
de  forme  octoèone,  contient  des  fonts  baptismaux,  grand 
Inssln  de  porphyre  antique  avec  couvercle  en  bronze  ;  sa 
coupole  a  été  peinte  par  A.  Sacchi,  et  ses  murs  par  Ge- 
mîgnsnl,  Camassei  et  C.  Haratta.  Dans  un  cloître  du 
xm«  siècle,  contigu  à  la  basilique,  se  trouve  la  chaise 
de  porphyre  sur  laquelle  chaque  pt^  s^assied  devant 
la  porte  quand  il  vient  prendre  possession  de  sa  dignité. 
Au  milieu  de  la  place  de  Smean-de-Latran  8*élève  le 
plus  grand  obélisque  de  Rome,  apporté  d*Héliopolis  en 
Egypte  an  temps  de  Constance  pour  être  placé  au  Cirque 
Uaxime,  et  qui,  retrouvé  sous  terre  en  1587,  fut  redressé 
par  D.  Fontana  ;  il  est  en  granit  rouge,  orné  d*biâroglirphes, 
et  atteint  une  hauteur  de  33  met.,  sans  la  base  et  le  pié- 
destal. A  droite  de  la  basilique  est  un  palais  pontifical 
qu*é(Ulla  D.  Fontana,  et  que  Grégoire  XVI  a  converti  en 
musée  d^antiquités,  et  un  édifice  oui  conUent  le  saint 
«scolter  (scaia  santa)^  formé  de  28  marches  en  marbre 
blanc  provenant,  dit-on,  du  palais  de  Ponce-Pilate  à  Jé- 
rusalem, et  qu*on  ne  monte  qu*à  genoux.  B. 

JEDBURGH  (Abbaye  de),  en  Ecosse,  dans  le  comté  de 
Roxbuxgh.  Cette  abbaye,  dolée  par  le  roi  David  I^,  sou- 
vent assiégée,  saccagée  et  brûlée  pendant  les  guerres 
dvilea,  détruite  enfin  par  le  comte  de  Hertford  lors  de  la 
Réformation,  est  considérée  comme  le  plus  parfait  et  le 
plus  curieux  monument  de  Tarchitecture  saxonne  et  nor- 
mande en  Ecosse.  Les  parties  qui  en  restent  encore  de- 
bout sont  la  nef,  presque  tout  le  chœur,  Faile  méridio* 
oale,  la  tour  du  centre,  et  le  transept  du  nord,  qui  a 
longtemps  servi  de  cimetière  particulier  à  la  famille  des 
marquis  de  Lothian.  Malheureusement  on  a  établi  au  mi- 
hea  de  ces  lielles  mines  une  église  paroissiale. 
JEHAN  DE  LANSON,  chanson  de  geste  sur  le  siège 


d*un  château  par  CSiariemagne  et  les  douze  pairs.  Jehan 
de  Lanson  (Lanciano,  dans  rAbruzze  citérienre),  neven 
des  traîtres  Ganelon  et  Hardré,  donne  asile  aux  ennemlt 
de  Tempereur,  et  refuse  de  hii  iaire  hèmmage  de  ses 
terres.  11  est  fait  prisonnier,  et  meurt  dans  un  monastère 
de  FnMioA.  -^  Cette  chanson  est  à  la  Bibliothèque  natfo- 
wOe  de  Paiis  dans  un  manuscrit  du  xiii*  siècle,  et  à  b 
bibliothèque  de  l'Arsenal  dans  un  manuscrit  du  xyK 

JEHAN  DE  PARIS.  V.  le  Supplément, 

JÉRUSALEM  (Monuments  de).  V,  Tbmplb,  dans  notre 
Dictioftnatr»  de  Biographie  et  d'Histoire^  et,  dans  le  pré- 
sent ouvrage,  Sâ»DLcas  (Église  du  Saini^). 

jéassALEM  (Assises  de).  V,  Assises,  dans  notre  Z>te- 
ttonnatre  de  Biographie  et  d'Histoire, 

jéaDSALBM,  2«  brandie  du  Chevaiier  au  Cygne,  C*est  le 
récit  des  combats  que  les  CrolBés  soutinrent  sous*  lef 
murs  de  la  ville  sainte  avant  de  Fenlever  aux  Turcs.  Ce 
poème,  comme  les  autres  parties  de  la  même  chanson,  » 
été  arrangé  par  Graindor.  Il  est  conservé  dans  six  ma» 
nuscrits,  dont  cinq  h  la  Bibliothèque  nationale  .et  un  è 
la  bibliothèque  de  TArsenal ,  à  Paris.  V,  Histoire  litté- 
raire de  la  France,  t.  XXII.  H.  D. 

JâiosALBii  (La  Destruction  de),  poôme  du  xm*  siècle 
sur  la  ruine  de  Jérusalem  par  les  Romains.  Vespasien, 
affiigé  de  la  lèpre,  est  guén  par  Tapplication  d*un  voile 
qui  conservait  Tempreinte  des  traits  de  Jésus-Christ* 
Pour  reconnaître  ce  bienfait,  il  permet  au  pape  de  prê- 
cher la  religion  nouvelle,  et  fait  serment  de  venger  la 
mort  du  Sauveur.  Il  détruit  donc  Jérusalem,  et  envoie 
Ponce-Pilate  dans  la  prison  de  Vienne.  La  prison  s'éoroule, 
et  le  gouverneur  de  la  Judée  est  englouti  dans  un  abîme. 
—La  tradition  de  Temprisonnement  et  de  la  mort  de  Hlate 
à  Vienne  est  encore  populaire  dans  le  Dauphiné.  Il  existe 
deux  manuscrits  du  poème  à  la  Bibliothèque  nationale 
de  Paris.  V.  Histoire  littér,  de  la  France,  U  XXH.  H.  D. 

JéansALEM  cëLBSTB,  OU  Architecture,  représentation 
plus  ou  moins  grossière  de  la  ville  de  Jérusalem  par  un 
groupe  de  petits  monuments  formant  dais  au-dessus 
d'une  niche  qui  contient  un  saint.  —  Ce  couronnement 
symbolique,  particulier  à  Tépoaue  romane,  indique  la 
Jérusalem  céleste,  où  le^saint  aoit  Jouir  d*un  bonheur 
éternel. 

jéausALEM  Déuvaés  (La),  poème  épique  du  Tasse,  dont 
le  sujet  est  la  conquête  de  Jérusalem  par  Tarmée  des 
Croisés,  sous  la  conduite  de  Godefroy  de  Bouillon. 

L'ange  Gabriel  porte  à  Godelh>y,  élu  chef  de  Tarmée 
chrétienne,  les  orores  du  Très-Haut.  Godefroy  harangue 
ses  troupes,  dont  le  poète  nous  fait  un  dénombrement 
imité  d'Homère.  Aladin,  tyran  de  Jérusalem  ou  Solyme, 
instruit  de  l'approche  des  chrétiens,  s'apprête  à  les  re- 
pousser. 1^  les  conseils  de  l'enchanteur  Ismen ,  il  fait 
enlever  une  image  de  la  Vierge  particulièrement  chère 
aui  chrétiens;  mais  le  simulacre  sacré  disparaît  de  la 
mosquée  où  il  a  été  transporté.  Pour  sauver  fe  peuple  de 
Jérusalem  des  conséquences  du  courroux  d'Aladin ,  une 
vierge  chrétienne,  Sophronie,  se  déclare  coupable  du 
larcin  :  cdle  va  expirer  dans  les  flammes,  k  côté  d'Olinde, 
son  amant,  lorsque  arrive  au  secours  du  tyran  la  guer- 
rière Glorinde,  qui  obtient  la  gr&ce  du  couple  infortuné. 
Cet  épisode,  où  le  Tasse  a  déployé  tout  son  talent  dans 
l'art  d'intéresser  et  d'attendrir,  ne  tient  en  aucune 
façon  au  reste  du  poème.  —  Cependant  les  chrétiens 
s'approchent  de  Jérusalem  :  le  combat  s'engage  avec  les 
Sarrasins:  Tancrède  se  mesure  avec  Glorinde  sans  la 
connaître.  Herminie,  assise  au  haut  d'une  tour,  près 
d'Aladin,  nomme  k  ce  monarque  les  principaux  chefs  des 
Croisés.  Irrité  des  progrès  des  chrétiens,  Satan  assemble 
les  démons,  et  les  excite  contre  eux  par  ses  discours.  Sous 
l'influence  de  l'Enfer,  Hidraot,  roi  de  Damas,  envoie  sa 
nièce,  la  magicienne  Armide,  au  camp  de  Godefroy,  pour 
t&cher  de  séduire  les  chefs  de  son  armée  :  par  ses  arti- 
fices et  ses  séductions,  Armide  obtient  le  secours  de  dix 
guerriers  chrétiens,  destinés  à  la  rétablir  sur  le  trône  de 
son  père.  Cn  défi  entre  Gernaud  et  Renaud  amène  la 
mort  du  premier.  Godefroy,  irrité,  censure  vivement  ces 
querelles  fratricides  :  sur  le  conseil  de  Tancrède,  Renaud 
quitte  le  camp  des  Croisés;  mais  bientôt  des  chrétiens 
apportent  son  armure  ensanglantée.  Arg^illan,  inspiré  par* 
l'Enfer,  accuse  Godefroy  d'avoir  fait  pénr  ce  Jeune  guer-  • 
rier,  l'Achille  des  chrétiens,  et  cette  calomnie  allume  nnC  ] 
sédition,  que  Godefroy  apaise  par  sa  fermeté.  Alors  Bel- 
phéffor,  sous  les  traits  d'Araspe,  va  trouver  Soliman ,  le 
chef  des  Arabes,  et  réveille  sa  fureur.  Le  sultan ,  dans 
l'ombre  de  la  nuit,  attacpie  les  chrétiens.  Le  Très-Haut 
ordonne  k  Michel  de  précipiter  dans  les  Enfers  les  esprits 
infernaux  qui  tourmentent  ses  guerriers;  ceux-ci  repren- 


JET 


1124 


JEU 


nent  l'afaDtage,  gr&oe  à  rarrivée  des  cheraliert  ehrédens 
que  la  perfide  Amide  retenait  prlsonoiers,  et  qa*a  déli- 
frés  répée  de  Renaad.  Alors  le  eiége  de  Jérusalem  se  res- 
serre. Ârmnt  et  Clorinde  prennent  la  résolution  d'aller 
«mbraser  la  tour  que  les  chrétiens  ont  élevée  pour  donner 
l'assaut.  Ils  sont  découverts  et  poursuivis.  Argant  rentre 
dans  Solyme,  mais  Clorinde  reste  seule  au  milieu  des  en- 
nemis, "nuidis  qu'à  la  faveur  de  la  nuit  elle  cherche  à  se 
perdre  dans  la  foule,  Tancrède  l'aperçoit,  et  lui  propose 
le  comhaL  Clorinde  succombe,  et  reçoit  le  baptême  des 
mains  du  héros.  —  La  mort  de  la  guerrière  répand 
l'alarme  dans  Jérusalem,  bmen  enchante  la  forêt  d'où 
les  chrétiens  tirent  le  bois  pour  leurs  ouvrages.  Vaine- 
ment Godefiroy  de  Bouillon  y  envoie  les  .principaux  guer- 
riers :  Tancrède  lui-même  est  contraint  à  fuir,  dupe  des 
artîices  des  démons.  0ans  cette  extrémité,  Hugues  appa- 
raît h  Godefroy,  et  lui  persuade  de  rappeler  Renaud  : 
deux  guerriers.  Guelfe  et  Ubalde,  sont  chargés  de  cette 
entreprise;  ils  partent,  rencontrent  un  rieiliard  sur  les 
bords  du  fleuve  qui  osigne  Ascalon,  et  apprennent  de 
lui  le  aân  du  jeune  Renaud,  et  l'amour  subit  qu'Armide 
avait  conçu  pour  lui.  Sous  la  conduite  d'une  femme  In- 
connue, ils  abordent  aux  Iles  Fortunées,  séjour  de  l'en- 
chanteresse, triomphent  de  mille  obstacles,  et  arrivent 
dans  le  palais  d'Armide.  Ubalde  présente  aux  regards  de 
Renaud  le  bouclier  de  diamant  :  à  cet  aspect,  le  courage 
du  héros  se  réveille,  et  il  quitte  le  palais.  Armide,  fu- 
rieuse. Jure  la  perte  de  Renaud,  fait  détruire  par  les  dé- 
mons son  magique  palais,  et  s'envole  sur  son  char  à 
Gaza,  où  s'assemble  l'armée  que  le  sultan  d'Egypte  en- 
voie au  secours  de  Jérusalem.  Renaud  rentre  dans  le 
eamp,  et  témoigne  à  Bouillon  son  amer  repentir  ;  seul  et 
couvert  de  ses  armes,  il  va  dans  la  forêt  enchantée.  En 
vain  le  fantôme  d'Armide  se  présente  à  tes  yeux  ;  en  vain 
VEnfer  lui  oppose  mille  obstacles.  Il  en  triomphe,  et 
branche  le  cyprès  funeste  auquel  le  charme  était  attaché. 
On  reconstruit  alors  de  nouvelles  machine»,  et  Bouillon 
ordonne  l'assaut.  Renaud  le  premier  escalade  les  rem- 
parts ;  les  infidèles  ftiient ,  et  les  chrétiens  pénètrent  dans 
Solyme. 

Le  s^|et  de  la  JimsaUm  délivrée  est  peut-être  le  plus 
grand  qu'on  ait  choisi,  et  le  Tasse  l'a  traité  avec  autant 
d'intérêt  que  de  grandeur  :  l'ouvrage  est  bien  conduit; 
presque  tout  y  est  lié  avec  art,  et  des  contrastes  habiles  y 
entretiennent  l'intérêL  D  est  écrit  en  ottaioa  rima  (  strophe 
ie  8  vers);  le  style,  sauf  quelques  conoêtti,  est  pres- 

3ue  partout  clair  et  élégant ,  et ,  lorsque  le  si^et  deinande 
e  l'élévation,  on  est  étonné  de  voir  la  mollesse  de  la 
lan^e  italienne  prendre  un  nouveau  caractère  sous  la 
main  du  poète,  et  se  chanser  en  majesté  et  en  force. 
L'épisode  d'Armide  est  un  obef-d'œuvre,  et  celui  d'Her- 
minie  ches  les  bergers  une  pastorale  charmante,  destinée 
à  soulager  le  lecteur  de  la  description  des  combats.  Un 
génie  admirable  éclate  dans  la  variété  des  caractères,  la 
manière  dont  ils  sont  annoncés,  et  l'art  savant  avec  lequel 
ils  sont  soutenus.  Jjbl  JérnsaUm  dAivrée,  depuis  long- 
temps chantée  en  Italie,  doit  être  placée  à  cèté  des 
œuvres  de  Virgile  et  d'Homère,  nud^ré  ses  Duites  et  mai- 
gré  la  critique  de  Boileau.  E.  B. 

JESSÉ  (Arbre  de).  V.  Arbrs  oiN^ALOCiQUE. 

JESUS  (Images  de).  F.  Christ  (Images  du),  Bon  Pas- 
mm,  Caucinx,  Crccifiembnt. 

i^SDS  (Ptpier),  papier  employé  pour  les  ouvnwes  d'un 
grand  format  et  pour  l'impression  des  gravures.  Son  nom 
lui  vient  de  ce  qu'autrefois  il  portait  pour  marque  1.  H.  S., 
premières  lettres  du  nom  de  Jésus  en  grec 
I  JET  D'EAU ,  ornement  des  bassins  et  des  fontaines, 
principalement  depuis  le  temps  de  Louis  XIV.  Tantôt  le 
{et  est  isolé,  comme  dans  les  Tuileries;  tantôt  il  forme 
es  gerbes,  comme  au  Palais-Royal  ;  il  entre  encore  dans 
la  composition  des  scènes  qui  animent  les  pièces  d'eau, 
ainsi  qu'on  le  voit  à  Versailles.  Les  Anciens  connaissaient 
les  Jets  d'eau,  puisqu'on  en  a  trouvé  une  représentation 
lans  les  peintures  de  Pompél  ;  d'ailleurs,  il  y  en  avait 
ouvent  un  dans  Vimpluoium  des  maisons  romaines. 

JETÉ,  JETÉ  BATTU.  V.  Pas. 

JETÉE,  construction  élevée  en  maçonnerie  à  l'entrée 
d*nn  port  pour  protéger  l'entrée  et  la  sortie  des  navires, 
Maer  les  fortes  lames  oui  arrivent  de  la  haute  mer,  et 
ttrêter  l'invasion  des  galets  ou  du  sable.  Par  conséquent, 
!•  ^fstème  des  Jetées  doit  être  combiné  avec  la  direction 
des  courants  et  la  force  de  la  mer.  On  les  construit  sur 
deux  lignes  parallèles,  entre  lesquelles  se  trouve  la  voie 
du  port  n  y  en  a  de  très-belles  aux  Sables  d'Olonne,  à  Ca- 
!)!s,  et  h  Dunkerque.  Les  Jetées  sont  ordinairement  élevées 
par  les  ingénieurs  du  gouvernement,  et  •  si  elles  se  trou- 


I 


vent  à  l'entrée  d'un  port  de  guerre,  elles  entrent  dans  le 
système  des  fortifications. — Les  andens  Romains  avaient 
inventé  et  appliqué  un  système  de  letées  pour  protéger 
on  port ,  tout  à  la  fois  contre  les  antations  de  la  mer  et 
contre  les  ensablements  :  c'étaient  des  Jetées  en  arcades, 
comme  des  ponts,  mds  avec  des  piles  plus  fortes.  La 
partie  supérieure  de  l'arcade  était  fermée  par  des  portes 
trempant  un  peu  dans  l'eau,  et  laissant  tonte  la  partie 
inférieure  ouverte.  La  vague,  poussée  sur  la  digue,  en- 
trait dans  le  port  par  le  bas  des  arcades  ;  mais,  ne  péné- 
trant qu'à  une  certaine  profondeur  sous  le  niveau  de 
l'eau  intérieure,  elle  l'agitait  fort  peu;  ensuite,  par  son 
mouvement  naturel  de  reflux,  elle  ramenait  avec  elle  le 
sable  qu'elle  pouvait  avoir  charrié,  de  sorte  qu'il  ne  pou- 
vait Jamais  y  avoir  d'accumulation  dans  le  port.  U  existe 
au  cap  Misène  et  à  Pouxzoles,  auprès  de  Naples,  des 
ruines  antiques  de  Jetées  de  ce  genre.  Celles  de  Pouzzoles 
sont  appelées  vulgairement  le  pont  4$  CcUigula.  V,  de 
Fazio,  ïntemo  al  migliar  tisUnui  di  costnaionê  dt^  porti, 
Naples,  iS28,  in-4*.  C.  D— v. 

JETON,  pièce  de  métal,  dlvolre,  de  nacre,  d'os,  de 
bois,  etc.,  plate  et  généralement  ronde,  dont  on  se  servait 
autrefois  pour  odculer,  et  qu'on  emploie  encore,  en  lui 
donnant  une  valeur  de  convention,  pour  compter  et  payer 
an  Jeu.  Suivant  Hérodote,  les  Égyptiens  comptaient  avec 
de  petites  pierres  plates,  polies  et  arrondies.  Les  Romains, 
qui  en  firent  paiement  usage,  les  nommèrent  calculs 
{calctUi),  Des  Jetons  en  pierre  blancs  ou  noirs  servaient 
à  marquer  les  Jours  fastes  ou  néfastes.  On  en  avait 
d'autres  en  bois  mince,  polis  et  firottés  de  cire,  pour  voter 
dans  les  assemblées.  Depuis  le  xiv*  siècle,  les  rois,  les 
seigneurs,  les  villes,  les  compagnies  firent  frapper  des  Je- 
tons à  leur  nom,  comme  bons  de  payement  pour  une 
somme  réelle.  De  grandes  cités  en  eurent  de  purement 
honoraires,  qui  fournissent  ai]4ourd'hui  d'ntitos  rensei- 
gnements sur  l'histoire  municipale  des  villes,  leurs  ma- 
gistrats, et  particulièrement  leurs  maires.  La  Biblio* 
tbèque  impériale  de  Paris  conserve  de  belles  séries  de 
ces  médailles,  entre  antres  des  midres  de  Tours  et  de 
ceux  de  Nantes.  Elles  sont  frappées  en  argent ,  et  quél- 
ouefois  en  cuivre. — On  appelle  ^stoi»  de  présence  un  Jeton 
donné  dans  les  Académies  et  autres  Sociétés  à  chaque 
membre  présent  k  une  séance  :  11  a  une  valeur  réelle,  et 
s'échange  contre  de  l'argent  monnayé.  Les  méreaux 
(V,  cê  mot)  étaient  des  Jetons  de  cette  nature.  Ce  fut  en 
1701  que  la  munificence  royale  accorda  des  Jetons  de  pré- 
sence à  TAcadémle  française.  De  nos  jours,  certaines 
corporations  et  les  grandes  compagnies  industrielles  dis- 
tribuent aussi  des  Jetons  de  prâence  pour  les  réunions 
périodiques  ou  extraordinaires  de  leurs  conseils  d'admi- 
nistration. Ils  sont  en  argent,  et  de  forme  hexagonale  phis 
souvent  que  circulaire. 

JEU  (du  latin  jocut),  amusement  quelconque.  Il  y  a 
des  Jeux  où  le  corps  principalement  est  en  exercice,  et  qui 
développent  la  rigueur,  l'sigilité  et  l'adresse:  tds  étaient, 
ches  les  Anciens,  les  Jtiux publics  (  V.  ce  mot  dans  notre 
Dictionnaire  d$  Biographe  st  iHttUÀrê)^  consistant  en 
lutte,  pugilat,  saut,  course,  etc.;  au  moyen  Age,  lei 
ioûtês  et  les  towmou;  chez  les  modernes,  les  earnustis, 
les  Jeux  de  halls,  de  panam»,  de  barrss,  etc.  D  en  est 
d'autres  qui  sont  purement  Jeux  d'adresse ,  comme  ceox 
de  boulês,  de  quiUss,  de  bamtês,  de  billard,  de  bilbo- 
quet, etc.  On  nomme  Jeux  Œsspf*it  ceux  qui  supposent 
quelque  chose  k  trouver  ou  à  deriner,  tels  que  Vénigms, 
\&  charads,  le  logogriphê,  le  rébus,  Vacrostiche,  l'ona- 
qramme,  les  bouts-rimés.  Les  Jsuœ  de  calcul  ou  de  oom- 
binaison,  comme  les  damês  et  les  échecs^  exigent  un» 
tension  plus  grande  de  l'intelligence.  Les  Jeux  de  hasard 
sont  le  pfMir  ou  non,  le  creps,  les  dés,  la  roulette^  le  loto, 
les  loteries,  et.  parmi  les  Jeux  de  cartes,  le  burQn,  lé 
lansquenet,  le  baccarat,  le  pharaon,  etc.  Dans  certsist 
Jeux  de  hasard,  le  talent  du  Joueur  peut  aider  ou  corriger 
la  fortune  :  tels  sont  les  dominos,  le  trictrac,  Vécarté,  le 
piquet,  Vimpériale,  le  whist,  la  bouillotte,  le  boston,  etc 
Les  petits  jeux  ou  jeux  innocents  sont  des  amusementr 
de  société  qui  varient  selon  les  pays  et  les  temps. 

Dans  les  Jeux  de  hasard  principalement,  les  Joneo» 
engsgent  quelque  argent.  Les  entraînements  de  la  pss- 
sion  du  ieu  ont  rendu  nécessaire  l'intervention  des  pou- 
voirs publics.  Les  lois  romaines  défendaient  de  Jouer  de 
l'argent  :  non-seulement  elles  refusaient  toute  action  Ju- 
diciaire pour  payement  des  dettes  de  Jeu,  mais  eue» 
accordaient  an  pôrdant  le  droit  de  réclamer  ce  quil  avait 
pa^é.  Justinien  décida  que,  pour  les  Jeux  qui  étaient  per- 
mis, on  ne  pourrait  engager  plus  d'un  écn  d'or  par 
partie,  et  que«  pour  les  Jeux  prohibés,  si  le  perdant  né- 


lEt 


1125 


JOB 


glig^t  de  Tftclamer  ce  qu'il  vnâi  peflin,  les  offiden 
omiiicipanx  poniraient  en  poursuivre  la  r^édtioii,  et 
appliquer  la  somme  à  des  ouvrages  d'utilité  publique. 
Chsriemagae,  dans  ses  Capitulaires,  défend  les  Jeux  de 
iassrd^  à  peine  d'être  privé  de  la  communion  des  fidèles, 
lioais  IX  condamna  à  une  amende  les  gens  qui  Jouaient 
m  échecs.  Charles  V,  par  une  ordonnance  de  1369,  in- 
terdit la  boule»  la  paume,  les  quilles,  le  palet ,  et  tous  les 
antres  Jeux  qui  ne  contribuent  pas  à  apprendre  le  métier 
das  armes.  Hais  d'autres  rois  donnèrent  eux-mêmes  ^ 
Penmple  de  la  passion  du  Jeu  :  Louis  XI ,  Charles  VIII, 
Henri  111  et  Henri  IV  étaient  Joueurs.  Les  courtisans  ne 
te  firent  pas  faute  d'imiter  le  maître  ;  la  ville  imita  la 
coor,  et  il  s'ouvrit  un  grand  nombre  de  tripots  publics, 
décorés  du  nom  d'Académiâs  de  Jeu.  Suivant  L'Estoile, 
Paris,  au  tempe  d'Henri  IV,  ne  comptait  pas  moins  de 
47  maisons  autorisées,  dont  les  principaux  magistrats  r»- 
lindent  chacun  une  pistole  par  Jour.  Ces  maisons  ftirent 
fermées  an  commencement  du  règne  de  Louis  XHL  Une 
déclaration,  en  date  du  30  mai  lôii,  accorda  à  celui  qui 
anrait  perdu  au  Jeu  une  action  en  Justice  contre  le  pro- 
priétaire ou  le  locataire  de  la  maison  où  le  Jeu  se  serait 
tenu,  pour  se  fidre  restituer  par  lui  le  montant  de  sa 
perte.  La  foreur  du  Jeu  fit  de  nouveaux  ravages  pendant 
la  minorité  et  la  Jeunesse  de  Louis  XIV,  et  les  femmes 
ellea-mémes  s'y  laissèrent  entraîner  :  plus  tard,  le  roi 
pabUa  plus  de  vingt  ordonnances  et  déclarations  pour  y 
remédier.  Au  mépris  des  édits,  la  noblesse  se  Ima  au 
jeu  aTee  fbreur  :  on  Jouait  à  la  promenade,  en  voiture,  à  la 
porte  des  tbé&tres.  M"**  de  Montespan  perdit  en  upe 
soirée  4  millions.  Parmi  les  tripots  qui  eurent  de  .la  tA- 
lâ»rité  au  xvni*  siècle,  on  remarque  le  salon  de  M"^  de 
Sainte-Amarante,  dont  la  fille  épousa  M.  de  Sartines. 
Après  la  Révolution  de  1789,  des  maisons  de  Jeu  k 
rasage  de  la  bourgeoisie  s'organisèrent  de  tous  côtés  ;  le 
mal  prit  des  proportions  eflrayantes  sous  le  Directoire.  Le 
gouvernement  consulaire  réduirit  à  9  le  nombre  des  mai- 
■ODS  de  Jeu,  et  astreignit  les  entrepreneurs  à  {Mtyer  à  l'au- 
torité une  redevance.  La  ferme  des  Jeux  à  Paris  appartint 
snooesalvement  aux  frères  Perrin  (de  Lyon),  à  Bour- 
aanlt  Malherbe,  aux  frères  Chalabre,  et  à  Benazet  :  les 
eomtea  de  Chalabre  versaient  annuellement  5  millions 
dans  les  caisses  de  la  ville  de  Paris.  La  loi  du  18  Juillet 
iS36  aoppiima  cette  ignoble  institution  ;  les  maisons  de 
ien  étaient  alors  au  nombre  de  sept  :  quatre  au  Palais- 
Boyai,  soos  les  n**  36, 113, 127,  et  154;  une  sur  leboule- 
vanl  des  Italiens,  au  coin  de  la  rue  Favart  ;  deux  dans  la 
me  de  Richelieu,  sous  les  noms  de  Frtucati  (où  les 
femmes  étaient  a^oDdses),  et  de  Cercle  des  étrangers.  Ces 
maiaona  ouvraient  k  midi,  et  fermaient  à  minuit.  Notre  lé- 
malation  actuelle  n'admet  d'action  Judiciaire  pour  dettes 
de  jeu^  «loe  s'il  s*agit  de  Jeux  qui  tiennent  à  l'exercice  du 
eorpe,  comme  les  courses,  le  Jeu  de  paume,  etc.  ;  mais  les 
tribunaux  restent  maîtres  de  rejeter  la  demande,  quand  la 
somme  leur  naratt  excessive.  Le  Code  pénal  prononce 
une  amende  oe  100  fr.  k  6,000  fr.  et  un  emprisonnement 
de  2  à  6  m<^  contre  quiconque  aura  tenu  une  maison  de 
jeu;  l'Interdiction  de  certains  droits  ciriques,  dvils  et  de 
fhmille,  peut  être  aussi  prononcée  pour  5  ans  au  moins 
et  10  ans  au  plus  ;  les  fonds  et  effets  destinés  au  Jeu,  les 
meubles  et  uistruments  employés,  sont  confisqués;  le 
sinmle  joueur  n'est  pas  puni.  Une  amende  de  6  à  10  fr. 
eat  infligée  à  quiconque  a  établi  des  Jeux  de  hasard  dans 
les  mes,  cheânins  et  places  publiques;  ses  engins  sont 
ansal  conflsoués;  pour  la  rô^dive,  la  peine  est  une 
amende  de  lo  à  200  fr.,  et  un  emprisonnement  de  6  Jours 
à  1  mois.  —  Les  maisons  de  Jeu  ont  été  supprimées  en 
Angleterre  à  psrtir  du  1*'  déc  1853.  liais,  en  Allemagne, 
pihiGipalement  sur  les  bords  du  Rhin,  les  États  s'en 
sont  cyt  un  monopole  lucratif,  quils  adju^^nt  à  des  fer- 
miera.  F.  Duasaulx,  De  la  passion  du  jeu  depuis  les 
CeiRpf  amciens  iusqu*d  nos  jours,  Paris,  1779,  in-8*.    B. 
ne ,  nom  donné  pendant  le  moyen  âge  à  de  petites 
eompositions  dramatiques.  Matthieu  Paris  mentionne  un 
certain  Godefroy,  mort  en  1146,  qui  fit  représenter  au 
monastère  de  S^Alban  un  jeu  intitulé  laVtedeS^Ca- 
tfttfrtne.  Un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  impériale  de 
Paria  (fonda  de  La  Vallière,  n«  9736)  contient  plusieurs 
pièces  de  oe  genre,  entre  autres  le  Jeu  du  PHertn,  le  Jeu 
de  Robm  et  de  MarUm,  le  Jeu  du  mariage ,  le  Jeu  de 
S^^Nieoias. 

juj,  nom  donné  dans  l'orgue  à  une  série  de  tuyaux  de 
la  même  eepèee^  ne  diflérant  entre  eux  que  par  leur,  tona- 
lité, rintensité  et  le  timbre  de  leurs  sons,  et  formant  une 
iuile-eiiiomatlcrae  plus  ou  moins  étendue.  Les  Jeux  corn- 
pleis  ont  actuellement  54  notes;  les  incomplets  ont  trois 


ou  deux  octaves.  Les  Jeux  d'orgue  se  ^Ovtient  en  den 
grandes  classes,  les  jetix  à  bouche  et  les  jeux  d*anek 
{V.  ces  mots).  F.  C. 

JBo  (Grand-),  nom  donné  dans  l'orgue  à  la  réunion 
des  Jeux  d'anche,  auxquels  on  ajoute  quelques  autres 
Jeux,  tels  que  les  prestants.  Pour  obtenir  le  grand  Jeu,  on 
met  les  claviers  ensemble,  et  on  se  sert  des  cornets,  des 
prestants,  des  trompettes,  des  clairons  et  des  cromomes 
dans  le  nand  orgue  et  dans  le  positif;  quelquefois  même 
on  fait  Jouer  le  récit  et  l'écho.  On  emploie  les  mêmes 
pédales  qu'au  p{0if»-jett.  F.  C. 

JBU  (Plem-K  nom  donné  dans  l'orgue  au  mélange  des 
montres,  des  huit-pieds  ouverts,  des  bourdons,  des  pre^ 
tants,  des  doublettes,  des  fournitures  et  des  cymbales 
dans  le  grand  orgue  et  dans  le  positif.  Pour  le  plein-Jeu, 
on  met  les  claviers  ensemble,  et  on  se  sert  des  pédales 
de  trompette,  de  clairon  et  de  bombarde;  quelquefois 
on  remplace  les  pédales  de  trompette  et  de  clairon  par 
des  pédales  de  flûte,  ce  qui  se  fUt  lorsqu'il  y  a  des  seize- 
pie<u.  —  On  désigne  aussi  rar  le  nom  de  pleki^eu  le 
registre  sur  lequel  sont  réunies  la  fourniture  et  la  çynn 
bue.  Ce  mélange  sert  à  accompagner  le  plain-chant,  et 
est  un  prédeux  reste  de  l'harmonie  telle  qu'on  la  com- 
prenait pendant  le  moyen  ftge.  F.  C. 

JEU  DB  MOTS ,  espèce  d'équivoque  fondée  sur  l'emploi 
de  deux  mots  qui  s'accordent  pour  le  son,  mais  qui  dif- 
fèrent de  sens.  Telle  est  cette  réponse  du  marquis  de 
Bièvre  k  la  reine  Marie-Antoinette,  qui  avait  des  pan- 
toufles vertes,  et  qui  lui  demandait  de  faire  un  calem- 
bourg  sur  sa  personne  :  «  Madame ,  l'uni-vert  (  l'uni- 
vers) est  à  vos  pieds.  »  On  fit  souvent  usage  des  Jeux  <to 
mots  dans  les  devises  des  armoiries,  dans  les  madri- 
gaux, les  épigrammes,  les  impromptus,  etc.  Alors  c'est  à 
peu  près  une  énigme,  comme  dans  cette  devise  de 
Henri  II ,  gravée  sur  le  Louvre  à  côté  du  chifOre  de  Diane 
de  Poitiers,  et  de  son  croissant  emblématique  :  Doneo 
totus  impleat  orbem^  «  Jusqu'à  ce  qu'il  ait  rempli  l'uni- 
vers,  ou  son  plein.  »  C.  D— t. 

jBo-PARTi,  genre  de  composition  poétique  emprunté 
aux  troubadours  par  les  trouvères,  et  nommé  quelquefois 
parture  (F.  Teuson).  Les  principaux  trouvères  dont  on 
connaît  des  jeuœ-partis  sont  :  maistre  Richart  et  Gau- 
tier de  Dargies  ;  Guillaume  le  Viniers  et  Frère  ;  Andrieu  ; 
mai^  Adam  de  Givenci,  etc.  V.  AitfransOsische  Lieder, 
par  Edouard  Mfttzner,  Berlin,  1853,  in-8<>.  E.  B. 

JBO  SATTRiQOB,  nom  qu'ou  doonalt,  au  xvi*  siècle,  à 
une  petite  pièce  du  genre  de  la  farce,  qui  servait  de  lever 
de  rideau  avant  une  tragédie  ou  une  comédie.  Les  Jeux 
satyriquea  s'appehdent  aussi  les  Veaux,  on  ne  sait  trop 
pourquoi.  Peut^tre  était-ce  le  nom  de  quelque  confrâfie 
Joyeuse  ;  ou  bien,  des  veaux  avaient  figuré  de  leur  per- 
sonne ou  de  leur  noni  dans  quelque  bouffbnnerie  fa« 
meuse. 

JEUNE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra* 
pkie  et  d^  Histoire. 

JBONB  PSBMIBR.    V.  AmOURBOX. 

JEUNES  DE  LANGUES  (École  des).  V.  Égolb  sbs 
jbiinbs  DB  LAffouBS ,  dsus  notTO  Dictionnoire  de  BiogrO' 
pMe  et  d^RisUnre^  pase  878,  col.  1. 

JBOIIBS  AVBOOLBS.    V,  AVBDGLBS. 
JEUNB8  DETENDS.    F.  DETENDS. 

JEUX.  K.  Jbc. 

JOAILLERIE,  art  de  monter  les  pierres  précieuses  sur 
des  ornements  en  or  ou  en  arsent.  Le  montage  à  jour  est 
surtout  en  usage  pour  le  diamant  et  pour  les  objets 
composés,  comme  les  parures,  qui  prennent  la  forme  de 
guirlandes,  de  bouquets,  etc.  :  on  se  sert  du  montage 
plein  pour  les  pierres  de  couleur  et  pour  les  objets  sim- 
ples. L'opération  par  laquelle  la  pierre  est  fixée  au  métal 
s'appelle  sertissage.  Pour  les  bagues,  les  pierres  sont 
fixées  dans  un  chaton,  que  l'on  soude  ensuite  à  l'an- 
neau. L'argent  dont  se  sert  le  joaillier  est  au  titre  de  980 
millièmes,  et  l'or,  pour  les  doublures,  k  celui  de  500  mil* 
lièmes.  F.  Buouterxe,  ORPévRBRiK. 

JOANÈSE,  monnaie  d'or  portugaise,  valant  45  fr.  05  c 

JOB  (Livre  de),  un  des  livres  canoniques  de  l'Ancien 
Testament,  écrit  on  ne  sait  précisément  ni  dans  quel 
temps  ni  dans  quel  lieu.  Les  commentateurs  Juifs  ou  chré- 
tiens, ainsi  que  la  plupart  des  savants  modernes,  acceptent 
Job  comme  un  personnage  réel,  et  le  font  vivre,  les  uns 
an  XIV*  siècle,  les  autres  au  vm*  av.  J.-C.  Quant  au 
poème  qui  porte  son  nom,  et  dont  l'auteur  est  demeuré 
inconnu,  non-seulement  11  est  indépendant  des  autres 
livres  de  la  Bible,  mais  il  en  difTère  par  le  style,  par  l'ori- 
ginalité des  tours  et  des  expressions.  Il  contient  tous  les 
genres  de  beauté;  c'est  un  des  plus  admirables  monu- 


JOC 


tt26 


JUA 


xOMntB  litkénim  et  philosophiqaM,  le  phn  éloquent 

.  Inité  de  la  douleur  et  de  la  Providence  qu'il  ait  été 
donné  à  un  génie  humain  de  composer.  La  conclusion 
naturelle  de  cette  œuvre  sublime  et  pleine  d'enseigne- 
ments ,  c*est  que  Thomme  ne  pouvant  rien  savoir  sur  sa 
rpre  destinée,  ni  sur  le  gouvernement  de  runivers, 
vraie  sagesse  consiste  à  sinclioer  devant  la  volonté 

.  divine ,  à  en  accepter  les  décrets  avec  une  pieuse  rési- 
gnation. V.  Essat  philosophioMê  sur  le  po»n$  de  Job , 
par  Gaben  ;  Cours  familier  de  littérature  par  M.  de  La- 
martine. 11*  et  12*  Entretiens,  Paris,  1856  ;  le  Livre  de 
Job,  traduit  de  l'hébreu  par  Ernest  Renan,  Étude  sur 
Vàge  et  le  caraetèredu  poème,  Paris,  1858.         P— s. 

JOBBERS ,  agioteurs  de  la  Bourse  de  Londres,  dont  le 
nom,  pris  aénéralement  en  mauvaise  part,  est  presque 

.  synonyme  de  wÀeurs*  Jh  font  des  achats  et  des  ventes  à 
terme,  sans  posséder  ni  argent  ni  titres,  et,  quand  vient 
l'époque  fixée,  règlent  leurs  marchés  par  des  différences 
(  K.  Bourse).  Ils  ont  beaucoup  d'analogie  avec  lies  cour" 
tiers-^narrotts  de  la  Bourse  de  Paris. 
JOBEUNS.  V.  DRAHisnft. 

JOCKEY,  mot  anglais,  passé  aujourd'hui  dans  la  plu-, 
part  des  langues  de  l'Europe,  et  qui  désigne  le  valet* 
d'écurie  chargé  de  soigner  et  d'exercer  les  chevaux,  de 
les  monter  daîns  lea  courses.  Par  extension,  on  l'applique 
à  tous  ceux  qui  font  courir  ou  qui  courent  eux-mêmes. 

JOCKET  (Jeu  du).    V.  TaiCTRAC. 

JOGKBT-CLUB,  c-à-d.  club  dss  jockeys,  société  d'ama- 
.  tours  de  chevaux,  formée  en  Angleterre  par  des  membres 
.de  l'aristocratie  qui  se  proposent  l'amélioration  de l'es- 
.  pèce  chevaline.  Un  Jockey^lub  s'est  constitué  par  imi- 
tation à  Paris  ;  chacun  de  ses  menobres  paye  une  cotisa- 
tion annuelle  de  500  fr. 

JONCHETS  ou  HONCHETS,  petits  bâtons  d'os,  d'ivoire 

ou  de  bois,  fort  menus,  dont  quelques-uns  sont  sculptés 

»Êa  foi,  en  reine,  etc.,  et  que  l'on  jette  confusément  les 

.uns  sur  les  autres,  pour  louer  à  qui  en  retirera  le  plus 

avec  un  crochet,  sans  en  faire  remuer  d'autres  que  celui 

.'Ou'on  veut  dégager.  On  s'est  primitivement  servi  de  brins 

de  Jonc,  d'où  est  venu  le  nom  de  jonchets.  Ce  Jeu  est 

très-ancien  :  il  en  est  fait  mention  dans  Ovide. 

.     JONES  (  Tom  ).  V.  Ton  Jonbs. 

JONGLEURS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire, 

JONQUE  (du  portugais iunco),  nom  que  les  Européens 
donnent  aux  grands  navires  de  la  Qiine,  appelés  tckouen 
par  les  habitants  de  ce  pays.  La  coque,  Jusqu'à  la  ligne 
46  flottaison,  est  en  bois  ordinaire,  mais  toutes  les  hautes 
œuvres  sont  en  teck.  On  emploie  les  chevilles  de  fer  pour 
lier  les  couples  et  lea  bordages.  Les  coutures  sont  très- 
bien  calfatées  avec  une  étoupe  tirée  du  bambou,  et  le 
fond  avec  une  espèce  de  résine  d'une  grande  adhérence. 
L'avant  et  l'arrière  sont  plats  ;  mais  le  premier  est  plus 
petit,  sans  quille  et  sans  taille-mer;  l'arrière  renferme 
une  chambre  immense,  où  le  gouvernail  est  h  l'abri  des 
coups  de  mer.  Les  Jonques  ont  de  deux  à  ouatre  mâts , 
sans  aucune  proportion  entre  eux.  Un  carré  de  bembou 
fendu  et  étendu  sur  une  vergue  ou  canne  tient  lieu  de 
voile,  n  n'y  a  qu'un  seul  pont;  l'intérieur  est  divisé  en 
cabines  ou  compartiments  pour  les  marchandises  et  les 
passagers.  Une  Jonque  offire  h  l'œil  quelque  chose  de  bi- 
zarre :  le  pont  a  la  forme  d'un  croissant;  les  extrémités 
•ont  si  hautes  et  si  pesantes,  que  l'on  croirait  qu'au  pre- 
mier coup  de  vent  le  bâtiment  doit  sombrer.  Il  n'en  est 
rien  cependant  :  quelque  défectueuses  qu'elle»  nous  pa- 
raissent au  point  de  vue  de  l'art  européen,  les  Jonques 
sont  très-soIides  à  la  mer  ;  mais,  à  moms  que  le  vent  ne 
soit  très-favorable,  elles  marchent  mal,  et  la  manœuvre 
en  est  très-difficile.  Quatre  hommes  pour  100  tonneaux 
gouvernent  facilement  un  vaisseau  marchand  d'Europe , 
mais  une  Jonque  en  exige  cinq  fois  plus.  On  en  a  vu  des 
plus  grandes  avoir  une  vingtaine  et  plus  de  matelots  à  la 
jbaire  seulement.  Leur  d^iacité  varie  entre  60  et  500  ton- 
neaux :  quelques-unes  atteignent  une  longueur  de  35 
met.,  et  une  largeur  de  8  mèu  Le  premier  navhre  chinois 

Îui  soit  venu  en  Europe  arriva  en  Angleterre  en  mars 
848  :  il  avait  20  met.  de  long  sur  11  de  Urge.       B. 

JOUÉE,  partie  d'un  pied-droit  «  qui  comprend  le  ta^ 
bleau,  la  feuillure  et  l'ébrasement. 

JOuELLE,  vieux  mot  synonyme  de  joyau. 

JOUISSANCE ,  en  termes  de  Droit,  un  des  attributs 
de  la  propriété,  consistant  à  en  recueillir  les  fruits,  à  en 
percevoir  les  revenus.  La  Jouissance  et  la  propriété  sont 
aouvent  séparées  l'une  de  l'autre,  et  établies  sur  des  per- 
jonnes  différentes,  par  exemple  dans  le  cas  d'uiu/hiti 
XV*  ce  mot)m 


jODissaiiCK  (Action  de)  V.  Action. 

JOUQUB  i  nom  qu'on  donnait  quelquefois  à  la  cotleâe 
mailles. 

JOURDAIN  DE  BLAIVES,  poCme  de  chevalerie,  qui  fait 
suite  à  celui  d*Amis  et  Amyle,  Jourdain  de  Blaives  ou 
Blaye  était  petit-Als  d'Amis  et  de  Belissent.  Son  père 
^rart  a  été  assassiné  par  le  traître  Froment,  neveu  dn 
traître  Hardré;  il  est  sauvé  par  le  dévouement  de  son 
parrain  Renier,  qui  livre  son  propre  fils  à  la  vengeance 
de  Froment.  Devenu  grand,  Jourdain  délivre  le  royaume 
de  Marcasille  attaqué  par  les  Sarrasins,  et  épouse  Oria- 
bel,  fille  du  roi  Maôrcon.  U  marie  sa  fille  à  l'empereur  de 
Gonstantinople,  et  revient  en  Gascogne  pour  tuer  Fro- 
ment; enfin  il  succède  à  son  b^u-père  Marcon.  —  Cette 
chanson  est  conservée  à  la  Bibliothèque  nationale  de 
Paris  dans  un  seul  manuscrit.  La  Bibliothèque  de  Tour- 
nai possède  sur  le  même  sujet  un  long  poème,  traînant, 
insipide  et  mal  rimé,  qui  fut  écrit  par  Druel  Vignon  vers 
1461.  V.  Histoire  littéraire  de  la  France,  t.  XXII.  H.  D. 

JOURNAL.  V,  ce  mot  dma  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire,  et,  dans  le  présent  ouvrage,  l'ar- 
ticle Presse. 

JOURKAL,  livre  de  conmierce.  V.  GoMPTABiuré  commer- 
ciale. 

JOUTE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtclioniuitra  de  Biogra- 
phie et  d'Histotre, 

JOUY  (Aqueduc  de),  ou  de  Met%,  aqueduc  romain , 
construit  et  voûté  en  maçonnerie,  et  qui  amenait  à  Mets 
les  eaux  de  sources  situées  an  village  de  Gorxe,  à  plus 
de  22  kilom.  au  N.-0.  de  la  ville.  Au  vallon  de  Jouy, 
l'aqueduc  était  en  élévation  dans  une  longueur  de 
1092  met.,  et  passait  sur  des  arcades,  dont  quelquea- 
unes  avaient  une  hauteur  considérable.  On  en  voit  en- 
core 17,  dont  plusieuiis  sont  entières  et  les  autres  plus  ou 
moins  dégradées.  Les  plus  élevées  ont  environ  10  met., 
et  ne  forment  pas  toute  la  hauteur  dea  collines  ;  leor 
épaisseur  est  de  3"",52<^,  sur  5  met.  d'ouverture.  Les  gens 
du  pays  nonunent  cet  aoueduc,  construit  en  petits  ma- 
tériaux, le  Pont  du  Diable.  On  conjecture  qu'il  fut  établi 
avant  l'an  70  de  J.-C.  C  D— t. 

JOYAU,  ornement  d'or,  d'argent  et  de  pierreries,  qui 
sert  h  la  parure  des  femmes.  U  implioue  une  matière 
plus  riche  et  plus  précieuse  que  le  mot  hijou. 

JUAN  (Don) ,  personnage  mythique,  dont  la  littératun 
s'est  souvent  emparée,  et  dont  elle  a  fait  l'idéai  du  maté- 
rialisme, de  la  débauche  et  de  l'impiété.  Il  est,  comme 
Faust  {V.  ce  mot)^  un  symbole  de  l'étemel  problème  de 
la  vie  !  après  avoir  suiri  une  voie  différente,  il  arrive  an 
même  but,  il  se  rencontre  avec  fui  dans  une  même  idée 
de  doute,  dans  le  môme  sarcasme  contre  le  monde  et 
contre  Dieu.  La  légende  de  Don  Juan  est  d'origine  espa- 
gnole. On  racontait  qu*à  Séville,  sous  le  règne  de  Pierre 
le  Cruel  selon  les  uns,  au  temps  de  Charles-Quint  seton 
les  autres,  un  certain  Don  Juan,  de  l'illustre  famille 
Tenorio,  s'était  proposé  d'enlever  la  fille  du  gouverneur 
ou  commandeur  de  la  ville,  pour  la  sacrifier  à  ses  pa»> 
sions;  qu'après  avoir  tué  en  duel  le  père  de  sa  victime, 
il  descendit  dans  son  caveau  sépulcral  du  couvent  de 
S^-François,  et,  s'adressant  avec  raillerie  à  la  statue  de 
pierre  placée  sur  le  tombeau,  l'invita  à  être  son  hMe  ; 
que  la  statue,  exacte  au  rendez-vous,  le  contraignit  de  la 
suivre,  et  le  livra  aux  puissances  de  l'Enfer.  Tel  est  le 
thème  que  dévdoppa  la  poésie.  On  y  mêla  l'histoire 
d'un  autre  débauché.  Don  Juan  de  MÛafia,  qui  s'était, 
dit^on,  donné  au  Diable,  mais  qui  finit  par  se  convertir  et 
mourut  en  odeur  de  sainteté.  Gabriel  Telles  (Tirso  de 
Molina^  traita,  le  premier,  la  légende  de  Don  Juan,  dsns 
son  El  Burlador  de  Sevilla  y  convivado  de  piedra  : 
dans  ce  drame.  Don  Juan,  type  du  sensualisme  raffiné, 
est  un  personnage  hardi,  entreprenant,  qui  court  d'un 
pays  à  l'autre,  d'un  duel  à  un  rendex-vous,  de.U  grande 
dame  à  la  simple  servante,  et  ches  qui  Ilmpiété  li 
plus  téméi'aire  s'unit  d'une  manière  très-puissante  à  l'é- 
goisme  et  à  la  dépravation.  Le  même  sn^et  fut  transporté 
sur  la  scène  française  par  De  Villiers,  en  1650,  sous  le 
titre  de  :  Le  Festin  de  pierre  ou  le  Fils  criminel.  Vint 
ensuite  Don  Juan  ou  U  Festin  de  pierre,  de  Molière 
(1665)  :  mais  ici  Don  Juan  n'est  qu'un  mauvais  sujet 
qui  nous  amuse ,  sans  nous  étonner)  Sganarelle  est  siîn- 
plement  un  drôle  de  la  Camilie  des  Soapin;  la  ststue  du 
commanaeur  n'inspire  aucun  eflh>i ,  car  on  est  trop  dis* 
posé  à  rire  pour  se  prêter  à  cette  demi-soroeUerie.  En 
1660  parut  un  Festin  de  pierre  ou  l'AMe  foudroyé^  par 
DumesniU  dit  Rosimon.  Puis,  Thomas  Corneille  mit  en 
vers  la  pièce  de  Molière,  et.  en  1677,  Sadwell  adapta  ce 
sujet  A  la  scène  anglaise,  dans  son  lÀbertiM*  Veis  k  fia 


JUB 


1127 


JUD 


du  HA*  dède,  rœoTre  origiDale  de  (Sabriel  Tellex  fut 
iDodttée  et  remise  à  la  scène  espagnole  par  Antonio  de 
Zamora.  Quelques  années  plus  taôrd,  Goldoni  fit  Jouer  en 
ItiKe  xm  Giovanni  Tenorto,  ossia  il  dissoltUo  punito, 
fA  les  ^tuations  sont  invraisemblables,  les  caractères 
nides  et  goiDâés,  et  qui  fait  de  Don  Juan  un  être  misé- 
nble,  nlnspirant  aucune  pitié,  aucune  sympathie.  Vers 
17(S6,  Gluck  en  fit  le  sujet  d*un  ballet.  Le  premier  com- 
positeur qui  en  ait  fait  un  opéra  fut  Righini,  sous  le 
titre  d'il  Convitato  di  pietra,  ossia  il  dissduto  (1777). 
Le  Dom  Jwm  de  Mozart,  dont  le  lîbretto  fut  écrit  par 
Lorenzo  da  Ponte  (1787),  a  le  plus  popularisé  la  légende 
en  Burope  :  si  Jamais  elle  fut  bien  comprise  et  bien  ren- 
due, c*est  dans  cette  musique  profonde  et  passionnée, 
dans  oeitte  Joie  farouche  et  ces  chansons  moqueuses  qui 
courent  d'un  bout.de  la  pièce  à  l'autre.  Le  Don  Juan  de 
lord  ^vron  est  un  beau  po6me  :  mais  nous  n*y  retrou- 
fons  plus  le  personnage  espagnol,  nature  ardente,  in- 
quiète, toujours  avide  de  changements  et  de  nouvelles 
émotions,  qui  cherche  les  occasions  et  domine  les  circon- 
stances pour  satisfaire  ses  passions;  le  Don  Juan  de 
Byron  est  un  être  fictif,  par  la  bouche  duquel  le  poète 
'  exprime  ses  propres  doutes  et  prononce  tous  ses  para- 
doxes. Nous  avons  vu  paraître  encore  un  Don  Juan  de 
Marana,  ou  la  Chute  cT un  ange^  drame  par  M.  Alexandre 
Dumas,  1836;  Les  Ames  du  Purgatoire,  ou  les  deux  Don 
Juan,  nouvelle  par  H.  Mérimée,  1834  ;  Mémoires  de  Don 
Juan,  par  M.  MalIeflUe,  1858.  En  Espagne,  Zorilla  a 
donné  trois  ouvrages,  Don  Juan  Tenorio  (1844),  El  De- 
safio  del  diablo  et  Un  Testigo  de  Bronce  (1845).  En 
Allemagne,  Grabbe,  Braunthal,  Wiese,  Hauch,  Lenau 
et  Holtâ  ont  aussi,  de  nos  Jours,  traité  des  sujets  ana- 
logues. Grabbe  surtout  a  trouvé  une  belle  idée  dans  son 
drame 'de  Don  Juan  et  Faust  :  c^était  de  mettre  en  pré- 
sence ces  deux  caractères,  T&me  et  les  sens,  l'idéalisme 
du  savant  et  le  matérialisme  de  Thomme  du  monde;  il  y 
avait  là  un  vaste  champ  pour  l'imagination  d'un  poète, 
trop  vaste  pour  Grabbe,  qui  n'a  fait  de  son  Faust  qu'une 
pAIe  copie  de  celui  de  Goethe,  et  créé  un  Don  Juan  trop 
rêveur  et  trop  métaphysicien.  B. 

JUBAL,  jeu  de  flûte  ouvert  de  huit  pieds  et  de  quatre 
pieds,  n  se  trouve  aux  pédales  dans  l'orgue  de  Gcsrlitz, 
oà  il  semble  tenir  la  place  d'un  Jeu  d'octave.  Un  J'ubal  de 
buit  pieds,  avec  double  lèvre,  se  trouve  en  clavier  supé- 
lieor  dans  l'orgue  de  Francfort-sur-le-Mein. 

JUBÉ,  construction  plus  ou  moins  riche,  élevée  à  l'en- 
trée du  chœur  de  quelques  églises,  et  formant  une  galerie 
ou  tribune  qui  le  sépare  de  la  nef.  Il  a  remplacé  l'amfron 
(V.  cê  mot).  Autrefois  on  y  chantait ,  dans  les  fêtes  solen- 
nelles, les  leçons  des  maânes,  l'épltre  et  l'évangile  de  la 
nsesse.  Les  Jubés  furent  ainsi  nommés  du  premier  mot 
que  prononce  le  diacre  en  demandant  la  bénédiction  de 
rofficiant  avant  de  commencer  la  lecture  de  l'évangile  : 
Jubé,  domine,  benedicere  (veuille^  seigneur,  me  bénir). 
Ds  ne  datent  guère  que  du  xiv*  siècle.  Les  calvinistes  en 
ont  détruit  un  grand  nombre  pendant  les  guerres  de  re- 
ligion, et  on  en  a  abattu  d'autres  pendant  le  xvm*  siècle 
pour  de  prétendues  raisons  artistiques.  Les  dessins  de 
quelques-uns  ont  été  conservés,  comme  celui  de  Notre- 
Dame  de  Paris  (au  Cabinet  des  estampes)  et  celui  de 
S'-Ouen  de  Rouen  (dans  l'histoire  de  cette  abbaye  par 
La  Pommeraye).  Le  Jubé  de  Chartres  s'wpelait  la  lé" 
(fende,  parce  <{u  on  y  lisait  les  leçons  des  Ifetînes.  Parmi 
ceux  qui  subsistent  en  France,  les  plus  célèbres  sont  ceux 
des  cathédrales  d*Albi  et  de  Rodez,  de  l'église  S^^Ma* 
deleine  à  Troyes,  et  de  S^-Étienne-du-Mont  à  Paris. 
Il  y  en  a  même  dans  de  petites  églises ,  comme  celui  de 
Folgoat  en  Bretagne,  et  celui  en  bois  richement  sculpté 
de  Villemaure  (Aube).  La  cathédrale  de  Limoges  (V.  ce 
mot)  contient  un  Jubé  qui  n'occupe  pas  la  place  ordi- 
naire. Celui  de  l'élise  de  la  Chaise-Dieu,  en  Auvergne, 
est  à  Ventrée  de  la  nef.  11  en  existe  de  beaucoup  plus  mo- 
dernes, et  d'un  goût  détestable,  dans  certaines  églises, 
par  exemple,  à  la  cathédrale  de  Rouen;  celui  de  Bayenx 

S  été  récraiment  abattu.  £n  Belgique^  on  admire  le  Jubé 
e  r^se  S'-Pierre  à  Louvain ,  reproduit  dans  l'éfflise 
de  Brou  à  Bourg-en-Bresse,  ceux  des  églises  d'Aerschot, 
de  Tessenderloo ,  de  S'-Gomaire  à  Lierre,  de  l'église  pa- 
toiasiale  de  Dixmude,  et  de  la  cathédrale  de  Tournai  i  On 
voit  aussi  un  assez  grand  nombre  de  iubéa  en  Alle- 
magne et  en  Angleterre.  Souvent  on  y  a  placé  des  buffets 
fforgae^  qu'ils  frétaient  nullement  destinés  h  supporter  \ 
0  en  est  ainsi  à  Tolède.  B. 

JUBILÉ.  V.  ce  niot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
^ne  et  ér Histoire. 

JCBILUSt  mot  <|ui  signifia  d'abord  chant  joyeux,  n 


désigna  ensuite  un  chant  de  guerre,  espèce  de  cri  et  d'ac- 
clamation militaire  en  siane  de  Joie  et  de  triomphe.  Enfin, 
certains  liturgistes  donnèrent  le  nom  de  jubUuskeeqa» 
d'autres  ont  appelé  neume  {V.  ce  mot), 

JUDAÏSME,  dénomination  sous  laouelle  on  comprend 
la  croyance,  les  lois  et  les  idées  religieuses  des  Juifs, 
y.  Jdjfs  et  MoIsB,  dans  notre  />icttonnatr«  de  Biogra» 
phie  et  d'Histoire, 

JUDICIAIRE  (Combat).  V.  Combat  imiciAutB,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 

JUDiciAiRB  (Conseil),  Conseil  donné  au  prodigue  qui 
dissipe  ses  biens.  Le  Droit  romain  et  notre  ancien  Droit 
mettaient  le  prodigue  en  état  d'interdiction  ;  ce  fut  seu- 
lement lors  de  la  présentation  du  projet  de  Code  dvil  au 
Tribunat,  et  sur  les  observations  de  Treilhard  et  de  Por- 
tails, oue  l'on  erut  sufitoant  d'employer  ce  terme  moyen 
entre  l'interdiction  et  la  liberté.  La  cause  qui  peut  en 
modifier  l'application,  c'est  la  prodigalité:  mais  quant  à 
l'appréciation  des  circonstances  qui  la  constituent,  elle 
est  réservée  aux  tribunaux,  qui  ont,  h  cet  égard,  un  pou- 
voir discrétionnaire.  La  nomination  du  Conseil  peut  être 
provoquée  par  tous  ceux  qui  ont  droit  de  demander  rin« 
terdiction;  elle  est  Jugée  de  la  même  manière;  le  choix 
est  réservé  au  tribunai  ;  et  la  même  publicité  est  donnée 
au  Jugement  qu'à  celui  qui  ordonne  l'intendJction.  La 
conséquence  de  cette  nomination  est  d'empêcher  le  pro- 
digue de  plaider,  tran^ger,  emprunter,  recevoir  un  ea^ 
pital  mobilier,  en  donner  déchaiîge,  aliéner,  hypothéquer 
sans  l'assistance  de  son  conseil  (Code  Napol,^  art.  513 
et  514  )  ;  mais  l'administration  de  ses  biens  reste  toujours 
entre  ses  mains,  et,  dans  les  autres  actes,  il  figure  tou- 
jours d'ailleurs  en  son  propre  nom.  Le  Conseil  n'est,  du 
reste,  ni  comptable,  ni  responsable.  Les  actes  postérieurs 
à  la  nomination  du  Conseil,  et  souscrits  sans  son  assis- 
tance, sont  nuls,  sauf  pour  ce  dont  aurait  profité  le  pro- 
digue ;  les  actes  antérieurs  sont  valables,  sauf  les  cas  de 
dot  et  de  fVande.  La  défense  de  procéder  sans  l'assistance 
d'un  Conseil  ne  peut  être  levée  qu'à  l'aide  des  formalités 
au  moyen  desguelles  elle  a  été  posée*  R.  n'E. 

jUDiGiAïas  (Eloquence)  ou  do  BAsasAi),  titre  sous  1^ 
quel  on  range  non-seulement  lM/)>laidoyers  et  tous  les 
discours  prononcés  par  les  avocats  et  les  magistrats  dans 
rexercice  de  leurs  fonctions,  ou  sur  les  matières  de  leur 
état,  mais  tout  discours  admsé  directement  ou  indirec- 
tement à  une  assemblée  faisant  ofiice  de  tribunal.  Ainsi, 
d'un  cAté  \ee  plaidoyers  offensifs  ou  défensifii,  les  m«rcif- 
riales,  les  liarangues  d'installation,  d*ouvertare  ou  de 
clôture  )  de  l'autre,  les  consultations,  mémoires,  foctuiéis, 
appartiennent  à  l'éloquence  Judiciaire.  En  France,  an 
temps  des  parlements,  il  y  avait  aussi  les  remontrances 
adressées  au  roi  :  elles  demeuraient,  suivant  la  nature 
du  sujet,  purement  Judiciaires,  on  prenaient  un  caractère 
administratif  et  politique.  V,  Delamalle,  Essai  d^lnsli" 
tuHons  oratoires  à  l'usage  de  ceux  qui  se  destinent  au 
barreau,  9«  édit..,  1822,  2  voL  in-8«;  Lacretelle,  Élo- 
quence judiciaire  et  philosophie  législative,  1823,  3  voL 
in-8»;  Pinard,  Le  Barreau,  1843,  in-8o;  Paignon,  Elo- 
quence et  improvisation,  art  de  la  parole  oratoire^ 
1854,  in-S». 

L'éloquence  Judiciaire  fut  nulle  chez  les  Ghaldéens  et  les 
Égyptiens  :  leurs  tribunaux  étaient  silencieux,  leur  procé- 
dure sommaire.  Les  parties  comparaissaient ,  exposaient 
leurs  raisons,  souvent  par  écrit;  A  défaut  de  leurs  propres 
lumières,  elles  pouvaient  s'aider  de  celles  des  sages;  les 
témoins  étaient  entendus  :  le  tribunal  délibérait  et  pro* 
nonçaiU  Telle  est  encore  aujourd'hui  la  Justice  asiatique. 
L'Ai^topage,  ce  tribunal  muet  d'Athènes,  était  une  impor- 
tation égyptienne. 

L* éloquence  à  Athènes,  —  Mais,  dans  tonte  ht  Grèce  et 
dans  Athènes,  surtout  en  dehors  de  l'Aréopage,  la  parole 
fut  libre,  et,  de  bonne  heure,  il  y  eut  une  élocpience  judi- 
ciaire. Dans  Homère,  la  description  du  boucher  d^Achiile 
présente  les  scènes  oratoires  destribnnauxet  des  places  pu- 
bliques. Chez  le  peuple  d'Athènes,  plaideur  et  discoureur 
entre  tous,  l'étoquenoe  judiciaire  dc^t  se  développer.  Les 
Institutions  démocratiques  y  aidèrent  puissamment  ;  les 
discussions  politiques  deventrient  aisément  des  querelles 
personnelles;  les  adversaires  prenaient  le  rôle  d'accusi^ 
teor  et  d'accoBé4  et  la  lutte  commencée  devant  les  citoyens 
se  terminait  devant  lea  juges.  Certaines  dispositions  des 
lois  étalent  de  véritables  appels  à  la  dénonciation.  La 
passion  de  plaider  et  de  juger  devint  un  trait  distinctif  du 
^caractère  national.  IVun  autre  côté,  l'éloquence,  étudiée 
par  des  hommes  habiles,  devenait  un  art  :  k  Athènes, 
Selon  fonda  une  école  dWoquence;  après  lui,  Mn^sl* 
phile,  Sophile,  Antipbon,  développèrent  la  théorie  o^« 


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1128 


JUD 


tolrei  lear  travail,  repris  par  les  rhéteurs  siciliens  (Gorax, 
Tisias,  etc.),  et  par  les  sophistes  de  la  première  époque 
(  Protagoras,  Hippias,  etc.},  fut  achevé  plus  tard  par  tes 
maîtres  du  temps  de  Philippe  et  d*Aleiandre  (Isée,  Iso- 
erate,  Aristote,  etc.).  L'éloquence  put  donc  se  déployer 
dans  toute  sa  liberté,  avec  toutes  ses  ressources,  devant 
les  tribunaux  d*Athènes.  Là ,  d'ailleurs,  aussi  bien  que 
sur  la  place  publique,  elle  n'était  le  priviléf^  de  per- 
sonne :  chacun  pouvait  être  orateur,  ou  du  moins  avait 
droit  de  l'être.  Au  temps  de  Démosthène,  l'éloquence 
polltfque  avait  reçu  une  sorte  d'organisation;  il  y  avait 
des  orateurs  do  peuple,  investis  d'une  espèce  de  ministère 
public  :  il  n'en  était  pas  de  même  dans  les  tribunaux  ; 
on  pouvait  parler  soi-môme,  ou  se  faire  représenter  par 
un  autre  ;  on  lisait  son  discours,  ou  on  le  débitait;  on  le 
composait  soi-même,  ou  on  le  donnait  à  composer  à 
quelque  habile.  Ces  habiles  étaient  le  plus  souvent  des 
professeurs  d'éloquence,  sophistes  ou  rhéteurs,  des  ora- 
teurs publics ,  ou  tout  simplement  des  hommes  versés 
dans  les  lois  et  les  affaires,  capables  de  parler  ou  d'écrire. 
GBtte  liberté  pourtant  eut  quelques  limites  :  il  y  avait 
des  lois  contre  les  calomniateurs;  une  peine  atteignait 
tout  accusateur  qui  ne  gagnait  pas  h  sa  cause  un  certain 
nombre  de  suiTrages.  On  réglementa  aussi  le  geste  et 
l'action  des  orateurs;  on  détermina  la  durée  des  plaidoi- 
ries. Enfin,  on  interdît  l'accès  des  tribunaux  aux  gens  lié- 
tris  par  les  lois  et  par  l'opinion  publicpe. 

Dans  l'histoire  de  l'éloquence  Judiciaire  ches  les  Grecs, 
Il  ne  fout  point  parler  des  Sophistes  :  VÊloge  d^Hélène  et 
VApoloffie  de  Palamède,  fussent-ils  même  authentiques, 
n'apjMurtiennent  pas  au  genre  Judiciaire,  non  plus  que  le 
Plaidoyer  dt  Ulysse.  Mais  les  hommes  politiques  ont  laissé 
des  souvenirs  de  leur  éloquence  :  Péridès  eut  à  défendre 
Damon,  Anaxagore,  Aspasie;  Critias  fit  condamner  Thé- 
ramène.  Géon ,  Hyperbolus,  Gléopbon,  Aristophon,  sont 
assez  connus  par  le  r61e  qu'ils  Jouèrent  à  la  tête  de  la  fac- 
tion démagogique;  pour  montrer  quel  usage  ils  faisaient 
de  l'éloquence  Judiciaire,  il  suffit  de  rappeler  qu'Aristo- 

Shon  fut  accusé  75  fois  devant  le  peuple,  et  qu'il  se  ren- 
it  à  son  tour  l'accusateur  d'Iphicrate,  de  Timothée  et  de 
tous  les  meilleurs  citoyens.  On  a  d'Andocide  un  discours 
contre  Alcibiade,  une  apologie  pour  lui-même  à  son  re- 
tour de  Texil ,  et  un  discours  sur  les  mystères,  en  réponse 
à  Lysiaa  qui  s'était  porté  son  accusateur.  On  a  aussi  le 
discours  ae  Lysias,  et  six  plaid<^ers  du  même  orateur, 
reconnus  pour  authentiques;  beaucoup  d'antres  lui  sont 
attribués.  Cette  première  période  est  celle  des  Attiques 
purs,  remarquables  par  la  simplicité  et  l'élégance. 

Un  autre  âge  commence  avec  Antiphon,  flls  de  So- 
phile,  le  premier  qui  se  fit  payer  par  ses  clients  et  qui 
vendit  des  discours  :  on  peut  le  considérer  par  là  comme 
ayant  Jusqu'à  un  certain  point  créé  la  profession  d'avo- 
cat. Après  lui ,  vint  Isocrate.  Ne  pouvant  vaincre  la  timi- 
dité <|ui  l'écartait  de  la  place  publique  et  des  tribunaux, 
il  écrivit,  pour  d'autres,  des  plaidoyers  dont  quelques- 
uns  nous  sont  parvenus.  Par  ses  leçons  comme  par  ses 
écrits,  il  exerça  une  grande  influence,  perfectionna  la 
composition  et  le  style,  et  introduisit  dans  les  discours 
politiques  et  Judiciaires,  en  même  temps  qu'une  harmonie 
plus  raffinée  et  plus  savante,  la  grâce  des  détails  et  l'usage 
des  idées  générales  et  des  développements  moraux.  Isa, 
Hypéride,  Céphisodote,  Léodamas,  Démosthène,  et  bien 
d'autres,  étudièrent  sous  sa  direction.  —  Isée  se  distin- 
gua au  barreau  et  dans  l'école;  onze  plaidoyers  nous 
restent  de  lui.  Denys  d'Halicamasse  trouvait  en  Ly^as 
plus  de  variété,  de  délicatesse  et  de  grâce,  en  Isée  plus 
de  force  et  de  gravité.  —  Signalons  en  passant  F^Dly- 
crate,  qui  composa,  ditr-on,  pour  Anytus  le  discours  de 
dénonciation  contre  Socrate.  —  Lycnrgue  avait  écrit 
quinze  discours,  tous  d'accusation  :  on  a  encore  celui 
contre  Léocrate,  et  on  y  retrouve  la  simplicité  un  peu 
rude,  la  véhémence  et  rhonnêteté  qui  distinguaient  son 
caractère  et  son  éloquence.  —  Eubule,  ennemi  de  Dé- 
mosthène, s'eflbrça  de  l'impliouer  dans  une  affaire  capi- 
tale avec  Arista^^ue,  et  défenoit  contre  lui  d'abord  Hi- 
dias,  puis  Eschine  dans  raifaire  de  l'ambassade.  Le  seul 
avantage  qu'il  eût  procuré  à  la  ville,  disait^on,  c'est 
qu'on  pouvait  désormais  s'avouer  publiquement  mauvais 
citoyen.  —  Pythéas,  après  la  mort  de  Lycurgue,  attaqua 
ses  enfants  en  justice,  les  fit  condamner  à  une  amende 
et  mettre  en  prison  ;  il  se  constitua  un  des  adversaires 
de  Démosthène  dans  l'aflkire  d'Harpalus.  —  Hypéride . 
composait  des  plaidoyers  à  l'usage  d'autrui  ;  c'est  lui  qui  ' 
défendit  Phryné  accusée  d'impiété,  et  lui  que  les  Athé- 
niens chargèrent  de  poursuivre  Démosthène  accusé  de 
s'être  laissé  corrompre  par  Uarpaius.  Les  Anciens  admet- 


taient comme  authentiques  52  discours  parmi  77  qu'on 
lui  attribuait.  Nous  en  avons  quelques  fragments;  Tua 
semhle  appartenir  à  un  pliddoyer  en  faveur  des  enfanta 
de  Lycurgue. — Dinarque  s'ennchit  à  vendre  des  discours 
à  ceux  qui  en  avaient  besoin.  On  lui  en  attribuait  plus 
de  160;  trois  sont  restés  :  contre  Démosthène,  contre 
Aristogiton,  contre  Philoclès  ;  un  4*,  contre  Théocrino,  a 
M  aussi  attribué  à  Démosthène. — Eschine,  illustre  sur- 
tout par  sa  lutte  contre  Démosthène,  était  aussi  un  des 
habiles  orateurs  de  son  temps.  Nous  avons  de  lui  trois 
discours,  que  les  Anciens  appelaient  Us  trois  Grâces  :  S9 
défense  contre  Démosthène  au  sujet  de  l'ambassade;  soo 
plaidoyer  contre  Timarque;  son  discours  contre  Ctcsi- 
phon.  —  Le»  discours  Judiciaires  qui  nous  reatent  de 
Démosthène  sont  assez  nombreux  :  à  18  ans  il  plaida 
contre  ses  tuteurs  (contre  Aphobus,  trois  discours; 
contre  Onétor,  deux);  plus  tanl,  il  composa  pour  Dio- 
dore  un  discours  d'accusation  contre  Androtion  ;  viennent 
ensuite  l'accusation  contre  Aristocrates,  le  procès  contre 
Eschine  au  sujet  de  l'ambassade,  une  série  de  plaidoyers 
civils  ou  politiques  contre  Néœra,  Stéphanus,  Enbn- 
lide,  etc.  Victorieux  dans  le  procès  qu'Eschine  loi  liH 
tenta,  à  lui  et  à  Ctésiphon,  Démosthène  fut  molai 
heureux  quand  on  l'accusa  d'avoir  reçu  l'or  d'Harpaluei 
nous  n'avons  plus  ni  le  discours  qu'il  avait  prononel 
pour  sa  défense,  ni  beaucoup  d'autres,  dont  on  voit 
la  liste  générale  dans  la  Bibliothèque  de  Ftabridnet 
mais  il  en  reste  assez  pour  nous  donner  une  idée  com- 
plète de  son  éloquence  Judiciaire,  civile  et  politique.  Ls 
Discours  sur  la  Couronne  est  le  chef-d'œuvre  de  l'élo- 
quence humaine  :  inspirations  généreuses,  récits  entraî- 
nants, mouvements  passionnés,  diatribes  véhémentes, 
sentiments  religieux,  tactiaue  liabile,  toutes  les  forces, 
toutes  les  ressources  du  génie  et  de  l'art  sont  concentrées 
dans  cette  protestation  suprême  de  la  Grèce  vaincue  par 
la  fortune  macédonienne;  c'est  le  cri  d'un  peuple  qui 
tombe  en  attestant  son  droit.  Les  autres  plaidoyers  n'of- 
firent  point  ce  grand  spectacle  ;  mais  ils  portent  presque 
tous  quelque  empreinte  du  génie  de  leur  auteur,  et  ils 
sont  en  outre,  pour  la  connaissance  des  mœurs,  des  lois 
et  des  institutions  de  la  Grèce  et  d'Athènes,  comme  poar 
l'histoire  politique  de  ces  temps,  des  sources  abondantes 
et  précieuses. 

Après  oue  l'influence  ou  la  domination  macédonienne 
se  fut  établie  sur  toute  la  Grèce,  Athènes  continua  d'être 
la  ville  des  beaux  discours,  des  disputes  et  des  plaidcK 
ries.  Mais  il  semble  que  Féloquence  Judiciaire  tir&t  tout 
son  éclat  des  inspirations  et  des  passions  politiques  :  de- 
puis Démétrius  de  Phalère  Jua^'à  la  fin  de  l'Empire  ro- 
main, elle  n'a  pas  produit,  ou  il  ne  nous  est  pas  resté  un 
seul  monument.  Beaucoup  de  noms  ont  survécu  ;  beau- 
coup d'orateurs  ont  eu  de  leur  temps  une  grande  renom- 
mée; la  plupart  étaient  des  rhéteurs  qui  brillaient  à  la 
fois  dans  l'école  et  au  barreau.  Ce  qui  reste  de  leurs 
déclamations  ne  fait  guère  regretter  la  perte  de  leurs  plai- 
doyers. Nicétas  de  Smyme,  Polémon  de  Laodicée,  Théo- 
dote,  Antiochus,  Lucien  (de  Samosate),  Damien,  Cyrî- 
nus,  plaidèrent  avec  éclat  :  mais  c'était  le  temps  des 
déclamateurs,  leur  mauvais  go&t  envahissait  tout,  ils  ne 
se  contentèrent  pas  de  gâter  l'éloquence  Judiciaire,  ils  en 
créèrent  une  nouvelle  espèce.  On  reprit  les  discours  pro- 
noncés par  les  anciens  ou  les  questions  traitées  par  eux; 
on  refaisait  ainsi  le  discours  d'Eschine  ou  celui  de  Dé- 
mosthène, on  défendait  Léocrate  contre  Lycurgue,  Aris- 
togiton contre  Dinarque.  Dans  les  écoles,  on  plaidait  des 
causes  imaginaires,  on  s'ingéniidt,  sur  des  données  ro- 
manesques, à  bâtir  des  arpimentations  surprenantes  ;  et 
l'éloquence  qu'on  déployait  dans  ces  exercices  répondait 
à  la  puérilitâ  de  la  matière.  On  ne  trouve  donc  point 
chez  les  Grecs  de  Tépoque  romaine  les  traces  de  îélo- 
quence  Judiciaire,  et  le  meilleur  titre  des  dédamateun 
de  divers  genres  dont  la  Grèce  pullula  dès  le  commence- 
ment de  sa  décadence,  c'est  qu'us  contribuèrent  à  former 
les  premiers  orateurs  de  Rome. 

Véloqu&nce  à  Borne,  —  Les  Romains,  ce  peuple  orateur 
et  légiste,  étaient  dignes  d'être  les  élèves  des  Grecs  :  ils 
n'attendirent  même  pas  leurs  leçons,  et,  avant  que  Car- 
néade,  Gritolatls  et  Diogène  eussent  fait  admirer  dans 
Rome  les  merveilles  de  leur  parole,  on  y  comptait  de 
nombreuses  générations  d'orateurs.  L'éloquence  Judi- 
ciaire néanmmns  ne  trouva  pas  d'abord,  dans  les  instito- 
tions  de  l'État,  des  conditions  aussi  favorables  que  Télo- 
quence  politique.  Les  patriciens  seuls  connaissaieat  les 
lois  et  la  procédure;  tout  était  en  formules,  et  il  y  avait 

S  en  de  place  à  la  faconde.  L'établissement  de  la  répu- 
lique,  le  droit  d'appel  an  peuple,  les  réfvélations  du 


jnn 


1129 


JUO 


greffier  Ftevins,  qui  divulgua  les  fonnules.  Jusqu'alors 
secrètes^  des  jurisconsultes,  rusage  des  consultations  pu- 
bliques, Introduit  par  Tlbérius  Coruncanlus,  le  premier 
plébéien  oui  fat  g;nuid  pontife,  l'influence  croissante  îles 
danes  plebéiennea,  les  luttes  topJours  plus  vives  des  in- 
térêts, oes  idées  et  des  partis,  et  ragrandissement  même 
de  rempire,  développant  rapidement  Téloquence,  et 
BDltiplierent  iea  causes  et  les  orateurs.  Corn.  Sdpion , 
Appius  Cbnidiiia  Cecus,  Q.  Fabius  Bfaximus,  Cornélius 
Cétbégus,  s'étaient  fait  une  réputation  d'éloquence.  Après 
eoz  était  venu  Caton,  dont  la  parole  vive,  abrupte,  éner- 

S 'que  et  pittoresque,  se  forma  dans  les  luttes  journalières 
i  la  tribune,  et  dans  90  procès  où  il  avait  figuré  comme 
aocosé  ou  comme  accusateur.  Les  Grecs  arrivèrent  alors, 
et  l'éloquence  prît  un  essor  nouveau.  Pour  citer  tous  les 
ofsteurs  de  la  République,  il  faudrait  nommer  pres(^ue 
tous  ceux  qui  Jouèrent  un  grand  rôle,  depuis  le  premier 
Africain  Jusqu'à  César.  La  défense  des  clients  devant  les 
tribnnanx  était  la  charge  la  plus  lourde,  la  plus  hono- 
laUe aussi,  du  patronat;  elle  aonnaitle  renom,  la  popu- 
larité et  iea  honneurs.  Lei  esprits  hardis  ou  agressifs, 
pour  mieux  se  signaler  d'abord,  s'en  prenaient  h  quelques 
grands  personnages,  et  se  faisaient  pour  ainsi  dire  accu- 
aateors  publics.  Les  magistrats,  les  gouverneurs  de  pro- 
finœs,  les  chets  d'armées ,  les  candidats  aux  grandes 
âections  populaires,  passaient  tour  à  tour  devant  les  tri- 
buniox,  et  11  se  trouvait  toi^ours  quelqu'un  pour  leur 
demander  compte  légalement  de  leurs  bripes,  de  leurs 
Entes,  de  leurs  péculats  et  de  leurs  prévarications.  Dans 
(M  grands  proœs  où  les  matières  criminelles,  civiles, 
administratiTes  et  politiques  étaient  le  plus  souvent  mè- 
Ito,  l'éloquence  avait  large  carrière;  la  puissance  des 
parties,  la  force  des  cabales,  l'importance  des  questions 
et  des  intérêts  débattus,  surexcitaient  les  orateurs,  avi- 
faient  leurs  passions  et  enflammaient  leur  parole.  Ainsi, 
saos  parler  des  Gracques,  s'illustrèrent  Galba,  Catulus, 
Snlpitius,  Grassus,  Antonius,  Cotta,  et  Hortensius  enfin , 
le  prédécesseur  immédiat,  le  contemporain  et  le  rival  de 
Qcéroo.  Gicéron  avait  entendu  les  uns,  et  lisait  les  ou- 
nagn  des  autres  :  nous  n'avons  plus  que  leur  souvenir, 
et  nous  ne  pouvons  les  Juger  que  par  les  brillants  éloges 
qi»  Gicéron  leur  accorde.  L'œuvre  Judiciaire  de  Gicéron 
loi-même  n'a  pas  tout  entière  survécu;  le  temps  en  a 
épvgné  de  grandes  parties,  et,  dans  la  collection  de  ses 
plaidoyers,  on  peut  étudier  l'art  admirable  du  plus  parftdt 
des  orateurs  qui  aient  Jamais  plaidé  devant  un  tribunal. 
Si  on  eicepte,  en  effet,  le  discours  de  Démosthène  sur  la 
Couronne,  il  n'y  a  rien  dans  les  fastes  judiciaires  que  l'on 
pmne  comparer  aux  plaidoyers  de  Gicéron.  Après  avoir 
soiTi  les  tribunaux  et  le  Forum,  après  avoir  io<*n  les  le- 
(ODs  de  maîtres  latins,  puis  de  maîtres  grecs,  il  >»vait  dé- 
buté par  la  défense  de  Quinctius  et  celle  de  Roscius 
d'Amérie.  Il  voyagea  alors,  entendit  les  professeurs  et  les 
snteurs  les  plus  Illustres  de  la  Grèce  et  de  l'Asie,  et  ré- 
parât au  baireau  de  Rome  pour  défendre  Roscius  le  co- 
médien. Rappelons  les  plaidoy^ers  qu'il  prononça  contre 
Verres,  pour  Cluentius,  Rabirius,  Moréna,  Bfilon,  Har- 
oellQe,  Ugarius,  et  tant  d'autres  où  l'on  retrouve  l'abon- 
dance, la  grftce,  l'habileté  de  discussion,  la  persuasion 
tantôt  pathétique  et  tantôt  captieuse,  les  mille  res- 
sources du  génie  le  plus  souple,  de  llmagination  û  plus 
féconde,  de  la  langue  la  plus  opulente. 

Après  Gicéron,  l'éloquence  déchut  à  Rome.  Le  peuple 
ne  aisposait  plus  des  charges  publiques;  la  popularité 
des  orateurs  ne  leur  valait  plus  les  honneurs;  la  triboine 
étant  supprimée,  l'éloquence  Judiciaire  ne  pouvait  plus  se 
retremper  dans  l'éloquence  politique;  les  avocats  n'étaient 
plus  en  même  temps  des  hommes  d'État  Réduit  à  lui- 
même,  le  barreau  fut  amoindri.  D'un  autre  côté,  l'art,  le 
box  art  des  déclamateurs,  étendait  sur  Rome  sa  pemi- 
deoae  influence.  Dès  le  commencement  de  l'Empire,  les 
Séaèques  apportèrent  le  goût  espagnol,  l'amour  ae  l'em- 
phase et  le  culte  de  l'antithèse.  Les  traditions  et  les 
instincts  du  génie  romain  ne  résistèrent  pas  longtemps. 
Us  monuments  de  cette  éloquence  nouvelle  ont  pari,  et 
nous  ne  pouvons  Juger  du  barreau  impérial  que  par  les 
témoignages  qu'en  ont  rendus  les  auteurs  contemporains 
et  d'après  les  caractères  généraux  de  la  littérature.  Plu- 
iieurs  y  gagnaient  encore  une  brillante  renommée;  et 
quelques-uns  sans  doute  la  méritèrent  en  déployant  des 
qualités  brillantes  en  même  temps  qu'Us  échappaient  en 
partie  aux  défauts  de  leur  temps.  Les  premiers  qui  vin- 
rent après  Gicéron,  Messala,  PoUion,  Gassius  Severus, 
Montanus,  avaient  évidemment  retenu  quelque  chose  du 
grand  siècle.  Plus  tard,  Domitius  Afer,  Ëprius  Marcellus 
et  Matemns  sous  Néron  et  Domitien  Tacite  et  Pline  le 


Jeune  sous  Tnjan,  Régulus  même  et  quelques  autres 
core,  durent  montrer  au  barreau  un  incontestable  talent 
ou  quelque  chose  au  moins  de  leur  génie.  D'ailleurs,  il  v 
eut  toujours  deux  écoles  :  si  l'une  préconisait  l'espnt 
nouveau,  l'autre  rappelait  l'art  antique,  et  cette  résis- 
tance des  anciens  ralentissait  du  moins  l'entraînement 
des  tnodemes.  L'éloauence  Judiciaire  et  ses  traces  s'ef« 
facent  à  mesure  que  la  sodétié  grecque  et  romaine  avance 
vers  sa  fin.  Il  nous  est  parvenu  quelques  œuvres  des  so- 
phistes et  des  rhéteurs  latins  et  grecs  des  derniers  siècles; 
plusieurs  d'entre  eux  ont  plaidé  :  pourquoi  ne  demeure- 
t^il  rien  de  leurs  discours  Judiciaires?  Ne  les  écrivaitron 
plus?  Ou  avaient-ils  si  peu  de  mérite,  qu'on  n'ait  pas  cm 
devoir  les  conserver,  quand  on  admirait,  quand  on  trans- 
mettait d'ailleurs  des  ouvrages  souvent  si  médiocres? 

Ce  que  le  barreau  avait  perdu  en  éloquence,  il  l'avait 
gagné  en  organisation.  Dès  le  temps  de  Domitien,  les 
avocate  eurent  un  nom  et  formèrent  une  classe  :  on  les  ap- 
pelait caundici,  comme  qui  dirait  plaideurs  de  causes. 
Autour  d'eux  se  groupaient  d'autres  gens  de  métier,  pr^ 
nant  part  aux  plaids  :  les  iegtUeii  s'appliquaient  à  con- 
naître tons  les  textes  des  innombrables  lois  romaines;  les 
formtUarii  et  les  cognitores  étudiaient  la  chicane  et  se 
chargeaient  de  veiller  h  la  procédure;  l'avocat,  quand  il 
parlait,  avait  auprès  de  lui  le  monitor,  avocat  subsidiaire 
qui  improvisait  les  répliques,  et  derrim  lui  un  autre  ffio- 
nttor  prêt  à  venhr  en  aide  à  son  imagination  et  à  sa  mé- 
moire; un  fnorator,  enfin,  ftutre  auxiliaire  qui  se  chargeait 
de  tenir  le  tribunal  et  la  partie  en  haleine,  si  l'avocat  avait 
besoin  de  se  reposer.  Au  temps  d'Ulpien,  les  avocats  consti- 
tuaient une  corporation  honorée.  Valentinien  et  Valons 
établirent  que  les  plus  hauts  dignitaires  pourraient  être 
avocats  sans  déroger  :  aux  avocats  émérites  Anastase  ac- 
corda le  titre  de  clarissimes.  Les  édits  impâriaux  ne 
leur  rendirent  point  l'antique  éloquence.  On  des  noms 
sous  lesquels  on  désigna  le  plus  souvent  les  avocats  dans 
les  premiers  siècles  du  moyen  Age  est  celui  de  clamo' 
tor$s  :  les  Barbares  n'y  mettaient  point  sans  doute  une 
intention  maligne;  mais  on  peut  croire  qu'un  pareil  nom 
avait  sa  raison  d'être.  V,  Grelletp-Dumazeau,  Le  Barreau 
romain,  1858,  in-8*. 

L'éloquence  en  Gaule  et  en  France,  —  La  Gaule  sous 
la  domination  romaine  n'avait  point  manqué  d'avocats, 
ni  ses  avocats  manqué  d'éloquence  ;  les  écoles  d'Autun, 
de  I^on,  d'Arles,  de  Marseille,  de  Bordeaux,  Jusque  dans 
les  cienuers  temps,  étaient  fameuses  :  on  y  venait  de 
l'étran^,  même  de  l'Italie.  Sous  les  Barbares,  tout,  plus 
ou  moms  rapidement,  disparut,  et  on  ne  doit  plus  cher- 
cher l'éloquence  Judiciaire  en  France  qu'à  l'origine  de  la 
magistrature  elle-même ,  sous  Philippe  le  ^el.  H  y  eut 
foule  bientôt  pour  entendre  Raoul  de  Presie,  Pierre  de 
Cugnières,  Jean  et  Guillaume  de  Dormans,  Jean  Desma- 
rets.  On  avait  perdu  depuis  longtemps  l'habitude  de  dira 
et  d'entendre  de  beaux  et  surtout  de  longs  discours  ;  pour 
la  retrouver,  il  fallut  un  peu  de  temps  aux  nouveaux 
orateurs,  plus  encore  au  public.  «  Quand  les  avocats 
content  leurs  plaids,  dit  Beaumanoir,  beau  métier  est 
qu'ils  comprennent  leur  fait  en  le  moins  de  paroles  qu'ils 
pourront.  »  liais  une  fols  que  l'éloquence  eut  pris  son 
cours,  elle  ne  s'arrêta  plus  :  dès  le  xiv«  siècle  on  essaya 
de  la  modérer  par  des  règlements,  par  des  amenda  ;  les 
lois  n'v  réussirent  pas  mieux  que  les  conseils,  et,  pen- 
dant bien  longtemps,  la  surabondance  demeura  le  défaut 
le  plus  commun  des  orateurs  du  barreau.  Cependant, 
au  XV*  siècle,  l'abbé  de  S^Fiacre  et  surtout  Gerson  trou- 
vèrent un  langage  et  des  mouvements  oratoires.  Philippe 
de  Morvilliers,  Halle,  Bréban,  Nicole  Bataille,  de  La  Vao- 
querie,  eurent  aussi  quelque  talent.  Le  barreau  aussi  pour- 
rait accuser  peut-être  la  Renaissance  de  l'avoir  troublé 
dans  les  progrès  naturels  de  son  éloquence  :  elle  lui  ap- 
porta, en  eflTet,  Térudition,  qui  devint,  avec  la  prolixité, 
le  second  fléau  de  l'art.  Celui  qui  y  échappa  le  plus  sou- 
vent et  le  plus  heureusement  fut  Etienne  Pasquier,  dans 
quelques-uns  de  ses  plaidoyers,  et  dans  son  fameux  dis- 
cours pour  l'Université  contre  les  Jésuites,  où  son  style 
est  net,  ferme,  rapide,  avec  une  certaine  force  et  beau- 
coup de  passion.  Diès  ce  temps  aussi,  dans  quelques  pages 
de  Julien  Péléus,  se  manifestait  le  tour  agréable  et  pi- 
quant de  l'esprit  français. 

Au  'commencement  du  xvii*  siècle,  Expllly,  Servfn  et 
Gautier  étaient  les  coryphées  de  l'éloquence  Judiciaire; 
le  premier  et  le  troisième  ont  quelques  belles  pages.  On 
s'attendrait  h  trouver  dans  leurs  successeurs  une  élo- 

2uence  plus  ou  moins  comparable  h  celle  que  Bossuet, 
ourdalone  et  Fénelon  faisaient  briller  dans  les  chaires 
chrétiennes  :  il  n'en  est  pas  ainsi,  et  les  hommes  du  bar- 


JUD 


1130 


JU6 


tmxk  wmbleQt  s'être  dérobés  longtemps  k  css  heureuses 
influences  qui  sgisssîent  alors  sf  puissamment  sur  tous 
les  travaux  de  Fesprit.  Le  plus  souvent,  la  plupart  d'entre 
eux  gsrdèrent,  en  plein  siècle  de  Louis  XiV,  le  fatras,  le 
désordre,  Térudltion  et  Temphase  de  l'&ge  précédent.  Ce- 

Sendant«  on  rencontre,  dans  les  discours  de  Rouillard  et 
'Orner  Talon,  des  pages  d*un  goût  pur  et  d'une  noble 
éloquence;  Charles  de  Févret  a  de  beaux  plaidoyers  ;  An- 
toine Le  Maistre,  qui  plaida  trop  peu  longtemps,  se  mon- 
trait, par  les  fortes  qualités  de  sa  parole  correàe,  élégante 
et  chaleureuse,  digne  d'appartenir  à  cette  maison  de 
Port-Royal  où  il  se  retira  en  sortant  du  Palais.  Patru, 
conune  Le  Maistre,  mérite  sa  renommée  :  on  trouve  dans 
ses  plaidoyers,  notaomient  dans  ceux  pour  les  religieux 
delà  S'*-Trinité,  pour  un  gradué  de  l'Oniversité,  pour 
maître  Galichon,  etc.,  un  style  pur  et  soutenu,  de  belles 
peintures,  de  nobles  pensées,  et  quelquefois  sa  plai- 
doirie tout  entière  emprunte  h  la  vivacité  de  ses  senti- 
ments honnêtes  une  véritable  éloquence.  Le  plaidoyer  de 
Fourcroy  pour  le  sieur  de  S^-Aignan  est  plein  de  choses 
bien  pensées,  bien  dites,  ingénieuses  ou  spirituelles. 
Érard  a  quelquefois  des  mouvements  d'une  éloquence 
saisissante  et  des  développements  du  plus  beau  langage. 
Gillet  se  recommande  par  l'élégante  pureté  de  son  style. 
Mais  les  trois  discours  supplicatifs  de  Pellisson,  adressés 
à  Louis  XIV  en  faveur  de  Fouquet,  du  fond  de  la  Bastille, 
où  l'avocat  lui-même  était  retenu,  sont  le  principal  mo- 
nument que  nous  ait  laissé  l'éloquence  judiciaire  du 
xvn*  siècle.  Ces  discours  furent  à  la  fois  une  belle  action 
et  une  belle  œuvre.  «  Si  les  amis  de  la  franche  et  noble 
interprétation  des  sentiments,  dit  M.  Berryer.  bl&ment 
l'air  agenouillé  de  ces  admirables  discours,  qu'ils  se  rap- 
pellent dans  quel  état  désespéré  ils  furent  composés,  et  à 
quel  orgueilleux  monarque  ils  s'adressaient.  »  Nous  ajou- 
terons :  qu'ils  considèrent  encore  que  Pellisson  parlait 
|>our  an  autre;  c'est  là  sans  doute  sa  meilleure  justifica- 
tion. Le  barreau  du  xvii*  siècle  n'est  pas  à  dédaigner 
antant  que  beaucoup  le  croient  peut-être.  Deux  tnits 
communs  à  tous  les  avocats  les  recommandent  et  les  ca- 
ractérisent :  tous  écrivent  avec  soin,  et,  là  où  ils  sont 
bons.  Us  sont  excellents;  tous  sont  honnêtes  et  chrétiens, 
et  ils  ont  dû  à  leur  vertu  et  à  leur  foi  une  partie  de  leur 
mérite,  et  leurs  plus  belles  inspirations. 

Daguesseau  et  Cochin,  deux  noms  fort  inégaux  d'ail- 
leurs, forment  la  transition  du  xvii*  au  xviii*  siècle. 
Daguesseau  est,  avec  L'Hôpital,  le  plus  grand  honneur 
de  la  magistrature  fhmçaise.  Écrivain,  poète,  juriscon- 
sulte, administrateur  et  législateur,  honnête  homme, 
chrétien  et  philosophe,  grand  par  son  caractère  comme 
par  son  esprit,  11  ne  fit  pas  seulement  des  plaidoyers  où 
la  force  de  la  pensée  et  l'éclat  de  l'imagination  s'unissent 
à  l'élégance  du  langage,  des  mercuriales  où  l'éloquence 
de  la  parole  est  égale  à  la  noblesse  des  pensées  :  u  dota 
la  France  d'une  foule  de  Ipis,  d'édits  et  de  règlements,  qui 
furent  pour  le  pays  entier  ou  pour  diverses  classes  de 
citoyens  autant  de  bienfaits.  Cochin  fut  le  plus  brillant 
des  avocats  de  son  temps;  ses  improvisations  étaient,  dit- 
on,  pleines  d'éclat  et  entraînantes;  dans  ses  discours 
écrits  on  ne  retrouve  point  les  grandes  qualités  oratoires, 
mais  le  style  en  est  soigné  et  plein  de  goût  Par  son  ta- 
lent comme  par  son  caractère,  il  se  rattache  à  la  tradition 
littéraire  et  chrétienne  du  siècle  passé;  il  ne  participe  ni 
au  mauvais  goût,  ni  aux  travers  pnilosophiques  de  la  plu- 
part de  ses  contemporains.  Mannory  est  un  plaisant  plutôt 
encore  qu'un  avocat;  Loyseau  de  Mauléon  est  un  senti- 
mental, et  fait  du  plaidoyer  un  roman;  Servan  est  un 
déclamateur.  Dupaty,  dans  un  Mémoire  justificatif  pour 
trois  hommes  condamnés  à  mort,  a  des  morceaux  vigou- 
reux et  pathétiques.  Linguet,  esprit  souple,  étendu,  fé- 
.cond,  actif,  mais  passionné,  querelleur  et  méchant,  s'était 
distingué  dans  le  barreau  avant  d'en  être  chassé;  son 
Mémoure  pour  le  comte  de  Horangiès  est  excellent.  Ger- 
bier  n'a  laissé  aucune  œuvre  saillante  :  pourtant,  du 
Parlement  de  Bretagne,  où  il  plaidait,  sa  renommée 
s'étendit  par  toute  la  France.  Citons  encore  Monclar,  Élie 
de  Beaumont,  Target,  Tronchet,  Bergasse.  Les  chefs- 
d'oBuvre  de  l'éloquence  Judiciaire  à  la  fin  du  xviu*  siècle 
sont  des  Mémoires  :  ceux  de  La  Chalotais ,  de  Lally,  et 
de  Beaumarchais.  Leurs  mérites  sont  singulièrement 
divers  t  ce  qu'on  trouve  dans  le  Comptt^endu  sur  les 
Constitutions  des  Jésuites  et  dans  les  Mémoires  justifia 
eatifs  écrits  des  prisofij  du  mont  S^^Michd,  c'est  une 
parole  ferme,  nerveuse,  simple,  un  peu  âpre;  duis  les 
Mémoires  de  Lall  v  pour  la  réhabilitation  de  son  père,  c'est 
une  éloquence  châtiée,  élégante  et  noble,  quelque  peu 
icadémique;  quant  à  ceux  de  Beaumarchais,  l'auteur  s'y 


est  ndstout  entier,  et  c'est  assurément  son  chef-d'cravre, 
plus  dramatique  mie  ses  drames,  plus  comique  que  sei 
comédies  ;  il  s'y  élève  par  accident  Jusqu'à  l'éloquence 
philosophique,  et  presque  à  l'éloquence  relideuse. 

Beaumarchais  et  Linguet  nous  amènent  à  laRévola- 
jtion.  Mentionnons  le  procès  de  M"**  de  Marignane,  où 
Portails  et  MirabcAu  tinrent  la  parole;  citons  les  noms 
vénérés  de  de  Sèze  et  de  Malesherbes,  de  Thouret,  Meu- 
nier, Chapelier,  Bamave,  Lanjuinais,  Vergniaud ,  Dela- 
malle,  et  Tronçon  du  Coudbray.  Nousarrivons  au  xix*  siëclSb 
Beaucoup  de  noms  y  brillent,  bientôt  obscurcis  :  les  avo- 
cats sont  orateurs  quelquefois,  presque  jamais  écrivains; 
c'est  là  le  mal  de  leur  gloire,  ou  le  défaut  de  leur  talent 
Sous  la  Restauration,  nous  trouvons  Bonnet,  Billecoq, 
Guichard,  Bellart,  Marchangy,  Berville;  et,  après  eux, 
nos  contemporains,  MM.  Dupin,  Marie,  Berryer,  Paillet 
Teste,  Delangle,  Chaix-d*li)st-Ange,  Dufaure,  Odilos 
Barrot,  Crémieux,  Jules  Favre,  Léon  Dnval,  Beth* 
mont,  Liouville,  etc.,  pléiade  nombreuse  et  brillante. 
V,  Falconnet,  Le  Barreau  français  moderne,  ou  Choix 
de  plaidoyers  des  plus  célèbres  avocats,  1806,  2  vol. 
in-4°;  Gair  et  Clapier,  Barreau  français,  ou  Col- 
lection de  chefsSœuvre  de  Véloquence  judiciaire  m 
France,  1821, 16  vol.  in-S®;  Annales  du  Barreau  franr 
çais,;,  depuis  Le  Maistre  et  Patru  jusqu'à  nos  jours, 
1833-47, 20  vol.  in-8°;  Berryer,  Leçofts  et  Modèles  rf^o- 
quence,  du  xiv*  au  xix*  siècle,  1838,  in-4<>  ;  BoinviUiers, 
Principes  et  ntorceaux  choisis  d^éloquence  judiciaire, 


xvu*  siècle,  1856,  in-8'';  Sapey,  Études  biographiques 
pour  servir  à  Vétude  de  Vancienne  magistrature  fran- 
çaise, 1858,  in-8».  T.  de  B. 

JUDiciAïas  (Organisation).  V.  Psarcb,  dans  notre  Dio- 
tionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire,  page  1084,  col.  % 

JUDICIAIRE  (Pouvoir).  V,  Pouvoir. 

JUGE,  mot  qui,  après  avoir  reçu  diverses  acceptions 
{V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d* Histoire)^  ne 
désigne  plus  qu'un  magistrat  chargé  f»t  l'autorité  pa- 
blique  de  renors  la  justice  aux  particuliers.  Il  sert  à 
qualifier  spécialement  les  Juges  de  paix,  les  membres 
des  tribunaux  de  commerce  et  ceux  des  tribunaux  de 
V  instance.  Les  magistrats  des  Cours  d'appel  et  de 
la  Cour  de  cassation  ont  titre  de  conseillers, 

JUGE  coHMissAïas,  jugo  commls  par  un  tribunal  pour 
une  opéiation  quelconque. 

JUGE  DE  paix.  F.  ce  mot  dans  notre  Dicttonnaire  as 
Biographie  et  d^Bistoire. 

JUGE  d'instruction,  magistrat  qui,  dans  cha(|ue  arron- 
dissemti.t,  est  invesà  de  la  mission  d'instruire,  c-â-d. 
de  recueillir  tous  renseignements,  entendre  tons  témoins 
et  faire  toutes  constatations  relativement  aux  crimes  et 
délits.  Aux  termes  du  Code  d'instruction  criminelle 
(art  55),  il  devait  être  choisi  parmi  les  membres  du  tri- 
bunal civil  pour  trois  ans,  et  conservait  séance  au  juge* 
ment  des  aluùres  civiles,  suivant  le  rang  de  la  réception. 
Un  décret  du  ^^^  mars  1852  permet  de  confier  les  fonc- 
tions de  l'instruction  aux  juges  suppléants.  V.  Delamorte* 
Félines,  Manuel  du  juge  d'instruction,  1836,  in*8«; 
Do  verser ,  Manuel  du  juge  d'instruction ,  2"  éditi  1844, 
3  vok  in-8°;  Cassassoles,  Guide  pratique  du  juge  ^in- 
struction, 1855,  in-8». 

JUGEMENT.  En  Psychologie,  le  Jugement  est  un  fait 
par  lequel  on  affirtne  qu'une  chose  est  ou  n'est  pas,  on 
bien  qu'elle  est  d'une  façon  et  non  d'une  autre.  On  s 
donné  aussi  le  nom  de  jugement  h  la  faculté  qui  produit 
le  fait  et  au  résultat  du  fait  ;  mais  la  faculté  n'est  autre 
chose  que  l'intelligence  elle-même,  et  le  résultat,  la 
croyance  qui  en  est  l'effet  Le  caractère  essentiel  du  ju- 
gement est  l'affirmation  ;  le  mot  qui  donne  la  vie  à  la 
proposition  est  le  verbe.  Tout  {ugement  renferme  trois  ' 
notions  :  celle  de  l'antécédent,  substance  ou  cause,  être 
modifié  ou  agissant,  le  sujet;  celle  du  conséquent,  mode 
ou  acte,  effet  souffert  ou  produit,  Vattribut;  celle  da 
r<tpport,  exprimée  par  le  vorbe,  lorsque  le  Jugement  est 
énoncé  par  des  mots.  Le  Jugement  entraîne  irrésistible 
ment  à  croire  que  ce  qui  a  été  jugé  est  ou  eonste,  et  à  as 
l'affirmer.  C'est  cette  affirmation  mentale  que  le  moi 
porte  au  dehors  à  l'aide  des  signes,  sous  la  forme  de 
proposition;  elle  conduit  à  la  certitude.  —  On  distin^e 
dans  le  Jugement  la  matière  et  la  forme,  La  maitire 
varie,  parce  qu'elle  peut  provenir  d'une  notion  concrète 
et  individiAelle ,  ou  abstraite,  générale,  universelle;  ce 
qui  donne  lieu  à  autant  d'espèces  de  jugements.  La  forme 
ne  varie  Jamais,  elle  contient  toujours  l'affirmation.  Be» 


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JUN 


]aUv«aMot  à  la  fonne,  les  jagaaenu  doivent  être  consi* 
dârés  80U8  aoatre  points  do  rue;  le  dernier  toutefois 
B'est  pas  exciluiTemeni  formel  :  1*  par  rapport  à  Vexte»- 
non,  aelon  le  nombre  des  objets  compns  dans  Tidôe; 
c'est  le  point  de  Tue  de  la  quantité;  il  donne  lieu  aui 
logaments  généfraux,  partùnUiêrs ,  indmduêU;  3°  par 
rapport  à  la  compréhension,  selon  que  les  idées  peuvent 
être  ou  ne  peurent  pas  être  unies;  c*est  le  point  de  vue 
de  iagiMiZtM;  les  lugements  sont  alors  affirmatifs,  né- 
aatifSy  indâtêrminis;  3<>  par  rapport  à  la  relation^  diaprés 
te  rap|>ort  entre  les  objets  que  le  Jugement  rapproche  ou 
sépare;  si  Ton  affirme  purement  et  simplement»  le  Juge- 
nent  est  catégorique:  si  l'on  affirme  avec  condition,  il 
est  hifpothétique^;  si  1  on  affirme  la  nécessité  de  choisir 
par  voie  d'élimination  entre  deux  attributs  qui  s'ex- 
cluent, il  est  disjonctif;  4^  sous  le  point  de  vue  de  la 
modalité;  celle-ci  désigne  le  rapport  du  Jugement  à  l'es- 
prit, ou  la  manière  dont  œlui-d  conçoit  l'existence  des 
cboses,  ce  qui  donne  lieu  aux  Jugements  problémati- 
fan,  auertoirêM,  ajKMJictigrtiM.  —  On  distingue  encore 
les  jugements  en  t  1*  anatvPiques,  quand  Tattribut  est 
nécessairement  contenu  dans  le  si^et;  2<*  s\fnthétiques , 
quand  il  n'y  a  pas  identité  entre  le  sqjet  et  l'attribut, 
ils  sont  substantif ij  quand  ils  affirment  simplement 
Tedstence  ;  aUnbuX^s ,  quand  ils  affirment  la  conve- 
Qince  ou  la  disconvenance  d'un  suiet  par  rapport  à  une 
qualité;  primitifs ovi  spontanés,  réfléchis  ou  Sêcondairss, 
—  Le  sens  {philosophique  du  mot  jugement  explique  cer- 
tûaes  locutions,  comme  :  c'est  un  homme  de  bon ,  de 
grand  jugement,  ou  dénué  de  jugement,  c-à-d.  qui  saisit 
bien  ou  mal  les  rapports  des  choses» 

En  Droit,  un.  jugement  (du  latin  jus,  droit,  et  dicere, 
dire)  est  une  décision  émanée  de  l'autorité  Judiciaire  ; 
c'est  le  nom  doané  à  toute  décision  des  tribunaux  infé- 
rieurs, celles  de  la  Cour  de  ûissation  et  des  Cours  impé- 
riales sont  des  arrêts^  A  la  suite  d'une  enquête,  la  déci- 
sion d'un  seul  Juge  est  une  ordonnanoe.  Les  Jugements 
en  1**  instanœ  ne  peuvent  être  rendus  par  moins  de 
ffoia  Juges,  à  peine  de  nullité.  Les  Jugements  émanent 
de Is  iuridictioQ  criminelle  ou  de  la  Juridiction  civile; 
dans  le  l*'  cas ,  ils  sont  ou  de  simple  police  ou  correc- 
Uonnets;  dans  la  %\  on  les  distingue  en  jugements  con- 
tradictoires, par'  défaut^  et,  au  criminel,  par  contumcœe, 
frwisoires,  préparatoires,  interlocutoires,  définitifs.  On 
diatiogoe  aussi  l«s  jugements  sur  requête,  ceux  d'expé- 
dknts,  et  ceux  ^^homologation.  Ils  sont  en  premier  ou 
f»  dernier  ressort.  Le  ju^ment  doit  contenir  les  noms 
'^jiiges,  du  pTocureur  impérial  ou  de  son  substitut, 
s'il  a  été  entendu,  ainsi  que  des  avoués;  les  noms,  pro- 
fessions et  demeures  des  parties,  leurs  conclusions,  l'ex- 
position somniaire  des  points  de  fait  et  de  droit,  les 
motils  et  le  dispositif  (Coos  de  Procédure^  141).  Les  Juge- 
ments ont  pour  eflet  de  lier  les  parties  entre  lesquelles 
ils  sont  rendus  s  c'est  là  l'autorité  que  la  loi  attribue  à  la 
chose  Jugée  (Code  Napol.,  1350  et  1351).  V.  Poncot, 
Trotté  des  jugewnents,  1822, 2  voL  in-S"».  R. 

iMiMENT  n'awooa  (Le),  poème  allégorique  et  satiriquo 
du  im*  siècle.  Deux  demoiselles  se  querellent  pour  le 
mérite  de  leurs  amis.  Blancheflor  aime  un  clerc,  et  Flo- 
noce  un  cbevaUer.  Elles  portent  leur  différend  devant 
te  trS>unal  du  Pieu  d'amour.  Bien  des  oiseaux  parlent 
tour  à  tour,  les  uns  pour  les  clercs,  les  autres  pour  les 
cherallers.  Enfin  le  roi  décide  que  la  querelle  se  videra 
par  un  combat  singulier  entre  le  rossignol ,  défenseur 
des  clercs,  et  le  papegaux  (perroquet),  défenseur  des 
cbevaliers.  Le  papegaux  rend  son  épée,  et  la  cour  décide 
qœ  les  clercs  ont  plus  de  vaillance  et  de  courtoisie  que 
tes  chevaliers.  Floiwice  en  meurt  de  chagrin.  —  Le  même 
SQjet  a  été  traité  par  deux  autres  auteurs  sous  les  titres  de 
Florance  et  Blanchefleur  et  de  Buéline  et  Êglantine, 
V.  Bistmre  littéraire  de  la  France,  t  XIX.        H.  D. 

JvcmiNT  DEBiiin,  Jugement  solennel  et  général  que 
Jésos-Christ,  suivant  la  doctrine  catholique ,  doit  faire 
ém  vivants  et  des  morts,  au  dernier  Jour,  à  la  consom- 
mation des  siècles.  —  Parmi  les  œuvres  d'art  qui  ont 
pour  si^et  le  Jugement  dernier,  on  peut  citer  un  bas- 
rdief  du  portail  de  Notre-Dame  de  la  Couture,  au  Mans; 
d'auu^es  au  grand  portail  de  Notre-Dame  de  Paris,  de  la 
ouhéiirale dVLutun,  del'égUae  SWean  à  Nuremberg;  les 
peiaturas  d'Ôrcagna  au  Campo-Santo  de  Pise;  le  tableau 
de  lean  Cooain  an  Musée  du  Louvre,  et,  à  Rome,  la 
liesque  de  Micbel-AiigB  dans  la  chapelle  Sixtine,  dont  il  y 
a  one  belle  copie«  par  Sigalon,  au  Palais  des  Beaux-Arts, 
à  Paris.  —  Le  Juiçement  denier  est  un  sm'et  trop  su- 
biinie  ei  tiop  terrible  pour  la  peinture;  aussi  les  plus 
puds  artistes,  sans  en  eicepter  MicheUAnge,  y  ont 


écbood.  One  mào»  dn  Galvràre  excitera  la  plus  donkm* 
reuse  émotion,  et  il  n'est  pas  très-rare  que  des  artistes 
éminents  y  aient  réussi;  xnais  devant  ces  tableaux  dits 
du  Jugement  dernier,  on  n'est  frappé  que  de  l'imagina» 
tion  du  peintre  :  le  cœur  et  l'esprit  restent  froids,  an 
lieu  d'être  oonsteméa  de  respect  et  de  terreur.   C  D— t. 

JDGEM ENT  DE  DIEU.  V,  EPSEUVES  JimiOAISES,  daUS  nOtTS 

Dictionnaire  de  Biographie  et  dBistoire. 

JUIFS  (Langue  et  Littérature  des).  F.  H<braiqiib. 

JDIFS  (Relifflon  des).  F.  Jdifs  et  Moisb,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

JUILLET  (Colonne  de),  V.  Colonnes  mondiientalbs, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  dffistoire. 

JULES,  monnaie  d'argent  des  États  romains,  ainsi 
apoelée  du  pape  Jules  II,  et  valant  environ  30  centimes^ 

JUMELÉ ,  en  termes  de  Blason ,  se  dit  d'un  sautoir^ 
d'un  chevron  ou  de  toute  pièce  formée  de  deux  jumelles* 

JUMELLE ,  terme  de  fiisrine.  V.  Gabdron. 

JUMELLES ,  en  termes  de  Blsson,  se  dit  de  deux  pe- 
tites fasoes,  bandes,  barres,  etc.,  parallèles,  qui  n'ont  que 
le  tiers  de  la  largeur  ordinaire. 

JUMIÉGES  (Abbaye  de),  k  27  kilom.  O.  de  Rouen,  près 
de  la  Seine.  A  l'époque  où  S\  Philibert  fonda  un  monaa- 
tère  en  cet  endroit,  en  655,  on  y  voyait  deux  églises  con- 
tigués,  consacrées  l'une  à  la  S^«  Yierge,  l'autre  à  S^  Pierre. 
En  851 ,  les  pirates  normands  saccagèrent  et  brûlèrent 
le  monastère,  ainsi  que  l'église  Notre-Dame.  Guillaume 
Longue-Épée  fit  reconstruire  le  couvent  et  réparer  l'église 
en  940.  Sur  l'emplacement  de  celle-ci,  on  bâtit  plus  tard 
un  autre  édifice,  qui  fut  consacré  en  1067,  et  ou  se  troïk- 
veni  quelques  portions  con^rvées  de  l'ancien.  La  noi^ 
velle  église  Notr&-Dame  est  celle  dont  on  admire  aujour- 
d'hui les  ruines  :  une  partie  considérable  en  fut  abattue 
à  la  Révolution,  avec  tout  le  couvent,  dont  il  ne  sul>- 
siste  que  la  maison  du  portier,  convertie  en  maison 
d'habitation;  mais  les  portions  qui  restent  sont  heureu- 
sement les  plus  anciennes,  et  en  même  temps  les  plus 
remarquables;  les  constructions  en  ogive  sont  en  ruines, 
mais  les  tours  normandes  ont  échwppé  k  la  destruction. 
L'église  abbatiale,  qui  avait  87  met.  de  longueur  sur  21 
met.  de  largeur,  est  un  bel  exemple  de  la  simplicité  du 
style  architectural  des  anciens  Normands,  ses  fon<Uk- 
teurs  :  les  ornements  y  sont  trte- rares.  C'est  ôaxïs  les 
magniflcpes  arcades  placées  sous  la  tour  centrale,  dans 
la  nef  si  lonçie,  si  large  et  si  haute,  dans  l'élévation  de 
la  façade  occidentale,  qu'il  faut  chercher  le  secret  de 
l'effet  imposant  produit  par  l'édifice.  La  façade ,  corn* 

f>létement  unie,  a  le  caractère  roman  ;  son  arcade  circu- 
aire,  dépourvue  de  toute  espèce  de  moulures,  repose 
sur  deux  colonnes.  Aux  angles  de  cette  façade  sont  deux 
tours  de  forme  octogonale,  qui  avaient  51  met.  de  hau- 
teur, et  entre  lesquelles  existent  de  légères  différences. 
Is.  tour  centrale  est  eh  partie  ruinée.  Le  toit  de  l'église 
a  entièrement  disparu.  Les  arcades  de  la  nef  reposent 
sur  des  piliers  auxquels  sont  attachées  des  demi-co- 
lonnes ;  tous  les  chapiteaux  sont  unis;  quelques-uns  ont 
conservé  des  traces  de  peintures  imitant  grossièrement 
des  feuilles.  On  voit  de  larges  galeries  à  la  partie  sup^ 
rieure  des  colhitéraux.  Quant  à  l'égUse  de  S*-Pierre,  sea- 
proportions  étaient  beaucoup  moins  vastes  que  celles  de 
Notre-Dame,  parce  que,  lors  de  sa  reconstruction,  on 
n'en  avait  conservé  que  la  partie  d'en  haut  :  elle  n'avait 
plus  d'issue  au  dehors,  et  l'on  y  entrait  par  l'autre 
église,  au  moyen  d'un  corridor  voûté,  de  5  à  6  met.  de 
longueur.  Les  deux  églises  de  Jumié«es  renfermaient 
plusieurs  tombeaux  qui  ont  été  détruits,  entre  autrea 
celui  des  Enervés  (V.  JoMiéGBS,  dans  notre  Dictionnaite 
de  Biographie  et  d'Histoire) ^  rapporté  sans  raison  au 
vm*  siècle,  et  qui  ne  remontait  certainement  pas  au  delà 
du  xiii^  LÎb  cloître,  b&ti  en  1530,  renfermait  la  salle  des 
sardes  de  Charles  VII,  longue  de  33  met.  et  large  de 
il  met. ,  seul  reste  des  appartements  que  ce  roi  avait 
occupa  pendant  son  s^our  à  Jumi^^es ,  où  mourut  sa 
maîtresse  Agnès  Sorel.  V.  Deshays,  Histoire  de  Vabbaye 
noyale  d»  Jumiéges,  Rouen,  1820,  in-8<';  Langlois,  Essai 
sur  les  Enervés  de  Jumiéges,  1838,  in-8^ 

JUNIUS  (Lettres  de).  V.  notre  Dictionnaire  de  BiO" 
graphie  et  d  Histoire. 

JUNON.  Les  monuments  antiques  représentent  cette 
déesse  sous  les  formes  les  plus  nobles.  Son  visage  a  les 
traits  de  la  jeunesse  avec  la  maturité  de  la  beauté;  il  est 
doucement  arrondi  sans  être  trop  plein ,  et  commande 
le  respect  sans  avoir  rien  de  rude  :  le  front  est  entouré 
de  cheveux  .qui  sont  arrêtés  obliquement  par  derrière  i 
les  yeux  regardent  droit  en  avant.  Junon  est  couronnée 
de  la  Stéphane  ou  diadème;  lea  coiffures  qu'on  y  ajoute» 


s\m 


1132 


JUS 


le  polo$ ,  to  calalhas,  le  modios ,  ne  font  qa»  mieux 
sortir  son  caractère  de  diTînité  du  Ciel  et  de  la  Nature. 
Vhimation  ou  voile  gui  Teoyeloppe ,  le  cMUm  dont  elle 
est  yetne  et  qui  ne  découvre  que  le  cou  et  les  bras,  im- 
priment à  son  maintien,  par  là  sévérité  de  leurs  drape- 
ries, un  caractère  de  réserve  et  de  pudeur  qui  sied  à 
l'épouse  et  à  la  matrone.  Polyclète  passait  pour  avoir 
fixé  ce  type  :  il  avait  fait  une  statue  colossale  en  or  et  en 
ivoire  pour  le  temple  ériflcé  à  Junon  entre  Argos  et  My- 
cènes  ;  la  déesse  tenait  d'une  main  une  grenade,  sym- 
bole de  la  Nature,  et  de  Tantre  un  sceptre,  à  rextrémité 
duquel  était  perché  un  coucou.  Le  paon  fut  aussi  un 
attribut  de  Junon.  Plusieurs  impératrices  romaines  affec- 
tèrent de  se  faire  représenter  sous  les  traits  de  Tépouse 
de  Jupiter  :  aussi,  la  plupart  des  statues  de  Junon  que 
nous  possédons  sont  des  statues  dlmpératrices.       B. 

JUNTE.  V.  notre  Dictùmn.  de  Biog.  et  d*Bistoire, 

JUPITER.  L*art  antique  nous  représente  ce  Dieu,  tan- 
tôt debout  et  nu,  tantôt  assis  sur  son  trône,  et  la  partie 
Inférieure  du  corps  vêtue.  Le  Jupiter  d*01ympie,  osuvre 
de  Phidias,  était  couronné  d*olivier  sauvage,  tandis  que 
celui  de  Dodone  avait  une  couronne  de  chêne.  L'attribut 
ordinaire  de  Jupiter  était  la  foudre,  gu'il  tenait  à  la  main 
ou  faisait  porter  par  un  algie  placé  à  ses  côtés.  Il  est 
Teconnaissax)le  en  outre  à  une  patère  ou  coquille  ^  au 
sceptre,  ou  à  la  déesse  de  la  victoire  qu'il  tient  à  la  main. 
Ses  cheveux,  relevés  sur  le  front,  retombent  en  ondes 
serrées  sur  les  côtés,  et  ont  quelgue  ressemblance  avec  la 
crinière  du  lion.  Les  plus  célèbres  temples  de  Jupiter 
étaient  ceux  d'Olympie,  d'Âgri^nte,  et  de  Rome  (V;  Ga- 
KTOLB,  Oltmpib,  dsiis  uotro  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire,  et,  dans  le  présent  ouvrage,  l'art  Acai- 
«shtb).  Au  temps  des  Romains ,  on  fit  plusieurs  statues 
colossales  de  ce  dieu  :  tels  tarent  le  Jupiter  roscoti,  élevé 
par  Sp.  Curvilius,  l'an  482  de  Rome,  avec  l'airain  enlevé 
aox  Samnites,  et  le  Jupiter  une  l'empereur  Adrien  fit 
éri^  à  Athènes.  Les  amours  ae  Jupiter  ont  fourni  aux 
artistes  le  sujet  d'un  grand  nombre  de  compositions. 
F.  WsBlcker,  Sur  le  temple  et  la  statue  de  Jupiter  à 
IXympie,  en  allemand,  Leipzig,  1704;  Seebenkees,  Sur 
U  temple  et  la  statue  de  Jupiter  d  Œympie,  en  allemand, 
Nuremberg,  1795;  Hans,  Essai  sur  le  temple  et  la  statue 
de  Jupiter  d  Olympie,  en  ital..  Païenne,  1814;  Klenze, 
Sur  le  temple  de  Jupiter  Olympien  à  Agrigente,  en  alle- 
mand, Stuttgard,  1821,  in-4°;  Émeric  David,  Jupiter, 
recherches  sur  ce  Dieu,  sur  son  culte  et  sur  les  monU" 
ments  qui  le  représentent ,  Paris ,  1833,  2  vol.  in-8^    B. 

JURANDE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
•graphie  et  d* Histoire. 

JURASSIEN  ou  BRESSAN  (Patois),  dialecte  parlé  dans 
les  campagnes  an  midi  de  la  Bourgogne,  dans  les  an- 
ciens pays  de  Bresse,  de  Bugey,  de  Val-Rom^  et  de 
Dombes  (département  de  l'Ain,  et  partie  de  ceux  de 
Saône-et-Loire  et  du  Jura).  Il  participe  du  celtique,  de 
Fallemand,  du  latin,  du  français,  et  aussi  de  l'idiome 
bourguignon  :  certains  indices  révèlent  l'arabisme  dans 
le  patois  des  Burrins,  habitants  du  village  de  Boz  au 
bord  de  la  Saône,  et  que  la  tradition  fait  dmcendre  d'une 
colonie  de  Sarrasins.  Voici  un  exemple  de  cet  amalgame, 
emprunté  à  un  noél  bugiste  (de  Nantua)  : 

Venian  don  dar,  o  tare  Un  itranzo 
Venant  da  ciel,  11  serait  bien  étrange 
Qnt  votufate  no  çMcona, 
Qu'il  voolût  nous  tromper. 

Venian  s'éloigne  peu  du  latin  ventens;  qu'i  voluisse  a 
bien  detl'analogie  avec  quod  voluisset  ;  dar  est  pur  bour- 
guignon; itranzo  est  provençal.  Un  des  caractères  dis- 
'ânctifs  de  ce  patois  est  le  retour  fréquent  de  la  termi- 
naison 0  prononcé  grave  et  très-allongé  ;  cette  terminaison 
1M  change  en  a  long  et  ouvert  dans  le  patois  du  Bugey. 
Le  paysan  |urassien  parle  un  langage  peu  figuré;  il  ne 
connidt  pas  les  métaphores,  et  se  contente  de  dire  sim- 
plement sa  pensée.  L'habitant  de  la  plaine  prononce 
mvec  une  volubilité  qui  contraste  avec  la  lenteur  de  son 
geste  ;  le  montagnard,  au  contraire,  a  des  manières  vives 
et  une  parole  pesante.  La  littérature  du  patois  bressan 
n'est  pas  riche  :  cependant  Jacques  Brocard  de  Mon- 
taney,  conseiller  au  présidial  de  Bourg,  qui  vivait  au 
XVII*  siècle,  a  laissé  des  chansons,  une  comédie,  VEn- 
ràlement  de  Tiwin,  et  des  noéis  qui,  avec  ceux  de  Bor|on, 
forment  un  recueil  assez  intéressant.  Des  Noèls  bressans 
ont  été  publiés  en  1845.  P— s. 

JURAT,  r.  ce  mot  dans  notre  Diettonnasre  d»  Bùh 
fraphie  et  d^ Histoire. 

JURATOIRE  (Caution),  serment  qae  fait  quelqu'un  en 


Justice  de  rmésenter  sa  personne  ou  de  rapporter  une 
chose  dont  if  est  chargé. 

JURÉ.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionmasre  de  Biogra- 
phie et  d'Histovre, 

JURIDICTION.  V,  CovpéTBRCB. 

JURISCONSULTE  (du  latin  jus,  gén.  iiirû,  droit,  et 
consultus,  savant,  expert,  qui  a  médité),  celui  qui  est 
versé  dans  la  science  du  Droit  et  des  lois,  et  qui  fait 
profession  de  donner  des  conseils  et  avis  sur  cette  ma- 
tière. Dans  l'ancienne  Rome,  les  Jurisconsultes  étaient 
distincts  des  avocats  plaidants,  et  leurs  décisions  fai- 
saient autorité  :  ainsi,  Valentinien  m  et  Tbéodose  le 
Jeune  décidèrent  oue  les  ouvrages  de  Papinien ,  de 
Gains,  de  Paul,  d'UIplen  et  de  Modestns  auraient  force 
de  loi.  Le  Digeste  nW  quHm  recueil  d*avis  des  Juris- 
consultes. L'action  des  Jurisconsultes  a  été  moins  puis- 
sante en  France,  quoique  considérable  encore  :  sous 
l'andenne  monarchie,  Cujas,  Domat,  Pothier,  Duaiou» 
lin,  Lo^rseau,  Lauriers,  firent  les  plus  oâèbres.  Le  Code 
Napoléon  est  sorti  des  travaux  ae  tpielques  Juriscon- 
sultes ,  et  ce  sont  encore  aujourd'hm  des  savants  en 
Droit  qui  expliquent  les  lois,  qui  en  recherchent  l'espri^ 
et  préparent  ainsi  les  décisions  de  la  Justice. 

JURISPRUDENCE,  mot  qui  s*entend  de  la  science  du 
Droit,  mais  plus  exactement  de  l'art  d'appliquer  à  la 

Sratique  la  connaissance  des  principes.  A  un  autre  point 
e  vue,  la  Jurisprudence  est  l'uniformité  non  Inter- 
rompue de  plusieurs  arrêts  sur  des  questions  sembla 
blés  :  c'est  en  ce  sens  qu'on  dît  la  jurisprudence  des  tri' 
bunaux,  la  jurisprudence  est  fixée  sur  tel  ou  tel  point. 
Le  soin  de  fixer  et  de  maintenir  la  Jurisprudence  en 
France  appartient  à  la  Cour  de  cassation. 
JURISTE ,  celui  qui  écrit  sur  les  matières  de  Droit. 
j*jn  Y  (  F.  ces  mots  dans  notre  Die- 

JUSSION  (Lettres  de  )•  j     fgiS^t  ^'"^"^^  ^ 

JUSTAUCORPS  (pouritisto  ai»  corps),  vêtement  étroit, 
à  manches,  qui  serre  le  buste  et  descend  Jusqa*aux  ge- 
noux. Ce  mot  était  en  usage  surtout  au  xvn*  siède. 

JUSTE  (du  latin  jus,  droit).  Cest  le  caractère  de  ce 
qui  est  conforme  aux  règles  étemelles  de  la  raison  :  6tre 
Juste,  c'est  respecter  tous  les  droits,  et  en  particulier 
ceux  de  la  nature  humaine;  être  injuste,  c'est  les  violer. 
Le  Juste,  en  Morale,  donne  l'idée  de  l'absolu  ;  il  est  dans 
la  consdenoe  de  chacun,  fixe.  Invariable  et  indépendant  ; 
il  trouve  son  application  dans  )e>.  justice^  R. 

JUSTE,  vieux  mot  désignant  un  vase  ou  flacon  de  table, 
en  forme  d'àiguière,  avec  un  couvercle  et  des  anses.  On 
faisait  de  ces  vases  en  or,  en  arj^t.  et  surtout  en  étain. 
Une  petite  Juste  s'appelait  moa  iusUiette. 

JUSTICE.  Elle  consiste  à  traiter  chacun  selon  son 
droit ,  Justitia  m  suo  cm<iue  trUbuendo  (Cic.)  La  Jastioe 
est  ordinairement  regardée  comme  le  droit  écrit,  et  dont 
l'exécution  peut  être  exigée  par  la  contrainte;  c'est  ce 
oui  la  distingue  de  Yéquiti,  qui  comprend  tel  ou  tel 
droit  qui  peut  n'être  pas  inscrit  dans  le  Code,  mais  qui 
est  reconnu  par  la  consdence,  au-dessus  de  toute  con- 
vention. Cette  distinction  vient  de  ce  que  la  loi  potitim 
peut  n'être  pas  exempte  d'erreur;  ma»,  au  fond,  la  Jus- 
tice et  l'équité  sont  identiaues  dans  leur  essence.  La  jtis- 
tice  se  distingue  aussi  de  la  chariU  ou  a$nowr,  en  ce  que 
oelle-d  a  des  degrés  et  que  la  Justice  n'en  a  pas.  La 
charité  peut  conduire  à  Vinjustice;^  mais,  si  elles  diffè- 
rent, elles  doivent  s'unir  pour  éviter  la  faiblesse  d'un 
côté  et  la  tyrannie  de  Tautije.  Elles  se  complètent  par 
ces  deux  préceptes  oui  formulent  la  loi  du  juste  dans 
toute  son  étendue  :  m  fais  pas  à  oufrut  ce  que  tu  ne 
penses  pas  gu'uti  autre  ait  le  droit  de  te  faire  ;  fais  pour 
tes  autres  ce  que  tu  désirerais  que  les  autres  lissent  pour 
toi,  —  A  ridée  de  Justice  se  Ile  nécessairement  celle  de 
mérite  et  de  démérite,  qui  annonce  une  sanction  (  F.  M£- 
Rrrs).  U  appartient  aussi  h  ta  Justice  de  réaliser  cette  sanc- 
tion; c'est  ce  que  fait  ISijustwedistrUnUioe.  La  sodâté  ne 
peut  y  satisfaire  que  d'une  manière  très-limitée,  et  Isl  jus- 
tice aistributive.  se  confondant  nécessairement  avec  la 
sagesse  et  la  miséricorde  de  Dieu,  devient  la  justice  dî' 
vine.  Hais  dans  ce  monde  11  y  a  \ti  justice  humaine,  qui  se 
règle,  autant  que  le  permet  notre  nature,  sur  la  pre- 
mière. La  justice  kumaine  rég^e  les  rapports  des  hommes 
entre  eux ,  et  assure  la  conformité  de  leur  conduite  ré- 
ciproque avec  l'ordre  dvil  et  les  lois  positives  :  elle  est 
distrioutwe  et  commutative.  Toute  Justice  s'administre 
au  nom  du  souverain,  quelle  que  soit  la  forme  de  la 
souveraineté.  La  Justice  distributive  a  pour  but  de  pro- 
téger et  de  récompenser  chaque  memrae  de  la  société, 
suivant  sa  position  sociale  et  son  mérite;  de  punir,  sui- 


JDS 


1133 


JUX 


lant  la  gim?ilé  du  délit.  La  Jaitiee  oommotaftive  Tègle  les 
npporu  des  ciuqrens  entre  eox ,  soiTant  les  drmts  de 
ebioiD.  Le  povre&r  de  reodre  la  lostlce  étant  néoettel- 
lement  délégaé  par  le  souTerain,  la  Justice  prend  qiiel- 
fMfoia  le  nom  de  fwndictkm,  et,  selon  la  nature  da 
pMfoir  attriboé  an  magistnt,  on  dit  :  JusUeê  eioile,  /«f- 
tia  eriminêlU ,  Juêtke  conttUair§,  etc.  R. 

JcsncB,  déesse.  i  V.  notre  DicHofuiatr»  lU  Buh' 

josnci  (Chambre  de).  \      graphk  0t  (THittoin. 

nsncM  (Déni  de),  v,  Ùtm  db  joshce. 

josncB  (Droit  de).  F.  notre  Dicttonnoire  de  BiogropM» 
d  et  Histoire. 

nsncE  (Hante  Gonr  de).  F.  Haute  Goctu 

nsncB  (Ut  de}.  F.  Lit  m  lumci,  dans  notre  DicHim- 
soin  da  Biographie  et  ^Histoire, 

nsncM  nttain  de).  F.  Bator  a  sioima. 

josncB  (Ministère  de  la).  F.  MunsTlniB,  dans  notre 
Dictwmturê  do  Biographie  et  d! Histoire,  page  1803, 
col.  2. 

fcsncB  (Palais  de).  F.  Palais  de  josnce. 

JUSTICE  ns  CABunET.  F.  Gabinbt. 

JUSnCB  DB  PAIX.    F.  JWB  DB  PAIX. 

JUSTICE  «ARTTIIfB,  laUTAIBB.    F.  MASmilB ,  MlUTAnB. 

JUSTIFICATION,  en  termes  de  Théologie,  passage  de 
rétat  de  péché  à  l'état  de  Justice.  La  Justification  est 
reffst  des  sacremeots  de  Baptême  et  de  Pénitence,  et  de 
riofosion  de  la  Grâce.  Les  protestants  la  fondent  sur  la 
ki  nale,  les  cathoUqnes  sur  les  bonnes  oBuvres  Jointes  à 
Itfoi. 

JusnncATioH,  en  terme  de  Typographie,  longueur  des 
ligDes;  éDe  est  iixée,  pendant  tonte  la  durée  d*nn  ou« 


vrsge,  par  la  dimension  du  composteur  (V.  oe  mol).  -* 
Lss  fondeun  en  caractères  donnent  le  nom  de  /us <4l0e* 
tion  à  Topéntion  qui  donne  la  même  longnenr  à  tentée 
les  lettres  fondues,  et  qui  s'exécute  au  moyen  d*nn  Instm- 
mentjmelé  ooiipotr. 

JUSTINE,  en  italien  Ghutina,  monnaie  d'argent  de 
Venise,  valant  5  fr.  9Î  c. 

JUSTINIEN  (Code).  F.  Gode  et  JosnmBii,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Histoire. 

JUXTAPOSITION,  terme  de  Grammaire  appliqué  aux 
mots  composés  dont  les  éléments  ne  se  sont  pas  fondus 
intimement  les  uns  avec  les  autres  et  consenrent  plus  on 
moins  intacte  la  forme  qu'ils  auraient  s'ils  étaient  déta- 
chés. Cest  ce  qui  a  lieu  presque  sans  exception  en  fran- 
çais; ainsi,  les  mou  petit-iait,  petii^maitre,  bUme^eing, 
chef4ieu,  chef-d^œuvre,  cAoi*-/lêtir,  Aorf-d'amers,  aprèO' 
dinie,  partout,  pourtant,  cependcuU,  ots-dH^tt,  près- 
qu'ile,  porte-^roix,  porto-drapeau,  tire-bourre,  pommo 
de  terre,  dorénavant ,  ^tc.,  sont  formés  par  Juxtaposition. 
Les  langues  anciennes  offrent  aussi  de  nombreux  exemples 
de  ce  procédé;  par  exemple, en  latin  :  prœterea,  gtiotidd- 
quidem,  namque,  eUnitn,  agricultura,  legislator,  pater- 
famUias,  etc.  Les  verbes  dans  la  composition  desquels 
entre  une  préposition  n'ont  réellement  que  des  éléments 
Juxtaposés.  Enfin,  doivent  être  considérés  comme  formés 
par  Juxtaposition  de  leurs  divers  éléments  les  mots  com- 
posés dont  les  parties  composantes,  si  elles  étaient  déta- 
chées, seraient  lointes  les  unes  aux  antres  |>ar  une  con- 
jonction copulative,  par  exemple  :  tragi-eomique,  c-à-d. 
tragique  et  comique;  a/f^lo-français ,  c-à-d.  anglais  ei 
français,  ou  forme  à  la  fois  d'anglais  et  de  Ihmçais,  etc.  P. 


K 


EAL 


EAL 


K,  endème  lettre  et  8*  consonne  de  l'alphabet  tnn^ 
çàt.  Cest  une  gnttorale  dérivée  du  «  (Icappa)  des  Grecs, 
et  ooe  nous  n'emplirons  guère  que  pour  des  mots  tirés 
de  oogues  étrangères.  Les  Romains  paraissent  ne  s'en 
être  i^vis  qu'à  partir  du  dernier  siècle  de  leur  Répu- 
blique, et  l'on  prétend  qu'elle  fut  introduite  par  Salluste  : 
hieo  qu'on  le  troure  dans  certains  mots  [Kalendm, 
Kelwnnia,  Kapnt,  Kaius,  JBTcb^o),  (>uintilien  se  refuse 
à  Tadmettre  comme  lettre  latine.  Priscien  voulait  qu'on 
M  remplc^àt  qae  dans  les  mots  dérivés  du  grec.  Les  ca- 
kmniateun  étalent  marmiés  au  front  d'un  fer  rouge  por- 
liDt  un  K.  Sur  les  médailles  antiques,  K  est  pour  CAar, 
Qouâe,  CoÊupaeine,  Carthage,  etc.  -^  Quelques  auteurs 
QDt  fait  de  cette  lettre  un  caractère  numéral ,  valant  250, 
Cl,  eo  le  surmontant  d'un  trait  horixontal  (C), 250,000. 
Qwx  les  Grecs,  x'  valait  20,  et  ,x  20,000.  —  An  m^yen 
Ige,  Ghariemagne  signait  K  pour  Karl.  Dans  les  chartes 
et  diplômes,  on  troure  souvent  les  abréviations  suivantes  : 
KR,  chorus;  K  R.  C,  eoro  doittu;  KRM«,  cartnen;  KS, 
chaos;  JL  T.*e€Êpite  tonsus,  etc.  Le  K  a  été  employé 
poor  C  duis  Kaiendrier,  Kwrolus,  etc.  Au  temps  de  Pi^ 
qnier,  il  remplnct^t  qu.  Il  a  été  la  marque  des  monnaies 
inppées  à  Bordeaux. 

Daos  les  langues  gsrmaniques,  le  K  s'emploie  à  la  place 
du  C,  sartoat  lorsque,  par  l'effet  de  la  voyelle  qui  suit 
immédiatement,  cette  dernière  lettre  ne  pournut  con- 
lerver  son  caractère  de  gutturale  et  deviendrait  sifflante. 
Le  K  initial  peat  ne  pas  appartenir  à  la  racine  du  mot, 
et  œ  représenter  qu'une  simple  aspiration  :  ainsi ,  en 
sablais,  il  est  muet  dans  les  mots  où  la  consonne  N  le 
soit  (l9M9,  knife,  knit,  knoll,  etc.).  (3iez  les  Serbes  et 
la  RuKea,  qoi  donnent  an  C  la  valeur  de  notre  S,  le  K  a 
ssturellement  on  fréquent  emploi.  B. 

KAABA  (La).      1  r .  Gaba,  Gabalb,  dans  notre  Diction-' 

KABBALE  (  La),  t    wsire  de  Biographie  et  d: Histoire. 

KABYLE  (Langue).  V.  Bnetes. 

KACHEMTR  (Langue  dn  pays  de).  V.  CAcmnai. 

KACHIQUEL  ndiome).  V.  Mbxiqub  (Langue  du). 

KAFTAN.  F.  Gafbtar. 

KAIMAKAlf  •  F.  CaIvacah. 

KAKATOES.  V.  Cacatois. 

KALâDOSGOPE  (du  grec  haios,  bean,  eidos^  image, 
CI  sfcoipéjii,  vegarder).  Jouet  d'enHuit  inventé  en  1817  par 


l'Écossais  Brewster.  Cest  un  tnbe  de  carton  on  de  métal, 
fermé  à  une  extrémité  par  un  obturateur,  dont  le  centre 
est  percé  d'une  petite  ouverture  servant  d'ocidalrei 
l'antre  extrémité  présente  une  capacité  fermée  à  llnté- 
rieor  par  une  lame  de  verre  transparente,  à  l'extérieur 
par  une  lame  de  verre  dépoli,  et  contenant  divers  petits 
objets,  comme  des  firac^ents  de  verre  colora,  des 
feuilles,  des  morceaux  de  dentelle,  etc.  Le  tube  est  nmi 
intérieurement  de  lames  de  verre  plus  ou  moins  incluées 
les  unes  à  l'égard  des  autres,  et  dans  lesquelles  ces 
objets  peuvent  se  réfléchir.  Quand  on  place  l'instrument 
dans  une  direction  horizontale  et  qu'on  regarde  par  Tocn- 
laire,  on  aperçoit  des  Imans  variées,  qui  changent  sans 
cesse  si  l'on  déplace  les  oojets  renfermés  dans  la  calue 
vitrée  en  imprimant  au  tube  un  mouvement  de  rotation. 
Les  dessinateurs  en  broderies  et  en  toiles  imprimées  se 
servent  du  kaltidoscope  comme  producteur  de  deaslns 
modèles,  quils  peuvent  varier  à  l'inlini.  —  L'idée,  pre- 
mière du  Kaléidoooope  n'appartient  pas  à  Brewster  :  on 
la  trouve  dans  la  Magie  naitureUe  de  Porta  (Naples,  1558)| 
dans  VArs  magna  lucis  et  umbrœ  du  P.  Kircher  (Rome, 
1646),  et  dans  la  ifoi^ta  tMitvsrso/tf  natures  et  artis  dn 
P.  Schott  (Wttrxbourff  1657). 

KALEWALA,  épopée  nationale  des  Finnois,  qui  a  pour 
sujet  les  guerres  des  hsbitants  du  pays  de  Kalewa  (Fin- 
lande) et  des  Pohiolas  (Lapons).  Des  fhigments  en 
avaient  été  recueillis  et  publiés  au  siècle  dernier  et  an 
commencement  de  celui-ci  :  L5nnret  en  a  fidt  une  nou- 
velle collection,  et  les  a  publiés  en  1835  sons  le  titre  de 
Kalewaia  (pays  de  Kalewa);  l'édition  de  1840  contient 
22,800  vers,  partagés  en  50  runes  ou  chants.  Une  autre 
édition  ra  a  été  donnée  par  Schlefner,  à  Helsingfors, 
1852.  L'opinion  générale  fait  remonter  Jusqu'au  xi*  nède 
l'origine  de  ce  poème  demi-païen,  demi-chrétien.  Noua 
en  avons  une  traduction  française  dans  l'ouvrage  de 
M.  Léonzon-Leduc,  la  Finlande^  son  histoire  primitim, 
sa  mythologie,  sa  poésie  épique,  etc.,  Paris,  1845,1 
vol.  in-8*.  ♦ 

KALILA  et  DIHNA.  V.  Gaula. 

KALMOUKS  (Langue  des),  une  des  langues  tartareiii 
Bien  qu'elle  renferme  un  grand  nombre  d'expressions 
étrangères  au  mongol,  les  mots  qui  forment  le  fond  des 
deux  idiomes  ont  une  dérivation  commune.  Leur  i^ystème 


KEM 


nu 


Km 


^Noiautiad  est  à  peu  près  le  mftne  »  ienleoieBt  lekal» 
■Mmli adee.  fonMs  phis  simipIeB  pour  U  déclinaiBOo  dee 
— befnntifi,  et  une  eoi^ugaiioa  pliu  safante.  Son  alphabet 
■e  dMn  anni  ém  mongol  que  par  Taditition  d*an  petit 
nombre  de  lettres.  —  Les  Kalmouka  ont  une  fittémtore; 
Pirad  lea  ouna^ss  ou*eUe  oomprend,  on  cité  :  te  Yêt' 
êunchi  tooli  (Miroir  du  monde),  sorte  de  cosmographie 
abrégée,  oft  les  idées  des  Hindous  su^  la  constitution  de 
l'oniTers  sont  fidèlement  reproduites;  le  Bogdo  (fssnir- 
khtmf  oamrage moral,  prenant  son  titre  d*un  personnage 
iidmienx  qui  y  joue  le  principal  rôle  ;  VOuchandeur^khanf 
onrrage  mythologique;  Ooh4ehikitu,  roman  mytholo* 
aique.  F.  Bergmann,  Voyagé  eh$x  1er  KalmfmkSf  trad. 
de  Tallem.  par  Moris,  Chfttiilon-«ur-Seîne,  1825,  in-8% 

KÂNARA  (Idiome).  V.  KAanAnQOB. 
•  KANOUBI  (Langue),  une  des  langues  africaines,  parlée 
dans  le  Bomou.  La  déclinaison  a  cmq  cas.  Il  v  a  habi* 
tueUement  absence  dindication  des  genres.  L'article  se 
confond  avec  le  pronom  déasonatrafif .  Les  vois  des  verbes 
sont  nombreuses;  on  remarque  un  mode  négatif,  comme 
en  copte. 

KAimSIlE,  philosophie  de  Kant.  T.  Aiuoiam»!  (Phi- 
hnophie). 

KARLI  (Temple  de),  près  de  Bombay.  Il  est  coiMacré 
à  Bouddha,  et  formé  par  une  suite  de  grottes  distri« 
bnées  autour  d'un  sanctuaire  prindpai.  Ce  sanctuaire  a 
39  met.  de  profondeur,  20*,S^  de  laqseur,  et  la  voûte  en 
est  soutenue  par  des  colonnes  reposant  sur  des  éléphante, 
lesouels  portent  en  outre  divers  personnages.  De  tous 
c6tes  sont  des'  bas-reliefs  représentant  des  scènes  de  la 
vie  de  Bouddha,  et  des  inscriptions  accompagnent  ces 
fleures.  Un  péristyle  sculpté  donne  entrée  dans  le  tem- 
ple. Les  grottes  contiennent  un  grand  nombre  de  pièces 
destinées  à  Thabltation  des  prêtres  et  des  gens  de  service. 

KARNAC  (^Ruines  de).  V,  Tutus, 

KABNATIQUE  (Idiome),  un  des  dialectes  indiens,  de 
la  famille  dravidienne  {V,  ce  mot),  Qn  dit  aussi  Kamon 
taca  et  KoÊMra.  Il  se  parle  dans  le  centre  du  Dekkan,  et 
a*écrit  avec  le  caractère  télinsa  on  le  caractère  malabar. 
V.  Thomas  Estevans,  Arte  daiinffua  canarinaf  Goa,  1640, 
in-8*;  W.  Carey,  A  Grcunmar  of  the  kumata  language, 
Serampour,  1817,  in-8«;  J.  Ifackerell,  A  Grammar  ofthe 
camataca  ianguag9t  Bladras,  1820,  in-4^,  D  existe  un 
Dictionnaire  de  cette  langue  par  Reeve,  Madras,  1834-32, 
4  vol. 

KARÛUBAHL,  monnaie  d*Alger.  80  valent  2  fr.  70  c. 

KAS,  sorte  de  tambourin  des  habitants  du  pajrs  d'An- 
gola, fidt  d'un  bloc  de  palmier  creusé,  et  recouvert  d*une 
planche  au'on  frappe  avec  une  baguette. 

KASSuTO,  instrument  de  musique  des  habitants  du 
Congo.  C'est  une  pièce  de  bois  longue  d'un  mètre  et 
demi  environ,  creusée,  et  recouverte  d'une  planchette 
qui  présente,  de  distance  en  distance,  de  petites  tranches 
sur  lesquelles  on  racle  avec  un  b&ton. 

KAwI  (Idiome),  ancien  idiome  de  Tlle  de  Java,  où 
il  est  la  langue  littéraire  et  sacrée.  Cest  une  corrup- 
tipn  du  sanscrit,  dans  laquelle  celui-ci  est  privé  de 
ses  inflexions  et  a  pris  en  échange  les  prépositions  et 
les  verbes  auxiliaires  du  Javanais  vulgaire.  Le  kawi, 
qu'on  parlait  également  à  lladura  et  à  Bali ,  cessa  d'être 
en  usage  au  xiv*  siècle  de  notre  ère  :  sanscrit  par  sa  no- 
menclature, il  a  généralement  la  grammaire  du  Javanais 
et  des  autres  langues  malaises.  Sa  littérature  est  riche, 
mais  elle  est  en  grande  partie  une  imitation  de  celle  de 
rinde;  au  nombre  des  ouvrages  qu'elle  comprend,  on 
cite  :  le  Kanda,  poëme  dont  l'original  parait  être  perdu, 
mais  dont  il  reste  une  traduction  en  javanais,  et  <ïui  re- 

Eréaente  la  lutte  des  divinités  indiennes  avec  les  divinités 
idigènes;  le  Brata  Youdha  (la  Guerre  sainte,  ou  la 
Guerre  du  malheur),  poëme  de  719  stances  de  diverses 
rimes,  composé  au  vui*  ou  au  xii*  siècle  par  Pouseda,  qui 
en  emprunta  le  sujet  à  l'épopée  indienne  du  Mahabhc^ 
rata;  le  Manék-Maya  (l'Homme),  poème  où  est  exposée 
la  cosmogonie  des  Javanais,  d'après  le  dogme  boud- 
dhique; le  NUisoitra,  traité  de  morale  du  xii*  ou 
iuii*  siècle.  F.  Guillaume  de  Humboldt,  Sur  la  langue 
kawi,  en  allemand,  Berlin,  1836-40, 3  vol.  in-4o. 

KAZNEH,  nom  donné  en  Égvpte  à  la  somme  représen- 
tée par  1,000  bourses  de  500  piastres,  environ  125,000  fr. 

KEEPSAKE,  mot  anglais  désignant  ces  livres  élégam- 
ment imprimés,  illustrés  et  relia,  qui  se  donnent  en  ca- 
deau. Il  signifie  qu'il  faut  les  garder  (ka^)  avec  affection 
{sake), 

KEES  ou  KIS,  nom  donné  en  Egypte  à  une  bourse  de 
500  piastres,  environ  125  fr. 

KEBIANGÉH,  instrument  à  archet  des  Arabes.  On  en 


dtathume  plutiean  sortes.  La  Kemâttgti^  nmmy,  de  la 
taflle  a*un  violon  ou  d'un  alto,  est  montée  de  6  cordes  en 
bo^rvu  et  de  6  cordes  en  faûton  :  l'archet  ne  sert  que  pour 
lee  cordes  en  boyau,  qui  sont  montées  par  qnartes,  à 
l'exception  de  la  3*  et  de  la  4*  qui  son»  à  la  tierce  l'one 
de  l'autre;  les  cordes  en  laiton  sont  passées  sous  le 
manche,  et  résonnent  à  vide  harmoniquement.  La  Ke^ 
màngth^goux  n'a  que  deux  cordes  :  son  manche  est 
cvlindrique  de  leur  cOté;  la  table  d'harmonie,  au  lieu 
<f  être  en  bois,  consiste  en  une  peaa  de  requin  collée  sui 
les  bords  d'une  noix  de  coco,  qui  forme  le  corps  de  Tin- 
strument;  les  cordes  sont  accordées  à  la  quarte,  La  Ke^ 
mângéhr-farkh  ne  diflère  de  la  précédente  que  par  son 
accord,  qui  est  d'une  quarte  plus  élevé.  ^  Les  Turcs  ont 
trois  instruments  du  même  genre,  quils  appellent 
Keman,  AjakH-kema»  et  Sine^keman, 

KSPnLWORTH  (Château  de),  en  Angleterre,  dana  le 
comté  de  Warwick.  Ce  château,  immortalisé  par  un  ro- 
man de  Walter  Scott,  remontait  au  roi  Henri  I^,  et  fat 
donné  par  la  reine  Elisabeth  au  comte  de  Leicester. 
Cromwell  le  flt  démanteler,  mais  les  mines  en  sont 
tot^ours  magniflques.  Le  donjon,  vulgairement  appelé 
IVNÎr  de  César,  et  dont  les  nnuaiiles  ont  en  certains 
,  points  Jusqu'à  5  met  d'épaisseur,  présente  encore  la 
salle  bioronale.  longue  de  28  met.,  sur  15  de  large. 

KENSINGTÔN  (Palais  de),  palais  situé  à  l'extrémité 
ocddentale  de  Londres,  dans  le  quartier  de  l'aristocratie. 
Son  architecture  est  irrégulière,  et  il  n'a  dHmposant  que 
ses  proportions*  Guillaume  III  l'acheta  au  lord  chancelier 
Finch,  et,  apH»  lui,  les  reines  Harie  et  Anne  aimèrent  à 
y  habiter.  Les  apparlenenta  sont  ornés  de  portraita  et 
de  tableaux  de  prix;  Kent  a  peint  le  grand  escalier  ei  les 

{>lafonds  de  plusieurs  salles.  Biais  ce  qui  a  fait  surtout 
a  réputation  de  Kensington,  ce  sont  ses  Jardins,  des- 
sinés sous  la  direction  de  la  reine  Caroline,  femme  de 
George  n.  Six  portes,  dont  quatre  ouvrent  sur  Hydc- 
Park,  donnent  au  public  accès  dans  cette  promenade. 

KÉPI ,  sorte  de  casauette  légère,  en  drap,  un  peu  co- 
nique, et  avec  une  visière  de  cuir  verni.  Il  fut  d'abord 
adopté  par  qudques  corps  des  troupes  françaisea  en 
Afrique,  après  la  conquête  d'Alger,  puis  se  répandit  dans 
le  reste  de  l'armée.  On  le  porte  en  petite  tenue  pour 
remplacer  le  shako. 

KERATION,  monnaie.  F.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graiphie  et  d'Histoire. 

KÉRADLOPHONE,  Jeu  d'orgue  qu'on  appelle  aussi 
Flûte  à  entailles.  B  appartient  à  la  catégone  des  Jeux 
ouverts  à  bouche.  Son  intonation  est  celle  du  huit-pieds; 
mais  le  procédé  des  entailles  peut  s'appliquer  à  tous  les 
Jeux  àtuyaux  ouverts,  quelle  que  soit  leur  intonation.  Le 
timbre  distinctif  de  ce  jeu,  qui  rappelle  dans  ses  notes 
graves  celui  du  cor,  est  produit  par  un  trou  rond  ou 
carré  convenablement  disposé  dans  la  partie  supérieure 
du  tuyau.  F.  C. 

KERMESSE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

KETCH,  navire  anglais  de  50  à  200  tonneaox,  à  poupe 
carrée,  portant  un  grand  m&t  et  un  mftt  d'artimon, 
gréant  ses  voiles  sur  des  cornes,  et  portant  deux  grands 
focs  sur  son  beaupré,  qui  est  peu  relevé. 

KHAN,  nom  que  les  Orientaux  donnent  à  tout  cara- 
vansérai  situé  dans  l'intérieur  d'une  ville. 

KHARl  BOU.  V.  Indiennes  (Langues). 

KHILAT,  nom  commun  à  tous  les  dons  que  font  les 
sultans  de  l'Orient,  comme  témoignage  d'honneur;  ce 
sont  des  pelisses,  des  ch&Ies,  des  turbans,  des  pièces  de 
brocart,  des  armes,  des  chevaux,  des  éléphants,  etc. 

KHOTBAH,  prière  musulmane  pour  le  prince. 

KIBITKA,  voiture  russe,  munie  à  l'arrière  d'une  ciqxMe 
en  tresse,  qui  garantit  contre  l'intempérie  des  saisons. 

KIN,  instrument  de  musique.  V.  GmNB  (Musique  en). 

KING  (Les^.  V.  Chinoisb  (Littérature). 

KINNOR,  instrument  à  cordes  des  Hébreux.  Il  avait, 
selon  Josèphe,  10  cordes,  qu'on  touchait  avec  un  plec- 
trum;  cependant  la  Bible  dit  positivement  que  David 
jouait  du  kinnor  avec  la  main.  Quant  à  la  forme  de  cet 
ustrument ,  les  uns  croient  qu'elle  était  celle  de  notre 
harpe  ;  les  autres  inclinent  pour  la  guitare.  S^  Jérème  lui 
attribue  la  figure  du  delta  grec  f  A)  et  24  cordes.  U  paraît 
qu'il  y  avait  une  espèce  particulière  de  kinnor  à  8  cordes, 
appelé  Scheminith.  B. 

KIOSQUE ,  mot  d'origine  turque,  désignant  un  petit 
pavillon  ouvert  de  tous  côtés,  placé  sur  une  terrasse  ou  à 
l'extrémité  d'un  Jardin,  et  consacré  à  prendre  du  repos 
pendant  les  chaudes  heures  du  Jour.  On  a  imité  coea 
nous  ces  constructions,  en  leur  donnant  le  plus  souveni 


KOR 


1116 


RYR 


des  loltB  à  la  chinoise;  mais  notre  climat  exige  qu'elles 
ment  presque  toujours  fermées.  Vers  i855,  des  kiosques 
ont  été  placés  dans  les  jardins  publics  et  sur  les  boule- 
nids  de  Paria,  pour  senrir  d'abri  à  des  marchands  de 
jouets  d*enfants  ou  de  journaux. 

KITÂB  EL-AGHANI,  c-à-d.  lAvrt  dès  poésies,  recueil 
nés-important  de  morceaux  de  la  littérature  arabe,  dont 
il  existe  un  numuscrit  à  la  Bibliothèque  impériale  de 
Pferis  et  un  antre  à  celle  de  TAcadémie  des  Sciences  de* 
S^Pétersbourg.  L*auteur  de  ce  recueil  est  El-Isfahanl. 
Sylvestre  de  Sacy  et  Kosegarten  en  ont  publié  dea  extraits. 

KUFPBR.  V.  Cuma. 

KLOSTERNEUBURÔ  (Abbaye  de),  prèa  de  Vienne  en 
Autriche.  Cette  abbaye  d*Augustins,  Tune  des  plus  riches 
derEmnire  autrichien,  fut  fondée  au  commencement  du 
in*  siècle  par  le  margrave  Léopold  le  Saint.  Les  b&ti- 
ments  actuels  du  couvent  ont  été  pour  la  plupart  con- 
struits en  1730  et  agrandis  en  1834  :  ils  contiennent  une 
im])ortante  bibliothèque,  un  cabinet  d'objets  d'art  et 
d'histoire  naturelle,  une  galerie  de  tableaux,  et  des  caves 
immenses.  L'église,  rebfttie  à  la  suite  d'un  incendie  en 
1318,  a  conservé  quelques  débris  des  anciennes  construc- 
tions. L'une  de  ses  tours  date  de  1584,  l'autre  de  1637.  A 
l'intérieur  de  Tédiflce,  on  remarque  les  stalles  du  chœur, 
la  cliaire  en  nuu-bre,  une  ch&sse  émaiUée  qui  contient 
les  restes  de  S*  Léopold,  un  autel  à  volets,  exécuté  en 
1181  par  Nicolas  de  Verdun,  et  recouvert  de  51  plaques  de 
métal  où  sont  niellés  divers  épisodes  de  la  Bible,  enfin 
la  couronne  archiducale  de  Bfaumilien,  fils  de  l'empereur 
Maximillen  II,  reproddte  exactement  dans  la  couronne 
colossale  en  cuivre  qui  surmonte  l'une  des  tours  de 
révise.  Le  cloître,  de  1285,  renferme  une  croix  de  bois 
sculpté,  véritable  chef-d'œuvre. 

KTiOCT.     )  y.  ces  mots  dans  notre  Diction- 

KNOW-WOTHING.  ]     nair»  de  Biogr.  et  d^Histoire. 

KOBANG,  monnaie  d'or  du  Japon.  Le  vieux  kobang 
vaut  63  fr.  75  c,  le  nouveau  30  fîr. 

KOBIZE ,  instrument  de  musique  des  Kirghizes.  C'est 
une  espèce  de  violon  ouvert  à  la  partie  antérieure,  con- 
care  A  Tintérieur,  et  monté  ordinairement  de  trois 
grosses  cordes  en  crin  de  cheval.  Pour  en  jouer,  on  le 
tient  entre  les  genoux  :  les  sons  n'en  sont  ni  agréables  ni 
purs.  Quelques  Kirghizes  savent  imiter  avec  cet  instru- 
•ment  le  chant  de  plusieurs  oiseaux. 

KOBSA,  instrument  de  musique  en  usa^  chez  les 
Vddo-Valaques.  Cest  une  espèce  de  mandohne  à  cordes 
de  métal ,  qui  sert  de  basse  au  violon  et  à  la  flûte  de  Pan. 

KOGS,  nom  donné  en  Danemark  aux  terrains  que  l'on 
gagnr^  SUT  la  mer  en  les  entourant  de  digues. 

KOLBACK,  coiffure^  F.  Colback. 

KOLENDA,  nom  que  l'on  donne,  en  Pologne  et  dans 
les  provinces  roumaines,  à  des  cantiques  ou  chansons 
populaires,  chantés  par  des  tfxmpee  d'enfants  devant  les 
fenêtres  des  maison»  seigneuriales,  la  veille  de  Noél  et 
du  nouvel  an.  Ce  sont  les  Noëls  de  notre  moyen  &ge. 

KOLOUCHE  (Langue),  langue  parlée  sur  la  côte  N.-O. 
de  l'Amérique  septentrionale.  Phisteurs  mots  y  commen- 
cent et  d'autres  finissent  par  t2,  comme  en  mexicain;  dans 
aucun  on  ne  trouve  l'r.  Le  nombre  et  le  genre  ne  sont 
pas  indiqués  par  des  terminaisons  diflérentes.  Plutôt  que 
d'emprunter  dee  mots  aux  étrangers,  les  Kolouches 
créent  des  mots  nouveaux  chacune  fois  qu'ils  ont  à  dési- 
gner des  objets  précédemment  inconnus. 

KOKK ,  monnaie  russe,  en  cuivre,  valant  4  centimes 
de  notoe  monnaie. 

KOPFSTUCK,  c-à-d.  pièce  à  tête,  monnue  d'argent 
autrichienne,  vaJant  80  kreuzer  ou  86  centimes  et  demi. 

KOPPA,  ancienne  lettre  grecque,,  en  usage  surtout 
cfaex  les  Doriens,  et  dont  les  Romains  firent  le  Q.  On  ne 
l'employa  ensuite  chez  les  Grecs  que  comme  lettre  nu- 
n^rale,  valant  00. 

KORAN.  V.  CoRAH,  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
§raphu  et  d^Histoirei 

KORÉISCH  ou  KORÉISCHITE  (Dialecte),  ancien  dia- 
lecte de  l'Arabie,  parlé  à  la  Mecque  et  dans  le  Nord.  II 
fut,  dit-on,  primitivement  composé  d'hébreu  mêlé  à  la 
angoe  des  Joramites,  tribu  avec  laquelle  Ismaôl  fit 
sDianoe  après  son  arrivée  dans  le  désert.  Par  suite  de 
l'aflloenoe  des  pèlerins  de  diverses  tribus  qui  venaient  à 
la  Hsoque  visiter  la  Càba,  il  s'appropria  les  expressions 
les  plus  heureuses  du  dialecte  de  chacune,  et  acquit  ainsi 


une  grande  ahondanoe,  sans  perdre  son  hoinoMénéHé» 
Au  temps  de  Mahomet,  il  devint  le  fond  même  de  la 
langue  arabe. 

KOUAN,  monnaie  de  compte  de  l'Empire  d'Annam, 
valant  en  moyenne  1  fr.  10  c. 

KOUAN-HOA  (Langue).  F.  Choioisb  (Langue). 

KOUFIQUE  (Écriture).  F.  CocnguE. 

KOURDE  ou  KURDE  (Idiome),  idiome  de  la  même  fa- 
mille que  le  persan  moderne.  Il  s'est,  plus  que  lui  en- 
core, éloigné  du  zend.  D  n'a  point  de  flexions  pour  indi- 
quer les  nombres  et  les  cas,  et  manque  également  du 
verbe  substantif.  Gonnne  en  hébreu,  le  sufel  et  l'attribut 
s'énoncent  sans  l'intermédiaire  dHine  copule  verbale.  La 
conjugaison  n'a  que  deux  temps,  dont  l'un  n'est  que  l'in- 
finitif précédé  du  pronom  personnel ,  et  l'autre  répond  à 
l'aoriste  persan.  On  trouve  dans  le  kourde  un  certain 
nombre  de  termes  arabes,  turcs,  araméens  et  grecs,  ap^- 
portés  psr  les  révolutions  religieuses  ou  politiaues,  mais 
qui  ne  peuvent  se  confondre  avec  le  fonds  de  la  langue. 
K.  Garzoni,  Grammatica  e  wcaJMario  deUa  lingua 
kurda^  Rome,  1786,  in-8<>;  Rédiger  et  Post,  Études 
kourdes,  dans  le  Jourtèol  asiatique  aUemand,  Bonn, 
1840. 

KOURGANES,  élévations  coniques  en  t^re  que  l'on 
rencontre  au  N.  de  la  mer  Noire  et  de  la  mer  d'Azow. 
Recouvertes  de  gazon,  elles  offrent  une  analogie  frap- 
pante avec  les  tumulus,  les  barrows,  et  les  gtugals;  il 
est  rare  que  leur  hauteur  soit  moindre  de  3  met.  et  dé* 
passe  8  à  10  met.  On  croit  que  les  Kourganes  servirent 
de  lieux  de  sépulture.  Peut-être  les  érigea-t-on  dans  les 
endroits  de  campement  des  tribus  nomades,  ou  pour 
faire  reconnaître  la  route  à  suivre  au  milieu  des  steppes. 

KOURUJEN  (Idiome),  idiome  parlé  non -seulement 
dans  l'archipel  des  Koauiles,  mais  dans  l'Ile  Tairakaî ,  et 
sur  le  continent  asiatique,  vers  l'embouchure  de  l'Amour. 
Dans  les  lies,  on  le  nomme  encore  aifno.  Il  offine  plusieurs 
racines  communes  aux  idiomes  sibériens,  et  spéciidement 
au  samoyède. 

KOURNA  (Palais  de).  F.  Thèbes. 

KOU-WEN  (Langue).  F.  Chjmoisb  (Langue). 

KRABS,  jeu.  F.  Crbps. 

KREBiLIN.  F.  Moscou. 

KREUZER,  monnaie  allemande,  dont  la  valeur  varie 
suivant  les  États,  et  dont  le  nom  dérive  de  la  croix  (en 
allemand  kreuz  )  dont  elle  porte  l'empreinte.  On  compte  ' 
ordinairement  00  kreuzer  au  florin,  et  90  au  tfaal^  :  c'est 
enviren  3  centimes  6/10  par  kreuzer.  En  Autriche,  le 
kreuzer  est  une  monnaie  réelle,  en  cuivre,  valant  4  pfen* 
nings,  c.-à-d.  à  peu  près  A  centimes,  et  on  frappe  des 
1/2  et  des  1/4  de  iureuzer  :  il  y  a  aussi  des  pièces  d'argent 
de  3,  de  5,  de  10  et  de  20  kreuzer. 

KROXENTHALER,  monnaie  d'argent  allemande,  dont 
la  valeur  a  varié  entre  5  fr.  65  c  et  5  fr.  72  c. 

KRUMHORN.  F.  Cromornb. 

KUblQUE  (Écriture).  F.  CounQus. 

KURDE.  F.  Kourde. 

KURTKA,  sorte  d*habit- veste  d'origine  polonaise, 
adopté,  sous  le  premier  Empire  ftunçais,  pour  les  lan- 
ciers de  la  garde  impériale  et  les  bmciers  polonais. 

KUSSIR,  instrument  de  musique  des  Turcs,  composé 
de  5  cordes  tendues  sur  une  peau  qui  couvre  une  eapèoe 
d'assiette  de  bois. 

KWETZ,  instrument  de  musique.  F.  Agada. 

KYMRIQUES  (Langues).  F.  Celtiques. 

KYRIE  ELEISON,  mots  çrecs  oui  signifient  Seigneur, 
ayez  pitié.  Cest  une  invocation  qui  fait  partie  de  la  Messe, 
et  qui  se  place  entre  VlntrcU  et  le  Gloria  in  excelsis. 
On  répète  trois  fois  Kyrie  eleison^  puis  trois  fois  Christe 
eleison,  et  encore  trois  fois  Kyrte  eleison,  pour  adorer 
successivement  et  également  les  trois  personnes  de  la 
sainte  Trinité.  On  récite  aussi  le  Kyrie  au  commence- 
ment des  Litanies.  Le  Kyrie  est  en  usage  dans  l'Église 
depuis  le  iv*  siècle  ;  ce  fut  le  pape  Sylvestre  I*'  qui  T'in- 
troduisit en  Occident.  Pendant  plusieurs  siècles  encore, 
le  diant  des  hynmes  et  des  psaumes  resta  confié  aux 
prêtres  :  les  fidèles,  qui  n'y  comprenaient  rien  et  qui 
avaient  de  la  peine  à  prononcer  les  paroles  latines,  ne 
chantèrent  que  des  suites  de  Kyrie  eleison,  ou,  comme 
on  a  dit,  oes  Kyrielles,  Le  Kyrie  fut  aussi  employé 
comme  refrain  de  chants  de  guerre  écrits  en  langue  vul- 
gaire. £» 


L|  13*  iBttra  n  e*  eontonne  de  notre  alphabet.  Elle  eM 
■ne  dM  eoDHQnea  qualifléoB  de  lùpùdM  et  de  Imguaiti 
(V>  cee  mota).  Nous  diatiagaoDa  l'f  ordinaire,  dan»  mo- 
iâd»,  eéittU,  ehaitmr,  etc.,  M  l'f  mooillëe,  dont  le  un  est 
tout  «Uirérttit,  dans  famiiU,  brillant,  somtoml,  rouUlt, 
itail,  etc.  La  conionna  I  n'eit  juniia  mouillée  au  com- 
mBDcementdwmotai  k  toute  antre  place,  il  nVapaide 
rt^e.  e'eat  Twage  qal  en  décide.  Le  boq  de  notre  1 
mouillée  CM  donné  en  eepa^ol  ani  deux  1  qui  commen- 
cent no  mot  (llMwr,  tlamar,  etc.),  et  en  portugais  au 
groupe  16  {Ihmo,  umtiêr),  comme  en  tanfaia  dan*  gm- 
ttUomiM.  A  la  fin  de  certaine  meta,  I  wt  muette  :  outU, 
fWtil,  foah.  SouTent  aiuai  en  «n^ais  on  ne  la  prononce 
pM,  comme  dan*  unmU,  eouU,  heif,  talmon.  Dani  le 
paaèage  d'nne  lancne  à  une  autre,  I  môinute  aouTent  arec 
r  :  ^nsi,  lea  Launa  TormArent  batatimi  du  grec  bara- 
lAm;  DODi  aTDM  fait  )>él«rin,  dn  latin  pwsirriniu,  et,  par 
KO»  nbitittitlon  InTsne,  07in«,  de  ulmus.  Les  Cblaoia, 
ifnl  ne  peuvent  prononcer  la  lettre  r,  lui  substituent  i,  ce 
qne  font  ouelquefoii  chei  nous  lee  eabots,  qai  disent, 
par  exemple,  moi  pour  bnu,  gloi  pour  çroi.  En  passant 
do  latin  en  français,  la  syllabe  ai  eet  sourent  dsTonue 
Mt  ;  almi  aiba  a  fait  aube.  One  subatltutian  de  ce  der- 
nier genre  a'eet  faite  de  eotUd,  fcel,  col,  wl,  i  eouUau, 
•ceoH.  cou,  (OU,  et  »e  fait  encore  en  formant  le  pluriel 
deeiMiMen(il(MaJ,nHMtz;  Omal.dmaïuB,  etc.)  — 
Comme  abrériatlon,  let  Ixtim  emplmlent  L  povr  la- 
ItMt,  iMchu,  Larm,  lepio,  Ugatui,  Ux,  tibra,  libiKi, 
tthrlui,  etc.!  LLS  pour  tetttrtiiu  (libra  ttrnu).  Dm* 
lêa  dlpIOmee  do  moyen  Ige,  LS  slgniBe  lociu  hgilli;  dana 
iManconp  de  lime  modernea,  J.  e.  et  I.  d.  teulent  dire 
tooo  eitoio,  loëo  Itmioto  (paasage  cité).  En  fïançAia,  L 
s'emploie  pour  Loau,  Lactm;  LL.  AA.  pour  Lturt  Àl- 
JH«M,'  Ub  HM.  pour  Lturt  MajitUs  :  J  signille  limu  on 
ïttn;!.  c,  JieiM  earrie:i.it.,  iiurt  ittrUng.  Lei  Anglais 
■e  serrent  de  L  pour  lord,  I~  L,  pour  t(r-d-linUmant, 
{LL.  D.  pour  doclfur  ii  lois  civtiet  tt  et  IM*  toclitiat- 
tùpiti.  —  Chez  lee  Greca,  le  lambda  (X],  employé  comme 
risne  muni' 
on  30,000  1 

L  50,000.  -    ._  , 

ftappéa  i  Savonne. 

LA,  iwto  de  mudoue,  la  0*  de  notre  gamme  d'»l.  An- 
treTota  on  la  nommait  A.  —  La  eat  aussi  le  nom  de  la 
S*  corde  du  riolon,  et  de  la  cbanterelle  ou  1"  corde  de 
l'alto,  du  Tloloacella  et  de  la  contre-beaee,  Ceit  sur  cette 
note  qne  s'accordent  lee  instrument*  et  qu'est  r^é  le 
^paaon  (C  M  mol);  de  là  le*  expressions  donn«r  et 
fnndr»  la  lu.  B. 

LAACH  (Abbaye  de),  dans  la  Pnisoa  rhénane.  Cette 
■bbaye,  fondée  eo  1003  par  Henri  de  Uach,  comte  pala- 
tin du  Rhin,  fnt  une  dee  pins  richea  de  l'Allemaigne.  Le 
monantee  comptait  plus  de  SOO  cbambrea  :  une  aile 
ét^t  réserrée  aux  étrangère  de  passage,  une  autre  aux 
btralide*  et  aux  paunes  de  la  contrée  i  il  y  iTsIt  aussi 
ane  bibtiothigue  et  une  islerie  de  tableaux.  Sécularisée 
en  1803,  rabbaye  de  Laacli  tnt  Tendue  et  transformée 
•n  ferme  et  en  anbern.  L'4diae  seule  est  restée  la  pro- 
priété de  mat,  qui  l'eDtretlBnt  i  c'eat  no  de*  échantll- 
nns  Im  plu*  complets  qui  eilHent  dn  s^ls  roman.  On 
T  entre  par  an  beao  doUre. 

LABAROM.  V.  ce  mot  dan*  notre  Dietionnain  d»  Bto- 
iraphi*  tt  tHUtoin. 

LABDACISUB,  mot  formé  de  idbda  ou  lanAda,  nom 
de  la  11*  lettre  de  l'alpbabet  grec.  Il  désignait  la  pronon- 
ciation Tldeiiae  et  trop  pleine  du  X,  ou  la  répétition  tré- 
qoeole  de  cette  lettre  dana  ane  phrase  ou  dans  plnaleun 
meta  de  aulte.  IM  Romain*  désign^ent  par  le  même  mot 
la  répétition  multipliée  de  j,  comme  dans  cette  phnae  i 
mI  tt  Ima  tue*  JuMnt  aibi,  Uoi,  iaettà;  ou  la  pronon- 
dailea  trap  fwte  de  cette  lettre  dana  lee  mots  où  ^e  de- 
Tah  10  prononcer  légèrement  (comme  tll*.  nlliiim,  Jana, 
Itgo),  xnp  bibie  dana  ceux  oA  on  devait  Is  marquer  da- 
notage  (comme  olbui,  olpa).  L'emploi  de  t'I  par  attrac- 
tion poBRtft  être  anid  désigné  de  même  :  illiMlrot  pour 
Mhuîral.  ediDqmum  poor  eonJaquitun,  etc.  P. 


LABIALES  (ConaonaBs),  dn  lattn  tabla  (lérras)  i  cm 
sonnes  qui  se  prononcent  par  le  mouvement  des  Itnd 
ou  plutAt  L  la  prononciation  desquellsa  le  mouvammi 
des  lèvres  contribue  printipalement.  Tellea  swit  o,  (,  b, 
p,  m;  cette  dernière  est  demi-laUale  et  demi-nasale.  Le* 
labiale*  ont  entre  elles  une  telle  affloité,  que,  dans  la 
compositian  et  dana  la  dérivation,  elles  se  prennent  k* 
unea  pour  le*  autres  :  ainti  les  mot*  tatina  noinu  et  •» 
Mm  sont  derenuB  iwti^ en  lïançais  ;  boM^a  formé  6oooHr; 
lo  latin  «ertieii;  a  formé  btrbû  et  brtbit,  tountmt  estlt 
même  mot  que  le  latin  tubindt;  qtùeopiu  eat  dartn 
oMCOto  en  Italien,  bitchoff  en  allemand ,  bithof  en  *a> 

Elais;  marmor  est  derenn  marbri.  Le  grec  a  troi*  la> 
laies.  S,  c,  o.  P. 

LABOimOlN  (Dialecte}.  V.  BasQoa. 

LABRUM,  vase  ou  basaln  dont  les  Romains  ae  aer- 
valent  pour  leurs  ablution*  dans  lea  bains  et  dam  les 
temple». 

LABYRINTHE.  Ce  mot.  appliqué  i  plusieurs  :none- 
menu  de  l'antiquité  {V.  aotre  Dtctionnatrc  d»  Bioifrajilm 
et  d'Hitlûirej,  nq>pelle  anssi  une  disposition  particulièie 
du  pavage  Aet  églises  an  moyen  ïge.  L'an»ngameiit,  la 
coupe  et  la  couleur  dee  pevés  formuent.  par  leurs  eont- 
binations,  des  ligne*  linoeuses  conduisant  par  de  noiD> 
breux  détours  à  dilfâwites  station*,  et  flnalement  i  n* 
Calvaire  Ognré.  Les  fldèlea  qui  ne  pouvaient  accomplir  le 

Èlerinage  de  la  Terre  Sainte  venaient  parcourir  ta 
tyrlnthea  mystiques,  pieds  nus  ou  à  gononi,  s'an^ 
tant  aux  diveraes  station*.  Jusqu'à  ce  qnlls  rossent  snivés 
au  pied  du  Calvaire.  Quelque*  abn*  sortirent  de  cet* 
coutume  religieuse  i  les  enl^ta  en  faisaient  un  amne» 
mant.  Peu  à  peu  lliabllade  de  ce  pèlerinage  en  minia- 
ture disparut  avec  celle  des  pèlerinages  loinUdns,  et  k 
clergé  Ht  enlever  en  beaucoup  d'endnrfts  les  labyrinlbes 
comme  Inatiles  et  gSnania.  Le  labyrinthe  de  Sens,  d^ 
tnilt  en  17G8,  et  celui  d'Amiens,  détruit  en  lS15,avtdeDl 
'  Qtnieur:  celui  de  Chartres,  ool  sobslsle 
I.  On  en 


EdïyrMb  ib  SaM-QmrUm. 

Bayeux.  Dans  le  iabyriothe  de  Reims,  appelée  Chem» 
di  Jiruialmt,  et  détroit  en  1779,  on  décblRtalt  le  nom 
des  quatre  architectes  de  l'ésllse.  Le  dessin  da  labyrtntta* 
de  l'ancienne  ^Uae  S'-BertTn  i  S>-Omer  noua  a  été  mo- 
•orvé,  E,  L. 

LAanuNTsa,  nom  donné  k  dea  allées  concentriqo**  éta- 
blies pour  l'oriMinant  des  parcs  et  de*  lardins.  On  en  a  na 
mod^  an  lardln  des  Planlea  da  Paris,  au  monticule  »• 
marquaUe  par  on  vieui  cèdre  du  Uban.  Ce  labyrlniM 
est  urminé  mr.nnjolikiosqueàjour,  tout  eol»eiuat*> 


LAC 


1137 


LAE 


^9ù  Ton  Jouit  d*iixie  assez  belle  Tue  sur  une  partie  de 
Faris. 

LAC,  amas  d*eao  entourée  de  tous  côtés  par  ta  terre  et 
n*ayant  avec  la  mer  aucune  communication,  au  moins  tm- 
meoiata.  Parmi  les  lacs  sans  écoulement,  les  uns,  comme 
celui  d*Albano  près  de  Rome,  sont  d'andens  cratères  de 
Yokan  remplis  d*eau,  ne  reçoivent  aucune  eau  courante, 
3t  sont  alimentés  par  des  sources  souterraines;  les  autres, 
situés  sur  des  plateaux  élevés  ou  au  milieu  de  dépressions 
profondes,  reçoivent  souvent  des  fleuves  considérables 
sans  que  leur  niveau  s*élève,  parce  oue  la  quantité  d^eau 
qui  s'en  évapore  est  égale  à  celle  qui  s*y  verse,  ou  bien 
parce  que  le  fond  de  ces  lacs  est  de  nature  poreuse  et  ab- 
sorbe une  partie  de  leurs  eaux  :  tels  sont  le  Balaton  et  le 
Neusiedel  en  Europe,  la  Caspienne,  TAral,  les  lacs  Bal- 
kasch,  Dzalsang,  Issikoul,  Van  et  Ourmiah  en  Asie,  le 
Tchad,  le  N'gami,  le  Nyassi,  rUkerewe,  et  TUJiji,  en  Afri- 
que, etc.  En  Amérique,  les  lacs  sans  écoulement  sont  réunis 
entre  eux  par  des  rivières,  oui  sont  de  véritables  déversoirs 
appelés  par  les  Espagnols  besaguaderos  ;  par  exemple,  le 
Titicaca  et  le  Pansa,  le  Salé  et  TUtah.  Dans  TAustralie, 
les  lacS'Tiorrents  Gairdner,  Grégory,  généralement  peu 
profonds,  varient  étrangement  d'étendue,  suivant  Tépoque 
de  la  saison  sèche  et  pluvieuse.  Le  caractère  général  des 
lacs  sans  écoulement  est  leur  salure  extrême,  souvent 
plus  prononcée  que  celle  de  TOcéan,  et  qui  augmente 
lans  cesse,  les  misères  salines  apportées  par  les  eaux  se 
déposant  au  fond  des  lacs  sans  Jamais  être  emportées  par 
les  courants.  —  Les  lacs  à  écoulement  sont  aussi  de  deux 
sortes  :  ceux  qui,  placés  souvent  à  de  grandes  hauteurs, 
Boorris  par  de  petits  filets  d'eau  presque  invisibles  ou 
par  des  canaax  souterrains,  servent  de  sources  à  de 
grands  fleuves,  comme  Tltasca  au  Missîssipi  ;  et  ceux  qui 
reçoivent  et  émettent  des  eaux  courantes  qui  les  traver- 
sent. Ces  derniers  se  rencontrent  surtout  au  sortir  des 
contrées  montagneuses,  à  l'endroit  où  les  fleuves,  dont  ils 
ne  sont  proprement  que  des  dilatations,  rencontrent  une 
vallée,  s^y  précipitent,  et  la  remplissent  Jusqu'à  ce  que 
leurs  eaux  soient  arrivées  au  niveau  du  bord  opposé  et  le 
dépaasenL  Ainsi  se  sont  formés  les  lacs  de  la  Suède, 
eeox   de  Constance,  de  Genève,  de  Garde,  de  Gôme,  le 
lac  Mi^^Bor*  le  Baikal  en  Asie,  le  Dembéa  en  Abyssinie. 
Les  lacs  à  écoulement  reçoivent  et  absorbent  les  matières 
tcrrenaes  qne  les  fleuves  charrient  :  ainsi ,  le  Rhône, 
très-troable  à  son  entrée  dans  le  lac  Léman,  en  sort  clair 
et  limpide  à  Genève.  Seulement  cet  apport  d'alluvions 
rétrécit  sans  cesse  l'étendue  des  lacs  et  augmente  d'au- 
:aat  la  Tallée  solide  des  fleuves.  Le  caractère  le  plus  re- 
marquable de  ces  lacs,  et  qui  leur  a  fait  donner  le  nom  de 
Ues  régtUaUurs,  c'est  d'établir  une  sorte  de  système  de 
comperâation  entre  les  saisons.  Quand  la  masse  d'eau 
qm  descend  des  montagnes  est  très-considérable,  le  lac  la 
reçoit  sans  que  son  niveau  augmente  brusquement,  et 
par  coq^équent  sans  que  l'affluent  qui  déverse  le  surplus 
des  eanx  grossisse  subitement  en  dévastant  les  cam- 
pagnes; de  même,  quand  les  ruisseaux  qui  alimentent 
le  ne  se  dessèchent  ou  diminuent,  le  niveau  du  lac  baisse 
très-lentement  à  cause  de  la  vaste  étendue  de  sa  surface, 
n>  le  fleuve  auquel  il  donne  issue  n*est  point  sensible- 
ment amoindri  ;  les  lacs  régulateurs  gardent  les  eaux  de 
nnondation  pour  les  Jours  de  sécheresse.  Dans  les  pays 
pourvus  de  ces  lacs,  comme  la  Lombardie,  les  inonda- 
tions sont  régulières,  maîtrisées  à  volonté,  et  les  eaux, 
réparties  dans  d'innombrables  canaux,  servent  à  la  dé- 
fense on  à  la  fécondation  du  sol,  comme  dans  les  fertiles 
plaines  et  les  rixières  de  la  Lombardie.  Dans  les  autres, 
eOes  sont  des  fléaux  dévastateurs  :  il  en  est  ainsi  dans  le 
faaann  inférieur  du  Rhône,  parce  que  ce  fleuve,  grossi 
par  la  Saône,  l'Ardèche,  l'Isère,  la  Durance,  n'a  plus, 
comme  en  Suisse,  de  grand  lac  qui  retienne  le  surplus  de 
ses  eanx.  Aussi  sonse-t-on  aujourd'hui  à  combattre  et  à 
inéfeolr  même  les  inondations,  non  plus  par  des  levées 
au»  cesse  emportées,  et  qui  ne  servent  qu'à  exhausser  le 
fit  des  fleuves  en  arrêtant  les  alluvions,  et  conséquemment 
tD  anmentant  le  péril,  mais  par  des  barrages  et  des  lacs 
irtûdâs  qoi  Joueraient  le  rôle  de  lacs  régulateurs.  Les 
Andeos  en  ont  donné  l'exemple,  puisque  les  rois  d'Egypte 
et  de  Babylone  firent  creuser  ou  agrandir  les  lacs  Mceris 
tt  Pallaoopas  pour  servir  de  régulateurs  aux  inondations 
da  NU  et  de  TEaphrate.  —  Quelouefois,  au  lieu  d'un 
■ail  bc  régniatenr,  il  y  a  plusieurs  nassins  superposés  et 
cnmmf  |]es  étagBS  successifs  de  lacs  :  ainsi,  en  Suisse, 
^Aar  parcourt  l'un  après  l'autre  les  lacs  de  Brienz  et  de 
Ibun,  la  Thiële  ceux  de  Neufchfttel  et  de  Bienne;  en 
Âonje,  le  lac  Lagoda  reçoit  par  la  Svir  les  eaux  du  lac 
0D^^  par  le  V^olcbow  celles  du  lac  Jlmen,  et  les  dé- 


verse par  la  Neva  dans  le  golfe  de  Finlande;  en  Amé^ 
rique,  cinq  lacs,  qui  semblent  des  mers  d'eau  douce,  let 
lacs  Supérieur,  Mlchigan,  Huron,  Érié,  et  Ontario,  se  dé- 
versent l'un  dans  l'autre,  les  deux  derniers  par  le  Ni»- 
gara,  et  arrivent  enfin  à  la  mer  par  l'estuaire  du  S^ 
Laurent.  G.  P. 

LAC,  bassin  de  fontaine  chez  les  anciens  Romains. 
F.  notre  Dictionnaire  de  Biograptiie  et  d^ Histoire, 

LACS  ET  ÉTANGS.  Chacuo  pout  fidro  des  lacs  et  étangs 
sur  sa  propriété,  pourvu  au*ils  ne  nuisent  pas  aux  droits 
d'autrui,  et  que  les  propriétés  voisines  soient  garanties  de 
tout  dommage.  Les  propriétés  inférieures  doivent  recevoir 
les  eaux  quand  on  met  ces  lacs  et  étangs  à  sec  pour  pê- 
cher :  c'est  une  servitude  imposée  par  la  situation  natu- 
relle des  lieux.  La  suppression  des  lacs  et  étan^p  peut 
être  ordonnée  par  le  préfet,  et  sans  indemnité,  s'ils  sont 
reconnus  cause  d'inondations  ou  d'insalubrité. 

LACS ,  mot  employé  autrefois,  en  termes  d'Architec- 
ture et  de  Passementeriei  comme  synonyme  d'entre-lacs 
{V,  ce  mot), 

LACEBNA,  vêtement  romain.        )  F.  ces  mots  dans 

LA  CHAISE  (Cimetière  du  Père),  f    notre  Dictionn»  de 

LACINIENNE  (Table).  \    Biogr.  et  d'Hist. 

LACK,  expression  monétaire  usitée  dans  l'Inde,  et  dé- 
signant une  somme  de  100,000  rouptei  (240,000  fr.)* 

LACONICUH.  F.  Bains. 

LACONISME,  lanpge  bref  et  succinct,  particulier  aux 
anciens  Lacédémoniens  ou  Laconiens.  Aux  sommations 
de  Xerxès  <|ui  lui  demandait  de  rendre  ses  armes,  Léoni- 
das  répondit  :  Viens  les  j^endre.  —  Ne  voulez-vous  pas 
me  recevoir  dans  votre  vtlle  ?  faisait  demander  un  Jour  le 
roi  Philippe  de  Ifacédoine  aux  magistrats  de  Sparte  i 
Non,  répondirentrils.  Le  même  prince  insultait  à  leur 
abaissement  depuis  les  rudes  coups  qu'ils  avaient  reçus 
d'Épaminondas  :  Denys  à  Corintne  fut  leur  réponse,  qui 
faisait  allusion  à  la  disgrâce  du  roi  de  Syracuse,  réduit  è 
se  faire  maître  d'école.  La  dépêche  qui  annonçait  à  Sparte 
la  victoire  de  Platées  (479  av.  J.-C.|  contenait  ces  seuls  . 
mots  :  {Les)  Perses  (sont)  humiltés.  Après  la  chute 
d'Athènes  à  la  fin  de  la  guerre  du  Péloponèse,  le  vain- 
queur écrivit  à  Lacédémone  :  Athènes  (est)  prise.  Le  Vent, 
vidi,  vici  de  César  est  un  laconisme.  —  Par  extension, 
le  mot  Laconisme  désigna  souvent,  chez  les  Anciens 
comme  dans  les  temps  modernes,  l'affectation  du  style 
bref  et  sentencieux,  l'union  de  la  sécheresse  à  un  excès 
de  brièveté.  Le  laconisme  ne  doit  donc  pas  être  confondu 
avec  la  concision  :  il  en  diffère  en  ce  <)u'il  dit  les  choses 
avec  le  moins  de  mots  possible,  et  qu'il  emploie  à  peine 
les  mots  nécessaires,  tandis  que  la  concision  consiste  à 
n'emplover  que  les  paroles  nécessainv;  '^  l'intelligence  de 
la  pensée.  La  concision  n'exclut  piui  Ifdée  de  certains 
développements  :  ainsi.  Tacite  et  Montesquieu  sont  des 
écrivains  concis,  mais  leur  style  ni  leurs  ouvrages  n'ont 
rien  de  laconique.  Homère  est  concis  lorsau'il  prête  à 
AJax,  enveloppé  dans  une  soudaine  obscurité,  cette  excla- 
mation adriœsée  à  Jupiter  :  Lumière,  même  au  prix  de  la 
vie!  Un  Spartiate  y  eût  trouvé  de  la  redondance.  Le  mot 
d*Athalie  dans  Racine  :  Toi  voulu  voir,  j'ai  vu,  est 
concis,  mais  non  point  laconicpe.  L'éclat,  la  grâce,  peu- 
vent se  concilier  avec  la  concision,  mais  sont  incompa- 
tibles avec  le  laconisme.  En  un  mot,  le  laconisme  ne 
saurait  ê^e  une  qualité  littéraire;  maà  il  convient  mer- 
veilleusement aux  dépêches  télégraphiques.  Voici  un 
exemple  du  laconisme  porté  à  ses  dernières  limites  :  deux 
amis.  Joutant  à  qui  ferait  la  lettre  la  plus  courte,  le  pre- 
mier, afin  d'atteindre  plus  aisément  son  but,  emprunta 
la  langue  latine,  et  écrivit  :  eo  riM  (Je  vais  à  la  cam- 
pagne) ;  l'autre  répondit  :  t  (va).  .  P. 

LACRYMATOIRE.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d^ Histoire. 

LACTAIRE  (Colonne).  F.  Colonnes  monumentales, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d*Histoire, 
page  634,  col.  1. 

LAC13NAR,  expression  qu'on  trouve  dans  les  écrivains 
ecclésiastiques  pour  désigner  un  plafond  en  bois,  plus  ou 
moins  orné,  par  opposition  à  caméra,  qui  signifie  voûte. 

LADÈRES,  nom  des  menhirs  dans  le  pa^s  chartrain. 
LACUSTRES  (Habitations).  F.  au  Supplément. 

LADRERIE.  (  F.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

LADY.  )      Biographie  et  d^ Histoire. 

LAEKEN  (Palais  royal  de),  dans  le  faubourg  de  ce  nom, 
au  N.  de  Bruxelles.  Ce  palais,  destiné  à  la  résidence  d'été 
des  gouverneurs  autrichiens  die»  Pays-Bas,  fut  b&ti,  de 
1781  à  1784,  sur  les  plans  de  l'archiduc  Albert  de  Saxe 
Teschen,par  les  architectes  Montoyer  et  Payen.  En  170 T. 
après  la  bataille  de  Jemmapes,  les  archiducs,  obligés  de 

7« 


LAI 


1138 


LAH 


Fibandonner,  en  enleràrent  une  grande  quantité  d'ob- 
jets précieux.  Le  chirurgien  Brahamon.  oui  racheta  quel- 
ques années  après,  commençait  à  lui  laure  subir  d*étran- 
oQs  mutilations,  lorsque  Bonaparte,  l*'  consul,  s*en  rendit 
acquéreur  en  1802,  et  le  fit  remeubler.  Le  palais  a  reçu 
de  notables  accroissements  depuis  1814.  La  façade  d*en- 
frée,  élé^te  et  spacieuse,  est  précédée  d*une  cour  d'hon- 
neur. Elle  est  ornée  d'un  portique  de  quatre  colonnes 
ioniques  qui  soutiennent  un  bel  entablement  où  Gode- 
vhanes  a  représenté  en  bas-reliefs  le  Temps  présidant 
%ux  heures,  les  quatre  époques  du  Jour,  et  les  Saisons.  l«s 
ailes  sont  formées  de  pavillons  ornés  de  pilastres  qui 
embrassent  le  premier  et  le  second  étage.  Vu  du  parc,  ce 
oàtiment  présente  une  façade  en  forme  de  rotonde,  avec 
des  pilastres  qui  soutiennent  l'entablement  et  l'attique 
surmontés  d'une  coupole,  et  ornés  aussi  de  bas-reliefs  par 
xe  môme  Godecharles  ;  les  ailes  sont  également  décorées  de 
pilastres.  De  ce  côté,  une  belle  pelouse,  encadrée  de  mas- 
sifs d'arbres,  descend  vers  la  Senne.  Des  parterres,  des 
fleurs,  des  serres,  une  orangerie,  une  grande  cascade,  un 
temple  du  Soleil,  contribuent  à  l'embellissement  de  ce 
parc. 

LiENA,  vêtement  romain.  V,  notre  Dictionnaure  de 
Biographie  et  d^Histoire, 

LiETARG,  nom  du  4*  dimanche  de  Carême.  Il  est  tiré 
de  ce  que  l'introït  de  la  messe  de  ce  Jour  commence  par 
les  mots  Latare,  Jérusalem  (réjouis-toi,  Jérusalem). 

LAGARES  (Vers),  c-à-d.  en  grec  vers  éreintés,  nom 
donné  par  quelques  grammairiens  anciens  à  certains  vers 
d'Homère  au  milieu  desquels  on  trouve  un  trochée  au 
lieu  d'un  spondée. 

LAGUNES,  amas  d'eau  peu  profonds  qui  se  forment 
sur  les  parties  basses  des  rivases,  princiiMiIement  entre 
les  bras  des  fleuves  à  deltas  ou  dans  leur  voisinage,  et  sont 
séparés  de  la  mer  par  des  flèches  ou  cordons  littoraux^ 
qu'interrompent  de  fré^entes  ouvertures.  On  les  ren- 
contre aussi  sur  des  rivages  où  ne  débouche  aucun 
fleuve,  mais  dont  le  sol  est  très-abaissé  et  baigné  par  des 
mers  peu  profondes  et  limoneuses  :  la  principale  de  ces 
lagunes  est  la  mer  Putride,  formée  par  la  mer  d'Azow 
entre  la  cête  orientale  de  Crimée  et  la  flèche  d'Ara- 
bath,  et  qui  présente  une  étendue  de  plus  de  S,000  kilo- 
mètres curés.  Les  lagunes  sont  redoutées  pour  les  fièvres 
dangereuses  et  les  maladies  pestilentielles  auxquelles 
elles  donnent  naissance. — On  nomme  aussi  Lagunes  des 
réunions  d'Uots  nombreux  et  bas,  sur  une  côte  maritime. 
La  Hollande  en  a  beaucoup,  et  Venise  entière  est  bâtie 
sur  des  lagunes  de  ce  genre,  formant  une  série  de  petites 
baies  que  des  barrages  naturels  appelés  lido  (nvage) 
séparent  de  la  mer.  C.  P. 

LAI,  c.-èr-d.  chant,  pièce  de  poésie  fort  en  vogue  chez 
nos  anciens  poètes.  Le  mot  était  à  peu  près  synonyme  de 
fabliau  (K.  oe  mot).  Le  lai  était  primitivement  un  récit 
de  grandi  et  nobles  faits;  puis  il  devint  un  conte,  une 
nouvelle  quelconque,  où  le  merveilleux  se  mêlait  pr^ue 
toc^ours  aux  événements  historiques.  On  le  chantait  en 
•'accompagnant  de  la  harpe  ou  de  la  rote.  Il  n'avait  pas, 
à  la  vérité,  la  forme  lyrique  favorable  à  la  musi({ue,  et 
n'était  point  divisé  en  stances  ;  mais  le  chant  n'était  pro- 
bablement qu'une  sorte  de  déclamation  rhythmée.  L'abbé 
de  La  Rue  donnait  aux  l^s  une  origine  armoricaine; 
M.  Ampère  lee  rapporte  plutôt  à  la  Germanie,  soit  à  cause 
des  allusions  aux  croyances  Scandinaves  qu'ils  renfer- 
ment, soit  pour  la  ressemblance  du  mot  lai  avec  les  mots 
lêoih  en  saxon  et  lied  en  allemand.  Quoi  qu'il  en  soit, 
les  lais  bretons,  qui  ont  inspiré  bon  nombre  de  romans 
4e  la  Table  ronde,  ne  nous  sont  point  parvenus  généra- 
.  unent  dans  la  langue  originale;  des  traductions  les  ont 
jauvés  de  l'oubli  (v.  Bitson,  Ancient  english  metrical 
romances;  Ellis,  Spécimen  of  the  english  poets).  Un  des 

S  lus  anciens  lais  français  est  le  Lai  du  prisonnier  ou 
'lanaurèSf  par  Renaud,  lequel  remonte  au  moins  à  l'an 
1200;  il  a  été  publié  par  Monmerqué  et  Francisque  Mi- 
chel (Paris,  1832,  in-8o}.  Parmi  les  Trouvères  qui  ont 
écrit  des  lais,  nous  citerons  Marie  de  France,  Christine 
de  Pisan,  Froissart,  Guillaume  de  Machau,  Eustache  Des- 
champs. Beaucoup  de  compositions  de  ce  genre  sont 
anonymes.  Les  écrivains  des  &ges  suivants  y  ont  souvent 
puisé  :  ainsi,  le  Lai  du  Frêne  est  le  premier  type  de  la 
nouvelle  queBoccace  a  composée  sous  le  titre  de  GrisHi' 
dis;  Marmontel,  dans  son  conte  du  Philosophe,  a  imité 
le  Lai  d'AristoU  d'Henri  d'Andeli.  V.  Lais  inédiU  des 
xn*  et  xm*  siècles,  publiés  par  Francisque  Michel,  Paris, 
1836,  in-i2;  F.  Wolf,  Sur  les  Lais,  en  allemand,  Hei- 
dolberg,  1841,  in-8*. 
L'ancien  lai  était  une  suite  de  vers  de  8  pieds;  mais. 


le  chant  appelant  la  forme  lyrique,  n  devint  ime  sorto  ds 
romance,  et  fut  alors  partagé  en  stances.  Au  xiv*  siècle, 
il  se  composait  ordinairement  de  24  stances,  ayant  cha- 
cune 4,  6,  B  ou  12  vers,  sur  deux  rimes  au  plus.  Souvent 
ces  vers  étaient  coupés  de  deux  en  deux  par  an  vers 
plus  court.  En  voici  un  exemple  : 

Sar  l'appnl  da  inonda 
Qne  fant-il  qn'on  fonde 

D'espoir  ? 
Cette  mer  profonde , 
En  dtfbrtâ  féconde» 

Fait  Toir 
CUme  an  matin  Tonds, 
Et  l'orage  y  gronde 

Le  aoir. 

Quand,  après  la  1**  stance ,  on  faisait  virer  (tourner) 
les  grands  vers  en  petits,  et  les  petits  en  longs,  la  pièce 
devenait  un  Virelai.  Au  xvi*  siècle,  ces  mocÛllcations 
avaient  enlevé  au  lai  son  caractère  primitif;  ce  n'était 
plus  qu'une  forme  poétique,  à  laquelle  on  renonça 
bientôt.  M.  Victor  Hugo,  dans  son  drame  de  Cromwell,  a 
écrit  la  ballade  du  fou  sur  le  rhythme  d'un  lai.  B. 

LAI  (Frère).  j  V.  ces  mots  dans  notre  ZMction- 

laïc  ou  laïque,  s      naire  de  Biographie  et  d^HÎM- 

LAIRD.  )      toire. 

LAIS,  terrains  que  la  mer  et  les  rivières  forment 
par  alluvion.  On  nomme  relais  les  terrains  qu'elles 
abandonnent  en  se  retirant.  Les  lais  et  relais  de  la 
mer  font  partie  du  domaine  public,  et  le  gouverne- 
ment peut  les  concéder  aux  conditions  qu'il  Juge  conve- 
nable; ceux  des  rivières  appartiennent  aux  propriétaires 
riverains. 

LAKISTES.  F.  cemotdansnotreDîctioiMuitrscbBîo- 
arapfcM  et  d'Histoire. 

LALLATION,  vice  de  prononciation  qui  consiste  à  sub- 
stituer la  lettre  I  à  la  lettre  r  :  Malte  pour  Marie,  Le 
grasseyement  d'Aldbiade  disant  Théodole  pour  Théodore 
était  une  lallation. 

LABIA.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra-- 
phie  et  d^  Histoire. 

LAMANEUR.  F.  Pilotb. 

LAMBEL,  en  termes  de  Blason,  barre  borisontale,  gar- 
nie de  trois  pendants  en  forme  de  trapèze. 
Set  placée  à  la  partie  supérieure  de  l'écu, 
toutefois  sans  toucher  les  bords;  sa  lar^geur 
doit  être  la  0*  partie  du  chef.  F.  la  fig.  ci- 
contre.  Le  lambel  servit  d'abord  à  distin- 
guer les  enfants  du  père,  parce  que  ceux- 
là  seuls  qui  n'étaient  pas  mariés  en  portaient;  puis  on 
en  fit  la  brisure  des  premiers  cadets. 

LAMBOURDE,  nom  donné  aux  pièces  de  bois  de  adage 

Su'on  couche  et  qu'on  scelle  sur  un  plancher  pour  j 
louer  le  parquet. 

LAMBREQUINS,  étoffes  découpées  en  festons  et  flot- 
tantes, dont  on  couvrait  autrefois  le  casque  et  qui  des- 
cendaient sur  la  cuirasse,  qu'elles  protégeaient  contre  la 
pluie  et  la  poussière.  On  donna  le  même  nom  à  des 
bandes  fixées  an  bas  de  la  cuirasse,  ainsi  qu'à  des  rubans 
oui  arrêtaient  le  chaperon  sur  le  casque  et  qu'on  entor- 
tillait autour  du  cimier.  Ces  ornements,  appelés  aussi 
volets,  parce  qu'ils  voltigeaient  au  gré  du  vent,  passèrent 
des  armures  dans  les  armoiries,  et,  en  termes  de  Blason, 
les  lambre(mins  furent  des  festons  oouronoant  et  em- 
brassant l'écn,  avec  la  même  cooleur  qne  les  émaux.  — 
Les  tapissiers  nomment  lambrequins  des  découpures 
d'étoflé,  de  bois  ou  de  tMe  couronnant  un  paivillon,  une 
tente,  un  store,  etc. 

LAMBRIS,  boiserie  qui  revêt  les  parois  d'un  mur.  On 
nomme  lambris  de  rwétement  celui  qui  règne  du  bant 
en  bas;  lambris  d^ appui,  celui  qui  n'existe  qu'à  la  partie 
inférieure,  sur  une  hauteur  de  70  à  120  centimètres. 

LAME,  mot  qui,  dans  les  vieux  auteurs  français  et 
dans  les  inscriptions,  est  synonyme  de  tombeau,  de 
pierre  sépulcrale. 

LAMENTATIONS,  nom  donné  aux  chapitres  des  can- 
tiques de  Jérémie  que  l'on  chante  aux  Matines  le  mer- 
credi, le  leudi,  et  le  vendredi  de  la  Semaine  Sainte  dûs 
l'Église  catholique. 

LAMPADAIRE,  porte-lampe  ches  les  Anciens.  C*était 
un  pied,  plus  ou  moins  élégant,  haut  de  20  ou  25  centi- 
mètres, et  que  l'on  posait  sur  une  table  ponr  recevoir  une 
lampe,  afin  de  lui  faire  projeter  sa  lumière  pins  loin.  D 
V  avait  des  lampadaires  en  forme  d'arbres  chargés  de 
fruits,  dont  chacun  était  une  lamix^;  d'autres,  en  forme  . 
de  tronc  d'arbre  desséché,  avec  4  ou  5  branches  seule- 


Btot,  d'où  p«ndu«iit  des  lunpe»  secroebâes  me  des 
cbilnetw».  u  Sgure  ci-deMOUS  raprteDte  un  lamps- 
dilre  de  ce  gaon,  «a  «Inln,  trouTd  lùiu  le»  rolnet  dller- 


,  flkareiit  de»  rlncetui,  et  dont  on  u  lert  duis 
ICI  gnndea  Tillea  pour  porter  les  lantsrnea  h  gai  de 
ridainge  pnbllc  (Uds  les  rues  «trolies.  L>  figure  ci- 

' '-'-M  un  lampadaire  de  ce  genre.  Cest  le 

adopljt  pour  la  ville  de  Paris,  dont  ils 


cean.  Cea  Umpadalrei  ont  de  1  met.  à  1  met.  50  de  lon- 
gueur, et  sont  scellés,  en  encorbellement,  d&ns  le  mur  de 
Jàce  dés  m^aoti»,  fc  4  mèk  enTiron  du  mI.      C.  D—t. 


UMPC  (du  gtecJompM,  Oambean).  CeU, 
n  implicite,  na  petit  Tua  dans  leqnu  brûle  une  mèche 
doat  la  flamme  est  ftllmenlde  par  de  l'huile.  On  en  attri- 


bat  l'inTentioia  aux  Ërâpiiens,  aoiquels  les  Grâce  l'au- 

'.— r On  Bt  des  lampes  ea  lem  râite,  en 

brome,  «a  argent,  et  mCme  en  or;  !«■  coUecttonaen  len- 


raleot  empruntée.  On  1 


(trniHit  de  formes  trè»-Tari«ei,  et  quetqoefoti  d'nn  dessin 
Bnd  par  que  gradenx  :  lantât  c'est  une  cbauTe-BOuris, 
qmbale  de  la  noh,  oui  a  prâté  ses  formes  an  Tase  sus- 
pendu; tantôt  un  biboo,  tantM  des  flgurea  humaines, 
de*  entants,  dea  esdafei,  serrent  de  support  k  la  lampe, 
qu'ils  semblent  entretenfr  d'huile.  Le*  lunpea  serraient 
i  tous  les  usages  domestiques  i  on  en  plaçait  dans  les 
templea,  sait  pour  les  4clHrer  peoduit  les  cérémonieb 
Doctanies,  soit  pour  honorer  les  dieux  dsTant  les  statues 
detoueb  elles  brOlalent:  on  en  suspendait  aussi  dans  les 
tombeanx.  H  n'y  a  gnin  qu'une  soliantaine  d'années  quv 
ka  Ismpei'saat  parfèctfoanéea  ;  jusqu'alors  elles  aTaleat 
httit  k  tir  Hbre,  comme  dan*  l'anUquIté  i  les  chandelle< 


rtdM 


:,  pbamaden  à  Paris,  Tut  1« 


J9  LAN 

premier  qui  entra  dans  la  voie  des  amélioralions  an  p\^ 
tant  au-desaus  de  la  flamme  des  lampes  un  toyaa  da 
-tirage  qu'il  ^tpela  tayau-chnnmée.  En  17S3,  Ar^nd, 
pbyMcien  et  médecin  de  Genève,  disposa  la  mèche  dans 
un  double  (^liodre  creux,  où  Tair  passait,  et  donna  à  la 
Oamme  de  la  puissance  et  de  la  netteté.  En  1800,  Csrcel 
plaça  le  rtsarroir  dans  le  pied  da  la  lampe,  et  fit  monter 
l'hnlle  an  moyen  d'nn  mouTement  d'horiagerie.  Vinrent 
ensnile  les  lampes  hjrdrostadqnes  des  lïâes  Girard  en 
1803,  pub  les  lampes  fc  modéralenr  de  Franchot,  1830, 
où  le  mouTament  aliorloeerie  est  remplacé  "par  an  rea< 
tort  d'ader  en  spirale,  dont  l'ei^slon  sert  de  force 
motrice.  V.  liceu.  De  Itnxntâ  aatiguonàm  rsconditia, 
Venise,  1021.  E.  L. 

uaras  n'fousE.  C'est  une  prescriptioa  très-andsnne 
que  déplaça-,  devant  l'autel  où  est  déposée  l'Eucharistie, 
au  moins  une  lampe  allumée,  ponr  montrer  k  tous  les 
jeux  qoe  Jésn»-Christ  est  la  lumiâre  du  monde.  La 
lampe  a  toujaon  été,  d'ullaurs',  considérée  comme  une 
"[ne  d'honneur  :  les  empereurs  du  Bu-Empira  en 


marque  d 


les  ^ses  posaédërei] 
d'or  —  -" 


nunémeot  des  lampes 
it  d'ordinaire 


.  ..   .     __„ maintenante* 

BQ  cuivre  argenté  ou  doré.  On  an  suspead  k 
devant  le  nultro-autel,  en  mémoire,  dit-on,  de  la  S" 
Trinité.  Le  vase  qui   contient  l'huile   est  supporté  par 
trois  chaînettes  attachée)  ani  chaînes  de  la  lampe. 
LAHPIER.  svnaavmB  de  Fanal  da  einutièrt  (V.  m 

LAMPION,  godet  en  terre  cuite,  en  for-blanc,  ou  en 
verre,  dans  lequel  on  met  du  suir  ou  de  l'huile  avec  une 
mèche,  et  dont  on  se  sert  surtout  pour  les  JtlumiDaÛons. 
On  a  renoncé,  dans  les  grandes  villes,  depuis  l'invention 
du  pa,  k  illumioer  avec  des  lampions. 

LANCE,  arma.  V.  notre  Dtclionnotra  d*  ffiograpAu  tt 
d'Hùloire. 

LucE  s  FED,  futée  emoiaochée,  servant  k  mettre  le  feu 
k  des  pièces  d'artillerie  on  d'ardSce. 

LAKCELOT  (U  Roman  de),  3*  partie  du  cvcle  du 
Sainl-Graai  ou  de  la  Tabt»  ronds  (V.  GauL,  et  Uisun), 
écrite  par  Gautier  Map,  chapelain  du  roi  Henri  n  d'An- 

S  leurre.  Les  Étais  du  roi  armoricain  Ban  de  Benoic, 
esceodant  de  Nascien,  sont  envahis  par  les  soldats  dn 
roi  Clandas  de  la  Déserte;  son-flls  au  berceau  va  périr 

I  fée 

Viviane,  l'élève,  l'amante  et  la  geôlière  de  t'encbanteor 
Herlln.  Les  soldats  la  ponrsnivent;  Ils  vont  l'atleindrE), 
quand  elle  se  précipite  dans  un  lac  avec  son  brdeau.  Ce 
lac  n'était  qu'une  illusion  trompeuse,  et  sa  surface  re- 
couvrait de  magiques  palais,  où  le  royal  orphelin  est 
élevé soua  le  nom  de  l'oncdol  (le  jeune  garçon),  dont  on 
Ht  plus  tard  lane»lol  du  Lac.  I^enn  i  la  Jeunesse, 
Lancetot  est  condoit  par  Viviane  k  la  cour  du  roi  Arthur. 
La  série  de  ses  aventures  amoureuses  et  guerrières  se  dé- 
roule dana  dnq  romans,  GaUehol,  la  CharrMe,  Agra- 
vam,  ta  Quit*  du  GrouJ  et  la  Mort  d'Arthur.  Les  deei 
premiers  ne  sont  qu'une  longue  dizrMsion  k  la  légende 
du  Salnt-Giaal,  sans  aucune  trace  de  l'inspiration  mys- 
tique qui  a  enfonté  cette  légende,  et  qui  fait  place  ici  k 
l'amour  chevtlenaqne,  ardent,  délicat  et  raffiné.  Galtebot, 
rot  dM  lomloinM  iUi,  est  un  pasonnage  qui  introduit 
lAocelot,  sous  le  nom  du  ChmùJwr  otu;  armât  noirst, 
auprès  de  la  reine  Genièvre,  et  qui  sert  son  amoor  avec 
beaucoup  de  lèle.  L'épisode  de  la  CharratI»  noua  montr» 
I^ncelot  k  la  recherche  de  Genièvre  enlevée  par  le  fils  dn 
rot  de  Gorre,  et  encourant  momentanément  «es  dédaini 
pour  être  mont4  snr  une  charrette,  véhicule  indigne  d'an 
chevalier. 

Cest  dans  la  3*  par^e  du  roman  de  lAncelot,  désignée 
ordinairement  sous  le  nom  iAgraitain,  un  des  chevalier* 
d'Arthur,  que  la  légende  dn  Sniut-Graal  reparaît.  Juaque- 
Ik  les  cbevàliera  de  la  Table  ronde  ont  bien  bit  quelques 
courses  k  la  recherche  du  vaae  sacré,  mais,  trop  distraits 
de  leur  but  par  des  préoccupations  IHvoles,  ils  ont  échoué 
dans  leur  entr^trlse.  Le  roman  d'Agraoain  nous  raconte 
l'arrivée  des  premiers  chevalien  dans  la  Terrt  fOraint  : 
mais  ni  Gauiàin,  neveu  d'Arthur,  ni  Lancdot,  protégé  de 
HerllD,  n'obtiendront  la  divine  reliqne;  pour  la  conqué- 


I  Idéal  nécessaire,  Galaad,  flls  de  I^ncelot,  Perceval,  ne- 
veu du  roi  qui  a  la  garde  du  saint  Graal,  et  Boor,  flls  du 
roi  de  Ganae*.  La  OitiU  du  laint  Qraal  noiu  montre  Gs- 


LAN 


1140 


LAS 


iMd  prenant  pl«ee  au  si6ge  réservé  de  la  Table  ronde^  | 
•t  donnant  le  signal  de  la  croisade  nijrstique  et  gaerrière. 
Les  miracles,  Ui  prophéties,  les  visions  succèdent  aux 
passes  d'armes  mondaines;  Arthur  «  Gauvain,  Lancelot, 
ne  Jouent  plus  qu*un  rôle  secondaire  et  sacrifié.  Galaad, 
Perceval  et  Boor,  après  une  longue  suite  d'aventures 
merveilleuses,  parviennent  au  château  de  Corbenic  ;  dix 
antres  chevaliers,  également  dignes  de  la  souveraine  ré- 
compense, arrivent  en  même  temps  de  Gaule,  d'Irlande  et 
des  autres  contrées  de  TEurope.  Tous  treize  sont  admis 
à  ta  contemplation  du  saint  Graal,  et  communient  de  la 
main  de  Tévéque  Josèphe,  descendu  du  ciel.  Puis,  comme 
les  peuples  d'Occident,  livrés  aux  passions  terrestres,  ne 
méritent  plus  de  posséder  parmi  eux  le  vase  divin,  le 
Seigneur  ordonne  à  Galaad,  Perceval  et  Boor  de  le  re- 
porter en  Orient.  Les  trois  chevaliers  s'embarquent  sur 
u  nef  de  Salomon,  qui  les  attend  au  rivage  de  la  mer, 
abordent  en  Asie,  non  loin  de  l'antique  cité  de  Sarras,  et 
déposent  le  Graal  au  Palais  Spirituâ,  sa  première  rési- 
dence. Après  avoir  régné  un  an  sur  Sarras,  Galaad  meurt 
dans  une  des  extases  que  procurait  l'adoration  du  Graal, 
«t  ton  âme,  accompagnée  par  l'évèipie  Josèphe,  monte  au 
del.  Une  main  dont  le  corps  est  invisible  s'empare  du 
vase,  que  personne  ne  doit  plus  voir;  Perceval  se  retire 
dans  un  ermiiage,  et  Boor  retourne  à  la  cour  d'Arthur 
poor  raconter  ces  événements  suprêmes. 

Id  finit  la  légende.  Mais  les  chevaliers  de  la  Table 
londe  demeuraient,  et  trop  d'intérêt  s'était  attaché  à 
leurs  aventures  pour  qu'il  ne  fût  pas  nécessaire  de  ra- 
conter leur  fin  :  tel  est  le  but  d'une  cinquième  œuvre,  la 
Mort  (T Arthur,  Arthur  est  instruit  des  amours  de  sa 
femme  Genièvre  avec  Lancelot  du  Lac,  et  la  guerre 
éclate  :  avec  le  roi  combattent  Gauvain,  Kex,  Yon,  Ka- 
radoc,  ettous  les  chevaliers  d'origine  bretonne;  du  côté 
de  Lancelot  sont  les  descendants  de  Nascien,  Boor,  Lio- 
nel, Bliomberis,  etc.,  qui  ont  leurs  domaines  dans  la 
Petite- Bretagne.  Arthur  traverse  l'Océan,  et  assiège  la 
cité  de  Gannes  :  sur  la  nouvelle  que  Mordred  a  envahi 
ses  États,  il  ramène  bientôt  sea  troupes,  tue  l'usurpateur 
dans  une  bataille  près  de  Salisbury,  mais  voit  pénr  tous 
ses  chevaliers  et  est  lui-même  blessé  mortellement.  Lan- 
celot et  les  siens  accourent  pour  le  venger,  et  massacrent 
les  fils  de  Mordred  à  Winchester  :  tout  finit  par  une  re- 
traite volontaire  de  Lancelot  et  de  Genièvre  dans  un 
couvent.  B. 

LANCÉOLÉ ,  qui  a  la  forme  d'un  fer  de  lance.  On  dit 
an  arc  lancéolé  ;  les  divisions  des  roses  gothiques  sont 
quelquefois  lancéolées. 

LANCETTE  (Style  à).  K.  Ogivalb  (Architecture.) 

LANCHE,  embiurcation  en  usage  sur  les  côtes  du  Bré- 
sil. Elle  a  un  mât  droit  à  l'avant,  on  autre  mât  plus 
grand  et  très-couché  sur  l'arrière,  et  n'a  qu'un  faible 
tirant  d'eau. 

LANCIERS,  corps  de  cavalerie  de  li^e,  dont  nous 
avons  donné  l'historiqne  dans  notre  DicPumnaiir^  de  Bio- 
graphie et  d^ Histoire,  L'uniforme  est  :  habit  bleu  ;  collet, 
retroussis,  parements  et  passe-poils  de  couleur  variable 
selon  les  régiments;  bricles  d'épauleties  garance,  avec 
passe-poil  bleu;  boutons  blancs  à  numéro;  épaulettes 
garance,  avec  franaes  et  torsades  blanches;  pantalon  ga- 
rance, à  deux  bandes  bleues  sur  les  côtés  ;  czapska  ga- 
rance, avec  soutache  et  galon  bleu,  cordon  en  fil  blanc, 
avec  nœuds  et  coulants  en  laine  garance  ;  plumet  en  crin 
noir  tombant  ;  ceinture  en  tissu  à  5  bandes,  dont  3  bleues 
et  S  garance;  buifieterie  blanche.  Les  officiers  portent 
Tépaulette  d'aroent.  Les  armes  sont  la  lance  garnie  d'une 
bandenole  tricolore,  le  pistolet  et  quelquefois  le  moua- 
queton. 

LANQS,  mode  de  réparation  d'un  mur  qui  consiste  à 
«Dfoncer  des  moellons  ou  des  pierres  dans  les  parties  dé- 
gradées. —  On  donne  le  même  nom  aux  deux  pierres 
plus  longues  que  le  pied-droit  dans  les  Jambage  d'une 
porte  ou  d'une  croisée. 

L^DES^**^'  l  ^'  ^  ™^  <^*  ^^^  Dictionnaire 

LANDGRAVE.  \      de  Biographie  et  ^Histoire. 

LANDIERS.  7.  Chznbts. 

LANDIT.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d^ Histoire. 

LANDLER ,  espèce  de  valses  en  usage  en  Autriche  et 
dans  quelques  autres  parties  de  l'Allemagne.  Leur  mé- 
lodie, d'une  aaieté  sautillante,  s'exécute  dans  un  mouve- 
ment modéré,  en  mesure  à  2/4. 

LAND-TAX ,  nom  de  l'impôt  foncier  en  Angleterre. 

LANDWEHR.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  ^Histoire. 


LANGACSE.  La  pensée  est  un  (ait  intérienr,  qui  a  be- 
soin, pour  se  manifester,  des  secours  de  l'orgsnisme ,  sa 
moyen  duquel  se  produit  le  langage.  Celui-ci  est  donc 
tout  mouvement  organique,  spontané  ou  volontaire,  qui 
a  pour  but  d'exprimer  un  phénomène  interne.  D'où  il  suit 

2u'il  y  a  autant  de  sortes  de  langages  qu'il  y  a  de  sortes 
e  signes  propres  à  manifester  la  pensée.  Parmi  eux,  les 
uns  sont  natitrels,  et  les  autres  arti/U:iels  :  les  premiers 
résultent  de  l'organisation  naturelle  de  l'être  qui  les  pro- 
duit, ils  sont  passagers,  tels  que  les  gestes,  les  cris,  la  pa- 
role; les  seconds,  pris  hors  de  nous  et  au  moyen  de  mo- 
difications matérielles  oui  ne 'sont  pas  données  par  la 
nature,  sont  plus  ou  moins  durables,  tels  que  le  dessin, 
la  sculpture,  les  emblèmes,  l'écriture,  etc.  Le  langage 
naturel  est  encore,  1*  absolu,  parce  que  de  lui-même,  et 
indépendamment  de  toute  convention,  il  est  compris  par 
tout  le  monde,  quelquefois  même  par  les  animaux, 
comme  les  gestes,  les  cris  dus  à  la  colère,  ou  les  accents 
de  la  bienveillance  et  de  l'amitié;  2^  conventionné, 
parce  que  ce  langage,  indépendamment  des  éléments 
fournis  à  l'homme  par  sa  nature,  a  une  valeur  de  conven- 
tion; tels  sont  les  mots  dont  l'ensemble  forme  une 
langue,  et  dont  le  sens  a  été  fixé  arbitrairement.  II  en 
est  de  même  pour  les  langages  artificiels,  qui  sont 
absolus  quand  les  signes  ont  un  caractère  de  fixité, 
comme  le  dessin,  et  eonnentionnels,  quand  les  signes 
sont  arbitraires,  comme  les  emblèmes,  les  signes  téli< 
naphiques.  En  outi^  le  langage  est  sgnthétiqus  ou  ana- 
ryttqiM.  Le  langage  synthétique  exprime  le  sentiment, 
l'émotion,  la  pensée  dans  leur  ensemble,  sans  distinguer 
leurs  éléments,  sans  les  décomposer  ;  il  est  expressif, 
c'est  celui  de  la  passion,  mais  il  ne  suffit  pas  touipurs, 
l'homme  a  besoin  du  langage  analytique.  Celui-ci  dé- 
compose le  fait  de  conscience  ;  il  donne  un  signe  particu- 
lier et  propre  à  chacune  de  ses  parties,  un  pour  le  sujet, 
un  pour  l'attribut,  un  troisième  pour  le  verbe;  au  lieu 
de  pousser  un  cri  pour  marquer  sa  Joie,  l'homme  peut 
dire  :  je  suis  heureux.  Parmi  les  langages  analytiques,  il 
n'en  est  pas  de  plus  beau,  de  plus  parfait  que  la  parole  ; 
nul  n'exprime  si  exactement,  ni  si  complètement  U' 
pensée  (V.  ce  mot).  Après  la  parole,  le  langage  analy- 
tique le  plus  employé  est  Vécnture  (K.  ce  mot).  —  Les 
signes  en  général  et  le  langage  parié  en  particulier  for- 
ment un  Uen  social  entre  les  nommes.  Les  signes  in- 
stinctifs et  naturels  manifestent  les  sentiments  les  plus 
naturels  qui  attirent  les  hommes  les  uns  vers  les  autres; 
la  parole  et  l'écriture  transmettent  les  idées  soit  dans  le 
pr&ent,  soit  dans  l'avenir,  et  augmentent  ainsi  d'âge  en 
âge  la  somme  de  nos  connaissances.  Il  ne  fiuidrait  pas  en 
conclure,  comme  cela  est  arrivé,  que  la  pensée  dépend 
entiteement  des  signes  :  l'homme  pense  sans  avoir  besoin 
de  signes,  et,  s'il  parle,  c'est  parce  qu'il  pense;  mais, 
d'un  autre  côté,  le  langage  parlé  aide  infiniment  à  la  for- 
mation et  au  développement  des  idées  (V.  Pasolb).  Si* 
le  langage  rend  à  l'homme  d'immenses  services,  il  a  aassi 
ses  inconvénients,  an  point  qu'on  a  prétendu  qu'il  était 
la  source  de  toutes  nos  erreurs,  ce  qui  est  exag&ré  ;  mais 
il  est  certain ,  d'une  part,  que  les  signet  ne  sont  pas  tou- 
jours la  représentation  exacte  des  objets  ou  des  idées; 
d'autre  part,  aue  l'esprit  s'attache  parfois  tellement  aux 
signes,  ôu'il  s'nabltue  à  se  payer  de  mots. 

Au  point  de  vue  historique,  l'origine  du  langage  tient 
à  celle  du  genre  humain  ;  en  théorie,  cette  question  con- 
siste à  examiner  si  l'homme,  doué  des  facultés  qu'il  pos- 
sède, pouvait  arriver  à  se  former  un  moyen  de  commu- 
niquer ses  idées.  Les  signes  naturels  absolus  constituent 
un  langage  primitif  qui  a  son  origine  dans  la  constitution 
de  l'homme  ;  mais  déjà  chez  celui-ci  l'attention  s'attache 
au  fait  primitif  pour  reproduire  la  même  impression  par 
le  même  signe.  On  est  conduit  par  là  à  rechercher  l'ori- 
gine du  langage  parlé;  on  a  cnerché  à  résoudre  cette 
question  de  trois  manières  difTérentes.  Selon  les  uns,  Is 
parole  et  les  langues  primitives  sont  de  pure  convention 
et  se  composent  de  signes  arbitraires.  On  voit  dans  le 
Cratgle  de  Platon,  où  Hermogène  soutient  cette  opinion 
qu'elle  existait  déjà  dans  l'antiquité  ;  chez  lee  modernes 
on  la  trouve  dans  réa>le  qui  se  rattache  à  CondiUac  Ce 
philosophe  admettait  en  fait  la  révélation  de  la  parole  à 
Adam  et  Eve;  mais,  en  théorie,  il  n'en  voit  l'origine  qne  • 
dans  certains  cris,  certains  mouvements  de  la  langue 
auxquels  on  finit  par  attacher  un  certain  sens;  c'était  ra- 
mener l'origine  du  langage  au  hasard  et  à  l'arbitraire.  Un 
autre  système,  qui  fut  développé  par  M.  de  Bonald, 
attribue  à  la  parole  et  même  à  l'écriture  une  origine  en- 
tièrement divine;  les  gestes  eux-mêmes  viendraient  aussi 
d'une  source  surnaturelle,  et  ne  seraient  qu'une  imitatîoo 


LAN 


1141 


LAN 


és  ce  m  rhomoM  aurait  vu.  De  plus,  lelon  la  mâme 
bfpothlse,  rhomme  pense  sa  parole  arant  de  parler  sa 
pensée;  c'était  retomiier  dans  Técueil  de  Condillac  et  de 
If.  deliracv.  Le  principal  défaut  de  cette  théorie  consiste 
i  méconnaître  la  part  d*actiTité  réfléchie  et  d'intelligence 

3 as  lliomme  apporte  nécessairement  dans  Tusage  et 
80S  la  formation  des  signes,  et  [Muticalièrement  de  ceux 
du  langage  parlé.  Rousseau  a?ait  émis  une  opinion  à  peu 
près  semblable  dans  son  Discours  sur  Vorigin$  et  les  (on- 
àtmmds  à»  l'méQolUé  parmi  les  hommes;  mais,  dans  son 
Essai  sur  rorigtne  des  langues,  il  cherche  à  établir  que 
«  la  parole,  étant  la  premier  institution  sociale,  ne  doit 
sa  forme  qa'k  des  causes  naturelles.  »  Il  rentrait  ainsi 
dans  la  troisième  explication,  qui  pose  en  principe  que 
la  parole  est  une  faculté  naturelle,  qui  s'est  développée 
graduellement  comme  la  pensée,  et  que  les  signes  dont 
elfe  fait  usage  ont  des  rapports  avec  les  choses.  Déjà  in- 
diquée dans  le  Cratyle,  où  Socrate  réfute  Hermogène, 
elle  fat  développée  par  le  président  de  Brosses  et  par 
Court  de  Gébeiin.  En  résumé,  pour  trouver  la  solution 
du  problème  psychologique  de  l'origine  du  langage,  il  ne 
faut  pas  oublier  que  nous  tenons  de  la  nature  les  signes 
naturels  absolus,  un  organe  vocal  propre  à  émettre  des 
wns  articulés,  la  faculté  d'analyser  la  pensée  et  d'abs- 
traire, enfin  la  raison  et  la  volonté,  au  moyen  desquelles 
nous  pouvons  attacher  un  sens  ai)x  signes  que  nous  em- 
ployons. 

Tout  langage  repose  sur  le  rapport  qui  s'établit,  soit 
naturellement,  soit  artificiellement  et  par  convention, 
entre  une  idée  et  un  signe,  et  sur  la  puissance  qu'a  ce 
rapport  de  provoquer  en  nous  la  conception  de  l'idée  à 
la  simple  perception  du  signe.  Une  langue  ne  peut  donc 
nous  faire  concevoir  fidèlement  la  pensée  d'autrui  qu'à  la 
triple  condition  que  chacun  des  signes  qui  la  composent 
aoit  attaché  à  une  seule  idée,  corresponde  toujours  à  la 
même,  et  ne  devienne  Jamais  le  signe  d'une  autre  ;  oue 
ti  cette  idée  vient  à  être  modifiée,  il  le  soit  d'une  manière 
analogue;  enfin  que  si  d'autres  idées  proviennent  de 
celles-là,  par  filiation  ou  par  composition,  du  signe  pri- 
mitif sortent  de  même  d'autres  siçnes  qui  soient  avec  lui 
dan»  le  môme  rapport.  De  là  trois  caractères  essentiels 
(fune  langue  bien  faite  :  1<*  la  précision,  qui  est  le  rap- 
port exact  du  signe  à  la  chose  signifiée;  à  la  riçueur, 
elle  exige  autant  de  mots  que  d'idées  et  pas  plus  aidées 
que  de  mots  ;  la  langue  seule  des  mathématiques  atteint 
à  cet  idéal  ;  il  est  impossible  pour  celles  des  autres 
idencp3  et  des  arts,  et  pour  le  langage  vulgaire;  — 
9*  Vanalogie ,  qui  consiste  à  faire  passer  dans  les  termes 
tous  les  rapports  de  ressemblance  ou  d'opposition  qui  se 
trouvent  entre  les  idées.  L'analogie  suppose  une  analyse 
saflisante  de  la  pensée  humaine  ;  cependant,  les  langues 
primitives,  et  celles  qui  ont  pu  se  former  d'elles-mêmes 
et  en  suivant  le  mouvement  naturel  et  spontané  de  l'es- 
prit humain ,  la  possèdent  à  un  certain  degré  ;  —  3*  la 
darté,  qui  résulte  en  partie  des  deux  caractères  précé- 
dents, et  en  partie  de  l'ordre  et  de  l'arrangement  des 
mots,  de  manière  à  éviter  l'ambiguité  et  les  sens  équi- 
voques. Les  langues  qui  aiment  l'inversion  sont  plus 
exposées  à  tomber  dans  ce  défaut  que  celles  qui  suivent 
Tordre  logique  ;  celui-ci  est  l'ordre  même  de  la  réalité  et 
de  la  science.  Toute  langue  oui  s'y  soumet  a  un  avantage 
marqué  dans  la  pratique  et  les  travaux  scientifiques.  La 
langue  françidse,  qui  admet  à  peine  l'inversion  en  poésie, 
a  cet  avantage  sur  la  plupart  des  autres  langues  :  ce 
qu'elle  perd  en  vivacité  et  en  éclat,  elle  le  regagne  en  ce 
qui  fait  la  qualité  essentielle  et  fondamentale  de  toute 
expression  de  la  pensée,  la  clarté.  A  ces  caractères,  une 
Isngue  parfaite  Joindrait  une  facilité  de  construction  qui 
le  prêterait  également  à  l'esprit,  à  l'imagination,  au  sen- 
timent et  à  l'oreille,  c-àr-d.  qui  serait  propre  à  satisfaire 
nntelligence  et  la  sensibilité. 

L'idée  d'une  langue  universelle  préoccupa  les  esprits 
les  plus  éminents  du  ivn*  siècle,  surtout  ceux  qui  se 
fixaient  à  l'étude  des  sciences,  Bacon,  Descartes,  Pascal, 
Leibniz.  Ce  dernier  surtout  s'en  occupa  sérieusement;  à 
la  même  épooue,  Wilkins;  évêque  de  Ghester,  et  Dal- 
garno  y  travaillaient  de  leur  côté  ;  mais  Leibniz ,  n'es- 
pérant rien  de  leurs  travaux,  se  proposa  de  construire 
une  espèce  ^alphabet  des  pensées  humaines.  Cet  alphabet 
devait  se  composer  d'un  certain  nombre  de  caractères 
correspondant  à  toutes  les  idées  simples  et  les  plus  élé- 
mentaires, ou  plutôt  aux  éléments  de  nos  idées.  Les 
combinaisons  diverses  de  ces  caractères  devaient  servir  à 
exprimer  les  idé^  complexes  et  les  diverses  opérations 
de  la  pensée.  Cétait  sur  cette  donnée  que  reposait  la  re- 
cfaercne  de  la  Caractéristique  universelle  (V.  ce  mot),  l 


Appliquer  une  espèce  d'algèbre  au  langage  parlé  était  qm 
tentative  probablement  Impossible,  parce  qu'il  faudrait 
que  les  hommes  n'eussent  Jamais  que  des  idées  à  expri- 
mer, et  oue  chez  tous  elles  pussent  avoir  le  même  dearé 
de  clarté.  D'ailleurs,  en  supposant  trouvé  cet  alphabet 
des  pensées  humaines,  «  il  faudrait  encore,  dit  Fonta- 
nelle, trouver  l'art  de  persuader  aux  différents  peuples  de 
s'en  servir.  »  De  nos  Jours,  on  a  prétendu  arriver  à  une 
langue  universelle  par  l'étude  comparée  de  tous  les  dia- 
lectes primitifs,  et  en  cherchant  à  engendrer,  par  la 
combinaison  d'un  nombre  limité  d'idées  simples,  lin* 
flnité  des  idées  qu'enfante  l'esprit  humain.  Il  est  per- 
mis de  mettre  en  doute  le  succès  d'une  telle  entrepriseb 
F.  Langue. 

F.  De  Brosses,  Traité  de  la  formation  mécanique  des 
langues,  Paris,  1765,  2  vol.  ln-12;  Herder,  Sur  i'origine 


des  langues,  Berlin,  1772;  Copineau,  Essai  synthétique 
sur  l'origine  et  la  formation  des  langues,  Pfuis,  1774^ 


en  anglais,  1774-99,  6  vol.  in-8<>;  W.  Beatie,  Sur  la 
théorie  du  langage,  en  ani^lais,  Aberdeen,  1783;  Hervas« 
Origine,  formation,  mécanisme  et  harmonie  des  langues, 
en  ital.,  Césène,  1784,  in^<>  ;  Cesarotti ,  Essai  sur  la  pÂi- 
losophie  des  langues,  dans  ses  Œuvres  complètes,  Pise, 
1805-13;  Reid,  Recherches  sur  Ventendmnent  humain, 
t.  II ,  ch.  4;  Adam  Smith,  Considérations  sur  la  formth 
tion  du  langage,  à  la  suite  de  sa  Théorie  des  sentiments 
moraux;  de  Gérando,  Des  signes  et  de  Vart  de  penser 
considérés  dans  leurs  rapports  mutuels  ;  Charma,  Essas 
sur  le  langage,  2*  édit.,  1846,  in-8<»;  Sotos  Ochando, 
Projet  d^une  langue  universelle^t  traduit  de  l'espagnol  par 
Touzé,  Paris,  1855,  in-8<».  H. 

LANGAGE  DBS  PLEUnS.  F.  FlEURS. 

LANGRES  (  Arc  de  ),  monument  romain ,  enclavé  au- 
jourd'hui dans  la  muraille  de  la  ville  qui  regarde  le  N.-E.« 
entre  les  portes  du  Marché  et  de  S^Dizier.  Il  terminait 
la  voie  qui  conduisait  de  Langres  au  camp  de  S^*-Ger- 
maine,  près  de  Bar-sùr-Aube.  Cet  arc,  large  de  19"*,9i9 
à  la  base,  haut  de  13"*,  70,  est  à  peu  près  complet  sur  la 
face  extérieure,  à  l'exception  de  l'attique,  qui  n'existe 
plus.  La  décoration  se  compose  de  5  pilastres  corinthiens, 
dont  2  à  chaque  extrémité  ;  le  5*,  au  centre,  sépare  deux 
arcades  qui  ont  4*",  25  de  largeur  dans  œuvre  et  9"*,  30 
de  hauteur  sous  clef.  Des  cinq  chapiteaux,  trois  sont  bien 
conservés.  Quelques  parties  de  l'architrave  ont  été  dé- 
truites pour  pratiquer  des  meurtrières  et  des  embra- 
sures. La  frise  était  ornée  d'armures  sculptées  en  demi- 
relief.  La  corniche  est  très-mutilée.  Tout  l'appareil  est 
d'une  grande  beauté.  Les  blocs  sont  liés  entre  eux  par  des 
crampons  de  métal.  On  ne  saurait  préciser  l'époqifb  de 
la  construction  de  l'arc  de  Langres  :  les  uns  penchent 
pour  le  commencement  '  du  iv«  siècle;  les  autres  s'at- 
tachent au  règne  de  Marc-Aurèle  ;  d'autres  enfin  croient 
au*il  fut  érigé,  ven  l'an  240,  en  l'honneur  des  deux  Gor- 
diens, les  deux  arcades  égales  signifiant  l'union  des  deux 
empereura,  oui  triomphèrent  le  même  Jour. 

LANoass  (Cathédrale  de).  Cette  église,  placée  sous  l'in- 
vocation de  S' Mammès,  est  un  des  monuments  les  plus 
curieux  de  l'école  bourguignonne  du  xii*  siècle,  et  repré- 
sente l'âge  de  transition  entre  le  style  romano-byzantin 
et  le  style  ogival.  Le  plan  est  en  forme  de  croix  latine,  avee 
collatéraux  et  nefs  déambulatoires.  Le  triforium  s'ouvre 
dans  les  combles  couvrant  les  bas  côtés.  Le  plein  cintre 
se  montre  aux  portes,  aux  fenêtres  et  au  triforium,  tan- 
dis aue  l'ogive  apparaît  presque  constamment  dans  les 
arcades  inférieures  et  dans  les  voûtes.  On  a  prétendu  que 
la  cathédrale  de  Lan^p-es  avait  été  b&tie  sur  l'emplace- 
ment d'un  temple  antique  consacré  à  Jupiter  Ammon,  et 
que  l*on  voyait  dans  l'abside  quelques  traces  de  la  con- 
struction païenne  :  mais  les  têtes  de  béliere  et  les  chapi- 
teaux corinthiens  qu'on  allègue  en  faveur  de  cette  opi- 
nion sont  de  simples  imitations  décoratives  de  l'arc  de 
triomphe  romain  qui  est  dans  la  ville.  Les  fenêtres  de 
l'extrémité  de  l'abside  ont  été  refaites  au  xiii*  siècle. 
Pendant  le  xiv*,  le  xv«  et  le  xvi*,  on  bâtit  les  chapelles  de 
l'abside  et  des  bas  côtés.  Les  piliers  de  la  nef  sont  carrés, 
avec  pilastres  cannelés  et  chapiteaux  corinthiens;  ceux 
de  l'abside  sont  cvlindriques,  (Cément  à  chapiteaux  co- 
rinthiens. Des  pilastres  corinthiens  séparent  les  arcades 
du  triforium  ;  à  l'extrémité  du  chevet ,  ils  alternent  avee 
des  colonnes  ^minées,  ce  qui  est  encore  une  imitation 
de  l'arc  de  triomphe.  Comme  à  la  cathédrale  d'Antun , 
le  chœur  commence  par  une  travée  semblable  à  celles  de 
la  nef.  Le  chevet  n'a  qu'une  chapelle  ;  cellea  qu'on  a  i^ou* 


LAN 


iui 


LAN 


tées  au  uv*  siècle  le  Idbg  da  iws  oMé  qui  tomne  aatour 
du  saoctuaire  n'appartiennent  pas  au  plan  primitif.  Le 
portail  primitif  de  la  cathédrale  de  Lançres  a  été  rem- 
placé, de  17G1  à  1768,  par  une  construction  en  style  du 
xvni*  siècle.  On  remarque,  à  Tintérieur  de  Tédifice,  un 
Jubé  qui  date  de  1555,  une  chaire  épiscopale  en  marbre 
rouge,  et  le  derant  du  maître-autel,  qui  est  en  argent,  et 
où  Ton  a  représenté  Thistoire  de  S*  Hammès  et  de  S^  Jean 
TEvangéliste.  B. 

LANGUE,  nom  sous  leçiuel  on  désigne  la  totalité  des 
usages  propres  à  une  nation  pour  exprimer  les  pensées 
par  la  parole  ou  par  récriture.  Dans  toute  langue,  on 
distingue  les  mots  considérés  isolément,  et  les  mots  as- 
semblés dans  un  certain  ordre  qui  constitue  la  phrase. 
La  nomenclature  et  Tétude  des  mots  isolés  font  Tobjet 
de  la  lexicologie  et  de  la  lexicographie,  L*ordre  des  mots 
entre  eux  et  des  phrases  entre  elles  est  réglé  par  les  lois 
de  la  construction  et  de  la  syntaxe,  lesquelles  consti- 
tuent la  phraséologie.  Les  langues  des  diverses  nations , 
arec  de  nombreux  rapports  généraux  qui  tiennent  à  la 
conformité  naturelle  de  toutes  les  pensées  dans  Tespèce 
humaine,  ont  aussi,  dans  le  détail,  des  différences  re- 
marquables qui  tiennent  à  des  circonstances  particu- 
lières de  temps,  de  lieu,  de  civilisation,  de  religion ,  à 
une  tournure  propre  de  l'esprit  national,  etc.  Ce  sont 
ces  différences  qui  constituent  le  génie  des  langues.  Tou- 
tefois, il  y  a  certaines  classes  de  mots  qui  doivent  offirir 
dans  presque  toutes  les  langues,  sinon  une  ressemblance 
complète,  du  moins  une  très-prande  analogie  ;  tels  sont 
les  mterjections  proprement  dites,  les  premiers  mots  en- 
fantins, et  ceux  qui  sont  formés  par  onomatopée,  pro- 
cédé ((ui  a  dû  être  employé,  à  peu  près  exclusivement,  à 
l'(Mrigine  de  toute  langue,  pour  former  les  appellations 
des  choses  physiques,  et  que  l'on  retrouve  dans  oeaucoup 
d'idiomes  de  rOcéanie. 

On  a  pu  classer  JusquMci  environ  2,000  langues  ;  niais 
ee  classement  présente,  dans  son  ensemble  comme  dans 
ses  détails,  de  grandes  difficultés,  parce  oue  nos  connais- 
sances en  linguistique,  quelques  progrès  qu'elles  aient 
faits  aujourd'hui,  sont  encore  bien  imparfaites.  Cepen- 
dant, on  peut  adopter  deux  systèmes  :  l'un,  consistant  à 
les  énumérer  selon  Tordre  des  continents,  en  commen- 
çant par  celui  qui  a  été  le  plus  anciennement  connu,  et 
aies  grouper  selon  leur  degré  d'affinité  ;  l'autre,  à  les  dis- 
tribuer d'après  leur  plus  ou  moins  de  simplicité,  en 
commençant  par  celles  qui  nous  paraissent  se  rappro- 
cher davantage  du  caractère  que  Ton  suppose  avoir  été 
propre  aux  langues  primitives.  D'après  le  premier  sys- 
tème, la  distribution  géographique,  à  son  point  de  dé- 
part, se  fera  ainsi  :  langues  asiatiques ,  langues  euro- 
péer^es,  langues  africaines,  langues  américaines,  langues 
océaniennes  (V.  ces  mots);  puis,  les  langues  partielles 
de  chacun  oe  ces  continents  se  classeront  par  ordre 
chronologique  ou  par  groupes  de  familles.  D'après  le 
deuxième  système,  on  Tes  classera  en  trois  groupes  gé- 
néraux :  langues  monosyllabiques,  langues  d*agglutina- 
iion^  langties  fiexionnelies  {V,ces  mots ).  Cet  ordre  peut 
être  suivi  conjointement  avec  la  distribution  par  conti- 
nents; lùnsi,  dans  la  région  asiatique,  on  classera  ,les 
langues  monosyllabiques ,  puis  les  langues  d'agglutina- 
tion, puis  les  langues  de  flexion.  Les  idiomes  s'élèvent- 
lls  par  degrés  de  l'état  monosyllabique  à  l'état  d'agglu- 
tination ,  pour  aboutir  enfin  à  l'état  de  flexion?  Non  : 
{lar  exemple,  le  latin  est  plus  riche  en  formes  que  les 
diomes  romans  qui  en  proviennent;  les  langues  mo- 
dernes de  l'Inde  qui  dérivent  du  sanscrit  sont  d^énérées; 
le  chinois  est  aujourd'hui  aussi  monosyllabique  qu'au- 
trefois. Il  est  donc  difficile  de  constater ,  dans  la  crois- 
sance des  langues,  une  marche  ascendante  et  régulière. 

Une  langue  est  dite  ancienne  ou  morte,  quand  elle 
n*est  plus  parlée  et  n'existe  que  dans  les  monuments 
littéraires;  telles  sont  ai;Jourd*hui  les  langues  sanscrite, 
hébraïque,  grecque  et  latine.  Une  langue  mère  est  celle 

3ui  est  censée  n'avoir  été  formée  d'aucune  autre,  mais 
e  laquelle,  au  contraire,  plusieurs  autres  sont  dérivées  : 
tel  est  le  latin,  souche  commune  de  l'italien,  du  fran- 
çais, de  l'espagnol  et  du  portugais.  Une  langue  est  dite 
classique,  lorsqu'elle  a  produit  des  œuvres  propres  à 
former  le  goût,  à  servir  de  modèles  aux  ftg^  futurs  et 
de  base  à  une  éducation  libérale  :  telles  sont,  en  France, 
la  langue  grecque  ancienne  (depuis  Homère  Jusqu'à 
Théocnte  ),  la  langue  latine  (  depuis  Plante  Jusqu'à  Ta- 
cite), la  langue  française  (depuis  Bfalherbe  Jusqu'à  J.^. 
Rousseau  ).  Une  langue  vivante  ou  vulgaire  est  celle  qui 
est  actuellement  parlée  par  toute  une  nation.  Dans  une 
langue  vivante  on  distingue  la  langue  famUiihre  et  la  lan- 


gue écrttê  :  Fane  a  plus  d'abandon,  et  comporte  certalnei 
négligences,  que  l'antre,  plus  soignée,  plus  sévère,  s'in- 
terdit habituellement,  tout  en  s'efforcant  de  concilier 
Part  avec  le  naturel.  L'une  est  à  l'usage  de  tout  le  monde; 
l'autre  exige,  pour  être  parfaitement  comprise,  une  cer- 
taine culture  intellectuelle.  —  Une  langue  est  dite  /{(Mi- 
rais, par  opposition  à  une  langue  vulgahre  qui  en  est 
l'altération  plus  ou  moins  profonde  :  ce  terme  s'appliqae 
spécialement  :  1*  au  grec  tel  qu'on  le  trouve  dans  les 
écrits  du  moyen  âge  et  qui  différait  beaucoup  du  grec 
populaire,  lequel  arrivait  de  degrés  en  degrés  au  grec 
moderne  ;  2^  au  latin  ecclésiastique  des  temp  barbares 
de  rOcddent,  qui  se  rapprochait  beaucoup  plus  du  latin 
classique  que  celui  du  peuple  on  roman  rustique;  3*  à 
l'arabe  du  Koran  et  du  moyen  âge,  par  opposition  avec 
l'arabe  moderne  on  vulg^re.  F.  Langage. 

V,  Bibliander  (Buchmann J,  De  rations  communi  <m- 
guarum,  Bàle,  1518,  in^**;  Conrad  Gesner,  Mithridates, 
De  differentiis  linauarum ,  Zurich,  1555,  in-8<*  ;  Qaude 
Duret,  lYésor  de  l'histoire  des  langues  de  œt  univers, 
1613,  in-4^;  Algarotti,  Essai  sur  les  langues ,  dans  le 
3*  vol.  de  ses  OBuvres  complètes,  Venise,  1791-04, 11 
vol.  in-8*  ;  Adelung,  Mithridate,  ou  Scwnce  générale 
des  langues,  Berlin,  1806-17,  4  vol.;  Vater,  Tableaux 
comparatifs  des  grammaires  des  langues  de  l'Europe  et 
de  VAste^  Halle,  1822 1  De  Mérian ,  mnctpes  dé  Vétudt 
comparative  des  langues,  Paris,  1818,  in-8'>;  Eicfahoff, 
Parallèle  des  langues  de  l'Europe  et  de  l'Inde ,  Paris, 
1836,  in-4*  ;  G.  de  Humboldt,  Science  des  langues  (Ber- 
lin, 1848),  Classification  des  langues  (1850),  et  Onffine 
des  langues  (1851}  ;  Btnlasw^  Aperçu  général  de  la  science 
comparative  des  langues^  in-^;  Breulier,  De  la  formor 
tion  et  de  Vétude  des  langues^  1858 ,  in-8*.  P. 

LANGUE  (Écoles  de).  V.  Écoles  de  langue,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire^  p.  878,  col.  1. 

LANGUE  DE  SERPENT,  petit  ornement  architectural 
oui  sépare  ordinairement  deux  oves,  et  qui  a  hi  forme 
Œune  tète  de  flèche  à  pointe  triangulaire. 

LANGUE  D'OC,  une  des  langues  néolatines  (V.  ce 
mot)^  appelée  quelquefois  langue  provençale,  Cest 
l'idiome  originairement  parlé  du  Sud  de  la  Loire  aux 
Pyrénées.  On  le  distingue  de  la  langue  d^oU  ou  roman 
du  nord^  et  de  l'espagnol,  de  l'italien  et  du  portugais, 
désignés  sous  le  nom  de  langues  de  si,  distinction  tirée 
des  particules  oc,  oil  (oui),  si,  par  lesouelles  les  Fran- 
çais du  nord  et  du  miui,  les  Ewagnols,  les  Italiens  et  les 
Portu^s  font  une  réponse  affirmative.  La  particule  oc 
est  le  neutre  de  l'adjectif  latin  hic,  hcec,  hoc,  qui  û- 
gnifle  «  cela,  »  comme  le  si  des  Espagnols  et  des  Italiens 
est  l'adverbe  latin  sic,  qui  signifie  «  ûnsi.  »  La  langue 
d'oc  est  quelquefois  exclusivement  désignée  par  le  nom 
de  romane;  cW,  en  effet,  le  terme  par  lequel  les  trou- 
badours nomment  toujours  leur  propre  langue.  Il  est  cer- 
tain que  les  pays  de  langue  d'oc  furent  ceux  qui  perdi- 
rent les  derniers  les  traditions  romaines  ;  d'où  vient  que 
la  renaissance  de  la  poésie  eut  lieu  dans  leurs  limites. 
Toutefois,  cette  expression  est  mal  fûte;  car  le  dialecte 
du  nord ,  qui,  en  se  polissant,  est  devenu  le  français,  est 
une  langue  tout  aussi  romane,  c-à-d.  tout  aussi  formés 
du  latin,  langue  des  Romains,  que  le  dialecte  du  midi. 
—  Bien  des  écrivains  prétendent  que  la  langue  d^oc  pro- 
vint de  la  corruption  du  latin  amenée  par  la  conquête 
gsrmanique  :  c'est  une  erreur.  Elle  est  bien  un  latin 
écomposé;  mais  cette  décomposition  remonte  Jusjiu'aa 
temps  de  la  conquête  de  J.  Câar,  où  le  latin  fut  intro- 
duit dans  la  Gaule.  Les  peuples  de  cette  contrée,  amenés 
par  la  politique  de  Rome  à  adopter  le  latin,  y  transpor- 
tèrent le  génie  de  la  langue  celtique,  parlèrent  et  écrivi- 
rent la  nouvelle  langue  selon  leur  génie,  et  selon  la  con- 
formation particulière  de  leurs  organes.  Les  gens  instruits, 
les  habitants  des  villes,  purent  parler  un  latin  correct; 
mais  la  masse  du  peuple,  particulièrement  dans  les  cam- 
pagnes, dut  insensiblement  créer  un  idiome  çiui,  dans  le 
midi  de  la  Gaule,  ne  devait  pas  beaucoup  différer  de  la 
langue  d'oc.  —  La  langue  d'oc  a  dû  garder  des  traces 
des  idiomes  divers  parla  en  Gaule  au  moment  de  la  con- 
quête romaine.  Outre  le  latin,  qui  devint  la  principsle 
langue,  on  y  parlait,  au  v*  siècle ,  le  celte,  le  grec  et 
l'ibérien,  qui  n'eet  autre  que  le  basque.  On  retrouve 
dans  la  hingue  d'oc  des  échantillons  nombreux  de  ces 
langues,  auxuuels  s'ijoutèrent,  mais  en  petit  nombre, 
certains  rocanles  teutoniques  introduits  par  les  Ger- 
mains. —  Quoique  plus  analytique  que  le  latin,  puis- 
qu'elle possède  l'article  et  les  verbes  auxiliaires,  la 
langue  d'oc  présente  moins  de  caractère  oue  le  français, 
et  se  rapproche  beaucoup  plua,  en  général,  de  sa  mèrsf 


LAN 


1U3 


LAO 


sinsi,  elle  rapprime  le  pronom  dans  la  conlogaison ,  et 
désire  les  personnes  par  des  flexions  particullôres.  Ses 
locotions  sont,  en  général,  moins  chargées  de  mots,  plus 
coDCtses  ({ue  celles  du  français;  ce  qui  explique  la  ?olu- 
bilité  qa*aDportent  les  méridionaux  dans  la  prononcia- 
tion de  la  langae  française.  —  La  langue  d'oc  comprend, 
comme  dialectes  importants,  le  languedocien,  Vagénais , 
ViUÊnergnat^  le  limousin,  le  catalan,  le  provençal,  et 
des  ious-variétés  telles  que  le  béarnais,  le  pottooin,  le 
tahUongeois,  le  périgourdin,  V.  Honnorat,  Dictionnaire 
prooençal-français,  ou  Dictionnaire  de  la  langue  d^oc 
ancienne  et  moderne,  1846-50,  4  vol.  in-4«  ;  Blary-Lafon, 
Tableau  historique  et  littéraire  de  la  langue  parlée  dans 
le  midi  de  la  France,  1842,  in-i8.  E.  B. 

LANGUEDOCIEN,  un  des  grands  dialectes  issus  de  la 
langue  d^oc.  11  se  distingue  par  ses  terminaisons  en  a  et 
en  el.  n  a  supprimé  Vr  final  des  deux  premières  conju- 
gaisons, et  dit^  par  exemple,  ama,  fini,  tandis  qu'en  pro- 
vençal on  dit  amar,  finir. 

LANGUE  D*OIL,  nom  donné  à  la  langue  romane  pariée 
au  moyen  tçà  dans  le  N.  de  la  France,  depuis  la  Loire 
jusqu'au  Rhin.  On  y  distingue  trois  dialectes  princi- 
paux, le  bourguignon,  le  picard,  et  le  normand^  dont  les 
aatr»,  tels  oue  le  franc-comtois,  le  champenois,  le  lor- 
rain, le  wallon,  ne  sont  que  des  variétés.  La  langue 
cToiï  est,  dans  tous  ces  dialectes,  identique  au  fond,  et 
n'offre  de  différences  que  pour  les  détails.  Le  fond,  c'est 
le  langage  des  vieilles  populations  gallo-romaines,  com- 
biné avec  le  dialecte  de  haut  allemand  que  parlaient  les 
Franka.  Les  mots  d'origine  allemande  y  sont  en  petit 
nombre,  comparativement  aux  mots  latins;  l'influence 
germanique  a  été  un  peu  plus  grande,  sans  l'être  beau- 
coup encore,  sur  les  formes  grammaticales  :  mais  l'action 
du  langage  francique  a  été  considérable  sur  la  pronon- 
ciation et  sur  les  formes  que  celle-ci  imprime  aux  mots  ; 
c'est  elle  cpii  a  dénaturé  le  latin.  Les  différences  des  dia- 
lectes qui  composent  la  langue  d^oil  existent  principa- 
lement dans  la  prononciation  et  dans  les  formes  des 
mots,  car  les  règles  grammaticales  étaient  les  mêmes 
pour  tous,  c'était  la  môme  grammaire.  La  langue  fran- 
çaise est  née  du  mélanse  et  de  la  fusion  de  ces  dialectes; 
die  les  a  peu  à  peu  fait  déchoir  du  ranp  de  langages 
écrits,  et  les  a  relégués  au  rang  de  patois  :  les  circon- 
stances qui  établirent  entre  eux  des  communications 
dans  un  centre  commun,  le  domaine  des  rois  Capétiens, 
ont  fait  naître  et  dégagé  d'eux  tous  une  langue  com- 
moae,  plus  parfaite  qu'aucun  d'eux,  plus  ample  dans 
ses  ressources.  V.  Burguv,  Grammaire  da  la  langue  SoU, 
ntme  d'un  glossaire,,.  1853-56,  3  vol.  in-8**. 

LANGUES  ORIENTALES  (École  desj.  F.  notre  Diction^ 
noire  de  Biographie  et  d'Histoire,  p.  878,  col.  1. 

LANISTE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
puphieet  d^Bistoire, 

LANLEFF  (Temple  de),  à  8  kilom.  de  Paimpol  (Côtes- 
da-Nord).  Ce  monument,  servant  de  vestibule  ou  de 
porche  à  T^ise  du  village,  est  circulaire,  et  se  com- 
pose de  deux  enceintes  concentric^ues  en  pierre ,  dont 
rane  est  en  partie  détruite.  L'enceinte  intoieure,  de  10 
met,  de  diamètre,  et  de  8  met.  de  hauteur,  est  percée  de 
13  arcades  voûtées  en  plein  cintre ,  et  ayant  un  peu 
moins  de  2  met.  d'ouverture.  Douze  colonnes  de  hau- 
teur in^^e  (3  à  5  met.),  dont  plusieun  paraissent 
avoir  soutenu  une  voûte  qui  n'existe  plus,  sont  adossées 
à  la  muraille,  une  entre  chaque  arcade;  les  chapiteaux 
en  sont  complètement  dé^^és.  L'enceinte  extérieure, 
un  peu  moins  élevée  que  l'enceinte  intérieure,  en  est 
séparée  par  on  espace  de,3  met.,  et  lui  était  unie  par  un 
toit  :  elle  est  percée  de  16  arcades,  hautes  d'un  peu  plus 
de  S  met.,  et  dont  le  cintre  est  surélevé.  Son  pourtour 
est  de  55  mèt«  environ.  Elle  ofllre,  vera  le  milieu  de  sa 
hauteur,  on  cordon  uni ,  et,  à  son  sommet,  une  espèce 
te  corniche  saillante.  Le  monument,  tout  en  granit  du 
pays,  avait  une  seule  porte  d'entrée,  située  à  l'orient. 
Les  ans  voient  dans  le  temple  de  Lanleff  une  construc- 
tion romaine,  les  autres  un  Baptistère  des  chrétiens  pri- 
niti&«  ceux-ci  un  hôpital  pour  les  pèlerins  revenant  de 
k  Tem  Sainte,  ceux-là  une  église  de  Templiers  :  selon 
Topinion  la  plus  vraisemblable,  c'était  un  temple  cel- 
tique, consaoé  au  Soleil.  En  effet,  la  figure  du  soleil  y 
est  sculptée,  et  les  12  arcades  paraissent  représenter  les 
aisis  d3  l'année  ou  les  aimes  du  zodiaque.  B. 

LANSQUENET  (Jeu  du).  V,  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  Sffutoire,  p.  1437,  col.  1. 

LANTERNE ,  enveloppie  d'une  forme  quelconque,  dans 
laquelle  on  place  une  lumière  que  les  courants  d'air  ne 
^eafeoC  éteindre.  Les  lanternes  les  plus  communes  sont 


en  fer-blanc,  avec  une  petite  porte  en  verre  ou  en  corne 
transparente.  On  les  nomme  lanternes  sourdes,  quand 
elles  ont  une  sorte  de  volet  cru'on  peut  amener  sur  le 
verre  pour  cacher  la  lumière.  On  fait  aussi  des  lanternes 
en  papier,  en  toile,  en  gaze.  Celles  dites  vénitiennes,  en 
papier  de  diverses  couleura,  servent  aux  illuminations. 
Les  Chinois  fabriquent  d'élégantes  lanternes  avec  des 
châssis  sculptés  et  des  verres  peints.  —  Les  Anciens  ont 
connu  l'usage  des  lanternes,  qu'ils  faisaient  en  bois, 
en  terre  cuite,  et  plus  souvent  en  bronze.  Empédocle 
d'Agrigente  et  le  poète  comique  Théopompe  sont  les  pre* 
miere  auteun  qui  en  aient  parlé.  L»  mots  grecs  phanos 
(d'où  est  venu  probablement  fanal  )  et  lychnoukhos ,  le 
mot  latin  latema,  désignaient  la  lanterne.  Bien  aue  l'on 
connût  le  verre,  il  ne  paraît  pas  qu'on  en  ait  fait  usage 
pour  laisser  passer  la  lumière  ;  on  se  servait  de  corne, 
de  vessie  ou  de  toute  autre  membrane  transparente,  et 
même  de  toile  humectée  d'huile.  Plutarque  dit  que  les 
Augures  avaient  des  lanternes  pour  leura  fonctions.  Les 
Anciens  les  employèrent  fréquemment  dans  les  camps  : 
les  troupes,  quand  elles  marchaient  de  nuit,  en  portaient 
qui,  fixées  au  haut  d'une  pique,  n'éclairaient  qu'en  ar- 
rière. Il  y  en  avait  aussi  sur  les  navires.  Les  rondes  noc- 
turnes militaires  se  faisaient  avec  des  lanternes;  on  en* 
plaçait  auprès  des  sentinelles  sur  les  mura  des  villes  de 
guerre.  Dans  des  siècles  où  les  villes  ne  possédaient  pas 
d'éclairage  public,  les  particuliers  s'aidaient  de  lanternes 
le  soir  pour  regagner  leur  demeure  :  les  riches  se  fai-' 
salent  précéder  par  un  esclave  porte-lanterne,  latemaf 
rius.  Ce  ne  fut  que  ven  le  xii*  siècle  qu'on  sid)8titua  le 
verre  à  la  corne  dans  l'un  des  côtés  des  lanternes.  Cest 
l'usage  dans  l'Église  catholique  de  porter  une  ou  plu- 
sieun lanternes  devant  le  S'  Sacrement  dans  les  proces- 
sions, et  devant  le  prêtre  qui  va  administrer  le  viatique 
à  un  moribond.  B. 

LANTERNE,  tourello  élovéo  au-dessus  d'nn  dôme  ou 
d*une  coupole,  dont  elle  forme  l'amortissement,  comme 
au  Panthéon  et  aux  Invalides  de  Paris.  — Au  moyen  âge, 
pendant  la  période  romane,  on  appela  lanterne  la  tour  « 
ou  le  clocher  qui  s'élève  au-dessus  de  la  croisée  des  * 
églises,  et  dont  on  voit  l'intérieur  quand  on  se  place  au  ' 
milieu  du  transept.  Dans  le  Ifidi  et  dans  l'Est  de  la 
France,  ces  lanternes  présentent  à  l'intérieur  une  cou- 
pole sur  pendentifs,  et,  dans  l'Ouest,  très-souvent  une 
voûte  d'arête.  A  l'époque  ogivale,  les  lanternes  furent 
fermées  à  l'intérieur  par  des  voûtes  ogivales  aux  fines  et 
élégantes  nervures,  et  elles  se  couronnèrent  en  dehon 
d'une  flèche  gracieuse  et  élancée.  Les  Joura  de  fête,  on 
illuminait  ces  lanternes.  Une  des  plus  reman{uables  est 
celle  de  la  cathédrale  de  Coutances,  qui  existe  encore. 
On  en  voit  également  aux  cathédrales  d'Évreux ,  de  Li- 
sieux,  de  Laon,  etc.  Celle  qu'on  doit  regretter  le  plus 
s'élevait  au-dessus  de  la  cathédrale  de  Beauvais.      E.  L. 

LANTERNE    DE    OéMOSTHENE.    F.     ChORAGIQUES    (  Moua- 

ments). 

LANTERNE  DE  DIOGÈNE.   V.  ClX>UD  (SaINT-). 
LANTERNE  DES  MORTS.   V.  FaNAL  DE  UMETIÈRE. 

LANTERNISTES,  société  littéraire  qui  se  forma  anf 
commencement  du  xviii*  siècle  à  Toulouse,  et  dont  les 
membres,  ne  se  réunissant  que  le  soir  pour  n'être  pas 
troublés,  évitaient  de  se  faire  conduire  avec  des  flam- 
beaux et  prenaient  seulement  une  petite  lanterne.  Ils 
acceptèrent  le  sobriquet  que  quelques  plaisants  leur 
avaient  donné,  et  prirent  pour  devise  une  étoile  avec  ces 
mots  :  Lucema  in  nocte,  lis  distribuèrent  chaque  année 
une  médaille  à  l'auteur  du  meilleur  sonnet  composé  en 
l'honneur  du  roi  sur  des  bonts-rimés  proposés  par  la 
compagnie, 

LANTERNON,  petite  tourelle  à  toit  conique,  placée  au- 
dessus  d'un  escalier  de  tour  ou  de  clocher,  pour  le  proté^ 
ger  contre  la  pluie. 

LAOGOON  ^Groupe  du).  F.  notre  Dictionnaire  de  9to- 
graphie  et  dnistoùre. 

LAON  (Église  Notre-Dame  de).  Cette  ancienne  église 
cathédrale,  dont  on  fait  remonter  la  première  fondatioii 
à  l'évoque  S>  Rémi,  fut  incendiée  en  1112,  pendant  lerf 
luttes  qui  signalèrent  rétablissement  de  la  commune  de 
Laon.  Deux  ans  après,  on  commença  l'édifice  actuel,  qui 
ne  fut  terminé  quà  la  fin  du  xu*  siècle  ou  dans  les  pre- 
mières années  du  xni*.  Les  dimensions  en  sont  vastes  t 
longueur,  107  met  ;  largeur  du  transept,  40  met.  ;  largeur  * 
de  la  nef,  y  compris  les  collatéraux,  35  met.  ;  hauteur 
sous  voûte,  30  met.  ;  hauteur  de  la  lanterne,  40  met.  On 
remarque,  entre  autres  particularités  de  la  construction  « 
que  l'abside  est  carrée,  ainsi  que  les  bras  de  la  creix, 
qui  ont  seulement,  du  c6té  du  chœur,  une  chapelle  cir- 


LAP 


114« 


LAO 


colaire.  La  cathédrale  de  Laoo  devait  aToir  sept  tours, 
deax  au  portail  principal,  quatre  aux  angles  des  croisil- 
lons, et  une  à  la  croisée  :  on  n*en  a  élevé  que  quatre , 
dont  deux  au  grand  portail,  et  deux  aux  extrémités  des 
transepts.  Rien  n*égaie  la  hardiesse,  la  légèreté  et,  pour 
ainsi  dire,  la  transparence  de  ces  tours;  Faction  des  vents, 

Soi  sont  très-violents  sur  la  montagne  où  Tédiflce  est 
evé,  n*aurait  pas  tardé  à  détruire  des  masses  plus  com- 
pactes. Toutefois,  comme  la  construction  fut  faite  trop  ra- 
pidement, il  y  eut,  à  la  façade,  des  tassements  et  des  dé- 
chirements, qui  ont  nécessité  de  nos  Jours  une  importante 
restauration.  Les  tours  étaient  autrefois  surmontées  de 
flèches;  elles  sont  aujourd'hui  terminées  par  des  beffrois 
octogones,  flanqués,  sur  les  faces  parallèles  aux  diago- 
nales du  carré,  de  pinacles  à  deux  étapes  ajourés,  où  sont 
des  figures  colossales  de  bœufs.  L'intérieur  de  l'éf^ise  pré- 
sente une  disposition  architecturale  remarquable.  Les 
chapiteaux  des  piliers  monocylindriques  sont  tous  d*nne 
sculpture  différente  :  sur  ces  chapiteaux  s*appuient  des 
colonnettes  qui  s'élancent  Jusqu'à  la  voûte  pour  en  rece- 
voir les  nervures,  et  qui  sont  imrtagées  par  cinq  annelets. 
Quatre  des  piliers  de  la  grande  nef  sont  formés  d'une 
eolonne  centrale  et  de  six  colonnettes  séparées  et  isolées 
dans  tonte  la  longueur  de  leur  fût.  Un  pilier  du  transept, 
à  la  travée  centrale,  est  composé  de  quatre  colonnes 
sroupées.  La  lanterne  de  là  croisée  est  d'une  grande 
flégEince.  La  galerie  s'étend  sur  toute  l'étendue  des  col- 
latéraux, comme  à  Notre-Dame  de  Paris,  à  S*-Étienne  de 
Gaen,  à  Notre-Dame  de  Ch&lons-sur-Blarne  et  à  No^on. 
Au-dessus  se  trouvent  des  arcades  à  plein  cintre  qui  si- 
mulent un  triforium,  et  des  fenêtres  ogivales.  Dans  le 
chœur,  on  trouve  également  des  arcades  ogivales  ap- 
puyées sur  des  colonnes  monpcylindriques,  une  galerie 
aussi  profonde  nue  sur  les  bas  côtés,  une  seconde  galerie 
aveugle,  et  des  fenêtres  ogivales  de  dimension  médiocre. 
Les  chapelles  qui  entourent  la  cathédrale  de  Laon  sont 
fort  petites  et  plus  récentes  que  le  corps  de  l'édifioe;  eUes 
ont  été  pnoiquées  entre  les  contre -forts  extérieurs,  au 
XV*  et  au  XVI*  siècle,  et  sont  fermées  du  côté  des  colla- 
téraux par  d'élégantes  clôtures  en  pierre  dans  le  style  de 
a  Renaissance.  Parmi  les  richesses  du  monument,  on  | 
peut  encore  dter  le  buffet  d'orgues,  les  rosaces,  ornées 
de  beaux  vitraux,  et  les  pierres  tombales  dont  il  est  en- 
tièrement pavé.  Le  long  du  flanc  méridional  de  la  nef,  il 
existe  un  cloître  voûté  en  arcs  d'ogive .  V.  J.  Marion , 
Essai  historique  et  archéologique  sur  l*église  cathédrale 
de  Notre-Dame  de  Laon,  1843,  in-8*.  B. 

LAPA ,  grande  trompette  des  Tartarea,  fidte  d'un  tube 
de  cuivre  long  de  2  à  3  mètres. 

LAPIDAIRE  (du  latin  lapis,  pierre),  ouvrier  qui  taille 
et  polit  les  pierres  précieuses,  artiste  qui  y  grave  ou 
sculpte  des  figures.  Les  lapidaires,  formes  autrefois  en 
corporation,  avaient  pour  patron  S'  Louis. 

LAPIDAIRE  (Style),  style  employé  dans  les  inscriptions, 
qui  sont  le  plus  souvent  gravées  sur  la  pierre.  L'étude 
en  est  assez  difficile  à  cause  des  signes  conventionnels, 
des  abréviations  nombreuses  et  des  particularités  propres 
au  texte  ordinaire  des  inscriptions.  Ces  particulantés, 
pour  les  inscriptions  grecaues  et  latines,  sont  désignées 
sous  le  nom  de  figures,  telles  que,  par  exemple,  Vanaco- 
luthe  on  manque  d'accord  entre  le  verbe  et  le  sujet,  le 
mrotoustère  ou  expre.^on  qui  n'est  pas  à  sa  place,  et 
Vantiptose  ou  cas  mis  pour  un  autre.  A  ces  difiîcultés  se 
Joignent  celles  qui  résultent  de  la  différence  des  dialectes, 
des  expressions  locales,  et  des  fautes  qui  ont  pu  être  com- 
mises par  l'ignorance  du  graveur.  Le  plus  souvent,  les 
Inscriptions  grecques  et  latines  sont  en  prose;  on  en 
trouve  pourtant  un  certain  nombre  écrites  en  vers,  et 
qui  sont  app^^^  métriques;  d'autres  enfin  offrent  un 
mélange  de  vers  et  de  prose,  et  parfois  même  de  grec  et 
de  latin,  comme  on  le  voit  sur  le  dppe  iunéraire  trouvé 
Il  y  a  quelques  années  à  Lyon.  Dans  le  style  lapidaire, 
las  mots  sont  le  plus  souvent  séparés  par  des  points, 
•nssi  bien  les  mots  écrits  en  toutes  lettres  (pie  ceux  écrits 
en  abrégé  ou  indiqués  seulement  par  l'initiale.         B. 

LAPIDAIRES  (Signes),  marques  variées  et  nombreuses 

S 'on  trouve  sur  les  pierres  des  édifices  du  moyen  âge. 
s  maîtres  tailleurs  de  pierre  et  même  les  ouvriers 
avaient  l'habitude  d'appliquer  sur  les  pierres  ou'ils  tail- 
laient une  espèce  de  monogramme,  chiffre  ou  signe,  sur- 
monté généralement  d'une  croix.  On  trouve  aussi,  à  côté 
de  ces  signatures  symboliques,  de  nombreux  repères  de 
tidlle  également  croisetés.  Des  rapprochements  ont  été 
faits  pour  trouver  qudaue  analogie  entre  les  marques  des 
pierres  des  édifices  de  différents  pays,  ce  qui  eût  expliqué 
les  rapports  maçonniques  des  grandes  compagnies  ou- 


vrières du  moyen  âge;  mais  l'immense  multiplicité  de 
ces  signes  a  dérouté  tous  les  calculs.  Ainsi  les  murs  d'en- 
ceinte d'Aigues-Mortes  seuls  ont  donné  237  variétés  de 
signes,  la  cathédrale  de  Strasbourg  en  a  offert  près  de 
350,  le  château  de  Nuremberg  157,  etc.  E.  L. 

LAPIDATION,  action  de  tuer  quelqu'un  à  coups  de 

Eierres.  Ce  fut  un  genre  de  supplice  usité  chez  1»  Hé- 
reux  pour  l'idol&trie,  le  blasphème,  l'adultère,  l'iDceste, 
la  violation  du  sabbat,  etc.  C'étaient  les  témoins  qui  Je- 
taient la  première  pierre  au  coupable. 

LAPITHES  (Danse  des),  danse  exécutée  chez  les  an- 
ciens Grecs  au  son  de  la  flûte  à  la  fin  des  festins,  pout 
célébrer  quelque  grande  victoire.  Elle  avait  été  inventée, 
dit- on,  par  Pirithoûs,  en  mémoire  du  combat  des  Cen« 
taures  contre  les  Lapithes. 

LAPON  (Idiome),  un  des  idiomes  finnois  (  F.  ce  mot), 
différencié  des  autres  du  même  groupe  par  l'emploi  du 
nombre  duel  dans  les  pronoms  et  dans  les  verbes.  C'est 
avec  le  hongrois  qu'il  a  le  plus  d'aflinité.  On  y  reconnaît 
trois  dialectes,  que  distinguent  entre  eux  des  éléments 
suédois,  norvégiens  et  russes.  Lé  lapon  contient  beaucoup 
d'onomatopéoi;  il  n'a  pas  de  mots  exprimant  des  idées 
abstraites.  Il  y  a  huit  cas,  et  deux  déclinaisons  entre  les- 
quelles se  partagent  les  substantifs  et  les  adjectifs,  selon 
que  leur  nominatif  se  termine  par  une  voyelle  ou  par  une 
consonne.  Il  existe  également  pour  les  verbes  deux  conju- 
gaisons, que  détermine  la  terminaison  de  la  3* personne  do 
présent  de  l'indicatif.  Le  pluriel  se  forme  dans  les  noms, 
tantôt  en  affaiblissant  ou  en  retranchant,  tantôt  en  renfor- 
çant ou  redoublant  les  consonnes  radicales.  L'emploi  de 
flexions  [Muticulières  dans  les  verbes  permet  de  rendre  par 
un  seul  mot  ce  qui  exige  des  périphrases  dans  la  plupart 
des  lances.  V.  FlellstrOm,  Grammaire  suédoise-laponne, 
et  IHcttonnaire  suédois-lapon^  Stockholm,  1738,  in-8<*; 
Ganander,  Grammaire  laponne  (pour  le  dialecte  suédois), 
1743,  in -8^:  Knud  Leem,  Grammaire  laponne,  Copen- 
hague, 1748;  le  même.  De  Lapponibus  Finmarchiœ 
eorumque  linpuâ,  1767,  iii-4**;  le  même,  Lexicon  lappo- 
ntco-dantco-Tatinum  (piour  le  dialecte  norv^en),  1768; 
Lindahl  et  CEhrling,  Lexicon  lapponicum,  Stockholm, 
1780,  in-4**;  Rask,  Grammaire  laponne^  Copenhague, 
1832,  in-8*;  Possart,  Grammaire  laponne,  Stuttgard, 
18i0;  Sainovicz,  Demonstratio  idioma  Hungarorumet 
Lapponum  idem  esse,  Copenhague,  1770;  Ihre  OEhr,  De 
conveniefUiâ  linquœ  lappdnicœ  cum  hungaricà,  Upsal, 
1777  ;  J.  Hager,  Nouvelles  preuves  de  la  parenté  du  hon- 
grois avec  le  lapon,  en  allem..  Vienne,  1734.  in-8*. 

LAPSUS,  mot  emprunté  au  latin  pour  aésigner  une 
erreur,  une  faute  échappée  par  méspsrde  dans  le  discours 
{lapsus  linguœ)  ou  dans  l'écriture  (fapsus  ca/amt). 

LAQUE ,  sève  de  deux  arbres  de  la  Chine  et  du  Japon, 
Vaugia  sinensis  et  le  thus  vemix.  Cest  ane  gomme-ré- 
sine d'autant  plus  fine  et  noircissant  d'autant  plus  vite 
à  f  air,  que  sa  couleur  café  au  lait  tire  plus  sur  le  rouge. 
On  s'en  sert  pour  vernir  des  meubles,  fabriqués  le  plus 
ordinairement  en  cjrprès.  Les  opérationa  de  vernissage 
sont  longues  et  minutieuses.  Le  bois  reçoit  d'abord  une 
couche  de  fiel  de  buffle  et  de  grès  rouge  pulvérisé  :  ce 
premier  fond  est  poli  avec  un  brunissoir  de  grès,  pois 
gommé  ou  ciré ,  et  l'on  étend  par-dessus,  avec  un  pin* 
ceau  plat  fait  en  cheveux ,  une  couche  de  vernis,  com- 
posé de  605  grammes  de  laque  fine  étendus  dans  1 ,310 
grammes  d'eau  avec  addition  de  38  grammes  d'huile  de 
camellia  sesanqiui,  d'un  fiel  de  porc,  et  de  19  grammes 
de  vinaigre  de  riz.  Quand  le  bois  ainsi  préparé  est  resté 
quelque  temps  dans  un  séchoir  humide,  on  le  plane  à 
reau  avec  un  schiste  d'un  grain  très-fin  ;  on  donne  une 
deuxième  couche  de  laque,  puis  un  deuxième  poli,  et 
ces  deux  opérations  se  succèdent  Jusqu'à  ce  que  la  sur- 
face soit  parfaitement  unie  et  brillante.  Il  n'y  a  jamais 
moins  de  3  couches,  ni  plus  de  18.  L'artiate  qui  veut 
orner  de  dessins  cette  surfitce  polie  fait  d'abord  une 
esquisse  avec  un  pinceau  blanchi  d'un  pea  de  cérose  : 
s'il  est  satisfait  de  son  croquis,  il  le  burine,  et  trace  les 
mille  petits  détails  du  s^|et,  puis  il  le  peint  avec  la  laque 
du  Kouang-si  camphrée,  qui  sert  de  mordant,  et  enfin  fl 
dore  au  tampon  et  an  pinceau.  On  obtient  des  reliefs 
avec  une  ou  deux  couches  de  hoorkinn^i,  et  l'on  enjo- 
live ces  miniatures  dorées  avec  la  laque  du  Fo-Kien.  Les 
laques  de  Sou-tchou  et  de  Nan-King  sont  remarquables 
par  la  pureté  et  l'éclat  du  vernis,  la  finesse  merveilleuse 
du  décor,  et  la  correction  du  travail  d'ébénisterie.  La 
fabrication  des  meubles  en  laque  est  encore  supérieure 
dans  le  Japon  :  on  y  incruste  des  fragments  d'haliottde 
et  d'avicule,  diversement  découpés  et  colorés.  Ce  fut 
vers  1675  que  les  missionnaires  apportèrent  en  fnacs 


LAT 


1145 


LAT 


les  premiers  laques  de  Chine.  On  les  imite  aujourd'hui 
CD  France  et  en  Angleterre.  On  commence  par  poser  sur 
le  bois  (ordinairement  du  tilleul,  du  hêtre,  du  frêne  ou 
da  mensier)  un  fond  de  noir  de  fumée  et  un  apprêt  à 
Pocreon  à  la  céruae;  puis  on  polit  au  papier  verre,  on 
passe  deux  couches  de  noir  mat,  on  donne  deux  pon- 
çages, on  applique  une  couche  de  noir  dMvoire  broyé 
arec  de  Thuile  et  de  l*essence,  et  l'on  termine  par  deux 
glads  et  UD  frottis  au  Ternis  teinté.  Le  brillant  est  dû 
priDcipalement  au  vernis,  tandis  qu'en  Chine  on  l'obtient 
arec  le  poli.  En  Angleterre,  surtout  à  Birmingham,  on 
laqoe  toutes  sortes  d'ouvrages  de  tabletterie  en  papier 
mftché  et  en  carton  verni ,  et  ces  ouvrages  peuvent  être 
\ijTes  à  bas  prix. 

L\RAIRE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d*Histotre. 

L\RGO,  mot  italien  qui  signifie  largement,  et  qui, 
placé  au  commencement  d'un  morceau  de  musique,  in- 
dique un  mouvement  plus  lent  que  Vadagio,  et  le  plus 
leot  de  tous.  Il  faut  qu'un  pareil  morceau  ne  soit  pas 
lODg  pour  ne  point  devenir  ennuyeux.  —  Larghetto^  di- 
fflioatif  de  largo,  indique  un  mouvement  un  peu  moins 
lent,  très-approchant  de  Vandantino, 

L\RGUE,  terme  de  Marine  qui  signifie  lâche,  non 
tendu.  Larguer^  c'est  élargir,  rel&cher,  détendre.  Largue 
désigne  encore  l'allure  d'un  bâtiment,  celle  où  il  reçoit 
le  Tent  dans  une  direction  oblique  par  rapport  à  la  quille. 
Les  voiles  sont  alors  peu  ouvertes.  Le  vent  est  largtie^ 
qaand  il  souffle  dans  cette  direction. 

lARIDON,  nom  que  l'on  donnait  Jadis  à  la  hastê  de 

m, 

LARIGOT  (Jeu  de).  V.  Nasard. 

lARIN,  monnaie  de  la  Perse,  qui  fut  primitivement 
propre  à  la  ville  de  Lar,  et  valant  \  fr.  21  cent.  Cest  un 
fil  d'argent  plié  en  deux,  et  sur  lequel  on  voit  le  nom  du 
fionrerain. 

URBUER,  partie  d'une  corniche  qui  est  le  plus  en 
niUie.  11  présente  en  dessous  un  plafond,  qui  reçoit  une 
ornementation  en  rapport  avec  l'ordonnance  architectu- 
nie:  dans  tous  les  cas,  ce  plafond  doit  porter  vers  le  bord 
extérieur  un  canal  appelé  motic^tto,  qui  arrête  les  gouttes 
d'eau  pluviale  et  les  Ikit  tomber  verticalement,  en  larmes, 
saos  baver  le  long  de  la  corniche.  La  saillie  du  larmier 
nrie  suivant  les  ordres  :  elle  est  d'un  module  pour  le 
tOKan,  de  1,72  pour  le  dorique  et  l'Ionique,  de  2,374 
poor  le  corinthien  et  le  composite.  Dans  l'ordre  dorique. 
Je  plafond  du  larmier  est  incliné  en  avant,  pour  offrir  un 
obiticle  de  plus  à  la  goutte  d'eau  qui  aurait  franchi  la 
OKKKhette.  Le  larmier  lui-même  s'orne  quelquefois  de 
euaax.  A  l'époque  romane,  le  larmier  a  perdu  sa  forme 
classique  ;  ce  n'est  plus  qu'une  forte  moulure  inclina, 
et  ornée  parfois  de  modillons  et  de  corbeaux.  Le  larmier 
gsthique  se  modifie  encore  dans  sa  forme;  il  prend  un 
pea  plus  d'importance,  et  se  compose  d'un  plan  incliné 
lop^ear,  très-saillant,  et  d'une  face  étroite,  ornée  en 
dessous  d'une  gorge  et  d'un  listel.  La  Renaissance  a  ra- 
mené les  larmiers  classiques.  E.  L. 

LARMOYANTE  (Comédie).  V.  Com«dib. 

LARUETTE.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
BioQraphie  et  d^ Histoire, 

^  LàSCARS,  nom  donné  aux  matelots  indiens,  particu- 
lièrement à  ceux  qui  servent  sur  les  bâtiments  européens. 
Os  sont  tirés  de  la  classe  des  Parias. 

LASSO,  forte  lanière  de  cuir,  longue  de  45  à  20  met., 
pnie  de  plomb  à  ses  extrémités,  et  que  les  indigènes 
de  PAménque  du  Sud  Jettent  avec  une  étonnante  a<fresse 
pour  enlacer  et  prendre  les  chevaux  et  les  bosufli  sau- 
vages. 

LASTRIGA,  aire  aveclaquelle  les  Napolitidns  font  leurs 
pbuichers  intérieurs  et  les  terrasses  qui  couvrent  leurs 
bâtiments.  Elle  est  composée  de  deux  parties  poosxolane, 
loe  partie  tuile,  et  deux  parties  chaux  vive. 

lATICLAVB.  y.  ce  mot  dans  notre  Dietiomiairê  de 
Siograi^  H  d^Hittùire. 

UTDf  (Style).  V.  AacHiTBcnmi. 

lATWB  {CnAs).  V.  Cboix. 

.utniB  (ÊgUae).  V.  Églisb  cathouqob,  daos  notre  Dto- 
tomoiracie  BwgraphM  et  d'Histoire, 

UTras  (Lansa^.  Ses  caractères  spécioua,  «  La  lannie 
laiioe,  dit  un  éaunent  philologue,  am>artient  à  la  famille 
des  langues  tgtUhéUques,  c-à-d.  qm  tendent  à  exprimer 
piasieurs  idén  à  la  fois  par  un  seul  mot,  et  qui  abondent 
en  formes  et  en  flexions  grammaticales.  »  {Élémmts  de 
trmmaire  comptai,  par  M.  Egger,  ch.  xxii.)  En  effet, 
as  y  rencontre  tout  d'aoord  une  grande  Tariéie  dans  les 
Minaisons,  soit  qu'on  en  admette  cinq,  suivant  la  divi* 


sion  vulgaire,  soit  qu'une  grammaire  plus  rigoureuse  lef 
réduise  a  trois,  toujours  aussi  fertiles  en  désinences. 
Trois  genres  dans  les  noms  et  les  a(]yectifs,  comme  en 
grec  et  en  allemand  (le  français  n'a  pas  de  geinre  neutre)! 
deux  nombres,  comme  en  français  (le  grec  en  avait  un 
troisième,  le  duel,  qui,  sans  être  nécessaire,  ajoutait  à  Ui 
facilité  et  à  l'élégance  du  langage);  point  d'articles,  et, 
par  conséquent,  moins  de  clarté  que  dans  la  phrase  gireo- 
que  ou  française,  plus  d'ambiguïtés  et  d'équivoques  è 
craindre  ;  dans  les  verbes,  quatre  conjugaisons,  réduc- 
tibles, si  l'on  veut,  à  une  seule,  mais  riche  en  terminai- 
sons  variées,  sonores,  et  par  conséquent  significatives  ; 
une  forme  passive  analogue  à  celle  des  Grecs,  et  qui 
n'exige  pas,  comme  en  français,  une  proposition  tout  en- 
tière :  tels  sont  les  premiers  éléments  et  les  conditions 
constitutives  de  la  langue  latine.  —  Le  français,  qui  n'a 
pas  de  déclinaisons,  et  dont  les  rares  désinences  no 
s'adressent  guère  qu'aux  yeux,  exprime  les  rapports  des 
idées  et  des  mots  par  l'emploi  des  prépositions  ou  par  la 
place  qu'ils  occupent  dans  la  phrase;  le  latin  fait  servir 
toutes  ses  désinences  à  exprimer  ces  mêmes  rapports,  et 
multiplie  les  régimes  immédiats  des  substantifs  et  des 
verbes.  «  Les  règles  d'accord  et  de  dépendance,  dit  en- 
core le  même  savant,  dominent  dans  la  syntaxe  latine  t 
les  règles  de  position  y  sont  plus  rares  et  moins  rigou- 
reuses. Dans  notre  syntaxe,  les  règles  depo^thon,  quoi- 
que simples  et  moins  nombreuses,  l'emportent  sur  les 
règles  d'accord  et  de  dépendance,  »  (Ibid.)  —  Aussi  le 
latin  est-il,  comme  le  grec,  une  langue  essentiellenïent 
inversive.  Les  mots  s'y  rangent  dans  l'ordre  de  leur  va- 
leur et  de  leur  Importance,  d'après  la  force  et  la  progres- 
sion des  idées,  ou  bien  encore  selon  les  lois  de  l'harmo- 
nie, et  donnent  naturellement  à  la  phrase,  en  prose 
comme  en  vera,  un  tour  expressif  et  musical.  Grftce  à  cet 
heureux  privilège,  les  langues  grecque  et  latine  méritent 
par  excellence  l'estime  que  Boileau  professait  pour  les 
mots  mis  en  leur  place.  On  a  justement  remarcpié  que 
l'inversion,  si  favorable  à  l'effet  et  à  l'élé^nce  du 
style,  convenait  à  merveille  au  génie  artiste  des  Grecs,  et 
même  des  Latins,  quoique  moins  heureusement  doués,  et 
lentement  parvenus  au  sentiment  et  à  la  culture  des  arts; 
tandis  que  la  constitution  essentiellement  méthodique  de 
notre  langue  et  l'ordre  successif  de  notre  phrase,  en  les 
rendant  plus  claires  et  plus  rigoureuses,  semblent  les- 
destiner  à  l'expression  des  ventés  scientifiques  et  des 
conceptions  de  la  raison.  Ajoutons  encore  que  ces  qualités 
conviennent  aux  discussions  et  aux  conventions  diploma- 
ti(fues,  où  les  Romains,  lorsqu'ils  traitaient  avec  les 
vaincus,  ne  se  faisaient  pas  toujoun  scrupule  d'employer 
des  éouivoques  plus  politiques  qu'honorables.  Un  juge 
singulièrement  sensible  aux  qualités  expressives  des 
idiomes  anciens,  Fénelon,  a  caractérisé  Ilnveraion  avec 
la  délicatesse  habituelle  de  son  goût  et  ouelque  peu  d'in- 
justice pour  sa  langue  nationale,  qu'il  avait  pourtant 
maniée  si  admirablement.  «  Les  Anciens,  dit-il,  facili- 
toient  par  des  invereions  fréquentes  les  belles  cadences, 
la  variété  et  les  expressions  passionnées.  Les  invendons 
se  tournoient  en  grandes  figures,  et  tenoient  l'esprit  sus- 
pendu dans  l'attente  du  merveilleux...  Notre  langue  n'ose 
jamais  procéder  que  suivant  la  méthode  la  plus  scrupu- 
leuse et  la  plus  uniforme  de  la  grammaire.  On  voit  tou- 
joura  venir  d'abord  un  nominatif  substantif  qui  mène 
son  adjectif  comme  par  ta  main  ;  son  verbe  ne  manque 
pas  de  marcher  derriènre,  suivi  d'un  adverbe  qui  ne  souffre 
rien  entre  eux  deux,  et  le  régime  appelle  aussitôt  un  ac- 
cusatif qui  ne  peut  jamais  se  déplacer.  Cest  ce  qui  exclut 
toute  suspension  de  l'esprit,  toute  attention,  toute  sur- 
prise, toute  variété,  et  souvent  toute  magnifique  cadence.» 
{Lettre  sur  les  occupations  de  V Académie,  v.)  —  A  oet> 
caractères  essentiels,  il  faut  ajouter  la  facilité  de  former 
les  mots,  moins  par  composition  que  par  dérivation,  faci- 
lité que  Fénelon  enviait  encore  aux  langues  mortes,  et 
ou'il  désirait  voir  passer  en  firançals,  malgré  l'exemple 
oécourageant  de  Ronsard.  Les  éléments  des  mots  com- 
posés ne  se  multiplient  pas  indéfiniment  en  latin  comme 
en  allemand.  En  général,  ils  se  réduisent  à  deux  ter- 
mes ;  l'expression  y  gagne  en  facilité,  sans  être  surcharj^ 
d'une  stérile  et  oonmse  abondance.  Au  reste,  le  latin  ne 
se  prêta  iamais  avec  autant  de  facilité  que  le  grec  à  Is< 
combinaison  des  mots  composés.  Les  longs  mois  twffiè- 
plaisamment  par  Plante  à  l'imitation  d'Aristophane  ne 
sortaient  pas  du  style  comique.  Les  Romains  n'avaient 
pas  la  flexibilité  de  cette  bouche  harmonieusemmi  ar^ 
rondie,  dont  la  Muse,  dit  Horace,  avait  doué  les  fUs  pri- 
vilégiés d'  la  Grèce.  Mais  la  langue  romaine,  destinée  t 
s'imposer  au  monde    avait  d'autres  qualités,  d'aotrea 


L.\T 


1146 


LAT 


«▼«DtaigeB;  elle  les  posséda  sans  doate  avant  même  de  se 
polir  au  contact  d*un  idiome  étranger.  Un  peuple  formé 
dans  las  assemblées  publiques  et  les  tribunaux  à  la  pra- 
tiqpie  des  aiblres  et  des  lois,  partagé  entre  la  guerre  et 
les  luttes  du  Forum,  acquérait  naturellement  à  cette 
double  école  la  précision,  la  force  et  la  grandeur  avec  la 
brièreté  du  commandement.  Lorsque  les  relations  avec 
la  Grèce  eurent  apporté  à  Tidiome  des  vieux  Latins  un 
peu  de  la  politesse  et  de  Tabondanoe  qui  lui  manquaient, 
il  prit  cette  solidité  et  cette  ampleur  oratoires  qui  de- 
vaient faire  son  originalité,  sa  puissance  et  sa  durée. 
Cette  belle  forme  de  la  période,  que  les  Romains  appe- 
laient le  ctrctttt,  le  cadré  de  la  parole,  ou  plut6t  le  tour 
par  où  la  parole  se  développe  (circuttuf,  ambitus,  com^ 
prehengto  vérborum)^  semble  presque  leur  appartenir  en 
propre,  bien  quils  en  eussent  trouvé  le  modèle  dans  la 

Ehrase  admirablement  nette,  précise  et  abondante  de 
^émostbène.  Cicéron  nous  donne  presque  la  date  pré- 
cise de  Tapparition  de  la  période,  avec  Télégance  grecque; 
il  en  fait  honneur  à  M.  Emilius  Lépidus,  surnommé 
Porcins,  créateur  de  ce  qu'il  appelle  d*un  terme  tout  mo- 
derne le  style  curtistê,  artifex  (an  de  Rome  617,  av.  J.-C. 
437).  Dès  lors,  la  g^vité  des  assemblées  publiques  et 
l'autorité  que  donnait  la  parole  auprès  du  Sénat  et  du 

riple,  conduisirent  naturellement  la  langue  oratoire 
rfaarmonieuse  nujesté  de  Grassus  et  de  Cicéron, 
comme  à  la  m&le  toergie  de  Brutus.  «  Rien  n'égale  la 
dignité  de  la  langue  latine.  Elle  fut  parlée  par  le  peuple- 
roi  qui  lui  imprima  ce  caractère  de  grandeur  unique  dans 
rhistoire  du  langage  humain ,  et  que  les  langues ,  même 
les  plus  parfaites,  n*ont  jamais  pu  saisir.  Le  terme  de 
majesté  appartient  au  latin.  La  Grèce  Tignore,  et  c*est 
par  la  majesté  seule  qu'elle  demeurera  au-dessous  de 
Bome,  dans  les  lettres  comme  dans  les  camps.  Née  pour 
commander,  cette  langue  commande  encore  dans  les 
livres  de  ceux  qui  la  parlèrent.»  (  J.  de  Haistre,  du  Pape, 
I ,  XX.  )  —  Un  autre  caractère  propre  à  la  langue  latine 
-est  de  se  prêter  merveilleusement  an  style  lapidaire 
(V,  ce  mot).  Brève  et  concise,  elle  réduit  les  termes 
•et  ménage  1  espace  au  profit  des  idées;  libre  dans  sea 
constructtons,  elle  peut  placer  les  mote  dans  l'ordre 
le  plus  avantageux  et  le  plus  éloquent.  Ces  qualités  ont 
'fait  préférer  longtemps  le  latin  aux  langues  modernes 
•pour  les  monuments  et  les  médailles,  et  le  font  quelque- 
fois adopter,  même  de  nos  jours,  quoique  nous  ne  pen- 
sions pas  toii^ours  à  rechercher  dans  nos  inscriptions 
modernes  la  vigueur  ni  l'élégance.  «  Le  signe  européen, 
dit  encore  de  Maistre,  avec  sa  verve  éloquente,  c'est  la 
langue  latine...  Les  médailles,  les  monnaies,  les  tro- 
phées, les  tombeaux,  les  annales  primitives,  les  lois,  les 
canons,  tous  les  monuments  parlent  latin  :  faut-il  donc 
les  effacer,  ou  ne  plus  les  entendre?.. •  Au  lieu  de  ce 
noble  laconique,  vous  lires  des  histoires  en  langue  vul- 

Saire.  Le  marbre,  condamné  à  bavarder,  pleure  |a  langue 
ont  il  tenait  ce  beau  style  qui  avait  un  nom  entre  tous 
les  autres  sQrles,  et  qui,  de  la  pierre  où  il  s'était  établi , 

•  s'élançait  dans  la  mémoire  de  tous  les  hommes.  •  {là.  ) 

Origines  et  histoire  sommcUre  de  la  langue  latine.  — 

Les  origines  du  latin  sont  très-obscures  et  trè»-difficiles 

.  à  déterminer.  Les  grands  maîtres  de  la  prose  historique 

•  chez  les  Romains,  plus  soucieux  d'éloquence  que  d'éru- 
dition, ne  nous  ont  rien  appris  de  leur  histoire  et  de  leur 
langue.  Varron,  dans  les  six  livres  incomplets  qui  nous 
restent  de  son  traité  Sur  la  langue  UUine,  Festus,  dans 
son  livre  de  la  Signification  des  mots,  quelques  débris 

■  de  l'ancien  langage,  recueillis  çà  et  là  par  une  critique  in- 
génieuse dans  la  poussière  des  monuments  mutilés  ou 
dans  les  erammauiens  (  V.  Bgger,  Laiini  sermonis  r«i*- 
çwûs),  voua  où  il  faut  puiser  les  éléments  d'une  histoire 
de  la  langue  latine  dans  les  premiers  siècles  de  Rome. 
«  Notre  langue,  dit  Varron,  n'est  pas  tirée  toute  des 
^termes  nationaux  »  (liv.  IV,  init.).  Il  est  étobli,  du  moins, 
>4iue  le  latin  des  vieux  âges  avait  une  origine  commune 
.  avec  le  grec.  Les  immigrations  de  peuplades  helléniques 
avaient  apporté  sur  le  sol  Italien  une  langue  d'origine 
>  indienne,  issue  du  sanscrit,  et  destinée  à  se  perpétuer  en 
Italie  comme  en  Grèce,  mais  avec  des  fortunes  bien  dif» 
férentes.  Une  vie  agricole  et  guerrière,  point  de  sentiment 
des  arts,  c'étaient  là  des  conditions  faites  pour  maintenir 
le  langage  à  l'état  rudimentaire,  et  réduue  le  rustique 
Latium,  comme  l'appelle  dédaigneusement  Horace,  à  la 
dégoûtante  âpreté  du  grossier  mètre  saturnien  (grave 
virus).  Dans  quelle  proportion  les  populations  italiques, 
les  Osques,  les  Sabins,  les  Étrusques,  modifièrent-ils 
ces  éléments  primitifs?  Il  est  impossible  de  le  dire.  La 
langue  latine  dut  TieiUir  dans  une  enfancede  cinq  siècles, 


jusqu'au  moment  où  le  progrès  des  armes  romaines  la 
mit  en  présence  de  la  langue  grecque,  et  fit  subir  aux 
rudes  fils  de  Romulus  l'sscendant  d'une  civilisatioa  en- 
core inconnue.  Les  deux  idiomes,  bien  que  sortis  d'une 
même  souche,  avaient  singulièrement  changé  pour  se  re- 
connaître après  une  séparation  si  profonde.  Toutefois,  on 
put  retrouver  peu  à  peu  les  traces  de  la  commune  ori- 
gine, un  air  de  famille,  et  adopter  les  mots  grecs  avec 
d'autant  plus  de  facilité.  Cest  depuis  ce  moment,  c.  à-d. 
depuis  la  guerre  de  Pyrrhus,  que  le  latin  se  forme  et  se 
polit.  Il  suit  alors  un  progrès  constant,  du  moins  à  nos 
yeux,  jusqu'au  siècle  de  Cicéron  et  d'Auguste,  jusqu'à  la 
perfection  de  la  langue  oratoire  et  de  la  langue  poétique. 
Remarquons  cependant  que  Cicéron,  meilleur  Juge  que 
les  modernes ,  cherche  la  vraie  pureté  de  la  langue  dans 
les  âges  qui  l'avaient  précédé,  et  en  fait  honneur  an 
siècle  de  Caton,  d'Ennius  et  de  Térence.  Comment  s'ex- 
pliquer cette  infériorité  de  langage  dont  Cicéron  semble 
accuser  son  siècle?  Sans  doute,  il  veut  dire  que  la  langue, 
à  cette  époque,  était  essentiellement  latine,  peu  mêlée 
de  grec  et  dMdiomes  étrangers,  tandis  que,  de  son  temps, 
les  poètes  de  Cordoue  même  apportaient  à  Rome,  avec 
leur  langue,  l'enflure  particulière  à  leur  pays.  On  le  voit 
d'ailleurs  insister,  lorsqu'il  raconte  dans  le  BnUus  l'his- 
toire de  l'éloquence,  sur  le  mérite  des  orateurs  qui  par- 
laient bien  le  latin,  et  en  faire  une  partie  de  la  gloire 
d'Antoine  {Brutus,  xxxn).  —  Du  reste,  si  le  latin  s'alté- 
rait déjà,  ce  n'était  point  par  la  recherche  des  archaïsmes. 
Au  temps  de  César,  Salluste  lui-même,  malgré  son  goût 
affecté  pour  l'antiouité,  ne  s'inquiétait  gum  plus  des 
vieilles  sources  de  rhistoire  et  du  langage  que  de  la  pré- 
cision géographique.  Varron  écrivait,  il  est  vrai  :  «  Hieux 
«  vaut  approuver  celui  qvA  donne  facilement  beaucoup 
«  d'explications  sur  les  ongines  des  moto  que  de  critiquer 
«  celui  qui  ne  peut  pas  les  donner  toutes;  d'autant  plus 
«  qu'en  matière  d'étymologie  on  ne  peut  pas  rendre  rai- 
«  son  de  tout  »  (liv.  VI).  Hais  les  écrivains  supi^rieurs 
aimaient  mieux  mépriser,  comme  Horace,  tes  poudreuses 
annales  dês  pontifes,  et  déclarer  ininMigÙtles  des  humtus 
saliens  de  ffuma,  que  les  étudier,  ou  tout  an  moins  les 
sauver  de  la  destruction.  Ainsi  se  sont  perdus,  avec  ces 
hvmnes  salions,  le  chant  des  frères  Arvals,  le  texte  com- 
plet et  original  des  lois  des  Douze  Tables,  les  Grandes 
Annales,  une  foule  enfin  de  documente  où  la  philologie 
moderne  retrouverait  certainement,  à  force  de  patience 
et  de  sagacité,  les  éléments  du  ladn.  —  La  langue  du 
Droit  avait  dû  se  former,  et  la  langue  oratoire  avsit  pu  se 
préparer  ches  les  Romains  avant  le  commerce  des  Grecs; 
mais  celles  de  la  philosophie  et  de  la  poésie  furent  une 
conquête  de  Rome  sur  la  Grèce,  ou  plutot  encore  de  la 
Grèce  sur  Rome.  Après  le  laborieux  enfantement  d'En« 
nius,  ce  sont  Lucrèce  et  Catulle  qui  assouplissent  l'instru- 
ment poétique  dont  Virgile  et  Horace  feront  un  si  mer- 
veilleux usage.  Après  les  effbrte  de  Lucrèce  pour  rompre 
aux  sqjeto  philosophiques  l'idiome  rebelle  de  son  pays, 
dont  il  accuse  si  fréquemment  l'indigence,  c'est  Cicéron 
qui,  dans  ses  grands  traités,  donne  à  ses  lecteurs  et  à  son 
pays  la  lançue  de  la  philosophie,  en  même  temps  que 
celle  de  la  cntique  littéraire.  —  D^à,  cependant,  le  latin 
subissait  une  modification  nouvelle  par  un  effet  de  cette 
loi  inévitable  qu'Horace  exprime  en  termes  d  poétiques 
quand  il  compsre  les  mots  qui  s'en  vont  a»*x  feuilles  qm 
tombent.  Lui-même,  avec  tout  son  génie,  contribuait  à 
cette  altération  par  l'emploi  trop  fréquent  et  trop  heu- 
reux des  héllénismes.  Le  temps  n'était  pas  très-éloigoé 
où  les  mote  grecs  viendraient  reprendre,  dans  les  vers  de 
Juvénal  lui-même,  la  place  qu'ils  avaient  eue  jadis  dans 
ceux  de  Lucilius.  A  cùté  de  la  langue  poétique,  les  formes 
de  la  prose  changeaient  également  :  Sénôoue  coupe  et 
brise  la  période;  Tacite  introduit  dans  la  langue  histo- 
rique les  termes,  les  tours,  les  hardiesses  propres  à  la 
poésie.  Les  règles  de  la  grammaire  commencent  à  s'on* 
Dlier,  ou,  du  moins,  le  grand  écrivain  se  permet  dei 
licences  comme  Horace  s'en  était  permis.  Bientùt  rété* 
ment  barbare  arrive  à  la  suite  de  l'élément  grec.  Les 
guerres  lointaines,  les  rapporta  perpétuels  et  inévitables 
avec  des  vaincus  tout  près  de  devenir  vainqueurs,  cor- 
rompent le  latin,  surtout  en  Gaule  et  même  en. Italie. 
Vienne  le  règne  de  Théodose,  et  la  langue,  déjà  réduite  à 
la  stérile  élégance  de  Claudien,  s'abiâsera  encore  dans 
les  vers  d'Ausone,  pour  descendre  aux  poèmes  de  Sidoine 
Apollinaire  et  de  rortnnat,  et  à  la  prose  de  Grégoire  de 
Tours.  La  transformation  s'opère  à  travers  les  révolutions 
de  l'Europe,  et  la  corruption  de  la  langue  mère  forme  les 
langues  néolatines,  telles  que  le  francs,  l'italien  et  ras* 
pagnol.  On  pourrait  fixer  sans  doute  au  serment  des  fili 


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1U7 


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de  Lirais  te  Débonnaire,  en  843«  la  disparition  du  latin 
comme  langue  politique  en  France,  de  même  qne  Ter- 
doonâflce  de  Villere-Cottereta,  en  1539,  le  bannit  de  la 
langue  Judiciaire  et  des  arrêts  du  Parlement.  II  demeure 
encore,  comme  au  moyen  âge,  la  langue  de  la  théologie, 
dn  Droit,  de  la  philosophie  sootastique,  de  réniditîon, 
même  des  sdenoes  naturelles  {  car,  au  xvii*  siècle,  Des- 
cartes  écrit  encore  ses  traités  de  physique  en  français  et 
eo  latio.  Il  est  également.  Jusqu'à  la  Révolution,  la  langue 
de  rOniversité  ;  le  prince  de  Conti  félicitait  Rollin  de 
parler  U  froHçatM  comme  si  à'eiU  été  sa  langue  naturelle; 
et  rUaiTenité,  en  mémoire  de  ces  vieilles  traditions,  l'a 
oooeenré  dans  ses  distributions  du  concours  général. 
Eollo,  il  est  la  langue  de  TÊglise  catholique,  et  doit  à 
cens  coDsécration,  &ns  les  soaétés  modernes,  cet  usage 
onifenel  et  ces  Immortelles  destinées  que  l'orgueil  des 
Romaine  mesurait  autrefois  à  la  durée  du  Capitole  et  de 
taroehsrs  inébranlables. 

Bibliographie.  —  La  bibliographie  de  la  langue  latine 
foorninit  une  nomenclature  trës^longue;  nous  n'en  pou- 
vons indiquer  que  quelques  ouvrages  importants  :  parmi 
ia  Andeos,  Vairon,  Festus,  et  les  grammairiens  de  se- 
cond ordre,  tels  que  Macrobe  et  Aulu-Gelle;  parmi  les 
Dodemes,  Laurent  Valla,  Do  latinœ  linguœ  elogaïUiâ 
lihri  VI,  Rome,  1471,  in-fol.;  le  cardinal  Adrien,  De 
mrnone  Itttino  et  do  modis  latine  loquondi^  1515,  in- 
toL  ;  Et  Dolet,  Commontariorum  lingua  latmœ  tomi  H, 
Ljroo,  1536,  in-fol.  ;  J.  Camerarius,  Commentaire  dos 
(aii9«es  grecque  et  laiinOf  Bàle,  1551,  in-fol.;  Func- 
dus,  De  ongino  ot  puoritia  latinœ  linguœ,.,^  De  ado^ 
leeôuia,  oirUi  œtato,  imminonto  senectute  linguœ  la- 
(Ma...,  De  vegota  senectute,  etc....  De  inorti  ac  decrepita 
micdile,  etc.,  lfarboui]g,  1123-50,  in-8^  Walch,  His- 
tem criHca  lingtsœ  latinœ,  Leipzig,  1761 ,  in-4<*  ;  Pop- 
Bui,  Fragmonts  do  Varron,  des  anciens  historiens  la- 
tw,  etc.,  1580,  in-S^";  Fabricius,  Bibliothèque  latine, 
Emb.,  17il,  Leipzig,  1773,  3  vol.  in-8<»;  Nahmmacher, 
hkoduction  à  la  connaissance  de  la  langue  latine , 
Leipzig,  1778,  en  nllem.  ;  Reisig,  Cours  de  langue  latine; 
Giyur,  Théorie  du  stule  latin;  Bopp,  Grammaire  com- 
pris des  kmguos  indo-germaniques,  1833,  ln-8<»;  Rav- 
moard.  Lexique  romop.....  Grammaire  comparative  aes 
laasm  de  V Europe  latine,  Paris,  1838-U,  6  vol.  in-8»; 
Aide  M&ouce,  Hudimenta  grammatica  linmue  latinœ, 
Venise,  1501,  in-4**;  Jean  Despautère,  CommentarH 
grummatiei,  Paris,  1537,  in-fol.,  et  Lyon,  1563,  in-i»; 
D.  Tliomas  (le  cardinal  Wolsey),  Rudimenta  grammati- 
ca d  éocendi  mothodus,  1637  ;  J.-C.  Scaliger,  De  causis 
Ungem  latinœ  libri  Xll,  Paris,  1540,  in-8*  ;  Melanchthon, 
Grammatica  laténOy  Nuremberg,  1547,  in-8^  ;  Sanctius, 
Maerw,  seu  de  causis  linguœ  latinœ,  Salamanque, 
1587,  ouvrage  réédité  par  Bauer,  Leipzig,  1793-1801, 
Srol.in-8«;  Scioppius,  Grammatica  phuosophica,  Bfllan, 
i628,  io-8>;  G.  Vossius,  Grammatica  latina^  Amst., 
i^,  2  vol.  in-4**;  Lanoelot,  NouMlle  méthode  pour 
apprendre  la  langue  latine,  dite  Grammaire  latine  de 
Port^Roifol,  Paris,  1655,  in-8<*;  Ruddimann,  Grammor 
tk9  latmœ  institutiones ,  Edimbourg,  1725-31,  2  vol. 
!i>-S»,oavrage  réédité  par  Stalbaum,  Leipzig,  1823, 9  Vol. 
in-^;  P.  C  Gneroult,  Nouvelle  Méthode  pour  étudier 
^  Imgue  latine,  Paris,  1708,  in-8o;  Lemare,  Cours 
ArânQve  et  pratique  de  la  langue  latine,  Paris,  1804, 
3  vol.  io-8*;  Bnmouf ,  Méthode  pour  étudier  la  langue 
letme,  1841 ,  in-8*;  Guérard  et  Moncourt,  Grammaire 
lottM,  3*  édit.,  Paris,  1861,  in-12;  les  Grammaires 
écrites  pour  les  Allemands  par  G.  Schl^el,  Brœder, 
Gnrtefend,  Schneider,  Zumpt,  Madvig,  etc.;  le  Thesati- 
nu  (tii0iHS  latmœ  de  Robert  Estienne;  les  anciens  dic- 
tionnaines  de  Calepin,  Boudot,  Danet;  les  dictionnaires 
de  Faeciolati,  Forcellini,  Freund,  etc.  A.  D. 

UTniXUttâratare.)  Caractères  et  divisions,— Ia  litté- 
ntore  Uohie,  originale  dans  certains  genres,  tels  que  la 
Btire,  Tépltre,  et  peut-être  encore  l'éloquence,  a  imité  la 
t<Tke  dans  la  poésie,  la  philosophie  et  la  science,  mais 
21  devant  rimitation  à  la  beauté  des  modèles  (K.  Imi- 
Amm'.  Dramatique  et  positive  comme  le  génie  tout  poU- 
8q«e  des  Romidns,  elle  donne  peu  à  l'imagination  et  à 
[a  lamaisie,  beaucoup  à  la  raison  sérieuse,  aux  applica- 
tioas  de  la  conduite  et  de  la  vie.  Peu  spiritualiste ,  elle 
s'ittiehe  à  Faction,  à  la  politique,  aux  sITaires,  à  la  mo- 
sle  pratique  :  les  facultés  de  l'âme  et  les  problèmes  de 
la  dôtinée  humaine  n'y  tiennent  guère  de  place.  Ce  que 
la  philosophie  romaine  a  dit  de  ces  grands  sijets  n  est 
qu'ira  reflet  de  la  Grèce;  ce  qu'en  disent  les  Pères  de 
l'Egtise  n'appartient  plus  à  la  littérature  classique;  c'est 
«notre  monde.  Là  est  le  défont  des  lettres  latines,  défont 


plus  sensible  encore  si  l'on  se  reporte  anx  puissants  et 
admirables  efforts  du  génie  grec  sur  ces  questions  mys- 
térieuses et  infinies,  llalgré  des  affinités  certaines  d'ori- 
slne  et  de  climat,  la  race  latine  n'avait  pas  cette  richesse 
inépuisable  d'imagination  qui,  pendant  les  beaux  siècles 
de  la  Grèce,  se  répandit  dans  tous  les  genres  de  la  poésie, 
inspirant  un  nomore  prodigieux  de  <mefs-d'œuvre  lyri- 
ques ou  dramatiques  dont  il  nous  reste  à  peine  la 
moindre  partie.  Rome,  autrement  douée,  laborieuse  et 
guerrière,  prit  d'alM>rd  et  garda  les  habitudes  impérieuses 
de  l'autorité  militaire,  de  la  gravité  patricienne  et  sacer- 
dotale, et  les  goûts  poritifs  d'épargne  et  d'avidité  que 
donnent  la  vie  des  champs  et  la  pauvreté.  Le  mérite  et 
l'oriçinalité  de  la  littérature  latine  est  d'avoir  égalé  la 
précision  et  la  vigueur  de  son  langage  à  la  solidité  et  à 
l'énergie  du  peuple-roi,  à  ces  qualitâ  sévères,  que  Cicé- 
ron  énumère  avec  orgueil  dans  la  préface  des  Tùsculanes^ 
«  gravité,  grandeur  d'Ame,  probité,  bonne  foi,  toutes  les 
vertus  qui  mettaient  ses  ancêtres  au-niessus  de  toute 
comparaison.  »  {Tusc.  1, 1).  On  sait  en  quels  termes  ma- 
gniftoues  Bossuet  a  résumé  ce  qu'il  appelle  le  fonds  du 
peuple  romain,  «  le  plus  fier  et  le  plus  hardi  de  tous  les 
peuples  du  monde,  mais  tout  ensemble  le  plus  réglé 
dans  ses  conseils,  le  plus  constant  dans  ses  maximes,  le 
plus  avisé,  le  plus  laborieux,  et  enfin  le  plus  patient.  » 
{Histoire  universelle,  III,  6).  La  gloire  de  la  littérature 
latine  est  d'exprimer  dignement  ces  caractères  plus  so- 
lides que  brillants.  Non  pas  cependant  qu'elle  soit  tou- 
jours solennelle,  ni  majestueuse  Jusqu'à  la  monotonie  ; 
quelquefois  déclamatoire,  plus  souvent  grossière  et  même 
triviale,  non-seulement  dans  les  comiques,  mais  parfois 
même  chez  les  orateurs  et  les  poètes  sâieux,  elle  se  res- 
sentira.  Jusque  dans  ses  plus  beaux  Jours,  de  la  rudesse 
naturelle  à  une  nation  de  laboureurs  et  de  soldats;  on 
peut  en  croire  le  témoignage  d'Horace.  Mais,  dans  la 
crudité  même  du  langage,  elle  conserve  encore  un  cer- 
tain air  de  grandeur,  un  sentiment  de  la  valeur  et  de  la 
puissance  personnelles  :  c'est  toujours  l'expression  de  la 
pensée  d'un  peuple  conquérant,  légiste,  organisateur,  qui 
a  dominé  le  monde  penduit  des  siècles 

Par  1m  lois,  par  lee  nwitrs^  et  rartoot  ptr  U  goarre. 

An  premier  conp  d'œil,  l'histoire  de  la  littérature  latine 
se  divise  en  deux  grandes  périodes  :  la  première ,  qui 
s'étend  Jusqu'à  l'Empire,  est  remplie  par  le  progrès  poli- 
tique et  la  pratique  des  gprandes  affaires  au  dedans  et 
au  dehors.  L'action  domine  ;  la  pensée  n'en  est,  pour 
ainsi  dire,  que  l'instrument.  Dans  cette  vie  pénible  et 
sans  loisirs,  toutes  les  intelligences  sont  occupées  à  sou- 
mettre, à  constituer,  à  gouverner.  Les  genres  cultivés  de 
préférence  se  rapportent  à  la  vie  publique,  et,  malgré  la 
puissante  influence  des  Grecs,  l'esprit  romain  n*a  guère 
changé  de  Caton  à  Cicéron. 

La  seconde  période,  qui  commence  à  l'avènement  d'Au- 
guste, est  celle  où  l'action  s'affaiblit  et  disparaît,  pour 
laisser  la  place  aux  loisirs.  La  vie  politique  a  cessé  ;  la 
force  et  l'intérêt  se  retirent  de  l'éloquence,  qui  expire 
dans  l'enceinte  étroite  des  basiliques,  ou  dans  la  sténlité 
des  écoles.  Alors  les  esprits  supérieurs  se  replient  sur 
eux-mêmes,  et  cherohent  leur  voie  dans  la  poésie,  la 
philosophie,  et  l'histoire.  Les  lettres  sont  cultivées  par 
plaisir  et  par  dédommagement  de  la  vie  politique  à  Jamais 
disparue.  Jusqu'au  moment  où  elles  se  perdent  dans  le 
naufrage  de  la  société. 

La  première  période  se  subdivise  naturellement  en 
deux  époques,  la  littérature  avant  et  après  les  guerres 
Puniques.  La  première  époque,  qui  embrasse  les  cinq  pre- 
miers siècles  de  Rome,  est  inféconde,  et  présente  à  peine 
des  germes  littéraires  :  Rome  est  tout  occupée  à  com- 
battre pour  son  existence  et  sa  conservation.  La  seconde, 
qui  s'étend  des  guerres  Puniques  à  l'Empire,  est  celle  où 
Rome  combat  pour  la  conquête  et  la  domination.  BAise 
en  rapport  avec  la  Grèce,  elle  l'imite,  à  regret  d'abord, 
en  se  défendant  contre  cet  ascendant  irrésistible  du  génie 
et  de  l'élégance;  mais  elle  cède  à  mesure,  et  puise  dans 
cette  défaite  pacifique  les  moyens  de  lutter  avantageuse- 
ment contre  la  Grèce  au  siècle  de  Cicéron.  —  La  seconde 
période  se  partage  Clément  en  deux  époques,  la  littéra- 
ture avant  et  après  les  Antonins.  Dans  la  première,  après 
la  splendeur  littéraire  du  règne  d'Auguste,  Rome  con- 
serve encore  une  partie  de  ses  grandes  qualités.  Pendant 
qu'elle  résiste  aux  Barbares,  sans  en  être  ébranlée,  elle 
accueille  avec  une  faveur  marquée  tout  ce  que  lui  donne 
la  Grèce,  les  vices  comme  les  arts.  L'esprit  grec  s'iden- 
tifie avec  le  caractère  romain.  La  littérature  latine  a  cessé 


>  I 


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11IS 


LAT 


d'être  ftOBsl  pratique,  aussi  forte  qu^autrefols;  cependant, 
elle  cache  son  déclin  sous  des  apparences  imposantes. 
Dans  la  seconde  époque,  celle  des  Antonins  et  de  leurs 
•accesseurs,  la  décadence  se  précipite  :  les  conditions  po- 
litiques, la  dégradation  des  mœurs,  rentrée  des  Barbares 
dans  TEmpire  et  dans  la  société,  ont  enlevé  au  caractère 
romain  le  peu  qui  lui  restait  de  ses  vieilles  qualités.  Nous 
avons  indiqué  comment  la  langue  latine  (V.  ce  mot)  s*al- 
tère  et  se  corrompt,  surtout  après  Théodose.  Les  restes 
de  la  littérature  t;omme  de  la  langue  dureront  Jusqu'au 
siècle  de  Charlemagne,  c.-à<d.  Jusqu'à  la  naissance  des 
idiomes  modernes ,  puis  deviendront  lettre  morte,  sinon 
dans  la  science  et  dans  la  religion. 

Première  période  :  Première  époque,  Utiérature  lalime 
aoant  les  guerres  Puniques,  —  On  a  vu  qu'il  ne  faut  pas 
chercher  à  Rome ,  pendant  les  cinq  premiers  siècles  de 
son  existence,  les  hautes  inspirations  religieuses  et  mo- 
rales de  ces  interprètes  sacres  des  dieux,  comme  Horace 
les  appelle,  qui  civilisaient  par  leurs  chants  les  peuples 
de  la  Grèce,  et  les  initiaient  au  monde  supérieur  des 
dieux  et  des  génies  (V.  Grecqob — Littérature).  Rome  est 
plus  occupée  de  vivre,  de  labourer,  de  combattre,  d'obéir, 
que  de  rechercher  les  origines  et  les  lois  de  la  nature, 
eu  de  célébrer  l'aspect  éblouissant  de  la  terre  et  des 
deux.  Elle  ne  chante  pas  non  plus  ses  héros  ni  ses  lé- 
gendes: elle  n'a  ni  Orphée,  ni  Homère,  ni  même  Héro- 
dote; le  chant  des  frères  Arvals,  invocation  aux  dieux 
Pénates  et  au  dieu  Biars,  les  hymnes  des  prêtres  Salions, 
où  Vénus  n'était  pas  nommée,  puisque,  au  témoignage 
de  Varron,  cette  déesse  n'avait  même  pas  de  nom  en  latin 
au  temps  des  rois,  des  oracles  en  vers,  objet  des  railleries 
d'Horace,  qui  les  déclare  inintelligibles ,  les  prédictions 
transcrites  par  Tite-Live  sous  le  nom  du  devin  Marcius , 
contemporain  de  la  première  guerre  Punique,  voilà  les  pre- 
miers essais  poétiques  «  de  ces  vieux  laboureurs,  coura- 
oeux  et  riches  de  peu,  qui  ne  connaissaient  de  repos  et  de 
fête  qu'après  la  moisson  rentrée».  (Hor.,  Ep.  Il,  i,i39.) 
AJoutons-y  les  vers  fescennins,  satires  dialoguées  écrites 
dans  le  mètre  saturnien,  qui  n'était  guère  que  de  la  prose 
rhythmée ,  et  connues  surtout  par  quelques  vers  d'Ho- 
race. Ce  qu'on  en  sait  de  plus  clair,  c'est  que,  nées  de 
l'esprit  grossièrement  railleur  des  paysans,  elles  tournè- 
rent en  satires  personnelles  et  sanglantes,  et  que  la  loi 
des  XH  Tables  les  fit  taire,  en  réduisant  les  moaueurs 
menacés  du  bâton  «  au  seul  plaisir  de  bien  dire  et  cl'amu- 
ser.  B  Cette  interdiction  fut^-elle  toujours  observée?  On 
vit  Octave  composer  des  vers  fescennins  contre  son  ami 
Pollion,  lequel  n'avait  garde  «  d'écrire  contre  un  plaisant 

Îiui  pouvait  prosoire  ».  Mais,  populaire  ou  non,  la  satire 
escennine  ne  parait  pas  avoir  Jamais  compté,  même  à 
Rome ,  pour  un  titre  poéticjue.  —  Quant  à  la  prose,  une 
religion  positive  et  superstitieuse,  qui  relevait  du  patri- 
dat,  et  fut.  Jusqu'aux  derniers  Jours,  une  partie  de  l'au- 
torité et  de  l'empire,  donna  aux  Romains  les  premiers 
germes  de  Vhistotre;  c'étaient  les  Grandes  annales  et  les 
Livres  des  pontifes,  où  se  consignaient  tous  les  événe- 
ments importants,  mauvais  présages,  revers,  fondation 
des  temples,  etc.  L'histoire,  chez  les  Grecs,  était  née  de 
la  poésie  ;  à  Rome,  elle  sortit  du  calendrier.  —  Ia  juris- 
prudence ne  tient  guère  de  place  dans  la  littérature  ; 
cependant,  les  Jurisconsultes  romains  s'y  rattachent  par 
l'histoire  de  la  langue  (  c'est  dans  le  Droit  comme  dans 
la  religion  qu'elle  varie  le  moins),  par  le  caractère  na- 
tional ,  dont  la  législation  est  une  expression  vivante , 
par  les  documents  politiques  et  Judidaires,  indispen- 
sables à  l'intelligence  des  historiens,  des  orateurs,  et 
même  des  poètes  comiques,  n  suffit  d'indiquer  ici  la 
forme  impérieuse  et  militaire  de  ces  lois,  la  condsion  do 
leurs  formules,  en  joutant  qu'dles  furent  d'abord  la 
propriété  exclusive,  et,  plus  taira,  le  privilège  des  patri- 
dens.  La  science  du  Droit,  au  siècle  de  César,  devait  affeo 
ter  pQur  un  temps  une  forme  littéraire,  dans  le  Dialogue 
perdu  de  Brutus,  et  le  Traité  des  Lois  de  Cicéron,  imité 
de  Platon.  —  L'agriculture  n'est  ni  politique,  ni  élo- 
quente; mais  elle  a,  ches  les  Romains,  une  physionomie 
à  part,  et  mérite  une  place  dans  l'histoire  littéraire.  On 
n'en  rencontre  pas  de  monuments  avant  Caton;  mais  le 
livre  du  fameux  censeur,  qui  fut  à  la  fois  agriculteur, 
soldat,  historien  et  orateur,  est  un  monument  curieux 
de  la  langue,  des  mœurs  et  du  caractère  romains,  dont 
Caton  est  l'expression  la  plus  vigoureuse. — Nous  pouvons, 
pour  terminer  immédiatement  ce  qui  re^^de  cette  ma- 
tière vraiment  romaine  de  l'agriculture,  citer  Varron  et 
Columelle,  qui  la  maintiennent  en  honneur  dans  la  litté- 
rature, Jusqu'à  l'époque  où  les  immenses  parcs  des  riches 
ibsorbenl  au  profit  du  luxe  le  sol  de  l'Italie.  Varron, 


contemporain  de  Cicéron,  a  composé,  dans  la  forme  à  la 
mode  d'alors,  des  Dialogues  sur  la  vie  rustique,  très^-sa- 
vants,  mais  pesamment  écrits,  avec  un  mélange  de  bon- 
homie et  de  pédantisme.  Columelle,  contemporain  de 
Tibère,  philosophe  et  moraliste  selon  le  goût  de  son 
époque,  écrit  avec  une  élégance  où  se  fait  sentir  Tio* 
fluence  des  dédamateurs,  professe  une  grande  admiration 
pour  Virgile,  et  pense  plus  aux  gens  de  lettres  qu'aux  cul- 
tivateurs. Jusque-là  qu'un  livre  de  wn  Agriculture  est 
écrit  en  vers.  —  Nous  venons  d'antidper  sur  les  temps, 
pour  esquisser  brièvement  ce  qui  regarde  ces  deux  genres 
très-inférieurs,  qui  ne  tiennent  à  la  littérature  que  par 
les  côtés  accessoires.  Reste  le  genre  par  excellence,  celui 
qui  convenait  le  mieux  aux  goûts  d'un  peuple  laboureur, 
politique,  légiste  et  soldat,  Véloquence.  Populaire  dès  les 
premiers  temps,  au  témoignage  de  (Scéron,  elle  dut, 
comme  il  le  pense,  séduire  d'abord  tous  les  Jeunes  gens 
ambitieux  de  gloire,  et  provoquer  des  efforts  que  paraly- 
sait le  défaut  de  méthode  et  a'exerdce.  Les  guerres  Pu- 
niques, en  faisant  connaître  les  modèles  et  les  maîtres 
grecs,  portèrent  au  plus  haut  point  cette  ardeur  oratoire, 
désormais  plus  intelligente,  et  entretenue  par  la  gran- 
deur des  causes  et  la  magnificence  des  récompenses. 
Mais,  sur  ces  origines  de  l'éloquence  romaine,  il  ne  reste 
que  les  hypothèses  de  Cicéron.  Les  luttes  politiques  sup- 
posent, il  est  vrai,  l'usaçe  et  la  puissance  de  la  parole  ; 
et  Virgile  même  introduit  des  orateurs  dans  les  récits  de 
l'épopée,  où  Homère  n'avait  placé  que  des  aèdes.  Cepen- 
dant, ni  l'éloquence  militaire,  ni  l'éloquence  sénatoriale, 
ni  même  l'éloquence  tribunitienne  n'ont  laissé  de  monu- 
ments. Les  admirables  discours  de  llte-Live  sont,  comme 
on  le  sait,  un  exerdce  de  son  imagination  dramatique 
ausd  bien  qu'un  complément  de  son  Histoire.  Sans  donte, 
même  ces  premiers  orateurs  n'ont  eu  que  les  qualités 
auxquelles  Buffon  réduit  dédaigneusement  l'éloquence 
populaire  :  «  Un  ton  véhément  et  pathétique,  des  gestes 
expressifs  et  ft^uents,  des  paroles  rapides  et  sonnantes.  «> 
En  fallait-il  plus  avec  des  auditeurs  qui  n'avaient  aucune 
idée  de  Tart,  et  ne  comprenaient  que  l'activité,  Tîntérèt 
positif  et  l'obéissance?  À  l'éloquence  suppléait  une  cer- 
taine habitude  de  la  parole,  et  comme  une  tactique  des 
combats  du  ForuQi,  dont  l'expérience  et  le  goût  formè- 
rent cette  langue  oratoire  que  C&on  devait  illustrer  le 
premier,  et  que  parlait  sans  doute  avant  lui  l'harmo- 
nieux Cornélius  Céthégus,  l'orateur  «  à  la  bou<:he  moel- 
leuse et  persuasive  »,  célébré  par  Ennius. 

Première  période  :  Deuxième  époque,  i^  Les  gtserres 
Puniques;  influence  des  Grecs  ;  littérature  latine  jusqu'où 
siècle  de  Cicéron.  —  Les  noms  de  Caton  et  d'En  ni  us 
marquent  dans  les  lettres  latines  une  époque  nouvelle  ; 
c'est  l'éveil  du  sens  littéraire,  devant  l'éclatante  révéla- 
tion du  génie  grec  ;  et  l'on  peut  croire,  sans  taxer  d'exa- 
gération l'orgueil  national  des  écrivains  romains,  qu'ils 
eurent  bientôt  des  monuments  dignes  d'une  telle  école. 
Les  discours  de  Caton,  dont  Cicéron  fait  un  si  magni- 
fique éloge,  et  dont  il  reste  des  fhigments  précieux,  pré- 
sentent le  plus  haut  degré  de  puissance  où  s'élève  Télo- 
quence  pnmitive,  formée  par  la  pratique  des  afTaires, 
sans  les  qualités  littéraires  que  donne  l'étude.  Caton  ne 
devait  qu^à  lui-même  cette  grandeur  morale  qui  lui  in- 
spira le  fameux  mot  adressé  à  son  fils  Blarcus  :  «  L'ora- 
teur est  l'honnête  homme  qui  sait  bien  parler  >;  et  il  y 
Joignait  la  verve,  la  finesse;  l'àpreté  moqueuse,  la  v^é- 
mence.  Vigoureux  ennemi  des  rhéteurs  et  des  sophistes 
grecs,  qui  commençaient  à  enseigner  à  Rome  l'art  de 
plaider  également  le  pour  et  le  contre,  il  fit  fermer  leurs 
écoles  ;  et  cependant  il  apprit  le  grec  dans  sa  ▼ieillesse, 
pour  lire  Thucydide  et  Démosthène  ;  et  ce  fut  une  des 
conquêtes  les  plus  précieuses  de  l'esprit  grec,  d'avoir  en- 
fin  subjugué  ce  rude  adversaire. 

Une  autre  victoire  non  moins  considérable,  oe  fut  l*im- 
portation  et  les  succès  de  l'art  dramatique.  inlh>dnit  à 
Rome  par  Livius  Andronicus,  six  ans  avant  la  naissance 
de  Caton.  Déjà  le  Sénat,  par  un  singulier  mélange  du 
sentiment  religieux  et  de  la  pensée  politique,  avait  ap* 
pelé  de  TÉtrurie  les  acteurs  et  les  jeux  scéniques,  pour 
apaiser  la  colère  des  dieux  pendant  une  épidémie*  et 
pour  amuser  les  esprits  épouvantés  par  la  ténacité  de  la 
contagion  (  an  de  R.  390,  avant  J.-C  963  ).  Rome  eut. 
d'aborîd  des  dialogues  moqueurs,  accompagnés  de  gestes 
et  de  danses  à  la  mode  toscane,  puis  des  saUres,  c-à-d. 
un  mélange  de  prose  et  de  vers,  accompagné  par  la  flû.te»| 
et  dansé  ou  fl^ré  par  les  histrions.  Enfin,  le  Tarentini 
Livius  Andronicus  ose  le  premier  substituer  à  ces  chantsj 
informes  une  véritable  intrigue  sur  un  sujet  diamatique^j 
imité  sans  doute  des  Grecs.  Il  laisse  aux  Romains,  aux 


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1149 


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]nnea  geos  do  condition  libre,  le  monopole  de  leurs  Kh 
^ntt  derenoes  les  «Dodw  et  les  aUUanM,  espèce  de  pa- 
ndes  peut-être  improvisées,  que  le  go&t  ombrageux  des 
dtoyeos  se  résenre,  et  qu*il  interdit  aux  histrions,  désor- 
mais notés  d'infamie.  A  ces  essais  de  comédies  ou  de  tra- 
gédie», liyius i^oute une traductionde VOdyiiéô en  vers, 
ctToilàle  drsme  et  Tépopée  admis  parmi  les  divertisse- 
ments des  rustiques  «  Câhégus  à  la  robe  relevée  »,  ainsi 
S'Borsce  les  appelle.  —  Un  contemporain  de  Caton,  le 
Dpanleo  Nénus,  suit,  non  sans  talent,  la  voie  ouverte 
?ar  Livius,  compose  un  poème  épique  sur  la  guerre  Punl- 
ijoe,  et  essaye  de  transporter  la  liberté  grecque  au  thé&tre. 
itàs  û  avait  méconnu  le  caractère  de  son  public  :  l'esprit 
d'obéissance  dominait  à  Rome,  avec  un  profond  mépris 
poor  lesscteurs,  qui  étaient  esclaves.  Gomment  permettre 
SOI  histrions  d'attaquer  les  magistrats,  les  patnciens,  les 
coosulsires?  Comment  endurer  qu'un  Névius  os&t  dire  à 
rAfricain  et  aux  Métellus  de  mordantes  vérités?  Le 
puTre  poète  y  gagna  la  prison ,  puis  l'exil  après  réel- 
dire,  sans  exdter  même  la  pitié  de  ses  confrères  les 
piNUes  comii|ues,  exposés  cependant  au  même  danger. 
Ao  ffloitts  laissait-il  des  œuvres  très-estimées,  et  une 
zépatatioa  d'écrivain  asses  bien  établie  pour  résister 
alèoe  à  la  perfection  du  siècle  d'Auguste  et  à  la  mau- 
nise  humeur  dSHorace,  qui  n'aimait  pas  le  vieux  latin, 
etprdait  aux  vers  de  Névius  une  rancune  d'écolier.  — 
Mus  le  plus  grand  nom  poétique  parmi  les  contempo- 
niss  de  Caton  est  celui  d'Ennius,  qui  se  prétendait 
rbéritier  direct  du  génie  d'Homère,  par  la  loi  de  la  mé- 
toBpsycoee,  et  avait  fait  accepter  la  suprématie  exclusive 
de  tt  gloire  aux  Romains  qu'il  avait  chantés.  Ami  des 
soUeset  protégé  de  Caton,  il  consacre  dans  Rome  les 
deux  genres  déjà  naturalisés  par  ses  devanciers,  la  tn^ 
gédie  et  l'épopée.  Énergique,  élevé,  pathétique,  malgré  la 
doreté  et  la  sécheresse  inévitables  de  son  époque,  il  fut 
admiré  de  Lucrèce  et  de  Qcéron,  et  conteste  dllorace  et 
de  Virgile,  qui  cependant  n*a  pas  dédaigné  de  lui  faire  des 
eopnints;  car  il  avait  déjà,  dans  ses  AnnalM  romaines , 
5Qelqije  chose  de  l'accent  et  de  la  grandeur  épiques;  et 
il  tTùt,  le  premier,  employé  en  latin  l'admirable  forme 
de  Iliexamètre.  —  Viennent  après  lui  son  neveu  Pacw- 
mt,  ■  le  docte  vieillard  »,  selon  l'expression  un  peu 
iromqae  d'Horace;  ^ccii»,  «  le  vieillard  profond  »,  rival 
dePacavios,  et  nue  Cicéron  put  connaître,  lequel,  s'écar- 
tui  des  routes  obligées,  traite  des  sujets  romains  (pres- 
^  toujours  les  poètes  tragiques  traduisaient  les  roo- 
wies  grecs  ) ,  et  crée  la  tragédie  pritexU ,  où  les 
penoonages  .étaient  latins  comme  la  langue.  Horace  a 
recomia  le  mérite  de  cette  tentative ,  s'il  n'en  fait  pas 
(firectement  honneur  à  Accius.  Enfin,  après  Acdus, 
neodroot  les  compositions  tra^ques  des  contemporains 
d'Auguste,  Variu9,  Pollion^  Omde,  oui  témoignent,  dnon 
deb  popularité  acquise  à  des  chefs-d'œuvre,  au  moins 
de  2a  haute  estime  où  les  meilleurs  esprits  de  Rome  te- 
naient la  tragédie,  puisque  Horace  écrit  en  grande  partie 
<ar  cette  matière  son  épltre  aux  Pisons  Sur  VArt  po^ 

Pour  compléter  cette  histoire  sommaire  de  la  poésie 
latine  pendant  la  première  période,  et  avant  le  siècle  de 
Ccsar,  il  nous  reste  à  parler  de  deux  genres,  la  comédie 
et  U  satire,  tous  deux  considérables  à  des  titres  divers  ; 
le  premier,  par  le  génie  des  poètes,  le  second  par  sa  con- 
fcrmité  parfaite  avec  le  caractère  et  les  goûts  des  Ro- 
maii».  Dans  la  comédie,  deux  grands  écrivains  s'immor- 
talisent entre  beaucoup  d'autres;  ce  sont  Plante  et 
Térenc9,  imitateurs  et  traducteurs  des  comiques  grecs 
Tua  comme  Tautre,  mais  avec  des  qualités  bien  diffé- 
rentes.  Nous  n'hésitons  pas  à  donner  de  iseaucoup  la 
supériorité  à  Plaute,  le  seul  de  tous  les  poètes  comiques 
dont  la  verve  originale  et  entraînante,  le  dialogue  joyeux 
et  cordant  rappâlent  le  génie  de  Molière.  Trop  de  bouf- 
fonnerie et  l'exquise  élégance  de  son  successeur  lui  ont 
£ut  tort  auprès  de  tous  les  modernes;  mais,  malgpré  la 
bTeur  sceordée  par  Boesuet  à  Térence,  l'élégance  ne  sup- 
plée pas  à  la  gaieté,  et  nous  adoptons  sans  réserve  le  Ju- 
gement de  Câar,  qid  se  connaissait  en  matière  de  goût, 
et  regrettait,  dans  de  fort  Jolis  vers,  de  ne  pas  trouver 
'heice  demi'Ménamdre  la  puissance  comique  unie  au  ta- 
eat  de  Técrivain.  —  Qtons  encore,  parmi  les  auteurs  de 
*  «tiédies,  CécUiiàs,  le  protecteur  de  Térence,  recom- 
mandé au  souvenir  de  Thistoire  par  l'admiration  des  Ro- 
ip^as,  et  n'oublions  pas,  en  voyant  la  poésie  drama- 
tique, et  principalement  la  comédie,  cultivées  par  des 
geos  d*hamb1e  condition,  des  esclaves,  des  affirancbis , 
des  étranaers,  que  les  citoyens  auraient  dérogé  à  se  per- 
mettre publiquônent  la  culture  des  lettres;  ils  les  prot^ 


geaient  par  amusement,  par  orgueil  arlstocradqne,  el 
aussi  par  une  supériorité  naturelle  de  l'intelligence  et  du 
goût,  comme  les  Scipions  ;  mais  ils  n'avaient  garde  de 
s'exposer  au  surnom  de  méchant  Grec  {GreBculuà).  La  vie 
politique  les  absorbait  tout  entiers  ;  ils  laissaient  aux 
vaincus  et  aux  affranchis  la  satisfaction  d'écrire  pour  le 
plaisir  et  pour  la  gloire  de  leurs  maîtres.  Aussi  la  tragé- 
die prétexte  et  la  comédie  à  toge,  c-à-d.  à  sujets  ro- 
mains, ne  furent-elles  que  des  essais  passagers  et  promp- 
tement  abandonnés.  Les  Romains  ne  tenaient  pas  à 
s'attendrir  sur  leur  histoire,  ni  à  laisser  les  poètes  comi- 

3ues  les  railler  de  leurs  travers.  Ils  aimaient  mieux  (ceux 
u  moins  qui  goûtaient  les  œuvres  dramatiques  :  car  te 
petit  peuple  préférait  volontiers  des  combats  d'ours  et  de 
gladiateurs),  ils  aimaient  mieux  pleurer  sur  les  infor- 
tunes de  Télèphe  et  de  Pelée,  et  dépayser  leurs  ridicules 
et  leurs  vices,  en  se  transportant,  avec  Plaute,  en  Épire 
ou  en  Étoile.  — Ils  soûtaient  cependant  ce  genre  de  plai- 
santerie satirique;  ils  lui  ont  donné  même  sa  forme 
propre,  celle  de  la  satire  didactiqw,  telle  que  l'ont 
adoptée  les  modernes  ;  et  les  Grecs  ne  les  avaient  pas 
devancés  là  comme  dans  toutes  les  créations  littéraires. 
Les  immortels  moqueurs  de  Paros  et  d'Athènes,  Archi- 
loque,  Aristophane,  toute  Vancienne  comédie  enfin, 
avaient  épanché  leur  impitoyable  malignité  dans  la  poé- 
sie lyriaue  et  sur  le  théâtre.  Un  chevalier  romain,  Lnci* 
liua,  a  l'idée  de  se  mettre  à  leur  école;  il  change  le 
mètre,  le  rhythme,  les  conditions  dramatiques  qu'il  trou- 
vait dans  ses  modèles  (il  en  coûtait  cher  pour  railler  aa 
théâtre)  :  il  reprend  la  vieille  forme  latine  de  la  satire 
{satura  lanx^  pot-pourri),  et  attaque  hardiment  les 
vices,  à  l'abri  de  sa  naissance  et  de  ses  hautes  relations» 
Ainsi  comprise,  la  satire  tenait  encore  de  la  vie  publique. 
Morale  et  générale  sans  être  personnelle,  du  moins  an 
même  degré  que  la  comédie  çecque,  elle  gardait  quelque 
chose  du  grsnd  air  des  magistratures  romaines,  de  la 
censure,  par  exemple.  Nous  n'avons  de  «  Ludle,  appuyé 
de  Lélie,  »  que  des  fragments  très-courts ,  ain^  que  de 
presoue  tous  les  poètes  de  cette  époque.  Mais,  quand  on 
voit  l'esprit  satinque,  inné  chez  les  races  mobiles  et  mo- 
queuses de  l'Italie,  si  commun  à  Rome,  si  approprié 
aux  habitudes  rustiques,  militaires,  politiques,  oratoires^ 
on  comprend  comment  Quintilien  a  pu  diro,  avec  un  or- 
gueil Justifié  :  «  La  satire  est  toute  à  nous.  » 

Lttcilius  était,  dit-on,  l'oncle  du  grand  Pompée.  La  date 
de  sa  mort  (105  av.  J.-C.  )  nous  amène  presque  au  siècle 
de  Cicéron  et  de  César.  Mais,  en  suivant  le  développe- 
ment de  la  poésie  durant  cette  première  période,  nous 
avons  laissé  derrière  nous  et  nous  devons  reprendre  les 
orateurs  et  les  historiens,  depuis  Caton  et  les  giMrrea 
Puni<|ues.  Cicéron  nous  a  transmis,  dans  le  Brutus,  mot 
magmfique  histoire  de  l'éloauence  latine.  On  y  voit  le 
progrès  rapide  des  orateurs  importants  et  célèbres  qui 
se  succédèrent  à  Rome  :  Galba,  abondant,  pathétioue  à 
la  tribune,  flasque  et  mou  la  plume  à  la  main  ;  Scipion 
Émilien  et  Lélius,  représentants  de  l'éloquence  patri- 
cienne et  aristocratique  ;  Carbon,  plus  harmonieux  que 
fort,  mais  le  meilleur  avocat  de  son  temps;  les  Grecques, 
orateurs  populaires  élevés  par  des  maîtres  grecs ,  mais 
dont  le  second  seul  a  l'honneur  d'être  caractérisé  en  dé- 
tail par  Cicéron,  qui  loue  son  éloquence,  la  vigueur  et 
l'abondance  de  son  style ,  auquel,  dit-il,  a  manqué  la 
dernière  main;  enfin,  parmi  beaucoup  de  noms  secon- 
daires, les  deux  glorieux  précurseurs  de  Cicéron,  Crassus 
et  Antoine,  le  premier  plein  d'abondance,  de  force,  de 
sel,  concis  et  orné  tout  ensemble,  pathétique  et  sublime, 
écrivain  distingué,  le  plus  parfait  de  tous  les  orateursi 
au  Jugement  de  Cicéron,  qui  se  plaît,  dans  ses  Dialoffues, 
à  le  substituer  à  sa  propre  place,  et  à  le  prendre  pour 
interprète  de  ses  opinions  et  de  ses  principes;  le  second, 
improvisateur  admirable,  inférieur  pour  la  langue,  in- 
comparable dans  l'action  oratoire,  qui  était  comptée  pour 
une  si  grande  partie  de  l'éloauence  sur  le  vaste  théftlze 
du  Forum  et  avec  la  vivacité  des  impressions  populaifos. 
Tous  deux  malheureusement  ne  sont  connus  que  par  les 
belles  analyses  de  Qcéron  et  les  allusions  perpâuelles 
qu'il  fait  à  leurs  discours  ;  car  ceux  de  Crassus  sont 
perdus,  et  Antoine  n'écrivait  pas  les  siens,  pour  éviter 
la  responssbilité  gênante  des  contradictions  si  ordinaires 
dans  la  profession  d'avocat.  Crassus  mourut  à  la  veille 
des  guerres  civiles  ;  Antoine  fut  une  des  plus  dépkmp 
blés  victimes  de  Marius  ;  c'est  dire  que  le  siècle  de  Cicé- 
ron était  commencé. 

Un  autre  genre  de  la  prose,  qui  convenait  également  à 
l'esprit  positif  et  à  la  gravité  des  Romains,  c'est  l'hia» 
toire  ;  et  cependant,  de  Caton  à  Salluste,  elle  préMQl» 


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MU  dMntérftL  On  eo  a  va  plos  haut  les  MiivceB  et  la 
forme  première,  dans  les  Annales  d9s  Pontifes.  Il  n'eet 
]Ma  sûr  que  Fabius  Pictor,  le  premier  historien  dont  le 
nom  se  soit  conserré,  ait  écrit  en  ladn  ;  et  il  est  certain 
qae  Cindos  Alimentas  écrivit  en  grec  Thistoire  de  Rome 
Jusqu'à  son  époque,  fait  assez  singulier,  qui  se  reproduit 
ehes  le  flls  du  prender  Africain  et  chei  beaucoup  d'antres. 
Les  OfriginM  de  Coton,  que  nous  n'avons  pas,  étaient  au 
moins  une  histoire  latine,  d'autant  plus  précieuse  Qu'elle 
contenait  les  origines  die  toutes  les  vUles  d'Italie.  De 
Bombfw  historiens,  à  peu  près  inconnus,  se  livrèrent 
après  loi  à  ce  genre  de  composition,  depuis  Calpumius 
Pison  «  l*hoaime  de  bien  »  ^ /ruflr*  )«  Jusqu'à  Lutatius  G»- 
tulus,  le  collègue  et  la  victime  de  Marias.  Les  hommes 
célèbres  commençaient  aussi  à  écrire  leurs  Mémoires . 
pour  se  reposer  de  la  vie  et  des  Ibnctîons  publiques,  et 
donnaient  un  exemple  qui  fut  suivi  pendant  toute  la  du- 
rée de  l'Empire,  liais  ici  encore,  nous  ne  rencontrons 
guère  que  des  regrets  et  des  pertes  irréparables.  Mé- 
moires de  S^Ua,  Mémoires  de  Cicéron,  Mémoires  de  la 
seconde  Asrippine ,  Mémoires  d'Adrien.  Les  Commsti- 
iaim  de  Cisar  nous  apprennent  comment  les  Romains 
parlaient  d'eux-mêmes  et  de  leurs  actions. 

Premiers  périods  :  deuxième  époque,  2*  SiMe  de 
Oicéron  et  as  César  jusqu'au  règns  ^Auguste.  —  Le 
Tfaéteur  Apollonius  Molon  disait  à  un  Jeune  homme  qui 
écoutait  ses  leçons  à  Rhodes  :  «  Je  te  loue  et  t'admire; 
mais  le  plains  le  sort  de  la  Grèce,  en  voyant  que  la  seule 
•upérionté  qui  nous  reste,  celle  du  savoir  et  de  l'élo- 
quence, va  par  toi  passer  du  c6té  des  Romains.  »  Ce  Jeune 
homme  était  Cicéron,  qui,  après  une  victoire  sur  Horten- 
sius  et  une  cause  gagnée  malgré  Sylla,  parcourait  la 
Grèce  et  l'Asie  pour  compléter  son  éducation  :  il  avait 
alors  vingt-huit  ans,  et  C&ar  en  avait  vingtrdeux.  Nous 
n'avons  pas  à  raconter  sa  vie;  à  peine  même  pouvons- 
nous  esçtuisser  les  plus  grands  traits  de  cette  histoire  de 
son  génie,  qui  est  celle  de  Télo^ence  et  de  la  philosophie 
romunea.  Compatriote  de  Manus ,  il  n'appartenait  pas  à 
ees  familles  patriciennes  où  les  Jeunes  gens  s'élevaient  au 
milieu  des  affaires,  et  se  formaient,  presque  à  leur  insu, 
par  l'habitude  des  conversations  politiques.  Il  n'aborda 
la  tribune  qu'à  près  de  quarante  ans,  et  ses  discours  po- 
litiaues  datent  ae  son  consulat,  qu'il  obtint  peu  de  temps 
après  (l'an  600  de  Rome,  63  av.  J.-C).  Biais  il  avait  déjà 

Ç laide,  parmi  bien  d'autres  causes,  le  grand  procès  contre 
erres,  où  il  revendiquait  hardiment  sa  qualité  d'homme 
nouveau,  comme  un  titre  à  la  faveur  populaire,  et  tra- 
^t,  dans  les  pages  immortelles  des  Verhnes,  ces  pein- 
tures tour  à  tour  plaisantes  ou  pathéticpies  des  rapines 
et  des  cruautés  d'un  préteur.  Le  discours  pour  ta  loi 
ManUia  n'était  encore  qu'une  sorte  de  harangue  d'ap- 
parat, à  la  louange  de  Pompée,  plus  harmonieuse  ou  au 
moins  plus  intéreuante  que  les  panégyriques  d'Isocrate. 
Le  consulat  lui  fournit  l'occasion  des  quatre  discours  sur 
la  loi  agraire,  où  il  toama  si  habilement  les  volontés  du 
peuple  contre  elles-mêmes,  et  des  CatUinaires,  qui  sont 
demeurées,  avec  les  Philippiques  de  Démosthène,  le  type 
presque  proverbial  de  l'éloquence  agressive  et  militante. 
Bientôt,  en  plaidant  pour  le  poêle  Archias,  il  donne  un 
modèle  exquis  du  genre  démonstratif,  où  il  excellait. 
Exilé  par  l'influence  de  Clodius,  et  ramené  à  Rome  sur 
les  bras  de  l'Italie  tout  entière,  il  marque  un  nouveau 
point  de  sa  carrière  d'avocat  par  la  oélèbre  MUoniennê; 
un  autre  par  la  défense  de  Ugarius,  sous  la  dictature  de 
César,  et  atteint,  dans  le  remerclment  pour  le  rappel  de 
Marcellus,  la  perfection  de  l'éloquence  tempérée.  Rap- 
pelé à  la  tribune  par  les  guerres  civiles,  il  prononce  ou 
publie  quatorze  PnUippiques  contre  Antoine,  et  paye  de 
sa  tête  son  dévouement  à  la  liberté  expirante  et  sa  haine 
contre  le  triumvirat.  —  Cette  grande  vie  avait  encore  été 
occupée  de  compositions  poéti(|ues  estimées,  telles  que  le 
poème  de  Marius  et  la  traduction  des  Phénomènes  d'Arar 
tas;  d'une  immense  Correspondance,  dont  nous  n'avons 
que  la  moindre  partie,  environ  neuf  cents  lettres,  infini- 
ment précieuses  pour  l'histoire  politique  et  intérieure  de 
la  société  d'alors.  On  f  fait  connaissance  avec  des 
hommes  supérieurs,  le  spirituel  et  prudent  Atticus,  Caton 
d'Utique,  Brutus,  le  vif  et  mordant  Célius,  Q.  Cicéron , 
le  frère  de  l'orateur  ;  plusieurs  de  leurs  lettres  se  sou- 
tiennent dignement  à  côté  de  celles  de  Cicéron.  Enfin, 
l'illustre  consulaire,  l'avocat  par  excellence,  avait  encore 
trouvé  le  temps  d'écrire  quantité  d'ouvrages  de  rhéto- 
rique et  de  philosophie,  dont  un  seul  eût  suffi  à  son  im- 
mortalité. Citons,  parmi  les  premiers,  les  trois  Dialogues, 
De  l'Orateur,  le  Brutus  ou  Dialogue  sur  les  orateurs  cé- 
lèbres, et  l'Orateur,  et  disons  en  un  mot  que  Cicéron 


apporta,  dans  la  critique  et  l'histoire  de  l'art  oni  faisait 
sa  gloire,  une  éloquence  peut-être  égale  à  celle  de  ses 
plus  beaux  discours;  c'étaient  en  quelque  sorte  les  confi- 
dences  de  l'âme  et  du  génie.  —  Amoureux  de  la  gloire 
pour  sa  patrie  autant  que  pour  lui-même ,  Cicéron  rem 
lui  donner  une  philosophie,  et  enlever  à  la  Grèce  le  mo- 
nopole de  cette  science.  Les  philosophes  enseignaient  de- 
puis longtemps  à  Rome,  cachés  sous  le  nom  de  rhéteurs, 
méprisés  comme  Grecs,  mal  vus  depuis  Caméade,  qui 
avait  payé  du  bannissement  sa  popularité  de  maavaii 
aloi.  Et  cependant,  épicuriens  et  stoïciens,  avec  leur  phi- 
losophie positive  et  pratique ,  avalent  trouvé  des  parti- 
sans :  le  stoldsme  avait  même  bit  des  disciples  parmi 
les  Scipions.  Nous  retrouverons  Épicore  chez  les  poètes, 
dans  les  vers  de  Lucrèce.  Gcéron,  stoïcien  tempéré  en 
morale,  admirateur  de  Platon  et  élève  de  la  nouvelle  Aca- 
démie, consacra  à  ces  grandes  doctrines  les  loisirs  que  lai 
avaient  faits  les  révolutions,  et,  dans  la  République,  les 
Lois,  les  TusctUanes,  la  Nature  des  dieux^  les  Devoirs, 
les  traités  de  VAmitii  et  de  la  Vieillesse,  il  enseigna  aui 
Romains  la  seule  science  qui  put  un  Jour  consoler  les 
ftmea  élevées  de  la  liberté  perdue.  Lui-même  avait  dû  à 
ces  nobles  effbrts  le  plus  précieux  délassement  des  cha- 
grins politiques  et  un  rang  des  plus  élevés,  sinon  parmi 
les  inventeurs,  an  moins  parmi  les  écrivains  philoso- 
phiques, dernier  trait  d'une  rie  si  complète,  qu'a>^ 
remplie  tout  entière  la  double  passion  des  lettres  et  de  la 
gloire. 

Si  le  nom  de  Cicéron  est,  comme  le  dit  Qnintilien,  le 
nom  même  de  l'éloquence,  l'iûsloire  du  genre,  se  rédait 
singulièrement  après  lui.  Hortensias,  qui  l'avait  précédé 
dans  la  cairière,  et  mourut  sept  ans  avant  lui ,  n'a  laissé 
qu'une  grande  réputation,  éclipsée  d'aflleors  dans  la  sê* 
conde  moitié  de  sa  rie,  et  un  de  ces  nombreux  exemples 
du  talent  qui  se  surrit  à  lui-même.  Son  heureux  riTsl, 
qui  le  fait  connaître  dans  le  Brutus,  caractérise  eo  loi 
une  des  écoles  oratoires  de  son  temps.  Rome  avait  tu 
déjà  des  orateurs  antiques,  par  goût  d'archaïsme;  des 
orateurs  stùleiens,  c-à-d.  logiciens  rigoureux,  et  trop  secs 
pour  être  populaires  :  Caton  d'Utique  en  était  un  ;  des 
épicuriens,  peu  élégants,  mais  très-habiles  à  discuter 
nettement  les  intérêts  positifs.  A  ces  diverses  cat^o- 
ries.  Il  faut  i^outer  les  deux  grandes  écoles  asiatique  ci 
attique,  l'une  abondante  Jusqu'à  la  diflfusion,  et  souvem 
déclamatoire  :  Hortensius  en  était  le  représentant  le  pln> 
accrédité;  l'autre,  élégante  et  pure  dans  l'expression. 
mais  sèche,  fh>ide,  maussade  psr  système,  outrant  h 
simplicité  de  Lysias ,  et  accusant  Démosthène  d'affecia- 
tion  ;  le  stoïcien  Brutus  n'était  pas  éloigné  de  comprendre 
ainsi  l'atticisme.  Biais  ces  différentes  écoles,  à  Tavéoe- 
ment  d'Auguste,  allaient  inéritablement  s'éteindre  dso^ 
le  silence  qu'imposait  le  nouveau  régime.  L'éloquence, 
bannie  de  la  lie  publique,  était  oondsmnée  à  s'altérer  et 
à  se  corrompre  dans  l'ombre  des  écoles,  an  stérile  exe^ 
doe  des  déclamations. 

Pendant  que  Téloouence  politique  et  Jadidaire  jetait 
un  si  grand  éclat,  l'histoire  s'élevait  aux  qualités  litté- 
raires qui  devaient  en  faire  prochainement  un  dédom- 
magement de  la  tribune  muette.  On  a  va  qu'elle  avait 
été  préparée  à  Rome  par  une  étude  grave  et  ^>profondie; 
seulement,  elle  s'attachait  au  point  de  vue  romain,  et 
s'occupait  uniquement  des  guerres  et  de  la  politique  ro- 
maines ;  encore  celle-d  lui  échappait-elle  souvent;  la 
historiens  ne  regardaient  guère  que  l'extérieur  des  aflaire 
au  Forum ,  et  n'étudiaient  pas  ces  grandes  traditions  do 
Sénat  dont  Bossuet  et  Montesquieu  ont  si  éloquemmeot 
expliqué  le  secret.  Nous  pouvons  croire  le  progrès  litté- 
raire accompli  dans  l'histoire,  au  moins  en  partie,  ren 
le  temps  de  Cicéron,  malgré  ses  plaintes  sur  rinsoffi- 
sance  oes  auteurs.  Ne  faut-il  pas  supposer  une  certaine 
i^eur  à  Cornélius  Sisenna,  à  Gœlius  et  à  bien  d'autres, 
parmi  lesquels  Luccéius,  auquel  est  adressée  la  fameoie 
lettre  de  Cicéron  sur  son  consulat?  Tous  les  «eares  his- 
toriques existaient ,  histoire  religieuse  et  poirti(|oe,  mé- 
moires, biographie;  enfin,  trois  écrivains  sopéneurs  «i 
donnèrent  Tes  modèles:  —  Salluste,  moins  originii 
qu'imitateur,  car  son  goût  affecté  pour  l'archidsme  n'est 
tout  au  plus  qu'une  singularité,  a  tout  à  fait  le  caractère 
romain  ;  il  ne  voit  les  choses  qu'au  point  de  vue  natio- 
nal. La  vie  publique  était  tout  aJors  ;  aussi  ne  trouve-t-on 
chez  lui  que  les  choses  de  la  YÏe  publique  ;  par  exempl^ 
les  événements  politiques  et  militaires  de  la  guerre  de  Jo- 
gurtha,  oui  intéressaient  le  Forum,  la  topographie  des  com- 
bats, mais  presque  rien  sur  les  mœurs  et  la  géographie  d'op 
pays  si  curieux,  ou'il  avait  cependant  gouverné.  H  ne  fait 
pas  comprendre  l'influence,  ni  connaître  la  politique  de 


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1151 


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Gitilina;  il  «ocoeUle  &cilement  toutes  les  imputations 
odieuses  qui  plaisent  à  ses  préventions  d*hoinme  de  parti. 
Mus  il  se  montre  grand  ôcrirain  :  ses  portraits,  em- 
pmntés  au  genre  oratoire ,  sont  traités  supérieurement; 
son  style  est  plein ,  rapide,  conds,  avec  quelque  gène  et 
quelque  obscurité;  enfin ,  il  a  porté  dans  Thistoire  deux 
qualités  de  premier  ordre,  Fintelligence  politique  et  le 
talent  littéraire.  —  César,  grand  écrivain,  gnnd  orateor, 
poète  élégant ,  ami  dei  lettrée  et  des  arts,  a  troové,  dans 
cette  vie  u  pleine  el  si  agitée,  le  tempe  d'écrire  beaucoup  : 
te  harangues,  des  lettres,  des  vers,  des  traductions,  un 
traité  de  grammaire,  un  libelle  contre  Gaton,  titre  ttr- 
efaeiix  à  la  renommée:  enfin ,  les  Cofnmentaires  sur  la 
fvarre  dn  Gaules  et  la  guerre  ewUe,  écrits,  a-t-on  dit 
^stement,  avec  le  môme  esprit  qui  les  avait  conduites. 
Netteté,  précision,  simplicité,  absence  de  toute  préoccu- 
liatîoa  personnelle,  élégance  et  pureté  de  style  hautement 
louées  par  le  meilleur  Juge  du  temps,  c.4Mi.  par  Qcé- 
ron,  toutes  ces  qualités  font  admirer  César  comme  «  un 
excdleot  maître  pour  faire  de  grandes  choses  et  pour  les 
écrire  »  (Bossuet,  Lettre  au  pofpe  Innocent  XI  sur  Vidu- 
taikmdu  Dauphin).  —  Salluste  avait  écrit  Thistoire  gé- 
nérale de  son  temps.  César  ses  Mémoires,  Coméhus 
Népos  composa  des  biographies.  Un  copiste  nous  a  rendu 
le  Ûcheux  service  de  1»  abréger  presque  toutes  ;  au 
ffloios  savons-nons  que  Cornélius  y  avait  porté  la  pureté 
et  l'élégance  de  C&ar.  Tous  deux  pourraient  former 
oomme  une  école  attique  parmi  les  historiens  latins;  il 
étut  réservé  à  Tite-Live  de  réaliser  la  manière  dont 
Gcéron  avait  conçu  Thistoire  dans  son  traité  des  Lois. 

Reste,  pour  compléter  ce  tableau  de  la  prose  au  temps 
de  César  et  de  Gcéron,  un  genre  bien  secondaire,  mais 
qui  doit  sMntroduire  de  plus  en  plus  dans  les  goûts  et 
les  habitudes  des  Romains,  comme  dans  toute  littéra- 
tare,  à  mesure  que  s'useront,  dans  les  genres  supérieurs, 
rinspiration  et  Foriginalité;  nous  voulons  parler  des 
grammairiens.  C'était  le  nom  que  les  Anciens  donnaient 
SOI  commentateurs,  aux  critiques,  aux  gens  de  lettres. 
Leurs  études,  introduites  de  bonne  heure  à  Rome,  plai- 
saieot  aux  meilleurs  esprits  et  aux  plus  grands  penon- 
nages;  César  écrivit  on  traité  sur  V Analogie,  et  Ton  sait 
qae  Tibère  et  Claude  se  mêlaient  de  régler  le  langage.  Un 
homme  très-savant,  one  Cicéron  appâa  «  le  plus  prend 
ées  polygraphes,  »  admirable  d'activité  et  de  patience, 
Varron,  se  distingua  dans  ce  genre.  Nous  avons  déjà  ren- 
contré son  nom  parmi  les  écrivains  de  la  vie  rustique. 
Ses  Satires  Mémppées  forent  probablement  un  mélange 
de  philosophie,  d'observation  de  mœurs,  et  de  plaisante- 
ries; son  traité  de  la  Langue  (Ui$ie,  plus  utile  que  facile 
à  lire,  à  cause  de  la  pesanteur  du  style  et  de  la  bisarrerie 
des  expressions,  ouvre  pour  la  grammaire  une  époque  de 
PRMpâité  éclatante. 

Poésie,  —  L'histoire  de  la  poésie  latine  ne  se  borne 
pas,  hemeuflement  pour  nous,  aux  essais  de  Cicéron  et 
de  César,  assez  pands  tous  deux  pour  se  passer  de  la 
gloire  des  vers.  Ces  divines  régions  de  llmagination  et 
de  lidéal,  où  les  Grecs  dominaient  en  maîtres,  n'étaient 
plus  fermé»  au  géuie  romain.  Déjà,  «  depuis  les  guerres 
paniques  il  avait  cherché  à  quoi  ouvaient  servir  Thespis, 
Eschyle  et  Sophocle.  »  L'épopée  et  la  poésie  didactique, 
c4-d.  l'histoire  et  la  science  en  vers,  ne  devaient  pas 
trouver  moins  de  faveur.  Le  vieil  Ennius  est  encore  le 
père  de  la  poésie  ^dactique  chez  les  Romains.  Cepen- 
dant, elle  s^nble  languir  après  lui.  Rome,  au  fond,  n'en- 
coungeait  guère  que  ce  cjui  se  rattachait  à  la  vie  poli- 
tique, l'époj^  qui  célébrait  ses  triomphes,  le  théâtre  qui 
l'amusait,  et,  d'ailleurs,  oflîrait  un  puissant  moyen  de 
candidature,  la  satire,  qui  était  en  quelque  sorte  œuvre 
de  censeur.  Pour  mettre  en  lumière  ce  ^enre  didactique 
oii  les  Oecs  avaient  si  bien  réussi,  il  fallait  un  homme 
de  génie,  Lucrèce,  contemporain  de  Sylla,  mort  par  un 
suicide  le  Jour  peut^^tre  de  la  naissance  de  Virgile.  En- 
core fut -il  peu  lu,  peu  goûté  de  ses  contemporains. 
Cicéron  lui  trouvait  beaucoup  d'art,  un  génie  médiocre; 
mais  l'admiration  d'Ovide  et  e  Virgile  l'a  vengé  de  cette 
injustice.  Physicien  et  naturaliste  comme  on  pouvait 
l'être  de  son  temps,  philosophe  matérialiste,  sinon  athée, 
parce  qu'il  soutient  le  système  d'Épicure,  il  est  poète,  et 
poète  de  premier  ordre,  par  le  sentiment  admirable  des 
grandes  choses,  de  la  science ,  de  l'humanité  et  de  ses 
misères,  par  la  pdnture  immortelle  des  sociétés  et  des 
révolutions.  R  a  le  style  didactique  serré  Jusqu'à  la  roi- 
deur  et  la  sécheresse,  mais  d'une  excellente  précision,  le 
style  descriptif  et  le  style  oratoire  poétiques  et  sublimes 
au  plus  haut  degré.  R  est  original  par  la  conviction,  par 
timpression  de  son  caractère  personnel^  si  fortement 


marquée  dans  son  poème  ;  pour  le  reste,  il  est  Grec  t  il 
aime  Athènes  de  passion  ;  il  chante  la  paix  et  invoque 
Vénus  au  milieu  d'hommes  oui  adoraient  le  dieu  Mars, 
et  lui  offraient  les  affreuses  nécatombes  des  guerres  ci- 
viles. Atteint  peut-être  de  folie,  il  a  laissé  un  p>éme  ina- 
chevé, et  une  langue  philosophique,  œuvre  laborieuse  et 
forte,  qui  suffit  à  l'expressisn  du  sublime,  mam  n'est  pas 
encore  assouplie  Jusqu'à  donner  de  l'intérêt  et  de  la  ^âtce 
aux  détails  arides  et  techniques,  dernier  terme  de  l'art 
où  Virgile  excellera.  La  poésie  didactique,  la  poésie  lé- 
gère, l'épigramme  florissaient  à  l'époque  de  Lucrèce,  avec 
Hortensius,  Cicéron,  César,  Calvus,  Varron  d'Atax;  les  per- 
sonnages illustres  formés  par  les  grammairiens  se  diver- 
tissaient à  ce  genre  d'exercice:  mais  Catulle  est  le  seul 
oui  soit  parvenu  à  la  postérité  et  qui  ait  mérité  la  gloire. 
Spirituel  et  brillant,  Cadle  et  gracieux  dans  sa  poésie 
comme  dans  sa  conduite,  il  a  surtout  le  sentiment  exquis 
d'un  artiste,  dans  la  poésie  erotique  ainsi  que  dans  l'épi- 
gramme. U  essaye  de  la  poésie  lyrique,  adresse  à  César 
de  mordantes  épigrammes,  porte  dans  l'élégie  plus  d'es- 
prit que  de  sentiment;  il  est  peintre  par  excellence,  dans 
des  ven  pleins  d'élégance  et  de  précision,  de  laisser-aller 
et  d'harmonie.  —  Catulle  et  Lucrèce,  César  et  Cicéron 
nous  ont  conduits  Jusqu'au  second  triumvirat,  et  à  l'éta- 
blissement du  pouvoir  monarchique,  où  s'arrête  la  pre- 
mière période  de  l'histoire  de  la  littérature  latine.  A  ce 
moment  nous  voyons  l'éloquence,  arrivée  à  la  perfection, 
et  condamnée  fatalement  à  la  décadence;  la  philosophie, 
développée  par  Cicéron,  et  appelée  à  exercer  une  puis- 
sante influence  sur  quelques  âmes  d'élite;  l'histoire, 
élevée,  grâce  à  l'éloquence,  au  rang  de  composition  litté- 
raire; la  poésie,  enfin,  œuvre  d'art  plutùt  que  d'inspira^ 
tion,  mais  préparée  aux  matières  sérieuses  et  sublimes 
aussi  bien  qu'aux  sujets  légen,  et  à  la  veille  d'enfanter 
des  chefs-d  œuvre. 

Deuxième  période  :  LUtéraiure  latine  ammt  et  après 
les  Antonins;  caractères  oénéraux,  —  L'établissement 
du  pouvoir  monarchique  vient  transformer  la  vie  des  Ro- 
mains, et  les  enlever  à  la  politique.  La  littérature  cesse 
de  se  rapporter  tout  entière  à  l'éloquence,  et  d'être,  pour 
les  citoyens  considérables,  un  délassement  des  charges  et 
des  fonctions  publiques;  elle  est  plus  estimée,  perce  que 
les  loisirs  se  multiplient.  Gcéron  ne  se  croirait  plus 
obligé  de  s'excuser  au  temps  qu'il  donne  à  la  poésie;  les 
vers  ont  proilté  de  tout  ce  qu'a  p.<^u  l'éloquence.  A  quoi, 
du  reste,  serviraient  les  harangues?  U  ny  a  plus  de  tri- 
bune, plus  de  comioes;  le  barreau  même  déchoit,  il  est 
banni  du  Forum,  et  les  causes  importantes  sont  devenues 
plus  rares.  Toutefois,  les  habitudes  oratoires  se  retrou- 
vent dans  l'histoire,  l'épopée,  la  satire.  Sous  le  règne  de 
Tibère,  la  parole  est  aux  délateurs;  le  Sénat  n'entend  que 
leur  éloquence  toute  de  lucre  et  de  sofip,  comme  l'appelle 
Tacite;  rhistoire  elle-même  se  tait.  On  la  verra  renaître, 
en  même  temps  qu'un  fantùme  d'éloquence,  sous  Nerva 
et  Trajan.  Hais  alors  la  déclamation  et  la  mauvaise  rhé- 
torique ont  envahi  les  écoles;  et  elles  se  sont  emparées 
de  U  poésie,  qu'elles  dénaturent  en  la  réduisant  aux 
succès  frivoles  des  lectures  publiques  :  on  ne  rencontre 
partout  que  rhéteure et grammainena.  Quant àla  philo- 
sophie, comme  la  réflexion  et  la  vie  personnelle  ont  rem- 
placé l'action  et  la  rie  publique,  l'Empire  fait  des  mora- 
listes, tandis  que  la  Rmublique,  avant  Gcéron,  n'avait 
connu  d'autre  philosophie  que  le  Droit.  L'Épicurâsme  est 
la  doctrine  du  grand  nombre,  le  Stoïcisme  celle  des  ca- 
ractères d'élite  qui  cherchent  dans  sa  morale  énergique 
un  soutien  et  une  consolation.  Enfin  les  sciences,  faute 
d'observations  bien  faites  et  d'applications  industrielles, 
tournent  aisément  à  la  déclamation,  par  exemple  ches 
Sénèque  et  chez  Pline.  —  R  n'y  a  point  là  d'ailleure  d'in- 
vention originale;  les  Grecs  avaient  précédé  les  Romains 
dans  tous  ces  différents  genres;  c'est  pourquoi  la  littéra- 
ture se  fatigue  et  s'épuise  de  Jour  en  Jour.  Au  commen- 
cement de  cette  p^ode,  dans  la  ferveur  des  illusions 
causées  par  l'avènement  d'Auguste  et  la  satisfaction  d'une 
paix  d'autant  plus  ardemment  désirée  qu'elle  avait  été 
payée  cher,  l'inspiration  produisit  des  chefs-d'œuvre. 
Les  idées  d'ordre  et  de  grandeur  régulière  et  pacifique, 
mêlées  aux  restes  de  l'ancienne  indépendance,  la  fierté 
romaine,  la  foi  aux  destinées  de  l'Empire,  et,  d'autre 
part,  l'imitation  habile  et  originale  des  Grecs,  l'érudition 
des  grammairiens,  et  le  solide  bon  sens  du  prince  et  de 
ses  amis,  qui  empêchaient  la  politesse  et  réléganoe  de 
tourner  à  l'affectation,  furent  les  caractères  du  siècle 
d'Auguste  et  les  causes  de  sa  splendeur.  Biais  lorsque 
Tibère  eut  inauguré  le  despotisme  inquiet,  sanguinaire 
et  dépravé,  d'où  devaient  sortir  les  guerres  civiles,  la  vie 


LAT 


llSi 


LAT 


^■lellectiielle  et  monle  se  rédaitit  aux  doctrines  d*Épl* 
eure  et  de  Zenon,  Tune  enieignant  Tindifférence,  Tiiutro 
ftuiBsant  l'esprit  ptr  ses  exagérations.  Le  naturel  était 
rare  et  sans  rigneur  ;  Tintérét  provoquait  la  flatterie  et 
les  bassesses.  Nerra  et  ses  successeors  ramenèrent  poar 
an  temps,  dans  les  aflkires  et  dans  les  idées,  une  vérité, 
une  liberté  dont  on  avait  perdu  Phabitude.  Dans  ce  retour 
à  là  source  unique  du  beau,  la  littérature  latine  retrouva, 
comme  TEmpire,  une  prospérité  passagère  ;  il  se  forma 
des  historiens,  des  satiriques,  des  moralistes,  des  littéra- 
teurs. Hais  cet  éclat  n'était  pas  durable.  Il  s'éteignit  avec 
les  vertus  des  princes,  et  la  dernière  période  d«  lettres 
latines  reproduisit  avec  une  fatale  et  déplorable  fidélité 
la  décadence  et  la  décrépitude  du  monde  romain. 

Siècle  d'Auguste  :  Poésie.  —  Les  noms  de  Virgile  et 
^THorace  n'ont  pas  besoin  d'une  longue  histoire.  Le  pre- 
mier appartient  à  la  famille  des  génies  privilégiés  qui 
«nt  réausé  dans  les  srts  l'idéal  de  la  beauté  toujours 
égale,  toujours  pure  et  Irréprochable  ;  c'est  la  famille  de 
Radne,  de  Raphafil  et  de  Mozart.  Original  par  l'élévation 
sublime  de  son  génie  et  l'exquise  sensibilité  de  son  âme, 
il  est  imitateur,  comme  tous  les  Romains,  dans  le  choix 
des  sqjets  et  même  dans  les  détails.  Il  emprunte  à  Théo- 
crite  le  eenre  pastoral,  et,  malgré  la  sràce  mélodieuse 
des  Bucoliques,  il  n'arrive  pas  à  la  yénté  dramatique  et 
saisissante  de  son  modèle.  Le  fond  des  Géorgiques  était 
à  tout  le  monde,  depuis  Hédode;  mais  c'était  un  fond 
tout  romain,  où  Virgile  porta  l'amour  de  la  campagne, 
des  antiques  vertus,  de  la  paix  et  de  la  grandeur  nfUio- 
nale,  exprimé  avec  une  perfection  de  langage  et  de  poésie 
que  sans  lui  les  Romains  n'eussent  peut-être  Jamids 
connue.  Peintre  Incomparable  de  la  nature  et  de  la 
réalité,  il  avait  élevé  la  poésie  didactique  {V,ce  mot)  à 
un  d^fré  de  perfection  désespérante,  et  consacra,  dans 
VÉnétde,  la  maturité  de  son  génie  aux  origines  de  Rome, 
de  sa  religion  et  de  sa  gloire.  Il  y  montra  Auguste  der- 
rière Énée,  et  les  splendeurs  de  la  ville  étemelle  d^rière 
l'humble  royaume  d'Êvandre,  avec  une  admiration  sin- 
cère pour  le  génie  qui  fonde  et  pacifie,  et  sans  idol&trie 
du  succès  et  de  la  puissance.  Il  mourut  sans  avoir 
achevé  son  œuvre,  sans  avoir  atteint  à  la  sublimité 
d'Homère,  mais  en  laissant  derrière  lui  tous  les  Imita- 
teurs de  l'avenir,  condamnés  à  le  reconnaître,  comme  le 
Dante,  pour  leur  guide  ^  leur  seigneur  et  leur  maUre, 
«  Aussi^  dit  un  homme  de  goût  qui  aime  Virgile  comme 
on  doit  l'aimer,  aux  époques  si  tristes  du  moyen  âge  est- 
Il  révéré  comme  on  saint;  c'est  un  oracle  qui,  dans  les 
sortes  VùrgUianœ,  surrit  au  paganisme.  Ces  pauvres  ha- 
bitants de  l'Italie  étaient  encore  émus  aux  accents  de 
cette  voix  divine  s  Ils  retrouvaient  dans  quelques-unes 
de  ses  églogues  le  tableau  de  leur  misère  présente,  et 
dans  son  poème  national  le  sentiment  de  leur  grandeur 
passée.  »  {Notes  sur  la  versification  et  la  composition 
latines,  par  M.  Chardin,  Paris,  1861.) 

Horace,  son  ami,  et  peut-être  son  égal  dans  un  autre 
genre,  presente  une  physionomie  à  part,  et  l'une  des 

glus  originales  de  la  littérature  latine.  Promptement  dés»- 
usé  de  la  politique,  où  son  rùle  n'avait  pas  été  brillant, 
il  avait  obtenu  par  son  talent,  et  surtout  grâce  aux  bons 
offices  de  Varius  et  de  Vh^le,  l'amitié  de  Mécène  et  d'Au- 
guste. Il  fut  toute  sa  vie  épicurien,. ami  de  son  indépen- 
dance et  grand  poète.  Il  commence  par  les  Satires^  œuvre 
de  bon  sens,  de  bonhomie  piquante,  de  raillerie  sans' 
méchanceté,  véritables  conversations  morales  dont  les 
stoïciens  font  quelquefois  les  frais.  Dans  les  Odes,  il  re- 
vient à  l'imitauon  des  lyriques  grecs;  Il  emploie  leurs 
formes  et  leur  métrique  avec  une  facilité  et  une  élégance 
merveilleuses.  Sa  vraie  inspiration,  c'est  la  grandeur  de 
Rome  et  d'Auguste,  ou  bien  la  fragilité  des  plaisirs;  hors 
de  là,  c*est  un  artiste  excellent  qui  applique  aux  détails 
du  style  la  studieuse  et  brillante  flexibilité  de  son  génie. 
Enfin  les  Êpitres  le  ramènent  au  genre  didactique  :  il  y 
raconte  sa  vie  et  son  caractère,  les  mœurs  et  les  idées  de 
son  temps,  sans  prétendre  aux  grands  effets,  mais  avec 
ane  raison  et  une  finesse  Inimitables.  La  dernière, 
•dressée  aux  Pisons,  est  demeurée  pour  le  fond,  sinon 
pour  l'ordre  et  la  méthode,  le  type  de  toutes  les  Poéti- 
qaes  modernes,  et,  sans  quitter  le  caractère  familier  de 
la  causerie,  le  manuel  du  bon  sens,  du  goût,  et  de  l'art 
d'écrire  en  vers,  surtout  pour  le  théâtre.  N'oublions  pas 
Aon  plus,  dans  les  titres  d'Horace,  celui  de  maître  et  de 
modèle  de  Boileau. 

La  gloire  des  poètes  élégtaques,  sans  être  du  même 
ordre,  est  une  des  richesses  du  siècle  d'Aueuste.  Déjà 
facile,  précise  et  brillante  dans  les  vers  de  Catulle, 
l'âégie  convenait  aux  mœurs  comme  au  goût  littéraire 


de  l'Empire.  Gallus,  mieux  connu  par  la  belle  églogue  ds 
Virgile  que  par  des  pièces  apocrypnes;  Tlbulle,  écrivalii 

Î;racieux,  ami  de  la  paresee,  épicurien  dont  la  sensibilité 
éininine  ne  ressemble  guère  au  sang-froid  philosophique 
d'Horace,  et  nous  montre  où  l'esprit  romain  s'abaissait 
par  la  haine  de  la  guerre  et  le  goût  des  plaisirs;  Pro- 
perce, imitateur  de  Callimaque  et  de  Phllétas,  moins  na- 
turel et  moins  passionné  que  Tibulle,  mais  plus  nerveaX| 
et  quelnuefois  même  élevé  et  noble,  vécurent  pendant 
la  première  moitié  du  règne  d'Auguste ,  et  moururent 
Jeunes.  Ovide,  pour  son  malheur,  prolongea  Jusque  sous 
Tibère  une  vie  empoisonnée  par  la  disgrftce;  mais  il  ap- 
partenait à  la  grande  époque,  à  Vâge  aor  de  la  littéra- 
ture latine,  comme  on  l'appelle  quelquefois  ;  il  en  ^ 
sinon  par  la  sûreté  d'un  goût  irn§prochable,  au  moins 
par  l'élégance  et  la  pureté  de  la  langue,  la  facilité  et 
l'agrément  du  stvle.  Son  tort  le  plus  grave,  aux  yenx  de 
la  critique,  est  d^avolr  eu  trop  d'esprit.  Au  point  de  vae 
de  la  morale,  il  est  bien  plus  coupable;  mads  tous  les 
élégiaqUesettous  les  poètes  latins,  sauf  Virgile  et  Lucain, 
mârltent  les  mêmes  reproches,  et  de  plus  graves  encore; 
c'était  la  faute  de  la  civilisation,  des  mœurs  et  du  temps. 
Oride,  ingénieux  et  léger  dans  la  poésie  erotique,  pea 
digne  dans  les  Tristes,  inégal,  mais  intéressant  dans  les 
Fastes,  qui  sont  encore  une  Imitation  de  Callimaque, 
mérite  vraiment  le  titre  d'écrivain  supMeur  dans  les 
Métamorphoses,  où  la  variété  Infinie  des  si^ets  lui  four- 
nissait tour  à  tour  des  descriptions  brillantes,  des  ana- 
lyses délicates,  des  peintures  gracieuses  et  même  tou- 
chantes :  son  poème  est  l'histoire  de  la  mythologie 
grecque  et  latine,  le  cycle  des  dieux  et  des  héros.  Coin- 

C remis  dans  une  obscure  Intrigue  de  palais,  Oride  avait 
rûlé  son  ouvrage  avant  de  quitter  Rome  ;  heureusement 
pour  le  poète  et  pour  les  lettres,  ses  amis  en  avaient 
gardé  copie.  De  sa  tragédie  de  Médée,  il  ne  reste  qn*un 
souvenir.  Jusqu'à  Phèdre  et  Lucain,  la  poésie  n'offre 
guère  que  des  noms  :  celui  de  Pollion,  loué  d'Horace 
pour  son  talent  éplaue;  celui  de  Varius,  dont  le  Thyesti 
partageait  l'admhration  du  public  avec  la  Médée  d'Ovide. 
Si  la  tragédie  fut  alors  le  travail  de  prédilection,  le  dé- 
lassement préféré  des  gens  d'esprit,  comme  on  peut  le 
conclure  de  l'épttre  d'Horace  sur  VArt  poétique,  elle  n'a 
pas  laissé  de  monuments.  —  Les  poèmes  de  Gratius  Fa- 
liscus  sur  la  Chasse^  de  Manilius  sur  V Astronomie,  mé- 
ritent peu  d'attention  après  Virgile,  Horace,  et  même 
Ovide;  le  oénie  poétique  des  Romaina  semble  fatigué  de 
sa  gloire  :  Il  se  repose  ou  se  tait. 

Prose,  Histoire,  —  L'esprit  politique  et  l'éloquence 
s'étaient  retirés  dans  l'histoire.  Là  se  troandt  le  reToge 
naturel  dea  citoyens  élevés  pour  la  carrière  oratoire,  à 

3ui  la  monarchie  avait  fait  des  loisirs,  en  leur  laissant 
'ailleurs  la  connaissance  des  affaires  pnbûoues,  an  moins 
dans  le  passé,  et  même  quelques  restes  de  liberté.  Tacite 
fait  dater  de  la  bataille  d'Actium  le  silence  des  hummes 
de  génie;  il  serait  plus  juste  de  le  reporter  au  règne 
de  Tibère;  Au^ste  avait  voulu  amortir  plus  encore 
qu'étouffer  le  vieil  esprit  républicain,  et  appelait  Tite- 
Uve  un  Pompéien.  Lui-même  avait  hiissé  des  Mémoires; 
son  lieutenant  et  son  ministre  avalent  écrit  l'his- 
toire de  leur  temps;  les  biographies,  les  compositions 
historiques  abondaient.  De  tous  ces  livres,  il  ne  reste,  à 
proprement  parler,  que  l'ouvrage  mutilé  mais  admirable 
de  Tite-Live.  Trop  orateur  et  trop  poète  pour  nos  goûts 
et  nos  idées  modernes,  il  donne  trop  sans  doute  à  lima- 
gination,  au  goût  de  l'éloquence,  à  la  passion  de  la  gloire 
nationale;  quand  il  trouve  un  gîiide  sûr  comme  Polybe, 
il  ne  lui  est  pas  toujours  fidèle  :  mais  il  a  tant  de  vérité 
dramatique  et  morale,  tant  de  chaleur  et  de  vie,  il  parle 
une  langue  si  belle,  que  nous  n'avona  paa  le  coura^  de 
lui  reprocher  ses  défauts.  Sommes-nous  donc  si  à  plaindre 
d'avoir  à  le  rapprocher  d'Hérodote,  comme  a  fait  Quin- 
tilien,  et  peutp-être  même  d'Homère  et  de  Vîreile?  «  On 
voudndt  croire,  dit  un  excellent  Juge,  que  Virgile  et  Tite- 
Live  se  sont  connus  et  aimés,  que,  dans  ce  palais  d'Au- 
guste qui  leur  était  si  hospitalier.  Ils  se  sont  entretenu! 
de  Rome,  de  sa  gloire  passée,  de  ses  grands  hommes,  et 

Sue,  sans  médire  d'AuguBte,iIs  se  sont  quelquefois  stten- 
ris  pour  Pompée  et  exaltés  pour  Caton.  »  (M.  D.  Nissrd, 
Etude  sur  Tite-Live.) 

Après  Tite-Uve,  il  faut  citer  Trogue  Pompée  pour 
l'estime  qu'en  faisaient  les  Romains,  car  nous  n'avons 
que  l'abr^  de  son  histoire,  fait  par  Justin  ;  il  y  racon- 
tait le  plus  grand  empire  avant  l'Empire  romain,  celui 
d'Alexandre,  Jusqu'à  la  conquête  de  la  Macédoine,  et  gar- 
dait, comme  tous  ses  prédécesseurs,  la  religion  de  la 
grandeur  romainoi 


LAT. 


ltS3 


LAT 


£loqu»o»»  Dédamaticn,  Grommatr».  —  Cest  on  fait 
nmarqaatble  que  VBmpire  ait  (irappé  de  mort  réloqnence 
btÎDft,  malgré  toutes  les  raisons  secondaires  de  snccès  et 
de  popu\anté  qui  sobsistaient  toii^ours.  Le  genre  oratoire 
était  en  honneur;  il  faisait  le  fond  de  Féducation  libé- 


frappé  âlmpuissance,  parce  que 
eear  ne  parlait  plus  an  peuple,  qu*ll  trouvait,  au  Sénat, 
les  dédatons^  prises  dans  le  conseil  da  prince,  et,  au  bar- 
reau, la  crainte  des  délateurs,  de  leur  nrutale  énergie  et 
de  leurs  armes  redoutables.  Réduite  à  Tombre  des  écoles, 
fintellieenoe  s*épuisait  dans  le  déplorable  jeu  des  causes 
romaneequee  et  imaginaire^,   combinait  des  extrava- 
gaacQB,  pour  avoir  le  plaisii  de  soutenir  le  pour  et  le 
contre»  et  faisait  grand  bruit .  les  modèles  qu*àle  imitait 
mal  oa  qu'elle  attaquait.  Le  père  de  Sénèque,  qui  avait 
pu  entendre  Cicéron,  et  qui  publia  ses  Sow>enirs  sous 
Tibère,  noua  a  laissé  un  recueil  curieux  de  ces  tristes 
compoêitiona,  où  Ton  ne  rencontre  que  pirates,  parri- 
ddeâ,  tyranniddes,  inventions  imposswles  ou  absurdes. 
—  Les  grammairiens  valaient  mieux,  sans  que  les  noms 
d'Hygin  ou  de  Verrius  Flaccus  soient  bien  intéressants, 
et  les  arts  produisaient  au  moins  un  Hvre  utile,  sinon 
éltomment  écrit,  celui  de  Vitruve  sur  VArchUtcture, 
&ècU  d»  Jïbèn.  PhUosophne.  —  Lliéritage  de  Télo- 
quenoe  devait  passer  de  rhistoire  à  la  philosophie.  Après 
Ks  dernières  et  sombres  années  d'Auguste,  le  défaut  ab- 
sola  de  liberté  sous  Tibère  arrête  et  réduit  au  silence 
quicompie  n*exalte  pas  les  idées  du  )our  par  dévouement 
ou  par  flatterie.  L*esprit  revient  alors  sur  lui-même,  il  a 
bsMÎn  de  savoir  les  moyens  de  se  conduire  sous  un  ré- 
gime de  délation  et  de  tyrannie  ;  on  étudie  le  devoir  et  les 
condliasions  du  deveh*  avec  les  ménagements  obligés. 
Peu  de  métaphysique,  beaucoup  de  morale,  une  gran- 
deur véritable  et  quelquefois  sublime  dans  Tapplication 
des  précités,  tels  sont  les  caractères  de  la  philosophie 
sous  TEmpire.  Elle  ne  compte  pas  beaucoup  d'écrivains  : 
Qttintilien  donne  peu  de  noms  après  Cicéron.  On  ren- 
contre parmi  les  philosophes  quelques  délateurs,  et  un 
grand  nombre  de  maîtres  greos,  à  demi  grammairiens, 
car  la  philosophie  se  rapproche  de  la  philologie.  Ces 
sisltres  habitent  souvent  les  grandes  maisons  :  on  en  voit 
an,  80U8  Galigula,  accompagner  Canus  Julius  à  la  mort, 
comme  une  sorte  de  confesseur.  La  foule  les  harcèle  et 
lei  tourne  en  ridicule,  et  le  pouvoir  ne  les  aime  pas;  les 
empereurs  les  persécutent  souvent ,  Jusou'au  Jour  où  Do- 
mitien  chasse  de  Rome  les  professeurs  de  la  sagesse,  sui- 
vant Texpreesion  de  Tadte.  Gcqpendant,  les  grands  noms 
et  les  grands  caractères  se  rattachent  tous  plus  ou  moins 
étroitement  à  la  philosophie.  —  Sénèque,  exemple  si  ce- 
lâne  des  fortunes  de  cour,  de  l'abus  de  l'esprit,  et  des 
inconséquences  de  caract^,  partage  avec  Cicéron  le 
premier  rang  parmi  les  philosophes  romains.  VApocolo^ 
cyatose,  espèce  de  Ménippée  dont  Claude  est  le  triste 
héros,  ne  fait  pas  honneur  à  la  dignité  du  précepteur  de 
Néron;  maia  les  traités  de  morale  Sur  la  Colère,  la  Clé' 
menée,  les  Bienfaits,  etc.,  suffiraient  à  lui  assurer  un 
Tiag  tr^-^onorable  dans  la  littérature  latine,  et  ses 
ÏÂ^res  à  LucUhu,  par  la  grandeur  des  idées  et  la  pureté 
toute  nouTelle  de  la  monde,  ont  mérité  au  philosophe 
t'boanear  d'être  considéré  comme  un  précurseur  du 
diristianisme.  N'oid)lions  pas  les  Questions  naturelles, 
ouvrage  de  philosophie  plus  que  de  science,  où  l'on  trouve 
peu  de  physique  générale  et  beaucoup  de  détails  et 
(Tinecdotea.  Homme  d'esprit  et  de  cour,  Sénèque  était 
parfaitement  placé  pour  l'observation  et  l'analyse;  c'est 
DU  de  ses  grands  mérites.  Sa  doctrine  est  élevée;  mais  la 
subtilité ,  rexagération,  les  habitudes  de  rhéteur  en  atté- 
ooent  reffet.  L'application  des  idées  morales  à  la  vie  pu- 
blique loi  inspire  des  pages  touchantes,  sur  les  esclaves, 
par  exemple.  Son  style,  coupé,  spirituel ,  semé  de  traits 
piquants  et  d'antithèses  que  l'auteur  multiplie  à  plaisir, 
a  été  sévèrement  Jugé  par  Rollin  et  bien  d'autres  cri- 
tiques ;  et,  en  effet,  il  a  pu  contribuer  à  la  corruption  du 
Roût  s  mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  cette  altération 
Q*e8t  pas  l'ouvrage  de  Sénèque;  elle  avait  commencé 
avant  hii;  et,  pour  être  populaire,  il  se  trouvait  forcé 
d'être  de  son  temps.  —  U  est  moins  excusable  d'avoir 
mivi  la  mode  dans  les  tragédies  qui  portent  son  nom , 
et  que  l'on  est  très-fondé  à  lui  attribuer  (la  dixième, 
Oelavie,  est  Fceavre  d'un  imitateur  inconnu].  Ces  tragé- 
dies n'ont  que  la  forme  du  drame  ;  ce  sont  des  déclama- 
tkms  dialognées,  pleines  d'antithèses  et  de  descriptions 
èmdites  et  prétenâeuaes,  où  des  Stoïciens,  suivant  la  re- 
marque de  M.  Nlsard,  discutent  par  aphorismes  avec 


toute  l'enfiore  et  Taffectation  des  pins  mauvais  jours- de 
la  décadence.  N'oublions  pas  cependant  que  Racine  a  fait 
des  emprunts  à  VHippdyte,  et  qu'il  n'en  a  rien  dit. 

Sciences.  —  Le  nom  de  Sénèque  appurtient  à  la  science 
comme  à  la  poésie,  par  des  œuvres  secondaires.  On  a  vu; 
depuis  Cicéron  Jusqu'à  Vitruve,  ce  que  pouvaient  être  les 
saences  spéculatives  et  appliquées  ches  un  peuple  dédai- 
gneux de  la  science  proprement  dite,  qui  confondait  l'as- 
tronoooie  et  l'astrolosie,  et  avait  pris,  dans  l'origine,  les 
médecins  pour  des  bourreaux.  La  guerre  lui  convenait 
mieux,  et  plusieurs  hommes  du  métier  en  avaient  écrit; 
le  plus  important  des  traités  de  ce  genre  est  celui  des 
StrcUaghnes  de  Frontin,  qui  appartient  à  l'époque  de 
Tacite  et  de  Trajan.  La  médecine,  pratiquée  par  Caton 
pour  les  bestiaux  plus  que  pour  les  hommes,  et  long- 
temps abandonnée  aux  Grecs ,  offrit  enfin  un  nom  latin 
considérable,  celui  de  Celse  le  Gaulois,  philosophe  et  po« 
lygraphe  du  temps  de  Qaude,  qui  écrivait  avec  pureté  et 
élégance.  Nous  avons  parlé  déjà  de  Columelle  et  de  sa 
Vie  rustique.  Mais  le  grand  nom  de  la  science  chez  les 
Romains  est  celui  de  Pline  l'Ancien,  cet  homme  d'une 
érudition  et  d'une  activité  prodigieuses,  qui  avait  écrit 
sur  tous  les  sujets,  y  compris  le  maniement  de  la  jave» 
Ime,  avait  rempli  de  grandes  fonctions,  trouvé  le  temps 
de  iaire,  outre  ses  ouvrages,  cent  soixante  volumes  de 
notes  et  d'extraits,  et  mourut,  comme  un  soldat  au 
champ  de  bataille,  en  étudiant  la  grande  éruption  du 
Vésuve.  11  reste,  de  cette  vie  si  occupée,  les  trente-sept 
livres  de  VHistoire  ncUurelle.  «  Il  avait,  dit  Buffon, cette 
facilité  de  penser  en  grand  qui  multiplie  la  science...  Son 
ouvrage  est,  si  l'on  veut,  une  compilation  de  tout  ce  qui 
a  été  fait  d'excellent  et  d'utile  à  savoir;  mais  cette  copie 
a  de  si  grands  traits,  cette  compilation  contient  des 
choses  rassemblées  d'une  manière  si  neuve,  qu'elle  est 
préférable  à  la  plupart  des  ouvrages  originaux  qui  traitent 
des  mêmes  matières.  »  Il  faut  cependant  réduire  ce  bel 
élo^  et  remarquer  que  Pline  est  un  homme  politique  et 
actif,  qu'il  expose  les  faits  sur  parole,  et  qu'il  manque 
souvent  de  cntique  et  même  de  Jugnnent.  Cuvier,  de 
môme,  a  trop  loué  l'écrivain  dans  Pline;  il  aurait  dû  faire 
la  part  du  mauvais  goût  et  de  l'obscurité  prétentieuse  où 
il  se  laisse  aller  fréquemment. 

Poésie,  —  Tibère  et  Néron  faisaient  des  vers,  mais  ce 
n'étaient  pas  eux  qui  pouvaient  arrêter  la  décadence 
inévitable  de  la  poésie  latine.  Le  règne  du  premier 
compta  plus  de  poètes  que  de  prosateurs;  toutefois,  ai 
l'épopée  était  en  honneur,  le  gôire  lyrique  et  le  genre 
didactique  se  mouraient  lentement.  Le  premier  vrai  poète 
de  ce  temps  écrit  dans  un  genre  nouveau  :  c'est  le  fabu- 
liste Phèdre,  affranchi  d'Auguste,  persécuté  par  Séjan , 
et  mort  probEiblement  sous  Qaude.  Dédaigné  pendant  sa 
vie,  dépossédé  de  la  propriété  de  ses  fables  jusqu'à  nos 
jours,  il  n'en  est  pas  moins,  dans  sa  simplicité  et  sa  con- 
cision élégante,  l'un  des  meilleurs  écrivains  de  son 
siècle,  surtout  dans  les  fables  toutes  romaines  où  l'allu- 
sion a  remplacé  l'imitation.  —  Le  règne  de  Néron  pro- 
duisit un  homme  de  grand  talent,  capable  sans  doute 
d'aller  plus  loin  que  le  point  où  la  mort  l'arrêta,  Lucain, 
qui  rendit  à  l'épopée  dégénérée  une  vie  au  moins  passa- 
gère; malheureusement,  les  conditions  du  genre  et  du 
sujet  n'étaient  pas  favorables,  et  la  mode  des  lectures 
publiques  avait  mis  en  faveur  universelle  l'enflure,  les 
antithèses,  la  recherche  du  trait,  tous  les  moyens  enfin 
d'enlever  les  applaudissements  dans  une  séance  à  grand 
effet  et  à  grand  étalage.  Lucain,  stoïcien  de  cour  et  dé- 
clamateur,  ami  de  Néron  Jusqu'aux  persécutions  littéraires 
du  prince,  n'apportait  guère  de  conviction  et  de  foi  à  ce 
terrible  sujet  des  guerres  civiles,  oui  d'ailleurs  convenait 
mal  à  l'épopée  {V.  ce  mot).  Membre  de  la  brillante  fa- 
mille des  Annéus  et  neveu  de  Sénèque,  Espagnol  par  le 
goût  aussi  bien  que  par  la  naissance,  plus  orateur  que 
poète  dans  le  génie  et  même  dans  le  style,  il  exagère  et 
fausse  l'histoire,  dont  il  ne  peut  pas  s'écarter,  fait  de 
Caton  un  caractère  grandiose,  mais  forcé,  de  César  une 
sorte  de  capitan  dont  la  grandeur  éclate  encore,  en  dépit 
du  poète;  u  ne  connaît  ni  vertu  ni  grandeur  en  dehors 
de  l'exagération  stoïcienne  :  ses  vers,  vigoureux  et  quel- 

Suefois  sublimes,  fatiguent  par  la  monotonie  des  procé- 
és,  et  Fénelon  pensait  peut-être  à  lui  auand  il  a  dit  :  «  Un 
auteur  qui  a  trop  d'esprit  lasse  et  épuise  le  mien...  Il  me 
tient  trop  tendu;  la  lecture  de  ses  vers  me  devient  une 
étude.  »  Et  cependant  Lucain,  mort  à  vingt-six  ans,  avec 
l'orgueil  du  stoïcien  et  du  poète,  qui  ne  l'avait  pas  préservé 
d'une  lâcheté  odieuse  et  inutile,  peut  Justifier  le  goût  de 
l'auteur  des  Essais,  «  qui  aime  Lucain  et  le  pratique  vo» 
lontierB,  non  pas  tant  pour  son  style  qœ  ponr  la  valeur 

73 


LAT 


1154 


LAI 


46  «i  optaioiu  «t  iygonMQtt  ». -»  A|irèi  loi,  il  ftuik  dltf 
Piétroiie  «t  80B  méaiocre  essai  de  Guem  cwUê;  el«  pour 
ne  psft  BBTenir  à  ce  penonmige  peu  hononble,  qu'il  soit 
•a  non  VarbUrê  du  goût  dont  parle  Tacite,  il  Crât  men- 
tlomier  immédfaitement  ie  Satyricon^  métange  bizarre  et 
matilé  de  vers  et  de  prose,  espèce  de  romaa  où  Toc 
ttwiftt  des  pages  piquaatsa»  et  surtout  des  récits  im- 
mendea,  avec  quelques  obsemtioiis  littéraires,  empreiiites 
du  manvais  goût  même  que  eondamue  Tanteur.  -*  Ce  sont 
des  hommes  d'un  antre  caractère,  et  d'un  talent  plus  sé- 
rieux que  Staoe  et  Silius  Italicus,  les  derniers  poêlas 
épiques  de  Rome,  avec  Valérius  Flaccus.  Celui-ci,  con- 
temporain de  Pline  rAncien,  n*a  fait  qu'amplifier,  avec 
plus  de  prétention  que  d'esprit,  les  ArgonauUqtêei 
d'Apollonius  de  Rhodes.  Staee  et  Silius  étaient  contem- 
porains tous  deux  des  Flaviens  ;  le  premier,  très-popu- 
laire dans  les  lectures  publiques,  recherché,  mais  IvUlant 
et  quelquefois  même  touchant  dans  la  ThAwtdêf  curieux 
et  spirituel  dans  les  SUv^s^od  il  met  élégamment  en  vers 
les  événements  du  Jour,  adorateur  de  Virgile  et  élève 
d'Ovide,  selon  la  remaroue  Ingénieuse  et  solide  de  M.  Ni- 
■ard;  le  second,  bien  inférieur,  érudit  sérieux  qui  versifie 
rhistoire  de  la  Guerre  Punique,  déclamateur  qui  prétend 
Imiter  Virgile,  et  ne  laisse  pas  d'avoir  quelmies  vers 
heureux. —  Restent,  pour  terminer  l'histoire  de  la  poésie 
latine,  la  satire  -et  l'épigramme  ;  car  nous  ne  tenons  pas 
pour  œuvre  poétique  la  Métrique  de  Terentianus  Maurus, 

Zui  n'est  que  de  la  grammaire  on  de  la  prosodie  vernflée. 
'esprit  satirique  n'avait  pas  sommeillé  sous  l'Empire;  la 
dépravation  et  la  servitude  n'avaient  fait  oue  l'animer, 
malgré  les  ligueurs  du  pouvoir.  Il  éclatait  dans  les  pam- 
phlets, les  testaments,  les  libelles  posthumes,  comme  les 
adieux  de  Pétrone  à  Néron  <  il  perçait  même  dans  les 
déclamations  et  dans  la  philosophie  ;  on  le  retrouve  dans 
Sénèque  ettlans  Pline.  Laissons  de  cMé  les  imprécatiotis 
de  Valérius  Gaton,  ouvrage  assez  insignifiant  et  de  ca- 
ractère indécis,  et  parlons  tout  de  suite  de  l'^ève  d'Ho- 
nu».  Perse  le  stoiden,  homme  indépendant  et  honnête, 
écrivain  pénible  et  obscur,  mai  préparé  peut-être  à  la 
satire  par  une  vie  trop  retirée,  mais  poète  original,  éner- 
gique, remarquable  surtout  pour  les  idées,  car  il  a  con- 

j  tribué  pour  sa  part  à  l'altération  de  la  langue  et  du  stvie. 

i  — Plaçona  à  côté  de  lui  Sulpicia,pour  ses  vers  estimables 
sur  l'expulsion  des  philosopnes  par  Domitien,  sans  oublier 
qu'elle  avait  composé  des  vers  amoureux  ^.^r  milliers,  et 
arrivons  à  Juvénal,  qui  est  aussi  supérieur  à  Perse  par 

.  le  génie  qu'il  en  est  loin  par  l'honnêteté.  On  peut  adopter 
le  Jugement  que  Boileau  a  porté  sur  sa  «  mordante  hy- 
perbole et  ses  beautés  sublimes.  »  «  Son  livre,  dit  l'élo- 
quent historien  des  Poëtee  latins  de  la  décadence,  est  nn 
admirable  complément  de  celui  de  Tacite;  c'est  la  chro- 
nioue  privée  d'une  époque  dont  Tacite  a  écrit  l'histoire 
pubiiaue...  Il  semble  que  la  langue  latine  ait  fait  un  dttn- 
nier  effort  pour  se  prêter  au  rude  génie  de  son  dernier 
poète.  »  Est-Il  toujours  de  bonne  foi  dans  ses  invectives 
contre  le  vice?  Des  Juges  sérieux  en  ont  douté  pour  de 
bonnes  raisons  ;  mais  on  a  eu  raison  de  leur  répondre 
«  qu'il  n'aurait  pas  exprimé  ces  affreuses  vérités  avec  tant 
d'éloqnenoe,  s'il  ne  les  eût  bien  senties  ».  (Pierron,  Hist, 
de  la  lÀtt,  rom.  )  —  L'épigramme,  si  populaire  à  Rome, 
mais  cultivée  Jusqu'alors  par  des  hommes  qui  écrivaient 
en  d'autres  genres ,  eut  son  poète  particulier  dans  Mar- 
tial, Espagnol  comme  Sénè({ue  et  Lucain;  car,  depuis 
le  siècle  d'Auguste,  les  écrivams  latins  se  recrutaient  vo- 
lontiers hors  de  l'Italie.  Martial  diffère  de  Catulle,  en  ce 
qu'il  vise  an  trait  final,  devenu  depuis  une  règle  du 
genre.  Facile,  spirituel  et  fin,  libre  souvent  Jusqu'à  l'ez- 
trême  licence,  il  est  encore  de  la  bonne  école  pour  le 
style  et  le  langage,  mais  il  en  est  le  dernier  poète,  et 
meurt  à  la  fin  du  i**"  siècle  de  l'ère  chrétienne. 

Éloquence  avant  lee  Antonins,  —  On  a,  dans  cette 
histoire  de  la  poésie,  rencontré  à  chaque  pas  les  rhéteurs, 
les  déclamations,  les  lectures  publiques  ;  on  en  conclura 
facilement  ce  que  pouvait  être  l'éloquence  avec  de  tels 
maîtres  et  de  tels  objets.  La  rhétorique  cependant  revint 
aux  grandes  leçons  de  Cicéron  grâce  à  Quintilien,  Espagnol 
comme  tant  d'autres,  et  naturalisé  Romain  par  le  goût  et 
le  style.  Son  Institution  oratoire  prend  l'enfant  au  ber- 
ceau, et  ne  l'abandonne  qu'après  en  avoir  fait  un  orateur 
'conforme  à  l'idéal  ancien.  Mais  QtdnUlien, consciencieux 
et  (h>id,  n'était  qu'un  bon  maître  et  un  bon  écrivain. 
Quand  il  aurait  eu  le  génie  de  Cicéron,  il  eût  été  impuis- 
sant à  remonter  le  cours  de  la  décadence.  Il  n'avait, 
d'ailleurs,  pour  combattre  les  défauts  séduisants  de  Sé- 
nèque, qu'une  méthode  solide  et  un  style  pur,  correct  et 
abondant  qui  n'était  pas  tonloura  exempt  d'enoui  — 


Un  mommaol  tiè»4mportant  de  l'étoquenoe  du  lompi 
est  le  DitUogm  du  Oratmirs,  faussement  attribué  à  QniD*> 
tilien  et  à  Pline  le  Jeune,  et  probablement  composé  par 
Tsdte  daoa  sa  Jeunesse,  comme  Tladiquent  les  mana* 
serits.  A  quel  autre  écrivain  attribuer  ees  magnifigoei 
éloges  de  l'éloquence  et  de  la  poésie,  ces  diseussions  £ril* 
lantes  sur  lesAndens  et  sur  lesModêmea,  toutes  ces  beU« 
idées  rendues  avec  tant  de  raison  et  de  chaleur,  dans  on 
style  si  latin  et  si  beau?  —  Qiiintilien  eut  pour  élève 
Pline  ie  Jeune,  à  qui  aon  fkmeux  Pat^égyrique  de  Trajan 
fit  une  grande- réputation  oratoire,  bien  aflkiblie  avjour- 
d'hui.  Pourquoi  PUae,  en  effet,  râduisait-ll  les  grandet 
qualités  de  Pempereur  à  des  riena  ingénieux,  à  des  traits 
heureux  qui  n'étaient  guère  que  des  madrigaux  pleins  de 
grâce  et  d'esprit t  Ces  Jolies  qualité  étaient  plus  à  lear 
place  dans  une  Correspondance  :  aussi  les  Lettres  é» 
Pline  sont-elles  le  titre  le  plus  intéressant  et  le  plus  pré> 
deux  de  leur  auteur,  qui  s'y  montre  honnête  homme, 
honorablement  occupé,  trop  vaniteux  sans  doute,  mais 
toujours  estimaiile  et  toujours  spirituel.  Il  n'y  a  plus  là 
d'étoquence  ;  mais  nons  avons  dit  adieu  depuis  longtemps 
an  grand  style  oratoire,  dont  le  Dialogue  des  Orateurs 
est  le  dernier  écho,  et  ce  n'est  paa  dana  le  misérsble  re- 
cueil des  Panégyriqum  imités  de  Pline  qu'il  fkudtsit 
aller  le  chercher 

Histoire  aioant  lee  Antomnsm  —  Ce  iQie  oe  eonsemtt 
encore  dans  l'histoire.  Vellélua  Paterculna,  offlder  de 
Tibère,  et  trop  favorable  à  son  ancien  général,  dont  il  ne 
rit  paa  du  reste  les  années  les  plus  odieuses,  avait  ré- 
sumé  rhistoire  de  son  pays  avec  exactitude,  netteté  et 
intérêt;  il  avait  du  trait,  de  l'éloquence,  et  le  style  de Is 
bonne  époque.  Valère  BAaxime,  plus  souvent  cité  que 
Velléius,  mais  bien  inférieur  pour  le  talent,  et  arili  de- 
vant Tibère  sans  avoir  les  mêmes  excuses ,  n'était  ao 
fond  qu'un  rhéteur,  et  faisait,  sous  le  nom  d*histoire,  un 
recueil  d*anecdotes  et  de  morale  en  action,  où  il  louait  la 
cruauté  et  insultait  les  vaincus;  il  représente  le  plus 
mauvais  esprit  du  rè^e  de  Tibère.  Après  ce  redoutable 
prince,  l'histoire,  moins  dangereuse,  fut  bien  plus  culti- 
vée; mais  elle  ne  nous  présente  ^ère  que  des  nomsoD 
des  incertitudes.  Où  placer  Qunte-Curce  et  FlonuT 
Quinte-Curce  semble  un  contemporain  de  Quintilien.  Il 
a,  dans  son  histoire  d'Alexandre,  la  suite,  la  facilité,  la 
poétique  élégance  de  cette  époque;  il  décrit  et  fait  def 
romans  à  la  manière  des  déclamateurs;  il  tient  peu  di* 
compte  de  la  critique,  de  la  géographie,  de  la  chronologie, 
et  sacrifie  à  peu  près  tout  a  la  rhétorique.  11  revient  à 
l'école  de  Tite-Live,  mais  par  les  petites  choses,  et  n'a 
paa  le  génie  du  maître.  Florus  est  encore  an  déclamateur, 
qui  résume  l'histoire  du  peuple  romain,  de  son  enfonce 
à  sa  virilité,  a?ec  une  rivadté  brillante  et  poétique,  qui 
se  ressent  de  l'Espagne  (peut-être  était*il  de  la  fomille 
des  Sénèques).  Suâone,  écrivain  bien  plaa  Ikible,  mais 
d'une  grande  autorité  historique,  «  écrit,  dit  S^  Jérôme, 
la  rie  des  douze  Césars  avec  une  liberté  égale  à  celle  de 
leur  ^e.  »  C'est  Tacite,  son  contemporain,  qui  est  un  des 
maîtres  du  genre  par  la  profondeur  de  son  génie  et  l'ad- 
mirable énergie  de  son  style.  Salluste  avait  écrit  l'his- 
toire en  politique,  Tite-Live  en  Romain  passionné  pour 
la  gloire  nationale,  Quinte-Curce  en  romancier;  Tsdte 
récàrit  en  moraliste.  Passionné  peutp-être,  quoiqu'il  s'en 
défende,  et  parfois  exagéré,  comme  l'ont  remarqué  de 
bons  Juges,  il  n'a  certainement  calomnié  personne;  n 
aime  à  croire  au  bien,  et  il  porte  dans  le  stjrle  une  di- 
gnité perpétuelle,  une  '^blesse  exempte  d'enflure;  il  est 
positif  et  grand,  plein  de  rai^n  et  de  poésie,  profond  sans 
être  rêveur.  On  peut  reprocher  à  aa  diction  si  forte  et  si 
colorée  l'abus  des  tours  poétiques,  le  goût  du  trait,  et 
une  concision  quelquefois  obscure;  maia  il  est,  eo 
somme,  bien  difficile  d'être  sévère  avec  un  si  grand  et  si 
honnête  homme,  qui  a  mérité  d'êtie  appe)A  par  Racine 
«  le  premier  peintre  du  monde.  » 

Deuxième  époque  :  littérature  après  les  Antonins.  — 
Nous  en  avons  fini  malheureusement  avec  les  grands  écri- 
vains et  les  épo^es  intéressantes.  On  ne  trouve,  dans  le 
second  et  le  troisième  siècle  de  l'ère  chrétienne,  qu'une 
stérile  nomenclature,  et  les  vertus  des  Antonins  ne  dé- 
fendirent pas  la  littérature  latine  d'une  défaillance  dé- 
sormais sans  retour.  Fronton,  précepteur  de  Marc-Aurële, 
n'est  qu'un  rhéteur  puéril  et  ennuyeux;  Marc-Aurèle 
écrit  ses  Mémoires  ou  ses  Psti^st  en  grec;  Aulu-Gelle 
est  un  grammairien  érudit;  il  a  laissé  dans  ses  PMt 
attiques,  qui  seraient  mieux  appelées  Veillées,  une  com- 
pilation précieuse;  Apulée  est  un  Africain,  nul  en  philo- 
sophie, mais  très-amusant,  malgré  l'étrangeté  de  sa 
langue,  dans  son  roman  de  l'Ane  aor,  imité  de  Uiden- 


lAT 


m% 


hkt 


*{!i  è^  «uivant^  les  po&nes  didactique»  de  iTémésien 
et  les  Eglogtiss  de  Calpurnius,  contemporains  Tan  et 
TS?  ^*  ^Tittes  emperenn  Garus,  Carin  et  Namériens 
Boffineot  <iu*un  mincô  intérêt  t  à  plus  forte  raison  le^ 
gnmmsiiienft  Festus,  Nonius,  Marcellus^Censorinus.  Les 
éoÎTBins  marne»  de  VEùtoirê  Atiffutte,  contemporains  de 
Diodétieii,  ne  Jettent  pas  pins  de  lustre  sur  le  r/*  sièclOi 
malgré  les  tristes  emprunts  que  Ghatesubriand  leur  à 
frits  dans  ses  Etudes  hiêUtri^ue».  Le  titre  d'historien  ne 
âedçaère  à  AméHiis  Victor  ni  à  Entrope,  simples,  clairs 
et  fi£bles;  il  oonviendrut  mieux  à  Ammien  Maroellin, 
qd  écrivit  rhistoire  de  l'Empire,  depuis  les  FlaWens  Jus- 

£*au  règne  de  Valeos,  airec  non  sens  et  vigueur,  ouoique 
os  un  style  &  demi  bsitere.  Svmmaque,  apolofpste  in- 
téressant des  beaux  souvenirs  de  Rome  païenne  et  de 
rsntel  de  la  Victoire,  vivsit  sous  le  ré^e  de  Tbéodose,  et 
composait  avec  esprit  des  Lettres  agréables  et  des  DiS" 
covtn  que  ses  contemporains  comparaient  à  ceux  de  Gi- 
céron.  Son  ami  Hacrobe  compilait,  dans  ses  SatumuUes, 
beaucoup  de  documents  précieux,  comme  avait  fait  Aulu- 
Celle,  les  âoyait  dans  des  commentsires  Illisibles,  mais 
conservait,  sans  le  savoir,  pour  la  postérité,  un  beau  pro- 
logue de  Labérius  et  le  Songe  a»  Sdpion.  Triste  ma- 
tière pour  rhistoire  de Is  prose  latine!  Quant  à  la  poésie, 
Anaone  nous  apporte  les  descriptions  maniérées  et  obs- 
cures de  son  pofime  de  la  MaseUe;  Rutilius,  la  grftce 
prolixe  de  son  Itinéraire,  où  l'on  trouve  au  moins  un  peu 
d*ftme  et  de  sentiment.  Claudien  seul,  dans  les  satires 
eomtre  Ritfin  et  Eutrope,  dans  V Éloge  de  StUicon,  surtout 
dans  VEnlèvement  de  Proserpine,  arrive,  par  une  versi- 
fication habile  et  sonore,  à  cet  éclat  apparent,  à  cette 
pompe  facile  et  vulgaire  qui  abuse  le  public  des  époques 
de  décadence.  Jusqu'à  faire  évoquer,  en  l'honneur  de 
l'écrivain,  rftme  de  Virale  et  la  muse  d'Homère.  La 
poésie  de  Claudien  s'est  abîmée  dans  la  çrande  catar 
strophe  de  l'Empire  romain;  mais  elle  n'avait  pas  besoin 
de  l'invasion  des  Barbares  pour  être  plongée  daôis  l'oubli. 
— Et  cependant  c'est  la  dernière  lueur  de  la  vraie  langue 
latine;  car  Sidoine  Apollinaire,  Fortunat  et  Grégoire  de 
Tours,  qui  appartiennent  à  l'histoire  de  l'invasion  ger- 
maniqpae,  ne  peuvent  plus  compter  même  parmi  les  der- 
niers dâiris  des  classiques;  ils  s'éteignent  avec  la  société 
romaine  dans  la  barbarie. — Qaant  aux  Pères  de  l'Église, 
ce  sont  des  écrivains  d'un  ordre  et  d'un  caractère  tout 
nooveeax,  qui  n'appartiennent  plus  à  la  littérature  clas- 
sique, nuds  à  la  littérature  sacrée.  Le  vieux  monde  latin 
a  trouvé,  à  la  mort  de  Glaudien,  le  dernier  terme  de  sa 
décrépttade,  après  avoir  épuisé  tout  ce  que  pouvaient  en- 
fanter,  soit  à  l'école  des  Grecs,  soit  par  eux-mêmes,  un 
9écde  poissant  et  une  grande  cinlisatlon.  V,  au  SuppUm. 

F.  J.-N.  Fonck  ou  Funccius,  De  Origine  Imguœ  lor- 
tmœ,  Giessen  et  Francfort,  1720,  in-4<>;  De  pueritta,  de 
adoinoanUa,  de  wrili  œtatê,  de  imminenti  senectute, 
da  végéta  seneetute,  de  inerti  ae  decrepita  senectute, 
Uarbourg,  1720-1744,  ln-4»,  et  Lemgo,  1750;  Fabricius, 
B&d.  ItU,,  Hamburg,  1721,  édit.  Emesti,  Leipzig,  1773; 
G.  E.  Millier,  /ntroîeitictiofi  historique  et  critique  à  la 
œnmaissaince  des  écrivains  latins,  Dresde,  1747-51  (en 
allem.);  T.- G.  Harles,  Brevior  notitia  Litt,  Rom.^  avec 
les  SupplémenU  de  Klugling,  Leipzig,  1790-1817,  3  vol. 
in-^;  F.  A.  Wolf,  Histoire  de  la  Tittérattire  romaine, 
Halle,  1787  (en  allem.);  Cours  d^histoire  de  la  littéra- 
ture romaine,  publié  par  Gûrtier,  Leipzig,  1832  (en  al- 
lem.} ;  J.-T.  Bergmann,  Comment,  de  Litter.  conditione 
apud  Bomanos  inde  a  bello  punico  primo  usque  ad  VeS" 
pasianum,  Leyde,  1818;  F.  Schœll,  Histoire  de  la  litté- 
ratture  romaine,  Paris,  1815,  4  vol.  in-8<*;  Dunlop,  His- 
toire de  la  littérature  romaine  au  siècle  d'Augtiste^ 
Londres,  1823-1828  (en  anglais);  Gavriani,  Délie  scienie, 
lettsrs  ed  arti  dei  Romani  dalla  fondazione  di  Roma  /Ino 
odAuffUsto,  Mantoae,  1822,  2  vol.  in-8<*;  Charpentier, 
Études  morales  et  historiques  sur  la  littérature  romaine 
depuis  son  origine  jusqu*à  nos  jours,  Paris,  1829,  in-8®  ; 
Bemhardy,  Esquisse  de  la  littércUure  romaine,  Halle,1830 
(en  allem.);  Bœhr,  Histoire  de  la  littérature  romaine, 
(en  allem.),  3«  édit.,  Garlsruhe,  184i-45, 2  vol.  in-8o  :  un 
abrégé  ea  a  été  fait  en  français  et  publié  à  Louvain  par 
Roules;  Krause,  Histoire  delà  littérature  romaine,  Ber- 
lin, 1835  (en  allem.)  ;  D.  Nisard,  Études  de  mœurs  et  de 
critique  sur  les  poètes  latins  de  la  décadence,  Paris,  1834, 
2  vol.  in-8«;  2«  édition,  Paris,  1849,  2  vol.  in-8o; 
A.  Pierron,  Histoire  de  la  littérature  romaine,  Paris, 
1852,  in-12.  A.  D. 

LATINES  (Fériés).  V,  F^ribs,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

uxam  (VoUai).  K  Voiles. 


LATINISIfE,  expression  ou  tour  de  phrase  particuliei 
à  la  hingue  latine;  —  locution  imitée  du  latin,  qu'elle 
soit  ou  non  conforme  à  la  construction  grammaticale  et 
logique.  Il-  y  a  un  laUnisme  dans  le  ven  ci-dessûus  ds 
La  Fontaine  (I,  22,  I^  Chêne  et  le  Roseau)  : 

OUqI  de  qui  la  tSfte  au  dal  était  voisine. 

LATITUDE.  )  F.  ces  mots  dans  notre  Diction- 

LATIUH  (Droit  de).  [    naire  de  Biographie  et  d'His- 

LATOMIES.  )    toire. 

LATRAN  (Palais  et  Basilique  de).  7.  Jean-de-Latran 
(Sahit*). 

LATRIE.  V.  CoLTE. 

LATRUNCULI.  V,  ce  mot  dans  notre  DictUmnavre  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

LATVÉGE.  r.  Letton  (Idiome). 

LAODATIF  (Genre).  V.  DéMONSTRATrr. 

LAUDES.  V.  ce  mot' dans  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d'Histoire. 

LAUDl  SPIRITUAL! ,  nom  qu*on  donne  en  Italie  aux 
cantiques  religieux.  Us  (tirent  surtout  à  la  mode  au  xv* 
et  au  xvi«  siècle.  Ange  Politien,  le  Bembo ,  Laurent  de 
Médicis ,  le  Pelci ,  Flliciya,  etc.,  en  firent  les  paroles  :  1^ 
chant  fut  d*abord  pour  une  seule  voix,  puis  à  3,  4  et  5 
parties. 

LAURE  (do  grec  laura  ou  labra,  chemin  creux,  ruelle), 
réunion  de  cellules  ou  petites  demeures  habitées  par  des 
moines,  qui  vivent  indépendamment  les  uns  des  autres, 
quoique  soumis  à  la  juridiction  d*un  abbé.  Les  laures 
ont  précédé  les  couvents  :  on  pense  que  la  première  fut 
établie  près  de  Jérusalem  par  S^  Euthyme,  au  v*  siècle. 

LAURÉAT  (Poète).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire. 

LAURET,  monnaie  d'argent  firappée  en  Angleterre 
sous  Jaccpies  I*',  et  ainsi  nommée  du  laurier  dont  la  tète 
de  ce  prince  y  était  couronnée. 

LAURIER ,  arbre  consacré  à  Apollon ,  soit  parce  que 
Daphné,  qu*il  avait  aimée,  fut  changée  en  laurier,  soit 
parce  que  les  feuilles  de  cet  arbre  servaient  à  tirer  des 
présaçes.  Le  trépied  d* Apollon  était  primitivement  fait 
de  bois  de  laurier,  ou  c*était  près  d'un  laurier  tenant  au 
sol  par  trois  racines  qu'on  rendait  les  oracles.  La  Pythie, 
les  devins  de  toute  sorte,  ceux  qui  consultaient  les  dieux 
sur  revenir  ou  qui  faisaient  des  expiations,  portaient  du 
laurier.  On  en  brûlait  dans  les  temps  où  Tencens  n'était 
pas  encore  connu.  On  se  servait  du  laurier  dans  les  en- 
chantements, et  de  ses  feuilles  on  composait  des  guir- 
landes pour  orner  la  tète  des  victimes.  Non-seulement 
Apollon,  mais  Esculape,  Vulcain,  Hercule,  Vesta,  Janus , 
les  dieux  Pénates  furent  représentés  couronnés  fie  lau- 
rier. Lorsque  le  feu  des  Vestales  était  éteint,  on  le 
rallumait  en  frottant  vivement  deux  morceaux  de  bois 
de  laurier  l'un  contre  Tautre.  Dans  presque  toutes  les 
solennités  publiques,  les  Romains  décoraient  leurs  portes 
de  lauriers.  On  mettait  du  laurier  la  nuit  sous  l'oreiller, 
pour  avoir  des  rêves  heureux.  Souvent  les  soldats  en 
prenaient  pour  marcher  au  combat,  en  paraient  leurs 
armes  dans  les  cérémonies  du  triomphe,  et  il  devint  un 
svmbole  de  victoire  :  de  là  l'expression  de  litterœ  laureatm 
(lettres  laurées)  pour  désigner  des  lettres  qui  annon- 
çaient de  bonnes  nouvelles.  Enfin  les  poètes  se  couron- 
naient souvent  de  laurier  pour  réciter  leurs  vers,  et  le 
laurier  était  aussi  le  prix  qu'on  leur  donnait,  ainsi  qu'aux 
autres  vainqueurs  dans  les  Jeux  publics.  B. 

LAUSANNE  (Cathédrale  de).  Cette  é^ise,  une  des 
plus  belles  de  la  Suisse,  présente  un  mélange  de  diverses 
architectures.  Fondée  vers  l'an  1000,  elle  ne  fut  sérieu- 
sement entreprise  qu'au  xm«  siècle,  et  le  pape  Grégoire  X 
en  fit  la  dédicace  en  1275.  Plus  tard,  on  la  reconstruisit 
en  partie,  et  elle  fut  encore  réparée  en  1506.  Elle  a  la 
forme  d'une  croix  latine  :  sa  longueur  est  de  93  met.  Le 
grand  portail,  construit  dans  les  premières  années  du 
XVI*  siècle,  est  flanqué  de  deux  tours  :  celle  du  Midi  , 
seule  achevée,  contient  dans  sa  partie  inférieure  les  ar- 
chives du  canton  de  Vaud,  et  dans  sa  partie  supérieure 
le  befiîrol  ;  la  terrasse  qui  recouvre  le  beffroi  est  à  47 
met.  au-dessus  du  sol  ;  une  flèche  à  huit  pans  s'en  élève 
à  une  hauteur  de  13  met.  Le  chœur  est  surmonté  d'une 
lanterne,  d'abord  rectangulaire,  puis  octogone,  haute  de 
40  met,  et  qui  se  termine  par  une  aiguille  en  charpente. 
Le  portail  du  midi,  nommé  Porte  des  Apôtres,  se  com- 
pose de  72  colonnes  et  d'ogives  surmontées  d'un  fronton 
aigu;  au-dessus  de  la  porte  sont  figurées  la  mort  et  la 
résurrection  de  la  S**  Vierge.  Llnterieur  de  l'église  est 
éclairé  par  70  fenêtres  ;  on  remarque  principalement  la 


LAZ 


1156 


LEG 


rose,  oamie  de  vitraux  qui  représentent  des  si^ets  de  > 
îlUstorre  sacrée.  On  voit  dans  le  chœur  plusieurs  tom- 
beaux intéressants. 

LAVABO,  mot  latin  qui  signifie  je  laverai,  et  qui  dé- 
signe un  acte  Uturgimie  du  rite  catholique.  Autrefois , 
iprçs  Toffertoire  de  la  messe,  le  prêtre  se  lavait  les 
nuùns  :  il  y  avait  pour  cet  usage,  dans  un  des  murs  laté- 
laux  du  sanctuaire ,  un  laoatorium  ou  piscine.  Depuis 
longtemps  le  prêtre  se  contente  de  présenter  au-dessus 
d*un  bassin  ses  doigts,  sur  lesquels  le  servant  verse 
quelques  gouttes  d^eau.  Cette  cérémonie ,  suivant  S*  Cy- 
rille, est  destinée  à  rappeler  symboliquement  la  pureté 
du  prêtre  célébrant  les  saints  mvstères.  On  donne  aussi 
le  nom  de  laoabo  au  linge  avec  lequel  le  prêtre  s*essuie 
les  doigts,  et  au  canon  d'autel  qui,  placé  du  côté  de 
Tépltre,  contient  les  versets  du  psaume  25  qui  doivent 
être  récités  à  ce  moment.  —  En  termes  d'ébénisterie,  un 
lavabo  est  un  meuble  de  toilette  garni  des  ustensiles 
nécessaires  pour  se  laver,  pot  à  eau,  cuvette,  verres, 
brosses,  flacons,  etc. 

LAVATORIUM.  V.  Cloitrb. 

LAVEMENT  DES  PIEDS.  V.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

LAVIS,  genre  de  peinture  dans  \e(^ue\  on  emploie  sur 
le  papier,  avec  Teau  pure  et  des  pmceaux,  Tencre  de 
Chine  et  les  couleurs  gommées.  Si  Ton  se  sert  de  papier 
blanc,  on  opère  avec  du  bistre,  de  la  sanguine,  de  l'encre 
de  Chine,  de  l'indigo,  de  l'outremer,  ou  de  la  sépia;  si 
Ton  prend  du  papier  coloré  et  teinté,  dit  papier  d$  pàU, 
on  opère  avec  les  mêmes  couleurs  rehaussées  par  le 
blanc  et  la  gouache.  Une  seule  couleur  suffit  au  lavis  ; 
les  ombres  et  les  clairs  sont  déterminés  par  des  teintes 
plus  ou  moins  fortes.  On  a  des  lavis  de  Van  Ostade,  Ru- 
gendas,  Paul  Bril,  Ruysdael,  Both  et  Winants.  Raphaël, 
Lesueur,  Mignard  et  Lebrun,  avant  d'exécuter  leurs  fres- 
ques, en  faisaient  des  esquisses  au  lavis.  Le  lavis  a  au- 
jourd'hui cédé  la  place  à  l'aquarelle  :  il  n'est  plus  guère 
en  usage  que  pour  des  dessins  sans  conséquence  ou  des 
croquis.  Les  ingénieurs  et  les  architectee  s'en  servent 
pour  leurs  plans. 

LAVIS  (Gravure  au).  V,  GRAvims. 

LAVOIR,  emplacement  disposé  sur  le  bord  d*un  étang , 
d'une  source  ou  d'une  rivière,  pour  qu'on  puisse  y  laver 
commodément.  Les  lavoirs  complets  doivent  se  com- 
poser de  stalles,  de  pierres  plates  pour  presser  le  linge, 
de  buanderies,  sècheries,  salles  à  repasser,  etc.  On  crée 
a^Jourd*hui  dans  certaines  villes  des  lavoin  publics, 
établissements  précieux  pour  les  classes  populaires.  A 
Paris,  le  droit  d'entrée  dans  un  lavoir  public  est  de  10 
centimes  par  Jour. 

LAXEMBOURG  (Château  de),  dans  la  basse  Autriche, 
à  10  kilom.  de  Vienne.  Ce  cnâteau,  appelé  aussi  la 
Maison  bleu»,  sert,  alternativement  avec  Schœnbrunn, 
de  résidence  d'été  à  la  famille  impériale.  Composé  d'un 
vieux  ch&teau  bâti  de  1378  à  1380  par  le  duc  Albert  m, 
sur  l'emplacement  d'un  autre  ch&teau  détruit  par  un  in- 
cendie en  1377,  et  d'un  ch&teau  neuf  qui  ne  date  que  de 
Marie-Thérèse,  il  n'est  remarquable  ni  par  l'ampleur 
de  ses  proportions,  ni  par  son  architecture.  On  y  voit  un 
manège,  une  salle  de  spectacle  qui  peut  contenir  1,200 
spectateurs,  une  bibliothèaue  avec  G  beaux  tableaux  du 
Canaletto,  un  tableau  de  Van  Dyck  sur  l'autel  de  la  cha- 
pelle. I«e  parc,  composé  de  17  lies  formées  par  la  Schwe- 
chat,  est  un  des  plus  magnifiques  Jardins  anglais  qu'il  y 
ait  en  Europe  :  au  milieu  d'un  lac  se  trouve  le  Franzens^' 
burg ,  reproduction  minutieusement  exacte  d'un  ch&teau 
gothique  b&ti  par  Maximilien  I*'  dans  le  Tyrol,  et  qui 
contient  une  collection  d'antiquités  tirées  de  divers  cou- 
vents et  ch&teaux  d'Autriche. 

LAYETIERS-EMBALLEURS ,  ouvriers  qui  fabriquent 
des  caisses ,  malles,  boites  (autrefois  layettes;  de  laie, 
laye,  bois),  et  qui  emballent  les  objets  nragiles  destinés 
à  être  transportés.  Us  furent  érigés  en  corps  de  métier, 
au  commencement  du  règne  de  Louis  XIV,  et  prirent 
S'  Fiacre  pour  patron. 

LAZARET.  K .  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BUh 
graphie  et  d'Bistotre. 

LAZZARI  (  Thé&tre  ),  nom  que  prit,  en  170S,  un  thé&tre 
ouvert  en  1779  sur  le  boulevard  au  Temple  à  Paris,  vis- 
à-vis  de  la  rue  Chariot ,  sous  le  titre  de  Salle  des  élèves 
de  VOpéra,  puis  connu  sous  celui  de  Lycée  dramatique, 
Lazzari  était  un  mime  italien,  qui  Joua  des  arlequinades 
•avec  un  grand  succès.  Son  thé&tre  fut  incendié  en  1798, 
remplacé  par  un  café-chantant,  et,  de  1821  à  1823,  par  le 
Panorama  dramaHigue,  où  Bouffé  fit  ses  débuts.  Cette 
nouvelld  salle  fut  démolie;  un  autre  thé&tre  »  dont  Bo- 


bèche illustrait  les  tréteaux,  prit  alors  le  nom  de  Retii- 
Lazzari. 

LAZZARONI.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtctionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

LAZZI.  Ce  mot  italien ,  <iui  est  le  pluriel  de  lax%o 
(plaisanterie,  badinage),  désigne  les  Jeux  de  scène  comi- 
ques, les  grimaces,  contorsions,  gestes  burlesques  psr 
lesquels  les  comédiens  cherehent  &  faire  rire.  En  passant 
dans  la  langue  française,  il  a  pris  un  sens  figuré,  et  si- 
gnifie les  sttUlies  bouffonnes,  les  plaisanteries  qui  se  débi- 
tent dans  les  parades. 

LEADER,  c-à-d.  en  anglais  conducteur,  homme  poli- 
tique autour  duquel  se  groupent,  dans  le  Parlement  an« 
C^ais,  ceux  oui  partamnt  la  même  opinion  et  tendent  au 
même  but.  u  discipnne  le  parti ,  et  lui  donne  le  mot 
d'ordre. 

LÉCHÉ,  en  termes  de  Pdnture,  se  dit  d*nn  ouvrage  où 
le  fini  est  poussé  à  l'excès.  Cest  un  mot  qui  se  prend  en 
mauvaise  parL 

LEÇON,  mot  formé  du  latin  lectio  (lecture),  et  dési- 
gnant une  instruction  donnée,  surtout  du  haut  d'une 
chaire,  par  le  moyen  d'une  lecture,  ou  d'un  discours  im- 
provisé. —  Chez  les  Jurisconsultes  latins ,  ce  mot  dési- 
rait le  texte  d'un  article  de  loi ,  c-&-d.  la  manière  dont 
il  était  ^crtl  et  par  conspuent  dont  on  le  lisait.  De  là  le 
sens  moderne  introduit  par  les  critiques  paléographes  : 
Manière  particulière  de  tire  un  mot  ou  une  phrase  dans 
les  anciens  manuscrits.  Certaines  éditions  étalent  tout 
au  long,  au  bas  des  pages  ou  à  la  fin  du  volume,  les  di- 
verses leçons  {lectiones  variœ)  données  par  les  ma- 
nuscrits ou  adoptées  par  des  éditeurs  antérieure.  La 
discussion  des  leçons  exige  de  la  part  du  critique  une 
grande  sagacité  unie  &  une  érudition  aussi  sûre  qu'éten- 
due ;  c'est  un  genre  d'études  dans  lequel  les  Allemands 
réussissent  d'une  manière  remarquable.  P. 

Liçoii ,  en  termes  de  Liturgie ,  lecture  qui  se  fait ,  & 
chaque  Nocturne  des  Matines,  de  quelques  extraits  de  la 
Bible,  des  Pères,  ou  de  la  légende  du  Saint  du  Jour.  U  y 
a  trois  leçons  à  chaque  Nocturne.  On  ne  les  chante  pss, 
ou  fait  seulement  une  inflexion  sur  la  dernière  syllsbe 
de  chaque  phrase. 

LECTEUR.  V,  ce  mot  dans  notre  DicUonnaâre  de  Bûh 
graphie  et  d'Histoire, 

LECnCAIRËS,  mot  de  même  sens  que  Cliniques 
(V.  ce  mot), 

LECnONNAIRE,  mot  synonyme  à'Êpistoliër  (  V.  ce 
mot), 

LECnSTERNE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

LECTRIN,  vieux  mot  synonyme  de/uM  et  de  pupUre, 

LECTRUM,  vieux  mot  signifiant  prte-Dieu, 

LECTURE ,  art  d'assembler  par  la  pensée  et  psr  la 

ftarole  les  lettres  d'abord,  puis  les  syllabes ,  les  mots  et 
es  phrases.  On  distingue  plusieurs  méthodes  pour  en- 
seigner &  lire.  La  Méthode  <inaly tique,  dite  aussi  Méthode 
mécanique ,  consiste  &  faire  apprendre  d'abord  des  mots 
entière  aux  enfants,  pour  descendre  ensuite  des  mots  sax 
syllabes  et  des  syllabes  aux  lettres  :  on  met  aous  leois 

Îreux  les  mots  qui  leur  sont  le  plus  familiers,  et  on  les 
eur  fait  retrouver,  soit  complets,  soit  par  parties,  dans 
d'autres  mots  plus  étendus ,  de  manière  &  découvrir  les 
syllabes  élémentaires,  puis  les  lettres.  Cette  méthode, 
exposée  en  1790  dans  un  livre  intitulé  la  Vraie  manière 
dk  apprendre  une  langue,  et  perfectionnée  par  Lemsre, 
fut  celle  qu'employa  Jacotot  ;  elle  a  été  reprise  de  nos 
Joure  par  Laffore  sous  le  nom  de  StaJtiLégie,  On  lui  re- 
proche avec  raison  d'être  trop  mécanique,  et  de  ne  s'sp- 
pliquer  oue  très-difficilement  &  un  enseignement  oollectifl 
—  La  Méthode  syllabique,  en  usage  dans  un  grsnd 
nombre  d'écoles  d'enseignement  mutuel ,  procède,  non 
par  mots  entiers,  mais  par  syllabes ,  que  l'enfant  pro- 
nonce d'un  seul  Jet,  sans  les  décomposer.  —  D'apr&  la 
Méthode  synthétique  ou  Méthode  d^épellation,  qui  a  été 
constamment  employée  depuis  la  plus  haute  antiquité, 
on  va  des  éléments  auz  composés,  c.-à-d.  que  l'enfant 
apprend  d'abord  le  nom  et  la  valeur  des  lettres,  puis  les 
réunit  pour  former  des  syllabes ,  et  arrive  ^n  aox 
mots.  Quelques  doutes  furent  émis  vere  la  fin  da 
XVI*  siècle  sur  l'efficacité  de  cette  méthode  :  mais  la  seule 
modification  qui  ait  été  utilement  apportée  au  mode 
d'épellation  nous  vient  de  la  Grammaire  raisonnes  de 
Port-Royal  ;  elle  consiste  à  désigner  les  consonnes  psr 
les  sons  qu'elles  rendent  dans  la  pratique,  h  leur  donner 
à  toutes  une  terminaison  uniforme,  celle  de  l'a  muet, 
sans  autre  règle  que  celle  de  l'élision  de  Ye,  Ainsi,  l'en- 
fant épdlera  plus  aisément  quand  om  lui  ann  dit  que  les 


LÉ6 


115^ 


LÊ6 


Mtns  f,  I,  m,  r,  «,  ds,  se  nomment  fê,  le,  fiM,  ra,  $é,  œe, 
(|oeft*il  lai  faut  commencer  par  les  appeler  effe,  »ll$, 
mm»,  9rre,  «sse,  ix,  pour  supprimer  aussitôt,  dans  le 
Km  i^ttabique ,  lia  première  intonation  et  ne  conserver 
((ne  rintonation  radicale.  Quant  à  ces  procédés  plus  ou 
moins  ingénieux  à  Taide  desquels  on  a  prétendu  rendre 
Is  lecture  agréable  et  facile,  tels  que  les  dés,  les  dominos 
«t  les  /Iches  couverts  de  lettres,  ou  bien  les  abécédairss 
ei  syllabaires  à  images,  ils  peuvent  assurément  plaire 
aux  enfanta  :  mids  on  B*en  est  exagéré  limportance,  et 
Os  sont  généralement  trop  compligu&  pour  supplanter  la 
méthode  onttnaîre.  On  voit  dans  Quinulien  (Instit.  orat,^ 
1, 9)  que  déjà  les  Romains  avuent  fait  un  Jeu  de  Ton- 
leiçaement  de  la  lecture,  en  mettant,  comme  des  hochets, 
aux  mains  des  enfants  des  lettres  en  ivoire  ou  en  bois. 

ucmas  A  HAUTS  VOIX.  Cest  Vart  de  bien  lire,  qui 
consiste  à  donner  aux  mots  et  aux  phrases  la  vmleur 

S'ils  doivent  avoir,  n  exige  :  1^  de  Ytntelligence^  car  il 
it  avoir  bien  compris  pour  bien  exprimer;  2^  de  la 
voix,  car  elle  est  Tinstrament  de  rintelligence,  et,  pour 
s'en  passer,  il  faudrait  avoir  tout  l'esprit,  toute  l'habileté 
d*Andrieax,  qui  sut  se  faire  entendre  au  Collège  de 
France  à  force  de  se  faire  écouter;  3<^  une  bonne  pronoi»- 
eiation,  sans  aucun  de  ces  vices  qui  viennent  de  la  na- 
ture oa  des  habitudes  d'enfance  ;  4®  de  Vintonation,  dont 
la  justesse  est  la  conséquence  de  l'intelligenoe  du  lecteur 
et  FeCTet  presque  constant  d'une  inspiration  soudaine. 
On  a  quelquefois  érigé  en  règle  la  lenteur  du  débit;  elle 
contribue  sans  doute  à  la  netteté  de  la  prononciation  ; 
mais  la  diction  n'a  réellement  d'autre  règle  que  celle  de 
suivre  la  pensée  de  Técrivain  et  le  mouvement  de  sa 
phrase.  L  art  de  bien  lire  a  toujours  été  un  rare  privi- 
lège, et  les  bons  lecteurs  sont  plus  rares  que  les  bons 
écrivains. 

On  a  défini  la  lecture  «  une  conversation  que  l'on  a 
avec  les  plus  beaux. génies  et  les  plus  rares  esprits  de 
tous  les  siècles  ».  Cette  pensée  n'est  Juste  qu'en  tant 
qu'elle  s'applique  à  la  lecture  des  modèles;  lire  des  ou- 
vrsges  mauvais  ou  médiocres,  en  effet,  c'est  pour  l'es- 
prit ce  que  la  mauvaise  compagnie  est  pour  les  manières 
et  la  conversation.  Lire ,  ce  n'est  point  parcourir  rapide- 
ment des  livres,  pour  charmer  ses  loisirs  ou  satisfaire 
une  curiosité  frivole,  mais,  comme  l'indique  le  mot  latin 
leoere,  choisir  ce  qu'il  y  a  de  bon  et  de  beau  dans  les 
pensées,  dans  les  sentiments  des  écrivains,  et  se  l'appro- 
prier ensuite  par  la  mémoire  et  la  réflerion.  La  lecture 
■Inâ  entendue  est  un  puissant  moyen  de  se  former  à 
Part  d'écrire.  Si  l'on  n'écarte  pas  les  ouvrages  qui  por- 
tent atteinte  à  la  religion  et  aux  bonnes  mœurs,  on  perd 
bien  vite  cette  noblesse  et  cette  générosité  de  nature  sans 
Vsquèlles  il  est  impossible  de  Irien  penser,  de  bien  vou- 
blr  et  de  bien  agir.  Quiconque  veut  cultiver  son  esprit, 
doit  slattacher  aux  chefs-d'œuvre  des  plus  beaux  siècles, 
et  se  gsrder  des  auteurs  médiocres,  au  commerce  des- 
quels le  goût  s'altère  et  se  corrompt.  Enfin ,  selon  la  re- 
marque de  Pline  le  Jeune,  ce  n'est  pas  en  lisant  beau- 
coup de  llrres  que  Ton  s'instruit,  mais  en  lisant  beaucoup 
an  même  livre  :  rien  n'est  plus  propre  à  détendre  les 
ressorts  de  l'intelligence,  à  engendrer  la  confusion,  que 
les  lectures  trop  variées  et  décousues,  et  l'on  doit  se 
larder  de  cette  passion  de  lire  oui  est  une  sorte  d'intem- 
pérance, fort  dangereuse  pour  resprit.  François  de  Neuf- 
chSteau  a  écrit,  sur  l'art  ae  lire  les  vers,  une  Jolie  épttre. 
Delille  poeséduit  ce  talent  à  un  rare  de^.  B. 

LBcnniB  (Cabinet  de).  K.  Cabinet. 

LECTVaSS  PUBUQOIS.  V.  RéOTATIOll. 

LÉGALISATION,  déclaration  par  laquelle  un  fonction- 
naire public  qui  en  a  le  pouvoir  affinne  une  signature 
apposée  à  un  acte  et  la  qiûdité  de  la  personne  dont  elle 
énâane.  Ainsi,  le  maire  tégalise  la  rignature  du  citoven 
de  sa  commune;  le  préfet,  le  sous-prefet  ou  le  président 
du  tribunal  dvil  légalise  celle  du  nialre,  etc.  Les  greffiers 
des  tribunaux  perçoivent,  pour  la  légalisation,  un  droit 
de  tt  centimes.  En  général,  la  signature  des  fonction- 
naires est  légalisée  par  leur  supérieur  immédiat.  La  léga- 
lisation p'est  qu'une  forme  extrinsèque  de  l'acte,  et  aie 
n'en  préjuge  en  rien  le  contenu  :  elle  a  seulement  pour 
effet  d'étendre  l'authenticité  de  l'acte  d'un  lieu  h  un 
antre.  Les  actes  passés  en  pays  étranger  et  dont  on  veut 
se  servir  en  Ftancet  ceux  passés  en  France  et  dont  on 
vent  faix»  usage  à  l'étranger,  doivent  être  légalisés  par  les 
agonts  diplomatiques  des  puissances  respectives. 

LÉGALITÉ,  conformité  d'un  fait  avec  la  prescription 
de  la  loi. 

LÉGAT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnatre  de  Biogra^ 
phie  et  d^BisloirB» 


LÊGATAIRB.  F.  Laos. 

LÉGATION,  en  Diplomatie,  s'entend  de  lent  le  pm>* 
sonnel  d'une  ambassade. 

LEGATO,  adjectif  italien  qui  signifie  It^,  et  qui,  placé 
en  tète  d'un  morceau  de  musique,  indique  qu'il  faut  en 
lier  les  notes.  Il  a  ausri  le  sens  d^ooUgé,  de  contraint  par 
certaines  règles  :  un  canone  legato,  une  fugha  Ugata, 
c'est  un  canon,  une  fogue  qui  doivent  se  renfermer  dans 
telles  bornes  prescrites. 

LÉGENDE  (dn  latin  legendum.,  à  lire,  qui  doit  être 
lu),  nom  donné  d'abord  aux  versets  que  l'on  récitait  dans 
les  leçons  des  Matines ,  puis  aux  Vies  des  saints  et  des 
martyrs,  qu'on  lisait  dans  les  réfectoires  des  couvents. 
En  ce  dernier  sens,  les  légendes  sont  comme  la  mytho- 
logie du  christianisme ,  et  forment  une  paitie  importante 
de  la  littérature  du  moyen  âge,  principalement  au  vn*  et 
au  vm"  siècle.  Elles  ont  toutes  certaines  parties  com- 
munes, la  prophétie  qui  annonce  les  destinées  du 
Saint,  la  rision  qui  lui  révèle  son  avenir,  les  miracles 
qu'il  opère,  le  songe  qui  l'avertit  de  sa  fin,  et  les  mer* 
veilles  (jui  s'accomplissent  sur  son  tombeau  ou  dans  la 
translation  de  ses  reliques.  L'Ancien  et  le  Nouveau  Tes- 
tainent  étaient  des  choses  sacrées,  que  la  fantaisie  ne 
pouvait  modifier  :  l'imagination  des  peuples  s'en  prit  à 
la  rie  des  saints.  L'enthousiasme  de  la  foi  dans  le  narra- 
teur, la  crédulité  naïve  et  l'amour  du  merveilleux  chei 
les  premiers  fidèles,  le  désir  de  convaincre  par  des  pro- 
diges les  Barbares  de  la  Germanie  qu'il  s'agissait  de  con- 
vertir, l'émulation  des  dévotions  locales  cherchant  à 
illustrer  leurs  patrons,  tout  conspira  pom*  développer  et 
propager  les  légendes.  Le  premier  légendaire  ou  coUeo- 
teur  de  légendes  fut  Siméon  ,  dit  Métaphraste  (gloss»- 
teur,  traducteur),  qui  éoririt  en  grec  au  commencement 
du  X*  siècle.  D'autres  auteur»  grecs ,  tels  que  Psellus  el 
Nicéphore  Calliste,  s'exercèrent  ensuite  à  ces  pieux  ré- 
cits. Flodoard,  chanoine  de  Reims,  contemporain  de  Louis 
d'Outre-Mer,  rédigea  en  latin  les  Vies  des  saints  pour 
chaque  mois  de  l'année.  A  la  fin  du  xi*  siècle,  Gosselin. 
moine  de  l'abbaye  de  S^-Bertin  à  Saint-Omer,  fut  appelé 
en  Angleterre  par  S*  Anselme  de  Cantorbéry,  qui  lui  fit 
écrire  un  grand  nombre  de  ^es  de  saints.  Au  commen- 
cement du  xm«,  Césaire,  de  l'ordre  de  Clteaux,  composa 
en  dialogues  IS  livres  de  miracles  et  d'histoires  me^ 
veilleuses.  Jacoues  de  Varase  ou  de  Varagto,  appelé 
aussi  Jacques  de  Voragine  (du  gouffre)  parce  qu'il  fut 
un  gouflîre  de  science,  est  auteur  de  la  Légende  dorée^  quff 
eut  un  prodigieux  succès  pendant  plusieurs  siècles. 
Pierre  Calo,  Bernard  Guidonis  ou  de  Guv,  Pierre  Natal 
ou  de  Natalibus,  ont  recueilli  aussi  des  légendes  moins 
connues.  A  la  fin  du  xvi*  siècle,  le  P.  Ribadenoira  publia 
la  Fleur  des  Saints.  La  collection  des  Bollandistes 
(V,  Actes  dbs  Saoits)  naquit  du  désir  de  réunir  toutes 
les  landes  et  d'y  appliquer  un  peu  d'esprit  critique. 
V.  Alfred  HIaury,  Essat  sur  les  légendes  jeteuses  au  moyen 
âge,  Paris,  1843,  in-8».  B. 

LéGBNDB,  en  termes  de  Numismatioue,  se  dit  de  tonte 
inscription  placée  sur  les  monnaies,  médailles.  Jetons,  etd 
Les  landes  peuvent  se  trouver  sur  l'une  et  l'autre  face 
de  la  pièce,  ou  encore  sur  la  tranche.  Sur  les  faces,  elles 
peuvent  être  disposées  drculairement,  ou  en  ligne  droite, 
ou  en  sens  divers;  quelquefois  on  les  place  sur  une  partie 
du  type,  comme  sur  un  oouclier,  on  dppe,  un  autel,  etc. 
Depuis  longtemps  la  face  proprement  dite  ofli^  une  lé- 
gende circulaire,  donnant  les  nom  et  titres  du  person- 
naoe  représenté;  sur  le  revers,  la  légende  est  rectillgne , 
et  Indique  la  valeur  de  la  pièce,  l'année,  le  lieu,  l'événe- 
ment,  etc.  Beaucoup  de  ces  indications  sont  en  abrégé 
ou  symboliques.  —  Dans  les  premiers  temps  du  mon- 
nayage, les  légendes  furent  très-courtes,  et  se  bornèrent 
h  l'indication  du  peuple  ou  de  la  ville.  Puis  elles  renfer* 
mèrent  les  noms  des  divinités  locales,  des  magistrats, 
des  rois,  la  valeur  nominale  de  la  monnaie,  etc.  Les 
pièces  consulaires  romaines  ofl'rent  des  légendes  inté- 
ressantes sur  les  principales  fomilles  de  Rome,  sur  les 
hauts  laits  qui  les  ont  illustrées,  sur  leur  origine.  An 
temps  de  l'Empire,  les  légendes  contiennent  invariable- 
ment des  formules  aduhitrices,  et  n'ont  plus  rien  d'inté- 
ressant que  les  faits  et  les  dates.  Au  moyen  âge,  les 
légendes  sont  presque  toi:Jours  en  latin.  En  France,  sous 
les  Méroringiens,  elles  n'ofi^rent  que  le  nom  de  la  rille  et 
celui  du  monétaire,  très-rarement  le  nom  du  roi.  Sons 
les  Carlovinriens,  il  n'y  a  plus  gue  le  nom  du  roi,  avec 
la  formule  Gratta  Dei  ou  Misericordta  Det,  Au  xii*  sièds 
apparaît  sur  les  monnaies  d'or  la  légende  XPG  (Christus) 
vtncit,  XPC  régnât,  XPC  imperat.  qui  s'y  maintint  Jus- 
qu'en 1789.  De  Louis  XI  date  la  légende  Sit  nomen  Do^ 


LÉG 


11  Si 


LEa 


mmt  beneâkUim,  acd  devint  presque  européeiuie  et  oui 
nbsista  Jusqu'à  la  Révolution  française.  Les  sj^nels  et  les 
moutons  d*or  portèrent  ces  mots  :  Agnus  Dei,  qui  toUis 
fêccata  mundt,  mtserere  nobis.  Les  monnaies  des  barons 
et  des  prélats  reçurent  des  légendes  très-variées.  En 
1685,  on  commença  de  mettre  sur  la  tranche  de  la  mon- 
naie royale  les  mots  Domine  scUvum  fac  regem.  En  171K), 
FAssemblée  Constituante  rétablit  dans  la  légende  de  la 
fiuse  le  titre  de  Roi  des  Français,  oui  datait  de  Cbarle- 
magne ,  et  qu*Henri  III  avait  remplacé  par  celui  de  Roi 
de  France  ;  on  lut  au  revers  Règne  de  ta  loi,  et,  sur  la 
tranche,  La  «otton,  la  loi.  et  le  Rot.  En  1793,  le  nom  du 
roi  fit  place  aux  mots  R^inAlique  française,  et,  sur  les 
pièces  de  cuivre,  on  mit  :  Liberté,  égalité.  Les  hommes 
sont  égaux  devant  la  Un,  —  Au  temps  de  Napoléon  I*', 
en  lut,  d'un  côté  de  la  monnaie.  Napoléon  empereur, 
de  Tautre  République  française,  et  plus  tard,  à  dater  de 
1809  seulement.  Empire  français,  et,  sur  la  tranche,  avant 
•t  depuis  cette  époque.  Dieu  protège  la  France.  La  Restau- 
zstion  fit  reparaître  les  titres  de  Roi  de  France  et  de  Na- 
varre et  Domine  salvum  fac  regem,  Louia-Philippe  reprit 
la  titre  de  Roi  des  Français^  avec  la  phrase  de  la  tranche 
Dieu  protège  la  France^  qui  a  toujours  été  conservée  d^ 
puis.  Après  la  Révolution  de  1848,  on  rétablit  les  lé- 
aendes  République  française,  et  on  ajouta  :  Liberté^  éga- 
XiU,  frot^mit^.  Après  le  coup  d'État  de  1851,  les  monnaies 
portèrent  Napoléon  Bonaparte  d'un  côté.  République 
française  de  l'antre  ;  depuis  1852,  les  lé^ndes  sont  JVo- 
jfoléon  III,  empereur,  et  Empire  français.  —  Beaucoup 
^e  Jetons  du  xv«  et  du  xvi*  siècle  portent  des  légendes 
barôques,  dont  on  ne  peut  déterminer  ni  le  sens  ni  le 
but.  Au  xvii*t  les  légendes  des  jetons  sont  ou  bibliques, 
ou  mythologiques,  ou  historiques;  au  xvm*,  on  y  trouve 
généralement  le  caractère  galant.  B. 

.  LEGILE  (du  latin  UgUis,  qui  sert  à  lire),  pièce  d'étoflTe 
dont  on  couvre  le  pupitre  sur  lequel  on  chante  l'épltre  et 
révangile  aux  messes  solennelles. 

LÉGION.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictkmncùre  de  Bio- 
graphie et  d*Histoire, 

i^GioN  d'honneur.  )  V.  notre  Dtcttonnaire  (20 

.  LÉGION  D'HONNBua  (MaîsoQs  /      Biographie  et  d'His- 
d'éducation  de  la).  ;      toire. 

uSgion  ÉTRANGfcRB,  corps  de  troupes  formé  en  1831  avec 
des' réfugiés  et  des  volontaires  de  divers  pays  étrangers, 
et  employé  par  la  France  en  Algérie.  Ce  corps  fut  cédé 
à  l'Espagne  en  1835.  Mais  on  en  constitua  presque  aua- 
sitôt  un  nouveau,  qui  s'est  composé  de  2  régiments  à 
4  bataillons  chacun,  et  qui,  en  décembre  1861,  a  été  ré- 
duit à  un  seul  régiment. 

LÉGISLATIF  (Corps).  V.  Corps  législatif  et  Palais, 
dans  notre  Dictionncdre  de  Biographie  et  d'Histoire, 

LÉGiSLATipJ  Pouvoir).  V.  Pouvoir. 

LÉGISLATION  (  du  latin  lex,  legis,  loi ,  et  latio,  action 
^  porter),  se  dit  de  l'acte  de  faire  des  lois,  et  plus  gé- 
néralement du  corps  des  lois  d'un  pays. 

LÉGISLATURE,  mot  qui  désigne,  soit  les  pouvoirs 
collectifs  qui,  dans  un  État,  font  les  lois,  soit  le  temps 
légal  d'existence  d'une  Chainbre  ou  d'une  Assemblée  lé- 
gislative élue. 

LÉGITIMATION,  acte  par  lequel  un  enfant  naturel  est 
admis  à  tous  les  avantages  d'un  enfant  légitime.  Le  Droit 
romain  reconnaissait  six  moyens  différents  de  légitima- 
tion :  per  oblatùmem  curiœ ,  lorsque  le  père  faisait  en- 
trer son  fils  naturel  au  nombre  des  décunons  d'une  cité; 
par  adoption;  par  testament, si  le  père  avait  de  justes 
motifs  pour  ne  pas  épouser  la  mère  de  l'enfant;  par  re- 
eonnaissance^  lorsque  le  père  avait  nommé  son  fils  dans 
un  acte  sans  ajouter  la  mention  qu'il  était  enfant  na- 
turel; par  mariage  subséquent  des  père  et  mère;  enfin, 
par  lettres  du  prince.  Ces  deux  derniers  moyens  furent 
en  usage  dans  notre  ancienne  législation  ;  les  b&tards  lé- 
gitimés avaient  le  droit  de  porter  le  nom  et  les  armes  de 
leur  père,  mais  devaient  mettre  dans  leurs  armes  une 
barre  qui  les  distinguait  des  enfants  légitimes.  Notre  lé- 
gislation actuelle  n^uimet  plus  crue  la  légitimation  par 
mariage  subséquent.  Pour  que  des  époux  dont  l'union 
anndt  été  stérile  ne  puissent  se  créer  une  postérité  légi- 
time par  consentement  mutuel ,  et  aussi  pour  empêcher 
qja»  1  un  d'eux  n'amène  l'autre  à  reconnaître  un  enfant 
gui  lui  serait  étranger,  il  faut  que  l'enfant  soit  légale- 
ment reconnu  avant  le  mariage,  ou  tout  au  moins  dans 
l'acte  môme  de  célébration.  La  légitimation  peut  avoir 
lieu  même  en  faveur  des  enfants  décédés  qui  ont  laissé 
des  descendants,  et  alors  elle  profite  à  ces  derniers.  Les 
droits  acquis  par  l'enfant  légitimé  ne  datent  (jue  de 
l'époque  de  la  légitimation;  il  ne  peut,  au  préjudice  des 


tiers,  élever  de  prétention  à  des  droits  qui  auraient  pris 
naissance  antérieurement.  La  lé^timation,  assimilée  en 
cela  à  la  survenance  d'un  enfant,  a  pour  effet  d'annuler 
toute  donation  entre-vifs.  La  loi  n'accorde  pas  aux  en- 
fants incestueux  et  adultérins  le  bénéfice  de  la  légitima- 
tion. —  Il  a  paru  en  France  que  la  légitimation  par  ma- 
riage subséouent  était  propre  à  favoriser  le  repentir  et  le 
retour  aux  iwnnes  mœurs.  En  Angleterre,  au  contraire, 
où  on  la  Juge  Immorale  et  favoranle  à  la  licence,  elle 
n'existe  en  aucun  cas. 

LÉGITIME,  portion  d'hérédité  ({ue  notre  ancien  Droit 
assurait  aux  héritiers  du  sang,  indépendamment  de  la 
volonté  du  défunt.  La  légitime  se  nomme  aujourd'hui 
Résen>e  légale  (V.  ce  mot). 

LÉGimiB  (Enfant).  V.  Enfant  et  LéciTmrrÉ. 

LÉGirniE  DéFENse.  V.  Défense  (Légitime). 

LÉGITIMITÉ,  état  de  l'enfant  conçu  dans  le  mariage. 
Aux  termes  du  Code  Napoléon  (art.  312  et  sulv.)*  Tea- 
fant  né  après  le  180*  tour  du  mariage,  ou  moins  de 
300  jours  après  la  dissolution  du  mariage,  est  réputé  lé- 
gitime. La  légitimité  ne  résulte  que  aun  mariage  va- 
lable: si  le  mariage  est  nul,  les  enfants  qui  en  naissent 
sont  naturels,  mais  il  produit  néanmoins  a  leur  égard  ses 
effets  civils,  s'il  a  été  contracté  de  bonne  foi,  ne  fût-ce 
que  par  l'un  des  époux.  Qu'un  homme  mort  civilement 
se  marie  avec  une  femme  qui  l'ignore,  les  enfants  nés  de 
ce  mariage  seront  légitimes.  La  légitimité  peut  être 
prouvée  de  trois  manières  (  V.  Filiation).  Bien  que  le 
mariage  opère  une  présomption  légale  de  légitimité,  cette 
présomption  peut  être  détruite  en  certains  cas  par  le 
désaioeu  de  paternité  (V.  ce  mot), 

utormiiTé,  en  termes  de  Politique,  caractère  de  tout 
pouvoir  institué  conformément  au  Droit  constitutionnel, 
que  ce  pouvoir  découle  de  l'hérédité  ou  de  l'élection.  En 
France,  le  mot  légitimité,  avec  un  sens  plus  restreint, 
et  dans  le  langage  des  partis,  signifie  le  droit  d'hérédité 
par  ordre  de  primogéniture,  spécialement  dans  la  famille 
des  Bourbons,  et  Ton  donne  le  nom  de  légitimistes  aux 
partisans  de  la  légitimité  ainsi  entendue. 

LEGS,  toute  disposition  de  biens  faite  par  testament 
On  nomme  légataire  la  personne  au  profit  de  laquelle  un 
legs  a  été  fait.  Le  mot  vient  de  lex  (loi),  parce  (jue  la 
volonté  dernière  du  testateur  est  comme  une  loi  qu'il 
impose,  ou  de  legare  (lier),  parce  <)ue  cette  volonté  en- 
chaîne ceux  qui  survivent.  On  distingue  trois  sortes  de 
legs.  Le  legs  universel  est  la  disposition  testamentaire 
par  laquelle  le  testateur  donne  k  une  personne,  ou  i 
plusieurs  conjointement,  l'universalité  des  biens  qu'il 
laissera  à  son  décès.  S'il  y  a  des  héritiers  réservataires, 
c.-4-d.  au  profit  desquels  la  loi  rend  indisponible  une 
quote-part  des  biens  laissés,  ces  héritiers  seuls  sont 
saisis  de  plein  droit  de  la  totalité  de  la  succession,  et  le 
légataire  universel  est  tenu  de  leur  demander  la  déli' 
vrance  des  biens  légués  (Code  Napol.^  art.  013,  915, 
1004).  S'il  n'y  a  pas  d'héritiers  à  réserve,  le  légataire  est 
saisi  de  droit,  par  la  mort  môme  du  testateur  ;  toutefois, 
s'il  est  institué  par  un  testament  olographe  ou  mystique 
(V.  Testament),  il  doit  se  faire  envojrer  en  possession 
par  une  ordonnance  du  président  du  tribunal  civil  [Code 
Napol.y  art.  1007-1008).  Le  légataire  universel,  s'il  y  a 
un  ou  plusieurs  héritiers  à  réserve,  est  tenu,  personnel- 
lement pour  sa  part,  et  hypothécairement  pour  le  tout, 
des  dettes  et  charges  de  la  succession  ;  à  défaut  d'héri- 
tiers réservataires ,  les  dettes  et  charges  lui  deviennent, 
{»ar  le  fait  de  l'acceptation ,  propres  et  personnelles.  Le 
égataire  universel  est  tenu  d'acquitter  les  leei  particu- 
liers ;  si  les  legs  dépassaient  la  ouotité  disponinle,  on  les 
réduit  au  marc  le  franc.  —  Le  legs  à  titre  universel  est 
celui  par  lequel  le  testateur  lègue  une  quote-part  des 
biens  doqt  la  loi  lui  permet  de  disposer,  telle  qu'une 
moitié,  un  tiers,  ou  tous  ses  immeubles,  ou  tout  son  mo- 
bilier, ou  une  quotité  fixe  de  tous  ses  immeubles  ou  de 
tout  son  mobilier.  Jamais  le  légataire  à  ce  titre  n'est  saisi 
de  droit  de  la  propriété  de  la  chose  léguée  ;  il  faut  tou- 
jours qu'il  en  demande  la  délivrance  aux  héritiers.  Il  est 
tenu  des  dettes  et  charges  de  la  succession,  personnelle- 
ment pour  sa  part,  et  hypothécairement  pour  le  tout;  il 
doit  aussi  acquitter  les  legs  particuliers  par  contributioD 
avec  les  héritiers  naturels  [art  1010-1013).  —  Toute 
disposition  testamentaire  qui  n'est  ni  de  Tuniversalité 
des  biens  ou  de  la  portion  disponible  de  ces  biens,  ni 
d*une  quote-part  de  ces  biens  ou  de  la  portion  dispo- 
nible, est  un  legs  particulier^  Le  lé^taire  à  titre  parti- 
culier est  obligé  de  demander  la  délivrance  de  son  legst 
il  n'est  pas  tenu  des  dettes  de  la  succession.  Si  la  chose 
léguée  est  grevée  d*un  usufruit  ou  hypothéquée,  'béri- 


LEO 


115» 


LET 


tf«  «*«Bi  ipas  teou  de  la  dégager.  ^  fjc  legs  eA  caduc  ^ù 
planeur»  ca»  (F.  Cadcc). 
LEKH1QUE  (Langue).  V.  Polonaise 
IaMUE  (da  greclAiima,  proposition  admise),  proposi- 
tioa  préliminairo  que  l'on  établit  pour  servir  à  la  dé- 
momtralioii  d'un  antre  proposition. 

1£MNISQITB.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographe  et  d^Bistoirt. 

LËMOSINE  (Langue).  V.  LnocsiNE. 

LEMNl-LENAPB  adiome).  V.  Dblawakb. 

I£N1T]IVLU^  jeu  de  cartes,  le  même  que  la  Mouche 
(F.  ce  mot), 

LÉON  (Cathédrale  de)>  magnifique  église  de  style  ogi- 
val, la  plus  belle  qui  existe  en  Espagne.  Suivant  un  vieux 
dicton,  la  cathédrale  de  Séville  est  grande,  celle  de  To- 
lède est  riche,  celle  de  Santiago  e^t  solide,  mais  celle  de 
tAom  les  surpasse.  B&tie  au  xm*  siècle,  elle  est  digne  de  sa 
célébrité  par  la  légèreté  et  la  hardiesse  de  sa  structure. 
Le  gnnd  portail,  tourné  vers  TOccident,  offre  cinq  arcs 
en  ogive,  dont  trois  donnent  entrée  dans  les  nefs  de 
régiise  :  les  piliers  de  ces  arcs  forment  un  portique  sur- 
EDMité  d*un  balcon  tout  à  Jour,  que  dominent  deux  tou- 
reUea  hexagonales.  On  compte  plus  de  40  statues,  un  peu 
pins  grandes  que  nature,  autour  des  piliers  et  entre  les 
portes.  Des  deux  c6tés  du  portail  s*élancent  deux  tours, 
belles  aans  doute,  mais  moins  aériennes  et  moins  déli- 
cates que  celles  de  Burgos,  moins  sévères  et  moins  ma- 
jestueuses que  celles  de  Palma.  Tout  Textérieur  du  mo- 
nument pràente  une  étonnante  profusion  de  statues  et 
de  scalptnres.  L'admiration  redouble  quand  on  pénètre 
à  rintérieur  :  les  piliers  qui  supportent  les  arcs  des 
vofttes  sont  d'une  finesse  extrême;  les  murs  du  contour, 
qu*aneiine  chapelle  ne  couvre,  ont  été  tellement  fouillés 
par  les  sculpteurs,  qu'en  quelques  endroits  ils  n'ont  pas 
plus  de  30  centimètres  d'épaisseur,  et  l'on  a  peine  à  com- 
prendre qu'ils  puissent  se  soutenir;  une  galerie  cpii  fait 
le  toor  du  vaisseau  est  du  plus  merveilleux  travail;  des 
coupes  de  cpiatre  statues  séparent  les  fenêtres,  et  celles- 
ci,  finement  découpées,  sont  garnies  de  vitraux  de  cou- 
leurs; dMmmenses  rosaces  se  développent  à  l'entrée  de  la 
grande  nef  et  aux  extrémités  du  transept.  Les  collatéraux 
OB  Tafaside  ont  des  chapelles  fermées  par  de  belles  grilles 
en  fer,  et  quelques-unes  possèdent  de  précieux  rétables. 
Le  chœur,  séparé  de  la  nef  par  un  mur  orné  de  figures 
en  demi-relief  peintes  et  dorées,  est  entouré  de  stalles 
sculptées  en  bois,  et  renferme  les  orgues,  ainsi  qu*une 
tribune  haute  pour  les  musiciens  et  les  chanteurs  ;  son 
pourtour  et  celui  du  sanctuaire  sont  clos  par  une.  grille 
en  fer  rehaussée  d'ornements  en  bronze.  L*une  des  cha- 
pelles donne  accès  dans  un  cloître  carré,  qui  a  sur  chaque 
côté  six  arcs  gothiques,  décorés  avec  moins  de  goût  que 
la  cathédrale  elle-même. 

LÉONIN  (Cîontrat),  contrat  dans  lequel  une  des  parties 
s'est  fait  la  part  du  lion,  par  exemple,  quand  elle  s'est 
mise  à  l'abri  de  toute  perte  en  stipulant  une  part  dans 
les  bénéfices,  ou  quand  les  chances  de  perte  ne  sont  pas 
en  rapport  direct  avec  les  chances  de  bénéfice.  La  loi 
condamne  ce  genre  de  contrat  {Code  Na/poU,  art.  1855). 

LÉONINS  (Vers),  vers  latins  qui  offrent  une  même 
consonnanoe  à  l'hémistiche  et  à  la  fin  ;  tel  est  celui-ci  de 
Vîi^le  {Georg,  I,  497)  - 

Grandiaqne  effosatt  mlrtbltar  osas  Mpnlerit, 

«  n  contemplera  avec  effroi,  dans  les  tombeaux  entr'ou- 
verts,  la  grandeur  des  ossements.  » 

Des  curieux  ont  eu  la  patience  puérile  et  stérile  de 
rechercher  combien  il  y  a  de  vers  léonins  dans  les 
12,900  vers  que  contiennent  les  œuvres  do  prince  des 
poètes  latins,  et  ils  en  ont  trouvé  924.  Cela  ne  prouve  pas 
que  les  portes  de  la  bonne  latinité  aient  recherché  comme 
un  ornement  ce  penre  de  consonnances  qui  est  une  véri- 
table rime.  Le  fait  s'explique  par  l'habitude  où  étaient  les 
Latins  de  placer  après  la  césure  du  3*  pied  un  mot  qui  se 
rap|K>rtait  grammaticalement  au  mot  terminant  le  vers.  — 
Ce 'fui  n'était  qu'un  accident  dans  la  versification  antique 
détint  une  règle  au  moyen  ftge,  surtout  pour  la  composi- 
tion des  proses  et  des  hymnes  de  l'Église.  La  qualification 


f^tiuveau  Testament,  conservée  en  manuscrit  à  la  Biblio- 
thèque impériale  de  Paris,  et  dont  tous  les  vers  riment 
à  chaque  hémistiche.  Hildebert,  évêoue  du  Mans,  a  laissé 
ao  grand  nombre  de  pièces  en  vers  ae  cette  espèce. 
On  a  quelquefois  donné  le  nom  de  vers,  léonins  à  ceux 


qui  sont  entremêlés  de  firançais  et  de  Isitint  tel  est  lé' 
couplet  suivant  du  chansonnier  Panard  : 

Bacelios,  oher  Qr^ire, 
A^o6i«  imperai  *  ; 
Chantons  tous  as  gloire. 
Et  quitque  bibat  K 
Hfttona-noua  de  fairo 
Qvod  detidtrat  *  ; 
Il  aime  an  bon  frère 
Qui  sape  bibat  *, 

1.  Noua  commande.  —  t.  Et  que  chaenn  boive.  —  s.  Ce  qu'il 
dësire.  —  4.  Qai  boive  aonveot. 

LEOPOLDINO,  monnaie  d'areent  de  Toscane,  valant 
2  florins  (2  fr.  80  c).  Le  leopolaone  a  une  valeur  double. 

LEPSIS,  terme  de  la  musique  grecque.  V,  Anabase. 

LEPTON,  monnaie  des  anciens  Grecs,  le  7*  du  chalcus 
(  V.  cê  mot).  Chez  les  Grecs  modernes,  le  lepton  est  une 
monnaie  de  cuivre,  valant  à  peu  près  un  centime. 

LESCHÉ.  )  V,  ces  mots  dans  notre  Diction^ 

LÈSE-MAJESTÉ.  ]     naire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

LESGHIZE  (Langue),  une  des  langues  caucasiennes 
(  y.  ce  mot)^  parlée  dans  le  Daghestan  avec  des  dialectes 
tellement  <tissemblables,  qu'il  faut  la  plus  grande  atten- 
tion pour  distinguer  les  ressemblances  qui  les  rappro* 
chent.  Les  principaux  de  ces  dialectes  sont  Vaware  et 
Vakuscha. 

LÉSION ,  en  termes  de  Droit ,  dommage  souffert  par 
suite  d'une  convention,  et  qui  autorise  à  demander  la 
rescision  (F.  ce  mot).  Ce  dommage  doit  être  d'une  telle 
importance  relativement  à  la  valeur  totale,  qu'il  soit  éri- 
dent  que  la  partie  lésée  a  été  rictime  d'une  fraude. 

LEST  (de  l'allemand  last,  charge),  réunion  de  tous 
les  poids  embarqués  à  bord  d'un  narire  en  sus  dé  son 
chargement ,  pour  le  maintenir  sur  l'eau  dans  la  position 
la  plus  favorable  h  sa  marche  et  à  la  sécurité  de  la  navi- 
zation.  Il  y  a  le  lest  dormant,  placé  à  fond  de  cale,  et  le 
Test  volant^  qu'on  transfère  au  besoin.  La  marine  militaira 
n'emploie  guère  pour  lest  oue  des  gueuses  en  fonde  de 
fer;  dans  les  bâtiments  marcnands,  le  lest  se  compose  dé 
pierres,  de  briques,  de  sable,  etc.  Dans  le  commerce,  no- 
viguer  sur  lest,  c'est  navieuer  sans  cargaison.  Le  lestage 
est  l'action  de  lester  ;  le  délestage  est  l'opération  Contraire. 
Il  est  défendu  de  jeter  le  lest  dans  les  ports,  bnsins  èl 
rades,  sous  i>eine  de  500  fr.  d'amende  pour  la  prenrière 
fois,  et  de  saisie  du  b&timent  pour  les  récidives. 

LETTIQUES  (Langues),  branche  des  langues  slaveè- 
(V,  ce  mot),  formée  du  borussien  ou  vieuar prussien^  du 
lUlntanien  et  dvL  letton  {V.  ces  mots). 

LETTON  ou  LIVONIEN  (Idiome),  idiome  slave  de  to 
branche,  lettique,  appelé  aussi  UUvège  et  letwa»  On  le 
parle  dans  la  portion  de  la  Livonie  désignée  quelquefoh^ 
sous  le  nom  de  Letland  ou  Lettonie,  et  dans  l'ancienne 
Semigalle  (Courlande).  La  moitié  de  ses  racines  est 
slave;  l'autre  moitié  peut  être  attribuée  par  portions  à 
peu  près  égales  au  gothique,  à  l'allemand  et  au  finnois  : 
quelques  mots  russes  s'y  sont  également  introduits.  Ce 
mélange  d'éléments  étrangers  le  rend  moins  original  <fue 
le  lithuanien  ( K.  ce  mot),  mais  donne  à  sa  constructioa> 
plus  de  variété,  à  sa  syntaxe  une  flexibilité  plus  grande. 
Les  deux  idiomes  ont,  en  général,  les  mêmes  traita 
grammaticaux.  Le  letton  est  au  lithuanien  comme  l'ita- 
lien est  au  latin  :  il  possède,  par  exemple,  l'article,  qui 
est  étranger  au  lithuanien.  Il  n'a  que  deux  genres.  Les* 
cas  de  la  déclinaison  sont  au  nombre  de  dx.  La  pronon« 
ciation  est  hérissée  de  sifflantes.  Le  letton  s'écrit  avec 
l'alphabet  allemand,  dont  il  a  même  adopté  l'A  pour  mar* 
quer  la  longueur  de  la  voyelle  précédente.  Certains  sons 
particuliers  s'expriment  par  des  signes  diacritiques,  ijou-» 
tés  aux  lettres  allemandes.  L'orthographe  a  une  bizarrerie 
qui  rend  difficile  l'étude  de  la  langue. 

Le  Letton  a  été  d'assez  bonne  heure  une  langue  litt^ 
raire.  Ses  plus  anciens  monuments  écrits  sont  des  doca« 
ments  officiels  qui  remontent  au  xiû*  siècle.  Vers  1630, 
Ramm  traduisit  les  Psa/umes  en  letton.  Un  siècle  après, 
Einhom  composa  en  latin  une  HisUnre  des  Let$es*  Manael 
fixa  l'orthographe  et  les  règles  de  la  langue  lettone  par 
sa  traduction  des  EpUres^  par  ses  Cantiques,  et  par  la 
composition  d'nn  Vocabulaire.  La  Bible  entière  parut  en- 
1G89,  traduite  par  Fischer  et  GlOck.  Au  lYUi"  sièele^ 
Graven  composa  d'excellents  Cantiques.  Mais  le  plus  nand* 
écrivain  letton  est  Stender,  à  qui  l'on  doit  des  Récits 
épiqtiee,  des  Fables,  des  Chants  nationaux,  une  Gram^ 
maire  lettone  {Brunswick,  1761),  et  un  Dietionmawe 
letton^Ulemand  (Mittau,  1789).  Après  lui  on  doit  citer 
Baumbach ,  poète  lyrique }  Stobbe,  rédacteur  d'un  Jour- 


LET 


1160 


LET 


iil  Utléraire  ott  flê  troavent  réunies  les  poedes  cootem- 

Ï moraines;  Elverfeld,  auteur  de  gracieuses  pastorales; 
ndrick,  chansonnier  populaire  ;  Bâ^;mann,  émteur  d*ou- 
rra^  d'instruction  ;  Rosenberger,  auteur  d'une  Gram- 
maire Uttone,  1830  ;  et  Zlmmermann,  qui  a  écrit  une 
Histoire  littéraire. 

LETTRE,  nom  donné  aoi  signes  ou  caractères  inven- 
tés pour  figurer  par  l'écriture  les  émissions  de  la  parole, 
et  dont  se  composent  les  alphabets  (F.  Alphabr,  Écri- 
tobb).  Les  lettres  se  divisent  en  deux  classes,  les  voyelles 
et  les  coMotifiM  (  F.  ces  mots).  Certaines  combinaisons 
de  voyelles  forment  des  diphthongues  (  V.  ce  mot).  Les 
lettres  servent  à  former  des  syllabes,  les  syllabes  des 
mots,  et  les  mots  des  phrases.  Avant  Finvention  des 
chiinrés  arabes^  on  emplova  les  lettres  pour  marquer  les 
nombres  :  dans  ce  cas,  elfes  sont  dites  lettres  numérales, 

LBTTSB  f  La)  et  TEspRiT.  V,  Esprit. 

Lcme  (Avant  la).  V,  Épreovb. 

LETTRB  ou  LBTTRB  MISSIVE,  écrit  destiué  à  être  envoyé 
à  une  personne  absente,  ou  publié  sous  la  forme  épisto- 
laire  sans  être  adressé  à  un  correspondant  réel.  V.  Épi- 
STOLAiBB  (Genre).  —  L'administration  des  Postes  trans- 
porte les  lettres  des  particuliers  moyennant  l'acquittement 
d'une  taxe  (  V.  Taxe).  Les  lettres  chargées,  c-à-d.  dont 
l'expéditeur  fait  constater  le  dépôt  dans  un  bureau  de 
poste,  par  un  reçu  qu'on  lui  donne,  doivent  toujours  être 
affranchies,  et  payent  une  surtaxe  de  20  centimes  :  une  in- 
demnité de  50  fr.  est  accordée  pour  la  perte  de  toute  lettre 
chargée,  mais  dont  la  valeur  n'a  pas  été  déclarée  au  mo- 
ment de  l'afnranchissement.  Dans  le  cas  de  déclaration, 
la  quotité  de  la  somme  incluse  dans  la  lettre  doit  être  écrite 
d'avance,  par  l'expéditeur  lui-même,  sur  l'adresse,  sans 
rature  ni  surcharge;  alors  l'administration  est  responsable 
de  l'intégralité  de  la  somme,  si  la  lettre  est  perdue,  sans 
cas  de  force  majeure.  Une  lettre  ne  peut  contenir  plus  de 
2,000  fr.  ;  l'administration  ne  répond  que  de  cette  somme 
pour  une  seule  lettre.  Il  est  interdit  aux  messagers,  voitu- 
rlers,  conducteurs  de  diligence,  et  à  tout  voyageur  de  por- 
ter des  lettres,  soit  à  découvert,  soit  dans  aes  paquets  ou 
ballots  fermés,  sous  peine  d'une  amende  de  150  à  300  tr.  : 
on  excepte  les  lettres  qu'un  particulier  adresse  à  un  autre 
par  son  domestique  ou  par  un  exprès.  On  ne  doit  insérer 
dans  les  lettres  conilées  à  la  poste  ni  effets  au  porteur, 
ni  espèces  monnayées,  ni  matières  d'or  ou  d'argent,  ni 
autres  objets  prédieux  :  l'administration  ne  répond  pas 
de  la  perte  de  ces  objets.  Pour  retirer  une  lettre  Jetée 
dans  une  boite  de  bureau,  il  faut  signer  une  déclaration 
qu'on  est  l'auteur  de  cette  lettre,  garantir  la  responsa^ 
bilité  des  effets  de  sa  suppression  ou  de  son  retard,  être 
connu  du  directeur,  ou  se  présenter  accompagné  de  deux 
témoins  domiciliés  et  connus;  la  lettre  est  ouverte  en 
leur  présence  pour  constater  l'identité  de  la  signature  do 
la  lettre  et  de  celle  du  réclamant.  Pour  pouvoir  retirer 
une  lettre  adressée  poste  restante,  il  faut  Justifier  de  son 
Identité,  soit^par  la  production  d'un  passe-port  ou  d'autres 
lettres  adressées  au  même  destinataire,  soit  par  des  té- 
moins connus  et  domiciliés.  Il  est  IntOTdit  aux  employés 
des*  postes  de  chercher  à  pénétrer  le  contenu  des  lettres, 
et  même  de  chercher  à  connaître  et  de  divulguer  que  tel 
exnédie  ou  reçoit  des  lettres  (Lois  des  10,  14  et  26  août 
1790).  Toute  suppression,  toute  ouverture  de  lettres, 
commise  ou  facilitée  par  un  fonctionnaire,  est  punie 
d'une  amende  de  16  fr.  à  300  fr.,  et  de  l'interdiction  de 
toute  fonction  ou  emploi  public  pendant  5  ans  au  moins 
et  10  ans  au  plus.  X'employé  des  postes  qui  a  supprimé 
ou  soustrait  une  lettre,  pour  s'emparer  des  valeurs  qu'elle 
contenait,  subit  la  peine  des  travaux  forcés  à  temps;  s'il 
n'est  pas  constaté  que  la  lettre  renfermait  des  valeurs,  il 
encourt  la  peine  de  la  reclusion  {Code  pénal,  art.  173, 
187,  386^.  Les  lettres  adressées  à  un  né^iant  constitué 
en  état  de  faillite  sont  remises  aux  agents  ou  aux  syndics 
constitués  par  le  tribunal  pour  gérer  la  faillite;  celles 
adressées  à  des  individus  en  état  de  prévention  ou  d'ac- 
cusation peuvent  être  saisies  en  vertu  d'une  réquisition 
dn  procureur  impérial.  Les  lettres  adressées  à  une  per  • 
senne  décédée  sont  portées  au  domicile  désigné,  aussi 
longtemps  qu'elles  y  sont  reçues,  à  moins  que  le  directeur 
je  la  poste  n'ait  été  autorisé  par  un  acte  légal  à  les  re- 
mettre ioit  à  un  exécuteur  testamentaire,  soit  à  un  tu- 
leor,  soit  à  un  héritier  ou  h  toute  autre  personne.  Les 
lettres  refusées,  ou  dont  les  adresses  sont  erronées  ou 
illisibles,  sont  renvoyées  à  l'administration,  qui  les  re- 
toome  à  leurs  auteurs,  ou  qui,  faute  de  renseignements 
suffisants,  les  laisse  au  bureau  des  rebuts,  puis  les  détruit 
après  un  temps  déterminé.  —  En  Droit,  les  lettres  mis- 
nvet,  écrites  et  signées  par  ceux  dont  elles  émanent, 


forment  des  actes  aeos  seing  privé  ma  peuvent  établir 
des  conventions,  des  engagements,  des  oécharges.  Mais 
on  ne  pourrait  produire  comme  preuve  d'une  convention 
une  lettre  qu'une  des  parties  aurait  adressée  à  un  tien; 
de  plus,  une  lettre  ne  peut  être  produite  en  Justice  sans 
le  consentement  de  la  personne  qui  l'a  reçue,  et  elle  ne 
doit  Jamais  l'être  si  elle  avait  un  caractère  confidentiel, 
indiqué  dans  la  suscription  ou  l'adresse.  Avant  d'être  pro- 
duites en  Justice,  les  lettres  missives  doivent  être  visées 
pour  timbre,  sous  peine  de  5  fr.  d'amende  :  elles  payent 
un  droit  fixe  de  2  fr.  si  elles  ne  contiennent  ni  obuga- 
tion,  ni  quittance,  ni  convention;  celles-là  seules  sont 
soumises  au  droit  proportionnel,  qui  servent  de  titre  an 
cr^cier  pour  l'obligation,  ou  au  débiteur  pour  sa  libé- 
ration. 

LBTTBB  (COIITBE-).  V,  GONTBB-LBTTBB. 

LETTBB  CLOSB,  lettre  du  chef  de  l'État,  scellée  de  son 
sceau. 

LETTBE  DB  CACHET,  nom  doutté,  avant  la  Révolutîon,  à 
une  lettre  signée  du  Roi  de  France,  scellée  de  son  soeaa 
privé,  et  adressée  à  une  autorité  pour  lui  signifier  la  vo- 
lonté de  S.  M.  C'était  pour  convoquer  à  quelque  grande 
assemblée,  pour  commander  une  cérémonie  publique, 
telle  qu'un  te  Deum,  par  exemple  ;  mais  le  plus  souvent, 
c'était  un  ordre  arbitraire  et  personnel  contre  la  liberté 
d'une  pœsonne,  ordre  d'exil  ou  d'incarcération.  Cest  dans 
ce  dernier  sens  que  les  lettres  de  cachet  sont  surtout 
célèbres.  Sous  Louis  XIV,  la  Régence,  et  Louis  XV,  on  en 
fit  abus  pour  envoyer  dans  les  prisons  d'État  des  gens  de 
toute  condition,  qui  n'avaient  d'autre  tort  que  d'avoir  dé- 

fdu  à  la  Cour,  aux  ministres,  ou  à  leurs  protégé.  La 
ettre  de  cachet  était  imprimée  :  il  n'y  avait  à  remplir 
que  les  noms  du  prétendu  criminel  d'État,  celui  du  Ahr 
teau  fort  où  il  fallait  l'incarcérer,  et  la  date  du  Jour.  La 
lettre  était  signée  d'avance  (du  moins  sous  Louis  XV) 
par  une  griffe  de  la  signature  du  Roi,  confiée  à  un  estam- 
pilleur  chargé  de  cet  office.  Il  existe  à  la  bibliothèque 
impériale  de  S*-Pétersbourg,  au  département  des  manu- 
scrits, beaucoup  d'exemplaires  authentiques  de  ces  impri- 
més; void  leur  libellé  uniforme  : 

«  Mons ,  Je  vous  fais  cette  lettre  pour  vous  dire  de 

«  recevoir  IL.,  dans  mon  ch&tean  de  •••..•.,  et  de  l'y  r^ 
«  tenir  Jusqu'à  nouvel  ordre  de  ma  part. 

«  Sur  ce.  Je  prie  Dieu  qu'il  vous  ait,  Mons ,  en  sa 

«  sainte  garde. 

«  Écrit  à. LoDis.  v 

Pour  peu  que  l'on  eût  de  crédit  auprès  des  ministres 
ou  du  lieutenant-général  de  police,  on  obtenait  aisément 
de  ces  imprimés,  dont  ils  avaient  provision.  Les  châteaux 
de  S.  M.  étaient  la  Bastille  et  Vincennes,  et,  quand  ils 
étaient  encombrés,  Belle-Isle  et  Charenton. 

La  lettre  était  envoyée  à  un  huissier,  qui  se  mettait  en 
quête  de  la  victime,  venait  l'arrêter  à  son  domicile,  et  la 
conduisait  au  lieu  désigné.  Sur  le  vu  de  ce  passe-port 
banal  d'incarcération ,  le  gouverneur  recevait  le  prison- 
nier qu'on  lui  amenait,  et  le  gardait  Jusqu'à noutwiordrs. 

Le  nouvel  ordre  était  ausâ  une  lettre  de  cadiet,  avec 
un  court,  nuiis  très-grave  changement  dans  la  rédaction. 
En  voici  un  spécimen  provenant  de  la  même  source  que 
plus  haut  : 

«  Mons ,  Je  vous  fais  cette  lettre  pour  vous  dire  de 

«  mettre  en  liberté  M que  vous  détenei  par  mes 

«  ordres,  dans  mon  ch&teau  de 

«  Sur  ce.  Je  prie  Dieu  qu'il  vous  ait,  Mons ,  en  sa 

a  sainte  garde. 

«  Écrit  à. 

a  LODES.  » 

Vers  la  fin  du  règne  de  Louis  XV,  les  prisons  d'Étal 
regorgeaient  de  victimes  des  lettres  de  cacnet;  des  mal- 
heureux y  languissaient  depuis  de  longues  années,  pour 
des  causes  où  il  n'y  avait  de  grave  que  la  haine  ou  la 
dureté  des  gens  puissants  qui  les  y  maintenaient;  mais, 
hors  ces  cas  exceptionnels,  la  détention  ordinaire  variait 
de  8  à  15  Jours.  Sous  Louis  XVI,  en  1788,  les  prisons 
étaient  presque  vides. 

Les  autorités  et  les  grands  seigneurs  puissants  fUsalent 
détenir  les  prisonniers  aux  ferais  du  Rot,  comme  oo  disait, 
c.-à-d.  de  l'État;  mais  la  lettre  de  cachet  était  si  bien 
passée  en  habitude,  ou'on  en  donnait  aussi  aux  chefs  de 
familles  qui  en  sollicitaient ,  contre  leurs  enfants,  leon 
femmes,  leurs  descendants  :  dans  ce  cas,  ils  payaient 
l'entretien  des  prisonniers.  Cette  lettre  de  cachet  privés 
était  ainsi  conçue  s 


LET 


1161 


LÊT 


■  De  IMT  le  Roi,  il  est  ordonné  à. .  • .  • .  d'arrêter  et  de 

c  eonduire  à .  •  •  •  •  •  le  nommé aux  dépends 

«  de (son  pèrot  son  grand-père  ou  sa  grand* 

mère,  etc.) 

«  Fait  à  Versailles ,  le » 

Vwa  citer  an  exemple,  entre  mille,  de  cette  tyrannie 
domesdqae,  nous  rappellerons  qae  le  marquis  de  Mira- 
beaa,  qai  s'appelait  lui-même  Vomi  des  hommes,  le  père 
du  gmnd  orateur  de  la  Révolution,  avait  sollicité  et  obtenu 
54  lettres  de  cachet,  tant  contre  son  fils  que  contre  sa 
femme!  Il  en  fit,  plusieurs  fois,  un  moyen  de  se  débarras- 
ser de  procès  en  réclamations  de  biens  qu'il  eut  à  soute- 
nir contre  eux.  Le»  lettres  de  cachet  tombèrent  avec  la 
Bastille,  le  14  juillet  1789.  C.  D  —y. 

LBTTBV  DB  CHAiiGs.  Lo  contrst  de  change  (V.  Change) 
consiste  à  livrer  dans  un  lieu  une  valeur  fournie  dans  ud 
antre  lieu.  La  lettre  de  change  constate  ce  contrat.  Elle 
ressemble  sous  certains  rapports  au  mandat;  mais  elle 
doit  être  accepta  (te  refus  d'acceptation  est  constaté  par 
un  acte  qu'on  nomme  Protêt  faute  d^acceptation),  et 
entraîne  des  conséquences  plus  graves  en  cas  de  non- 
payement.  La  lettre  de  change,  dit  le  Code  de  Com- 
merce (art.  110),  doit  être  tirée  d'un  lieu  à  un  autre. 
Elle  est  datée.  Eue  énonce  :  1®  la  somme  à  payer;  2<*  le 
nom  de  celui  qui  doit  payer  ;  3*  l'époque  et  le  lieu  où  le 
payement  doit  être  effectué  ;  4<»  la  valeur  fournie  en  es- 
pèces, en  marchandises,  en  compte  ou  de  toute  autre  ma- 
nière. Elle  est  à  l'ordre  d*un  tiers  ou  h  l'ordre  du  tireur 
hn-même,  suivant  le  libellé  ci-dessous  : 


Paris,  et  l«r  vnan  1802.        B.  P.  P.  1000. 

A  qaannte  Joins  de  date,  payes  par  cette 
première  de  change,  à  l'ordre  do  M.  Paul,  la 
eomme  de  millb  francs,  valeur  reçue  en  esçècea 
que  TOUS  passerez  sana  antre  avis  (  ou  suivant 
avis  du 1868). 

U.  Jacquss,  Pibrrb. 

Négociant  i  Besancon. 


Quand  on  fait  plusieurs  exemplaires  d'une  même  lettre 
de  change,  dans  la  crainte  que  l'un  d'eux  ne  soit  perdu 
dans  le  voyage,  on  le  mentionne,  en  disant  : 

a  A  quarante  Jours  de  date,  payez  par  cette  deuxième 
de  change,  la  première  ne  Tétant  pas  (ou  la  2*,  ou  la 
3*,  etc.)  «  à  l'ordre  de » 

On  appelle  tireur  celui  oui  tire  la  lettre  de  change, 
c'est  id  Pierre;  et  tiré^  celui  sur  qui  on  la  tire,  c'est  ici 
Jacques.  Quand  le  tiré  a  une  fois  pris  l'engagement,  tou- 
jours nécessaire  pour  la  validité  du  titre,  de  payer  la 
lettre,  il  devient  accepteur.  Le  bénéficiaire  est  celui  qui 
la  reçoit  ;  le  premier  bénéficiaire  est  toujours  celui  à  l'oi^ 
dre  de  <rai  elle  est  tirée,  c'est  ici  Paul.  Le  porteur  est 
celui  qui  l'a  en  sa  possession  au  moment  de  l'échéance. 
n  Caot  avoir  le  soin  de  mettre  en  tète,  d'un  côté,  la  date 
et  le  lieu  auxquels  la  lettre  est  tirée,  de  l'autre  B.  P.  F., 
c-à-d.  Bon  pour  francs,  et,  à  la  suite,  la  somme  en 
chiffres.  Dans  le  corps  du  billet,  la  somme  doit  être  écrite 
en  toutes  lettres  et  en  gros  carsctères.  Si  la  somme  était 
payable  en  livres  sterling, on  mettrait  en  tète  :  B.  P.  L.  st.; 
car  une  lettre  de  change  doit  toujours  désigner  la  mon- 
naie dans  laquelle  elle  doit  être  payée.  On  peut  exprimer 
f  époque  de  l'échéance  en  jours  ou  en  mois.  Au  lieu  de 
par  cette  première,  ou  seconde,  ou  troisième  de  change, 
on  peut  mettre  :  par  cette  seule  de  change,  ou  par  cette 
lettre  de  change,  si  on  ne  fait  qu'un  seul  exemplaire.  On 
désigne  toujours  la  nature  de  la  valeur  fournie  :  valeur 
en  espèces  ou  valeur  comptant  signifie  que  le  tiré  a  reçu 
de  rargent;  valeur  en  fournitures  ou  valeur  en  mar- 
duÊHdîses,  qu'il  a  reçu  des  marchandises;  valeur  en 
compte,  qu'il  y  a  un  compte-courant  entre  le  tireur  et  le 
tiré.  Que  vous  passerez  veut  dire  :  «  Que  vous  passerez 
sur  T3S  livres  au  débit  de  mon  compte.  »  On  peut  tirer 
une  lettre  de  change  sur  un  débiteur  sans  le  prévenir, 
surtout  quand  on  a  de  fréquentes  relations  avec  lui  et 

£'oo  est  dans  l'usage  d'agir  ainsi  ;  c'est  dans  ce  cas  qu'on 
ît  :  ums  autre  ams.  JÙtais  il  est  bien  plus  sage  oie  le 
jfféveolr,  puisque  la  lettre  de  change  suppose  acceptation 
dfe  la  part  du  tiré;  dans  ce  cas  on  écrit  :  suivant  avis 
Al....,  arec  la  date  du  Jour  où  on  l'a  fait  prévenir  par 
Boe  lettre  d'ntris.  Au-dessous  du  nom  du  tiré,  il  ne  faut 


qui  sera  porteur  de  la  lettre  au  moment  de  Téchéance  en 
quel  lien  il  devra  être  pavé.  Pour  qu'une  lettre  de  change 
soit  valable,  il  faut  qu'elle  ait  été  réellement  tirée  d'un 
lieu  sur  un  autre,  et  que  le  tiré  soit  bien  commerçant. 
La  loi  s'est  montrée  tres-sévère  à  cet  égard.  «  Sont  rou- 
tées simples  promesses  toutes  lettres  de  change  contenant 
supposition  soit  de  nom,  soit  de  qualité,  soit  de  domicile, 
soit  des  lieux  où  elles  sont  tirées  ou  dans  lesquels  elles 
sont  payables  (art.  112  du  Code  de  Commerce).  »  Cette 
sévénté  a  pour  but  d'empêcher  les  simples  créances  or- 
dinaires de  particuliers  de  revêtir  la  forme  du  contrat  de 
change,  entraînant  après  lui  la  poursuite  devant  les  tri* 
bunaux  de  commerce  et  la  contrainte  par  corps.  Cepen- 
dant il  arrive  tous  les  Jours  que  la  loi  est  violée  malgré 
ces  précautions.  La  lettre  de  change  peut  se  transporter 
par  voie  d'endossement  (  V,  ce  mot),  La  loi  a  fixé  les  ter- 
mes d'échéance  suivants  :  la  lettre  à  vue  est  payable  à  sa 
{>résentation  ;  la  lettre  après  délai,  à  l'échéance  fixée  par 
a  date  de  Tacceptation  ;  la  lettre  à usance  est  de  30 Jours; 
la  lettre  payable  en  foire  est  échue  la  veille  du  Jour  de  la 
clôture  de  la  foire.  V,  Schiebé,  Traité  théorique  et  pratique 
des  lettres  de  change,  1819,  in-8<>  ;  Fœlix,  Des  Lettres  de 
change  et  billets  d^ Angleterre,  1835,  in-S^;  Persil,  Traité 
de  la  lettre  de  change,  1837,  in-8«  ;  Pardessus,  Traité  du 
contrat  et  des  lettres  de  change,  1800, 2  vol.  in-8^;  Vèche, 
Traité  de  la  lettre  de  change^  1846,  in-8*  ;  Nouguier,  Des 
lettres  de  change  et  des  effets  de  commerce  en  général , 
2*  édit.,  1851, 2  vol.  in-8«.  —  V,  aussi  Lbttrb  de  change, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Histoire,    L. 

LETTRE  DE  CSéANCE.   V,  CRéANCB. 
LETTRE  DE  CRéOlT.   V,  CséofT. 

LETTRE  DE  GAGE,  uom  douné  sux  tltros  de  crédit  ou 
obligations  qu'une  Société  de  crédit  foncier  émet,  et  qui 
ont  pour  garantie  le  fonds  social  et  l'ensemble  des  pro- 
priétés sur  lesquelles  la  Société  a  hypothèque.  Les  lettres 
de  gage  sont  nominatives  ou  au  porteur,  et  portent  inté- 
rêt. 11  est  procédé  chaque  année  à  leur  remboursement 
au  prorata  des  sommes  affectées  à  l'amortissement  des 
emprunts. 

LETTRE  DE  MARQDE,  sutorisation  dounéo  par  un  État  & 
ses  nationaux,  et  pour  un  temps  déterminé,  d'armer  des 
b&timents  en  guerre,  et  de  fure  la  course  sur  les  vais- 
seaux ennemis  {V,  Course).  On  fait  dériver  l'expression 
de  l'ancien  mot  mark  (frontière),  parce  que  c'est  comme 
une  autorisation  de  franchir  les  frontières  du  pays  avec 
lequel  on  est  en  gi^erre.  En  France,  les  lettres  de  marque 
étaient  délivrées  par  le  ministre  de  la  marine  ;  dans  les 
colonies,  par  les  gouverneurs  (V.  la  Ix>i  des  31  Janvier- 
1*''  février  1793,  et  l'arrêté  du  2  prairial  an  xi,  —  22  mai 
1803). 

LETTRE  DE  MBB,  OU  tcrmos  de  Marine,  est  synonyme  de 
congé  (V.  ce  mot), 

LETTRE  DE  NATURAUSATION.   V,  NATCRAUSATION. 

LETTRE  DE  RAPPEL,  notificatiou  adressés  à  un  ambassa* 
deur  pour  mettre  fin  à  sa  mission  et  le  rappeler  dans  son 
pays. 

LETTRE  DE  RECséANCB,  lettre  qu'uu  souvendu  envoie  à 
son  ambassadeur  pour  la  présenter  au  prince  d'auprès 
duquel  il  le  rappelle.  On  donne  le  même  nom  à  la  lettre 

3u'un  prince  remet  à  un  ambassadeur  qui  prend  congé 
e  lui  pour  le  prince  qui  a  notifié  le  rappel. 

LETTRE  DE  RELIEP.   Y,  DéROGEANCE. 

LETTRE  DE  SERVICE,  lettre  ministérielle  par  laquelle  un 
officier  en  disponibilité  est  appelé  h  remplir  les  fonctions 
de  son  grade. 

LETTKB  DE  VOITURE,  fouiUe  ouverto,  adresséc  à  toute  per- 
sonne à  qui  l'on  envoie  des  marchandises  par  voitures 
ou  bateaux.  Elle  doit  être  datée,  exprimer  la  nature  et  le 

Soids  ou  la  contenance  des  objets  à  transporter,  le  délai 
ans  lequel  devra  se  faire  le  transport,  les  nom  et  domi- 
cile du  commissionnaiie  par  l'entremise  duquel  ce  trans- 
port s'opère  s'il  y  en  a  un,  le  domicile  du  voiturier,  le 
nom  du  destinataire,  le  prix  du  transport ,  et  l'indemnité 
due  pour  cause  de  retara.  Elle  est  assujettie  à  un  timbre 
fixe  de  35  centimes,  et  signée  par  l'expéditeur  ou  le  com- 
missionnaire. Le  commissionnaire  est  tenu  d'en  avoir  U 
copie  sur  un  registre  coté  et  paraphé  sans  intervalles. 
LETTRE  DOMINICALE,  è  V.  CM  mots  dsDS  notro  Dictioi^ 
LETTRE  PASTORALE.   >     natfs  de  Biogr.  et  SHistoire, 
LETTRES,  mot  qu'on  emploie  souvent  pour  désigner 
l'ensemble  des  connaissances  qui  concourent  à  l'ornement 
de  l'esprit.  On  appelle  spécialement  Belles- Lettres  la 
grammaire,  l'éloauence  et  la  poésie,  ce  gue  les  Romains 
désignaient  sous  le  beau  nom  de  humantores  litterœ,  \e$ 
lettres  les  plus  humaines. 
LETTRES  (Fruités  dcs),  corps  de  professeurs  chargés 


LE¥ 


1162 


LIA 


de  l'ttiiMigiMiiieiit  SQpârieor  des  Lettres  dans  rUniTenité 
de  France.  On  en  compte  16,  siégeant  à  Aix,  Besancon, 
Bordeaux,  Gaen,  aermont^Ferrand,  DHon,  Douai,  Gre- 
noble, Lyon,  Montpellier,  Nancy,  Paris,  Poitiers.  Rennes, 
Strasboorg  et  Toaiouse.  Les  FM^ultés  ont  des  chaires  de 
littérature  ancienne,  de  littérature  française,  de  littéra- 
ture étrangère,  de  philosophie,  et  d'histoire.  A  la  Faculté 
de  Paris,  ces  divers  enseignements  sont  morcelés  :  ainsi, 
il  T  a  des  chtthiBs  pour  la  littérature  grecque,  Téloquence 
latine,  la  poésie  latine.  Téloquenoe  française,  la  poésie 
fipsnçidse,  la  philosophie,  Tbistoire  de  la  philosophie, 
Thistoire  ancienne,  Thistoire  moderne,  la  géographie,  etc. 
Toutes  les  FactLltte  confèrent  les  trois  grades  universi- 
taires, baccalauréats  licence  et  doctorat.  Le  traitement 
des  proressenrs  se  composa  de  deux  éléments,  Tun  fixe 
et  Pautre  éventuel  :  le  traitement  fixe  fut  de  7,500  fr. 
à  Paris,  et  de  5,000  fr.  dans  les  départements.  Le  trai- 
tement éventuel  fut  le  droit  de  prMence  aux  examens  : 
ce  droit  fut  de  7  fr.;  un  décret  du  20  déc  1854  fixa, 
à  Pnri8«  un  maximum  de  prodoit  éventuel,  qui  fut  de 
5,000  fr.  pour  les  professeurs  et  le  secrétaire,  de 
9,500  fr.  pour  les  asrégés.  (F.  AeaisATioif.)  Un  arrêté 
du  7  mars  1853  a  réglé  la  distribution  des  matièrea  de 
chaque  enseignement  F.  le  SupplémeiU, 

LgTTRBs  (Hommes  de).  F.  Gras  db  LEiraBS. 

LETTRINE  (diminutif  de  Uttre),  nom  que  l'on  donne, 
en  lyposraphie,  1*  aux  petites  lettres  placées  an-dessus 
ou  à  côté  d*un  mot  pour  renvoyer  le  lecteur  h  des  notes 
placées  à  la  marge  ou  au  bas  de  la  page;  î?  aux  minus- 
cules placées  au  haut  des  pages  ou  des  colonnes  d*un  dic- 
tiennaire  pour  indiquer  les  initiales  des  mots  qui  s'y 
trouvent. 

LETTRISÊS  (Vers),  nom  donné  aux  vers  dont  les 
mots  commencent  par  la  même  lettre,  V»  AixiriBATiON. 

LEU  D*ESSER£NT  (Église  de  Saint-),  dans  le  dépar- 
tement de  rOise,  à  6  kilom.  S.-O.  de  Greil.  Cest  un  re- 
marquable monument  de  la  transition  entre  Tarchitec- 
ture  romane  et  l'architecture  ogivale.  Le  portail  consiste 
en  une  grande  arcade  romane  ornée  de  trois  rangs  de 
zigzags  et  reposant  sur  de  courtes  colonnes  à  chapiteaux 
rustiques.  A  droite,  le  clocher,  haut  de  50  met.,  présente 
deux  étages  de  légères  arcades  romanes,  surmontés  d'une 
flèche  octogone  à  écailles  de  poisson  et  dont  chaque  angle 
est  garni  d'un  clocheton  élégant.  Derrière  le  portail,  un 
porche,  aussi  large  oue  l'église,  et  profond  de  6  met., 
supporte  une  vaste  salle  voûtée,  reposant  sur  des  piliers 
à  chapiteaux  fantastiquement  historiés,  et  éclairée  par 
des  fenêtres  romanes.  L'église,  longue  de  71  met.,  large 
de  21  met.,  haute  de  27  met.  sous  voûte,  est  dépourvue 
de  transept ,  et  se  termine  en  hémicycle  à  l'orient.  Les 
In»  côtés,  qui  tournent  autour  du  chœur  et  du  sanc- 
tuaire, sont  séparés  de  la  nef  par  de  larges  arcades  à 
ogives  surbaissées,  portant  sur  24  gros  piliers  romans  à 
chapiteaux  ornés  de  feuillages.  De  minces  colonnes,  ados- 
sées à  une  partie  de  ces  piliers,  s'élancent  jusqu'à  la 
naissance  des  voûtes,  tandis  qu'aux  autres  les  colon- 
nettes  s'élèvent  seulement  à  partir  des  chapiteaux.  Au- 
dessus  des  arcades  règne  une  galerie,  qui  s'ouvre  sur 
Féçlise  par  de  petites  ogives  géminées  très-simples,  et 
^  qui  était  éclairée  extérieurement  par  de  petites  fenêtres 
romanes,  aujourd'hui  bouchées,  et  alternant  avec  des  ro- 
saces. La  galerie  est  surmontée  de  42  larges  et  hautes 
fenêtres  à  ogive.  Le  chœur  et  le  sanctuaire  ont  presque 
la  même  longueur  que  la  nef.  Sur  chaque  Imis  côté,  pa- 
rallèlement au  sanctuaire,  s'élève  une  tour  romane  sans 
flèche.  L'abside  est  garnie  de  cinq  chapelles. 

LEVAGE,  en  termes  de  Construction,  pose,  sur  un  bâ- 
timent, des  différentes  parties  d'une  charpente  taillée  au 
chantier. 

LEVÉ ,  en  termes  de  Musique,  se  dit  du  temps  de  la 
mesure  où  on  lève  la  main  ou  le  pied.  Cest  toujours  un 
temps  faible. 

LEVÉE,  élévation  de  terre  ou  de  maçonnerie  en  forme 
de  digue  pour  retenir  les  eaux  d'un  canal,  d'une  rivière, 
ou  pour  servir  de  chemin  à  travers  un  marais.  La  plus 
belle  levée  ouMI  v  ait  en  France  est  celle  des  bords  de  la 
Loire,  depuis  Orléans  Jusqu'à  Nantes. 

LEviB  MiuTAisB.  V,  notTO  Dictûmnatre  d$  Biographie 
et  SHi$toir$, 

LEVÉES  (Pierres).  V.  Gbltxqubs  (Monuments). 

LEVER-DIEU,  moment  de  la  Messe  où  le  prêtre  élève 
Pbostie  consacrée. 

LEVIER  PNEUMATIQUE.  Cet  appardl,  qu*on  appelle 
•nssl  mécanisme  BarkHr,  du  nom  de  son  inventeur,  est 
^pliqué  au  mécanisme  ordinahre  des  claviers  de  l'orgue, 
et  a  pour  objet  de  rendre  rabaissement  des  touches  aussi 


facile  que  sur  le  piano,  et  de  donner  une  légèreté  psiftits 
an  toucher,  même  dans  le  cas  où  plusieurs  claviers  se 
trouvent  réunis  sur  un  seul.  Cet  appareil  se  oomposs  : 
1*  d'une  série  de  petits  soufflets,  dont  un  pour  chaque 
touche  du  clavier  principal  ;  2»  d'une  série  de  soupapes  ft 
double  effet  attenantes  anxdits  souflleU,  et  destinées  à 
être  mises  en  Jeu  par  l'action  des  touches;  elles  ont  pour 
objet  de  laissÎBr  pénétrer  de  Pair  comprimé  dans  les 
soufflets,  de  manière  à  les  gonfler  lors  de  la  dépression 
des  touches ,  et  de  les  dégonfler  quand  ces  dernières  as 
relèvent,  afin  d'établir  une  succession  de  mouvementi 
identioues  avec  ceux  des  touches,  et  qui,  transmis  par  le 
mécanisme  ordinaire  Jusqu'aux  soupapes  propres  de  l'or- 
gue, admettent  le  vent  aux  tuyaux  sans  qu'il  y  ait  aucune 
résistance  sensible  sous  les  doigts  de  l'organiste  ;  3®  d'une 
série  de  pédales  qui  ont  pour  effet  de  porter  l'action  do 
levier  pneumatique  sur  tel  ou  tel  clavier,  de  constituer 
des  accouplements  de  toute  nature,  soit  à  l'unisson,  soit 
à  l'octave  grave  ou  aiguô,  d'augmenter  ainsi  presque  îd- 
déflniment  la  puissance  et  la  variété  des  effets.  Le  ICTier 
pneumatique,  appliqué  généralement  aujourd'hui  à  toutes 
les  grandes  orgues,  est  le  jplus  ingénieux  et  le  plus  utile 
perfectionnement  qu'on  ait  introduit  dans  la  facture  des 
orgues.  F.  G. 

LEVIÇAT.  ) 

LÉVITES.  (  F.  ces  mots  dans  notre  Dtctionnotrt 

LÊVITIQUE.      (        de  Biographie  et  d^ Histoire. 

LEXIARQUES.  ] 

LEXICOGRAPHIE,  ensemble  des  règles  qui  concernent 
la  composition  des  Lexiques ,  Vocabulaires  ou  Diction- 
naires de  mots  d'une  langue.  Quelques  grammairiens  ont 
donné  le  même  nom  à  la  partie  de  la  grammaire  qoi 
traite  des  mots  considérés  isolément  et  en  eux-mêmes, 
sans  tenir  compte  des  reports  qu'ils  ont  les  uns  avec 
les  autres,  lesquels  font  l'objet  de  la  SytUaœe.  D'autres 
disent  Lexicologie,  d'autres  Lexigraphie,  P. 

LEXIQUE  (du  grec  lexicon,  livre  de  mots).  Chez  les 
anciens  Grecs,  ce  mot  correspondait  à  ce  que  nous  appelons 
Dictioinnaire  ou  Vocabulaire,  Les  Lexiques  n'étaient  pas 
chez  eux  des  recueils  simplement  destinés  à  donner  l'or- 
thographe et  l'accent  de  chaque  mot  de  la  langue,  mais 
des  recueils  tout  à  la  fois  orthographiques,  philologiques, 
littéraires,  critiquée,  interprétatifs,  comme  nous  pouvons 
en  juger  par  les  monuments,  fort  inconipiets  d'ailleurs, 
qui  nous  sont  parvenus  en  ce  genre.  Quelques-uns  de 
ces  Lexiques  sont  de  véritables  commentaires  :  par  exem- 
ple, celui  d'Harpocration ,  qui  contient  le  catalogue  et 
l'explication  de  tous  les  termes  judiciaires ,  législatif, 
administratifs,  politiaues,  employés  par  les  dix  orateurs 
athéniens  qui  avaient  laissé  des  ouvrages  ;  celui  de  Suidas, 
à  la  fois  biographique,  historique,  géographique  et  litté- 
raire, et  rempli  de  citations.  VEtymologicum  magnum, 
VOnomcuticfin,  etc.,  ne  sont  que  des  variétés  de  ce  genre 
de  recueils. — La  littérature  latine  a  été  beaucoup  moins 
riche  en  Lexiques  que  celle  des  Grecs.  Il  ne  nous  en  est 
parvenu  aucun  monument  complet;  le  plus  important  qui 
nous  en  reste  est  l'abrégé  de  seconde  main  du  Diction- 
naire de  Verrius  Flaccus.  —  Chez  les  Modernes,  le  mot 
Lexique  ne  s'est  guère  appliqué  qu'aux  recueils  de  mots 
des  langues  mortes.  Tels  sont  les  Isxica  grafco-latina  de 
Craston  (xv*  siècle),  de  Constantin  (xvi*  siècle),  de  Sca- 
pula  et  de  Schrevelius  (xvii*  siècle),  etc.  Les  Lexioues  les 
plhs  importants  datent  du  xvni*  siècle  ;  ce  sont  :  Lsxicon 
totius  IcUinitatis  de  Facciolati  ;  Lexicon  technologie  grm- 
corum  rhetoricœ^  et  Lexicon  technologiœ  IcUinorum  rhe- 
torum,  d'Emesti.  On  a  sous  le  nom  de  l'abbé  Prévost 
(1755)  un  Manuel-Lexique  pour  la  langue  française,  qui 
n'offre  rien  de  remarquable.  En  général,  pour  les  langues 
modernes,  on  se  sert  du  terme  Vocabuûitre  (  K  es  mot). 
Certains  Lexiques  relatifs  aux  langues  anciennes  portent 
le  nom  de  Thésaurus  {V,  es  mot).  Les  Lexiques  renfer- 
mant les  mots  propres  à  certains  dialectes  ou  patois,  soit 
du  moyen  âge,  soit  des  temps  modernes,  s'appellent 
Glossaires  (V,  ce  mot).  P. 

LÉZARDÉ,  fente  qui  se  produit  dans  un  mur  à  la  suite 
d'un  tassement  ou  de  ouelque  rupture  ou  écrasement. 
Lorsqu'un  b&timent  se  lézarde,  on  doit  l'inspecter  et  se 
rendre  compte  de  la  marche  de  la  détérioration  par  celle 
des  lézardes  :  pour  cela  on  place,  en  travers  des  lézardes 
et  par-dessus,  de  petits  tasseaux  en  plâtre,  oui  se  fendent 
au  plus  petit  mouvement  de  l'édifice,  et  inoiquent  sAre- 
ment  les  progrès  plus  ou  moins  rapides  du  mal  ;  ou  sim* 
Clément  on  colle  du  papier  dessus.  £.  L. 

LIAISON,  en  termes  de  lecture  et  de  débit,  désigne 
l'union  qui  se  fait  dans  la  prononciation  entre  une  con- 
sonne finale  habitueUement  muette  et  la  voyelle  Initiale 


LIA 


1163 


LIB 


ékmanmànai  afin  «TéTiter  ua  hiatus,  poomi  toutefois 
qw  les  deux  mots  Toisins  se  lieot  DatareUement  entre 
eux  par  la  force  da  aena.  S  et  ses  analogues  X  et  Z,  T  et 
MD  analogue  D^  sont  les  consonnes  qui  se  Uent  le  plus 
Tolontien  ajec  le  mot  suivant.  La  liaison  de  s  et  «se  fait 
looJoQis  avec  le  son  de  x  : 

Les  rastot  oppMtt  d^B]l  faliear  d*  oonquétat... 
SI  le  del  k  ces  mAns  oralt  borné  ma  peine... 
F^niUetes  d  loUir  toni  lee  eièdee  peiêée. 

D  sonne  comme  T  : 

QuUe  tftallen  eeeret  ma  limite  et  um  èhagitasl 
Et  tout  ce  granl  èdat  de  leur  gloire  tende... 


i^  réglé  sur  Teuphonie,  supprime  eertainea  de  ees 
liaisons, par  eseniple  dans  les  mots  chaud,  froid,  pM, 
fond,  0OW,  etc.  On  dit  toutefois,  arec  la  liaison  :  «  De 
pied  fil  cap,  de  fond  «n  comble.  »  D  ou  T  final,  précédé  de 
r,  est  toiigoura  muet  :  dépar[t)  imprévu;  û  sor{t)  en 
wwrant;  le  Mor{t)  en  est  jeté;  tl  cour{t)  à  bride  abeUtue; 
idor{()  à  Vomare;  un  r$gar{d)  effroyMe;  un  bor{d)  es- 
cuvé;  Malherbe Mr(Q encore  de  modèle.  Au  pluriel,  ces 
mots  font  sonner  leur  «  :  «  des  bordi  escarpés  ;  des  efforts 
indomptables.  »  Pour  le  mq(  remords,  qui  s'écrit  au  sin- 
gulier comme  ao  pluriel ,  «[uelques  pcorsonnes  prétendent 
qali  faut  supprimer  la  liaison  au  singulier,  et  dire  un 
rmnorids)  importun,  mais  la  rétablir  au  pluriel  et  dire 
•lore  aes  remor{é^  tmportuns.  Cette  règle  nous  parait 
subtile;  car,  en  raison  surtout  de  Tétymologie  (mTiornif), 
I  doit  sonner  dans  Tun  et  Tautre  cas,  comme  cela  a  lieu 
pour  le  mot  cotir«  et  ses  dérivés  concours,  recours^  se» 
contrs,  etc.,  du  moins  dans  le  débit  soutenu. 

Dans  les  mots  terminés  en  et,  t  est  fort  souvent  muet, 
particulièrement  dans  les  mots  respect,  aspect,  instinct; 
la  liaison  avec  le  mot  suivant  se  fait  par  le  c  :  respec(t; 
fotmain,  aspec(t)  affreux,  in8tinc(t)  impérieux,  a  II  y  a 
incertitude  et  d^ccord  pour  les  mots  suspect,  drcon- 
sptct.  Dans  le  mot  abject,  on  fait  sonner  toujours  le  t.  Il 
faat  avouer  qu'à  cet  égard  les  règles  ne  sont  ni  sans  con- 
fusion ni  sans  bizarrerie.  Aussi ,  dans  le  langage  familier, 
sopprime-t-on  avec  beaucoup  de  raison,  même  devant 
les  voyelles,  la  iHt>nonciation  du  c  et  du  t,  oue  Tinstinct 
populaire  a  toujours  laissés  muets.  Au  pluriel,  liaison  par 
U  seule. 

Après  les  consonnes  s,x,  2,  t,  d,  la  lettre  qui  est  le 
plus  communément  susceptible  de  liaison  est  r,  mais  seu- 
lement aux  iniinitifs  : 

Anenn  traite  pent-tl 
Forcer  nu  chat  k  la  reconnaIttaDce? 

L*e  qui  précède  a  toujours  en  ce  cas  un  son  plutôt  ou- 
fot  que  fermé.  Partout  ailleurs  la  liaison  ne  peut  avoir 
lieo  sans  une  bizarrerie  inintelligible  ou  ridicule  :  ainsi, 
on  ne  peut  Jamais  modifier  la  prononciation  de  la  finale 
de  berger^  panier,  diner,  cuisinter,  etc. 

Je  prendrai  mon  dîner  dans  le  i>snl0r  an  pain. 
Et  ce  beau  cniaiDi«r  ann<  d'un  grand  eouteao. 

Eo  prose  et  dans  le  langage  familier,  Tinfinitif  en  er  ne 
laisse  pas  sonner  r,  dès  qu^il  y  a  une  légère  pause  exigée 
par  le  sens;  mais,  en  vers,  cette  liaison  est  généralement 
obligatoire,  comme  dans  ce  vers  de  La  Fontaine,  où  elle 
forme  même  une  sorte  d*onomatopée  : 

Et  mon  dwt  de  ciUr,  et  le  rat  d^aœourlr. 

Les  autres  consonnes,  telles  que  c,  g,  {,  n,  p,  ne  se  lient 
qa*  accidentellement  à  la  voyelle  initiale  du  mot  suivant. 
C  sonne  dans  les  mots  estomac,  tabac,  franc^  croc,  etc,  : 
«  mon  estomac  «st  plein  ;  le  tabac  est  divin  ;  courir  à  franc 
Arier,  donner  un  croc  m  Jambes,  etc.  »  G  se  lie  avec  le 
ion  ic  :  «  un  rang  ^evé;  sangr  artériel;  long  entretien  ;  ce 
loD0  mnas  d*^eux,  etc.  L  se  lie  avec  le  son  mouillé  : 
«  gentil  toiune,  gentil  enfant.  »  N  n*est  susceptible  de 
Uaison  que  dans  la  préposition  en  et  dans  Tadverbe  de 
même  son  ;  dajis  le  nom  indéfini  on  { sauf  les  inversions)  ; 
dans  les  adje<^fa  mon,  ton,  son;  et  dans  les  a4|ectifs  en 
M,  Ml,  am  {pmcien,  plein ,  certotn,  t;tlam ,  vam) ;  dans 
lÛiverbe  bien ,  lorsan'il  est  proclitique  (cela  est  oten  ai- 
naUe)^  ou  lorsquMl  forme  locution  avec  les  mots  sui- 
vants (il  fallait  6m»  et  beau);  enfin  dans  le  nom  indé- 
fini rien,  Maia  aucune  liaison  ne  saurait  avoir  Heu  dans 
les  mots  terminés  en  in,  on,  un;  il  n'y  a  d'exception  que 
«mr  le  mot  un  et  son  dérivé  aucun.  P  se  lie  très-rare- 
•wnt,  comme  dios  les  mots  trop,  coup  :  «  on  coup  inat- 


tendu (mais  seulement  en  vers);  il  est  trop  ftonnète 
homme.  »  L'adverbe  beaucoup  admet  aussi  la  liaison,  mais 
non  pas  les  locutions  pour  te  coup,  tout  à  coup,  sur  le 
coup,  après  lesquelles  l'usage  a  consacré  l'hiatus.  En 
vers,  pour  ériter  un  hiatus  désagréable ,  on  ménase  en  ce  , 
cas  dans  le  dâ>it  un  léger  intervalle,  comme  dans  cet 
vers  de  La  Fontaine  : 

Dane  nn  champ  —  k  Ttfcart  —  volt  do  blé  répandu. 
Seigneur  lonp  —  étrangla  le  luindet  aane  remMe. 

Les  liaisons  ne  sont  de  rè^e  que  dans  la  lecture  et  dans 
le  débit  soutenu ,  surtout  en  vers ,  lorsque  la  mesure  et 
rharmonie  en  font  une  loi  impérieuse.  Dans  la  conversa- 
tion familière,  il  est  de  bon  goût  de  supprimer  toutes 
celles  qui  ne  peuvent  pour  ainsi  dire  passer  inaperçues  : 
ainsi,  généralement,  on  néglige  de  prononcer  r  de  l'in- 
finitif à  la  1**  conjugaison  ^  s  oui  ou  x,  signes  du  plu* 
riel;  on  dit  plutot  :  «  les  Françai{s)  ont  été  vainqueurs 
que  les  Françai-g-ontété,.,,  plutôt  trois  heure{s)  et  demie 
que  trois  heure-z-et  demie,  qui  a  quelque  chose  d'affecté. 
Gerteines  liaisons  se  sont  établies  d'une  manière  tout  à 
fait  arbitraire  dans  le  langage  familier,  et  cela  depuis  un 
temps  presque  immémorial  ;  de  là  dans  l'orthographe  des 
modifications  que  la  raison  et  Tétymologie  n'autorisent 
guère.  Tel  est  l'usage  de  faire  entendre  «  à  la  1**  per- 
sonne des  verbes  de  la  2*,  3*  et  4*  conjugaison  :  je  /Uiit-d 
l'instant,  je  avis-en  Dieu,  jjattends-encore.  Primitivement 
on  écrivait  ie  fini,jecroi,  j*attend^  conformément  à  l'anaF* 
logie  du  laàn  /Inio,  ored^,  aUendo.  De  même,  l'imparfait 
n'avait  paa  s,  mais  e  muet  à  la  i**  personne  ;  s  ne  parais- 
sait an'à  la  H*  personne,  comme  t  à  la  troisième,  ainsi 
que  oans  la  conjugaison  latine.  Ce  n'est  que  dans  la  pro- 
nonciation que  cette  s  intei^calaire  s*est  fait  entendre  d'a- 
bord ;  mais,  dès  le  xvi*  siècle,  elle  s'introduit  peu  à  peu 
dans  récriture,  où  elle  est  aujourd'hui  consacrée.  La  même 
observation  s'applique  aux  mots  certes^  jfisques,  guères, 
dont  la  double  orthographe ,  encore  autorisée ,  s'étendait 
autrefois  aux  mots  mêmes  et  m>ême ,  presques  et  presque, 
ore  et  ores,  encore  et  encores,  aveci^  et  avecques,  oncque 
et  oncques,  etc,  Récipromiement,  le  t  final,  exigé  par  l'é- 
tymolojgie,  a  disparu  de  la  3«  pers.  du  sing.  de  l'indicatif 
présent  et  passé  défini,  à  la  1**  conjugaison,  et  dans  les 
verbes  U  a,  U  va  :  il  ne  s'est  maintenu  que  dans  la  tour» 
nure  inversive  aime-4-il,  tH^-^-il,  a^t-tl,  dansort^il?  U  a 
également  disparu  au  futur  :  U  viendra  à  trois  heures: 
mais  il  reparaît  dans  le  tour  interrogatif  viendr(»^t-U  r 
(  V,  Cum.)  Sur  les  liaisons,  on  trouve  des  développemente 
dans  le  chap.  2  de  la  Grammaire  des  Grammaires  de 
Girault-Duvivier,  p.  33-78,  de  l'édition  de  M.-A.  Le- 
maire.  P. 

uAisoN ,  en  termes  de  Construction ,  manière  de  dispo- 
ser les  pierres  ou  les  briques  par  enchaînement  les  unes 
aux  antres,  de  sorte  que  les  Joints  verticaux  se  croisent^ 
et  ne  tombent  pas,  pour  deux  assises  consécutives,  les 
uns  sur  les  autres.  La  liaison  est  dite  à  sec,  quand  les 
pierres  sont  posées  sans  mortier.  Quand  on  se  sert  de 
mortier  ou  de  pl&tre  détrempé  pour  Joindre  les  pierres 
ou  les  briques  entre  elles,  on  fait  une  liaison  de  joint. 

LIAISON,  en  Calligraphie,  trait  délié  qui  Joint  une  lettre 
h  une  autre  ou  les  parties  d'une  même  lettre.  —  En  Mu- 
sique, trait  recourbé  qui  Joint  les  notes  liées,  c.-à-d.  des- 
tinées à  être  exécutées  du  même  coup  d'archet,  ou  du 
même  souffle,  ou  du  même  coup  de  ^sier.  C'est  là  ce  qu'on 
nomme  liaison  de  chant.  Il  y  a  liaison  d'harmonie^  lors- 
qu'une note  d'un  accord  demeure  dans  l'accord  suivant, 
par  exemple  dans  les  accords  de  la  tonique  et  de  la  sous- 
dominante,  où  le  même  son  sert  de  quinte  à  Tune  et 
d'octeve  à  l'autre.  Dans  le  plidn-chant,  on  nomme  liaison 
une  suite  de  notes  passées  sur  la  même  syllabe. 

UARD.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Btogm- 
phie  et  d^ Histoire» 

UBAGES  (  du  latin  libare,  effleurer) ,  en  termes  d'Ar- 
chitectnre,  quardersde  pierres  dures  qu'on  emploie  pree* 
que  brutes  dans  les  fondations,  où  elles  servent  de  plate- 
forme pour  asseoir  la  maçonnerie  de  pierres  de  taille  ou 
de  moellons. 

LIBATION.  {  F.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

LIBELLA.     )       Biographie  et  d'Histoire. 

LIBELLE  (du  latin It6ellu< ,  petit  livre).  Ce  mot  n'em- 
portait pas  originairement  une  idée  défavorable  ;  il  avait, 
dans  la  langue  du  Droit,  le  sens  d'acte  Judiciaire.  Ainsi, 
le  libelle  de  divorce  était  l'acte  par  lequel  un  mari  noti- 
fiait à  sa  femme  qu'il  la  répudiait  ;  le  libelle  de  proda^ 
malien,  l'action  intentée  en  Justice  pour  obtenir  la  répa^ 
ration  d'un  dommage;  le  libelle  Saceusation,  l'acte  dans 
lequel  un  accusateur  s'engageait  à  subir  la  peine  portée 


LI6 


1104 


L1B 


pir  la  loi,  s*il  tuecombait  dans  nm  accusation.  Ai^our- 
a*hui  on  Ai  encore  libdler  an  réquisitoire,  une  sentence. 
Mais  le  mot  liMle  a  pris  depuis  longtemps  le  sens  d*écrit 
diffamatoire,  et  la  qualification  de  twdltste  est  doTeoue 
méprisante  pour  un  auteur.  Une  distinction,  que  l'on  ne 
lait  pas  to^|oorb,  existe  entre  le  libellé  et  le  pamphlet  : 
le  premier,  dénonciation  haineuse,  souvent  anonyme, 
contre  des  particuliers,  ne  survit  guère  à  Tintérêt  qui  Ta 
inspiré  ;  le  second,  attaque  passionnée,  mais  courageuse 
contre  le  pouvoir,  peut  vivre  longtemps,  sMI  a  été  Vex- 
pression  d'une  venté  générale  et  la  revendication  d'un 
droit.  Voltaire  a  fait  avec  raison  la  remarque  suivante  : 
c  Tous  les  honnêtes  gens  qui  pensent  sont  critiaues,  les 
malins  sont  satiriques,  les  pervers  font  des  libelles.  >  Le 
libelle  a  existé  de  tout  tomps,  parce  qu'il  y  a  toujours  eu 
des  passions  et  des  querelles.  La  loi  des  Douze-Tables 
défendit,  sous  peine  de  mort,  les  chansons  dirigées  contre 
les  citoyens.  UAnti-Caton  de  César  était  un  libelle.  Sous 
l'Empire  romain ,  les  libelles  contre  le  prince  tombèrent 
sous  l'application  de  la  loi  de  lèse-majesté.  Julien ,  raillé 
par  les  habitants  d'Antioche,  ne  fit  point  usage  de  la  puis- 
sance impériale  ;  il  se  contenta  de  répondre  par  le  Èfiso- 
pogon.  Le  Code  de  Justinien  déclare  inhabiles  à  tester 
ceux  qui  auront  été  condamnés  pour  des  libelles.  Dans 
l'ancienne  France,  les  libelles  contre  les  souverains  et 
les  personnes  puissantes  étaient  rigoureusement  punis  : 
la  peine,  laissée  à  l'arbitraire  des  Juges,  fut  souvent  la 
mort  pour  l'auteur,  quelquefois  même  pour  l'imprimeur; 
les  simples  détenteurs  n'étaient  pas  à  l'abri  des  pour- 
suites. Il  y  a  eu,  dans  les  deux  derniers  siècles,  des 
Ubellistes  fameux.  Garasse,  Nonotte,  Kréron,  La  Beau- 
melle,  Linguet,  eto.  Ce  dernier  a  composé  contre  les  li- 
bellistes  une  Théorie  du  libelle,  ou  VArt  de  calomnier  avec 
fruit,  1775,  in-12.  De  nos  Jours,  le  libelle  s'est  souvent 
incorporé  au  Journal ,  ou  a  pris  la  forme  de  biographies 
•candaleuses.  Il  est  réprimé  par  la  loi  sur  la  dif&mation 
(V.  ce  mot).  B. 

LIBÉRAL,  mot  du  langsse  politique  depuis  la  Révolu- 
tion, et  s'appliquant  à  touthomme  dévoué  à  la  défense  de 
la  liberté  et  des  autres  droits  conquis  par  cette  Révolu- 
tion. Le  libéralisme  est  la  doctrine  professée  par  les  libé- 
raux. Ces  mots  furent  surtout  en  usage  du  temps  de  la 
Restauration. 

LIBÉRALITÉS,  terme  de  Droit.  V.  Doiiatio:<i. 

LIBÉRATION,  action  de  se  libérer  d'une  dette,  d'une 
obligation  envers  un  particulier,  et  du  service  militaire 
envers  l'État.  Dans  le  premier  cas,  la  libération  s'opère 
par  le  payement ,  par  la  novation  (  V.  ce  mot  ) ,  et  par  la 
remise  volontaire  du  titre.  Dans  le  second,  elle  a  lieu, 
soit  quand  le  Conseil  de  révision  a  reconnu  des  droits  lé- 
gitimes à  l'exemption  du  service ,  soit  par  l'exonération 
et  le  remplacement  (V.ces  mots  ) ,  soit  pour  infirmités 
contractées  au  service,  soit  après  parfait  accomplissement 
du  tomps  de  service. 

LIBÉRAUX  (Arts).  V.  Arts  uséRAUX. 

LIBÉRÉS,  reclusionnaires  et  forçats  qui  ont  subi  leur 
peine,  et  qui  sont  sous  la  surveillance  de  la  haute  police. 
Le  décret  du  i"  Janv.  1807  mettait  les  forçats  libérés  à  la 
disposition  du  ministre  de  la  police  générale;  le  Code 
péncU  (art.  44)  donnait  seulement  à  l'administration  le 
droit  de  déterminer  les  lieux  où  il  était  interdit  aux  libé- 
rés de  paraître.  Le  décret  du  16  avril  185'2  et  la  loi  du 
30  mai  4854  décident  que  les  forçats  libérés  dont  la  peine 
était  inférieure  à  8  ans  de  travaux  doivent  résider  à  la 
Guyane  française  pendant  un  temps  égal  à  la  durée  de 
leur  condamnation  ;  que,  si  la  peine  était  de  8  ans  et  au 
delà,  ils  sont  tenus  de  résider  dans  la  colonie  pendant 
toute  leur  vie  t  qu'en  cas  de  grftce  ils  ne  peuvent  être  dis- 
pensés de  la  résidence  que  par  une  disposition  spéciale  ; 
que  le  gouverneur  peut  les  autoriser  à  quitter  momenta- 
nément la  colonie,  mais  Jamais  pour  se  rendre  en  France  ; 
que  des  concessions  provisoires  ou  définitives  de  terrains 
peuvent  leur  être  faites;  que  tout  libéré  qui  sort  de  la 
colonie  sans  autorisation  est  envoyé  aux  travaux  forcés 
pendant  une  durée  de  1  à  3  ans;  que  les  infractions, 
crimes  et  délits  des  libérés  sont  Jugés  par  le  Conseil  de 
guerre  de  la  colonie ,  auquel  sont  adjoints  deux  officiers 
du  commissariat  de  la  marine.  V.  Bernéol ,  Essai  sur  les 
condamnés  libérés,  1854,  in-S*". 

LIBERTÉ.  La  liberté,  considérée  comme  fait  interne, 
prend  le  nom  de  liberté  morale,  et  consiste  dans  le  pou- 
roir  de  se  déterminer;  la  détermination  supposant  ordi- 
nairement un  choix,  la  liberté  est  aussi  appelée  libre 
arbitre  (du  latin  libta,  balance).  Rigoureusement,  la 
liberté  ne  se  démontre  pas;  elle  se  montre  par  des  actes 
qui  se  répètent  à  chaque  heure  de  la  vie  et  que  la  con* 


science  proclame.  Mais,  pour  ceux  qni  feulent  des  preoret» 
il  y  en  a  de  deux  sortes,  les  preuves  psychologiques  et  les 
preuves  morales.  Les  premières  sont  :  1*  le  sentiment 
immédiat  que  l'homme  a  de  sa  liberté;  «  un  homme  qoi 
n'a  pas  i'esprit  gâté,  dit  Bossuet,  n*a  pas  besoin  qu'on 
lui  prouve  son  franc  arbitre,  car  il  le  sent,  et  ne  sent  pas 
plus  clairement  qu'il  voit  et  qu'il  raisonne;  »  —  ^  h 
notion  du  devoir;  car  il  n'y  a  de  devoir  que  pour  l'être 
qui  est  libre  de  se  conformer  à  la  loi  ou  de  la  violer;  -^ 
3<*  certains  faits  qui  précèdent  ou  suivent  les  actes  libres, 
tels  que  les  engagements,  les  promesses,  la  délibération, 
le  choix^  la  satis&ction  morale,  le  remords;  «  la  notion 
si  claire  que  nous  avons  de  nos  foutes,  dit  encore  Bossuet, 
est  une  marque  certaine  de  la  liberté  que  nous  avons  eue 
de  les  commettre.  »  Les  preuves  morcàes  consistent  dans 
l'universalité  de  l'idée  de  liberté,  constatée  dans  toutes 
les  langues  par  un  mot  qui  l'exprime;  dans  l'universalité 
de  certains  faits  moraux  qui  seraient  impossibles  si 
l'homme  n'était  pas  libre,  comme  les  lois,  les  traités,  les 
contrats,  le  mépris,  l'admiration,  etc.  Une  dernière  con- 
sidération se  joint  à  ces  preuves.  Il  y  a  des  cas  où 
l'homme  n'est  pas  libre;  ainsi,  dans  le  sommeil,  l'ivresse, 
la  folie,  l'extase,  eto.  :  tout  le  monde  sait  la  différence 
qu'il  y  a  entre  ces  divers  états  et  celui  de  liberté;  la 
Justice  en  tient  compte,  ce  quin'aurait  pas  lieu  si  l'homme 
n'avait  Jamais  la  liberté  morale  ou  s*il  l'avait  toujours. 
Aucune  objection  ne  peut  la  détruire  :  celle  tirée  du  mo- 
tif  déterminant  {V.  Motif)  repose  sur  une  fausse  analogie 
entre  les  motifs  et  les  poids  d'une  balance;  une  autre, 
s'appu^ant  sur  la  nature  divine,  sacrifierait  la  bonté  et 
la  justice  de  Dieu  pour  sauver  sa  prescience  {V.  ce  mot), 
ce  qui  conduirait  à  une  absurdité  révoltante. — La  liberté, 
si  évidente  en  fait,  a  donné  lieu  à  de  longues  controverses 
dans  la  spéculation.  Le  fatalisme  (V.  cemot)^  professé 
par  l'École  du  Portique,  faisait  en  quelque  sorte  partie 
de  la  religion  dans  l'antiquité;  Oreste  et  Œdipe  en  sont 
la  preuve;  il  dominait  dans  l'Asie.  La  doctrine  de  la 
grâce {V.  ce  mot)  n'était  autre  qu'une  lutte  entre  le  fata- 
lisme et  la  liberté,  lutte  soutenue,  à  des  degrés  divers, 
par  S*  Augustin  contre  Pelage,  par  Gomar  contre  Armi- 
nius,  par  Port-Royal  contre  les  Molinistes. 

Si  la  liberté  est  contestée  en  théorie,  elle  ne  l'est  pas 
dans  la  pratiaue;  elle  est,  au  contraire,  reconnue  dans 
toutes  les  sphères  de  Tactivité  humaine.  En  l'envisageant 
donc  dans  ses  manifestations,  il  y  a  lieu  de  distinguer  ; 
la  liberté  naturelle,  droit  qu'a  l'homme  d'user  de  ses 
facultés  en  vue  de  son  bien  ;  l'état  social  met  nécessaire- 
ment, dans  l'intérêt  commun,  des  limites  à  cette  liberté; 
la  liberté  civile,  droit  de  faire  ce  qui  n'est  pas  défendu 
par  la  loi,  et  de  s'abstenir  de  ce  qu'elle  n'ordonne  pas; 
fa  liberté  politique,  jouissance  de  certains  droits  poli- 
tiques réglés  et  accordés  par  la  Constitution  ;  la  liberté  d$ 
penser,  droit  de  faire  connaître  son  opinion  avec  une  en- 
tière indépendance  sur  toutes  matières,  religion,  philo- 
sophie, politique,  eto.  ;  la  liberté  de  conscience,  droit  qu'a 
tout  homme  de  choisir  et  de  préférer  les  cro3rances  reli- 
gieuses qui  lui  paraissent  le  plus  conformes  à  la  vérité, 
sans  pouvoir  être  inquiété  ;  la  liberté  des  cultes,  droit 
qu'a  chacun  de  manifester  par  des  actes  extérieurs  son 
hommage  à  la  divinité,  selon  les  rits  de  la  religion  qu'il 
professe,  et  de  manière  à  ne  pas  troubler  l'ordre  puolic 
(F.  Cultes)  ;  la  liberté  de  la  presse,  droit  de  manifester  sa 
«nsée  par  des  écrits,  et  en  particulier  par  les  joumaax 
V.  Presse)  ;  la  liberté  de  l'industrie  et  du  travail,  droit 
'exercer  sa  profession  sans  être  soumis  à  aucune  en* 
trave;  la  liberté  du  commerce^  droit  de  vendre  et  d'ache- 
ter, à  l'intérieur  ou  au  dehors,  sans  être  soumis  à  des 
règlements  prohibitifs  ou  restrictifs  (V.  Libre  ^hangb); 
Isiliberté  des  mers,  droit  commun  à  tous  les  peuples  de 
naviguer  sur  toutes  les  mers.  R. 

LIBERTE,  divinité  allégorique  du  paganisme.  On  la  disait 
fille  de  Jupiter  et  de  Junon.  Elle  était  représentée  sons 
la  figure  d'une  femme  vêtue  de  blanc,  tenant  un  sceptre 
à  la  main,  quelquefois  une  lance,  et  coiffée  du  bonnet 
phrygien,  par  allusion  à  la  coutume  des  Romains  d'en 
remettre  un  à  l'esclave  qu'ils  voulaient  affranchir.  A  se» 
pieds  était  un  chat,  animal  ennemi  de  toute  contrainte. 
Pendant  la  Révolution,  on  vit,  sur  les  places  publiques, 
des  statues  de  la  Liberté  à  la  place  de  celles  des  rois,  et, 
dans  certaines  solennité  publiques,  des  femmes  repn^ 
sentèrent  la  Liberté,  ainsi  nue  la  déesse  Raison.      R., 

UBERTâ  (Arbres  de  la).  F.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire. 

UBERTé  d'enseigremint.  V.  Ensbionbiient. 

LiBERTé  mtovisoiBB  (Mlso  ou).  EUo  peut  être  accordés 
tous  caution  on  sans  caution.  Au  premier  cas,  elle  n'est 


LIB 


1169 


LIB 


«ilODnèe  qQ*mn  matière  Gorrectionnelle,  par  décision  de 
la  Chambre  do  conaeil,  et  sous  condition  que  le  prévenu 
donneFa,  en  aroem  on  en  immeublea,  une  caution  qui 
o*eit  Jamais  moiDdre  de  900  fir.  On  ne  l'accorde  pas  aux 
repria  de  justice.  Rectifiant  Tart.  04  du  Codé  (f/tutmo- 
tÙNi  crimme(l«,  une  loi  de  1855  porte  que,  dans  le  cours 
de  rinstruction,  le  Juge  peut,  sur  les  conclosiona  con- 
formes du  procureur  impérial,  donner  mainlevée  de  tout 
mandat  de  dépôt,  à  la  charge  par  le  prévenu  de  se  pré- 
senter à  tous  les  actea  de  la  procédure  etnour  Teiécution 
du  Jugement  aussitôt  quMl  en  sera  requis.  V,  au  Suppl, 

IIBERTÉS  DB    L*i6USB  GALLICAICB.     V.  EgiJSB  QALUCAHB, 

dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 
UBERUM  VETO,  i  V,  ces  mots  dans  notre  Dictiot^ 
UBITINAIRE.        >      noire  de  Biographie  et  d'His- 
UBITINE.  )      totr». 

LIBRAIRE,  marchand  de  livres.  S'il  achète  des  ma> 
BQscrits  pour  les  publier,  il  est  dit  éditeur4ibraire  {V.  ce 
Mol),  et  n  airive,  moins  souvent  aujourd'hui  qu'autrefois, 
qu'il  imprime  ses  ouvrages  lui-même.  Celui  qui  ne  fidt 
eue  placer  et  expédier,  moyennant  certaines  remises,  les 
Évres  édités  par  d'autres,  s'appelle  itôroire-commiwto»- 
mmre  ou  d^auortimmU,  Le  commerce  des  livres  d'occa- 
sion est  le  fait  du  bouquiniste  (  F.  BooQom).  —  Un  pas- 
sage de  VAnabasê  (  vn,  5)  de  Xénophon  parait  être  la 
plus  ancienne  mention  du  commerce  des  livres.  Diogène 
Laeroe  {Vte  de  Zenon,  VU,  3)  perle  de  libraires  athéniens. 
JHooB  avons  indiqué,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biograr 
pAtf  st  d  Histoire,  les  différents  personnages  auxquels  les 
aociens  Ronwins  donnaient  le  nom  de  libraires.  En 
teHn,  librarius  ne  si^piflait  que  copiste,  et  le  marchand 
de  livres  s'appelait  bibliopola;  les  deux  professions  fu- 
rent, au  reste,  souvent  confondues,  et  s'^outèrent  môme 
rfois  à  celle  d'auteur.  On  voit  par  Pline  le  Jeune  que 
Tille  de  Lyon  avait  des  libraires  dès  le  i*'  siècle  de 
notre  ère.  Cétait  sans  doute  l'asage,  comAie  chez  les 
Modernes,  de  placer  le  nom  du  libraire  sur  les  livres 
qu'il  mettait  en  vente  ;  d'où  il  résulte  que  l'on  a  pu 
prendre,  sur  d'anciens  manuscrits,  le  libraire  pour  l'au- 
teur ;  Eckard  pense,  par  exemple,  gue  l'iEmilius  Probus, 
à  qui  l'on  a  attribué  l'œuvre  de  (!omélius  Népos,  était 
on  libndre  du  temps  de  Théodose.  Pendant  les  premiers 
siècles  du  moyen  &ge,  les  moines  forent  les  seuls  à  s'oo 
cnper  de  copier  et  d'échanger  des  livres.  Au  xm*  siècle, 
rtiniversité  de  Paris  s'adjoignit  des  clercs  libraires  jurés- 
chargés  de  débiter  les  livres  sous  sa  surveillance  :  on  les 
appd^ait  quelquefois  en  latin  stattonarii;  en  anglais, 
JtatiofMr  est  encore  le  mot  qui  veut  dire  libraire.  Les 
HhralTeB,  formés  en  communauté,  étaient  obligés  par 
leors  statuts  de  soumettre  aux  Facultés  les  copies  des 
manuscrits  originaux;  Ils  ne  pouvaient  les  mettre  en 
feote  que  lorsqu'elles  avalent  été  revues  et  approuvées. 
Linvention  derimprlmerie  donna  une  forte  impulsion  au 
eommerce  des  llTies;  mais,  à  partir  de  Henri  II,  les  11- 
tiraires  ftirent  assujettis  à  des  règlements  sévères.  Ainsi, 
d'après  une  ordonnance  du  27  Juin  1552,  Ils  ne  pouvaient 
Gûre  venir  des  livres  des  pays  non  catholiques,  et  l'au- 
torité ecclésiastique  devait  assister  à  l'ouverture  des  bal- 
lots de  provenance  étrangère.  Une  ordonnance  du  27  Juin 
1553  leur  interdit  de  vendre  d'autres  livres  que  ceux  qui 
fttaleiit  inscrits  sur  leur  catalogue.  La  publication  d'une 
simple  gravure  sans  l'autorisation  du  roi,  la  vente  ou 
distribution  de  livres  sans  permission  spéciale,  étaient 
punies  de  mort.  L'ordonnance  de  Moulins  en  1566  mo- 
difia les  pénalités,  mais  on  abandonna  l'application  à 
^^arbitraîre  des  juges.  Henri  IV  apporta  quelques  adou- 
dasements  à  la  lé^slation.  En  1615,  un  arrêt  du  Parle- 
ment fixa  à  4  années  la  durée  de  l'apprentissage,  que  l'on 
réduisit  plus  tard  à  3  ans,  et  nul  indiridu  marié  ne  pou- 
vait être  reçu  apprenti.  Le  nombre  légal  des  membres  de 
la  corporation  des  libraires  était  alors  de  24.  En  161 8,  une 
Chambre  syndicale  de  la  librairie  et  de  Vimjnimerie  fut 
instituée  (k.  CHAMsas).  La  vente  des  livres  ne  se  faisait 
pas  seulement  par  les  libraires  en  titre,  mais  aussi  par 
des  marchands  ambulants  et  par  des  bouquinistes  ou  éta- 
lagistes :  les  Ubraires  obtinrent  en  1640  la  suppression  de 
eette  concurrence.  En  vertu  d'un  édit  de  162o,  la  peine  de 
mort  fut  rétablie  contre  Jes  auteurs  ou  distributeurs  d'ou- 
vrages attaquant  la  rell^on  et  le  gouvernement.  Ce  même 
édit  exigeait  que  les  livres  fassent  imprimés  «  en  beaux 
earactères,  sur  de  bon  papier,  et  bien  corrects,»  que 
tout  Imprimeur  ou  libraire  fôt  «  congru  en  langue  la- 
tine »  et  sût  lire  le  grec.  La  résidence  dans  le  quartier 
derUniversité  était  obligatoire;  les  Infractions  à  ce  règle- 
ment furent  si  réitérées,  qu'un  édit  du  l**  avril  1620 
de  mort  les  délinquants,  et  que  d'autres  édita  de 


1686  et  1725  portèrent  contre  eux  les  peines  «  de  i^nftr^a- 
tion  des  livres,  presses,  caractères  et  ustensiles  servant  à 
l'imprimerie,  de  privation  de  la  maîtrise,  et  de  punition 
corporelle  en  cas  de  récidive.  »  L'édit  de  172d  soumit 
aussi  à  des  examens  sévères  les  candidate  qui  ae  desti- 
naient à  la  profession  d'imprimeur-libraire.  Bien  que  les 
Parlements  eussent  refusé  de  Tenregistrer,  un  amt  du. 
Conseil  de  1744  en  étendit  Tapplication  à  tout  le  com- 
merce de  la  librairie  en  France.  De  leur  c6té,  les  Parle- 
ments publièrent  des  arrêts  de  règlement  sur  le  fait  de 
la  librairie;  mais  ces  arrêts  difléndeot  entre  eux  dans 
leurs  principales  dispositions,  et  la  législation  offrait  sur 
ce  point  un  incroyable  pèle-mèle.  En  1777,  divers  arrêts 
du  Conseil  organisèrent  la  librairie  sur  de  nouvelles 
bases.  Le  nombre  des  libraires  fut  illimité  :  la  maîtrise 
de  libraire  coûta  1,000  livres,  et  celle  d'Imprimeur  500» 
Pour  être  reçu  libndre,  il  fallut  être  de  la  religion  catho* 
lique,  de  bonne  rie  et  mœurs,  et  avoir  subi  un  examen 
en  présence  des  syndics,  adjoints  et  autres  préposés.  La 
recteur  de  l'Université,  entre  les  mains  du(]|uel  les  li- 
braires et  les  imprimeurs  prêtaient  serment,  faisait  expé- 
dier les  lettres,  qui  étaient  soumises  au  lieutenant  génâral 
de  police  et  au  g^e  des  sceaux  avant  l'arrêt  du  u>nseiU 
La  durée  du  droit  de  propriété  des  libraires  sur  les  livret 
fut  restreinte  à  la  vie  des  auteurs.  A  la  RévoIotloUf 
l'exercice  de  la  profession  de  libraire  fut  déclarée  libiei 
et  sans  autre  condition  qu'une  patente.  Le  décret  impé- 
rial du  5  février  1810,  les  art.  283,  487  et  477  du  Codé 
pénai,  les  diverses  lois  sur  la  presse  des  21  octobre  1814, 
17  et  26  mai  1810,  0  septembre  1835,  et  le  décret  du 
24  mars  1852,  forment  aujourd'hui  le  code  de  la  librairie. 
Nul  ne  peut  exercer  la  profe8sion\  de  libraire  sans  un 
brevet  délivré  par  l'autoritâ,  et  que  l'on  obtient  en  adres- 
sant au  ministre  de  l'intérieur  pour  Paris,  aux  préfets 
pour  les  départements,  une  demande  accompagnée  de 
Pacte  de  naissance  du  demandeur,  d'un  certificat  de  me* 
ralité  délivré  par  le  mdre  du  lieu  où  il  râ&lde,  et  d'un 
certificat  de  capacité  signé  par  4  Imprimeurs  ou  librairea. 
Ce  brevet,  accordé  gratuitement,  est  personnel  et  local; 
il  doit  être  enregistré  au  tribunal  de  l'*  instance.  Le 
libraire  prête  en  même  temps  serment  de  ne  vendiê,  dé- 
biter ou  distribuer  aucun  ouvrage  contraire  aux  devoirs 
envers  le  souverain  et  à  l'intérêt  de  l'État.  L'exerdce  de 
la  librairie  sans  brevet  entraîne  un  einprisonnement  de 
l  mois  à  2  ans,  et  une  amende  de  100  fr.  à  2,000  fir.,  in- 
dépendamment de  la  fermeture  de  l'établissement.  Lapa- 
tente  de  libraire-éditeur  est  de  100  fir.  à  Paris;  elle  n'est  que 
de  80  fir.  et  au-dessous,  dans  les  départements,  selon  l'inH 
portance  de  la  localité  ;  celle  du  simple  libraire  et  du  bon* 
quiniste  en  boutique  est  de  50  fir.  à  Paris.  Les  libralree- 
éditeurs  sont  tenus  au  dépôt  légal  {V.  ce  mot)',  chaque 
livre  qu'ils  éditent  doit  porter  leur  vrai  nom,  à  peine  de 
0  Jours  à  0  mois  d'emprisonnement  La  vente  ou  distri- 
bution d'ouvragea  contraires  aux  bonnes  mœurs  est  [mnle 
d'un  emprisonnement  d'un  mois  à  un  an,  d'une  amende 
de  16  fir.  à  500  fr.,  et  ces  ouvrages  sont  confisqués  et  mis 
au  pilon.  Le  débit  d'ouvrages  contrefaits  entraine  une 
amende  dont  la  quotité  varie  selon  les  cas.  La  vente  ou 
diatribution  d'un  ouvrage  sans  nom  d'imprimeur  est 
punie  d'une  amende  de  2,000  fir.,  qui  est  réduite  à  1,000  fr. 
si  l'on  fait  connaître  le  nom  de  l'imprimeur.  —  Une  Di» 
rection  de  la  librairie  et  de  l'imprimerie  a  été  créée  en 
1810  pour  veiller  à  l'exécution  des  lois  et  règlements  qui 
concernent  ces  deux  industries  :  annexée  d'abord  au  mi- 
nistère de  l'intérieur,  elle  a  été  placée  en  1852  dans  les 
attributions  du  ministre  de  la  police  générale;  dès  l'an- 
née suivante,  on  l'a  rendue  au  ministère  de  l'intérieur. 
V.  Fritsch,  Tractatus  de  typographie,  bibliopolis,  etc., 
léna,  1675,  in-4'*;  Batta^ini,  Dissertazione  academica 
sut  commercio  dêgli  antuihi  e  modemi  librai,  Rome, 
1787,  in-8°;  Peignot,  Essai  historique  et  archéologique^ 
sur  l*état  ds  la  libraine  chez  les  Anciens,  Dijon,  1834, 
in-8<>;  Géraud,  Essai  sur  les  livres  dans  y  antiquité, 
Paris,  1840,  in-8°.  B. 

LIBRAIEUE,  boutique  de  livres.  Elle  a'^ipelait,  chei 
les  anciens  Romains,  apotheca  (du  srec  apothM,  maga- 
sin), ou  tabema  libraria,  ou  amplement  libraria.  Les 
librairies  se  trouvaient  pour  la  plupart  dans  la  rue  Argi' 
letum  et  dans  le  Vicus  scandalarius  ;  il  y  en  avait  aussi 
près  des  temples  de  Vertunme  et  de  Janus.  Les  devan- 
tures étaient  couvertes  d'inscriptions  et  d'a£Bches  indi- 
quant les  ouvrages  en  vente  x  à  l'intérieur,  la  forme  de 
rouleaux  étant  la  plus  usitée  pour  les  livres,  les  mon 
étaient  garnis  de  cases  aaseï  semblables  à  cellflé  que  pré- 
sentent les  colombiers,  et  ^>pelées  nids  (nidi)  par  Mar- 
tial. Les  libniriet  étatat  on  Ueo  de  féonioir  pour  kê 


LIB 


1169 


LIB 


oisMl  et  160  gens  ée  lettres;  AoliMïelle  (XIH,  3fl^ nous  a 
IttiBé  on  coneux  tableau  île  œ  ifoi  8*y  passait.  Rome  eut 
aussi  des  étalages  de  livres  sous  les  portiques  ei  dans 
d'autres  lieui  pablics.  —  En  France,  Jusqu^an  xvii*  siècle, 
le  mot  iibftuHs  désigna  une  bibliothèque  :  la  tour  de 
ranciei  Louvre  où  étaient  renfermés  les  livres  du  roi  se 
nommait  Tour  ds  la  Uhrairie.  B* 

UBRE  ARBITRE.  V.  Ldbrté. 

I<IBREfiCHANGE(Systèmedtt),o|iinion  diaprés  laquelle 
le  commerce  entre  les  nations  doit  Ôtre  libre,  c-àrd. 
esempt  de  taxes,  on  ne  supporter  que  des  droits  établis 
avec  précaution  dans  llntérftt  exclusif  da  Esc,  eonmie  en 
Fkanoe  les  droits  de  douane  perçus  sur  le  coton  et  sur  le 
café.  Un  droit  établi  sur  le  fer,  la  houille  on  toute  antre 
matière  que  notre  pays  produit,  permet  anx  producteurs 
de  fer,  de  houille,  etc.,  de  vendre  a  un  prix  trM-supérieur 
à  celui  qu'ils  eussent  pu  demander  si  ces  matières 
eossent  été  admises  en  franchise  :  en  supposant  que 
eette  hausse  artifldelle  soit  de  100  fir.  seulement  par 
tonne  ou  1,000  kilogr.,  ai  la  Fhmce  consomme  annuel- 
lement 400,000  tonnes  de  fer,  de  houille,  etc.,  fàbri- 
onés  ou  extraits  à  rintérienr,  c'est  une  redevanee  de 
40  millions  payée  aux  maîtres  de  forge  ou  aux  proprié- 
ttdres  de  mines  de  houille,  etc.,  outre  les  droits  de 
douane  perçus  au  profit  de  l'État  à  raison  du  fer  ou  de  la 
houille  qui  aura  été  importé.  Le  système  de  libre  échange 
«'«^plique  anx  cas  de  cette  nature. 

Echanger  est  un  droit  naturel  :  chaque  productenr  doit 
pouvoir  se  procurer  les  matières  premières  aux  condi- 
tions on'il  JuM  être  les  plus  avantageuses,  sans  qu'un 
tiers  vienne  s'interposer  dans  le  débat,  au  risque  et  en 
vue  même  de  fausser  l'équivalence  qui  doit  présider  à 
tout  échange.  Chaque  consommateur  a  également  le  droit 
de  vivre  au  meilleur  marché  possible,  c-à-d.  de  ne  payer 
les  choses  que  ce  qu'elles  valent  naturellement  :  toute  sur- 
taxe imposée  par  une  autorité  supérieure,  le  condamnant 
à  payer  on  produit  au  delà  du  prix  tel  qu'il  résulte  de 
l'état  de  l'ofire  et  de  la  demande,  et  par  conséquent  l'obli- 
geant adonner  plus  qu'il  ne  reçoit  ou  qu'il  ne  recevrait  si 
réchange  était  libre,  porte  atteinte  à  la  liberté  naturelle 
da  consommateur,  à  son  intérêt  légitime,  à  la  sincérité 
des  transactions.  Toute  mesure  qui  place  le  consomma- 
teur dans  une  infériorité  forcée  devant  le  producteur, 
telle  que  celle  qui  met  celui-ci  à  Tabri  de  la  concurrence 
pour  la  vente  des  produits  similaires,  lui  livrant  ainsi 
totalement  on  en  partie  le  marché  national,  est  injuste. 

Les  raisons  économiques  qui  poussent  les  peuples  à  se 
livrer  à  de  mutuels  échanges  sont  très-puissantes.  11  n'est 
point  de  nation  capable  de  se  suffire  à  elle-même.  La  di- 
versité des  propriétés  naturelles  de  la  terre  donne  lien  à 
l'échange  des  différents  produits  naturels  au'elle  fournit. 
Chaque  pays  donne  certains  produits  ou  plus  parfaits  ou 
«xdusivement  à  toute  autre  contrée.  Toute  l'Europe  pro- 
duit du  Un,  mais  celui  de  la  Russie  Blanche  et  de  Bologne 
est  le  meilleur;  plusieurs  pays  abondent  en  cuivre,  mais 
celui  de  la  Suède  et  du  Jaîwn  est  d'une  qualité  supé- 
rieure; les  vins  renommés,  le  sucre,  le  café,  les  épices, 
ne  viennent  que  dans  certains  climats  où  se  rencontrent 
rarement  avec  abondance  la  houille  et  le  fer.  Surabon- 
dance d'une  part,  indigence  de  l'autre,  d'où  naît  la  né- 
cessité pour  chaque  nation  d'écouler  le  trop -plein  de 
certains  produits,  et  de  s'approvisionner  de  ceux  dont 
elle  manque  t  sinon,  U  civilisation  resterait  stationnaire; 
pour  certains  peuples  la  vie  serait  fort  limitée,  pour  les 
antres  elle  deviendrait  presque  impossible.  De  même 
que  les  productions  réparties  entre  les  territoires,  les 
aptitudes  des  hommes  sont  diverses.  Telle  population 
excelle  dana  telle  ou  telle  catégorie  de  production,  et  alors 
il  s'établit  une  sorte  de  division  du  travail  entre  les  na> 
tions,  comme  il  s'en  établit  une  entre  les  membres  d'un 
même  État.  Les  avantages  de  cette  division  sont  l'éco- 
nomie dans  les  frais  de  production,  l'abondance  des  pro- 
duits, la  perfection  plus  grande  de  ces  produits,  obtenue 
avec  moins  de  sacrifices,  de  capital  et  de  travail.  Un 
autre  grand  avantage  du  libre  échange,  c'est  la  paix  uni- 
verselle* En  effet,  lorsque,  faute  de  communications,  les 
nations  vivaient  isolées,  deux  peuples  pouvaient  dévorer 
leur  activité  et  leurs  finances  dans  des  guerres  intermi- 
nables, sans  que  les  autres  eussent  rien  à  perdre  ou  à 
gagner;  aussi  restaient-ils  spectateurs  indifférents  en  pa- 
reille circonstance.  Ai^ourd'hui  que  les  chemins  de  fer, 
les  bateaux  à  vapeur  et  une  demi-liberté  commerciale  ont 
établi  des  relations  d'intérêt  entre  les  pays  les  plus  éloi- 
gnés, il  ne  peut  se  tirer  nulle  part  un  coup  de  canon 
sans  qu'il  en  résulte  un  dommage  pour  tout  le  monde. 
QuMque  toute  l'Europe  ne  prenne  pas  part  à  une  guerre, 


cependant  les  Bourses  des  psjs  neutres  sqkvBOit  les  oscil- 
lations des  Bonrses  des  pays  engagés  dans  la  lutte*  et  les 
titres  de  propriété  se  déprécient  dans  toutes  les  mains. 
Cette  solidarité  d'intérêts,  qui  arrêts  déjà  les  guerres  à 
leur  début,  développée  par  la  multiplicité  des  échanges  et 
poussée  Jusqu'aux  pavs  les  plus  reculés,  en  rendra  le  re- 
tour presque  impossible  par  l'intervention  des  puissances 
qui,  sans  y  prendre  part, auraient  néanmoins  à  en  soafl!rir* 

Malgré  les  entraves  qui  résultent,  pour  le  développa 
ment  des  échanges,  de  rétablissement  des  droits  fiscaux, 
ces  droits  ne  peuvent  soulever  aucune  objection.de  prin- 
cipe. S'ils  restreignent  la  sphère  des  échanges,  c'est  par 
un  accident  inévitable;  mais  ils  n'ont  pas  pour  but  de  la 
restreindre.  Il  en  est  tout  autrement  des  droits  proteo- 
teurs  ou  prohibitifs  (V.  Proiiditioii),  oui  sont  directi^ 
ment  établis  en  vue  de  limiter  le  rayon  aes  échanges. 

La  théorie  du  libre  échange  n'est  pas  nouvelle  :  au 
xvi«  siècle,  Bodin ,  dans  son  ouvrage  sur  la  République, 
réclamait  déjà,  non-eeulement  l'abolition  des  douanes  In- 
térieures, mais  l'entrée  libre  de  la  plupart  des  marchan- 
<yses  étrangères.  Au  commencement  du  siècle  suivant, 
Barthélémy  de  Laffemas,  dans  un  opuscule  intitulé  :  Lu 
mou9n$  de  chcus^r  la  gueus^rye,  tte.,  soutint  à  son  tour 
les  bienfaits  du  libre  édiange.  Plus  tard,  Vanban,  et  Boia* 
gnillebert  attaquèrent  le  système  mercatUiU  (  F.  ce  mot  ), 
et  fàrent  imités,  sous  Louis  XV,  par  François  Queanay 
et  ses  disciples  :  la  fameuse  maxime  des  physiocialea  : 
«  Laissez  faire,  laissez  passer,  »  s'applinue  aussi  bien  ani 
rapports  internationaux  qu'aux  conditions  économiques 
sur  lesouelles  repose  l'ordre  à  l'intérieur,  et  Mercier  de 
La  Rivière  s'est  surtout  attaché  à  ce  o6té  de  la  doctrine 
ph3rsiocratique.  Adam  Smith,  qui  publia  en  1776  ses  cé- 
lèbres Recherches  sur  la  nature  et  les  causes  de  la  ri» 
càesse  des  nations,  %  vol.  in-4°,  n'est  donc  pas,  ainsi 
qu'on  le  crdt  assex  conmmnément,  le  premier  qui  ait  for- 
mulé et  développé  la  théorie  du  libre  échange.  Les  idées 
de  cet  économiste  anglais  ont  été,  de  nos  Jours,  vulpui- 
sées  en  France  par  J.-B.  Say.  Le  véritable  métaphysicien 
du  libre  échanêe  est  Frédéric  Bastiat.  qui  dans  son  livre 
les  Sophismes  économiques,  Paris,  1846,  in-16,  a  battu  en 
brèche  le  système  prohibitif;  après  Ini,  le  mouvement 
purement  théorique  est  épuisé  :  on  n'a  plus  fait  que  ré- 
péter et  ressasser  ses  arguments. 

Parmi  les  gouvernements  qui  ont  mis  plus  ou  moins 
en  pratique  Tes  principes  de  la  liberté  commerciale,  il 
faut  dter  celui  du  grand-duc  Léopold  II«  en  Toscane, 
qm  établissait  dès  1766  la  liberté  du  commerce  des  crains 
et  de  la  boulangerie;  celui  de  France  sous  le  ministère 
de  Turoot,  du  20  Juillet  1774  au  13  mai  1776,  relative- 
ment  libre-échangiste,  sous  l'inspiration  des  économistes 
physiecrates;  celui  de  l'Assemblée  constituante  de  1789; 
celui  d'Angleterre  en  1825,  sous  le  ministère  d'Huskisson, 
et  depuis  1842,  époque  où  ont  commencé,  par  l'initiative 
de  Robert  Peel  et  sous  l'impulsion  de  l'Association  de 
Manchester,  les  râfonnes  lib^ales  qui  ont  contribué  à  la 
prospérité  actuelle  de  l'Angleterre;  la  Suisse,  qui  n'a 
pour  ainsi  dire  que  des  douanes  presque  nominales  de- 
puis la  chute  du  système  continental,  puisque  tout  peut 
entrer  en  payant  des  droits  minimes;  enfin  la  France, 
qui,  sous  le  règne  de  Napoléon  III,  depuis  1861 ,  est 
entrée  dans  la  voie  du  libre  échange  par  un  traité  de 
commerce  avec  l'Angleterre,  et  des  traités  de  même  n^ 
ture  avec  onelques  autres  nations  européennes.  V.  Men- 
gotti.  Du  Colbertisme  ou  de  la  lU^srlé  du  commerce  des 
produits  du  sol,  en  italien,  Blilan,1802,  S  vol.;  Rodet, 
Questions  commerciales,  Paris,  1828,  in-8«;  Billiet,  Du 
commerce,  des  douanes,  et  du  système  des  prohibittons, 
Paris,  1828,  in-8«;  Gastaldi,  ùe  la  liberté  eommsrciaU, 
du  crédit  et  des  banques,  Turin,  1840,  in-8<»;  GoIdenbei% 
Libre  échange  et  Protection,  Paris,  1847,  itt-4*;  Rœderer, 
Études  sur  les  deux  systèmes  opposés  du  libre  échange 
et  de  la  protection,  Paris,  1851,  in-8*;  Ch.  Gouraud, 
Essai  sur  la  liberté  du  ^mmerce  des  no^tofis,  1853, 
in-8^;  Emile  de  Lavelye,  Etudes  historiqmf  s  et  critiques 
sur  lesprvncipes  et  les  conséquences  de  la  liberté  du  ootn- 
msrcs  international ,  1857,  in-18.  A*  L. 

LiBSB  BXAMBi.  C'ost  Is  liberté  humaine  considérôe  au 
point  de  vue  de  l'exercice  de  la  raison;  en  d'autres 
termes,  c'est  le  droit  que  nous  avons  de  chercher,  au 
moyen  de  notre  raison,  le  redressement  ou  la  confirma- 
tion de  nos  opinions  et  de  nos  croyances. 

LIBRES  (Vers),  en  termes  de  Poésie,  vers  de  diffé- 
rentes mesures  dans  une  même  pièce,  et  qui  ne  sont  pas 
soumis  au  retour  d'un  rhythme  régulier.  Les  Fables  de 
La  Fontaine,  par  exemple,  sont  en  vers  libres* 

UBRETTO.  7.  Opéba. 


Lie 


1167 


Lie 


UBKffOB,  >  F*  cet  mois  dans  notre  IHeUomutùrê  de 

Uftimm.     s     Biooraphiê  et  S  Histoire. 

LIBYENNE  (Langue),  v.  BEaaèRB. 

UCB  (du  kan  Viciât,  clMiur»),  enceinte  préparée  ponr 
flB  oombat,  on  tonmoi  ou  une  course.  On  appela  lieet 
uBoyen  âge  Tespace  laissé  entverenceinte  d'une  place 
et  006  muraille  extérieure  ùa  une  palissade  de  bois  que 
roo  «sbHassH  en  dehors,  et  qui  formait  une  sorte  de 
chemin  csofterl  r  presque  tot^oors  un  fossé  peu  profond 
pfoiégeiH  les  iioes,  et  quelquefois  un  seoôod  fossé  se 
troaTsit  entre  elles  et  les  murs. 

uo.  terme  de  Tapissorie.  V.  Ussa. 

LICENCE  (du  latin  liceutia,  permission),  autorisation 
accordée  psr  Tadministratlon  :  i*  pour  importer  ou  ex- 
porter exceptiomiellement  certaines  denrées  et  mar- 
ehaodises  prohibées;  i*  pour  trafiquer  avec  une  nation 
étnogère,  quand  la  guerre  a  interrompu  les  relations 
eommerdsles  avec  elle  ;  3*  pour  exercer  certaines  indus- 
tries (entrepreoear  de  voitures  publiques,  5  fr.  par  voi- 
ton  à  quatre  roues.  S  fir.  par  voiture  à  deux  roues  ;  fabri- 
eut  de  salpêtre,  iO  fr.  par  an;  —  de  cartes,  de  sucre 
Miaène,  50  f^.;  —  etc.  ),  ou  vendre  certains  objets  (  piin- 
dpsiement  les  boissons  ;  de  6  fr.  à  50  fr.,  selon  la  popu- 
btioo  de  la  commune).  Dans  ce  dernier  cas ,  TÉtat  per- 
çut 00  Droit  de  liosncs. 

uciRci,  grade  universitaire.  Intermédiaire  entre  le 
bocealauriat  et  le  doctorat  (  F.  ces  mots  ).  H  existe  dans 
tintes  les  Facultés,  sauf  celle  de  médecine.  Son  nom 
Tieot  de  ce  que  Jadis  11  conférait  la  permission  (licmtia) 
de  pratiquer  renseianement  public.  Il  y  a  la  (tcsnce  es 
iittm,  et  la  Itoefie^  es  scimcês.  On  les  obtient  à  la  suite 
(foo  examen  passé  devant  une  Faculté.  A  la  licence  es 
lettres,  Texamen  consiste  en  épreuves  orales  et  épreuves 
écrites  sur  le  grec,  le  Istln,  et  le  français.  —  II  y  a  trois 
aortes  de  licences  es  sciences  :  celle  des  sciences  mathé- 
matiques, celle  des  sciences  physiques,  et  celle  des 
icieoces  naturelles.  L*examen  se  compose  d^éprenves 
écrites,  d'épreaves  praticfues,  et  d^épreuves  orales.  Tout 
caoâidat  à  la  licence  doit  produire  un  diplôme,  obtenu 
depuis  on  an,  de  bachelier  es  lettres,  ou  es  sciences,  sui- 
TSDt  la  nature  de  la  licence  à  laquelle  il  aspire,  et  avoir 
pris  quatre  inscriptions  aux  cours  de  la  Faculté  devant 
laquelle  il  se  pr^nte.  Des  dispenses  d*as8iduité  sont 
ordioairement  accordées  aux  candidats  engagés  dans 
Feoieignement  public,  et  qui  n'ont  pu  suivre  les  cours 
de  la  Faculté.  Les  droits  des  inscriptions,  de  Texamen  « 
du  eertiflcat  d'aptitude,  et'  du  diplôme,  sont  de  140  fr. 
Chaque  Faculté  tient  annuellement  deux  sessions  d'exa- 
meo  pour  la  licence.  Le  grade  de  licencié  est  indispen 
sable  pour  se  présenter  au  doctorat  et  à  Tagri^tion,  e 
il  est  exigé  dana  l'Université  nour  certaines  ronctions  ad- 
mloistratlves,  telles  que  celles  de  proviseur  d'un  lycée, 
OQ  de  principal.  —  Les  avocats,  les  avoués,  les  Juges  de.^ 
direrstribunaiix,  doivent  d*abord  être  licenciés  en  Droit. 
Les  ioscriptiona,  les  droits  d'examen  et  de  diplôme  s*élè- 
rent  à  560  fr.,  non  compris  40  fr.  pour  inscriptions  à  la 
Faculté  des  lettres.  —  Pour  la  licence  en  théologie,  les 
droits  des  inscriptions,  des  examens  et  du  diplôme  sont 
de45fr. 

LICENCE,  en  termes  de  Poétique,  liberté  que  se  donne  le 
po^  de  violer  une  r^le  généralement  adoptée,  soit  pour 
sa  propre  commodité,  soit  pour  prêter  à  l'expression  de 
sa  peosée  un  tour  plus  original ,  plus  harmonieux,  plus 
éoergique.  On  diaungue  les  licences  d'orthographe,  les 
lioeoces  de  constmcSon,  les  licences  de  grammaire,  et 
les  licences  de  versification.  Les  premières  consistent 
daos  le  retranchement  ou  l'addition  arbitraire  d'une  ou 
de  plusieurs  lettres  dans  un  mot  :  ainsi ,  guères,  nor- 
dams  pour  0iiér«,  naguère;  Athène,  Londrê  Versaille, 
Chariê ,  pour  AthèMs ,  Londres ,  VersaUles,  Cfiarles  ; 
ncor  pour  muxré;  je  vai,  je  croi,  je  soi,  pour  je  vais,  je 
erois,  je  sais.  Les  licences  de  construction  et  de  gram- 
maire ne  sont  guère  <rae  des  figures  de  grammaire,  telles 
qoe  rinversion  ,  rSllipse,  le  Pléonasme,  la  Syllepse 
(V.  ces  mots).  Les  licences  de  versification  sont  ti%s- 
rares  en  français;  elles  consistent  surtout  dans  l'emploi 
de  l'Enjambement  (  F.  ce  mot)^  et  de  certaines  coupes 

2^  os  mot)  des  vers  autres  que  la  césure  proprement 
te,  dams  des  rimes  forcément  inexactes,  telles  que 
Féstu  et  9emês  on  (sntis,  etc.  L'emploi  tudicienx  de 
rarchaisme  (V.  es  mot)^  la  création  de  mots  conformes  à 
raoalogie  de  la  langue  (comme  invaincu,  exorable,  etcX 
sont  des  licences  antorisiées  ;  l'emploi  demi-neutre,  demi- 
paasif ,  du  partidpe  expiré^  dans  cet  hémistiche  de  Ra- 
cine {Phèdre)  :  «  A  ces  mots,  ce  héros  eocpiré...  >,  est  une 
ûm  pins  heoreuaes  licences  de  notre  langue  poétique. 


Au  resta,  e^est  pimôt  là  une  hardissss  de  style  quHmt 
véritable  licence. 

La  versification  des  langues  anciennes  est  bien  pins 
féconde  que  la  nôtre  en  lismcesy  grftce  à  la  plus  grande 
souplesse  du  latin  et  surtout  du  grec.  Toutefois,  comme 
nous  ne  connaiisons  des  langues  anciennes  que  la 
langue  poétique  et  oratoire,  comme  la  langue  familière 
et  courante  est  absolument  morte  pour  nous,  bien  deé 
formes  de  mots  ou  de  phrases,  qui  psssent  à  nos  yeux 
pour  des  licences  ou  des  étrangetés,  pouvaient  panltre 
très-naturelles  aux  Anciens.  Ainsi,  une  des  Ucenoes  dont 
les  If  odernes  ont  été  le  plus  frappes  dana  la  versificatioa 
latine,  la  suppression  de  s  dans  les  terminaisons  en  us 
et  en  û  bref  des  noms  et  a4]ectife  O^m'  malorum,  œdihu* 
nostris),  n'était,  au  témoignage  de  Qoéron,  que  la  re- 
production exacte  de  l'ancienne  prononciation  de  œs 
finales,  où  s  disparaissait  en  elTet  dans  le  langage  fami- 
lier. Nous  prêtons  aussi  maintes  licences  de  versificatkon 
à  Homère,  sur  lesquelles  l'étude  de  la  prose  d'Hérodote 
nous  éclaire.  P. 

UCENCIEBIENT,  mot  Jadis  synonyme  de  congé  ab- 
solu,  et  qui  s'appliquait  aux  militaires  considérés  indlr 
viduellement.  Maintenant  il  ne  se  dît  plus  que  de  la 
dislocation  d'un  corps  de  troupes,  mais  sans  qu'il  y  ait 
toujours  libération ,  car  des  corps  licenciés  peuvent  être 
versés  ou  amalgamés  dans  d'autres  cadres*  Le  licencie- 
ment peut  s'accomplir  par  punition. 

LICES.  V.  LicB. 

UCHAKA,  sorte  de  flûte  des  Gafres.  Cest  un  roseau 
accordé  au  moyen  d'un  petit  tampon  mobile  placé  à  la 
partie  Inférieure,  et  ayant  au  bout  supérieur  une  ouver- 
ture coupée  transversalement  On  n'en  tire  qu'un  seul 
son,  comme  du  cor  russe  {V.  ce  mot)^  et  il  faut  autant 
d'instruments  qu'il  y  a  de  notes  dans  l'échelle  musicale. 

LICHAVEN.  F.  Celtiques  (Ifonuments). 

LICHFIELD  (Cathédrale  de),  en  Angleterre,  dans  le 
3omté  de  Stafford.  Cette  église,  bâtie  pendant  le  xm*  et  le 
XIV*  siècle,  restaurée  au  temps  de  Charles  II,  n'est  point 
une  des  plus  grandes  du  royaume,  et  cependant  elle 
ojfre  un  â*and  intérêt.  Cest  la  seule  nui  ait  trois  flèches, 
et  qui  soit  parfaitement  Isolée.  Son  plan  est  en  forme  de 
croix,  mais  le  transept  est  plus  rapproché  du  portail 
occidental  que  de  l'abside  :  aussi  la  cnapelle  de  la  S*^ 
Vierge,  qui  est  derrière  le  chcsur,  se  compose-t^elle  de  0 
travées.  La  forme  polygonale  de  l'abside  se  rencontre 
rarement  en  Angleterre,  tandis  qu'elle  est  fort  commune 
en  France.  Le  grand  portail  a  de  belles  et  harmonieuses 
proportions,  auoique  moins  développé  que  dans  la  plu- 
part des  cathédrales  de  France.  A  la  partie  inférieure, 
trois  portes  en  ogive  donnent  accès  aux  trois  nefs  inté- 
rieures ;  la  porte  centrale  a  une*  voussure  profonde  ;  les 
deux  autres  sont  trop  resserrées.  Au-dessus  des  portes 
règne  mie  galerie  composée  d'arcs  trilobés,  avec  des  sta* 
tuettes,  et  surmontée  elle-même  d'une  laige  fenêtre 
placée  en  retraite.  La  partie  supérieure  de  la  façade  est 
an  fronton  plein,  orné  d'un  réseau  de  nervures  délicates, 
et  couronné  par  une  statue  de  la  S^*  Vierge.  Les  tours 
carrées  qui  flan<|uent  le  portail  sont  percées  d'une  fe« 
nêtre  à  deux  divisions  :  à  l'endroit  où  commence  la 
flèche  octogonale ,  elles  ont  aux  quatre  an^es  un  cloche- 
ton élégant  ;  de  distance  en  distance,  le  corps  de  la  flèche 
est  entouré  d'un  anneau  qui  le  partage  en  sections,  dont 
les  quatre  premières  présentent  une  fenêtre  très-ornée. 
Xes  clochers  atteignent  une  hauteur  de  60  met.  La  tour 
qui  s'élève  à  l'entre-croisement  des  transepts  s'élève,  avec 
sa  flèche,  à  115  met.  A  l'intérieur,  Tédiflce  a  les  dimen- 
sions suivantes  :  longueur,  120  met.;  largeur  de  la  nef, 
y  compris  les  collatéraux,  32  met.  ;  largeur  au  transept, 
dO  met.  ;  hauteur  des  voûtes,  20  met.  Entre  autres  objets 
intéressants,  on  remarque  les  vitraux  de  la  chapelle  de 
la  Vierge,  provenant  de  l'abbaye  ruinée  de  Belgium ,  les 
tombcAux  de  Garrick,  de  Samuel  Johnson,  de  lady  Mon- 
tague.  B. 

LiaTATION  (du  latin  Itcitart,  enchérir),  acte  par  le- 
quel les  copropnétaires  par  indivis  d'une  diose  qui  ne 
peut  être  partagée  commodément  ou  sans  dépréciation , 
la  font  mettre  aux  enchères  pour  être  adjugée  et  appar- 
tenir au  dernier  et  plus  fort  enchérisseur,  à  la  charge 
par  celui-ci  de  payer  à  chacun  des  copropriétaires  une 
part  du  prix  proportionnelle  à  la  portion  indfivise  qu'il 
avait  dans  la  chose.  La  licitation  a  donc  ponr  objet  de 
diviser  le  prix  d'une  propriété  commune ,  quand  le  par- 
tage direct  et  en  nature  de  cette  propriété  est  Impossible. 
Elle  peut  être  demandée  par  tout  copropriétaire,  en  vertu 
de  ce  nrlncipe  que  nul  ne  peut  être  contraint  à  demeurer 
dans  rindivision.  On  la  dit  volontaire  ou  à  VamiaMe,  si 


LIB 


116S 


LIE 


iouB  les  oopropriétaîreB  sont  majeurs,  maîtres  de  leurs 
droitSj  préîents  oa  dûment  repraentés,  et  d*accord  entre 
aux  ;  jùdkkUrêf  lorsqae  ces  conditions  ne  sont  pas  toutes 
rfonies.  La  lidtation  Tolontaire  peut  se  faire  sans  publi- 
cité, si  c'est  l'un  des  intéressés  qui  prend  la  propriété 
entière  ;  mais  Tadmission  des  étrangers  est  de  droit,  du 
moment  qn*nn  des  colidtants  la  demande,  et  alors  la 
publicité  est  obUsatoire.  Le  Juge  est  tenu  d'ordonner  la 
Udtation,  quand  11  y  a  demande  formelle  de  Tun  des  co- 
propriétaires, et  quand  Timpossibilité  du  partage  est 
bien  constatée.  Dans  la  lidtation  Judiciaire,  les  étrangers 
sont  toqjours  admis  à  enchérir.  La  lidtation  ne  se  fait 
Jamais  par  acte  sous  seing  privé.  F.  le  Codé  de  Procé- 
àum,  2*  partie,  liv.  II,  tit.  1 

LICIUM ,  ceinture  à  plusieurs  tours  des  Victimaires 
romains. 

UCOKNE,  animal  fabuleux,  qu'on  disait  avoir  les 
formes  du  sheval,  le  poil  roux  ou  blanc,  et  le  tront  armé 
d'une  longue  corne  aiguë.  La  licorne  a  été  un  symbole  de 
force  et  de  stabilité,  parce  que  sa  corne  n'était  point  ca- 
duque. Dans  le  Blason,  elle  sert  tantôt  de  pièce  prind- 
pale,  tantôt  de  dmier. 

LICTEUR.  V»  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
^aphie  et  d^Histoire. 

UÉ ,  terme  de  Musique.  V.  Lbgato  et  Ijaisor. 

LIED ,  mot  allemand  qui  correspond  au  mot  français 
chanson  et  au  mot  italien  canxone»  Les  prindpaux  au- 
teurs de  liedsr  sont  Gœthe,  Gleim,  Voss,  Hoalty,  Burger, 
Amdt,  KoBmer,  Hdne,  etc. 

LIÈGE  (  Êfldise  S*-Paol,  k).  Cette  église,  érigée  en  ca- 
thédrale en  1793,  à  la  place  oe  celle  de  S*-Lambert,  dont 
les  derniers  vestiges  ont  disparu  en  1828,  fut  fondée  au 
X*  siècle,  et  reb&tie  dans  le  xm*  ;  mais  il  ne  reste  de  cette 
époque  que  l'arrière-chœur.  Chaque  siècle  suivant  est 
venu  i^outer  qudque  chose  à  son  srchitecture  :  la  nef, 
avec  ses  fenêtres  en  style  flamboyant,  appartient,  ainsi 
que  ses  collatéraux,  au  coounencement  du  xvi*  siècle;  les 
chapelles  de  ces  collatéraux  datent  de  1528  ;  la  tour,  de- 
meurée inachevée,  a  été  décorée  d'une  flèche  en  bois  en 
1813.  L'aspect  de  la  cathédrale  de  Liège  à  l'extérieur  est 
tro\d  et  mesquin  ;  elle  n'a  que  deux  entrées  latérales,  où 
le  gothique  se  mêle  avec  peu  de  bonheur  au  style  de  la 
Renaissance.  Mais  l'intérieur  produit,  par  ses  vastes  nn^ 
portions,  un  effet  saisissant  :  la  nef  a  74  met.  de  Ion  • 
gueur,  et  le  chœur  28  met.  La  voûte  est  couverte  d'ara 
£K»ques  peintes,  qui  s'harmonisent  mal  avec  le  caractère 
de  rarchitecture.  On  remarq[ue,  outre  plusieurs  bons  ta- 
bleaux, 1®  une  chaire  en  bois  sculpté,  du  style  ogival  le* 
plus  luxuriant,  ornée  de  statues  de  marbre,  et  surmontée 
d'un  abat-voix  en  forme  de  flèche  qui  s'élève  à  une  hau- 
teur de  près  de  20  met.;  c'est  un  ouvrage  de  Guillaume 
Geefs;  2»  dans  une  chapelle  latérale,  un  Christ  au  tom- 
beau ,  en  marbre  blanc,  par  Delcourt ,  à  qui  l'on  doit 
aussi  le  Christ  en  bronze  de  la  grande  porte;  3<*  la  grille 
qui  sépare  le  chœur  de  la  nef,  beau  travail  de  serrurerie  ; 
i^  dans  le  Trésor  de  l'église,  un  buste  de  S*  Lambert , 
pièce  d'orfèvrerie  exécutée  en  1M3  par  Henri  Zutman. 
Un  cloître  du  xvi*  siècle  est  adossé  à  la  cathédrale. 

uiGB  (  Église  SMacqovs,  à).  Ce  monument,  à  l'excep- 
tion de  la  tour,  qui  est  de  la  fin  du  xii*  slède  et  le  seul 
reste  d'une  église  antérieure ,  est  un  des  types  les  plus 
parfaits  qui  existent  du  style  ogival  tertiaire  parvenu  à 
son  apogée,  et  déployant  toute  la  richesse,  peut^^tie 
excessive,  de  son  ornementation  si  nulée.  Le  portail, 
construit  au  commencement  du  xvi*  siède  sur  les  dessins 
d'nn  architecte  liégeois  nonmié  Lombard  ou  Lambert, 
est  un  horsrd'œuvre  en  style  de  la  Renaissance,  appliqué 
à  un  édifice  gothique.  LMntérieur  de  l'église  est  vaste, 
majestueux  et  léger  tout  à  la  fois.  La  voûte  semble  cachée 
sous  un  réseau  de  fines  arêtes,  qui  s'entre-croisent  avec 
symétrie,  et  encadrent  des  médaillons  ornés  de  tètes 
peintes  ;  mais  ces  arêtes  enluminées  en  Jaune,  avec  des 
bracelets  bruns,  blancs  ou  rouges,  des  fonds  bleus  qui 
lemplissent  les  vides  de  la  voûte,  ne  satisfont  pas  un  goût 
délicat  On  est  émerveillé  de  l'immensité  des  fenêtres,  de 
la  légèreté  des  galeries  ogivales,  des  broderies  de  pierre 
qui  festonnent  les  arcades  de  la  nef.  Au-dessus  des 
piliers,  entre  les  tètes  des  arcades,  on  a  représenté  en 
médaillons,  et  accompagné  de  versets  en  caractères  go- 
thiques, les  portraits  des  principaux  personnages  de 
rÉôriture.  Le  buffet  d'orgues,  d'une  richesse  extraordi- 
naire, déploie  à  ses  deux  eûtes  de  vastes  panneaux  dorés, 
chargés  d'anges  et  de  saints,  et  se  termine  par  le  bas, 
presque  à  portée  de  main  d'homme,  en  forme  de  cul-de- 
lampe  garni  de  dnq  statues.  On  remarque  aussi  l'escalier 
double  d'une  petite  tribune  d'où  l'on  a  vue  sur  le  chttar, 


I  et  les  stalles  du  chosur,  sculptées  avee  oae  déilcrtcMS 
merveilleuse.  F.  Delsaux,  J^itst  S^-JacqtÊm  à  Liège, 
1  vol.  in-fol. 
LIEN ,  en  termes  de  Construction,  pièce  de  charpente 

Si  relie  deux  maîtresses  pièces  ensônble,  telles  qu'un 
tage  avec  le  poinçon,  un  arbalétrier  avec  l'entrait,  un 
poteau  avec  son  chapeau,  etc. 

uni,  en  termes  de  Droit,  est  synonyme  de  pa/renU, 
Le  lien  est  simple,  entre  frères  et  sœurs  qui  ont  un  p^ 
ou  une  mère  différents  ;  double,  entre  personnee  iiaaes 
d'un  même  père  et  d'une  même  mère. 

LIERNES ,  nervures  des  voûtes  ogivales.  Elles  partent 
des  tiercerons,  et  viennent  se  réunir  à  la  clef;  elles  for- 
ment une  croix  dont  la  def  est  le  centre.  On  ne  les  voit 
paraître  que  vers  le  milieu  du  xv*  siède.  —  Dana  l'art 
du  charpentier,  on  donne  le  nom  de  liemes  à  des  pièces 
de  bois  horizontales  qui  relient  deux  poinçons ,  ou  qui, 
formant  des  courbes  horizontales  et  concen^ques,  relient 
à  dilTérentes  hauteurs  les  maîtresses  pièces  d^n  dûmeoa 
d'une  coupole.  B.  L» 

LIERRE ,  arbuste  consacré  à  Bacchus.  Tot^ours  vert, 
il  symbolisait  l'étemelle  Jeunesse  de  ce  dieu  ;  et  on  se 
rappelait,  d'ailleurs,  que  ses  baies  paraissent  en  automne 
au  temps  des  vendanges.  Plusieurs  princes  de  Syrie  et 
d'Egypte,  surtout  ceux  qui  prirent  le  surnom  de  Diony- 
sos, sont  représentés  sur  les  médailles  avec  une  cou- 
ronne de  lierre  comme  Bacchus.  On  couronnait  les  porter 
de  lierre,  parce  que  Bacchus  est  un  compagnon  de.. 
Muses.  Les  Andens  aimaient  à  employer  les  feuilles  de 
lierre  pour  les  bordures  de  vêtements,  pour  celles  des 
vases,  et  pour  les  ornements  des  frises  d'architecture. 
Les  vases  ornés  de  feuilles  de  lierre  étaie;»*  dits  Aede- 
rata^  et  ceux  décorés  de  ses  fruits,  corymbÎMêm 

LIEUTENANT  (du  latin  locum  tenens,  temait  liea, 
suppléant),  second  ofiider  d'une  compagnie  ou  d'un  es- 
cadron. Il  aide,  comme  son  nom  l'indique,  le  capitaine 
dans  ses  fonctions,  et  le  remplace  en  cas  d'absence.  H 
porte  l'épaulette  d'or  ou  d'argent  (selon  le  corps)  à  can- 
che,  et  la  contre-épaulette  à  droite.  V,  Ueotbiiaiit,  aaos 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  (TBistoire, 

UEomuiiT  (sous-),  3*  offider  d'une  compagnie  on 
d'un  escadron.  Il  porte  l'épaulette  d'or  ou  d'argent  (seleD 
le  corps)  à  droite,  et  la  contre^paulette  à  gauche.  Le 
pcrte-Hirapeau  et  le  porte-étendaid  sont  toijours  sons- 
lieutenants.  Le  grade  de  sous- lieutenant  fut  créé  vers 
i585. 

uniTBziART-coLOTiBL.  i  V.  ces  mots  dans  notre  Diction» 

LiBOTBiiAirr-GÉNéRAL.  )       naire  de  BioçT.etd'Histoire^ 

UEOTBFfAinr  DB  VAISSEAU,  grade  de  la  marine  militaire, 
assimilé  à  cdui  de  capitaine  dans  l'armée  de  terre.  Il  est 
au-dessus  de  celui  d'enseigne  de  vaisseau,  et  au-dessous 
de  celui  de  capitaine  de  frégate.  Il  y  a  des  lieutenants  de 
vaisseau  de  deux  classes.  Ils  font  exécuter  les  ordres  du 
capitaine,  président  aux  manœuvres,  et  commandent  les 
quarts  à  bord  des  vaisseaux  ;  à  terre,  ils  commandent  les 
compagnies  des  équipages  de  ligne,  et  sont  attachés  à 
Tétat-mijor  ou  à  la  dutiction  des  ports.  Ils  portent  deux 
épaulettes  en  or  mat,  à  petites  torsades  et  a  corps  uni, 
sur  lequel  est  une  ancre  en  or  et  couronnée. 

UEUX  D'AISANCES.  V.  Fossb  d'aisarcbs. 

LIEUX  COMMUNS,  nom  que  les  anciens  rhéteurs  ont 
donné  aux  divers  aspects  généraux  sous  lesquels  II  est 
possible  d'envisager  un  si:det  donné,  aux  idées  générales 
qui  lui  sont  applicables ,  à  des  espèces  de  réperlolru 
où  l'on  trouve  des  preuves  pour  un  sujet  quelconque.  Os 
en  traitaient  dans  la  partie  de  la  Rhétorique  qu'on 
nomme  l'Invention.  Quand  les  lieux  communs  appartien- 
nent au  fond  même  du  sujet,  ils  sont  dits  tn^rmséqrties  ; 
quand  ils  sont  pris  hors  du  sujet,  on  les  appelle  extrin- 
sèques. Les  lieux  intrinsèques  sont  :  la  définition.  Venu- 
mération  des  parties,  le  genre  et  Vespèce,  la  comparai^ 
son,  les  contraires,  les  répugnants,  les  antécéélents  et  les 
conséquents,  les  circonstances,  la  cause  et  Veffet.  Les 
lieux  extrinsèques  sont  :  la  loi,  les  titres,  la  renommée, 
le  serment^  les  témoins,  la  question  {V.  ces  mots),  —  Les 
Andens  attachaient  une  grande  importance  aux  lieux 
communs.  Aristote  et  Cicéron  composèrent  des  traités  sur 
cette  matière,  sous  le  nom  de  topiques.  Les  rhéteurs 
attribuaient  à  l'étude  approfondie  des  lieux  communs  tes 
succès  des  plus  grands  orateurs;  c'était  faire  trop  d'hon- 
neur à  cette  méthode  banale  d'invention.  Mais  il  est  vrai 
de  dire  que,  si  les  lieux  communs  ne  font  pas  trouver 
les  Idées,  ils  aident  à  les  mettre  en  œuvre.  C'est  une 
espèce  de  mécanisme  que  l'habitude  nous  rend  funllier, 
et  que  nous  mettons  en  mouvement  sans  nous  en  speiv 
cevoir.  Les  exerdces  de  l'école,  les  déclamations,  arcou* 


LIG 


1169 


UM' 


•UBmit  Vmptix  à  laiiir  Titement  certains  aspeets  d'un 
ijet,  et  à  les  exprimer  immédiatement  sans  obscurité  et 
os  embams  :  plus  tard,  quand  l*écolier  est  derenn  on 


plus  tard,  quand 
bomme,  il  profite  de  la  souplesse  qu'il  a  donnée  à  son 
esprit,  mais  il  oublie  les  procédés  au  moyen  desquels  il 
ra  acquise.  Poète,  philosophe,  historien,  orateur,  il  dé- 
veloppe des  lieux  communs  sans  le  savoir,  pour  ainsi 
dire,  et  entraîné  par  Tinspiration  du  moment.  Cicéron 
{De  Oraton,  u,  30)  fait  connaître  clairement  Futilité 
des  lieux  communs.  Ce  sont,  dit^il,  des  principes  géué- 
ranx  d*où  se  tirent  les  raisonnements  pour  tous  les 
genres  de  cause  et  de  discours.  Chaque  fois  que  nous 
avons  un  mot  à  tracer,  il  n*est  pas  nécessaire  que  nous 
portions  successivement  notre  pensée  sur  toutes  les  let- 
tres qaï  le  composent  :  de  même,  à  chaque  affaire  qu*il 
nous  faudra  plaider,  nous  n'avons  pas  besoin  de  passer 
en  revue  tous  les  aréuments  qui  peuvent  s'y  rapporter, 
U  suffit  d'avoir  en  réserve  certains  lieux,  qui  viendront 
ao88lt6tse  prunier  à  nous.  Mais  l'orateur  ne  peut  tirer 
parti  de  ces  lieux,  s'il  ne  s'est  formé,  soit  par  l'expé- 
rience, que  l'âge  donne  à  la  longue,  soit  à  force  d'écouter 
et  de  réfléchir,  car  le  travail  et  l'étude  devancent  les 
années.  F.  Hiionyille,  De  la  théorie  des  lieux  eomT- 
nmn$  dans  les  Topiqttes  d^Aristote,  1856,  in-8".    H.  D. 

UBDX  FOBucs,  dénomination  sous  laauelle  on  com- 
prend les  endroits  que  l'autorité  est  chargée  de  surveiller, 
tels  que  foires,  marchés,  spectacles,  cafés,  cabarets,  mai- 
sons de  Jeux,  etc.,  et  où  les  agents  de  la  police  adminis- 
tzatlre  ont  toujours  le  droit  de  pénétrer.  Par  rapport  à 
la  publicité  en  matière  de  diffamation  et  d'injures,  sont 
r^tés  lieux  publics  :  une  place,  une  rue,  une  auberge, 
une  école,  une  salle  de  spectacle,  les  bureaux  d'une  ad- 
ministtstion  publique,  etc. 

LIÈVB ,  en  termes  de  Jurisprudence  ancienne,  extrait 
d*nii  terri9r{V,  ce  motU  quo  i*on  remettait  au  receveur, 
pour  ^'11  fit  payer  le  cens,  les  rentes  et  les  droits  sei- 
gneunaux. 

LIÈVRE ,  animal  qui ,  dans  les  hiéroglyphes  égyptiens, 
était  un  symbole  de  franchise,  n  fut  consacré,  chez  les 
Grecs,  à  la  déesse  Vénus  et  à  Bacchus. 

LIGATORE ,  terme  de  Musique,  synonyme  de  LÂauon 
(F.  cê  mo^» 

usATons,  en  termes  d'Ecriture  et  de  Typographie,  se  dit 
de  ploaiears  lettres  liées  ensemble,  comme  fl,  (T*  G'«t  une 
faventloD  des  copistes  de  livres,  avant  l'impnmerie,  afin 
d'abréger  récriture  :  la  Qrpographie  l'adopta  dès  l'origine, 
et  Ton  s'eo  servait  encore  au  xtq*  siècle  pour  les  livres 
mes.  On  y  a  renoncé  depuis.  Les  ligatures,  très-multi- 
pfîées,  surtout  en  grec,  rendaient  les  livres  moms  lisibles, 
mais  Initiaient  à  la  lecture  des  vieux  manuscrits. 

UGNAGE ,  mot  qui  a  vieilli  et  qui  était  synonyme  de 
race,  de  famUlê.  L^a4iectif  lignager  se  distdt  des  per- 
sonnes du  même  lignage.  V.  Retrait. 

LIGNE,  terme  d'Art  militaire,  qui  s'emploie  avec  plu- 

lieaxs  significations  t  il  veut  dire  la  direction  générale 

de  la  position  des  troupes,  soit  pour  combattre,  soit  pour 

s'exercer  aux  manosuvres.  Se  porter  sur  la  ligne,  c'est  se 

diriger  vers  le  point  qu'on  doit  y  occuper  ;  entrer  en  ligne, 

cfest  s'y  placer:  rompre  la  ligne,  c'est  s'v  tenir  trop  en 

avant  (fore&r  la  ligns)  ou  trop  en  arrière  {refuser  la 

iigns).  La  ligne  de  direction  est  celle  qu'un  corps  djit 

suivre  pour  se  porter  d'un  lieu  à  un  autre;  la  ligne  Sf^ 

rotàan,  celle  qu'une  armée  doit  rallier  sans  cesse  pour 

eoooourir  à  une  grande  opération.  La  lïgnie  pietns  est 

ceDe  où  la  dnrîte  d'un  corps  s'appuie  à  la  gauche  d'un 

antre  corps  ;  la  ligne  par  intervalles  laisse  un  espace  vide 

entre  la  gauche  d'un  corps  et  la  droite  d'un  autre,  ifor- 

tker  em  Itgnê,  c'est  conserver  en  marchant  l'alignement 

fénéraL  Au  commandement  de  par  pelotons  ou  par  sec^ 

ikms  em  ligne,  une  troupe  en  marôhe  par  le  flanc  se 

#vise  et  s'échelonne  en  pelotons  ou  en  sections.  La 

fertNqw  de  Ugne,  ou  dmplement  la  ligne,  se  compose  des 

eorps  qui  forment  la  It^ne  de  bataUle,  par  opposition  à  la 

kw^eiégère,  et  c^est  en  ce  sens  qu'on  dit  infanterie,  oo- 

taUriê,  régimenl  de  ligne.  —  Dans  la  Fortification,  ligne 

^Êt  qMmyme  de  retrandument ,  et  on  distingue  les 

Ugnes  etmtmues  et  les  lignes  d  intervalles ,  selon  qu'il 

y  a  ou  non  interruption  entre  les  ouvrages  qui  les  oom- 

pQssiBt  (F.  GnooNVALLATiON).  —  Dsus  la  Marine,  on 

iMmme  eotitsaiig  de  ligne  les  plus  forts  bâtiments  de 

gnBi%  destinés  à  combsttre  en  ligne  de  bataille. 

uem,  en  termes  de  Généalogie,  chaîne  ou  série  de  pa- 
icats  eoi  remontent  à  un  mâne  chef.  Ou  distingue  la 
Ugne  dsreeU,  suite  de  parents  qui  descendent  les  uns  des 
antres,  comme  le  père,  le  fils,  le  petit-fils  ;  et  la  ligne  001» 
iotmie»  dont  les  membres,  sans  descendre  les  uns  des 


autres,  ont  pourtant  un  auteur  commun ,  ainsi  que  *• 
firères  ou  sœurs,  cousins  ou  cousines,  oncles,  neveux  on 
nièces.  Les  degrés  de  parenté  ne  se  calculent  pas.de  la 
même  manière  pour  les  deux  lignes.  F.  PAanni» 

UGNB,  en  termes  de  Géographie,  est  synonyme  d'équa* 
leur.  F.  Baptême  de  la  ligne. 

UGNB  de  défense.  F.  DÉFENSE. 

UGNB  DE  DOUANES,  suite  de  postes  et  de  bureaux  de 
douanes  placés  le  long  d'une  frontière  pour  percevoir 
les  droits  et  empêcher  la  contrebande. 

UGNE  DE  FLOTTAISON.   F.  FLOTTAISON. 

UGNE  DE  PARTAGE  DBS  EAUX,  suito  de  moutagiies  qui  sé- 
parent les  bassins  hydrographiques  d'un  pays,  et  dont  les 
pentes  déterminent  la  direction  des  cours  d'eau.  On  dit 
ussi  Arête  hydrographique  et  Arête  dorsale. 

UGNES  DE  MUSIQUE.    F.   PORTÉE. 

UGUE  (du  bas  latin  liga,  fait  de  ligare,  lier),  union 
Âb  princes  ou  d'États  pour  attat^uer  un  ennemi  commun 
on  pour  s'en  défendre.  Elle  se  distingue  de  Vailiance,  en 
ce  qu'elle  suppose  moins  de  durée  et  que  son  but  est . 
prochain. 

LIGURIUS ,  pierre  précieuse  que  S*  Jér5me  croit  être  - 
la  même  que  l'hyacintue,  et  dont  les  Anciens  vantent  la 
nuance  d'un  violet  tendre  et  brillant.  Dans  la  Symbo- 
lique, le  ligurius  a  représenté  Aser  et  l'apôtre  Simon. 

ULLEBONNE  (Antiauités  de).  Cette  viUe,  située  à 
32  kilom.  E.  du  Havre,  a  peu  de  «ustance  de  la  Seine,  eut 
au  temps  des  Romains,  sous  le  nom  de  Juiiobona,  une 
grande  importance,  fille  était  le  point  de  départ  de  quatre 
voies  romaines  au  moins,  dirigées  sur  Rouen,  Pont-Au« 
demer,  Harfleur,  et  Fécamp.  On  a  trouvé  dans  son  terri- 
toire un  grand  nombre  de  médailles,  des  urnes  sépul- 
crales, des  vases  lacrymatoires,  des  tombeaux.  En  1812,  on 
a  découvert  à  LîIIebonne  un  amphithéâtre,  qui  est  mainte- 
nant presQue  entièrement  déblayé,  ainsi  que  des  bains  an- 
tiques, OUI  furent  ornés  avec  un  certain  luxe,  et  où  l'on 
a  recueilli  deux  belles  statues  en  marbre,  divers  usten- 
siles et  des  médailles.  UUebonne  a  aussi  un  ch&teau  du 
moyen  âge,  appelé  le  ch&teau  d'Harcourt.  Il  est  flanqué, 
à  l'E.,  d'une  tour  ronde  fort  élevée,  de  17  mètres  de  dia- 
mètre, construite  en  cailloux,  et  à  laquelle  on  arrive  par 
un  pont^levis  de  11  met..  Jeté  sur  le  fossé  profond  qui 
l'environne.  L'intérieur  du  ch&teau  n'ofilrG  plus  qu'une 
vaste  cour  entourée  de  plusieurs  salles  en  ruine,  tapis- 
sées de  ronces  et  de  lierre,  et  les  débris  d'une  tour 
hexagonale,  dont  quelques  fenêtres,  semblables  à  celles 
des  églises  gothiques,  pourraient  faire  penser  qu'elle  con- 
tenait une  chapelle. 

IJMAÇON.  F.  EscAUBS. 

LIMBES.  (  F.  ces  mots  dans  notre  Dtetionnaire 

UMÉNARQUE.  )     de  Biographie  et  d: Histoire. 

LUHMA,  signe  d'altération  dont  les  andens  Grecs  se 
servaient,  dit-on,  dans  la  mélodie,  pour  faire  l'office  de 
notre  dièse  ou  de  notre  bécarre. 

LIMOGES  (Église  S^Étiennb,  à).  Cette  église  cathé- 
drale fut  commencée  en  1270,  continuée  durant  tout  le 
XIV*  siècle,  abandonnée  pendant  la  plus  grande  partie  do 
xv%  reprise  à  la  ftn  de  ce  même  siècle,  et  laissée,  vers 
1537,  dans  l'état  où  elle  se  trouve  ai^ourd'hui.  Le  chœur 
et  l'abside  sont  des  œuvres  pures  et  grandioses  du  style 
ogival  primitif  et  secondaire;  le  transept  et  trois  travées 
de  la  neT  appartiennent  au  style  flamboyant;  trois  autres 
travées ,  élevées  seulement  à  la  hauteur  de  3  met.,  sem- 
blent attendre  leur  achèvement.  Toute  la  construction, 
envgranit  compact  et  fin,  s'est  parlaitement  conservée. 
L'édifice  a  la  forme  d'une  croix  latine,  avec  chevet  semi- 
circulaire,  et  est  divisé  en  trois  nefs.  Le  chœur,  le 
transept  et  les  nefs  déambulatoires  offrent  une  fErande 
richesse  de  style  et  une  ordonnance  pleine  de  mi^esté. 
Les  larges  fenêtres  sont  garnies  de  vitraux  assez  bien 
conservM.  Le  Jubé,  exécuté  en  1533,  se  distingue  {>ar  h 
profusion  des  ornements,  la  délicatesse  et  le  fini  des 
sculptures,  et  serait  comparable  à  celui  de  S^*-Bladel  eine 
de  Troyos,  si  quelques  dégradations  n'en  avalent  pas 
altéré  la  beauté  :  on  est  étonné  de  trouver  là  des  bas -re- 
liefs représentant  les  travaux  d'Hercule.  La  partie  qu! 
sert  de  tribune,  et  qui  fidt  saillie  en  encorbellement,  esr 
soutenue  par  c[uatre  colonnes,  dont  les  Intervalles  sont 
occupés  par  six  niches,  ,a^)ourd*hul  vides  de  leurs  sta- 
tues. Ce  Jubé  se  trouvait  autrefois  à  sa  place  naturelle, 
entre  le  chœur  et  la  nef  i  il  a  été  transporté  en  1780  an 
devant  de  la  porte  principale.  Trois  tombeaux,  dignes 
d'attention,  renferment  les  restes  de  deux  évêoues  Ut 
Limoges  et  d'un  doyen  du  chapitre  :  celui  de  révêqut 
ReguMiltde  LaPorte,  en  ûice  de  la  sacrMe,  construit  er 
pierre  calcaire  dans  le  style  du  un*  et  du  uv*  siècle,  tat 

74 


LIM 


1170 


LIN 


ytrdenliteement  lemarqoable.  Le  portail  Mtentrional  est 
«ae  des  parties  les  plus  brillantes  de  l'église  t  la  rosace 
■BDible  formée  d'une  dentelle  de  pierre.  Le  clocher  de  la 
cathédrale  de  Limoges  forme  un  massif  indépendant , 
placé  en  dehors  de  Taie  de  la  nef,  et  d*un  style  tout  diffé- 
lent  :  il  est  de  forme  octogonale,  et  présente  au  spectateur 
placé  en  face  de  la  nef,  non  Tun  de  ses  côtés,  mais  Tan 
4»  ses  angles  ;  il  penche  visiblement  du  côté  de  Térèché. 
£levé,  dit-on ,  en  1190  ou  1101,  frappé  de  la  foudre  en 
4483, 1484  et  1571,  il  se  compose  de  quatre  étages,  dont 
chacun  est  percé  de  deux  ou  trois  ouTertures  assez 
étroites  et  surmontées  d*ogiYes  très-peu  algues  :  la  base 
i«>ose  sur  une  voûte  en  pendentif,  soutenue  par  quatre 
piliers  ;  \h  sommet  n'indique  plus  que  la  naissance  de  la 
pyramide  qui  le  couronnait.  B. 

uiiOGBS  (Émailleurs  de).  Dès  le  xii*  siècle,  Limoges 
avait  une  grande  célébrité  pour  la  fabrication  des  émaux, 
que  Ton  api>elait  opus  a$  LmogiA,  labor  Umogiœ, 
opus  Lemoviticum.  Ces  émaux  étaient  incrustés  sur  des 
crosses  d'évêmies,  des  calices,  des  dholrea,  des  croix,  des 
reliquaires,  des  ch&sses,  des  tombeaux,  des  vases  de 
tonte  sorte,  des  colliers,  des  candélabres,  des  coupes,  des 
fermoirs,  des  agrafes,  des  plats,  des  assiettes,  des  bahuts, 
des  casques ,  des  poignées  d'épées,  des  manches  de  cou- 
teaux, etc.  Au  xnr*  siècle,  les  artistes  de  Limoges  eurent 
dès  rivaux  dans  les  orfèvres  de  Ifontpellier.  Leur  art,  in- 
terrompu par  les  malheurs  de  la  guerre  de  Cent  Ans,  re- 
prit un  nouvel  éclat  au  xvi*  siècle,  et  ce  fut  sans  doute 
alors  seulement  qu'on  adopta  le  procédé  Italien,  consis- 
tant à  peindre  en  émail  avec  des  couleurs  étendues  sur 
le  métal  et  non  plus  encaissées  dans  des  dreux.  Léonard 
fut  nommé  directeur  de  la  manufacture  rétablie  par 
François  I*';  parmi  les  morceaux  admirables  qu'il  a 
laissés,  on  peut  citer  les  médaillons  du  tombeau  de  Diane 
de  Poitiers,  et  les  portraits  de  Philippe  de  Chabot  et  de 
François  de  Guise,  conservés  an  Louvre.  Au  xvi*  ilècle 
appartiennent  les  émailleurs  Jean  Courtois,  de  Court  ou 
Corteys,  Pierre  Courtois,  Susanne  Courtois,  Jean  de 
Limoges,  Pierre  Raymond  ou  Rexmann,  et  Pénicant. 
Pendant  le  xvii*  siècle,  les  Laudin  soutinrent  la  gloire 
de  Técole  limousine  :  la  cathédrale  de  Limoges  pcwsède 
trois  magnifiques  émaux  de  Nicolas  Laudin,  l'alné  de 
cette  famille.  A  côté  de  Joseph  LaucUn  et  de  Valérie 
Laudin ,  on  mentionne  Etienne  Mersier  et  Poucet.  Au 
XVIII*  siècle,  Tart  de  rémailleor  ne  fut  plus  soutenu  que 
rar  les  Nouailhier  (Bernard,  Jean-Baptiste,  Joseph  et 
Pierre),  dont  les  œuvres  marquent  une  grande  décadence 
dans  le  dessin  et  la  couleur.  La  peinture  en  émail  dis- 
parut vers  1766,  et  fut  remplacée  par  la  peinture  sur 
porcelaine. 

LIMON.  V,  EsGAum. 

LIMOSINAGE,  maçonnerie  grossière,  faite  de  moel- 
lons, de  blocage  ou  de  libages  noyés  dans  un  bain  de 
mortier,  et  dont  on  fait  les  fondations  d'un  bâtiment. 

LIMOUSINE  ou  LÉHOSINE  (Langue),  un  des  dia- 
lectes de  la  Langue  SOc  (V.  u  moOi  parlé  dans  la  pro- 
vince du  Limousin.  Il  a  eu,  dans  le  moyen  âge,  une  cer- 
taine importance,  et  les  linguistes  lui  trouvent  une 
grande  analogie  avec  le  catalan  {V,  ce  moi).  On  sait, 
en  effet,  qu*en  1212,  plus  de  400  Limousins,  moines, 

I prélats  et  chevaliers,  allèrent  s'établir  dans  la  Catalogne; 
e  Code  que  Jacques  I*',  roi  d'Aragon,  donna,  en  1238^ 
aux  habitants  du  royaume  de  Valence,  était ,  nous  dit-on, 
.écrit  en  langue  «  limousine  ou  catalane;  n  Gaspard  Esco- 
lano  intitule  un  des  chapitres  de  son  Histoire  de  Valence  : 
De  la  lengua  lemosina  y  valenciavia.  Les  critiques  ita- 
liens, espagnols,  portugais,  se  servent  souvent  de  l'ex- 
pression Umosine  pour  désigner  la  langue  romane  du 
midi.  —  Ce  qu'on  nomme  ai^ourd'hui  le  Patois  limousin 
est  la  Langue  d'Oc  très-corrompue;  on  y  rencontre  des 
phrases  entières  de  basse  latinité.  Les  verbes  auxiliaires 
et  les  articles  y  sont  employés  avec  des  terminaisons  mé- 
ridionales. L'absence  de  Ve  muet,  si  commun  dans  la 
langue  française,  les  voyelles  qui  terminent  presque 
tous  les  mots,  rendent  ce  patois  sonore  et  harmonieux. 
D  a  de  la  grftce,  de  la  naïveté,  se  prête  facilement  à  un 
dialogue  caustique  et  spirituel ,  et  rend  avec  originalité 
'es  détails  burlesques;  mais  il  manque  de  noblesse.  Il 
existe  un  Dictionnaire  du  patois  limousin  par  B«x)nie, 
augmenté  par  Vialle,  Tulle,  in-4«. 

LivousiNB,  manteau  de  grosse  laine  commune.  Jau- 
nâtre ou  grisâtre,  froncé  dans  sa  partie  supérieure,  et 
sans  autre  façon.  Il  n'y  a  plus  guère  que  les  voituriers 
qui  le  portent. 
LIMUS.  V.  ce  mot  dam  notre  i>tc(toimatr0  de  Biogrth 
^''  et  d'iEf  ûtoin» 


LINGBDL ,  mot  qut  signifiait  autrefob  tonte  «ipèee  de 
linge,  et  qui  ne  s'applique  plus  qu'an  drap  dont  on  enve- 
loppe les  morts  avant  de  les  mettre  an  cercueil. 

UNÇOIR,  en  termes  de  Construction,  forte  pièos  d» 
boia  qui,  daîns  un  plancher,  recouvre  un  vide  et  reçoit 
l'extrémité  des  solives. 

LINCOLN  (Église  Notre- Damb,  à),  ee  Angleterre, 
dans  le  comte  de  Lincoln.  Cette  église  cathédrale,  bâtit 
sur  une  éminence,  fut  commencée  après  1075  par  Ton 
des  compagnona  de  Guillaume  le  Conquérant,  Rémi, 
d'abord  abjblé  de  Fécamp ,  puis  promu  à  l'épiscopat.  Op 
la  dédia  en  1092.  Cétait  un  monument  de  s^le  romano- 
l^ysantin.  De  graves  dommages,  causés  par  un  incendie 
en  1124,  furent  promptement  réparés.  En  1186,  à  la  suite 
d'un  tremblement  de  terre  qui  avait  renyersé  les  voûtes 
et  léiardé  tous  les  murs,  on  procéda  à  la  reconstruction 
totale  de  l'édifice,  sur  on  plan  nouveau,  et  dans  le  style 
ogival  :  les  travaux,  retardés  par  la  chute  de  la  tour  cen- 
trale en  1235,  ne  furent  achevés  qu'au  xiv*  siècle.  Par  la 
grandeur  des  dimensions,  la  beauté  de  l'ordonnance,  la 
régularité  de  l'ensemble  et  l'élégance  des  détails,  la  cap 
thédrale  de  Lincoln  est  une  des  plus  remarquables,  non- 
seulement  de  l'Angleterre,  mais  de  toute  l'Europe.  Son 
plan  est  en  forme  de  croix  archiépiscopale  ou  à  double 
traniept  :  la  longueur  hors  œuvre  est  de  170  met  ;  la 
largeur  de  la  nef,  y  compris  les  collatéraux,  de  25  mèt.{ 
la  longueur  du  gprand  transept ,  de  70  mètres.  La  ré- 
gion sMidale  se  termine  carrément.  La  façade  occiden- 
tale, ornée  d'une  infinité  de  petites  arcatures  à  oçi- 
ves,  se  distingue  plus  par  la  multiplicité  des  détails 
que  par  la  grandeur  des  lignes  :  au  centre  et  en  retraite 
est  la  porte  principale,  surmontée  d'une  vaste  fenêtre, 
puis  d'une  rose,  et,  de  chaque  c6té,  on  voit  plusieurs 
arceaux  de  style  romano-byzantin,  ce  qui  fut  supposer 
qu'une  partie  de  l'église  de  l'évèqne  Rémi  a  été  conser- 
vée dans  la  construction  nouvelle.  Les  extrémités  de 
cette  façade  offrent  chacune  une  tourelle  dont  le  clo- 
cheton seul  dépasse  la  hauteur  de  toute  la  construction  : 
mais,  au-dessus  du  portail ,  de  chaeue  côté  du  fronton, 
s'élève  une  tour  carrée,  haute  de  60  met.,  percée  de  fe- 
nêtres à  ogives,  avec  couronnement  formé  de  moulures 
et  de  feuillages,  et  dont  les  angles  sont  tout  à  la  fois 
soutenus  et  décorés  par  des  contre-forts  aurmontés  de 
clochetons.  Plus  belle  encore  est  la  tour  centrale ,  con- 
struite à  l'intersection  des  transepts,  et  haute  de  100  met.; 
elle  ne  le  cède  qu'à  la  tour  de  l'église  S^-Ouen  de  Rouen 
Elle  porte. les  statues  de  onze  rois  normands,  de  gran- 
deur naturelle,  et  renferme  une  énorme  cloche ,  dite  U 
gros  Thomas.  La  perspective  intérieure  de  la,  cathédrale 
de  lincoln  est  très-pittoresque,  et  l'effet  général  ne  lais- 
serait rien  à  désirer  si  les  voûtes  étaient  plus  hautes. 
Les  fenêtres  manquent  aussi  un  peu  d'élévation ,  psiœ 
qu'elles  sont  comprises  entièrement  dans  la  hauteur  de 
la  retombée  latérale  de  la  voûte.  Il  y  a  une  salle  capitu- 
laire  remarquable  :  c'est  un  décagone  de  20  met.  de  dia- 
mètre et  de  14  met.  de  hauteur,  voûté  en  pierre;  au 
centre  est  un  pilier  en  pierre,  accoté  de  10  colonnettes 
en  marbre,  qiu  lui  sont  attachées  par  un  annelet  cireur 
laire  vers  le  milieu  du  fût.  Les  arceaux  de  la  route  s'ap- 
puient d'un  côté  sur  ce  pilier  central,  et  de  l'autre  sur 
des  colonnettes  groupées  à  chaque  angle  du  décagone. 
A  l'extérieur,  des  contre-forts  et  des  arcs-boutants  sou- 
tiennent les  angles  de  cette  construction,  et  les  fenêtres 
sont  surmontées  de  fh)ntons  aigus.  T.  VHld,  An  illus- 
tration of  architecture  and  sculpture  of  the  cathedrd 
church  of  lAncoln,  Londres,  1819,  in-4®.  B. 

LINÉAIRE  (Dessin).  V.  Dessin  industriel. 

LINGE  DE  TABLE.  V.  Nappe,  Serviette. 

LINGOT,  en  termes  dTmprimerie,  nom  donné  aux 
morceaux  de  fonte  qui  servent,  soit  à  remplir  les  blanci 
des  pages,  soit  à  maintenir  le  haut  et  le  bÂa  d'une  page 
divisée  en  colonnes. 

LINGUALES ,  consonnes  dont  l'articulatioii  exige  cer- 
tains mouvements  de  la  langue.  Ce  sont  les  dentales  d 
et  t ,  les  palatales  I  et  r,  et  la  nasale  n. 

LINGUISTIQUE  (du  latin  linffua,  langue),  recherche 
des  prindpes  universels  du  langage,  de  aon  oriigine,  de 
son  caractère,  mais  surtout  de  ses  matériaux,  de  ses 
procédés,  de  ses  formes,  des  rapporta  qui  rattachent  les 
divers  idiomes  entre  eux  malgré  lenr  oiveTaité  (  id  eOe 
se  confond  avec  la  Philologie  comparée  ) ,  des  méthodes 
les  plus  logiques  pour  arriver  à  établir  nettement  leur 
classification  et  leur  filiation ,  ou  leor  distribation ,  soit 
chronolo^que,  soit  ethnographique,  soit  d*apr^  le  sys^ 
tème  grammatical  (  V.  Langue  ).  I^  progrès  de  l'eUmogra* 
I  phie  ont  di^à  contribué  à  Jeter  une  vive  lunnîère  sur  œ 


LTO 


1171 


LIO 


genre  de  recherches ,  dont  les  premiers  essais  importants 
neremontent  guère  au  delà  de  la  fin  du  iviu*  siècle.  Anté- 
rieurement à  cette  époque,  les  travaux  ne  pouvaient  abou- 
tir. I^s  Grecs  et  les  Romains  traitaient  de  barbcures  les 
peaples  et  les  langues  du  reste  du  monde  :  des  idiomes  de 
rantique  Europe,  à  peine  leurs  écrivains  nous  ont^ila  fait 
coDDutre  quelques  noms  propres  plus  on  moins  défigurés, 
et  on  petit  nombre  de  mots  techniques  aussi  infidèlement 
traoïcrits;  le  traité  de  Varron,  ^/tngud  latinà^  ne  donne 
pas  une  bien  haute  idée  de  ses  connaissances  étymolo- 
giques, puisqu'il  s*évertue  à  expliquer  par  le  vieux  latin 
one  foule  de  mots  qui  dérivaient  du  grec.  Chez  les  mo- 
dernes, la  Linguistique,  outre  qu'elle  manquait  de  maté- 
riaux suffisants ,  s'engagea  dans  une  voie  fausse  :  elle 
voulut  découvrir  la  langue  mère  de  toutes  les  autres  ; 
Thébreu  rallia  le  plus  grand  nombre  de  partisans ,  et  son 
droit  de  primogéniture  fut  proclamé  et  admis  presque 
comme  un  article  de  foi  ;  cependant,  Pezron,  Pelloutier, 
La  Tour  d'Auvergne  prirent  ha  parti  do  bas  breton  \  plus 
d'un  savant  s'escrima  en  faveur  du  basque  ;  Van  der  Beken 
et  Van  Scbrieck  plaidèrent  la  cause  du  flamand,  etc.  On 
aptreroyait  confusément  quelque  ressemblance  entre  deux 
langues,  et  on  en  concluait  que  Tune  était  la  mère  et 
Tautre  la  fille  ;  on  ne  soupçonnait  même  pas  la  descen- 
dance collatérale.  Au  lieu  de  prendre  pour  termes  de 
coniparaison  les  mots  qui  expriment  les  objets  naturels , 
les  idées  simples  et  les  premiers  besoins  de  l'homme,  et 
qni  touchent  nécessairement  au  berceau  du  langage,  on 
prenait  an  hasard  des  mots  d'une  civilisation  plus  avancée, 
«s  termes  d'art  ou  de  science,  que  les  peuples  peuvent 
•e  communiquer  par  lenrs  relations  subséquentes.  On  se 
eonteotait  le  plus  souvent  d'une  ressemblance  fortuite 
de  lettres  ou  de  syllabes,  au  lien  de  rechercher  la  ressem- 
blance du  sens,  ce  fut  seulement  depuis  Leibniz  que  les 
travaux  devinrent  plva  sérieux  :  ce  savant  avait  recom- 
atandé  l'étude  des  idiomes  avant  de  bâtir  des  systèmes, 
et  on  se  mit  à  recueillir  des  matériaux.  On  n'avait  encore 
obtenu  que  des  résultats  partiels,  et  il  leur  manquait  un 
lien,  lorsque  les  conquêtes  des  Anglais  dans  l'Inde  atti- 
rùrent  l'attention  sur  le  sanscrit.  On  découvrit  qu'il  était 
la  souche  des  grandes  branches  du  langage  européen,  et 
la  descendance  collatérale  des  langues  fut  désormais  une 
vérité  évidente.  On  étudia  d'après  ce  principe  les  autres 
langues  connues,  et  l'on  est  arrivé  à  réduire  à  cinq  ou 
six  le  nombre  des  langues  mères  ou  indépendantes.  Pré- 
exista-t-il  une  langue  unique,  type  perdu,  dont  les  autres 
idiomes  reproduisent  quelques  traits?  C'est  ce  que  ne 
démontre  aucune  preuve  concluante.  Parmi  les  travaux 
Tei  plus  importants  sur  la  Linguistique,  sont  :  le  Voc<k- 
bidair*  wAyglGtU  d'Hervas,  1787;  le  MUhridate  d'Ade- 
inog,  1817;  VIndex  alphabétique  des  langues  de  tout 
fmûvers  par  Vater,  1815  ;  V Alphabet  européen  appliqué 
«MX  langues  asiatiques jJ^bt  Volney,  1819;  VAsiep(Ày' 
9^oUe,  de  Klaproth,  1823;  V Atlas  ethnographique  du 
9Me,  par  Adr.  Balbi,  1826;  Ib^  Grammaire  comparative 
des  laiçfsês  indo-germaniques,  par  Fr.  Bopp,  1833-53; 
les  ObsmyfaOons  d'Eo^ne  Bumouf  sur  cette  Grammaire. 
1833  ;  les  Notions  de  linguistique  de  Charles  Nodier,  1834 
(oorrage  souvent  très-paradoxal);  le  Parallèle  des  lan- 
gues de  r Europe  et  de  l'Inde,  par  Eichhoff,  1836;  l'ex- 
oellente  Dissertation  de  Guill.  de  Humboldt  sur  le  Kawi 


VBistaire  générale  et  systèmes  comparés  des  langues  sé- 
WHiiques,  par  If.  Renan,  1855;  le  Z)tcttonnatr0  de  lin- 
gîÊÎstiqne,  par  M.  Jehan  {Encyclopédie  théologiqiie  de 
l'abbé  MUgne). 

UNGULA.  T.  notre  Dictionn.  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

UNOS,  nom  d'une  très-ancienne  chanson  grecque, 
tiré  de  linos ,  fils  d'Apollon  et  d'Uranie  (T).  Homère  en 
bit  mention  au  18*  chant  de  V Iliade  y  dans  la  description 
des  vendanges  représentées  par  Vulcain  sur  le  bouclier 
ffAcliille;  et  un  fragment  d'Hésiode,  cité  par  Eustathe 
dans  son  commentaire  sur  Homère,  nous  apprend  qu'on 
chantait  le  Linos  dans  les  festins  et  dans  les  chœurs  de 
daoïe.  Cétait  un  chant  lugubre.  On  l'appelait  aussi 
ifimof .  F.  YAjax  furieux  de  Sophocle  (v.  625)  et  l'Élégie 
de  Moscfaus  sur  la  mort  de  Bion.  P. 

UDÎTKA1I,  pièce  de  charpente  ou  de  fer  placée  en  tra- 
vers et  sur  les  Jambages  d'une  baie  de  petite  porte  ou  de 
fenêtre  pour  en  former  la  fermetiiire.  Si  le  linteau  doit 
mster  apparent,  on  le  décore  de  sculptures. 

liOr^  Cet  animal  a  été  considéré  de  tout  temps  comme 
le  symbole  de  la  force  et  de  la  mijesté.  Lm  anciens 
Fenes,  Venise^  la  Belgique,  plusieurs  ordres  de  cheva- 


lerie, l'ont  pris  pour  emblème.  Chez  les  Grecs,  il  étali 
spécialement  consacré  à  Cybèle.  En  Egypte,  il  fut  le  sym- 
bole de  la  vigilance,  et  ouelquefsis  du  Nil.  Au  moyen  âge, 
le  lion  fut  un  animal  héraldique  :  il  est  dit  naissant,' 
quand  il  ne  parait  qu'à  moitié  sur  le  champ  de  l'écu; 
mome,  sll  n'a  ni  dents  ni  langue;  affamé^  sans  queue ;.- 
issant,  lorsque  étant  sur  un  chef  ou  une  fasce  il  ne  mon- 
tre que  la  tète,  le  bout  de  ses  pattes  de  devant  et  l'extré 
mité  de  sa  queue;  léopardé,  quand  il  semble  marcher; 
lampassé,  quand  sa  langue  et  ses  gnifes  sont  d'un  autre 
émail  que  son  corps.  —  La  figure  du  lion  a  toi^ours  été 
employée  pour  orner  les  trônes  et  les  entrées  de  sanc- 
tuaires et  de  palais.  Quand  le  sculpteur  ne  pouvait  placer 
l'animal  entier,  il  en  rappelait  l'idée,  en  ornant  de  griffes 
les  appuis  de  différents  meubles.  On  vit  assez  fréquem- 
ment des  effigies  de  lions  décorer  les  portails  des  éiglises 
du  moyen  âge  :  ces  lions  étaient  l'image  de  la  juridiction 
ecclésiastique,  qui  s'exerçait  à  la  i)orte  des  églises ,  et, 
comme  le  disent  certaines  chartes ,  inter  leones.  Il  y  en  a 
au  porche  méridional  de  la  cathédrale  du  Mans ,  aux 
entrées  de  beaucoup  d'églises  italieones,  notamment  à 
Reggio,  Bologne,  Foligno,  Plaisance,  etc.  Quelquefois  un 
lion  soutient  la  chaire  épiscopale  et  le  cierge  pascal.  Le 
lion  est  un  attribut  du  prophète  Daniel,*  de  S^  Marc,  de 
S»  Venant,  de  S**  Thècle,  etc.  B. 

LION  d'or,  monnaie.  V.  notre  Dict.  de  Biogr» 

LTON  DP.  BOURGES.  V.  lo  Supplément. 

LIOUBE ,  terme  de  Construction  ;  la  même  chose  que. 
la  gueule  de  loupCV.  ce  mot). 

LIPOGRAMMATIQUE  (Ouvrage),  mot  formé  du  grec 
leipô,  Je  laisse,  et  gramma^  lettre,  et  signifiant  ou  U 
n^entre  pas  certaines  lettres.  Pindare  avait  fait,  dit-on, 
une  ode  où  n'entrait  pas  la  lettre  Ç,  et  Lasos  d'Hermione 
une  ode  et  une  hymne  sans  ç.  On  citait ,  au  m"  siècle 
de  notre  ère,  une  Iliade  de  Nestor  de  Laranda,  dont 
le  P'  livre  était  sans  a,  le  H*  sans  6,  etc.  Une  Odyssée 
lipogrammatique  fut  également  composée  par  IWphio- 
dore.  Un  certain  Gordianus  Fulgentius  composa  Sur  les 
âges  du  monde  et  de'l*homme  un  ouvrage  latin  en  23  cha- 
pitres, où  manquait  successivement  une  lettre  de  l'al- 
phabet :  il  nous  en  reste  14  chapitres.  Dans  un  reçuei 
de  pièces  espagnoles  publié  en  1 709  par  Isidore  de  Roblès, 
les  cinq  premières  rejettent  chacune  à  leur  tour  une  des 
cinq  voyelles.  Orazio  Fidèle  a  publié  à  Turin,  en  1633, 
L'  a  sbandito  sopra  la  potenza  d'amore,  poème  de 
1,600  vers,  où  la  lettre  r  ne  se  trouve  pas  une  seule  fois. 
On  peut  rapprocher  de  cette  misérable  frivolité  le  soin 
minutieux  et  ridicule  qu'on  a  prêté  à  Isocrate  de  ne  lais- 
ser échapper  aucun  hiatus  dans  un  de  ses  plus  longs 
ouvrages,  et  la  gêne  inutile  que  s'est  donnée  Coôffeteau 
pour  éviter  l'emploi  de  car  dans  toute  l'étendue  d'un 
assez  gros  volume.  Gomberville  se  vantait  puérilement 
de  n'avoir  pas  employé  une  seule  fois  cette  conjonction 
dans  son  roman  de  Polexandre,  où  elle  s'était  néanmoins, 
à  son  insu,  glissée  en  trois  endroits.  P 

LIQUIDATION,  en  termes  de  Commerce,  apurement 
de  tous  les  comptes  d'une  maison  de  commerce  ou  d'une 
société  quelconque,  dépouillement  de  toutes  les  dettes 
actives  et  passives,  et  payement  intégral  ou  proportionnel 
des  unes  et  des  autres.  La  liquidation  peut  se  faire  dans 
quatre  circonstances  différentes  :  1^  par  suite  de  la  simple 
retraite  ffun  commerçant,  qui  cède  ses  affaires  à  un 
autre;  avant  de  se  retirer,  il  fait  un  inventaire  général 
de  sa  situation,  opère  le  recouvrement  de  toutes  les 
sommes  qui  lui  sont  dues,  et  vend  à  son  successeur  son 
fonds  et  son  actif,  déduction  faite  du  passif;  rien  de  plus 
simple  que  ce  genre  de  liauidation .  qui  se  confond  pres- 
que avec  rinventaire  {V.  ce  mot)\  —  2«  par  stUte  du 
aécès  du  commerçant.  Si  le  mort  a  un  successeur,  la 
liquidation  se  fait  absolument  comme  dans  le  cas  précè- 
dent, et  la  personne  du  négociant  décédé  est  représentée 
par  les  héritiers.  Si  le  mort  n'a  pas  de  successeur,  on 
commence  par  faire  l'inventaire,  on  vend  les  marchan 
dises  et  effets,  on  solde  les  dettes,  on  recouvre  les  créances, 
et  le  partase  des  biens  n'a  lieu  définitivement  ({ue  quand 
la  liquidation  est  terminée  et  qu'on  a  pu  détermmer  exac- 
tement le  chiffre  de  la  fortune  du  mort;  —  3^  par  suite 
de  dissolution  de  société.  Si  c'est  une  société  anonyme,  la 
liquidation  est  faite  par  une  personne  élue  par  les  action- 
naires; si  c'est  une  société  en  nom  collectif,  elle  a  lien 
par  un  ou  plusieurs  associés  ;  si  c'est  une  société  mixte, 
la  liquidation  a  lieu  par  un  ou  plusieurs  des  sociétaires 
en  nom  collectif  et  solidairement  responsables.  En  tout 
cas,  le  liquidateur  est  responsable,  non-seulement  envers 
les  associés  auxonels  il  est  substitué,  mais  encore  envers 
les  personnes  qui  ont  en  des  relations  avec  la  Société  ;  — 


LIS 


LIT 


4*  par  tuUê  ds  nutuvaises  affaires»  La  liquidation ,  dans 
ee  cas ,  a  pour  but  de  conserver  aux  créanciers  les  débris 
de  la  fortune  du  commerçant,  et  de  leur  partager  propor- 
tionnellement à  leurs  créances  les  valeurs  actives  de  la 
maison  en  déconfiture.  Ce  dernier  genre  de  liquidation 
se  rapproche  de  la  faillite  (F.  cê mot).  En  résumé,  voici 
les  principes  de  la  liquidation  s  le  Ucruidateur  monétise 
toutes  les  valeurs  de  la  Société  ou  de  la  maison  de  com- 
merce ;  dans  les  bonnes  aflaires,  il  paye  toutes  les  dettes, 
remplit  tous  les  engagements,  satisfait  à  toutes  les  obli- 
gations, et,  quand  la  Société  ne  doit  plus  rien,  il  partage 
entre  les  associés  ce  qui  reste  au  prorata  de  leurs  droits  ; 
dans  les  mauvaises.  Il  réunit  en  bloc  ce  qu'il  peut  réali- 
ser, et  le  distribue  au  marc  le  franc  par  contribution 
d'abord  entre  les  créanciers  jusqu'à  extmction  de  leurs 
créances,  et  ensuite  entre  les  associés  :  c'est  alors  une 
fiiillite  déguisée,  et  le  liquidateur  est  plnt6t  un  syndic 

Les  successions,  les  dissolutions  de  communauté  entre 
époux,  nécessitent  aussi  des  liquidations.  V,  Michaux , 
Traité  pratique  des  liquidations,  1860,  in-8^ 

En  matière  Judiciaire,  on  reconnaît  aussi  la  liquidation 
des  dommages-intérêts  et  la  liquidation  des  frais  et  dé-- 
pens,  faites  par  le  Jugement  même  qui  les  adjuge. 

En  termes  de  Bourse,  la  liqtùdation  des  rentes  est  le 
règlement  des  négociations  pour  fin  courant,  lequel  se  fait 
généralement  à  la  4*  bourse  du  mois  suivant.  Les  opéra- 
tions sur  les  chemins  de  fer  se  liquident  deux  fois  par 
mois,  le  15  et  le  30.  L. 

LIQUIDE,  en  termes  de  Finances,  est  synonyme  de 
net,  clair,  crui  ne  peut  donner  lieu  à  contestation,  et  se 
dit  surtout  d'une  dette,  d'une  créance. 

LIQUIDES  (Consonnes).  Ce  sont  les  4  lettres  L,  M,  N, 
R,  qui,  étant  employées  à  la  suite  d'une  autre  consomie 
dans  une  même  syllabe,  sont  coulantes  et  se  prononcent 
aisément.  Ce  terme  est  adopté  dans  renseignement  de  la 
langue  erecque  ;  mais  il  n'est  guère  d'usage  dans  celui  des 
antres  langues.  H  nous  vient  des  grammairiens  latins, 
qui  appelaient  spécialement  ainsi  L  et  R  ;  chez  les  Grecs 
seulement,  le  nom  de  Liquides  s'appliquait  aussi  à  M  et 
N.  Certains  grammairiens  placent  le  \f.  parmi  les  labiales, 
X,  V,  p  parmi  les  linguales,  et  cette  distribution  est  adop- 
tée aussi  par  plusieurs  grammairiens  français  pour  nos 
4  lettres  correspondantes.  P. 

LTRAZZA,  ancienne  monnaie  d'argent  de  Venise,  valant 
environ  63  centimes. 

LIRE,  monnaie.  V.  notre  Dict.  de  Biogr,  et  d^Bistoire, 

LIS  (Fleurs  de^  V,  Fleors  db  Lis,  dans  notre  Diction- 
naire de  Biograprde  et  d'Histoire, 

USBONNINE,  monnaie  de  Portugal,  ainsi  nommée  de 
la  ville  de  Lisbonne.  On  l'appelle  aussi  moeda  d^ouro 
f  monnaie  d'or)  ;  elle  vaut  4,800  reis  ou  33  fr.  96  c.  Il  y  a 
aes  demi-lisbonnines  ou  meta  moeda  (16 fr.  98  c.)  et  des 
quarts  de  lisbonnine  ou  quartinhos  (8  fr.  49  c). 

USIEUX  (Église  S*-PiEaRs-BT-S^PAUL,  à).  Cette  an- 
cienne église  ciObédrale,  fondée  vers  l'an  1022,  a  subi  tant 
de  reconscructions  et  de  réparations,  que  le  style  roman 
primitif  a  fait  place  partout  aux  formes  o^vales.  La  fa- 
çade, précédée  d'un  parvis  auquel  on  accède  par  une  ouin- 
zaine  de  marches,  est  simple  et  sévère  :  la  porte  principale 
est  surmontée  d'une  longue  croisée  à  meneaux  fleuris  ; 
les  deux  petites  portes  sont  pratiquées  sous  deux  tours, 
dont  une  seule,  celle  du  Midi,  est  surmontée  d'une  flèche. 
Toute  cette  construction,  moins  la  flèche  érigée  en  1579  à 
la  Blace  d'une  autre  qui  s'était  abattue  en  1553,  est  du 
xsr  H  du  xin*  siècle,  ainsi  que  la  plus  grande  partie  ds 
la  Mf.  L'édifice  est  en  forme  de  croix  latine  :  son  vais- 
seau, qui  manque  de  largeur,  a  néanmoins  de  l'élégance 
et  de  la  hardiesse.  La  voûte  est  soutenue  par  des  colonnes 
monocylindriques  à  bases  garnies  d'empâtements.  Les 
collatéraux  font  tout  le  tour  de  l'église,  et  sont  garnis  de 
chapelles.  Le  transept  est  couronné  d'une  tour,  en  forme 
de  lanterne.  La  chapelle  de  la  S** -Vierge,  érigée  au 
XV*  siècle  par  Pierre  Cauchoo,  en  expiation  de  sa  con- 
duite perverse  et  cruelle  envera  Jeanne  d'Arc,  a  reçu  de 
nos  Jonra  un  bel  autel  gothique,  ouvrage  de  Bleuet.  L'église 
de  lisleux  est  presque  complètement  dépourvue  d'œuvres 
d'art  :  tout  a  été  saccagé  par  les  calvinistes  en  1562  et 
par  les  révolutionnaires  ae  1793.  C'est  à  la  Révolution 
que  l'on  détruisit  un  Jubé  de  menuiserie,  qui  avait  pris, 
en  1689,  la  place  d'un  Jubé  en  pierre. 
I  USSE  ou  LICE  (du  latin  lictum,  trame),  nom  donné 
aux  cordelettes  tendues  sur  le  métier  à  tapiss^ie  et  an 
moyen  desquelles  l'ouvrier  ramène  la  laine  d'avant  en  ar- 
rière. Dans  le  métier  à  haute  lisse ,  ces  cordelettes  sont 
tendues  verticalement,  tandis  que  dans  le  métier  à  basse 
lisse  elles  sont  tendues  horizontalement. 


LISSES,  en  termes  de  Marine,  longues  pièces  de  bols 

S'en  met  sur  le  bout  des  membres  des  cdtés  d'un  navire. 
s  lisses  de  vibord  ou  de  plat-bord  sont  la  ceinture  qui 
envelopj>e  le  bfttiment  dans  sa  partie  supérieure;  les  liua 
d^appus  sont  les  garde-corps. 

LISTE  CIVILE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dietiomiaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

usTB  ÉLBCTORALE,  listo  des  élocteurs,  dressée  par  le 
maire  dans  chaque  commune.  Le  tableau  des  additioDB 
et  des  retranchements  est  déposé  au  secrétariat  le  15  Jao* 
vier  au  plus  tard,  et  on  en  est  averti  par  voie  d'affiches  : 
pendant  10  Jours,  tout  citoyen  omis  peut  présenter  sa 
réclamation ,  et  tout  citoyen  inscrit  peut  réclamer  rin- 
scription  ou  la  radiation  d'nne  personne  omise  on  indû- 
ment inscrite.  Les  réclamations  sont  Jugées  par  une  com- 
mission composée,  à  Paris,  du  maire  et  de  deux  a4ioints, 
et,  partout  ulleun,  du  maire  et  de  deux  conseillers  mu- 
nicipaux désignés  par  le  Conseil  s  la  décision  doit  être 
renoue  dans  les  5  leurs,  puis  communiquée  dans  le  délai 
de  3  jours  aux  intéressés.  On  peut  en  appeler,  dans  les 
5  Jours  de  la  notification,  devant  le  Juse  de  paix  du  can- 
ton, qui  statue  dans  les  10  leurs,  bl  la  demande  impli- 
quait la  solution  préalable  d^une  question  d'état  ciril  on 
politique,  cette  question  devrait  avoir  été  vidée  par  les 
juges  compétents,  avant  la  décision  du  juge  de  paix.  Cette 
décision  peut  être  enfin  déférée  à  la  Gonr  de  cassation 
dans  les  10  joun  de  la  notification.  Tous  les  actes  Judi- 
ciaires en  madère  électorale  sont  dispensés  da  timbre  et 
enregistrés  gratis.  Au  31  man,  le  maire  dût  définitive- 
ment la  liste,  qui  reste  déposée  an  secrétariat,  où  toute 
personne  peut  en  requérir  la  communication,  et  elle  reste 
en  cet  état  jusqu'à  l'année  suivante. 

LISTEL.  V.  FïLR. 

UT,  meuble  destiné  au  concher.  Les  premiers  lito  du- 
rent être  des  litières  de  paille  ou  d'heroe,  des  amas  de 
Joncs  ou  de  roseaux  jetés  sur  le  sol ,  puis  de  simples  plan- 
ches, exhaussées  sur  des  piliers  pour  ériter  l'humidité  du 
sol,  et  recouvertes  de  peaux  de  bétes,  d'herbes  sèches  oa 
de  laine.  Peu  à  peu  le  luxe  embellit  la  forme  des  lits,  et 
la  mollesse,  arrivant  à  la  suite  des  richesses  et  des  pro- 
grès de  la  civilisation,  insphra  l'Idée  de  les  garnir  de 
coussins  ou  de  matelas  souples  et  moelleux,  et  de  lea 
couvrir  de  somptueuses  étoffes.  Les  Égyptiens  donnaient 
fréquemment  à  leura  lits  la  forme  d'animaux,  dont  la  tète, 
plus  élevée,  formait  le  coussin.  Les  Romains  eurent  dif- 
férentes espèces  de  lits  (  V.  Lit,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d*Histoire) .  Pendant  le  moyen  Age  et 
dans  les  temps  modernes,  la  forme  des  lits  n*a  guère 
varié  que  dans  les  pilien  qui  les  soutiennent  et  les  bal- 
daquins qui  les  couvrent.  Longtemps  on  les  a  faits  très- 
hauts  ,  au  point  qu'il  fallait  des  gradins  pour  y  monter; 
on  les  élevait,  d'aiUeun,  sur  une  estrade,  et  une  balus- 
trade les  entourait,  au  moins  de  trois  côtés.  De  la  base 
de  ces  grands  lits  on  pouvait  souvent  faire  sortir  un  tiroir 
à  roulettes,  qui  était  lui-même  un  autre  Ut,  une  couchette 
pour  un  serviteur. 

UT,  en  parlant  des  pierres,  surface  sur  laquelle  elles 
reposaient  dans  la  camère.  On  doit,  dans  la  oonstructioa 
des  édifices,  faire  attention  au  lit  des  pierres,  afin  de 
les  placer  dans  le  même  sens  pour  les  assises  horizon- 
tales ;  autrement  la  pierre,  dite  alon  posée  en  détit,  perd 
une  grande  partie  de  sa  force,  et  résiste  moins  à  l'écra- 
sement. Loi^ue  la  pierre  forme  les  claveaux  d'un  arc, 
d'une  voûte  ou  d'une  plate-bande,  les  lits  doivent  suivre 
les  Joints  normaux,  parce  que  c'est  par  là  que  la  pierre 
prend  charge. 

UT  DB  CAMP,  couche  en  bols  placée  à  demeure  dans 
les  corps  de  garde.  Elle  se  compose  de  planches  Incli- 
nées, sur  lesquelles  on  jette  des  paillasses  ou  des  ma- 
telas, ou  quelquefois  qui  restent  nues. 

UT  DE  JUSTICE.  {  K.  cos  mots  dsns  notre  Dictionnaire 

UTANIES.         S       àe  Biographie  et  d^Histoire. 

UTEV^KA.  V.  LiTHDANIEll. 

LITHOCHROMIE  (du  grec  lithos ,  pierre,  et  chrâma. 
couleur) ,  procédé  de  coloriage  des  estampes,  ainsi  appelé 
parce  qu'on  l'appliqua  d'abord  aux  limographiea.  On 
étend  derrière  l'estampe,  qu'on  a  rendue  transparente  eo 
l'imprégnant  d'un  vernis  gras,  des  couleurs  à  l'huile  par 
couches  égales  et  épaisses;  on  n'emploie  jamais  qu'un 
seul  ton  pour  chacune  des  parties  qui  sont  à  peindre. 
L'image  étant  transparente,  les  lumières  et  les  ombrci 
qui  s'y  trouvent  modifient  le  ton  uniforme  de  la  couleur, 
et  lui  donnent  les  demi-tons  nécessaires  pour  le  modelé. 
On  colle  l'estampe  sur  une  toile  à  peindre  an  moyen 
d'une  couche  de  blanc  de  céruse,  et  on  passe  on  vends 
sur  la  surface  extérieure.  De  cette  façon  on  obtient  près- 


LIT 


1J73 


LIT 


fM  mécaniquement  des  tableaux  agréables  et  Imitant  les 
tableaux  à  l'halle. 

LITHOGRAPHES.  Us  sont  soumis,  au  point  de  Yue  de 
Ja  législation,  aux  mêmes  règlements  que  les  imprimeurs 
m  ^pograpfaie. 

LITHOGRAPHIE  (du  grec  lithos,  pierre  «  et  grapM, 
J'écris^ ,  art  de  tracer  des  caractères  et  des  dessins  sur 
ooe  pierre  calcaire,  dite  pierre  lithographiquef  et  de  les 
r^roduire  sur  le  papier  par  Timpression.  Pour  qu'une 
pierre  soit  bonne,  il  faut  qu'elle  soit  sans  tache ,  d'un 
nain  très-fln,  d'un  ton  uniforme,  pesante  et  spongieuse. 
Les  deux  faces  opposées  sont  parfaitement  planes  ;  l'une 
des  deux  surfaces  est  brute,  l'autre  a  été  bien  polie  au 
moyen  de  la  pierre  ponce.  On  écrit  ou  on  dessine  sur 
cette  surface  unie,  avec  une  plume  d'acier  trempée  dans 
une  encre  dite  lithographique  ou  arec  un  crayon  gras  : 
poison  fixe  l'écriture  ou  le  dessin  en  lavant  la  pierre  avec 
one  eau  de  gomme  à  laquelle  est  mêlé  un  peu  d'acide 
oitrique  ou  chlorhydrique.  Ce  lavage  rend  le  dessin  inso- 
luble, pénètre  la  portion  non  dessmée  de  la  pierre,  et  la 
^rend  incapable  de  recevoir  et  de  retenir  les  corps  gras , 
mais  susceptible  de  retenir  l'eau.  Pour  imprimer,  on  place 
la  pierre  dans  un  chariot,  espèce  de  caisse  où  elle  est 
maintenue  solidement  à  l'aide  de  vis  en  fer  on  de  coins 
en  bois  :  on  la  mouille  avec  de  l'eau  propre ,  puis  on  en- 
lève les  dessins  ou  les  écritures  avec  de  l'essence  de  téré- 
beatliine.  On  humecte  do  nouveau  et  très-légèrement 
toute  la  pierre  avec  une  éponge  fine;  on  étend  aussitôt, 
avec  un  rouleau  élastique,  de  l'encre  d'.mprimerie,  qui  se 
fixe  seulement  sur  le  dessin.  On  place  alors  une  feuille 
de  papier  blanc  un  peu  humide  sur  la  pierre,  on  la  recou- 
rre d'une  seconde,  dite  de  macuUUure,  et  on  abat  dessus 
un  cbâasia  de  fer  garni  d'un  cuir  fort  et  bien  tendu.  On 
soumet  le  tout  à  la  pression  d'un  rouleau  ou  d'un  rftteau 
en  bois,  qui  agit  perpendiculairement  sur  la  surface.  — 
U  lithogiûphie  fut  découverte  en  1706  par  un  Bavarois 
Qommé  Senefelder,  à  qui  le  célèbre  musicien  Weber  dis- 
puta cette  invention;  introduite  en  France,  dès  1802,  par 
trédéric  André,  l'un  de  ses  associés,  elle  ne  commença 
d'y  prospérer  qu'à  partir  de  1814,  grâce  aux  efforts  du 
comte  de  Lasteyrie,  à  Paris,  et  d'Engelmann  à  Mulhouse. 
Motte,  Bry,  Lemercier,  Chevalier,  Lanzlumé,  Jobard,  la 
perfectionnèrent  ensuite,  et  elle  atteignit  rapidement  son 
apogée  avec  les  dessins  de  Charlet,  de  Carie  et  d'Horace 
Veraet,  d'Ach.  Devéria,  de  Fragonard,  de  Picot,  de  Da- 
gnerre,  d'Isabey,  de  Villeneuve,  de  Gosse,  de  Bourgeois, 
deMIchalon,  de  Léon  Noël,  de  liaurin,  de  Gavaml,  de 
Û^ivedon,  de  Mouilleron,  de  Nanteuil,  de  Daumier,  etc. 
F.  Senefelder,  VArt  d$  la  lithoffraplM,  Paris,  1819;  Gbe- 
nlier  et  Langlumé,  Manuel  du  lUhooraphe,  1838  ;  Thénot, 
Cours  complet  de  lithographie,  1836;  Engelmann,  Traité 
théorique  et  pratique  de  lithographie,  1839;  Bré^ut, 
Koecht  et  Desportes,  Manuel  complet  de  V Imprimeur 
lithographe,  1850. 

On  donne  le  oom  de  chromo4ithographi»  à  la  lithogra- 
pbie  en  conleor.  On  fait  d'abord  le  trait  sur  la  pierre,  puis 
OQ  fût  autant  d*épreuves  qu'on  a  besoin  d'employer  de 
cooleors.  On  transporte  chaque  épreuve  de  trait  sur  une 
pierre  différente ,  puis  on  modèle  chaque  couleur  de  ma- 
oière  à  produire  les  effets  désirés,  en  combinant  les  cou- 
leurs de  manière  qu'elles  tombent  les  unes  sur  les  autres. 
Cest  an  procédé  long  et  minutieux,  surtout  quand  les 
oouleorset  les  teintes  sont  nombreuses,  et  on  n'y  a  bien 
zéoisi  que  depuis  EngelmauL  En  Angleterre,  Daty,  Ho- 
SUth,  et  Rowney  ont  publié  des  fac^imile  d'aquûeUes, 
<tm  ont  eu  un  très-grand  succès.  En  France,  la  chromo- 
lithographie a  été  employée  pour  les  pUnches  d'ouvrages 
importants,  tels  que  la  Monographie  des  tfitraux  de  la 
9athédraiê  de  Bourges,  le  Moyen  âge  et  la  Renaissanee, 
fhmtation  de  J^-C,  le  lÀore  d:Heures  tFAnne  de  Bre- 
tejne,  etc.  Elle  permet  de  reproduire  avec  une  perfection 
étonnante  non-seulement  les  miniatures  des  manuscrits, 
mais  encore  les  tableaux  des  grands  maîtres  :  c'est  ainsi 
fa'on  a  publié  le  Couronnement  de  la  Vierge  d'après 
Giovanni  da  Flesole  et  la  Vierge  du  Pérugin. 

UTHO-PBOTOGRAPHIE,  photographie  sur  piene.  Les 
premiers  essais  pour  transformer  les  plaques  dsnier- 
riennes  en  planches  gravées  ont  été  faits  par  SOI.  Fleean 
«  Lemahre;  mais,  la  morsure  à  l'acide  étant  trop  faible, 
sa  na  put  obtenir  qu'une  vingtaine  d'^renves.  Plus  tard, 
MH^LismevQMr,  BareswiU  et  Lerebours  prirent  un  brevet 
Mc>iitt  neviMa  UMHle  d'application  de  la  photographie 
I^IsliliiiMnpkiB.  Leur  prooMé  a  aervi  pour  la  pubiica- 
JHA  ^  isrrwàÉi  d»  Memphis  par  If.  Mariette,  pour 
Hifiu*  d^mAÊf^  éê  Paris  par  M.  PenguiUy  i'Hari- 


UTIIOSTROTOS-  V.  Mosaïque. 

LITHO-TYPOGRAPHIE,  procédé  à  l'aide  duquel  on  (Ut 
des  fao-^imile  d'impressions  typoçraphi(jues.  On  décalque 
sur  pierre,  à  l'aide  d'une  prépairation  chimique,  les  pages 
de  livres  ou  les  gravures  dont  on  veut  obtenir  de  nou- 
velles épreuves,  et  on  en  fait  le  tirage  par  les  moyens 
ordinaires  de  la  lithographie.  On  peut  de  la  sorte  renou- 
veler des  éditions  rares  et  précieuses.  Les  premiers  essais 
furent  faits  par  MM.  Boyer  et  Massias,  qui  donnèrent  è 
leur  procédé  le  nom  d'homoeographie.  MM.  Aug.  et  Paul 
Dupont,  imprimeurs  à  Paris,  ont  obtenu  des  résultats 
plus  satisfaisants. 

LITHUANIEN  (Idiome),  idiome  slave,  de  la  branche 
lettiquc,  appelé  Ittewka  par  ceux  qui  le  parlent.  11  a  été 
remplacé,  dans  les  classes  élevées  de  la  population  par 
l'allemand,  le  polonais  ou  le  russe,  selon  la  domination 
que  subit  l'ancienne  Lithuanie;  mais  les  classes  infé- 
rieures, et  principalement  les  habitants  des  campagnes, 
en  font  toujours  usage.  On  y  reconnaît  trois  dialectes  s 
le  lithuanien  proprement  dit,  parlé  à  l'Est,  dans  les  pala- 
tinats  de  Wilna  et  de  Troki  ;  le  samogitien  ou  potaco» 
lithuanien,  au  Nord;  et  le  prusso^ lithuanien,  dans  les 
pays  de  Tilsitt,  d'Insterburg,  de  Gumbinnen  et  de  Memel. 
Le  lithuanien  est  généralement  regardé  comme  l'ancienne 
langue  des  Hérules  et  des  Wendes,  et  passe  pour  être  le 
plus  pur  des  idiomes  slaves,  le  plus  rapproché  de  la 
source  indienne.  Il  Joue  vis-à-vis  des  langues  slaves  le 
même  rôle  que  le  gothique  vis-à-vis  des  langues  germa- 
niques. Les  racines  y  existent  plus  simples  et  plus  mélo* 
dieuses,  et  les  mots  y  ont  des  finales  douces  et  sonores. 
II  a  conservé  en  grande  partie  les  formes  grammaticales 
et  la  variété  d'intonations  qui  distinguent  le  sanscrit  t 
il  en  a  les  sept  cas  de  déclinaison,  le  nombre  duel,  et  les 
désinences.  En  lithuanien,  le  substantif  ne  marque  pas 
le  genre  neutre.  On  ne  distingue  pas  les  3**  personnes  du 
singulier,  du  duel  et  du  pluriel.  Le  passif  s'exprime  à 
Taide  de  l'auxiliaire  être.  Il  existe  uim  voix  moyenne  on 
réflective,  qui  se  forme  par  un  suffixe  et  un  préfixe.  Les 
coïncidences  que  le  lithuanien  offrw  avec  le  grec  et  avec 
le  gothique  ne  sont  probablement  fondées  oue  sur  la  com- 
munauté d'origine.  On  se  sert ,  pour  l'écnre,  de  l'alpha- 
bet allemand  ou  de  l'alphabet  polonais.  —  La  littérature 
lithuanienne  n'est  pas  riche,  une  traduction  de  la  Bible 
à  l'usage  des  paysans  fut  commencée  en  1580  par  Bredke, 
mais  ne  put  être  achevée  que  longtemps  après  par  une 
réunion  de  pasteurs,  parmi  lesquels  on  cite  Schwab, 
Schimmel,  etc.  La  plupart  des  livres  lithuaniens  appar- 
tiennent à  la  littérature  religieuse.  La  production  la  plus 
importante  dans  le  genre  profane  est  un  poème  sur  les 
Saisons,  composé  au  xvui*  siècle  par  Donaleitis.  Un  re- 
cueil de  DaUtios  (V'  ce  mot)  a  été  publié  par  Rhesa  à 
Kœnigsberg  en  1818.  On  doit  à  Ostermqrer  une  Histoire 
littéraire,  et  à  Hassenstein  une  Histoire  de  la  Réforma- 
tion.  F.  Klein,  Grammatica  lithuanica,  Kœnigsberg, 
1633,  in-8*,et  Compendium  lithuanico^ermanicum,  ou 
Courte  Introduction  à  la  langue  lithuanienne^  1673,  in-8*; 
Szyrwid,  Dictionnaire  polonais,  latin  et  lithuanien, 
Wihia,  1677,  in-8«;  Haack,  VocainUaire  lUhuanien-ail&' 
mand,  Halle^  1730,  in-8*;  Mielcke,  Grammaire  lithua- 
nienne,  et  Dictionnaire  lithuanien  et  allemand,  1800,  ou- 
vrages composés  antérieurement  par  les  deux  Rufaig; 
Pott,  De  borusso-lithuanico  in  slavicis  letticisque  lingws 
principatu.  Halle,  1837,  \n-i^\  Von  Bohlen,  5iir  iss  rop- 
porte  de  la  langue  indienne  avec  le  lithuanien,^  en  allem., 
KœnigsberjB,  1830,  in-8<>;  Bopp,  Grammaire  comparée 
du  sanscrit^  du  xend.  du  grec,  aillai,  du  lithuanien, 
du  gothique  et  de  VatUmand,  en  allem.,  Berlin,  1830-42, 
4  parties  in-8*. 

LmËRE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtetionnaire  de  BiO" 
graphie  et  d^Bistoùre* 

LITIGE  (du  latin  lis,  litis,  procès).  Une  chose  est  se 
litige,  quand  elle  est  l'objet  d'une  contestation,  d*un  pro- 
cès. On  appelle  litigont  celui  oui  conteste  en  Justice,  et 
litigieuœ,  ce  qui  peut  faire  robjet  d'un  débat. 

LmSPENDANCE  (du  latin  lis,  litis,  procès,  et  pen-- 
dere,  être  pendant),  se  dit,  1®  du  temps  consacré  à 
l'instruction  d'une  cause;  S*  de  la  durée  d'un  procès; 
3«  d'une  instance  qui  n'a  pas  encore  été  terminée  par 
Jugement  ou  par  an  arrêt  souverain  ;  A^  de  l'existence  si- 
multanée de  deux  actions  entre  les  mêmes  parties  pour  le 
même  objet,  mais  portées  devant  deux  tribunaux  diffé- 
rents. 

LITOTE  (du  grec  litotes,  petitesse,  exiguïté),  figure 
de  Rhétorioue  qui  consiste  à  se  servir  par  modestie,  par 
égard,  par  ironie,  d'une  expression  qui  dit  le  moins  pour 
faire  entendre  le  plus  sCt  m'estpaê  un  sanmU ,  poat  ^tn 


LIV 


1174 


LOJIl 


f€8t  wn  tgfioroni  -»  Ils  ne  s*atment  pas.  pour  Us  se 
kaUsewt;  —  Cet  enfant  n'est  pas  sot,  c-à-d.  est  inteUi- 
O^nt,  Fa,  je  ne  te  hais  point ,  dit  Chimène  à  Rodrigue  : 
œ  mot  est  une  déclantion  d^amour  faite  avec  la  délica- 
tesse que  réclame  la  situation  des  deux  personnages. 
Lorsque  Corydon,  dans  Virgile,  dit  à  Alexis  :  Nec  sum 
adeo  informu,  nuper  me  in  littore  vidi  Qe  ne  suis  pas 
li  difforme.  Je  me  suis  tu  dernièrement  dans  la  mer), 
il  veut,  sous  cette  forme  modeste,  donner  à  son  Jeune 
ami  une  haute  idée  de  sa  beauté  et  de  ses  grftoes.  Po!y- 

Çhème  en  dit  autant  de  lui-même  dans  la  0*  idylle  de 
héocrite  (▼.  34)  et  dans  la  11"  (v.  70).  P. 

LITRE,  y.  CeifETDRB  PUIli'.DIlE. 

LITTÉRALE  (Langue).  V,  Langub. 

UrrERATURE.  V.  le  Supplément. 

LITURGIE,  en  grec  leUourgta  {deleitos,  adjectif  ionien 
de  laos,  peuple  ;  et  de  ergon,  osane),  se  disait,  en  géné- 
ral ,  chez  les  anciens  Grecs  organisés  démocratiquement, 
de  tout  service  public,  et,  &ns  un  sens  restreint,  de 
certaines  prestaftons  imposées  aux  citoyens  qui  remplis- 
saient les  conditions  de  fortune  déterminées  par  la  loi. 
Ces  prestations,  distinctes  de  l'impôt  sur  les  biens,  ser- 
Taient  de  supplément  aux  revenus  publics.  A  Athèn««,  il 
7  en  avait  de  deux  sortes  :  les  liturgies  encycliques  ou 
ordinaires,  qui  revenaient  tous  les  ans  et  dans  un  orortî 
déterminé;  et  les  liturgies  extraordinaires,  qui  n'avaient 
lien  qu'en  temps  de  guerre.  On  distinguait  ouatre  litur- 
Kjes  encycliques  principales:  1<^ la  Choréiie  (  V,  CHoaéGE)  ; 
V  la  Gymnasiarchie  (  V.  Gtmn asiasque,  dans  notre  Dict, 
de  Biographie  et  d' Histoire)  i  ZH*HestiasiSf  banquet  donné 
pendant  les  fêtes  des  tribus,  et  dont  les  fhds  étaient  sup- 
portés par  un  citoyen  choisi  dans  chaque  tribu  ;  4<*  VAr- 
chithioîrie,  consistant  àconduire  les  théories  oudéputations 
sacrées,  qui  se  rendaient  à  Délos  et  dans  d'autres  lieux 
sacrés,  et  qui  assistaient  aux  grands  Jeux  de  la  Grèce. 
Les  liturgies  extraordinaires  étaient  au  nombre  de  deux  : 
la  triérarehiê,  consistant  dans  l'équipement  et  l'entretien 
des  navires  de  guerre,  et  VAvance  de  l'imp&t  pour  le 
eompte  d'autres  contribuables. 

UTuanu,  formule  de  prières.  F.  notre  Dietiomtake  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

LTTUUS.  (  V.  ces  mots  dans  notre  Dtctiomuure  de 

UVAH.     ]     Biographie  et  d'Histoire. 

UVARDE  (Voile).  V.  Voiu». 

UVONIEN  (Idiome).  F.  Lbttoh. 

LIVRAISON,  en  termes  de  Commerce,  remise  ou  déli- 
france  que  le  débiteur  d'une  marchandise,  d'une  chose 

Selconque,  en  fait  au  créancier.  Après  une  vente,  si  le 
u  de  la  livraison  n'a  pas  été  indiqué  par  la  convention, 
il  fiuit  examiner  si  robligation  est  de  livrer  un  corps 
certain  ou  des  choses  indéterminées  :  dans  le  premier  cas, 
la  livraison  doit  se  faire  au  lieu  même  où  se  trouwdt  la 
chose  au  moment  du  contrat  ;  dans  le  second,  si  llnter- 
prétation  de  la  convention ,  l'usage  local  ou  les  circon- 
stances laissent  subsister  l'incertitude,  le  lieu  de  la  livrai- 
son est  la  demeure  du  débiteur.  Relativement  au  temps^ 
la  livraison  est  due  au  terme  convenu,  et,  si  aucun  terme 
n'a  été  fixé,  aussitôt  que  le  prix  a  été  payé. 

LivEAisoN,  en  termes  de  Librairie,  portion  détachée 
d'un  livre,  qui  se  publie  ainsi  pour  en  rendre  l'acquisition 
plus  facile  au  public.  Ce  mode  de  publication ,  coomiun 
aujourd'hui  pour  les  ouvrages  de  lon^e  haleine  ou  très- 
populaires,  n'est- pas  nouveau  :  au  lieu  de  livraison,  on 
diuit  autrefois  mumr  ou  fascicule. 

LIVRE,  monnaie.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire.   < 

uvRB,  assemblage  de  feuilles  manuscrites  ou  impri- 
mées que  l'on  destine  à  la  publicité.  Nous  avons  indiqué, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biograplne  et  d'Histoire,  ce 

Sue  (ùt  le  livre  chez  les  Anciens  et  Jusqu'à  la  découverte 
u  papier  et  de  l'imprimerie.  On  conçoit  que  les  livres, 
écrits  à  la  main,  Éar  des  matières  d'un  prix  élevé,  n'aient 
point  été  communs,  surtout  au  moyen  âge,  et  aient  été 
payés  des  sommes  énormes.  Daunou  affirme  (  Hist,  litt.  de 
MFrance,  t.  XVI  )  qu'an  xui*  siècle  un  in-folio  valait  quatre 
à  cinq  cents  firancs d'ai4ourd*hui.  En  1279,  on  copiait,  à 
Bologpe,  une  Bible  pour  80  livres  (435  fr.).  Vers  1400, 
une  copie  du  Aoimm  de  la  Bose  ae  vendit,  à  Paris,  à  rai- 
son de  S33  fr.  Au  xv«  siècle  môme,  le  Pogge  avait  à  ven- 
dre on  TIte-Live  pour  ISO  écus  d'or.  An  reste,  ces  prix 
M  sont  peut-être  pas  très-précis,  attendu  qu'ils  devaient 
être  souvent  accrus  par  la  dorure  et  l'enluminure.  L'im- 
primerie fit  baisser  le  prix  des  livres  :  si  Ton  voit  encore, 
en  1470,  on  évêqoe  d'Angers  payer  40  écos  d'or  la  Bible 
de  Blayence,  imprimée  en  140â,  bientôt  les  catalogues  de 
Colines  et  de  Robert  Bstienne  mirèrent  les  acheteui  par 


la  modération  de  leurs  prix.  F.  Amett,  Bedierches  sur  ta 

nature  et  la  forme  des  livres,  Londres,  1837;  Edmond 
Werdet,  Histoire  du  livre  en  France  jusqu'en  1789,  Paris, 
1861,  2  vol.  gr.  in-i8.  F.  CaujGaAPiUB,  Écarroas.      B. 

UVRB  DB  BORD,  reçlstro  coté  et  paraphé  que  doit  tenir 
tout  capitaine  de  navire  marchand,  et  sur  lequel  il  inscrit 
toutes  les  circonstances  qui  concernent  ses  fonctions. 

UVRK   DOR  \ 

f  fv..  «.V*  .vi,««  .m»./«n.    I  V,  ces  mots  dans  notre 
«vîî  îmm.  »*""«"•  }      Dictionnaire  de  Bio^ 

UVRÉ^S.  )     O^aphia  et  d'Histoire 

UVRES  (Tenue  des).  /    y  couviabiutL 

IJVRBS  DB  COMMBRCE.       J       ^'  I-OMPTABIUTB. 
UVRB8  D'éGUSE.    F.  ÉCUSB. 

LIVRET,  petit  livre  dont  devait  être  muni  tout  onvrier 
(roi  avait  terminé  son  temps  d'apprentissage  et  qoi  était 
libre  de  tout  engagement.  Il  était  délivré,  moyennant  on 
prix  fixe  de  25  centimes,  par  le  préfet  de  police  à  Paris, 
par  le  préfet  du  Rhône  à  Lyon,  et  par  le  maire  dans  toute 
autre  commune.  En  tête  du  livret  se  trouvaient  les  lois  et 
les  ordonnances  concernant  la  matière.  Le  livret  conte- 
nait les  nom  et  prénoms  de  l'ouvrier,  son  Age,  le  lieu  de 
sa  naissance,  son  signalement,  la  désignation  de  sa  pro- 
fession, et  le  nom  du  maître  chez  lequel  il  devait  travail- 
ler quand  le  livret  lui  était  accordé.  Chaque  fois  qu'il 
changeait  de  maître,  il  devait  faire  inscrire  sur  son  livret 
sa  sortie  et  son  entrée  par  son  ancien  et  son  nouveau  maî- 
tre; il  devait  de  plus  y  fitire  écrire  qu'il  était  libre  de  tout 
engagement;  chaque  mut&tion  nécessitait  un  visa  qui 
était  gratuit.  Le  maître  inscrivait  sur  le  livret  les  avances 
dont  l'ouvrier  pouvait  rester  débiteur  envers  lui  ;  mais  il 
ne  pouvait  y  faire  aocune  annotation  favorable  on  déf»?o- 
rable.  Tout  ouvrier  qui  voyageait  devait  être  muni  de  son 
livret — Les  lettres  patentes  du  12  septembre  1740  avaient 
déjà  exigé  que  tout  ouvrier,  quittant  son  patron,  fût  muni 
d'un  congé  d*acquit.  La  loi  du  12  septembre  1781  ordonna 
que  tout  ouvrier  eût  son  livret;  elle  (Ut  confirmée  par  ia 
loi  du  29  germinal  an  xi  et  par  l'arrêté  consulaire  du  9  fri- 
maire an  XII  (l«'déc  1803).  Les  lois  du  14  mai  1851  et  du 
22  Juin  1854  ont  complété  et  fixé  la  législation  en  cette  ma- 
tière. Les  contraventions  aux  règlements  sur  les  livrets  ne 
poursuivaient  devant  le  tribunal  de  simple  police  :  la  pé- 
nalité consistait  le  plus  souvent  en  une  amende  de  1  à 
15  fr.,  et  pouvait,  suivant  les  circonstances,  s'aggraver 
d'un  emprisonnement  de  1  à  15  Jours.  Le  livret  est  sup- 
primé dep.  1869. 

Le  livret  a  été  Imposé  en  1853  aux  domestiques  (V,  ce 
mot).  Chaque  soldat  en  reçoit  un  également  i  ce  livret, 
qui  commence  par  le  Code  pénal  militaire,  contient  les 
nom,  prénoms,  Age,  profession  ancienne,  domicile,  Ueo 
de  naissance  et  signalement  du  soldat,  la  désignation  du 
corps  auquel  il  appartient,  la  note  des  effets  d'équipe- 
ment et  d'habillement  qu'il  a  reçus,  ainsi  que  les  rete- 
nues à  lui  faites  pour  la  masse,  etc. 

Les  déposants  aux  caisses  d'épargne  reçoivent  un  livret 
numéroté,  portant  leurs  nom  et  prénoms,  Age,  profession 
et  demeure,  et  destiné  à  l'inscription  des  sommes  qui  se- 
ront successivement  versées  ou  reti  rées  pour  leur  compte. 

uvarr ,  poème  d'opéra.  F.  OpAra. 

LLOYD.  F.  ce  mot  au  Supplément  a  la  fin  de  l'ou- 
vrage.  , 

LO  (Eglise  Notre-Dame,  à  Saint-).  Cette  église,  qui 
s'élève  au  sommet  de  la  ville,  a  été  commencée  dans  les 
premières  années  du  xiv«  siècle.  Le  portail  occidental 
préisente  trois  portes  assez  exigués,  surmontées  chacune 
dune  grande  fenêtre  à  meneaux  :  des  deux  tours,  celle 
du  nord  est  la  plus  ancienne,  celle  du  midi  appartient  an 
XV*  siècle.  Ce  fut  seulement  au  xvii*  siècle  qu'on  les  cou- 
ronna de  flèches  polygonales  élancées,  percées  de  distance 
en  distance  par  de  peUtes  roses.  Une  des  particularités 
curieuses  de  l'édifice  est  une  grande  chaire  en  pierre, 
adoflsée  extérieurement  à  la  muraille  de  l'un  des  oêtés. 
—  Saint-L6  possède  une  autre  église,  celle  de  SeùtUé- 
Croix,  fondée  en  805,  et  l'une  des  plos  anciennes  que 
l'on  connaisse.  On  y  remarque  des  sculptures  intéres- 
santes, deux  hommes  tenant  un  animal  enchaîné  au- 
dessos  du  portail,  les  chapiteaux  bisarres  des  colonnes 
du  chœur,  les  représentations  de  la  vie  de  S*  Êloi  et  de 
S^  Hubert,  le  Pèsement  des  âmes,  etc. 

LOANGO  (Idiome).  Bien  que  plusieurs  articles  et  on 
grand  nombre  de  racines  semblent  indiquer  qoe  cet 
idiome  ot  celui  do  Goniro  ont  une  même  origine,  ces 
idiomos  sont  réellement  distincts.  Presse  tons  les  moti 
du  loango  sont  monosyllabiques  oo  bisyllabiquês.  Les 
lettres  a  et  o  y  sont  très-firéquemment  employées,  el  ter- 
minent beancoop  de  syllabes.  Vh  aspirée  et  Vr  n'existent 


LOC 


1175 


LOG 


fis,  et  tont  nmplaeés  par  cfc  el <.  n  ny  a  ni  niirM,  ni 
ooiiibres,  ni  cas.  Pour  exprimer  la  difffrence  des  genres 
dsi»  lea  objets  animés,  on  ijoute  les  mots  qoi  signifient 
mâle  et  fraieUa.  Les  cas  sont  indiqués  par  des  préposi- 
tions.  On  compte  sept  espèces  d'articles,  pour  le  singu- 
lier, et  six  poor  le  plurieL  II  existe  des  pronoms  person- 
nels du  verbe,  lorsqa'on  parle  d'hommes  on  de  femmes  ; 
Us  se  rendent  par  les  articles  propres  des  noms,  lorsqu'on 
parle  de  bètes  ou  de  choses  inanimées.  Les  Terbes  ont 
tons  les  temps  de  la  langue  française,  et  d'autres  encore 
pour  exprimer  diflérentes  nuances  du  passé.  Les  conjonc- 
tions nian<|aent  presque  entièroment. 

LOBE  «  terme  d'Arcbéologie  qui  désigne  les  fragments 
de  cercle  qoi  entrent  dans  la  formation  des  roses  et  ro- 
saces ogimes  ou  des  divers  ornementa  taillés  dms  la 
Î lierre,  tels  que  les  trèfles,  les  quatre-feuilles,  les  quinte- 
Miles.  On  dit  d'une  rose,  d'une  feuille,  d'un  omemeui, 
quila  aont  trUobés,  mtUtuobéM,  polyMiis,  «te.  Lorsque 
les  lobea  sont  découpés  en  creux,  au  lieu  d'être  sailhmts, 
en  les  nonsme  oorUr94obes,  E.  L. 

LOCATAIRE  (du  latin  locare,  louer),  celui  qui  prend 
à  lojer  une  maison  on  un  appartement.  Pour  ses  obliga- 
tioiis,  F.  Bail. 

LOCATIF  (Cas),terminaiBon  des  noms  de  la  langue 
sanscrite  ponr  nuuquer  le  lieu  :  elle  est  en  î  au  singu- 
lier, en  m  an  plunef.  On  suppose  que  l'ancienne  langue 
grecque  eut  nn  cas  de  ce  genre,  et  que  les  terminaisons 
adverbiales  Ot,  Ot,  8c,  as,  U,  en  sont  des  traces.  Il  faut  v 
rattacher  les  adverbes  en  oi,  qui  marquent  nn  lieu  où 
Ton  est,  et  Ut  terminaison  Oo,  analogue  aux  terminaisons 
k  et  Oc.  La  trace  du  cas  locatif  se  retrouve  encore  dans 
la  langue  latine,  où  il  a  la  désinence  t  pour  caractéri»- 
timie,  comme  en  grec  et  en  sanscrit.  C'est  ainsi  que  s'ex- 
plique Is  forme  particulière  des  deux  adverbea  de  lieu 
s6i  et  ii6t,  et  des  composés  alibi,  intin ,  utroln  ;  celle  des 
mots  ru»,  domu»,  et  des  noms  de  ville  à  la  quntion  ii6f . 
mn',  domt,  Lugàunt,  Romœ  (anciennement  Bomai\  ;  en- 
fin le  mot  tomport  ponr  dire  sn  temp<  et  ittfu,  et  l'anverlie 
'  A  la  question  quo,  le  locatif  est  marqué  par  la  dési- 


nence o  :  90,  illo,  alto,  9110,  altquo,  intro,  ullro;  à  la 
question  911a,  |>ar  a  :  ea,  iUa,  qua,  eadem  ;  à  la  question 
umU,  par  de  :  ind»,  exmde,  deinde,  imds.  P. 

LOCATION,  se  dit  de  l'action  de  donner  à  loyer,  et  du 
contrat  de  louage.  F.  Bail,  Looagb. 

LOCH ,  instrument  servant  à  mesurer  le  tUlagê  on  la 
vitesse  des  navires,  n  se  compose  d'un  bateau  de  loch, 
planchette  triangulaire,  lestée  à  sa  base  de  manière  à 
^re  presque  entièrement  immergée  et  à  se  tenir  verticap- 
lement  une  pointe  en  haut,  et  d'une  iî^ns  de  loch,  corde 
de  très-petite  grosseur,  attachée  par  une  extrémité  au 
batean  de  loch,  enroulée  par  l'autre  sur  nn  tour  dans  le 
navire,  et  divisée  en  partieB  é^des  par  des  norads  formés 
à  des  distances  de  15  mèL  Quand  le  navire  est  en  mar- 
che, on  Jette  à  la  mer  le  batiean  de  Iqch,  et  on  laisse  U 
ligne  se  dévider  :  si  le  navire  s'écarte,  en  une  minute , 
de  2,  3,  4  nœuds  de  son  bateau  éb  loch,  on  dit  qu'il 
fUe2^5f4  noBuds  à  la  minute.  Cette  manière  de  mesurer 
la  chemin  est  asses  peu  exacte.  La  table  de  loch  est  une 
srdoise  on  un  tableau  noir,  sur  lequel  on  marque  les 
heures  où  le  loch  a  été  Jeté,  ainsi  que  les  nœuds  qui  y 
correspondent. 

LOCHES  (Château  de).  Construit  snr  un  vaste  plateau 
dominant  la  ville,  parallèlement  au  cours  de  l'Indre  et  à 
SO  met.  de  hauteur  à  pic  au-dessus  de  cette  rivière,  il  a 
une  enceinte  de  mnitdUes,  de  tours  et  de  fossés,  oui  a 
près  de  %  kilomèt.  de  développement.  Le  donjon,  qu^on  a 
fait  remonter  aux  x"  et  xi*  siècles,  et  même  à  l'époque  ro- 
maine, mais  one  IL  éb  Caumont  ne  croit  pas  antérieur  au 
xn*  siècle,  s  la  forme  d'un  carré  long,  dont  deux  façades 
ont  iS  met.  environ,  et  les  deux  autres  i4  met.,  et  s'élève 
encore  à  une  hauteur  de  40  met  Les  façades  du  nord  et 
du  midi  sont  garnies  de  quatre  piliers  butants  1  la  façade 
de  Test  n'a  que  trois  piliers,  et  celle  de  l'ouest  trois.  Les 
murs  ont  4  met.  d'épaisseur  à  leur  base,  et  S  met.  seu- 
lement vers  le  sommet;  nn  escalier  en  pierre,  nratiqné 
dans  leur  intérienr,  communiquait  à  chaque  étage,  et 
conduisait  à  la  plate-forme,  ruinée  depuia  longtemps.  Il 
n'y  avait  de  fenêtres  que  dans  la  partie  inférieure  de  U 
Cour,  où  elles  étaient  protégées  par  le  mur  d'enceinte;  on 
les  a  marées  :  plus  hant,  on  remarque  des  trous  ronds 
00  carrés  de  mlTérentes  grandeurs,  alignés  horisontale- 
ment,  et  dcmt  Fosage  n'est  pas  eonnu,  et  enfin  un  certain 
moahn  de  petites  embrasures.  An  nord  du  donjon  s'élève 
une  antre  tour  qui  Inl  est  contigné,  et  <mi  parait  avoir 
été  bâtie  pen  de  temps  après  :  encore  pins  ruinée,  elle 
a  Is  mOme  forme*  nuds  mr  de  moinms  piQportIoos 


fis  met  sur  7),  et  est  moins  élevée;  ses  mnrs  ont  S*,OI 
d'épaineur,  et  on  remarque  encore  an  second  étage  quai- 
oues  peintures  à  fresque.  Les  deux  tours  servent  aigour- 
a'hui  de  prison.  A  l'angle  N.-O.  de  l'enceinte,  Louis  XI  fit 
élever  une  troisième  tour,  dite  tour  ronde,  tour  neuve  oa 
tour  des  firisonmers,  pour  y  tenir  sous  sa  main  les  pri^ 
sonniers  d'État  On  la  voit  encore  maintenant  telle  quelle 
était,  moins  un  corps  de  b&timent  attribué  aux  prison- 
niers de  marque,  lequel  s'est  écroulé  en  1815  :  les  sulles 
y  sont  vastes,  les  cheminées  immenses,  les  plafonds  dé» 
mesurément  hauts.  Dans  les  fondations  se  trouve  une 
salle  circulaire  voûtée,  où  l'air  et  le  Jour  ne  pénètrent  que 
par  des  meurtrières  insuffisantes,  poncées  à  travers  un 
soubassement  qui  n'a  guère  moins  de  4  mètres  <f  épais- 
seur :  on  y  descend  par  un  escalier  de  43  marches  qu'io« 
terrompent  plusieurs  portes,  et  c'est  là  qu'étaient  les 
fameusea  cagiss  où  furent  enfermés  La  Balue  et  Comines, 
et  on'on  a  détruites  à  la  Révolution.  Toutefois,  les  vrais 
cachots  de  Loches  ne  sont  pas  dans  la  tour  neuve,  mais 
dans  la  fondation  d'une  autre  tour  aujourd'hui  détruite, 
et  dont  il  ne  reste  qu'une  salle  des  ganles  :  il  ne  faut  pas 
descendre  moins  de  08  marches  pour  arriver  au  cachot 
de  Ludovic  le  More ,  où  l'on  aperçoit  encore  quelques 
traces  d'inscriptions  et  de  peintures  faites  par  ce  prince, 
et  à  une  oubliette  dont  les  parois  sont  encore  teintes  ds 
sang.  —  L'ancienne  église  collégiale  de  Notre-Dame  de 
Loches,  comprise  dans  le  ch&teau,  est,  depuis  le  Con- 
cordat, consacrée  à  S^  Ours,  patron  de  la  viUe.  Elle  oflre 
deux  styles  différents  :  la  partie  la  plus  ancienne  est  ds 
la  tin  du  X*  siècle,  le  reste  date  du  xii*.  Deux  flèches  ge* 
thiques  et  deux  campaniles  moins  élevés  la  surmontent. 
Près  de  la  collégiale,  un  palais  construit  par  Charles  VII 
et  Louis  XII  sert  d'hôtel  de  la  sous  -  préfecture  :  on  f 
montre  l'oratoire  d'Anne  de  Bretagne  et  le  tombeau 
d'Agnès  Sorel. 

LOCO,  c.-à-d.  en  Italien  d  la  place,  mot  qui,  mis  après 
un  passage  de  musique  exécuté  à  l'octave  supérieure,  in- 
dique qu'il  faut  prendre  les  notes  suivantes  telles  qu'elles 
sont  émtes  et  sans  transposition. 

LOCUTION,  se  dit  d^une  construction  de  mots,  el 
d'une  manière  de  s'énoncer.  Une  locution  prépositive  est 
une  préposition  qui  s'emrime  par  plusieun  mots,  comme 
auprès  ae,  au  travers  as,  loin  de^  etc. 

LOCUTOIRE,  endroit  des  monastères  où  Ton  se  réunis- 
sait autrefois  pour  parler  pendant  les  récréationa. 

LODS  ET  VENTE.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogrth 
phis  et  dHistoire, 

LOF  (de  l'anglaia  loof  ou.  luff)^  en  termes  de  Marine  « 
bord  d'un  navire  opposé  au  vent.  Pour  dire  au  timonier 
de  venir  au  vent,  on  lui  crie  :  au  lof,  ou  simplement 
lof,  U^er,  c'est  venir  au  vent  Virer  lof  pour  lof,  c'est 
faire  tourner  le  bâtiment,  et  prendre  le  vent  à  l'autn 
bord.  On  appelle  étoffée  ou  auloffée  le  mouvement  poor 
entrer  dans  le  vent. 

LOGAiEDIQUE  (du  grec  I090S,  parole,  et  aùtdê^  chanâ, 
e.-4-d.  qui  tient  de  la  prose  et  des  vers,  du  parlé  et  au 
chanté;  nom  donné  par  les  andens  aoteun  die  Métriques 
à  certains  vers  lyriques  commençant  par  un,  deux,  on 
pluaieurs  dactyles,  suivis  de  2  ou  de  3  trochées.  On  le 
donnait  encore  :  1*  au  vers  arohébulique  composé  de  4 
anapestes  et  d'un  bacchius;  2*  au  trimètre  anapestiqne 
accru  d'un  bacchius;  3<*  an  dlmètre  anapeatlqne  dont  le 
4*  pied  est  un  pyrrhique  ou  un  Ïambe;  4^  au  monomètre 
hypercatalectique  terminé  de  même  façon.  On  rettache  4 
ce  genre  certains  vere  des  tragiqnes,  sur  la  nature  dee- 
quds  les  érudits  ne  sont  pas  d'accord,  et  qui  sont  corn* 
posés  d'un  ïambe,  d'un  anapeste,  puis  d'un  ïambe  suivi 
d'un  bacchius  final,  ou  d'un  amphibraqne,  équivalent  dn 
bacchius  à  la  fin  d'un  vers.  P. 

LOGE  (de  l'italien  loggui),  petite  salle,  tribune,  on 
balcon  couvert,  ouvert  par  devant,  et  plus  on  moins  ri- 
chement décoré  de  colonnes  et  d'arcades.  Le  pape  a  sa 
loge  placée  an-deaans  du  portique  de  l'église  de  S^Pierre. 
et  d'où,  le  jour  de  Pâques,  il  donne  la  bénédiction  Urbi 
et  Or6t,  «  a  U  ville  et  au  monde  ».  Dana  d*antrea  égliaai 
d'Italie,  des  loges  analogues  servent  pour  des  sermoM 
adressés  à  la  foule,  ou  pour  des  chants  exécutés  deveat 
elle.  Lee  Italiena  donnent  aussi  le  nom  de  loge  à  une  fi* 
lerie,  à  une  snHe  de  portiques  :  les  loges  du  Vatican  ont 
été  peintes  psr  les  plus  grands  maîtres.  Certaine  cons- 
psramenls  clos  et  réservés  dans  les  théâtres,  pour  un 
petit  nombre  de  spectateere,  ont  reçu  le  nom  de  loaes. 
On  l'a  ensuite  appuqné  anx  bontiqnea  en  phmchea  où  se 
donnent  les  spectacles  fondes,  ans  œllules  d'aliénés,  ans 
habitations  des  portiers,  etc. 

Losi,  nom  donné,  dans  le  Aino^foçomierie  à  un 


LOG 


1176 


LOG 


groape  de  JMrm  rfonis  sous  un  même  vénérable  ou 
-préndent,  ainsi  qa*aa  local  où  ils  se  réunissent. 

LOGEBftENT,  local  destiné  à  l*habitatioD.  U  loi  do 
.13  avril  1850,  complétée  par  les  décrets  des  22  Jany.  1852 
.et  27  mars  1854,  a  donné  anx  autorités  municipales  des 
grandes  WUes  les  moyens  d^assainir  les  logements  in- 
salubres. Le  propriétaire  peut  être  mis  en  demeure  d*ezé- 
coCer,  dans  un  délai  déterminé,  les  travaux  d*assainisse- 
1  ment  Jugés  nécessaires,  sous  peine  d*une  amende  de 
'  10  à  100  fr.  ;  Tamende  peut  être  portée  à  une  valeur  égale 
ou  môme  double  de  celle  des  ^travaux  à  exécuter,  s'ils 
n  ont  pas  été  faits  dans  Tannée  qui  a  suivi  la  condamna- 
tion, et  si  le  logement  insalubre  a  continué  à  être  occupé. 
Si  Tassainissement  est  jugé  impossible ,  l'autorité  mu- 
nicipale peut  interdire  provisoirement  la  location  du 
.logement;  mais  Tinterdiction  absolue  ne  peut  être  pro- 
noncée que  par  le  Conseil  de  préfecture,  sauf  recours  au 
Conseil  d*ÉtaL  Les  locataires  ainsi  expulsés  ne  peuvent 
réclamer  aucune  indemnité. 

LocBiiBNT,  en  termes  d*Art  militidre,  ouvrage  de  cam- 
pagne à  la  fois  offensif  et  défensif.  Lorsqu'une  armée 
assiège  une  ville,  elle  doit,  à  mesure  qu'elle  approche 
des  murs  au  moyen  des  cheminements,  ménager,  de 
place  en  place,  des  endroits  d'une  étendue  suffisante, 
pour  y  loger,  soit  les  batteries,  soit  les  troupes  protec- 
trices des  travaux  et  les  colonnes  d'attaque.  Ces  loge- 
ments, surtout  pour  les  batteries  de  brèche,  doivent  être 
•olidement  établis  à  l'abri  des  feux  de  l'ennemi,  par  ^es 
blindages  et  tous  les  autres  movens  dont  dispose  le 
génie  militaire.  De  la  solidité  des  logements  dépend  sou- 
Tont  la  réussite  de  l'attaque.  —  Dans  l'Administration 
militaire,  on  entend  encore  par  Logement  le  lieu  d'habi- 
tation ou  de  gîte,  que  ce  lieu  soit  de  résidence,  de  pas - 
•âge,  ou  de  route ,  et  la  troupe  qui  part  à  l'avance  pour 
le  préparer.  Dans  les  armées  de  Rome  et  de  Byzance,  les 
fonctionnaires  chargés  des  logements  militaires  s'appe- 
laient mensêurs,  tnétatmirs,  comtes  du  logement.  Jadis 
an  France  la  direction  en  cette  partie  dépendit  du  grand 
sénéchal,  puis  du  connétable,  du  grand  maître  des  arba- 
létriers, du  grand  prévôt,  etc.  Aujourd'hui,  le  soin  des 
logements  appartient  aux  officiers  de  l'intendance ,  aux 
maréchaux  des  logis,  aux  fourriers,  et  même  aux  auto- 
rités civiles.  En  Angleterre,  ce  service  est  l'objet  d'une 
aorte  de  Ministère,  dirige  par  le  quartim'-maître  général, 

LOGEMBiTT  TBlllet  de),  Dillet  que  reçoivent,  dans  les 

communes  ou  ils  s'arrêtent,  les  soldats  en  congé  on  en 

marche,  pour  être  logés  chez  les  bourgeois.  L'origine  de 

.ces  logements  remonte  à  Louis  XII,  comme  il  panlt  par 

une  ordonnance  du  20  février  1514. 

LOGEUR.  F.  AOBBRGISTB. 

IX)GIQUE  (du  grec  logos,  raison,  raisonnement).  La 
Logique  est  la  science  du  vrai  en  général;  elle  ne  s'oc- 
cnpe  pas  de  la  matière  des  connaissances,  mais  seule- 
ment des  conditions  générales  sans  lesquelles  nos  con- 
naissances ne  peuvent  être  Traies.  Elle  a  donc  pour  objet 
rintelligence,  et  pour  btU  de  la  guider  dans  la  recherche 
du  vrai.  Comme  connaissance  des  lois  qui  régissent  les 
opérations  de  l'intelligence,  la  Logique  est  une  science; 
lorsqu'elle  traduit  ces  lois  en  règles,  et  que  de  la  théorie 
elle  passe  à  la  pratique,  elle  devient  un  art»  Le&auteura 
de  la  Logique  de  Port-Royai  ont  défini  la  Lo^que  VArt 
de  penser,  et  l'ont  divisée  en  craatre  parties,  d'après  les 
ffnatre  opérations  principales  de  la  pensée  :  concevoir, 
juger,  raisonner,  ordonner;  ce  qui  donne  lieu  à  traiter 
des  idées,  du  jugement,  du  raisonnement  et  de  la  me- 
thode.  Cette  division  est  insuffisante,  surtout  si  on  consi- 
dère la  Logique  an  double  point  de  vue  de  la  théorie  et 
Je  la  pratique.  Elle  comprend  alon  :  1^  la  Méthode,  qui 
*  noua  donne  le  moyen  d'arriver  au  vrai  ;  2«  la  Certitude, 
qui  nous  enseigne  les  conditions  sans  lesquelles  nons  ne 

-pouvons  t«iir  une  connaissance  pour  vraie  ;  3®  la  théorie 
au  raisonnement,  qui  nous  donne  les  conditions  néces- 
aaires  pour  qu'une  conclusion  soit  vraie;  à  quoi  il  faut 

Joindre  V Analogie  et  V Induction,  an  moyen  desquelles 
BOUS  pouvons  étendre  nos  connaissances  expérimentales; 
4*  la  critique  du  témoignage  humain,  qui  nous  donne 
des  règles  pour  nous  assurer  de  la  valeur  des  moyens 
d'arriver  à  la  vérité  par  autrui  ;  S^  le  Langage,  comme 
manifestation  de  lapeiuBée,  et  la  tendance  qu'il  nous  donne 
vera  la  vérité  ou  ven  l'erreur  ;  6<»  nos  Erreurs  et  leurs 
causes,  pour  nous  mettre  en  garde  contre  elles,  pour 
nous  empêcher  de  nous  écarter  du  vrai,  ou  pour  nous  y 
lamener.  Cette  énumération  suffirait  poor  montrer  l'im- 
portance de  la  Logique.  Même  à  ne  voir  en  elle  que  la 
science  de  raisonner,  aa  nécessité  serait  encore  évi- 
dHite«  pane  que  seule  elle  peut  comprendre  les  lois  de 


la  démonstration  et  en  tracer  hi  théorie  nécessaire.  Dam 
l'enseignement,  la  Logique  fit  toujoun  partie  du  conn 
de  philosophie;  sa  place  est  naturellement  après  la  psy- 
chologie, parce  qu'ayant  pour  objet  de  diriger  l'exercice 
des  facultés  intellectuelles,  elle  ne  fait  que  continuer  le 
travail  de  la  psychologie,  qui  les  a  fait  connaître.  De- 
puis 1852,  elle  a  pris,  au  moins  nominalement,  plus 
d'importance,  en  donnant  son  nom  au  cours  de  philoso- 
phie qui  termine  les  études  classiques  ;  mais  elle  ne  peut 
en  être  qu'une  partie. 

On  a  fait  remonter  la  Logique,  comme  procédé  scienti- 
fique. Jusqu'à  Zenon  d'Élée  (v«  siècle  av.  J.-G.)  ;  mais  il 
ne  faut  pas  la  confondre  avec  la  Dialectique,  qui  était 
alon  le  procédé  suivi.  On  la  retrouve  non-seulement 
chez  Zenon,  mais  chex  les  sophistes,  dans  l'école  de  Hé- 
gare,  chez  Socrate,  et  chex  Platon  dans  ses  Dialogues. 
La  dialectique  s'attache  à  réfuter,-  la  logique  démontre, 
elle  procède  dogmatiquement  et  par  déduction.  Cest  ce 
qu'on  voit  chez  Aristote,  environ  4  siècles  av.  J.-G.,  dans 
un  ensemble  d'écrits  auquel  on  a  donné  le  nom  d^Orga- 
non,  et  qu'on  nonune  ordinairement  la  Logique  d'Aris- 
tote.  Cet  ensemble  comprend  ;  1*  le  traité  des  Catégories 
2<>  celui  de  V interprétation;  3«les  Premiers  Analytiques, 
ou  traité  du  syllogisme  ;  4<*  les  Derniers  Analytiques,  ou 
traité  de  la  démonstration  ;  5*  les  Topiques;  6<*  le  traité 
des  Sophismes,  A  ces  écrits  on  joint  ordinairement  l'/i>- 
troductùm  aux  Catégories,  de  Porphjrre,  mort  904  ans 
aprèa  J.-C.  Ainsi,  la  Logique  du  Stagyrite  va  des  catégo> 
nés  à  la  théorie  de  la  proposition,  ae  celliHci  au  syllo- 
gisme, et  de  ce  dernier  à  la  forme  parfaite  du  raisonne- 
ment, qui  est  la  démonstration  ;  les  deux  dernière  traités 
sont  consacrés  à  l'application.  Après  Aristote ,  deux  de 
ses  disciples,  Théopbraate  et  Eudème,  continuèrent  ses 
travaux,  sans  rien  y  ajouter,  mais  non  sans  quelques 
critiques  de  détail.  Cette  controverse  nous  a  été  trans- 
mise par  Alexandre  d'Aphrodise,  dans  ses  Commentaires, 
Du  Lycée,  la  Logique  passa  à  l'éeole  du  Portique.  Les 
stoldens  lui  donnèrent  la  première  place  dans  leur  phi- 
losophie; il  est  à  remarquer  qu'ila  essayèrent  d'y  com- 
prendre nne  psychologie  et  une  méthode  ;  mAlheurenae- 
ment  leun  travaux  sur  cette  partie  de  leur  doctrine  ne 
sont  pas  arrivés  jusqu'à  nous.  Épicure,  en  donnant  à  sa 
Logique  le  nom  de  Canonique,  ne  lui  laissa  qu'un  rôle 
tout  à  fait  insuffisant  ;  il  en  fit  une  partie  de  la  phv- 
sique,  comme  Vy  contraignait  son  sensualisme  étroit. 
Galien  (o*  siècle)  avait  fait  sur  la  Logique  d'immenses 
travaux,  qui  to,us  ont  péri  ;  on  lui  attribue,  mais  à  tort, 
l'invention  de  la  4*  figure  du  syllogisme.  De  siècle  en 
siècle  on  vit  se  succéder  une  foule  de  commentateurs  de 
la  Logique  4!Aristote.  Les  études  sur  VOrganon  commen- 
cèrent dès  le  règne  des  Ptolémées ,  pour  ne  plus  cesser  : 
outre  Galien  et  Alexandre  d'Aphrodise,  on  vit  Porphyre, 
Thémistius,  Simplicius,  et  Jean  Philopon.  Pendant  les 
dernière  siècles  <|u  Bas-Empire,  on  compte  un  David , 
qui  traita  des  Catégories  d'Aristote  et  des  Prédicables  de 
Porphyre,  un  Nicéphore  Blemmide,  un  Georges  Pachy- 
mère,  etc.  —  A  Rome,  la  philosophie  ne  compta  pas  un 
seul  logicien  proprement  dit,  malgré  l'écrit  de  Gicéron 
intitulé  Topiques,  oui  a  fort  peu  d'analogie  avec  celai 
d'Aristote.  Au  v«  siècle,  Boêoe  traduisit  ou  commenu  les 
traités  qui  composent  VOrganon;  il  commenta  aussi 
Visagoge  de  Porphvre,  et  par  là  il  exerça  une  grande 
influence  aur  les  siècles  suivants.  Le  moyen  à^B  vit  ré- 
gner la  Lo|i:ique  despoti<piement ,  au  nom  d'Aristote. 
Avec  Abélard  elle  avait  pns  une  importance  capitale,  en 
inclinant  Quelque  peu  vere  la  dialectique  de  Platon; 
mais,  vere  la  fin  du  xn*  siècle,  les  travaux  des  Anibes,  eD 
répandant  la  connaissance  des  écrits  d'Aristote,  assurè- 
rent à  sa  Logique  un  empire  longtemps  incontesté.  Au 
xv«  siècle  elle  fut  attaguée  par  Laurent  Valla  {De  dialeo^ 
Hca  contra  Aristotelicos),  un  siècle  plus  tard  par  on 
grand  nombre  et  surtout  par  Ramus  {Aristotelicm  am- 
madversianes),,  et  enfin  par  François  Bacon.  Ce  dernier 
opposa,  en  1020,  son  Novum  Organum  à  VOrganon 
d'Aristote.  Cétait  une  méthode  nouvelle,  criif  ramenait 
la  philosophie  à  Tobservation  et  à  l'expérienee.  Bacoo 
cn^t  détruire  la  Logique  d'Aristote  ;  il  ne  faisait  qae  la 
compléter,  en  montrant  la  nécessité  de  joindre  rinduo» 
tion  au  procédé  déducttf.  Descartes  fit  plus  encore  daoi 
son  Discours  de  la  Méthode  (1637),  en  proclamant  lin- 
dépendance  absoloe  de  la  raison  dans  l'ordre  des  choses 
humaines,  en  rappelant  Thomme  à  l'observation  et  à 
l'analyse  des  fUts  de  la  vie  spirituelle,  et  en  substituant 
les  quatre  règles  de  sa  méthode  aux  préeeptes  si  nom- 
breux et  souvent  si  obscure  de  la  Logique  scolastique. 
Cependant  la  vieille  Logique,  attaquée  de  toutes  parts  eo 


LOG 


1177  LOI 


Wm  des  abos  <|Q*élIe  ayait  engendrés,  fût  soutenuo 
me  imputialitô  par  Loibnix ,  notamment  dans  son 
Dimers  Umchant  ia  méthod»  dé  la  certitude  et  l'art 
immUer,  et  par  son  disciple  Wolff  {Phiioeophia  ratio-' 
Mltt,nvs  Logica  methodo  scienti/ieà  pertractata,  i7S8). 
VM»  de  L4>cke  et  de  Condillac  négligea  la  Logique,  ((ai 
tttmiTa  réduite  anx  étroites  proportions  de  V Idéologie; 
Nnlo  écoasaiBe  n*eQ  tint  pas  non  plus  grand  compte  ; 
miii  la  Lof^que  tronnt  en  Allemagne,  dans  la  personne 
de  Kant,  un  homme  qui  lui  donna  dans  la  philosophie 
OM  place  nouvelle.  Kant,  dans  sa  Critique  de  la  raison 
fwn,  entreprit  de  dégager  de  tout  élément  empirique  et 
de  eonsidérer  dans  toute  leur  pureté  les  principes  à 
priori  gai  ae  rapportent  à  la  connaissance  de  certains 
olijets.  De  là  deux  sortes  de  lois  qui  constituent  la  vérité  : 
'sue  subiective  et  rationnelle,  Tautre  ol^ectioe  et  maté- 
rielle. Avec  Hegel,  la  Logique  se  dénature,  et  devient 
me  ontologie  qui  conduit  à  Tidéalisme  le  plus  exagéré. 
Ai4<Nird*lnii  la  Logique  semble  revenir  en  Allemagne  à 
on  esprit  pliia  raisonnable,  et  reprendre  en  Ecosse  et  en 
Fhmce  quelque  faveur  :  en  Ecosse  ont  paru,  depuis  une 
trentidne  d'années,  des  écrits  d'une  valeur  médiocre, 
nais  qui  ont  doncé  lieu  à  une  polémique  de  bon  augure, 
et  qui  a  fait  connaître  M.  W.  Hamilton,  l'auteur  d'une 
iVoiNclle  AnalytUtue;  en  France,  H.  Barthélémy  Saint- 
Hilaîre  a  publié  une  traduction  complète  de  la  Logique 
d'Aristote. 

Dans  l'Inde,  la  Logique,  aussi  ancienne,  comme  science, 
que  dans  la  Grèce,  a  son  code  et  ses  lois  dans  le  Nyàya, 
qui  fut  suivi  par  les  brahmanes  et  les  bouddhistes ,  au 
nord  et  au  midi  de  la  presqu'île;  aujourd'hui  toutes  les 
écoles  de  l'Inde  n'ont  pas  d'autre  Organon  que  le  Nyàya, 
qni  probablement  ne  ooit  rien  à  Aristote. — Outre  les  ou- 
viagea  originaux  déjà  dtés,  on  peut  consulter  :  Gassendi, 
De  origine  et  varietate  Logicœ,  dans  le  Syntagma  phiUh 
wpkiemm,  Lyon,  1(^58;  G.-J.  Vossins,  De  natura  et 
eomstitutUmê  Logicœ;  Buhle,  Recherches  sur  VétiU  de  la 
Logique  ehoss  Us  Grecs  avant  Aristote,  dans  les  Mémoires 
de  la  Société  de  GcsUinçue,  U  X;  Dugald  Stewart,  Con- 
sidérations sur  la  Logtque  d^Aristote;  Fullebom,  His- 
toire de  la  Logique  ckez  les  Grecs  ;  Barthélémy  Saint- 
Hilaire,  De  la  Logique  d^ Aristote,  1838,  2  vol.  in-8«; 
Franck,  Esquisse  d^une  histoire  de  la  Logique,  1838; 
la  Loguiuê  de  Bossuet;  celles  de  Creusas  et  du  P.  Buf- 
ter;  VArt  do  penser  et  de  raisonner,  de  Condillac;  la 
LogtqiM  de  Destntt  de  Tracy,  partie  de  son  Idéologie; 
DamiroD.,  TVaité  de  Logique,  1836;  Charma,  Leçons  de 
Logique,  1840;  Du  val*  Jouve,  Traité  de  Logique,  1843; 
Waddington-Kastus,  Essais  de  Logique,  ln>8«;  Bénard, 
La  Logique  enseignée  par  les  auteurs,  1858;  Goumot, 
Estai  sur  les  fondements  de  nos  connaissances,  etc.  On 
cite  en  Angleterre  les  Éléments  de  Logique  do  Richard 
Whalely,  Londres,  1829,  et  un  2Vat^^  de  Logique  d'après 
lea  principes  SAldrich,  par  John  Huyshe,  Oxford,  1833; 
maia  cea  deux  écrits  ne  sont  pas  à  la  hauteur  de  la 
ience.  R* 

ixMUQUB  (Anidyse,  S^]et).  V.  Analyse,  Sujet. 
IX)GOGRAPrîÈS ,  terme  de  Littérature  grecque.  V, 
itr^  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 
IXKXKSRAPHIB  (du  grec  logos,  parole,  eXarapM, 
J'écris),  nom  donné  en  1790  à  un  procédé  qu'on  imagina 
pour  recueillir,  sans  signes  abrénatifs,  les  débats  de 
r  Aasemblée  constituante.  Douze  ou  quatorze  scribes  se 
langeaient  autour  d'une  table  ronde.  Gnacnn  avait  devant 
aol  une  provision  de  bandes  longues  et  étroites  de  pa- 
pier, divisées  par  compartiments,  et  portant  chacune  un 
noniéro  d'ordre.  Quelques  mots  de  la  première  phrase  du 
dhcoura  piononcé  étaient  saisis  par  l'écrivain  n*  1,  ((ui, 
far  un  coup  de  coude  ou  tout  autre  signal,  avertissait  le 
■Pi  de  recueillir  les  mots  suivants;  celui-<i  faisait  de 
ntae  poor  le  n*  3,  et  ainsi  de  suite.  Après  le  dernier 
écrivain,  le  premier  recommençait,  et  toujours  ainsi  On 
passait  les  bandes  à  des  copistes,  qui  les  mettaient  au  net 
pour  lea  livrer  à  l'impression.  La  logographie  fut  aban- 
donnée après  le  10  août  1792,  et  Ton  ne  tarda  pas  à 
adopter  la  Sténographie  (F.  es  mot). 

LOGOGRIPHE  (du  grec  logos,  parole,  et  griphos,  piège, 
Aiet),  sorte  d'énigme  qui  donne  à  deviner  un  mot  par 
raaalyae  de  cr  mot  lui-même,  en  le  décomposant  en  d'an- 
tEesmots,  en  indiquant  les  différentes  significations  qu'il 
mod  sidvant  qu'on  en  retranche  une  on  plusieurs  lettres. 
Ba  void  un  exemple,  tiré  du  Mercure  de  France  (Jan- 
i7ô8) t 

Bien  n'est  plus  viens,  rien  n*eet  et  been  qne  mol. 
Des  lettrée  de  mon  nom  eflue  le  troisième  ; 
▼leas  «a  jeuM,  je  sois  ffene  leMenr  eitrlma» 


IcetnDèhe  Is  seeondo  :  à  eheane  instaot  èhes  toi 

J'augmente  en  dépit  de  toi-même. 

Ton  emberrss  me  ftlt  pitié. 
Tn  ne  m*ss  j'amsis  m,  ta  ne  penz  me  eonnsltrei 
Vais  reconnais  an  moins  ma  première  moitié  : 

Ta  l'as  m  mourir  et  renaître. 

On  trouve  chez  les  Anciens  quelques  exemples  de  logo- 
griphes.  Les  Arabes  en  faisaient,  dit-on,  un  de  leurs  di- 
vertissements, à  une  époque  très-reculée.  On  fait  remon» 
ter  le  logogriphe  en  France  au  temps  de  Charlemagne  : 
mais  il  ne  fut  véritablement  en  vogue  qu'au  commen- 
cement du  xvni*  siècle.  Cest  en  1727  que  le  Mercure 
inséra  ses  premiers  modèles;  le  succès  en  fut  tel,  que  le 
logogriphe  fut  dès  lors  régulièrement  admis  dans  cette 
feuille  au  même  titre  que  Ténigme  et  la  charade.  Une 
véritable  poétique  du  logogriphe,  attribuée  à  La  Con- 
damine,  y  fut  insérée  en  1758.  L'Angleterre  nous  avait 
devance  dans  ces  Jeux  d'esprit;  la  reine  Elisabeth  s'y 
livrait  avec  passion.  —  Disons  aux  personnes  qui  n'au- 
raient pas  voulu  exercer  la  sagacité  de  leur  esprit  sur  le 
logogriphe  ci-dessus,  qu'il  est  b&ti  sur  le  mot  ange,  où 
l'on  trouve  An»,  âge,  et  on. 

LOGOBIACHIE  (du  grec  logos,  parole,  et  makhè,  com- 
bat), dispute  de  mots  qui  provient  de  ce  que  les  deux  ad- 
versaires prennent  en  des  sens  différents  le  mot  sur 
lequel  roule  la  discussion,  ou  n'envisagent  pas  la  même 
face  de  la  question.  Le  remède  aux  logomacnies  est  dans 
de  bonnes  définitions. 

LOGOS,  mot  grec  qui  signifie  la  parole,  et  en  même 
temps  VinleUigence,  la  raison,  que  la  parole  manifeste  au 
dehors.  Dans  la  philosophie  de  Platon,  le  Loaos  était  Dieu 
même,  considéré  comme  la  source  des  idées.  &  Jean 
rÉvangéliste  s'est  servi  du  mot  Logos  pour  désigner  la 
second  personne  de  la  Trinité,  et,  pour  le  traduire  en 
latin,  S^  Jérôme  ne  trouva  d'autre  terme  que  Verbum, 
dont  nous  avons  fait  le  Verbe. 

LOGOTHÈTE.  V.  noire  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'ffistoire. 

LOHENGRIN,  poème  allemand  de  la  fin  du  xm*  aiècle, 
composé  en  strophes  de  10  vers  par  deux  auteurs  de- 
meurés inconnus,  et  qui  tire  son  nom  de  son  principal 
héros,  n  se  rattache  à  la  guerre  de  la  Wartburg,  et  Wol- 
fram d'Eschenbach,  qui  y  figure  contre  Klinsor,  est  censé 
le  narrateur  du  récit  On  y  retrouve  la  légende  des  che- 
valiers du  Cygne,  mêlée  à  celle  du  S^  Graal  et  aux  exploits 
fabuleux  du  roi  Henri  I*',  et  11  se  termine  par  un  aperçu 
des  événements  arrivés  depuis  ce  prince  Jusqu'à  Henri  H. 

LOHÉRAIMS  (Chanson  aes),  une  des  plus  vieilles  chan- 
sons de  gestes  de  notre  littérature.  Elle  comprend  Hervis 
de  Metz,  Garin  le  Lohéraxn,  Girbert  (V.  ces  tnot^),  et  enfin 
Ans^.  Dans  ee  dernier  roman,  Ludie,  après  le  meurtre 
de  Fromondin,  se  sépare  de  son  mari  Hemaut,  et  pousse 
ses  fils  Louis  et  Manessier  à  venger  la  mort  de  leur  oncles 
Ils  assassinent,  en  effet,  Girbert;  mais  ils  tombent  entre 
les  mains  de  leur  père,  et  sont  pendus  par  son  ordre.  — 
La  chanson  des  Lohérains  parut  être  plus  ancienne  que 
tous  les  autres  romans  des  douze  Pairs.  H.  D. 

LOI  (du  latin  lex,  qui  vient  de  légère,  parce  que,  sui* 
vant  Varron,  on  avait  coutume  de  lire  la  loi  au  peuple). 
L'idée  la  plus  simple  qu'on  puisse  se  faire  d'une  loi  est 
celle  de  certaines  conditions  générales  et  permanentes^ 
nécessaires  pour  la  production  de  tous  les  faits  de  même 
espèce.  Dans  un  sens  plus  général  et  plus  élevé,  les  lois 
sont,  selon  Ifontaïquieu ,  «  les  rapports  nécessaires  qai< 
dérivent  de  la  nature  des  choses.  »  D'où  il  suit  que  tout 
a  ses  lois.  On  distingue:  1®  les  (ots  physiques,  fyii  ré- 
gissent le  monde  matériel  :  ainsi ,  la  séné  des  points  où 
se  trouve  successivement  un  corps  à  des  instants  déter- 
minés, devient  la  loi  de  son  mouvement;  les  sciencea 
physiques  et  naturelles  ont  pour  but  de  déterminer  lea 
lois  d'après  lesquelles  se  produisent  les  faits  étudiés  par 
l'observation  et  l'expérimentation  ;  2*  les  lois  psychoUH 
giques;  en  étudiant  notre  nature,  à  la  fois  sensible,  intel- 
ligente et  libre,  nous  trouvons  encore  des  Ion  dans  la 
succession  invariable,  dana  la  nécessité  de  certaines  con- 
ditions; Z^  la  loi  morale  ou  divine,  qui  émane  de  Dieu«. 
qui  lui  est  coéternelle,  puisqu'elle  subsiste  en  loi.  Elle 
préexista  aux  lois  humaines,  et  les  Godes  ne  sont  léd- 
times  que  par  elle  et  de  par  elle  :  elle  s'adresse  à  des 
«très  libres,  qu'elle  oblise  sans  les  contraindre  ;  elle  est 
souveraine,  universelle,  immuable.  Dans  Tindivida,  c'est 
la  lot  naturelle,  ou  l'ensemble  des  principes  qui  doivent 
régler  la  conduite  de  l'homme,  et  qiii  résultent  de  sa  na- 
ture d'être  intelligent  et  libre  t  l'amour  poor  ses  parentSt 
la  reconnaissance  envers  son  bienfaiteur,  l'obli^aion  de 
M  pas  faire  à  autrui  ce  que  nous  ne  voolooa  pat  an*oo 


LOM 


1178 


LOR 


nous  base,  et  d'dtre  à  son  égard  ce  mie  dous  Tontons 
qa*il  soit  au  nôtre,  sont  des  précepte^e  la  loi  naturelle, 
qni  est  ainsi  la  base  du  Droit  natunl;  c'est  Tobjet  de  la 
9ciênc9  morale.  Dans  les  sociétés,  la  loi  morale  est  le 
prindpe  de  toute  loi  sociale,  la  condition  de  tout  devoir, 
et,  dans  ses  applications,  elle  donne  Tautorité  aox  Uns 
Jbwmoifief  on  potttitMt.  Gellea-d  sont  variables,  parce 
i^'elles  subissent  Tinfluence  du  temps  et  de  la  civilisa- 
tion; elles  prennent  différents  noms  suivant  la  nature 
des  devoirs  et  des  droits  qu'elles  énoncent  :  il  y  a  les  lois 
organiques,  civiles,  crtÊninelles,  pénales,  fiscales,  reli' 
gieuses,  politiques,  commerciales,  militaires,  e(e.,  autant 
de  cat^ries  qu'il  y  a  d'espèces  de  Droits  {V»  ce  mot). 
Le  pouvoir  législatif  appartient  an  souverain,  représenté 
par  le  chef  de  l'État  dans  les  gouvernements  despotiques, 
par  le  chef  de  l'État  et  les  pouvoirs  représentatifs  dans 
les  gouvernements  constitutionnels.  Pour  qu'une  loi  soit 
obligatoire,  il  faut  qu'elle  ait  été  promulguée  {V,  Pro- 
mulgation ),  et  qu'elle  idt  une  sanction  (  V.  ce  mot)\  elle 
n*a  Jamais  d'effets  rétroactif  (  V,  RérROAcnviri).  une  loi 
promulguée  est  exécutoire  dans  toute  l'étendue  du  terri- 
toire, après  l'expiration  d'un  délai  déterminé  (F.  Dis- 
lAifCB  LiGALs).  La  loi  est  censée  connue  de  tout  le 
monde;  nul  ne  peut  alléguer,  en  cas  de  crime,  délit  ou 
eontravention,au'il  l'ignorait.  Les  lois  cessent  de  produire 
leur  effet  par  abrogation  ou  par  désuétude.  V.  Goguet, 
De  l'origine  des  lots,  des  arts  et  des  sciences^  6*  édit., 
1820, 3  vol.  in-8°  ;  Montesauieu,  Esprit  des  lou;  Matter, 
De  Vinfluence  des  lois  sur  les  mœurs,  in-8*  ;  l'abbé  Bau- 
tain.  Philosophie  des  lois,  t860,  in-S*.  R. 

LOI  (Homme  de).  V.  Homme  db  loi. 

!^!  SÎ^IÏt^t    l   K.  ces  mots  dans  notre  Oictiotmatre 
!2îïoîIl.t       I       de  Biographie  et  d'Histoire. 
LOI  d'exception.  V.  Exception. 

LOI  DE  6AAGB,  DB  NATURE,  DE  RIGUEOa.   V.  ALLIANCE. 

LOIS  (Bulletin  des).  V.  Bulletin. 

LOIS  AGRAIRES,  SOMPTUAIRBS.  F.  AGRAIRES,  SOMPTUAIRES, 

dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  i Histoire. 

LOMBARD ,  nom  donné  à  une  maison  de  prêt  ouverte 
à  Paris  vers  la  fin  dû  xn*  siècle  par  des  banquiers  venus 
de  la  Lombardie,  et  qu'on  a  appliqué  depuis  à  toutes  les 
maisons  de  prêts  sur  gages.  Ces  établissements,  tolérés 
en  Angleterre,  sont  mântenant  prohibés  en  France,  en 
Belgique  et  dans  d'autres  pays,  et  iiemplacés  par  les 
Monts-de-Piété  {V.  ce  mot). 

LOMBARD  ou  MILANAIS  (Dialocto),  tttt  doB  dlaloctes  ita- 
liens. On  V  retrouve  sans  doute  les  traces  des  peuples  qui 
ont  tour  a  tour  occupé  la  haute  Italie.  Les  origines  cel- 
tiques se  manifestent  dans  la  rudesse  des  sons,  et  les  ori- 
E'nes  romaines  dans  le  vocabulaire.  Les  Ostrogoths  et  les 
>mbards  ont  dû  y  laisser  une  empreinte  plus  profonde. 
€e  dialecte  supprime  les  voyelles  finales  et  souvent  môme 
les  médianes  ;  Il  a  en  commun  avec  le  piémontaia  et  le 
génois  les  sons  «u,  u,  an,  in,  on,  un,  ainsi  que  la  con- 
Bonne  i,  toutes  valeurs  phonétiqueB  françaises.  Il  a  une 
littérature  asses  abondante  :  Maggi ,  Tansi ,  Balestriori, 
Parîni ,  Bossi ,  Carlo  Porta,  Grossi ,  etc.,  l'ont  employé 
avec  succès. 

LOMBARD  (S^le).  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d*Histoire. 

LOMBARDE  (École),  une  des  grandes  écoles  italiennes 
de  peinture.  Lanzl  ne  reconnaît  pas,  dans  les  peintres 
<{u'on  y  range  d'ordinaire,  le  caractère  d'unité  qui  dis- 
tingue les  autres  écoles  :  pour  cette  raison,  il  établit 
plusleors  groupes,  les  écoles  milanaise,  bolonaise,  gé- 
noise, piémontaise,  et  celles  de  Crémone,  de  Ferrare  et 
de  Parme  {V.  ces  mots). 

LOMBARDE  (Écriture),  nom  donné,  en  Paléographie,  à 
l'écriture  usitée  en  Italie  du  temps  dee  Lombards.  Ses 
lettres  majuscules  s'éloignent  peu  des  minuscules  ro 
-maines;  celles  qui  sont  blstorièBs  ofCnent  des  comparti- 

•  ments  à  la  façon  des  mosaïques,  et  admettent,  dans  leur 
composition,  des  figures  d'hommes  et  d'animaux  de  toutes 

•  sortes.  Gomme  cursive,  l'écriture  lombarde  ne  manque  pas 
<<l'élégance;  elle  est  à  peu  près  aussi  large  que  haute,  et 

les  contours  en  sont  arrondis  :  elle  fut  employée  dans  les 
'Chartes  et  dans  les  bulles  pontificales,  concurremment 
avec  la  française.  Jusqu'au  un*  siècle.  Le  t  avec  traverse 
recourbée  caractérise  surtout  la  minuscule,  et  l'a  en 
forme  d*»  la  cursive. 

LOMBARDS  (Lois  des).  Elles  furent  écrites  en  643 
fÊT  le  roi  Rotharis,  et  approuvées  dans  une  assemblée 
générale  à  Pavie.  Ce  n'était  point  un  code  complet;  Ro- 
tharis ne  fit  que  réunir  et  corrigsr  les  édite  de  ses  prédé- 
cesaewii  çii  ne  t'étaient  conBenrés  que  par  traditioiL  See 


succesBeurs  en  publièrent  plusieurs  antres.  V,  GantA, 
Histoire  des  Italiens,  t.  IV  de  la  traduction  françaiis, 
1860. 

LOMBARDS  ( Mounsies  des).  K.  Itauenne  (Numismai 
tique). 

LONDRES  (Monuments  de).  V.  Bourse,  Kensuigtob 
(Palais  de),  Guildhall,  Paul  (Église  Sainte),  Todr  db 
LoNDaBS,  Westminster,  Whitbhall,  et,  dans  notre  DiO' 
tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire,  Colonnes  moud* 
MENTALES,  psgc  635,  col.  1,  et  Tunnel. 

LONGCHAMPS.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire. 

LONG  COURS.  V.  Navigation,  Caph-ainb. 

LONGITUDE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnairs  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

LONGITUDES  (Bureau  des).  V.  Burbau,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  a  Histoire. 

LONGPONT  (Abbaye  de),  abbaye  jadis  célèbre,  fondée 
vers  1130  par  Raoul,  comte  de  Crespy,  à  une  extrémité  de 
la  forêt  de  Villers-Cotterets,  à  18  kilom.  S.-0.  de  Sois- 
sons.  L'église,  dé(Uée  en  1227,  ruinée  en  1793,  et  dont  il 
reste  encore  des  ruines  assez  imposantes,  avait  108  met 
de  longueur,  39  de  largeur,  et  38  de  hauteur  sons  voûtes; 
la  croisée,  dont  le  chœur  occupait  la  plus  grande  partie, 
était  longue  de  50  met.  Au-dessus  des  arcades  de  la  nef 
régnait  une  galerie  faisant  tout  le  tour  de  l'édifice.  Les 
roses  du  grand  portail  et  des  transepts  étaient  renommées 
pour  leur  beauté. 

LONGS  MURS,  épaisses  murailles  qui  s*éteadaient 
d'Athènes  au  Pirée.  Le  rempart  du  Nord,  construit  par 
Périclès,  avait  une  longueur  de  40  stades  ;  celui  du  Sud, 
dû  aux  soins  de  Thémistode,  et  composé  de  larges  pierres 
carrées,  liées  entre  elles  avec  du  fer  et  du  plomb ,  avait 
35  stades  de  longueur  et  40  coudées  de  hauteur.  Sur  tous 
deux  s'élevaient  de  nombreuses  tours,  qui  furent  conver* 
ties  en  habitations  particulières  lorsque  la  ville  ne  suJBt 
plus  pour  loger  les  citoyens. 

LONGUE  (Syllabe),  syllabe  dont  la  prononciation  est 
é^e  à  deux  temps,  c.-à-d.  à  deux  brèves  {V.  ce  mot). 
Ainsi,  en  français,  lâche  exige  un  temps  de  plus  que 
vache,  mâle  un  temps  de  plus  que  malle.  Le  signe  coi^ 
venu  pour  marquer  la  longue  en  latin  est  un  petit  trait 
horizontal  au-dessus  de  la  voyelle  :  tôtàs.  En  français, 
elle  s'annonce  assez  souvent  dans  l'usage  par  Tacoent  cir- 
conflexe. Sont  longues  en  français  :  1<*  Tes  syllabes  finales 
masculines  des  substantifs  pluriels  :  des  sacs,  des  sêU, 
des  pots;  2*  les  syllabes  finales  masculines  des  substan- 
tifs singuliers  avant  à  ce  nombre  une  terminaison  plu- 
rielle ;  un  vers,  le  temps,  le  nêx,  une  fais:  3®  les  syllabes 
nasales  suivies  d'une  consonne  autre  que  m  ou  n  ;  jâm^f, 
rampe,  sombre,  tendre,  feindre,  humble;  4*  les  syllabei 
suivies  de  deux  r,  dont  un  seul  se  prononce:  frôrrt, 
bizarre,  carré,  terre,  verre,  tonnerre.  Cependant  ârraef 
ger  et  arriver  ont  la  1'*  brève  ;  5^  les  pénultièmes  suivies 
de  se,  %e  :  vase,  diocèse,  sottise,  fnmchise,* seize,  rose, 
muse,  douze,  blouse;  6"  les  pénultièmes  terminées  fft 
une  voyelle  suivie  d'un  e  muet  :  boue,  rue,  icie,  pensée, 
armée»  —  Ces  règles  subissent  de  nombreuses  exceptions 
dans  le  langage  familier,  et  on  s'en  écarte  quelquefois 
dans  le  débit  oratoire  et  dans  la  récitation  déclamée,  sHI 
doit  en  résulter  quelque  heureux  effet.  A  cet  égard,  le 
goût  et  le  sentiment  de  l'harmonie  sont  à  peu  près  les 
seuls  guides.  P. 

LONGUE,  figure  de  note  qui,  dans  l'ancienne  notation, 
était  le  signe  d'une  durée  double  de  la  brève  ou  roiub. 
Dans  la  mesure  ternaire,  elle  valait  trois  brèves.  Elle  était 
de  forme  carrée,  avec  une  queue  sur  la  droite. 

LOQUIFER  (Bataille  de),  15*  branche  de  la  chanson 
de  Gutllaume  au  coiurt  nez.  Les  Infidèles  ont  envahi  la 
France  :  leur  chef  Desramé  remet  le  sort  de  l'expédltioD 
à. un  combat  singulier  entre  Rainouart  et  le  géant  La- 
qoifer.  Rainouart  est  vainqueur;  mais  son  fila  Haillefeis 
est  enlevé  par  les  Sarrasins,  et  emporté  dans  la  ville 
d'Odierae.  Il  se  met  à  la  recherche  de  son  enfant;  il  est 
tran^  porté  dans  le  royaume  des  fées,  et  revient  enfin  dans 
sa  ville  ce  i^rtpidllart  sans  avoir  retrouvé  Maillefers.  — 
Cette  chanson  est  conservée  dans  six  manuscrits,  dont 
un  à  la  bibliothèque  de  l'Arsenal,  à  Paris.  M.  Leroux  de 
Lincy  en  a  publié  une  partie  dans  son  LÀvre  des  Légendst. 
Paris,  1836,  in-8«.  V.' Histoire  littéraire  de  la  Firan» 
tomeXXIL  H.  D. 

LORD.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie  et  d^  Histoire. 

LORD-lIAIRE,  titre  que  portent  à  Londres  et  à  Du- 
blin les  chefs  du  corps  municipal ,  élus  chaque  année  par 
les  hiJiitaBtB,  et,  à  Loadrea»  par  les  bouIb  habitants  de  11 


LOS 


1179 


LOU 


M,  Toot  candidat  à  la  charge  de  tord-maire  de  Lendres 
doit  être  membre  libre  de  l'une  des  1^  corporations  prin- 
dpslea  de  la  Cité,  avoir  rempli  les  fonctions  de  shénf,  et, 
sa  tempe  des  élections,  fait  l'office  d'alderman  dans  Tun 
d«s  quartiers.  L'élection  a  lieu  à  Gulldhall  (F.  ce  mot). 
Le  Jour  de  la  S^Biichel,  les  corporations  s'y  rassemblent, 
sous  la  présidence  des  shérift  :  tous  les  aldermen  qui  ont 
pmé  par  le  shérifat  sont  proposés  saccessivement  à  la 
csndidatniB  par  ordre  d'andennetô;  les  deux  qui  réunis- 
sent le  plus  grand  nombre  de  suffrages  sont  signalés 
dsns  an  rapport  à  la  Cour  des  aldermen,  laquelle  décide 
du  choix  à  faire.  Ce  choix  est  soumis  à  l'approbation  du 
souveralii ,  qui  n'est  guère  qu'une  formalité,  lie  8  no- 
ranbfe,  Téiu  prononce  à  Guildball,  en  présence  des 
citoyens,  le  serment  de  bonne  et  fidèle  administration,  et 
est  Installé  le  lendemain  à  Westminster  par  les  barons 
de  rÉdiiquier.  Le  lord-maire  est  dit  très'-himorablê  hrd, 
A  titre  de  gonvemeur  ci?il  de  Londres,  il  est  le  premier 
Joge  de  toutes  les  cours  et  commissions  de  la  até,  pré- 
aîdeat  de  l'élection  des  aldermen,  conservateur  de  la  Ta- 
mise ;  sons  le  rapport  militaire,  il  a  les  mêmes  pouvoirs 
que  les  lords-lieutenants  des  comtés.  Comme  insignes 
halntnels  de  sa  charge,  il  porte  constamment  au  cou  une 
double  chaîne  d'or  ou  un  nche  collier  de  pierreries;  dans 
les  efrconstaoces  solennelles,  il  est  vêtu  d'une  robe  de  ve- 
lours cramoisi  ;  son  costume  ordinaire  est,  en  hiver,  une 
robe  de  diap  écarlate  à  capuchon  de  velours,  et,  en  été, 
une  robe  de  soie  bleue  doublée  de  fourrure.  Dans  les 
processions  où  sa  présence  est  officiellement  recjuise,  on 
porte  devant  lui  l'épée  et  la  masse  d'armes,  soit  en  or, 
soit  en  argent  :  s'il  est  à  pied,  un  page  soutient  la  queue 
de  sa  robe;  s'il  va  en  voiture,  c'est  dans  un  carrosse 
splendide  à  quatre  chevaux.  Il  réside  à  Mansion-House, 
au  bout  du  pont  de  Ijondres.  Jadis  la  personne  du  lord- 
maire  était  sacrée  et  inviolable,  et  l'outra^r  était  un 
crime  puni  de  mort;  il  avait,  conmie  le  roi,  son  poète 
lauréat  et  son  bouffon.  B. 

LORETTB  (Église  de),  dans  les  États  romains.  Cette 
église,  dite  de  la  lladone,  fut  commencée  en  1404,  et 
adbevée  en  1513,  sous  la  direction  de  Bramante,  à  l'ex- 
seption  de  la  coupole,  ajoutée  sous  Clément  1^  et  Paul  III, 
et  de  la  façade,  construite  sous  Sixte-Quint,  en  1587,  dans 
le  eoût  de  la  décadence.  On  l'a  encore  réparée  depuis  cette 
époque.  Située  sur  une  place  que  décorent  oeux  por^ 
tiques,  une  fontaine  et  la  statue  de  Sixte-Quint ,  elle  office 
de  belles  portes  à  bas-reliefs  en  bronze,  et  un  grand 
nombre  de  fresques  et  de  mosaïques.  Mais  ce  qui  excite 
surtout  rintérèt,  c'est  la  Scmta,  Casa  placée  sous  la  cou- 
pole, maisonnette  en  bols  d'ébèoe  et  en  briques,  habitée 
aotrefols,  selon  la  légende,  |Mr  la  S^  Vierge,  et  emportée 
de  Nazaretb  en  Dalimstie,  puis  à  Lorette,  par  des  anges,  à 
U  fin  da  xm^  siècle.  Elle  a  10'",60  de  long,  4",96  de 
large,  et  6™,66  de  haut.  Dn  revêtement  en  marbre,  dont 
le  dessin  est  de  Bramante,  inl  a  été  appliqué,  et  est  cou- 
vert de  Ins-reliefo  splencUdes,  exécutés  par  Sansovino, 
Lombardo,  Bandinelli ,  Tribolo,  Jean  de  Bologne  et  autres 
bons  maîtres.  On  y  entre  par  une  porte  avec  grille  en  ar- 
gent. Llntèrieur  est  dépourvu  d'ornements  :  mais  sur 
Tantel  s*élève  une  statue  de  la  Vierge  en  bois  de  cèdre, 
acoiptée,  dit-on,  par  S^  Luc,  et  couverte  de  très-riches 
ornements;  prte  de  là  on  montre  des  vases  en  terre 
qa*on  prétend  avoir  servi  à  la  Sainte  Famille,  et  la  fe- 
nêtre par  laouelle  serait  entré  l'an^  Gabriel  lors  de  l'An- 
Qonciation.  V.  l'abbé  Caillau,  Histoire  critiqw  et  reli- 
ginue  ds  réglise  Notr^ùavM-^i^'Lorétte ,  Psris,  1843, 
in- 12;  Bfartorelli,  Teairo  istorieo  délia  Santa  Casa, 
Rome,  2  voL  hi-fol.  B. 

LORICA.  F.  CoiRASsi. 

LORMIERS,  ancienne  corporation  d'ouvriers  qui  fa- 
briquaient des  mors  pour  les  chevaux.  Leurs  statuts  se 
trouvent  dans  le  Livre  des  métiers  d'Etienne  Boilean. 
Plus  tard,  il  y  eut  des  lormiers'éperonniêrs,  des  lormiêrS' 
saUtsrr,  et  des  lormiers-bourreliers, 

LORRAIN  eu  AUSTRASIEN  (Patois),  un  des  patois  qui 
dérivent  de  la  Langue  d'oïl  {V,  ce  mot)^  et  dont  le  Meuin 
est  une  variété.  Au  xiu*  siècle,  il  avait  ses  plus  grandes 
aoaJogies  avec  le  champenois,  et  il  était,  comme  lui, 
ideotlqoe  pour  le  fond  avec  le  bourguignon  :  mais  il  a 
emmîité,  en  plus  grand  nombre  que  le  champenois, 
dinereotes  formes  du  dialecte  picard.  V,  dom  J.  Fiançois, 
Vocabfdaire  austrasien.  Mets,  1773;  Oberiin,  Euai  sur 
U patois  Unrmm des  emriroiu  du  Bande  la  Roche,  Strss- 
booiB,  1775. 

LORRAINE  (Croix  de).  V.  Caoïx. 

LOSANGES,  ornements  psrticnlien  à  Tarchitecture 
leÉmiu  byiantine,  lis  sont  simplet  on  endialnéSt  en 


creux  on  en  sailHe,  et  disposés  sur  les  moulures  plates 
des  srchitraves  et  des  corniches. 

LOTERIE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio* 
graphie  et  d'ffistoire, 

LOTERIE,  Jeu  de  cartes.  On  prend  au  hasard  un  certain 
nombre  de  cartes  d'un  jeu  complet,  et  on  les  couvre  d'en« 
Jeux.  Des  cartes  d'un  autre  Jeu  ayant  été  distribuées  aux 
Joueurs,  celui  (}ui  a  une  carte  correspondant  à  l'une  de 
celles  qu'on  a  tirées  d'abord,  gagne  ce  dont  celle-ci  est 
chargée. 

LOTO  (du  mot  lot)^  Jeu  de  hasard,  pour  lequel  on 
emploie  Si  cartons  contenant  chacun  trois  rangées  tracs- 
venales  de  10  compartiments,  dont  5  colorés  et  5  à  fond 
blanc.  Sur  ces  derniers  sont  inscrits  les  numéros  1  à  90, 
sans  autre  ordre  que  de  mettre  ceux  de  1  à  10  dans  la 
1^  colonne,  ceux  de  10  à  20  dans  la  2%  et  ainsi  de  suite. 
Chaque  carton  présente  15  numéros,  et  chacun  des  nom- 
bres se  reproduit  quatre  fois  sur  la  totalité.  Les  joueurs 
prennent  chacun  2,  3  ou  4  cartons,  et ,  quand  Us  ont  fait 
une  poule  d'un  taux  convenu,  l'un  d'eux  tire  successive- 
ment, d'un  sac  ou  d'une  boite,  des  boules  portant  un 
numéro,  qu'il  appelle.  Celui  qui  trouve  le  numéro  sur 
ses  cartons  le  manque  avec  un  Jeton.  Un  seul  numéro  sur 
la  même  ligne  horizontale  fait  un  extrait ,  deux  font  un 
om^tf,  trois  un  terne,  ouatre  un  quateme;  la  poule  ap- 
partient au  premier  qui  arrive  au  quine,  ou  5*  numén>. 
—  Dans  le  mode  particulier  de  Jouer  le  loto  qu'on  nomme 
tombola,  chaque  Joueur  ne  prend  qu'un  carton,  et  la 
poule  appartient,  non  au  premier  oui  a  le  quine,  mais 
à  celui  qui  a  entendu  appeler  les  15  numéros  de  son 
carton. 

LOTUS.  Cette  plante  était,  pour  les  anciens  Égyptiens, 
un  symbole  de  la  fécondation  et  de  la  vie.  Le  dieu  Horus, 
personnification  du  soleil  levant,  était  représenté  sur  un 
lotus  dont  le  bouton  s'élance  du  sein  des  eaux,  et  avec  un 
collier  de  fleurs  et  de  boutons  de  lotus.  On  trouve  d'au- 
tres divinités  encore  avec  une  tige  de  lotus  à  la  main. 
Trois  tiges  de  lotus,  s'échappent  d'un  bassin,  étaient  le 
symbole  de  la  haute  Egypte. 

LOUAGE  (Contrat  de),  contrat  par  lequel  une  des 
parties  s'oblige  à  faire  Jouir  l'autre  d'une  chose  ou  du 
fruit  de  son  travail  pendant  un  temps  déterminé  et 
moyennant  un  certain  prix.  De  là  la  distinction  du  louage 
de  choses  et  du  louage  d'industrie  ou  d^ouwage.  Le  louage 
des  choses  prend  différents  noms ,  selon  les  objets  aux- 
quels il  s'appliaue  :  bail  à  loyer,  s'il  s'açit  de  maisons 
ou  de  meubles;  Oatf  à  ferme,  pour  les  héritages  ruraux; 
baU  à  cheptel ,  s'il  s'agit  d'animaux  dont  le  profit  se  par- 
tage entre  le  propriétaire  et  le  locataire  (F.  Bail,  Chep- 
tel). Le  louage  des  services  embrasse  :  1'  le  louage  des 
gens  de  travail,  ouvriers  ou  domestiques,  qui  s'engagent 
au  serrice  de  quelqu'un  ;  2®  celui  des  voituriers  par  terre 
ou  par  eau ,  qui  se  chargent  du  transport  des  personnes 
ou  des  marchandises  ;  3*  celui  des  entrepreneurs  d'ou- 
vrag^  par  suite  de  devis  ou  marchés.  V.  Duvergier, 
Traité  au  louage,  2  vol.  in-8<>;  Troplong,  Commentaires 
des  titres  du  Louage  et  de  l'Echange,  1852.  2  vol.  in-8«; 
Vanhuffel ,  Traité  du  contrtU  âe  louage  et  de  dépôt  appli' 
que  aux  voituriers,  etc.,  1841,  in-8*. 

LOUGRE  (de  l'anglais  lugger)^  petit  navire  très-léger, 
souvent  armé,  employé  surtout  comme  éclaireur  dans  la 
guerre  maritiine,  et  dont  les  pirates  ont  souvent  fait 
usage.  Il  a  un  grand  mât  et  un  m&t  de  misaine,  porteurs 
de  deux  grandtes  voiles  trapézoïdales,  et,  au  besoin,  de 
huniers  et  de  perroquets  volants;  parfois,  il  en  dresse  ul 
troisième,  dit  tape-cul,  sur  l'arrière;  son  beaupré  est 
très-court.  Un  lougre  peut  porter  Jusqu'à  18  pièces  di* 
canon. 

LOUIS,  monnaie.  V,  notre  Dict.  de  Biogr» 

LOUIS  (Chant  de).  V.  le  Supplantent 

LODis  (Gode).  V.  CooB,  dam  notre  Dietionnaire  de 
Biographie  et  t  Histoire. 

LOUIS  (Institut,* Ordre  de  S^).  V.  notre  Dictionncare  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

LODIS  XIV  (Le  siècle  de),  qualification  que  Ton  donne 
à  la  plus  brillante  période  de  la  littérature  française,  à 
celle  qui  s'étend  de  la  mort  de  Henri  IV  à  celle  de 
Louis  aIV;  non  que  ce  dernier  prince  ait  formé  les  gé- 
nies qui  ont  illnstié  son  règne,  mais  parce  ou'il  a  su  gé» 
néralement  les  encourager,  les  mettre  en  lumière,  W 
foire  concourir  à  sa  propre  grandeur.  —  Voltaire  a  donné 
le  nom  de  Siècle  de  Louis  XIV  à  l'un  de  ses  grands  oe« 
vrages  historioues.  Il  était,  pour  récrire,  an  point  de  vue 
le  plus  favorable  :  sa  première  Jeunesse  s*etait  écoulée 
durant  les  deiiilères  années  de  Lonis  XIV,  et  il  avait  fré- 
({oeoté  plnaienrt  des  personnages  qui  avalent  approché 


LOD 


llgO 


LOU 


ee  mooarqae  ou  slégâ  dans  ses  Consellii  en  pleine  nur 
tarité  de  r&ge  et  du  talent,  il  n*était  plus  exposé  à  céder 
à  renthousiasme  qu'avaient  excité  les  prospérités  du  roi 
on  au  dénigrement  produit  par  ses  malheurs,  et  il  Ta  Jugé 
tout  à  la  fois  a?ec  admiration  et  impartialité,  vantant  ses 
belles  qualités  et  ses  grandes  actions,  sans  dissimuler  ses 
fautes.  Ce  qui  fit  roriginalité  du  Sièch  de  Louis  XIV,  ce 
fut  rheureuse  idée  de  ne  pas  borner  l'histoire  d'une 
époque  à  celle  des  batailles  et  des  faits  et  gestes  des 
princes,  mais  de  représenter  le  mécanisme  de  l'admi- 
nistration, les  vicissitudes  des  finances,  les  relations  des 
gouvernements  et  des  peuples,  les  développements  du 
commerce  et  de  l'industrie,  le  mouvement  des  lettres,  des 
sciences  et  des  arts.  Voltaire  a  su  réunir  l'exactitude 
scrupuleuse  à  l'art  de  peindre,  la  critique  éclairée  à  la 
vivacité  du  sentiment  et  de  l'imagination,  môler  des  ré- 
flexions au  récit  sans  le  suspendre  ni  le  ralentir.  Ce  livre 
de  Voltaire  est  admis  comme  classique  dans  nos  écoles. 

LOUIS  XV  (Place),  à  Paris.  K.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire. 

LOUP,  animal  adoré  à  Lycopolis,  dans  l'andenne 
Egypte.  Il  figurait  parmi  les  hiéroglyphes  comme  ie  signe 
du  voleur.  Les  Grecs  consacrèrent  le  loup  à  Apollon  ;  les 
Romains,  à  Mars,  parce  qu'une  louve  avait  nourri  Ro- 
mulus  et  Rémus,  nls  de  ce  dieu.  Chez  les  Scandinaves, 
Loki,  le  Satan  du  Nord,  avait  pour  fils  le  loup  Fenris. 
Les  légendes  chrétiennes  font  du  loup  un  emblème  du 
démon.  —  Les  Anciens  donnaient  le  nom  de  loup  à  une 
enseigne  et  à  une  machine  de  guerre.  F.  Enseignb  et 
Harpagon,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d^Histoire, 

Loop,  sorte  de  demi-masque  en  velours  noir,  que  les 
dames  du  xv^  et  du  xvi"  siède,  et  aussi  certains  courti- 
ïana,  portaient  presque  constamment,  de  peur  de  hâler 
leur  teint.  Cet  usage  s'est  perpétué  à  peu  près  Jusqu'à 
nos  Jours  chez  les  déimes  Espagnoles. 

LÛUQSOR  (Temple  de).  V.  Tateas  (Ruines  de). 

LOURE ,  danse  grave  dont  l'air  était  assez  lent  et  ordi- 
nairement marqué  à  six-quatre.  Cet  air  commençait  en 
levant,  et  se  composait  de  deux  reprises  de  8,  12  ou 
i6  mesures.  Quand  chaque  temps  porte  trois  notes,  on 
poinie  la  première,  et  ron  fait  brève  celle  du  milieu. 
Jjourer,  c'est  marquer  la  première  note  de  chaque  temps 
plus  sensiblement  que  la  deuxième,  quoique  de  même 
valeur,  et  en  nourrir  le  son  avec  douceur  t  ce  mode 
d'exécution  est  particulièrement  en  usage  pour  les  com- 
positions d'un  caractère  rustique.  —  On  a  encore  appelé 
loure  un  instrument  assez  semblable  à  la  musette. 

LOUSTIC  (  de  l'allemand  lustigt  Joyeux  ),  nom  donné 

iadis,  dans  les  régiments  suisses  que  soudoyait  la  France, 
k  des  bouffons  chargés  de  les  égeiyer,  et  de  prévenir  ou 
dissiper  dans  les  soldats  le  mal  du  pays.  Il  y  en  avait  un 
par  compagnie. 

LOUVAIN  (Église  de  S^-Punas,  à).  Cette  église  coUé- 
dale,  bâtie  sur  l'emplacement  d'un  édifice  antérieur,  qui 
fut  incendié  en  1130  et  en  1373,  date  du  xv«  siècle,  et  a 
été  faite  d'un  seul  jet  :  de  toutes  les  églises  de  Belgique, 
il  n'y  a  que  celle  de  S^*-Waudru  à  Hons  oui  puisse  lui 
être  comparée  pour  la  pureté  et  l'harmonie  cle  l'ensemble. 
L'extérieur  n'annonce  pas  cependant  une  construction  de 
premier  ordre  x  les  arcs-boutaots  qui  soutiennent  la 
snuide  nef  et  le  chœur  sont  extrêmement  lourds;  on  a 
laissé ,  au  xviu*  siècle,  des  maisons  et  des  boutiques 
s'implanter  entre  les  contre-forts;  le  portail  devait  avoir 
trois  tours  surmontées  de  flèches  à  jour,  dont  on  prétend 
avoir  le  modèle  à  l'hôtel  de  ville,  et  l'on  ne  fit  ou'une  flèche 
en  bois,  détruite  par  les  flammes  en  1604.  L'utérieur  est 
bien  autrement  satisfaisant:  il  est  en  forme  de  croix  latine, 
avec  trois  nefs,  et  a  100  met.  de  longueur  sur  25  de  lar- 

Sur.  La  grande  nef  étonne  par  la  hardiesse  et  l'élégance 
son  architecture.  Au-dessus  des  grands  arcs  ogiTaux 
règne  un  triforium  découpé  en  quatre-feuilles  et  à  ar- 
cades trilobées,  et,  au-dessus  de  celui-ci,  de  grandes  fe- 
nêtres ogivales  éclairent  l'édifice.  Toutefois,  on  regrette 
l'absence  de  vitraux  de  couleur,  et  le  badigeon  nuit  au 
caractère  sévère  de  l'ensemble.  Un  Jubé,  i)eau  modèle  de 
style  flamboyant,  sculpté  et  fouillé  avec  une  grande  re- 
cherche, sépare  le  chœur  de  la  nef  :  il  est  surmonté  d'un 
mmense  crucifix  qui  s'élève  Jusqu'à  la  voûte  ;  quelques- 
nes  des  parties  de  ce  Jubé  sont  dorées,  et  l'une  des  deux 
>  bapelles  qui  sont  au  pied  contient  un  Christ  noir  comme 
(  e  rébène  et  vètn  d'une  longue  robe  rouge.  Vis-à^vis  est 
i  n  lustre  en  fer,  que  l'on,  a  attribué  à  Quentin  Matsys. 
la  chaire,  sculptée  en  bois  par  Berger  ponr  l'éfldise  de 
Mnove  en  1742,  et  apportée  à  Loovala  en  ISOTTa  la 
fu.ine  d*iin  roriier,  d'où  s'élèvent  deux  palmiers  à  one 


hauteur  d'enrinm  10  mèC  ;  d'un  côté,  l'artiste  a  repré- 
senté S^  Pierre,  de  grandeur  naturelle,  an  moment  où  11 
renie  le  Sauveur,  et,  de  l'autre,  S^  Paul  renversé  de  che- 
val en  poursuivant  les  chrétiens  yers  Damas.  Les  orgues 
ont  été  construites  par  Golphus,  en  1634.  Les  portes  de 
fer,  exécutées  en  1811  par  Goemans,  passent  pour  an 
chef-d'œuvre.  A  droite  du  maltre-autel  est  un  tabernacle 
doré,  dont  la  flèche,  haute  de  12  met.,  est  sculptée  avec 
la  l4;èreté  d'une  dentelle,  et  qu'on  rapporte  k  l'année 
1435.  Un  lutrin  gigantesque,  où  l'on  voit  à  la  base  S*  Paul 
et  son  cheval  renversés,  tandis  que  des  anges  voltigent 
autour  des  rameaux  qui  forment  le  couronnement,  est 
une  des  plus  belles  sculptures  en  bois  qui  sment  venues 
jusqu'à  nous.  L'église  S'-Plerre  possède  Quelques  tablesnx 
remarquables  de  Hemling,  de  Matsys,  de  Van  der  Wey- 
den,  de  Crayer,  et  de  Van  Dyck.  B. 

LouvAm  (Hôtel  de  Ville  de),  le  plus  bel  édifice  dvil 
d'architecture  ogivale  que  possède  la  Belgique.  Il  toi  bAti 
de  1448  à  1463  par  Hathieu  de  Layens,  et  on  l'a  res- 
tauré de  nos  Jours.  C'est  un  ouadrilatère,  isolé  sur  trois 
de  ses  faces,  et  dont  la  façade,  un  peu  plus  large  que 
haute,  a  34  met.  Il  se  compose  d'un  res -de-chaussée 
assez  élevé  et  de  deux  étages.  Les  archivoltes  des  fenêtres 
ogivales  sont  ornées  de  feuillages.  Les  entre- deux  de 
fenêtres  présentent  des  saillies  qui  s'élancent  depm's  te 
rez-de-chaussée  Jusqu'au  toit,  et  oui  sont  décorées  de 
feuillages,  de  niches,  de  dais,  de  reliefs  de  toutes  sortes. 
Une  balustrade  découpée,  surmontée  de  pinacles,  borde 
le  toit,  qui  est  très-élevé  et  porte  trois  rangées  de  lu- 
carnes. Aux  quatre  angles  de  l'édifice  sont  des  tourelles 
octogones,  garnies,  à  différentes  hauteurs,  de  balcons  eo 
forme  de  corbeilles,  et  terminées  en  flèches  pyramidales. 
Aux  deux  extrémités  du  toit,  deux  tourelles  semblables, 
partant  seulement  de  la  balustrade,  dominent  les  quatre 
autres  flèches.  Tout  cet  ensemble  est  extrêmement  élé- 
gant et  gpcieux,  et  l'ornementation  est  d'une  délicatesse 
extraordinaire.  B. 

L0UV£TER1B,  institution  destinée  à  fayoriser  la  des- 
truction des  loups,  renards  et  autres  animaux  nuisibles. 
Un  grand  nombre  de  dispositions  de  la  loi  des  Bourgui- 
gnons et  des  Capitulaires  ont  trait  à  la  destruction  des 
loups,  et  offrent  des  récompenses  à  ceux  qui  en  prendront. 
Charlemagne  établit  deux  louvetiers  dans  chacun  des 
gouvernements  de  son  empire  :  il  leur  était  attribué  2  de- 
niers par  loup  et  3  deniers  par  louve,  payables  par  cha- 
que feu  de  viUage  à  deux  lieues  à  la  ronde  de  l'endroit  où 
l'animal  avait  été  pris.  Plus  tard,  le  nombre  des  louve- 
tiers  fut  multiplié.  François  l"*"  les  créa  en  titre  d'office, 
et  plaça  au-dessus  d'eux,  en  1520,  le  grand  louvetier 
dont  la  charge  paraît  remonter  Jusqu'au  xv*  siècle.  Néan- 
moins, les  loups  se  multipliaient  d'une  manière  effhiyante. 
Henri  III,  par  une  ordonnance  de  Janvier  1583,  enjoignit 
aux  officiers  des  eaux  et  forêts  de  requérir,  trois  fois  Tan, 
un  homme  par  feu  de  chaque  paroisse ,  avec  armes  et 
chiens  pour  la  chasse.  Une  ordonnance  de  1601  imposa 
aux  seigneurs  l'obligation  d'exiger  de  leurs  tenanciers  ce 
même  service.  Il  ne  parait  pas  qu'on  soit  arrivé  à  des  ré- 
sultats bien  sérieux;  car,  au  xviii*  siècle,  les  intendants 
des  provinces  payaient  Jusqu'à  30  livres  [Mtr  tête  de  loup. 
Aujourd'hui,  d'après  le  décret  du  25  mars  1852,  la  louve- 
tene  fait  partie  des  attributions  du  grand  veneur.  Les  pré- 
fets, sur  l'avis  du  conservateur  des  forêts,  nomment  tons 
les  ans  des  lieutenants  de  louvêterie,  dont  la  commission 
est  honorifique,  et  qui  doivent  :  1'  entretenir  à  leurs 
frais  un  équipage  de  chasse,  composé  au  moins  d'un  pi- 
queur,  deux  vaJets  de  limiers ,  un  valet  de  chiens,  dix 
chiens  courants  et  deux  limiers;  2<*  de  procurer,  dans  la 
proportion  des  besoins,  les  pièges  nécessaires  pour  la 
destruction  des  animaux  nuisibles.  En  retour  de  ces  obli 
gâtions,  les  lieutenants  de  louveterie  ont  le  droit  de  cbaa* 
ser  au  loup,  sans  permis  ;  d'employer,  pour  la  destruction 
des  bêtes  nuisibles,  certains  pièges  interdits  par  la  loi  de 
1844  sur  la  chasse;  de  chasser  à  courre  le  sanglier,  deux 
fois  par  mois,  dans  les  forêts  de  l'État,  et  même  de  le 
tirer,  quand  il  résiste  aux  chiens.  Ils  ont  un  uniforme 
permis,  mais  non  obligatoire.  Les  batUtes  ne  peuvent 
avoir  lieu  qu'en  vertu  d'arrêtés  des  préfets,  qui  en  fixent 
les  jours  et  déterminent  les  lieux  et  le  nombre  d'hommes. 
Ces  battues  sont  sous  la  surveillance  des  agents  fores- 
tiers, afin  que  les  louvetiers  ne  profitent  pas  de  l'autori- 
sation de  faire  une  battue  pour  se  livrer  au  plaisir  de  la 
chasse.  Les  animaux  nuisibles  qui  ont  été  tués  dans  unu 
battue  sont  la  propriété  du  concessionnaire  de  la  chasse; 
Toute  personne  est  autorisée  à  tuer  les  loups  et  autres 
bêtes  malfaisantes  sur  sa  propriété.  La  prime  allouée  pour 
la  destruction  des  loups  est  de  6  fr.  par  lou^roiMi^,  n  fr. 


LOIJ 


1181 


LOU 


MT Vm».  15  tnncê  ptr  lon?e  non  pleine,  et  i8  fr.  par 
WnrepieliM.  Ces  d^pîenses  figurent  au  budiget  des  dépar- 
tanents.  B. 

LOUVIERS  (Église  de).  Cet  édifice,  dont  les  parUes  les 
plus  sneiMiiiet  aont  dn  un*  siècle,  a  été  agrandi  an  xv*, 
nos  doate  à  euae  de  raccroissement  de  la  population 
do  pajs.  11  est  à  dna  nefs,  qui  s'arrêtent  carrément  an 
dicMir,  dont  on  ne  fait  pas  le  tour  t  la  nef  mi^eore  et  les 
bas  côtés  qui  y  sont  attenants  appartiennent,  aToe  le 
dMBor,  à  la  constmctlon  primitiTet  les  deux  autres  col* 
latéraux  sont  postérieurs.  On  remarque,  an  baut  du 
deoxièiiie  collatéral  du  sud,  la  statue  et  le  cénotaphe  du 
sire  d'Estemay,  personnsge  qui  prit  psrt  à  la  Ligue  du 
bien  pablie,  et  qui  ftit  noyé  par  orén  de  Louis  XI;  dans 
un  collatéral  du  nord,  une  mise  au  tomliean  et  un  Christ 
coormuié  dTépines.  De  grandes  statues  ont  été  placées, 
dans  le  xv*  siècle,  an-dessus  des  chapiteaux  de  la  nef 
principale.  Les  vitraux  sont  du  x^  et  du  xvi«  siècle,  mais 
fort  délabrés.  Extérieurement,  Téglise  de  Louviers  forme 
une  masse  lourde  et  disgracieuse,  parce  qu'aucune  pyra- 
mide élancée  ne  la  surmonte  :  la  tonr  carrée  oui  sNâère 
à  rentrée  dn  cbcnir  est  fort  basse,  décorée  seulement  de 
quelques  statues  dn  temps  de  la  Renaissance,  et  se  ter- 
mine en  plate-forme,  depuis  que  son  aiguille  de  bols  et  de 
^omb,  constmite  en  1379,  et  hante  de  50  met.,  a  été  ren- 
versée par  le  vent  en  1705.  Une  autre  grosse  tour,  dite 
des  Qocbes,  fat  commencée,  vers  la  fin  du  xnr*  diôcle, 
tu  coin  de  la  façade  occidentale  et  du  collatéral  septen- 
trional, qui,  pour  ce  motif,  est  plus  court  que  les  autres  ; 
«Ue  est  inacherée.  Mais  ce  qui  recommande  l'église  de 
LooTiers,  c*est  un  porche  appliqué,  vers  hi  fin  du  xv*  siè- 
de,  sur  son  flanc  méridional ,  et  restauré  de  nos  Jours 
sous  la  dSrection  de  M.  Bourguignon  :  on  retrouTe,  dans 
ses  déeoaparea  et  ses  pendentifs,  toute  hi  finesse  et  toute 
Is  richesse  exubérante  qui  annonçaient  alors  la  décadence 
du  style  ogival. 

LOUVOTS  (Théâtre).  Ce*théàtre  parisien  fut  bâti  de 
1101  à  1103,  sur  l'un  des  côtés  de  la  rue  dont  11  portait 
le  nom*  11  resta  peu  de  temps  ouvert,  à  cause  de  hi  dé- 
coofltme  des  entrepreneurs.  Picard  l'occupa,  avec  la 
troupe  de  rOdéon,  de  1801  à  1808,  et,  sous  la  Restaura- 
tion, on  y  plaça  rOpéra  itslien.  En  1827,  il  a  été  changé 
ta  maison  psiticulière. 

LOUVOYER,  en  termes  de  Marine,  remonter  le  lit  du 
vent  en  eouant  des  bordées,  c.-à-d.  en  fkisant  des  routes 
ihemativement  inclinées  à  droite  et  à  gauche,  d'une  cer- 
taine quantité  sur  hi  direction  du  vent. 

LOUVRE  (Le).  F.  notre  Dictionnaire  dé  Btographtê  $t 


loevaa  (Musée  du).  L'origine  des  collections  rassem- 
blées an  Louvre  remonte  à  François  l*',  qui  fit  recueillir 
et  adwier  partout,  et  mincipatanent  en  Italie,  de  nom- 
treox  ebjett  d'art,  antiquités,  médailles,  byoux,  tableaux, 
itatoea,  etc.  Ces  objets  précieux  furent  pls!oés  d'abord  au 
diàtean  de  Fontainebleau.  Le  nombre  en  fut  peu  aug- 
Bienté  Jnaqu'aa  règne  de  Louis  XIV,  sous  lequel  Colbcùrt 
lit  racqniMtion  du  cabinet  de  Mazarin,  enrichi  des  dé- 
pooilles  de  celui  de  Charles  I*',  roi  d'Angleterre  ;  puis, 
«ras  la  direction  de  Lebrun,  on  se  procura  de  nouveaux 
cb^Hd'oBovre,  empruntés  à  tous  les  pays,  à  toutes  les 
écoles,  à  tous  les  genres,  et  qui  servirent  d'ameublement 
an  palais  de  Versailles.  Au  temps  de  Louis  XV,  en  1 743, 
le  gouvernement  profita  encore  de  la  vente  des  tableaux 
do  prince  de  Cangnan.  En  1750,  une  partie  des  trésors 
que  l'on  possédait  fut  transportée  au  Luiembourg,  afin 
qoe  le  public  et  les  artistes  pussent  en  Jouir;  mais  vers 
1785,  le  Luxembourg  ayant  été  donné  par  Louis  XVI  à 
"  H>n  frère  le  comte  de  Provence,  les  tableaux  retournèrent 
à  Versailles.    Un  décret  de  l'Assemblée  constitoaDte 
(M  mai  1701)  ordonna  gue  le  Louvre  recevrait  le  dépôt 
des  monuments  des  sciences  et  des  arts,  mais  ne  fut 
exécuté  qu'après  une  nouvelle  d<'cision  de  la  Convention, 
en  date  du  87  Juillet  1793.  On  réunit  de  tous  côtés  les 
tsbieanx  que  les  rois  avaient  achetés  ou  fait  exécuter,  et 
œox  qui  provenaient  soit  des  couvents,  soit  des  hôtels 
sôgnenrianx,  et  la  collection,  rendue  publique  le  8  no- 
reubre  1703,  sous  le  nom  de  Mutée  national,  Muséum 
français,  puis  Musée  cmUral  des  arts,  compta  537  U- 
i^ieaax,  tant  fhmçais  qu'étrangers.  Les  conquêtes  de  la 
République  et  du  premier  Empire  augmentèrent  consi- 
déâblement  ce  premier  dépôt;  la  eollection  Borghèse  fût 
icàetée  par  Napoléon  I*',  et,  en  1814,  le  Musée  ne  conte- 
ssît  pes  moins  de  1,S00  tableaux.  En  1815,  les  Bourbons 
cédèrent  aux  alliés  une  portion  de  ces  richesses.  Depuis 
cette  époque  )naqn'à  la  Révolution  de  1848,  le  Musée, 
flacé  daae  les  attributions  de  la  liste  dvile,  a  peu  à  peu 


.  réparé  ses  pertes.  Napoléon  m  le  plaça  soof  la  dfro»» 
tion  dn  ministre  d'État,  et  il  fût  partagé  en  IS  coUectionst 

1*  Iftués  dspftnliiri.  Situé  an  premier  étsge  dn  Lonne, 
et  composé  de  plua  de  1,800  tableaux,  11  est  divisé  en 
plusieurs  parties,  dans  lesquelles  on  a,  autant  que  pos* 
sible,  clsssé  les  tableaux  i>ar  écoles.  Dans  ]*école  fran« 
çaise,  qni  compte  près  de  700  toiles,  il  n'est  pas  de  maître 
qui  ne  figure  au  moins  pour  un  ou  deux  tsbleaux.  On  y 
admire  la  fomeuse  Histoire  de  S^Bruno  par  Lesneur 
(22  tablesnx);  10  paysages  de  Claude  Lorrsin;  ÎO  ta- 
bleaux de  Le  Brun,  parmi  lesquels  les  5  grandes  toiles 
dites  Batailles  d^Alexandre;  40  tableaux  du  Poussin;  la 
Pêche  miraculeuse  de  Jouvenet  ;  la  Vierae  à  la  arappe, 
S^  Luc  peignant  la  Vi/erge,  et  la  S^  CécHe  de  Mignsrd  % 
27  toilea  de  Joseph  Vemet  ;  les  Sabines,  Léonidas  aux 
Thermopyles,  et  le  portrsit  de  Pie  VII  nsr  David;  Une 
scène  du  Déluge,  Èndymûm,  la  Révolte  du  Caire,  et 
Atala  au  tombeau  psr  Girodet;  Psyché  et  V Amour,  par 
Gérard  ;  Marcus  SêoDtut,  par  Guérin  ;  le  Naufrage  de  la 
Méduse  par  Géricault,  etc. — Les  écoles  flamande,  hollan- 
daise et  allemande  sont  représentées  psr  pins  de  000  ta- 
bleaux, au  nombre  desquels  on  peut  citer  le  portrait  de 
Thomas  Monts  par  Hoibeln  ;  la  Femme  hydropùiue  de 
Gérsrd  Dow  ;  le  portrsit  de  Charles  I"  par  Van  Dyck  ;  le 
Coup  de  vent  de  Backuisen  ;  la  Kermesse  et  la  Vierge  aux 
anges  de  Rubens;  le  Rémouleur  de  Ténlers.  —  Les  di- 
verses écoles  d'Italie  comptent  près  de  550  tableaux. 
Parmi  les  plus  remsrquables  figurent  la  Sainte  Famille, 
S^Mi<^l  terrassant  le  démouy  le  SommeU  de  Jésus,  la 
Belle  Jardinière,  par  Raphaél;  la  Joconde  de  Léonard 
de  Vind;  Circé  st  la  Décollation  de  S^  Jean  par  le  Guer- 
chin;  la  5**  FamUle  dn  Dominiquin  ;  les  Noces  de  Cana 
et  les  Pèterins  d^EmmaUs  par  Paul  Véronèse;  la  Nais» 
sance  de  la  Vierge,  la  Prédication  de  S*'  Jean-Baptiste, 
la  Madeleine  et  le  ^  Sébcutien  d'Annibal  Carrache  ;  le 
Mariage  mystique  de  5**  Catherine  ^  le  Sommeil  d^An- 
tiope,  par  le  Coiîrége. — L'École  d'Espagne  est  représentée 
psr  r^dorotton  des  bergers,  de  Ribéra;  quelques  beaux 
portrottf  de  Velssquez;  et  surtout  par  7  toiles  de  Mo- 
rille, parmi  lesquelles  la  Concsptton  immaculée  de  la 
Vierge,  chef-d'œuvre  acheté  015,000  (t.  en  1852,  à  la 
vente  de  la  galerie  Soult. 

2<*  Musée  des  dessins  et  des  pcutels.  U  contient  des 
esquisses,  au  crayon  ou  à  la  plume,  de  la  plupart  des 
maîtres  dont  le  musée  principal  possède  des  tableaux,  et 
aussi  des  dessins  de  quelques-uns  qui  n'y  sont  point  re- 

Çrésentés,  Michel-Ange  entre  autres.  On  compte  environ 
00  dessins  des  écoles  d'Italie,  200  des  écoles  fiamande, 
allemande,  et  hollandaise,  400  de  l'école  flrançsise.  La- 
tour,  Vivien,  Chardin  sont  les  auteurs  des  plus  remar- 
quables pastels.  Dans  le  même  musée  sont  exposés 
50  émaux  de  Petitot,  représentant  des  personnages  cé- 
lèbres de  la  cour  de  Louis  XIV. 

3"  Musée  des  gravures.  Il  renferme  les  osuvres  d'Ede- 
linck,  des  Andran,  de  Baudet,  de  Tardieu,  de  Duchange, 
de  Rousselet,  de  Picard  le  Romain,  de  D^noyers,  etc. 

4*  Musée  de  la  sculpture  antique.  Cette  collection  est 
distribuée  dans  les  belles  salles  du  res-de-chaussée  du 
Louvre,  entre  autres  la  célèbre  Salle  des  Caryatides, 
ouvrage  de  Pierre  Lescot,  de  Paul  Ponce,  et  de  Jean  Gou- 
jon. On  y  rencontre  des  produits  de  toutes  sortes  de  l'art 
antique,  candélsbres,  sièges,  trépieds,  cippes,  urnes,  sar- 
cophages, vases  en  marbre  et  en  bronze,  etc.  An  nombre 
des  couvres  de  la  ststuaire,  on  distingue  la  Vénus  de  Milo, 
la  Vénus  d^ Arles,  la  Diane  chassereue,  le  Gladiateur 
tombattantA'Antmoits,  deux  Hermaphroailes,\eMarsyas 
attaché,  le  raune  à  Venfant,  VBf^ant  à  Voie,  deux  Faunes 
dansant,  une  Melpomène  colossale,  un  Centaure  anee 
V Amour  en  croupe,  nne  Polymnie,  un  Achdle,  un  Pol- 
luât, l'ilpoUon  au  lézard,  des  Jfmsfoe,  des  BaeÎBhus,  des 
Hercule,  plusieurs  statues  d^empereurs  romains,  etc. 

5*  Musée  de  la  sculpture  moderne.  On  y  voit  des 
œuvres  de  Michel -Ange,  Jean  de  Bologne,  Benvenuto 
Cellini,  Jean  Cousin,  Jesn  Goujon,  etc.,  les  Grdcsf  de 
Germain  Pilon,  le  troupe  de  l'ilmour  et  Psyché  par  Ga- 
nova,  le  MUon  de  Crotone  de  Pnget,  etc. 

0*  Jtf iis^  assyrien.  Cette  collection ,  oommenoée  len- 
lement  en  1847,  renferme  des  monuments  piédeux  de 
l'antique  civilisation  de  Ninive  et  de  Babylone.  Ces  mo* 
numents  sont  exposés  dans  deux  salles,  et  se  divisent  en 
sujets  religieux,  rq>résentations  driles  ou  historiques, 
inscriotions,  énianx,  petits  objets  de  terre,  de  bronze,  de 
sardome  et  autres  pierres.  Aux  fragments  originaux 
s'^foutent  des  empreintes  de  plâtre.  Les  murailles  de  la 
première  salle  sont  revêtues  d'encadrements  en  maçon» 
nerie  dans  lesquels  on  a  placé  des  baa-fetteft.  On  te» 


LUC 


118} 


LUS 


jMrqne  dans  la  leconde  ,deox  énormes  teureani  à  face 
humaine,  flanqués  de  gigantesques  statues. 

7*  JftiMB  égyptttn.  Placé  dans  une  paierie  du  rec-de- 
cfaauuée,  du  côté  de  Téglise  SMSermain-rAuxerrois,  ce 
musée  contient  de  grandes  et  lourdes  pièces  de  sculpture 
tenant  au  culte  et  aux  monuments  publics,  statues,  bustes, 
sarcophages,  sphinx,  lions,  etc.  Une  autre  collection  d*an- 
tiquités  égyptiennes,  enrichie  par  le  cabinet  do  CIot-Bey, 
est  renfermée  dans  des  ritrines  :  ce  sont  de  petits  objets 
se  rapportant  aux  mœurs  domestiques,  tels  que  figurines, 
amulettes,  rases,  ustensiles,  armes,  anneaux,  morceaux 
d*étefres,  boites  de  momies,  ete. 

8*  Musée  de  Vart  américain.  Il  se  compose  de  fétiches, 
d'ustensiles  et  de  divers  ornements  enlevés  aux  temples 
du  Mexique  et  aux  palais  du  Pérou. 

0*  Musée  étrusque.  On  comprend  sous  ce  nom  quel- 
ques productions  de  Tart  italique,  et  de  beaux  vases 
étmsques  des  différentes  époques. 

iO*  Musée  algérien.  Il  ne  contient  eneore  qu'un  petit 
nombre  d'antiauités. 

il*  Musée  de  marine.  Cette  collection,  ordonnée  en 
i827,  et  ouverte  au  public  depuis  1837,  renferme  une 
série  de  petits  modèles  de  bâtiments  fhmçais  et  étrangers 
de  tentes  les  époques,  depuis  le  tronc  d*arbre  creusé  Jus- 
qu'an  vaisseau  à  trois  ponts  et  au  bateau  à  vapeur;  les 
plans  en  relief  et  les  vues  générales,  à  l'échelle  de  1  1/2 
ou  S  millimètres  par  mètre,  de  nos  ports  militaires;  les 
armes  et  engins  oe  toute  espèce  affectés  au  corps  de  la 
marine;  les  débris  provenant  du  nanfrage  de  La  Pey- 
rouse;  un  pand  nombre  d'objets  provenant  des  lies  de 
la  mer  du  Sud,  flèches  empoisonnées,  caase-tète,  instru- 
ments de  musique,  piroçies,  vêtements,  parures,  etc. 

ii"  Musée  des  Souverams.  Ce  mosée,  qui  nefotcomposé 

S  n'en  1852,  fut  dissons  après  Mapoléon  III.  On  y  avait 
ré  de  plusieurs  éublissements  religieux  ou  civils  divers 
objets  qui  ont  authentiquement  appartenu  à  des  souve- 
rains français,  tels  que  le  fauteuil  de  Dagobert,  la  cuve  bap- 
tismalede  Louis  IX,  la  chapelle  de  l'ordre  du  S^Espritsous 
Henri  11;  diverses  armures  et  panoplies  ;  la  redingote  grise, 
le  petit  chapeau,  le  trône,  le  lit  de  campagne  et  les  vête- 
ments de  cour  de  Napoléon  I*%  le  berceau  du  roi  de  Rome. 

LOVELACE.  V.  Clarisse  Harlowb. 

lOYER,  prix  payé  par  le  locataire  pour  prix  de  la 
chose  qui  lui  est  louée.  On  peut  louer  toutes  sortes  de 
Uens  meubles  ou  immeubles. 

LOYOLA  (Monastère  de).  Ce  monastère,  élevé  en 
1683  par  Tarchitecte  italien  Fontana,  sur  l'ordre  de  Marie- 
Anne  d'Autriche,  veuve  de  Philippe  IV,  roi  d'Espagne, 
est  très-voisin  de  la  ville  d'Azpeitia  (Gnipuiooa).  Il  a  la 
figure  d'un  aigle  prêt  à  prendre  son  vol  :  le  corps  est 
fonné  par  l'église,  la  tête  par  le  portail,  les  ailes  par  la 
sainte  maison  où  namiit  è^  Ignace  de  Lovola  et  par  le 
collège  des  Jésuites,  la  queue  par  divers  b&timente  se- 
condaires. Un  magnifique  perron  à  trois  corps  flanqués 
de  balustrades  de  pierre  et  de  lions  de  marbre  donne  accès 
au  portail,  oui  est  lourd  et  peu  digne  de  l'ensemble,  bien 
qne  constant  en  marbres  précieux.  L'église  est  une  ro- 
tonde de  36  met.  de  diamètre,  au  centre  de  laquelle 
s'élèvent  8  grandes  colonnes  supportant  la  coupole;  celle- 
ci,  oui  est  toute  en  pierre,  a  21  met.  de  diamètre,  est 
éclairée  par  8  fenêtres,  et  sa  lanterne  atteint  à  56  met. 
au-dessus  du  sol.  Dans  le  collège,  l'escalier  est  une  œuvre 
remarquable.  La  sainte  maison  n'est  qu'une  tour  de 
l'ancien  manoir  de  Lovola,  construite  en  pierres  brutes 
et  en  briques  fonnant  aes  dessins  :  cdie  est  à  trois  éta^, 
et  c'est  au  troisième  que  se  trouve  la  chambre  du  saint, 
transformée  en  chapelle. 

LUC  (Académie  de  S*-),  Académie  fondée  à  Rome,  à  la 
place  d'une  eonflrérie  de  même  nom  qui  existait  de  temps 
immémorial,  dans  le  but  de  relever  les  beaux-arte.  Giro- 
lamo  Muziano,  peintre,  graveur  et  mosaïste,  surintendant 
des  travaux  du  Vatican,  en  avait  eu  idée  le  premier,  et  le 
papeGrégoireXIlI  publia  un  bref  à  cet  eflist,  lei5  sept.  1577. 
Toutefois,  rentreprise  ne  fût  réalisée  oue  par  le  peintre 
F.  Zuccaro,  en  i593,  en  vertu  d'une  bnlio  de  Sixten^uint. 
L'Académie  de  S'-Luc  existe  encore  aujourd'hui.  Deux 
classes  la  composent  :  l'une ,  qui  est  la  véritable  Acadé- 
mie, compte  dans  son  sein  les  artistes  habiles:  l'autre,  à 
laonelle  est  resté  le  nom  de  confrérie,  admet  des  artistes 
médiocres,  et  même  les  ouvriers  dont  la  profession  relève 
des  beaux-arto.  Puni  les  peintres  français  qui  en  ont 
fait  partie,  on  remarque  Ponssln,  Lebrun,  et  Joseph  Ver- 
net.  —  Une  Sodité  de  S^^Imc  existait  à  Florence  dès  l'an- 
née 1350.  Les  peintres  de  Paris  formèrent  aussi  une  ilco- 
démie  de  S^'-lMe  en  1391.  Charles  VII,  en  confirmant 
iears  stetots  en  1430,  les  exempta  de  toutes  tailles,  snb» 


sides,  guet,  gardes,  etc.  En  1613,  la  conuncnauté  dos 
sculpteurs  se  joignit  à  eux.  On  admit  plus  tard  les  grs- 
veurs  et  les  marbriers.  En  1705,  l'Académie  de  S*-Lw 
obtint  l'autorisation  de  tenir  une  école  publique  de 
dessin  et  de  distribuer  des  prix.  B. 

LUCARNE  (du  latin  lux,  lumière,  ou  lucema,  flam* 
beau  ),  ouverture  de  1  met.  à  1  met.  30  de  large,  prati- 
quée au  toit  d'un  b&timent  pour  éclairer  et  aérer  l'espace 
qui  est  sous  le  comble.  On  distingue  :  la  lucarne  carrée, 
la  lucarne  ronde  ou  bombée,  fermée  en  haut  par  an  arc 
de  cercle  ;  la  lucarne  flamande,  en  maçonnerie,  couron- 
née d'un  fronton  et  portant  sur  l'entablement  ;  la  lucarne 
capucine,  couverte  en  croupe  de  comble  ;  la  lucarne  d^ 
moisdle,  en  charpente,  portée  par  des  chevrons  et  cou- 
verte en  triangle.  —  Dans  les  monuments  civils  de  la 
seconde  moitié  du  xv*  siècle,  les  fenêtres  en  lucarne? 
sont  ordinairement  les  plus  importantes  psr  leurs  di' 
mensions  et  surtout  par  la  richesse  de  leur  ornementa- 
tion. Ces  fenêtres,  placées  à  la  naissance  du  toit,  sont 
souvent  reliées  les  unes  aux  autres  par  une  balustrade 
élégante,  derrière  laquelle  est  ménagé  un  espace  qui  sert 
de  balcon.  Telles  sont,  à  Rouen,  celles  du  Mais  de  Jus- 
tice et  de  l'hôtel  du  Bourgtheroulde. 

LUCERNAIRE  (du  latin  lucema,  flambeau),  nom  em- 
ployé quelquefois  dans  l'Église  latine  comme  synonyme 
de  Vêpres,  parce  que  cette  partie  de  l'office  ne  se  chan- 
tait jadis  que  le  soir  et  aux  lumières.  On  l'a  aussi  appliqué 
simplement  au  répons  qui  précède  l'hvmne  des  vêpres. 

LUETTE  ^Jeu  de  la),  jeu  en  usage  dans  le  bas  Poitou. 
Ce  n'est  pomt,  comme  l'ont  pensé  certains  commeota- 
teurs  de  Rabelais,  le  palet  ou  la  fossette,  mais  un  jeu  de 
csrtes.  On  se  sert  de  cartes  venues  d'Espagne,  et  repré- 
sentant de  tout  autres  figures  que  les  cartes  françaises. 
Le  jeu  comporte  une  foule  de  signes  et  de  grimaces. 

LUMIÈRE,  en  Peinture,  s'entend  de  la  lumière  elle- 
même,  et  de  la  manière  dont  on  la  représente  sur  un 
tableau.  La  lumière  est  dite'princtpais  ou  souveraine, 
ouand  elle  vient  du  haut  et  tombe  d'aplomb  sur  la  partie 
éminente  de  l'objet;  glusante^  si  elle  ne  fait  que  couler 
sur  les  objets:  diminuée  ou  [perdue,  lorsque,  s'éloignant 
du  principe  qui  la  produit,  elle  diminue  d'éclat  et  finit 
par  se  confondre  avec  la  masse  de  l'air  ;  réfléchie ,  si  elle 
rejaillit  d'un  corps  qui  l'avoisine.  L'étude  de  la  décrois- 
sance de  la  lumière  suivant  les  plans  qu'elle  éclaire,  et 
des  modifications  qu'elle  éprouve  en  se  reflétant  ou  en 
traversant  les  corps  transparents  qui  se  trouvent  sur  son 
passa^  constitue  la  science  du  c(atr-o6scur  et  de  la  per^ 
spectwe  aérienne  (  V.  ces  mots). 

LUMINAIRE,  prestetion  usitée  au  moyen  âge,  et  qui 
consistait  à  abandonner  aux  églises  les  cierges  allumés 
autour  du  oercueil  des  morte,  ceux  qne  portaient  les 
fidèles  en  assistent  anx  enterrements,  ceux  des  femmes 
qui  faisaient  leurs  relevailles,  etc.  —  En  Auver^e,  les 
marguilliers  étaient  appelés  luminiérs,  parce  qu'ils  pre* 
naient  soin  de  l'entretien  du  luminaire  de  régliae,c4-d 
des  cierges,  bougies,  lampes,  etc. 

LUNE  (DcMi-).  V.  Dbmi-Liins. 

LUNETTE,  en  termes  de  Construction,  baie  cintrée 
qui  traverse  les  reins  d'une  voûte  en  berceau,  et  par  con- 
séouent  beaucoup  moins  profonde  à  sa  partie  Inférieure 
qu'à  sa  partie  supérieure.  Les  voûtes  (Tarête  sont  ordi- 
nairement formées  par  quatre  lunettes.  —  On  nomme 
encore  lunette  une  petite  ouverture  ménagée  dans  la  flèche 
d'un  clocher  pour  donner  de  l'air  à  la  charpente. 

LDNBTTB,  OU  tenuos  de  Fortification,  ouvrage  avan^, 
formé  de  deux  fisces  présentant  en  dehors  un  angle  sail- 
lant, et  construit  généralement  auprès  des  glacis,  vis-à- 
vis  les  angles  rentrante  du  chemin  couvert.  Il  est  armé 
de  canons  et  défendu  par  des  fossés.  On  donne  encore 
le  nom  de  lunettes  à  des  places  d'armes  retranchées, 
attenantes  à  un  bastion  ou  à  tout  autre  ouvrage . 

LUNETTES.  V.  an  Supplément. 

LUNULE ,  mot  qui,  outre  l'acception  qu'il  avait  chez 
les  Romains  {V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  A 
d^Bistoire)^  désigne  l'espèce  de  boite  ronde ,  en  or  ou  en 
vermeil,  oui  renferme  l'hostie,  et  qu'on  place  dans  le 
centre  de  l'ostensoir. 

LUSACIEN  (Idiome).  V.  Wbidb. 

LUSIADES  (Les),  poème  épique  portugais,  dont  Luii 
de  Camoêns  est  l'auteur.  Le  sujet  est  la  découverte  de 
l'Inde  par  Vaaco  de  Gama.  Le  poème  s'ouvre  par  une  pein- 
ture de  la  flotte  portugaise,  naviguant  le  long  des  côtes 
d'Ethiopie.  Les  dfieux  s'assemblent  dans  l'Olympe  :  car 
le  succès  de  l'entreprise  portugaise  va  décider  du  sort  du 
monde  orientel.  Jupiter  déclare  que  les  Portugais  réussi- 
ront :  les  ordres  du  Destin  leur  promettent  nn  nouvw 


XUT 


im 


LUX 


empire.  Bacchns  combat  la  râsolutipn  du  maître  des 
fféux;  mai^  il  a  contre  loi  Vénus  et  Mars,  qui  exhortent 
Jupiter  à  assurer  rezécntion  des  décrets  de  la  destinée. 
Mercure  est  envoyé  pour  servir  de  ouide  aux  Portugais 
rers  nie  de  Mozambique,  peuplée  ae  Musulmans.  Fte- 
ntnt  les  traits  d*un  vieillard,  Bacchns  soulève  le  fana^ 
tisnie  de  ces  peuples.  Une  bataille  s*engage  t  les  païens 
MDt  battus,  et  la  flotte  victorieuse  continue  sa  route  sous  • 
Is  direction  d*un  pilote  more,  qui  conseille  aux  Porto- 
ph  d'aborder  à  Quiloa.  Tout  y  est  préparé  pour  leur 
mine;  mais,  par  la  protection  de  Vénus,  ils  évitent  le 
piège,  déjouent  de  nouveaux  complots  qo!  les  attendent 
à  Honbaza,  et  arrivent  enfin  à  Mélinde,  où  ils  sont  reços 
par  le  roi  do  p|ays  avec  toutes  les  maïques  de  Thospita- 
nté.  L'admiration  excitée  dans  Tàme  du  chef  arabe  par 
le  courage  audacieux  de  ses  hôtes  prépare  ingénieuse- 
ment le  lecteur  ao  long  épisode  ^i  suit.  L^istoire  du 
Portugal  que  Gama  raconte  au  roi  de  Mélinde  n*est  pas 
Molement  nécessaire  pour  donner  à  ce  noovel  allié  une 
haute  idée  de  la  valeor  des  Portugais  ;  elle  se  lie  nato- 
reUement  à  Tentreprise  même  de  Gama,  et  en  expose  le 
motif.  Dans  œ  récit,  qoi  oocope  les  deox  ders  do  poème, 
M  troave  le  célèbre  et  toochant  épisode  dînes  de  Castro. 
On  rencontre  là  aossi  le  morceao  regiurdé  par  quelques- 
ans  comme  le  plus  beao  des  Lusiades,  rapparition  do 
léant  Adamastor,  au  moment  où  Gama  s*apprète  à  doo- 
Sler  le  cap  de  Bonne-Espérance. 

Plein  d*admiration  pour  la  nation  portugaise,  le  roi 
de  Mélinde  donne  à  Gama  un  pilote  fidèle,  qui  dirige  ses 
niaseaox  à  travers  rOcéan  Indien.  Pendant  la  nuit,  pour 
donner  les  loisin  du  voyage,  les  Portugais  se  racontent 
les  gestes  des  anciens  preux.  Un  Jeone  guerrier,  Velloso, 
rappelle  l'histoire  de  ces  IS  Portugais  qui  allèrent  venger 
dans  Londres  l'injure  faite  à  la  beauté  :  par  sa  teinte 
chevaleresque,  ce  récit  est  Tun  des  plus  caractéristiques 
da  temps  et  de  l'ouvrage.  Mais  de  funestes  présages  font 
préfoir  une  tempête;  rorage  éclate  :  il  est  décrit  avec 
ose  vigueur  digne  de  Virgile.  Protégé  par  VénuA,  Gama 
échappe  aux  foreurs  des  flots,  et  arrive  enfin  aox  bords 
désirés  de  llnde,  dans  Tempire  de  Calicut.  Après  avoir 
bit  alliance  avec  le  samorin,  qui  essaye  vainement  de  le 
retenir,  Gama  met  à  la  voile  pour  revenir  en  Europe. 
Cest  alors  que,  pour  récompenser  le  courage  des  héros 
portugais ,  Vénus  s'apprête  à  les  recevoir  dans  une  lie 
délidease  qui  s'élève  tout  à  coup  du  sein  des  mers.  Rien 
de  plus  grscieax  que  ce  charmant  épisode.  Thétis,  pre- 
nant Gama  par  la  main,  le  conduit  au  sommet  d'une 
montagne  dans  un  palais  d'or  et  de  cristal,  où  l'avenir 
de  n  patrie  lui  est  révélé.  De  là,  les  Portugais  rentrent  à 
Uibonne,  et  le  poème  est  fini. 

Les  buiades  sont  en  10  chants,  et  en  stances  de  8  vers 
de  onze  syltabea,  dont  les  6  premiers  sont  à  rimes  croi- 
léek  Ije  poème  fut  imprimé  à  Lisbonne,  en  1572.  Son 
titre  dgidfle  les  enfants  d$  Lusus,  qui  passait  pour  le 
père  des  Lusitaniens,  andens  habitants  du  Portugal. 

Tout  en  blâmant  Camoèns  d'avoir  introduit  les  divinitée 
mythologiques  dans  un  s^Jet  chrétien,  on  ne  peut  nier 
quH  n'y  ait  de  gnndes  beautés  dans  les  Lusiadst.  Vol- 
taire, qui  ne  savait  pas  le  portugais,  a  fait  de  ce  poème 
heaocoup  de  critiques  très-mauvaises.  Ce  qu'on  pour- 
rait reprocher  au  poète,  c'est  qu'il  se  montre  trop  sou- 
vent historien  ;  qu'il  n'attache  pas  assez  par  l'action  prin- 
cipale, et  manque  quelquefois  de  goût  ;  mais  en  même 
temps,  il  ne  faot  pas  ooblier  qu'il  fut  le  premier  épique 
moderne.  E.  B. 

LUSTRATION.  F.  ce  mot  et  Eau  lustrale  dans  notre 
Pietiofinatre  de  Biographie  et  d^ffistotre. 

UISTRE,  lominidre  à  plosleurs  branches,  destiné  à 
nœroir  des  lampes  oo  des  boogies,  et  qu'on  sospend  à 
on  plafond  oa  à  une  voûte.  H  est  souvent  orné  de  cris- 
taox  taillés  qui  reflètent  la  lumière.  On  se  sert  de  lustres 
^  les  grands  salons,  les  églises  et  les  thé&tres.  Cer- 
tains lustres  d'église  portent  le  nom  de  couronnes  de 
(ststérs  (V.  ce  mot  ).  Aujourd'hui  les  lustres  de  théâtre 
unt  généralement  éclairés  ao  gaz  hydrogène,  et  soovent 
par  des  boogies  simolées,  dont  on  petit  jet  de  gaz  repré- 
lentelaflamme. 

LCTH,  en  latin  leuUu,  lutana*  ancien  instroment 
de  mosiaoe  à  cordes  en  bovao,  qot  fat  à  la  mode  Jos- 

?D*an  miUea  do  xvm*  siècle,  et  qui  vint  des  Arabes 
K.  EooD)  par  l'intermédiaire  des  Mores  d'Espagne.  Il 
dtait  composé  de  quatre  parties  :  la  table^  en  sapin  on 
a  cèdre;  le  corps,  arrondi  en  dessous,  formé  de  neof 
9B  dh  édlaaes  qoi  avaient  l'aspect  de  eètes  de  melon,  et 
appelé  aussi  le  ventre  oo  la  donte;  le  manche,  garni  de 
iMcbes  oo  divisions  comme  oeloi  de  la  goitarei  la  tête 


oo  crosse,  un  pea  renversée,  et  sor  laquelle  étaient  des 
chevilles  qo'on  toomait  poor  monter  les  cordes.  U  y 
avait,  comme  à  la  guitare,  une  rose  au  milieu  de  la  table, 
par  où  sortait  le  son,  et  un  chevalet,  où  étaient  attachées 
les  cordes.  Les  cordes,  d'abord  ao  nombre  de  6,  furent 
portées  à  10, 12,  et  même  34.  Pour  Jouer  du  luUi ,  on 
pinçait  les  cordes  de  la  main  droite,  en  appuyant  de  la 

Saoche  sor  les  touches.  Les  luths  de  Bologne  et  de  Pa- 
oue  étaient  les  plus  estimés  pour  la  qualité  du  bois,  qui 
produisait  les  plus  beaux  sons.  Le  plus  anden  fabricant 
de  luths  dont  on  ait  gardé  le  souvenir  est  Jean  Ott,  de 
Nuremberg,  qui  vivait  au  milieu  du  xvi«  siècle.  Les  exé- 
cutants étaient  dits  luthériens,  et  parmi  eux  on  distingua 
Jacques  Mauduit,  Jacques  et  Charles  Hedington,  Bérard, 
Julien  Perrichon,  Hémon,  Blancrocher,  les  deux  Gau- 
thier. D  existe  une  Méthode  de  tuth  par  Basset,  insérée 
dans  le  Traité  des  instruments  à  cordesy  du  P.  Mersenne, 
et  un  Trcùté  théorique ,  historique  et  pratique  du  lu^ 
par  Baron,  Nuremberg,  1727.  —  La  pandore^  la  man-^ 
dore ,  la  mandoline ,  le  calascione ,  le  téorbe,  Yarchir 
luth  [V.  ces  mots)^  étaient  des  instruments  de  l'espèce 
du  luth.  De  cet  instrument  on  n'a  retenu  que  le  nom, 
qui  figure  toi^ours  dans  la  poésie.  B. 

LUTHÉRANISME.  V,  Luther,  LuTHâmms,  Conpes- 
sioif  d'Adgsbodrg,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie  et  d'Histoire, 

LITTHIERS,  fabricants  de  Inths,  et,  par  extension, 
d'instruments  à  cordes  en  général.  II  y  eutantrefois  deux 
écoles  célèbres  de  lotherie  :  celle  de  Crémone,  qoi  a  pro- 
duit Maggini,  Amati,  Stradivarios,  Goam^us,  Gufr- 
dagnini,  etc.;  et  l'école  allemande,  représentée  par  Stei- 
ner,  Clotz  père  et  fils,  etc.  L'école  française  ne  date  que 
du  xvui*  siècle,  et  compte  Pic,  Lupot,  Koliker,  Thîbout, 
Gand,  Feinte,  Villaume,  Chanot,  Boquet.  Basset,  etc. 

LUTRIN,  anciennement  lectrin  (du  bas  latin  lectri- 
num,  dérivé  de  légère,  lire),  meuble  de  chceur  d'une 
église,  dont  la  forme  la  plus  générale  est  celle  d'un  globe 
soutenant  on  aigle  aox  ailes  déployées  (V.  Aigle),  et  qoi 
sert  à  soutenir,  soit  le  livre  des  Épltres,  soit  le  Graduel 
et  l'Antiphonaire  not^.  Le  lutrin  de  l'église  de  Hal,  près 
de  Bruxelles,  date  du  xv«  siècle  ;  il  est  formé  d'un  pied- 
droit  hexagonal ,  flanqué  de  trois  contre-forts  doubles 
soutenus  par  des  lions  et  surmontés  de  statuettes  d'an- 
ges. On  cite  encore  les  lutrins  des  cathédrales  d'Albi  el 
(l'Amiens,  de  Tirlemont,  de  Louvain,  de  Norwich.  Le  lu- 
trin fût  quelquefois  appelé  roue,  et  en  latin  plulteus  ver» 
satilis,  parce  qu'il  tourne  sur  lui-même. 

LCTRm  (Le),  poème  héroï-comique  de  Boileau,  en  six 
chants,  dont  les  quatre  premien  parurent  de  1671  à 
1074,  et  les  deux  autres  en  1683.  L'auteur  le  composa 
poor  répondre  ao  défi  d'un  grave  magistrat,  M.  de  La- 
moignon,  et  sur  one  querelle  qui  venait  de  diviser  les 
chanoines  de  ïbl  S^'-Chapelle  de  l^s.  A  one  époqoe  où  la 
poésie  burlesque  dégradait  les  héros  et  avilissait  de 
grands  sujets  par  des  formes  triviales,  il  voulut  ennoblir 
une  action  commune,  et  mettre  en  Jeu,  au  milieu  des 
solennelles  fictions  de  l'épopée,  des  personnages  vulgslres 
et  ridicoles.  Plos  poète  et  plos  artiste  qoe  dans  aocone 
aotre  de  ses  œovres,  il  a  produit  une  fantaisie  tout  à  la 
fois  brillante  et  correcte,  où  le  mouvement  et  la  couleur 
s'unissent  to^joun  à  la  rigoureuse  perfection  du  travail. 
Gr&ce  à  une  profonde  connaissance  des  modèles  antiques, 
Boileau  a  pu  faire  un  heureux  emploi  dn  merveilleux  et 
des  machines  de  l'épopée  ;  la  Discorde  et  la  Renommée 
ne  sont  pas,  dans  son  spirituel  badlnage,  de  froides  allé- 
gories, mais  des  personnages  agissants,  et  la  Mollesse, 
plus  encore  la  Chicane,  sont  des  créations  véritablement 
poétiques.  Partout  les  caractères  sont  tracés  et  soutenus 
de  main  de  maître,  et  les  mosun  observées  avec  une  fidé- 
lité qui  ne  se  dément  Jamais.  Toutefois,  le  5*  chant,  tout 
en  pudsant  encore  par  l'élégance  do  style,  est  plein  de 
détails  peu  variés  et  trop  épisodiques  ;  le  perroqmer  et  st 
femme,  qoi  tiennent  tant  de  place  dans  les  commence- 
ments do  poème,  disparaissent  toot  à  eoop  ven  la  fin; 
le  dénoûment  enfin  est  annoncé  soos  forme  de  prétéri- 
tlon,  et  l'on  volt  paraître  ao  6*  chant  plosieon  person- 
nsges  d'one  gravité  disparate  (la  Piété,  rnémis,  Ariste), 
destinés  sans  doote  à  montrer  les  véritables  sentiments 
do  poète,  et  à  réprimer  le  xèle  des  gens  qoi  eussent  vo- 
lontiera  transformé  en  grossière  inconvenance  oo  en  ou- 
trage  impie  un  ingénleox  délassement  de  l'esprit. 

LUTTE.       i  F.  ce  mot  dans  notre  Dictumnaire  dé 

LUTTEUR.  )      Biographie  et  d^Btstoire. 

LUXE ,  tonte  dépense  excessive  et  soperfloe.  Où  com- 
mencent l'excès  et  hi  snperfloité?  Évidemment  11  y  a  au- 
tant de  degrés  dans  l'appréciation  qu'il  y  eo  a  entre  les 


Lnx 


1184 


LYC 


dUMfBBtM  dviHntionB  ot  entre  les  oondHioM  dlTen^s 
det  penonnes  dans  une  même  sodétô.  Un  sauTage  qai 
donne  une  partie  de  aa  chaïae,  destinée  à  sa  noorritare^ 
poor  avoir  un  petit  miroir  qu'il  inapendra  dans  aa  hutte, 
fait  une  dépense  de  luxe  :  un  liomme  civilisé  oui,  même 
dans  une  très-modeste  fortune,  a  plusieurs  glaoes  dans 
son  appartement,  n'est  pas  aoàisé  pour  cela  de  recher- 
clier  le  luxe.  Porter  un  chapeau  est  pour  une  paysanne 
un  luxe,  et  souvent  un  luxe  prétentieux  et  ridicule  :  une 
femme  de  la  ville  a  plusieurs  chapeaux  sans  que  per- 
sonne trouve  sa  dépense  excessive.  Ia  plupart  des  objets 
qui  font  maintenant  partie  de  notre  ameublement,  ou 
qui  sont  entrés  dans  les  habitudes  Journalières  de  la  vie, 
ont  oonmienoé  par  être  regardés  comme  un  luxe  quand 
ils  ont  été  inventée  ou  mis  en  usage  :  il  fût  un  temps  où 
c'était  un  luxe  que  de  porter  une  chemise  ;  l'usage  de  la 
bougie  et  plus  anciennement  de  la  chanddle  était  un 
Inxe.  n  n'y  a  donc  rien  de  fixe  à  cet  égard  ;  et,  quand 
on  se  plaint  des  progrès  du  luxe,  il  faut  distinguer  net- 
tement ce  qu'on  pouirait  appeler  le  luase  légitimé  du  luxe 


Le  luxe  légitime  consiste  dans  les  progrès  du  bien- 
être,  dans  ramélioradon  des  conditions  de  la  vie  maté- 
rielle et  même  de  la  vie  intellectuelle.  Ce  genre  de  luxe 
est  un  bien.  Si  les  simples  ouvriers  vivent  ai^ourd'hui, 
sous  certains  rapports,  d'une  manière  plus  confortable 
que  les  seigneurs  ne  vivaient  il  v  a  cinq  cents  ans,  s'ils 
portent  sur  le  corps  des  étoffes  plus  moelleuses  et  mieux 
tissues,  sils  achètent  des  vêtements  neufs  plus  souvent 

3u'un  chevalier  du  moyen  âge,  s'ils  ont  de  la  porcelaine, 
es  lampes  à  double  courant  d'air,  et  mille  autres  pe- 
tites commodités  qui  sont  aujourd'hui  d'un  usaoe  ordi- 
naire et  qui  étaient,  11  y  a  quelques  centaines  d'wmées, 
des  merveilles  inconnues  au  luxe  le  plus  raffiné ,  tant 
mieux;  c'est  une  preuve  que  l'industrie  a  fait  des  pro- 
grès, et  que  la  société  entière  en  a  profité.  Tant  qu'on 
se  contente  de  dépenser  son  revenu  pour  se  procurer  des 
louissanoes  honnêtes,  quelque  modeste  ou  quelque  élevé 
que  soit  ce  revenu,  on  fait  de  son  argent  un  usage  lé- 
gitime. 

Le  luxe  ruineux  est  celui  qui  consomme  non-een]»> 
ment  les  revenus,  mais  les  capitaux  :  un  particulier  qui^ 
par  ostentation,  aliène  une  partie  de  son  fonds  pour  sa- 
tisfaire à  ses  ^laiairs  ou  à  sa  vanité,  a  un  luxe  niinenx  ; 
nn  Jour  doit  venir,  sil  continue  à  mener  le  même  train 
de  vis,  où  sa  fortune  tout  entière  sen  dissipée  ;  c'est  un 
grand  dommage  pour  lui,  c'en  est  un  aussi  pour  la  so- 
ciété. On  slmagine  que  l'argent  psssant  d'une  main  à 
une  autre,  il  y  a  simplement  déplacement  de  richesse, 
sans  perte  réelle,  et  que  l'honmie  ruiné  a  seul  le  droit 
de  se  plaindre  I  c'est  une  erreur  :  s'il  possédait  un  mil- 
lion, ce  million  ftdsait  partie  du  capital  social;  qu'est-il 
devenu?  il  a  été  réparti  entre  une  foule  de  personnes 
qui,  leoevant  cet  argent  comme  un  revenu,  l'ont  con- 
sommé en  grande  partie  improductivement,  c-à-d.  en 
dépenses  qui  ne  laissent  rien  après  elles,  au  lieu  de  le 
conserver  à  l'état  de  capital  ;  et,  du  million  qui  enrichis- 
sait hi  société,  il  ne  reste  plus,  après  )a  ruine  du  pro- 
digue, que  200,000  ou  300,000  francs  qui,  placés  d'une 
manière  reproductive,  constituent  encore  une  richesse 
applicable  a  l'industrie  et  produisant  intérêt.  Les  États 
peuvent,  aussi  bien  que  les  particuliers,  se  rendre  cou- 
pables de  ce  genre  de  luxe,  qui  est  funeste  parce  qull 
appauvrit  la  société.  V,  J.  Pinte,  Essai  sur  le  luxe,  Am- 
sterdam, 1703,  in^2;  Saint-Lambert,  Essai  sur  le  luxe, 
i704,in-iS;  Butel-Dumont,  Théorie  du  luxe,  1771,  j 
8vol.in-8*;  Butini,  Traité  sur  le  luxe,  Genève,  1774,  ; 
in-12;  l'abbé  Pluquet,  Traité  philosophique  et  politique 
sur  le  luxe,  1780,  2  vol.  in-12.  L. 

LUXEMBOURG  (Palais  du).  (  V.notx»  Dictionnaire  de 
LuxBMSooao  (Petit).  )     Biogr,  et  d'Btstoire, 

LDXBMBOuiia  (Musée  du),  situé  à  Paris,  dans  le  palais 
de  ce  nom.  H  y  occupe  une  partie  des  silos  du  nord  et 
du  sud ,  et  les  deux  pavillons  extrêmes  de  la  façade  de 
'est,  sur  la  rue  de  Toumon.  Ce  musée,  originairement 
coniposé  des  tableaux  de  Rubens  représentant  l'histoire 
de  Henri  IV  et  de  Marie  de  Médicis,  de  la  Vie  de  S*  Bruno 
par  Lesueur,  et  la  suite  des  ports  de  France  par  Joseph 
Vemet  et  Hue,  qui  ont  été  réunis  au  musée  du  Louvre  en 
1818,  est  destiné  à  recevoir  les  chefs-d'œuvre  des  peintres 
et  des  sculpteun  vivants.  Il  contient  environ  160  ta- 
bleaux, 40  œuvres  de  sculpture,  9  cartons  de  dessins, 
quelques  gravures  et  lithographies.  Ces  œuvres  doivent 
rester  au  Luxembourg  dix  ans  encore  apri^^  la  mort  de 
iBurs  auteurs,  en  attendant  qu'on  fasse  un  choix  parmi 
lies  pour  en  doter  le  Louvre. 


LYCÉE,  un  des  gymnases  de  l'andenne  Athènes,  Mr 
les  bords  de  l'Ilissus,  aussi  fréquenté  que  le  Cynoesige 
et  l'Académie.  Il  tirait  son  nom  de  Lycus,  fils  de  Pan- 
dion,  et  était  consacré  à  Apollon,  qui  en  reçut  le  surnom 
de  Lycien.  On  y  trouvait  des  cours  entourées  de  porti- 
ques, des  salles  o&  les  philosophes  et  les  rhéteun  réu* 
ninaient  leun  disciples,  des  pièces  réservées  pour  k» 
bains,  des  terrains  préparés  pour  la  lutte,  un  stade  pour 
la  course,  des  Jardins  et  de  beaux  ombnuÉes  de  platanes. 
Cest  là  qu'Aristote  enseigna  sa  philosophie,  appelée  poor 
cette  raison  péripat^ieienne  (c.-à-d.  qu'on  expliaue  sa 
se  promenasU).  Les  murs  du  I^cée  éûdent  enrichis  ds 
peintures. 

LTCÉB ,  nom  donné  en  France  aux  établissements  pn- 
blics  d'instruction  secondaire  oui  appartiennent  à  l'État, 
par  opposition  aux  Collèges,  qui  sont  entretenus  aux  frais 
des  villes.  De  1815  à  1848,  on  les  appela  Collèges  royaux, 
pour  les  distinguer  des  Collèges  communaux.  Avant 
1848,  on  distinguait  trois  classes  de  Collèges  royaux, 
dans  lesquelles  les  traitements  des  membres  du  person* 
nel  différaient  :  ai^ourd'hui  les  Lycées  sont  tous  do 
même  ordre,  à  l'exception  des  Lycées  de  Paris  (Louis- 
le^rend,  Charlemagne,  S*-Louis,  Napoléon,  et  Bona- 
parte) et  du  Lycée  de  Versailles;  on  ne  les  distiague  que 
par  le  prix  de  la  pension  et  de  l'externat,  et  les  ooembres 
du  personnel,  distribués  en  trois  classes  pour  le  trai- 
tement, peuvent  franchir  sur  plsce  tous  les  degrés. 
L'État  entretient  dans  chaque  Lycée  un  certain  nombre 
de  boursiers,  et  pourvoit,  si  cela  est  nécessaire,  à  l'in- 
sufBsanco  du  revenu  par  le  moyen  d'une  subvention  : 
les  départemonu  et  les  villes  fournissent  aussi  quel- 
ques nourses.  La  direction  d'un  Lycée  est  confiée  à 
un  proviseur,  assisté  d'un  censeur  des  études,  d'un 
aum&nier  et  d'un  économe,  logés  dans  l'établissement; 
l'enseignement  est  donné  par  des  professeurs  en  titre, 
par  des  chargés  de  cours,  et  par  des  maitres  (msltres 
élémentaires,  maîtres  de  dessin,  d'écriture,  etc.);  ea 
dehore  des  classes  faites  par  ces  fonctionnaires,  les 
élèves  internes  sont  surveillés  et  dirigés  par  des 
maîtres  répétiteurs  et  des  aspirants  répétiteurs  (pré- 
cédemment sppelés  maîtres  d'éhtdes)^  au-dessus  des- 
quels est  un  surveillant  général,  tous  logés  et  nourris 
au  Lvcée.  Les  divers  fonctionnaires  sont  nommés  psr 
le  ministre  de  linstmction  publique,  et  révocables 
par  lui  :  avant  1848,  les  professeun  titulaires  étaient 
inamovibles,  à  moins  d'un  jugement  du  Conseil  rpysl 
de  linstmction  pubUque.  L'enseignement  des  Ly- 
cées comprend  :  1"  une  division  élémentaire,  formée 
des  classes  de  huitième  et  do  septième,  ei  presque 
toqjoun  précédée  d'une  classe  préparetoirei  2*  une 
division  ne  grammaire,  formée  des  années  oa  classes 
de  sixième,  de  cinquième,  de  quatrième»  après  les- 
quelles les  élèves  subissent  un  examen  qui  décide  s'ils 
sont  admis  à  ponreuivre  leurs  études;  3*  une  division 
supérieure,  formée  des  classes  de  troisième,  de  seconde, 
de  rhétorique,  et  de  philosophie  pour  les  élèves  qui 
se  destinent  au  baccalauréat  es  lettres^  et  de  deux 
années  de  mathématiques  pour  ceux  qui  tendent  sn 
baccalauréat  es  sdenres  on  qui  se  dirigent  ven  le» 
écoles  du  gouvernement  (école  navale,  école  fores- 
tière, école  centrale  des  arts  et  manufactures,  école 
Saint-Cyr).  Les  plus  importants  Lycées  ont  une  sntre 
année  d'enseignement  scientifique,  la  classe  de  nur 
thématiques  spéciales  ou  supérieures,  destinée  à  la 
prépantion  aux  Écoles  Normale,  Polytechnique,  etc. 
k  côté  de  cet  Enseignement  classique,  il  existe  un 
Enseignement  spécial,  divisé  en  quatre  années,  et 
dans  lequel  les  élèves ,  ne  fSûsant  ni  grec  ni  latin, 
étudient  le  fhtnçais,  la  littérature,  la  morale,  les  él^ 
ments  de  l'économie  politique  et  du  droit,  les  sdences 
mathématiques,  phvsiques  et  naturelles.  L*enaeigne- 
ment  classique  est  non  né  psr  les  professeun  aui  ont 
subi  les  épreuves  de  l'une  des  agrégations  des  lycées, 
ou  par  ceux  qui  ont  tout  au  moins  le  titre  de  licencié 
es  lettres  ou  de  licencié  es  sciences.  L'enseignemen» 
spécial  a  ses  professeun  agrégés  spéciaux;  à  leur 
défaut,  il  est  donné  par  des  maîtres  de  l'enseigne- 
ment classique.  Enfin,  chaque  diridon  des  Lycées  re- 
çoit un  enseignement  reli^eux,  dont  le  programme 
est  approuvé  par  l'évêque  diocésain;  pour  cet  en- 
seignement, les  élèves  protestants  relèvent  de  leur 
pasteur.  B. 

LYCIENNES  (Antiquités).  Les  vovageure  du  xix*  siècle 
ont  découvert,  dans  Tancienne  Lycfe  (Asie  Mineure),  un 
certain  nombre  do  constructions  tumulaires,  que  les  uns 
ont  rog^rdéfts  comiDe  des  œuvres  indigèneiH  ki  antres 


LYD 


il  85 


LYO 


MUDA  roa^nge  de  colons  étrangers.  Ce  sont  des  mona- 
MDts  tsillés  dans  le  roc  :  le  style  des  scalptures  et  le 
caractère  des  sujets  représentés  sur  les  parois  rappellent 
Péeole  des  srtisCes  de  la  Perse,  légèrement  modifiée  pent- 
tin  psr  l'influence  de  l'art  grec  Ces  monuments  ont 
urtout  exdté  l'attention  à  cause  des  inscriptions  qui  y 
notgnTées.  Un  anglais,  Cockerell,  fut  le  premier  qui  en 
Gopis  plusieurs,  mais  d'une  manière  imparfaite.  Plus 
tard,  DsTid  Ross,  Charles  Fellows,  Daniell,  Forbes  et 
Spnûtt,  Toyageurs  de  la  même  nation,  en  relevèrent  d'au- 
tns  à  Antiphellus,  à  Xantbe,  à  Limyra,  à  Myra,  etc. 
()nelqiies  inscriptions  sont  bilingues,  et  présentent  des 
cusctères  phéniciens,  grecs  ou  latins.  Juxtaposés  aux 
caractères  d^une  autre  langue  dont  il  n'y  a  de  traces  nulle 
piit  ailleors  ;  mais  la  comparaison  des  textes  est  souvent 
IN»  utilité,  parce  qu'ils  ne  correspondent  cas  toulours 
)m  nos  aux  autres  ;  les  différents  peuples  qui  occupèrent 
la  Lyde  se  seront  servis,  pour  la  sépulture  de  leurs 
iBorts  ou  pour  d'autres  usages,  des  monuments  taillés 
par  ceux  auxquels  ils  avuent  succédé,  et  auront  laissé 
soboster  les  inscriptions  primitives,  qui  ne  leur  étaient 
poit-êlre  pas  intelli^les,  à  cMé  de  cellea  qu'ils  tra- 
çaient eux-mêmes.  Outre  les  monuments  funéraires,  on 
a  trouvé  des  médailles  en  Lyde  :  les  unes,  qui  ont  pour 
emblème  ordinaire  une  Ivre,  et  dont  les  l^^ndes  sont 
grecques,  appartiennent  à  l'époque  des  Sélenddes;  les 
lotres,  plus  anciennes,  reproduisent  les  caractères  ly- 
oeos  dtt  inscriptions  lapidaires ,  et  portent  presque 
tontes  on  emblème  appelé  par  les  antiquaires  trtquêtra , 
flC  diDs  lequel  on  a  youlu  voir,  tantôt  un  trépied,  tantôt 
on  dochet  ou  grappbi,  ou  encore  ouelque  chose  d'ana- 
logoeanx  trois  jambes  d'hommes  figurées  sur  certaines 
médailles  de  Selge  en  PIsidie. 

.  Quelle  est  donc  cette  langue  lycienne  révélée  an  monde 
sBfam  par  les  inscriptions  et  les  médailles?  Dans  l'état 
actuel  des  étades,  les  linguistes  la  rattachent  générale- 
ment à  la  famille  des  langues  indo-européennes  (F.  ce 
mat).  Ainsi,  Spratt  et  Forbe»  pensent  que  la  Lyde  fut 
dépoiplée  par  l'invasion  des  Perses,  et  que  l'idiome  ly- 
dà  psrvenu  jusqu'à  nous  fut  employé,  non  par  les  an- 
cieiis  indigènes,  mais  par  les  conquérants  t  si  l'alphabet 
employé  pour  écrire  cet  idiome  ne  présente  pas  le  ^ype 
penao,  c'est  qu'aucun  des  alphabets  persans  dont  nous 
vnm  connaissance  ne  remonte  à  cette  époque,  et  que 
lea  Perses,  Toolant  écrire  en  Lycie  les  sons  de  leur 
laijpie,  recoururent,  en  le  modifiant,  an  système  gra- 
phique des  hommes  avec  lesquels  ils  se  trouvaient  mis 
nooreDement  en  rapport  Grotefend  a  été  amené  aussi , 
par  la  comparaison  de  plusieurs  inscriptions,  à  Juger  que 
Il  langue  dans  laquelle  elles  étaient  écrites,  devsit,  en 
labon  surtout  du  nombre  et  de  la  nature  de  ses  voyelles, 
•ppartenir  à  la  fiunille  indo-européenne.  Sharpe  a  re- 
marqué que  ces  v<»yelles  correspéndent  presque  exacte- 
ment à  celles  de  Tandon  persan  ;  que  la  lansue  à  laquelle 
tppartiennent  les  noms  inscrits  sur  les  tonibes  lydennes 
nimnble  plus  qu'aucune  autre  au  zend  ;  qu'elle  a  même 
des  mots  plus  voiains  encore  du  sanscrit  que  du  lend; 
^  sa  structure,  et  en  particulier  la  déclinaison  des 
son»  et  des  pronoms,  est  essentiellement  indo-euro- 
péenne; que  non-seulement  l'alphabet  lyden  a  pour 
nie  la  plupart  des  lettres  de  l'alphabet  grec  primitif, 
nuls  sossi  que  la  conjugaison  ofiîre  les  particularités  de 
Tiogment  et  du  redoublement,  ainsi  que  les  flexions  de 
tempe  qui  caractérisent  le  grec;  ou'enfln  il  existe  une 
nmiemblance  particulière  entre  récriture  lydenne  et 
Pétnmqoe.  Qjjant  aux  radnes  sémitiques  qui  se  trouvent 
dans  le  lyden ,  outre  qu'elles  ont  revêtu  des  flexions 
ttraogères  à  leur  nature,  et  qu'elles  sont  sans  eompa^ 
ainn  beaucoup  moins  nombreuses  que  dans  le  pehlvi 
^  eit  une  langue  indo-européenne,  leur  présence  s*ex« 
pljqne  psr  le  voisinaipe  de  la  Syrie.  F.  Saint-Martin, 
Omnutiofu  itir  les  rnscripUons  lycimnes  découoertei 
por  if.  CocKerell  (dans  le  Journal  des  Savants,  avril 
Ifôl);  Fellows,  Excwsions  en  Asie-Mineure,  en  anglais, 
Lonoéa,  1839;  le  même.  Essais  de  découvertes  en  Ly» 
cû,  1840,  et  Voyages  et  Recherches  en  Asie-Mineurp , 
iSSS;  Texier,  Description  de  V Asie-Mineure,  1838  ;  Gro- 
tefend, Sur  Vécriture  et  la  langue  lyciennes ,  en  allem., 
dans  le  Jotimoi  des  études  orientales,  Bonn,  1842,  in-8<»; 
Spntt  et  Forbea,  Voyages  en  LyciCy  Londres,  1847, 2  voL 
ii-8*,  en  anslais. 

LYDIEN  (Art).  Les  débuts  des  peuples  de  l'Asie 
Mioeore  dans  l'art  de  l'architecture,  avant  l'arrivée  des 
colooiea  grecques,  na  nous  sont  c(mnus  que  par  des  mo- 
numents fonérairest  notamment  par  ceux  qui  furent 
érigea  à  la  mèmoiie  des  voii  lydleDs.  Ils  consistaient 


en  Umwli  d'une  grande  hauteur,  soutenus  à  leur 
par  une  maçonnerie  grossière  de  pierres  irr^ulières  :  o« 
bien  c'étaient  des  grottes  taillées  dans  le  roc,  et  oflhmt 
en  façade  une  porte  assez  régulière.  Des  inscriptions  en 
langue  lydienne  qu'on  y  a  trouTées  ne  sont  pas  asses 
nombreuses  pour  qu'on  ait  pu  essayer  avec  succès  de  les 
déchiflter.  Si  les  peuples  de  l'Asie  Mineure  paraissent 
avoir  été  peu  avancés  dans  l'art  architectural,  en  revan- 
che ils  semblent  avoir  eu  de  l'habileté  dans  celui  de  tra- 
vailler les  métaux,  de  teindre  les  étoflies;  Aristote,  nous  dit 
Pline,  rapportait  la  découverte  de  la  fonte  et  de  l'alliage  de 
l'airain  à  Scythes  le  Lvdien  ;  Platon  parle  d'un  cheval  de 
bronze  trouvé  par  Gy«s  dans  les  entrailles  de  la  terre  ;  les 
Lvdiens,  selon  Hérodote,  furent  les  premiers  qui  frap- 
pèrent de  la  monnaie  d'or  et  d'arsent.  On  connaît  le 
§oût  des  Lydiens  pour  la  musique,  et  les  découvertes  qu'ils 
rent  dans  cet  art.  Ils  passaient  notamment  pour  les 
inventeurs  de  la  magade  et  de  la  pectis  (  K.  ces  mots)\ 
Etienne  de  Byzance  leur  attribue  aussi  la  dthare  à  trois 
cordes. 

LYDiin  (Mode),  un  des  modes  de  la  mudque  des  andens 
Grecs,  placé  entre  l'éolien  et  l'hypcrdorien.  On  l'appe- 
lait quelquefois  mode  barbare,  parce  qu'il  portait  le  nom 
d*un  peuple  asiatique. 

LYON  (ÉgUse  S^hIban,  à).  Cette  église  métropolitaine, 
située  sur  la  rive  droite  de  la  Saône,  au  pied  du  coteau  de 
Fourrières,  et  sur  l'emplacement  d'un  ancien  baptistère^ 
réunit  plusieurs  styles  architectoniques.  La  grande  nef, 
remarquable  par  la  pureté  et  l'élégance  des  lignes,  appar* 
tient  à  l'architecture  ogivale  du  xiv*  et  du  xv*  siècle.  Le 
chcBur,  plus  anden,  réunit,  dans  ses  arcades  et  dans  les 
ouvertures  de  la  psjrtie  supérieure,  les  pleins  dntres  et 
les  osives,  ce  qui  est  le  caractère  du  xn*  siède,  &ge  de 
tranution.  Le  plan  général  de  l'édifice  sindine  Ters  la 
gauche  (F.  Ax«.  La  cathédrale  de  Lyon  a  79  met*  de  lo&« 
gueor,  3fi",60  de  largeur,  et  33™,30  de  hauteur  sous  yo4> 
tes.  Quatre  tours,  dont  deux  à  hi  façade  et  deux  sur  les  bras 
des  transepts,  la  surmontent  :  andennes  par  la  base,  leur 
sommet  ne  date  que  de  la  fin  du  xv*  siède;  elles  n'en 
pas  reçu  toute  l'élévation  projetée,  et  se  terminent  brus, 
quement  en  plate-forme.  L'art  du  xv*  siède  a  répandu 
le  luxe  de  sa  décoration  savante  sur  les  trois  portes  de 
la  façade,  que  surmontent  des  frontons  aigus,  éridés  à 
Jour  :  au-dessus  de  ces  portes,  dont  une  galerie  la  sépare, 
se  développe  une  magnifique  rose,  entre  deux  fenêtres 
simulées,  et  le  tout  est  dominé  par  un  fronton  central. 
A  l'intârieur,  le  monument  offre  un  genre  de  décoration 

Sii  ne  se  retrouve  qu'à  l'andenne  cathédrale  de  S^Man- 
ce,  à  Vienne  s  ce  sont  trois  frises  en  marbre  incrusté  de 
dment  rouge,  qui,  à  différentes  hauteurs,  ceignent  le 
chour.  On  voit  dans  le  sanctuaire  de  très-belles  boiseries 
sculptées,  provenant  de  l'abbaye  de  Cluny.  Parmi  les 
chapelles  latérales,  on  distingue  celle  que  firent  con- 
struire le  cardinal  de  Bourbon  et  son  frère  Pierre  de . 
Bourbon,  gendre  de  Louis  XI  ;  elle  est  en  style  Renais- 
sance, et  a  une  charmante  balustrade,  où  l'on  voit  le  nom 
de  son  fondateur  combiné  avec  des  feuillages.  Quelques 
uns  des  ritraux  peints  sont  bien  conservés.  La  cathédrals 
de  Lyon  contient  une  horloge  astronomique,  construite 
en  iSl&è  psr  Nie.  Uppius  de  Bàle,  rétablie  et  augmentée 
en  1660  par  Guill.  Nourrisson,  et  en  1780  par  Ghamy. 

LYON  (Église  S^Martin-d'Ainat,  à),  monument  de  style 
romsno-byiantin,  l'un  des  plus  complets  des  x*  et  si*  né» 
clés,  mais  souvent  remanié  et  agrandi.  Cette  église  occupe 
l'emplacement  d'un  temple  que  60  nations  des  Gaules 
dédièrent  à  la  déesse  Rome  et  à  l'empereur  Auguste.  La 
façade  a  un  cordon  de  losanges  incrustés  en  couleur 
rouge.  Les  deux  premiers  étages  du  docher  sont  percés 
de  fenêtres  en  plein  dntre,  toutes  d'un  style  différent;  le 
3*,  de  construction  postérieure,  se  compose  d'une  py- 
ramide que  flanquent  quatre  cornes  sépulcrales  d'm 
asses  mauvais  goût.  Un  élégant  vestibule,  placé  au  centre 
de  la  façade,  et  ouvrant  sur  le  parris  par  une  porte 

S;ivale  du  xin*  siècle,  donne  entrée  dans  l'église.  L^exté- 
eur  de  Tabside  présente  un  appareil  varié,  composé  de 
pierres  taillées  en  losanoes,  en  carrés,  etc.,  dont  la  forme 
se  desdne  au  moyen  d'incrustations  semblables  à  celles 
de  la  façade.  L'intérieur  de  l'église  d'Ainay,  que  des  sr- 
chéologues  pensent  avoir  été  primitivement  en  forme  da 
croix  latine,  offre  a^iourd*hui  l'aspect  d'une  badliqne. 
Quatre  colonnes  de  granit,  qui  supportent  la  coupole,  re- 
montent à  l'épocnie  romaine;  elles  avaient  des  chapi- 
teaux antiques  de  bronze,  qui  ont  été  remplacés  au 
moyen  âge  par  de  mauvaises  copies  en  pierre  calcaire. 
Les  trois  chapelles  absidales  sont  ornées  de  peintures  s«r 
Ibnd  d'or  par  M.  Flaodrin.  On  remarque  dans  la  chapelle 

75 


1 


LYR 


118« 


LTR 


4t  la  Vief^o  un  confessionnal  en  style  l^zantin ,  ehef- 
d'csnvre  de  menuiserie  et  de  sculpture.  Le  |>srris  et  le 
OMfchepied  du  maître -autel  sont  formés  par  de  belles 
OMsalques,  ouvraoB  de  MM.  Morst  firères. 

LTOR  (Église  S^-Niznm,  à).  Cette  église,  de  style  ogital, 
construite  au-dessus  d*une  crypte  où  S^  Pothin  oélé- 
Iwait  les  mvstères,  appartient  à  la  première  moitié  du 
lY*  siècle.  Un  portail  en  etirle  Renaissance  fut  ajouté,  de 
1530  à  f  540,  par  Philibert  Delorme;  de  nos  Jours  on  en  a 
transformé  le  fronton  en  pignon  aigu,  et  le  milieu  a  reçu 
une  statue  de  la  Vierge  par  M.  Bonnassienx,  des  statues 
de  S**  Anne,  de  S^  Joachim,  et  de  S*  Nizier  par  M.  Fa- 
bisch.  On  a  aussi  terminé  récemment  le  côté  méridional 
4e  la  façade,  en  élerant  une  tour  surmontée  d*une  flèche 
gothique.  L'intérieur  de  l'église,  en  forme  de  croix  latine, 
mesure  74  met.  de  longueur,  38  de  largeur  et  30  de  hauteur. 
La  nef  centrale  est  séparée  des  collatéraux  par  six  piliers 
de  chaque  cAté,  avec  chapiteaux  à  feuillages  entremêlés 
d'animaux.  Une  belle  galerie  règne  au-dessus  des  arcades 
et  fait  le  tour  de  l'édifice.  La  grande  TOûte  est  remar^ 
qoable  par  hi  hardiesse  de  son  trait  surbaissé  et  par  le 
ttpricieux  entrelacement  de  ses  nervures  :  des  écussons 
coloriés  lui  donnent  une  grande  richesse.  Le  maltre-autel, 
en  marbre  blanc  de  Carrare,  et  en  style  gothique,  a  été 
senlpté  par  Blandin,  d'après  les  dessms  de  l'architecte 
FH^lleL  La  chapelle  de  hi  Vierge  contient  une  statue  par 
Antoine  Coysevox. 

LYON  (Hètel  de  Ville  de).  Ce  monument,  construit  de 
1640  à  1655,  par  Simon  Maupin,  architecte  lyonnais,  dé- 
fasté  par  un  incendie  en  1074,  réparé  en  1702  par  Blan- 
lard,  qui  le  f^  en  voulant  l'embellir,  a  été  récemment 
restauré  par  M.  Desjardins.  Isolé  de  tous  côtés,  il  a  une 
façade  principale  sur  la  place  des  Terreaux,  une  seconde 
fiiçade  sur  la  place  de  la  Comédie,  et  deux  ailes.  La  cour 
est  plus  âevée  que  le  sol  des  mes  adljscentes.  La  façade 
principale  a  40  mètres  de  largeur  :  elle  se  compose  de  deux 

Cvillons  flanquant  un  bftument  en  arrière-corps.  Ce 
timent  présente  un  grand  balcon  au  niveau  dii  premier 
étage  ;  le  milieu,  où  se  trouve  l'entrée,  est  accusé  par  des 
chaînes  de  pierre  en  bossages,  et  présente,  à  la  hauteur 
du  deuxième  étage,  un  Qrmpan  orné  d'une  statue  équestre 
d'Henri  TV  par  Legendre-Hérald,  et  surmonté  des  armes 
de  la  ville.  Au-dessus  de  ce  second  étage  est  une  balu»- 
trade  en  pierre,  supportant  la  statue  d'Hercule  par  M.  Fa* 
Usch,  et  celle  de  Pallas  par  M.  Bonnet.  Les  pavillons 
d'angle  se  terminent  par  un  ftonton  et  par  un  dôme  à 
quatre  pans.  Derrière  la  façade  s'élève  la  tour  de  l'hor- 
loge ou  oeifroi,  hante  de  plus  de  50  met.  et  finissant  en 
petite  coupole.  On  monte  à  la  grande  porte  de  l'Hôtel  de 
Ville  par  un  perron  de  14  marches.  Dans  le  vestibule, 
dont  la  voûte  en  are  surbaissé  est  d'une  grande  hardiesse, 
on  foit  les  groupes  en  bronze  de  la  Saânê  et  du  RMnê 
par  les  frères  Coustou.  La  façade  de  la  place  de  la  Co- 
médie a  été  totalement  reconstruite  en  1858  :  elle  est 
formée  de  plusieurs  arcades  que  surmonte  une  ^erie 
avec  balustrade  en  pierre;  on  a  placé  dans  le  milieu  un 
petit  Jet  d'eau  Jaillissant  d'une  coquille.  Les  adminis- 
trations départementale  et  municipale  sont  installées  à 
l'Hôtel  de  Ville  :  les  salons  de  réception  et  les  apparte- 
ments du  préfet  du  Rhône  occupent  l'étage  d'honneur 
dans  l'aile  méridionale;  les  appartements  de  l'Empereur 
et  de  l'Impératrice  sont  situés  au  même  étage  dans  l'aile 
septentrionale.  La  salle  des  Arohives  contient,  outre  les 
archives,  un  musée  historique.  Dans  la  salle  de  la  com- 
mission administrative  on  a  placé  les  portnits  de  Jacquard 
et  de  l'abbé  Rorier.  Les  fresques  du  plafond  du  grand 
escalier,  où  Blanchet  avait  représenté  l'incendie  de  Lug- 
dimum  an  temps  de  Néron,  ont  été  restaurées  de  nos  Jours 
par  M.  Odier. 

LYRE,  instrument  de  musique  à  cordés,  dont  les 
Écrptiens  attribuaient  l'invention  au  dieu  Hermès  Tris- 
iriéisiste,  et  les  Grecs  à  Apollon,  ou  à  certains  mortels 
favorisés  des  dieux,  Orphée,  Amphion,  Linus,  etc.  La 
lyre  se  composait  d'un  magas,  sorte  de  boite  oblongue 
rectangulaire,  en  bois,  plus  rarement  en  métal ,  en  ivoire 
ou  en  écaille,  où  s'attachaient  les  cordes  par  une  extré- 
mité, et  qui  était  destinée  à  augmenter  leur  sonorité  ;  d'une 
table  j  qui  fermait  cette  caisse  résonnante,  et  qui  souvent 
ne  fut  an'nne  pean  sèche  tendue;  de  deux  montants, 
adaptés  a  la  cauise  vere  ses  extrémités;  d'un  joug,  tra- 
verse placée  an  sommet  des  montants,  et  garnie  de  che- 
villes où  s'enroulaient  les  cordes  par  l'autre  extrémité. 
Ges  parties  essentielles  de  l'instrument  ont  pu  recevoir 
tontes  sortes  de  formes,  plus  ou  moins  élégantes.  Le 
moffos  fût  sans  doute  orif^nairement  une  éadUle  de  tortue, 
et  de  là  vint  le  nom  de  chétys  (en  latin  testitdo^,  donné 


par  les  Grecs  à  la  Ij^ra.  Le  monoeonls  on  lyre  à  une  seule 
corde  ne  fut,  selon  toute  vraisemblance,  qu'une  échelle 
des  tons,  que  le  musicien,  à  l'idde  d'un  chevalet  gliiniit 
le  long  de  la  corde,  ftisait  résonner,  et  qui  lui  soviit  à 
prendre  le  ton.  La  lyre  à  trois  cordes  était  la  plus  dmple; 
elle  suffisait  aux  besoins  du  chant,  qui  ne  fut  peedant 
longtemps  qu'une  récitation  rhythmée,  gu'une  dédaauk 
tion  plus  on  moins  musicale.  La  lyre  fut  quaUflée  de 
titraeordê,  pentacorâê,  hexacord»,  selon  qu'elle  eat4, 5 
ou  0  cordes;  vint  ensuite  Vheptacord»  de  Terpaaihs, 
création  pour  laquelle  ce  poète-musicien  fut,  (Ut-on, 
banni  de  Sparte.  Simonideiyouta  à  son  tour  une  8*  corde, 
Tbéophraste  une i9*,  et  TImotbée  se  servit  d'une  Ijnï 
13  cordes.  Les  cordes  étaient  presque  toujours  en  wpn; 
on  en  fit  cependant  avec  du  laiton  et  un  mélange  d'or 
et  d'argent.  On  Jouait  de  la  lyre  soit  avec  un  pMctnsa 
(  K.  cê  mot  ) ,  soit  en  pinçant  les  cordes  avec  les  doigts. 
C'était  un  instrument  fort  borné,  puisqu'il  n'avait  pu  de 
manche  pour  que  les  doigts  pussent  y  modifier  les  lato-  ' 
nations;  une  lyre  ne  rendait  qu'un  nombre  de  sods  égil 
à  celui  des  cordes,  et  le  musicien  ne  pouvait  changer  de 
mode  sans  changer  de  lyre.  Ghes  les  Grecs,  on  se  pee- 
sait  la  Ijrre  de  main  en  main  dans  les  fesdns,  et  chaque 
convive  chantait  à  son  tour  en  s'accompagnant  La  lyn, 
en  grand  honneur  dans  l'anticniité,  se  perdit  au  mayeù 
Age  ches  les  Ocddentanz,  et  fit  place  à  d'antres  instra* 
menu.  V,  CiTHàas,  Babbitos,  PnoaHuix,  AMraicaoaoïnL 
LYRIQUE  (Poésie).  On  ne  pense  guère  à  chercher  an- 
Jourd'hui  dans  Bollean  les  caractères  et  les  règles  de  la 
poésie  lyrique,  malgré  les  ven  qu'il  loi  a  consacrai 
dans  son  Art  poétique,  ch.  U  i 

Voie,  Bvee  pins  d'ëdat  et  non  moini  d^ënergls, 

jélerftnt  Juqu'BU  ciel  son  vol  unbltieoz. 

Entretient  dans  eet  ven  oommeroe  avec  lea  dlenz,  ete. 

n  ne  faut  pas  cependant  mépriser  ce  Jugement,  parée 
qu'il  est  sage  et  mesuré,  et  qu'il  exprime  avec  calme  le 
nature  et  les  lois  du  genre  le  plus  hardi  et  le  plus  pes* 
donné  de  tous.  Biais  nous  trouverons  en  effet  plus  d'&me 
et  de  chaleur  dans  quelques  lignes  du  Discours  sw  TAft- 
totrs  unwertdU.  «  Il  se  faisait,  dit  Bossnet,  des  an- 
tiques que  les  pères  apprenaient  à  leun  enfants,  csa- 
tiques  qui,  se  chantant  dans  les  fêtes  et  dans  les  assem- 
blées, y  perpétuaient  la  mémoire  des  actions  les  plot 
éclatantes  dea  siècles  passés.  De  là  est  née  la  poé8i^ 
changée  dans  la  suite  en  plusieun  formes ,  dont  la  plus 
ancienne  se  conserve  encore  dans  les  odes  et  dans  lei 
cantiques  employés  par  tous  les  anciens  à  louer  la  Divi- 
nité et  les  grands  hommes.  Le  style  de  ces  cantiguee, 
hardi,  extraordinaire^  naturel  toutefois^  en  ce  qu'il  est 
propre  à  repréeenter  la  nature  dane  ses  transports,  9W 
marché  pour  cette  raison  par  de  frives  et  impétueuses 
saillies,  affranchi  des  liaisons  ordmaires  <iue  rechereks 
le  discours  uni,  renfermé  d^aUleurs  dans  des  cadeem 
nombreuses  qui  en  augmentent  la  force,  surprend  l'o- 
reille ,  saisit  Vimagination,  émeut  le  ccmr,  et  s*imprimê 
plus  aisément  dans  la  mémoire  >  (H*  partie,  ch.  lÛ).  U 
poésie  l]rrique  est  là  tout  entière,  enthouaiasme  religieai 
et  guerrier,  admiration  de  la  grandeur  sous  toutes  see 
formes,  éblouissements  et  retoure  de  l'imagination ,  hsr- 
monie  éclatante  et  musicale,  puissance  populaire  et  pa- 
triotique, tout  ce  qui  fait  l'incomparable  beauté  des 
Psaumea  et  des  Prophètes,  des  Odes  de  Pindare  et  de 
l'éloquence  de  Bossuet  II  manque  seulement  à  ce  tableia 
un  trait  que  le  prêtre  aurait  Jugé  «  peu  sérieux  et  peo 
digne  »,  mais  d'où  le  génie  des  anciens  et  des  modernei 
a  tiré  ses  plus  vives  et  ses  plus  gracieuses  inspirations; 
la  passion  qu'Horace  appelle  le  «  soud  de  la  jeunesse  •, 
l'amour  avec  ses  emportements,  ses  Joies  et  ses  doulemSi 
Ces  nuances  infinies  de  la  passion,  le  poète  lyrique  les  ex- 
prime  en  son  propre  nom.  Il  n'est  plus,  comme  dans  l'épo- 
pée, un  témoin  qui  raconte  et  peint  la  vie  humaine  en  se 
dérobant  derrière  ses  héros  ;  il  ne  prend  pas,  comme  dans 
le  drame,  les  personnages  que  l'histoire  on  l'imagination 
hii  fournissent  pour  interprètes  de  sa  pensée.  Sa  poésie 
est  toute  personnelle  ;  son  àme  s'ouvre  et  s'adresse  di- 
rectement à  ses  auditeura,  sans  intermédiaire  ni  déguise- 
ment; de  Uk  cette  liberté  de  mouvementé,  cette  variétâ 
poétique,  ces  contrastes  saisissants,  ces  brusques  pss- 
sages,  où  l'art  n'est  pas  étranger,  selon  la  remarque  de 
Bmleau,  mais  que  l'art  réduit  à  lui-même  n'enseigne 
Jamais;  car  ils  naissent  de  la  passion,  avec  ses  inconsé- 
quences, ses  contradictions  et  sa  logique  secrète.  —  U 
critique  est  tombée  dans  une  grave  «reur,  quand ,  sons 
le  nom  de  «  désordre  pindarioue  » ,  elle  a  imputé  sa 
plus  grand  dea  lyriques  grecs  les  ftoldes  exclamatloDS 


LTR 


1187 


LYR 


doDt  la  mdftioo  fit  longtemps  ane  règle  da  genre  :  «  Qae 
fii»j6?  où  Taift-Je?  où  sois-JeT  • 


QptSïm  doeta  et  Mlnta  irthmm», 
▲qfoaraiml  ne  bit  la  loi? 

Pbdire  n*est  pas  responsable  de  ces  figures  ambl- 
daises,  non  plus  que  de  VOde  sur  la  prise  de  Namur, 
doDt  nous  venons  de  citer  le  début,  et  la  sereine  majesté 
de  sa  poésie  ne  connaît  pas  ce  fracas  puéril.  Si  Tode  est 
impétueuse,  c*est  qu'elle  est  une  effuMon  de  Tàme  forte- 
oeotéfflue 

V<Al  watt  la  strophe,  ouvrant  tes  elles  dans  lee  eleox. 

V.  Hnao. 

Cest  fexpressiott  la  plus  éclatante  et  la  plus  harmo- 
oisosB  de  la  foi ,  du  patriotisme,  de  Tamour,  de  Tespé- 
nuios,  de  la  crainte,  da  la  douleur;  à  elle  appartiennent 
(DOS  les  sentlmenta,  tontes  lee  passions  qui  enlèvent 
rhomine  à  lui-même  et  le  transpoitent  dans  les  sublimes 
rtgioi»  de  ridéal , 

Aff*  cee  miles  de  feu  o^  ravissent  une  âme 
An  céleste  ^ifynu, 

J.-B.  ROCSSBAU. 

U  poésie  lyrique  est  peut-être  à  la  pensée  ce  que  le 
dttDt  est  à  la  parole;  et,  par  l'ampleur,  la  yarièté  et 
Pédat  du  rliythme  et  dea  sons,  elle  tient  de  près  à  la 
■uskpie,  cette  traduction  enivrante  et  sensuelle  de  la 
pwion  et  de  la  rêverie.  Les  deux  arta  ne  faisaient  qu*un 
diez  les  Hébreux  et  chez  les  Grecs.  La  harpe  et  la  lyre 
s'étaient  pas  des  emblèmes,  comme  chez  les  modernes; 
c'était  une  partie  de  la  poésie  elle-même.  Quatre  mille 
dttBteors,  appartenant  à  la  tribu  de  Lévi,  attachés  au 
lenrice  du  temple  et  divisés  en  vingt- quatre  classes,  fai- 
ttieot  retentir  les  cantiques  sacrés  dans  Jérusalem  ;  et 
les  poésies  de  Pindare,  comme  les  choeurs  de  la  tragédie 
gneqoe,  étaient  aïooompagnés  par  les  instrumenta,  et 
ipwlqaefois  même  figurées  par  la  danse.  La  civilisation 
Bodonie  a  clumgé  ces  conditions,  en  multipliant  à  l'in- 
ini  le  nombre  et  les  ressources  de  ces  instruments,  qui 
n  réduisaient  dans  Torigine  aux  «  notes  rares  et  sA- 
fères  »  dont  parle  Horace.  Elle  a  fait  de  la  musique  un 
vt  levant  et  compliqué,  qui  a  ses  effets  comme  ses 
limiies,  et  atteint  parfois  à  un  degré  de  puissance  eztra- 
«finaire,  surtout  lorsqu^il  emprunte  un  sens  à  la  parole 
faaiDaiBe,et  quMil  en  seconde  et  développe  les  intentions 
et  les  idées.  Hais  la  poésie  tout  entière,  et  surtout  la 
poésie  lyrique,  fidèle  à  son  origine,  en  a  gardé  son  carac- 
tère musical,  la  richesse  et  la  variété  des  rhythmes,  la 
tédnction  du  nombre  et  de  la  mélodie;  c'est  par  là, 
comme  par  la  sublimité  de  ses  inspirations,  qu'elle  a  mé- 
rité le  nom  da  «  langage  des  dieux  ». 

La  poésie  Ijrriciue  apparaît  aux  premiers  Jours  des  so- 
détés,  et  elle  a  le  privilège  de  convenir  à  toutes  les 
époques  de  leur  existence,  à  leur  vieillesse  même,  lors- 
qu'elles ont  conservé  du  génie  et  du  style,  parce  que  la 
poésie  lyrique  est  l'homme  même.  Née  au  milieu  des 
dogmes  et  des  croyances  de  l'Orient,  nous  l'avons  vue,  de 
001  jours,  remuer  profondément  les  générations  mo- 
dernes que  le  doute  dévore,  et  puiser  des  Inspirations 
jusque  dans  ce  douloureux  état  moral ,  qui  semble  la  né- 
pdoa  de  la  poésie,  puisqu'il  est  celle  de  la  crojrance. 
—  Nous  ne  pouTons  rien  dire  de  la  poésie  lyrique  des 
Indiens,  ma^T^  Tlmportance  qu'ils  ont  prise  aux  yeux 
de  la  critique,  et  peut^^tre  de  la  mode.  Il  semble  seule- 
ment que  les  hymnes  des  Védas,  enfantées  dans  une 
brûlante  et  sensuelle  atmosphère,  ne  contiennent  crue  le 
coite  de  la  matière,  de  la  puissance  et  de  la  fécondité,  et 
que  Factivité  de  l'àme  s'endorme  dans  leur  immobilité 
mystique  et  leur  splendeur  monotone.  C'est  dans  les 
i^saunes  de  David  et  dans  les  Prophètes  qu*il  faut  cher- 
dier  les  magnifiques  images  de  la  divinité,  la  piété  ar- 
dente, les  cris  douloureux  de  la  misère  humaine,  le  senti- 
ment profond  des  prospérités  et  des  malheurs  de  la  pa- 
trie, et  Jusqu'aux  douces  peintures  de  la  paix  et  du  bon- 
Iwor.  Au  xvn*  riède,  on  n'osait  pas  parler  du  sublime 
des  livres  saints  à  propos  de  «  choses  si  profanes  »  que 
it  HttéFstnre;  et  Rollin  s'excusait  d'analjnsier  les  beautés 
de  ces  cantiques  où  s'était  si  souyent  Inspiré  Bossuet. 
Après  les  méchantes  plaisanteries  de  Voltaire  et  de  son 
école,  fort  Insensibles  d'ailleurs  à  la  poésie  lyrique, 
même  profane,  la  foi  est  devenue  plus  hardie,  et  a  cessé 
de  cralodre  que  sa  pureté  ne  s'altérfct  à  louer  les  sublimes 
•Beents  de  David  et  disale. — Pendant  qu'un  petit  peuple, 
léparé  du  lesie  dn  monde  par  sa  religion  et  ses  lois,  d^ 


vait  à  une  Inapliation  divine  des  chanta  destinés  à  de* 
venir  la  langue  sacrée  de  toute  civilisation  chrétienne* 
une  autre  race,  mervellleuaement  douée  des  Muses, 
comme  elle  le  disait  ell»-mème  dans  ses  riantes  fictions* 
recevait  la  poéaie  lyrique  des  mêmes  répons  d'où  elle 
avait  tiré  l'épopée.  Entre  la  lécende  Immortelle  d'Orphée 
et  les  Odes  de  Pindare,  la  Giêce  compte  bien  des  poètes 
Ivriques  dont  nous  pouvons  à  peine  entrevoir  le  génie 
dans  quelques  ven  mutilés,  conservés  par  haaard  ches 
les  graînmairiens.  Mais  qu'elle  était  merveilleuse  et  puiv 
santé,  cette  imagination  oui  créait  dans  le  même  temps, 
et  pour  la  même  nature  d'inspiration,  deux  formes  égar 
lement  belles,  la  poésie  m&ique  ou  Mienne^  et  la  poésie 
chorique  ou  donenne,  inventait,  pour  servir  la  wiét^ 
infinie  du  sentiment,  des  rhythmes  variés  presque  à 
l'Infini,  remplissait  l'esprit  et  roreille  charmés  d'hymnec 


cette  poésie,  il  ne  nous  reste  guère  que  des  ruines,  des 
parcelles;  et  cerpendant,  telle  est  la  vie  attachée  à  cette 
poétique  poussière,  «reste  des  ans  et  des  barbares  », 
que  les  noms  d'Alcée,  de  Sapho ,  d'Anacréon ,  sont  de- 
meurés immortels,  et  que  nous  pouvons  répéter,  après 
Horace ,  leur  élève  glorieux  :  «  L'amour  respire  encore, 
avec  les  ardeurs  confiées  à  la  1^  de  la  Jeune  éolienne.  » 
—  La  grande  renommée  de  Pindare,  admiré  des  anciens 
et  contesté  de  quelques  modernes,  a  été  dignement  ap- 
préciée dans  l'éloquente  et  poétique  étude  que  lui  a  con« 
sacrée  l'un  des  msAtres  de  la  critique  contemporaine 
(M.  Yillenudn ,  Étude  sur  le  génie  de  Pindare).  Quand 
on  se  représente  ces  mobiles  et  ingénieuses  populations 
de  la  Grèce,  et  leur  paasion  pour  les  palmes  de  la- lutte 
et  de  la  course  des  chars,  on  rit  des  impertinences  de 
Voltaire  contre  Pindare,  qu'il  appelle  «  un  chantre  des 
combata  à  coups  de  poing  »,  et  l'on  retrouve  sans  peine 
dans  les  strophes  harmonieuses  des  (Hympùiues,  des  Né' 
méennes,  des  Pythiques,  le  profond  sentiment  de  la 

Î gloire,  de  la  grandeur  et  de  la  vertu.  Encore  les  quatre 
ivres  oui  nous  restent  de  lui  ne  sont-ils  crue  la  moindre 
partie  ae  ses  ouvrages,  comme  il  arrive  u  souvent  avec 
ces  grands  maîtres  de  l'antiquité.  —  Le  génie  lyrique  des 
Grecs  Jette  également  un  éclat  incomparable  dans  les 
chœura  de  la  tragédie,  qui  avait  pris  son  origine  dans  le 
dithyrambe  et  le  culte  mystérieux  de  Bacchus.  Horace, 
dans  son  Art  poétique ,  ne  présente  le  choeur  oue  comme  . 
un  personnage  du  drame.  Pour  en  donner  ridée  com- 
plète, il  aurait  dû  le  montrer  tour  à  tour  pathétique, 
splendide,  efnrajrant  dans  Eschyle,  plein  de  fraîcheur,  de 
majesté,  de  richesae  dans  Sophocle  et  dans  Euripide, 
idéal  et  brillant  même  dans  Aristophane,  quand  il  laisse 
apparaître  la  beauté  pure  et  sérieuse  au  milieu  des  sa- 
tkes  et  des  bouffonneries.  Toute  cette  poésie  «  bouillonne 
comme  celle  de  Pindare,  et  s'échappe  à  grands  flots  de 
ces  bouches  profondes,  »  pour  emprunter  le  magnifique 
langage  d'Horace.  —  Et  cependant ,  c'étaient ,  sur  le  sol 
de  la  Grèce,  les  demien  accents  de  la  grande  inspiration 
Ijnrique  :  au  siècle  d'Alexandre,  l'hymne  succède  à  l'ode, 
et  la  gravité  du  philosophe  à  l'enthousiasme  du  poète, 
dans  l'hommage  sublime  que  Cléanthe  adresse  au  dieu 
souverain.  —  Il  faut  se  transporter  à  Rome  pour  retrou- 
ver le  génie  hellénique  dans  les  ex(|uises  imitations 
d'Horace.  Trop  épicurien  pour  ressentir  profondément 
la  passion  et  la  fol  du  poète  lyrique,  le  spirituel  and 
d'Auguste  et  de  Virgile  eet,  dana  la  forme  et  le  style,  un 
artiste  merveilleux  ;  de  plus,  il  est  pour  nous  le  miroir 
inestimable  de  la  poésie  grecque,  qui  lui  a  servi  de  mo- 
dèle. Au  reste,  quoiqu'il  se  dârobe  à  l'émotion  et  ramène 
Tolontien  l'enthousiasme  au  ton  du  badinage.  Il  est  téu- 
Joun  sincère  et  sublime,  quand  il  chante  la  grandeur  de 
Rome  ou  la  vanité  des  foies  humaines,  et  iamals  le 
plaisir  et  «  la  liberté  du  vin  »  n'ont  trouvé  un  Interprête 
plus  charmant. 

Le  christianisme  proscrivit  les  chants  profanes  de  la 
Grèce  et  de  Rome  ;  il  avait  les  cantiques  des  Hébreux  et 
les  hynmes  de  TÉglise.  S^  Grégoire  de  Nadanze  et  Sy- 
nésius  enseignèrent  à  la  muse  dorienne  une  langue  nou- 
velle, celle  du  dogme  et  des  vérités  abstraites  et  méta- 
physiques, mêlées  aux  épanchements  d'une  foi  ardente 
et  a  ces  images  gracieuses  dont  la  jMésIe  grecque  ne  pou* 
vait  se  priver  tout  à  fait.  —  La  imrbarie  marchait  plus 
vite  en  Occident  ^u'à  Constantinople  et  à  Ptolémals.  La 
langue  latine,  destinée  à  devenir  lalanguede  l'Église,  passa 
des  hymnes  de  l^rudenoe,  et  de  ses  ven  si  touchants  sur 
les  innocentes  yictimes  d'Hérode,  aux  proses  rimées  dn 
moyen  âge,  naïve  et  puissante  expression  d'une  fol  i»rf^ 


nt-t" 


'""'■'■"T^eST.^^- 

'—„».-•—"!  w^».  vol».»  « 

,  rendirent  à  Qulnanlt 

„  ,m  écriraliu,  et  Uléma 

f^  i  iM  poaus  iTTiqaM. 

,fl«  iiplcation  lyrlqno  du 

,g  I  :  il  eût  r«llu  la  cher- 

Ufc  snet,  du)B  l'inuimpB' 

K"  lei  fil^vattmw  it  Dmu 

£'  i&rw,  «ont  pleluM  da 

oads  PlciWeistlB 

td6D  qoo  les  ehcsnn 

'^'^  iblM  canliqwi  écriu 

jf^Â  ^  le  premier  poète 

„„r  Si  lie  et  m  Tocatian  n'en 

uriip"  ^il'^'ri^ ^'>  i^i^^l'e-  Le  malheureoi  eual 

ariMii  Aii^  ^g  coDtpU  qua  pour  mémoire,  témoigne 

Je B#i'«"v'^h^  alora  plu»  dlmportancs  fc  la  Tonne 

ip'  'ïn^ dfltoP»*'^ lyntiae, Non» en »TOns une prenve 

^>Mil«D(i     ^^rioiretradittonn^ledel.-B.  RouMeau, 

mu'Il^^J^  daa  odes  ucrées  et  des  odes  plndariiiues 

9>^  '^^^^  d'antre  lentimaDt  que  la  complaiiauce  d'nn 

"ïfi.  Va^rain   pour  md    talent    Une  ôltlqiis  mieni 

I  il  •  npl»  l'anteiu'  de  l'Od*  au  emita  du  Lac  et 

i^  r^  d  '"  '^'"'t'*"  P*"»)  <=**  "iteoTS  de  rëpntatiDD 

^Juine  uni  n'eidteDt  plu»  ni  sympathie  ni  colère. 

"^ZoB  A  U  a  vfeu  D^it  pas  bTOnble  k  I»  poétie 

fl^e;  la  aod«t«  i^Uonipliique  et  littéraire  m  moquait 

ialueun  trop  rwet  échappées  fc  Gilbert  on  fc  Le  mne 

A  nnip<S*i*'>-  ^  "  ^'^  '^  enaelpieiiMiita  terrible»  de* 

i^niiiitiona  pour  ramener  Teeprit  bancal»  au  Idée»  forte» 

0l  léHenMa,  aux  problAmea  de  U  desHnée  homalno  «t 

^  de»  locidiéi ,  matière  inépuisable  des  réflaxiona  du 

pbiloaophe  et  de»  émotloD»  du  po«e.  Non  que  la  mélan- 

coliset la  doulaor  m  «aient  pa«  des  seoUmenu  communs 

MU  écriTBins  de  tona  les  temps,  aogai  Uen  que  l'enthoa- 

■iatme  de  la  patrie  «t  de  la  gldre.  Haï»  le  monde  mo- 

■  -  -    ■  remué  de  toaies  pan»,  derenu  Inc^iatde  de 


de  Scfalegel,  de  BQtto';  elle  s'enlTrait  dei  ehanta  guer- 
ilen  d'iundt  et  de  Kmraar,  où  éclatait  llndlgnation  et 
Tardeur  de  la  liberté.  Noua  n'arlons  encore,  en  Fnace, 
aptes  la  redoutable  cbantoa  de  Rouget  ds  l'JsIe,  après  les 
hjmne»  patriotique*  de  Chénier,  où  la  parole  était  testée 
Bu-desaoua  de  la  moBiqoe  ou  de  lloleation  du  poSte,  que 
«nelques  esMl»  inéguii  de  Le  Brun,  mâange  ainiluuer 
dldées  forte»  et  de  grande»  lm»ge»  avec  le»  formes,  les 
tour»  coDTenuf,  et  la  mythologie  consacrée  de  récole  da 
J.-B.  Rousseau.  Ce  fut  an  lendem^n  de  la  grande  mlae 
da  premier  Empire  que  la  France  entendit  avec  iTrease 
la  TOii  nouTelle  des  poètes  lyriqne».  La  premier  dan» 
l'ordre  des  temps,  Béranger  a  en  te  priTll^  d'une  popo- 
larlté  preacpie  nnlTeraelle.  ÉcilTaln  siqiérienr,  mais  mus 
babile  qu'inspiré,  U  a  dit  sa  ^oire  de  dreonatanoe  à  la 
saiire,»on  or^clualité  la  plus  complète  et  sa  glotre  la  plu» 


//tf  ^^^tUunte,  JoTlale,emntiMiiis,Eiù 

j««4* i *?îS^ie"  trop  souvent  la  grtca  idéile 
^f  'iîî^**fffW«f(''»i  11  y  a  daUB  se»  ooutrei  qod- 
*  '  i  £  P^^Si»>  rniment  élerées  et  toachaales,  dont 
^la^ ''SEntouM'u  sur  l'homme  et  ma  le  poRe.  A li 
f/ri^SSii^ônéaijtla  trop  dédsigné  de  nos  Jour, 
, iSS^S^v'^  tooehslt  viTement  les liniei  en  chin- 
l^^lM  glolrsl  et  les  malheur»  de  son  pays  ■.  Hiit 
'  lïofui'  <'"  MntininuMM  aralt  le  goût  du  théiire,  plni 
L,  é6  ïoàa  ou  de  l'éléglei  et  ta  grande  poésie  lyilinie 
%,ât  (rouTer  ses  Imeriwètes  les  pins  compléta,  les  pla 
AJMi,  les  plus  digne»,  dans  HH.  de  LamartiDe  et  VIcioT 
Fi^.  Le  charme  exquis  des  JfMitolioM  et  des  Sormo- 
wt  fùiHqiMt  Tirra  autant  que  notre  langne  ;  et,  qnel- 
jea  rfsû'vttB  que  le  goAt  issse  contre  les  abus  et  lei 
rangetés  où  se  complut  le  talent  qui  a  dicté  les  Oritu- 
Isi;  et  lea  ConttmpIdtioM*,  il  serait  puérile  de  lui  déniir 
bsrdiease,  l'édat,  ht  Tigueur,  l'abondance,  la  soDorilè, 


porléea  su  plus  haut  d««rA.  Le  prestige  des  belles  clioNt 
et  de  la  nouraauié,  si  puiesant  »ar  lajeaneste,  et  celui 
même  desbiiBn«rles,ODt  dooné  aux  doux  poètes  un  gnnd 
nombre  d'étère»  at  dimltaleorsi  l'érele  Ijrlqus  modem» 
a  compté  des  répntatioDsbrltlantea^  et  multiplié  molbeu- 
reosement  le»  TOcatloD»  avortées  et  tMomiirtMt.  Les  ven, 
et  la  composition  ellft^nème,  ont  Une  à  tout  le  monde 
leuiB  secrets  et  leors  procédé»,  dnenus  une  sorts  de 
mécanisme  i  mal»  l'originalité  de»  maltrM  ne  doit  pu 
eooSMr  dsa  erreor»  on  dea  sottise»  qui  se  sont  aatorltéet 
de  leor  nom,  et  la  postérité  se  chargera  de  régler  le< 
part»;  —  Quel  sera  maintensnt  l'sTenir  de  la  poésie 
Irriqne,  dans  one  sadété  qa'épulseot  tes  agitationi  po- 
lltiqoee,  et  quo  dérore  ce  qu  Horace  nommait  L  Rome  •  la 
romlle  dea  soucis  Sarotntf  ■  L'auteur  des  JfAJttsJKW, 
enqtorté  dans  le  tourbillon  de  la  tie  publique,  h  laqnella 
ilatantsacrlflé,  a  cherché  >  les  destinées  delapoâie», 
et  II  a  interdit  l'avenir  à  la  muse.  Il  l'a  condamnée  u 
silence  et  i  la  mort.  Hais  il  est  pennis  d'en  appeler  d'une 
sentence  il  ngonreuse,  et  de  cndre  que  le  poète,  inpu 


poésie  lyrique  dtiit  durer  autant  que  lui,  à  moins  qse, 
deatitué  de  cunadence  et  incapable  d'émotloi»,  il  ne  ta 
réduise  fc  rinlelligente  régularité  des  macbinea  dont  le 
bruit  l'assourdit  et  dont  b  Aimée  l'aTengle.  JusquoU, 
nous  poorrons  adresser  aux  chantrM  Inspirés  de  la  pu- 
slon,  aux  hommes  que  la  tradition  mytbologiqua  aoraii 
appelés  Butrefoi»  les  ftls  de  Galliope,  ce»  Ter»  du  plua  mé- 
lodieux de  toua  i 


LYRIQUES  (Vers),  nom  donné,  cbei  le»  andens  Grecs, 
aux  Ter»  employés  dans  les  poèmes  qui  se  chant^ectui 
son  de  la  lyre.  Peu^^tre  tous  les  ver»  forent-ils  d'abord 
'     ''~     ~  la  lyre;  mais,  fc  partir  dn  vn*aiècle  av.  I.-C 

wt  lyrvtat 
des  odes  d'Alcée,  de  S 


le  nom  de  twt  lyrvtat*  ne  «'sopllque  plus  qu'aux  tei 
des  odes  d'Alcée,  de  Supbo,  (TÀlcman,  d'Anou,  d'&ns- 
créon,  de  Corinne,  de  nodaré,  etc.,  et  fc  oenx  des  chtEnn 
drsmatiqne»  d'Eschyle,  de  Sophocle,  d'Euripide,  d'Aris- 
tophane. Ils  étaient  de  différeatea  langueurs.  Les  prind- 
pMix  éûdent  le  trochôvvtM,  VUk^^umi^ui,  le  erèsitiitt, 
le  docAnHoqiw,  le  <JaotvJiiiti«,  le  ^uriâmbiqm,  l'oscU- 
ptofts,  riomgtM,  l'oMKrAiBitgMilegaUtaffiAiqtM,  le  fit- 
niqua,  le  glveoniqiw,  le  pUrserotûn,  le  priapini,  l'oiliv 
nvtm,  le  «apMvtM,  etc.  (Y.  et*  mot*].  Lés  ver»  des odei 
de  Plndare  et  des  cbmnr»  de  la  tragédie  et  de  la  comédli 
présentent  souvent  aux  Uodemes  de  laèa^vndes  dUE- 
cultes  :  ils  psTslMM»  avoir  été  plutèt  de»  porases  cadas- 
céea  selon  certaines  mesures  (dont  le  secret  naos  édi^ipa* 
qui  ét^enten  rapport  avec  le  svitème  musical  des  Grecs, 
et  auxquelles  le  cum  et  la  muuqne  donnaient  anavalsni 

Ïi'dles  perd^ent  k  la  lecture),  que  dea  vera  pni|Heineiii 
tsi  anasi  les  poètes  romalna,  qui  ont  reprodoit,  en  le* 
modlBant  conformément  au  génie  de  la  langue  latine, 
tous  tes  mètres  lyriques  inventés  psr  les  Grecs,  u'oat-ila 
Jamids  reproduit  ce  genre  de  vers,  soit  dans  leur»  owTrei 
dramatique»,  soit  dans  leun  pièces  lyriiniea  propnmeiii 
dites  I  et  c'est  en  partie  dans  ce  sena  quit  but  eoieodie 
ce  que  dit  Horace,  lorsqu'il  compare  à  la  témérité  dn  fib 
de  Dédale  l'amUtieni  qui  prétend  Imiter  lea  tons  doo- 
veaui  où  Pindare  élevait  aouvent  sa  vois,  en  affranchli- 
aant  aon  r^ythme  de  toute  loi  consacrée.  Les  vers  Irriqoa 
des  Grecs  ont  été  réellement  chanté»  an  ion  delaljrti 


LYR 


1189 


LYT 


pÊM&  que,  pendant  plusieurs  siècles ,  tout  podte  était 
mosiden;  en  iMp-U  été  de  même  à  Rome?  Gela  est  au 
moins  fort  dootenx  :  les  poètes  lyriques,  comme  Catulle 
et  Horace,  sont  plutôt  écnvains  oue  musiciens. 

Cbes  les  peuples  modernes,  ou  la  lyre  n*a  jamais  été 
en  nsage^  le  nom  de  vers  lyriques  a  été  également  appli- 
qoé  aux  Ters  adoptés  pour  les  odes  et  pour  toute  compo- 
adon  poétique  qoi  procède  par  stances,  strophes  ou 
ooaplets.  En  Anançais,  ils  sont  généralement  courts  t  ce- 
pendant lo  yen  de  iO  syllabes  se  rencontre  assez  souvent, 
même  dans  toute  retendue  d'une  pièce;  plus  habituelle- 
ment il  est  entremêlé  à  d'autres  mesures  ;  et  parfois,  sur- 
toQt  de  notre  temps,  le  vers  de  12  sylUbes  est  employé 
Mit  seul,  soit  concurremment  avec  des  vers  plus  petits 
{Y,  les  Messéntemnes  de  C  Delarime,  les  chcsurs  de  sa 
tragédie  le  Paria^  les  poésies  de  Victor  Uu^so  et  de  La- 
nsrtine,  etc.).  Dans  le  i*'  chœur  d'AUuUte,  le  vers  de 
^2  Bjrlhdies  domine  avec  le  vers  de  8  syllabes;  on  y 


trouve  aussi  quelques  vers  de  10  syllabes,  ^  tm  seul  vert 
de  0.  Le  second  chœur  offire  les  mêmes  mesures  avec  un 
certain  nombre  de  vers  de  7  syllabes;  le  3*  a  deux  vers 
de  4  syllabes.  Le  vers  de  5  syllabes  est  fréquent  ches 
Quinault,  et  Racine  termine  par  cette  mesure  une  de  ses 
plus  belles  strophes  (Cteuo;,  abaissex-^xnu),  J.-B.  Rous- 
seau a  employé  le  vers  de  5  syllabes  dans  sa  cantate  de 
Circé.  Les  vers  de  8  syllabes  sont  Hréquemment  em- 
ployés seuls  :  on  trouve  ce  système  dans  les  chansons  de 
geste,  les  odes,  les  stances,  les  chansons.  Dans  une  chan- 
son de  Malherbe  (IV),  en  10  couplets,  les  vers  de  9  svl* 
labes  alternent  deux  par  deux  avec  des  vers  de  10.  On 
trouve  des  couplets  entiers  de  0  syllabes  dans  les  opéras- 
comiques  de  Sedaine  et  dans  les  chansons  de  Béranger. 
F.  Stancb,  Strophe,  Vers.  P. 

LYSICRATE  (Monument  de).  V,  Choragiqobs  (Monu- 
ments). 

LYTIERSE.  F.  Chakson. 


M 


MAB 


MAC 


H,  W  lettre  et  10*  consonne  de  Talphàbet  latin  et  des 
atobabets  qui  en  dérivent.  Elle  fait  partie  des  liquides 
(r.  ce  moi)y  et  Tarticulation  qu'elle  représente  est  à  la 
fois  labiale  et  nasale  (  V.  ces  mots).  Le  son  que  noas 
donnons  à  la  lettre  M,  quand  elle  est  placée  au  commen- 
cement d'une  syllabe,  est  le  même  dans  la  plupart  des 
bagues  européennes  :  mais,  si  elle  termine  la  syllabe  à 
laquelle  elle  appartient,  et  si  la  syllabe  suivante  com- 
mence par  une  autre  laSbiale,  elle  ne  fait  qu'indiquer  la 
Dualité  de  la  voyelle  précédente  et  Jouer  le  rôle  de  1*N, 
comme  dans  lankpe,  assembler,  emploi,  imbu,  combler, 
combiner,  eompagms,  tomber,  humble,  tympan,  etc.  Il 
en  est  de  même  quana  elle  termine  certains  mots,  nom, 
renom,  faim,  jHurfum,  thym;  mais  elle  conserve  sa  va- 
leur ordinaire  à  la  fin  des  noms  propres  étrangers,  Mon 
llnàMlem,  Jérusalem^  Abraham^  Cham^  Sem,  Ibrahim, 
StcdMm,  Amsterdam,  etc.  ;  il  faut  en  excepter  Adam. 
Suivie  d'une  N,  elle  doit  coaserver  sa  prononciation  or- 
dinaire (amnistie,  indemnité,  Agamemnon,  Mnémosyne)^ 
excepté  dans  dcunner  et  ses  dérivés.  Placée  à  la  fin 
d'one  syllabe  et  devant  une  autre  Bf,  tanttôt  elle  se  pro- 
nonce comme  N  (comme  dans  emmener)^  tantôt  elle  a  sa 
valeur  normale  de  consonne  (comme  dans  immense,  com- 
wuT,  mammifère^.  Dans  certains  mots  où  elle  est  suivie 
de  P,  elle  est  encore  un  signe  de  nasalité,  et  le  P  ne  se 
prononce  pas  :  covup,  chaanp,  exempt,  prompt,  dompter. 
En  latin,  l'H  à  la  fin  des  mots  était  la  caractéristique 
habituelle  de  l'accusatif  singulier.  Dans  la  poésie,  elle 
n*empechait  pas  l'élision  de  la  voyelle  qui  la  précédait, 
lorsque  le  mot  suivant  commençait  par  une  voyelle  ou 
par  un  h;  elle  rendait  alors,  au  dire  des  pammairiens 
latins,  un  son  sourd  {obscurum)^  et  donnait  sans  doute, 
comme  en  français,  le  caractère  de  nasalité  à  la  voyelle 
précédente.  —  Comme  abréviation  dans  les  inscriptions 
lapidaires  et  sur  les  médailles,  M  tient  la  place  du  pré- 
nom Marcus;  des  noms  de  lieu  ou  de  peuple  Macedonia, 
MassUia,  Mediolanum,  Mamertini,  stc.  ;  des  noms  com- 
muns mater,  magister,  mUes,  monumentum,  munici- 
pum,  mamibus,  memoriœ,  etc.  ;  des  épithètes  magnus» 
isiltlarit,  memor,  missus;  de  l'adverbe  merito,  etc.  Avec 
■ne  apostrophe ,  M*  est  pour  le  prénom  Manius.  Chez 
es  Modernes,  M.  A.  a  signifié  magister  artium  (maître 
h  arts)  ;  en  franc-ais,  M.  veut  dire  monsisur,  MM.  mes- 
neurs,  S.  M.  Sa  Majesté.  En  écossais.  M' Joint  à  un  nom 
reut  dire  Hoc  (fils).  Sur  les  ancien ucs  monnaies  fran- 
taises,  M  était  la  marque  de  Toulouse.  —  Signe  numéral, 
ie  mu  (M^)  des  Grecs  valait  40.  Chez  les  Romains,  M 
valait  f  ,000;  surmontée  d'un  trait  horizontal,  elle  valait 
i,JO0,0OO.  B. 

MABIKOGI.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BU}- 
§raphie  et  d^  Histoire. 

HABRIAN,  un  des  romans  Garlovingiens  {V.  ce  mot). 
On  y  rappelle  les  exploits  de  Renaud  de  Montauban  et  de 
son  cousin  Maugis.  Ce  dernier,  voulant  rentrer  dans  la 
bonne  voie,  se  retire  dans  l'hôpital  de  Rome,  v  fait  des 
aermons  en  style  dcéronien,  et  devient  cardmal,  puis 


Î>ape  à  la  mort  de  Léon  m.  Par  un  mélange  singulier  des 
àblès  carlovingiennes  avec  celles  du  cycle  d'Arthur,  Ma- 
brian  est  reprâenté  comme  petit-fils  de  Renaud ,  et  sa 
naissance  est  protégée  pat  la  fée  Morgane.  Aprà  une 
longue  suite  d'aventures,  il  devient  roi  de  Jérusalem, 
puis  de  l'Inde,  où  il  établit  le  christianisme.  F.  Biblii^ 
tfièque  des  romans,  Juillet  1778. 
MACABRE.  F.  Danse  des  moets. 
MACâDAMISAGE,  système  pour  la  construction  des 
routes.  Il  consiste  en  un  empierrement  de  cailloux  con- 
cassés, de  la  grosseur  de  4  à  6  centimètres  cubes  envi- 
ron, entassés  en  couche  de  0",S5,  fortement  comprimée 
par  un  nrand  rouleau  de  fer  fondu,  pesant  de  é,000  à 
8,000  kilog.  La  bonne  confection  du  macadamisage  exige 
que  les  cailloux  ne  contiennent  point  de  parties  terreuses 
ou  argileuses,  ce  que  l'on  obtient  souvent  par  un  lavage 
préalable.  Les  routes  macadamisées  n'exigent  ni  fonda- 
tion, ni  accotement;  elles  sont  impennéables  à  l'eau; 
leur  entretien  n'exige  qu'un  balayagje  facile,  et  le  rem- 
plissage, par  du  caillou  fin,  des  parties  dégradées.  Pour 
opérer  le  nettoyage  des  routes,  les  ponts  et  chaussées  ont 
fait  construire  des  voitures  basses,  dont  les  roues  font 
tourner  un  système  de  r&teaux  ou  de  balais  munis  de 
pelles,  qui  enlèvent  les  boues  et  les  déposent  dans  la  voi- 
ture. Du  reste,  les  cantonniers  avec  des  balais  suffisent  à 
ce  nettoyage.  —  On  a,  depuis  plus  de  30  ans,  adopté  en 
Angleterre,  et,  depuis  1849,  en  France,  le  système  du 
macadamisage  pour  les  principales  rues  des  villes;  mais 
la  grande  circulation  des  voitures  maintient  dans  ces  rues 
une  poussière  ou  une  boue  permanente  qui  font  regretter 
aux  piétons  l'ancien  pavage.  L'entretien  en  est  en  outre 
très-dispendieux.  —  Le  macadam  est  ainsi  nommé  de 
l'ingénieur  anglais  Bfac-Adam,  qui  commença  de  l'appli- 

rr  avec  succès  en  1816  aux  environs  de  Bristol;  cepen- 
t  il  n'en  est  pas  l'Inventeur,  car  un  ingénieur  francs 
nommé  Trésageur  construisit,  dans  le  Limousin,  vers 
1761,  des  routes  en  cailloux  concassés.  F.  C^.  Diipin, 
Voyages  dans  la  Grande-Bretagne,  3*  partie,  c.  4.  E.  L. 
MACAIRE,  roman  du  cycle  carlovin^en.  Macalre  s'est 
introduit  à  la  cour  de  Charlemagne,  et,  n'ayant  pu  séduire 
la  reine,  s'entend  avec  le  nain  favori  du  roi  pour  la 
déshonorer  aux  yeux  de  tous.  Sur  de  trompeuses  appa- 
rences, on  croit  la  reine  coupable  d'adultère.  Condamnée* 
sur  l'avis  de  Bfacaire,  à  être  brûlée  vive,  elle  demande  un 
confesseur  :  l'abbé  de  S^Denis,  après  l'avoir  entendue, 
demeure  convaincu  de  son  innocence,  et  fait  tant  par  ses 
prières,  que  la  peine  du  feu  est  changée  en  celle  de  l'exiL 
Albaris  (Aubry)  est  chargé  d'escorter  la  reine;  Macalre 
lui  dresse  une  en]d)ttscade;  Albaris  est  tué,  la  reine  se 
cache  dans  un  bois.  Macaire  revient  à  la  cour;  mais,  pen-> 
dant  le  dtner  de  Charlemagne,  le  chien  d'Albaris  pénètre 
dans  la  salle  et  saute  à  la  gorge  du  traître;  trois  tours 
après,  cette  scène  se  renouvelle.  Les  soupçons  s'éveillent, 
on  suit  le  chien,  on  trouve  le  corps  d'Albaris.  Charle- 
magne ordonne  un  combat  singulier  entre  le  chien  et 
Maodre;  celui-d,  vaincu,  avoue  son  double  crime,  et  est 


MAC 


1190 


MAC 


brOIé  vir.  Oef>enclaiit,  la  reine  8*e8t  mise  «ras  la  protec- 
tion d*iin  bûcheron  nommé  Baroche,  qui  la  conduit  à 
Gonstantinople,  où  sont  ses  parents.  En  trayersant  la 
Hongrie,  elle  donne  le  Jour  à  un  fils,  qui  reçoit  le  nom 
de  Louis.  La  guerre  éclate  entre  Tempereur  de  Gonstan- 
tinople et  Charlemagne;  ce  dernier  est  vaincu,  mais  il 
est  lieureux  d^apprendris  que  sa  femme  vit  encore  et 
qu'elle  lui  a  donné  un  fils;  il  les  emmène  à  Paris,  où  la 
réconciliation  est  célébrée  par  de  grandes  réjouissances. 
—  Ce  roman  est  évidemment  la  source  de  la  légende  po- 
pulaire du  chien  de  Montargis,  et  Macaire  est  resté  le 
r)  du  coquin  eflîronté.  Le  roman  existe  à  la  bibliothèque 
S*-lfarc,  à  Venise,  dans  un  manuscrit  français  du 
XIV*  siècle,  qui  figure  au  Catalogue  sous  le  titre  faux  de 
Doon  de  Mayencê,  et  où  sont  racontées  en  plus  de 
i8,000  vers  les  aventures  de  Beuve  d'Antone,  de  Pépin 
et  de  Berthe  aux  grands  pieds,  et  de  Charlemagne.  11  a 
été  publié  par  M.  Guessard,  Paris,  18GC.  H.  D* 

MACAO  (Jeu  de).  F.  VniGT-ET-i}]i. 

BfACARON,  en  termes  de  Marine,  court  morceau  de 
bols  placé  debout,  de  distance  en  distance,  pour  soutenir 
les  fargues  d*une  embarcation. 

MâCARONIQUES  (Vers),  vers  où  sont  mélangées  plu- 
sieurs langues,  où  Ton  emploie  ce  qu*on  appelle  vulgai- 
rement le  latin  de  cuisine,  c-à-d.  des  terminaisons 
latines  appliquées  à  des  mots  d*un  idiome  moderne, 
eomme  dans  Texemple  suivant  pris  de  Michel  Morin, 
petit  poème  de  ce  genre  :  De  hranca  in  brancam  degrin- 
golcU,  atque  facit  poufl  Le  nom  de  macaroniques  vient 
d*un  certain  rapport  qu'on  a  trouvé  entre  les  bouffonne- 
ries de  haut  goût  que  ces  vers  expriment  et  le  mets  itsr 
Uen  appelé  macaroni,  dans  lequel  entrent  divers  ingré- 
dients. On  appelle  macaronée  un  poôme  en  vers  macaro- 
niques.Un  moine  italien  du  xvi*  siècle,  Théophile  Folengo 
de  Mantoue,  plus  connu  sous  le  nom  de  Merlin  Coccaie 
{Merlinus  coquus,  Merlin  le  cuisinier),  quMl  adopta  pour 
publier  une  sorte  d*épopée  burlesque  {Aventures  de  BcU' 
dus)  y  est  regardé  comme  Tinventeur  ae  la  poésie  maca- 
ronique.  Il  a  été  imité  en  France  par  Antoine  de  La  Sable 
(Àntonius  de  Arena)^  dont  on  a  un  récit  burlesque  de 
Texpédition  de  Charles-Quint  en  Provence,  et  par  Rémi 
Belleau,  qui  écrivit  contre  les  huguenots.  C*est  le  style 
macaronique  qui  fut  employé  par  Rabelais  dans  Pantor 
gruel,  lorsqu'il  voulut  railler,  au  mojren  des  doctes  dis- 
cours de  recoller  parisien,  le  pédantisme  universitaire, 
et  par  Molière  dans  la  cérémonie  du  Malade  imaginaire, 
où  il  tourna  en  ridicule  la  latinité  peu  savante  des  méde- 
cins de  son  temps.  V.  A.  Canningham,  Delectus  maca" 
ronicorum  carminum,  Edimbourg,  1801;  Nodier,  Du 
langage  factice  appelé  macaronique,  Paris,  1834.      B. 

MACASSAR  (Idiome).  F.  G^ésiens  (Idiomes). 

MACCHABÉES  (Livre  des).  V.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

MACCHUS,  personnage  des  Atellanes  (  F.  ce  mot).  Ce 
li*est  point  notre  Polichinelle  avec  sa  double  bosse,  mais 
le  pulcinella  napolitain,  paysan  gourmand  et  sot,  qui 
charme  encore  au|ourd*hui  les  lazzaroni  par  ses  saillies 
et  sa  poltronnerie,  et  dont  la  figure,  sous  le  nom  de  civis 
Atellanfis,  a  été  trouvée  dans  les  peintures  d^Herculanum. 

MACÉDOINE,  se  dit,  en  Littérature,  d*un  ouvrage  où 
se  trouvent  réunis  des  morceaux  de  tous  les  genres,  en 

}>rose  ou  en  vers,  sur  différents  sujets.  Nous  ignorons 
^origine  de  ce  mot  —  En  termes  de  Jeu,  une  Macédoine 
est  une  suite  de  parties  dans  laquelle  chacun  des  Joueura, 
tenant  les  cartes,  prescrit  l'espèce  de  Jeu  qu'on  va  Jouer 
gous  sa  main. 

MACÉDONIEN  (Dialecte),  une  des  variétés  de  Tan- 
denne  langue  grecque.  Ce  dialecte  fat  d'abord  appelé, 
suivant  Dlcéarque,  hellénique,  et  peut-être  fut-il  com- 
mun, dans  Torigine,  à  la  Macédoine  méridionale  et  à  la 
Thessalie,  où  habitèrent  longtemps  les  Hellènes  propre- 
ment dits  :  peut-être  aussi  est-ce  dans  ce  dialecte  antique 
que  les  po&ies  religieuses  de  Musée  et  d*Orphée  se  ré- 
pandirent parmi  les  peuples.  Le  dialecte  macédonien  dut 
subir  dans  la  suite  des  modifications  importantes,  en  par- 
ticulier vers  le  vni*  siècle  av.  J.-C,  loraque  Garanus  vint 
en  Macédoine  avec  une  colonie  argienne,  et  à  partir  du 
V*,  grftce  à  la  culture  intellectuelle  que  le  roi  Archélaûs 
s'efforça  de  propager,  mais  surtout  sous  le  règne  de  Phi- 
lippe et  d'Alexandre,  tous  deux  amis  des  lettres  et  des 
Iwaux-arts.  Ce  qui  rendit  au  dialecte  macédonien  son 
Importance  et  sa  célébrité,  ce  fut  la  conc|uète  de  l'Orient 
par  Alexandre;  il  exerça  aussi  quelque  influence  sur  les 
urecs  eux-mêmes,  et  finit  par  modifier  Jusqu'au  dialecte 
athénien  :  telle  fut  la  source  de  ce  que  les  critiques  ap- 
pelèrent langue  commune  ou  hêilénmue.  Mais  il  subit 


lui-même  en  Écrpte  et  en  Asie,  particulièrement  en 
Svrie,  des  modiflciEiAions  considérables,  d'où  provinrent 

ÎJusieura  dialectes  nouveaux,  dont  le  plus  important  fut 
e  dialecte  alexandrin.  On  n'a,  sur  le  dialecte  macédo- 
nien, que  des  données  assez  vagues  :  comme  particulsp 
rites,  on  cite  l'emploi  de  la  lettre  B  à  la  place  de  l'aspirée 
4>  ;  ainsi,  Bérénice  est  un  mot  de  forme  macédonienne, 
au  lieu  de  Phérémce  usité  dans  les  autres  dialectes.  Les 
Phrygiens  s'appelaient  aussi  chez  eux  Brygiens,  et  la  ville 
macédonienne  de  Bércea  eût  été  appelée  ailleurs  Phénea, 
Quant  aux  reproches  de  macédonisme  adressés  par  les 
grammairiens  aux  écrivains  postérieura  au  iv*  siècle  avant 
J.-C,  ils  portent  principalement  sur  des  néologismes,  on 
plutùt  sur  les  modifications  que  les  écrivains  de  cette 
époque  faisaient  subir  au  sens  de  certains  mots;  ainsi, 
ils  reprochent  à  Polybe  d'employer  le  mot  (^(iVi  (élan, 
impétuosité,  mouvement  accéléré)  dans  le  sans  de  me, 
inconnu  aux  Attiques,  et  nopeiiDoX^  dans  le  sens  de 
camp,  lorsque  ce  mot  avait  toujoun  signifié  jusque-là 
intercaUUion,  ou,  en  termes  militaires,  attaque  par  1$ 
flanc,  F.  Saumaise,  De  Linguâ  hellenisticâ^  cm  sit,  an 
fuerit,  1643;  Sturz,  De  Diaiecto  macedonicA  et  alexan- 
drinâ,  1808.  P. 

MACELLUM.  F.  Bodcrerib. 

MACÉRATION  (du  latin  macerare,  amaigrir),  se  dit  des 
austérités  de  tout  genre  (Jeûne,  discipline,  etc.)  qu'on 
exerce  sur  son  corps  par  esprit  de  pénitence. 

MACERIA.  F.  Appârbil. 

MACHECOULIS  ou  MACHICOULIS,  ouvertures  prati- 
quées dans  la  partie  inférieure  des  galeries  saillantes  au 
sommet  d'une  tour  ou  d'un  rempart,  de  telle  sorte  que, 
tout  en  étant  abrité  par  les  pjsrois  de  la  construction  en 
saillie,  on  pouvait  Jeter  des  pierres,  des  traits,  de  l'huile 
bouillante,  du  plomb  fondu,  etc.,  sur  la  tête  des  assail- 
lants qui  attaquaient  le  pied  des  murailles.  On  fait  venir 
ce  mot,  soit  de  masse  et  de  couler,  parce  que  les  ouy^- 
tures  servaient  à  faire  couler  des  masses  sur  les  assail- 
lants, soit  du  latin  mactare  collum,  briser  le  cou.  Les 
mâchicoulis  faisaient  partie  du  système  des  fortificatioDS 
au  moyen  âge;  l'emploi  n'en  devint  général  qu'au 
XIV*  siècle.  Ils  disparurent  avec  les  vieux  châteaux.  On 
en  peut  voir  au  palais  des  papes  à  Avignon,  aux  ch&teaai 
de  Sens,  de  Mehun,  etc.  B. 

MACHIAVÉLISME,  système  de  Politique  développé  psi 
Machiavel  dans  son  livre  du  Prince  (F.  ce  mot). 

MACHICOTAGE,  sorte  d'ornement  dont  on  chargeaj 
autrefois  le  plain-chant,  surtout  dans  le  rit  parisier 
C'était  une  addition  de  notes  qui  remplissaient  par  une 
marche  diatonique  les  intervalles  de  tierce  et  autres.  U 
machicotage,  dont  on  ne  s'abstenait  qu'à  l'office  des 
Morts,  était  exécuté  par  les  machicots,  ecclésiastiques 
inférieure  aux  bénéficiers  et  supérieure  aux  chantres  à 
gages.  L'étymologie  du  mot  est  incertaine. 

MACHINES.  Les  machines  sont,  pour  l'industrie,  des 
moyens  de  tirer  un  parti  plus  avantageux  des  forces  de  la 
nature.  La  puissance  musculaire  de  l'homme,  toujours 
proie  à  fonctionner  avec  intelligence  sans  appareil  inter- 
médiaire, a  été  pendant  longtemps  la  seule  utilisée: 
mais  elle  est  la  plus  coûteuse  de  toutes  les  forces  mo- 
'trices.  La  force  musculaire  des  animaux  est  d'un  prix 
inférieur  à  celle  de  l'homme;  réservée,  quant  à  présent, 
à  l'industrie  des  transports  et  à  faire  mouvoir  quelques 
mécaniques,  elle  a  déjà  trouvé  une  concurrence  redou- 
table dans  les  locomotives  et  les  locomobiles.  Après  les 
chutes  d'eau  naturelles,  la  vapeur  est  la  puissance  mo- 
trice la  plus  répandue  aujourd'hui,  surtout  dans  les 
localités  oh  abondent  les  matières  premières  et  où  le 
combustible  est  à  bas  prix.  —  Quand  la  valeur  vé- 
nale ou  prix -courant  des  produits  des  machines  reste 
la  même  malgré  cette  plus  abondante  production,  c'est 
le  producteur  qui  profite  de  l'utilité  produite  ;  quand  le 
prix-courant  baisse,  c'est  le  consommateur  qui  en  pro- 
fite.— L'introduction  d'une  nouvelle  machine  occasionne 
une  diminution  dans  la  somme  des  revenus  gagnés  par 
les  ouvrière,  Jusqu'au  moment  où  ils  parviennent  i^  occu- 
per leure  facultés  à  une  autre  partie  de  la  même  on  de 
toute  autre  production.  Le  revenu  des  entrepreneurs  ou 
capitalistes,  au  contraire,  en  est  augmenté.  Cet  effet  est 
momentané;  et,  pour  l'ordinaire,  après  pen  de  temps, 
les  producteure  pouvant  baisser  leure  prix  sans  y  perdre. 
le  revenu  du  consommateur  s'en  trouve  augmenté,  sans 
que  ce  soit  aux  dépens  de  personne,  et  la  demande  du 
travail  des  manouvriera  n'est  pas  moindre  Qu'auparavant. 
—  L'invention  des  nutchlnes  a  exercé  l'innuenoe  la  plus 
énergique  sur  le  développement  industriel  du  xix«  siècle. 
Ce  qui  distingue  surtout  les  machines  parmi  les  motesrs 


MAC 


1191 


MAC 


ifenqa*offire  la  Batnre,  c'est  de  pooTdr  être  employées 
ptrloat,  ea  umia  aaisonf  dans  toutea  les  branches  de 
nndastrie,  et  à  tous  les  degrés  de  force  réclamés  par  les 
eiigeoces  de  la  production.  C'est  arec  leurs  secours 
qu'ont  été  organisées  les  plus  grandes  manufactures  (  V,  cê 
mot).  Enfin,  appliquées  à  la  navigation,  elles  permettent 
de  lésliser  des  vitesses  de  24  kilom.  à  rheure. 

Quelques  faits  suffiront  pour  fidre  comprendre  Timpor- 
tiDoe  des  machines  :  il  fallait,  au  temps  d'Homère,  le 
travail  d'une  personne  pour  moudre  le  nié  nécessaire  k 
%  autres.  Le  moulin  à  ean  le  plus  simple  peut  moudre 
eo  on  four  autant  de  blé  que  150  hommes;  il  dépense 
10  fr.  par  jour,  tandis  oue  les  hommes  coûteraient  300  fr., 
et  rérônomie  de  290  rr.,  répartie  sur  une  quantité  de 
96  hectolitres  de  grain,  constitue  la  moitié  du  prix  du 
Ué  loi-même.  Le  moulin  de  Saint-BIaur,  près  Paris,  se 
eooiDose  de  40  meules  surveillées  par  20  ouvriers,  et  qui, 
es  24  heures,  réduisent  en  farine  720  hectolitres,  suffisant 
à  alimenter  72,000  personnes  :  ainsi,  280  ouvriers,  ré- 
partis dans  14  moulins  semblables  à  celui  de  Saint-Maur, 
pourraient  moodre  pour  un  million  de  personnes.  — 
Un  ouvrier  fileur  de  coton  confectionne  aujourd'hui 
3S0  fois  plus  de  fil  qull  n'en  faisait  en  1774.  Dans  la 
filature  du  Un,  qui  ne  date  guère  que  de  1820,  un  ou- 
vrier suffit  à  soigner  120  broches,  lesquelles  produisent 
aolant  et  de  plus  beaux  fils  que  240  flleuses.  On  cheval- 
vapeur  peut  faire  msrcher  500  broches  de  filature  avec 
les  machines  accessoires,  on  12  métiers  à  tisser  :  or, 
nn  cheval -vapeur  correspond  à  3  chevaux  de  trait  ou 
î\  hommes  de  peine.  Â.  L. 

■ACHoiis  DB  coBaRB,  Instruments  à  l'aide  desquels  les 
Andeos  lançaient  des  projectiles  ou  battaient  les  mu- 
railles des  places  fortes.  Les  Latins  donnaient  aux  ma- 
efaines  de  jet  le  nom  commun  de  tormenta  (de  tarquere^ 
tordre),  parce  que  le  Jet  des  projectiles  était  produit  par 
la  détente  de  cnns,  de  cordes  oti  de  fibres  végétales  tor- 
dues et  tendues  fortement;  les  principales  étuent  la  &a^ 
lak,  la  ccUajmitê,  Vhàlépolé,  le  scorpion  ou  onagre.  Les 
machines  de  brèche  peuvent  se  ramener  toutes  au  bHUr, 
Qoand  une  armée  s'avançait  en  bataille,  les  machines 
étaient  placées  sur  les  derrières,  et  tiraient  par-dessus 
les  rangs.  Il  y  avait  encore  des  machines  pour  couvrir 
les  troupes  qui  s'approchaient  des  murailles;  c'étaient  la 
krtw,  le  manUlêt,  la  vigne,  les  tours  roulantes.  Sur 
mer,  on  employait  le  dauphin,  le  corbeau,  etc.  Toutes 
les  machines  des  Anciens  disparurent  après  l'invention 
deFartillerie.  V.  Végèce,  De  re  militari;  Biton,  De  con- 
ttntetione  bdlicarum  machinarum,  et  Héron  d'Alexan- 
drie, De  constructions  et  msnsurà  manubalistœ,  dans 
les  MathemaHci  veteres,  Paris^  1693,  in-fol.  ;  Juste-Upse, 
Mioroattcdfiy  siœ  de  machints,  tormentis,  telis  librt  V; 
Bmccio,  De  mackims  bellicis,  Venise,  1572,  in-4«:  fllai- 
aeroy,  Traité  swr  Vart  des  sièges  et  sur  les  machines  des 
Anaens,  Paris,  1778,  in-8»;  Dureau  de  La  Bialle,  Polior- 
eéîiQue  des  Anciens,  Paris,  1819,  in-8%  et  atlas  in-4^ 

macbuies  bb  TsiATas,  machines  à'  l'aide  desauelles  on 
opère  SUT  la  scène  les  changements  de  décors,  les  trans- 
fonnations  à  vue,  et  tout  ce  qui  sert  à  l'illusion  du  spec- 
tacle. La  descente  des  nuages,  le  vol  des  personnages 
(pli  s'élèvent  dans  les  airs,  les  mouvements  des  flots,  la 
nancBovTB  des  trappes,  l'animation  des  animaux  en  car- 
ton ou  en  étofle,  le  tonnerre,  les  éclairs,  etc.,  sont  do 
ressort  du  machiniste.  Les  Anciens  ont  obtenu,  par  des 
mqyeos  qui  nous  sont  inconnus,  des  résultats  presque 
menreilleux.  Ds  imitaient  la  foudre,  Tincendie  ou  Vécrou- 
lement  des  maisons,  et  faisaient  descendre  les  Dieux  dans 
des  chars  ailés,  sur  des  griffons  et  autres  montures  fàn- 
taatiqoes;  il  y  avait  des  trappes  placées  sous  la  scène 
pour  l'apparition  des  Ombres,  des  Furies  et  des  Divinités 
infernales  (F.  Anapibsma).  Dans  le  Prométhée  enchaêné 
d^Eachyle,  le  chœur  tout  entier  arrivait  par  la  voie  des 
oûeeiix,  et  le  vieil  Océan  sur  un  dragon  ailé.  Les  com^ 
dies  d'Aristophane  supposent  toutes  sortes  d'inventions 
iagénienses,  puîsipi'on  y  voit  des  personnages  déguisés  en 
Siifpes,  en  grenouilles,  en  oiseaux,  en  nué&L  L'art  du  ma- 
chiniste n'exista  réellement  pas  au  moven  âge  :  ce  fut  seu^ 
lement  aux  derniers  temps  de  la  représentation  des  Mvs- 
ièm  qu'on  put  réaliser  quelques  efftjts  de  mise  en  scène 
oéeeiaaires  a  ces  pièces,  tels  que  l'éclipsé,  le  tremblement 
de  terre,  le  brisement  des  pierres  de  la  Passion,  etc.  Au 
ni*  tiède,  Léonard  de  Vinci  prépara  pour  le  Paradiso, 
{■terale  jouée  en  l'honneur  de  la  duchesse  de  Milan, 
les  machmes  qui  mettaient  en  mouvement  les  sept  phi- 
BAtes  aous  les  yeux  des  spectateurs.  Un  prospectus  lancé 
par  les  comédiens  du  Marais,  en  1648,  pour  annoncer 
rUlysse  dœss  Vile  de  Circé,  pièce  de  l'abbé  Boyer,  an- 


nonce, entre  autres  prodiges,  une  mer  figurant  l'agltatioa 
des  flots,  un  char  traîné  par  deux  dragons  et  s'envolant 
chargé  de  trois  personnes,  un  Jupiter  porté  sur  son  aklo 
et  lançant  la  foudre.  Dans  VÀndromède  de  Corneille 
(1682),  véritable  pièce  h  machines,  le  Pégase  monté  par 
Persée  était  un  coursier  qui  agitait  ses  ailes.  Ce  fut  l'Ita- 
lien Toricelli  qui  machina  les  spectacles  des  fêtes  de 
Mazarin  et  les  ballets  de  Louis  XIV.  Au  xvni*  siècle^  à 
l'Opéra  de  Paris,  on  imitait  le  tonnerre  au  moyen  d'une 
ou  deux  roues  dentelées  qu'on  faisait  mouvoir  sur  des 
planches  derrière  la  scène,  ou  à  l'aide  d'un  gros  tambour, 
que  manœuvrait  un  soldat  aux  gardes.  En  1713,  on  vit 
manœuvrer,  dans  le  ballet  des  Amours  déguisés,  un  na- 
vire équipé  et  tout  chargé  de  monde.  Servandoni  porta 
l'art  à  une  perfection' qui  semble  n'avoir  point  été  d^ 
passée  depuis  :  il  représentait  des  lunes  et  des  soleils, 
des  incendies,  des  flots  agités,  des  lacs  glacés  et  couverts 
de  neige,  des  forêts  enchantées,  etc.  De  nos  jours  on  a 
imité  en  machines  l'écroulement  et  l'incendie  d'un  palais 
(au  5*  acte  de  l'opéra  le  Prophète,  de  Scribe  et  Meyer- 
beer);  on  figure  des  inondations  qui  envahissent  toute 
la  scène.  —  Autrefois  l'Opéra  de  Paris  était  renommé 
pour  ses  machines  ;  tous  les  changements  de  décorations 
d'une  même  pièce  s'y  faisaient  toujours  à  vue.  Cette  ma- 
gnificence artistique  a  été  supprimée  depuis  1830,  par 
économie,  lorsque  l'Opéra  fut  abandonné  à  une  entre* 
prise  privée.  B. 

MACLE  (du  latin  macula,  marque),  en  termes  de 
Blason,  losange  formé  d'un  simple  trait  sur  le  fond  de 
l'écn.  —  On  &nna  aussi  le  nom  de  macles  aux  mailles 
de  haubert,  faites  en  losange,  ainsi  qu'aux  pierres  de 
croix  (lapides  crudferi^  cfui  se  trouvent  dans  les  ardoises 
et  auxquelles  la  superstition' attacha  une  origine  et  des 
propriétés  merveilleuses.  Ces  pierres  sont  des  prismes 
triangulaires,  présentant  sur  leur  tranche  une  croix  en- 
relief  de  couleur  bleue,  enfermée  dans  un  losange. 

MAÇONNERIE,  mot  qui  exprime  à  la  fois  l'ouvrage  du 
maçon  et  l'art  de  maçonner.  Il  s'applique  spécialement 
aux  constructions  faites  de  matériaux  de  petites  dimen-^ 
sions  (moellon,  meulière,  brique),  ou  avec  ces  matériaux 
mélangés  avec  la  pierre  de  taille,  par  opposition  à  la  con- 
struction toute  en  pierre  de  taille,  appelée  proprement 
appareil  {V.ce  mot).  Les  Modernes  sont  restés  lon^ 
temps  inférieurs  aux  Anciens  pour  les  travaux  de  maçon- 
nerie, non  qu'ils  possèdent  des  matériaux  moins  bons, 
mais  parce  qu'ils  ont  apporté  un  soin  moins  minutieux 
à  les  choi^r  et  à  les  assembler.  Les  murs  des  Anciens 
consistent  généralement  en  deux  parements  de  moellons 
ou  de  briques,  qui  formaient  les  surfaces,  l'intérieur 
étant  garni  en  blocage  ou  béton  ;  le  cube  du  mortier  y 
excède  souvent  celui  des  [fragments  de  pierre  qu'il  enve- 
loppe. La  bonté  d'une  construction  dépend  non-seulement 
du  choix  et  de  l'assemblage  des  matériaux,  mais  encore 
et  surtout,  quand  la  construction  est  en  petits  matériaux, 
de  la  qualité  du  mortier  (  V.  ce  mot).  La  maçonnerie  de 
pierres  de  taille  se  fait  par  assises  horizontales,  en  ob- 
servant d'assembler  les  pierres  aussi  bien  que  possible, 
d'en  garnir  avec  soin  les  ioints  avec  du  mortier  coulé  on 
fiché,  et  d'alterner  les  joints  verticaux.  Dans  la  maçon- 
nerie de  moellon,  on  s'attache  moins  à  ce  que  les  assises 
aient  une  horizontalité  parfaite  :  l'essentiel  est  que  les 
moellons  ne  soient  pas  inégaux,  qu'ils  soient  débarrassés 
des  parties  terreuses,  convenablement  ajustés  les  uns 
contre  les  autres,  placés  autant  que  possible  sur  leur  face 
la  plus  large,  pNariaitement  assis  sur  le  mortier,  et  tassés 
par  quelques  coups  de  marteau.  Quand  les  pierres  d*ap- 
pareil  ne  sont  employées  que  dans  les  parements,  il  faut, 

f^our  qu'elles  se  lient  bien  avec  la  maçonnerie  de  moel- 
on,  leur  donner  une  longueur  inégale  dans  le  sens  de 
l'épaisseur  du  mur,  les  placer,  comme  on  dit,  alternati- 
vement en  besace  et  en  boutisse.  Pour  la  maçonnerie  qui 
ne  doit  pas  supporter  un  poids  ou  une  poussée  considé- 
rable, on  emploie,  au  lieu  de  mortier,  le  pl&tre,  qui 
sèche  plus  vite;  si  les  constmcttons  sont  exposies  à  être 
mouillées,  on  se  sert  de  ciment  romain.  On  fait  ausf^i  de 
la  maçonnerie  où  la  terre  remplace  le  mortier,  et  même* 
de  laimaçonnerie  en  pierres  sèches  •  elles  ont  beaucoup 
moins  oe  soiidité.  Outre  la  grosse  maçonnerie,  dite  limoth 
sinage,  et  faite  par  les  ouvriers  appelés  Limousins,  parce 
que  la  plupart  viennent  de  la  province  de  ce  nom,  il  y  » 
la  maçonnerie  légère,  que  font  les  compagnons,  et  qui 
comprend  les  ouvrages  en  pl&tre,  crépi,  enduit,  cloisons, 
plafonds,  corniches,  etc. 

MACoiiNEiui  (Chambre  de  la).  V.  Chambre. 

MAçoNNBRiB  ( Franc-).  V.  Francs- maçons,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 


MAD 


1192 


HAD 


.  HAQONS,  uideane  corporation,  cpii  se  réunit  en  147G 
à  celle  des  charpentiers,  sous  rinvocation  de  S'  Biaise. 
L'apprentissage  darait  0  ans. 

L^    HACROCOSME.  K.  Microcoshb. 

m    MACUTAS,  monnaie  d'areent  des  possessions  porta- 

^^«lises  d*Afrique.  Dix  valent  2  fr.  85  c. 

Î  MADAME.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio» 
frraphM  et  S  Histoire, 
MADÉGASSE  ou  MALGACHE  (Langue),  langue  des  ha- 
I  bitants  de  Madagascar,  nommée  par  quelques  auteurs 
]  maléctuse  ou  malacassa.  Malgré  Topinion  contraire  de 
Balbi,  on  s*accorde  généralement  à  penser  que  cette 
kmgue  est  parlée  dans  Plie  entière,  bien  que  la  popula- 
tion appartienne  à  deux  races  distinctes,  Tune  africaine, 
Pautre  malaise,  et  que  des  montagnes  inaccessibles  et 
des  forêts  impénétrables  les  séparent  presque  complète- 
ment. Entre  les  diverses  parties  du  littoral,  entre  le  lit- 
toral et  l'intérieur,  il  n'existe,  pour  le  lan^^e,  que  des 
différences  d'accentuation  et  quelques  permutations  de 
consonnes  :  les  habitants  de  toutes  les  régions  de  Blada- 
nscar  se  comprennent  parfaitement.  Le  madécasse,  que 
Balbi  appelle  matait  africain,  offre  des  rapports  incon- 
testables de  signification  et  de  prononciation  avec  le  ma- 
lais de  rOcéanie.  Il  v  a  de  part  et  d'autre  un  grand 
nombre  de  racines  identiques,  et  même  de  mots  sem- 
blables, sauf  certains  changements  de  consonnes,  comme 
ceux  du  6  malais  en  v,  du  p  en  f,  du  k  en  h,  du  d  en 
r,  etc.  :  tels  sont  les  noms  des  objets  naturels  les  plus 
marquants,  les  noms  de  nombre,  les  noms  des  Jours  de 
la  semaine.  Guillaume  de  Humboldt  a  signalé  dans  le 
madécasse  un  certain  nombre  de  mots  sanscrits,  et  Du- 
mont-d'Urville  beaucoup  de  mots  de  la  langue  polyné- 
sienne ;  on  y  trouve  aussi  quelques  racines  sémitiques, 
dont  l'introduction,  due  à  des  rapports  avec  les  Arabes, 
est  relativement  récente;  enfin  Malte- Brun  a  reconnu 
plusieurs  mots  se  rapprochant  des  idiomes  cafres,  no- 
tamment du  betjouana.  L'idiome  madécasse  est  remar- 
3uable  sons  le  double  rapport  de  l'harmonie  et  de  la 
Ichesse  :  il  offre  une  grande  abondance  de  vovelles  so- 
nores, de  mots  compiosés  et  d'expressions  qui  rendent 
toutes  les  nuances  de  la  pensée.  11  n'y  a  dans  les  noms 
ni  nombres,  ni  genres,  ni  cas  ;  ce  sont  des  particules  qui 
lemplissent  le  rôle  des  flexions  de  la  déclinaison.  Le 
nombre  des  adjectifs  qualificatifs  est  très-restreint;  et 
cela  se  comprend  dans  une  langue  où  la  nomenclature  est 
^  infiniment  variée,  où  Ton  a,  par  exemple,  pour  exprimer 
les  cornes  d'un  bœuf,  des  mots  qui  diff&ent  selon  la 
forme,  le  volume,  la  direction,  etc.,  de  cette  putie  de 
',  l'animial.  Les  dix  premien  noms  de  nombre,  les  nombres 
i  100  et  1,000,  sont  seuls  exprimés  par  des  mots  simples; 
pour  il,  on  dit  dix  un,  pour  20,  deux  dix,  etc.  Toute  la 
coqjugalson  se  fait  au  moyen  de  particules  préfixes; 
c'est  par  elles  que  l'on  distingue  les  temps,  les  modes,  les 
voix,  et  que  l'on  peut  former,  avec  le  verbe  simple,  des 
verbes  passifs,  réfléchis,  réciproques,  potentiels,  causa- 
tifs,  etc.  Les  Madécasses  se  servent  de  l'alphabet  arabe 
assez  profondément  altéré.  Bs  possèdent  une  certaine 
littérature,  composée  surtout  de  chansons,  de  proverbes, 
de  légendes,  de  traités  sur  l'astrologie  et  la  médecine. 
Un  recueil  do  leun  chansons  fut  publié  à  Puis  par  M.  de 
Pomy  en  1787.  V,  Houtman,  Dictionnaire  malais  et  ma* 
dàcasse,  Amst.,  1603;  Medser,  Description  de  Vile  ifo- 
daqascar,  en  allem.,  Altenbourg,  1609,  in-4«;  Arthusius, 
CoUoquia  latino-^naUyica  et  madagascarioa,  Francfort, 
1613;  in-4«;  De  Flacourt,  Relation  de  VUe  de  Madagascar, 
et  Dictionnaire  de  la  langue  de  Madagascar,  Paris,  1658; 
Drury,  Madagascar^  Londres,  17i9,  in-8»;  Ghalland, 
Vocabulaire  françau -malgache  et  malgache -français, 
1773,  in-8o;  Bochon,  Voyage  à  Madagascar,  1791-1802, 
3  vol.  ;  Lesson,  Annales  maritimes,  année  1827  ;  Jacquet, 
Vocabulaire  arabe -malacassa,  dans  le  Journal  i»ta- 
Hque,  2«  série,  t  XI  ;  Freeman  et  Jobns,  Dictionnaire 
anplais-malgachê  et  malgache-anglais:  W.  Ellis,  Hts- 
Unre  de  Madagascar,  en  anglais,  Londres,  1838,  in-8<>; 
Dnmont-d'Urville,  Voyage  de  l'Astrolabe,  Paris,  1839, 
in-8*;  Eug.  de  Froberville,  Aoergu  sur  la  langue  mal- 
gâche,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  de  géographie, 
XI«  vol.,  «•  série,  1839.  ^--^    r     , 

MADELEINE  OÊdise  de  la),  à  Paris.  F.  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d^  Histoire, 

MADEUNIEBS.  V.  Madeb. 

MADEMOISELLE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnatre 
ie  Biographie  et  d'Histoire, 

MADEBIN.  V.  Madrb. 

MADONE  (de  l'iulien  Madonna,  contraction  de  mia 
4gnna,  ma  dame)«  nom  que  les  Italiens  donnent  à  la  | 


S^^  Vierge,  et  que  nous  avons  traduit  par  Notre-Dame 
MADBAGUE,  nom  des  parcs  établis  dans  la  Méditer 
nnée  pour  la  pèche  du  thon.  Dn  arrêté  du  9  thermidor 
an  IX  (28  Juillet  1801)  a  réglementé  la  pèche  à  la  ma- 
drague. 

M\DBE,  vase  à  boire  au  moyen  âge.  On  riq>pela{t 
aussi  madelin,  maderin,  mazelin.  Selon  les  uns,  le  rnadre 
serait  un  bois  d'érable,  et,  selon  les  autres,  une  sorte 
d'agate.  Les  fabricants  de  madrés  étaient  dits  madelinien 
ou  nuueliniers. 

MADBID  (Palais  royal  de),  en  Espagne.  Situé  dans  la 
partie  la  plus  occidentale  de  la  ville,  il  occupe  remplace- 
ment où  s'élevèrent  successivement  un  Alcazar  ou  forte- 
resse du  moven  ftge  et  un  château  construit  sous  Gharles- 
Quint  et  Philippe  IL  Philippe  V  avait  demandé  des  plans 
à  Juvan;  mais  les  conceptions  de  cet  architecte  furent 
Jugées  trop  grandioses  et  d'une  exécution  trop  coûteuse  : 
on  adopta  les  plans  de  son  élève  J.-B.  Sachetti,  de  Turin. 
On  se  mit  à  l'œuvre  en  1737,  et  le  palais,  dont  la  dé- 
pense s'éleva,  dit-on,  à  80  millions,  fut  inauguré  sous 
Charles  m,  en  1764.  L'édifice  forme  un  carré  de  132  met. 
de  côté,  dont  les  angles  sont  flanqués  de  corps  sallUmts 
qui  forment  pavillon  et  rompent  la  ligne  horizontale.  Les 
quatre  façades,  à  peu  près  semblables  dans  leur  arclti- 
tecture,  diffèrent  par  l'élévation  :  celles  du  S.  et  de  TË* 
ont  environ  30  met.  de  hauteur,  et  les  deux  autres  pres- 

3ue  le  double,  par  suite  de  la  déclivité  du  soi.  Le  res- 
e-chaussée,  en  pierres  à  bossages,  est  simple  et  sévère, 
tandis  que  le  corps  qu'il  supporte  est  léger  et  gracieux. 
Les  parties  en  retrait  sont  ornées  de  pilastres  à  chapi- 
teaux,  doriques;  celles  qui  font  saillie,  de  colonnes  ioni- 
ques. Les  espaces  compris  entre  les  colonnes  ou  les 
pilastres  sont  percés,  au  rei-de^haussée,  de  fenêtres 
surmontées  d'auvents;  au  premier  étage,  toutes  les  ou- 
vertures sont  ornées  de  riches  balcons  et  de  frontons 
alternativement  triangulaires  ou  ciroulaires,  tandis  que 
celles  des  deux  étages  supérieure  sont  oblongaes  et  sans 
ornement.  Une  large  corniche  cache  la  toiture  de  plomb, 
et  supporte  une  balustrade  en  pierre,  ornée  Jadis  des 
statues  d'une  multitude  de  rois  et  de  princes,  garnie  seu- 
lement aujourd'hui  de  grandes  urnes.  La  corniche,  les 
colonnes,  les  pilastres,  les  Jambages  et  les  frontons  des 
fenêtres,  en  un  mot,  tout  ce  qui  est  en  relief  et  sculpté 
est  en  pierre  blanche;  le  reste  des  constructions  est  en 
granit  rouge&tre.  Les  portes  et  les  fenêtres  sont  pour  la 
plupart  en  acajou.  Les  trois  portes  de  la  façade  princi- 

fiale,  au  S.,  conduisent  à  un  vestibule  ciroulaire,  d'où 
'on  passe,  par  un  large  portique  où  se  trouve  l'escalier, 
dans  la  cour  intérieure.  Cette  cour  est  carrée,  et  entourée 
d'un  portique  que  surmontent  deux  galeries,  l'une  vi- 
trée, au  1"  étage,  l'autre  découverte  et  garnie  d'une  ba- 
lustrade de  pierre  :  sous  les  arceaux  sont  les  statues  asses 
médiocrement  exécutées  des  empereurs  romains  nés  en 
Espagne.  L'escalier,  tout  en  marbre  noir  et  blanc,  est 
magnifique  :  à  partir  d'un  palier  orné  de  deux  lions  de 
marbre  blanc,  il  se  divise  en  deux  branches  parallèles 
qui  conduisent  à  la  Salle  des  Gardes.  La  cage  de  cet 
escalier  est  décorée  de  12  colonnes  d'ordre  composite, 
dont  les  chapiteaux  sont  formés  de  ch&teaux,  de  Iiods  et 
de  colliere  de  la  Toison  d'or.  Sur  la  voûte,  Conrad  Gia- 
cinto  a  peint  à  fresque  la  Monarchie  espagnole  rendant 
hommage  à  la  religion.  Tout  l'intérieur  du  palais  de  Ma- 
drid est  décoré  avec  une  magnificence  extraordinaire  :  oo 
doit  mentionner  surtout  la  Salle  des  Ambassadeun  et  li 
chapelle;  mais  partout  la  matière  l'emporte  de  beanooap 
sur  l'art,  et  les  distributions  ont  été  faites  avec  un  goût 
équivoque.  Les  tableaux  précieux  qui  se  trouvaient  dans 
les  divers  appartements  ont  été  transportés  au  Musée  pu- 
blic; il  n'y  a  plus  de  véritablement  admirable  qu'une 
collection  de  tapisseries  flamandes*  Un  grand  bâtiment 
renferme  de  somptueuses  voitures  de  gala,  qui  servent 
au  cortège  royal  dans  les  cérémonies  extraordinures. 
En  définitive,  le  palais  de  Madrid  est,  à  l'extérieur,  d'un 
aspect  imposant;  c'est  une  énorme  masse  qui  ne  manqae 
pas  de  mi^esté,  mais  sans  Jardins,  sans  eaux;  une  forte- 
resse où  plane  la  tristesse. 

MADRID  (Château  de),  château  de  plaisance,  situé 
vere  l'angle  N.-O.  et  Joignant  le  Bois  de  Boulogne,  près 
Paris.  Il  fut  bâti  par  un  architecte  inconnu  (on  a  supposé 
gratuitement  que  c'était  le  Primatice),  sur  l'ordre  de 
François  I*',  qui  venait  y  passer  librement  quelques-unes 
de  ses  Journées,  loin  de  sa  cour  et  au  milieu  d'un  groupe 
intime  de  savants  et  d'artistes.  On  le  nommait  Château 


HAD 


1193 


MA6 


de  n  prison  en  Espagne.  Le  château  de  Madrid,  qui  fut 
lendD  pendant  la  Hévolution  à  un  entrepreneur,  moyen- 
nuit  649,205.  livres  en  assignats,  et  détruit  en  grande 
pirtie,  8*élendt  au  centre  d*un  plateau  rectangulaire,  sur 
on  aoQbaoaement  contenant  des  offices  et  des  cuisines 
voûtées.  Cétait  un  bâtiment  entouré  de  fossés,  plus  long 
qœ  large,  et  à  4  étages,  dont  les  deux  premiers  avec 
portiques  en  arcades  ornés  de  colonnes  engagées.  L*en- 
tfée  principale  était  au  N.  ;  la  façade  postérieure  au  S. 
Quatre  petits  pavillons  saillants  divisaient  chacune  des 
laçades  en  trois  parties;  si*r  chacun  des  pignons  on  avait 
pratiqué  des  escaliers  en  vis,  dans  une  tourelle  ronde  et 
saillante.  Ce  qui  faisait  du  château  de  Biadrid  un  type 
unique  parmi  les  constructions  françaises  de  la  Renais- 
sance, (Tétait  le  syatème  de  décoration  en  terre  cuite  et 
ému'Uée  qu*on  avait  adopté  pour  les  façades,  et  même 
pour  1m  tuyaux  extérieurs  des  cheminées.  Cette  orne- 
mentation était  Tœuvre  de  Girolamo  délia  Robbia,  que 
Fruiçois  l*'  avait  mandé  de  Florence,  et  le  peuple  don- 
nait au  château  de  Uadrid  le  nom  de  chAtêou  de  fiOencê. 
U  décoration  intérieure  offirait,  comme  dans  les  autres 
.monuments  de  la  môme  époque,  un  mélange  capricieux 
de  mythologie  et  de  snlets  sacrés  :l  ainsi  on  avait  repré- 
leoté  dans  la  salle  principale  plusieurs  scènes  de  la  BibU 
et  des  Métmnorphoses  d*Ovide.  Les  restes  du  château  de 
Madrid  (nrent  démolis  sous  le  règne  de  Louis  XVIIL 

■anam  (Le  Bmoi  Retiro,  â].  V.  Bden  Rfinao. 

MADRIERS  (de  reapagnol  madeira,  bois,  planche), 
Dièces  de  bois  de  8  à  16  oentimèt.  d^épaisseur  sur  27  â 
M  centoèt.  de  largeur,  dont  on  se  sert  pour  faire  des 
pilotis,  asseoir  les  fondations  des  murs  dans  des  terrains 
ineottsistants,  soutenir  les  terres  dans  les  tranchées,  les 
fouilles  et  les  mines,  et  former  les  plates -formes  des 
batteries  d'artillerie. 

MADRIGAL,  petite  pièce  de  poésie,  ingénieuse  et  ga- 
linte,  qui  conaiste  seulement  en  quelques  pensées  tendres 
eiprimées  avec  délicatesse  et  précision. 

On  ne  sait  d*où  nous  est  venu  ce  genre  de  poésie,  et 
rél^ologie  du  mot  est  même  incertaine  ;  d'après  le  car- 
diiûl  BeDâ)o,  il  dériverait  de  mandra,  bergerie,  d'où  les 
halieos  auraient  tiré  mandritUe,  berger;  madriaiê  ou 
madrigalê  signifierait  alors  chant  à  Tusage  des  bergers, 
poérie  pastorale.  Selon  Ferrari ,  le  mot  serait  d*origi!ie 
espagnole,  et  viendrait  de  madruifar,  se  lever  matin  :  ma- 
iriçlu  voudrait  dire  chant  du  matin,  comme  sérénade, 
éioX  du  soir.  Huet  pense  que  le  madrigal  pourrait  bien 
DOQS  venir  des  Martegaux,  montagnards  provençaux, 
tnxqaels  on  attribue  une  espèce  de  poésie  appelée  de 
km  nom  martegcUt  comme  la  danse  appela  gavotte 
Dons  est  venue  des  Gavots,  montagnards  du  pays  de  Gap. 
Selon  Ménage  enfin,  il  ne  serait  pas  impossible  que  le 
mtdrieal  vint  d'une  ville  d'Espagne  ainsi  nommée,  comme 
notre  VaudevUU  a  pris  le  sien  du  Val  de  Vire,  qui  fut 
un  berceau.  Le  madrigal  n'est  soumis  à  aucune  règle 
Pttticnlière,  quant  au  rbythme  et  à  l'ordonnance  ;  ce  qui 
le  distingue,  c'est  le  naturel  et  la  facilité;  et  le  talent 
consiste  à  teaûi^  une  seule  idée  le  mieux  et  le  plus 
brièvement  possible.  Marot  en  offre  de  nombreux  mo- 
dales, tr^t-connus;  en  voici  un  qui  Test  moins,  adressé 
à  nne  jeune  femme  : 

C»  mliseaa  bous  tes  pas  cache  au  sein  de  la  terre 
Son  eoQrs  BUencIeux  et  ses  flots  oubliés  : 
Qu  ma  Tte  ineonnue .  obscure  et  solitaire 

Ainsi  passe  a  tes  pieds! 
Aux  portes  da  ooacbant  le  del  se  décolore , 
Le  Jour  n'éclaire  plus  notre  aimable  entretien  ; 
Kab  est-il  on  sourire  aox  ft^res  de  TAarore 

Plus  charmant  qae  le  tien? 

CBATBAUBBXAin>. 

Dn  reste,  notre  littérature  excelle  dans  ce  genre,  et, 
ïanni  les  poètes  qui  s'y  sont  le  plus  distingués,  tels  que 
Mellin  de  Salnt-Gelals,  le  marquis  de  la  Sfl3>Iière,  Fonte- 
neUe,  La  Mounoye,  Dorât,  Boufilers,  etc.,  Voltaire  est 
uoa  contredit  celui  oui  tient  le  premier  rang.  Il  faut 
^iter  que  le  madrigal  ne  tourne  a  la  fadeur  et  à  l'affé- 
terie :  c'est  le  défaut  qu'on  reproche  à  Domoustier  dans 
ses  Lauree  à  Emilie  sur  la  mythologie.  Dorât  et  son 
^le  voulurent  imposer  au  xvm*  siècle  leurs  madrigaux 
prétentieux  et  musqués;  mais  le  goût  public  en  fit 
promptement  Justice.  G. 

lunaiGAL,  composition  musicale  fort  à  la  mode  en 
Italie  aux  xvi*  et  xva*  siècles,  et  ainsi  nommée  parce 
<IQ'eIle  était  faite  sur  un  madrigal  poétique.  Les  madri- 
lux,  où  les  compositeurs  s'appliquaient  k  rattacher  l'ex- 
pvesiion  de  la  musique  au  sens  des  paroles,  étaient  écrits 


le  plus  souvent  à  4,  5  ou  6  voix,  dans  un  style  fyigné 
assez  sév&re,  dit  style  fnadrigalesqw,  et  étaient  exécutée 
dans  les  réunions  d'amateurs.  On  en  a  réclamé  l'inven- 
tion pour  Arcadelt,  qui  en  publia  un  recueil  en  15*79; 
mais  ils  étaient  connus  antérieurement.  Las  musiciens 
qui  ont  le  mieux  réussi  dans  ce  genre  de  composition 
sont  Lnca  Blarenrio,  Palestirina,  Pomponio  Nenna,  Mon- 
teverde,  Gesualdo,  prince  de  Venouse,  Tommaso  Pecci, 
Mazzochi,  et  Scarlatti.  Le  madrigal  fut  remplacé  dans  la 
musique  de  chambre  par  la  cantate  {V,ce  mot)  ;  ou  bien, 
comme  Lotti,  Marcello,  Dorante,  Steffani,  on  fit  des  ma- 
dripux  accompagnés,  qui  comportent  plus  de  liberté, 
mais  qui  exigent  plus  d'expression.  On  a  appelé  mo- 
drigaux  spirttuelt  ceux  qui  étaient  composés  sur  des 
paroles  pieuses  :  les  Psaumes  de  Marcello  sont  de  ce 
genre.  B. 

MiENIA  (Colonne).  V.  (Colonnes  voiiiniBrrrALBS,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire* 

ILENIANUM,  nom  que  les  anciens  Romains  donnaient, 
i®  à  une  sorte  de  bucon  ou  de  portique  faisant  saillie 
d'une  maison  sur  la  rue;  2"  à  une  portion  de  gradins 
d'amphithé&tre  comprise  entre  deux  précinctions. 

MAESTRO,  c-èpd.  en  italien  maître,  nom  que  l'on 
donne  aux  compositeurs  de  musique. 

MAFRA  (Palais  de),  immense  édifice  situé  à  26  kilom. 
N.-O.  de  Lisbonne,  et  qui  est  à  la  fois  église,  palais  et 
couvent*  Un  Allemand,  Jean-Frédéric  Ludovici,  en  fut 
l'architecte,  sous  le  règne  de  Jean  V;  on  y  employa,  pen- 
dant 13  ans,  de  1717  à  1730,  de  vingt  à  vingtrcinq  mille 
ouvriers.  Le  monument  forme  un  carré  régulier,  de 
245  met.  sur  chaque  face.  La  façade  principale,  qui  est  à 
l'O.,  est  divisée  en  trois  corps  distincts  de  bâtiments  :  la 
partie  centrale,  ou  l'église  ;  la  partie  méridionale ,  rési- 
dence de  la  reine,  et  ut  partie  septentrionale,  résidence 
du  roi.  Du  pavé  à  la  plate-bande  des  terrasses,  l'élévation 
est  de  30  met.  Les  gros  pavillons  carrés  qui  sont  aux 
angles  de  la  façade  ont  près  de  30  met.  de  côté,  et  dé- 
passent de  25  met  le  bord  des  terrasses  ;  leur  soubasse- 
ment en  talus  plonge  dans  un  fossé  profond.  Les  deux 
palais  ont  trois  rangs  de  fenêtres,  distingués  par  des  ar- 
chitraves d'un  ordre  différent.  Dans  le  palais  du  roi,  on 
remarque  :  la  salle  du  baisemain,  décorée  de  belles 
fresques;  la  salle  à  manger,  meublée  de  dressoirs  des 
XIV*,  XV*  et  xvi*  siècles,  provenant  de  couvents  suppri- 
més; un  salon  garni  de  tableaux  de  peintres  portugais 
modernes;  la  chapelle  privée,  ornée  avec  une  extrême 
richesse.  Les  appartements  de  la  reine  sont  de  tous  points 
magnifiques,  soit  comme  ameublement,  soit  comme  or- 
nementation. L'entrée  de  l'église  est  un  portique  d'ordre 
ionique  à  fronton,  flanqué  de  deux  tours  qui  s'élèvent  à 
68  met.  ;  les  cloches  que  renferment  ces  tours,  y  compris 
celles  du  carillon,  fabriquées  à  Liège,  sont  au  nombre  de 
115.  Le  dôme  qui  se  dresse  au  milieu  de  l'église  est 
une  imitation  heureuse  de  celui  de  S*-Pierre  de  Rome  ; 
l'énorme  pierre  qui  en  ferme  la  voûte  au  centre  est 
percée  de  8  lucarnes,  et  supporte  une  croix  de  bronze  pe- 
sant, avec  l'appareil  qui  la  consolide,  5,000  kllogr.  L'in- 
térieur de  relise  est  d'un  luxe  effiréné;  il  y  a  une  pro- 
fusion incroyable  de  colonnes,  de  niches,  de  statues ,  de 
bas-relifs,  de  mosaïques  et  de  dorures.  La  sacristie, 
tapissée  de  marbres  précieux,  contient  des  ornements  sa- 
cerdotaux d'une  roa^ificenco  sans  égale.  Quant  aux  bl^ 
timents  du  couvent,  on  y  compte  870  pièces,  300  cellules, 
5,200  portes  et  fenêtres.  En  1808,  un  corps  de  1S,000  Fran- 
çais put  y  loger  à  l'aise,  et  a^)ourd'hul  l'École  militaire 
ae  Portugal  y  est  installée.  II  faut  v  signaler  :  la  chapelle 
particulière  des  moines,  très-richement  décorée;  une 
autre  église,  dite  des  Morts;  l'infirmerie,  longue  salle 
voûtée,  dont  le  fond  est  occupé  par  un  autel,  et  où  chaque 
cellule  présente  deux  tableaux  en  faïence  qui  représen- 
tent le  Christ  et  la  Vierge;  la  bibliothèque,  salle  d'une 
beauté  rare,  dallée  en  marbre,  couverte  d'une  voûte  à 
compartiments  et  d'une  coupole,  avec  galeries  de  bois 
sculpté  et  tribunél^  soutenues  par  des  consoles  d'une  ad- 
mirable exécution. 

MAGADE ,  instrument  de  musique  à  cordes  des  An- 
ciens, inventé,  dit  Athénée,  par  les  Lydiens.  Cétait  nne 
sorte  de  harpe.  Euphorion ,  dans  son  livre  Sur  les  jeux 
Isihmiques,  nous  apprend  que,  par  la  suite,  eUe  changea 
de  forme  et  prit  le  nom  de  samlmque  (V*  ce  mot). 

MAGADHA  (Alphabet),  le  plus  ancien  système  d'écri- 
ture ou'on  ait  trouvé  jusqu'à  présent  dans  l'Inde.  Tel  que 
le  présentent  les  inscriptions  qui  se  rencontrent  dans  le 
Bihar,  Il  a  36  lettres.  H  est  employé  pour  le  magadhi 
qui  est  un  des  dialectes  du  prdtrit  (F.  ce  mot)» 

MAGAS.  V.  GiTHAHi  et  Lysi. 


HAG 


119i 


MAG 


MAGASIN  (de  Tanbe  makhian.  trésor),  local  daos  le- 
quel on  Tenferme  des  marchandises.  Dans  un  sens  plus 
restreint,  magaàn  a  remplacé  le  mot  boutique,  qui  est 

Iugé  moins  élégant,  et  dont  s*offenserait  ai:^urd*hui 
*amour^propre  des  marchands. 

MAGASIN,  mot  qui  s'est  introduit  au  siècle  dernier  dans 
la  littérature,  pour  désigner  diTers  recueils,  et  qui  fut 
importé  d'Angleterre.  Toutes  les  sciences,  tous  les  arts 
furent  mis  en  magasins,  et  beaucoup  de  ces  magasins 
■ont  vides  ou  assez  mal  remplis.  M '^*  Leprince  de  Beau- 
mont  seule  a  laissé  une  collection  estimable,  le  Magasin 
des  Enfants.  Un  recueil  sérieux  et  estimé  parut  au  com- 
mencement de  notre  riècle  sous  le  nom  de  Magasin  Et^ 
cyclopédique;  nous  STons  eu,  en  1859-00,  sous  le  nom 
de  Magasin  de  librairie,  une  publication  périodique,  qui 
s*est  depuis  transformée  en  Revue  nationale.  L'ouvrage 
le  plus  utile  pour  les  connaissances  pratiques  qu'il  répand 
est  le  Magasin  pittoresque,  dont  le  début  remonte  à 
i833.  B. 

lAAGASINAGE ,  ce  que  les  marchands,  négociants  et 
commissionnaires  passent  en  compte  à  leurs  correspon- 
dants, pour  l'occupation  momentanée  par  des  marchan- 
dises qui  leur  appartenaient.  —  Les  propriétaires  des 
marchandises  qui  ont  été  déposées  dans  les  magasins 
des  Douanes  payent  un  drot^  de  magasinage  de  1  p.  100 
de  la  valeur.  Le  droit  n'est  que  de  ift  p.  100  sur  les  ob- 
jets déchargés  par  suite  d'une  relâche  forcée  et  rechargés 
faute  de  vente.  Le  droit  de  1  p.  100  est  dû,  après  3  mois 
d'entrepôt,  sur  les  marchandises  provenant  de  confis- 
cation. 

MAGASINS  GÉNÉRAUX,  créés  par  décret  du  21  mars 
1848,  afin  de  pourvoir  aux  nécessités  d'une  crise  com- 
merciale, et  de  procurer  d'urgence  au  commerce  les  res- 
sources de  crédit  dont  il  avait  besoin.  Aux  termes  de  la 
loi  du  28  mai  1858,  ils  peuvent  recevoir  les  matières  pre- 
;  mières,  les  marchandises  et  les  objets  fBJ>riqué3  que  les 
^  négociants  et  les  industriels  veulent  y  déposer.  A  chaque 
récépissé  est  annexé  un  UHirrant  ou  bulletin  de  gage; 
l'un  et  l'autre  peuvent  être  transférés  par  voie  d'endosse- 
ment (  V.  WARRAirr).  La  môme  loi  autorise  la  vente  vo- 
lontaire, aux  enchères  et  en  gros,  de  certains  produits 
par  le  ministère  des  courtiers,  sans  l'intervention  du 
Tribunal  de  commerce. 

MAGDEBOURG  (  Cathédrale  de).  C'est  un  monument 
du  passage  de  la  période  byzantine  à  la  période  ogivale. 
L'église  fondée  par  Otbon  le  Grand  ayant  péri  en  1208, 
on  édifia  l'église  actuelle,  qui  ne  fut  consacrée  qu'en 
1363.  Elle  a  lld",66  de  longueur;  le  toit  de  la  nef  at- 
teint une  hauteur  de  37  met.  ;  la  tour  du  nord,  achevée 
en  1530,  s'élève  à  110  met.  au-dessus  du  sol.  On  trouve 
trois  &ges  successifs  de  construction  dans  les  arcades 
du  chœur,  dans  celles  de  la  nef,  et  dans  les  fenêtres  de 
l'étage  supérieur.  Les  arcades  du  chœur  ont  des  ogives 
très-aigués;  celles  de  la  nef,  destinées  à  être  cintrées, 
et  réduites  après  coup  en  ogives,  présentent  des  écarte- 
ments  excessifs;  les  fenêtres  seules  sont  construites 
d'après  les  règles  de  l'architecture  ogivale,  qui  semblent 
n'avoir  pénéu^  qu'assez  tard  dans  la  Saxe.  Le  chœur  mé- 
rite une  attention  toute  particulière  :  il  présente  quatre 
étages  superposés;  les  ogives  aisués,  qui  forment  le  plus 
bas,  se  perdent  dans  un  secondf  étage,  dont  les  compar- 
timents sont  séparés  par  quatre  colonnes  corinthiennes 
en  granit  gris,  en  porphyre  rouge,  en  vert  antique,  et  en 
porphvre  rose,  supportées  par  des  consoles  que  forment 
des  faisceaux  de  colonnettes,  et  encadrant  de  petites  tri- 
bunes carrées;  le  3*  étage  se  compose  de  grandes  tri- 
bunes, entre  lesquelles  apparaissent  des  statues  byzan- 
tines; le  4*  est  rempli  par  de  larges  fenêtres.  Dans  le 
pourtour  du  chœur  sont  pratiquées  des  chapelles  qui, 
rondes  à  leur  base,  deviennent  polygonales  en  s'élevant. 
Le  Jubé,  construit  au  commencement  du  xvi*  siècle,  offre 
les  formes  les  plus  complexes  du  s^le  flamboyant.  La 
chaire,  de  style  Renaissance,  a  été  sculptée  par  Sébastien 
Ertler.  On  remaroue,  à  l'extrémité  occidentale  de  l'édi- 
fice, un  beau  tomoeau  en  bronze,  de  Peter  Vischer. 

MAGDBBouRG  (Ceuturies  de).  V,  Cntroaus,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Histoire. 

MAGHOL.  V.  le  Supplément. 

MAGISME  ou  MAZDEISME,  religion  de  Zoroastre. 
F.  Zbnd-Avbsta. 

MAGISTER,  mot  latin  qui  veut  dire  maitre,  et  dont 
on  faisait,  dans  les  anciennes  Universités,  un  titre  pour 
les  docteurs  en  théologie.  H  ne  s'emploie  plus  que  par 
ironie,  en  parlant  d'un  maître  d'école  de  village. 

MAGISÎIIAT,  nom  qui  convient,  en  un  sens  général, 
à  tout  officier  ou  fonctionnaire  exerçant  quelque  portion 


de  la  puissance  publique,  dans  l'ordre  adminfetralif  ou 
dans  l'ordre  Judiciaire.  Dans  le  langage  ordinaire,  il  a 
un  sens  restreint,  et  s'applique  seulement  aux  membres 
de  l'ordre  Judiciaire.  Ceux-ci ,  sauf  les  Juges  de  paix  et 
les  officiers  du  ministère  public,  sont  inamovibles  :  tou- 
tefois, un  décret  du  l*'  mars  1852  a  fixé  l'âge  où  ils  sont 
mis  de  plein  droit  à  la  retraite  (75  ans  pour  les  membres 
de  la  Cour  de  cassatioo,  70  ans  pour  ceux  des  Cours  im- 
périales et  des  tribunaux  de  1^  instance). 

MAGISTRATURE,  se  dit  tantôt  de  l'ordre  des  mag^ 
trats,  tantôt  de  la  dignité  et  des  fonctions  du  magistrat. 
Dans  l'organisation  Judiciaire,  on  distingue  la  magistra- 
ture assise^  composée  des  conseillers  et  Juns,  et  la  mor 
gistrature  debout,  qui  forme  le  Parquet  (V.  ce  mot), 

MAGNANERIE  (du  languedocien  magnan,  mangeur, 
qualification  par  laquelle  on  désigne  le  ver  à  soie),  b&ti- 
ment  où  l'on  élève  des  vers  à  soie.  Il  doit  être  sur  un  pla- 
teau bien  aéré,  avec  fenêtres  au  levant  et  au  couchant  D 
se  compose  d'un  rez-de-chaussée  et  d'un  premier  étage. 
Cet  étage,  où  sont  les  vers  à  soie,  se  nomme  Vatelier  : 
une  étendue  de  14  met.  de  long  sur  5  de  large  suffit  à 
400,000  vers.  On  pose  ces  animaux  siur  des  daies  espa- 
cées à  distances  égales;  il  faut  une  hauteur  de  4  met 
pour  établir  7  étaçes  de  claies.  Au  milieu  de  l'atelier  est 
ménagée  une  petite  chambre  carrée,  qui  communique 
avec  le  rez-de-chaussée  au  moyen  d'une  tn^pe;  «'est  par 
là  qu'on  monte  les  feuilles  de  mûrier  destinées  à  la  nour- 
riture des  vers,  et  qu'on  desosnd  celles  qui  leur  ont  servi 
de  litière.  Au  rez-de-chaussée  se  trouve  une  chambre  à 
air,  contenant  un  calorifère  et  des  caisses  en  cuivre  ou 
en  zinc  où  l'on  met  de  l'eau  bouillante  ou  de  la  glace, 
selon  que  l'on  veut  donner  de  l'humidité  à  l'air  de Tate- 
lier  ou  le  refroidir  :  cette  chambre  communique  avec  le 
premier  étage  par  des  tuyaux  et  par  une  chenôinée  com- 
mune, au  haut  de  laquelle  est  un  ventilateur  qui  renou- 
velle l'air  de  l'atelier.  Le  thermomètre  de  l'atelier  doit 
marauer  20»  Réaumur  pendant  les  cinq  premiers  jours 
de  l'éducation  des  vers  à  soie,  et  20°  pendant  les  19  autres 
Jours  ;  l'hygromètre  destiné  à  régler  l'emploi  du  ventila- 
teur doit  toujours  marquer  de  70**  à  85**.  Au  rez-de-chaus- 
sée est  une  étuve  où  Ton  fait  éclore  les  œufs. 

MAGNÉTISME  ANIMAL.  On  donne  ce  nom  à  un  en- 
semble de  phénomènes  produits  dans  le  système  ner- 
veux, et,  par  suite,  dans  la  sensibilité,  l'intelligence,  l'ac- 
tivité, l'action  musculaire  et  même  toutes  les  fonctions 
de  l'économie  animale  d'un  individu,  par  les  gestes,  la 
volonté  exprimée  ou  secrète  d'un  autre  individu.  On  a 
cru  pouvoir  attribuer  les  effets  du  magnétisme  animal  à 
un  uuide  particulier,  transmis  d'un  corps  à  un  autre, 
sous  certaines  conditions.  L'existence  de  ce  fluide  n'est 
pas  démontrée;  cependant,  certains  effets  qui  lui  sont 
attribués  ont  tant  d'analogie  avec  d'autres  dont  les  causes 
sont  bien  connues,  tels  que  ceux  qui  résultent  du  sys- 
tème nerveux,  de  la  transmission  de  certaines  maladies, 
et  même,  à  quelques  égards,  de  la  force  vitale,  de  l'élec- 
tricité galvanique,  etc.,  qu'on  est  porté  à  croire  à  l'exis- 
tence de  ce  fluide.  D'autres  ont  attribué  les  dfets  du 
magnétisme  animal  à  la  crédulité,  à  l'imagination,  i 
l'empire  oue  prennent  de  prétendus  magnétiseurs  sur  des 
espnts  faibles  ;  de  là  le  charlatanisme  et  le  décri  souvent 
mérité  du  magnétisme  animal. 

On  trouve  quelque  idée  de  ce  magnétisme  dès  le 
XVI*  siècle,  chez  le  médecin  Paracelse,  ches  J.  Roberti , 
et  naturellement  chez  les  illuminés  Van  Helmont,  Robert 
Flud,  chez  le  Jésuite  Kircher  et  d'autres  encore  ;  mais  ce 
fut  le  médecin  Mesmer  qui  vint  en  France  attirer  sur  cet 
agent  une  attention  toute  particulière,  en  1778.  Tous  les 
èdres,  selon  Mesmer,  sont  plongés  dans  un  océan  de 
fluide  au  moyen  duquel  ils  agissent  les  uns  sur  les 
autres.  L'homme  peut  concentrer  ce  fluide  et  le  diriger 
sur  ses  semblables  ;  c'est  un  moyen  de  guérir  immédiar 
tement  les  maux  de  nerfs  et  médiatement  lea  autres 
maux.  Par  analogie  avec  les  attractions  de  l'aimant  ou  du 
magnétisme  minéral,  Mesmer  qualifia  cette  influence 
de  magnétisme  animal,  L'Académie  de  médecine  voulut 
s'opposer  à  l'emploi  d'un  moyen  d'une  efficacité  si  dou- 
teuse, et  une  commission  fut  nommée,  composée  de  mé- 
decins et  de  membres  de  l'Académie  des  sciences;  le 
rapport,  rédigé  par  Bailly,  l\it  contraire  au  magnétisme. 
Scnil,  M.  de  Jussieu  déclara,  dans  un  écrit  particulier, 
qu'il  regardait  comme  réels  les  effets  du  magnétisme,  et 
qu'il  pouvait  être  utilement  employé  comme  moyen  de 
guérison.  En  faisant  largement  la  part  du  charlatanisme, 
on  ne  peut  nier  certains  effets  dont  la  cause  est  jusqu'à 
présent  restée  inexpliquée,  et,  si  le  magnétisme  animal 
eit  encore  un  mystère,  il  ne  s'ensuit  pas  qu'il  Adlle  le 


MAH 


llfl 


MAH 


tÊÊt  abMhmieBt.  On  a  cherché  à  txfXkfomt  par  le  m»« 
métiame  animal  certains  phénomènes  frappants  de  l'an* 
Sqnité  et  des  temps  modernes,  comme  le  ainum  de  So- 
oîte,  la  diYina|ion,  la  sibylle,  la  pythie,  les  prophètes  et 
les  Toyams,  les  augures  dans  les  antres  de  Tropnonius  et 
d^Escnlspe,  les  conynlsionnaires  des  Gévennes  et  de 
S*-Médard  ;  cette  explication  n'est  pas  de  nature  à  lerer 
tous  les  doutes.  Deux  des  disciples  de  Mesmer,  les  frères 
Pay-Ségur,  établirent  à  son  exemple  un  baquet  magné» 
UqiÊÊ;  mais,  au  lieu  d*exciter  des  crises  nerveuses,  ce 
ipii  srrÎTait  fréquemment  avec  Mesmer,  ils  déterminaient 
on  Mouieil  durant  lequel  le  magnétisé  a  la  Tue  inté- 
rioore  de  son  corps  et  de  celui  de  la  personne  avec  la- 
quelle il  est  en  rapport  ;  quelquefois  même  cette  vue  dé- 
passe la  portée  des  sens.  C'est  par  cette  porte,  çui  tient 
de  près  an  mvsticisme,  que  le  magnétisme  anmial  est 
entré  dans  le  domaine  du  charlatanisme.  De  nos  Jours,  il 
senible  reprendre  quelque  crédit  sous  le  nom  d*  Ayimo- 
tismê,  ou  sommeil  nerveux,  d'i^rès  des  expériences  fiûtes 
à  rhôpital  Necker  par  MM.  Azaur  et  Broca,  expériences 
qui  furent  l'objet  d'un  rapport  du  docteur  Velpeau  à 
l'Académie  des  sciences. 

On  a  écrit  de  nombreux  volumes  sur  le  magnétisme 
animal  dans  presque  toutes  les  langues  de  rEurope. 
F.  entre  autres  :  les  Mémoires  9t  ^ropontions  de  Mesmer, 
ks  écrits  du  fiaarcruis  Puy-Ségur,  les  Atmales  du  magné- 
titm,  la  Biblwthê(i%tê  du  mt^nétitme,  VBermèg,  les  An- 
noiêt  de  la  Société  de  Strasbourg  et  de  Metz  ;  le  Dietion^ 
mr$  de  médecine  de  Nysten,  revu  par  MM.  Littré  et 
Ch.  Robin  ;  /h*  magnétisme  animal ,  suivi  de  Considéra- 
lions  sur  t'exiase,  i>ar  le  docteur  Bertrand;  Observations 
particulières  de  vision  magnétique,  rapport  à  l'Académie 
de  médecine  par  le  docteur  Gerdv,  dans  sa  Physiologie 
fhilosophique  des  sensations  et  de  l'intelligence,       R. 

MAGNIFICAT,  cantique  de  la  S^*  Vierge,  qui  nous  a 
été  conservé  dans  l'Évangile  de  S^  Luc,  et  que  l'on  chante 
aox  vêpres.  Marie,  étant  allée  visiter  sa  cousine  ÉUsabeth 
quelque  temps  aprto  la  Conception,  répondit  à  ses  féli- 
citations par  le  cantique  Magnificat  anvnameaDominum 
(Mon  àme  glorifie  le  Seieneur),  dans  lequel  elle  remer- 
ciait Dieu  de  l'avoir  choisie  pour  être  la  mère  du  Sauveur. 

MAGOT,  nom  donné  à  d(es  figures  grotesques  en  por- 
oelaine  ou  en  talc,  qui  nous  viennent  de  la  Chine. 

MAGREBIN  (Dialecte),  nom  qu'on  donne  à  l'arabe  des 
Etats  barbai^eeques,  mélangé  de  mots  berbères  et  eu- 
ropéens. • 

MAGUELONNE  (Église  de).  Cette  église,  autrefois  ca- 
thédrale, est  en  rume.  Elle  fut  bAtie  de  1048  à  1178,  en 
ionne  de  croix  ladne.  La  façade  occidentale,  terminée  en 
ftooton,  présente  une  fenêtre  romane  à  colonnettes , 
dont  rarchivolte  est  formée  de  pierres  noires  et  blanches, 
et  une  porte  ogivale,  dont  le  linteau  est  orné  de  rinceaux 
élégants.  Les  pieds -droits  de  la  porte  sont  flanqués  de 
deu  bas-reliefe  grossiers,  représentant  S^  Pierre  et 
S' Paul  ;  la  scalpture  du  ^mpan  représente  le  Christ  sur 
on  trône,  entouré  des  attributs  des  Évangélistes.  Du  côté 
Mptentrional,  une  tour  dite  du  S^  Sépulcre  s'élève  encore 
Ki-deesus  du  comble  de  l'édifice.  Le  toit,  auquel  on  ar- 
rive par  un  escalier  appuyé  contre  le  mur  de  la  nef,  est 
eoovert  en  larges  dalles.  L'intérieur  de  l'église  ne  pré- 
sente qu'une  nef,  avec  deux  chapelles  dans  les  transepts, 
et  une  troisième  pratiquée  dans  le  mur  méridional,  et 
sous  une  tour  rmnée.  Les  voûtes,  d'une  forme  ogivale 
pea  pronoÉcée ,  sont  soutenues  par  des  arcs-doubleaux 
qui  reposent  sur  de  hautes  colonnes  engagées.  Une  large 
tribone,  destinée  autrefois  aux  chanoines,  occupe  la  plus 
gnade  partie  de  la  nef.  Le  chœur,  terminé  par  une 
Toute  en  abside,  est  orné  de  trois  fenêtres  romanes.  On 
ranarque  enfin  dans  cette  église  quatre  autels  quadran- 
gnlaires  à  table  de  marbre ,  un  sarcophage  qu^on  croit 
être  du  V*  ou  du  VI*  siècle,  et  deux  tombeaux  ogivaux  du 
nv*  et  du  xv*. 

MAGYARE  (Langue).  F.  Hongboise. 

MAHABHARATA ,  c-4-d.  le  Grand  bardU  (ce  mot  mo- 
derne traduit  assez  exactement  le  mot  sanscrit ,  et  le  nom 
de  bhârata  était  donné ,  dès  les  temps  les  plus  anciens 
da  llnde,  aux  poëtes  qui  composaient  des  vers  et  des  re- 
dis héroïques,  anx  bardes)^  poème  épique  des  Indiens, 
fé  n'est  connu  dans  son  entier  en  Europe  que  depuis 
1839,  par  l'édition  qui  en  fut  alors  publiée  à  (^cutta 
(4  vol.  in  4*);  on  en  connsissait  dé|à  le  sommaire,  et  plu- 
aieors  fragments  avaient  été  imprimés  avec  leur  traauc- 
tioD  aolt  en  latin,  soit  dans  quelqu'une  des  langues  mo- 
tenes,  par  exemple,  la  Bhaguat  Geeta  (Bhagaioad-GUà) 
de  WiltiDs  (1785),  le  Nalus  {Nala)  de  Bopp  (1819),  et 
le  Muge  avec  diren  épisodes  (1839).  Ce  poème,  dans  sa 


totalité,  ne  reitfenne  pas  moins  de  850,000  vers,  géné- 
ralement partagés  en  distiques  ou  çlôkas  de  32  syllabes 
chacun  :  ces  3x  sylhibes  forment  dieux  vers  de  i6,  paiw 
tagés  eux-mêmes  en  deux  hémistiches  de  8.  C'est  là  le 
vers  épique  de  la  poésie  sanscrite  ou  classique  des  In- 
diens. Mais  parfois  aussi ,  quand  le  mouvement  de  la 
pensée  l'exige,  le  vers  s'allonge  on  se  raccourcit,  et 
prend  une  allure  plus  ou  moins  lyrique;  c'est  ce  que  l'on 
remaraue  surtout  dans  les  parties  du  poëme  que  l'on 
considère  comme  relativement  modernes.  Tout  l'ensemble 
de  l'épopée  se  partage  en  18  chants  ou  Parvas,  et  ren- 
ferme comme  complément  le  poème  appelé  Barivansa 
(F.  ce  mot).  Si  l'on  retranche  les  additions  évidentes  et 
que  l'on  s'en  tienne  à  l'édition  imprimée,  le  Mahâbkâ^ 
rata  renferme  encore  314,778  vers;  mais  comme  die 
contient  le  Barivansa,  dont  l'étendue  est  de  32,748  vers, 
le  grand  poème  se  trouve  réduit  à  182,030  vers,  propop> 
tion  qui  doit  être  elle-même  considérablement  amoindrie 
par  la  critique. 

Le  s^Jet  fondamental  du  poème  est  la  guerre  des  Cou- 
rons et  des  PAndous  en  Pantchàlas  au  scjet  de  la  supré- 
matie royale  de  l'Inde.  Les  adversaires  sont  les  fils  de 
deux  frères,  Pàndou  et  Dhritaràshtra,  descendants  du 
dieu  de  la  Lune.  Dhritarftsthra  avait  cent  fils,  dont  l'alné* 
Duryôdhana,  était  le  plus  animé  contre  ses  cousins; 
ceux-ci  étaient  au  nombre  de  cinq,  dont  les  trois  idnés 
avaient  pour  mère  Prithà  ou  Kuntf,  et  étaient  des  incar- 
nations divines,  YudhistMra  de  Dharma  ou  la  Justice, 
BMmà  de  VAyu  ou  le  Vent,  Arjuna  dlndra,  dieu  du 
Ciel  ;  les  deux  derniers,  NakiUa  et  Sahadéva,  étaient  les 
incarnations  des  deux  cavaliers  célestes  nommés  Açwins, 
qui  sont  les  Dioscores  du  panthéon  brahmanique,  et 
avaient  pour  mère  Màdrt ,  fille  du  roi  de  Madra.  Dhrita- 
rftsthra  régnait  à  Hastinàpura  f  Delhi  ^;  quoique  son  frère 
P&ndou  (le  pftle  )  fût  Talné,  la  couleur  de  son  visase 
l'avait  fait  exclure  du  trône;  11  s'était  retiré  dans  l'Hi- 
màlaya,  et  il  y  était  mort.  Demeurés  seuls,  ses  enfants 
furent  amenés  auprès  de  leur  oncle,  qui  les  éleva  comme 
ses  fils. 

Le  1"  chant  raconte  l'origine,  la  naissance,  l'éducation 
et  les  premières  aventures  des  fils  de  Pàndou,  l'inimitié 
naissante  de  leurs  cousins,  et  les  complots  de  ceux-ci 
contre  la  vie  des  cinq  frères;  l'incendie  du  palais  où  Ils 
demeuraient  avec  leur  mère  ;  leur  fuite,  et  le  bruit  ré- 
pandu qu'ils  avaient  péri;  leur  vie  au  désert;  leur  retour 
à  l'occasion  du  mariage  de  Draupadl ,  qui  devint  leur 
épouse.  —  Au  2*  chant,  Dhritaràshtra  partage  la  souve- 
rtkineté  entre  ses  fils  et  ses  neveux  qui  représentaient  les 
droits  légitimes  d'une  branche  aînée.  Yudhisthlra  et  ses 
frères  sont  établis  à  Indraprastha,  et  gouvernent  la  vallée 
de  la  YamunA  (Jumna);  Duryôdhana,  avec  ses  frères^ 
règne  à  HastinApura  sur  le  Gange.  D'après  les  usages  de 
l'Inde  antique,  la  suprématie  devait  appartenir  au  plus 
Agé  de  tous  ces  princes,  qui  était  Yudhisthira.  Le  sacri- 
fice solennel  où  les  autres  princes  doivent  lui  rendre 
hommage  et  reconnaître  sa  suzeraineté,  est  une  puissante 
cause  d  envie  et  de  haine  pour  ses  cousins.  —  Pendant 
les  fêtes  du  Bâjasûya,  les  cousins  Jaloux  entraînent 
Yudhishthira  dans  une  partie  de  dés ,  où  il  perd  contre 
Duryôdhana  son  palais,  sa  fortune,  son  royivime,  sa 
femme,  ses  frères,  et  lui-même;  ainsi  dépouillé,  il  est 
réintégré  par  son  vieil  oncle;  mais,  tenté  de  nouveau,  il 
convient  que,  s'il  perd,  il  passera  douze  ans  au  désert 
avec  ses  frères,  qu'il  demeurera  inconnu  la  13*  année,  et 
que,  s'il  reparait,  il  recommencera  son  exil.  Battu,  il 
part  pour  la  forêt  avec  sa  femme  et  ses  frères.  La  vie 

2u'ils  y  mènent  forme,  avec  l'épisode  de  Nàla,  le  sujet 
u  3*  chant.  —  Au  4*,  les  cinq  frères  ont  fini  leur  exil  ^ 
et  entrent,  inconnus,  au  service  du  roi  VirAta,  qui,  à  la 
fin  de  la  13*  année,  les  reconnaît,  et  leur  promet  son 
alliance.  Préparatifs  de  la  guerre  ;  énumération  des  chefs 
qui  ae  rangent  à  l'un  ou  à  l'autre  parti  ;  alternative  pro- 
posée par  Krishna,  en  qui  est  incamé  Vishnu,  A  Duryôd- 
hana de  choisir  entre  sa  seule  alliance  ou  une  grande 
armée;  imprudence  de  Duryôdhana,  qui  prend  ce  der- 
nier parti;  départ  de  Krishna,  qui  devient  l'allié  des 
fils  de  Pàndou  et  l'écuver  d'Ariuna.  —  Les  armées  des 
Courons  sont  commandées  tour  A  tour  par  Bhlshma, 
grand-oncle  de  Duryôdhana,  par  Drôna,  son  précepteur, 
par  Kama,  roi  des  Angas,  par  Salya,  roi  de  Madra  ;  les 
exploits  guerrierà  de  chacun  de  ces  chefs  font  la  matière 
d'autant  de  chants,  dans  lesquels  les  dieux  Jouent  un 
rôle  important.  Chacun  des  chefs  ayant  été  tné,  Duiyôd- 
huia  lui-même  est  tué  par  Bhtma  dans  un  combat  sin- 
gulier. —  Le  10*  chant  renferme  le  rédt  d'une  attaque 
nocturne  dirigée  par  les  chefs  qui  survivent  contre  le 


MAH 


11 M 


MAH 


CMBp  des  fils  de  Pàndou;  cette  attaque  est  raponssée, 
nftce  à  rintervention  de  Kririina.  —  Les  lamentations 
des  femmes  qui  viennent  sur  le  diamp  de  bataille  re- 
troaTer  les  cadavres  des  leurs,  le  désespoir  du  vieux 
Dhritarftsbtra,  les  regrets  de  Yudhisthira  lui-même,  for- 
ment la  matière  du  11*  chant.  I^  12*  est  une  exposition 
br&hmanique  des  devoiis  de  la  royauté,  des  avantages 
de  la  générosité,  et  des  moyens  de  parvenir  à  la  déli- 
vrance finale.  Le  13*  traite  des  devoirs  de  société  exposés 
à  Yudhisbthira  par  Bhishma  mourant.  Le  14*  donne  la 
description  de  Tantiaue  sacrifice  du  cheval ,  célébré  par  le 
vainqueur,  en  témoignage  de  sa  suzeraineté.  Le  15*  ra- 
conte la  retraite  de  Dbriturftshtra  au  désert ,  où  il  obtient 
la  délivrance  finale;  le  16*,  la  destruction  de  la  race  des 
Yàdavas,  dont  Krishna  lui-même  faisait  partie,  et  la  sub- 
mersion de  la  ville  de  Dwàraka,  sa  capitale.  Le  17*  est 
le  récit  du  Grand  départ,  c-à-d.  de  Tabdication  de 
Yudhishthira,  et  de  son  départ  pour  THimàlaya  et  la 
montagne  sainte,  le  Mérou.  Dans  ce  voyage,  le  héros  perd 
tour  à  tour  sa  femme  et  ses  frères  ;  demeuré  seul  avec 
son  chien ,  il  refuse  d*entrer  sans  lui  au  ciel  d*Indra  : 
Indra  cède  sur  ce  point.  Au  chant  18*,  le  héros  entre  au 
ciel ,  où  il  trouve  heureux  ses  ennemis,  et  cherche  en 
vain  sa  femme,  ses  amis  et  ses  frères.  Un  messager 
divin  les  lui  fait  voir  dans  les  tourments.  La  grandeur 
d*àme  do  héros  éclate  à  ce  dernier  moment  ;  les  dieux 
arrivent,  et  le  spectacle  disparaît.  Yudhisthira,  transfi- 
guré, reprend  sa  place  avec  ses  frères  au  milieu  des  di- 
vinités dont  la  personne  s*était  incamée  en  eux  pour 
combattre  le  mal  personnifié  dans  leurs  ennemis. 

Dans  ce  vaste  développement  d*idées  et  de  faits,  la  cri- 
tique moderne  distingue  des  parties  anciennes  et  d'autres 
Îlus  modernes.  Parmi  ces  dernières,  on  peut  compter  le 
2*  et  le  13*  chant,  et  probablement  aussi  le  16*.  On  a 
lieu  de  penser  également  que  les  deux  derniers  chants 
ont  été  ijoutés  au  poème  primitif  à  une  époque  où  la 
doctrine  morale  des  brahmanes  avait  atteint  une  grande 
élévation  théorique,  époque  qui  ne  peut  guère  avoir  été 
celle  des  temps  héroïques  de  Tlnde.  On  doit  retrancher 
également,  comme  intercalés  dans  le  texte,  un  certain 
nombre  d'épisodes,  qui  ne  s*y  rattachent  que  fort  indi- 
rectement, et  dont  plusieurs  témoignent  de  doctrines 
postérieures  à  rétablissement  du  bouddhisme  :  telle  est 
fa  Bhagavadijitâ,  dans  laquelle  les  faits  de  Ul,  guerre  ne 
sont  qu'une  occasion  de  discourir,  et  ne  servent  qu'à  la 
mise  en  scène  du  dialogue.  D'après  les  Indiens  eux- 
mêmes,  le  poôme  primitif  ne  comprenait  pas  le  5*  de 
l'étendue  qu'il  a  aujourd'hui.  Ce  qui  fait  le  fond  du 
poème,  c'est  la  guerre  des  Gourous  et  des  Pantch&las  ; 
c'est  là  le  noyau  primitif  donné  par  la  légende  et  déve- 
loppé par  les  poètes,  et  les  trois  quarts  an  moins  de 
ToBuvre  totale  n'ont  aucun  rapport  avec  ce  si^et.  On  peut 
donc  admettre,  en  général ,  que  le  Màhàbhdrata,  tel  que 
■ous  l'avons,  s'est  formé  peu  à  peu  de  pièces  njost^, 
et  que  le  poème  primitif  n'a  été  qu'un  centre  autour  du- 
quekles  bri^manes  ont  groupé  tout  ce  qui  pouvait  se 
trouver  chez  eux  de  traditions  épiques  ou  d'idées  pou- 
vant servir  à  l'instruction  des  rois.  Il  est  hors  de  toute 
vraisemblance  que  le  poème  soit  une  œuvre  moderne, 
c-à-d.  postérieure  à  l'expulsion  du  bouddhisme  ou  du 
moins  à  sa  propagation  dans  l'Inde  ;  et  c'est  ce  qu'il  fau- 
drait admettre,  si  l'on  se  refusait  à  en  opérer  le  démem- 
brement ,  et  à  reconnaître  dans  ses  diverses  parties  des 
œuvres  d'époques  et  de  styles  différents,  plus  ou  moins 
habilement  rattachées  à  1  épopée  antique.  Plusieurs  de 
ces  parties,  qui  sont  de  véritables  traités,  n'ont  nullement 
le  caractère  épique,  et  sont  évidemment  bien  postérieures 
à  l'Age  de  l'épopée.  On  a  tout  lieu  de  croire  que  le  Ifoô^d- 
bhârata  primordial  ne  dépassait  pas  le  triomphe  final  des 
Pandous,  et  comprenait  tout  au  plus  le  sacrifice  du  cheval 
et  la  réintégration  du  roi  légitime  sur  son  trône;  encore, 
dans  les  quatorze  premiers  chants,  doit-on  faire  un  cheix 
entre  les  passages,  supprimer  beaucoup  d'épisodes  et 
d'Interpolations,  pour  arriver  à  la  dimension  primitive 
Indiquée  par  les  brahmanes. 

Réduit  à  ces  proportions,  le  Mahâbhârata  présente, 
avec  lesépopées  des  autres  nations,  et  surtout  avec  VHiade, 
des  rapports  de  ressemblance  évidents.  Le  récit  des  ba- 
tailles y  occupe  une  place  importante  et  y  est  traité  avec 
une  vérité  frappante,  même  là  où  les  dieux  semblent 
substituer  leur  action  à  celle  des  héros.  La  description 
des  combats  singuliers  est  tout  à  fait  homérique.  On  ne 
npralt  concevoir  un  tableau  rendu  avec  plus  de  vérité 
pittoresque  et  de  sentiment,  que  celui  du  11*  chant,  où 
l'auteur  amène  sur  le  champ  de  batjûlle  de  Kuruxètra 
les  veuves,  les  mères,  les  sœurs  des  guerriers,  cherchant 


à  reconnaître  les  leurs  parmi  ces  cadavres  que  se  dispu- 
tent déjà  les  bettes  sauvages,  les  insectes  et  les  oiseaux. 
L'attaque  nocturne  du  camp,  avec  les  circonstances  mvs- 
iérieoses  qui  l'accompagnent  ou  la  précèdent,  a  un  intérêt 
poétique  saisissant.  Les  préparatifs  de  la  bataille  soDt 
plus  grandioses  que  la  partie  correspondante  du  poème 
grec  Le  3*  chant  oifine  cette  scène  du  }eu,  trait  de  moBurs 
propre  aux  Orientaux,  et  sur  lequel  les  écrivains  de  l'Inde 
reviennent  volontiers,  pour  le  rendre  dans  toute  sa  viva- 
cité et  en  tirer  un  enseignement  sévère.  Nous  ne  pouvons 
citer  id  toutes  les  scènes  poétiques,  grandioses  ou  gra- 
cieuses, terribles  ou  touchantes,  que  renferme  la  grande 
épopée.  On  peut  croire  que,  du  Jour  où  la  critique  euro- 
péenne aura  dégasé  le  mahâbhârata  des  additions  qui  le 
rendent  souvent  diffus,  des  interpolations  déplacées,  des 
épisodes,  qu^que  intéressants  qu'ils  soient,  qui  brisent 
sa  marche  et  retardent  les  événements,  ce  poème  se  mon- 
trera comme  une  des  épopées  les  plus  parfaitement  poé- 
tiques que  nous  connaissions.  Du  reste,  parmi  ces  ad- 
ditions, il  en  est  qui  ne  s'éloignent  point  du  caractère 
assigné  par  le  poète  à  ses  héros  i  tels  sont  les  deux  de- 
niers chants,  l'une  des  compositions  les  plus  sublimes 
qu'un  poète  ait  Jamais  conçues.  Or,  cette  naute  pensée 
morale,  exprimée  si  magnifiquement  à  la  fin  du  poème, 
domine  toute  l'épopée  indienne.  Les  héros  du  Makâbhâ^ 
rata  ne  sont  pas-  seulement  des  guerriers,  comme  ches 
les  Grecs,  plus  ou  moins  maîtres  d'eux-mêmes;  ce  sont 
des  hommes  pieux,  pratiquant  la  Justice,  fidèles  à  leur 
parole  Jusqu'à  l'abnégation  et  au  sacrifice  de  leur  per- 
sonne, luttant  contre  les  forces  de  la  nature  avec  une  pa- 
tience infatigable  et  une  douceur  que  aoutient  le  désir  de 
la  Justification  et  de  la  délivrance  finale 

Quant  à  la  date  de  l'épopée  primitive,  il  est  bien  diffi- 
cile de  la  fixer  même  approximativement.  On  peut  penser 
qu'elle  est  antérieure  au  Râmâyana  (F.  es  mot\  comme 
les  faits  eux-mêmes  qui  sont  la  matière  de  run  et  de 
l'autre  poème.  Les  Aryas  ont,  selon  toute  apparence,  mis 
un  temps  assez  long  à  s'étendre  de  la  vallée  supérieure 
du  Gange  à  l'Ile  de  Cevlan.  Or,  il  n'est  guère  croyable 
que,  si  la  grande  expédition  du  Sud  eût  été  t^minée  à 
l'époque  dn  Mahâbhârata,  il  n'y  eût  été  fait  dans  celui-d 
aucune  allusion.  On  conclurait  donc  de  cette  remarque 
que  le  premier  poème  a  été  fait  dans  l'intervalle  des  deux 
expéditions.  Cette  période  de  temps  est  comprise  dans  le 
moyen  âge  brahmanique,  pendant  lequel  s'est  développée 
la  littérature  des  commentaires,  à. côté  du  sanscrit,  qoi 
était  la  langue  littéraire,  représentée  alors  par  les  chants 
épiques.  Ces  chants  étaient  nombreux,  et  plusieurs  sont 
parvenus  Jusqu'à  nous  sous  le  nom  d^Itihâsas;  le  premier 
mahâbhârata  semble  n'avoir  pas  été  autre  chose;  et 
lorsqu'il  fut  fixé  par  l'écriture  et  attribué  à  Vyàsa  Pftrà- 
çarya,  tout  porte  à  croire  qu'il  existait  depuis  longtemps 
dans  les  traditions  populaires  par  fragments  isolés,  comme 
cela  eut  lieu  pour  les  chants  des  aèdes  de  la  Grèce  La 
période  des  Itibàsas,  qui  concourt  avec  celle  des  commen- 
taires du  Véda,  a  suivi  de  près  l'entrée  des  Aryas  dans 
les  vallées  du  Gange;  mais  elle  a  dû  se  prolonger  elle- 
même  un  certain  nombre  de  siècles,  si  l'on  en  Juge 
d'après  l'étendue  et  la  succession  encore  reconnaisssbie 
des  ouvrages  scolastiques  qu'elle  a  produits.  A  quel 
point  de  cette  période  placer  l'origine  du  Mahâbhârata? 
Il  est  croyable  que  l'épopée,  ayant  pris  naissance  à  une 
certaine  distance  des  événements,  n'apparut  guère  avant 
le  milieu  de  l'âge  dont  les  guerres  elles-mèoiBs  rempli- 
rent les  commencements.  Or,  si  l'on  songe  que  l'ère  du 
Bouddha  date  du  milieu  du  vi*  siècle  avant  J.-G.,  et  que 
la  prédication  de  ce  sage  suppose  une  civilisation  et  une 
moralité  publiques  en  décadence,  on  est  conduit  à  placer 
plusieurs  siècles  auparavant  la  fin  du  moyen  âge  nràh- 
manique,  et  à  penser  que  l'épopée  primitive  des  Indiens 
n'est  pas  postérieure  à  celle  d'Homère,  et  qu'elle  loi  est 
probanlement  antérieure  de  quelque  temps.  Le  témoi- 
gnage de  navigateurs  grecs  (chez  le  rhéteur  Ghrysostome), 
rapportant  que  les  Indiens  avaient  traduit  Homère,  na 
aucune  valeur,  puisque  les  Grecs  et  les  Romains  rame- 
naient à  leurs  idées  et  à  leurs  noms  tout  ce  qu'ils  trou- 
vaient d'analogue  chez  les  peuples  étrangers;  il  prouve 
seulement  qu'il  existait  alors  dans  l'Inde  une  grande 
épopée.  Le  silence  de  Mégasthène  ne  saurait  être  non 
plus  une  preuve  négative,  ou  bien  il  faudrait  l'appliquer 
de  même  à  tous  les  grands  ouvrages  qu'il  ne  nomme  pas; 
ce  qu'il  est  Impossible  d'admettre.  Les  livres  bouddhiques 
du  nord  citent  les  Pftndous  conune  une  tribu  dévastatrice 
habitant  les  montagnes  :  mais  sont-ce  les  P&ndous  du 
Mahâbhârata?  Et,  si  c'est  la  même  famille,  on  en  con- 
clurait tout  au  plus  que  les  Pàndous,  chsMés  du  trône 


MÀH 


1197 


MAI 


•tfâlbgléft  ma  les  hanteon,  âtaientdefeiras  telsaa  temps 
où  furent  écrite  ces  Uvres  bouddhiques.  Le  nom  de  Vyàsa 
M  le  reneontro  pas  dans  ceux  des  BrâhmanuMS  qui  ont 
M  lus  Jusqu^à  ce  Jour;  mais  les  Brâhmamu  sont  des 
itires  de  scolastique,  où  le  nom  d*un  chant  épique  pour» 
ndt  paraître  déplacé  s*il  s*y  rencontrait  :  ne  Toyons-nous 
pas  un  fait  semblable  pour  les  chants  épiones  de  notre 
moyen  ige,  composés  dans  une  période  a*études  sco- 
lasoquea  î  De  ces  coniddéralions  il  résulte  que  la  question 
de  date  n'est  pas  complètement  résolue  pour  le  Mahà^ 
Miârata. 

Tontes  les  parties  du  poème  ont  pour  nous  un  intérêt 
historique  nuueur.  Les  passages  é?idemment  les  plus  an- 
ttoues  nous  offlrent  le  rédt  de  grands  érénements  accom- 
plis dans  le  N.-O.  de  Tlnde,  à  une  époque  oui  ne  dut 
pas  Ctre  postérieure  de  beaucoup  de  siècles  à  rétablisse- 
ment des  Aryaa  de  Flndus  sur  les  rives  du  Gange  et  de 
ses  affluents.  Au  milieu  de  cette  çrande  lutte  où  trourent 
place  les  Aryas  et  leurs  alliés  indigènes,  s'agitent  des 
questions  de  constitution  politioue  et  sociale  d'une  haute 
lnqwrtance  pour  l'histoire  indienne  des  temps  posté- 
xieiors.  Les  nombreux  renseignements  que  nous  donne  le 
poème  à  cet  égard,  rapprochés  des  faits  analogues  de 
rhiatoire  grecque  et  des  plus  anciens  temps  des  peuples 
do  Nord,  Jettent  sur  eux  un  Jour  tout  nouyeau.  Les  chants 
f  S*  et  13%  composés  certainement  longtemps  i^rès  l'épo- 
pée prlmitiTe,  n'en  sont  pas  moins  une  exposition  in- 
structive, à  tous  é^^urds  :  ils  nous  font  connaître,  avec  plus 
de  détails  que  les  lois  de  Blanou,  l'idée  que,  dans  la  divi- 
sion de  la  société  en  castes,  on  se  faisait  des  devoirs  des 
nris  scrit  envers  leurs  scjets,  soit  envers  la  caste  privi- 
l^ée  des  prêtres.  On  y  voit  aussi  le  but  suprême  de  la 
▼ie  que  la  religion  Inràhmanique  proposait  aux  hommes 
et  paracolièrement  à  ceux  des  classes  les  plus  élevées. 
lies  détails  dans  lesquels  sont  entrés  les  auteurs  de  ces 
chante  noos  font  pénétrer  dans  l'esprit  de  la  société  in- 
dienne, qoi,  dès  rorigine  du  brêhmanisniie,  à  travers  tous 
les  diangements  polhiqnes  et  les  transformations  du  culte, 
est  demeuré  le  même  Jusqu'à  nos  Jours,  c-àni.  profon- 
dément empreint  du  caractère  religieux,  et  subordonnant 
toutes  les  actions,  les  pensées  et  les  discours  à  certains 
ptrincipes  de  philosophie  théologique  époncés  dans  la  loi 
et  acceptés  pur  les  mœurs. 

Le  Mmhâhhârata^  pris  dans  sa  totalité,  renferme  aussi 
une  multitude  de  légendes,  les  unes  d'un  caractère  his- 
torique et  se  rapportant  aux  plus  anciens  temps  des  Aryas, 
les  autres  évidraiment  syninoliques  et  servant  de  com- 
plément on  d'explication  à  celles  qui  se  trouvaient  déjà 
mentkmnéea  dans  le  Vida.  Ces  dernières  peuvent  sou- 
vent être  rapprochées  des  traditions  mjrthologiques  des 
peuples  gréco-italiques  et  des  peuples  du  Nord  ;  <ÀllesHd, 
qui  ne  noos  sont  pas  parvenues  avec  le  grand  et  poétique 
développement  des  fsbles  de  la  Grèce,  peuvent  s'éclairer 
▼ivement  des  récits  du  Mahàbhârata;  il  en  est  souvent 
de  même  des  qrmboles  helléniques,  presque  tous  origi- 
naires de  l'Asie,  mais  transformés  par  le  génie  poétique 
des  Grecs,  et  localisés  par  eux  dans  leur  propre  pays. 
Ces  ^mboles,  qui  souvent  ont  perdu  en  Grèce  la  clarté 
de  leur  aigniflcation,  se  retrouvent  dans  le  poème  indien 
avec  leur  valeur,  et,  rapportés  ensuite  au  Vida,  d'où  ils 
émanent,  peuTont  recevoir  une  interprétetion  vraisem- 
blable et  souvent  même  évidente.  L'étude  approfondie 
de  r^pée  indienne  est  donc  d'une  grande  utilité  pour 
la  symbolique,  et  en  est  même  devenue  l'un  des  fonde- 
ments. Elle  a  pour  complément  celle  des  Puràfuu  {V,cê 
moQ,  des  Itihâsas,  du  RAmàyana,  du  Harivansa,  et 
génmlement  de  tous  les  ouvrages  connus  dans  l'Inde 
sous  le  nom  de  Kaoyas,  c-àrd.  poèmes  épiques. 

On  ensemble  ou,  pour  mieux  dire,  une  succession  de 
doctrines  philosophiques  peut  être  extraite  du  Mahâbhà' 
rata.  Les  diverses  parties  du  poème  en  contiennent  une 
proportion  d'autant  plus  considérable  qu'elles  semblent 
eUes-mêmes  plus  modernes;  leur  comparaison,  faite  à 
ce  p(^t  de  vue,  aura  ce  double  résultet,  d'en  fixer  les 
dates  relatlTes,  et  de  donner,  pour  leur  oart,  des  rensei- 
nemente  utiles  sur  le  développement  de  la  philosophie 
mdienne.  Les  brahmanes  des  temps  postérieure  ont,  en 
effet,  pris  l'épopée  primitive  comme  un  cadre  indéfini, 
dans  lequel  ils  pouvaient  insérer  leun  propres  idées, 
commeils  y  intercalaient  des  fragmente  poéti<](ues.  Or, 
ees  passages  de  philosophie  théologique,  produite  à  dif- 
férentes  Craques,  et  parfois  même  à  des  siècles  d'inter- 
valle, répondent  à  des  étate  divers  de  la  science.  Rappro- 
chés des  écrite  philosophiques  proprement  dits,  ils  peu- 
vent beaucoup  servir  au  démemorement  du  poème  actuel, 
et  aider  les  critiques  à  le  ramener  à  ses  Justes  et  vraies 


proportions.  Cest  ainsi  que  l'on  doit  retrancher  à  pre- 
mière vue,  du  grand  poème,  le  chant  connu  sous  le  nom 
de  Bhagaoad-gttà  { V,  ce  moi)^  traité  complet,  dogmatique 
et  didactique,  du  Ydga  (V,  IimiBimB  ^  Philosophie )« 
doctrine  qiii  n'a  pu  arriver  à  cet  étet  de  perfection  qu'a- 
près un  long  développement  de  l'esprit  philosophique. 

K.  Fr.  Johnson,  silêctions  from  the  Mahâbnâratap 
Londres,  1842,  in-8*;  Fragments  du  Mahàbhârata,  tra- 
duits par  Th.  Parie,  Paris,  184i,  in-8(»:  SàffUrL  épisode 
du  Mahàbhârata,  traduit  par  Pauthier,  {n-8%  1841;  Nala, 
épisode  du  MahâMUirata,  traduit  par  l'auteur  de  cet 
uticle,  Nancy,  1856;  in-8*;  A.  Sadous,  Fragments  du 
Mahàbhârata  traduite  en  français,  Paris,  1858,  in -13; 
Holumann,  Indravijaya,  Garisruhe,  1841  ;  la  Boagavad" 
gitâ.  texte  en  caractères  firancais  et  traduction  françaisoi 
par  l'auteur  de  cet  article,  1801  •  En.  B. 

HAHMOUDI,  monnaie -d'argent  de  Perse,  valant  en- 
riron  70  centimes;  —  pièce  d'argent  du  sultan  Mah- 
moud I**,  valant  5  piastres  (Atr,  14  c). 

HAHMOUDIÉ,  pièce  d'or  turque,  valant  enriron  24  i^. 

HAHOITRES  ou  IIAHEUTRËS ,  carcasses  qu'on  pla- 
çait an  XV*  siècle  sous  les  manches  du  pourpoint,  afin 
de  faire  paraître  les  épaules  plus  larges  et  plus  hautes. 
Les  maholtres  différaient  dea  gigots  pmtés  par  les  femmes 
parisiennes  et  autres,  vers  1830,  en  ce  qu'ils  bouffaient 
dans  la  direction  verticale,  et  semblaient  faire  monter 
jusqu'à  la  hauteur  du  menton  l'articulation  de  l'hu- 
mérus. 

liAHOMÉTISME.  K.  Coran,  Chittbs,  SmmnBS,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biograpme  et  d'Histoire, 

BfAHONE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BUh 
graphie  et  d'Histoire. 

BfAHRATTE  (Idiome},  un  des  idiomes  de  l'Inde,  parié 
entre  les  fleuves  Nerbuodah  et  Kriachna,  c-à-d.  dans  le 
Goncan,  le  Gundwana,  et  une  partie  des  provinces  de 
Malwah,  de  iCandeisch,  d'Aureng-Abad,  de  Bed]apour,  de 
Goudierate  et  de  fiérar.  Adelung  l'apparentalt  aux  idiomes 
malabare;  Balbi  et  Lassen  le  rattachent  avec  plus  de 
raison  au  pr&crit.  En  effet,  sous  le  rapport  de  la  lexico- 
graphie et  de  la  grammaire,  le  mahratte  n'est  qu'une  mu- 
tilation du  sanscrit,  et  peut  être  regardé  comme  trèn  du 
bengali  IV.  ce  mot).  On  y  trouve  un  certein  nombre  de 
substantifs  persans,  amenés  par  la  conquête  musulmane  ; 
mais  les  adjectifs  et  les  verbes  sont  sanscrite.  Comme 
dans  l'hindou! ,  les  flexions  grammaticales  ont  à  peu  près 
disparu,  pour  faire  place  au  système  analytique  des  par- 
ticules et  des  auxiliaires.  La  construction  ressemble  à 
celle  de  Thindoustani  ;  mais  le  mahratte  est  plus  logique 
que  cette  langue  pour  la  composition  et  la  dérivation  des 
mots.  U  a  plusieun  dialectes,  tels  que  le  basopouri  et  le 
ouadi ,  qui  régnent  dans  le  Malwah  ;  le  desh,  parlé  au 
N.-E.  de  Pounah;  le  kokouni,  en  usage  dans  le  Ko- 
kunt,  eto.  La  prononciation  est  sourde  et  traînante.  Les 
Biahrattes  emploient  deux  alphabete  différente  :  pour  les 
sujete  religieux  ou  d'un  caractère  relevé,  le  balhodh  ou 
balabandi ,  qui  n'est  autre  que  le  dêvanagari  des  livres 
sanscrite;  pour  les  relations  ordinaires,  la  correspon- 
dance et  les  affaires,  le  mod  ou  modi,  qui  se  compose 
de  44  lettres,  difficiles  à  lire  sous  leur  forme  cursive.  Ils 
ont  des  chroniques,  des  compositions  morales,  et  des 
chante  de  euerre.  La  base  de  la  vereification  est  tantèt 
la  mesure  des  syllabes,  tantôt  la  rime.  Nous  avons  des 
Grammaires  de  la  langue  mahratte,  écrites  en  anglais, 
par  W.  Carey  (Serampour,  1808,  in-8*},  Drumond 
(Bombay,  1808,  in-foK),  Ballantyne  (Edimbourg,  1830, 
in-4*),  et  J.  Stevenson  (Bombay,  V  émt.,  1843  )  ;  des  £>to- 
tUmnaires  mahrattes-<mglais,  par  Carey  (Bombay,  1810, 
in-8»),  par  Molesworth  (ibid.,  1831,  in-8«),  et  par  Ken- 
nedy (ibid.,  1834,  in-fol.). 

BIAHRI  (Idiome).  V.  Ëkhkiu. 

MAI ,  nom  que  1  on  donnslt  autrefois  au  tableau  offert 
chaque  année,  au  1*'  Jour  de  mai,  par  la  corporation  des 
orfèvres  de  Paris  à  l'église  Notre-Dame.  Le  s^jet  en  était 
tiré  des  Actes  des  Apôtres.  Cette  coutume  dura  de  1008 
à  1708.  Antérieurement  à  1608,  le  don  consistait  en  un 
petit  morceau  d'architecture  en  forme  de  tabernacle, 
qu'on  suspendait  à  la  voûte  de  l'église. 

MAI  (Arbre  de).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire, 

BIAIL  (Jeu  de),  Jeu  qui  consiste  à  pousser  sur  une  route 
ou  sur  de  longues  allèBs,  en  les  frappant  d'un  coup  avec 
une  petite  massue  appelée  motl,  des  boules  de  bois,  de 
manière  à  parcourir  le  plus  grand  espace  possible,  et  à 
toucher  finalement  un  Dut  manqué. 

BIAILLE  (en  bas  latin  mallta,  pour  medallia,  mé- 
daille), petite  monnaie  de  cuivre  qui  eut  ooura  en  Franee 


MAI 


119S 


MAI 


Mot  lès  premien  toit  de  U  3*  iBoe,  et  qui  valait  la 
iBoitié  d*aii  denier.  Il  j  eut  des  maUUs  patigk,  des 
WMiiUes  tournois,  et  des  demi-maUlei  de  ces  deux  espèces 
de  monnaie.  La  maille  de  Poitou  s*ant)elait  pito.  En  1303, 
raiippe  le  Bel  fit  frapper  des  motUss  blanchêt,  c-AhL 
d'argent.  An  commencement  du  xvi*  siède^  la  mailU  de 
Lorraine,  en  or,  portant  d*an  c6té  une  croix,  de  Tautre 
Teffigie  d'un  duc  de  Lorraine,  valait  33  sous  0  deniers.  — 
Le  mot  moti/s  est  entré  dans  plusieurs  locutions  :  La 
Fontaine  appelle  an  avare  un  pincê^maiiUê  ;  n'avoir  ni 
sou  Ht  maâlê,  c'est  ne  posséder  rien;  oootr  mailU  à 
partir  (à  partager)  avec  quelqu'un,  c'est  être  en  diffé- 
lend  avec  lui  pour  peu  de  chose.  B. 

MAILLE,  en  termes  de  Blason  «  boucle  ronde  sans 
ariiUon. 

MAIULBTAfiE.  V.  Doublagb. 

MAILLOT,  vMement  collant,  en  laine  tricotée,  que  re- 
vêtent souvent  les  saidmfaanques.  On  donne  le  même 
nom  à  l'espèce  de  caleçon  on  oe  pantalon  que  portent  les 
danseuses  sur  la  scène.  Un  nommé  Maillot  l'inventa. 

MAIN.BIle  figure  fréquemment  dans  les  scnlptores  chré- 
tiennes, comme  emblème  de  la  puissance  divine.  —  Une 
main  droite  au  sommet  d'un  bols  de  lance,  éudt  Tenseine 
du  manipule,  dans  les  lédons  romaines.  Les  Anciens  dé- 
posaient dans  leurs  temples  des  mains  votioês  en  bronze, 
appelées  quelquefois  mains  panthées ,  parce  qu'elles 
étaient  couvertes  de  symboles  se  rapportant  à  toutes  sortes 
de  divinités. 

MAIN  CHAUM,  jou  d'oufants,  oft  un,  parmi  plusieurs,  se 
courbe  sur  les  genoux  d'un  autre  et  les  yeux  fermés, 
reçoit  des  coups  dans  une  main  qu'il  tient  derrière  lui , 
et  doit  deviner  qui  l'a  touché.  Celui  qui  a  été  deviné 
prend  la  place  du  patient. 

MAIN  COURANTE,  livre  de  commerce  sur  lequel  on 
inscrit  à  leur  date  les  ventes,  achats,  payements,  re- 
oettes,  en  un  mot,  toutes  les  affiodres,  en  même  temps 
qu'on  les  conclut.  On  l'appelle  aussi  Brouillard  et 
ÈrouUlon, 

MAIN  DE  JUSTICE.  V.  Bator  a  signeb. 

MAIN-D'OBUVRE,  travail  manuel  appliqué  à  la  créa- 
tion d'un  produit.  La  cherté  des  vivres,  la  concurrence, 
les  crises  politiques ,  l'invention  des  machines ,  sont  des 
causes  accidentelles  qui  influent  sur  le  prix  de  la  main- 
d'œuvre. 

MAINET,  titre  d'un  roman  poétique  sur  l'enfance  et 
la  jeunesse  de  Charlemagne,  qui  s'v  trouve  désigné  sous 
le  nom  de  Charles  le  Btainet,  c.-à-d.  le  Petit.  Brouillé 
avec  son  père  Pépin,  Charlemagne  va  se  mettre,  avec  un 

rnd  nombre  de  guerriers,  au  service  d'un  roi  sarrasin 
Tolède,  Galafre,  dont  la  fille,  Galiane,  lui  inspire  une 
vive  passion.  Mais  11  lui  faut  disputer  cette  princesse  à 
Bramant,  autre  roi  de  l'Espagne  musulmane  :  il  le  met 
en  déroute,  enlève  Galiane,  l'emmène  en  France,  la  fait 
baptiser  et  l'épouse.  —  Ce  roman,  dont  la  composition 
remonte  au  xii*  siècle,  a  été  développé  en  prose  italienne 
dans  le  6*  livre  du  recueil  de  fictions  chevaleresques  in- 
titulé Dei  Bsali  di  Prancia.  On  en  trouve  un  extrait 
moins  détaillé  et  nlus  libre,  en  prose  castillane,  dans  la 
Chroniquegénérated^Espagns  composée  sous  Alphonse  X. 

MAIN-FERME.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^  Histoire. 

MAIN-FORTE.  V.  Force  pdbuqde. 

MAIN  HARMONIQUE,  nom  donné  par  Gui  d'Arezzo  à 
la  gamme  de  son  invention ,  parce  qu'il  la  représentait 
au  moyen  d'une  main  sur  les  doigts  de  laquelle  étaient 
marqués  tous  les  tons. 

MAINLEVÉE,  en  termes  de  Droit,  acte  qui  fait  cesser 
l'empêchement  résultant  d'une  saisie ,  d'une  opposition , 
ou  d'une  inscription  hypothécaire.  Elle  est  volontaire^ 
quand  le  saisissant,  l'opposant  ou  le  créancier  y  consent 
(ce  qui  doit  se  faire  néanmoins  par  acte  authentique)  ; 
iudiciairet  quand  elle  est  prononcée  par  Jugement;  ad- 
ministralive,  quand  elle  résulte  d'un  arrêté  préfectoral. 
La  demande  en  mainlevée  Judiciaire  doit  être  portée  de- 
vant le  tribunal  du  domicile  de  la  partie  saisie  {Code  de 
Procéd.,  art.  567). 

MAINMISE,  ancien  terme  de  Droit,  synonyme  de 
sauts. 

MAINMORTE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

MAINTENON  (  Ch&teau  de),  dans  le  département 
d'Eure-et-LoIr.  B&ti  à  l'extrémité  de  la  ville  pour  Jean 
Cottereau,  trésorier  des  finances  sous  Charles  vn  et 
Louis  XI,  il  fût  acheté,  en  1674,  par  la  veuve  Scarron, 
ooe  Louis  XIV  créa  marquise  de  Maintenon.  U  forme  une 
double  potence  dont  les  ms  sont  tournés  vers  le  parc  : 


l'un  des  bras  est  terminé  par  une  jolie  tour  ronde,  l'auiiv 
par  une  tour  carrée,  dont  le  dôme  domine  le  reste  de 
l'édifloe.  Les  bâtiments  sont  peu  élevés,  de  style  plus 
élégant  que  magnifique,  et  bien  distribués.  L'intérieur  a 
été  décoré  à  la  moderne  par  le  duc  de  Noailles,  proprié- 
taire actuel  du  château.  Le  oorps  de  logis  principal  était 
l'appartement  de  la  marquise;  on  voit  encore,  dans  la 
chambre  à  coucher,  son  portrait  par  Mignard.  L'apparte- 
ment du  roi  y  existe  aussL  La  chapelle,  où  il  n'y  a  d' n- 
téressant  que  les  vitraux,  est  fort  simple,  et  a  été  soi- 
gneusement conservée  :  on  croit  généralement ,  mais  è 
tort,  que  le  mariage  de  Louis  XIV  avec  la  veuve  Scar  on 
y  a  été  célébré.  L'Eure  et  Ul,  Voise  baignent  les  murs  da 
château,  et  parcourent  le  parc  et  les  jardins  dans  de 
nombreux  canaux.  B. 

maintenon  (Aqueduc  de).  Il  tôt  conçu  en  1680  par 
Lahire  et  Vauban  pour  amener  à  Versailles  les  eaux  de  la 
ririère  d'Eure,  depuis  le  boui^  de  Pont-Gouin  Jusqu'à 
l'étang  de  U  Tour,  à  20  kil.  de  Versailles,  et  déjà  l'un  de 
ses  réservoirs.  Les  travaux  furent  commencées  en  1683; 
on  ouvrit,  de  Pont-Gonin  Jusqu'à  Bere&res-l^-Mangot, 
un  canal  de  5  met.  de  large  sur  plat-fond,  3  met.  de  pnn 
fondeur,  et  48  kilom.  de  longueur,  en  partie  coupé  dans 
les  collines,  supporté  dans  les  vallées  par  de  hautes  levées 
el  par  30  ponts,  n  devait  traverser  la  vallée  de  Mainte- 
non sur  une  construction  en  maçonnerie  longue  de  45 
kilom.  environ,  et  toute  en  arcades  au  plus  profond  de  la 
vallée.  Cette  dernière  partie  dut  être  à  3  rangs  d'srcades 
superposées  ayant  les  proportions  suivantes  :  le  rang  in- 
férieur, 47  arcades  de  13  met.  d'ouverture  sur  23",  50  de 
hauteur,  et  d'une  longueur  totale  de  974",  50;  le  2*  rans, 
195  arcades  embrassant  une  longueur  de  2,234",  50, 
ayant  aussi  13  met.  d'ouverture,  et  22  seulement  de  hau- 
teur ;  enfin  le  3*  rang,  390  arcades,  mêaas  longueur  que 
le  précédent,  et  11  met  de  hauteur.  L'élévation  totele 
devait  mesurer  71  met.  Les  parements  des  arcs,  les  anf^es 
de  leurs  pieds-droits,  ceux  d*un  contre-fort  qui  les  appuie^ 
sont  en  pierres  de  taille  d'un  grand  appareil,  et  les  psrdeii 
intermédiaires  en  forts  moellons.  Mais  après  4  années 
de  travaux  et  une  dépense  de  8,613,000  livres,  et  quoi- 
qu'on eût  employé  pendant  plusieurs  années  30,000  nom- 
mes de  troupes  aux  travaux  de  terrassement,  l'entre- 
prise fut  abandonnée.  Le  rang  des  arcades  inférienree 
de  l'aqueduc  de  Maintenon  était  alors  seul  exécuté. 
L'exécution  de  ce  projet  fut  une  des  plus  grandes  entre- 

{>rises  du  règne  de  Louis  XIV,  et  aurait  ég^é  tout  oe  que 
es  Romains  ont  fait  de  plus  grand  en  ce  genre.  Sous 
Louis  XV,  on  rint  prendre  à  cet  aqueduc  les  matérianx 
nécessaires  pour  rebâtir  le  château  de  M"*  de  Pompa- 
dour  à  Grécy  ;  néanmoins,  en  1780,  il  restait  encore  aaseï 
de  parties  de  cet  immense  travail  pour  que  rachèvement 
en  fût  possible;  mais  depuis,  l'ûpieduc  de  Maintenon 
fut  encore  fortement  attaqué,  et  il  n'en  reste  plus  au- 
jourd'hui ope  11  arcades  entières.  G.  D— t. 

MAIRE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtcttonfiotrs  de  Biogra» 
phie  et  d^  Histoire, 

MAIRE  (Lord-).  V.  Lord-Mairb. 

BIAIRIE,  mot  qui  désignait  autrefois  les  fonctions  de 
maire,  et  qui  ne  s'applique  plus  qu'à  l'édifice  où  siège 
l'administration  municipale  de  chaque  commune.  Cest 
dans  la  mairie  que  sont  conservés  les  registres  de  l'état 
civil,  et  qu'aux  termes  de  la  loi,  doivent  être  célébrés 
les  mariages. 

MAISON  (du  latin  mansio,  demeure).  Après  s'être  abri- 
tés dans  les  grottes  et  les  cavernes  naturelles,  les  hommes 
dressèrent  des  tentes  et  des  cabanes,  puis  employèrent 
divers  matériaux  pour  la  construction  de  leurs  habita- 
tions. D*aprè8  TÉcriture  Sainte,  les  constructions  élevées 
après  le  oéluge  étaient  en  briques  séchées  au  soleil  et 
cimentées  de  bitume.  Tosorthrus,  fils  de  Menés,  premier 
roi  d'Egypte,  inventa,  dit-on,  l'art  de  tailler  la  pierre 
pour  bâtir.  Les  maisons  ont  naturellement  varié  selon  les 
temps,  les  climats,  et  les  progrès  de  la  civilisation.  — 
Chez  les  Bébreuafi,  elles  étaient  bâties  en  argile,  en  bri- 
ques, ou  en  pierres;  pour  les  palais  et  les  maisons  des 
grands,  on  employait  les  pierres  de  taille,  quelquefois 
même  le  marbre.  Comme  ciment  on  Titilisait  Taspbalte, 
mais  plus  souvent  la  chaux  et  le  plâtre,  qui  servaient 
aussi  d'enduit.  Les  murs  des  grandes  maisons  ëtaiem 
badigeonnés  en  couleur  rouge.  Le  bois  de  construction  le 


ployé  que  pour  les  boiseries  de  luxe.  Quant  à  la  disposi- 
tion, les  grandes  maisons  formaient  ordinairement  un 
carré,  avec  une  cour  an  milieu»  dans  laquelle  se  trouvait 


MAI 


iiw: 


MAI 


itt  puits  <m  aiM  citerne,  aiosi  aa*uo  boasin  gerfaut  quel- 
qnefois  de  bain.  Aatonr  de  réaîfice  il  y  avait  ordinaire- 
ment une  afmat-coar,  fermée  par  un  mur  d'enceinte. 
L'édifice  était  diTisé  en  plusieure  étages.  Les  toits  étaient 
plats,  tels  qu'on  les  yoit  généralement  chez  les  Orien- 
tsax,  et  seofement  un  peu  élevés  vers  le  milieu,  pour  que 
reso  de  pluie  s'écouUt  dans  des  gouttières  :  on  les  cou- 
mit  de  briques,  ou,  comme  dais  la  Syrie  moderne, 
é'one  composidon  de  pierres,  de  chaux,  de  sable  et  de 
eeodie.  On  s'y  promenait  pour  prendre  le  frais,  on  y 
MBcbait  même  dans  la  belle  saison,  on  y  dressait  des 
lentes  pour  la  ftte  des  Tàbemadee.  Le  toit  du  pauvre 
n'était  couvert  que  d'une  couche  de  terre,  sur  laquelle 
poussait  souvent  quelque  verdure.  On  n'arrivait  aux  ap- 
partements du  rn-de-chau8sée  que  par  la  cour  inté- 
rieure ;  à  Tun  des  côtés  de  l'édifice,  un  escalier  conduisait 
directement  de  l'avant-cour  ou  oour  eitérieureaux  étages 
mpérieurs  et  au  toit.  Les  appartements  étaient  lam- 
brissés et  parquetés,  les  murs  couverts  d'ornements  en 
ivoire  et  peut-être  de  peintures  ;  on  les  ch'aufliidt  en  hi- 
ver au  moyen  d'un  réchaud  ou  brasier  placé  au  milieu. 
Les  verrous,  lee  serrures,  les  clefs  étaient  ordinairement 
en  bois,  comme  on  en  voit  encore  maintenant  chez  les 
Orientaux.  Au-dessus  des  portes,  il  y  avait  des  inscrip- 
tiona  d'un  caractôre  religieux.  Les  fenêtres  étaient  dis- 
tribnées  avec  symétrie,  et  garnies  de  treillis  ou  de  Jalou- 
des;  contrairement  à  ce  qui  se  pratique  presque  toujours 
dus  l'Orient  aiodeme,  où  les  fenêtres  ne  donnent  que 
nr  la  cour  intérieure,  il  y  en  avait  qui  ouvraient  aussi 
mr  la  rue.  —  Vitruve  nous  apprend  que  les  peuples  de 
la  Colchide  et  du  Pont  construisaient  des  habitations  en 
Ms  de  mime  horizontalement  superposés  :  cette  dispo- 
sition, adoptée  par  les  Daces,  les  Sarmatesetles  Scythes, 
s'est  perpétuée  jusqu'à  nos  Jours  dans  les  régions  cor- 
respondantes, &  l'exception  de  la  forme  de  la  toiture,  qui 
était  pyramidale.  —  Les  Phrygiens,  qui  manquaient  de 
bois,  creusaieat  circulairement  des  tertres  naturels ,  et 
pbataient,  autour  de  l'orifice,  des  perches  qu'ils  cour- 
oaient  vers  le  centre  et  liaient  ensemble  de  manière  à 
former  une  espèce  de  coupole  :  ils  recouvraient  le  tout 
avec  des  roseaux  et  une  couche  d'argile.  On  pénétrait 
dans  ces  habitations  au  moven  d'une  galerie  pratiquée 
dans  le  flanc  da  tertre.  —  nous  avons  parlé,  dans  notre 
Dietûmnairê  da  Biographie  et  d'Histoire  (p.  1689,  col.  2), 
des  maisons  é(fyptiennes,  grecques  et  romaines. 

Les  habitahons  des  Ckûdois  étaient  de  forme  circu- 
laire, et  bâties,  soit  en  pierre,  soit  en  bois  et  en  terre, 
c-i-4,  avec  des  poteaux  soutenant  de  doubles  claies 
d'osier,  entre  lesquelles  des  couches  de  paille  hachée, 
pétrie  avec  de  l'argile,  formaient  une  muraille  solide.  Le 
toit,  en  branchages  légers,  était  couvert  de  chaume  ou  de 
ôirdeaux.  Lee  briques  et  les  tuiles  ne  furent  connues 
que  sous  la  domination  romaine  :  on  fit  alors  des  mai- 
sons sur  le  modèle  de  celles  des  vainqueurs,  c.-à-d.  des 
bâtiments  rectangulaires,  à  un  ou  plusieurs  étages.  Les 
invasions  des  Barbares  au  v*  siècle  firent  disparaître  ces 
oonstnictions,  et  il  ne  reste  plus  rien  ai^ourd'hui  des 
liabitsdoos  I4>partenant  aux  premiers  siècles  du  moyen 
le^*  On  n'en  trouve  pas  qui  soient  antérieures  au 
xn*  siècle  :  celles  qu'on  voit  dans  quelques  villes  du 
IGdi,  en  Champagne  et  dans  l'Orléanais,  ont  des  façades 
percées  de  fenêtres  en  plein  cintre,  peu  élevées,  et  d'un 
style  sévère.  Perpignan  et  Reims  possèdent  queloues 
maisons  en  pierre  du  xiii*  siècle;  celles  de  Metz,  a  la 
même  époque,  sont  surmontées  de  créneaux.  Aux  de- 
oieares  des  familles  nobles,  des  armoiries  étaient  sculp- 
tées an-dessus  des  rares  fenêtres  percées  sur  les  façades. 
Dana  les  villes  ^i  Jouissaient  de  la  liberté  politique,  les 
bourgeois  aimaient  à  garnir  de  tours  leurs  maisons  : 
sinsi,  au  xm*  siècle,  Avignon  ne  comptait  pas  moins  de 
30O  maisons  de  ce  genre.  Le  xiv*  siècle  nous  a  légué  peu 
de  maisons  en  pierre  :  les  fenêtres  et  les  portes  y  sont 
ordinairement  en  ogive,  avec  des  tympans  et  des  corni- 
ches plus  ou  moins  ornés;  souvent  les  arcades  supé- 
rieores  portent  à  faux  sur  celles  du  rez-de-chaussée.  Les 
maisons  en  bois  sont  plus  nombreuses,  et  on  les  trouve 
principalement  dans  nos  provinces  septentrionales.  Elles 
se  terminent  par  un  pimon  aigu,  dont  la  saillie,  sup- 
portée par  deux  pièces  de  bois  formant  ogive,  abrite  les 
étages  inférieurs.  Les  pièces  de  bois  de  la  charpente  ap- 
parente sont  l'unique  décoration  de  la  maison  ;  ordinai- 
Rment,  pour  assurer  leur  conservation,  on  les  recouvrait 
d'ardoises,  où  l'on  imagina  de  sculpter  des  figures.  Le 
itt-de-chaossée  était  occupé  par  une  étroite  entrée  et  par 
nne  boutique  non  close  pendant  le  Jour.  C'est  surtout  au 
XV*  siècle  que  s'établirent  les  étages  en  encorbeUement, 


^rptombant  lee  uns  sur  lee  antres  s  alors  aassl,  on  voit 
ta  brique  concourir  à  Ul  décoration,  en  formant  les  rem- 
plissages de  la  charpente  ;  qnelouefois  elle  est  remplacée 
par  des  carreaux  de  faïence  colorée.  Par  sentiment  de 
défiance,  les  fenêtres  du  rez-de-chaussée  sont  petites, 
élevées,  garnies  de  grilles,  et  plusieurs  portes  uonnent 
sur  des  rues  différentes.  Les  ouvertures  des  étages  supé- 
rieurs sont  grandes  ou  petites,  selon  les  climats,  pour 
laisser  entrer  ou  pour  Arrêter  la  lumière  et  la  chaleur* 
C'était  un  signe  die  richesse  et  de  puissance  que  d'avoir, 
aux  angles  ou  sur  le  milieu  du  mur  extérieur,  des  tou- 
relles saillantes,  rondes  ou  poljrgonales  ;  d'autres  tou- 
relles étaient  b&ties  à  l'intérieur  des  cours  pour  contenir 
les  escaliers.  La  distribution  intérieure  des  maisons  était 
fort  simple  et  peu  commode;  pour  toute  décoration,  il 
n'y  avait  que  des  lambris  divisés  en  compartiments,  en- 
richis de  peintures  ou  de  sculptures,  ainsi  qu'un  carre» 
lage  de  faïence  colorée,  et  encore  était-ce  un  ornement 
d'une  grande  recherche.  Au  xvi«  siècle,  la  RenaUssancê 
introduisit  dans  les  habitations  des  modifications  de  toute 
espèce  :  la  brique  et  la  pierre  fuient  simultanément  em» 
ployées  ;  les  arcs  en  anse  de  panier  remplacèrent  l'ogive  t 
les  arabesques  furent  mêlées  aux  détaib  gothiques  dans 
l'ornementation.  Cependant  on  continua,  surtout  pen- 
dant les  guerres  de  religion,  de  donnv  aux  maisons  ces 
tourelles,  ces  murailles  à  meurtrières,  ces  saillies  qui  les 
rendaient  propres  à  la  défense.  Au  goût  italien  succéda 
le  goût  flamand  :  du  temps  de  Henri  IV  et  de  Louis  xm, 
les  constructions  eurent  pour  caractères  les  toits  aigus , 
les  hautes  cheminées  et  les  briques  rouges.  Avec  Louis  XIV, 
rarchitecture  revint  à  Ul  copie  servile  de  l'antioue,  à  l'en- 
tablement, à  la  nudité.  Depuis  cette  époaue,  runiformité 
la  plus  monotone  s'est  peu  à  peu  établie.  Autrefois, 
chaque  habitation  avait  sa  physionomie,  et  présentait  un 
pignon  diversement  orné  ;  pas  une  porte,  pas  un  balcon, 
pas  un  toit  qui  n'eût  son  style,  qui  ne  portât  sa  date;  la 

{>ierre,  la  brique,  le  bois  peint  ou  sculpté  s'entremè- 
aient  de  maisons  en  maisons,  et  offraient  une  continuelle 
variété  de  tons  et  de  nuances  :  aujourd'hui,  dans  les  con- 
structions qu'on  appelle  belles,  pas  une  corniche,  pas 
une  cheminée  qui  dépasse  ses  voisines;  même  taille, 
même  patron,  même  couleur  pour  toutes  les  façades.  En 
général,  les  maisons  sont  construites  en  maçonnerie  de 
moellons  et  de  mortier  de  chaux  depuis  le  fond  des  fon- 
dations Jusqu'à  la  surface  du  sol ,  et  en  maçonnerie  de 
moellons  et  de  plAtre  depuis  le  sol  Jusqu'au  faite  ;  toute- 
fois les  angles  et  le  parement  de  la  devanture  sont  sou- 
vent faits  en  pierre  de  taille.  Les  murs  diminuent  d'épais- 
seur en  s'élevant,  en  sorte  qu'au  dernier  étage  ils  ne 
sont  guère  plus  épais  que  les  cloisons  int^eures  qui  sé- 
parent les  chambres  les  unes  des  autres.  Ils  sont  enduits, 
après  coup ,  d'une  couche  de  plâtre ,  qui  permet  de  les 
couvrir  d'ornements.  Les  étages  diminuent  de  hauteur 
en  montant  {V,  Bathients  —  Police  des^. 

En  Angleterre ,  toute  famille  qui  Jomt  d'une  fortune 
même  médiocre  est  seule  dans  son  habitation,  tandis 
qu'en  France  plusieurs  logements  distincts  sont  presque 
toujours  ménagés  dans  une  même  maison.  Dans  une 
maison  anglaise,  le  rez-de-chaussée  est  élevé  d'environ 
t  met.  au-dessus  de  la  rue,  dont  il  est  séparé  par  un  fossé 
ou  une  cour  basse  de  1  à  2  met.  de  lai^ur  sur  2  met. 
de  profondeur  ;  sur  son  parapet  est  une  grille  en  fer. 
C'est  par  le  moyen  de  ce  fossé  au'eet  éclairée  la  cuisine, 
qui  est  souterraine  ;  la  cave  lui  est  contiguê.  Un  palier 
en  pierre  sert  de  pont  pour  traverser  le  fossé,  et,  au 
moyen  de  quelques  marches,  pour  arriver  à  la  porte  de 
la  maison.  Dans  le  sol  du  trottoir  qui  borde  la  rue  est 
une  petite  grille  ouvrante,  par  laquelle  on  Jette  le  charbon 
de  terre  dans  un  caveau  pratiqué  au-dessous  et  qui  a  une 
issue  dans  la  cour  basse.  Chaque  étage  de  la  maison  est 
composé  de  deux  ou  trois  pièces  au  plus.  Au  rez-de- 
chaussée  sont  un  parloir,  un  cabinet  et  l'escalier;  au 
1*'  étage,  la  salle  à  manger  et  ses  dépendances;  au  2% 
les  chambres  à  coucher;  au  3",  les  logements  des  do- 
mestiques. Les  appartements  sont  généralement  peints 
à  l'huile.  B. 

MAISON  cABRi&B,  uom  vulgalro  i  nuùs  impropre,  d'un 
temple  romain  de  hi  ville  de  Ntmes.  On  ne  sait  qui  en 
fut  l'architecte;  d'après  les  indications  que  laissent  les 
débris  d'une  inscription  de  la  frise,  il  parait  avoir  été 
dédié  aux  enfants  d'Agrippa,  petits-flls  de  rempereur 
Auguste.  Longtemps  enseveli  sous  les  ruines  des  édifices 
voisins,  ce  temple  reparut,  mutilé  et  délabré,  pour  chan- 
ger souvent  de  maîtres,  subir  de  nouvelles  mutilations, 
et  même  des  réparations  ignobles.  Mieux  apprécié  de  nos 
jours,  il  a  repris  sa  forme  et  presque  sa  splendeur  pr»- 


MAI 


1SM 


MAX 


Hlères  I  il  ronfenne  un  musée  de  tableaux  et  d'aatlqaea. 
Ceit  un  temple  pseuda-péripUrê,  parce  qu'il  a  «ur  les 
cMés  dea  colonnes  engagées  ;  prostyle,  parce  qu*il  n'a  de 
portique  que  sur  une  face  ;  hKeastyUf  parce  qu'il  a  6  co- 
lonnes sur  la  façade.  Son  ordonnance  est  corinthienne. 
n  y  a  il  colonnes  sur  les  c6tés,  en  y  comprenant  celles 
des.  coins.  Le  plan  de  l'édifloe  est  un  parallélogramme 
rectangle  de  25™,13  sur  12%97.  La  construction  pose 
sur  un  stylobate  haut  de  3*,30.  On  monte  au  péristyle 
par  un  escalier  de  15  marches.  Les  colonnes  cannelées, 
«nées  de  chapiteaux  d'un  traTail  admirable,  supportent 
Fentablement.  auquel  on  ne  reproche  que  trop  de  ri- 
ehesse;  mais  dans  tout  l'édifice  un  goût  exquis  accom- 
pagne cette  profusion  d'ornements.  Lm  modilions  offrent 
une  particularité  qui  ne  se  voit  nulle  part  ailleurs  :  ils 
sont  sculptés  dans  le  sens  inverse  de  ceux  qui  décorent 
tous  les  entablements  antiques,  c.-à-d.  que  leur  partie  la 
plus  saillante,  au  lieu  de  s'appuyer  contre  la  corniche 
pour  former  une  console,  est  Toisine  du  larmier.  Quand 
on  restaura  la  Jfatsoii  carrée  en  1823,  on  pratiqua  des 
fouilles  qui  permirent  de  Toir  de  longues  murailles  pa- 
rallèles au  monument,  une  suite  de  bases  de  colonnes, 
des  fûts  renyersés  et  des  débris  de  chapiteaux  ;  Il  en  ré- 
sulte que  le  temple  était  entouré  d'une  enceinte  sacrée  : 
il  a  éà  démontré  même  que  cette  colonnade  s'étendait 
asses  loin,  de  manière  à  drconacrire  un  forum.  Barthé- 
lémy appelait  la  Maison  carrée  le  chef-d'œuvre  de  l'ar- 
chitecture antique  et  le  désespoir  de  l'architecture  mo- 
demei  Golbert  aurait  voulu  l'emporter  pierre  à  pierre 
pour  embellir  les  Jardins  de  Versailles,  et  le  cardinal  Al- 
beronl  âsait  qu'il  la  faudrait  envelopper  d'or.         B. 

MAISON  JD'àMXÈT.  F.  AaaÉT. 

VAISON  DB  COlUlBCnON,  —  DB  D^TEUTION,  —  DB   PORCB. 

V.  Faisons. 

MAISON  DB  JEU.  V,  JbU. 

MAISON  BB  L'BMpmBUR  (Ifinistère  de  la).  Ministère  qui, 
de  i853  à  la  fin  de  i860,  était  réuni  au  Ministère  d'Etat 
(F.  ce  mot).  H  avait  pour  attributions  les  b&timents  et  la 
dotation  mobilière  de  la  couronne,  l'administration  de 
ses  domaines  et  forêts,  les  pensions  sur  la  liste  civile,  etc. 

MAISON  BB  PRÊT.   K.  MONT-DB-PléTÊ. 

MAISON  BB  SANT<,  établissement  privé,  destiné  à  rece- 
voir à  demeure  des  malades,  qui  payent  une  pension, 
plus  ou  moins  Importante  suivant  le  logement  qu'ils 
occupent,  et  la  nature  des  soins  qu'exige  leur  état.  Une 
maison  de  santé  est  sous  la  direction  d'un  médecin,  dont 
elle  est  souvent  la  propriété  qu'il  administre  et  gère  à 
ses  risques  et  périls.  Gotaines  de  ces  maisons  sont  spé- 
ciales pour  le  traitement  des  aliénés.  V,  AuiN^s. 

MAISON  n'oa  on  doréb  de  Néron.  Elle  était  située  à 
Rome,  dans  la  vallée  entre  les  monts  Palatin,  Esquilin 
et  Gélius,  el  en  partie  sur  ces  deux  dernières  collines, 
avec  d'immenses  Jardins.  Le  tout  occupait  une  superficie 
de  i 8,000  met.  carrés,  ou  120  hectares,  le  cinquième 
du  Bois  de  Boulogne  de  Paris.  On  n'a  sur  cette  demeure 
que  dea  données  un  peu  vagues.  Devant  la  maison  était 
un  vaste  vestibule  flanqué  de  portiques  de  mille  pas 
(i,48i  met)  à  triple  rang  de  colonnes,  au  milieu  du- 
quel on  voyait  une  statue  colossale  de  Néron,  haute  de 
120  pieds  (35",S5).  A  l'intérieur,  tout  resplendissait  d'or, 
depieireries,  de  nacre  et  d'ivoire.  Les  plafonds  des  salles 
de  festin  étaient  plaqués  d'ivoire,  et  disposés  mécani- 
quement de  manière  a  s'ouvrir  pour  laisser  tomber  une 
pluie  de  fleura  ou  asperger  les  convlvea  d'eaux  de  sen- 
teur. La  principale  ne  ces  salles  était  ronde,  et  tournait 
Îour  et  nuit  pour  imiter  le  mouvement  diurne  du  monde. 
1  y  avait  des  bains  d'eau  de  mer,  et  d'autres  d'eau  sul- 
fureuse, amenée  des  environs  de  Tlbur.  Cette  maison, 
pour  l'ornement  de  laquelle  on  enleva  de  Grèce  plus  de 
500  statues,  était  d'une  telle  somptuosité,  qu'elle  reçut  de 
Néron  même  le  surnom  de  maison  S  or  ou  dorée.  Les  Jar- 
dhu  renfermaient  des  champs  labourés,  des  prés,  des  vi- 
gnobles, des  bois  peuplés  de  toutes  sortes  d'animaux,  des 
solitudes,  des  plaines,  avec  de  magnifiques  points  de  vue  ; 
dîms  le  fond  de  la  vallée  il  y  avait  un  lac  si  grand,  qu'on 
rappdalt  une  mer  :  en  outre,  il  était  entouré  de  bâti- 
ments, comme  une  place  publique  de  ville.  Les  architectes 
de  cette  maison  d'une  somptuosité  inouïe ,  furent  Sé- 
vérus  et  Geler.  —  Néron  créa  sa  Maison  dorée  sur  les 
ruines  d'une  partie  de  Rome,  à  la  suite  de  l'incendie  qui 
dévora  les  deux  tiers  de  la  ville,  l'an  810  de  Rome,  64  de 
J.-C.  n  épuisa  l'Empire  pour  cette  création,  qu'il  laissa 
Imparfaite.  Vespasien  et  Titus  la  démembrèrent  pour  en 
consacrer  les  diverses  parties  à  des  services  publics  :  le 
Temple  de  la  Paix,  les  Thermes  de  Titus,  sortirent  de 
eette  transfonnatioa,  et,  sor  l'emplacement  du  lac  dit  ki 


mer,  Vespasiea  éleva  le  prodigieux  amphithéâtre  fi» 
vien,  aqjourd'hui  le  Golisée.  G.  D— y. 

MAISONS  QARNivs.  Coux  qul  tiennent  ces  maisons  sont 
obligés,  sous  peine  d'une  amende  de  0  à  10  fir.,  d'inscrire 
sur  un  registre  spécial  l'entrée  et  la  sortie  de  toute  pe^ 
sonne  qui  a  logé  chez  eux,  ne  fût-ce  que  pour  une  nuit^ 
et  de  présenter  ce  registre  aux  autorités  de  police  (F.  Ad» 
bbroistb).  Les  personnel  qui,  sans  être  aunereistes,  h6« 
teliers,  logeurs  de  profession,  louent  habituellement  on 
appartement  garni,  doivent  en  avoir  fait  \h  déclaration  à 
la  préfecture  de  Police  pour  Paris,  à  la  mairie  pour  les 
départements,  et  faire  connaître  an  commissaire  de  po- 
lice du  quartier  les  noms,  prénoms,  ftge,  qualité  ou  pro- 
fession des  personnes  logé»,  dans  les  24  neures  de  leur 
arrivée,  ainsi  que  leur  sortie,  le  tout  à  peine  d'une 
amende  de  6  à  10  fr.,  et,  en  cas  de  réddive,  d*un  empri- 
sonnement de  1  à  5  Jours  (ordonn.  du  2U  déc.  1734,  du 
8  nov.  1780,  du  24  août  1700,  et  du  22  JuiUet  1701  ;  Coâ* 
pénal,  art  475-478). 

MAISONS   IMPÉRIALES  NAPOLéON.   F.    LEGION    B'HOmiBDB, 

dans  notre  Dictionnaire  de  Bioffraphie  et  d^ Histoire, 

MAISTRANCE,  mot  par  lequel  on  désigne,  dans  la  Ma- 
rine, le  corps  des  m(àtres  ae  diflérentes  spécialités  at- 
tachés à  un  port  ou  embarqués  sur  un  navire  de  TÊtat. 
La  maistrance  se  compose  des  premiers  maUres  de  ma- 
nœîsvre,  ou  mattres  d^ équipage^  de  canonnage  et  de 
timonerie^  des  maîtres  charpentiers,  calfats  et  voUien, 
et  des  seconds  maitres  ou  contre^maitres  de  ces  diffé- 
rentes catégories.  Il  existait  à  Brest,  à  Rochefort  et  à  Tou- 
lon des  Ecoles  de  maistrance,  établies  en  1819  pour 
l'instruction  d'un  certain  nombre  d'ouvriers  destinés  i 
la  maistrance  :  depuis  1868,  il  y  a  5  écdes  prépara" 
toires  de  maistrance,  à  Brest,  Gherbourg,  Lorient, 
Rochefort,  Toulon,  et  2  écoles  seoondairei  de  mais* 
trance,  à  Brest  et  Toulon. 

MAITRE,  en  termes  de  Marine,  nom  des  sous-ofBciers 
(  V,  ÉQDiPAGB  —  Maître  d',  Contre -BIaitrs,  Qdarties- 
MAma).  On  appelle  Maitres  entretenus  des  marins 
chargés  de  surveiller  les  ouvriers  des  arsenaux  et  établis- 
sements maritimes  :  un  décret  du  iO  mars  1856  les  a 
divisés  en  trois  classes,  dont  le  traitement  est  fixé  à 
2,000,  i,800  et  1,500  fr.  Le  Maitre  de  port  est  un  sous- 
ofllder  chargé,  dans  les  ports  de  l'État,  de  faire  exécuter 
les  ordres  que  lui  donne  pour  les  opérations  maritimes 
le  capitaine  du  port,  et  qui  dirige  toua  les  appareils  de 
force  qu'exigent  ces  opérations.  Il  y  a  aussi,  dans  les 
ports  de  commerce,  des  maitres  de  port  chargés  de  la  po- 
lice maritime  :  ils  sont  de  quatre  classes  ;  un  décret  da 
15  Juillet  1854  a  pourvu  à  leur  organisation  et  défini  leurs 
fonctions. 

MAiraS  DB  CHAPELLE.  V,  CHAPELLE  Ot  COMPOSrTSnU 

MAITRE  D'érOBES.    V.  RéPéTrTBUR. 

MAITRE  DE  PENSION.  V,  INSTITUTION  (Ghof  d'). 

MArrRE  DE  POSTE.  V,  POSTB. 

MAITRE  DBS  COMPTES.    V,  COMPTBS  (GoUT  de8)« 

MArrRE  DES  REQUÊTES.  V,  État  (Gouseil  d'). 

MAITRE  kS  ARTS.  V.  ARTS. 

MAITRISE,  terme  d'Arts  et  Métiers.  F.  notre  Dictwnn 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

MAmusE,  école  dans  laquelle  les  enfants  do  choenr 
d'une  édise  reçoivent  leur  éducation  musicale.  Avant  la 
Révolunon,  on  comptait  en  France  plus  de  400  maîtrises, 
réunissant  quatre  à  cinq  mille  enfants ,  et  d'où  sortaient 
presque  tous  les  compositeurs,  les  organistes  et  les  chan- 
teurs. Il  n'en  existe  plus  aqjouird'hui  qu'un  petit  nombre. 

MAJESTÉ.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d  Histoire, 

MAJEUR  (du  latin  fiN^or),  qui  a  l'ftge  de  majorité 
(K.  ce  mot), 

MAJEUR,  terme  de  musique.  V,  Intervalle,  Mode* 

MAJEURE,  l'une  des  prémisses  du  syllogisme,  ainsi 
nommée  parce  qu'elle  contient  renonciation  du  rapport 
du  grand  terme  {major  termin/us)  avec  le  moyen  terme 
(F.  Prémisses,  Stllogisme,  Terme).  La  Majeure  s'énonce 
ordinairement  avant  la  Mineure;  mais  cela  n'a  lieu  ni 
toujours  ni  nécessairement,  et  ce  serait  on  moyen  peu 
sûr  de  les  distinguer  que  de  se  fier  à  leur  ordrâ  maté- 
riel. R— B. 

majeure,  dans  certains  Jeux  de  cartes,  ae  dit  de  Is 
tierce,  de  la  quarte  et  de  la  quinte  où  se  trouve  Pas. 

MAJOUQuE,  nom  que  les  Italiens  du  xv«  siècle  don- 
nant aux  vases  de  faïence,  parce  que  les  premiers  qu'ils 
virent  provenaient  de  Majorque.  On  le  conser*'e  aux 
iUences  qu'ils  fabriquèrent  a  cette  époque.  V,  Cte  «nous. 

MAJOR.  V,  ce  mot  dans  notre  Dtctionnatr»  de  béogror 
phiê  et  d'Histoire» 


MAJ 

«*ioi  (Aid^adant-).  7.  Adjodant. 
■Aioft  iGhirorgien-).  V,  Chirorgiois. 
«AWR  (Bonde,  SaiEpant,  Tambour).  V.  Rom, 
Tahboob. 

■Aïoa  DB  BBiOADB.  1  F.  uotre  Dictionnaire  d$  Biogra^ 
HAJoa  DB  MABiNB.    )     pMê  et  SHittotrâ, 
VAioa  DB  PLACB,  offidoT  Supérieur  chargé  du  détail  et 
delà  sonreillaiioe  du  aenice  d'une  place  de  guerre.  Il  a 
nédilemeot  dans  ses  attributions  les  çtfdM,  les  rondes 
tt  nuit  et  de  jour,  la  police  de  la  garnison,  la  rédaction 
des  rapporta  Jounialiers,  les  écritures  de  bureau.  Son 
nog  est  immédiatement  après  le  commandant  de  place. 
Quand  il  n'y  a  pas  de  mijor  titulaire,  c*est  Ta^judant  de 
place  le  plus  ancien  qui  en  remplit  les  fonctions. 
BAJoa  câiéBAL.  1  Y,  notre  Dtctionnaire  de  Biographie 
HâJORâT.         )      et  d'Histoire. 
HAJORDOME  (du  latin  maior  domue  «  maître  de  la 
maison  >  ),  le  premier  de  ceux  de  la  maison,  le  chef  des 
cuisines  et  de  Toffioe,  le  grand  ordonnateur  des  festins. 
Ce  lut  le  titre,  !•  des  maires  du  palais  sous  les  rois  Mé- 
roYin^ens;  S*  du  maître  de  l'hôtel  ou  grand  maître  de 
la  maison  des  princes;  3o  du  premier  ministre  dans  cer- 
taines petites  cours. 

MAJORITÉ,  âge  auquel  on  est  supposé  ayoir  atteint  la 
maturité  d'esprit  et  de  Jugement  dont  on  a  besoin  pour 
diriger  ses  affaires  soi-même.  A  Rome,  où  la  puissance 
palànelle  était  si  forte,  la  majorité  était  fàxée  a  25  ans; 
dies  les  Germains,  à  15  ans,  âge  auauel  on  pouvait  porter 
les  armes.  Dans  l'ancienne  France,  il  n'y  eut  pas  de  règle 
fixe  :  lA  où  dominait  le  Droit  romain,  la  minorité  fut  gé- 
néralement ramenée  à  25  ans;  ailleurs,  ce  fut  14, 15  ou 
20  ans.  D'après  le  Code  Napoléon  (art.  488),  la  majorité 
est  fixée  à  21  ans  pour  les  deux  sexes  :  il  n'v  a  d'excep- 
tion qu'en  matière  de  mariage  et  d'adoption  (K.  ces 
ntouy  —  Lamajorité  politique  est  la  même  que  hi  ma- 
jorité civile  (K.  Élbctbub).  En  matière  d'élections,  la  ma- 
jorité est  la  pluralité  des  votants  :  elle  est  absolue  ou 
reiaiioe,  suivant  qu'elle  est  formée  de  la  moitié  des  voix 
plus  une,  ou  qu'elle  dépend  simplement  de  la  supériorité 
du  nomlire  de  voix  obtenues  par  un  concurrent. 

MÂJOBoi  DBS  souvBaADis.  Los  régeucos,  en  matière  de 
gouvernement,  amenant  souvent  à  leur  suite  des  incon- 
vénients graves,  on  s'est  accordé,  à  peu  près  dans  tous 
les  pays,  à  fixer  l'âge  de  majorité  des  souverains  beau- 
eoap  plus  t6t  que  pour  les  citoyens.  Cette  mesure  put  se 
justifier,  non-seulement  par  une  sorte  de  nécessité  poli- 
tique,  nuis  aussi  par  la  situation  tout  exceptionnelle  des 
personnes  en  fitveur  de  qui  fut  proposé  le  privilège.  En 
eBet,  rhéritier   présomptif  d'une  couronne  reçoit  une 
éducation  toute  particulière,  et  vit  dans  un  milieu  qui 
bâte  le  développement  de  son  intelligence;  il  acquiert 
une  aptitude  précoce  pour  les  afEsires,  une  sorte  d'expé- 
rience de  bon  sens  et  de  jugement  pour  se  choisir  des 
ewiseilleis  habiles,  dont  il  se  fait,  dans  son  for  intérieur, 
comme  nne  espèce  de  tutelle.  Jusqu'au  Jour  où  11  peut 
porter,  sans  trop  de  crainte  ni  de  faiblesse,  Ul  responsa- 
oilité  qni  pèse  sur  tout  chef  de  nation.  —  En  France,  le 
désir  ^abrégBT  les  réglées  fut  peut-être  d'abord  porté 
on  pea  loin  :  Philippe  le  Hardi  ua,  par  une  ordonnance 
dn  3  octobre  1270,  à  14  ans  accomplis  la  majorité  de  son 
héritier  présomptif  :  on  regarde  cette  ordonnance  comme 
le  pranier  texte  connu  sur  la  matière.  Sous  la  l'*  race, 
il  y  eut  des  rois  qui  prirent  leur  majorité  à  15  ans. 
Charles  V  enchérit  un  peu  sur  Philippe  le  Hardi,  en  abais- 
sant à  14  ans  commencés  la  majorité  de  l'héritier  de  la 
couronne  (édit  de  Vincennes,  du  mois  d'août  i374). 
Charles  VI  confirma  cet  édit  par  une  ordonnance  de  1302, 
qui  a  régi  la  mati&re  jusqu'à  Ul  Constitution  de  1701,  ^i 
éleva  à  18  ans  accomplis  l'&ge  de  majorité  du  souverain. 
La  roi  était  déclaré  majeur  dans  un  lit  de  Justice  tenu  à 
est  eifet.  —  Le  1"  Empire  français  suivit  cette  règle 
(sénatos-consulte  organique  du  28  floréal  an  xn,  ou 
48  mai  1804);  —  la  Royauté  de  1830  l'adopta  aussi  par 
sa  loi  du  30  août  1842  sur  la  Régence  ;  —  enfin  le  2«  Em- 
pire Ta  consacrée  de  nouveau  dans  le  sénatus-consulte 
dal7JuiUeti856. 

Voia  maintenant,  en  1862,  quel  est  l'tae  de  majorité 
des  souverains  dans  les  principaux  États  de  l'Europe,  et 
dus  le  grand  empire  du  Brésil. 

Angleterre,  —  D'après  la  loi,  le  roi  est  censé  n'être 
jamais  mineur;  néanmoins,  pur  mesura  de  simple  pru- 
dsoos,  si  c'est  nn  prince  qui  monte  sur  le  trùne,  le  Par- 
lement nomme  nn  régent  ou  un  conseil  de  tuteurs  Jusqu'à 
ce  qn^  ait  atteint  sa  18*  année  ;  et  si  c'est  une  princesse, 
jusqu'à  ce  qu'elle  ait  16  ans.  Néanmoins,  le  consente- 
OMot  du  mineur  ou  de  la  mineure  royale  est  nécessaire 


1301 


MAL 


pour  cela,  et  même  ce  conseil  ne  peut  entraver  la  vis» 
ipnté  du  souverain-enfant,  car  ce  que  ferait  le  souverain 
sans  lui  ou  sans  2e  régent  serait  localement  valable.  Or- 
dinairement, en  cas  de  prévision  de  minorité,  une  loi  en 
règle  d'avance  les  dispositions. 

Dans  les  autres  États,  l'âge  de  18  ans  a  prévald  pres- 
que partout,  peutp^tre  à  l'exemple  de  la  France,  ou  platût 
par  acte  de  prudence;  on  le  trouve  adopté  dans  les 
royaumes  ou  empires  ci-dessous  :  Autriche,  —  Bavière, 

—  Belgique,  —  Brésil,  —  Danemark,  —  Espagne,  — > 
Hanovre,  —  Italie,  —  Pays-Bas,  —  Portugal,  —  Prusse» 

—  Saxe,—  Suède  et  Norvège,  —  et  Wurtemberg. 
Dans  les  États  de  VEglise,  le  souveiain  étant  électif, 

il  n'y  a  jamais  de  mineur.  —  En  Russie,  le  souverain 
est  xn^eur  à  16  ans;  s'il  est  mineur  de  16  ans,  il  v  a  un 
conseil  de  régence.  —  En  Turquie  et  en  Êgupte,  la  suc- 
cession au  trône  a  lieu  par  ordîre  de  primo^niture  parmi 
les  fils  ou  les  frères  du  souverain  ;  le  plus  âgé  succède.  Si 
le  plus  âgé,  dans  l'une  des  catégories,  est  enfant,  le  grand 
viar  gouverne,  mais  au  nom  seul  du  sultan.  G.  D— t. 
MAJUSCULES  (Lettres),  du  latin  majusculus  (un  peu 
plus  grand);  nom  donné  à  certaines  lettres  plus  grandes 
que  les  autres  et  qui  ont  presque  toutes  une  figure  diffé- 
rente de  celles-ci  :  A,  a;  B,  b,  etc.  Chez  les  Grecs  et  les 
Romains,  l'écriture  parait  d'abord  avoir  été  toute  en  ma- 
juscules :  plus  tard  l'usage  en  est  resté  dans  les  inscrip- 
tions, comme  cela  a  lieu  encore  chez  nous.  Quant  à  leur 
emploi  dans  l'écriture  cursive  concurremment  airec  les 
minuscules,  il  a  peut-être  été  inconnu  dans  l'antiquité. 
Ce  n'est  guère  qu'à  l'époque  de  l'invention  de  l'impri- 
merie que  cet  usage  s'est  établi  ou  du  moins  a  été  con- 
sacré. Le  premier  mot  d'un  discours  quelconque,  de 
toute  phrase  nouvelle  qui  commence  âpres  un  point  ou 
un  alinéa,  doit  être  distingué  des  autres  par  une  lettre 
initiale  nûduscule.  Il  en  est  de  même  d'un  discoure  di- 
rect que  Ton  cite,  quand  même  la  phrase  précédente 
n'en  serait  séparée  que  par  deux  points  ou  une  virgule. 
Les  noms  propres  de  divinités,  d'hommes,  d'êtres  abstraits 
personnifiés,  de  lieux  géographiques,  les  noms  appella- 
tifs  des  tribunaux,  des  compagnies,  des  corps,  les  ad- 
jectifs servant  de  surnom  caractéristique,  prennent  une 
initiale  majuscule.  En  adressant  la  parole  à  une  per- 
sonne ou  à  un  être  quelconque,  le  nom  qui  désigne  cette 
personne  ou  cet  être,  fût -il  appellatif,  doit  commencer 

Sir  une  grande  lettre  :  0  Ciell  à  Terre!  Monseigneur, 
esdames.  Majesté,  Altesse,  Les  adjectifs  qui  précèdent 
les  noms  de  dignitâs  éminentes  prennent  la  majuscule  : 
«  J'ai  vu  Son  Altesse.  »  Le  prinape  étant  que  tout  nom 
propre  s'écrit  par  une  majuscule,  tous  les  substantifs, 
quelle  que  soit  leur  nature,  qui  ont,  dans  une  phrase,  la 
valeur  d'un  nom  propre,  doivent  s'écrire  par  une  minus- 
cule. Depuis  l'invention  de  l'imprimerie  il  fut  d'usage  de 
donner  une  majuscule  au  nominatif  de  chaque  phrase, 
et  quelquefois  même  à  chaque  substantif;  cet  usage  du- 
rait encore  au  xvn*  et  au  xvm*  siècle.  Par  un  reste  très- 
mitigé  de  cet  usage,  quand  un  mot  a  plusieun  sens  plus 
ou  moins  différents,  on  emploie  quelouefois  la  minuscule 
pourindiouer  le  sens  le  plus  considérable;  ainsi,  «  la 
Noblesse  d'Angleterre,  »  c.-à-d.  le  corps  des  nobles,  tan- 
dis qu'on  écrit  :  a  La  vertu  est  la  vraie  noblesse.  »  On 
écrit  !  «  Il  se  rendit  au  sénat,  »  c-èrd.  à  la  salle  où  se 
réunissent  les  sénateurs;  mais  «  Il  fut  blâmé  par  le  Sé- 
nat, »  c-àrd.  par  le  corps  des  sénateure.  Dans  la  poésie, 
il  est  reçu,  pour  mieux  assurer  la  distinction  des  vers,  de 
mettre  une  initiale  minuscule  à  chaque  vere.         P. 

MAKAMAT,  mot  arabe  qui  veut  dire  séances,  et  dé- 
signe, par  extension,  des  réunions  littéraires  où  les 
auditeun  entendent  des  récits  improvisés.  Il  a  été  ap- 
pliqué par  Hamadàni  à  un  recueil  de  400  récits  en  forme 
de  Nouvdles.  Hariri  l'a  pris  aussi  pour  ses  contes. 

BfAL.  L'idée  du  mal  est  essentiellement  négstive. 
Toutes  les  créatures  étant  appelées  à  aller  à  leur  fin,  le 
mal,  pour  elles,  consiste  à  ne  pas  y  aller  ;  il  résulte  donc 
d'un  désaccord  entre  leur  nature  et  leur  fin,  c'est  une 
imperfection.  Le  mal  réel  devient  physique  en  raison  de 
la  sensibilité,  moral  en  raison  de  la  liberté,  métaphy^ 
sique  en  raison  de  la  nature  de  tout  être  contingent.  Le 
miU  physique  consiste  dans  les  désordres  qui  se  mani- 
festent dans  le  monde  matériel  et  chez  les  êtres  orga- 
nisai. Chez  l'homme,  ce  n'est  qu'une  des  formes  du  mal 
sensible,  c'est  la  douleur  qui  se  localise  dans  les  organes; 
il  est  relatif,  au  point  que  ce  oui  est  un  mal  pour  les  uns 
est  quelquefois  un  bien  pour  les  autres.  Le  mal  moral  a 
sa  source  dans  la  liberté  humaine,  celle-ci  étant,  entre 
autres  choses,  le  pouvoir  de  mal  faire.  Biais  cette  liberté 
n'entraîne  que  hi  possibilité  du  mal  moral,  et  non  ss 

76 


MAL 


1202 


MAL 


fteUntimi  néeesflcire;  ôter  cette  poesiUIité,  c'est  Mer 
«elle  du  bien  moral,  c'est  changer  la  natare  et  la  fin  de 

'  rhcmme.  Le  mtU  métapkygùiuê  résulte  de  cette  nature. 
'  IMeu  seul  existant  par  lui-même,  et  ayant  seul  la  pléni- 
tude de  Tetra,  est  parfait;  toute  créature  est  néceuaire- 
ment  imparfaite,  et  par  suite  exposée  «a  mal  et  suaoep- 
lible  dV  tomber.  On  s*est  appuyé  sur  Texiatenoe  du  mal 
|>our  nier  la  Providence;  mais  la  réflexion  montre  que  le 
mal  physique  d'une  part,  et  le  mal  moral  de  l'autre,  loin 
d*etre  en  contradiction  avec  la  sagesse,  la  bonté  et  la 

•  toute-puissance  de  Dieu,  entrent  comme  éléments  néces- 
saires dans  le  plan  de  la  création.  C'est  en  partant  de 
cette  vérité,  et  en  se  rappelant  la  nécessité  du  mal  méta- 
physique, cause  des  deux  autres,  qu'on  peut  expliquer 
l'origine  du  mal.  Gomme  réponse  à  cette  question  d'ori- 
gine, on  vit  naître,  dès  la  plus  haute  antiauité,  la  doc- 
trine des  deux  principes  :  les  Égyptiens  les  adoraient 
sous  les  noms  d'Osiris  et  de  TVphon,  les  Mèdes  et  les 
Perses  sous  ceux  d'Ormuzd  et  d^ArimÀhn  ;  au  m*  siècle 
^  de  notre  ère,  on  la  vit  renaître  dans  le  Manichéisme. 
Chez  les  Grecs,  les  Stoïciens  attribuaient  le  mal  à  la  fota- 
Uté,  les  Épicuriens  au  hasard,  Platon  aux  Dieux  subal- 
ternes  chvgés  de  régir  le  monde;  les  Gnostiques  donnèrent 
aussi  leur  explication  (V,  Gnosticisiie).  Les  Prédestina- 
tiens  attribuaient  tout  a  la  puissance  arbitraire  de  Dieu. 
C'était  méconnaître  sa  bonté  et  sa  justice,  auxquelles  il 
faut  s'en  rapporter  pour  tout  ce  qui  est  au-dessus  de 
rintelligenoe  humaine.  K.  Doulbcb,  Duausvb,  Opti- 
misme. R. 

BfALABAR  (Idiome],  terme  générique  par  leauel  cer- 
tains linguistes  désignent  les  mvers  idiomes  inoiena  qui 
ne  se  rattachent  pas  à  la  souche  sanscrite,  tels  que  le 
tannoui,  le  télinga,  le  kamatique  (7.  DaATWiBNNBS  — 
Langues).  Les  missionnaires  andens  ne  l'appliquent  qu'au 
tamoul,  et  plusieurs  modernes  qu'au  fiuiiaydia.  Le  ma- 
labar domine  sur  la  côte  de  Malabar,  à  Tïavaneore,  à 
Gochin,  à  Cananor,  à  Calicut,  à  Mahé,  etc.  Il  a  huit  cas, 
trois  genres,  et,  dans  les  substantifs,  trois  nombres.  Les 
adjectifs  sont  invariables.  La  conjugaison  n*a  que  trois 
temps  ;  des  affixes  suppléent  à  l'absence  des  modes  autres 

Sue  l'indicatif.  Du  reste,  la  plupart  des  verbes  sont  défec- 
fs.  La  prononciation  du  malabar  est  douce  et  harmo- 
nieuse. Il  s'éorit  avec  un  alphabet  particulier,  dont  quel- 
ques caractères  lui  sont  communs  avec  le  tamoul  :  seloii 
Adelung,  il  manque  des  valeurs  correspondant  à  nos 
lettres  f,  g,  y,  x  et  s.  F.  Qément  Peani,  Alphabetium 
mrandonico-nudabfurictsm  sive  satMcradonicum,  Rome , 
1772,  in-8°;  Clément  de  Jesu,  Grammatica  malabare, 
Rome,  1774,  in-8<^;  R.  Drummond,  Malabar  grammar, 
Bombay,  1709. 

MALADRERIE.  V,  Lfraiox,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

MALâGA  (Cathédrale  de),  en  Espagne.  Cette  église, 
dont  on  attnbue  la  construction  à  Diego  de  Slloé  ou  à 
Juan  Bautista,  appartient  au  style  de  la  Renaissance  : 
commencée  en  15S8,  elle  était  déjà  fort  avancée  en  1558, 
puisqu'on  y  trouve  en  quelques  endroits  les  armes  de 
Philippe  II  et  de  sa  femme  Marie  d'Angleterre.  Elle  est 
vaste  et  d'une  masse  imposante.  La  façade  principale  a 
deux  corps  d'architecture,  présentant  chacun  huit  belles  co- 
lonnes de  marbre  :  elle  est  flanquée  de  deux  tours  rondes, 
dont  une  seule,  celle  du  Nord,  fort  élégante,  et  haute  de 
52  met,  est  achevée.  L'intérieur  est  à  trois  nefs,  avec 
transept  :  ces  nefs  sont  dans  le  style  de  Bramante  Jus- 
qu'au sommet  des  colonnes  ;  mais,  sur  les  voûtes,  les 
ornements,  sans  être  de  style  purement  ogival,  ont  quel- 
que chose  qui  rappelle  ce  genre  d*architecture.  La  lon- 
gueur de  l'édiflce  est  de  115  met.,  la  largeur  de  75  met., 
et  la  hauteur  sous  voûtes,  de  40  met.  On  remarque  :  le 
mattre-autel  ;  les  deux  orgues,  pour  leur  construction, 
leur  ornementation  et  la  puissance  de  leurs  sons;  un  re- 
table de  style  gothique,  dans  la  chapelle  de  Santa  Bar- 
bara; un  retable  en  pierre  et  en  marbre  dessiné  par  Juan 
de  Villanueva,  dans  celle  de  rincamation  ;  plusieurs  bons 
tableaux.  La  cathédrale  de  Malaga  est  pavée  en  marbres 
de  couleurs  variées,  formant  des  mosaïques.  B. 

MALAISE  ( Langue).  Parlée  en  plusieurs  dialectes  dans 
les  divers  archipels  de  U  Malaisie  et  dans  la  presqu'île 
de  Malacca ,  comprise  même  dans  toutes  les  i^^ons  de 
'Océanie,  cette  langue  se  rattacherait,  selon  Bopp,  au 
sanscrit  :  mais  cette  opinion  est  fort  sujette  à  contro- 
verse. Tout  ce  ou'on  peut  admettre,  c'est  çuc  l'antique 
idiome  br&hmaniaue  a  exercé  une  certaine  influence  sur 
le  malais,  qoi  lui  doit,  par  exemple,  la  plupart  de  ses 
expressions  ayant  rapport  aux  idées  morales  ou  meta- 
'   physiques.  Suivant  Crawfurd  {Histoire  de  VArcfUpel  tn- 


disfi),  sur  100  mots  nulais,  50  ^>partleDiieBt  an  fioads 
génml  océanien,  27  sont  particulien  à  la  Malaisie,  16 
sont  sanscrits,  5  sont  arabes,  et  2  sont  empruntés  soit  au 
télinga  ou  au  persan,  soit  aux  langues  des  Européeit 
(Portugais,  Anglais,  Hollandais)  qui  ont  fréquenté  ces 
parages.  Adelung  pensait  que  le  malais  appartint,  dans 
le  principe,  à  la  classe  des  langues  monosyllabiques  (les 
mots  les  plus  andens  peuvent  être,  en  effet,  ramena  à 
la  forme  monosyllabique),  mais  au'ensnite  il  se  modifia 
par  suite  des  rapports  multipliés  du  peuple  qui  le  parlait 
avec  les  étrangers;  selon  lui,  on  devrait  le  placer,  avec  le 
mongol  et  le  mandchou,  comme  hmgue  de  transition,  en 
tète  des  langues  polysyllabiques.  —  L'articulation  douce 
et  facile  des  consonnes,  qui  sont  séparées  entre  elles  par 
des  vovelles  nombreuses  et  sonores,  et  l'usage  où  sont 
les  Malais  de  placer,  dans  les  mots  de  plusieurs  syllabes, 
l'accent  sur  la  pénultième,  donnent  à  leur  langue  de  la 
cadence  et  de  rharmonie.  Quant  au  vocabulaire,  il  est 
riche,  en  ce  sens  qu'il  oflre  une  gracde  abondance  de 
mots  pour  l'expression  des  nuances  dans  les  idées  fami- 
lières; mais  il  est  pauvre  en  termes  abstraits  et  géné- 
raux, et  on  a  dû  les  emprunter  aux  langues  de  l'Inde.  Le 
malais  a  une  grande  simplicité  de  formes  grammaticalei 
et  une  grande  clarté  de  syntaxe.  La  forme  des  pronoms 
personnels  varie  suivant  le  rang  de  la  personne  qui  parte 
ou  de  celle  à  qui  l'on  parle.  L^  rapports  des  noms  sont 
exprimés  par  des  particules  prépositives.  Le  verbe  n'a 
pas  de  formes  particulières  pour  les  personnes,  les  nom- 
bres, les  temps  ni  les  modes  :  les  personnes  et  les  nom- 
bres sont  indiqués  par  les  pronoms,  les  temps  et  les 
modes  par  des  particules  adverbiales.  Une  préfixe  parti- 
culière donne  au  verbe  le  sens  passif.  On  distingue  en 
malais  plusieurs  styles  r  le  bhoKtrdalam  ou  style  de 
cour,  employé  dans  la  rédaction  des  actea  officiels  et  des 
lettres  des  souverains,  et  caractérisé  par  une  sorte  de 
recherche  éléçinte  et  de  purisme;  le  bhosa-dagang , 
stvle  des  relations  familières  et  commerciales,  où  l'on 
admet  quelques  mots  étrangers;  et  le  bhasa^an,  langue 
dos  livres  ou  malais  littéral.  Le»  Malids  ont  adopté  Tal- 
phabet  arabe,  tout  impropre  qu'est  pour  une  langue  riche 
en  voyelles  un  alphabet  qui  ne  transcrit  que  les  articu- 
lations :  n'ayant  ni  gutturales  ni  consonnes  emphati- 
ques, ils  n'ont  pris  que  14  lettres  aux  Arabes,  et  ont 
formé  6  caractères  nouveaux  par  une  modification  parti- 
culière des  points  <Uacritiques.  Il  est  vraisemblable  qu'an- 
térieurement à  l'introduction  de  l'Islamisme  chez  eux,  ils 
possédaient  un  alphabet  particulier.  F.  Arthusius,  CoU 
loquia  latino^nuilaica ,  Francfort,  1613,  in-fol.  ;  Lorber, 
Grammatica  malaica,  Weimar,  1688,  in-8'';  Wemdley, 
Grammaire  malaise,  Amst.,  1730,  in-8^;  James  Howi- 
son.  Grammaire  de  la  langue  malaise,  en  tète  de  son 
Dictionnaire,  Londres.  1801,  in-4»;  W.  Marsden,  Gram- 
maire de  la  langue  malaise^  ibid.,  1812,  in-4<*;  De  Hollan- 
der.  Grammaire  malaise,  Breda,  1845,  iii-8*  ;  WDdens, 
Dictionnaire  hollandais  et  malais,  La  Haye,  1623,  in-4*; 
Haex,  Dictionnaire  malais  et  latin,  Rome.  1631,  in-4'; 
Gueynier,  Vocabulaire  néerlandais  et  malais^  fiauria, 
1677.  ln-4*»;  fiowrey.  Dictionnaire  anglcûs  et  moloû, 
Londres,  1701,  in-4*,  avec  une  Grammaire  et  des  Dialo' 
aues;  Levden,  Vocabulaire  comparé  du  birman,  du  nu»- 
Jais  et  du  siamois,  Serampour,  1810,  in-^<^;  Marsden; 
Dictionnaire  malais  et  anglais,  Londres,  1812,  in-4*, 


tionnaire  français-malais,  avec  des  Dialogues,  Paris, 
1826,  in-16;  Elont,  ZHcXtomuurs  hollandais  €t  malais, 
suivi  d'un  Dictionnaire  fran^is  et  malais,  Harlem.  1826, 
2  vol.  in-4<*  ;  Leydekker,  Dictionnaire  malais^neerlan' 
dais.  Batavia,  7  vol.  in-fol.;  Marsden,  Sur  les  traces  de 
la  langue  et  de  la  littérature  de  VInde  chez  les  Malais, 
dans  le  t.  IV  des  Recherches  Asiatiques^  publiées  à  Cal- 
cutta; Levden,  Sur  la  langue  et  la  liUéralure  des  na- 
tions de  V Indo-Chine,  dans  le  t.  X  du  même  recueil; 
F.  Bopp,  Sur  les  rapports  des  langues  malaises-pclf 
nésiennes  avec  les  langues  indo-européennes,  en  àllem., 
Berlin,  1841,  in-4*;  E.  Jacquet,  Mélanges  malais,  java- 
nais et  polynésiens ,  dans  les  t.  VUI  à  XI  de  la  2*  série 
du  Journal  de  la  Société  astatique  de  Paris:  Dulaurier, 
Mémoires,  Lettres  et  Rapports  relatifs  au  cours  de  Ion- 
gués  malaye  et  japonaise,  Paris,  1843,  in-8%  et  ChresUh 
maXhie  malaye,  1845,  in-8*. 

MALAISE  (Littérature).  Les  Malais  possèdent  une  litté» 
rature  riche  et  variée.  Leurs  vers  sont  rlmés.  Parmi  les 
divera  genres  de  poèmes,  on  remarque  i\^  des  romaot 
formés  d'une  suite  de  sldsas  ou  stancea  de  4  vers  te^ 


MAL 


1203 


MAN 


■bte  par  mue  rime  eommwae;  9»  les  pmUown$,  eom- 
posés  de  etanees  à  rimes  croisées^  et  servant  aoi  luttes 
poèliqaee  des  Iminovlsatears;  3*  quelques  romans  d*une 
ffiBàe  étendue,  tels  que  ceux  qui  ont  pour  titres  la 
Ctmntme  dms  wultans  par  Bokarnr  de  DJohor,  BidorSari, 
Kmi-Tambouhan^  Smimbari,  STÙRâma  (K.  une  étude 
ds  M.  Boson  sur  ee  dernier  ouTrage,  dans  le  Journal 
oHoNqiM  de  mal  1846  ).  La  littérature  malaise  comprend 
des  ouTrages  hislorioues,  entre  autres  le  S^kê^tfant  Ma- 
layon,  chronique  rédigée  au  commencement  du  xvii*  siècle 
à  Mslaera,  et  qui  s*étend  du  i**  siècle  de  notre  ère  jus- 
qa'k  rairiTée  des  Portugais  en  1511  :  VBirakat-Malaika, 
où  lont  racontées  les  circonstances  de  rétablissement  des 
Malais  dans  la  presqu*tle  qui  porte  leur  nom;  la  Crains 
iês  rois  de  JoMt,  qui  comprend  une  durée  de  17  à  \% 
ilèdes;  la  Chnmiqw  des  rois  de  Pasay  (dans  nie  Su- 
matra), publiée  en  France  par  M.  Dulaurier.  Les  Malais 
ont  des  recueils  de  lois,  pour  lesquels  ils  ont  puisé  dans 
ks  travaux  des  Hindous  et  des  Arabes.  Ils  connaissent 
par  des  traductions  presque  tous  les  bons  ouvrages  qui 
existent  dans  les  autres  littératures  de  TOrient.  Une 
riche  collection  de  manuscrits  malais,  formée  par  Tho- 
mas Raffles,  est  devenue  la  propriété  de  la  Société  asia- 
tique de  Londres  :  le  catalogue  raisonné  en  a  été  publié 
pu-  M.  Dulaurier  dans  le  t.  X  de  la  3*  série  du  Journal 
de  la  Société  asiatiqxie  de  Paris, 

MALAYALA  (Idiome),  idiome  parlé  sur  la  côte  de  Ma- 
labar depuis  le  cap  Comorin  Jusqu'à  Dilli,  et  appelé  aussi 
grantham  ou  grandonicwn.  Il  appartient  à  la  classe  des 
laimea  dravidiennes  {V.  ce  mot).  On  en  a  des  Gram- 
ma&ea  par  Spring  (Madras,  1839)  et  par  Peet  (1841), 
ainsi  qo^  Dictionnaire  par  Bailey  (ISiVI). 

MIALCHUS,  nom  donné  dans  le  principe  aux  confes- 
aîonoanz  qui  n'avaient  au*une  stalle  pour  les  pénitents. 
On  disait  alors  qulls  n'avaient  qu'une  oreille,  comme 
Malchos  blessé  par  S*  Pierre. 

MALÉDICTION.  V.luptLÉamoft, 

MALGACHE  (Idiome).  F.  MAoécAssi. 

MALINES  (Cathédrale  de).  Cette  é^ise  métropoli- 
taine, dédiée  à  S'  Rombaud,  est  entl^ment  d'un  so- 
thique  très -pur,  et  doit  être  rangée  au  nombre  des 
monoments  les  plus  remarquables  du  style  ogival ,  non- 
flealement  en  Belgique,  mais  dans  tout  le  Nord  de  l'Eu- 
rope. Construite  sur  l'emplacement  d'une  autre  église 
inceodiée  en  1342,  elle  date  de  la  seconde  moitié  du 
uv«  siècle.  Les  nefs,  les  transepts  et  les  murs  latâraux 
du  chœur  appartiennent  au  style  ogival  secondaire;  l'in- 
térieur et  le  chevet  du  chœur,  les  chapelles  au  collatéral 
gauche  de  hi  grande  nef,  sont  de  style  ogival  tertiaire,  et 
dateat,  par  oonséouent,  du  xv*  siècle;  la  voûte  du  chorar 
ftit  achevée  en  1431  ;  plusieurs  chapelles  ne  remontent 
pas  an  delà  du  xvi*  siècle.  Les  fenêtres  de  la  nef  sont 
rayonnantes ,  tandis  que  celles  du  choeur  sont  flam- 
boyantes; il  y  en  a  même  plusieurs  an  fond  du  chœur 
qm,  dans  le  réseau  d'amortissement,  présentent  la  forme 
toute  française  de  la  fleur  de  lis.  Ces  difTérences  de  swle 
B'teqpéefaent  pas  l'éslise  d'avoir  un  aspect  général  d'unité. 
Le  portail  principal  n'a  presque  pas  d'ornements.  H  est 
■onnonté  d'une  toor  carrée  et  massive,  soutenue  sur 
chaque  face  par  quatre  contre-forts  omÀ  de  clochetons' 
en  iqyplication,  et  dont  la  base  forme  l'oc^ve  de  la  grande 
porte  d'entrée.  Cette  tour,  commencée  en  1452,  était 
arrivée  en  1M3  à  l'état  où  elle  est  anfourd'hui  ;  hante  de 
97  mtees ,  sa  plate-forme  devait  servir  de  base  à  une 
flèche  découpée  à  Jour.  Quatre  cadrans  de  16  met.  de 
Aamètre  sont  attachés  à  ses  quatre  faces,  et  elle  con- 
tient on  carillon  complet.  A  l'intérieur,  la  ci^édrale  de 
MaHnea  a  été  badigeonnée  :  les  vitraux  ayant  été  brisés 
en  ISSOpar  les  protestants,  on  ne  voit  plus  que  des  verres 
Uaaca  ans  fenêtres  latérales,  et  des  verrières  modernes 
au  cfattor.  Des  statues  des  Apôtres  sont  placées  devant 
les  piliers  de  la  nef.  La  chaire  sculptée  en  bois  repré^ 
sente  la  conversion  dé  S^  Paul.  On  remarque  auesi  les 
belles  et  larges  fenêtres  placées  au  fond  de  chaque  branche 
du  transept  plusieurs  groupes  sculptés  par  Fayd'herbe, 
divers  monoments  fhnérsires,  et,  entre  autres  tableaux, 
m  Cmct/Umsnt  par  Van  Dyck.  B. 

MALLE  (de  l'allemand  nudl)^  cofOre  en  bois  ou  en 
eoir,  propre  à  transporter  les  effets  d'un  voyageur.  —  On 
a  dnmé  le  même  nom  à  la  valise  ou  caisse  diuis  laquelle 
les  courriers  de  la  poste  portent  les  lettres,  et,  psr  exten- 
sion, on  a  appelé  malle-poste  la  voiture  même  qui  trans- 
pOTte  les  dépêches.  Depuis  l'établissement  des  chemins 
de  fer,  il  n'y  a  plus  guâre  de  malles-poste. 

MALLÉOLUS,  projectile  de  guerre  des  anciens  Ro- 
orâis.  Cétait  une  tige  de  bois,  terminée  par  une  cage  en 


fil  de  fur,  de  la  forme  d'un  fhseau  et  pleine  de  matlèrei' 
inflammables,  et  qu'on  lançait  contre  les  travaux  ou  lea 
navires  de  l'ennemi ,  où  elle  s'enfonçait  par  une  tête  de 
flèche. 

MALLUM.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d*ffistoire, 

MALTAIS  (Idiome).  On  ne  sait  si  les  peuples  qui  oo>* 
copèrent  successivement  llle  de  Malte,  Phéniciens, 
Grecs,  Carthaginois,  Romains,  Vandales,  Goths,  Arsbes,* 
y  trouvèrent  une  population  aborigène,  perlant  une 
langue  particulière.  Le  dialecte  maltais  actuel  a  une  ori* 
gine  évidemment  sémitique.  Jusqu'au  xix*  siècle,  on  crut 
que  c'était  du  punique  pur  ;  de  nos  jours,  Gésénius  et  de 
Slane  ont  démontré  que  le  génie  de  ce  dialecte,  comme 
sa  grammaire  et  la  plus  grande  partie  de  son  vocabulaire, 
est  arabe.  Le  maltais  présente  les  28  sons  de  la  langue 
arabe,  auxquels  il  ajoute  les  articulations  tch,  guetpde 
litaiien.  Psr  rapport  à  la  syntaxe,  on  remarque  un  mé*' 
lange  des  règles  de  l'arabe  ancien  et  de  celles  de  i'an^ 
moderne  :  ce  sont  les  mêmes  principes  de  formation  des 
diminutifs,  le  même  mode  de  déterminer  le  genre  dans 
les  noms,  la  même  déclinaison  double  pour  le  masculin 
et  le  féminin,  les  mêmes  pronoms  possessifs  affixes,  la 
même  distinction  des  verbes  en  trilittères  et  quadrilitp* 
tères.  La  plupart  des  particules,  prépositions,  adverbes 
et  conjonctions,  sont  littéralement  arabes  ou  dérivées  de 
l'arabe.  Les  mots  qui  ne  se  rattachent  point  à  des  racine» 
arsbes  proviennent  du  grec,  du  latin  ou  de  l'italien  s 
quelques-uns,  que  ces  langues  n'expliquent  pas,  appar- 
tiennent pent^^tre  à  la  langue  primitive  des  habitants  de 
nie  ou  au  phénicien.  Les  Maltais  se  servent  de  l'alphabet' 
latin,  en  (usant  subir  quelques  modifications  à  la  valeor 
et  à  la  forme  des  caractères.  Ils  possèdent  des  chaasons 
en  forme  de  quatrains  rimes,  des  moralités  et  des  pRK 
verbes,  une  version  des  Évanffiles  et  des  Actes  des  Apô^ 
très,  V,  J.-H.  Mai,  Spedmen  linguœpunicœ  in hodiemâ 
Melitensium  suiperstite ,  Marbourg,  1718,  in -8*»;  Aglua 
de  Soldanis,  Délia  linguapunica^  presentamente  iMttata 
dai  Maltesi,  Rome,  1750,  in-8*;  Vassalli,  Grommattca- 
délia  lingua  Maltese^  Malte,  1827,  in-8*,  et  Lessicon  mal' 
tese,  1796;  Gésénius,  Essai  sur  la  langue  maltaise^  en 
allem.,  Leipzig,  1810,  in-8*;  Pazavecchia,  Grammaire  de 
la  langue  maltaise,  Malte,  1845,  in-8<>;  de  SUme, 
Note  sur  la  langue  maltaise,  dans  le  Journal  asiatique 
de  mai  1846. 

MALTUA,  genre  de  mortier  des  anciens  Romains,  qai 
servait  à  enduire  l'intérieur  des  aqueducs.  Il  était  com- 
posé de  chaux  vive,  réduite  en  poudre,  trempée  dans  du 
vin,  et  broyée  ensuite  avec  du  saindoux  et  des  figues. 
Selon  Festus,  on  employait  encore  de  la  poix  et  de  la  cire^ 
Les  parties  sur  lesquelles  on  voulait  étendre  le  maltha 
étaient  préidablement  frottées  d'huile. 

MALTOTE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bûh 
graphie  et  d^  Histoire, 

MALVERSATION,  mot  qui,  dans  son  acception  géné- 
rale, comprend  toute  faute  grave  et  punisssble  commise 
par  les  fonctionnaires  publics  dans  l'exerdoe  de  leur 
charge  ou  par  les  officiers  ministériels  dans  l'exercice  de 
leur  emploi.  Il  s'applique  spécialement  aux  déliu  di 
corruption^  ^exaction  et  de  conctMSton  (F.  cas  mots)* 
Lee  magistrats  et  autres  fonctionnaires  se  rendent  cou- 
pables de  malversation,  lorsque,  par  intérêt,  haine  ou 
vengeance,  ils  font  quelque  injustice  ou  mettent  obstacle 
à  des  choses  Justes.  Il  y  a  malversation  pour  l'avocat  qui 
engage  ses  clients  dans  des  procès  injustes,  trahit  la 
cause  qui  lui  est  confiée,  révèle  les  secrets  dont  il  est 
dépositaire,  etc. ,  cas  auxquels  il  est  passible  de  dom*' 
mages-intérêts  envers  la  partie  lésée,  et  même  de  priva- 
tion d'emploi.  Il  y  a  malversation  de  la  part  d'un  huis- 
der  qui  srrête  quel((u*un  sans  une  ordonnance  du  Juge 
ou  favorise  une  éntfion,  qui  s'empare  des  meubles  d'un 
saisi ,  qui  commet  des  excès  et  violences  en  procédant 
aux  saisies  et  aux  exécutions;  de  la  part  d*un  geôlier  qui 
maltndte  ses  prisonniers  ou  les  fait  évader,  qui  aggrave 
la  peine  dont  ils  ont  été  frappés,  etc. 

MANCANZA,  monnaie  d'or  des  pays  napolitains,  va- 
lant 4  ducats  (envht>n  16  fr.  25  c.) 

MANCHE  (en  hitin  montca,  dérivé  de  marna,  main), 
partie  du  vêtement  qui  recouvre  le  bras.  On  a  porté 
pendant  plusieurs  siècles,  des  mancMsd  Vange,  qui  traî- 
naient presque  Jusqu'à  terre  ou  qui  voltigeaient  coname 
des  ailes.  —  Au  {eu  on  appelle  manehê  chaque  division 
d'une  partie  qu'on  fsit  en  deux  fractions;  celui  qui  gagne 
les  deux  manches  gagne  la  partie. 

MancHB,  mot  emplové  en  France,  an  commencement 
du  xvm*  siècle,  dans  l'Art  militaire  «  comme  «ynonyma 


MAN 


1201 


MAN 


de  dwaUm.  Ainri  Ton  disait  qu*an  corps  rompait  en  8 
ou  iO  manches. 

MaNCHB ,  partie  des  instruments  de  musique  à  cordes, 
par  laquelle  on  les  saisit,  et  où  l*on  pose  les  doigts  de  la 
main  ganche  sur  les  cordes  pour  former  les  différents 
tons.  Cest  à  rextrémitô  du  manche  que  se  trouvent  les 
dieyiiles  qui  servent  à  accorder  Tinstrument. 

MAHCHB,  en  termes  de  Marine,  tuyau  de  toile  ou  de 
eolr  servant  de  conduit  à  Teau  ou  à  tout  autre  liquide. 
n  y  a  des  tnanckes  à  ouverture  trés-vaste  qa*on  tourne 
dn  côtô  du  vent;  elles  servent  de  ventilateurs  à  bord  des 
navires,  pour  aârer  fortement  Tintârieur  du  bà^ment. 

MANCHETTES  DES  LIVRES.  On  nomme  ainsi ,  en 
lypc^prapkie,  des  notes,  et  plus  souvent  de  brefo  som- 
maires imprimés  à  la  marge  d'un  livre,  en  petits  carac- 
tères, et  embrassant  les  matières  traitées  dans  un  ou 
plusieurs  paragraphes.  Cette  disposition,  pour  des  notes, 
rapproche  immédiatement  de  Todl  du  lecteur  ce  qu*il 
peut  avoir  besoin  de  lire  en  suivant  sa  lecture  princi- 
pale ;  pour  des  sommaires,  elle  montre  Tordre  de  la  com- 
position, aide  à  en  suivre  toutes  les  parties,  et,  quand 
on  veut  (aire  une  recherche  dans  un  certain  nombre  de 
pages,  la  rend  plus  facile  et  plus  prompte.  Cette  mé- 
thode date  au  moins  du  iv*  siècle,  car  elle  fut  pratiquée 
par  Optaden,  dans  son  panégyrioue  en  vers  de  Constan- 
tin, et,  vers  Ul  fin  du  m^oie  siècle,  S^  Jérùme  remploya 
aussi  dans  la  traduction  d'une  lettre  de  S'  Épiphane. 
Au  xvn*  et  au  xvm*  siècle,  la  plupart  des  ouvrages  sé- 
rieux s'imprimaient  avec  des  manchettes;  mais  depuis 
le  commencement  du  xix*  siècle  cette  bonne  coutume 
est  devenue  une  exception ,  soit  pour  donner  aux  livres 
un  meilleur  aspect  en  laissant  toutes  leurs  marges  in- 
tactes, soit  parce  que  cela  épargne  un  peu  de  soin  et  de 
travail  de  la  part  de  Touvrier,  et  procure  une  petite  éco- 
nomie. Néanmoins  Tusage  des  manchettes  n'est  pas 
abandonné,  et  ne  le  sera  sans  doute  Jamais  entière- 
ment. C.  D— T. 

MANCHON ,  fourrure  qu'on  porte  en  hiver  pour  se 
garantir  les  mains  des  atteintes  du  fh>id.  Au  xvi*  siècle, 
les  manchons  s'appelèrent  des  conUnancês^  puis  des 
konnes  grâces.  Ce  n'est  plus  aujourd'hui  qu'un  article 
de  la  toilette  des  femmes;  mais,  au  xvm*  siècle,  les 
hommes,  et,  au  commencement  du  xix*,  quelques  vieil- 
Utfds  portèrent  aussi  des  manchons. 

MANCIPATION.  (  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 

MANDARIN.        S       de  Biographie  «t  â: Histoire. 

MANDAT  (du  latin  mandaJbwnt  confié),  acte  par  le- 
quel une  personne,  dite  mandant ^  donne  à  une  autre , 
i4>pelée  mandataire^  pouvoir  ou  procuration  de  faire 
quelque  chose  en  son  nom.  Le  fondé  de  pouvoir  prend 
aussi  le  nom  de  mandataire,  quelquefois  celui  de  pro- 
cureur fondé,  ou  simplement  procureur.  Le  mandat  est 
spécial,  c-à-d.  donné  pour  une  afilaire  ou  pour  certaines 
affaires  déterminées ,  ou  général ,  c-à-d.  pour  tontes  les 
affaires  du  mandant.  Le  mandat  cdoiçu  en  termes  géné- 
raux n'embrasse  que  les  actes  d'administration  ;  s'il  s'agit 
d'aliéner,  d'hypothéquer,  de  faire  acte  de  propriété ,  de 
■aisir  immobilièrement,  d'incarcérer  pour  dettes,  de  don- 
ner mainlevée  d'une  inscription,  il  doit  être  spécial.  Le 
mandat  se  donne,  soit  par  acte  public,  soit  par  écrit  sous 
seing  privé ,  soit  verbalement  ;  mais ,  dans  ce  dernier 
cas,  la  preuve  testimoniale  n'est  reçue  que  lorsqu'il  y  a 
commencement  de  preuve  par  écrit,  ou  que  lorsque  la 
valeur  de  l'objet  pour  lequel  il  a  été  donné  est  infé- 
rieure à  150  tr.  Le  mandat  est  gratuit,  s'il  n'y  a  pas  con- 
vention contraire.  Le  contrat  est  formé  du  moment  qu'il 
y  a  acceptation  de  la  part  du  mandataire,  et  l'exécution 
du  mandat  est  considérée  comme  une  acceptation  tacite, 
quand  il  n'y  en  a  pas  eu  d'autre.  Le  mandat  finit  par  sa 
révocation,  par  la  renonciation  dn  mandataire  au  mandat, 
nar  la  mort  naturelle  ou  dvlle,  linterdiction,  la  décon- 
fiture du  mandant  ou  dn  mandataire.  Le  mandant  est 
tenu  de  remplir  les  engagements  contractés  en  son  nom 
par  le  mandataire  conformément  aux  pouvoirs  gu'il  lui  a 
donnés,  de  lui  rembourser  les  avances  et  frais  faits  pour 
l'exécution  du  mandat,  ainsi  que  ses  salaires,  lors  même 
que  l'affkire  n'aurait  pas  réussi  ;  il  doit  l'indemniser  des 
pertes  qu'il  a  éprouvées,  sans  qu'une  imprudence  lui  soit 
imputable,  à  l'occasion  de  sa  gestion.  S'il  y  a  eu  révoca- 
tion dn  mandat  et  qu'elle  n'ât  été  notifiée  qu'au  man- 
dataire, le  mandant  ne  peut  l'opposer  aux  tiers  qui 
auraient  traité  dans  l'ignorance  de  cette  révocation,  et  il 
ne  lui  reste  alors  que  son  recours  contre  le  mandataire 
pour  les  affaires  commencées  avant  la  révocation.  Le 
mandataire  est  responsable  de  l'inexécution  du  mandat, 
te  dommages-intérêts  qui  peuvent  en  résulter,  du  dol 


et  des  fautes  qu'il  commet  dana  sa  gestion,  et  de  la  pei^ 
sonne  qu'il  se  serait  substituée  dans  l'exécution  du  man- 
dat, si  le  mandat  lui  confère  le  droit  de  substituer,  n 
doit,  en  cas  de  mort  du  mandant,  achever  la  chose  com- 
mencée, s'il  y  a  péril  en  la  demeure.  Il  ne  peut  rien 
faire  au  delà  de  ce  qui  est  porté  dans  le  mandat  :  mais 
il  n'aurait  aucune  responsabilité  envers  la  partie  avec 
laquelle  il  aurait  indûment  contracté,  s'il  lui  avait  donné 
connaissance  du  mandat.  S'il  renonce  au  mandat  ssns  y 
être  obligé  par  un  pr^udice  considérable  gue  lai  cause- 
rait la  continuation  de  son  office,  il  doit  indemniser  le 
mandant  du  préjudice  qu'il  lui  cause  par  cette  renonda» 
tion.  Les  engagements  qu'il  aurait  pns  avec  des  tiers  de 
bonne  foi ,  dans  l'ignorance  de  la  revocation  du  mandat 
ou  de  la  mort  du  mandant,  sont  valables  et  doivent 
être  remplis.  En  cas  de  mort  du  mandataire,  ses  héri- 
tiers sont  tenus  d'en  avertir  le  mandant,  et  de  pourvoir, 
en  attendant,  à  ce  oue  les  intérêts  de  celui-ci  exigent 
Les  femmes  et  les  mineurs  émancipés  peuvent  être  pris 
pour  mandataires.  Un  titre  tout  entier  du  Code  JVapo- 
îéon  (  art.  1984-2010)  est  consacré  au  mandat  :  il  a  été 
commenté  par  M.  Troplong,  1841, 2  vol.  in-8^ 

MANDAT,  ligne  de  conduite,  obligations  que  deséleo 
teurs  imposent  à  leurs  députés.  Autrefois,  les  cahien 
des  bailliages  étaient  de  véritables  mandats  pour  les  dé- 
putés aux  États  Généraux.  Depuis  1789,  on  n'a  Jamais 
admis  en  France  les  mandats  de  ce  genre,  dits  mandats 
impératifs* 

MANDAT,  acte  émané  d'un  magistrat  ayant  pouvoir  de 
le  décerner,  et  dont  signification  est  faite  par  huissier  ou 

Sir  un  agent  de  la  force  publique.  On  distingue  :  1*^  a 
andat  de  comparution,  assignation  donnée,  au  nom  du 
magistrat  instructeur,  à  la  personne  inculpée,  lorsque 
celle-ci  est  domiciliée,  et  que  le  fait  est  de  nature  à  ne 
donner  lieu  qu'à  une  peine  correctionnelle;  ^  le  Mandat 
d^amener,  décerné,  soit  contre  l'inculpé  qui  ne  peut  être 
l'objet  que  d'une  poursuite  correctionnelle,  et  qui  n'a 
point  obéi  au  mandat  de  comparution,  soit  contre  tout 
inculpé  d'un  délit  emportant  peine  afflictive  et  Infamante, 
soit  contre  des  témoins  qm  refusent  de  comparaître; 
on  doit  les  interroger  dans  les  24  heures;  3<*  le  Mandat 
de  dépôt,  en  vertu  duquel  l'inculpé  mis  en  état  de  pré- 
vention est  envoyé  proviaoiremènt  dans  une  maison  d'ar- 
rêt, et  dont  mainlevée  peut  enauite  être  donnée  par  le 
inge  d'instruction,  sur  l'avis  conforme  du  ministère  pu- 
blic; 4»  le  Mandat  S  arrêt,  en  vertu  duquel  le  prévenu 
d'un  fait  emportant  emprisonnement  correctionnel,  ou 
peine  afflicdve  ou  infamante,  est  mis  en  état  d'arrestar 
tion,  après  avoir  été  entendu,  ainsi  que  le  procureur 
impérial.  Ces  divers  mandats  sont  exécutoires  dans  tout 
l'Empire  :  ils  doivent  être  signés  de  celui  qui  les  décerne, 
et  munis  de  son  sceau.  Le  mandat  d'arrêt  doit,  de  plus, 
contenir  renonciation  du  fait  pour  lequel  il  eet  décerné, 
et  la  dtation  de  la  loi  qui  déclare  que  ce  fait  est  un  délit 
ou  un  crime.  Tout  mandat  doit  être  exhibé  au  prévenu, 
et  copie  lui  en  être  donnée.  L'inobservation  de  ces  for- 
malités entraîne  une  amende  de  50  fir.  contre  le  greffier. 

MANDAT,  rescrit  apostolique  accordé  autrefois  par  les 
souverains  pontifes,  et  en  vertu  duquel  lea  collateuis 
étaient  tenus  de  conférer  à  la  personne  qui  en  était  pour- 
vue le  premier  bénéfice  vacant. 

MANDAT,  autorisation  ou  ordre  donné  de  payer  à  un 


personnes, 

un  débiteur,  et  un  intermédiaire  qui  touche  sur  l'ordre 
donné  par  le  créancier  la  somme  due  par  le  débiteur;  il 
faut  de  plus  que  le  créancier  et  le  débiteur  ne  demeoreot 
pas  dans  la  même  ville.  Ces  conditions  distinga«it  nette- 
ment le  mandat  des  billets.  Voici  le  modèle  d'un  mandat: 

Paris,  le  1»  mais  ISSS.  B.  P.  F.  1000. 

A  présentation  ie  vous  prie  de  payer  par  le  présent 
mandat,  à  l'ordre  de  M.  Paul ,  la  somme  de  mtlu  psanc^ 
valeur  en  compte,  sans  antre  avis  (ou  suivant  avis). 

k  M.  Jacques,  PisanB. 

négociant  à  Besançon. 

Le  mandat  est  un  véritable  contrat  de  change,  d'un 
usage  Journalier  dans  le  commerce.  Il  est  transmissible 
par  endossement,  comme  l'indique  la  formule  :  A  l'ordre 
de...  II  diffère  cependant  de  la  lettre  de  change  en  ce 
qu'il  n'est  pas  accepté  par  le  débiteur,  et  que  quelquefois 
même  on  y  Joint  la  formule  :  Non  soumis  àVacc^tation. 
Cest  donc  un  papier  qu'un  négociant  peut  émettre  très- 
librement  dans  certains  cas  où  la  lettre  de  change  M 


MAN 


1205 


MAiN 


es;  il  ▼  a,  pour  nommer  le  choYal,  autant  de 
substantifs  qu*il  peut  prendre  d'allures,  etc.  La  nomen- 
datore  des  a^jectifo  et  des  adverbes  est  d'autant  plus 
restreinte  que  celle  des  substantifs  et  des  verbes  est  plus 
étendue.  La  seconde  catégorie  de  mots  comprend  ceux 
qui  ont  été  empruntés  au  mongol^  depuis  deux  siècles  au 
pins;  ils  se  rapportent  pour  la  plupart  à  des  objets 
d'une  importance  secondaire.  La  troisième  se  compose  de 
mois  tirés  du  chinois,  et  se  rapportant  surtout  à  des  ob- 
fels  adentiflqnes.  Quelques  termes  sont  venus  de  llnde, 
et  «xpfiment  des  objets  relatifs  au  culte  de  Bouddha.  Les 
mots  étrangers  an  mandchou  forment  à  peu  près  la  cin- 
quième partie  du  vocabulaire  de  cette  langue.  L'empereur 
KSoo-Long,  Toulant  le  ramener  à  sa  pureté  primitive,  fit 
eoiDposer,  pour  remplacer  les  mots  d'origine  étrangère, 
des  mots  nouveaux  formés  de  racines  mandchoues  :  on 
en  créa  ainsi  5,000,  dont  les  employés  du  gouvernement 
furent  tenos  de  se  servir.  —  Bien  que  la  dynastie  qui 
rfigne  aujourd'hui  sur  la  Chine  soit  venue  de  la  Mand- 
ebourie,  le  mandchou  n'est  nulle  part,  pas  même  en 
MsndcfaiNirie,  la  langue  dominante;  il  subsiste  seulement 
àoMé  do  chinois  dans  toutes  les  parties  du  Géleste-Em- 
plie,  n  ne  connaît  ni  l'artide  défini,  ni  les  genres  gram- 
maticani;  mais  il  a  des  signes  pour  distinguer  les  nom- 
bras,  et  désigne  les  cas  à  T'aide  de  particules  affixes  ou 
iioiées.  Dans  lea  Terbes,  l'impératif  est  le  thème  ou  ra- 
éai  à  l'état  pur  x  des  affixes  syllabiques,  placés  à  la 
■île  de  ce  tfa&flMf  servent  à  marquer  les  temps,  les 


iv^  pas  de  mise.  Un  négodant  de  Paris,  par  exemple,  I 
eoToie  sa  marchandise  à  Marseille  :  il  a  besoin  d'argent,  • 
et  ne  peut  attendre  Jusqu'au  Jour  où  l'acheteur  de  Mar- 
leille  aura  reçu  cette  marchandise  et  lui  aura  écrit  qu'il 
en  accepte  livraison  :  dans  ce  cas,  il  tire  sur  lui  un  man- 
dat Le  mandat  est  par  là  même  d'un  usage  très-fréquent; 
mais  une  loi  de  1834,  en  rendant  le  timbre  presque  né- 
cettsire  pour  les  mandats,  qui,  par  suite,  sont  suscep- 
tibles d'acceptation  (une  traite  sur  papier  libre  ne  peut 
être  acceptée),  les  a  presque  confondus  avec  la  lettre  de 
chtoge.  L. 

VANOATS  TBaanoausx,  nom  donné  à  un  papier-mon- 
naie créé  sous  le  Directoire,  en  vertu  de  la  loi  du  28  ven- 
tôse an  iT  (18  mars  1796).  On  en  émit  pour  2  milliards 
400  millions.  Ces  mandats,  ^ui  avaient  cours  forcé,  et 
qui  devaient  être  reçus  au  prix  des  valeurs  métalliques, 
étaient  destinés,  non -seulement  au  payement  des  dé- 
penses publiques,  mais  au  remboursement  des  assignats 
sur  le  pied  de  30  capitaux  pour  un.  Le  jour  de  leur  pre- 
mière émission,  ils  ne  furent  cotés  qu'à  18  fr.  pour  100  fr. 
Dne  loi  dédda  alors  qu'on  ne  les  recevrait  qu'au  cours 
du  jour  de  la  part  de  ceux  qui  achèteraient  des  domaines 
nationaux,  et  seulement  pour  un  quart  du  prix  d'acqui- 
attdoD.  La  déprédation  fut  si  rapide,  qu'au  mois  de  sep- 
tembre le  cours  des  mandats  était  tombé  à  5  fr.  pour 
100  fr.y  et  on  n'avait  échangé  que  pour  350  millions 
d'assignats.  Une  loi  du  16  pluviôse  (4  février  1797)  dé- 
cida que  les  mandats  cesseraient  d'avoir  cours  forcé,  et 
ne  seraient  plus  admis  qu'en  payement  des  contributions 
arriérées,  et  seulement  Jusqu'au  1*' germinal  suivant. 

UANDCHOUE  (Langue).  L'origine  et  la  composition  de 
cette  langue  ont  donne  lieu  à  bien  des  opinions  diverses. 
De  Siebold,  dans  son  Mémoire  sur  l'origine  des  Japonais^ 
trouTo  une  assez  grande  analogie  entre  le  Japonais  et  le 
ODandcboo;  un  écrivain  mongol,  Abougasi,  ne  voit  dans  le 
mandchoa  qu'un  mélange  de  mongol  et  de  chinois;  les 
missionnaires,  au  contraire,  en  font  une  lançie  mère, 
■ans  rapports  avec  aucune  autre  ;  quelques  linguistesenfln 
y  trouyent  des  analogies  avec  le  grec,  le  latin,  le  hon- 
grois, l'allemand,  etc.,  lesquelles  sont  rien  moins  que  prou- 
Téea,  quand  on  a  fait  la  part  naturelle  des  cas  fortuits  et 
celle  des  cas  douteux.  Ce  qui  parait  hors  de  contestation, 
e*e8t  que  le  mandchou,  qui  est  aujourd'hui  une  langue 
polys^labique,  a  été  originairement,  comme  le  malais 
\\\  C9  mot)^  une  langue  monosyllabique  :  en  effet,  les 
moca  d'une  seule  syllsbe,  qu'il  contient  encore  en  grand 
nombre,  ont  chacun  plusieurs  acceptions  différentes,  et 
appartiennent  à  la  fois  à  plusieurs  parties  du  discours, 
comme  cela  a  Ueu  dans  les  langues  qui  ont  conservé  le 
raonoayllabisme.  D'après  Abel  Rémusat,  il  y  a  trois  caté- 
gories éQrmolo^ues  de  mots  dans  le  mancfchou.  La  pre- 
mière comprend  les  mots  qui  lui  sont  communs  avec  les 
autres  idiomes  toungouses  :  ils  constituent  le  fond  de  la 
langue.  On  y  trouve  beaucoup  d'onomatopées,  peu  de 
termes  génériques,  mids  des  termes  spécifiques  expri- 
mant une  foule  de  nuances  d'idées  \  les  animaux,  par 
«lemple,  sont  désignés  par  des  noms  différents,  selon  leur 
eooleor,  leur  taille,  leur  âge,  leurs  qualités  bonnes  ou 


modes  et  les  voix.  F;  y  a  des  voix  active,  passive,  né^ 
tive,  réciproque,  inchoative,  fréquentative,  etc.  Au  heu  *.' 
de  prépositions,  le  mandchou  a  des  postpositions.  L'ordre  ?. 
inverse  domine  dans  la  construction  :  le  sujet  de  la  pro-  *. 
position  s'exprime  en  premier  lieu,  l'adjectif  précède  le  ^ 
substantif,  le  complément  direct  ne  vient  qu'après  le 
complément  indirect,  et  le  verbe  termine  la  phrase.  Cet  ^ 
ordrêest  rigoureusementsuivi.  Laprononciation  du  mand-  « 
chou  est,  en  général,  douce  et  harmonieuse.  Jusqu'au 
xvii*  siècle  de  notre  ère,  les  llandchoux  ne  possédèrent 
pas  d'écriture,  et,  par  conséquent,  pas  de  livres  :  un  sa- 
vant de  leur  nation,  Takhaf,  composa,  par  ordre  de  l'em- 
pereur Tal-Tsoung,  une  écriture  imitée  de  celle  des  Mon- 
gols, et  dont  les  groupes  syllabigues,  fort  nombreux,  ae 
réduisent  à  24  caractères  primitifs,  dont  6  voyelles  et 
18  consonnes.  Ceci  avec  cette  écriture  çue  Ton  a  traduit 
en  mandchou  la  p  .upart  des  livres  chinois.  F.  le  P.  Amyot, 
Gra/mmcure  tartare-mandchoue  (dans  le  t.  XIII  des  mé' 
moires  concernant  l'histoire,  les  sciences  et  les  arts  des 
Chinois)^  qui  n'est  qu'une  traduction  des  Elemmta  Iti»- 
gtUB  tartaricœ  du  P.  Gerbillon;  le  même,  Dtctioitnatrs 
tartare^mandchoti-français^  publié  par  Langlès,  Paris, 
1789,  3  vol.  in-8»;  Langlès,  Alphabet  mandchou.  1787, 
in-8*^;  Larionowitch  Leontiew,  Lettre  sur  la  littérature 
mandchoue^  traduite  du  russe,  Paris,  1815,  in-8<*;  Kla- 
proth,  Chrestomathie  mandchoue,  Paris,  1828,  in-8^; 
A.  Rémusat,  Recherches  sur  les  langues  tartares^  Paris, 
1820,  in-4^^  Schott,  Essai  sur  les  langues  tariares,  en 
allem.,  Berlin,  1836,  in-4<^;  Conon  de  La  Gabelentz,  Elé- 
ments de  la  grammaire  mandchoue,  Altenbourg,  1832, 
in-8*;  Kaulen,  Unguœ  mandshuricœ  institutioneSy  Ra- 
tisbonne,  1855,  in-8<». 

BIANDÉ,  nom  donné,  dès  les  temps  carlovingiens,  à 
une  cérémonie  qui  consistait  à  laver,  tous  les  Jours  de 
carême,  les  pieds  des  pauvres. 

MANDÉEN ,  variété  d'écriture  svriaque,  particulière  à 
la  secte  des  Sabéens.  Elle  a  cela  de  particulier,  qu'on  y 
fait  entrer  les  voyelles  dans  le  corps  de  l'écriture,  et  que 
les  lettres  y  sont  Jointes  les  unes  aux  autres  par  une 
barre  qui  les  traverse.  L'alphabet  mandéen  fût  porté  au 
xn*  siècle  par  quelques  prêtres  nestoriens  chez  les  Turcs 
Olgonrs,  et,  au  siècle  suivant,  les  Mongols  en  formèrent 
un  sur  le  même  modèle. 

BiANDEMENT  (du  verbe  mander)^  formule  exécutoire 
qui  termine  les  lois,  les  actes  authentiques,  les  Juge- 
ments, et  qui  contient  ordre  aux  différents  fonctionnsires 
d'en  procurer  l'exécution, 

MAïf DEK BNT,  écrit  sdressé  par  un  évêque  à  ses  diocé- 
sains, et  qui  se  termine  par  quelque  prescription  ou  oi^ 
donnance,  relative,  par  exemple,  à  des  jeûnes,  à  des 
prières,  à  des  Jubilés,  aux  mesures  de  discipline.  Les 
évêaues  écrivent  des  Mandements  en  prenant  possession 
de  leur  siège,  et  tous  les  ans  au  commencement  du  Ca- 
rême; on  les  lit  au  Prône.  Bossuet  et  Fénelon  nous  en  ont 
laissé  d'admirables. 

MANDILLE,  manteau  de  laquais  au  xvii"  siècle.  Il 
était  composé  de  trois  pièces,  dont  l'une  pendait  sur  le 
dos,  et  les  deux  autres  sur  les  épaules. 

MitJVDINGUE  (Idiome),  idiome  parlé  en  plusieurs  dia- 
lectes dans  là  Nigritie,  et  qui  domine  de  la  Gambie  an 
Niger.  II  est  rempli  de  sons  gutturaux. 

MANDOLINE,  instrument  de  musique,  qui  n'est  suère 
répandu  qu'en  Espagne  et  en  Italie.  Il  est  composé  d'une 
caisse  sonore  ovoïde  ou  en  forme  de  moitié  de  poire, 
comme  celle  du  luth  {V.  ce  tnot),  et  d'un  manche  asses 
semblable  à  celui  de  la  guitare,  et  sur  lequel  sont  tendues 
4  cordes  de  laiton  disposées  et  accordées  comme  celles  du 
violon.  En  Italie,  il  y  a  des  mandolines  à  3  cordes, 
d'autres  à  5,  dont  l'accord  varie  selon  le  caprice  des 
maîtres.  La  mandoline  se  tient  de  la  main  gauche,  et  on 
en  tire  des  sons  en  attaquant  les  cordes  avec  un  petit 
morceau  de  plume,  d'écaillé,  ou  d'écorce  de  cerisier, 
taillé  en  cure-dent  plat,  qu'on  tient  avec  l'extrémité  du 
pouce  et  de  l'index.  Le  son,  frêle  et  nasillard,  ne  manque 
ni  de  piquant,  ni  d'originalité.  Mozart,  dans  le  second 
acte  de  son  Don  Juan,  a  fait  un  heureux  usage  de  la 
mandoline.  Denys  a  composé  une  Méthode  pour  cet  In- 
strument. B. 

MANDORE,  instrument  de  musique  de  l'espèce  du 
luth,  depuis  longtemps  abandonné.  Long  de  50  centime!, 
environ,  il  était  monté  de  4  cordes,  accordées  de  quinte  en 
quarte,  c-à-d.  que  la  4«  était  à  la  quinte  de  la  3*,  la  3*  à 
la  quarte  de  la  2",  et  la  2*  à  la  quinte  de  la  chanterelle. 
On  abaissait  quelquefois  la  chanterelle  d'un  ton,  ailn 
qu'elle  fit  la  quarte  avec  la  3*  corde  :  c'est  ce  qu'on  appe- 
lait accorder  à  corde  analée.  Souvent  auad  on  abaMsall 


MAN 


120$ 


MAN 


Ift  dumtarelle  et  la  3*  corde  d*uiM  tierce  nu^^^'O  ponr 
bdre  raccord  eo  tierce.  La  chanterelle  de  la  roandore  à 
4  cordes  «errait  à  Jouer  le  sujet;  on  la  pinçait  avec  rin- 
dex,  au  bout  duquel  était  fixé  un  petit  morceau  de 
plume;  les  trois  autres  cordes  formaient  une  octave  rem- 

i^lie  de  sa  quinte,  et  le  pouce  lea  frappait  Tune  après 
'autre.  Le  nombre  des  cordes  ftit  quelquefois  élevé  tus- 
qa*à  16;  les  mandores  oui  avaient  plus  de  4  cordes  s^i^ 
pelaient  mamàorn  luthiss,  B. 

MANDUGUS.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnain  ds 
Biographie  et  d^ Histoire, 

IfiANÉCANTERIE  ou  MANICANTBRIE  (du  latin  mansio 
cantorum?)^  nom  donné  autrefois,  dans  certains  dio- 
cèses, à  Técole  où  l'on  instruisait  les  enfants  de  choBur. 
C'est  ce  qu'on  nomme  plus  communément  maitrise{V,  ce 
moty, 

fllANÉGE  (du  latin  manu  agere,  conduire  à  la  main), 
art  de  dompter,  de  discipliner,  d'instruire  les  chevaux,  et 
d'exercer  les  cavaliers  k  les  conduire.  V,  Éqoitatioii. 

MANtes,  espace  circulaire  ou  rectangulaire,  entouré 
d'une  clôture  et  souvent  couvert,  destiné  aux  leçons 
d'équitatlon  ou  au  dressage  des  chevaux.  Les  manèges 
dviis  ont  en  moyenne  40  met.  de  long  sur  13  met.  de 
laiige;  mais  on  en  fait  de  beaucoup  plus  grands  pour  la 
cai^erie.  Le  terrain  doit  être  soigneusement  nivelé,  et 
recouvert  d'une  couche  de  sable  mêlé  de  tan  ou  de  sciure 
de  bois,  repiqué  dès  qu'il  tend  à  se  durcir,  et  arrosé  sou- 
vent, sans  le  rendre  trop  humide.  Les  manèges  complets 
doivent  contenir  des  ferles  ou  tribunes  pour  les  per- 
sonnes qui  veulent  assister  aux  leçons,  des  écuries  pour 
les  chevaux,  ainsi  que  diverses  pièces  accessoires,  telles 
que  vestiaire,  sellerie,  logement  du  gardien,  salle  du  di- 
recteur, etc.  Les  cirques  servent  souvent  de  manège  pour 
les  leçons  d'équitatlon  dans  les  villes  de  second  ordre. 

MANGONNEâU.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

MANICANTERIE.  V.  Manécartbrib. 

MANIGHORDION.  V.  GuvicoaDB. 

HANICLB,  vieux  mot  qui  signifiait  bracelet, 

MANIÈRE,  se  dit,  en  Peinture,  de  la  méthode  suivie 
par  un  artiste  ou  par  une  école  dans  l'exécution  de  leurs 
compositions.  Le  même  mot  s'emploie,  en  Littérature 
comme  dans  les  Beaux-Arts,  dans  le  sens  d'o/Tsctation, 
de  recherche  exagérée, 

MANitsE  Roms  (Gravure  à  la).  V,  Gravurb. 

MANIFESTE,  sorte  de  proclamation  adressée  par  une 
milssance,  non -seulement  à  une  autre  puissance  avec 
laquelle  elle  est  en  contestation,  mais  au  monde  entier,  que 
l'on  prend  en  quelque  sorte  pour  juoe.  Les  manifestes 
contiennent  d'ordinaire  des  aéclarations  de  principes, 
l'exposé  des  griefs  dont  on  se  plaint,  le  but  ou'on  se  pro- 
pœe  en  prenant  les  armes,  et  quelquefois  auasl  les 
moyens  qu'on  veut  employer.  Le  nom  de  manifeete 
vient  de  ce  oue  les  pièces  de  ce  genre  commençaient 
)adls  par  les  deux  mots  latins  manifestwn  est  (il  est  ma- 
nifeste). Un  des  plus  fameux  manifestes  de  l'histoire  con- 
temporaine est  celui  que  lança  le  duc  de  Brunswick, 
commandant  des  armén  prussienne  et  autrichienne  coa- 
lisées qui  allaient  envahir  la  France.  Cette  déclaration, 
datée  de  Coblentz,  le  fô  juillet  1792,  fut  l'ouvrage  des 
émigrés  fhmçals.  Elle  était,  d'un  bout  à  l'autre,  une  me- 
nace contre  la  France  révolutionnaire,  une  injonction  à 
tout  le  monde  .de  revenir  à  rancienne  fidélité  au  roi, 
mie  défense  aux  villes  et  aux  habitants  de  résister  à  rav- 
inée coalisée,  sous  peine  de  toutes  les  rigueurs  do  la 
Snerre.  Ce  manifeste,  dont  on  attendait  beaucoup,  n'eut 
'autre  effet  que  de  rendre  la  Révolution  plus  terrible,  et 
d'augmenter  les  dangers  de  Louis  XVI  et  de  sa  famille. 

MANILLE,  Jeu  de  cartes.  On  y  Joue  de  S  à  5  personnes 
avec  un  Jeu  complet,  dont  les  cartes  sont  distribuées  3 
par  3,  ou  4  par  4,  Jusqu'à  la  fin.  Le  premier  en  cartes 
Joue  de  manière  à  se  débarrasser  du  plus  grand  nombre 
possible  de  cartea  qui  se  suivent;  quand  II  y  a  Interrup- 
tion, le  Joueur  qui  peut  continuer  fait  de  même,  Jusqu'à 
ee  qu'il  sit  à  son  tour  une  lacune  dans  son  Jeu,  et  ainsi 
4e  suite.  Quand  personne  ne  peut  continaer  après  celui 
qui  s'interromnt,  tous  payent  à  celui-ci  un  jeton.  Un 
Joueur  qui  arnve  à  une  lacune  peut  la  combler  avec  le 
■touf  de  carreau,  dit  numUle,  s'il  le  poesède,  et  alors  11 
reçoit  un  Je^on  de  tout  lé  monde;  on  peut  donner  à  cette 
carte  telle  valeur  qu'on  Joce  à  propos.  Tout  Joueur  qui 
place  un  roi  reçoit  un  Jeton  des  autres  Joueurs.  Celui  qui 
•'est  défait  le  plus  tôt  de  toutes  ses  cartes  gagne  les  en- 
Jenz,  et  les  autres  Joueurs  lui  payent  autant  de  Jetons 
qu'il  leur  reste  de  cartes  dans  la  main.  Si  la  manille  est 
m  aoiiibra  de  ces  eartas,  le  Joueur  qui  ne  l'a  pas  placée 


donne  un  Jeton  à  chacun  i  on  paye  également  un  Jalon 
pour  chaque  roi. 

MANIPULE,  en  latin  mapfwki,  sudarium,  omemeat 
ecclésiastique  en  Ibrme  de  petite  étole,  kuige  de  10  oen- 
timètres  environ,  et  oui  se  porte  sur  l'avant-bras  gauche. 
On  le  nomme  aussi  fanon.  Ce  n'était  dans  le  priocipe 
qu'un  mouchoir  qu'on  tenait  à  la  main  ou  aur  le  bras 
pendant  les  offices,  parce  que  l'aube  n'avait  pas  d'autra 
ouverture  que  celle  d'en  haut  pour  paaaer  la  tète  :  cette 
pièce  d'étone  fut  d'abord  ornée  d'une  frange  et  de  brode- 
ries; en  s'écartant  de  son  but  primitif,  elle  devint  de  plus 
en  plus  riche,  et  finit  par  être  exclusivement  un  orne- 
ment. Le  clergé  romain  voulut  s'en  réserver  le  privilège, 
comme  le  prouve  une  lettre  de  S' Grégoire  à  Jean,  arche- 
vêque de  Ravenne;  mais  l'usage  du  manipule  devint 
général.  Il  se  p<»ta  longtemps  à  la  main,  aussi  bien  que 
sur  le  bras.  Les  Grecs  et  lee  Biaronites  en  mettent  deux, 
un  à  chaque  bras.  Le  prêtre  officiant  prend  le  msnipule 
après  l'étole,  et  en  disant  une  prière  spéciale.  Ad  tnani^ 
pulum.  Le  diacre  et  le  aona-diacre  ont  aussi  un  manipule. 

MAifiPCLB,  terme  d'antiquité  militaire.  V,  notre  Dto- 
tionnaire  de  Biographie  et  â^  Histoire, 

MANKS  (Dialecte),  dialecte  gaélique,  parlé  dans  nie 
de  Man.  Il  en  existe  une  GraitMnaire  par  Kelly,  Londres, 
1803,  et  un  Dictûmnavre  par  Cregeen,  Douglas,  1835. 

BIANNAJA  (Supplice  de  la).  V,  Gdillotinb. 

MANNEQUIN  (de  l'allemand  mOnnchen^  petit  homme, 
ou  de  ranghûs  mankind,  en  forme  d'homme),  figure 
ayant  la  fonne  du  corps  humain,  dont  tous  les  membres, 
à  jointures  brisées,  imitent  le  Jeu  des  articulations,  et 
sur  laquelle  les  peintres  et  les  sculpteurs  disposent  des 
draperies  après  lui  avoir  donné  l'attitude  qu'ils  veulent 
représenter.  Le  premier  qui  en  fit  usage  fut,  dit-on, 
Bacdo  délia  Porta. 

MANOBUVRE  (de  main  et  awvra),  tout  homme  qui  tra- 
vaille de  aea  mains,  et,  dans  un  sens  plus  restreint,  ap- 
prend qui  aert  les  maçons  et  les  couvreurs. 

MAROEiivaE,  terme  d'Art  militaire»  qui  a'applique  saw 
mouvements  tactiquea  dea  troupea,  ainsi  qiraux  mou- 
vements stratégiques  des  armées.  On  diatingue  les  mor 
nantoree  de  détau  (école  de  peloton t  école  de  bataillon 
ou  d'eecadron),  les  mancnwres  d^ ensemble  ou  dt  {tQtie 
(une  brigade  ou  une  division),  et  les  mananmres  d^ar* 
mée  ou  grandes  manasyiores.  Les  manœuvres  de  détail 
doivent  être  uniformes  et  invariables,  afin  de  conserver 
dans  la  totalité  de  l'armée  l'unité  d'action  ;  elles  con- 
stituent la  paràe  purement  mécanique  de  la  guerre.  Les 
grandes  manoeuvres  ne  peuvent  pM  admettre  un  mode 
aexécutlon  uniforme  et  invariable  pour  toutes  les  par- 
ties de  l'armée,  parce  que  l'étendue  du  terrain  qu'elles 
embraasent  et  les  dispositions  de  Vadversaire  imposent 
nécessairement  des  modificationa  aux  mouvements;  elles 
constituent  la  partie  Intellectuelle  de  la  guerre,  où  Ton 
a  besoin  de  réflexion,  de  perspicacité,  d'inspiration.  Les 
manoBuvres  de  ligne  sont  nécessairement  mixtes. 

MANCBOVRB,  OU  tenuos  de  Marine,  partie  de  la  tactioue 
navale  qui  enseigne  à  gouverner  un  vaisseau,  à  régler 
tous  ses  mouvements,  et  à  lui  faire  faire  toutes  les  évo- 
lutions de  route  et  de  combat.  V,  Bréan,  TraiU  du 
gréement  et  de  lamanau'ore.  Paria,  1861, 1  voL  gr.  in-8^ 
— ManoBUiore  est  encore  synonyme  de  eorde  :  les  mancn»* 
vres  courantes f  attachéea  aux  objets  mobiles,  servent  à  la 
transmission  des  forces;  les  mononiorsadonnafitM  lient 
entre  eux  les  points  fixes.  Les  manœuvres  passées  de 
l'arrière  à  l'avant  sont  dites  passées  à  contre;  celles  pas- 
sées de  l'avant  à  l'arrière,  passées  à  tours. 

MANOIR  (du  latin  manere,  demeurer )«  château  du 
aeigneur  au  moyen  âge.  Par  extension,  ce  nom  fut  appli- 
oue  à  toute  habitation  de  quelque  Importance  entourée 
ue  terrea. 

MANOU  (Lois  de),  Jlfdfi4MW-dAarma-p<UCr»»  ouvrage 
en  IS  livrée,  comprenant  5,370  vere  dans  l'édition  pu- 
bliée à  Paris  en  1830,  et  dans  lequel  sont  exposés,  comme 
un  enseignement  révélé,  les  prebeptes  de  la  Loi.  Manoo 
est  le  nom  d'un  être  supérieur  fréqueomient  «lié  dans  la 
littérature  indienne,  et  dont  la  première  mention  se 
trouve  dans  le  Véda,  où  il  est  donné  conune  le  père 
commun  des  hommes;  c'est  à  lui  particulièrement  que 
les  poètes  rspportent  l'institution  du  sacrifice.  Las  Aryas 
de  rindus  le  considéraient  comme  leur  prindUf  législa- 
teur, avant  d'être  descendus  vers  le  S.-E.  dans  les  ^léas 
de  la  Yamunà  et  du  Gange  :  ce  n'est  pas  un  personnage 
escluaivement  indien  ;  les  traditions  vêdioues  le  faisaient 
remonter  an  temps  où  leur  race  vivait  oans  son  unité 
primordiale  le  long  des  rives  de  l'Qxus.  On  doit  doue 
considérer  le  Manon  indien  comme  un  penonnaga  ^yoh 


^HAN 


1207 


MAN 


Mhfiie.  liO  code  dm  Lois  de  Uamra,  dans  m  rédaction 
préMte,  est  attribué  à  Bbrigou  psr  les  brfthmaiiee  :  or, 
Bfari^oQ  «  daas  le  Véda^  est  un  riM,  c-à-d.  un  saint 
penoDMÎge  d*iin  ordre  supérieur  et  même  -surhumain, 
dont  le  rôle  tout  entier  fait  partie  de  la  mythologie  8jm« 
boHqne  de»  Afyaa  de  llndns,  et  oui,  de  beaucoup  anté- 
rieor  à  tous  les  hymnes  du  recueil,  remonte  aux  temps 
primilifa  de  la  race.  Nous  ignorons  Tauteur  véritable  on 
livre  de  la  Loi;  il  y  a  même  lien  de  croire  que  ce  livre 
eit  Foravre  commune  de  plusieurs  brahmanes,  auxquels 
leur  sdenoe  a  donné  Pantorité  nécessaire  pour  le  fidre 
prévaloir  et  rattriboer  à  Manou  et  à  Bhrlgoo.  Quant  à 
répoqne  où  il  Ait  composé,  il  est  impossible  de  la  fixer 
aojonrd'bai  avec  précision.  Si  Ton  considère  le  fond  des 
doctrinea  et  des  lois,  mêmes,  il  est  certainement  fort  an- 
tique; mais  la  rédaction  qui  est  entre  nos  mains  peut 
remonter  k  une  époque  moins  reculée.  Toutefois,  il  n*est 
Gsit,  dans  le  code  de  tfanon,  aucune  allusion  à  la  réforme 
boaddhiqoe,  ce  qui  aurait  lieu  de  nous  étonner  dans  un 
ime  de  cette  naûire^  ai  cette  réforme  radicale  lui  eftt  été 
antérieme.  Si  Ton  compare  Vétat  des  doctrines  et  des 
moBors  dans  le  code  de  Manon  et  dans  les  plus  anciennes 
prédications  bouddhiques,  le  code  brahmanique  dénote 
une  ^loqae  besnconp  plus  ancienne  que  celle  du  boud- 
dha, mort  vera  l'année  543  av.  J.-C  Les  Furâ$uu(y,  ce 
moi)  devant  être  considérés  comme  postérieurs  au  Bood- 
dfaâaoïe,  il  en  résulte  que  le  code  de  Manou,  dans  sa  ré- 
daction actuelle,  semble  appartenir  à  la  période  des  épo- 
pées. Cest,  dn  reste,  le  même  langage,  la  même  manière 
de  penser,  le  même  état  de  civilisation  politique  et  re- 
l^^eose  qiie  dans  ces  grands  poèmes.  Les  lois  de  Manou 
flont  aoavent  citées  dans  le  MtihâbhânUa,  et  cela  dans  les 
îm  lima  mêmes  dn  code  que  nous  possédons.  Il  existe  dans 
lliide  an  moins  56  codies  du  même  genre  :  loin  qu'ils 
poissent  rivaliser  d'ancienneté  avec  les  lois  de  Manou, 
ceDes^  lenr  ont  serri  de  type  et  de  fondement,  et  pré- 
aentent  entre  lenrs  diverses  parties  une  proportion  qui 
ne  parait  paa  se  retrouver  au  même  degré  dans  les  antres. 
Selon  la  tradition  indienne,  un  antique  code  de  Manou 
ftu  écrit  par  Ifamou  lui-même  en  300,000  vers;  le  sage 
divin  Nârada  l'abréna  en  12,000  vers;  un  fils  de  Bhri- 

gOt  Soamati,  le  réduiût  à  4,000  :  notre  rédaction  n*est 
ne  paa  celle  de  Soumati,  et  cette  traduction  inonve 
oalqaement  que  les  Indiens  ont  eu,  avant  la  nôtré^  plu- 
aicoie  rédactions  de  leurs  lois. 

La  législation  de  Blanon  est  fondée  sur  le  Vida,  dont 
les  docmnes  s'y  retrouvent,  fort  développées,  maisessen- 
^tlellemeot  les  mêmes  :  le  code  passe  même  aux  yeux  des 
Indlena  pour  contenir,  sous  la  forme  de  précepte  et  de 
règles,  le  Vida  dans  son  entier.  C'est  asses  dire  qu'il  est 
orthodoxe.  On  ne  peut  donc  le  considérer  comme  Issu 
d*niie  des  écoles  de  la.  philosophie  indienne  :  an  con- 
traire, las  difTérents  commentaires  sanscrits  des  lois  de 
Manoo  iqipartiennent  à  des  écoles  particulières,  et  don- 
nent souvent  de  ses  préceptes  ou  de  ses  énondations 
thédogiqaes  une  interprétation  inadmissible.  H  est  donc 
néoesnâre,  pour  bien  comprendre  ce  livre,  de  se  tenir  en 
debora  de  tonte  doctrine  préconçue  autre  que  celle  du 
Véda,  et  de  se  défier  des  commentaires.  Mse  en  elle- 
même,  la  doctrine  de  Manou  porte  non-seulement  sur 
les  loia  drilee  et  poUtiques,  mais  aussi  sur  la  reli^on,  la 
morale,  la  métaphvsique,  et  la  cosmogonie;  elle  est,  en 
on  mot,  à  la  fois  théorique  et  pratique,  et  ne  nésfîge  au- 
cune des  baaea  sur  lesquelles  repose  la  société  br&hma- 
niqne;  elle  en  est  l'expression  la  pins  complète  qu'aucun 
ooviage  indien  nous  présente.  —  Le  polythéisme  est  la 
fcnne  extérieure  et  vûible  de  la  religion  dans  Manon;  il 
est  qrmboliqae'  dans  son  ensemble  comme  dans  ses 
mcîndrea  parlieo  :  mais,  tandis  que  les  qrmboles  védi- 
ques repréaentent,  dans  les  hymnes,  presque  excluaive- 
ment  la  natore  extérieure  et  matérielle,  un  caractère 
laétaphyiiqne  et  moral  trterévident  se  remsrqne  en  eux 
Âua  Manon.  Ces  symboles,  qui,  dans  le  vida,  sont 
presque  indépendants  iea  uns  des  autres,  sont  Ici  coor- 
donnés et  rappoittéa  à  un  principe  commun  qui  les  réunit 
et  k»  anime  s  lepanthéen  védique  se  trouve  sinsi  oso- 
servé  conformément  à  la  tradition  des  Aryas,  mais  re- 
légué an  second  rang,  le  rang  supérieur  dans  la  hiérar- 
«hie  des  êtres  étant  oecupé  par  le  principe  absolu  et 
iadlviaflUa.  Nonr-sealement  les  dieux  du  ciel,  Indra  et 
les  antrea,  sont  devenus  des  génies  d*un  ordbre  secon- 
daire; maia  Brahmft  lui-même,  dont  le  nom  n'existe  pas 
dans  le  Véda,  est  dépassé  par  la  notion  métapt^ysique 
ie  IVdBoln  neutre  et  indiscernable  qui  porte  le  nom  de 
Brmimm*  Le  panthéisme  est  ainai  constitué  d'une  m»- 
•tore  conplèce  et  déinitive,  développant  le  Véda  sans 


le  contredire,  et  demeurant  orthodoxe.  Le  l**  livre  expose 
la  formation  du  monde,  laquelle  n'est  pas  une  cr^ûoon 
aubttantielle,  maia  une  siinple  producâon  des  formes  ; 
l'origine  des  Vidas;  la  création  du  brahmane,  du  xatriya, 
du  vai^ra  et  du  çoùdra,  c.-èrd.  des  quatre  castes  fonda 
mentales  de  la  société  brahmanique;  la  naissance  des 
Manous,  des  dieux,  des  astres,  des  hommes,  des  ani- 
maux et  des  plantes;  les  productions  et  les  destructions 
successives  des  univers;  la  division  dn  temps;  le  Jonr 
et  la  nuit  de  Brahmft;  la  tliéorie  des  âges  ;  l'origine  et  les 
fondements  de  la  Loi.  Ce  l*'  livre  est  donc  une  véritable 
Genèse  indienne.  —  Le  2"  livre,  revenant  sur  les  bases 
de  la  Loi,  qui  sont  la  tradition  et  la  révélationii  établit  le 
privilège  des  br&hmanes,  et  fixe  les  limites  de  la  contrée 
brahmanique.  Le  Jeune  brahmane,  né  dans  le  BrahmA- 
varta,  reçoit  une  sorte  de  baptême  et  un  nom  ;  ce  2*  livre 
décrit  les  cérémonies  par  leequelles  il  doit  passer  pour 
arriver  au  rang  de  novice,  la  ceinture,  le  cordon,  le  blb- 
ton;  il  expose  les  devoirs  de  l'ablution,  de  la  purification 
spirituelle,  les  égards  dus  par  le  novice  à  ses  supérieurs, 
à  ses  parents,  à  son  maître  spirituel.  —  Le  3*  livre  fixe 
la  durée  du  noridat,  à  la  suite  duquel  le  Jeune  brahmane 
se  marie;  choix  de  la  femme;  divers  modes  de  mariage; 
manière  dont  on  doit  honorer  les  femmes;  cérémonies 
imposées  au  chef  de  famille;  devoirs  d'hospitalité;  sou- 
venir des  morts  et  repas  funèbres,  composition  de  ras- 
semblée du  featin,  prière  aux  morts.  —  Les  règles  con- 
cernant l'alimentation  ont  une  grande  importance  dans 
la  reli^on  indienne;  le  4*  et  le  5"  livre  roulent  en  grande 
partie  sur  ce  si;^et  ;  les  détails  où  entre  le  code  de  Manon 
s'expliouent  par  le  besoin  qu'éprouvaient  les  législateurs 
àiyaa  de  ne  pas  laisser  leur  race  se  mêler  avec  les  races 
indigènes,  noires  ou  Jaunes,  dont  l'infériorité  morale  et 
intefiectudle  était  évidente;  beaucoup  de  préceptes  mo- 
raux contenus  dans  ces  livres  et  dans  les  autres  n'ont 
pas  d'autre  but,  et  s'adressent  prindpalement  aux  castes 
supérieures.  —  Le  terme  de  la  ^<à  approchant,  le  chef 
de  famille,  auqud  est  né  un  petit-fils,  se  retire  dans  le 
désert  pour  s'y  livrer  à  l'austérité  et  à  la  méditation  ;  il 
derient  f>ànapra$iha  ou  anachorète.  Les  devoirs  de  l'ana- 
chorète sont  exposés  dans  le  6*  livre.  —  La  seconde 
moitié  du  livre  de  Manou  diffère  notablement  de  la  pre- 
mière par  son  contenu  :  cellend  énonce  des  préceptis 
généraux  qui  s'adressent  à  tout  le  monde,  mais  surioèt 
aux  bràhmanea.  Les  livres  suivants  ont  pour  objet  léés 
détails  de  loi  relatifs  à  l'organisation  de  la  sod^té  |(olI- 
tiqne,  dvile  et  militaire,  et  aux  devohrs  des  castes,  ba 
création  d'un  roi,  son  autorité,  ses  devoirs  ;  le  choix  dâi 
ministres;  le  palais,  la  forteresse;  les  impôts;  le  butta 
de  ffuerre;  les  questions  relatives  au  droit  des  gens,  axa 
droits  de  la  guerre  et  de  la  rictoire  :  tels  sont  les  prind- 
panx  sujets  du  7"  livre.  —  Le  8«  et  le  0«  traitent  des  lois 
driles  et  criminelles,  de  la  composition  des  tribunaux, 
de  la  procédure;  des  dettes  et  contrats;  des  témoins  et 
des  témoignages;  de  la  conscience  morale,  du  serment, 
de  l'épreuve;  de  l'intérêt,  dea  cautions,  des  amende»; 
des  lois  pénales  pour  crimes  et  délits;  du  mariaee  ciril, 
des  enfknts,  des  successions;  de  hi  subordinauon  des 
castes  par  rapport  aux  brahmanes.  —  Une  importance 
considâable  est  attachée  aux  devoira  dea  castes  dans  les 
temps  de  disette;  la  division  de  l'Inde  en  un  grand 
nombre  de  petits  États  rendait  ces  fléaux  irrésistibles,  et 
portait  dans  l'accomplissement  des  devoira  légaux  des 
désordres  que  les  législateure  se  sont  efforcés  de  préveidr 
en  suspencumt  l'exerdce  même  de  la  loi  dans  des  condi* 
tiens  déterminées.  Ce  cas  et  les  règles  qui  s'y  rapportent 
forment  l'objet  principal  du  livre  lO*.  —  L«i  deux  der- 
nière roulent  sur  des  si:4ets  moraux  et  religieux,  qui  sont 
comme  le  couronnement  de  la  législation  de  Manou.  La 
crime  et  le  délit  ne  blessent  pas  seulement  la  aodéUi 
mais  ils  souillent  l'ftme;  de  sorte  que  la  punition  dn  cou- 
pable n'est  efficace  que  si  elle  est  accompagnée  ou  suliia 
de  pénitence  et  d'expiation;  le  péché  doit  donc  êtM 
effacé,  comme  la  force  doit  rester  à  hi  loi  ;  sans  cette 
double  condition,  la  société  ne  derient  pas  meillemé. 
Quand  le  repentir  a  effacé  la  faute,  même  secrète,  alOM 
on  peut  aspirer  à  la  béatitude  finale,  qui  est  l'objet  de 
toute  la  léîcislatlon  brfthmanique,  et  dont  les  condition 
sont  renfermées  an  i2*  livre  de  Manou.  La  distincllon  ds 
rame  et  du  corps  est  le  fondement  de  la  loi  morale  et 
des  conséquences  finales  qu'dle  entralae  t  cet  osnsA- 
quenoes  sont  diverses  suivant  l'état  de  purification  oà 
rême  et  le  corps  de  l'homme  sont  parvenus  au  Jour  de 
fai  mort.  Le  oiminel  non  purifié  tombe  aux  enfers,  oè  U 
souffre,  dans  son  corps  et  dans  son  &me,  des  tourmenH 
variés;  et^  an  renouvellement  de  l'univers,  le  principa 


MAN 


1208 


MAN 


vivant  qui  ranimait  renaît  dans  une  condition  inférieure 
et  dans  une  misère  proportionnée  à  son  état  antérieur. 
Le  Juste,  qui  a  accompli  les  actes  exigés  par  la  loi  ou 
indiqués  par  une  raison  supérieure,  parvient  à  la  béati- 
tude finale,  qui  consiste  dans  la  contemplation  de  TÊti^ 
suprême,  et  dans  Tabsorption  de  Tindividualité  dans  la 
girande  ftme  du  monde;  s'il  est  parfait,  il  ne  renaît  pas 
au  Jour  du  renouvellement  du  monde,  et  échappe  de  la 
sorte  aux  vicissitudes  de  la  vie  et  de  la  mort. 

L'esprit  général  qui  anime  les  lois  de  M anou  peut  se 
résumer  en  deux  mots,  pureté  physique  et  morale,  su- 
bordination des  hommes  entre  eux.  Les  éléments  qui 
composent  cette  législation  sont  si  compactes,  en  quelque 
sorte,  qu'il  est  difficile  de  dire  si  les  castes  ont  été  créées 
pour  conserver  l'esprit  religieux  des  Aryas,  ou  si  la  doc- 
trine religieuse  a  été  conçue  en  vue  de.  la  conservation 
des  castes.  On  ne  peut  retrancher  ni  modifier  aucune 
des  parties  essentielles  de  cette  législation,  sans  qu'elle 
s'écroule  tout  entière.  La  loi  de  Manou  n'a  Jamais  été 
changée  que  dans  quelques  détails  de  pratique  d'une  va- 
leur tout  à  fait  secondaire;  elle  sert  encore  aujourd'hui 
de  base  à  la  société  br&hmanique  de  l'Inde;  tout  ce  qui, 
du  dehors  ou  du  dedans,  a  paru  lui  être  hosdle  a  été  re- 
poussé par  les  brahmanes  avec  une  persistance  qui 
ne  s*est  point  lassée.  Les  musulmans  ont  pu  conquérir 
rinde,  mais  n'ont  pu  détruire  ni  l'institution  des  castes, 
ni  la  religion  des  Aryas;  la  race  br&hmanique  ne  s'est 
mêlée  à  la  leur  que  dans  une  proportion  minime.  Long- 
temps auparavant,  la  réforme  bouddhique,  qui,  née  dans 
l'Inde,  prêchait  l'égalité  et  attaquait  le  principe  des 
castes,  n'a  pu  se  maintenir,  mal^^é  les  progrès  qu'elle 
avait  faits  dans  le  peuple.  Plus  tard,  le  christianisme, 
prêché  dans  l'Inde  par  un  ordre  célèbre,  ne  parveoait  à 
faire  quelques  progrès  qu'en  faisant  lui-même  d»  con- 
cessions, ue  système  ayant  été  désapprouvé,  la  loi  de 
Hanou  a  repris  tout  son  empire,  et  constitue  encore,  au- 
iourd'hui  même,  la  plus  grande  force  morale  contre 
laquelle  les  Européens  aient  à  lutter  en  Orient. 

V.  Manavct-Dherma-ScLStra,  or  thê  insiitutes  ofMwu, 

Eublié  par  Chamney  Hau^hton,  Londres,  18S5,  2  vol. 
i-i**  ;  Mmu  Sanhtta,  unth  a  commetitary  of  Kulluka 
Bhatta,  Calcutta,  1830,  2  vol.  in-8<';  77^  laws  ofMmu, 
en  sanscrit,  en  bengali,  et  en  anglais,  Calcutta,  1832; 
Ê4ri$  d»  Manou,  texte  et  traduction  française,  par  Loise- 
Iflor-Deslongchamps,  1830-1833,  2  vol.  in-S"».     Em.  B. 

MANS  (Cathédrale  du).  Cette  église,  placée  sous  l'in- 
Tocadon  de  S^  Julien,  oflîre  deux  styles  bien  distincts  :  la 
grande  nef  et  les  bas  côtés  appartiennent  à  la  période  ro- 
mano-byzantine;  le  transept,  le  chœur  et  ses  chapdles, 
ainsi  que  toute  la  partie  supérieure  de  l'église,  à  la  pé- 
riode ogivale.  Blalgré  cette  absence  d'unité,  c'est  au  mo- 
nument dont  l'ensemble  possède  de  la  noblesse  el  de  la 
grandeur.  H  se  distingue  à  l'extérieur  plutôt  par  la  sévé- 
rité des  lignes  architecturales  que  par  la  richesse  de  l'or- 
nementation; le  chevet,  soutenu  par  de  grands  et  légers 
contre-forts  qui  supportent  trois  rangs  d'arcs-boutants 
superposés,  et  entouré  de  diapelles  qui  forment  de  pe- 
tites absides  rayonnantes  autour  de  l'abside  principtde, 
donne  une  perspective  très-pittoresque.  Rien  n'est  plus 
simple  que  le  grand  portail.  Trois  portes  &  plein  cintre, 
surmontées  de  chevrons  brisés ,  de  nillettes  et  autres  or- 
nements de  style  romano  -  byzantin  ;  au-dessus,  une 
grande  fenêtre  entre  deux  autres  de  moindre  dimension , 
toutes  trois  à  plein  cintre;  deux  contre-forts,  sur  lesquels 
sont  fixées  deux  énormes  bêtes;  enfin,  au  sommet,  un 
crand  pignon  en  maçonnerie  maillée,  soutenue  par  des 
pierres  de  taille  de  moyen  appareil  :  voiU  toute  la  déco- 
ration de  ce  portail.  Le  portail  latéral  du  midi,  construit 
dans  le  s^le  de  transition  du  xn*  siècle,  a  plus  de 
richesse  :  l'ogive  qui  donne  entrée  dans  une  espèce  de 
narthex  ou  vestibule,  est  encore  indécise,  et  ornée  de 
moulures  romano-bvsantines;  la  porte,  surmontée  d'un 

rpan  o&  l'on  voit  le  Sauveur  et  les  figures  symboliques 
quatre  Évangélistes,  a  une  voussure  chargée  de  pe- 
tites statuettes,  et  des  pieds-droits  garnis  de  huit  grandes 
statues,  toutes  maltraitées  par  le  temps  et  par  les 
hommes.  Ce  portail  est  surmonté  d'une  tour  qui  a  66  met. 
de  hauteur,  et  qui  renferme  une  fort  belle  horloge.  A  l'in- 
térieur, on  est  frappé  de  la  beauté  de  la  nef,  avec  ses 
fenêtres  et  ses  galeries  à  plein  cintre,  avec  ses  travées 
d'une  exécution  surprenante  et  d'une  grandeur  d'effet 
extraordinaire  :  elle  a  été  bâtie  au  xi*  nècle,  ainsi  que 
les  bas  côtés,  dont  les  murs  sont  soutenus  par  des  co- 
lonnes engagées,  à  chapiteaux  historiés  de  figures  fan- 
mstiquas,  harpies,  griffons,  chim^rw,  serpents  entre- 
leoés»  etc.  Les  arcades  qui  séparent  la  nef  et  les  ailes 


étaient  à  plein  cintre,  soutenues  par  des  colonnes  qrllB- 
driques  ;  mais,  dans  la  suite,  de  deux  en  deux  on  leo- 
ferma  une  des  colonnes  dans  un  pilastre  csrré,  et  les 
arcades,  rétrécles  par  ce  grossissement  alternatif  des 
supports,  furent  transformées  en  ogives  obtuses.  La  psrtie 
ogivale  de  l'édifice  se  rapporte  an  commencement  do 
xm*  siècle,  sauf  la  remarquable  rose  du  côté  gauche  da 
transept,  qui  est  du  xv*.  Le  chœur,  avec  ses  colonnes  et 
ses  arcades  d'une  élégance  parfaite,  avec  sa  galerie  dé- 
coupée entièrement  à  Jour,  avec  ses  éblouissants  vitraux, 
n'a  rien  à  envier  aux  plus  célèbres  monuments  gathiqnes. 
La  cathédrale  du  Mans  renrerme  quelques  monuments 
funéraires  d'un  grand  m^ite  :  le  tombeau  de  la  reine 
Bérengère,  apporté  de  l'abbaye  de  l'Épau  en  1821  ;  dans 
la  chapelle  des  fonts  baptismaux,  le  sarcophage  et  la 
statue  en  marbre  blanc  de  Charles  d'Anjou,  comte  du 
Ifaine  (mort  en  1472),  et  le  mausolée  de  Guillaume  da 
Bellay,  ouvrage  de  Geamain  Pilon,  placé  autrefois  dans  Is 
chapelle  de  Notre-Dam^-du-Chevet.  Quant  aux  dimen- 
sions de  l'édifice,  qui  occupe  une  superficie  d'environ 
5,000  met.,  il  a  150  met.  de  longueur  dans  œuvre;  la  nef 
a  58  met.  de  longueur,  et  24  de  largeur  y  compris  les  col- 
latéraux; la  longueur  transversale  de  la  croisée  est  de 
50  met.,  et  sa  largeur  de  10;  le  chœur,  avec  ses  latéraux 
fort  habilement  divisés,  par  un  rang  circulaire  de  co- 
lonnes, en  deux  allées  de  hauteur  inégale,  est  large  de 
32  met.,  long  de  44,  et  sa  hauteur  sous  voûte,  beaucoup 
plus  considérable  que  celle  de  la  nef,  est  de  34  met; 
chacune  des  onze  chapelles  du  pourtour  a  11  mèL  de  pro- 
fondeur, celle  de  l'abside  18  met,  sur  5  met.  de  lar^or. 
Cette  disposition  de  chapelles  profondes,  dont  l'une,  celle 
du  centre,  a  plus  de  profondeur  encore,  se  trouve  égale- 
ment à  la  cathédrale  de  Séez.  V,  Richelet,  Le  Mam  oa- 
ctsti  et  moderne.  1830;  E.  Hucher,  Calquss  des  vitraux 
peints  de  la  eathàdrale  du  Mans,  1855  et  soiv.        B. 

MANS  (NoTaB-DAMB-DB-LA-CooToas,  su).  Gotto  égliso, 
autrefois  abbatiale,  faisait  partie  du  couyent  dont  les  bâ- 
timents servent  aujourd'hui  d'hôtel  de  la  préfecture.  Elle 
appartient  aux  xi*,  xu*  et  xui*  siècles.  Sa  longueur  hors 
œuvre  est  de  05  met.,  et  sa  largeur  aux  transepts,  de 
43  met  La  façade  occidentale,  large  de  35  met,  est 
ornée  de  statues  et  de  sculptures  fort  curieuses.  Antoor 
de  l'ouverture  extérieure  du  pordie,  on  yoit  des  espèces 
de  crochets  végétaux ,  terminés  par  des  têtes  de  moines 
et  des  figures  bizarres.  La  voussure  de  la  porte  offre  trob 
rangs  de  statuettes  :  au  1*'  rang,  au  milieu  des  anges. 
Moïse,  Aaron  et  trois  autres  vieillards;  le  2*  rang  est 
formé  de  martyrs,  et  le  3*  de  vierges.  Le  tympan  repréf 
sente  le  Jugement  dernier  et  le  Pèsement  des  âmes; 
six  grandes  statues  garnissent  les  côtés  de  la  porte.  A 
rintérieur  de  l'église,  on  remarque  70  stalles  exécutées  en 
chêne  au  commencement  du  xvi*  siècle.  Il  y  a  une  crypte, 
longue  de  14"',30,  et  large  de  7  met.,  dans  laquelle  se 
trouvent  cinq  colonnes  monolithes  en  marbre  étranger  sa 
pays  et  peut-être  antique.  B. 

MANSARDE,  nom  donné  à  une  fenêtre  droite  dans  un 
comble  brisé,  parce  qu'on  en  attribue  l'invention  à  Man- 
sard,  architecte  de  Louis  XIV.  On  faisait  de  ces  fenêtres 
dès  le  xm*  siècle,  et  tous  les  b&timents  ciTila  de  la  Re- 
naissance en  sont  pourvus.  Par  extension,  on  a  donné  le 
nom  de  mansardes  aux  chambres  à  plafond  incliné  pla- 
cées sous  les  toits  et  éclairées  par  des  fenêtres  à  lucsmes. 

MANSE.       j  K.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  dt 

MANSION.  S      Biographie  et  d'Histoire. 

MANTE  (du  latin  mantetlwn^  nappe,  voile),  nom 
donné  d'abord  à  un  grand  voile  noir,  traînant  Josoa'i 
terre,  que  les  dames  de  la  cour  portaient  dans  les  céré- 
monies et  surtout  dans  le  deuil;  puis,  à  un  vêtement  de 
femme,  ample  et  sans  manches,  quelquefois  à  capuchon , 
se  portant  dans  les  temps  firoids  par-dessus  les  sutres 
vêtements.  On  a  encore  appelé  mante  la  chape  de  laine  à 
capuchon  que  revêt  quelquefois  le  pape,  rfaid>it  de  oei^ 
taines  religieuses,  le  balandran  ou  la  cape  des  Toyageors, 
ou  enfin  une  couverture  de  lit.  B. 

BfANTEAU,  autrefois  Mantel  (du  latin  manMum, 
voile),  vêtement  sans  manches,  long  et  ample,  destiné  à 
se  placer  par-dessus  les  autres  et  à  envelopper  le  corps.  : 
Ce  n'est  pas  seulement  chez  les  peuples  dont  le  dimst 
est  froid  qu'il  fslt  partie  du  costume;  il  est  aussi  en 
usage  dans  les  pays  chauds,  principalement  en  Espagne. 
Les  Anciens  ont  eu  bien  des  espéDes  de  manteaux  :  les 
philosophes  et  les  soldats  romains  hors  de  Rome  por- 
tèrent Vahclla  de  toile  mise  en  double,  attachée  par  une 
broche  sous  le  cou  ou  au  haut  de  l'épanle  ;  les  gens  de 
basse  condition  eurent  Valicula^  manteau  plus  court, 
attaché  aussi  sur  le  devant  par  une  agrafe,  et  qœ  le  veoi 


MAN 


1209 


MAN 


ftlaait  flotter  comme  de  petites  ailes  sur  les  épaules.  La 
cManiyda,  la  cîUène,  la  paUa,  le  péplum,  le  pallwm, 
te  M0tim,  le  paludamentwn^  la  pcanu^a,  la  IcBna,  etc. 
(T.  cis  tnoto),  étaient  aussi  des  formes  du  manteau.  En 
France,  le  manteau  n*était  guère  porté  autrefois  que  par 
les  ^ns  à  cheval.  Après  avoir  été  adopté  par  les  femmes 
aussi  bien  que  par  les  hommes,  il  est  aujourd'hui  presque 
onoplétement  remplacé  par  des  vêtements  de  même  des- 
tination, mais  de  formes  et  de  noms  très-variables.  On 
a  donné  &  de  petits  manteaux  courts  le  nom  de  erispin 
(F.  ce  mot).  —  Le  manteau  de  cour  est  une  espèce  de 
Tobe  sans  corsage,  attachée  an  bas  de  la  taille,  ouverte 
par  devant,  et  à  queue  traînante,  que  les  dames  d'une 
ooor  portent  les  jours  de  présentation  et  de  cercle.     B. 

■âHnan  (Rôles  k\  en  langage  de  Théâtre,  rôles  des 
personnages  graves  et  &gés,  des  tuteurs,  des  notaires,  etc. 

naiiTBAD ,  en  termes  de  Blason,  fourrure  herminée  sur 
laquelle  est  posé  Técu.  Il  n'appartient  qu'aux  souverains, 
aux  princes  et  aux  ducs. 

MANTEAU.    F.  ChEHDI^ 

MANTELET,  petit  manteau  violet  que  les  évoques 
fefetent  sur  leur  rochet  quand  ils  sont  en  présence  du 
pape  on  de  son  légat,  pour  témoigner  que  leur  autorité 
lui  est  subordonnée. 

MARTsuT,.  pièce  de  cuir  qui  s'abat  sur  le  devant  et  sur 
les  côtés  d'une  calèche,  pour  défendre  les  voyageurs  contre 
la  pluie  ou  le  vent. 

l^lfTBLBT,  en  termes  de  Blason,  espèce  de  lamoreouin 
large  et  court,  dont  les  anciens  chevaliers  couvraient  leur 
casque  et  leur  écu  ;  —  courtine  du  pavillon  des  armoi- 
ries^  quand  elle  n'était  pas  recouverte  de  son  ch^[>eau. 

■AMRLBTt  engin  de  guerre  des  Anciens,  destiné  à  pro- 
téger les  travailleurs  dans  l'attaque  des  places.  Cétait 
tantôt  un  grand  rideau  formé  d'un  tissu  épais  de  cordes 
tressées,  suspendu  à  des  espèces  de  potences,  et  flottant , 
que  les  traits  et  les  pierres  des  aaaiégés  ne  pouvaient 
traverser  ;  tantôt  un  parapet  portatif  et  roulant ,  en  bois 
recouvert  de  claies  en  osier,  et  revêtu  en  dehors  de  cuir 
mouillé,  pour  éviter  le  feu. 

MARTELET,  00  tcrmcs  do  Blarine,  volet  qui  ferme  un 
sabord. 

MANTES  (Église  Notre-Dame,  à).  Cette  église  était 
antrefois  une  collégiale  que  Philippe-Auguste  donna  au 
chapitre  de  S^Denis,  et  dont  le  roi  était  abbé  titulaire. 
fiUfiS  à  la  fin  du  xii"  siècle,  dans  le  même  style  ogival  et 
peut-être  par  les  mêmes  architectes  que  Notre-Dame  de 
hris,  elle  est  surmontée  de  deux  tours,  qui  dominent 
une  partie  du  cours  de  la  Seine.  La  porte  principale  est 
séparée  en  deux  baies  par  un  trumeau  qui  porte  une  statue 
dalal^rge,  et  accompagnée  de  8  grandes  statues  de  rois 
et  de  patriarches  ;  les  funérailles  et  l'Assomption  de  la 
aère  de  Dieu  sont  sculptées  dans  le  tympan  ;  dans  les 
foosaures,  on  quadruple  rang  de  50  figures  représente 
David  et  les  rois  de  Juda.  La  résurrection  du  Christ  fait 
le  tnjet  du  tympan  de  la  porte  latérale  de  gauche.  La 
porte  de  droite,  refaite  au  xrv*  siècle,  ofiîre  des  médaillons 
où  sont  figurées  des  scènes  de  marWrs,  une  double  vous- 
sure contenant  les  12  apôtres  et  12  martyrs,  enfin  un 
tympan  divisé  en  3  zones,  dont  l'une  représente  l'Annon- 
ciation, la  Visitation,  la  Nativité,  et  l'Adoration  des 
Mages,  l'antre  la  résurrection  des  morts  et  leur  sépara- 
tion en  élus  et  réprouvés,  la  3*  des  groupes  de  person- 
nages qni  semblent  gloiifler  Dieu.  L'église  de  Mantes  a 
penln  ses  vitraux  et  ses  mausolées  ;  le  cœur  de  Philippo- 
Angoate  repose  encore  dans  un  caveau  sous  le  sanc- 
to&e.  Les  six  piliers  qui  entourent  le  chœur  sont  d'une 
déttcatesse  et  d'une  légèreté  admirables.  L'édifice  n'eut 
aucune  cliiq[>eUe  jusqu'au  xiv*  siècle  :  à  cette  époque,  on 
en  ébnra  one  fort  remarquable  contre  le  bas  côté  méridio- 
nal du  chcBor.  Ttois  autres,  dont  une  au  sud  et  deux  au 
DOfd,  ont  été  pratiquées  plus  tard,  mais  avec  beaucoup 
Aoina  d'habileté.  Une  particularité  de  l'église  Notre- 
Dame  de  Mantes,  c'est  sa  toiture  en  tuiles  vernissées  et 
ànailléea.  K.  A.  Moutié,  Jfontos,  histoire,  monuments, 
mvtrtmf ,  ifô2,  in-S*.  B. 

MANTILLE .  espèce  de  {prand  flchn  à  trois  pointes,  dont 
celle  de  deornëre  arrondie,  fait  en  velours  ou  en  drap 
écariate  rehaussé  d'un  galon  ou  d'une  broderie  d'or,  et 
foe  les  femmee  adoptèrent  vers  1725,  pour  se  garantir  le 
eoQ  el  les  épaules  contre  le  froid.  -—  En  Espagne,  la  man- 
tille est  nne  longue  et  large  écharpe  noire,  qui  se  porte 
erdinairement  sur  la  tète  et  se  croise  sous  le  menton ,  de 
manière  à  ne  laisser  voir  distinctement  que  les  yeux. 

MANTOUE  (École  de),  nne  des  écoles  italiennes  de 
peiiitara  qœ  l'on  comprend  sons  la  dénomination  géné- 
rale ^éooU  lanUfardê.  EUe  tôt  fondée  par  André  Man* 


tegna,  et,  outre  Louis  et  François,  fils  de  ce  peintre,  on 
y  comprend  Lorenzo  Costa,  G.-F.  Carotte,  et  rr.  Monsi* 
gnori.  Une  vigoureuse  impulsion  lui  fut  donnée  par  Jules 
Romain,  que  les  Gonzague  appelèrent  à  BAantoue.  Ce 
grand  artiste  construisit  dans  cette  ville  le  Palais  ducal 
et  le  palais  du  T,  qu'il  orna  aussi  de  peintures,  et  donna 
les  dessins  pour  la  reconstruction  intérieure  du  Dôme. 
Outre  le  Primatice,  qui  Ait  plutôt  son  aide  que  son  élève, 
on  vit  se  former  sous  sa  direction  Benedetto  I^ni, 
Ferme  Guisoni,  Rinaldo,  Teodoro  Ghigi,  Ippolita  An* 
dreasi,  etc.  Depuis  Jules  Romain,  l'école  de  Mantoue  n'a 

{produit  aucun  maître  ;  les  Gonzague  appelèrent  plus  vo- 
ontiers  les  peintres  étrangers,  le  Titien,  le  Corrège,  le 
Tintoret,  l'Albane,  Domenico  Feti,  etc. 

MANUBAIiSTE.  y.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

BÎANUëL  (du  latin  manuale,  qui  se  tient  à  la  main), 
livre  portatif,  présentant  sous  un  petit  format  la  sub- 
stance d'ouvrages  étendus.  Les  Anciens  ont  connu  les  ma- 
nuels ;  mais  c'étaient  chez  eux  des  recueils  de  maximes 
philosophiques,  comme  le  Manuel  SÊpictète,  Chez  les 
modernes,  que  les  in-quarto  et  les  in-folio  n'ont  point 
effrayés  pendant  bien  des  siècles,  il  ne  parait  pas  avoir 
existé  de  manuels  avant  le  règne  de  Louis  XIV,  où  deux 
Oratoriens  publièrent  un  Manuel  des  Pécheurs.  Au  siècle 
suivant ,  les  livres  s'étant  multipliés  et  les  lecteurs  deve- 
nant plus  occupés  ou  moins  patients,  chamie  science, 
chaque  art,  chaique  métier  eut  son  manuel.  Cette  multi* 
plication  des  petits  livres  s'est  encore  accrue  de  notre 
temps,  où  le  libraire  Roret  a  publié  une  collection  de 
Manuels  qui  portent  son  nom.  B. 

MANUFACTURES.  Cest  l'industrie  qui  donne,  par  un 
changement  de  forme,  de  la  valeur  à  une  matière  brute, 
ou  bien  afoute  de  la  valeur  à  une  matière  déjà  manufac- 
turée. Les  objets  d'un  usage  général  présentent  seuls  des 
avantages  de  perfection  et  d'économie  à  être  produits  par 
grandes  masses;  et,  parmi  ces  objets,  au  premier  rang, 
sont  les  étoffes  qui  servent  à  nous  vêtir;  aussi  les  pre- 
mières manufactures  furent  celles  de  draps,  de  toiles,  de 
soie,  de  coton,  etc.  La  protection  qu'il  convient  le  mieux 
à  un  gouvernement  éclairé  de  donner  aux  manufactures 
se  réduit  à  écarter  les  obstacles  qui  sont  de  nature  à 
rendre  la  production  moins  économique  et  moins  perfec- 
tionnée ;  à  faciliter  l'achat  et  l'arrivée  des  matières  pre- 
mières tirées  de  l'étrangerj;  à  les  affranchir  de  droits,  ou 
ne  leur  en  faire  supporter  que  de  très-faibles;  à  favoriser 
les  ouvriers  en  leur  faisant  supporter  peu  d'impôts.  La 
densité  de  la  population  est  une  des  causes  principales 
qui  favorisent  le  développement  des  manufactures.  De 
tous  les  pays  d'Europe,  l'Angleterre  est  le  plus  manufao 
tnrier,  parce  que,  eu  égard  à  l'étendue  de  son  territoire^ 
il  est  le  plus  peuplé.  Après  l'Angleterre,  viennent  la 
France  et  la  Belgique,  puis  quelques  États  de  l'Alle- 
magne et  la  Suisse;  les  contrées  presque  désertes  de 
la  Russie  et  celles  de  l'Amérique  méridionale  sont  au 
dernier  rang.  Dans  un  même  pays,  on  remarque  même, 
à  cet  égard ,  d'une  province  à  l'autre,  des  diffâences  no- 
tables, selon  que  les  populations  y  sont  plus  ou  moins 
pressées  :  le  Lancashire,  si  riche  et  si  peuplé,  l'emporte 
de  beaucoup,  sous  le  rapport  du  développement  manu- 
facturier, sur  tous  les  autres  comtés  de  la  Grande-Bre- 
tagne ;  en  France,  les  départements  de  la  Seine,  du  Nord, 
de  la  Seine-Inférieure  et  du  Haut^Rhin ,  l'emportent,  par 
la  même  raison,  sur  les  autres;  dans  l'Amérique  du 
Nord,  les  États  de  l'Est,  les  plus  anciennement  occupés 
et  les  plus  peuplés,  sont  aussi  les  seuls  où  les  arts  ma- 
nuflEurturiers  ont  acquis  quelque  puissance,  tandis  que  lea 
États  de  l'Ouest,  plus  jeunes,  y  sont  encore  presmie  to- 
talement étrangers.  D'une  autre  part,  si  la  densité  de  la 
population  influe  sur  le  développement  manufacturier, 
l'accroissement  de  cette  industrh,  favorisé  par  certaine» 
drconstances  locales,  influe  à  bon  tour  sur  l'accroisse- 
ment de  la  population. 

Linvention  des  machines  et  leur  mise  en  action  dan» 
les  manuOsctures  ont  fait  gagner  l'ouvrier  sous  le  rapport 
de  Yintensité  du  travail ,  mais  l'ont  fait  perdre  sous  celui 
de  la  durée  :  les  chefs  d'industrie  exigèrent  des  homme» 
un  labeur  moins  pénible,  mais  plus  prolongé,  et,  comme 
la  douceur  du  travail  s'accommodait  assez  à  la  faiblesse 
de  la  femme  et  des  enfants,  ils  imposèrent  bientôt  à  cea 
derniers  la  présence  dans  l'atelier  pendant  le  jour  et 
quelquefois  pendant  la  nuit.  Ces  excès,  déjà  nuisibles  à 
la  santé  de  l'homme  mùr,  étaient  plus  funestea  encore  à 
l'existence  des  adolescents,  et  des  enfants  surtout.  De  là» 
la  nécessité  d'une  intervention  de  la  loi  (K.  Eufaitts  a&Nf 

LES  MANUFACmaBS). 


J 


MAN 


1210 


MAP 


L*iléfikioa  do  prix  des  prodaits  dn  munanustom  fran* 
çaltet  comparé  i  celai  des  produits  similaires  anglais 
ttenl  à  plusieurs  causes;  mais  ii  en  est  une  qui  dônvait 
de  notre  système  douanier,  et  ({ui  sera  certainement  albd* 
bile  par  suite  de  ia  concurrence  qu'amènera  le  traité  de 
eommerce  du  33  Janvier  i860.  EUbenf,  par  exemple,  ne 
manulkcture  pas  en  grand;  11  n'entreprend  qu'à  la  ftçon  t 
U  est  mal  outillé,  mal  organisé;  le  trarail  est  éparpillé, 
sans  avoir  rien  de  commun  avec  la  division  du  travaiU 
Chaque  opération  s*y  fait  chez  un  entrepreneur  distinct, 
xdntore,  filature,  tissage,  apprêt,  etc.  Cependant  cette 
ville  produit  pour  plus  de  70  millions  de  draperie  par  an, 
à  Taide  d'un  crédit  dont  touissent  la  plupart  des  produc- 
teurs, dont  le  chiffre  d'affidres  ne  dépasse  ptt  pour 
chacun  iOO  à  450,000  fr.;  on  compte  seuléfbent  trente 
manufacturiers  qui  produisent  ensemble  pour  la  somme 
de  90  à  25  millions.  Dans  ces  conditions  de  production  et 
d'outillage  industriel  très-imparfait ,  les  Trais  de  main* 
d'oBuvre,  uuoique  le  prix  de  la  Journée  soit  moins  élevé 
qu'en  Angleterre,  sont  cependant  plus  considérables.  Les 
manufacturiers  d'Elbeu/,  protégés  par  un  sjstème  prohi* 
bitif,  pouvant  retirer  de  très  -  beaux  prents  malgré  un 
matériel  incomplet ,  ne  songeaient  point  à  raméliorer  ; 
ainsi,  tandis  que  l'Angleterre  comptait,  en  1855,  plus  de 
15,000  ,métien  mécaniques  à  tisser  les  étoffes  de  laine, 
Elbeuf  n'en  possédait  pas  un  seul.  En  1857,  il  en  avait 
dnq.  Cependant ,  avec  un  métier  de  ce  genre,  telle  pièce 
de  drap  dont  le  tissage  à  bras  coûtait  25  à  30  fr.,  se  fait 
mécaniquement  au  pnx  de  9  à  10  fr.  Avec  les  anciens  pro- 
cédés, rouvrier  tissait  de  6  à  7  met.  car  Jour;  maintenant 
il  peut  en  tisser  de  18  à  20  met.  Quoioue  le  tissage  méca- 
nique soit  beaucoup  plus  répandu  aans  l'industrie  du 
coton  que  dans  celle  de  la  laine,  on  cite  Amiens,  où  se 
fiibriquent  les  velours  de  coton,  comme  ne  connaissant 
l»8  encore  l'usage  du  tissage  mécanioue  :  une  pièce  de 
Teloun,  qui  coûte  dans  cette  ville  2  fir.  50  o.,  se  MX  à 
Manchester  et  à  BrQnn  en  Allemagne  pour  70  c  L'indus- 
trie du  coton  a  adopté  dès  l'orimnep  pour  sa  fabrication , 
la  spécialité  des  tissus  fins,  lussant  le  tissu  commun  à 
l'AjoigleteRe,  qui  a  toujours  eu  pour  but  principal  de  pro- 
duire le  plus  économiquement  possible,  et  a  pu  réaliser 
sous  ce  rapport  des  résultats  remarquables,  dus  au  bas 
prix  de  ses  combustibles  et  à  l'emploi  presque  exclusif 
du  travail  mécanioue.  Le  prix  de  nos  tissus,  par  suite  de 
leur  finesse  et  de  leur  élégance,  est  supérieur  à  celui  des 
tissus  de  nos  voisins  d'outre-Manche  ;  mais  le  rapport  de 
«es  prix  est  resté  presque  le  même,  preuve  des  progrès 
de  notre  part  analoguea  à  ceux  des  manufacturière  an- 
glais. On  estime  que  les  34  millions  de  kilogr.  de  tissus 
fabriqués  en  1834  coûtaient  à  peu  près  aussi  dier  que  les 
^  millions  de  kilogr.  produits  en  1853. 

Les  manufactures  françaises  durent  à  Colbert  une  exis- 
tence assurée  par  un  édit  de  1664,  qui  réduisit  en  un 
seul  tous  les  droits  de  traites  intérieures  ;  par  celui  de 
1667,  sur  l'entrée  et  la  sortie  des  matières  premièrei  et 
des  marehandises  fabriquées,  eto.  A  propos  de  ces  édite, 
Roland  de  La  Pl&trière  disait  que  si  la  multiplicité  des 
réglemente  concourait  aux  progrès  des  manufactures, 
•ouïes  de  France  devraient  être  les  plus  florissantes  dn 
monde  entier.  Des  manufacturière  habiles,  attirés  de 
tous  côtés  par  de  grands  avantages,  fondèrent,  sous  le 
flèene  de  Louis  XIV,  de  vastes  etabliasemente  ;  des  ou- 
vriers initiés  aux  secrète  de  la  fabrication  étrangère 
-étaient  partout  recrutés.  Cest  ainsi  que  les  manufactures 
se  trouvèrent  augmentées  et  perfectionnées  {V,  Indos- 
TSiB  ).  Cependant  une  lutte  s'éteblit  bientot  entre  l'indus- 
trie et  le  commerce,  qui  demandaient  la  liberté,  et  Tad- 
ninistration,  qui  prétendait  les  garder  en  tutelle;  dans 
«es  combate  entre  lea  règles  et  la  liberté,  le  commerce  et 
les  manufactures  furent  constemment  inquiétés.  Vers  la 
en  du  xvn*  siècle,  l'Angleterre  s'empara  de  laprépondé- 
tanoe  manufacturière  de  la  France,  en  s'enricnissant  du 
personnel  et  de  l'outillage  des  ateliere  français  et  fla- 
mands, en  attirant  à  elle,  par  la  liberté  civile  et  reli- 
Êeuae,  l'élite  des  artisans  de  ces  deux  pays,  qui  s'en  exi- 
lent par  suite  de  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes. 
^.'Allemagne  protestante  a  dû  à  la  même  cause  le  dév^ 
loppement  de  ses  manufactures,  et,  dans  le  même 
temps,  l'Espagne,  en  laissant  dépérir  ses  fabriques,  par 
«es  persécutions  contre  les  races  Juive  et  arabe,  entrait 
dans  la  voie  de  décadence  où  eUe  a  eu  tant  de  peine  à 
sarrêter  de  nos  Jours* 

Les  corporations  d'arto  et  de  métien  {V,  Axn  n  Blé- 
nsas),  après  avoir  été  la  cause  des  progrès  accomplis 
d'ans  l'industrie,  furent  pins  tard  un  obstacle  à  l'applir 
•cation  des  décourertes  de  la  sdenoe.  Ainsi,  rtrt  de  i 


vernir  et  d'emboutir  la  tole  fût  découvert  en  1761  ;  maisi 
comme  il  exigeait  l'emploi  d'ouvrien  et  d'outils  de  pro- 
fessions diflérentes,  l'inventeur,  trop  pauvre  pour  payw 
les  droite  de  maîtrise  de  diacune  de  ces  corporatioai,  fat 
obligé  de  transporter  son  industrie  à  l'étranger,  d'où  sUe 
n'est  revenue  en  France  qu'en  1703,  après  l'abolitioa  des 
corporations.  Quelquefois  les  obstack»  furent  levés  pu 
l'intervention  du  pouvoir,  qui  dégageait  dea  entraves  des 
réglemente  sur  les  maîtrises  les  inventeun  d'un  procéd4 
ou  d'un  art  nouveau  eu  piufectionné,  en  donnant  à  leof 
fabrique  le  titre  de  manufaetun  rayaU.  D  en  Ait  ainti 
pour  Leooir,  fabricant  d'instrumente  de  mudque;  Ami* 
Argand,  l'inventeur  de  la  lampe  à  double  courant  d'air  i 
Réveillon,  célèbre  fabricant  de  papiere  peinte,  eto.  ^  On 
donna  aussi  le  nom  de  manufaehuret  rôyaUs,  nationaiet 
ou  impériales  à  des  étahHssemente  entretenus  et  admi- 
nistrés par  l'État,  telles  que  la  manufiKture  de  porce- 
laine de  Sèvres,  celle  dea  Gobelins,  eto.  Privées  de  bras 
pendant  les  guerres  de  la  République  et  de  l'Empire,  les 
manufactures  françaises  se  soutinrent  cependant,  gr&ce 
aux  énormes  besoins  qu'elles  avaient  &  satiafaire  et  aa 
privilège  dont  elles  Jouissaient  par  suhe  du  fameux 
blocus  continental  (K.  PaoRonnoN);  elles  ne  commeo- 
Gèrent  à  reprendre  un  nouvel  essor  qu'en  1816,  au  réu^ 
blissement  de  la  paix  générale.  A.  L. 

vânoFAcrvass  (Conseil  général  des).  Conseil  institué 
près  du  Ministère  de  l'agriculture,  du  commerce  et  des 
travaux  publics,  en  rue  d'éclairer  le  gouvernement  sur 
les  questions  d'intérêt  IndustrieL  D'aims  les  décrets  des 
1"'  Avrier  et  9  avril  1851,  il  est  oonmesé  de  8  membres 
nommés  par  le  ministre,  et  d'un  Inuustriel  nommé  par 
chaque  Chambre  conaultetive  des  arto  et  manufiulBres 
parmi  ceux  qui  exer^nt  ou  qui  ont  exercé  pendant  5  ans 
au  moins  une  industrie.  Les  fonctions  de  ces  membres 
sont  gratuites.  Le  Conseil  ne  se  réunit  que  quand  il  est 
convoqué  ;  Il  est  présidé  par  le  ministre,  mais  chouit 
dans  son  sein  un  vice-président;  les  fonctions  de  secr6- 
taire  sont  remplies  par  un  employé  du  ministère,  et  des 
commissaires  du  Gouvernement  exposent  les  questions. 
Le  Conseil  délibère,  soit  séparément,  soit  avec  le  Gonteil 
général  du  commerce;  mais,  même  dans  ce  dernier  cas, 
son  vote  reste  distinct»  V.  Arts  vr  MAnoFACTimas. 

HANUiaSSION.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionruure  ds 
Biographi*  $1  d^BisUnre. 

HANOSCRIT,  ouvrage  écrit  à  la  main.  Les  Andem 
avaient  deux  sortes  de  manuscrite  :  les  uns  éuient  dis- 
posés en  rouleaux,  et  appelés  par  cette  raison  wlumiM 
(de  eolosTf ,  rouler)  ;  les  antres,  plies  en  feuiliets,  et  for- 
mant des  livres  reliés  ou  brocnés,  se  nommaient  co- 
âiees.  Ils  employaient  généralement,  pour  les  copier,  des 
esclaves  ou  des  affranchis  {tcribœ,  Itbrani)  ;  au  moyen 
àtt,  les  moines  se  chargèrent  de  ce  travail  (F.  Consns)» 
LNâtude  des  écritures  des  manuscrits,  dans  le  but  decon- 
steter  l'authenticité  et  l'âge  de  ces  ouvrages,  fait  l'ob* 
Jet  de  la  Paléographe  (K.  es  moi)  ;  l'examen  des  chartes 
et  autres  titres  du  moyen  ftge  est  l'objet  de  U  DipUmm- 
tùiue  (F.  es  mot).  Les  manuscrite  du  moyen  Age  attirent 
l'attention  non-seulement  par  l'écriture,  mais  par  les 
lettres  ornées  et  les  enluminures  dont  les  artistes  cslli- 
graphes  les  ont  enrichis  (F.  Ëcarroaa,  CALUOsAras, 
MmiATuaa).  V.  A.  Pfeiffer,  Sur  les  momifortlf  m  géné- 
ral, en  allem.,  Erlangen,  1810;  Èbert,  Sur  la  connais- 
sance des  manuscrits,  en  allem.,  Leiprig,  18S5. 

MANUTENTION  (du  latin  manu  tênere,  tenir  en  main), 
mot  qui  a  le  sens  général  d'administratùm,  de  gestwi, 
de  ooluerwittoii.  Dans  un  sens  spécial,  on  nomme  Ma- 
nutenHon  dês  viores  l'étabUssemeot  oà  se  fabrique  et  se 
conserve  le  pain  pour  les  troupes.  Cest  une  question  fort 
controversée  de  savoir  s'il  faut  établir  des  manutentions 
pour  le  service  des  villes,  ou  si  l'on  doit  laisser  les 
troupes  s'approvisionner  librement.  D  y  a  aussi  des  ma- 
nutentions ae  la  Marine,  dont  le  personnel  est  placé  sous 
l'autorité  des  oflScien  du  commissiariat  chargés  du  service 
des  subsistences  t  on  distingue  des  chefs  de  manutention 
généraux,  des  chefs  et  des  sons-chefii  de  nÉanuteatios, 
ayant  rang  de  oommIssaires-acQointe,  de  sous-commis* 
saires  et  d'aides-eommissaires,  avec  3,500, 9,500  et  1,8001 
de  traitement. 

MAPPA.  F.  cemotdansnotreDicttomidtredsiNoffr» 
^Ms  et  d*  Histoire, 

MAPPEMONDE  (de  mappa,  carte  géographioue,  el 
mundus,  monde),  carte  qui  représente  tout  le  glooe  ter- 
restre. Supposant  qu'on  a  scié  le  globe  en  deux  suivant 
le  plan  de  l'un  de  ses  méridiens,  on  représente  les  deux 
hémisphères  cOte  à  cOte.  F*  Gaans  etfoesAmionas,  Gio- 


MAR 


1211 


MAR 


MAQUETTE  ou  UARQUETTE,  modèle  en  petit  d*tm 
oomM  en  ronde-boese,  &it  en  terre  molle  ou  en  cîre. 

HAQUIGNON^  nom  donné  Jadis  à  tons  les  marchands 

de  chevam  indistiiictenient,  et  qui,  ne  se  prenant  pins 

pAn  aalourd'hni  qa*en  mauvaise  part^  désigne  ceux  de 

CM  maichaiids  qoi  cherchent  à  tromper  les  achetoucs. 

MARABOTIN.  I  F.  ces  mots  dans  notre  Dietionnain 

HARABOVT.    i      de  BiographiB  0td*aistoir9, 

MARAIS,  amas  d'eanz  stagnantes,  très-peu  profondes, 

et  même  sojettes  ({nelqnefois  à  se  desséchier.  Les  marais 

sont  formés,  quoique  souvent  dans  le  voisinage  de  la 

awr,  par  des  Infiltrations  souterraines  d'eau  douce,  on 

par  la  stagnation,  dans  des  terrains  d*un  niveau  inférieur 

anz  oellines  voisines  et  au  rivage  de  la  mer,  de  rivières 

trop  pea  oonridérables  pour  former  des  bcs  ou  fhmchir 

le  littoral.  Tels  sont  les  marais  répanVius  sur  les  cètes 

nérldioiiales  de  la  Baltlipe,  ceux  de  la  Hongrie  et  de  la 

Roaaie,  les  Marais  Pontms  et  les  Maremmes  en  Italie. 

Dans  le  bassin  des  fleuves  sujets  à  des  débordements  pé- 

riodionea  et  considérables,  on  rencontre  des  marais  qui, 

dans  le  tempe  de  la  crue,  sont  des  bras  du  fleuve,  et,  dans 

la  saison   sèche,  des  réservoirs  isolés  ou  quelquefois 

même  se  dessèchent  et  forment  de  riches  pâturages.  Tels 

sont  les  Marigots  du  Sénégal,  les  Bayous  du  Mississipi 

et  les  Olboutes  des  fleuves  de  hi  Sibérie  méridionale.  Les 

plus  Tastes  mands  du  ^be  sont  au  S.  de  rUimalaya  et 

à  PB.  des  Andes  du  Chili,  dans  Tlnde  septentrionale  et 

dana  la  République  Argentine,  où  les  torrents  précipités 

dos  gtaders  dans  les  plaines  croupissent  longtemps  avant 

de  rencontrer  la  pente  qui  les  verse  dans  les  affluents 

dn  Gange  et  de  la  Plata,  et  forment  ainsi,  sur  plus  de 

1300  kilomètres  de  longueur  et  sur  une  largeur  de  900  à 

400  Idiomètres,  des  terrains  perfides  où  Thomme  ne  pé» 

a  être  qu'en  trinnblant.  Quelques  marais  présentent  le 

carieos  ^wctade  des  Ues  flottantes  :  ce  sont  des  terrains 

de  natore  tooriiease,  mais  très*légers,  qui,  minés  par  les 

canx,  sa  détachent  du  sol  avec  les  arbres  qu'ils  portent; 

OD  volt  de  ces  llea  sur  le  lac  de  Kolk  (province  d*Osna- 

bnick),  et  sur  celui  de  Gerdau  en  Perse. 

Dana  le  Droit  féodal,  les  marais  appartenaient  ans  sei- 
gneors,  à  moins  que  l'État,  les  communes  ou  les  parti- 
culiers n'eussent  des  titres  à  faire  valoir.  L'ordonnance 
de  1670  sur  les  eaux  et  forêts  leur  accordait  même,  sous 
le  nom  de  triage,  le  droit  de  revendiquer  le  tiers  des  ma- 
rais appartenant  aux  communes,  lorsque  celles-ci  les 
tenaient  d*etix  à  titre  gratuit,  et  que  les  deux  autres  tiers 
suffisaient  à  Tnsage  des  habitants.  Les  lois  des  15  mars 
1790,  28  août  1793  et  10  Juin  1793,  qui  aboUreot  la 
législation  antérieure,  déclarèrent  que  les  communes 
étaient  de  droit  propriétaires  de  tous  les  marais,  à  la  con- 
dition de  les  revendiquer  dans  les  cinq  ans.  F.  Dassé- 
cminnr.  C.  P. 

MAaais  rrhéàtre  du).  F.  notre  Dictionnatre  de  Biogrtp- 
pftis  et  dP Histoire. 

BASAIS  SALANTS,  psrties  basses  du  littoral,  analogues 
SOI  h^puies  psr  lenr  origine  et  leur  constitution  phy- 
sique, mais  qui  en  diilièrent  en  ce  que  Tindustrie  les  a 
ptffectioanés  pour  sinsi  dire  et  a  su  en  faire  une  source 
de  richesses.  Les  marais  salants  se  rencontrent  surtout 
dans  les  terrains  Inondés  à  Tembouchure  des  fleuves  à 
dèhaa,  oa  des  rivières  peu  considérables  qui  se  perdent 
sar  une  cdW  basse  :  telles  sont  les  lagunes  de  Ck>mscchio, 
la  S.  da  deha  du  PÔ  7  celles  de  Languedoc  et  de  Provence, 
snMiéea  improprement  étangs  de  Leucate,  de  Sigean,  de 
nâa,  de  Magaelonne,  de  Hauguio,  de  Valcarès,  de  Beire; 
et  suftoot  les  marais  salants  proprement  dits  des  eûtes 
es  la  ^Intonge,  de  TAunls,  du  Poitou,  et  d'une  partie 
ée  la  Bretagne.  Toute  cette  partie  du  sol  est  coupée  par 
des  Mert  oitf  canaux  de  4  met  de  hugeur  et  de  2  de  pro- 
floadeor,  qui  reçoivent  les  eaux  de  la  mer  à  la  marée 
bsBia^  dsa  édases  permettent  de  les  retenir,  et  de  larges 
dignes  on  tetftt ,  assez  élevées  pour  être  livrées  au  labon- 
nge  en  servir  de  chaussées,  circonscrivent  les  aires  sa* 
fin»  où  lea  eanx  déposent  le  sel  qu'elles  contiennent. 
Ln  nMiaia  salants  de  TOcéan  fournissent  à  la  eonsom* 
■atfan  de  TOoest  et  du  Nord  de  la  France.  C.  P. 

MARACA,  Instrument  qui  sert  pour  guider  les  danses 
■BBRlèraa  des  tribus  indigènes  dn  Brésil.  (Test  une  cala- 
MS  ovato,  ornée  da  plumes  d^sra,  garnie  d'un  mandie, 
«I  **«'!fl-f"^  dn  gndnes  oui  résonnent  qnand  on  l'agite* 
Selon  qaeiqiies  anteurs.  Il  rappelle  synîboliquement  le 
fraadenieBt  dn  tonnerre,  que  ces  tribus  adorent. 

■ABANISCH,  nom  de  rarabe  parié  dans  l'Espsgne 
ansnlniBBa.  Il  était  oaeore  en  usage  à  lafln  dn  &vn*  aie- 
de  dans  les  montagnes  des  psovlnces  d'Andalousie,  de 
Vslwce  ot  d'Aragon;  des  voyageurs  prétendent  qn'll 


existe  tocrfoura  dans  un  patois  de  la  Sierra  Moreiia. 

MARAUDE  ou  MARAUDAGE,  vol  eommis  par  un  on 
plusieun  soldats  écartés  de  l'armée.  Avant  1189,  le  ma- 
raudeur pris  en  flagrant  délit  par  le  prévèt  de  l'armée 
était  pendu  sur-le-champ.  D'après  la  loi  du  18  brumaire 
an  V,  la  maraude  simple  fut  punie  de  la  prison  et  de  l'ex- 
position; la  maraude  avec  récidive,  de  5  ans  de  fers;  la 
maraude  à  main  armée,  de  8  ans  de  la  même  peine.  «- 
En  dehora  de  l'armée,  on  appelle  marandage  l'acte  de 
dérober,  dans  les  champs,  des  productions  non  encore 
détachées  du  sol  ;  il  est  puni  d'une  amende  de  5  à  iO  fr« 
Il  en  est  de  même  du  fait  de  cueillir  et  manger  sur  place 
les  fkvits  appartenant  à  autrui  ;  la  peine  est  de  1  à  5  fr. 

MARAVÉDI,  ancienne  monnaie  espagnole,  dont  la 
plus  ancienne  mention  remonte  au  commencement  dn 
xm*  siècle.  Les  premien  maravédis  furent  des  monnaies 
d'or  et  d'argent;  ce  fut  en  1474  qu'on  frappa  pour  la  pre- 
mière fois  des  maravédis  de  cuivre,  dits  ftioravédis  de 
veUan,  Cest  la  34*  partie  du  r^,c.-àp-d.  moins  d'un  cen- 
time; le  maraA)édt  de  plata  ^  double  du  maravédi  de 
*feIlon,  vaut  un  centime  et  demi. 

BIARBOURG  (Église  de  S'*-Éusabeib,  à),  dans  la 
Hesse  électorale.  Bâtie  de  1235  à  1283,  et  remaniuablo- 
ment  bien  conservée,  elle  est  du  style  ogival  le  plus  pu£. 
Deux  tours  carrées  flanquent  le  portail  occidental ,  dont 
les  sculptures  méritent  aussi  l'attention.  Les  fenêtres  du 
chcBur  sont  garnies  de  beaux  vitraux.  Dans  un  bras  dn 
transmt,  on  admire  la  riche  chapelle  de  S^'-Élisabeth, 
fille  d^André  II,  roi  de  Hon^e,  épouse  du  landgrave 
Louis  de  Thuringe,  et  patronne  de  l'église.  Le  transept 
opposé  contient  les  mausolées  en  pierre  de  quelques 
landgraves  de  Hesse,  avec  des  bas- reliefs  en  bronze.  On 
conserve  dans  la  sacristie  la  châsse  de  S^  Elisabeth  ;  elle 
est  en  chêne,  couverte  de  lames  de  cuivre  doré,  et  oméa 
de  bas-reliefo  en  argent  massif  et  doré. 

MARBRE.  Le  mot  latin  marmor,  dérivé  du  grec  mdr' 
maros  (blanc),  s'appliquait  particulièrement,  dansl'ori* 
gine,  su  seul  marbre  statuaire.  Le  premier  marbre,  et  le 
plus  célèbre  qui  ait  été  employé  par  les  Anciens,  étidt  Ûré 
de  rUe  de  Paros  ;  la  Vénus  de  Médicis  et  la  Dtons  chasse- 
resse du  musée  du  Louvra  en  sont  faites.  Le  marbre  dn 
PentéUque,  en  Attique,  plus  fin  et  plus  serré,  mais  d'^ne 
teinte  moins  unie,  se  reconnaît  dans  plusieun  statues 
antiques  du  même  musée.  Dans  la  suite,  les  statuaires 
grecs  adoptèrent  le  marbre  de  Luni  (près  de  Carrare), 
dont  est  fait  V Apollon  du  Belvédère.  Ce  sont  aussi  les 
marbres  de  Carrare  que  préfèrent  les  Modernes,  à  cause 
de  leur  finesse  et  de  leur  netteté. 

Les  marbres  d'ornement  sont  nombreux  et  variés.  Les 
Anciens  ep  employaient  de  plurieura  sortes,  dont  les  car- 
rières sont  perdues  pour  nous,  et  qu'on  ne  trouve  plus 
que  dans  les  ruines.  Ce  sont  :  le  notr  antique,  surnommé 
marbre  de  Lucullus,  psrce  que  ce  Romain  le  fit  connaltue 
en  Italie,  et  tiré  de  Milet  et  d'Alabanda  en  Carie;  le 
rotige  antique  ou  d'Egypte,  devenu  plus  rare  encore  orao 
le  iK^cédent;  le  vert  antuiue,  exploité  dans  la  ThessMie, 
et  dont  on  voit  quatre  belles  colonnes  dans  la  salle  de 
Psllss  au  Louvre;  le  bleu  antique,  d'un  blanc  rosé  avec 
taches  d'un  bleu  ardoise,  en  rigzags  interrompus  ;  le  bien 
turquin  antique,  dont  les  carri&es  se  trouvaient  en  Mau- 
ritanie; le  petit  antique,  d'un  grsin  très-fin,  veiné  de 
blanc  et  de  cris  d'ardoise,  tiré  de  Staremma  en  Étrurie*. 
le  jaune  anttque,  exploité  en  Macédoine,  et  dont  est  faite 
la  greoane  qui  entoure  les  deux  tables  de  lapis-lazuli  de 
la  galerie  d'Apollon  au  Louvre;  le  grand  antique,  com- 

{>08é  de  fragments  et  de  linéaments  d'un  noir  foncé,  mé-^ 
anges  de  fragments  dn  plus  beau  blanc;  le  cipotin  an- 
tique,  dans  lequel  le  talc  forme  des  veines,  et  qu'on  croit 
avoir  été  tiré  de  llle  d'Elbe;  la  brèche  violetU  antique, 
appelée  on  ne  sait  pourquoi  brèd^  d^Alep  (elle  s'explol* 
tait  dans  les  environs  de  Carrare),  offrant  des  oouleuHK 
très-variées,  le  plus  souvent  des  fragments  anauleux  de 
couleur  lllas  sur  un  fond  d'un  brun  violfttre;  la  brèehê 
a(Hcaineantique,  aux  i^agments  rouges^  gris,  violets,  etc., 
sur  un  fond  noir;  la  brkhe  rose  anttque,  composée  de 
petits  fhigments  ros&tres  sur  un  fond  ronge  dair;  la 
orécAs  jaune  antique,  d'un  Jaune  clair,  avec  des  taches 
pins  foncées;  la  brèche  ariequine,  présentant  des  taches 
rondes  de  diverses  couleun  ;  la  brèche  rouge  et  blanche, 
dans  laquelle  ces  deux  couleun  dominent;  la  brèche 
vierge,  composée  de  fragments  anguleux  blancs,  bruns, 
rouges  et  Jaunâtres;  la  brèche  fleur  de  pécher,  qui  offlre 
de  grandes  taches  violettes  ou  Ile  de  vin  sur  un  fond 
blanc,  etc. 

Les  Modernes  possèdent  aussi  beaucoup  d'espèces  ds 
marbres.  Parmi  les  narinres  nolrt,  nonstiterons  :  le  noir 


MAB 


1212 


MAR 


mKÊiqm  oa  drap  mortuaire,  dont  la  ooalear  est  uniforme, 
et  qu'on  emploie  surtout  dans  les  monuments  funèbres; 
le  petit  granit,  dont  le  fond  noir  est  parsemé  régulière- 
ment de  parties  claires,  et  dont  les  ébénistes  se  serrent 
fréquemment  pour  les  dessus  de  meubles;  le  marbre 
S^*'Anne^  à  veines  blanches  se  croisant  en  tous  sens,  et 
dont  sont  faits  les  dessus  de  tables  dans  la  plupart  des 
cafés  de  Paris  ;  le  petit  antique,  offrant  un  mélange  de 
taches  noires  et  blanches,  à  peu  près  égales,  et  angu- 
leuses; le  portor  (porte-or),  présentant  des  veines  d^in 
Jaune  doré.  Les  marbres  rouges  les  plus  connus  sont  :  le 
marbre  griotte,  dont  le  fond,  d*un  rouge  brun,  est  régu- 
lièrement parsemé  de  taches  d'un  rouge  plus  clair;  le 
marbre  de  Sarancolin  (Pyrénées),  d*un  rouge  foncé,  mêlé 
de  1^  et  de  Jaune,  avec  des  parties  transparentes;  le 
marbre  incamat  ou  du  Languedoc,  d'un  rouge  assez 
clair,  irrégulièrement  môle  de  parties  plus  claires.  Notre 
département  de  l'Aude  fournit  des  marbres  rouges  et 
blancs,  dont  on  peut  prendre  une  idée  par  les  colonnes 
de  l'arc  du  Carrousel,  à  Paris.  Il  y  en  a,  dans  le  Pas-de- 
Calais,  qui  ont  la  couleur  café  au  lait  veinée  d'un  peu  de 
blanc  t  on  l'appelle  marbre  Napoléon,  parce  que  la  co- 
lonne de  Boulogne  en  est  faite  tout  entière.  On  en  voit 
plusieurs  dessus  de  tahles  dans  les  deux  Trianons;  le 

{)iéde8tal  de  la  statue  de  Louis  XIY  à  Caen  en  est  éga- 
ement  fait.  Les  marbres  jaunes  de  Sienne  et  de  Vérone 
sont  d'une  belle  teinte  rouge,  sur  laquelle  se  détachent 
des  ammonites.  Florence,  Prato,  Bergame  et  Suze  ont 
leur  marbre  vert,  plus  ou  moins  tacheté  de  blanc  ou  de 
gris.  On  trouve  aussi  à  Florence  le  marbre  ruiniforme, 
présentant  des  dessins  d'un  brun  Jaun&tre  sur  un  fond 
gris,  qui  simulent  l'apparence  de  ruines.  On  appelle  lu- 
machSUes  (de  Titalien  lumacha,  limaçon)  les  marbres  qui 
contiennent  des  coquilles  fossiles  dans  leur  intérieur  : 
les  lumachelles  les  plus  estimées  sont  celles  dites  dAs- 
i  rakhan,  à  reflets  Jaunes  sur  fond  brun,  et  la  lumachetle 
op  aiine,  à  reflets  de  couleur  rouge  ou  orangée,  rouge  de 
fe  u  et^rge  de  pigeon.  Les  marbres  tirent  leurs  couleurs 
de  s  dinerents  oxydes,  surtout  des  oxydes  de  fer,  qui  sont 
mè  lés  au  calcaire.  Il  en  est  qui  se  décolorent  sous  l'ac- 
tion alternative  de  la  pluie  et  des  rayons  solaires  ;  ce 
sont  ceux  principalement  qui  renferment  des  parties 
d'argile,  du  schiste, de  la  magnésie  ou  des  matières  talc- 
queuses  :  on  doit  ne  les  employer  que  dans  les  intérieurs. 
Tels  sont  les  marbres  de  Campan  (Pyrénées),  tantôt 
rouges,  tantôt  verts,  ou  rose  tendre,  qui  ont  servi  à  la 
décoration  des  châteaux  de  Versailles  et  de  Trianon. 

MARBRE  (Table  de).  7.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

MARBRES  D'ARUNDEL  ou  DE  PAROS.  V.  Paros,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire. 

MARBRES  CAPnoLms.  V.  Fastbs,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d^ Histoire, 

MARBRES  d'blgin.  V,  Elgdi,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

liARC,  monnaie  de  divers  pays.  Le  marc  danois  de 
1770  vaut  0  fr.  04  c.  ;  le  marc  lubs  ou  de  Lubeck,  et  le 
marc  courant  de  Hambourg,  1  fr.  53  c.  Le  marc  banco 
n'est  qu'une  monnaie  de  compte,  de  i  fr.  88  c. 

MARC  (Église  de  Sadit-),  à  Venise,  sur  l'un  des  côtés  de  la 
place  du  même  nom.  L'art  chrétien  n'a  rien  produit  d'aussi 
original  :  c'est  un  mélange  des  styles  byzantin,  roman  et 
ogival,  un  musée  de  dépouilles  apportées  de  la  Grtee,  de 
Constantinople,  de  Syrie,  d'Espagne,  de  tous  les  pays  où 
Venise  vit  flotter  son  pavillon,  et  une  magnifique  galerie 
de  peintures  nationales.  L'édifice  fut  commencé  en  977, 
sur  l'emplacement  d'une  première  église  b&tie  en  828  et 
détruite  par  le  feu;  on  n'en  fit  la  consécration  solennelle 
qu'en  ilil.  n  n'est  devenu  église  cathédrale  qu'en  1817, 
et  fut  considéré  Jusque-là  comme  la  simple  chapelle  des 
do^,  destinée  aux  cérémonies  qui  avaient  un  caractère 
national.  Le  doge  nommait  le  primider  et  les  26  chanoines 
du  chapitre.  Les  architectes  de  S^-Marc,  nourris  des  prin- 
cipes de  l'école  byzantine,  donnèrent  à  leur  plan  la  forme 
d'une  croix  grecque,  longue  de  76*>50,  en  y  fjoutant  un 
portique  large  de  60  met.,  qui  rappelle  aussi  le  narthex 
des  églises  d'Orient.  Ils  plurent  au  centre  de  la  croix 
une  coupole  de  14  met.  de  diamètre,  et,  sur  les  branches, 

Suatre  antres  coupoles  un  peu  plus  petites,  copies  ré- 
uites  de  celle  de  S*«-Sophie  à  Constantinople,  c-à-d. 
que  cbacqne  est  exhaussée  sur  quatre  pUiers  et  quatre 
grands  arcs,  auxquels  elle  se  rattache  par  des  pendentifs, 
et  entourée  d'une  ceinture  de  fenêtres.  Ces  coupoles,  qui 
sont  des  moitiés  de  sphère*  reçurent  au  xv*  siècle  la 
forme  renflée  et  bolbouse  de  l'architecture  arabe,  par 
FAddition  dschaipentes  revêtues  de  feuilles  de  plomb. 


Comme  elles  sont  Juxtaposées,  deux  des  piliers  et  un  dei 
grands  arcs  de  chaque  petite  coupole  se  confondent  arec 
les  piliers  et  les  arcs  de  la  coupole  centrale  :  pour  agran- 
dir leur  plan,  les  architectes  donnèrent  aux  grands  arcs 
de  coupoles  et  aux  piliers  qui  les  soutiennent  un  déve- 
loppement excessif,  tout  à  fait  inutile  à  leur  solidité; 
chaque  pilier  eut  près  de  7  met.  sur  chaque  face,  et 
chaque  grand  arc,  devenu  une  large  voûte  en  beroeaa, 
fût,  à  l'exception  de  ceux  de  la  coupole  centrale,  fermé 
du  côté  de  l'extérieur  par  un  mur  très-mince,  que  l'on 
perça  de  fenêtres;  les  piliers,  rétrécissant  de  toute  leur 
masse  l'intérieur,  furent  évidés  et  percés  d'ouvertores 
Les  voûtes,  dans  la  construction  desquelles  les  artista 
grecs  étaient  expérimentés,  ont  été  préférées,  pour  U 
reste  de  l'édifice,  aux  plafonds  de  bois  des  basiliôues  la^ 
tines.  L'église  a  un  clocher  séparé,  tour  carrée  de  102  met. 
de  hauteur ,  surmontée  d'un  ange  d'or  servant  de  gi- 
rouette :  on  monte  Jusqu'au  sommet  par  une  rampe 
douce,  sans  marches  et  en  forme  de  limaçon. 

Le  portique  ou  vestibule  qui  sert  de  façade  à  l'église 
S^-Marc  est  percé  de  cinq  grands  arcs,  soutenus  par  deux 
ordres  de  petites  colonnes  superposés,  et  de  deux  arcs  plus 
petits  :  au-dessus  de  ces  arcs,  une  galerie  règne  sur  trois 
côtés  de  l'église  ;  elle  est  ornée  d'une  colonnade  de  marbre 
à  hauteur  d'appui.  Au  milieu  de  cette  galerie,  au-dessus 
de  la  principale  porte,  sont  quatre  chevaux  antiques  en 
bronze  doré  qu'on  attribue  à  Lysippe,  et  qui,  apportés,  dit- 
on,  d'Alexandrie  à  Rome  par  Auguste,  placés  successive- 
ment sur  les  arcs  de  Néron  et  de  Tn^an, -transportés  par 
Constantin  dans  l'hippodrome  de  Constantinople,  furent 
enlevés  de  cette  ville  par  les  Vénitiens  après  la  4'  croisade, 
en  1204.  De  la  ^erie  s'élève  un  second  ordre  de  ciaq 
grands  arcs,  soutenus  par  des  colonnes  de  porphyre,  et 
dont  les  renfoncements  sont  remplis  de  mosaïques,  de 
figures,  de  guirlandes,  etc.  Ces  arcs  sont  surmontés  de 
grandes  statues  de  marbre;  celui  du  milieu,  plus  élevé 
({ue  les  autres,  supporte  un  S*  Marc  foulant  aux  pieds  na 
lion  de  bronze  doré.  Entre  les  arcs  et  leurs  statues  s'élè- 
vent de  petits  clochetons  à  Jour.  Au  centre  du  portique 
on  aperçoit  dans  le  pavé  un  losange  en  marbre  rouge&tre, 
marquant  l'endroit  où  l'empereur  Frédéric  I^  Barbe- 
rousse  s'humilia  devant  le  pape  Alexandre  m,  en  1177. 
Les  grandes  mosaloues  des  voûtes  inférieures  représen- 
tent l'Enlèvement  au  corps  de  S^  Marc,  le  Jugement  der- 
nier, les  Honneurs  rendus  à  S^  Marc,  une  Vue  de  l'an- 
cienne église  de  S^-Marc,  et  ont  pour  auteurs  Pierre 
Vecchia,  Pierre  Spagna,  et  Léopold  del  Pozzo.  Celles  des 
voûtes  supérieures,  représentant  la  Descente  de  croii, 
l'Apparition  aux  limbes,  la  Résurrection  et  l'Ascension 
de  Jésus-Christ,  sont  de  Louis  Gafitano.  Du  portique  on 
entre  dans  l'église  par  trois  portes  de  bronze,  marquetées 
d'argent  :  les  vantaux  de  celle  de  droite  ont  été  enlevés 
de  S^- Sophie  de  Constantinople;  une  autre,  ainsi  que 
l'indique  une  inscription,  fut  l'œuvre  d'un  artiste  véni- 
tien, nommé  Bertuccio,  en  1300. 

L'effet  intérieur  de  l'ésiise  de  S^-Maïc  est  des  plot 
pittores<][ues  :  ses  voûtes  d'or,  ses  dallaoes  des  marbres  les 
plus  choisis  et  les  plus  variés,  ses  riches  mosuaues,  ses 
colonnes  de  bronze,  de  marbre,  de  porphyre,  d'ali)&tre,de 
vert  antique,  de  serpentine,  dont  le  nomm  s'élève  à  plus 
de  500,  et  dont  les  chapiteaux  sont  composés  d'élé^ts 
feuillages,  peu  saillants,  mais  taillés  avec  beaucoup  de 
finesse,  tout  cela  produit  un  ensemble  merveilleux.  Les 
colonnes  et  les  arcs  en  plein  cintre  qui  séparent  la  nef 
des  ailes  supportent  une  galerie  qui  fiîit  le  tour  de  l'édi- 
fice, et  qui  est  réservée  aux  femmes,  selon  les  usages  de 
l'Orient.  Le  chœur  est  séparé  de  la  nef  par  un  soubasse- 
ment de  marbre,  surmonté  de  huit  colonnes  :  sur  l'archi- 
trave, 14  statues  de  marbre,  sculptées  en  1393  par  les 
frères  Dalle  Massegne,  représentent  la  S^*  Vierge,  S^  Marc 
et  les  Apôtres;  au  milieu  est  une  croix  d'argent  massif. 
Sur  les  côtés  de  l'entrée  du  chœur,  il  y  a  deux  chaires  de 
marbre,  et  deux  petits  autels  dont  la  sculpture  très-déU- 
cate  est  attribuée  à  P.  Lombarde  (xv*  siècle).  Le  maltre- 
autel,  au-dessus  duquel  règne  un  baldaquin  soutenu  par 

Suatre  colonnes  de  marbre  couvertes  de  bas-r^efs,  a 
eux  icônes  ou  tableaux,  dont  l'un  recouvre  l'autre  :  le 
premier,  dans  le  goût  byzantin,  a  été  peint  à  l'huile  sur 
planche,  en  14  compartiments,  par  maître  Paul  et  ses  fils 
Luc  et  Jean  de  Venise,  l'an  1^44;  le  second,  appelé  la 
palla  d*oro,  est  peint  en  émail  sur  lame  d'argent  et  d'or 
ornée  de  ciselures,  guiUochis,  perles,  camées,  pierres 
précieuses,  et  a  été  exécuté  à  Constantinople  à  la  fin  du 
X*  siècle,  mais  plusieurs  fois  restauré.  Le  tabernacle  est 
formé  de  lames  d'or  avec  des  bas-reliefs,  dont  les  figures 
sont  dans  des  espèces  de  niches  entoioées  de  diamants. 


MAR 


1213 


HAR 


de  raUi,  d'éDMnades,  etc.  Vaatd  oft  accompagné  de 
huit  itatues  en  bronze  :  les  quatre  ÉYangéliates,  par  San* 
sovino,  et  les  quatre  docteurs,  par  G.  Caliari.  Dmière  ce 
grand  autel  on  en  Toit  un  autre  où  repose  le  Saint  Sacre- 
ment :  il  est  orné  de  bas-reliefo  en  marbre  et  en  bronie 
doré,  par  Sansorino,  et  entouré  de  colonnes,  dont  deux, 
an  alMtrB  oriental  transparent  comme  le  cristal,  pro- 
tiennent,  dit-on,  du  temple  de  Jérusalem;  la  balustrade 
est  en  porphyre.  Le  chœur  contient  encore  des  sièges 
vBéi  d'ooTrages  très-fins  en  marmieterie  du  xti*  siècle, 
et,  lu-dessus  de  ces  siégee,  deux  tnbunes  avec  bas-reliefs 
en  bronze,  où  SansoTino  a  représenté  la  vie  de  S^  Uarc 

Dus  Faile  gauche  de  Téglise,  on  remarque  :  i®  la  cha- 
pelle de  Notre -Dame-des-M&Ies,  ainsi  appelée  parce 
^'eUe  q>partinl  à  une  confirérie  religieuse  oui  excluait 
les  fenmies,  et  où  se  trouvent  un  autel  en  marbre  de  très- 
^le  sculpture  et  des  mosaïques  de  Giambono  (fin  du 
iT*  lièd^  représentant  Tbistoire  de  la  Vierge;  2"  la  cha- 
pelle de  5*  Isidore,  où  la  vie  de  ce  saint  est  figurée  en 
mosaïques  du  xiv*  siècle,  et  dont  la  porte  est  surmontée 
(fan  arbre  de  Jeasé,  exécuté  par  V.  Bianchini,  sur  les 
cartons  de  Salviati  ;  3<*  Toratoire  de  la  Croix,  où  se  trouve 
one  colonne  de  porphvre  noir  et  blanc,  qui  passe  pour  un 
échantillon  unique;  4**  la  sacristie,  ornée  d'admirables 
mosaïques  et  d'ouvrages  en  marqueterie  du  xvi*  siècle, 
et  dont  Ja  porte  en  bronze,  magnifique  ouvrage  de  Sanso- 
vino,  r^résente  la  mort  et  la  résurrection  de  J.-C.  —  Da 
côté  droit  se  trouvent  :  1*  un  bénitier  de  porphyre,  dont  la 
base  est  un  autel  antique;  ^  le  Baptiatère,  contenant  des 
moealmies  très-aadennes,  le  tombeMi  du  doge  André 
Dindolo,  et  un  nand  bassin  de  marbre  avec  couvercle  en 
hmoB  orné  de  M^-reliefi^  exécuté  par  Tizianino  de  Pa- 
dons  et  Desiderio  de  Florence;  3<»  le  Trésor,  dépouillé 
(fan  grand  nombre  d'objets  précieux  en  1797,  et  où  l'on 
eroserre  encore  des  reliques  et  quelques  curiosités. 
F.  Meschinello,  La  cfUesa  ducale  dt  San  Marco,  1853- 
1851,  in-S*.  B. 

HARC-AURÈLB  (Colonne  de).  V.  Coloriibs  mondiibn- 
làus,  dans  notre  utctUmnain  ds  Biog,  et  d^Histoire. 

MARCELLUS  (Théâtre  de),  le  second  thé&tre  de  pierre 
qai  rot  élevé  dans  l'ancienne  Rome.  L'empereur  Auçuste 
le  Ht  construire  en  l'honneur  de  llarcellus,  fils  de  sa 
lœarOctavie.  Le  style  de  ce  monument  était  si  parfait, 
qae  tes  architectes  modernes  l'ont  adopté  pour  modèle, 
soit  des  ordres  ionique  et  dorique,  soit  de  la  proportion 
la  plos  convenable  à  observer  entre  ces  deux  ordres  lors- 
qaMIs  sont  superposés.  Le  théâtre  de  Marcellus  pouvait 
(»oteoir  30,000  spectateurs.  Transformé  en  forteresse  au 
moyen  àge^  le  milieu  se  remplit  de  décombres  :  plus 
tard,  la  âunille  Massfani  y  fit  construire  un  palais,  sur 
les  dMns  de  Balthasar  Peruzzi.  On  voit  encore  quelques 
raines  encastrées  dans  des  constructions  modernes,  du 
oMé  de  la  place  Montanara.  —  Près  du  théâtre  était  le 
saperbe  Portique  d^Octaviê,  destiné  à  servir  de  refuge  au 
prâple  surpris  par  la  pluie.  Servant  d'encadrement  à 
des  temples  de  Jupiter  et  de  Junon,  il  avait  la  forme 
d'an  vaste  parallélogramme  à  double  rang  de  colonnes 
de  marbre,  an  nombre  de  270  environ,  et  était  décoré  de 
statoes  et  de  peintures.  11  n'en  reste  plus  que  4  colonnes 
et  3  pilastres  devant  l'église  San  Angelo  in  Peschlera. 
Cest  parmi  ses  mines  qu'on  a  découvert  la  Vénus  dite 
de  Médicis  qui  se  trouve  à  Florence. 

MARCHAGE,  société  que  formaient  autrefois  les  habi- 
taots  de  plusieurs  paroisses  pour  avoir  droit  de  faire 
paître  leurs  troupeaux  sur  leurs  terres  respectives. 

MARCHAND.  V.  GoinrERÇANT. 

MARCHANDAGE,  traité  passé  avec  un  adjudicataire  de 
travaux  pour  la  confection  de  telle  ou  telle  partie  de  ces 
tnTaox.  Ainsi,  l'entrepreneur  de  la  menuiserie  d'un  bfti- 
tioieat,  lorsqu'il  s'arrange  avec  un  ouvrier  ou  un  sous- 
oitrepreneur  pour  la  confection  des  portes  ou  des  croi- 
sées, avec  un  autre  pour  les  boiseries,  etc.,  fait  du  mar^ 
cbandage.  Cette  opération  est  pour  les  ouvriers  laborieux 
ose  épreuve  de  leur  capacité  personnelle,  un  achemine- 
Beot  vers  leur  propre  établissement  comme  entrepre- 
DeofB.  Cependant  elle  a  été  l'objet  de  plaintes  très-vives 
de  la  part  des  ouvriers,  parce  qu'un  entrepreneur  général 
çtpe  toujours  sur  les  sous-entrepreneurs,  et  que  les 
Rmples  travûlleors  se  trouvent  ainsi  exploités  au  profit 
de  plosieurs  dans  une  seule  et  même  entreprise.  Le  Gou- 
vernement provisoire  de  1S48,  par  décret  en  date  du 
!i  mars,  Interdit  le  marchandage,  et  le  frappa  d'une 
amende  de  80  &  100  fr.  pour  la  première  fois,  de  100  à 
^  fr.  pour  la  récidive,  et  enfin,  en  cas  de  nouveau  délit, 
d'an  emprisonnement  d'un  à  six  mois.  Ce  décret  n'est 
pas  abrogé. 


MARCHANDISE,  tout  ce  qui  peut  fidie  Tobjet  drim 
commerce,  en  productions  de  la  nature  oo  de  l'industrie 
humaine.  Les  produits  à  vendre  ae  rangent  en  trois 
classes  :  les  denrées,  c.-&-d.  les  objets  dâtinés  à  une 
consommation  directe,  et  comprenant  essentiellement  Umt 
ce  qui  se  rapporte  &  l'alimentation;  les  maUiree  pr^ 
mièrei,  c-àrd.  les  produits  destinés  à  devenir  l'objet 
d'un  travail  manufacturier;  enfin  les  produits  manufaO' 
turés. 

La  demande  d'une  marchandise  s'étend  avec  le  boa 
marché;  et  comme  il  faut  la  payer  avec  une  autre  ma^ 
chandise,  la  production  de  celle-ci  s'accroît  par  la  raison 
que  la  première  est  accrue  :  son  prix  courant  est  déter- 
miné par  le  rapport  qui  s'établit  entre  l'offre  et  la  de- 
mande. Le  tact  du  négociant  est  de  savoir  ae  rendra 
compte,  pour  chacun  des  articles  de  son  eommerce,  de 
l'importance  probable  de  la  production  et  de  celle  de  la 
consonunation  ordinaire,  afin  d'établir  la  comparaison 
entre  ces  deux  termes.  En  ce  qui  concerne  les  articles 
essentiels  à  la  vie,  il  suffit  souvent  d'un  très-faible  dé- 
ficit dans  l'approvisionnement  anouel  pour  occasionner 
une  hausse  rapide  sur  les  prix,  tandis  que  le  moindre 
excès  dans  la  production,  surtout  pour  les  objets  d'une 
conservation  difficile  ou  dispendieuse,  amène  l'avilisse- 
ment du  coura. 

L'importance  de  la  production,  pour  les  marchandises 
dont  le  commerce  est  concentré  sur  certains  points,  est 
en  général  établie  et  discutée  publiquement.  Ainsi,  Ll« 
verpool  et  le  Havre,  les  deux  grands  marchés  d'Europe 
pour  le  coton  en  laine,  publient  tous  les  huit  Jours  une 
feuille  commerciale,  indiquant  quel  était,  au  Jour  corres- 
pondant de  la  semaine  précédente,  le  nombre  de  balles 
existant  dans  les  entrepôts;  on  y  i^oute  ce  qui  a  été  lm« 
porté  depuis  Ion  ;  on  en  déduit  le  nombre  de  balles  ven- 
dues, et  Ton  constate  par  cette  opération,  au  moment  de 
la  publication,  Timportance  de  l'approvidonnement  dé- 
signé sous  le  nom  anglais  de  stock.  Il  faut  enfin  y  ^Jonter 
les  renseignements  venus  des  États-Unis  du  Sud,  le  grand 
pays  producteur  de  cette  marchandise,  sur  l'Importance 
présumée  de  la  récolte,  ainsi  que  sur  le  nonâbre  des 
lûmes  déjà  parvenues  dans  les  porta  d'embarquement  de 
la  Noiïvelle-Orléans,  de  Mobile,  de  Charleston,  etc.  A 
l'aide  de  ces  avis,  les  oscillations  sont  moins  grandes 
dans  les  prix. 

De  même  que  les  rentes  sur  l'État,  les  marchandiaes 
sont  aussi  une  matière  d'agiotage  {V.  ce  mo^, 

Quel<{uefois  on  fixe  ou  taxe  le  prix  des  denrées,  et 
l'adiaiinistration  empêche,  autant  qu'elle  peut,  qu^elles 
ne  soient  vendues  au-dessus  ou  au-desaous  de  ce  prix.  Ce 
règlement  ne  fait  pas  ({ue  le  prix  de  la  taxe  soit  la  valeur 
réelle  de  la  marchandise  :  il  en  arrive  seulement  que  le 
consommateur  paye  cette  marchandise  un  prix  au-deaaous 
ou  au-dessus  de  sa  valeur  vraie,  et  duqucu  il  résulte  une 
perte  abusive  ou  un  ealn  abuuf  pour  les  producteurs. 
Cest  un  déplacement  de  richease  causé  par  un  exoèa  d'au- 
torité. Depuis  le  commencement  du  xix*  siècle,  la  corpo- 
ration pnvilégiée  des  boulangera  de  Paris,  dans  des 
années  où  le  blé  était  cher,  a  été  contrainte  de  donner 
pour  70  centimes  les  %  kilogr.  un  pain  qui  en  coûtait  80, 
et  pour  80  centimes  un  qui  revenait  à  90  :  lea  boulan- 
gera se  soumettaient  à  cette  condition,  parce  qu'ils  étaient 
indemnisés  par  l'administration.  D'autres  lois,  l'admi- 
nistration leur  taxait,  par  manière  de  dédommagement, 
à  60  centimea  un  pain  qui  ne  leur  revenait  qu'à  50  cent. 
Les  taxes  que  Ton  appelle  maximum  {V.  ce  mot)^  et  qui 
fixent  le  prix  des  choses  au-dessous  de  leun  fhds  de  pro- 
duction, outre  qu'elles  attentent  à  la  propriété,  nuisent 
à  la  production  et  à  la  consommation  de  l'objet  taxé. 

On  a  appelé,  à  une  certaine  époque,  marchandises  de 
traite,  les  objets  que  nos  armateun  envoyaient  en 
Afriçiue  pour  être  échangea  avec  certains  produits  des 
liabitants  de  ce  pays.  A.  L. 

MARCHANDISES  RBUVBS.  Une  lol  du  25  Julu  184i,  destinée 
à  protéeer  le  commerce  sédentaire  contre  la  perturbation 
que  lui  causaient  les  marchands  forains,  interdit  les 
ventes  en  détail  de  marchandises  neuves,  à  cri  publie, 
soit  aux  enchères,  soit  au  rabais,  soit  à  prix  fixe  pro- 
chmié,  avec  ou  sans  assistance  d'offlden  miniatériels. 
La  contravention  est  punie  de  la  confiscation  des  max^ 
chandises,  et  d'une  amende  de  50  fir.  à  3,000  f^<  pro- 
noncée correctionnellement  contre  le  vendeur  et  l'officier 
2ui  l'aura  assisté,  sans  préjudice  des  dommages^-intérèta. 
ette  loi  n'est  pas  partout  rigoureusement  appliquée. 

MARCHE,  en  termes  de  'Tactique,  mouvement  qu'exé- 
cute un  corps  de  troupes  pour  se  porter  d'un  lieu  dans 
un  autre.  F.  Colonni  (Ordre  en),  Ôaima  db  MâBcns. 


MAR 


12U 


MAB 


■àRaUf  pièe6  ds  imiil^d  ooniposéo  povr  dM  imlru- 
menti  à  veot  et  de  peroaasiooi  et  destinée  à  régler  la 
manh$  ou  le  pei  d'one  troape  militaire,  d*iui  cortège, 
d*ime  proeemon,  etc.  Les  marchés  militaires,  dont 
faaage  date  .de  la  «terre  de  Trente  Ans,  sont  ordinaire* 
sent  à  deox  repnses,  atec  on  alternatif  ou  trio  ;  quel- 
faeibla  elles  forment  an  seul  raorcean,  qui  se  loue  de 
ioite,  mais  ad  doit  être  aases  étendu  et  imppeier  plusieurs 
fois  le  motif  principal.  Elles  sont  à  4  temps,  ce  qpA  les 
dietingue  du  Pas  redoublé,  écrit  à  2  temps,  et  d'ailleurs 
plus  m.  n.y  a  en  elles  un  mouvement  modéré,  quelque 
chose  es  eérémonienx  et  de  solennel.  Ce  caractère  est 
Bortout  Ihtppant  dans  les  marchés  reUgieuses  et  dans  les 
marches  funèbres  :  nous  citerons,  parmi  les  premières,  la 
Marche  de  la  communion,  que  Cherubini  a  écrite  pour  sa 
Messe  du  Saere;  la  Marche  des  pèlerins  de  la  symphonie 
d*HarM  par  Berlioz;  et,  parmi  les  seconds,  fa  marche 
de  la  Symphonie  hér(Àque  de  Beethoven.  Certains  opéras 
contiennent  des  marches  :  telles  sont  celles  d*Alceste 
fOluck),  de  la  Flûte  enchantée  (Mozart 2,  de  LodxÂska 
(Kreutzer),  de  la  Juive  et  de  la  Heine  ae  Chypre  (  Ha- 
lévy),  de  Ùom  S^ûwttsn  (Donizetti),  du  Prophète  (Heyer- 
heer).  La  marche  se  réunit  souvent  aui  cboBurs,  et  beau- 
coup de  cboBors  sont  dessinés  en  marche.  B. 

■ARCHE,  mot  employé  en  Musique  comme  synonyme  de 
progression  (V.ce mot),  et  de  touche  dans  l'orgue  et  la 
irielle. 

MAROR,  en  termes  de  Construction,  est  synonvme  de 
degré.  Dans  les  marches  d'eecalier,  la  surface  horizontale 
sur  laquelle  le  pied  pose  se  nomme  giron;  la  partie  qui 
forme  le  devant  est  la  oontre^marche, 

MARCHE  DE  NOiT.  V,  notTB  OicttofiftatTs  de  Biographie 
et  d^HisUrire, 

MARCHÉ,  traité  d'achat,  de  vente  ou  d'échange.  H  peut 
être  fdt«  soit  verbalement,  en  donnant  des  arrhes  (K.  es 
mot)^  ant  par  écrit,  sous  seine  privé  ou  par-devant  no- 
taire. On  disttngue  encore  le  iiarché  d  terme,  dont  Texé- 
catkm  est  ijoumée  à  un  délai  filé;  le  Marché  d  liorer, 
qui  consiste  à  fixer  le  prix  d'une  chose  et  à  la  vendre, 
mais  à  ne  la  livrer  qu'ultérieurement  et  d'après  les  con- 
Tentiona  arrêtées  d'avance  ;  le  Marché  d  forfait  ou  d  devis 
(F.  FoRPAiT.  Devis),  et  le  Marché  d  prime  (K.  Bourse). 

■ARGHé,  lieu  où  l'on  se  rassemble  pour  vendre  et 
acheter,  et,  par  extension,  lieu  quelconque  où  il  se  pré- 
sente des  acheteurs. 

La  quantité  et  la  «{ualité  aes  marchandises  offertes 
influent  sur  les  conditions  du  marché;  toutefois,  ces  con- 
ditions rentrent  dans  la  volonté  des  parties,  puisque, 
avec  l'abondance  des  marchandises,  les  besoins  pouvant 
être  lîMdlement  satisfaits,  le  consommateur  devient  plus 
exigeant  sur  la  qualité  et  sur  le  prix  (  F.  Prix);  si,  au 
contraire,  il  y  a  rareté  de  marchandises,  l'acheteur  aug- 
mente son  ofre.  Quant  an  vendeur,  ses  prétentions,  res- 
treintes d'abord  par  la  concurrence,  s'élèvent  aussitôt 
que  celle-ci  disparaît. 

Vétendue  du  marché  résulte,  pour  chaqne  produit  : 
i*  des  qualités  qui  le  rendent  propre  à  satisfaire  certains 
besoins  des  consommateurs;  f*  4le  l'intensité  de  ces  be- 
soins; Z**  de  son  prix  de  revient,  et  des  frais  nécessaires 
pour  l'amener  sur  le  marché. 

n  y  a  plusieurs  causes  d'encombrements  partiels  et  de 
ftagnations  temporaires  sur  le  marché  :  1°  IHgnorance 
des  besoins  da  marché,  c-à-d.  de  l'étendue,  de  fénergie, 
de  la  durée  de  ces  besoins,  et  des  moyens  d'échange  que 
possèdent  ceux  qui  les  éprouvent;  2*  un  accroissement 
Irréfléchi  de  la  population  ;  3<*  l'introduction  soudaine  de 
machines  nouvelles  et  puissantes,  qui  prennent  la  place 
des  travailleurs  et  anmnentent  la  masse  des  produits; 
4®  le  passage  soudain  d*nn  état  politique  à  on  autre,  de 
la  paix  à  la  guerre,  et  vice  versa,  changements  qui  amè- 
nent des  intevuptions  brusques  dans  les  rapports  des 
peuples  commerçants,  et  qui  Jettent  violemment  les  ca- 
pitalistes et  les  travailleurs,  les  manufacturiers  et  les 
agriculteurs,  hors  des  routes  ordinaires.  A.  L. 

■ARCHi  (Bris  de).  V,  Bris  de  marchI 

MABCHi,  lieu,  soit  construit,  soit  en  plein  air,  alfecté  à 
la  Tente  des  denrées  et  autres  objets  nécessaires  k  la  vie. 
L'habitude  de  la  vie  extérieure,  aussi  bien  que  l'absence 
de  ces  boutiques  ouvertes  en  si  çrand  nombre  dans  nos 
Tilles,  devait  donner  chez  les  Anciens  une  grande  impor- 
tance aux  marchés  :  les  Grecs  leur  donnaient  le  nom 
d'Agora  (V,  ce  mot)^  et  les  Romains  celui  de  Forum 
{V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
i Histoire),  Au  moyen  &ge,  il  y  eut  peu  de  marchés 
construits;  les  ventes  se  faisaient  en  plein  air  sur  la  place 
pi;d>li<XMi  et  cotte  coutume  s'est  perpétuée  Ju8<m*à  nos 


Jours  dans  un  certain  nombre  de  localités.  Dmtds  le 
XVI*  siècle  on  a  construit  de  fort  beaux  tnarcho.  TiJi 
sont,  en  Italie:  le  Mercato  nuovo  (Marché-Neuf)  de 
Florence,  bâti  par  Gosme  I*'  de  Médids  en  1548,  vaste 
loge  de  forme  rectangulaire,  plus  élégante  mie  commode, 
ouverte  de  tous  oètâi,  divisée  par  des  colonnes  corin- 
thiennes qui  supportent  les  retombées  des  voûtes  et  dei 
arcades,  et  flanôuée  aux  angles  de  quatre  massifs  on 
contre-forts;  le  iâercato  vecchio  (Vieux  Msrché)  de  la 
même  ville,  bâti  aussi  par  Cosme  i*',  sur  les  dessins  de 
Vasari  ;  le  Portique  des  Marchands,  à  Arezzo,  oeuvre  du 
même  architecte;  le  marché  de  Naples,  près  de  la  rue  de 
Tolède,  construit  au  xix*  siècle,  vaste  cour  rectangulaire 
de  trois  côtés  et  circulaire  de  l'autre,  entourée  d'un  por- 
tique dorique  sous  lequel  sont  placés  les  étaux  des  bou- 
chers ,  les  autres  denrées  se  vendant  en  plein  air  dans 
l'intérieur  de  l'enceinte.  On  peut  encore  citer  les  ma> 
chés  de  Bologne,  de  Bergame,  de  Turin ,  de  Milan,  de 
Padoue,  de  Blantoue,  de  Rimini,  etc.  —  Londres  a  de 
vastes  marchés;  il  en  a  trois  très-remarquables  par  leur 
construction  monumentale,  Farington,  Covent-Garden  et 
Hungerford.  Le  i",  construit  en  1820  par  W.  Montagne, 
est  un  rectangle  de  78  met.  sur  50,  bâti  en  briques  et 
éclairé  par  des  lunettes  ;  un  double  rang  de  boutiques 
existe  sur  toute  la  longueur  de  trois  côtés.  Le  î*,  con- 
struit en  1830  par  Flower,  se  compose  de  trois  rangs  de 
galeries  s'étendant  de  l'E.  à  l'O.;  la  façade  de  chacune  an 
N.  et  au  S.  est  ornée  de  colonnes  de  granit,  hautes  do 
4  met.,  formant  une  promenade  converte  ;  la  façade  à 
l'E.  offre  un  triple  rang  de  colonnes  surmontées  d'une 
belle  terrasse,  large  d'environ  9  met.  —  En  Hollande,  on 
mentionne  les  marchés  de  Breda,  de  Delft  et  de  Rotter- 
dam. —  En  France,  Paris  offre  naturellement  les  plus 
belles  constructions  de  ce  genre  {V.  Halles,  Marchés, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire). 
Dans  les  départements,  les  marchés  de  Strasbourg,  Saint- 
Dizier,  Troyes,  Caen,  Napoléon-Vendée,  S*-Jean-d*AE- 
gély,  Montpellier,  Ifarseille,  etc.,  méritent  une  attention 
piufticulière. 

L'autorité  municipale  a  la  surveillance  des  marchés.  Ses 
arrêtés  fixent  les  heures  d'ouverture  et  de  fermeture,  les 
vérifications  préalables  de  certaines  denrées,  TemplMe- 
ment  des  marchands,  les  mesures  d'ordre  et  de  salubrité. 
Les  contraventions  sont  constatées  par  les  commissaires 
ou  les  agents  de  police,  et  punies  d'amende  par  le  tribo- 
nal  de  police.  Le  défaut  ou  le  refus  de  payement  dec 
taxes,  et  les  contestations  qui  en  résultent  donnent  lieu 
à  un  procès  devant  les  tribunaux  civils.  B. 

VASCHé  A  TERME.  On  nommo  ainsi  la  vente  à  pri^ 
ferme  d'une  marchandise  dont  le  vendeur  n'est  pas  en 
possession,  mais  qu'il  s'engage  à  livrer  à  son  acheteur  i 
un  terme  plus  ou  moins  éloigné.  Le  blé,  les  denrées,  les 
métaux,  etc.,  les  rentes  sur  l'État,  les  actions  indus- 
trielles, de  banques,  de  chemins  de  fer,  etc.,  peuvent  être 
objets  de  marchés  à  terme.  On  en  fait  surtout  sur  ces 
dernières  valeurs  depuis  l'époque  de  la  Régence ,  et  la 
plupart  ne  sont,  en  réalité,  que  des  paris  sur  leur  hausse 
ou  leur  baisse  à  une  époque  à  bref  délai.  L'affaire  se  ré- 
sout psr  le  simple  payement  d'une  différence  en  plus  ou 
en  moins  entre  le  prix  au  moment  de  la  vente  et  celui 
au  Jour  où  l'on  est  censé  devoir  faire  ou  prendre  livrai- 
son. Ces  opérations  sans  capital  conduisirent  bien  des 
spéculateurs  nudavisés  à  de  sérieuses  catastrophes,  qni 
amenèrent  des  contestations  sur  la  légalité  de  ces  sortes 
d'affaires;  un  arrêt  du  Conseil,  du  U  sept.  1724,  déclan 
que  les  effets  publics  ne  pouvsient  €tre  vendus  par  mar- 
cnés  k  terme.  Néanmoins,  le  Jeu  continua  comme  par  le 
passé,  et  de  temps  en  temps  des  désastres  attirèrent  Tat- 
tention  publique.  L'administration,  se  voyant  impuissante 
contre  les  Joueurs,  pensa  couper  le  mal  dans  sa  racine  en 
enlevant  aux  spéculateurs  aléatoires  les  garanties  légales 
ordinaires  :  trois  arrêts  du  Conseil  du  7  août,  du  if  oc- 
tobre 1785  et  du  22  septembre  1786,  décidèrent  que  dé- 
sormais la  loi  ne  reconnaîtrait  plus  les  marchés  à  terme 
sur  des  effets  publics,  déclarant  ainsi  au  spéculateur 
malheureux  et  peu  scrupuleux  qu'il  pourrait  désormais 
se  dispenser  de  payer. 

Napoléon,  parvenu  au  pouvoir  comme!*' consul,  porta 
aussi  son  attention  sur  les  Jeux  de  bo»irse  ;  son  sens  mo- 
ral, si  profond,  était  révolté  des  fortunes  subites  et  des  ca- 
tastrophes qui  en  résultaient,  et  il  voulut  aussi  interdire 
les  marchés  à  terme.  En  1799,  consultant  sur  ce  point 
Mollien,  alors  directeur  de  la  Caisse  d'amortissement,  et 
qui  fut  depuis  ministre  du  Trésor,  il  le  trouva  d'un  ans 
contraire.  Mollien  prétendait  oue,  s'il  y  avait  des  aboi 
dan«  les  marchés  à  terme,  on  devait  en  accuser  surtout 


HAR 


1216 


war 


h  lwliwnéMic#  qui  les  mettait  bon  da  domaine  de  la 
kil$«aym  homim  libre  ayuH  pris  dee  ongÉeemeiiu  té- 
néniree  défait  troufer  dni»  leor  eaécution  la  peine  de 
am  improdeDoe  ou  de  sa  mauTsise  foi  ;  qne  refficacité 
de  la  pêliie  étant  dans  Teiemple  qu'elle  laisse,  ce  n'était 
pn  on  bon  eiëmple  donné  par  la  Jurispnidenee^  que  Tan- 
■olstion  du  oorpa  da  délit  au  profit  da  plos  coupiÂ>Ie; 
que  les  marchés  de  Boarse  ayant  ce  caractère  Particalier, 
que  Isa  deux  contractants  s^obUgent  Tiui  envers  Tantie 
psr  la  métfisSioii  d*aR  agent  de  change,  qui  est  rbomme 
de  la  loi,  et  cet  agent  étant  responsable  devant  la  loi  de 
tous  ses  actes,  il  n'en  devait  être  aucun  au'ene  refusât 
déjuger;  que  Tobjection  commune  contre  les  marchés  à 
terme  faits  &  la  Bouise,  que  nul  n*a  droit  de  vendre  ce 
qu'y  ne  possède  pas,  et  que  la  loi  ne  peut  reconnaître  un 
marché  mii  n'aurait  pas  dû.  être  fut,  n'était  au  fond 
qu'une  pétition  de  principe;  qu'enfin  la  loi  ne  devait 
pss  défendre  ee  qu'elle  ue  pouvait  pas  p  nir,  et  bien 
moina  encore  ee  qu'elle  était  réduite  à  tolérer,  le  mal 
dont  on  ae  plaignait  prouvant  par  sa  persiatanoe  l'inuti- 
lité des  arrêts  qui  avaient  été  rendus.  —  Napoléon  fut 
frappé  de  cette  dernière  considération ,  qui  touchait  au 
respect  dû  à  l'autorité  publique,  et  ne  prononça  pas 
rinterdlction  qu'il  méditait;  mais  il  gsrda  sa  convicnon 
sur  le  reste,  car,  onse  ans  apr^  il  inscrivit  dans  le  Oodf 
pénal  (art.  492)  des  dispositions  contre  les  msrcbés  à 
terme  sur  les  ellets  publics;  il  abrogea  la  légialation  an* 
térieore,  d'aprèa  laquelle  les  tribunaux  ont  toi^ours  Jug* 
depuis  lea  questions  de  ce  genre,  sans  vouloir  dUnn- 
guer  lea  marchés  conclus  par  l'entremise  d'agenta  de 
diange  de  ceux  bits  hors  de  la  Bourse ,  ne  regardant 
ni  lea  uns  ni  les  autrea  comme  sérieux  ou  valahlie. 
r.  BooasB.  C.  D— T. 

MÂBCsé  aÉGifiATBua.  V*  CéaéALBS. 

MARCHEPIED,  servitude  établie  pour  l'utilité  pu- 
Uique.  et  consistant  dans  le  passage  oui  doit  être  laine 
le  long  des  rivières  navigables  ou  flottsbles. 

MâRDELLES,  margelles  ou  marges,  excavations 
qu'on  trouve  dans  certaines  parties  du  Beny,  en  Suisse 
et  en  ÉcMse.  Elles  sont  en  forme  de  cônes  tronqués  ren- 
versés, de  ^KmensioDS  variables  (150  met.  de  large  sur 
6  4  8  de  profondeur  quelquefois),  le  plus  souvent  réunies 
en  asses  grand  nombre.  On  les  fait  remonter  Jusqu'au 
.temps  des  Celtes,  et  l'on  y  a  vu  soit  des  habitations,  soit 
des  siloa.  F.  De  La  Yillegille,  Notice  sur  les  mordilles, 
dans  les  JIfémoirw  de  la  Société  des  Antiquaires  de  France, 
nouvelle  série,  t.  IV. 

MARÉCHAL.  i  F*  ces  mots  dans  notre  Diction' 

MARÉCHAUSSÉE.  \     naire  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

MARÉCHAUX  FERRANTS,  ancienne  corporation  dont 
les  statuts,  rédigés  au  xm*  siècle,  furent  complétés  par 
une  ordonnance  du  prévôt  de  Paris  en  i473,  et  homo- 
logués an  Châtelet  en  1651.  L'apprentisssge  était  de 
3  ans;  le  brevet  ooûtsit  120  livres,  et  la  maîtrise  600.  Le 
patron  de  la  corporation  était  S*  Éloi. 

MARÉCHINB  (La),  danse  en  usage  dans  le  Baa  Poitou 
parmi  les  habitants  des  marécages.  Elle  est  à  deux  per- 
sonnes, guidées  par  un  branle  chanté,  ou  plutôt  fre- 
donné. Les  mouvements  de  ïambes  y  sont  peu  de  chose; 
ks  pas  sont  courts  et  sans  glissades. 

MARÉE,  mouvement  journalier  et  régulier  d'osdllar 
tion  par  lequel  la  mssse  de  l'Océan  se  soulève  et  s'abaisse 
altematlTement ,  de  sorte  que  les  eaux  couvrent  et  aban- 
donnent alternativement  une  partie  du  littoral.  Ce  phé- 
nomène est  produit  par  l'action  attractive  du  soleil  et  de 
Is  lune.  Les  eaux  montent  pendant  6  heures  environ,  en 
inondant  les  rivages  et  en  se  précipitant  dans  l'intérieur 
des  fleuTOS  Jusqu'à  de  grandes  distanças  de  leurs  embou- 
cbnres;  c^est  le  flux  ou  la  marée  montante  :  après  s'être 
maintenues  quelques  instants  à  leur  plus  grande  éléva- 
tion (ce  qu'on  appelle  pleine  mer  ou  marée  haute  ),  ellea 
descendent  aussi  pendant  6  heures;  c'est  le  reflux  ou  la 
narée  descendante;  le  temps  que  'es  eaux  restent  au 
plus  bas  ae  nomme  basse  mer  ou  m'^rée  basse.  La  durée 
de  chaque  oscillation  est  d'un  peu  plus  de  12  heures  :  la 
durée  moyenne  de  deux  oscillations  est  d'un  Jour  et 
50  minutes,  temps  moyen  qui  s'écoule  entre  le  passage 
de  la  lune  an  méridien  d'un  lieo  et  son  retour  à  ce 
même  méridien  ;  psr  conséquent,  d'un  Jour  à  l'autre,  la 
marée  retarde  de  50  minutes.  Ce  n'e»*  Pas  »«  moment  où 
le  soleil  et  la  lune  exercent  leur  action  que  l'effet  s'ob- 
KTve;  les  marées,  dans  nos  portai  suivent  en  général 
fan  Jour  et  demi  Hnstant  des  phas».  Dans  chaque  mois, 
Cest  à  l'époque  des  syzywcs,  c-è-d- vcts  le  temps  de  la 
nouvelle  et  de  la  pleine  lune,  que  1  élévation  de  la  mer 
est  la  plus  consiaérable'  son  intu'iiescence  est  la  plus 


fldMe  à  l*ipoque  du  premier  et  du  dernier  quartier.  Les 
marées  syzygiea  qui  arrivent  lors  de  l'équlnoxe  sont  gé-  ' 
néralement  plus  ferles  que  celles  du  reste  de  Tannée.  La 
marée  ne  se  fait  pas  senâr  an  même  instant  dans  tous  les 
lieux,  Men  que  la  distance  qui  les  sépare  soit  ssseï  peu 
considérable.  L'élévation  verticale  dea  eaux  par  la  marée 
montsnte  n'est  oss  non  plus  la  même  partout  :  elle  est, 
par  exemple,  oe  7  mm.  environ  à  Ouessant,  Brest, 
Cherbourg,  le  Havre,  Douvres;  de  12  met.  à  Guemesey^ 
de  15  met.  entre  Jersey  et  Saint-tf  Jo,  de  15  à  17  met 
pr^ de  Bristol,  de  SO  a  S3  met.  dans  la  baie  de  Fùndy ; 
aux  petites  lies  de  l'océan  Pacifique,  la  marée  ne  monte 
qne  de  0"',65;  aux  Iles  africaines  de  l'Atlantique,  elle 
Yarie  de  1  à  3  met.;  au  N.  de  l'Europe,  elle  est  de 
1"',50;  au  N.  de  l'Amérique,  elle  n'est  quelquefois  que 
de  0»,0,  Jamais  de  plus  de  0",55.  On  a  dit  une  la  Médi- 
terranée n'était  pas  sujette  au  flux  et  au  reflux  :  cepen- 
dant la  marée  y  existe;  elle  est  de  moins  d'un  mètre, 
I  et  a  été  constatée  dans  les  ports  de  Toulon ,  de  Venise, 
de  Naplea  et  d'Alger.  Bien  que  les  marées  les  plus  fortes 
se  remarquent  d'ordinaire  dans  les  goires,  il  y  a  aussi  de 
hautes  marées  sur  des  cotes  peu  découpées  :  ainsi,  on  en 
a  observé  de  13  met.  dana  la  Guyane,  au  mouillagie  de  la 
Callebasse.  Les  causes  des  différences  dans  l'heure  et 
dana  l'élévation  des  msrées  sont  :  les  distances  plus  on 
moins  considérables  du  soleil  et  de  la  lune  à  la  terre,  la 
position  respective  de  ces  deux  astres  et  leur  déclinaison , 
l'étendue  et  la  profondeur  dea  mera.  le  gisement  des 
cètes  et  la  disposition  des  anfhictuosités  qu'elles  pré- 
^ntent,  la  direction  dea  eouranta,  la  puissance  des 
vents,  etc.  Gertainea  mers  resserrées  eu  d'une  flsible 
étendue,  comme  la  Baltique,  la  mer  Noire  et  la  Cas- 
pienne, n'ont  pas  de  msxées,  du  moins  apprédablea  : 
cela  vient  de  ce  que  la  force  attractive  dea  astrea  n*em« 
brasse  point  un  espace  assez  considérable  pour  que  l'élé- 
vation des  eaux  soit  sensible.  —  Le  phénonAne  des 
marées  avait  été  observé  par  les  Anciens.  Hérodote  et  Dio- 
dore  parlent  de  l'élévation  et  de  l'abaissement  Journalier 
dea  eaux  de  la  mer  Rouge.  Aristote  ne  connut  le  flux  et 
le  reflux  que  par  oui-dire,  et  Jes  soldats- d'Alexandre 
éprouvèrent  une  admiration  mêlée  de  frayeur,  lorsqu'aux 
bouches  de  l'Indus  l'océan  Indien  leur  offrit  un  spec- 
tacle dont  la^  Méditerranée  n'avait  pu  leur  donner  une 
idée.  Les  Stoïciens  attribuèrent  les  msrées  aux  aspira- 
tions et  expirations  de  l'Ame  du  monde.  Mais  Pythéss  de 
3farseille,  qui  visita  l'Atlantique,  eut  une  connaissance 
plus  claire  des  oscillations  de  la  mer,  et  remarqua  qu^eUea 
étaient  en  rapport  avec  les  révolutions  de  la  lune.  On 
voit  dana  Strabon  que  Posidonins,  ami  de  Gicéron  et  de 
Pompés,  était  également  instruit  de  cette  coïncidence. 
Cest  dans  Pline  {Hist,  fiot.,  H ,  07 )  que  les  marées  ont 
été  le  moins  imparfaitement  expliquéea,  jusqu'au  Joor 
où  Newton  lea  rattacha  scientifiquement  à  la  loi  de  la 
gravitation  universelle.  fi. 

MARELLE  ou  MÉRELLE,  nom  de  deux  Jeux  d'en- 
fants.  Dans  l'un,  on  se  sert  d'un  carton  sur  lequel  sont 
tracés  trois  carrés  rrafermés  Tun  dans  l'autre  et  unis 
entre  eux  par  8  lignea  transversalea,  dont  quatre  anx 
quatre  coins  et  quatre  aux  quatre  milieux.  Un  petit  rond 
eat  tracé  à  la  Jonction  de  toutes  les  lignes,  ce  qui  fait  que 
les  quatre  côtés  des  trois  carrés  portent  chacun  trois  p^ 
titB  ronds.  Les  deux  Joueurs  ont  chacun  0  pions  de  cou* 
leur  différente.  L'habileté  consiste,  d'un  côté,  à  placer 
de  front  une  rangée  de  3  pions  de  même  couleur,  et ,  de 
l'autre,  à  y  faire  obstacle  en  plaçant  un  pion  entre  lea 
deux  ou  à  la  suite  des  deux  de  l'adversaire.  Celui  qui 
réussit  à  faire  une  rangée  de  trois  de  ses  pions  a  le  droit 
d'enlever  à  son  choix  un  des  pions  de  l'adversaire.  Les 
pions  ne.  marchent  qu'en  ligne  droite.  La  partie  est  finie 
lorsque  Tun  des  Joueurs  n'a  plus  nue  S  pions.  —  Pour 
l'autre  jeu  de  Marelle,  on  trace  sur  le  sol  un  carré  long, 
divisé  en  6  parties  par  des  lignes  transversales,  oe  qui 
forme  6  rectangles,  dont  les  quatre  premiers  sont  dési- 
gnés par  les  n^  1,  2,  3  et  4,  le  5*  est  appelé  enfer^  et  le 
6'  reposoir.  Sur  le  prolongement  du  grand  carré  long,  on 
figure  un  carré,  divisé  par  deux  figues  diagonales  en 
quatre  triangles  appelés  culottes  et  désignés  aussi  par 
des  numéros.  Enfin ,  plus  loin  encore,  on  trace  un  demi- 
cercle  qui  ferme  la  marelle  et  se  nomme  paradu.  Le  Jeu 
consiste  à  Jeter  un  palet  dans  tous  les  compartiments 
successivement,  à  aller  le  chercher  à  cloche-pied,  et  à  le 
faire  sortir  de  la  marelle  sans  qu'il  s'arrête  sur  aucune 
ligne  et  sans  y  toucher  soi-même.  On  se  repose,  c-4-d. 
qu'on  peut  mettre  les  deux  pieds  à  terre,  dans  le  reiposoifr 
et  dans  le  paradis.  Le  palet  et  le  sauteur  doivent  tou- 
jours franchir  Venfer  sans  y  entrer. 


MAR 


1216 


MAR 


MARENNE,  espèce  de  ponton  composé  de  iU  navires 
oints  ensemble,  et  supportant  une  tour  de  bois.  Lee 
Croisés  s*en  servirent  en  1217  pour  attaquer  la  ville  de 
Damiette.  ^.    .        .      _ 

HARFORIO.  r.  ce  mot  dans  notre  Déctwmuum  os 
BèographU  et  S  Histoire, 

MARGELLES  ou  BiARGES.  7.  BIardellbs. 

MARGEUR ,  en  termes  d*Imprimerie ,  ouvrier  chargé 
de  placer  les  feuilles  de  papier  pour  que  des  cordons,  au 
moyen  du  mouvement  de  rotation  donné  à  la  presse 
mécanique,  les  fissent  arriver  sous  les  cylindres  passant 
sur  les  formes  qui  doivent  les  imprimer. 

MARGITÈS,  poème  satirique  grec,  ainsi  appelé  du  nom 
du  personnage  qu*on  y  tournait  en  ridicule.  Il  en  reste 
très-peu  de  chose.  On  a  attribué  ce  poème  à  Homère, 
•pinion  que  rend  inadmissible  la  présence  des  vers 
tambiques  mêlés  aux  hexamètres.  Ce  n*en  était  pas 
moins  une  œuvre  ancienne  ;  Aristote  pensait  que  le  Mar- 
gitès  avait  été  à  la  comédie  ce  qu'étaient  à  la  tragédie 
Vniade  et  VOdyssée,  c-à-d.  le  prototype  des  caractères 
comiques. 

MARGRAVE.        )  7.  ces  mots  dans  notre  Oicttotmatre 

MARGUILUER.  ]      ^  Biographie  et  (T Histoire. 

MARIAGE,  union  légitime  de  Thomme  et  de  la  femme, 
ayant  pour  but  la  naissance  d*une  famille.  On  distingue 
le  mariage  doU,  contracté  devant  Tautorité  civile,  et  le 
mariage  religieux,  contracté  devant  un  ministre  du 
culte.  La  faculté  de  se  marier  étant  un  droH  naturel  et 
civil ,  la  loi  civile  n*a  point  à  proclamer  ce  droit  :  elle  se 
borne  à  indiquer  les  restrictions  ou  empêchements  qu'il 

Kut  recevoir.  Ces  empêchements  sont  ou  absoltis,  comme 
xistence  d'un  premier  mariage  non  dissous,  la  qualité 
de  prêtre  catholique,  l'erreur  quant  à  la  personne;  ou 
conditionnels^  c-À-d.  susceptibles  d'être  levés  par  des 
dispenses,  comme  le  défaut  d'&ge.  L'âge  légal  du  mariage 
est  de  18  ans  révolus  pour  l'homme,  15  ans  pour  la 
femme  :  le  chef  de  TÉtat  peut  accorder  une  dispense  d'une 
année.  On  peut  aussi  diviser  les  empêchements  eif  em- 
pêchements généraux^  qui  interdisent  le  mariage  avec 
toute  peraonno ,  comme  un  premier  mariage  non  &80us, 
ou  un  défaut  'i'^sf'  dont  on. n'aurait  pas  été  relevé;  et  en 
;^m  pêchements  spéciaux,  c-è-d.  relatifs  au  mariage  entre 
certaines  personaes,  comme  la  parenté  à  un  degré  déter- 
miné par  la  loi.  Le  mariage  est  prohibé,  en  ligne  directe, 
entre  tous  les  ascendants  ou  descendants,  naturels  ou 
adoptifs,  et  les  allite  dans  la  même  liane  ;  en  ligne  col- 
latérale, entre  frère  et  sœur,  beau-père  et  bell^mère, 
bean-flls  et  belle-flUe,  gendre  et  bru.  Il  ne  peut  avoir 
lieu  entre  l'oncle  et  la  nièce,  la  tante  et  le  neveu,  les 
beaux-frères  et  belles-sœurs,  sans  une  dispense  du  chef 
de  l'État.  Le  défaut  de  consentement  des  père  et  mère 
(en  cas  de  dissentiment,  celui  du  père  suffit),  ou,  à  leur 
oéfaut,  des  autres  ascendants,  est  encore  un  empêche- 
iuent  au  mariage  des  fils  et  des  filles  qui  ont  atteint  l'âge 
légal  :  mais  cet  empêchement  n'est  que  temporaire,  et  se 
résout  en  délais  et  en  formalités  respectueuses.  Après 
Page  de  25  ans  pour  le  fils  et  de  21  pour  la  fille,  ils  peu- 
vent, en  cas  de  refus  de  consentement,  adresser  trois 
fois  à  leurs  parents,  de  mois  en  mois,  un  acte  respec- 
tueux ou  sommation  respectueuse;  après  30  ans,  un  seul 
acte  suffit.  Puis  on  peut  passer  outre  à  la  célébration  du 
mariage.  C'est  également  un  empêchement  temporaire 
qui  ne  permet  pas  aux  fils  et  filles  privés  d'ascendants 
de  se  marier  avant  l'âge  de  21  ans,  sans  le  consentement 
du  Conseil  de  famille.  Les  militaires  et  les  marins  doi- 
vent, pour  se  marier,  justifier  d'une  pennission  de  leurs 
chefs  ;  les  officiers,  en  passant  outre,  encourraient  la  des- 
titution, et  la  perte  de  leurs  droits  â  toute  pension  ou 
récompense.  Les  officiers  doivent  Justifier  que  leur  femme 
aura  une  dot  de  1,200  fr.  au  moins  en  fortune  person- 
nelle. Tout  officier  de  l'état  civil  qui  célèbre  sciemment 
le  mariage  d*nn  militaire  non  autorisé  est  destitué  de  ses 
fimctions. 
Pour  assurer  l'exécution  des  prescriptions  relatives  aux 
ipêchements  au  mariage,  la  loi  fournit  trois  moyens  : 


i*  l'obliçation  de  faire  précéder  le  mariage  de  certaines 
publications  (  F.  Ban  db  mariagi)  ;  2<*  la  voie  d'opposi- 
tion, ouverte  à  ceux  qui  ont  un  intérêt  ni  et  actuel  à 
s*opposeri  3*  Vaction  en  nullité,  possible  même  après  la 
eéléoration  du  mariage ,  si  les  formalités  légales  ont  été 
négligées  ou  mal  remplies,  ou  si  le  mariage  célébré  re- 
cèle en  lui-même  des  vices  radicaux  propres  à  l'annuler. 
S*il  y  a  bigamie  ou  inceste,  la  poursuite  en  nullité  n'est 
pas  seulement  accordée  à  ceux  qui  ont  un  intérêt  per- 
sonnel, mais  le  ministère  public  agit  d'office.  Si  la  de- 
mande en  nullité  n'est  fondée  que  sur  le  défaut  d'âge 


des  contractants  Ion  de  la  célébration  d«  mariage,  et  qm 
rage  légal  ait  été  atteint  avant  cette  réclamation,  on  la 
repousse  par  une  fin  de  non-recevoir,  parce  qu'il  est  de 
règle  d'admettre  la  I^ité  du  mariage,  toutes  les  fois 
qu'il  est  posais  de  le  faire  d'une  manière  plausible.  11 
en  est  de  même  si  le  vice  allégué  est  Tabsenoe  de  con- 
sentement, et  oue  cette  absence  ait  été  couverte  depuis 
par  quelque  adhésion,  même  tacite. 

Le  mariage  lécpal  est  iàit  par  l'offider  de  l'état  dvil ,  en 
présence  de  4  témoins.  Après  avoir  donné  lecture  aux 
futurs  époux  des  art  du  Coos  Napoléon  relatifs  aux  obli- 
gations du  mariage  et  aux  droits  respectifs  des  époux,  il 
reçoit  d'eux  la  déclaration  qu'ils  veulent  se  prendre  pour 
mari  et  femme;  il  prononce,  au  nom  de  la  Loi,  qu'ils 
sont  unis  par  le  mariage,  et  en  dresse  acte  sur-le-champ. 
Certaines  obligations  naissent  du  mariage  légalement 
con  Acte.  Ainsi ,  les  deux  époux  ont  l'obligation  com- 
mune de  nomrir  et  d'élever  leurs  enfants.  La  femme  est 
obligée  d'habiter  avec  le  mari,  et  celui-ci  est  obligé  de  Is 
recevoir.  Les  époux  se  doivent  mutuellement  fidélité, 
secours ,  assistance  ;  le  msri  doit  protection  à  sa  femme, 
la  femme  obéissance  à  son  mari.  Du  msriage  résultent 
aussi  certains  droits  respectifs  des  époux  en  ce  qui  con- 
ceiTie  leurs  biens  (V.  Feuue,  ComiuNAiiTé,  Dot,  Dotal 
—  Régime  ). 

Nul  homme  ne  peut  avoir  en  même  temps  plusieurs 
épouses ,  ni  aucune  femme  plusieurs  maris  (  F.  Bisavie, 
Poltgahib)  :  cette  règle  fondamentale  et  absolue  est  seule 
propre  à  honorer  le  mariage.  C'est  encore  un  principe 
reconnu,  que  le  mariage  n  est  point  une  union  tempo- 
raire, mais  qu'il  ne  peut  se  former  que  dans  des  vues  de 
perpétuité.  Certains  peuples  ont  admis  le  divorce  ou  la 
dissolution  de  l'union  pour  des  cas  plus  ou  moins  graves 
(  V,  DivoncB ,  dans  notre  Dictionnai^    de  Biographie  et 
d*Bistoirêi  Auioujrd'hui.  en  France  le  mariafor  oe  se  dis- 
sout que  p*u  ta  muit  de  l'un  des  époux;  tes  peines  en 
I    traînant  autrefois  mort  civile  peuvent  seulement  dotin  ( 
*    lieu  à  demande  en  séparation  de  corps.   V,  te  Co 
'  Napoléon,  art  144-228  ;  Bemardl^  Commentaire  sur  l 
toi  du  24  wntése  an  xi  concernant  le  mariage  ^  1903. 
in-8®  ;  Nouçffède,  Jurisprudence  du  martaqe,  1817,  in-8*  ; 
Daubenton,  Traité  complet  des  droits  des  époux  Vun 
envers  Vautre  et  à  l'égard  de  leurs  enfants,  1818,  in-8*; 
Baston,  Concordance  des  lois  civiles  touchant  le  mariage] 
1824,  in-12;  Vazeille,  Traité  du  mariage,  1825,  2  vol. 
in-8;  Peizani,  Traité  des  empêchements  du  mariage, 
1838,  in-8o  ;  Allemand ,  Traité  du  mariage  et  de  ses  effets, 
1847,  2  vol.  in-8<>  ;  Rupert,  Les  Lois  civiles  concernant 
le  mariage  des  chrétiens,  1853,  in-12;  Tiercelin,  Du  ma- 
riage ciml  et  du  mariage  religieux,  1854,  in-8°  ;  Demo- 
lombe.  Traité  du  mariage  et  de  la  séparation  ie  corps, 
1800,  in-8^.  V.  aussi  Mariage,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

MARUGB  (Acte  de ) ,  un  des  actes  de  l'État  civil  {V.  ce 
mot)^  formant  le  titre  légal  des  époux ,  et  suffisant  pour 
faire  preuve  complète  du  mariage.  Il  contient  les  noms, 
prénoms,  professions,  âges,  lieux  de  naissance  et  domi- 
ciles des  époux,  s'ils  sont  majeurs  ou  mineurs;  les  pré- 
noms, noms,  professions  et  domiciles  des  pères  et  mères, 
le  consentement  des  pères  et  mères,  aïeuls  et  aïeules,  et 
celui  de  la  famille,  dans  les  cas  où  ils  sont  requis  ;  les 
actes  respectueux ,. s'il  en  a  été  fait;  les  publications 
dans  les  divers  domiciles;  les  oppositions  s'il  y  en  a  eu, 
leur  mainlevée,  ou  la  mention  qu'il  n'y  a  pas  eu  op- 
position ;  la  déclaration  des  contractants  de  se  prendre 
pour  époux,  et  le  prononcé  de  leur  union  par  l'officier 
public  ;  les  prénoms ,  noms ,  âge,  professions  et  domiciles 
des  témoins ,  et  leur  déclaration,  s'ils  sont  parents  on 
alliés  des  parties,  de  quel  côté  et  à  quel  degré. 

UAsuGB  (Contrat  de),  contrat  qui  régit  l'association  con- 
jugale et  fixe  les  droits  des  époux  quanta  leurs  biens.  Il  est 
entièrement  abandonné  au  libre  arbitre  des  contractants  : 
toutefois,  ils  ne  pourraient  faire  aucune  convention  déro- 
geant soit  aux  droits  que  la  puissance  maritale  confère  h 
l'époux  sur  la  personne  de  l'épouse  ou  des  enfants,  soit 
à  ceux  qui  dénient,  pour  l'un  ou  l'autre  des  conjoints, 
de  la  puissance  paternelle  ou  de  la  tutelle  légitime.  Ainsi, 
pour  les  biens  du  mari ,  une  clause  qui  soumettrait  le 
mari  à  demander  à  sa  femme  ou  à  la  Justice  la  permis- 
sion de  les  administrer  et  d'en  disposer,  serait  nulle;  l 
en  serait  de  même,  pour  les  biens  de  la  femme  non  ma- 
riée sous  le  régime  de  la  séparation  de  biens,  si  une 
clause  en  réservait  l'administration  à  la  femme  et  la  seule 
louissance  au  mari  ;  serait  nulle  aussi  la  clause  qui  attri- 
buerait à  la  femme  le  droit  d'aliéner  ses  biens  sans  auto- 
risation. La  loi  déclare  également  nulles  :  les  conveotioDi 


j 


MÀR 


1217 


MAR 


qoi  dérosanfant  à  Tordre  légal  des  saooesdonst  les  sti- 
palationi  loterdites  par  quelque  prohibition  da  Code  ; 
oeUesmii ,  aaas  être  prérues  par  un  texte  spécial ,  seraient 
cDotniret  au  bonnes  mosors  on  à  Tordre  public.  II  y  a 
cmq  rentes  différents  de  conventions  matrimoniales, 
que  les  futurs  époux  peavent  choisir,  et  dont  ils  ont  môme 

SûcoJté  de  former  un  mélanoe  :  la  commtmauté  légale, 
eommunamU  convetUiomMlê ,  TecBcItiràm  êûnple  de 
ctmmunaitU,  la  séparation  de  biens,  et  le  régime  dotal 
{ Y»  cet  mots  )•  Lorsque  les  époux  se  marient  sans  fiUre 
de  contrat,  ils  sont  soumis  an  rég;ime  de  la  communauté 
légale.  Les  conventions  matrimoniales  doivent  être  arr^ 
téei  avant  la  célébration  du  mariage,  par  acte  passé  d^ 
Tint  notaire  et  avec  minute;  tant  que  la  célébxîition  n*a 
p«  en  lieu,  on  peut  y  faire  des  changements,  mais 
toujours  par  acte  passé  devant  le  notaire  en  minute,  et 
avec  le  concours  de  tous  ceux  qui  ont  été  parties  au  con- 
trat (c-è-d.  les  époux,  ceux  des  signataires  qui  leur  ont 
bit  des  Ubâralités,  ceux  dont  le  consentement  est  néces- 
nire  à  leur  marînge,  et  ceux  môme  dont  ils  sont  tenus  de 
requérir  conseil).  Tout  changement  apporté  au  contrat 
après  la  célébration  est  nul.  Bien  que  le  futur  époux  qui 
«  encore  quelque  ascendant  ne  soit  majeur  pour  le  mariage 
qa*à  r&gede  35  ans  révolus,  il  est  majeur  aSi  ans  pour  le 
'  contrat  de  mariage  ooDune  pour  les  autres  contrats  pécu- 
otaires;  de  plus,  la  loi  dédare  valables  les  conventions 
laites  par  un  mineur  avec  Tassistance  de  ceux  dont  le 
«ODseotement  suffit  à  son  mariage.  Le  contrat  fait  par  un 
mineur  ou  un  prodigue  sans  Tassistance  voulue,  ou  par 
un  mineur  avant  Tâge  exigé  pour  le  mariage  et  sans  avoir 
obtenu  dispense,  devient  valable  par  une  exécution  volon- 
tairement faite  au  moment  où  Ton  serait  devenu  capable. 
Lorsque  les  époux  ou  Tun  d'eux  sont  commerçants,  leur 
tootrat  doit  être  transmis  par  extrait ,  da<is  le  mois  de  sa 
date,  aux  greffes  des  tribunaux  civil  et  de  commerce  du 
domicile  du  mari,  pour  être  exposé  pendant  un  an  dans 
leur  auditoire,  et  aux  chambres  des  notaires  et  des  avoués; 
f*il  n'y  a  pas  de  tribunal,  cette  exposition  est  faite  dans 
la  principale  salle  de  la  mairie.  La  loi  a  voulu  par  là  que 
ceox  qui  seraient  en  relations  d'affaires  commerciales  avec 
tes  époux  pussent  connaître  le  plus  ou  moins  de  sûreté 
que  le  contrat  leur  donne.  Le  notaire  oui  négligerait  de 
bire  la  transmission  eerait  passible  d'une  amende  de 
iOO  fr.,  et  môme  de  destitution  et  de  responsabilité  en- 
îen  les  crôancien,  s'il  était  prouvé  que  l'omission  était 
volontaire.  L'époux  séparé  de  biens  ou  marié  sous  le 
régime  dotal  doit,  s'il  se  fidt  commerçant  après  son  ma- 
riage, faire  aussi  la  remise  de  son  contrat,  sous  peine, 
en  cas  de  Milite,  d'être  condamné  comme  banqueroutier. 
F.  le  Code  Napoléan.  art.  4387^581  ;  Bemardi ,  Com^ 
i^tntaire  sur  Us  lai  du  ^  pluviôse  an  xii,  relative  au 
tvdrat  de  mariage,  i804,  in-8*;  Carrier,  Traité  du  con' 
<nrt  de  mariage,  1818,  in-8*;  Biret,  Traité  du  contrat  de 
muiage,  1825,  in-S*;  Bellot  des  Minières,  Traité  du 
«Mtrol  de  mariage,  1826,  4  vol.  in-8»,  et  Le  contrat  de 
uoriage  considéré  en  luinnême ,  1860,  1  vol.  in-8*  ; 
Odier,  ThUté  du  eonirat  de  mariage,  1840,  3  vol.  in-8»  ; 
Pont  et  Rodière,  Traité  du  contrat  de  mariage,  1850, 
i  vol.  in-8*  ;  Troplong,  Commefitotrs  du  contreit  de  ma- 
fisge,  1850,  4  vol.  in-8*. 

luaucB  aBuoiBox.  «  Je  ne  vols  pas,  dit  l'abbé  Fleory, 
que  les  mariages  des  Israélites  fussent  revêtus  d'aucune 
eéréoionie  de  religion,  si  ce  n'est  des  prières  du  père  de 
ftunille  et  des  assistants  pour  attirer  la  bénédic^on  de 
Dieo.  Nous  en  avons  des  exemples  dans  le  mariage  de 
Bebecca  avec  Isaac,  de  Ruth  avec  Booz,  de  Sara  avec 
Tobie.  Je  ne  vois  point  qu'on  offrit  de  sacrifice  à  ce  sujet, 
qo*on  allât  au  temple,  ou  qu'on  fit  venir  de  prêtres.  Gela 
•a  passait  entre  les  parents  et  les  amis.  Ausri  ce  n'était 
encore  qu'un  contrat  civil.  »  Chez  les  Grecs,  le  mariage 
était  accompagné  de  sacrifices  à  Jupiter,  à  Junon,  à  Diane, 
^  Destin.  A  Rome,  il  n'y  eut  de  cérémonie  religieuse 
que  dans  le  mariage  jNir  con/SafY^ton. 

La  loi  chrétienne  a  élevé  le  mariage  à  la  dignité  io 
Saccffflient  (  F.  ce  mot  ).  8^  Cyrille,  S'  Épiphane,  8^  Au- 
fDstîji  disent  qoe  ce  fut  Jésus-Christ  qui,  par  sa  présence 
Vix  noces  de  Cana,  institua  ce  Sacrement  comme  signe 
de  son  union  avec  l'Église.  Cette  doctrine  ne  fut  point  un 
dogme  universellement  admis,  puisoue  8^  Thomas  et 
S^  Boaaventure  élevèrent  des  doutes  à  ce  s^Jet.  Mais  le 
jncile  de  Trente  a  décidé  la  question.  Le  caractère  du 
wemeot  de  mariage  est  de  sanctifier  l'alliance  de 
nmname  et  de  la  femme,  en  leur  donnant  la  grftce  de 
livre  ensemble  chrétiennement  Cest  le  prêtre  qui  est 
le  mmistre  du  Sacrement.  L'Église  catholique  enseigne 
^'ui:  mariage  entre  des  infidèles  ou  des  hérétiques  peut 


être  valide  comme  contrat  naturel  et  contrat  civil,  ma» 
qu'il  ne  peut  être  élevé  à  la  dignité  de  Sacrement,  quand 
même  les  contractants  abjureraient  ensuite  leurs  erreurs, 
n  y  eut,  dans  les  premiers  temps  du  christianisme,  des 
sectes  qui  soutinrent  que  le  mariage  était  un  crime; 
d'autres  prétendirent,  contrairement  au  sentiment  des 
Apôtres,  que  la  vir^ité  n'était  pas  un  état  plus  parfidt 
que  le  mariage.  Beaucoup  de  Pères  de  TÉgUse  blâmèrent 
les  secondes  noces.  Aujourd'hui,  la  loi  canonique  déter- 
mine un  certain  nombre  d'empêchements  au  mariage. 
Les  uns,  âits  prohibitifs,  rendent  le  mariage  illicite,  sans 
l'annuler;  les  autres,  appelés  dirimants,  le  rendent  nul. 
Pour  les  premiers,  ce  sont  :  l'omission  de  la  publication 
des  bans,  la  célébration  du  mariage  dans  le  temps  pro- 
hibé par  l'Église  f  depuis  TAvent  jusqu'à  TÉpiphanie,  et 
depuis  le  mercredi  des  Cendres  Jusqu'au  mmanche  de 
l'octave  de  Piques) ,  le  vœu  de  chasteté  ou  d'entrée  en 
reli^on.  Les  seconds  sont,  outre  ceux  que  précise  notre 
loi  civile  :  la  profession  religieuse ,  Tamnité  spirituelle, 
le  meurtre  pour  arriver  au  mariais,  Tadultère,  le  rapt, 
la  violence,  la  clandestinité,  la  folie,  etc.  Quant  aux 
mariages  mixtes ,  c.-à-d.  entre  personnes  de  religions  ou 
de  communions  différentes,  TÉgUse  se  refuse  générale- 
ment à  les  bénir,  à  moins  que  les  époux  ne  s'engagent  à 
faire  élever  leurs  enfants  dans  la  religion  catholique.  Les 
évêques  peuvent  donner  des  dispenses  pour  marier  dans 
lea  temps  prohibés  ou  sans  que  tous  les  bans  aient  été 
publiés  ;  mais  le  pape  seul  lèîre  quelques-uns  des  empê- 
chements plus  graves.  En  France,  avant  la  Révolution 
de  1780,  le  ministère  du  prêtre  accomplissait  à  la  fois  le 
mariage  civil  et  le  mariage  reli^eux  :  depuis  cette  épo<{ue, 
le  mariage  dvll  suffit  pour  valider  l'union  matrimonialo 
aux  yeux  de  la  société,  et  le  Code  pénal  (art.  100,  200} 
porte  même  des  peines  contre  tout  ministre  du  culte  qm 
procéderait  au  mariage  religieux  avant  le  mariage  civil. 
Ces  principes  ont  été  admis  dans  le  royaume  d'Italie. 
Mais  l'Église  n'accorde  le  caractère  de  légitimité  qu'au 
mariage  qui  a  été  sanctionné  par  la  reli^on  ;  en  sorte 
que  les  enfants  nés  avant  la  bénédiction  nuptiale,  même 
après  le  mariage  civil ,  sont  illégitimes  aux  yeux  des  ca- 
tholiques, tendus  qu'ils  le  seraient  d'après  la  loi  fran- 
çaise, si  le  mariage  religieux  seul  eût  été  célébré. 

L'Élise  grecque,  comme  TÉdise  catholique,  fait  du 
mariage  un  Sacrement.  Pour  les  Protestants,  au  contraire, 
le  nuuriage  est  un  contrat  purement  civil,  et  la  bénédic- 
tion nuptiale  n'est  qu'une  simple  cérémonie,  ne  produis 
sant  pas  plus  d'effet  qu'une  pnère  ordinaire.  Les  catho- 
liques n'admettent  aucune  cause  qui  puisse  autoriser  le 
divorce,  les  protestants  le  permettent  dans  plusieun  caa« 

MARIAGE  (Jeu  du)  OU  do  BaiSQim,  Jeu  de  cartes  dans 
lequel  chacun  des  deux  Joueura  reçoit  S  cartes  ;  la  11*  sert 
d'atout ,  et  le  donneur  qui  la  retourne  peut  la  changer 
contre  le  sept  d'atout,  s'il  le  possède  en  main.  Après 
chaque  levée,  on  prend  une  carte  au  talon.  Le  roi  et  la 
dame  de  la  même  couleur  constituent  le  martage^  et  «e 
comptent  pour  SO;  le  valet  y  aloute  10;  le  mariage 
d'atout  compte  double.  L'as  et  le  dix,  cartes  privilégiées 
qui  l'emportent  sur  les  figures,  sont  appelées  brisques. 
on  les  compte  chacune  pour  10,  lorsque  les  Joueura 
cherchent  à  la  fin  celles  qu'ils  ont  dans  leure  levées. 

IfARlÉE  (Jeu  de  la]  ou  de  Godibardb,  Jeu  de  cartes 
pour  lequel  on  prend  un  jeu  de  piquet  s'il  n'y  a  que  cinq 
joueura,  un  Jeu  complet  s'il  y  en  a  plus.  Jusqu'à  0.  Il  j  a 
trois  cartes  privilégiées,  dans  Tordre  suivant  :  la  fifuim- 
barde  ou  dame  de  cœur,  le  roi  de  cœur,  et  le  fou  ou  valet 
de  carreau.  Les  chances  qui  viennent  ensuite  sont  le 
potfi^  ou  3,  4  et  5  certes  de  même  couleur,  et  le  mch 
riage,  formé  d'un  roi  et  d'une  dame  de  même  couleur. 
Cinq  corbeilles  affectées  à  ces  cinq  chancea  reçoivent  de 
chaque  Joueur  un  Jeton,  pour  celui  qui  aura  Tune  ou 
l'antre  dans  son  Jeu«  Les  Joueura  ayant  reçu  chacun 
5  cartes ,  on  déclare  successivement  le  point,  les  ma- 
riages, le  fou,  le  roi,  et  la  guimbarde.  Puis,  tous  ayant 
mis  de  nouveau  un  Jeton  dans  la  corbeille  du  point,  on 
Joue  à  faire  des  levées  pour  gagner  cette  mise.  Le  Jouem 
qui  renonce,  ou  qui  Joue  avant  son  tour,  ou  qui,  pou- 
vant forcer  ou  couper,  ne  le  ftdt  pas,  paye  un  jeton  à 
tous  les  autres.  T6ut  mariage  qui  se  fait  en  Jouant  vaut 
à  celui  qui  a  mis  le  roi  un  Jeton  de  chaque  Joueur;  le 
mariage  du  roi  et  de  la  dame  de  cœur  en  vaut  deux  ;  le 
fou  qm  fait  la  levée  gagne  aussi  im  Jeton  «  mais  il  paye 
s'il  est  pris. 

HARIE-BUAJEURE  (Basih'que  de  Sanm»-),  à  Rome, 
sinsi  nommée  psrce  qu'elle  est  la  principale  des  églises 
consacrées  à  la  Vierge.  Elle  est  la  quatrième  des  nasi- 
Hques  patriarcales,  et  s'élève  sur  le  mont  Esquilioi  à 

77 


MAR 


121« 


MAR 


t/mplaornoÊùX  d*im  tomple  de  Jwion  Lacbie«  «t  près 
ffnne  esplanade  IrréguUère,  où  Paul  V  a  ftdt  ériger  sur 
mn  piédestal  une  saperbe  coloDoe  corinthieiuie,  haute  de 
M  met.,  en  marlire  blanc,  tirée  de  la  basilique  de  Con- 
stantin, et  sormontée  d*une  statue  de  la  Vierge,  en  brome 
doré.  S**-llarie-Bf4eore,  fondée  en  352,  sous  le  pontificat 
de  S<  Libère  (d*où  lui  vint  le  nom  de  Banlique  Ubé- 
risiifié),  fut  d'abord  appelée  S^-Mari^-oux-Nêiges^  en 
mémoire  d*une  neige  épaisse  qui  était  miraculeusement 
tombée  du  ciel  an  mou  d'août  pendant  une  sécheresse 
dévorante.  Sixte  lU  l'agrandit  en  432,  et  elle  reçut  alors 
le  plan  général  qu'elle  a  conservé  Jusqu'à  nos  Jours,  et 
que  nous  allons  décrire.  La  façade  se  compose  de  deux 
portiques  superposés,  ornés  de  colonnes.  Celui  d'en  bas 
a  cinq  ouvertures,  dont  trois  sont  surmontées  de  fron- 
tons, triangulaires  pour  les  baies  des  extrémités,  drcu- 
laires  pour  celles  du  centre.  Les  colonnes,  au  nombre  de 
huit,  la  porte  centrale  en  ayant  deux  rentrantes,  sont 
d'ordre  ionique  et  en  granit.  Sous  ce  portique  on  trouve 
dnq  portes,  dont  une,  la  porte  Sainte,  reste  murée, 
excepta  dans  le  temps  de  Jubilé.  Le  portioue  supérieur 
n'est  qu'à  trois  arcades,  avec  colonnes  corintniennes;  l'ar- 
cade du  milieu,  plus  haute  que  ses  collatérales,  forme 
one  looe  d*où  le  pape  donne  la  bénédiction  an  peuple  les 
leurs  de  grande  solennité.  L'ensemble  est  surmonté  d'une 
balustrade  ornée  de  cinq  statues.  Deux  bâtiments  d'une 
architecture  de  palais,  et  dont  les  lignes  architecturales 
•e  profilent  avec  cette  façade,  l'encadrent,  se  Joignent  au 
portique  inférieur  en  demeurant  détachés  du  portique 
supérieur,  et  servent  d'habitation  aux  chanoines  de  la 
basilique.  Vers  le  fond  de  l'église  s'élève  un  campanile 
quadrangulaire,  le  plus  haut  de  Rome.  Cette  façade,  qui 
a  de  la  mî^esté  et  de  la  grandeur,  est  l'osuvre  de  F.  Fuga, 
qui  réleva  par  ordre  de  Benoit  XIV,  en  4743,  et  pour 
laquelle  on  démolit  l'ancienne  façade  qui  avait  été  con- 
struite par  Eugène  UI,  en  1145.  Les  bâtiments  réservés 
aux  chanoines  datent  de  Paul  V,  et  le  campanile  de  Gré- 

Soire  XI.  —  L'intérieur  rappelle  tout  à  fait  la  disposition 
'une  basilique  de  Tandenne  Rome.  Il  est  divisé  en 
3  nefs  par  deux  files  de  36  colonnes  ioniques,  18  de  chaque 
Q6té,  en  marbre  blanc  veiné,  supportant  un  entablement 
continu,  interrompu  aux  deux  tiers  de  la  nef  par  deux 
nandea  arcades  ouvertes  sur  deux  chapelles  latérales. 
Sur  cet  entablement  s'élève  une  sorte  d'attlque  orné  de 
pilastres  composites  à  l'aplomb  de  chaoue  colonne,  de 
niches  dans  leurs  intervalles,  Qt  de  granos  carrés  de  mo- 
saïque datant,  dit-on,  du  vui*  siècle.  La  nef  est  couverte 
par  un  plafond  à  5  files  de  caissons  dorés,  ouvrage  de 
San-Gallo.  Au  fond  de  l'abside  brille  une  grande  mo- 
saïque d'un  bel  effet,  où  le  couronnement  de  la  Vierge 
est  représenté  sur  fond  d'or.  On  admire  aussi  les  mo- 
saïques du  pavé,  en  appareil  alexandrin.  En  entrant,  on 
voit  deux  tombeaux  :  à  droite,  celui  de  Clément  IX,  avec 
des  statues  de  ce  pape  par  Guidi,  de  la  Foi  par  Fanc«lli, 
de  la  Charité  par  Hercule  Ferrata;  à  gauche,  celui  de 
Nicolas  IV,  deuiné  par  Dom.  Fontana,  avec  statues  par 
Léonard  de  Sarzane.  Le  maltre-autel  de  la  basilique, 
plaûé  au  droit  des  deux  grandes  arcades,  est  isolé  :  formé 
par  une  grande  urne  de  porphyre,  que  recouvre  une 
table  de  marbre  blanc  et  noir  soutenue  par  4  petits  anges 
en  bronze  doré,  il  a  un  riche  baldaquin  composé  par  Fuga, 
porté  par  quatre  grandes  colonnes  corinthiennes  de  por- 
phyre entourées  de  palmes  dorées;  en  haut  sont  6  anges 
de  marbre  sculptés  par  P.  Bracci.  Du  c6té  droit  de  l'édi- 
floe  est  la  belle  chapelle  du  S^-Sacrement  ou  de  la  Crèche, 
commandée  à  Fontana  par  Sixte-Quint,  et  qui  serait  à 
elle  seule  une  église  complète,  puisqu'elle  a  sa  coupole, 
ses  chapelles  latérales  et  sa  sacristie.  Elle  est  en  croix 
grecque;  au  milieu  s'élève  Tautel  du  S^ -Sacrement, 
dont  le  tabernacle  est  soutenu  par  quatre  anges  de  bronie 
doré,  et,  au-dessous,  un  autre  autel  consacré  à  la  Nati- 
vité de  J.-C;  à  droite,  le  tombeau  de  ^xte-Quint,  des- 
siné par  Fontana,  avec  statue  par  Valsoldo,  s'élevant  au 
milieu  de  ouatre  colonnes  de  vert  antique,  et  entre  les 
statues  de  S'  François  par  Flaminio  Vacca  et  de  S^  An- 
toine par  P.  Olivieri  ;  a  gauche,  le  tombeau  de  Pie  V, 
dont  le  corps  est  conservé  dans  une  urne  de  vert  antique 
ornée  de  bas-reliefs,  et  dont  la  statue  est  de  Léonard  de 
Banane.  De  l'autre  c6té  de  la  nef,  en  parallèle  de  la  cha- 
pelle du  S^-Sacrement,  est  celle,  plus  riche  encore,  de  la 
8**-Vierge,  dite  chapelle  Borghise,  construite  en  1611 
aux  frais  du  pape  Paul  V  par  Flaminio  Ponzio,  et  en  croix 
grecque  aussi  avec  une  coupole.  Les  murs  en  sont  re- 
vêtus de  marbre;  une  image  de  la  Vierge,  attribuée  à 
8^  Luc,  est  placée  sur  un  fond  de  lapis-lazuli  et  entourée 
de  pierres  prédeuses  i  l'autel  a  quatre  colonnes  canne- 


Jées  en  Jaspe  oriental,  avec  basée  et  chapiteaus  dsbnoie 
doré,  et  l'entablement  est  en  agate;  beaucoup  d'aitistai 
ont  couvert  de  fresques  les  srcades  et  la  cos^rale,  enus 
autres  le  Guide,  Lanfranc,  Maderno,  GigoU,  le  chevsliei 
d'Arpino.  A  droite  de  la  chapelle  s'élève  le  tombesu  de 
Clément  VŒ,  avec  quelques  bas-reliefs  du  Bemio  ;  à 
gauche,  celui  de  Paul  V,  dont  les  bsa-reliefs  sont  aoisi 
du  plus  grand  mérite.  —  Le  baptistère,  comparable  pour 
la  magnificence  aux  oravres  plus  andennes,  sppartieDt  sa 
pontificat  de  liéon  XII.  V.  Paulus  de  AnjBells,  Descriptio 
et  delinealio  basUicœ  Sanclm  Mariœ  Maéoris,  Roms, 
1621,  in-fol.  B. 

MARIENGROSGHEN ,  monnaie  de  compte  et  monnsie 
de  billon  du  Hanovre  et  du  Brunswick,  valant  on  peuplai 
de  10  r^mtiiii»f>ft 

MARIENGOLDEN,  monnaie  d'argent  dn  Brunswick, 
valant  2  fr.  16  c. 

1IARIE-SAI/)PE,  ou  gabare  à  wue,  grande  barque  oà 
l'on  place  la  vase,  le  sable  et  autres  immondices  qu'on 
recueille  en  curant  les  ports,  et  qui  sert  à  les  Jeter  sa 
laiige.  Elle  a,  de  chaque  cM  du  oiAt,  une  oaverture  par 
laquelle  on  la  déctuu%e. 

MARIGOT,  se  dit,  sur  la  côte  ocddentale  de  l'Afriqus, 
des  canaux  remplis  d'eau  presque  dormante  qui  se  for^ 
ment  dans  les  deltas  des  fleuves. 

MARILLAC  (Code).  V.  Cons,  dans  notre  Dictionnain 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

MARIMaA»  sorte  de  luth  des  habitants  du  Congo.  Ls 
table  est  un  parchemin  très-mince.  Les  cordes  sont  atta- 
chées à  des  anneaux  auxquels  pendent  de  petites  plaques 
de  métal.  On  frappe  les  cordes  avec  le  poil  d'une 
queue  d'éléphant  ou  un  morceau  d'éoorce  de  palmiert  et 
les  plaques,  mises  en  mouvement,  produisent  un  oertsin 
bnut  harmonieux.  —  Les  Cafres  ont  aussi  un  instrument 
appdé  Marimba :  c'est  une  petite  caisse  en  bois,  garnie, 
à  une  extrémité,  d'un  chevalet,  sur  lequel  passent  sept 
ou  neuf  lamea  de  fer.  L'exécutant  met  ces  tames  en  ri- 
bration  avec  ses  doigts,  et  en  tire  des  sons  d'un  grsod 
volume.  —  On  connaît  enfin  sous  le  nom  de  Marimba 
un  instrument  des  Nègres,  formé  de  16  calebssses  de 
différentes  grandeurs,  rangées  entre  deux  planches,  et 
dont  on  tire  des  sons  en  frappant  avec  deux  petites  bar 
guettes  les  tranches  d'un  bois  sonore  qui  recouvrent  leur 
embouchure. 

MARINE  (du  latin  mare,  mer),  mot  qui  désigne  tout 
à  la  fois  une  sdence  et  l'ensemole  des  bâtiments  d*an 
État.  La  sdence  de  la  Marine  comprend  les  eonstructiom 
naivales  et  la  navigation  (V,ces  mots).  Comme  ensemble 
des  navires  qui  font  le  scùnrice  maritime,  on  distingue  ls 
Marine  marchande,  dont  les  bâtiments,  construits,  équi- 
pés, frétés  par  des  particuliers,  transportent  des  passa- 
gers ou  des  marchandises;  et  la  Marine  militaire  ou  ifo- 
rtns  de  VËtat,  composée  de  bâtiments  de  guerre.  Une 
Marine  militaire  sert  à  orotéger  le  commerce  national,  i 
défendre  les  colonies,  a  lavoriser,  selon  roccaaion ,  lei 
entreprises  de  terre  ou  de  mer,  et  à  dsire  échouer  celles 
que  les  ennemis  pourraient  tenter.  lyr,  Garthage, 
Athènes  dans  l'antiquité,  ont  dû  leur  pulsaaoce  à  leur 
aituation  maritime,  et  au  soin  qu'elles  avaient  mis  à  pro- 
fiter de  leurs  ressources  navales.  De  même,  au  moyes 
âge.  Gènes,  Venise  et  les  villes  inaritimee  de  la  Ligos 
£iiséatique  trouvèrent  dans  la  naviption  une  source  de 
richesses  et  d'influence,  et  c'est  aussi  à  la  navi^tion  que 
de  faibles  États  modernes,  le  Portugsl  et  la  Hollande, 
durent  la  conquête  de  vastes  empires  dans  rinde.  Pour 
le  tfdileau  des  forces  maritimes  des  divers  États,  nous 
renvoyons  aux  articles  consacrés  à  ces  États  dans  notxs 
DUstioimaire  de  Biographie  et  d^Histoura,  V.  aussi 
De  Montferrier,  Dictionnaire  umvenel  et  raùonmi  de  fsa- 
rtiM  ;  Bonnefoux  et  Paris,  Dictionnaire  de  mariné.  1850, 
2  vol.  gr.  in-8*i  De  Boismèlé  et  de  Richebourg,  Histoire 
générale  d»  la  marine,  Paris,  1744-58,  3  voL  in-4»; 
Bouvet  de  Cressé,  Histoire  de  la  marme  de  tous  le$ 
peuples,  Paris,  1824, 2  vol.  in-8«;  Chasseriau.  Précis  àô- 
torique  de  la  marine  française,  1847,  2  voL  in-8<*. 

MAaraE  (Code  de  U).  La  législation  maritiaie  de  la 
France  est  éparse  dsns  de  nombreuses  lois  et  ordoo* 
nanoes.  Avant  1789,  le  premier  et  le  plus  considérable 
des  règlements  fut  l'ordonnance  du  15  avril  1689,  pré- 
psrée  par  Colbert,  et  rendue  sur  le  rapport  de  son  lila 
Selgnelay.  Vinrent  ensuite  le  règlement  du  l*'  août  1731^ 
les  ordonnances  du  27  aepu  1776  et  du  S5  oiars  1785b 
Par  une  loi  du  21-22  août  1700,  FAsseinblée  oonslipj 
tuante  abrogea  toutes  les  dispodtions  antérieures,  oomiiil 
incompatibles  avec  les  prindpes  d'une  Constitutiai 
libre]  un  décret,  qui  reçut  le  nom  de  Code  des  vam 


MAR 


121» 


MAR 


MON»  OU  Codé  pénal  ds  la  Marm$,  régla,  mais  d*ane 
manière  imparfaite,  la  procédure  à  suivre  pour  les  fautes 
et  délits  commis  dans  Tannée  naTale  et  dans  les  ports, 
at  ia  pénalité  qu*oo  devrait  appliquer.  Pour  compléter 
no  aoTTS,  l'Assemblée,  par  une  loi  du  12  octobre  i7Ql, 
étendit  aox  troupes  de  la  marine  les  lois  des  21-23  oo- 
ftère  1790  et  20  septembre  1791  sur  la  discipline  mi« 
litaireb  Vinrent  ensuite  :  la  loi  du  3  brumaire  an  iv  sur 
riBscription  maritime;  Tarrété  du  5  germinal  an  xn 
nr  les  Conseils  de  guerre  maritimes  ;  les  décrets  du 
IS  juillet  1806  sur  Torganisation  des  Conseils  de  mar 
rine  et  Texercice  de  la  police  et  de  la  Justice  à  bord  des 
nuneaox,  du  12  novembre  1800  relativement  à  la  créa- 
tion et  à  Torganisation  des  tribunaui  maritimes,  du 
4  mai  1812  sur  la  recherche  et  la  punition  des  déserteurs 
de  la  marine;  l'ordonnance  du  21  février  1816;  les  lois  des 
18  afril  et  11  mai  1831  sur  les  pensions  de  Tarmée  de 
mer,  des  2(^28  avril  1832  sur  Tavancement  dans  Tannée 
oavale;  le  décret  des  12-14  mars  1848,  portant  abolition 
des  peines  de  la  bouline,  de  la  cale  et  des  coups  de 
corde;  ceux  des  26  mars  et  16  avril  1852  sur  le  régime 
delà  justice  maritime,  applicables,  sous  le  point  de  vue 
dûdplinaire  et  pénal,  à  la  marine  marchande  comme  à 
k  marine  militaire.  En  1858.  un  nouveau  Code  [jour  la 
marine  militaire  a  été  établi.  V.  Valin,  Commentaire  sur 
f Ordonnance  de  la  marine,  du  mois  S  août  i681,  Paris, 
1834,1  vol.  in-4<*  ou  2  vol.  in-8<»;  Blanchard,  Répertoire 
Armologvjue,  par  ordre  des  matières,  des  principales 
lois  relatives  à  la  marine,  in-8**;  Desaint,  RecueÛ  des 
loi»  rdatioes  à  la  marine  et  aux  colonies,  1709-1809, 
18  Tol.  in-8o;  Bi^ot  et  Poirré,  Annales  maritimes  et  CO" 
hnialts,  ou  recueil  des  lois  et  ordonnances,  règlements  et 
éédsions  nUnistérielles ,  mémoires,  observations,  etc., 
181647, 104  voL  in-8«;  Hautefeuille,  Législation  cnmt- 
BfU«  maritime,  1830,  in-8<*;  fieaussant.  Code  m<iritime 
nmposê  des  lois  de  la  marine  marchande,  réunies,  coor- 
^miMs  et  expliquées ^  1840,  2  vol.  in-8o;  Rimbaud, 
fludft  sur  la  UgiAatwn  et  l'administration  maritime, 
1851,  itt-8*;  Prugnaud,  Législation  et  administrcUion  de 
lamarine,  Rochefort,  1851^2, 2  vol.  in-8»;  Gardât,  Ma- 
nne  mardtande,  1854,  in-8*;  Hautefeuille ,  GiUde  des 
iuges  marins^  Code  de  la  justice  militaire  pour  Varmée 
dt  mer,  1860,  in-8». 

uaniB  (Commissaires  de),  officiers  de  Tadministration 
maritime,  chargea  des  approvisionnements,  des  revues 
desemplovés  au  service,  du  payement  des  soldes,  et  de 
toos  les  détails  de  oonu)tabihté.  Us  se  divisent  en  Com- 
fMsaires  généraux,  Commissaires,  Commissatres-ad^ 
ioûUf ,  Soui^ommissaires  (deux  classes  de  chaque  sorte), 
et  Aides^ommissaires, 

viara  (CoBieil  des  travaux  de  la).  Conseil  créé  en 
1831,  pour  donner  son  avis  sur  les  mémoires,  rapports, 
pkns,  devis  estimatifs,  tarifs  de  main-d'œuvre  et  autres 
félsûîs  aox  constructions  navales,  au  matériel  de  l'artil- 
lerie, aux  travaux  des  ports  et  arsenaux  maritimes;  pour 
préparer  les  règlements  nécessaires  à  l'exécution  des  tra- 
vaux de  tout  genre,  rédiger  les  programmes  des  concours, 
eninioer  les  systèmes  nouveaux  proposés  par  des  inven- 
tion, etc.  n  est  présidé  par  un  viœ-amiral,  et  comprend 
trois  officiers  gén^uux  ou  supérieurs  de  la  marine,  Tin- 
•peeteor  général  du  génie  maritime,  un  inspecteur  gé- 
néral des  travaux  hydrauliques,  le  directeur  et  deux 
officiers  supérieurs  des  constructions  navales,  un  inspec- 
tev  et  on  officier  de  TartiUerie  de  marine,  un  inspecteur 
dirisionnaîre  on  on  ingénieur  des  travaux  hydrauliques. 
■AIME  (Dépôt  de  la).  V.  D^pot  de  la  masinb,  dans 
notre  Dietumnaire  de  Biographie  et  d'Histotre. 

■Ainre  (Êoole  de).  F.  Éoolb  navale,  dans  notre  Dio- 
^oenaire  de  Biographie  et  d'Histoire,  page  870,  col.  1. 
.  Kâam  (Invalides  de  la).  F.  Invaliobs,  dans  notre  Dio- 
(MoatTi  de  Biographie  et  d'Histoire. 
■AaoïB  (Mécaniciens  de  la).  F.  MécAinaBRS. 
■ABOIE  (Ministère  de  la).   F.  Moiistàrb,  dans  notre 
^Mtmnaxre  de  Biographe  et  d^ Histoire^  p.  1804. 
■Aius  (Musée  de  la).  F.  Loovbb  (Musée  du). 
Marines,  dessins  et  peintures  qui  représentent  des 
<)biets  et  des  scènes  maritimes.  Les  plus  habiles  peintres 
de  marine  ont  été  :  en  Flandre,  Paul  Bril  et  les  Willaert  ; 
a  Hollande,  les  Van  den  Velde,  fiackhuysen.  Van  der 
Hejden,  Wlieger,  Cuyp,  Ruvsdael,  Van  Everdlngen;  en 
Italie,  Salvator  Ross  et  Ganaletto;  en  Angleterre,  Wilson, 
^^UMoas  Jones,  Andries  Both,  Tumer,  Stanfleld,  Callow, 
Bonmgton,  Harding,  Galoott  et  Newton  Fielding;   en 
Ptance,  Claude  Lorrain,  Joseph  Vemet,  Gudin ,  Game- 
ny,  Isabey,  Rogneplan,  Morel-Fatio,  Mozin,  Aug.  Dela- 
«n}ix,  Lepohtenit. 


MARIOLE,  mot  qui  signifiait,  au  moyen  âge,  une  image 
de  la  Vierge  Marie. 

MARIONNETTES,  poupées  de  bois  ou  de  carton  repré- 
sentant toutes  sortes  de  personnages,  et  que  Ton  fait  mon* 
voir  sur  un  théâtre  à  l'aide  de  flU  ou  de  ressorts.  Leur  nom 
vient,  dit^on,  d'un  Italien  nommé  Blarion,  qui  les  intro- 
duisit en  France  sous  Charles  IX.  Les  anciens  Grecs 
connurent  les  marionnettes  sous  le  nom  de  neurospasta 
(objets  mis  en  mouvement  ^  des  fils),  et  les  Romains 
sous  ceux  d*imagunculœ,  simulacra,  oscilla.  On  leur 
trouverait  peut-être  une  origine  hiératique  :  car,  les 
idoles  des  dieux,  après  avoir  été  grossièrement  taillées 
dans  des  troncs  d'arbres,  furent  faites  de  pièces  as* 
semblées,  et  articulées  pour  mieux  imiter  la  vie.  Telle 
était,  au  dire  de  Diodore  (liv.  XVII),  la  statue  de  Jupiter 
Ammon,  qui  indiquait  d'un  mouvement  de  la  tête  a  ses 

{urètres  la  route  qu'elle  voulait  suivre;  ou  celle  de  TApol- 
on  d'Héliopolis,  qui  rendait  ses  oracles  en  poussant  ses 
porteurs,  ou  qui  s'élevait  toute  seule  sous  la  voûte  de 
son  temple.  On  sait  aussi  que,  dans  les  banquets,  les 
Ég^tiens  se  passaient  de  main  en  main  des  figurines  en 
bois  peint  représentant  des  momies,  et  les  tombeaux  de 
leurs  enfants  contiennent  souvent  des  statuettes  à  mem« 
bres  mobiles.  Ce  que  les  Grecs  appelaient  la  vie  dédO' 
lique  dans  une  statue  était  peut-être  une  allusion  aux 
statues  de  Dédale,  qui  auraient  eu  des  membres  articu* 
lés.  Aristote  (De  animât  1, 3)  parle,  en  efTet,  d'une  Vénus 
de  bois,  attribuée  à  Dédale,  et  qui  était  douée  de  mou* 
vement.  On  fit  aussi  des  poupées  en  terre  cuite,  avec 
Jambes  et  bras  articulés;  car  on  en  a  trouvé  un  grand 
nombre  dans  les  ruines  de  Camarine.  La  statuaire  mo- 
bile, descendue  du  temple  aux  amusements  de  Tenfance, 
finit  par  être  admise  sur  le  thé&tre.  Nous  voyons  dans 
Athénée  (Deipn.,  xvi)  qu'un  Joueur  de  marionnettes  Tut 
autorisé  à  faire  monter  ses  acteurs  de  bois  sur  le  thé&tre 
de  Bacchus  à  Athènes.  —  Les  mêmes  faits  se  sont  pro- 
duits chef  les  Romains.  La  statue  de  la  Fortune,  à  An- 
tium,  s'agitait  avant  de  rendre  ses  oracles.  Les  tombeaux 
d'enfants  découverts  en  Italie  contenaient  des  pantins 
d'os,  d'ivoire,  de  bois  on  de  terre  cuite.  Horace,  Aulu- 
Gelle,  Maro-Aurèle,  les  Pères  et  les  Apologistes  de  l'Église 
font  allusion  aux  marionnettes  théâtrales,  et  Apulée  {De 
mundo)  donne  une  idée  de  la  perfection  avec  laouelle 
elles  étaient  construites.  Dans  le  souper  de  TrimaldoUk 
Pétrone  fait  j^araltre  devant  les  inrités  une  larve  d'ar- 
gent pajrfaitement  articulée  et  qui  exécute  une  danse. 

Sans  parier  de  la  statuaire  mobile,  qui  fut  souvent 
employée  dans  les  églises,  dans  les  processions  et  dans 
les  fêtes,  il  est  certain  que  les  marionnettes  théâtrales  ne 
furent  pas  oubliées  pendant  le  moyen  âge.  On  en  a  figuréi 
par  exemple,  dans  une  miniature  du  xn*  siècle  de  1 'flor- 
tus  deliciarum  composé  par  Herrade  de  Landsbeig  et 
conservé  à  la  bibliothèque  de  Strasbourg.  —  Parmi  les 
Modernes,  ee  sont  les  Italiens  qui  ont  le  plus  goûté  les 
marionnettes  :  ils  les  nomment  burattint,  fantoccini 
ptippi,  ptippost,  et  leur  font  Jouer  des  pièces  de  tout 
genre,  soit  dans  des  loges  en  plein  air,  soit-dans  des  salles 
couvertes  et  plus  él^antes.  Le  héros  de  la  scène  est 
Cassandnno  a  Rome,  Girolamo  k  Milan,  GiranduSa  à 
Turin,  Puleinello  et  Scaramuccia  à  Naples.  —  L'Espagne 
a  emprunté  les  marionnettes  (titeres)  a  l'Italie.  Les  sta- 
tuettes de  saints  à  Jointures  mobiles  et  les  madones  à 
ressorts  y  étaient  depuis  longtemps  en  usage,  lorsque 
Giov.  Torriani,  habile  mécanicien  amené  par  Charles- 
Quint,  appliqua  son  art  au  perfectionnement  des  ma- 
rionnettes. Tantôt,  comme  au  temps  de  TEmpire  romain, 
on  donnait,  sur  le  devant  du  thé&tre,  l'explication  de 
leur  pantomime;  tantôt,  celui  qui  les  faisidt  mouvcnr, 
caché  derrière  le  fond,  parlait  pour  elles.  Le  répertoire 
des  marionnettes  espagnoles  est  profondément  empreint 
de  l'esprit  national  :  les  héros  sont  des  Mores,  des  che- 
valiers, des  géants,  et»  magiciens,  des  conquérants  de 
llnde,  des  personnages  de  l'Ancien  Testament,  des  saints 
et  des  ermites.  —  En  Angleterre,  avant  le  schisme  de 
Henri  VDI,  on  représenta,  aux  fêtes  de  Noël,  de  P&(^ues 
et  de  TAscension,  des  espèces  de  Mystères  dans  les  églises 
à  l'aide  de  grandes  poupées  ou  mannequins  (mtrocis- 
plays);  ces  engins,  emplovés  dans  les  processions  popu* 
laites,  portaient  le  nom  de  pageants.  l>epuls  Tétablisse- 
ment  ou  protestantisme,  il  n'y  eut  plus  que  des  ma- 
rionnettes théâtrales,  auxquelles  on  donne  les  noms 
divers  de  puppet,  mammet,  motwn,  drollery.  Outre 
l'ancien  répertoire  religieux  (Jonas  et  la  Baleine,  Sodome 
et  Gomorrhe,  Adam  et  Ève^  etc.),  ces  marionnettes  re« 
présentèrent  des  chronide-plays  {Jules  César,  le  Duc  de 
Guise^  la  Conspiration  des  Poudres^  etc.).  Interdites  par 


MAR 


1220 


MAR 


le  rigorisme  puritain  au  momeat  de  la  Rérolutien  d*An- 
detcrre,  éUea  roprirent  faveur  après  la  restauration  des 
Stuarts,  et  ce  fut  alors  qu*on  rit  paraître  le  fameux 
PiÊnch,  dont  le  nom  est  rahrégé  de  PiUemelto,  écrit  quel- 
quefois PunefUndio,  Ce  sont  les  aventures  de  ce  libertin 
tapageur,  mari  pen  fidèle  et  père  brutal  «  souvent  tW>n- 
deur  en  politique,  qai  ont,  depuis  cette  époque,  fourni  le 
fond  dee  pièces  à  marionnettes.  Toutefois,  le  répertoire 
religieux  n*a  pas  complètement  disparu,  même  de  nos 
Joors,  et  Ton  Joue  encore  l'Arche  de  Noé.  l'Enfant  pro- 
digue,  la  PassumdeJ.^C.^  à  côté  d'imitations  de  pièces  de 
Shakspeare. — L'Allemagne  avait,  dès  le  xn*  siècle,  ses  Jeux 
de  mûionnettes  {tokkmtpil,  hampêlmann).  Ces  acteurs 
de  bois  ne  tardèrent  {ms  à  représenter  des  légendes  ro- 
manesques et  populaires,  Genewève  de  Brabant^  lee 
Quatre  fUs  Aymon,  Blanche  comme  neige,  la  Dame  de 
Boitssillon,  la  Belle  Maguelonne,  eto.,  sujets  entremêlés 
de  magie  et  d'apparitions  diaboliques,  et  qui  trouvèrent 
comme  leur  complément  et  leur  dernier  écho  dans  le 
Docteur  Faust.  Parmi  les  pièces  religieuses  on  distinguait 
David  et  Goliath,  Judith  et  Holopherne,  la  Naissance  de 
Jésus,  le  Massacre  des  Innocents,  Au  milieu  de  ces 
drames  pieux,  et  malgré  la  gravité  du  sujet,  les  Alle- 
mands ont  placé  le  bouffon  obligé  de  tout  théâtre  de  ma- 
rionnettes :  ils  le  nomment  ffanswurst  ou  Jean  Boudin, 
et  en  font  un  personnage  moins  mauvais  st^et  que  Punch, 
mais  plus  lourd  et  plus  glouton.  Hanswurst  a  été  dé- 
trôné en  Hollande  par  Bans  Pickelhdrmo,  puis  par  Jan 
Klaassen,  en  Autriche  par  le  Joyeux  paysan  Casperle. 

En  France,  comme  dans  les  autres  pays,  les  marion- 
nettes commencèrent  par  être  quelque  chose  de  sérieux. 
n  se  peut  même  qu'on  les  ait  ainsi  appelées  de  la  Vier^ 
Marie,  nom  dont  Marion  et  Marionnette  sont  des  dimi- 
natifs  :  car  des  statues  animées  de  Marie  parurent  sou- 
vent dans  les  cérémonies  religieuses.  Après  avoir  Joué 
des  Mystères,  les  marionnettes  devinrent  des  acteurs 
profanes.  Le  xvi*  siècle  vit  naître  deux  types  vraiment 
français ,  Polichinelle  et  la  Mère  Gigogne.  Polichinelle 
dérive  du  Macchus  des  Atellanes  antiques,  en  passant 
par  le  Pulcinello  napolitain  :  il  rappelle,  par  son  carac- 
tère enjoué,  railleur  et  batailleur^  comme  par  son  cos- 
tume, la  physionomie  traditionnelle,  sinon  du  roi  Henri  IV, 
au  moins  de  l'officier  béarnais.  La  mère  Gigogne,  modèle 
de  la  fécondité  maternelle,  est  une  parente  des  concep- 
tions rabelaisiennes  de  Granàgousier  et  ae  GargamelU; 
elle  parut  sur  les  grands  thé&tres,  à  l'hôtel  de  Bourgogne, 
dans  les  ballets  du  Louvre,  avant  de  tomber  dans  le  do- 
maine du  théâtre  populaire.  Sous  Louis  XIV,  Jean  Brio- 
ché, dont  le  singe  Pagotin  est  resté  classique,  établit  à 
Paris,  au  bas  du  Pont-Neuf,  près  de  l'hôtel  de  Nesle,  un 
thé&tre  de  marionnettes,  qui  eut  un  grand  succès.  On 
essaya  vainement  de  lui  faire  concurrence  au  Marais,  où 
fut  élevé  un  thé&tre  dit  des  Pygmées  ou  des  Bamboches» 
Au  XVIII*  siècle,  les  marionnettes  eurent  leur  véritable 
patrie  à  la  foire  de  SMSermaln,  sur  l'emplacement  do 
marché  actuel,  et  à  la  foire  SMjaurent,  entre  les  rues  ao- 
taellee  du  faubourg  S^-Denis  et  du  faubourg  S*-Martin. 
Les  pièces  que  Ton  composa  pour  elles  forment  une  vo- 
lumineuse collection  t  on  y  parodia  un  grand  nombre 
d'ouvrages,  le  Médecin  maigri  lui  de  Molière,  le  Romulus 
de  La  Motte  {Pierrot-Bomulus  ou  le  Bavisseur  poli),  la 
Mérope  (Javotte)  et  VAlzire  de  Voltaire  (la  FUle  obéis- 
sante)^ VAtys  et  VAmadis  de  Quinault,  la  Didon  de  Le- 
franc  de  Pompignan  {la  Descente  d'Enée  aux  Enfers) y  etc., 
et  plusieurs. écrivains  en  renom  ne  dédaignèrent  pas 
d'enrichir  ce  répertoire,  tels  que  Piron,  Fuzelier,  Lesage. 
Les  princes  et  les  riches  particuliers  voulurent  avoii 
leurs  théâtres  de  marionnettes  :  il  y  en  eut  à  Sceaux  chez 
le  duc  du  Maine,  à  Cirey  chez  Voltaire.  Aux  approches  de 
la  Révolution,  des  entreprises  de  marionnettes  furent 
dirigées  avec  un  certain  éclat  sur  le  boulevard  du  Temple 
par  Nicolet  et  par  Audinot;  mais  le  théâtre  fondé  en  1784 
au  Palais-Royal  par  Séraphin  éclipsa  tous  les  autres  :  il 
s'y  est  maintenu  lusqu'en  1861,  époque  où  il  a  émigré 
sur  lee  boulevards.  Il  faut  convenir  que  la  malice,  la 
verve  et  la  satire  ont  considérablement  baissé  aajour- 
dliui  dans  le  répertoire  des  marionnettes.  Sur  les 
scènes  un  peu  aristocratiques,  on  compose  des  spectacles 
pour  les  yeux  t  les  marionnettes  du  Pré-Catelan,  au  bois 
de  Boulogne,  déploient  la  richesse  de  leurs  costumes  et 
la  perfection  de  leur  mécanisme.  Mitis  la  marionnette 
populaire  est  bien  près  de  se  perdre  :  à  Paris,  elle  n'a 
d'autre  refuge  que  de  petits  théâtres  en  plein  vent.  Gui- 
gnol  aux  Champs-Elysées,  Guignolet  au  Luxembourg; 
i  dans  les  départements,  de  malheureux  industriels  pro- 
mènent de  foire  en  foire  leurs  acteurs  mal  appareillés  et 


défraîchis,  auxquels  ils  font  jouer  sans  esprit  et  sans  ait 
Genetnève  de  Brabant,  le  Malade  imaginaire,  la  Tovar  âe 
Nesle,  et  surtout,  bien  que  l'auditoire  soit  médiocrement 
croyant  et  recueilli,  Joseph  vendu  par  ses  frères,  VEn- 
fant  prodigue,  la  Passion  de  f.-C.,  et  la  Tentation  4$ 
S^  Antoine.  V.  Ma^in,  Histoire  des  Marionnettes  en 
Europe  depuis  Vanttgtûà  jiuqu'à  nosjours^  Paris,  1852, 
1  vol.  in-8*.  B. 

MARITIME  (Droit,  Génie,  Inscription).  V.  Dboit,  Gé> 
niB,  Inscription. 

VAsiTiMB  (Justice).  D'après  l'ordonnance  de  1689,  tous 
les  délits  commis  â  bord  des  navires  étaient  Jugés  par  les 
commandants  :  pour  les  crimes,  ils  étaient  jugés  à  terre 
par  un  Conseil  de  guerre,  composé  de  l'amiral,  du  vice- 
amiral,  des  lieutenants  généraux,  intendants,  chefs  ^d'es- 
cadre, capitaines  de  marine  et  autres  officiers;  toutefois, 
en  présence  de  Tennemi  ou  dans  un  danger  pressant,  le 
commandant  pouvait,  après  avoir  pris  l'avis  de  ses  offi- 
ciere,  punir  d'urgence  les  crimes.  Les  peines,  â  terre 
comme  â  bord,  étaient  la  mort,  les  mlères,  les  fers,  le 
pain  et  l'eau,  la  barre  de  Justice,  la  Bouline,  la  cale.  Le 
règlement  du  l*'  août  1131  donna  aux  intendants  de  jus- 
tice, police  et  finances  des  galères  la  connaissance  de  tous 


les  autres  crimee  et  délits  étant  renvoyés  an  Jugement 
du  Conseil  de  guerre.  Cette  même  ordonnance  iostitiiB 
un  Conseil  de  marine  pour  Juger  les  commandants  de 
bâtiments  oui  auraient  manqué  a  leurs  devoirs.  L'ordoo- 
nanœ  du  i5  mars  1765  envoya  devant  un  Conseil  de 
guerre  les  capitaines  qui  avaient  perdu  le  navire  qu'ils 
commandaient.  L'ordonnance  du  35  man  1785  étendit 
l'action  du  Conseil  de  guerre  aux  troupes  de  la  marine. 
La  loi  du  2i  août  1790  introduisit  Intempestivement 
dans  la  Justice  maritime  le  Jugement  j^ar  Jury,  et  distin- 
gua les  peines  disciplinaires  et  les  peines  amictives  :  les 
premières  étaient  le  retranchement  du  rin  pendant  trois 
Jours  au  plus,  les  fers,  la  mise  â  cheval  sur  une  barre  du 
cabestan,  et  la  peine  d'être  attaché  au  prend  mât  pendant 
trois  Jours  au  plus;  et,  pour  les  officiers,  les  arrêts,  1: 
prison,  la  suspension  pendant  un  mois  au  plus,  avec  oi; 
sans  privation  de  solde;  les  secondes  étaient  les  coups  (i< 
corde,  la  prison  ou  les  fers  sur  le  pont  pendant  plus  de 
trois  Jours,  la  réduction  de  grade  ou  de  solde,  la  cale,  In 
bouline,  les  galères,  la  mort.  Une  législation  analogui 
fut  donnée  aux  arsenaux,  le  12  oct.  1791.  La  loi  du  16  ni- 
vôse an  II  supprima  Ta^jonction  du  Juir  dans  la  plu* 
part  des  cas.  Le  décret  du  22  Juillet  1806,  qui  resta 
pendant  cinquante  ans  la  loi  de  la  Marine,  créa  des  Con- 
seils de  Justice  et  des  Conseils  de  guerre;  les  premiers, 
composés  de  5  Juoes,  pour  connaître  des  délits  commis  à 
bord,  emportant  la  peine  de  la  cale  ou  de  la  bouline;  les 
seconds ,  formés  de  8  officiers  généraux  on  supérieurs, 
pour  Juger  les  autres  crimes  et  délits  emportant  une 
peine  plus  grevé,  n  maintint  aux  commandants  des  bâti- 
ments les  pouvoirs  d'urgence  que  leur  conférait  l'ordon- 
nance de  1689 ,  et  confirma  l'existence  des  Conseils  de 
guerre  spéciaux  que  la  loi  de  1790  avait  institués  poor 
Juger  les  déserteurs.  Le  décret  du  i%  nov.  1806  créa, 
pour  les  arsenaux  et  les  ports,  les  tribunaux  maritimef 
(  y.  plus  loin).  L'ordonnance  du  21  février  1816  supprima 
les  tribunaux  institués  pour  Juger  la  désertion,  et  attri- 
bua la  connaissance  de  ce  crime  aux  Conseils  de  gnerre 
ordinaires.  Le  gouvernement  provisoire  de  1848  abolit 
les  châtiments  corporels,  sauf  l'emprisonnement  de  quatre 
Joure  â  un  mois  au  plus,  avec  les  fers.  Un  décret  da 
26  mars  1852  apporta  de  nouvelles  modifications  à  la  ^ 
nalité.  Le  nouveau  Code,  adopté  le  4  Juin  1858,  est  divisé 
en  quatre  livres,  comprenant  :  i^  l'organisation  des  tri- 
bunaux de  la  marine  ;  2"  la  compétence  de  ces  tribu- 
naux; 3®  la  procédure;  4"  les  crimes,  les  délits  et  ij» 
peines.  Les  Juridictions  qu'il  conserve  sont  :  les  Conseils 
de  guerre,  les  Conseils  de  Justice,  et  les  IVibunaox  ma- 
ritimes. Un  décret  du  21  Juin  a  déterminé  le  ressort  des 
Conseils  de  guerre  et  des  Tribunaux  maritimes  des  8^ 
rondissements  maritimes;  un  autre  décret  du  mèmejoor 
a  étendu  aux  colonies  le  nouveau  Code  de  fustloe  mari- 
time. Les  peines  prononcées  sont  :  en  matière  de  crime, 
la  mort,  les  travaux  forcés  â  perpétuité,  la  déportation, 
les  travaux  forcés  â  temps,  la  détention ,  la  réclusion,  le 
bannissement,  et  la  dégradation  militaire;  en  matière 
de  délit,  la  destitution,  les  travaux  publics,  l'emprison- 
nement, la  privation  de  commandement,  l'inaptitude  l 
l'avancement,  la  réduction  de  grade  ou  de  classe,  le  ca^ 
chot  ou  double  boucle,  et  l'amende. 


NAR  1221 

■ABimB  (L^tlalion).  K.  Marins  (Gode  de  la). 

MARmifES  (Tribunaux),  tribunaux  qu'il  ne  faut  pas 
eoofoDdre  arec  les  Conseils  de  guerre  maritimes  (K. 
GcniB—  Conseil  de),  et  qui  furent  établis  en  1806  pour 

Ë^  les  crimes  «  délits  ou  contraventions  commis  par 
marins  et  autres  personnes  dans  les  ports  et  arse- 
naux, contre  leur  police  et  leur  sûreté,  ou  contre  le  ser- 
Tke  maritime.  Ils  n*étaient  pas  originairement  perma- 
neats,  et  se  dissolvaient  après'  le  Jugement  de  la  cause 
MUT  laquelle  ila  avaient  été  convoqués.  Ils  étaient  dV 
Mffd  composés  de  huit  juges ,  dont  six  pris  parmi  les 
«ffieiers  de  marine,  à  la  désignation  du  préfet  maritime, 
et  deux  parmi  les  Juges  du  tribunal  civil,  et  présidés 
pu-  rofficier  le  plus  élevé  en  grade  présent  dans  le  port 
Depuis  le  Code  de  4858,  qui  a  rendu  ces  tribunaux  pei^ 
manents,  ils  se  composent  d*un  capitaine  de  vaisseau  on 
de  frégate,  d'un  Juge  du  tribunal  de  l'*  instance,  d*un 
Juge  suppléant  (ou  d*un  avocat,  ou  d*un  avoué),  d*un  com- 
musaire-a^loint  ou  d*un  soua-eommisaaire  de  marine,  de 
S  lieutenants  de  iraisseau,  et  d'un  sous-ingénieur.  —  11  y 
s  eu  des  tribunaux  maritimes  spéciaux  pour  Juger  les  con- 
tnventionB  aux  règlements  de  police  dans  les  chiourmes, 
les  bagnes,  et  les  eolonies  pénitentiaires  :  aujourd'hui  les 
tribunaux  maritimea  d*arrondia8ement  les  remplacent  — 
Us  décrets  dea  S4  mars  et  46  avril  1852  sur  la  marine 
niarchande  ont  organisé  dea  tribunaux  nuiritimes  com- 
nerdanx,  qui  connaissent  des  délits  énumérés  dans  ces 
décrets,  et  dont  les  décisions  ne  peuvent  être  attaquées 
pir  aucun  recours  ni  en  révision  ni  en  cassation. 

MARIVAUDAGE,  nom  donné  par  dénigrement  au  style 
et  au  genre  d^esprit  de  Marivaux.  On  entend  par  là  ce 
mélaDge  bixarre  de  métaphysique  subtile  et  de  senti- 
ments alambiqués,  en  même  temps  que  ces  formes  gra- 
deuaement  maniérées,  ce  cliquetis  de  mou  ingénieux , 
œtte  finesse  étudiée,  qui  caractérisent  Tauteur  des 
Fauites  eonfidmoêt.  En  voici  un  nonrt  exemple  dans  U 
/eu  fU  l'amour  et  du  hasard  {h  6)  : 

8ILTIA,  ions  le  nom  de  LiêêUê, 
Vol  Je  venx  que  Bonrgalgnoa  in*alnie. 

DOBAXTB,  Bone  le  nom  de  Bourguignon. 
Tb  te  ftds  toirt  de  dire  Je  Teoz,  belle  LUette,  tu  n'M  pee  be- 
Nlii  d'ordoimer  pour  être  servie. 

M  A  B 1  o ,  frérê  de  Silvin. 
Hmilciir  Bourguignon,  roue  «Tes  pUlé  oetta  galanterie -1k 
VMlqu  part 

DOBAVTX. 

Yent  aves  raiaon    monalenr;  e*eet  dans  Mi  yaoz  qm  Je  l'ai 


MAR 


11  m  ra  pas  1 
■tqi'k  prendre. 


MABIO. 

plat  Je  te  défende  d*avolr  tant  d'esprit 

aiLTIA. 

dépene,  et  s'il  en  tronre  dans  mee  yenz,  il 


HARLY  (  Château  de],  château  de  plaisance  construit 
par  Mansanl  pour  Louis  XIV,  et  que  ce  prince  habita 
pendant  sa  vieillesse.  On  y  arrivait  par  une  magnifique 
areDoe  :  12  pavillons,  distribués  à  droite  et  à  gauche 
d'une  vaste  pièce  d*eau,  et  communiquant  entre  eux  par 
dei  berceaux  en  fer  garnie  do  feuillages,  formaient  une 
belle  perspective,  terminée  par  un  gros  pavillon  carré  et 
iiolé.  Ces  divers  bâtiments  étaient  extérieurement  dé- 
corés à  fresque,  sur  les  dessins  de  Lebrun,  de  manière  à 
figurer  le  temple  du  Soleil  (Louis  XIV ^  au  milieu  des 
signes  du  Zodiaque.  Le  parc,  attenant  a  celui  de  Ver- 
noUes,  fut  planté  par  Dunuié,  et  non,  comme  on  Ta 
dit,  par  Mansard  :  on  y  trouvait  des  fontaines  jaillis- 
nntes  an  milieu  des  baquets,  des  théâtres  de  veardure, 
de  longues  perspectives  peuplées  de  statues,  dMmmenaes 
chutes  d'eau,  etc.  Ce  fut  une  faveur  très-enviée  que  d'être 

"de  trois  iours,  de- 
château  de  liarly  a 
national,  et  démoli. 
On  en  tira  plusieurs  des  statues  qui  décorent  ai^ourd'hui 
le  jardin  des  Tuileries.  B. 

HASLT  (Machine  de),  machine  hydraulique,  placée 
n  bas  de  Louveciennes,  et  que  Louis  XIV  fit  établir 
poor  envoyer  aa  château  de  Blarlv,  et  plus  tard  â  celui 
deVenailles,  des  eaux  de  la  Seine.  Elle  consistait  en 
U  roues  â  piïettes,  de  ii  mètres  de  diamètre,  installées 
SB  3  rangs,  les  uns  devant  les  autres,  sur  un  barrage  en 
pilotis  fermant  tout  un  bras  de  la  Seine,  dans  une  lon- 
punr  de  10,i50  met.  ;  les  roues  agissaient  sur  221  corps 
ie  pompes,  04  aspirantes  et  foulantes,  sur  la  ririère,  et 
i57  foulantes,  installées  â  deux  hauteurs  différentes  sur 
■cftte,  et  poussant  l'eau  sur  un  aqueduc  de  pierre,  â 
194  mèû  aiMloaaus  du  niveau  du  fleuve,  et  â  une  dis- 


tance horizontale  de  i,23G  met.  La  machine  de  Marly 
fût  construite  de  1676  à  1683,  sur  les  plans  du  baron  de 
Ville  secondé  par  un  charpentier  liégeois,  nommé  Ren- 
nequin  Sualem ,  et  co^ta  environ  4  millions  de  livres. 
L'appareil  formidable  des  i4  roues,  leurs  supports,  qui 
semblaient  une  forêt  de  charpente;  la  transmission,  sur 
la  montagne,  des  mouvements  par  d'immenses  tirants  de 
fer  articulés,  longs  de  670  met.  environ ,  tout  cela  avait 
un  air  de  complication  et  un  aspect  gigantesque  qui  pnn 
voqua  l'admiration  générale  :  ce  n'était  cependant,  sous 
tous  les  rapports,  qu'une  conception  de  l'enfance  de  l'art» 
Son  maximum  d'effet,  lorsque  la  rivière  était  très-forte, 
produisait  5,760  met.  cubes  d'eau,  et  moitié  en  temps 
ordinaire.  Elle  tomba  â  1,iôO  met.  par  l'usure  de  la  ma- 
chine, puis,  en  1780,  à  614  met.,  enfin,  en  1803,  â  230 
met.  —  L'année  suivante,  Brunet,  ingénieur  charpen- 
tier, remplaça  l'ancienne  machine  par  une  nouvelle,  qui, 
composée  d'une  seule  roue  hydraulique  et  de  4  corps  de 
pompe,  montait  d'un  seul  Jet  l'eau  sur  l'aqueduc  de 
Marly,  et  en  donnait  une  quantité  double  de  ce  que  l'on 
obtenait  en  dernier  lieu.  —  Cependant  cette  machine , 
très-peu  dispendieuse,  ftit  remplacée,  en  1826,  par  une 
pompe  â  feu,  établie  sur  la  rive  gauche  de  la  Seine,  et  qui, 
%rec  une  force  de  62  chevaux,  élevait  environ  1,700  met. 
cubes  en  24  heures.  Mais  elle  brûlait  pour  300  fr.  de 
charilK>n  par  Jour  de  travail,  et  dès  l'abord  on  ne  Tem- 
plojra  que  comme  auxiliaire  des  roues,  lorsqu'elles 
étaient  noyées,  puis  on  revint  tout  â  fait  â  la  force  hy- 
draulique :  le  vieux  barrage  fut  remplacé,  de  1855  â  1850, 
par  une  digne  en  maçonnerie  où  3  roues  â  palettes,  de 
12  met.  de  diamètre  sur  4"*,  50  de  large,  en  fer  forgé,  oni 
été  placées;  elles  font  monter,  d'un  seul  Jet,  l'eau  sut 
l'aoueduc,  au  moyen  de  12  corps  de  pompes  aspirantes  et 
foulantes,  placées  horizontalement.  Ces  roues  marchent 
Jour  et  nuit,  et  élèvent,  en  24  heures,  de  7,000  â  8,000 
met.  cubes.  Cette  machine,  très-économique,  a  été  con- 
struite par  M.  l'ingénieur  Dufrayer,  et  fait  le  service  de- 
puis 1859.  L'emplacement  de  3  autres  roues  a  été  réservé 
dans  la  digue,  pour  utiliser,  au  besoin,  toute  la  force 
d'eau,  qui,  avec  une  chute  de  2*",  50,  en  moyenne,  est 
évaluée  â  1,200  chevaux-vapeur.  C.  D— y. 

MARMOUSETS.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  d» 
Biographie  et  d'Histoire, 

MARONITE,  qualification  que  l'on  donne  quelquefois 
à  l'alphabet  syriaque. 

MARONNETTES.  V.  Cbotales. 

MAROTTE  (pour  mérotte,  petite  mère),  tète  bizarre 
placée  au  bout  d'un  bâton  et  accompagnée  de  grelots. 
C'est  le  sceptre  des  fous.  On  représente  â  tori  Momus 
avec  une  marotte;  cet  attribut  ne  lui  est  donné  sur  aucun 
monument  ancien,  et  no  date  que  du  moyen  ftge. 

MAROUFLER,  en  termes  de  Peinture,  coller  la  toile 
d'un  tableau  sur  une  autre  toile  pour  la  renforcer,  ou 
sur  un  panneau  de  bois,  sur  une  muraille,  pour  l'y  fixer. 
La  plupart  des  plafonds  peints  â  l'huile  sont  sur  toile 
marouflée. 

MARQUE,  tout  signe  servant  â  distinguer  ou  â  classer 
des  objets  semblables  ou  analogues ,  â  rendre  chacun 
d'eux  remarquable  parmi  les  autres.  En  matière  fiscale, 
la  marque  a  pour  but  principal  de  constater  le  payement 
des  taxes  imposées,  et  quelquefois  de  garantir  en  même 
temps  aux  acheteurs  la  qualité  de  certaines  marchan- 
dïses.  L'estampille  du  gouvernement  donne  â  la  marque 
le  caractère  d'une  garantie  publique.  Un  édit  du  14  oc- 
tobre 1564  punissait  â  l'égal  des  faux  monnayeurs  ceux 
qui  étaient  convaincus  d'avoir  falsifié  ou  contrefait  les 
marquée  mises  sur  les  pièces  de  drap  d'or,  d'argent  et  de 
soie.  L'ordonnance  de  Juillet  1681  et  la  déclaration 
d'octobre  1720  punissaient  des  galères  et  d'une  amende 
ceux  qui  auraient  contrefait  ou  faussement  apposé  des 
marques  et  cacheta.  La  marque  des  fers  fut  établie  en 
1626,  pour  arrêter  les  abus  de  la  fabrication  et  du  com- 
merce de  cette  marchandise;  les  commissaires  établis 
par  Henri  IV  pour  le  rétablissement  des  manufacturée 
avaient  représenté,  dès  1608,  que  la  fabrication  dea  fers, 
très-négligée  pendant  les  guerres  ciriles ,  continuait  à 
dépérir  ;  qu'on  ne  cessait  de  se  plaindre  de  la  substitu- 
tion du  fer  aiere  au  fer  doux,  et  que  la  France,  qui  four- 
nissait précédemment  la  quincaillerie  aux  étrangers, 
était  réduite  â  celle  qu'ils  apportaient.  Cette  marque  fut 
supprimée  par  la  loi  du  17  mars  1701,  avec  tous  les  im- 
pôts indirects  de  l'ancien  régime. 

La  marque  des  objets  Sor  et  d^argent  eut  d'abord  pour 
objet  de  prévenir  la  dissipation  des  matières  précieuses, 
puis  de  venir  en  aide  aux  lois  somptuaires.  qui  limitaient 
a  un  poids  déterminé  la  fabrication  et  l'usage  de  la  vaia- 


MAR 


1222 


MAR 


Mlle  d*argoni  et  de  rorféTreiie,  en  assurant  rezécation 
de  ces  lois ,  et  même  en  augmentant  par  la  percepUon 
d*an  droit  le  prix  de  ces  ouvrages.  On  lui  donna  le  nom 
de  droit  de  remède,  sous  le  prétexte  que  ce  droit  devait 
rendre  à  Tor  et  à  Targent  la  valeur  que  leur  Mait  TaU 
liage  ajouté  par  les  orfèvres.  Ai:dourd'hui,  cette  marque, 
eonnue  sous  les  noms  de  contrôle  et  de  garantie  {V.  ces 
mots),  a  pour  effet  de  certifier  au  public  le  titre  ou  degré 
de  pureté  des  objets  d'or,  d'argent,  et  de  plaqué. 

une  marque,  appelée  timbre,  est  empreinte  sur  le 
parchemin  ou  le  papier  destinés  aux  actes  publics  ou  de 
commerce  (F.  Timbre). 

Les  marques  de  vérification  ont  pour  but  principal  la 
lécurité  publique ,  soit  au  point  de  vue  des  transactions, 
soit  à  celiU  de  la  salubrité. 

Parmi  les  marques  se  rattachant  k  des  intérêts  parti- 
enliers,  les  plus  importantes  sont  les  marques  de  for- 
hrique,  signes  emblématiques  destinés  à  faire  reconnaître 
l'origine  ou  la  nature  des  marchandises.  Elles  étaient 
obligatoires  par  la  plupart  des  statuts  des  corporations  ; 
i  absence  de  marque  ou  Tapposition  d'une  fausse  marque 
entraînait  la  confiscation  de  la  marchandise,  sa  destruc- 
tion, des  amendes  et  diverses  peines  corporelles.  Des 
droits  de  maroue  et  de  visite,  ainsi  qu'une  quote-part 
dans  le  produit  des  amendes,  stimulaient  le  zèle  des 
agents  chargés  de  la  vérification.  La  marque,  qui  avait 
l'avantage  de  garantir  la  matière  première  et  le  mode  de 
son  emploi,  était  d'une  autre  part  une  entrave  à  tout  per- 
fectionnement, puisqu'elle  était  refusée  à  ce  qui  n'était  pas 
selon  l'usage  établi.  La  loi  du  18  germinal  an  xi  (8  avril 
1803)  reconnut  la  marque  comme  un  droit  pour  chaque 
manufacturier  ou  artisan,  et  punit  l'usurpation  ou  la  con« 
trefaçon  des  mêmes  peines  que  le  faux  en  écriture  privée. 
I^mi  les  décrets  qui  avaient  attribué  des  marques  spé- 
ciales à  quelques  mdustries,  celui  du  25  Juillet  i8l0, 
concernant  la  coutellerie  et  la  auincaillerie,  est  le  seul 
qui  soit  resté  en  vigueur  Jusqu'à  ce  Jour.  La  loi  du  28 
Juillet  1824  a  substitué  des  peines  correctionnelles  aux 
peines  appliquées  au  faussaire.  L'usurpation  des  marques 
de  fabrique  peut  aussi  donner  ouverture  à  l'action  civile. 
-^  Dans  les  usages  du  commerce,  le  signe  ou  la  figure 
apposée  sur  les  produits  fabriqués,  pour  en  garantir 
l'identité,  est  souvent,  au  lieu  d'une  marque  arbitraire- 
ment choisie,  le  nom  même  du  fabricant  ;  on  l'appelle 
alors  marque  nominale.  Sans  doute  la  législation  de  1824 
fournissait  aux  fabricants  un  moyen  de  créer  et  de  fonder 
la  réputation  de  leur  industrie  ;  mais  les  noms  ne  sau- 
raient offrir  les  mêmes  résultats  que  les  marques  propre- 
ment dites  :  s'ils  présentent  l'avantage  d'exister  et  de  se 
conserver  indépendamment  de  toute  formalité  à  remplir, 
ils  prêtent  beaucoup  plus  aux  attaques  de  la  concurrence 
déloyale.  Avec  la  marque  emblémcUique,  au  contraire,  le 
droit  exclusif  et  absolu  du  premier  occupant  est  reconnu 
et  consacré  :  aussi  la  loi  au  23  Juin  1857,  qui  a  pour 
objet  unique  la  marque  emblématique  librement  ap- 
4MÎ8ée  par  le  fabricant  ou  le  commerçant,  pour  constater 
l'origine  de  ses  produits  et  leur  imprimer  aux  yeux  du 
j>ublic  le  caractère  de  sa  personnalité,  deviendra  de  Jour 
en  Jour  le  droit  commun  en  ces  matières.  Elle  a  pour 
but  d'assurer  une  protection  réelle,  qui  était  auparavant 
insuffisante,  à  la  marque  de  fabrique  et  de  commerce  ; 
d'intérMser,  par  l'efficacité  de  la  protection  qui  la  cou- 
rira  désormais,  celui  qui  la  possède  à  lui  donner  de  la 
-«leur  et  à  s'en  faire  une  source  de  fortune  par  la  loyauté 
de  tes  produits,  et  d'arriver  par  ce  moven  indirect  à  sau- 
vegarder les  intérêts  du  consommateur  lui-même.  D'après 
la  loi  de  1857,  la  marque  de  fabrique  est  facultative  : 
toutefois  des  décrets  peuvent  exceptionnellement  la  dé- 
clarer obligatoire  pour  les  produits  qu'ils  déterminent. 
Sont  considérés  comme  marques  de  fabrique  et  de  com- 
merce :  les  noms  sous  une  forme  distinctive,  les  dénomi- 
nationt,  emblèmes,  empreintes,  timbres,  cadiets,  vignet- 
tes, reliefii,  lettres,  chiifires,  enveloppes  et  tous  autres 
signes  servant  à  distinguer  les  produits  d'une  fabrique 
ou  les  objets  d'un  commerce.  Un  décret  du  16  Juillet  1858 
.  porte  règlement  d'administration  publique  touchant  l'exé- 
.  cution  de  cette  loi.  Pour  acquérir  la  propriété  exclu- 
sive d'une  marque,  il  faut  déposer  deux  exemplaires  du 
modèle  au  greffe  du  tribunal  de  commerce.  Sont  punis 
d'une  amende  de  300  à  3,000  tr.  et  d'un  emprisonnement 
de  3  mois  à  3  ans,  ou  de  l'une  de  ces  peines  seulement  : 
ceux  qui  ont  contrefait  une  marque,  ou  fait  usage  d'une 
marque  contrefaite  ;  ceux  qui  ont  apposé  sur  leurs  pro- 
duits une  marque  appartenant  à  autrui  ;  ceux  qui  ont 
sciemment  vendu  des  produits  à  marque  contrendte  ou 
frauduleusement  apposée.  L'amende  est  de  200  à  2,000  fr.. 


et  l'emprisonnement  d*un  mois  à  nn  an,  si  les  Indicatloni 
d'une  marque  sont  propres  à  tromper  Tacheteur  sur  la 
nature  du  produit.  L^amende  est  de  100  à  1,000  fr.,  l'em- 
prisonnement de  15  Jours  à  6  mois,  pour  le  fait  de  n'avoir 
point  apposé  sur  des  produits  une  marque  déclarée  obli- 
gatoire, ou  de  les  avoir  ainsi  mis  en  vente.  Il  y  a  confis- 
cation des  produits  qui  ont  donné  lieu  à  la  poursuite, 
ainsi  que  des  instruments  et*  ustensiles  ayant  servi  à 
commettre  le  délit.  Les  peines  peuvent  être  doublées  en 
cas  de  récidive. 

11  existe  donc  législativement  deux  sortes  de  marques 
de  fabrique  :  les  unes  sont  obligatoires,  et  prescrites 
principalement  dans  un  intérêt  public  et  fiscal  ;  les  autres 
sont  facuttalives,  et  instituées  dans  l'intérêt  du  fabri- 
cant qui  veut  garantir  la  qualité  et  assurer  la  réputation 
de  aes  produits.  Quoique  essentiellement  protectrices  da 
travail  privé,  elles  ne  sont  pas  étrangères  à  l'intérêt  na- 
tional ;  car,  d'une  part,  accordées  à  certaines  villes,  elles 
conservent  la  renommée  industrieUe  de  toute  une  popu- 
lation locale;  d'autre  part,  elles  maintiennent  le  droit 
des  loyaux  produits  de  notre  industrie  à  la  confiance  des 
nations  étrangères.  Les  marques  de  fabrique,  imposées 
Jadis  comme  une  garantie  forcée  ou  concédées  k  titre  de 
privilège,  ont  repris  dans  la  législation  moderne  leur 
véritable  caractère  de  propriété  libre,  et  de  la  plus  in- 
violable de  toutes ,  celle  qui  est  le  résultat  du  travail.  Le 
principe  de  la  propriété  aes  marques  est  la  conséquence 
directe  du  droit  de  propriété  existant  sur  les  objets  que 
l'on  fabrique  ou  que  l'on  vend.  L*indu8triel  a  le  droit 
d'employer  un  signe  quelconque  pour  faire  reconnaître 
les  marchandises  provenant  de  ses  ateliers;  si  sa  fabrica- 
tion a  quelque  supériorité,  il  doit  Joidr  exclusivement  da 
bénéfice  de  sa  réputation  ;  il  a  droit  d'empêcher  qu'an 
tiers  ne  l'en  dépouille.  La  propriété  des  marques  est  de 
droit  perpétuel;  elle  se  transmet  par  héritage,  et  ne 
tombe  dans  le  domaine  public  que  lorsqu'il  résulte  des 
circonstances  qu'elle  peut  être  réputée  abandonnée.  Pour 
produire  aes  effets  léçuix,  la  marque  doit  :  1<*  être  adhé- 
rente aux  produits  ;  v*  se  distinguer  nettement  de  tonte 
autre  marque  précédemment  adoptée.  S*il  importe  au 
manufacturier  de  garantir,  par  sa  marque,  la  bonne  con- 
fection de  ses  produits,  et  de  leur  assurer  ainsi  un  débit 
{proportionné  à  leur  mérite,  la  marque  offre  an  négociant 
ntermédiaire  entre  le  producteur  et  le  consommateur 
un  moven  précieux  de  çigner  et  de  conserver  la  confiance 
du  public.  En  imprimant  un  signe  distincdf  aux  ol^eti 
qu'il  achète  pour  les  revendre,  ils'oblige  lui-même  àea 
faire  un  choix  intelligent  et  consdencfeux,  à  les  livrer 
purs  de  toutes  les  altérations  que  le  commerce  de  détail 
fait  souvent  subir  aux  marchandises  anonymea.  L'exten- 
sion de  la  marque  de  commerce  sera  peut-être  le  moyeo 
le  plus  efficace  de  prévenir  les  falsifications  opérées  dam 
la  transmission  de  certains  objets,  qui,  livrés  en  bon  état 
par  le  fabricant ,  parviennent  dénaturés  au  consomma- 
teur. —  La  loi  de  1857  maintient  au  profit  des  étrangers 
qui  exercent  leur  industrie  en  France  les  garanties  râol- 
tant  du  Droit  commun;  mais  elle  ne  prot^  les  marques 
étrangères  que  lorsque  des  traités  diplomatiques  ont  éta- 
bli la  récipxÎDcité  pour  Im  marques  françaises.  Ne  peut-oo 
dire  à  cet  éçard  que  l'intérêt  de  notre  propre  industrie 
et  les  principes  du  droit  réclament  le  respect  absolu  et 
universel  des  marques,  même  étrangères,  parce  que  c'est 
là  en  même  temps  une  propriété  du  droit  des  gens?  Ces 
usurpations  firauduleuses,  qui  ne  profitent  qu'à  un  petit 
nombre ,  trompent  le  public ,  déconsidèrent  l'industrie 
et  le  commerce,  et  constituent  une  concurrence  anssi 
fâcheuse  que  dâoyale  pour  les  industriels  honnêtes.  D 
aurait  donc  mieux  valu  peut-être  que  la  garantie  dei 
marques  tùi  reconnue  sans  condition  de  réciprocité,  aa 
lieu  de  perpétuer  un  système  de  reprtetlles.  Les  con- 
ventions intervenues  Jusqu'à  ce  Jour  pour  la  protectioa 
mutuelle  des  marques  de  fabrique  sont  :  1®  celle  du  If 
avril  1851,  entre  la  FVance  et  le  Portugal,  ^  celle  da  K 
mai  1856,  entre  la  France  et  le  grand -duché  de  Bade 
3«  celle  du  2  Juillet  1857,  entre  la  France  et  le  ropuni 
de  Saxe;  4*  le  traité  de  commerce  et  de  navigation  do 
14  Juin  1857  (articles  22  et  24)  entre  la  France  et  b 
Rurâie.  V,  Calmais,  Des  noms  de  marques  de  fabrùiui, 
1858,  in-8*;  Ambr.  Rendu  Traité  des  marques  ds  tor 
brique,  1858,  in-8».  A.  L. 

MARQUE,  châtiment.  V,  ce  mot  dans  notre  /Hcttonnotn 
de  Biographie  et  d*Histoire. 

MARQUE,  dans  le  Blason,  objet  qui  sert  à  la  connaissanef 
de  la  personne  et  de  la  famille.  Les  marques  sont  l'éco 
décore  d'une  ou  de  plusieurs  figures,  la  cotte  d'armeaoe 
livrée,  le  cimier  ou  timbre  du  casque,  et  le  gonfianoib 


MAR 


1223 


MAR 


vuMUm  (liOttre  de).  V,  Leitiib  db  iiarqdi. 

SAttQim,  signe  qa'xkn  artiste  met  vat  aes  onvrages  pour 
IM  disdngaer  de  oeax  d'aatmi.  Certains  maîtres  ne  sont 
ooimas  que  par  leur  marque  :  on  dit  2e  Maitre  à  VétoUê, 
U  Matin  à  Vécrwisse ,  le  Maitre  à  l'oiseau,  le  Maitre  à 
la  Itcome. 

UARQUÉSANB  (Uingne),  langue  parlée  aux  lies  Har- 
Qoiaet.  EUe  n^est  ni  flexiTe,  comme  nos  langues  d*Ocd- 
oent,  ni  parement  agglutinative,  comme  les  langues  de 
llndo-Oiine  et  de  VAmérique,  mais  agglutmative  à  rela^ 
HonSfC-èrd,  que  non-seulement  il  y  a  addition  successiye 
de  diven  mots  ou  suffixes,  mais  que  chacun  des  mots, 
n'étant  en  lui-même  ni  substantif,  ni  adjectif,  ni  verbe, 
ni  eoi^onctlon,  peut  devenir  Tun  ou  l'butre  selon  le  mot 
dont  il  est  précédé  ou  suivi,  et  celui-ci  à  son  tour  doit  à  ce 
noiovean  rapprochement  sa  signification  particulière.  V. 
Bacfamann,  La  langue  deê  Ues  Marquises,  en  allemand. 
MARQUETERIE,  ouvrage  fait  avec  différents  bois  pr^ 
deux  qà,  par  leurs  nuances  variées,  forment  des  des- 
sins, et  auxquels  on  Joint  même  des  filets  et  des  plaques 
d'or,  d'argent,  d'ivoire  ou  d'écaillé.  Los  bois  ne  sont  le 
pins  souvent  crue  des  feuilles  minces  appliquées  sur  de  la 
menuiserie.  Des  le  xv*  siècle,  les  Italiens  excellaient  dans 
l'art  de  la  marqueterie.  V,  EBiPiisTERiB. 
MARQUETTE.  V,  MAQcnrB. 
MARQUISE,  tente  on  auvent  d'une  coupe  élégante, 
servant  à  garantir  de  la  pluie.  Elle  est  habituellement  en 
menuiserie  p<ûnte  et  dorée,  imitant  des  toiles  et  des  cor- 
dons de  tentare. 

MARREAU  ou  MÉREAU.  V,  ce  mot  dans  notre  Dic- 
libfMKBrs  de  Biographie  et  d'Histoire, 

MARRON ,  pièce  de  cuivre  ou  petit  morceau  de  métal 
oue  les  rondes  et  les  patrouilles  déposent  à  chaque  poste 
dans  une  boite  spéciale,  pour  constater  que  le  seorvice 
s'est  ùât  avec  exiûrtitude. 

luaaoïi,  qualification  donnée  dans  les  colonies  euro- 
péennes an  nègre  qui  s'est  enfui  de  Thabitation  de  son 
maître.  —  Par  extension ,  on  appelle  marron  celui  qui 
exerce  une  profession  sans  commission  ou  sans  titre;  tels 
sont  les  eouriiers  marrons. 

MARS ,  dieu  de  la  guerre.  C'était  une  conception  trop 
abstraite  poar  qu'il  devint  en  Grèce  l'un  des  principaux 
mjets  de  Tart  ;  il  n'y  avait  pas  de  ville  où  on  l'adorât 
comme  dieu  tutélaire.  Alcamène  et  Scopas  firent  les  sta^ 
tues  les  plus  remarquables  de  Mars,  et  elles  servirent  dé 
modèles  à  tontes  les  autres  :  on  donnait  à  ce  dieu  un  cou 
charnu  et  vigoureux,  des  muscles  fortement  accusés,  un 
front  plus  bas  que  celui  des  antres  fils  de  Jupiter,  des 
diereux  formant  de  petites  boucles  en  désordre,  des  yeux 
pedts  et  ouverts.  Tantôt  il  est  nu ,  tantôt  il  porte  une 
ehlnmyde.  Sur  les  reliefs  d'ancien  style,  il  est  revêtu 
d'une  armure  complète;  sur  ceux  qui  ont  été  sculptés 
plus  tard,  il  n'a  qu'un  casque.  Le  plus  ordinairement  il  se 
t^t  debout.  Scopas  sculpta  un  Mars  assis.  Sur  les  mon- 
naies romaines,  une  marche  accélérée  indique  le  Mars 
Gradknu;  l'aigle  des  légions  et  autres  signes,  le  tfars 
Stator  on  Ultor;  des  trophées,  des  Victoires,  une  branche 
d'olivier,  le  Mars  Victor  ou  Pacifer.  Les  Romains  repré- 
sentèrent encore  Mars  avec  llia  ou  Rhéa  Sylvia. 

«AKS  (École  de).  V,  École  db  Maes,  dans  notre  £)(0- 
Hofimaire  de  Biographie  et  â^ Histoire^  page  878,  col.  i. 
MARSEILLAISE  (La).  V.  notre  Dict.  de  Biogr. 
MARSEILLE  ^Faïences  de).  V.  au  Supplément, 
BIARTEAU,  heurtoir  mobile,  fixé  sur  une  porte  d'en- 
trée de  maison,  pour  frapper  et  par  là  prévenir  le  portier 
d'ouvrir  la  porte.  Les  marteaux  sont  en  fer  fondu  ou 
dselé,  quelq|uefois  en  cuivre.  Depuis  les  commencements 
du  xa*  siècle,  on  a  commencé  de  substituer  des  cor- 
dons on  des  tirages  de  sonnettes  aux  marteaux,  que  l'on 
ne  voit  plus  gu&re  qu'aux  anciennes  maisons.  Du  temps 
de  Louis  XIV,  on  appelait  graisser  le  marteaUy  donner 
on  pourboire  an  portier  d*un  juge  que  Ton  visitait  comme 
plaidenr. 

VAVTBAIIX.    F.  ChBVBLDRB. 

MARTELAGE,  en  termes  d'Administration  forestière, 
application  de  l'empreinte  du  marteaiu  sur  les  arbres  que 
rfiStat  réserve  pour  son  service  dans  les  triages  destinés  à 
être  vendus.  Le  marteau  porte  une  ancre  surmontée  du 
sceau  de  TÉtat:  autrefois,  l'offider  préposé  à  la  garde  de 
es  marteau  était  appelé  garde-marteau.  Les  contrefao* 
tears  on  falsificateurs  de  marteau  sont  punis  des  travaux 
forcés  à  temps. 

MARTELLOS ,  nom  donné  aux  tours  rondes  et  voûtées 
que  Ton  construisit,  au  temps  de  Charies-Quint,  sur  les 
côtes  de  la  Sardaigne  et  de  la  Corse,  pour  les  protéger 
contre  les  i^rates. 


MARTIALE  (Gour,  Loi).  V,  Cous,  Loi,  dans  nom 
Dtctiannafre  de  Biographie  et  d'Histotre, 

MARTIN  (Les) ,  emploi  de  théâtre  dans  l'opérarcomique. 
Il  exige  une  voix  de  baryton  étendue  et  agile,  comme 
était  celle  du  chanteur  Martin,  contemporain  et  rival  du 
ténor  EUeviou.  Au  répertoire  des  Martin  appartiennent, 

gar  exemple,  les  rôles  de  Frontin  dans  les  opéras  de 
oleldieu,  celui  du  Mattre  de  chapelle^  de  Pafir,  etc. 

BIARTINETS,  nom  qu'on  donnait,  dans  l'ancienne  Uni- 
versité de  France,  aux  écoliers  qui  allaient  de  collège  en 
collège. 

BfARTINGALE,  coup  de  Jeu  qui  consiste  à  doubler  la 
mise  qu'on  a  perdue,  afin  de  rentrer,  quand  on  gagne, 
dans  tout  son  argent.  —  On  donne  le  même  nom  à  di- 
verses manières  déjouer  que  certains  joueurs  ont  imagi- 
nées et  (pi'ils  poursuivent  avec  opini&treié,  dans  l'i^ 
que  le  gain  est  assuré. 

MARTYR  (du  grec  martur,  témoin),  celui  qui  a  souf- 
fert des  supplices  et  môme  la  mort  en  témoignage  des 
croyances  qu'il  professe.  Le  mot  se  dit  surtout  en  par» 
lant  de  la  religion  chrétienne. 


BIARTYRIUM.  V.  Adtbu 

MARTYROLOGE,  liste  od  catalogue  des  martyrs.  Le 
pape  S^  Clément,  qui  vécut  immédiatement  après  leê 
Apôtres,  introduisit,  ditH>n,  l'usage  de  recueillir  les  noms 
et  les  actes  des  martyrs.  Le  mar^rologe  d'Eusèbe  de  Ce» 
sarée,  traduit  en  latin  par  S' Jérôme,  rat  célèbre  dans  les 
premiers  siècles  de  l'Église  ;  il  n'en  reste  plus  que  quel- 

Saes  fragments.  Parmi  ceux  que  nous  possMons  en  en- 
er,  on  remarmie  ceux  de  Bède,  continué  par  Florus,  de 
Raban  Maur,  d^Adon,  de  Wandelbert,  d'Usuard,  de  Ne- 
velon,  de  Notker,  de  Bellin ,  de  liaurolycus,  de  Molanui 
(  Van  der  Meulen).  —  Les  Protestants  ont  aussi  leurs 
martyrologes  :  les  plus  importants  sont  ceux  de  Fox,  de 
Bray,  et  de  Clarke. 

MARTYRS  (Actes  des).  F.  Actes  des  vABiras. 

MARTYRS  (Les),  épooéo  en  prose  française,  et  en  24  11* 
vres,  composée  par  Chateaubriand,  et  publiée  en  iSOQv 
en  vue  de  prouver  que  le  merveilleux  de  la  religion  chré- 
tienne peut  lutter  contre  celui  du  papnisme.  Il  choiÀ 
l'époque  de  la  persécution  de  Diocl^en,  vers  la  fin  du 
in*  siècle,  et  imagina  la  fible  suivante  t  —  Cymodocéé, 
fllle  de  Démodocus,  prêtre  d'Homère,  s'est  égarée  dans 
les  bois  du  Tavgète.  Elle  y  rencontre  Eudcnre,  jeune  guer- 
rier, neveu  de  Constantin,  et  retiré  de  la  cour  :  il  la 
ramène  auprès  de  sa  demeure,  la  remet  à  sa  nourrice,  et 
s'éloigne.  i>émodocus  part  avec  Cymodocée  pour  aller 
remercier  celui  qui  lui  a  rendu  sa  fille,  et  les  deux  £a* 
milles  se  lient  par  l'hospitalité.  Eudore  raconte  sa  vie,  et 
Cymodocée  s'éprend  pour  lui  d'un  chaste  amour  qu'Eu* 
dore  partage  aussitôt.  Bien  que  prêtresse  d'Homère,  Cy« 
modocée  veut  se  faire  chrétienne  pour  épouser  Eudore. 
Démodocus  combat  la  résolution  de  sa  fille,  cède  enfiil 
à  ses  vœux,  et  la  fiance  à  Eudore.  Cependant,  une  perse* 
cution  vient  d'être  ordonnée  contre  les  chrétiens  par 
Hiéroclès,  ministre  de  Galérius.  Hiéroclès  aimait  depida 
longtemps  Cvmodocée;  Airieux  d'avoir  un  rival,  il  la  fait 
enlever,  conduire  à  Rome,  où  elle  estploni^  dans  les 
prisons,  en  qualité  de  chrétienne.  Eudore,  arrêté  comme 
confesseur  du  Christ,  va  être  livré  aux  bêtes  dans  l'am^ 
pbithéfttre  Flavien.  Cymodocée,  qu'un  ami  a  sauvée  de 
sa  prison,  l'apprend,  onitte  sa  retraite,  vde  à  l'ampM* 
théâtre,  et,  se  jetant  dans  les  bras  de  son  fiancé,  péiit 
martyre  avec  lui.  Au  même  instant,  une  croix  de  liunééce 
apparaît  dans  le  ciel,  la  fondre  gronde,  et  une  voix  mys» 
térieuse  fidt  retentir  ces  mots  :  «  Les  dieux  s'en  vont."» 
«^  Ce  sujet  est  très-heureusement  choisi  pour  le  but  que 
se  proposait  Chateaubriand,  car  il  renferme  dans  un 
même  cadre  le  tableau  de  deux  religions,  la  morale^  les 
sacrifices,  les  pompes  de  deux  cultes.  Néanmoins,  le  livre 
tat  trèftovivement  critiqué,  et  ce  ne  fût  pas  seulement  le 
lancage  de  la  passion  qu'un  écrivain  du  temps  fit  elK 
tendre,  en  disant  s  «  Lorsqu'au  milieu  d'un  peuple  dont 
toutes  les  croyances  ont  été  ébranlées  ou  renversées,  une 
imagination  plus  poétique  que  religieuse  met  en  ien  les 
mystères  de  la  foi  et  fait  agfar  les  puissances. célestes, 
duis  une  œuvre  en  prose,  d'un  caractère  indécis  entre  le 
roman  et  l'épopée,  u  est  impossible  que  ce  spectacle  ne 
ptt^e  pas  de  sa  grandeur.  Le  Ciel  et  l'Enfer  de  M.  de 
Chateaubriand,  rEtemel  représenté  an  milieu  des  croiras 
célestes,  ne  sont  que  de  belles  études.  »  Malgré  les  cri* 
tiques  f  l'ouvrage  obtint  un  grand  succès  dû  à  la  madi 
d'un  langage  coloréf  souple ,  harmonieux;  à  des  pen» 


tfAS 


1224 


MAT 


tnres  fraîches  et  virantes;  à  beaucoup  de  tableaai  pleins 
de  yérité  et  de  poésie,  tels  que  les  catacombes  de  Rome 
(Ut.  V),  les  mœurs  des  Francs  Givre  VU),  Vellôda  (Ut.  IX 
et  X},  les  retraites  de  la  Thébalde  (Ht.  XI^,  etc.  Enfin 
In  Martyrs  eurent  un  retentissement  qui  fit  presque 
époque  dans  la  littérature. 

MASCARADE.  V»  Casnatal  et  HASQUBt  àiaa  notre  Dtc- 
ttonnoirtf  d$  Biographie  et  dT  Histoire. 

MASCARRT.  K.  Barre. 

MASCARILLE,  personnage  comique  emprunté  par 
noire  théâtre  A  celui  des  Italiens.  Cest  un  Talet  peureux, 
Toleur,  gourmand,  complice  des  amoura  de  son  miUtre. 

M ASCARON ,  tête  d*homme  ou  d'animal,  souTent  ima- 
ginaire, grotesque  ou  fantastique,  sculptée  en  ronde  bosse 
ou  en  bas-relief  sur  une  clef  d*arc  ou  de  Toûte,  sur  un 
chiq)iteau ,  sous  un  entablement  ou  un  balcon,  etc.  On 
emploie  aussi  ce  genre  de  décoration  aux  extrémités  des 

Suttières  et  aux  orifices  des  fontaines  ;  alore  la  figure 
it  aToir  la  bouche  ouTerte,  et  on  y  place  le  conduit  de 
Teau.  Les  sculpteura  de  la  période  romane  et  ceux  des 
XTii*  et  xviii*  siècles  ont  fort  abusé  des  mascarons. 

MASCHEROLÊ,  en  langage  du  moyen  â^^,  garni  de 
mâchicoulis. 

MASQUE.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictûmnatrê  d$  Bio- 
ffraphiê  et  d'Histoire, 

MASSACMUSETT  (Idiome),  un  des  idiomes  algonquins. 
n  est  très-riche  en  formes  grammaticales.  Il  n*a  pas  de 
Tertie  substantif,  et  msnoue  de  moyens  pour  distinguer 
les  genres  et  les  cas;  mais  il  en  possède  pour  marquer 
les  diflTérents  nombres,  les  degrés  de  comparaison  et  une 
foule  de  rapports  entre  le  sujet  et  l'attribut  par  des  mo- 
difications qu*il  donne  aux  yerbes.  11  forme  le  mode  in- 
terrogatif  par  des  afflxes  ;  il  intercale  la  né^ition,  et  place 
les  prépositions  après  leun  régimes.  Elliot  a  publié,  en 
1066,  une  erammahre  du  massachuaett,  et  traduit  la  Bible 
dans  cet  idiome. 

MASSE,  en  termes  d'Administration  militaire,  somme 
formée  des  retenues  faites  sur  la  solde  de  chaque  soldat 
à  pied  et  à  cheTal,  et  allouée  par  abonnement  pour  une 
dejpense  spéciale.  Il  y  a  la  masse  d'habillement,  de  chaus- 
sure, d'émiipement,  etc. 

■ASSB,  oàton  de  cérémonie.  V.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d*  Histoire, 

MASSE ,  ancienne  monnaie,  la  même  que  la  chaise  d^or 
(Y,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
aHistoire), 

MASSE  D  ARMES ,  on  latin  clava,  arme  de  fer  du  moyen 
âge,  fort  pesante  d*un  bout,  longue  comme  le  Inras,  et 
avec  laquelle  on  assommait.  Le  gros  bout  se  terminait 
quelquefois  en  boule  hérissée  de  srosses  pointes,  ou  par 
quatre  ou  cinq  ailerons  dentelés  :  la  masse  serTait  alon  à 
nriser  les  casques  et  les  cuirasses.  L'extrémité  opposée 
portait  un  gros  anneau ,  où  l'on  attachait  un  fort  cordon, 
pour  oue  l'arme  ne  s'échappât  point  de  la  main.     B. 

MASSOLA  (La),  nom  d'un  supplice  autrefois  usité  en 
Italie.  Quand  le  patient  aTait  les  yeux  bandés,  les  mains, 
les  pieds  et  les  genoux  attachés,  le  bourreau  le  frappait 
aune  massue  de  Imis  entre  l'oreille  et  l'œil  ;  après  l'aToir 
ainsi  étourdi  et  Jeté  sur  le  côté,  il  lui  perçait  la  gorge 
âTec  un  long  couteau,  et  lui  ouTndt  toute  la  poitrine. 

MASSORA.  V,  HéBRAlQDB  (Littérature). 

MASSUE,  la  plus  ancienne  des  armes  oflènsiTes.  Ce 
Art  primitiTement  un  bâton  noueux,  beaucoup  plus  gros 
par  un  bout  que  par  l'autre,  et  plus  tard  une  masse  de 
métal.  La  massue  est  un  attribut  d'Heroule.  Elle  flçire, 
dans  Homère,  entre  les  mains  de  plusieura  guerrière. 
Xénophon  mentionne  un  corps  de  porteun  de  massue  qui 
servaient  dans  l'armée  thébalue  A  la  bataille  de  Leuctres. 
tl  y  eut  aussi,  chei  les  Romains,  des  combattants  dont 
les  massues  étaient  garnies  de  clous.  Au  moyen  ftge,  la 
massue  prit  le  nom  de  nuuse  d'ormat  (K.  os  mot).  Elle 
est  encore  aujourd'hui  entre  les  mains  de  tous  les  sau- 
vages, sous  les  noms  de  casse-tête,  de  tomahawk^  etc. 

MASTIC,  en  termes  d'Architecture,  désigne  toute  es- 
pèce de  mortier  factice,  autre  que  les  mortiers  de  chaux 
et  de  plâtre.  La  composition  de  quelques  mastics  en 
usage  dans  l'antiquité  nous  a  été  conservée  par  les  au- 
teura;  ils  étaient  formés  des  divera  mélanges  suivants: 
1*  poix,  cire  blanche,  brique  pilée,  chaux  pulvérisée , 
goudron;  2«  dissolution  d'ammoniac,  soufre  et  poix; 
avec  ces  deux  mélanges,  on  Jointoyait  la  maçonnerie  ex- 
posée k  la  chaleur;  3<*  sang  de  boBuf ,  chaux  de  coquille 
et  poix;  4°  suif,  cendre  fine,  pierre  ponce,  chaux  en 

Kudre,  et  huile;  ces  deux  dernien  mélanges  étaient 
ns  pour  arrêter  les  Infiltrations  de  l'ean.  —  Un  des 
«eiUean  mastics  modemesi  connu  s^ps  le  nom  de  DM, 


I  qui  l'inventa  en  1869,  se  fait  avec  neuf  parties  de  brique 
I  ou  de  terre  de  gaxette,  et  une  de  litharge,  le  tout  mis  en 
pâte  avec  de  l'huile  de  lin  ;  il  sert  à  couvrir  les  terrasses» 
souder  les  briques  et  les  pierres,  et  peut  recevoir  des 
peintures  à  l'huile,  comme  on  le  voit  dans  la  chapelle  ex- 
piatoire de  l'église  de  S^Denis.  Le  mastic  de  marbrier  se 
fait  avec  du  plâtre  fin,  du  marbre  blanc  et  de  la  térében- 
thine.  —  Le  mastic  de  limaille,  fait  ajec  de  la  limaille 
de  fer  oxydé  dans  du  vinaigre,  de  l'unne  et  de  l'ail ,  ou 
bien  avec  de  la  limaille  de  fer,  un  peu  d'ammoniac  et 
de  fleur  de  soufre,  s'emploie  dans  les  endroits  humides: 
mais  c'est  un  mauvais  mastic,  parce  que  l'oxyde  de  fer 
s'augmente  toujours,  et  qu'alon  ou  le  Joint  ou  la  pierre 
se  casse  ;  on  s'en  sert  avec  avantage  pour  bourrer  des 
Joints  de  tuyaux  de  fonte  dans  les  machines  à  vapeur.  — 
La  mine  orange  ou  le  minium,  pétri  avec  du  blanc  de 
plomb  broyé  à  l'huile,  fait  un  très^bon  mastic  pour  lu- 
ter,  mais  sous  une  forte  compression,  les  conduites  de 
vapeur  ou  de  gaz.  —  Le  mastic  de  mouleur,  qui  sert 
à  faire  les  pièc^  les  plus  difficiles  du  moulage,  est  un 
composé  de  cire,  de  ciment  fin  tamisé,  et  de  résine.  ^ 
Le  mastic  de  Corbel  pour  maçonnerie  comprend  16  par- 
ties de  ciment  fin,  â  de  litharge,  2  de  cénisej,  3  d'huile 
grasse,  le  tout  mis  en  pâte  avec  de  l'buile  de  lin.     E.  L. 

MAT,  pièce  de  bois  destinée  â  supporter  la  voilure 
d'un  navire.  Les  mâts  sont  généralement  en  pin,  swin, 
mélèze,  cèdre,  etc.,  parce  que  ces  bois  réunissent  la  lon- 
gueur, la  flexibilité,  l'élasticité,  et  la  légèreté.  On  les  fait 
ronds,  pour  qu'ils  présentent  la  même  résistance  à  l'ac- 
tion du  vent  de  tous  les  côtés.  Leur  partie  inférieure  est 
fixée  dans  la  quille  des  navires  ;  ils  sont  maintenus  à 
leur  partie  supérieure  par  des  étais,  cordages  qui ,  par- 
tant de  l'avant,  servent  à  les  garantir  contre  les  effets  du 
tangage,  et  par  des  Aoti&ans,  qui ,  psrtant  des  deux  bords, 
les  aident  à  résister  au  roulis,  ainsi  qu'à  l'action  du  vent 
de  l'arrière  et  de  côté.  Le«  mâts  des  navirea  de  commerce 
et  des  petits  bâtiments  de  guerre  sont  ordinairement 
faits  d'un  seul  arbre;  mais,  pour  ceux  des  vaisseaux  de 
premier  rangvon  assemble  Jusqu'à  16  et  15  pièces  â  l'aide 
de  oeroles  de  fer,  qu'on  place  à  chaud  pour  qu'ils  serrent 
davantage  ;  le  grand  mât  d'un  vaisseau  de  136  canons  a 
46  met.  de  longueur,  3  met.  de  circonférence  movenne, 
et  pèse  plus  de  46,6()6kilogr.  Un  mât  se  compose  de  2  on 
de  3  parties,  selon  la  grandeur  des  navires;  la  l'* partie 
en  montant  est  le  bas  màt,  la  2*  le  mât  de  hune^  la  3*  le 
mât  de  perroquet.  Cette  manière  de  composer  les  mâts 
rend  plus  facile  l'opération  du  monta^,  ainal  que  la  ré- 
paration des  accidents,  au  moyen  de  pièces  de  rechange  ; 
un  mât  d'une  seule  partie  serait,  d'ailleurs,  trop  flexible 
et  trop  cassant,  et  on  ne  pourrait  ni  descendre  la  mâ- 
ture haute  quand  on  est  an  mouillage,  ni  la  sacrifier  au 
salut  du  navire  dans  les  tempêtes.  Les  plus  petits  bâti- 
ments, comme  le  cutter  et  le  sloop,  n'ont  qu'un  mât  ver- 
tical ;  la  goélette,  le  chasse-marée,  le  louêre  et  le  brick 
en  ont  deux;  les  navires  de  commerce  totinés  â  faire 
de  longues  traversées,  les  corvettes,  les  frégates,  les  vais- 
seaux de  ligne,  en  ont  trois.  Le  1*'  mât  à  partir  de 
l'avant  est  le  mât  de  misaine;  le  2*,  tou^oun  le  plus 
élevé,  est  le  grand  mât  ou  mât  de  maître;  le  3*,  qui 
est  le  moins  haut,  est  le  mât  Sartimon.  Quelques  bâti- 
ments ont  encore  â  l'arrière  un  autre  mât,  dit  tapecul, 
Lea  navires  à  1,  2  et  3  mâts  verticaux  ont  tous  â  l'avant 
un  mât  incliné,  appelé  beaupré, 

MAT  DE  GocAGiiB,  mât  qu'ou  drosse  sur  une  place  dans 
les  fêtes  publiques,  et  au  sommet  duquel  sont  placés 
diven  objets  de  plus  ou  moins  de  valeur.  Il  faut  aller 
prendre  ces  objets  en  grimpant  au  mât,  dont  l'ascensioD 
a  été  rendue  plus  diffiâle  â  l'aide  de  savon  on  d'autres 
corps  gras.  Ce  Jeu  existait  dès  le  xv*  siècle. 

MATADOR  (du  latin  mactator,  tueur),  nom  qn*os 
donne  en  Espagne  au  plus  important  des  toréadors,  à 
celui  qui ,  dans  l'arène,  met  â  mort  le  taureau.  Riche- 
ment vêtu  d'or  et  de  soie,  il  s*élance  au  signal  des  tam- 
boure,  tient  de  la  main  gauche  la  muleta ,  pièce  d'étoffe 
écarlate  dont  la  vue  irrite  l'animal ,  et  de  la  droite  une 
longue  épée,  dont  il  doit  le  frapper  à  l'endroit  de  la 
réunion  de  la  nuque  avec  le  dos.  En  France,  le  mot  ma^ 
tador  est  appliqué  quelquefois  à  des  personnages  d'ho- 
portance,  sans  doute  par  réminiscence  du  rôle  que  Joua 
en  Espagne  celui  qui  porte  le  dernier  coup. 

MATAMORE,  mot  espagnol  qui  veut  dire  dompteur  ds 
Mores,  et  par  lequel  on  a  désigné,  au  théâtre  d'abord , 
puis  dans  le  monde ,  les  bravaches  et  les  fanfiut>ns.  La 
fanfaronnade  étant  de  tous  les  temps  et  de  tous  les  pays, 
le  fanfaron  a  eu  son  nom  dans  chaque  langue.  La  comé- 
die de  Plante  intitulée  :  Miles  glonostis  (le  Soldat  faa* 


MAT 


122S 


MAT 


hroQ),  nous  montre  un  Pjrii^poUDice  {vainqueur  dei 
tonn  et  des  villes  ) ,  -  guerrier  invincible  et  homme  A 
bonnes  fortanes,  type  emprunté  à  la  Grèce,  où  des  ayen- 
torien  qui  araient  servi  en  Asie  racontaient  avec  em- 
phase leurs  exploits  lointains.  Dans  VEunwiUê  de  Té- 
reoce  figoro  un  personnage  du  même  genre,  Thrason, 
empnmtÀ,  nous  dit  Tauteur,  à  Hénandre,  et  qui  se  dis- 
tingue des  caricatures  triviales  de  la  fatuité  militaire  par 
ime  certaine  prétention  au  bon  goût  et  au  bel  esprit.  Voilà 
les  premiers  modèles  du  Sptxvento  milanais  et  de  notre 
opitsine  Frtiecase,  oflBciers  vantards  qui  ont  été  fort  à 
k  mode  dans  les  lettres  su  xvi*  siècle  et  au  commence- 
ment du  xvii*,  et  que  l'on  rencontre  dans  le  Brave  de 
Balf ,  dans  le  Pédant  joui  de  Cyrano  de  Bergerac,  dans 
TAoesUan  de  Colchos  de  Rotrou,  dans  le  Jodetet  duelliste 
de  Scarron.  Mais  c*est  surtout  du  Matamore  casUllan  que 
notre  vieux  théâtre  s*est  emparé  t  ce  personnage  figure 
avec  soo  nom  étranger  dans  l  Illusion  comique  de  P.  Cor- 
neille (1636),  et  il  fut  outré  encore  dans  TArtabaze  des 
Ftttbfifiatrftf  de  Desmareet  de  Saint-Sorlin  (1639).  Le 
soldat  fanfaron  s'est  maintenu  sur  la  scène  Jusou'à  nos 
tours  :  on  le  retrouve  dans  le  Don  Annibal  de  lAventU' 
rière,  comédie  par  M.  Emile  Augier,  Jouée  en  1848.  II  a 
passé  le  Rhin,  et  a  été  adopté  en  Allemagne;  là,  André 
Grfph  ou  Greif  Ta  appelé  HornbUicribrifaœ,  et  en  a  fait 
la  personnification  des  officiers  rentrés  dans  la  vie  civile 
après  la  guerre  de  Trente  Ans.  B. 

■ATAMoaa ,  nom  qn*on  donnait,  dans  les  États  Barba- 
resques,  à  im  cachot  soutemin  dans  lequel  on  enfermait 
les  eadsTes  toutes  les  nuits,  et  où  l'air  et  la  lumière  ne 
pénétnient quepar une  lucarne. 

MATASSlnS  (Ballet  des),  sorte  de  danse,  imitée  de  la 
danse  année  des  Anciens,  et  qui  était  encore  en  usage  an 
xvni*  siècle.  Elle  était  ordinairement  exécutée  par  24  sol- 
dats, qui  s'escrimaient  l'épée  à  la  main.  Il  en  est  parlé 
dans  rentrée  de  ballet  du  l*'  acte  du  de  Pourceaugnae 
ds  Minière.  La  danse  et  son  nom  sont  espagnols. 

MATELOT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictumnaire  de  Biù" 
gn^ieet  SBisUÀre, 

MATÉRIALISME,  système  philosophique  qui  n*admet 
pas  d'autre  substance  que  la  matière.  Le  matérialisme 
complet  ne  vent  pas  reconnaître  Dieu,  cause  du  monde, 
ni  rime  dans  l'homme;  ne  nier  que  l'un  ou  l'autre  seu- 
lement, c'est  être  inconséquent.  Le  matérialisme  attaque 
donc  les  deux  points  les  plus  essentiels  à  l'homme,  la 
cwyauce  en  Dieu  et  à  une  âme  spirituelle  et  immortelle. 
Mais,  en  refusant  de  reconnaître  dans  l'univers  un  être 
supérieur  à  la  matière,  une  cause  infiniment  puissante  et 
intelligente,  il  est  forcé  d'attribuer  au  hasard  l'ordre  ad- 
ndrabto  qrtd  règne  dans  la  nature,  la  coordinadon  har- 
monique des  êtres  organisés.  Dans  l'homme,  il  doit  rap- 
porter an  corps,  à  la  matière,  toutes  les  opérations  de 
llntélligeiice,  les  vérités  premières  données  par  la  raison, 
et  la  loi  morale  qui,  dans  certains  cas,  nous  ordonne  le 
lacriflce  d«i  intérêts  matériels,  et  qui  donne  naissance  à 
one  lutte  entre  la  passion  et  le  devoir.  De  là  des  ob- 
jections auxquelles  le  matérialisme  n'a  jamais  répondu, 
tandis  que  les  démentis  qu'il  donne  au  sens  commun,  k 
la  consdence  et  à  la  raison  suffiraient  pour  le  réfoter. 
Les  matitâriaUstes  les  plus  célèbres  n'ont  produit  que  des 
doctrinea  Jpgées  depuis  longtemps  :  chez  les  Anciens, 
Leudppe,  Démocrite,  Épicure,  Straton  et  Diagoras;  chez 
les  Modernes,  Hobbes,  le  baron  d'Holbach,  Hèlvédus, 
Lamettrie,  Cabanis,  Broussais.  Le  panthéisme,  en  absor- 
bant Dieu  dans  le  monde,  peut  être  regardé  comme  un 
svrtème  matérialiste.  Tous  les  adeptes  de  cette  triste 
doctrine  se  fondent  sur  l'impossibilité  d'expliquer  com- 
ment deux  substances  essentiellement  différentes  agissent 
l'une  sur  l'antre.  Ils  oublient  qu'on  n'explique  pas  mieux 
comment  les  eoips  agissent  sur  les  corps,  comment  deux 
molécules  de  matière  s'attirent  ou  se^repoussent.  Faut-fl 
nier  tout  ce  qu'on  ne  peut  expliquer?  R. 

MATERIAUX,  nom  sous  lequel  on  comprend  tout  ce 

Îoi  entre  dans  la  construction  d'un  bâtiment,  pierres, 
riques,  moellons,  tuiles,  sable,  chaux,  bois,  fer,  etc. 
F.  an  Supplément. 

MATEiUtiL,  nom  sous  lequel  on  comprend  tout  ce  qui 
6Bt  employé  à  un  service,  à  une  industrie,  à  une  exploi- 
tation. Le  matériel  d'un  corps  de  troupes  est  l'ensemble 
des  caissons  et  fourgons  nécenaires  au  service  des  vivres, 
des  hôpitaux  et  ambulances,  des  postes  militaires,  au 
tranqïort  des  papiers,  etc.  Un  matériel  d'artillerie  se 
compose  d'un  nombre  déterminé  de  bouches  à  feu  avec 
leurs  munitions,  d'obus,  de  grenades,  d'aortifices,  de  for- 
ges, etc.  Les  caissons  et  chariots  chargés  de  porter  les 
solilB  aéccMilrfti  anx  travaux  de  siège,  les  nsdnes  et 


fsabions  préparés  à  Favance,  les  équipages  de  pont  pour 
le  passage  des  rivières,  oomposent  le  matériel  du  génie. 
Sous  le  nom  de  matériel  de  siège,  on  embrasse  à  peu  près 
tous  les  objets  dont  il  vient  d'être  parié,  avec  cette  mfTé- 
rence  qu'on  y  emploie  des  bouches  à  feu  d'un  plus  fort^ 
calibre. 

MATERNITÉ  (Uospice  de  la),  à  Paris,  rue  do  Port* 
Royal  (autrefois  de  la  Bourbe),  dans  les  bâtiments  de 
l'abbaye  de  Port-Royal.  H  existe  dans  cette  maison  ua 
pensionnat  et  une  école  d'accouchement  pour  l'instruc- 
tion des  élèves  sages-femmes  qui  viennent  des  départe- 
ments. La  pension  annuelle  est  de  600  fir. 

MATIÈRE,  mot  qui,  dans  le  sens  le  plus  étendu,  dé- 
signe la  substance  universelle,  le  principe  dont  toutes 
choses  sont  Haïtes;  la  matière  en  ce  sens  est  l'opposé  de 
la/brms  ou  de  Veeience{V.  ces  mots).  Dans  un  sens  pins 
restreint,  c'est  seulement  la  substance  des  choses  corpo* 
relies,  et  alors  ht  matière  est  l'opposé  de  VesprU,  La 
philosophie  ancienne  a  presque  toujours  entendu  la  ma* 
tière  dans  la  première  oe  ces  acceptions,  et  les  opinions 
des  philosophes,  très-variables  en  ce  qui  concerne  la 
nature  propre  de  la  mottérs,  se  sont  en  général  accordées 
sur  ce  point,  ou'elle  est  un  principe  indépendant,  incréé, 
coétemel  à  Dieu,  qui  n'a  fait  que  la  mettre  en  ordre» 
C'est  le  christianisme  qui  a  vulj^sé  et  fait  passer  dans 
la  philosophie  la  notion  de  Dieu  créateur.  Grftce  à  ce 
progrès,  les  questions  relatives  à  la  matière  ont  pu  se 
circonscrire  et  se  préciser.  D'abord  le  nom  de  mattère  a 
cessé  d*être  donné  à  la  substance  spirituelle,  et  c'est  aux 
sciences  physiques  qu'est  revenue  la  description  des 
propriétés  des  corps,  en  tant  que  ces  propriété  tom*^?nt 
sous  les  sens.  Que  reste-t^il  à  savoir,  après  cela,  de  la 
matière?  Sa  nature  intime,  son  existence  même,  et  la  va- 
leur réelle  des  idées  que  nous  en  avons.  Cest  de  ce  que 
les  sens  nous  en  montrent  que  nous  pouvons  Inférer  ce 
qu'elle  est  et  le  fait  même  de  son  existence,  le  tout  à  la 
lumière  de  ce  principe  conçu  à  prtori,  que  «  toute  qualité 
suppose  nécessairement  une  substance.  ■  Cest  ainsi  que, 
percevant  la  couleur,  l'étendue,  le  chaud,  le  froid,  nous 
crovons  qu'il  y  a  une  substance  colorée,  étendue,  chaude, 
froide,  et  cette  substance  est  ce  que  nous  nommons  corps 
ou  matière.  Maintenant,  qu'est  en  elle-même  cette  ma- 
tière? Comme  nous  n'en  percevons  que  les  propriétés, 
nous  l'ignorons,  et  nous  ne  l'ignorerions  pas  moins,  quand 
même  l'analyse  chimique  ramènerait  à  l'unité  les  élé^ 
msnts  de  la  physique  moderne ,  en  mettant  à  nu,  dans 
les  corps  considérés  aujourd'hui  comme  tels,  un  principe 
unique  et  universel  ;  car  ce  principe,  cet  absolu,  ne  nous 
serait  encore  perceptible  que  par  certaines  qualités  agis- 
sant sur  les  sens.  Donc,  de  Quelque  nom  qu'on  appelle 
la  matière,  substance  corporelle,  corps  en  général,  «tf6- 
siratuim  ou  sujet  d'inhérence  des  qualités,  on  n'en  a 
qu'une  idée  vague  quant  à  l'essence  et  à  la  définition, 
quoiqu'on  en  ait  une  idée  nette  quant  à  l'existence. 

Certains  systèmes  philosophiques  s'écartent  plus  ou 
moins  de  cette  manière  de  voir.  Ainsi  la  doctrine  du  Car* 
téslanisme  sur  la  matière  peut  se  résumer  dans  les  pro^ 
position^  suivantes  :  1*  nous  ne  connaissons  les  corps 
que  par  leurs  qualités,  et  celles-ci  que  par  les  idées  que 
nous  en  avons;  S*  l'existence  des  corps  étant  admise,  il 
faut  de  toute  nécessité  admettre  l'existence  de  la  matière  ; 
3*"  la  matière  consiste  essentiellement  dans  l'étendue.  Deux 
rtpproches  peuvent  être  adressés  à  cette  doctrine.  D'abord, 
elle  subonionne  à  une  hjrpothèse  l'existence  de  la  ma- 
tière !  elle  existe  si  les  corps  existent.  Mais  qui  nous  ga- 
rantit quils  existent,  si  nous  n'en  percevons  pas  même 
directement  les  qualités?  Dieu,  suivant  Descartes,  Dieu, 
qui  ne  saurait  nous  tromper,  et  qui  a  mis  dans  notre 
esprit  un  irrésistible  pencnant  à  croire  à  la  réalité  des 
corps.  Mais  ce  recours  à  la  véracité  divine  n'est  qu'un 
des  expédients  de  l'idéalisme  pour  relever  d'une  main  ce 
qu'il  oiHruit  de  l'autre  (V.  InéAUsm).  Encore  cela  ne 
suffit-il  pas  à  ISalebranche,  qui,  pour  affirmer  l'existence 
des  corps,  veut  qu'à  la  révélation  natorelle  du  sentiment 
intérieur  se  Joigne  la  révélation  surnaturelle  proposée  à 
la  foi  religieuse.  En  second  lieu,  faire  de  l'étendue  fes- 
sence  des  corps,  c'est  résoudre  la  matière  dans  un  de  ses 
attributs,  le  plus  important,  sans  doute,  et  celui  que 
même  par  l'imstraction  on  peut  le  moins  en  concevoir 
séparé,  mais  cependant  rien  de  plus  qu'un  attribut  ;  et 
Descartes  prépare  ainsi  la  singulière  assertion  de  Locke 
et  de  Conmllac,  que  la  matière  est  la  collection  des  an»- 
lit^,  un  assemblage  (dont  le  comment  est  Inexplicable) 
de  grandeur,  de  figure,  de  solidité,  etc.  C'est  ce  que 
Ijoioniz  a  voulu  éviter  en  supposant  les  coms  essentielle- 
ment fermés  ds  subsunces  simples  (F.  Moradbs),  tfoi 


M  AU 


1226 


MAX 


lont  en  même  temps  des  forces.  Sur  le  temdn  comman 
de  lldéaliame,  où  l'existence  de  la  matière  est  si  com- 
promise, Berkeley  et  Hume  se  rencontrent  avec  Des- 
cartes. Tandis  oue  les  Cartésiens  cherchent  les  mojrens 
de  la  raffermir,  Berkel^  et  Hume  la  nient  résolument,  le 
preiotder  an  profit  du  spiritoalisme,  le  second  au  profit 
an  scepticisme.  Cest  encore  le  scepticisme  oo!  trouve 
son  compte  dans  le  système  de  Kant.  Selon  Kant,  nous 
ne  connaissons  la  mati^  qu*à  titre  de  phénomène:  nous 
ignorons  ce  qu'elle  est  en  soi.  liais,  cruelle  que  soit  son 
eisenoe,  comme  elle  ne  nous  est  donnée  que  sous  la  con* 
dition  de  Tesnace,  et  one  l'espace,  toujours  selon  Kant, 
n'est  qu'une  forme  swi^etive  de  la  sensibilité,  dont  rien 
aihsolument  ne  nous  garantit  la  réalité  o6i«cttoe  (F.  en 
motf),  nous  ne  savons  en  définitive  rien  de  certain  de  la 
matière,  pas  même  son  existence,  ou  plutût  son  existence 
moins  que  tout  le  reste.  C'est  au  malaise  que  l'esprit 
ressent  a  se  trouver  ainsi  renfermé  en  lui-même,  qu'il 
fant  attribuer  d'un  côté  les  eSbrts  pour  ressaisir  le  réel 
et  l'extérieur  que  dénotent  les  systèmes  de  Flchte,  de 
Schelling,  de  Hegel;  et,  d'un  antre  cèté,  le  retour  aux 
notions  communes  préconisé  et  mis  en  pratique  dans  les 
écrits  de  Reid  et  de  Stewart  V.  PncBPTioii ,  QoAUTis  pbb- 
viÈKBS  et  QuAuris  secondes. 

Kant  a  encore  entendu  dans  un  sens  tout  particulier  le 
mot  matière,  en  opposant  la  moHère  de  la  connaissance, 
e.-à-d.  l'ensemble  des  éléments  variables  et  accidentels 
<iu'el1e  embrasse,  à  la  forme,  qui  est  l'élément  général  et 
logique.  F.  Fouhb.  B— i. 

MATIÈRES  D'OR  ET  D'ARGENT.  V.  Buooterik,  Cow- 
ni  '.E,  Garantib,  Marque. 

ikATiftass  soNHAïass,  affaires  de  peu  d'importance  on 
argentés  qui  peuvent  et  doivent  être  instruites  et  Jugées 
promptement  et  avec  peu  de  frais.  Ce  sont  :  les  appels 
des  Juges  de  paix;  les  demandes  pores  personnelles, 
quand  il  v  a  titre  non  contesté;  les  actions  personnelles 
et  mobilières  qui  n'excèdent  pas  1,500  fr.;  les  actions  im- 
mobilières qui  n'excèdent  pas  60  fir.  de  revenu;  les  de- 
mandes provisoires  ou  qui  requièrent  célérité;  les  de- 
mandes en  payement  de  loyers  et  arrérages  de  rentes  ; 
les  demandes  en  expropriation  pour  cause  d'utilité  pu- 
blique; les  affaires  relatives  aux  domaines  et  rentes  cédées 
aux  hospices  par  l'État;  les  oppositions  aux  états  dressés 
par  les  maires  relativement  aux  recettes  municipales  ; 
les  actions  civiles  relatives  aux  chemins  vicinaux  ;  les 
demandes  en  nullité  de  vente  d'animaux  domestiques 
pour  vices  rédhibitoires. 

Matières  pREniÊnss.  V.  an  Supplément, 

MATINES.  V.  notre  Dictionn.  de  Bioqr,  et  d^ Histoire. 

MATLAZINGUB  (Idiome).  F.  Mexioue  (Langues  du). 

MATRACA,  énorme  crécelle  en  usage  en  Espagne,  et 
surtout  au  Mexique,  pour  remplacer  les  cloches  pendant 
les  trois  derniers  Jours  de  la  semaine  sainte.  La  roue  eu 
noyau  n'a  pas  moins  de  S  met.  de  diamètre. 

MATRICULE,  registre  sur  lequel  on  écrit  le  nom  des 
personnes  qui  entrent  dans  certains  corps,  dans  certaines 
sociétés  on  Compagnies.  Chaque  soldat  qui  arrive  à  son 
-corps  est  immatrtctdé  sur  nn  grand  livre,  avec  son  nu- 
méro d'ordre,  le  lieu  et  la  date  de  sa  naissance,  et  son 
signalement  ;  on  y  porte  ensuite  les  changements  de  corps, 
les  services,  les  blessures,  les  actions  d'éclat,  les  puni- 
tions, les  désertions,  etc.  Les  re^stres  matricules  de 
l'armée  sont  en  double  expédition  :  la  1**,  tenue  au  corps 
par  le  trésorier,  sous  la  surveillance  du  major;  la  2%  te- 
nue dans  les  bureaux  du  ministère  de  la  guerre.  Ils  ser- 
vent à  vérifier  les  services,  à  constater  les  droits  à  l'avan- 
cement ou  à  la  retraite.  Dans  les  réslments  de  cavalerie, 
il  y  a,  en  outre,  nn  registre  matricule  des  chevaux. 

MATRONEUM,  partie  des  anciennes  baidliques  réservée 
aux  femmes. 

MATURE.  r.MAT. 

MATUTINAL,  ancien  livre  d'église,  qui  contenait  l'of- 
liee  des  Matines. 

MAUGÈRE,  en  termes  de  Marine,  conduit  de  cuir  on 
^e  toile  goudronnée  par  où  l'eau  s'éooule  d'un  navire 
dans  la  mer;  —  morceau  de  cuir  cloué  au-dessus  des 
dalots  et  destiné  à  en  fermer  l'ouverture. 

MAUGIS  D'AIGREMONT,  une  des  branches  de  la  Geste 
des  Quatre  fUe  Aymon,  Maugis  est  le  cousin  de  Renaud 
de  Montauban.  Élevé  par  la  fée  Oriande,  c'est  lui  qui  fait 
la  conquête  du  cheval  Bajrard  et  de  l'épée  Froberge  on 
Flambergn,  quil  céda  plus  tsrd  à  Renaud.  -—  La  chanson 
de  Maugis  est  une  suite  insipide  d'aventures  merveil- 
leuses; elle  est  beaucoup  moins  ancienne  que  celle  des 
quatre  fils  Aymon.  La  Bibliothèque  nationale  de  Paris 
tt^ea  possède  qn'nn  seul  manuscrit,  qvd  est  du  xiv*  siècle* 


Cette  chanson  a  été  quelquefois  imprimée  avec  eelle  des 
quatre  fils  Aymon.  La  plus  ancienne  édition  française 
est  du  xvf  siècle,  Paris,  chei  Lotrian,  in-4*  sans  date. 
V.  VHistoire  littéraire  de  la  France,  U  XXII.      H.  D. 

MAURESQUE  ou  MORESQUE  (Architecture).  K.Arabb. 

MAUSOLEE,  magnifique  et  splendide  tombeau,  élevé 
par  Artémise  II  à  Mausole,  son  mari,  roi  de  Carie.  I^ 
monument  était  si  beau,  que  les  Andens  le  comptèrent 
parmi  les  sept  mervdlles  du  monde,  et  one,  depuis,  les 

λlus  belles  sépultures  royales  furent  appelées  Uausoiéee, 
1  Alt  érigé  l'an  v  de  la  iOfi*  olympiade,  353  av.  J.-C., 
en  vue  de  la  plus  belle  place  d'Halicamasse  et  de  la  mer, 
à  ml-c6te  d'une  colline  en  deml-H^ercle,  où  l'on  fit  une 
esplanAle  carrée  de  103  met.  de  côté.  Le  Mausolée  était 
en  marbre  blanc.  Sur  un  soubassement  de  30  met.  de 
face  de  l'E.  à  l'O.,  et  33  de  côté  du  N.  au  S.,s'élevait  une 
sorte  de  temple  quadrangulaire,  entouré  de  36  colonnes 
ioniques,  ayant  dans  leurs  entre-colonnements  36  statues 
alternativement  de  héros  et  de  Uons,  les  premières  en 
partie  colossales,  les  secondes  en  partie  de  grande  nature. 
Les  lions  figuraient  là  comme  gardiens  du  tombeau,  sui- 
vant une  conception  bien  connue  de  l'art  antique.  Sur  ce 
péristyle,  haut  de  Î5  coudées  (ii«,57),  s'élevait  une  py- 
ramide de  même  hauteur,  en  M  gradins,  et  portant  un 
quadrige  colossal  de  marbre  :  le  diar  contenait  les  stap 
tues  de  Mausole  et  d'ArtémIse,  debout  et  de  3  met  de 
proportion.  Les  chevaux  avalent  des  hamala  d'airain.  La 
hauteur  totale  du  monument,  y  compris  le  quadrige,  me- 
surait 440  pieds  (43"",30)  ;  mais  du  côté  de  la  mer  il  p»- 
raissait  beaucoup  plus  grand,  pane  qu'on  arrivait  à  son 
esplanade  par  une  suite  de  rampes  et  de  terrasses  qui 
ajoutaient  encore  à  sa  mijesté.  La  sépulture  n^e  était 
mms  nn  caveau  creusé  sous  l'esplanade  du  monument. 

Les  architectes  Satyres  et  Pythis  construisirent  le  Mau- 
solée, et  les  sculpteurs  les  plus  célèbres  de  la  Grèce  s'en 
partagèrent  l'ornementation  :  Bryaxisfit  le  nord,  Scopas 
Test,  Timothée  le  sud,  et  Léocharès  l'ouesL  Pythis,  qui 
était  sculpteur  en  même  temps  qu'architecte,  exécuta  le 
quadrige.  —  Ce  superbe  tombeau  subsista,  an  moins  en 
grande  partie,  Jusqu'en  1522  ;  alors  les  chevaliers  de  Jé- 
rusalem achevèrent  sa  ruine  pour  en  tirer  les  matâ-ianx 
dont  Us  construisirent,  à  Boudroum,  un  chftteau  fort  ap- 
pelé la  Tour-S^Pierre.  En  1857,  M.  Ch.  Neiwton,  vice- 
consul  anglais  à  Mytilène,  a  retrouvé  l'emplacement  du 
Mausolée,  et  recueilli  beaucoup  de  parties  de  ses  sculp- 
tures, qui  sont,  ainsi  que  l'architecture,  du  plus  besn 
temps  ne  l'art  me  II  les  envoya  au  British-Museum  de 

Londres»  où  elles  sont  conservées.  La  forme  générale  dn 
tombeau  de  Mausole  fût  empruntée  aux  grands  bûchers 
que  l'on  construisait  pour  les  funérailles  des  rois  on  des 
personnages  illustres;  tel  fut  celui  de  Denys  l'Ancien,  ^- 
ran  de  Sjrracuse,  ârigé  Tan  i*'  de  la  103*  olympiade,  3Ô8 
av.  J.-C,  et  15  ans  avant  le  Mausolée.  V.  Vltruve,  II,  8; 
VIT,  préf.;  Pline,  XXXVI,  4;  ilcod.  dee  /n«crtpt.,t.  XXVI; 
Newton,  On  the  sculptures  from  the  Mansoleum  of  Ha- 
licamasse,  dans  le  ClassiciU  Musewn,  XVI;  Papers  res- 
pecting  thê  eoocavatùms  at  Budrm^  etc.,  Londres,  1S58, 
in-fol.;  Further  papers  respecfmg  the  eseoMitioM  et 
Budrum  and  Cnidees,  ete»,  Londres,  1860,  In-fol.,  aves 

Slans  topographiques,  et  une  restauration  du  Mausolée; 
^uUetino  MV  InstUuto  archeologico^  1860,  p.  39;  Momh 
menti  dtiV  Instit.  a/rehêcHog.,  vol.  5.  G.  D— t. 

MADSOLÉB  D'AUGUStB.  )  V.  uotro  fKotîoiuiain 

HAUSOLéE  D'AORiBf.  >     dé  Bîoor»  et  ^His» 

VADSOLAs  chez  LES  HODESIIBS.   |       tOÎTS. 

MAX  (Abréviation  de  Maaoimilien)^  monnaie  d'or  de 
Bavière,  valant  17  fr.  24  c.  Il  y  a  des  doubles  max,  des 
deml-max  et  des  quarts  de  max. 

BfAXlME,  r^le  de  conduite  qui  dirlae  dans  leuis  ac- 
tions les  États  et  les  particuliers  (du  latin  maxima,  très- 
grande,  à  cause  dA  son  importance^.  Montesquieu  vante 
les  maximes  du  Sénat  romain,  et  Bossuet  nous  apprend 
que  la  maooime  du  prince  de  Gondé  était  que,  dans  lea 
grandes  actions,  il  »ut  uniquement  songer  à  bien  faire, 
et  laisser  venir  la  gloire  aprèa  la  vertu.  —  Dans  un  sens 
plus  littéraire,  on  a  appelé  MaoBtmes  des  réflexions  sur  h 
nature  humaine,  présentées  communément  sous  ans 
formé  sentencieuse.  Parmi  les  Maximes  célèbres  de  notre 
littérature,  brillent  au  premier  rang  celles  de  La  Rocbe- 
foncauld.  Ce  recudi,  dont  la  i**  édition  parat  en  1002, 
méritait  à  double  titre  son  succès.  D'abord  11  contribuait 
poor  sa  part  à  fixer  la  langue  française  :  personne,  nsi 
même  Pascal,  dont  les  Pensées  ne  furent  publiées  (preo 
1070,  n'avait  Jusque-là,  du  moins  dans  un  sujet  ana- 
loeue,  doté  notre  Idiome  de  toutes  les  qualités  qui  ren- 
daient le  DOttvean  Ujrt  si  séduisant;  c'était  la  prendêM 


MAY 


122t 


MAZ 


Mt  qae,  pour  peindre  les  faiblesses  et  les  rtees  du  cœur 
hamain,  an  écriyain  unissait  tant  d'éclat  et  de  relief  à 
tant  de  précision,  dans  un  style  savant  dont  les  termes 
et  le»  tours  ne  devuent  plus  périr.  Pour  atteindre  à  cette 
beauté,  La  Rochefoucauld  avait  poli  et  repoli  sans  cesse 
son  osuvre,  appelant  à  l'aide  de  son  propre  esprit  et  de 
son  art  le  goût  délicat,  Timagination,  le  savoir  et  l'esprit 
des  plus  aimables  collaboratrices,  dans  ce  salon  de  H™*  de 
Sablé  qui  fût  son  hôtel  de  Rambouillet  L'ouvrage  avait 
an  autre  attrait  :  Descartes  avait  porté  la  philosophie 
dans  les  sphères  de  la  métaphysique;  Port-Royal,  plus 
pratique»  nuis  inspiré  par  l'esprit  chrétien,  se  plaçait, 
pour  étudier  l'homme  et  lui  dicter  des  règles  de  conduite, 
aa  point  de  vue  de  sa  destinée  relîs^euse.  La  Rochefou- 
cauld ilrit  pour  lui  le  domaine  encore  inexploré  de  l'ob- 
aenrsDon  morale.  Psychologue  à  sa  façon,  il  se  donna 
pour  tâche,  après  ses  déboires  politiques  et  les  désen- 
chantements de  sa  liaison  avec  M"**  de  Longueville,  de 
descendre  au  fond  des  cœurs,  d'y  surprendre  nos  in- 
stincts les  plus  secrets,  et  de  dévoiler  sans  pitié  les  mo- 
ûfi  cachés  des  actions  humaines.  Ifalheurftusement  fl 
observait  les  hommes  dans  un  moment  peu  favorable  :  la 
Fivade  ayant  comme  Jeté  tous  les  partis  hors  de  leur 
▼rai  caractère,  les  mauvais  penchants  de  la  nature  hu- 
maine, l'esprit  de  révolte,  l'ambition,  l'égolsme  et  la  var 
nité,  refoulaient  au  fond  des  &mes  les  bons  instincts. 
Prévenu  par  ses  propres  mécomptes,  La  Rochefoucauld, 
an  Heu  de  pénétrer  jusque-là,  eut  le  tort  de  s*arrèter  à  la 
surface,  qui  lui  représentât  les  hommes  tels  mie  son 
ressentiment  voulait  les  voir  et  les  peindre;  de  là  ce 
triste  aphorisme  qui  résume  toute  sa  doctrine  :  «  Les 
▼ertas  se  perdent  oans  Tintât,  comme  les  fleuves  dans 
la  mer.  •  On  s'est  donné  le  facile  plaisir  de  réfuter  La  Ro- 
ehefoucaold  ;  on  lui  a  victorieusement  démontré  que  les 
actions  humaines  ont  d'autres  mobiles  que  l'intâét  ou 
famoar-propre;  on  a  réclamé  la  part  du  devoir  et  des 
passions  généreuses;  en  quoi  on  avait  raison  ;  mais  on  a 
eu  tort  de  Juger  de  l'homme  par  le  système.  On  de- 
vait se  rappeler  que  La  Rochefoucauld ,  avec  la  frivolité 
d*esprit  et  l'^Isme  qu'on  veut  bien  dire,  n'eût  pas 
inspiré  à  des  femmes  telles  que  M"**  de  Sablé,  M""*  de 
(tévîgné,  surtout  M°>*  de  La  Fayette,  l'admiration  ou 
rattachement  passionné  dont  elles  l'entourèrent  Jusqu'à 
la  fin.  Il  fallait  songer  que,  s'il  se  montra  infidèle  à 
M"**  de  Longuerille  et  à  la  Fronde,  il  eut  peut-être  le 
droit  de  se  croire  dupe  lui-même,  et  qu'un  noble  cœur 
déçu  risque  de  s*aigrir  en  proportion  même  de  ses  illu- 
sions détruites.  Faut-il  le  dire  enfin,  s'il  a  calomnié  les 
hommes,  il  ne  s'est  trompé  guère  que  du  plus  an  moins. 
Qu'on  change  les  adverbes;  qu'on  lise  souvent  quand  il 
écrit  UHfjowrs,  qu'on  entende  qudquefois  (raand  il  dit 
mmoent,  et  ses  luximes  ainsi  modifiées  oflnront  à  qui 
veut  se  connaître  un  miroir  assez  sincère.  Consultez  à  ce 
propos  La  Fontaine,  il  vous  répondra  par  sa  fable  VHomnu 
«f  son  image  Œy.  I,  f.  11).  V.  Moraustes  (Écrivains), 
CâSAcrtoiBS,  PBfséBS,  Proverbes.  A.  H. 

WAXiMS,  ancienne  note  de  Musique,  en  forme  de  carré 
long  horizontal,  terminé  à  droite  par  une  queue  verti- 
cale. Elle  valait  8  mesures  à  %  temps,  c.-à-d.  2  longues, 
et  quelquefois  3,  selon  le  mode.  Elle  n'est  plus  en  usage 
depais  qa*on  sépare  les  mesures  par  des  barres,  et  qu'on 
marque  avec  des  liaisons  les  tenues  ou  continuités  des 


IfAXIHILIErtNES  (Tours).  F.  Tours. 

HAXmOM,  limite  supérieure  de  prix  imposée  par  la 
loi  à  la  vente  d'une  marcnandise.  Ainsi,  H  y 'a  en  France, 
pour  le  pain,  un  maximum  que  des  tableaux  affichés  font 
connaître  aux  consommateurs.  On  a  essayé  de  taxer  aussi 
la  viande  de  boucherie ,  mais  ce  système  a  été  bientôt 
aliandonné.  La  loi  mii  fixe  à  5  ou  0  p.  100  le  taux  du 
prêt  de  Targent  (F.  iirr<at;T)  est  une  loi  de  maximum. 
Il  en  est  de  même  des  lois  qui  règlent  les  honoraires  des 
officiers  ministériels,  des  agents  de  change,  des  cour- 
ders  de  commerce,  les  prix  de  transport  sur  les  chemins 
de  fer.  Une  loi  qui  établirait  un  minimum  des  salaires 
serait  par  le  fUt  une  loi  de  maa^tmum,  puisqu'elle  fixe- 
nit  la  plus  grande  somme  de  travail  que  l'ouvrier  de- 
vrait exécuter  pour  un  prix  déterminé.  Il  y  eut,  pendant 
b  Révolution,  en  1793,  une  application  fameuse  du 
maximum  à  la  vente  des  denrées  (F.  Maximum,  dans 
notre  Dicthnnaire  de  Biographie  et  d'Histoire). 

MAYA  ou  YOCATÈQUE  (Langue).  F.  Mexique  (Langues 
do). 

MAYENCE  (Cathédrale  de).  L'église  primitive  dédiée 
à  S^  Martin ,  et  dont  S^  Boniftce  tut  archevêque ,  était 
Me  prabableiiient  en  bois  «  puisque  l'histohre  annonce 


avec  une  certaine  emphase  qu'en  07S  l'archevêque  WIW 
ligis  entreprit  de  la  rebâtir  en  nierres.  Le  Jour  même  de 
sa  dédicace,  ce  nouvel  édifice  fut  incendié  :  on  en  repri$ 
la  construction  en  1009,  et  il  fut  achevé  en  1037  par 
rarchevêque  Bardon.  La  cathédrale  de  Mayence  eut  en« 
core  à  souffrir  de  deux  incendies ,  en  1081  et  en  1191 1 
des  travaux  importants  furent  nécessaires,  et  l'on  dut 
faire  une  nouvelle  consécration  en  1239.  Les  murs  de  la 
nef  et  l'abside  orientale  appartiennent  éridemment  an 
XI*  siècle,  et  sont  dus  sans  doute  à  Bardon,  On  recon« 
naît  dans  la  masse  des  autres  constructions  l'ouvrage  dn 
xn*  siècle  ;  le  transept  et  l'abside  de  l'ouest,  postérieurs 
à  l'incendie  de  1191 ,  sont  de  style  ogival  ;  les  chapelles 
ont  été  i^outées  vers  \b,  fin  du  xui*  siècle  et  dans  le  cours 
du  XIV*  ;  autour  de  l'église  sont  des  cloîtres  du  xv*.  De* 
puis  cette  époque,  le  monument  n'a  pas  reçu  de  change- 
ments notables  ;  on  a  dû  seulement  te  réparer  après  les 
ferres  de  la  République  firançaise.  Il  est  du  plus  haut 
intérêt,  à  cause  de  ses  dispositions  architecturales  :  deux 
absides  romanes  en  terminent  les  extrémités,  l'une  ser- 
vant au  chapitre,  l'autre  à  la  paroisse,  et  chacune  a  son 
transept  ;  il  est  surmonté  de  deux  belles  coupoles  et  de 
quatre  tourelles  élancées.  L'une  des  portes  a  des  pan* 
neaux  de  bronze  provenant  d'une  ^ise  de  Notre-Dame^ 
aujourd'hui  détruite.  Tout  l'édifice,  en  pierres  d'un  roues 
plus  ou  moins  clair,  a  126">,75  de  longueur,  et  47™  de 
largeur  en  y  comprenant  les  chapelles  latérales  ;  la  Dat- 
geur  de  la  nef  est  de  34»,50.  A  l'Intérieur,  U  n'y  a  point  de 
vitraux,  et  un  badigeon  blanc  a  été  étendu  partout  Mais 
on  remarque  une  magnifique  cuve  baptismale  en  bronze 
fondue  en  1325,  une  chaire  de  la  fin  du  xv*  siècle,  et  les 
tombeaux  des  archevêques-électeurs,  adossés  aux  piliers 
et  aux  murs,  ou  formant  des  autels,  n  faut  y  idouter  le 
monument  en  grès  rouge  élevé  à  S'  Boniface»  la  pierre 
tumulaire  de  Fastrade,  l'une  des  femmes  de  Charlema- 

S  ne,  et  le  mausolée  du  minnesvnger  Frauenlob,  ouvrage 
e  Schwanthaler.  B. 

MA  YEUX,  un  des  Urpes  les  plus  cyniques  de  la  cari- 
cature française.  Aussi  inmsu  et  plus  libertin  que  Poli- 
chinelle, laid,  méchant,  éhonté,  U  fut  créé  aussitôt 
après  la  Révolution  de  1830  :  enfant  des  barricades,  puis 
g^e  national,  il  courut  ensuite  une  série  d'aventures 
qui  provoquèrent  le  rire  aux  dépens  surtout  de  la  bour- 
geoisie et  au  gouvernement  de  Juillet.  Son  règne  n'a  duré 
que  deux  ans  environ. 

MAYPURE  (Idiome),  Idiome  américain,  parlé  dans  la 
vallée  supérieure  de  l'Orénoque.  41  est  clair,  précis, 
riche  d'expressions,  exempt  de  sons  gutturaux.  Les  noms 
de  nombre  reçoivent  des  terminaisons  différentes,  selon 
ou'ils  se  rapportent  à  des  hommes,  des  animaux  ou 
d'autres  objets.  Les  prépositions  sont  toujours  placées 
après  leurs  compléments,  et  les  conjonctions,  dont  U  y 
a  un  très-petit  nombre,  à  la  fin  de  la  phrase.  Le  Cavere, 
parlé  dans  le  bas  Orénoque,  n'est  qu'un  dialecte  du 
majrpure. 

MAZARINADES,  nom  donné  aux  pamphlets,  libelles  ^ 
satires,  en  vers  et  en  prose,  que  Ton  publia,  durant  U 
Fronde,  contre  le  cardinal  Mazarin.  Ce  nom  vient  de  la 
pièce  la  plus  célèbre  du  genre,  la  Maiarinadê,  datée 
du  11  mars  1051.  On  l'a  étendu  aux  écrits  publiés  aussi 
en  faveur  du  cardinal.  Le  nombre  des  Mazarinades  est 
évalué  à  4,000  environ.  Elles  n'ont  ni  l'originalité,  ni 
Tàcreté,  ni  la  verve  des  libelles  de  la  Ligne,  parce  oue 
les  intérêts  étaient  moins  sérieux,  les  passions  moins 
profondes  et  moins  terribles  :  le  burlesque  en  est  le  ca- 
ractère général ,  et  il  en  est  un  certain  nombre  qui  soat^ 
pleines  de  raieté.  Les  hardiesses  politiques  que  raq  f» 
trouve  s'expliquent  par  l'absence  d'une  autorité  répres^v 
sive;  cependant  des  poursuites  furent  exercées  contre  )eé; 
imprimeurs,  qui  datèrent  de  Bruxelles  ou  d'Anvers  beau- 
coup de  morceaux  sortis  de  leurs  presses.  Les  amateurs, 
recherchent  surtout  les  pièces  suivantes  :  la  Pure  vérUS. 
cachée,  la  Custode  de  la  reine ^  la  Famine,  le  Gowoer^- 
nemeni  prisent  ou  Êloùe  de  son  Emineneef  la  MUHoA, 
au  Éloge  burlesque  de  Maxarin,  la  Mcaanhade,  1$  2Vs-- 
tament  ampïûlxdogique^  la  BouteUle  cassée,  MaseunUi, 
les  Barricades,  VEnvoi  de  Maiarin  au  mont  Gibet,  F»*', 
relay  sur  les  vertus  de  Sa  Faquinance,  Lettre  de  PoU»' 
chineîleàJules  Mazarint ,  etc.  Parmi  les  écrivains  qui  si 
firent  remarquer  dans  cette  guerre  de  plume,  nous  cite* 
rons  le  cardinal  de  Retz,  Joly,  Sarrazin,  Patru,  les  deux 
Laffemas,  Guy  Patin,  Naudé,  Marigny,  Loret,  Portai,  Cau* 
martin.  Produites  avec  une  srande  rapidité,  les  Mazari- 
nades sont,  au  point  de  vue  de  la  typographie,  extrême* 
ment  incorrectes;  ouelques  -  unes  ont  des  gravures..^ 
Gomme  on  les  imprima  presque  tontes  sur  une  même 


HEA 


1228 


MED 


lorte  de  papier,  plié  petit  in-4*,  on  a  pa,  dès  leur  ^>par 
ritioD,  en  former  des  Tolumes.  La  Bibliothèque  impé- 
riale, la  Bibliothèque  Mazarine,  les  bibliothèques  du 
LouTre,  de  S^-OenevlèTe  et  du  Corps  législatif,  a  Paris, 
possèdent  d'abondantes  collections.  F.  Moreau,  Biblh" 
4fraphîê  des  Mastarinades,  Paris,  1850-55,  3  yoK  in-8»,  et 
Choix  de  Maxarinades,  2  toI.  gr.  in-8*.  B. 

MAZARTNE  (Bibliothèque).  Dès  1644,  la  Biblioth«xiue 
du  cardinal  Mazarin,  dans  son  palais,  rue  de  Richelieu, 
était  publique.  En  1688,  plusieurs  années  après  U  mort 
de  son  fondateur,  elle  fut  transférée  au  Collège  Maza- 
rin,  sur  le  quai  Conti,  où  elle  est  encore.  Composée, 
à  Torigine,  des  6,000  volumes  de  la  collection  acquise 
d*un  savant  chanoine  de  Limoges,  Jean  Descordes,  elle 
s'accrut  de  livres  achetés  par  Gabriel  Naudé,  son  pre- 
mier bibliothécaire,  à  Paris,  en  Hollande,  en  Italie,  en 
Allemagne  et  en  Angleterre ,  et  de  la  collection  du  car- 
dinal de  Toumon.  Elle  demeura  sous  Tadministration 
de  la  maison  de  Sorbonne  depuis  le  14  avril  1688  Jus- 
qu'au 7  mai  1701,  date  de  la  remise  des  clefs  de  la  Bi- 
bliothèque par  Luce-Joseph  Hooke,  oui  avait  refusé  de 
prêter  serment  à  la  Constitution  dvile  du  clergé.  De- 
puis, cette  bibliothèque  fut  réunie,  ainsi  que  la  Biblio- 
thèque royale,  la  Bibliothèque  de  TArsenal  et  la  Biblio- 
thèque S^*-Geneviève,  aux  attributions  du  ministre  de 
rintérieur.  Elle  renferme  aujourd'hui  200,000  vol.  et 
4,000  mss.  Un  des  plus  curieux  objets  qu'elle  contienne 
est  le  projet  d'une  caiàpagne  de  d&ouvertes  proposé  au 
roi  par  La  Pérouse ,  accompagné  de  notes  écrites  de  la 
main  de  Louis  XYI.  On  y  remarque  .aussi  le  globe  ter- 
restre de  ce  malheureux  prince.  Petit^Radel  a  donné,  à 
la  suite  de  ses  Recherches  sur  les  bibliothèques  anciennes 
et  modernes,  une  notice  historique  sur  la  Bibliothèque 
Hazarine.  Cet  établissement  lui  doit  80  modèles  exécutés 
en  relief  représentant  des  monuments  pélasdques  de 
ntalie,  de  la  Grèce  et  de  l'Asie-Mineure.        C.  de  B. 

MAZDÉISME  (du  send  maxda,  loi  suprême),  nom 
donné  à  la  relinon  des  anciens  Perses,  contenue  dans  le 
Zené^Avesta  (y.  ce  mot). 

IIAZELIN.  V.  Hadrb. 

MAZOVIEN  (Dialecte).  F.  Poi^naisb  (Langue). 

UAZOURKA,  MAZURKA  ou  MAZUREK ,  m  de  danse 
de  la  Bfazovie  (Pologne),  dont  la  première  partie  est  tou- 
jours mineure,  et  la  seconde  majeure.  Cet  air  s'écrit  à  3 
temps,  comme  la  polonaise  (V.  ce  mot)^  mais  d'un  mou- 
vement plus  vif.  Il  possède  un  rhjrthme  particulier  qui 
consiste  à  marquer  a^uvent  le  S*  temps  de  la  mesure;  la 
période  se  termine  sur  le  ^  temps.  La  danse  de  la  ma- 
lourka  tient  à  la  fois  de  la  valse  et  de  la  polka. 

MÉANDRE.  K.  Freitb. 

MEAUX  (Église  S^-ÉnBifiiB,  à).  Cette  église  cathédrale. 

Su  reconnaît  aussi  la  S^*  Vieige  pour  patronne,  oflTre  pln- 
eurs  styles,  mais  appartenant  tous  à  la  période  ogivale. 
Les  six  arcades  Inférieures  du  chœur,  les  bases  et  les 
chapiteaux  de  quelques  colonnes  de  la  nef,  paraissent 
remonter  à  la  fin  du  xu*  siècle  ;  les  parties  de  la  nef  voi- 
sines du  transept  offrent,  dans  les  arcades  de  la  galerie 
et  les  grandes  verrières,  les  formes  simples  du  xm*  ;  les 
parties  supérieures  du  chœur,  le  sanctuaire  et  les  cha- 
pelles absidales  sont  de  la  fin  de  ce  même  siècle;  le  xiv*  et 
le  XV*  ont  vu  s'élever  le  transept  avec  ses  deux  portails, 
et  une  partie  de  la  fiiçade  occidentale  ;  une  partie  de  la 
nef,  au  moins  en  ce  qui  concerne  l'ornementation ,  le 
bas  côté  septentrional,  et  les  parties  supérieures  de  la 
tour  datent  du  commencement  du  xvi*.  A  l'extérieur,  la 
cathédrale  de  Meaux  est  d'un  style  sévère,  dont  l'austé- 
rité n*est  dissimulée  par  aucun  artifice  de  décoration,  ^ 
il  Ton  en  excepte  les  portails,  on  trouve  à  peine  quel- 
ques traces  de  sculptures  sur  les  murailles.  C'est  une 
nuMse  nue  et  sans  vie,  dont  les  matériaux  sont,  en  outre, 
de  mauvais  choix.  Le  pourtour  du  chœur  et  de  l'abside 
a  un  aspect  moins  triste  :  les  contre-forts,  qui  soutiennent 
éeuz  rangs  superposés  d'arcs-boutants,  sont  tqpiinés 

Cir  de  petites  pyramides,  ornées,  sur  leurs  angles,  de 
ailles  ou  de  fleurons.  Point  de  ces  saleries  découpées , 
£d  forment  ceinture  autour  des  conibles  des  autres  ca- 
édrales;  elles  sont  remplacées  par  une  simple  rampe 
de  fer.  La  couverture,  en  tuiles  grossières,  contribue  en- 
core à  donner  de  la  lourdeur  à  l'édifice.  La  grande  fa- 
çade, commencée  sur  un  plan  vaste  et  imposant,  n'a 
Jamais  été  achevée  ;  les  voussures  des  trois  portes ,  qui 
avalent  été  travaillées  avec  soin,  ont  été  mutilées  par  les 
calvinistes  en  1501  ;  la  rose  centrale,  à  compartiments 
rayonnants,  est  la  plus  belle  partie  de  ce  irontisplce. 
Dm  deux  tours  qui  flanquent  la  façade,  celle  du  nord, 
kiute  de  68  met.,  est  seule  terminée;  le  sommet  de  celle 


du  sud  est  recouvert  d'ardoises.  L'intérieur  de  Péglise  a  ni) 
tout  autre  mérite  que  le  dehors,  et  peut  rivaliser,  pour 
l'élégance  et  la  hardiesse,  avec  les  cathédrales  plus  in»> 
portantes  :  il  ne  manque  à  la  grande  nef  q^u'une  longueur 
plus  considérable.  Le  chœur  et  le  sanctuaire  sont  surtout 
romarquablea  pour  l'élancement  des  colonnes  qui  les 
soutiennent  :  ces  colonnes,  hautes  de  IS'^fSO,  couronnées 
de  gracieux  ckttpiteaux,  sont  cantonnées  d'une  grftle  co« 
lonnette  qui  monte  d'un  seul  Jet  Jusqu'à  la  naissance  de 
la  voûte.  Les  fenêtres,  aujourd'hui  privées  de  verrières, 
semblent  un  peu  courtes,  parce  que  la  ^erie  qu'elles 
surmontent  n'est  pas  éclairée.  Les  cinq  chapelles  absi- 
dales forment  un  rayonnement  symétrique  d'un  eflët 
imposant;  contre  la  coutume,  celle  de  la  S'*- Vierge  n'a  pas 
de  plus  grandes  dimensions  que  les  autres.  L'une  d'elles 
contient  le  tombeau  en  marbre  de  Bossuet.  Les  quatre 
chapelles  b&ties  en  sous-œuvre  entre  les  massifii  des  con- 
tre-forts de  la  nef  forment  une  disparate  f&cheuae.  Le 
riche  Jubé  qui  existait  autrefois  à  l'entrée  du  chœur  a 
été  abattu  au  xvm*  siècle;  il  fut  remplacé  par  de  massifs 
autels,  qu'on  a  heureusement  fait  disparaître  de  nos  Jours. 
La  nef  n'a  oue  cinq  travées,  y  compris  celle  gue  remplit 
la  tribune  des  orgues  :  les  piliers  y  sont  en  iaisoean.  La 
partie  inférieure  des  murailles  est  ornée  d'une  fausse 
galerie  en  relief.  Les  dimensions  de  la  cathédrale  de 
Meaux  à  l'intérieur  sont  :  longueur  dans  œuvre,  84",35  ; 
largeur  du  transept,  35*"  ;  hauteur  de  la  voftte  du  chœur, 
20";  hauteur  de  la  voûte  au  milieu  du  transept,  31". 
F.  MB*  Allou,  Notice  sur  la  cathédrale  de  Meaux,  in-8*. 

MÉCANIQENS  DE  LA  MARINE.  On  distingue  :  les 
mécaniciens  en  chef,  assimilés  aux  capitaines  de  cor- 
'vette,  et  aiyolnts  aux  commandants  supérieurs  des  bâti- 
ments à  vapeur  dans  les  ports  dédgnes  par  le  ministre 
de  la  marine;  les  mécaniciens  principaux  de  1**  classe, 
qui  ont  rang  de  lieutenants  de  vaisseau,  et  qu*on  emploie 
à  terre  selon  les  besoins  du  service;  les  mécaniciens 
principaux  de  2*  classe,  assimilés  aux  enseignes  de  vais- 
seau, et  employés  à  la  mer  et  à  terre  ;  enfin,  les  maî- 
tres mécaniciens. 

MÉCANIQUE  (Philosophie),  doctrine  qui  ne  fait  ré- 
sulter les  qualités  des  corps  que  du  rapprochement  d'un 
certain  nombre  d'éléments  ou  de  principes  sans  qualités 
propres,  et  de  leur  manière  de  se  grouper.  Le  système 
d'Anaximandre  est  déjà  un  commencement  de  philoso- 
phie mécanique  ;  mais  c'est  dans  Straton  de  Lampsaque 
qu'on  la  trouve  complète  et  sans  mélange.  D'après  son 
système,  le  monde  n'est  pas  animé;  ses  principes  exis- 
tant d'eux-mêmes,  le  mouvement  et  les  eflfets  qui  en 
résultent  sont  dus  à  la  nécessité.  Ce  système  différait  de 
celui  de  Démocrite  et  d'Épicure  en  ce  qu'il  n'admettait 
pas  les  atomes  ni  le  vide;  il  expliquait  toute  chose  à 
l'aide  de  certains  mouvements  ;  u  est  inutile  d'i^outer 
qu*il  repoussait  toute  croyance  à  la  divinité.  La  philoso- 
pliie  m«:anique  n'est  qu'une  forme  de  la  physique  chei 
les  Anciens,  et  du  matérialisme  chez  les  Modernes.  Des- 
cartes s'est  rapproché  de  cette  doctrine,  en  Toulant  ex- 
pliquer les  phénomènes  physiques  par  la  matière  et  le 
mouvement,  mais  avec  cette  différence  capitale,  qull  a 
recours  à  Dieu  pour  imprimer  le  mouvement.  R. 

IléCitNlQDBS  (Arts).  V.  ASTS  BT  MtnBBS. 

MÉCHOUAR,  nom  que  les  Arabes  donnent  à  la  cita- 
delle de  quelques-unes  de  leurs  villes. 

MÉDAILLE.  Cest,  proprement,  une  pièce  métaUiqoc 
et  oommémorative,  destinée  à  conserver  et  à  transmettre 
le  souvenir  soit  d'un  événement,  soit  d'un  homme.  Ches 
les  Anciens,  la  médaille  n'était  pas  distincte  de  la  mon- 
naie, parce  que  la  monnaie  portait  le  plus  souvent  la 
témoignage  du  temps  où  elle  était  frappée,  ou  mèms 
parce  qu'elle  étût  émise  à  l'occasion  d'un  fait  important, 
comme  le  serait  une  médaille  ai^ourd'hui.  Une  monnaie 
antique  a  donc  généralement  eu  un  double  caractère: 
moyen  d'échange,  elle  a  circulé  avec  une  valeur  déter- 
minée; monument  historique,  elle  a  conservé  sa  sigoi- 
flcation  commémorative,  nous  apportant  les  noms  des 
magistrats,  la  mention  des  événements,  l'image  à» 
temples,  statues,  édifices  publics  ou  sacrés  <ra*eUe  devait 
faire  connaître.  De  là  sa  double  dénomination  de  mon- 
naie et  de  médaille;  de  là  aussi  les  secours  qu'elle  ap* 
{»orte  à  l'histoire,  les  lumières  qu'elle  lui  fournit  dans 
'absence  de  tout  autre  témoignage.  Cependant,  il  parait 
impossible  de  rattacher  à  un  système  monétaire  quel- 
conque quelques-unes  des  pièces  une  nous  a  transmises 
l'antiquité  :  dans  ce  nombre,  nous  signalerons  les  grandes 
pièces  d'argent  de  Syracuse  à  la  tète  de  Cérès  ou  de  Pro- 
serpine  {V.lafig. ci-dessous ),  et  les  médaillons  de  brooss 
de  l'Empire  romain.  La  rareté  de  ces  pièces,  qa'on  a  troa* 


hkd 


1229 


MËD 


Téeè  quelquefois  montées  comme  des  bijocix,  porte  à 
croire  qu'elles  ont  été  émises  à  petit  nombre,  pour  être 
dstriboées  à  des  fonctionnaires,  et  non  livrées  au  com- 
merce. Les  auteurs  anciens  ne  nous  fournissent  à  cet 
égard  aucun  renseignement. 


hkidaàllon  de  Syraeuu  (face). 


MéiaUlon  de  Syracuse  (reren). 

Au  moyen  ftge,  la  monnaie  a  perdu  le  caractère  easen- 
deUement  mobile,  actuel,  oommémoratif,  qu'elle  avait  eu 
dans  l'antiquité  ;  les  types  ont  tendu  à  l'immutabilité;  le 
Qom  du  souverain  a  seul  changé.  Aussi  le  retour  à  l'étude 
da  Fantiquité  a-t-il  fait  inventer  la  médaille.  En  France, 
tel  plos  anciennes  médailles  sont  de  très-grandes  pièces  en 
•r,  d'une  atrême  rareté,  thippées  par  le  roi  Charles  VII  ; 
sUes  sont  ooQTertes  de  longues  légendes  où  Ton  célèbre 
U  défaite  des  Anglais  et  la  délivrance  du  sol  français  par 
le  roi  Charles  VII.  —  En  Italie,  l'art  Joue  un  plus  grand 
rtle  dans  la  médaille;  il  s'y  manifeste,  du  premier  coup, 
STee  une  puissance  et  une  originalité  très-remarquables  : 
mais,  dans  les  imitations  des  Anciens,  on  employa  pen- 
dant longtemps  les  moyens  matériels  que  ceui-ci  avaient 
mis  en  œuvre,  c-è-d.  le  moule  qui  donne  des  épreuves 
aonvent  iné^es,  remplies  de  soufflures;  les  artistes 
étaient  obli^  de  les  retoucher  eux-mêmes,  ou  de  les 
ûdre  ciseler  par  leurs  élèves.  Au  commencement  du 
XVI*  siècle,  Victor  Camelo  inventa  l'art  d'enfoncer  les 
coins  dans  l'acier,  et  on  commença  à  préférer  les  épreuves 
dues  à  ce  procédé  aux  épreuves  fondues.  Cependant,  tan- 
dis <pi*en  Italie  on  abandonnait  le  moulage,  en  France,  il 
continua  d'âtre  en  usage  sous  Dupré  et  sous  Varin,  et 
FÂllemagne,  qui  le  conserva,  pxx>duisit  également  de 
très-belles  pièces.  —  L'invention  du  balancier  ou  du 
moulin ,  an  milieu  du  xvi**  siècle,  permit  d'obtenir  des 
épreuves  parfaitement  nettes  de  médailles  d'une  grande 
dimension ,  et  dispensa  l'artiste  de  les  retoucher.  Au- 
jourd'hui encore,  après  IMnvention  de  la  machine  Thon- 
aelier,  qui  frappe  les  monnaies  sans  le  secours  de  la 
mahi  de  l'homme,  on  se  sert  du  balancier  pour  frapper 
les  médailles  :  c'est  le  seul  engin  dont  on  puisse  obtenir 
la  force  nécessaire,  en  lui  faisant  donner  autant  de  coups 
fallesthooin. 

Les  graveurs  en  médailles  dont  les  œuvres  sont  le  plus 
recherchées  sont  :  à  l'étranger,  Victor  Pisanello,  le  grand 
irtiste  du  xv«  siècle,  fondi^r  de  l'école  de  Vérone,  qui 
lompte  Mathieu  de  Pasti,  Jules  Terra,  Torre  et  tant 
d'autres;  en  France,  Dupré,  le  plus  habile  graveur  fran- 
çais, contempondn  de  Henri  IV  et  de  la  r^;ente  Marie  de 
Uéffida;  Varin,  graveur  des  principales  médailles  de 
Loais  XIV  ;  Dnvivier,  contemporain  de  Louis  XV,  etc.  — 
AQJourd'hià  la  gravure  en  médailles  est  en  décadence  i  il 
est  vrai  que  cet  art  éteit  autrefois  l'oblet  d'une  protection 
spéciale  ;  les  rois  faisaient  frapper  des  médailles  à  l'oc- 


casion de  tous  les  événements  de  leur  lègne.  Le  nombre 
en  fut  assez  considérable  pour  fournir  la  matière  de 
grandes  publications,  telles  que  VHistoire  du  règne  de 
Louis  Al  r  par  les  médailles,  V Histoire  du  règne  de 
Louis  XV,  etc.  Ces  pièces  forment  de  belles  suites  d'un 
module  uniforme,  et  dont  on  peut  voir  les  exemplairea 
en  or,  destinés  an  roi,  dans  les  collections  du  Cabinet 
de  la  Bibliothèque  imp^ale  de  Paria.  D'autres  ouvrages, 
faits  sur  le  plan  des  précédents,  ont  pris  les  monuments 
monétaires  comme  témoignages  de  l'histoire,  ainsi  VHis* 
toire  métallique  de  la  Riwlution  par  M.  Hennin ,  YBis» 
toire  mitalliqve  de  Napoléon  le  Grand  par  Millingen,  etc. 
Le  plus  récent  de  ces  sortes  d'ouvrages  est  VHistoire  mé^ 
taliique  de  la  Révolution  de  1848,  publiée  par  M.  F.  de 
Saulçy.  Nous  dirons  au  mot  Monnaie  tout  ce  que  l'on  a 
rapporté  improprement  au  mot  Médaille,  en  établissant 
entre  ces  dénominations  une  synonymie  qui  n*a  Jamais 
existé;  car  une  médulle  n'est  pas  une  monnaie,  et  les 
monnaies,  quoique  antiques,  ne  sauraient,  sans  incon* 
vénient,  ètro  confondue<%  avec  les  médailles.  D. 

MÉDAILLES  CCsbinot  des)  et  antiques  de  la  Biblio- 
thèque nationale  de  Paris.  Il  est  situé  à  l'extrémité  N. 
du  b&àment  de  la  bibliothèque  sur  la  rue  de  Richelieu, 
au  f  étage.  C'était  un  salon  de  l'ancien  hôtel  de  la  mar- 
quise de  Umib^rt ,  et  remarquable  parmi  les  beaux  sa- 
lons du  xvm*  siècle.  On  y  voit  4  dessus  de  porte  peints 
par  Boucher,  et ,  sur  les  trumeaux ,  3  tableaux  de  Carie 
Vanloo,  et  3  de  Natoire;  tous  peuvent  compter  parmi  les 
bons  ouvrages  de  ces  artistes.  Dans  un  des  taoleaux  de 
Vanloo  représentant  les  trois  protecteurs  des  Muses, 
Apollon,  Mercuro,  et  Hercule  Mussagète,  Apollon  est  re- 
présenté sous  les  traits  de  Louis  XV.  —  En  eifet,  c'est  à 
ce  prince  que  la  Bibliothèque  doit  son  cabinet  actuel  des 
médailles,  et  c'est  lui  qui  en  a  fait  fairo  la  décoration. 
François  I^  est  le  premier  roi  de  France  qui  collectionna 
des  médailles  et  des  pierres  gravées;  il  les  plaça  à  Fon- 
tainebleau. Henri  II  y  ijouta  une  collection  apportée 
en  France  par  Catherine  de  Médicis.  Charles  IX  déposa 
cette  collection  au  Louvro,  et  créa  une  place  de  conser- 
vateur des  médailles.  Le  Cabinet  fut  presque  entièrement 
perdu  pendant  les  troubles  de  la  ligue;  Henri  IV  com- 
mença de  le  roformer,  et  Louis  XHI  abandonna  le  projet 
de  son  père.  Louis  XIV  eut  le  goût  des  médailles;  il 
réunit  au  Louvre  toutes  celles  des  maisons  royales,  et  en 
composa  ce  qu'on  appelait  le  Cabinet  des  antiques,  qu'il 
augmenta,  en  1660,  de  la  collection  de  Gaston  d'Or- 
léans. En  1666,  le  conservateur  des  médailles  ayant  été 
assassiné  au  Louvre,  l'année  suivante  Colbert  transféra 
le  Cabinet  à  la  Bibliothèque  royale,  rue  Vivienne.  Il  y 
resta  Jusou'en  1684 1  alors  Louis  XIV,  qui,  depuis  deux 
ans,  faisait  sa  résidence  iiabituéUe  au  château  de  Ver- 
sailles, y  fit  installer  le  Cabinet  des  Antiques,  encore 
beaucoup  accru,  particulièrement  par  les  méaailles  de  Sé- 
guyn,  1669,  et  les  pierres  gravées  de  Lauthier,  1670.  En 
outre,  le  roi  avait  fait  voyager  en  Italie,  en  Sicile,  en 
Grèce,  en  Algérie,  en  Egypte  et  en  Perse,  pour  y  acheter 
des  médailles  et  des  camées;  tous  ces  soins  rendirent  sa 
collection  la  plus  importante  de  l'Europe. 

Louis  XV,  qui  n'avait  pas  les  nobles  instincts  de  son 
aïeul,  abandonna  les  collections  de  Louis  XIV,  et,  en 
174i,  en  ordonna  la  translation  à  la  Bibliothèque  royale 
de  Paris.  Dans  la  décoration  de  ce  superbe  Cabinet,  on 
plaça,  aux  deux  extrémités,  les  portraits  en  pied  de 
Louis  XIV,  copie  faite  d'après  Rigaud,  et  de  Louis  XV.  Us 
en  furent  retirés  pendant  la  Révolution.  A  la  Restaura- 
tion, on  rétablit  celui  de  Louis  XIV,  et,  à  la  place  de 
celui  de  Louis  XV,  on  mit  le  portrait  de  Louis  XVIII , 
peint  par  Ary  Schefier.  —  Les  richesses  du  Cabinet  des 
médailles  et  antiques  sont  renfermées  dans  une  suite  de 
9  corps  d'armoires  bas,  en  menuiserie  sculptée,  posés  sur 
de  grands  guéridons,  en  bois  sculpté  aussi ,  à  dessus  de 
marbre  chantournés,  et  que  l'on  croit  avoir  été  apportés 
du  cabinet  de  Louis  XIV  à  Versailles.  Chaque  armoire 
contient  une  quadruple  rangée  de  tiroirs  percés  de  trous 
où  sont  placées  les  médailles.  Au  milieu  de  la  salle,  ime 
armoire  vitrée,  posée  sur  une  hirge  table  à  dessus  de 
marbre  de  plus  de  4  met.  de  long,  expose  aux  regards 
une  foule  d'objets  d'art  antiques  ou  anciens,  la  plupart 
extrêmement  curieux.  Sur  les  armoires  sont  des  bustes 
antiques,  formant  une  série  iconographique  du  plus 
grand  intérêt ,  et ,  parmi ,  quelques  vases  antiques  aussi* 
—  Le  Cabinet  contient  200,000  médailles  environ,  et  plus 
de  3,500  camées  et  pierres  gravées  ;  nul  autre,  excepté 
peut-être  celui  de  Vienne,  n'a,  en  pierres  gravées,  autant 
de  morceaux  de  premier  ordre,  tels  que  :  V Apothéose  d'Au» 
guste,  celui  de  Germanicus,  la  LuUe  d$  pfeptmie  et  du 


HËD 


1230 


MËD 


Minerve  pour  âoi^mer  le  nom  à  la  ville  de  Cécrops,  Achille 
Citharède,  le  Cachet  de  Michel -Ange,  le  Vase  de  Vab^ 
baye  de  S^-Denis,  le  Portrait  d'Elisabeth  d'Angleterre. 
Gomme  ensemble,  c'est  le  plos  riche  Cabinet  da  monde. 
Il  ne  fat  ouvert  au  public  qu'en  1737.  —  Les  principaux 
objets  d'art  du  Cabinet  des  médailles  et  des  antiques  ont 
éti  gravés  dans  Montfaucon,  Monuments  de  la  monar^ 
chie  française,  et  VAnti^té  expliquée;  dans  Millin, 
Monuments  antiques  inédds;  dans  Caylus,  RecueU  d'an^ 
tiquités;  et  surtout  duis  le  Trésor  de  numismatique  et  de 
jglyptique.  C  D— t. 

MÉDAILLES  (Gravure  en).  Les  graveurs  en  médailles 
eonmiencent  par  exécuter  en  relief,  comme  un  camôis 
mais  à  l'extrémité  d'un  cylindre  d*acier,  le  sujet  dont  ils 
doivent  obtenir  des  empreintes  ;  ce  c^rlindre,  durci  par  la 
jtrompe,  s'appelle  poinçon»  On  prépare  en  forme  de  cône 
ft  base  très-large  le  morceau  d'acier  qui  doit  devenir  le 
creux  de  la  médaille;  on  fait  correspondre  la  pointe  ou 
sommet  de  ce  cône  avec  le  milieu  du  sujet  gravé  sur  le 
poinçon  ;  et  en  firappant  sur  le  poinçon ,  on  écrase  la 
pointe  du  cône  rougie  à  blanc,  et  on  fait  pénétrer  dans 
les  molécules  du  métal  amolli  le  relief  dont  on  veut 
obtenir  un  creux.  Ce  procédé  permet  de  reproduire  avec 
le  même  poinçon  les  creux  ou  coins  lorsqu'ils  viennent  à 
se  briser.  —  Parmi  les  graveurs  en  médailles,  nous 
citerons  en  France,  au  xyu*  siècle,  Dupré,  Varin ,  Molard , 
Mauger, Bernard,  Roussel,  Clerion,  Breton,  DoUin,  Du- 
four,  Chéron;  au  xviii*,  Duvivier,  Roettiers,  Leblanc, 
Léonard,  Dassier,  Fontaine,  Droz,  Aug.  Dupré,  Gatteaux; 
au  xix%  Andrieu,  Dumarest,  Galle,  Brenet,  Gayrard, 
Tiolier,  Depaulis,  Bfichaut ,  Caqué ,  Cannois,  Bovy,  Be- 
rnard, Barre,  Oudiné,  Merley,  etc.  D. 

MSDAiLLB  MiuTAiRB,  médaille  instituée  par  Napoléon  III, 
en  vertu  de  décrets  du  S2  janvier  et  du  29  février  1852, 
en  faveur  des  sous-officiers  et  soldats  des  armées  de  terre 
et  de  mer.  Une  pension  annuelle  de  100  fr.  est  attadiée 
à  cette  décoration.  La  médaille  est  d'argent,  suspendue 
à  un  ruban  Jaune  orange,  liséré  de  vert,  et  est  surmontée 
d'une  aiffle  en  métal  jaune. 

MÉDAILLIER,  collection  de  médailles;  —  meuble  à 
tiroirs  où  les  médailles  sont  rangées  dans  un  ordre  mé- 
thodique; —  salle  où  se  trouvent  placées  les  armoires  qui 
contiennent  des  médailles.  V,  Médailles  (Cabinet  des). 

SIÊDAILLON,  en  termes  de  Numismatique,  pièce  mé- 
tallique d'un  poids  supérieur  à  celui  des  médailles  ordi- 
naires. Les  médaillons  grecs,  assez  semblables  aux  mon- 
naies contemporaines, paraissent  avoir  eu  le  môme  usage; 
les  médaillons  romains,  beaucoup  plus  grands,  ont  sans 
doute  servi,  soit  h  des  présents,  soit  à  la  conservation  des 
■ouvenirs  d'un  haut  intérêt  ;  ceux  qu'on  plaçait  aux  en- 
leignes  militaires  représentaient  les  effigies  des  dieux  ou 
des  empereurs,  et  portaient  une  bordure  formée  de  plu- 
sieurs cercles.  D'autres  servaient  de  parure,  se  portaient 
an  oou,  et  étaient  montés  en  filigraine  d'or  et  d'argent, 
avec  bélières.  Quelques-uns  sont  formés  de  deux  alliages 
différents;  le  milieu  est  rouge  ou  or,  et  le  bord  en  bronze  : 
les  deux  allisees  ont  été  soudés  avant  la  frappe.  Les 
contomiates  (v.  ce  mot)  sont  des  médaillons.  Il  est  des 
médaillons  byzantins,  dits  concaves  à  cause  de  leur  forme, 
et  où  le  sujet  est  gravé  en  creux.  , 

M^AiLLOïc,  en  termes  d'Architecture,  ornement  en 
forme  de  médaille  ronde  ou  ovale,  dans  lequel  on  place 
an  si^et  sculpté  ou  une  rosace.  L'art  ogival  n'employa 
guère  les  médaillons  que  dans  la  peinture  sur  verre,  et 
ne  leur  conserva  pas  toujours  la  forme  circulaire;  il  en 
fit  de  carrés,  de  losanges,  etc.  La  Renaissance,  au  con- 
traire, en  fit  un  très-firéquent  usage,  et  les  médaillons, 
toijours  heureusement  et  habilement  employés,  sont  de- 
venus un  des  caractères  dominaats  de  l'architecture  à 
cette  époque.  E.  L. 

MÈDE  ou  MÉDIQUE  (Langue),  hmgue  des  anciens 
Mèdes,  l'une  de  celles  qui  nous  sont  connues  par  les 
inscriptions  cunéiformes  TV.  ce  mot).  On  donne  le  même 
nom  à  ridiome  pehlvi  (  K.  ce  mot). 

MÉDECIN  (  du  latin  medicus).  Chez  les  plus  anciens 
peuples,  l'art  médical  fut  un  aes  privilège  des  corps 
sacerdotaux.  Comme  on  crovait  que  les  mâadies  étaient 
infligées  par  les  dieux  irrités,  on  se  borna  longtemps  à 
apaiser  ces  dieux  par  des  sacrifices  ou  par  des  pratiques 
superstitieuses.  Il  ne  parait  pas  que  les  prêtres  de  l'Egypte 
en  aient  profondément  étudié  les  secrets  :  la  croyance  où 
ils  étaient  que  toute  incision  sur  les  cadavres  était  un 
sacrilège  dut  faire  obstacle  aux  développements  de  l'ana- 
tomie  et  de  la  chirurgie;  divisant,  d'ailleurs,  le  corps 
humain  en  parties  isolées,  comme  le  corps  social  était 
divisé  6D  castes,  ils  se  partagèrent  09  médecins  des 


yeux,  des  bras,  des  Jambes,  etc.  Chez  les  Ghaldéens,  ii 
renommés  pour  leur  science,  U  guérison  des  maladies 
n'était  pas  le  Dsit  de  l'habileté  humaine,  mais  d'une  inter- 
vention divine  ou  du  hasard  :  car  on  expossit  les  ma> 
lades  dans  les  mes,  et  ceux  qui  passaient  mdiquaient  les 
remèdes  dont  ils  avaient  usé  ou  entendu  parler.  Es 
Grèce,  bien  que  ne  faisant  plus  partie  des  prêtres,  les 
médecins  formèrent  une  sorte  de  corporation  sainte,  qui 
se  donna  des  lois  h  elle-même;  l'exercice  de  leur  art  fot 
complètement  libre,  si  ce  n'est  qu'à  Athènes  celui  qui 
voulait  s'y  consacrer  était  tenu  de  déclarer  dans  un  dis- 
cours public  où  et  comment  il  avait  étudié.  Rome  ftst 
longtemps  exploitée  par  des  médecins  étrangers,  esclaves 
grecs  pour  U  plupart  :  puis  J.  César  fit  accorder  le  droit  de 
dté  aux  étrangers  qui  seraient  en  état  d'enseigner  la  mé- 
decine, et  Auguste  exempta  les  médecins  de  tout  impôt, 
de  toute  charge  publique.  Au  iv*  siècle  de  l'ère  chré- 
tienne, on  institua  des  médecins  de  la  cour  (archtcUrt 
sancti  palatii)  et  des  médecins  des  pauvres  (arcfùatrt 
populaires)  :  mais  du  moment  où  la  médecine  pouvsit 
être  une  fonction  publique,  on  établit  des  conditions 
d'admission,  et  on  décida  que  les  archlâtres,  formés  en 
collège,  se  recruteraient  par  voie  d'élection  après  examen 
des  candidats.  Les  médecins  qui  n'étaient  pas  fonction- 
naires continuèrent  d'éclu4>per  à  toute  espèce  de  con- 
trôle. 

Après  la  chute  de  l'Empire  romain,  l'art  de  guérir  fat 
exercé  par  le  clergé,  surtout  par  les  moines;  des  Juifs  et 
des  Mahométans  s*y  Uvràrent  également.  Cest  seulement 
vers  la  fin  du  moyen  Age  qu'il  se  forma  un  corps  médical, 
composé  des  mattres  es  scienees  physiques  et  médicales 
reçus  par  les  Universités.  La  profenion  de  médecin  est 
aujourd'hui  réde  en  France  psr  la  loi  du  19  ventôse  an  xi 
(11  mars  1803).  Nul  ne  peut  exercer  la  médecine  sans 
avoir  été  examiné  et  reçu  dans  la  forme  prescrite.  On 
distingue  les  docteurs  en  médecine  ou  en  chsrurgief  reçus 
par  les  Facultés  de  médecine,  et  que  leur  diplôme  au- 
torise à  pratiquer  leur  art  dans  toute  la  France,  et  les 
officiers  de  saniU ,  qui  ne  peuvent  s'établir  que  dans  le 
département  où  Us  ont  été  reçus  par  un  Jury  médical 
(K.  DoGTBua,  OpnaBR  de  sant^).  Quiconque  exerce  Is 
médecine  sans  diplôme  est  passible  d'une  amende  au 
profit  dM  hospices,  et,  en  cas  de  récidive,  peut  être 
condaomé  à  un  emprisonnement  de  6  mois  au  plus  (Loi 
du  19  ventôse  an  xu-29  fév.  1804).  Le  Code  Napoléon 
(art.  909)  décide  que  les  médecins  qui  ont  traité  une 
personne  pendant  la  maladie  dont  eUe  menrt  ne  peu- 
vent profitéir  des  dispositions  testamentaires  faites  en 
leur  faveur.  D'après  le  Code  pénal  (art.  160),  tout  mé- 
decin qui ,  pour  favoriser  auâqu'un,  certifie  faussement 
des  maladies  ou  infirmités  propres  à  dispenser  d'un 
service  public,  est  puni  d'un  emprisonnement  de  3  à 
5  ans  :  s'il  a  éité  mû  par  dons  et  promesses,  il  est  puni 
du  bannissement,  et  les  corrupteurs  LDnt  punis  de  is 
même  peine.  Les  médecins  ont  un  privilé^  sur  les 
meubles  des  défunts,  pour  le  payement  des  soins  donnés 
à  ceux-ci  pendant  leur  dernière  maladie.  Au  bout  d'un 
an ,  on  peut  leur  opposer  la  prescription.  Ils  sont  sounùs 
à  une  patente  du  15*  de  la  valeur  locative.     , 

En  Angleterre,  la  profession  médicide,  y  compris  l'en- 
seignement, est  abandonnée  sans  réserve  à  TexploitatioD 
des  psrticuliers.  Il  est  vrai  qu*une  charte  d'Henri  VIII 
a  reconnu  les  privilèges  d'un  collège  ou  corporation  des 
médecins  de  Londres,  qui  ont  seuls  Te  droit  d'exercer  leur 
art  dans  cette  ville  et  dans  un  rayon  de  sept  milles,  et 
que,  pour  pratiquer  la  médecine  en  Angleterre,  il  faut^ 
à  moms  d*être  gradué  des  Universités  d'Oxford  et  de 
Cambridge,  avoir  été  reçu  par  ce  collège,  et  être  muni 
de  lettres  délivrées  par  le  président  et  par  trois  de  ses 
membres.  Il  existe  aussi  à  Londres  un  collège  de  chirur- 
giens établi  sur  des  bases  analogues  par  deux  statuts 
d'Henri  VIU  et  de  George  H.  lAais  l'Angleterre  n'a  pas 
d'écoles  de  médecine.  Tout  médecin  a  ses  élèves,  et  leur 
donne  l'instruction  médicale  comme  il  lui  plaît.       B. 

MÉDECINE  (Académie  de).  Cette  société  savante  de 
Paris,  créée  par  Louis  XVDI  le  28  décembre  1820,  rem- 
plaça la  Société  royale  de  Médecine  et  VAcadénUe  royale 
de  chirurgie  qui  existaient  avant  1 789.  Elle  fut  divisée  ori- 
ginairement en  trois  sections,  médecine,  chirurgie,  phar- 
macie, et  comprit  cinq  sortes  de  membres  :  honoraires, 
titulaires,  associés,  adjoints  résidants,  et  a<iyoints  corres- 

B[>ndants.  Le  l"'  médecin  du  roi  fut  président  d'honneur, 
ne  ordonnance  du  27  décembre  1820  nomma  pour  les 
trois  sections  80  membres  et  associés  résidants  (45  titu- 
laires), et  33  associés  non  résidants;  une  antre  ordon- 
nance, du  0  février  1821,  ratifia  l'élection  de  40  tito- 


MÊB 


1231 


M£6 


Mini  ttile  par  ooox  de  la  premi^  foodatloat  en  tout, 
15a  mepihrea.  Une  place  de  secrétaire  perpétuel  fut 
ioatitoée  en  183SL  Par  ordoonance  du  18  octobre  1820, 
Quuiea  X  décida  que  1  Académie  ne  ferait  désormais 
aa'one  élection  par  trois  eitinctiona  Jusqu'à  réduction 
de  «es  membres  à  100,  qu^elle  aérait  partage  en  11  sec- 
tiooa,  et  supprima  lea  désignations  aaaaodés  résidants 
et  ]^noralraa.  Une  ordonnance  de  Louis-Philippe  (20  Jan- 
iTÎer  1835)  aaaimila  aux  titulaires  les  a4j  oints  et  les  as- 
aociéa,  en  aorte  que  tous  les  membres  de  TAcadémie 
furent  égaux.  Cependant,  depuis  1830,  le  nombre  des 
membres  résidants  ou  titulaires  s*était  élevé  à  252  :  ré- 
duit àifi7  en  1830,  àl24  en  1848,  U  n*est  plus  que  de 04, 
sans  compter  7  associés  libres,  8  associés  nationaux, 
30  aB80ci&  étrangers,  100  correspondants  nationaux  et 
50  eonreqiondanta  étrangers.  L*Académie  de  médecine, 
avec  aoa  budget  et  les  dons  qui  lui  ont  été  faits,  avec 
une  aubYention  annuelle  du  ministère  de  TlnstrucUon 
publique,  donne  des  Jetons  de  présence  à  ses  membres,  et 
distribae  chaque  année  des  pru  et  des  récompenses.  Elle 
a  des  archives  importantes,  une  bibliothègue,  un  labora- 
toire de  chimie,  et  publie,  outre  un  Bulletin  de  quinzaine, 
des  Mémoires  annuels.  Le  GouvememenI  la  consulte  sur 
loot  ce  qui  intéresse  la  santé  publioue,  principalement 
sur  les  épidémies,  les  épizooties,  les  différents  cas  de  mé- 
decine, les  remèdes  nouveaux  et  les  remèdes  secrets,  les 
eaux  minérales  naturelles  ou  factices.  B, 

MéoBaNs  (École  de),  un  des  monuments  de  Paris. 
7.  notre  Dicttonnaire  a^  Biographie  et  d'Histoire. 

Mà>iciifB  (Écoles  de).  /.  Égolbs  db  m éDEcras,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Bistoire,  p.  878. 

iiéDECuiB  (Facultés  de),  établissements  d'enseignement 
supérieur,  à  Paris,  Montpellier,  Nancy,  Lyon, Bordeaux, 
où  Ton  enseigne  i*anatomie,  la  physiologie,  la  phar- 
macie, la  matiVre  médicale  et  tbérapeuti(]ue,  l'hygiène, 
U  pathologie  interne  et  externe,  la  médeane  opératoire^ 
les  accouchements,  la  chimie,  la  physique  et  l'histoire 
■atnrelle  médicale.  Il  y  a  des  professeurs  titulaires  et 
des  agrégés,  ceux-ci  nommés  au  concours.  La  Faculté  de 
Paris  a  S6  professeurs  titulaires  et  24  agrégés  ou  sup- 
pléants t  il  y  a  17  chaires  dans  les  autres  facultés.  Les 
traitements  des  professeurs  sont  de  13,000  fr.  àPaiis, 
de  6,000  fr.  à  11,000  fr.  dans  les  départements. 

MBDBCiNE  (Ecoles  préparatoires  ou  secondaires  de). 
On  en  compte  19  dans  les  villes  d'Amiens,  Angers, 
Arias.   Besançon,  Caen,  Clermont-Ferrand,   Dijon, 
Grenoble  «  Ulle,  Limoges,  Lyon,  Blarseille,  Nantes. 
mtiers,  Reims,  Rennes,  Rouen,  Toulouse  et  Tours.  Ces 
écoles  ne  peuvent  conférer  de  grades  :  les  études  qui  y 
lODt  faîtes  valent  auprès  des  Facultés,  nuds  pour  un 
temps  moindre  que  le  temps  passé  dans  une  Faculté.  Huit 
inscriptions  ont  toute  leur  valeur;  les  autres  ne  comptent 
qae  pour  un  tiers.  Les  otTiciers  de  santé  peuvent  exercer 
après  4  ans  d^études  dans  une  école  secondaire.  Ces 
écoles  ont  été  organisées  par  ordonnances  des  18  mai 
18iO,  13  octobre  1840  et  12  mars  1841.  Le  traitement  mi- 
Qimum  est  de  1,500  fr.  pour  les  professeurs,  1,000  fr. 
pour  les  adjoints. 

UÈbYCmE  ET  PHARMAC»  MlLirATRES  (ÉCOlO  do).  V.  ÉCOLB, 

dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 
page  878,  col.  2. 

KKDECiNR  LécALS,  brauche  des  sciences  médicales  qui 
s'occupe  des  rapports  de  la  médecine  avec  la  Justice. 
L'avis  du  médecin  est  demandé  par  les  magistrats  lors- 
qu'il s'agit  de  prononcer  sur  Tétat  de  démence  des  indi- 
vidus, sur  les  cas  do  viol,  d'avortement,  d'infanticide,  de 
suicide,  d'assassinat  ou  d'empoisonnement,  sur  la  dis- 
tinction des  cas  de  mort  réelle  et  de  mort  apparente,  etc. 
K. Bayard,  Manuel  pratique  de  médecine  légale,  1843, 
in-18*;  Briand  et  Chaude,  Manuel  complet  de  médecine 
légale.  6*  édit,  1857,  in-8o*,  Devergie,  Médecine  légale, 
théorique  et  pratique,  3«  édit.,  1852,3  vol.  in-8«;  Orflla, 
Traité  de  médecine  légale,  i*  édit.,  1847,  4  vol.  in-8». 

MÉDECINS  DU  ROL  Y.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d^ Histoire. 

«éoccms  CAirroNAUx  et  coiniuNAux,  médecins  chargés 
de  soigner  gratuitement  les  pauvres  des  communes  ru- 
rales, de  vacdner  quand  il  n'y  a  pas  un  service  spécial 
^rg^isé,  de  surveiller  les  enfants,  les  infirmes  et  les 
fiàllards  placés  au  compte  du  département  chez  les  par- 
ticuliers, et  d'inspecter  l'hygiène  publique.  Leur  senrîce 
est  réglé  par  des  arrêtés  préfectoraux.  La  dépense  est 
supportée  par  les  départements  avec  le  concours  des 
eoTomunes.  L'institution  des  médecins  cantonaux  n'existe 
encore  que  dans  quelques  départements. 

«tovcms  HiuTAiRBS,  uu  dos  corps  du  service  de  santé. 


Le  cadre  est  ùié  ainsi  qu'il  suit  :  7  médecins  inspeetêurê, 
80  médecins  prineipowc^  dont  moitié  de  !■*  classe  et 
moitié  de  9«  ;  290  médicins  mofors,  dont  130  de  !'•  classe 
et  260  de  2*;  SÛO  médecins  aides-maiors,  dont  moitié  de 
l*"*  classe  et  moitié  de  2*.  Les  aides-midors  de  2'  classe 
sont  recrutés  pour  les  3/4  parmi  les  élèves  qui  ont  fait 
leur  stage  à  l'École  de  médecine  militaire  du  Val-de- 
Gr&ce;  les  autres  emplois  sont  réservés  aux  médecins 
civils  commissionnés  par  le  ministre  de  la  guerre.  Pour 
devenir  aide-major  de  1'*  classe,  puis  médecin  major  de 
8*  classe,  jl  faut  2  ans  de  service  au  moins  dans  le  grade 
inférieur  :  2/3  des  emplois  vacante  sont  donnés  à  l'an- 
denneté,  l'autre  tiers  au  choix.  On  ne  devient  médecin 
mi^or  de  1^  classe  ou'après  4  ans  de  grade  inférieur;  les 
emplois  sont  donnes  moitié  à  l'ancienneté,  moitié  an 
choix.  L'avancement  aux  grades  supérieurs  est  toujours 
au  choix. 

MÉDIÂIÏOCHE,  repas  qui  se  fait  au  milieu  de  la  nuit. 
Le  mot  et  la  chose  sont  d'origine  espagnole,  et  furent 
introduits  en  France  au  xvii'  siècle,  par  la  reine  Anne 
d'Autriche,  femme  de  Louis  XIII. 

MËDIANTË  (du  latin  media$u,  oui  est  au  milieu),  nom 
donné  en  musique  à  la  tierce  de  la  tonique,  parce  que,^ 
dans  l'accord  parfait,  elle  tient  le  milieu  entre  cette  to- 
nique et  sa  qumte.  C'est  par  la  médiante  que  l'on  recon* 
naft  si  le  ton  est  majeur  ou  nuneur. 

MÉDUTEUR  PLASTIQUE.  F.  Amb,  paoe  108,  c  2. 

MÉDIATION,  acte  par  lequel,  lorsc^ue  deux  États  sont 
en  contestation  ou  en  guerre,  un  troisième  interpose  ses 
bons  offices  pour  amener  un  accord  ou  rétablir  la  ^siz^ 
On  peut  accepter  une  médiation,  et  néanmoins  refuser  la 
solution  proposée;  c'est  ce  qui  distingue  la  médiation  de 
Varbitrage,  dont  les  décisions  sont  obligatoires. 

MéniATioïc,  nom  donné  dans  le  plain-chant  à  une  in- 
flexion de  la  voix  ou  à  une  suite  de  sons  qui  s'opère 
vers  le  milieu  du  verset  d'un  psaume,  avant  I  astérisque 
qui  le  divise  en  deux  parties.  Cette  médiation  est  la 
môme  à  tous  les  versets,  à  moins  qu'il  ne  se  rencontre 
un  mot  hébreu  ou  un  monosyllabe  :  dans  ce  cas,  on  lui 
fait  subir  un  léger  changement.  F.  C. 

MÉDIATISATION.  F.  ce  mot,  et  MâoiATisé,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

MÉDINET-ABOU  (Temple  de).  F.  ThIuibs. 

^^  MÉDIUM,  portion  moyenne  de  l'étendue  d'une  voix  ou 
I  aim  instrument. 

I     MEETING.  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

I    MÉGALITHIQUES  rMonuments).  F.  au  Supplément. 

I  MËGALOGRAPHIE  (du  grec  megale^  grande,  et  prapho, 
Je  peins),  nom  que  les  Anciens  donnaient  à  la  peinture 
noble,  représentant  les  actions  des  dieux  on  des  héros. 
MÉGARE  (École  de),  école  de  philosophie  grecque  oui 
tire  son  nom  de  la  patrie  de  son  fondateur,  Euclide,  dis- 
ciple de  Socrate.  Elle  dura  environ  un  siècle  ;  son  dernier 
représentant  tut  Dlodore  Cronus;  les  autres  philosophes 
de  l'école  furent  Ichthyas,  Pasiclès,  Thrasymaque,  Clino- 
maque,  Eubulide,  Stilpon,  Apollonius  Cronus,  Euphante, 
Bryson  et  Alexinus.  L'école  mégarique  s'occupa  surtout 
de  Logique  et  de  Métaphysique,  et,  dans  la  Logique,  elle 
donna  la  préférence  à  la  Dialectique,  ce  qui  fit  donner 
aux  Mégariques  le  surnom  d'éristiques  (disputeurs),  parce 
qu'ils  faisaient  dégénérer  en  dispute  la  science  du  rai- 
sonnement. Ils  se  rattachaient,  par  suite,  aux  Sophistes 
et  aux  Ëléates.  Ainsi  que  ceux-ci,  ils  repoussaient  la 
certitude  des  sens,  les  regardant  comme  trompeurs,  et  ne 
voulant  s'en  rapporter  qu'à  la  raison.  Ce  principe  logique 
conduisait  nécessairement  à  la  négation  du  mouvement, 
du  changement,  de  la  pluralité,  et  à  l'affirmation  de  l'im- 
mutabilité. C'est  ce  que  firent  les  Mégariques.  Un  prin- 
cipe qui  leur  appartient  en  propre  est  ridentification  de 
Vétre  et  du  bien,  principe  adopté  plus  tard  par  l'école 
d'Alexandrie.  La  morale  tint  peu  de  place  dans  l'école  de 
Mégare  ;  cependant  les  Stoïciens  lui  empruntèrent  quel- 
ques maximes,  entre  autres  celle-ci  de  Stilpon  :  «  Le  bien 
consiste  dans  l'impassibilité.  »  F.  Gunther,  Dissertatiê 
de  methodo  disputandi  megaricâ,  léna,  1707,  in-4«; 
G.-L.  Spaldinz,  FtndtcÛB  philosophorum  megaricorum, 
Berlin,  1793,  in-8«;  Deycks,  De  Megaricorum  doctrine, 
ejusque  apud  Platonem  et  Aristotelem  vestigiis,  Bonn, 
1827,  in-8^;  Ritter,  Romarques  sur  la  philosophie  de 
4' École  de  Mégare,  Paris,  1843,  in-8*  ;  V Ecole  mégarique, 
dans  le  Musée  du  Rhin,  Bonn,  1828;  C.  Mallet,  Henné, 
Histoire  de  V école  de  Mégare  et  des  écoles  d'Elis  et  d'Êré^ 
tri»,  Paris,  1845,  iu-8o. 

MEGASCOPE.  VA^Supplémmt, 
MÊGISSIKRS,  apprôteurs  de  peaux.  Ils  reçurent  des 
statuts  eu  1210.  L'apprentissage  était  de  six  ans;  le  brevet 


MÉL 


1232 


MËL 


wAtait  90  UiTM,  et  là  maîtrise  600.  On  les  réunit,  en 
1776,  avec  les  tit/inean,  les  conroyeurs,  les  peaussiers  et 
les  pârchemiaiers  en  une  seule  et  même  corporation, 
dont  S>*  Madeleine  était  la  patronne. 

MEIL,  tunique  de  dessus  du  grand  prêtre  des  Hébreux. 
Ole  était  de  couleur  violette,  ferméiB  de  tous  les  côtés, 
avec  des  ouvertures  pour  passer  les  bras  et  la  tête,  et 
garnie,  par  le  bas,  d*une  bordure  où  Ton  voyait  des  gre- 
nades 06  différentes  couleurs,  et  de  petites  clochettes 
d'or. 

MEILLANT  (Château  de),  dans  le  département  du 
Cher.  Un  vaste  logis  flanqué  de  tours  carrées,  et  biti  au 
temps  de  Louis  \l  par  Pierre  d*Amboise,  constitue  la 
masse  des  constructions  encore  existantes.  Il  fut  en 
partie  réédiflé  par  Charles  Cfaaumont  d*Amboise,  gouvei^ 
neur  du  Milanais  sous  Louis  XII  ;  on  refit  partout  les  ba- 
lustrades, les  fenêtres  et  les  lucarnes;  une  chapelle  d*un 
travail  délicat  s*éleva  extérieurement,  à  quelques  pas  de 
Tédiflce.  La  partie  la  plus  remarquable  de  Fœuvre  nou- 
velle est  une  tour  hexagone  contenant  l'escalier  ^i  con- 
duit aux  grands  appartements  :  elle  présente  trois  étages 
de  fenêtres  rampantes  qui  alternent,  sur  plusieurs  de  ses 
faces,  avec  des  pans  ciselés  d'un  trè»-riche  dessin,  et  est 
couronna  d'un  campanile  élésant  qu'environne  une  bar 
lostrade  à  jour.  Les  portes  qui  donnent  entrée  dans  les 
appartements  sont  surmontées  de  médaillons  sculptés 
représentant  des  empereurs  romains.  Dans  la  Salle  des 
Cêrfs^  ainsi  appelée  parce  qu'on  y  voit  trois  grands  cerfs 
sculptés,  se  trouve  une  belle  galerie  à  Jour  qui  forme 
eeinture  autour  du  manteau  de  la  cheminée.  A  l'inté- 
rieur de  la  chapelle  on  voit  une  charmante  tribune  en 
boiserie,  sur  les  panneaux  de  laquelle  sont  peintes  trois 
scènes  de  la  Passion. 

MEISTERS^ENGERS,  c-à-d.  en  allemand  maUres 
chanteurs,  poètes  d'origine  bourgeoise,  qui,  à  partir  des 
premières  années  du  xiv*  siècle,  continuèrent  l'école  ly- 
rique des  Mùmesifiaers  (F.  ce  mot).  Leurs  associations 
furent  appelées  MeUterorden  (ordres  de  maîtres)  et 
SingMchuUn  (écoles  de  chant)  :  il  y  en  eut  à  Mayenoe, 
Strasbourg,  Ulm,  Memmingen,  Heilbronn,  Nuremberg. 
En  1378,  l'empereur  Charles  IV  leur  accorda  des  lettres 
de  franchise  et  des  armoiries  particulières.  Henri  de 
Misnie  passe  pour  le  plus  ancien  des  Meistersengers;  on 
dte  encore  Henri  de  Mugeln  au  xiv'  siècle,  Muscatblut  et 
Michel  Behaim  au  xv*,  Hans  Sachs  au  xvi«.  A  partir  du 
xvu*  siècle,  l'éclat  des  associations  de  maîtres  chanteurs 
s'évanouit.  ' 

MÉLANGE,  terme  de  Droit.  V.  Accession. 

MÉLANGES,  en  termes  de  Littérature,  nom  donné  à 
des  recueils  de  petits  ouvrages  en  prose  ou  en  vers  sur 
différents  sujets. 

MELGORIENNE  (Monnaie),  nom  que  porta  au  moyen 
âge  la  monnaie  des  évêques  de  Maguelonne,  parce  qu'elle 
était  frappée  au  château  de  Melgueil. 

MÉLIADUS  DE  LÉONNOIS,  un  des  romans  de  hi 
Table  ronde.  On  y  trouve  d'amples  renseignements  sur 
tout  ce  qui  se  rattache  à  l'histoire  fabuleuse  de  cette 
institution.  Méliadus  est  un  descendant,  en  ligne  colla- 
térale, de  Joseph  d'Arimathie,  et  le  père  du  fameux  Tris- 
tan (  V,  ce  mot).  Le  roman  auquel  on  a  donné  son  nom 
A  eu  plusieurs  éditions  à  Paris,  en  1528,  en  1532  et  en 
1535.  On  en  trouve  un  extrait  dans  la  Bibliothèqtte  des 
romans,  de  février  1776.  Les  amours  de  Méliadus  et  de 
la  reine  d'Ecosse,  qui  forment  une  partie  importante  de 
TouTrage,  sont  une  imitation  évidente  de  celles  de  Lan- 
eelot  et  de  Genièvre. 

MÉUSMATIQUE  (du  grec  mélisma,  groupe  harmo- 
nieux), se  dit  d'un  chant  orné  dans  lequel  une  syllabe 
porte  plusieurs  notes,  par  opposition  au  chant  sylla- 
hiqtie,  dans  lequel  une  note  unique  correspond  à  chaque 
syllabe  du  texte. 

MELLUSINE  ou  MERLUSINE,  en  termes  de  Blason, 
figure  échevelée,  demi-femme  et  demi-serpent,  qui  se 
mire  et  se  baigne  dans  une  cuve.  On  ne  se  sert  de  ce 
terme  que  pour  les  cimiers. 

MÉLODICA,  instrument  à  clavier,  en  forme  de  clave- 
cin, avec  un  Jeu  de  flûte.  La  mélodica  fut  inventée,  dans 
«a  seconde  moitié  du  xvui*  siècle,  par  J.-A.  Stein,  d'Augs- 
bourg. 

MELODICON,  instrument  à  clavier  dans  lequel  le  son 
était  produit  par  le  frottement  de  pointes  métalliques  sur 
un  cylindre  d*acier.  Il  fut  inventé  par  Rieffelsen,  de  Co- 
penhague. 

BIÉLODlE  (du  grec  mélos,  vers,  mesure,  et  ôdè,  chaut), 
fuccession  de  sons  différents,  articulés  diatoniquement 
et  chromattqueaient,  par  degrés  conjoints  ou  par  degrés 


disjoints,  et  formant,  à  l'aide  du  rhythÊHS  {V.  ôs  moi^^  xm 
sens  musical.  Une  succession  de  sons,  dépourvue  des 
moyens  qui  servent  A  préciser  la  durée  die  chacun  de 
ces  sons,  serait  encore  une  mélodie;  mais  elle  n'aurait 
rien  d'açréable  ni  d'expressif  :  c'est  le  rhythme  qui  per- 
met de  coordonner  les  sons  par  l'emploi  varié  de  leurs 
signes  représentatifs,  de  les  classer  dans  les  cadres  ap- 
pelés mesures,  de  les  faire  entendre  sur  les  temps  divers 
de  ces  mesures,  et  d'établir  un  ordre  quelconque  entre 
les  membres  de  phrase,  les  phrases  et  les  périodes  du 
discours  musical.  Une  mélodie  non  rhythmée  n'est  qu'une 
chose  inerte,  un  corps  Inanimé,  auquel  le  rhvtbme  donne 
le  mouvement  et  la  vie.  La  mélodie  et  le  rhythme  sont, 
avec  Vharmonie  (F.  ce  mot)^  les  parties  constitutives  de 
l'art  musiraJ.  Toutefois,  il  n'est  pas  nécessaire  d'avoir 
fait  des  études  d'harmonie  pour  composer  de  bonnes  mé- 
lodies :  quelques-unes  des  mélodies  de  la  Flûte  enchantée 
ont  été  foufiiies  à  Mozart  par  son  poGte,  fort  mauvais 
musicien.  La  musique  est  si  bien,  dans  son  essence,  une 
chose  de  sentiment,  que  des  ignorants  ont  pu  souvent 
trouver  des  chants  mélodieux;  une  foule  d'airs  ont  été 
composés  instinctivement  dans  le  midi  de  la  France,  en 
Allemagne,  en  Italie,  même  avec  les  rhythmes  les  mieux 
appropriés  aux  sentiments  que  ces  airs  expriment,  et  il 
n'est  pas  rare  que  plusieurs  voix  les  exécutent,  non  pas 
A  runisson,  mus  en  harmonie,  avec  une  certaine  con- 
venance. La  mélodie  est  le  produit  de  l'Imagination;  elle 
réaulte  d'une  Inspiration  heureuse,  et  non  dfes  calculs  de 
la  science  :  c'est  elle  seule  qui,  dans  une  composition 
musicale,  frappe  le  plus  grand  nombre  des  auditeurs. 
Toutefois,  cette  faculté  de  créer  ne  s'étend  pas-au  delà  de 
limites  assex  étroites  ;  elle  ne  s'applique,  par  exemplt, 
qu'à  un  petit  air,  à  une  romance  :  celui  qui  ne  compose 
oue  d'instinct  est  incapable  de  développer  un  si^et  à 
raide  de  la  modulation,  et  d'ajuster  ses  motifs  sur  une 
harmonie  régulière.  V,  Doni,  Sur  la  perfection  de  la  mé- 
lodie, dans  le  2*  volume  de  ses  CEuvres  musicales  ;  Riepel, 
Éléments  de  la  compQsiUon  musicale^  en  allem.,  Ratis- 
bonne,  1752  et  1754,  in-fol.  ;  Kpch,  Essai  d'une  introduc- 
tion à  la  composition,  en  alleml  ;  Reicha,  Draité  de  mâ- 
lodie,  2*  édit,  1832,  2  vol.  in-4«;  Choron  et  A.  de  La- 
fage.  Manuel  de  musique,  Paris,  1838.  B. 

MÉLODION,  instrument  en  forme  de  petit  piano,  in- 
venté par  Diez  en  1811.  Il  est  muni  de  pédales  qoi 
servent  à  faire  mouvoir  une  roue.  Les  sons  se  produi- 
sent par  le  frottement  de  petits  b&tons  en  métal ,  cpe 
les  touches  font  mouvoir  sur  le  cylindre.  Le  mélodion 
imite  bien  la  flûte,  la  clarinette,  le  cor  de  basset  et  le 
basson.  Il  peut  exprimer  les  diverses  nuances  d'intensité 
des  sons. 

MÉLODIUM.  F.  Orgue  EXPRESSIF. 

MÉLODRAME  (du  grec  mélos,  air,  chant,  et  drama, 
action,  drame).  Ce  mot,  qui,  d'après  l'étymologie,  signifie 
drame  en  musique,  servit  primitivement,  en  effet,  à  dé- 
signer l'opéra.  Biais,  au  xviu*  siècle,  il  prit  une  tout  autre 
acception  :  par  suite  de  l'interdiction  qui  fut  faite  aux 
théâtres  secondaires  d'exploiter  les  genres  de  pièces  qu'on 
représentait  à  l'Académie  royale  de  Musique  et  à  la  (}o- 
médie-Française,  lesauteurs  imaginèrent  un  eenre  bfttard, 
où  ils  amalgamèrent  la  tragédie,  le  drune  bourgeois,  la 
comédie,  la  danse  et  la  musique  :  tel  fut  le  mélodrame, 
même  après  que  la  Révolution  eut  donné  aux  entreprises 
théâtrales  une  liberté  sans  limites.  L'action  était  toujours 
à  peu  près  la  même,  et  se  passait  entre  quatre  person- 
nages principaux  :  un  tyran  souillé  de  vices,  animé  de 
toutes  les  mauvaises  passions,  souvent  prince,  quelque- 
fois chef  de  brigands;  une  héroïne,  bourgeoise  ou  prin- 
cesse, douée  de  toutes  les  vertus,  et  p^sécutée  par  le 
tyran  ;  un  amant  de  cette  victime  infortunée,  la  délivrant 
au  moment  du  péril  et  tirant  de  son  ennemi  une  ven- 
geance exemplaire  ;  enfin  un  niais,  souvent  poltron,  quel- 
quefois gourmand,  ou  possédant  simultanément  ces  di- 
vers caractères,  afin  d'égayer  un  aussi  sombre  spectacle. 
La  pièce  était  généralement  en  3  actes,  le  l*'  consacré  i 
l'amour,  le  2*  au  malheur  et  à  l'efliroi,  le  3*  à  la  punitioL 
du  crime  et  au  triomphe  de  la  vertu.  Les  intrigues  étaien. 
toi^ours  ténébreuses,  les  situations  inattendues,  les  émo* 
tiens  violentes,  le  style  tour  à  tour  emphatique  et  trivial. 
Un  ballet  ou  divertissement  était  intercalé  tant  bien  qui 
mal  dans  la  pièce.  C'était  d'ordinaire  par  une  scène  d'es* 
crime,  dite  combat  des  quatre  coups<,  et  dans  laquelle 
plusieurs  personnages,  quelquefois  la  princesse  elle- 
même,  échangeaient  en  mesure  des  coups  d'estoc  réglés 
d^avance,  que  le  nœud  de  la  pièce  était  trancbé  avec  U 
vie  du  traître.  Quant  à  la  musique,  elle  avait  pour  em- 
ploi d'ouvrir  et  de  préparer  l'Ame  des  spectateurs  au2 


MEL 


1233 


M£M. 


•entiiiieDts  qu'on  allait  développer  devant  enx^  et  d'anç- 
menter  Teffet  dea  émotioiu  produites  :  ainsi,  une  mélo<ne 
vive  et  animée  annonçait  l'arrivée  du  comique,  une  sym- 
phonie lugubre  précédait  rentrée  du  tyran,  et  des  tons 
lamentables  accompagnaient  les  pas  de  la  princesse.  Ge 
fut  le  théâtre  de  la  Gaité  qui  exploita  le  genre  du  mé- 
lodrame arec  le  plus  de  succès,  grice  surtout  aux  pièces 
de  Victor  Ducange  et  de  Guilbcrt  de  Pixérécourt.  Depuis 
1830  environ,  ce  genre,  tout  en  conservant  une  certaine 
faveur  aur  quelques  sc&nes,  n'a  plus  d'existence  avouée  ; 
il  a  fait  place  au  dram$  (  V,  ce  mot)^  et  le  mot  mélodrame, 
toujours  pris  en  mauvaise  port,  est  appliqué  comme 
qualification  méprisante  aux  œuvres  indignes  d'nn  autre 
nom.  B. 

MÉLOPÉE  (du  grec  milos,  chant,  et  poiém,  faire), 
nom  cpie  lea  anciens  Grecs  donnaient  à  Tart  de  composer 
des  chants,  des  mélodies.  Une  règle  fondamentale  de  cet 
art  était  de  limiter  toute  mélodie  à  un  certain  ton,  de  la 
faire  commencer  et  terminer  par  ce  ton;  on  pouvait 
toutefois  commencer  par  la  quinte  du  ton.  On  employait 
ordinairement  le  genre  diatonique.  En  ce  qui  concerne  la 
progreasion  des  intervalles,  Aristoxène  recommande  de 
oc  pas  pratiquer  plus  de  deux  demi-tons  et  de  deux 
qnahs  de  tous  successifs,  et  de  ne  point  mettre  deux 
tierces  mineures  de  suite.  Encllde  distingue  quatre  suc- 
cessions de  sons,  qu*ii  appelle  :  ag6gè^  par  degrés;  plokè, 
|Mir  degrés  disjoints  et  par  saut;  petleia,  fréquente  répé- 
tition du  même  son;  tonè,  prolongation  du  son.  Aristide 
Quintilien  distingue  trois  parties  dans  la  mélopée  :  la 
lêpsis  (choix),  apprenant  quelle  espèce  de  voix  ou  d'in- 
strument doit  exécuter  une  mélodie,  quel  rhythme,  quel 
genre  et  qud  mode  conviennent  le  mieux  au  caractère  du 
nome  qn*on  veut  faire;  ]timixts  (mélange),  contenant  In 
doctrine  de  la  modulation;  la  chré^is  (usage),  qtii  ren- 
ferme lea  trois  premières  espèces  de  successions  de  sons 
indiquées  par  Euclide.  Par  rapport  au  style,  11  la  divise  en 
trois  modes  différenta  :  le  tragique,  où  le  chant  régnait 
seulement  sur  les  sons  graves  ;  le  nomique,  sur  les  sons 
moyens;  le  bachique  ou  dithyrambique^  sur  les  sons 
aigus.  De  la  distinction  de  ces  trois  styles  on  est  peut- 
être  en  droit  de  conclure  que  les  voix  de  femme  étaient 
exclues  du  mode  tragique,  et  que  les  voix  de  basse 
n*étaieot  pas  employées  pour  Texpression  des  sentiments 
oyeux*  B. 

MÉLOPHÂRB,  fanal  à  plnsie^irs  petites  fenêtres  qu*oo 


passer  u  mmiorn  placée 

itrum*»nt  «it  monfi'  sur  un^pied,  comme  un  pupitre; on 
s*cn  sert  pour  donner  des  concerts  nocturnes.* 

HKLOPUONE.  V,  le  Supplément 

IIÉLOPLASTE,  tableau  composé  oes  cinq  lignes  de  la 
portée,  avec  quelques  lignes  additionnelles  au-dessus  et 
an-deasous.  Ce  tableau,  sur  lequel  le  professeur  de  mu- 
sique promène  une  baguette  terminée  par  une  petite 
boule,  sert  à  représenter,  par  une  notation  mobile,  des 
chants  qui  sont  chantés  par  les  élèves  au  fur  et  à  mesure 
que  la  baguette  leur  indiaue  de  nouveaux  sons,  ce  qui 
les  dispense  d*apprcndre  à  lire  les  signes  ordinaires  de 
la  musique,  de  connaître  les  clefs  et  tous  les  accessoires 
de  la  musique  écrite.  Cette  méthode  a  été  inventée,  vers 
1817,  par  Pierre  Galin,  de  Bordeaux. 

lÔELPOMËNE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ffistoire. 

MELROSE  (Abbaye  de),  en  Ecosse,  dans  le  comté  de 
Roxbur^.  Cette  abbaye,  fondée  en  1130  par  David  I*',  et 
achevée  en  1140,  fut  détruite  par  les  Anglais  en  i3*i^i,  et 
bientôt  réédifiée.  Elle  eut  encore  à  souffrir  les  dévasta- 
tions des  Aurais  en  i385,  et  des  protestants  au  xvi*  siècle. 
les  ruines  de  T^ise  subsistent  seules  pour  attester  la 
magnificence  du  monastère.  Le  chœur,  le  transept,  une 
partie  de  la  nef  et  de  Taile  septentrionale,  presque  toute 
l'aile  méridionale,  sont  encore  debout;  le  côté  occidental 
de  la  tour  carrée  qui  s*élevait  au  centre  de  Tédiflce  a 
également  survécu  aux  ravages  des  hommes.  Ces  belles 
ruines  appartiennent  au  style  gothique  fleuri.  Le  portail 
méridional  offre  une  magnifique  fenêtre  de  7"*,30  de 
hauteur  et  de  5  met.  de  largeur,  surmontée  de  niches, 
rides  aujourd'hui  de  leurs  statues,  et  une  riche  décor&r- 
lioQ  où  se  mêlent  les  rosaces,  les  fleurs  de  lis,  les  têtes 
de  Chérubins  et  de  Sirènes,  et  les  figures  les  plus  gro- 
tesques. Du  même  côté,  le  mur  de  Téglise  est  percé  de 
S/eoètres  ornées  latéralement  de  têtes  de  moines  ou  de 
religieuses,  et  surmontées  de  pinacles  qui  sont  de  véri- 
tables chefa-d*fleuvre  de  sculpture.  Une  partie  des  voûtes 
1  disparu.  Du  côté  du  nord  est  une  porte  admirablement 


sculptée,  qui  conduisait  à  des  cloîtras,  Vehbuye  de  BIel« 
rose  a  été  décrite  par  W.  Scott  dans  son  roman  du  Mo' 
nastère,  sous  le  nom  de  Kennaquhair. 

MEMBRE ,  en  termes  d^Architecture,  se  dit  de  toute 
grande  partie  du  système  selon  lequel  un  édifice  est 
construit,  par  exemple,  d'une  /rise.  d  une  corniche.  Il  se 
dit  aussi  des  parties  plus  petites  dont  les  plus  grandes 
se  composent  t  ainsi,  la  fnse  est  un  membre  de  Tent»- 
blement,  le  larmier  est  un  membre  de  la  corniche, 

IIBMBRB.  V.  PiâUODB. 

MEMBRURE,  en  termes  de  Construction  navale,  assem- 
blage des  pièces  de  boia  qui  forment  lea  côtés  d'un  b&ti-« 
ment;  —  en  termes  de  Charpenterie  et  de  Menuiserie, 
grosse  pièce  de  bois  servant  ae  point  d'appui,  soit  à  une 
charpente,  soit  à  un  assembhige  de  pièces  ajustée». 

MEMENTO,  mot  Utin  qui  veut  dire  souvienS'4oi ,  et 
par  lequel  on  désigne,  tantôt  un  carnet  de  poche  destiné 
a  contenir  des  notes,  tantôt  un  livre  présentant  l'abrégé 
de  quelque  science.  ~  En  termes  de  Liturgie,  on  désigne 
par  Mémento  la  partie  du  canon  de  la  messe  où  l'on  fait 
la  commémoration  des  vivants  et  des  morts;  le  mémento 
des  vivants  est  avant  la  consécration,  celui  des  morta  te 
dit  après. 

MEMNON  (Statue  vocale  d?).  J  y  Tu feRr* 

.MEMNONIUM.  J  ^'  i^b^ks. 

MÉMOIRE,  faculté  que  nous  possédons  de  conserver 
.es  notions  acquises.  Le  fait  de  la  Mémoire  est  le  soU" 
venir.  Le  souvenir  d'une  perception  ou  d'une  sensation, 
en  présence  de  cette  même  perception  ou  sensation  re- 
nouvelée, est  proprement  la  reconnaissance.  Comme 
toutes  les  autres  facultés,  la  Mémoire  se  manifeste  spon- 
tanément; en  outre,  le  plus  grand  nombre  de  nos  sou- 
venirs se  présentent  d'eux-mêmes,  et  quelquefois  malgré 
nous.  Il  y  en  a  qui  semblent  exiger  un  acte  de  volonté 
et  même  un  effort;  mais  la  volonté  et  l'eff'ort  n*ont  pour 
but  que  d'éclaircir  par  l'attention  une  notion  qui  revient 
obscure  et  confuse  :  ee  qu'on  a  appelé  souvenir  volon-^ 
Uûre  n*est  mi'un  souvenir  instinctif  suivi  d'un  acte  d'at- 
tention réfléchie.  Pour  que  la  Mémoire  entre  en  exercice 
et  produise  le  souvenir.  Il  faut  :  Videntité  du  moi,  car  se 
souvenir  c'est  se  retrouver  tel  qu'on  était  dana  un  moment 
du  paasé;  la  durée  du  moi  et  la  succession  de  ses  modes; 
enfin,  un  fait  antérieur  dont  le  souvenir  n'est  que  la  re- 
production. La  Mémoire  donne  pour  résultat  la  certitude 
de  la  durée  du  moi,  et,  avec  elle,  les  notions  d*identité, 
de  durée,  &avant  et  d'après,  de  temps.  Il  faut  jouter 
que  la  Mémoire  est  pour  nous  la  condition  de  l'expérience 
et  du  progrès  :  l'intelligence  humaine  serait  réduite  à 
rien,  s'il  ne  lui  était  pas  donné  de  conserver  les  connais- 
sances Qu'elle  acquiert;  une  notion  à  peine  obtenue  dis» 
paraîtrait  A  Jamais  ;  tout  le  travail  qu'elle  aurait  coûté 
serait  sans  cesse  à  recommencer,  et  tout  perfectionne- 
ment intellectuel  serait  impossible.  Le  fait  de  la  Mémoire 
se  présente  sous  trois  formes  diflTérentes  :  i«  le  souvenir 
complei,  quand  la  notion  reparaît  dans  l'esprit  avec 
toutes  les  circonstances  de  la  perception  où  elle  a  pris 
naissance;  9*  la  réminiscence,  lorsque  la  notion  se  pré- 
sente encore  comme  celle  d'un  objet  réel,  antérieurement 
perçu,  mais  d'une  manière  si  vague,  que  nous  ne  pou- 
vons dire  ni  quand,  ni  où,  ni  comment;  3*  la  conception, 
quand  it  ne  reste  que  la  simple  notion,  sans  que  nous  sa- 
chions comment  elle  est  venue  dans  notre  pensée.  Dans 
ces  deux  derniers  cas,  la  Volonté  peut  intervenir  pour 
aider  la  Mémoire.  Dans  ce  but  on  a  quelquefois  recours 
à  des  moyens  artificiels,  dont  l'ensemble  constitue  la 
Mnàmotechnie,  ou  l'an  d'aider  et  de  fortifier  la  Mémoire 
(  V.  ce  mot),  —  La  Mémoire  varie  naturellement  d'indi- 
vidu à  individu,  et  avec  le  temps  dans  la  même  per- 
sonne; et  la  manière  dont  Texerce  et  la  façonne  le  pou- 
voir personnel  accroît  ou  modifie  ses  variations.  Telle 
mémoire  est  prompte  et  facile,  et  semble  reproduire  de 
préférence  les  Idées  acquises  par  les  sens  avec  lea  signes 

3ui  les  expriment;  c'eat  la  ménwtre  physique,  et  celle 
es  mots  :  telle  autre  est  plutôt  tenace  et  fidèle,  s'atta- 
ehant  aux  idées  et  aux  rapports  qui  les  lient;  c'est  la 
mémoire  rationnelle^  mémoire  des  pensées  et  des  choses. 
La  première,  qui  est  aussi  celle  de  l'enfance,  est,  chez 
jes  poètes  et  les  orateurs,  fortifiée  par  l'exercice  t  la  ae^ 
conde  appartient  plutôt  à  Tftge  niûr,  au  logicien,  au 
savant.  Ces  variétés  ne  s'expliquent  pas  plus  que  le  fait 
de  la  conservation  ou  de  la  durée  en  nous  des  notions 
qui  y  reparaissent  identiques  à  elles-mêmes.  Que  de- 
viennent-elles quand  elles  ne  se  montrent  pas?  L'école 
d'Aristote  prétendait  expliquer  le  phénomène  de  la  Mé- 
moire parues  impressions,  des  traces  ou  des  images  lais- 
«'^os  dans  le  cerveau.  Récemment,  M.  Damiron  a  émis 

78 


MËM 


1234 


MEM 


Topinion  que  les  notions  restent  dans  le  moi,  voilées  et 
non  pas  éteintes,  latentes  et  obscures,  mais  réelles,  et 
prêtes  à  se  réveiller  et  à  reparaître  au  premier  signal. 
Nous  ne  disons  rien  de  la  théorie  de  la  néminiscmce  de 
I  Platon,  qui  ne  s'appliquait  qu'aux  Idées,  Aucune  de  ces 
explications  n'est  satisfaisante,  ce  qui  n'empôche  pas  le 
fait  du  souvenir  d*ètre  incontestable.  V.  les  écrits  de  Reid 
et  de  Dugald  Stewart,  et  Topuscule  d'Aristote,  De  la 
Mémotre  et  de  la  Rémtniscence,  traduit  par  M.  Barthé- 
lémy Saint-Hilaire.  R. 

MéHoniB ,  terme  de  Liturgie.  V.  Coumi^ioration. 

HihioTiiB,  en  termes  de  Comptabilité,  état  de  ce  qui  est 
dû,  présenté  par  les  fournisseurs  à  leurs  débiteurs.  Les 
apothicaires  ont  eu  une  réputation  proverbiale  pour  l'art 
avec  lequel  ils  enflaient  leurs  Mémoires. 

M^oiRB,  nom  qu'on  donne  à  toute  dissertation  sur  un 
sujet  littéraire  ou  scientifique,  destinée  à  être  lue  devant 
un  corps  savant.  Beaucoup  d'Académies  et  de  Sociétés 
publient  des  recueils  de  Mémoires  de  ce  pnre  :  le  style 
doit  en  être  simple,  concis,  nourri  de  faits,  et  propre  à 
convaincre  la  raison.  Les  Mémoires  de  notre  Académie 
des  Inscriptions  et  belles-lettres  offrent  beaucoup  d'ex- 
cellents modèles  de  ce  genre,  surtout  dans  la  nouvelle 
série. 

MéifoiRB,  en  termes  de  Pratique,  écrit  sur  une  affaire 
litigieuse,  composé  par  un  avocat,  et  distribué  aux  Juges 
et  même  au  public.  C'est  l'exposition  et  le  détail  des 
faits ,  avec  les  principales  preuves  qu'apporte  une  partie, 
et  aussi  avec  les  pièces  à  l'appui.  Par  là  on  sollicite  au 
tribunal  de  l'opinion  un  jugement  présomptif,  ou  on  en 
appelle  devant  lui  d'une  condamnation  juridique.  La  pu- 
blicité des  Mémoires  judiciaires  a  été  surtout  importante 
dans  le  temps  où  il  n*y  avait  que  des  procédures  écrites, 
et  il  est  de  ces  Mémoires  qui  figurent  parmi  les  monu- 
ments de  l'éloquence  judiciaire,  par  exemple,  ceux  de 
Pellisson,  de  Servan,  de  Lally-Tollendal,  de  Beaumar- 
chais, et  de  Mirabeau.  Les  avocats  et  les  officiers  ministé- 
riels qui  auraient  signé  des  Mémoires  outrageants  peu- 
vent être,  de  la  pjirt  des  Juges,  l'objet  de  mesures  disci- 
plinaires. 

MÉMOIRES,  composition  du  genre  historique,  qui  a  pour 
marc|ue  distinctive  de  raconter  des  événements  contem- 
porains, dont  l'auteur  a  été  témoin  ou  acteur.  Les  autres 
ouvrages  d'histoire,  composés  par  des  écrivains  désinté- 
ressés, peuvent  offrir  un  choix  plus  sévère  des  faits,  plus 
de  mesure  et  de  gravité  dans  le  récit  ;  mais  les  Mémoires 
nous  saisissent  et  nous  attachent  plu*^  fortement ,  car  ils 
sont  une  œuvre  plus  vivante.  On  rédige  ses  Mémoires 
pour  satisfaire  ce  désir  irrésistible  qui  sollicite  tout  écri- 
vain à  mettre  le  public  dans  la  confidence  de  sa  pensée. 
La  vanité  n'y  est  pas  étrangère  non  plus  :  elle  s'appelle 
tantôt  le  droit  imprescriptible  de  protester  contre  l'in- 
justice de  l'opinion;  tantôt  le  désir,  propre  aux  grandes 
âmes ,  de  se  survivro  ;  souvent  aussi  l'orgueil  très-légi- 
time d'éclairer  son  siècle  et  les  &ges  qui  suivront,  et  de 
prévenir  les  erreurs  de  l'histoire.  L'utilité  des  Mémoires 
est  manifeste,  mais  11  faut  mesurer  la  cré^ce  qu'on 
leur  accorde,  et  les  contrôler  par  (l'ai.tres  Mémoires.  —  La 
France  est  plus  riche  que  nul  [vi\r-:  ]>p;iple  en  ouvrages 
de  ce  genre;  aucune  des  '^ond.i.i  :s  (]u*ils  exigent  ne 
manque  à  noti'e  pays,  (  ariiwus  sonuies  un  peuple  d'imn- 
gination,  communicatif  cl  conteur  par  nature.'  Ajoutoii» 
que,  du  jour  où  commença  de  se  former  la  France,  des 
événements  se  sont  succédé  chez  nous  dont  la  grandeur 
ou  l'importance  ne  saurait  s'exagérer,  puisqu'ils  sont 
l'histoire  de  la  civilisation  même  :  les  Croisades,  revanche 
et  réaction  de  l'Europe  chrétienne  contre  les  conquêtes 
de  llslamisme;  la  lutte  séculaire  de  l'Angleterre  et  de  la 
France  ;  le  règne  de  Louis  XI ,  qui  prépara,  par  la  des- 
truction violente  de  la  féodalité  apanagée,  le  despotisme 
des  rois;  les  guerres  d'Italie,  où  la  France  sauva  l'indé- 
pendance universelle  de  l'ambition  autrichienne:  la  Ré- 
formation,  qui  embrasa  l'Europe;  le  règne  de  Henri  IV 
et  l'administration  de  Richelieu  et  de  Mazarin ,  dignes 

Î)récurseurs  de  Louis  XIV  ;  le  xvin*  siècle,  où  les  lettres 
françaises  firent  l'opinion ,  qui  fut  alors  la  reine  de  l'Eu- 
rope; enfin  la  Révolution,  qui  travaille  encore  aujour- 
d'hui tous  les  peuples  ;  tel  est  l'ensemble  imposant  des 
faits  qui  constituent  notre  histoire.  Le  haut  intérêt  dont 
Us  sont  l'objet  universel  rejaillit  sur  les  particularités 
mômes  qui  servent  à  en  représenter  la  véritable  physio- 
nomie. Les  auteurs  n'ont  pas  non  plus  fait  défaut  aux 
sujets,  et  beaucoup  se  trouvèrent  placés  dans  une  situa- 
tion très-favorable  pour  bien  voir,  ou  du  moins  voir 
beaucoup  :  qui  pouvait  savoir  et  comprendre  mieux  que 
loinvillc  la  vie  do  S*  Louis,  mioux  qi;o  Coniines  celle  de 


I^uis  XIT  De  même,  il  appartenait  éminemment  à  Saint- 
Simon  de  pénétrer  l'&me  de  Louis  XIV,  à  M*"*  Rolland 
d'apprécier  les  personnages  célèbres  de  la  Révolution. 
Enfin  il  s'est  rencontré  chez  nous  des  plumes  féminines, 
lésères  et  délicates,  mesurées  et  discrètes  dans  la  fa- 
miliarité de  leurs  anecdotes  touchantes  ou  malicieuses. 
Ainsi  donc  toutes  les  circonstances  les  plus  propres  k 
faire  naître  et  fleurir  les  Mémoires,  Intérêt  particulier 
des  événements,  dispositions  morales,  talent  littéraire, 
rôle  et  situation  sociale  ou  politique  des  écrivains,  se 
sont  heureusement  rencontrées  aux  divers  périodes  de 
notre  histoire.  Quoi  d'étonnant  si ,  en  ce  genre ,  notre 
Littérature  éclipse  toutes  les  autres,  même  l'antiquité! 
Les  Anciens,  en  effet ,  ont  connu  les  Mémoires  :  chez 
les  Grecs,  VAnabase  de  Xénophon,  récit  de  l'expédition 
du  Jeune  Cyrus  contre  Artaxerxès  H,  et  de  la  célèbre  re- 
traite des  Dix  mille,  dont  il  fut  le  chef  élu,  est  de  ce 
genre  ;  elle  en  a  les  qualités  et  les  défauts,  des  peintures  un 
peu  longues  de  mœurs  asiatiques  ou  grecques,  beaucoup 
d'anecdotes,  et  des  épisodes  disposés  et  racontés  avec  art. 
Les  Mémoires  furent  très-communs  chez  les  Romains, 

3ui  les  appelaient  Commentaires  {V,  ce  mot)  :  à  dater  du 
emier  siècle  de  la  République ,  époque  où  la  culture 
des  lettres  devint  générale,  beaucoup  d'entre  les  zrands 
citoyens,  appelés  a  manier  de  grandes  affaires,  a  con- 
duire d'importantes  guerres  lointaines,  rentrés  dans  la 
retraite ,  consignèrent  les  souvenirs  de  leur  vie  publique 
dans  des  Mémoires.  Sylla,  Lucullus,  César  et  bien 
d'autres,  parmi  lesc^uels  plusieurs  membres  de  la  famille 
Porcia,  avaient  écnt  des  Commentaires;  ceux  de  Sylla 
avaient  22  livres,  et  il  les  finit  la  veille  de  sa  mort.  Ces 
documents  précieux  sont  perdus,  à  l'exception  des  Com- 
mentaires de  César.  On  pourrait  presque  dire  que  nous 
avons  ceux  de  Cicéron,  dont  les  nombreuses  Lettres 
sont  si  remplies  de  ses  Jugements ,  de  ses  expériences, 
de  ses  désespoirs  touchant  les  affaires  de  son  temps  et  Ir 
part  qu'il  y  prit.  La  lecture  de  Tacite,  de  Valère-Maximc, 
de  Suétone,  de  Plutarque,  de  Dion  Cassius,  d'Appien, 
surtout  dans  ses Gti«rre5  civiles,  prouve  clairement,  par 
certains  détails,  qu'il  existait  un  grand  nombre  de  Hé- 
moires sur  les  événements  du  dernier  siècle  de  la  répu- 
blique et  de  l'ère  des  empereurs.  Auguste,  notamment, 
avait  aussi  laissé  des  Commentaires.  Plus  tard,  {"Histoire 
secrète  de  Justinien,  par  Procope,  a  tous  les  caractères 
de  Mémoires  satiriques  inspirés  par  la  vengeance. 

Il  serait  difficile  de  compter  tous  les  Mémoires  que  les 
lettres  françaises  ont  produits  de  siècle  en  siècle.  Ville- 
hardoin,dè5  le  commencement  du  xiii*  siècle,  dans  une 
prose  sérieuse  et  ferme,  où  le  sens  des  affaires  s'allie  i 
l'expression  répétée  d'une  profonde  coi^iance  en  la  pro- 
tection de  Dieu,  raconta  sur  un  ton  élevé,  épique  par- 
fois, la  4*  Croisade  qu'il  avait  suivie.  Joinvitle,  moini 
d'un  siècle  après,  animé  d'une  foi  déjà  moins  vive,  mais 
aussi  d'une  tendresse  touchante  pour  son  roi,  peignit, 
avec  art  et  naïveté  tout  ensemble,  les  incidents  tragiques 
de  la  V  Croisarlo  et  les  vertus  de  Louis  IX.  —  Il  est  per- 
mis peut-être  d'assimiler  à  des  Mémoires  la  Chronique 
universelle  de  7.  Froissart,  cet  Hérodote  français,  voya- 
geur infatigable,  qui,  dans  sa  passion  de  tout  voir,  de  tout 
savoir  et  de  tout  conter,  visita  tous  les  pays,  et,  chemin 
f'\i«;n'^t.  n'-'"rnv\n,  sans  réflexion**  rr.-'ime  sans  confusion, 
les  avoiiiures  bénou&cb  et  les  unci  :!  '  >  'iMailicrc;»,  peintre 
aussi  remarquable  par  l'énergie  des  traits  que  par  iné- 
puisable variété  des  couleurs.  —  Comines  a  laissé  sur 
Louis  XI  des  Mémoires  précieux.  Moraliste  et  politique 
autant  que  narrateur,  comparable  à  Tacite,  s'il  en  avait 
eu  les  colères  et  le  chsigrin,  il  enseigne  aux  princes  leurs 
devoirs  d'un  ton  qui  fait  songer  à  Bossuet,  et  professe  ce'te 
croyance  que  Dieu  distribue  les  succès  et  les  revers  ^m 
hommes,  selon  qu'ils  se  montrent  ici-bas,  non-seulement 
bons  ou  pervers,  mais  encore  clairvoyants  ou  aveugles, 
circonspects  ou  téméraires,  prudents  ou  malavisés.  —  Les 
guerres  d'Italie  eurent  aussi  leurs  Mémoires  ;  les  vertus 
chevaleresques  de  la  noblesse  française  y  brillèrent  de 
leur  suprême  éclat,  personnifiées  par  Bayard.  De  là  l'in* 
térêt  historique  et  moral ,  sinon  littéraire,  qui  s'attache 
à  la  Chronique  du  Chevalier  sans  peur  et  sans  reproche^ 
par  son  loyal  serviteur» 

Les  luttes  religieuses  suivirent  ces  expéditions,  d'où  les 
Français  avaient  du  moins  rapporté  le  goût  des  lettres  et 
des  arts.  La  cour  et  la  noblesse  gardèrent  en  même 
temps  la  tradition  de  cette  galanterie  qui  prit  naissance, 
et  dégénéra  bien  vite  en  corruption,  à  la  cour  de  Louis  XII 
et  de  François  I*'.  La  guerre  civile  et  les  aventures  amou- 
reuses remplirent  donc  les  Mémoiresde  lafin  du  xvi*  5;!èc^c 
Va  dorni  Manjucrite  de  Valois,  par  un  style  qui  ivur..» 


MËM 


1235 


MEN 


la  forre  et  le  naturel,  la  rapidité  et  l'émotion  ;  le  farouche 
Montluc,  par  ses  Commentaires  œuvre  d*un  soldat  insa- 
tiable de  combats  et  d^un  catholique  impitoyable  et  for- 
cené; le  vaniteux  BrcuUôme,  par  ses  Chroniques  trop 
casconnes  et  ses  récits  trop  gaulois  sur  les  dames  galantes; 
enfin  le  rude  et  intraitable  Agrippa  (TAubignéj  par  Tàpreté 
«rcastique  de  ses  écrits,  brillèrent  parmi  les  Tavannes, 
ei  Lanoue,  les  Vieilleville  et  les  Coligny. 

Au  xvii*  siècle,  après  Tapaiscment  des  guerres  reli- 
deuses,  les  nobles  tournèrent  leur  humeur  indocile  contre 
^es  premiers  ministres,  Concini,  Richelieu,  Mazarin;  puis 
releva  Louis  XIV,  qui,  par  Tappàt  des  ^ces  royales* 
'*âsoupIît  les  résistances,  transforma  en  courtisans  les 
ùen  hùTDs  de  la  Fronde,  et  subordonna  leur  fortune  à 
son  intérOt  et  à  ses  plaisirs.  Tel  est  le  spectacle  instructif 
et  varié  que  nous  présentent  les  Mémoires  de  ce  siècle  ; 
car  tandis  que  la  littérature  offîcielle  reflétait  la  gloire  et 
les  pompes  du  temps,  des  Mémoires,  plus  vrais  parce 
qu'ils  vont  au  delà  de  Tapparence  et  déchirent  tous  les 
voiles,  en  peignaient  non-seulement  Téclat  éblouissant, 
maiHauss{  les  misères,  les  scandales,  les  turpitudes  et  les 
douleurs,  et,  par  leurs  détails  vifs  et  nus,  donnaient  le 
moyen  de  mesurer  un  jour  chacun  à  sa  véritable  taille. 
Pour  retrouver  la  physionomie  de  cette  époque,  avec  ses 
nolents  contrastes  de  grandeur  et  de  petitesse,  de  hau- 
tiur  et  de  servilité,  de  mœurs  relâchées  et  de  dévotion, 
Wi  Mémoires  s'offrent  en  foule  :  le  duc  de  Rohan,  Riche- 
lieu,  Bassompierre,  Tallemant  des  Réaux,  le  cardinal  de 
Rel2,  La  Rochefoucauld,  Turenne,  Bussy-Rabutin,  Dan" 
geau,  HamUtxm  et  le  duc  de  Grammont,  M"**  de  Motte- 
ville,  lf"«  de  Caylus,  M^'  de  Montpenster,  Af"'«  de  La 
Fayette,  Louis  XI Y  lui-même,  et,  par-dessus  tous,  Saml" 
Simon,  dont  les  critiques  célèbrent  à  l'envi  le  style  fou- 
gueux et  pittoresque,  la  verve  étincelante,  la  pénétration, 
la  profondeur  et  le  coloris,  furent,  entre  beaucoup  d'au- 
tres, les  peintres  immortels  d'eux-mêmes  et  de  leur  temps. 

Au  xviii*  siècle ,  où  les  lettres  éclipsèrent  la  politique, 
et  où  l'édition  d'un  livre  émeut  autant  l'opinion  que 
rinique  partage  de  la  Pologne,  le  trait  commun  des  Mé- 
moires, et  leur  caractère  original ,  est  de  peindre  au  vif 
les  mœurs  et  le  mouvement  intellectuel  de  cette  société, 
déréglée  dans  ses  idées  comme  dans  sa  conduite.  C'est 
alors  que  Rousseau  publia  ses  Confessions  {V.  ce  mot)^ 
que  Dttclos ,  d^Alembert ,  Diderot ,  Marmontel ,  compo- 
sèrent leurs  Mémoires,  œuvres  secondaires  et  médiocres  ; 
et  que  Voltaire  répandit  les  siens  dans  sa  vaste  et  volu- 
mineuse Correspondance,  que  l'on  peut  regarder  comme 
ses  Mémoires. 

Le  goût  pour  la  vérité  historique,  qui  distingue  le 
XII*  siècle,  fait  lire  avec  avidité  tous  les  Mémoires,  et  en 
a  fait  publier  beaucoup  d'apocryphes.  Il  en  a  été  donné 
an  grand  nombre  d'authentiques  sur  la  Révolution  fran- 
çaise, sur  le  1"*  Empire,  sur  la  Restauration,  tels  aue  les 
Mémoires  de  Mirabeau,  composés  de  documents  laissés 
par  lui  ;  (ie  La  Fayette,  composés  de  même  ;  de  Chàteai^ 
briand,  du  roi  Joseph  Bonaparte,  du  duc  de  Raguse,  du 
Prince  Eugène  (I^eauharnais),  de  Béranger,  etc.  Parmi 
tous  ces  Hémoires,  aucuns  n'épient  en  importance,  en 
intérêt,  même  en  talent,  les  Mémoires  de  Ptapoléon  I"  : 
ils  sont  l'œuvre  non-seulement  d'un  des  plus  grands 
génies  et  des  plus  grands  souverains  qui  aient  jamais 
existé,  mais  aussi  d'un  écrivain  précis,  exact,  nerveux, 
plein  de  chaleur  et  dMmagination.  Ces  Mémoires  l'em- 
portent de  beaucoup,  à  tous  les  points  de  vue,  sur  les 
Commentaires  de  César. 

On  a  eu,  de  nos  jours,  Theureuse  idée  de  réunir  les 
Mémoires  de  quelque  importance,  publiés  à  toutes  les 
époques  de  notre  histoire ,  en  une  sorte  de  bibliothèque 
ou  de  section  de  bibliothèque,  naturellement  un  peu  vo- 
lumineuse. Hais,  par  là,  on  a  mis  ces  livres  intéressants 
à  la  ponée  de  plus  de  monde.  Les  principaux  recueils  de 
ce  genre  sont  :  Collection  des  Mémoires  relatifs  à  ihis- 
toire  de  France,  depuis  la  fondation  de  la  monarchie 
française  jusqu'au  xiii*  siècle,  publiée  avec  des  notices 
et  des  notes  par  M.  Guizot, Paris,  1823-27,  29  vol.  in-S""  : 
ce  ne  sont  que  des  Chroniques  très-peu  personnelles  en 
çénéral ,  et  traduites  du  latin  ;  —  Collection  des  cturoni" 
iues  nationales  françaises  écrites  en  langue  vulgaire,  du 
W  au  xvi«  siècle,  1824-29, 47  vol.  in-S*',  publiée  par  Bu- 
chon,  qui  en  reproduisit  la  plus  grande  partie  dans  le 
Panlhwn  littéraire;  —  Collection  des  Mémoires  relatifs  à 
l'histoire  de  France,  depuis  le  règne  de  Philippe-Auguste 
itt^tt'd  la  paix  de  Paris  conclue  en  1763,  par  Petitot  et 
Monmerqué,  Paris,  1819-27,  132  vol.  in-8";  —  Nouvelle 
collection  de  Mémoires  relatifs  à  Vhistoire  de  France  de- 
puis le  xui'  siècle  jusqu'à  la  fin  du  ^v^^*•,  par  ^!:rliaiitî  ci 


Poujoulat,  Paris,  1836etsniv.,  32  vol.  gp.  in-8»;  —  Choix 
de  Mémoires  du  xviii»  siècle,  par  Barrière,  Paris,  1846- 
1849, 12  vol.  in-12;— ifémo/rM  relatifs  à  la  Révolution 
française,  par  Berville  et  Barrière,  Paris,  1820-26, 56  voL 
in-8o.  Les  diverses  collections  reproduisent  beaucoup  de 
Mémoires  semblables  ;  mais  aucune  d'elles  ne  dispense 
complètement  des  autres. — M.  Guizot  a  publié  une  Col- 
lection de  Mémoires  relatifs  à  la  Révolution  d'Angle- 
terre, 25  vol.  in-8<».  En  Allemagne,  Schiller  a  édité  une 
collection  de  Mémoires  historiques,  du  xii*  siècle  jusqu'à 
lui,  léna,  4790-1806,  33  vol.  in-8«>.      A.  H.  et  C.  D—y. 
MËMORANDUM,  mot  latin  qui  signifle  dont  il  faut  se 
souvenir^  et  qu'on  emploie  en  Diplomatie  pour  désigner 
une  note  signée  par  laauelle  un  gouvernement  entend 
établir  le  véritable  état  d'une  question  et  justifier  l'atti- 
tude ou  les  mesures  qu'il  a  prises  pour  maintenir  son 
droit.  C'est  une  sorte  de  plaidoirie ,  de  mémoire  d'avo- 
cat ,  oui  n'a  pas  le  caractère  d'une  simple  communication 
de  caoinet  à  cabinet ,  mais  qu'on  destine  à  la  publicité 
et  qui  s'adresse  à  l'opinion. 

MÉMORIAL,  mot  employé,  soit  comme  synonyme  de 
Mémoires,  comme  quand  on  dit  le  Mémorial  de  Sainte' 
Hél^,  titre  de  l'ouvrage  de  Las  Cases  sur  la  captivité 
de  Napoléon  I*'  à  l'île  S^'-Hélène  ;  soit  pour  désigner,  à 
Rome  et  en  Espagne,  un  placet,  un  mémoire  servant  à 
l'instruction  d'une  affaire.  Il  désigne  encore  le  livre- 
journal  où  les  commerçants  et  les  banquiers  inscrivent 
leurs  affaires  quotidiennes,  au  fur  et  à  mesure  qu'elles 
sont  conclues  ;  ou  bien  il  sert  de  titre  à  certains  jour- 
naux. Autrefois  on  donna  aussi  le  nom  de  Mémoriaux 
aux  actes  notariés,  et  aux  registres  des  Chambres  des 
flbmptes. 
MEMPHITIQUE  (Dialecte).  V.  Coptb  (Ungue). 
MENACES.  Elles  constituent  un  délit  ou  un  crime, 
selon  les  circonstances  dont  elles  sont  accompagnées.  La 
menace,  par  écrit  anonyme  ou  signé,  d'assassinat ,  d'em- 
poisonnement,  d'incendie,  est  punie  des  travaux  forcés  à 
temps,  si  elle  a  été  faite  avec  ordre  de  déposer  une 
somme  dans  un  lieu  déterminé  ou  de  remplir  toute  autre 
condition  ;  s'il  n'y  a  eu  ni  ordre  ni  condition ,  la  peine 
est  un  emprisonnement  de  2  à  5  ans,  et  une  amende  de 
100  à  600  fr.  La  menace  verbale,  avec  ordre  ou  sous  con- 
dition, est  punie  d'un  emprisonnement  de  6  mois  à  2  ans, 
et  d'une  amende  de  25  à  300  fr.  (Code  pénal ,  art.  305- 
307  ).  Dans  les  deux  cas ,  le  coupable  peut  en  outre  être 
mis  sous  la  surveillance  de  la  haute  police  pour  5  ans  au 
moins  et  10  ans  au  plus.  La  menace  verbale,  sans  ordre 
ou  sans  condition ,  n'est  pas  punie.  Dans  certains  cas,  la 
menace  est  considérée  comme  outrage  (V.  ce  mot).  Le 
délit  de  mendicité  (V.  ce  mot-)  est  aggrave  par  la  menace. 
MÉNAGIER,  nom  qu'on  donnait  jadis  à  tout  traité  de 
morale  et  d'économie  domestique. 

MENAI  (Pont  de).  V.  Menai  et  BarrAimiA,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 

MENDE  (Église  Notre-Dame,  à).  Cette  église  cathé- 
drale, monument.de  style  ogival  très-rare  dans  cette  con- 
trée de  la  France,  fut  commencée  en  1368  sous  la  direc- 
tion d'Urbain  V,  pape  d'Avignon,  et  achevée  par  ses 
successeurs.  Les  protestants  la  dévastèrent  en  1580,  mais 
les  d^ts  furent  Dïentôt  réparés.  Ce  qu'elle  offre  déplus 
remarquable,  ce  sont  ses  deux  flèches,  appuyées  sur  deux 
tours  carrées  :  la  plus  élevée  est  un  chef-d'œuvre  d'art  et 
de  délicatesse. 

MENDICITÉ,  état  de  l'indigent  qui  demande  l'aumône 
habituellement.  Depuis  bien  des  siècles,  l'autorité  pu- 
blique est  intervenue  pour  réprimer  ou  empêcher  la 
mendicité.  En  806,  Charlemagne  ordonna  de  secourir  les 
mendiants  dans  leurs  paroisses,  et  défendit  de  leur  faire 
l'aumône  partout  ailleurs.  Une  ordonnance  de  1320  pres- 
crit a  que  tout  fainéant  qui,  n'ayant  rien  et  ne  gagnant 
rien,  fréquente  les  tavernes,  soit  arrêté,  interrogé  sur  ses 
facultés,  et  banni  de  la  ville,  s'il  est  surpris  en  mensonge 
ou  convaincu  de  mauvaise  vie.  n  En  1351,  Jean  le  Bon 
enjoignit  aux  mendiants,  «  sains  de  corps  et  oiseux,  » 
de  sortir  de  Paris  sous  trois  jours  ou  de  renoncer  au  va- 
gabondage; ceux  qui  n'obéiraient  pas  devaient  être  mis 
en  prison  an  pain  et  à  l'eau  pendant  quatre  jours,  punis 
du  pilori  en  cas  de  récidive,  et,  pour  une  troisième  faute^ 
marqués  au  front  d'un  fer  chaud  et  bannis.  Les  archers 
chargés  de  les  poursuivre  portaient  le  nom  d*archers  de 
Vécuelle,  L'ordonnance  de  police  de  1413  voulait  qu'on 
forçât  les  mendiants  valides  à  aller  labourer.  Sous  Fran<» 
çois  I*',  une  ordonnance  de  1545  prescrivit  d'ouvrir  des 
ateliers  de  travail,  où  ils  devraient  se  rendre,  sous  peine 
du  fouet,  des  verges,  et  du  bannissement  à  temps  ou  à 
perpi^'tuité;  les  invalides  seraient  enfermés  dans  les  liOpî- 


MÊN 


1236 


MKM 


taux  0 1  entretenas  par  les  paroissee.  Les  mendiants  et 
les  vagabonds  s*étant  multipliés  pendant  les  guerres  de 
religion,  le  Parlement,  par  arrêt  des  29  août  et  24  octobre 
i5)H5,  les  chassa  de  Paris,  sous  peine  d*être  pendus  sans 
forme  de  procès;  disposition  qui  fut  reproduite  dans  un 
arrêt  du  Parlbment  de  Normandie,  du  16  novembre  1622. 
Un  édit  fut  encore  rendu  contre  la  mendicité  le  27  août 
1012.  En  1627  on  força  les  mendiants  à  prendre  du  ser- 
ficc  dans  les  compagnies  de  commerce  ou  dans  la  marine, 
et  à  s'embarquer  pour  les  Indes.  En  1638,  on  expulsa 
les  mendiants  de  Paris,  avec  menace  des  galères.  Citons 
aussi  les  édits  d'avril  1656,  d*août  1661,  de  iuin  1662,  du 
12  octobre  1686,  du  21  décembre  1700,  du  23  mars  1720, 
du  18  juillet  1724,  du  5  février  1731,  du  20  octobre  1750. 
Malgré  les  mesures  les  plus  sévères,  les  mendiants  ne 
cessaient  pas  de  pulluler.  En  1764,  on  conçut  un  nouveau 
système,  celui  des  maisons  de  correction,  appelées  de- 
puis dépôts  de  mendicité;  des  ordonnances  de  1 767  et  1 77G 
le  mirent  en  application.  Le  mal  fut  un  peu  atténué.  Un 
décret  de  l'Assemblée  constituante  (30  mai  1790),  dont  la 
plupart  des  dispositions  sont  encore  en  vigueur  aujour- 
d'hui, ordonna  l'ouverture  d'ateliers  pour  les  mendiants 
valides.  Le  décret  du  24  vendémiaire  an  ii  (15  oct.  1703) 
supprima  les  dépôts  de  mendicité,  pour  les  remplacer  par 
des  mcùsons  de  répression,  où  devaient  être  envoya  les 
mendiants  et  les  vagabonds,  et  prononça  la  peine  de  la 
transportation  contre  ceux  qui  seraient  en  état  de  réci- 
dive. Il  fut  abrogé  par  le  décret  du  5  Juillet  1808,  qui 
ordonna  de  créer  un  dépôt  de  mendicité  dans  chaque 
département.  Les  établissements  de  ce  genre  n'ont  pas 
été  toujours  soutenus  par  les  gouvernements  ultérieurs  : 
il  n'en  existe  plus  maintenant  que  20,  dont  16  départe- 
mentaux et  4  communaux  ;  quelques  dépôts  départemen- 
taux servent  pour  plusieurs  départements.  Le  salaire  du 
travail  que  le  mendiant  y  exécute  est  partagé  par  moitié 
entre  le  dépôt  et  lui.  Toute  personne  trouvée  mendiant 
dans  un  lieu  oour  lequel  il  existe  un  dépôt  de  mendicité 
est  punie  de  â  à  6  mois  d'emprisonnement,  et  conduite 
au  dépôt  après  l'expiration  de  sa  peine  {Code  pènat, 
art.  274)  :  le  séjour  au  dépôt  n'est  pas  une  peine,  mais 
une  mesure  de  police,  que  l'administration  peut  faire 
cesser  sans  le  concours  des  tribunaux.  Dans  les  lieux  où 
il  n'y  a  point  de  dépôts  de  mendicité,  les  mendiants  d*ha- 
bitude  valides  sont  punis  de  1  mois  à  3  mois  d'empri- 
sonnement s'ils  sont  arrêtés  dans  le  canton  de  leur  i^i- 
dence,  et  de  6  mois  à  2  ans  s'ils  sont  arrêtés  hors  de  ce 
canton  (art.  275).  Cette  dernière  peine  frappe  aussi  les 
mendiants,  même  invalides,  qui  usent  de  menaces,  qui 
entrent  sans  permission  dans  une  habitation,  qui  fei^ent 
des  plaies  ou  des  infirmités,  et  qui  mendient  en  réunion, 
à  moins  que  ce  ne  soit  le  niari  et  la  femme,  le  père  ou 
la  mère  et  les  Jeunes  enfants,  Taveugle  et  son  conduc- 
teur. Tout  mendiant  qui  voyage  muni  d'un  passe-port 
reçoit  un  secours  de  30  centimes  par  myriamètre,  payable 
de  5  en  5  myriamètres  par  les  manicipalités  placées  sur 
la  route  que  le  passe-port  indique.  V,  Paupérisub. 

MENEAUX,  montants  de  pierre,  de  forme  variable,  qui 
divisent  une  fenêtre  en  plusieurs  parties.  Pendant  toute 
la  période  ogivale,  ils  occupent  une  place  importante 
dans  le  système  architectural,  et  servent  à  déterminer 
les  époques  des  constructions.  An  temps  de  la  transition, 
le  meneau  est  lourd  et  souvent  disgracieux;  mais,  avec 
le  xiii*  siècle,  il  s'alléçit ,  se  compose  d'un  tore  élégant , 
divise  la  fenêtre  en  deux  ou  trois  parties,  monte  droit 
jusqu'à  la  naissance  de  l'arcade,  et  se  courbe  ensuite 
gracieusement  en  fer  de  lance  qu'il  couronne  d'une  rose 
polylobée;  c'est  Tépoque  du  style  lancéolé.  Au  xiv*  siècle, 
l'architecture  devient  rayonnante,  les  fenêtres  s'élargis- 
sent, les  meneaux  se  multiplient  en  s'allégissant  encore, 
et  forment  des  compartiments  plus  nombreux,  mais  à 
simple  courbure.  Enfin ,  à  la  troisième  période  ogivale, 
les  meneaux  s*enlacent  et  se  tordent  comme  les  anneaux 
d'un  serpent,  ou  flamboient  comme  une  flamme  folle  et 
ardente,  suivant  le  caprice  de  l'architecte.  En  Angleterre, 
les  meneaux  montent  droits  à  travers  Tamortissement  de 
la  fenêtre,  et  forment  une  particularité  qu'on  nomme 
perpendiculaire.  —  On  donne  encore  le  nom  de 
meneau  à  la  moulure  plus  ou  moins  compliquée  qui 
forme  par  ses  enroulements  la  décoration  à  jour  d'un 
d'une  balustrade  on  d'un  fronton.  E.  L. 

MËNBPHTHFXM.  F.  Thèbks  (Ruines  de). 
MÉNESTRELS  ou  MÉNÉTRIERS  (du  bas  latin  minis- 
trotor,  homme  au  service  d'un  autre),  nom  qui  parait 
avoir  remplacé  celni  de  Bardes  vers  le  viii*  siècle  de 
notre  ère.  On  a  prétendu  même  le  faire  dériver  d  un  cer- 
tain Ménestrel  ou  Minstrel,  maître  de  chapelle  do  Pépin 


le  Bref.  Les  ménestrels  marchaient,  comme  les  andeni 
chantres  gaulois,  à  la  tète  des  armées,  et  donnaient  le 
signal  en  entonnant  un  chant  guerrier.  Ainsi  faisait  en- 
core Taillefer  au  premier  rang  de  l'armée  de  GuilUume 
le  Conquérant  avant  la  bataille  d'Hastings,  en  1066.  Ber- 
dic,  qui  hérita  de  son  talent,  reçut  de  Guillaume  trois 
paroisses  dans  le  comté  de  Glocester.  Plus  tard ,  on  ap- 
pela Ménestrels  les  musiciens  qui  composèrent  des  chants 
pour  les  poésies  des  Troubadours  et  des  Trouvères,  ou  qui 
accompagnèrent  de  quelque  instrument  tandis  aue  le 

rete  chantait.  Il  y  en  eut ,  tels  que  Rutebeuf ,  qui  turent 
la  fois  poètes  et  musiciens,  et  alors  on  leur  donnait 
plutôt  le  nom  de  chantarres.  Parmi  les  ménestrels,  Jean 
Bretel  et  Jean  Bodel ,  tous  deux  d'Arras,  acquirent  une 
grande  célébrité  au  xm*  siècle;  Vynot  le  Bourguignon 
composa  de  gais  refrains,  qui  se  chantaient  dfans  les 
rues  et  sur  les  places  publiques.  Les  musiciens  ambu- 
lants se  mêlèrent  aussi  de  représenter  des  miracles  (K.  ce 
mot).  En  1330 ,  il  se  forma  à  Paris,  sous  le  nom  de  Mé- 
nestrandie,  une  corporation  qui  prit  pour  patrons  S^  Ju- 
lien et  S*  Genest,  et  dont  le  chef  reçut  le  titre  de  rot  des 
Ménétriert,  Cette  corporation  fonda,  dès  l'année  1331,  un 
hôpital  pour  les  musiciens  pauvres.  Elle  comprenait  des 
chanteurs,  des  joueurs  d'instruments,  et  même  des  bala- 
dins et  des  faiseurs  de  tours.  En  1397,  les  musiciens,  se 
séparant  de  ces  derniers ,  se  reconstituèrent ,  et  leurs 
nouveaux  règlements  furent  approuvés  par  Charles  YI,  le 
2i  avril  1407  :  ils  répudièrent  le  nom  de  ménétriers^  des- 
tiné à  ne  plus  désigner  dans  la  suite  que  les  pauvres 
joueurs  de  violon  qui  font  danser  les  villageois,  et  prirent 
celui  de  joueurs  d'instruments,  tant  hauts  comme  bas; 
leur  chef  fut  appelé  rot  des  violons.  En  octobre  1658, 
Louis  XIV  déciaa  qu'on  ne  pourrait  être  admis  à  la  maî- 
trise qu'après  quatre  années  d'apprenttssa|ge  ;  aue  les 
élèves  qui  prétendraient  à  la  maîtrise  payeraient  60  livres 
au  roi  des  violons,  et  10  livres  aux  maîtres  de  la  confrérie 
de  S^-Julien  ;  que  les  maîtres  seraient  soumis  à  une  re- 
devance annuelle  de  30  sous  envers  la  confrérie,  et  à 
roblisation  de  payer  un  droit  pour  chacun  de  leurs  élèves 
au  roi  des  violons;  que  les  maîtres  seuls  auraient  le  droit 
«  de  Joner  aux  cabarets ,  chambres  garnies  et  autres 
lieux.  »  Une  sentence  de  police,  du  10  juin  1603,  obligea 
les  organistes  et  les  maîtres  de  clavecin  à  payer  un  droit 
au  roi  des  violons  :  mais  Ils  en  appelèrent,  et  le  Parle- 
ment leur  donna  gain  de  cause,  par  arrêt  du  7  mai  1695. 
La  confrérie  de  S^-Julien  paya  22,000  livres,  en  1707, 
pour  obtenir  des  lettres  patentes  du  roi  qui  soumettaient 
à  sa  juridiction  les  maîtres  de  clavecin,  de  Tiole,  de 
théorbe,  de  luth ,  de  guitare  et  de  flûte  ;  mais  œs  lettres 
furent  révoquées  la  même  année.  En  1747,  la  querelle 
avec  les  organistes  se  ralluma  ;  un  arrêt  définitif  du  Par- 
lement,  en  date  du  30  mai  1750,  débouta  de  ses  préten- 
tions le  roi  des  violons.  Guignon  abdiqua  cette  charge 
en  1773 ,  et  elle  fut  supprimée  par  édit  royal.  La  con- 
frérie subsista  encore  Jusqu'en  1789.  Bernhard,  Re- 
cherches sur  l'histoire  de  la  corporation  des  Ménétriers, 
dans  la  Biblwthèque  de  V École  des  Chartes,  1842  et 
1843,  in-8».  B. 

MENEUM ,  livre  d'hymnes  et  de  prières  chorales,  di- 
visé en  12  parties  pour  les  12  mois  de  Tannée.  II  est  en 
usage  dans  l'Église  grecque. 

MENHIR.  V.  Celtiques  (Monuments). 

MENIANA.  V.  Balcon. 

MENIN.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra» 
phie  et  d^Histoire. 

MÉNIPPÊE  (Satire),  ouvrage  fameux  de  la  fin  du 
XVI*  siècle,  ainsi  appelé  par  imitation  de  l'auteur  latin 
Varron ,  qui  avait  donné  le  nom  de  Ménippées  à  des  sa- 
tires où  il  avait  entremêlé  la  prose  et  les  vers  ;  non  que 
Ménippe,  disciple  de  Diogène,  eût  composé  ni  vers  ni  sa- 
tires, mais  parce  qu'il  s'était  fait  une  réputation  par  son 
humeur  moqueuse  et  par  l'indépendance  cynique  de  son 
langage.  Deux  siècles  après  Varron ,  Lucien  emploj^a  en- 
core le  personnage  de  Ménippe  comme  type  du  railleur. 
A  l'époque  de  la  Renaissance,  les  débris  des  Ménippées 
de  Varron,  épars  dans  les  auteurs  anciens,  furent  re- 
cueillis par  Robert  Estienne,  et  publiés  dans  sa  collection 
des  Fragments  des  vieux  poètes  laUins  (Paris,  1564);  il 
est  probable  que  cette  publication  ne  fut  pas  sans  in- 
fluence sur  les  auteurs  de  notre  Ménippée.  La  Ménippèe 
est  un  pamphlet  politique  dirigé  contre  la  Ligue,  et  une 
œuvre  littéraire  d'une  i^nde  ^eur.  Au  milieu  des  pas- 
sions religieuses  et  des  graves  intérêts  qui  ponasalent  les 
Sartis  aux  moyens  extrêmes,  y  compris  l'assassinat ,  elle 
t  entendre  la  voix  de  la  raison  et  du  bon  sens,  et  con- 
tribua beaucouo  à  l'apaisement  général ,  en  ramenant  an 


MEN 


1237 


MER 


sentiment  du  vrai  les  esprits  qu*aveuglaient  l'intolérance 
nt  Vambition.  Elle  parut  à  un  moment  bien  choisi ,  après 
les  États  Généraux  de  la  Ligue,  où  il  avait  été  impos- 
sible de  B^entendre  sur  Télection  d'un  roi ,  et  ses  traits 
acérés  aidèrent  au  triomphe  des  Politiques,  partisans 
de  Henri  IV.  Ce  fut  en  1593,  et  quelques  mois  avant  Ten- 
trt>e  du  rot  dans  Paris,  que  fut  imprimée  à  Tours  une 
brochure  de  15  feuillets,  intitulée  la  Vertu  du  Catholicon 
(T Espagne;  l'année  suivante,  après  la  soumission  de 
Paris,  on  sjouta  à  cette  brochure  un  Abrégé  des  Eitats 
de  la  Ligtte,  et  le  toQt  reçut  le  nom  de  Satire  Ménippée. 

La  défense  de  la  religion  catholique  était  le  prétexte 
sous  lequel  s'abritait  la  Ligue  pour  entretenir  la  guerre 
civile  et  cnipècher  Henri  IV  de  régner.  La  Vertu  (W  Ca- 
tfiolicon  d'Espagne  développe  cette  idée,  qu'une  fois  entré 
dans  Tassociation  à  titre  de  catholique,  quelque  vicieux 
et  déshonoré  qu'on  fût  d'ailleurs,  on  devenait  pur  et  sans 
tache.  Elle  nous  montre,  pendant  qu'on  ffdt  au  Louvre 
des  préparatifs  pour  la  tenue  prochaine  des  Ëtats,  deux 
charlatans,  l'un  Espagnol,  l'autre  Lorrain,  vantant  à 
Tenvi,  dans  la  cour  du  palais,  la  vertu  de  leur  drolgne 
qm  est  le  CatKtHteon.  Ce  morceau,  d  un  ton  vigoureux, 
sert  comme  de  prologue  à  VAbrégé  des  Estais  de  la 
Ligue,  qui  est  beaucoup  plus  étendu.  Cette  seconde  partie 
de  la  Ménippée  débute  par  la  description  comique  d'une 
procession  des  députés  ligueurs  avant  l'ouverture  des 
États;  puis  vient  rénumération  des  sujets  que  sont  cen- 
sées représenter  les  tapisseries  dont  la  salle  des  États  est 
tendue  :  ces  sujets  imaginaires ,  les  uns  contenant  des 
allégories  ironiques,  les  autres  représentant  des  portraits 
chargés  ou  des  faits  récents,  tels  que  la  bataille  d'Ivry, 
sont  une  satire  mordante  de  la  conduite  de  la  plupart  des 
membres  de  l'assemblée.  Le  chapitre  suivant,  qui  traite 
de  VOrdre  tenu  pour  les  séances,  est  assaisonné  d'allu- 
sions malignes,  de  plaisanteries  parfois  peu  décentes.  Les 
orateurs  ^  parlent  avec  une  naïveté  tantôt  bouffonne, 
tantôt  sérieuse,  qui  découvre  ie  secret  des  sourdes  in- 
trigues de  chacun.  On  voit  clairement  que  tous  n'ont 
aucun  souci  de  la  religion ,  et  ne  tendent  qu'à  se  fidre 
une  part  dans  les  dépouilles  de  la  France.  Mais  pour  que 
leurs  espérances  se  réalisent,  il  faut  à  tout  prix  conti- 
nuer la  guerre  ;  le  mot  même  de  paix  leur  est  odieux , 
et  les  maasiers,  chargés  de  la  police  de  l'assemblée,  ré- 
clament le  silenee  en  ces  termes  :  Qu*on  se  taise  !  n'osant 
dire  :  Paix  là!  Toutes  les  harangues  sont  des  chefs- 
d'œuvre  de  parodie;  chaque  trait  y  frappe  juste,  et  la 
verve  comioue  ne  tarit  pas.  Le  morceau  capital,  celui  qui 
couronne  rouvragOi  cW  la  harangue  prononcée  par 
d'Aubraj  an  nom  du  tiers  état  :  l'histoire  de  la  Ligue 
7  est  ewjiiissée  en  traits  rapides,  énergiques  et  pitto- 
resques, inspirés  par  un  ardent  patriousme  uni  a  une 
haute  raison.  L'orateur,  avec  une  loeique  puissante  et 
une  indignation  sincère,  fait  Justice  des  prétentions  du 
roi  d'Espagne  et  de-  la  maison  de  Lorraine,  passe  en 
revue  les  maux  qui  désolent  le  pays  et  ceux  surtout 
oue  Paris  a  soufferts,  exalte  le  courage,  la  clémence 
d*Henri  IV,  et  conclut  en  proposant  qu'on  aille  lui  de- 
mander la  paix. 

Les  auteurs  de  la  Ménippée  étaient  des  hommes  hon- 
nêtes et  convaincus,  des  catholiques  sincères,  et  en  même 
temps  des  écrivains  de  premier  ordre.  Us  n'écoutèrent 
que  la  voix  de  leur  conscience  et  leur  amour  du  bien  pu- 
blic; le  sentiment  du  devoir  leur  donna  le  courage  de 
dire  la  vérité.  Pierre  Le  Roy,  chanoine  de  Rouen  et  au- 
mônier du  Jeune  cardinal  de  Bourbon ,  conçut  l'idée  pre- 
mière de  la  Méntppée,  en  donna  le  plan,  et  écrivit  la 
Vertu  du  Catholicon.  Ses  collaborateurs  furent  :  Jacques 
GîUot,  conseiller  au  Parlement;  Florent  Chrestien,  an- 
cien précepteur  d'Henri  IV  ;  Nicolas  Hapin ,  grand  prévôt 
de  Uoonnétablie;  Passerat,  professeur  de  philosopnie  au 
Coll^  de  France  ;  et  Pierre  Pithou ,  Jurisconsulte  éml- 
nent,  qui  défendit  les  libertés  de  l'Église  gallicane.  Pas- 
serat et  Rapin  passent  pour  avoir  composé  les  vers  latins 
et  français  qui  sont  à  la  suite  de  l'ouvrage:  mais  la  plus 
grande  part  revient  au  premier.  La  Satire  Ménippée  a  eu 
d'innombrables  éditions;  les  meilleures  sont  celles  de 
Ch.  Nodier,  1884,  S  vol.  in-8«,  et  de  Ch.  LaUtte,  1843  et 
1857,  în-iï.  P— s. 

MÉNISQUE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphiê  et  d^  Histoire. 

MÉNOLOGE  (du  grec  min,  mois,  et  logos,  discours)^ 
c.-4-d.  discours  pour  chaque  mois;  terme  qui  répond, 
dans  l'Église  grecque,  à  ce  qu'on  entend  dans  l'Église  ro- 
maine par  martyrologem 

MENSAIRES.  V.  notre  DictwmuMre  de  Biographie  et 


MENSAO.  V,  Gelttqcbs  (Monuments). 

MENSE.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  dUlis» 
totre. 

MENSOLE  (de  l'italien  mensola),  nom  donné  quelquo- 
fois  à  la  clef  ae  voûte. 

BIENUET,  ancienne  danse  que  l'on  croit  originaire  du 
Poitou ,  et  qui  tirait  son  nom  de  ce  qu'on  la  dansait  à 
pas  menuets  (à  petits  pas).  Le  menuet,  tout  à  la  fois 
grave  et  éléeant,  se  dansait  à  deux ,  et  commençait  ordi- 
nairement le  bal  :  il  se  composait  essentiellement  de 
quatre  pas  exécutés  en  forme  de  Z ,  avec  un  repos  de 
quatre  en  quatre  mesures,  et  deux  reprises  du  même 
motif.  Il  fVit  à  la  mode  pendant  les  règnes  de  Louis  XIV, 
de  Louis  XV  et  de  Louis  XVI,  à  la  cour,  dans  la  haute 
société,  et  sur  le  théâtre.  Les  airs  en  étaient  à  3  temps, 
d'un  mouvement  modéré  :  ceux  d'Exaudet,  de  Fischer,  et 
de  Grétry  eurent  une  grande  réputation.  Mozart  a  placé 
un  menuet  dans  le  l*'  finale  de  Don  Juan,  Meyerbeer 
dans  le  5*  acte  des  Huguenots,  et  Verdi  au  début  du 
premier  acte  de  RigolettOé  —  les  compositeurs  de  mu 
sique  instrumentale  introduisirent  des  menuets  dans 
leurs  symphonies,  leurs  quatuors,  leurs  sonates,  après 
Vandante.  et  en  firent  un  morceau  d'école,  d'une  harmo- 
nie difficile.  Ces  menuets  se  composent  d'une  première 
partie,  qui  comprend  trois  reprises,  et  d'une  seconde,  qui 
n'en  a  le  plus  souvent  que  deux,  et  qu'on  nomme  trio 
dans  les  quatuors  parce  que  le  violoncelle  n'y  concourt 
point;  toutes  ces  reprises  se  répètent  la  première  fois, 
et,  au  da  capo,  on  va  de  suite  Jusau'à  la  fin  de  la  i'*  par- 
tie, que  l'on  reprend  toujours  après  le  trio.  Certains  me- 
nuets ont  une  queue  {coda)>t  que  l'on  exécute  pour  finir. 
Les  plus  anciens  durent  avoir  le  mouvement  du  menuet 
danse,  ainsi  qu'on  le  voit  dans  les  oravres  de  Boccherini  ; 
mais  les  Allemands ,  Haydn,  Moxart,  Beethoven,  ont 
donné  beaucoup  plus  de  rapidité  et  de  vigueur  à  ce  genre 
de  composition.  Aujourd'hui  le  schêno  (K.  es  mot)  a 
remplacé  le  menuet.  B. 

MENUIERIE,  nom  par  lequel  on  désignait  autrefois  les 
petites  pièces  d'orfèvrerie,  tabatières,  boites  à  portraits, 
boites  de  senteur,  bonbonnières,  cassolettes,  etc. 

MENUISERIE,  art  intermédiaire  entre  la  charpenterie 
et  l'ébénisterie,  et  auquel  appartient  le  travail  du  menu 
bois  pour  l'établissement  des  portes,  fenêtres,  parquets, 
lambris,  escaliers,  cloisons,  alcôves,  volets,  persIennes, 
Jalousies,  meubles  communs  (tables,  couchettes,  bancs, 
armoires,  bibliothèques). 

MENUISIERS ,  ancienne  corporation ,  dont  les  statuts 
remontaient  à  l'année  1396,  et  dont  la  fête  se  célébrait  à 
la  S'^Anne,  anniversaire  du  Jour  où  ces  statuts  avaient 
été  donnés.  Un  édit  du  mois  d'août  1776  les  réunit  aux 
ébénistes,  aux  tourneurs  en  bois,  et  aux  layetiers.  L'ap- 
prentissage durait  6  ans;  le  brevet  coûtait  24  livres,  et  la 
maîtrise  600. 

MENUS  PLAISIRS  DU  ROI,  nom  donné,  avant  1789, 
&  l'administration  des  fêtes  de  la  cour,  siégeant  dans  un 
hôtel  de  la  rue  du  faubourg  Poissonnière  à  Paris,  et 
ai^ourd'bui  démoli.  De  cette  administration  relevaient 
les  thé&tres,  en  ce  qui  concernait  les  subventions  qu'ils 
pouvaient  recevoir  ou  les  représentations  que  leurs  ac- 
teurs donnaient  devant  le  roi.  Le  nom  de  Menus  Plaisirs 
du  roi  fût  rétabli  par  la  Restauration  de  1814;  mais  cette 
administration  faisant  le  service  des  pompes  et  cérémo- 
nies funèbres  pour  la  famille  royale,  on  plaisanta  de 
ces  singuliers  menus  plaisirs  du  roi  ;  alors  la  dénominar 
nation  fut  changée  en  celle  de  Matértd  des  fétês  et  oérét 
monies  de  la  couronne. 

MENU-VAIR.  V.  Vair. 

MENZILS ,  nom  qu'on  donne  en  Orient  aux  maisons 
de  ceux  oui  reçoivent  les  voyageurs  dans  les  lieux  où  il 
n'y  a  ni  khans  ni  earavansérais. 

MÉPLAT,  pour  mi^lat  ou  à  demp-plat,  terme  de  la 
langue  des  beaux-arts.  Une  succession  de  lignes  droites 
ou  de  psrties  plates  donne  un  dessin  et  des  formes 
roides;  les  parties  rondes  et  les  lignes  drculafa'es  font  un 
dessin  mou  et  des  formes  lourdes.  Les  méplats  établissent 
le  passage  d'un  plan  à  un  autre  dans  l'objet  en  relief.  En 
Gravure,  on  donne  la  qualification  de  méplates  à  des 
tailles  tranchées  et  sans  adoucissement ,  dont  l'usage  est 
de  fortifier  les  ombres  et  d'arrêter  les  contours. 

MER  ou  OCÉAN ,  ensemble  des  eaux  salées  répandues 
à  la  surface  du  globe  terrestre,  dont  elles  couvrent  plus 
des  deux  tiers,  et  dont  elles  entourent  la  partie  solide  ou 
la  terre.  C'est  dans  l'hémisphère  austral  que  se  trouve  la 
masse  d'eau  la  plus  grande,  et  dans  l'hémisphère  boréal 
la  plus  grande  masse  de  terre.  La  salure  de  la  mer  n'est 
pas  la  même  partout  :  l'océan  Atlantique  est  plus  saM 


MER 


1238 


MER 


*\ae  le  Grand  Oci^an,  et  la  Méditerranée  plus  que  TAtlan- 
tic^ue;  la  salure  diminue  en  approchant  des  régions  po- 
laires, ce  qui  peut  provenir  de  la  fonte  d'une  panie  des 
glaces;  elle  est  généralement  moindre  dans  les  mers  in- 
térieures, ainsi  que  prte  des  côtes  et  à  Tembouchure  des 
grands  fleuves  ;  elle  peut  être  modifiée,  soit  par  des  sai- 
sons plus  ou  moins  pluvieuses,  soit  par  des  sources  d*eau 
douce  qui  se  trouvent  dans  la  mer  même.  L*eau  paraît 
fitre  moins  salée  à  la  surface  qu*à  une  certaine  profon- 
deur. —  La  température  de  la  mer  s'abaisse  de  Téqua- 
teur  aux  régions  polaires;  il  en  est  de  môme,  sous  le 
môme  parallèle,  près  des  lies  et  des  continents,  et  au- 
dessus  des  bancs  de  sable.  En  pleine  mer,  la  tempéra- 
hire  s'abaisse  en  raison  des  profondeurs,  excepté  dans  les 
mers  boréales,  où  le  contraire  a  lieu.  Dans  le  voisinage 
des  deux  pôles,  Teau  de  la  mer  gèle  ;  mais  les  glaces  fixes 
s'étendent  plus  loin  autour  du  pôle  austral  qu  autour  du 
pôle  boréal ,  puisqu'on  a  pu  naviguer  au  N.  Jusqu'à  83^, 
et  au  S.  Jusqu'à  74  degrés  seulement.  —  Prise  en  petite 
quantité,  l'eau  de  la  mer  est  incolore,  et  généralement 
transparente  :  au  rapport  des  plongeurs ,  la  lumière  {ié- 
nètre  à  20  met.  au  moins  au-dessous  de  la  surface;  on  a 
pu  quelquefois  apercevoir  le  fond  à  60  met.,  et  le  capi- 
taine Wood  raconte  qu'en  1670,  aux  environs  de  la  Nou- 
velle-Zemble, il  y  voyait  les  coquillages  à  160  met.  Vue 
en  masse,  l'eau  parait  d'un  bleu  azuré,  plus  ou  moins  in- 
tense. Près  des  côtes,  et  dans  les  mers  du  Nord ,  cette 
couleur  se  rapproche  de  l'aigue-marine.  Les  nuages  peu- 
vent changer  l'aspect  de  la  mer,  qui,  dans  les  gros 
temps,  devient  gris&tre.  Quelquefois  la  présence  d'ani- 
maux microscopiques  ou  de  certaines  algues  dans  l'eau 
lui  donnent  une  teinte  rouge&tre  ou  verdàtre.  Là  où  l'eau 
est  peu  profonde,  la  couleur  peut  en  être  modifiée  par 
celle  du  fond,  qui  se  compose  de  sables  ou  de  vases 
jaunes ,  rouges,  etc.  Une  propriété  remarquable  de  l'eau 
de  la  mer  est  sa  phosphorescence,  principalement  dans 
la  zone  intertropicale  :  ce  phénomène  est  dû  à  la  présence 
d'animaux  microscopiques  très-nombreux,  qui  sécrètent 
une  matière  phosphorescente.  —  La  mer  a  plusieurs 
mouvements  :  les  uns,  superficiels  et  accidentels,  comme 
les  vagues^  les  autres  r^liers,  comme  les  marées  {V,  ce 
mot  ).  La  masse  des  eaux  subit  aussi  l'action  de  puissants 
courants  (  K.  ce  mot  ).  -^  Laplace,  démontrant  que  la 

f>rofondeur  moyenne  de  la  mer  ne  pouvait  être  qu'une 
iraction  de  la  différence  qui  existe  entre  les  deux  axes  de 
la  terre,  pensait  qu'elle  ne  pouvait  excéder  8,000  met. 
Dans  la  baie  d'Huason,  Ellis  toucha  le  fond  à  1,782  met.; 
le  capitaine  Ross,  dans  la  baie  de  Bafiin,  à  2,100  met.; 
Scoresby,  entre  le  Spitzberg  et  le  Groenland,  à  2,400  met. 
James  Ross,  par  15«  3'  de  lat.  S.,  et  23«  14*  de  long.  O., 
n'a  trouvé  le  fond  qu'à  une  profondeur  de  9,200  met.; 
Henri  Mangles  Denham,  par  36*  39'  de  lat.  S.,  et  36»  7' 
de  long.  O.,  qu'à  15,412  met.;  mais  leurs  sondes  n'étaient- 
elles  pas  entraînée»  par  des  courants  sous-marins,  au 
lieu  de  tomber  verticalement?  La  profondeur  varie  beau- 
coup le  long  des  côtes  :  plus  celles-ci  sont  hautes  et  es- 
carpées, plus  les  eaux  qui  les  baignent  sont  profondes. 
—  L'analogie  fait  présumer  que  le  fond  de  la  mer  pré- 
sente les  mômes  inégalités  que  la  surface  des  continents. 
Les  lies,  rochers,  r£ifs  et  écueils  sont  les  sommets  de 
montasnes  sous-marines,  qui  forment  en  plusieurs  en- 
droits Ta  continuation  de  celles  des  continents,  et  entre 
lesquelles  s'étendent  de  longues  et  profondes  vallées.  Le 
fond  de  la  mer,  partout  où  la  sonde  peut  atteindre,  parti- 
cipe de  la  nature  des  côtes  voisines  :  il  est  ou  vaseux,  ou 
sablonneux,  ou  pierreux,  ou  rocailleux,  et  souvent  môle 
de  coquilles;  dans  le  Grand  Océan,  il  est  fréquemment 
formé  par  des  coraux.  Du  reste,  il  doit  éprouver  des 
changements,  soit  par  les  chocs  continuels  de  l'eau,  qui 
dégrade  les  points  élevés,  soit  par  l'arrivée  des  matières 
que  charrient  les  fleuves  ou  que  les  vagues  enlèvent  aux 
rivages  et  qui  remplissent  les  cavités,  soit  enfin  par  les 
explosions  des  volcans  sous-marins.  —  La  mer  est  un 
grand  réservoir  d'où  s'élèvent  sans  cesse  des  vapeurs  hu- 
.mides,  qui,  portées  par  les  vents  sur  les  terres,  s'y  con- 
densent, s'y  convertissent  en  pluies,  et  alimentent  les 
sources  des  rivières  et  des  fleuves.  C'est  de  son  niveau 
que  l'on  calcule  les  hauteurs  de  la  terre.  Gb  niveau  est 

{)lus  élevé  dans  quelques  parages  que  dans  d'autres;  mais 
a  différence  n'est  due  qu'à  des  circonstances  locales, 
puisque  la  mer,  comme  tous  les  liquides,  doit  prendre  à 
sa  surface  une  horizontalité  parfaite.  Cependant ,  le  ni- 
veau des  mers  intérieures  est  généralement  plus  élevé 
que  celui  des  autres  mers  :  cela  tient  à  ce  qu'elles  reçoi- 
vent une  masse  d'eau  proportionnellement  plus  grande, 
et  dont  elles  ne  peuvent  se  débarrasser  promptement. 


resserrées  qu'elles  sont  par  la  terre  ferme,  et  ne  commu- 
niquant avec  le  reste  de  TOcéan  que  par  d'étroits  ca- 
naux. Des  faits  nombreux  prouvent  que  la  mer  s'est  reti- 
rée de  certains  lieux  qu'elle  couvrait  et  baignait  jadis,  et, 
réciproquement,  que  des  lieux  autrefois  situés  à  quelque 
distance  du  littoral  sont  aujourd'hui  recouverts  par  les 
eaux  :  on  ne  les  expliquerait  pas  tous  en  disant  que  Is 
mer  se  retire  d'un  côté  et  avance  de  l'autre;  mais  on 
peut  encore  admettre,  tantôt  un  exhaussement  ou  gonfle 
ment  partiel  des  terres,  produit  par  quelque  révolution 
souterraine  ou  par  des  dépôts  d'alluvion,  tantôt  un  affais- 
sement du  sol  près  de  la  mer. 

La  mer  fournit  aux  contrées  les  plus  éloignées  les  unes 
des  autres  le  moyen  de  communiquer  ensemble,  et  il  est 
à  remarquer  que,  dans  les  continents  où  elle  forme  le 
plus  grand  nombre  d'enfoncements  ou  golfes,  les  rela- 
tions sont  plus  faciles  et  plus  fréquentes  entropies  habi- 
tants. La  forme  compacte  de  l'Afrique  doit  figurer  parmi 
les  causes  qui  ont  retardé  la  civilisation  dans  ce  conti- 
nent. —  La  mer,  source  et  réservoir  de  toutes  les  eaux 
du  globe,  est  essentiellement  destinée  à  rester  commune 
à  tous  les  hommes  :  elle  ne  peut  devenir  l'objet  d'une 
propriété  exclusive  (V.  Daorr  iiariiimb).  Néanmoins, 
suivant  les  principes  du  Droit  des  gens,  tout  État  qui 
touche  à  la  mer  est  considéré  comme  étendant  son  em- 

{>ire  jusqu'à  la  plus  grande  portée  du  canon  au  delà  de 
a  terre;  cet  espace,  qu'on  nomme  la  mer  territoriale  de 
cet  État,  est  un  asile  inviolable  pour  toute  puissance 
avec  laquelle  l'État  n'est  point  en  guerre.  Le  littoral  de 
la  mer  est  une  dépendance  du  domaine  public  :  les  limites 
de  ce  domaine  sont  tixéGi  par  l'étendue  du  sol  vers  le- 
quel s'élèvent  les  plus  hautes  marées.  B. 

MBR  (Consulat  de  la).  V,  Consulat  ns  la  heb,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

MRR  d'airain.  V,  Tbmplb  (le),  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d^Histoire» 

MERCANTILE  (Système),  nom  donné  au  système  de 
commerce  appliqué  par  Colbert  lors  de  l'établissement 
régulier  des  douanes,  et  dont  les  principes,  basés  sur 
l'idée  de  la  balance  du  commerce  (K.  Balancb)  ,  étaient 
de  considérer  le  numéraire  comme  la  mesure  véritable 
de  la  richesse,  et  d'aider  par  tous  les  moyens  à  ce  que  le 
pays  exportât  le  plus  et  importât  le  moins  possible. 

MERCIERS,  le  3*  des  six  corps  de  marchands  de 
Paris  avant  1789.  On  y  distinguait  20  sections  :  l*'  les 
marchands  grossiers,  vendant  en  gros  sous  balle  et  sous 
corde  toute  espèce  de  marchandises ,  sauf  les  étoffes  de 
laine;  2^  les  marchands  de  drap  d'argent  et  de  soie; 
3**  les  marchands  de  dorure,  qui  ne  vendaient  <iue  des 
galons  et  autres  tissus  d'or  et  d'argent  sur  soie,  ainsi  que 
des  dentelles;  4°  les  commerçants  en  camelot,  éta- 
mines,  etc.;  5»  les  Joailliers;  6°  les  marchands  de  toile 
et  ling^  de  table;  7°  les  marchands  de  points  en  dentelle 
de  fil ,  batistes,  linons,  mousselines,  toiles  de  Hollande  ; 
8"  les  marchands  de  soie  en  bottes  ;  9°  les  marchands  de 
peausserie;  10°  les  marchands  de  tapis,  tapisseries,  cour- 
tes-pointes; 11^  les  marchands  de  fer,  acier,  étain,  plomb, 
cuivre,  charbon  de  terre;  12<*  les  quincailliers;  13**  les 
marchands  de  tableaux,  estampes,  candélabres,  curio- 
sités pour  les  appartements;  14*  les  margliands  de  mi- 
roirs, glaces,  sacs,  carreaux,  coussins;  ib**  les  rubaniers 
et  les  marchands  de  gaze  et  taffetas;  10°  les  papetiers  et 
fournisseurs  de  bureaux;  17°  les  chaudronniers;  18°  los 
marchands  de  parapluies  et  parasols  ;  19°  les  marchands 
de  menue  ipercerie;  20'  les  petits  merciers,  marchands 
de  peignes,  chapelets,  etc.  Le  corps  des  merciers  re<;ut 
ses  premiers  statuts  de  Charles  VI  en  1407  et  1412;  sta- 
tuts confirmés  ou  augmentés  par  Henri  II  en  1&48,  1557 
et  1558;  par  Charles  IX  en  1567  et  1570;  Louis  XIII  en 
1613;  et  par  Louis  XIV  en  1645.  Il  était  assez  nombreux 
pour  qu'en  1557,  dans  une  revue  de  la  milice  parisienne,  it 
eût  3,000  hommes  sous  les  armes.  Pour  être  reçu  dans  ce 
corps,  il  fallait  avoir  fait  un  apprentissage  de  3  ans,  et 
servi  un  maître  pendant  3  autres  années.  Les  maîtres  no 
pouvaient  avoir  plus  d'un  apprenti ,  non  marié  ni  étran- 
ger; il  leur  était  défendu  de  prêter  leur  nom,  d'avoir  un 
associé  non  marchand,  d'être  courtiers  ni  commission- 
naires, et  de  tenir  plus  d'une  boutique.  Un  noble  pouvait 
être  mercier  sans  déroger.  Jusqu'en  1597^  la  mercerie 
n'eut  qu'un  seul  chef,  dit  Boi  des  merciers^  dont  l'auto- 
rité s'étendait  à  toute  la  France,  et  qui  avait  des  lieute- 
nants dans  les  principales  villes  :  à  lui  seul  appartenait 
le  droit  de  conférer,  moyennant  finances,  les  brevets  de 
maîtrise.  Cette  charge,  qui  était  une  véritable  surinten- 
dance du  commerce,  fut  supprimée  par  Henri  IV,  en  1597. 
en  punition  du  7.èle  que  les  mer^.iers  avaient  montré  pour 


MRR 


1239 


MÉR 


\iUgA«^«A  ses  atiribations  passèrent  au  grand-chancelier, 
^maviùi  déjà  rinspection  des  arts  et  des  manufactures. 
t)epu\s  celte  époque,  le  corps  des  merciers  fut  administré 
par  7  maîtres  et  gardes  électifs,  chargés  de  la  police  du 
corps  et  de  la  conserration  de  ses  privilèges  ;  ces  gardes- 
m  Tcien  portèrent  la  robe  consulaire  dans  les  cérémonies 
publiques.  L*écu8son  des  merciers  était  un  champ  d'ar- 
gent, chargé  de  trois  vaisseaux,  dont  deux  en  chef  et  un 
en  pointe  ;  ces  vaisseaux  étaient  matés  d*or  sur  une  mer 
de  sinople,  le  tout  surmonté  d*un  soleil  d'or  avec  cette 
devise  :  Tb  toto  orbe  ssqumnur  (Nous  te  stdvrons  par 
toute  la  terre  ).  Il  fallait,  pour  arriver  à  la  maîtrise,  avoir 
fait  an  apprentissage  de  3  ans,  servi  les  maîtres  pen- 
dant un  temps  égal,  et  payer  1,000  livres.  Le  patron  de 
la  corporation  était  S^  Louis.  B. 

MERCURE ,  dieu  que  les  artistes  ont  représenté  sous 
différentes  formes,  selon  la  manière  dont  ils  comprenaient 
son  rôle.  A  Torigine,  et  particulièrement  en  Arcadie,  Mer- 
cure, ou  plutôt  Hermès,  fut  rangé  parmi  les  divinités 
chthoniennes,  qui,  du  fond  de  ràjblme,  dispensent  des 
fruits  et  des  bénédictions;  dieu  de  la  fécondation,  on  le 
plaça  sur  les  chemins  sous  la  forme  d*un  poteau  pourvu 
d'une  tète  et  d*un  phallus  {V.  Hermès).  Il  n'était  pas  sans 
analogie  avec  Pluton,  qui  présidait  aussi  aux  richesses  du 
sol  et  régnait  sur  les  morts,  et  c*est  pour  ce  motif  qu'on 
le  reprâenta  armé  d*une  baguette  et  introduis  nt  les 
âmes  aux  Enfers  :  de  là  vint  plus  tard  son  rôle  de  psycko- 
pompe,  de  ministre  subalterne  des  dieux.  Dès  le  temps 
d'Homère,  une  transformation  s*est  opérée  ;  le  poète  nous 
montre  Hermès  en  messager  divin ,  armé  d*une  verge 
d'or,  adoré  surtout  par  les  hérauts  :  avec  ce  caractère, 
l'art  le  représente  sous  la  forme  d'un  homme  vigoureux, 
a?cc  une  barbe  pointue,  de  longs  cheveux  bouclés ,  une 
chlamyde  rejetée  en  arrière,  un  bonnet  de  voyage,  des 
ailes  aux  pieds,  et  le  caducée  à  la  main.  Hermès  a  été 
aussi ,  spécialement  en  Béotie,  le  dieu  des  exercices  gym- 
nastiques,  dont  il  disputait  Tinvention  à  Hercule  :  en 
cette  qualité,  les  artistes  donnèrent  à  son  image  les  attri- 
buts de  la  jeunesse  ;  il  a  les  cheveux  courts  et  peu  bou- 
clés, les  formes  de  la  souplesse  et  de  la  vigueur,  et  porte 
la  chlarayde  rejetée  en  arrière.  C'est  le  dieu  latin  Mer- 
cure, identifié  par  les  Romains  avec  Hermès,  qui  est  sur- 
tout représenté  comme  dieu  du  lucre  et  du  commerce; 
use  bourse  figure  alors  au  nombre  de  ses  attributs.  Il 
n'y  a  qu'un  très-petit  nombre  d'oeuvres  où  on  Tait  re- 
présenté comme  protecteur  des  troupeaux  ou  inventeur 
de  la  Ivre.  Parmi  les  plus  célèbres  figures  de  Mercure,  il 
faut  citer  celle  qu'où  nomme  improprement  rAntinoQs 
du  Belvédère,  et  le  bronze  découvert  à  Hercalanum.  Un 
Mercure  colossal  fut  exécuté,  sous  le  règne  de  Néron , 
par  le  Grec  Zénodore  pour  la  cité  des  Arvemes  dans  la 
Gaule.  B. 

VERCOUB  DB  PBATfCE,  MERCIJBB  GALANT.  F.  JODSNAL,  dsns 

notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  (VHistoire. 

MERCURIALE,  nom  qu'on  donna  d'abord  dans  les 
écoles  aux  réunions  du  mercredi  {Mercurii  dies^  Jour  de 
Mercure),  dans  lesquelles  les  notes  de  la  semaine  étaient 
tues  aux  élères;  on  l'appliqua  aussi  aux  allocutions  où 
l'on  distribuait  à  chacun  l'éloge  ou  le  bUune.  Le  mot 
passa  ensuite  au  Barreau  (  V,  Mercdriales,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire).  On  s'en  servit 
enfin  pour  désigner  des  assemblées  de  gens  de  lettres, 
tenues  le  mercredi  chez  quelque  savant:  il  y  avait,  par 
eiemple,  des  mercuriales  chez  Ménage.  —  Aujourd'hui , 
le  nom  de  Mercuriale  n'est  plus  donné  qu'aux  prix-cou- 
lants  des  grains  et  farines,  fixés  par  l'autorité  municipale 
à  l'issue  de  chaque  marché,  pour  servir  de  base  à  la  taxe 
du  pain ,  ainsi  qu'à  l'importation  et  à  l'exportation  des 
Rrains  et  farines.  Cet  usage,  qui  date  de  16G7,  n'existe 
qu'en  France. 

HÈRE.  La  loi  a  déterminé  les  droits  de  la  mère  sur 
Ks  enfants.  Dans  l'état  de  mariage,  ces  droits  se  con- 
fondent avec  ceux  du  père.  Après  la  mort  naturelle  ou 
civile  de  celui-ci,  et  pendant  le  temps  de  sa  disparition, 
la  mère  a  la  surveillance  des  enfants,  le  soin  de  leur  édu- 
cation ,  l'administration  et  la  jouissance  de  leurs  biens 
iusqu'à  ce  qu'ils  aient  atteint  l'&ge  de  18  ans;  elle  a  le 
droit  de  tutelle  sur  les  mineurs  et  le  droit  de  les  éman- 
ciper; elle  peut  s'opposer  à  leur  mariage  {Code  NapoL, 
art.  141, 173,  384,  390,  477  ).  B. 

MÉREAUX,  jetons  de  présence  distribués  jadis  aux 
dianoines  pour  récompenser  leur  exactitude  à  l'office,  aux 
maires  des  villes  pour  honorer  leur  présence  au  pouvoir, 
et  aox  ouvriers  comme  des  bons  remboursables  plus  tard. 
On  les  faisait  ordinairement  en  cuivre  ;  il  en  existe  ce- 
pendant quelque»-ans  en  argent.  Les  plus  anciens  datent 


de  Philippe  VI ,  et  Ton  s'en  servait  encore  en  17S0.  Les 
types  des  méreaux  sont  très-variables  :  tantôt  ce  sont  des 
copies  des  espèces  courantes,  tantôt  ils  portent  des  figures 
et  des  légendes  particulières.  K.  Rouyer,  Notes  pour  ser^ 
vir  à  Ntude  des  méreaux,  dans  la  Revue  de  Numisma» 
tique  de  1849. 

MBRËLLE.  V.  MAnELLB. 

MÉRIDIEN,  nom  donné  à  tous  les  grands  cercles  verti- 
caux de  la  sphère,  c-à-d.  qui  passent  par  les  de^x  pôles, 
et  qui  servent,  concurremment  avec  l'équateur  et  les  pa- 
rallèles, à  fixer  la  position  des  lieux  par  la  détermination 
de  leur  longitude,  c-à-d.  de  leur  distance  à  un  premter 
méridien.  Tous  les  méridiens  étant  de  grands  cercles,  la 
forme  du  globe  terrestre  ne  fournit  aucun  motif  pour  en 
choisir  un  préférablement  à  tout  autre,  comme  on  fait 
pour  l'équateur,  le  seul  cercle  que  l'on  puisse  tracer  à 
égale  distance  des  deux  pôles  :  le  premier  méridien ,  au- 
quel se  rapportent  tous  les  autres,  est  donc  arbitraire. 
Ptolémée  a  placé  le  sien  aux  lies  Fortunées  (Canaries), 
parce  que  c'était  la  limite  la  plus  occidentale  des  pays 
alors  connus;  les  Hollandais,  au  pic  de  TénériflTe,  l'une 
de  ces  lies;  Mercator,  géographe  du  xvi*  siècle,  à  l'Ile 
Corvo,  l'une  des  Açores,  parce  (fue  de  son  temps  c'était 
la  ligne  sur  laquelle  l'aiguille  aimantée  n'éprouvait  au- 
cune variation  ;  les  Portugais,  à  Tercère,  une  autre  des 
Açores;  les  Espagnols,  à  Tolède.  Louis  XUl,  en  1634,  or- 
donna que  l'on  se  servirait  en  France,  comme  premier 
méridien,  de  celui  qui  passe  par  l'Ile  de  Fer,  la  plus  occi- 
dentale des  Canaries,  et  le  géographe  Guill.  Delisle  fixa 
la  longitude  de  Paris  à  20  degrés  à  "*£.  de  ce  méridien. 
Depuis,  des  observations  plus  exactes  ont  fait  connaître 
que  la  différence  de  longitude  entre  Paris  et  le  bourg 
principal  de  l'Ile  de  Fer  était  de  30'*5'50";  il  fallut  donc  avan- 
cer le  premier  méridien  de  5'50"  à  l'orient  de  ce  point  ;  en 
sorte  qu'il  n'est  plus  aujourd'hui  qu'un  cercle  de  conven- 
tion ,  qui  ne  passe  par  aucun  lieu  remarquable.  Depuis 
cette  époque,  des  observatoires  ayant  été  établis  dans  les 
capitales  des  principaux  États,  les  géographes  des  grandes 
nations  maritimes  ou  savantes  ont  adopté  chacun  le  mé- 
ridien qui  passe  par  son  observatoire.  Aujourd'hui  Icj 
méridiens  les  plus  employés  sont  au  nombre  de  cinq  : 
1*  en  France,  celui  de  Paris;  2<^  en  Angleterre,  celui  de 
Greenwich,  près  de  Londres,  à  2<>20'O.  de  Paris;  3"  aux 
États-Unis  d'Amérique,  celui  qui  passe  par  le  Capitule  de 
Washington,  à  79*22'24"0.  de  Pans  ;  4"  en  Russie,  celui  de 
l'observatoire  de  Poulkowa,  à  St-Pétersbourg,  à  27«57'58" 
E.  de  Paris;  5*  le  méridien  rectifié  de  l'Ile  de  Fer,  em«- 
ployé  concurremment  avec  celui  de  Paris  par  les  Alle- 
mands, qui  n'ont  pu  s'entendre,  à  cause  de  la  division 
politique  de  leur  pays,  pour  placer  leur  méridien  dans 
une  de  leurs  35  capitales.  —  Les  anciens  géographes,  et 
pendant  longtemps  les  modernes,  comptèrent  les  longi- 
tudes en  commençant  par  le  côté  oriental  du  premier  mé- 
ridien, et  en  poursuivant  dans  le  même  sens  sur  toute  la 
circonférence  do  l'équateur.  Jusqu'à  ce  qu'ils  fussent  re- 
venus au  côté  occidental.  De  cette  manière  on  comptait 
i  360  degrés  de  longitude  sur  la  sphère,  et  les  calculs  de 
réduction  que  nécessitait  la  diversité  des  méridiens  se 
bornaient  à  une  opération  unique,  addition  ou  soustrac- 
tion. Ainsi,  S'-Pétersbourg  étant  à  27» 57' 58"  du  méri- 
dien de  Paris,  pour  savoir  à  quelle  distance  il  est  de  celui 
de  Greenwich,  il  suffit  d'ajouter  la  différence  des  deux 
méridiens  anglais  et  français,  2» 20',  et  l'on  obtient 
30' 17' 58";  ou  bien,  Paris  éUnt  à  20»  du  méridien  de 
Vile  de  Fer,  pour  savoir  à  quelle  distance  il  est  du  méri- 
dien hollandais  de  Ténériffe,  situé  un  degré  à  l'E.  du 
précédent,  ou  retranche  1  de  la  longitude  donnée,  et  l'on 
a  19.  Les  calculs  sont  devenus  plus  compliqués,  depuis 

Îiue  les  longitudes  n'embrassent  plus  que  la  demi-circon- 
érence  de  la  sphère,  c-à-d.  180^  de  chaque  côté,  et  que 
le  globe  est  partagé  en  deux  hémisphères  par  rapport  au 
premier  méndien  ;  dans  l'hémisphère  situé  à  l'ouest,  sont 
les  longitudes  occidentales;  dans  l'autre,  les  longitudes 
orientales.  Toutes  les  cartes  sont  aujourd'hui  graduées 
d'après  ce  système.  Pour  les  réductions,  il  faut  bien  ob- 
server de  quel  côté  le  méridien  auquel  on  veut  rapporter 
les  longitudes  est  placé  par  rapport  à  l'autre,  pour  retran- 
cher leur  différence  de  toutes  les  longitudes  de  même 
nom  que  ce  côté,  et  l'i^outer  à  toutes  celles  de  nom  con- 
traire. Ainsi,  le  cap  de  Bonne-Espérance,  étant  à  18^23' 
£.  de  Greenwich ,  n'est  qu'à  16^3'  E.  de  Paris,  parce  que 
le  méridien  de  Paris  est  de  2**  20'  à  l'est  de  celui  de  Green- 
wich ;  au  contraire,  le  cap  Hom,  placé  par  les  Anglais  à 
67*^21'  O.  de  leur  observatoire,  se  trouve  à  69<>41'  O.  du 
nôtre.  Si  les  points  à  réduire  tombent  entre  les  deux  mé- 
ridiens, le  lieu  qui  est  oriental  par  rapport  à  l'un  devient 


MER 


1240 


MER 


occidental  par  rapport  à  l'autre.  Par  exemple,  Douttos  est 
à  i*18'  de  longitude  orientale  de  Greenwich;  en  retran- 
chant cette  longitude  de  la  différence  des  méridiens,  2<> '20', 
il  restera  i<>2'  pour  la  longitude  ocddentaie  de  Donvres 
par  rapport  au  méridien  de  Paris.  —  Les  degrés  de  lon- 
gitude se  comptent  et  se  numérotent  à  chaque  méridien  ; 
mais,  en  réalité,  ils  se  mesurent  sur  retendue  de  l'équa- 
teur  et  des  parallèles,  que  Ton  nomme  pour  cela  cercles 
de  longitude;  et  comme  ceux-ci  deviennent  de  plus  en 
plus  petits  à  mesure  qu'on  s'avance  vers  les  pôles,  les 
degrés  de  longitude  vont  aussi  en  diminuant  vers  ces 
deux  points;  à  l'équateur,  le  degré  de  longitude  compte 
111,277  mètres;  sous  le  parallèle  de  Paris  (48«50'U'% 
73,140  met.;  sous  celui  de  S^-Pétershourg  ^0*56' 31"), 
55,775  met.;  il  est  nul  au  pôle.  G.  P. 

BiÉRlTE,  DÉMÉRITE.  L'homme  est  libre  et  intelli- 
gent; par  suite,  la  loi  du  devoir  l'oblige  à  faire  le  bien  et 
à  éviter  le  mal.  Lorsqu'il  obéit  à  cette  loi,  il  conçoit  qu'il 
a  mérité^  et  qu'il  a  démérité  dans  le  cas  contraire.  A  côté 
de  la  preiriière  loi ,  il  en  conçoit  donc  une  seconde,  qui 
est  celle  du  mérite  et  du  démerile.  Celle-ci  a  toute  l'uni- 
versalité de  la  première.  A  la  vue  de  l'homme  de  bien  se 
résignant,  au  nom  du  devoir,  à  supporter  le  malheur 
pour  rester  pur,  il  n'est  personne  qui  ne  déclare  qu'il  est 
digne  d'une  récompense  proportionnée  à  son  mérite;  on 
appelle,  au  contraire,  sur  le  coupable  le  châtiment  qu'il 
a  mérité»  Cette  loi  est  donnée  par  la  raison,  car  elle  parle 
pour  l'avenir  surtout,  et  l'expérience  n'atteint  que  le  pré- 
sent. Il  en  résulte  que  la  loi  du  mérite  est  le  complément 
nécessaire  de  celle  du  devoir,  et  qu'elle  en  est  insépa- 
rable ;  mais  le  devoir  et  le  mérite  diffèrent  en  ce  que  le 
premier  n'a  pas  de  degrés  et  qu'il  j  en  a  dans  le  second, 
attendu  qu'il  est  plus  ou  moins  difficile  d'accomplir  son 
devoir.  Cette  différence  nous  montre  la  justice  de  Dieu, 
qui  récompense  chacun  selon  son  mérite ,  et  qui  punit 
chacun  selon  ses  fautes.  La  loi  humaine  est  déjà  l'appli- 
cation de  ce  principe  de  Justice.  Aussi  la  loi  du  mérite 
et  du  démérite  a  pour  conséquence  de  donner  une  sanc- 
tion à  la  Morale.  Une  fois  son  devoir  accompli,  l'homme 
a  droit  au  bonheur  dâ  à  la  vertu  ;  Thomme  de  bien  est 
un  créancier  de  la  Justice  divine,  de  même  que  le  cou- 
pable est  son  débiteur;  et,  soit  en  ce  monde,  soit  dans 
l'autre,  la  Morale  est  satisfaite.  De  tout  temps  l'humanité 
a  rapporté  à  Dieu  la  dispensation  de  la  justice.       R. 

MëRLETTE,  terme  de  Blason.  V.  Canetti. 

MERLIN  (Le  roman  de),  2*  partie  de  la  légende  du 
Saint  Graal  ou  de  la  Table  Ronde  {V,  Graal).  Trois  cents 
ans  se  sont  écoulés  depuis  que  le  graal  a  été  apporté  en 
Grande-Bretagne;  nul  ne  sait  ce  qu'il  est  devenu,  et  le 
sojivenir  en  est  presque  effacé  parmi  les  hommes.  Alors 
naquit  l'enchanteur  Merlin ,  fils  du  démon  et  d'une  re- 
cluse abusée.  Son  père,  qui  le  destinait  à  ruiner  sur  la 
terre  l'œuvre  de  la  rédemption,  lui  a  donné  son  pouvoir 
surnaturel,  la  connaissance  des  choses  cachées  ;  mais,  sa 
mère  l'ayant  fait  baptiser,  il  a  reçu  de  Dieu,  pour  com- 
penser les  dons  de  Satan ,  la  science  des  choses  futures, 
que  ce  dernier  ne  possède  pas.  Merlin  est  donc  un  être 
mixte,  partagé  entre  deux  influences,  entre  le  Ciel  et  l'En- 
fer, et  qui,  tout  en  favorisant  l'accomplissement  des  des- 
seins providentiels,  montrera  beaucoup  de  complaisance 
pour  les  passions  des  hommes.  Le  roman  de  Merlin  nous 
transporte  au  royaume  des  Bretons  Logriens,  sous  les 
règnes  successif  de  Wortigern,  d'Dter  et  d'Arthur.  Il 
nous  retrace  la  naissance  de  ce  dernier  (V,  Arthub  — 
Légende  d'),  les  aventures  de  sa  jeunesse,  ses  courses 
errantes,  son  mariage  avec  Genièvre,  et  toujours  Merlin 
apparaît  sous  diverses  formes  dans  les  moments  critiques, 
pour  veiller  sur  son  protégé  et  lui  aplanir  les  voies.  Puis, 
Merlin  conseille  au  roi  Uter  d'établir  la  Table  Ronde, 
figure  de  l'ordre  de  la  chevalerie  :  tous  ceux  qui  pren- 
dront place  à  cette  table  s'engageront  à  consacrer  leur  vie 
à  la  recherche,  à  la  conquête  du  saint  graal;  ils  auront 
plus  tard  un  chef  suprême,  chevalier  accompli ,  élu  de 
Dieu,  plus  proche  des  anges  que  des  hommes,  une  sorto 
de  vicaire  du  Christ,  pour  lequel  on  conserve  un  siège 
plus  élevé  que  les  autres.  Après  avoir  inspiré  l'institution 
de  la  Table  Ronde,  Merlin  se  retire  au  fond  des  bois,  où 
il  s'éprend  d'amour  pour  la  fée  Viviane,  qu'il  instruit 
dans  les  secrets  de  la  magie.  Un  four  qu'ils  sont  ensemble 
dans  la  forêt  de  Brocéliande,  Viviane  veut  savoir  comment 
on  peut  emprisonner  un  homme  sans  murailles,  sans  l^ois 
ni  fer,  sans  liens  d'aucune  sorte.  A  peine  a-t-elle  appris 
le  moyen  de  construire  cette  prison  magique,  qu'elle  s'en 
sert  contre  Merlin  lui-même,  pendant  qu'il  se  livre  au 
sommeil.  Depuis  ce  moment,  nul  n'a  plus  vu  l'enchan- 
tenr  t  an  leal  dM  chevaliers  d'Arthur,  Gauvain,  passant 


dans  la  forêt  de  Brocéliande,  entendit  la  voix  dn  captif  le 
charger  d'aller  raconter  au  roi  ce  qu'il  était  devenu.  — 
Le  roman  de  Merlin,  écrit  en  un  français  iemarquabie 
par  sa  simplicité,  est  attribué  à  Robert  ae  Borron.  On 
voit  dans  la  forêt  de  Paimpont  (ancieuuu  Brocéliande) 
un  cromlech  qui  n'est  autre  chose ,  selon  la  tradition 
que  le  cercle  magique  où  Merlin  fut  retenu  prisonnier.  '/. 
Fréd.  de  Schlegel,  Histoire  de  Venchanteur  Merlin,  Leip- 
zig, 1804  ;  Hersart  de  La  Villemarqué,  Contes  popidairn 
des  anciens  Bretons,  Paris,  1842. 

Ml!)RLINE,  orgue  mécanique  qui  sert  à  siffler  les  merles. 
Il  est  plus  fort  que  la  serinette. 

MERLON,  partie  pleine  d'une  muraille  entre  deux  cré- 
neaux, ou  d'un  épaulement  de  batterie  entre  deux  em- 
brasures. 

MËRULA,  ancien  jeu  d'orgue,  le  môme  que  VAmci- 
nium  {V.  ce  mot). 

MERVEILLES  DU  MONDE  (Les  sept).  l^'S^^2^^i\ 
MERVEILLEUSES  (Les).  \    ^/f^ï 

MERVEILLEUX,  mot  qui  s'applique,  en  Littérature, 
aux  incidents  surnaturels  dont  l'imagination  des  poètes 
entremêle  les  événements  ordinaires  de  la  vie.  Dans  les 
poèmes  épiques  de  l'antiquité,  les  rapports  perpétuels 
des  dieux  avec  les  hommes  ;  au  moyen  ftçe,  les  scènes 
magiques  qui  remplissent  les  épopées  italiennes;  enfin, 
dans  les  épopées  modernes,  les  luttes  de  l'Enfer  avec  le 
Ciel,  sont  autant  de  formes  distinctes  du  merveilleux.  La 
place  du  merveilleux,  sauf  de  très-rares  exceptions,  n'est 
ni  dans  la  poésie  légère,  ni  même  dans  l'ode,  où  les  dieux 
ne  seraient  que  des  fictions  mythologiques,  des  abstrac- 
tions personnifiées  et  décorées 'd'attributs  de  convention; 
elle  est  dans  la  poésie  dramatique,  et  surtout  dans  Tépo- 
pée,  où  la  présence  des  dieux  mêle  en  quelque  sorte  1» 
ciel  à  la  terre,  et  donne  à  ces  deux  poèmes  une  gran- 
deur et  un  éclat  parfois  incomparables.  Nous  oublions 
volontairement  ici  la  poésie  comique,  où  la  fantaisie  d'un 
Aristophane,  dépassant  toutes  les  bornes  de  la  licence,  a 
bafoué  les  Immortels,  Hercule  et  Bacchus  surtout,  dans 
des  scènes  du  burlesque  le  plus  délirant. 

Mj^térieux  et  terrible  comme  les  légendes  de  la  vieille 
religion  grecque,  le  merveilleux  d'Eschyle,  plus  propre 
peut^^tre  à  étonner  l'imagination  qu'à  émouvoir  les  âmes, 
nous  jette  dans  un  monde  étranger  au  nôtre  et  presque 
fantastique.  Témoin  cette  pièce  étrange  du  Prométhée  dont 
la  critique  discute  encore  le  sens  aujourd'hui,  ou  encore 
la  ronde  infernale  qu'autour  d'Oreste  parricide  dansent 
et  chantent  les  Furies,  vengeresses  de  Clytemnestre.  -  • 
Sophocle,  rapprochant  l'Olympe  de  la  terre,  et  faisant  de 
ses  dieux  des  êtres  qui  ne  demeurent  plus,  comme  les 
personnages  mythologiaues  de  son  devancier,  en  dehors 
de  rhumanité,  leur  a  donné  un  rôle  plus  moral  et  plus 
humain  :  tel  est  le  double  caractère  de  l'exposition  de 
VAiax,  où  Minerve,  après  avoir  frappé  d'une  folie  lou- 
daine  le  héros,  prend  plaisir  à  provoquer  ses  saillies  in- 
sensées, ses  menaces  de  mort  contre  Ulysse  qui  l'entend, 
et  qui,  sans  songer  au  péril  dont  l'a  sauvé  la  démence 
de  son  ennemi  mortel,  ne  trouve  plus  que  des  paroles  de 
pitié  pour  la  faiblesse  humaine.  —  Euripide  a  gâté  ce 
dont  ses  prédécesseurs  avaient  tiré  de  si  dramatiques  ef- 
fets; son  merveilleux,  quelquefois  plein  de  grftce  et  d'ori* 
ginalité  pathétique,  comme  le  dernier  entretien  de  Diane 
avec  Hippolyte,  n'est  plus,  en  général,  qu'un  merveiileui 
dégénéré  ;  sorte  d'expédient  propre  à  tirer  le  poète  d'em- 
barras quand  il  a  tout  dit  et  qu'il  ne  sait  comment  quitter 
la  scène.  —  Les  conditions  du  théâtre  moderne  semblent 
rendre  difficile  aux  auteurs  dramatiques  l'emploi  du  mer- 
veilleux. L'esprit  du  temps  expliquerait  assurément  les 
sorcières  et  les  fantômes  do  Shakspearc;  mais  n'y  aurait- 
il  pas  à  faire  des  réserves  sur  le  Méphistophélès  de  Gœthe, 
quelles  que  soient  d'ailleurs  les  beautés  de  son  singulier 
drame? 

Plus  essentiel  encore  à  l'épopée,  car  il  la  soustrait  an 
péril  de  n'être  qu'un  genre  faux  d'histoire  mensongers 
et  fastidieuse,  le  merveilleux  a  partagé  les  destinées  di 
la  poésie  épique.  Chez  les  Anciens,  il  est  presoue  exclu- 
sivement mythologique.  Depuis  Homère  jusqu'à  Quintus 
de  Smyme,  depuis  Virgile  jusqu'à  Staoe,  et  même  Jus- 
qu'à Claudien,  la  mythologie,  transformée  selon  le  ca- 
ractère particulier  des  époques  et  le  caprice  du  poète, 
tantôt  seule,  tantôt  mêlée  .de  nécromancie,  comme  dans 
Lucain,  constitue  le  merveilleux  de  toute  épopée  grecque 
et  romaine.  Seulement,  il  convient  de  signaler  entre  Ho- 
mère et  ses  imitateurs  une  différence  radicale  :  les  as 
semblées,  les  querelles  des  dieux ,  leurs  apparitions  sui 
la  terre,  ne  sont,  pour  ce»  derniers  et  pour  leurs  leoteurs 


MKS 


12«1 


MBS 


qii*o04  machine  épique;  ils  se  permettent  ces  fictions  au 
nom  des  droits  qu'on  est  convenu  de  reconnaître  à  ce 
genre  de  poésie,  et  n*ont  d'autre  prétention  que  de  re- 
lever ainsi,  par  remploi  du  surnaturel,  les  différents 
épisodes  de  leur  œuvre.  Homère  ignore  quels  privilèges 
lui  donne  ou  lui  refuse  l'épopée  :  ce  qu'il  chante,  il  le 
rroit;  la  foi  naïve  des  ftges  antiques  et  la  candeur  du 
poôte  convertissent  ses  fictions  en  réalité,  et  c'est  le  mé- 
rite et  la  profonde  originalité  du  mervdlleux  homérique 
quo  de  n'être  pas,  pour  ainsi  dire,  merveilleux. 

I^  moyen  âge  et  la  Renaissance,  les  croyances  reli- 
irieuseset  le  culte  passionné  des  lettres  païennes,  prodni- 
sireot  un  mélange  bizarre  de  la  Fable  avec  les  ficiiuns 
dont  la  religion  chrétienne  était  la  source.  Dante  passa 
PAchéron  pour  aborder  son  Enfer,  et  le  Léthé  avant  de 
monter  au  Ciel  ;  le  Tasse  nomma  Pluton  dans  sa  Jérusa- 
lem: Gamoëns  alla  Jusqu'à  rendre  les  Néréides  amou- 
reuiesdes  Portugais,  Jusqu'à  Jeter  Amphitrite  dans  les 
bras  de  Vasco  de  Gama;  le  lendemain,  il  est  vrai,  Am- 
phitrite explique  au  héros  qu'elle  n'existe,  elle,  les  Né- 
réides, et  tous  les  dieux  de  TOlympe,  gue  dans  l'imagi- 
nidoii  des  poètes.  Ep  même  temnt,  le  renom  dont  la 
superstition  populaire  honorait  alors  les  astrologues  et 
les  magiciens  mspirait  au  Tasse  les  célèbres  épisodes 
des  Jardins  d'Armide  et  de  la  forêt  enchantée;  oe  sorte 
que  le  merveilleux  participait  à  la  fois  du  paganisme,  du 
christianisme  et  de  la  sorcellerie.  —  Dans  les  temps  mo- 
dernes, l'élément  chrétien  a  fait  disparaître  ou,  du  moins, 
I  éclipsé  la  mythologie.  Milton  conserve  encore  aux  fleuves 
infernaux  leurs  dénominations  grecques;  mais  la  Fable 
n'a  point  obtenu  place  dans  les  épopées  suivantes,  et 
Desmarets  de  Saînt-Sorlin,  Chapelain,  Voltaire,  Klop- 
stock  et  Chateaubriand  ne  lui  ont  rien  emprunté,  sinon 
peut-être  quelques  allégories.  Cette  transformation  pro- 
voqua, dès  le  XVII*  siècle,  une  discussion  qui  s'est  pro- 
longée Jusqu'à  nos  Jours.  Bolleau,  qui  ne  connaissait  pas 
le  Satan  de  Blilton,  enseigna  que  fa  religion  chrétienne 
ne  devait  ni  ne  pouvfdt  être  substituée,  dans  le  pofime 
épique,  à  la  mythologie;  Marmontel,  le  cardinal  ne  Po- 
lignac  et  M.  de  Fontanes,  pour  des  raisons  analogues,  em- 
pruntées à  la  nature  du  christianisme,  soutinrent  la  même 
thèse.  Desmarets  répondit  à  Boileau  ce  que  Chateaubriand 
répliqua  plus  tard  à  de  Fontanes  :  que  le  christianisme 
est  la  religion  qui  se  prête  le  plus  à  la  poésie,  et,  pour  le 
démontrer.  Tua  composa  Clovit,  et  l'autre  les  Martyrs. 
n  est  permis  de  croire,  en  dépit  de  l'argumentation  spé- 
cieuse des  deux  auteurs  et  de  leurs  poèmes,  qu'ils  avaient 
contre  eux  la  vérité  :  le  Paradis  perdu  est  une  de  ces 
rares  exceptions  par  lesquelles  le  génie  semble  vouloir 
prouver  à  la  critique  la  plus  sage  qu'il  est  au-dessus  de 
ses  règles  et  de  ses  lois.  Les  deux  partis  ne  discutaient 
Que  du  merveilleux  qui  convient  le  mieux  à  la  poésie 
qiioue;  il  nous  faut  craindre,  ai^ourd'hui,  que  1  esprit 
moderne,  c.-à-d.  l'esprit  d^examen,  le  goût  de  la  critique 
historique,  et  le  créait  toujours  croissant  des  sciences^ 
n'ait  à  jamais  tué  l'un  et  l'autre.  A.  H. 

MÉSAIL.  V.  Mbail. 

MESAULON,  nom  donné  par  les  anciens  Grecs  à  une 
cour  ménagée  entre  plusieurs  corps  de  bâtiment ,  pour 
donner  des  Jours  et  des  dégagements  aux  intérieurs. 

MESCAL,  instrument  de  musique  des  Turcs,  sorte  de 
flûte  de  Pan,  à  23  tuyaux,  qui  donnent  trois  sons  difiTé- 
lents  selon  la  manière  de  les  insuffler. 

MÉSOCHORES.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictumnasre  de 
Biographie  et  ^Histoire. 

UESODUS,  terme  de  l'ancienne  Musique,  s'appliquant 
aux  chanteurs  des  parties  intermédiaires  entre  le  dessus 
et  la  basse.  Le  mesodus  actUior  était  le  contralto ,  et  le 
mesodus  gravior  le  lénor. 

MÉSO-<>OTinQDË,  nom  donné  quelquefois  à  la  langue 
des  Gotha,  parce  que  ce  peuple  se  fixa  au  ni*  siècle  dans 
la  Mésie.  K.  Allemande  (Langue). 

>1ESS,  table  militaire  des  officiers.  Le  mot  a  été  pris 
de  l'andais,  à  l'époque  de  la  guerre  de  Crimée,  en  1854, 
et  du  siège  de  Sébastopol  par  une  armée  franco-anglaise. 
MESSAGE  (du  latin  missio,  envoi),  en  Politique,  toute 
'ommunication  officielle  adressée  par  le  pouvoir  exécutif 
tu  pouvoir  législatif,  ou  par  l'une  des  deux  chambres  à 
faatre.  Le  terme,  en  usage  particulièrement  aux  États- 
Cnis,  a  été  adopté  en  ÏVance  depuis  1848. 

MESSAGERS,  MESSAGERIE.  Ce  furent  les  Universités 
ifui,  les  premières,  firent  usage  des  messagers.  A  une 
époque  où  il  n'y  avait  aucun  commerce  réeulier,  aucune 
correspondance  suivie  entre  la  France  et  les  autres  na- 
tions, ni  même  entre  les  provinces  de  la  France,  elles 
^blU^ent  un  service  de  messagers,  qui,  avec  de  lourdes 


charrettes  où  l'on  plaçait  à  la  fois  les  hommes  et  les  ha» 
gagea,  allaient  chercher  les  Jeunes  étudiants  et  les  rame- 
naient à  leurs  familles.  En  considération  des  services  qua 
rendaient  ces  messagers,  le  gouvernement  leur  accorda 
divers  privilèges.  Philippe  le  Bel,  par  lettres  du  27  février 
1297,  enjoignit  à  ses  officiers  de  Justice  et  autres  de  les 
défendre  contre  toutes  injures  et  violences,  et  d'autres 
lettres  de  Louis  X,  en  date  du  2  Juillet  1315,  déclarèrent 
qu'ils  devaient  être  libres  de  vaquer  à  leurs  fonctions 
sans  aucon  empêchement.  A  cause  des  droits  et  des  fa- 
veurs nui  s'y  trouvaient  attachés,  le  titre  de  messager 
d'une  Ij  niversité  fut  recherché  avidement  :  au  xv*  siècle, 
des  bourgeois  importants,  qui  ne  firent  aucun  service  de 
transports,  mais  qui  se  bornèrent  à  fournir  de  l'argent 
aux  écoliers  et  à  remplacer  près  d'eux  leurs  familles,  ob- 
tinrent le  titre  de  grands  messagers,  ^ui  les  exemptait 
des  droits  d'entrée  sur  le  vin,  du  service  du  guet,  de  la 
garde  des  J^rtes,  et  autres  servitudes.  Les  autres  bour- 
geois d  Paris,  dont  on  augmentait  les  charges,  récla- 
mèrent, et,  en  1478,  le  nombre  des  messagers  fut  sensi- 
blement diminué  i  ceux  oue  f  on  conserva  formèrent, 
dans  l'église  des  Mathurins,  une  confrérie  sous  le  pa- 
tronage de  U  S^*  Vierge  et  de  Charlemagne.  En  1488, 
Charles  VIII  décida  qu'il  n'y  aurait  plus  quuin  seul  grand 
messager  pour  chaque  diocèse  de  France,  et  un  pour 
chaque  diocèse  étranger  dont  il  se  trouverait  des  éco- 
liers étudiant  en  l'Université.  Les  grands  messagers,  qui 
n'avaient  nul  besoin  de  voyager,  se  faisaient  recevoir  à 
la  Cour  des  aides;  les  petits  messagers,  toujours  chargés 
des  transports,  faisaient  enregistrer  leurs  provisions  au 
Ch&telet  et  quelquefois  au  Parlement. 

A  l'exemple  des  Universités,  la  Cour  des  comptes  eut 
18  messagers,  ayant  pour  mission  de  porter  et  de  tran^ 
mettre  les  rôles,  mandements  et  commissions  qui  éma- 
naient d'elle  :  un  édit  du  12  mars  1514  donna  à  ces 
messagers  le  droit  de  faire  les  exploits,  et,  vers  1540,  ils 
prirent  le  nom  d'huissiers.  —  Les  Parlements  eurent 
également  leurs  messagers  jurés^  pour  porter  les  sacs  des 
procès. 

Les  particuliers  songèrent  naturellement  à  employer 
les  messagers  des  Universités,  à  leur  confier  des  lettres 
et  des  paquets,  au  lieu  d'attendre  comme  autrefois  le 
départ  ou  le  passage  de  ({uelque  marchand.  Puis  on  ima- 
gina de  créer  des  services  réguliers  de  transports.  Des 
lettres  patentes  de  Henri  III,  en  date  du  10  octobre  1575, 
concédèrent  le  premier  privilège  pour  la  conduite  des 
coches,  dont  il  y  eut  deux  aortes  t  les  coches  d'eau,  qui 
devaient  toqjours  conserver  ce  nom,  et  les  coches  de 
terre,  qu'on  désigna  ensuite  par  les  noms  i^nériques  de 
carrosses,  de  voitures,  ou  par  les  noms  spécîflaues  de  di- 
ligences,  de  messageries.  En  novembre  1576,  un  édit 
créa,  pour  le  transport  des  bagages  et  des  personnes,  des 
messagers  royaux,  auxquela  furent  accordés  les  mêmes 
privilèges  qu'aux  messagers  de  l'Université.  Les  pre- 
mières lignes  établies  mreni  celles  de  Paris  à  Orléans, 
Rouen,  Troyes,  Amiens  et  Beauvais  ;  elfes  étaient  si  mal 
clesservies,  que,  pour  exercer  une  surveillance,  Henri  IV 
créa,  en  avril  15v4,  un  commissaire  général  et  surinten^- 
dant  des  coches  ^  carrosses  publies  :  le  Parlement,  en 
enregistrant  l'édit  de  cette  création,  fixa  le  prix  des 
places,  et  exigea  que  le  commissaire  fit  deux  fois  par 
mois  un  rapport  à  la  police  sur  les  abus  qui  auraient  été 
commis.  Un  arrêt  du  Conseil,  du  13  avril  1601,  établit  les 
coches  de  Ch&Ions,  de  Vitiy  et  de  Ch&teau-Thierry.  Le 
22  iuillet  1610,  la  régente  Marie  de  Médicis  révoqua 
l'édit  de  1576,  et,  en  mars  1613,  une  dame  De  Fontaine  fut 
reconnue  propriétaire  des  coches  de  Firance  :  mais  les 
messagers  royaux  furent  rétablis  par  un  édit  du  mois  de 
février  1620.  En  août  1634,  Louis  xm  créa  en  titre  d'of- 
fice héréditaire  trois  conseillers,  intendants  et  contré- 
leurs  généraux  des  messagers,  voituriers  et  routiers  du 
royaume.  En  1641,  l'Université  de  Paris  afferma  ses  mes- 
sageries particulières,  et  consacra  le  produit  à  l'entretien 
de  la  Faculté  des  Arta.  En  1644,  les  prêtres  de  la  congré- 
gation de  la  Mission  obtinrent  le  privilège  d'établir  des 
coches  et  carrosses  de  Paris  à  Rennes,  en  desservant 
toutes  les  villes  placées  sur  la  route,  et  retendirent 
ensuite  à  toutes  les  parties  de  )a  Bretagne.  En  1052, 
Louis  XIV  accorda  à  sa  nourrice  Perrette  Dufour  un  pri- 
vilège semblable  pour  Nancy  et  pour  Strasbourg. 

Les  services  de  transports  se  multipliaient,  mais  sans 
améliorations  bien  sensibles.  La  lenteur  dea  coches  était 
proverbiale  :  en  1761,  la  voiture  qui  faisait  le  service 
public  de  Paris  à  Strasbourg  n'arrivait  que  le  7*  jour  à 
Bar<-Ie-Duc,  le  8*  à  Nancy,  et  le  12*  à  Strasbourg.  Turgot 
réunit  toutes  les  entreprises  particulières  de  messageries. 


MES 


1242 


MES 


pour  former,  sont  la  direction  de  TÉtat,  une  entreprise 
générale;  le  nom  de  turgoUnes  fut  alors  donné  aux  voi- 
tures publiques.  La  loi  du  9  vendémiaire  an  vi  (30  sr.pt. 
1 797  )  supprima  ce  monopole  de  l'État  :  des  entreprises 
privées  purent  se  former,  toutefois  avec  l'autorisation  du 
gouvernement,  et  sous  condition  de  payer  au  Trésor  un 
dixième  du  prix  des  places.  La  Compagnie  dês  message^ 
ries  impériales  (plus  tard  royales)  se  fomia  en  1805,  et 
eut  le  monopole  des  transports  publics  jusgu'en  1826, 
époque  où  furent  établies  les  Messageries  natioruUes.  Les 
entreprises  de  messagerie  ont  vu  décroître  rapidement 
leur  importance,  la  plupart  même  des  plus  considérables 
ont  cessé  leur  service,  depuis  rétablissement  des  chemins 
de  fer,  aui  leur  enlèvent  chaque  année  de  nouvelles 
lignes.  K.  Voitures  publiques.  B. 

MESSE,  nom  donné,  dans  TÉglise  catholique,  au  sa- 
crifice mystique  offert  à  Dieu  par  le  prêtre,  sous  les  ap- 
parences du  pain  et  du  vin,  en  mémoire  de  la  derni^ 
Cène  et  de  la  mort  de  J.-G.  Dans  les  premiers  siècles,  le 
sacrifice  de  Tautel  s'appelait  la  liturgie,  c-à-d.  l'œuvre 
publique,  Toeuvre  du  culte  par  excellence,  nom  que  TÉglise 
orientale  a  toujours  conservé.  Le  mot  messe^  qu'on  voit 
employé  au  iv«  siècle,  vient  du  latin  missa,  forme  ancienne 
de  missio  (renvoi),  parce  qu'avant  Toblation  du  pain  et  du 
vin,  on  faisait  sortir  les  catéchumènes  et  les  pénitents. 
De  là  l'antique  division  de  la  messe  en  deux  parties,  dites 
messe  des  catéchumènes  et  messe  des  fidèles.  La  messe 
consiste  essentiellement  dans  la  consécration  des  espèces, 
et  dans  la  distribution  du  corps  et  du  sang  de  J.-C.  aux 
fidèles  :  les  prières  et  cérémonies  qui  les  précèdent  ont 
été  établies  pour  la  préparation  du  sacrifice  ;  celles  qui 
les  suivent,  pour  l'action  de  grinces.  Pour  dire  la  messe,  le 
prêtre  est  revêtu  d'habits  spéciaux,  aui  sont  Vamict, 
Vaube,  la  ceinture^  le  manipule,  Vétole  et  la  chasuble 
{V.  ces  mots).  On  distingue  d'ordinaire  six  parties  dans  la 
messe  :  1<*  la  Préparation,  composée  de  l'antienne  /n- 
troibo,  du  psaume  Judica  me,  Deus,  et  du  Confiteor, 
que  le  prêtre  placé  au  bas  de  l'autel  et  les  assistants 
récitent  alternativement,  pais  de  deux  courtes  prières 
récitées  à  voix  basse  par  le  prêtre  à  l'autel  ;  2**  l'/nstruo 
tion,  comprenant  Vlntroït,  le  Kyrie  eleison,  le  Gloria  in 
excelsis,  la  Collecte,  VÊpitre,  le  Graduel,  V Alléluia  ou  un 
Trait,  quelquefois  une  Prose,  puis  V  Évangile  (qui  peut 
être  suivi  d'un  Prône)^  et  le  Credo:  3«  VObtalion  du 
pain  et  du  vin,  accompagnée  de  prières,  dont  une  seule, 
VOffertoire,  peut  être  chantée  ;  4°  le  Sacrifice^  qu'inau- 
gurent la  Préface  et  le  Sanctus,  et  dont  les  prières  sont 
dites  Canon  de  la  messe;  c'est  ^e  moment  de  la  Consé- 
cration et  de  l'Élévation  ;  5<>  la  Communion,  qui  com- 
mence par  une  courte  Préface,  le  Pater  et  VAgnus  Dei; 
&*  V Action  de  grâces,  composée  de  deux  courtes  prières, 
appelées  communion  et  post-communion,  et  après  les- 
quelles le  prêtre  congédie  les  fidèles  en  pronon^nt  Vite, 
missa  est.  Il  ajoute,  depuis  quelques  siècles  seulement, 
une  bénédiction,  et  récite  le  commencement  de  l'Évangile 
de  S*  Jean  sur  l'incarnation  du  Verbe.  Le  Canon  et  la 
Communion,  qui  forment  la  messe  proprement  dite,  ont 
des  formules  invariables,  tandis  que  les  autres  parties 
sont  composées  de  prières  qui  vanent  selon  les  solenni- 
tés. S^  Basile  en  Orient,  S'  Ambroise,  puis  le  pape 
S*  Grégoire  en  Occident,  ont  fixé  l'ordinaire  de  la  messe. 

Une  messe  dont  quelques  parties  sont  chantées  est 
dite  grand'messe  ou  messe  haute;  le  prêtre  qui  la  cé- 
lèbre est  ordinairement  assisté  d'un  diacre  et  d'un  sous- 
diacre.  Une  messe  non  chantée  s'appelle  petite  messe  ou 
basse  messe.  Une  Messe  de  liequiem  est  celle  qu'on  dit  h 
l'intention  des  morts,  et  dont  l'introït  commence  par  les 
mots  Requiem  œlernam.  On  appelle  Messe  de  minuit, 
colle  qui  se  célèbre  au  milieu  de  la  nuit  de  Noël;  Messe 
dtis  présanctifiés,  celle  du  Vendredi  Saint,  dans  laquelle 
il  n'y  a  pas  de  consécration;  Messe  sèche,  celle  dans  la- 
qnolle  le  prêtre,  ayant  déjà  communié,  ne  consacre  pas; 
ife^se  conventuelle,  la  grand'messe  où  tous  les  membres 
d'un  chapitre  ou  d'un  monastère  assistent  et  chantent 
ensemble.  Une  Messe  du  S^-Espritest  celle  qu'on  célèbre 
à  Touverture  annuelle  des  tribunaux,  ou  à  la  rentrée  des 
classes  dans  les  lycées  et  les  collèges  :  avant  la  Révolution 
do  17S9,  la  messe  du  S'-Ësprit  au  Parlement  de  Paris  s*ap- 
pclait  Messe  rouge,  parce  que  les  conseillers  y  assistaient 
en  robe  rouge.  Une  Messe  votive  est  celle  d'un  Saint  ou 
d'un  mystère  dont  on  ne  fait  ni  l'office  ni  la  fête,  comme 
celles  de  la  S^*  Vierge  et  du  S*-Esprit.  —  Jadis  on  nom- 
mait Messe  du  scrutin  celle  qui  se  disait  pour  les  caté- 
chumènes le  mercredi  et  le  samedi  de  la  4*  semaine  de 
Carême,  lorsqu'on  examinait  s'ils  étaient  suffisamment 
préparés  au  baptême  s  Messe  du  jugement,  celle  qu^on  cé- 


lébrait pour  un  accusé  qui  voulait  se  justifier  par  les 
preuves  établies. 

Les  luthériens  et  les  calvinistes  n'ont  pas  de  mes^j, 
parce  qu'ils  ne  reconnaissent  pas,  les  premiers  la  trans- 
substantiation, les  seconds  la  présence  réelle. 

En  Musique,  on  appelle  Messe  une  œuvre  écrite  sur 
les  paroles  de  certaines  prières  de  la  messe.  Elle  com- 
prend d'ordinaire  le  Kyrie,  le  Gloria  in  excelsis,  le  Credo, 
le  Sanctus  et  VAgnus;  les  Italiens  se  bornent  quelquefois 
au  Kyrie  et  au  Gloria,  On  ajoute  aussi  parfois  un  0  sain- 
taris  hostia  et  un  Domine  salvum  fac.  Dans  une  Messe  des 
morts,  les  parties  sont  :  Tintrolt  Requiem  œtemam,  s'en- 
chalnant  avec  le  Kyrie;  la  prose  Dies  irœ;  rofTertoire 
Djmine,  Jesu  Christs;  le  Sanctus,  quelquefois  suivi  d'un 
Pie  Jesu;  VAgnus  Dei;  l'antienne  Lux  œterna.  Les  messes 
en  musique  sont  brèves  ou  solennelles  :  dans  le  premier 
cas,  les  paroles  ne  sont  presque  point  répétées,  et  chaque 
morceau  est  de  peu  de  durée;  dans  le  second,  tout  a  un 
développement  considérable.  Les  messes  sont  devenues 
plus  longues  à  mesure  qu'on  a  voulu  rendre  plus  drama- 
tique la  musique  d'église.  F.  Église  (Musique  d').    B. 

MESSÉNIENNES,  titre  que  C.  Delavigne  a  donné  à  un 
recueil  d'élégies  nationales,  sur  les  désastres  de  la  France, 
après  la  guerre  ie  1815,  par  souvenir  des  élégies  que 
composa  le  poète  grec  T^rtée  pendant  les  guerres  de 
Sparte  contre  la  Mœsénle.  Ce  n*était  pas  une  bonne  xdùa 
d'appliquer  un  nom  étranger  à  une  chose  toute  française; 
aussi  l'expression  n'a  été  adoptée  par  personne  pour  des 
ouvrages  de  ce  genre. 

MESSIADE  (La),  ou  plutôt  lb  messie,  poSme  allemand 
en  20  chants,  en  vers  hexamètres,  composé  par  KIop- 
stock,  et  mis  ordinairement  au  nombre  des  épopées.  Le 
sujet  en  est  la  vie  du  Messie,  rédempteur  du  genre  Iiu- 
main,  à  partir  du  moment  où  ses  ennemis  demandent  sa 
mort;  le  dénoûment  est  la  victoire  du  Dieu  de  miséri- 
corde, et  la  réconciliation  de  l'espèce  humaine  avec  son 
créateur.  Bien  que  Klopstock  n'ait  pas  divisé  son  œuvre 
en  deux  parties,  cependant  les  iO  premiers  chants  forment 
un  pofime  complet  qui  finit  à  la  mort  du  divin  Sauveur: 
les  10  derniers,  remplis  par  des  hymnes  qui  se  chantent 
dans  les  cieux,  sont  une  espèce  é^Oratorio,  consacré  à  la 
résurrection  du  Christ.  Le  manque  d'action,  le  défaut  de 
péripétie,  est  le  vice  radical  de  la  Messiade,  et  ce  qui 
empêche  les  bons  critiques  de  la  considérer  comme  une 
épopée.  Ils  reprochent  encore  au  poète  d'avoir  altéré  la 
simplicité  évangéliquc,  et  ipême  le  dogme.  Le  poème  finit 
par  une  ode  d'action  de  grâces  au  Sauveur.  Tout  le  talent 
de  Klopstock,  essentiellement  lyrique  et  descriptif,  brille 
dans  l'exécution.  On  y  remarque  les  portraits  des  douze 
apètres  et  de  leurs  anges  ganiiens  (ch.  3),  et  beaucoup 
de  très-beaux  chants;  les  épisodes  de  l'ange  rebelle  Abdiel- 
Abbadona,  repentant  et  cherchant  à  faire  du  bien  aux 
hommes  (ch.  ^2  et  9)  ;  de  Cidli  et  Sémida,  ressuscites  par 
Jésus,  et  qui  s'aiment  d'une  affection  pure  et  céleste 
(ch.  4  et  15)  ;  de  Porcia,  que  Marie  implore  pour  son  fils 
(ch.  7);  la  mort  de  Marie-Madeleine  (ch.  1^);  la  vision 
d'Adam,  à  qui  le  Messie  découvre  une  partie  du  jugement 
dernier  (ch.  18,  19),  etc.  ~  La  Messiade  parut  en  plu- 
sieurs fois  :  Klopstock  donna  les  trois  premiers  chants  cr. 
1748,  le  4*  et  le  5«  en  1751,  les  5  suivants  en  1755;  puis 
après  un  intervalle  de  13  ans,  il  publia  les  chants  11  à  IT), 
en  1768;  et,  cinq  ans  plus  tard,  en  1773,  les  chants  1t> 
à  20.  Son  poème  eut  un  immense  succès  :  on  n'eu  vit 
que  les  beautés,  et  la  grande  tendance  que  Klopstock 
avouait  hautement,  celle  de  créer  une  poésie  nationale 
allemande.  Ce  but  il  l'atteignit,  et  le  mouvement  qu'il 
imprima  a  survécu  à  son  succès;  car  aujourd'hui  le  Mes- 
sie est  un  poème  que  les  Allemands  admirent  beaucoup 
et  lisent  peu,  à  cause  du  vice  de  la  composition  :  on  nn 
lit  volontiers  des  fragments,  et  peu  à-la  fois,  tant  la  mo- 
notonie de  l'ouvrage  dompte  l'admiration  du  lecteur. 
Néanmoins,  il  est  toujours  compté,  avec  raison,  pann 
les  monuments  de  la  littérature  germanique.  CTcst  co 
poème  qui  a  naturalisé  dans  la  poésie  allemande  le  vr r> 
iiexamètre  qu'on  y  connaissait  à  peine.  M""  de  Carlowiiz 
a  donné  une  traduction  française,  en  prose,  de  la  Mes» 
siade,  Paris,  1859,  gr.  in-18. 

ÎÎpccÎSd                    I  y-  ces  mots  dans  notre  Dn" 

îîrccÎDS*                   >  iionnaire  de  Biographie  et 

MbbbmE.                     (  d*  Histoire 

MESTRE-DE-CAMP.  )  ^«»««'*^«- 

MESURE,  en  Versification,  espace  contenant  un  ou 
plusieurs  temps.  L'étendue  du  temps  est  d'une  fixation 
arbitraire  :  ainsi  ^  '^,  ^  "^  ^,  ^-,  -^,  "^  "',  "  ""  "> 
"  ",  v^  w  w  w  ^  g^ç  ^  forment  autant  de  mesures,  ayant 

les  unes  2  les  autres  3  les  autres  4  temos.  Ces  mesures 


MES 


1243 


MKT 


sont  très-souvent  appelées  pieds  :  c*est  d'elles  que  se  for- 
ment les  vers.  Aiosi  : 

Fliaselai  Ille  qnem  yidetls  hospltei 

forme  un  vers  de  six  mesures  iambiques  (  ^  ~)  ; 
Nesdaque  humanis  preclbus  mansaeacere  corda 

forme  un  vers  de  6  mesures,  dont  la  1>^,  la  3*  et  la  5^ 
soat  dactyliques,  la  2*  et  la  4'  constituent  un  spondée, 
et  la  ti'  un  trochée.  Dans  les  vers  latins  et  dans  les  vers 
;recs,  la  mesure  repose  sur  la  quantité  des  syllabes; 
(kms  les  vers  français,  elle  repose  sur  la  quotité  des  syl- 
labes; dans  les  vers  italiens,  allemands,  anglais,  Taccent 
joue  un  grand  rôle  dans  la  détermination  de  la  mesure. 

V.  Mbtbe,  Pied,  Yebs.  P. 

UESORB,  en  Musique,  division  de  la  durée  en  un  cer- 
taia  nombre  de  parties  égales  qu*on  appelle  temps,  et 
que  Ton  marque  par  des  mouvements  du  pied  ou  de  la 
inain.  Les  mesures  se  séparent  sur  la  portée  par  des  li- 
imes  verticales,  appelé»  barres  {V.  ce  mot).  On  distin- 
gue les  mesures  smiples  et  les  mesures  composées.  Les 
premières  sont  les  mesures  à  4  temps,  à  5  temps,  et  à  2 
temps.  Les  temps  se  divisent  en  forts  et  en  faibles;  les 
forts  sont  frappés ,  et  les  faibles  levés.  La  mesure  à  4 
temps  se  bat  en  frappant  le  !'■'  temps,  portant  la  main  à 
gauche  pour  le  2*,  à  droite  pour  le  3",  et  en  levant  pour 
le  4%  ou,  selon  la  mode  italienne,  en  frappant  les  deux 
premiers  t«mps  et  en  marquant  les  autres  par  un  mou- 
Tement  de  la  main  en  Tair  ;  elle  se  marque  à  la  clef  par 
un  4  ou  par  un  C.  La  mesure  d  2  temps  se  bat  en  frap- 
pant le  \^  temps  et  en  levant  la  main  au  2*;  on  la  maraue 
par  un  1  ou  par  un  C  barré.  La  mesure  d  5  temps  se  nat 
en  frappant  le  i*'  temps,  portant  la  main  adroite  pour  le 
2%  et  levant  pour  le  3*.  L'unité  de  valeur  est  une  ronde 
ou  quatre  nôtres  pour  la  mesure  à  4  temps,  une  blanche 
ou  deux  noires  pour  la  mesure  à  2  temps,  une  blanche 
pointée  ou  trois  noires  pour  la  mesure  à  3  temps.  —  Les 
mesures  composées  ne  sont  que  des  fractions  des  mc^ 
sures  simples.  On  les  exprime  par  deux  chiffres.  La  ronde 
étant  Tunité  comparative  à  laçiuelle  se  rapportent  toutes 
les  divisions,  le  chiffre  supérieur  désigne  le  nombre  de 
notes  que  doit  contenir  chaque  mesure,  ou  leur  équiva- 
^Qt,  et  le  chififre  inférieur  indique  le  nombre  de  ces 
notes  qui  forme  la  durée  d^une  ronde;  ainsi,  Tindication 
2/4  signifie  que  la  mesure  sera  remplie  par  deux  noires  ou 
quarts  de  ronde  ;  G/8,  qu'elle  le  sera  par  six  croches  ou 
Imitièmes  de  ronde.  Les  mesures  composées  qu'on  em- 
ploie le  plus  ordinairement  sont  :  à  4  temps,  12/5  et  12/4  ; 
iî  temps,  2/4,  6/4  et  6/8;  à  3  temps,  3/2,  9/8,  9/4,  3/i 
et  3/8.  —  Toute  mesure  qui  peut  se  partager  en  deux  temps 
égaux  est  dite  6tfui»re  (du  latin  binus,  double)  ;  toute  me- 
^re  qui  se  partage  en  3  temps  égaux  est  dite  ternaire 
(de  temus,  triple).  On  ignore  comment  les  musiciens  ont 
été  conduits  à  reconnaître  la  nécessité  de  ces  deux  sortes 
démesures.  Suivant  les  vieilles  traditions  qui  faisaient 
considérer  le  nombre  3  comme  le  plus  parfait,  la  mesure 
ternaire  était,  il  y  a  plusieurs  siècles,  dite  parfaite,  et  la 
mesure  binaire  imparfaite.  Sur  100  morceaux  écrits  au 
i\*  ou  au  xvi*  siècle ,  plus  de  80  sont  en  mesures  à 
3  temps.  —  On  se  sert  quelquefois  d^une  mesure  d 
5  temps,  composée  alternativement  d'une  à  3  et  d*une  à 
2  temps.  Elle  est  difficile  à  suivre ,  mais  elle  peut  être 
firorable  à  Mnvention  de  chants  neufs  et  originaux.  — 
I>  n'y  a  pas  de  mesure  à  un  temps  ;  mais,  comme,  dans 
•c  pr»^o  à  3  temps ,  on  ne  peut  en  marquer  qu'un  ,  la 
mesure  ne  se  bat  réellement  qu'à  un  temps,  quoiqu'elle 
en  ait  3, 

Le  degré  de  vitesse  ou  de  lenteur  qu'on  donne  à  la  me- 
sure dépend  :  1^  du  caractère  du  morceau ,  qui  en  fait 
sentir  le  véritable  mouvement;  2<»  de  la  valeur  des  notes 
qui  composent  la  mesure;  3**  du  mouvement  indiqué 
par  un  mot  placé  en  tête  du  morceau,  comme  Andante, 
Allegro,  etc. 

On  De  comprend  pas  bien  comment  les  Anciens  conci- 
liaient la  mesure  musicale  avec  le  mètre  de  la  poésie.  On 
trouTc  chez  quelques  auteurs  grecs  deux  mots ,  arsis  et 
théiis ,  qui  indiquent  l'élévation  et  l'abaissement  de  la 
rDain  pour  marquer  les  I3mps  de  la  mesure  :  mais  ces 
mo?j  peuvent  aussi  n'avoir  signifié  autre  chose  que  des 
accents  différents  de  la  vMx  (7.  Ansis).  C'était  avec  le 
pied  au'on  battait  la  mesure  (  V,  Crupbzia)  ;  de  là  le  nom 
^^pedarii  donné  par  les  Romains  à  ceux  qui  en  étaient 
fharsiHi.  On  ne  voit  pas  que  le  plain-chant,  qui  recueillit 
rbéritage  de  la  musique  des  Anciens ,  ait  jamais  été  me- 
ure jusqu'au  XI*  siècle ,  époque  où  Francon  de  Cologne 


distingue  pour  la  prcmit'n*e  fois  \amustqu9  plane  {mth 
sica  plana)  et  la  musique  mesurée  {musica  mensura) 
V.  Aug.  Pisa,  tiattuta  délia  musica  dichiarata,  Rome. 
1611,  in-4'';  Sacchi,  Délia  divisione  del  tempo  nella  Mu- 
sica, nel  Ballo  e  nella  Poesia,  Milan,  1770,  in-8°;  Bo' 
nesi ,  Traité  de  la  mesure ,  ou  de  la  division  du  temps 
dans  la  Musique  et  dans  la  Poésie.  B. 

MESURE  (Bâton  de).  V.  Baton  de  mesure. 

MESURES.  V.  Poids  et  Mesures. 

META.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra^ 
phie  et  d'Histoire. 

MÉTABASë  (en  grec  métabasis^  action  de  passer  outre, 
omission),  en  termes  de  Rhétorique,  artifice  de  langage 
qui  consiste,  soit  à  revenir  au  sujet  après  s'en  être  in- 
opinément écarté,  soit  à  passer  brusquement  à  quelque 
idée  nouvelle.  —  Dans  le  langage  philosophique,  la  Mé- 
tabase  est  une  digression,  ou  une  introduction  inoppor- 
tune dMdées  contraires  ou  étrangères  à  l'objet  en  dis- 
cussion. 

MÉTABOLE  (d'un  mot  grec  qui  veut  dire  changement)^ 
en  termes  de  Grammaire,  transposition  de  lettres  qui  a 
liou  dans  quelques  mots  pour  les  besoins  de  l'euphonie , 
ou  à  cause  des  exigences  de  la  mesure  dans  les  vers.  — 
En  termes  de  Rhétorique,  c'est  une  Figure  consistant  à 
répéter  sous  des  termes  différents  une  même  idée,  ou  un 
rapprochement  d'antithèses  présentées  en  ordre  inverse. 

MÉTACHRONISME  (du  grec  méta^  après,  et  chronos, 
temps) ,  sorte  d'anachronisme  (  V.  ce  mot)  par  lequel  on 
donne  à  un  fait  une  date  postérieure  à  celle  où  il  s'est 
passé. 

MÉTAL,  en  termes  de  Blason,  se  dit  de  l'or  et  de  l'ar- 
gent formant  le  champ  de  l'écu.  En  couleur,  on  repré- 
sente l'or  par  le  Jaune,  et  rarp:cnt  par  le  blanc  ;  en  gra- 
vure, l'or  par  une  foule  de  petits  points,  l'argent  par  une 
surface  unie.  Quand  l'écu  porte  métal  sur  mêlai,  c-à-d. 
or  sur  argent,  on  dit  que  les  armes  sont  fausses  ou  d 
enquerre  (à  enquérir,  à  vérifier), 

MÉTALEPSE  (du  grec  métalépsis,  transposition),  figure 
de  Rhétorique  par  laquelle  on  explique  ce  qui  suit,  pour 
faire  entendre  ce  qui  précède,  comme  quand  on  dit  : 
Nous  le  pleurons,  pour  II  est  mort  ;  ou  ce  qui  précède  pour 
faire  entendre  ce  qui  suit,  comme  dans  ce  vers  de  Ray- 
nouard  au  sujet  de  la  mort  des  Templiers  (acte  v,  se.  4)  : 

Mais  il  n'dtait  pins  temps,  les  chants  aTafent  cessé. 

C'est  l'expression  d*une  même  idée ,  mais  adoucie  dans 
la  forme.  La  Métalepse  est  quelquefois  encore  une  ma- 
nière indirecte  et  détournée  d'exprimer  un  sentiment 
secret  ou  caché  ;  telle  est  cette  exclamation  de  la  Phèdre 
de  Racine  (acte  i,  se.  3)  : 

Dieux  l  Que  ne  suts-Je  assise  k  l'ombre  des  Torfits  ! 
Quand  ponrral-je ,  an  travers  d*ane  noble  pousaibre 
Suirre  de  l'œil  un  char  fuyant  dans  la  carrière  I 

La  Métalepse  a  beaucoup  de  rapport  avec  la  Métonymie 
et  laSynecdoche  {V.  ces  mots).  G. 

MÉTALLIQUE  (Histoire),  nom  qu'on  donne  à  l'histoire 
d'un  règne  ou  d'une  époque  constatée  par  une  suite  d^ 
médailles. 

MÉTALLIQUES ,  billets  qu'un  État  rembourse  et  dont 
il  paye  les  intérêts  en  espèces  sonnantes,  non  en  papier- 
monnaie. 

MÉTAMORPHOSE  (du  grec  métamorphôsis,  change- 
ment de  forme),  mot  qui  ne  s'employait  guère  qu'au 
propre,  dans  l'antiquité  païenne,  pour  exprimer  un 
genre  de  prodiges  opérés  par  les  dieux,  comme  Narcisse 
changé  en  fontaine,  Progné  en  hirondelle,  Philomèle  en 
rossignol,  Daphné  en  laurier,  lo  en  génisse,  Actéon  en 
cerf,  etc.  Les  dieux  se  métamorphosaient  eux-mêmes  : 
ainsi,  Jupiter  prit  la  forme  d'un  cygne  pour  s'approcher 
de  Léda.  Sous  le  titre  de  Métamorphoses^  Ovide  nous  a 
laissé  un  poème  en  15  chants,  qui  contient  246  fables  de 
ce  genre.  Cest  par  là  surtout  qu'il  s'est  placé  parmi  les 
grands  poètes.  Le  nom  de  Métamorphoses  appartient 
aussi  au  roman  d'Apulée  intitulé  VAnê  d'or  {V.  ce  mot). 

MÉTANÉES,  ancien  nom  des  formes  ou  stalles  des 
églises. 

MÉTAPHORE  (en  grec  métapkora,  action  de  transpor- 
ter), le  plus  beau,  le  plus  riche  et  le  plus  fréquemment 
employé  des  tropes  (K.  ce  mot).  C'est  une  figure  par  la- 
quelle on  transporte  la  signification  propre  d'un  mot  à 
une  autre  signification  qui  ne  lui  convient  qu'en  vertu 
d'une  comparaison  sous-entendue.  La  lumière  de  l'esprit, 
la  fleur  de  l'âge,  Vivresse  du  plaisir,  le  feu  des  passions, 
la  tendresse  du  cœur,  les  aHes  du  tempa,  le  printemps  de 


^« 


MET 


nu 


MET 


la  Tfe,  le  poids  des  ans,  la  chaleur  du  combat,  la  péné- 
tration de  Tesprit,  la  rapidité  de  la  pensée ,  les  mouve- 
ments de  r&me,  bouillant  de  colère,  saisi  d*épou vante, 
sonder  les  cœurs,  voler  à  rennemi,  riépondre  sèchement, 
recevoir  froidement,  énoncer  clairement,  etc.,  sont  des 
métaphores.  Les  noms,  les  adjectifs,  les  participes,  les 
verbes,  les  adverbes,  peuvent  donc  s'employer  métapho- 
riquement. La  poésie  et  Téloquence  ne  sauraient  exister 
sans  ce  langage  auxiliidre  de  l'imagination,  qui  donne  du 
corps  aux  pensées ,  les  embellit  et  les  colore,  et  dont  le 
propre  est  de  frapper  par  des  images,  comme  la  peinture. 
Les  exemples  de  métaphore  abondent  dans  les  grands 
écrivains  : 

Le  Dieu  qal  met  nn  frein  k  Ia  fureur  dei  flots 
Sait  «UBsl  des  méchants  arriter  les  complou. 

llàciHB,  Athalie,  \,  I. 

Brillante  sur  ma  tige  et  Yhonneur  du  Jardin, 
Je  n'tti  vu  luire  encor  que  les  feux  da  matin* 
Je  veux  achever  ma  journée. 

Ahdub  Cobsisb,  la  Jeune  Captive. 

Au  banquet  do  la  vie,  Infortuné  eomivê. 
J'apparus  un  Jour,  et  Je  meurs  ! 

GiLBBKT»  Ode  imitée  de  pliuteurt  Psaumes. 

Le  chagrin  monte  en  eroupe  et  (^otopf  avec  lui. 

BOILBAUf  Ep.  A. 

Le  flot  qui  rapporta  recule  êpouvanlf*. 

Bagihb,  Phidre,  V,  4. 

La  métaphore  doit  être  appropriée  au  ton,  au  caractùro 

général  du  discours  :  on  conçoit  que  telle  métaphore, 
ien  placée  dans  le  stvle  poétique,  devienne  ridicule  dans 
le  style  familier,  et  rôdproauement  ;  que  telle  autre,  qui 
sied  à  une  harangue,  produise  un  mauvais  effet  dans  une 
histoire  ou  dans  une  dissertation  philosophique.  Il  faut 
éviter  d'emprunter  des  métaphores  à  des  objets  bas  ou  à 
des  circonstances  triviales,  conune  fit  Tertullien  quand  il 
appela  le  déluge  la  lessive  du  genre  humain.  Une  méta- 

{more  est  défectueuse,  quand  elle  est  forcée,  prise  de  trop 
oin,  et  que  le  rapport  n'est  pas  assez  naturel  et  assez 
sensible.  L'excès  de  hardlense  peut  être  aussi  un  défaut, 
comme  dans  ces  vers  de  J.-B.  Rousseau  (III,  Ode  au  comte 
de  Zinzindorf)t 

Et  les  Jeunes  B<$phlr8  do  leurs  chaudes  haleines 
Ont  foniu  Yéeorce  des  eaux.... 

n  doit  y  avoir  dans  les  termes  métaphoriques  une  es- 
pèce d'unité  et  de  concordance,  et  la  métaphore  est  vi- 
cieuse si  elle  n'est  pas  suivie,  si  les  mots  qui  la  consti- 
tuent éveillent  des  idées  incohérentes,  comme  dans  ces 
vers  de  Malherbe  {Ode  au  roi  Louis  XUI)  t 

Prends  ta  foudre,  Louts^  et  va,  comme  un  lion 
Porter  le  dernier  cuiip  h  la  dernière  tête 
De  la  rébellion. 

Voici  un  bel  exemple  de  métaphore  suivie,  que  nous 
empruntons  à  un  grand  orateur  sacré.  Il  s'agit  de  l'eiïel 
produit  par  la  nouvelle  des  désastres  de  l'armée  française 
et  de  son  chef  à  la  suite  de  la  fameuse  campagne  de  Mos- 
cou, en  181),  et  du  dénoûmont  qui  termina  cette  çuerre 
en  1814  :  «  Tout  h.  coup,  au  sein  même  de  la  patne,  un 
cri  prodigieux  s'élève  :  le  descendant  de  Cyrus  et  de  Cé- 
sar, le  maiti*e  du  monde,  avait  fui  devant  ses  ennemis; 
les  aigles  de  l'Empire,  ramenées  à  plein  vol  des  bords 
sanglants  du  Dnieper  et  de  la  Vistule ,  se  repliaient  sur 
leur  terre  natale  pour  la  défendre,  et  s'étonnaient  de  ne 
plus  ramasser  daâs  leurs  serres  puissantes  que  des  vic- 
toires blessées  à  mort.  Dieu,  mais  Dieu  seul  avait  vaincu 
la  France,  commandée  Jusou'à  la  fin  par  le  génie,  et  triom- 
phante encore  au  quart  d^heure  même  qui  signalait  sa 
chute.  »  (Le  P.  LACoaDaiRi,  OrtMon  funèbre  de  M,  de 
Forbin-Janson). 

Chaque  langue  a  ses  métaphores  propres  et  tellement 
consacrées  par  l'usage,  qu'il  est  souvent  impossible  d'en 
changer  les  termes,  même  par  des  équivalents.  Entrailles, 
dans  sa  sigtiiflcation  métaphorique,  exprime  la  tendreue 
paternelle  {  Racine  a  dit  {Phèdre^  iv,  3): 

Je  f  aimais,  et  Je  sens  que,  melgré  ton  offense, 
Hes  eiUraillêt  pour  toi  se  troublent  par  avance. 

Hais  à  ce  mot  on  ne  pourrait  pas  substituer  un  synonjrme  ; 
et  c'est  pourquoi,  dans  les  traductions,  il  est  souvent  im- 
possible de  faire  passer  littéralement  une  expression 
métaphorique  d'une  langue  dans  une  autre  :  le  latin,  par 


exemple,  dit  sinistrum  cornu  (la  corne  gauche)  en  parlant 
d'une  armée,  tandis  que  nous  disons  Voile  gauche,    E 

MÉTAPHRASE  (du  grec  métaphrasis,  interprétation), 
traduction  littéralement  fidèle.  Nous  avons  sous  ce  titre 
plusieurs  versions  faites  du  grec  en  latin,  telles  que  celles 
d'Eutrope  par  Posanius  et  de  César  par  Planude,  ou  des 
traductions  en  prose  d'Esope  et  de  Phèdre. 

MÉTAPHYSIQDE.  Arîstote,  après  avoir  écrit  ses  traitas 
de  Physique,  s'occupa  de  Philosophie  première^  et  les 
écrits  qu'il  lui  consacra  reçurent  de  lui  ou  de  l'un  de  ses 
successeurs  le  titre  de  ta  (uxà  ta  fuatxà ,  ce  qui  doit  être 
lu  après  la  physique,  ou  bien  ce  qui  est  au-desstu  des 
choses  sensibles.  Telle  est  l'origine  du  mot  Métaphysique, 
Quant  à  la  science,  Arîstote  n'en  est  pas  l'inventeur: 
Thaïes  et  Pythagore,  l'école  d'Élée,  Platon,  l'avaient  trai- 
tée à  leur  manière  ;  mais  Arîstote  y  mit  plus  de  méthode 
en  la  constituant  régulièrement.  Dans  son  sens  le  plus 
élevé,  la  Métaphysique  a  pour  objet  l'être  en  tant  qu'être, 
c.-à-d.  l'essence  des  choses  ;  elle  est  le  point  le  plus  élevé 
de  la  Philosophie  :  de  là  vient  que  cette  dernière  «  prise 


rationnelle  {V.  ces  mots)  ;  leur  ensemble  forme  ce  qu'on 
appelle  les  Sciences  métaphysiques.  La  question  essen- 
tielle, en  M^^taphysique,  est  de  savoir  si  l'esprit  humain 
a  le  droit  d'affirmer  si  ce  qu'il  conçoit  nécessairement 
existe,  et  s'il  existe  comme  il  le  conçoit,  par  exemple,  la 
substance,  la  cause,  le  temps,  l'infini,  etc.  De  la  réponse 
faite  à  cette  question  capitale  sont  nés  les  grands  sys- 
tèmes et  aussi  les  grandes  erreurs  en  Philosophie;  le 
Spiritualisme,  Tldéalisme,  le  Panthéisme,  etc.,  ce  qui 
montre  l'extrême  importance  de  la  Métaphysique.  Lr.-s 
réponses  souvent  si  opposées  viennent  de  la  différence 
des  procédés  employés  à  les  chercher.  La  vraie  méthode 
consiste  à  substituer  la  conscience  à  des  abstractions ,  à 
un  procédé  tout  géométrique,  conune  chez  Spinoza,  ou  à 
la  prétention  de  s'identifier  a  priori  avec  l'infini,  comme 
l'ont  fait  plusieurs  philosophes  allemands,  ou  à  celle,  non 
moins  aventureuse,  de  s'élever  à  la  vérité  suprême  par 
l'enthousiasme  et  l'amour,  en  dédaignant  les  secours  de 
la  raison  et  de  la  science.  La  vraie  Métaphysique,  en  s'ap- 
puyant  sur  les  croyances  universelles  et  nécessaires  don- 
nées par  la  raison,  et  sur  l'union  de  cette  dernière  avec 
le  sentiment,  conduit  à  faire  concevoir  à  l'homme,  et  à 
offrir  à  son  adoration  l'Être  divin  et  absolu  en  qui  sont 
toutes  les  perfections. 

L'antiquité  accorda  de  tout  temps  une  grande  attention 
à  la  Métaphysique.  Aristote,  dans  la  iMurtie  ontologique, 
distingue  quatre  principes  :  la  qualité,  par  laquelle  une 
chose  est  ce  qu'elle  est;  la  matière;  le  principe  du  mou- 
vement;  le  principe  de  la  fin  ou  du  bten.  Les  commenta- 
teurs les  plus  connus  de  cette  iiartie  de  ses  œuvres  sont, 
chez  les  Anciens,  Alexandre  a'Aphrodise,  Thémlstius, 
J.  Philopon  ;  chez  les  Arabes ,  Avicenne,  AverroCs.  Dans 
le  moyen  âge,  S^  Anselme  de  Cantorbéry  se  distingue  par 
son  indépendance,  en  cherchant  à  asseoir  le  dogme  sur 
des  arguments  métaphysiques.  Les  maîtres  les  plus  cé- 
lèbres qui  cherchèrent  à  établir  la  Métaphysique  d'Aris- 
tote  dans  les  écoles  en  l'interprétant,  furent  Alexandre 
de  Haies,  Albert  le  Grand,  S*  Thomas  d'Aquin,  Duns 
Scot.  La  philosophie  moderne,  ayant  surtout  en  vue  la 
méthode,  s'occupa  plus  du  sujet  que  de  l'objet,  et,  par 
suite,  sembla  accorder  moins  d'importance  à  la  Métaphy- 
sique. Bacon  en  fait  une  partie  de  la  Physique,  sans  ce- 
pendant la  méconnaître,  puisqu'il  admet  une  théologie 
naturelle  fondée  sur  la  raison  seule.  Pour  Descartes, 
«  toute  la  philosophie  est  comme  un  arbre  dont  les  ra- 
cines sont  la  Métaphysique,  a  Malebranche,  le  plus  grand 
métaphysicien  de  l'école  française,  voit  dans  la  même 
science  les  vérités  qui  peuvent  servir  de  principes  aui 
sciences  particulières;  il  est  plus  près  de  Platon  que 
d' Aristote;  Leibniz  se  place  entre  les  deux  pour  les  con- 
cilier. Après  lui,  la  Métaphysijjue  perd  de  ses  droits  et 
de  son  importance  dans  l'histoire  de  la  philosophie  avec 
Locke,  Condillac,et  l'école  idéologique;  en  faisant  dériver 
de  la  sensation  toute  la  connaissance,  ils  méconnaissaient 
les  conceptions  de  la  raison  et  les  premiers  principes.  Avec 
Kant,  la  Métaphysique  reprend  la  place  qui  lui  appartient, 
mais  avec  un  caractère  essentiellement  subjectif  :  le  phi- 
losophe allemand  ne  voit  en  elle  que  la  liste  des  notions 
données  par  la  raison.  Avec  Schelling  et  He^l,  elle  fut 
entraînée  à  dépasser  ses  limites  légitimes.  En  France, 
rÉclectisme  prit  en  Métaphvsique  le  caractère  dualiste  et 
cartésien  du  \vn*  siècle.  Y.  Aristote,  La  Métaphysique, 
trad.  en  français  par  Piorron  et  Zévort,  184i;  Plotin. 


MET 


1245 


MET 


iê$  EnnmdêSi  tradnlidsparM.  Booillet;  le  Pidado-Denys^ 
Dm  Noms  dwins.  De  la  hiérarchi»  célesU;  Scot-Erigène, 
De  la  division  de  la  Nature;  Avicebron  (Salomon  ben 
Gai)irol),  Fons  vUm;  Malebranche,  Entretiens  sur  la 
Métaphysique  et  la  Relijgion;  4687;  'Sgravesande,  Intro- 
duction à  la  philosophie,  1730-1756;  Para  du  Phanjas, 
Cours  de  Métaphysique,  ou  Théorie  des  Êtres  insensibles, 
1779;  les  écrits  philosophiques  de  FéneloD  et  de  Bossuet; 
l'analyse  delà  Métaphysique  d^Artstote^  par  H.  Michelet, 
de  Berlin;  V Essai  sur  la  Métaphysique  d^Aristote,  par 
M.  Ravaisson,  1836-46  ;  M.  Yacherot,  De  la  Métaphysique 
et  de  la  Science.  R. 

MÉTAPLÂSME  (en  grec  métaplasmos,  transformation), 
terme  de  Grammaire  qui  s'applique  à  toutes  les  altérations 
qae  peuvent  éprouver  les  lettres  ou  les  syllabes  des  mots. 
làprosthèse,  Vépenthèse,  \&paragoge,  là  diérèse,  làcrase, 
Vaphérèse,  la  syncope,  Vapocope,  la  synérèse,  Yélisùm, 
Il  métathièse  {Y*ces  mots)^  sont  des  métaplasmes- 

MÉTATHÊSE,  terme  de  Grammaire  et  de  Rhétorlqae, 
dérive  du  grec,  et  signifiant  trantpontum,  spécialement 
d'une  lettre  dans  le  corps  d*un  mot.  Cest  IV  qui  Joue  le 
principal  rôle  dans  cette  figure,  dont  il  y  a  des  exemples 
très-fréquents  en  grec,  en  latin  et  en  français.  Ainsi,  le 
latin  vervex  a  formé  en  français  berbis,  remplacé  défini- 
tivement par  brebis;  formica  a  formé  fourmi,  et  frémi, 
qui  ne  se  dit  plus  que  dans  les  campagnes;  provideo  a 
formé  pourvoir;  protrahere,  portraire.  On  disait  autre- 
fois pourmener,  on  dit  depuis  longtemps  promener;  le 
mot  propos  a  passé  en  anglais  sous  la  forme  purpose. 
Quelquefois  c'est  une  syllabe  entière  qui  s'est  transposée  : 
ainsi  le  grec  morphè  est  devenu  le  latin  forma.  —  On  a 
donné  aussi  le  nom  de  Hétathèse  à  la  répétition  des 
mêmes  mots  dans  deux  phrases,  lorsque  Tordre  est  in- 
verse dans  Tune  et  dans  l'autre,  comme  Eripis  ut  perdas, 
perdis  ut  eripicu.  —  Chez  les  Grecs,  la  Métathèse  pre- 
nait encore  les  noms  d'Hyperthèse  et  d^Enallaxe.    P. 

MÊTATOME.  F.  Dbnticijlbs. 

MÉTAYAGE.  V.  FEaitACB. 

UÉTEBIPSYCHOSE,  et,  par  altération,  M^tbhpstcosk, 
(du  grec  meta,  marquant  changement,  etpsukhè,  &me), 
transmigration  des  Aines.  La  métempsycose  est  une  des 
premières  formes  que  prit  le  dogme  de  l'immortalité  de 
l'âme.  Les  Égyptiens  croyaient  que  T&me,  aussitôt  après 
la  mort,  entrait  successivement  dans  les  corps  de  tons 
les  animaux  qui  vivent  sur  notre  globe,  et  Qu'elle  rêve- 
nait  au  bout  de  trois  mille  ans  dans  le  corps  d  un  homme, 
et  cela  éternellement.  Cette  forme  grossière  fut  remplacée 
par  la  croyance  à  un  empire  des  morts  appelé  Amenthès 
(qui  donne  et  qui  reçoiQ,  et  sur  lec^el  régnait  Osiris, 
sons  le  nom  de  Sérapis.  Chez  les  Indiens,  la  métempsy- 
cose prit  un  caractère  plus  métaphysique,  et  qui  se  rat- 
tachait à  la  doctrine  des  émanations;  le  cercle  des  trans- 
migrations embrassait  la  nature  organisée,  depuis  la 
plante  Jusqu'à  l'homme,  et  la  fin  de  T&me  était  d'aller 
s'absorbor  en  Dieu.  Chez  les  Perses,  la  métempsycose 
devint  la  croyance  à  la  résurrection  de  T&me  dans  le  corps 
qu'elle  avait  occupé;  cette  doctrine,  enseignée  par  ^ 
roastre,  annonçait  un  Jugement  dernier.  On  trouve  encore 
la  métemp^cose  enseignée  en  Grèce,  dans  les  Mystères, 
an  nom  d'Orphée.  Aprai  lui,  Pythagore  lui  donna  une 
forme  plus  précise,  en  posant  comme  condition  une  cer- 
taine harmonie  entre  les  facultés  de  l'&me  et  l'organisa- 
tion du  ooipe  qu'elle  doit  habiter.  Platon  prit  de  la  mé- 
tempsycose ce  qu'elle  avdt  de  plus  spiritualiste ,  en 
cherchant,  da^as  son  Pnidon,  à  l'élever  à  la  hauteur  d'une 
doctrine  philosophique.  Porphyre  essaya  de  la  faire  en- 
trer dans  la  philosophie  alexandr.ne,  sans  faire  descendre 
l'àme  Jusqu^à  l'échelle  animale.  A  cette  forme  nouvelle 
se  rattache  celle  qu'on  rencontre  dans  la  Kabbale  des 
iuifs;  des  deux  côtés,  on  voit  la  métempsycose  renfermée 
dans  la  vie  humaine.  —  De  nos  Jours,  on  a  vu  cette  vieille 
doctrine  dans  un  livre  de  M.  Pierre  Leroux,  De  l'Huma^ 
nité,  avec  ce  caractère  nouveau  qu'au  lieu  d'être  une 
déchéance  pour  l'homme,  c'est  un  progrès,  et  dans  le 
système  de  Charles  Fourier,  père  de  l'école  phalansté- 
rienne,  qui  admet  une  série  d'eitistences  dans  ce  monde 
ou  inlnirmondames  et  dans  des  sphères  sui)érieures  ou 
exlra-mondasnes  (V,  sa  Théorie  de  Vunité  universelle,)  R. 

MÉTHODE  (du  grec  mélhodos,  recherche,  perquisi- 
tion). On  nomme  communément  méthodes  les  divers 
procédés  par  lesquels  l'esprit  arrive  à  découvrir  ou  à  dé- 
montrer une  vérité,  les  différentes  séries  d'opérations  qui 
y  mènent,  l'ordre  qu'il  faut  suivre  soit  dans  la  recherche 
de  cette  vérité,  eoit  dans  son  enseignement.  Ces  procédés 
varient  suivant  la  nature  des  objets  à  connaître;  mais 
leur  différence  tient  à  ce  f[u'îls  sont  plus  on  moins  con- 


formes a  celui  qu'il  est  dans  la  nature  de  notre  esprit  de 
suivre,  et  qui  atteint  le  mieux  le  but  de  la  méthode,  qui 
est  de  substituer  une  idée  claire,  exacte  et  complète,  à 
une  notion  confuse,  superficielle  et  incomplète.  Cette  mé- 
thode, dite  naturelle,  se  compose  de  deux  parties  :  l'ano- 
lyseet  ItLsynthèse  (V.  cm  mo^s).  Dans  la  première,  l'esprit 
pierçolt  volontairement  l'objet,  s'y  applique,  le  distingue 
de  tous  ceux  qui  l'entourent,  et  le  décompose  ;  dans  la  se- 
conde, il  le  recomi^se.  En  examinant  ces  faits  et  les  rap- 
ports qu'ils  ont  entre  eux,  on  reconnaît  oue  l'ordre  dans 
lequel  ils  se  présentent  est  invariable,  qu'aucun  d'eux  ne 
Dourraitètre  déplacé.  Cette  succession  constante  des  faits, 
qui  amènent  la  connaissance  réfléchie,  en  constitue  la  ^ot, 
e  t  cette  loi  n'est  autre  chose  que  la  méthode  naturelle, 
h  Vmaiyse  ou  décomposition,  et  la  synthèse  ou  recomposi- 
tl  on,  ne  sont  pas  deux  méthodes,  mais  les  deux  parties 
né  cessaireset  inséparables  de  toute  méthode,  et,  de  plnx^ 
la  synthèse  ne  vaut  que  ce  que  vaut  l'analynA,  puia- 
q'uelle  donne  une  connaissance  de  l'ensemble  dont  1  ana- 
lyse ooit  lui  fournir  toutes  les  parties.  —  Une  méthode 
particulière  i^'est  que  la  méthode  naturelle  appliquée  à 
un  objet  spécial  et  dans  un  but  déterminé.  Si  le  but  est 
Ia  découverte  d'une  vérité,  la  méthode,  tout  en  se  modi- 
Q  ant  suivant  la  nature  des  objets  que  cette  vérité  con- 
cerne, reste  méthode  de  rechetxhe  ou  d*invention:  ainsi, 
dans  les  sciences  expérimentales,  la  méthode  part  de  faits 
particulière  pour  conduire  aux  faits  généraux  et  aux  lois 
qui  les  régissent;  cette  méthode  particulière  est  dite 
expérimentale^  a  postenori,  et  encore  méthode  d'indue- 
tion;  au  contraire,  la  méthiyde  synthétique  ou  de  déduo- 
tion  fait  sortir  de  certaines  vérités  générales  les  consé- 
quences qu'elles  renferment,  comme  cela  arrive  dans  les 
sciences  de  raisonnement.  Si  le  but  est  simplement  d'ex- 
poser des  vérités  connues  ou  de  les  communiquer,  la 
méthode  n'est  plus  cpi'un  moyen  d'enseignement  ou  ordre 
méUutdique,  appelé  aussi  analytique  ou  synthétique,  se* 
Ion  que  domine  la  synthèse  ou  l'analyse,  mais  sans  que 
l'une  ou  l'autre  soit  exclue.  La  méthode  d'induction,  dit 
Laplace,  quoiaue  excellente  pour  découvrir  des  vérités 
générales,  ne  dispense  pas  de  les  démontrer.  Les  classi- 
fications sont  encore  des  méthodes;  elles  sont  artifl' 
cielles,  quand  elles  déterminent  des  espèces  ou  des 
genres  d'après  quelques  caractères  secondaires;  nafti- 
relles,  quand  elles  ont  recours  à  la  constitution  entière 
et  complète  des  êtres. 

La  nécessité  de  la  méthode  se  montre  par  la  marche 
des  sciences  et  leun  progrès  à  traven  les  siècles.  Socrate 
l'indique,  et  fait  sentir  l'utilité  de  l'induction.  Sur  ses 
traces  marehent  Platon  et  Aristote  ;  ce  dernier  applique 
la  méthode  à  l'histoire  naturelle,  et  lui  fait  faire  un  grand 
pas.  Si  le  moyen  âge  reste  en  arrière  sous  le  rapport  des 
sciences,  c'est  que  l'analyse  lui  manque,  ainsi  que  l'ob- 
servation et  l'expârimentation.  Avec  Bacon  et  Descartes, 
l'esprit  humain  entre  dans  une  voie  nouvelle.  Bacon  re- 
commande une  méthode  qu'il  donne  comme  un  nouvel 
instrument  pour  former  les  sciences  et  la  philosophie, 
Novum  organum  scientiarum,  comme  un  mo^en  de  les 
replacer  sur  leura  véritables  bases,  Instauratw  magna, 
capable  de  leur  faire  prendre  de  nouveaux  accroissements. 
De  augmentis  scientuirum.  Cette  méthode,  c'est  l'analyse 
suivie  de  la  «lynthèse,  car  l'observation  et  l'induction  ne 
sont  pas  autre  chose.  Cest  par  elle  qu'il  explique  comment 
il  faut,  non  pas  se  contenter  d*observer  les  faits  que  le 
hasard  nous  offre,  mais  faire  naître  les  occasions,  repro- 
duire ces  faits  avec  des  circonstances  plus  favorables  à 
l'examen,  c-ànl.  expérimenter,  pour  s'attacher  à  l'inva- 
riable, aux  lois.  Pendant  ({ue  Bacon  préconisait  en  An- 
gleterre la  méthode  expérimentale.  Descartes  la  produi- 
sait en  France  avec  plus  de  précision  dans  son  Discours 
de  la  méthode.  Il  la  réduit  a  quatre  règles,  qui  recom- 
mandent :  de  ne  s'attacher  qu'à  l'évidence  ;  de  décompo- 
ser les  objets  ou  d'analyser;  d'épuiser  l'analyse  par  des 
subdivisions  successives  et  des  dénombrements  entiers; 
enfin  d'opérer  une  synth^  en  allant  du  simple  au  com- 
posé et  en  classant  an  moyen  des  rapports.  C'était  près- 
crire  exactement  les  procédés  de  la  méthode  naturelle. 
En  l'appliquant  aux  faits  intérieure  et  à  la  pensée.  Des- 
cartes créa  en  quelque  sorte  la  psychologie,  et  mérita  le 
nom  de  Père  de  la  philosophie  moderne.  Grâce  à  lui  et 
k  Bacon,  la  méthode,  appliquée  à  toutes  les  parties  de  la 
science,  les  plaça  sur  leure  bases  véritables,  les  fit  mar- 
cher et  grandir,  et  montre  ce  que  pouvfdt  l'homme  muni 
le  ses  secours.  R. 

if#.TH0DE,  nom  donné  k  certains  livres  élémentaires, 
particulièrement  à  ceux  qui  concernent  l'étude  d'une 
langue,  ou  du  chant,  ou  d'un  instrument  de  musique  Ea 


MET 


1246 


MET 


Musique,  on  appelle  aussi  Méthode  la  manière  de  chanter 
ou  d*e|écuter,  le  style  propre  de  chaque  artiste. 

MÉTIERS.  V,  Arts  et  métiers. 

MÉTIS  (de  Tespagnol  mestizOf  mélangé), celui  qui  est 
né  d'un  Européen  avec  une  Américaine,  ou  d'un  Améri- 
cain avec  une  Européenne. 

MÉTONOMASIE  (du  grec  meta,  préposition  qui  marque 
changement,  et  onoma,  nom),  changement  de  nom  propre 
par  voie  de  traduction.  Ce  fut  un  usage  assez  répandu 
parmi  les  savants  au  xvi*  siècle.  Ainsi ,  Schwarzerd  prit 
le  nom  de  Mélanchthon ,  qui ,  comme  lui ,  signifie  terre 
noire;  La  Ramée  se  fit  appeler  Ramus;  le  médecin  Du- 
bois prit  le  nom  de  Sytvws;  le  poète  italien  Trapassi 
traduisit  son  nom  en  grec,  et  s'appela  Métastase,  etc. 

MÉTONYMIE  (du  grec  meta,  préposition  qui  marque 
changement,  et  onoma,  nom  ),  figure  de  mots  de  la  classe 
des  tropcs  (V.  ce  mot).  Elle  consiste  à  employer:  !•  la 
cause  pour  TefTet.  On  dit,  par  exemple.  Mars  pour  la 
guerre,  Bacchus  pour  le  vin,  Cérès  pour  lepatn,  Neptune 
pour  la  mer,  Vénus  pour  la  beauté,  VtUcain  pour  le  feu; 
vivre  de  son  travail ,  c.-à-d.  vivre  de  ce  qu'on  gagne  en 
travaillant;  lire  Bossuet,  c-à-d.  lire  les  ouvrages  de 
Bossuet;  Atkatie,  le  Cid,  c-^mI.  les  tragédies  dont  ces 
personnages  sont  le  sujet;  un  Elzevir,  un  Barbou,  pour 
un  livre  édité  par  EIzevir,  par  Barbou;  j'ai  un  Rem- 
brandt, c.-à-d.  un  tableau  de  Rembrandt;  avoir  une 
belle  main,  c.-à-d.  bien  écrire;  un  habile  pinceau,  pour 
un  habile  peintre;  une  bonne  lame,  pour  un  homme  fort 
à  V escrime;  une  plume  distinguée,  pour  un  écrivain 
distingué;  je  suis  reconnaissant  de  vos  bontés,  pour  des 
effets  de  votre  bonté;  —  2°  TefTet  pour  la  cause,  comme 
dans  ces  mots:  la  triste  vieillesse,  la  pâle  mort,  Vor^ 
gueilleuse  richesse;  boire  la  mort,  pour  le  poison  qui  la 
donne;  Pélion  n'a  plus  d^ombres,  c.-à-d.  n'a  plus  d'ar- 
bres ;  —  3«  le  contenant  pour  le  contenu  :  botre  une  boî^ 
teille;  avaler  une  coupe  empoisonnée;  Vunivers,  pour  les 
peuples  qui  l'habitent;  une  bonne  table,  pour  le  bon 
repas  dont  elle  est  couverte;  —  4<>  le  signe  pour  la 
chose  signifiée  :  le  sceptre  ou  la  couronne  pour  la  royauté, 
la  robe  pour  la  magistrature,  Vépée  pour  Vétat  militaire, 
Volivier  pour  la  paix,  le  laurier  pour  la  victoire,  le  léo- 
pard pour  V Angleterre  dont  il  est  l'emblème ,  le  crois- 
sant pour  le  mahométisme,  le  cothurne  pour  la  tragédie, 
les  brodequins  pour  la  comédie;  —  h^  le  lieu  où  une 
chose  se  fait,  pour  la  chose  elle-même  :  on  dit  un  sedan, 
un  elbeuf,  pour  un  drap  qui  a  été  fabriqué  à  Sedan,  à 
Elbeuf;  un  panama,  pour  un  chapeau  de  Panama;  un 
manille,  pour  un  cigare  de  Manille  ;  un  damas,  un  ma- 
dras, du  bordeaux,  du  Champagne,  un  cachemire;  Bol- 
leau  a  dit  un  caudebec,  pour  un  chapeau  fabriqué  à  Cau- 
dcbcc  ;  le  Lycée,  le  Portique,  se  disent  pour  la  philosophie 
qu'on  Y  enseignait;  —  6«  le  physique  pour  le  moral, 
ou  le  siège  d'une  faculté  ou  d'un  sentiment  pour  la  fa- 
culté ou  le  sentiment  lui-mômc  :  avoir  du  cœur,  c.-à-d. 
du  couraj^e  ;  femme  de  tête ,  c.-à-d.  qui  a  de  la  fermeté  ; 
une  méchante  langue,  c-à-d.  une  personne  médisante  ; 
homme  sans  cervelle,  c-à-d.  irréfléchi;  homme  sans  en^ 
trailles,  c-à-d.  dur  ;  —  ?<>  l'abstrait  pour  le  concret  :  ma 
demande,  pour  la  chose  que  Je  demande  ;  mon  espérance, 
oour  la  chose  que  J'espère  : 

Les  vAlnqaenrs  ont  parld  :  Veselavage  en  aliénée 
Obéit  à  leur  rois  dans  cette  vUle  immense. 

VoLTAiBB.  l'Oiphelin  de  la  Chine,  acte  I,  bc.  S. 

—  8^  le  maître  ou  le  patron,  pour  la  chose  qui  lui  appar- 
tient :  S^-Pierre  de  Rome,  Notre-Dame  de  Paris,  pour 
les  églises  placées  sous  le  patronage  de  S^  Pierre  et  de  la 
S**  Vierge;  les  Pénates,  pour  la  demeure;  —  9"  le  nom 
du  souverain ,  pour  la  monnaie  qui  porte  son  effîgie  :  un 
louis,  un  napoléon;  —  lO**  le  possesseur  pour  la  chose 
possédée  :  on  dit  d'un  homme  qu'il  a  été  incendiéy  pour 
signifier  que  sa  maison  a  été  brûlée.  B. 

MÉTOPE  (du  grec  meta,  entre,  et  opé,  trou),  intervalle 
carré  qui ,  dans  la  frise  dorique,  sépare  les  triglyphes. 
Dans  l'origine  de  larchitecture  grecque,  les  métopes 
étaient  les  espaces  laissés  sur  la  face  entre  les  extrémités 
des  poutres  formant  le  plafond  ;  elles  durent  même,  dans 
le  principe,  rester  vides  et  servir  à  éclairer  l'intérieur 
d(?s  édifices:  elles  furent  closes,  et  présentèrent  à  la 
sculpture  un  champ  dont  celle-ci  sut  profiter.  Tantôt  on 
y  représentait  des  têtes  de  victimes  ou  des  boucliers, 
tantôt  on  y  sculptait  les  scènes  des  luttes  héroïques; 
quelquefois  même  on  y  plaçait  des  ornements  en  métal. 

METRE,  pied  déterminé  par  la  quantité  des  syllabes: 
•Snsi,  le  spondiîc  (— ),  le  dactyle  ("^''),  l'anapeste 


(-*'"),  l'iambe  ("^  "1,  sont  des  mètres.  Un  vers  composé 
de  6  pieds  s'appelle  hexamètre;  un  vers  de  5  pieds,  pen- 
tamètre. Cependant  V hexamètre  iambique  {senarius]  re- 
cevait souvent  le  nom  de  tnmètre;  c'est  qu'au  lieu  de 
compter  par  pied,  on  comptait  par  système  de  pieds  pour 
le  scander  ;  ainsi  une  dipodie  formait  un  mètre.  Le  mot 
mètre  est  peu  employé  et  peu  convenable  pour  les  lan- 
gues modernes,  la  française  surtout  :  on  y  donne  quel- 
quefois ce  nom  à  la  réunion  de  deux  syllabes;  ainsi 
nous  disons  heoMmètre  au  lieu  d'alexandrin,  pentamètre 
au  lieu  de  vers  de  dix  syllabes,  etc.  P. 

MÉTRIQUE ,  mot  qui  désigne  surtout  la  connaissance 
de  la  quantité  et  des  différents  mètres  de  la  versification 
ancienne.  Diomède  et  Terentianus  Maurus  ont  laissé  di^ 
Métriques  latines  qui  nous  sont  très-précieuses.  F.  I^o- 
soDiR,  Versification.  P. 

MÉTROMÈTRE.  V.  Chronomètre. 

MÉTRONOME  (du  grec  métron,  mesure,  et  nomns, 
loi,  règle),  instrument  employé  pour  indiquer  les  divers 
degrés  de  vitesse  du  mouvement  musical.  Il  se  compose 
d'un  balancier  enfermé  dans  une  petite  boite  p>Taniidale, 
et  dont  les  oscillations,  sensibles  à  l'oreille,  marquent  les 
temps  de  la  mesure.  Ces  oscillations  peuvent  être  acrélé- 
rées  ou  ralenties,  en  déplaçant  un  poids  mobile  porté  sur 
une  tige  adaptée  au  balancier.  Les  numéros  d'une  échelle 
placée  derrière  le  balancier  indiquent  le  nombre  des  os- 
cillations au'il  exécute  dans  une  minute.  Le  métronome 
donne  28  degrés  de  mouvement.  Beaucoup  de  morceaux 
de  musi^e  portent  aujourd'hui  le  numéro  de  cet  instru- 
ment qui  correspond  au  mouvement  que  Tauteur  a  voulu 
donner  à  son  œuvre.  Le  métronome  a  été  inventé  ou 
plutôt  perfectionné  en  1815  par  Maelzel.  B. 

MÉTROPOLE.  V»  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

METTEUR  EN  PAGES.  V.  Iiiposmoif. 

METZ  (Église  S^-Étiennb,  à).  Cette  église  cathédrale, 
fondée  en  i014,  s'éleva  avec  une  extrême  lenteur;  elle  ne 
fut  entièrement  achevée  qu'en  1546.  Située  sur  l'un  des 
côtés  d'une  place,  en  face  de  l'hôtel  de  ville,  elle  domine 
toute  la  cité,  et  présente  de  loin  un  aspect  imposant.  Les 
contre-forts  sont  couronnés  de  clochetons  aigus  en  pj'^ra- 
mides  octogones,  et  les  arcs-boutants  décora  de  festons. 
L'une  des  tours,  surmontée  d*une  flèche  à  jour,  a  85  met. 
de  hauteur,  et  renferme  une  cloche  nommée  Mutte,  qui 
pèse  13,000  kilogr.;  l'autre  n'a  point  été  achevée;  au  lieu 
d'être  élevées  sur  la  façade,  ces  tours  sont  posées  sur  les 
troisièmes  travées  des  collatéraux  de  la  nef.  Le  portail 
principal,  que  Ton  rebâtit  sous  Louis  XV,  en  mémoire 
de  la  guérison  de  ce  prince  à  Metz,  est  une  construction 
d'ordre  dorique,  lourde  sous  des  ornements  sans  nombre, 
triste  avec  des  airs  de  coquetterie  ccmme  tout  le  style 
Pompadour,  et  qui ,  accolée  à  un  monument  gothique, 
est  singulièrement  choquante.  Dans  cette  façade  mo- 
derne est  incrustée  l'ancienne  rose,  dont  l'élégance  est 
encore  rehaussée  par  le  contraste  des  formes  qui  l'avoi- 
siucnt.  Il  est  regrettable  que  des  échoppes  et  des  mai- 
sons encombrent  l'extérieur  de  l'édifice.  Le  plan  général 
de  la  cathédrale  de  Metz  est  une  croix  latine,  ma»  dont 
les  bras ,  comme  à  Reims  et  à  Ch&lons-sur-Mame,  sont 
plus  rapprochés  du  sanctuaire  que  dans  les  autres  cathé- 
drales; il  en  résulte  que  le  chcôur  empiète  de  toute 
l'étendue  de  la  croisée  sur  le  reste  de  l'édifice  :  l'har- 
monie souffre  de  cette  modification  au  plan  universelle- 
ment adopté.  La  nef,  à  sa  partie  inférieure,  appartient 
au  style  ogival  primitif,  et,  à  sa  partie  supérieure,  au 
style  secondaire;  le  transept,  le  chœur  et  l'abside  sont 
du  style  tertiaire.  Les  dimensions  générales  sont  :  lon- 
gueur totale,  l'24'^\35;  largeur  de  la  nef,  IG  mëU;  lar- 
geur des  collatéraux,  14™,  G5;  hauteur  de  la  nef  sous 
voûte,  44'", 33;  hauteur  de  la  voûte  des  collatéraux, 
13  met.  On  admire  la  beauté  de  la  grande  nef,  qui  est 
la  plus  haute  de  France,  l'espacement  hardi  des  piliers, 
le  développement  et  la  richesse  des  fenêtres  ornées  de 
précieuses  verrières,  et  dont  les  meneaux  sont  diverse- 
ment  façonnés  selon  le  st^le  de  la  construction.  La  plu- 
part des  piliers  sont  cylindriques,  et  les  chapiteaux  à 
feuillages  sont  traités  avec  grâce  et  délicatesse;  au-dessus 
des  arcades  ogivales  règne  une  autre  série  d'arcades  à 
plein  cintre  s'appuyant  sur  des  modillons  à  figures  bi- 
zarres, réminiscence  assez  surprenante  du  style  roman. 
Les  piliers  de  l'entre-croisement  de  la  nef  et  des  tran- 
septs sont  accompagnés  de  colonnettes  à  demi  engagées, 
qui  s'élancent  Jusqu'à  la  naissance  de  la  voûte  pour  en 
supporter  les  nervures  et  servir  d'appui  aux  arcs-dou- 
blcaux.  Les  fenêtres  ouvertes  aux  extrémités  du  transept 
se  distinguent  par  la  grandeur  de  leurs  proportious  ci 


MEU 


1247 


M  EX 


par  leur  eiécution  large  et  savante.  Les  chapelles  absi- 
(lales  et  les  grandes  ouvertures  du  rond-point  oflîrent  une 
ordonnance  symétrique  et  une  perspective  pittoresque. 
Les  vitraux  du  chœur  ont  été  exécutés  de  i52i  à  1520 
par  Antoine  Bousch,  peintre-verrier  de  Strasbourg.  On 
doit  déplorer  que  Taire  du  chœur  ait  été  considérable- 
ment exhaussée  au  siècle  dernier,  et  qu'en  établissant 
les  degrés  par  lesquels  on  y  monte  on  leur  ait  donné  une 
saillie  semi-circulaire  sur  la  nef.  Il  n*y  a  pas  plus  de 
goût  dans  la  décoration  des  chapelles.  V.  Bégin ,  His- 
toire et  description  de  la  catJiedràle  de  Metz,  Metz,  1842, 
in-8».  B. 

METZ  (École  de).  V.  École  d'aiitillerie,  dans  notre 
Dicticmnaire  de  Biographie  et  d^Histoire. 

MEUBLE,  mot  qui  s*est  appliqué  d'abord  à  tout  ce  qui 
est  mobile,  facile  à  remuer,  et  qui  a  désigné  ensuite  tout 
objet  garnissant  un  appartement  ou  servant  à  divers 
usages  de  la  vie,  comme  les  lits,  tables,  commodes,  se- 
crétaires, armoires,  chaises,  fauteuils,  canapés,  etc.  La 
fabrication  des  meubles  forme  une  partie  importante  de 
l'ébénisterie  (K.  ce  mot), 

MEUBLES ,  en  termes  de  J>roit,  toutes  les  choses  mo- 
bilières. Sont  meubles  par  leur  nature  :  les  corps  qui 
peuvent  être  transportés  d*un  lieu  à  un  autre,  soit  par 
Feffet  d*une  force  étrangère,  comme  les  choses  Inanimées, 
Goit  par  leur  propre  mouvement,  conmie  les  animaux  ; 
les  bateaux,  bacs  et  navires,  les  bains  sur  bateaux,  les 
moulina,  et  généralement  toutes  usines  non  fixées  par 
des  piliers;  les  objets  ajoutés  à  un  immeuble  comme 
décoration  par  un  locataire  ;  les  matériaux  destinés  à  la 
construction  d'un  immeuble,  et  ceux  à  retirer  ou  prove- 
nant de  démolitions;  les  coupes  ordinaires  de  bois  tûllis 
ou  de  futaies,  qu'elles  soient  faites  ou  simplement  ven- 
dues sur  pied;  les  fruits  détachés  de  la  terre.  Sont 
meubles  par  détermination  de  la  loi  ou  par  fiction  :  les 
obligations  et  actions  qui  ont  pour  objets  des  sommes 
exigibles  ou  des  effets  mobiliers;  les  actions  ou  intérêts 
dans  les  compagnies  de  finance,  de  commerce  ou  d'in- 
dustrie; les  rentes  perpétuelles  ou  viagères,  soit  sur 
l'État,  soit  sur  de  simples  particuliers.  On  nomme 
meubles  incorpùrels,  par  opposition  aux  meubles  corpo- 
rels, les  droits  mobiliers  qui  ne  se  rapportent  pas  à  un 
corps  certain.  On  entend  par  meubles  meublants  ceux 
destinés  à  Pusage  et  à  l'omcment  des  appartements, 
comme  tapisseries,  lits,  sièges,  glaces,  pendules,  tables, 
porcelaines  et  autres  objets  de  cette  nature  :  les  tableaux, 
les  statues,  les  porcelaines  n'en  font  pas  partie,  du  mo- 
ment que  ce  sont  des  ^eries  ou  des  collections  particu- 
lières. Le  mot  meMe^  employé  dans  les  dispositions  de 
la  loi  ou  des  particuliers,  sans  addition  ou  désignation , 
ne  comprend  pas  l'argent  comptant,  les  pierreries,  les 
livres,  les  médailles,  les  instruments  des  sciences,  arts 
et  métiers,  le  linge  de  corps,  les  armes,  les  équipages, 
les  vins,  grains,  foins  et  autres  denrées,  les  dettes  ac- 
tives, enfin  tout  ce  qui  fait  l'objet  d'un  commerce,  bien 
que  ces  divers  objets  soient  rangés  parmi  les  biens  mo- 
biliers. Le  propriétaire  d'une  maison  a  le  droit  de  se  faire 
payer  ses  loyers  sur  les  meubles  du  locataire.  Les  saisies 
qu'un  créancier  peut  pratiquer  sur  les  meubles  de  son 
débiteur  varient  selon  Tobjet  auquel  elles  s'appliquent 
(K.  Saisis}.  Certains  créanciers  ont  un  privilège  sur  les 
meubles  (V,  PriviliSgb).  V.  Chavot,  Traité  de  la  pro- 
prièté  mobilière  suivant  le  Code  civil,  1839,  2  vol.  in-8<». 

iiEDBLES,  en  termes  de  Blason,  toutes  figures  qui  entrent 
dans  Técu ,  figures  humaines,  parties  du  corps  humain , 
arbres,  fleurs,  fruits,  etc. 

MEURTRE  ,  homicide  provenant  de  coups  donnés  vo- 
lontairement ,  mais  sans  préméditation.  Il  est  puni  des 
travaux  forcés  à  perpétuité,  sauf  le  cas  de  légitime  dé- 
fense (V.  ce  mot),  et  celui  d'adultère  (V.  ce  mot)  :  en 
toute  autre  circonstance  où  le  fait  d'excuse  est  prouvé,  la 
peine  du  meurtre  est  réduite  à  un  emprisonnement  de 
1  à  5  ans.  Indépendamment  de  l'action  publique,  les  pa- 
rents du  défunt  ont  une  action  en  dommages-intérêts 
contre  le  meurtrier. 

MEURTRIÈRES,  ouvertures  longues  et  étroites  à  l'ex- 
térieur, larges  et  évasées  à  l'intérieur,  percées  dans  les 
murs  des  forteresses,  et  permettant  aux  défenseurs  de 
tirer  avec  avantage  sur  les  assaillants.  Il  en  existait  dès 
les  temps  les  plus  reculés,  et  elles  sont  encore  en  usage 
de  nos  jours.  Elles  s'appelaient,  au  moyen  &ge,  archières 
et  arbalétrières,  suivant  qu'elles  servaient  aux  archers 
on  aux  arbalétriers. 

MEURVIN,  un  des  romans  carloringiens  (K.  ce  mot)» 
Meurvin  est  le  fils  d'Ogier  le  Danois  et  de  la  fée  Mor- 
^ne.  T!  Ignore  <%an  baptême;  poussé  par  les  circonstances 


au  milieu  des  païens,  il  sort  enfin  de  sa  basse  condition 
à  force  de  courage,  et  se  mesure  avec  les  chevalien 
chrétiens,  Huon  de  Bordeaux,  Galicn  Rhétore,  O^cr,  etc. 
Charlemagne,  étant  venu  en  Palestine  pour  visiter  le 
tombeau  du  Christ,  est  fait  prisonnier  par  Meurvin  : 
mais  celui-ci ,  au  moyen  d'un  avertissement  céleste,  est 
instruit  de  sa  naissance  et  de  la  religion  dans  laquelle  il 
est  né;  il  donne  une  protection  respectueuse  à  son  illustre 
captif.  V.  la  Bibliothèque  des  romans,  de  février  1778. 

MEXICAIN  (Art).  I.  Architecture,  —  Le  Mexique  ef^t 
un  des  pays  où  l'on  trouve  en  plus  grand  nombre  les 
monuments  de  l'art  primitif  américain  {V,  ce  mot)  :  le 
plateau  d'Anahuac  en  ofi're  qui  sont  antérieurs  à  l'arrivée 
des  Aztëçiues  dans  le  pays.  Ce  sont  surtout  des  pyra- 
mides, dites  téocallis,  et  qui  ont  une  destination  reli- 
gieuse. Il  y  en  a  deux  d'inégale  grandeur  dans  la  vallée  do 
Mexico,  à  San-Juan  de  Teotihiuu:an  :  les  indigènes  les 
nomment  encore  aujourd'hui  les  Maisons  du  Soleil  et  de 
la  Lune,  à  qui  elles  étaient  consacrées.  On  montait  jadis 
au  sommet  de  chacune  d'elles  par  un  grand  escalier  de 
larges  pierres  de  taille.  Elles  étaient  surmontées  de  petits 
autels,  avec  des  coupoles  en  bois,  et  de  statues  colossales 
couvertes  de  feuilles  d'or.  On  y  distinguait  quatre  étages, 
subdivisés  en  petits  gradins  d  un  mètre  de  haut.  Les  ra- 
vages du  temps  et  la  végétation  des  cactus  et  des  agaves 
en  ont  déçradé  l'extérieur.  Selon  les  traditions  indiennes, 
elles  seraient  creuses.  Autour  des  deux  grandes  pyra- 
mides, et  aboutissant  à  leurs  quatre  faces,  sont  disposées 
en  allées  plusieurs  centaines  de  petits  téONcallis,  hauts  de 
9  à  10  met,  et  dédiés,  dit-on,  aux  étoiles;  on  croit  qu'ils 
servirent  de  sépulture  à  des  chefs  de  tribu.  —  Plus  à  l'E., 
au  milieu  d'une  forêt  voisine  du  golfe  du  Mexique, 
s'élève  la  pyramide  de  Papantla,  découverte  vers  la  fin 
du  siècle  dernier.  De  forme  plus  élancée  que  les  précé- 
dentes, et,  comme  elles,  construite  en  pierres  de  taille 
d'une  coupe  belle  et  régulière,  elle  eut  six  et  peut-être 
sept  étages  :  elle  est  toute  couverte  de  sculptures  hiéro* 
glyphiques,  et  présente  une  suite  de  petites  niches  dis- 
posées symétriauement,  et  dont  le  nombre,  selon  M.  de 
Humboldt,  serait  une  allusion  aux  318  signes  du  calen- 
drier des  Toltèques.  Elle  a  18  met  de  hauteur,  sur 
25  de  largeur  à  la  base.  Trois  escaliers  conduisent  au 
sommet  —  La  pyramide  de  Cholula,  dite  Montagne 
faite  de  main  d'homme,  ressemble  de  loin  à  une  col- 
line naturelle  chargée  d'une  épaisse  végétation.  Elle  est 
à  quatre  étages,  et  faite  de  couches  de  briques  alter- 
nant avec  des  couches  d'argile;  ses  côtés  sont  exacte- 
ment orientés  d'après  les  points  cardinaux.  La  base  a 
450  met  de  côté  ;  la  hauteur  est  de  56  met.,  comme  à 
la  plus  cpinde  des  pyramides  de  Teotihuacan.  A  l'inté- 
rieur existaient  des  cavités  considérables,  servant  à  la 
sépulture.  Sur  la^late-forme,  qui  présente  une  surface 
de  4,200  met  carrés,  s'élevait,  au  temps  des  Aztèques, 
un  petit  autel  dédié  au  Dieu  de  l'air  :  les  Espagnols  l'ont 
remplacé  par  une  église  sous  l'invocation  de  Notre-Dame 
de  Los  Remédies;  elle  est  entourée  de  cyprès.  —  Le  mo- 
numen^«  de  Xochicalco,  oue  l'on  appelle  la  Maison  des 
fleurs,  appartient  à  l'arcnitecture  militaire.  C'est  une 
colline  isolée,  de  117  met.  d'élévation,  qui  a  reçu  des 
hommes  une  forme  conique  assez  régulière,  et  qu'entoure 
un  large  fossé.  Sa  plate-forme,  de  près  de  9,000  mètr. 
cxurrés,  est  défendue  par  un  mur  en  pierres  de  taille.  On 
ne  peut  trop  admirer  le  poli  et  la  coupe  de  ces  pierres,  le 
soin  avec  lequel  elles  ont  été  jointes,  sans  qu'on  ait  eu 
recours  au  dment,  et  l'exécution  des  figures  en  relief 
dont  elles  sont  ornées. 

Quant  aux  Aztèques,  on  ne  peut  Juger  de  leur  archi- 
tecture que  par  les  récits  des  conquérants  espagnols  :  la 
nature  des  matériaux  qu'ils  employèrent  expliquerait  la 
ruine  de  leurs  constructions,  lors  même  que  les  Espa- 
gnols n'auraient  pas  détruit  de  fond  en  comole  la  plupart 
des  villes  mexicaines.  Les  maisons  des  pauvres  étaient 
faites  de  roseaux  ou  de  briques  non  cuites,  et  couvertes 
d'une  espèce  de  gazon  sur  lequel  on  fixait  des  feuilles 
d'aloès  taillées  en  forme  de  tuiles  :  elles  n'avaient  ou'un 
appartement,  où  toute  la  famille  vivait  pêle-mêle.  Dans 
les  villes,  chaque  maison  avait  un  petit  oratoire  et  une 
salle  de  bain.  Les  habitations  des  grands  étaient  con- 
struites en  pierres  rouges,  poreuses,  friables,  légères, 
réunies  par  un  mortier  de  chaux  ;  elles  se  terminaient 
par  un  toit  plat  et  en  forme  de  terrasse.  On  se  servait 
dos  mêmes  matériaux  pour  les  palais  et  les  temples. 

II.  Peinture,  —  Les  Mexicains  ont  employé  ia  pein- 
ture, tantôt  pour  représenter  les  dieux,  les  rois,  les 
grands  hommes,  les  animaux  et  les  plantes,  tantôt  dans 
nn  but  purement  topotrraphique  ou  chorographîq'ie,  pour 


MEI 


au 


MËI 


donnor  Timage  d'une  province,  d'un  littoral,  d'une 
ville,  d'un  fleuve,  tantôt  enfin  comme  moyen  d'exprimer 
symboliquement  la  pensée.  Partout  le  dessin  est  d*une 
extrême  incorrection;  les  couleurs  sont  vives,  tran- 
chantes, posées  de  manière  à  établir  les  contrastes  les 
plus  prononcés:  les  personnages  ont  généralement  le 
corps  large,  trapu  et  très-court,  la  tète  d*une  grosseur 
énonne,  les  doigts  des  pieds  fort  longs.  Les  tôtes  sont 
dessinées  de  profil,  mais  Tœil  est  celui  d*une  figure  do 
face.  C'est  Tart  dans  sa  première  enfance.  S*il  y  a  des 
peintures  moins  informes,  elles  sont  postérieures  à  la 
conquête  espagnole.  K  Léon  de  Rosny,  Collection  d'at^ 
ciennes  peintures  meodcaines.  Paria,  1855,  in -4^  et 
atlas  in-folio. 

On  doit  citer  comme  monuments  de  Tindustrieuse  pa- 
tience des  Aztèçiues  ces  mosaïques  en  plumes  qui  exci- 
tèrent Tadmiration  des  Espagnols,  et  qu'on  estimait  à  un 
prix  fort  élevé.  Ces  plumes  recevaient  mille  formes  di- 
iTcrbcs,  et  s'unissaient  si  parfaitement  au  moyen  d*un  suc 
gommeux,  que  tout  le  tableau  semblait  une  couche  de 
pointure,  vive,  brillante,  nuancée,  et  remarc|uable  surtout 
par  la  dégradation  des  teintes.  La  perfection  de  cet  art 
étonne,  quand  on  sonae  que  la  peinture  proprement  dite 
fit  »i  peu  de  progrès,  u.  fut  encore  pratiqué  sous  la  domi- 
nation espagnole,  et  il  ne  s*est  perdu  qu'au  xvui*  siècle. 

m.  Sculpture,  —  La  sculpture  mexicaine  participa  de 
la  barbarie  de  la  peinture  :  c'est  le  même  système  de 
dessin.  Les  reliefs  les  moins  imparfaits  sont  ceux  qui  dé- 
corent les  pyramides  de  Papantia  et  de  Xochicalco.  Com- 
ment se  fait-il  que  l'art  soit  demeuré  si  grossier  chez  un 
peuple  qui  semblait  s'en  occuper  avec  intérêt,  puisou*i1 
multipliait  les  idoles,  les  statues,  les  pierres  sculptées? 
«  Le  caractère  de  la  figure  humaine,  dit  M.  de  Hum- 
boldt,  disparaissait  sous  le  poids  des  vêtements,  des  cas- 
ques à  têtes  d'animaux  carnassiers,  et  des  serpents  oui 
entortillaient  le  corps.  Un  respect  religieux  pour  les 
signes  faisait  que  chaque  idole  avait  son  type  individuel, 
dont  il  n'était  pas  permis  de  s'écarter.  C'est  ainsi  que  le 
culte  perpétuait  rincorrection  des  formes,  et  que  le 
peuple  s'accoutumait  à  ces  réunions  de  parties  mons- 
trueuses que  l'on  disposait  cependant  d'après  des  Idées 
systématiques.  L'astrologie,  et  la  manière  compliquée 
de  désigner  graphiquement  les  divisions  du  temps,  étaient 
la  principale  cause  de  ces  écarts  d'ima^nation.  Chaque 
événement  paraissait  influencé  à  la  fois  par  les  hiéro- 

f;lyphes  qui  présidaient  au  Jour,  à  la  demi-décade,  ou  à 
'année.  De  là  l'idée  d'accoupler  des  signes,  et  de  créer 
CCS  êtres  purement  fantastiques  que  nous  trouvons  ré- 
pétés tant  de  fois  dans  les  monuments  qui  sont  parvenus 
Jusqu'à  nous.  »  On  a  rapporté  du  Mexique  un  grand 
nombre  de  vases  en  terre  cuite,  coloriés  et  vernis ,  qui 
ont  beaucoup  d'analogie  avec  ceux  des  anciens  Étrusques. 
IV.  Musique,  -r  Malgré  le  luxe  et  la  civilisation  rela- 
lativcment  avancée  des  Mexicains  lorsque  leur  pays  fut 
conquis  par  les  Espagnols,  on  ne  trouva  rien  parmi  eux 
cfui  fût  digne  du  nom  de  musique.  Leurs  principaux 
instruments  étaient  deux  tambours,  le  huehuetl  et  le 
teponaztli  (V,  ces  mots).  Ils  avident  aussi  des  trompes, 
des  conques  marines,  des  flûtes  qui  rendaient  un  son 
ai^,  et  un  instrument  dont  se  servaient  les  danseurs, 
Vajacastli  (V.  ce  mot), 

Y.  Numismatique,  —  Les  Mexicains  se  servaient, 
dans  leurs  échanges,  de  sacs  de  cacao,  contenant  chacun 
'ii,000  grains,  et  de  petits  ballots  de  toile  de  coton.  Ils 
donnaient  aussi,  en  guise  de  monnaie,  de  la  poudre  d'or 
contenue  dans  des  tuyaux  de*  plumes  d'oiseaux  aquati- 
ques, tuyaux  transparents  pour  qu'on  pût  reconnaître  la 
grosseur  des  grains  d'or  et  leur  qualité.  Dans  ouel- 
aues  provinces,  la  monnaie  courante  consistait  en  pièces 
(le  cui\Te  auxquelles  on  avait  donné  la  forme  d'un  T. 
Aux  environs  de  Tasco,  on  se  servait  de  très-minces 
pièces  d*étain  fondues.  V,  Alex.  Lenoir,  Antiquités  mexi- 
caines. Paris,  183G;  Aglio,  Antiquities  of  MeaHco,  Lon- 
dres, 1830. 

MEXICAINE  (Religion).  Ce  que  nous  savons  de  cette 
religion  nous  a  été  transmis  par  les  auteurs  espagnols 
du  \\f  siècle,  qui  écrivaient  à  une  époque  où  les  traces 
de  l'antique  civilisation  du  Mexique  n'étaient  pas  encore 
complètement  efIacée8.Les  Mexicains  croyaient  à  un  Dieu 
suprême,  créateur  et  maître  de  l'univers,  et  au-dessous 
duquel  se  rangeaient  IS^grands  dieux  et  plus  de  200  de 
moindre  importance.  Les  plus  vénérés  étaient  Huitzilo- 
potchli,  dieu  de  la  guerre,  et  QuetzalcoatI,  dieu  de  l'air, 
oui  avait  enseigné  aux  hommes  la  culture,  le  travail 
dos  métaux  et  1  art  de  gouverner.  De  nombreuses  lé- 
gi-ndes  MT  la  vie  des  dieux  rappelaient  les  métamor- 


phoses racontées  par  les  poètes  greo»  et  latins  tu  si^ 
des  habitants  de  rOlympe.  D'autre»  avaient  une  analogie 
frappante  avec  les  traditions  bibliques  :  ainsi,  les  Meii- 
cains  connaissaient  le  dogme  d'un  péché  originel,  dont 
on  se  purifiait  par  le  baptême,  et  regardaient  le  genre 
humain  comme  Jeté  par  punition  sur  U  terre;  le  déluge 
universel  et  l'histoire  de  la  tour  de  Babel  leur  étaient 
connus  avec  des  circonstances  semblables  à  celles  qu'on 
trouve  dans  la  Bible.  Leurs  dogmes  et  leurs  pratiques  fe 
rapprochaient  même  en  certains  points  du  christianisme: 
dans  une  cérémonie  pareille  à  celle  de  la  Communion,  les 
prêtres  distribuaient  aux  fidèles  les  fragments  d'une iRia|;'} 
de  Dieu,  que  l'on  mangeait  comme  sa  chair  même  :  ils 
avaient  une  sorte  de  Confession  et  une  absolution  reli- 
gieuse; enfin  la  croix  figurait  parmi  les  objets  du  culte. 
Les  Mexicains,  considérant  le  séjour  de  l'homme  sur  la 
terre  comme  une  expiation,  croyaient  que  tous  les  Cires 
ont  besoin  d'être  rachetéty  et  que  la  divii«ité  s'apaise 
avec  le  sang  :  de  là  l'usage  dea  acnfices  humains,  ii* 
concevaient  dans  la  vie  future  trois  états  qu  on  puurrrài 
comparer  au  Paradis,  au  Purgatoire  et  à  l'Enrcr  de^ 
chrétiens  :  seulement  leur  Enfer  n'avait  pas  de  torturer 
physiques,  et  le  châtiment  des  damnés  consistait  en 
peines  morales,  en  remords.  Ils  croyaient  que  le  monde 
avait  prouvé  quatre  catastrophes,  où  tout  avait  péri  : 
pour  conjurer  un  cinquième  catacivsme,  ils  célébraient, 
vers  le  solstice  d'hiver,  qui  concordait  avec  la  fin  de  leur 
année,  une  fête  commémorative  de  la  fin  et  du  renou- 
vellement du  monde,  et  se  livraient  pendant  cinq  Jours  à 
des  manifestations  de  désespoir;  alors  on  brisait  les  pe- 
tites images  des  dieux  qui  ornaient  les  maisons  comme 
les  Lares  des  Romains,  et  on  laissait  mourir  le  feu  sacré 

3ui  brûlait  dans  les  temples  :  venaient  ensuite  i'i  jours 
e  fête  pour  rendre  grâce  aux  dieux  de  laisser  vivre  en- 
core l'espèce  humaine.  —  Les  prêtres  formaient  un  corps 
nombreux,  riche  et  puissant,  et  qui  s'était  réservé  le 
monopole  de  l'enseignement;  ils  étaient  gouvernés  par 
deux  grands  prêtres  électifs,  qui  marchaient  immédiate- 
ment après  le  chef  de  l'État.  Il  y  avait  des  prétresses 
investies  de  certaines  fonctions,  mais  qui  ne  participaient 
point  aux  sacrifices.  V,  Michel  Chevalier,  De  la  civilisa- 
tion mexicaine  avant  Femand  Cortex,  dans  la  Revwi 
de  Deux  Mondes  de  1843. 
MEXIQUE  f  Langues  du).  Ceux  des  habitants  du  Mexique 

Siii  forment  la  population  blanche  descendent  des  an- 
ens  conquérants  espagnols,  et  parlent  le  castillan ,  mé- 
langé toutefois  de  termes  empruntés  aux  langues  indi- 
gnes. Les  mulâtres  et  les  nèsres  se  servent  du  même 
idiome,  avec  certains  mots  qui,  n'étant  ni  espagnols  ni 
indigènes,  ne  peuvent  provenir  une  des  langues  afri- 
caines apportées  en  Amérique  par  les  premiers  esclaves. 
Les  Mexicains  aborigènes,  au  dire  du  Jésuite  Clavijero, 
qui  vivait  au  milieu  du  xviii*  siècle,  ne  parlaient  pas 
moins  de  35  idiomes  différents  ;  au  commencement  de 
notre  siècle,  Alex,  de  Humbold  en  citait  quinze,  dont  il 
existe  des  Grammaires  et  des  Dictionnaires. 

La  langue  indigène  la  plus  répandue  est  Vaxtèque  ou 
mexicain  proprement  dit.  Cette  langue,  dont  le  centre 
est  le  plateau  d'Anahuac,  est  répandue  non-seulement 
dans  le  Mexique,  mais  encore  au  milieu  des  États  de 
l'Amérique  centrale  Jusqu'au  lac  de  Nicaragua  :  toutefois, 
son  vaste  domaine  est  coupé  et  divisé  par  celui  d'autres 
langues.  Elle  est  désignée  par  le  simple  qualificatif  de 
namatl  (clair,  sonore).  Pauvre  en  éléments  phonétiques, 
elle  manque  des  articulations  b,  d,  U  0*  r,  s,j^  II,  Qn;  en 
revanche  elle  en  possède  qui  reviennent  à  satiété,  no- 
tamment t,  z,  ch,  tl,  tz;  l'articulation  l  ne  ^  trouve 
Jamais  au  commencement  des  mots.  La  répétition  fré- 
quente des  syllabes  tli,  itl,  tla,  atl,  donne  de  la  mono- 
tonie et  de  fa  rudesse  à  la  prononciation.  L*accent  pro- 
sodique tombe  sur  la  pénultième  des  polysyllabes.  Ces 
polysyllabes,  noms  propres  ou  autres,  fort  longs  et  fort 
nombreux,  sont  formés  par  la  réunion  de  plusieurs  radi- 
caux significatifs,  qu'accompagnent  quelquefois  des  par- 
ticules explétives.  Il  n'est  pas  rare  d'en  trouver  de  10  ou 
13  syllabes  :  il  parait  cependant  que  de  pareils  mots  ne 
se  trouvent  pas  dans  la  langue  parlée,  et  que  ce  sont  des 
espèces  de  définitions  par  lesquelles  les  Mexicains  tra- 
duisaient, sur  la  demande  des  missionnaires  chrétiens, 
certaines  idées  pour  lesquelles  ils  n'avalent  Jamais  eu 
d'expressions  particulières.  En  aztèque,  il  n'y  a  pas  de 
genres  pour  les  objets  inanimés;  le  pluriel  des  noms 
d'objets  inanimés  se  forme  par  l'addition  du  mot  miec 
(beaucoup);  celui  des  noms  d'êtres  animés,  ordinai- 
rement par  la  répétition  de  la  syllid)e  initiale  et  la  ter- 
t  minuison  tin.  Les  quatre  premiers  noms  de  notiibN 


MEX 


1249 


MEX 


ferrent,  mur  leur  combinaison  aTOC  ceux  ({ni  eitwtawnt 
5, 10  et  15,  k  former  tous  les  autres.  Les  augmentatif  et 
lei  diminutifs  sont  très-nombreux.  Le  comparatif  s'ex- 
prime à  l'aide  de  particules;  Il  nV  a  pas  de  termes  saper- 
iatirs.  De  tout  substantif  ou  adjectif  on  peut  fUre  un 
f«rbe;  tout  verbe  peut  à  son  tour  se  convertir  en  sub- 
itaotif  au  moyen  d*une  flexion  particulière.  Les  n^iports 
ies  noms  s*expriment,  non  par  des  prépositions,  mais  par 
des  postpositiotts  ou  suffixes.  Suivant  le  rang  des  per- 
Kmnes  à  qui  ou  de  qui  Ton  parle,  la  phrase  s'allonge  de 
particules  révârencieuses  qu'on  ijoute  aux  verbes,  anx 
tdrertws  et  aux  noms.  —  La  langue  aztèque  a  subi, 
depuis  la  découverte  de  rAménque,  des  modiflcaF- 
tioos  assex  importantes.  Dès  le  xvi*  siècle,  les  Mexicains 
ne  comprenaient  plus  les  hymnes  antiques  dont  Ils  ac- 
oompagnaieDt  leurs  danses  sacrées.  Leur  langue  a  reçu 
de  l'espagnol  les  prépositions  de  l'usage  le  plus  ordinaiit). 
r.  Andres  de  Olmos,  Arit  et  Vocabularium  mêODÎeamtm, 
Mexico,  1555,  «n-l»;  Akmso  de  Molina,  Vocaôoîarw 
mnekano^  1555,  et  Art9  de  la  Ungua  mexioana,  157t 
Ant.  del  RIncon,  Arte  de  la  Ungua  mexuuma,  1505, 
in-^o;  Pedro  de  Arenas,  Vocabolario  de  Uu  letiguai 
outâ/ana  y  fiMancona»  1611,  in-12;  Die^  de  Gualda 
Oonnan,  GramnuUica  de  la  lengtM  mexkana,  1643, 
in-^;  Horaclo  Carochl,  An  copiosiss  ma  linguœ  meoÂ- 
cnm,  1645,  in-4<*  ;  Âug.  de  Vetancourt,  Arte  de  la  lengua 
mtxicana,  1673,  ln-4**;  Ant.  Vasquez  Gastelu,  Arte  de 
\aUikqwime3ncemat  Puebla,  1689,  iD-4«;  Manual  Ferez, 
krUéBla  Ungua  mexioana,  Mexico,  1713  ;  F^.  de  Avila, 
ÂrU  de  la  lengua  meoneana,  1717,  in-8'*;  Carlos  de 
Turia  Zenteno,  ArU  novUeima  de  la  lengua  mexicaina, 
1753,  in-4*;  Aldama  y  Guevara,  ArU  de  lalenguamexi* 
«flao^  1754,  in-13;  lanacio  Paredes,  Arte  de  la  lengua 
mtxKona,  1750;  Rafaël  Sondoval,  ArU  de  la  Ungua 
flMxîcaiia,i810. 

Si  nous  passons  aux  idiomes  secondaires  que  Ton  parie 
au  Mexique,  nous  trouvons  d'abord  le  mcofté^iM,  en 
osage  an  N.  de  Tescuco.  Il  diffère  de  Taztèque  par  les 
mots  et  par  la  grammaire,  et  ses  racines  paraissent  le 
nttacher  aux  langues  du  Yucatan.  Le  pluriel  des  noms 
ij  forme  à  l'idde  de  la  terminaison  cAïc  on  du  préfixa 
éam  (beaueoup).  On  peut  former  des  diminutifs  en 
ajoutani  aux  substantifs  la  terminaison  «!•  Les  pronoms 
l'emploient  eomme  aflflxes.  n  n'y  a  pas  de  verbe  substan- 
tif; les  antra  verbes  ont  deux  conjuçûsons,  différenciées 
entre  elles  par  le  prétérit.  F.  Carlos  de  Tu>ia  Zenteno, 
Mvâa  de  la  Ungua  huasteca,  Mexico,  1767,  in-4**. 

A  1*0.  de  Mexico,  dans  le  Mechoacan ,  on  parle  I» 
iasgoe  tanuque,  une  des  plus  harmonieuses  et  des  plus 
aoQons  de  l'Amérique.  Elle  manque  des  articulations 
fetl,  ne  commence  Jamais  un  mot  par  les  lettres  b,  d, 
Hf  t,  r,  et  emploie  souvent,  dans  le  corps  des  mots,  une 
f  eophonique.  Les  noms  sont  susceptibles  d'être  déclinés, 
ai  Ton  considère  comme  désinences  les  suffixes  ou  post- 
poaitioos  qui  expriment  les  rapports  des  mots.  Les  voix 
dea  verbes  se  forment  par  l'Intercalation  de  particules 
daotleor  radical.  F.  Angelo  Sierra,  Dictiùnnaire  ta^- 
[0<Viie,  Mexico,  1607;  Mathurin  Gilbort,  Grammaire  de 
la  langue  taraenue;  Diego  Basalenquc,  GrammcUre  ta- 
naquey  publiée  par  Nicolas  de  Quixas,  Mexico,  1714. 

La  langue  core  ou  cora  est  en  usage  dans  la  Nouvelle- 
Biaca^,  dans  les  prov.  de  Zacatecas  et  de  Guadalajara. 
Certains  auteurs  no  veulent  lui  reconnaître,  ainsi  qu'au 
tarasque,  aucune  affinité  avec  les  autres  idiomes  du 
Mexique,  tandU  que  d'autres  trouvent,  dans  ses  racines 
<t  daas  ses  Aexions,  des  ressemblances  avec  l'aztèque. 
Oa  y  remarque  quatre  formes  de  pronoms  personnels, 
KloQ  les  circonstances  différentes  dans  lesquelles  ils  sont 
^loves.  Le  r^me  et  le  pronom  font  corps  avec  le  ra- 
I  «Kil  da  verbe.  Les  articulations  d,  f,  q  manquent  à  cet 
Idiome.  V.  José  de  Ortega,  Vocabolarto  en  lengua  cas- 
!  W/oao  y  eora,  Mexico,  1732. 

I  £0  ae  rapprochant  du  golfe  de  Californie,  on  rencontre 
u  lingoe  tarahumara.  Elle  a  quelques  rapports  de  ra- 
cines avec  l'aztèque,  auquel  elle  a  emprunté  aussi  ses 
noms  de  nombre;  mais  ses  désinences  lui  sont  propres* 
kOn  n'y  connaît  pour  ainsi  dire  pas  d'adjectifs,  mais  on 
t  ^t  on  fréquent  emploi  des  participes.  Les  conjono* 
vou  se  placent  après  les  propositions  secondaires,  et  les 
^'"'^sitbos  après  leurs  compléments.  K.  Agost  de  Roa, 
*noirf  tarahumara;  Figueroa,  Grammaire  et  Dic^ 
noMna  tarahumara;  Miguel  Tellechoa,  Grammattca 
omara,  Mexico,  1826. 

Sur  la  côte  mexicaine  du  çolfe  de  Californie ,  dans  le 
hf>  de  Sottorm,  on  se  sert  de  la  langue  opata,  dont  il 
niiteane  Grammaire  par  Natal  Lombarde  (Âlexioo,  1702), 


et,  pins  an  N.  eneore,  de  la  langue  pmmu  GeHe-d,  qol 
a  de  nombreux  rapports  avec  le  tarahumara,  n*a  ni  pré* 
positions  ni  conjonctions  t  dana  la  coi^ugaison,  les  pro-' 
noms  seuls  indiquent  les  personnes. 

La  langue  othomi,  parlée  dans  le  Nouveau-Mexique  V 
est  la  plus  répandue  après  l'aztèque.  Elle  manque  de» 
articulations  f,  l,  r,  i,  mais  possède  beaucoup  d'asplr»*- 
tions  gutturales  et  nasales  oui  n*ont  pas  d'analoguec 
dans  nos  langues.  Les  Othomis  ont  une  manière  sèche 
et  brusque  d'articuler  les  consonnes  fc,  p  et  t,  qu'on  w 
comparée  au  bruit  que  font  les  singes  en  cassant  det 
noix,  et  qui  a  fait  appeler  ees  consonnes  détonantei. 
Ils  prononcent  les  voyelles  avec  une  variété  de  tons  ou 
accents  qui  servent  à  distinguer  une  foule  de  mots 
autrement  homophones.  Mids  ce  qui  caractérise  surtout 
Tothomi  parmi  les  langues  environnantes,  c'est  le  mono- 
•vllabisme  de  ses  mots  :  le  nombre  des  mots  de  deux  et 
principalement  de  trois  syllabes  est  très-restreint.  U  n'y 
a  ni  genres  grammaticaux  ni  flexions  dans  les  noms.  Un 
même  mot»  suivant  le  sens  général  de  ceux  qui  l'acconH 
pagnent,  est  substantif  ou  verbe  ;  il  peut  aussi  avoir  à  la 
ois  les  sens  d'adjectif  et  d'adverbe.  Quand  cela  est  né» 
oessfiire  pour  la  clarté  de  la  phrase,  on  fait  précéder  le 
nom  de  la  particule  na  pour  indiouer  le  substantif,  et  de 
la  particule  sa  pour  indiquer  l'adiectif  \  on  peut  encore 
distinguer  le  substantif  et  l'adjectif  par  la  règle  qui  vent 
que  le  qualificatif  précède  le  terme  qualifié.  La  conjn- 
eaison  se  fait  au  moyen  de  particules  indiquant  les  idées 
de  personne,  de  temps  et  de  mode.  La  uistinction  des 
voix  est  inconnue.  V,  Luis  de  Neve  y  Molina,  Réglât  de 
orthographia,  dkeionario  y  arU  M  idioma  othomi, 
Mexico,  1767,  ln-8^;  Joaquim  Lopez  Yepes,  Vocabulaire 
otitomi,  à  la  suite  de  son  Catéchisme^  ibid.,  1826,  in-4^; 
Naxera,  De  linguà  Olhomitorum,  dans  les  Transactione 
de  la  Société  philosophique  améneame^  Philadelphie  « 
1835,  in-8<*;  Piccolomlni ,  Orommatica  dMla  lingua  o<a- 
mt,184i,in-8*. 

Au  S.  de  Mexico,  dans  la  vallée  de  Toluca,  on  parle  le 
matUuingue,  essentiellement  différent  de  Taztèque,  et 
dont  nous  avons  une  Grammaire  et  un  Vocabulaire  pat 
Andréa  de  Castro.  —  Le  tlapanèqm  n*est  plus  en  usage 
que  dans  l'Etat  de  Puebla. 

La  langue  totonaque  domine  inr  les  oètes  du  golfe  du 
Mexique,  dans  l'État  de  Vera-Cruz.  Les  consonnes  b,  d, 
f,  k  e!tv  manquent  à  cette  langue.  Les  cas  y  sont  ex- 
primés par  une  sorte  d'article  ;  fa  distinction  des  genres 
Îr  est  Inconnue,  et  celle  des  nombres  ne  se  fait  que  pour 
es  noms  d'êtres  animés.  La  coqjugaison  est  trèÂ-riche. 
Les  nrépositions  précèdent  leurs  compléments.  V.  Andres 
de  Olmos,  Grammatica  et  Lexicon  linguarum  mexi- 
canoë,  totonacm  et  huaxtecœ,  Mexico,  1560,  inr4^;  Eug. 
Romero,  ArU  para  aprender  las  Uûgwu  mexicana  et 
totonaca;  Zambrano  y  Bonilla,  ArU  de  la  lengua  toto* 
naca,  Puebla.  1752  ;  Diaz  de  Anaya,  Grammaire  et  Dio» 
tionnaire  de  la  langue  totonaca. 

Le  mistèque  a  cours  dans  les  États  d'Oaxaca  et  de 
ChiiHI».  Il  manque  des  articulations  6,  f,  p,  r.  Il  a  na 
grand  nombre  de  pronoms  personnels  différents,  dont 
l'emploi  dépend  de  l'âge,  du  sexe  et  de  la  condition  des 
Interlocuteurs,  ou  de  ce  que  l'objet  d6nt  on  parle  est 
animé,  inanimé  ou  mort.  La  né^Ltion  varie  aussi  selon 
les  temps  du  verbe.  La  conjugaison  est  riche,  mais  elle 
n*a  pas  de  passif  par  flexion.  Le  verbe  substantif  y  -est 
tout  régulier.  11  y  a  un  grand  nombre  de  verbes  fréquen- 
tatifs, y.  A.  de  los  Reyes,  ArU  de  la  lengua  mixteca^ 
Mexico,  1593,  in-4*;  Francisco  de  Alvarado,  VocabulaHo 
mixleco,  —  A  la  môme  r^on  appartiennent  :  le  2a  po- 
tèque,  dont  il  existe  des  Dictionnaires  par  Juan  de  Cor> 
dova  (Mexico ,  1578) ,  par  Christoforo  Aquaro,  et  une 
Grammsire  par  Antonio  del  Pozo  ;  le  mixe,  dont  Agostino 
Quintana  a  composé  la  Grammaire  et  le  Dictionnaire; 
le  popolouque^  dont  on  a  aussi  une  Grammaire  et  un 
Dictionnaire  par  Toral,  et  qu*il  ne  faut  pas  confondre 
avec  un  idiome  de  même  nom,  parlé  au  Guatemala  dans 
l'État  de  San-Salvador. 

Dans  la  presqu'île  du  Yucatan  domine  la  langue  maya 
ou  yucatèque,  qui  fut  aussi  parlée  dans  le  N.  du  Guaté-i 
mala  et  dans  le  Honduras,  ainsi  qu'à  Cuba  et  à  Ilafti. 
Cette  langue  est  sans  rapporta  apparents  avec  l'aztèque, 
mais  elle  a  des  analogies  avec  le  nuaStèaue  et  l'othomi. 
Ainsi,  elle  possède,  comme  ce  dernier  idiome,  un  grand 
nombre  de  monosyllabes ,  et  la  faculté  de  donner  à  un 
même  mot  différentes  significations  en  variant  le  ton  on 
l'accent.  On  y  trouve  certaines  consonnes  gutturales  et 
très-rudes,  que  les  étrangers  prononcent  difficilement. 
Le  mai'a  n'a  pas  de  valeurs  phonéUqnes  gui  correspon- 

79 


MEX 


1256 


MIC 


(fftttt  %  nw  toUnw  d,  f,  gj,  q,r,9ei  v,  Dmb  cette:  lan- 
9M,  1»  BtAetantîf  et  Taiyeotir  iont  indécUnablet.  Les 
fMiree  ne  sont  employa  que  pour  exprimer  le  sexe  des 
personnes;  ils  s*ezpnment  au  moyen  d'un  préfixe,  qui 
1^*est  Mire  chose  que  le  pronom  de  la  3*  personne.  Cest 
«1  eBphnrant  de  la  même  maniàre  le  pronom  du  pluriel, 
•B'  bien  la  terminaison  o6,  que  Ton  mdimie  le  nombre 

Cmiel.  Le  suffixe  U,  employé  avec  les  sulstanlifs,  Joue 
iMe  de  Tartlcle  défini  \  employé  aTOc  les  a^iectin,  il 
«I  ferme  le  comparatif  de  supériorité.  On  distingue  en 
wuM  4  coqjugsisons  t  Tnne  sert  pour  les  verbes  neutres 
et  ne  Yeii>e8  passifs,  les  3  trois  antres  se  partagent  tous 
les  Yeii>es  actifs.  U  existe,  pour  certains  temps  composés, 
«n  Terbe  auxiliaire  qui,  diaprés  certaines  règles,  tantM 
précède  et  tantM  suit  le  psrtkipe.  On  Adt  un  firéquent 
niape  d'élisions  et  de  syncopes,  au  milieu  desquelles  les 
racinea  des  mots  sont  souvent  diflkiles  à  retrouver. 
F.  Gabriel  de  San-Bonaventura,  ArU  del  idioma  maya, 
1660 1  Beltran,  Artê  dsl  idioma  mayo  rmUêcido  a  iuc» 
emctas  réglât,  y  LBoneon  yucatêco,  1746;  Vr.  de  Wal* 
deok,  VoyagB  piUonsiiUê  et  arMoihgiquê  dans  la  jnV' 
vhice  d'Yucatan,  Paris,  1838;  Normann,  Bambles  in 
Yucakm,  New-York,  1848,  in-8«. 

Les  indigènes  du  Guatemala  perlent  plusieurs  idiomes, 
qui  ont  plus  ou  moins  de  rapports  avec  ceux  du  Mexique 
proprement  dit.  Tsit  sont  :  le  pipU,  en  usage  sur  la  cote 
iu  Grand  Océan ,  et  qa*on  regûrde  comme  Tastèque  cor* 
rompu  par  lintroduction  de  mots  étrangers;  le  quit^, 

Îil  s'étendait  autrefois  dans  la  province  mexicaine 
Oaxaea,  et  limité- ai^nThui  à  TEtat  de  Guatemala; 
le  kacfwjuel,  parlé  dans  le  même  État,  enseigné  à  TUni- 
versité  de  Guatemala,  et  dont  nous  avons  une  Gram- 
maire par  José  Florès  (Guatemala,  1753);  le  pooomoii 
ou  poconehi,  en  usage  oepuis  la  flnontière  mexicaine  au 
N.  Jusqu'à  l'État  de  San-Salvador  au  S.,  et  que  Ton  re- 
carde, ainsi  que  le  quiche  et  le  kaehiquel,  comme  dérivé 
du  maya;  le  mam,  répandu  dans  l'État  de  Vera-Paz;  le 
ehorU,  parlé  à  Zacapa  et  Jusqu'à  Tandenne  ville  de  Go- 
pan  à  l'B.  ;  le  iinca,  parié  le  long  dn  Grand  Océan,  an  S. 
du  Nouveau-Guatemala. 

MixiQDB  (Littérature  du).  De  tous  les  peuples  du 
Mexique,  les  Aztèques  sont  les  seuls  qui  possédèrent  une 
littérature.  Avant  la  conquête  espagnole,  et  lorsqu'ils 
Ignoraient  encore  l'écriture,  ils  conservaient  et  trans- 
mettaient graphiquement  leurs  connaissances  ou  le  sou- 
venir des  événements  à  Taide  de  nœuds  fkits  à  des 
cordons  de  différentes  couleurs.  Plus  tard,  vers  le  vi«  on 
le  vu*  siècle  de  notre  ère,  ils  employèrent  des  signes 
hiéroglyphiques,  des  représentations  peintes  ou  sculp- 
tées. Les  premiers  voyageurs  qui  ont  visité  le  Mexique 
depuis  l'expédition  de  Fernand  Cortez  parlent  de  livres 
mexicains  très-variés,  d'annales  historiques,  de  rituels 
ncerdotaux,  de  calendriers,  d'écrits  astrologiques  et  géo- 
graphiques, etc.  Le  fanatisme  espagnol  fit  la  guerre  à  ces 
monuments  d'une  drilisation  païenne,  qui  rarent  pres- 
que tous  détruits  par  Juan  de  Zumarrasa,  premier  ardie- 
tèqne  de  Mexico.  On  établit,  il  est  vrai,  dans  cette  ville, 
en  1.553,  une  chaire  pour  l'interprétation  des  hiérodyphes 
mexicains  ;  mal^  dièa  le  commencement  du  siède  sui- 
vant, cette  sdence  avait  péri,  et  les  indigènes  eux-mêmes 
étaient  hors  d'état  de  comprendre  et  d'expliquer  leurs 
anciens  caractères  d'écriture.  De  nos  Jours,  le  déchiffre- 
ment des  hiéroglyphes  mexicains  a  été  repris  avec  ardeur 
par  Alex,  de  Humnoldt  et  par  Prescott  :  ces  savants  pen- 
sent que  les  Aztèques  ont  surtout  Dût  usage  de  caractères 
ilguratifs ,  mais  que  cependant  leurs  hiéroglyphes , 
comme  ceux  de  nmdenne  Egypte  (K.  HiÉaooLVPHBs), 
■ont  assez  souvent  miboliques,  et  même,  s'il  s'agit  de 
transcrire  des  noms  de  personnes  ou  de  lieux,  véritable- 
ment phonétiques.  Dans  ce  dernier  cas,  ils  se  lisent,  en 
général,  de  droite  à  gMiche  et  de  bas  en  haut.  Quant 
aux  hiéroglyphea  non  phonétiques,  il  n'y  a  pas  de  règle 
^e;  la  manière  dont  sont  tournées  les  figures  est  le 
meilleur  guide  à  suivre  pour  la  lecture,  car  les  lignes 
d'écriture  font  des  circuits  très-capridenx.  Dn  des  ma- 
nuscrits mexicains  de  la  Bibliothèque  royale  de  Dresde 
et  im  antre  de  la  Bibliothèque  impériale  de  Paris  pré- 
aeoient  on  type  tout  différent  des  antres  :  les  caractères, 
placés  régulièrement  à  côté  les  uns  des  autres,  et  inter- 
rompus seulement  d'espace  en  espace  par  des  sortes  de 
fisnettes,  sont  regardés  comme  tout  à  fisit  convention- 
nels et  phonétiques. 

Les  grands  dépdts  bibliographiques  de  l'Europe,  tels 
ane  l'Escurial,  le  Vatican,  les  bibliothèques  de  Bologne, 
de  Dresde,  d'Oxford,  de  Paris,  possèdent  un  certain 
nombre  de  maaoscrits  mexicains.  On  voit,  entre  autres, 


•à  1» 'Bibliothèque  impériale,  un  rituel,  nn  Uvre  d'astro- 
lode,  une  histoire  du  Mexique  allant  de  1197  à  1561,  et, 
à  la  Bibliothèque  du  Corps  l^slatif ,  un  calendrier.  La 
Bibliothèque  de  l'Université  de  Blexico  est  moins  riche 
qu'on  ne  pourrait  le  supposer  :  elle  possède  moins  d'ori- 
ginaux que  de  copies,  et  l'authenticité  de  ces  copies  ne 
saurait  même  être  garantie.  Les  manuscrits  mexicains 
sont  en  peau  de  cof,  en  tissus  de  coton,  ou  en  papier 
fabriqué  avec  les  fibres  de  l'agave;  dans  ce  dernier  cas, 
ils  forment  des  bandes  de  20  a  25  mêL  de  longueur,  sur 
une  largeur  de  25  à  50  centimètrea,  lesquelles  se  re- 
plient un  œrtain  nombre  de  fois  sur  elles-mêmes, 
conune  nos  feuilles  routières  et  autres  cartes  géogra- 
phioues. 

L'autsur  espagnol  Claviiero  fait  un  pompeux  éloge  dea 
talents  orsloiies  et  du  sinie  poétique  des  Aztèques.  On 
accoutumait  de  bonne  heure  les  jeunes  gens  destinés 
aux  ambassades  à  débiter  de  longues  haranguée  sur  les 
matières  politiques.  Comcie  les  procès  se  Jugeaient  som- 
mairement et  sur  pièces,  l'art  de  bien  parier  était  inutile 
aux  plaideurs.  Les  poêles  chantaient  lea  merveilles  des 
deux  et  de  la  terre,  les  devoirs  des  hommes,  la  gloire 
des  rois  et  des  vainoueurs.  Il  existait  des  représentations 
scéniques  du  genre  le  plus  grossier,  où  l'on  voyait  prin- 
cipalement des  aveugles  se  heurter  contre  des  sourds, 
des  boiteux  ae  traîner  sur  les  mains,  des  bossus  se  rendre 
encore  plus  contrefaits,  des  nains  marcher  sur  la  pointe 
des  pieds  ;  on  bien  les  acteurs  se  travestissaient  en  ani- 
maux de  toutes  sortes.  Ce  n'étaient  que  misérables  farces, 
où  le  dialogue  devait  être  de  la  pire  espèce. 

Le  plus  ancien  livre  mexicain  dont  on  fasse  mention 
a  pour  titre  :  Teamoœtli^  et  fut  rédigé  chez  les  Tdtèqnea, 
vers  l'an  660,  par  l'astrologue  Huematain  :  c'est  une  his- 
toire du  del  et  de  la  terre,  et  un  rédt  des  premières 
migrations  des  peuples.  Mais  l'auteur  le  plus  célèbre  est 
NesahualeoJotl ,  roi  de  Tezcuco  au  xv*  siècle,  aumoaimé 
psr  les  EqMgnols  le  Selon  de  l'Amérique  :  il  rédigea  des 
lois,  dont  on  connaît  encore  la  teneur,  fonda  nne  aorls 
d'Académie  sous  le  titre  de  Conseil  de  musioue,  et  com- 
posa des  hymnes  religieux  et  des  élégies ,  dont  le  texte 
primitif  parait  ne  plus  exister,  mais  dont  nous  avons  une 
traduction  espagnole.  Au  xvi*  siède,  aprèa  la  ooncfaête 
de  Fernand  Gortez,  on  peut  mentionner  parmi  lea  écri- 
vains mexicains  Domingo  Ghimalpain ,  Fernando  de  Alva- 
rado  Tezozomoc,  Gristoval  del  Castillo,  et  Zapaln  ;  l'his- 
toire du  pays  fut  alors  partieullèrement  étudiée.  Puis, 
l'actirité  littéraire  s'affaiblit,  et  l'on  a  fini  par  ne  plus 
écrire  en  aztèque  que  des  livres  d'instruction  religieuse. 

MEZAIL,  anden  masque  de  fer,  qu'on  ijoutait  au  cas- 
que, et  au  milieu  duquel  faissit  saillie  un  appendice 
conique  et  percé  de  trous,  lequel  servait  à  loger  le  nei 
et  à  établir  le  passage  de  l'air  pour  la  respiradon.  En 
face  de  chaque  obU  étadt  pratiquée  une  wiê  ou  fente  hori- 
zontale. Le  mezail  s'ouvrait  soit  de  cêté,  soit  de  bas  en 
haut,  au  moyen  de  charnières  posées  sur  les  faeea  la^ 
raies  du  casque;  on  pouvait  ausai  le  déposer,  en  <Mant  la 
fiche  des  charnières  sur  lesquelles  11  Jousit.  B. 

MEZZANINE  (de  l'italien  mexio,  milieu),  en 
d'Architecture,  petit  étage  pratiqué  entre  deux  pins  gran< 
—  On  nomme  fenêtre  en  meisanin»  toute  fenêtre  carr 
ou  plus  large  que  haute,  pratiquée  dans  un  attiqne 
dans  un  entre-sol. 

MEZZO- SOPRANO.  V.  Soprano. 

MEZZO- TINTE.  V.  GaAvmiB. 

MI ,  note  de  musique,  le  3*  degré  de  notre  gamme 
turelle  d'trf  nufo^f «  ^  ^^  5*  de^ré  ou  la  dominante 
rdatif  mineur  de  cette  gamme.  Mi  est  auad  le  nom 
la  chanterelle  du  violon  et  de  la  guitare. 

MIAfifi  ou  ILLINOIS  (Idiome),  un  des  idiomes  algoi 
quins.  n  distingue  par  inflexion  les  substantifs  plari< 
des  singuliers.  Il  n'a  pas  de  verbe  substantif,  mais  pc 
aède  une  conjugaison  particulière  pour  les  verbes  pessil 
On  V  trouve  le  son  du  jota  espagnol,  du  th  an^ais,  et 
Vh  fortement  aspirée  des  Arabes. 

MICA ,  Jeu  des  anciens  Romains.  F.  notre 
de  Biographie  et  dBistoire. 

MICHAU  (Code).  F.  Maroxac,  dans  notre  Dicti 
naire  de  Biographie  et  d^ Histoire. 

MICHEL  (MoNT-S^).  V.  MoNT-Sanrr-MiCHKL. 

MICROCOSME,  du  grec  micrùs,  petit,  et  eosn 
monde.  Selon  la  plupart  dea  andennea  écoles  de  phllf 
iophie,  ce  petit  monde  était  l'homme,  ainsi  nommé  p| 
opposition  au  grand  mouds  ou  mncroco»M  (  de  nuK 
grand) ,  c-à-d.  à  la  terre,  regardée  alors  comme  on 
mal  composé  d'un  corps  et  d'une  âme.  On  trouve 
croyance  chez  Pythagore,  chez  Platon   dans  Técole 


termes  i 


niL 


1251 


MIL 


dMoe.  EUe  lomba  ansoite  dans  une  brtncbe  du  my»- 
tidune  qui  n*était  que  de  la  philosophie  hermétique  « 
eouuneon  le  voit  dana  les  écnts  de  Jaoob  Bœhm,  de 
Robert  Fludd,  de  Van  Helmont,  etc.  A  leurs  yeux,  rhomme 
était  no  résomi  complet  de  la  créatioa,  un  microcomê; 
il  7  iTiit  une  corrélation  parfaite  entre  les  organes  du 
oorpi  baaudn  et  les  métaux,  entre  les  métaux  et  les  prin- 
dpileB  conslellatioDs«  entre  la  vie  humaine  et  la  vie  du 
monde.  Comme  conséquence^  on  crut  voir  une  influence 
réciproque  entre  le  grand  et  le  petit  monde,  entre  la  terre 
et  rhomme.  Le  premier  décidât  en  quelque  sorte  de  la 
tedoés  de  chacun,  et  l'homme  à  son  tour  avait  un  pou- 
TOff  surnaturel  sur  l'univers.  Au  fond  de  cette  folle 
doctrine  se  trouraient  Tastrologie  et  le  panthéisme  mys- 
tique. R. 

MICROLOGtlE  (da  grec  mtcrof,  petit,  et  hgos,  dis- 
oout),  nom  qu'à  réfxwue  de  la  Renaissance  on  donna 
aox  éradits  qui,  dans  rinterprétation  grammaticale  des 
lodens  aatem,  attachaient  une  grande  importance  à  de 
minimes  détails. 

HIDSHIPBIAN  (de  l'anglais  midship,  milieu  d'un  vais- 
ieaa,et  mon,  homme) ,  nom  qu'on  donne,  dans  la  marine 
anglaise,  aux  aspirants  employés  à  bord  des  navires  de 
ffierre,  parce  que  leur  place  est  au  milieu  du  pont  du 
Marnent.  A  bord  d'un  vaisseau  de  ligne  de  120  canons, 
00  compte  ordinairement  24  mtdshipmen. 
MIGNONNE.  V.  GASAcrkan  n'oipaiiiERiB. 
MIGRATION  DES  AlfES.  V.  MAtempstcosb. 
MILâDY,  et  plus  exactement  my/ady,  titre  au'on  donne, 
en  Angleterre,  à  la  femme  d'un  lord  ou  d'un  iMtfonnet,  en 
hd  pariant  ou  en  parlant  d'elle. 

MILAN  (D6me  de),  église  cathédrale,  située  à  peu 
près  an  centre  de  la  ville,  et  l'une  des  plus  vastes  et  des 
plus  wmptoensea  d'Italie.  Cest  un  composé  d'architec- 
tue  gothique  et  aarrasine,  et  de  quelques  parties  d'ar- 
chitecture romaine.  La  façade  présente  un  grand  mur, 
terminé  en  ferme  triangnlaira,  comme  les  deux  rampants 
d*on  immense  toit«  A  oiaperonné  de  merlons.  Six  demi- 
tours  gothiques  qoadrangulaires  la  divisent  perpendicu- 
lafaeaient  en  5  parties  i  chaque' tour  finit  à  la  hauteur  du 
iimpaot,  et  porte  une  flèche  couronnée  par  une  statue 
cakMBsle.  Tontea  oea  flèchea  sont  d'tele  hauteur,  de  sorte 
qoe  leora  sommets  suivent  eo  l'air  ut  formé  tombante  de 
cbaqae  rampant.  Une  porte  d'architecture  romaine  s'ou- 
ne  dans  l»  intervalles  des  tours.  Chacune  est  surmontée 
d'one grande  fenêtre  avec  balcon,  et  au-dessus  de  cette 
feottre  il  y  a  une  ou  deux  niches.  Le  balcon  de  la  porte 
da  ndliea  a,  sur  ses  angleai  2  statues  colossales  de  l'An- 
ciei  et  do  Nouveau  Testament.  La  base  des  tours  est 
oraée  de  47  bea-reliefs  très-beaux,  et  250  statues  sont 
reparties  dans  toote  cette  façade.  Le  monument  est  flan- 
qiié,  dans  tout  ioa  pourtour,  de  pilastres  saillants,  aev- 
TtBtde  oontre-lbrtB,  et  terminés  aosai  en  aiguilles  portant 
da  ttataes  :  U  y  a  littéralement  une  forêt  d'aiguilles. 
L'abside  paase  pour  un  modèle  d'architecture  gouique. 
«-  Sw  le  miUea  de  l'égUae  rème  nne  vaste  plate-lionne, 
as  centre  de  laquelle  eat  nne  lanterne  gothique,  dont  la 
tov  eat  accotée  de  3  petits  contre-forts  en  pilastres  oui, 
^  la  aai^aance  du  toit,  se  terminent  en  aiguilles  :  4  de 
ces  aiguilles  sont  coonnnées  d'une  statue  d'ange  en 
braoïe,  et  les  autres,  d'une  étoile  de  même  métal.  Du 
nnbie  pointa  a'élnnce,  à  20  mètres  de  la  terrasse  et  à 
106  do  soi,  une  aiguille  plus  forte,  oui  domine  toutes  les 
>Btiea,  et  sujpporte  U  statue  de  ta  Sainte  Vieiige  en 
;  Inue  doré.  On  peut  arriver  Jusqu'à  ses  pieds  par  di- 
vers escaliers,  qui  forment  314  marches  à  partir  au  pavé 
&  régKae. 

Llniérieor  du  Dôme-  de  Blilan  est  en  croix  latine,  à  5 
)c&i  répondant  à  chacune  des  5  portes.  Les  nefs  sont 
mies  Dsr  82  piliera  octogones,  hauts  de  24",30,  de 
plus  de  7  mètres  de  drconférenoe,  et  accotés  chacun  de 
coloo nettes.  Le  chapiteau  se  compose  de  8  niches  en 
*^îes,  avec  statues,  à  l'aplomb  des  intervalles  des  co- 
;  1  onn.  Ce  chapiteau,  composé  par  Pllippino  de  Hodèoe, 
^  unique  en  son  genre  ;  Il  mesure  près  de  6  met.  de 
.bauteer,  et  ses  statues  sont  plus  grandes  que  nature.  Tout 
.ttU  est  en  harmonie  avec  les  proportions  de  cetintérieur  t 
b  nef  centrale  a  148  met.  de  longueur,  sur  40  de  hauteur, 
du  pavé  à  la  voûte,  et  04  met.  Jusqu'à  la  lanterne  exclosi- 
Ivement.  La  largeur  des  5  nefa  réunies  égale  52  met ,  et,  à 
croix,  87  met.  De  nombreuses  nervures  peintescouvrent 
parois  de  la  vo4le  centrale.  On  volt  dans  le  pourtour 
ia  lanterne  les  statues  des  4  Docteurs  de  l'Église,  et 
I»  de  60  Saints.  —  Le  pavé  est  composé  de  marbres 
<iiflérentes  couleurs  incrustés  en  forme  d'arabesques. 
7  remarque,  à  quelque  distance  de  la  porte  centrale, 


une  méridienne  tracée  en  1780  par  lee  astronomes  de 
Bréra.  Au-dessus  dé  cette  porte  règne  un  balcon ,  repo- 
sant sur  2  colonnes  colossales  de  çranit  rose;  il  est  orné 
de  2  grandes  statues ,  celle  de  S^  Ambroiee  par  Monti  , 
et  celle  de  S^  Gharlea  Borromée  par  Marchesl.  A  gauc  ho 
en  entrant  dans  le  Dôme  sont  les  fonts  baptismaux ,  co  m* 

S  osés  d'une  belle  cuve  de  porphyre,  qui  provient,  dit- on, 
es  thermes  de  Haximlen  Hercule.  Quelques  monuments 
funéraires  méritent  aussi  d'être  remarqua  :  ceux  des 
cardinaux  Blarino  Caraccîolo,  Cajétan  et  Frédéric  Borro- 
mée, des  archevèoues  Othon  et  Jean  Visconti,  et  celui  de 
Jean-Jacques  de  Médiris,  frère  de  Pie  IV,  dont  le  dessin 
a  été  attribué  à  Blichel-Ange.  Deux  chalrea  en  bronze 
doré,  couvertes  de  bas-reliefs,  entourent  deux  des  4  piliers 
qui ,  à  l'entrée  du  chœur,  portent  la  lanterne  ou  coupole  : 
elles  reposent  sur  des  cariatides  colossales ,  modelées  par 
Brambilla,  coulées  en  bronze  par  Busca,  et  représentant 
les  quatre  Évangélistes  et  les  quatre  Docteurs  de  la  foL 
On  doit  signaler  encore  les  bas-reliefs,  au  nombre  de  17, 
de  la  partie  supérieure  du  mur  d^enceinte  du  chœur,  et, 
au  milieu  de  la  chapelle  du  bras  gauche  de  la  croix ,  un 
très-beau  candéhibre,  dit  Arbre  de  la  Vierge,  à  sept 
branches,  en  bronxe  doré,  formé  de  rinceaux  gothiques 
entremêlés  de  statuet^  ;  fabriqué  au  xm*  siècle,  il  a  été 
posé  en  1502  sur  un  piédestal  de  marbre  de  Sienne,  cou- 
vert de  fines  sculptures.  Derrière  le  chœur  est  une  statue 
colossale  de  S^  Barthélemi  écorché,  par  Marco  Agrati; 
quel  qu'en  soit  le  mérite  comme  imitation  anatomique, 
c'est  une  œuvre  qui  sied  nuil  en  ce  lieu.  Il  y  a  deux  sar 
cristies,  une  au  midi  et  une  au  nord  :  celle  du  midi  ren- 
ferme le  Trésor,  contenant  entre  autres  richesses  :  un  ca- 
lice en  ivoire,  du  xiv*  siècle;  deux  diptyques  byzantins; 
un  évanfféliaire  du  xi*  siècle,  avec  une  couverture  en  métal 
ornée  d'émaux;  deux  statues  en  argent  de  S^  Ambroise 
et  de  S*  Charles,  données  par  la  ville  en  1098,  et  pesant, 
l'une  2,000  onces,  l'autre  1700;  une  statue  du  Christ  à 
la  colonne,  par  Solari,  dit  le  Gobbo;  une  paix  en  or, 
d'une  ciselure  exquise;  im  devant  d'autel  en  argent, 
donné  en  1835  par  le  comte  Tavema.  — En  fhce  de  cha- 
que sacristie  est  une  grille  de  fer,  conduisant  au  Scurclo^ 
chapelle  souterraine  éclairée  par  une  ouverture  carrée , 
ménagée  dans  la  voûte,  en  avant  du  chœur.  Là  repose, 
dans  une  châsse  de  vermeil  enrichie  de  pierreries,  le 
corps  de  S^  Charles  Borromée,  revêtu  de  ses  habits  pon- 
tificaux, et  qu'on  peut  apercevoir  à  travers  de  riches 
panneaux  transparents  en  cristal.  La  voûte  est  ornée  de 
bas-reliefs  d'argent. 

Le  Dûme  de  Blilan  est  tout  en  marbre,  sans  une  seule 
pièoe  de  bois.  C'est  un  monument  qui,  malgré  toutes  ses 
magnificences,  est  néanmoins  plus  extraordinaire  que 
beau.  Le  plan  est  une  masse  qui  ressemble  assez  k 
S*-Pierre  de  Rome,  bien  <pe  beaucoup  moins  grand  ;  le 
mélange  de  partiea  d'architecture  romaine  avec  d'autres 
^yles,  et  surtout  le  gothioue,  n'est  pas  heureux;  le  go- 
thique manque  de  naïveté,  et  est  à  la  fois  recherché  et 
vague.  On  oompte  1023  statues  dans  toutes  les  parties  de 
l'édifloe,  et  il  en  reste  encore  550  à  ffdre.  —  La  première 

Jierre  die  ce  magnifique  monument  fut  posée  par  le  duc 
ean-Galéaa  Visconti ,  le  15  mars  1380  :  les  carrières  de 
Candoglia,  sur  la  route  du  Slmplon,  au  delà  du  lac  Bfa- 
leur,  fournirent  tous  les  matériaux;  c'est  un  marbre 
blanc  très-fin,  auquel  le  temps  a  donné  une  couleur  légè- 
rement Jaunâtre.  Le  duc  avait  fait  venir,  dit-on,  un  ar- 
chitecte allemand,  Henri  Arler,  de  Gmûnd,  appelé  par 
les  Italiens  GamoUa,  pour  élever  l'édifice  d'après  les 

Ï principes  de  l'art  ogival ,  peu  connus  et  peu  goûtés  en 
taUe;  quelques  auteurs  ont  attribué,  au  contraire,  les 
premiers  travaux  à  Marc  de  Campiglione,  près  de  Lugane, 
a  Bonino  de  Gamnione,  à  Simon  d'Oraenigo,  à  Guarnerio 
de  Sirtcnl  •  à  Amnroiae  Ponzone.  Des  artistes  français  ar- 
rivèrent bientôt,  Philippe  Bonaventure  de  Paris  en  1389, 
Jean  de  Qmmpmousseux  et  Jean  Ifignot,  tous  deux  de 
Normandie,  en  1300.  Beaucoup  d'Allemands  prirent  part 
à  cette  namte  œuvre  :  Jean  de  Fernach,  Jean  de  Funm- 
bourg,  Pierre  de  ntmz,  Hanz  Marcbestein,  Ulric  Fusin- 

8 en  on  Elnsingen  d'Ulin.  En  1480  le  due  Jean-Galéas 
forsa  envoya  chercher  Hammerer,  nutUre  maçon  de  la 
cathédrale  de  Strasbourg,  pour  l'érection  de  la  tour  cen- 
trale de  Milan.  Les  travaux  avancèrent  lentement,  faute 
de  ressources.  On  ne  sait  si  les  premiers  architectes 
avaient  dressé  un  plan  pour  la  façade  principale;  mais, 
en  1560,  l'archevêque  S^  Charles  Borromée  chargea  Pel- 
legrini,  dit  Ubaldi,  de  donner  les  dessins  nécessaires 
pour  ériger  cette  façade.  La  composition  de  PellegrinI , 
conçue  £ms  le  goût  de  la  Renaissance,  est  en  désaccord 
avec  le  reste  du  monument;  d'ailleurs,  r&rtlste  ayant 


MIL 


1252 


MIL 


Hé  appelé  en  Espagne  pour  pdndrQ  TEscarial,  Fachère- 
ment  de  la  façade  fut  confié  à  des  mains  inhabiles.  Ce- 
lani  et  Ricchini,  exagérant  encore  la  manière  de  Pelle- 
grini,  couvrirent  d'ornements  superflus  tous  les  membres 
d'architecture.  La  façade  de  la  cathédrale  de  Milan  fut 
Tîvement  critiquée  au  xvii*  et  au  xvni*  siècle,  et  Ton 
finit  par  admettre  que  le  style  ogival  devait  remplacer  la 
décoration  moderne  :  des  projets  furent  présentés  par 
Gario  Buzzi  en  1635,  puUi  par  François  Castelli,  mais  en 
ne  les  exécuta  point.  Enfin,  en  1790,  il  fut  décidé  que, 
tOQt  en  conservant  les  ornements  de  Pellegrini,  on  don- 
nerait à  la  façade  un  revêtement  gothique.  Napoléon  I*' 
consacra  trois  millions  et  demi  aux  travaux  du  Dôme,  que 
Ton  ne  peut  pas  encore  considérer  comme  achevés  au- 
jourd'hui ,  après  474  ans  de  travaux,  souvent  interrom- 
pus. —  V,  FYancbetti ,  Storia  e  Descrizione  del  Dttomo 
ai  MUano,  1821,  in-4o;  Rupp  et  Bramati,  Descrizione 
êtoricO'CrUica  del  Dwmo  ât  MUano,  1823;  Gioachino 
d'Adda,  la  Metropolitana  di  MUano,  1823,  in-fol.;  E.  Ser- 
gent, /•  Dame  de  MUan,  texte  italien  et  100  planches.  B. 

MiLAii  (Église  S^-Ambroisb,  à)*  blette  église,  dont  la 
fondation  remonte  à  Tannée  387,  et  où  se  fit,  pendant 
un  certain  temps,  le  couronnement  des  rois  dltalie,  fut 
agrandie  au  ix*  siècle  et  augmentée  de  l'atrium  en  brique» 
qui  la  précède.  Elle  présente  trois  nefs  d'architecture  ro- 
mane, sur  lesquelles  des  voûtes  ogivales  furent  ajoutées 
en  1305.  On  entre  par  trois  portes  en  bois  de  cyprès, 
travail  du  ix*  siècle  ;  c'est  de  là  que  S*  Ambroise  repoussa 
l'empereur  Théodose  après  le  massacre  de  Thessalonique. 
Les  colonnes  de  l'inténeur  sont  revêtues  de  stuc  imitant 
le  marbre  blanc.  La  chaire  en  marbre,  portée  par  huit 
arceaux,  et  assez  longue  pour  que  l'orateur  puisse  y  mar^ 
cher,  est  un  monument  du  xn*  siècle,  composé  de  frag- 
ments plus  anciens  ;  sur  la  face  postérieure  on  a  sculpté 
nne  sorte  de  Cène  ou  un  repas  des  agapes;  sous  cette 
chaire  est  un  tombeau,  regardé  à  tort  comme  celui  de 
Sdlicon.  Lepoi^tod'oro  ou  devant  du  maître-autel,  tout  en 
or,  est  un  merveilieux  travail  d'orfèvrerie  du  ix*  siècle. 
On  remarque  enfin  le  trône  en  marbre  des  premiers 
évèques  de  Milan,  une  antlcfue  peinture  à  fresque  dans 
l'abside,  où  l'on  voit  S^  Ambroise  assistant  en  esprit  aux 
funérailles  de  S^  Martin  de  Tours,  et,  dans  la  nei  du  mi- 
lieu, une  colonne  de  porphyre  portant  un  serpent  do 
bronze,  celui,  selon  une  tradition  populaire,  que  Moïse 
éleva  au  milieu  du  désert.  B. 

MILANAIS  (Dialecte).  V.  Loubard. 

MILANAISE  (École),  une  des  écoles  italiennes  de  pein- 
ture qne  l'on  range  sous  le  nom  commun  d* École  lom- 
barde. Elle  dut  à  l'oridne  participer  de  l'école  floren- 
tine, puisque  l'on  voit  Giotto  travailler  à  Blilan  en  1335, 
et  que  l'on  cite  parmi  les  disciples  de  ce  peintre  un  Jean 
de  Milan  et  un  Pierre  de  Novare.  Toutefois,  Yincenzio 
Foppa,  qui  florissait  dans  les  premières  années  d» 
XV*  siècle,  est  généralement  considéré  comme  le  fonda- 
teur de  la  première  école  milanaise.  On  cite,  après  lui, 
Jacques  Morazzone.  La  perspective  était  alors  la  qualité 
distinctive  de  l'école.  Puis,  Bramante,  l'architecte-peintre, 
introduisit  à  Milan  le  style  de  Mantegna.  Bramantino, 
ion  élève,  et  Ambrogio  Borgognone,  eurent  plus  de  grftce 
et  d'expression.  —  Une  nouvelle  époque  commence  avec 
Léonard  de  Vinci,  appelé  de  Florence,  vers  la  fin  du 
XV*  sièclo,  pour  diriger  l'Académie  de  dessin  et  de  pein- 
ture à  Milan.  Au  nombre  de  ses  disciples  figurent  Bel- 
traffio,  Gesare  da  Sesto,  Marco  d'Oggione,  F.  Meizi,  André 
Solari,  et  peut-être  Bemardîno  Luini,  qui  eut  un  faire 
plus  facile  et  un  moelleux  plus  parfait.  L'ancienne  école, 

{profitant  des  progrès  opérés  par  la  nouvelle,  ne  se  con- 
bndit  pas  avec  elle,  et  lui  opposa  Gaudenzio  Ferrari,  co- 
loriste plus  habile  que  ne  le  sont  d'ordinaire  les  Milanais. 
—  Une  autre  Académie  des  beaux-arts  ayant  été  fondée 
en  1009  par  le  cardinal  Frédéric  Borromée,  les  trois  frères 
Procaccini  en  prirent  la  direction,  et  professèrent  des 

{principes  évidemment  puisés  dans  les  œuvres  du  Corrége  : 
'artiste  le  plus  remarquable  de  cette  nouvelle  période 
fût  Daniel  Crespl,  après  lequel,  comme  dans  les  autres 

aarties  de  l'Italie,  les  arts  dégénérèrent  promptement.  Le 
lilanais  n'a  plus  produit  qu'à  la  fin  du  siècle  dernier  un 
artiste  de  talent,  Appiani. 

MILÉSIENNES  ou  MILÊSIAQUES  (Fables).  V,  Conte. 

BIILICE.  y.  ce.mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire, 

MILITAIRE  (Administration).  V.  Intendance,  Advi- 
insTRATiON  (Conseil,  —  Officiers  d'),  et,  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire,  le  mot  Ministères, 
p.  1803  et  suivantes. 

MiuTAULE  (Architecture)^  art  de  fortifier  les  places  de 


guerre.  V.  FoanncATioN,  Foax,  FcaTUESsa,  GAin  mu- 

TAIRS. 

MiLrrAiRB  (Art  ).  Les  expressions  art  mâtfatraet scMnci 
mUiUùre  sont  souvent  emplovées  l'une  pour  l'autre,  et 
c'est  à  tort  :  la  science  est  a  l'art  ce  qu'en  général  1& 
théorie  est  à  la  pratique.  La  science  militaire  est  la  con- 
naissance approfondie  de  tout  ce  qui  se  rapporte  au  mé- 
tier des  armes,  histoire  militaire  des  nations  anciennes 
et  modernes,  organisation,  administration,  armement, 
comptabilité ,  police  et  discipline  des  armées.  Ëbaucbée 
dans  les  écoles  militaires,  cette  connaissance  ne  peot  se 
compléter  qu'à  la  guerre,  dans  l'exercice  des  grades  im- 
portants de  la  hiérarchie.  Il  ne  faut  pas,  sans  doute,  sé- 
parer de  l'art  militaire  la  connaissance  du  service,  celle 
des  manœuvres  de  toutes  les  armes,  des  lois  et  règle- 
ments militaires  :  mais  cet  art  est ,  avant  tout,  nne  mé- 
thode habile  de  faire  avec  succès  la  guerre  suivant  cer* 
taines  règles,  quelquefois  même  contre  toutes  les  règles, 
pourvu  que  ce  ne  soit  point  au  hasard.  Il  implique  la 
connaissance  de  la  fortification ,  de  la  tactiqw  et  de  la 
stratégie  (  V.  ces  mots)^  et  auss  un  sénie  qui  a  ses  inspi- 
rations soudaines,  une  conception  Instantanée  des  com- 
binaisons les  plus  profondes,  la  simultanéité  de  la  pensée 
et  de  l'action.  —  Parmi  les  écrivains  militaires  de  Tao- 
cienne  Grèce,  on  a  toujours  consulté  avec  fruit  Thucy- 
dide, Xénoçhon ,  Polvbe ,  Arrien  et  Êlien.  Les  Romans 
nous  ont  laissé  les  Commmtaires  de  César,  le  traité  de 
Modestus  De  re  mUitari,  et  les  Stratagèmes  de  Frontin. 
Végèce  fut  le  premier  qui  rédigea  un  traité  <fogmatiqu9 
tnr  la  matière;  son  Epitonu  institvtionum  rei  mUUaris 
est  un  extrait  de  divers  auteurs  qui  avaient  écrit  sur  Van 
militaire.  Chez  les  modernes,  les  ouvrages  fondamentaui 
sont  ceux  de  Feuquière,  de  Vauban,  de  GOhom,  du  gran<i 
Frédéric,  du  chevalier  de  Folard,  de  Guischardt,  de  Gai- 
bert.  V,  D'Ecrammerville,  Essai  historique  sur  VariJlf 
la  guerre,  1780-90;  Carrion-Nisas,  Histoire  générale  dt 
l'art  mUitaire,  1823;  De  La  Barre  du  Parcq,  Histoire  dd 
l'art  de  la  guerre  avant  l'usage  de  la  poudr»,  1860,  in-ii^. 

MiuTAiRB  r  Discipline).  V.  Discipune. 

MiLiTAïaE  (École),  monument  de  Paris.  F.  notre /?ic- 
tionnaire  de  Biographie  et  ^Histoire. 

MiuTAiRB  (Éloquence^,  titre  sous  lequel  on  comprend 
les  harangues  et  allocutions  adressées  a  des  troupes  )>ar 
leurs  chefs.  L'usage  d'adresser  la  parole  aux  armées  pour 
exciter  ou  soutenir  leur  valeur  était  trèa-fréquent  chez 
les  Anciens.  Tous  les  discours  qu'on  trouve  dans  les  his- 
toriens n'ont  sans  doute  pas  été  prononcés^  et  l'on  j  re- 
connaît le  talent  particulier  de  chaque  auteur  :  mais  on 
a  dû  s'attacher  à  les  rendre  vraisemblables,  c.-àr<i.  con- 
formes au  caractère  des  personnages  dans  la  bouche  des- 
oraels  ils  sont  placés.  Il  n'est  pas  dans  les  mœurs  mo- 
(femes  de  faire  avant  le  combat  une  harangue  ;  quelques 
mots  ardents  et  vifs  sont  tout  ce  que  l'histoire  a  recaeillL 
A  Coutras,  Henri  de  Navarre  dit  an  prince  de  Condé  et 
au  comte  de  Soissons,  qui  commandaient  sous  lui  :  •  Je 
ne  vous  dirai  rien  autre  chose,  sinon  que  yous  êtes  de  la 
maison  de  Bourbon,  et,  vive  Dieu!  }e  voua  montreni 
que  je  suis  votre  aîné.  »  A  Ivij,  il  adreÎMait  à  ses  troupes 
ces  paroles  mémorables:  «Mes  compagnons,  s!  vous 
courez  aujourd'hui  ma  fortune,  je  cours  aussi  la  vôtre. 
Je  veux  vaincre  ou  mourir  avec  vous.  Gardes  bien  vos 
rangs.  Je  vous  prie;  si  la  chaleur  du  combat  vous'ies 
lait  quitter,  pensez  aussitôt  au  ralliement,  c'est  le  gain 
de  la  bataille.  Et  si  vous  perdez  vos  enseignes,  comettei 
et  guidons,  ne  perdez  point  de  vue  mon  panache  blanc, 
vous  le  trouverez  toujours  au  chemin  de  l'honneur  et  dt 
la  victoire.  »  Le  grand  Condé  ne  dit  que  ces  mots  avant 
la  bataille  de  Lens  :  «  Amis,  souvenez-vous  de  Rocroi, 
deFribourp  et  de  Nordlineue.  »  Pendant  les  guerres  de 
la  Révolution ,  la  plupart  des  chefs  d'armée  eurent  plu 
de  courage  cpie  de  littérature,  et  surent  mieux  vaincre 
que  parler  :  on  ne  parlait  même  pas  alors,  on  chantait,  et 
IskMarsetilaise  gagna  plus  de  batailles  que  les  plus  beaaij 
discours.  L'éloquence  militaire  ne  consiste  ac^ourd'bai 

3u'en  proclamations  et  en  ordres  du  jour,  qu'on  répand 
ans  toute  l'armée  ;  mais,  sous  cette  forme,  elle  a  ét^ 
élevée  à  une  hauteur  Jusqu'alors  inconnue  par  le  gâoéml 
Bonaparte,  dont  les  proclamations,  pleines  de  verve  e^ 
d'élan,  respirent  la  confiance  d'un  vainqueur  et  d'an 
maître.  Le  secret  de  cette  éloquence  n'est  point  perdue 
on  en  trouve  le  reflet  dans  la  proclamation  de  NspH 
(éon  III  à  l'armée  dltalie  en  1850.y.  Ordrb  dd  joea.  B. 
MiuTAïas  (Exécution).  K.  Execution. 
MiuTAiRB  (Génie).  V.  Gâm. 

MiuTAiRB  (Justice  ).  LMnstitatlon  d'une  Justice  spéda)^ 
'  pour  l'armée  n'est  pas  une  idée  propre  à  notre  pajrs  et  | 


MIL 


1253 


MIL 


notre  temps;  partout  et  toi^oun  on  a  reconna  que  l'ar- 
■née  devait  avoir  ses  tribunaux  particuliers,  que  les  crimes 
et  les  délits  militaires  devaient  être  soumis  à  des  prin- 
cipes exceptionnels  de  répression,  et  que  les  formes  ordi- 
naires de  la  procédure  ne  pouvaient  leur  être  appliquées. 
L'armée  doit  avoir  ses  tribunaux  particuliers,  parce 
qu'elle  vit  sous  Tempire  de  devoirs  et  de  règles  à  part, 
•t  qu'il  est  naturel  (|[ue  ceux-là  qui  Jugent  soient  les 
bemmes  qui  les  connaissent  et  sont  intéressés  à  les  dé- 
fendre, et  qu'on  appelle  à  décider  des  questions  de  disci- 
pline ceux  qui  font  du  commandement  et  de  l'obéissance 
la  science  et  Tbabitude  de  leur  vie.  Les  crimes  et  les  dé- 
lits militaires  doivent  être  soumis  à  des  principes  excep- 
tionnels de  répression,  parce  que  la  criminalité  des  actes 
ne  se  mesure  pas  seulement  sur  l'intention  de  leur  au- 
teur, mais  aussi  sur  les  dangers  qu'ils  font  courir  à  la 
société,  sur  l'étendue  des  devoirs  méconnus,  sur  la  gra- 
vité des  intérêts  compromis.  Enfin ,  les  formes  de  la  pro- 
cMure  ordinaire  ne  sauraient  être  appliquées  en  des  ma- 
tières où  il  s'agit  souvent  de  prévenir  le  mal  plus  encore 
que  de  le  réprimer,  où  l'exemple  doit  toujours  être 

E rompt,  où  la  première  condidon  de  la  justice  doit  être 
k  célérité.  VoiÛ  pourquoi  il  y  a  une  législation  militaire 
^>éciale  et  des  Conseils  de  guerre  (K.  ce  mot)  pour  l'ap- 
pliquer. 

■lUTAiBB  (Lédslation).  Jusqu'à  ces  derniers  temps,  la  lé- 
gislation militaire  de  la  France,  quoique  prélérabîe  à  celle 
des  antres  États,  a  présenté  une  grande  confusion.  Elle 
se  composait  de  lois  édictées  dans  diverses  circonstances 
auxquelles  elles  n'auraient  pas  dû  survivre,  souvent 
contradictoires  entre  elles,  partiellement  abrogées  par  des 
diqwsttions  ultérieures.  Tantôt  le  législateur  s'était  mon- 
tré violent  et  emporté,  comme  dans  la  loi  du  12  mai  1793, 
où  la  peine  de  mort  et  celle  des  fers  figurent  à  presque 
tons  les  articles  ;  tantôt  il  était  plein  de  sagesse  et  de  mo- 
dération, comme  dans  les  lois  des  13  et  21  brumaire 
an  V,  des  18  vendémiaire  et  17  fructidor  an  vi.  La  législa- 
tion militaire  ne  comprenait  pas  moins  de  91  lois,  dé- 
crels,  ordonnances,  avis,  etc.  La  confusion  et  les  incerti- 
tudes ont  enfin  disparu  par  la  promulgation  d'un  Code 
de  Justice  militaire  oour  Vaxmée  de  terre  (4  août  1857), 
lequel  n'a  pas  tardé  à  être  appliqué  aussi  à  la  marine.  Ce 
Gode  embrasse  tout  à  la  fois  l'organisation,  la  compétence 
et  la  procédure  des  juridictions  militaires,  ainsi  que  les 
crimes  et  les  délits  qu'il  entend  plus  spécialement  ré- 
primer. En  ajoutant  différentes  lois  antérieurement  pu- 
bliées sur  les  pensions  militaires,  le  recrutement ,  Yavan- 
cemênt,  la  dotation  de  V armée,  etc.  (V.  ces  mots)^  on  a 
un  Droit  militaire  qui  ne  se  trouve,  chez  aucune  autre 
nation,  à  an  aussi  haut  desré  d'unité  et  de  centralisation, 
r.  Dorat-Lasalle,  Droit  ettégislation  des  armées  de  terre 
et  de  mer.  Recueil  méthodique  complet  des  lois,  dé' 
crets,  etc.^  1844-1853, 10  vol.  in-S»  ;  liêerand,  Études  sur 
ta  législation  militaire  et  la  jurisprudence  des  Conseils 
de  guerre  et  de  révision,  1835,  in-^";  Broutta,  Cours  de 
Droit  militaire,  1842,  in-8«;  Gh.  Duez,  Codefénal  miZt- 
totre,  1847,  in-8^  ;  Dumesgnil ,  Dictionnaire  de  la  justice 
militaire,  1847,  in-8<^;  Gonvot,  Manuel  de  légisUUùm 
milittUre,  1847,  in-8<>  ;  Ghénier,  Guide  des  tribunaux  mi» 
litaires.  2*  édit.,  1853,  3  vol.  in-8«  ;  Gérard,  Code  de  Jus- 
tice et  de  discipline  militaires,  1852,  in-18  ;  Alla,  Le  Pra- 
ticien  des  tribunaux  militaires,  2*  édiu,  1853,  2  vol* 
in-8<*  ;  Victor  Foucher,  Commentaire  sur  le  Code  de  jus- 
tice  militaire,  1858,  in-8<>;  Tripier,  Code  de  la  Justice 
«ultlatre,  1857,  gr.  in-4». 

MiuTAmB  (Musique).  De  tout  temps  les  armées  ont 
marcbé  ma  combat  aux  sons  d'une  musique  guerrière; 
mais  U  serait  impossible  de  déterminer  comment  les 
corps  de  musique  étaient  composés  avant  l'âge  moderne. 
Les  peuples  de  l'antiquité  avalent  des  tambours,  des 
trompettes,  des  clairons,  des  buccines,  des  cors,  des  cor- 
•eta,  des  flûtes,  et  les  voix  se  joignaient  môme  aux  in- 
Itmments,  puisque  l'on  exécutait  des  chants  en  l'hon- 
neur de  Mars,  de  Castor  et  de  PoUux.  Nous  savons  que 
les  tamboors,  au  lien  d'être  placés  en  tète  des  corps,  se 
trooTaient  par  derrière.  —  La  môme  incertitude  existe 
au  sujet  des  musiques  militaires  du  moyen  âge.  A  partir 
du  XVI*  siècle,  les  généraux  en  France  ont  entretenu  pour 
leurs  années  un  certain  nombre  de  musiciens.  Dans  la 
musique  da  grand  Condé  se  trouvaient  des  violons,  et 
Ton  en  vit  24  accompagner  le  régiment  de  Ghamnasne 
pour  ouvrir  les  travaux  de  tranchée  an  siège  de  Lerida  t 
ns  violoos  eurent  longtemps  leur  rôle,  puisqu'il  en  exis- 
tait en:o!re  dans  quelques  régiments  pendant  les  pre- 
mières années  de  la  République.  Mais,  en  génâ«l« 
c'ètaieiit  les  tambours  qui  marquaient  la  marche  et  bat- 


taient la  charge,  avec  accompagnemen  de  fifres  et  de 
hautbois.  Le  hautbois  fut  admis  dans  les  régiments  fran-^ 
çais  à  la  fin  du  règne  de  I.ouis  XIII;  les  timbales  pa- 
rurent sous  Louis  AlV,  en  1G92,  dans  les  musiques  de 
cavalerie;  l'introduction  du  basson,  du  cor  et  de  la  clari- 
nette date  des  premières  années  du  xvm*  siècle,  et  celle 
des  instruments  de  cuivre  à  clefs,  de  1770  environ.  Puis 
vinrent  successivement  les  trombones,  les  ophicléides, 
les  cornets  à  pistons,  et  enfin,  de  nos  jours,  les  sax-hom 
et  les  saxophones. 

Aujourd'hui ,  chaque  régiment  de  cavalerie  et  d'artil- 
lerie en  France  a  une  fanfare  de  trompettes  (sa  mu- 
sique a  été  supprimée  en  1867);  chaque  régiment  d'in- 
fanterie, ses  tambours,  sa  fanfare,  et  sa  musique;  chaque 
bataillon  de  chasseurs  à  pied,  ses  clairons  et  sa  fanfare. 
L'organisation  des  corps  de  musique  a  été  l'objet  de 
nombreux  règlements.  Sous  Louis  aIV,  chaque  compa- 
gnie de  gardes  du  corps  avait  sept  trompettes  et  un  tim- 
balier; mais  le  nombre  des  musiciens  de  régiment  dé- 
pendait des  colonels,  qui  en  avaient  l'entretien  à  leur 
charge.  Au  temps  de  Napoléon  I*',  une  musique  régimen- 
taire  comptait  de  22  à  24  musiciens  :  8  grandes  clari- 
nettes, 1  petite,  1  petite  flûte,  2  cors,  2  bassons,  3  trom- 
bones, 2  serpents,  1  grosse  caisse,  1  cliapeau  chinois, 
1  cymbalier,  1  caisse  roulante.  Une  ordonnance  de  1827 
décida  que  les  musiciens  seraient  désormais  entretenus 
et  soldés  aux  frais  de  l'État ,  et  en  fixa  le  nombre  à  27  par 
régiment.  Ce  règlement  ne  fut  pas  longtemps  observé,  et 
l'on  en  vint  dans  plusieurs  corps  à  doubler  presque  le 
nombre  déterminé.  En  1800,  un  décret,  conservant  aux 
musiques  des  régiments  de  gendarmerie  et  des  guides  de 
la  garde  impériale,  ainsi  qu'à  celle  de  la  garde  de  Paris, 
leur  orsanisation  exceptionnelle,  régla  dnsi  qu'il  suit  la 
composition  des  musiques  régimentaires  : 

MDSIQDB  DE  TROUPB  A  PIED. 

Flûtes 2 

Petites  clarinettes 2 

Grandes  clarinettes 4 

Hautbois 2 

Saxophones  sopranos 2 

Saxophones  altos 2 

Saxophones  ténors 2 

Saxophones  barytons 2 

Cornets  à  pistons 2 

Trompettes  à  cylindres 2 

Tromoones 3 

Sax-homs  si  bémol  contraltos 2 

Saxotrombas  altos  mi  bémol 3 

Sax-horns  barytons  si  bémol 2 

Sax-homs  basses  si  bémol  à  quatre  cylindres.  3 

Sax-hom  contre-basse  mi  bémol i 

Sax-hom  contre-basse  grave  sî  bémoU  ...  1 

Caisse  claire  on  roulante •  1 

Grosse  caisse. 1 

Qymbales  (paire  de). i 

40 

MUSIQUE  DE  TROUPB  A  CHEVAL. 

Petit  sax-hom  aigu  si  bémol 1 

Petit  sax-bora  soprano  mi  bémol 1 

Sax-homs  contraltos  si  bémol é 

Sax-hom  alto  la  bémol i 

Saxotrombas  altos  mi  bémol, S 

Saxotrombas  barytons  si  bémol 2 

Sax-homs  basses  »t  bémol  à  quatre  cylindres.  4 

Sax-hom  contre-basse  mi  bémol i 

Sax-hom  contre-basse  grave  si  bémol 1 

Cornets  à  pistons • 2 

Trompettes  à  cylindres. 4 

Th)mlM>nes • 3 

muTAmE  (Organisation}.  V.  notre  DieHtmnaire  deBiO' 
graphie  et  d  Histoire,  p.  1079,  col.  2. 

v lUTAiEE  (Paye  ou  Solde),  v.  Solde. 

MiUTAiBE  (Sâryice).  V,  SpvicE. 

MILITAIRES  (Colonies,  Écoles).  V.  Colouies,  Ecoles, 
dans  notro  DietkmtMire  de  Biographie  et  d*Histoire. 

MniTAiaES  (Honneurs),  démonstrations  extérie-ves  de 
respect  auxquelles  tout  militaire  est  tenn  à  l'égara  de  ses 
supérieurs.  EUes  se  réduisent  presque  partout  ai^our 
d'bui  an  salut,  qui  consiste  à  porter  la  main  à  la  tète. 
Un  soldat  en  faction  porte  l'arme  à  tout  officier  jus» 
qu'an  grade  de  capitaine  induaivementi  ainsi  qtl  tout 


MIL 


1254 


HIM 


tMl  qui  a  la  chrfx  de  la  Légion  d*honneàr  (non  le  simple 
roban);  il  présentie  Taroie  aux  officiers  supériears.  Un 

Kite  ne  prend  les  armes  qtie  pour  Tofficier  de  rondo, 
ns  les  parades  et  les  revues,  les  offidçrs  saluent  de 
leur  saîyre  en  passant  devaht  le  drapeau.  Des  honneurs 
particuliers  sont  rendus  dans  les  places  fortes  aux  princes 
et  aux  grands  personnages  qui  viennent  les  visiter  ;  le 
Bombre  des  coups  de  canon  gu*on  doit  tirer  en  pareilles 
Occasions  est  déterminé  par  des  règlements.  En  mer,  les 
vaisseaux  se  saluent  réciproquement  ;  Ils  saluent  égale- 
llDent,,par  un  certain  nombre  de  coups  de  canon,  les 
forts  devant  lesquels  ils  passent  ou  jettent  Pancre. 

MiuTAiaBS  (Hôpitaux).  V.  Hôpital  muTAiRB»  dans 
notre  Dictionnaire  dëi  Biographie  et  d^ Histoire, 

MiuTAtaBS  (  Chirurgiens ,  Médecins ,  Pharmaciens). 
V,  CmauRGiERS,  Médecins,  PBAaMAaeFis. 

mutÀiABS  (Ouvriers,  Prisons).  V,  Ouvaiias,  Prisons. 

MILLE.       (  r.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

ifiLLB  D*OR^  /      Biographie  et  (T Histoire. 

MILLE  ET  UNE  NUITS  (Les),  recueil  de  contes  orien- 
taux, publié  pour  la  première  fois  en  Europe  par  Gal- 
lànd,  qui  Tattribualt  à  un  auteur  arabe  Inconnu.  Caussin 
de  Percerai  a  enrichi  de  nouveaux  contes  Tédition  qu*il 
en  donna  en  1900  :  comme  le  style  dans  lequel  ces  contes 
sont  écrits  est  vulgaire  et  nécessairement  assez  mo- 
derne, il  ne  leur  donnait  paa  plus  de  trois  ou  quatre 
siècles  d'antiquité.  Langlès  et  M.  de  Hammer  ont  pensé, 
au  contraire,  que  les  Mille  et  une  Nuits  avaient  une 
haute  antiquité,  et  qu*on  pouvait  en  attribuer  la  première 
rédaction  à  Tlnde,  ou  du  moins  à  la  Perse,  avant  la  con- 
quête de  ce  pays  par  les  An^es.  Pour  enlever  aux  Arabes 
1  honneur  d^avoir  inventé  cette  espèce  de  cycle  roma- 
nesque, on  allègue  un  passage  de  Thistorien  arabe  Ma- 
souai,  qui  écrivait  vers  l'an  947  de  J.-G.  ;  à  propos  de 
récits  relatifs  à  certains  personnages  antérieurs  à  Ma- 
homet, cet  historien  les  traite  de  faibles,  «  semblables,  dit- 
Il  ,  à  celles  qu'on  nous  a  traduites  des  langues  persane , 
indienne  et  grecque,  tels  que  le  livre'  intitulé  les  Mille 
eontês;  »  et  on  remarque,  a  Tappui  de  ce  passage,  que, 
■DUS  les  califes  Haroun-al-Raschid,  Amin  et  Al-Mamoun, 
la  littérature  arabe  s*enrichit,  en  effet,  de  la  traduction 
d*un  grand  nombre  d'ouvrages  étrangers.  Sylvestre  de 
Sacy,  dans  un  Mémoire  lu  à  l'Académie  des  Inscriptions 
et  Belles-Lettres ,  pense  gue  la  seule  conclusion  à  tirer 
légitimement  de  la  phrase  de  Masoudi,  c'est  qu'il  aura 
eusté,  sous  le  nom  dé  MUïe  contes,  un  livre  originaire- 
ment persan  ou  indien,  puis  traduit  en  arabe,  et  duquel 
Fauteur  des  Mille  et  une  Nuits  aura  tiré  certains  sijets 
et  peut-être  même  lés  noms  de  ses  personnages.  Les  rai- 
sons qui  ne  lui  semblent  pas  permettre  de  donner  aux 
Mille  et  une  Nuits  une  origine  indienne  ou  persane  sont 
les  suivantes  :  ce  recueil  présente  à  chaque  page  le  ta- 
bleau de  là  reli^on,  des  coutumes,  des  lois,  des  mœurs, 
du  luxe,  de  Tétiquette  des  cours  de  Bagdad  ou  du  dure  ; 

Eresque  tous  les  acteurs  des  contes  sont  des  musulmans; 
k  scène  des  événements  est  le  plus  souvent  sur  les 
bords  du  Tigre,  de  l'Euphrate  ou  du  Nil;  les  sciences 
réelles  ou  fantastiques  dont  il  y  est  question,  sont  celles 
dont  les  Arabes  te  font  honneur  ;  les  Génies  qui  y  figu- 
rent n'indiquent  pas,  comme  on  le  prétend,  une  source 
indienne,  mais  sont  ceux  de  la  mythologie  arabe,  modi- 
fiés par  les  préjugés  musulmans,  et  toujours  tremblants 
au  seul  nom  de  Saloinon  ;  les  religions  dont  il  est  parlé 
ne  sont  Jamais  autres  que  l*islamisme,  le  christianisme, 
le  Judaïsme  et  le  magisme;  on  y  parie  de  Moïse,  de 
David  et  autres  personnages  inconnus  à  l'Inde  et  à  la 
Perse  ayant,  l'introduction  du  naahométisme  dans  cet 
contrées  ;  les  opérations  magiques  se  font  au  mo^^en  de 
pratiques  et  d'instruments  .empruntés  aux  Juifs.  Si  l'au- 
teur a  introduit  dans  ces*  contes  des  personnages  et  des 
noms  persans  ou  tartares,  s'il  a  quelquefois  placé  la 
icèae  en  Chine,  dans  les  Indes,  à  ^aschgar  ou  à  Samar- 
cand,  c'est  pour  dépayser  ses  lecteurs  en  les  transpor- 
tant loin  des  r^ons  qui  leur  sont  connues,  et  pour  se 
donner  ain^  plus  de  liberté  de  feindre  et  d'Inventer. 
Enfin,  il  serait  étrange  qu'un  recueil  de  contes  qui,  à  la 
plus  brillante  époque  de  la  littérature  arabe,  aurait  été 
Jugé  digne  d'être  traduit  de  l'indien  ou  du  persan,  soit 
devenu,  sous  la  forme  actuelle  àoA  Mille  et  une  Nuits , 
on  assembla»»  de  morceaux  appartenant  à  diverses  épo- 
ques et  de  différents  styles  ;  que  le  fond  primitif  ne  con- 
stitua plus  qu'une  faible  partie  de  ce  recueU,  par  suite 
de  llntercalatlon  et  de  la  substitution  de  Nouvelles 
arabes;  que  les  contes  indiens  ou  persans,  éliminés  par 
les  écrivains  arabes,  ne  se  retrouvent  nulle  part  ailleurs. 
Sylvestre  de  Saqr  résume  en  ces  termes  ce  qu'il  j  a  de 


plus  vndsémblable  sur  l'histoire  du  recueil  des  Aft(i#  et 
un^  Nuits  : 

«  Il  me  parait  qu'il  a  été  écrit  originairement  en  Syrie, 
et  dans  le  langage  vulgaire;  qu'il  n*À  Jamais  été  acheTé 
par  son  auteur  ;  que,  dans  la  smtè,  les  copistes  ont  cher- 
ché à  le  compléter,  soit  en  y  insérant  des  nouvelles 
déjà  connues,  mais  qui  n'appartenaient  pas  à  ce  recueil, 
comme  les  Voyages  de  Sindbiad  le  nUuin  et  le  Uvre  dit 
sept  vizirst  soit  en  composant  eux-mêmes  avec  plus  oq 
moins  de  talent,  et  que  de  là  naît  la  variété  qu'on  a  ob- 
servée entre  les  manuscrits  du  recueil  ;  que  telle  est  aussi 
la  raison  pour  laquelle  les  manuscrits  ne  sont  point 
d'accord  sur  le  dénoûment,  dont  il  existe  deux  rôdts 
très-différents;  que  les  contes  «Joutes  l'ont  été  à  diffé- 
rentes époques  et  peut-être  en  diverses  contrées,  mais 
surtout  en  Egypte;  qu'enfin  le  recueil  n'est  pas  fort 
ancien,  comme  le  prouve  le  langage  dans  lequel  il  est 
écrit,  et  qu'on  peut  en  reporter  la  composition  vers  le 
milieu  du  ix*  siècle  de  l'hégire,  c-4-d.  qu'il  compterait 
'  environ  400  ans  d'existence.  » 

La  fable  des  Mille  et  une  Nuits  est  celle  d*un  souveialn 
qui  croit  avoir  d'excellentes  raisons  pour  faire  mourir  sa 
femme,  la  sultane  Schéhérazade,  et  qui ,  durant  trois  ans, 
diffère.  Jour  par  Jour,  l'exécution  de  son  dessein,  pour 
avoir  le  plaisir  d'entendre  le  lendemain  la  continuation 
ou  la  fin  d'une  histoire  qu'elle  a  commencée.  Le  livre 
manque  de  philosophie,  de  but  vraiment  moral  ;  il  con- 
tient beaucoup  de  folies:  mais  11  est  fécond  et  varié;  il 
amuse  et  intéresse  ;  par  l'emploi  du  merveilleux,  il  flatte 
le  penchant  que  nous  avons  à  nous  laisser  abuser,  et 
nous  rapproche  de  l'enfance  et  de  l'âge  des  illusions.  On 
y  trouve  une  peinture  fidèle  du  caractère  et  des  mœurs 
des  peuples  orientaux  ;  sous  les  yeux  du  lecteur  se  dé- 
roulent tour  à  tour  les  artifices  des  femmes  corrompues 
par  la  iservitude,  rh3'pocrisie  des  derviches,  la  corruption 
des  gens  de  loi,  la  friponnerie  des  esclaves,  etc.  Les 
Mille  et  une  Nuits  sont  la  seule  production  littéraire  de 
l'Orient  qui  soit  populaire  en  Europe.  B. 

MILLÉSIME  (du  latin  mUlesimus,  millième),  chiffre 
qui,  sur  les  monnaies,  médailles.  Jetons,  etc.,  indique 
Tannée  de  la  fabrication.  II  n'a  commencé  d'être  en  usage 
qu'au  XV*  siècle  :  dans  l'antiquité  et  au  moyen  âge,  on 
avait  indiqué  l'époque  de  l'émission  des  monnaies  par 
les  noms  des  magistrats,  par  l'effigie  des  souverains,  par 
les  consulats  ou  tribunats  des  empereurs  ou  par  l'année 
de  leur  règne.  La  plus  ancienne  pièce  qui  porte  un  mil- 
lésime est  une  monnaie  d'argent  de  Jean  de  Heinsberg, 
évêque  de  Uége,  en  1428  ;  en  France,  la  première  est  un 
écu  d'Anne  de  Bretagne,  en  1498.  On  a  un  écu  de  Fran- 
çois I*  avec  le  millésime  de  1532.  Les  chiffres  romains 
furent  d'abord  employés  à  cette  marque  :  mais,  en  1549, 
Henri  II  ordonna  qu'on  prit  les  chiffres  arabes. 

MILLIAIRES  (Pierres  ou  Colonnes).  7.  notre  Diction^ 
noire  de  Biographie  et  d*Bistoire, 

MILVINE,  nom  que  les  Anciens  donnaient  à  une  sorte 
de  flûte,  soit  parce  qu'elle  était  fidte  d'un  oa  de  milan  (en 
latin  milimsy,  soit  parce  que  le  son ,  qui  en  était  fort 
aigu ,  ressemblait  au  cri  de  cet  oiseau. 

MIMANSA.  V.  Indibwvb  (Philosophie). 

MIMB  (du  grec  mtm^omot,  imiter,  mimer),  nom  qu'on 
donna,  chez  les  Anciens,  à  une  sorte  de  composition 
dramatique,  et  aux  acteurs  qui  la  représentaient.  So- 
phron  et  Xénarque  étalent  cités  parmi  les  Grecs  comipe 
mimographês  ou  auteurs  de  mimes  :  mais  ces  écrits 
'  étaient  faits  pour  U  lecture  ou  la  récitation,  non  pour  la 
scène.  Selon  le  témoignage  des  écrivains  latins,  les  mimes 
die  Sophron,  bien  qu'appartenant  au  genre  de  la  farce, 
respectaient  U  décence,  et  faisaient  éprouver  aux  hon- 
nêtes gens  les  mêmes  émotions  que  les  pièces  de  Plante 
et,  déférence.  Il  en  fut  tout  autrement  des  mimes  d'ori- 
gine romaine,  qui  Jouirent  d'une  grande  faveur  après  les 
Atellanes  (F.  ce  mot)  :  en  s'y  proposait  de  diverdr  le  bas 
peuple  par  de  grosses  plaisanteries  et  même  psr  da 
obscénités.  Ces  compositions  grossières  étaient  en  vers, 
tandis  que  celles  de  Sophron  étalent  en  prose;  ellei 
eurent  beaucoup  de  vogue  à  l'époque  de  J.  César  :  Tea* 
time  que  des  écrivains  sérieux  avalent  pour  les  mimes  ds 
Labériua,  de  P.  Syrus  et  de  Cn.  Matins,  permet  cepen- 
dant de  penser  que  ces  auteurs  ne  descendirent  point 
aussi  bas.  Quant  aux  mimes-adeurs,  c'étaient  des  bouf- 
fons à  tête  rasée,  sans  chauàsure,  aux  vêtements  fonn^ 
de  diverses  couleurs,  planipedes,  eoxalceati,  pannieulij 
sannMnescapreœ,  V.  Calllachus,  De  ludii  soeMCisfi^^ 
morum  et.  .pantomimorum  synlagfna,  Padoue,  i'iih 
in-4<';  Ziegler,  De  mifnis  Bomanorum,  Goattingue,  178S. 

MIMÈSE  (du  grec  mintésis,  Imitadon),  «orte  dlrooii 


MIN 


1255 


MÎN 


fii,  TBDMit  de  la  haine ,  da  méprii  eu  de  la  colère,  pa- 
rodie le  toD,  les  geeloa  et  lesjperolee  d'une  personne, 
afin  ds  loi  donnei  un  ridicule.  On  en  tronve  un  exemple 
dant  la  loèBe  dn  Misanthrope  de  Molière,  entre  Arsinoé 
etCéUmène.  .     - 

MQOQDB  (da  grec  mimas^  imitateur),  art  de  parler 
aux  yeux  aana  le  teooura  de  la  parole  et  de  récriture^ 
ptr  las  attitudes,  les  mouvements  des  maina  et  da  corps, 
las  jeux  de  la  physionomie,  assc^ettis  à  certaines  lois  ou 
defBBua  signes  de  convention.  C'est  un  langase  à  rasage 
d»  parsonnes  qui  ne  parlent  pas  la  même  Tangue,  ou 
^  MDt  privéea  de  Toiguie  de  la  psrole.  La  liimique 
Mit  soan,  dans  les  pièces  de  théâtre  appelées  panto- 
admas  et  ballets,  à  remplacer  la  parole  pour  Texpresaion 
des  idéas  et  dea  sentiments.  Enfin,  associée  à  la  partie, 
aoit  ckei  Toratenr,  soit  sur  la  scène,  elle  ajoute  à  sa  poia- 
nooe.  F.  Acnoii,  DaAiuTiQin  (Art),  Gbstb. 

MIMODRAME,  osuvre  scsènique  dana  laquelle  les  a&> 
teuis  ne  parlent  pas,  mala  se  bornent  à  mimer  leur  rOle. 
Ce  ganre  prit  naissance,  lorsque  l'autorité,  dana  le  bat 
de  protéger  lea  théàtrea  royaux  contre  une  concurrence 
dsogereuse,  interdit  tout  empiétement  sur  leur  domaine 
aux  théitraa  secondaires.  Tantôt  le  nombre  des  person- 
nages qoi  pouvaient  occuper  simultanément  la  scène  ftit 
Bmité,  tantôt  on  ne  permit  la  parole  qu'à  un  seul,  tantèt 
tous  les  perM»nagaa  durent  rester  muets  et  se  contenter 
dn  geste,  pendant  qu'on  déclamait  l'ouvrage  derrière  la 
toile  de  fond  ou  dana  les  coulisses.  Quelquefois  même  Us 
portèrent  dea  écrUeaai,  indiquant  aux  spectateurs  ce  que 
la  geste  seul  n'annit  pu  leur  faire  comprendre.  Le  mi- 
modrame  cberdui  des  moyens  de  séduction  dans  la 
besoté  des  décora,  la  richesse  des  costumes,  le  nombre 
ai  las  manoaavrea  des  comparses,  et  l'on  eut  ce  qu'on 
appelle  encore  aiidourd'hui  des  ptdcet  à  ipêetades.  n  a 
aa  800  plus  beau  théâtre  au  Cirque  Olympique  de  Psris. 

HIHOGQAPHE.  F.  HiMB. 

BONARDE  (Ordonnance).  F.  HmAan,  dana  notre  Die- 
tmnairB  d»  Biographie  H  éPHiMtairê, 

MINARET  (de  rarabe  minora,  lieu  de  lumière),  tour 
hante  et  svelte  annexée  aux  mosquées.  Elle  est  divisée  en 
étages  et  ceint»  de  balcons  en  saillie,  d'oA  le  muenln  an- 
ooDce  aux  Musulmans  lea  dnq  heures  de  la  prière. 
K.  AsABB  (Architecture),  la  fig»  p.  185,  2*  colonne. 

HINB,  monnaie  de  compte  des  anciena  Grecs,  ^ant 
100  drachmes,  ou  la  60*  partie  du  talent  attique.  La 
mme  ptolémalque  on  alexandrine  ne  fut  que  lea  4/5  de  la 
mine  stdque. 

MiRB,  en  termes  d'Art  militaire,  chemin  soatenain 
pTMiqaé  par  un  assiégeant  pour  arrmr  sous  un  ouvrage 
delà  place,  et  le  détruire  (F.  Mina,  dans  le  Sup- 
pUment  ).  Une  mine  se  compose  d'une  galerie  et  d'un 
foemcaii  (F.  ce«  MOtf).  L'usage  de  charger  les  mines 
srec  de  la  poudre  date  de  i487  ;  l'invention  appartient 
aox  Gèsoia,  qui  assiégeaient  Sarzanella.  Hais  l'Espagnol 
Pedro  de  Navarre  fût  Te  premier  â  qui  ce  moyen  réussit, 
an  attaquant  le  château  de  l'OBuf,  à  Naples,  en  1503. 
F.  Bousmsfd,  Estai  général  de  fortiflcaUon ,  Paris, 
an  xn  ;  Gillot ,  TVoita  de  (ortilicatwn  souterraine,  1805. 

Mllie(COIfTRB-).   F.  CONTSB-lfinB. 

MINÉRALES  (Eaux).  F.  Eaox  mifiaALBS. 

lONERVAL.  F.  ce  mot  dans  notre  DictionnaMre  de 
Biographie  et  d^Ristoire. 

MINERVE ,  divinité  latine  que  les  Romains  assimila 
tant  à  la  déeaee  grecque  Athénê.  Celle-ci  représenta  pri- 
mitifemeot  l'air  pur ,  l'atmosphère ,  puis  devint  une 
déeaae  dea  eaux,  dite  Tritoeénio  ou  Tritonie  {née  des 
taux,  d'aprèa  l'éQrmologie  sanscrite),  parce  qu'on  re- 
gvda  l'atmosphère  comme  la  source  de  l'humidité  et 
des  eaux.  De  là  Tépithète  de  glauMpis  (aux  yeux  glan- 
qees)  qu'elle  reçoit  dans  Homère  ;  de  là  aussi  les  rapports 
<tae  la  Fshle  établit  entre  elle  et  Poeéldon  ou  Neptune^ 
iot  pluriours  traditions  lui  donnèrent  même  pour  père. 
Fenooniication  de  •  l'air  pur ,  Athènè  fut  conaidérée 
comme  vierge,  et  v^lla  sur  la  chasteté  des  femmes;  par 
sQite,élle  predda  aux  travaux  des  femmes,  à  l'aigaille,  à 
la  navette,  an  fuaeaa  ;  elle  devint  le  type  des  plus  hautea 
vertus,  de  la  poretéet  de  la  sagesse  suprêmes,  et,  comme 
ces  vertus  émanent  de  Jupiter,  on  la  fit  naître  du  oer- 
▼ean  de  ce  Dieu,  mythe  que  quelquee*uns  rattachent  au 
taraem  de  Tritode,  dérivé  de  tritô  (tête,  en  dialecte 
béotleo).  C'est  encore  comme  divinité  de  l'air  pur  qa*A« 
tbeoê  liit  ose  déesse  médicale,  une  divinité  de  la  santé, 
canfoodue  avec  Hygle  i  elle  eut,  ainsi  qu'Esculape,  le 
serpent  pour  emblane.  I^aroe  qu'elle  créa  l'olivier,  lea 
Athéniens  la  prirent  pour  protectrice  t  le  serpent  étant 
W  Igera  eeoa  laquelle  le»  Hellènes  repréeentaient  le  gé- 


nie local,  on  a'explique  encore  par  là  qu'il  soit  devom: 
l'un  de  ses  attrlbuta.  Protectrice  d'une  importante  cité« 
Athénè  prit  les  caractères  d'une,  divinité  guerrière  :  os 
la  dit  sortie  tout  armée  de  la  tète  de  Jupiter  ;  on  lui  atn 
tribua  l'art  de  dompter  et  de  conduire  les  chevaux,  ainsi 
crue  l'invention  des  chars  et  dea  trompettes  de  guevre 
Quand  Athènè  fut  confondue  en-  Italia  avec  la  déesse 
étrusque  Mnerlia,  devenue  la  Minerve  des  Latins,  celle-ci 
reçut  les  traits  de  la  divinité  athénienne*  Athènè  fut  eiH 
eore  la  patronne  dea  laboureurs;  à  ce  titre,  elle  fut  ap- 
pelée baudeia,  ftoormia  (qui  attelle  les  bcauft  au  Joug),  et 
fut  représentée  avec  dea  couronnes  et  des  fruits  sur  la 
tète.  —  On  donnait  à  Minerve  une  beauté  simple  et  mo> 
deste,  un  air  grave,  noble,  plein  de  force  et  de  mijefté, 
et  on  la  représentait  colflée  d'un  casque,  vêtue  d'une  tu- 
nique lonâue,  sans  manchea,  sans  coutures  aux  cètéa, 
avec  l'égide  sur  la  poitrine,  et  armée  de  la  lance,  que 
parfoia  elle  brandit  :  on  a  expliqué  ainsi  son  nom  de 
PalU»  {ÔBpaUâ,  acdter,  brandir),  qui,  selon  d'autrea, 
sigpaiflerait  Jeune  fille  {paUax),  Son  temple  le  plus  m»* 
gniflque,  le  Parthénon  d'Athènes,  était  par  excellence  le 
sanctuaire  de  la  divinité  vierge.  Là  se  trouvait  son  image 
]b,  plua  achevée,  la  sutue  chryséléphantlne  exécutée  par 
Phidias  :  Oilo  représentait  la  déesse  debout,  et  était  haute 
de  il  met.  environ.  Elle  était  creuae;  les  lames  d'ivoire 
et  l'or  qui  servaient  pour  le  casque,  l'égide  et  le  péplos  de 
U.  déesse,  étaient  appliqués  sur  une  carcasse  en  bois  son* 
tenue  par  une  armature.  Cette  Minerve,  restituée,  dana 
de  médiocrea  proportions,  par  M.  le  duc  de  Luynea,  a 
été  eoiécutée  par  le  sculpteur  Simart.  Une  statuette  de 
Minerve,  vue  par  Lenormant  à  Athènes  en  1860,  et  qui, 
bien  que  d'un  travail  vulgaire,  parait  être  une  imitation 
de  ToBuvre  de  Phidias,  peut  servir  à  rectifier  quelquea 
erreurs  des  archéologues  qui  ont  restitué  cette  osuvre* 
Le  combat  des  Géanu  figuré  sur  le  bouclier  qui  est  aox 
pieda  de  la  déesse,  le  serpent  qui  se  dresse  en  levant  hi 
tête  sous  la  protection  de  l'égide,  les  dieux  assistant  à  la 
naissance  de  Pandore  sur  le  piédestal ,  tous  les  accès* 
soirée  de  cette  statuette,  sont  conformes  aux  descriptions 
que  les  Anciens  nous  ont  laissées  de  la  fameuse  Minerve; 
mais  la  forme  et  les  ornements  du  casque  difièrent, 
ainai  que  la  place  et  l'attitade  du  serpent;  la  représenta» 
tion  du  comnat  des  (Séants,  au  lieu  d'être  le  sujet  d' une 
frise,  est  ciselée  dans  le  champ  du  bouclier,  dana  la 
partie  convexe,  et  non  dans  la  concavité  ;  c'eat  de  la  main 
droite,  et  non  de  la  gauche,  que  la  déesse  porte  la  statue 
de  la  Victoire,  la  gauche  tenant  la  lance.  Indépendant 
ment  de  la  Minerve  du  Parthénon,  Phidias  fit  la  Minerve 
Poliade  de  l'Acropole,  et  la  Minerve  de  Platée,  en  bole 
doré  et  en  marbre  pentélique,  toutes  deux  de  propoiv 
dons  colossales.  Biinerve  eut  des  temples  célébrée  à  tin^ 
dos,  à  Mantinée,  à  Tégée  ;  dans  cette  dernière  ville,  la 
statue  de  la  déesse,  toute  en  ivoire,  avait  été  faite  par  I9 
sculpteur  Endnos;  Auguste  la  fit  transporter  à  Rome.  Lea 
plus  anciens  sanctuaires  de  Minerve  chez  les  Romains 
s'élevaient  sur  les  monts  CapitoUn,  Aventin  et  Gœliua; 
l'empereur  Domitien  en  fit  élever  plusieurs,  entre  autres 
celui  d'où  est  resté  à  une  partie  de  Rome  moderne  le 
nom  de  Minerva.  Cest  là  qu'a  été  découverte  la  Pallaa 
Giustiniani.  En  1707,  on  a  trouvé  à  VoUetri  une  Pallaa 
colossale  en  marbre  de  Paros,  qui  est  aujourd'hui  au  Mu- 
sée du  Louvre.  Cet  établissement  possède  une  Minerve 
d'un  seul  morceau  d'albàtre  oriental  :  la  déesse  est  re* 
présentée  tenant  dans  la  main  gauche  une  chouette;  sa 
poinrine  est  couverte  de  l'égide  bordée  de  serpents  et  où 
est  figurée  la  tête  de  Méduse  sur  un  fond  d'écaillés.     B. 

mNEBVB  (Chant  de),  en  latin  Canticum  ou  Nomm 
Mtnervœ,  chant  grec,  composé  par  Olympe,  oui  vivait 
sous  le  règne  de  Mldas.  H  fut  conserver  avec  sa  musiquOii 
pendant  pluaieura  siècles. 

MINES,  masses  de  substances  minérales  ou  fossilee 
renfermées  dana  le  sein  de  la  terre,  et  qui  contienilent 
de  l'or,  de  l'argent,  du  platine,  dn  mercure,  du  plomh^ 
du  fer,  du  cuivre,  de  l'étain,  du  sine,  de  la  calamine,  dn 
bismuth,  du  cobalt,  de  l'arsenic,  du  manganèse,  de  Tai^ 
tinioine,  dn  molybdène,  de  la  plombagine,  du  soufre,  d» 
la  houille,  de  l'alun,  des  sulfates  à  base  métallique,  eCe. 
On  appelle  Minières  lea  minersis  de  fer  dits  d'alluvien, 
les  terres  pyrlteuses  propres  à  être  converties  en  sulbla 
de  fer,  les  terres  alumlneuses  et  les  tourbes.  L'exploita- 
tion des  mines  est,  dans  preeque  tous  les  pays,  on  dea 
obfeta  de  la  solfidtnde  du  gouvernement,  une  source  de 
revenus,  de  prospérité  et  de  force.  L'attribvtion  de  1a. 
propriété  des  mines  an  propriétaire  dn  sol  est  favorable 
à  la  recherche  des  mines,  mais  non  à  leur  exploitation  1 
l'attribution  à  llnventenr^'eat  pas  plus  Avrerable  à  \%a-^ 


MIN 


1256 


MFN 


r 


{iloitatiM,  mais  elle  Test  beaacoap  plos  à  la  déoouTerte. 
1  paraîtrait  donc  utile,  au  premier  abord,  d'attribuer  la 
propriété  de  la  mine  à  tHsTenteur  plutôt  qu'au  proprié- 
taire. Toutefois,  ce  principe  ne  saurait  être  appliqué  aux 
mines  dont  l'existence  est  connue  depuis  longtemps  ;  en- 
suite, quelles  limites  assigner  à  la  concession  fondée  sur 
ce  principe?  S'il  est  Juste  que  l'inventeur  soit  récompensé 
proportionnellement  à  l'importance  de  sa  découverte,  il 
serait  extravagant  d'attribuer  des  richesses  minérales 
immenses  à  l'auteur  d'une  découverte  due  le  plus  sou- 
vent an  hasard.  A  l'égard  du  propriétaire  du  sol,  si  les 
mines  étaient  id)andonnées  au  premier  occupant,  les  ma- 
tières les  plus  précieuses  seraient  bientôt  perdues  par  le 
gaspillage.  Aussi,  sur  presque  tout  notre  continent,  la 
propriété  des  mines  fait  partie  du  domaine  public,  et  ne 
peut  devenir  propriété  particulière  qu'en  vertu  d'une 
concession  de  l'État.  Ce  principe  parait  plus  conforme  au 
Droit  que  celui  qui  est  adopté  en  Angleterre,  car  le  pro- 

{iriétaire  de  la  surface  n*a  fait  aucun  travail  de  nature  à 
ui  faire  attribuer  la  valeur  de  la  mine.  En  outre,  l'ex- 
ploitation de  cette  propriété  intéresse  trop  vivement  la 
prospérité  publique  pour  être  abandonnée  à  l'arbitraire 
du  concessionnaire,  dont  l'incurie  aurait  les  résultats  les 

S  lus  funestes.  Une  exploitation  mal  dirigjée,  soit  par  le 
éfaut  do  connaissances  nécessaires,  soit  par  suite  de 
l'intérêt  du  moment,  qui  pousse  toujoun  à  extraire  les 
parties  les  plus  riches  sans  s'inquiéter  de  l'avenir,  peut 
rendre  impossible  l'exploitation  d'une  valeur  bien  plus 
considérable  que  celle  que  l'on  a  déjà  retirée. 

Chez  les  Athéniens,  l'État  était  seul  propriétaire  des 
mines  ;  mais  il  les  affermait  moyennant  une  somme  une 
fois  payée  et  une  redevance  perpétuelle  du  24*  du  produit 
brut.  Les  mines  d'argent  du  Laurium  et  les  mines  d'or 
de  l'Ile  de  Thasos  et  de  Scapte-Hyle  étaient  seules  exploi- 
tées directement  au  compte  de  l'État.  —  Chez  les  Ro- 
mains, le  droit  régalien  ne  s'appliqua  d'abord  qu'aux 
mines  d'or  et  d'argent.  Sous  la  République,  le  domaine 
oe  possédait  qu'un  petit  nombre  de  mines,  et  les  exploi- 
tait en  régie  ;  les  autres  appartenaient  aux  particuhera, 
2 ni  payaient  à  TÉtat  une  redevance  affermée  pour  une 
poque  déterminée.  Des  officiera  spéciaux  autorisaient 
l'exploitation  des  mines  et  en  surveillaient  les  travaux. 
Dans  les  derniera  temps  de  l'Empire,  les  mines  devinrent 
presque  toutes  la  propriété  du  fisc.— Sous  le  r^me  féodal, 
le  domaine  des  mines  passa  dans  les  mains  des  seigneura. 
Puis,  loroque  la  centralisation  eut  peu  à  peu  ébranlé  ou 
éBàcé  les  souverainetés  locales,  ce  domaine  devint  rég^ 
lien.  —  En  Allemagne,  Charlemagne,  remettant  en  vi- 
gueur dans  cette  pfurtie  de  son  Empire  les  principes  du 
droit  régalien,  réclama  au  profit  de  l'État  la  propnété  de 
Umtes  les  mines,  tant  découvertes  qu'à  d&ouvrir.  La 
BuU$  d^ùr  de  1356  attribua  aux  électeun  de  l'Empire  la 
propriété  des  mines  de  leun  États.  Une  exploitation  ré- 
|ulière  fut  organisée  en  1271  par  une  ordonnance  du  duc 
oe  Brunswick  relative  aux  mines  du  Harz,  et  par  le  roi 
de  Bohème,  en  1275,  pour  celles  situées  dans  ses  États. 
Le  droit  réêilien  éudt  également  appliaué  en  Angleterre, 
puisque,  dès  1231,  la  houille  y  est  exploitée  pour  la  pre- 
mière foison  vertu  d'une  concession  du  roi  Henri  III  aux 
habitants  de  Newcastle.  Depuis  cette  époque,  ce  droit 
parait  avoir  été  abandonné.  Mais,  du  reste,  en  Angleterre, 
la  grande  étendue  des  propriétés  superficielles,  l'immen- 
aite  des  fortunes  particulières,  le  bas  prix  des  capitaux 
el  la  disposition  générale  à  créer  des  compagnies  puis- 
santes pour  ce  genre  d'entreprise,  rendent  peut-être  l'in- 
tervenaon  du  gouvernement  moins  nécessaire  que  dans 
les  autres  pays. 

Le  premier  acte  rédementaire  des  mines  en  France 
date  de  Charles  VI  (39)  mai  1415).  11  proclame  le  droit 
régalien  en  ce  sens  que  le  10*  du  produit  des  mines  ap- 
partient au  roi.  Elles  formaient  une  propriété  distincte 
de  la  superilde,  et  l'État  pouvait  les  exploiter  pour  son 
compte  ou  les  concéder  à  son  gré.  Une  ordonnance  de 
Louis  XI  (27  Juillet  1471  )  consacra  le  principe  de  la  sur- 
veillance de  l'État,  et  même,  dans  certains  cas,  de  l'expro- 
priation des  propriétaires.  En  même  temps  elle  créait  une 
diarge  de  maitre  général,  visiteur  et  gouverneur  det  mines 
du  royaume.  Cette  charge  fut  maintenue,  en  changeant  de 
vom, Jusqu'au  rèene  de  Louis  XV,où  lui  succéda,  en  1748, 
tne  Gompapie  Investie  du  privilège  d'exploiter  toutes 
ies  mines  du  territoire.  L'Aûemblée  constituante ,  sur 
:jft  proposition  de  Mirabeau,  déclara,  par  la  loi  du  12  Juil- 
;let  1791,  que  les  mines  étaient  la  propriété  de  la  Nation, 
iqu'elles  ne  pouvaient  être  exploitées  que  de  son  consen- 
tement, et  à  la  charge  d'indemniser  le  propriétaire  de  la 
'lurfaco:  elle  reconnaissait  en  outre  au  profit  du  proprié* 


taire  le  droii  absolu  et  inconditionnel  d'exploiter  sur  son 


préférence 

paration  des  dommages  résultant  de  l'exploitation,  con- 
sistait à  payer  le  double  de  la  valeur  intrinsèoae  du  lol 
qui  aurait  été  l'objet  des  dég&ts,  ou  dont  la  jouissance 
aurait  été  paralysée  entre  les  mains  du  propriétaire.  Si 
celui-ci  voulait  exploiter  une  mine  aituée  au-dessous  de 
sa  propriété,  le  gouvernement  ne  pouvait  lui  refuser  la 
concession,  à  moins  que  sa  terre  ne  fût  pas  assez  étendue 
pour  former  une  exploitation.  Dans  les  dispositions  de 
cette  loi,  la  limitation  dans  la  durée  des  concessions  était 
injuste,  en  ce  que  les  exploitants  n'avaient  pas  le  temps 
d'amortir  leur  capital.  En  outre,  elle  laissait  l'exploita* 
tion  sans  contrôle,  et  ne  la  contraignait  pas  même  à  l'ac- 
tivité; aussi  le  dépérissement  des  mines  au  milieu  do 
développement  de  l'industrie  générale  démontra,  après 

Zuelques  années,  la  nécessité  d'une  législation  nouvelle. 
a  loi  du  21  avril  1810  pose  en  principe  que  les  masses 
minérales,  considérées  comme  chose,  sont  de  droit  com- 
mun, et,  qu'étant  une  dépendance  de  la  surface,  elles 
appartiennent  au  propriétaire  du  sol.  Toutefois,  comme 
leur  exploitation  met  en  mouvement  de  très-grands  inté- 
rêts publics  et  économiques,  l'utilité  générale  doit  faire 
fléchir  le  droit  absolu  du  propriétaire.  Ce  dernier  ne  peut 
donc  user  de  sa  mine,  qui  demeure  inerte  entre  ses  mains; 
mais  l'État  le  dépossède  pour  cause  d'utilité  publique,  et 
moyennant  une  indemnité.  Les  droits  de  la  surface  étant 
purgés,  l'État  concède  la  mine  à  qui  bon  lui  semble; 
cette  concession  crée  une  propriété  nouvelle ,  qui  est  à 
son  tour  de  droit  commun,  qu  on  peut  vendre,  donner, 
hypothéquer  comme  un  immeuble  quelconque  dont  on 
est  propriétaire  incommutable.  L'étendue  superficielle 
d'une  concession  de  mines  ne  peut  dépasser  120  kllom. 
carrés;  généralement  elle  est  beaucoup  moins  forte.  Les 
propriétâres  de  mines  payent  à  l'État  une  redevance  fixe 
de  10  fr.  par  kilom.  cûrré,  et  une  redevance  proportion- 
nelle aux  produits  de  l'extraction,  laquelle  ne  peut  Jamais 
s'élever  au-dessus  de  5  p.  100  du  produit  net.  Cette  der- 
nière est  imposée  et  perçue  dans  les  mêmes  formes  que 
la  contribution  foncière  :  toutefois,  les  propriétaires  des 
mines  peuvent  la  convertir  en  un  abonnement,  qu'un 
décret  de  1860  a  basé  sur  le  produit  net  de  deux  an- 
nées. Le  droit  attribué  aux  propriétaires  de  la  surface, 
lorsqu'ils  ne  sont  pas  concessionnaires,  est  réglé  à  une 
somme  déterminée.  Les  concessionnaires  de  mines  sont 
tenus  de  payer  les  indemnités  dues  au  propriétaire  de 
la  surface  où  ils  établissent  leun  travaux;  si  les  travaux 
entrepris  ne  sont  que  temporaires,  et  si  le  sol  qui  les  a 
subis  peut  être  mis  en  culture  après  un  an ,  comme  il 
l'était  auparavant,  l'indemnité  se  règle  au  double  de  ce 
qu'aurait  produit  net  le  terrain  endommagé.  Lorsque 
roccupation  des  terrains  pour  la  redierohe  ou  les  travaux 
des  mines  prive  les  propriétaires  du  sol  de  la  Jouissance 
du  revenu  au  delà  d'un  an ,  eu  lorsqu'après  les  travaux 
les  terrains  ne  sont  plus  propres  à  m  culture,  on  peut 
ériger  l'acquisition  de  ces  terrains  ;  si  le  propriétaire  de 
la  surface  le  requiert,  les  pièces  de  terre  trop  endommagées 
ou  dégradées  sur  une  trop  grande  partie  de  leur  surface 
doivent  être  achetées  en  totalité.  Le  terrain  à  acquérir 
est  toojoura  estimé  au  double  de  la  valeur  qu'il  avait 
avant  l'exploitation  de  la  mine.  —  Une  mine  ne  peut  être 
vendue  par  lots  ou  partagée  sans  une  autorisation  préa- 
lable du  gouvernement.  L^  mines  sont  immeubles, 
ainsi  que  les  b&timents,  machines,  puits,  galeries  et  autres 
travaux  établis  à  demeure.  Sont  réputés  meubles  les  ac- 
tions ou  intérêts  dans  une  société  ou  entreprise  pour  l'ex- 
ploitation des  mines,  les  matières  extraites,  les  approfi- 
sionnementa  et  autres  obfets  mobiliers,  sauf  les  chevaux, 
agrès,  outils  et  instruments  servant  à  l'exploitation  même. 
L'exploitation  des  mines  n'est  pas  considérée  comme  un 
commerce,  et  les  sociétés  qui  sont  formées  pour  cettt 
exploitation  dépendent  de  la  Juridiction  civile. 

La  loi  de  1810  a  reçu  divera  compléments  spéciaux  et 
réglementaires  par  le  décret  du  3  Janvier  iSlà,  les  lois 
du  27  avril  1838,  du  17  Juin  1840,  et  le  décret  du  23  oc* 
tobre  1852.  Une  disposition  de  la  loi  de  1838  porte  que, 
lorsque  plusieun  mines  situées  dans  des  concessions  dif- 
férentes sont  atteintes  ou  menacées  d'une  inondsUoo 
commune,  de  nature  à  compromettre  leur  existence,  la 
sûreté  publique  ou  les  besoins  des  consommateun,  le 
gouvernement  peut  obliger  les  concessionnaires  i  exécutei 
en  commun  les  travaux  nécessaires,  soit  pour  assécher 
tout  ou  partie  des  mines  inondées,  soit  pour  arrêter  les 
progrès  de  l'inondation.  Le  décret  dn  3  ocL  i85i  défend  à 


Mrif 


t25T 


MIN 


tout  concenionnaire  de  mines  de  réunir  une  ou  plusieurs 
concessions  à  d*aatre8  de  même  nature,  sans  autorisation, 
liln  d^empècher  la  concentration  entre  quelques  mains, 
et  d'arrêter  ainsi  la  formation  d*un  monopole.  —  La  Bel- 
gique a  gardé  la  loi  française  de  1810,  mais  eo  ia  nodi- 
liaDt  dans  rintérôt  des  propriétaires  de  la  surface,  par 
ane  loi  du  2  mai  1837,  qui  établit  que  l'indemnité  attri- 
boée  par  la  loi  de  1810  doit  être  déterminée  au  moyen 
d'une  redevance  fixe  qui  n'est  jamais  moindre  de  25  cen- 
times par  hectare  de  superficie,  et  d'une  redevance  pro- 
portionnelle fixée  de  1  à  3  p.  iOU  du  produit  net  de  la 
mine  arbitré  annuellement  par  un  comité  d'évaluation, 
iioit  sur  les  renseignements  fournis  par  les  exploitants,  soit 
pir  forme  d'imposition  ou  d'abonnement.  —  En  Prusse, 
dont  la  législation  a  servi  de  modèle  au  reste  de  l'AlIe- 
msgoe,  toutes  les  mines  font  partie  du  domaine  public, 
et  ne  peuvent  être  exploitées  qu'en  vertu  d'une  concession. 
Les  exploitants  sont  soumis  à  la  surveillance  des  agents 
spéciaux  de  l'autorité,  à  l'acquittement  de  certains  droits 
en  ar^nt,  et  à  une  redevance  annuelle  du  dixième  du 
produit  brut.  L'État  se  réserve  toujours  un  droit  de  pré- 
emption des  produits  de  l'exploitation  des  mines  d'or  et 
d'argent.  Les  carrières,  quand  l'extraction  peut  avoir  lieu 
à  dâ  ouvert,  appartiennent  au  propriétaire  de  la  surface, 
qui  peut  les  exploiter  sans  autorisation  ;  si  le  propriétaire 
ne  les  exploite  pas,  toute  autre  personne  peut  prends  sa 
place,  moyennant  une  indemnité  et  une  part  dans  les 
produits  de  la  carrière,  dès  que  l'exploitation  a  été  dé- 
clarée d'utilité  publique.  La  recherche  des  gttes  métal- 
li<|ues  ou  minéraux  doit  être  autorisée  par  l'agent  des 
mioes  de  la  localité,  et  ne  peut  avoir  lieu  qu'à  quatre 
pieds  (l'^fSS^)  des  habitations  et  des  bâtiments  d'exploi- 
tation. —  En  Russie,  le  droit  régalien  s'exerce  d'aoord 
par  un  prélèyement  sur  le  produit  des  mines  particu- 
lières, lequel,  depuis  1847,  est  de  40  p.  100  pour  les  mines 
d'or  et  d'argent,  puis  par  l'obligation  généralement  im- 
posée aux  exploitants  de  livrer  leurs  produits  au  gouver- 
nement, à  un  taux  fixé  par  lui.  —  En  Espagne,  la  légis- 
lation sur  les  nnines  est  la  même  que  celle  de  la  France. 
y,  Blarier,  JurisprudsM»  des  mtnes  m  Allemagne,tnir 
didt  de  Cancrixi,  1825,  3  vol.  in-8^  dont  le  dernier  con- 
tient la  législation  firançaise;  Locré,  Légitlation  sur  Us 
mmaa,  1828,  in-8«;  Barrier,  Code  des  mines,  1820,  in-8<»; 
Beaumont,  Coup  d*œU  sur  les  mines,  Paris.  1834;  Héron 
de  ViUefosse,  De  la  richesse  minérale,  1838, 1  vol.  et  atlas  ; 
Delebeoque,  TraUé  sur  U»  législation  des  mines  et  mi- 
nières en  France  et  en  Belgique,  1836-38,  2  vol.  in-S»; 
Richard,  LAgislcUion  française  sur  les  mines,  1838, 2  vol. 
iii-8*;  Barinet,  Code  des  ponts  et  chaussées  et  des  mines, 
1S2d40,  7  vol.  in-8*;  Peyret-Lallier,  Traité  sur  la  légis- 
lation des  mines,  minières,  carrières,  tourbières,  usines, 
1844, 2  vol.  in-S<>;  Et.  Dupont,  Traité  pratique  de  lajt^ 
nsprudence  des  mines^  minières^  forges  et  carrières.  1853, 

2  vol.  iD-8<>;  Lamé-Fleury,  De  la  législation  minéraie  sous 
l'ancienne  monarchie,  1857,  in-8<>,  et  Recueil  méthodique 
tt  çhronotogique  des  lois,  etc.,  concernant  le  service  des 
tngémeurs  au  corps  des  mines,  1857,  2  vol.  in-8";  Du- 
four.  Les  lois  des  mineSy  1857,  in-8®  ;  Rev,  De  la  propriété 
des  mines,  1857, 2  vol.  in-8<*;  DeFooz,  Points  fondamen- 
taux de  la  législation  des  mines,  minières  et  carrières^ 
Tournai,  1858,  in-8<»  ;  Bury,  Traité  de  la  législation  des 
nines,  des  minières,  des  usines  et  des  carrières  en  Bel- 
gique et  en  France,  Ué^  1860,  2  vol.  in-8o.       A.  L. 

Mins  (Conseil  général  des).  V.  Conseil  g6«<ral  dks 
■ffiss,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d* His- 
toire, 

mtas  (École  des).  V,  École  des  mines,  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire, 

■DiBS  (Gardes-).  V,  Gardbs-mimes. 

MovEs  (Ingénieurs  des),  corps  qui  fait  partie  du  Génie 
civil,  et  qui  est  chargé  de  surveiller  l'exploitation  des 
mines  quand  elle  est  faite  pour  le  compte  des  particu- 
liers, de  la  diriger  quand  elle  a  lieu  dans  l'intérêt  du 
domaine  pid>lic.  Il  dépend  du  Ministère  des  travaux  pu- 
blics. Charles  VI  institua,  dans  chaque  bailliage,  des 
commissaires  royaux,  à  la  fols  administrateurs  et  magis- 
trats, pour  sorvàller  les  exploitations  et  résoudre  les  dif- 
ficultés élevées  sur  le  fait  des  mines.  Plus  tard,  on  créa, 
pour  cette  branche  de  l'administration  publique,  un 
SraDd-mattre  anrintendant  des  mines,  un  lieutenant  g^ 
serai  et  un  contrôleur,  des  lieutenants  particuliers,  et 
plusieurs  conseillers  du  roi.  En  1788,  l'administration  et 
te  corps  des  mines  se  composaient  de  1  intendant,  de  2 
eommissakes  du  roi,  de  5  inmecteurs  généraux,  de 

3  lOQs-inspecteoiB,  et  de  6  ingénieurs.  Il  existait  des 
fMKtkMmairea  ds  niAme  naUire  dans  tes  pays  d'États.  Le 


décret  du  18  noT.  1810  réorganisa  le  corps  des  minés,  et 
détermina  d'une  manière  précise  les  fonctions  des  ingé- 
nieurs. Cette  organisation  nouvelle  a  été  légèrement 
modifiée  par  «ne  ordonnance  du  27  avril  1832.  Le  corps 
des  mines  comprend  :  6  inspecteurs  généraux  de  1  ■^  classe 
ei  8  de  seconde  (12,000  et  10,000  fr.  de  traitement); 
It  ingénieurs  en  chef  de  l'"  classe,  et  15  de  seconde 
(6,000  fr.,  5,000  fr.  et  4,500  fr.)  ;  19  ingénieurs  ordinaires 
de  l**  classe  (3,000  fr.J,  30  de  seconde  (2,rH)0  fr.),  et 
12  de  troisième  (1,800  ir.).  Les  ingénieurs  reçi'ivent,  en 
outre,  de^  allocations  annuelles  pour  frais  et  loyer  d» 
bureau ,  et  une  indemnité  de  frais  de  tournées. 

Pour  le  service  des  mines,  le  territoire  français  est  di- 
visé en  5  inspections  : 


Inspections. 
Nord-Ouest. 


Departementt 
Nord,  Pas-de-Calais,  Somme,  Oise, 
Aisne,  Seine-etrOise,  Seine,  Seîne-et- 
Mnrnc,  Loiret,  Eurc-etrLoir,  Sarthe, 
Mayenne,  Ille-et- Vilaine,  Finistère  y 
Morbihan,  Côtes-du-Nord,  Orne,  Man- 
che, Calvadus,  Eure,  Seine-Inférieure. 
Nord-Est.  —  Ardcnncs,  Meuse,  Marne,  Meurthe-et- 
Moselle,  Vospes,  arr.  de  BeKort,  Aube, 
Yonne,  H»«-Maroe,  H*«-Saône,  Doubs, 
Côte-d'or,  Jura,  Saône-et^Loire,  Ain. 
Centre.  — Indre-et-Loire,  Maine-et-Loire,  Loire- 
Inférieure,  Vendée,  Deux-Sèvres,  Loir- 
et-Cher,  Vienne,  Indre,  Cher,  Nièvre, 
Allier,  Charente,  Charente-Inférieure, 
Haute-Vienne,  Creuse,  Corrèze,  Cantal , 
Uordognc,  Puy-de-Dôme,  Loire,  Haute- 
Loire,  Rhône. 
8nd-Est.  — Isère,  Savoie,  Haute-Savoie,  Lozère, 
Ardèche,  Drôme,  Hautes-Alpes,  Basses» 
Alpes,  Alpes-Mari imes,  Gard,  Vaucluse, 
Bouches-du-Khônc,  Var,  Hérault,  Corse. 
Sud-Ouest.» Gironde,  Lot-et-Garonne,  Lot,  Aveyron, 
Landes,  Gers,  Tarn-et-Garonne,  Tarn, 
Bassos-Pyrénées,  H««»-Pyrénées,  H»»-Ga- 
ronne,  Ariége,  Aude,  Pyrénées-Orient. 

MINEUR  (du  latin  mmor,  moindre),  se  dit  de  tout» 
personne  qui  n'est  pas  assez  &gée,  aux  yeux  de  la  loi, 
pour  être  présumée  capable  de  gérer  ses  afihirea.  Le 
temps  où  la  Minorité  finit  est  celui  où  la  Majorité  com- 
mence (V,  MAJoarré).  Le  mineur  est  soumis  à  l'autorité 
paternelle,  et,  si  le  père  décède  ou  disparaît,  à  l'autorité 
d'un  tuteur.  Le  Code  Napoléon  (art.  1124)  range  les  mi* 
neurs  parmi  les  personnes  incapables  de  contracter;  par 
VÊmancipation  (V,  ce  mot)^  ils  sont,  à  certains  égards, 
releva  de  cette  incapacité.  Le  domicile  d'un  mineur  non 
émancipé  est  celui  de  ses  père,  mère  ou  tuteur  {Cod^ 
Napoléon,  art.  108).  D'après  ce  principe,  que  le  minear 
ne  peut  détériorer  sa  condition,  mais  qu'il  peut  l'amé- 
liorer, un  contrat  avantageux  qu'il  aurait  fait  avec  une 
personne  majeure  est  valable,  et  celle-ci  ne  serait  pas 
admise  à  opposer  l'incapacité  du  contractant  (art.  1125^  ; 
si  le  contrat  lèse  le  mineur,  il  n'est  pas  nul  de  plein 
droit,  mais  simplement  sujet  à  rescision,  et  le  mineur 
peut  se  faire  restituer  pour  cause  de  lésion  (art.  1305). 
Il  en  serait  encore  ainsi  dans  l'un  et  l'autre  cas,  quand 
même  le  mineur  contractant  se  serait  déclaré  majeur 
(art.  1307).  Toutefois,  si  la  loi  garantit  le  mineur  de  toute 
perte,  elle  n'a  pas  voulu  l'enrichir  avec  l'argent  d'au* 
trui  :  par  conséquent,  il  est  tenu  au  remboursement  des 
sommes  reçues  par  suite  d'une  convention,  si  elles  ont 
servi  à  dégrever  ses  fonds  d'une  ancienne  chaive  (art. 
1312).  D'autre  part,  il  n'y  a  pas  lien  à  rescision,  lorsque- 
la  lésion  n'est  résultée  que  d'un  événement  casnel  et 
imprévu,  ou  lorsque  les  engagements  ont  été  ratifiés  en 
majorité  (art.  1306,  1311).  Il  ne  peut  y  avoir  non  plna 
restitution  contre  des  conventions  matnmoniales  lé^sle- 
ment  formées,  ni  contre  des  ventes  d'immeubles  ou  paiw 
tages  de  successions,  consommés  avec  les  formalitéa 
prescrites  relativement  aux  biens  des  mineurs,  ni  contre 
ïee  obligations  résultant  d'un  délit  ou  quasi-délit  (art. 
1300, 1310, 1314).  Le  mineur  commerçant,  banquier  on 
artisan,  n'est  pas  restituable  contre  les  engagement» 
qu'il  a  pris  à  raison  de  son  commerce  ou  de  son  art  (art. 
13CHS);  nuds,  poor  ses  autres  afTairea,  et  spécialement 
pour  l'aliénation  de  ses  immeubles ,  sa  situation  n'est: 
pas  modifiée.  La  loi  maintient  enfin  les  actions  hypo» 
thécaires  des  mineurs  indépendamment  de  toute  inscrip* 
tion  (art.  2135  et  suiv.),  et  déclare  que  le  cours  de  Isk 
presoription  «t  interrompu  on  s'arrête  contre  eux,  tsm 


MIN 


1258 


HIN 


q«e  dore  la  minorité  (art  3258)*  A  10  ans,  le  mineur 
peut  tester  Joaqu^à  concurrence  de  la  moitié  de  aee  biens. 
La  oontninte  par  corps  ne  peut  pas  être  exercée  contre 
loi.  n  a  one  hypothèmie  légsle  sur  les  biens  de  son  tu- 
tenr,  en  garantie  de  la  gestion  de  celui-ci.  -^  Uétat  de 
minorité  a  aussi  des  conséquences  dans  le  Droit  crim'l- 
nel  (K.  DucBaimiiiiT).  F.  Desquiron,  Traité  de  la  itfî* 
fiorttë,  de  la  Tutelle,  etc.,  1810,  in-8«;  Bfarchand,  Codé 
ds  la  MmoriU  et  de  la  TiMU,  1839,  in-^«;  Magnin, 
Traité  des  MinorUés,  1842.  S  toI.  in-8*;  FréminTiUe, 
T^wU  de  la  MmoriU  et  de  la  TtMU,  1846,  S  vol.  in-»>; 
Demolombe,  De  la  Minorité,  de  la  TiMle  et  de  VÊmat^ 
dpatiio»,  etc.,  2  toI.  in-8<*;  Arbois  de  Jubainville,  A0- 
eherchee  sur  la  Minorité  et  ses  effets  en  Droit  féodal 
français,  1852,  in-8«. 

viNBUR,  terme  de  Musique.  V,  iNTsavALus,  Mode. 

MiI<IEDRB,  seconde  prémisse  du  syllogisme,  ainsi 
nommée  parce  qu'elle  contient  renonciation  du  rapport 
du  petit  terme  (minor  temUnus)  avec  le  moyen  terme. 
K.Majeukb,  Peémissbs,  Stllogisiib,  Termb. 

î!ïïl«î?f*.^i-  A^\   l  ^-  netre  Diclimnaire  de  Bio- 

MINIATURE.  Ce  mot,  qui  veut  dire  peinture  au  nu- 
mum  (oiyde  de  plomb),  s'appliqua  d'abord  aux  rubri- 
ques, c-àrd.  aux  lettres  de  couleur  rouge  que  les  calli- 
graphes  du  moyen  âge  exécutaient  dans  les  manuscrits 
au  commencement  des  dkapitres,  des  paragraphes  et  des 
alinéas.  On  retendit  ensuite  aux  lettres  ornées  d'arabes- 
ques, d'enroulements,  de  feuilles  de  vigne  (d'où  est  venu 
le  nom  de  wgnettes^  et  enfin  aux  enluminures  ou  sujets 
peints  qui  prirent  la  place  de  ces  lettres.  Ces  dernières 
miniatures,  où  l'on  n'a  plus  employé  une  couleur  unique, 
sont  faîtes  avec  plus  ou  moins  de  talent,  suivant  le  goût 
du  siècle  et  la  capacité  de  l'auteur  (F.  l'art,  suiv.  et  le 
mot  GALuaBAPHis).  —  Depuis  la  découverte  de  l'impri- 
merie, les  miniaturistes  cessèrent  presque  complètement 
d'orner  des  livres;  ils  exécutèrent,  sur  papier,  sur  vélin, 
«ur  bois ,  sur  émail,  sur  ivoire,  avec  des  couleurs  dé- 
layées à  l'eau  de  colle  ou  à  l'ean  gommée,  principale- 
ment avec  le  minium,  tontes  sortes  de  peûts  sujets, 
fleurs,  animaux,  portraits,  etc.,  que  l'on  encadra,  ou  dont 
•on  orna  des  bottes,  des  bonbonnières,  des  éventails,  des 
tabatières.  Dans  cette  nouvelle  période  de  la  miniature, 
-on  doit  mentionner  :  au  xvu*  siècle ,  André  de  Viio, 
Isaac  Olivier,  Jean  Cerva,  Jacques  Ugozio,  François  et 
Michel  Gaatello,  J.-GuiU.  Bauer,  Laire,  Duguemier, 
Fhiitiers,  Gerbier,  Bisi,  Jeanne  Garzoni,  Jacques  Bailly, 
Aubriet,  Sophie  Ghéron;  an  xvm*,  Ferrand,  Klingitet, 
Félicité  Sartori,  Leblond,  Félicité  Tlbaldi,  Arlaud,  Ismaél 
Mengs,  RosaUMt  Garriera,  Joseph  Camerata,  Baudouin, 
liotiurd,  Kœnig,  ICodowiecky,  Cbarlier,  Dumont,T[uérin; 
au  XIX*,  Augustin,  Isabey,  Aubry,  Saint,  Millet,  Man- 
sion,  M"«  Jaquotot,  M»«  de  Miriwl,  M'^  E.  Gallault,  etc. 
Dans  la  miniature,  les  chairs  se  font  par  des  teintes 
pointillées  et  superposées  t  les  dn^ieries  et  les  accès- 
ioifes  s'exécutent  à  la  gouache  recouverte  de  hachures 
«errées  et  croisées.  V.  Mayoi,  Introduction  à  la  nUma- 
hure,  Amsterdam^  1771,  in-12|  Violet,  T^ité  sur  Vart  de 
veindre  en  mtmators,  Paris.  1788,  2  vol.;  Bachelier, 
Ecole  de  la  miniature,  Paris,  1814,  in-12;  Ballart,  École 
de  la  miniature,  ouvrage  revu  par  Gloquet,  1817  ;  Man- 
aion.  Lettres  sur  la  miniature,  1823,  in-12.  B. 

■miATimi  DBS  uvRBs.  Ge  genre  de  peinture  ftit,  dans 
«a  splendeur,  un  art  firançais  et  surtout  parisien.  Au 
XII*  siècle,  ceux  qui  s'y  livraient,  les  enlumineuirs,  étaient 
-diyà  si  fameux,  cpi'on  envoyait  à  Paris  pour  v  faire  faire 
les  plus  beaux  livres  tUiMMn^;  les  miniaturistes  d'Italie 
■et  de  Flandre  n'égalaient  pas  cenx  de  France,  dont  la  su- 
périorité commença  dès  le  vm*  siède,  an  temps  de  Ghar- 
temagne.  Il  y  avait  aussi  de  célèbres  écoles  ou  ateliers 
de  jointure  pour  rornementation  des  manuscrits  à 
Bourges,  à  Poitiers,  et  surtout  à  Tours.  Un  livre,  et  même 
«ne  miniature  on  peu  importante,  était  l'œuvre  de 

Ïlusieurs  artistes,  parmi  lesquels  il  y  avait  des  femmes, 
'art  de  la  peinture  ne  fleurit  que  dans  les  livres  ius- 
4in*an  commeocement  du  xv*  siècle;  il  s'exerçait  dans 
les  missels  et  les  livres  de  lutrin,  ainsi  que  dans  les 
Eeures  et  les  Bibles  en  usage  ches  les  ISunilles  opulentes. 
"Cm  livrear  grands  ou  petits,  offrent  toutes  les  parties  con- 
stitutives de  la  peintore,  même  des  plus  vastes  propor- 
tions :  art  de  la  composition,  ordonnancement  habile 
«d'un  scjet  avec  peti  ou  beaucoup  de  perwnnages,  expres- 
-sion  et  gràœ  des  figures,  vigueur  ou  naïveté  de  l'exécu- 
lion,  éclat  et  Jeu  de  (a  couleur,  tout  s'y  trouve.  Ges  qua- 
Hfeés  portées  à  mt  point  pins  ou  moms  élevé  firent  et 


font  encore  le  prix  de  ces  beau  livres  mannseriti, 
établis  à  grands  frais,  et  que  lea  amateurs  payent  ai 
cher   aujourd'hui.  Toutes  les  grandes  bibliothèques 
publiques,  et,  en  France,  notamment  la  BibUotfaèqoe   ' 
nationale  de  Paris,  ont  des  collections  on  des  spécimens 
de  ces  splendides  manuscrits  ornés  de  miniatures.  Le 
phis  beau  peut-être  fut  à  la  Bibliothèque  de  ïa  ville 
de  Paris  s  c'était  un  Pontifical  dit  Missel  de  Juviiiat 
des  Ursins,  exécuté  entre  1440  et  1457,  pour  Jacques 
Ju vénal  des  Ursins,  administrateur  de   l'évêché   de 
Poitiers,  et  fils  de  Jean  Juvénal  des  Ursins,  qui  fut 
prévêt  des  marchands  de  Paris.  Il  était  grand  m-fol., 
et  d'une  ridiesse  sans  pareille  par  ses  ornements  mai^ 
ginaox,  où  l'on  voyait  de  délidenses  arabesques,  par 
3,222   lettres  historiées,  et  surtout  par  140  grandes 
miniatures,  vrais  tableaux  d'histoire,  peints  largement, 
bien  qu'avec  une  grande  finesse.  L'ensemble  des  mi- 
niatures tormait  comme  un  musée  des  costumes,  des 
armés,  des  instruments  de  toute  espèce,  des  édifices 
et  des  meubles  de  l'époque.  On  y  remarquait  quelques 
vues  du  vieux  Paris,  qui  ne  se  trouvent  plus  guère 
que  là{  13tt  de  ces  miniatures  avaient  pour  cadre  une 
grande  lettre   initiaie   richement  peinte.  Ge  Missel, 
acheté  3U,0(M)  fr.,  par  Amb.  Firmin  Didot,  dans  uns 
vente  publique  fiûte  àparis  en  1801,  avait  été  cédé  par 
lui,  au  même  prix,  à  la  ville  de  Paris.  Il  périt  dans 
l'incendie  de  l'UOtei-de-ViUe  (mai  1871).  — -  Presque 
tous  les   miniaturistes  sont  demeurés  inconuus;  Is 
plupart  vivaient  dans  les  monastères.  Mous  citerous: 
au  xiu*  siècle.  Guide  de  Sienne,  Simon  Memmi,  et  Fran- 
çois de  Bologne;  au  xiv*,  Cibo;  auxv*,  D.  Lorenzo,  Fra 
Bemardo  dit  Buontalenti ,  Gherardo,  Bartolommeo  délia 
Gatta,  Agosto  Decio,  Stefianeschi,  Pletro  Gesarei  ;  au  xvi*, 
le  P.  Piiigi,  Fouquet,  Antoine  de  Gompaigne,  Jules  Clo- 
vio,  Jérôme  Flcino,  Jacques  Argents  de  Fenrare,ValeBtin 
LomeUino,  Anne  Segbers,  Jean  Mielich.  L'art  des  minia- 
turistes commença  de  se  perdre  à  la  fin  du  xv*  siècle, 
lorsque  parurent  les  premiers  essais  de  l'imprimerie. 
On  fit  beaucoup  moins  de  livres  manuscrits  ;  les  livres 
imprimés  les  remptacèrent,  et  la  tvpographie  les  orna 
d'images  que  l'on  coloria  pour  imiter  les  miniatures. 
Il  n'y  eut  plus  que  les  riches  qui  purent  se  donner  le 
luxe  des  beaux  livres  chefs-d'œuvre  de  calligraphie  et  de 
peinture.  Alors  la  miniature  disparut  peu  à  peu  de  Frsnce; 
elle  se  soutint  encore  en  Italie  jusqu'au  xvi*  siècle,  mais 
au  siècle  suivant,  elle  tomba  partout  en  oubli.  V,  Amb. 
Firmin  Bidot,  Missel  de  JacqtÊêS  JuvémU  des  Ursins, 
Paris,  1861,  br.  in-8».  G.  D— t. 

MINIHIS  ou  MENEHIS  (du  celtique  menechrti,  maison 
de  moine,  ou  manach4U  canton  de  terre  affiranchi),  nom 
qu'on  donnait  autrefois  en  Bretagne  à  des  lieux  d'ssile 
consacrés  psr  la  demeure  ou  par  la  pénitence  de  quelque 
saint. 

MINIME,  ancienne  note  de  musique,  appelée  ensuite 
Planche.  Le  premier  emploi  de  cette  note  est  dû  à  Plii- 
lippe  de  Vitry  (xiv*  siècle).  La  «emé-mtiitms  apparaît  à  la 
fin  du  même  siècle. 

BIINISTÈRE.  r.  ce  mot  dans  notre  Dicttonnaire  ds 
Biographie  et  SHistoùre, 

MIMSTËRE  POBUG,  magistrature  amovible  qui  a 
pour  mission  de  surveiller  et  de  poursuivre  devant  les 
tribunaux  la  répression  des  crimes  et  délits,  et  d'assurer 
l'action  de  la  Justice  et  des  lois.  Le  mode  d'accusation 
(K.  Agcosation)  qui  était  en  usage  chez  les  anciens  Ro- 
mains, le  système  de  la  compensation  pécuniaire  adopté 
psr  les  Barbares  après  la  chute  de  l'Empire,  l'ussge  dn 
duel  Judiciaire  dans  les  temps  féodaux,  étaient  incompar 
tibles  avec  une  institution  de  ce  genre.  Le  Ministère 
public  ne  prit  naissance  en  France  qu'après  la  constitu- 
tion du  Parlement  :  les  officiers  qui  le  composèrent 
furent  appelés  gens  du  roi  ;  c'était  le  procureur  général 
et  les  aoocats  du  roi  (K.  Paocoasua,  Avocat  GéiiésAL). 
Leurs  attributions  furent  très-étendues  dès  l'origiDe  : 
outre  le  <hroit  de  poursuite  qui  leur  appartenait  au  cri- 
minel, ils  apportaient  les  ordres  du  prince  au  Parle- 
ment, étaient  souvent  consultés  sur  les  lois  proposées, 
en  requéraient  Tenregistrement ,  reuuéraient  aussi  tout 
ce  qui  était  utile  au  maintien  de  Tordre  public  et  au 
bien  de  l'État,  et  veillaient  à  la  conservation  de  Panteriti 
royale,  des  prérogatives  de  la  couronne,  des  dnnts  ds 
domaine,  des  lois  fondamentales  de  la  monarchie,  dei 
libertés  de  la  nation,  et  surtout  des  libertés  de  l'Églisi 
de  France.  Persuadés  que,  pour  bien  servir  le.  roi,  il 
fallait  savoir  résister  à  sa  volonté,  et  que,  comme  le  dispH 
l'avocat  général  Omer  Talon  au  xvn*  siècle,  a*ils  étaient 
les  gens  du  roi,  ïHm  étaient  aussi  \ips.gens  de  la 


MIN 


1259 


MIR 


M  let  tH  pTotmt«r  pluflîeun  fois  (il  Juin  1470, 13  man 
i417, 14  JftOT.  1555,  etc.)  contre  les  aliénations  de  di- 
vorses  parties  du  domaine  de  TÉUt.  De  môme,  en  1590, 
le  procureur  général  de  La  Guesle  s'opposa  à  Tenregls- 
trement  dee  lettres  patentes  de  Henri  IV,  portant  déso- 
nioD  de  son  domaine  puticulier  d*avec  le  domaine  de  la 
conronne.  La  Révolution  de  1780  fit  rentrer  le  Ministère 
public  dans  les  limites  de  Tautorité  Judiciaire  :  il  est 
efeieé  «4<>nni*hui  par  les  procttrvurt  généraux  près  la 
Cour  de  cassation  et  la  Cour  des  comptes,  et  par  leurs 
mfocaU  généraux;  par  les  procureurs  généraux  près  les 
Cours  impériales,  et  par  leurs  avocat»  généraux  et  leurs 

1  tubitUuis;  par  les  procure%ir$  impériaux  près  les  tribu- 
naux de  l'*  instance  et  par  leurs  substitut». 

Sn  madère  civile,  le  Ministère  public  a^t,  soit  par 
voie  de  réqumtion ,  soit  (Foffio»  ou  par  vou  d^ action.  Il 
agit  par  voie  de  réquisition  et  obligatoirement  dans  les 
causes  que  détermine  Tart.  83  du  Code  d»  procédure 
ekfUe  :  1®  c^es  qui  concernent  Tordre  public,  TÉtat,  le 
domaine,  les  communes,  les  établissements  publics,  les 
dons  et  legs  au  profit  des  pauvres  ;  2*  celles  qui  concer- 
nent Tétai  des  personnes  et  les  tutelles;  3»  les  déelina- 
loires  sur  incompétence;  4"  les  règlements  de  Juges,  les 
récusations  et  renvois  pour  parenté  et  alliance;  5**  les 
prises  à  partie;  0»  les  causes  des  femmes  non  autorisées 
par  leurs  maris,  ou  même  autorisées,  lorsqu'il  s'agit  de 
leur  dot  et  qu'elles  sont  mariées  sous  le  régime  dotal,  et 
eénérmiement  tontes  celles  où  l'une  des  parties  est  dé- 
fendue par  un  curateur;  7**  les  causes  concernant  ou 
intéressant  les  personnes  présumées  absentes.  Il  peut 
prendre  communication  des  autres  causes  dans  lesquelles 
il  cn^t  son  action  néeeuaire,  et  le  tribunal  peut  aussi 
ordonner  cette  communication.  Le  Ministère  publie  ne 
peut  agir  d'office  que  dans  tes  cas  suivants  :  1*  pour 
poursiuvre  l'annulation  d'un  mariage  non  valablement 
oontracté;  2*  pour  faire  pron<Hieer  l'interdiction  d'un  in- 
dividu frappé  d'imbécillité,  de  démence  ou  de  fureur, 
ifil  est  sans  époux  ni  parents  ;  3*  pour  suppléer  à  la  né- 
gligence des  maris  tuteurs  ou  subrogés  tuteurs,  en  pre- 
nant les  inscriptions  d'hypotltèques  légales;  4*  pour  ndre 
des  actes  conservatoires  dans  l'intérêt  des  personnes  ab- 
sentes; 5*  pour  appeler  des  décisions  rendues  par  le 
Conseil  de  discipline  de  l'erdre  des  avocats,  dans  les  cas 

.  prévus  par  les  art.  14  et  15  de  l'ordonnance  du  20  no- 
vembre 1822. 

I     En  matière  criminelle,  le  Ministère  public  recherche 

.  «c  poursatt,  devant  les  Cours  d'appel,  les  Cours  d'assises 
et  les  tribunaux  correctionnels,  toutes  les  infractions  à 
Tordre  public  réputées  crimes  ou  délits  aux  termes  des 
lois  péiiales.  Pour  les  eontraventwns,  l'action  publique 
s'eierce,  devant  les  tribunaux  de  simple  police,  par  les 
commissaires  de  police,  par  les  maires  ou  leurs  adjoints. 
Devant  les  tribunaux  mûitaires,  les  fonctions  du  Blinis- 
tère  publie  sont  remplies  par  les  capitaines  rapporteurs 
et  les  commissaires  du  gouvernement.  Quand  le  Minis- 
tère public  fait  des  réquisitions  au  nom  de  la  loi ,  les 
Cours  et  tribunaux  sont  tenus  de  lui  en  donner  acte  et 
d'en  délibérer.  11  doit  être  entendu  dans  toutes  les  causes, 
et  n'est  pas  récusable.  Il  ne  peut  être  admonété  ni  cen- 
nvé  par  la  Cour  ou  le  tribunal  devant  lequel  il  porte  la 
parole.  11  liait  exécuter  le»  Jugements  et  an^Hs,  et  requiert 
à  cet  effet  Tassistanoe  de  la  force  publique. 

Une  antre  attribution  du  Ministère  piid>lic  est  la  sur- 
veillance et  l'action  disciplinaire  qu'il  exerce  à  Tégard 
des  officiers  ministériels  de  Tordre  Judiciaire,  du  nota- 
riat, du  iMrroaa,  des  Juges  de  paix,  etc.  H  a  encore  la 
surveillaiiee  des  registres  de  Tétat  civil.  F.  Schenck, 
Traité  sur  te  Mimstire  public,  1813,  2  vol.  in-8«;  Del- 
pon,  E»»tti  »ur  Vhistoire  de  V Action  publique  et  du  Mv' 
mstère  vublie,  1830,  2  vol.  in-8*;  Ortolan  et  Ledeau, 
U  Mmutère  mUdie  en  France,  1830,  2  vol.  in-8«;  De 
liolèBes,  Trotté  pratiqué  de»  fonction»  du  Mini»tère  pu- 
bUc,  1843,  2  vol.  in-8*  ;  Mas8al>iau,  Manuel  du  Mimetàre 
pMie,  3*  édit.,  1858,  3  vol.  in-8*. 

MnàSTERIUM,  nom  pat  lequel  les  anciens  écrivains 
eedésînstiqiies  désignent  d'une  manière  générale  tous  les 
ornements  et  autres  objets  servant  à  l'autel. 

MINISTRE  (du  latin  mtnisttr),  haut  fonctionnaire 
cbarsé,  dans  un  État,  de  l'une  des  branches  de  Tadmi- 
■îstntion  publique,  dite  Minietère,  Un  Minietre  à  pot' 
tefeuUlê  est  eelni  qui  a  un  Ministère;  un  Minietre  »an» 
port^emUle,  celui  qui  n'est  appelé  que  pour  le  conseil. 
l«s  pouvoirs  et  attributions  des  Ministres  à  portefeuille, 
en  maee,  sont  t  le  contre-^eing  des  décrets  impériaux 
nialifs  eux  sttriboiîons  de  leurs  Ministères  respectifs , 
dM  leur  vient  le  titre  de  Secrétaire»  d^État,-  Tordon* 


nancement  des  dépenses  publiques;  la  mise  à  exécution 
des  lois  et  décrets  par  des  r^lements,  des  instructions, 
des  interprétationa  ;  la  nomination  d'un  grand  nombre 
de  leurs  subordonnés  et  agents  ;  le  contrôle  des  actes  des 
autorités  inférieures,  qu'ils  peuvent  confirmer  ou  réfor- 
mer ;  la  direction  des  services  publics  qui  leur  sont  con- 
fiés, et  la  préparation  des  mesures,  décisions  et  r^le- 
ments  nécessaires.  Sous  la  monarchie  constitutionnelle, 
ils  étalent  responsables  devant  les  Chambres  :  la  Consti- 
tution de  1852  déclare  qu'ils  ne  peuvent  être  meniJ)res 
du  Corps  législatif,  qu'ils  dépendent  uniquement  de  l'Em- 
pereur, et  que  le  Sénat  seul  peut  les  mettre  en  accusa- 
tion. Des  Ministres  sans  portefeuille  ont  été  institués  à  la 
fin  de  1860,  pour  porter  la  oarole  au  nom  du  Gouverne- 
ment dans  le  Sénat  et  dans  le  Corps  législatif  (  F.  le 
Supplément),  —  Les  agents  diplomatiques  qui  viennent 
après  les  ambassadeurs  (F.  eemo^  sont  appelés  Minietre» 
ou  Envoyé»  plénipotentiaire»,  quand  Us  sont  chargés 
d'une  mission  spéciale  et  temporaire,  et  Mini»tre»  r&i^ 
dent»,  quand  Ils  sont  à  poste  fixe.  B. 

MINNESINGERS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^Histovre, 

MINORITÉ.  V.  MiNBua. 

MINUSCULES  (du  latin  minusculu»,  un  peu  plus  petit), 
se  dit,  par  opposiaon  kmaiu»euies,  des  petites  lettres  em- 
ployées dans  Técriture  cursive  ou  imprimée. 

MINUTE,  en  termes  de  Pratique,  signifie  l'original,  la 
première  rédaction  des  pièces  Judiciaires  ou  des  actes 
civils.  Les  minutes  restent  déposées  chez  les  notaires,  les 
Jases  de  paix,  les  greffiers  des  tribunaux.  Les  notaires 
doivent  çvder  la  minute  de  tous  les  actes  qu'ils  reçoivent 
(Loi  du  25  ventôse  an  xi);  ils  ne  peuvent  s'en  dessaisir 
que  dans  les  cas  prévus  psr  la  loi  et  en  vertu  d'un  Juge- 
ment, et  alors  ils  en  dressent  une  copie  figurée,  que  le 
président  et  le  procureur  impérial  certifient,  et  qui  est 
substituée  à  la  minute  f  asqu'a  la  réintégration  de  celle- 
ci.  Le  Code  pénal  (art.  439)  édicté  des  peines  contre  celui 
qui  aurait  brûlé  ou  détruit  des  minutes. 

mnoTB,  la  12*  partie  du  module  dans  les  ordres  toscan' 
et  ionique,  la  18*  dans  les  ordres  ionique  et  corinthien. 

MIR,  sorte  de  trompette  faite  d'écorcede  bouleau,  quel- 
quefois longue  de  plus  d'un  mètre,  et  qui  rend,  un  son 
fort  et  perçant.  Les  bergers  suédois  s'en  servent  pour 
éloigner  les  bêtes  féroces. 

MIRACLE,  en  latin  mtraculum  (de  mtran,  admirer, 
être  surpris),  événement  contraire  aux  lois  constantes  de 
la  nature.  Telle  est  la  transformation  de  l'eau  en  vin 
par  la  parole  de  J.-C,  ou  la  résurrectibn  d'un  mort. 
J.-J.  Rousseau  a  dit  ;  «  Dieu  peut-il  faire  des  miracles  f 
Cette  question  serait  impie,  si  elle  n'était  absurde.  Ce 
servit  raire  trop  d'honneur  à  celui  qui  la  résoudrait  né- 
gativement que  de  le  punir,  il  suflSrait  de  Tenfermer.  «^ 

MiaACLSs,nom  qu'on  donna  aux  premiers  essais  de  l'art 
tliéâtral  en  France,  où  Ton  représentait  les  merveilles  de 
la  vie  des  Saints. 

MIROIR  (de  miran,  regarder  fixement),  surface  polie 

3ui  reproduit  par  réflexion  l'image  des  objets  placés  au 
evant.  Les  Anciens  se  servirent  de  miroirs  en  métal.  On 
voit  dans  V Exode  (ch.  xxxviu,  v.  8)  que  Moïse  fit  un 
bassin  d'airain  avec  les  miroirs  des  femmes.  Générale- 
ment on  se  servit  d'un  alliage  d'étain  et  de  cuivre,  puis 
d'argent;  on  voit,  au  musée  de  Naples,  deux  miroirs 
d'or  provenant  des  fouilles  d*Herculanum.  Pline  le  Nar- 
turaliste  mentionne  aussi  des  miroirs  en  pierre  obsi- 
dienne, comme  ceux  que  les  Espagnols  trouvèrent  chez 
les  habitants  du  Pérou.  Néron  avait,  dit-on,  un  miroir 
d'émeraude.  Selon  Suétone,  Domitien  fit  garnir  une  ga- 
lerie de  pierres  réfléchissant  les  objets  et  qu'il  appelle 
phmigite»;  on  ne  sait  ce  qu'il  faut  entendre  par  iL  Les 
miroirs  faits  à  Corinthe  et  à  Brindes  étaient  les  plus  es- 
timés. On  fabriquait  à  Sidon  des  miroirs  avec  des  plaques 
de  verre  garnies  par  derrière  d'une  feuille  de  métal  ;  mais 
il  ne  pwalt  pas  qu'ils  soient  devenus  d'un  usage  général, 
et  ils  ne  sont  Jamais  mentionnés  parmi  les  meubles  pré- 
cieux. Les  miroirs  en  alliage  de  métaux  se  ternissent 
promptement,  et  doivent  -être  constamment  nettoyés  et 
poUs  :  aussi  on  y  attachait  une  éponge  et  une  pierre 
ponce.  Ceux  que  Ton  conserve  dans  les  musées  modernes 
sont  ronds  ou  ovales,  et  ont  un  manche  on  une  poignée. 
L'nsage  de  décorer  les  appanements  avec  des  miroirs  de 
granctos  dimensions  ne  fut  pas  inconnu,  ainsi  que  le 
prouve  la  description  de  la  chambre  de  Vénns  par  le 
poète  Claudien;  Sénèque  {Ep,  85)  parie  aussi  de  ce  raf- 
finement de  luxe.  Les  Modernes  font  leurs  miroirs  en- 
glaces  de  verre  très-uni  eft  étamé.  Cette  intention  était 
connue  au  xm*  slèelet  car  John  Peckham,  moine  fraa« 


MIS 


12«0 


MIS 


dteaiii  ânslais,  en  fait  mention  dans  un  Traité  d'optique 
qu'il  écrivit  en  1272.  Les  miroirs  ont  ioué,  à  certaines 
époques,  un  r6Ie  important  dans  la  toilette  :  un  chroni- 
queur dit  qu'au  temps  de  Chariemagne  les  religieux  de 
rordro  de  S^-Martin-de-la-Tour  en  portaient  sur  leurs 
souliers  ;  au  xvu*  siècle,  les  dames  en  avaient  d'inscrust^ 
dans  leurs  éventails,  ou  en  suspendaient  à  leur  cein- 
ture. B. 

viROiR,  en  termes  de  Marine,  cartouche  de  menuiserie 
où  se  niettent  le  nom  du  vaisseau,  quelquefois  les  armes 
du  pays  ou  de  Tarmateur,  le  tout  entouré  fréquemment 
de  sculptures. 

MIROIR  DB  SAXE,  en  allemand  Sachsen''spiegel,  Code 
contenant  Tancien  Droit  de  la  Saxe,  et  compilé  vers  Tan 
1215  ou  1218.  Il  se  compose  de  coutumes  populaires  et 
de  sentences  Juridiques  d*échevins,  auxquelles  le  rédac- 
teur, Ekkard  de  Repkow,  a  ajouté  des  suppléments  Urés 
du  Droit  romain  et  du  Droit  canon.  Une  édition  en  a  paru 
à  Beriin  en  1827. 

MraoïR  DE  sooABE,  OU  allemand  Schwaben-spiegel , 
Gode  contenant  Tancien  Droit  de  la  Souabe  ou  des  Aie- 
mans,  et  compilé  en  1268  ou  1282.  Il  jouissait  d'une  au- 
torité plus  grande  que  le  Miroir  de  Saxe,  Le  rédacteur 
a  ajouté  des  suppléments  tirés  des  Capitulaires,  des  lois 
de  rEmpirc,  du  Droit  romain  et  du  Droit  canon,  quelque- 
fois même  de  la  Bible. 

mRorR  DO  SALUT  (Le),  en  latin  Spéculum  hwnanœ  nal- 
vaiionis,  titre  d'un  ouvrage  populaire  qui,  comme  la 
Bible  des  pauvres  {V.ce  mot)^  après  avoir  couru  en  ma- 
nuscrit pendant  les  derniers  siècles  du  moyen  &ge,  fut 
un  des  premiers  dont  l'imprimerie  s'empara.  Il  contenait 
un  certain  nombre  d'images  ou  tableaux,  avec  de  courtes 
explications  en  latin,  et  servait  de  texte  aux  prédications 
dû  Ordres  mendiants.  Les  artistes  en  tirèrent  beaucoup 
>    de  sujets  de  sculpture  et  de  peinture. 
,      MIROITIERS,  autrefois  airoiriers ,  ancienne  corpora- 
"    tion  dont  les  statuts  dataient  de  1581,  et  c(ui  fut  bientôt 
augmentée  par  l'adjonction  de  celles  des  bimbelotiers  et 
des  doreurs  sur  cuir.  L'apprentissage  était  de  5  ans;  le 
brevet  coûtait  50  livres,  et  la  maîtrise  500. 

lUROLOGUE  (du  grec  moi»'a,  destin,  mort,  et  logos, 
discours),  nom  qu'on  donne,  chez  les  Grecs  modernes,  à 
un  chant  funèbre  par  lequel  on  déplore  U  mort  d'un  pa- 
rent. Ce  sont  les  femmes  qui  composent  et  chantent  les 
mirologues.  Ce  genre  d'élégie  est  une  tradition  de  l'anti- 
quité :  dans  V Iliade  d'Homère,  la  famille  de  Priam  exprime 
ses  lamentations  sur  le  corps  d'Hector;  le  monologue  que 
Sophocle  prétest  Electre,  pleurant  sur  l'urne  qu'dle  croit 
renfermer  les  cendres  d'Oreste,  est  un  véritable  mirologue. 

IfIRZA  (de  mir  on  émir,  seigneur,  prince,  et  de  sa, 
abréviation  de  sadeh,  flis  de),  nom  que  portent  généra- 
lement les  ministres  en  Perse. 

MISAINE,  de  l'italien  mezzano,  placé  au  milieu.  Le 
mât  de  misaine  est  celui  qui  est  placé  à  l'avant  d'un 
navire,  entre  le  beaupré  et  le  grand  màt.  La  vergue  et  la 
hune  de  ce  màt  s'appellent  vergue  de  misaine  et  hune  de 
misaine;  sa  voile,  qu'on  nomme  simplement  la  misaine, 
■ert  par  tous  les  temps,  et  ne  se  supprime  que  devant 
une  tempête  irrésistible. 

MISANTHROPIE,  en  grec  misanthrôpia,  haine  contre 
les  hommes.  Ce  sentiment  est  le  dernier  degré  du  mécon- 
tentement qu'un  homme  peut  ressentir  contre  le  genre 
humain;  c'est  la  déclaration  de  guerre  d'un  seul  contre 
tous.  Il  naît  de  Tingratitudo  des  hommes,  de  grandes  in- 
fortunes non  méritées,  de  l'inflexibilité  d'un  caractère  in- 
capable de  transiger  avec  les  faiblesses  et  les  vices  de  la 
société,  d'une  humeur  frondeuse  et  d'une  fierté  égoïste, 
et  parfois  de  l'amertume  d'un  amour  non  partagé.  La 
misanthropie  vraie,  morale,  philosophique,  est  oeUe  oui 
naît  au  spectacle  des  vices  et  des  faiblesses  du  monae, 
dans  une  Ame  vivement  éprise  de  l'amour  de  la  vertu. 
Lemisantlirope  réel  est  le  f  Jknenx  Timon  d'Athènes,  que 
Plutarque  a  dépeint  dans  les  Vies  d'Antoine  et  d*Atci- 
biade,  Lucien  lui  a  consacré  un  dialogue  sous  le  titre  de 
Timon  ou  le  Misanthrope;  mais  il  en  a  singulièrement 
altéré  le  caractère  :  Timon  est  devenu  sceptique  et  rail- 
leur, en  se  voyant,  au  sein  de  la  pauvreté,  abandonné  de 
ceux  qui  le  courtisaient  dans  l'opulence.  Libanius  en  a 
,  fait  l'objet  d'une  de  ses  Déclamations^  expression  amère 
du  découragement  de  l'homme  eu  face  des  maux  de  la 
vie,  et  de  la  haine  que  lui  inspirent  l'hypocrisie  de  ses 
contemporains  et  l'amour  qu'il  ressent  pour  Aldbiade; 
car,  par  une  contradiction  familière  au  cœur  humain, 
Tannemi  de  tous  le^  hommes  est  invinciblement  attiré 
ten  l'un  d'eux,  comm^l'Alceste  de  Molière  l'est  vera  Cé- 
Uinàiie.  Pendant  le  moyen  âge,  on  ne  mit  point  «p  «eène 


la  misanthropie,  sentiment  propre  lox  sodélés  dMà 
vieillies;  mais  elle  revint  avec  le  lUnon  d^ Athènes  de 
Shakspeare  :  c'est  une  sorte  de  grand  seigneur  généreux 
et  dupe,  auquel  la  trahison  de  prétendus  amis  inspire 
bientôt  une  misanthropie  qui  s'exhale  en  imprécations 
sanglantes,  pour  aboutir  à  des  accès  de  fureur  d'une 
sauvage  énergie.  A  cèté  de  Timon,  misantlirope  d'occa- 
sion, se  trouve  son  ami  Apémante,  qui  l'est  par  principe, 
plein  de  haine  et  de  mépris  pour  les  trahisons  et  les 
faussetés  de  l'espèce  humaine.  Cette  double  étude  de  la 
misanthropie  est  plus  vivante  et  plus  forte  que  ses  de- 
vancières, dont  elle  reproduit  d'ailleura  les  principaux 
traits. — Vint  ensuite  le  Misanthrope  de  Molière.  Alceste 
est  un  homme  qui  se  sent  mal  à  l'aise  dans  un  monde 
corrompu  ;  il  réagit  fortement  contre  les  vices  da  temps, 
mais  donne  lui-même  à  sa  misanthropie  le  plus  éclatant 
démenti  par  son  amour  pour  une  coquette  qu'il  veut 
épouser.  Ce  philosophe  guidé  par  la  notion  abstraite  du 
Juste,  ce  cœur  droit  foulant  aux  pieds  les  banales  et 
hypocrites  convenances  du  monde,  et  cédant  à  son  amour 
pour  Célimène,  plus  fort  que  sa  misanthopie,  offre  la 
leçon  morale  la  plus  frappante  et  la  plus  touchante  de 
toute  la  pièce.  Satire  particulière  du  siècle  de  Louis  XIV, 
ce  caractère  d' Alceste  a  encore  le  mérite  d'être  une  satire 
générale  de  l'humanité. 

L'expression  de  la  misanthropie  était  tellement  haute 
dans  Molière, qu'elle  ne  pouvait  plus  que  déchoir  en  chan- 
geant de  caractère  dans  les  imitations  qui  en  ont  été 
faites.  Le  Plain  Dealer  (l'homme  tnne)  de  Wicherley  ne 

E résente  plus  qu'un  certain  Manlv,  capitaine  de  vaisseau, 
rutsl  et  impoli,  qui  finit  par  aojurer  sa  misanthropie. 
Fénelon,  dans  son  XVII*  Dialogue  des  Morts,  où  il  met 
en  scène  Socrate,  Alcibiade  et  Timon,  fait  consister  le  ca- 
ractère du  misanthrope  en  une  sorte  de  Juste-milieu. 
Marmontel  a  fait  un  conte  moral,  le  Misantlirope  corrigé, 
où  Alceste,  retiré  à  la  campagne,  prend  l'amour  de  l'hu- 
manité, en  devenant  témoin  des  vertus  domestiques  <iue 
lui  offire  son  nouvel  entourage  ;  c'est  une  anivre  inspirée 
par  cette  chimère  tant  caressée  au  xvin*  siède,  le  bonheur 
aux  champs.  Dans  ce  siècle,  la  misanthropie  prit  un 
autre  caractère  :  au  lieu  de  s'attaquer  aux  vices  des  indi- 
vidus, le  Uié&tre  mit  en  cause  la  constitution  même  de  la 
société,  à  l'exemple  des  publicistes  et  des  philosophes. 
Un  certain  F.  Delisle  donna  Tûnon  le  Misanthrope,  co- 
médie remplie  d'attaques  contre  l'ordre  social,  devançant 
ainsi  les  diatribes  si  gaies  des  contes  et  des  romans  de 
Voltaire,  les  amères  récriminations  des  discours  de  Rous- 
seau, et  les  épigrammes  badines  des  Lettres  persanes  de 
Montesquieu.  J.-J.  Rousseau,  dans  sa  Lettre  sur  les 
spectacles,  ayant  attaqué  l'Alceste  de  Molière,  avec  le- 
quel il  avait  plus  d'un  lien  de  parenté,  et  prétendu  qu' Al- 
ceste devait  être  plein  de  sensibilité  pour  les  malheurs 
publics  et  d'inditTérence  pour  tout  ce  qui  le  touche  per- 
sonnellement, Fabre  d'Ëglantine  donna  <«  PhUinte  de  Mo^ 
lière,  où  Alceste,  type  de  perfection  idéale  et  surhumaine, 
est  un  modèle  accompli  de  générosité  et  de  philanthropie, 
un  redresseur  de  tous  les  torts.  En  Allemagne,  la  misan- 
thropie. Jointe  à  une  sorte  de  sentimentalité  mélanco- 
lique, donna  naissance  aux  drames  du  MisanUwope  par 
Scniller,  et  de  Misanthrope  et  Repentir  par  Kotzebfle. 
Mais  de  tous  les  écrivains  qui  ont  traité  de  la  misan- 
thropie ou  l'ont  produite  sur  la  scène,  Molière  est  le  seul 
qui  l'a  saisie  dans  ce  au'elle  a  de  vrai,  de  profbnd,  d'uni- 
versel, et  en  a  élevé  le  caractère  au  plus  haut  point  où 
l'on  puisse  atteindre.  V,  A.  Widal,  Des  divers  caractères 
du  Misanthrope  chez  les  écrkHÛns  anciens  et  modernes, 
Paris,  1851,  in-S«.  F.  B. 

MISCHNA.  V,  -TàîMVD,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^  Histoire» 

MISE  AU  POINT,  en  termes  de  Sculpture,  travail  de 
copie  d'une  statue  par  un  ouvrier  intslUgent  nommé 
praticien,  La  mise  au  point  se  lait  ordinairement  pour 
l'exécution  en  marbre  ou  en  pierre  d'une  statue  modelée 
en  terre  grasse  par  un  sculpteur;  c'est  une  manière  de 
calque  sur  relief,  exécuté  ainsi  :  on  assujettit  au-dessus 
du  modèle  à  copier  un  cadre  un  peu  plus  grand  que  la 
masse  générale  de  ce  modèle,  et  on  y  attadie  des  fils  k 
plomb  en  diven  endroits.  On  place  un  cadre  exactement 
semblable  au-dessus  du  bloc  de  marbre  ou  de  pierre  dans 
lequel  on  doit  tailler  la  copie  à  faire.  Le  praticien,  avec 
un  compas  à  branches  un  peu  recourbées  en  dedans, 
mesure,  sur  le  modèle,  la  distance  en  largeur  et  en  hau- 
teur de  tel  point  au  fil  à  plomb  qu'il  a  Jeté  devant,  la- 
reporte  pour  la  hauteur  sur  le  bloc,  puis  arec  un  trépan 
y  perce  un  petit  trou  Jusqu'à  une  profondeur  un  peu 
moindre  que  la  largeur  relevée.  Il  procède  ainsi  un  pmé 


MIS 


1261 


KllT 


ttombte  de  fols,  en  perçant  des  points  dont  il  calcula  la 
place,  et  qu'il  xniittiplie  de  manière  à  cerner,  poar  ainsi 
dire,  les  pâitieB  du  marbre  ou  de  la  pierre  destinées  à 
tomber  sons  le  cisean  pour  dépoailler  le  bloc  des  njasses 
inutiles  voilant  la  statue  qui  doit  en  sortir.  Le  prati- 
cien se  sert  aussi,  dans  le  cours  de  cette  opération,  d*un 
«Qfnpas  à  trois  branches,  qui  lui  permet  de  relever  à  la 
fois  trois  distances  diiTérentes.  Cest  après  la  mise  an 
point  qa*il  commence  à  dégrossir  le  bloc;  et  c*est  après 
«  dégrossissement  que  le  statuaire  lui-même  met  la  der- 
■ière  main  à  son  œuvre.  C.  D— t. 

laSB  DB  VOIX,  en  termes  de  Musique,  art  de  poser 
le  son,  d'en  coordonner  rémission  avec  les  mouvements 
de  la  respiration,  de  ronfler  progressivement  autant  que 
4e  comportent  le  timbre  et  la  puissance  de  Torgane,  et  de 
le  diminuer  Jusqu'à  l'émission  la  plus  douce.  Dans  les 
Anciennes  écoles  de  chant  de  l'Italie,  la  mise  de  voix  était 
ooe  étude  de  plusieurs  années. 

MISB  EN  DEMEURE.  V.  Demecre. 

MISE  EN  SCÈNE,  en  termes  d*Art  dramatique,  travail 
par  lequel  on  règle  dans  tous  ses  détails  et  dans  son  en- 
semble la  manière  dont  les  acteurs  doivent  représenter 
une  pièce.  Cest  le  fruit  des  répétUUms^  et  c'est  à  force 
d'études,  d'essais,  de  calculs.  Joints  à  une  grande  en- 
tente, acquise  ou  naturelle,  que  l'on  arrive  à  une  bonne 
mise  en  scène.  On  peut  l'appeler  le  complément  de  la 
pensée  de  l'auteur,  et  en  beaucoup  de  points  sa  traduc- 
tion matérielle,  son  expression  extmeure.  Elle  met  l'har- 
monie dans  l'art  de  représenter  un  drame. 

MISÈRE,  une  des  formes  du  mal  physique  (K.  Mal), 
celle  qui  frappe  plus  particulièrement  les  classesouvrières. 
La  Rochefoacauld-Llanoourt  disait  à  la  tribune  de  l'As- 
semblée constituante  :  «  La  misère  publique  est  un  tort 
des  gouvernements.  »  Cest  là  une  opinion  fausse,  qui 
contient  en  germe  toutes  ces  théories  socialistes,  vides  et 
infécondes,  qui,  par  les  promesses  trompeuses  qu'elles 
prodiguent  aux  classes  souffrantes,  sont  périlleuses  pour 
la  société.  Qu'un  gouvernement,  par  son  incurie,  sa  ra- 
pacité, son  ignorance,  ses  prodigalités,  contribue  à  plonger 
4ana  la  détresse  une  population  nombreuse,  cela  n'est 
pas  douteux;  mais  il  ne  fait  qu'ajouter  un  surcroît  à  des 
manx  qui  ont  des  causes  plus  profondes.  L'histoire  de  la 
oiisère  est  aussi  vieille  que  le  monde,  parce  que  la  mi- 
«ère  est  une  loi  constante  de  la  société  humaine,  nn  fait. 
primordial,  universel,  qui  s'est  produit  et  se  produira 
invariablement  dans  tous  les  temps  et  chez  tous  les 
peuples.  €  II  y  aura  toujours  des  pauvres  parmi  vour,  » 
a  dit  la  Sagesse  inspirée;  et,  en  effet,  Tinég^ité  entre  les 
individus,  inégalité  que  présente  l'être  physique  comme 
l'être  moral ,  existe  nécessairement  parce  que  l'homme 
est  une  créature  intelligente  et  libre,  qui  fait  de  ses  forces 
et  de  ses  facultés  tel  emploi  qu'il  lui  plalL  On  ne  doit 
dmc  pas  faire  remonter  l'origine  de  la  misère  à  l'organi- 
sation politique  et  civile,  et  à  l'action  des  pouvoirs  pu- 
blics ctiaigés  de  maintenir  cette  organisation  :  la  misère 
est  dne,  tantôt  aux  vices,  anx  passions,  aux  désordres  de 
eeaz  qui  la  subissent,  tantôt  à  des  causes  qui  leur  sont 
étrangères,  telles  que  l'élévation  du  prix  des  objets  de 
première  nécessité,  l'abaissement  de  la  valeur  du  travail, 
raocrolssement  des  charges  de  la  famille,  toutes  choses 
qui  diminuent,  suspendent  ou  détruisent  les  ressources 
sur  lesquelles  repose  la  vie  journalière.  Pour  supprimer 
la  misère,  il  faudrait  supprimer  les  maladies,  la  baisse 
des  salaires,  les  chômages,  l'inconduite,  l'imprévoyance 
et  la  paresse.  Tout  ce  que  peuvent  les  particuliers  et  les 
nmvemements,  sons  l'empire  de  la  morale  naturelle  et 
des  religions  positives,  c'est  de  combattre  la  misère, 
cfeet  de  loi  apporter  des  adoucissements.  V,  Assistarcb 
rmuQOE,  Paupérisme. 

MISÉRIGORDE.  F.  Dague  et  Stalle. 

MISLA^  nom  que  donnent  les  Lithuaniens  à  des  poésies 
éoigmatiques  dans  la  forme  d'interrogation. 

MISOLOGIE  (du  grec  misot,  haine,  et  logot,  raison), 
disposition  où  sont  certaines  personnes  à  répudier  fa 
raison  en  certaines  matières,  notamment  dans  les  ques- 
tions religieuses. 

BlISSEL,  en  latin  misscAe  (de  mma^  messe),  livre  qui 
contient  le  texte  des  messes  propres  aux  différents  Jours 
et  aux  Dfttes  de  l'année.  Le  pape  Gélase  rassembla  les 
prières  dont  on  se  servait  avant  lui  pour  le  sacrifice  et 
qui  passaient  ponr  venir  directement  des  Apôtres,  les 
mit  en  ordre,  et  ▼  ajouta  sans  doute  de  nouveaux  offices 
ponr  les  Saints  dont  le  culte  était  plus  récent.  Son  re- 
cueil, intitolé  Sa/cramvntaire,  fut  plus  tard  corrigé  par 
le  pqw  Grégoire  le  Grand,  qui  en  retrancha  certidnes 
prives  et  en  i^outa  d'autres,  mais  sans  toucher  au  Canon* 


Autrefois  il  y  avait  trois  sortes  do  Missels  s  dam  les  uns 
on  ne  trouvait  que  les  Collectes,  les  Préfaces  et  le  Canon  ; 
d'autres  contenaient  en  outre  tout  ce  qui  se  chante  dani 
le  chœur,  l'Introït,  le  Graduel,  l'Alleluia,  le  Trait,  l'Of- 
fertoire, le  Sanctus  et  la  Communion  ;  les  Misselsplémers 
renfermaient  avec  tout  cela  les  Leçons,  les  Épitres  et  les 
Évangiles.  Depuis  la  Renaissance,  plusieurs  évènues  ont 
fait  rédi^  des  Missels  particuliers  :  là  môme  où  la  litur* 
gie  romaine  a  été  ensuite  rétablie,  les  Missels  contiennent 
toujours  cerddns  offices  et  certaines  prières  spéciales. 
Chaque  Ordre  religieux  a  aussi  son  Missel,  avee  l'office 
de  ses  Saints.  B. 

îîîllînMM^Sl^'  }  y^  °oû^  Dictionnaire  de  Biogrxh 

KONS.^^^''!      P^^etd^Histoire.  "^ 

MISSIVE  (du  latin  missio,  envoi  ),  lettre  de  circon- 
stance concernant  des  affaires  particulières,  et  destinée 
à  être  envoyée  sans  délai. 

MISTÈQUE  (Idiome).  K  Mexique  (Langues  du). 

MISTRAL.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnain  de  Duh- 
graphie  et  d*  Histoire, 

MITHRAS,  dieu  des  anciens  Perses.  Dans  les  bas-reliefii 
antiques,  il  est  presque  toujours  représenté  sous  la  figure 
d'un  Jeune  homme,  coiffé  du- bonnet  phrvgien,  vêtu  de 
la  candys  ou  manteau  flottant,  du  saaérè  ou  tuniqne 
courte,  et  de  l'espèce  de  pantalon  appelé  par  les  Grecs 
anaxyris.  Il  presse  du  genou  un  taureau  abattu,  lui  tient 
le  mufle  de  la  main  gauche,  et  lui  plonge  de  la  droite  un 
poignard  dans  le  cou.  Cette  scène  rappelle  soit  l'homme- 
démon  frappé  par  Mithras  d'après  le  Zend'Avesta,  soit 
le  sacrifice  offert  par  Blithras  à  Ormuzd  pour  la  rédemp- 
tion du  péché  du  premier  homme,  ou  bien  le  soleil  tou^ 
Jours  Jeune  entrant  dans  le  signe  du  Taureau.  Ailleurs, 
Mithras,  roi  du  ciel  mobile,  est  reoonnaissable  au  sym- 
bole solaire  de  sa  tête  de  lion,  à  deux  ailes  descendantes 
qui  indiquent  son  origine  divine  et  ses  fonctions  célestes, 
à  deux  autres  ailes  qui  s'abaissent  vers  la  terre,  dont  il  a 
aussi  le  gouvernement,  enfin  aux  deux  clefs  qu'il  tient  à 
la  main,  et  oui  ouvrent  les  portes  du  soleil  et  de  la  lune; 
quelquefois  il  ne  tient  qu'une  clef,  et  l'autre  main  porte 
un  sceptre;  le  serpent  enroulé  autour  de  lui  est  l'image 
de  la  route  tortueuse  que  le  soleil,  selon  Topinion  des 
Anciens,  suivait  dans  l'écliptique. 

MITOYEN,  MITOYENNETÉ.  En  Droit,  mitoyen  se  dit 
d'un  mur,  d'un  fossé,  d'une  haie,  d'un  puits,  etc.,  placés 
sur  ]b,  linûte  commune  de  deux  propriétés.  La  ligne  sé- 
parative  se  trouve  au  milieu  ;  mais  les  deux  parties  des 
objets  mitoyens  étant  inséparables  et  ne  formant  qu'un 
seul  corps,  ces  objets  sont  censés  communs  entre  les 
deux  voisins.  Le  Code  Napoléon  (art.  6M-676)  a  réglé 
tout  ce  qui  concerne  la  mitoyenneté.  Tout  mur  servant 
de  séparation  entre  b&timents  Jusqu'à  Yhéberge  (point  où 
l'un  des  deux  bâtiments  de  hauteur  inégale  cesse  de  pro- 
fiter du  mur  commun),  ou  entre  cours  et  jardins,  et 
même  entre  enclos  dans  les  champs,  est  présumé  mi- 
toyen, s'il  n'y  a  titre  ou  marque  du  contraire.  Il  y  a  mar- 
que de  non-mitoyenneté,  lorsque  la  sommité  du  mur  est 
oroite  et  à  plomb  de  son  parement  d'un  côté,  et  présente 
de  l'autre  un  plan  incliné,  ou  lorsqu'il  n'y  a  que  d'un 
côté  ou  un  chaperon  ou  des  filets  et  corbeaux  de  pierre 
qui  y  auraient  été  mis  en  bâtissant  le  mur.  Dans  ces  cas, 
le  mur  est  censé  appartenir  exclusivement  an  proprié- 
taire du  côté  duquel  sont  l'égout  ou  les  corbeaux  et  filets 
de  pierre.  La  réparation  et  la  reconstruction  da  mur  mi- 
toyen sont  à  la  chargé  de  tous  ceux  qui  y  ont  droit,  et 
proportionnellement  au  droit  de  chacun  :  cependant  tout 
copropriétaire  peut  se  dispenser  d'y  contribuer  en  re- 
nonçant à  la  mitoyenneté.  Tout  copropriétaire  peut  faire 
bâtir  contre  un  mur  mitoyen,  et  faire  placer  des  poutres 
on  solives  dans  toute  réjMdssenr  de  ce  mur,  à  54  ndlli- 
mètres  près.  Tout  copropriétaire  peut  faire  exhausser 
le  mur  mitoyen;  mids  il  doit  payer  seul  la  dépense  de 
l'exhaussement,  les  réparations  dVntretien  au-oessus  de 
la  hauteur  de  la  clôture  commune,  et,  en  outre,  lin* 
demnité  de  la  charge  en  raison  de  l'exhaussement  et  8ni« 
vaut  la  valeur  i  le  voisin  qui  n'a  pas  contribué  à  Tex- 
haussement  peut  en  acquérir  la  mitoyenneté,  en  payant 
la  moitié  de  la  dépense  qu'il  a  coûté,  et  la  valeur  de  la 
moitié  du  sol  fourni  pour  l'excédant  d'épaisseur,  s'il  y  en 
a.  Tout  propriétaire  Joignant  un  mur  a  la  faculté  de  le 
rendre  mitoyen,  en  remboursant  an  maître  du  mur  la 
moitié  de  sa  valeur.  Il  est  interdit  d'étabUr  dans  un  mur 
mitoyen  aucune  ouverture  ou  fenêtre,  même  à  verre 
dormant.  —  Tous  fossés  qui  séparent  les  héritages  sont 
présumés  mitoyens,  s'il  n'y  a  titre  ou  marque  du  contraire  t 
ils  doivent  être  entretenus  à  firais  commans  (F.  FosséV 


MU 


1262 


MOB 


Toute  haie  agd  eépare  des  Mrltages.  est  réputée  tnhoyeaDe, 
à  moins  qvil  n*f  ait  <|a*ao  seul  de  ces  héritages  en  état 
de  cl6tiite«  on  sil  n*y  a  titre  cm  possession  soffisante  an 
4»ntraire  (F.  Haii). 

MITRAILLE,  balles  et  autres  petiu  projectiles  lancés 
par  les  bouches  à  feu.  On  fait  de  la  mitraille  arec  des 
débris  de  poterie,  des  cailloux,  des  morceaux  de  ferraille, 
qu^on  met  dans  des  gargousses  en  fér-blaoc,  pour  ne 
point  endommager  Tàme  des  pièces.  Elle  ne  sert  que 
contre  les  masses,  parce  qu*elle  s'écarte  comme  le  petit 
plomb,  et  il  ftmt  être  à  une  faible  distance  de  Tennemi , 
car  elle  ne  porte  guère  à  plus  de  500  met.  L'emploi  de  la 
mJtndlle  est  presque  contemporain  de  l'emploi  de  l'aitil- 
lerie;  il  en  est  fait  mentïon  à  propos  de  la  bataille  de 
Harignan,  en  i5i&. 

MITRE,  nom  qui  s'appliqua,  dans  le  principe,  en 
iarèce,  à  une  espèce  de  ruban  ou  de  bandeau  tissé  qu'on 
loulait  autour  de  la  tête  en  façon  de  diadème.  Il  désigna 
aussi  la  tian  (F.  ce  mot)  des  rois  assyriens,  et,  en  gé- 
néral ,  toute  ooilftira  pyramidale  en  usage  chez  les  Asia^ 
tiques.  La  mitre  était  surtout  en  usage  en  Phrvgie,  chez 
les  prêtres  de  Cybèle,  et  dans  la  Syrie,  d'où  elle  fut  appor- 
tée à  Rome  par  des  courtisanes.  De  là  le  discrédit  dont 
elle  fut  ûnppée  au  temps  de  TEmpire  romain.  Par  un 
reWrement  d'opinion,  elle  fut,  au  nr*  siècle  en  Afrique,  au 
▼m*  en  Espagne ,  adoptée  par  les  vierges  consacrées  à 
Dieu.  Dans  certaines  contxîtes  d'Asie  et  d'Afirique,  les 
femmes  Juives  portent  encore  aujourd'hui  une  sorte  de 
mitre.  —  Le  nom  de  mUrs  désigne,  chez  les  peuples  car 
iholiques,  un  bonnet  pointu,  fendu  par  le  haut,  garni  de 
fanons  pendants  sur  le  dos,  et  que  portent  les  évêques  dans 
les  cérémonies  religieuses.  Les  fanons  ont  été  empruntés 
à  la  tiare  royale  des  Assyriens.  La  mitre  n'eut  d'abord 
que  10  oentimèt.  environ  de  hauteur;  elle  s'éleva  à  20 
centimèt.  an  xiv*  siècle,  à  30  an  xv*;  c'est  au  xvu*  qu'elle 
a  pris  l'élévation  qu'on  lui  voit  encore  ai^ourd'hui.  La 
mitre  épiseopale  fut  adoptée  de  bonne  heure  dans  l'^se 
d'Orient;  en  Occident,  il  n'en  est  pas  parlé  dans  les 
anciens  Sacramentaires  et  les  premiers  livres  de  litur- 
ffle,  et  elle  ne  devint  d'un  usage  général  pour  les  hauts 
dignitaires  qu'à  dater  du  xi*  siècle.  Une  des  plus  an- 
ciennes mitres  que  l'on  conserve  est  celle  de  S' Thomas 
de  Cantorbéry,  qui  est  à  la  cathédrale  de  Sens.  Une  lettre 
du  pape  Galixte  II  prouve  que,  pour  porter  la  mitre,  les 
évêques  avaient  besoin  d'une  permission  du  souverain 
ponttfe.  A  partir  du  concile  de  Lyon,  en  1245,  les  cardi- 
naux abandonnèrent  la  mitre  pour  le  chapeau.  Certains 
abbés  obtinrent  du  Saint-Siège  le  privilège  de  la  porter  : 
Hugues,  abbé  de  Cluny,  en  est  le  premier  exemple,  en 
i08&  Le  pape  Léon  IX  accorda,  en  1053,  aux  chanoines 
de  Bamberg  le  droit  de  porter  la  mitre.  Alexandre  U  le 
donna  anssi  à  Wratislaw,  duc  de  Bohême.  Las  chanoines 
de  Lvon  et  de  Besançon,  le  prieur  et  le  chantre  de  la  col- 
légiale de  Loches  le  reçurent  également.  Un  règlement 
de  Clément  IV  porta  que,  dans  les  conciles  et  les  synodies, 
les  abbés  pourraient  avoir  une  mitre  garnie  d'orfroi,  mais 
non  de  lamea  d'or  ou  d'argent,  ni  de  pierres  précieuses. 
De  simples  ecclésiastiques  reçurent  l'autorisation  de 
porter  une  mitre  en  soie.  Le  pape ,  comme  évêoue  de 
Rome,  prend  la  mitre  dans  les  consistoires»  Sur  les  ar- 
moiries, les  évêques  portent  la  mitre  de  fooe  en  guise  de 
heaume;  les  abbés  la  placent  de  profil.  —  Antrerois  une 
mitre  de  papier  fut  un  signe  d'infamie  imposé  à  quelques 
oondamnéSi  On  en  coUla,  par  exemple,  Jeanne  d^Arc 
marchant  au  supplice.  B. 

MmuL  en  termes  de  Constroction,  couronnement  de 
terre  cuite  qu'on  place  sur  les  cheminées  pour  les  em- 
pêcher de  fumer  et  de  recevoir  les  eaux  pluviales. 

MiTMt  (Arc  en).  F.  Arc  ANeoLAiaB. 

MIURUS  (Vers),  c-à-d.  en  grec  qui  a  une  queue 
moindre,  espèce  d'hexamètre,  dont  le  dernier  pied,  au 
Ueu  du  qwndée  légitime,  oiSrait  un  ïambe  ou  un  pyr- 
iliiques 

Luctum  habeî  |  œtêm\um  ob  lUtes  fe\cunda  iVi|^. 

MDΠ (Idiome).  V.  Mexique  (Langues  du). 

BUXIS.  V.  MÉLOP^ 

MIXO-LYDIEN  (Mode).  V.  Htpbr-doaien. 

MIXTE  ou  CONNEXE  (Ton).  Cest,  dans  le  PUdn- 
chant ,  un  ton  qui  emprunte  plusieurs  notes  à  son  au- 
tkentiitue^  s'il  est  plaqal  (F.  ces  mots)^  à  son  plagal,  s'H 
est  authentique.  Ainu.  l'authentique  qui  descend  de  plus 
d'un  ton  au-dessous  de  sa  finale  est  mixte;  et  le  plagal 
qui  monte  plus  d'une  rixte  au-dessus  de  sa  finale  est  éga-  . 
lement  mixte.  Quand  les  tons  mixtes  atteignent  au  grave 


et  à  l'aigu  les  limites  de  la  double  échelle  diatonique  de 
l'authentique  et  du  plagal  qui  les  eompoeent,  on  les 
nomme  communs  parfaits,  F.  G. 

MixTB  (Le),  en  latin  mxtum,  coup  à  boire  qu'on  don» 
nait,  dans  les  monastères  Bénédictins,  anx  lecteurs  de 
table,  anx  serviteurs  de  cuisine,  et  à  ceux  qui,  pour  une 
nUson  quelconque,  étaient  obligés  de  prévenir  l'heure  du 
repas.  On  y  ajoutait  un  peu  de  pain. 

MIXTURE  (Jeux  de),  nom  dont  on  se  sert  quelquefois 
pour  désigner  le  Pleit^eu  de  l'orgue  (F.  Jeu  —  Plein). 

MNÉMONIQUE  ou  MNÉMOTEGHNIE  (dugrecumAfil. 
mémoire,  et  tekhnê,  art),  art  d'aider  et  de  fortifier  b 
mémoire ,  de  créer  une  mémoire  artificielle.  Toute  Mné- 
motechnie  repose  sur  VAssoàaJtMn  des  idées  (K.  ee  mot) 
et  consiste  à  rappeler  des  faits  compliqués  et  d'un  sou- 
venir difficile,  au  moyen  de  combinaisons  plus  simples 
et  plus  faciles,  ou  à  fier  entre  eux  des  noms,  des  dates, 
des  faits  qui  se  présentent  isolés.  Cest  sur  les  rapports  de 
lieu,  de  ressemblance  ou  ^analoffie,  qu'on  s'appuie  prin- 
cipalement On  emploie  aussi  le  rhythme  et  U  rime,  et 
l'on  exprime  en  vers  techniques  les  oonnaissanoes  diffi- 
ciles à  retenir,  comme  a  fait  Lancelot  dans  son  Jardin 
des  racines  grecques,  —  Les  Anciens  connaissaient  la 
Mnémotechnie,  et  en  attribuaient  l'invention  au  poète 
Simonide.  Gcéron  (De  Oraiore,  II,  86)  décrit  lea 


de  la  7opoio0t6  ou  mémoire  locale  ;  Quintilien  (XI,  2  )  et 
Pline  le  naturaliste  (VII,  24^  mentionnent  également  cet 
art  Raymond  Lulle  en  mit  à  profit  les  procédés  dans  son 
Ars  magna.  A  partir  du  xv*  siècle,  on  vit  ee  produire 
de  nombreuses  théories  de  Mnémonique,  entre  autres 
celles  de  Publicius  (1482),  de  Rombercb  (1533),  de  Gra- 
taroli  (1554),  de  Jordano  Bruno  (1558),  de  Maraforti 
(Ars  memoruBp  1002),  de  B.  Porta  {Ars  reminisoend%, 
1002),  de  Lambert  Schenckel  (Gaxophylacium,  1610), 


notre  siècle,  lea  procédés  de  la  Mnémotecimie  ont  été 
étudiés  avec  une  nouvelle  ardeur,  par  Kaestner  (JMmo- 
nique)^  Kluber  (Compendium  de  iinémonùiue,  1804),  le 
baron  d'Arétin  (Art  de  la  mémoire  pratique^  1810),  Fe- 
naiele  (Nouvri  Art  de  la  mémoire,  Londres.  18iS),  Aimé 
Paris  {Principes  et  appliccUions  diverses  ae  la  ÈÊnémo- 
technie,  7*  édition,  Paris,  1833),  les  frères  Félicien  et 
Alexandre  de  Castilho  {Traité  de  Mnémotm^ique,  5*  édi- 
tion, Bordeaux,  1835). 

MNÉMOSYNE,  déesse  greoqoe,  mère  des  Muses.  La 
statuaire  la  représente  ordinairement  enveloppée  d'un 

nd  manteau,  sous  lequel  elle  élève  sa  main  droite  vers 
lenton  dans  l'attiûide  du  recueillement;  ou  bien 
assise,  la  tête  p«ichée,  une  main  cachée  dans  eon  sein, 
et  un  pied  sur  un  escabeau. 

MOALLAKATS.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

MOBILE,  en  termes  de  Philosophie,  principe  ou  cause 
de  résolution  et  d'action.  Bien  que  le  langage  ordinaire 
embrouille  et  confonde  les  mots^  on  peut  dire  que,  sous 
le  nom  de  Prine^es  des  actions  humaines,  se  rangent 
les  MotifSi  qui  sont  raisonnes,  et  les  Mobiles,  qui  ne  le 
sont  pas. 

MOBILIER,  expression  qui,  en  Droit,  a  la  même 
signification  cnie  Meuble  {V.  ce  mt^). 

MOBiusa  (Crédit).   V.  Cafoir. 

MOBILIÈRE  (Contribution),  une  des  Contributions 
directes  en  France.  Elle  est  répartie  par  le  Conseil  géné- 
ral de  chaque  département  et  par  les  Conseils  d'arron- 
dissement entre  tous  les  habitants,  français  et  étrangers 
de  tout  sexe.  Jouissant  de  leurs  droits,  et  non  réputés  in- 
digents, proportionnellement  à  la  valeur  locative  des  ha- 
bitations, mais  seulement  pour  les  parties  de  bftttment 
servant  à  l'habitation  personnelle  :  ainsi ,  la  boutique, 
les  magasins  d'un  négociant,  les  classes ,  réfectoires  et 
dortoirs  d'un  maître  de  pension ,  en  sont  exempts.  Les 
personnes  logeant  dans  des  chambres  ou  dans  des  appar- 
tements ^;arnis  sont  soumises  comme  les  autres  à  cette 
contribution.  La  taxe  mobilière  peut  se  payer  en  plu« 
sieurs  lieux,  si  le  contribuable  a  plusieurs  domieiles.  Le 
prix  du  loyer  ne  détermine  pas  toi^ours  la  valeur  loca- 
tive; cette  valeur  est  estimée  par  les  répartiteurs,  mais 
le  contribuable  qui  se  croit  lèse  peut  réclamer  au  Conseil 
de  préfecture,  en  s'appuyant  sur  l'exemple  de  deux  per- 
sonnes supportant,  avec  un  loyer  ésal  bu  supérieur,  une 
taxe  moinare  que  hi  donne.  A  Pana,  en  1862,  lea  loge* 
ments  d'habitiûion  de  1,500  fr.  et  au-dessus  sont  taxés, 

four  la  contribution  mobilière,  à  9  pour  100;  ceux  de 
.499  fr.  à  1^000  fr.,  à  7  p.  100;  ceux  de  099  fr.  à500  fir.. 


MOD 


1261 


MOD 


i  S^  p.  lOa;  ceux  d»  409  fr.  à  250  fr.,  à  dp.  100;  oeaz 
dru»  itlflor  locadve  inférieure  à  SGO  fr.  sont  aflhuichis 
de  toute  contribution,  à  Tezception  de  ceux  des  patentés, 
IsKpielft  sont  passibles,  sur  tonte  la  partie  affectée  à  Tha- 
Intation,  d*une  contribution  établie  à  raison  de  3  p.  100. 
Lorsque,  par  anito  de  changement  de  domicile,  un  con- 
tribuable est  imposé  dans  deux  communes,  il  ne  doit  la 
contribution  one  dans  sa  nouvelle  résidence.  Le  mari  doit 
rtmpôt  mobilier  de  l'habitation  particulière  de  sa  femme 
séparée  de  biena,  laaiaiMn  de  eorpa.  Las  personnes  logées 
gfâtuitement  dans  des  b&timents  nabitea  doivent  la  con- 
tribution mobilière  sur  la  valeur  des  logeniente  qui  leur 
sont  accordés.  Les  locaux  destinés  à  des  réunions  d*in- 
térOt  général  ne  sont  pas  imposables;  il  en  est  autrement 
des  locaux  affectés  aux  cercles,  aux  sociétés  littéraires  et 
antres.  Lea  propriétaires  ou  principaux  locataires  sont 
responsables  de  la  contribution  des  personnes  logées 
ches  oox;  ils  doivent,  à  déflmt  de  p^résentation  de  la 
quittance,  prévenir  le  percepteur  avant  les  déménage- 
ments. L. 

MouuEE  na  LA  couBORifs ,  partie  de  la  dotation  de  la 
oooronne  qui  comprend  les  meubles  meublants  contenus 
dans  rhôtel  du  gaide-meubie  et  dans  les  divers  palais 
et  étabiiaaements  nationaux.  Ce  mobilier  est  inaliénable 
et  imprescriptible  ;  il  ne  peut  être  donné,  vendu,  enmgé, 
ni  grevé  d'hypothèques.  Les  objeta  susceptibles  de  dété- 
rioration par  l'usage  sont  inventoriés  avec  estimation,  et 
peuvent  être  aliénai  moyennant  remplacement. 

MOBILISATION,  ensemble  des  mesures  prises  pour 
iSdre  passer  une  année  du  pied  de  paix  au  pied  de 


MOGOBI  (Idiome).  7.  PéamnBfNBS  (Langues). 
MODALES  (Propositions).  Les  logiciens  appellent 
ainsi ,  par  opposition  aux  propositions  al>solue$  ou  caU- 
9oriqu€t,  dans  lesquelles  l'attribution  est  simplement 
énoncée,  celles  dont  l'attribut  est  modifié  par  une  des 
quatre  conditions  suivantes:  possibilité,  impossibilité, 
contingence,  nécessité.  La  théorie  des  propositions  mo- 
daies,  de  leurs  oppositions,  de  leurs  conversions,  et  des 
sy  Uogiames  qui  en  sont  formés,  an  point  de  vue  de  lln- 
fliience  qa'exerce  sur  la  conclusion  la  modalité  des  pré- 
misses, a  été  développée  par  Aristote  dans  son  traité  de 
V Interprétation  et  dans  les  chapitres  8-i2  du  1**  livre  des 
IVvmssrr  Analytiques.  V,  Rondelet,  Théorie  logique  des 
9ropo9iHons  modales^  1861.  B—s. 

MODALITÉ,  terme  de  Philosophie  soolastique,  aigni- 
flant  le  mode  ou  hi  manière  dont  une  chose  ou  un  fait 
existe.  En  considérant  nos  Jugemente  par  rapport  à  la 
modalité,  Kant  les  divisait  en  jugements  problématiques, 
se  rapportant  au  possible;  jugements  assertoriques,  se 
rappoilant  an  réel;  et  jugements  apodictiques,  se  rap- 
portant an  nécessaire. 

MODB ,  terme  de  Loipque,  dont  on  fait  le  synonyme 
^AUrilnÂ.  S'il  y  a  <|uelque  nuance  dans  la  signification 
de  cea  deux  mots,  il  nous  parait  que  Mode  désigne  la 
((ualité  prise  dans  les  choses  mêmes,  et  Attribttt  la  qua- 
lité envisagée  au  point  de  vue  logique,  l'idée  de  cette 
qualité  dans  un  rapport  de  convenance  avec  un  si^et  dé- 
terminé. B — E. 

MODES  DO  STLLOoism,  disposltions  particulières  qui  ré- 
sultent, dans  le  syllogisme,  de  remploi  et  des  différentes 
combinaisons  des  quatre  espèces  de  propositions  à  titre 
de  prémisses  (V.  Psémisses).  Les  combinaisons  possibles 
sont  au  nombre  de  16  dans  chaque  figure  (F.  Figdrb)  ; 
mais  tentes  ne  donnent  pas  de  conclusions,  et,  soit  en 
vertu  des  règles  générales  du  syllogisme,  par  exemple, 
bnquMl  s'agit  de  deux  propositions  particulières  ou  de 
deux  négatives  dont  on  sait  que  le  rapprochement  ne 
conduit  à  aucune  conclusion  (K.  Syllogisme),  soit  en 
verte  de  convenances  propres  à  chacune  des  figures,  le 
sombre  total  des  modes  concluants,  les  seuls  dont  on 
s'occupe,  n'est  que  de  19,  savoir  :  4  dans  la  l'*  figure, 
4  dans  la  3*,  0  dans  la  3*,  et  5  dans  la  4*.  Ce  sont  oes 
modes  qne  Ton  désigne  par  les  notationa  mnémoniques 
Bartara,  Ceiarenty  etc.  {V,  Babbara).  V.  la  Logique  de 
Port-iioyai ,  3*  partie,  ch.  4-8,  et  Euler,  Lettres  à  une 
pmeesse  d^ Allemagne,  3*  partie,  lettres  38  et  39.  B— b. 
M»B,  en  termes  de  Grammaire,  désigne  les  inflexions 
paiticnlièras  du  verbe  marquant  les  dfiverses  manières 
dont  le  verbe  présente  l'action  ou  l'état  qu'il  exprime.  On 
diidnsne  les  mo^  personnels  et  les  modes  tmpsn oti- 
Mb/Les  modes  personnels  sont  ceux  dans  lesquels  la 
fonae du  verbe  vaîie  selon  les  personnes;  les  modes  im- 
penonnels,  ceux  dont  l'action  n'est  pas  attribuée  à  une 
personne  plutôt  qu'à  une  autre.  Le  français  a  quatre 
modes  pononnels  \  Vindicatif,  le  condiUonnel,  Vimpéra- 


et  le  participe;  k  celui-ci  se  rattachent  les  adjectifs  ver» 
bauan  en  uo^  (marquant  obligation)^  et  en  t6c  (mar- 
quant poxn&iliM  ou  rrfn»/tat  occomph).  Le  conditionnel 
est  donc  propre  mi  français,  le  gérondif  et  le  supin  au 
latin,  l'optatif  et  les  adjectifs  vâbaux  au  grec  Le  latin 
'  et  le  grec  ont  des  jou^yena  de  anppléer  à  notre  condi- 
tionnel (  F.  ce  mot).  Le  gérondif,  qui  est  pn^rement  la 
déclinaison  de  l'Infinitif  emplové  comme  complément 
indirect  d'un  nom,  d'un  adjectif  ou  d*un  verbe,  est  re- 
présenté en  français  par  rinfinitif  précédé  des  diverses 
prépositions;  en  grec  de  même,  si  ce  n'est  que  les  pré* 
positions  doivent  toijjours,  dans  cette  langue,  être  suiviei 
de  l'article.  V.  Optatif,  Vbrbau  P. 

MODB  (du  latin  modus) ,  nom  que  l'on  donne,  dans  la 
Musique  moderne,  à  un  certain  caractère  qui  se  mani- 
feste dans  la  mélodie  et  Tharmonie  d'un  morceau,  et  qui 
résulte  de  tels  ou  tels  sons,  de  tels  ou  teJs  accords.  Le 
mode  n'existe  pas  pw  lui-même,  il  n'est  qu'une  manière 
d'être  du  ton.  Le  ton  est  déterminé  par  un  certain  son 
pris  dans  l'échelle  musicale,  et  qui  sert  de  point  de  dé- 
part à  la  gamme  du  morceau;  il  est  la  base  du  chant  et 
le  point  où  il  se  repose  forcément.  Le  mode  du  ton  se 
détermine  par  la  tierce  au-dessus  de  la  note  tonique;  il 
est  majeur  ou  mineur,  selon  que  cette  tierce  est  majeure 
ou  mineure.  Le  mode  majeur  est  naturellement  donné  par 
les  résonnances  harmoniques  d'une  corde  grave  mise  en 
vibration  ou  d'un  gros  tuyau  d'orgue  :  le  mode  mineur, 
bien  qu'il  ne  soit  pas  donné  par  ses  résonnances,  n'en 
est  pas  moins  naturel  ;  il  a  éte  emplo)ré  de  toute  anti- 
quité, comme  l'autre,  et  même  la  musique  primitive  et 
populaire  semble  l'affectionner.  La  quarte  et  la  quinte 
sont  toujours  majeures  dans  les  deux  modes;  mais  la 
tierce,  la  sixte  et  la  septième,  mineures  dans  le  mode 
mineur,  sont  mineures  dans  le  mode  mineur.  Seulement, 
comme  la  septième  ou  note  sensible  doit,  pour  que  le 
ton  soit  bien  caractérisé,  rester  à  intervalle  de  demi-ton 
vis-à^vis  de  la  tonique,  elle  est  quelquefois  majeure  dans 
le  mode  mineur,  et  même,  quand  la  mélodie  monte,  elle 
entraîne  souvent  la  sixte  à  être  mineure  aussi.  Le  mode 
majeur  et  son  mode  relatif  mineur  sont  indiqués  à  la 
clef  par  les  mêmes  signes.  V.  BéMOL,  Dièsb. 

Dans  la  musique  des  Anciens,  le  mut  Mode  avait  une 
autre  acception  (  K.  Gkecqub  — Musique),  qui  s'est  en 
partie  reproduite  dans  le  plain-chant.  Dans  le  chant  ec- 
clésiastique, en  effet,  on  appelle  mode  ou  ton  Toctove  qui 
constitue  le  ton  dans  lequel  une  mélodie  est  composée. 
Les  sept  notes  employées  dana  le  plain-chant,  et  qui  sont 
désignées  par  les  lettres  A,  B,  C,  D,  E,  F,  G,  servent  de 
base  chacune  à  une  octeve  toî^ours  formée  de  cinq  tons 
et  de  deux  demi-tons.  Cha({ue  octeve  se  divise  de  deux 
manières  x  la  première  division  se  fait  en  montant  de  la 
note  la  plua  basse  de  l'octeve  à  la  quinte  au-dessus,  et  de 
cette  quinte  à  la  quarte  au-dessus,  qui  est  la  répétition  de 
la  première  note  de  Tocuve  ;  la  seconde  division  se  fait  en 
montant  de  la  note  la  plus  grave  à  la  quarte  au-dessus, 
et  de  cette  quarte  à  la  quinte  au-dessus,  qui  est  la  répéti* 
tion  à  l'aigu  de  la  pviemière  note  de  l'octeve.  Une  octeve 
forme  donc  deux  modes  ou  tons.  L'octeve  qui  a  la  quinte 
en  bas  et  la  quarte  au-dessus  constitue  un  ton  appelé 
authentique  {V.  ce  mot)  ou  principal;  l'octeve  qui  a  la 
quarte  en  bas  et  la  quinte  au-dessus  constitue  un  ton 
nommé plagal  {V,  ce  mot)  ou  inférieur.  Les  modes  Ai 
tons  du  plain-chant,  qui  étaient  dans  l'origine  au  nombre 
de  douze,  ont  été  réduite  à  huit.  Cette  réduction  a  eu 
pour  cause  le  bémol  accidentel  employé  dans  lea  i*^ 
2*,  5*  et  0"  tons,  et  qui  rendait  dans  ce  caa  ces  tons  sem- 
bkibles  au  9*,  19",  11"  et  12*  tons.  L'usage  accidentel  de 
ce  bémol  est  devenu  presque  continuel  dans  cea  tons, 
par  suite  de  la  tendance  naturelle  aux  chanteurs  à  toutes 
les  époques  d'adoucir  les  intervalles  un  peu  rudes  et 
d'une  intonation  difficile.  La  suppression  des  anciens 
modes  et  leur  réduction  à  huit  a  considérablement  mul- 
tiplié le  nombre  des  bémols  dans  les  1*',  3*,  5*  et  6*  tons, 
par  suite  de  la  nécessité  où  Ton  s'est  trouvé  de  rendre 
les  échelles  de  ré,  de  la,  de  fa  et  d'ut  semblables  à  celles 
de  la,  de  mi,  d'ut  et  de  fa.  Le  moine  Alcuin,  précepteur 
de  Gharlemagne,  avait  déjà  adopté  le  système  des  huit 
modes  ou  tons,  ainsi  qu'il  le  déclare  dana  son  Traité  de 
musique.  On  peut  même  faire  remonter  l'adoption  des 


MÔD 


Met 


MOD 


tiah  mod««  on  tons  h  S^  Grégoire  le  Cnuid,  qni  ijouta, 
d  après  la  tradition,  les  quatre  tons  plagauz  aux  quatre 
tons  au^entiques  construits  sur  les  notes  ré,  mi,  fa,  sol, 
et  qui  paraissent  avoir  servi  de  base  au  travail  de  S^  Am- 
broise.  Les  modes  on  tons  du  plain-diant  se  divisent  en 
parfaits,  imparfaits,  surabondants,  mixtes,  commixtes, 
réguliers,  irréguliers  (F.  ces  mots).  On  reconnaît  les 
modes  ou  tons  d*un  morceau  de  plain-chant  1 1**  à  sa 
iSnale  ;  3°  à  sa  dominante;  3*"  à  la  nature  de  la  qninte  et 
de  la  quarte  de  son  échelle  diatonique. 

Le  i**"  ton,  de  ré  à  ré,  est  le  donen« 

Le  i%  de  la  à  la,  est  Thjrpodorien. 

Le  3*,  de  mi  à  mi,  est  le  phrygien. 

Le  4*,  de  si  à  si,  est  Thypophrygien* 

Le  5*,  de  fa  à  fa,  est  le  lydien. 

Le  6«,  d'ut  à  ut,  est  rhypolvdien. 

Le  7*,  de  sol  à  sol,  est  le  mfxolydien. 

Le  8*,  de  ré  à  ré,  est  Thypomixolydien. 

Ces  modes  ont  reçu  des  qualifications  qui  en  indiquent 
le  caractère,  et  dont  on  peut  juger  la  Justesse  par  certains 
exemples  :  le  1"  est  grave  (les  proses  Victimœ  pcuchali 
laudes.  Vent  sancte  Spiritus)\  le  2*  triste  (la  Préface  de 
la  messe,  les  O  de  Noti,  le  Dies  irœ)  ;  le  3"  mystùjue  Oes 
hymnes  Range  lingua,  A  solis  ortu  cardine)  ;  le  4*  har^ 
monique  (le  Gloria  in  eoocelsis  des  fêtes  simples,  l'hymne 
Urbs  Jérusalem  beata)  ;  le  5"  joyeux  (le  Regina  coAi)  ; 
le  6"  divotieux  (y Ave  regina);  le  7*  angélique  (la  prose 
Lauda  Sion,  Tantienne  funèbre  In  Paradimn)\  le  8* 
parfait  (les  hymnes  Verbum  supemum  prodiense^  Veni 
veator), 

II  y  eut  encore  un  autre  sens  du  mot  Mode  au  moyen 
iige  :  il  daigna  une  manière  de  marquer  la  mesure, 
c.-à-d.  la  valeur  proportionnelle  des  notes  entre  elles, 
au  moyen  de  barres,  ou  de  cercles  et  demi-cercles,  figurés 
en  travers  de  la  portée  au  commencement  du  morceau, 
après  la  clef. 

MODB,  partie  mobile  et  capricieuse  des  moeurs,  celle 
qui  exerce  son  empire  sur  les  parures,  les  costumes,  les 
ameublements,  les  équipages,  etc.  Le  mot  signifie  pro- 
prement la  manière,  c-à-d.  la  manière  oui  est  la  bonne 
par  excellence,  et  qui  ne  doit  plus  se  raisonner.  Cepen- 
dant la  mode,  usage  passager,  prend  sa  source  dans  les 
fiuitaisies  d'un  goût  souvent  corrompu ,  qui  cherche  à 
satisfaire  la  vanité  et  varier  les  iouissances  des  grands, 
des  riches  et  des  oisifs;  à  peu  près  inconnue  aux  classes 
inférieures,  elle  alimente  cependant  une  foule  d'ouvriers 
laborieux.  Les  Asiatiques  ont  des  passions  plutôt  que  des 

Sûts,  des  volontés  et  peu  de  caprices;  les  institutions, 
i  idées  et  les  mœurs  ont  chez  eux  un  caractère  de  sta- 
bilité presque  inaltérable.  La  mode,  qu'ils  ne  connidssent 
pas,  est,  au  contraire,  toute-puissante  dans  l'Europe  ci- 
vilisée, particulièrement  en  France,  où  se  succèdent  les 
impressions  ranidés  et  légères.  Elle  a,  dans  ce  dernier 
pays,  presque  tJoi^ours  un  cachet  de  bon  goût,  d'él^nce 
réelle  et  de  grâce,  oui  fait  rechercher  ses  produits,  sur- 
tout ceux  à  rusage  des  femmes,  dans  le  reste  de  l'Europe. 

F.  COSTCIIB. 

MODELAGE,  opération  par  laquelle  le  sculpteur  fait 
en  argile,  en  plâtre  ou  en  cire,  le  modèle  d'après  leguel 
il  travaillera  ensuite  la  pierre,  le  marbre  om  le  bronze.  Il 
pétrit  la  matière  qu'il  a  choisie,  ajuste  les  formes  avec 
les  doigts,  surtout  avec  le  çoace,  et  avec  un  ébauchoir, 

Sitite  spatule  de  bois  ou  d'ivoire.  —  On  nomme  encore 
odelage  le  travail  qui  consiste  à  faire,  avec  de  la  cire 
blanche  ou  rose,  de  petits  bas-reliefs,  des  fleurs,  des  mé- 
daillons, sur  fonds  d'ardoise  ou  d'ébène.  V.  F.  Goupil, 
Manuel  général  du  modelage,  Paris,  1860,  in-8^ 

MODÈLE  (du  latin  modulus,  mesure),  en  termes  do 
Beaux-Arts,  image,  objet  ou  personne  que  l'artiste  veut 
représenter.  Les  sculpteurs  appellent  aussi  Modèle  la 
figure  auMls  ont  modelée  [V.  Modelage).  En  Arohitecture, 
un  Modèle  est  une  réduction  de  monument  :  c'est  ainsi 
que,  pour  la  basilique  de  S*-Pierre  à  Rome,  divera  mo- 
dèles furent  faits  par  Bramante,  Raphaël,  San-Gallo  et 
Michel-Ange  ;  on  conserve  à  Paris,  dans  les  caveaux  de 
de  l'église  S'*-Geneviève,  le  modèle  qui  fut  fait  de  ce 
vaste  édifice  par  Soufflet. 

MODELÉ,  en  termes  de  Peinture,  façon  de  rendre,  au 
moyen  des  lignes  et  des  ombres,  le  relief  des  figures,  les 
méplats  et  les  détails  du  système  musculaire.  Le  modelé 
dépend  du  dessin  et  de  la  couleur. 

MODÉNATURE  (de  l'italien  modanatura)^  proportion, 
assemblage  et  galbe  des  membres  d'une  corniche.  Elle 
détermine  le  caractère  des  divers  ordres  d'architecture. 

MODÈNE  (École  de),  une  des  écoles  italiennes  de  pein- 
ture que  l'on  comprend  sous  le  nom  commun  d'Ecole 


lombarde.  Elle  remonte  au  xiv"  siècle,  où  elle  eut  poar 
représentants  un  nommé  Thomas,  ^nt  il  existe  un  ta- 
bleau à  Vienne  et  un  autre  à  Trévise,  Barnabe,  et  Serar 
fine.  Yen  4500  florissait  Nicoletto,  qui  grava  lui-mèae 
plusieurs  de  ses  compositions.  Plus  tûrd,  l'école  produisit 
Nicole  deir  Abbate,  Hugo  da  Garpi,  Louis  Lana,  et  Fran» 
çois  Stringa. 

MODfcNB  (Monuments  de).  Le  D^me  ou  cathédrale,  placé 
sous  l'invocation  de  San-Geminiano,  fut  commencé  en 
1099  par  la  célèbre  comtesse  Mathilde,  et  consacré  en 
1184.  On  l'a  réparé  en  4822.  On  y  remarque  :  un  tableau 
de  Serafino  (xiv*  siècle),  un  des  plus  anciens  spécimens 
de  l'art  modénais;  la  chaire  en  marbre,  faite  en  1322 
par  Tomasone  di  C^plone;  les  stalles  du  chœur,  exécu- 
tées en  1405;  un  groupe  de  la  Nativité  de  J.-C.,  en  terre 
cuite,  par  Bcjgarelli.  Le  campanile,  connu  sous  le  nom  de 
Ghiriandina,  à  cause  d'une  guirlande  de  bronze  qui  en- 
toure la  girouette,  est  isolé,  de  forme  carrée,  tout  en 
marbre  blanc,  et  l'un  des  plus  élevés  de  l'Italie  :  on  y 
conserve  le  vieux  seau  de  bois  que  les  Modénais  enle- 
vèrent aux  Bolonais  en  1325,  après  une  lutte  que  Tas- 
soni  a  chantée  dans  son  poème  héroi-comique  la  Secdua 
rapita,  —  Le  Palais  ducal^  vaste  édifice  commencé  an 
xvn*  siècle  et  agrandi  de  nos  Jours,  a  sa  façade  au  S.  sur 
une  grande  place,  et  encadre  de  ses  deux  ailes  au  N.  le 
corso  del  Naviglio,  La  cour  est  environnée  de  colonnades. 
L'escalier,  le  salon  principal  et  les  appartements  sont 
ornte  avec  une  grande  magnificence.  Ce  palais  contenait 
autrefois  une  fameuse  galène  de  tableaux,  qui  fut  achetée 
en  1746  par  l'électeur  de  Saxe  et  qui  se  trouve  à  Dresde; 
il  a  cependant  encore  quelques  bons  tableaux. 

MODILLON  (de  l'italien  modiglUme)^  ornement  en 
forme  de  console  renversée,  qui  semble  soutenir  le  lar- 
mier de  la  corniche  corinthienne.  Il  figure  l'extrémité  des 
chevrons  du  comble  primitif;  son  axe  doit  correspondre 
avec  celui  de  la  colonne  inférieure.  Le  modillon  change 
de  forme  et  de  nom  dans  les  autres  ordres  d'architec- 
ture :  il  devient  le  mutule  et  même  le  denticule;  dans  les 
styles  roman  et  ogival,  il  s'appelle  corbeau,        E.  L. 

MODINHAS,  nom  que  les  Portugais  donnent  à  des 
chansonnettes  qui  s'exécutent  à  une  on  deux  roix,  avec 
accompagnement  de  guitare  ou  de  piano. 

MODIOS,  sorte  de  boisseau  qu'on  voit  sur  la  tète  de 
plusieun  divinités  de  l'antiquité,  entre  autres  Diane 
d^phèse,  Sérapis,  Isis,  etc.  C'est  un  symbole  d'abon- 
dance. 

MODULATION  (du  latin  modus,  mode),  mot  qui  a 
deux  acceptions  en  Musicpie.  Dans  le  sens  le  plus  étroit, 
il  signifie  la  manière  de  traiter  convenablement  le  mode 
(entendu  comme  chez  les  Anciens  ou  dans  le  plain-chant), 
en  faisant  entendre  souvent  les  notes  essentielles  qui  lui 
sont  propres,  et  en  évitant  toute  altération  par  dièse,  bé- 
mol ou  bécarre,  qui  reppellerait  un  mode  étranger.  Dans 
une  acception  moins  restreinte,  et  plus  usitée  aujour- 
d'hui, la  Modulation  est  le  passage  d'un  ton  à  un  autre, 
conformément  à  des  règles  établies,  dans  le  coure  d'un 
même  morceau.  Pour  opérer  un  changement  de  ton,  on 
fait  entendre  les  altérations  qu'il  néoàaite  dans  les  sons 
du  ton  que  l'on  quitte,  afin  de  les  rendre  propres  i  celui 
dans  lequel  on  veut  aller.  Pour  qu'une  modulation  soit 
agréable  et  régulière,  il  suffit  qu'elle  ait  lieu  du  ton  prin- 
cipal à  l'un  de  ses  analogues,  c-à-d.  qu'elle  introduise 
dans  la  mélodie  un  dièse  ou  un  bémol  de  plus,  ou  qu'elle 
en  retranche  un.  Ainsi,  quand  on  est  en  ton  de  ré  ma- 
jeur, dans  lequel  il  y  a  deux  dièses,  on  peut  moduler 
soit  en  si  mineur,  où  il  y  a  le  même  nombre  de  dièses, 
soit  en  la  majeur  ou  en  fa  dièse  mineur,  où  il  y  a  un 
dièse  de  plus,  soit  en  sol  majeur,  où  il  y  a  un  dièse  de 
moins.  Rossini  a  souvent  modulé  d'un  ton  majeur  à  nn 
ton  mineur  avec  un  dièse  de  plus,  comme  de  ré  majeor 
à  fa  dièse  mineur.  Il  faut  revenir,  pour  finir,  au  ton  où 
l'on  était  en  commençant;  ce  ton  est  dit  principal,  et 
ceux  c{u'on  y  a  entremêlés  sont  appelés  relatifs,  La  mo- 
dulation est  aussi  nécessaire  à  la  musique  que  la  difié- 
rence  des  teintes  l'est  à  la  peinture  ;  sans  elle  la  musique, 
ne  sortant  pas  des  cordes  d'un  ton  donné,  scndt  fatigants 
par  son  uniformité.  Cependant  il  faut  se  ^srdee  d'en 
abuser,  car  la  marche  de  la  mélodie  serait  entravée  mal 
à  propos,  et  l'oreille,  surprise  à  chaque  instant,  suivrait 
difficilement  le  ton.  B.  * 

MODULE  (du  latin  modulw)^  mesure  conventionnelle, 
prise  sur  le  fût  de  la  colonne,  pour  établir  les  rapporta 
mutuels  de  toutes  les  parties  d'une  ordonnance  archi- 
tecturale. De  même  que  les  peintres  et  les  sculpteurs 
rapportèrent  les  proportions  des  dilTérentes  parties  du 
corps  de  l'homme  à  celle  de  la  tête,  de  même  les  iicbi- 


HOEU 


1255 


MOH 


IKtBB  grecs  cherchèrent  à  établir  les  rapports  des  Ordres 
ff&pTès  une  mesure  inhérente  à  eux-mêmes.  Ces  rapports 
sont  nécessairement  susceptibles  d*une  l^re  variation  ; 
md  eeox  qui  ont  été  adoptés  :  le  module  est  la  moitié 
da  fût  de  la  colonne  à  sa  base;  la  colonne  toscane  n*a 
ffoe  deii  à  14  modules,  la  doriôue  de  13  à  14,  IMonique 
de  15  à  17,  la  corinthienne  de  lo  à  18.  Le  module  se  di- 
vise ordinairement  en  IS  parties  ou  minutes  pour  le 
toscan  et  le  dorique,  en  18  pour  les  autres  Ordres;  Quel- 
ques architectes  ont  même  porté  les  diyisions  Jusou^à  30. 
Les  stjrles  ogivaux  du  moyen  ftge  n'ont  pas  de  mo- 
dules. E.  L. 

■ODCLB,  en  numismatique,  diamètre  des  médailles. 
On  fistingue,  pour  les  médailles  de  bronze,  trois  mo- 
dules, déngnés  sous  les  noms  de  grand  bronze,  moyen 
bronze,  et  petit  bronze.  V*  Bronze. 

MOELCK  (Abbaye  de),  en  Autriche.  Cette  abbaye,  bâtie 
sur  un  rocher  haut  de  60  met.,  et  au  pied  duquel  coule 
le  DaniÂe,  ressemble  plus  au  palais  a*un  puissant  sou- 
ferain  qu*à  un  couvent  de  cénobites.  Elle  est  occupée  par 
60  Bénédictins  environ,  dont  les  uns  vont  enseigner  dans 
diirérentes  yilles  de  TEmpire,  tandis  que  les  autres  se 
livrent  à  l'étude.  L'église,  consacrée  à  S*  Pierre  et  à 
S'  Paul,  est  surmontée  de  deux  tours  et  d'une  coupole 
couvertes  en  cuivre;  devant  le  portail  sont  les  statues 
colossales  de  S*  Léopold  et  de  S^  Coloman  ;  on  remarque, 
à  rintérieur,  le  plafond  peint  à  fresque  par  Scanzoni  et 
Rottmayr,  divers  tableaux  de  G.  Bachmann  et  de  Paul 
T^oeor,  on  orgue  Justement  estimé,  plusieurs  tombeaux, 
et  un  Trésor  qui  contient  des  reliques  et  des  curiosités 
de  toute  sorte.  Les  bâtiments  de  l'abbaye  renferment 
une  riche  bibliothèque,  une  galerie  de  tableaux  de  l'an- 
denne  école  allemande,  une  collection  de  médailles  et  un 
cabinet  d'histohre  naturelle.  Les  caves,  assez  vastes  pour 
qu*on  y  circule  en  voiture,  ont  fourni  à  l'armée  fran^se, 
en  18({9,  200,000  pintes  de  vin,  sans  que  la  provision  fût 
diminuas  de  moitié. 

MOELLON  (du  latin  mollis,  tendre),  pierre  de  petite 
dimension  et  de  forme  irrégulière,  qu'on  emploie  en  Con- 
struction, en  la  recouvrant  de  moitier  ou  de  plâtre.  Les 
mo^ons  sont  des  débris  de  pierres  de  taille,  quelquefois 
de  ptorres  à  plâtre  et  de  pierres  siliceuses.  Us  sont  dits 
wuiUons  de  plat,  quand  on  les  pose  horizontalement  sur 
leur  lit;  mwHlons  d'appareil,  quand  on  les  a  équarris 
pour  s'en  servir  en  parement  ;  moellons  de  coupe,  quand 
on  les  pose  sur  champ  dans  la  construction  des  voûtes  ; 
moefioiwirtgii^,  lorsque,  après  avoir  été  équarris,  ils  sont 
piqnéft  Jusqu'au  vif  par  la  pointe  du  marteau  ;  tnœllons 
oioquéa,  quand  ils  sont  de  trop  mauvaise  qualité  pour 
être  égoairis. 

MOâRIS  (Lac).  T.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire. 

IftKCRS  (du  latin  mos,  morts,  habitude,  manière  de 
vivre),  qualités  et  inclinations  de  l'âme  qui  se  manifestent 
âios  les  habitudes  de  la  vie  et  produisent  des  actions 
bonnes  ou  mauvaises.  Les  mœurs  sont  privées  ou  pi«62t- 
9iMt.  Les  moeurs  privées  consistent  dans  la  praticpie  con- 
stante des  vertus  ou  dans  le  dérèglement  ordinaire  de  la 
conduite  :  elles  sont  uniquement  du  ressort  de  la  Morale. 
Lemot  fiMnir»,  employé  sans  épithète,  se  prend  en  bonne 
part  :  avoir  des  mosurs,  c'est  régler  sa  conduite  sur  la 
JKrtion  du  devoir.  On  entend  par  mœurs  publiques  les 
habitudes,  les  coutumes,  les  usages  et  les  pr^ugés  oui 
tiennent  à  la  manière  de  penser,  de  sentir  et  d'agir  des 
averses  nations.  Elles  dépendent  de  l'éducation,  de  la 
religion,  du  gouvernement,  du  climat,  et  rentrent  dans 
la  Politique.  Les  mœurs  des  peuples  chasseurs  sont  sau- 
viges  et  cruelles;  celles  des  peuples  pasteurs,  douces  et 
ToTuptnenses;  celles  des  peuples  laboureurs,  pures  et 
sévères  ;  celles  des  peuples  commerçants,  plus  proropte- 
ment  civilisées,  mais  avares  et  perfides  ;  celles  des  peuples 
navigateurs,  indulgentes,  faciles,  audacieuses  et  corrom- 
pues. Les  moeurs,  nées  de  l'habitude,  et  exerçant  leur 
emnire  sur  tout  le  monde,  sont  plus  puissantes  que  les 


t'utilfté  et  la  stabilité  de  celles-ci  se  fondent  sur  la  pureté 
4e  celles^à.  Cest  la  tyrannie  des  mœurs  qui  Jette  une 
femme  Indienne  sur  le  bûcher  de  son  époux  ;  qui  a  fait 
des  églises,  dans  certains  temps,  l'asile  inviolable  des 
assassins;  qui  autorise  en  Angleterre  la  vénalité  des  suf- 
frages 4farif  les  élections  ;  qui  force  un  homme  d'honneur 
ta  Fhmce  à  risquer  sa  vie  en  duel  pour  une  légère  in- 
culte. Les  moeurs  pabliques  ne  sont  pas  toujours  la  con- 
^éq^ience  imaiédiate  des  mœurs  privées,  et  sont  même 


quelquefois  en  contradiction  avec  elles  :  ainsi,  les  Al^ 
^ais,  qui  ont  le  sentiment  très-vif  de  toutes  les  libertés, 
oppriment  les  catholiques  de  l'Irlande.  Les  mœurs  ne  sont 
pas  et  ne  peuvent  pas  être  immuables;  elles  se  transfor- 
ment avec  les  siècles.  Un  attachement  trop  superstitieux 
aux  anciennes  mœurs  est  aussi  contraire  à  l'ordre  public 
que  la  fureur  des  innovations  précoces.  On  trouve  o'inté- 
ressantes  peintures  des  mœurs  privées  et  publiques  aux  • 
différents  âges  de  l'histoire  dans  les  écrivains  moralistes 

(F.  MORAUSTBS). 

Appliqué  aux  œuvres  littéraires  du  genre  dramatique, 
le  mot  mœurs  a  pris  une  signification  différente  de  celle 
qu'on  lui  donne  uans  le  langage  commun  :  on  entend  par 
mœurs  dramcUiques  Tohaârvation  exacte,  la  peinture 
fidèle  des  caractères  et  des  mœurs  selon  le  temps,  le  pays 
et  l'état  social  auxquels  appartiennent  les  personnages 
mis  en  scène. 

En  un  autre  sens  encore,  les  MoBurs  sont  la  partie  do 
la  Rhétorique  oui  traite  des  mœurs  ou  qualités  que  l'ora- 
teur doit  posséder,  ou  du  moins  qu'il  doit  produire  au 
dehors,  et  des  égards  qu'il  doit  témoigner  pour  ses  audi- 
teurs, suivant  leur  âge,  leur  condition,  leur  intelligence, 
afin  de  se  concilier  leur  bienveillance.  On  distingue  les 
mœurs  réelles  des  mœurs  oratoires.  Tous  les  moralistes 
s'accordent  à  dire  que  l'orateur  doit  être  vertueux,  et  que 
sa  conduite  doit  être  conforme  aux  principes  de  morale, 
de  Justice  et  d'équité. <^'il  invoque  dans  ses  discours. 
Aussi,  les  Anciens  déflnissaientr-ils  l'orateur  «  un  homme 
de  bien  qui  sait  manier  la  parole  ».  Mais,  malgré  les  ef- 
forts des  moralistes  pour  démontrer  que  l'homme  de  bien 
seul  est  véritablement  éloquent,  Thistoire  prouve  que  le  * 
don  de  la  parole  peut  se  trouver  dans  l'homme  le  plus 
corrompu.  Les  vertus  que  l'orateur  doit  avoir,  ou  plutôt 
qu'il  doit  respecter,  sont  :  la  probité,  la  modestie,  la  bien- 
veillance, la  prudencs.  La  probité  oratoire  consiste  à  faire 
voir  aux  auditeurs  ou'on  n'a  pas  l'intention  de  les  trom- 
per, qu'on  ne  cherche  pas  son  propre  intérêt,  mais  la  vé- 
rité, et  qu'on  a  fait  une  étude  sérieuse  de  la  cause;  la 
modestie,  à  éviter  les  formes  de  langage  y  les  gestes  qui 
pourraient  faire  croire  à  l'auditeur  qu'on  le  méprise,  et  à 
ne  Jamais  parler  de  soi  sans  y  être  contraint  par  une  né- 
cessité impérieuse;  la  bienveillance,  à  faire  voir  à  l'au- 
diteur qu'on  cherche  à  lui  être  utile  ;  la  prudence,  à  se 
tenir  toujours  loin  des  opinions  extrêmes,  de  manière  à 
ne  point  passer  pour  un  homme  de  parti.  On  voit  que  les 
mœurs  oratoires  ne  sont  autre  chose  que  l'observation 
des  bienséances  et  des  convenances. 

MOFADDALIAT  (El),  Anthologie  arabe  faite  par  El- 
Mofaddal  Ibn  Mohammed,  le  Dabbite,  lecteur, à  Coufk, 
vers  l'an  776  de  notre  ère,  pour  l'usage  du  khalife  abbas- 
side  Al-Mahdi.  Elle  comprenait  30  poèmes  qui,  lus  en 
présence  du  philologue  Al-Asmal,  furent  portés  par  lui  à 
120.  M.  de  Slane,  dans  son  édition  des  poèmes  d'Imroul- 
kais  (Paris,  1837,  p.  117),  établit  qu'il  y  a  128  pièces. 
La  bibliothèque  royale  de  Berlin  possède  un  très-ancien 
manuscrit  qui  en  contient  109.  On  y  troure  un  nombre 
considérable  de  Caoidas  ou  odes,  et  beaucoup  de  mor- 
ceaux de  plus  petite  dimension.  Aucun  ordre  certain  ne 
semble  avoir  été  observé  dans  le  classement.  Marzoukl  a 
commenté  cette  anthologie  aux  points  de  vue  lexicosra- 
phique  et  grammatical,  avec  étendue  dans  la  prenuère 
partie  du  manuscrit,  et  avec  brièveté  pour  le  reste.  Les 
poèmes  mentionnent  rarement  des  faits  historiques  :  ils 
roulent  sur  des  expéditions  guerrières  dans  le  désert, 
sur  la  générosité,  la  bravoure,  l'amour;  il  y  aussi  des 
éloges  funèbres,  des  satires  et  des  louanges.  V.  la  pré- 
face de  l'ouvrage  de  M.  Kosegarten,  The  Hudsaiian  poems, 
Londres,  1854.  G.  D. 

MOGIAIX)UA  (Lanffue).  F.  Abonda. 

MOHATBA,  nom  d'un  contrat  de  vente  usuraire  en 
usage  au  xvi*  siècle,  et  ^  consistait,  dans  les  cas  de 
besoin  d'argent,  à  recevoir  d'un  prêteur,  et  à  crédit,  telle 
ou  telle  marchandise  dont  on  s'obligeait  à  payer  le  prix 
dans  un  temps  déterminé,  puis  à  la  lui  revendre  immé- 
^tement  argent  comptant,  mais  avec  un  grand  rabais. 
C'était  un  moyen  détourné  imaginé  pour  échapper  aux 
lois  sur  l'usure. 

MOHAWK  (Idiome),  un  des  idiomes  iroquois,  lopins 
perfectionné  de  tous.  (Test  lui  qui  possède  le  vocabulaire 
le  plus  étendu  et  ]b,  grammaire  la  plus  savante.  Les  arti- 
culations labiales  p  et  m  lui  sont  inconnues.  On  a  traduit 
en  mohawk  la  Bible,  toutes  les  prières  du  service  divin, 
et  quelques  livres  ascétiques. 

MOHICAN  ou  MOHEGAN  (Idiome),  un  des  idionies 
algonquins.  La  déclinaison  distingue  le  genre,  mais  pas 
le  nombre.  On  emploie  les  participes  au  lieu  des  adjecnlih 

$0 


MOL 


126« 


MON 


^i  rrmnqaent  presque  entièremeiit,  et  les  rerbes  neutres 

BOUT  exprimer  le  verbe  substantif,  qui  fait  aussi  défaut. 
ien  que  les  trois  temps  présent,  passé  et  futur  existent, 
on  se  sert  presque  toujours  du  présent.  Les  prépositions 
■oa^  en  très-petit  nombre.  V,  Jonathan  Edwards,  OhMêT" 
«i^iofif  sur  la  langue  des  Mohicans,  en  anglais,  1788. 

MOHTESIB,  nom  qu*on  donne,  chez  les  peuples  mu- 
•olmans,  an  Juge  des  marchés,  à  IMntendant  delà  police. 

MOBUR,  monnaie  d*or  en  usage  dans  les  Indes.  Le 
mohur  de  la  Compagnie  des  Indes  vaut  36  fr.  84  c,  celui 
ëe  Calcutta  41  fr.  90  c,  et  celui  du  Grand-Mogol  43  fr.  20. 

MOI,  NON-MOI.  Vàme  et  le  mot  ne  font  qu'un  seul 
et  même  être;  cependant  il  y  a  entre  eux  une  grande 
différence.  Le  mot ,  c*est  Tàme  qui  a  conscience  d'elle- 
même,  qui  se  sent,  qui  se  connaît,  qui  veut,  et  qui  sait 
tout  cela*  C'est  donc  i'àme  à  l'état  râléchi  de  développe- 
ment, mais  ce  n'est  pas  l'&me  tout  entière.  Il  y  a  des 
moments  dans  la  vie  où  l'&me  ne  se  connaît  pas,  des  états 
dont  elle  n*a  pas  conscience  ;  l'enfant  qui  vient  de  nattre 
a  une  àme,  mais  en  lui  le  moi  n'est  pas  encore.  Celui-ci 
n'est  réellement  ^e  par  la  conscience  et  la  volonté.  L'école 
allemande,  depms  Kant,  a  limité  ou  élargi  l'idée  du  mot  : 
Kant  ne  l'a  vu  que  dans  la  conscience,  en  distinguant  un 
mot  pur  et  un  mot  empirvtue  ;  celui-ci  est  la  conscience 
appliquée  aux  faits  sensibles  ;  Fichte  fait  du  mot  l'être 
absolu  ;  pour  Schelling  et  Htoel,  c'est  une  des  manifes- 
tations de  l'être  absolu.  De  telles  interprétations  sont  loin 
de  la  vérité.  En  s'élevant  à  l'état  du  mot ,  i'àme  se  dis- 
tingue de  tout  ce  qui  n'est  pas  elle;  de  son  corps,  qui  est 
à  elle  sans  être  elle-même,  de  toute  la  nature  extérieure, 
et  de  certains  modes  internes  qui  changent,  tandis  que 
rame  reste  identique;  toute  cette  opposition,  substance 
ou  mode,  forme  le  non^noi,  R. 

MOINEAUX.  V.  le  Supplément. 

MOINES.  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  d^Bistoire, 

MOIODOR,  monnaie  d'or  portugaise,  la  même  que  la 
Lisbonnine  {V.  ce  mot). 

moïse  ,  assemblage  de  pièces  de  charpente  plates  que 
Ton  boulonne  ensemole. 

MOISSAC  (Église  S^-Purbb,  à).  Cette  église,  autrefois 
abbatiale,  a  été  construite  longtemps  après  le  porche  ou 
péristyle  qui  la  précède,  et  ne  pr^nte  de  remarouable 
que  les  restes  d'un  pavage  en  mosaïque.  L'entrée  du 
porche  est  un  arc  ogive,  flanqué  de  deux  colonnes  enga- 
gées que  surmontent  les  statues  de  S' Pierre  et  de  S^  Paul. 
L'intérieur  de  ce  porche  est  formé  de  deux  faces  latérales 
et  d'un  portail  qui  donne  accès  dans  l'église  :  sur  la  face 
droite  on  a  flguro  en  bas-reliefs  de  pierre  et  de  marbre 
l'Annonciation,  l'Adoration  des  Mages,  la  Fuite  en  Egypte, 
et,  sur  la  gauche,  la  Luxure,  l'Avarice,  le  mauvais  nâie, 
le  bon  pauvre  ou  Lazare;  les  sculptures  du  portail,  dont 
en  a  donné  diverses  interprétations,  paraissent  repré- 
aenter  Dieu,  les  emblèmes  des  Évangélistes,  et  les  24  vieil- 
lards de  l'Apocalypse.  —  Un  cloître,  bâti  en  1100,  est 
attenant  à  l'église.  On  y  reconnaît  des  fhigments  d'une 
construction  encore  plus  ancienne.  Les  colonnes  du  pour- 
tour sont  en  marbre  du  pays  ;  leurs  chapiteaux,  repré- 
aentant  des  scènes  de  la  Bible,  supportent  des  arcades 
ogives  peu  prononcées.  On  remarque,  sur  les  piliers  qui 
sont  disposés  aux  angles  et  interrompent  l'arcature  de 
distance  en  distance ,  des  figures  en  bas-relief  d'assez 
grande  dimension,  sculptées  sur  des  plaques  de  marbre  : 
ce  sont  celles  de  onze  Apôtres  ;  la  Iz*  représente  l'abbé 
Durand,  qui  fit  la  dédicace  de  l'église  en  1063,  et  qui 
tient  ici  la  place  de  l'apôtre  Simon.  Qq  doltre  est  couvert 
en  charpente,  et  non  voûté. 

MOLDAVE  (Langue).  V.  Roumaiib  (Langue). 

MOLE  (du  latin  jnoles,  masse  énorme),  sorte  de  Jetée 
en  pierre  qui  s'avance  dans  la  mer  à  l'entrée  d'un  port 
pour  rompre  l'impétuosité  des  vagues  et  mettre  les  na- 
vires plus  en  sûreté.  Le  mot  est  surtout  employé  sur  les 
bords  de  la  Méditerranée,  à  Gênes,  Naples,  Alger,  Barce- 
lone, etc.  V.  Jetée. 

MOLE  d' ADRIEN.  V.  Madsoléb  ,  daus  notTO  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d* Histoire. 

MOLINISME.  V.  Grâce. 

MOLLAH.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio» 
graphie  et  d'Histoire, 

MOLOSSE,  pied  de  la  versification  grecque  et  latine, 
composé  de  3  longues  :  trÔdëntés.  Les  uns  attribuaient  ce 
nom  k  l'usage  fréquent  que  faisaient  de  cette  mesure  les 
Molosses  dans  leurs  chants  gueniers;  d'autres  préten- 
daient que  ce  pied  avait  été  inventé  par  on  poète  du  nom 
de  Molosse.  II  est  admis  quelquefois  jpar  les  poètes  co- 
miques comme  substitution  du  choriambe,  dont  il  est 
l'équivalent  (-^  »  "),  Ou  le  trouve  aussi  à  la  fin  de  cer- 


tains doehmiaques  hypermètres.  Le  molosse  sert  asseï 
souvent  de  rejet  dans  les  vers  hârolques,  et  annonce  une 
action  moins  vive  ou  un  sentiment  plus  calme  que  le 
rejet  du  dactyle.  P. 

MOMIES.  K .  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bior 
graphie  ei  d^ Histoire. 

MOMON,  vieux  mot  qui  signifiait  mascarade  et  baUet 

MONADE  (du  grec  monas,  unité).  Dans  l'antiquité^ 
Pythagore,  en  disant  que  les  nombres  étaient  les  principst 
des  choses,  avait  ramené  en  même  temps  les  nombres 
eux-mêmes  à  leur  principe,  l'unité.  Chez  les  modernes, 
Leibniz,  en  partant  de  l'idée  de  force,  créa  le  mono* 
disme  ou  la  théorie  des  monades.  Les  monades  sont  des 
substances  simples,  des  atomes  incorporels.  Elles  datent 
de  la  création  ;  elles  peuvent  être  anéanties,  mais  elles 
ne  peuvent  subir  aucune  altération,  aucune  modification 
par  un  changement  interne.  Le  monde  est  à  leur  égard 
dépourvu  d'action,  et,  suivant  les  expressions  de  Leib- 
niz, en  elles  n'existent  ni  portes  ni  fenêtres  oui  puissent 
leur  donner  accès.  Elles  nH>ntni  étendue  ni  ngure,  et  na 
peuvent  occuper  d'espace  ou  se  trouver  dans  un  lieu.  Psr 
la  même  raison  elles  sont  privées  de  mouvement.  Elles 
diffèrent  entre  elles  par  certaines  propriétés  ou  qualités 
oui  leur  sont  inhérentes  ;  ainsi,  parmi  les  monades  créées, 
il  en  est  dans  lesquelles  la  perception  est  plus  distincte 
et  révélée  par  la  conscience  ;  ce  sont  les  âmes  proprement 
dites.  Les  Ames  humaines  se  distinguent  de  celles  des 
animaux  par  la  connaissance  des  vérités  nécessaires,  ooi 
constituent  la  raison.  Cette  théorie  conduit,  1®  à  VidêOr 
lisme,  car  une  agrégation  de  monades  ne  peut  pas  avoir 
des  qualités  qui  ne  sont  pas  dans  ses  éléments  ;  les  mo- 
nades n'ayant  ni  figure,  ni  étendue,  ni  mouyement,  les 
corps  ne  sont  que  des  phénomènes;  ^  k  VoptimisrMy 
parce  que  les  monades  sont  disposées  les  unes  k  l'égard 
des  autres  de  manière  à  produire  le  meilleur  des  mondes 
possibles;  3"  au  fatalisme,  par  Vharmonie  préétablie. 
(7.  ces  mots),  R. 

MONARCHIE  (du  grec  monos,  seul,  et  arkhéin,  com- 
mander), gouvernement  d'un  peuple  par  un  seul  homme, 
qui  porte  ordinairement  le  titre  de  rot  ou  d'empereur. 
Ce  gouvernement  est  absolu,  quand  la  souveraine  pui> 
sance  appartient  au  monar<que  sans  aucune  restrictiua 
{V.  AMS0Lvnsut,)\  constitutionnel,  tempéré  ou  représen- 
tatif^  quand  le  pouvoir  est  partagé  entre  le  chef  de  TÉtat 
et  les  représentants  de  la  nation,  et  réglé  dans  son  exer- 
cice par  une  Constitution  {V.  ce  mot).  Une  monarchie 
peut  être  ou  héréditaire  ou  élective.  Son  écueil  est  le  des- 
potisme  {V.  ce  mot).  On  a  dit  que  la  monarohie  était 
sortie  de  la  famille,  et  que  le  père  avait  été  le  Qrpe  du  roi; 
mais  la  vie  patriarcale  conduit  bien  plutôt  à  l'oligarchie; 
car,  après  la  mort  du  péro,  qui  a  régné  sur  toutes  les  gé- 
nérations nées  de  son  vivant,  l'unité  da  pouvoir  est  bri- 
sée, les  fils  deviennent  les  chefs  de  nouvdles  familles,  et 
la  puissance  tend  à  se  morceler  de  plus  en  plus.  D'ail- 
leurs, il  résulte  de  l'expérience  que  le  pouvoir  royal  et  le 
pouvoir  paternel  sont  loin  d'être  identiques;  que Végialité 
entre  les  membres  de  la  famille  politique,  l'amélioration 
de  leur  bien-être  et  de  leur  intelligence,  n'ont  guère  été 
le  soud  des  souverains,  dont  un  très-petit  nombre  ont 
mérité  d'être  appelés  les  pères  des  peuples  ;  que  souvent 
même  ils  affecteirent  de  n'être  pas  de  même  race  que  les 
sujets,  et  affichèrent  une  origine  supérieure,  sinon  divine 
(k.  Droit  divin).  Sans  attacher  trop  d'importance  à  ce 
vers  de  Voltaire  (Mérope,  I,  3)  : 

Le  premier  qui  ftit  roi  ftit  an  soldst  beureaz, 

on  peut  admettre  que  la  force  a  été  fk'équemment  le  prin- 
cipe du  pouvoir.  On  ne  trouverait  guère  de  dynasties  qui 
n'aient  débuté  par  une  usurpation ,  et  c'est  seulement  i 
la  suite  d'une  possession  plus  ou  moins  longue  de  l'au- 
torité, ou  par  l'ascendant  de  services  rendus,  qu'elles  onl 
été  définitivement  acceptées.  Si  la  monarchie  a  été  cbei 
la  plupart  des  peuples  une  institution  primordiale,  il  est 
remarquable  qu'elle  a  été  partout  en  lutte  avec  les  su- 
jets, dont  les  efforts  ont  tendu  k  limiter,  à  amoindrir  son 
autorité.  V.  RoYADTé. 

MONASTERE.  F.  Abbate. 

MONAULB.  V.  Flots. 

MONCADES.  F.  Moquette. 

MONDE  (Ame  du).  V.  Ame  du  ifom>B. 

MONERIS,  galère  des  Anciens,  à  un  rân^  de  rames. 

MONÉTAIRE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dwtionnairt  é$ 
Biographie  et  d'Histoire. 

MONéTAiRB  (Musée),  collection  formée  à  la  Monnaie  de 
Paris»  et  comprenant  tous  les  coins  et  poinçons  des  mon- 


MON 


1267 


MON 


oaiei,  médailles,  pièces  de  plaisir  et  Jetons  qui  ont  été 
frappés  en  France  depuis  Gmurles  Ym  Jusqu'à  nos  Jours. 
Oo  j  voit  aussi  en  dépôt  une  grande  quantité  de  coins  et 
poinçons  appartenant  à  divers  graveurs  et  éditeurs. 

MONFÉRINB,  danse  de  la  Lombardie  et  du  Piémont. 
Lamasioue  en  est  gale,  d*un  mouvement  très-vif,  et  me- 
niée  à  6/8.  Elle  se  divise  en  deux  reprises  composées 
cbacane  de  8  mesures,  et  de  ces  reprises  on  répète  seu- 
lement la  dernière. 

MONGOLE  (Langue),  une  des  langues  tartares,  celle 
oui  parait  le  mieux  avoir  une  origine  monosyllabique. 
Ses  radicaux,  en  effet,  sont  fort  courts,  et  composés  le 
plus  souvent  de  trois  lettres  seulement.  H  est  vrai  qu'ils 
«ont  susceptibles  de  flexions ,  tant  de  déclinaison  que  de 
coDJagaiaon.  Abel  Rémusat  a  signalé  les  analogies  qui 
existent  entre  le  mongol  et  le  thibétain  :  c'est  des  deux 
côtés  la  même  pauvreté  de  termes  de  rapport  et  de 
connexion ,  la  même  marche  dans  la  syntaxe  et  la  con- 
struction. Le  mongol  a  encore  des  coïncidences  avec  le 
tore ,  dans  les  mots  comme  dans  les  formes  grammati- 
cales, et  son  vocabulaire  contient  aussi  un  certain  nom- 
bre de  termes  sanscrits.  On  ne  trouve  en  mongol  ni  dis- 
tinction des  genres,  ni  article;  les  pronoms  sont  d'un 
usage  assez  rare  :  au  lieu  de  remplacer  par  eux  le  sub- 
stantif, on  répète  celui-ci.  Le  verbe  n'a  pas  de  subjonctif, 
et  rindicatif  tient  lieu  de  ce  mode;  la  conjugaison  n'a 
ni  personnes  ni  nombres.  Il  n'y  a  pas  de  prépositions , 
mais  des  postpositions.  L'absence  de  dures  associations 
de  consonnes  et  une  riche  distribution  de  voyelles  ren- 
ient la  prononciation  harmonieuse  et  sonore.  L*alphabet 
mongol  se  compose  de  6  voyelles  et  17  consonnes,  qui, 
par  leurs  combinaisons ,  fournissent  une  centaine  de 
signes.  On  écrit  en  colonnes  verticales  de  haut  en  bas,  et 
de  gaache  à  droite.  —  Les  Mongols  ont  une  littérature 
composée  de  poèmes,  de  romans,  d'ouvrages  historiques, 
et  surtout  de  livres  de  théologie  bouddhique  :  beaucoup 
de  ces  livres  sont  traduits  du  thibétain.  V.  Thévenot, 
Voyages^  contenant  une  Grammaire  mongole  traduite 
d^m  manuscrit  arabe,  1663-72;  Bayer,  Orthographia 
tungolica,  dans  les  Acta  eruditorum  de  1731  ;  le  même, 
EUmenta  lUteraturm  mongolicœ;  Abel  Rémusat,  Re- 
cherchts  tur  Us  langues  tartares,  Paris,  1820,  in-4°; 
W.  Scbott,  Essai  sur  les  langues  tartares,  en  allemand  ; 
J.-J.  Schmidt,  Grammaire  de  la  lamgue  mongole,  en 
allem.,  S^-Péiôrsbourg,  1831,  in-4°,  et  Dictionnatre  mon- 
ffûl-aUemandrrtuse,  1835  ;  Kowalewski,  Grammaire  abré'  \ 
géedela  langue  savante  des  Mongols ,  1835,  Chrestoma^ 
tin»  mongole,  1836,  et  Dictionnaire  mongcl-russe-fran^ 
pois,  Kazan,  1844,  in-4«. 

MONIAL,  ancien  mot  synonyme  de  moine  ou  reli- 
psex. 

MONITEUR.  F.  Ensugnxmert. 

HoiuTEUR  umvBRSBL.  V,  JOURNAL,  daus  uotTe  Dtctîofi- 
emrs  de  Biographie  et  éP Histoire. 

HONITION.       i  7.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

MONITOIRE.    I      de  Biographie  et  d* Histoire, 

MONNAIE  (en  latin  moneta;  de  monere,  avertir,  parce 
que  le  type  ou  la  marque  légale  dont  elle  est  emprunte 
arertit  qu'il  n'y  a  pas  eu  de  fraude  dans  la  fabrication), 
mot  qui  s'entend  généralement  des  espèces  métalliques 
frappées  par  une  autorité  souveraine,  marquées  au  coin 
d'un  prince  ou  d*nn  État,  et  servant  au  commerce.  I^s 
Économistes  la  définissent,  dans  une  acception  plus  vaste, 
«  un  instrument  d'échange,  qui ,  en  même  temps  qu'il 
sert  de  mesure  pour  la  valeur  des  objets  échangés,  est 
par  lui-même  un  équivalent  ».  La  monnaie  est  une  partie 
très-importante  du  capital  circulant  d'une  nation ,  bien 
qu'elle  soit  loin  d'être  la  plus  considérable.  Une  monnaie 
n'est  pas  autre  chose  qu'une  marchandise  qui  sert  d'in- 
termédiaire dans  l'échange  des  aunes  marchandises.  Si 
J'ai  besoin  de  pain  et  que  je  sois  chapelier,  donnerai-Je 
un  chapeau  au  boulanger?  Quel  rapport  y  a-t-il  entre 
un  chapeau  et  une  livre  de  pain?  D'ailleurs,  ai-je  besoin 
d'une  quantité  de  pain  exactement  égale  à  la  valeur  du 
chapeau?  Et  le  boulanger  a-t-il  besoin  d'un  chapeau,  pour 
accepter  celui  que  le  lui  offire  en  échange  de  son  pain? 
n  est  érident  qu'il  faut  un  intermédiaire,  qui  ait  une  var 


leur  aases  déterminée  pour  déterminer  lui-même  la  valeur 
des  autres  marchandises  et  servir  de  mesure  de  compa- 
raison, qui  soit  accepté  é^lement  par  tous  et  facilement 
divisible.  Pour  qu'une  marchandise  devienne  monnaie,  il 
£aut  :  i»  qu'elle  ait  une  valeur  réelle,  c-à-d.  une  valeur 
sérieuse  et  non  de  pure  convention  ;  autrement  dit,  qu'elle 
ioit  le  produit  d'un  travail  ;  2^  qu'elle  ait  une  valeur 
stable,  c-ànd.  qu'elle  ne  puisse  pas  s'altérer,  se  corrom- 
pttf  le  volatiliser^  ni  être  exposée  à  des  mouvements 


trop  subits  de  hausse  et  de  baisse;  3*  qu'elle  soit  divisibk 
aisément,  de  manière  que  la  somme  des  parties  ait 
une  valeur  égale  au  tout ,  et  qu'une  partie  à  poids  égal 
n'ait  pas  plus  ou  moins  de  valeur  qu'une  autre  ;  4^  qu'elle 
soit  facile  à  transporter,  d'un  volume  peu  considérable; 
Sp  que  sa  valeur  soit  facile  à  constater,  c.-à-d.  qu'on  ne 
puisse  pas  aisément  la  falsifier  ou  la  confondre  avec  une 
autre.  L'or  et  l'argent  réunissent  au  plus  haut  decpré  cet 
diverses  qualités,  et  c*est  pour  cette  raison  qu'ils  ser- 
vent presque  universellement  de  monnaie.  On  a  essayé 
en  Russie,'  de  1828  à  1845,  de  faire  des  monnaies  de 
platine;  mais  ^  valeur  de  ce  métal  n'est  pas  assez  con* 
stante.  Quelques  peuples  ont  employé  ou  emploient  en* 
core  pour  monnaie  dans  les  menus  échanges  cortainet 
autres  marchandises,  à  Terre-Neuve  les  morues,  aa 
Mexique  les  grains  de  cacao ,  en  Abyssinie  le  sel ,  aux 
Maldives  certains  coouillages,  en  Russie  Jusqu'à  Pierre  1% 
le  cuir. — Combien  faut-il  de  monnaie  à  un  peuple  pour 
suffire  à  ses  échanges?  environ  un  dixième  des  valeun 
qui  sont  dans  la  drculation  :  mais  celte  évaluation  ne 
repose  sur  aucune  donnée  certaine.  La  quantité  de  mon- 
naie n'est  pas  seulement  déterminée  par  la  quantité  des 
marchandises,  mais  pÊsc  l'état  du  crédit;  s'il  est  vrai  que 
plus  il  y  a  de  marchandises  en  circulation,  plus  il  y  a 
oesoin  de  monnaie,  il  faut  ^jouter  que  plus  il  y  a  de 
crédit ,  moins  il  faut  de  monnaie.  Le  crédit  supplée  en 
grande  partie  à  la  monnaie,  grâce  aux  effets  de  commerce 
et  aux  banques  (  V.  Gnéorr,  Effets  db  comuercb,  BanqdbV* 
Le  pai>ier-monnaie  remplace  quelquefois  en  partie  la 
monnaie:  mais  c'est  toujours  une  anomalie  cb  courte 
durée  (  V.  Papier-monnaib). 

On  appelle  monnaies  réelles  ou  effectives  celles  qol 
circulent  avec  une  valeur  déterminée  ;  monnaies  de  compte 
ou  imaginaires,  celles  auxquelles  ne  correspond  aucune 
pièce  de  monnaie  réelle,  qui  n'ont  d'existence  que  sur  le 

f papier,  et  qu'on  emploie  par  habitude,  ou  pour  faciliter 
es  comptes  en  les  établissant  sur  une  base  certaine  et 
invariable,  comme  les  livres  sterling  en  Angleterre,  lea 
réaux  de  vetllon  en  Espagne,  les  reis  en  Portugal,  la 
livre  de  banque  en  Prusse,  le  rouble  de  compte  en  Rua» 
sie,  et  autrefois  la  pistole  en  F^rance.  Les  monnaies  réelles 
ont  une  valeur  intrinsèque,  celle  de  la  matière  dont  elles 
sont  formées,  et  une  valeur  nominale ,  celle  que  l'auto- 
rité publique  leur  attribue  :  les  étrangers  ne  reconnais- 
sent aux  monnaies  d'un  pavs  que  leur  valeur  réelle,  tan- 
dis que  les  indigènes  les  donnent  et  les  reçoivent  pour 
leur  valeur  nominale.  Le  tUre  d'une  monnaie  est  la  quan- 
tité pure  qu'elle  contient  du  métal  dont  elle  porte  le  nom  t 
ainsi,  en  France,  les  pièces  d'or  et  la  pièce  de  5  fr.  en 
argent  sont  au  titre  de  9  dixièmes,  c.-à-d.  qu'elles  con- 
tiennent 9  dixièmes  d'or  ou  d'argent  fin  et  un  dixième 
de  cuivre;  il  y  a  une  tolérance  de  S  millièmes  au-dessus 
et  au-dessous  pour  l'or,  et  de  3  millièmes  pour  Targent; 
les  pièces  d'argent  de  2  f^.,  1  fr.  et  0,50  cent.,  sont  au  titre 
de  0,835;  nos  pièces  de  1,  2,  5  et  10  centimes  sont  de 
bronze,  composé  de  05  centièmes  de  cuivre,  4  d'étain  et 
1  de  âne.  On  nomme  frai  la  diminution  de  poids  qu'é- 
prouvent les  monnaies  par  Teffet  de  la  circulation. 

Dans  toute  pièce  de  monnaie,  on  remarque  :  Vavers , 
droit  ou  face,  le  revers,  la  légende,  Vexergw,  le  cordon, 
et  le  millésime  (F.  ces  mots). 

FabriccUion  de  la  monnate.  —  Quand  on  songe  que 
l'art  de  la  gravure  en  relief  et  en  creux  sur  les  métaux 
atteignit  de  bonne  heure  la  perfection,  on  est  étonné  de 
la  lenteur  avec  laquelle  se  sont  développés  les  procédf^s 
de  la  fabrication  des  monnaies.  Autrefois  les  monnaies 
étaient  frappées  par  le  marteau ,  tantôt  à  froid,  tantôt  à 
chaud,  et  U  en  a  été  ainsi  jusqu'à  la  seconde  moitié  du 
xvi*  siècle.  Après  avoir  fait  subir  aux  matières  d'or  et 
d'argent  l'alliage  légal,  on  les  fondait  et  on  les  coulait 
en  lames,  qui  étaient  ensuite  recuites  [)our  être  étendues 
sur  l'enclume.  Quand  les  lames  avaient  à  peu  près 
l'épaisseur  des  espèces  à  fabriquer,  on  les  coupait  en 
morceaux  à  peu  près  de  la  grandeur  des  espèces,  ce  qu'on 
appelait  couper  quarreaux.  Les  quarreaux  réduits  au  vo« 
lume.des  espèces  prenaient  le  nom  de  fl€U>ns.  Pour  mar- 
quer l'empreinte  légale  sur  les  deux  côtés  du  flaon,  on  se 
servait  de  deux  poinçons  appelés  coins  ou  quarrés  (  F. 
Com).  L'un  était  Isipile;  c'est  celui  sur  lequel  était  gravé 
l'écusson  :  l'autre,  qui  portait  la  croix  ou  l'effigie  du  roi, 
s'appelait  le  trousseau.  Le  flaon  étant  posé  sur  la  pile, 
on  mettait  le  trousseau  sur  le  flaon  :  d'une  main  on  pres- 
sait la  pièce  entre  la  pile  et  le  trousseau,  de  l'autre  on 
donnait  trois  ou  quatre  coups  de  maillet  de  fer  sur  le 
trousseau,  et  ainsi  le  flaon  se  trouvait  monnayé  des  deux 
côtés.  Ce  terme  de  pile  venait  de  œ  que  la  pile  est  fhip- 


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pée,  pUéê  sons  le  trousseau,  et  celui  de  troui$9au,  de  oe 
qa*on  tenait  et  troussait  œ  coin  de  la  main.  —  Les  in- 
oon?énient8  de  ce  mode  de  fabrication  étaient  nombreux  : 
il  faut  compter,  parmi  les  plus  graves,  Tirrégularité  de 
Tempreinte  en  une  loule  de  cas,  Tencouragement  donné 
par  là  au  faux  monnayage,  et  la  facilité  aue  Ton  avait  de 
rogner  les  espèces.  En  1547,  Henri  II  décida  que  son  effi- 
gie serait  empreinte  sur  les  monnaies  à  la  place  de  la 
croix,  qui  étut  trop  facile  à  falsifier,  et  défendit  de  fa- 
briquer avec  des  coins  autres  que  ceux  qui  auraient  été 
mvés  par  le  taUlsur,  sculptsur  et  graveur  générai  de 
France.  Le  graveur  qui  fit  les  nouveaux  coins  fût  Bfaïc 
Béchot.  Bientôt  on  vint  proposer  an  roi  une  machine  à 
forger  les  monnaies  :  cette  machine,  dont  Tinvention  est 
attnbu^  par  les  uns  à  un  Allemand  nommé  Antoine 
Brucher,  et  par  les  autres  à  un  certain  Aubin  Olivier, 
fut  appelée  oalancier  ou  moulin,  parce  qu'elle  agissait 
par  un  mouvement  circulaire.  Elle  fut  installée  en  1553 
dans  le  palais  du  Louvre,  au  bout  du  Jardin  des  étnves, 
à  Tendroit  où  sont  aujourd'hui  les  saleries.  Vers  le  même 
temps  on  eut  Tidée  de  mettre  une  légende  sur  la  tranche 
des  espèces,  pour  empêcher  qu'elles  fussent  rognées.  La 
fiû>rication  par  le  marteau  et  celle  par  le  balancier  se 
firent  concurremment.  En  1587,  Henri  III  défendit  cette 
dernière,  si  ce  n*est  pour  médailles,  pièces  de  plaisir  et 
Jetons,  et  il  n'y  eut  plus  que  le  marteau  pour  la  monnaie. 
Le  monnayage  au  moulin  ne  fut  cependant  pas  univer- 
sellement abandonné  :  il  avait  été  installé  à  Pau,  en 
1564,  par  Jeanne  d'AIbret,  reine  de  Navarre.  En  1617, 
Nicolas  Briot,  tailleur  général  des  monnaies,  proposa  de 
nouvelles  machines  :  on  les  repoussa,  malgré  des  essais 
concluants,  et,  en  1629,  Briot  alla  porter  son  invention 
en  Angleterre,  où  l'on  en  tira  profit.  Enfin,  des  édits  de 
décembre  1630,  de  mars  1640  et  1645,  rétablirent' la  fa- 
brication exclusive  par  le  balancier  :  ce  triomphe  définitif 
de  la  machine  sur  la  main  d'oeuvre  est  dû  aux  conseils 
et  à  l'influence  de  Varin.  Vers  1685,  on  adopta,  pour 
marquer  les  espèces  sur  la  tranche,  une  machine  inventée 
par  l'ingénieur  Castaing.  Avec  la  presse  monétaire  in- 
ventée par  Tlionnelier  en  1820,  on  fabriaue  en  10  heures 
20,000  pièces  de  5  tr.  L'hôtel  des  monnaies  de  Paris  pos- 
sède 16  de  ces  presses  mues  par  deux  machines  à  va- 
Çeur.  Le  monnayage  comprend  les  opérations  suivantes  : 
®  la  fonte  des  métaux;  2*  l'essai  de  l'alliage,  pour  véri- 
fier s'il  est  au  titre  convenable  ;  Z^  le  laminage  des  lin- 
gots obtenus  par  la  fonte;  A*  le  découpage  des  flans  à 
l'aide  d'un  emporte-pièce  mécanique;  5*  le  frappage  des 
pièces  à  l'aide  des  coins  et  du  balancier.  Le  cordonnage 
des  flans  s'est  fait  d'abord  au  moyen  d'une  machine  par- 
ticulière; depuis  l'invention  deThonnelier,  le  cordon- 
nage  se  fait  en  même  temps  que  l'impression  des  sur- 
faces, et  d'un  même  coup  de  balancier.  Les  médailles 
d'or  et  d'argent  sont  terminées  aprte  le  frappage;  celles 
de  cuivre  reçoivent  leur  couleur  brune  dana  un  mélange 
d'acétate  de  cuivre  et  de  matières  organiques. 

Le  procédé  moderne  de  fabrication  donne  plus  de  pu- 
reté aux  lignes,  plus  de  régularité  aux  pièces,  et  une 
complète  uniformité  entre  elles;  mais  celui  des  Anciens, 
qui  moulaient  leurs  monnaies,  permettait  de  faire  en 
bronze  les  pièces  de  faible  valeur,  qu'on  est  obligé  main- 
tenant de  faire  en  cuivre,  parce  que  le  bronze  est  trop 
dur  pour  le  procédé  actuel.  Or,  à  cause  de  la  dureté  du 
bronze,  les  monnaies  anciennes  s'usaient  moins  que  les 
nôtres,  et  étaient  aussi  moins  sujettes  à  s'oxyder. 

La  fabrication  des  monnaies  en  France  est  faite  dans  des 
hôtels  appartenant  à  l'État,  mais  par  des  entrepreneurs 
portant  le  titre  de  directeurs  de  la  fabrication  et  qui  sont 
lous  la  surveillance  et  le  contrôle  d'agents  nommés  par 
le  ministre  des  finances.  L'État  alloue  aux  entrepre- 
neurs, pour  frais  de  confection  des  monnaies,  1  fr.  50 
par  kil.  d'argent,  et  6  fr.  70  c.  par  kil.  d'or.  Les  directeurs 
des  monnaies  doivent  fournir,  en  pièces  fractionnaires  de 
celles  de  5  f^.,  un  vingtième  de  la  fabrication  de  la  mon- 
naie d'argent,  soit  par  million  50,000  fr.  ainsi  divisés  : 
en  pièces  de  2  f^.,  10,000  fr.;  de  1  fr.,  25,000  fr.;  de 
50  centimes,  12,500  fr.;  de  20  centimes,  2,500  fr.  Pour 
la  monnaie  d*or,  ils  fournissent,  par  million  :  en  pièces 
de  iOO  nr.,  5,000  fr.  ;  de  50  fr.,  10,000  fr.  ;  de  20  fr., 
740,000  f^.  ;  de  10  fir.,  190,000  fr.  ;  de  5  fr.,  55,000  tr.  Le 
prix  de  fSabrication  de  la  monnaie  de  cuivre  est,  par  kilo- 
gramme, de  92  cent,  pour  la  pièce  de  10  c.  ;  1  fr.  32  c. 
pour  celle  de  5  :>  ;  2  fr.  24  c.  pour  celle  de  2  c.  ;  3  fi*,  pour 
celle  de  1  c.  Chaque  hôtel  des  monnaies  (il  n'y  en  a  que  s} 
&  une  marque  ou  point  secret,  qui  fait  reconnaître  l'ori- 
;;ine  des  pièces,  et  une  lettre,  qui  les  distingue  é^loment 
;  Paris,  A;  Bordeaux,  K  J. 


Du  fauœ  monnayage.  —  Le  faux  monnayage  a  eiiité 
de  tout  temps,  mais  principalement  à  r^)oque  où  la  fli- 
brication  publique  était  imparfaite,  n  consiste,  soit  à 
couler  des  pièces  de  monnaie  dans  des  moules,  ce  qui  ne 
donne  que  des  copies  défectueuses  et  faciles  à  recon- 
naître, soit  à  en  fabriquer  à  l'aide  des  procédés  mêmes 
aue  l'on  emploie  dans  les  hôtels  des  monnides,  en  leur 
onnant,  par  excès  d'alliage,  ou  par  manaue  de  poids, 
une  valeur  inférieure.  On  a  fait  aussi  des  monnaies 
fausses  dont  le  corps  est  une  matière  quelconque  recou- 
verte d'une  pellicule  d'or  on  d'argent.  En  général,  on 
distingue  beaucoup  de  monnaies  fausses  au  son  qu'ellei 
rendent.  Aux  yeux  de  la  loi,  on  contrefait  encore  la  mon- 
naie, quand  on  la  couvre  d'un  enduit  pour  lui  donner 
une  valeur  supérieure,  quand  on  la  rogne  pour  la  mettre 
ensuite  en  circulation  avec  son  ancienne  valeur.  Un  des 
plus  anciens  édits  royaux  contre  les  faux  monnayeurs  est 
celui  de  Childéric  III*  en  744,  infligeant  la  perte  du  poiog 
au  coupable,  une  amende  de  60  sous  à  ses  complices  s'ils 
sont  libres,  et  60  coups  s'ils  sont  esclaves.  Louis  le  D^ 
bonnaire  en  819  et  Charles  le  Chauve  en  864  prononcè- 
rent les  mêmes  peines.  D'après  plusieurs  ordonnances  de 
Louis  EX,  les  faux  monnaveurs  devaient  être  pendus;  la 
peine  portée  par  les  Êlaolissements  de  ce  pnnce  est  la 
perte  des  yeux.  Les  Coutumes  de  Bretagne  et  de  Norman- 
die portaient  qu'ils  seraient  bouillis  vivants,  puis  pendus. 
Philippe  le  Bel,  qui  altérait  si  bien  les  monnaies,  obtint 
du  pape  Clément  V,  en  1309,  une  bulle  d'excommuni- 
cation contre  les  coupables,  sentence  renouvelée  sous 
Charles  le  Bel  en  1320.  sous  Philippe  VI  de  Valois  en  1 319, 
et  sous  Henri  III  en  1583.  Louis  XI  déclara,  par  lettres 
du  2  nov.  1475,  que  le  crime  de  fausse  monnaie  était  un 
de  ceux  dont  les  rois  faisaient  le  serment  de  ne  jamais  ac- 
corder le  pardon.  La  terreur  n'arrêtait  pas  les  faussaires, 
et  les  nobles  n'étaient  pas  moins  coutumiers  du  fait  que 
les  roturiers  ;  des  provinces  entières  avaient  un  fort  mau- 
vais renom  sous  ce  rapport.  En  1631,  le  cardinal  de  Ri- 
chelieu établit  une  Chambre  de  justice  pour  la  recherche 
et  la  répression  du  crime  de  fausse  monnaie ,  et  cette 
Chambre  prononça  de  nombreuses  et  sévères  condam- 
nations. Dans  rOrdonnance  de  1670,  la  fausse  monnaie 
continua  d'être  considéra  comme  crime  de  lèse-majesté. 
Un  édit  du  SO  février  1725  sanctionna  toutes  les  disposi- 
tions pénales  antérieures.  Le  Code  pénal  de  1791  maintint 
la  peine  de  mort  pour  ceux  qui  contreferaient  lespiq>iers 
nationaux,  mais  ne  punit  que  de  15  années  de  fers  les 
faux  commis  sur  les  monnides.  A  ces  peines  la  loi  da 
l»  brumaire  an  ii  (22  oct  1793)  ijouta  la  confiscation 
des  biens,  et  celle  du  23  floréal  an  x  (13  mai  1802)  la 
marque  ou  flétrissure.  Une  loi  du  2  frimadre  an  ii  (22  no- 
vembre 1793)  punit  de  6  ans  de  fers  la  fabrication  de 
fausse  monnaie  étrangère,  ainsi  que  celle  des  effets  de 
commerce.  La  loi  du  14  germinal  an  xi  (4  mai  1803}  ré- 
tablit la  peine  capitale  contre  les  autours  et  les  complices 
de  la  contrefaçon  ou  altération  de  la  monnaie  nationale. 
Cette  peine  fut  conservée  dans  le  Code  pénal  de  1810. 
Depuis  1832,  le  crimei  de  fausso  monnaie  est  puni  des 
travaux  forcés  à  perpétuité,  quand  la  contrefaçon  oa 
l'émission  s'est  attaquée  aux  espèces  d'or  et  d'argent,  et 
seulement  des  travaux  forcés  k  temps,  s'il  s'agit  de  mon- 
naies de  cuivre  ou  de  billon.  La  fiusification  ou  contre- 
façon, ainsi  que  l'emploi,  d'effets  émis  par  le  Trésor 
public  avec  son  timbre,  ou  des  billets  des  oanques  auto- 
risées par  la  loi,  entraînent  les  travaux  forcés  à  perpé- 
tuité. En  ce  qui  regarde  les  monnaies  étrangères  altérées, 
contrefaites,  et  émises  en  France,  la  peine  est  celle  des 
travaux  forcés  à  temps.  Ceux  qui,  ayant  reçu  de  fausses 
pièces  pour  bonnes,  les  remettent  saemment  en  drcola- 
tioo,  sont  punis  d'une  amende  triple  au  moins  et  sex- 
tuple au  plus  de  la  somme  qu'elles  représentent,  sans 
que  cette  amende  puisse  être  en  aucun  cas  inférieure  à 
16  fr.  La  révélation  du  crime  de  fausse  monnaie  avant 
ou  même  après  poursuites,  s'il  s'ensuit  l'arrestation  des 
coupables,  exempte  de  la  peine  celui  qui  aurait  participé 
à  la  fabrication  ou  à  l'émission  ;  mais  il  peut  être  mis,  à 
temps  ou  pour  sa  vie ,  sous  la  surveilUmce  de  la  hauts 
police.  —  L'achat  et  la  vente  des  monnaies  au-dessnt 
du  cours  légal ,  pour  en  faire  commerce  et  les  exporter 
à  l'étranger,  sont  punis  d'une  amende  qui  peut  s'élever 
jusqu'à  3,000  fr.  Il  en  est  de  même  de  la  fonte  des  mon- 
naies qui  aurait  pour  but  de  profiter  d'un  excédant  de 
poids. 

K.  l'art.  Monnaie  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie  et  d'Histoire ,  et,  dans  le  présent  ouvra^,  les  arti- 
cles consacrés  à  la  Numismattquê  des  prinopaux  pavas 
les  Traités  des  monnaies  par  Boizard  (1699,  2*  édit^ 


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1711),  Pounain  (1821  ;  2*  édit,  1700],  Dapré  de  Saint- 
Maar  (1746),  et  Abbot  de  Bazinghen  (1764);  Galiani, 
Délia  moneta,  2*  édit.,  1780;  Rochon,  Esiai  sur  les  monF- 
naias  ancimnes  et  modernes,  1702;  Bonneyille,  Traité 
des  monnaies  d^or  et  émargent  chez  les  différents  peuples 
(1806) ,  refonda  sous  le  titre  d* Encyclopédie  des  mon" 
naies  (1850)  ;  Juvigny ,  Traité  théoriqtte  et  pratique  sur 
les  momuues^  3*  édit.,  1834;  Nelienbrecher,  Nouveau 
Mamui  des  monnaies .  traduit  de  Tallemand  par  Dea- 
chamM,  1844;  Michel  Chevalier,  La  Monnaie,  1850, 
io-S".  F.  pour  les  monnaies  anciennes,  Nomismatiqub.  B. 
HOiiNAiE  DB  BiLLON.  Le  billon  ne  mérite  pas,  en  réalité, 
le  nom  de  monnaie,  car  il  n'aqu*une  valeur  fictive,  c-à-d. 
qui  n*est  ni  la  mesure,  ni  Téquivalent  de  la  chose  pour 
laquelle  on  le  reçoit  ou  on  le  donne;  néanmoins  le  nom 
a  prévalu.  En  France,  la  monnaie  de  billon  ne  valut 
jamais  intrinsèquement  que  la  moitié  de  sa  valeur  lé- 
gale. Un  des  grands  inconvénients  de  cette  surélévation 
était  de  provoquer  le  faux  monnayage;  en  1726,  il 
existait  en  Angleterre  et  en  Allemagne  des  ateliers  wur- 
ticuliers  qui  fabriquaient  d*énormes  quantités  de  oil- 
loD,  dont  ils  inondaient  la  France.  Pendant  la  Révéla- 
tion, avec  une  livre  de  cuivre  rouge  qui  valait  un  franc, 
00  fabriquait  45  sous,  valant,  légalement,  2  fr.  25  c.  Les 
soos  de  cloche,  avec  la  môme  valeur  légale,  ne  conte* 
naient  que  pour  60  centimes  de  matière,  n  s'en  fabriqua 
alors  une  quantité  tellement  disproportionnée  avec  les 
besoins  du  commerce,  qu'ils  étuent  comme  une  plaie 
dans  les  transactions ,  parce  que  Ton  faisait  des  paye- 
ments importants  tout  en  sous.  En  1706,  un  arrêté  du 
Directoire,  pour  réprimer  cet  abus,  autorisa  dans  les 
payements  faits  en  monnaie  réelle,  l'emploi  d'un  40"  seu- 
lement en  monnaie  de  cuivre  ou  de  billon,  c.-à-d.  25  fr. 
sur  un  paiement  de  1000  fr.  Ce  40*,  qui  doublait  à  peu 
près  le  poids  de  la  somme  en  argent,  était  si  gênant, 
que  des  spéculateurs  imaginèrent  d'établir  à  Paris  et  à 
Rouen  deux  espèces  de  banques  dites  factoreries  des  soiu, 
qui,  pour  éviter  l'embarras  du  transport  de  cette  lourde 
monnaie,  émettaient  des  billets  au  porteur  payables  en 
ions,  lesquels  circulaient  comme  aujourd'hui  des  billets 
de  banque  :  cela  fut  imité  dans  d'autres  villes,  ce  qui  mul- 
tiplia, représentativement,  la  monnaie  de  cuivre  dans 
nne  proportion  énorme. 'En  1810,  l'abus  était  dans 
toute  son  extension  :  l'État  ne  trouvait  Jamais  à  écou- 
ler tous  les  sous  qu'il  recevait  :  sur  une  recette  de  850 
millions  de  fîrancs  environ,  11  y  avait  pour  40  millions  de 
nos!  La  régie  des  postes,  qui  ne  recevait  alors  qu'un 

rtn  plus  de  10  millions  de  francs,  versait  au  Trésor 
millions  de  sous!  Enfin  un  décret  du  13  août  1810  dé- 
clara que  la  monnaie  de  billon  ne  sendt  plus  reçue  dans 
les  payements  que  pour  appoint  au-dessous  de  5  fr.  ;  ce 
décret  est  encore  en  vigueur. 

En  1852,  le  gouvernement  s'occupa  de  remédier  radi- 
calement au  mal,  en  refondant  toute  la  monnaie  de  bil- 
km,  et  en  la  remplaçant  par  des  pièces  plus  légères,  bien 
frappées,  d'un  bronze  très-riche  en  cuivre,  mais  toi^ours 
d*ane  valeur  lég^e  bien  supérieure  à  la  valeur  intrin- 
sèque. On  en  frappa  pour  lasomme  totale  de  48,500,000  fr., 
ainsi  repr^ntée,  et  en  partant  du  dédme,  dont  le  poids 
fut  filé  à  10  grammes  : 

Pièce  de  10  centimes,  ou  décime.  25,065,830  fir.  70  c. 

-  5      —  —  20,702,005  15 

-  2      —  —  1,162,665  64 

-  i      —  —  668,589  M 

Total.      48,500,000  fr.  00  c. 

Cette  opération ,  la  plus  vaste  qu'on  ait  encore  faite 
en  ce  genre ,  s'accomplit  de  1852  à  1858 ,  et  les  fhûs 
de  fabrication  furent  de  7,762,  077  fr.  Toutes  les  pièces 
portèrent  l'effigie  de  Napoléon  m.  En  1860,  les  besoins 
du  commerce  exig!èrent  une  fabrication  supplémentaire 
de  10  millions,  ce  qui  a  porté  à  58,500,000  fr.  toute  la 
monnaie  de  billon  actuelle.  L'ancienne  a  été  démoné- 
tisée, et  a  produit  0,039,292  kilog.  pesant.       G.  D— y. 

voivNAiEs  (  Commission  des  ),  Commission  chargée  : 
1*  de  juger  le  titre  et  le  poids  des  espèces  fabriquées,  et 
de  surveiller,  dans  toute  l'étendue  de  la  France,  l'exécu- 
tion des  lois  monétaires  et  la  fabrication  des  monnaies  ; 
^  de  délivrer,  conformément  aux  lois,  aux  essayeurs  du 
commerce  et  aux  essayeurs  des  bureaux  de  garantie,  les 
certificats  de  capacité  dont  ils  doivent  être  pourvus  avant 
d*etttrer  en  fonction;  ^  de  statuer  sur  les  difficultés  re- 
latives au  titre  et  à  la  marque  des  lingots  et  ouvrages 
d'or  et  d'argent,  dans  toute  l'étendue  de  la  France.  Elle 
védige  les  tableaux  tervint  à  déterminer  le  titre  et  le 


V.  AuTOnOHES,  CONSULAïaSS, 

Famille,  OasmiONALES. 


poids  d*après  lesquels  les  espèces  et  matières  d*or  tl 
d'argent  sont  échangées  dans  les  hôtels  des  monnalea» 
Elle  fait  procéder,  toutes  les  fois  qu'elle  le  Juge  conve- 
nable, à  la  vérification  du  titre  oes  espèces  étrangères 
nouvellement  fabriquées.  Elle  fait  aussi  procéder,  lors- 
qu'elle en  est  requise  soit  par  les  tribunaux,  soit  par  les 
autorités  administratives,  à,  la  vérification  des  espèces 
monnayées,  légalement  fabriquées  ou  arguées  de  faux , 
sous  le  rapport  du  titre,  du  poids  et  des  empreintes;  a 
la  vérification  du  titre  des  lingots  du  commerce,  et  à  celle 
des  poinçons  de  l'État,  apposés  sur  les  ouvrages  d'or  et 
d'argent  Elle  surveille  les  opérations  de  tous  les  fonc- 
tionnaires des  ateliers  monétaires.  Elle  doit  également 
surveiller  la  fabrication  des  médailles  d'or,  d'argent  et 
de  bronze,  en  faire  constater  le  titre,  et  n'en  autoriser  la 
délivrance  ou  mise  en  vente  qu'après  avoir  observé  les 
mêmes  fonnalités  que  celles  prescrites  pour  le  Jugement 
des  espèces  monnayées.  Elle  est  chargée  enfin  de  con- 
trôler la  confection  des  planches  et  l'impression  des  tim- 
bres-poste, billets  de  banque,  etc. 
MONNAIES  (Cour  des).  )  V.  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
MONNAIES  (Hôtel  des).  )       graphie  et  d^ Histoire, 

MONNAIES  AUTONOMES. 

—  CONSULAIEES. 

—  DE  FAMILLE. 

—  OBSiniONALES.i 

MONOCHROME  (du  grec  monos,  seul,  et  khrôma,  cou- 
leur), qui  est  d'une  seule  couleur.  Le  camaïeu,  la  gri- 
saille, la  sépia,  sont  des  peintures  monochromes.  Ce 
genre  de  travail  a  été  connu  des  Anciens,  et  même  la 
peinture  n'eut  primitivement  qu'une  seule* couleur.  La 
plupart  des  vases  étrusques  étaient  monochromes.  On 
voit  au  musée  de  Naples  une  peinture  antique  en  cinabre 
rouge  de  l'Inde,  qui  représente  Thésée  tuant  le  Mino- 
taure. 

MONOCORDE  (du  grec  monos,  seul,  et  khordé,  corde), 
instrument  dont  les  Anciens  attribuaient  l'invention  à 
Pythagore,  et  qui  servait  à  déterminer  les  rapports  nu- 
mériques des  sons.  Cet  instrument,  qu'on  nommait  aussi 
canon  harmonique,  se  composait  d'une  règle,  divisée  en 
plusieurs  parties,  et  d'une  corde  de  boyau  ou  de  métal , 
tendue  sur  cette  règle  entre  deux  chevalets  fixes.  En  pro- 
menant sous  la  corde  un  chevalet  mobile  contre  les  difiîé- 
rents  degrés  marqués  sur  la  règle,  on  trouvait  les  rap- 
ports des  sons  avec  les  longueurs  des  cordes  qui  les 
pendaient.  Au  moyen  âge,  on  employa  le  monocorde  à 
renseignement  de  la  musique,  pour  faciliter  aux  com- 
mençants la  Justesse  des  intonations. 

MÔNOCULE,  se  disait  autrefois  du  collateur  qui  n'avait 
qu'un  seul  bénéfice  à  conférer,  et  de  ce  bénéfice  même. 

MONODIE  (du  grec  monos,  seul ,  et  ôdè,  chant),  nom 
que  les  Anciens  donnaient  au  chant  à  une  voix  seule. 

MONOGRAMME  (du  grec  monos.  seul,  et  gramma^ 
lettre),  caractère  d'écriture  compose  de  plusieurs  lettres 
réunies,  de  façon  que  le  même  Jambage  ou  la  même 
panse  serve  à  deux  ou  trois  lettres  différentes.  C'est  en 
cela  qu'il  se  distingue  du  chiffre,  formé  de  lettres  entre- 
lacées, mais  dont  on  peut  suivre  distinctement  toutes  les 
parties  :  cependant  on  appelle  monogramme  du  Christ  le 
chiffre  composé  de  lettres  grecques  par  lequel  on  désigne 
le  Christ  (mS).  Il  y  a  des  monogrammes  sur  un  grand 
nombre  de  monnaies  grecques  et  romaines  ;  mais  la  plu- 
part sont  indéchiflhibTes  pour  nous.  On  en  trouve  aussi 
dans  les  inscriptions  lapidaires,  où  l'on  avait  besoin  de 
ménager  l'espace.  Le  plus  ancien  monog^mme  qui  figure 
sur  un  acte  public  est  celui  de  Théodoric,  roi  des  Ostro- 
goths.  Eginhard  dit  que  Charlemagne  se  servait  d'un  mo- 
nogramme pour  signature  :  les  successeurs  de  ce  prince 
l'imitèrent  Jusqu'à  Philippe  le  Hardi ,  et  le  droit  de  si- 
gnature en  monogramme  fut  longtemps  considéré  comme 
un  privilège  des  souverains.  Les  papes  n'en  ont  guère 
usé  que  dans  le  ix«  siècle.  Les  monogrammes  ne  sont 
tombés  en  désuétude  en  Allemagne  (^u'au  milieu  du  xv«. 
—  On  a  appelé  Monogrammes  les  chiffres  ou  signes  dont 
les  artistes  ont  marqué  leurs  tableaux  ou  leurs  gi-avures. 
principalement  aux  xv"  et  xvi"  siècles;  il  en  est  resté 
beaucoup  d'inexpliqués.  V.  J.-F.  Christius,  Dictionnaire 
des  monogrammes,  traduit  en  français,  Paris,  1759, 
in-8«;  BruUiot,  Table  générale  des  monogrammes,  Mu- 
nich, 2«  édit.,  1834,  2  vol.  in-4».  ,  ,   B. 

MONOGRAMME ,  mot  par  lequel  les  Andens  désignaient 
un  dessin  au  simple  trait. 

MONOGRAPHIE  (du  grec  monos,  seul,  et  graphém, 
décrire),  écrit  qui  traite  spécialement  d'un  point  parti- 
culier de  la  science.  Le  mot,  usité  surtout  pour  les  des* 
criptions  des  genres  ou  des  espèces  dans  l'Histoire  nv 


MON 


1270 


MON 


tarelle,  s'applique  également  à  la  description  d*an  édifice 
MONOLITHE  (da  grec  monoi,  seul,  et  lithos,  pierre), 
eolonne,  stèle,  ou  tout  autre  ouvraga  exécuté  d*une  seule 
pierre.  Les  obélisques  égyptiens  sont  monolithes;  tel  est 
eiêlui  de  Louqsor,  qu'on  a  transporté  à  Paris,  et  celui 

Sie  Sixte-Quint  fit  ériger  à  Rome  sur  la  place  du  Vatican, 
érodote  parle  d*un  roc  placé  à  Sais  et  qui ,  creusé  inté- 
rieurement, ofihdt  une  chambre  de  18  coudées  de  long 
«ur  12  de  large  et  5  de  haut  (8",i0;  5-,40;  2",25).  Le 
Sphinx  (7.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
êi  d'Histoire)^  ainsi  que  le  zodiaque  de  Dendérah,  qui 
est  à  l'aris,  sont  des  monolithes.  Les  fÙts  de  colonnes  de 
marbre  ou  de  granit  des  monuments  romains  de  Tépoque 
impériale  étaient  souvent  monolithes  ;  la  Renaissance  en 
fit  de  môme  un  certain  nombre.  On  Toit  sur  la  principale 
place  d*Arles  un  monolithe  de  granit  découvert  en  1339, 
et  ^gé  seulement  pendant  le  règne  de  Charles  X;  il  a 
16  met.  26  c.  de  hauteur  sans  compter  le  piédestal,  haut 
de  4",51«.  La  colonne  d'Alexandre,  à  S*-Pétersbourg,  est 
le  plus  grand  monolithe  du  monde.  Au  nombre  des  mo- 
nolithes célèbres,  on  place  le  dôme  du  tombeau  de  Théo- 
doric  à  Ravenne,  et  les  deux  gnmdes  pierres  dont  Per- 
rault a  couvert  les  côtés  du  fronton  de  la  colonnade  du 
Louvre.  V,  Bloc 

MONOLOGUE  Tdu  grec  mono$,  seul,  et  logos^  dis- 
cours), scène  dans  laquelle  un  personnage,  resté  seul  sur 
le  théâtre,  s'entretient  avec  lui-même.  Dans  la  vie  réelle, 
n  est  très-rare  qu'un  homme  formule  ses  pensées  en  pa- 
roles, s'il  n'a  un  interlocuteur  :  U  faut  qu'il  soit  livré  à 
une  grande  préoccupation,  dominé  par  quelque  passion 
forte,  et  encore  ses  id逻  et  ses  sentiments  ne  s'échappe- 
ront qu'en  inteijections,  en  mots  isolés  et  sans  suite.  Le 
monologue  dramatique  est  donc  essentiellement  une  faute 
contre  la  vérité.  Cependant,  les  conditions  matérielles  des 
représentations  scéniques  l'ont  rendu  nécessaire  :  d'une 
pût,  le  spectateur  ne  peut  se  contenter  d'exclamations 
qui  n'auraient  pour  lui  aucun  sens,  et  veut  être  initié 
aux  plus  secrètes  pensées  des  personnages,  afin  de  con- 
naître les  causes  intimes  des  événements  qu'on  déroule 
devant  lui  ;  d'autre  part,  la  scène  ne  devant  Jamais  de- 
meurer vide,  il  faut  bien  admettre  conventionnellement 
qu'elle  est  de  temps  à  autre,  entre  les  entrées  et  les 
sorties  de  divers  personnages,  occupée  par  un  seul  ac- 
teur, lequel  ne  peut  rester  muet.  C'est  à  l'écrivain  drar- 
matique  de  donner  aux  monologues  le  plus  de  vraisem- 
blance possible;  il  ne  devra  ni  les  multiplier,  ni  en  trop 
prolonger  la  durée,  et  il  aura  soin  de  les  placer  dans  des 
•ituations  telles ,  que  le  personnage,  tiré  en  divers  sens 

Sar  des  sentiments  opposés,  ou  en  proie  à  la  violence 
'une  passion,  ait  une  sorte  de  prétexte  et  d'excuse  en 
Sarlant  seul  à  voix  haute.  Parmi  les  beaux  monolo^es 
e  notre  thé&tre  classique,  nous  citerons,  dans  le  Ctnna 
de  Corneille,  celui  d'Auguste  suspendu  entre  la  ven- 
^teance  et  la  clémence  ;  les  stances  du  Cid  et  celles  de 
Polyeucte  ;  le  monologue  de  Phèdre  dans  la  pièce  de  Ra- 
cine; celui  d'Harpagon  dans  V Avare  de  Molière,  quand 
on  lui  a  enlevé  sa  cassette;  celui  de  Y  Amphitryon  du 
même  auteur,  où  Sosie  s'exerce  devant  sa  lanterne  à 
l'entretien  qu'il  doit  avoir  avec  Alcmène.  Mentionnons 
encore  le  monologue  d*Hamlet  méditant  sur  le  suicide, 
celui  de  la  Jeanne  d'Arc  de  Schiller,  celui  de  VHemani 
de  V.  Hugo,  où  Charles-Quint,  élu  empereur,  interroge 
la  cendre  de  Charlemagne.  Le  mélodrame  moderne  a  fait 
du  monologue  un  abus  qui  n'a  pas  peu  contribué  à  le 
rendre  ridicule.  Dans  le  vaudeville  de  nos  Jours,  on 
trouve  souvent  des  monologues  qui  servent  d'exposition, 
et  dans  lesquels  un  acteur  raconte  tout  au  long  ses  aven- 
tures, entremêlées  même  de  communications  et  d'inter- 
rogations qui  prennent  la  forme  d'un  dialogue  avec  les 
spectateurs.  B. 

MONOMÈTRE  (du  grec  monos,  seul,  et  métron,  me- 
tore).  En  termes  de  Versification  grecque  et  latine,  ce 
mot  désigne  tantôt  un  vers  qui  n'a  qu'un  pied,  tantôt  un 
▼ers  qui  n'a  qu'une  dipodie.  Les  monomètres  dactvliques, 
crétiques,  péonlques,  ioniques  (majeurs  et  mineurs), 
chorlambiqnes,  antispastiques,  dochmiaques,  ont  un  pied  : 
les  monomètres  anapestic^ues,  trochalques,  lambiques,  en 
ont  deux.  On  ne  composait  pas  de  pièces  en  monomètres; 
mais  ces  petits  vers  s'entremêlaient  à  des  vers  plus 
grands,  et  leur  servaient  de  clausule.  P. 

MONOPÉDICULÉ ,  qualification  que  l'on  donne  aux 
cuves  baptismales  du  moyen  ftge  qui  ne  sont  soutenues 
que  par  un  seul  pédicule. 

MONOPOLE  (du  grec  monof,  seul,  et  pôlein,  vendre), 
fente  par  un  seul  de  marchandises  ou  de  denrées  dont 
(a  vente  devrait  on  pourrait  être  libre.  Il  y  a  deux  ca- 


tégories de  monopoles  légaux  :  ceux  qui  s'exploitait 
pour  le  compte  de  l'État,  et  ceux  établis  au  profit  d'in- 
dividus ou  de  classes  d'individus.  Parmi  les  mono- 
poles de  l'État,  il  en  est  qui  ne  sont  ou'une  forme  de 
perception  des  impôts,  tel  que  celui  de  la  fabrication  et 
de  la  vente  du  tabac  ;  d'autres  ont  le  double  but  de  pro- 
curer des  ressources  au  Trésor  et  la  sécurité  publique, 
tels  que  ceux  de  la  poste  aux  lettres,  de  la  fabrication  et 
de  la  vente  de  la  poudre  de  guerre,  et  de  la  fabrication 
des  monnaies  ;  d'autres  enfin,  nullement  fiscaux,  et  même 
quelquefois  onéreux  pour  l'État,  sont  motivés  sur  des 
considérations  d'intérêt  public,  tels  que  le  monopole  de 
l'enseignement  et  celui  des  travaux  publics.  I^s  mono- 
poles légaux  établis  au  profit  d'individus  ou  de  classes 
d'individus  consistent  soit  dans  la  concession,  sans  adju- 
dication, de  certaines  exploitations  dépendant  par  leur 
nature  du  domaine  national,  les  mines  par  exemple,  que 
l'on  peut  appeler  monopole  foncier;  soit  dans  l'inter- 
diction d'exercer  certaines  professions  sans  autorisadon 
pi^alable,  comme  les  offices  ministériels,  et  dans  la  limi- 
tation du  nombre  des  individus  appelés  à  les  exercer; 
soit  dans  la  prohibition  ou  la  restriction  de  la  concur- 
rence étrangère  sur  le  marché  du  pays  pour  certaines 
marchandises.  En  1539,  François  I",  ayant  besoin  d'ar- 
gent, déclara  par  un  édit  que  «  le  droit  de  travailler  était 
un  droit  royal  que  le  prince  pouvait  vendre  et  que  les 
si:Jets devaient  acheter.»  L'or^nisation  industrielle  deve- 
nant ainsi  une  propriété  taillable  et  corvéable  à  volonté, 
fit  naître  les  corporations,  qui  exploitaient  exclusivement 
une  industrie  grevée  de  charges.  Il  en  était  de  même  pour 
le  commerce  extérieur  :  la  Compagnie  des  Indes  avait 
chèrement  acheté  le  privilège  d'introduire  dans  le  royaume 
les  denrées  d'outre-mer,  et,  par  conséquent,  d'en  fixer 
arbitrairement  les  prix.  Louis  XVI,  en  1776,  et  une  loi 
du  17  mars  1791 ,  supprimèrent  successivement  toutes 
les  corporations,  offices  et  privilèges  industriels,  quelle 
que  fût  leur  dénomination,  «  afin,  disait  l'exposé  dee 
«  motifs,  que  les  pauvres  ne  fussent  plus  obligés  de  su- 
«  bir  la  loi  des  riches.  »  La  Déclarcttion  des  droits,  mise 
en  tête  de  la  Constitution  du  24  Juin  1793,  porta^  art  17  : 
«  Aucun  genre  de  travail ,  de  culture,  de  commerce,  ne 
«  peut  être  interdit  à  l'industrie  des  citoyens,  n  On  a  vu 
de  nos  Jours,  vers  1822,  Méhémet-Ali,  pacha  vice-roi 
d'Egypte,  et  son  fils  Ibrahim-Pacha,  possesseurs  effectifs 
de  toutes  les  terres,  les  faire  cultiver  pour  leur  compte, 
s'en  attribuer  exclusivement  tous  les  produits,  et  les 
vendre  à  leurs  sujets  au  prix  qu'ils  avaient  eux-mêmes 
fixé.  En  France,  où  les  mines  de  métaux  et  de  combus- 
tibles fossiles  ne  se  rencontrent  qu'en  petit  nombre  tout 
en  ayant  à  satisfaire  à  des  besoins  très-étendue,  les  con- 
cessions de  mines  abondantes  et  faciles  à  exploiter  re- 
présentent d'immenses  valeurs.  En  Angleterre,  l'ex- 
ploitation de  la  mine  est  attribuée  au  propriétaire  de  la 
surface  :  sur  tout  le  continent  européen,  la  propriété  des 
mines,  qui  est  considérée  comme  une  partie  du  domûne 
public,  ne  peut  devenir  propriété  particulière  qu'en  vertu 
d'une  concession  de  l'Etat*  Le  mode  le  plus  légitime 
d'appropriation  des  mines  paraît  consister  dans  des  con- 
cessions de  l'État,  au  moyen  d'adjudications  publiques, 
accessibles  à  tous.  —  Pour  ce  qui  concerne  les  monopoles 
légaux  résultant  des  restrictions  ^>portéea  à  la  concu> 
rence  étrangère,  F.  PaonramoN.  A.  L. 

MONOPTÈRE,  nom  donné  aux  temples  circulaires  de 
l'antiquité  qui  n'avaient  qu'un  seul  rang  de  colonnes 
supportant  une  coupole. 

MONORIME  (du  grec  monos^  seul,  et  de  rime),  se  dît 
d'un  poème  dont  tous  les  vers  finissent  par  la  même 
rime.  Les  Arabes  ont  les  premiers  composé  des  œuvres 
de  ce  genre.  Nos  anciens  romans  de  chevalerie  étaient 
écrits  en  stances  monorimes.  Les  Commandements  de 
Dieu  et  de  V Église  sont  monoiimes.  Une  suite  de  pareils 
vers  ne  peut  avoir  que  le  mérite  de  la  difficulté  vaincue; 
la  monotonie  qui  en  résulte  pour  l'oreille  les  a  fait  con» 
plétement  abandonner. 

MONOSYLLABE  (du  grec  monos,  seul),  mot  composé 
d'une  seule  syllabe,  quelquefois  d'une  seule  lettre  :  a,  â, 
y,  an,  jeu,  pour,  prends,  courts,  etc.  Asseï  rares  dans 
les  langues  européennes,  si  l'on  excepte  les  lan$;ues  ger- 
maniques, ils  abondent  dans  la  lansue  anglaise,  qui  n'a 
guère  de  polysyllabes  que  ceux  qui  lui  ont  été  fournis 
par  le  latin  et  le  français.  Dans  la  composition  des 
phrases,  le  grec,  le  latin,  le  français  et  les  autres  langues 
néo-latines  évitent  la  rencontre  trop  fréquente  des  mono- 
syllabes, qui  donnent  au  style  quelque  chose  de  sautil- 
lant. Quelquefois  cependant  une  phrase  composée  de 
monosyllabes  ne  laisse  pas  que  d'être  harmonieuse. 


MON 


1271 


MON 


comme  on  le  toH  par  ce  Yen  de  Racine  (Phàdr§,  IV,  2)  i 

Le  Jonr  ]i*est  pts  plot  pur  que  le  Tond  de  mon  coeur. 

n  n*en  est  pas  de  même  de  celai-ci  de  Corneille  (le  Cid, 
10,4): 

J*al  iUt  68  que  J*ai  dû,  Je  fais  ce  qae  Je  doit. 

Ud  Ters  girec  on  Isdn  composé  de  monosyllabes  serait 
intolérable;  il  est  déjà  très-dur  lorsque  plusieurs  s'y  ren- 
contrent de  suite,  à  moins  qu*un  ou  deux  ne  soient  en- 
clitiques, ou  qu'ils  ne  s'enchaînent  tellement  les  uns  aux 
antrespar  le  sens,  qu'ils  semblent  n'en  plus  former  qu'un 
seul.  Oo  évitait  également  de  finir  par  un  seul  mono- 
^llabe,  à  moins  qu'il  ne  fût  enclitique;  car  la  dernière 
nrllabe  d'un  vers  (nous  ne  considérons  ici  que  les  vers 
mctjrliques,  et  surtout  l'hexamètre)  ne  doit  pas  être  accen- 
tuée; on  ne  a'écartait  de  cette  r^le  que  s  il  résultait  de 
la  yiolation  même  un  effet  poétique.  La  césure  d'un  vers 
08  devait  pas  non  plus  porter  sur  un  monosyllabe  qui  ne 
s'appuyât  sur  le  mot  précédent  et  ne  fit  pour  ainu  dire 
corps  avec  lui  : 

Dnc  âge,  doc  ad  mot;  tu  lUi  limins  dlmm 
Tangere. 

ViBO.,  Gtorç.,  IV,  S68. 

VjmgiuL  mb  hoe  ego  mm  Gereri  gratinima  llgno. 

Or.,  MHam.,  YIII,  771. 

Ces  vers  ont  une  cadence  parfaite;  celui-d  d'Horace  {Art 
poé(.,  19)  est  d^ectueux  à  cet  égard  : 

fled  anno  t  non  erat  t  hie  loci»;  I  et  fortaaee  eapTesemn... 

P. 

MONOSYLLABIQUES  (Langues),  langues  dont  tous  les 
mots  se  composent  exclusivement  d'une  seule  syllabe 
et  sont  restés  à  l'état  de  racvM,  Cette  syllabe  est  im- 
moable,  et  n'exprime  que  l'idée  absolue  et  abstraite, 
comme  ferait  ao  ou  form  en  latin  et  en  français;  aussi 
KTt-elle  à  la  fois  comme  nom  et  comme  verbe.  La  sens 
relatif  et  concret  ne  peut  être  indiqué  dans  ces  langues 
que  par  la  manière  dent  le  monosyllabe  est  mis  en  rap- 
port avec  d'autres  mots,  et  par  certaines  intonations  qui 
MQt  plus  ou  moins  variées,  plus  ou  moins  nombreuses 
dans  les  différents  dialectes.  La  langue  monosyllabique 
par  excellence  est  l'ancien  chinois  :  donnent  ensuite  les 
dialectes  nombreux  qui  s'y  rattachent,  le  chinois  mo- 
derne, l'annamite,  le  cambodgien,  le  siamois,  le  barman, 
le  thibétain,  etc.  Le  domaine  des  idiomes  monosyllabiques 
comprend  donc  les  pays  situés  au  N.  du  Gange,  et  au  delà 
deI*Himalaya,  la  Chine  proprement  dite  et  la  presqu'île 
S.-B.  de  l'Asie.  P. 

MONOTHÉISUE  (du  grec  monos,  seul,  et  thèos,  dieu), 
doctrine  qui  n'admet  qu'un  seul  Dieu.  L'opposé  du  mono- 
thétame  est  le  Polythéisme  (V.  ce  moQ.  Dans  l'antiquité, 
les  Hébreux  connurent  et  conservèrent  toujours  le  dogme 
de  ruDîté  de  Dieu.  Même  parmi  les  nations  polythéistes, 
il  ae  rencontra  des  sages  dont  la  doctrine  fut  monothéiste, 
par  eicemple  Socrate  et  Platon  chez  les  Grecs. 

MONOTRIGLYPHE,  entre-colonnement  dont  lalaroeur 
ne  permet  l'emploi  que  d'un  seul  triglyphe  entre  deux 
colonnes  doriques,  comme  l'a  pratiqué  Mansard  au  por- 
tail de  l'église  des  Invalides,  à  Paris.  Le  triglyphe  porte 
tour  à  tour  sur  le  plein  d'une  colonne  et  sur  le  vide  de 
l'entre-colonnennent. 

MONREALE  (Église  et  couvent  de),  en  Sicile.  L'église, 
fondée  en  1174  par  le  roi  Guillaume  II  le  Bon,  et  dédiée 
à  la  S**  Vierge,  est  le  chef-d'œuvre  de  l'architecture  sar- 
rasine- normande.  Extérieurement  elle  est  peu  impo- 
sante :  le  portail,  orné  d'arabesques  et  de  mosaïques,  a 
des  portes  en  bronze,  dont  les  bas-reliefs  sont  attribués 
à  Bonanno  de  Pise  (1186).  L'édifice  a  la  forme  d'une 
croix  grecque.  A  l'intérieiu*,  les  murailles  sont  couvertes 
d'or  et  de  mosaïques,  dont  les  personnages  ont  presque 

rtoot  le  costume  grec.  La  grande  nef  est  ornée  de 
colonnes  de  sranit  oriental,  qui  s'appuient  sur  une 
base  en  marbre  blanc  et  sur  un  socle  carré  en  marbre 
iKrir;  les  chapiteaux  sont  en  marbre  blanc,  et  quelques- 
ans  de  s^le  antique.  Sur  le  fronton  de  l'arc  qui  sépare  la 
Def  du  chœur,  on  remargue  la  Sagesse  de  Dieu,  adorée 
par  les  archanges  Michel  et  Gabriel.  Au  fond,  dans  la 
demi-coupole  qui  termine  la  grande  nef,  est  une  figure 
colossale  du  Qurist.  Les  plafonds  en  bois  sculpté,  oui 
étaient  d'une  grande  magnificence,  furent  on  partie  aé- 
truits  en  1811  par  un  incendie  i  on  en  a  placé  de  nou- 
▼eiox.  Les  tombeaux  de  Guillaume  le  Bon  et  de  Guil- 
Innie  le  Haunds,  dans  le  transept  de  droite*  ne  sont 


plus  qne  des  mines.  Le  maitre-antel,  en  argent  doré,  % 
été  élevé  au  siècle  dernier.  L'église  de  Monreale  renferme 
une  partie  des  restes  de  Louis  IX,  roi  de  France.  —  La 
couvent,  occupé  par  des  Bénédictins,  a  été,  à  cause  de  sa 
magnificence  et  du  goût  de  ses  ornements,  quelquefoto 
appelé  VAlhan^a  d$  la  Sicile.  Pour  promenade,  les 
moines  ont  un  cloître  dont  le  milieu  est  un  Jardin 
rempli  de  fleurs  et  arrosé  par  des  Jets  d'eau,  et  dont  la 
colonnade  est  d'un  fini  et  d'une  élégance  incomparables  : 
les  216  colonnes  de  marbre  blanc  qui  la  composent  sont 
à  torsades  ou  couvertes  de  mosaïques,  Jumellées  pour  la 
plupart,  avec  des  chapiteaux  richement  décorés  de  feuil- 
lages ou  d'animaux  bizarres.  Dans  un  escalier  grandiose  dv 
couvent,  on  admire  deux  tableaux  de  Velasquez  et  de 
Pietro  Novelli.  V.  dom  Michèle  del  Giudice,  Deecrizione 
dei  real  tempio  e  monasterio  di  Santa-Maria^Nuova  dK 
Monreale,  Païenne,  1762;  Hittorf  et  Z&nih^  Architecturw 
moderne  de  la  Sicile,  Paris,  1835;  Serra  di  Falco,  M 
dttomo  di  Monreale,  Palerme,  1838,  in-fol.  B. 

MONS  (Église  de  S**-Waodrd,  à),  un  des  plus  beaux 
édifices  de  style  ogival  aue  possède  la  Belgique.  Goo? 
struite  à  l'emplacement  d  une  autre  église,  que  des  ior 
cendies  dévoieront  en  1603,  en  1113  et  en  1169,  elle  fol 
commencée  en  1449,  sous  la  direction  d'un  architecte 
inconnu,  bientôt  remplacé  par  Jean  de  Thuin.  Plus  d'u9 
siècle  s'écoula  avant  1  achèvement  des  travaux  :  elle  fut 
consacrée  en  1582,  et  finie  seulement  en  1589.  L'élévatioa 
de  l'édifice,  sous  clef,  est  de  24",56;  la  longueur  dm 
vaisseau  de  108",66,  et  sa  largeur  de  35",75,  Le  chœur, 
qui  est  la  partie  la  plus  ancienne,  et  dont  les  fenêtres 
resplendissent  de  vitraux  magnifiques,  a  32",71  de  Ion* 
gueur  sur  16",66  de  largeur.  Tout  le  vaisseau  est  un 
chef-d'œuvre  de  hardiesse,  d'élégance  et  de  légèreté  < 
des  faisceaux  de  nervures,  partant  du  sol,  s'élancent 
Jusqu'à  la  voûte  sans  interruption,  et  vont  y  former  des 
ogives  multipliées,  ou  se  perdre  dans  des  culs-de-lampe 
et  dans  la  galerie  qui  règne  autour  de  la  nef  et  du  chœur. 
La  couleur  foncée  que  le  temps  a  donnée  à  la  pierre  da 
calcaire  bleu  qui  revêt  l'intérieur,  communique  à  l'église 
un  aspect  somnre  et  mystérieux.  On  remarque  un  autel 
gothique  en  pierre,  sculpté  à  iour  comme  de  la  dentelle, 
plusieurs  bons  tableaux,  et  divers  bas-reliefs.  Il  y  avait 
autrefois  un  beau  Jubé  en  marbre  noir  et  blanc,  orné  da 
statues;  il  a  été  détruit,  mais  les  statues  ont  été  conser- 
vées. Une  tour  de  166  met.  d'élévation,  dont  on  posséda 
le  plan,  devait  surmonter  l'église  de  S**-Waudru  :  maie 
le  projet  fut  abandonné  faute  d'argent  en  1636,  et  la  tour 
n'attemt  que  la  hauteur  des  nefo.  Le  portail  est  aussi 
resté  inachevé  :  le  perron  en  pierres  bleues  qu'on  y  re* 
marque  a  été  construit  en  1839.  B. 

MONs  (Hôtel  de  Ville  de),  monument  de  style  ogival« 
mais  un  peu  lourd,  construit  de  1446  à  1458.  Sa  faiçade» 
percée  d'un  double  rang  de  fenêtres  en  accolade,  n» 
manque  pas  d'élégance.  Les  niches  existant  entre  les  fe- 
nêtres ont  été  dépouillées  de  leurs  statues  à  la  fin  du 
xvui*  siècle,  et  les  dais  qui  les  surmontaient  ont  été  snp- 

E  rimes  lors  de  la  restauration  de  l'édifice  en  1823.  L» 
alcon  placé  au-dessus  de  la  porte  a  remplacé,  en  1777, 
une  ancienne  tribune  ogivale.  La  toiture  est  surmonté* 
d'un  campanile  dont  l'exécution  date  de  1718.         B. 

MONSEIGNEUR,  è  V,  ces  mots  dans  notre  Dict' 

MONSIEUR.         j      naire  de  Biog.  ei  d'Histoire. 

MONSTRANCE.  V.  Ostensois. 

MONTAGNES,  nom  que  donnent  les  Géographes 
élévations  de  terrain  considérables,  plus  importantes  qne 
les  collines  et  les  émmences.  Leurs  sommets  ont  reçu, 
d'après  leur  configuration,  les  noms  de  plateaux^  anguilles, 
pics  ou  puys,  cornes,  dents,  dames,  ou  bcUlons,  Une  soîtA 
de  montagnes  forme  une  chaine  ;  plusieurs  chaînes  réunieai 
un  groupe;  plusieurs  groupes,  un  système.  Les  pentas 
d'une  montagne  s'appellent  flancs:  celles  d'une  chaîne, 
versants.  Les  chaînes  secondaires  aul  se  détachent  d'une 
chaîne  principale  en  sont  les  ramifications  ou  les  contre^ 
forts.  On  traverse  les  chaînes  de  montagnes  par  des  pas- 
sages que  leurs  formes  et  leurs  aspects  variaJiles  ont  ûdt 
appeler  cols,  défUés,  gorges,  etc.  En  ce  qui  concerne  U 
formation  des  montaj^es,  les  géologues  sont  partagés  : 
les  uns,  dits  Vulcaniens,  pensent  Qu'elles  ont  été  son» 
levées  par  les  feux  souterrains,  par  les  forces  qui  ébran« 
lent  l'intérieur  de  la  terre;  les  antres,  dits  Neptunie^t 
les  expliquent  pas  l'afiaisBement  des  eaux  terrestres. 

MONTAGNES  KDSSBS,  plsus  Inclinés  OU  bols  d'où  on  laa* 
çait  des  chars  à  roulettes,  retenus  par  des  rainures;  ce» 
chars,  où  deux  personnes  se  plaçaient  assises,  arrivés  aa 
bas  de  la  rampe,  étaient  remontés  au  moyen  d'une  chaîne 
mue  par  un  manège.  Ce  Jeu  amusant,  mais  dangeiea^ 


MON 


127i 


MON 


Alt  empniDtd  par  les  Parisiens  aux  Rosses,  qui  se  lais- 
sent glisser  en  hiver  sur  des  traîneaux  du  haut  de  yéri- 
tables  collines;  on  le  yit,  dès  1816,  dans  un  jardin  pu- 
blic des  Ternes  :  plus  tard ,  on  Pinstalla  aux  Champs- 
Elysées,  à  la  Folie-Bea^Jon.  Depuis  longtemps  ces  mon- 
tagnes ont  disparu.  B; 
MONTANSIER  (Thé&tre  de  la).  V.  Palais-Rotau 
MONT-GASSIN  (Monastère  du).  F.  Cassin. 
MONT-DE-PIÉTÉ,  nom  donné  à  des  établissements 
Drivilégiés  de  prâts  sur  gages,  institués  dans  un  but  phi- 
lanthropique, et  que  Fadministration  firançaise  nuage  au- 
jourd'hui a  tort  au  nombre  des  établissements  de  bien- 
faisance. L'Église  ayant  pendant  longtemps  condamné  le 
I»^  à  intérêt,  Tusure  oes  Juifs  et  des  Lombards  avait 

Sroduit  de  grands  maux  en  Europe.  Le  premier  mont- 
e-piété date  du  xii*  siècle,  et  fut  établi  à  Freisingen  en 
BaWère,  sons  la  direction  d*une  association  charitable 
approuvée  par  le  pape  Innocent  III.  Le  mont-de-piété 
de  Pérouse,  inauguré  en  1450,  fut  créé  à  Taide  du  produit 
d'ane  quête  due  à  Tinitiative  du  P.  Barnabe  de  Terni ,  et 
aous  la  dénomination  de  Monte  di  Pieta  ou  Banque  de 
Charité f  francisée  plutôt  que  traduite  par  MonP-dthpiété. 
Des  établissements  du  môme  genre  s'ouvrirent  à  Viterbe 
en  1471,  Bologne  en  1473,  Savone  en  1479,  Mantoueet 
Parme  en  1488,  Gésène  en  1489,  MiUn  en  1490.  Ces  ban- 
ques de  prêt  n'exigeaient  des  emprunteurs  que  le  rem- 
boursement de  leurs  frais  de  service.  Bientôt,  le  pai)e 
Léon  X  ayant,  sur  Tavis  du  concile  de  Latran,  permis 
aux  prêteurs,  par  une  bulle  de  1515,  de  retirer  un  inté- 
rêt de  leur  argent,  Turin  en  1519,  Rome  en  1539,  Vicence 
en  1534,  Naples  vers  la  môme  époque,  organisèrent  de 
sen^lables  institutions,  qui  prêtaient  à  5  p.  100  ;  aujour- 
d'hui il  en  existe  55  en  Italie.  Le  Piémont  possède  môme 
des  espèces  de  monts-de-piété  agricoles  {Monts  gruna^ 
Himee)^  tels  que  ceux  de  Zôme  et  d'Ottabiano,  qui  prêtent 
diaque  année,  au  mois  de  mars,  des  grains  pour  semences, 
et  on  les  leur  rend  en  septembre  suivant.  ARome,  le  mont- 
de-piété  a  un  capital  de  230,000  écus  romains  ;  il  prête 
gratuitement  sur  les  nantissements  d'une  valeur  infé- 
rieure à  un  écu ,  et  perçoit  5  p.  100  sur  les  prêts  supé- 
rieurs à  cette  somme.  —  L'introducteur  des  monts-de- 
piété  en  Hollande  fut  Wenceslas  Cœberger,  peintre, 
architecte  et  économiste,  au  temps  de  l'archiduc  Albert 
et  d'Isabelle.  Il  y  en  a  74  affermés  à  des  entrepreneurs, 
et  34  dirigés  par  l'État,  les  communes  ou  les  établisse- 
ments de  bienfaisance;  mais  la  plupart  ne  sont  que  des 
buiques  de  produit  au  profit  des  villes.  La  plus  considé- 
rable est  celle  d'Amsterdam,  fondée  en  1578  sous  le  nom 
de  lombard  par  un  particulier  qui  abusa  de  son  privi- 
1^,  au  point  que  le  gouvernement  la  prit  pour  son 
compte  en  1614.  Elle  possède  le  droit  exclusif  de  prêter 
sur  sages;  mais  elle  n'use  pas  ellop-même  de  ce  droit; 
elle  le  délègue  à  des  banques  de  petits  prêts,  au  nombre 
de  60  à  Amsterdam.  Les  établissements  de  Hollande  sont 
surtout  remarquables  par  la  modicité  des  finis  d'adminis- 
tration, qui  ne  dépassent  pas  3  p.  100  des  sommes  prê- 
tées. L'intérêt  est  exorbitant,  de  50  à  60  p.  100.  Une  loi 
de  1840  a  fixé  le  minimum  du  prêt  à  30  centimes,  et 
le  maximum  à  1  florin  40  cents,  et  toujours  par  progres- 
sion de  10  cents.  —  La  Belglaue  possède  22  mont»-de- 
piété,  qui  prêtent  aux  taux  de  6  à  24  p.  100.  Le  plus 
important  est  celui  de  Bruxelles,  fonde  en  1618.  Une 
loi  du  30  avril  1848  a  supprimé  les  commissionnaires  au- 
près de  ces  établissements,  mais  les  résultats  de  cette 
mppression  restent  encore  ignorés.  —  On  cite  en  Alle- 
magne les  monts-de-piété  de  Nuremberg  (1498),  d'Ulm, 
d'Augsbourg,  de  Hambourg,  de  Weimar,  de  Dresde,  de 
Berlin,  de  Gotha,  de  Baireuth,  deCoIogne,  d'Elberfeld,  etc., 

2 ai  prennent  de  8  à  12  p.  100  d'intérêt.  —  Deux  monts- 
e-piété  ont  été  fondés  en  1791  à  S^-Pétersbourg  et  à 
Moscou ,  qui  prêtent  à  5  p.  100.  A  S^Pétersbourg  le 
nombre  annuel  des  prêts  est  de  70,000  environ,  repré- 
•entant  une  valeur  de  10  millions  de  fr.;  à  Moscou,  il 
n'est  que  de  3,000,  équivalant  à  plus  de  3  millions  de  fr. 
—  Les  deux  principaux  monts-de-piété  de  l'Espagne  sont 
eeux  de  Madnd  et  de  Barcelone. — L  Irlande  possède  depuis 
pen  de  temps  des  monts-de-piété. — L'Angleterre  seule  n'a 
point  d'étaolissements  publies  de  prêts  sur  nantissement; 
M  prêt  sur  gages  y  est  autorisé.  Une  loi  du  28  Juillet  1800 

ÎPaw-broker's  act)  fixe  le  tarif  de  l'intérêt  à  1  denier  ster- 
ing  pour  b  schellings,  et  proportionnellement  Jusqu'à 
4  deniers  pour  une  livre,  soit  20  p.  100  par  an.  Au-dessus 
de  10  livres,  on  ajoute  3  deniers  par  mois  pour  chaque 
livre  en  sus.  —  A  New-York,  le  mont-de-piété  prête  à  7  p. 
100  sur  les  sommes  inférieures  à  25  dollars  (133  fr.),  et 
à  85  p.  100  sur  les  sommes  qui  dépassent  cette  limite. 


Le  premier  mont-de-piété  en  France  fût  fondé  à  Avi- 
gnon en  1577  ;  on  en  établit  d'autres  à  Beaacaire  en  1583, 
à  Carpentras  en  1612.  Ceux  qui  s'ouvrirent  à  Nancy,  à 
Sedan  et  à  Arras,  en  1615,  furent  confirmés  par  Louis  XÉL 
Vinrent  ensuite  les  montSKie-piété  d'Apten  1674,  de  l'Isle 
(Vauduse)  en  1675,  de  Tarascon  en  1676,  de  Brignoles 
en  1677,  d'Aneers  et  de  Montpellier  en  1684,  de  Marseille 
en  1606.  Celui  de  Paris  fut  fondé  par  lettres  patentes  du 
0  décembre  1777,  et  ouvert  le  l*'  Janvier  1778,  avec  l'au- 
torisation, en  date  du  7  août  de  la  même  année  et  du 
25  mars  1779,  d'emprunter  sur  l'hypothèque  des  droite 
et  revenus  de  l'hôpital  général.  Le  taux  du  prêt  fut  fixe 
à  10  p.  100  par  an.  Renversé  par  la  Révolution  en  1792, 
il  fut  réorganisé  iNir  un  décret  du  16  Juillet  1804,  suivi 
d'un  règlement  du  27  Juillet  1805.  Cest  à  partir  de  la 
même  époque  que  furent  institués  ou  réorganisés  les 
monts-de-piété  de  Bordeaux  (1806),  Marseille  (1807), 
Nantes  et  MeU  (1813),  Toulon  (1821),  Dijon  et  Reims 
(1822),  Besançon  et  Boulogne-sur-Mer  (1823),  Brest  et 
Strasboure  (1826),  Nîmes  (1828),  Calais  et  S*-GermaiD- 
en-Laye  (1822),  SM}uentin  (1833),  Lunéville  et  Le  Havre 
(1835),  Lvon  (1836),  Limoges  et  Arles  (1841),  Arras  et  Ver- 
sailles (1845).  La  réorganisation  du  mont-de-piété  de 
Paris  eut  lieu  sur  l'ancien  pied,  qui  admettait  des  action- 
naires commanditaires;  une  ordonnance  du  12  Janrier 
1831  remplaça  les  actionnaires  par  un  Conseil  d'adminis- 
tration présidé  par  le  préfet  de  la  Seine,  et  soumit  la 
comptabilité  du  mont-de-piété  à  la  Cour  des  comptes.  Il 
est  régi  pour  le  compte  des  hospices  de  Paris.  Des  prêts 
faits  comme  placement,  et  pris  au  cours  de  l'intérêt  da 
Jour  contre  un  simple  mandat  remboursable  à  échéance 
fixe;  le  profit  sur  les  ventes  (f objets  engagés,  dont  il  va 
être  parlé  plus  bas,  composent  son  capital  roulant  II  a 
constamment  en  magasin  pour  12  à  13  millions  d'effets, 
représentés  par  600  à  650,000  objets.  Le  prêt  s'y  fait  sur 
l'engagement  d'effets  mobiliers  estimés  par  des  commis- 
saires-priseurs  attachés  à  Tinstitution,  et  dont  le  droit  de 
prisée  est  fixé  à  1/2  p.  100.  Une  reconnaissance  de  Tobjct 
mis  en  gage  est  délivrée  à  l'emprunteur;  elle  est  faite  nu 
porteur.  La  durée  du  prêt  est  d'un  an  ;  mais  l'empruu- 
teur  peut  s'acquitter  auparavant  par  des  remboursements 
successifs,  dont  le  moindre  peut  être  d'un  franc  ;  s'il  ne 
renouvelle  pas  son  engagement,  le  nantissement  est  vendu 
dans  le  13*  mois.  Le  6ont ,  c-à-d.  l'excédant  du  produit 
de  la  vente  sur  ce  qui  est  dû  au  mont-de-piété  en  capital, 
intérêts  et  frais,  reste  pendant  trois  ans  à  la  disposition 
de  l'emprunteur  ;  passé  ce  délai ,  la  propriété  en  est  pres- 
crite au  profit  des  hospices,  qui  bénéficient  de  cette 
manière  de  75  à  80,000  fr.  environ  par  an.  Les  déposants 
vendent  souvent  leurs  reconnaissances,  pour  se  procurer 
nne  partie  de  la  plus-value  constatée  par  leurs  titres:  la 
loi  du  24  juin  1851  a  eu  pour  but  de  prévenir  ces  ventes, 
en  autorisant  les  déposants  à  requérir,  après  un  délai  de 
trois  mois,  la  vente  de  leur  nantissement.  Le  prétest 
des  4/5  de  la  valeur  aur  la  vidsselle  et  les  bijoux  d'or  et 
d'argent,  et  des  2/3  pour  les  autres  effets.  Tous  les  six 
mois,  les  droits  et  autres  frais,  calculés  par  quinzaine, 
sont  réglés  par  l'administration.  Le  taux  do  l'intérêt  est 
de  3/4  p.  100  par  mois  ou  0  p.  100  par  an,  dont  uoe 
partie  représente  l'intérêt  des  avances,  et  le  reste  est 
applicable  aux  frais  d'administration.  Une  ordonnance 
ministérielle  du  25  fév.  1854  a  fixé  à  4 1/2  p.  100  le  taux 
des  emprunts  du  montHio-piété,  avec  faculté  d'élever  ce 
taux  à  5  p.  100,  si  la  réserve  déposée  au  Trésor  venait  à 
descendre  au-dessous  de  1,200,000  fr.  Il  existe  à  Paris 
deux  bureaux  auxiliaires,  et  21  commissionnaires  près  les 
monts-de-piété  ;  ces  derniers  prélèvent  annuellement 
500,000  fr.  environ  sur  les  emprunteurs.  Leurs  droits 
sont  complexes  :  2  p.  100  de  la  somme  prêtée;  2  p.  100 

riur  le  renouvellement  ;  1  p.  100  pour  les  dégagements; 
p.  100  des  bonis.  Les  commissionnaires  sont  nommés 
par  l'administration  sur  la  présentation  de  leurs  cédants  : 
opérant  à  leurs  risques  et  périls,  ils  reçoivent  les  çsges, 
en  donnent  un  récépissé  provisoire,  font  une  appréciation 
qui  n'est  pas  obligatoire  pour  l'administration,  et  se  met- 
tent en  avance  de  leurs  propres  deniers.  Ik  sont  tenns 
de  porter,  le  Jour  môme,  les  gages  au  mont-de-piété,  où 
l'engagement  définitif  a  Heu.  —  Le  nombre  des  monts- 
de-piété  en  France  est  de  44;  mais  le  prêt  sur  gages 
interlope  supplée  à  l'absence  ou  à  l'insuiBsance  de  ces  éta* 
blissements.  Celui  de  Paris  fait  à  lui  seul  plus  d'opéra- 
tions que  tous  les  autres  ensemble.  Après  lui  viennent 
ceux  de  Lille,  de  Marseille,  de  Lyon.  Ils  peuvent  disposeï 
d'un  fonds  de  roulement  de  35,103,648  fr.,  ainsi  composé: 
fonds  appartenant  aux  monts-de-piété,  2,859,135  fr*i 
aux  hospices,  4,460,615  fr.;  emprunta  à  des  particulier, 


MON 


1273 


MOR 


11,641,350  fr.;  cautionnement  des  coioimisslonnaires, 
4,1^,554  fr.;  fonds  pupillaires,  &onw  non  réclamés, 
1,075,987 flr.  Quatre  mont»-d&-piété  prêtent  gratuitement; 
U  capitalisent  lenrs  bénéfices  pour  augmenter  leurs 
foDds  de  roulement  ou  leur  dotation;  13  versent  leurs 
bénéfices  dans  les  caisses  des  hospices  ou  des  bureaux  de 
bienfaisance;  3  les  partagent  avec  les  administrations 
cfaaritabk».  SI  les  monts-de-piété  qui  prêtent  sans  intérêt 
font  moins  d'affaires  que  les  autres ,  cela  tient  à  ce 
qu'ils  accordent  moins  de  facilités  que  les  autres  aux 
empranteurs.  A  Grenoble ,  à  Toulouse,  à  Montpellier,  et 
à  Angers  ,  le  prêt  est  gratuit;  à  Avignon  et  à  Brignoles, 
le  taux  est  de  4  pour  iOO  ;  à  Toulon,  de  7  pour  100  ;  à  Bor- 
deaux et  à  Paris,  de  0  pour  100;  k  Besançon,  Boulogne, 
Brest,  Cambrai,  Douai,  etc.,  de  12  pour  100.  La  moitié  des 
pressent  de  1  à  5  fr.;  plus  des  deux  tiers  n'atteignent 
ras  10  fr.  Il  y  a  eu  à  Paris  un  prêt  de  200,000  fr.  en 
1813,  et  un  de  00,000  fr.  postérieurement.  La  moyenne 
générale  des  prêts  est  de  16  Ar.  80  c.  Dans  les  villes  de 
fabrique  et  de  passage,  la  durée  des  prêts  est  très- 
coorte;  dans  celles  ou  Ton  prête  gratuitement  ou  à  un 
taux  faible,  la  durée  est  très-longue.  L'immense  majorité 
des  engagements  servent  à  soulager  des  misères  ou  des 
gÊnes  réelles.  Les  monts-do-piété  sont  placés  sous  l'auto- 
rité du  ministre  de  l'Intérieur  et  des  préfets,  et  admini- 
strés par  des  commissions  gratuites  de  5  à  8  membres, 
pris  généralement  parmi  les  membres  des  commissions 
administratives  des  hospices^  et  auxquels  sont  adjoints 
on  ou  deux  conseillers  municipaux  ou  un  notable  com- 
sierçaot. 

K.  Gerretti,  Histoire  des  Monts-de-Piéti,  Padoue,  1752  ; 
Helln,  VonMàratUms  sur  les  Monts-de-Piété ,  Paris, 
an  m;  Â.  Beugnot^  Des  banques  publiques  de  prêt  sur 
Toges,  et  de  leurs  inconvénients^  Paris,  1829  ;  Amould, 
Àvaidages  et  inconvénients  dés  banques  de  prêt  connues 
sous  le  nom  de  Monts-de-Piété,  Namur,  1831  ;  Ballîn, 
EssM  historique  sur  les  Monls-de-Piété ,  Rouen ,  1843  ; 
A.deWatteville,  Rapport  surVadminislration  des  Monts- 
d»-Piété^  1850  ;  Decker,  Études  historiques  sur  les  Monts- 
de-Piété  en  Belgique,  Bruxelles,  1844;'Blaize ,  Des  Monts- 
dê-Piété  et  des  banques  de  prêts  sur  gage,  en  France  et 
ianslesdivers  Etats  de  l'Europe,  4856,2vol.in-8».  A.  L. 

UONTIER ,  MONSTIER  ou  MOUTIER ,  vieux  mot  qui 
iSgniflait  monastère.  On  donnait  quelquefois  ce  nom  par- 
ticulièrement à  la  cellule  du  moine,  et,  surtout  en  A11&- 
oagne,  aux  églises  desservies  par  des  moines. 

MO^n^OIE.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

MONTPELLIER  (Aqueduc  de),  aqueduc  en  pierres  de 
taille,  qui  amène  à  Montpellier  les  eaux  des  villages  de 
S*  Clément  et  de  Boulidou.  Sa  longueur  est  de  1 3,904  met., 
dont  4,252  met.  hors  du  sol  ;  sur  une  longueur  de  850  met., 
dq>uis  le  réservoir  dit  des  Arcades  jusqu'à  la  place  du 
njrm^  il  est  supporté  par  53  arcades  de  8  met  d'ou- 
TVtore,  surmontées  de  183  arcades  plus  petites.  La  con- 
atraction  de  cet  aaueduc  fut  commencée,  à  la  fin  du 
r^e  de  Louis  XIV,  par  l'ingénieur  Pitot.  Les  eaux  ar- 
rirent  à  la  place  du  Peyrou,  où  l'architecte  Donat  a  élevé 
on  cb&teau  d'eau  :  c'est  une  rotonde  hexagonale,  dont 
chaque  face  est  ouverte  en  arcades  ;  l'intérieur,  rond  et 
TOûté  en  coupole,  renferme  un  bassin,  d'où  l'eau  coule 
o  nappe  et  tombe  en  cascades  sur  des  rochers  oui  la 
TBnent  dans  un  bassin  extérieur.  B. 

MONTRE,  ce  que  les  marchands  exposent  au-devant  ou 
doriëre  les  vitres  de  leurs  boutiques  ou  marins,  pour 
bire  connaître  aux  passants  les  objets  qu'ils  vendent. 
Dana  les  grandes  villes,  les  montres  sont  une  curiosité 
<IQi  mérite  l'attention.  Celles  des  marchands  de  nouveau- 
tés exigent  beaucoup  d'expérience  et  de  goût,  et  c'est  à 
Psris  qu'elles  sont  surtout  remarquables. 

voimiE,  ancien  mot  du  langage  militaire,  signifiant 
noue.  Il  se  disait  aussi  de  la  paye. 

■oiTBB,  nom  qu'on  donna  d'abord  au  cadran  d'une 
borioge,  puis  à  une  petite  horloge  de  poche.  On  croit  que 
les  premières  montres  furent  faites  k  Nuremberg,  vers 
Tas  1500,  par  Pierre  Hcle,  et  on  les  appela,  à  cause  de 
leor  forme,  oeufs  de  Nuremberg,  De  bonne  heure  on  en 
E^brimia  de  très-petites  :  au  temps  de  François  P',  Mir- 
nédoe  fit,  dit-on,  des  montres  ayant  la  grosseur  d'une 
tmaode;  il  excellait  à  en  faire  en  forme  de  croix.  En  1542, 
une  montre  à  sonnerie,  contenue  dans  une  bague,  fut 
offerte  au  duc  dUrbin.  A  l'époque  de  Charles  IX,  la  boite 
était  souvent  en  cristal  de  roche  :  la  collection  du  prince 
Soltykoff,  à  Paris,  contenait  deux  montres  en  forme  de 
t^^,  l'une  de  l'horloger  Cl.  Jolly,  l'autre  de  RugendL 
Moger  d*Aach.  La  prmcesse  Anne  de  Danemark,  qui 


épousa  Jacques  I"',  portait  une  bague  ornée  d'une  montra 
en  guise  de  pierre  ;  un  marteau  indiquait  les  heures  en 
frappant  de  petits  coups  sur  le  doigt.  On  fit  pour  Louis  XIV 
une  montre  qui  Jouât  à  chaque  heure  un  air  d'opéra* 
Les  Anglais  Barlow,  Tompion,  et  Quare  furent,  en  lÔ76t 
les  inventeurs  des  montres  à  répétition. 

MONTas  (Jeux  de),  jeux  plaçai  en  avant  de  l'orgue  et 
qui  en  garnissent  la  façade  ;  tels  sont  le  trente-deux  pieds, 
le  seixe-pieds  ouvert  et  le  huit-pieds  ouvert.  Les  jeux  de 
montre  tiennent  beaucoup  des  jeux  de  flûte,  et  en  ont 
rharmonle  douce  et  pénétrante.  Les  tuyaux  de  montre  for- 
mant les  tourelles  et  les  plates-faces  des  buflists  d'orgue, 
sont  alimentés  séparément  par  des  porte-vent,  et  ce  moyen 
de  transmission  de  l'air  s'appelle  po<(age.  F.  G. 

MONTRÉAL.  V.  Monréalb. 

MONT-SAINT-lilCUEL  (Abbaye  du).  Cette  antique 
abbaye  bénédictine,  devenue,  depuis  la  Révolution,  niai- 
son  centrale  de  détention  et  prison  d'État,  fut  fondée  en 
708  selon  les  uns,  en  006  selon  les  autres,  et  reconstruite 
à  partir  de  1022.  Elle  est  aussi  curieuse  pour  son  stylo 
que  pour  sa  situation  au  sommet  d'un  rocher,  à  45  met. 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  à  2  kilom.  environ  de  la 
côte  de  Normandie,  au  milieu  d'une  g^ve  que  couvre  Is 
marée  haute.  La  porte  d'entrée,  dont  l'embrasure  de  voûte 
s'ouvre  entre  deux  tourelles  encorbellées  en  culs- de- 
lampe,  est  d'un  aspect  sombre  et  terrible.  L'ancien  grand 
réfectoire  des  religieux,  un  des  plus  beaux  vaisseaux  go- 
thiques qui  existent  en  France,  a  été  transformé  d'abord 
en  atelier  de  toiles  à  voiles,  puis  en  caserne;  les  dortoirs 
sont  devenus  des  ateliers,  tandis  que  le  réfectoire  d'en  haut 
sert  de  dortoir  aux  détenus.  La  saile  des  Chevaliers,  ad- 
mirable morceau  d'architecture  du  xu*  siècle,  à  voûtes 
surbaissées,  à  piliers  énormes,  est  maintenant  un  atelier 
de  tisserandene  et  de  filature;  ce  fut  là  que  Louis  XI  in- 
stitua l'ordre  de  S^M ichel,  en  1469.  Le  cloître  est  entouré 
d'une  galerie  ^adrangulalre,  soutenue  par  deux  rangs  de 
colonnettes  disposées  en  herse;  la  cour  de  ce  cloître, 
dont  le  sol  est  en  plomb,  reçoit  les  eaux  pluviales,  et  les 
conduit  dans  une  citerne  où  elles  sont  conservééi  pour 
l'approvisionnement  de  la  maison.  Véglise  est  de  style 
roman,  sauf  l'abside,  qui  appartient  au  xv'  siècle;  on 
n'en  a  respecté  ^ue  le  chœur  et  le  transsept,  la  nef  a  été 
changée  en  atelier  ;  la  haute  flèche,  que  surmontait  une 
statue  dorée  de  S*-Micbel,  tournant  au  vent  comme  une 
girouette,  a  été  remplacée  par  un  télégraphe  aérien.  Dans 
le  souterrain  des  gros  piliers,  on  voit  un  groupe  central 
d'énormes  piliers  de  granit  qui  supporte  toute  la  masse 
de  l'église.  De  belles  écuries  sont  sous  la  salle  des  Che- 
valiers; U  longue  galerie  du  promenoir  conduit  au  ca- 
chot de  la  cage  de  fer  de  Louis  XI,  laquelle  fut  remplacée 
plus  tard  par  une  case  de  bois.  —  V.  l'abbé  des  Thuille- 
ries.  Description  du  Mont-Saint-Michel,  dans  le  Mercure 
de  1727;  Blondel,  Notice  historique  du  MonlScùnl-Mi- 
chel.  1813;  Raoul,  Histoire  pittoresque  du  Mont-Saint' 
Michel,  1833-34, 2  vol.  in-8«;  BoudentrGodeUnière,  Notice 
historique  sur  le  Mont-Saint-Michel,  2*  édit.,  1843,  in-8*; 
Fulgence  Girard,  Histoire  du  Mont^Saint-Michel,  1843, 
in-8<*;  Le  Héricher  et  Bouet,  Histoire  et  description  du 
Mont-Saint-Michel,  Caen,  1848,  in-fol.  B. 

MONUMENT  (Le),  à  Londres.  V.  Colonnes  monumkn- 
TALES,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographieet  d'Histoire, 

MONUMENTS  HISTORIQUES  (Commission  des),  com- 
mission Instituée  près  le  ministère  de  llnst.  pnbl.,  com- 
posée de  18  membres  nommés  par  le  chef  de  l'État,  et 
chargée  de  dresser  la  liste  des  monum**  histor.,  de  répartir 
les  sommes  accordées  par  l'Eut  pour  l'entretien  on  lare- 
construction  de  cesmonunit*,  etde  proposer  les  architec- 
tes auxquels  sont  confiés  les  travaux.  Il  y  a  des  corres- 
pondants dépaitementaux  accrédités  auprès  des  préfets, 
et  un  inspecteur  général  des  travaux  en  cours  d'exécution. 

MOORS  (Dialecte).  V.  Indiennes  (Langues). 

MOQUETTE  on  MOUQUETTE,  tapis  de  pied  de  laine, 
ras,  dont  la  fabrication  fut  faite  à  Toumay,  pour  la  pre- 
mière fois,  vers  la  fin  du  xvi*  siècle.  On  appela  d'abord  ces 
tapis  Moncades,  puis  Moucades,  et,  par  altération  de  la 
prononciation,  mouquettes  et  Moquettes,  On  commença 
d'en  fabriquer  en  France,  à  Abbeville,  en  1627. 

MORAILLES,  en  termes  de  Blason,  meuble  représen- 
tant des  tenailles,  denchées  Intérieurement.  Quand  il  y 
en  a  plusieurs  dans  l'écn,  elles  sont  superposées. 

MORALE.  Ce  mot  exprime  deux  choses  qu'il  ne  faut 
pas  confondre  :  la  Morale  en  dle-même,  et  la  Morale  con- 
ddérée  comme  une  science.  La  première  peut  exister 
sans  la  seconde,  parce  que  tout  homme  a  par  nature  les 
deux  conditions  de  toute  moralité  :  la  notion  de  la  loi  du 
devoir,  que  nous  portons  en  nootf  et  la  liberté  de  s'y  oon* 


HOR 


1274 


MOR 


ttonner  Yolontairement.  Il  a  une  rtele  pour  Juger  du  bien 
et  du  mal  dans  les  actions,  c'est  fii  conscience;  en  sorte 
que  la  science  de  la  Morale  est  plus  ou  moins  bonne,  se- 
lon qu'elle  interprète  plus  ou  moins  fidèlement  la  con- 
science. Cette  science  est  nécessaire,  parce  que  l'homme 
a  besoin  de  règles  pour  se  conduire.  La  Morale,  ainsi  con- 
Bîdérôe,  6ft  la  science  des  devoirs  de  l'homme  ;  elle  est 
toute  rationnelle,  et  ne  traite  que  de  ce  qui  doit  être;  elle 
ne  s'occupe  pas  de  la  peinture  des  mœurs,  mais  des  de- 
Toirs  de  l'homme  dans  toutes  les  positions  que  la  vie  peut 
lui  créer.  Ces  devoirs  sont  nombreux  et  variés  ;  de  là  une 
division  de  la  Morale  en  Morale  personnelle,  qui  traite 
des  devoirs  de  l'homme  envers  lui-même  ;  Morale  sociale, 
oui  comprend  les  devoirs  de  l'homme  comme  membre 
de  l'humanité,  d'une  société  civile  et  d'une  famille;  et 
Morale  religieuse,  qui  a  pour  oblet  les  devoir»  de  l'homme 
envers  Dieu.  Les  devoirs  de  1  homme  envers  lui-même 
comprennent  l'homme  tout  entier,  c.-èMl.  le  corps  et  l'&me. 
Au  sein  de  l'humanité,  il  doit  obéir  à  la  loi  d'équité  et 
de  iustice,  qui  lui  impose  des  devoirs  négatifs,  et  a  la  loi 
de  bienveillance  et  d'amour ,  qui  lui  impose  des  devoirs 
positifs.  La  famille  impose  à  l'homme  des  devoirs  envers 
les  enfants  et  les  serviteurs,  et  réciproquement.  La  société 
civile  exige  de  chacun  de  ses  membres  :  amour  à  la  patrie, 
respect  au  souverain,  obéissance  aux  lois.  Les  devoirs  en- 
vers Dieu  consistent  à  chercher  à  le  connaître,  à  l'aimer, 
et  à  l'adorer.  Quelmies  moralistes  ont  admis  une  qua- 
trième division  de  la  Morale,  qui  comprend  les  devoirs 
de  l'homme  envers  tous  les  êtres  qui  lui  sont  inférieurs. 
Considérée  d'une  manière  plus  générale,  la  Morale  se 
compose  de  deux  grandes  parties  :  Tune,  qui  s'occupe  des 
principes ,  qui  les  détermine  et  les  classe ,  qui  pose  les 
règles  de  conduite  sur  les  idées  de  bien  et  de  mal,  de 
mérite  et  de  démérite,  de  devoir  et  de  droit,  de  la  loi  mo- 
rale et  de  sa  sanction  ;  l'autre,  qui  considère  les  principes 
dans  leur  application.  La  première  est  la  plus  importante; 
elle  prend,  dans  quelques  auteurs,  le  nom  de  Métaphy- 
nque  des  moeurs.  Elle  s'occupe  du  devoir  en  général,  tan- 
dis que  l'autre  détermine  quelles  sont  les  différentes 
espèces  de  devoirs. 

La  Morale,  ayant  pour  base  des  conditions  qui  sont 
inhérentes  à  la  nature  humaine,  se  montra  dès  que 
l'homme  sentit  s'éveiller  la  conscience  en  lui ,  mais  ob- 
scure et  faible.  Aussi  les  premiers  préceptes  n'ont  pour 
objet  que  les  premiers  besoins  de  la  vie.  Elle  parla  d'abord 
dans  la  Sagesse  et  les  Proverbes  de  Salomon,  dans  les 
Maximes  des  sept  Sages  de  la  Grèce ,  dans  les  vers  des 
Gnomiques,  dans  les  Vers  dorés  de  Pythagore,  dans  les 
fables  et  les  allégories,  dans  les  Maximes  de  Confucius. 
A  ces  époques,  elle  reste  mêlée  aux  autres  parties  de  la 
science.  Socrate,  en  séparant  la  philosophie  des  autres 
branches  de  la  connaissance,  prépara  la  formation  de  la 
science  de  la  Morale  ;  Aristote  en  fut  le  véritable  fonda- 
teur, comme  de  la  Logique.  A  partir  de  ce  moment,  on 
peut  étudier  l'histoire  de  la  Morale  dans  les  svstèmes 
auxquels  elle  a  donné  lieu  :  ces  systèmes  résultent  de 
l'idée  que  leurs  auteurs  s'étaient  faite  du  bien  et  du  prin- 
cipe de  nos  actions.  I^es  uns,  pensant  trouver  ce  principe 
soit  dans  le  motif  égoïste,  soit  dans  une  des  tendances 
primitives  de  notre  nature,  érigèrent  en  motif  unique  ce 

Îdi  n'est  qu'un  des  motifs  ou  des  mobiles  de  l'activité, 
els  furent,  d'une  part,  les  Systèmes  égdistes,  comme  la 
Morale  d'Êpicure  chez  les  Anciens ,  celle  d'Helvétius  et 
de  Lamettne  en  France,  de  Hobbcii  et  de  Bentham  en 
Angleterre  ;  d'autre  part,  les  Systèmes  instinctifs,  basés 
sur  le  principe  d'expansion  :  au  premier  rang  se  trouve 
le  Système  sentimentcU  qu'Adam  Smith  a  développé  dans 
■a  Théorie  des  sentiments  moraux.  A  ce  système  se  rat- 
tachent ceux  de  Shaftesbury,  Butler,  Hutcheson,  Hume, 
J.-J.  Rousseau,  et  Jacobi.  Aucun  d'eux,  pas  plus  que  le 
système  égoïste,  ne  pouvait  donner  le  caractère  obliga- 
toire, indispensable  à  la  Morale;  ils  n'avaient  en  vue  que 
le  bien  sensible.  D'autres  systèmes  considérèrent  le  bten 
en  soi,  qui  est  absolu,  et  le  bien  morale  qui  est  relatif  : 
ces  deux  idées  pouvaient  être  confondues  ;  c'est  ce  qu'ont 
fUt,  dans  leurs  Systèmes  rcUionnels,  les  Stoïciens  chez 
les  Grecs,  et,  chez  les  modernes,  Price,  Thomas  Reid, 
Dugald  Stewart,  Kant.  Les  systèmes  rationnels  qui  ne 
confondent  pas  les  deux  idées,  mais  qui  ne  s'accordent 
pas  toujours  dans  l'ensemble  de  leurs  théories,  sont  ceux 
de  Wollaston,  de  Clarke  et  de  Montesquieu,  de  Leibniz, 
de  Wolff,  de  Puffendorf,  de  Malebranche,  etc.  Quels  que 
soient  les  systèmes,  il  est  facile  de  se  faire  une  idée  exacte 
de  la  Morale ,  en  se  rappelant  sa  liaison  intime  avec  la 
Religion.  La  Morale  est  la  science  des  devoirs,  en  tant 
que  devoirs  ;  la  Religion  est  la  connaissance  de  ces  mêmei 


devoirs  dans  leur  harmonie  nécessaire  avee  le  bonbev 
mérité  par  leur  accomplissement  ;  ce  sont  deux  vues  dif« 
férentes  d'une  seule  et  même  chose,  la  destinée  humaine. 

Les  ouvrages  de  Morale  les  plus  remarquables  sont  : 
YÊUUque  à  ^udème,  VÊtkique  à  Nicomaque,  la  Grands 
Éthéti(tue  d'Aristote,  écrits  qui.  Joints  à  son  Traité  d$s 
vertus  et  des  vices,  forment  un  cours  complet  de  Morale; 
le  Traité  des  Devoirs  de  Cicéron;  les  Traités  moraux  de 
Sénèque;  le  Manuel  d*Epictète,  écrit  par  Arrien  ;  les  Pea- 
sées  deMarc-Aurèle;  les  OEuvres  morales  de  Plutarqae; 
la  Morale  de  Confucius  ;  le  traité  Des  Devoirs,  par  S^  Am- 
broise  ;  la  Morale  tirée  des  quatre  Évangiles  ;  —  chez  les 
modernes ,  Traité  de  la  scigesse^  de  Charron  ;  Essais  de 
Morale,  par  Nicole;  Essai  moral,  économique  et  politiqitê 
de  Bacon  ;  Éléments  de  ta  Morale  universelle,  par  d'Hol- 
bach ;  Draité  de  Morale  de  Malebranche  ;  Institution  de  la 
science  morale,  par  F.  Hutcheson  ;  Éléments  de  science 
morale,  par  Beattie;  Philosophie  des  facultés  morales, 
de  Du^ld  Stewart;  Principes  de  philosophie  morale, 
de  W.  Paley;  Crttigue  de  la  Raison  pratique,  de  Kant; 
Déontologie,  de  Bentham  ;  Morale  sociale,  de  M.  A.  Gar- 
nier,  in-«°  ;  Le  Devoir,  par  M.  J.  Simon,  in-8*. 

Pour  l'histoire  de  la  science,  on  peut  consulter:  Gott- 
lieb  Stolle,  Histoire  de  la  morale  jpaJienne,  en  allem., 
léna,  1714,  in-4<*;  Grundling,  Historta  philosophiœ  mo- 
ralisa Halle,  1706,  in-4<*;  England,  Inquiry  into  th» 
moral  ofAndent,  Londres,  1735,  in-8°;  Histoire  abrégée 
des  sciences  métaphysiques,  morales  et  politiques,  depuis 
la  Renaissance  des  lettres,  par  Dugald  Stewart  (traduite 

Sar  J.-A.  Buchon)  ;  Histoire  de  la  philosophie  morale,  de 
lackintosh  (traduite  par  M.  Poret),  Paris,  1834,  in-S^": 
Histoire  critique  générale  de  la  Morale  chez  les  Anciens 
et  les  modernes^  deMeiners,  Gœttingue,  1800-1801, 2  vol. 
in-8<^,  en  allem.;  Revue  des  principes  les  plus  importants 
de  la  Morale,  depuis  Aristote  jusqu'à  nos  jours,  à» 
Garve,  en  allem.,  Breslau,  1798,  in-8o;  Stceudlin,  His- 
toire de  la  philosophie  morale,  en  allem.,  Hanovre,  1818, 
in-8®;  Histoire  des  doctrines  morales  et  politiqws  des 
trois  derniers  siècles j  par  Matter,  Paris,  1837-38,  3  vol. 
in-8®;  Cours  de  droit  naturel,  de  JouflTroy,  Paris,  1843, 
3*  édit.,  3  vol.  in-8°  ;  Théories  et  idées  morales  dans  Toa- 
tiquité,  par  M.  J.  Denis.  R. 

MORALISTES,  écrivains  philosophes  dont  le  mérite 
propre  est  d'être  accessibles  au  vul^re,  et  de  donner  à 
quiconque  recherche  leur  commerce  quelques  sensibles 
et  salutaires  enseignements.  La  Métaphysique,  comme 
science  des  premiers  principes,  est  le  fondement  même  de 
toutes  les  autres  sciences  :  mais  le  caractère  abstrait  et 
spéculatif  de  ses  recherches,  l'aridité,  au  moins  appa^ 
rente,  ou  la  profondeur  de  ses  formules,  le  retour  des 
mêmes  problèmes  toujours  résolus  et  toujours  discutés, 
la  spécialité  assez  ardue  du  vocabulaire,  déconcertent  les 
profanes  et  les  éloignent.  Les  Moralistes  ne  discutent  point 
de  l'être,  ni  de  l'absolu,  ni  des  rapports  du  nécessaire 
avec  le  contingent,  et  autres  questions  ardues;  ils  doos 
parlent  de  nous-mêmes,  et  piquent  ainsi  à  la  fois  notre 
amour^propre  et  notre  curiosité  ;  ils  analysent  nos  pré- 
Jugés  ,  nos  erreurs  ;  ils  nous  instruisent  du  vrai  prix  de 
chaque  chose,  et  nous  font  estimer  la  vie  même  à  sa  Jaste 
valeur  ;  ils  nous  disent  nos  habitudes,  nous  font  toucher 
du  doigt  les  plaies  les  plus  secrètes  de  notre  &me,  comme 
ils  nous  en  découvrent  les  nobles  penchants  et  les  instincts 
divins  ;  peintres  et  précepteurs  de  l'homme,  ils  l'éclairent 
sur  son  origine,  sur  sa  nature  et  sur  sa  destinée.  La  vie 
et  l'infinie  multiplicité  des  soins  qui  la  remplissent,  le 
cœur  et  ses  inclinations,  plus  dissemblables  que  les  visa* 
ges,  selon  le  mot  de  Bossuet,  et  plus  nombreuses  que  les 
vagues  mêmes  de  l'Océan  quand  il  est  agité  par  la  tem- 

{>ête,  tel  est  donc  le  vaste  et  inépnisiJ>le  s^)et  qui  occupe 
es  Moralistes. 

Leurs  œuvres  ne  présentent  pas  moins  de  variété  :  IVm 
rédise  des  Sentences,  des  Pensées^  des  Maximes,  l'antre 
dessine  des  Caractères  et  des  Portraits  ;  celui-ci  prétend 
redire  les  causeries  familières  d'un  Banquet,  celui-là 
prête  aux  morts  des  Dialogues  à  l'adresse  des  vivants; 
tel  nommera  Essais  ses  épanchements  et  ses  confidences 
au  lecteur,  et  tel  nous  soumettra  pour  notre  bien  ses 
Considérations  sur  les  Mceurs  de  son  siècle;  celui-ci 
s'est  proposé  de  composer  un  Traité  dogmatique,  celui- 
là  nous  guide  par  des  Lettres  qui  sont  aœeasées  à  la  pos- 
térité plus  encore  qu'à  son  correspondant;  les  ans  énAn 
demandent  à  la  prose  sa  précision  sévère,  les  autres  em- 
pruntent à  la  poésie  la  parure  et  les  ornements  de  son 
langage.  Mais  la  variété  des  oeuvres  ne  détruit  pas  l'unité 
de  la  matière  :  ces  livres  à  cent  formes  diverses  ont  pour 
Sttlet  identique  l'homme  et  sa  nature,  mystérieux  nié> 


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1275 


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tangs  de  fioe»  el  de  vertus,  de  petitesse  et  de  mndeor. 
n  ùaaX  chercher  Tor^gine  de  ce  genre  littéraire,  ayant 
tout,  dans  cette  curiosité  instinctive  d'où  sortit  jadis  la 
philosophie,  et  qui  porte  llionune  à  s'étudier  lui-même 
et  le  monde  qui  l'entoure.  L'antique  maxime  gravée  sur 
te  frontispice  du  temple  de  Delphes ,  «  Connais-toi  toi- 
m^De  »,  est  non-fleulement  un  conseil,  mais  aussi  Theu- 
reuse  expression  d'un  penchant  naturel  à  notre  esprit. 
C'est  à  ce  penchant  d'abord  que  cèdent  les  Moralistes, 
lorsqu'ils  observent  l'àme  humaine  et  la  peignent.  Sup- 
posez maintenant  soit  une  philosophie,  soit  une  religion 
^'  prescrive  à  ses  adeptes  de  veiller  sur  eux-mêmes,  de 
looder  leurs  cœurs  pour  en  arracher  toutes  les  inclina- 
doos  mauvaises,  de  se  demander  compte  chaque  jour  de 
tour  arancement  dans  le  bien,  de  méditer  enfin  sur  leur 
destinée,  une  telle  doctrine  n'est-elle  pas  propre  à  pro- 
duire les  habitudes  d'observation  et  de  réflexion  oui  font 
les  Moralistes  7  Telle  a  été,  en  effet,  l'influence  au  stoï- 
cisme et  du  christianisme.  —  Si  l'objet  des  EHoralistes  est 
il  peinture  de  l'homme  et  de  la  vie  humaine,  un  pareil 
ipectacle  a  pour  avantage  dé  chasser  un  instant  de  notre 
esprit  les  préoccupations  des  intérêts  et  des  affaires,  de 
flous  faire  rentrer  en  nous-mêmes  pour  y  voir  le  tableau 
de  DOS  misères  et  de  nos  imperfections,  et  de  nous  rendre 
indulgents  aux  défauts  d'autrui  par  la  conscience  de  nos 
propres  faiblesses  ;  de  provoauer  au  fond  de  nos  cœurs 
des  mouvements  de  honte  salutaire,  de  bonnes  et  géné- 
reuses résolutions,  et  des  aspirations  vers  le  bien  ;  parfois 
même  d'éveiller  dos  instincts  les  plus  élevés,  et,  en 
l'adressant  à  la  partie  divine  de  notre  être,  de  reporter 
nos  pensées  de  crainte  ou  de  reconnaissance  vers  notre 
créateur.  M*"*  de  Sévigné  avait  sans  doute  éprouvé  quel- 
ou'un  de  ces  effets,  quand  elle  disait  qu'elle  voudrait  faire 
de  tel  Essai  de  Nicole  «  un  bouillon  pour  l'avaler.  » 

Hésiode  fut  le  père  des  Moralistes,  en  donnant,  dans 
son  poëme  sévèrement  didactique  des  OEuvres  et  Jours, 
Texemple  de  ces  maximes  qui  formèrent  le  genre  gno- 
mique  ou  sentencieux.  Les  sept  Sages,  puis  les  poètes 
gnomiques  Selon,  Phocylide  de  Milet,  Théognis  de  Mé- 
dire, sont  ses  plus  célèbres  héritiers:  Solon,  qui  sut 
être  à  la  fois  un  grand  législateur,  le  plus  bienveillant 
lies  hommes  et  le  plus  aimable  des  poètes;  Phocylide, 
véritable  créateur  du  genre,  qui  composa  des  maximes 
poor  elles-mêmes,  tandis  que  Solon   faisait  servir  la 
poésie  à  la  politique  ;  Tbéognis,  ^e  des  troubles  civils 
chassèrent  de  son  pays,  et  qui  mit  parfois  dans  ses  ré- 
flexions morales  autant  d'élévation  et  de  force  que  d'Àpreté 
dans  ses  invectives  politiques.  Si  l'on  syoute  k  ces  sen- 
tences, fréquentes  d'ailleurs  dans  toutes  les  œuvres  ly- 
riques de  ces  temps-là,  les  maximes  à  demi  énigma- 
tiqoes  des  pythagoriciens,  on  aura  la  première  forme 
que  revêtit  en  Grèce  l'œuvre  si  compliquée  des  mora- 
listes. Aristote  et  Théophraste,  par  leurs  portraits  ou  ca- 
ractères, lui  donnèrent  la  seconde;  et  une  autre  enfin  lui 
Tint  de  Xénophon,  de  Plutarque  et  de  Lucien.  Aristote, 
faisant,  à  l'exemple  de  Platon,  de  la  rhétorique  une  partie 
de  la  science  de  l'homme,  et  lui  donnant  comme  prin- 
cipe fondamental  la  connaissance  de  l'Ame  humaine,  con- 
ncra  tout  un  livre  de  son  ouvrage  sur  l'art  oratoire  à 
décrire,  avec  une  exactitude  et  une  finesse  admirables, 
les  passions  et  les  mœurs  ;  de  là  notamment  ce  portrait 
des  jeunes  gens,  des  vieillards  et  des  hommes  faits ,  in- 
complètement retracé  par  Horace  et  par  Boileau,  ses  imi- 
tateurs. Théophraste,  qui   faisait  sans  doute  pour  la 
comédie  ce  que  son  maître  avait  fait  pour  l'éloquence, 
0t  qui  voulait  dessiner  des  modèles  à  l'usage  des  poètes 
dximatiques,  pénétra  plus  avant  dans  l'analyse  des  ridi- 
cules et  des  vices,  les  décrivit  en  plus  grand  nombre, 
Mec  des  détails  piquants ,  jusque  dans  leurs  nuances  les 
plus  fines  et  les  plus  délicates.  Xénophon,  Plutarque  et 
Laden  durent  leur  nom  de  Moralistes,  non  plus  à  des 
nsximes  ni  à  des  portraits,  mais  à  des  compositions  de 
pins  longue  haleine,  dont  le  bat  était  de  servir  les  hommes 
en  éclatant  leur  inexpérience,  en  persiflant  leun  tra- 
^en,  ca  guérissant  leure  faiblesses,  en  dissipant  leur 
ignorance.  Cette  intention  d'écrire  des  choses  utiles,  qui 
Tait  d'eux  des  écrivains  éminemment  pratiques,  est  le 
fond  eonamon  de  leun  œuvres  morales  et  leur  seule 
Qidté.  Les  plus  renonmiéei  de  Xénophon  sont  :  l'Jscono- 
«19110,  charmant  dialogue  sur  l'administration  du  ménage 
et  ragriculture;  le  Bawtuet,  dialogue  entremêlé  de  scènes 
o&  Socrate  est  le  principal  acteur,  conversation  vive  et 
wiée,  mais  d'un  tour  légèrement  vulgaire,  avec  des  traits 
d'âne  couleur  parfois  trop  antique;  l'HiVron,  dialogue 
«lire  Hiéron  de  Syracuse  et  le  poète  Sîmonide,  parallèle 
^  lyran  et  du  simple  citoyen,  rempli  d'observations  ju- 


dicieuses sur  Part  de  gouverner  les  hommes.  Plutarque» 
le  plus  infatigable  causeur  de  l'antiquité,  en  fut  aussi  le 
Moraliste  le  plus  fécond  et  le  plus  attrayant.  Ses  écrits 
vulgairement  appelés  Morales  atteignent  le  chiffre  de 
quatre-vingts;  il  est  vrai  que  tous  les  genres  y  sont  re- 
présentés, et  sous  les  formes  les  plus  variées  :  traité  dog- 
matique sur  l'éducation  des  enfants;  préceptes  sur  la  ne 
conjugale;  conseils  aux  enfants  sur  la  lecture  des  poètes; 
dissertations  sur  l'utilité  des  ennemis,  sur  la  fortune, 
sur  l'exil,  sur  le  destin;  souper  des  sept  Sages;  consi- 
dérations sur  le  bavardage,  sur  la  curiosité,  sur  la  mau- 
vaise honte;  dialogue  sur  les  délais  de  la  justice  divine; 
propos  de  banquet  en  neuf  livres;  histoires  d'amour; 
apophthegmes ;  questions  naturelles;  recherches  sur  la 
décadence  des  oracles;  consolation  à  sa  femme  sur  la 
mort  de  sa  fille;  tout  y  est,  la  religion,  la  philosophie,  la 
littérature,  les  sciences  et  les  arts,  autant  que  la  morale» 
et  partout  l'on  sent  une  àme  sincèrement  amie  du  bien 
et  du  beau,  même  au  milieu  d'étranges  erreura,  un  cœur 
simple,  un  esprit  curieux  et  juste,  éloigné  de  tout  excès, 
un  homme  de  bonne  foi  et  de  bon  sens.  Lucien  fut  scep- 
tique et  moqueur  comme  Plutarque  était  croyant  et  bon, 
et  il  consacra  sa  vie  et  son  esprit  tantôt  à  bafouer  toute 
croyance  religieuse  ou  philosophique  qui  dépasse  l'étroit 
horizon  de  nos  sens,  même  le  scepticisme  spéculatif;  tan- 
tôt à  persiffler,  avec  une  verve  intarissable  et  digne  d'Aris- 
tophane, les  traven,  les  ridicules ,  les  vices  de  ses  con- 
temporains et  des  hommes  de  tous  les  temps.  Ses  Dialogues 
des  morts  sont  immortels.  Esprit  élégant  et  distingué,  un 
jour  qu'il  voulut  être  sérieux,  il  écrivit  sur  l'amitié,  ce 
sujet  aimé  des  Moralistes,  quelques  pages  originales,  qui 
conservent  encore  leur  agrément  et  leur  prix,  même  après 
Cicéron,  même  après  Montaigne. 

A  Rome,  il  convient  de  donner  un  souvenir  au  livre 
de  Cicéron  Sur  V Amitié,  k  son  traité  plus  original  encore 
et  plus  attrayant  Sur  la  Vieillesse ,  ainsi  qu'à  Horace  pour 
ses  Êpttres,  Mais  les  vrais  moralistes  furent  les  Stoïciens. 
Sénèaue,  particulièrement  dans  ses  Lettres  à  Lucilius, 
Épictëte  dans  le  Manuel  de  ses  leçons  qu'Arrien  nous  a 
transmises,  Juvénal  et  Perse  dans  quelques-unes  de  leurs 
brûlantes  Satires ,  Marc-Aurèle  dans  ses  Pensées ,  por- 
tèrent une  analyse  pénétrante  jusaue  dans  les  replis  les 
plus  cachés  de  l'àme,  ou  enseignèrent  d'exemple  cette 
humilité,  ce  renoncement  à  soi-même,  cette  tendresse 
expansive  et  cet  amour  du  prochain  que  la  religion  chré- 
tienne, avec  une  force  d'enthousiasme  irrésistible  et  au 
prix  du  sang  des  martyra ,  allait  répandre  bientôt  par 
tout  l'univers.  Tous  les  Pères  de  l'Église,  en  effet,  Grecs 
ou  Latins,  apologistes  ou  dogmatiques,  et  les  évêquea 
ou  prédicateurs  leun  héritiera  du  moyen  âge  et  des  temps 
modernes,  tous  les  représentants  illustres  du  christia- 
nisme, précédés  dans  cette  voie  par  l'auteur  sacré  des 
Proverbes  (  V,  ce  mot)  et  du  livre  de  VEcclésiaste,  depuis 
S^  Paul  jusqu'à  S^*  Thérèse,  et  depuis  S*  Bernard  jusqu'à 
Fénelon,  se  montrèrent  d'admirables  moralistes,  sans  en 
avoir  le  titre,  en  peignant  dans  leun  œuvres  les  mala- 
dies cachées  du  cœur  humain,  comme  aussi  ses  aspira- 
tions les  plus  sublimes. 

Il  est  juste  de  nommer,  dans  la  littérature  française  « 
Boileau,  Voltaire,  et  Gilbert,  l'un  pour  plusieurs  de  ses 
Épitres  et  de  ses  Satires,  l'autre  pour  ses  Discours  en 
vers  sur  Vkomme ,  pour  ses  Épttres  sur  la  calomnie ,  à 
Horace,  aux  Délices,  etc.,  le  3*  pour  sa  satire  le  Dix^ 
Huitième  siècle.  Mais  les  vrais  moralistes  furent  tous  des 
prosateura,  qui  mêlèrent  souvent,  nouvelle  originalité 
dans  un  genre  déjà  si  complexe,  aux  pensées  morales 
des  maximes  littéraires.  Montaigne  en  ouvre  glorieuse-, 
ment  la  liste  dès  le  xvi«  siècle  par  ses  Essais,  Éclairé, 
sinon  profondément  attristé  par  les  (querelles  religieuses^ 
à  l'entêtement,  à  la  présomption  opiniâtre  qui  poussait 
ses  concitoyens  à  s'entr'égorger,  il  opposa  le  doute  sys^ 
tématique,  et  fit  le  procès  à  la  raison  humaine,  détrui- 
sant toutes  les  affirmations  des  sages  les  unes  par  les 
autres.  Il  avait  raison  de  protester  contre  les  égarements 
de  la  raison  de  son  siècle  ;  mais  pourquoi  faut-Il  aue  de 
parti  pris  il  ne  conduise  l'àme  à  la  paix  que  par  rindif- 
férence,  à  la  sérénité  que  par  une  peinture  quelque  peu 
épicurienne  de  la  vertu?  Aussi  ce  fut  avec  une  grande 
force  d'éloquence  que  Pascal  (Diaiogue  sur  Êpictète  et 
Montaigne)  battit  en  brèche  et  renversa  cette  doctrine 
trop  diangereusement  commode.  A  côté  de  Montaigne, 
Qiarron,  sans  avoir  autant  de  verve,  d'esprit  et  de  finesse, 
se  recommande  du  moins  par  un  grand  sens,  et  par  dei 
opinions  à  la  fois  fermes  et  modérées,  qui  ne  démentent 
pas  le  titre  de  son  livre,  De  la  sagesse.  Le  xvii*  siècle  cite 
avec  orgueil  les  Maanmes  de  La  Rochefoucauld;  les  Pei^ 


MOR 


127S 


MOR 


tén  de  Pascal  ;  les  Essais  où  Nicole,  aa  liea  de  troubler 
les  Ames,  leur  donne  le  calme,  et  doucement  les  réconforte 
eontre  les  passions  ;  les  Caractères  de  La  Bruyère  ;  enfin, 
à  un  degré  inférieur,  les  Réflexions  de  Saint-Évremond 
sur  Tusage  de  la  vie,  ses  Discours  sur  les  Belles-Lettres, 
et  d*autres  Réflexions  sur  la  tragédie  et  la  comédie.  A  ces 
noms  illustres,  le  xvm*  siècle,  sans  parler  de  J.-J.  Rous- 
seau et  de  Bernardin  de  SaintrPierre  qui  ne  se  rattachent 
quMndirectement  à  ce  groupe  d'écrlTains,  oppose  Vau- 
Tenargues  avec  ses  Réflexions  et  Maximes ,  Duclos  avec 
ses  CwuûUraltof»  sur  les  Moeurs  de  ce  siècle,  observa- 
tions fines  et  Judicieuses,  mêlées  à  des  sentiments  cmi 
sont  d*un  honnête  homme  et  d*un  bon  citoyen  ;  enfin 
Montesquieu,  avec  quelques  pensées  morales  et  litté- 
raires, où  il  sut  être  encore,  après  ses  prédécesseurs, 
original  et  piquant.  Joubert  (Pensées,  Essais  et  Maximes, 
S*  édit,  Paris,  1849, 2  vol.  in-8o^  couronnerait  la  série,  s'il 
fallait  croire  que  notre  xdl"  siècle  a  dit  son  dernier  mot; 
mais  on  a  pubué  les  œuvres  de  M*^*  Swetchine  (  If  "^  Swet^ 
chine,  sa  vie,  ses  oeuores,  par  M.  de  Falloux,  Paris,  1861, 
2  vol.  gr.  in-18),  et  cette  dame  aura  peut-être  des 
successeurs.    F.  CABACitaBS,  Uaxihes,  Pensées,  Ré- 

PLEXIONS.  A.  H. 

MORALITÉ,  conformité  des  résolutions  et  des  actions 
humaines  à  la  loi  du  devoir.  Elle  suppose  le  discernement 
et  la  liberté.  On  appelle  encore  moralité  le  sens  moral 
ou  la  vérité  que  Ton  peut  tirer  d*une  fable,  d*une  com- 
position allégorique,  etc. 

MORAUTé  ^Certificat  de) ,  on  ds  bonne  vie  et  mœurs, 
certificat  déhvré  par  les  officiers  municipaux ,  et  dont  la 
production  est  souvent  exigée  de  ceux  qui  demandent  un 
emploi  ou  qui  veulent  exercer  certaines  professions.  Il  est 
nécessaire,  par  exemple,  à  quiconque  veut  entrer  dans 
les  Douanes ,  à  Tétudiant  en  Droit  pour  prendre  sa  pre- 
mière inscription,  à  la  personne  qui  désire  diriger  un 
établissement  d'aliénés,  aux  engagés  volontaires,  aux 
nourrices  et  autres  personnes  qui  veulent  se  charger  des 
enfants  trouvés  des  hospices,  à  ceux  qui  aspirent  aux 
fonctions  d'instituteur  primaire.  Les  Chambres  de  dis- 
cipline des  notaires,  avoués,  huissiers,  délivrent  des  cer- 
tificats de  moralité  et  de  capacité  à  ceux  qui  prétendent 
devenir  officiers  ministériels. 

MORALITÉS,  nom  donné,  dans  l'histoire  de  la  littéra- 
ture française,  à  des  poèmes  composés  généralement  par 
des  prêtres  ou  des  moines  pendant  le  xii*  et  le  xin*  siè- 
cle, dans  un  but  religieux  et  moral ,  pour  les  opposer  aux 
Fabliaux  {V.  ce  mot).,  trop  enclins  à  l'incrédulité  ou  au 
libertinage.  Tels  sont  les  Moralités  des  j^hilosophes  par 
Atars  de  Cambrai ,  les  Enseignements  SAristote  par  Pierre 
de  Vemon ,  le  Débat  du  corps  et  de  Vàme  (  K.  Ancien 
Théâtre-Français,  Paris,  t.  III),  le  Dialogue  de  Pierre 
de  la  Broche,  qui  di^nUe  à  la  Fortune  par  devant  Reson 
(F.  Théâtre^Françau  au  moyen  âge  par  Monmerqùé  et 
Francisque  Michel,  1839).  Dans  ces  compositions^  le 
dialogue  se  mêla  de  bonne  heure  au  récit,  et,  lorsqu'au 
xiv*  siècle  le  goût  de  l'allégorie  devint  général ,  on  eut 
naturellement  l'idée  de  transformer  en  personnages  de 
théâtre  les  passions,  les  vertus  et  les  vices.  Les  Moralités 
devinrent  alors  des  œuvres  scéniaues,  conservant  ce  trait 
de  leur  ancien  caractère,  qu'elfes  étaient  fort  courtes 
(1000  à  1200  vers),  et  simples  par  le  sujet  comme  par 
le  nombre  des  acteurs.  La  représentation  des  Mystères 
(V,  ce  mot)  étant  le  privilège  exclusif  des  Confrères  de 
la  Passion,  les  clercs  de  la  Basoche  (T.  ce  mot  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire)  se  mirent  à 
Jouer  les  Moralités.  Ces  pièces  exprimèrent  d'abord  des 
idées  religieuses  à  l'aide  de  personnages  abstraits  et  allé- 
goriques, et  eurent  pour  fonds  commun  le  tableau  des 
épreuves  de  l'àme  et  de  son  acheminement  vers  le  salut 
ou  vers  sa  perte;  puis,  tout  en  conservant  l'usage  de  la 
leçon  morale,  on  alla  prendre  des  personnages  réels 
dans  les  paraboles  de  l'Évangile,  et  l'on  représenta,  par 
exemple,  la  parabole  de  l'Enfant  prodigue,  ou  l'histoire 
du  Mauvais  Riche.  En  faisant  un  pas  de  plus,  on  emprunta 
des  noms  et  des  sujets  à  l'Ancien  et  au  Nouveau  Tes- 
tament, et  la  Moralité  se  rapprocha  du  Mystère.  Enfin, 
on  prit  dans  la  vie  réelle  l'action  ou'on  avait  Jusque-là 
demandée  surtout  à  la  tradition  religieuse;  la  Moralité 
fut  de  plus  en  plus  humaine  et  familière,  et  l'élément 
comique  s'y  mêla  souvent  à  la  pensée  sérieuse.  Au  mi- 
Jeu  de  ces  transformations,  les  pièces  reçurent  des  dé- 
veloppements plus  considérables  et  exigèrent  un  plus 
grand  nombre  d'acteurs.  Les  Moralités  restèrent  en  fa- 
Teur  Jusqu'au  temps  de  François  I*'  ;  alors  la  censure  mit 
on  Juste  frein  à  leurs  hardiesses  satiriques,  et  la  Renais- 
sance acheva  de  les  faire  tomber.  B* 


MORATOIRES  (du  latin  mora,  retard,  délai),  se  dh 
des  intérêts  qui  sont  dus  à  raison  du  retard  apporté  an 
payement  d'une  créance  exigible. 

MORBIDESSE,  en  italien  morbidexxa  (de  l'italien 
morbido,  délicat,  souple  au  toucher),  se  dit  en.  Peinture 
et  en  Sculpture,  de  l'imitation  de  cette  douceur  aoi 
caractérise  les  chairs  dans  les  natures  délicates,  teUei 
que  celles  des  femmes  et  des  enfants. 

MORDANT,  ancien  ornement  de  chant,  qn'U  est  asses 
difficile  de  définir,  et  qui  semble  avoir  eu  du  rapport  avec 
deux  petites  notes  d'agrément  précédant  une  note  qoel* 
conque. 

MORDANT,  pièce  de  métal  qu'on  appliquait  autrefois 
l'extrémité  pendsmte  des  ceintures. 

MORDVHŒ  (Dialecte),  dialecte  parié  par  la  tribu  fin- 
noise des  Mordvines,  qui  habite  sur  les  horûs  du  Volgs, 
dans  les  gouvernements  de  Saratow  et  de  Pensa.  On  ne 
le  connaît  que  par  la  traduction  des  Évangiles  faite  par 
Van  der  Gabelentz,  et  imprimée  avec  des  lettres  russes. 

MORESQUE  (Architecture).  V.  Axabe. 

MORGANATIQUE  (Mariage).  V.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire,  au  Supplément. 

MORGANTE  LE  GRAND,  poème  héroi-comique,  com- 
poséen  italien  par  Pulci,  à lasollicitation  de  Laurent  deMé- 
dicis.  Quelques  critiques,  trompés  par  la  fausse  ntiveté 
de  certaines  apostrophes  pieuses,  ont  vu  dans  cet  ouvrage 
une  œuvre  sâieuse;  mais  c'est  bien  mal  connaître  le 
temps  où  vivait  Pulci,  son  caractère,  et  celui  de  la  société 
pour  laquelle  il  écrivait  :  son  poème  n'est  qu'une  sorte  de 
parodie  des  romans  poétiques,  ce  qu'est  le  Don  Quichotte 
pour  les  romans  de  chevalerie.  Morgante  le  Grand  est  un 
des  géants  vaincus  par  Roland,  et  qui  se  fait  le  compa- 
gnon de  ses  combats.  Mais  il  n'est  qu'un  personnage 
secondaire  :  au  premier  rang  figurent  Renaud ,  Astolpbe, 
les  fils  A^mon ,  etc.,  le  tout  entremêlé  d'enchanteurs  et 
de  magiciens.  Pulci  abandonne  son  style  burlesque  quand 
il  s'agit  de  raconter  la  mort  de  Roland  :  malgré  la  trempe 
ironique  de  son  génie,  et  le  dessein  qu'il  avait  d'amuser 
Laurent  de  Médicis,  il  est  souvent  pathétique,  parce 
qu'il  est  poète,  et  que  son  sujet  le  domine  et  l'émeut.  Le 
Morgante  le  Grand  a  28  chants,  écrits  en  rimes  octaves. 
La  l'*  édition  en  fut  donnée  à  Venise  en  1481.  Cet  ou- 
vrage est  particulièrement  estimé  des  Toscans,  qui  y  re- 
trouvent l'idiome  primitif  florentin.  E.  B. 

MORGENGABB.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnairs  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

MORGUE  (d'un  vieux  mot  qui  veut  dire  visage),  second 
guichet  d'une  prison,  dans  leauel  on  retient  quelque 
temps  les  gens  que  l'on  écroue;  les  gardiens  les  y  exami- 
nent à  loisir  pour  les  reconnaître  au  besoin  ;  —  lieu  pu- 
blic où  l'on  expose  les  corps  des  personnes  trouvées 
mortes  hors  de  leur  domicile,  et  que  l'on  ne  connaît  pas, 
afin  qu'on  puisse  venir  les  reconnaître. 

MORION.      l  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnain  6» 

MORMONS.  S      Biographie  et  d: Histoire. 

MORNÊ,  en  termes  de  Blason,  se  dit  du  lion  et  antrei 
animaux  sans  dents,  bec,  langue,  griffes  ou  queue. 

MORS  ou  FREIN,  pièce  de  fer  ou  de  bois  qui  se  place 
dans  la  bouche  du  cheval  pour  le  gouverner.  Pline  en 
attribue  l'invention  à  un  certain  Pelethronius,  et  Virgile 
aux  Lapithes,  qu'il  appelle  pelethronii,  du  nom  d'une 
montagne  de  Thessalie,  le  Pelethronius,  où  l'on  com- 
mença à  dompter  les  chevaux.  —  Autrefote  on  appelait 
Mors  (de  mordre)  l'agrafe  qui  retient  sur  la  poitnoe  les 
bords  de  la  chape. 

MORT  (Images  de  la).  Les  premiers  hommes,  ne  pou- 
vant s'expliquer  la  cessation  de  la  vie,  attribuèrent  ce 
phénomène  à  une  puissance  invisible,  à  une  divinité  ca- 
chée qui  se  vengeait  d'une  offense,  et  qui  frappait  osten- 
siblement dans  les  combats  et  mystérieusement  daos  tel 
maladies;  c'était  T*yphon  chez  les  Égyptiens,  Afariman 
chez  les  Perses.  Souvent  la  Bible  nous  montre  Dieu  en- 
voyant son  Ange  exterminateur  pour  punir  les  coupables, 
et,  dans  son  langage  poétique,  elle  fait  de  la  Mort  un 
chasseur  armé  de  flèches  et  de  filets,  un  ravisseur,  un 
guetteur  qui  se  cache  sous  le  manteau  de  la  nuit  et  l'ap- 
parence d'une  contagion.  Chez  les  Grecs,  la  Mort  porta 
{>lusieurs  noms,  comme  celuide  Jlfotra,  lesquels  indiquent 
'idée  de  partage;  elle  était  censée  apporter  à  chacun  son 
lot,  sa  part.  C'était  la  Parque,  à  qui  ils  attribuaient 
l'emploi  de  filer  les  Jours  des  mortels.  Plus  tard  on  dis- 
tingua trois  Parques,  à  cause  du  passé,  du  présent  et  de 
l'avenir  :  tantôt  elles  enlevaient  elles-mêmes  ceux  dont 
elles  avaient  rendu  l'arrêt  Hital,  tantôt  elles  confiaient  ce 
soin  à  des  divinités  inférieures  appelées  Kères,  qui  étaient 
toi\|ours  du  sexe  du  mourant^  particularité  qu'on  retroufi 


MOR 


1277 


MOR 


dans  les  croyances  da  moyen  Age  (V.  Dansb  dss  morts). 
Ces  Kères,  d'après  les  postes  et  les  artistes,  étaient  noires; 
elles  STsient  des  ongles  en  forme  de  griffes,  des  dents 
•igoes,  et  dea  ailes  aux  pieds  et  an  dos  :  pour  donner 
ta  mort  aux  liommes  et  les  conduire  au  Tartare,  elles 
étaient  aidées  par  Até,  Némésis  et  Dicé  (le  Malheur,  le 
Destin  fengenr  et  la  Justice),  les  Pœnœ  et  les  Alastorês 
(dïTinités  de  la  punition),  les  Erynnies,  les  Harpies  et 
ksSirêfies  (de  stiréin,  attirer},  qui  chantaient  à  la  fois 
pour  sdoudr  les  horreurs  de  la  mort  et  pour  attirer  les 
morts,  qu'elles  livraient  à  l'Enfer  (Hadès).  Les  Sirènes 
et  les  Harpies  étaient  représentées  sous  la  forme  de 
femmes  ailées  on  d'oiseaux  à  tête  de  femme.  Avec  le 
tiède  de  Périclès,  la  croyance  à  toutes  ces  divinités  léthi- 
fères  disparut  peu  à  peu;  alors  la  Mort,  personnifiée,  prit 
place  parmi  les  divinités  infernales,  et  fut  souvent  con- 
fondue avec  Hadès  ou  Pluton.  Les  Grecs  se  la  fleurèrent 
noire,  avec  des  ailes  de  la  môme  couleur,  la  barbe  et  les 
dieveax  hérissés.  —  Les  Étrusques  donnaient  au  dieu  de 
la  Mort  Taspect  d'un  vieillard  portant  des  ailes  et  une 
kmgae  barbe,  et  tenant  un  marteau  pour  frapper  ceux 
qui  devaient  mourir.  Leurs  Furies,^  chargées  de  conduire 
les  âmes  aux  Enfers,  ont  une  physionomie  plus  farouche 
qoe  les  Kères  :  c'étaient  des  femmes  ailées,  aux  bras 
entourés  de  serpents,  aux  doigts  crochus,  et  d'un  aspect 
tont  à  fait  horrible.  Les  Étrusques  ^pelaient  aussi  la 
Mort  Âtkrpa,  Muira,  altérations  évidentes  des  noms 
grecs  Atropos  et  Moira;  la  forme  italique  de  ce  dernier 
mot,  étant  Morta,  Morsa,  a  foit  naître  le  substantif  latin 
Mon. 

Chez  les  Latins,  la  Mort  était  désignée  par  les  mots 
^•etssUas,  Fors,  Fatum^  Fortuna;  on  lui  donnait  aussi 
le  nom  d'Orcus  comme  divinité  infernale.  La  répugnance 
({n'avaient  les  Grecs  et  les  Latins  pour  toute  idée  lugubre, 
pour  tout  emblème  hideux,  nous  explicpie  pourquoi  leurs 
sculpteurs  ne  créèrent,  pour  la  décoration  des  tombeaux, 
que  des  images  dont  l'aspect  ne  pouvait  blesser  la  déli- 
catese  :  ils  représentaient  la  Mort  sous  les  traits  Juvé- 
niles d'an  génie  ailé,  dormant  appuyé  sur  un  flambeau 
leoTersé,  dont  il  presse  la  flamme  contre  le  sol  pour 
annoncer  qu'il  éteint  la  vie  ;  un  masque  est  placé  parfois 
à  ses  pieds  ou  dans  sa  main,  pour  indiquer  que  le  rèle 
est  achevé.  On  rencontre  aussi  sur  des  tombeaux  des 
têtes  de  Méduse,  belles  et  sans  contorsions,  et  pourtant 
ingénieuses  et  parfaites  images  de  l'immobilité,  de  la 
frâdear  et  de  l'exanimation  du  cadavre.  Ailleurs  ce  sont, 
comme  emblèmes  de  destruction,  soit  des  oiseaux  dévo- 
rant des  serpents  et  des  lézards  ou  becquetant  des  fruits, 
soit  des  chèvres  broutant  des  vignes,  soit  des  coqs  com- 
battant, etc.  La  figure  du  sphinx  était  aussi  emi)loyée 
pou*  désigner  ce  que  l'autre  vie  a  pour  nous  d'énigma- 
tique  et  de  mystérieux.  Souvent  l'immortalité  de  r&me 
et  la  fuite  rapide  de  la  vie  étaient  exprimées  par  la  figure 
d'an  papillon  sortant  de  la  bouche  du  défunt  ou  volti- 

EDt  au-dessus  de  sa  tombe.  Des  couronnes  ou  des  guir- 
des  de  cyprès  et  de  pin  décoraient  aussi  les  sépul- 
tures antiques  ;  le  premier  de  ces  arbres  était  consacré 
à  Pluton,  le  secoua  à  Proserpine.  Parfois  ces  divinités 
elles-mêmes  ou  les  Parques  étaient  représentées  sur  les 
tombeaux  des  riches  et  des  grands.  On  y  voyait  enfin 
des  sacrifices,  des  combats,  des  chasses,  et  Jusqu'à  des 
•cènes  domestiques.  C'était  alors  une  espèce  de  mons- 
traosité  que  d'allier  à  ces  images  les  tètes  de  morts  et  les 
squelettes,  si  généralement  employés  dans  le  moyen  âge. 
n  en  fut  de  même  chez  les  premiers  chrétiens,  qui  ne 
figurèrent  sur  les  murs  des  catacombes  et  sur  les  sarco- 
phages que  des  emblèmes  religieux,  tels  que  le  labarwn, 
la  oolonme  de  l'arche  de  Noé,  l'açneau  mystique,  etc., 
m  certains  sujets  tir&  des  livres  saints,  comme  Adam  et 
tve.  Moïse  firappant  le  rocher,  Jésus  en  croix,  la  résur- 
rectioD  du  fils  de  la  veuve  de  Nalm  ou  celle  de  Lazare, 
et  Jonas  en^outi  et  vomi  par  la  baleine,  témoignages 
évidents,  quant  aux  trois  derniers  si^ets,  d'une  espé- 
fanoe  eonaolatrioe,  la  résurrection  de  la  chair.  Dans  les 
inscriptions  tomolaires,  on  excluait  également  tout  ce 
qui  pouvait  rappeler  la  putridité  du  tombeau.  Cependant 
les  Anciens  ont  dérogé  quelquefois  à  la  pureté  de  goût 
^  caractérisait  leurs  conceptions,  en  représentant  des 
iquelettes  et  des  tètes  décharnées.  Gori,  dans  son  Mu- 
"Mm  tlortntmum^  décrit  une  sardoine  antique  sur  la- 
quelle un  squelette  danse  devant  un  vieux  pÀtre  assis  et 
jouant  de  la  double  flûte,  et,  dans  son  MiucBum  etruscum, 
en  mentionne  une  autre  qui  représente  une  tète  de  mort 
et  un  trépied  couvert  de  mets,  avec  cette  inscription  : 
•  Bois,  mange,  et  couronne-toi  de  fleurs;  c'est  ainsi  que 
BOUS  serons  bientôt.  »  Sur  l'un  des  petiu  côtés  d'un  sar- 


cophage reproduit  dans  le  tome  V  de  V Antiquité  expl^ 
qtU$  de  Montfaucon,  on  voit  un  cr&ne  placé  au-dessus  de 
la  tète  d*un  vieillard  qui  représente  le  fleuve  infernal* 
En  1800,  on  a  trouvé  près  de  Cumes,  dans  des  chambres 
sépulcrales,  trois  bas-reliefs  en  stuc,  dont  l'un  représente 
trois  squelettes  (F.  le  Magasin  encyclopédique  de  Jan- 
vier 1813).  On  peut  encore  citer  l'usage  suivi,  dès  la  plus 
haute  antiquité,  de*  promener  à  la  ronde,  sous  les  yeux 
des  convives,  des  images  de  squelettes  et  des  squelettes 
même  :  Pétrone  parle  du  petit  squelette  d'argent  dont 
un  esclave  faisait  mouvoir  les  ressorts  au  festin  de  Tri- 
malcion.  La  figure  du  squelette  ne  représentait  alors  que 
l'état  final  où  la  mort  réduit  l'homme,  mais  non  la  Mort 
elle-même,  et  n'avait  que  le  but  tout  matérialiste  d'in- 
viter l'homme  à  Jouir  le  plus  possible  des  plaisirs  de 
la  vie. 

Chez  les  Anciens,  malgré  le  genre  du  mot  Mors,  la 
Mort  ne  paraît  pas  comme  femme  :  les  Scandinaves  et 
les  Slaves  lui  ont  donné  le  sexe  féminin,  tandis  que  les 
Finnois  et  les  LiUiuaniens  lui  attribuent  indifféremment 
les  deux  sexes.  Les  Scandinaves  se  représentaient  la  Mort, 
sous  le  nom  de  Halya  ou  Hely  comme  une  déesse  noire, 
ne  tuant  pas,  mais  saisissant  les  morts,  à  l'exception  des 
guerriers  tombés  sur  le  champ  de  bataille.  Les  &mes  de 
ceux-ci,  recueillies  par  les  Walkyries,  messagères  du  dieu 
Odin,  étaient  conduites  au  Walhalla,  séjour  de  toute  fé- 
licité, et  non  dans  l'Enfer.  D'autres  divimtés  que  celles  du 
monde  souterrain  s'emparaient  également  des  âmes  : 
ainsi,  Ràn,  déesse  de  la  Mer,  attirait  à  elle  avec  un  filet 
les  corps  de  ceux  qui  s'étaient  noyés  dans  ses  eaux. 

Chez  les  Chrétiens,  pour  frapper  l'imagination  des 
peuples  et  augmenter  l'horreur  du  péché,  dont  la  mort 
est  le  fruit  et  la  conséquence,  on  imagina  de  prendre, 
comme  représentation  de  la  Mort,  l'image  réelle  d'un 
cadavre  <ttns  le  tombeau.  Pendant  plusieurs  siècles,  la 
Mort  fût  un  cadavre  desséché,  livide,  à  l'œil  creux,  aux 
chairs  pendantes.  C'est  seulement  aux  approches  de  la 
Renaissance  qu'elle  se  présente  sons  la  forme  d'un  sque- 
lette, lorsque,  par  la  perfection  des  études,  les  artistes 
purent  connaître  l'anatomie  humaine.  Les  poètes  du 
moyen  Age  en  font  un  ennemi  toujours  vainqueur  de 
l'homme,  tantôt  l'attaquant  par  surprise,  tantôt  accou- 
rant à  la  voix  des  malheureux  qui  l'appellent  :  elle  est 
souvent  montée  à  cheval  ;  ici  elle  tient  un  arc  et  des 
flèches,  une  lance  ou  une  hache;  là  elle  fïappe  d'un  fouet 
à  quatre  lanières,  ou  porte  un  filet  pour  enlacer  les  hn- 
muns  ;  ou  bien  elle  tient  la  faux  qui  tranche  leur  exis- 
tence, et  elle  enrôle  les  morts  sous  sa  bannière  pour  en 
faire  les  soldats  de  sa  grande  armée.  On  la  compare  aussi 
à  un  garde  forestier,  qui  doit  avoir  l'œil  sur  les  arbres 
du  bois  destinés  à  toniber.  Non-seulement  elle  se  l>at  les 
armes  à  la  main  contre  l'homme,  mais  elle  le  cite  devant 
un  tribunal  Juridique;  c'est  probablement  dans  ce  sens 
qu'il  faut  entendre  ce  proverbe  :  «  Contre  la  mort  n'a 
point  d'appel,  i»  Les  artistes  traduisirent  les  idées  des 
poètes,  et  se  plurent  en  outre,  soit  à  multiplier,  dans  la 
décoration  des  tombeaux,  les  cadavres  rongés  de  vers  et 
les  squelettes  ;  soit,  dans  leurs  peintures  et  leurs  sculp- 
tures, à  représenter  la  Mort  avec  des  attitudes  et  des 
attributs  encore  plus  variés  (  V,  Danss  des  mosts).  Au 
XVI*  siècle,  le  goût  s'épura  un  instant,  et  se  rapprocha 
de  celui  des  Anciens  ;  mais  les  formes  repoussantes  ne 
tardèrent  pas  à  reparaître  et  à  dominer  :  la  Mort,  quand 
on  ne  la  confondit  pas  avec  le  Temps,  fut  toujours  peinte 
sous  la  forme  nue  d'un  squelette. 

K.  liossing,  Comment  les  Anciens  ont  représenté  la 
Mort,  traduit  en  français  par  Jansen  dans  le  RecueU  d$ 
pièces  intéressantes  concernant  les  antiquités,  Paris, 
1786;  Jacob  Grimm,  Mythologie  allemande,  2«  édition, 
Gcettingue,  1844,  in-8<>  ;  F.  Naumann,  la  Mort  sous  tous 
les  points  de  vue  (en  allem.),  Dresde,  1844,  in-12;  Alfred 
Maury,  Sur  le  personnage  de  la  Mort,  dans  la  Revue 
arcMologiqw ,  Paris^  1847-48;  E.-H.  Langlois,  Essai 
historique,  philosophique  et  pittoresque  sur  les  Danses 
des  morts,  complété  et  publié  par  MM.  Pottier  et  Baudry, 
Rouen,  185i,  2  vol.  çr.  in-8».  P— s. 

MORT  (Peine  de).  K .  Pbinb  capitale. 

MORT  CIVILS,  état  de  l'individu  qui,  par  suite  d'une 
condamnation  Judiciaire,  a  perdu  tous  les  droits  civils  et 
se  trouve  comme  retranché  de  la  société.  La  mort  civile  e 
été  supprimée  par  la  loi  du  3i  mai  1854.  Ce  n'était  pas 
une  peine,  mais  la  suite  ou  l'eiTet  de  la  condamnation  à 
la  mort  naturelle,  aux  travaux  forcés  à  perpétuité,  et  à  U 
déportation.  Par  la  mort  cirile,  le  condamné  perdait  la 
propriété  de  ses  biens,  qui  étaient  dévolus  à  ses  héritière 
comme  s'il  était  mort  naturellement  et  sans  testament! 


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MOR 


0  ne  pouvait  plus  ni  tranunettre,  par  donation  entre  Yifii 
on  par  teatament,  oe  qu*il  aurait  acquia  depuia  aa  con- 
damnation, ni  rien  recevoir  au  même  titre,  si  ee  n'est 
pour  cauae  d*alimenta;  lea  biens  acquia  après  la  con- 
damnation paaaaient  à  l*Ëtat  par  voie  de  déahérenoe  au 
moment  de  la  mort  naturelle.  Le  condamné  ne  pouyait 
encore  ni  exercer  une  tutelle;  ni  être  témoin  dans  un 
acte  authentique,  ou  en  justice;  ni  demander  ou  dé- 
fendre derant  un  tribunal,  si  ce  n'est  sous  le  nom  et  par 
le  ministère  d*un  curateur  que  nonmudt  oe  tribunal;  ni 
contracter  un  mariage  produisant  des  effets  civils,  et,  s*il 
était  marié  antérieurement,  ce  mariage  était  dissous 
ouant  à  ses  effets  civils.  La  mort  civile  était  encourue  à 
dater  de  Fezécotion  de  la  condamnation,  B*il  y  avait 
eu  débat  contradictoire,  et  seulement  au  bout  de  5  ans, 
al  la  condamnation  avait  été  prononcée  par  contumace  : 
dans  ce  dernier  caa,  les  biens  du  condanmé  étaient  admi- 
nistrés et  ses  droits  exercés,  pendant  les  5  années,  de  la 
même  manière  que  ceux  d*un  abaent.  Si  le  contumace  se 
présentait  ou  était  saisi  après  le  délai  de  grâce,  et  qu'il 
lût  absous  ou  condamné  a  une  peine  n'emportant  pas  la 
mort  dvile,  il  rentrait  dans  la  plénitude  de  ses  droits 
civils  pour  Tavenlr,  maia  le  prenuer  Jugement  conservait, 
pour  rintervalle  écoulé  entre  les  dnq  ana  et  la  comparu- 
tion en  Justice,  les  effets  que  la  mort  civile  avait  pro- 
duits. Si  le  contumace  mourait  pendant  le  délai  de  griu», 
Il  était  réputé  mort  dans  Tintégrité  de  ses  droits.  En 
aucun  cas  la  prescription  de  la  peine  ne  réintégrait  le 
condamné  dans  ses  droits  dvils  pour  Tavenir.  Y,  Dea- 
quiron,  Traité  de  la  mort  cwUe  en  France,  1821,  in-8®. 

HORTAILLàBLES.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictùmnaire 
de  Biographie  et  d*Histotre, 

MORTAISE,  cavité  ou  entaille  pratiquée  dans  TéiMda- 
seur  d'une  pièce  de  bois  ou  de  métal  pour  recevoir  le 
tenon  d'une  autre  pièce,  de  manière  à  former  un  assem- 
blage. 

MORTALITÉ,  mot  désignant,  soit  la  condition  inva- 
riable des  êtres  animés ,  qui  est  de  mourir,  soit  la  mort 
d'une  quantité  plus  ou  moms  considérable  d'hommes  ou 
d'animaux  emportés  en  peu  de  temps  par  la  même  ma- 
ladie, soit  enfin  la  quantité  d'individus  de  l'espèce  hu- 
maine qui,  sur  un  certain  nombre  de  vivants,  meurent 
dans  le  cours  d'une  année.  Dans  cette  demiénre  accep- 
tion, la  mortalité  suggère  un  certain  nombre  de  remar- 
ques d'Économie  politique.  La  mortalité  s'apprécie  géné- 
ralement par  le  rapport  des  décès  à  la  population ,  et , 
bien  que  le  nombre  dea  habitants  et  celui  des  morts  ne 
soit  pas  constaté  dans  tous  les  pays  de  manière  à  donner 
des  résultats  certains,  on  croit  que  les  chiffres  suivants, 
relatifs  à  l'Europe,  sont  assez  près  de  la  vérité  :  dans  le 
Nord,  1  décès  pour  41  habiunts  ;  dans  le  centre,  1  pour  40  ; 
dans  le  Midi,  1  pour  34.  Toutefois,  des  climats  trop  rigou- 
reux donnent,  aussi  bien  que  les  climats  très-chauds,  une 
proportion  défavorable  :  pendant  une  période  de  6  an- 
néeÂ,  on  a  conataté  en  Islande  1  décèa  par  30  habitants. 
La  mortalité  est  ai^ourd'hni  de  1  pour  45  habitants  en 
France  et  en  Angleterre,  de  1  pour  38  en  Prusse,  de  1 
pour  33  en  Autriche.  Les  populations  des  villes  payent  à 
la  mort  un  tribut  plus  élevé  que  lea  populations  rurales  : 
Il  a  été  constaté,  en  Belgique,  que  le  rapport  était  de 

1  mort  sur  37  habitante  dans  les  villes,  et  de  1  sur  47 
dans  les  campagnes.  Les  chiffres  recueillis  parles  statisti- 
ciens tendent  à  établir  qu'il  existe  un  rapport  direct  entre 
la  fécondité  et  la  mortalité,  c-à-d.  que  le  nombre  des 
nalasances  est  réglé  par  celui  des  décès;  d'où  l'on  conclut 
que  la  population  tend  toujours  à  prendre  un  certain  ni- 
veau, déterminé  par  la  quantité  des  produits.  On  a  éga- 
lement remarque  que  les  morts-nés  du  sexe  masculin 
•ont  notablement  plus  nombreux  que  ceux  du  sexe  fémi- 
nin; que  la  mortalité  des  mâles  est  aussi  plus  grande 
pendant  les  premiers  mois  qui  suivent  la  naissance,  et 
qu'elle  devient  à  peu  près  la  même  pour  les  deux  sexes 
après  la  période  de  l'allaitement  ;  que  la  mortalité  des 
femmes  augmente  dans  une  forte  proportion  de  14  à 
18  ans  ;  que  de  21  à  20  ans  la  mortaliâ  des  hommes  l'em- 
porte de  nouveau,  et  que  de  26  à  30  l'égalité  tend  à  se 
rétablir.  Quoique  la  vie  moyenne  dea  femmes  soit  un  peu 
plus  longue  que  celle  dea  hommes^  on  a  cru  reconnaître 
qu'il  y  a  plus  de  centenairea  chez  ceux-ci  que  chez  celles- 
là.  La  durée  moyenne  de  la  vie  en  France  a  été  en  aug- 
mentant depuis  un  siècle  :  elle  n'était  guère  que  de  33  ans 
au  xviu*  siècle,  elle  est  aujourd'hui  de  40  ans  10  moia 
17  Jours,  d'après  les  calculs  de  Bouvard.  Mais  elle  varie 
singulièrement  selon  les  départements,  sans  qu'on  ait 
une  explication  nette  de  cette  différence  :  unsi,  elle 
atteint  54  ana  8  moia  20  Joun  dana  les  Haatea-Pyrénéeâi 


53  ana  8  mois  16  Jours  dans  l'Orne,  tandla  qu'elle  n'est 
que  de  31  ans  1  mois  28  Jours  dans  les  Ek)uchefr-dii- 
Rhône,  et  de  31  ans  8  moia  5  Jours  dans  la  Seine.  Lei 
Basses-Pyrénées,  l'Ariége,  la  Vienne,  les  Deux-Sèvres,  le 
Cantal,  les  Ardennes,  la  Moselle  et  la  Haute-Marne  sont 
des  départements  placés  dans  des  conditions  favorables 
à  la  longévité;  le  Var,  Vauduse,  les  Basses -Alpes  Je 
Cher,  le  Morbihan,  le  Finistère,  lllle-et-Vilaine,  sont 
dans  la  plus  mauvaise  catégorie.  En  recherchant  d'après 
le  nombre  des  naissances  et  la  longévité  la  période  né- 
cessaire pour  le  doublement  de  la  population,  on  a  trourë 
que  ce  doublement  s^'effectuerait  en  70  ans  dans  la  Mo- 
selle ,  tandis  qu'il  demanderait  dans  l'Eure  17  siècles 
et  demi. 

On  appelle  Tables  de  mortalité,  des  tableaux  qui  pré- 
sentent une  série  décroissante  de  nombres  exprimant  la 
loi  en  vertu  de  laquelle  un  groupe  d'individus  d'âge  égal 
arrivent  successivement  à  la  mort.  La  table  la  plus  an- 
cienne que  l'on  connaisse  a  été  dressée  par  Halley;  elle 
exprime  la  loi  de  la  mortalité  dans  la  ville  de  Breslau, 
d'après  les  observations  faites  de  16S7  à  16U1.  Des  tables 
de  ce  genre  furent  bientôt  disposées  par  Smart  poor  la 
ville  de  Londrea,  par  Dupré  de  Sadnt-Maur  pour  Paris, 
par  Sussmilch  pour  Vienne  en  Autriche,  par  Muret  pour 
les  campagnes  de  la  Suisse,  etc.  En  1746,  Deparcieui 
publia  son  Essai  sur  les  probabilités  de  la  vie  humaint, 
ouvrage  qni  fit  autorité  pendant  prèa  d'un  siècle,  et  qui 
Jouit  encore  d'une  grande  estime,  bien  que  des  recher- 
ches nouvelles  l'aient  rectifié  sur  quelques  point.  En  1783, 
Price  donna  une  nouvelle  table,  devenue  classique  en 
Angleterre,  bien  (Qu'elle  assign&t  k  la  vie  humaine  une 
trop  grande  rapidité  ;  cette  table  a  été  refaite  à  diverses 
époques  par  Finlayson,  par  Farr  et  Milne.  En  1806,  Du- 
villard  publia  en  France  une  autre  table,  qui,  faite  à  une 
époque  où  diverses  causes  abrégeaient  la  vie  humaine, 
donne  une  mortalité  trop  rapide  :  on  la  trouve,  ainsi  que 
celle  de  Deparoieux,  dans  V Annuaire  du  Bureau  des 
Longitudes.  Nous  avons  enfin  des  tablea  de  mortalité 
disposées  par  M.  de  Montferrand  en  1838,  et  par  M.  Que- 
telet  en  1845.  Celle  de  M.  de  Montferrand,  calculée  sur 
11,793,289  décès,  donne,  pour  10,000  naissances,  le 
nombre  de  survivants  depuis  1  an  Jusqu'à  104  ans  : 


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81 

48 

ss 

68 

ss 

84 

S3 

10,000 

6,788 

5,601 

8.825 

5S3 

1 

8,471  ' 

28 

6,678 

48 

5,548 

64 

3,688 

85 

427 

S 

8,059 

28 

6,604 

44 

5,478 

65 

8.540 

86 

854 

8 

7,808 

84 

6,586 

45 

5,416 

66 

8,889 

87 

280 

4 

7,643 

85 

6,451 

46 

5.886 

67 

8,836 

88 

825 

5 

7,584  . 

86 

6.885 

47 

5,878 

68 

8,0SO 

89 

119 

6 

7,488  1 

87 

6.887 

48 

5,804 

69 

8,925 

90 

189 

7 

7,858 

88 

6,853 

49 

5.151 

70 

8,770 

91 

109 

8 

7,885 

89 

6,807 

50 

5,086 

71 

8,608 

98 

92 

9 

7,889 

80 

6,158 

51 

5,017 

78 

8,488 

93 

64 

10 

7,188 

81 

6,106 

58 

4.943 

78 

8.884 

94 

48 

11 

7,141 

88 

6,061 

53 

4,868 

74 

8,017 

95 

36 

18 

7,109 

83 

6,017 

54 

4,780 

75 

1,811 

96 

Sô 

18 

7,078 

84 

5,978 

55 

4,693 

76 

1.616 

97 

18 

14 

7,048 

85 

5,9^ 

56 

4.605 

77 

1,431 

98 

12 

15 

7,006 

36 

5.881 

57 

4,513 

78 

1,875 

99 

16 

6,965 

87 

5,835 

58 

4,416 

79 

1,185 

100 

17 

6,985 

88 

5,788 

59 

4,817 

80 

995 

101 

18 

6.881 

89 

5,748 

60 

4,815 

81 

878 

108 

19 

6.888 

40 

5,698 

61 

4,104 

88 

751 

108 

80 

6,785  ! 

1 

41 

5,667 

68 

3,976 

88 

688 

104 

'  1 

Pour  les  opérations  d'asaurances  sur  la  vie  ou  de  pla- 
cement viager,  il  faut  connaître  les  probabilités  de  la 
vie  humaine,  c.-à~d.  les  chances  que  la  personne  assurée 
ou  sur  la  tète  de  laquelle  on  place  un  capital  peut  avoir, 
eu  égard  à  son  &ge,  de  vivre  encore.  Mtus  les  tables  de 
mortidité  sont  toutes  plus  ou  moins  inexactes,  parce  que 
les  recensements  de  population  n'ont  pas  une  exactitade 
rigoureuse,  et  (pie,  d'ailleurs,  les  éléments  de  la  popu- 
lation se  modifient  avec  lea  circonstances  et  avec  le 
temps.  Il  en  résulte  que  les  Compagnies  d'assurances 
emploient,  dit-on,  selon  leur  intérêt,  ou  les  tables  à  mor- 
tahté  lente,  ou  les  tables  à  mortalité  rapide.  Ainsi,  elles 
se  servent  de  la  table  de  Duvillard  pour  les  sommes 
payables  au  décès  des  aasurés  ;  mais,  pour  les  assurances 
payables  du  vivant  dea  assurée,  elles  font  usage  de  la 
table  de  Deparcieux.  B» 


NOS 


1279 


MOS 


XORTES-PAYES.  V.  ce  mot  dani  notre  Dhhonnairê 
i»  Biographie  et  <r Histoire, 

MORT-GAGE.  F.Antichrèsb. 

MORTIER,  mélanea  de  chaux  et  de  sable  ou  de  poux- 
lobne,  qui  sert  à  lier  entre  elles  les  pierres  des  ma- 

Sneries.  Le  mortier,  quand  il  a  résisté  à  l'action  des 
aences  auxquelles  il  est  surtout  sensible  dans  les 
oommencements  de  son  emploi,  durcit  de  plus  en  plus 
in  fieilliannt  :  c'est  à  cette  loi,  plutôt  qu'à  l'excellence 
des  mortiers,  qu'il  faut  attribuer  la  consenratipn  des  con- 
tractions monumentales  des  Romains,  faites  d'ailleurs 
srec  tout  le  soin  possible  et  sans  souci  de  la  dépense. 
Aujourd'hui  on  construit,  avec  les  mortiers  fabriqués 
d'après  les  procédés  de  l'ingénieur  Vicat,  des  maçonne^ 
ries  qd  ont,  après  deux  ans  seulement  d'existence,  plus 
de  dureté  que  celles  des  Romains  :  la  qualité  de  la  chaux 
est  le  point  essentiel.  Si  l'on  ne  suit  pas  rig;oureusement 
les  règles  prescrites  à  cet  égard,  c'est  que  la  résistance 
ibsolue  des  maçonneries  n'est  pas  toujours  ce  qui  préoc- 
cupe le  plus  le  constructeur,  et  qu'on  donne  une  plus 
grande  importance  à  la  célérité  du  travûl  et  au  prix  de 
revient  Lm  proportions  des  nuOières  qui  entrent  dans  la 
eomposition  des  mortiers  varient  selon  l'emploi  qu'on  en 
veut  fiûre  et  selon  la  nature  de  ces  matières.  Le  moyen 
ie  plus  ordinaire  pour  fabriquer,  le  mortier  consiste  à 
mélanger  la  chaux  avec  le  sable  ou  la  pouzzolane  au 
moyen  de  r€ibats,  longues  perches  terminées  par  un  mot^ 
oeau  de  bois  méplat  et  manœuvrées  par  des  hommes  : 
mais,  quand  on  a  besoin  d'une  très-grande  quantité  de 
mortier,  on  emploie,  pour  opérer  le  mélange,  le  manège 
à  rtnie  ou  le  tonneau  a  mortier,  mus  par  des  chevaux,  ou 
pv  de  petites  machines  à  vapeur,  mobiles;  ce  sont  des 
nmes  dans  l'un,  des  râteaux  tournoyants  dans  l'autre, 
gui  écrasent  et  mélan^nt  les  matières.  V,  Hassenfratz, 
traité  de  Vart  de  coIcvmt  la  pierre  calcaire,  et  de  fabri- 
iwr  toutes  sortes  de  mortiers,  ciments,  bétons,  etc., 
Paris,  1825,  in-i^;  Vicat,  Résumé  des  conncùssances  ac~ 
t^Us  sur  les  qtiaiités,  le  choix  et  la  convenance  des 
matériaux  propres  d  la  fi\brication  des  mortiers  et  ci- 
ments calcaires,  Paris,  1828,  io<4^. 

MORTiBK,  vase  à  fond  hémisphérique,  évasé  dans  sa 
partie  supérieure,  fait  de  fer  ou  de  bronze  fondus,  de 
marbre,  de  pierre,  de  verre,  ou  de  bois,  et  dont  on  se  sert, 
sartoQt  en  Pharmacie,  pour  y  réduire  en  poudre  avec  un 
pibn  certaines  substances. 

■oiTiea,  bouche  à  feu,  faite  à  peu  près  comme  un 
mortier  à  piler,  et  dont  on  se  sert  pour  lancer  des  bom- 
bes, ou  des  carcasses  pleines  de  pierres  ou  de  matières 
ioiUmmables.  L'&me  de  la  pièce  a  de  longueur  à  peu 
près  une  fois  et  demie  son  calibre.  Il  est  parlé  de  mor- 
tiers au  sié^B  de  Naples  par  Charles  VTTT  ;  les  Turcs  en 
firent  usage  ao  siège  de  Rhodes  en  1522.  Les  mortiers 
tOQt  de  bronze  et  quelquefois  de  fer  fondus. 

HORTiEK,  coiffure.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
tt  (T  Histoire, 

MORTIFIGATION,  mot  qui  désigne  les  austérités  et 
les  jeOoes  qui  servent  à  dompter  les  appétits  déréglés  du 
corps. 

mosaïque  ,  assemblage  de  petits  cubes  réguliers  de 
marbre,  de  pierre,  de  matières  vitrifiées,  qui,  réunis  à 
l'aide  de  mortier,  de  stuc,  ou  d'un  mastic  formé  de  chaux 
et  de  poudre  de  marbre,  ou  de  résine  et  de  pl&tre,  forment 
des  dessins,  des  ornements,  des  figures  même.  Le  mot 
Tient,  dit-on,  de  Musia  ou  Musiva,  parce  qu'on  attribuait 
aux  Muses  ce  genre  de  travail,  ou  parce  qu'elles  avaient 
été  représenta  en  mosaïque.  Le»  œuvres  de  cet  art 
furent  appelées  en  latin  opus  tessellatum,  k  cause  des 
petits  cubes  dont  elles  étaient  formées,  et  opus  sectUe , 
quand  elles  étaient  faites  de  feuilles  minces  de  marbre , 
taillées  suivant  le  dessin  qu'on  voulait  exécuter.  On  ap- 
pelait tossi  la  mosaïque  en  général  opus  musivum.  La  mo- 
saïque est  une  ingénieuse  application  de  la  peinture,  que 
Ton  tenta  dès  les  temps  anciens.  Chez  les  Perses,  on 
employa  d'abord  des  cubes  ou  dés  de  deux  couleurs  seule- 
ment ,  disposés  de  diverses  façons  ;  puis  on  varia  les  des- 
sins et  les  nuances  an  point  d'imiter  les  lignes  et  les  cou- 
leurs des  étires;  enfin  les  marbres  les  plus  recherchés 
furent  appelés  à  remplacer  la  brique  et  les  autres  maté- 
riaux communa  employés  primitivement  à  la  composition 
^ces  ouvrages.  La  Bible  nous  apprend  que  le  pavé  du  pa- 
^  d'Assuérus ,  composé  de  porphyre  et  de  marbre 
blanc ,  était  embelli  de  plusieurs  figures  d'une  admi- 
rable variété.  Chez  les  Grecs,  à  la  mosaiUque  à  compar- 
tments  (  liihostrôios)^  composée  de  pièces  de  rapport  de 
diverses  couleurs  et  d'égales  dimensions,  et  destinée 
principalement  à  paver  les  édifices,  on  substitua  par  la 


suite  la  morgtiétorte  en  pierre,  que  Pline  appelait  o^sniis 
paoïmenti  grœcanict.  Ce  genre  d'ouvrage,  encore  en  &vear 
chez  les  Italiens  de  nos  Jours  sous  le  nom  de  lavoro  a 
composto,  diffère  du  pr&édent  en  ce  que  les  diversea 
pièces  dont  il  se  compose  n'ont  de  grandeurs  et  de  formes 
déterminées  que  par  les  exigences  du  sujet  qu'il  s'agit  de 
représenter.  On  imagina  ensuite  une  autre  mosaïque 
appelée  opus  vermiculatwn,  parce  qu'elle  était  formée  de 
frajgments  de  marbre  irréguliers  et  extrêmement  petits , 
disposés  en  zones  que  l'on  compara  à  des  vers  pressés  les 
uns  contre  les  autres  :  on  mêlait  à  ces  fragments  une 
sorte  de  stuc,  et  l'on  formait  ainsi  une  p&te  qu'on  impli- 
quait sur  des  dessins  en  relief  ou  qu'on  disposait  sur  un 
plancher  de  la  même  manière  que  les  cubes.  Cette  mo- 
saïque était  d'autant  plus  recherchée,  qu'elle  permettait 
aux  artistes  d'y  représenter  des  figures  géométriques  et 
des  dessins,  des  animaux  et  des  personnages,  et  Jusqu'à 
des  si^ets  entiers  de  la  mythologie  et  de  l'histoire.  Ces 
sortes  d'ouvrages  avaient  acquis  une  grande  importance 
cruand  la  Grèce  passa  sous  la  domination  romame  :  car 
1  immense  navire  que  fit  construire  Uiéron  II,  roi  de 
Syracuse,  contenait  un  pavage  en  mosaïque  représentant 
toute  Vlliade, 

Ce  fut  sous  Sylla  que  l'usage  des  mosaïques  s'intro- 
duisit à  Rome  :  cet  art  y  atteignit  une  perfection  remar- 
quable. Il  n'y  a  pas  de  maison,  k  Herculanum  et  à  Pom- 
péi ,  qui  n'ait  au  moins  son  atrium  pavé  en  mosaïques  de 
dessins  infiniment  variés  ;  à  plus  forte  raison  Rome 
a-t-elle  fourni,  dans  ses  monuments  en  ruines,  une 
énorme  quantité  de  ces  sortes  d'ouvrages  :  dans  tous  les 
pays  où  les  Romains  ont  étendu  leurs  conquêtes,  on  a 
également  trouvé  beaucoup  de  mosaïques.  Les  plus  belles 
aue  l'on  conserve  à  Rome  sont  :  au  musée  Pio-Glémentin, 
dans  la  salle  circulaire,  la  mosaïque  d'OtricoIi ,  représen- 
tant une  tète  de  Méduse,  avec  une  bordure  où  sont 
figurés  des  combats  de  Centaures  et  des  groupes  de  Tri- 
tons et  de  Néréides,  de  grandeur  naturelle;  —  au  musée 
Capitolin^  une  mosaïque  faite  au  m*  siècle  avant  notre 
ère  par  Sosus  pour  Attale,  roi  de  Pergame ,  trouvée  à  la 
villa  d'Adrien ,  près  de  Tivoli ,  et  qui  représente  une 
coupe  dans  laquelle  boivent  des  coloinbes  ^  k.  Asabotum)  ; 
c'est  un  des  plus  parfaits  ouvrages  de  ce  genre  ;  —  au 
palais  Barbenni ,  une  mosaïque  provenant  de  Palestrina 
(  ancienne  Préneste  ) ,  et  dont  le  sujet  est  l'enlèvement 
d'Europe  ;  —  au  palais  Borghèse ,  un  Orphée  entouré 
d'animaux.  On  voit  encore  à  la  villa  Albani  une  mosaïque 
trouvée  dans  le  pays  d'Urbin,  et  qui  représente  une  éa>le 
de  philosophes,  et  à  Palestrina,  sur  l'emplacement  qu'oc- 
cupait le  temple  de  la  Fortune,  une  superbe  mosaïque 
représentant  des  rivages  égyptiens,  et  crue  Pline  dit  avoir 
été  exécutée  au  temps  de  bylla.  En  1831,  on  a  trouvé  à 
Pompéi,  dans  la  maison  de  Pan  ou  du  Faune,  une  mo- 
saïque de  5  met.  de  long  sur  2  met.  et  demi  de  hauteur, 
représentant  une  bataille  entre  les  Grecs  et  les  Perses. 
Dès  1762,  dans  la  villa  de  Cicéron  de  la  même  ville,  on 
avait  découvert  une  mosaïque  en  verre,  œuvre  de  Dios- 
coride  de  Samoa,  représentant  une  duise.  Dans  une 
autre  on  voit  une  répétition  théâtrale.  En  Espagne,  la 
mosaïque  d'Italica  représente  des  jeux  du  cirque,  et, 
alentour,  les  bustes  des  Muses  dans  des  médaillons  cir- 
culaires. En  France,  les  fouilles  opérées  à  la  Maison 
Carrée  de  Nîmes  ont  mis  au  jour  des  mosaïques  fort 
intéressantes;  on  en  a  également  découvert  à  Orange, 
Riez,  Fréjus,  Aix,  Vienne,  Lyon,  Autun,  Bordeaux;  le 
musée  d'antiquités  de  Rouen  en  possède  une  qui  était 
enfouie  dans  la  forêt  de  Bretonne.  D'autres  ont  été  re- 
cueillies en  Saxe,  dans  le  Wurtemberg,  et  Jusqu'en  An- 
gleterre. C'est  au  temps  de  l'Empire  romain  que  fut  in- 
venté le  genre  de  mosaïque  appelé  opus  alexandrinum 
(K.  Alexandrin  —  Appareil). 

L»i  mosaïstes  romains,  frappés  du  défaut  de  vivacité 
des  couleurs  dans  la  mosaïque  à  compartiments  des  Grecs, 
recoururent  aux  pierres  précieuses,  aux  émeraudes,  aux 
turquoises,  aux  onyx ,  aux  agates,  aux  cornalines,  aux 
sardoines,  etc.  Mais  bientôt  la  cherté  de  ces  matériaux 
les  força  à  chercher  des  substances  moins  coûteuses  et 
comparativement  aussi  brillantes.  Ce  fût  ainsi  qu'on  eut 
l'idée  d'employer  des  pâtes  de  verre.  Les  ouvrages  qu'on 
obtint  avec  cette  matière  nouvelle  se  distinguèrent  sur- 1 
tout  par  la  vivacité  du  coloris,  par  la  netteté  et  le  fini  du 
dessin;  et  dès  lors  les  mosaïques  de  verre  furent  adop- 
tées non-seulement  pour  les  pavés  et  les  voûtes  des  édi- 
fices, mais  encore  pour  le  revêtement  des  murailles,  des 
colonnes,  et  même  des  meubles.  La  p&te  de  verre,  dans 
les  travaux  de  mosaïque,  devint  d'un  usage  général  dès  le 
règne  de  Constantin.  Ce  genre  de  travail ,  honoré  au  point 


/ 


MOS 


12S0 


MOS 


Îae  Théodose  exempta  des  ser?ices  pablics  ceux  qui  B*y 
▼raient,  finit,  sous  le  Bas-Empire,  par  remplacer  la 
peinture.  Les  mosaïstes  byzantins  apportèrent  à  leur  art 
de  grands  perfectionnements  :  ainsi  ils  imaginèrent  de 
lecouvrir  de  petits  cubes  de  marbre  avec  une  couche  de 
ferre,  sous  laquelle  ils  introduisaient  des  feuilles  d*or  ou 
d*arsent  :  telle  fût  l'origine  de  la  peinture  en  émaU. 
L'élise  de  S'*-Sophie  à  Gonstantinople,  les  basiliques 
romaines  de  S**-^nès,  de  S*-C6me  et  S*-Damien,  de 
S^-Pierre  et  S*-Pauf  hors  les  murs,  les  églises  de  S^Vital 
et  de  S^Apollinaire  à  Ravenne,  de  S'-Marc  à  Venise, 
fournissent  des  exemples  remarquables  de  la  richesse 
avec  laquelle  ces  artistes  décoraient  les  édifices.  Aux 
xu*  et  XIII*  siècles,  il  y  eut  d*habiles  mosaïstes  en  Italie, 
Jacopo  et  Mino  de  Torrita ,  Jacopo  de  Camerioo ,  André 
Tafl ,  Gaddo  Gaddi ,  etc. 

La  mosaïque  en  p&tes  de  verre  se  répandit  ailleurs 
qu'en  Orient  et  en  Italie  pendant  le  moyen  âge.  Il  existe 
à  Fabbaye  de  S*-I>enis  deux  fragments  de  ce  genre,  pro- 
venant des  chapelles  du  rond^point  du  chœur;  on  les 
rapporte  au  xn*  siècle,  au  temps  de  l'abbé  Suger. 

Ge  fut  la  mosaïque  de  pavage  qui  fut  surtout  en  usage. 
Au  X*  siècle  d^à,  le  pavé  des  églises  était  formé  de 
pierres  de  diverses  couleurs  représentant  des  sujets  his- 
toriques. Au  XI*  appartiennent  le  pavé  de  l'église  de 
Reims,  exécuté  par  Guyon  Widon  avec  de  petites  pierres 
de  Jaspe,  de  porphyre,  de  marbre,  peintes  et  émaillées, 
représentant  dans  plusieurs  cartouches  les  Apôtres,  les 
quatre  Saisons,  les  sept  Arts  libéraux  et  les  douze  Mois , 
et  le  pavé  dé  l'église  S'-Philippe  de  Tournus,  ^i  repré- 
sente, entre  autres  choses,  les  signes  du  zodiaque.  Un 
pavé  de  l'église  d'Ainay,  à  Lyon,  représentant  le  pape 
Pascal  n,  est  aussi  du  xi*  siècle. 

Un  genre  particulier  de  mo»ûque  est  celui  de  la  pierre 
tombale  de  Frédégonde,  qui  était  autrefois  à  réglise 
S*-Germain-des-Prés,  à  Paris,  et  qu'on  a  transportée  à 
l'abbaye  de  S*-Denis.  Les  contours  des  vêtements  et  des 
ornements  sont  dessinés  par  des  lames  de  cuivre;  les 
espaces  sont  remplis  par  une  matière  composée  de  chaux, 
de  porphyre  et  de  marbre  blanc  concassés  irréguliè- 
rement. 

Aux  XV*  et  XVI*  siècles,  la  mosaïque  de  pavage  et  la  mo- 
saïque de  tableaux  et  de  revêtement  reprit  une  grande 
activité  en  Italie.  De  ce  temps  datent  les  fabriques  de  mo- 
saïques de  Venise  pour  pavements,  dites  pavés  vénitiens. 
Les  plus  belles  mosaïques  modernes  sont  celles  dont  le 
pape  Glément  VIII  fit  décorer,  au  commencement  du 
xvn*  siècle,  la  coupole  de  S*-Pierre  de  Rome;  elles  sont 
l'œuvre  de  F.  Zucchi  et  de  P.  Rosetti  ;  les  pendentift  de 
la  coupole  sont  de  J.-B.  Calandro.  Au  commencement  du 
xvm*  siècle,  Christophoris  fonda  à  Rome  une  école  qui 
fournit  un  certain  nombre  de  mosaïstes  distinguai,  Bru- 
ghio,  Gonti,  Goccei,  Fattori,  Gossone,  Ottaviano.  Ge  fut 
dans  cette  école  que  l'on  exécuta  en  mosaïque  tous  les 
immenses  tableaux  d'autel  de  la  basilique  de  S^Pierre, 
copiés  d'originaux  des  meilleurs  peintres. 

La  mosaïque  n'a  guère  été  pratiquée  jusqu'à  nos  jours 
en  dehors  de  l'Italie.  Les  matières  qu'elle  emploie,  le 
marbre,  l'albàtre,  la  serpentine,  le  jaspe,  le  porphyre, 
l'agate,  l'aventurine,  la  calcédoine,  la  malachite,  etc.,  ne 
se  trouvent  point  partout,  et  il  en  coûte  des  sommes 
considérables  aux  mosaïstes  pour  obtenir  une  variété  de 
couleurs  et  de  nuances  qui  permette  de  représenter  toutes 
sortes  de  sujets.  Il  faut  5,000  petits  cubes  par  mètre  carré. 
On  peut  voir  au  ch&teau  de  S*-Gloud  un  dessus  de  table 
qui  fut  exécuté  par  des  artistes  des  Gobelins  au  temps 
de  Louis  XIV.  Sous  Napoléon  I*%  en  1808,  le  gouverne- 
ment fonda  à  Paris  une  école  de  mosaïque,  dirigée  par 
Belloni,  de  Florence.  Cest  de  cet  établissement  qu'est 
sortie  la  belle  mosaïque  qui  orne  le  pavé  de  la  salle  de 
Melpomène  au  musée  de  sculpture  du  Louvre.  L'école  fut 
supprimée  en  1823.  Une  manufacture  de  mosaïques  fut 
encore  créée  en  1829  par  Giuli,  de  Rome;  elle  a  fut  qu^- 
ques  travaux  pour  l'église  de  S^Denis  en  1834,  mais  elle 
n'existe  plus.  —  On  a  trouvé  récemment  près  d'Orange 
(Vaucluse)  une  ocre  argileuse  de  couleurs  variées,  qui,  dé- 
trempée dans  l'eau,  puis  convenablement  séchée,  est  sus- 
ceptible d'acquérir,  par  la  cuisson  à  un  degré  déterminé, 
les  qualités  de  la  pierre  la  plus  dure,  et  qui  peut  aussi,  au 
moyen  de  certains  principes  colorants,  prendre  toutes 
les  nuances  imaginables.  Les  matériaux  économiques  une 
fois  trouvés,  une  usine  a  été  créée  pour  les  soumettre  à 
la  taille,  partie  du  travail  qui  était  précédemment  fort 
longue  et  augmentait  considérablement  le  prix  de  revient 
de  la  mosaïque  :  les  machines  et  la  vapeur  y  remplacent 
le  ciseau  manié  par  l'homme.  Pendant  que  l'ocre  argi- 


leuse est  encore  molle  et  malléable,  on  la  soumet  à  Tope* 
ration  du  moulage  par  la  presse  et  au  moyen  de  moules, 
et  l'on  obtient  à  chaque  pression  une  quantité  considé- 
rable de  cubes,  d'une  ^lité  parfaite  de  grosseur  et  de 
forme;  puis  ces  cubes  subissent  l'opération  qui  leur 
donne  la  dureté  de  la  pierre.  Après  la  cuisson,  on  fait  1« 
triage  des  cubes,  on  choisit  et  on  classe  les  nuances.  Li 
mètre  carré  de  ces  cub^  ne  revient  qu'à  30  fr,  G*est  uni 
précieuse  découverte  pour  le  pavage  en  mosaïque. 

La  mosaïque  n'a  point  été  inconnue  aux  indigènes  de 
l'Amérique  :  on  a  trouvé  au  milieu  des  ruines  de  Mitla 
dans  la  province  mexicaine  d'Oaxaca,  des  arabesques 
des  labyrinthes,  des  méandres  formés  avec  de  petites 
pierres  carrées  enfoncéœ  dans  une  masse  d'argile. 

V.  Giampini,  Sur  les  moscOques  des  édifices  sacrés  et 
profanes^  en  latin,  Rome,  1600-09,  2  vol.  in-fol.  ;  Furietti, 
De  musivis  vel  picturœ  mosçiïcœ  artis  origine,  Rome, 
1752,  in-4<*;  Le  Vieil,  Essai  sur  la  peinture  en  mosaïque, 
Paris,  1768,  in-12;  Fougeroux,  Traité  sur  la  falnrication 
des  mosaïques,  1769,  in-8';  de  Gaylus,  Essai  sur  la  ma- 
nière de  peindre  en  marbre,  dans  le  t  XXIX  des  Mém. 
de  VAcadém.  des  Inscriptions;  Spreti,  Compendio  stO" 
rico  delV  arte  di  comporre  i  musaïci ,  Ravenne,  1804, 
in-4<*  ;  Gurlitt,  Dissertation  sur  Vart  de  la  mosaMqw,  en 
allem.,  Hambourg,  1806;  J.-F.  Artaud,  Histoire  abrégée 
de  la  peinture  en  mosaïque,  Lyon,  1835,  in-rS*  ;  iku-bet 
de  Jouy ,  Les  mosaïques  chrétiennes  dss  basiliques  et  des 
églises  de  Rome ,  Paris,  1857,  in-8*.  B. 

MOSAISME  (de  M(^e)^  nom  donné  quelquefois  à  l'en- 
semble des  doctrines  relideuses  et  morales  des  Hébreux. 

MOSETTE.  V.  Camail. 

MOSGA  (Idiome),  idiome  parlé,  avant  la  conquête  es- 
pagnole, sur  le  plateau  de  Bogota,  en  Golombie,  par  la 
tribu  des  Moscas,  et  qui  est  aujourd'hui  éteint.  Il  man- 
quait des  articulations  a ,  { ,  x.  On  y  distinguait  les  genres 
et  les  nombres  par  l'addiûon  de  suffixes  aux  substantifs. 
La  négation,  à  certains  temps  du  verbe,  s'Incorporait 
dans  la  racine.  Vers  la  fin  d^  xvm*  siècle,  on  a  découvert 
un  monument  graphique  de  pette  langue  :  c'est  un  calen- 
drier lunaire,  écrit  en  hiéroglyphes  du  genre  de  ceux  des 
Mexicains.  V.  Bem.  de  Luge ,  GrammcUica  en  la  lengua 
del  nuevo  regno  llamada  Mosca^  Madrid,  1619,  in-8^. 

MOSGOU  (Le  Kreml  ou  KacMUn ,  à).  Les  Russes  don- 
nent le  nom  de  Kreml  à  une  forteresse,  ou  encore  à  un 
quartier,  le  plus  souvent  situé  au  milieu  d'une  ville,  et 
entouré  d'un  rempart  et  d'un  mur.  Le  Kreml  de  Moscou 
s'élève  sur  un  mamelon  dont  la  Moskowa  baigne  le  pied, 
et  est  environné,  dans  une  étendue  de  3,900  met.,  d'un 
mur  épais  en  briques  vertes  et  rouges,  flanqué  d'un  grand 
nombre  de  vieilles  tours  rondes.  On  y  pénètre  par  une 
arcade  nommée  la  Porte  sainte ,  et  que  l'on  ne  peut  tra- 
verser que  tête  nue.  Les  édifices  qu'enferme  l'enceinte 
sont  surmontés  d'une  foule  de  coupoles,  de  dômes  bul- 
beux, et  de  flèches,  aussi  variés  dans  leur  style  que  dans 
leurs  formes  et  leurs  couleurs,  et  oui  forment  un  en- 
semble des  plus  pittoresques.  La  cathédrale  de  VÂssomp' 
tion  ou  du  Couronnement,  la  première  éslise  en  pierre 
qui  ait  été  bâtie  à  Moscou  (1475),  d'après  les  plans  d'un 
architecte  bolonais,  est  celle  où  les  czars  sont  sacrés;  on 
y  remarque  beaucoup  de  reliques,  et  une  image  de  la 
S^*  Vierge,  enrichie  de  pierrenes  et  attribuée  à  S^  Luc 
L*éçlise  S^'Michel  ou  des  Séptdtures,  ornée  de  fresques 
cuneuses ,  renferme  les  tombeaux  de  tous  les  grands 
princes  et  czars  Jusqu'à  Pierre  le  Grand,  hlwan  véliki, 
c.-à-d.  le  grand  Iwan,  est  un  clocher  isolé  près  de  réglise 
S*-Nicolas,  haut  de  90  met.,  terminé  par  une  coupole 
en  cuivre  doré  et  une  croix  colossale  en  lames  du  même 
métal,  et  contenant  une  énorme  cloche  enlevée  par 
Iwan  m  à  la  ville  de  Novpgorod.  Près  de  là  se  trouTtf 
aussi  la  fameuse  cloche  fondue  par  Monterine  f  V,  Glogh  x  ). 
Le  Kreml  contient  également  :  l'ancien  palais  des  pa- 
triarches de  Moscou,  où  s'assemble  aujourd'hui  la  sec- 
tion du  Saint-Synode  qui  a  son  siège  dans  cette  ville, 
l'ancien  palais  des  czars,  dit  Palais  anguleux  ^  à  canse 
de  son  revêtement  extérieur  qui  est  à  facettes;  le  nou- 
veau château  impérial,  construit  en  1849;  Tarsenal, 
fondé  par  Pierre  le  Grand,  reconstruit  en  1818,  et  où  se 
trouve  une  collection  d'armes  précieuses  ;  le  Trésor,  où 
sont  les  Joj'aux  de  la  couronne,  les  portraits  de  tons  les 
czars  et  czarines,  plusieurs  trônes,  les  vêtements  que 
portait  Pierre  le  Grand  dans  les  chantierB  de  Saar 
dam ,  etc. 

MOSQUÉE,  temple  des  peuples  Musulmans.  Le  mot 
vient  de  l'arabe  mesdjid,  en  égyptien  mssguid,  par  Tin- 
termédiaire  de  l'espagnol  mezquita,  La  mesdjîd  est  la 
mosquée  simple,  le  lien  où  l'on  se  prosterne;  on  nomme 


Mot 


1281 


MOU 


4iâmi  (qai  rôanit)  celle  où  lek  croyattts  s'assemblent 
pour  la  pière  pabliqae  du  vendredi,  et  xaouia  celle  où 
WDt  inhomés  les  restes  de  quelque  saint  personnage,  et 
où  Ton  instmit  les  enfants.  Toute  mosquée  a  la  forme 
carrfe,  comme  la  Càba,  type  des  constructions  reli- 
gieuses, et  pour  que  le  mthrah^  point  de  direction  sur  la 
Mecque,  soit  établi  au  milieu  d^une  des  faces  du  carré. 
Elle  est  surmontée  de  tours  ou  minarets ,  que  domine  le 
cToiHHmt,  et  qu'entoure  une  galerie,  où  le  muezzin  peut 
ae  toomer  vers  tous  les  points  de  Thorlzon  en  appelant 
les  fidèles  à  la  prière.  LMntérieur  rappelle,  par  la  dispo- 
sition é»  colonnes  et  des  nefs,  celui  des  éslises  romanes. 
D  offre  certaines  dispositions  toujours  identiques  :  la 
kiMi,  niche  pr^quée  au  mUirabj  et  vers  laquelle  on  se 
tourne  en  pnant;  à  droite,  le  siège  du  cheikh,  et,  à 
mâche ,  la  tribune  des  muezzins  \  un  peu  plus  en  dédains 
de  la  nef,  la  tMmbwr,  chaire  à  escalier  droit,  où  se  tient 
debout  le  lAatib  ou  prédicateur.  Le  sol  est  couvert  de 
nattes  et  de  tapis,  sur  lesquels  on  ne  :doit  marcher 
qa'après  avoir  quitté  sa  chaussure.  Des  derges  brûlent 
près  du  mihrab,  éoB  lampes  sont  suspendues  aux  voûtes  ; 
les  mors  portent  ordinairement  des  inscriptions  tirées  du 
Koran  et  encadrées  dans  des  anJDesques.  Il  n'y  a  i^  au- 
tels, ni  tableaux,  ni  statues,  ni  sié|^  pour  les  croyants. 
Aa  dehors  on  a  gravé  des  inscriptions  cominémore^tives 
de  fondation  ou  de  restauration.  Autour  de  la  mosquée 
sont  des  fontadnes  et  des  piscines  pour  les  ablutions,  et 
one  maksoura  ou  salle  de  lecture.  Autroibis  on  y  voyait 
aosri  un  asile  pour  les  malades  ;  ces  sortes  d'hospices  ont 
presque  tons  disparu.  Le  génie  arabe  a  dfoloyé  toute  sa 
richesse  dans  rornementanon  des  mosquées  :  peinture, 
scalptore,  métaux  précieux,  verres  colorés,  mosaïques, 
tout  s*y  trouve  à  profusion. 

MOT,  toute  syllabe  ou  réunion  de  syllabes  qui  exprime 
aoe  idée  distincte ,  se  prononce  à  part  et  s'écrit  à  part. 
Qa&nd  le  mot  n'a  qu'une  seule  syllabe,  il  est  dit  mono- 
syliabe:  s'il  en  a  deux,  dissyllabe;  s'il  en  a  trois,  irii" 
syllabe ;a.}i  delà,  tous  les  roots  s'appellent  po{ysyi/a6s9. 
On  dislingue  les  mots  variables  ou  déclinables  et  les  mots 
fMcariabUs  ou  indéclinablts  :  le  terme  variable  s'ap- 
ftliouo  généralement  aux  langues  néolatines  et  à  Van- 
gia^;  et  aédinable,  an  grec,  au  ^atin .  à  l'allemand.  Les 
mots  variables  sont  ceux  dont  la  tenninCson  est  suscep-  ^ 
tible  de  s'infléchir,  comme  lev  noms  (^ectif  et  sub- 
stantif), les  articles,  les  pronoms,  les  veines  ;  les  inva- 
riables sont  ceux  qui  se  présentent  toi^ours  sous  la 
même  forme,  comme  les  adverbes,  les  prépositions,  les 
conjonctions,  les  interjections.  L'article  anglais  fait  partie 
des  mots  hdvuîables.  V.  Discocrs.  <  *  P. 

MOT  (Bon),  F,  Bon  mot. 

■or  d'ohdre,  —  DE  RALUEMBiiT.  Daûs  lo  langage  ipili- 
tiire,  on  wpelle  mot  Sordre  un  mot  donné*  pour  se  i^ 
connaître  ^s  les  patrouilles,  dans  les  rondes  de  nuit, 
dans  une  expédition.  Il  se  donne  tous  les  soirs  -à  l'année 
et  en  garnison.  La  série  des  mots  d'ordre  est  faite  au 
ndidstère  do  la  guerre  et  envoyée  par  (quinzaine  aux  g|é- 
nénux  qui  commandent  les  divisions  militaires.  A  Paris, 
le  ehef  de  l'État  donne  le  mot  d'ordre  aux  Tuileries.  Tout 
général  le  donne  dans  l'armée  qu'il  commande.  Le  mot 
6M  communiqQé  aux  chefs  de  poste  et  aux  ofBders  de 
ronde.  À  la  suite  du  mot  d'ordre  on  donne  chaque  Jour 
on  mal  de  raUimnent,  communiqué  à  chaque  sentinelle, 
et  qu'elle  exige  de  toute  ronde  ou  patrouille  qui  passe. 
On  postemii  reconnaît  une  patrouille  en  reçoit  le  mot 
d'ordre  et  lui  donne  celui  de  ralliement  :  au  çontraûre, 
an  doit  donner  le  mot  d'ordre  aux  rondes  d'officier  sup4- 
rieur,  et  elles  rendent  le  mot  de  ralliement.  En  temps 
de  goerre,  la  divulgation  du  mot  d'ordre  est  punie  de 
iBort  Les  mots  d'orars  et  de  ralliement  sont  n'importe 
qoels  mots  :  Louis  XVm  mourant  en  fit  un  Jour  une 
■orte  de  Jeu  de  mots,  en  donnant  deux  noms  de  villes  : 
Sakt-Denis,  Givet  (Ty  vais). 

MOTET,  autrefois  mottet  ou  motes,  en  latin  motteius, 
noMttff,  motelluM,  nom  qu'on  donna  pendant  le  moyen 
^e  à  des  morceaux  de  chant  demi-sacrés  et  demi-  pro- 
Aûies,  composés  sansrègles  précises,  en  prose  ou  en  vers, 
en  latin  on  en  français,  et  qui  faisaient  partie,  comme 
les  Notis,  les  ÊpUres  farcies  et  certaines  Proses,  de  ces 
pièces  de  fantaisie  que  le  clergé  laissa  pénétrer  dans  les 
é^aes  à  côté  du  plain-chant  traditionnel.  On  les  appe- 
lait mottets  (petits  mots),  parce  qu'ils  étaient  faits  sur 
une  jpériode  trèe-courte,  ou,  selon  d'autres,  du  latin  nHh 
^  ^nouvement) ,  parce  que  la  mélodie  en  était  plus 
BKNiTementée  que  le  plain-chant.  Le  motet  fut  ensuite 
«ne  chanson  purement  profane,  du  genre  des  hds,  des 
^''^'    IX  et  des  rondeaux  (V.  est  mots).  Dans  la  parti* 


tion  chorale,  la  voix  de  haute-contre  reçut  aussi  le  nom 
dé  mottetus,  parce  que,  chargée  de  fleurir  le  cnant,  elle 
avait'  plus  de  mouvement  que  les  autres  voix.  Enfin,  chef 
les  modernes,  le  motet  est  une  pièce  de  musique  des- 
tinée è  l'Église  et  composée  sur  des  paroles  latines  prises 
en  dehors  de  l'office,  comme  un  psaume,  une  hymne, 
une  antienne,  un  n^pons,  ou  quelque  verset  de  l'Écri- 
ture. B. 

MOTIF  (du  latin  motivus,  propre  à  mouvoir),  en  termes 
de  Philosophie,  influence  exercée  soit  sur  notre  intelli- 
gence, soit  sur  notre  volonté.  Delà  la  distinction  des  mo- 
tifs de  jugement  et  des  motifs  d^action.  Tout  Jugement 
prononcé  avec  certitude  a  pour  motif  Tévidence,  mani- 
festée par  l'un  quelconque  de  nos  moyens  de  connaître; 
tout  Jugement  conjectural  n'a  pour  motif  que  la  proba- 
bilité. En  ce  qui  concerne  nos  résolutions  et  nos  actions, 
un  motif  est  un  principe  raisonné  oui  les  détermine 
(K.  PamciPE).  On  s'est  armé  de  l'influence  des  motifs 
sur  la  volonté,  pour  nier  la  liberté  humaine  :  mais  la 
liberté  ne  serait  contrainte  que  si  nous  n'avions  pas  la 
conscience,  tout  en  oédant  aux  motifs,  de  pouvoir  leur 
résister,  et  il  arrive  souvent  que  nous  nous  déterminons 
sciemment  dans  un  sens  contraire  aux  motifs  les  iheil- 
leurs  et  les'  plus  puissants. 

MOTIF,  idée  principale  et  dominante  d'une  pièce  de 
musique.  C'est ,  pour  ainsi  dire ,  l'àme  de  la  mélodie 
(  V,  ce  mot)y  le  fil  qui  en  détermine  le  dessin,  qui  relie 
entre  eux  les  sons  et  en  fait  autre  chose  qu'une  série 
insignifiante.  C'est  dans  les  motifs  que  se  révèle  le  génie 
propre  du  compositeur  ;  c'est  dans  la  manière  de  les 
amener,  de  les  développer,  de  les  abandonner,  de  les 
reprendre,  qu'on  reconnaît  son  habileté. 

MOTION ,  dans  le  langage  parlementaire,  proposition 
faite  de  son  propre  mouvement  par  un  membre  d'une 
assemblée.  Une  nwtUm  S  ordre  est  celle  par  laquelle  on 
demande  la  parole  sur  l'ordre  qu'on  doit  suivre  dans  une 
délibération,  quand  plusieurs  propositions  se  trouvent  K 
la  fois  en  discussion. 

MOTC  PROPRIO.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bioora- 
vhie  et  d'Histoire,  i 

MOCCADES.  r.  Moquette. 

MOUCHARABY,  mot  dérivé  de  Tarabe.  et  par  lequel  on 
désigne  une  sorte  de  nalcon  fermé,  percé  de  mâchecoulia  ; 
(> .  ce  mot )  à  sa  partie  inférieure,  et  ordinairement  niacô 
au-dessus  d'une  porte  pour  en  défendre  l'entrée.  On  le 
nommait  aussi  Assommoirm 

MOUCHE,  nom  donné,  dans  la  Marine,  à  tout  petit 
navire  de  guerre,  brick,  goélette  ou  cutter,  de  marche  et 
d'évolutions  faciles,  qui  est  employé  à  épier  les  manoeu- 
vres de  rennemi  et  à  transmettre  des  ordres.  ■  . 

MoncBBf  p^t  Uiorceau  de  taflietas  noir  gommé,  de  la 
grandeur  d  une  aile  de  mouche,  que  les  dames  se  met^ 
talent  autrefois  sur  le  visage,  pour  cacher  quelque  défaut 
ou  pour  faire  ressortir  la  blancheur  de  leur  teint.  Au 
xvn*  siècle,  nulle  ne  sortait  sans  sa  boite  à  mouches, 
dont  le  couvercle,  doublé  d'un  miroir  à  IMntérieur,  per- 
mettait de  rajuster  les  mouches  qui  s'étaient  dérangées 
par  accident.  Les  mouches  rondes  s'appelaient  des  as- 
sassines; celle  placée  au  milieu  du  front  était  la  majeS' 
tuetêiê;  au  coin  de  l'œil,  la  passionnée:  sur  le  nez^ 
V effrontée;  sur  les  lèvres,  la  coquette;  celle  qui  cachait 
un  bouton ,  la  reoéleuse.  Au  temps  de  Louis  XV,  certains 
hommes  du  beau  monde  portèrent  aussi  des  mouches. 
Aujourd'hui,  on  n^en  fait  plus  guère  usage  que  dans  les 
bals  costumés.  —  Le  nom  de  mouche  a  été  donné  aussi 
au  petit  bouquet  do  barbe  qu'on  laisse  croître  sous  la 
lèvre  inférieure,  et  qu'on  a  également  appelé,  selon  les 
temps,  impériale  et  royale, 

MODCHs  (La),  ou  la  Bête,  Jeu  de  cartes  qui  se  Joue,  soit 
à  deux  avec  un  Jeu  de  piquet,  soit  à  quatre,  cinq  ou  six 
personnes  avec  un  Jeu  entier.  Les  cartes  ont  le  même 
rang  qu'au  piquet,  sauf  l'as ,  qui  ne  vient  qu'après  le 
valet.  On  en  donne  cinq  à  chaque  Joueur.  Chacun  peut 
passer,  si  son  Jeu  est  trop  mauvais;  celui  qui  voU  le  jeu 
peut  pren(hre  au  talon  autant  de  cartes  qu'il  en  veut 
écarter.  Aprè^  quoi,  si  un  Joueur  a  la  mouche,  c-àrd. 
toutes  cartes  de  même  couleur,  il  gagne  ce  que  tous  ont 
mis  à  la  corbeille,  et  ceux  qui  ont  vu  le  Jeu  prennent  la 
mouche,  c-àrd.  mettent  à  la  corbeille  autant  qu'elle  con- 
tenait. Sll  y  a  plusieurs  mouches,  celle  d'atout,  désignée 
par  la  retourne,  l'emporte;  à  son  défaut,  le  gagnant  est 
le  Joueur  dont  le  point  est  le  plus  élevé.  Si  personne  n'a 
de  mouche,  on  Joue,  chaque  Joueur  devant  fournir,  for- 
cer et  même  surcouper;  chaque  levée  gagne  le  5«  de 
l'enjeu  ;  celui  qui  ne  mit  pas  de  levée  prend  la  mouche  • 

MOUCHERON  (Le)  {Culeaa,  en  latin),  petit  poème 

81 


MOU 


1282 


HOU 


> 


de  413  Tera,  qui  nous  est  parvenu  tous  le  nom  de  Wt- 
gile,  et  dont  Toici  le  sujet  :  un  berger  s'endort  en  gardant 
son  troupeau  ;  un  serpent  va  lui  donner  la  mort^  lors- 
ou*un  moucheron  réveille  en  le  piquant  au  visage;  mais 
rinsecte  est  tué  par  celui  même  qui  lui  doit  la  vie.  Le 
berger  échappe  par  la  fuite  au  reptile,  revient  sur  lui  avec 
un  fort  bUon  de  chêne,  et  le  frappe  à  la  tête  d*un  coup 
mortel.  La  nuit  suivante,  tandis  (râril  sommeille,  Tombre 
du  moucheron  lui  appuatt  et  lui  reproche  son  Ingrati- 
tude. Touché  de  repentir,  il  lui  élève  un  petit  mausolée. 
Stace  et  Suétone  ont  fait  allusion  dans  leurs  écrits  au 
Moucheron  de  Virale;  mais  il  est  douteux  que  celui  que 
nous  possédons  soit  Tœuvre  du  célèbre  poète,  car  la  com- 
position et  le  style  en  sont  d'une  grande  faiblesse. 

MOUCHETTE.  V.  Larmier. 

MOUCHOIR,  linge  qu'on  porte  dans  sa  poche  pour  se 
moucher  et  s'essuver.  Les  mouchoirs  que  les  Anciens 

Sortaient  n'ont  gulro  servi  à  cet  usage,  du  moins  en  pu- 
lic;  c'étaient  le  plus  souvent  des  tissus  somptueux, 
imprégnés  d'odeurs.  La  siccité  du  nez  donnait  du  prix  à 
la  beauté.  Le  sudarium  et  Vorarium  des  Romains  étaient 
destinés  à  essuyer  la  sueur  du  visage  et  la  bouche.  Quand 
on  était  à  la  tribune,  au  thé&tre  on  dans  un  temple, 
on  devait  sécher  la  sueur  de  son  front  avec  sa  robe.  Chez 
les  Modernes,  on  a  généralement  abandonné  les  mou- 
choirs de  coton,  qui  excitent  des  cuissons  et  des  rougeurs 
à  la  peau,  pour  ne  prendre  que  des  tissus  de  lin  et  de 
chanvre;  les  mouchoirs  de  sole  appelés  foulards  sont 
même  devenus  trèsH»>mmuns.  Les  mouchoirs  de  tissus 
fins  et  brodés,  ornés  de  dentelles ,  sont  des  objets  de 
parure  et  de  luxe,  et  non  d'utilité.  —  Les  mouchoirs  de 
cou,  nommés  fichus,  se  font  en  matières  très-diverses, 
depuis  l'indienne  et  la  soie,  Jusqu'à  la  gaxe,  la  blonde,  et 
la  dentelle. 

MOUFLARD.  V.  Chanfrein. 

MOUILLAGE  (du  latin  mullare,  lécher,  laisser  aller, 
s.  ent.  l'ancre),  en  termes  de  Marine,  endroit  de  la  mer 
propre  à  jeter  l'ancre. 

MOUKHTACAR ,  précis  de  la  lé^slation  musulmane 
selon  le  rite  malékite ,  qui  est  celui  des  Arabes  de  l'Al- 
gérie. 11  a  été  écrit  par  Sidi-Khalil,  Jurisconsulte  du 
vm*  siècle  de  l'hégire,  et  se  divise  en  deux  parties  :  Tune 
comprenant  la  jurisprudence  religieuse,  et  l'autre  la  Ju- 
risprudence civile.  Sidi-Khalil  ne  touche  pas  au  dogme, 
quMl  suppose  connu  ;  car  ce  n'est  pas  un  traité  de  théo- 
logie qu'il  prétend  écrire,  c'est  un  rituel,  un  formulaire. 
Ses  prescriptions  sont  toutes  relatives  au  culte,  et  con- 
tiennent les  pratiques  légales  pour  les  purifications,  la 
prière,  les  cérémonies,  l'aumône,  le  jeûne,  et  le  pèleri- 
nage de  la  Mecque.  Après  deux  chapitres  sur  l'usage  de 
la  chair  des  animaux  et  sur  les  serments,  l'auteur  expose 
sans  beaucoup  d'ordre  les  matières  civiles,  la  çuerre  et 
le  droit  de  conquête,  la  constitution  de  la  famille,  l'es- 
clava^,  la  propriété,  les  successions,  la  législation  in- 
dustnelle  et  commerciale,  les  peines  à  in/liger  aux  crimes 
et  délits,  la  procédure,  etc.  Le  Moukhtaçar  a  été  traduit 
en  français  par  M.  Perron,  et  publié  par  ordre  du  gou- 
vernement en  1857.  R. 

MOULAGE ,  opération  qui  consiste  à  prendre  la  copie 
d'une  figure,  d'un  bas-relief,  d'un  ornement  quelconque^ 
an  moyen  d'un  moule  en  pl&tre  formé  sur  l'objet  lui- 
même.  Quand  le  plâtre  a  été  cuit  au  four,  pulvârisé,  et 
passé  au  tamis  de  sole,  on  le  délaye  plus  ou  moins  dans 
de  l'eau,  selon  la  fluidité  qu'on  veut  lui  donner.  Si  on 
veut  faire  seulement  le  moule  d'une  médaille  ou  d'un 
ornement  de  bas-relief,  on  imbibe  d'huile  ces  objets  au 
moyen  d'un  pinceau,  afin  d'tmpêcher  l'adhérenoe,  puis 
on  les  couvre  de  plâtre.  S'il  s'agit  de  mouler  une  figure 
de  ronde  bosse,  le  moule  est  formé  nécessairement  de 
plusieurs  pièces,  qui,  étant  toutes  réunies,  donnent  un 
creux  dont  les  proportions  sont  exactement  les  mêmes 
oue  celles  de  l'original  :  pour  s'en  servir,  on  imbiba 
u'huile  ces  diverses  parties,  on  coule  du  pl&tre  assez 
fluide  pour  s'introduire  dans  toutes  les  sinuosités  du 
moule,  et,  quand  ce  pl&tre  est  bien  sec,  on  enlève  succes- 
sivement les  parties  du  revêtement,  et  on  découvre  la 
figure  moulée.  On  nomme  balèvres  les  coutures  qui  s'a- 
perçoivent sur  cette  œuvre,  et  qui  ont  été  produites  par 
les  jointures  des  parties.  Le  même  moule  peut  servir  à 
faire  plusieurs  copies.  M.  Stahl  a  découvert  que,  pour 
obtenir  des  épreuves  d'une  grande  pureté,  il  suffit  d'en- 
duire de  chlorure  de  zinc  les  objets  à  mouler.  Dans  l'in- 
due trie  de  la  fonte,  on  se  sert  de  moules  de  terre,  dee- 
tin<:5  à  recevoir  le  cuivre,  le  bronze  et  la  fonte  liquéfiés; 
pour  empêcher  l'adhérence,  on  saupoudre  d'orainaire 
l'intérieur  des  moules  avec  une  poussière  très-fine  de 


chaxlxm  de  bols.  Cette  sdbetanoe,  nuisible  à  la  santé  des 
ouvriers,  commence  à  être  avantageusement  remplacée 
par  la  fécule  de  pomme  de  terre  x  l'idée  de  cette  substi- 
tution appartient  à  IL  Rony.  Le  mouhige  à  la  gélatine, 
ou'on  doit  à  M.  Hippolyte  Vincent ,  vers  1844,  est  uoe 
découverte  précieuse  pour  l'art  plastique  :  avec  la  géla- 
tine on  forme  des  moules  d'une  seule  pièce,  capables  ée 
reproduire  avec  une  exactitude  mathématique  les  sujets 
de  haut-relief  les  plus  compliqués,  et  cela  sans  balèvres 
ni  réparage,  sans  relouche  aux  épreuves  sorties  da 
moule,  et  avec  une  rapidité  incomparablement  plus 
grande  que  celle  des  anciens  procédés. 

On  ne  saurait  nier  que  les  Anciens  connnrant  le  mou- 
laoe;  il  existe  des  bsMeliefs  antiques  en  terre  cuite, 
rehaussés  de  peintures  polychromes,  qui,  par'^eur  iden- 
tité avec  des  s^|eiB  connus  et  souvent  décrits,  montrent 
qu'ils  ne  sont  pas  des  ouvrages  modèles  et  originaux, 
mais  habilement  moulés.  Cest  au  moulage  que  nous  de- 
vona  un  grand  nombre  de  figurines,  de  vases  et  d'orne- 
ments. André  Verrochio,  artute  italien  du  xiv*  siècle,  a 
eu  la  première  Idée  de  façonner  des  moules  en  pl&tre 
sur  le  visage  des  personnes  vivantes  on  mortes;  dans 
ces  moules  on  fond  des  masques  de  cire.  Vers  le  milieu 
du  xvni*  siècle,  cette  invention  fût  perfectionnée  par  le 
peintre  Benoist;  les  masçiues  de  cet  artiste  étaient  ani- 
més par  des  couleurs  si  naturelles  et  par  des  yeux 
d'émail  imités  avec  tant  d'art,  que  loaTent  on  les  con- 
fondait avec  les  modèles. 

MOULINS  (Église  Notre-Dame,  à).  Cette  église,  an- 
cienne chapelle  du  château  des  ducs  de  Bourbon,  érigée 
en  cathédrale  en  1817,  appartient  tout  entière  au  s^le 
ogival  tertiaire.  Très-remarquable  comme  chapelle  sei- 
gneuriale, elle  n'a  pas,  comme  église  épiscopale,  la  gran- 
deur et  la  dignité  nécessaires.  L'édifice  n*a  jamais  été 
achevé,  bien  que  la  façade  occidentale  soit  décorée  d'une 
rose  :  composé  seulement  de  11  travées,  il  offre  une  nef 
de  23  met.  de  long  sur  7'",50«  de  large,  avec  des  collaté- 
raux larges  de  4",25«,  et  des  chapelles  d'une  profondeur 
de  2™,50^.  La  construction  est  de  granit  et  dn  calcaire  le 
plus  compacte.  Les  piliers  qui  soutiennent  les  voûtes 
sont  hardiment  espaote,  et  entourés  de  colonnettes  f<n^ 
tement  engagées  ;  des  tores  disposés  avec  goût  y  tiennent 
lieu  de  ciutpitp  lUX.  Il  n'y  a  pas  de  triforium,  et  les  tra- 
vées support^^t  immédiatement  les  fenêtres.  Le  chevet 
est  terminé  de  la  manière  la  plus  heureuse  par  des  pani 
en  polygone.  En  plusieurs  endroits  on  admire  des  ritranx 
peints  du  commencement  du  xvi*  dècle.  Derrière  l'autel 
est  un  ensevelissement  du  Christ,  dont  les  personnage» 
portent  les  costumes  du  temps  de  François  I*'.  Dans  ud 
des  murs  de  l'église  est  encastrée  une  pierre  tombale,  sur 
laquelle  on  a  sculpté  en  demi-relief,  avec  une  efirayante 
vérité,  un  cadavre  rongé  par  les  vers. 

MOULURE ,  ornement  d'architecture  ou  de  sculpture 
placé  sur  le  nu  d'un  mur,  et  exécuté  en  pierre,  en  stne, 
en  pl&tre,  en  béis,  sur  les  façades  et  à  l'intérieur  des 
édifices,  ou  encore  en  bronze  et  en  métaux  précieux  sur 
les  flancs  d'un  vase  et  les  parois  d'un  meuble.  Parmi  lea 
moulures,  les  unes  sont  en  saillie,  les  autres  en  retrait 
ou  en  creux,  celles-ci  plates,  celle»-là  arrondies.  Le  fiUt 
ou  listel ,  le  larmier,  la  fasce  ou  plate-bande,  la  plinth, 
sont  des  moulures  plates  en  saillie  ;  Vooe  ou  quofi  à» 
rond,  la  baguette,  le  tare  ou  boudin,  sont  des  moulures 
rondes  en  saillie;  la  scatie,  la  gorge,  le  trochih,  le 
glvphe,  le  cavet,  le  eomoé,  sont  des  moulures  creuses.  H 
y  a  des  moulures  oui  ont  tout  ensemble  de  la  saillie  et 
du  creux,  comme  le  talon  et  la  doueime.  Les  monlores 
sont  susceptibles  d'une  certaine  ornementation,  comme 
des  billettes,  des  denticules,  des  feuillages,  etc. 

MOUQUETTE.  V.  Moquette. 

MOURRE,  jeu  italien.  V.  Mica,  dans  notre  Dktùm- 
naire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 

MOUSQUET.  )  V.  ces  moto  dans  notre  Dictùm- 

MOCSQUETATRES.  S      naire  de  Biog.  et  d'Bistoirt. 

MOUSQUETON ,  c-à-d.  petit  mousquet ,  nom  qu'on 
donne  à  une  arme  à  feu  plus  courte  et  plus  légère  que 
le  fusil,  èk  moitié  montée  sur  bois,  et  dont  on  se  sert 
dans  la  grosse  cavalerie ,  dans  les  hussards  et  dans  la 
gendarmerie. 

MOUSSE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d'Histoire, 

MOUSTACHE  (du  grec  miustax,  forme  dorienne  pour 
fiMUtoop,  lèvre  supérieure),  partie  de  la  barbe  qu'on  laîaie 
croître  au-dessus  de  la  lèvre  supérieure.  Les  Grecs  et  1» 
Romains  la  portèrent  et  rabandonnèrent  tour  à  tour. 
Beaucoup  de  peuples  de  l'Orient,  principalement  les  Chi- 
nois, ont  toujours  eu  des  moustaches,  bien  que  se  rMAfit 


MOU 


1283 


MUA 


e  reste  de  U  barbe.  Les  Francs  en  portèrent  Jusqu'au 
K*  siècle;  alors  les  moustaches  disparurent  Jusqu'au 
tempe  des  Croifladea.  On  y  renonça  encore  depuis  la  fin 
da  UT*  siècle  Jusqu'au  xvi«.  Depuis  François  P'  et 
Henri  H ,  les  hommes  de  toute  condition  sodale  repri- 
rent la  moustache  :  elle  cessa  d*ètre  de  mode  sous 
Loois  XIV,  et  ne  servit  plus  qu'à  distinguer  certains 
corps  d'élite  de  l'armée,  les  grenadiers  et  les  hussards. 
En  1805,  Tusage  de  la  moustache  fût  concédé  à  toute  la 
caialerie ,  les  dragons  exceptés  ;  on  l'accorda  aux  officiers 
de  toutes  armes  en  1821  «  et  à  tous  les  militaires  en  1832. 
Dans  le  civil,  la  moustache  a  repris  faveur  après  1890. 

HOUSTIJSRS  (Faïences  de).  F.  au  Stippl^ment. 

MOUSTIQUAIRE,  rideau  de  gaze  ou  de  mousseline 
:ris-€laire  dont  on  entoure  les  lits,  pour  les  fermer  her- 
métiquement, dans  certains  pays  chauds,  tels  que  l'Égsrpte, 
où  Ton  est  exposé  aux  moustiques. 

HOnriER.  K  Mortier. 

MOUTON,  machine  de  guerre.  T.  Bélier. 

MOUTON,  machine  employée  dans  la  ConstructioiL  V. 

SomiETTB. 
MOUTON  d'OB.    V.  AGNBL. 

MOUTONNES.  V.  Peuroqobs,  dans  notre  Dtcttonnatre 
âê  Biographie  et  d'Histoire. 

MOUVEMENT,  changement  de  situation  des  corps,  dé- 
plac^nent  de  leurs  nupports.  Nous  le  percevons  par  la  vue 
et  par  le  toucher.  Tout  mouvement  a  lieu  dans  l'es- 
pace; il  détermine  l'espace  lui-même,  qui  est  une  con- 
ception rationnelle,  et  nous  sert  à  mesurer  l'étendue. 
Tout  mouvement  a  lien  aussi  dans  le  temps,  il  est  lui- 
même  une  succession;  c'est  par  les  divisions  des  mou- 
vements que  nous  marquons  les  divisions  du  temps.  Non- 
seulement  le  mouvement  est  le  signe  et  la  mesure  de 
l'espace  et  du  temps,  mais  encore  il  est  le  lien  de  ces 
deux  idé^  dans  notre  esprit.  Le  problème  du  mouve- 
ment a  donné  lieu  à  beaucoup  de  théories  métaphy- 
siqaes.  Pour  Héradite,  tout  était  dans  un  mouvement 
on  on  changement  perpétuel  ;  ce  philosophe  refusait  aux 
choses  toute  permanence,  toute  existence  perpétuelle. 
L'école  d'ÉIée,  an  contraire,  nia  la  réalité  et  la  possibilité 
du  mouvement,  doctrine  que  reproduisirent  les  philo- 
sophes mégariens  :  pour  toute  réponse  à  leurs  sophismes, 
Diogène  le  Cynique  se  mit  à  marcher  devant  Zenon. 
Pour  Aristote,  le  mouvement  est  le  fait  caractéristique  du 
la  nature  ;  ses  deux  éléments  constitutifs  sont  la  puis- 
sance^ capacité  qu'ont  les  objets  de  devenir  tels  ou  tels, 
et  Yacte  ou  la  possession  réelle  d'une  qualité  que  ces 
objets  n'avaient  qu'en  puissance;  le  mouvement  est  la 
puissance  qui  devient  acte,  il  est  le  rapport,  le  terme 
moyen  de  la  puissance  et  de  l'acte.  L'ancienne  école  ato- 
mistique  faisait  du  mouvement  une  propriété  inhérente 
aux  atomes  :  Deacartes  refuse  aux  éléments  de  la  matière 
tonte  capacité  de  produire  en  eux-mêmes  le  mouvement , 
et  leur  fait  imprimer  le  mouvement  par  un  premier  mo- 
teur qui  le  leur  conserve  par  une  action  continue  ;  selon 
Leibniz,  les  éléments,  âpres  avoir  reçu  un  premier  mou- 
vement, retiennent  lia  capacité  de  se  mouvoir  et  ont  en 
eux  le  principe  de  leurs  modifications. 

HODVEiiENT,  en  termes  de  Musique,  degré  de  vitesse 
3n  de  lenteur  que  l'on  donne  à  la  mesure,  suivant  le  ca- 
nct^  de  l'air  qu'on  exécute.  Le  mouvement  détermine 
ia  valeur  réelle  du  temps.  On  l'indiqua  d'abord  par  les 
noms  de  certains  airs  de  danse  connns,  en  appelant,  par 
exemple,  allemande,  gigue,  sarabande^  les  morceaux  dont 
le  mouvement  devait  être  analogue  à  ceux  de  ces  danses. 
Puis,  on  adopta  des  mots  particuliers,  empruntés  à  l'ita- 
lien, pour  indiquer  les  mouvements  lents,  modérés,  ou 
«/< ,  avec  leurs  diflérentes  nuances  :  pour  les  mouve- 
ments lents,  grave  y  Ui^rgo,  larghetto;  pour  les  mouve- 
oients  modérés,  adagio,  andante,  andantino;  pour  les 
monvements  vifa,  allegretto,  allegro,  presto,  vivace.  En- 
fin Ilnvention  des  divers  chronomètres  et  dn  métronome 
{V.  ces  mots)  a  permis  de  donner  une  mesure  du  temps 
mns&cal  plus  rationnelle  et  plus  positive.  —  On  donne  en- 
core le  nom  de  mouvement  à  la  marche  que  suivent  les 
parties  concertantes  d'un  morceau;  il  est  semblable  ou 
(tir»e£,  oblique,  contraire,  selon  que  les  parties  montent 
ou  descendent  ensemble,  ou  que  l'une  reste  au  même 
<iegré  tandis  que  l'autre  se  meut,  ou  enfin  qu'elles  vont 
en  sens  inverse.  B. 

MOGZON  (Église  de),  ancienne  église  abbatiale,  la 
pins  importante  du  département  des  Ardennes.  Œuvre 
du  xin*  ou  du  xnr*  siècle,  elle  se  distingue  par  la  régula- 
rité de  sa  construction ,  par  son  ornementation  sculptn- 
nk  et  ses  vitraux  historiés.  Autrefois  elle  avait  trois  clo- 
^Ts;  il  n'en  reste  plus  que  deux,  qui  flanquent  le 


portail  occidental.  Ils  se  composent  de  erois  étages  percés 
d'ouvertures  géminées,  et  se  terminent  en  pynmida 
élancée.  La  porte ,  surmontée  d'une  large  fenêtre  à  me* 
neaux  et  d'un  fronton  aigu,  est  coupée  par  un  trumeaa 
auquel  est  adossée  une  statue  de  la  Vierge  et  de  l'enfant 
Jésus;  un  cordon  de  12  anges  remplit  la  voussure;  le 
tympan  offre,  sur  trois  compartiments  superposés,  des 
scènes  empruntées  à  la  vie  de  la  S**  Vierge  et  de  S' Victor* 

MOXO  (Idiome).  F.  Pércvibnubs  (Langues). 

MOYEN  ou  VOIX  MOYENNE,  forme  particuUôre  de  la 
ooi^uçaison  srecque,  intermédiaire  entre  la  voix  active  et 
la  VOIX  passive,  se  rapprochant  de  la  i'*  par  le  sens^ 
mais  prcÂoue  identique  à  la  2«  par  U  forme.  En  effet,  1% 
présent  et  l'imparfait,  aussi  bien  que  le  parfait  et  le  plus* 
que-parfait,  ne  diffèrent  jamais  au  mcyen  et  au  passif. 
Le  futur  est  ordinairement  terminé  en  00(141  à  la  voix 
moyenne,  l'aoriste  1"  est  en  ot^pL-nv,  l'aoriste  2*  en  épuriVt 
tandis  que  le  passif  est  ordinairement  ^o[uti  au  futur^ 
Ovjv  à  l'aoriste  i*',  Jt*  à  l'aoriste  2*.  Beaucoup  d'aoristea 
en  6nv  et  en  Tpr  s'emploient  néuimoins  conmie  moyens; 
et  réciproquement,  les  exemples  de  aopiai  avec  le  sens 
passif  sont  très-nombreux.  L'aoriste  l*'  en  oapinv  (4^t^v}Vf 
à(iT)v,  etc^  est  seul  vraiment  propre  à  la  voix  moyenne; 
seul  aussi  il  a  invariablement  la  signification  particu- 
lière au  moyen.  Cette  signification  est  réfléchie  (  F.  ce 
mot).  Très-souvent  la  coi^ugaison  moyenne,  par  rapport 
à  la  syntaxe,  répond  à  ceux  de  nos  verbes  pronommaux 
qui,  formés  de  verbes  actifs,  sont  suivis  d'un  complé- 
ment direct  et  ont  pour  complément  indirect  le  proniHU 
qui  les  précède  immédiatement.  De  là  on  employait  lo 
moyen  lorsque  l'objet  souffrant  l'action  était  quelque 
chose  appartenant  au  sujet  du  verbe.  Le  moyen  rend  fort  ■ 
souvent  aussi  ce  qu'exprime  le  français  faure  faire.  Un 
certain  nombre  de  verbes  latins,  en  revêtant  la  forma 
passive,  et  de  verbes  français,  en  revêtant  la  formeré- 
fléchie,  se  rapprochent  en  partie  de  la  nuance  délicate 
exprimée  par  le  moyen  grec.  Ainsi,  acdngor  si^ifie, 
non  pas  on  m'arme,  mais  je  m'arme  ;  misceor ,  je  me 
mêle;  moveor,  je  me  mets  en  mouvement.  P. 

MOYENNES  (Consonnes).  F.  Fortes. 

MOZARABE  (Rit),  Liturgie  catholique  particulière  à 
TEspagne  durant  le  moyen  âge.  Elle  fut  faite  par  S^ 
Léandre,  archevêque  de  Séville,  et  complétée  par  S^  Isi- 
dore, son  frère  et  son  successeur;  un  concile  tenu  à  To- 
lède en  633  lui  donna  sa  sanction.  Le  rit  Romain  s'étant 
établi  peu  à  peu  en  Espagne,  le  rit  Mozarabe  fut  confiné 
par  le  cardinal  Ximénès  dans  une  chapelle  de  Tolède, 
où  il  est  resté  en  usage  Jusqu'à  nos  Jours.  Les  historiens 
ecclésiasticrues  lui  ont  oTonné  aussi  le  nom  de  ritiAel  To- 
lédan,  de  bréviaire  de  S^  Isidore,  de  rit  Gothique» 

MOZCA  (Idiome).  F.  Mosca. 

MOZETTE.  V.  Camail. 

MOZOUNAH,  ancienne  monnaie  d'Alger,  valant  un 
peu  plus  de- 6  centimes. 

MUANCE  ou  MUTATION,  c-à-d.  changement  (du  latin 
mutare,  changer),  terme  de  la  Musique  ancienne,  expri- 
mant tout  passage  d'un  orcLre  ou  d'un  sujet  de  chant  à  un 
autre.  Les  Grecs  distinguaient  cinq  espèces  de  mutations, 
qu'ils  appelaient  métaboles  :  1<*  la  métaboîe  de  genre, 
lorsque  le  chant  passait,  par  exemple,  du  diatonique  au 
chromatique  ou  à  l'enharmonique,  et  réciprocpiement; 
2?  la  métaboîe  de  système,  lorsque  la  modulation  unis- 
sait deux  tétracordes  disjoints  ou  en  séparait  deux  con- 
joints, ce  qui  revient  an  passage  du  bécarre  au  bémol,  et 
réciproquement;  3*  la  métaboîe  de  mode,  quand  on  pas- 
sait, par  exemple,  du  dorien  au  phrygien  ou  au  I^r- 
dien,  etc.  ;  A**  la  métaboîe  de  rhythme,  quand  on  passait 
d'un  mouvement  à  un  autre,  du  lent  au  vite,  etc.  ;  b^  la 
métaboîe  de  mélopée,  quand  on  interrompait  par  un  chant 
gai  un  chant  triste,  etc. 

Au  moyen  âge,  on  appela  muances  les  diverses  ma- 
nières d'appliquer  aux  notes  les  syllabes  ut,  ré,  mt,  fa, 
sol,  la,  selon  les  diverses  positions  des  deux  demi-tons 
de  l'octave  et  les  différentes  façons  d'y  arriver.  Gui 
d'Ârezzo  n'ajrant  inventé  que  six  de  ces  syllabes,  comme 
il  y  a  sept  notes  à  nommer  dans  une  octave,  il  fallait  né- 
cessairement répéter  le  nom  de  quelque  note.  On  nomma 
toi:^ours  mt  fa  en  montant,  et  fa  la  en  descendant,  les 
deux  notes  entre  lesquelles  se  trouvait  un  demi-ton  ;  ces 
noms  déterminèrent  en  même  temps  cenx  des  notes  les 
plus  voisines,  soH  en  montant,  soit  en  descendant.  Un  tel 
système  de  notation  était  trèandlfficUe:  au  xvn*  siècle,  on 
eut  l'idée  en  France  d'i^outer  la  syllabe  «t  aux  six  an- 
ciennes; la  7*  note  de  l'échelle  se  trouvant  nommée,  les 
muances  derinrent  inutiles.  Cependant  on  les  conserva 
longtemps  encore  dans  les  autres  pays. 


&IUG 


1284 


HUN 


MOCHE,  nom  Tulgftire  de  quelques  andens  sou- 
tenrains. 

HUE  DE  LA  VOIX.  V.  Voix. 

MCETS.  V,  ce  mot  dans  notre  DictiomnaxrB  de  BiO" 
graphie  et  d^Bistoire. 

MUETTE,  nom  qu*on  donnait  autrefois  à  une  petite 
maison  où  Ton  gardait  les  mtêês  de  cerfs,  ou  les  oiseaux 
de  iSuiconnerie  an  temps  de  la  muê,  ou  les  meiUês  de 
chiens.  On  l'appliqua  ensuite  à  des  pavillons  et  autres 
édifiées  lerrant  de  rendes-yous  de  chasse.  Telles  étaient 
iesmtfttogde  SMsermain-en-Laye,  de  Fontainebleau,  etc. 

MUETTES  (Consonnes),  nom  donné  par  les  grammai- 
riens grecs  aux  consonnes  p,  y,  d,  ic,  x,  t,  f ,  x«  ®«  parce 
qu'elles  ne  pouyaient  se  prononcer  sans  le  secours  des 
fOfeliei»  Us  les  divisaient  en  tinu$i,  ic,  x,  t;  en  ojpt- 
rAs,  9,  x«  ®l  ^  moymnes,  p,  Ti  S*  Buis  l'enseignement 
élémentaire,  en  F^rance,  les  moyennes  reçoivent  le  nom 
de  douces,  les  ténues  celui  de  fortes.  Chez  les  Anciens, 
les  aspirées  comptaient  quelquefois  parmi  les  demi- 
▼oyeUes.  Ces  classifications  reposaient  sur  la  prononcia- 
tion, restée  mystérieuse  pour  nous,  de  ces  9  consonnes. 
Pour  les  Latins,  les  muettes  étaient  au  nombre  de  8  :  &, 
p,  d,  t,  c,k,  q,  g.  Cette  division  des  consonnes  n'est  pas 
d'usage  dans  les  langues  modernes.  F.  Sbmi-Votelles. 

MURTES  (Lettres),  nom  donné  en  français  aux  lettres, 
consonnes  ou  voyelles,  qui  s'écrivent  sans  se  prononcer  : 
tel  est  le  p  dans  dompter,  compter;  Vo  dans  paon,  faon, 
Laon;  (Uverses  consonnes  doublées,  abbé,  accueillir,  at- 
tentif, affaire,  innocent,  Hippolytef  assez  ^  arriver;  e  final, 
comme  dans  libre,  esclave,  espère;  diverses  consonnes 
finales,  tu  aimM,  les  saisoni,  poicb,  choiiB,  venait,  vien- 
nent, faisaient,  etc.  E  muet  final  se  prononce  légèrement 
dans  les  vers  lorsqu'il  n'est  pas  éliaé;  et  eénéralement, 
toutes  les  fois  que  le  sens  le  permet.  Tes  consonnes 
muettes  finales  sonnent,  en  vers  et  dans  le  surle  soutenu, 
devant  les  mots  commençant  par  une  voyelle  (V,  Liaison). 
La  conversation  familière  admet  encore  certaines  muettes 
^fû  se  font  sentir  davantage  dans  le  débit  soutenu,  par- 
ticulièrement e  :  ainsi,  j^arriverai  se  prononce  vulgure- 
ment  j'arriverai;  nous  le  fsrons,  notM  l*  frons;  je  vien- 
drai si  je  peux,  j*  viendr<U  si  j*  peux;  cepeifidant,  p' 
fendant;  setier,demi-setier,  s*tter,dmni'S'tier,etcOiez 
les  Romains,  Jusque  vers  l'an  50  av.  J.-C,  s  finale  était 
souvent  muette  devant  les  mots  commençant  par  une  con- 
sonne, et  on  prononçait  opiumu*  parens,  tanto  dignu* 
munere,  ex  omnibu*  partibus.  De  là  ces  fins  de  vers  dans 
Ennius  :  rêbOs  gërùndis,  lâssiis  dXëi,  cômmôdûs  vèr- 
Mtoi;  et,  chez  le  même  poète,  au  commencement  d'autres 
vers  :  Hœccè  Idcùtûs  vfkàtj  ScitHs,  sëcûndà  Uftiuefls; 
Pànditè  sûltïs  gênas  (Pandtte,  si  vwtis)  ;  de  là  ce  vers 
de  Lucilius  :  Sublatus  pudor  ômnïs,  lïcentia  fènûs  rè- 

Î'êrtur.  Tantôt  cette  finale  muette  était  retranchée  dans 
'écriture,  tant6t  on  la  laissait  subsister.  St  était  souvent 
muet  devant  une  consonne;  ainsi ,  Quintilien  témoi^e 
que  les  Anciens  écrivaient  et  prononcent  po*  meridtem 
pour  poH;  et  il  semble  faire  entendre  qu'on  prononçait 
or'  studiorum,  et  non  pas  ars  sludiorum,  pour  éviter  le 
heurt  de  deux  sifflantes  entre  deux  autres  consonnes. 
S,  ST,  ont  été  de  môme  muets  en  français  au  milieu  ou  à 
la  fin  d'un  grand  nombre  de  mots;  ces  lettres  sont  au- 
jourd'hui supprimées,  excepté  dans  beaucoup  de  noms 
propres.  On  écrivait  eune,  aspre,  pasture,  pcuque, 
ÊStrenne,  esponge,  espée,  monstrer,  il  est  prest^  elle  est 
preste  {prœsto  est),  protest,  etc.  RS  étaient  muets  dans 

{lars,  mot  depuis  longtemps  vieilli.  Dans  la  prononciation 
atine,  m  finale  était  a  peine  prononcée  et  conmie  éteinte; 
elle  ne  servait  guère  que  de  note  entre  deux  voyelles,  dit 
Quintilien,  pour  empocher  qu'elles  ne  se  confondissent. 
De  là  son  élision  dans  les  vers,  surtout  depuis  le  siècle 
d'Auguste.  Ce  môme  rhéteur  nous  apprend  que,  du  temps 
de  Caton,  on  écrivait,  pour  figurer  la  prononciation,  aie 
on  diee  hanc  {diem  hanc),  et  il  bl&me  ceux  qui  corri- 
geaient cette  orthographe  dans  les  manuscrits.  H  en  latin, 
comme  en  français,  était  muette  au  commencement  des 
mots  et  après  les  lettres  c,  r,  t  :  la  prononciation  aspirée 

S'en  lui  donnait  souvent  ne  faisait  rien  à  cet  égara.  En 
mçais,  le  nom  d*aspirée,  appliqué  à  Vh,  est  véritable- 
ment impropre;  dans  le  héros,  ma  haine,  on  fait  un 
hiatus,  mais  il  n'y  a  point  d'aspiration,  et  h  est  absolu- 
ment muette.  P. 
MUEZZIN,  l  F.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 
MUrn.        S     Biographie  et  d'Histoire. 
MUGLIAS,  matière  employée,  au  moyen  âge,  à  faire 
des  patenôtres  odoriférants,  et  qu'on  brûlait  en  fumiga- 
tions. On  suppose  que  c'était  le  musc  II  y  avait  un  tissu 
du  môme  nom. 


MOU  (du  latin  tmUleus),  nom  qu'on  donnait  autrefois 
à  des  pantoufles  sans  quartier,  généralement  à  tsloa 
élevé  et  en  cuir  rouge.  11  n'est  plus  usité  que  loraqu^il 
s'a^t  de  la  pantoufle  du  pape,  sur  laquelle  il  y  a  une 
croix  qu'on  est  admis  à  baiser. 
MULLEUS.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Bidknnaire  àe 
MULSUM.  I  Biographie  et  d:  Histoire, 
MUNICH  (Églises  de).  L'église  métropolitaine  de  NiAre- 
Dame  a  été  construite  de  ilfiS  à  1494  par  lorg  Gankoffeo 
de  Halspach.  Gé  longueur  est  de  liS  met,  sa  largeur  de 
42,  sa  hauteur  de  38.  La  façade  est  flanquée  de  deux  tours, 
hautes  de  110  met.,  et  couronnées  par  une  coupole  qui 
annonce  le  voisinage  de  l'architecture  byzantine.  Cette 
cathédrale  est  le  monument  religieux  le  plus  intérsHSDt 
parmi  les  anciens  qui  se  trouvent  à  Munich.  —  Les 
églises  modernes  sont  des  pastiches  plus  ou  moins  réussis. 
La  plus  belle  est  Notre-Dam^-da-ÉonTSecours ,  bfttie  de 
1831  à  1839,  au  faubourg  d'Au,  dans  le  style  ogivsl  le 
plus  pur,  par  OhlmQller  et  Ziebland.  Construite  moitié 
en  briques,  moitié  en  grès,  elle  a  70'^,50  de  lo&gaeaTf 
24™,30  de  largeur,  et  28"*,50  de  hauteur.  Le  milieu  de  as 
façade  eat  surmonté  d'une  grosse  tour,  d'abord  carrée, 
puis  octogone,  et  terminée  par  une  pyramide  à  Jour  qai 
s'élève  à  84  met.  au-dessus  du  sol.  Les  portails  latéraux 
sont  également  surmontés  de  pyramides  plus  petites.  Le 
toit  de  l'édifice  est  en  tuiles  ânaillées,  formant  des  des- 
sins. L'intérieur  est  divisé  en  trois  nefs  par  16  colonnes 
élancées  qui  supportent  ta  voûte;  le  chœur  s'élève  de 
quelques  degrés  au-dessus  des  nefs,  et  est  décoré  des 
statues  des  Apôtres;  les  autels,  ainsi  que  les  murs  des 
collatéraux,  sont  ornés  de  sculptures  en  bois;  les  19  fe^ 
nôtres,  hautes  de  16  met,  larges  de  4,  ont  des  vitraux 
magnifiques,  comparables  aux  plus  beaux  de  l'art  ancien. 
— L'église  S^Lott»,  dont  Gemert  a  été  l'architecte,  psrait 
avoir  été  inspirée  par  quelques  édifices  religieux  de  l'école 
florentine.  On  reconnaît  particulièrement  l'imitation  de 
cette  école  dans  la  forme  des  fenêtres,  dans  la  disposition 
des  voûtes  et  des  colonnes  qui  les  supportent,  et  dans  le 
plan  môme,  où  les  saillies  de  la  croix  sont  légères.  Oo 
retrouve  aussi  l'influence  du  style  byzantin  dans  certsins 
détails  du  porche.  Enfin  toute  la  partie  postérieure  du 
monument  est  une  combinaison  des  formes  chrétiennes 
employées  avant  le  xm*  siècle  :  les  arcs -boutants  des 
flancs  et  les  contre-forts  forment  un  Jeu  de  lignes  qui  ne 
manque  pas  de  grandeur.  L'église  S^Louis  a  été  b&tie 
pour  recevoir  le  tableau  du  Jugement  dernier  dont  Cor- 
nélius avait  fait  un  carton  à  Rome.  Elle  offre  d'autres  fres- 
ques encore  par  G.  Hermann,  Stflrmer,  Kranzberger,  Hell- 
weger,  Schabet,  Heiler,etc. —  L'église  de  Tous  les  Saints 
ou  Nouvelle  Chapelle  de  la  cour  a  été  élevée  de  1826  à 
1837  par  L.  de  Klenze,  dans  le  style  byzantin  du  xi*  siècle, 
mais  sans  coupole  extérieure.  Elle  a  50  met  de  lon- 
gueur, 30  de  largeur,  24  de  hauteur.  La  façade,  tournée 
vers  l'Orient,  est  divisée,  par  deux  pilastres  en  saillie,  es 
trois  parties  qui  correspondent  aux  trois  nefs  :  8  coloones 
de  marbre  et  4  forts  piliers  séparent  la  grande  nef  de  ses 
collatéraux,  et  cette  nef  est  couverte  par  deux  coupoles 
basses,  sans  Jour  et  sans  percée  extérieure.  On  remarqoe 
les  frcnques  exécutées  sur  fond  d'or  par  Hess,  Schran- 
dolph,  Kock  et  MûHer.  —  La  Basilique  ou  église  S^Bo- 
niface  a  été  élevée  de  1825  à  1850  par  Ziebland,  d'après 
le  modèle  d'une  basilique  romaine.  La  façade  se  compose 
d'un  péristyle  ouvert,  formé  de  neuf  arcades  supportées 
par  des  colonnes  de  calcaire  blanc;  les  trois  portes  sont 
ornées  de  reliefs  en  bois.  L'intérieur  a  78  met  de  lon- 
gueur, 37  de  largeur,  et  est  divisé  en  dnq  nefs  par  quatre 
rangs  de  16  colonnes  chacun  :  la  nef  du  milieu  a  25  met 
de  hauteur,  et  les  autres  13  seulement;  les  colonnes  sont 
des  monolithes  de  marbre  gris  poli.  Les  fresques  sont 
l'ouvrage  des  mômes  artistes  qui  ont  peint  l'église  de 
Tous-les-Saints. 

MUNICH  (Palais  royal  de).  Ce  palais  se  divise  en  trois 
parties  distinctes,  l'Ancienne  Résidence,  la  NouvelU 
Résidence ,  et  le  Palais  des  fêtes  ou  des  salles.  L'An- 
cienne Résidence,  bâtie  de  1600  à  1616,  sur  les  plans 
de  Pierre  Candide ,  n'ofilre  pour  façade  qu'une  grande 
muraille  grise,  longue  de  165  met.,  percée  de  deux  rangs 
de  grandes  fenêtres  sans  encadrements,  ornée  des  figures 
en  bronze  de  la  Sagesse,  de  la  Justice,  de  la  Valeur  et 
de  la  Modération,  de  4  lions  de  bronze  portant  les  armes 
de  la  Bavière  et  de  la  Lorraine,  d'une  niche  de  marbre 
rouse  contenant  une  statue  en  bronze  de  la  Vierge,  enfin 
de  deux  portails  en  marbre  rou^,  entre  lesquels  est  on 
corps  de  garde.  Elle  renferme  4  cours  dites  de  l'Empe- 
reur, de  la  Ciùsine,  de  la  Chapelle  et  de  la  Fontaim,  et 
contient  dans  sa  masse  de  bâtiments  t  V  VAntiq^arium^ 


MUN 


1285 


MUN 


OU  collection  d'antiqnités;  2<^  la  Chambre  du  Trésùr; 
>  la  Chapirih  riche,  dont  le  plafond  est  en  lapis-lainli, 
le  paTé  en  mart>re  et  en  vert  antique,  les  marailles  en 
mosaïque  de  Florence,  l'autel  en  ai^nt;  4*  les  Apporte-' 
mmti  d»  Charles  VII,  où  sont  entassés  les  ornements 
les  plus  riches  dans  le  goût  du  xvm*  siècle.  —  La  Nou- 
velle Résididace  a  été  bâtie  de  1826  à  1835  par  L.  de 
(Ueoze.  Sa  façade,  imitation  du  palais  Pitti  de  Florence, 
a  i30  met.  de  longueur;  il  y  a  trois  étages  au  milieu, 
deox  seulement  aux  ailes.  Trois  portes  donnent  accès 
dans  un  vestibule  supporté  par  io  colonnes  de  marbre. 
Outre  les  appartements  du  roi  et  de  la  reine  de  Bavière, 
fermés  au  public,  cette  partie  du  palais  contient  cinq 
salles  dites  des  Niebelungen,  parce  que  les  fresques  dont 
Schnorr  les  a  décorées  ont  pour  sujets  des  scènes  de 
cette  épopée  allemande.  —  Le  Palais  des  Fêtes,  b&ti  de 
1832  à  1842  dans  le  style  de  Palladio,  d'après  les  dessins 
de  L  de  Klenze,  a  une  façade  de  240  met.  Le  milieu 
(bmie  un  triple  portail  avec  un  portique,  qui  supporte 
•a  balcon  dominé  par  2  lions  assis  et  les  8  statues  co- 
ossales  des  cercles  de  la  Bavière,  œuvres  de  Schwan- 
thaler.  On  voit  au  rea-de-chaussée  six  salles  ornées  de 
peintures  représentant  les  principales  scènes  de  VOdyssée 
8t  qui  ont  été  exécutées  par  Hiltensperger  sur  les  dessins 
de  Schwantbaler.  Au  l*'  étage  sont  les  salles  dites  du 
Bd,  des  Beautés 9  des  BataUles  ou  des  Banquets,  de  Char- 
Urnaone,  de  Frédéric  Barberousse,  de  Rodolphe  de  Habs- 
howQ,  et  du  Tt&ne,  toutes  ornées,  moins  la  dernière,  de 
fresques  et  de  tableaux. 

¥DiiicH  (La  Glyptothèque  de),  monument  bâti  par  L.  de 
Ilenze,  de  1816  à  1830,  pour  servir  de  musée  ae  sculp- 
tare.  11  est  carré,  orné  aans  tout  son  pourtour  à  la  ma* 
oière  antique,  et  sans  autre  ouverture  duis  les  murs 
eitérieurs  que  la  porte  de  la  façade.  Cette  façade  est  en 
marbre  blanc,  et  présente  six  niches,  renfermant  les 
statues  de  Vulcain,  de  Phidias,  de  Prométhée,  de  Péri- 
clès,  d'Adrien  et  de  Démosthène  :  au  milieu  s'avance  un 
péristyle  de  8  colonnes  ioniques,  oui  supportent  un  vaste 
fronton  sculpté.  Cest  de  la  cour  intérieure,  par  des  fe- 
nêtres immenses,  que  les  salles,  au  nombre  de  12,  re- 
çoi?eDt  la  lumière.  Deux  de  ces  salles,  dites  des  Fêles 
ou  salle  des  Dieux  et  salle  Troyenne,  et  destinées  au 
repos,  ont  été  entièrement  peintes  à  fresque  par  Comé- 
fios,  Hess,  Zimmermann  et  quelques  autres  artistes.  Les 
nlles  consacrées  à  la  sculpture  sont  :  1"  la  salle  Êgyp- 
tienne;  f*  la  salle  des  Incunables,  où  sont  réunis  les  plus 
lodens  essais  de  l'art  grec,  originaux  ou  copiés,  alors 
qui]  imitait  encore  le  style  de  l'Egypte  ou  celui  de  la 
Phénide;  3*  la  saUe  des  marbres  iÊgine;  4<^  la  salle 
cf ^poUos,  ainsi  nommée  d'un  Apollon  Githarède,  en 
oaÂre  pentélique  et  de  proportions  colossales;  5**  la 
lotit  de  Bacchue,  où  Ton  a  placé  des  statues  et  des  bas- 
reliefs  se  rapportant  presque  exclusivement  au  culte  de 
es  dieu;  0°  la  salle  des  Niobides,  idnsi  appelée  parce 
qu'elle  renferme,  entre  autres  œuvres,  une  i^épétltion  du 
Nlobide  mourant  de  Florence  et  un  Miobide  agenouillé  ; 
7*  la  salle  des  Héros;  8®  la  salle  des  Bomains,  la  plus 
TStte  de  toutes,  longue  de  40  met.  sur  14  de  large;  0»  la 
Mtie  des  Sculptures  coloriées  et  dorées;  i(y*  la  salle  des 
Modernes,  où  les  œuvres  ne  remontent  pas  plus  haut  que 
Canoya. 

■DHiCHifLa  Pinacothèque  de).  Cet  édifice,  construit  de 
1826  à  1830,  sur  les  plans  de  IClenze,  est  un  bâtiment  du 
«Me  des  palais  romains,  long  de  156  met,  large  et  haut  de 
^mèt,  terminé  à  chaque  bout  par  deux  ailes.  Sa  façade 
principale  est  décorée  de  25  statues  de  peintres  célèbres, 
par  Sdivanthaler.  Il  ne  contient  pas  seulement,  comme 
■OQ  nom  le  ferait  supposer,  un  musée  de  peinture,  mais 
des  collections  de  gravures ,  de  dessins,  de  vases,  etc.  La 
plerie  de  tableaux,  placée  an  1*  étage,  est  une  des  plus 
Mlles  de  l'Europe  :  elle  compte  plus  de  1,300  tableaux, 
répartis  en  0  salles  et  23  cabinets.  Panni  les  plus  inté- 
ressants, on  remarque  ceux  de  l'andenne  école  d'Alle- 
niagne,  et  05  ouvrages  de  Rubens.  La  aaltfie  de  Munich 
ft  été  formée  avec  celles  de  Dusseldori,  de  Deux-Ponts, 
de  Mannheim,  de  Schleissheim,  et  enrichie  encore  par 
l'acquisition  de  la  collection  des  frères  Boisserée.  Le  ca- 
binet des  estampes  ^,t)00  pièces),  celui  des  dessins  et 
teides  (12,000),  et  celui  des  vases  grecs  et  étrusques, 
eccnpent  tout  le  res-de-chaussée.  —  Au  nord  et  à  peu  de 
distance  de  la  Pinacothèque,  on  a  élevé,  de  1846  à  1853, 
nr  les  dessins  de  Voit,  une  Nouvelle  Pinacothèque,  qui 
contient,  au  rez-de-chaussée,  une  collection  de  peintures 
MT  porcelaine,  et,  à  l'étam,  300  tableaux  environ. 

■tniicH  (Théâtre  de).  Construit  par  Fischer  en  1825, 
restauré  en  1853,11  a  60  met.  de  longueur  et  45  mèU  de 


hauteur.  Un  escalier  en  marbre  conduit  à  son  portique» 
formé  par  8  colonnes  corinthiennes.  Il  a  deux  frontons 
ornés  de  fresques  par  Hiltensperger  et  Nilson  ;  les  frises» 
les  chapiteaux,  les  corniches  sont  décorés  de  peintures 
polychromes.  Trois  portes  donnent  accès  dans  un  vesti- 
bttle,  offrant  en  face  l'entrée  du  parterre,  à  droite  et  à 
gauche  deux  escaliers  de  marbre  garnis  de  statues  d'au« 
teurs  dramatiques.  La  salle,  une  des  plus  grandes  de  l'Al- 
lemagne, peut  contenir  2,500  spectateurs,  sans  compter 
les  60  places  de  la  loge  royale  et  les  100  places  de  ror» 
chestre.  Elle  est  écliûrée  par  un  lustre  de  400  becs  de  sauk 

MUNiaPAL  (Conseil).  V.  Commune,  dans  notre  Dio- 
tionnaxre  de  Biographie  et  d^ Histoire, 

MumaPAL  (Droit),  ensemble  des  lois  concernant  les 
municipalités.  Il  comprend  tout  ce  qui  concerne  les  attri- 
butions du  corps  municipal  (mdre,  adjoints,  conseil  mo- 
nidpal),  les  propriétés  communales,  les  contrats  et  procès 
des  conrniunes,  leurs  dépenses  et  recettes,  leur  compta- 
bilité. On  peut  consulter,  au  point  de  vue  historiçiue  on 
pratique,  les  auteurs  suivants  :  Delapoix-FreminviUe, 
iVatM  général  du  gouvernement  des  biens  et  affaires  det 
communautés  d^habitants,  de  vUles,  bourgs,  etc.,  Paris» 
1768,  in-4<»;  Boileau,  Recueil  des  règlements  et  recherchée 
concertumt  la  municipalité,  1785, 5  vol.  in-12;  Fabvier» 
Recherches  historiques  sur  les  municipalités,  1780,  in-8*; 
6uichard,yurtapni(lefic«  communale  et  munic^le,  1820; 
le  baron  Dupin,  Précis  historique  de  l'admintstrcUion  et 
de  la  comptabilité  des  retfenus  communauat,  1820,  in-8*; 
Dupin,  Lois  des  communes,  1823,  2  vol.  in-8«;  Rondon* 
neau,  les  Lois  administratives  et  municipales  de  la 
France,  1825-32,  6  vol.  in-8»;  Leber,  Histoire  critique 
du  pouvoir  municipal,  de  la  condition  des  cités,  det 
villes  et  des  bourgs,  et  de  l* administration  comparée  det 
communes,  1828,  in-8<^  ;  Raynouard,  Histoire  du  droU 
municipal  en  France,  1829,  2  vol.  in-8®;  le  baron  Du- 
pin, Histoire  de  V administration  locale,  ou  Revue  histo^ 
rique  des  divers  changements  survenus  dans  l'organisa^ 
lion  administrative  dis  villes  et  communes,  des  prom:%cet 
et  départements,  1829,  in-8^;  Ghrardon  et  Nabon-Devaux» 
Questions  de  Droit  municipal,  1833,  4  vol.  in-8o;  Dn- 
quenel.  Lois  municipales,  rurcies,  administrcOives  et  de 
police,  2«  édit.,  1833,  2  vol.  in-8«  ;  Henrion  de  Pans^» 
Du  pouvoir  municipal  et  de  la  police  intérieure  des  corn* 
munes^  3«  édit.,  1833,  in-8«;  Gillon  et  Sturm,  Code  det 
mufiictpalités,  1834,  in-12;  De  Gormenin,  Loi  sur  Vor» 
ganisation  municipale,  1838,  in-8<*;  Leber  et  de  Put 
busqué,  Cocfe  municipal  annoté,  1839, 1  vol.  in -8*;  Bost» 
JVaité  de  Vorganisation  et  des  attributions  des  corps 
municipaux,^*  édit.,  1840, 2  vol.  in-8^;  Renard,  RecuiU 
des  lois  municwales,  1841,  in-8";  Boyard,  Nouveau  ifo- 
nuel  municipal,  3*  édition,  1843,  2  vol.  in-8°;  Davenne, 
Régime  administratif  et  financier  des  communes,  4' édit., 
1843, 1  vol.  in-8^;  de  Puibusque,  Dictionnaire  municipal, 
3*  édit,  1843,  in-8*^;  Miroir  et  Jourdan,  Formulaire  mu- 
nidpal,  2*  édit.,  1844-46,  6  vol.  in-8o;  De  Champagny, 
Traité  de  la  police  municipale,  1844-47,  3  vol.  in-8*t 
Fauchet,  Code  des  municipalités,  Grenoble,  1846,  2  voU 
in-8«;  Paul  Gère,  Code  de  la  mairie,  Paris,  1852,  in-18| 
Dupont,  Dictionnaire  des  formules,  1858,  2  vol.  in-8«. 

MUNICIPALITÉ,  mot  oui  s'entend  du  corps  des  officiers 
municipaux,  du  territoire  administré  par  eux,  ou  de 
l'édifice  où  ils  tiennent  leurs  séances  et  ont  leurs  bureaux. 

MUNIOPE.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  â! Histoire. 

MONITIONNAIRES  ou  FOURNISSEURS,  ceux  qui  ont 
l'entreprise  et  la  fourniture  des  vivres  et  fourrages  néces- 
saires aux  troupes.  La  fourniture  des  crains  est  mise 
chaque  année  en  adjudication  avec  pubhcité  et  concur- 
rence. Le  service  des  fourrages  est  fait  au  moyen  de 
mardiés  à  prix  ferme  passés  en  acUudication  publique* 
Les  munitionnaires  qui  fraudent  sor  la  nature  d&e  vivres, 
ou  qui  apportent  de  la  négligence  à  les  livrer,  sont  punis 
d'un  emprisonnement  de  6  mois  à  5  ans,  et  de  dom- 
mages-intérêts; s'ils  abandonnent  leurs  fonctions,  ils 
sont  condamnés  à  une  amende  de  500  fr.  au  moins,  aux 
dommaoefr-intérèts  et  à  la  réclusion  {Code  pénal,  art.  420- 
433).  K.  MuNiTiONNAiRis,  daus  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d^  Histoire, 

MUNITIONS  (du  latin  mtmtrs,  munir,  approvisionner)» 
mot  qui  désire  tout  ce  qui  constitue  l'approvisionne- 
ment des  armées,  doi  places  fortes  et  des  lieux  de  gar- 
nison. Les  munitions  de  guerre  comprennent  les  poudres» 
cartouches,  gargousses,  projectiles,  armes  portatives,  ou- 
tils de  rartillene  et  du  génie,  et  en  général  tout  le  maté- 
riel d'une  armée  ou  d'une  place;  les  munitions  de  boudm 
sont  les  vivres  de  toute  nature,  pain»  biscuit,  fourrages» 


MUS 


1286 


«US 


La  fiuU  de  munUUm  est  celui  de  l*infanterie  de  ligne. 
Le  pain  de  tnunUion  est  celui  qui  eet  flftbriaué  pour  les 
troupes  dans  les  manutentions  de  TÉtat.  La  détention  de 
munitions  de  guerre  par  des  particaliers  est  punie  (F.  Dé- 
Tsmoif  ].  —  On  nomme  munitions  naoaUe  tous  les  ob- 
jets de  guerre  ou  d'approyisionnement  embarqués  sur  les 
bâtiments  de  l*État  ou  emmagasinés  dans  les  arsenaux. 

MtlNLENL  K.  Roomanb  (Langue). 

MUPHn.  V.  Mura,  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
(/raphie  et  d'Histoire. 

MUR,  partie  importante  de  toute  construction  archi- 
tecturale. Les  murs  de  maison,  qui  ont  une  faible  épais- 
■eur  relativement  à  leor  hauteur,  exigent  un  grand  soin 

gir  rapport  au  choix  des  matériaux  et  à  la  main  d'csuTre. 
n  les  fait  ordinairement  en  moellons  ou  en  briques,  sou- 
vent avec  chaînes  ou  piles  en  pierres  de  taille,  qu'on  place 
de  préférence  aux  angles  et  près  des  portes  et  des  fe- 
nêtres. Les  parements,  c.*à-d.  les  deux  surfaces  des  murs 
en  moellons,  doivent  être  reliés  par  de  longs  moellons 
appelés  parpaings,  qui  traversent  toute  Tépaisseur.  En 
âevation,  et  hors  de  l'humidité,  le  plâtre  s*emploie  de 
préférence  au  mortier,  parce  quMl  sèche  plus  vite  et  qu'il 
est  plus  propre  pour  les  enduits.  L'épaisseur  des  murs 
▼a  naturellement  en  diminuant  du  bas  au  haut  de  Tédi- 
flce,  parce  que  la  charge  à  supporter  est  moindre.  A  Paris, 
les  murs  de  maison  se  font  habituellement  en  pierre  de 
taille  de  0™,50  pour  les  façades  extérieures;  en  briques 
4e  0",35,  et  plus  souvent  en  pans  de  bois  hourdés  en 

C3  de  (^,46  à  (H".i8  pour  les  murs  de  refends  ou  les 
es  des  cours.  —  Les  murs  de  soutènement  des  terres 
•e  construisent  aussi  en  moellons  ou  en  briques,  avec  ou 
Mns  chaînes  en  pierres  de  taille  de  distance  en  distance; 
mais  on  ne  se  sert  que  de  mortier  de  chaux,  à  cause  de 
rhumidité,  aui,  à  la  longue,  décompose  le  plâtre.  On 
doit  donner  à  ces  murs  une  certaine  inclinaison  en  de- 
dans, ou  fruit,  qui  varie  du  10*  au  20*;  s'ils  soutiennent 
des  terres  remblayées,  leur  épaiaaeur  à  la  base  est  ordi- 
nairement du  tiers  de  leur  hauteur;  elle  est  moindre,  si 
las  terres  sont  vierges.  -»  Les  murs  de  clôture,  qui  n'ont 
point  de  charge  à  supporter,  se  font  en  moellons,  en  bri- 
qiies,  ou  en  pisé  (V,  ce  mot).  Ceux  en  moellons  ou  en 
j  firiaues,  maçonnés  avec  du  morder  ou  du  plfttre,  ont  une 
{ épaisseur  de  30  à  40  centimèt.  pour  une  hauteur  de  2  à 
S  met.  ;  on  emploie  quelquefois  la  terre  comme  mortier. 
Tout  mur  de  clôture  bien  construit  est  surmonté  (|^nn 
chaperon  (F.  ce  mot). 

'MUR  DE  CHUTE.   V.  CHUTK. 

MURAILLES  CÉLÈBRES.    F.  notre  Dtctumnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 
MURÈNE.  F.  CoLUBR. 
MUREX.  F.  Chausse-trapb. 
HURGEIS.  F.  TuMOLUS. 

MOS^ras^^"^^'  l  ^'  ^^^^  DicHonnaire  de  Bio- 

MUSCULUS.'  )      Oraphie  et  d'Histoire. 

MUSE,  nom  donné  à  la  musette  pendant  le  moyen  ftge. 
—  La  muse  de  blé  était  un  simple  chalumeau. 

MUSEAU ,  accoudoir  de  stalle,  ainsi  nommé  parce  que 
lès  sculpteurs  lui  donnaient  habituellement  la  forme  d'un 
museau  ou  mufle  d'animal. 

MUSÉE ,  en  grec  motiséion,  nom  oue  les  Anciens  don- 
nèrent à  tout  temple  des  Muses ,  pus  à  tout  endroit  qui 
leur  était  consacré  et  où  l'on  s'occnfMit  de  lettres,  de 
sciences  ou  d'arts.  Tel  était  le  célèbre  Musée  d'Alexandrie 
an  Egypte  (F.  Musût,  dans  notre  Diotionnaire  de  Biogror 
phie  et  d* Histoire).  Le  Musée  d'Athènes,  colline  Yoisine 
da  la  citadelle,  tira  son  nom  du  poète  Musée,  qui  venait 

i  réciter  ses  vers.  Les  modernes  ont  donné  le  nom  de 
usée  aux  collections  publiques  d'œavres  d'art  et  d'ob- 
jMs  rares  ou  curieux,  tels  que  tableaux,  statues,  sculp- 
tures, mosaïques,  dessins,  estampes,  médailles,  pierres 
gravées,  meubles  et  ustensiles  antiques,  etc.  Les  Anciens 
n'avaient  pas  de  collections  de  ce  genre,  et  c'était  exclusi- 
Yement  dans  les  temples  et  autres  édifices  publics  qu'on 
pouvait  admirer  les  ouvrages  des  artistes  :  on  ne  s'est 
mis  à  en  former  qu'à  partir  du  xv*  siècle  de  notre  ère.  A 
Mrt  les  considérations  tirées  da  l'espace  dont  on  ne  peut 
disposer,  il  est  certains  principes  d^rganisation  dont  on 
ne  doit  pas  s'écarter  dans  la  distribution  des  richesses 
d'un  musée,  particulièrement  d'une  galerie  de  tableaux  : 
c^est,  par  exemple,  de  les  ranger  par  écoles,  et  en  sui- 
vant, dans  chacune  d'elles,  Tordre  chronologique.  On 
>eut  toutefois  se  proposer,  comme  dans  le  grand  salon 
earré  du  Ix>uvre,  de  produire  une  impression  d'ensemble 
par  le  grandiose  et  la  magnificence  de  l'exposition,  et 
Héunir  les  chefs-d'œuvre  qui  font  le  plus  d'honneur  à 


l'art  humain.  Il  est  important  d'obtenir  dans  les  galeriei 
un  Jour  Juste  et  plein  d'effet:  autrefois,  on  faisait  venir 
le  jour  du  plafond,  système  auquel  nos  arehitectes  re- 
viennent aujourd'hui. 

Les  plus  célèbres  musées  d'Italie  sont  ceux  de  Rome 
(F.  Vatican),  de  Naples,  de  Florence,  de  Venise,  de  Turin. 
En  Allemagne,  où  ils  sont  très-nooibreux,  on  remarque 
ceux  de  Munich  (F.  ce  mot),  de  Dresde,  de  Vienne,  de 
Berlin,  de  Gotha,  de  Weimar,  de  Darmstadt ,  de  Prague, 
le  Musée  cUlemand  de  Nuremberg ,  etc.  Nous  dterons  en- 
core le  Musée  de  l' Ermitage  à  S^Pétersbouiig,  le  Musée 
Thorwaldsen  à  Copenhague,  le  musée  d*Oxford,  et  le 
Musée  britannique  a  Londres  (F.  plus  loin). 

La  France,  sous  le  rapport  des  collections  artistiques, 
ne  le  cède  à  aucun  pays  du  monde.  Paris  possède  les  mu- 
sées du  Louvre,  du  Luxenoibourg,  de  Cluny,  et  de  l'École 
des  Beaux-Arts  (F.  LouvaE,  Lcxehboubg).  Dans  les  dé- 
partement, les  musées  les  plus  importants  sont  ceux  de 
Lyon,  de  Versailles,  d'Orléans,  de  Rouen,  de  DQon,  de 
Besançon,  de  Chrenoble,  d'Aix,  d'Angers,  de  Bordeaux,  de 
Montpellier,  de  Gaen,  du  Mans,  de  Marseille,  de  Nancy,  de 
Nantes,  de  Nîmes,  de  Reims,  de  Rennes,  d'Alençon,  etc. 

MUSÉE  d'artillerie.  F.  Artillerie. 

vosiB  muTAiimQUB,  en  anglais  British  Muséum,  vaste 
édifice  de  Londres,  où  sont  déposées  de  très-riches  col- 
lections, et  qui  est  à  lui  seul  pour  les  Anglais  ce  que  sont 
à  Paris  la  Bibliothèque  impériale,  le  Louvre  et  le  Mu- 
séum d'histoire  naturelle.  Cet  immense  amas  de  livr^ 
d'objets  d'art  et  de  sciences,  fut  créé  an  1755,  et  doit  ion 
orinne  à  la  réunion  de  trois  colle<^ons  de  Hans  Sloane, 
de  Robert  Cotton  et  de  W.  Harley.  Ces  collections  furent 
déposées  dans  les  appartements  de  Montaigu-House.  Des 
legs  considérables  et  des  acquisitions  nombreuses  les 
augmentèrent  avec  rapidité.  Quand  l'État  eut  acheté  les 
marbres  recueillis  par  lord  Hamilton  pendant  son  am- 
bassade à  Naples,  puis  la  collection  Townley  en  1805,  il 
fallut  ijouter  des  constructions  nouvelles  au  corps  prin- 
cipal de  l'hètel.  Une  autre  annexe  s'éleva  pour  les  marbres 
du  temple  d'Apollon  à  Phigalie;  une  autre  encore  en 
1816,  pour  recevoir  les  statues  et  les  bas-reliefs  du  Par- 
thénon,  rapportés  d'Athènes  par  lord  Elgin.  Lorsau'en 
1823,  la  bibliothèque  de  George  HI  accrut  encore  d'une 
manière  notule  le  fonds  primitif,  il  fallut  renoncer  au 
système  d'extension  successive  des  b&timenta,  et  le  Par- 
lement décida  la  construction  de  Tédiflce  actuel.  Cet  édi- 
flce,  achevé  seulement  en  1851,  et  construit  sur  les  des- 
sins de  Robot  SmixiLe,  devait  être  sufiisant  pour  contenir 
ce  que  Ton  possédait  d^&  et  ce  crue  l'avenir  devait  au- 
porter.  On  a  recueilli,  en  effet ,  depuis  cotte  époque,  la 
bibliothèque  de  Thomas  Grenville,  les  collections  éfirp- 
tiennes  de  Sait,  de  Halliburton,  d'Anastasi,  de  Bel- 
more  et  d'Andrew,  les  monuments  lyciens  rapportés 
par  FeUows,  les  antiquités  assyriennes  découvertes  par 
Layard,  etc.  Le  British  Muséum  est  divisé  en  8  ooUeo- 
tions  ou  départements  :  au  rez-de-chaussée  sont  les  ma- 
nuscrits (plus  de  30,000),  les  livres  (500,000),  et  les 
collections  archéologiques,  comprenant  des  monuments 
de  la  Grèce,  de  l'Egypte,  de  l'Asie  Mineure,  etc.;  dans  les 
étages  supérieurs  on  a  placé  les  collectiona  d'histoire  na- 
turelle. La  salie  de  lecture,  de  forme  circulaire,  at  éclsiréa 
par  le  centre  de  la  coupole,  devrait  servir  de  modèle  à 
toutes  les  salles  de  bibliothèques  publiques  :  plus  de 
300  lecteurs  y  trouvent  &  la  fois  toutes  les  ressources 
d'une  vaste  bibliothèaue  et  toutes  les  commodités  du  ca- 
binet de  travail  le  oueux  pourvu.  Dans  las  salles  consa- 
crées aux  médailles,  aux  hôronxas,  aux  vaaas,  aux  émaui, 
aux  fidences,  aux  ivoires,  aux  terres  cuites,  aux  pein- 
tures, aux  dessins,  anx  estampes^  dont  les  collections  sont 
très-riches,  tout  est  rangé  avec  beaucoup  de  goût,  de  luxe 
même,  et  de  la  façon  la  plus  avantageuse  pour  l'étudd. 
Enfin,  rétablissement  reçoit  chaque  année  du  Parlement 
une  riche  subvention.  B. 

MUSETTE,  instrument  de  musique  d'un  caractèrs 
champêtre,  confondu  génénlament  avec  la  cornemuse 
(F.  ce  mot)^  mais  qui  est  d'une  construction  pins  déUcste 
et  plus  soignée,  et  dont  les  sons  ont  plus  de  Justesse  et 
de  douceur.  L'outre  de  la  musette  reçoit  la  vent  d'un 
soufflet  placé  sous  le  bras  gauche,  tandis  que  la  corne- 
muse est  insufflée  avec  la  bouche  :  de  plus ,  le  bourdoi 
de  la  musette  est  percé  de  plusieurs  trous,  bouchés  par 
des  chevilles  de  bois  aa  divoire  appelées  layettes,  el 
dont  on  ouvre  un  ou  deux  pour  avoir  la  toniqaa  at  U  do- 
minante du  ton  où  l'on  yeut  jouer.  La  musette,  à  pec 
près  abandonnée  a^ourd'hni,  eut  autrefois  une  grands 
vogue  :  Lulli  s'en  servit  à  l'orchestre  de  l'Académie 
reysle  de  musique,  et  elle  figura  également  dans  la  ma- 


HU-S 


1287 


MUS 


ffqae  du  rai;  an  xvm*  siècle  soitoat,  une  femme  du 
monde  devait  joaer  de  la  musette,  aussi  bien  que  de  la 
mandoline,  du  claTedn  et  de  la  ▼iole  d*amour,  et  la  mar- 
opise  de  Pompadour  en  donna  l'exemple.  Musette  est  un 
diminutif  de  muse;  quelques-uns  font  yenir  le  mot  d*un 
certain  Colin  Muset,  qui  aurait  mis  Tinstrument  en  vogue 
ta  xm*  siècle.  V,  Boijon,  Traité  de  la  musette,  Lyon, 
1672,  in-4<*.  —  Par  extension,  on  appela  Musettes  cer- 
tains morceaux  d'un  caractère  agreste  et  naïf.,  d'une  me- 
sore  assez  lente,  à  deux  ou  à  trois  temps,  avec  une  basse 
en  pédale  soutenue.  Celles  de  la  Callirhoé  de  Destouches 
et  des  Talents  luntpaes  de  Rameau  ont  été  célèbres.  L'effet 
de  la  musette  est  bien  imité  dans  l'orchestre  par  le  haut- 
bois tenant  la  mélodie  et  accompagné  par  la  flûte,  la  cla- 
rinette, le  cor  anglais  et  le  basson  ;  c'est  ainsi  qu'est 
composée  la  musette  de  la  Nina  de  Dalayrac,  et  celle  par 
laqaelle  Nicolo  a  commencé  l'ouverture  de  son  Joconde; 
l'introduction  du  Richard  Cœur-de-Lùm  de  Grétry  est  une 
masette.  Pendant  longtemps  il  fut  de  tradition  chez  les 
organistes,  dans  les  Te  Dewn  solennels,  de  jouer  une 
masette  sur  le  verset  Judex  crederis  esse  venturus;  ils 
sa  plaçaient  une  également  à  la  Blesse,  pendant  la  Corn* 
mnnion.  B. 

HOSETR,  jeu  d'anche  de  certaines  orgues,  en  étain  fin, 
et  en  forme  de  cône  renversé.  On  lui  donne  toute  l'étendue 
da  clavier,  aoit  du  positif,  soit  du  grand  orgue.  Il  sonne 
huit  pieds,  quoiqu^l  n*ait  que  quatre  pieds.  Le  son  en 
est  an  peu  plus  faible  que  celui  du  cromome,  et  imite 
assez  bien  la  vraie  musette. 

MUSÉUM  D'HISTOIRE  NATURELLE.  V.  Jardin  des 
PuiTTBs,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
iHistoire. 

MDSICO.  V.  Castrat. 

HDSIGOCRAPUB.  V.  le  Supplément  et  Pantophoni. 

MUSIQUE ,  art  de  combiner,  de  produire  des  sons  de 
manière  à  flatter  ToicWe  et  à  toucher  le  cœur.  Son  but 
est  d'émouvoir.  Comme  l'émotion  est  id  un  phénomène 
qoi  ne  peut  se  produire  que  par  l'intermédiaire  de  l'or- 
g&oisme,  l'action  de  la  musique  est  nécessairement  très- 
diverse  sur  les  êtres  organisa,  en  raison  des  différences 
qoi  existent  dans  leur  système  nerveux  :  tel  homme  est 
agréablement  touché  à  l'audition  d'un  morceau,  tel  autre 
demeare  indifférent  ou  n'éprouve  que  de  la  fatigue,  par- 
fois même  de  la  souffirance.  Parmi  les  individus  sensibles 
aax  plaisirs  de  la  musique,  les  uns  aiment  telles  ou  telles 
combinaisons  de  sons,  qui  déplaisent  à  d'autres  ou  les 
laissent  impassibles;  oeux-d  recherchent  un  genre  d'exé- 
cation  qui  ne  plaît  point  à  ceux-là;  une  pièce  de  musique 
^tn  ne  noua  a  pas  émus  dans  un  moment  exdte  en  un 
antre  temps  notre  enthousiasme.  Si  le  goût  de  la  musique 
est  donné  à  l'homme  par  la  nature,  il  faut  ajouter  que 
Tâducation  le  complète,  et  qu'elle  peut  même  le  faire 
naître  dans  celui  qui  ne  l'avait  point  eu  tout  d'abord , 
■oit  par  imperfection  native,  soit  par  défaut  d'exerdce  de 
la  sensibilité.  La  musique,  surtout  avec  la  puiMance  et 
la  richesse  auxquelles  elle  est  parvenue  ai^ourd'hui, 
n'est  donc  pas  faite  pour  tout  le  monde ,  de  même  que 
toat  le  monde  n'est  pas  fait  pour  elle;  il  faut  qu'elle 
s'adresse  à  des  hommes  intelli^nts  et  doués  d'une  orpa- 
nisation  spéciale  (  K.  Sens  musical  ).  Ses  moyens  d'action 
sont  la  méloéUe,  formée  par  les  combinaisons  successives 
des  fions,  Yharmonie,  résultant  des  combinaisona  simul- 
tanées, le  rhythme,  et  Vacc«nt  ou  Yexpression  {V,  ces 
mots). 

La  vérité  est  le  principe  de  la  musique,  comme  de  tous 
les  arts.  Mais  la  Yérité  en  général  ne  s'adresse  pas  à 
Toreille;  l'esprit  seul  en  jouit  :  par  conséquent,  toute 
vérité  n'est  pas  ansceptible  d'être  exprimée  par  des  sons 
i&Qdcaux,  et  la  musique  n*est  point  une  langue  analogue 
i  tonte  autre.  La  Térité  pour  elle  consiste  essentiellement 
&  rendre  et  à  tnmamettre  les  affections  de  l'ftme;  la  mu- 
riqoe  n'exprime  qu'autant  qu'elle  émeut.  Elle  a  pu  imiter 
avec  plus  ou  moins  de  succès  certains  effîBts  de  La  nature, 
tels  que  la  tempête,  le  balancement  des  vagues,  le  ra- 
mage des  oiseaux  :  mais  elle  est  impuissante  à  traduire 
des  idées  sans  le  secours  de  la  jwrole ,  et  sa  foculté 
d'imiter  et  de  décrire  est,  sinon  contestable  de  tous 
points,  au  moins  trèa-limitée  (K.  Dbsgriptivb  —  Mu» 
doue).  Il  en  résulte  que,  quand  on  unit  aux  sons  les  pa- 
rons articolées,  ce  n^efit  pas  l'expression  minutieuse  de 
ces  paroles  qui  est  l'objet  principal  de  la  musique,  mais 
l'expression  du  sentiment  ou  de  la  passion  one  les  paroles 
tt  les  sons  concourent  à  faire  passer  dans  Vàme  des  au- 
diteurs; et  l'on  a  tort  de  reprocher  quelquefois  aux  mu- 
siciens la  répétition  fréquente  des  mêmes  paroles  dans 
VI  moroean*  car  ces  répétitions  ont  pour  but  de  donner 


à  la  musique  le  temps  de  passer  par  tous  les  degrés  de 
lajpassion,  ce  qui  est  son  véritable  rôle.  Mettre  de  l'es- 

rit  dans  les  sons,  les  employer  k  faire  ressortir  un  mot, 
produire  une  inflexion  comique,  sacrifier  la  période 
musicale  à  la  rapidité  du  langage,  ce  n'est  pas  de  la  mu- 
sique. J.  César  avait  raison  de  dire  k  un  professeur  de 
déclamation  qui  voulait  faire  servir  la  musique  à  seconder 
la  parole  :  «  Tu  parles  trop  pour  un  homme  qui  chante, 
tu  chantes  trop  pour  un  homme  qui  parle.  »  Dans  les 
morceaux  du  genre  dramatique  où  l'articulation  préci- 

λitée  des  paroles  produit  un  bon  effet,  ce  n'est  plus 
Idée  musicale  ou  la  mélodie,  mais  le  rhythme  qui  est 
important,  et  d'ailleurs  l'accent  bouffon  de  l'acteur  est 
pour  beaucoup  dans  l'effet  de  ces  morceaux.  Quand  les 
paroles  dominent  la  musicpe ,  ce  ne  peut  être  que  dans 
un  but  de  repos  et  de  variété,  parce  qu'il  est  impossible 
d'être  continuellement  ému. 

La  musique  se  compose  de  deux  grandes  parties,  la 
composition  et  Veasécution  {V,  ces  mots).  Elle  est  à  la 
fois  un  sentiment  et  une  science  :  elle  exige,  en  effet,  de 
la  part  de  celui  qui  la  cultive,  exécutant  ou  compositeur, 
une  inspiration  naturelle,  et  des  connaissances  çui  ne 
s'acc^uièrent  que  par  de  longues  études.  La  réunion  du 
savoir  et  de  l'inspiration  constitue  l'art.  Des  hommes 
étrangers  à  la  sdence  ont  pu  produire  d'instinct  des  airs 
gradenx  et  même  sublimes,  témoin  Rouget  de  Lisle  et 
sa  Marseillaise:  d'autres,  qui  ont  étudié  patiemment  la 
théorie,  écriyent  des  morceaux  conformes  aux  règles  et 
qui  satisfont  l'ordlle,  sans  rien  dire  au  cœur  ni  à  l'ima- 
gination. Mais  les  uns  et  les  autres  ne  sont  que  des  ar- 
tistes incomplets,  si  tant  est  qu'ils  méritent  le  nom  d'ar- 
tistes. 

Eu  égard  k  la  nature  des  sons  qu'elle  emploie,  la  mu- 
sioue  se  divise  en  musUiue  vocale  et  musique  instrument 
taie.  La  musique  vocale  peut  être  écrite  pour  une  ou 
plusieurs  voix,  et  la  musique  instrumentale  pour  un  ou 
plusieurs  instruments,  ou  pour  des  masses  d'instruments. 
La  première  se  divise  en  musique  sacrée,  religieuse  on 
d'église,  miuique  dramatique  ou  opéra,  musique  de 
chambre,  et  airs  poptUaires  {V,  Égusb,  Opéra,  Ghambrb, 
Air)  ;  la  2*,  en  musique  d'orchestre  et  musique  de  chambre, 
comprenant  les  ouvertures,  les  symphonies,  quatuors, 
quintettes,  sextuors,  etc.,  les  sonates,  les  concertos,  les 
pièces  d'orgue,  etc. 

L'histoire  raconte  toutes  sortes  de  merveilles  sur  la 
puissance  de  la  musique.  Parmi  les  effets  de  cet  art,  les 
uns  sont  purement  physiques,  et  les  autres  moraux.  La 
mudque  agit  sur  les  oreanes  non-seulement  de  l'homme, 
mais  des  animaux.  Le  chien,  doué  d'une  excessive  sensi- 
bilité à  cet  égard,  pousse  des  cris  et  des  hurlements  qui 
f paraissent  êâ^  une  expression  de  douleur,  et,  s'il  est 
ibre,  il  s'enfuit  dès  qu'il  entend  un  instrument.  Des  ex- 
périences nombreuses  ont  prouvé  que  les  oiseaux,  les 
chevaux,  les  cerfs,  les  castors,  les  rats,  les  éléphants,  les 
lézards,  les  araignées,  entendent  de  la  musique  avec  plai- 
sir (F.  Fétis,  Curiosités  historiques  de  la  mustque, 
ch.  xi).  On  s'explique  dès  lors  que  la  musi<]^e  ait  pu 
être  employée  comme  moven  curatif  dans  certaines  affec- 
tions qui  ont  pour  principe  soit  une  douleur  profonde, 
soit  une  aberration  de  l'esprit  :  l'émotion  de  l'àme  répond 
alors  à  l'ébranlement  des  sens.  Sans  aller  aussi  loin 
qu'Homère,  Plutarque,  Théophraste  et  Galien,  qui  étaient 
persuadés  que  la  musique  guérissait  de  la  peste,  des  rhu- 
matismes et  des  pioûres  de  reptiles,  ou  que  uiemerbroecli. 
Bonnet,  Baglivl,  Kircher,  Haffenreffer  et  Desault,  qui  lui 
attribuaient  la  guérison  de  la  phthlsie,  de  la  goutte,  de 
l'hyd^hoble,  et  de  la  morsure  des  animaux  yenimeux, 
il  est  certain  qu'elle  agit  sur  les  maladies  dépendantes 
du  svstème  nerveux.  La  harpe  de  Darid  calma  les  accès 
de  démence  de  SatU;  le  roi  d'Espagne  Ferdinand  VI  fut 
guéri  de  l'aliénation  mentale  par  les  chants  de  Farinelli. 
—  Les  Andens  ont  louTent  parlé  de  l'influence  de  la  mu- 
sique sur  la  dvilisation  et  les  bonnes  mœurs.  Homère 
place  un  musicien  auprès  de  Clytemnestre  pendant  l'ab- 
sence d'Agamemnon,  pour  garaien  de  sa  chasteté,  et 
Égisûie  fût  sans  puissance  sur  l'esprit  de  la  reine  tant 
qu'elle  entendit  les  chants  qui  lui  présentaient  les  images 
ae  la  vertu.  Polybe  attribue  à  la  culture  de  la  musique  la 
pureté  de  mœurs  des  Arcadiens.  Selon  Plutarque,  Ter- 
pandiê,  par  le  secours  de  son  art,  apaisa  une  sédition  à 
Lai^émone.  Empédode  passdt  pour  avoir  prévenu  un 
meurtre  par  le  son  de  sa  lyre.  Antigénlde  et  TImothée, 
après  avoir  excité  jusqu'à  la  démence  l'ardeur  belliqueuse 
d'Alexandre  le  Grand,  rendaient  le  calme  à  son  âme  en 
changeant  seulement  de  mode.  Si  l'on  ne  doit  Yolr  qu'une 
inutge  dans  les  tigres  et  les  lions  apprivoisés  par  Orphée, 


y 


ML» 


12S8 


MUS 


des  assassins  ont  été  bien  réellement  désarmés  par  les 
accents  de  Stradella* 

Histoire,  —  La  musique  est  un  des  arts  les  plus  anciens, 
parce  que  son  moyen  d*expression,  le  son,  a  été  donné 
>  %  tous  les  hommes,  et  que  tout  sentiment  vif  cherche  à 
'  se  manifester  par  des  sons.  Tous  les  essais  que  les  Hé- 
<  breux,  les  Chinois,  les  Indiens  et  autres  peuples  primi- 
tifs ont  pu  faire  n*ont  rien  de  commun  avec  Part  actuel. 
Chez  les  Grecs,  la  musique  fut  en  quelque  sorte  partie 
intégrante  de  la  religion  par  les  hymnes  de  toute  sorte 
consacrées  à  tous  les  dieux  et  &  toutes  les  fêtes,  par  les 
airs  que  les  instruments  exécutaient  pendant  les  proces- 
sions et  les  sacrifices.  Elle  fut  aussi  de  toutes  les  céré- 
monies publiques.  Les  Aigiens  allaient  au  combat  au  son 
des  flûtes,  les  Cretois  au  son  de  la  cithare,  presque  tous 
en  entonnant  le  Péan  ou  tout  autre  chant  de  guerre. 
Quand  Êpaminondas  fit  construire  Messène,  des  musi- 
dens,  au  dire  de  Pausanias ,  excitèrent  Tardeur  des  tra- 
vailleurs en  exécutant  des  airs  de  Pronomos.  Dans  les 
jeux  publics,  il  y  avait  des  luttes  de  chant  et  d'instru- 
ments, et  la  musique  s'associait  à  la  poésie  pour  célébrer 
les  vainqueurs.  H  y  avait,  pour  les  œuvres  scéniques,  une 
sorte  de  déclamation  musicale,  et  la  voix  de  Tacteur  était 
doublée  et  soutenue  par  la  ilûte  ;  ces  œuvres  étaient  en- 
tremêlées de  chœurs.  Les  oracles ,  les  lois  mêmes  furent 
primitivement  chantées  en  public.  Ne  pas  savoir  chanter 
était  une  honte.  La  musique  avait  si  bien  pénétré  dans 
Ifrs  habitudes  et  les  mœurs,  qu*il  existait  des  nomes, 
c-à-d.  de  certains  genres  consacrés  de  chansons,  pour 
toutes  les  professions  et  toutes  les  circonstances  de  la  vie 
(F.  Chanson).  Liée  aux  mathématiques  par  les  propor- 
tions de  ses  consonnances,  à  la  métrique,  k  la  danse  et 
à  la  mimique  par  le  rhytbme,  elle  était  un  élément  né- 
cessaire de  réducation ,  à  laquelle  elle  donnait  son  nom 
même,  (Lovfftx^.  Ce  mot  indiquait  toutes  les  attributions 
des  Muses.  Suivant  Platon,  le  nombre  et  Tharmonie,  s*in- 
linuant  de  bonne  heure  dans  l'&me,  y  font  entrer  en 
même  temps  la  grftce  et  le  beau ,  et  Aristide  Quintilien 
dit  <|ue  la  musique  donne  à  TilLme  les  mœurs  par  Thar- 
monie,  au  corps  l'élégance  par  le  rhytbme.  Ampbion 
élevant  les  murs  de  Thèbes  aux  sons  de  sa  lyre  et  Orphée 
adoucissant  les  bêtes  féroces  étaient  l'image  du  pouvoir 
de  la  musique  sur  la  Grèce  encore  barbare;  quand  Platon 
déclarait  que  la  musique  était  nécessaire  à  quiconque 
voulait  gouverner  l'État,  il  pensait  à  la  puissance  de  cet 
art  pour  le  maintien  des  mœurs  publiques  dans  la  Grèce 
civilisée.  —  Malheureusement  nous  ne  pouvons  nous  faire 
une  idée  de  la  musique  grecque  que  par  les  écrivains  théo- 
riciens (F.  Grecque  —  Musique)  ;  et  il  est  assez  difficile 
de  comprendre  ces  écrivains,  si  l'on  n'oublie  pas  le  sens 
attaché  par  les  modernes  à  un  certain  nombre  de  mots, 
tels  que  mode,  ton,  harmonie,  diatonûiue,  chromatique, 
êtUiarmonique  (V.  ces  mots)^  entendus  tout  autrement 
par  les  Anciens.  Les  fragments  de  chants  qui  ont  été  re- 
cueillis sont  peu  nombreux,  très-courts,  et  à  peu  près 
Insignifiants.  Ils  ont  été  publiés  par  Bottrigari  et  Galilei 
en  1581  <  puis  dans  l'édition  d'Aratus,  qui  parut  à  Oxford 
en  1672,  enfin  par  Burette  dans  les  Jdêm,  de  VAcad.  des 
Inscript,  et  Belles-Lettres,  V  série,  t.  V.  Le  christianisme 
a  pris  pour  ses  chants  quelques-unes  des  mélodies 
païennes,  qu'il  est  ai^ou^'^ui  impossible  de  distinguer; 
tout  le  reste  a  péri  avec  les  sociétés  antiques.  Le  vieux 
système  musical  et  la  notation  ayant  été  changés  au 
moyen  &ge,  les  numuscrits  de  la  musique  ancienne  par 
rurent  n'avoir  plus  aucun  sens;  on  les  laissa  se  perc&e, 
ou  bien  les  copistes  les  grattèrent  pour  employer  le  même 
parchemin  à  la  transcription  d'autres  œuvres. 

La  musique  instrumentale  était  moins  en  faveur  que 
le  chant.  Aristote  déclarait  le  Jeu  des  instruments,  et  sur- 
tout des  flûtes,  indigne  de  l'homme  libre;  il  ne  voulait 
cependant  parler  que  de  la  profession,  et,  en  effet,  presque 
tous  les  instrumentistes  furent  des  esclaves  ou  des  étran- 
gers. Les  préventions  contre  la  flûte  venaient  de  ce  qu'elle 
était  d'origine  barbare  ou  asiatique,  défigurait  les  traits 
de  l'exécutant,,  et  ne  pouvait  servir  à  s'accompagner  en 
chantant.  Longtemps  le  Jeu  isolé  des  instruments  fut  in- 
connu, et  on  ne  les  employa  que  pour  prendre  le  ton  et 
soutenir  la  voix.  Les  airs  de  danse,  qui  semblent  réservés 
aux  instruments,  étaient  souvent  chantés,  ou  bien  l'on 
te  contentait  de  marquer  le  rhythme  à  l'aide  du  tympanon 
•n  des  crotales. 

I^s  Romains  n'ont  point  été  un  peuple  artiste.  Long- 
temps ils  ne  connurent  de  la  musique  que  ce  qui  leur 
avait  été  enseigné  par  les  Étrusques,  et  l'on  ne  peut  sup- 
poser une  grande  valeur  au  chant  des  frères  Arvals,  ou 
a  celui  des  prêtres  Saliens  qui  dansaient  en  frappant  sur 


des  boucliers.  Servins  Tullius  créa  deux  centuries  ds 
Joueurs  de  cor  et  de  trompette.  On  employa  les  flûtes 
dans  les  cérémonies  funèbres,  puisque  les  Douse-Tsbles 
en  fixent  le  nombre  à  huit.  De  bonne  heure  les  musi- 
ciens grecs  et  asiatiques  affluèrent  à  Rome,  mais  lorsque 
déjà  la  musique  grecque  était  en  décadence  :  ils  figurèrent 
par  bandes  considérables  dans  les  spectacles  publics. 
Ainsi,  à  la  première  naumachie,  qui  eut  lieu  sur  le  lac 
Fucin,  J.  César  produisit  11,000  chanteurs  et  instrumen- 
tistes. A  la  suite  d'un  meurtre  commis  au  théâtre,  TibèrE 
chassa  de  Rome  tous  les  musiciens;  mais  ils  furent  rap- 
pelés par  Caligula.  Néron  eut  5000  musiciens  attachés  à 
sa  maison.  La  pompe  des  exécutions  musicales  pouvait 
être  grandiose  et  la  sonorité  puissante,  mais  il  est  dou- 
teux que  l'art  y  trouvât  son  compte. 

L'enfantement  de  la  musique  moderne  a  été  laborieux 
et  long.  Au  vi*  siècle,  le  pape  S^  Grégoire  le  Grand  forme 
de  l'ancienne  mélopée  des  Grecs  le  plain-chant  ou  chant 
ecclésiastique  (F.  Puuii-Chant).  Puis,  Tharmonie  com- 
mence à  naître  :  elle  se  manifeste  d'abord  dans  de  faible 
essais  appelés  Déchant  (V,  ce  mot) y  et,  s'améliorant  pep 
à  peu,  elle  arrive  au  contre-^nt  (V.  ce  mot).  Les  pre- 
mières combinaisons  de  l'harmonie  ne  suffirent  pas  lonf- 
temps  pour  rompre  l'uniformité  de  la  musique,  qui  en 
était  toujours  &  l'ordre  unitonique.  En  établissant  l'échelle 
musicale  diatonique.  Gui  d'Arezzo  opéra  une  nouvelle 
révolution,  et  bientêt,par  l'adoption  de  la  mesure,  on 
distingua  la  musique  plane  et  la  musique  mesurée,  Aa 
XVI*  siècle,  Monteverde  fit  l'essai  des  intervalles  disso- 
nants, et,  àcûté  de  la  tonalité  dérivant  des  Grecs,  s'éleva 
la  tonalité  moderne  avec  ses  modes  mineur  et  mineur 
(K.  ToNÂUTÉ),  découverte  qui  développa  si  prodigieuse- 
ment l'élément  passionné  dans  la  musique.  En  même 
temps  l'invention  de  la  basse  continvLe  (V.  ce  mot)y  en 
rendant  la  basse  indépendante  de  la  partie  chantée,  fut 
le  germe  d'un  vaste  et  brillant  système  d'instrumenta- 
tion. Juec[ue-Ui  aussi,  la  musique  n'avait  eu  qu'un  but, 
l'expression  des  sentiments  religieux  ;  qu'un  temple , 
l'église;  qu'un  style,  qu'une  forme,  qu'un  genre  ;  de  œ 
tronc  plein  de  sève  vont  sortir  désormais  deux  branches  | 
distinctes  et  vigoureuses,  l'une  formée  du  concours  des 
voix  et  des  instruments,  l'autre  purement  instrumentale, 
Corelli  crée  la  sonate;  Carissimi  pose  dans  l'oratorio  les 
éléments  de  la  cantate,  de  l'opéra ,  de  toute  la  musique 
dramatique.  Le  quatuor  d'instruments  à  cordes,  tenté  jmt 
Allegri,  se  perfectionne  constamment  Jusqu'à  Boccherini 
et  Haydn,  qui  lui  donnent  un  caractère  fixe  ;  il  en  est  de 
même  pour  la  sjrmphonie,  depuis  Stamitz  Jusqu'à  Bee- 
thoven. Le  drame  lyrique  marche  d'essais  en  essais,  de 
P^  Jusqu'à  Mozart  et  Rossini.  Mozart  opère  un  nouveau 
progrès  en  imaginant  la  substitution  d'un  ton  à  un  autre 
par  le  moyen  de  Venharm<mie  (F.  ce  mot).  Enfin  l'inven- 
tion de  nouveaux  instruments  ou  le  perfectionnement  des 
anciens  donnent  chaque  jour  de  nouveaux  effets  de  sono- 
rité, et  les  pratiques  des  maîtres  sont  réduites  en  prin- 
cipe» par  d'illustres  théoriciens,  qui  se  succèdent  depuis 
Zarlino  Jusau'à  Catel,  Reicha  et  Fétis.  Nous  renvoyons, 
pour  une  histoire  plus  complète  de  la  musique  dans  les 
temps  modernes,  aux  articles  de  ce  Dictionnaire  qui  trai- 
tent de  la  musique  en  Italie,  en  Allemagne,  en  France, 
en  Angleterre,  en  Espagne  et  dans  les  autres  pays. 

BibltoQraiphi»,  —  Plusieurs  écrits  de  l'antiquité  sur  la 
musique  nous  sont  parvenus,  tels  que  ceux  d'Aristoxène, 
d'Eudide,  de  Nicomaque,  d'Al^ius,  de  Gaudentius,  de 
Bacchius,  et  d'Aristide  Quintilien.  Meibom  les  a  réunis 
sous  le  titre  de  Antitmœ  musicœ  auctores  septem,  grec- 
latin,  Amsterdam,  1652,  avec  celui  de  Martianus  Capella 
en  appendice.  Une  autre  collection,  publiée  par  J.  Wlllis, 
contient  les  Harmoniqws  de  Ptolémée,  le  Commentaire 
de  Porphyre  sur  cet  ouvrage,  et  les  Harmoniques  de  Ma- 
nuel Bryenne.  Plusieurs  chapitres  d'Aristote ,  d'Élien  et 
d'Athénée,  les  ouvrages  de  Plutarque,  de  S*  Augustin,  de 
Boèce,  et  de  Michel  Psellus  sur  la  musique  doivent  aussi 
être  consultés.  Les  principaux  théoriciens  du  moyen  âge 
ont  été  recueillis  par  Gerbert,  1784,  3  vol.  in^^  De  tout 
temps  on  a  publié  en  Allemagne  des  DictionwUres  de  Mvh 
sique;  nous  citerons  ceux  de  Walter  (Leipzig,  1733);  de 
Wolf  (Halle,  1787);  de  J.-H.  Knecht  (Ulm,  1705);  de  Bur- 
khard  (Ulm,  1832)  ;  de  Hasuser  (2*  édit.,  Meissen,  1833). 
En  France,  on  connaît  surtout  ceux  de  Brossard,  de  J.-J* 
Rousseau  (1768);  de  Castil-Blaze  (1821  et  1825),  et  de 
MM.  Escudier  (1853);  ou  la  traduction  de  celui  de  Lich- 
tenthal  (1839).  —  Parmi  les  ouvrages  théoriques,  outre 
ceux  qui  ont  été  indiqués  aux  art.  CoMPOsmoii ,  Goii- 
Taa-poiNT,  Hariion»,  on  peut  mentionner  le  Traité  spé» 
euiatif,  pratiqué  et  philosophique  de  musique  par  Alex* 


MUS 


1289 


MUS 


Valeolm  (Êdimboorg,  1721,  in-8<>),  les  Prmcipes  élémef^ 
taim  de  musitrue  par  les  membres  da  Gonserratoire  ;  la 
Vuitqus  misB  à  la  portée  de  tout  le  monde^  par  Fétis;  les 
Idées  nur  Vesthétviue  de  la  musiqw  par  Schabert  (en 
sUoOm  1806)  ;  VEssai  d^une  esthétique  de  la  musique  par 
G.-C  MOller  (en  allem.,  Leipzig,  1830),  2  vol.  in-8o.  — 
Les  piindpaox  écrivains  qui  se  sont  occupés  de  Thistoire 
de  la  musique  sont  :  Galllei,  DiaXogo  délia  musica  antica 
e  modema,  Florence,  1581  et  1602,  in-fol.;  Bontempi, 
Bistoria  miaica,  Pérouse,  1605,  in-foL;  Kircher,  Musur- 
oiauniversalis,  1650,  2  toI.  in-fol.;  Bonnet,  Histoire  de 
la  musique  et  de  ses  effets,  Paris,  1715,  in-8<*,  où  il  n*est 
gaère  question  que  du  compositeur  Lulli  ;  Marpurg,  /n- 
troduction  critique  à  VMstotre  de  la  musique,  en  allem., 
Berlin,  1754;  BlainvUle,  Histoire  générale,  critique  et 
pkUoklgique  de  la  musique,  Paris,  1767,  in-4<*,  ouvrage 
pldn  de  faits  erronés  et  d'une  érudition  factice  ;  le  P.  Blar- 
doi,  Storia  délia  musica,  Bologne,  1757-81,  3  vol.  in-4°, 
Uvre  très-savant,  mais  malheureusement  inachevé;  La- 
borde.  Essai  sur  la  musique  ancienne  et  moderne,  Paris, 
1780,  4  vol.  in-4',  amas  indigeste  de  matériaux  recueillis 
■ms  discernement  et  sans  goût;  Hawkins,  Histoire  gêné- 
ralede  la  musique,  en  anglais,  Londres,  1776, 5  vol.  in-4o; 
Bomey,  Histoire  générale  di  la  musique,  en  anglais, 
Londres,  1776-80, 4  vol.  in-8^;  Forkel,  Histoire  générale 
(b/amtm9iie,en  allem.,  Leipzig,  1788-1801, 2  vol.  in-8S 
excellent  ouvrage,  inachevé;  Kalkbrenner,  Histoire  de  la 
musique,  Paris,  1802, 2  vol.  in-8%  où  il  n*est  guère  ques- 
tion que  de  la  musique  des  Hébreux  et  des  Grecs; 
Busby,  Histoire  générale  de  la  musique,  en  anglais,  Lon- 
dres, 1819, 2. vol.  in-8%  extraite  de  Burney  et  de  Hawkins; 
Fétis,  Curiosités  historiques  de  la  musique^  Paris,  1830, 
m-8«;  Cooke  Stafford,  Histoire  de  la  musique,  traduite 
de  ranglais  parH"**  FéUs,  Paris,  1832,  in-12;  Fink,  His- 
toire primordiale  de  Vart  musical,  en  allem.,  Essen.  1831 , 
iii-12  ;  Kleinsmîdt  et  Buschcndorf ,  Histoire  abrégée  de 
la  musique,  en  allem.,  Leipzig,  1832;  Kiesewetter,  His- 
toire de  la  musique  de  V Europe  occidentale^  en  allem., 
Leipzig,  1831,  in-4*^;  Adrien  de  Lafage,  Histoire  de  lamih- 
siqws,  Paris,  1844,  2  vol.  in-8®  ;  Labat,  Études  philoso- 
phiques et  morales  sur  Vhistoire  de  la  musique,  Paris, 
1852, 2  vol.  in-8»;  Félix  Qément,  Histoire  générale  de  la 
mifttique  religieuse,  Paris,  1860,  jpr.  in-8*;  Fétis,  Biogra- 
phie universelle  des  musiciens,  2*  édlt.,  1860  et  suiv.  B. 

MUSIQUE  (Académie  impériale  de).  K.  Opéra,  dans  notre 
Dietkmnaire  de  Biographie  et  S  Histoire. 

MusiQiiB  (Chef  de),  celui  oui  dirige  un  corps  de  musl- 
dens  dans  Tannée  ou  dans  la  garde  nationale.  Il  fait  par- 
tie de  rétat-ma]or,  et  a  le  rang  de  sergent-major. 

McsiQUB  (Conservatoires  de),  établissements  destinés  à 
conserver  et  à  propager  les  connaissances  musicales.  Ils 
OQt  pris  naissance  en  Italie  :  le  premier  fut  fondé  à  Niq)Ies 
es  1537,  sous  le  nom  de  Santa-Maria  di  Loreto,  et,  en 
1576,  on  en  institua  un  second  dans  la  même  ville  sous 
celui  de  Sant^  Onofrio.  Leur  succès  fit  ériger,  en  1607, 
on  3*  établissement ,  celui  délia  Pietà  ou  de'  Turchini, 
dont  le  Conservatoire  de  Sont'  Onofrio  devint  une  simple 
nccorsale.  Un  4%  appelé  de*  Poveri  Jesu  Christi,  qui 
datait  de  1589,  finit  par  n*étre  qu*ane  dépendance  du 
lémixiaire  diocésain.  Le  Conservatoire  de  Santa-Biaria 
a  Loreto  fut  supprimé  en  1799,  et  les  deux  autres  furent 
réunis  en  1806  sons  le  nom  de  Collège  royal  de  musique. 
Après  les  Conservatoires  de  Naples,  entièrement  consa- 
crés aoux  hommes,  et  où  Ton  pouvait  rester  depuis  Tâge 
de  8  ans  Jusqu'à  20,  les  plus  célèlireB  furent  oeux  de 
Venise,  réservés  aux  femmes  :  il  y  en  avait  quatre, 
fOspedàle  deila  Pietà,  le  Mendicantt,  le  Incurabili,  et 
fOtpedaUtto  di  son  Giovanni  e  Pa/cHo.  Le  1*'  et  le  3*  sub- 
dstèrent  Jusqu'aux  dernières  années  du  xvni*  siècle;  le 
I*  disparut  avec  la  République;  celui  délia  Pietà  subsiste 
leol  «njourd'hui.  C'était  une  chose  curieuse  que  d'y  voir 
on  ofchestre  uniquement  composé  de  Jeunes  filles.  Un 
Conservatoire  a  été  fondé  à  Milan  en  1807,  sous  la  direc- 
tion d'Asioli,  pour  24  élèves  seulement,  qui  étaient  en- 
tretenus de  toutes  choses. 

En  France,  les  maîtrises  des  cathédrales  et  l'école  de 

rAcadémle  royale  de  musique  avaient  suffi  pour  former 

les  chanteurs  dont  l'église  et  le  théâtre  avaient  besoin, 

lorsque  la  révolution  opérée  par  Gltlck  rendit  nécessaire 

SB  nouvel  enseignement  musical.  En  1784,  une  École 

royale  de  chant  fut  fondée,  &  laouelle  on  ijouta,  en  1786, 

des  classes  de  déclamation  qui  la  firent  nommer  Éof^ 

royale  de  chant  et  de  déclamation.  Cet  établissement, 

dont  Goflsec  fàt  le  directeur,  disparut  en  1780.  Mais  alors 

Sarrette  réunit  les  45  musiciens  des  gardes-firançaisss, 

^our  eo  farmer  la  p<^infère  qui  dossenrirait  les  00  b^ 


taillons  de  la  garde  nationale  parisienne;  en  mai  1700,  la 
municipalité  se  chargea  de  la  dépense,  porta  le  nombre 
des  exécutants  à  78,  et  les  chargea  du  service  des  fêtes 
publiques.  La  suppression  des  compagnies  soldées  de  la 
garde  nationale,  en  1792,  entraîna  celle  des  musiciens; 
mais,  peu  de  temps  après,  Sarrette  obtint  de  la  munici- 
palité la  création  a'une  école  gratuite,  qui  fut  bientôt  en 
mesure  de  fournir  des  orchestres  pour  les  solennités  na- 
tionales et  des  corps  de  musiciens  pour  les  armées  de  la 
Républiaue.  La  Convention,  par  décret  du  18  brumairt 
an  n,  érigea  cette  école  en  Institut  national  de  musiflue^ 
et,  le  16  thermidor  an  m,  en  Conservatoire  de  musique» 
L'étaJbllssement,  placé  dans  le  local  des  Menus  Plaisirs, 
fut  composé  de  115  artistes,  chargés  de  donner  gratuite* 
ment  rinstruction  à  600  élèves  des  deux  sexes  (6  psr  dé- 
partement) ;  un  crédit  de  240,000  fr.  fut  ouvert  pour  les 
dépenses,  et  on  vota  l'établissement  d'une  bibliothèque 
musicale,  composée  de  livres  et  de  partitions,  ainsi  que 
la  création  d'une  collection  d'instruments.  Si  l'on  ne  se 
nq>pelait  que  le  but  principal  du  Conservatoire  était 
alors  le  recrutement  des  corps  de  musique  militaire,  on 
trouverait  étrange  la  composition  du  personnel  ensei- 
gnant. Il  comprenait,  en  effet  :  pour  le  solfège,  14  pro- 
fesseurs; dannette,  19;  flûte,  6;  hautbois,  4;  oasson,  12; 
cor,  12  ;  trompette,  2  ;  trombone,  1  ;  serpent,  4  ;  buccin,  1; 
timballes,  1  ;  violon,  8;  basse,  4;  contre-basse,  1  ;  clave- 
cin, 6  ;  oreue,  1  ;  vocalisation,  3  ;  chant  simple,  4  ;  chant 
déclamé,  2;  accompagnement,  3  ;  composition.  7.  —  En 
1802,  le  crédit  du  Conservatoire  fut  réduit  à  100,000  fr., 
le  nombre  des  élèves  à  300  (admis  après  examens) ,  et 
celui  des  professeurs  à  35,  non  compris  le  directeur  et 
3  inspecteurs  de  l'enseignement.  En  1805,  on  créa  ua 
pensionnat  pour  12  hommes  et  6  femmes.  En  1808,  l'or- 
ganisation du  Conservatoire  fut  encore  modifiée;  on  y 
créa  des  cours  de  déclamation  comique  et  tragique  ;  on 
porta  le  nombre  des  élèves  à  400,  dont  36  pensionnaires; 
outre  son  ancienne  destination,  l'établissement  dut  pré- 
psrer  des  sujets  de  tous  les  genres  pour  les  principaux 
thé&tres  ;  de  nombreux  concerts  furent  donnés  pour  for- 
mer d'habiles  exécutants  et  des  chefs  d'orchestre;  les 
professeurs  composèrent  des  méthodes  de  toute  sorte.  La 
Restauration,  donnant  au  Conservatoire  le  nom  d'École 
royale  de  musique,  la  plaça  sous  la  direction  de  l'inten- 
dant des  menus  plaisirs,  diminua  son  budget,  congédia 
Sarrette,  et  supprima  les  concerts.  Tout  dépérissait,  même 
sous  l'administration  de  Peme ,  lorsque  Chérubin!  fut 
nommé  directeur  en  1822.  Il  rendit  aux  études  leur  an- 
cien éclat.  La  Soàété  des  concerts  fut  formée  en  1828, 
pour  exécuter  &  grand  orchestre,  dans  plusieurs  réunions 
annuelles,  les  productions  les  plus  remarquables  des  di- 
verses écoles.  En  1830,  le  Conservatoire  reprit  son  nom. 
M.  Auber  a  remplacé  Cherubini  en  1842.  Sous  son  admi- 
nistration, on  a  institué  une  quatrième  classe  de  décla- 
mation dramatique,  et  une  classe  d'histoire  et  de  littérar- 
ture  au  point  de  vue  de  l'art  et  du  théâtre.  Aujourd'hui, 
le  pensionnat  n'existe  plus  que  pour  10  hommes, sdmis 
par  voie  de  concours,  et  destinés  aux  études  lyriques. 
Plus  de  600  élèves  viennent  recevoir  gratuitement  l'édu- 
cation musicale  et  dramatique;  on  les  admet  depuis 
19  ans  Jusqu'à  22.  L'enseignement  est  organisé  de  la  ma- 
nière suivante  i  classe  des  chœurs,  2  professeurs  ;  sol- 
fège, 14;  classe  d'ensemble,  1  ;  chant.  7;  étude  de  rôles, 
2  ;  opéra  sérieux,  2  ;  opéra-comique,  1  ;  déclamation  spé- 
ciale, 3  ;  maintien  théâtral,  1  ;  lecture  à  hante  voix,  1  ; 
harmonie  et  accompagnement,  4  ;  contre-point  et  fUçie, 
4;  composition,  2;  orgne,  1  ;  piano,  4;  étude  du  clavier, 
3;  harpe,  1;  violon,  4;  violoncelle.  2;  contre-basse,  1; 
flûte,  2  ;  hautbois,  1  ;  clarinette,  2  ;  basson,  1  ;  cor,  1  ;  cor 
à  pistons,  1  ;  trompette,  1  ;  trombone,  1.  Le  Conserva- 
toire est  particolimment  renommé  pour  son  école  in- 
strumentale, la  première  de  l'Europe.  Sa  bibliothèque 
contient  environ  12,000  partitions,  40,000  parties  sép»* 
rées  d'orchestre,  une  quantité  considérable  de  chœurs, 
messes,  motels,  oratorios,  méthodes,  etc.,  6,000  pièces  de 
thé&tre,  plus  de  100  volumes  de  plain-chant.  Plusieun 
écoles  de  musioue  des  départements  ont  été  érigées  ea 
succursales  du  Conservatoire  de  Paris:  ce  sont  celles  de 
LUle  en  1826,  de  Toulouse  en  1840,  de  Marseille  et  de 
MeU  en  1841,  de  Dijon  en  1845,  de  Nantes  en  1846. 
V.  Lassabathie,  Histoire  du  Conservatoire  de  musique 
et  de  déclamation,  Paris,  1850. 

D'autres  pays  ont  pris  exemple  sur  la  France.  Des  Con- 
servatoires ont  été  fondés  à  Prague  en  1810.  à  Vienne  et 
àVarsovie  en  1821,  à  Madrid  en  1830,  à  Berlin,  à  Leipzig, 
à  Cologne,  à  Munich,  à  Londres,  à  Bruxellet,  etc.      B. 

MUSiQDi  (Gravure  de  la).  V.  Csayssb, 


MTR 


1290 


MYS 


MCSIVUH  (Opus).  F.  MosaIqcb. 

MUSOLMÀNË  (Architecture).  V.  Arabe. 

MusoufATiB  (Reli^on).  V,  Coran,  Diotiormaiire  de  BiO" 
graphie  et  (TBistotre, 

MUTATION  (du  latin  mtUare,  changer),  en  termes  de 
Droit,  transmission  des  biens  d*une  personne  à  une  autre, 
par  Tente,  échange,  donation  ou  succession.  A  chaque 
mutation  par  donation  ou  par  succession,  le  Trésor  pu- 
blic perçoit  sur  le  nouveau  propriétaire  un  droit  quirarie 
selon  le  degré  de  parenté.  Les  lois  des  28  avril  1816  et 
21  avril  1832,  qui  réglaient  le  tarif,  ont  été  considérable- 
ment modifiées  par  celle  du  18  mai  1850.  Pour  les  trans- 
missions entre  vifs  de  meubles  à  titre  onéreux ,  le  droit 
tarie  de  0  fr.  50  à  10  fr.  pour  lOO  fr.;  pour  les  transmis- 
sions entre  vifs  d*immeubles  à  titre  onéreux,  de  1  fr.  50 
à  10  fr.  pour  100  fr.;  pour  les  transmissions  entre  vifs  à 
titre  gratuit  en  ligne  directe,  de  1  à  4  p.  100;  pour  les 
transmissions  entre  vifs,  à  titre  gratuit,  entre  époux,  de 
0  fr.  75  à  4  fr.  50  p.  100  ;  pour  les  transmissions  entre 
▼ifs  &  titre  gratuit  en  ligne  collatérale,  de  2  à  8  p.  100; 
poor  les  transmissions  entre  vifs  à  titre  gratuit  entre 
personnes  non  parentes,  de  4  à  9  p.  100  ;  pour  les  muta- 
tions par  décès  en  ligne  directe,  meubles,  0  fr.  25,  im- 
meubles, 1  fr.  p.  100  ;  pour  les  mutations  par  décès  entre 
époux,  meubles,  1  fr.  50,  Immeubles,  3  fr.  p.  100  fr.; 
pour  les  mutaUons  par  décès  en  ligne  collatérale,  de  3  à 
0  p.  100;  pour  les  mutations  par  décès  entre  personnes 
non  parentes,  meubles,  6,  immeubles,  9  p.  100.  Les  droits 
de  mutation  sont  perçus  par  Tadministration  de  Tenre- 

g'strement  et  des  domaines.  Si  la  déclaration  n'a  pas  été 
ite  dans  les  délais  prescrits  (6  mois  pour  la  France, 
8  mois  pour  les  autres  pays  de  TEurope,  1  an  pour  l'Amé- 
rique, z  ans  pour  TAfhque,  et  autant  pour  TAsie),  on  est 
tenu  de  payer  droit  et  demir-droit.  Les  omissions  et  les 
évaluations  insuffisantes  donnent  lieu  à  un  double  droit 
sur  les  objets  omis  ou  non  suffisamment  estimés. 

MOTATiON,  terme  de  Musique.  V.  Moarce. 

MUTATION  (Jeux  do),  nom  donné  à  une  série  des  Jeux  à 
bouche  de  Torgue.  Ces  Jeux ,  formés  de  plusieun  ran- 
gées de  tu^ux  réunis  ensemble  et  n'ayant  qu'un  seul  et 
même  registre,  sonnent  à  la  quinte  ou  à  fa  tierce  des 
Jeux  d'octave  ou  de  fonds.  Les  Jeux  de  mutation  sont  :  le 
gros  nasard,  la  grosse  tierce,  le  nasard,  la  qttarte  de 
nasard,  la  tierce,  le  larigot,  la  fourniture,  la  cymbale , 
et  le  cornet.  F.  C. 

MUTE  (du  bas  latin  muto),  vieux  mot  qui  signifiait 
beffroi,  tourelle,  et  cloche, 

MUTILATION ,  peine  qui  a  été  fréquemment  em- 
ployée autrefois.  Elle  était  comprise  dans  la  peine  du 
talion,  en  usage  chez  les  Hébreux.  Dans  l'ancienne 
Egypte,  on  coupait  le  nez  à  la  femme  adultère  ;  on  lui 
arrachait  les  yeux  chez  les  Grecs,  qui  coupaient  encore 
la  langue  aux  traîtres  et  auxfiauz-monnaveura.  Au  moyen 
âge.  la  perte  des  yeux  fut  souvent  inflieée.  Malo^  les 
prohibitions  des  conciles  de  Mérida  (606),  de  Tolède 
(675),  de  Francfort-sur^le-Mein  (794),  la  mutilation  se 
maintint  dans  les  lois.  L'ablation  du  poing  a  subsisté 
dans  notre  Code  pénal  jusqu'en  1832.  La  mutilation 
d'un  individu  par  un  autre  est  aujourd'hui  punie  comme 
blessure  grave  {Code  pénal,  art.  303-311).  La  mutilation 
pratiquée  volontairement  pour  échapper  au  service  mili- 
taire est  punie  d'emprisonnement  (Loi  du  21  mars  1832), 
et,  à  l'expiration  de  la  peine,  le  mutilé  fait  son  temps  de 
service  dms  une  compagnie  de  discipline. 

MUTULE  (du  latin  mutulus,  pierre  en  sdllie),  sorte 
de  modillon  carré,  propre  à  la  corniche  de  l'ordre  ionique, 
et  qui  représente  au-dessous  du  larmier  l'extrémité  des 
chevrons.  Il  répond  perpendiculairement  au  trigljrphe. 
Les  Romains  ont  quelquefois  employé  les  mutnles  dans 
Tordre  composite. 

MYCÊNES  (Ruines  de).  V,  Gregqub  (Architecture). 

MYCTÉRISME,  nom  donné  par  quelques  rhéteun  & 
llronie  insultante,  parce  qu'on  lève  le  nez  (en  grec  myc- 
ter)  pour  regarder  de  haut  en  bas  et  avec  dédain  ceux 
qu'on  veut  humilier. 

MYRIOBIBLON,  mot  formé  de  deux  mots  grecs  signi- 
fiant dix  mille  volumes,  et  qui  sert  de  titre  à  l'ouvrage 
de  Photius  plus  connu  sous  celui  de  Bibliothèque.  Cet 
ouvrage  ne  passe  cependant  en  revue  que  279  écrits  de 
Tantlquité. 

MYRIORAMA  (du  grec  mwrios,  dix  mille,  et  orama, 
vue) ,  sorte  de  tu>leau  inventé  à  Paris  par  Brès,  perfec- 
tionné à  Londres  par  Clark,  et  consistant  en  pièces  mo- 
biles au  moyen  desquelles  on  peut  représenter  une  foule 
de  vues,  en  combinant  plusieurs  fhigments  exécutés  sur 
des  cartons  séparés. 


MYSTÈRE  (du  grec  mustêrion,  chose  cachée),  nom 

Sue  l'on  donne,  dans  le  christianisme,  à  tout  ce  que  les 
dèles  doivent  accepter  comme  articles  de  foi,  à  tout  ce 
que  la  raison  humame  ne  peut  comprendre.  La  Trinité, 
rlncamation,  la  Rédemption,  la  Prince  réelle  de  J.-d 
dans  l'Eucharistie,  sont  des  mystères. 

MTSTfeaBS,  institution  sacrée  des  Grecs  et  des  Romaiiu, 
ayant  pour  objet  Tinitiation  à  la  connaissance  de  oer* 
tsÀnes  doctrines  religieuses  et  la  célébration  de  certains 
rites.  Les  Mystères  n'étaient  pas,  comme  beaucoup  d'an- 
teura  l'ont  pensé,  des  espèces  d'affiliations  ou  sociétés 
secrètes  ;  car  ils  avaient,  du  moins  pour  la  plupart,  an 
caractère  en  quelque  sorte  public ,  chacun  étant  libre  de 
s'y  faire  admettre,  et  les  prêtres  ne  constituaient  pas 
une  caste  à  part,  dépositaire  d'une  science  inaccessible 
au  vulgaire.  Seulement,  les  principes  qu'on  enseigna  dans 
les  Mystères  étaient  en  progrès  sur  les  croyances  com- 
munes, et  répondaient  aux  nouveaux  besoins  intellec- 
tuels et  moraux  que  la  civilisation  développait.  Quelques 
prêtres  ont  pu  entretenir  et  propager,  chez  des  hommes 
Ignorants  ou  crédules,  certaines  supentitions  condam- 
nables, certaines  pratiques  ridicules  :  mais,  en  général, 
les  Mystères  ont  eu  quelque  chose  d'élevé  et  de  saint  Ds 
consistaient  en  purifications,  expiations,  sacrifices,  pro- 
cessions, chants  et  danses,  comme  dans  les  cultes  ordi- 
naires; mais  les  rites  prenaient  le  caractère  orgiastiqtte, 
c-à-d.  le  caractère  de  l'extase,  et  même  de  l'agitation 
violente  et  furieuse.  Cest  par  là  que  les  abus  se  sont  in- 
troduits; les  rites  orgiastiques  furent  la  dégénérescence 
du  sentiment  que  les  Anciens  appelaient  enthousiasme, 
et  qu'ils  regardaient  comme  la  source  des  connaissances 
les  plus  pures  et  des  actes  les  plus  nobles.  La  doctrine 
prit  encore  dans  les  Mystères  un  caractère  symbolique  : 
les  Dieux  ne  s'y  offrirent  plus  comme  des  personnages 
humains,  aux  formes  nettes  et  précises;  leur  naissance , 
leure  passions,  leura  aventures  et  leur  mort  ne  furent 
plus  qu'une  suite  d'allégories  dans  lesquelles  se  dévelop- 
pait la  doctrine.  Les  images  des  Dieux  et  leurs  attributs 
devinrent  aussi  des  symboles;  les  fêtes  furent  des  repré- 
sentations mimiques  de  leur  histoire.  Le  silence  qu'on 
devait  garder  sur  les  Mystères  n'avait  pas  le  caractère 
qu'on  lui  prête  d'ordinaire  :  il  tenait  au  respect  dont  les 
choses  saintes  devaient  être  environnées;  les  principes 
augustes  eussent  été  profanés  en  les  livrant  aux  appré- 
ciations de  la  vie  commune  ;  si  on  ne  les  divulguait  pas, 
ce  n'était  point  pour  en  dérober  la  connaissance  au  vul- 
gaire, mais  afin  de  leur  donner  du  prestige.  V.  Ouwsp 
roff.  Essai  sur  les  Mystères  d' Eleusis  ^  3*  édit. ,  Paris, 
1816;  Sainte-Croix,  Recherches  historiques  et  critiques 
sur  les  Mystères  du  Paganisme,  Paris,  1817,  2  vol. 
in-8<*;  Lobeck,  Aglaophâmus,  Kœnigsberg,  1829,  2  vo- 
lumes in-8*. 

MTSTÀRBS,  pièces  de  théâtre  représentées  pendant  le 
moyen  ftge,  et  dont  les  sujets  étaient  empruntés  à  FÂn- 
cien  et  au  Nouveau  Testament,  ou  à  la  ne  des  Saints. 
Le  christianisme,  qui  voulait  s'emparer  complètement 
des  âmes,  devait  donner  satisfaction  à  tous  leurs  be- 
soins intellectuels  :  or,  la  passion  pour  les  Jeux  scéni- 
ques  avait  été  jusqu'à  la  fin  l'une  des  plus  rives  do 
monde  païen.  Le  clergé  n'essaya  pas  de  la  détruire,  mais 
lui  donna  une  direction  nouvelle.  On  mit  en  drames  les 
actes  de  Jésus-Christ  et  des  première  héros  du  christiar 
nisme;  les  traditions  des  tragédies  grecques  et  romaines, 
conservées  dans  les  monastères,  fournirent  des  cadres 
pour  ces  première  essais.  Dès  le  x*  siècle,  Hroswitba, 
religieuse  à  Gandersheim,  composa  six  tragédies,  qae 
jouèrent  ses  sœun  en  reli^on.  De  pareilles  oeuvres, 
écrites  en  latin ,  pour  charmer  les  loisire  du  cloître, 
n'étaient  faites  que  pour  les  clercs.  Les  églises  servirent 
à  représenter  aux  yeux  des  fidèles  les  mystères  célébréf 
dans  les  principales  fêtes  :  à  N06I,  la  crèche  se  peupla 
des  personnages  qui  avaient  figuré  à  Bethléem,  y  com- 
pris le  bœuf  et  l'&ne;  &  l'Epiphanie,  on  montra  les  roit 
Mages  et  les  bereere;  à  Pâques,  les  trois  Maries,  etc. 
Ce  ne  furent  d'abord  que  des  ^gures  muettes,  en  cbe, 
en  pl&tre  ou  en  bois;  peu  à  peu  la  scène  s'anima:  des 
prêtres  ou  des  fidèles,  prenant  le  rôle  des  personna^ 
traduisirent  leure  sentiments  et  leura  pensées  à  l'aide 
des  gestes  et  du  langage  vulgaire.  Mais  ces  Jeux  bc^ 
ques,  saints  par  l'origine,  moraux  par  le  but,  dégénoè- 
rent  assez  promptement  :  la  religion  ne  pouvant  se  rendre 
solidaire  de  toutes  les  inventions  du  siècle,  le  dnme 
dut  sortir  de  l'église.  Toutefois  il  s'Installa  tout  auprès, 
sur  le  parvis  même  des  cathédrales,  et  conticnft  d'être 
un  complément  des  cérémonies.  Le  lien  qnl  avait  ratta- 
ché au  culte  la  représentation  des  Vystères  m  tsi  ^ 


MÏS 


1291 


MYT 


rampa  :  il  eiiste,  par  exemple,  à  U  BibUothèqoe  impô- 
riale  de  Paria,  un  maouacrit  des  premitees  aimées  du 
iv*  dède,  contenant  nne  cinquantaine  de  drames  en 
llMmnear  de  la  Vieige;  ila  sont  presone  tons  précédés 
de  sermons  en  proee  «  qoi  leur  senrent  de  prologue.  Très- 
souvent  aussi  les  M^tèree  se  terminaient  par  un  Te 
Dmm,  clianté  en  chœur  par  les  assistants.  Jusqu'à  la 
Aq  du  xnr*  siôcie,  toutes  les  classes,  prêtres,  clercs,  étu- 
diants, ouvriers,  avaient  concouru  aux  représentations  : 
en  i^,  une  troupe  régulière  d*acteurs  se  constitua  à 
Paris,  et  se  mit  à  exploiter  un  théfttre  au  bourg  de  Saint 
Maur;  elle  sMntitula  Confrérie  de  la  Pcution,  du  nom 
du  plus  important  des  Mystères,  et,  après  avoir  été  au< 
torisée  par  Charles  VI  en  1402,  vint  8*établir  à  l'hôpital 
de  la  Trinité,  près  de  la  porte  S^-Denis,  où  elle  prospéra 
pendant  près  d'un  demi-siècle.  Vers  1539,  on  lui  enleva 
soD  local,  et  elle  dut  se  transporter  à  Thôtel  de  Flandre. 
Une  société  plus  civilisée  comprenant  mieux  le  ridicule 
de  représentations  grossières  et  souvent  peu  décentes, 
le  Pariement  commença  par  défendre  aux  Confrères  d'ou- 
vrir leur  théfttre  à  certaines  fètoa  de  l'année.  Puis  d'autres 
acteurs,  d'un  caractère  profane ,  les  Enfants  sanê  souci 
et  les  Clercs  de  la  Basoche^  ftrent  une  rude  concurrence 
aux  Confrères  de  la  Passion,  dont  le  répertoire  s'altérait 
d'anieurs  par  l'invasion  des  détails  malins  ou  burlesques. 
Boîleau  pouvait  dire,  avec  raison  {Art  poitiqpey  ch.  ul), 
de  ces  pièces  : 

D0  lA  fol  tf*iiii  ehréti«n  les  myiièrea  terribles 
D'ornements  égi^jéê  ne  eont  pea  iosoeptiblei. 

Lea  Confrères  de  la  Passion  existaient  encore  dans  les 
premières  années  du  règne  de  Louis  xni;  ils  vendirent 
slors  leur  privilège  aux  comédiens  de  l'hôtel  de  Bour- 
gogne, et  bientôt  les  chefs-d'œuvre  de  notre  théfttre  clas- 
âque  firent  oublier  les  Mystères.  Ces  représentations 
sacrées  devaient  finir  comme  elles  avaient  commencé  : 
on  a  vu,  en  eflët.  Jusqu'à  nos  jours,  dans  le  fond  de 
quelques  prorinces,  des  comédiens  ambulants  donner  en 
spectacle  les  scènes  de  la  Passion  (K.  HAaiomcrrrES),  et 
même,  dans  un  certain  nombre  d'églises ,  on  figure  en- 
core, aox  fêtes  de  Noël,  la  crèche  de  Bethléem. 

Les  Mystères  ont  été  fort  nombreux.  La  Bibliothèoue 
impériale  de  Paris  possède  un  Mystère  des  Vierges  folles 
et  des  Vierges  sages,  du  xi*  siècle,  provenant  de  l'abbaye 
de  S^  Martial  de  Limoges  :  il  est  écrit  en  trois  idiomes  ; 
Jésus  parie  en  latin,  les  Vierges  sages  en  français,  et  les 
l^eigea  folles  en  provençal.  M.  de  Monmerqué  a  publié 
10  Mystères  tirés  d'un  manuscrit  de  S^Benolt-sor-Loire, 
et  dont  4  sont  du  xi*  siècle.  Au  xu*  siècle,  on  peut  citer 
deux  Mystères  sur  la  Bédemptùm ,  l'un  de  Guillaume 
Hennann,  poète  anglo-normand,  l'autre  d'Etienne  Lans- 
ton,  archevêque  de  Cantorbéry,  et  un  Mystère  sur  la 
Résurrection,  en  vers  anglo-normands,  publié  en  1834 

ST  M.  Jubinal.  Un  Mystère  sur  la  venue  de  V Antéchrist 
l  Joué  devant  l'empereur  Frédéric  Bariberousse.  Parmi 
les  auteurs  de  Mystères  dont  l'histoire  a  conservé  les 
n<Mns,  on  remarque  Jean  Bodel,  d'Arras,  dont  on  a  un  Jeu 
Je  S>  Nicolas,  écrit  vers  1260;  Rutebeof,  auteur  pr^ 
soffié  d'un  Mùraele  de  ThéopkUe,  qui  ftit  très-populaire; 
André  de  Langue,  Jean  du  Prier,  et  Jean  Michel,  médecin 
d'Angers,  du  xv*  siècle;  Pierre  Gringoire,  contemporain 
de  Louis  XII  ;  Barthélennr  Aneau,  qui  fit  Jouer  un  mystère 
de  la  Nativité  en  1539.  Le  répertoire  des  Confrères  de  la 
Paaabn  comprenait,  entre  autres  ouvrages,  le  Mystère 
de  S^  Martin^  le  Mystère  de  S^  Crépin,  le  Mystère  de 
^  Barbe,  le  Mystère  des  Actes  des  Apôtres.  Mais  au- 
cun sujet  ne  fut  plus  fréquemment  traité  que  celui  de  la 
Passiom,  trilogie  consacrée  à  la  Natirité,  à  la  Passion,  et  à 
la  Résorrection.  Celui  que  possède  la  Bibliothèque  impé- 
riale de  Paris  dans  un  manuscrit  de  1457,  et  qui  fut 
composé  avant  145S,  est  d'Amoul  Gresban.  Il  en  eriste 
on  antre  à  la  bibliothèque  de  Valendennes;  il  est  divisé 
en  SO  Journées,  et  compte  près  de  40,000  vers.  Un  ano- 
nyme et  Jean  Michel  l'ont  encore  amplifié.  Jusqu'à  faire 
07,000  vers.  Les  Mystères  n'étaient  oue  des  verâons  dia- 
kguées  de  l'Écriture  Sainte  ou  des  légendes;  on  y  suivait 
le  modèle  chapitre  par  chapitre,  avec  nne  servilité  qui 
eadot  tonte  espèce  d'invention,  de  plan  et  d'arrangement: 
de  là  dee  changements  de  scène  continuels ,  et  l'extrême 
JoDgnenr  de  ces  drames.  L'exactitude  de  la  traduction 
D'empéchaH  pas  mille  anachronismes  de  mœurs,  de  cos* 
tome  et  de  langagOt  qui  attestent  l'ignorance  et  \&  sim- 
plicité des  auteurs  et  des  acteurs.  Les  moindres  défauts 
du  style  étaient  la  platitude  et  la  prolixité.  On  ne  peut 
doftc  guère  trouver  qu'un  intérêt  de  curiosité  à  parcourir 


ces  premiers  monuments  de  notre  littérature  dramatknie. 
V.  Onésime  Leroy,  Êtitdes  sur  les  Mystères,  Paris,  1837, 
in-8°;  Berriat-Saint-Prix,  Recherches  sur  les  anciens 
Mystères,  Paris,  1823,  in-8«;  Victor  Foumel,  Curiosités 
théâtrales,  anciemkes  et  modernes,  Paris,  1859,  in-16.  B. 
MYSnaSME.  Le  caractère  le  plus  général  du  mysti- 
cisme est  la  prétention  de  s'élever  Jusqu'à  Dieu,  et  de  le 
voir  en  quelque  sorte  face  à  face,  sans  le  secours  de  la 
raison.  Les  causes  oui  lui  donnent  naissance  sont  nom- 
breuses; de  là  différentes  sortes  de  mysticisme;  maif 
tous,  quelle  que  soit  leur  ori^e,  ont  un  principe  oom-* 
mun,  la  faiblesse  et  l'impuissance  de  l'homme.  S'ih 
peuvent  être  distingués,  c'est  uniquement  par  les  consé- 
quences qu'ils  tirent  de  leur  principe  fondamental.  Les 
uns,  admettant  l'incapacité  de  la  raison  pour  saisir  Ut  vé- 
rité, et  l'impuissance  de  la  volonté  pour  aimer  et  prati- 
quer le  bien,  ont  un  caractère  essentiellement  moral  on 
religieux,  et  aboutissent  à  une  religion  positive  ;  les  au- 
tres, plus  philosophiques ,  après  avoir  épuisé  toutes  les 
forces  de  la  raison  pour  résoudre  le  problème  de  la  con- 
naissance, se  réfugient,  comme  par  désespoir,  dans  la 
doctrine  de  Tunion  avec  Dieu  par  l'extase.  Le  christia- 
nisme fournit  les  plus  frappants  exemples  de  la  première 
sorte  de  mysticisme  ;  on  le  trouve  exposé  dans  les  livres 
du  Pseudo-Denvs  l'Aréopagite,  Hiérarchie  céleste,  les 
Noms  divins ,  la  Théologie  mystiqw ,  où  se  montre  le 
chrétien  et  le  philosophe  alexandrin  ;  dans  les  écrits  de 
Hugues  de  S^Vlctor,  et  surtout  de  Richard,  son  disciple, 
principalement  dans  le  Beniamin  minor,  ae  gratta  oon^ 
templationis ,  occasions  accepta  ab  arca  Moysis;  dans 
quelques  ouvrages  de  S^  Bonaventure  :  Rediuctio  artium 
ad  theologiam,  IHnerarium  mentis  ad  Deum;  dans  ceux 
des  mystiques  allemands  du  xiv*  dècle;  dains  ceux  de 
Joachim ,  abbé  de  Flores,  au  xn"  :  dans  Vlmitatian  de 
Jésus-Christ;  chez  Gerson,  Thedogia  mystica;  ches 
l'Anglais  J.  Pordage,  Metaphysica  vera  et  aivina,  7%0O- 
logia  mystica  ;  chez  les  mystiques  espagnols,  à  la  tète 
desquels  se  placent  S'*  Thérèse,  J.  de  la  Croix,  J.  de 
Jesus-Maria  ;  chez  Jacob  Boahme  ;  dans  le  QuHtisme  de 
M"*  Guyon,  et  une  foule  d'écrits  où  le  nmtidsme  est 

Iklus  ou  moins  prononcé,  tels  que  chez  Fénelon,  Ma- 
ebranche,  etc.  La  seconde  sorte  de  mvsticisme  trouve  sa 
réalisation  la  plus  complète  dans  l'école  d'Alexandrie.  Le 
procédé  est  scientifique,  la  marche  est  graduelle ,  et  ce 
n'est  qu'après  avoir  passé  par  Vopinion  et  la  dia^ectiq^e, 
que  l'àme  s'élève  à  Dieu  sur  les  ailes  de  l'extase;  c'est 
ce  qu'on  voit  chez  Plotin,  Porphyre,  Jamblique  et  leurs 
sucœsseun  Jusqu'à  Proclus,  mais  à  des  degrés  diffé- 
rents. Quelques  mystiques  mêlèrent  la  science  au  senti- 
ment religieux  ;  tels  furent  Marsile  Fidn  et  les  Pic  de  La 
Ilirandole,  qui  se  rattachent  à  l'école  d'Alexandrie; 
agrippa,  R.  Fludd,  Jérùme  Cardan,  Van  Helmont  et  son 
fils  Mercurius  Van  Helmont,  Svvedenborg,  Martine»* 
Pasqualis,  et  Saint-Martin.  R. 

MYSTIQUE  (Sens),  en  termes  de  Théologie,  expiiez 
tion  allégorique  d'un  événement,  d'un  personnage  ou  d'ua 
texte  de  l'Écriture  sainte. 

HTsnQDB  (Testament).  F.  Tbstahknt. 

MYTHB  (du  grec  muthos,  fable  ),  nom  qu'on  applique 
anx  obscures  traditions  concernant  les  dieux  et  les  héroa 
du  paganisme  et  provenant  d'époques  antéhistoriques^ 
et,  par  suite,  à  tous  les  récits  allégoriques  et  symbo- 
liques. 

MYTHIAMBES,  c-à-d.  fables  UmUiupkes,  titre  des  far 
blés  de  Babrius,  écrites  en  vers  scazons. 

MYTHOGRAPHES,  écrivains  qui  ont  exposé  et  expli- 
qué les  traditions  poétiques  des  anciens  âges.  On  les 
nomme  aussi  Mythologues,  Chez  les  Anciens,  le  livre  de 
Comutus  Sur  Vessence  des  dieux  et  les  AUégories  home' 
riques  d'Héraclide  on  Heraclite  ramènent  aux  forces  de 
la  nature  l'essence  de  tous  les  dieux;  l'ouvrage  anonyme 
intitulé  Ubri  tncredibilium  donne  aux  mythes  une  inter- 
prétation historique  ou  pragmatique,  tandis  que  l'oor 
vrage  De  Ulicns  errorihus  cherche  à  y  trouver  un  sens 
moral.  Au  nombre  des  ouvrages  de  mythographle  an- 
cienne, on  peut  dter  encore  la  Bibliothèque  d'ApoUo- 
dore ,  les  Narrations  de  Conon ,  la  Nouvelle  Histoire  de 
Ptolémée.  dont  il  n'existe  plus  que  des  fragments  dans 
Photius,  les  Narrationes  amatoria  de  Parthénius ,  les 
Transformations  d'Antoninus  Liberalis,  l'ouvrage  de  Psir 
léphate  De  mcredibilibus,  celui  de  Pedesianus  De  Her» 
culis  laborihus,  celui  de  Nicétas  intitulé  Deorum  cogno- 
mina ,  les  Fables  d'Hyrin,  les  Mythologue  de  Fulgentins 
Lactantius,  le  traité  de  Julius  Firmicus  De  erroribus 
I  profanarum  reiigionum,  celui  d'Albricus  De  deorum 
I  tmaormi^iM.  Une  collection  des  mythographes  grecs  a  été 


MYT 


1292 


MYT 


publiée  par  Weftermann ,  Brunswick,  i  843;  les  mytho- 
graphes  latins  ont  été  publiés  par  Munck^  (Amst., 
1681.  3  TolA  et  par  Van  Slaveren  (ibid.,  4742 ,  2  vol. 
in-i2).  —  dbez  les  Modernes,  Samuel  Bochart,  Tabbé 
Banier,  J.  Brjrant ,  Hollmann ,  Bœttiger,  ont  donné  de 
tous  les  mythes  une  explication  historique  ;  Bacon  (De 
Sapiêntià  vêterum)  et  Noél  Gonti  IMythologiœ)^  des  ex- 
plications philosopniques,  morales  ou  politiques.  6.-J. 
Vossius  et  Huet  ont  prétendu  en  tirer  un  enseignement 
théologique,  dérivé  du  mosalsme  ;  J.  Tollius  est  allé  ]us- 

?a*àn^porter  à  la  chimie  les  fables  de  l'antiquité.  Vttbbé 
luche,  Dupuis,  Volnev,  Schweigger,  crurent  y  recon- 
naître l'histoire  de  la  Nature  et  surtout  celle  des  phéno- 


mènes astronomigaes.  Enfin,  Hegme,  Voss,  Ph.  But^ 
mann,  Welcker,  Ottfried  MOller  et  Fr.  Greozer  se  sont 
eÊTorcés  de  prouver  que,  dans  toutes  les  religions,  loi 
mythes  ne  sont  autre  chose  que  des  symboles. 

MYTHOLOGIE  (du  grec  muthos,  fable,  et  logos,  dis- 
cours), mot  qui ,  après  avoir  signifié  simplement  Thit- 
toire  fabuleuse  des  dieux  et  des  héros  de  l'antiquité 
païenne,  a  été  étendu  à  la  science  des  traditions  reli- 
gieuses et  poétiques  des  diflérents  peuples  sur  les  dieux 
et  sur  leurs  rapports  avec  les  hommes.  L'ouvrage  le  plus 
complet  sur  cette  matière  est  la  Biographie  mytholo- 
gique de  V.  Parisot,  Paris,  1832-33,  3  vol.  in-8»,  faisant 
suite  à  la  BiograpfUe  universelle  de  Michaud. 


N 


N 


NAI 


N,  14*  lettre  et  11*  consonne  de  notre  alphabet.  Ce  ca- 
ractère, qui  existe  ou  a  des  équivalents  dans  presque  tous 
les  alphabets  tant  anciens  que  modernes,  i>ossède  plu- 
sieurs valeurs  en  français.  Dans  son  emploi  normal,  il 
est  une  consonne  linguale  et  palato-nasale  :  tel  est  son 
caractère  quand  on  prononce  nacelle,  nébuletix,  novice, 
numéro,  une,  anis,  énoncer,  onéreux,  union,  une,  etc.  De 
plus,  Vn  sert  de  signe  auxiliaire  dans  la  représentation 
de  certaines  valeurs  phonétiques  nasales  qui  n'ont  pas  en 
propre  de  signe  graphiaue  simple.  Ainsi,  réuni  au  g,  il 
forme  une  gutturo-nasale,  conune  dans  bagne,  baigner, 
seigneur,  ligne,  signal  :ceUe  articulation  existe  aussi  en 
italien  (dans  ogni, signor),  en  anglais  {ring,  bague),  en 
allemand  {lang,  long),  en  espagnol,  où  elle  est  indiquée 
par  un  signe  particulier  nommé  tilde,  ft  (MarettUm, 
sefiora),  et  en  portugais,  où  elle  s'exprime  par  là  con- 
sonne double  nh.  Un  usage  capricieux  a  fait  supprimer 
quelquefois  le  g  dans  la  prononciation  :  Regnardae  pro- 
nonce Renard.  Notre  lettre  n  est  encore  un  signe  de  na- 
salité  des  voyelles,  dans  les  syllabes  an,  en,  in,  on,  un: 
c'est  un  genre  d'articulation  qu'on  trouve  éj^ement  dans 
d'autres  langues,  mais  elle  y  est  souvent  traduite  par  des 
caractères  différents.  Ceux  de  nos  ad|]ectifs  dont  le  mas- 
culin se  termine  par  une  voyelle  nasale,  prennent  au  fé- 
minin l'n  articulée:  mustâman,  musulmane;  ionien, 
ionienne;  /In.  fine;  bon,  bonne;  aucun,  aucune»  Dans  la 
terminaison  ae  la  3*  personne  du  pluriel  des  verbes,  Vn 
est  muette,  ainsi  que  le  t  qui  la  suit:  Us  viennent.  Us 
aimaient,  qu'Us  rendissent,  qu'Us  fussent,  —  Chez  les 
Grecs,  l'articulation  n  placée  dans  le  corps  d'un  mot  de- 
Tant  une  gutturale  parait  avoir  été  représentée  par  un  y 
(  gamma  )  :  du  grec  aggelos  et  egklinô  les  Latins  ont  fait 
angeliÂS  et  incline,  d'où  viennent  nos  mots  ange  et  incliner. 
Par  contre,  les  Grecs  changèrent  l'n  médiale  des  Latins 
1  en  une  autre  lettre  ou  la  supprimèrent,  faisant  Mallios 
,  de  Manlius ,  et  Ortèsios  d'Èortensius,  Les  Latins  sup- 
'  primaient  souvent  l'n  dans  le  corps  des  mots:  ainsi, 
.  Gicéron  a  écrit  foresia  pour  forensia,  et  Plante  st<is  pour 

ftans,  n  en  a  été  de  même  dans  nos  anciens  manuscrits 
et  dans  nos  vieilles  éditions,  où  l'on  substituait  à  l'n  un 
>  petit  trait  horizontal  placé  au-dessus  de  la  voyelle  qu'elle 
•  accompagnait  dans  la  prononciation.  L'n  de  cotalns  pri- 
mitifs latins  a  également  disparu  de  leurs  dérivés  mo- 
dernes :  ainsi,  le  latin  insula  est  devenu  l'italien  isola, 
et  le  français  isle,  Ue, 

La  lettre  N  a  été  employée  comme  si^e  d'abréviation, 
pour  Nonius,  Numerius,  nattu,  nobilts,  numerus,  nu- 
men,  nonœ,  etc.  Chez  les  Romains,  NL  sur  un  bulletin  de 
TOte  équivalait  à  non  liquet ,  et  indiquait  que  la  ques- 
tion sur  laquelle  on  votait  ne  semblait  pas  suffisamment 
éclaircie.  Sur  un  acte  authentique,  NP  voulait  dire  nota- 
Hus  publicus.  Au  moyen  ftge,  Tusage  s'établit  de  nuoquer 
d'une  N  sur  les  actes  la  place  d^^n  nom  propre  qu'on 
ignorait  ou  ou'on  ne  voulait  pas  faire  connaître;  il  âdste 
encore  dans  les  livres  d'église,  là  où  un  nom  propre  doit 
Hre  placé  dans  la  lecture  :  selon  les  uns,  lit  est  alors 
'initiale  de  nomen,  et,  selon  d'autres,  un  monogramme 
léformé,  tenant  lien  des  pronoms  ille,  Ula.  Sur  les  an- 
tennes monnaies  françaises,  N  est  la  marque  de  fabrique 
le  Montpellier.  En  Géographie,  N.  se  met  pour  Nord, 
f9.*E.  pour  nori^st,  N.-O.  pour  nord-ouest.  Oc  emploie 


encore  N.  B.  pour  nota  bene,  N*  pour  numéro,  N/C  Dour 
notre  compte,  N.-D.  pour  Notre-Dame,  N.  S.  pour  Notre 
Seigneur.  —  Signe  numéral,  le  nu  (N,  v)  des  Grecs 
valait  50,  et  ,v,  50,000.  Chez  les  Romains,  N  signifiait 
90  selon  les  uns,  000  selon  les  autres,  et ,  surmontée 
d'un  trait  horizontal  (n),  90,000  ou  900,000. 

NABAB.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictiomusire  de  BiogrO' 
phie  et  d'Histoire. 

NABATHÉEN  (Idiome).  Les  Nabathéens,  dont  les  livres 
bibliques  ne  font  pas  mention,  et  que  Diodore  dç  Sidle 
et  Strabon  placent  dans  l'Arabie  Pétrée,  paraissent  être 
venus  s'établir  en  ce  pays  vers  le  temps  où  Nabuchodo- 
nosor  II  détruisit  le  royaume  de  Juda  :  ce  n'est  point, 
ainsi  que  l'ont  pensé  Léon  de  Laborde  et  linant  (Voyagt 
de  V Arabie  Pétrée,  Paris,  1830,  in-fol.) ,  un  mélange  des 
anciens  Amalécites,  Iduméens,  Moabites  et  Madianites, 
ni,  comme  le  croyait  S^  Jérôme,  un  peuple  arabe,  issu 
d'bmafil,  mais  un  peuple  ori^^naire  de  la  Babylonie. 
C'est  ce  qu'affirment  Bfasoudi  et  les  autres  écrivains 
arabes.  L'idiome  parlé  par  les  Nabathéens  n'était  autre 
chose  que  le  chaldéen  ou  araméen  oriental.  Il  a  eu  la 
littérature  ;  mais  les  monuments  en  sont  perdus,  à  l'ex- 
ception d'un  traité  connu  dans  l'Orient  sons  le  nom 
d'Agriculture  nabathéenne,  et  composé  par  un  certain 
Kouthayi  :  encore  ne  le  connaissons-nous  que  par  la  ver- 
sion arabe  d'Abou-Bdu^Amin ,  sumonuné  lon-WahS' 
ehvah.  V.  Etienne  Quatremère,  Mémoire  sur  les  Naba- 
théens, dans  le  JounMl  asicUique  de  1835. 

NABLA,  NABLON,  NABLUM  ou  NEBEL,  instrument 
de  musique  à  cordes  des  anciens  Orientaux.  Il  avait, 
selon  Josèphe,  12  cordes  (ce  nombre  a  varié),  et  était 
pincé  avec  les  doigts.  On  n'est  pas  d'accord  sur  sa  forme: 
comme  Nebel  a  le  sens  d'outre  et  d'amphore,  quelques- 
uns  ont  cru  que  l'instrument  oui  portait  ce  nom  avait  la 
forme  du  vase  où  l'on  conservut  le  vin  ;  selon  d'autres,  il 
ressemblait  à  un  delta  renversé,  sur  un  coffre  rond  en 
bois  couvert  de  cuir;  d'autres  ont  voulu  y  voir  soit  un 
luth ,  soit  une  lyre.  B. 

NACAIRES  ou  NAQUAIBBS  (de  l'arabe  naqârah,  tim- 
bale), instrument  de  musique  du  moyen  lige,  qu'on  s 
pris  à  tort  pour  des  trompettes.  C'étaient  noa  timbalas. 

NACELLE  (  du  latin  naoicella,  pour  navicula),  petit 
bateau  n'ayant  ni  mâts  ni  voiles.  —  Par  extension,  on  a 
donné  le  même  nom  au  panier  suspendu  au-dessous  d'an 
ballon  et  où  se  placent  les  aéronautes. 

NACELLE,  nom  donné  quelquefois,  en  Architecture,  soi 
moulures  creuses.  F.  Mouldrb. 

NAFA,  instrument  de  musioue  en  usage  dans  les  Hd 
Tonga  (Océanie).  Cest  une  espèce  de  tamnoor,  fait^d'ui 
bloc  de  bois  long  d'un  mètre  environ,  et  creusé  daas  les 
deux  tiers  de  sa  longueur. 

NAHUALT.  V.  Mexique  (Langues  du). 

NAÏADES  (du  grec  naéin,  couler),  nymphes  des  rivière  • 
et  des  sources.  La  sculpture  antique  les  représente  soai 
la  forme  de  Jeunes  filles  à  demi  vêtues  :  toutefbto,  sur  lei 
monuments  d'Athènes,  elles  sont  complètement  habillées 
Souvent  elles  portent  de  posses  coquilles  devant  elles, 
ou  accompagnent  le  dieu  Pan.  On  en  voit  aor  les  mon- 
naies de  Syracuse* 

NAIN  JAUNE,  Jeu  de  cartes.  On  place,  au  milieu  de 
la  table  de  Jeu,  un  carton  sur  lequel  est  représenté  le 


NAI 


1293 


NAN 


sept  de  carreaa  tenu  par  un  nain  jaune,  et,  alentour,  la 
dame  de  pique,  le  roi  de  cœur,  le  dix  de  carreau  et  le  va- 
tet  de  trèfle,  (hi  se  sert  d*un  Jeu  complet ,  et  il  peut  y 
avoir  de  3  à  8  Joueurs:  à  trois,  chacun  reçoit  15  cartes; 
à  quatre,  12 ;  à  dnq,  9;  &  six,  8  ;  à  sept ,  7  ;  à  huit,  6. 
Chaaae  Joueur  met  5  Jetons  sur  le  nain  Jaune,  4  sur  le 
roi  de  cosur,  3  sur  la  dame  de  pique,  2  sur  le  valet  de 
trèfle;  1  sur  le  dix  de  carreau.  Le  premier  à  la  droite  de 
celui  qui  donne  les  cartes  commence  à  Jouer,  en  suivant 
Tordre  ascendant  des  cartes,  Tas,  le  deux,  le  trois,  et 
ainsi  de  suite,  sans  distinction  des  couleurs;  il  8*arrète 
dès  qui!  y  a  une  lacune  dans  son  ieu  ;  le  second  Joueur 
continue,  et  les  autres  de  même.  Si  la  carte  qui  manque 
à  celui  qui  ioue  est  restée  au  talon ,  il  poursuit.  Quand  un 
loueur  a  placé  sa  dernière  carte,  ceux  qui  restent  abat- 
tent ,  et  payent  un  Jeton  par  carte  ou  par  point,  selon  les 
conventions.  A  mesure  que  quelqu'un  peut  Jouer  une 
carte  semblable  à  l'une  de  celles  du  tableau,  il  prend  les 
fêtons  que  porte  celle-d  ;  si  Ton  n*a  pu  Jouer  quelque 
carte  du  tableau,  on  doit  doubler  la  somme  dont  elle  est 
chargée. 

NAINS.  Ce  fat  une  mode,  parmi  les  rois,  les  princes 
et  les  riches  de  Fantiquité,  d'entretenir,  pour  leur  amu- 
sement ,  des  nains  plus  ou  moins  diiîormes,  et  elle  a  tou- 
jours subsisté  chez  les  Orientaux.  L'empereur  Domitien 
fit  combattre  des  nains  dans  TamphithéAtre  contre  des 
femmes.  Au  moyen  àse,  on  leur  a  prêté  un  rôle  impor^ 
tant  duis  le  domaine  du  merveilleux  :  ils  étaient  les  gar- 
diens des  trésors  cachés,  et  accomplissaient  toutes  sortes 
de  prodiges  dans  les  épopées  cheviueresques,  où  des  êtres 
somaturels  prenaient  leurs  formes  monstrueuses.  Dans 
la  vie  réelle,  les  nains  servirent  de  pages  aux  ch&telaines 
et  de  messagers  aux  chevaliers.  La  manie  d'avoir  des 
nains  c'est  perpétuée  dans  les  cours  Jusqu'à  des  temps 
asses  rapprocha  de  nous  :  il  y  en  eut  auprès  de  Charles- 
Qoiot  et  de  François  I*';  celui  qu'on  appelait  Grand 
Jean ,  par  antiphrase,  se  faisait  porter  dans  une  cage, 
comme  un  perroquet.  Ce  fut  Louis  XIV  qui  supprima  la 
charge  de  mitn  du  rot.  Un  nain  anglais,  Jeffery  Hudson, 
fat  présenté  dans  un  p&té,  en  1627,  par  la  duchesse  de 
Buckingham,  à  la  reine  Henriette,  femme  de  Charles  I*'. 
Stanislas  Leczinski  eut  à  Nan^  un  nain  appelé  Nicolas 
Ferry,  mais  plus  célèbre  sous  le  nom  de  Bébé.  Depuis 

Sill  n'y  a  plus  de  nains  royaux,  les  nains  ne  sont  qu'un 
Jet  de  curiosité  :  on  a  vu ,  de  nos  Jours,  Tom  Pouc$^ 
Tnmp,  le  prince  et  la  princesse  Colibri,  B. 

NAISSANCE.  Les  déclarations  de  naissance,  dit  le  Code 
Naipolion  (art.  55  et  suiv.),  doivent  être  faites  dans  les 
trois  Jours  par  le  père,  ou,  à  son  défaut ,  par  le  médecin 
on  la  sa^femme,  et  par  deux  témoins,  à  l'officier  de 
l'état  civil  du  lieu,  lequel  en  dresse  acte  immédiatement. 
Si  la  mère  n'accouche  pas  à  son  domicile,  la  personne 
chez  qui  la  naissance  a  eu  lieu  doit  faire  la  déclaration, 
ftaaé  le  délai  légal ,  la  déclaration  ne  peut  plus  être  reçue 
qu'en  vertu  d'un  lugement  du  tribunal  civil.  Le  défaut  de 
déclaration  dans  le  délai  est  puni  d'un  emprisonnement 
de  6  Jours  à  6  mois,  et  d'une  amende  de  16  fr.  à  300  te. 
Toute  personne  qui  trouve  un  nouveau-né  est  tenue  de 
le  remettre  à  romcier  de  l'état  civil,  ainsi  que  les  vête- 
ments et  antres  effets  trouvés  avec  l'en  faut,  sous  peine 
des  mêmes  condamnations.  L'acte  de  naissance  d'un  en- 
fimt  à  la  mer  doit  être  dressé  dans  les  24  heures,  et  à  l'ar- 
mée dans  les  10  Jours.  Il  est  dressé  par  l'officier  d'admi- 
nistration de  la  marine  sur  les  bâtiments  de  l'État,  par 
le  capitaine,  maître  ou  patron  sur  les  navires  de  com- 
merce, par  un  quartier-maître  ou  un  capitaine  dans  les 
troupes;  plus  tard  on  en  fait  une  expédition  à  l'état  civil 
dn  domicile  des  parents.  —  En  France,  on  tire  101  coups 
de  canon  pour  la  naissance  d'un  prince,  21  pour  une 
princesse. 

SAissAKCB ,  en  termes  de  Construction ,  point  où  com- 
mence une  voûte  ou  un  arc.  Lorsque  plusieurs  voûtes 
doivent  se  contre-bnter,  il  faut  avoir  soin  de  placer  leurs 
oaissances  au  même  niveau.  Les  voûtes  doivent  porter 
une  plus  grande  épaisseur  à  la  naissance  qu'à  la  clef. 

NAÏVETÉ ,  qualité  du  style  voisine  du  naturel ,  mais 
qui  en  difl^  en  ce  qu'elle  n'admet  ni  réflexion  ni  étude. 
La  naïveté  naît  du  sujet  même  :  c'est  l'expression  spon- 
tanée que  le  sentiment  inspire  aux  bons  esprits,  et  qui 
parait  toujours  trouvée  plutôt  que  choisie.  l  naïveté  ne 
repousse  pas  les  ornements  du  style,  pourvu  qu'ils  aient 
la  simplicité  et  pour  ainsi  dire  la  négligence  de  la  nature. 
Leduurme  de  la  naïveté  est  si  grand,  que  nous  nous  in- 
t<'iiniiioiii  aox  choses  les  plos  communes  quand  elles  sont 
dîtes  mdvement.  Cest  par  la  naïveté  que  les  fables  de 
La  Fontidne  plaisent  aux  lecteurs  de  tout  ftge.  On  est 


naïf,  mais  on  ne  le  devient  pas.  «  Une  des  choses  qui 
nous  plaisent  le  plus,  dit  Montesquieu,  c'est  le  nalf( 
mais  c'est  aussi  le  style  le  plus  difficile  à  attraper  :  la 
raison  est  qu'il  est  précisément  entre  le  noble  et  le  bas; 
il  est  si  près  du  bas,  qu'il  est  très-difficile  de  le  côtoyer 
toujours  sans  y  tomber.  »  Aussi  ceux  qui ,  comme  La- 
motte,  ont  voulu  imiter  La  Fontaine,  n*ont  réussi  qu'à 
être  ftoiôA  et  bizarres  :  ils  peuvent  avoir  de  l'esprit,  ils 
n'ont  point  de  naïveté.  Le  mérite  de  la  naïveté  est  de 
s'ignorer  soi-même,  et  d'exister  en  quelque  sorte  sans 
s'en  douter.  Cest  ce  qui  faisait  dire  à  Diderot  :  «  On  est 
naïvement  héros,  naïvement  scélérat ,  nidvement  dévot, 
naïvement  beau ,  naïvement  orateur,  naïvement  philo- 
sophe; sans  naïveté,  point  de  beauté;  on  est  un  arbre, 
une  fleur,  une  plante,  un  animal  naïvement;  Je  dirais 
presque  que  de  l'eau  est  naïvement  de  l'eau,  sans  quoi 
elle  visera  &  de  l'acier  poli  et  au  cristal.  La  naïveté  est 
une  grande  ressemblance  de  l'imitation  avec  la  chose  s 
c*est  de  l'eau  prise  dans  le  ruisseau,  et  Jetée  sur  la 
toile.  »  H.  D« 

NAMAZ.  r.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogrth 
phie  et  d'Histoire, 

NANCY  (Église  Notre-Damb,  à).  Cette  égUse  cathé- 
drale est  de  construction  moderne.  La  façade,  large  de 
50  mètres,  est  formée  d'un  avant-corps,  de  deux  arrière- 
corps  et  de  deux  tours,  et  décorée  de  deux  ordres,  le  co- 
rinthien dans  le  soubassement,  le  composite  au-dessus. 
L'avant-corps,  où  est  la  porte  principale,  se  compose  de 
colonnes  accouplées  et  de  pilastres  en  arrière,avec  un  en- 
tablement qui  règne  le  long  de  la  façade,  et  est  surmonté 
de  deux  Anges  prosternés  devant  une  croix.  Les  arrière- 
corps  sont  à  pilastres,  et  une  porte  en  occupe  la  partie 
médiane.  Les  tours,  également  décorées  de  colonnes  et  da 
pilastres,  ont  une  fenêtre  à  plein  cintre  sur  chaque  cèté, 
et  se  terminent ,  à  une  élévation  de  80  met.,  par  un  dôme 
et  une  lanterne.  L'intérieur  de  l'église  paraît  lourd  :  la  n^ 
a  14  met.  de  largeur,  et  les  collatéraux  8  met.;  près  du 
sanctuaire,  l'édifice  est  couronné  d'un  dôme  de  16  met. 
de  diamètre,  dont  la  voûte,  peinte  par  Jacquart,  repré- 
sente le  ciel  ouvert.  Une  galerie  avec  balustres  règne  au- 
tour de  l'église  ;  les  bas  côtés  sont  ornés  de  pilastres, 
entre  lesquels  se  trouvent  trois  chapelles  de  chaque  côté. 

ifANGT  (Tapisserie  de).  F.  Tapisserie. 

NANKIN  (Tour  de  porcelaine  de}.  Cette  tour  octogonale 
dépend  d'un  temple  de  la  Reconnaissance,  bâti  au 
XIV*  siècle.  Elle  est  construite  en  briques  et  revêtue  do 
porcelaine.  Chacune  de  ses  faces  a  13  met.  de  largeur.  Le 
mur  a  12  met.  d'épaisseur  au  rez-de-chaussée,  et  3  met. 
au  sommet,  qui  s'élève  à  80  met.  Chacun  des  neuf  étages 
dont  la  tour  se  compose  est  entouré  d'une  galerie  ornée 
de  statues  d'idoles;  il  a  8  fenêtres  qui  vont  en  se  rétré- 
cissant comme  l'édifice,  et  un  toit  relevé  aux  angles,  les- 
auels  se  terminent  en  têtes  de  dragons  où  sont  suspen- 
ues  de  petites  cloches.  On  entre  dans  la  tour  par 
24  portes,  3  sur  chaque  face,  et  un  escalier  très-étroit 
conduit  aux  divers  étages  Jusqu'au  sommet,  où  s'élève  un 
mftt  entouré  d'ornements  en  forme  de  disques  et  que 
surmonte  un  énorme  globe  doré  :  huit  bandes  de  fer 
tournées  en  volutes  s'attachent  par  une  extrémité  aux 
angles  du  toit ,  et  par  l'autre  sous  le  globe. 

NANTES  (Cathédrale  de).  Cette  église,  qui  a  S*  Pierre 
pour  patron ,  n'offre  pas  un  aspect  imposant,  bien  qu'elle 
soit  placée  dans  une  partie  élevée  de  la  ville.  U  faut  l'at- 
tribuer aux  imperfections  de  la  construction,  qui  appar- 
tient à  différents  styles  et  est  demeurée  inachevée.  Quel- 
que parties  extérieures  de  l'abside  remontent  à  la 
première  période  romane,  c-IhL  au  x*  siècle;  l'intérieur 
de  l'abside  et  le  chœur,  avec  leurs  fenêtres  à  plein  cintre 
et  leurs  nervures  toriques,  sont  en  style  romano-by- 
zantin  du  xi«  et  du  xn'  ;  la  nef,  les  bas  côtés,  le  portail 
et  les  tours  ne  datent  que  du  xv*.  Les  flancs  de  l'édiflca 
sont  nus,  et  sans  perspective  pittoresoue.  Le  portail, 
composé  de  trois  entrées,  se  recommande  par  un  grand 
nombre  de  figurines  en  pierre,  distribuées  en  petits 
groupes,  et  sculptées  en  hauts  reliefs  :  ces  morceaux , 
aune  pureté  de  dessin  remarquable,  ont  été  soit  mutilés 
par  le  temps,  soit  amaigris  par  des  regrattages.  Au-dessus 
du  linteau  de  la  porte  principale,  une  rose  à  comparti- 
ments saillants  remplit  presque  tout  le  tympan  ;  la  vous- 
sure ofilre  une  magnifique  guirlande  de  statuettes  entre- 
mêlées de  dais.  Les  deux  autres  portes  sont  également 
ornées  avec  goût.  Les  tours  qui  les  surmontent  ont 
63  met.  de  hauteur,  et  paraissent  lourdes  et  tristes.  Las 
portes  de  bronze  qui  fermaient  autrefois  les  entrées  ont 
été  portées  à  l'atelier  monétaire  pendant  la  Révohitioiu 
A  rintérieur,  la  cathédrale  de  Nantes  a  40  met.  seulement 


NAN 


1294 


NAP 


de  longaenr,  S6  de  largeur,  37"*,  30  de  hauteur.  L'Im- 
pression wodoite  par  la  grande  nef ,  oui  est  une  des  plus 
belles  de  lYanœ,  et  que  supportent  10  piliers,  est  bientôt 
détnaite  par  le  défaut  d'^umonie  et  d*unité  de  Ten- 
•emble.  Cette  nef  parait  d*autant  plus  élevée  qu'elle  a 
peu  de  longueur  :  au-dessus  des  arcades  oglTsles,  la  ga- 
lerie du  triforlum  est  trè»-rictae  et  très-élégante,  et  il  ne 
loi  manque  que  d*6tre  transparente  et  éclairée  par  des 
titranx  peints.  Les  collatéraux  ont  des  chapelles,  dans 
deux  desquelles  se  trouvent  des  autels  modernes  de  style 
gothique.  Les  piliers  qui  soutiennent  la  voûte  du  buffet 
d'orgues  sont  ornés  de  beaux  bas-reliefe.  Nulle  verrière 
peinte  ne  tempère  l'éclat  du  jour  dans  toute  relise. 
Kntre  la  nef  et  le  chœur,  on  a  élevé,  de  1622  à  1650,  un 
jrandjubé  de  style  grec  :  remarquable  en  lui-même,  il 
ompt  d'une  façon  désagréable  l'harmonie  monumentide. 
le  chœur,  bas  et  étroit,  sans  collatéraux,  produit  aussi 
une  disparate  choquante  avec  la  nef.  Dans  le  transept  à 
la  droite  du  chœur,  on  voit  une  œuvre  admirable  oe  la 
sculpture  du  xvi*  siècle,  qui  ornait  Jadis  une  église  des 
Carmes,  démolie  à  la  Révolution  :  c'est  le  tombeau 
qu'Anne  de  Bretagne,  femme  de  Louis  XII,  fit  élever  en 
1507  à  son  père,  le  duc  François  II ,  et  qui  fut  exécuté 
par  Michel  Golumb,  artiste  de  Tours,  n  est  en  marbre 
blanc,  avec  des  assortiments  en  marbres  de  diverses  cou- 
leurs, et  a  3">,3  de  longueur,  l'*,41  de  largeur,  et  1"*,62 
de  hauteur.  Il  repose  sur  un  socle  haut  de  4  centimètres, 
et  orné  dT  et  d'hermines.  Sur  la  table  en  marbre  noir 
«ont  couchées  deux  statues  en  marinne  blanc,  un  peu  plus 
grandes  que  nature,  celles  de  François  II  et  de  Margue- 
nte  de  Foix,  sa  seconde  femme,  ayant  une  couronne  et 
le  manteau  ducal.  Des  carreaux  soutenus  par  trois  anges 
supportent  leur  tète,  et,  à  leurs  pieds,  un  lion  et  un  lé- 
vrier, symboles  du  courage  et  de  la  fidélité,  tiennent 
«ntre  leurs  pcttes  les  armes  de  Bretagne  et  de  Foix.  Aux 
quatre  angles,  quatre  statues  de  hauteur  naturelle  repré- 
aentent  avec  leurs  attributs  les  vertus  cardinales,  la  Jus- 
tice, la  Siwesse,  la  Prudence  et  la  Force.  Dans  U  statue 
emblématique  de  la  Justice  on  a  figuré  Anne  de  Bretagne, 
sous  le  costume  et  les  attributs  de  reine  et  de  duchesse, 
avec  la  couronne  fleurdelisée  et  fleuronnée  sur  la  tète.  La 
tète  de  la  Sagesse  est  double  :  d'un  côté,  c'est  la  figure 
d'une  Jeone  femme  ;  de  l'autre ,  celle  d'un  vieillard  à 
longue  barbe.  Aux  deux  côtés  du  mausolée  sont  les  douze 
Apôtres  en  marbre  blanc,  dans  des  niches  de  marbre 
rouget  à  la  tète,  S^  François  d'Assise  et  S^  Blarguerite, 
patrons  du  due  et  de  la  duchesse;  aux  pieds,  Charle- 
magne  et  S*  Louis.  La  base  est  ornée  de  16  petites  figures 
représentant  des  pleureuses,  dont  le  visage  et  les  midns 
sont  en  marbre  blanc,  et  le  reste  du  corps  en  marbre 
vert  —  On  a  entrepris  l'achèvement  de  la  cathédrale  de 
Nantes  sur  le  plan  de  la  grande  nef;  quand  elle  sera  ter- 
minée, elle  aura  102  met.  de  longueur.  B. 

NANTES  (Ch&teau  de),  monument  dont  on  fait  remonter 
la  fondation  au  x*  et  même  au  ix*  siècle,  mais  qui,  dans 
sa  forme  actuelle,  date  de  la  fin  du  xv*.  Une  partie  des 
bâtiments  fut  reconstruite  après  un  incendie  en  1670.  Le 
duc  de  Bretagne  François  II  avait  flanqué  de  quatre 
grosses  tours  le  ch&teau  de  Nantes  :  il  n'en  reste  plus  que 
trois;  la  Quatrième,  où  l'on  avait  établi  une  poudrière,  a 
sauté  en  1800.  L'extérieur  du  ch&teau  of&e  peu  d'intérêt; 
mais,  quand  on  pénètre  dans  la  cour  intérieure,  on  ad- 
mire, à  droite,  un  vaste  b&timent  dit  le  grand  logis,  spé- 
cimen du  style  de  la  Renaissance,  récenmient  restauré 
par  M.  Ménard.  On  peut  encore  visiter  les  salles  d'armes 
établies  par  la  direction  d*artillerie,  et  un  grand  puits 
que  surmonte  une  fermeture  remarmiable.  La  chapelle 
est  à  deux  étages;  l'explosion  de  1800  l'a  fort  endom- 
magée.   

NANnSSEBIENT  (du  latin  nans,  caution),  contrat 
par  leqoel  un  débiteur  remet  une  chose  à  son  créancier, 
pour  sûreté  du  payement.  Le  nantissement  d'une  chose 
mobilière  s'appeue  gage;  celui  d'une  chose  immobilière, 
amtichrèiê  (F.  ets  mots).  Le  dessaisissement  eflectif  du 
débiteur  est  une  condition  essentielle  du  contrat.  Dans 
le  langage  ordinaire,  on  appelle  aussi  nantissement  la 
chose  mobilière  qui  est  l'oojet  du  contrat.  Si  le  créan- 
cier n'est  pas  psjré  à  l'échéance  convenue,  il  peut  s'adres- 
ser &  la  Justice,  soit  pour  faire  ordonner  que  l'objet  mo- 
bilier lui  demeurera  en  payement  après  estimation,  soit 
pour  obtenir  le  <h*oit  de  le  vendre  aux  enchères,  et  de 
toucher  par  privll^  ce  qui  lui  est  dû  ;  si  l'objet  est  un 
immeuble,  il  peut  en  poursuivre  l'expropriation  dans  les 
formes  lépiles.  Pour  une  somme  excédant  150  fr.,  il  n'y 
a  priviléfle  que  s'il  existe  un  acte  public  ou  un  acte  sous 
Ming  privé  enregistré,  contenant  la  déclaration  de  la 


somme  due,  la  nature  et  l'espèce  des  choses  données  en 
nantissement.  Toutefois,  le  commissionnaire  qui  a  fait 
des  avances  sur  consignation  à  un  négociant  pour  mar 
chandises  expédiées  tune  a^Ure  place^  n'a  pas  besoin 
d'un  acte  rédigé,  pour  exercer  son  privil^n.  F.  Troplons:, 
Du  nantissement,  du  gage  et  de  Vantiehriee,  1841,  in-8". 

NANTOUILLBT  (Ch&teau  de),  ch&teau  construit  an 
temps  de  IVançois  I'',  près  de  Dammartin  (Seine-et* 
Marne),  pour  le  chancelier  Duprat.  n  était  dans  le  style 
des  beUes  villas  de  Toscane  et  de  Lombardie,  et  s'éleyait 
au  milieu  d'une  enceinte  quadrangulaire,  flanquée  de  toun 
tondes  en  briques.  L'enceinte  est  aujourd'hui  en  partie 
détruite,  et  11  ne  reste  plus  qu'un  corps  de  b&timent  con- 
sacré &  une  exploitation  rurale,  et  deux  ailes  à  moitié 
ruinées.  L'entrée  du  ch&teau,  la  partie  la  mieux  con- 
servée, est  de  ce  style  semi-gothique  qui  fUt  à  b  mode 
au  commencement  du  xvi*  sièeie.  Elle  se  compose  d'une 
grande  arcade  &  plein  cintre,  et  d'une  plus  petite  donnant 
passage  aux  gens  de  pied.  Au-dessus  de  la  grande  arcade 
est  une  statue  mutilée  de  Jupiter,  dans  une  niche  que 
surmonte  un  couronnement  sculpté,  et  que  flanquent 
d'autres  niches  vides  de  statues.  A  d^ite  et  à  gancoe  de 
cette  entrée  on  voit  les  restes  des  fossés  qui  entouraient 
le  ch&teau;  on  avait  accès  dans  rhabitatlon,  non  par  la 
chaussée  actuelle,  mais  par  un  pont  levis,  ainsi  que  l'in- 
diquent les  longues  ouvertures  destinées  &  le  manceuTrer. 
Le  b&timent  situé  au  fond  de  la  cour  d'entrée  contient  au 
res-de-chaussée  une  salle  des  gardes,  avec  une  grande 
cheminée  où  subsistent  quelques  vestiges  de  peintures 
mythologiques,  et,  au  premier  étage,  une  chapelle  ou 
oratoire  de  style  ogival,  pratiquée  dans  une  tourelle  que 
supportent,  du  côté  du  Jardin,  des  colonnes  à  pans  d'une 
délicatesse  extrême. 

NAOS ,  mot  grec  avant,  pour  l'Antiquité,  le  même  sens 
oue  cdla  (F.  ce  mot).  Dans  l'archéologie  chrétienne,  il 
aésigne  la  nef  d'une  église. 

NAPLBS  (Églises  de).  Ces  édifices,  très-nombreux, 
sont  généralement  peu  remarquables  par  leur  architec- 
ture, et,  si  leur  partie  décorative  est  riche,  souvent 
même  sarchaivée,  le  poût  en  est  trop  éouivoque.  L'église 
cathédrale  de  S^-fanmer,  fondée  vers  la  nn  du  xui«  siècle, 
sur  remplacement,  dit-on,  de  deux  temples  d'Apollon  ei 
de  Neptune,  fut  construite  sur  les  dessins  de  Blasuccio  ;  un 
tremblement  de  terre  la  renversa  eu  1456,  et  il  n'en  reste 
plus  que  les  deux  hautes  tours.  Le  nouvel  édifice,  oue  fit 
élever  Alphonse  le  Magnanime,  eut  encore  sa  fa^e  re- 
nouvelée en  1788,  et  Tintârieur  a  été  restauré  depuis  1837. 
Au-dessus  de  la  porte  principale  on  voit  les  tombeaux  de 
Charles  I*  d'Anjou,  de  Charles  Blartel,  roi  de  Hongrie, 
et  de  sa  femme  Clémence,  érigés  par  le  vice-roi  Olivar^s 
en  1599.  A  l'intérieur,  les  voûtes  sont  supportées  par  de 
nombreuses  colonnes  antiques  de  granit ,  de  marbre  afri- 
cain, et  de  dpolin,  et  décorées  de  peintures,  ûnsi  que 
la  partie  des  murailles  située  au-dessus  des  arcs  des 
nefs.  Les  fonts  baptismaux  consistent  en  un  vase  antique 
de  basalte  d'Egypte,  soutenu  par  un  pied  de  porphyre 
orné  des  attributs  de  Bacchus.  Parmi  les  chapelles  que 
renferme  l'édifice,  on  remarque  :  1®  la  chapelle  des  Mi- 
nutoli ,  où  se  trouvent  des  statues  du  Christ,  de  la  Vier^' 
et  de  S^  Jean,  par  Masuccio;  2*  la  chapelle  des  Caraccioli. 
qui  offre  un  grand  crucifix  de  bois,  attribué  au  mèau- 
artiste;  3*  la  <£apelle  de  S'-Janvier,  dite  le  Trésor,  conte- 
nant 7  autels.  Ai  colonnes  de  brocatelle,  19  statues  colos- 
sales en  bronse,  d'admirables  peintures  de  Ribera,  du 
Dominiquin.  et  de  Lanfranc,  et  où  s'opère  trois  fois  T^n 
({•'  samedi  de  mai ,  19  septembre,  Ifidécembre)  la  liquè- 
raction  du  sang  de  S^  Janvier.  Au-dessous  du  ma!tre-au- 
tel ,  ime  crypte,  pratiquée  de  1498  &  1508,  soutenue  pai- 
8  colonnes  ioniques,  et  incrustée  de  marbre  à  arabesques 
d'un  travail  délicat,  renferme  le  corps  du  même  saint 
On  voit,  dans  diverses  parties  de  l'église,  les  tombeam 
du  roi  André  de  Hongrie,  des  papes  Innocent  IV  et  Inno- 
cent Xn,  du  savant  Bfazocchi,  et,  dans  la  sacristie,  un 
crucifix  en  or  du  vu*  siècle,  et  un  candélabre  d'argent 
qu'on  dit  provenir  du  temple  de  Jérusalem.  —  L'ancienne 
basilique  de  S^^-Restitute,  réunie  à  ht  cathédrale  de 
SManvier,  en  forme  comme  une  grande  chapelle.  On  y 
trouve  une  mosaïque  ancienne,  représentant  la  Vierge 
dite  (M  Prmctpto,  parce  qu'elle  fht  la  première  adorée  à 
Naples. 

L'église  de  S**-Claire  (Santa  Chiarm),  commencée  en 
1310,  avait  été  décorée  de  nresaues  par  Giotto  :  mais  ces  ' 
peintures  disparurent  en  175x  sous  le  bediseon  ou  le 
stuc,  &  l'exception  d'une  Vierge.  Le  principal  intérêt  de 
l'Oise  consiste  dans  les  tombeaux  de  la  famille  royale, 
entre  autres,  celui  de  Robert  le  Sage. 


NAP 


1295 


NAP 


L'<^^Uae  S^Dommiquê,  construite  en  1285  par  Masuo- 
do,  est  an  bel  édifice  gothique,  malgré  les  altérations 
qa*il  a  subies.  Les  chapelles  en  sont  ornées  de  peintures 
par  le  Calabrais,  Lanfranc,  le  Carayage,  Zingaro,  etc.  La 
ncristie  est,  à  elle  seule,  un  des  premiers  monuments 
de  Naples,  moins  par  ses  stucs  dorés ,  son  pavé  de  mar- 
bres précieux,  ses  armoires  en  racine,  sa  longue  fresque 
de  Solimtee,  que  par  i%  tombeaux  de  ^orinces  aragonais, 
sniiinels  on  a  ijoaté  celui  du  marquis  de  Pesoure  et 
quelques  autres.  Cest  dans  le  superbe  monastère  atte- 
nant à  Tégliae  que  S*  Thomas  d'Aquin  vécut  et  enseigna. 

L'égHae  S^'PMipp9  de  Néri,  dite  aussi  des  GmAo- 
mmi,  foi  fondée  en  1592.  Sa  façade  en  marbre  est  de  bon 
gDÛt.  La  coupole  a  été  récemment  reconstruite.  L'inté- 
rieur de  rédifice,  décoré  avec  masuiflcence,  renferme  des 
tableaux  de  Lnca  Giordano,  du  Guide,  de  Solimène.  Le 
philosophe  Vico  y  est  enterré.  Dans  la  sacristie  sont  de 
oomfareoaes  pdntnres  du  Guide,  d*Ândré  Sabbatini,  du 
Dominiquin,  du  Tintoret,  de  Ribera,  de  Baroccio,  etc. 

La  chapelle  de  SanSevero  est  la  propriété  des  princes 
de  ce  nom.  On  l'appelait  autrefois  Santa  Maria  délia 
PisCo.  Construite  en  1590,  elle  fut  enrichie  plus  tard  de 
statues  et  de  sculptures.  Outre  les  tombeaux  de  la  famille 
Saoffri,  et  on  bas-relief  du  maltre-antel  où  Francesco 
Gelmano  a  représenté  le  Crudflement ,  on  remarque  trois 
statues  allégoriques  de  l'école  du  Bemin,  qui  témoignent 
à  la  fois  d*niie  grande  perfection  technique  et  d'un  goût 
d^ravé  :  rHonune  cherchant  à  sortir  du  filet  des  tenta- 
tions qui  l'enveloppe,  par  le  Guccirolo  ;  la  Pudeur,  figure 
dont  un  léger  voile  de  marbre  laisse  deviner  les  formes, 
par  Corradini;  un  Christ  enveloppé  de  son  linceul,  œuvre 
de  Giuseppe  Sammartino  sur  les  dessins  de  Corradini. 

RAFLES  (Le  HcséB  Bourbon,  ou  Mcséb  dbs  études  à], 
la  plus  riche  collection  d'antiques  qui  existe  en  Europe. 
Elle  est  installée  dans  un  b&timent  construit  en  1587  par 
le  doc  d'Ossuna  à  l'usage  d'écâries,  puis  livré  sncoessive- 
inent  à  lUniversité ,  aux  tribunaux  et  aux  troupes,  et 
approprié  à  sa  destination  actuelle  par  l'architecte  Schian- 
tarelli.  Ce  musée,  formé  primitivement  pour  les  statues 
et  autres  œuvres  que  les  rois  de  Naples  tirèrent  de  leur 
palais  Fàmôse  à  Rome,  de  Portici,  et  de  Capo  di  Monte, 
réunit  tour  à  tour  les  objets  trouvés  à  Herculanum,  à 
Pompéi,  et  dans  les  autres  localités  desDeux-Siciles,  ainsi 
t?ae  les  collections  du  duc  Carafa  di  Noja,  du  cardinal 
lk>rgia.  et  de  Vivenzio.  Il  comprend,  au  res-de-ehaussée  : 
t*  environ  1,600  peintures  murales  et  un  grand  nombre 
de  mosalqpes  antiques;  2*  plus  de  1,500  statues,  bustes, 
et  bas-reliefs  antiques  en  marbre,  entre  autres ,  le  Gla- 
diaieur  Famète,  un  Apollon  citharède.  la  Junon  Famèse, 
la  Minerve  Fanièse,  les  deux  statues  équestres  de  Balbus 
Dère  et  fils,  les  bustes  de  César,  d^Adrim ,  d'Antonin  le 
Pieux,  d^Eschme,  une  statue  d^Agrippme,  une  Flore  co- 
lossale, le  Torse  Famèse,  le  Torse  de  Psyché,  la  Vénus 
caUipuQe,  etc.  ;  dans  cette  partie  du  musée  se  trouve  aussi 
la  câebre  mosaïque  de  la  maison  du  Faune  à  Pompéi  -, 
3*  une  collection  de  près  de  1,600  inscriptions  sur  mar- 
bre, avec  le  Taureau  rarnèse  et  V Hercule  Famèse;  4«  des 
antiquités  &yptiennes  et  osques;  5*  une  galerie  des  sta- 
tuer et  des  bustes  en  bronze;  6*  environ  1,200  monu- 
ments de  l'art  au  moyen  âge,  çlus  de  4,000  verreries 
anticiues  et  plus  de  5,000  terres  cuites.  Â  l'étage  supérieur, 
on  a  placé  :  une  collection  de  petits  bronzes  antiques,  au 
nombre  de  13,000;  une  collection  de  3,300  vases  italo- 
grecs;  la  salle  des  papyrus,  contenant  près  de  3,000  rou- 
leaux; un  cabinet  de  plus  de  2,000  gemmes  et  objets  d'or 
et  d'areent;  un  cabinet  de  médailles,  comptant  70,000 
pièces  envfaîon  ;  une  çtlerie  de  900  tableaux  appartenant 
aux  dîTerses  écoles  italiennes;  un  cabinet  réservé  ou 
miuiée  secret,  renfermant  les  œuvres  d'un  art  licencieux  ; 
une  bibliothèque  de  200,000  volumes  et  3,000  manuscrits. 

HAPLES  (Palais  de).  Le  Palais  Royal,  que  le  vice-roi 
comte  de  Lemos  fit  construire  en  1600  par  Dominique 
Fontana,  ne  conserve  plus  de  sa  forme  première  que  la 
façade,  décorée  de  trois  rangs  superposés  de  pilastres 
d'ordres  différents,  et  couronnée  d'une  corniche  garnie 
alternativement  de  pynunides  et  de  vases;  le  reste  a  été 
modifié  à  diverses  reprises,  surtout  après  un  incendie 
eo  1837.  Ce  palais,  enveloppé  de  constructions  militaires, 
contient,  outre  les  salles  d'apparat  et  les  appartements 
privés,  on  certain  nombre  de  bons  tableaux,  une  biblio- 
thèque et  une  collection  d'estampes. — Le  Palais  de  Capo 
di  Monte,  commencé  en  1738  par  le  roi  Charles  III,  plu- 
sieurs fois  interrompu,  repris  en  1834,  et  embelli  d'un 
parc  en  1S39,  contenait  anù^efois  une  galerie  de  tableaux, 
qui  oot  été  transportés  au  Musée  Bourbon.  —  Parmi  les 
palais  des  parliculiers,  tous  ornés  d'œuvres  d'art,  on 


remarque  les  palais  d*Angri,  construit  par  VanvitelHi 
Baguara  ou  San  iinitmo,  piar  Carlo  Fontana  (1600)) 
Caramanica,  par  Fuga;  Avalos,  où  sont  de  précieuses 
tapisseries  ;  Gramna,  un  des  bons  ouvrages  d'srôhitectuiB 
du  XV*  siècle;  San  Anatio,  riche  en  tableaux,  vases, 
bronzes,  camées,  médailles,  etc. 

NAPOLÉON,  pièce  d'or  française  à  l'effide  de  l'empe- 
reur. Sous  Napoléon  I*',  il  y  en  eut  de  20  fr.  et  de  40  fr. 
Napoléon  m  en  a  fait  frapper  de  5,  de  10,  de  20,  de  50 
etdelOOfir. 

lUPOLioN  (Code),  ou  Codb  civil.  Le  nom  de  Code  civU 
était  donné,  avant  la  Révolution  de  1789,  à  l'ordon- 
nance de  1667  sur  la  Procédure  civile,  ordonnance  exa- 
minée par  les  plus  célèbres  avocats  du  temps,  revisée 
par  le  parlement,  et  due  en  grande  partie  à  Punort,  oui 
lut  chargé  avec  Auzanet  d'en  dresser  définitivement  les 
articles.  Aujourd'hui  il  s'applique  uniquement  à  la  réu- 
nion de  nos  lois  civiles  en  un  seul  corps,  décrétée  par  la 
toi  du  30  ventftse  an  xil  Une  seconde  édition  du  Code 
civil  fut  décrétée  par  \a,  loi  du  3  septembre  1807 ,  ^ 
substitua  le  titre  de  Code  Napoléon  à  celui  de  Code  cwU 
des  Françau,  par  le  motif  crue  ce  dernier  titre  ne  pou- 
vait convenir  à  un  code  déjà  regardé  comme  le  droit 
commun  de  l'Europe.  Elle  remplaça  les  dénominations 
républicaines  par  des  dénominations  plus  en  harmonie 
avec  le  gouvernement  impérial.  Une  3*  édition,  préparée 
par  la  Restauration  en  1816,  restitua  à  ce  recueil  le  titre 
de  Code  civil,  et  fit  dans  le  sens  de  la  royauté  les  change- 
ments antérieurement  faits  dans  le  sens  de  l'Empire. 
Sous  la  République  de  1848,  aucun  changement  n'eut 
lieu.  Le  décret  des  29-30  mars  1852  fit  revivre  la  déno- 
mination de  Code  Napoléon. 

Le  projet  de  Code  civU  fut  préi>aré  en  moins  de  sept 
mois  per  quatre  Jurisconsultes  éminents,  Tronchet,  Por- 
tails, Bigot  de  Préameneu,  et  Ifaleville,  puis  soumis  à 
l'examen  des  divers  tribunaux,  et  enfin  discuté  dans  le 
Conseil  d'État,  le  Tribunat  et  le  Corps  législatif.  Ce  Code 
se  compose  d'un  titre  préliminaire  «tir  le  Droit  et  les 
lois  en  générai^  et  de  trois  livres  qui  traitent  Des  per^ 
sonnes.  Des  btens  et  des  différentes  modifications  de  la 
propriété  ^  et  Des  différentes  manières  dont  on  acquiert 
la  propriété. 

Le  1^  livre  embrasse  la  jouissance  et  Ut  privation 


des  droits  civUs,  les  actes  de  Vétat  civU ,  le  domiçUe , 
Vabsence,  le  mariage,  le  dft>orcs,  la  paternité  et  la  jfUio- 


contient  la  distinction  des  biens,  la  propriété,  Vusufruit, 
Viisage  et  Vhabitation,  les  servitudes  ou  services  fotir 
fiers.  —  Le  3*  statue  sur  les  successions,  les  donations 
entre  vifs  et  les  testaments,  les  contrats  ou  obligations 
conventuelles  en  général  ^  les  engagements  sans  conven^ 
tion,  le  contrat  de  manage  et  les  droits  respectifs  des 
époux,  la  vente,  Véchange,  le  contrat  de  louage,  le  con^ 
trot  de  société,  le  prêt,  le  dépôt  et  le  séquestre,  les  cofi- 
trats  aléatoires,  le  mandat,  le  cautionnement,  les  trans- 
actions,  la  contrainte  par  corps  en  matière  civile ,  to 
nantissement,  les  privilèges  et  hypothèques,  Vexpro^ 
priation  forcée  et  les  ordres  entre  créanciers ,  la  prM- 
cription. 

Un  certain  nombre  de  lois  rendues  à  diverses  époques 
ont  rompu  l'unité  législative  établie  par  le  Code  citnf. 
Telles  sont  celles  du  24  mars  1806  sur  le  transfert  des 
inscriptions  de  rentes  appartenant  à  des  mineurs  et  à 
des  interdits;  du  3  sept.  1807, qui  rtela  le  taux  de  l'in- 
térêt de  l'argent  ;  du  14  novembre  1808,  sur  la  saisie 
immobilière;  du  28  mai  1816,  oui  abolit  le  divorce;  du 
14  Juillet  1819,  qui  supprima  le  droit  d'aubaine;  des 
17  mai  1826  et  lï  mai  1835,  qui  autorisèrent  les  substi- 
tutions dans  certaines  limites,  et  modifièrent  l'existence 
des  mijo^^t  du  17  avril  1832,  sur  la  contrainte  par 
corps;  du  20  mai  1838,  sur  les  vices  rédhlbitoires  dans 
les  ventes  et  échanges  d'animaux  domestiques;  dn  30  juin 
1838,  sur  les  aliéna»,  etc. 

Les  principaux  ouvrages  à  consulter  sur  le  Code  civil 
sont  :  Cussaire,  Analyse  des  observations  des  tribunaux 
d^appel  et  du  tribunal  de  cassation  sur  le  projet  de  Code 
civtt,  180S,  in-4<*;  Jooanneau  et  Selon,  Discussion  du 
CodecivU  dans  le  Conseil  d'État,  1803,  3  vol.  in-4'; 
Locré,  Procès-verbaux  du  Conseil  d'État,  contenant  la 
Discussion  du  projet  du  Code.  Paris,  1803-1804,  5  voL 
in-4«;  Fenet,  Recueil  complet  des  travaux  préparatoires 
ou  motifs  du  Code  dvU,  1836,  15  vol.  in-8*  ;  Duranton, 
Cours  de  Droit  français,  4«  édiu,  1844,  22  vol.  in-8*{ 
Touiller,  DroU  civil,  1846-1848, 15  vol.  in-8*;  Teulet 


NAP 


12M 


NAP 


d*AnvlUefB  et  Sulpicy,  Code»  françaii  «moMt.  3  fol. 
ln-4^;  Dftubenton,  Dictionnaire  du  Code  cwiî,  1806, 
In-S^*;  Dufoar,  Code  cioil  des  Français  m)$c  les  sources, 
suivi  de  la  différence  et  des  rapports  des  lois  romaines 
avec  les  lois  françaises^  1800,  4  vol.  ia-8^;  Bousquet, 
Eacplication  du  Code  civU,  1804-1806,  5  vol.  in-4«;  Co- 
telle.  Cours  de  Droit  français,  ou  le  Code  Napoléon  ap- 
profondi,  1813,  2  vol.  iii-8<^;  Pigeau,  Cours  élémentatre 
sur  le  Code  chnl,  1818.  2  vol.  in-8<>;  De  Maleville,  Ana- 
IvM  raisonnée  de  la  discussion  du  Code  ctvtt,  3*  édit., 
1821,  4  vol.  iii-8®;  Favard  de  Langlade,  Conférence  du 
Code  doU,  avec  la  discussion  du  Conseil  d'État  et  du 
Tribunal,  1805,  8  vol.  ia-8*  ;  Dard,  Conférence  du  Code 
civil  avec  les  lois  anciennes,  3*  édit,  1827,  in-8<>;  Del- 
vincourt.  Cours  de  Code  civU,  5"  édiU,  1834, 3  vol.  in-4<^; 
Portalia,  Discours,  rapports  et  travaux  inédits  sur  le 
Code  civU^  1844.  in-8°;  Lahaye  et  Waldeck-Rousaeau, 
Code  civil  annoté,  2*  éd.,  1844,  iD-4^  ;  Gousset,  Code  civil 
commenté  dans  ses  rapports  avec  la  Théologie  morale^ 
5^  édit.,  1834,  iii-8*  ;  Du  Caurrov,  Bonnier  et  Roustain, 
Commentaire  du  Code  dvil,  1851, 3  vol.  iii-8^  ;  Zacharis, 
Cours  de  Droit  civU  français,  trad.  de  Tallemand  par 
Aubry  et  Rau,  3<  édit.,  1858  et  suiv.,  6  vol.  in-8«;  Mar- 
cadé  et  Paul  Pont,  Explication  théorique  et  pratique  du 
Code  Napoléon,  5<  édit.,  1859,11  vol.  in-8«;  Duvergier, 
Continuation  de  Toullier,  1830-30,  8  vol.  in-8*  ;  Oudot, 
Conscience  et  science  du  devoir^  introduction  à  une  nou- 
velle explication  du  Code  Napoléon,  1856,  2  vol.  in-8«; 
Anthoine  de  Saint^oseph,  Concordance  entre  les  Codes 
civils  étrangers  et  le  Code  Napoléon ,  2*  édit.,  185G, 
4  vol.  gr.  in-8"  ;  Berriat  Saint-Prix,  Notes  théoriques  sur 
le  Code  civil,  1856,  3  vol.  in-8<*;  Demante,  Cours  analy- 
Uque  de  Code  civil,  1849  et  suiv.,  4  vol.  in-8<';  Delsol,  le 
Code  Napoléon  expliqué,  1854, 3  vol.  in-8<^;  Dcmolombe, 
Cours  de  Code  iVopoi^on,  1845-59, 15  vol.  in-8^  ;  Rogron, 
Code  civil  expliqué,  18o3,  2  vol.  in-8*;  Tapions,  le 
Droit  civil  expliqué  suivant  Vordre  des  articles  du  Code, 
27  vol.  in-8<';  Mourlon,  Répétitions  écrites  sur  le  Code 
Napoléon,  5'  édit.,  1859,  3  vol.  in-8«;  Proudhon,  TrcUté 
sur  Vétat  des  personnes  et  sur  le  titre  préliminaire  dut 
Code  cwû ,  édit.  de  Valette,  3  vol.  in-8*'  ;  Boileux,  Com- 
mentaire sur  le  Code  Napoléon,  6"  édit.,  1857  et  suiv., 
7  vol.  in-8°  ;  Vuillaume,  Commentaire  cutalytique  du 
Code  Napoléon,  1856,  in-8'*,  etc. 

iiAPOL&)N  (Maisons  impériales).  V,  Légion  d^honreob  , 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  ^Histoire, 

!iÀP0LtoN  (Tombeau  de).  V.  Mausol^,  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire, 

NAPOLITAIN  (Dialecte),  un  des  dialectes  italiens.  Il 
tronque  les  syllidbes,  et  elide  Vi  au  commencement  des 
mots  :  nziemme^  pour  insieme,  nzoleto  pour  insolite.  II 
aime  à  redoubler  les  consonnes  au  milieu  des  mots  : 
ammore,  femmena,  L*élision  de  Vin  se  combinant  avec 
une  contraction  euphonique  rend  quelquefois  les  mots 
méconnaissables  :  mmano  pour  in  vano ,  mmest^e  pour 
investire.  On  redouble  même  Vn  au  commencement  des 
mots,  ou  on  l'emploie  comme  une  sorte  d'esprit  :  Nne^ 
fole,  Naples ,  e  mbè  pour  e  bene.  Ve  final  s'élide  généra- 
lement, on  se  prononce  à  peine,  comme  Ve  muet  en  fran- 
çais. Cet  e  s'ajoute  parfois  à  des  mots  terminés  par  i  : 
maie  pour  mat,  gua^e  pour  guai.  Il  y  a  permutation  fré- 
quente du  6  et  du  t;  ;  on  dît  également,  par  exemple, 
viene  et  biene.  La  lettre  l,  suivie  d'un  d,  d'un  t  ou  d'un 
g,  se  change  souvent  en  u  {auto  pour  alto,  caudara  pour 
eaidaja)  ou  en  r  {concnuiere  pour  concludere).  Le  p  se 
change  aussi  en  ch  ':  chiù  pour  piU,  chiojgnere  pourptan- 
gere,  Vs  remplace  Vf,  et  s'emploie  aussi  comme  préfixe  : 
tctoto  pour  fiato,  sgobbo  pour  gobbo,  La  double  II  ou  Is 
se  change  en  z  :  voze  pour  voile,  sceuze  pour  scelse, 
VI  de  1  article  s'élide  souvent  :  o  pour  lo,  a  pour  la. 
V,  l'abbé  Galiani,  Del  dialeit-o  napoletano^  1779.  —  Le 
dialecte  napolitain  a  une  littérature,  dont  le  Cortese  est 
le  principal  représentant.  Les  auteurs  qui  s'en  sont  servis 
après  lui  ont  affectionné  presque  tous  le  genre  burlesque; 
nous  citerons  :  J.-B.  B&sile,  dont  on  a  un  Pentaméron , 
inspiré  par  le  Décameron  de  Boccace  ;  Valentino,  qui  a 
raillé,  dans  son  poôme  de  la  Mezza  Canna,  le  Inxe,  la 
vanité  et  la  sottise  de  ses  compatriotes  ;  Balzano  di  Sca- 
fati ,  qui  se  cacha  sous  le  pseudonyme  de  Sgruttendio 

r>ur  adresser  des  sonnets  pétrarquistes,  mais  dérisoires, 
toutes  sortes  de  femmes  ae  basse  condition  et  affligées 
de  défauts  corporeb,  ou  pour  célébrer  le  mets  national, 
le  macaroni;  on  autre  Valentino,  auteur  d'an  poème  de 
15,000  vers  environ,  intitulé  les  Ciseaux,  divisé  en  deux 
lames  et  une  paire  de  manches,  et  tout  farci  de  grec,  de 
latin«et  même  d'hébreu  Parmi  les  écrivains  sérieux. 


Nunziante  Pagano  a  retracé  dans  un  poème,  La  Mor» 
tdla  SOrzoloni,  une  histoire  touchante  et  pathétique; 
Pemccio  a  célébré  la  catastrophe  de  la  ville  d'AgnanCf 
dont  un  lac  prit  la  place;  Fusano  a  traduit  la  Jérusakm 
délivrée.  Nie.  Valletta  les  Odes  d'Horace,  le  baron  Zezza 
le  Malade  imaginaire  de  Molière.  Deux  coUecdons  de 
poésies  en  dialecte  napolitain  ont  été  publiées,  l'une  de 
1783  à  1788  en  38  vol.  in-12  par  PorcelU,  l'autre  en  1826, 
en  3  voL  in-8<^. 

NAPOLITAINE  (École),  une  des  écoles  italiennes  de 
peinture.  Quelques  auteurs  la  considèrent  comme  la  plus 
ancienne,  et  pensent  même  qu'elle  a  existé  sans  inter- 
ruptidn  depuis  l'âge  byzantin  :  ils  parlent  de  madones 
faites  dans  le  xi*  siècle,  tandis  que,  dans  les  autres  par- 
ties de  l'Italie,  les  arts  étaient  presque  entièrement  ou- 
bliés. Ce  qui  est  plus  certain,  c'est  que  l'école  de  Naples, 
à  toutes  les  époques,  n'a  eu  qu'un  éclat  d'emprunt  :  on 
n'y  trouve  pas  un  style  original,  un  ensemble  de  prin- 
cipes imposés  par  un  homme  de  génie  et  suivis  par  des 
duciples,  mais  toutes  sortes  d'influences  exercées  par  des 
étrangers  et  souvent  opposées  les  unes  aux  autres.  Dès 
le  commencement  du  xnr*  siècle,  Giotto,  appelée  Naples, 
y  exécuta  des  firesqnes  à  la  Santa-Chiara  et  à  l'Incoro- 
nata  :  Simone  est  le  plus  connu  des  peintres  qui  imitè- 
rent ses  exemples.  Il  ne  paraît  pas  que  l'art  ait  beaucoup 
progressé  dans  l'espace  d'un  siècle ,  puisqu'on  a  pu  atr 
tribuer  à  Simone  quelques  ouvrages  de  Golantonio  del 
Flore,  mort  en  1444.  Une  impulsion  plus  marquée  fnt 
donnée  à  la  pûnture  par  le  gendre  de  Golantomo,  An- 
toine Solario,  plus  connu  sous  le  nom  de  Zingaro,  et  les 
œuvres  faites  après  lui  furent  qualifiées  de  zingaresqusi. 
Au  nombre  de  ses  disciples,  on  remarque  les  frères  Don- 
zelli ,  puis  Bernard  Tesauro,  qui  montra  plus  d'invention 
et  de  natureU  Notons  aussi  Antonello  de  Messine,  ad 
apprit  du  peintre  flamand  Vpn  Eyck  la  manière  de  peindre 
à  rhuile,  et  qui  la  propagea  en  Italie. 

Au  XVI*  siècle ,  lorsque  la  peinture  prit  tant  de  déve- 
loppement à  Rome,  à  Florence,  à  Venise,  à  Parme,  à 
Mantoue,  etc.,  l'école  de  Naples  ne  fit  que  reproduire  les 
principales  qualités  des  autres  écoles;  si  elle  eut  le  feo 
de  l'invention,  la  fougue  du  pinceau  et  la  rapidité  de 
l'exécution,  elle  pécha  toujours  par  le  dessin,  et,  attachée 
à  l'imitation  directe  de  la  nature ,  ne  poursuivit  pas  le 
beau  idéal.  André  Sabbatini,  de  Saleme,  le  premier 
peintre  de  cette  nouvelle  période,  étudia  sons  Raphaël, 
dont  il  rapporta  les  principes.  Le  sac  de  Rome  par  les 
Allemands,  en  1527,  en  contraignant  les  artistes  de  fuir 
à  Naples ,  fortifia  dans  cette  ville  l'influence  de  l'école 
romaine  :  Polydore  de  Caravage,  Penni ,  dit  U  Fattore, 
et  Perino  del  Yaga,  y  laissèrent  quelques  modèles.  En 
même  temps,  les  principes  de  Michel-Ange  eurent  pour 
représentants  dans  l'école  napolitaine  Vasari  et  Marco  de 
Sienne,  tandis  que  d'autres  artistes  s'attachaient  au  Ti- 
tien, au  Tintoret  et  aux  autres  maîtres  de  Venise. 

La  première  moitié  du  xvii*  siècle  fut  l'&se  brillant  de 
la  peinture  napolitaine,  et  elle  dut  cet  éclat  à  la  pré- 
sence de  maîtres  étrangers.  Ce  fut  aussi  on  temps  dla- 
trigues,  de  haines,  de  persécutions,  de  crimes  même 
parmi  les  artistes.  Michel-Ange  de  Caravage,  chassé  de 
Rome  pour  homicide,  apporta  aux  artistes  napolitains, 
avec  son  style  éner^que  et  rude,  la  violence  de  ses 
mœors.  L'espagnol  Rioera,  son  élève,  le  grec  Corenzio, 
qui  avait  étudié  sons  le  Tintoret,  et  le  napolitain  Carao- 
aolo,  imitateur  d'Annibal  Carrache,  formèrent  un  triam- 
virat  redoutable  aux  étrangers  :  Annlbal  Carrache ,  le 
chevalier  d'Arpino,  Guido  Renl  et  son  élève  Gessi,  le 
Dominiauin,  Lanfranc,  furent  calomniés ,  menacés  de 
mort,  obligés  de  fuir,  et  la  condanmation  à  mort  de 
Francanzani,  l'un  des  élèves  et  agents  de  Ribera,  n'ar- 
rêta point  ses  ignobles  cabales.  Rioera  alla  Jusqu'à  mêler 
des  substances  corrosives  à  l'eau  qu'employait  Maasimo 
Stanzioni,  pour  faûre  périr  ses  œuvres.  A  cette  période 
appartiennent  encore  Preti ,  dit  U  Calabrese,  imitateur 
du  Cuerohin,  Aniello  Falcone,  peintre  de  batailles,  et 
son  élève  Salvator  Rosa,  l'un  des  maîtres  les  plus  origi- 
naux de  l'Italie. 

L'école  napolitaine  a  fini  avec  deux  peintres  distin- 
gués ,  Luca  Giordano ,  dont  le  surnom  de  Fa  presto  a 
été  justifié  par  une  prodigieuse  rapidité  d'exécution,  et 
François  SoUmène,  qui  peignit  Jusqu'à  90  ans  et  remplit 
de  sa  réputation  toute  l'Europe.  B. 

NAPPE.  L^usage  des  nappes  sur  les  tables  ne  remonte 
pas  au  delà  du  x*  siècle.  Alain  Chartier  attribue  à  Bu 
Guesclin  l'introduction  de  la  coutume  de  faire  trancher 
la  nappe  devant  ceux  qui  avaient  forfait  à  l'honneur.  — 
A  l'église,  où  elle  est  plus  ancienne,  la  nappe  est  la 


NAR 


1297 


NAT 


linge  dont  on  couvre  Tautel  {V.  Couverture  d*autel); 
on  appelle  nappe  de  communion  le  linge  placé  devant 
les  communiants. 
KAQUAIRES.  F.  Nacaires. 

NAQUET,  nom  donné  autrefois  aux  valets  qui  mar- 
quaient les  points  au  Jeu  de  paume. 

NARBONNE  (Église  S'^Just,  à).  Cette  église,  autrefois 
cathédrale,  fut  fondée  en  4272.  Le  chœur,  les  13  cha- 
pelles absidales  et  les  deux  tours  étaient  achevés  en 
1J32;  mais  l*édifice  ne  fut  point  continué,  et  Ton  flt  au 
lYm*  siècle  quelques  essais  infructueux  pour  reprendre 
les  travaux.  On  8*est  remis  à  l'œuvre  en  1840,  sans  faire 
encore  autre  chose  qu'une  partie  du  transept.  La  portion 
aDdenne  de  l'œuvre  est  donc  un  vaste  chœur  de  style 
ogival  f  presque  aussi  élevé  que  ceux  de  Beauvais  et  de 
Cologne  (40  met.),  et  remarquable  par  la  hardiesse  des 
contre-forts  et  des  arcs-boutants,  la  légèreté  et  la  grftce 
des  piliers.  Une  double  ceinture  de  créneaux  remplace  les 
balostrades  sur  les  chapelles,  et  réunit  les  culées  des 
arcs-boutants  terminées  en  forme  de  tourelles.  La  con- 
straction  est  d'une  simplicité  grandiose,  et  l'on  y  re- 
marque l'absence  de  ces  moulures  dont  les  cathédrales 
da  nord  de  la  France  sont  si  riches.  Les  fenêtres  n'ont 
pour  vitraux  que  des  grisailles  avec  entre-lacs  de  couleur 
etécussons  armoriés.  Le  mattre-autel,  à  colonnes  et  à 
baldaquin,  n'est  point  en  rapport  avec  le  style  du  monu- 
ment. La  boiserie  des  stalles  et  celle  de  l'orgue  ne  sont 
pas  sans  mérite.  Le  sanctuaire  a  conservé  sa  clôture  for- 
mée de  tombeaux  d'évèques.  Au  flanc  méridional  du 
chœur  est  un  cloître  du  xv*  siècle,  et  une  stalle  capitu- 
Ldre  d'un  bon  style. 

NARRAGANSETT  (Idiome),  un  des  idiomes  algonquins 
(V.  00  mot).  On  en  trouve  une  Grammaire  dans  l'ouvrage 
de  Roger  Williams  intitulé  A  Key  to  th»  language  of 
America,  1643,  in-4o. 

NARRATIF  (Cas),  cas  particulier  à  la  déclinaison  ar- 
ménienne, et  qui  exprime  la  qualité  de  l'être  ou  de  la 
diose  sur  laquelle  on  discourt. 

NARRATION  (du  latin  narrare,  raconter) ,  récit  d'un 
fait.  II  y  a  trots  espèces  de  narrations.  La  Narration 
htstorique  est  le  récit  exact,  fidèle  et  complet.  «  La  pen- 
sée de  l'historien,  dit  Lucien,  est  semblable  à  un  miroir 
brillant,  sans  tache,  et  d'un  centre  parfait.  Qu'il  repro- 
duise les  formes  des  objets  telles  qu'il  les  a  reçues,  sans 
les  renverser,  sans  leur  prêter  des  couleurs  ou  des  figures 
étrangère»,  b  Cependant  cette  fidélité  rigoureuse  n'exclut 
pas  les  agpréments  du  style,  les  réflexions  intéressantes, 
qui  donnent  de  la  vie  et  du  mouvement  au  récit.  Tadte 
et  Tite-Live  sont  des  modèles  de  narration  pariidte  dajas 
le  genre  historique.  —  La  Narration  poétique  est  laissée 
praque  tout  entièa^  à  l'imagination  du  poète;  il  peut 
iorenter,  embellir,  changer  les  événements  à  sa  guise; 
on  ne  lui  demande  que  d'être  intéressant  et  vraisem- 
blable. Fénelon  dans  le  Télémaque^  Corneille,  Racine  et 
Molière  dans  leurs  pièces,  oflErent  une  multitude  de  nar« 
^^tions  poétiques,  aussi  parfaites  ou'attravantes.  —  Il  y 
a  enfin  la  Narration  oratoire,  fin  Rhétorique,  la  Narra- 
tion est  la  troisième  partie  du  discours.  C'est  le  récit  du 
fait  qui  conatitue  la  cause.  L'orateur  ne  peut,  comme  le 
poète,  créer  les  faits  ;  mais  il  n'est  pas  obligé,  comme 
i'iiistorien,  de  les  présenter  avec  une  scrupuleuse  fidélité. 
Sins  tes  altérer,  il  loi  est  permis  de  les  adoucir,  d'atté- 
rier  ce  qu'ils  renferment  d'odieux  ou  de  blessant,  et  de 
r.iire  valoir,  au  contraire,  les  circonstances  favorables  à 
i^i  cause.  La  narration  oratoire  doit  avoir  trois  qualités  : 
>  >  brièveîé,  la  clarté,  la  vraisemblance.  La  brièveté  con- 
^iste  à  prendre  le  récit  an  point  Juste,  sans  remonter 
:  as  haut;  à  ne  point  donner  de  détails,  ouand  il  suffit 
'i  indiquer  sommairement  le  fait  ;  à  ne  faire  ni  digres- 
sions ni  redites.  La  clarté  consiste  à  observer  l'ordre  des 
temps  et  des  faits,  en  racontant  les  choses  comme  elles 
^  sont  passées,  ou  comme  il  est  vraisemblable  qu'elles 
nt  pu  se  passer,  et  à  n'employer  que  des  expressions 
impies  et  à  la  portée  de  tout  le  monde.  Enfin,  pour  don- 
wr  à  la  narntion  de  la  vraisemblance,  il  faut  la  revêtir 
(ie  tous  les  caractères  de  la  vérité,  observer  les  conve- 
nances de  personnes,  montrer  la  cause  de  chaque  fait, 
et  mettre  le  récit  en  rapport  parfait  avec  le  caractère  des 
I  vties,  les  habitudes  du  public  et  les  sentiments  de  l'an- 
ditnre.  Tontes  ces  qualités  se  trouvent  réunies  dans  la 
Narration  de  Cicéron  Pro  MUone,  Nous  avons  dit  que  la 
narration  est  la  3<^  partie  du  discours  ;  cependant  il  ar- 
rive souvent,  sartont  au  barreau,  qu'elle  devient  la  l**  : 
supprimant  l'exorde,  l'orateur  raconte  le  fait  en  ques- 
tion, puis  fait  connaître  la  division  de  son  discours.  La 
Proposition  vient  alors  après  la  Narration.  H,  D. 


NARTHEX ,  nom  donné ,  dans  les  basiliques  chré- 
tiennes, au  prottoo^,  c-à-d.  à  la  partie  précédant  la  nef; 
mais  comme  les  anciennes  basiliques  étaient  précédées 
de  cours,  d'atrium,  et  de  portiques,  on  ne  sait  à  laquelle 
de  ces  divisions  le  mot  narlhix  s'appliquait  particuliè- 
rement. Au]ourd*hui  les  archéologues  désignent  par  ce 
mot  le  porche  ou  la  galerie  voûtée  qui  précédait  la  nef 
et  qui  y  communiquait  par  une  ou  plusieurs  portes , 
semblables  à  celles  de  la  façade  extérieure  ;  c'est  Ik  que 
se  tenaient  les  catéchumènes  et  les  pénitents  pendant  le 
saint  sacrifice  de  la  messe.  Il  existe  un  narthex  remar- 
quable à  l'église  de  Vézelay.  Lorsque  le  narthex  est  divisé 
en  deux  parties  dans  le  sens  de  la  largeur,  comme  à 
S^*-Sophie  de  Constantinople,  on  nomme  exonarlhex  la 
partie  située  vers  l'extérieur,  et  esonarthex  la  partie 
placée  vers  l'intérieur.  E.  L. 

NASAL.  V,  CHANFBEm. 

NASALES  (Consonnes),  consonnes  dont  Tarticulation 
produit  un  son  nasal.  Ce  sont  m  et  n. 

NASALES  (Voyelles),  nom  donné  à  la  combinaison  des 
voyelles  avec  les  consonnes  m  et  n  finales,  comme  an, 
am,  en,  em,  m,  im,  ain,  aim,  «tn,  on,  cm,  un,  um,  dans 
paysan,  ambassade,  entrer,  empereur,  coquin,  imbécile, 
étain,  essaim,  sein,  passion,  Riom,  alun,  parfum.  Dans 
ces  exemples,  la  nasale  forme  une  syllabe  ou  finale  ou 
suivie  d'une  autre  syllabe  commençant  par  une  consonne. 
Si  la  syllabe  qui  la  suit  commence  par  une  voyelle,  la 
nasalité  disparaît:  wattaquable ^  bonheur,  nonobstant, 
vinaiare,  aimable,  unique,  etc.  On  excepte  enivrer,  enor^ 
gueillir.  Lorsque  la  nasale  finale  rencontre  un  mot  com- 
mençant par  une  voyelle,  elle  ne  doit  sonner,  ou,  comme 
l'on  dit  vulgairement,  on  ne  doit  faire  la  liaison  uue 
lorsque  le  sens  ne  permet  pas  une  légère  pause  entre  les 
deux  mots;  ainsi,  on  fera  sonner  n  finale  dans  un  ancien 
ami,  mais  non  pas  dans  cet  ancien  a  dit,  etc.  —  Pour 
les  mots  hymen,  Êden,  le  plus  grand  nombre  prétendent 
qu'il  faut  prononcer  hymene,  Edène,  les  autres  comme 
on  prononce  ancien^  païen,  etc.  Tout  le  monde  est  d'ac- 
cord sur  les  mots  Amen  et  abdomen.  Examen,  mot  en- 
tièrement latin,  a  été  longtemps  prononcé  exarràne;  mais 
ce  mot,  étant  devenu  d'un  usage  tout  à  fait  vulgaire  et 
s'étant  francisé^  doit  se  prononcer  comme  chemin,  main- 
tien, etc.  P. 

NASARD  (Jeux  de),  nom  donné  à  trois  des  Jeux  abouche 
de  l'orgue.  Ce  sont  des  Jeux  de  mutation,  de  grosse 
taille,  ouverts,  faits  en  étofiè,  et  ayant  toute  l'étendue 
du  clavier.  Le  nasard  proprement  dit  sonne  à  la  quinte 
du  prestant,  et  peut  être  placé  à  tous  les  claviers  ;  le  gros 
nasard  parle  à  la  quinte  de  la  flûte  de  huit  pieds,  et 
s'emploie  au  grand  orgue;  la  ^tiarfe  de  nasard  est  à 
Tunissou  de  la  doublette,  et  peut  être  placée  aux  trois 
claviers.  On  met  quelquefois  à  la  pédale  un  nasard  de 
douze  pieds,  accordé  à  la  quinte  au-dessus  du  seize* 
pieds.  On  appelle  petit  nasard  ou  larigot  le  jeu  accorda 
à  la  quinte  au-dessus  de  la  doublette  :  c'est  le  plus  aigu 
de  l'orgue,  et  il  est  toujours  placé  dans  le  positif.  F.  C. 

NASSE  (du  latin  nassa),  engin  de  pèche  qu'on  place 
au  fond  de  l'eau,  en  le  chargeant  de  pierres.  C'est  une 
espèce  de  panier  d'osier  très-conique,  ou  un  assemblage 
de  cônes  d'osier  emboîtés  les  uns  dans  les  autres,  de 
manière  à  ce  que  le  poisson,  attiré  Jusqu'au  fond  par 
l'app&t,  ne  puisse  plus  sortir.  D'après  l'ordonnance  du 
45  nov.  i830,  l'écartement  des  brins  d'osier  doit  être  de 
30  millimèt.  ponr  la  pêche  des  poissons  ordinaires,  et  de 
15  pour  les  petits  poissons.  L'ordonnance  du  28  fév.  1842 
permet  de  réduire  l'écartement  à  8  millimèt.  pour  la 
pêche  des  ablettes. 

NATAL  (du  latin  natalis,  et  en  sous-entendant  dies, 
Jour),  désignait  autrefois,  dans  l'Église,  le  Jour  de  Noôl 
ou  de  la  Nativité  de  J.-C,  et,  par  extension,  une  fête 
quelconque.  Les  fêtes  de  Noël,  de  Pâques,  de  la  Pente- 
côte et«de  la  Toussaint  étaient  appelées  spécialement 
les  quatre  Nataux, 

NATCBEZ  (Idiome  des),  un  des  idiomes  indigènes  de 
l'Amérique  du  Nord.  Il  parait  qu'il  se  parlait  en  deux 
dialectes,  l'un  à  Tusage  des  familles  puissantes,  l'autre  à 
Tusage  du  reste  de  la  tribu  ;  dans  le  premier  dialecte,  la 
déclinaison  se  faisait  comme  en  latin,  sans  le  secours  de 
l'article.  Les  femmes  donnaient  une  terminaison  et  une 
prononciation  différentes  aux  mots,  lorsqu'elles  pariaient 
aux  hommes. 

NATION,  agrégation  considérable  d'hommes  vivant  en- 
semble sous  Tes  mêmes  lois,  en  communauté  de  mœurs 
et  de  langage,  dans  une  certaine  circonscription  territo- 
riale. Le  mot  nation  implique,  mieux  que  peuple^  une 
'  origine  commune.  Ghaoue  nation  a  un  caractère  particu- 

82 


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lier  qui  la  distingue  :  I* Athénien  dans  l'Antiquité  et  le 
Français  parmi  les  modernes  ont  eu  la  réputation  d*esprit 
et  de  légèreté;  on  attribue  la  gravité  à  TEspagnol,  la 
fourberie  au  Grec,  une  nature  Jalouse  et  vindicative  à 
ritalien,  etc.  Les  droits  qui  appartiennent  à  une  nation 
sont  :  le  droit  de  se  gouverner  comme  il  lui  plaît;  le  droit 
de  conservation,  en  vertu  duquel  elle  repousse  par  la 
force  toute  agression  injuste  ;  le  droit  de  développer  et 
de  perfectionner  librement  toutes  ses  facultés,  sans 
autre  restriction  que  le  devoir  de  ne  pas  nuire  aux 
autres  nations. 

NATION,  mot  qui  désignait  autrefois,  dans  rQniversité 
de  Paris,  une  société  de  maîtres  et  d'étudiants  du  même 

ftays,  vivant  sous  les  mêmes  règles  et  les  mêmes  chefs, 
l  y  avait  quatre  nations,  celles  de  France,  de  Picardie, 
de  Normandie,  et  d'Allemagne. 

NATIONS  (Collège  des  quatre-).  V.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d' Histoire. 

NATIONALITÉ.  Lorsqu'il  existe,  au  milieu  d'une  nom- 
breuse agrégation  d'hommes  vivant  sous  les  mêmes  lois, 
certaines  tendances  générales  dans  les  idées,  un  but  d'ac- 
tivité commun  nettement  défini ,  des  intérêts  matériels 
et  moraux  presque  identiques,  la  nationalité  est  consti- 
tuée. Lorsque  la  communauté  des  idées  a  cessé ,  que  les 
intérêts  divergent  et  se  fractionnent,  et  qu'on  ne  s'en- 
tend plus  sur  le  but  à  poursuivre,  la  nationalité  s'afiîaisse, 
languit  et  meurt.  Le  commencement  de  presque  toutes 
les  nationalités  a  été  marqué  par  une  tendance  prononcée 
à  l'envahissement  des  territoires  voisins  et  à  l'oppression 
des  peuples  qui  les  occupent;  et  même,  depuis  le  temps 
où  une  sorte  d'équilibre  s'est  établie  entre  les  puissances, 
l'antagonisme  est  loin  d'avoir  cessé ,  parce  que  l'esprit 
de  nationalité  engendre  l'égolsme,  et  tend  à  sacrifier  à 
un  intérêt  privé  les  intérêts  généraux  de  l'humanité. 
L'effet  extérieur  de  la  nationalité  est  Vinfluence,  c.-à-d. 
une  certaine  action  sur  les  autres  agrégations  d'hommes. 
Néanmoins,  il  n'appartient  pas  à  toutes  les  nationalités 
d'agir  nécessairement  au  dehors  :  il  en  est,  telle  que  la 
nationalité  suisse ,  qui  se  concentrent  en  elles-mêmes , 
se  contentent  d'elles-mêmes,  vivent  sur  des  souvenirs 
communs  d'origine  et  de  race  ;  il  en  est  d'autres,  telles 
que  les  nationalités  hongroise  et  polonaise,  qui,  sans 
cesse  entravées  par  les  vices  de  leur  Constitution,  ne 
peuvent  devenir  influentes,  par  la  raison  qu'il  existe,  au 
sein  même  de  la  nation,  une  anomalie  complète,  une 
division  profonde  entre  les  classes.  Pour  (qu'une  nation 
soit  puissante  au  dehors ,  il  faut  qu'elle  soit  une  au  de- 
dans, qu'elle  s'entoure  d'un  certain  prestige  qui  flatte 
l'amour-propre  et  la  vanité  commune,  et  qu'elle  n'exclue 
ni  lieux  ni  personnes.  La  nationalité  française,  qui  réunit 
le  mieux  ces  conditions  diverses,  possède  le  droit  le  plus 
certain  à  servir  d'exemple  aux  autres,  à  exercer  une  in- 
fluence réelle  et  légitime.  En  France,  l'esprit  national 
n'est  point  en  opposition  avec  l'esprit  libérai ,  parce  que 
la  base  do  la  nationalité  est  le  sentiment  du  droit  de 
tous  à  une  même  loi,  à  une  même  liberté,  et  la  recon- 
naissanco  du  principe  de  l'égalité^  qui  a  pénétré  dans  les 
mœurs. 

NATTES,  ornement  architectural  de  certaines  églises 
romano-byzantines.  On  en  voit  à  la  cathédrale  de  Bayeux. 

NATURALISATION,  acte  par  le({uel  un  étranger  est 
admis  dans  un  corps  politique  dont  il  n*était  pas  membre 
par  sa  naissance,  et  qui  lui  confère  les  mêmes  droits  et 
les  mêmes  privilèges  qu'aux  naturels  du  pays.  Dans  l'an- 
cienne monarchie  française,  on  vit  souvent  des  étrangers 
exercer  des  emplois  civils  ou  pNoUtiques,  et  posséder  des 
bénéfices  ecclésiastiques  :  le  roi  leur  conférait  à  cet  effet 
des  lettres  de  naturalisation.  Charles  Y,  Charles  VI, 
Charles  VU  et  Louis  XII  rendirent,  pour  écarter  les 
étrangers,  plusieurs  ordonnances,  que  réclamait  l'opinion 
publique  ;  mais  on  ne  les  observa  guère,  et  une  nouvelle 
ordonnance,  publiée  en  1570  à  la  suite  des  plaintes  for- 
mulées par  les  états  généraux  de  Blois ,  exclut  des  di- 
gnités ecclésiastiques  quiconque  ne  serait  pas  d'origine 
française.  On  voyait  alors  certains  princes  étrangers 
prendre  à  ferme  les  impôts  de  la  France,  abus  que  Sully 
s'empressa  de  faire  disparaître.  En  1617,  à  propos  de 
l'administration  de  Concini,  le  parlement  de  Paris,  en 

Srésence  de  plusieurs  pairs  du  royaume,  rendit  un  arrêt 
e  règlement  pour  qu'à  l'avenir  aucun  étranger  ne  devint 
ministre.  Une  ordonnance  royale  de  1629  déclara  les 
étrangers  incapables  de  commander  une  place  française. 
L'élévation  du  cardinal  Mazarin  au  poste  de  premier  mi- 
nistre excita  le  plus  vif  mécontentement,  et  une  décla- 
ation  du  18  avril  1651  porta  qu'à  l'avenir  aucun  étranger, 
quoique  naturalisé,  n'aurait  entrée  aux  conseils  du  roi  et 


ne  serait  admis  à  la  participation  de  ses  affaires.  La  Con- 
stitution de  1791  reconnut  la  qualité  de  citoyen  français 
à  ceux  qui,  nés  en  France  d'un  père  étranger,  y  auraient 
fixé  leur  résidence.  Elle  raccorda  également  à  ceux  qui, 
nés  hors  du  royaume  et  de  parents  étrangers,  auraient 
5  ans  de  domicile  continu  en  France,  mais  à  la  condition 
soit  d'y  posséder  des  immeubles,  soit  d'avoir  épousé  une 
Française,  soit  d'avoir  formé  un  établissement  d'agricul- 
ture ou  de  commerce,  et  à  celle  de  prêter  le  serment  ci* 
Tique.  Elle  autorisa  enfin  le  Corps  législatif  à  accorder  à 
un  étranger,  pour  motifs  importants,  un  acte  de  natura- 
lisation, sans  autres  conditions  que  de  fixer  son  domi- 
cile en  France  et  de  prêter  le  serment  civique.  La  Con- 
stitution de  1793  simplifia  encore  les  conditions  de  la 
naturalisation  :  elle  admit  à  l'exercice  des  droits  de  ci- 
toyen tout  étranger  ({ui,  &gé  de  21  ans  accomplis,  domi- 
cilié en  France  depuis  une  année,  y  vivait  de  son  travail, 
ou  avait  soit  acquis  une  propriété,  soit  épousé  une  Fran- 
çaise, soit  adopté  un  enfant,  ou  nourrissait  un  vieillard  • 
et  tout  étranger  que  le  Corps  législatif  Jugeait  avoir  bien 
mérité  de  l'humanité.  La  Constitution  de  1795,  moina 
libérale,  exigea  comme  conditions  de  la  naturalisation 
r&ge  de  21  ans,  une  résidence  de  7  années  consécutives 
en  France,  le  payement  d'une  contribution  directe,  et. 
en  outre,  soit  la  possession  d'une  propriété  foncière,  soit 
un  établissement  d'agriculture  ou  de  commerce,  soit  le 
mariage  avec  une  Française.  La  Constitution  de  Tan  vin, 
plus  restrictive  encore,  exigea  de  l'étranger  qu'après  avoir 
atteint  T&ge  de  21  ans  accomplis  et  déclaré  Vintentlonde 
se  fixer  en  France,  il  y  eût  résidé  pendant  10  années  con- 
sécutives. Une  ordonnance  du  4  juin  1814  exige  en  outre 
des  lettres  de  grande  naturalisation  vérifiées  par  les 
Chambres  législatives,  pour  habiliter  les  étrangers  à  faire 
partie  de  ces  Chambres.  Un  avis  du  Conseil  d'État,  do 
17  mai  1823,  établit  une  distinction  entre  les  lettres  de 
naturalisation ,  constitutives  d'un  droit  nouveau ,  et  les 
letires  de  naturalité,  constatant  un  droit  précédemment 
acquis.  Un  décret  du  Gouvernement  provisoire  de  1848, 
en  date  du  28  mars,  autorisa  provisoirement  le  ministre 
de  la  justice  à  accorder  la  naturalisation  aux  étrangers 

3ui  la  demanderaient,  qui  justifieraient  d'une  résidence 
e  5  ans  en  France,  et  qui  produiraient  l'attestation  de 
l'autorité  départementale  qu'ils  sont  dignes  d'exercer  les 
droits  de  citoyen.  La  loi  du  21  nov.  1849  a  rétabli  la  légis- 
lation antérieure ,  mais  en  réduisant  à  1  an  le  délai  de 
10  ans  pour  les  étrangers  ayant  rendu  des  serrices  im- 
portants à  l'État.  La  naturalisation  d'une  étrangère  s'opère 
de  plein  droit  par  son  mariage  avec  un  Français  [Code 
Napol.^  art.  12)  ;  le  Français  naturalisé  à  l'étranger  perd 
sa  qualité  de  Français  (art.  17),  et,  de  plus,  la  propriété 
de  ses  biens  et  ses  droits  à  succéder,  à  moins  que  sa  na- 
turalisation à  l'étranger  n'ait  été  autorisée  par  le  chef  de 
l'État  (Décret du 26  août  1811).  Une  loi  de  1851  dédire 
Français  le  fils  de  l'étranger  né  et  domicilié  en  France, 
à  moins  que,  dans  l'année  qui  suit  sa  majorité,  il  ne  se 
soit  prévalu  de  son  extranâté.  V.  le  Supplément. 

NATURALISME,  religion  de  la  Nature;  cest  une  de^ 
formes  du  Polythéisme.  II  peut  consister  dans  le  féti- 
chisme, ou  dans  le  culte  des  éléments.  On  appelle  encore 
Naturalisme  une  opinion  philosophique  d'après  laquelle 
l'homme  arriverait  à  la  connaissance  de  la  vérité,  et  sur- 
tout de  la  vérité  religieuse,  par  le  développement  naturel 
des  forces  de  son  esprit,  et  ne  devrait  admettre  comme 
fondes  que  les  principes  acceptai  par  sa  raison.  Par 
conséquent,  le  Naturalisme  nie  toute  révélation,  à  la 
différence  du  Rationalisme  (  K.  ce  mot)^  qui  se  réserve 
l'examen  des  doctrines  révâées.  En  un  autre  sens,  le 
Naturalisme  est  un  système  qui  méconnatt  une  intelli- 
gence régulatrice  dans  le  monde  ou  la  Nature,  dont  il 
attribue  les  mouvements  à  une  force  intime  ou  au  ha- 
sard :  il  ^outit  au  panthéisme  ou  à  l'athéisme  (K.  ces 
mots),  —  Dans  la  langue  des  Beaux-Arts,  le  Naturalisme 
est  la  reproduction  aussi  exacte  que  possible  des  objets 
naturels,  sans  préoccupation  de  la  beauté  idéale,  ce  que 
l'on  nomme  de  nos  jours  le  Réalisme  (V.  c«  mot), 

NATURE,  ensemble  de  l'Univers  ou  des  êtres  créés.  On 
a  aussi  donné  le  même  nom  à  l'ensemble  des  forces  ei 
des  lois  établies  pour  l'ordre  perpétuel  et  les  révoIutioDs 
successives  des  choses,  par  exemple,  pour  le  mouvement 
de  la  terre  et  des  astres,  pour  le  cours  des  saisons,  pour 
la  reproduction  des  êtres  vivants.  Des  philosophes  ont 
fait  de  la  Nature  la  puissance  créatrice  de  l'umvers;  ca 
n'est  alors  qu'un  synonyme  plus  ou  moins  vague  de  Dieu. 
D'autres  ont  appelé  Nature  une  force  néce^aîre,  mais 
aveugle,  qui  produit  tout  ce  qui  existe  :  cette  doctrine, 
exposée  dans  le  Système  de  la  Nature  du  baron  d'Hot- 


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fiach,  et  dans  la  Philosophie  de  la  Nature  de  Delîsle  de 
Saies,  n*est  au  fond  que  la  négation  d*an  Dieu  créateur 
et  de  la  Providence,  qu'elle  remplace  par  le  hasard 
(F.  cê  mot)  ;  ou  bien  elle  attribue  aux  éléments  de  la  ma- 
tière une  force  propre  dejmouyement,  comme  le  pen- 
sait l'école  atomistique  (  K.  ce  moi).  De  nos  Jours,  en 
Allemagne,  on  nomme  Philosophie  de  la  Nature  toute 
recherche  qui  a  pour  but  de  tout  expli(;uer  par  un  prin- 
cipe unique,  d*où  Ton  déduirait  à  priori  les  lois  et  les 
phénomènes  du  monde;  on  a  même  imaginé  un  être  pro- 
totype qui,  en  se  développant,  en  se  multipliant,  obtient 
saccessivement,  par  ses  innombrables  variétés  et  espèces, 
toutes  les  créations  du  globe.  Jusqu'à  l'homme  lui-même, 
fleur  dernière  du  grand  arbre  de  U  vie,  et  cet  être,  c'est 
b  Nature.  Évidemment,  il  y  a  là  un  Panthéisme  déguisé. 
—  On  entend  encore  par  Nature  d'un  être  l'ensemble 
des  propriétés  qu'il  tient  de  sa  naissance  et  de  son  orjga- 
oisation,  par  opposition  à  celles  qu'il  peut  devoir,  soit  à 
â£s  causes  accidentelles,  soit  à  l'art  En  ce  sens  on  dira, 
ta  Médecine  par  exemple,  que  la  nature  vient  en  aide  à 
la  science  pour  la  guérison  des  maladies,  et,  en  Morale, 
qu'il  faut  vivre  conformément  à  la  nature  ou  selon  la  loi 
delà  nature.  Cette  loi,  qui  n'est  autre  chose  pour  l'homme 
que  la  conformité  de  ses  actes  à  ses  besoins  et  à  ses 
instincts  bons  ou  mauvais,  est  souvent  en  contradiction 
avec  les  lois  de  la  religion ,  de  la  vraie  morale,  et  de  la 
société.  —  Dans  les  Beaux-Arts,  le  mot  Nature  désigne 
tout  modèle  donné  immédiatement  par  la  nature,  un  être 
Tirant  ou  un  objet,  d'après  lequel  on  peut  peindre,  des- 
âner  ou  modeler,  au  lieu  de  prendre  un  dessin ,  un  ta- 
bleau, une  statue, 

NATcsE  (Le  Poôme  de  la),  poème  didactique  laitn, 
dans  lequel  Lucrèce  a  embelli  des  grâces  et  des  magnifi- 
cences de  la  poésie  la  plus  ingrate  et  la  plus  triste  des 
doctrines,  l'Epicuréisme.  Le  poème /)«  ta  Nature  {De 
Satura  rerum)  est  en  six  livres.  Au  i*',  Lucrèce  établit 
le  principe  fondamental  de  l'Epicuréisme,  que  rien  ne 
sait  de  rien,  et  que  les  vrais  éléments  des  êtres  sont  les 
atomes, éternellement  agités  dans  Tinfini  du  vide,  sans 
que  Tunivers  ait  un  centre  commun.  Au  2*,  il  explique 
la  formation  des  corps  par  le  mouvement  et  l'union  des 
molécules  invisibles,  et  professe  l'opinion  que  les  atomes 
roulant  sans  fin  dans  un  infini  sans  limite,  s'agrégeant  et 
se  désagrégeant  sans  interruption,  les  mondes  sont  à  la 
fois  innombrables  et  destructibles;  il  annonce  même  la 
fin  du  nôtre.  Au  3*  chant,  le  poète  étudie  d'abord  l'àme 
humaine,  qu'il  partage,  pour  ainsi  dire,  en  deux  moitiés  : 
l'àme  sensitive,  éparse  dans  toute  l'étendue  du  corps,  et 
t'àme  intellectuelle,  qui  réside  dans  le  cœur;  toutes  deux 
par  leur  union  forment  le  principe  vital.  Cette  distinction 
établie,  Lucrèce  s'épuise  en  efforts  stériles  pour  démon- 
trer que  l'àme,  matérielle  comme  le  corps,  meurt  avec 
hii,  ou  plutôt  retourne  se  perdre,  à  leur  séparation,  parmi 
les  atomes;  il  n*y  a  donc  pas  de  vie  future,  selon  lui,  et 
les  mortels  ont  tort  de  craindre  un  Enfer  qui  n'existe  que 
dans  le  cœur  des  méchants.  Le  4*  livre  est  une  étude  sur 
les  sens  et  sur  la  pensée,  à  laquelle  se  rattachent,  assez 
uaturellement  dans  ce  système,  la  théorie  des  songes  et 
celle  de  l'amour.  L'auteur  n'a  traité  que  de  l'amour  des 
corps,  et  en  médecin  autant  qu'en  poète.  Le  5*  livre,  le 
plus  beau  de  l'ouvrage,  malgré  les  erreurs  qu'il  renferme, 
présente,  dans  un  magnifique  langage,  d'abord  l'origine 
du  monde,  puis  la  marche  de  l'univers,  la  naissance  des 
êtres  anima  produits  par  la  terre,  enfin  l'histoire  primi- 
tive de  Thomme  et  de  la  civilisation.  Jamais  poète  n'a 
rendu  plus  éclatant  hommage  à  l'esprit  humain;  on 
s'étonne  qu'un  philosophe  matérialiste  ait  pu  ressentir 
uo  pareil  enthousiasme,  en  affirmant  que  l'intelligence  de 
Thomme  n'est  qu'un  mouvement  de  molécules  aveugles 
et  brutales.  Au  6*  livre,  Lucrèce  expose  la  physique  épi- 
curienne, la  théorie  des  phénomènes  météorologiques  et 
terrestres.  Ce  sujet  l'amène  à  rappeler  la  peste  d'Attiènes, 
doot  la  peinture  termine  l'ouvrage.  —  Ce  qui  manque 
dans  l'ensemble  de  ce  poème,  c'est  l'élégance,  le  respect 
et  l'observation  scrupuleuse  des  règles  de  l'art,  et  l'bar- 
nionie;  mais  les  descriptions,  notamment  celles  du  5* 
livre,  où  le  poète  peint  dans  un  style  enchanteur  la  ru- 
desse et  la  grossièreté  des  premiers  hommes,  ofi^ent  une 
vriu»  sauvage  qui  plaît  infiniment.  Ses  raisonnements 
didactiques  fatiguent  et  rebutent  par  leur  sécheresse  ; 
néanmoins  on  y  rencontre  fréquemment  des  expressions 
pleines  de  vie,  qui  couvrent  l'argumentation  de  fleurs 
inattendues,  dit  M.  Villemain ,  des  images  fortes  et  gra- 
cieuses, une  sensibilité  touchante  et  expressive.  N'ou- 
btions  pas  que  Lucrèce  avait  à  créer  sa  langue,  et  qu'il 
n'est  pas  moins  glorieux  pour  lui  d'avoir  triomphé  de  la 


pénurie  de  son  idiome  que  de  la  stérilité  d'une  doctrine 
qui  n'eût  pas  manqué  de  dessécher  une  imagination  moHM 
féconde  et  une  sensibilité  moins  riche  que  la  sienne  : 
un  art  plus  délicat,  une  langue  plus  souple  dans  ses 
formes,  et  plus  harmonieuse  dans  ses  tours,  leussent 
rendu  l'égal  do  Virgile.  A.  H. 

NATURE  MOSTE  (Tabloaux  do),  uom  ({u'on  donne  en 
Peinture  aux  tableaux  dont  la  partie  principale  se  com« 
pose  d'animaux  tués  ou  morts,  tels  qu'oiseaux,  gibier^ 
poissons,  etc.,  ou  de  végétaux  cueillis  ou  arrachés. 

NATUREL,  qualité  du  style  <{ui  consiste  à  rendre  les 
pensées  et  les  sentiments  avec  aisance,  sans  effort  et  sans 
apprêt.  Le  naturel  est  le  rapport  parfait  des  sentiments 
et  des  mots  avec  la  réalité.  L'expression  la  plus  belle 
perd  tout  son  mérite ,  dès  que  le  travail  s'y  laisse  voir  ; 
car  elle  nous  fait  penser  à  l'auteur  plus  qu'au  sujet  dont 
il  nous  entretient,  et  la  prétention  qu'il  semble  avoir  de 
se  faire  admirer  nous  fâche  et  nous  porte  à  le  Juger  plus 
sévèrement.  «  Au  contraire,  dit  Pascal,  nous  sommes 
étonnés,  ravis,  enchantés,  lorsque  nous  voyons  un  style 
naturel  ;  c'est  que  nous  nous  attendions  de  voir  un  au- 
teur, et  nous  trouvons  un  homme.  »  Comme  le  naturel 
n'est  autre  chose  que  la  vérité,  il  est  le  caractère  propre 
des  grands  génies.  Les  Jeux  de  mots,  les  antithèses,  les  or- 
nements travaillés,  les  inventions  bizarres,  sont  la  marque 
d'un  esprit  médiocre ,  faible  ou  faux.  «  On  gagne  beau- 
coup, dit  Fénelon,  en  perdant  tous  les  ornements  super- 
flus, pour  se  borner  aux  beautés  simples,  faciles,  claires, 
et  négligées  en  apparence.  Pour  l'élc^iuence  et  la  po^ie, 
comme  pour  l'architecture,  il  faut  que  tous  les  morceaux 
nécessaires  se  tournent  en  ornements  naturels;  mais 
tout  ornement  qui  n'est  qu'ornement,  est  de  trop  :  retran« 
chez-le,  il  ne  manque  rien  ;  il  n'y  a  que  la  vanité  qui  en 
souffre.  Je  veux  un  sublime  si  familier  et  si  simple ,  que 
chacun  soit  d'abord  tenté  de  croire  qu'il  l'aurait  trouvé 
sans  peine,  quoique  peu  d'hommes  soient  capables  de  le 
trouver.  Je  préfère  l'aimable  au  surprenant  et  au  mer- 
veilleux. Je  veux  un  homme  qui  me  fasse  oublier  qu'il 
est  auteur;  je  veux  qu'il  me  mette  devant  les  yeux  un 
laboureur  qui  craint  pour  ses  moissons,  un  berger  qui 
ne  connaît  que  son  village  et  son  troupeau,  une  nourrlcl 
attendrie  pour  son  petit  enfant.  Je  veux  qu'il  me  fass 
penser,  non  à  lui  et  à  son  bel  esprit,  mais  à  ceux  au'i 
fait  parler.  »  Le  naturel  cependant  n'est  pas  ennemi  d^i 
l'art,  c-ànd.  de  la  méditation  qui  règle  les  inspirations 
de  la  nature.  Les  plus  grands  poètes,  Virgile,  Racine,  tra- 
vaillaient lentement,  et  corrigeaient  souvent  leurs  écrits 
pour  arriver  à  l'expression  naturelle  des  sentiments  qu'ils 
voulaient  rendre.  Le  naturel  peut  s'acquérir  par  l'étude; 
c'est  lui  qui  produit  la  facilité  du  style  :  mais  il  faut  que 
le  travail  reste  caché.  Enfin  celui  qui  veut  être  naturel  ne 
saurait  trop  méditer  cette  maxime  de  Fénelon  :  «  Que 
nos  expressions  soient  les  images  de  nos  pensées,  et  nos 
pensées  les  images  de  la  vérité.  »  H.  D. 

NATUREL,  en  Music[ue,  se  dit  d'un  ton  ou  mode  qui 
n'emploie  ni  diète  ni  bémol. 

NATUREL  (Droit).  V,  Droit  naturbu 

NATUREL  (Enfant).  V.  Enfant. 

NAUFRAGE  (du  latin  navis  fracta,  navire  brisé),  perte 
d'un  navire  à  la  mer.  Le  capitaine  d'un  bâtiment  mar- 
chand qui  a  fait  naufrage  est  tenu  de  se  présenter  devant 
le  Juge  du  lieu  où  il  a  été  jeté,  d'y  faire  son  rapport,  de 
le  faire  vérifier  par  ceux  de  son  équipage  qui  se  seraient 
sauvés  avec  lui,  et  d'en  lever  expédition  {Code  de  Comm,^ 
art.  202).  Tout  capitaine  de  la  marine  de  l'État  qui  a  fait 
naufrage  est  appelé  à  rendre  compte  de  sa  conduite  de- 
vant un  Conseil  de  guerre.  Il  est  passible  de  la  peine  de 
mort,  si,  quand  il  y  a  eu  lieu  d'abandonner  le  navire,  il 
n'en  est  pas  sorti  le  dernier.  V.  Lebeau,  Code  des  bris, 
naufrages^  etc.,  1844,  in-8*. 

NAULAGE,  mot  de  même  sens  que  Nolis. 

NAUMACHIE.  V.  ce  mot  dans  *  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

NAUTILE.  V.  Bateau  plongeur. 

NAUTIQUE  (Art),  science  théorique  et  [>ratique  de  la 
navigation,  conE4>renant  la  manœuvre  et  le  pilotage  (  V.  ces 
mots). 

NAUTIQUE  (Légion),  corps  qui  fut  formé,  dans  la  cam- 
pagne française  d'Egypte,  avec  les  matelots  de  la  flotte. 

NAUTIQUE  (Théâtre),  théâtre  parisien  installé  à  la  salle 
Ventadour,  et  oui  eut  une  très-courte  existence.  Il  tirait 
son  nom  d'un  nassin  rempli  d'eau  qui  occupait  le  des- 
sous de  la  scène,  et  sur  lequel,  les  planches  ayant  été  en« 
levées,  on  vovait  flotter  une  gondole. 

NAVALE  (École).  V.  École  navale,  dans  notre  Diction^ 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire* 


NAV 


1300 


NAV 


NAVALES  (Constructions).  L*histoire  de  rarchitecture 
navale  commence  aux  temps  très-reculâi  où  Thomme, 
ayant  tu  un  tronc  d*arbre  flotter  sur  les  eaux  sans  être 
submergé,  imagina  d*en  réunir  plusieurs  ensemble  et 
d'en  faire  un  radeau  pour  traverser  ou  descendre  une 
riviâre;  mais  il  n'a  pas  fallu  moins  de  quatre  mille  ans 
pour  aller  de  la  pirogue  grossière  du  sauvage  au  magni- 
fique vaisseau  à  trois  ponts  des  Modernes.  La  nécessité 
de  diriger  sur  les  eaux  les  premiers  assemblages  de  bois 
où  l'homme  osa  monter,  a  fait  inventer  les  rames,  les 
voiles,  le  gouvernail  ;  celle  de  s'abriter  contre  les  intem- 
péries vie  Tair  fit  ensuite  ponter  les  navires.  lies  origines 
et  les  pfemiera  développements  des  constructions  navales 
sont  assez  peu  connus.  On  ne  peut  rien  tirer  de  certain 
d«i  traditions  relatives,  soit  à  l*Arche  de  Noé  (V.  Arche), 
soit  au  navire  Argo  des  Grecs.  Les  premières  traces  de 
l'art  des  constructions  se  trouvent  chez  les  Phéniciens  : 
les  ingénieurs  de  Tyr  firent  école;  ce  sont  eux  qui  ap- 
prirent aux  Assyriens  à  faire  des  navires,  et  qui  construi- 
sirent les  flottes  de  Salomon  sur  la  mer  Rouge.  Selon  les 
Egyptiens,  le  dieu  Osiris  osa  le  premier  construire  des 
navires.  Sésostris  en  fit  faire  un  de  bois  de  cèdre,  long  de 
140  met.,  et  qui  avait  pour  doublage  à  l'extérieur,  au 
lieu  de  cuivre  comme  aujourd'hui,  des  feuilles  d'argent; 
ce  navire  avait  trois  m&ts,  et  des  hunes  où  l'on  plaçait 
des  hommes  armés  d'arcs  et  de  flèches  pour  tirer  sur 
l'ennemi. 

I^s  Grecs  enreat  des  b&timents  de  transport  et  des  na- 
vires de  guerre.  Les  Modernes  ont  donné  à  ces  derniers  le 
nom  de  galères,  à  peu  près  inconnu  des  Anciens,  et  qui, 
dérivé,  suivant  Ovide,  du  casque  (galea)  qui  servait  quel- 
quefois d*ornement  à  la  proue,  Ait  fréquemment  employé 
par  les  Grecs  du  Bas-Empire  et  par  les  historiens  latins 
des  Croisades.  lies  premières  galères  furent  de  simples  bar 
teaux  découverts,  portant,  à  la  proue  et  à  la  poupe,  des 
planchers  où  se  plaçaient  les  soldats  pour  conuMtttre;  les 
pins  petites  avaient  de  chaque  côté  10  ramea,  et  les  plus 
grandes  50.  Leur  fond  était  plat,  leur  carène  peu  ren- 
flée, leurs  cùtés  en  ligne  droite,  effilés  et  élancés  à  l'avant 
et  à  l'arrière.  La  longueur  était  de  7  ou  8  fois  la  largeur. 
La  m&ture,  élevée,  portait  de  longues  voiles  à  antennes, 
ou'on  surmontait  d'une  voile  légère  quand  la  brise  souf- 
flait doucement.  On  ne  combattait  Jamais  sous  voiles, 
mais  seulement  à  l'aviron,  et,  pour  que  les  galères  fus- 
sent plus  légères,  plus  maniables,  on  les  construisait  en 
pin  et  en  sapin.  La  force  de  ces  navires  consistait  dans 
un  éperon  ou  bec  boitu  en  bois  ferré  qui  armait  la  proue, 
et  qu'on  appuyait  de  deux  épotides  ou  avant-becs  en 
grosses  poutres.  Quelques-uns  avaient  deux  gouvernails, 
l'un  à  l'avant,  l'autre  à  l'arrière.  Les  rides  qui  se  trou- 
vaient entre  chaque  bordage  étaient  remplis  d'une  espèce 
de  Jonc  marin,  et  l'on  y  fsdsait  couler  de  la  cire  fondue 
avec  quelques  matières  résineuses.  Les  hauts  étaient 
garnis  de  claies  d'osier  entrelacées  les  unes  dans  les 
autres  et  recouvertes  de  peaux.  Une  ceinture  renforçant 
la  muraille  du  navire  servait  de  point  d'appui  aux  bancs 
des  rameun;  ces  bancs  étaient  leur  lit  pour  la  nuit,  et 
les  rames  leur  abri.  —  Telle  fut  la  galère  primitive.  Les 
habitants  de  Thasos,  les  premiers,  la  couvrirent  d'un 
pont  ou  plancher,  qui  mit  les  rameurs  à  couvert,  et  où 
l'on  put  combattre  de  pied  ferme.  Sur  ce  pont  on  disposa 
un  nouveau  rang  de  rames,  et  l'on  eut  la  birème;  puis 
on  phiça  sur  ce  môme  poni,  sur  des  bancs  un  peu 
plus  hauts,  un  3*  rang  de  rames,  ce  qui  donna  la  trù' 
rème  ou  tnàre,  le  Taissean  de  guerre  par  excellence 
chez  les  Grecs  et  les  Romains.  Les  ^ères  de  ce  dernier 
peuple  eurent  les  extrémités  pointues,  dans  la  partie 
extérieure  comme  dans  la  partie  plongée  :  elles  se  ter- 
minaient par  une  pièce  de  bois  arquée  où  venaient 
aboutir  les  bordages,  et  cette  pièce  portait,  comme  de 
nos  Jours,  une  flgure,  un  symbole.  C'était  ordinairement 
une  tète  d'oie  (qu'ils  mettaient  à  la  proue,  peut-être  en 
souvenir  du  Capitole  sauvé.  Sur  le  gaillard  d'avant  était 
nne  petite  guérite,  où  se  plaçait  le  second  maître  de 
l'équipage. 

La  trirème  peut  être  considérée  comme  le  type  le  plus 
parfait  des  constructions  navales  dans  l'antiquité,  et  l'em- 
pereur Napoléon  m  en  a  fait  exécuter  à  Paris,  en  1860, 
un  grand  modèle,  qui  a  navigué  et  fait  voir,  en  pratique, 
la  solution  du  problème  :  il  a  40  mètres  de  longueur  à  la 
ligne  de  flottaison,  5",50  de  largeur,  et  porte  130  rames 
mues  chacune  par  un  seul  homme.  Dans  la  trirème  an- 
tique, immédiatement  au-dessus  de  la  plate-forme  qui 
servait  de  base  à  toute  la  construction,  était  la  sentine  ou 
cale,  dans  laquelle  s'entassaient  les  vivres,  les  munitions, 
les  cordages  et  les  voiles  de  rechange  :  toute  cette  partie 


plongeant  dans  la  mer,  l'eau  qui  s'y  infiltrait  était  chassée 
avec  des  pompes.  Le  1*''  étage  de  rameurs  était  à  quel- 
ques pieds  au-dessus  de  la  ligne  de  flottaison  :  comme  W 
était  fort  bas,  les  matelots  étaient  contraints  de  ne  s'y 
tenir  qu'assis,  et,  lorsqu'ils  se  levaient,  dans  une  poûtioD 
inclinée,  d'où  lui  vint  le  nom  de  thalamos  (lit),  et  aui 
rameurs  qui  l'occupaient  celui  de  thcdamistes;  on  les  ap- 

f>elait  aussi  colobùi  (rames  tronquées),  parce  qu'ils  avaient 
es  rames  les  plus  courtes.  Afin  d'empêcher  l'eau  de  pé- 
nétrer par  les  dalots  ou  ouvertures  pratiquées  dans  la 
muraille  pour  le  passage  de  ces  basses  rames,  un  man- 
chon en  cuir  était  cloué  autour  de  chaque  rame  et  contre 
le  bord.  Le  second  étage,  appelé  xygos,  était  occupé  par 
les  xygiteSf  armés  de  rames  plus  longues,  qui  ne  pou- 
vaient gêner  la  chiourme  inférieure  :  quand  on  naviguait 
à  la  voile,  ces  rameurs  allaient  aider  à  la  manœuvre  des 
antennes  et  des  cordases  sur  le  pont  supérieur  ou  thror 
nos.  Ici  étaient  les  tturanites,  marins  d'élite,  à  la  fois 
matelots ,  rameurs  et  soldats  :  s'il  fallait  faire  voguer 
la  trirème,  ils  nuiniaient  les  plus  longs  avirons  ;  si  l'on 
déployait  les  voiles,  ils  grimpaient  le  long  des  antennes; 
dès  oue  le  combat  s'engageait,  ils  prenaient  le  casque,  le 
bouclier  et  la  pique  pour  repousser  les  assaillants,  ou 
abordaient  le  navire  ennemi,  la  hache  à  la  main.  Les  trois 
rangs  de  rames  de  chaque  côté  du  navire  étaient  disposés 
obli(piement  l'un  au-dessus  de  l'autre.  Sur  le  pont,  vers 
l'amère,  il  y  avait  une  espèce  de  dunette  {c(Uastrômma\ 
où  logeaient  les  officiers,  et,  par-dessus,  on  trône  pour  le 
capitaine  et  le  pilote;  sur  la  proue  s'élevait  une  guérite 
pour  protéger  le  contre-maître  chargé  de  la  manœuvre 
de  l'avant,  et  où  se  tenait  aussi  le  matelot  en  vigie.  La 
proue  était  armée  de  l'éperon  ferré  et  d'un  bec  d'airain  à 
trois  pointes  :  presque  dans  le  prolongement  de  l'étrave, 
les  Romains  placèrent  un  m&t  perpendiculaire,  portant 
le  corbeau,  espèce  de  pont-levis  dont  une  extrémité  tour- 
nait au  pied  du  m&t  comme  sur  on  axe,  tandis  çue 
l'autre,  attachée  à  la  tête  par  une  corde  qu'on  l&chait  à 
volonté,  pouvait  s'abattre  sur  le  navire  ennemi  et  le 
clouer  d'une  énorme  broche  de  fer  dont  elle  était  garnie. 
Au  bout  des  antennes  pendaient  des  grappins  destinés 
aussi  à  accrocher  l'ennenod,  et  des  masses  de  plomb  pour 
défoncer  ses  ponts;  au  sommet  des  m&ts  étaient  des 

{>lates-formes  d'où  l'on  faisait  pleuvoir  des  pierres.  Sur 
e  pont  de  la  trirème  on  installait  des  toun  mobiles  pour 
les  arehers,  des  catapultes,  des  balistes  et  autres  engins 
de  guerre.  Afin  qu'un  seul  coup  d'éperon  ne  l'exposât  pas 
à  couler,  la  carène  était  partagée  en  plusieurs  cases  pres- 

aue  hermétiquement  fermées;  de  cette  manière,  l'irrup- 
on  de  l'eau  dans  la  cale  ne  pouvait  être  que  locale.  La 
manœuvre  exigeait  au  moins  50  rameun  par  étage  ;  il 
fallait  un  long  exercice  pour  obtenir  un  mouvement  si- 
multané des  rameurs  :  une  voix,  un  cri  donnait  la  me- 
sure, et  souvent  les  notes  d'une  flûte  marquaient  la 
cadence. 

Les  écrivains  de  l'antiquité  parlent  de  navires  plus 
considénd)les  que  la  trirème  :  la  qiuuiririme,  à  4  rangs 
de  rames  de  chaque  côté;  la  quinquêrème  ou  pentère,  à 
5  rangs;  la  sexttrimu  ou  kexeris,  à  6  rangs.  Il  y  eut 
même  l'octér^  de  Memnon,  la  galère  à  10  rangs  de  Dé- 
roétrius  Poliorcète,  celle  d'Hiéron  à  20  rangs,  et  le  palais 
flottant  de  Ptolémée  Philopator,  à  40  rangs  de  rames.  Re- 
lativement aux  rangs  de  rames,  plusieurs  représentations 
antiques  qui  sont  parvenues  jusqu'à  nous  ne  permettent 
pas  de  douter  qu'il  y  en  eut  Jusqu'à  dnq  superposés  : 
mais,  au  delà  de  ce  chiffre,  on  ne  peut  plus  croire  que  la 
disposition  ait  été  la  même.  En  effet,  une  rame  maniée  à 
une  plus  grande  hauteur  au-dessus  de  la  surface  de 
l'eau  devrait  être  tellement  inclinée  pour  toucher  l'eau, 
que  le  manche  ne  serait  plus  à  portée  du  rameur;  ou 
bien,  si  elle  était  faite  d'une  longueur  suffisante  pour 
obvier  à  cet  inconvénient,  comme  il  faut  de  toute  né- 
cessité qu'elle  soit  fixée  sur  le  touret  &  un  tiers  de  sa 
longueur,  la  partie  qui  serait  à  bord  irait  fort  avant  et 
rendrait  tout  mouvement  impossible.  11  est  donc  naturel 
de  penser  que,  quand  les  navires  avaient  plus  de  5  rani^s 
de  rames,  ces  rangs  étaient  comptés,  non  dans  une  a- 
rection  ascendante  de  la  surface  de  l'eau  au  plat-bord, 
mais  en  long,  par  le  nombre  d'ouvertures  à  rames  de 
l'avant  à  l'arrière. 

Pour  le  moyen  âge,  les  renseignements  relatifs  ans 
constructions  navales  ne  sont  ni  nombreux  ni  suivis.  Oit 
sait  que  Charlemagne  avait  des  flottes  pour  s'opposer  aui; 
descentes  des  Rarbares  sur  les  côtes  de  son  Empire;  mais 
elles  ne  se  composaient  guère  que  de  barquea.  Les  hom- 
mes du  Nord  qui  vinrent  aprà  lui  se  servaient  de  ba- 
teaux recouverts  de  peaux  de  bètes.  Le  drakar  (dra* 


NAV 


1301 


NAV 


ffm)  Scandinave  offrait  au  sommet  de  sa  proue  une  figure 
sculptée  en  dragon,  et  avait  dans  sa  forme  quelque  chose 
qui  rappelait  le  serpent  ;  il  était  à  fond  plat,  et  tirait  peu 
d'eau;  ses  flancs  étaient  larges,  et  sa  croupe  vaste,  de 
fiiçon  à. prendre  sur  l*eau  une  assiette  solide.  Le  sekkar 
différait  peu  du  drakar;  il  était  seulement  moins  long, 
moins  haut  et  moins  large.  Les  navires  Scandinaves 
n'avaient  cni*un  mât ,  avec  girouette  et  quatre  ou  cinq 
haubans;  les  plus  grands  étaient  pontés,  et  portaient 
sur  la  poupe  un  château  {V.  ce  mot).  Quand  Alfred  le 
Grand,  roi  des  Anglo-Saxons,  repoussa  Tinvasion  des 
Danois,  la  construction  navale  prit  plus  de  force  et  de 
grandeur  :  ses  navires,  très -longs,  étroits  et  peu  pro- 
fonds, avaient  le  fond  plat,  peu  de  tirant,  un  seul  màt, 
qu'on  plaçait  ou  enlevait  à  volonté,  38  bancs  de  4  ra- 
meurs à  chaque  bord ,  et  un  pont  très-élevé,  d*où  l'on 
pouvait  accabler  Tennemi.  Sur  la  Méditerranée,  la  trirème 
romaine  fit  place  à  la  çcUère  (F.  ce  mot  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d^Histoire\  qui  devint,  entre 
les  mains  des  Vénitiens,  le  navire  de  guerre  py  excel- 
lence. La  gcUiole,  la  gcUéacef  le  galion,  le  dromon,  la 
chélande  (V.  ces  mots)^  furent  des  variétés  de  la  galère, 
et  Ton  86  servit  encore  pour  le  commerce,  quelquefois 
aussi  pour  la  guerre,  des  caravelles  et  des  carraques 
{V.  ces  mots).  Pendant  les  Croisades,  on  eut  dos  carra- 
ques  capables  de  porter  Jusqu'à  i,500  hommes  d'armes 
avec  leurs  bagases.  Mais  l'emménagementétait  fort  impar- 
fait :  sur  le  navire  oui  porta  Louis  IX  en  Egypte,  les  deux 
tiers  des  hommes  étaient  entassés  dans  les  entre-ponts, 
et  l'on  coachait  à  deux  dans  l'emplacement  destiné  à  un 
seul,  l'an  à  la  tète,  l'autre  aux  pieds.  Les  chevaux  étaient 
suspendus  avec  des  sangles,  et  on  les  fouettait  de  temps 
en  temps  pour  dégourdir  leurs  membres. 

Même  après  l'invention  de  rartillerie,  les  galères  furent 
encore  longtemps  en  usage  dans  la  Méditerranée.  Mais, 
depuis  la  découverte  de  l'Amérique,  les  navires  propres 
à  longer  les  c6tes  ne  suffirent  plus,  et  l'on  se  mit  à  con- 
struire des  bâtiments  qui  pussent  affronter  et  traverser 
rOcéan.  Cette  construction  eut  aussi  son  enfance  et  ses 
progrès.  Primitivement,  les  navires  de  guerre  n'eurent 
qn'un  pont,  sur  lequel  on  plaçait  des  canons  ani  tiraient 
par-dessus  le  bord.  Au  xvi*  siècle,  on  donna  des  embra- 
sures aux  canons  en  créant  les  sabords.  On  eut  ensuite 
ridée  de  recouvrir  les  batteries  d'un  plancher,  pour  mettre 
les  canonnière  à  l'abri  de  la  mousqueterie.  Les  navires 
grandirent  peu  à  peu  :  une  seconde  batterie  s'éleva  sur 
h  première,  et  enfin  on  arriva,  sous  Louis  XIV,  à  faire 
des  vaisseaux  à  trois  ponts.  Le  premier  fut  construit  en 
1657  près  de  la  Roche-Bernara  en  Bretagne,  par  un 
Diq>pois,  nommé  Morin,  et  fut  appelé  la  Couronne,  Alors 
l'esprit  humain  s'arrêta,  et,  jusqu'au  xix*  siècle,  les  dé- 
couvertes se  bornèrent  à  quelques  améliorations  :  les 
vaioeanx  prirent  des  formes  plus  élégantes,  la  carène 
s'amincit  pour  fendre  l'eau  avec  plus  de  vitesse,  le  grée- 
ment  s*alfégea,  la  m&ture  s'éleva  plus  haut,  les  voiles 
présentèrent  aux  vents  une  surface  mieux  disposée.  Vers 
ia  fin  du  xvm*  siècle,  le  doublage  en  cuivre  augmenta 
la  promptitude  et  la  sûreté  de  la  navigation.  Quand  on 
eut  la  sécurité,  on  songea  au  confortable  :  on  fit  aux  em- 
ménagements tout  ce  qui  pouvait  rendre  le  séjour  des 
bâtiments  plus  agréable  et  plus  sain. 

Aujoard'hui,  pour  construire  un  navire,  on  commence 
par  la  qwlle,  sur  laquelle  repose  tout  l'édifice,  et  qui  est 
au  b&timent  ce  que  l'épine  dorsale  est  dans  la  charpente 
du  corps  humain.  Puis,  suivant  des  directions  plus  ou 
moins  Inclinées  au  gré  du  constructeur,  on  établit 
Vétrave  et  VarccLsse,  c-à-d.  les  nièces  extrêmes  de 
l'avant  et  de  l'arrière.  Ensuite  on  élève,  dans  des  plans 
verticaux  et  perpendiculaires  à  la  quille,  les  couples  in- 
termédiaires, qui  sont  comme  les  côtes,  et  l'on  a  la  car- 
casse du  navire.  On  la  recouvre  avec  des  planches  plus 
on  moins  épaisses,  dites  bordages;  on  lie  les  couples 
entre  eux  par  de  fortes  pièces  de  bois  nommées  baus; 
on  di^ose  les  ponts  en  étages,  on  calfate  les  bordages 
avec  de  Tétoupe  et  du  brai  sec,  on  cloue  des  plaques  de 
cuivre  sur  la  partie  qui  reste  immergée.  Quand  on 
lance  le  navire,  on  n*a  plus  qu'à  lui  donner  ses  m&ts  et 
ses  agrès.  —  Les  Modernes  construisent  leurs  bâtiments 
tout  en  bois  de  chêne,  à  l'exception  des  ponts.  Mais  une 
des  découvertes  du  xix*  siècle  a  été  la  substitution  du 
fer  au  bois  pour  U  coque  :  on  remplace  ainsi  une  matière 
Tégétale,  dont  U  croissance  demande  de  nombreuses 
annésSy  dont  La  détérioration  est  rapide,  et  qu'il  est  de 
plus  en  plus  difficile  de  se  procurer,  par  une  autre  ma- 
tière qnV>n  peut  produire  promptement  et  en  masses 
considérables.  V.  le  Supplément, 


Le  XIX*  sïècle  a  encore  ouvert  à  la  construction  navale 
une  voie  nouvelle  par  l'application  de  la  force  élastique 
de  la  vapeur  à  la  navigation  (  V,  Bateau  a  vapeur). 
L'énorme  quantité  de  combustible  consommée  par  la 
machine  à  vapeur  s'opposant  aux  longs  voyages,  on  a  eu 
l'idée  des  vaisseaux  nuxtes,  qui  marchent  ou  tour  à  tour, 
ou  simultanément  à  la  voile  et  à  la  vapeur.  La  vapeur , 
employée  d'a'bord  à  faire  mouvoir  des  roues,  puis  des 

{»alettes,  a  été  ensuite  appliquée  à  un  autre  propulseur, 
'hélice.  Employée  dès  1009  et  1743  par  Duguetet  Dubort 
pour  mettre  en  mouvement  des  moulins,  puis  recom- 
mandée pour  la  navigation  par  le  mathématicien  Paneton 
en  1768,  l'hélice  n'a  reçu  ce  dernier  emploi  que  depuis 
1823,  époque  où  Delisle,  capitaine  du  génie,  proposa  la 
vis  évidée  qui  porte  son  nom.  En  1832,  Sauvage  inventa 
l'hélice  pleine,  qui,  modifiée  en  certains  détails,  est  adop- 
tée aujourd'hui.  L'Anglais  Smith  en  1835  et  le  Suédois 
Ericsson  en  1836  firent  des  essais  heureux  de  navigation 
par  l'hélice.  Le  premier  vaisseau  de  guerre  à  hélice,  le 
Napoléon,  fut  lancé  au  Havre  en  1842.  Ce  propulseur  a 
de  grands  avantages  :  la  machine  peut  être  entièrement 
placée  au-dessous  de  la  ligne  de  flottaison,  et  la  vis  est 
a  l'abri  soit  des  boulets,  soit  des  avaries  d'abordage;  des 
batteries  peuvent  être  établies  dans  toute  la  longueur  du 
b&timent;  les  navires  à  hélice,  moins  larges  tpxe  les  na- 
vires à  roues,  peuvent  entrer  dans  des  bassins  qui  ne 
recevraient  point  ces  derniers;  la  vis,  toujours  immer- 
gée, fonctionne  avec  régularité,  tandis  que  les  roues,  au 
milieu  des  mouvements  de  roulis  et  de  tangage,  s'agitent 
souvent  dans  le  vide.  V.  stmoAcs,  au  Supplément. 

L'Antiquité  avait  fait  des  essais  de  constructions  gigan- 
tesques, puisque  le  navire  de  Ptolémée  Philopator,  qui 
toutefois  ne  navigua  jamais,  avait  280  coudées  de  Ion* 

tueur,  480  de  hauteur,  38  de  lar^r,  et  portait,  dJt-on, 
,000  rameurs,  4,000  matelots  et  3,000  soldats.  Les  Mo- 
dernes ont  opâré  des  prodiges  plus  réels.  De  1854  à  1857, 
les  Anglais  ont  construit  un  immense  b&timent,  appelé 
d'abord  Great  Eastem^  puis  Léviathan,  et  qui  n'a  pu 
effectuer  le  voyage  d'Amérique  qu'en  1860;  au  retour,  il 
a  subi  d'effroyables  avaries,  qui  dégoûteront  peut-être 
d'une  nouvelle  tentative.  Le  Léviathan^  long  de  207  met., 
large  de  25,  a  18  met.  de  creux;  il  est  divisé,  par  de 
fortes  cloisons  de  tôle,  en  compartiments  étanches  de 
18  met.  de  long.  La  cooue,  pour  laquelle  on  a  employé 
7,110  tonnes  de  fer,  est  formée  de  deux  bordages  en  tôle, 
l'un  intérieur  et  l'autre  extérieur  aux  membres,  et  sé- 
parés par  un  petit  intervalle  :  c'est  comme  une  coque 
plus  petite,  loçiée  dans  une  coque  plus  grande  d'un  mètre, 
avec  une  infinité  de  cloisons  transveisales  installées  entre 
deux.  Les  roues  à  aubes  et  l'hélice  constituent  des  mo- 
teurs d'une  puissance  collective  de  2,800  chevaux.  Le 
diamètre  des  roues  est  de  17  met.,  celui  de  l'hélice  de 
6",22.  Six  chaudières  à  vapeur  sont  destintes  &  la  ma- 
chine motrice  de  l'hélice,  et  quatre  autres  pour  les  roues 
&  aubes.  L'hélice  pèse  plus  de  40  tonnes.  Il  y  a  0  m&ts, 
qui  permettent  de  développer  5,184  met.  carrés  de  toile. 
Le  ÙvieUhan  a  été  emménagé  pour  recevoir  4,500  pas- 
sagers, et  pour  porter  3,000  tonneaux  de  marchandises. 
Son  poids,  avec  les  machines,  la  provision  de  charbon, 
l'équipement  et  la  cargaison,  dépasse  26,000  tonnes  mé- 
triques. Les  plans  du  navire  ont  été  donnés  par  Bru- 
nel  fils,  et  la  construction  a  été  faite  dans  les  chantiers 
de  M.  Scott-Itussell  à  lilillwal,  sur  la  rive  gauche  de  la 
Tamise,  à  la  porte  de  Londres.  V.  David  Le  Boy,  La  Ma- 
rine  des  anciens  peuples  expliquée,  Paris,  1777,  in-S*^  ; 
Jtà^  Archéologie  navale,  Paris,  1839,2  vol.  gr.  in-8^;  Glos- 
saire naïUique,  Paris,  1850,  2  vol.  gr.  in-8®;  la  Flotte 
de  César,  Paris,  1861,  gr.  in-18;  P&ris,  Essai  sur  la 
construction  navale  des  peuples  eostr a- européens,  collec- 
tion de  navires  et  pirogues,  etc.  Paris,  1841  et  suiv.,  in- 
fol.;  et  Traité  de  l'hélice  propulsive,  1855,  or.  in-8o.  B. 

NAVARRE  (Ch&teau  de),  à  '1  kilomèt.  d'Evreux.  Con- 
struit en  1332  pour  Jeanne  de  France,  reine  de  Navarre 
et  comtesse  d'Évreux,  remplacé  en  1686  par  un  ch&teau 
moderne,  oue  Mansard  dessfûa  pour  le  duc  de  Bouillon, 
habité  pendant  deux  ans  par  l'impératrice  Joséphine,  il 
a  été  détruit  en  1836.  C'était  un  b&timent  carré  &  faces 
symétriques,  décoré  de  perrons  et  de  vestibules  &  co- 
lonnes, couronné  d'un  vaste  dôme,  et  entouré  d'un  cannl 
d'eau  vive.  Un  parc  superbe,  des  jardins  charmants  l'en- 
vironnaient, et  offraient  avec  profusion  de  belles  eaux, 
des  masses  de  verdure,  des  fleurs  de  toute  espèce  :  17/0 
iT Amour  et  le  Jardin  iSibé  étaient  surtout  agréables. 

NAVARRE  r Collège  de).  V*  notre  Dictionnaire  de  Bio» 
graphie  et  d^ Histoire. 

NAVETTE  Cdiminntif  du  latin  navis)^  en  latin  ecclé- 


NAV 


13')2 


NÉC 


liastîque  Incensanum  ou  Acerraf  petit  vase  de  métal, 
ordinairement  en  forme  de  nacelle,  où  Ton  met  l'encens 
broyé  pour  le  service  de  Tencensoir. 

NAVIGATION  (du  latin  navis,  vaisseau),  action  de  na- 
Yîguer,  de  conduire  an  b&timent.  La  science  de  la  navi- 
ga&on  se  nomme  Art  nautique  (  K.  Cê  mot).  Eu  égard 
aux  moteurs  qui  font  marcher  le  navire,  on  distingue  la 
Nav^iatUm  à  la  rame,  la  Navigation  à  la  voile,  et  la 
Navigation  àvapeur^  c'est  par  abus  de  mots  qu'on  donne 
le  nom  de  Navigation  aérienne  à  l'art  de  diriger  les 
aérostats.  La  navigation  est  an  puissant  moyen  de  trans- 
port, an  a«nt  actif  et  considérable  des  râations  com- 
dierciales.  Selon  les  parages  où  elle  s'exerce,  elle  se  divise 
en  Navigation  intérieure,  sur  les  fleuves,  les  rivières,  les 
lacs  et  les  canaux,  et  Navigation  maritime  *  celle-ci  com- 
prend la  Navigation  eôtiàre  ou  cabotage  {V,  ce  mofj  et  la 
Navigation  hauturière  ou  de  long  coure,  qui  se  fait  en 
pleine  mer  (V.  GAPrrAniB  ao  long  cours).  Pendant  bien 
des  siècles,  les  progrès  dans  la  navigation  furent  lents. 
Les  Grecs  n*avaient  pour  se  diriger  que  l'étoile  polaire; 
peuvent  ils  embarquaient  avec  eux  des  oiseaux,  puis  les 
l&chaient,  poor  servir  de  guides  vers  des  lies  ou  un  con- 
tinent; c'est  ainsi  que  les  Argonautes  avaient  emmené 
dans  leur  expédition  une  colombe.  On  côtoyait  les  ri- 
vages; chaque  baie,  chaque  crique  était  un  port  contre 
la  tempête.  Les  voyages  des  Phéniciens  dans  l'Océan  n'é» 
taient  que  des  circumnavigations  de  plusieurs  années. 
L'invention  et  les  perfectionnements  de  la  boussole  à  la 
fin  du  moven  ftge  permirent  aux  marins  de  s'éloigner  des 
côtes,  et  il  devint  facile  alors  de  diriger  les  navires  à  tra- 
vers l'Océan.  V.  Bouguer,  Traité  du  navire,  1746,  in-4®  ; 
—  de  la  navigation,  1753,  in-4'';  —  de  la  manceuvre^ 
1757,  in-4*;  Bezoat,  Traité  de  navigation.,  dans  son 
Cours  de  mathématiguee,  1781-82, 0.  vol.  in-8*;  Homme, 
V Art  de  la  marine^  1787,  in-4<^;  Bonnefoux,  Séances  nau- 
tiques^ 1824,  in-4''  ;  Bourde  de  Villehuet,  le  Manœuvrier^ 
3*  édit.,  1814,  in-8<>;  Poterat,  TTi^orie  du  navire,  1820, 
fn-4<*;  Gilbert,  VArt  de  la  navigation  par  la  vapeur, 
1820,  in-4<»  ;  Ravinet,  Dictionnaire  de  la  navigation,  1824, 

5  vol.  in-8®;  Dutens,  Histoire  de  la  navigation  intérieure 
de  la  France,  1829,  2  vol.  in-i**;  Maiseau,  Répertoireuni- 
versel  du  commerce  et  de  la  navigation^  1837,  in-8°; 
Dit^tionnaire  universel  du  commerce  et  de  la  navigation, 
publié  par  Guillaumin,  1861-62,  2  vol.  gr.  in-8«. 

NAVIGATION  (Acto  de).  V,  Acte  dc  navigation,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

NAVIGATION  f  Droît  de) ,  droit  perçu  par  TÉtat  sur  la 
partie  navigable  et  flottable  des  fleuves  et  rivières,  pour 
subvenir  aux  frais  de  leur  entretien.  Chaque  bateau, 
préalablement  Jaugé,  est  imposé  par  chaque  myriamètre 
parcouru,  en  raison  de  sa  charge  réelle  en  tonneaux  de 
mer  (1,000  kilogr.).  Tout  batelier  ne  peut  naviguer,  s'U 
n'est  muni  de  la  copie  du  procès-verbal  de  jaugeage,  et 
d'un  laisser-passer  si  le  droit  est  acquitté  au  départ,  ou 
d'un  acquit-a-caution  td  la  taxe  n'est  perçue  qu'au  mo- 
ment de  l'arrivée.  On  peut  souscrire  des  abonnements 
pour  le  droit  de  navigation.  Chaque  grand  bassin  de  la 
France  est  divisé  en  arrondissements  de  naivigation,  dans 
chacun  desquels  il  existe  des  bureaux  de  perception.  Les 
contestations  relativement  au  payement  des  droits  sont 
Jugés  par  les  Conseils  de  préfecture.  —  Les  droits  perçus 
sur  la  navigation  maritime  sont,  outre  ceux  de  francisa^ 
tion  et  de  tonnage  {V,  ces  mots)  :  le  droit  d*expédition , 
dû  par  le  seul  fait  de  l'entrée  dans  un  port  de  France 
(pour  les  navires  français,  2  fr.  Jusqu'à  150  tonneaux, 

6  fr.  iusqu'à  300, 15  fr.  au-dessus;  étrangers,  18  fr.  Jus- 
mi'à  200  tonneaux,  36  fr.  au-dessus)  ;  le  droit  d'acquit 
(0  fr.  50  c.  pour  les  navires  français,  1  fr.  pour  les  étran- 
gers) ;  le  droit  de  congé  (1  fr.  pour  les  navires  non  pontés 
de  30  tonneaux  au  plus,  3  flr.  pour  les  navires  pontés  de 
même  tonnage,  6  fr.  pour  les  navires  oui  ont  plus  de  30 
tonneaux);  le  droit  de  passe-port  (1  fr.);  le  droit  de 
permis,  à  chaque  embarquement  et  débarquement  de 
marchandises  (0  fr.  50  c.  pour  les  b&timents  français, 
1  fr.  pour  les  étrangers);  le  droit  de  certificat  (même 
taux),  poar  tout  certiflcat  destiné  à  être  produit  en  Jus- 
tice. —  Les  bateaux  qui  transportent  des  vovageurs  sont 
soumis  au  droit  de  dixième.  V,  l^lou.  Manuel  régie- 
mentaire  et  pratique  de  la  navigation  intérieure,  1858, 
in-8o;  Grangez,  Traité  de  la  perception  des  droUs  de 
navigation,  2*  édit.,  1854,  in-8<>. 

NAVIRE  (du  latin  navis),  tout  b&timent  propre  à  navi- 
guer, quels  qu'en  soient  le  volume,  la  forme  et  les  usages. 
Les  navires  de  la  marine  militaire,  à  voiles  ou  à  vapeur, 
se  divisent,  suivant  leur  force,  en  diverses  classes  :  vais- 
seaux de  ligne,  frégates,  .corvettes,  avisos,  bricks,  flûtes. 


goélettes ,  bombardes ,  canonnières  ^  cutters ,  lougres , 
sloops,  batteries  flottantes,  etc.  (l^.  tes  mots).  Dans  U 
marine  marchande,  quelques  navires  portent  les  mèmei 
noms  qae  dans  la  marine  de  l'État,  comme  les  6rtcfcs,  les 
goélettes,  etc.  ;  on  y  emploie,  en  outre,  les  dénominationi 
de  paquebots,  steamers,  steamboats  {V.  ces  mots).  Les 
navires  servant  à  la  navimtion  fluviale  n'ont  pas  de  quille, 
mais  on  fond  plat,  afin  de  ne  pas  avoir  an  trop  fort  tirait 
d'eau  ;  il  leur  faut  un  gouvernail  très-large,  car,  en  raison 
de  leur  faible  tirant  d'eau,  an  gouvernail  ordinaire  serait 
impuissant  à  les  gouverner;  lorsqu'ils  sont  pontés,  ils 
portent  an  mât  dont  la  voile  ne  sert  qu'avec  le  vent  ar- 
rière. Les  navires  destinés  à  la  mer  sont  pourvus  d*one 
Suille  fine  et  solide  qui  leur  permet  de  fendre  Tonde, 
'un  gouvernail  étroit,  mais  long,  et  doué  d'une  actioa 
sûre,  enfin  de  plusieure  mâts,  dont  la  voilure  constitue 
leur  appellation  générique.  V.  Navales  (Constructions}. 
Le  Code  de  commerce  (art  190)  range  les  navires  dans 
la  classe  des  meubles,  et  cependant  les  aflécte  au  paye- 
ment de  certaines  créances  privilégiées  (art  191).  Les 
navires *sont  soumis  à  une  inscription  spéciale  :  qui- 
conque en  fait  construire  doit  faire  sa  aéclaration  au 
bureau  de  la  douane  du  port  où  sont  les  chantiers,  puis 
la  renouveler  à  la  fin  des  travaux,  non-seulement  an 
même  bureau,  mais  au  commissariat  de  la  marine ,  et 
indiquer  le  port  auquel  il  désire  attacher  sa  nouvelle 
propriété.  On  peut  plus  tard  changer  le  port  d'attache, 
mais  en  faisant  une  nouvelle  soumission.  Le  propriétaire 
doit  déclarer  le  nom  qu'il  donne  à  son  b&timent,  et  ce 
nom  ne  peut  être  changé  à  l'avenir  (Loi  du  5  Juillet  1836). 
Au-dessous  de  30  tonneaux,  les  navires  doivent  porter  à 
la  poupe,  sur  fond  noir  et  en  caractères  blancs,  un  nu- 
méro et  les  marques  du  port  auquel  ils  appartiennent  : 
au-dessus  de  30  tonneaux,  ils  portent  leur  nom  et  celui 
de  leur  porten  lettres  de  10  centimèt.  dehanteur,  et  un  dé- 
cret de  vendémiaire  an  xii  (sept.  1803)  porte  une  amende 
de  3,000  fr.,  si  le  nom  est  effacé,  couvert  ou  changé.  Le 
jaugeage  du  bftUment  est  gravé  sur  les  faces  arrière  et 
avant  du  maltre-bau,  pour  servir  de  base  à  la  perception 
des  droits.  On  ne  peut  naviguer  sans  avoir  pris  un  acte 
de  francisation  (V.  ce  mot).  Un  navire  perd  sa  nationa- 
lité, quand  il  devient  )a  propriété  d'un  étranger  pour 
plus  de  la  moitié  de  sa  valeur.  Tout  navire,  chaque  foi» 

3u'il  prend  charge,  est  soumis  à  une  visite  d'experts, 
ont  le  procès-verbal  est  déposé  au  tribunal  de  corn* 
merce,  ou,  à  son  défaut,  au  (greffe  de  la  Justice  de  paix,, 
et  le  capitaine  doit  avoir  une  expédition  de  ce  procès- 
verbal 

NAYADES.  V.NaTades. 

NEBEL,  instrument  de  musique.  V.  Nabla. 

NÉBULES,  ornement  architectural  de  l'époqne  romane 
et  de  transition,  formé  par  des  festons  pendants,  ondulés 
et  arrondis.  II  décore  les  larmiere  des  corniches,  et  quel- 
quefois des  moulures  d'archivoltes. 

NÉCESSITÉ  (La),  déesse  allégorique.  V,  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d* Histoire. 

N^CBSsrré,  terme  de  Philosophie  qui  s'applique  aui 
idées  et  aux  faits.  Dans  les  idées,  le  nécessaire  est  te 
contraire  du  contingent  {V.  ce  mot).  Dans  les  faits,  la 
nécessité  est  le  contraire  de  la  liberté;  elle  consiste  dans 
l'impossibilité ,  pour  ce  qui  arrive,  de  ne  pas  arriver,  ou 
d'arriver  d'une  manière  différente. 

NécESSiTÉ  (Pièces  de),  nom  donné,  en  Numismatique, 
aux  monnaies  frappées  lorsqu'il  y  a  manque  de  métaux 
précieux,  et  faites,  soit  en  objets  sans  valeur,  soit  en  un 
métal  auquel  on  donne  une  valeur  nominale  bien  au- 
dessus  de  sa  valeur  réelle.  Leur  émission  repose  unique- 
ment sur  le  crédit  de  celui  qui  les  met  en  circulation. 
—  Parmi  les  pièces  de  nécessité  il  faut  ranger  en  pre- 
mière ligne  la  Monnaie  obsidionale  :  c'est  une  monnaie 
de  cuivre  ou  de  nickel,  que  le  commandant  d'une  place 
soutenant  un  long  siège  fait  fabriquer  pour  le  besoin  de 
la  garnison ,  et  à  laquelle  il  donne  un  cours  forcé.  Elle 
ne  se  compose  que  de  billon,  et  la  valeur,  tout  arbitraire, 
que  le  commandant  lui  assigne,  est  très-«upérieure  à  sa 
valeur  intrinsèque.  Cette  monnaie  n'a  qu'un  cours  jtTO- 
visoire,  dont  la  durée  est  celle  du  siège;  alon  elle  doit 
être  retirée  de  la  circulation,  et  remboursée  en  monnaie 
légale  courante  du  pays.  V.  Duby,  Recueil  général  dej 
pièces  obsidionaies  et  de  nécessité,  Paris,  1786;  Reider, 
Essai  de  description  des  pièces  de  nécessité  frappées  depuis 
pltuieurs  siècles.  Halle,  1806. 

NÉCROLOGE  {dii  grec  nékros,  mort,  et  logos,  discours), 
livre-registre  sur  lequel  on  inscrit  les  noms  des  moils. 
Dès  les  premiers  temps  du  christianisme,  chaque  éjeilise 
inscrivit  dans  son  Nécrologe  ou  Obituaire  (du  latin  o&t/u^ 


NEF 


1303 


NÉG 


décès)  le  nom,  la  date  de  naissance  et  de  décès  des  évè- 
ques,  des  chanoines,  des  prêtres,  des  bienfaiteurs  da 
clergé;  les  couvents  d'hommes  et  de  femmes  adoptèrent 
à  leur  tour  cette  coutume  pour  les  abbés,  les  prieurs,  les 
religieux,  etc.  Primitivement  on  donnait  lecture  du  Né- 
crologe pendant  la  messe,  pour  rappeler  les  personnages 
en  faveur  desquels  des  prières  étaient  adressées  à  Dieu  : 
il  en  est  encore  ainsi  maintenant  dans  quelques  églises 
coptes  et  syriaaues.  Mais,  en  Occident,  la  longueur  des 
énumérations  fit  cpe  le  diacre  ou  le  sous-diacre  les  lut 
rapidement  et  à  voix  basse,  et,  finalement,  qu*ou  les  rem- 
plaça par  le  simple  Mémento  des  vivants  et  des  morts. 
Dans  les  monastères,  la  lecture  du  Nécrologe  fut  ren- 
fo^ée  à  l'office  de  Prime.  —  Chez  les  Modernes,  les  pu- 
blications destinées  à  faire  connaître,  au  moment  de  leur 
mort,  les  personnages  dont  le  nom  médte  d'être  con- 
servé, ont  reçu  le  nom  de  iVi^cro/oflfM.  Tels  furent  :  le 
Wécrologe  des  hommes  céUbres  de  France,  de  1764  à  1789, 
n  vol.,  pablié  par  Palissot,  Lalande,  François  de  Neuf- 
château,  etc.;  V Annuaire  nécrologique^  de  Mahul;  le 
riécrologe  allemand  de  SchlichtegroU ,  commencé  en 
1790;  le  Nécrologe,  entrepris  en  1853  par  Breton,  Ac- 
qoin  et  Combes.  Dans  les  derniers  Jours  de  décembre, 
certains  Journaux  donnent,  sous  le  titre  de  Nécrologie, 
la  lista  des  personnes  notables  qui  sont  mortes  dans 
Tannée.  B. 

NÉCROPOLE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire^ 

NÉERLANDAIS  (Idiome).  Cet  idiome,  parlé  au  moyen 
âge  en  Flandre,  en  Hollande  et  dans  le  Brabant,  n'est, 
>t;ion  Grimm,  que  le  bas  allemand,  mais  cultivé  de  bonne 
lieure,  et  enrichi  par  l'influence  du  commerce.  Il  a  donné 
naissance  au  flamand  et  au  hollandais,  qui  n'étaient  pas 
d'abord  distincts,  et  auxquels  on  donnait  le  nom  com- 
mun de  duilsch  (teuton);  c'est  encore  le  nom  que  les 
Brabançons  donnent  à  leur  langue,  et  par  lequel  les  An- 
glais désignent  le  hollandais. 

NEF  (du  latin  navis)^  mot  usuel  au  moyen  &ge  pour 
désigner  un  navire.  —  On  l'a  aussi  appliqué ,  dans  le 
même  temps,  à  un  surtout  d'orfèvrerie  qu'on  plaçait  sur 
la  table  des  rois  et  des  grands  seigneurs,  et  qui  contenait 
h^  épices,  certains  vases  à  boire,  les  cuillers ,  les  cou- 
teaux à  découper. 

NEP,  partie  des  églises  qui  s'étend  depuis  le  chœur  Jus- 
qu'à la  porte  principale,  et  (jui  offre  assez  d'analogie  avec 
la  coque  renversée  d*un  navire.  On  distingue  la  nef  ma- 
jeure ou  grande  nef,  qui  est  celle  du  milieu ,  et  les  nefs 
mineures,  qui  sont  de  chaque  côté,  et  qu'on  nomme  aussi 
collatéraux  ou  bas  côtés.  La  division  primitive  et  natu- 
relle des  églises  est  en  trois  nefs  :  quand  les  chrétiens 
adoptèrent  les  basiliques  antiques  pour  les  consacrer  au 
coite  divin,  ils  les  trouvèrent  généralement  partagées  en 
trois  longues  galeries,  dont  ils  conservèrent  la  disposi- 
tion. D'autres  galeries  régnaient  au-dessus  de  celles-là  : 
quelques  églises,  comme  les  cathédrales  de  Paris  et  de 
Tournai,  les  églises  de  Noyon,  de  Laon,  de  S*-Remi  à 
Reims,  de  S*-ÊtienneàCaen,  en  offrent  de  semblables.  Les 
lioaunes,  primitivement  séparés  d'avec  les  femmes,  occu- 
paieni  la  grande  nef  et  le  collatéral  de  droite  du  rez-de- 
chaussée,  qui,  pour  cette  cause,  fut  souvent,  à  l'époque  du 
Bas-Empire,  construit  plus  large  que  celui  de  gauche,  ré- 
servé anx  femmes.  Les  galeries  du  premier  étage  étaient 
destinées  aux  vierges  et  aux  veuves.  Au  xiii'  siècle  on  les 
supprima  pour  donner  plus  d'élévation  aux  collatéraux.  Les 
oels  communiquent  entre  elles  par  de  larges  arcades,  que 
soutiennent  des  piliers  ou  des  colonnes  de  formes  variées, 
n  les  voûtes  que  ceux-ci  supportent  sont  souvent  d'une 
liardiesse  étonnante.  Lorsque  l'édifice  se  termine  absida- 
lement  par  un  mur  plat,  des  autels  font  souvent  face  aux 
nets  latérales;  mais  souvent  aussi  celles-ci  se  terminent 
en  déoinbulatoire  tournant  autour  du  chœur  et  donnant 
entrée  dans  de  nombreuses  chapelles  absidales.  Les  mu- 
railles sont,  à  l'époque  romane,  percées  de  fenêtres 
étroites  qui  laissent  de  larges  parois  à  la  peinture  mu- 
rale. Vers  le  xiii' siècle,  les  fenêtres  s'allongent,  sans 
é'élargir  encore  beaucoup.  La  nef  centrale ,  toujours  plus 
élevée  que  les  collatéraux,  porte  un  ran^  supérieur  de 
hantes  fenêtres,  que  viennent  garnir  les  vitraux  à  grands 
perscnnages,  tandis  que  les  vitres  légendaires  sont  ré- 
servées pour  les  nefs  mineures.  Au  xiv*  siècle,  on  com- 
mence à  péh^er  les  murs  latéraux  des  basses  nefs  pour  y 
loger  des  chapelles,  et,  aux  xv*  et  xvi",  ces  chapelles  for- 
ment un  cordon  continu  tout  autour  de  l'église.  Bien  plus, 
tandis  que,  dans  les  premiers  temps,  le  nombre  des  nefs 
était  fixé  à  trois,  et  que  souvent  même,  pour  des  églises 
d  assez  grande  importance,  comme  la  cathédrale  d'Angers, 


on  se  contentait  d*une  seule  nef,  on  porta  le  nombre  des 
nefs  à  cinq,  comme  aux  cathédrales  de  Paris  et  de  Boor* 
ges;  on  alla  même  Jusqu'à  sept,  notamment  à  la  cathé- 
drale d'Anvers.  —  Les  basses  nefs  n'étaient  pas  nécessai 
rement  ouvertes  par  des  porches  ;  le  nombre  de  ces 
entrées  était  laissé  au  gré  de  l'architecte,  qui  les  propor 
tionnait  soit  au  nombre  des  fidèles,  soit  aux  dispositions 
intérieures  de  l'église.  En  l'absence  de  porches,  on  ter- 
minait les  collatéraux  en  façade  par  des  fenêtres  qui  pré- 
sentaient une  gracieuse  perspective.  —  Les  églises  des 
Ordres  mendiants  offraient  cette  particularité  qu'elles 
n'avaient  qu'une  nef  majeure  et  une  nef  mineure,  pour 
montrer  leur  pauvreté  ressortant  môme  de  leur  église  in- 
complète. Quelaues  paroisses  réellement  pauvres  avaient 
la  même  disposition.  —  Les  nefs  latérales  ont  reçu  quel- 
quefois une  ou  plusieurs  entrées  sur  leurs  flancs  ;  mais 
il  n'y  eut  pas  de  règles  à  ce  sujet.  Une  pareille  disposition 
dut  dépendre  des  exigences  du  service.  Les  grandes  nefs 
restèrent  longtemps  sans  être  voûtées,  laissant  apercevoir 
U  charpente  de  la  couverture  ;  ou  bien  elles  reçurent  une 
voûte  en  bois;  vers  le  xin*  siècle,  on  commença  à  leur 
donner  une  voûte  de  pierre.  E.  L. 

NEF  (avant-),  partie  des  anciennes  églises  chez  les  Grecs, 
située  à  l'entree,  avant  la  nef,  et  appelée  dans  les  auteurs 
priorpoHictM (premier  portique),  pronaos,  et  narihex. 
Sans  parler  de  Tantique  abbatiale  de  Gluny,  il  existe  une 
disposition  semblable  dans  les  églises  de  Yézelay,  de 
S^-Père,  de  Notre-Dame  de  D\jon. 

NËFYR,  sorte  de  trompette  des  Arabes.  On  en  tire  des 
sons,  aigus  et  criards. 

NÉGATION,  en  Grammaire,  mot  qui  sert  à  nier.  Tels 
sont,  en  français,  non,  ne,  ni.  Non  s'emploie  dans  les 
réponses  :  «  Est-il  venu?  —  Non;  »  ou  bien  au  commen- 
cement des  phrases  renfermant  une  négation  sur  laquelle 
on  veut  insister  avec  force:  «  Non,  l'homme  n'est  pas 
aussi  pervers  que  vous  le  Bui>posez.  »  Il  s'emploie  encore 
devant  un  adjectif,  un  participe,  un  adverbe,  un  sub- 
stantif, auxquels  on  veut  donner  une  valeur  négative  : 
a  Livres  non  réédités,  non  loin  d'ici,  etc.  »  Il  entre  comme 
particule  négative  dans  la  composition  d'un  petit  nombre 
de  mots,  comme  nonchalant,  non  pareil ,  non-activité, 
nonobstant.  —  Ne  s'emploie  seulement  avec  les  verbes  : 
u  Je  n'ose.  Je  ne  puis,  il  n'y  a...  »,  et  iq)rès  beaucoup  de 
verbes  ou  de  locutions  qui  expriment  une  idée  négative, 
ou  obstacle ,  empêchement ,  crainte ,  restriction ,  etc.  : 
«  La  pluie  empêchait  qu'on  ne  se  promenât.  —  Je  crains 
qu'il  ne  pleuve.  —  Prenez  garde  qu'il  ne  sorte.  —  Peu 
s'en  fallut  qu'il  n'interrompit  Mentor.  —  Mais  il  s'en  faut 
bien  au'il  ne  le  fasse.  »  * 

La  locution  française  ne...  que  est  le  résultat  d'une  el- 
lipse facile  à  suppléer  :  «  Je  n'ai  trouvé  que  ces  deux 
livres,  •  c-à-d.  «  Je  n'ai  trouvé  autre  chose  ou  d'autres 
livres  que  ces  deux  livres.  »  Il  équivaut  donc  à  l'adverbe 
seulement.  Dans  l'ancienne  langue,  on  ajoutait  quelque- 
fois pas  ou  point;  les  exemples  en  sont  nombreux  oans 
Amyot,  et  l'on  en  trouve  encore  dans  Corneille  : 

Ht  ne  rauront  point  vue  obtflr  qu%  son  prlnee, 

c.-à-d.  «  Ils  ne  l'auront  point  vue  obéira  d'autres  qu'à  son 
prince.  »  Cette  locution,  qui  n'est  plus  usitée  depuis  deux 
siècles,  est  fort  logique.  Aujourd'hui  on  dit  et  même  on 
imprime  des  phrases  telles  que  celle-ci  :  a  II  n'y  a  pas 
que  lui  qui  pense  ainsi  ;  »  cela  veut  dire  :  «  Il  n'y  a  pas 
d*autre  nomme  que  lui  qui  pense  ainsi  ;  »  mais  on  prend 
cette  locution  dans  un  sen^  tout  contraire ,  pour  dire  : 
a  II  n'y  a  pas  seulement  lui,  il  n'est  pas  le  seul  qui  pense 
ainsi.  «  C'est  faire  une  double  faute;  car  le  mot  que  tout 
seul  ne  peut  s\g,mû&r  swUement ,  sans  qu'il  réside  dans 
les  deux  mots  réunis  ne  que;  et  le  mot  pas  ne  saurait 
faire  une  double  négation  avec  ne;  ne  pas  équivaut  abso- 
lument k  ne  :  n  Je  ne  puis  le  faire ,  Je  ne  peux  pas  le 
faire.  »  P. 

NÉGOCIANT,  celui  qui  fait  le  commerce  en  gros,  qui 
traite  les  grandes  affaires,  sans  avoir  ni  boutique  ouverte, 
ni  étalage,  ni  enseigne.,  et  généralement  celui  qui  a  des 
relations  étendues  avec  les  pays  lointains.  V.  Commbr- 
ÇANT,  Commerce. 

NÉGOCIATION ,  en  termes  de  Banque,  commerce  des 
billets  et  lettres  de  change.  La  loi  du  20  vendémiaire 
an  IV  (il  oct.  1795)  défend  toutes  négociations  en  blanc 
de  lettres  de  change  et  autres  effets  de  commerce  à  ordre; 
mais  elle  est  tombée  en  désuétude.  Les  agents  de  change 
ont  seuls  le  droit  de  négocier  les  effets  publics  et  autres 
susceptibles  d'être  cotés  à  la  Bourse. 

NÈGBES  (Traite  des).  V,  Esci^vagb,  dans  notre  Z>ec- 
iionnaire  de  Biographie  et  d'Histotre*  —  Dans  les  États 


NÉO 


1304 


NËO 


noirs,  libres,  tels  que  Haïti,  par  exemple,  nègre  est  une 
injure;  il  faut  dire  d'un  citoyen  :  il  est  noir. 

NÉGRIER,  b&timent  qui  fait  la  traite  des  nègres  sur  la 
côte  d'Afrique.  L'entre-pont  est  dégagé,  pour  qu'on  puisse 
y  entasser  beaucoup  d'esclaves  ^  et  percé  de  meurtrières 
dans  sa  partie  supérieure,  pour  étirer  sur  eux  en  cas  de 
révolte. 

NEI,  flûte  faite  de  roseau,  en  usage  chez  les  Turcs. 

DiËIGES.  V,  Glaces  et  neiges. 

NEITU,  divinité  de  Tancienne  Ég^te.  On  la  repré- 
sentait coiffée  du  klaft,  partie  inférieure  du  pschent  ou 
tiare  royale  et  emblème  de  la  basse  Egypte.  Elle  tenait 
an  sceptre  à  fleur  de  lotus. 

NÉMÉËNNES  (Les),  recueil  d'odes  composées  par  le 
poète  grec  Pindare  en  l'honneur  de  ceux  qui  avaient  rem- 
porté des  prix  dans  les  Jeux  Néméens  (  V,  ce  mot  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  (Vffistoiré). 

NÉMÉSIS,  déesse  du  ch&timent  chez  les  anciens  Grecs. 
Elle  était  l'expression  du  système  de  rémunération  établi 
pour  les  actes  humains  :  de  là  l'air  grave  et  sérieux  de 
ses  simulacres;  de  là  aussi  la  mesure  (la  coudée)  placée 
entre  ses  mains,  ainsi  que  le  frein  et  le  Joug  qui  lui 
servent  d'attributs.  Certaines  médailles  de  Smyrne  la 
montrent  avec  les  attributs  de  la  vertu ,  ayant  quelque- 
fois le  bras  gauche  levé  et  un  doigt  sur  sa  bouche.  L*épée 
et  le  fouet  placés  dans  ses  mains  font  allusion  aux  ven- 
geances dont  elle  était  l'instrument.  On  l'a  aussi  repré- 
sentée avec  des  ailes  et  sur  une  roue,  comme  la  Fortune. 

NÉu  Ésis,  titre  donné  par  le  poète  Barthélémy  à  un  recueil 
des  satires  politiques  on  vers,  et  très-violentes,  qu'il  pu- 
blia hebdomadairement  à  Paiis  en  1831  et  1832.  On  en 
fiti  vol.  in-8%  Paris,  1833. 

NÉNIëS,  poëmo  funèbre  à  la  louange  d*an  mort,  chanté 
dans  l'atrium  de  sa  maison  au  son  des  flûtes  et  de  la 
Ivre,  par  une  chanteuse  et  pleureuse  à  gages  appelée  prcB- 
fica.  Ce  mot  s'est  appliqué  aussi  à  des  chants  tristes  quel- 
conques; ainsi,  Horace  désigne  les  élégies  de  Simonide 
de  Cféos  par  les  mots  Cea  nenia.  L*ode  du  poète  latin  sur 
la  mort  de  Quintilius, 

Qais  desiderio  ait  pndor  aut  modus. 

HOB.,  Od.  1 ,  24. 

est  une  très-belle  nénie.  Comme  les  nénies  étaient  pres- 
'^ue  toujours  médiocres,  on  en  donna  le  nom  aux  canti- 
lènes  populaires,  et  même  aux  rondes  d'enfants.       P. 

NÉOGRiVPHE  (du  grec  néos,  nouveau,  et  graphéin, 
écrire) ,  partisan  ou  promoteur  d'une  nouvelle  manière 
d'écrire  les  mots,  ou  de  nouveaux  signes  pour  mar- 
quer avec  précision  les  nuances  de  prononciation  com- 
munes à  une  même  lettre.  Le  premier  qui  songea  en 
France  à  établir  un  système  orthographique  fut  Geoffroy 
Tory,  en  1529,  dans  son  Art  et  science  de  la  due  et  vraie 
prononciation  des  lettres  proportionnées  selon  le  visage 
et  le  corps  humain.  En  1530,  Palsgrave  inventa  l'accent 
aigu.  Vers  le  môme  temps,  Florimond  introduisit  l'usage 
de  Tapostrophe.  Jacques  Dubois,  dit  Sylvius,  se  fit  le  ré- 
formateur de  l'alphabet ,  imagina  des  marques  de  lettres, 
des  accents,  des  tirets,  le  tout  pour  rendre  l'écriture  con- 
forme à  la  prononciation.  Maigret,  de  Lyon,  imagina  la 
cédille,  et  publia  en  1545  son  Tretté  de  la  Grammere 
françoëse,  premier  essai  systématique  d'une  réforme  de 
l'orthographe  :  parmi  bon  nombre  de  bizarreries,  quel- 
qaea  détails  sont  Judicieux.  La  voie  était  ouverte,  et  de 
siècle  en  siècle  on  vit  se  succéder  une  foule  de  née 
graphes  proposant  des  systègies  tout  aussi  bizarres,  et  à 
peu  près  tout  aussi  puénls  et  stériles  que  ceux  de  Geof- 
froy Tory,  Palsgrave,  etc.,  et  poursuivant  la  chimère  de 
faire  de  l'orthographe  l'image  de  la  prononciation  ;  nous 
sommerons  Jacques  Pelletier,  en  1550,  qui  donna  un 
Dialogue  de  Vortografe  e  prononciacion  françoëse:  Ra- 
mas, Gramere  fransoese,  1562;  Expilly,  Uorthographe 
fhtnçoise  selon  la  prononciation  de  notre  langue,  Lyon, 
1018;  Lesclache,  Véritables  règles  de  Vortografe  franr 
ce»»,  ou  Vart  d'aprandre  an  peu  de  tems  à  écrire  côrec- 
tement:  c'était  un  Auvergnat,  on  le  voit  de  reste.  En 
1675,  un  certain  Bérain  proposa  d'écrire  ai  au  lieu  de  ot , 
partout  où  cotte  syllabe  devait  sonner  comme  ai  :  il 
échoua,  et  cette  réforme  ne  commença  de  se  répandre 
qu'au  xvm*  siècle,  quand  Voltaire  l'eut  adoptée.  L'Aca- 
démie française  continua  de  la  repousser,  et  ne  l'a  ad- 
mise Qu'on  1835,  dans  la  6*  édition  de  son  Dictionnaire. 
L'abbe  de  Saint-Pierre,  l'abbé  Dangeau,  Du  Mas,  auraient 
voulu  qu'il  y  eût  dans  l'écriture  autant  de  figures  que  de 
sons  et  d'articulations;  que  les  lettres,  employées  à 
d'autres  fonctions  que  celles  qu'elles  ont  ordinurement, 
reçussent  une  marque  distinctive,  etc.;  c'était  proposer 


de  ravaler  la  langue  française  jusqu'à  la  langue  chinoise. 
Enfin  presque  tous  les  réformateurs  de  l'orthographe 
furent  plus  ou  moins  atteints  d'extravagance,  et  parmi 
eux  on  a  le  regret  de  compter  Beauzée  et  Duclos.  V.  le 
mot  suivant.  P. 

NÉOGRAPHIE  et  NÉOGRÀPHISME,  innovation  dans 
la  manière  d'écrire  les  mots.  Il  n'y  a  pas  de  langue  dont 
l'orthographe  n'éprouve  des  révolutions,  souvent  amenées 
par  le  changement  de  la  prononciation,  d'autres  fois  né- 
cessitées par  le  besoin  de  mettre  l'orthographe  en  har- 
monie soit  avec  l'étymologie,  soit  avec  la  physionomie  gé- 
nérale de  la  langue  à  certaines  époques  de  son  dévelop- 
pement. Au  xu*  siècle,  alors  que  le  français  commence  â 
prendre  une  physionomie  bien  déterminée  et  assez  diffO' 
rente  de  celle  qu'avait  eue  la  langue  dite  romane  { vir« 
XI*  siècle),  la  manière  d'orthographier  les  mots,  quelle 
qu'ait  pu  être  leur  prononciation ,  doit  avoir  eu  de  grands 
rapports  avec  l'orthographe  latine,  comme  on  le  voit  par 
les  mots paor,paourjpavor),  t  (t6t^,u  (udt),  com  {cum 
ou  quomodo),  etc.  U  se  prononçait  sans  doute  encon.* 
comme  dans  le  latin  et  dans  les  langues  méridionales  : 
de  là  le  mot  tut,  aujourd'hui  tout,  u  aujourd'hui  ou.  On 
trouve  au  singulier,  dès  cette  époque  reculée,  des  con- 
sonnes ,  caractéristiques  de  l'étymologie,  supprimées  à 
titre  de  muettes  :  H  cors,  set  noms  (les  corps,  corpus, 
sept  hommes,  septem^  etc.).  Jusqu'au  xv*  siècle,  il  n'y  eut 
pas  plus  d'unité  dans  l'orthog^phe  qu'il  n'y  en  avait 
dans  la  prononciation  et  dans  l'organisation  politique. 
L'invention  de  l'imprimerie  sembla  devoir  amener  plus 
d'ordre  et  de  fixité;  mais  l'étude  à  peu  près  exclusive  des 
auteurs  anciens  introduisit  en  môme  temps  une  confu- 
sion d'un  autre  genre  ;  les  érudits  et  les  grammairiens 
prétendirent  qu'il  fiUlait  calquer  l'orthographe  des  mots 
d'origine  latine  ou  grecque  sur  celle  que  l'on  trouvait 
observée  dans  les  manuscrits.  C'est  à  eux  que  Ton  doit 
ces  formes  bizarres  :  paulpierre  (palpebra)^  paulme 
(palma)^  etc.;  ils  faisaient  un  pléonasme  de  lettres,  u  re- 
présentant l ,  et  paume  équivalant  à  palme,  etc.  Quant  à 
sçavoir,  on  lui  donnait  plus  maladroitement  encore  un  c, 
qui  ne  se  trouve  pas  dans  l'original  sapere  :  on  songeait  à 
scire,  qui  n'a  fait  qtieescient  et  science.  Les  écrivains  pro- 
prement dits  et  le  public  voulaient  s'en  tenir  à  la  tradition 
de  l'usage  tel  qu'on  l'avait  reçu  du  xiv«  siècle,  où  Tortlio- 
graphe  fut  en  général  assez  raisonnable,  et  se  rapprochait 
beaucoup  de  celle  qui  est  adoptée  aujourd'hui.  Malheu- 
reusement cet  usaçe  variait  de  province  à  province,  et 
suivait  plus  ou  moms  l'analogie  des  prononciations  dia- 
lectiques ;  et  cette  divergence  donnait  gain  de  cause  à  l'or- 
thographe surchargée  des  érudits,  qui  avaient  pour  eux  les 
imprimeurs,  presaue  tous  érudits  eux-mêmes.  Entro  ces 
deux  partis  se  placèrent  de  prétendus  novateurs  qui  propo- 
sèrent, pour  concilier  tous  les  avis,  d'introduire  une  ortho- 
graphe conforme  à  la  prononciation  réelle,  toutes  les  fois 
Sue  les  lettres  étymologiques  étaient  muettes.  Leur  sys- 
^me,  repris  en  partie  au  xvn*  siècle  par  les  Précieuses, 
qui  s'inquiétaient  peu  des  étymologies,  finit  par  triom- 
pher dans  les  mots  trésor  au  lieu  de  tkrésor,  écrire  au  lieu 
de  escrire,  écriture  au  lieu  de  escripture,  etc.  Quant  aux 
lettres  doubles,  le  désordre  qui  avait  toujours  existé  de- 
puis l'origine  de  la  langue  continua,  et  l'on  écrit  encore, 
avec  une  bizarrerie  inexplicable,  honneur  et  honnête  ca 
même  temps  que  honorer,  honorable  {honor,  honestus, 
honorare),  etc. 

La  néographie,  renfermée  dans  de  Jostes  bornes  et  in- 
troduite avec  circonspection,  peut  donner  à  notre  langue 
une  orthogpraphe  plus  généralement  logique  et  naturelle, 
et  faire  disparaître  d'Inutiles  difficultés  souvent  rebu- 
tantes. Il  ne  s'agit  que  d'écarter  les  réformes  absolues  et, 
à  ce  titre,  presque  toujours  déraisonnables.  U  est  bon,  en 
général,  de  tenir  compte  de  l'étymologie,  mais  mieux  en- 
core de  la  dérivation  ;  ainsi ,  il  est  très-légitime  de  main* 
tenir  ps  dans  corps,  non  pas  tant  à  cause  du  latin  cor^ 
pus,  qu'à  cause  des  dériva  corporel,  corporation,  d'une 
part,  et  corsage,  corset,  corsdet  d'autre  part,  etc.  Ce  qui 
a  fait  échouer  les  réformateurs  excessifs  qui  ont  préten- 
du mettre  l'écriture  dans  une  harmonie  absolue  avec  la 
prononciation,  c'est  qu'ils  ne  tenaient  compte  ni  de  rét>-- 
mologie,  ni  de  la  dérivation ,  ni  par  conséquent  du  sens 
des  mots.  Enfin,  pour  une  réforme,  même  raisonnable, 
quelle  est  l'autonté  reconnue  assez  infaillible  pour  la 
proposer,  et  assez  puissante  pour  la  faire  adopter?  P. 
NÉOLATINES  (Langues),  c-à-d.  langues  latines  nou^ 
velles,  nom  donné  aux  idiomes  nés  de  la  déformation 
du  latin  dans  les  siècles  qui  suivirent  la  chute  de  l'Em- 
pire romain  jusque  vers  le  xii*  siècle.  Ce  sont  l'italiea , 
le  provençal,  le  français,  l'espagnol,  le  portupis,  le  va- 


NEO 


1305 


NER 


Jaque,  et  le  rou manche  ou  roman-helvétique.  Ce  qui 
frappe  surtout  lorsque  Ton  compare  philologiquemcnt 
€68  langues  sœurs  à  leur  mère  commune,  c*est  le  grand 
nombre  de  syncopes  et  de  contractions  suhies  par  les 
mots,  la  suppression  ou  Taltération  plus  ou  moins  pro- 
fonde des  désinences  de  déclinaison  et  de  conjugaison.  Ce 
resserrement  de  syllabes  s'obserrait  déjà  dans  la  lançue 
populaire  des  anciens  Ronuiins  et  dans  la  prononciation 
des  provinciaux.  Après  la  dissolution  de  TEmpire  d*Occi- 
dent,  la  violation  des  règles,  soit  d*accord,  soit  de  régime, 
devint  habituelle;  et  lorscpie  toute  étude  littéraire  sé- 
rieuse eut  peu  à  peu  disparu,  la  langue  populaire,  sous 
toutes  ses  formes  dialectiques  et  locales,  fut  la  seule  qui 
eut  cours,  et  le  petit  nombre  d'écrivains  que  Ton  compte 
à  partir  du  milieu  du  vi*  siècle  se  virent  obligés  de 
l'adopter  pour  être  compris  du  public ,  comme  Grégoire 
de  Tours  en  fait  Taveu  explicite;  encore  le  style  de  cet 
écrivain  doit-il  être  relativement  élégant.  Or,  c'est  de 
cette  langue  de  plus  en  plus  irrégulière,  confuse  et  défi- 
gurée, qui  s*appelait  le  romain  ou  roman ,  quelquefois 
hngvê  rtutiqiiê ,  que  sont  nées  insensiblement  les  lan- 
gues néolatines,  et  non  pas  de  Tancien  latin  litténûre, 
qui  ne  devait  exercer  d'influence  sur  ces  langues  et  sur 
leur  littérature  qu*à  Fépoque  de  la  Renaissance,  à  la  fin 
du  XV*  siècle  et  au  xvi*.  Les  caractères  distinctifs  des 
laofpes  néolatines,  comparées  à  l'ancien  latin,  sont: 
l'existence  de  Tarticle,  inconnu  à  celui-ci  ;  l'emploi  fré- 
quent des  verbes  auxiliaires  pour  marquer  les  temps 
passés  de  l'actif  autres  que  l'imparfait  et  le  parfait  dé- 
fini; l'absence  de  toute  conjugaison  passive;  la  construc- 
tion plus  directe,  plus  uniforme ,  moins  périodique  et 
moins  savante,  des  phrases;  l'emploi  à  çeu  près  con- 
stant, surtout  en  français,  des  pronoms  sujets  devant  les 
verbes;  la  multiplicité  des  prépositions;  l'emploi  bien 
moins  fréquent  des  particules  de  liaison  entre  les  phrases 
et  les  membres  de  phrase  ;  un  souci  moins  grand  du 
rfaythme  proprement  dit  que  de  la  netteté  des  idées,  du 
style,  et  de  l'expression.  P. 

NÉOIjOGIE  (  Ju  grec  néos,  nouveau,  et  logos,  parole], 
invention  et  usage  de  termes  nouveaux ,  ou  emploi  des 
termes  anciens  dans  un  sens  inusité  Jusque-là.  La  néo- 
logie n'est  légitime  que  lorsqu'un  terme  nouveau  est 
exigé  par  le  développement  et  le  renouvellement  des 
idées,  et  qu'il  épargne  une  périphrase.  L'histoire  litté- 
raire de  tous  les  peuples  nous  montre  la  tendance  à  la 
néologie  d'autant  plus  marquée  que  la  décadence  du  goût 
fait  plus  de  progrès;  aux  époques  où  il  règne  encore, 
cette  stérile  abondance  trahit  un  génie  médiocre,  une 
ima^ nation  déréglée,  une  connaissance  imparfaite  du 
génie  de  la  langue.  La  néologie  du  xu*  siècle  a  un  ca- 
ractère particulier  qui  s'est  maintenu  depuis  :  les  mots 
empruntés  au  latin  conservent  la  physionomie  qu'ils  ont 
dins  cette  langue  à  la  lecture,  au  lieu  que  les  mots  du 
moyen  ftge,  formés  primitivement  du  latin  parlé,  s'écap- 
tent  davantage  des  formes  latines  littéraires.  Amyot,  par 
sa  traduction  de  Plutarque,  introduisit  dans  l'usage  un 
grand  nombre  de  mots  et  de  locutions  qu'il  dut  créer, 
pour  exprimer  des  usages  de  l'antiquité,  ou  reproduire 
plus  fldèlemeat  une  image  brillante,  une  phrase  expres- 
«TO  de  son  original.  On  dut  aussi  à  Rabelais  et  à  Mon- 
taiçQe  quantité  de  locutions  heureuses  ^ui  sont  restées. 
Mais  une  bonne  partie  de  ces  acquisitions  se  trouva* 
perdue  dès  le  commencement  du  xvii*  siècle,  et  Vau- 
gelas  en  exprime  son  regret  Toutefois  un  assez  grand 
àombre  d'expressions  et  de  locutions  nouvelles  s'intro- 
duisirent alors  ;  tels  sont  les  mots  féliciter,  doué^  ttuul- 
t«r,  insidieux,  sécurité,  transfuge ,  pudeur,  bravoure, 
prosateur,  souveraineté^  vénération,  ronflement,  inao^ 
^,  effervescence,  impolitesse,  exactitude,  plaisan- 
terie, connaisseur,  désintéressement,  intrépide,  férocité, 
dûof/per,  insotUenable ,  insurmontable ,  esprit  juste , 
raUlerie  d^icate,  tourner  en  ridicule,  embarquer  une 
o/Tatre,  prendre  un  parti,  sacrifier  et  sacrifice  (dans  le 
sens  figuré),  en  user,  contre-temps^  bénéficier  (verbe), 
luxuriant.  Bienfaisance  fut  créé  par  l'abbé  de  Saint- 
Pierre,  verbeux  par  Fénelon  ,  démagogue  par  Bossuet. 
Au  siècle  suivant,  Voltaire  consacra  par  son  patronage 
vagissement  et  tragédien:  J.-J.  Rousseau,  investigation, 
regrettable ,  endolori ,  exubérance.  Tous  ces  mots  ont 
«ne  physionomie  naturelle,  un  sens  précis,  et  sont  con- 
fcrmes  à  l'analogie  de  notre  langue.  P. 

NÉOLOGISME ,  abus  de  la  néologie,  manie  d'intro- 
duire des  mots  inutiles,  c-à-d.  destinés  à  exprimer  des 
idées  clairement  rendues  déjà  par  d'autres  mots  ()ue 
l'nsage  a  consacrés.  De  ce  genre  sont  les  mots  omnipo- 
tent et  surgir,  vûnement  empruntés  au  latin ,  lorsque 


tout-putssant  et  s'élever  ou  paraître  disent  la  même 
chose  depuis  tant  de  siècles;  baser,  lorsque  la  langue 
possède  depuis  longtemps  fonder,  établir,  appuyer;  se 
suicider,  qui  dit  fort  mal  ce  qu'expriment  fort  bien  se 
tuer,  se  détruire,  se  donner  la  mort.  Il  n'en  est  pas  de 
même  du  substantif  suicide ,  très-bien  formé,  qui  long- 
temps manqua  à  la  langue,  et  qu'on  ne  peut  remplacer 
que  par  des  périphrases.  Démoraliser  est  encore  un  mot 
mal  fait  ;  car  il  est  tout  à  fait  contraire  à  l'analogie  et 
n'a  aucun  rapport  avec  le  positif  moraliser,  qui  signifie 
faire  le  moraliste,  tandis  que  démoraliser  est  pris  par 
les  néologues  dans  le  sens  de  déconcerter  les  facultés 
de  Vàme,  porter  le  découragement,  V abattement  dans 
Vàme.  Quant  au  sens  de  rendre  moral,  amener  à  la 
pratique  du  devoir  et  de  la  vertu,  que  l'on  donne  au* 
Jourd'hui  au  verbe  moraliser,  c'est  également  un  néolo- 
gisme 
aussi 

de  .  . 

1er  l'équivoque  souvent  produite  par  le  mot  égaler.  A 
auoi  sert  le  mot  distancer?  Et  que  dit-il  de  plus  que 
dépasser,  surpasser?  On  fait  aussi  abus  du  mot  incom- 
mensurable, improprement  employé  pour  immense;  car 
ce  mot,  emprunté  à  la  géométrie,  a  dans  cette  science 
un  sens  tout  différent  et  conforme  à  son  étymologie. 
Motion,  dans  le  sens  politique,  quoique  adopté  par  l'Aca- 
démie ,  est  un  mot  obscur.  Confortable  est  barbare  : 
l'analogie  ne  sauxtdt  en  autoriser  l'emploi  que  dans  le 
sens  de  susceptible  d^étre  fortifié  ou  consolé  ;  le  radical 
seul  de  cet  adjectif  est  francs.  Le  tour  affecté  des 
phrases,  les  alliances  de  mots  téméraires,  la  bizarrerie 
des  figures,  doivent  être  comptés  aussi  parmi  les  abus 
de  la  néologie.  Cest  surtout  parmi  les  talents  de  se- 
cond et  de  troisième  ordre  que.  l'on  a  à  signaler  ces 
défauts  littéraires,  vrais  fléaux  des  langues,  et  qui  finis- 
sent par  corrompre  le  goût  public  et  par  influer  sur  les 
grands  talents  eux-mêmes.  P. 

NÉOPHYTE.  V,  ce  mot  dans  notre  DictUmncùre  de 
Biographie  et  d^ Histoire, 

NÉO-PLATONISME.  V,  Alexandrie  (École  d*}. 

NÉORAMA,  par  corruption  de  Naorama  (du  grec 
naos,  temple ,  habitation,  et  orama ,  vue),  représenta- 
tion de  l'intérieur  d'un  édifice  animé  par  des  pei)3on« 
nages,  et  que  le  spectateur,  placé  dans  un  point  central 
du  tableau  même ,  aperçoit  avec  des  effets  de  lumière 
changeants.  Le  Néorama  est  un  spectacle  de  Jour.  L'in- 
vention en  est  due  à  J.-P.  Alaux,  qui  exposa  à  Paris, 
en  1827,  dans  un  local  construit  à  cet  effet,  une  vue  de 
l'intérieur  de  ]a  bcuiliqtte  de  S^Pierre  de  Rome,  et, 
plus  tard,  celle  de  VAbbaye  de  Westminster,  Ces  pein- 
tures furent  assez  médiocrement  réussies,  et  le  succès 
n'en  fut  pas  durable. 

NÉO-ZÉLANDAIS  (  Idiome},  idiome  parlé  par  les  ha- 
bitants de  la  Nouvelle-Zélanae.  Il  appaitient  au  groupe 
des  langues  malaises  polynésiennes.  On  y  trouve  nos 
cinq  voyelles,  et  seulement  neuf  consonnes,  g,  h,  k,  m, 
n,  p,  r,  t,  V.  Point  de  déclinaisons,  ni  conjugaisons,  ni 
adjectifs,  ni  yerbes,  ni  adverbes.  Les  genres  sont  mar- 

2 liée  par  l'addition  de  mots  signifiant  mâle  et  femelle. 
'article  et  le  pronom  prennent  seuls  la  marque  des 
nombres.  Les  Néo-Zélanoais  ont  des  chants  d'amour,  do 
guerre,  de  mort,  et  des  chants  satiriques;  ils  recueillent 
aussi  les  tradiûons  des  aïeux,  et  possèdent  des  espèces 
de  généalogies  en  vers. 

NÉPOTISME  (du  latin  nepos,  neyeu,  petit-fils),  mot 
créé  au  &v*  siècle  en  Italie  pour  exprimer  la  faveur  qnu 
certains  papes  accordèrent  à  leurs  neveux,  l'autorité 
qu'ils  leur  abandonnèrent  dans  l'administration  publique. 
Par  extension,  on  l'appUaue  aux  actes  des  hommes  haut 
placés  qui  distribuent  à  leurs  parents  les  emplois  et  les 
honneurs, 

NEPTUNE,  Dieu  italique  de  la  mer  et  de  la  naviga- 
tion, analogue  au  Nérée  et  au  Poséidon  des  Grecs.  Il  eu: 
un  temple  à  Rome  dans  le  Qrque  Flamînius;  plus  tard , 
Cn.  Domitius  en  fit  bâtir  un  second,  où  l'on  plaça  un 
groupe  de  Poséidon,  de  Thétis  et  d'Achille,  dû  au  ciseau 
de  Scopas.  Nous  possédons  fort  peu  de  simulacres  anti- 
ques de  Neptune.  Les  poètes  lui  donnent  un  air  farouche, 
des  traits  exprimant  la  force  et  la  virilité,  une  chevelure 
ruisselante  d'eau  de  mer,  et  l'arment  d'un  trident,  in- 
strument de  pêche,  dont  il  firappait  aussi  les  flots  pour 
les  soulever.  Neptune  avait  poor  attributs  le  dauphin,  le 
cheval,  qu'il  avait  fait  naître,  selon  la  Fable,  dans  sa 
lutte  contre  Minerve,  et  on  lui  consacrait  le  pin,  qui 
croit  sur  les  rivages.  B. 

NÉRÉE,  dieu  des  eaux  chez  les  Pélasges,  absorbé  plus 


NKU 


1306 


NEU 


tard  par  le  Poséidon  des  Hellènes,  et  réduit  alors  à  la 
conditfoi;  de  hdros.  Il  était  surtout  la  personnification 
des  flots  écumeux,  et,  poiir  ce  motif,  on  le  représentait 
comme  un  vieillard  à  cheveux  blancs.  Sa  chevelure  et  sa 
barbe  formées  de  plantes  marines  prouvent  qu*il  n'était 
pas  un  dieu  des  eaux  en  général,  mais  le  dieu  des  vagues 
de  la  mer.  B. 

NÉRÉIDES,  filles  de  Nérée.  L'Antiquité  les  a  dé- 
peintes fol&trant  à  la  surface  des  mers;  leurs  cheveux 
blonds  symbolisent  les  reflets  du  soleil  sur  les  flots.  Sur 
un  sarcophage  en  marbre  pentéligue  provenant  du  Ca- 
pitole  et  que  possède  le  Musée  du  Louvre,  elles  sont  cou- 
ronnées  de  lierre  et  portées  sur  des  Tritons.  Des  médailles 
et  des  pierres  gravées  romaines  les  montrent  parfois 
avec  un  corps  terminé  en  queue  de  poisson.  Quelquefois 
elles  tiennent  une  branche  de  corail,  ont  des  perles  dans 
les  cheveux,  et  une  draperie  voltigeant  sur  les  épaules. 

NÉRET,  diminutif  denotr,  au  moyen  &ge,  désignait, 
non  une  monnaie  particulière,  mais  toute  monnaie  de 
billon. 

NERVURES ,  côtes  ou  arêtes  saillantes  des  voûtes  ogi- 
vales, dont  elles  tracent  les  contours  et  les  comparti- 
ments. Les  nervures  sont  comme  la  carcasse  ou  la  char- 
pente des  voûtes;  elles  en  forment  les  rudiments,  en 
divisent  et  en  répartissent  la  charge  sur  les  points  d'ap- 
pui ;  elles  simplifient  en  outre  les  moyens  de  construc- 
tion, car  lorsqu'elles  sont  taillées  et  mises  en  place,  le 
reste  de  la  voûte  n'est  plus  qu'un  remplissage.  Les  ner- 
vures ne  commencent  à  paraître  qu'au  temps  de  la 
transition.  Elles  affectent  d'abord  la  forme  simple  d'un 
gros  tore,  puis  elles  se  profilent  aux  différentes  époques 
suivant  le  goût  changeant  des  styles.  Vers  le  xv*  siècle, 
les  tores  se  changent  en  guirlandes  de  feuillages.  Puis , 
les  nervures,  après  avoir  été  un  élément  gracieux  de 
construction,  deviennent  on  ornement  aux  formes  les 
plus  diverses,  forment  des  dessins  et  des  réseaux  com- 
pliqués, et  se  combinent  en  outre  avec  les  clefs  pen- 
dantes. Cest  dans  les  églises  du  Nord,  notamment  en 
Belgique,  qu*on  remarque  les  plus  belles  voûtes  ornées 
de  nervures  croisées.  —  On  donne  encore  le  nom  de 
Nervures  aux  moulures  placées  sur  des  parties  lisses  ou 
des  angles,  aux  côtés  des  cannelures,  et  aux  côtes  éle- 
vées qui,  dans  les  feuilles  d'ornement,  représentent  les 
tiges  des  plantes  naturelles.  E.  L« 

NESKHI  (Alphabet),  c.-à-d.  écriture  des  copies,  al- 

λhabet  dont  les  Arabes  se  servent  aujourd'hui  pour  écrire 
cur  langue,  et  qui,  avec  l'addition  de  quelques  signes, 
est  devenu  commun  aux  Turcs  et  à  presque  toutes  les 
populations  musulmanes  de  l'Asie.  C'est  une  écriture 
plus  cur^ve  à  la  fois  et  plus  complète  que  le  coufique , 
dont  elle  dérive,  sans  lui  être  cependant  postérieure  de 
beaucoup.  Les  Persans  ont  une  manière  élégante  de  la 
tracer,  à  laquelle  ils  donnent  le  nom  de  talik  (sus- 
pendue). L'invention  du  neskhi  est  g(^néralement  attri- 
buée au  vizir  Ibn-Moklah,  dans  la  première  moitié  du 
X*  siècle;  mais  il  est  employé  sur  des  médailles  plus  an- 
ciennes. 

NESLB  (Toor  de).  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire. 

NESLB ,  monnaie  de  billon  qui  eut  cours  en  France  au 
xvn*  siècle,  et  qui  tira  son  nom  de  la  tour  de  Nesle  où 
elle  avait  été  fabriquée.  Elle  valait  15  deniers. 

NESTORIEN  (Alphabet).  V.  Syriaque. 

NEUF3IB  ou  NEDME ,  droit  du  neuvième  que  les  curés 
prenaient  autrefois  sur  les  biens  meubles  des  personnes 
décédées. 

NEUMES,  signes  que  Ton  substitua  aux  caractères 
grecs  et  aux  lettres  de  l'alphabet  latin  servant  à  indiquer 
la  durée  relative  des  notes  de  musique.  Les  neumes,  dont 
le  dessin  représentait  la  succession,  l'élévation  et  l'abais- 
sement des  notes,  et  formait  même  des  groupes  de  notes, 
étaient  souvent  accompagnées  des  lettres  elles-mêmes. 
Cette  notation  se  composait  de  signes  représentant  des  sons 
isolés,  sous  la  forme  dépeints,  de  virgules,  de  traits 
horizontaux  ou  penchés,  et  des  groupes  de  sons,  sous  la 
forme  de  crochets  et  de  traits  contournés  et  liés  de  di- 
verses manières.  Les  caractères  neumatiques,  quoique 
représentant  des  sons,  ne  constituaient  pas  un  système 
complet  de  notation  ;  car,  sans  les  lettres,  ils  n'offraient 

{>a8  au  lecteur  les  indications  sufiisantes  pour  acquérir 
'intelligence  positive  et  claire  de  chacun  d'eux.  Chaque 
signe  neumatique  avait  un  nom  particulier  indiofuant  sa 
videur  et  son  emploi.  Voici  les  noms  des  principaux 
neumes  que  Ton  rencontre  dans  les  anciens  manuscrits  : 
viîjfule,  point ,  clivus,  podatus,  scandicus,  climacus, 
priscus,  gnomo,  porrectus,  franciUus,  quilisma,  etc. 


On  a[>pelle  aussi  Neume  la  suite  de  sons  qui  forme  la 
terminaison  d'un  verset  de  psaume^  probablement  parce 
que,  dans  certains  tons,  on  chante  plusieurs  sons  sur  la 
même  syllabe.  Cette  qualification  est  impropre;  car  le 
neume,  du  mot  gfecpneuma  (soufile) ,  est  une  vocalisa- 
tion assez  développée,  qui  a  un  sens  symbolique  et  ex- 
{irime,  selon  S'  Augustin,  le  transport  de  l'&me,  dont 
'enthousiasme,  ne  trouvant  pas  d'expressions  suffisantes, 
se  manifeste  par  des  sons  inarticulés  (les  Latins  l'ont 
aussi  appelé  Jubilum  ).  Les  neumes  n'ont  guère  lieu  que 
sur  les  lettres  e  et  a,  comme  dans  Kyrie  et  dans  AUf- 
luia.  Le  moyen  A^  qui  aimait  à  donner  un  sens  sym- 
bolique à  tous  les  actes  de  l'art  religieux,  attribuait 
cette  coutume  à  la  Joie  apportée  au  monde  par  les  mou 
de  la  Salutation  angélique  :  Ave,  Maria.  Le  mot  neume 
est  masculin  ou  féminin  à  volonté ,  selon  qu'on  le  rap- 
porte au  mot  grec,  ou  à  son  dérivé  latin  neuma^  œ 
(suite  de  sons).  V.  Tardif,  Essai  sur  les  neumes^  1853, 
in-8°.  ^  F.  C 

NEUTRALITE,  situation  d'un  État  qui  reste  en  paix 
relativement  à  plusieurs  puissances  belligérantes  et  ne 
prend  aucune  part  à  Jours  hostilités.  La  neutralité  est 
dite  armée,  quand  l'État  qui  reste  neutre  tient  sur  pied 
des  forces  suffisantes  pour  faire  respecter  son  territoire 
ou  ses  droits.  La  manière  d'agir  des  puissances  belligé- 
rantes à  l'égard  des  neutres  a  varié  selon  le  degré  d'achsr- 
nement  qu'elles  portaient  dans  la  ^erre,  et  selon  les 
progrès  de  la  moralité.  Une  convention  conclue  à  Paris, 
le  lo  avril  1856,  entre  la  France,  l'Autriche,  l'Angleterre, 
la  Prusse,  la  Russie,  le  Piémont,  l'Espagne  et  la  Turquie^ 
a  reconnu  la  neutralité  des  mers,  aboli  les  lettres  de 
marque  et  les  armements  en  course,  et  n'a  admis  de 
blocus  que  le  blocus  effectif;  elle  a  proclamé  que  le  pa- 
villon couvre  la  marchandise  ennemie,  à  l'exception  de 
la  contrebande  de  guerre,  et  que  la  marchandise  neatre, 
à  l'exception  de  cette  même  contrebande,  n'est  pas  sai- 
sissable  sous  pavillon  ennemi.  Par  conséquent,  la  liberté 
du  commerce  maritime  existe  pendant  la  guerre,  et  la 
navigation  peut  se  faire  d'un  port  neutre  à  an  port  en- 
nemi ;  tout  ce  qui  n'est  pas  l'instrument  direct  et  armé 
des  gouvernements  en  état  de  guerre  est  neutralisé. 
Les  Etats-Unis  d'Amérique,  dans  la  guerre  des  États  du 
Nord  contre  ceux  du  Sud,  ont  aussi  reconnu  ce  principe 
en  1861.  —  Certains  États  sont,  d'un  consentement^ 
néral,  neutres  en  toutes  circonstances  :  les  puissances 
belligérantes  ne  peuvent  traverser  leur  territoire,  y  lever 
des  recrues,  des  subsides,  etc.  On  peut  encore  neutra- 
liser, c-àrd.  mettre  en  dehors  des  opérations  militaires^ 
un  canton,  une  ville,  un  territoire  quelconque,  pour 
qu'ils  puissent,  par  exemple,  servir  de  rendez-vous  à 
des  négociateurs.  V.  Hautefeuille,  Des  droits  etdes  dO' 
voirs  des  nations  neutres  en  temps  de  guerre  maritime , 
2«  édit.,  1858, 3  vol.  in-S».  B. 

NEUTRE,  mot  d'origine  latine,  qui  signifie  :  ni  Tua 
ni  l'autre;  il  s'applique  en  Grammaire  aux  déclinaisons 
et  aux  conjugaisons.  Dans  les  noms  substantifs  et  adjec- 
tifs, les  Grecs,  les  Latins,  les  Allemands,  les  Anglais, 
ont  un  genre  neutre.  Quelle  que  soit  la  terminaison  du 
nominatif,  il  y  a  toujours,  tant  au  singulier  qu'au  plu- 
riel, trois  cas  semblables,  le  nominatif,  le  vocatif,  l'accu- 
satif; au  pluriel ,  ces  trois  cas  sont  terminés  en  a  dan» 
les  langues  grecque  et  latine.  En  angliûs  sont  neutres 
tous  les  noms  d'animaux  et  de  choses.  —  Dans  la  conju- 
^son,  on  appelle  Neutre  un  verbe  qui  exprime  uu 
simple  état  absolu,  comme  languir;  ou  une  action  qui 
reste  tout  entière  dans  le  sujet  sans  avoir  besoin  d'ea 
sortir,  comme  demeurer^  marcher,  courir,  naître,  mou- 
rir, etc.  Ces  deux  classes  de  verbes  neutres  sont  appe- 
lées verbes  neutres  intransitifs  ;  ceux  qui  ont  besoin 
d'un  complément  indirect  ou  circonstanciel ,  comme 
aller,  venir,  nuire,  sont  des  verbes  neutres  transitifs 
(  V.  TnANsrriF,  Intransitip).  Dans  la  pratique,  on  recon- 
naît mécaniquement  un  verbe  neutre  en  ce  qu'il  ne  peut 
prendre  la  forme  passive,  ou  en  ce  qu'il  ne  peut  être 
suivi  d'un  complément  direct  en  français,  en  italien,  en 
espagnol,  en  anglais  ;  de  l'accusatif  en  grec,  en  latin,  ea 
allemand.  Néanmoins,  certains  verbes  neutres  devien- 
nent actifs  dans  quelques  cas  ;  tels  sont  en  français  wi- 
loir,  coûter^  passer,  parler,  employés  flgurément  pour 
procurer,  occasionner,  nécessiter,  franchir,  omettre, 
employer  (en  parlant).  Réciproquement,  beaucoup  de 
verbes  actifs  deviennent  neutres  en  vertu  d'une  ellipse  : 
ainsi,  changer,  tourner,  retourner,  repousser,  tenw,  etc» 
Il  y  a  encore  des  verbes  neutres  qui  se  construiseni 
comme  des  verbes  passifs  en  vertu  d'une  syllepse,  comme 
1  périr.  Une  particularité  des  verbes  neutres  latins  et  alto» 


NEV 


1307 


NIE 


mands  est  de  pouvoir  s'employer  passivement  et  fmpor- 
sonoellement  à  la  troisième  personne  du  singulier,  par 
oiemple  saltatur,  P. 

NEUTRES.  V,  Neutralité. 

NEUVAINE,  espace  de  neuf  jours  consécutifs  pendant 
lesquels  on  fait,  en  Thonneur  de  Dieu,  de  la  S*«  Vierge, 
ou  de  quelque  Saint  dont  on  implore  le  secours,  certains 
actes  de  dévotion ,  tels  que  prières  particulières ,  obla< 
tiens ,  aumônes,  assistance  à  des  messes,  stations,  pèle- 
rinages, etc.  Il  y  a  tous  les  ans  à  Paris,  du  3  au  12  jan- 
vier, dans  réglise  S^-Étienne-du-Mont ,  une  neuvaine 
rélèbre  en  Thonneur  de  S^'-Geneviève ,  patronne  de  la 
ville.  Cest  pendant  la  neuvaine  qui  suit  Tanniversaire 
de  la  fête  de  S*-Janvier  que  doit  s'accomplir,  à  Naples , 
la  liquéfaction  du  sang  de  ce  Ssdnt.  —  Les  Anciens  attri- 
buaient aussi  à  certaines  cérémonies  répétées  pendant 
neuf  jours  consécutifs  une  vertu  particulière  :  ils  croyaient 
pouvoir  détourner,  par  des  sacrifices  offerts  durant  ce 
nombre  de  jours  {tiovendiales  feriœ)^  les  malheurs  dont 
les  menaçaient  les  prodiges.  C'était  au  9"  jour  après  la 
mort  d'une  personne,  qu'on  déposait  ses  cendres  dans 
une  urne,  et  on  offrait  on  sacrifice  appelé  novendicUe  sa- 
crifichun.  B. 

NEUVIÈME,  en  termes  de  Musique,  intervalle  disso- 
nant de  0  degrés.  La  neuvième  est  la  réplique  de  l'inter- 
valle de  seconde.  On  appelle  accord  de  neuvième  celui 
où  la  neuvième  est  unie  a  la  tierce  et  à  la  quinte,  comme 
sol  si  ré  la.  La  neuvième  de  cet  accord  peut  être  mi- 
neure, majeure,  ou  augmentée,  la  tierce  majeure  ou  mi- 
neure, et  la  quinte  juste,  diminuée,  ou  augmentée.  Cette 
neuvième  est  aussi  toujours  prépairée,  et  se  résout  en 
descendant  d'un  degré.  La  neuvième  augmentée,  qui  ne 
se  présente  que  sur  le  6*  degré  du  mode  mineur,  se 
résout,  au  contraire,  en  montant  d'un  degré.  L'accord  de 
neuvième  se  marque,  dans  la  basse  chiffrée,  par  un  0. 
—  Vaccord  de  neuvième  et  septième  diffère  du  précédent 
en  ce  que  la  septième  y  tient  la  place  de  la  quinte,  quel- 
fois  même  de  la  tierce.  La  septième  doit  y  être  préparée 
et  résolue,  mais  la  résolution  ne  se  fait  pas  tou)ours  en 
même  temps  que  celle  de  la  neuvième.  B. 

NEVERS  (Église  S^-Ctr,  à).  Cette  cathédrale  s'élève 
sur  remplacement  d'une  autre  construite  au  ix*  siècle, 
et  qui  avait  elle-même  succédé  à  une  basilique  consa- 
crée à  S^  Gervais  et  à  S'  Protais.  On  a  soutenu ,  sans 
beaucoup  de  vraisemblance,  que  deux  piliers  ronds  si- 
tués au  bas  de  la  nef,  et  quelques  pans  de  muraille 
de  la  chapelle  S*'-Julitte,  mère  de  S'  Cyr,  de  Tarse, 
sont  des  vestiges  de  l'ancienne  construction.  La  grande 
nef  appartient  au  style  ogival  primitif,  le  chœur  et  trois 
chapelles  absidales  au  style  secondaire,  les  chapelles 
latérales  et  la  tour,  au  style  tertiaire.  La  cathédrale  de 
Nevers  est  b&tie  sur  un  plan  qui  n'a  guère  d'analogue 
en  France  :  elle  présente  à  ses  deux  extrémités  deux 
erandes  al)sides,dont  Tune,  celle  de  l'O.,  forme  le  chœur, 
«t  Tautre,  celle  de  TE.,  est  consacrée  à  S^*  Julitte;  par 
suite,  les  portes  d'entrée  sont  rejetées  sur  les  flancs  do 
l'édifice.  Le  transept,  qui  est  de  la  période  romano-by- 
zantine,  n'est  pas,  comme  dans  nos  autres  monuments, 
eorre  le  chœur  et  la  nef,  mais  au  bas  de  celle-ci,  ainsi 
qa*on  le  voit  encore  à  l'église  des  SS.-Apôtres,  à  Co- 
logne. A  l'extérieur,  le  monument  présente  un  aspect 
grave  et  sévère.  De  deux  tours  qui  avaient  été  élevées 
d'abord  à  l'occident,  l'une  a  été  brûlée;  l'autre,  con- 
struite de  1509  à  1528,  et  restaurée  de  nos  Jours,  a  une 
élévation  de  52  met.,  depuis  le  sol  jusqu'à  l'appui  de  la 
iKilustrade  découpée  à  jour.  Elle  est  divisée  sur  sa  hau- 
teur en  trois  parties  par  des  galeries  à  jour  portant  sur 
des  cornichea  en  encorbellement  ;  les  quatre  angles  en 
sont  flanqués  de  tourelles,  octogones  en  commençant  et 
hexagonales  à  leur  sommet.  La  partie  la  plus  rapprochée 
du  sol  est  simplement  recreusée  de  nervures;  les  faces 
de  la  partie  intermédiaire  offrent  de  grandes  figures  en 
demi-ronde  bosse,  recouvertes  de  riches  dais  ;  la  partie 
supérieure  est  décorée  de  statues  et  de  sculptures  délica- 
tement travaillées.  L'intérieur  de  Téglise,  long  de  110 
met.,  se  divise  en  9  travées,  dont  5  pour  le  chœur  et 
4  pour  la  nef.  La  perspective  en  est  imposante  ;  mais  une 
partie  des  vitraux  a  péri,  et  une  lumière  trop  abondante 
fatigue  la  vue.  On  remarque,  entre  les  ogives  du  trifo- 
rium,  des  Anges  figurés  en  relief.  Les  chapiteaux  des 
<!olonnes  montrent  une  étonnante  variété  de  détails,  em- 
prantés  au  r^;ne  végétal.  La  comtesse  Marie  d'AIbret  et 
^  dames  de  sa  cour  avalent  fait,  pour  Tornement  du 
diœur,  des  tapisseries  de  haute  lisse  représentant  le  mar- 
^Te  de  S' Cyr;  elles  sont  dans  l'état  le  plus  déplorable.  B. 
këvers  (Kaiencos  de).  V.  au  Supplément, 


NEVEU,  NIÈCE,  fils  ou  fille  du  frère  ou  de  la  sœur, 
qui  par  contre  sont  dits  oncle  et  tante.  On  appelle  petite 
neveu  le  fils  d'un  neveu  ;  neveu  à  la  mode  de  Bretagne , 
le  fils  du  cousin  germain  ou  de  la  cousine  germaine  (  la 
Coutume  de  ce  pays  regardait  les  cousins  germains  et  les 
cousines  germaines  comme  frères  et  sœurs).  Les  neveux 
et  nièces  sont  parents  au  3*  degré  avec  leurs  oncles  et 
tantes.  Il  ne  leur  est  permis  de  se  marier  avec  eux  qu'au- 
tant qu'ils  ont  obtenu ,  pour  motifs  graves ,  mainlevée 
de  la  prohibition  prononcée  par  la  loi  {Code  Napol.^ 
art.  163,  164).  La  représentation  est  admise  en  leur 
faveur  dans  les  successions.  11  est  permis  aux  oncles  et 
tantes  de  faire  substituer  leurs  biens  en  faveur  de  leurs 
neveux  et  nièces. 

NIBELUNGEN.  V.  Nibbelcngen. 

NICHE  (de  l'italien  nichio,  coquille},  enfoncement  de 
forme  variable,  pratiqué  dans  rintérieur  d'un  mur,  et 
destiné  à  recevoir  une  statue,  un  groupe,  un  buste,  un 
vase  |>u  tout  autre  objet  d'ornement.  La  niche  antique,, 
réglée  dans  ses  dimensions,  a  ordinairement  en  hauteur 
deux  fois  sa  largeur.  Les  grandes  niches  formées  par  des 
murailles  entières  s'appellent  culs-de-four  :  les  Romains 
en  ont  fait  un  fréquent  usage,  et  les  ont  couvertes  de 
voûtes  élégantes  et  gracieuses.  Le  sanctusdre  absidal  des 
basiliques  fut  ainsi  une  niche  en  cul-de-four,  et  cette 
forme  se  conserva  longtemps  dans  les  édifices  chrétiens. 
Le  style  romano-byzantin  adopta  des  séries  de  niches 
serrées  les  unes  contre  les  autres,  dans  lesquelles  on 
plaçait  les  statues  des  Saints;  souvent  ces  niches  n'étaient 
que  des  arcades  à  Jour.  Le  style  ogival  préféra  aux  niches, 
pour  les  statues,  des  culs-de-lampe  sidllants  couronnés 
de  dais  :  cependant,  vers  la  3*  période  ogivale,  on  vit 
les  pinacles  et  les  clochetons  se  couronner  de  niches  à 
jour.  La  Renaissance  reprit  les  niches  antiques,  mais 
les  encadra  de  la  manière  la  plus  heureuse  :  on  peut 
citer  comme  exemple  les  charmantes  niches  qui  déco- 
rent la  façade  de  l'hôtel  de  ville  de  Paris.  Au  xviii^»  siècle,, 
on  trouva,  pour  des  niches  d'église,  une  nouvelle  dispo- 
sition, blâmée  par  les  puristes,  mais  qui  donne  un  effefe 
heureux  de  lumière  :  une  niche,  placée  derrière  l'autel 
absidal,  est  pratiquée  en  dehors  du  mur,  et  reçoit  direc- 
tement la  lumière  par  sa  coupole  à  jour;  elle  form» 
comme  une  espèce  de  petit  thé&tre  représentant  le  çlobe 
terrestre,  sur  lequel  rampe  le  serpent  que  la  Viergo 
écrase  de  son  talon  ;  la  chapelle,  peu  éclairée,  sert  de 
repoussoir  à  la  niche  et  au  si^et  religieux  qu'elle  con- 
tient, et  qui  sont  vivement  éclairés  par  la  lumière  tombant 
de  la  coupole.  On  voit  de  ces  niches  modernes  à  Paris , 
dans  les  églises  S^-Roch  et  S^-Sulpice.  —  On  nomme 
niches  à  cru  celles  qui  prennent  naissance  immédiate- 
ment au  rez-de-chaussée,  ne  s'élèvent  sur  aucun  corps 
ou  massif,  et  reposent  sans  plinthe  sur  l'appui  continu, 
d'une  façade  (telles  sont  les  deux  grandes  niches  du. 
portique  de  l'église  Saint-Snlplce,  à  Paris)  :  ces  niches 
reçoivent  ordinairement  un  piédestal  ;  niches  rustiques^ 
celles  dont  les  bandeaux  sont  décorés  de  refends  et  de 
bossages;  niches  en  tour  ronde,  celles  creusées  dans  le  pa- 
rement extérieur  d'un  mur  circulaire,  et  niches  en  tour 
creuse,  celles  creusées  dans  le  parement  intérieur;  niches 
feintes,  celles  qui  n'ont  que  très-peu  de  profondeur^  et 
dont  les  figures  sont  peintes  ou  en  bas-relief.  —  La  niche 
d'exposition  est  une  espèce  de  petit  trône  ou  de  taber- 
nacle fait  en  bois  doré  et  sculpté,  ou  orné  d'une  riche 
étoffe,  avec  un  dais  surmonté  de  panaches:  on  la  place 
sur  l'autel  pour  y  exposer  le  S*-Sacrement  pendant  ser* 
tains  offices.  E.  L. 

NICOLO,  ancien  instrument  de  musique.   V.  Bou- 

HARDE 

NIEBELUNGEN  (Les),  poôme  épique  allemand  du 
moyen  ftge.  Il  se  divise  en  deux  parties  :  la  première  est 
consacrée  au  récit  des  aventures  et  de  la  mort  de  Sieg- 
fried. Ce  héros,  fils  de  Siegmond,  roi  des  Pays-Bas,  se 
rend  à  Worms,  où  réside  Gunther,  roi  des  Bourguignons. 
Gr&ce  à  la  force  et  au  don  d'invisibilité  que  lui  donne 
un  manteau  magique,  il  idde  ce  prince  à  vaincre  la  belle 
Brunhilde,  reine  guerrière  d'Islande,  qui  avait  juré  de 
n'épouser  que  son  vainqueur.  Gunther  accorde  sa  sœur 
Chrimhilde  à  Siegfried,  Brunhilde,  devenue  la  femme 
du  roi  des  Bourguignons,  apprend,  dans  une  «querelle 
avec  Chrimhilde,  nue  ce  n'est  pas  Gunther,  mais  Siegfried 
qui  l'a  vaincue  :  elle  charge  de  ees  vengeances  Hagen  de 
Troneck,  qui  assassine  Siegfried  au  milieu  d'une  partie 
de  chasse  et  jette  dans  le  Rhin  le  trésor  que  ce  héros  a 
enlevé  jadis  aux  Niebelungen ,  princes  résidant  au  loin 
dans  le  Nord.  Dans  la  seconde  partie  du  poème,  Chrim* 
hilde  épouse  Etzel  (Attila),  roi  des  Uuns,  et  venge  crueU 


NIE 


1308 


NIO 


tanent  la  mort  de  son  premier  mari  :  elle  invite  les  Bour- 
guignons, que  le  poëte  appelle  ici  Niebeiungen,  à  une  fête 
où  elle  les  fait  massacrer,  et  avec  lesquels  périssent  ses 
frères  Gunthcr,  Gernot  et  Giselberr;  elle  tue  de  sa  pro- 
pre main  Uagen,  qui  emporte  en  mourant  le  secret  du  tré- 
sor, mais  est  frappée  elle-même  par  Hildebrand,  vassal 
de  Dietrich  de  Berne,  qui  a  succombé  dans  la  lutte. 

Cette  épopée,  que  des  critiques  allemands  n*ont  pas 
craint  de  placer  à  côté  et  même  au-dessus  de  Vlliads, 
est  un  assemblage  de  chants  nationaux,  d*une  antiquité 
reculée,  auxquels  un  auteur  inconnu  a  donné,  vers  Tan 
1210,  la  forme  sous  laquelle  on  les  trouve  dans  un  ma- 
nuscrit de  la  bibliothèque  de  Munich.  Deux  manuscrits 
de  Saint-Gall  et  de  Hohenems  nous  donnent  le  même 
poème  remanié.  On  a  attribué  les  Niebelungen  à  Conrad 
de  Wurzbourg,  à  Klingsœr,  à  Wolfram  d'Ëschenbach,  à 
Henri  d*Ofterdingen.  Il  y  a,  dans  ces  chants  épiques,  un 
mélange  de  faits  historiques,  tels  que  la  ruine  de  la  mai- 
son de  Bourgogne  et  les  exploits  d'Attila,  avec  des  tradi- 
tions de  VEdda  islandaise.  Le  nom  môme  des  Niebelun- 
gen ou  Niflwigen  rappelle  le  Nifiheim,  ce  lieu  froid  et 
sombre  dont  la  mythologie  Scandinave  faisait  un  Enfer. 
On  le  fait  venir  généralement  de  Kebel  jung,  enfant  du 
nuage.  Chaque  vers  du  poème  des  Niebelungen  compte  six 
longues;  au  milieu  est  une  césure^  de  sorte  que  chaque 
moitié  de  vers  a  trois  longues.  Le  nombre  des  orèves  qui 
se  Joignent  aux  six  longues  est  indéterminé,  et  varie  de 
quatre  à  dix.  Il  en  résulte  que  les  vers  sont  tantôt  lam- 
bi(][ues,  tantôt  trochaîques,  ou  bien  anapestiques  et  dac- 
tyliques.  Quatre  vers  forment  une  strophe.  Les  rimes 
sont  tantôt  masculines,  tantôt  féminines.  A  la  suite  des 
Niebelungen  se  trouve  un  poème  qui  parait  avoir  été 
composé  vers  la  fin  du  xii"  siècle  :  il  est  intitulé  Klage 
(la  Plainte)  ;  la  rime  y  arrive  toujours  après  trois  longues, 
au  lieu  de  ne  venir  qu'après  la  sixième.  On  y  voit  les 
funérailles  des  héros  morts  du  côté  d'Attila,  le  message 
«nvoyé  dans  leur  pays  pour  y  porter  la  nouvelle  de  leur 
mort,  et  les  honneurs  accordés  à  Dietrich  de  Berne.  — 
La  meilleure  édition  des  Niebelungen  a  été  donnée  en 
1826  par  Lachmann,  d'après  le  manuscrit  de  Munich; 
le  baron  de  Lassberg  a  publié  le  manuscrit  d' Hohenems; 
il  existe  encore  d'autres  éditions  par  Christophe  MQller 
(1782),  Von  der  Hagen  (1810),  Zeune  (1815),  Vollmer, 
Schœnhuth,  et  Leyser.  La  meilleure  traduction  en  alle- 
mand moderne  est  celle  de  Simrock,  bien  préférable  à 
celles  de  Von  der  Hagen,  de  Bûsching,  de  Rebenstoclc,  et 
de  Hinsberg.  Nous  avons  aussi  une  traduction  française 
par  M"**  Moreau  de  La  Mellière,  publiée  par  Fr.  Riaux, 
1839, 2  vol.  in-8<>.  V.  Gôttling,  Sur  ce  quHl  y  a  d'histo- 
rique dans  les  Niebelungen,  enallem.,  Rudolstadt,  1814; 
Mohne,  Introduction  aux  Niebelungen,  en  allem.,  Hei- 
delberg,  1818  ;  Von  der  Hagen ,  Sur  les  Niebelungen  et 
leur  composition,  en  allem.,  Breslau,  1819,  et  Examen 
des  Niebelungen,  Francf.,  1824;  Grimm,  Légendes  hé- 
rdques  allemandes,  en  allem.,  1829;  Lachmann,  Cri- 
tujue  des  Niebelungeny  dans  le  Musée  du  Rhin  de  1830; 
le  même.  Sur  la  composition  priinitive  des  Niebelungen, 
Berlin,  1816;  le  même.  Examen  des  Niebelungen  et  de 
la  Plainte,  ibid.,  1836.  —  Les  principales  scènes  des 
Niebelungen  ont  fourni  des  sujets  de  fresques  au  peintre 
Cornélius  ;  elles  ont  été  aussi  peintes  par  Schnorr  dans  le 
palais  du  roi  de  Bavière  à  Munich.  B. 

NIELLB.  en  italien  niello^  en  vieux  français  nœlle, 
noele,  noïele,  noms  dérivés  du  latin  nigellus,  noir.  On  a 
appelé  ainsi  l'émail  noir  dont  les  orfèvres  du  xv*  siècle 
couvraient  les  tailles  d'une  planche  d'argent  gravée  à  la 
pointe  ou  au  burin,  et  la  planche  elle-même  ainsi  émaillée. 
On  obtient  l'émail  noir  en  faisant  fondre  ensemble  38  par- 
ties d'arsent,  72  de  cuivre,  50  de  plomb,  384  de  soufre, 
et  36  de  borax,  qu'on  fait  chauffer  Jusqu'à  vitrification  : 
cette  composition,  une  fois  refroidie,  est  pilée,  broyée  et 
tamisée  en  poudre  très-fine,  qu'on  répand  avec  précau- 
tion sur  les  parties  gravées  de  la  planche  d'argent.  On 
place  la  planche  près  d'un  feu  clair,  dont  un  sotSSet  ren- 
voie sur  elle  la  flamme;  le  nielle,  mis  de  nouveau  en 
fusion,  adhère  au  métal,  et,  après  avoir  laissé  refroidir, 
on  use  la  superficie  de  la  planche  avec  une  pierre  ponce, 
puis  avec  des  matières  plus  douces.  —  On  a  trouvé  à 
Rome,  en  1793,  des  chandeliers  et  des  bracelets  niellés 
que  l'antiquaire  Visconti  croit  pouvoir  faire  remonter  au 
t*  siècle.  La  niellure  fut  pratiauée  en  France  dès  le 
▼n*  siècle,  surtout  par  les  Marseillais;  elle  servit  à  orner 
des  calices,  des  reliquaires,  des  poignées  d'épée,  des 
manches  de  couteau,  des  couvertures  de  livres,  etc.  La 
bibliothèque  de  l'Arsenal,  à  Paris,  possède  un  Christ  bé- 
«iisant,  ench&ssé  dans  une  reliure  du  xui*  siècle.  A  par- 


tir du  XV',  les  nielles  furent  fabriquées  presque  exclusi- 
vement en  Italie.  Le  Musée  de  Florence  possède  une  Paix 
niellée  en  1452  par  Maso  Finiguerra,  pour  l'église  SWean 
de  cette  ville.  Les  autres  orfèvres  nielleurs  dont  les  noms 
sont  parvenus  jusqu'à  nous  sont:  à  Florence,  Amerighi, 
Michel-Ange  Bandinelli ,  Phil.  Brunelleschi  ;  à  Boloi^ne, 
François  Furnio,  Bartolomco  Gesso,  Geminiano  Rossi,  ot 
le  Francia;  à  Milan,  Daniel  Arcioni  et  Caradosso;  Ain- 
broise  Froppa  de  Pavie,  Forzone  Spinelli  d'Arezzo,  Tagli;- 
came  de  Gènes,  Tencro  etTurino  de  Sienne;  enfin,  Ani. 
Danti,  Pierre  Dini,  Gavardino,  Léon-J,-B.  Alberti,  Per(^ 
grini  de  Césène,  etc.  De  nos  Jours,  les  Russes  ont  fau 
revivre  la  niellure  en  l'appliquant  à  la  décoration  dii 
tabatières  d'argent,  improprement  appelées  tabatières  ch 
plcUine.  En  1830,  un  atelier  de  niellure  a  été  ouvert? 
Paris  par  Wagner  et  Mention.  V.  Ducbesne,  Essai  sut 
les  nielles,  Paris,  182G,  in-8o.  B. 

NIGAUD  (Le),  Jeu  de  cartes,  appelé  aussi  la  Patienci 
russe»  Il  se  joue,  à  un  nombre  indéterminé  de  joueurs, 
avec  un  jeu  complet  ou  même  deux.  On  fait  trois  lots  de« 
enjeux,  un  gros,  un  moyen,  et  un  petit,  pour  les  premiers 
qui  gagneront.  Toutes  les  cartes  ayant  été  distribuées 
une  à  une,  chaque  Joueur  fait  un  tas  de  celles  qu'il  a  re- 
çues, et  les  retourne.  Le  premier  à  Jouer  prend  sa  carte 
de  dessus,  et  s'en  débarrasse  sur  celui  dont  le  tas  montre 
une  carte  immédiatement  inférieure;  il  continue  Jusqu'à 
ce  qu'il  ne  trouve  plus  à  placer  de  carte  de  cette  manière. 
Les  autres  Joueurs  font  de  même  à  leur  tour.  II  peut  se 
faire  qu'un  Joueur  se  trouve  chargé  peu  à  peu  d'une 
grande  quantité  de  cartes;  il  ftiit  le  nigaud  on  la  pO" 
tience  :  s'il  a  occasion  de  Jouer,  comme  ses  cartes  se 
suivent,  il  se  débarrasse  promptement,  ce  qui  s'appelle 
la  débâcle.  Les  trois  premiers  Joueurs  qui  ont  écoulé 
leurs  cartes  gagnent  les  enjeux. 

NIHILISME  (du  latin  nthil,  rien),  nom  par  lequel  on 
désigne  la  doctrine  sceptique  de  Hume.  Partant  de  ce 
principe  admis  par  Locke,  que  nous  ne  connaissons  rien 
que  par  Vintermédiaire  des  idées ,  Hume  démontrait  ri- 
goureusement que  nous  ne  connaissons  rien  autre  chose 
qus  nos  idées,  et  qu'ainsi  tout  dans  le  monde  se  réduit  à 
une  suite  d'iaées  et  de  sensations  purement  subjectives, 
sans  qu'il  soit  besoin  de  concevoir  nors  de  nous  quelque 
réalité  que  ce  soit.  B-— b. 

NILOMËTRK.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

NIMBE  (du  latin  nimbus,  nuage),  nom  que  les  Anciens 
donnaient,  tantôt  au  nuage  dans  lequel  un  Dieu  s'enve- 
loppait pour  descendre  sur  la  terre,  tantôt  à  la  couronne 
lumineuse  d'une  divinité,  d'Apollon  ou  le  Soleil  par  exem- 
ple. Le  nimbe  est  aussi  un  attribut  de  la  sainteté  dans 
l'Iconographie  chrétienne  :  comme  la  gloire  et  Yauréole, 
il  entoure  la  tête  des  personnes  divines,  des  anges  et  des 
saints;  on  en  a  mis  même  quelquefois  aux  empereurs  et 
aux  rois  comme  marque  de  leur  puissance.  Le  nimbe  est 
variable  de  forme.  Lorsqu'il  est  triangulaire,  il  ne  con- 
vient qu'à  Dieu;  il  indique  la  S^*  Trinité,  sans  désigner 
particulièrement  une  des  trois  personnes  ;  si ,  de  plus,  il 
est  Inscrit  dans  un  cercle,  il  indique  en  outre  l'éternité. 
Le  nimbe  circulaire  uni  convient  aux  personnes  divines, 
aux  anges  et  aux  saints;  quand  il  se  place  sur  la  tête 
d'une  dfes  trois  personnes  divines,  on  le  marque  d'une 
croix,  et  il  est  dit  nimbe -crucifère.  Le  nimbe  est  aussi 
souvent  rayonnant  ^  c.-à-d.  accompagné  de  rayons  :  lors- 
que ceux-ci  forment  une  croix,  le  nimbe  est  encore  cru- 
cifère. Les  nimbes  portent  quelquefois  le  nom  des  per- 
sonnes qu'elles  couronnent.  Enfin  ils  prennent  différentes 
désignations  suivant  leurs  ornements;  c'est  ainsi  qu'on 
dit  qu'un  nimbe  est  polylobé,  festonné,  orÛ^  etc.  La 
couleur  donnée  aux  nimbes  dans  les  anciennes  pein- 
tures a  été  quelc^uefois  symbolique,  comme  le  prouve  le 
nimbe  noir,  ou  nimbe  en  deuil,  attribué  au  traître  Judas; 
plus  souvent  elle  est  purement  hlérarchiaue.  Un  manu- 
scrit de  la  bibliothèque  de  Strasbouiv,  pemt,  dit-on,  par 
Herrade,  abbesse  du  monastère  de  S'*-Odile  en  Alsace, 
représente  tout  le  Paradis  :  le  Christ,  les  Vierges,  les 
Apôtres,  les  Martyrs  et  les  Confesseurs  portent  le  nimbe 
doré  ;  les  Prophètes  et  les  Patriarches,  qui  n*ont  connu 
la  vérité  qu'imparfaitement  et  à  travers  des  métaphores, 
ont  le  nimbe  en  argent;  les  continents  sont  ninu)és  en 
rouge,  les  mariés  en  vert,  les  pénitents  en  couleur  Jau- 
nâtre légèrement  nuancée. 

NIMES  (Arènes,  —  Maison  carrée  de).  V,  AaioiES, 
Maison  carrée. 

NINIVE  (Ruines  de).  V.  Asstmbn  (Art). 

NIOLË  (par  corruption  de  yole)^  nom  donné,  dans  les 
marais  du  bas  Poitou,  à  une  nacelle  en  planches  de  chêao. 


NOE 


1309 


NCEU 


dont  les  deux  extrémités,  légèrement  relevées  au-dessus 
de  l'eau,  sont  coupées  carrément.  Le  nioleau  (ou  petite 
Dîole)  est  carré  à  Tarant,  et  se  termine  en  pointe  k  l'ar- 
rière. Dans  les  résates,  on  se  sert  de  nioleaux  appelés 
périssoires.  Le  nioïeur,  qui  conduit  l'esquif,  est  placé  à 
l'arrière,  et  manœuvre  une  ningle,  hampe  de  2  à  5  met. 
de  long,  terminée  car  une  dent  de  fer  à  double  pointe. 

NIQUET,  monnaie  française  de  peu  de  valeur,  frappée 
nti  temps  de  Charles  YI.  On  pense  que  NiqtÂet  est  une 
abréviation  de  NicolaSy  nom  du  monnayeur  qui  aura  été 
chargé  de  fabriquer  ces  espèces. 

NIZÂM.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d'Histoire, 

NOBILIAIRE,  livre  contenant  le  catalogue  généalogique 
(t's  familles  nobles  d'un  pays,  avec  leurs  titres  et  armoi- 
ries. V,  Arhorial. 

NOBLE,  monnaie.  \  V.  notre  Dictionnaire  de  Btogra- 


NOBLESSE. 


phie  et  ^Histoire. 


ROBLESSB  (Quartiers  de^.  V.  Ocartier. 

MOBLBssB  (Titres  de).  V,  Noms  bt  rrrass. 

HOBLESSK  DU  8TTLB,  qualité  conslstaut  en  une  certaine 
élévation  de  sentiments  et  de  pensées  qui  fait  éviter  les 
objets  vils,  les  expressions  basses  et  triviales.  La  noblesse 
De  convient  pas  seulement  à  quelques  compositions  ;  les 
sujets  les  plus  simples,  les  détails  les  plus  humbles  ont 
une  noblesse  qui  leur  est  propre  et  que  le  goût  sait  dis- 
œroer.  C'est  la  pensée  de  Boileau  (Art  poét»y  ch.  x)  : 

Quoi  que  vous  écrlvlei,  tfvites  la  basseue  ; 
Le  style  le  moins  noble  a  pourtant  sa  noblesse. 

Les  grands  écrivains  n*ont  pu  s'interdire  toujours  les 
mots  communs  et  vulgaires,  mais  ils  ont  su  les  relever 
par  d'heureuses  alliances. 

N(XIES,  autrefois  nopces  (du  latin  nuptiœ)^  mot  qui 
désigne  moins  le  mariage  que  les  réjouissances  aui  l'ac- 
compagnent. On  l'emploie  avec  son  sens  naturel  quand 
on  {Mirle  de  secondes  noces.  Les  dangers  de  ce  second 
mariage,  quand  il  y  a  des  enfants  du  premier,  ont  été 
signalés  de  tout  temps,  et  Athénagore  allait  jusqu'à  l'ap- 
peler on  honnôte  adultère.  Nos  lois  anciennes  prohibaient 
les  secondes  noces,  lorsqu'il  existait  des  enfants  du  pre- 
mier mariage.  La  législation  actuelle  décide  que  l'époux 
qui  le  remarie  ne  peut  attribuer  à  l'autre,  par  donation 
contractuelle,  qu'une  part  d'enfant  '«3  moms  prenant, 
pourvu  encore  qu'elle  ne  dépasse  nas  le  quart  de  ses 
biens.  L'opinion  publique  a  ansbi  vu  longtemps  les  se- 
condes noces  avec  défaveur,  et  ceux  qui  y  convolaient 
étaient  exposés  à  un  charivari  (F.  ce  mot),  —  En  Hol- 
lande, on  nomme  noces  d^argenf  ?9.  fête  que  des  époux 
donnent  à  leurs  connaissances  api^s  25  -^os  de  mariage, 
et  noces  d'or  celle  qu'ils  donnent  après  50  ans.         B. 

KOCES  ALDOBBAWDni BS.    V.  AlDOBRANDINES. 

NOCTURNE,  terme  de  Liturgie.  V.  notre  Dictionnaire 
de  BiograptUe  et  ^Histoire, 

NOCTURNE,  en  termes  de  Musique,  morceau  à  deux,  trois 
ou  quatre  voix,  d'un  caractère  généralement  tendre  et 
langoureux,  propre  à  être  exécuté  le  soir,  en  guise  de  sé- 
réi»de.  Les  albums  de  chant,  publiés  chaque  année,  con- 
tiennent d'ordinaire  un  Nocturne.  On  a  étendu  ce  nom 
à  des  pièces  de  musique  écrites  dans  une  expression 
mélancolique  pour  deux  instruments  concertants.     B. 

N0EL5,  cantiques  spirituels  en  langue  vulgaire,  com- 
posés en  l'honneur  de  la  Nativité  de  Notre  Seigneur,  et 
qu'on  chantait  au  temps  de  Noél  dans  les  églises,  ordinai- 
rement sur  des  airs  populaires  et  rustiques,  pour  mieux 
rappeler  sans  doute  que  des  pasteurs  de  Bethléem  avaient 
les  premiers  célébré  la  venue  du  Sauveur.  C'est  de  là 
qae  leur  vint,  en  Italie,  le  nom  de  Pastourelles  ou  can- 
tiques des  Pasteurs,  et,  en  Angleterre,  celui  de  Ckristmas 
cârots  ou  rondes  champêtres  de  Noél.  On  dit  même  que, 
la  Teille  de  Noôl ,  ces  cantiques  se  chantaient  au  milieu 
(les  danses,  dans  le  cimetière  des  ^Uses.  —  Les  premiers 
NoéU  manuscrits  sont  du  xi*  siècle.  Guillaume  de  Vilit>- 
aeuve.  Trouvère  de  la  fin  du  un*,  cite  des  collections  de 
Koëls  dans  un  fabliau  recueilli  par  Babazan  et  Méon. 
La  bibliothèque  La  Vallière  possédait  dH^  genre  un  pré- 
cieux recueil  du  xiv*  siècle.  Le  siècle  smvant  en  a  laissé 
un  plus  grand  nombre  ;  mais  les  canti<{ues,  prenant  une 
antre  forme,  ont  été  mis  en  action,  distribués  par  per- 
sonnages, et  sont  devenus  de  véritables  Mystères  de  la 
Nativité.  Au  xvi*  et  surtout  au  xvn*  siècle,  les  Noëls  se 
multiplient  et  forment  des  recueils  considérables.  Parmi 
les  collections  de  Noêls  écrits  en  patois,  et  qui  ne  sortent 
pas  du  fcenre  primitif,  nous  citerons  :  Les  Noëls  nouveaux 
enpatois  de  Besançon,  par  F.  Gauthier,  2  vol.  in-i2  (1751), 


réédités  en  1804,  chefs-d'œuvre  de  naïveté  au  Jugemeat 
de  Charles  Nodier  ;  Grande  Bible  de  Noëls  anciens  et  itoti- 
veauXt  Toul,  1823;  le  recueil  des  62  Noëls  provençauM 
de  Saboly  (1669),  réédités  à  Avignon  en  1730  et  1820;  les 
Noëls  de  Pierre  Goudelin  (xvii*  siècle),  écrits  dans  ie  dia- 
lecte toulousain  ;  les  Noëls  en  patois  we  Montpellier  AZ'ïlSx 
les  Noëls  dauphinois;  les  Noëls  limousins,  Tulle  ;  Grande 
Bible  de  Noëls  poitevins  vimtx  et  nouveaux,  Poitiers  et 
Niort,  1824  ;  les  Noëls  d^ Auvergne,  recueillis  par  l'abbé 
Paturel,  Clermont-Ferrand,  1733  et  1739;  les  dix  Noëls 
en  patois  du  Fores ,  qui  se  trouvent  dans  les  œuvres  de 
Chapelon,  S^-Étienne,  1779;  les  Noëls  bressans,  qui 
datent  du  règne  de  Louis  XIV  (ceux  de  Bourg  sont  dus  k 
Brassard  de  Montaney,  ceux  de  Pont-de-Vaux,  de  Gone- 
vod,  de  Boz,  de  Reyssouse,  de  S'-Bénigne,  à  Boijoa), 
Chambéry,  1787  et  1845. 

Les  Noëls  ne  conservèrent  pas  toujours  leur  caractèfe 
religieux  ;  le  mot  fut  détourné  de  son  acception  primitive, 
et  servit  à  désigner  des  chants  destinés  à  glorifier  autre 
chose  aue  la  Nativité  de  Jésus-Christ.  C'est  ainsi  qu'outre 
le  Noëtreligietàx,  on  eut  le  Noël  roycU^  chanté  en  l'hon- 
neur du  souverain  ;  le  Noël  politique,  composé  dans  le 
but  d'honorer  un  personnage  distingué,  soit  dans  l'État, 
soit  dans  l'Église;  enfin  le  Noël  badin,  qui  traitait  d'un 
sujet  vulgaire  et  s'adressait  k  de  simples  particuliers.  Il 
y  a  loin,  en  effet,  des  Noëls  pieux  et  édifiants  des  xv*, 
XVI"  et  xvu*  siècles  aux  Noëls  bourguignons.  Ces  Noëls 
remplirent  l'office  de  gazette  pendant  tout  le  xviii*  siècle: 
il  ny  avait  pas  d'événement  dans  la  cité  de  Dijon ,  pas 
de  ridicule  Dourgeois,  pas  d'aventure  qui  ne  leur  servit 
d'aliment.  Le  succès  de  ces  petites  pièces  était  dû  sui^ 
tout  au  talent  d'Aimé  Piron  et  de  Bernard  de  La  Mon- 
noye  :  les  Noëls  du  premier  sont  disséminés  dans  plu- 
sieurs recueils,  où  ils  ont  paru  la  plupart  sans  nom 
d'auteur;  ceux  du  second  ont  été  publiés  à  part,  et  ont 
obtenu  jusqu'à  21  éditions  depuis  1700  jusqu'à  1842.  Ils 
ont  vécu  par  le  mérite  du  fond  et  de  la  forme.  Les  airs 
sur  lesquels  Ils  étaient  chantés,  et  qui  sont  notés  à  la 
suite  des  paroles,  leur  donnent  un  autre  genre  d'origina- 
lité :  ces  airs,  pour  la  plupart  connus  de  père  en  fils ,  et 
dont  il  est  difficile  d'indiquer  la  source,  ont  le  csractère 
du  plain-chant  par  leur  extrême  simplicité  et  par  le  peu 
de  modulations  qu'on  y  rencontre  ;  la  cadence  plagale  s'y 
reproduit  fréquemment,  et  ils  se  terminent  aussi  bien 
sur  la  quinte  que  sur  la  tonique.  Quelques-uns  sont  em- 
pruntés à  Lulli  ;  le  plus  grand  nombre  sont  des  airs  de 
menuets  et  de  gavottes  composés,  au  xvi*  siècle,  par 
Pierre  Certon,  maître  des  enfants  de  chœur  de  la  S**- 
Chapelle  de  Paris,  par  Maillard,  Arcadelt,  Clément  Jan- 
nequin,  Mornable,  les  deux  Vermont,  Fevim,  Dubuisson, 
et  Eustache  Du  Caurroy.  Il  est  assez  remarquable  que 
plusieurs  de  ces  airs  ont  une  ressemblance  frappante,  et 
qui  ne  peut  être  attribuée  au  hasard,  avec  des  mélodies 
écossaises  que  l'on  croit,  mais  à  tort,  avoir  été  composées 
par  David  Rizzio,  favori  de  Marie  Stuart.  Le  musicien  Le- 
sueur  a  enchâssé  dans  son  Oratorio  de  Noël  quelques- 
uns  des  drs  de  Noëls  dont  la  mélodie  est  la  plus  franche 
et  la  plus  populaire. 

NOEUD ,  partie  du  poëme  épique,  dramatique,  roma- 
nesque, etc.,  où  se  manifestent,  soit  des  obstacles  qui 
s'opposent  à  l'accomplissement  d'un  dessein,  soit  des 
difficultés  qui  jettent  un  ou  plusieun  personnages  dans 
une  perplexité  qui  fait  le  principal  intérêt  du  poëme. 
Ainsi,  dans  V Iliade,  le  nœud  de  l'action  est  formé  par 
l'inflexibilité  d'Achille  qui,  irrité  contre  Agamemnon,  et 
s'étant  retiré  des  combats,  résiste  aux  supplications  et 
aux  oflres  brillantes  que  l'offenseur,  humilié  de  la  défaite 
des  Grecs  en  l'absence  du  héros  thessalien,  lui  adresse, 
par  l'intermédiaire  d'Ulysse,  de  Phénix  et  d'Ajax,  pour 
qu'il  reparaisse  à  la  tété  de  ses  soldats  et  sauve  l'armée 
entière  d'un  désastre  imminent.  Le  refus  d'Achille  pro- 
longe les  vicissitudes  de  tous  les  acteun  du  poëme.  Dans 
VOdyssée,  le  nœud  est  l'arrivée  d'Ulysse  à  Ithaque  après 
une  absence  de  20  années,  pendant  lesquelles  U  a  été 
éprouvé  par  les  plus  cruelles  traverses  :  il  trouve  ses 
biens  ravagés  par  ses  voisins  tout-puissants  ;  personne 
ne  le  reconnaît  dans  la  détresse  où  il  est  tombé.  Com- 
ment, dénué  comme  il  est,  fera-t-il  reconnaître  sa  per- 
sonne et  ses  droits?  Comment  vengera-t-il  les  outrâj^ 
faits  à  sa  famille  et  à  son  autorité  7  Le  nœud  de  VÊnéuie 
est  la  ligue  excitée  et  soutenue  par  la  haine  de  Junon ,  et 
qui  met  Euée,  à  peine  arrivé  en  Italie,  dans  le  plus 
grand  danger  que  lui  ait  encore  fait  courir  la  colère  de 
cette  déesse.  L'action  de  la  Jérusalem  délivrée  se  noue  au 
moment  où  la  Croisade  est  sur  le  point  d'échouer  par 
l'absence  de  Tancrède,  et  par  celle  de  Renaud,  qui  a  cédé 


NOM 


1310 


NOM 


<iui  séductions  d^Arinide,  protectrice  des  ennemis  du 
nom  chrétien,  renforcés  alors  même  par  des  secours 
puissants.  —  L*arriTée  imprévue  de  Thést^e  et  son  en- 
trevue avec  Phèdre  forment  le  nœud  de  la  Phèdre  de 
Racine  ;  car  elles  mettent  dans  le  plus  grand  péril  la  reine 
d*abord,  et  ensuite  Hippolyte.  Celui  d'Athalie  se  resserre 
plus  que  jamais  lorsque  Joas  est  réclamé  par  cette  reine 
à  Josabeth.  —  Dans  la  comédie  d'intrigue,  le  nœud  est 
formé  au  moment  où  la  complication  est  la  plus  forte. 
Dans  la  comédie  de  caractère ,  c'est  lorsque  les  princi- 
paux personnages  vont  être  mis  dans  la  situation  qui  fera 
le  mieux  ressortir  les  travers,  les  faiblesses,  les  bizarre- 
ries, les  ridicules  qui  les  caractérisent  :  telle  est  la  fin  du 
3*  acte  du  Misanthrope  de  Molière.  P. 

NOEUD,  en  termes  de  Marine.  V,  Loch. 

NOIR  (Code),  nom  donné  à  un  édit  du  mois  de  mars 
1^85  ayant  pour  objet  principal  de  régler  la  condition  des 
nègres  dans  les  colonies  françaises  de  l'Amérique.  Il  se 
compose  de  60  articles.  L'esclave  y  est  qualifié  chose  ou 
metAle,  et  non  personne  civile  ;  à  ce  titre,  il  ne  peut  rien 
posséder  par  lui-même,  et  fait  partie  de  la  communauté 
entre  époux;  son  témoignaige  nW  pas  admis  en  justice 
contre  son  maître.  Celui  qui  a  frappé  son  maître  ou  quel- 
qu'un des  siens  au  visage,  avec  contusion  ou  effusion  de 
sang,  est  puni  de  mort.  Celui  qui  a  été  en  fuite  pendant 
un  mois  a  les  oreilles  coupées  et  est  marqué  d'une  fleur 
de  lis  sur  l'épaule  ;  pour  la  récidive,  on  lui  coupe  un 
Jarret ,  et  on  le  marque  sur  l'autre  épaule  ;  pour  la  3*  fois, 
il  est  mis  à  mort.  Il  est  loisible  au  maître  de  faire  en- 
chaîner et  battre  de  verges  ou  de  cordes  son  esclave; 
mais  il  ne  peut,  sous  peine  de  confiscation  par  TÉtat, 
lui  faire  subir  des  tortures  ou  des  mutilations  ;  s'il  Ta  tué 
de  ses  propres  mains,  il  peut  être  poursuivi  criminelle- 
ment. Le  Code  noir  recommande  de  traiter  les  esclaves 
«n  bon  père  de  famille,  de  donner  des  soins  à  ceux  qui 
sont  tombés  malades  ou  devenus  infirmes  ;  il  détermine 
la  quantité  de  \ivres  et  l'espèce  de  vêtements  qui  doivent 
leur  être  distribués  ;  il  interdit  le  concubinage  avec  une 
esclave,  et ,  s'il  a  lieu  néanmoins,  l'esclave  devient  libre, 
ainsi  que  les  enfants  qu'elle  aurait  eus  du  maître.  Tout 
blanc  &gé  de  33  ans  peut  afifîranchir  ses  esclaves.  Les 
maîtres  sont  tenus  de  faire  baptiser  et  instruire  leurs 
esclaves^  de  leur  permettre  d'assister  aux  exercices  reli- 
gieux, de  favoriser  les  mariages  entre  eux,  mais  il  ne  leur 
est  pas  permis  de  les  marier  contre  leur  gré.  Les  nègres 
qui  décèdent  chrétiens  doivent  être  déposés  en  terre 
sainte.  Le  travail  est  suspendu  pendant  24  heures, 
le  samedi  à  partir  de  minuit.  —  Une  ordonnance  de 
Louis  XVI,  en  1784,  compléta  la  législation  en  matière 
d'esclavage.  Après  avoir  spécifié  les  heures  de  repos  ac- 
cordées aux  esclaves  les  jours  de  fête  et  les  dimanches, 
elle  alloue  à  chacun  d'eux  un  petit  terrain  qu'ils  cultive- 
ront dans  leurs  loisirs,  et  dont  les  produits  tourneront 
entièrement  à  leur  aisance  personnelle;  elle  établit  des 
infirmeries  convenablement  meublées  pour  les  esclaves, 
défend  de  laisser  ceux-ci  coucher  par  terre,  exige  qu'on 
n'assujettisse  les  femmes  enceintes  et  les  nourrices  qu'à 
un  travail  modéré,  limite  à  50  le  nombre  des  coups  de 
fouet  infligés  comme  ch&timent,  et  décide  que  les  pro- 
cureurs ou  économes  des  habitations  pourront  être,  sui- 
vant les  cas,  pour  sévices  envers  les  esclaves,  révoqués  de 
leurs  fonctions,  ou  condamnés  à  l'amende,  ou  même  mis 
à  mort. 

Le  Code  noir  fut  aboli  par  la  loi  du  16  pluviôse  an  ii 
(9  février  1794),  qui  proscrivait  l'esclavage;  mais  il  fut 
rétabli,  sous  le  Consulat,  par  la  loi  du  30  floréal  an  x. 
Divers  adoucissements  avident  été  apportés  depuis  1815 
a  la  législation,  lorsque  la  Révolution  de  1818  entraîna 
définitivement  la  suppression  de  l'esclavage. 

NOIRE,  note  de  musique  qui  vaut  le  quart  d'une 
ronde  ou  la  moitié  d'une  blanche  :  2  croches,  4  doubles 
croches,  8  triples  croches,  16  quadruples  croches,  sont  des 
équivalents  d'une  noire.  On  (Ustinguait  autrefois  la  noire 
à  queue,  la  noire  carrée,  et  la  noire  en  losange:  le  plain- 
cliant  a  conservé  ces  deux  dernières  espèces,  mais  en  Mu- 
sique on  ne  se  sert  plus  que  de  la  première. 

NOIRS  (Traite  des).  V.  Esct.AVAGE,  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire. 

NOIX,  en  termes  de  Marine,  partie  d'un  m&t  de  hune 
ou  de  perroquet  qui  est  plus  forte  que  le  m&t  lui-même, 
et  qu'on  laisse  en  renfort ,  au-dessous  du  capelage,  pour 
soutenir  les  barres  ;  —  partie  d'un  cabestan  qui  reçoit  les 
baiTes  ou  leviers  au  moyen  desquels  on  le  fait  tourner. 

NOLIS.  V.  Fret. 

NOM,  en  termes  de  Grammaire,  signifie  l'objet  de  la 
^nsée.  C'est  la  chose^  la  substance  (comiue  terrCi  §o- 


m 

leil,  eau,  6o»),  ou  îa  manière  détre,  Vaccident  de  la 
chose,  de  la  substance  (comme  rond<t  chaud,  liquide^ 
dur).  Les  noms  qui  signifient  les  substances  ont  été  ap- 
pelés noms  substantifs  ou  simplement  substantifs;  les 
noms  signifiant  les  accidents  ont  été  nommés  noms  ad^ 
jectifs  ou  simplement  adjectifs  (  V,  Adjectif).  Très-sou- 
vent on  se  sert  seulement  du  mot  nom  pour  désigner  le 
nom  substantif.  11  y  a  deux  sortes  de  noms  substantifs  :  le 
nom  propre  et  le  nom  commun,  général  ou  appellatif. 
Le  nom  propre  est  le  nom  particulier  soit  d'une  personne* 
d'un  animal  ou  d'une  ^hose,  comme  Louis,  Bucéphale^ 
Paris,  Loire,  soit  accidentellement  de  plusieurs  per- 
sonnes, de  plusieurs  animaux  ou  de  plusieurs  choses; 
car  plusieurs  personnes  peuvent  s'appeler  Louis  ou  Pierre, 
plusieurs  chevaux  ou  plusieurs  chiens  peuvent  porter  le 
même  nom ,  plusieurs  villes  peuvent  s'appeler  Clermoni 
ou  Vienne.  Le  nom  commun  est  celui  qui  convient ,  non 
pas  à  plusieurs  personnes,  à  plusieurs  animaux,  à  plu- 
sieurs choses,  mais  à  toutes  les  personnes,  à  tous  les  ani- 
maux, à  toutes  les  choses  semblables  de  la  même  espèce  : 
homme,  cheval,  maison,  ville.  11  est  dit  aussi  appellatif, 
parce  qu'il  exprime  Vappellation  commune  à  tous  les 
individus  d'une  même  espèce.  Les  noms  communs  se 
divisent  en  noms  collectifs  et  en  noms  abstraits  (F.  Cox^ 
LBCTiFS,  Abstraits).  Quant  aux  noms  patronymiques, 
V.  ce  mot.  —  Les  noms  sont  généralement  susceptibles 
de  prendre  diverses  formes  suivant  le  genre  des  êtres 
dont  on  parle  et  suivant  leur  nombre  {V.  Genre,  Nombre). 
C'est  ce  qui  arrive  dans  toutes  les  langues  ;  mais  le  grec, 
le  latin,  l'allemand,  font  subir  aux  noms,  suivant  le  rôle 
qu'ils  remplissent  dans  la  phrase,  certaines  inflexions 
qu'on  appelle  cas  (V.  ce  mot)^  et  dont  la  récitation  dans 
un  certain  ordre  convenu  constitue  ce  qu'on  appelle  la 
déclinaison  (  V.  ce  mot).  Lorsqu'un  nom  manque  de  cer- 
tains cas,  ou  bien  lorsqu'il  ne  s'emploie  qu'à  l'un  des 
deux  nombres,  il  est  dit  défectif  ou  défectueux  (  K.  ce 
mot);  lorsque  la  formation  des  cas  ou  celle  du  pluriel 
n*ont  pas  lieu  en  vertu  des  règles  ordinaires,  il  est  dit 
i}Tégulier  {V.  ce  mot).  Dans  les  langues  pourvues  de  cas, 
on  appelle  hétéroclite  (V.  ce  mot)  le  nom  qui  présente 
une  déclinaison  à  certains  cas,  une  autre  à  d'autres; 
surabondants  (V.  ce  mot)^  ceux  qui  suivent  complète- 
ment deux  déclinaisons  différentes.  —  Sur  le  rôle  d'ocf- 
jectif]oué  souvent  par  le  nom  substantif,  V.  Adjectif, 
NOM  COLLECTIF  (Société  eu).  V.  SoaÉTé. 

NOM  DE  BAPTÊME.    V.   PR^NOM. 

NOM  DE  GUERRE,  uom  OU  sobriquet  que  prenaient  au- 
trefois les  soldats,  quand  ils  s'enrôlaient.  Par  extension , 
on  qualifie  de  même  les  sobriquets  qu'on  donne  à  une 
personne,  soit  en  badinant,  soit  pour  désigner  quelque 
qualité,  plutôt  mauvaise  que  bonne.  Les  comédiens 
prennent  souvent  des  noms  de  guerre,  qu'il  serait  plus 
logique  d'appeler  noms  de  théâtre. 

NOM  DE  NOMBRE.   V.  NUMÉRAOX  (AdjOCUfs). 

NOM  DE  RELIGION,  Dom  que  prennent  les  religieux  et  les 
religieuses  de  certains  Ordres  en  embrassant  la  vie  mo- 
nastique, et  qui  remplace  leur  nom  propre  ou  de  famille. 
Tels  sont,  par  exemple,  frère  Philippe,  sœur  S^^  M<i- 
rie,  etc.  Les  Frères  de  la  Doctrine  chrétienne  prennent 
aussi  des  noms  de  religion. 

NOM  PROPRE  ou  DE  FAMILLE.  V,  notTO  Dictionnoire  4ê 
Biographie  et  d'Histoire,  p.  1027,  col.  2. 

NOM  SOCIAL.  V.  Raison  sociale. 

NOMS  et  titres.  Avaut  la  Révolution  de  1789,  les  pos- 
sesseurs de  terres  féodales  ajoutaient  à  leur  nom  de 
famille  celui  de  la  terre  dont  ils  étaient  propriétaires  ou 
seigneurs,  et  souvent  même  ne  portaient  que  ce  dernier; 
ils  prenaient  aussi  la  qualification  nobiliaire  attachée  au 
domaine,  s'il  avait  titre  de  duché,  de  comté,  etc.  D'autres 
avaient  fait  précéder  leur  nom  de  la  particule  de,  à  la- 

2uelle  on  attachait  l'idée  de  noblesse.  Les  usurpations 
e  titres  nobiliaires  ont  existé  de  tout  temps  ;  elles  ont 
été  frappées  de  diverses  peines  par  l'ordonnance  d'Or- 
léans en  1560,  l'ordonnance  de  Blois  en  1579,  l'édit  de 
1600,  le  Code  Michau  en  1629,  l'édit  de  janvier  1634,  les 
déclarations  du  marier  1 661 ,  du  30  mai  1 702,  du  30  mai 
1703,  etc.  L'Ass^^Rée  constituante,  jugeant  les  noms  et 
les  titres  féodauxcontraires  à  l'égalité,  les  abolit  par  dé- 
cret du  19  juin  1790,  et  décida  qu'un  citoyen  ne  pourrait 
porter  que  le  vrai  nom  de  sa  famille.  Une  sanction  pénale 
fut  donnée  à  ce  décret,  le  27  septembre  1791  :  tout  ci- 
toyen qui,  dans  un  acte  quelconque,  aurait  pris  une  qua- 
lification ou  un  titre  supprimé,  devait  payer  une  amende 
éj^ale  à  six  fois  la  valeur  de  sa  contribution,  était  rayé  du 
tableau  civique,  et  déclaré  incapable  d'occuper  aucun 
emploi  civil  ou  militaire.  Par  décret  du  24  brumaire 


NOM 


1311 


NOM 


tnn  (14  norembre  1793),  la  Convention  conféra  à  tous 
ta  citoyens  la  faculté  de  changer  de  nom  propre,  et  de 
prendre  celui  qui  leur  conviendrût,  en  se  conformant  aux 
formalitét  prescrites  par  les  déclarations  de  naissance. 
Après  la  chute  de  Robespierre,  quelques  hommes  oui 
STaient  porté  des  titres  de  noblesse  ou  des  noms  précédés 
de  la  poticule  ayant  cru  pouvoir  les  reprendre  dans  les 
actes  publics,  la  loi  du  6  fructidor  an  n  (23  août  1794) 
interdit  à  tout  citoyen  de  porter  d*autres  noms  et  pré- 
noms que  ceux  exprimés  dans  son  acte  de  naissance,  et 
d*i\Iouter  aucun  surnom  à  un  nom  propre,  à  moins  quMl 
ficAt  servi  Jusque-là  à  distinguer  les  membres  d*une 
même  famille,  sans  rappeler  les  qualifications  féodales 
iQ  nobiliaires  :  les  contrevenants,  que  tout  citoyen  avait 
le  droit  de  dénoncer,  étaient  punis  correctionnellement 
d'un  emprisonnement  de  6  mois,  et  d*une  amende  égale 
su  quart  de  leurs  revenus;  la  récidive  entraînait  la  dé- 
gradation civiaue,  prononcée  par  le  tribunal  criminel. 
Les  fonctionnaires  coupables  de  n^avoir  pas  observé  sur 
les  actes  les  prescriptions  de  la  loi  étaient  frappés  de  des- 
titution, déclarés  incapables  d*exercer  aucun  emploi  pu- 
blic, et  condamnés  aussi  à  une  amende  égale  au  quart 
de  leurs  revenus.  Un  arrêté  du  Directoire,  en  date  du 
19  venttee  an  vi  (9  mars  1798),  eut  pour  but  de  rappeler 
à  Tobservation  de  la  loi  du  6  fructidor  an  n.  —  Une  réac- 
tion contre  les  idées  de  la  Révolution  eut  lieu  sous  le 
premier  Empire.  Malgré  la  Constitution  de  Tan  xu,  qui 
interdisait  le  rétablissement  du  régime  féodal,  un  décret 
du  30  mars  et  un  sénatus- consulte  du  14  août  1806 
créèrent  de  nouveaux  titres,  que  Napoléon  I*'  distribua 
i  ses  généraux  et  à  ses  ministres.  Le  1*'  nuirs  1808  pa- 
rurent les  statuts  qui  organisèrent  la  nouvelle  noblesse; 
celle-d  put  devenir  hérâiitaire  par  la  constitution  des 
majorats  et  à  certaines  autres  conditions.  Toutefois,  Na- 
poléon n'entendait  pas  rétablir  Tancienne  noblesse  :  dé- 
fense était  faite  de  porter  des  titres  qu'il  n*eût  pas  confé- 
rés, et  leCodepéncU  de  1810  infligea  un  emprisonnement 
de  G  mois  à  2  ans  à  quiconque  en  aurait  pris  indûment. 
La  Restauration  rendit  à  la  noblesse  ancienne  ses  titres, 
et  conserva  les  siens  à  la  nouvelle,  mais  en  spécifiant 
qu*il  ne  s'asissait  que  de  rang  et  d'honneurs,  nullement 
de  Texemption  des  charges  sociales.  Une  ordonnance  du 
il  juillet  1816  étendit  aux  titres  de  la  noblesse  monar- 
chique la  protection  que  le  Codé  pénal  avait  accordée 
aux  titres  impériaux.  Après  la  Révolution  de  1830,  les 
distinctions  nobiliaires  furent  dédaigneusement  aban- 
données au  caprice  et  à  la  merci  de  tous  ;  on  les  reléguait 
dans  la  fantaisie,  et  on  en  livrait  Tusurpation  au  ridi- 
cule. Néanmoins,  le  roi  Louis-Philippe  conféra  quelques 
titres,  UL  plus  grand  nombre  furent  usurpés  par  la 
vanité,  et  Ton  se  para  surtout  de  la  particule.  Le  Gou- 
vernement provisoire  de  1848  proscrivit  les  titres  et  qua- 
lifications de  noblesse;  mais  son  décret  fut  aboli  après  le 
coup  d*État  de  1851.  Il  y  eut  depuis  lors  une  recrudes- 
cence de  faux  nobles,  produite  par  la  mauvaise  foi,  Tin- 
térét  et  des  calculs  coupables,  plutôt  encore  que  par  la 
sottise.  Aussi  une  loi  du  28  mai  1858  est-elle  intervenue  : 
elle  frappe  d'une  amende  de  500  fr.  à  10,000  fr.  qui- 
conque, sans  droit  et  en  vue  de  s'attribuer  une  distinction 
honorifique,  aura  publiquement  pris  un  titre,  ou  aura 
changé,  altéré,  modifié  le  nom  que  lui  assignent  les  actes 
de  rétat  ciril.  Une  circulaire  du  ministre  de  la  Justice,  en 
date  du  19  juin  de  la  môme  année,  explique  le  sens  de 
cette  loi  :  on  n'a  point  voulu  inquiéter  les  familles  qui 
ont  pour  elles  la  bonne  foi,  rautorité  d*une  longue  pos- 
session, et,  en  général,  ces  preuves  morales  qui  tiennent 
Heu  de  titres  en  forme,  mais  seulement  atteindre  les 
charlatans  qui  ont  eu  en  vue  d'abuser  le  public.  Napo- 
léon m  a  conféré  au  maréchal  Pélissier  en  1856  le  titre 
de  doc  deMalaJcoff,  au  maréchal  Mac-Mahon  en  1859  celui 
de  duc  de  Magenta,  et  au  général  Cousin-Montauban  en 
1862  celui  de  comte  de  PiUikao.  Ceux  qui  obtiennent  des 
titres  de  noblesse  doivent  payer  certains  droits  :  d'après 
une  ordonnance  des  8-14  oct.  1814  et  une  loi  du  28  avril 
iS16,  il  y  a,  pour  lettres  patentes  portant  collation  du  titre 
<le  duc,  un  enregistrement  de  3,000  fr.  Pour  titre  hé- 
réditaiié  de  marquis  et  de  comte,  on  paye  :  au  sceau, 
0,000  fr.;  au  référendaire,  150  fr.;  à  l'enregistrement, 
1,200  fr.  JPour  titre  de  vicomte  :  au  sceau,  4,000  fr.;  au  ré- 
férendaire, 150  fr.;  à  l'enregistrement,  800  fr.  Pour  titre 
de  baron  :  au  sceau,  3,000  fr.;  au  référendaire,  150  fr.;  à 
l'enregistrement,  600  fr.  Pour  titre  de  chevalier  :  au  sceau, 
<K)lr.;  au  référendaire,  50  fr.;  à  l'enregistrement,  12  fr. 
PcNir  lettres  de  noblesse  :  au  sceau,  600  fr.;  au  référen- 
daire, 50  fr.;  à  l'enregistrement,  120  fr. — La  loi  du  1 1  ger- 
minal an  XI  (f  avril  1803)  décide  que  toute  personne 


qui  a  quelque  raison  de  changer  de  nom  doit  en  adraner 
la  demande  motivée  au  ministre  de  la  justice,  après 
avoir  fait  insérer  au  Moniteur  et  dans  deux  journaux 
de  son  département  l'avis  du  changement  qu'elle  ré- 
clame; le  ministre  ne  répond  qu'au  bout  de  trois  mois  : 
d'après  une  ordonnance  au  3  juin  1818,  l'arrêté  d'autori- 
sation ne  doit  recevoir  son  exécution  qu'au  bout  d'un^' 
année  à  dater  du  jour  de  son  insertion  au  BiUUtin  des 
Lois,  délai  pendant  lequel  des  oppositions  peuvent  ètro 
présentées.  Toute  erreur  de  nom  dans  un  acte  de  l'état 
dvil  ne  peut  être  rectifiée  que  par  un  jugement  du  tri- 
bunal civil;  ce  tribunal sancuonne  aussi  les  autorisations 
accordées  pour  changement  de  nom.  B. 

NOMADE,  qui  n'a  pas  d'habitation  fixe.  C'est  une 
qualification  donnée  aux  tribus  peu  civilisées  qui  font 
paître  des  troupeaux. 

NOMBRE,  en  Grammaire,  manière  de  signifier  les 
noms  communs,  selon  qu'on  les  applique  à  une  des  per- 
sonnes, à  un  des  animaux,  à  une  des  choses,  auxquels 
ils  conviennent,  ou  à  deux,  ou  à  plusieurs.  Dans  le 
1^  cas,  llnflexion  particulière  que  reçoit  le  nom  s'ap- 
pelle nombre  singulier:  dans  le  2*,  nombre  duel;  dans 
le  3*,  nombre  pluriel.  On  dit  par  abrévation  singulier, 
duel,  pluriel  (V.  ces  mots).  Les  noms  propres  ne  sont  par 
eux-mêmes  susceptibles  que  du  singulier;  si  on  les  met 
quelmiefois  au  pluriel,  comme  quand  on  dit  les  Césars, 
les  Àlexandres,  les  Platons,  c'est  par  figure,  en  compre- 
nant dans  le  nom  propre  toutes  les  personnes  oui  leur 
ressemblent.  —  Le  duel  est  propre  au  grec  et  à  l'hébreu. 
—  Les  adjectifs  anglais  ne  sont  point  susceptibles  de 
prendre  Tinflexion  du  nombre.  —  Par  extension,  le  nombre 
a  passé  du  nom  au  verbe.  Cette  inflexion ,  sensible  dans 
les  langues  néolatines,  l'est  surtout  dans  les  langues  an- 
ciennes. P. 

NOMBRE  (Noms  de).  V,  NovâiAux  (Substantifs). 

NOMBRE,  en  termes  de  Poétique,  succession  régulière 
de  temps  et  par  conséquent  de  mesures,  qui,  lorsqu'elle 
arrive  à  son  terme,  se  résume  pour  ainsi  dire  en  un  nombre 
total.  Les  mesures  ou  pieds  sont  les  éléments  du  nombre; 
aussi  les  anciens  Latins  confondaient  souvent,  dans  le 
langage  littéraire,  le  nombre  et  le  vers.  Levers  hexamètre 
est  un  nombre  résultant  de  la  succession  de  6  mesures 
qui  comprennent  chacune  4  temps,  c'est-à-dire  en  tout 
24  temps,  etc.  Si,  dans  le  vers,  on  considère,  non  plus 
la  succession  totale  des  temps,  mais  Vespace  même,  au- 
trement le  nombre  des  syllabes  dont  il  se  compose,  sans 
éf^d  à  leur  valeur  prosodique;  alors  ce  n'est  plus  un 
nombre,  c'est  un  rhythme.  Tels  sont  les  hendécasyl- 
labes  italiens,  et,  généralement  parlant,  les  vers  modernes 
(K.  Rbythmb).  —  Le  nombre  pouvait  entrer  aussi  dans  la 
prose  des  Anciens;  et  ils  disaient  que  le  style  était  nom- 
hreux,  lorsque  certains  pieds,  certaines  mesures  s'y  ren- 
contraient habilement  disposés,  ou  lorsqu'on  savait  y 
combiner  savamment  et  à  propos  les  brèves  et  les  lon- 
gues, enfin,  et  surtout,  lorsque  la  chute  de  la  période  se 
faisait  d'une  manière  harmonieuse.  Le  plus  parfait  mo- 
dèle de  la  prose  nombreuse  fut  chez  les  Grecs  Isocrate, 
chez  les  Romains  Cicéron.  Ce  dernier  a  exposé  la  théorie 
des  nombres  oratoires  dans  le  traité  intitulé  Orator,  S  ^9 
et  suiv.,  et  dans  le  1II«  livre  des  dialogues  De  Oratore,  5^8 
et  suiv.  V.  aussi  Quintilien,  IX,  4;  Benoit  Varchi,  Erco- 
lano,  quest.  9. — h^  nombre  est  bien  moins  marqué  dans 
les  langues  modernes,  et  on  particulier  dans  la  nôtre. 
Cependant  on  dit  quelquefois  un  style  nombreux,  une 
phrase,  une  prose  nombreuse;  ce  qui  signifie  qu'on  y 
trouve  un  heureux  assemblage  de  mots  à  syllabes  pleine» 
et  sonores.  P« 

NOMBRE  d'or.  I  F.  ces  mots  dans  notre  DiC" 

NOMBRES  (Livre  des).  )      tionnaire  de  Biographie  et 

NOMBRES  sACRés.  )     d^Histoirs. 

NOME.  Dans  la  littérature  grecque,  ce  mot  désigne  un 
chant  ou  un  air  assujetti  à  une  certaine  harmonie,  à  une 
certaine  cadence,  comme  à  une  sorte  de  loi  {nomos)  qu'il 
n'était  pas  permis  d'enfreindre  en  changeant  à  discrétion 
le  ton  de  la  voix  ou  celui  de  l'instrument.  Les  nomes 
étalent  accompagnés  par  la  lyre  ou  la  flûte,  et  consacrés 
à  des  sujeu  religieux.  Depuis  Terpandre,  on  les  divisait 
généralement  en  7  parties  ou  couplets,  dont  le  1*'  s'ap- 
pelait pr^/tMie  léparkhéia),  et  le  dernier  épilogue  {épUo- 
gos).  Le  musicien  Hmothée  en  avait  composé  un  nombre 
considérable;  mais  il  n'en  est  rien  resté.  Les  nomes  em- 
pruntaient leur  dénomination  :  1*  de  certains  peuples; 
ainsi,  il  y  avait  le  nome  édien,  le  nome  béotien;  —  2*  de 
la  nature  du  rhythme,  comme  le  nome  orthien,  air  de 
flûte,  à  modulation  élevée,  à  rhythme  vif;  il  était  surtout 
consacré  à  Pallas;  à  l'approche  des  batailles,  il  servait  a 


NON 


ni2 


NOR 


exciter  les  courages;  le  nome  trochaM(iu0  était  approprié 
aux  marches  et  aux  charges  militaires,  ou  aux  danses 
courantes  et  légères;  —  3*  de  leurs  inventeurs  :  nomes 
Terpandrien,  EtiéracUn^  Cépionign;  on  manque  de  ren- 
seignements sur  ceux  de  cette  catégorie;  —  4*  de  leurs 
sujets  :  le  nome  pythique  (consacré  aux  fêtes  d'Apollon) , 
avait  cinq  parties,  représentant  les  cinq  circonstances  du 
combat  d^ApoIlon  contre  le  serpent  Python  :  dans  la  i**, 
qui  n*était  qu'un  prélude  (jptfira),  le  Dieu  reconnaissait 
le  terrain  ;  la  2*  exprimait  la  provocation  {kat<ikel9tÂsmos); 
la  3*  {ïambicon^^  où  Ton  imitait  d'abord  le  son  delà  trom- 
pette, se  terminait  sur  un  ton  aigu,  pour  exprimer  le 
grincement  de  dents  du  monstre  percé  par  le  dieu  ;  la 
4*  Upondeion)^  d'un  ton  plus  grave,  exprimait  la  victoire; 
(a  5«  (catachoreusis)  figurait  la  danse  du  dieuen  réjouis- 
sance de  son  triomphe.  Le  nome  harmcUique  fut  inventé 
sans  doute  à  une  époque  où  on  combattut  encore  sur  des 
cliars  {harmata);  on  désignait  aussi  sous  ce  nom  un 
chant  relatif  à  Hector  traîné  autour  du  tombeau  de  Pa- 
trocle,  les  pieds  liés  au  char  d'Achille;  le  nome  pc4y~ 
mnestien  roulait  sur  des  demandes  en  mariage  {mnéstéià)  : 
il  y  en  avait  un  pour  chaque  sexe;  ces  nomes  parussent 
avoir  été  i)eu  décents  et  mal  famés;  le  nome  Cradias 
était  un  air  de  flûte  Joué  dans  les  fêtes  appelées  Cradé- 
phoriês,  parce  au'on  y  portait  des  branches  de  figuier 
(cradé)^  —  5*  ae  leur  mode  :  nome  aigu,  nome  grave  ; 
—  6*  de  leur  composition:  nome  trimèle,  Utraède  (à 
3  mélodies,  à  4  chants),  etc.  V.  le  commentaire  de  Bu- 
rette sur  le  Traité  de  ta  musique  de  Plutarque,  dans  le 
tome  X  des  Mémoires  de  VAcadémie  des  Inscriptions  et 
BelleS'LsUres ,  et  les  Observations  de  Clavier,  à  la  fin 
du  tome  XXII  de  son  édition  du  Plutaraue  d'Amyot,  Paris, 
1820,  25  vol.  in-8^  où  il  a  reproduit  ce  commentaire 
avec  quelques  additions.  P. 

N0MENCLATE13R.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictifmnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

NOMENCLATURE  (du  latin  nomen,  nom,  et  de  clams, 
clef),  liste  de  noms,  et,  par  extension,  ensemble  des  mots 
qui  composent  le  dictionnaire  d'une  langue,  ou  de  ceux 
qui  désignent  les  divers  objets  dont  s'occupe  une  science 
ou  un  art. 

NOMINALISME.  F.  ScoLâSTiQUE. 

NOBilNATIF,  le  premier  des  cas  dans  les  langues  dont 
les  noms  et  les  pronoms  se  déclinent.  Ce  n'est  pas  pro< 
prement  un  cas,  mais  la  matière  d'où  se  forment  les  cas 
par  les  diverses  inflexions  que  subit  cette  première  ter- 
minaison du  nom.  Son  principal  usage  est  d'entrer  dans 
le  discours  avant  tous  les  verbes,  pour  être  le  sujet  de 
la  proposition.  En  grec,  on  rencontre  quelquefois  un 
nominatif  sans  qu'il  soit  suivi  d'un  verbe  :  c'est  un 
nominatif  cAsolu  ;  le  latin  aussi  en  ofiDre  quelques  exem- 
ples. V.  AiiACOLOTBB.  p. 

NOMOGANON  (du  grec  nomos,  loi,  et  condn,  règle), 
recueil  de  canons  apostoUçpes,  de  canons  des  conciles, 
et  de  lois  impériales  relatives  aux  matières  ecclésiasti- 
ques. Le  plus  ancien  de  ces  recueils  est  celui  de  F*ui- 
gentius  Ferrandus ,  diacre  de  l'église  de  Carthaee  au 
VI*  siècle;  le  plus  complet,  oui  va  jusqu'à  Tan  787,  est 
celui  de  Photius,  auquel  Balsamon,  gûde  des  archives 
canoniques  de  Constantlnople  au  xiii*  siècle,  fit  des  addi- 
tions, et  que  Justel  a  publié  dans  sa  Bibliotlteca  juris  ca- 
ftonici,  Paris,  1661.  En  Russie,  le  plus  ancien  nomocanon 
est  attribué  à  S«  Vladimir  (096). 

NOHOTHÈTES  (du  grec  nomos,  loi,  et  tithémi,  Je 
pose ,  J'établis),  nom  donné  chez  les  anciens  Grecs  aux 
l^^gisUteurs.  Les  Athéniens  l'appliquèrent  aussi  aux 
membres  d'un  comité  de  législation  nommés  chaque 
rinnée  pour  examiner  les  changements  qu'on  proposait 
Je  faire  aux  lois  de  Selon. 

KON-ACnVITÉ.  V.  Activité  de  servicb. 

NONCE     i 

kXivi?      /  F.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

NONES.  \      Biographie  et  d: Histoire. 

NON-INTERVENTION  (Système  de).  V.  Intervention, 

2«  alinéa. 

NON-UEU  (Déclaration  de),  déclaration  par  laauelle 
]:i  Chambre  du  conseil  d'un  tribunal  prononce  qu'il  n'y 
a  pas  de  motif  suffisant  pour  poursuivre. 

NON-MOL  V.  Moi. 

NONNE ,  mot  dérivé  du  latin  barbare  nonna  ou  ftofi- 
nana ,  employé  dans  le  sens  de  pénitente,  puis  de  i^t- 
gieuse.  L'étymologie  de  non  nupia^  a  non  mariée,  »  est 
lausse. 

NONOBSTANCES, clauses  par  lesquelles  les  actes  éma- 
nés de  la  chancellerie  romaine  dérogent  aux  règles  éta- 
blies par  les  papes  ou  par  les  conciles.  Leur  nom  vient 


de  C'a  qu'elles  commencent  par  les  mots  latins  fum  cl* 
stantibus, 

NONPAREILLE.  V.  Caractèbes  D'jVPniVERiE. 

NOOLOGIQUES  (Sciences),  nom  par  lequel  on  a  quel  • 
quefois  désigné  les  sciences  qui  traitent  de  l'esprit  hu- 
main (du  grec  noos,  esprit,  et  logos,  discours). 

NOQUET,  lame  de  plomb  de  la  dimension  d'une  ar- 
doise, qui  se  place,  pliée  en  deux,  le  long  des  Joints  des 
lucarnes  et  des  cheminées,  et  sous  les  crochets  de  service. 

NORAGHES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

NORBIALE  (École).  V.  École  normalb,  dans  notre  Oic- 
tionnaire  de  BiograpJUe  et  d^Histoire. 

NORMAND  (Idiome).  Lorsque  les  Normands  se  fixèrent 
dans  la  partie  de  la  Neustrie  qui  a  gardé  leur  nom,  la 
Langue  d'oU  (V.  ce  mot)  était  née,  et,  quoique  informe 
encore,  possédait  déjà  ses  éléments  constitutifs.  Elle  ne 
tarda  pas  à  absorber,  dans  la  haute  Normandie,  l'idiome 
Scandinave  ou  normannique  importé  par  les  pirates  et 
devenu  bientôt  insuffisant  pour  leurs  besoins  :  sous  le 
successeur  de  Rollon,  elle  était  presque  seule  usitée  à 
Rouen.  Mais  à  Baveux  se  maintint  plus  longtemps  une 
langue  qui  avait  beaucoup  de  conformité  avec  le  nor- 
mannique ;  c'était  le  saxon,  apporté  par  q[uelques  aven- 
turiers dans  le  Bessin  vers  la  fin  du  ui*  siècle.  Ces  deux 
langues,  si  voisines,  et  parlées  par  des  peuples  qu'unissait 
une  législation  commune,  finirent  par  se  corrompre  l'une 
Tautre,  et  par  se  fondre  en  un  nouvel  idiome  où  les 
formes  et  l'esprit  du  latin  prévalurent,  le  franco-iior- 
mand  ou  romano-normand.  Cet  idiome  fut  en  usage  par* 
tout  où  les  Normands  imposèrent  leurs  lois,  en  Angle- 
terre et  en  Sicile,  comme  dans  les  provinces  de  France 
2ui  relevaient  de  leurs  ducs  (Normandie,  Maine,  Perche)  ; 
u  côté  du  Nord,  il  subit  l'influence  du  dialecte  picard, 
avec  lequel  il  se  mélangeait  dans  les  environs  d'Abbe- 
ville;  dans  le  commencement  du  xiii*  siècle,  il  s'avança 
vers  l'Est  jusqu'au  cœur  de  l'Ile-de-France;  il  s'étendit 
aussi  au  Sud  dans  la  Bretagne  (la  basse  Bretagne  ex- 
ceptée), dans  une  partie  de  1  Anjou,  et  Jusqu'au  delà  de 
la  Loire,  dans  la  Vendée. 

H  est  impossible  aujourd'hui  de  déterminer  la  part 
d'influence  du  Scandinave  dans  la  formation  du  Aranco-- 
normand  :  cette  influence  n'a  laissé  de  traces  certaines 
que  dans  les  noms  d'iiommes  et  de  lieux.  Les  noms  ter- 
minés en  ville  (du  latin  vUla)^  très-communs  dans  Is 
Seine-Inférieure,  renferment  pour  la  plupart  un  mot 
étranger,  qui  parait  avoir  été  le  nom  propre  ou  le  sur- 
nom d'un  Normand  qui  habitait  la  terre  ou  possédait  le 
village;  iQh  sont  :  BeuzevUle ,  BiervUle,  ifouppevUle, 
Sierville,  BacquevUle,  TancarvUle,  ValliquervUle.  D'au- 
tres noms  sont  terminés  en  tôt,  comme  Yvetot,  Cri- 
quetot,  Houdetot,  Sassetot,  etc.,  terminaison  qui,  en 
saxon,  signifie  cour,  masure,  enclos.  La  terminaison  bec 
vient  également  du  Scandinave  et  du  saxon  beke,  qui 
veut  dire  ruisseau  :  Bolbec^  le  Bec ,  Caudebec^  Brique- 
bec,  Robec,  etc.  Les  noms  en  ati  et  en  eur,  tels  que  Eu, 
Canteleu,  Harfleur,  Barfieur,  Vittefleur,  etc.,  fréquents 
dans  la  Normandie,  maritime,  dérivent,  soit  d'un  mot 
islandais  qui  désigne  un  lieu  baiené  par  l'eau,  soit  du 
Scandinave  (liot  ou  du  saxon  flod  (rivière,  courant).  Les 
mots  en  beuf  {Paimbeuf.  Marbeuf,  Belbeuf,  Criquebeuf, 
QitUlebeuf,  Elbeuf,  etc.  )  contiennent  la  même  terminai- 
son que  les  mots  danois  en  bœ  (demeure);  on  n'aura 
ajouté  Vf  final  qu'à  cause  de  la  ressemblance  avec  le  mot 
français  bœuf.  Enfin,  on  peut  signaler,  parmi  les  mots 
importés  par  les  Normands,  et  qui  ont  survécu,  le  mot 
acre,  qui  désigne  une  mesure  de  superficie  usitée  en 
Normandie,  en  Angleterre  et  dans  ses  colonies  d'Amé- 
rique, et  généralement  inconnue  ailleurs. 

Porté  en  Angleterre  par  Guillaume  le  Conquérant,  le 
franco-normand  y  devint  la  langue  dominante,  la  langue 
oflicielle  et  aristocratique;  mais  il  ne  put  étoufiier  l'an- 
glo-saxon, qui  avait  une  constitution  régulière  et  de 
nombreux  monuments  littéraires.  Il  prit  le  nom  d'angîo- 
normand,  qui  fut  aussi  appliqué  à  la  langue  parlée  au 
XII*  siècle  dans  la  Normandie  même,  et  l'on  qualifie 
ordinairement  (S^anglo^ormands  les  Trouvères  qui  ont 
rimé  des  deux  côtés  de  la  Manche  Jusqu'à  la  conquéts 
de  la  Normandie  par  Philippe-Auguste,  en  1204.  A  partir 
de.  cette  époque,  l'anglo-normand  est  encore  la  langue 
des  poètes  en  An^^eterre,  mais  déjà  dans  leurs  chants  ils 
se  plaignent  de  le  voir  dépérir;  l'anglo-saxon  perd  aussi 
du  terrain,  son  système  de  déclinaisons  et  de  conjugai- 
sons s'écroule  peu  à  peu  avec  sa  syntaxe,  et  les  radicaux 
saxons  prennent  souvent  la  place  des  mots  d'importadoc 
romane,  tandis  que  les  désinences  romanes  revctcai  les 


NOR 


1313 


NOR 


mots  saxons.  Bans  ce  travail  de  fusion  qui  s*opère  aux 
un*  et  XIV*  siècles,  ridiome  normand  triomphe  du  côté 
des  constructions  et  de  la  grammaire,  et,  à  ce  point  de 
vue,  c^est  lui  qui  régit  encore  TAngleterre;  sa  prononcia- 
don  même  survit  en  beaucoup  de  points.  C*est  du  saxon 
ainsi  mutilé  qu*est  sortie  lentement  la  langue  anglaise. 
Toatefola  Tanglo-normand  ne  disparut  pas  sans  laisser 
de  nombreux  vestiges,  encore  faciles  à  reconnaître  au- 
jourd'hui dans  le  matériel  de  la  langue,  dans  les  devises 
des  «lablee  familles ,  dans  celle  qui  entoure  les  armes 
royUes  (Dieu  bt  mon  droyt)^  dans  la  devise  de  Tordre  de 
la  Jarretière  {Bony,  soyL  qu  mal.  y.  petua),  et  surtout 
dans  la  langue  judiciaire  et  dans  les  livres  de  jurispru- 
dence. Quand  la  reine  d'Angleterre  accorde  sa  sanction 
aux  bills  des  deux  Chambres  du  Parlement,  la  formule 
aoi  retentit  en  son  nom  est  en  dialecte  anglo-normand  : 
la  reyne  mercye  ses  loyavix  subjects  de  Igur  betimO" 
lencê,  et  ainsi  h  veult;  et  quand  die  refuse,  la  déclara- 
tion est  celle-ci  :  La  rêyne  advisera. 

Tandis  que  le  franco-normand  se  transformait  en  An- 
gleterre, sur  le  continent  il  était  cultivé  en  même  temps 
que  la  langue  latine,  et,  jusqu'à  la  fin  du  moyen  &ge,  il 
conserva  la  prééminence  littéraire.  Il  fit  tant  de  progrès 
et  se  modifia  tellement  depuis  son  origine,  que  la  popu- 
lation qui  s'en  servait  ne  put  reconnaître  au  xv*  siècle, 
dans  les  Anglais  qui  envahirent  la  Normandie,  les  héri- 
tiers des  compagnons  de  Guillaume.  L'occupîation  an- 
glaise dura  assez  longtemps  pour  affecter  le  langage  : 
rianovation  la  plus  importante  fut  l'importation  de  T'y, 
que  l'anglo-normand  avait  emprunté  à  l'anglo-saxon. 
Cette  lettre,  qu'on  ne  rejnarquait  guère  au  xin*  siècle 
que  dans  les  mots  grecs  où  l'étymologie  demandait  sa 
présence,  semble  avoir  pris  au  xv*  siècle  presaue  entiè- 
rement la  place  de  l't;  on  eut  alors  :  le  roy,  la  royne. 
Je  siêys,  mylieu ,  la  nuyct,  parmy ,  Hmry,  Loys,  etc. 
Cest  à  l'influence  de  l'alphiûbet  anglais  qu'il  faut  attri- 
buer l'usage  d'employer  l'y  en  Normandie  dans  les  noms 
de  villes  et  de  paroisses  rurales,  tels  que  Bemay,  Bayetix, 
Isigny,  PavUly,  Andêly,  etc.  —  Au  xvi*  siècle,  lorsque 
toQs  les  dialectes  tendent  à  se  fondre  en  un  seul  pour 
constituer  la  langue  française,  le  normand,  outre  son  ap- 
port considérable  dans  le  vocabulaire  général,  fait  pi^ 
valoir  sa  prononciation,  qui  consistait,  entre  autres  par- 
ticularités, à  prononcer  é  ou  ot  la  diphthongue  ot.  C'est 
on  Normand,  Nicolas  fiérain,  avocat  au  parlement  de 
Normandie ,  ^ui  proposa  le  premier  de  faire  disparaître 
ranomaliequi  existai!  ><ire  la  prononciation  etl'ortho- 
^phe  :  dans  ses  A(n:»^a«s  remarqués  sur  la  langue 
(rançatse  (Rouen,  1675],  il  voulait  que  Ton  écrivit  les 
imparfaits  de  l'indicatif  en  ai  ou  ei;  c  est  donc  à  tort  que 
Voltaire  passe  pour  l'inventeur  de  ce  système  orthogra- 
phique. Biais  ce  qui  contribua  plus  que  tout  à  fixer  irré- 
Tocablement  dans  la  langue  française  l'articulation  ai^ 
ce  fat  la  pléiade  des  gens  de  lettres  normands ,  Duper- 
ron,  Desportes,  Vauquelin  des  Yveteaux,  Malherbe,  Bois- 
Robert,  Corneille,  qui,  sous  les  règnes  d'Henri  IV  et  de 
Uhûs  XIII,  devinrent  les  arbitres  du  langage.  Corneille , 
en  plein  xvii*  siècle,  introduisait  encore  dans  le  langage 
de  la  cour  certaines  manières  de  prononcer  qu'il  avait 
rapportées  de  Rouen;  c'est  depuis  lui  que  in  et  im,  en 
tant  que  Syllabes  initiales,  se  prononcent  semblable- 
ment.  Mais  à  mesure  que  la  Uogue  littéraire  marcha  vers 
runité,  les  formes  nouvelles  qu'elle  empruntait,  soit  aux 
dialectes  provinciaux,  soit  au  grec  et  au  latin,  la  rendi- 
reat  inintelli^ble  aux  populations  des  campagnes  x  une 
séparation  s'opéra  entre  la  manière  de  parler  des  hautes 
classes  et  celle  du  peuple  ;  le  hmgage  local  se  corrompit, 
et  tomba  à  l'état  de  patois. 

Le  patois  normand  peut  se  diviser  en  trois  variétés 
principales,  qui  dérivent  des  habitudes  de  ceux  qui  le 
parlent  :  le  langage  des  faubourgs,  celui  des  côtes ,  et 
celui  des  populations  rurales.  Le  type  du  premier  est  le 
pwrin  ou  gros  normand,  dont  la  terre  classique  est  à 
Rouen  dans  les  quartiers  S^Vivien  et  Martainville,  mais 
qui  se  retrouve  également  dans  les  bas  quartiers  de  la 
plupart  des  villes  manufacturières,  notamment  à  lî- 
sieux.  On  appelait  purinSy  avant  Tinvention  de  la  filature 
à  la  mécanique,  les  Aleurs  de  laine  à  la  main.  Le  langage 
purin,  tout  cynique  et  grossier  qu'il  est,  possède  une  lit- 
térature :  bon  nombre  de  pamphlets  ont  été  écrits  dans 
ce  patois  aux  xvu*  et  xvni*  siècles.  Nous  citerons  la  Muse 
normoiui^,  recueil  satirique  que  David  Ferrand  fit  pa- 
nitrede  1621  à  1655;  V  Inventaire  de  la  Muse  normande, 
ou  Beeueil  de  plusieurs  ouvrages  facétieux  en  langue 
intrinique,  du  même  auteur;  la  Muse  normande  de  Louis 
Petit  qui  fut  l'ami  intime  de  P.  Corneille  et  le  collabo- 


rateur de  Ferrand  ;  la  Mazarinade  publiée  en  1640  sous 
le  titre  des  Maltôtiers  ou  les  Pesquieux  en  eau  trouble; 
le  Coup  ^œil  purin,  ou  Conversation  entre  quatre  per^ 
sonnes  du  bas  peuple  de  la  ville  de  Bouen,  par  Ser- 
vais, 1773,  satire  violente  contre  les  membres  du  Conseil 
du  Roi  qui  avaient  remplacé  les  membres  du  parlement 
de  Normandie  chassés  par  le  chancelier  Maupeou.  Le 
patois  purin  est  en  partie  celui  du  pays  de  Caux  et  du 
Roumois;  les  campagnes  de  Louviers  ont  conservé  uu 
grand  nombre  de  mots  et  de  locutions  oui  lui  sont  pro- 
pres. La  basse  classe  de  Caen  et  de  Falaise  parle  un  pa- 
tois très-voisin  du  purin  ;  c'est  aussi  du  gros  normand , 
où  l'on  trouve,  ajoutée  au  fond  du  patois  ordinaire,  une 
forte  dose  d'expressions  triviales  et  d'intonations  pois- 
sardes. —  Le  langage  des  côtes  offre  d'autres  transfor- 
mations, et  se  ressent  du  voisinage  de  la  Picardie.  Les 
pécheurs  du  faubourc|  du  Pollet,  k  Dieppe,  ont  la  pro- 
nonciation molle;  les  j  et  les  g  deviennent  des  x  dans 
leur  bouche.  Leur  accent  singulier  se  reproduit  chei  les 
pêcheurs  et  les  pilotes  de  Quillebeuf.  Les  terre-neuvieiis 
des  côtes  de  TAvranchin  ont  aussi  une  langue  spéciale 
pour  leur  industrie.  —  Le  patois  des  campagnes  est  infi- 
niment supérieur  comme  langage  à  celui  des  faubourgs 
et  des  gens  de  mer.  Il  est  plus  primitif,  plus  naïf;  c'est 
lui  qui  est  l'héritier  de  l'ancien  dialecte  normand.  Mais 
il  n'a  conservé  son  originalité  que  dans  les  contrées  où 
la  population  est  restée  fidèle  aux  anciennes  mœurs,  et 
surtout  là  où  subsistent  encore  les  grandes  haies,  ces  clô* 
turea-fortifications  si  chères  aux  Normands.  Toutefois  ce 
n'est  pas  chez  les  paysans  du  Bessin  et  du  Cotentin  que 
l'on  trouverait  la  véritable  clef  de  Tanden  dialecte,  en 
ce  qui  concerne  les  questions  de  prononciation  ;  c'est 
dans  les  lies  de  la  lianche,  notamment  à  Jersey,  où  l'on 
suit  encore  la  Coutume  de  Normandie,  non  réformée,  et 
où  le  dialecte  normand  du  xn*  siècle  s'est  perpétué  dans 
la  population  rurale. 

V.  Kelham,  Dictionnary  of  the  norman  or  old  frencn 
language,  Londres,  1779;  Essai  sur  le  dialecte  normand, 
par  M.  Ravmond  Bordeaux,  ouvrage  manuscrit  couronné 
par  l'Académie  de  Rouen  ;  Dictionnaire  du  patois  nor» 
mand,  par  MM.  Édélestand  et  Alfred  Duïnéril ,  Caen, 
1849,  1  vol.  in-8®;  Histoire  des  expéditions  maritimes 
des  Normands,  par  Depping,  Paris,  1826,  2  vol.  in-8<>; 
Dictionnaire  du  patois  du  pays  de  Bray,  par  l'abbé  De- 
corde,  Rouen,  1852,  in-8"  ;  Patois  de  l'arrondissement 
de  Bayeuxy  par  Pluquet,  Bayeux,  1834,  2*  édition  ;  (?/o5- 
saire  du  patois  normand^  par  Louis  Dubois,  Caen,  1856, 

1  vol.  in-8%  P— s. 
NOHiiAiiD  (Style),  style  roman  ou  ogival  particulier 

aux  édifices  de  la  Normandie  et  à  ceux  que  les  Normands 
ont  bâtis  en  Angleterre.  Il  ne  diffère  du  s^le  général  que 
par  quelques  formes  et  quelques  dispositions  de  mou- 
lures ,  qu'une  connaissance  approfondie  des  styles  d'ar- 
chitecture peut  seule  faire  apprécier. 

NORMANDE,  genre  de  caractères  d*imprimerie  Inven-' 
tés  de  notre  temps,  et  qui  ne  sont  autre  chose  que  dn 
romain  ou  de  Vitalique  excessivement  gras. 

NORMANNIQUE  ou  NORR^NA  fLangue),  nom  donné 
à  la  langue  parlée  dans  tout  le  Nora  Scandinave  jusqu'au 
XIV*  siècle,  et  dont  sont  sortis  l'islandais,  le  norvégien,  le 
suédois,  et  le  danois. 

NORVÉGIEN  (Idiome),  un  des  idiomes  issus  du  lan- 
gage appelé  norsh  ou  norrœna,  lequel  a  été  parlé  dans 
tout  le  monde  Scandinave  jusqu'au  xiv*  siècle  et  se  rat- 
tache à  la  souche  germanique.  Il  n'a  de  caractères  par- 
ticuliers que  comme  idiome  parlé  et  populaire;  car  la 
langue  littéraire  de  la  Norvège  est  la  même  que  cello  du 
Danemark,  soit  à  cause  de  l'identité  d'origine,  soit  par 
l'effet  de  la  longue  si^étlon  des  Norvégiens  aux  Danois. 
On  évalue  à  plus  de  18,000  les  mots  employés  journelle- 
ment en  Norvège  et  qui  ne  sont  pas  dans  les  Diction- 
naires danois  :  bon  nombre  de  ces  mots  existent,  an  con- 
traire, dans  la  langue  islandaise,  et  les  livres  écrits  en 
islandais  sont  souvent  compris  par  les  habitants  de  la 
Norvège.  Holmboe  a  prouvé  que  neaucoup  de  mots  nor- 
végiens se  retrouvent  presque  sans  altération  dans  le 
sanscrit.  V.  N.-M.  Petersen  ^  Histoire  des  langues  da- 
noise, norvégienne  et  suédoise,  Copenhague,  1829-30, 

2  vol.  in-12  ;  Holmboe,  Du  sanscrit  et  de  la  vieille  langue 
du  Nord,  Christiania,  1846,  ln-4«;  le  même.  Des  rap- 
ports de  la  vieille  langue  du  Nord  avec  le  sanscrit,  ibid., 
1848,  in-4». 

NORVÉGIENNE  (Littérature).  Soumise  pendant  plu- 
sieurs siècles  au  Danemark ,  la  Norvège  n'a  pu  posséder 
une  littérature  distincte.  Au  nombre  des  écrive  ins 
qu'elle  produisit  sous  la  domination  étrangère,  nous  ci 


NOT 


1314 


NOT 


torons,  an  xvn*  siècle,  un  érèque  de  Dronth^m,  André 
Arreboe,  autear  d'un  pofime  sur  la  création,  intitulé 
Hêxameron  ou  VOEuvre  de  la  première  semaine,  et, 
au  XVIII*,  les  poètes  Tullln  et  Wessel,  le  célèbre  auteur 
dramaticpie  Holberg  ,  rbistorien  Strom ,  Tantiquaire 
Schœning,  le  naturaliste  Gunnerus.  Une  Université  fut 
établie  à  Christiania  en  1811 ,  et,  bientôt  après,  se  forma 
une  Société  pour  la  prospérité  de  la  Norvège,  divisée 
en  7  dasses  ayant  pour  attributions  spéciales  la  philo- 


végc,  séparée  du  Danemark  et  réunie  à  la  Suède,  a  vu 
commencer  enfin  pour  elle  une  littérature  nationale.  On 
cite  déjà  quelques  noms,  Biergaard,  Schwach,  Hansen  ; 
leurs  principales  productions  sont  des  chansons  à  boire 
ou  des  chants  patriotiques.  La  musique  qui  accompagne 
la  plupart  des  ballades  populaires  est  empreinte  d*une 
singulière  tristesse ,  qui  est  le  véritable  caractère  des 
hommes  du  Nord,  le  fond  même  de  leur  &me. 

NORWIGII  (Cathédrale  de),  en  Angleterre,  dans  le 
comté  de  Norfolk.  Cette  église  fut  commencée  en  i096, 
et,  dans  l'espace  de  25  ans,  on  éleva  le  chœur,  le  tran- 
sept, et  la  tour  qui  le  surmonte  ;  la  plus  grande  partie 
du  ui'  siècle  fut  employée  à  la  construction  de  la  grande 
nef  et  des  collatéraux.  La  chapelle  Notre-Dame  date  du 
milieu  du  xin*  siècle.  Depuis,  on  n*a  fait  à  Tédifice  que 
des  modifications  et  additions  peu  importantes.  La  fa- 
çade occidentale  présente  deux  styles  distincts  :  la  partie 
centrale,  c^ui  est  la  plus  moderne,  offre  une  immense 
fenêtre  ovisale,  remplie  de  meneaux  perpendiculaires; 
aux  parties  latérales,  qui  appartiennent  à  l'architecture 
romano-byzantine ,  les  portes,  la  galerie  simulée  et  les 
fenêtres  qui  les  surmontent,  sont  en  plein  cintre.  C*est 
également  le  plein  cintre  qi^i  se  montre  avec  toute  sa 
gravité  dans  la  nef  principale.  Plusieurs  gros  piliers  sont 
ornés  de  cannelures  torses  qui  s'y  enroulent;  les  chapi- 
teaux ne  sont  que  des  masses  cubiques,  lourdes  et  dis- 
gracieuses. Les  archivoltes  des  arcades  offrent  des  tores 
rompus  et  des  chevrons  brisés.  Le  chœur  est  très-re- 
marquable :  les  deux  premiers  étages  sont  formés  par 
des  arcs  en  plein  cintre  appuyés  sur  des  faisceaux  de 
colonnettes  ;  les  fenêtres  de  l'étage  supérieur  et  les  voûtes 
sont  de  style  ogival.  Le  plan  de  la  cathédrale  de  Norwich 
est  en  forme  de  croix  latine  :  la  longueur  est  de  125  met, 
dont  70  pour  la  nef;  la  largeur  de  la  nef  et  des  collaté- 
raux, de  23  met.  ;  la  longueur  du  transept,  de  58  met.  ; 
la  hauteur  des  voûtes,  de  23  met.  Sur  le  centre  du  tran- 
sept s'élève  une  tour  caxrée,  flanquée,  aux  angles,  de 
contre-forts  couronnés  de  clochetons,  et  entourée,  au 
sommet,  d'une  balustrade  crénelée,  disposition  com- 
mune en  Angleterre  :  cette  tour  supporte  une  aiguille 
octogone,  merveilleusement  effilée,  et  dont  les  nervures 
d'angles  sont  ornées  de  crochets  et  de  feuilles  grim- 

f  an  tes.  Cette  pyramide ,  qui  atteint  une  hauteur  de 
00  met.  au-dessus  du  sol ,  est  moins  riche  d'ornemen- 
tation ,  mais  d'une  construction  aussi  hardie  que  celle  de 
Lichfield.  Au  flanc  méridional  de  la  cathédrale  de  Nor- 
wich on  voit  de  beaux  cloîtres,  formant  un  carré  d'envi- 
ron 50  met.  de  côté.  B. 

NOTABLES,  nom  qu'on  donnait,  avant  1789  : 1°  aux 
bourgeois  appelés  avec  le  maire  et  les  échevins  à  former 
le  conseil  de  ville  ;  2*  aux  membres  des  trois  ordres  de  la 
nation ,  que  les  rois  choisissaient  pour  composer  les  As- 
semblées des  notables  (F.  Asseublee,  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d'Histoire).  Il  s'applique  aujour- 
d'hui aux  principaux  et  plus  considérables  citoyens 
d'une  ville,  d'une  province,  d'un  État  Les  notables 
commerçants  sont  ceux  dont  les  préfets  dressent  annuel- 
lement la  liste  pour  chaque  arrondissement,  et  qui  éli- 
sent les  membres  des  tribunaux  de  commerce  :  ils  ne 
peuvent  être  moins  de  25  dans  les  villes  dont  la  popula- 
tion n'excède  pas  15,000  âmes;  au-dessus  de  ce  chiffre, 
le  nombre  en  est  augmenté  à  raison  de  1  pour  1000  &mes 
de  population.  Un  décret  du  30  août  1852  a  chargé  les 
notables  commerçants  d'élire  aussi  les  membres  des 
Chambres  de  commerce,  et  ceux  des  Chambres  consulta- 
tives des  arts  et  des  manufactures. 

NOTABLES  (AiTêts),  nom  que  l'on  donnait  autrefois  aux 
arrêts  fixant  un  point  de  Jurisprudence  nouveau  ou  con- 
troversé. 

NOTAIRES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
(graphie  et  d* Histoire, 

NOTATION  MUSICALE ,  art  de  représenter  aux  yeux 
et  à  l'intelligence  les  sons  et  leurs  modifications  diverses, 
à  l'aide  de  signes  ou  caractères  particuliers.  Ces  signes 


sont  de  4eux  sortes,  les  signes  d^intonatimi  et  les  s}ones 
de  durée,  et  on  les  place  les  uns  et  les  autres  sur  hpor» 
tée ,  assemblage  de  cinq  lignes  tracées  horizontalement 
Les  signes  d'intonation  sont  les  clefs  et  les  notes.  Les 
clefs.,  placées  au  commencement  des  portées,  indiquent 
que  ce  qui  s'y  trouve  écrit  appartient  à  telle  ou  telle 
voix,  à  tel  ou  tel  instrument;  et  comme  il  y  a  plusieurs 
nuances  d'élévation  ou  de  gravité  parmi  les  voix  et  les 
instruments,  on  exprime  ces  nuances  en  donnant  aux 
clefs  différentes  positions  sur  les  lignes  (K.  Clep^.  Les 
notes  sont  les  signes  particuliers  de  chaque  son.  Il  n'est 
pas  nécessaire  d'avoir  un  signe  d'une  forme  spéciale  pour 
chacun  des  sons  ;  une  pareille  multiplicité  jetterait  la 
confusion  dans  l'esprit,  et  fatiguerait  la  mémoire  :  ce 
n'est  point  la  forme  de  la  note,  mais  sa  place  sur  la  por- 
tée, qui  détermine  l'intonation.  La  note  placée  sur  la 
même  ligne  que  la  clef  prend  le  nom  de  cette  clef ,  et 
sert  de  point  de  comparaison  pour  nommer  toutes  les 
autres  notes  de  l'échelle  :  par  conséquent,  le  nom  des 
notes  est  éventuel,  et  ne  peut  se  déterminer  d'une  msp 
nière  invariable.  L'intonation  des  notes,  telle  qu'elle 
résulte  de  leur  position  sur  la  portée  et  par  rapport  à  la 
clef,  peut  être  modifiée  par  une  nouvelle  espèce  de  signes 

2u*on  nomme  cKcidents  et  à  l'aide  desquels  on  indique 
es  sons  intermédiaires  :  ce  sont  le  dièse,  le  bémol  et  le 
bécarre  {V,  ces  mots). 

Les  notes  servent  de  signes  de  durée,  en  m^me  temps 
que  de  signes  d'intonation  :  destinées,  en  effet,  à  repré- 
senter les  sons,  elles  ont  dû  recevoir  des  modifications 
de  forme,  afin  de  pouvoir  exprimer  la  longueur  variable 
de  ces  sons.  Ce  sont  ces  formes  diveraes  çui  indiquent 
les  valeurs  respectives  des  notes.  On  a  pris  pour  unité 
de  durée  la  note  appelée  ronde  :  la  moitié  de  cette  durée 
a  reçu  le  nom  de  blanche;  le  <^uart,  celui  de  noire;  le 
huitième,  celui  de  croche  ;  le  seizième,  celui  de  double 
croche;  le  trente-deuxième,  celui  de  triple  croche;  le 
soixante-quatrième,  celui  de  quadruple  croche  [V,  Cro- 
che). —  Le  pot'n^  est  un  autre  signe  de  durée.  Placé  à 
la  suite  d'une  note,  il  augmente  de  moitié  la  durée  de 
cette  note  :  ainsi,  la  ronde  pointée  a  la  même  durée  que 
3  blanches,  ou  6  noires,  ou  12  croches,  etc.  —  Le  sUence 
est  un  élément  de  la  musique,  aussi  bien  que  le  son,  et» 
comme  lui,  il  a  des  variations  de  durée  :  on  a  donc  ima- 
giné des  signes  de  silence,  correspondant  aux  notes  ou 
signes  de  sons,  et  susceptibles  des  mêmes  divisions.  Le 
silence  d'une  durée  égale  à  celle  de  la  ronde  s'appelle 
pause;  la  moitié  de  cette  durée,  demi-pause;  le  quart, 
soupir;  le  huitième,  demi-soupir;  le  seizième,  quart 
de  soupir.  La  ronde  pointée  se  représente  par  une  pause 
suivie  d'une  demi-pause;  la  blanche  pointée,  par  une 
demi-pause  suivie  d'un  soupir,  etc.  —  Pour  que  la  mul- 
titude des  signes  placés  sur  la  portée  ne  trouble  pas  les 
yeux,  on  les  sépare  de  distance  en  distance  par  des  bants 
qui  traversent  perpendiculairement  la  portée  (F.  Bames 
DE  mesure)  :  l'espace  compris  entre  deux  de  ces  barres 
de  séparation  s'appelle  mesure;  la  somme  des  durées 
qui  y  sont  exprimées  doit  être  la  même  dans  toutes  les 
mesures  du  morceau  de  musique.  On  rend  encore  plus 
facile  la  lecture  des  signes  contenus  dans  la  mesure,  eD 
divisant  celle-ci  en  parties  égales  appelées  temps.  Les 
manières  différentes  dont  cette  division  peut  se  fûre 
déterminent  les  différentes  espèces  de  mesures,  qu'indi- 
quent aussi  des  signes  particuliers  (F.  Mesure,  Tevps). 
—  Les  signes  de  la  durée  des  sons  et  des  silences  ne 
donnent  que  des  quantités  relatives,  et  n'indiquent  pas 
la  durée  positive  qui  est  dévolue  à  chaque  signe.  On  fait 
connaître  cette  durée  positive,  en  écrivant,  en  tête  des 
morceaux,  certains  mots  italiens  ou  français  déterminant 
le  degré  de  lenteur  ou  de  vitesse  qu'il  faut  prendre;  tels 
sont  :  largo,  andante^  allegro,  presto,  etc.  Mais  la  va- 
riété de  durée  positive  produite  par  ces  mots  ne  change 
rien  à  la  valeur  relative  des  signes  entre  eux  (  V.  Moc- 
veiient). 

Quant  à  Vexpression  dans  l'exécution  de  la  musique, 
elle  est  aussi  indiquée  dans  la  notation  par  un  certain 
nombre  de  signes  spéciaux  {V.  Expression,  Accom, 
Liaison,  Détaché,  Agréhents). 

La  notation  musicale  emploie  encore  les  chiffres,  soit 
pour  mar(juer  la  proportion  des  sons  entre  eux,  comme 
dans  le  tnolet  (  V.  ce  mot),  soit  pour  indiquer  le  doigté 
de  certains  passages  qu'exécutent  les  instruments,  soit 
enfin  pour  représenter  les  accords  (K.  Basse  CHiFniéE}. 

La  notation  musicale,  avant  d'en  nrriver  au  point  où 
elle  se  trouve  aujourd'hui,  a  traversé  bien  des  phases. 
Les  Grecs,  et,  après  eux,  les  Romains,  ont  possédé  o'' 
système  de  signes  fort  compliqué  :  ils  se  servirent  dcs 


NOT 


1315 


NOT 


lettres  de  ]eui  alphabet,  en  leur  donnant  toutes  aortes 
de  formes  et  de  positions.  Burette,  d'après  Meibom, 
qa*il  interprétait  mal,  portait  à  1620  les  signes  ainsi  ob- 
leQQS,  l'abbé  Barthélémy  à  990.  Perne  (Revue  musicale, 
u  m)  les  réduit  à  90,  dont  une  moitié  était  consacrée  a 
la  TOix,  et  Tantre  aux  instruments,  et  il  essaye  même  de 
démontrer  que  44  caractères  suffisaient,  dont  22  pour  la 
Toix  et  22  pour  les  instruments.  M.  Vincent,  à  son  tour, 
ramène  toute  la  double  notation  des  Grecs  à  70  paires  de 
signes,  et  pense  que  la  notation  vocale  consistait  dans  les 
lettres,  tandis  que  la  notation  instrumentale  était  em- 
praotée  aux  signes  planétaires,  ce  que  les  chimères  des 
Anciens  sur  Tbarmonie  céleste  rendent  assez  vraisem- 
blable. Les  signes  s'écrivaient  au-dessus  des  syllabes  à 
chanter ,  formant  une  seule  ligne  horizontale ,  et  les 
di?ers  de^s  d'acuité  et  de  gravité  des  sons  étaient 
indioués  par  la  forme  spéciale  des  signes  :  si  la  musique 
devait  être  à  la  fois  chantée  et  jouée  sur  les  instruments, 
la  ligne  des  signes  pour  instruments  était  superposée  à 
la  ligne  vocale  (F.  Solmisation).  —  Quand  une  partie 
des  modes  musicaux  des  Anciens  fut  tombée  en  désué- 
tude, le  nombre  des  lettres  emi)loyées  à  la  notation  fut 
considérablement  restreint.  Puis,  le  pape  Grégoire  le 
Grand,  ayant  remarqué  que  les  rapports  des  sons  sont 
exactement  les  mômes  dans  chaque  octave ,  réduisit  le 
nombre  des  signes  aux  sept  premières  lettres  de  l'alpha- 
bet, qui  furent  placées  sur  des  lignes  parallèles  de  di- 
renés  couleurs  pour  indiquer  l'élévation  ou  l'abaisse- 
ment de  la  voix.  Si  une  pièce  de  chant  dépassait  les 
limites  de  Toctave,  on  employait,  pour  la  l'*  octave,  les 
lettres  majuscules,  pour  la  2*  les  minuscules,  et  on  les 
doublait  pour  la  3*.  Puis,  on  substitua  aux  lettres  sur  la 
portée,  à  une  époque  qu'on  ne  saurait  déterminer,  cer- 
tains points  de  différentes  formes,  qui  ont  été  l'origine 
des  notes  modernes  {V,  Nboubs).  Au  xi*  siècle,  le  moine 
Gui  d'Arezzo  imagina  une  mnémonique  des  sons  qui 
consistait  à  apprendre  par,  cœur  une  mélodie  connue, 
pour  s'en  servir  comme  d'un  point  de  comparaison,  en 
donnant  pour*  nom  aux  notes  de  cette  mélodie  les  syl- 
Ui^  placées  sous  chacune  d'elles,  afin  de  conserver  ces 
mêmes  sons  à  toutes  les  notes  semblables.  A  cet  effet,  il 
le  servit,  dans  l'école  qu'il  dirigeait,  du  chant  de  l'hymne 
de  S*  Jean-Baptiste  : 

Ui  qneuit  Iaxis  Reaonarv  fibrlt 
Mirz  geatornm  Faroull  tuonim, 
S<dTt  polluti  labll  reatum, 
Sancta  Joannea. 

Les  élèves  chantaient  cette  strophe,  dans  laquelle  l'into- 
nation de  la  note ,  s'élevant  d'un  degré  sur  chacune  des 
syllabes  ut,  ré,  mi,  fa,  sol,  la,  correspondait  à  une  des 
lettres  de  l'échelle  diatonique.  Gui  d'Arezzo  ne  désignait 
point  les  notes  par  ces  syllabes  ;  il  n'avait  voulu  que  créer 
une  méthode  d'enseignement  par  analogie  et  ayant  uni- 
quement pour  but  de  graver  l'intonation  des  sons  dans 
la  mémoire  de  ses  élèves.  Toutefois,  les  noms  ut,  ré,  mi, 
fa,  sol,  la,  furent  bientôt  adoptés  pour  indiquer  six  notes 
de  la  gamme.  La  septième,  B  (le  n),  ne  se  trouvait  pas 
nommée  dans  ce  système;  on  imagina,  pour  y  suppléer, 
le  système  barbare  des  muances  (  K.  ce  moi),  et  ce  ne 
fut  que  beaucoup  plus  tard  que  le  nom  de  si  fut  appliqué 
à  la  septième  note.  Longtemps  les  notes  furent  toutes 
d'une  ég^e  valeur  sous  le  rapport  de  la  durée,  et  ne 
marquèrent  que  les  différents  aegrés  de  la  gamme  et  les 
modifications  de  l'intonation;  selon  une  opinion  généra- 
lement répandue,  ce  serait  au  xiv"  siècle  que  le  chanoine 
Jean  de  Mûris  aurait  imaginé  d'indiquer  les  rapports  de 
durée  que  les  notes  devaient  avoir  entre  elles  par  des 
cfaanffements  dans  leur  figure,  et  distingué  les  rondes, 
les  blanches,  les  noires,  etc.;  du  même  temps  daterait 
la  distinction  de  la  notation  blanche,  c-à-d.  en  notes 
blanches  ou  vides,  et  de  la  notation  colorée,  c-à-d.  en 
notes  noires  ou  rouges;  mais  la  notation  mesurée  re- 
monte au  moins  au  u*  siècle.  Dans  les  ouvrages  où  Ga- 
forio,  vers  la  fin  du  xv*  siècle,  a  expliqué  le  système  de 
la  notation  de  son  temps,  on  voit  que  les  signes  princi< 
MOI  étaient  la  maxime,  la  longue,  la  brève,  la  semi- 
brève  et  la  minime  :  cependant,  dans  les  compositions  du 
commencement  du  xvi"  siècle,  la  noire,  la  croche  et  la 
double  croche  se  trouvent  employées. 

J.-J.  Rousseau  exposa,  en  1743,  un  système  de  nota- 
tion par  des  chiflîres.  Ce  sjrstème  a  été  repris  par  Pierre 
<^Iia,  et  vigoureusement  soutenu  de  nos  Jours  par 
MM.  Chevé  et  Aimé  Paris.  On  ne  saurait  nier  qu'il  a  de 
U  valeur  comme  moyen  tachygraphique,  qu'il  simplifie 
renseignement  de  la  musique  vocale,  et  que  les  élèves  en 


tirent  profit  pour  sidsir  les  rapports  de  rliythme  et  d'in- 
tonation. Les  maîtres  qui  le  préconisent  soutiennent  que 
la  multiplicité  des  signes  de  la  notation  ordinaire  est  un 
grave  embarras  ;  cela  est  vrai  :  mais,  une  fois  ces  signes 
classés  dans  la  mémoire,  toute  difficulté  disparaît,  car 
ils  donnent  par  eux-mêmes,  et  sans  aucune  complication 
d'idées,  la  notion  nette  et  positive  de  l'intonation  et  de 
la  durée.  Il  n'en  est  pas  de  même  de  la  notation  par 
chiffres  :  la  similitude  des  signes  pour  toutes  les  octaves 
et  la  suppression  des  clefs  en  sont  les  bases  ;  or,  la  simi- 
litude est  un  mal ,  et  les  clefs  sont  nécessaires.  Cest  ce 
que  les  partisans  dé  la  notation  par  chiffres  ont  reconnu 
mal^  eux,  puisqu'ils  ont  été  obligés  de  créer  des  signes 
auxiliaires  pour  distinguer  les  octaves,  et  de  remplacer 
les  signes  usuels,  qui  sont  une  figuration  des  sons,  per- 
ceptible aux  yeux,  par  des  points  de  reconnaissance  qui 
exigent  une  opération  d'esprit.  La  notation  par  chiffres 
est  inapplicable  dans  la  musique  instrumentale ,  dont  le 
diapason  est  incomparablement  plus  étendu  que  celui  de 
la  voix.  Elle  est  impuissante  à  traduire  avec  clarté  les 
transpositions  si  souvent  nécessaires  pour  certaines  par- 
ties d'instruments,  et  «à  représenter  les  groupes  de  sons 
simultanés.  A  plus  forte  raison  ne  pourrait-elle  donner 
au  piano,  comme  le  fait  la  notation  usuelle,  les  principaux 
effets  d'une  partition  écrite  sur  une  vingtaine  de  portées 
et  où  sont  employées  cinq  ou  six  clefs  différentes.  K.  Dan- 
jou.  Sur  les  notations  musicales  du  moyen  âge^  dans  la 
Revue  de  musique  religieuse  et  classique,  Juillet  1845, 
août  1847;  Fétis,  articles  de  la  Gazette  musicale  des  16 
et  23  Juin  1844,  et,  dans  la  Revue  de  Danjou  (1846),  Des 
origines  du  Plain-Chant;  Théodore  Nisard,  Etudes  sur 
les  anciennes  notations  musicales  de  l'Europe,  dans  la 
fiemie  arcMologique,  U  V,  et  De  la  notation  proportion- 
nelle du  moyen  âge,  1847.  B. 

NOTE  (du  latin  nota,  marque),  en  termes  de  Musique, 
nom  donné  aux  signes  figuratifs  des  sons.  F.  Notation. 

NOTE  PERLEE.    V,  ApPOGIATUSB. 

NOTE  DE  PASSAGE,  uoto  qul ,  daus  uue  mélodie,  ne  porte 
pas  d'harmonie,  mais  sert  à  lier  entre  elles  les  notes  har- 
moniques. 

NOTE ,  en  termes  de  Pratique,  signifiait  autrefois  la  mi- 
nute des  actes  passés  chez  tes  notaires.  De  là  le  nom  de 
gardes-^otes  donné  quelquefois  à  ces  officiers  publics. 

NOTE ,  remarque  ou  explication  imprimée  à  la  marge 
d'un  livre,  au  bas  d'une  page,  ou  à  la  fin  d'un  volume, 
pour  en  faciliter  l'intelligence.  Les  notes,  destinées  à  ex- 
pliquer un  mot,  un  passage,  une  allusion,  doivent  être 
courtes  et  précises  ;  autrement,  elles  dégénéreraient  en 
Commentaires  (F.  ce  mot),  —  Quelques  auteurs  of^  in- 
titulé Note  ou  Notes  un  opuscule  séparé. 

NOTE,  dans  le  style  des  affaires,  extrait  socjnairs,  ex- 
posé succinct. 

NOTE,  en  Diplomatie,  communication  confidentielle 
entre  des  agents  diplomatiques.  Cest  par  un  échange  de 
Notes  qu'on  arrive  à  la  conclusion  d'une  négociation.  On 
appelle  Notes  verbales  les  notes  au  moyen  desquelles 
ceux  qui  siègent  dans  une  Conférence  ou  un  Congrès 
communiquent  entre  eux,  lorsqu'elles  sont  seulement 
destinées  à  fixer  un  point  de  discussion  et  ne  portent  pas 
de  signature. 

NOTES  SURABONDANTES,  nom  donné  en  Musique 
aux  triolets,  aux  notes  marquées  5  pour  4,  etc. 

NOTES  TIRONIENNES.   V.  ABRÉVIATIONS. 

NOTICE ,  traité  succinct  donnant  la  connaissance  d'une 
certaine  classe  d'objets;  —  extrait  raisonné  mis  en  tête 
d'un  livre  pour  faire  connaître  l'auteur,  l'époque  à  la- 
quelle il  a  écrit ,  etc.;  —  écrit  de  peu  d'étendue  conte- 
nant les  principales  circonstances  de  la  vie  d'un  per- 
sonnage. .    , 

NOTIFICATION,  acte  fait  par  ministère  d'huissier,  et 
jar  lequel  on  donne  connaissance  de  quelque  chose  dans 
a  forme  officielle  ou  Juridique.  Le  nouveau  propriétaire 
d'un  immeuble  hypothéqué  est  tenu  de  faire  notifier  son 
contrat  aux  créanâers  lorsou'il  veut  se  mettre  à  l'abri 
de  leurs  poursuites  {Code  Napol,  art.  2185).  Le  minis- 
tère public  doit  faire  notifier  k  chaque  accusé  la  liste  du 
Jury,  pour  le  mettre  k  même  d'exercer  son  droit  de  récu- 
sation; il  en  est  de  même  de  la  liste  des  témoins,  sur  les- 
quels l'accusé  peut  avoir  des  renseignements  à  prendre 
(Code  d:instr.  crim.,  art.  395).  —  En  Politique,  on 
nomme  Notification  l'acte  par  leauel  une  puissance  fait 
connaître  officiellement,  et  de  manière  qu'on  doive  y  avoir 
égard,  une  résolution  prise  par  elle,  par  exemple  uû 
blocus  de  port  ennemi  ou  une  déclaration  de  guerre. 

NOTION,  en  termes  de  Philosophie,  s'emploie  comme 
synonyme  à  peu  prte  d'td^  et  de  connaissance.  Dans  le 


r. 


NOU 


1316 


NOV 


laogage  ordinaire,  il  désigne  plutôt  une  connaissance 
élémentaire  et  souvent  imparfaite. 

NOTOIRE  (Art).  V,  Art  notoiiuu 

NOTORIÉTÉ  (Acte  de),  acte  déliyré  par  un  notaire  ou 
un  Juge  de  paix,  et  par  lequel  des  témoins  attestent  un 
fait  comme  notoire  et  constant.  Il  dispense  la  partie  qui 
a  intérêt  à  établir  ce  fait  des  frais  et  des  lenteurs  d*une 
enquête  judiciaire.  Ainsi,  un  acte  de  notoriété  est  admis 
pour  établir  la  qualité  d'héritier  d*une  personne,  quand 
il  n*y  a  pas  eu  d'inventaire;  pour  faire  connaître  les 
ayants  droit  à  une  succession  ;  pour  prouver  Tidentitô 
d'une  personne  avec  celle  dont  le  nom  figure  dans  un 
acte  ou  dans  une  inscription  de  rente,  quoiqu'il  existe 
quelque  différence  dans  les  noms  ou  prénoms.  Lies  té- 
moins doivent  être  au  nombre  de  quatre;  ils  peuvent  être 
du  sexe  féminin,  et  môme  étrangers.  S'il  s'agit  de  sup- 
pléer au  défaut  de  représentation  de  l'acte  de  naissance 
d'un  futur  époux,  l'acte  exige  la  déclaration  de  7  témoins, 
et  doit  être  présenté  à  l'homologation  du  tribunal  civil, 

2ui  peut  l'accorder  ou  la  refuser  {Code  NapoL,  art.  71-72). 
n  cas  d'absence  de  l'ascendant  auquel  devrait  être  no- 
*iflé  un  acte  respectueux  avant  4^  passer  outre  au  ma- 
riage, quatre  témoins  suffisent,  et  la  formalité  de  l'homo- 
logation n'est  pas  prescrite  (art.  155).  Une  loi  du  8  Juillet 
1846  a  décrété  le  visa  pour  timbre  et  l'enregistrement 
gratuit  des  actes  de  notoriété  nécessaires  au  mariage  des 
pauvres.  Un  acte  de  notoriété  est  nécessaire  à  l'enfant 
naturel  reconnu,  qui ,  à  défaut  de  parents  au  degré  suc- 
cessible,  réclame  la  totalité  d'une  succession.  Quand  un 
militaire  a  disparu  de  son  corps,  un  acte  de  notoriété 
peut  être  utile  pour  constater  sa  disparition.  Celui  qui 
veut  adopter  peut  aussi  avoir  besoin  de  faire  constater 
qu*il  a  donné  pendant  un  certain  temps  des  soins  à 
radopté.  En  un  mot,  les  actes  de  notoriété  sont  destinés 
à  constater  des  faits  sur  lesquels  il  n'existe  pas  de 
preuves  écrites.  —  Dans  notre  ancien  Droit ,  les  actes  de 
notoriété  ne  se  délivraient  pas  seulement  sur  des  points 
do  faii ,  mais  aussi  sur  des  points  de  droit.  Par  exemple, 
des  officiers  de  justice,  ou  plusieurs  avocats  réunis,  don- 
naient une  attestation  sur  la  coutume  ou  l'usage  d'un 
lieu. 

NOTORiérâ  PUBLIQUE ,  opiuion  formée  par  une  réunion 
de  circonstances  ou  d'actes  connus  du  public.  La  faillite 
d'un  commerçant  est  souvent  dénoncée  à  la  connaissance 
des  tribunaux  par  la  notoriété  publique.  Des  Juges  peu- 
vent décider,  par  la  notoriété  publique,  que  des  marchan- 
dises placées  dans  des  mag^ins  loués  ne  sont  pas  la 
propriété  du  locataire.  Cest  aussi  sur  la  notoriété  des 
actes  répréhensibles  d*un  fonctionnaire  que  les  tribu- 
naux de  l'*  instance,  ayant  droit  d'en  connaître,  exercent 
leur  pouvoir  censorial. 

NOUGHE,  vieux  mot  signifiant  un  nœud,  un  fermaiL 

NOUE.  V.  Comble. 

NOUETS.  V.  CooLEUR. 

NOUMÈNES  (  du  grec  nouménos,  conçu  par  la  raison  ), 
nom  que  Kant  donne  aux  faits  tels  qu'ils  sont  absolument 
et  en  eux-mêmes,  inaccessibles  à  notre  intelligence,  in- 
connus de  nous,  par  opposition  aux  phénomènes,  qui 
sont  les  choses  telles  qu'elles  nous  apparaissent. 

NOURRICES  (Bureau  des),  administration  établie  à 
Paris  pour  fournir  aux  familles  qui  s'adressent  à  lui  des 
nourrices  dignes  de  confiance,  et  garantir  à  ces  dernières 
le  payement  de  leur  salaire.  Le  Bureau  des  nourrices 
fut  créé  en  1330,  en  faveur  de  quatre  filles  de  la  nour- 
rice du  roi  Jean.  On  les  appelait  recommanderesseSt 
et  elles  procuraient  aussi  des  servantes.  Une  ordonnance 
du  roi  Jean,  en  1350,  fixa  le  salaire  d'une  nourrice  à 
100  sous  par  an,  le  droit  des  demanderesses  à  2  sous, 
perçus  des  deux  parties,  et  condamna  la  nourrice  qui 
prendrait  plus  d'un  nourrisson  la  même  année  à  une 
amende  de  60  sous,  sans  compter  l'exposition  au  pilori; 
une  amende  de  10  sous  était  encourue  pour  tout  com- 
plice de  ce  délit.  Louis  XIII  et  Louis  XIV,  en  1615  et 
1655,  accordèrent  aux  recommanderesses  le  monopole  du 
placement  des  nourrices,  mais  avec  interdiction  de  s'oc- 
cuper à  l'avenir  du  placement  des  servantes.  En  1715, 
on  les  plaça  sous  les  ordres  du  lieutenant  général  de  po- 
lice; bientôt  on  en  éleva  le  nombre  de  deux  à  quatre.  En 
1769,  il  n'y  eut  plus  qu'un  bureau  de  placement,  confié  à 
deux  demanderesses  et  k  deux  directeurs,  tous  à  la  nomi- 
nation du  lieutenant  de  police.  La  Révolution,  en  abolis- 
sant tous  les  privilèges  de  profession,  ouvrit  la  porte  à 
l'industrie  des  placeurs  particuliers.  Néanmoins,  le  bu- 
reau général  a  été  conservé  par  le  gouvernement  consu- 
laire, et ,  depun  ce  temps,  il  est  dans  les  attributions  de 
l'administration  des  Hospices  :  elle  a  des  sous-inspecteurs 


à  chaque  chef-iieu  d'arrondissement,  dans  un  rayon  de 
120  à  160  kiL  de  Paris,  et  dans  chaque  canton  un  mé- 
decin qui  visite  les  enfants,  les  soigne  en  cas  de  maladie, 
et  donne  de  leurs  nouvelles  une  fois  par  mois. 

NOUTKA  (Langue).  F.  Wakash. 

NOUVELLE,  compositioa  littéraire  qui  tient  à  la  fois 
du  conte  et  du  roman;  récit  d'aventures  intéressantes  ou 
amusantes,  qui  peut  être  historique  ou  entièrement  ima- 

f  inaire.  Le  nom  de  Nouvelle  remonte  aux  premiers  Trou- 
adours  provençaux  :  il  a  été  ensuite  adopté  en  Italie,  en 
Espagne  et  en  France.  Chez  les  Italiens,  la  Nouvelle  a 
reçu  sa  forme  la  plus  parfaite  de  Boccace,  et  chez  les  Es- 
pagnols, de  Cervantes.  Boccace  a  su  donner  à  ce  genre, 
où  l'on  a  trop  souvent  recherché  un  badinaee  licencieux, 
un  caractère  touchant  et  élevé  dans  Griselidis  et  dans 
Titus  et  Gisippe,  Les  Nouvelles  morales  de  Cervantes 
sont  pleines  d'agrément  :  l'une  des  meilleures,  le  Curieux 
impertinent ,  a  été  insérée  dians  le  Don  Quichotte,  Les 
premiers  récits  français  qui  aient  porté  le  titre  de  Nou- 
velles sont  du  xiu*  siècle;  MM.  Moland  et  d'Héricault  les 
ont  recueillis  en  un  volume,  ainsi  que  les  Nouvelles  du 
xiv«  et  du  XV".  Les  Cent  Nouvelles  nouvelles  {V.ce  mot) 
sont  de  la  fin  du  xv*  siècle;  les  Nouvelles  de  la  reine 
de  Navarre,  du  milieu  du  xvi*  (7.  H£PTAiiâLO!i).  Au 
xvu*  siècle,  Scarron  publia  huit  Nouvelles  tragi- co- 
miques, dans  le  coût  espagnol.  A  la  fin  du  xvui*,  Florian 
donna  aussi  des  Nouvelles  qui  obtinrent  du  succès,  grâce 
k  une  certaine  naiveté,  et  bien  qu'elles  fussent  assez  mé- 
diocres. M"'*  de  Genlis  publia,  en  1802 ,  des  Nouvelles 
lùstoriques^  souvent  intéressantes.  Plus  tard,  Alûed  et 
Paul  de  Musset  ont  n^jeuni  ce  genre  littéraire  par  l'ori- 
ginalité avec  laquelle  ils  l'ont  traité;  Alfred  surtout  y  a 
montré  une  grande  sensibilité  d'&me.  Les  Nouvelles  (en 
vers)  de  H.  Kleist  sont  célèbres  duis  l'Allemagne  con- 
temporaine par  le  talent  avec  lequel  l'auteur  a  tracé  les 
caractères  et  dessiné  les  portraits  de  ses  personnages. 
V.  CoNTB,  Fabliau,  Roman.  P.    . 

NOUVELLES,  annonces  verbales,  écrites  ou  impri- 
mées, d'événements  publics  ou  privés,  vrais  ou  faux.  Aux 
termes  du  décret  sur  la  presse  en  date  du  17-23  février 
1852,  la  publication  ou  la  reproduction  de  nouvelles 
fausses  est  punie  d'une  amende  de  50  fr.  à  1,000  fr.;  si 
elle  a  été  faite  de  mauvaise  foi,  si  elle  est  de  nature  à 
troubler  la  paix  publique,  la  peine  est  d'un  mois  à  un  an 
d'emprisonnement,  et  d'une  amende  de  500  à  1,000  fr., 
et  le  maximum  est  appliqué  quand  les  deux  circonstances 
aggravantes  sont  réunies. 

NOUVELLES  A  LA  MAIN,  uom  donué  sux  gazcttcs  manu- 
scrites, ou  clandestinement  imprimées,  qui  précédèrent 
les  journaux,  et  qu'on  a  conservées  plus  tard  comnio 
moyen  de  faire  circuler  les  nouvelles  dont  la  censure  ou 
l'autorité  supérieure  n'aurait  pas  permis  la  publicaiiot). 
Elles  ont  toujours  eu  un  caractère  satirique.  Au  temps  de 
Louis  XIV,  on  en  poursuivit  sévèrement  les  auteurs* 
Pierre  Gizilard,  dit  La  Viguerie,  Jérémie  Brossard,  Srla- 
thurin  Esnault,  furent  mis  à  la  Bastille  en  1660;  Itfar- 
celin  de  l'Ange  fut  condamné,  en  1661,  à  la  fustigation  et 
au  baunissement,  etc.  Au  xvui*  siècle,  le  salon  de 
M*""  Doublet  fut  une  officine  de  Nouvelles  à  la  main , 
dont  on  composa  la  chronique  connue  sous  le  nom  de 
Mémoires  de  Bachaumont.  Vers  la  fin  du  règne  de 
Louis  XV,  un  certain  Métra  commença  une  Correspw- 
dance  secrète,  qui  dura  jusqu'à  la  Révolution.  Dans  le 
même  temps,  une  Gazette  ecclésiastique  se  joua  aussi  des 
poursuites  de  la  police.  A  la  fin  du  règne  de  Louis-Phi- 
lippe, des  Nouvelles  à  la  main  furent  publiées  en  con- 
currence avec  les  Guipes  d'Alphonse  Karr;  elles  ne 
purent  vivre  longtemps,  parce  qu'elles  n'avaient  pas  Tat^ 
trait  de  la  clandestinité,  qui  est  souvent  l'unique  cause 
de  succès  pour  ce  genre  d'écrits. 

NOVALES,  qualification  donnée,  dans  l'ancien  Droit, 
aux  terres  nouvellement  défrichées  (du  latin  not>a{tf,  dé- 
rivé de  novus,  nouveau^.  On  l'applique,  dans  quelquei 
pays,  aux  terres  en  jachère. 

NOVATION  (du  latin  novare,  renouveler),  en  termes 
de  Droit ,  substitution  d'une  nouvelle  obligation  à  une 
ancienne.  La  novation  est  parfaite,  si  elle  détruit  telk- 
ment  la  première  obligation ,  qu'elle  est  regardée  comnie 
non  avenue;  imparfaite,  si,  sans  anéantir  la  première 
obligation ,  elle  la  modifie  de  diverses  manières.  On  dis^ 
tingue  encore  la  novation  nécessaire ,  qui  se  fait  par  une 
condamnation  en  justice  et  ne  décharge  pas  les  fidéjus- 
seurs,  et  la  novation  volontaire,  qui  les  décharge  (Codf 
Napol.^  art.  1271-1281}.  La  novation  s'opère  de  trois 
manières  :  par  substituaon  d'une  autre  dette  à  l'ancienne 
(par  exemple,  une  rente  de  25  fr.  à  une  somme  df 


NOY 


1317 


NOT 


500  fr.),  par  sabstitution  d'un  nouveau  débiteur,  et  par 
substitution  d'un  nouveau  créancier.  V.  DéL^GATiON. 

NOVELLES.  l  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

NOVICE.       J      Biographie  et  d'Histotre, 

NOVUM  ORGANUM,  «Nouvel  organe»,  célèbre  ou- 
Tnçe  de  François  Bacon,  formant  la  2*  partie  de  Vlnstan^ 
rniio  magna  scientiarwn,  «  la  grande  Restauration  des 
aliénées  »  {V,  Restauration).  Cest  proprement  une  mé- 
t  iode  pour  étudier  les  sciences,  en  aidant  à  leur  progrès 
ei  à  leur  utilité.  L'ouvrage  a  deux  livres;  dans  le  i*'. 
Cocon  démontre  que  les  Anciens  et  les  Modernes  n'ont 
point  eu,  jusqu'à  lui,  de  métiiode  pour  étudier  les 
sciences,  et  qu'il  est  arrivé  de  là  qu'elles  n'ont  point 
progressé.  Dans  le  2*  livre,  il  entreprend  de  tracer  cette 
méthode  nécessaire  :  il  veut  que  l'on  commence  par  re- 
cueillir les  faits,  les  digérer,  les  ordonner,  pour  en  faire 
fappm  d'une  lente  et  successive  généralisation.  La  re- 
cherche doit  s'étendre  et  s'enrichir  par  l'examen  des 
choses  comparables;  les  expériences  doivent  être  instruc- 
Ures  plutM  mi'utiles;  avant  d'oser  interpréter  la  nature, 
il  faut  rexpérience  scientifique.  Une  méthode  d'expéri- 
mentation est  donc  un  indice  soit  d'expériences  nou- 
Telles,  soit  de  vérités  générales,  et  devient  ainsi  le 
Motnd  organe  de  la  nature,  ou  l'art  d'interpréter.  A  me- 
ure qae  l'induction  donne  naissance  à  des  propositions 
g(^QâraIes,  dit-il ,  vérifiez  si  ces  propositions  dépassent  la 
sphère  des  faits  qui  leur  servent  de  base;  si  elles  le  dé- 
passent, assurez-vous  qu'elles  indiquent  avec  certitude 
àt'%  vérités  nouvelles.  Souvenez-vous  toujours  de  la  règle  : 
li*"  rien  imaginer,  ne  rien  supposer,  mais  découvrir  ou 
trouver  ce  que  la  nature  fiEdt  ou  éprouve.  Puis  le  rôle  de 
la  raison  commence  ;  c'est  proprement  le  rôle  de  Tin- 
doction.  Bacon  entre  dans  des  détails  très-circonstanciés 
pour  Papplication  de  sa  méthode  ;  mais  le  2*  livre  n'ayant 
pas  été  terminé^  il  n'a  point  donné  de  méthode  sûre  pour 
les  procédés  d'investigation  qu'il  indique,  et  le  peu 
d'osage  qu'on  a  fait  de  son  Nouvel  Organe  en  rend  l'uti- 
lité fort  suspecte.  L'ouvrage  est  écrit  en  latin,  et  plu- 
neurs  parties  ne  sont  pas  exemptes  d'obscurité.  Malgré 
ces  imperfections,  le  Novum  Organum  est  l'ouvrage  le 
plus  important  de  Bacon,  celui  où:  il  a  montré  le  plus  de 
génie,  celui  aussi  qu'il  préférait  à  ses  autres  livres  et 
qn'îl  a  le  plus  soigné,  car  il  Ta  récrit  douze  fois.  Il  parut 
pour  la  première  fois  en  i620,  et  fut  réimprimé  en  Hol- 
lande sous  le  titre  de  Novum  Organum  scientiarum, 
Uyde,  1745  et  1750,  petit  in-12.  On  le  trouve  dans  les 
(Eavres  de  Bacon,  Londres,  1825-35,  17  vol.  in-8%  et 
dans  la  tiaduction  française,  revue  et  corrigée,  donnée 
par  M.  Riaux,  des  OEuvres  de  Bacon,  Paris,  1843, 2  vol. 
zr.  in-18.  Laplace,  dans  son  Essai  sur  les  probcAHités, 
^:mb]e  avoir  résumé  en  termes  très-simples  le  Nouoel 
Organe,  en  disant  :  «  La  méthode  la  plus  sûre  qui  puisse 
nous  guider  dans  la  recherche  de  la  vârité  consiste  à 
l'élever  par  induction  des  phénomènes  aux  lois,  et  des 
lois  aux  forces.  Les  lois  sont  les  rapports  qui  lient  entre 
eux  les  phénomènes  particuliers  :  quand  elles  ont  fait 
connaître  le  principe  général  des  forces  dont  elles  d6- 
nvent,  on  le  vérifie  soit  par  des  expériences  directes, 
lorsque  cela  est  possible,  soit  en  examinant  s'il  satisfait 
aux  phénomènes  connus;  et  si ,  par  une  rigoureuse  ana- 
lyse, on  les  voit  tous  découler  de  ce  principe.  Jusque 
dans  leurs  moindres  détails,  si ,  d'ailleurs,  ils  sont  très- 
rariés  et  très-nombreux,  la  science  flflors  acquiert  le  plus 
haiit  degré  de  certitude  et  de  perfection  qu'elle  puisse 
atteindre.  »  F.  Ch.  de  Rémusat,  Bacon ^  sa  vie,  son. 
iffnps,  sa  phUosophie  et  son  influence  jusqu'à  nos  jours, 
S*  édit.,  Paris,  1858,  gr.  in-18.  C.  D—v. 

.  NOYADE,  genre  de  supplice  qui  a  été  longtemps  en 
"Uge.  Chez  les  Romains,  le  parricide  était  cousu  dans 
nn  tac  avec  un  chien,  un  coq,  une  ripère  et  une  gue- 
non, et  jeté  dans  un  fleuve  ou  à  la  mer.  Les  Burgondes 
noyaient  dans  la  boue  la  femme  adultère.  Autrefois  en 
Angleterre  on  noyait  les  voleuses  dans  un  fossé  plein 
d'eao.  La  noyade  a  été  Infligée  en  France  surtout  pen- 
dant les  xiv«,  XV",  et  xvi"  siècles. 

NOYAU,  pièce  de  bois  qui ,  posée  à  plomb,  reçoit  dans 
des  mortaises  le  tenon  des  marches  d'un  escalier  de  bois, 
et  dans  laquelle  sont  assemblés  les  limons.  V.  Esgauer. 

ROTAc.  V,  Ame. 

NOYÉS  (Secours  aux).  V.  Segocss. 

NOYON  (Cathédrale  de),  dans  la  ville  de  ce  nom, 
département  de  l'Oise.  Quoiqu'il  soit  d'une  grandeur 
moyenne,  ce  monument  est  un  des  plus  beaux  et  des 
pins  curieux  de  l'époque  de  transition  entre  le  style 
roman  et  le  style  ogival.  B&ti  à  de  longs  intervalles  de- 
puis le  commencement  du  xi*  siècle  jusqu'au  milieu 


du  xn«,  dévasté  en  1131  et  en  1293  par  des  incendies  qui 
exigèrent  des  reconstructions  partielles,  il  dut  nécessai- 
rement  réunir  les  caractères  distinctifs  de  diverses  épo- 
ques. L'extérieur  n'a  rien  de  grandiose,  mais  offre  néan- 
moins nn  aspect  gracieux  et  plein  d'harmonie.  Le  grand 
portail ,  imposant  et  sévère,  présente  deux  énormes  tours 
carrées,  de  50  met.  de  hauteur,  presque  aussi  larges  au 
sommet  qu'à  la  base,  flanquées  de  contre-forts  épiSs  qui 
s'élèvent  en  retraite  d*étage  en  étage,  et  surmontées  d'une 
toiture  en  ardoise,  haute  de  16  à  17  met.  L'étage  infé- 
rieur est  percé  de  grandes  fenêtres  à  plein  cintre  :  le  2* 
étage  présente,  à  la  tour  méridionale,  six  arcades  soute- 
nues par  d*élégantes  colonnettes,  et,  à  la  tour  du  nord, 
quatre  ogives  géminées;  le  3*  est  formé  de  grandes  ou* 
vertures  ogivales.  Un  porche  de  30  met.  de  largeur  et  de 
10  met.  de  profondeur,  qui  nuit  à  l'unité  de  la  façade  en 
la  coupant  et  en  la  masquant  en  partie ,  abrite  sons  son 
triple  berceau  de  voûtes  ogivales  trois  portes  de  même 
style  donnant  entrée  dans  l'église  :  une  balustrade  en 
pierre  le  couronne.  Les  portes,  dont  les  voussures  étaient 
chargées  d'anges  et  de  saints,  et  le  tympan  de  scènes  re- 
ligieuses, ont  été  afireusement  mutilées  en  1703.  Au- 
dessus  de  la  principale,  une  vaste  fenêtre  très-simple 
éclaire  la  nef,  et  remplace  la  rose  qu'on  voit  d'ordinaire 
en  cet  endroit.  A  gauche  du  porche,  un  rieux  bâtiment , 
éclairé  par  cinq  grandes  ogives  richement  encadrées  et 
divisées  par  des  moulures  d'un  profil  très-pur,  servait  de 
salle  capitulaire.  En  arrière  de  cette  salle,  sur  le  flanc 
septentrional  de  la  nef,  est  un  cloître  en  partie  ruiné  :  la 
galerie  oui  reste  debout  est  formée  d'arcades  en  ogives 
surbaissées,  dont  chacune  en  renferme  deux  autres  gé- 
minées et  surmontées  d'une  rose  à  six  lobes.  Au  sortir 
du  cloître,  on  aperçoit  la  sacristie,  percée  de  quatre 
grandes  ogives.  Le  corps  de  l'église  a  des  proportions 
élancées,  un  toit  aigu  avec  une  crête  richement  dentelée, 
et  se  termine  par  un  chevet  composé  de  deux  rangs  de 
terrasses  se  reliant  à  l'abside  par  deux  séries  d'arcs-lsou- 
tants  superposés,  dont  quelques-uns  ont  été  remplacés, 
au  xviii*  siècle,  par  des  contre-forts  concaves  et  chan- 
tournés, surmontés  de  vases  à  parfums.  Les  transepts, 
au  lieu  de  finir  carrément ,  s'arrondissent  en  hémicycle 
comme  l'abside  du  chœur,  disposition  byzantine  qu'on 
trouve  également  à  la  cathédrale  de  Tournai.  Toutes  les 
ouvertures  de  la  nef  sont  à  plein  cintre,  et,  sauf  dans  les 
deux  étages  des  transepts,  dans  quelques  parties  de  l'ab- 
side, dans  les  tours  et  dans  la  (açade,  l'ogive  n'apparaît 
pas  sur  l'extérieur  du  monument.  Les  pleins  cintres  sont 
sveltes  et  élancés;  ceux  de  la  partie  supérieure  de  la  net 
et  des  transepts  sont  divisés  par  nne  longue  colonnette, 
et  un  ride  assez  profond  les  sépare  du  corps  même  de  la 
muraille,  combinaison  aussi  rare  qu'ingénieuse  et  d'un 
bel  effet.  Deux  portes  existent  près  des  transepts  :  celle 
du  nord,  dite  de  S'-Pierre,  est  précédée  d'un  porche,  et 
ornée  de  sculptures  qui  annoncent  un  temps  de  déca- 
dence; celle  du  sud  ou  de  S*-£utrope  conserve  les  traces 
d'un  goût  plus  sobre. 

La  cathédrale  de  Noyon  a  02  met.  de  longueur  dans 
œuvre  (102  en  ajoutant  le  porche),  20  de  largeur,  dont 
10  pour  la  nef  majeure ,  et  23  de  hauteur.  La  croisée  a 
47  met.  de  longueur,  sur  10  de  largeur.  Le  sol  en  est, 
ainsi  que  celui  du  chœur,  plus  élevé  de  0<",06  que  le  sol 
de  la  nef.  Le  chevet  a  une  légère  inclinaison  vers  la  droite 
(K.  Axe).  Toutes  les  dimensions  sont  combinées  dans 
des  rapports  de  parfaite  concordance.  Quand  on  pénètre 
dans  l'intérieur  de  l'édifice,  on  se  croirait ,  au  premier 
aspect,  au  milieu  d'une  construction  ogivale:  tel  est,  en 
efiet,  le  caractère  des  arcades,  des  voûtes,  des  nervures 
et  de  l'ensemble  de  la  décoration.  Mais  ensuite  on  voit 
régner  le  plein  cintre  aux  grandes  fenêtres  qui  éclairent 
le  sommet  du  vaisseau,  à  la  petite  galerie  placée  sous 
ces  fenêtres,  aux  trois  premières  travées  du  chœur,  aux 
chapelles  groupées  autour  de  l'alraide.  De  plus,  les  arcades 
de  la  nef  reposent  alternativement  sur  un  pilier  carré , 
flanqué  de  colonnes  engagées,  et  sur  une  colonne  cylin- 
drique isolée  ;  cet  emploi  alternatif  de  deux  genres  de 
supports  se  rencontre  fréquemment  dans  les  monuments 
à  plein  dntre.  L'union  du  roman  et  du  gothique  s'est 
opérée  ici  d'un  seul  jet,  et  sans  doute  intentionnelle- 
ment ;  car  l'ogive  apparaît  près  du  sol,  et  le  plein  cintre 
couronne  l'édifice,  ce  qui  est  le  contraire  dans  les  autres 
monuments  de  styles  mélangés.  Au-dessus  des  collaté- 
raux ,  et  sur  toute  leur  largeur,  s'étend  un  magnifique 
triforium,  percé,  dans  la  nef,  d'arcades  ogivales  ^min^, 
couronnées  d'un  trilobé,  et,  au  chœur,  d'ogives  et  de 
pleins  cintres  alternatifs,  tantôt  simples,  tantôt  jumelés. 
Les  chapiteaux  dans  la  nef  ne  sont  ornés  que  de  feuil- 


NUI 


1318 


NUM 


lages;  dans  le  chœur,  ils  portent  des  animaux  fantas- 
tiques. Une  chose  remarquable,  c*est  que  les  colonnes 
isolées  ont  ce  renflement  du  fût  qui  caractérise  rarchitec- 
ture  gréco-romaine,  et  qu'entre  le  fût  et  la  base,  entre  le 
chapiteau  et  le  fût,  se  trouvent  des  bourrelets  de  plomb, 
indice  d'une  haute  antiquité.  Au-dessus  de  chaque  co- 
lonne du  chœur,  trois  colonnettes  sept  fois  annelées  s'é- 
lancent Jusqu'à  la  voûte.  Les  chapelles  absidales  sont 
au  nombre  de  neuf  :  les  quatre  premières  sont  carrées, 
et  éclairées  par  une  seule  fenêtre  à  plein  cintre;  les  cinq 
autres,  qui  rayonnent  autour  du  rond-point,  sont  circu- 
laires, avec  une  entrée  à  plein  dntre  et  deux  fenêtres 
ogivales.  Les  chapelles  de  la  nef  sont  postérieures  an  mo- 
nument :  les  six  du  côté  du  nord  ont  été  construites  au 
XIII*  siècle  entre  les  contre-forts.  Il  y  en  a  trois  au  midi, 
%n  -dehors  des  contre-forts,  et  beaucoup  plus  grandes  :  la 
cliape!<e  de  S**-Luce  et  de  S^'-Marguerite  contient  un 
sépulcre  construit  en  1497,  à  l'imitation  du  S*-Sépulcre 
de  Jérusalem;  celle  de  Notre-Dame-de-Bon-Secours  est 
un  charmant  spécimen  du  style  de  la  Renaissance;  celle 
de  S*-Nico1as,  bien  que  bâtie  en  style  ogival,  est  de  la 
première  moitié  du  xvii*  siècle.  Le  chœur  de  la  cathé- 
drale de  Noyon  renferme  un  caveau  acoustique,  aujour- 
d'hui fermé,  et  qui  était  destiné  à  renforcer  et  à  réper- 
cuter la  voix  des  chanteurs.  Les  murs  en  sont  tapissés  de 
vases  en  terre  cuite  superposés  horizontalement  étranges 
avec  symétrie  ;  l'orifice  de  ces  vases  est  placé  extérieure- 
ment, et  une  maçonnerie  les  lie  ensemble,  de  manière  à 
ne  laisser  voir  que  leur  bouche;  une  large  ouverture 
placée  au  centre  de  la  voûte,  et  couverte  autrefois  d'une 
grille  à  Jour,  établissait  une  communication  entre  le  ca^ 
veau  et  le  chœur.  V,  Levasseur,  Annales  de  Véglise  ca- 
thédrale de  Noyon,  1633,  in-i**;  Ramée  et  Vitet,  Église 
de  Noyon,  plan,  coupes  et  détails,  1842,  in-fol.;  Dantier, 
Description  monumentale  et  histonque  de  Véglise  Notre- 
Dame  de  Noyon,  1845,  in-8^  B. 

NU  (Le),  en  termes  de  Sculpture  et  de  Peinture,  n'ex- 
prime que  l'idée  du  beau  et  l'étude  des  formes  humaines. 
En  Grèce,  la  plupart  des  statues  étaient  nues;  chez  les 
Romains,  elles  étaient  plus  ordinairement  vêtues.  Les 
Grecs  pensaient  que  le  nu  avait  une  expression  plus 
noble  et  plus  vraie,  car  sons  ce  climat  chaud,  on  était  à 
peine  vêtu;  les  enfants  ou  les  esclaves  étaient  souvent 
sans  vêtements. 

NUANCES ,  modifications  de  la  voix  ou  du  souffle  au 
moyen  desquelles  on  enfle  les  sons,  on  les  modifie,  on 
les  profiVre  avec  force  ou  douceur,  selon  l'expression 
propre  au  sentiment  que  l'on  veut  rendre.  Le  plain- 
chant,  qu'on  exécute  aujourd'hui  d'un  ton  uniforme,  a 
comporté  autrefois  des  nuances  :  sans  parler  des  orne- 
ments que  les  anciens  auteurs  appellent  voces  secabiles, 
tremulœ,  vinnulœ^  etc.,  on  sait  qu'on  employait  sur  les 
morceaux  notés  les  lettres  G,  M,  F.  etc.,  pour  indiquer 
qu'il  fallait  chanter  ctto  (vite),  moderato  (d'un  mouve- 
ment modéré),  ctim  fragore  (avec  force),  etc.  —  En 
Peinture,  les  nuances  sont  les  i^radations  des  couleurs, 
ce  qu'on  appelle  aussi  tons  et  temtes, 

NUE-PROPRIÉTÉ,  propriété  dont  l'acte  constitutif  en 
a  séparé  l'usufruit.  Elle  est  susceptible  de  transmission 
comme  toute  autre  propriété  :  seulement,  celui  qui  l'ac- 
quiert fait  un  contrat  aléatoire,  basé  sur  les  chances  de 
survie  que  présente  l'ftge  de  l'usufhiitier. 

NUIT  (La),  divinité  allégorique.  F.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

NUITS  (Les),  titre  d'une  série  de  Méditations  en  vers, 
publiées  à  partir  de  1740  par  le  poète  anglais  Young, 
irappé  de  divers  malheurs  de  famille.  Blinistre  d'une  re- 
ligion sévère,  dans  une  secte  qui  en  augmente  encore 
l'austérité,  Younç  développe  à  24  reprises  ce  seul  et 
même  thème,  qu'il  nous  faut  tous  mourir  un  Jour  :  il  fait 
de  la  mort,  non  le  terme,  mais  le  but  de  la  vie,  et  ce  but, 
il  veut  que  nous  l'envisagions  sans  cesse.  Les  Nuits,  tra- 
duites en  prose  française  par  Letourneur,  eurent  un  mo- 
ment de  grande  vogue;  Colardeau  mit  en  vers  les  deux 
premières,  sans  beaucoup  de  succès,  et  Baour-Lormian, 
dans  ses  Veillées,  en  imita  un  certain  nombre.  Cette  lit- 
térature mélancolique,  qui  s'explique  en  Angleterre  par 
cette  espèce  d'hjrpocondrie  qu'on  nomme  spleen,  ne  pou- 
vait guère  réussir  en  France. 

Norrs  ATTiQOBS  (Les),  ouvrage  latin  d'AuIu-GcIle,  qui 
eût  été  mieux  intitulé  Veillées  altiques.  C'est,  sous  forme 
d'entretiens,  une  compilation  précieuse  a«ix  Modernes 
par  beaucoup  de  faits  et  de  détails  qu'on  ne  trouve  plus 
que  là  et  qui  aident  à  faire  connaître  l'antiquité.  Aulu- 
Gelle  avait  des  livres  et  du  loisir,  et  il  passa  bien  du 
temps  à  réunir  des  anecdotes  et  des  extraits  de  toute 


espèce,  sans  autre  souci  que  celui  de  se  distraire.  Soi» 
livre,  au'il  intitula  Nuits  attiques,  en  souvenir  d'Athènes, 
son  séjour  favori,  est  une  bizarre  mosalaue  où  l'histoire 
et  la  médecine,  la  grammaire  et  la  morale,  les  vers  et  la 
prose  se  heurtent  à  chaque  page. 

NULLES.  V.  Cryptographie. 

NULLITÉ,  vice  qui  empêche  un  acte  ou  un  Jugement 
de  produire  son  effet.  Il  n'y  a  de  nullités  que  celles  éta- 
blies par  la  loi,  et  elles  sont  absolues  ou  relatives.  Les 
nullités  absolues  sont  celles  que  peuvent  invoauer  toutes 
les  personnes  ayant  un  intérêt  né  et  actuel  a  les  faire 
valoir  :  ainsi,  quand  la  loi  déclare  un  acte  nul  pour  vire 
de  forme,  c'est  une  nullité  absolue.  Les  nullités  relatives 
ne  sont  établies  que  dans  l'intérêt  des  parties,  et  ne 
peuvent  être  invoquées  que  par  elles  :  telle  est  la  nullité 
qui  résulte  du  dé&ut  d'autorisation  de  la  femme  mariée, 
car  la  femme  seule,  son  mari  ou  leurs  héritiers  peuvent 
s'en  prévaloir.  Parmi  les  nullités  absolues,  les  unes  sont 
radicales  et  perpétuelles,  par  exemple  la  convention  qui 
n'a  pas  d'objet,  qui  a  une  cause  illicite,  ou  qui  est  con- 
traire soit  aux  bonnes  mœon,  soit  à  l'ordre  public;  les 
autres,  temporaires,  ne  peuvent  pas  être  invoquées  par 
les  parties  après  cotains  délais  :  ainsi,  un  Jugement  dé- 
finitif rendu  en  premier  ressort,  fût-il  nul  de  plein  droit, 
acquiert  l'autonté  de  la  chose  Jugée,  si  l'on  n^en  a  point 
appelé  dans  le  délai  utile.  Les  nullités  relatives  qui  con- 
cernent la  forme  extérieure  des  actes  se  nomment  fins 
de  non-'procéder  ;  celles  qui  concernent  la  capacité  des 
parties  ou  le  fond  du  droit,  fins  de  non-recevoir  (F.  ce 
mot)  V.  Perrin,  TroÀté  des  Nullités  en  fnatière  civile, 
1816,  in-8«;  Biret,  Traité  des  Nullités  de  tous  genres  de 
droit  et  de  forme  admises  en  matière  cioile,  1821, 2  vol. 
in-8°;  Selon,  Théorie  sur  la  Nullité  des  actes  et  des 
commentions  de  tout  genre,  en  matière  cimle,  1840, 
S  vol.  iD-8«. 

NUMERAIRE,  masse  des  espèces  monnayées  qui  sont 
en  circulation.  On  y  comprend  quelquefois  le  papier- 
monnaie  et  les  billets  de  banque.  Le  numéraire  doit  être 
dans  une  certaine  proportion  avec  la  richesse,  l'industrie 
et  le  commerce  d'un  pays,  pour  ne  pas  entraver  la  cir- 
culation ou  l'échange  m  produits.  La  somme  du  numé- 
raire d'une  nation  est  toujoure  bien  inférieure  à  celle  des 
valeurs  en  émission  chez  elle,  valeurs  qui  ont  pour  bat 
de  suppléer  à  l'insuffisance  du  numéraire.  Le  numéraire 
n'est  point  le  capital  {V.  ce  mot),  avec  lequel  on  l'a 
souvent  confondu  :  le  capital  est  un  ensemble  de  valeurs 
(fui  rapportent  un  intérêt;  le  numéraire  ne  produit  rien, 
il  ne  sert  qu'à  estimer  ce  que  vaut  le  capital.  Chez  les 
peuples  peu  avancés  dans  la  civilisation,  la  fortune  pour 
les  mdividus  est  un  numéraire  accumulé,  qui,  toujours 
égal  à  lui-même  en  valeur,  doit  le  mieux  les  préserver 
de  périls  inconnus,  et  qu'il  est  toujours  facile  de  cacher 
et  de  sauver.  Mais,  dans  les  sociétés  mieux  organisées, 
où  la  propriété  est  bien  garantie,  le  numéraire  accumulé 
ne  peut  être  qu'une  richesse  improductive,  et  on  ne  le 
recherche  plus  que  dans  les  temps  de  crise.  —  Suivant  les 
difl'érents  auteura  qui  se  sont  occupés  des  monnaies  des 
principaux  pays  de  la  terre,  c'jst  la  France  qui  possède 
le  plus  de  numéraire  :  elle  en  avait  pour  600  millions  su 
commencement  du  ministère  de  Colberten  1601  ;  999  mil- 
lions en  1093;  1  milliard  600  millions  selon  Lawen  1716; 
1  milliard  600  millions  en  1754:  2  milliards  600  millions 
suivant  ^ecker,  1789;  2  milliards  300  millions  à  la  fin  du 
1*'  Empire  français,  en  1814;  2  milliards  715  millions  en 
1828;  3  milliards  583  millions  en  1832;  4  milliards  600 
millions  en  1841;  etatijourd'hui  (1875)  le  numéraire  paraît 
dépasser  6  milliards.  Après  la  France  vient  l'Angleterre  : 
depuis  le  règne  de  Charles  II  jusqu'en  1838,  on  a  émis 
dans  ce  pays  pour  3  milliards  835  millions  de  monnaie; 
depuis  1838,  le  numéraire  anglais  a  dû  s'accroître  dans 
une  proportion  bien  plus  forte.  Relativement  aux  au^ 
États  de  l'Europe,  nous  ne  possédons  que  les  rensei 
gnements  suivants  :  les  Pay^Bas  en  1823  av^ent  6i 
millions  de  numéraire;  l'Espagne  en  1782, 450  millions 
le  Portugal  en  1788, 150  millions;  le  royaume  de  Naple 
en  1780,  175  millions;  toute  l'Italie  en  1788,  250  mil 
lions;  l'Autriche  en  1807,  S75  millions;  la  Suisse  et  le 
États  de  la  Confédération  germanique  en  1820,  75  mil 
lions;  la  Prusse  en  1805,  218  millions;  la  Suède, 
Norvège,  et  le  Danemark  en  1800,  ensemble  225  millions 
la  Russie  en  1815, 181  millions  (alon  elle  n'exploiuit  pa 
ou  exploitait  mal  les  mines  de  TOural  et  de  l'Altaf). 
V.  Monnaie,  Or,  Abgbnt. 

NUMÉRALES  (Lettres),  lettres  employées  souvent  au- 
trefois pour  exprimer  les  nombres.  Tels  sont  les  chiffroi 
romains. 


NU  M 


1319 


NUM 


NUMÉfVAUX  (Adjectifs),  adjectifs  serrant  à  exprimer 
U  qoanii'té  ou  le  rang  et  l'ordre  des  personnes  et  des 
choses.  Il  y  en  a  deux  sortes  :  les  adjectifs  numéraux 
cardinattx  et  les  adjectifs  numéraux  ordinatix.  Les  pre- 
miers marquent  la  quantité  des  personnes  et  des  choses, 
comme  un,  deux,  trois,  dix,  vingt,  trente^  cent,  mille,  etc.; 
les  seconds,  Tordre  et  le  rang  que  les  personnes  et  les 
choses  occupent  entre  elles,  comme  premier,  second  ou 
deuxième,  troisième,  dixième,  vingtième,  trentième,  cm- 
tièmey  miilième,  etc.  Après  vingt,  trente^  quarante,  cin- 
quante ,  soixante  ,  quatre-vingts,  cent  et  mille,  on  dit 
unième  au  lieu  de  premier.  Lorsque  Tadjectif  numéral 
se  compose  de  deux  éléments  numéraux  ou  plus,  le  der- 
nier seul  prend  la  désinence  ordinale  :  dix-septième,  etc. 
On  usage  bizarre  a  voulu  qu*on  emploie  les  nombres 
cardinaux  au  lieu  des  nombres  ordinaux  en  parlant  des 
heures,  des  mois  et  des  années  courantes  :  Il  est  six 
heures,  aa  lieu  de  II  est  la  sixième  heure;  Le  deux 
mars  y  pour  le  deuxième  de  mars:  L'an  mil  huit  cent 
soixante,  pour  Lan  mil  huit  cent  soixantième,  etc. 
On  dit  toujours  le  premier  janvier.  Jamais  le  un  jan- 
vier. Il  en   est  de  même  lorsqu'on  désigne  le  numéro 
d'ordre  des  souverains,  princes,  duc^,  etc.,  de  même 
nom:  Louis  deux,  Charles  huit;  mais  il  faut  dire: 
NapoléoH  premier.  Vingt  et  cent,  précédés  d'un  nombre 
par  lequel  ils  sont  multipliés,  prennent  la  marque  du 
pioriel  :  qiuUre-vingts  hommes,  neuf  cents  hommes»  Mais 
si  un  autre  adjectif  numéral  suit,  la  marque  du  pluriel 
(Uspiiralt  :  quatre-^ngt-un^  trois  cent  quatre.  Si  vingt  et 
ceat  sont  employés  abusivement  pour  vingtième  et  cen- 
tième, ils  ne  doivent  et  ne  peuvent  Jamais  prendre  la 
marque  du  pluriel  :  l*anmilseptcentqiAatre-vingt,  Vannée 
sixcent.  L'usage  a  consacré  vingt  et  un,  trente  et  un,  etc.; 
mais  il  faut  dire  vingt-deux,  trente-trois,  etc.  On  peut 
dire  soixante-dix  et  soixante  et  dix;  mais  on  ne  peut 
dire  que  quatre-vingirdix,  cent  dix^  etc.  On  dit  soixante 
et  onze  mieux  que  soiocante-ome.  Quatre-vingt-un, 
quatre-vingt-onze,  cent  un,  mille  un,  s'emploient  tou- 
jours sans  la  conjonction  ;  on  dit  cependant  les  Mille  et 
une  nuits,  les  Cent  et  un,  —  Nos  adjectifs  numéraux 
•oDt  tirés  directement  de  ceux  de  la  langue  latine.    P. 

lumÉBADx  (Adverbes),  adverbes  qui  expriment,  soit  le 
nombre  de  fois,  soit  une  idée  de  rang  et  d*ordonnance. 
La  langue  française  ne  possède  guère  parmi  les  premiers 
que  les  deux  niots  doublement  et  triplement,  Isa  langues 
anciennes  sont  plus  riches  à  cet  égard.  Mi  en  français 
est  one  particule  numérale  inséparable,  (^ui,  préposée 
devant  un  nom  substantif  ou  adjectif,  expnme  l'idée  de 
moitié  :  mi-parti.  Les  adverbes  numéraux  ordinaux  se 
forment  en  français  par  l'addition  du  suffixe  ment  à  Tad- 
jectif  numéral  ordinal  :  premièrement,  secondement  ou 
dewâèmement,  troisièmement,  etc.  En  latin,  on  emploie 
avec  le  sens  adverbial  le  neutre  singulier  des  adjectifs 
ordinaux  ^nmum,terttum,Quarttf m),  I  -  Vablatif (primo,  . 
tertio,  quarto)  y  cas  qui  est  seul  usité  pour  dire  deuxiè- 
mement {secundo).  En  grec,  on  emploie  le  neutre  singu- 
lier ou  pluriel,  avec  ou  sans  article.  P. 

nciiéRADX  (Substantifs)  ou  nous  de  nombre,  mots  qui 
expriment  des  quantités,  soit  simples,  soit  multiples,  soit 
collectives,  soit  partielles.  Tels  sont  unité,  huitaine, 
^^ine^  douxaine,  millier,  million,  milliard ,  trillion, 
le  doMe,  le  tiers,  le  quart,  la  moitié,  le  triple,  etc.; 
enfin  le  mot  fois,  uni  à  un  adjectif  numéral  cardinal  ou 
ordinal.  Les  mots  semaine  et  neuvaine,  qui  signifient 
proprement  durée  de  sept,  de  neuf  jours,  ont  perdu,  par 
Tusage,  leur  caractère  primitif  de  substantifs  numéraux, 
et  ne  sont  considérés  que  comme  des  substantifs  com- 
muns ordinaires.  Les  langues  anciennes  comptent  aussi 
an  assez  grand  nombre  de  substantifs  i^uméraux,  surtout 
pour  exprimer  une  idée  collective.  P* 

HOMÉBAox  (Vers),  vers  dont  les  lettres  numérales  mar- 
quent le  millésime  de  quelque  événement.  V,  Chrono- 

GRAMME. 

NUMÉROTAGE  DES  MAISONS.  Autrefois  les  maisons 
de  Paris  n'étaient  point  numérotées;  on  désignait  leur 


roter  les  maisons  ;  mais  les  hôtels  se  trouvèrent  humiliés 
de  se  voir  ainsi  confondus  dans  la  foule -et  comme  enca- 
naillés dans  la  bourgeoisie ,  et  la  chose  commencée  ne 
fut  pas  poursuivie.  Un  M.  Kremfeld,  attaché  à  la  diplo- 
matie pour  rélecteur  de  Cologne,  et  qui  publia  en  1776 
et  années  suivantes,  sous  le  nom  d'Almanach  de  Paris, 
le  premier  almanach  d'adreases  des  principaux  habitants 


de  la  capitale,  le  fit  le  champion  du  numérotage,  qui 
devait  être  si  commode  pour  son  almanach  ;  néanmoins 
il  obtint  si  peu  de  succès,  qu'en  1782  on  réclamait  en- 
core pour  l'adoption  générale  de  cette  mesure.  Ce  ne  fut 
que  24  ans  plus  tard,  en  1806,  après  que  la  Révolution 
eut  tout  nivelé,  que  l'administration  municipale  put  effi- 
cacement ordonner  cette  mesure,  qui  fut  appliquée  avec 
une  méthode,  et  rendit  les  recherches  plus  promptes  et 
plus  faciles  :  toutes  les  rues  furent  classées  en  rues  pa- 
rallèles et  en  rues  perpendiculaires  à  la  Seine,  comme 
elles  le  sont  ou  à  peu  près ,  le  fleuve  coupant  la  ville  en 
deux.  Dans  les  rues  parallèles,  la  série  des  numéros 
commence  à  l'E.  et  se  suit  à  1*0.;  dans  les  rues  perpen- 
diculaires, la  série  part  de  l'extrémité  la  plus  rapprochée 
ou  la  moins  éloignée  du  fleuve,  et  va  en  s'avançant  vers 
l'extrémité  de  la  ville.  Enfin,  cette  marche  adoptée ,  tous 
les  nombres  pairs  sont  à  droite  et  les  impairs  à  gauche. 
Originairement  on  peignait  les  numéros  sur  les  maisons, 
du  côté  de  la  porte  d'entrée  ;  la  pluie  et  le  soleil  les 
altéraient  souvent  ;  vers  1850,  on  a  commencé  de  les 
faire  peindre  sur  une  plaque  de  grosse  porcelaine  de 
0"*4^  carrés,  à  fond  bleu,  avec  le  numéro  en  blanc. 
Cette  peinture  étant  cuite  au  four  est  inaltérable.  —  Le 
système  de  numérotage  des  maisons,  tel  qu'il  se  pra- 
tique à  Paris,  est  adopté  dans  toutes  les  communes  de 
France.  C.  D— t. 

NUMISMATIQUE  (du  grec  numisma,  monnaie).  La  nu- 
mismatique a  pour  objet  la  science  des  monuments  mé- 
talliques, médailles  et  monnaies.  Jetons  et  méreaux,  etc. 
Son  utilité  pour  l'étude  de  l'histoire  a  été  comprise  depuis 
longtemps,  mais  surtout  depuis  l'époque  où  le  grand  ou- 
vrage d'Eckel  {Doctrina  nummorum,  etc.)  a  posé  les 
bases,  établi  les  règles  de  la  science.  Les  portraits  des 
princes,  la  chronologie  de  leur  règne,  les  principaux  évé- 
nements de  la  vie  des  peuples,  sont  fournis  par  les  mé- 
dailles et  les  monnaies.  La  valeur  du  travail  artistique 
de  ces  pièces  indique  la  mesure  de  la  civilisation  des  pays 
où  elles  ont  été  fxappées,  et  l'abondance  de  la  monnaie 
est  une  indication  utile  pour  l'économiste,  qui  juge  par 
elle  la  richesse  relative  des  peuples  et  le  développement 
de  lewr  commerce  extérieur. 

Division,  —  Il  y  a  la  numismatique  ancienne  et  la  nu- 
mismatique moderne.  La  première,  portant  sur  des  temps 
reculés,  offre  beaucoup  plus  d'intérêt  que  la  seconde,  à 
laquelle  elle  est  fort  supérieure  sous  le  rapport  de  l'art. 
C'est  d'elle  que  nous  nous  occupons  ici. 

Noms  divers  portés  par  les  médailles.  —  Les  médailles 
ou  monnaies  antiques  {V.  Médailles)  ont  porté  chez  les 
Anciens  divers  noms,  les  uns  relatifs  au  sujet  représenté, 
les  autres  à  leur  forme.  On  appelait  Tortues  les  monnaies 
d'Éçine,  frappées  au  type  de  la  tortue  ;  PotUains,  celles  de 
Connthe,  comme  celle  ci-dessous,  ayant  au  droit  une  tète 


Médaille  poulain. 

de  Minerve,  et  au  revers  un  Pégase  aîlé;  Gentati  Philtppt, 
les  monnaies  de  la  Galatiequi  portent  des  génies  avec  des 
ailes;  Sagittaires,  les  Darîquesoù  figure  l'archer  royal, 
monnaie  de  Darius,  dont  nous  donnons  un  type  ci-contre  ; 


Dorique. 

Chouettes,  les  tétradrachmes  d'Athènes,  etc.  Il  y  a\^t 
aussi  les  Victoriati,  les  Biges,  les  Philippes^  les  Cyzi- 
cènes,  les  Phocéennes,  les  Homères  de  Smyme,  les  Vul- 
cains  de  Liparî,  etc.  —  Les  modernes  distinguent  parmi 
les  pièces  antiques  les  Incuses  (umôiruw),  gravées  en 
creux;  les  Serrati,  crénelées  sur  les  bords;  les  Fourrées, 
pièces  fausses  couvertes  d'une  lame  d'argent;  les  Saucées, 


NUM  i: 

ptècea  de  cuirre  trempées  dans  l'or  ou  l'argent  en  rusion  ; 
les  Fnisles,  pièces  usées  par  le  rrottement.  IndépeD^ain- 
meot  de  cet  diverses  pitrticularilés,  il  y  ■  encore  la  pa- 
tint,  espèce  de  remis  que  le  temps  met  sur  le  bronze 
antique,  et  qui  aide  à  reconnaître  son  authenticité.  —  Les 
monnaies  ont  eu!  frappées  en  cniTre,  en  argent,  en  or, 
en  électnim  (alliage  d'or  et  d'ai^nt),  en  potîn  (alliage  de 
cuim  et  d'argent).  Elles  portent  an  nombre  Infini  de 
lypM  ,  sujets  caractéristiques  du  pays  et  du  temps  où 
elles  ont  élé  émises;  on  y  trouic  quelqnerol?  des  tétea 
affrontéa,  opposée»  l'une  à  Pautre,  front  contre  ftvnt. 


t.  .VéJallIt  affrvKtii  S.  ilèiailU  eonSngvét. 

comme  celles  de  la  1"  pièce  cl-dessos,  représentant  les 
deux  fils  de  Pompée;  ou  cori;uj;u^,  dont  la  2*  pièce 
offre  un  exemple  ikns  les  tâte*  de  Ptolémée  Phtladel- 
plie.  It  faut  ;  distinguer  le  tignt  monitiûrt,  particulier 
à  l'atelier  et  primitu,  de  la  contrs-tnargM.  empreinte 
postérieure,  par  laquelle  on  a  modiflé  ta  râleur  et  la  si- 
gnification de  la  monnaie.  Les  Inscriptions  mises  tantAt 
ea  iégeitdtt  aatour  du  sujet ,  tantdt  exprimées  k  Ytxtr- 
gue  en  monogramm4t  ou  en  initiatts ,  sont  à  étudier 
avec  le  plus  grand  Min.  En  effet,  on  trouve  sur  les 
ntonnaies  antiques  owtononMi,  frappées  à  l'époque  où 
les  villes  Jouissaient  de  l'indépendance,  les  noms  des 
mogtstrati  non  titrés,  les  noms  des  maguUrats  avec  leur 
titre  d' Archonte,  de  Préteur,  d'Épliore,  de  Prytane,  etc.j 
sur  tes  monnaies  imptrit^et,  les  noms  des  magistrats 
litres  et  non  titrés,  les  noms  des  villes  avec  l'Iadicaticn, 
dans  le  titre  qu'elles  se  donnent,  de  leur  situation  po-' 
litique.  Ces  inscrinlions  sont  généralement  régulières, 
mais  quelquefois  les  lettres  sont  placées  dans  l'ordre 
Inverse  ;  c  est  cet  ordre  où  elles  se  présentent  à  re- 
bours qu'on  a  appelé  Bouitrophidon.  Il  j  a  ï  distinguer 
aussi  parmi  les  médailles  celles  qu'on  désigne  sous  te 
corn  Je  médailles  pariantes,  parce  qae  le  sujet  qui  y  est 
représenté  se  rapporte  k  la  siguiHcatlDn  de  leur  nom  : 
telles  sont  celles  de  Sélinonte,  où  figure  le  persil  (en  grec 
Selini);  celles  de  Cardia,  un  cœur;  de  Rhodes,  une  rose 
de  grenade,  etc. 

Type*  (t  tymboUi.  —  Les  renseignements  que  four- 
nissent les  médaille!  sur  les  mœurs,  les  luàges,  les 
croyances  dee  Anciens,  sont  en  quelque  sorte  lnnom~ 
branles.  Il  y  a  les  symboles  des  provinces  et  des  villes  ; 
I^l/Wgu«  e«t  déslgDM  par  une  tête  d'éléphant;  VÊgi/pt* 
par  un  sistre,  un  ibis,  un  crocodile;  la  Judit  par  une 
robe  et  un  palmier;  t'Èipagne  par  an  lapin  ou  un  soldat 
urmé  dé  deux  Javtûots;  VArabic  par  un  chameau,  etc.; 
les  symboles  des  divinités  :  Prottrpine  est  représentée 

Car  une  grenade;  Canop»  par  un  pot  de  terre  qui  porte 
i  Qeur  <f  Isls  :  les  DioKtiTes  par  des  étoiles,  comme  on 
le  voit  au  revers  de  la  médaille  ci-dessous  de  Scyros,  où 


Castor  et  Pollux  ont  une  étoile  sur  la  tète,  etc.  Les  attri- 
bul3  n'ont  pas  moins  d'Importance  :  la  haitt,  sans  fer,  ou 
plutôt  l'ancien  sceptre,  est  la  marque  du  commandement 
suprême;  la  path-e,  entre  les  mains  des  divinités, 
marque  les  sacrifices  qu'on  leur  fait;  le  caducét  marque 
le  pouvoir;  les  Mi^wnli  sont  le  signe  de  la  prudence,  les 
itin  celui  de  la  diligence,  etc.  On  voit  sur  les  méd^lles 


10  NUÎÎ 

romaines rfnscignxntlitutreplacéi.  __. 

diquer  une  colonie  nouvelle;  les  boviclitrt  vçlif)  eiprl- 
meni  les  vœui  publics  rendus  aux  dieux;  le  bonnet  eut- 
monlâ  d'une  pointe  croisée  sur  le  pied  ave^  des  pendants 
(op^xetlliiniintna)  marque  la  dignité  poatiflcale,laisqu'il 
est  accompagné  dés  instrumenta  de  sacrifices;  te  ckar 
traîné  par  des  clieraux  ou  des  lions  et  des  éléphants 
marque  le  triomphe  ou  l'apothéose  des  princes  ;  le  cliar 
traîné  par  des  mules,  k  l'usage  des  princesses,  marqua 
la  consécration,  ou  indique  qu'on  porte  leurs  images  aux 
jeut  do  Cirque.  Les  bonntta,  les  couronnti  qui  ceigaeni 
la  tête  ont  des  formes  très-diverses.  Cest  Se  diadème- 
bandeau  dont  on  s'est  servi  depuis  ronstantin  :  Jnsiinien 
est  le  premier  qui  s  pris  une  espèce  de  couronne  Iérm>!4' 
leamtlacftiium).  Ce  sont  les  counmnei  radiaiei,  qu'on 
place,  comme  le  nimbe,  cercle  de  lumière,  autour  de  la 
tète  du  prince  devenu  Dieu;  les  couronnai  roilrofei. 
muralts:  les  cii^tus,  faites  de  chêne;  les  athlétiqats, 
formées  d'ache,  etc.  Parmi  les  bonnets,  il  y  a  la  niilrs, 
sur  le  front  des  rois  d'Arménie  et  d'Assyrie;  la  liare, 
sur  celui  des  rois  Perses  et  Parthes;  lo  bonnet  Phrvgien, 
le  Pélase  de  Mercure,  barratle  avec  deux  ailes  ;  te  bonnet 
iarts  bords  de  Vulcain ,  des  Cabires  et  des  Cyclopes:  le 
bonnet  du  Dieu  Lunus,  recourbé  en  pointe  en  forme  de 
croissanl,  etc.  —  Très-souvent  dans  l'antiquité,  en  Grèce 
comme  en  Asie,  comme  en  Gaule,  les  peuples  ou  les 
villes,  au  lieu  d'inscrire  leurs  noms  sur  ut  monnaie,  ta 
contentent  d'y  placer  une  production  particulière  au  sot 
du  pays;  ainsi,  Cyrène,  dont  toutes  tes  pièces  sont  frap- 
pées au  type  du  silphium  ;  ou  un  animal  qui  est  le  lym- 
iMle  de  la  divinité  protectrice.  Un  nombre  conaidérabls 
d'animaux  figurent  sur  les  médaille*  :  le  eh«i>al  est  le 
hrpe  ordinaire  de  Carthage  ;  le  cAi'sn,  consacré  i  Mercure, 
de  Tyr;  te  coq  est  le  symbole  de  Lunus  ou  da  Mercure; 
la  com<ilJ«,  d'Apollon  ;  Vhippopolamt  est  le  symbole  du 
Ml  ou  de  l'Egypte  ;  Pégase  ailé,  celui  de  Corinthe,  de  Sy- 
racuse et  d'autre;  villes  de  Sidie;  le  phénix,  celui  de 
l'éternité  de  l'Empire  romain  ;  te  paon  ou  Vaigle  marque 
ta  consécration  des  princesses;  le  pigeon,  le  culte  de  Vé- 
nus; le  poisson  caractérise  les  villes  maritimes  ;  U  vigm, 
les  pays  de  vignobles;  la  tirant,  Cumes;  l'epi  de  blé, 
Mélaponte,  etc. 

Nous  n'en  finirions  pas  si  nous  voulions  déterminer  la 
signiflcatian  de  toutes  !ei  repré^ntatloQS  symboliques 
qui  abondent  sur  tes  monades  antiques. 

Beprésenlation  sur  Its  médailles  des  auvras  iTart  les 
plus  célibres  dâ  VantujuiU.  —  lin  des  meilleurs  piriis 
qu'on  tire  de  la  numismatique  ancienne,  c'est  pour  l'in- 
terprétation et  la  restauration  des  monuments,  surtout 
dot  statues  antiques.  Entre  les  ouvrages  d'art  de  premier 
ordre,  par  le  sujet  ou  par  le  talent  de  leurs  auteurs. 
qui  se  trouvent  sur  les  médailles,  citons  :  la  lanon  de 
Samos,  ouvrage  de  Smilis,  type  monétaire  de  cette  ville; 
la  Vénus  de  Paphos;  la  Dion*  d'Épdèse;  Avotlon  Ptûii- 
siiu,  réduction  d'une  statue  célèbre  de  Csnachus,  l'andeo 
chef  de  l'école  de  Si cy on e,  sur  les  monnaies  de  Slilet,  etc. 
Sans  ces  méd^llea,  nous  n'aurions  aucune  idée  de  ces 
chefs-d'œuvre  fameux  dans  l'andqulté,  et  dont  II  n'existe 
pas  d'autre  reproduction.  —  H  faut  encore  recourir  i  la 
numismatique  ancienne  pour  trouver  une  image  de  cet 
chefs-d'œuvre  de  maîtres  célèbres  qui  ont  disparu: 
à'Agéladas,  le  maître  de  Phidias,  nous  trouvons  la  re- 
présentation du  Jupiter  Ithomate  sur  un  médaillon  de 
Hes-sénie,  que  nous  donnons  d-dcsMUS,  oii  l'on  voit 


I  Jupller  tthomnr 

JapICer  nu  et  debout,  a»i>e  l'aigle  sur  le  bras  gauclie 
'wo^u.  et  la  foudre  qu'il  brandit  de  la  main  dnille: 
■—  i«  Phidias,  trois  de  ses  principaux  ouvrages,  te 
Juptlvr  d'OtympIe,  la  Minent  du  Partbénon.  It  Mi- 
nerve de  l'Acropole,  ont  fourni  le  ^pe  de  plusieurs  mé- 
dailles grecques.  On  a,  en  outre,  la  léte  de  Minerve  sur 
les  tétradrachmes  d'Athènes,  st  la  tète  de  Jupiter  sur  lu 
médaillons  des  Arcadiens  ;  —  de  Praxitile,  la  Viaus  de 
Cnida  au  revers  des  têtes  de  Caracaila  et  de  Plautille. 
le  groupe  de  Utone  et  de  Chlori*  sur  nm  médalll» 


firfin,  le  Fkane  «or  une  médiJIle  de  Ciesarea  de  Pa- 
atet  de  la  Trachonitide  ;  —  de  Lysipp»,  l'Hercule  h  table, 
lur  Ua  médailles  de  Crotone.  —  Les  médailles  çrecques 
reofertneDl  en  outre  la  réminiscence  ou  la  copie  d  une 
roule  de  graupes  et  de  «latues  dea  msltret  des  premières 

IVuniumaiKTU*  grteiiu».  —  Elle  comprend  plusieurs 
^ques.détorminéss  chacune  par  lafomie  des  médailles, 
cells  des  lettres,  et  le  style  du  dessin.  —  Frmiièra  ipo- 
<]w.  Rite  commence  «Tec  l'art  lui-même.  Hais  où  fa  mon- 
tre a-t-elle  été  InTentéeT  Si  l'on  en  croit  Hérodote,  c'est 
tu  lanie.  Void  une  monnaie  ftappée  en  Asie  Mineure, 


JTannaJt  yrtmMre. 

«  ipi'ï  ss  Tarme  globuleuse,  h  la  Krosaièreté  du  dessin, 
on  peut  placer  aux  premiers  temps  du  macDayage. 
Stnban  et  la  plupart  des  écrivains  grecs  foDt  Don- 
veur  de  l'iarention  de  ta  monnaie  i,  Pbédon ,  loi  d'Ar- 


Uimnali  fÉçInt. 

EM.  qui  mourut  daos  le  »•  sièclft  av.  notre  ère.  Laplus 
iDcieiiDe  fut  frappée  à  Ëgine  au  type  de  la  iorlu».  Quoi 
ip'il  en  soit  de  l'origine  de  la  fabricaUoo  monétaire,  il 
est  certain  qu'elle  Tut  bientût  portâe  chez  les  Grecs  k  une 
sorte  de  perfection.  Dans  cette  première  p^odo,  les 
pièce*  sont  rondes,  épaisses  j  il  n'y  a  de  représentation 
liçurée  <iuB  d'un  c6té.  —  La  ttconde  êpoitat  commence  k 
Aleiandre  T."  et  finit  an  commencement  du  règne  de 
Philippe  n  [*50  k  354  av.  J.-C.)  ;  c'est  ['époque  de  Phi- 
iliu.  In  pièce  est  moins  épaisse,  la  fabricalion  meilleure, 
lin  plus  parMu  Voici,  n°  1  ci-dessous,  comme  spéci- 
men de  l'art  monétaire  h  cette  époqne,  une  superbe 
monnaie  d'Aleiandre  J",  en  argent,  et  n*  3  une  mÉdaille 
de  Gela  de  Sicile,  ooi  font  partie  des  collections  de  la 
Bibliothèque  impéride  de  Paria. 


1.  Konaaitd'ttTgitiHAlamidnl". 


S.  Uonnali  de  Gela. 

Li  tfotnènu  périoth  de  la  numismatique  ftrecque  com- 
mence k  Philippe  II  et  Snit  arec  l'indépendance  de  la 
drict,  ou  plutôt  ne  finit  qu'avec  ses  conquérants,  car 


,1  NUM 

Home,  l'Asie,  les  provinces  dont  la  civilisation  l'est  for^ 
mée  ou  déreioppée  au  contact  de  la  Grèce,  conttnneni 
k  frapper  des  ihonnaies  erecques.  Un  Empire  qui  parte  la 
langue  grecQue  survit  il  l'Empire  romain,  et  la  monnde 
grecque  ne  disparaîtra  entièrement  qu'avec  lui  au  milieu 
du  IV*  siècle.  L'époque  qui  commence  avec  Philippe  II, 
et  se  prolonge  pendant  trois  siècles,  est  la  pins  brillante 
de  l'histoire  de  l'art  monét^re.  Pour  donner  une  idée  de 
sa  perfection,  on  n'a  que  l'embarras  du  choix.  Les  mé- 
daillons de  Syracuse  sont  d'incomparables  chefsHl'mavre. 
Voici  deux  revers  de  monnaies  grecques,  une  tète  de  Ju- 
piter de  Dodone  (n*  1  ),  une  tète  de  Méduse  (n*  3),  qui 
permettront  d'apprécier  l'eicellence  du  détail  et  l'éléva- 
tion du  stylo. 


l'oWa, 


1.  /upUrr  dt  Z>Ddi»M.  t.  Ufdfot. 

D»i  monnatis  grecquu.  —  C'étaient  le  (ofwii  et  la 
de  compte;  le  ttatàn,  la  irachm*  et 
effectives.  Le  talent  attique  valait  60  mi- 
100  drachmes,  le  etatére  d  or  8  drachmes, 
le  itatère  d'argent  4  drachmes.  On  évalue  la  drachme  à 
environ  80 centimes  de  notre  monnaie;  l'obole,  sixième 
partie  de  la  drachme  attique,ft  15  centimes.  Il  y  avait  des 
multiples  de  tantes  les  monnaies  :  des  didracbmts,  des 
IridrachmetyA^tHradraehjnta,  ieadcmbla  italères.àe» 
diobole) ,  des  Iriobolai,  des  t^froboJsi.  Les  divisions  de 
l'obole,  les  temi-oboita,  tas  quarti  d^obolei,  les  cAoIcom 
(8*  de  l'obole)  étaient,  comme  l'obole,  des  motmaies  de 

Numitmatigut  romaint.  —  Elle  se  divise  en  deux  pé- 
riodes, embrassant,  comme  l'histoire  même  de  Rome,  la 
République  et  l'Empire.  A  la  première  se  rapportent  le* 
monnotss  consulaires  ou  de  Camille;  h  la  seconde  les  tnon- 
naUs  frappées  â  l'effigie  dtt  empereurs,  soit  à  Rome,  soit 
dans  les  provinces.  Les  plus  anciennes  monnaies  furent 
d'airain.  On  voit  dans  les  cabinets  des  ta,  at  liberalit 
(  parce  qu'ils  pesaient  effectivement  1!  onces  de  l'ai, 
poids  dont  on  fait  remonter  l'origine  aux  rois).  Co  sont 
de  lourds  et  massifs  carrés  d'airain  marqués  à  l'em- 
preinte du  bceuf  ou  du  trident,  et  d'une  ex^ution  qui  ne 
manque  ni  de  lai^ur  ni  de  style.  Le  poids  de  l'a)  fut 
successivement  réduit,  i.  partir  de  l'époqoe  où  on  com~ 
menfaàmonnByerrargent,c.-h-d.  de  l'année 3119 av.  J.-C. 
11  y  eut  trois  monnaies  d'argent  :  le  denier,  valant  10  as, 
ain^  nommé  à  cause  de  sa  valeur  même,  de  dents  assi- 
bus  ou  dena  ani,-  le  guînairs,  valantcinq  as;  le  sesUrei, 
valant  deux  os  et  demi.  BientûCon  ne  compta  plus  par 
as,  mata  par  sesterces,  et  te  sesterce  devint  l'imité  moné- 
laire.  L'or  fut  d'abord  rare  i  les  conquêtes  l'ayant  rendu 
plus  commun  k  Rome,  on  flrappa  des  deniers  d'or  valant 
25  deniers  d'argent,  et  des  guinoirss  valant  la  moitié  du 
denier  d'or,  A  cette  époque  O'in  207  av.  J.-C),  le  rap- 
port de  l'or  à  l'argent  était  comme  1  est  à  17  ;  en  Grèce, 


romaines  portent  ordinairement  le  signe  de  leur 
valeur  :  le  denier,  un  X,  ou  V,  ou  XV],  indiquant  qu'il  a 
valu  X,  et  plus  tard  XVI  asi  le  quinaire,  Q  (Initiale  de 
4titnair«)ouVile  setterce,  DS  ou  HS,  indiquant  sa  valeut 
primitive,  deux  as,  plus  un  sem]  ou  demi-as.  Rome  ne 
donna  Jamais  le  droit  de  battre  monnaie  k  un  particulier; 
etjusqu'i  César.Jamala  on  n'osa  mettre  sur  la  monnaie 
l'emgje  d'm  homme  vivant.  Les  souvenirs  historiques, 
auxquels  les  médailles  font  fréquemment  allusion,  sodi 
invoqués  par  les  triumvirs  mooëtalrea,  lU,  VIR.  A.  A.  A. 
FF.,(mimiiiHauro,ar0nfo,(Brs,/I(i«do.f«>HKn[JD,  c.-i-d. 
triumvirs,  magistrats  cliargés  de  faire  mouler,  frap- 
per l'or,  l'argent,  l'airain.  Ces  fonctions  étalent  dévolues  a 
des  familles  consulaires  idelklenomdenionnaMf  contti- 
lairts  donné  par  les  numismatistes  aux  monnaies  de  la 
République.  Le  droit  de  frapper  monnaie  est  un  des  at- 
Iributa  do  l'autonomie  ;  cependant  II  arriva  souvent  que 
Home,  après  a'étre  rendue  maltresse  d'un  pays,   laissa 


NÏÏM  13 

YmeràK  de  ce  droit  aui  peuples  BoumU;  aussi  voyons- 
oDus  l'Image  des  empereurs  sur  les  monnaies  d'une  infi- 
nité de  villes.  Quant  aux  colonies,  elles  jie  purent  en 
frapper  qu'à  la  condition  de  stipuler  qu'elies  j  âtûent 
Butijrisâos  !  PERM.  PROC.  (permuii  procontui],  «  par  la 
permission  da  proconsul,  ■  et  plus  tord  :  PERH.  AVG. 
[ptnnisit  Aaoaslus),  «  parla  permission  de  l'empereur». 
—  Les  monnaies  consulaires  ont  un  vérilable  intérêt 
comme  teavres  d'art,  et  un  plus  grand  encore  sous  le  rap- 
port historique.  Les  Taita  qui  y  sont  relatés  présentent  un 
caractère  de  véracité  qui  manqu —  '— 


impériales,  oâ  l'ailulatian  prodiguait  les  mensonger  pour 
'  're  BUi  maîtres  du  monde.  Tantût  ce  sont  des  par- 
ia traditionnels,  comme  caui  de  Romulus  et  de  Numa, 
m  trouve  sur  les  monnaies  des  famille»  Mimmia  et 
inirnia  (voir  ct-dessous  n°'  1  et  S);  tantôt  des  Cait<; 


pnrenient  légendaires,  comme  sur  an  denier  de  la  famille 
Pampais,  la  Ioqts  et  le>  Jumeaux  Romulus  et  Rémus 
(Toir  n'3ct-dessousj!  ou  l'apparilion  des  jumeaux  divins, 


CBBtoretPoliux,  t  labatolltedulac  Régille,sur  un  denier 
de  la  jwi.t  Postumia  fvoif  n'  4).  l*  plus  souvent  la  mon- 
naie donne  le  portrait  authentique  d'an  homme  illustre, 
celui  de  Brutus  (gens  Jimia),  d'Ahala  Iqena  Servilia),  de 
Msrcellus,  n"  S  {gtnt  Ctaudia);  de  Scipion  l'Africain, 


D*  6  (g«nt  Comtlia)  ;  ceux  de  Pompée  (n"  7)  et  de  César 
(n°  S),  dans  les  monnaies  frap^iées  par  des  triumvirs 
monétaires,  appartenant  aux  (kiuilles  Pompeia  et  Julia  ; 


2  NUM 

ment  leur  effigje  et  leur  nom  sur  la  monnaie.  En  vold 
une  émise  par  Brutus,  qui  rappelle  les  Ides  de  Mars,  lig 
meurtre  de  César, et  qui  donne  l'image  du  libérateur  delà 
République  [n°91.—  Les  triumvirs  Marc- Antoine  et  Octava 
en  font  autant.  Sur  une  belle  pièce  d'Antoine,  frappée  en 
Asie,  ngure  d'un  c6té  le  triumvir,  et  de  l'autre,  au-dcMOi 
d'uD  eiitophort,  sa  femma  OclAiie  (?Dir  d-dessoua). 


Namiimalii)ue  impérialt.  —  Les  médiùllea  Impé- 
riatei,  depuis  Auguste  Jusqu'à  l'époque  des  Sévère,  re- 
[irésentent  la  plus  belle  période  de  l'art.  C'est  surtout 
dans  tes  médaillons,  qu'on  rencontre  souvent  encastrés 
dans  une  bordure  et  qui  ne  paraissent  point  avoir  été  mis 
en  circulation  avec  une  valeur  lé^le,  qu'on  admire  la 
finesse  du  travail,  la  perfection  de  la  composition  et  de 
l'eiécaUan.  On  peut  en  Jugerpar  la  médaillon  ci-dessous 
d'Antonin.  Le  reven  représente  ta  fahle  légendaire  de 
rarrivéed'Ënée  et  d'Ascagneenltitie.  Les  grands  bronjt». 


KfdaiUm  d'Aiitmiii. 


Rcrm  du  ntiaill^n  if'Jnriniliu 
moins  rares,   sont  d'une  exécution   aussi  soignée.  Ils 

relatant  Tbistoire  olDcielle  dos  empereurs,  le*  ciiton- 


Cnnij  tnnut  ir  GalM. 


NUM 


1323 


NUR 


ci-dessus,  dont  le  revers  nous  naoutre  cet  empereur  ha- 
ranguant les  soldats   après   son   ôlccilon  au   trône; 


Jiâvera  du  grand  bronze  de  Galha. 

el  cet  autre  de  Vitellius,  dont  le  revcM  fait  voir  une 
luamachie  dans  le  Cirque  donnée  à  l'occaslun  do  sou 


Grand  bronze  de  Vitellius. 


Rectrt  du  grand  bronte  de  Vitellius, 

aénement.  Mais  le  plus  souvent  la  monnaie  célèbre  les 
victoires  remportées,  les  pars  conquis,  TEmpire  fortifié, 
ou  embelli  par  des  monuments,  édifices  publics  et  reli- 
(rieax,  ponts,  temples,  statues,  palais.  Cest  une  mine 
inépuisable  de  documents  et  de  renseignements. 

II  existe  des  monnaies  impériales  en  argent,  en  or  et  en 
bronze.  Ls  titre  de  la  monnaie  d'argent  fut  altéré  depuis 
le  règne  de  Septime  Sévère  Jusqu'à  Dioclétien,  qui  réta- 
blit la  monnaie  d'argent  fin.  La  monnaie  d*or  antique  est 
(Généralement  d^nne  grande  pureté.  A  Rome  seulement  on 
émettait  des  espèces  dans  ces  deux  métaux  ;  la  province 
ne  pouvait  faire  que  de  la  monnaie  de  bronze.  Depuis 
Gallien,  il  n*y  a  plus  de  médailles  d'empereurs  frappées 
dans  les  villes  grecques  et  dans  les  colonies,  et  le  droit 
iconétaire  avait  été  enlevé  bien  plus  tôt  à  certaines  pro- 
vinces :  par  exemple  à  l'Espagne  par  Caligula.  La  suite 
complète  des  grands  bronzes  ne  va  pas  au  delà  de  Pos- 
tome.  Celle  des  petits  bronzes  est  la  plus  aisée  à  former  : 
elle  conduit  jusqu'aux  Paléologues.  La  suite  du  petit 
bronze,  facile  à  réunir  dans  le  Bas-Empire  depuis  Pos- 
tome  jusqu'à  Théodose,  difficile  depuis  Jules-César  ius- 
qu'à  Postume,  est  impossible  depuis  Théodose  Jusqu  aux 
Idéologues.  La  décadence  de  l'art  commence  à  Postume; 
elle  produit,  de  Constantin  à  Théodose,  des  médailles 
sans  relief;  après  Théodose  elle  est  absolue.  Dans  le  Haut- 
timpire,  le  nom  des  villes  est  souvent  en  légendes  et  en 
inscriptions;  dans  le  Bas-Empire,  principalement  depuis 
Constantin,  il  se  trouve  toujours  dan«  l'exergue  :  ainsi, 
CONGE  {Constantinopoli  obsignata)^  S.  M.  A.  {Signata 
'noneta  Antiochœ),  P.  T.  {Percussa  Treveris).  Ce  n'est 
'itie  dans  le  Bas-Empire  qu'on  a  marqué  les  années  du 
ligne  sur  le  revers  des  médailles.  Mats  on  s'est  servi  de 
^  langue  latine,  même  sur  les  médailles  frappées  à  Con- 
stantinople,  Jusqu'à  Michel  Rhangabé.  Michel  est  le  pre- 


mier qui  a  repris  la  légende  grecque,  et  oui  s'est  donn« 
le  nom  de  BAIIAEYI  [Basileus)^  équivalant  à  Auguste, 
comme  despotes  (en  grec)  équivalait  à  César.  A  partir  de 
cet  empereur,  la  langue  s^altère,  et  n'est  plus  qu'un 
mélange  de  grec  et  de  latin. 

F.  Spanheim,  De  prœstantiâ  et  usu  Numismatutn, 
Londres,  1706,  '2  vol.  in-fol.;  Vaillant,  Nummi  antiqui 
familiarum  romanarum,  Amst.,  1703,  3  vol.  in-fol.;  le 
même,  NumismcUa  imperatorum  romanorum  à  J.  Cœ^ 
saread  Posthumum,  édit.  de  Baldini,  Rome,  1743,3  vol. 
in-4°;  le  même,  Numismata  imperatorum.».  in  coloniis, 
municipiis  et  urbibus  jure  latino  donatis,  Paris,  2'  édit., 
1697,  in-fol.  ;  le  même,  Numismata  tmperatorum  àpo* 
pnlis  grœcè  loquentibus  percussa,  2*  édit.,  Amst.,  1701, 
in-fol.  ;  Banduri,  Numismata  imperatorum  romanorujn 
à  Trajano  ad  Palœologos,  Paris,  1718,  2  vol.  in-fol.,  avec 
Supplément  par  Tannini,  Rome,  1791,  in-fol.;  Eckhel, 
Doctrina  nummorum  veterum.  Vienne,  1702-96  et  1830, 
9  vol.  in-i**;  Rasche,  Leodcon  universœ  rei  nummariœ 
veterum,  et  prœcipuè  Grœcorum  ac  Romanorum,  cum 
observationibus  antiquariis,  geographiciSy  chronologicis, 
historicis,  criticis,  etc.,  Leipzig,  1785-94,  6  tomes  en 
12  vol.  in-8<*;  Morel,  Thésaurus  morellianus,  sive  fOf 
miliarum  romanarum  numismata  omnia,  Amsterdam, 
1734,  2  vol.  in-fol.,  dont  le  2*  contient  un  commentaire 
par  Havercamp  ;  le  P.  Jobert,  la  Science  des  médailles, 
Paris,  1739,  2  vol.  in-12,  nouvelle  édition  revue  par  Bi- 
mard  de  La  Bastie,  2  vol.  in-lS;  Mionnet,  Description  des 
médailles  antiques  grecques  et  romaines,  avec  leur  degré 
de  rareté,  Paris,  1806-13,  6  vol.  in-S*;  édit.  avec  Suppléa 
ment,  Paris,  1819-37,  9  vol.  in-8'';  Visconti  et  Mongez, 
Iconographie  romame,  1811-29,  2  vol.  in-fol.;  Millingen, 
Rectuil  de  médailles  grecques  inédites,  Rome,  1812, 
in-4°;  Jacob,  Traité  élémentaire  de  Numismatique,  1825, 
2  Yol.  in-8o;  Cadalvene,  Recueil  de  médailles  grecques 
inédites,  Paris,  1839,  in-4'*;  De  Luynes,  Choix  de  mé- 
dailles grecques,  Paris,  1840,  in-fol.;  Lenormant,  Trésor 
de  Numismatique  et  de  Glyptique,  1834-50,  in-fol.;  Hen- 
nin, Manuel  de  Numismatique  ancienne ,  contenant  les 
éléments  de  cette  science  et  les  nomenclatures,  Paris, 
1830,  2  vol.  in-8o;  J.-B.  Barthélémy,  Manuel  de  nuniiS" 
matique  ancienne,  Paris,  1851,  in-18;  H.  Cohen,  Des* 
cription  générale  des  monnaies  de  la  République  romaine, 
Paris,  lfô7,  in-4^;  le  même.  Description  des  monnaies 
impériales,  Paris,  1802,  5  vol.  în-4°.  D. 

NUMMUS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

NUNCOPATION.  V,  Testament. 

NUNDINES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dicftonnatre  de  Bio- 
graphie et  d  Histoire, 

NUNNATIONS,  nom  que  les  Arabisants  donnent  à 
certains  signes  de  l'écriture  arabe,  tracés  sous  une  forme 
analogue  à  celle  des  voyelles,  et  renfermant,  outre  une 
voyelle,  un  son  articulé,  celui  de  l'N.  Silvestre  de  Sacy  le 
traduit  par  w>yélles  nasales^  en  avertissant  que  cette 
expression  n'est  pas  rigoureusement  exacte. 

NUNNIE.  V.  Chanson. 

NURAGHES.  V.  Noraghes,  dans  notre  Dictumnaire  de 
Biographie  et  S  Histoire. 

NUREMBERG  (Église  S^-LAURENT,à).  Cette  église  fut 
commencée  en  1140  sur  l'emplacement  d'une  chapelle  du 
S'-Sépulcre.  Son  grand  portail  est  flanqué  de  deux  tours 
carrées  à  7  étages,  percées  d'une  seule  fenêtre  sur  chaque 
face  à  chaque  étage,  décorées  à  leur  sommet  d'une  sorte  de 
treillage  de  pierre,  et  achevées,  par  une  pyramide,  l'une 
en  1403,  l'autre  en  1498. 1!  n'y  a  qu'une  porte,  large  de 
8  met.,  haute  de  13°',30,  et  coupée  par  un  pilier  accolé 
d'une  statue  de  la  Vierge  et  de  l'enfant  Jésus;  on  a  en- 
tassé sous  la  grande  og^ye  qui  la  domine  une  foule  de 
sculptures  représentant  la  naissance  du  Christ,  Tadora- 
tion  des  Mages ,  la  Présentation  au  Temple,  la  Fuite  en 
Egypte,  la  Passion,  la  Résurrection,  le  Jugement  der- 
nier, etc.  La  rose  qui  est  au-dessus  de  la  porte  a  10  met. 
de  diamètre.  A  l'int^eur  de  l'édifice,  les  deux  ailes  sont 
moitié  moins  hautes  et  moitié  moins  larges  que  la  grande 
nef;  le  chœur,  construit  de  1459  à  1477,  sur  les  plans  de 
Conrad  Roritzer,  est  un  peu  plus  élevé  que  la  nef.  Dans 
la  nef  principale,  comme  aux  arcs  à  plein  cintre  des 
portes  latérales,  on  reconnaît  les  traces  du  style  byzantin. 
L'église  S^-Laurent  forme  un  carré  oblong,  qui  a  105  met 
sur  35.  On  remarque  les  deux  magnifiques  roses  de  la 
croisée,  ouvrage  du  vitrier-  Wolkamer,  les  vitraux  dei 
onze  fenêtres  du  chœur  restaurées  par  Kellner,  et  sur- 
tout, adossé  à  un  pilier  du  chœur,  un  tabernacle  sculpté 
par  Adam  Kraft  de  1496  à  1500  :  c'est  une  véritable  bijou- 
terie de  pierre,  qui  représente  l'histoire  de  la  Passion. 


NUR 


132^ 


NTM 


Le  crucifix  da  maître-autel ,  en  bois  doré,  a  été  exécuté, 
ainsi  que  la  chaire,  par  Rotermundt ,  d*après  les  dessins 
de  Heideloff.  —  Au  centre  de  la  place  qui  précède  le 
grand  portail  de  Téglise  S*-Laurent,  se  trouve  la  Fon- 
taine des  Vierges  y  construite  en  1589  par  Bénédict  Wur- 
zelbauer  :  du  milieu  d*un  bassin  en  pierre  s'élève  une  co- 
lonne, autour  de  laquelle  sont  groupées  en  deux  séries 
12  figures  de  fonte,  dont  6  enfants  nus  supportant  les 
armes  de  la  ville,  et  6  vierges  qui  sont  des  emblèmes  de 
vertus  ;  au  sommet  est  la  Justice,  avec  sa  balance,  et , 
près  d'elle,  une  grue,  symbole  de  la  vigilance. 

NUREMBERG  ( Église  Notre-Davb,  à),  monument  plus 
élégant  que  grandiose,  élevé  de  1355  à  1361,  à  Tépoque 
la  plus  brillante  de  Tarchitecture  ogivale,  par  les  archi- 
tectes Georges  et  Frédéric  Ruprecht,  et  le  sculpteur  Se- 
bald  Schonhofer.  Il  a  la  forme  carrée  des  premières 
églises  que  les  Grecs  construisirent  sur  le  modèle  des 
temples  païens.  A  la  fin  du  xv*  siècle,  on  y  adapta  Togive; 
c'est  aussi  à  cette  époque  que  fut  élevée  la  gracieuse  pe- 
tite tour  qui  surmonte  son  portail  occidental.  Ce  portail 
est  précédé  d'un  porche  où  la  sculpture  a  prodigué  toutes 
ses  richesses,  et  au-dessus  duquel  Adam  Kraft  a  ajouté 
une  chapelle  :  là  se  trouve  une  horloge  mécanique,  fabri- 
quée en  1509  par  Georges  Heuss,  mais  ne  fonctionnant 
plus  aujourd'hui ,  et  dans  laquelle,  quand  les  heures  son- 
naient, on  voyait  les  électeurs  d'Allemagne  passer  devant 
l'empereur.  L'église  Notre-Dame  a  été  rendue  au  culte 
catholique  en  1816,  mais  dépouillée  des  chefs-d'œuvre  de 
peinture  et  de  sculpture  qui  l'ornaient  autrefois  :  on  fit 
alors  subir  &  Tinténeur  une  restauration  trop  complète, 
on  le  surchargea  de  nouvelles  peintures  et  de  dorures. 
—  Près  de  l'église,  et  comme  elle  sur  la  place  du  Marché, 
s'élève  la  Belle  Fontaine,  œuvre  des  mêmes  artistes.  C'est 
une  élégante  construction  k  trois  étages,  oui  vont  en  se 
rétrécissant,  et  que  surmonte  une  pyramide  couverte  de 
boutons  de  fleurs  et  couronnée  par  deux  lis.  L'étage  in- 
férieur est  de  forme  octogone;  ses  8  piliers  sont  accotés 
de  16  figures  de  l'",30  de  hauteur,  qui  représentent  les 
sept  pnnces  électeurs,  Godefroy  de  Bouillon,  Clovis, 
Charlemagne,  Machabée,  Josué,  David,  J.  César,  Alexandre 
et  Hector.  L'étage  du  milieu  est  orné  des  statues  de  Moïse 
et  des  sept  Prophètes.  Cette  fontaine,  qui  était  autrefois 
peinte  et  dorée,  a  nécessairement  souffert  des  outrages 
du  temps;  de  1447  à  1586.  on  la  restaura  5  fois;  elle  a 
été  remise  à  neuf,  de  182x  à  1824,  sous  la  direction  de 
Reindel  ;  la  grille  de  fer  qui  l'entoure,  exécutée  par  Paul 
Kœhn,  date  de  1586. 

ndrembbro  (Église  S^-Sêkald,  à).  On  peut  suivre  sur 
ce  monument  les  progrès  de  l'architecture  allemande  de- 
puis son  origine  byzantine  Jusqu'au  xiv"  siècle,  où  elle 
acquit  son  plus  grand  développement.  La  partie  anté- 
rieure, qui  se  trouve  comprise  entre  les  deux  tours,  et 
qu'on  appelle  Lôffelsholz  ou  la  chapelle  de  S^-Pierre,  est 
la  plus  ancienne,  et  date  du  x*  siècle.  La  tour  méridio- 
nale fut  commencée  en  1300,  celle  du  nord  en  1345.  La 
population  de  la  ville  s'étant  considérablement  accrue, 
on  démolit  le  chœur  de  l'église,  et,  de  1361  à  1377,  on 
en  construisit  un  autre  plus  vaste,  qui  offre  l'él^nce  et 
la  délicatesse  des  œuvres  de  la  fin  du  xiv*  siècle.  Mal- 
heureusement les  arcs-boutants  qui  soutenaient  les  murs 
de  ce  chœur  durent  être  démolis  comme  menaçant  ruine, 
en  1561  ;  on  les  remplaça  par  une  toiture  d'un  aspect 
lourd  et  disgracieux ,  qui  a  fait  disparaître  aussi  les  fron- 
tons dont  les  fenêtres  étaient  surmontées.  C'est  en  1482 
et  1483  que  les  deux  tours,  d'une  forme  simple  et  élan- 
cée, reçurent  leurs  aiguilles,  et  atteignirent  ainsi  une  élé- 
vation de  88  met.  Entre  ces  deux  tours  et  de  la  fenêtre 
centrale  de  la  chapelle  de  S*-Pierre,  on  voit  pendre  un 


crucifix  colossal  en  bronze,  coulé  en  1482  par  les  frerpx 
Stark.  An  portail  latéral  du  nord,  dit  Porte  des  Fiancés^ 
on  a  sculpté  les  Vierges  sages  et  les  Vierges  folles  ;  à  celui 
du  sud,  se  trouve  un  beau  Jugement  dernier,  sculpté  en 
1485  par  Adam  Kraft.  L'intérieur  de  Téglise  présente  un 
bel  aspect  :  il  est  éclairé  par  95  fenêtres,  garnies  pouir  Is 
plupart  de  vitraux  de  couleur.  La  chapelle  de  S*-Pierro 
contient  trois  beaux  tableaux  peints  sur  or,  plusieurs 
bas-reliefs  de  Kraft,  et  d'admirables  fonts  baptismaui 
en  cuivre.  lAais  la  merveille  de  cette  église  est  le  tombeau 
de  S*-Sébald,  exécuté  en  bronze  par  Pierre  Vischer,  de 
1506  à  1519,  et  qui  est  resté  au  milieu  du  chœur,  bien 
que  l'édifice  soit  consacré  au  culte  protestant.  Ce  tom- 
beau a  5  met.  de  haut,  2'»,85  de  lon^  et  l'",55-de  large. 
Cest  une  sorte  de  cage,  dont  les-  minces  et  brunes  co- 
lonnes font  valoir  la  châsse  du  saint ,  toute  couverte  da 
lames  d'or  et  d'argent;  sa  base  repose  sur  d'énormes  es- 
cargots; les  colonnes  qui  la  joignent  au  faite  forment 
trois  arcades  ogivales  sur  chacune  des  faces  latérales^  et 
une  à  chaque  extrémité;  des  figures  ornent  la  base  de 
ces  colonnes,  et  d'autres  se  dressent  sur  le  sommet;  les 
statues  des  Apôtres  sont  adossées  encore  aux  colonnes, 
vers  les  deux  tiers  de  leur  hauteur;  enfin,  aux  quatre 
angles,  des  sirènes  soutiennent  des  candélabres.  Le  Catte 
du  tombeau  est  formé  de  constructions  arcbitectoniques 
et  de  clochetons  byzantins.  Ce  travail  de  Vischer  n'a  ^ 
d'égal  dans  la  sculpture  allemande  :  la  pureté  du  dessin, 
la  variété  des  poses,  l'expression  des  têtes,  la  largeur  des 
draperies,  le  mettent  sur  le  même  rang  que  les  bronzes 
les  plus  célèbres  des  maîtres  italiens. 

NDREMBER6  ( Hôtel  do  Ville  de),  monument  construit  de 
1332  à  1340,  agrandi  iusqu'en  1522,  et  reb&ti  presque  en- 
tièrement de  1616  à  1619  par  Holzschuher,  dans  le  style 
des  grands  palais  italiens.  Sa  façade  a  92°>,66  de  dévelop- 
pement, 36  fenêtres  de  firent,  et  2  étages  d'élévation.  La 
grande  salle  du  Conseil,  au  premier  étage,  a  27  met.  de 
long  sur  10  de  large,  et  appartient  au  bâtiment  primitif; 
les  vitraux  des  fenOtres  sont  de  Veit  Hirschvogef  (1521), 
et  le  plafund  en  bois  de  Vehaim  (1613  )  ;  tout  le  mur  sep- 
tentrional de  cette  salle  est  orné  de  peintures  d'Albert 
Durer,  représentant  le  triomphe  de  l'empereur  Maximi- 
lien  1*',  mais  endommagées  par  le  temps  et  mal  restau- 
rées; en  face,  les  fresques  sont  de  G.  Weyer,  et  ont  éga- 
lement subi  une  restauration.  Les  corridors  du  1*'  étage 
ont  un  plafond  où  Abraham  Grass  a  représenté  en  1G19, 
avec  figures  en  stuc  de  grandeur  naturelle,  un  tournoi  de 
l'an  1446.  Au  2"  étage  est  une  petite  salle  du  Conseil, 
dont  le  plafond  a  été  richement  peint  par  Paul  Juvenel. 
Sous  l'hôtel  de  ville  sont  creusés  des  souterrains  im- 
menses, dont  quelques-uns  ont  servi  de  prisons. 

NYAYA  (Philosophie).  V,  Indienne  philosophie). 

NYMPHES,  nom  donné  par  les  Anciens  à  des  berceanx 
de  feuillage,  à  de  simples  grottes,  à  des  édicules  élevés 
dans  les  bois  ou  sur  les  montagnes,  et  consacrés  aux 
Nymphes.  On  y  faisait  des  cérémonies  nuptiales  et  des 
festins.  Quelques  auteurs  pensent  qu'on  appelait  ATi/a»- 
phées,  soit  des  bains,  dont  le  nom  aurait  été  corrompu 
de  celui  de  lymphée,  soit  des  lieux  d'agrément  où  l'on 
amenait  des  eaux  vives  et  fraîches.  On  a  découvert  en 
Attique  un  Nympticeum  orné  intérieurement  de  bas-re- 
liefs, de  statues,  de  médaillons  et  d'inscriptions.  Il  existe 
encore  près  de  Rome  une  grotte  qu'on  dit  être  celle  de  la 
nymphe  Égérie,  et  où  l'on  voit  certains  ouvrages  ruinés 
et  des  fragments  de  sculpture.  Deux  petits  monuments 
situés  sur  le  bord  du  lac  Albano  portent  le  même  carac- 
tère et  les  mêmes  traces.  Les  premiers  chrétiens  appe- 
lèrent Nymphée  la  fontaine  placée  sur  le  parvis  des  ba- 
siliques, et  où  les  fidèles  se  lavaient  avant  d'entrer. 


0 


0 


0 


0,  la  15*  lettre  de  notre  alphabet  et  la  4*  des  voyelles. 
Cest  un  caractère  qui  répond  à  deux  voyelles  distinctes, 
l'une  se  prononçant  fort  ouverte,  comme  dans  botte, 
l'autre  peu  ouverte,  comme  dans  côte.  Cette  distinction 
de  l'o  bref  et  de  l'o  long  existait  aussi  chez  les  Grecs,  qui 
les  appelaient  omicron  et  oméga,  et  leur  donnaient  des 


figures  différentes  (0,  o;  Û,  co).  Notre  o  long  est  le  plus 
souvent  surmonté  de  l'accent  circonflexe;  il  a  la  même 
valeur  phonétique  sans  accent,  s'il  termine  un  mot  (nv- 
méro,  séro)^  ou  s'il  n'est  suivi  que  de  lettres  qui  ne  se 
prononcent  pas  [lot,  broc).  En  général,  l'accent  tient  la 
place  d'une  s  qui  a  été  supprima  dans  l'orthographe  mo- 


1325 


OBJ 


derne  :  hôte,  hâtelf  hâpittUf  côte,  rôtt,  s'écrivaient  hoste, 
luatèi,  hospUal,  coste,  rosti.  Il  rappelle  alors  Tétymo- 
logie  :  toutefois,  malgré  une  étymologie  commune,  la 
prononciation  diffère  pour  notre  et  le  nôtre,  votre  et  le 
vôtre.  Suivi  de  m  ou  de  n,  selon  les  cas,  Vo  est  la  trans- 
:ription  d'une  voyelle  nasale  {onde,  ombre).  Suivi  d'un  t, 
U  forme  une  diphthongua,  oi,  qui  se  prononce  ouà  (moif 
toi,  toi,  loi,  poiré)  ;  par  conséquent,  les  éléments  écrits 
4e  cette  diplithongue  ne  reprâentcnt  pas  ses  éléments 
prononcés.  Le  groupe  oé  se  prononce  également  ouà 
ipoUe),  Depuis  le  temps  de  Voltaire,  le  groupe  oi  a  été 
remplacé  par  ai  dans  un  assez  grand  nombre  de  ter- 
aiinaisons  :  Français^  il  aimait^  je  ferais^  ils  disaient,  etc., 
sa  lieu  de  :  François,  il  atmoitje  T^roM,  ils  disoient,  etc. 
Dans  la  diphtbongue  nasale  oin,  Vo  a  le  son  de  ou  (loin, 
>u<»,  soin).  Le  groupe  ou  est  l'expression  complexe  d'une 
foyelle  simple,  qui  est  identique  avec  Tu  des  Italiens, 
àth  Espagnols  et  des  Allemands,  et  que  les  Anglais  i^e- 
présentcnt  généralement  par  oo.  Dans  un  monosyllabe 
frsDçais,  où  il  est  précédé  de  a  et  suivi  de  n,  Vo  ne  se 
prononce  pas  :  faon,  paon,  Laon  se  prononcent  fan,  pan, 
Lan.  La  lettre  composée  <b  représente  éiymologiquement 
la  diphthongue  grecque  oi,  et  a  le  son  de  1'^  (OEdipe, 
asophageji  mais  elle  n'a  que  la  valeur  de  Ve  dans  œil, 
valeur  qui  est  aussi  celle  du  groupe  œu  dans  boeuf,  œuf, 
tœur,  mœurs^  etc,  —  La  variété  des  valeurs  phonétiques 
de  l'o  explique  certaines  permutations  qui  s'opèrent  d'une 
langue  a  l'autre  ou  dans  le  sein  d'une  même  langue. 
Ainsi,  la  terminaison  05  des  noms  grecs  est  devenue  us 
eo  latin  (prononcé  ous)  ;  le  latin  offre  colo  (ie  cultive)  et 
cultus  (cultivé),  lavo  (Je  lave)  et  lotus  (I^vé),  hâmo 
(booune)  et  humanus  (humain).  Dans  le  passage  du  latin 
au  français,  mola  est  devenu  meule;  populus,  peuple; 
cor,  cœur;  soror,  sœur;  corium,  cuir;  coctus,  cuit;  no- 
vetn,  neuf;  tumulus,  tombeau;  numerus,  nombre;  cul^ 
men,  comble;  movere,  mouvoir;  mori,  mourir.  L'italien 
a  fait  molto  du  latin  mullum,  f€KoUà  de  facultas,  popolo 
à»  populus,  etc.  En  espagnol,  Vo  latin  s'est  transformé  en 
ne  (oué)  :  bueno  vient  de  bonus,  muerte  de  mors,  prueba 
de  pro6a^to.  En  allemand,  les  voyelles  a,o,0  (eu)  per- 
mutent souvent  dans  les  dialectes  :  rath  se  transforme 
en  roih,  strcuse  en  stross,  etc.;  vogel  (oiseau)  fait  au 
pluriel  vOgeli  le  comparatif  de  gross  (grand)  est  grôsser, 
—  Dans  les  langues  slaves,  o  est  souvent  prononcé  a.  En 
suédois  et  dans  quelques  autres  idiomes  du  Nord,  il  rem- 
plit le  rôle  de  l'a  privatif  des  Grecs  :  trogen  (fidèle), 
otrogen  infidèle). 

Dans  les  inscriptions  latines,  O  est  employé  par  abré- 
viation pour  oUa,  ossa,  omnis,  optimus,  officium,  optio, 
ordo,  etc.  O.  M.  veut  dire  optimus  maximus,  et  O.  P.  op- 
timus princeps.  Dans  l'écriture  commerciale,  Vo  signifie 
Mnpte  ouvert.  Dans  l'ancienne  musique,  O  fut  la  maraue 
de  la  mesure  à  3  temps;  quelquefois  on  mettait  un  point 
SQ  milieu,  ou  on  le  barrait  verticalement;  une  moitié  d'O 
ou  un  C  marque  la  mesure  à  2  temps.  Signe  d'abrévia- 
tion géographique,  O.  signifie  ouest;  pour  les  Allemands 
il  représente  Vest,  parce  que,  dans  leur  langue,  ce  point 
cardinal  s'appelle  ost.  Chez  les  Irlandais,  O'  précédant 
on  nom  propre  signifie  fUs  de,  comme  le  Mctc  des  Écos- 
sais et  le  Ben  des  Arabes;  ce  n'est  pas,  comme  on  l'a  dit, 
une  contraction  de  la  préposition  anglaise  of  (de),  ayant 
le  même  r51e  que  notre  particule  nobiliaire  de,  ou  que 
les  particules  analogues  t?Ofi  en  allemand  et  van  en  hol- 
landais. —  Autrefois*  là  lettre  O  était  la  marque  moné- 
taire de  la  ville  de  Riom  (Auvergne).  —  Comme  lettre 
oamérale,  Vamicron  des  Grecs  valait,  selon  la  position 
deraccent,  70  (o  ^  ou  70,000  (,o),  et  leur  oméga,  800.  L'O 
des  Latins  valait  il, et,  surmonté  d'une  barre  horizontale 
(û),  11,000. 

0  (Le  cb&teau  d*^,  près  de  Séez  (Orne).  Il  est  composé 
d'aoe  façade  et  de  deux  ailes,  et  occupe  trois  côtés  d'un 
carré  que  baigne  une  petite  rivière.  Irrégulier  dans  son 
ensemble,  c'est  un  monument  remarquable  dans  quel- 
ques-unes de  ses  parties.  L'aile  septentrionale,  la  plus 
ancienne  aujourd'hui,  appartient  aux  dernières  années 
du  XV*  siècle  et  aux  prenuères  du  xvi*  s  elle  se  compose 
de  deux  tourelles  inégales  en  largeur  et  en  hauteur,  en- 
cadrant une  porte;  d'un  corps  principal,  et  d'une  cbar- 
oiaiite  tourelle  en  encorbellement,  où  l'on  voit,  unis  aux 
formes  du  style  ogival  flamboyant,  les  ornements  qui  ca- 
nctériseot  la  transition  du  gothique  à  la  pure  Renais- 
■aoce.  La  porte  est  encadrée  par  une  arcade  ogivale 
festonnée,  et  surmontée  de  deux  riches  baldaquins.  L'aile 
méridionale  est  d'une  construction  bien  postérieure,  à 
l'exception  d'une  petite  tour  crénelée  qui  en  forme  l'ex- 
trémité. La  façade,  unie  et  surmontée  d'une  balustrade. 


est  une  construction  de  1770;  mais,  à  l'intérieur,  on  ad- 
mire un  promenoir  de  la  Renaissance,  soutenu  par  des 
piliers  octogones,  aux  fûts  chargés  d'enroulements  ot 
d'arabesques,  aux  chapiteaux  délicatement  sculptés. 

0  DB  NOËL,  nom  donné,  dans  la  Liturgie  catholique,  1 
9  antiennes  qui  commencent  par  l'interjection  O,  et  qui 
se  chantent  avant  le  Magnificat  des  neuf  Jours  de  l'Aveu t 
oui  précèdent  la  fête  de  la  Nativité.  Dans  le  rit  romain, 
il  n'y  en  a  aue  sept.  L'usage  des  0  de  Noël  est  venu  d'Es- 
pagne, où  il  fut  établi  par  le  concile  de  Tolède  en  656. 

OBBA,  nom  que  les  Romains  donnaient  à  une  coupe 
se  terminant  en  pointe  à  sa  partie  inférieure.  L'épithète 
d^obbatus  s'appliquait  aux  bonnets  de  Castor  et  de  Pol- 
lux,  dont  le  haut  était  en  pointe. 

OBÉDIENCE  (Pays,  —  Lettre  d').  F.  notre  Dtcftofi- 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire» 

OBÉISSANCE,  soumission  aux  volontés  d'autrui.  L'o- 
béissance aux  lois  est  un  devoir  et  une  vertu.  La  femme, 
d'après  notre  Code,  doit  obéissance  à  son  mari.  L'armée 
doit  obéissance  absolue,  obéissance  passive^  à  ses  chefs, 
pour  tout  ce  qui  concerne  le  service  militaire;  cette 
obéissance  est  ta  base  de  la  discipline.  L'obéissance  est 
un  des  vœux  solennels  que  font  les  membres  des  ordres 
religieux. 

OBÈLE  (du  grec  obélos,  broche),  signe  imaginé  par  les 
éditeurs  criti^es  d'Alexandrie,  pour  indiquer  soit  une 
répétition,  soit  une  surabondance  de  mots  (-);  soit  un 
doute  sur  l'authenticité  d'un  passage  (•*-);  soit  une 
transposition  de  mots  ou  de  phrases  (-^j  ;  soit  un  dépla- 
cement, surtout  de  vers  (-*).  P. 

OBÉUSQUE.  V.  notre  Dtct.  de  Biogr.  et  d'Histoire, 

OBÉRON ,  épopée  romantique  de  Wieland,  en  douze 
chants  et  en  ottave  rime,  La  fable  est  tirée  d'un  vieux 
roman  de  chevalerie,  intitulé  Huon  de  Bordeaux  {V,  ce 
mot),  dont  Tressan  a  donné  un  abrégé,  en  1778,  dans 
sa  Bibliothèque  universelle  des  romans.  Mais  l'Obéron 
qui  dans  ce  dernier  ouvrage  Joue  un  rôle  surnaturel,  et 
rObéron  de  Wieland,  sont  deux  personnages  bien  dis- 
tincts :  celui  du  roman  est  fils  de  Jules  César  et  d'une 
fée,  être  fantastique  tenant  le  milieu  entre  l'homme  et  le 
farfadet;  celui  de  l'épopée  est  identique  avec  l'Obéron  de 
Shakspeare  dans  le  Songe  d'une  nutt  d'été,  —  VOb^ron 
de  Wieland  renferme  trois  actions  principales  :  1^  les 
aventures  du  chevalier  Huon,  chargé  par  Charlemagne  de 
lui  rapporter  une  touffe  do  la  barbe  et  deux  dents  m&che- 
lières  du  calife  de  Bagdad  ;  2<>  les  amours  de  Huon  et  de 
Rézia,  fille  de  ce  sultan  ;  3^  la  brouille  et  la  réconciliation 
de  Titania  avec  son  époux  Obéron,  roi  des  Elfes.  Cepen- 
dant ces  trois  actions  sont  si  habilement  combinées  et 
conduites,  qu'elles  ne  forment  qu'un  seul  tout.  En  effet, 
sans  le  secours  d'Obéron,  Huon  n'aurait  pu  réussir  dans 
sa  mission  auprès  du  calife;  sans  son  amour  pour  Rézia, 
et  sans  l'espoir  d'une  réconciliation  qu'Obéron  fondait 
sur  la  fidéhté  et  la  constance  des  deux  amants,  le  roi 
des  Elfes  ne  se  serait  pas  intéressé  à  leurs  amours.  Cet 
enchaînement  d'intérêts  divers,  ce  besoin  indispensable 
que  les  différents  personnages  de  l'épopée  ont  les  uns  des 
autres  pour  réussir  dans  leur  entreprise,  donnent  au 
poème  une  sorte  d'unité  assez  originale  et  nouvelle.  Obé* 
ron  fut  publié  en  1780,  et  il  fait  encore  aujourd'hui  les 
délices  des  Allemands.  «  Tant  orue  l'on  gardera  le  senti- 
ment de  la  poésie,  dit  Goethe,  Obéron  sera  aimé  et  ad- 
miré comme  un  chef-d'œuvre  d'art  poétique.  » 

OBIT  (du  latin  obitus,  décès),  en  termes  de  Liturgie 
catholique,  service  fondé  pour  le  repos  de  l'âme  d'un 
mort,  et  qui  doit  être  célébré  chaque  année  à  l'anniver- 
saire du  décès. 

OBrrUAIRE,  terme  synonyme  do  Nécrologe  (V.  ce 
mot),  et  qui  désigne  aussi  le  registre  des  obits  tenu  dans 
une  église.  —  A  la  cour  de  Rome,  en  termes  de  Daterie, 
un  Obituaire  est  l'homme  pourvu  d'un  bénéfice  vacant 
par  mort  (per  obitum). 

OBJECTIF,  SUBJECTIF.  Toute  pensée,  toute  connais- 
sance implique  nécessairement  deux  termes,  et  ces  deux 
termes,  d'une  part,  l'esprit  avec  les  facultés  dont  il  est 
doué,  de  l'autre,  les  phénomènes  et  les  vérités  qui  lui  sont 
présentes,  s'appellent,  dans  le  langage  de  la  philosophie 
moderne,  le  premier,  sujet,  le  second,  objet  {objectum, 
quod  objicitur)  de  la  connaissance.  Ainsi,  quand  Je  pense 
à  un  triangle,  ou  quand  Je  Juge  que  tous  les  angles  droits 
sont  égaux  entre  eux,  le  triangle,  l'égalité  réelle  et  effec- 
tive de  deux  quantités  sont  les  objets  de  ma  pensée. 
D'objet  et  de  sujet  on  a  tiré  objectif  et  subjectif,  et  même 
objectivité  et  subjectivité,  qui  s'emploient  dans  un  sens 
analogue.  Ainsi  on  dit:  élément  subjectif,  élément  objectif 
de  la  connaissance,  et  plus  généralement  phénomène  sub- 


OBL 


1326 


OBL 


jeetif»  réalité,  vérité  objective,  pour  désigner,  dans  le 
premier  cas,  tout  ce  qui,  dans  le  développement  si  corn- 

fUexe  et  si  varié  de  Tentendement,  se  rapporte  au  sujet,  à 
*esprit;  et,  dans  le  second,  à  Tobjet,  aux  choses  mêmes. 
La  sensation,  l'idée  elle-même  (en  tant  qu*acte  deTesprit 
qui  pense),  sont  des  phénomènes  subjectifs;  les  corps, 
les  propriétés  des  corps  que  Ton  perçoit,  les  vérités  ma- 
thématiques, métaphysiques  (Dieu,  l'espace,  le  temps) 
tont'des  réalités  objectives.  —  Faire  sûrement  et  équita- 
blement  la  part  de  l'Objeaif  et  du  Subjectif  dans  la  for- 
mation de  nos  connaissances  est  un  des  problèmes  les 
plus  délicats  de  la  haute  psychologie  ;  et  si  Ton  avait  à 
faire  ici  Thistoire  des  solutions  philosophiques  de  ce 
problème,  i!  faudrait  exposer  et  critiquer  les  systèmes 
idéalistes  qui,  en  attribuant  à  l'idée  une  existence 
propre  et  indépendante  de  Tesprit  (F.  Idi^.ausiib),  ne  font 
pour  ainsi  dire  qu'objectiver  le  subjectif,  et  par  cela 
même  s'interdire  la  perception  de  Tobjet  véritable;  et 
ceux  qui,  comme  le  Kantisme,  sans  se  méprendre  au 
caractère  subjectif  des  phénomènes  psychologiques,  s'en 
tiennent  de  propos  délibéré  au  doute,  en  ce  qui  concerne 
la  réalité  des  objets  qui  correspondent  à  ces  phénomènes, 
affirmant,  par  exemple,  la  sensation,  mais  non  l'objet 
senti,  les  concepts  du  temps  et  de  l'espace,  ou  tel  autre 
concept,  comme  formes  de  la  sensibilité  ou  de  l'entende- 
ment, mais  non  le  temps  ni  l'espace  eux-mêmes.  V,  ces 
mots,  et  Allemande  —  Philosophie.  B — e. 

OBJECTION,  ce  qu'on  oppose  à  une  allégation,  à  une 
opinion  quelconque. 

OBJETS  PERDUS,  TROUVÉS.  Les  paquets  abandonnés 
dans  les  bureaux  d'une  entreprise  de  transports,  et  qui 
n'ont  pas  été  réclamés  après  un  intervdle  de  deux  ans, 
appartiennent  à  l'Ëtat.  Les  effets  non  réclamés  dans  les 
greffes  criminels  sont  vendus,  et  le  produit  de  la  vente 
est  attribué  au  domaine,  s'il  n'a  pas  été  réclamé  dàiïs  le 
délai  d'un  an.  L'argent  déposé  à  la  poste  et  non  réclamé 
appartient  à  l'État  au  bout  de  8  ans.  Les  objets  trouvés 
doivent  être  déclarés  soit  à  un  bureau  de  police,  soit  au 
greffe  du  tribunal  ou  de  la  Justice  de  paix  ;  s'ils  ne  sont 
pas  réclamés  dans  les  3  ans,  ils  appartiennent  à  celui  qui 
les  a  trouvés.  Le  propriétaire  d'une  chose  perdue  peut, 
dans  ce  même  délai,  la  revendiquer  contre  celui  dans  les 
mains  duquel  il  la  trouve;  mais  si  la  chose  a  été  achetée, 
il  ne  peut  se  la  faire  rendre  qu'en  remboursant  au  pos- 
sesseur le  prix  qu'elle  Itii  a  coûté  (Code  Napol.^  art.  2279, 
2280J. 

OBLÂT.  V.  ce  mot  dans  notre  DictionncUre  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire» 

OBLATION  (du  latin  oblatio,  offrande),  terme  con- 
sacré en  religion  pour  désigner  toute  offrande  faite  à 
Dieu.  Dans  un  sens  liturgique,  il  a  été  appliuué  ancienne- 
ment au  sacrifice  même  de  la  Messe;  aujourd'hui  on 
n'entend  plus  par  Oblation  que  la  partie  de  la  Messe  qui 
suit  l'Évangile  et  le  Credo,  celle  dans  laquelle  le  prêtre 
offre  à  Dieu  le  pain  destiné  au  sacrifice,  et  le  vin  qu'il  a 
mêlé  d'un  peu  d'eau  dans  le  calice. 

OBLATIONARIUM.  F.  PaoTHàsB. 

OBLIGATION,  lien  de  droit  dont  résulte  la  nécessité 
de  faire  ou  donner  quelque  chose,  et,  par  extension,  acte 
qui  contient  la  preuve  du  fait  obligatoire.  Les  obligations 
sont  légaies  ou  conventionnelles  :  les  premières  résultent 
de  l'autorité  seule  de  la  loi  ;  de  ce  genre  sont  les  engage- 
ments involontaires  entre  propriétaires  voisins  (F.  Ser- 
vitude), et  ceux  des  tuteurs  et  autres  administrateurs  qui 
ne  peuvent  refuser  la  fonction  qui  leur  est  déférée;  les 
secondes  naissent  d'un  contrat  {V.  ce  mot).  Tout  ce  qui 
concerne  les  obligations  conventionnelles  a  été  réglé  par 
le  Code  Napoléon  (art.  1101-1369).  Eu  é^d  à  leurs  effets, 
il  y  a  une  grande  différence  entre  Vobligalion  de  donner 
et  Vobligatton  de  faire  ou  de  ne  pas  faire.  L'obligation 
de  donner  emporte  celle  de  livrer  la  chose  et  de  la  con- 
server Jusqu'à  livraison,  à  peine  de  dommages-intérêts; 
elle  rend  le  créancier  propriétaire,  avec  cette  particularité 
toutefois,  que,  s'il  s'agit  d'effets  mobiliers  à  d  livrer  suc- 
cessivement à  deux  personnes,  celle  qui  a  été  mise  en 
possession  réelle,  son  titre  fût-il  même  postérieur  en  date, 
demeure  propriétaire,  pourvu  que  la  possession  soit  de 
bonne  foi.  L'obligation  de  faire  ou  de  ne  pas  faire  produit 
toujours,  en  cas  d'inexécution,  une  action  en  dommag(>s- 
Intérêts  :  cependant  le  créancier  a  le  droit  de  demander 
que  ce  qui  aurait  été  fait  par  contravention  à  l'engage- 
ment soit  détruit;  il  peut  même  se  faire  autoriser  à  le 
détruire  aux  dépens  du  débiteur,  sans  préjudice  des 
dommages-intérêts.  Il  peut  aussi,  en  cas  d'inexécution, 
être  autorisé  à  faire  exécuter  l'obligation  aux  dépens  du 
débiteur.  Les  dommages-intérêts  ne  sont  dus,  quand  U 


s'agit  d'une  obligation  de  faire,  que  si  lé  débiteur  a  été 
mis  en  demeure  d'accomplir  son  obligation. —  L'obliga- 
tion, soit  de  donner,  soit  de  faire  ou  de  ne  pas  faire, 
n'est  pas  toujours  pure  et  simple;  elle  est  quelquefois 
conditionnelle.  Si  la  condition  est  suspensive,  l'obligation 
n'est  pas  encore  formée,  il  y  a  seulement  espérance 
qu'elle  se  formera  ;  mais  comme  cette  espérance  est  fon- 
dée sur  un  contrat,  elle  constitue  un  droit  acquis,  en  ce 
sens  que  le  créancier  conditionnel  ne  peut  en  être  privé 
maigre  lui,  et  voilà  pourquoi  il  est  autorisé  à  exercer, 
avant  l'accomplissement  de  la  condition,  tous  les  actes 
conservatoires  de  son  droit.  Si  la  condition  est  résolu- 
toire,  elle  ne  suspend  point  l'exécution  de  l'obligation, 
mais  elle  oblige  le  créancier  à  restituer  ce  qu'il  a  reçu, 
dans  le  cas  où  arrive  l'événement  prévu  par  la  condition. 
—  Vobligation  à  terme  diffère  de  l'obli^tion  condition- 
nelle, en  ce  que  le  terme  qui  y  est  apposé  ne  la  suspend 
pas,  et  de  l'obligation  pure  et  simple,  en  ce  que  l'exécu- 
tion n'en  peut  être  demandée  qu'à  l'expiration  du  terme. 
Ce  qui  prouve  qu'elle  existe  avant  l'expiration  du  terme 
tout  aussi  bien  que  l'obligation  pure  et  simple,  c'est  que 
ce  qui  a  été  payé  d'avance  ne  peut  être  répété.  —  On 
appelle  obligations  réelles  celles  qui  n'engagent  pas  seu- 
lement les  personnes  qui  les  ont  contractées,  mais  dont 
les  effets  s'étendent  aux  héritiers  et  successeurs  de  toutes 
les  parties  contractantes;  elles  sont  choses  figurant  à 
l'actif  et  au  passif  des  successions,  et  ont  d'ordinaire  pour 
garantie  un  immeuble,  sur  lequel  elles  doivent  être 
exécutées.  —  Vobligation  alternative  et  facultative  est 
celle  par  laquelle  le  débiteur  s'engage  à  fournir  l'une  de 
deux  ou  plusieurs  choses  ;  le  choix  appartient  au  débi« 
teur,  à  moins  que  le  contraire  n'ait  été  formeUemer. 
stipulé.  —  Vobligation  est  divisible,  quand  elle  a  poiir 
objet  une  chose  qui  dans  sa  livraison,  ou  un  fait  qui  dans 
l'exécution  est  suscei)tible  de  division  ;  dans  le  cas  con- 
traûre,  elle  est  indivisible,  —  Vobligation  est  solidaire, 
quand  il  y  a  solidarité  soit  entre  les  créanciers,  soit  entre 
les  débiteurs. 

L'existence  des  obligations  s'établit  par  actes  authen- 
tiques on  privés,  par  témoignage,  présomption,  aveu  de 
la  partie,  ou  serment.  Toute  obligation  s'éteint  par  le 
pavement,  la  cession  de  biens,  la  novation,  la  remise 
volontaire  de  la  dette,  la  compensation,  la  confusion  des 
qualités  de  débiteur  et  de  créancier,  la  perte  fortuite  de 
la  chose  due  (quand  cette  chose  consiste  en  un  corps  cer- 
tain et  déterminé),  la  nullité  on  la  rescision,  par  l'effet 
de  la  condition  résolutoire,  enfin  par  la  prescription. 
V,  Pothier,  Traité  des  obligcUions,  Paris,  1768,  S  vol. 
in-12;  Carrier,  Traité  des  obligations,  1818,  in-8«; 
H.  Blondeau,  Esquisse  d'un  traité  sur  les  Obligations 
iolidaires,  1819,  in-8*;  Duranton,  Traité  des  contr€Us  et 
obligations,  1819, 4  vol.  in-8«;  J.  Bousquet,  Dictionnaire 
des  contrats  et  obligations  en  matières  civile  et  commer- 
cicUe^  1840, 2  vol.  in-8*';  Bourbon  de  Layre,  Traité  sur 
les  obligations  divisibles  et  indivisibles,  1845,  in-8<*; 
Poujol,  Traité  des  obligations,  184C,  3  vol.  in-8«;  Moli- 
tor.  Traité  des  obligations  en  Droit  romain,  1850, 3  vol. 
in -8^;  La  Rombière,  Théorie  et  pratique  des  obligations, 
1857-58,  5  vol.  in-8'>;  Maynz,  Traité  des  obligations 
d'après  le  Droit  romain,  Bruxelles,  1800,  in-8», 

OBUGATiON,  phénomène  spécial  impliqué  dans  tous  nos 
Jugements  moraux,  soit  aue  ceux-ci  aient  pour  objet 
la  distinction  générale  et  tnéorio[ue  du  bien  et  du  mal, 
soit  qu'il  s'y  agisse  de  l'appréciation  d'un  acte,  et  de  l'in- 
fluence (^e  cette  appréciation  peut  exercer  sur  nos  dé- 
terminations particulières  et  individuelles.  L'obligation 
consiste  «n  ce  que,  concevant  le  bien,  nous  croyons  que 
nous  sommes  tenus  en  conscience  de  conformer  notre 
conduite  à  l'idée  que  nous  en  avons.  Rien  de  plus  oppose 
que  l'obligation  et  la  contrainte;  rien  de  plus  diffâ^nt 
aussi  que  l'obligation  attachée  aux  conceptions  morales 
et  l'attrait  qui  nous  porte  vers  le  plaisir,  ou  la  disposition 
réfléchie  que  nous  éprouvons  à  faire  ce  que  nous  jugeons 
utile  à  nos  intérêts.  L'obligation/  qui  suppose  la  liberté 
est,  avec  l'universalité,  un  des  caractères  essentiels  de  la 
loi  morale.  Les  devoirs  ne  sont  autre  chose  qie  l'obli- 
gation répartie  sur  les  diverses  applications  de  la  loi 
momie,  et  subsistant  tout  entière  dans  chacune  d'elles 
(  V.  Devoir).  Il  n'est  guère  de  moraliste  qui  n'ait  traité 
de  l'obligation;  V,  surtout  à  ce  sujet  :  Kant,  Critique  de 
la  raison  pratique,  in-8'*,  et  Jules  Simon,  le  Devoir, 
1857,  gr.  in-18.  B— k. 

OBLIGATIONS,  en  termes  de  Finances,  valeurs  émises 
par  les  États,  les  villes,  les  départements,  les  compagnies 
de  chemins  de  fer,  les  sociétés  de  crédit,  pour  couvrir 
des  emprunts  dont  l'intérêt  ne  dépasse  pas  4  p.  100,  ei 


OBS 


1327 


OCC 


qui  lont  remboursables  par  des  tirages  successifa,  avec 
primes  attachées  à  certains  numéros  que  désigne  un  Û» 
ng&  au  sort. 

OBLIQUE,  en  termes  de  Tactique,  se  dit  d*une  ma- 
nœuvre, d*une  marche,  d*un  ahgnement,  exécutés  à 
droite  ou  à  gauche  d*une  ligne  de  bataille. 

OBLIQUES  (Cas).  V.  Cas. 

OBNOXIATION.  i  K.  ces  mots  dans  notre  Z>/cttonnaire 

OBOLE.  (      de  Biographie  et  d'Histoire. 

OBREPnON  (du  latin  obripere^  obtenir  par  surprise), 
fraude  qa*on  a  commise  dans  l'obtention  d*une  gr&ce, 
cr  un  titre,  d'une  concession,  en  cachant  quelque  chose. 
La  subreption  est  la  firaude  par  allégation  d'un  Mi  faux. 

OBROGÂTION.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

OBROK,  impôt  foncier  annuel  que  payent,  depuis  1765, 
les  paysans  des  domaines  de  la  couronne  de  Russie.  Il 
vane  de  1/2  rouble  à  2  roubles  d'argent  (2  fr.  à  8  trX 

OBSCURANTISME  (du  latin  obscurare,  obscurcir), 
nom  créé  au  temps  de  la  Restauration,  et  appliqué  par 
les  libéraux  à  tout  système  politique  on  religieux  qui 
combattait  l'esprit  de  progrès  et  de  liberté. 

OBSCURITÉ,  défaut  du  st^le.,  contraire  à  la  clarté 
(F.  ce  mot)^  et  provenant,  soit  des  pensées  qui  ne  pré- 
sentent pas  un  sens  raisonnable  ou  un  ordre  régulier, 
soit  d'une  affectation  de  finesse  et  de  profondeur.  L'im- 
propriété des  termes,  leur  ambiguïté,  les  mauvaises 
coDstructioos,  les  inversions  forcées,  les  incorrections 
grammaUcales,  Texoessive  longueur  des  périodes,  sont 
autant  de  causes  d'obscurité.  K.  Clarté. 

OBSÉCRATION.  V.  DépaécATion. 

OBSÈQUES  (du  latin  ohsêquium,  devoir),  mot  qui  si- 
gnifia autrefois  l'office  ecclésiastique,  le  service  qu'on  dit 
pour  les  morts.  11  est  aujourd'hui  synonyme  de  funé- 
railles. 

OBSERVANCE,  mot  qui  désigne  :  i"*  l'action  d'obser- 
Ter  une  règle,  une  loi,  une  cérémonie;  2**  la  règle  même, 
la  loi,  le  statut,  l'ordonnance  qu'on  observe;  3^  le  corps 
ou  la  communauté  religieuse  qui  observe  certaines  règles. 
Quelques  conciles  ont  donné  le  nom  d'Observants  aux 
clercs  qui  desservent  une  église. 

OBSERVATION.  Des  objets  de  nos  connaissances,  les 
ans  sont  des  phénomènes  individuels,  des  vérités  parti- 
coliëres  et  contingentes; les  autres,  des  réalités  absolues, 
des  vérités  universelles  et  nécessaires.  Celles-ci  sont 
conçues  par  la  raison  ;  ceux-là  sont  du  ressort  de  la  con- 
Ecience  et  des  sens.  L'observation,  c'est  l'application 
d'abord  spontanée,  puis  réfléchie  et  méthodique  de  ces 
dernières  facultés  aux  objets  auxquels  elles  sont  natu- 
rellement propres.  N'oublions  pas  qu'il  s'agit  de  faits;  il 
n'y  a  pas  d'autre  manière  de  les  connaître  que  de  les  ob- 
server; il  s'agît  de  faits  différents  :  il  faut  les  observer 
avec  des  facultés  différentes,  chacun  d'eux  avec  la  faculté 
que  la  nature  nous  a  donnée  pour  cela  :  les  couleurs  avec 
la  vue,  les  grandeurs  et  les  formes  avec  le  toucher,  les 
idées  et  les  passions  avec  la  conscience.  Ce  sont  là  des 
principes  évidents,  que  plus  ou  moins  exactement,  mais 
partout  et  toujours,  on  a  instinctivement  mis  en  pratique. 
Aussi  toutes  les  sciences  de  faits  ont-elles  leur  origine 
dans  l'observation,  et  leurs  progrès  ont  été  d'autant  plus 
rapides,  leurs  conquêtes  d'autant  plus  étendues,  qu'elles 
y  sont  restées  plus  fidèles,  et  que  l'observation  a  été  et 
pins  scrupuleuse  et  plus  exacte.  Pourquoi,  en  histoire 
oaturelle,  l'autorité  d'Aristote,  au  témoignage  des  maîtres 
les  plus  compétents,  est- elle  restée  presque  intacte? 
Parce' qu'il  a  été  un  observateur  exact  de  la  nature,  de  la 
conformation  et  des  mœurs  des  animaux  qu'il  a  décrits. 
Pourquoi,  au  contraire,  sa  Physique  a-t-elle  fini  par 
tomber  dans  le  mépris?  Pourquoi,  plus  prèft  de  nous,  en 
est-il  de  même  de  celle  de  Descartes  l  Parce  qu'Aristote 
et  Desautes  ont  traité  par  d'autres  méthodes  des  ques- 
tions qui  ne  pouvaient  être  résolues  que  par  l'observation 
dfrs  faits.  Aussi  la  méthode  des  sciences  n'a-t-elle  été 
assurée  que  du  jour  où  Bacon,  sans  rien  inventer  cepen- 
ûanti  a  constaté  de  la  manière  la  plus  explicite,  dans  le 
Sovum  Organum,  la  nécessité  d'observer  les  faits,  et 
racé  en  termes  peut-être  trop  pédantesques  et  trop 
poétiques,  mais  au  fond  avec  beaucoup  de  sûreté  et 
l'exactitude^  les  règles  de  l'observation ,  et  celles  de 
'expérimentation  et  de  l'induction  qui  en  sont  le  com- 
plément (F.  NovuM  Obganuic}.  Après  avoir  répété  que 
l'observation  doit  être  appropnée  à  la  nature  de  l'objet 
vL'servé,  nous  nous  bornerons  à  ajouter  qu'elle  doit  être 
attentive,  prolongée,  réitérée  à  plusieurs  reprises,  tant 
en  raison  de  l'inégale  aptitude  que  l'esprit  peut  présenter 
d'un  moment,  d'un  Jour  à  un  autre,  pour  bien  saisir  la 


nature  des  choses,  qu'en  raison  des  modifications  que 
celles-ci  peuvent  subir;  enfin  impartiale,  c-à-d.  tenue 
en  garde  contre  les  différentes  causes  d'erreur  que  l'ex- 
périence nous  signale  comme  capables  de  fausser  non- 
seulement  nos  Jueements  et  nos  appréciations,  mais  Jus- 
qu'à nos  observatlojns  elles-mêmes.  V.  aussi  ExpéiuEiiCB 

MÉTHODE.  B— B. 

OBSERVATION  (Gorps  d'),  corps  d'armée  chargé  d'ob* 
server  l'ennemi  tandis  qu'on  attaque  une  de  ses  places, 
et  de  s'opposer  aux  efforts  qu'il  tenterait  pour  la  dégager. 
On  donne  le  même  nom  aux  troupes  placées  près  d'une 
frontière  pour  surveiller  les  mouvements  d'une  puis- 
sance voisine  qu'on  suspecte. 

.    OBSERVATOIRE  DE  PARIS.  V.  ce  mot  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

OBSESSION.  V.  Possession. 

OBSIDIENNE  (Pierre).         (  V.  notre  Dictionnaire  de 

OBSIDIONALE  (Couronne).  )      Biogr.  et  d^Histoire. 

OBSIDIONALES  (Monnaies}.  V.  NécESsrré  (Pièces  dé). 

OBUS,  projectile  creux,  qui  diffère  de  la  bombe  en  ca 
qu'il  a  un  diamètre  plus  petit,  et  en  ce  qu'il  est  sans  anse 
et  sans  culot.  Il  est  plus  épais  dans  le  fond,  et  l'épaisseur 
diminue  insensiblement  Jusqu'à  Voeil,  par  lequel  on  in- 
troduit la  poudre,  et  où  l'on  enfonce  la  fusée  destinée  à 
le  faire  éclater.  La  fusée  pouvant  s'éteindre  facilement, 
Simienowicz  avait  proposé,  dès  i649,  un  appareil  pour 
la  remplacer.  De  nos  jours  on  a  inventé  les  obus  per- 
cutants, dont  l'œil  est  muni  d'un  mécanisme  à  percus- 
sion qui  enflamme  la  charge  aussitôt  qu'ils  touchent  le 
but.  L'obus  a  moins  de  portée  qu'un  ooulet  de  m^me 
calibre.  Un  obus  de  10  centimètres  donne  17  éclats, 
dont  14  pèsent  plus  de  100  grammes;  un  obus  de  16  cen- 
timètres donne  21  éclats.  Le  matériel  d'artillerie  en 
France  admettait,  il  y  a  quelques  années,  trois  dimen- 
sions d'obus  :  celui  de  6  pouces  (16  à  17  centimètres  de 
diamètre),  celui  de  4  pouces  et  demi,  dit  de  24  (12  à 
13  centimètres),  et  celui  des  batteries  de  montagne,  dit 
de  12.  Aujourd'hui,  le  canon-obusier  de  12,  qui  a  rem- 
placé à  la  fois  la  pièce  de  8  et  l'ancien  obusier,  lance 
indistinctement  le  boulet  et  l'obus.  Outre  l'obus  ordi- 
naire, on  se  sert  d'obiu  d  balles,  ou  obus  d  la  spartelle, 
remplis  de  balles  en  fer  qui  ajoutent  leur  effet  à  celui  des  ' 
éclats,  et  à*obus  tête  de  mort,  percés  de  plusieurs  trous 
par  où  ils  vomissent  des  matières  d'artifice  enflammées. 
—  L'obus  date  du  xvu*  siècle.  On  en  connaît  un  floren- 
tin, coulé  en  1643,  et  qui  pesait  881  kilogr.  ;  huitobusiers 
anglo-hollandais  furent  pris  par  le  maréchal  de  Luxem- 
bourg à  la  bataille  de  Nerwinde  en  1693.  Le  premier 
emploi  de  l'obus  par  les  Français  fut  à  U  bataille  de 
Fontenoy,  en  1745.  Depuis  1754,  l'obus  a  été  appliqué 
avec  avantage  aux  fusées  à  la  Congrève. 

OBUSIER,  bouche  à  feu  qui  sert  à  lancer  l'obus.  Cest 
une  pièce  placée  sur  un  affût  à  roues  comme  les  canons, 
et  qui  a  un  tir  analogue  ;  sa  semelle  mobile  permet  tou- 
tefois de  la  pointer  à  60  degrés.  On  peut  aussi  lancer 
avec  l'obusier  des  cartouches  à  balles,  vulgairement  ap- 
pelées mitrailles.  L'àme  de  l'obusier,  cylindrique  comme 
celle  des  canons,  a  de  3  à  10  calibres  de  longueur,  non 
compris  la  chambre.  Les  batteries  de  campagne  comptent 
2  obusiers  pour  4  canons.  Aujourd'hui  l'artillerie  fran- 
çaise ne  fait  usage  que  du  nouveau  canon-obusier  de  12. 
L'obusier  a  dans  la  guerre  maritime  une  efficacité  par- 
ticulière :  un  seul  de  ces  projectiles  creux,  logé,  arrêté 
dans  la  muraille  d'un  bâtiment,  peut,  par  son  explosion, 
produire  un  déchirement  suffisant  pour  le  faire  couler 
à  fond. 

OC  (Langue  d').  V.  Langue  d'oc. 

OCCABUS,  sorte  de  collier  des  Anciens. 

OCCASIONNELLES  (Causes).  K.  Causes  occasion- 
nelles. 

OCCENTORES,  ancien  terme  de  Musique  qui  désignait 
les  ténors 

OCGITANIEN  (Patoi8),nom  donné  quelquefois  au  pa- 
tois agénais  ou  toulousain,  parce  que  le  Languedoc  fut 
appelé  Occitanie  au  moyen  âge. 

OCCUPATION  (du  latin  oc'Upartf,  s'emparer  de), acte 
par  lequel  on  s'empare  d*une  chose  dans  le  dessein  de 
se  l'approprier.  C'est  un  des  moyens  d'acquérir  la  pro- 
priété. Dans  l'état  de  nature  et  avant  l'établissement  dos 
sociétés,  l'occupation  a  été  le  signe  et  letitre  unique  de  la 
propriété  ;  mais  il  ne  pouvait  plus  en  être  ainsi  dans  l'état 
social,  et  la  légi^lation  n'a  reconnu  le  droit  du  premier 
occupant  que  dans  certains  cas.  Ainsi,  il  faut  que  U 
chose  soit  sans  maître,  sans  propriétaire.  De  plus,  l'occu- 
pation ne  peut  porter  que  sur  certai  nés  choses  mobilières, 
es  animaux  sauvages  et  les  poissons,  les  trésors,  les 


OCT 


1328 


ocr 


épaves,  les  plantes  et  les  herbages  qui  croissent  sur  les 
rivages  de  la  mer,  les  objets  peràus  et  dont  le  maître  ne 
se  représente  pas,  les  objets  abandonnés  volontairement. 
On  peut  acquérir  aussi  par  Toccupation  le  droit  de  jouir 
des  choses  qui  n'appartiennent  à  personne,  et  dont  Tusage 
est  commun  à  tous.  Enfin  les  découvertes  industrielles, 
les  procédés  nouveaux,  deviennent  des  propriétés  par 
Toccupation.  —  D'après  le  Droit  des  gens,  toute  nation 
fui  prend  possession  d'une  terre  vacante,  et  y  envoie  des 
eolons,  acquiert  la  propriété  de  cette  terre. 

OCCUPATION  (Armée  d'),  ensemble  des  troupes  mises  en 
garnison  dans  les  places  fortes  d'un  pays  conquis,  jusqu'à 
conclusion  de  la  paix,  et  même  jusqu'à  exécution  des 
conditions.  On  donne  le  même  nom  à  l'armée  qui ,  agis- 
sant dans  rintérét  d'un  État  ami  ou  allié,  occupe  son  ter- 
ritoire pour  le  garantir  d'une  attaque. 

OCÉAN.  V.  Meb. 

OCëANA,  titre  d'un  ouvrage  publié  en  Angleterre  en 
1056  par  James  Harrington,  et  dont  Olivier  Cromwell 
accepta  la  dédicace.  C'est  une  des  utopies  célèbres,  un 
plan  de  république  idéale.  Selon  Harrington,  le  gouver- 
nement le  plus  parfait  est  celui  où  la  liberté  existe  dans 
une  telle  mesure  qu'aucun  homme  ne  puisse'  espérer  en 
obtenir  (i^avantage  par  suite  d'une  révolution,  et  où  ce- 
pendant, s'il  se  trouvait  par  hasard  un  tel  homme,  les 
lois  soient  assez  puissantes  pour  s'opposera  la  réalisation 
de  ses  projets.  11  réfute  la  doctrine  de  Uobbes  sur  la  mo- 
narchie absolue,  et,  pensant  que  l'aristocratie  héréditaire 
et  rinégalité  de  fortune  sont  la  cause  de  toutes  les  ré- 
volutions, il  établit  dans  sa  république  un  maximum  de 
propriété  immobilière  (équivalent  de  200  à  500  fr.  de  re- 
venu), la  souveraineté  du  peuple,  le  suflrage  universel, 
un  Sénat  de  300  membres,  une  Chambre  de  1,000  dé- 
putés, un  Conseil  exécutif  de  7  membres,  tous  électifs 
et  temporaires;  il  supprime  toute  hérédité,  et  donne  à 
tous  une  éducation  commune.  Une  telle  république  ne 
devait  pas  périr,  disait-il,  puisque  la  dissension  ne  pou- 
vait éclater  dans  son  sein,  et  que  l'histoire  n'offre  aucun 
«xemple  d'une  république  conquise  par  les  armes,  sans 
que  des  fractions  intestines  aient  aidé  l'ennemi. 

OCÉANIENNES  (Langues).  Les  langues  de  l'Océanie 
forment  deux  groupes  :  l**  les  langues  polynésiennes 
{V,cê  mot);  2o  les  langues  malaises,  comprenant  le 
malais  proprement  dit,  le  javanais,  les  idiomes  célé- 
biens,  la  langue  tagale,  le  madécasse  ou  malgache 
(  V,  ces  mots). 

OCUAVO ,  monnaie  de  compte  espagnole,  valant  à  peu 
près  un  centime  et  demi. 

OCHLOCRATIE  (du  grec  okhlos,  populace,  et  cratos, 
pouvoir),  gouvernement  du  bas  peuple.  C'est  une  corrup- 
tion du  gouvernement  démocratique  :  une  vile  multitude 
substitue  ses  caprices  et  ses  fureurs  au  règne  des  lois,  et 
ce  n'est  plus  là  population  intelligente  et  morale  qui 
exerce  le  pouvoir.  L'ochlocratie  perdit  la  république 
d'Athènes,  et  rendit  possible  en  France  le  règne  de  la 
Terreur. 

OCRE ,  monnaie  de  Suède,  qui  est  la  8*  partie  du  marc 
d'argent  et  la  24"  du  marc  de  cuivre. 

OCREA.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnmre  de  Biogra- 
phie et  d* Histoire, 

OCTACORDË ,  en  termes  de  Musique,  système  com- 
posé de  huit  sons  ou  de  sept  degrés  ;  —  Instrument  à 
s  cordes. 

OCTAVA,  nom  donné  dans  quelques  pays  aux  jeux  de 
l'orgue  appelés  en  France  flûte  de  seize,  flûte  de  huit, 
flûte  de  quatre.  Les  Allemands  nomment  octava  le  prin- 
cipal de  huit  pieds,  et  superoctava  ou  disdiapason  le 
principal  de  quatre  pieds,  c-à-d.  le  jeu  à  la  double  oc- 
tave du  seize  pieds.  Le  mot  octava,  qui  est  appliqué  le 
plus  ordinairement  au  principal  ouvert,  est  quelquefois 
employé  pour  désigner  les  jeux  ouverts  qui  sonnent  l'oc- 
tave au-dessus  d'une  autre  Jeu  bouché.  F.  C. 

OCTAVE  (du  latin  octavus^  huitième),  en  termes  de 
Musique,  intervalle  de  sept  degrés  avec  réplique  au  grave 
ou  à  l'aigu  de  celui  qu'on  a  pris  pour  point  de  départ.  En 
parcourant  diatoniquement  la  distance  comprise  entre  les 
deux  notes  extrêmes  de  cet  intervalle,  on  fait  entendre 
huit  sons  difi'érents,  et  l'on  trouve  5  tons  et  2  demi-tons. 
L'octave  est  la  plus  parfaite  des  consonnances.  On  la 
confond  souvent  dans  la  pratique  avec  Vunisson;  elle  en 
diffère  cependant  :  l'unisson  est  formé  do  deux  sons 
identiques  réunis  sur  le  même  degré,  tandis  que  l'octave, 
composée  de  deux  sons  distincts  et  distants  l'un  de 
Pautre,  est  réellement  un  intervalle;  de  plus,  l'octave, 
en  raison  de  l'éloignement  de  ses  deux  notes,  produit 
<|uelque  harmonie,  tandis  que  l'unisson  en  est  dépourvu. 


quelle  que  soit  même  la  différence  du  timbre  des  sens 
qui  le  composent.  Toutes  les  cordes  de  notre  système 
musical  sont  renfermées  dans  l'octave  :  pour  établir  une 
suite  de  sons  dont  l'étendue  dépasse  les  limites  de  l'oc- 
tave, on  répète  nécessairement,  au  grave  ou  à  l'aiga, 
quelques-unes  des  notes  au'on  a  déjà  entendues  dans  cet 
intervalle,  et  l'ensemble  des  sons  appréciables  à  l'oreille 
n*est  qu'une  série  d'octaves  qui  se  reproduisent  avec  les 
mêmes  dispositions  relatives.  L'octave  est  l'intervalle  gé- 
nérateur de  tous  les  autres,  qui  n'en  sont  que  des  divi- 
sions: unsi,  la  moitié  de  l'octave  donne  d'une  part  la 
quarte,  et  de  l'autre  la  quinte  qui  en  est  le  renverse- 
ment; le  tiers  donne  la  tierce  mineure,  et  son  renverse- 
ment la  sixte  majeure,  etc.  Une  propriété  remarquable 
de  l'octave,  c'est  de  pouvoir  être  i^outée  à  elle-même  au- 
tant de  fois  qu'on  voudra,  sans  cesser  d'être  octave  et 
consonnance;  il  n'en  est  pas  de  même  des  autres  inter- 
valles. C'est  au  xvi«  siècle  qu'on  imagina  la  division  har- 
monique et  la  divtstùn  arithmétique  de  l'octave  (  K.  Aarra- 
uériQDB).  —  En  Harmonie,  on  évite  de  faire  deux  octaves 
de  suite  entre  plusieurs  parties  qui  marchent  par  mouve- 
ment semblable.  B. 

ociAVB  (Jeux  d'I.  V.  Fonds  (Jeux  de). 

OCTAVB  (Règle  de  1*),  nom  improprement  donné  à  une 
ancienne  formule  d'accompagnement  qui  consistait  à 
prendre  des  sixtes  sur  chaque  degré  de  la  gamme,  à  l'ex- 
ception du  i*'  et  du  5%  auxquels  on  faisait  porter  l'accord 
parfait.  C'était  un  moyen  d'un  assez  faible  secours  :  car, 
pour  s'en  servir,  il  fallait  que  la  basse  marchât  diatoni- 
quement par  gamme  ascendante  ou  descendante,  et  que 
la  mélodie  ne  sortit  pas  des  cordes  essentielles  du  ton. 
Là  règle  de  l'octave  fut  publiée  en  4700  par  un  certain 
Delaire  ;  l'invention  lui  en  a  été  disputée  par  deux  mem- 
bres de  l'Académie  royale  de  musique  de  Paris,  Mal  tôt  et 
Campion.  B. 

ocTAyE,  en  termes  de  Liturgie  catholique,  intervalle  de 
8  jours  consacré  au  service  et  à  la  commémoration  d'un 
saint  ou  de  quelque  fête  solennelle.  Durant  cet  inter- 
valle, on  répète  certaines  parties  du  premier  office,  telles 
qu'antiennes,  hymnes,  versets,  leçons,  etc.  Le  8*  jour, 
spécialement  nommé  Octave,  est  plus  solennel  que  les 
jours  précédents. 

OCTAVB ,  nom  qu'on  donnait  autrefois  à  une  collection 
de  8  sermons  prêches  dans  la  semaine  du  S*  Sacrement. 

OCTAVB,  stance  de  8  vers,  en  usage  dans  les  poésies  ita- 
lienne, espagnole  et  portugaise.  Les  verasont  nendécasyl- 
labes,  c.-à-d.  de  11  syllabes,  dont  la  dernière  est  muette; 
ils  répondent  par  conséquent  à  nos  vers  de  10  syllabes. 
La  Jérusalem  délivrée  du  Tasse  est  tout  entière  écrite  en 
octaves.  —  Un  étranger,  le  capitaine  prussien  Boaton,  a 
essayé,  au  xviu*  siècle,  d'introduire  l'octave  dans  la  poé- 
sie française,  en  lui  donnant  3  rimes  masculines,  3  fé- 
minines, et  un  distique  en  rimes  alternativement  mas- 
culines et  féminines.  Sa  tentative  est  assez  heureuse.  En 
voici  un  exemple,  pris  d'une  traduction  de  VObéron  de 
Wieland  : 

L*ob8carité  rëgna  dant  la  nature, 
'  Et  le  hiboa ,  s'âerant  dant  les  alra, 
PouBse  des  cria  de  fort  mauTalu  aafirurc. 
Mourant  de  faim  ,  mille  monstres  dlrers 
Hurlent  an  loin ,  cherchant  leur  nourriture. 
Quel  cheTaller,  errant  dam  oee  déserts. 
Mouillé,  recru ,  ne  trouvant  nul  passage. 
M'aurait  frémi ,  n'aurait  perdu  courage? 

Dans  cette  nuit ,  le  héros  étranger 
S'étonne .  tremble  (avouons-le  «ans  feinte  ), 
Quoique  jamais,  à  1  aspect  du  danger. 
De  la  frayeur  il  n'eût  senti  Tattelnte  ; 
Mais  le  projet  qui  le  tait  voyager 
S'offre  à  ses  yeux  et  dissipe  sa  crainte  ; 
La  bride  haute  et  Tépée  à  la  main. 
Le  long  du  roe  il  poursuit  son  chemin. 

Du  reste,  on  trouve  déjà  l'octave  dans  les  poésies  de  Thi- 
baut, comte  de  Champagne,  et  aussi  chez  les  Arates. 
C'est  donc  à  tort  que  les  Italiens  en  ont  attribué  l'inven- 
tion à  Boccace. 

OCTAVIER ,  en  termes  de  Musique,  donner  un  son  à 
l'octave.  Cest  ce  qui  arrive  quand  on  force  le  vent  dan" 
un  instrument.  Un  tuyau  d'orgue  octavie,  quand  il  prend 
trop  de  vent.  Il  en  est  de  même  d'une  corde  de  violon- 
celle, si  le  coup  d'archet  est  trop  brusque  ou  trop  voisin 
du  chevalet. 

OCTAVIN.  V.  Flotb  (Petite). 

ocTAviN,  nom  donné  par  quelques  facteurs  à  un  jeu  de 
Torgue.  C'est  une  petite  flûte  à  l'intonation  de  deux 


OCT 


132» 


OCT 


ds,  qu'on  emploie  généralement  dans  la  partie  de 
'orgue  appelée  Hécit,  afin  de  donner  plus  de  mordant 
NI  Jeux  (pii  la  composent.  Placé  sur  les  autres  claviers, 
Poctarin  peut  tenir  lien  de  doublette.  F.  C. 

OCTAVINE,  ancien  petit  clavecin  qui  n'avait  qu'une 
octave  d'étendue. 

OCTAVO  (In-).  V.  Tormat. 

OCTO-BASSE,  instrument  à  archet,  de  dimensions  co- 
lossales, récemment  inventé  par  M.  Yuillaume.  C'est  l'oc- 
tare  grave  du  violoncelle,  il  n'a  que  trois  cordes,  ac- 
cordées en  quinte  et  quarte,  ut,  sol ,  ut.  Les  doigts  n'étant 
ni  assez  longs  ni  assez  forts  pour  agir  convenablement 
sur  les  cordes,  l'instrument  est  muni  de  touches  mobiles, 
mues  par  des  leviers  que  la  main  et  le  pied  gauches  de 
l'eiécutant  tirent  de  haut  en  bas  derrière  le  manche; 
•'t>s  touches  pressent  énergiquement  les  cordes  sur  des 
^il'ets  placés  sur  le  manche  pour  produire  les  tons  et  les 
uumi-tons.  C'est  dire  assez  que  l'octo-basse  ne  peut  exé- 
cuter aucune  succession  rapide.  Son  étendue  est  d'une 
ortare  et  d'une  quinte.  Il  a  des  sons  d*une  puissance  et 
d'une  beauté  remarquables.  B. 

OCTOÈQUE  (  du  grec  octôèkhos,  les  huit  tons) ,  nom 
donné,  dans  l'Église  grecque,  à  un  livre  qui  contient 
tout  ce  qu'on  chante  pendant  les  offices,  selon  les  huit 
tons  du  Plain-Ghant. 

OCTONAIRE,  lambique  tétramëtre  acatalectique,  trèsr. 
usité  dans  le  théâtre  latin.  Chez  les  poètes  grecs,  il  avait 
unecésure  brève  au  4*  pied,  lequel  était  un  ïambe  ;  chez  les 
Latins,  l'ïambe  est  souvent  remplacé  par  un  spondée,  un 
dactyle,  un  anapeste,  et  même  un  procéleusmatique,  et 
le  vers,  à  cet  endroit ,  est  asynartëte,  comme  dans  cet 
exemple  de  Plante  : 

Die  narem  aalTani  niin|t!at  —  aat|  irat!  adTentnm  aenls. 

On trouvequelques  octonaires  hypermètres.         P. 

OCTOSTYLE,  en  termes  d'AI^bhitecture ,  ordonnance 
composée  de  huit  colonnes. 

OCTROI,  taxe  de  consommation  que  les  communes, 
toos  l'ancienne  monarchie  française,  s'imposaient,  avec 
^'autorisation  du  roi ,  en  cas  dMnsuffisance  des  revenus 
iirdlDaires,  pour  subvenir  aux  dépenses  locales.  Il  y  avait 
sur  les  octrois  un  prélèvement,  qui  fut  d'abord  d'une 
moitié,  puis  d'un  dixième,  au  profit  du  trésor  royal.  L*As- 
iemblée  constituante  de  1789  supprima  les  octrois  par 
une  loi  des  19-25  février  1701.  Le  Directoire,  par  des  fois 
da  il  frimaire  an  vn,  du  S7  frimaire  et  du  5  ventôse 
in  xm  {{^  décembre  1798,  18  décembre  et  S6  février 
1^99),  les  rétablit  sous  le  nom  de  Contributions  tndt- 
^ectes  et  loctUes,  et  autorisa  en  même  teihps  le  rempla- 
cement facultatif  de  tout  ou  partie  du  montant  de  la  cote 
iiiobilière  par  des  droits  additionnels  à  l'octroi  :  encore 
ujourd'bui ,  Granville  rejette  sur  cet  impôt  la  totalité, 
et  Cherbourg,  Bordeaux,  Lyon,  Marseille,  Paris,  etc., 
use  partie  de  leur  contingent  mobilier. 

L'administration  directe  des  octrois  appartient  aux 
miires.  Tout  décret  d'établissement  d'une  taxe  est  déli- 
i)éré  et  demandé  par  le  Conseil  municipal ,  puis  discuté 
"D  assemblée  générale  du  Conseil.  L'initiative  appartient 
'ooc  à  l'autorité  locale;  le  gouvernement  a  seulement  le. 
droit  de  restreindre  ou  de  rejeter  tout  article  d'un  tarif 
d'octroi  proposé  par  un  Conseil  municipal.  Les  délibéra- 
tions de  ce  demier  corps  sont  adressées  par  le  maire  au 
v>us-préfet,  qui  y  ajoute  ses  observations  et  les  envoie 
lu  préfet  Celui-ci  les  transmet,  également  avec  son  avis, 
'u  ministre  de  l'intérieur,  qui  autorise ,  s'il  y  a  lieu ,  le 
'Ooseil  municipal  à  délibérer  sur  les  tarifs  et  règlements 
Je  la  taxe  projetée.  Les  arrêtés  du  Conseil  passent  ensuite 
par  les  mains  du  préfet  et  du  directeur  général  des  coo- 
ributions  indirectes,  et  arrivent  au  ministre  des  finances. 
!1  est  d'usage  de  n'autoriser  la  création  d'un  octroi  que 
«»  les  communes  ayant  au  moins  4,000  habitants,  une 
ommone  veut-elle  remplacer  son  octroi  par  un  autre 
mode  de  perception,  le  maire  avertit  lo  préfet  qui  sol- 
licite du  ministre  de  Tintérieur  l'autorisation  de  faire  dé- 
libérer le  Conseil  municipal  à  ce  sujet.  Les  mesures  con- 
venables d'exécution  sont  prescrites,  en  dernier  lieu,  par 
le  ministre  des  finances. 

ToQs  les  objets  de  consommation  locale  sont  suscep- 
tibles d'être  imposés  :  boissons  et  liquides,  comestibles, 
combustibles,  fourrages,  matériaux,  etc.  Sont  exempts 
des  droits  d'octroi  :  les  bois  destinés  aux  constructions 
mobiles  de  l'artillerie  ;  les  matières  servant  à  la  fabrica- 
tion des  poudres  ;  les  consommations  faites  à  bord  des 
bàiimeots  de  l'État  ;  les  papiers  imprimés  du  gouver- 
nement ;  les  médicaments  ;  les  morues.  Le  sel  ne  paye  ,' 


qu'à  rentrée  de  Paris  ;  le  papier  est  taxé  &  Bordeaux  f 
le  papier  peint,  à  Alais  et  à  Uzès.  Les  matières  sou- 
mises à  des  droits  de  douane,  comme  les  sucres  et  les 
cafés,  ne  sont  çuère  atteints  c|[u*exceptionnellement  par 
les  tarifs  d'octroi  :  cependant,  il  y  a  aeux  cents  localités 
au  moins,  dans  le  centre,  l'ouest,  et  surtout  le  midi  de  la 
France,  où  les  sucres  sont  taxés.  Les  bestiaux  payent  on 
droit  au  poids,  ou  par  tête  pour  les  octrois  où  la  taxe  sur 
les  bœufs  n'excède  pas  8  fr.  Si  une  ville  s'annexe  sa  ban- 
lieue, les  marchandises  qui  se  trouvent  à  ce  moment 
dans  le  périmètre  nouveau ,  et  qui  étaient  destinées  à  la 
consommation  dans  l'ancien  rayon  de  l'octroi ,  ne  peuvent 
profiter  des  avantages  commerciaux  résultant  de  l'an- 
nexion, qu'à  la  condition  de  payer  l'impôt  municipal  dont 
elles  eussent  été  redevables  avant  le  décret  qui  a  reculé 
l'octroi  primitif.  —  Les  objets  assujettis  à  l'octroi  doi- 
vent entrer  par  certaines  barrières  où  se  trouvent  des 
bureaux  d*octroi.  Tout  portetir  ou  conducteur  des  sus- 
dits objets  est  tenu,  sous  peine  de  saisie  de  ces  objets, 
d'en  faire  une  déclaration ,  dont  les  préposés  à  l'octroi 
vérifient  l'exactitude  par  des  perquisitions.  Tout  voyageur 
à  pied  ou  à  cheval  est  soumis  aux  mêmes  visites.  —  De- 
puis l'établissement  des  chemins  de  fer,  dont  le  point 
d'arrivée  se  trouve  le  plus  souvent  dans  Tintérieur  des 
villes,  un  poste  d'employés  de  l'octroi  procède  aux  per- 
quisitions dans  le  débarcadère  même  du  chemin  de  fer. 

—  Certains  objets  soumis  à  l'octroi  ne  font  souvent  que 
traverser  un  lieu,  en  y  séjournant  moins  de  2i  heures  : 
en  ce  cas,  le  conducteur  de  ces  objets  doit  prendre  un 
p€us»^ebout,  sorte  de  permis  délivi^  sur  la  consignation 
des  droits  versés  en  cautionnement  et  dont  le  montant 
lui  est  restitué  au  bureau  de  sortie. 

La  loi  de  Tan  vn  frappait  le  fraudeur  d'une  amende 
double  de  la  taxe;  un  décret  de  l'année  suivante  le  con- 
damna à  verser  une  somme  égale  à  la  valeur  de  l'objet 
soumis  au  droit.  Pour  les  voitures  particulières  suspeln- 
dues,  l'amende,  d'abord  de  1,000  fr.,  a  été  réduite  à  100 
ou  200  fr.  Pour  l'escalade,  l'introduction  par  souterrain 
ou  à  main  armée,  il  y  a,  outre  l'amende  et  la  confiscation, 
une  peine  correctionnelle  de  six  mois  de  prison.  —  Les 
contraventions  en  matière  d'octroi  sont  de  la  compétence 
exclusive  des  tribunaux  de  pdlice  correctionnelle;  les 
contestations  civiles  qui  peuvent  s'élever  pour  l'applica- 
tion du  tarif  ou  la  quotité  des  droits  exigés  sont  portées 
devant  le  |uge  de  paix. 

L'administration  des  octrois  est  aujourd'hui  réglée  par 
la  loi  du  28  avril  1816,  qui  laisse  aux  Conseils  munici- 
paux la  liberté  de  choisir  entre  trois  modes  de  percep- 
tion :  la  régie  simple,  la  régie  intéressée,  le  baU  à  ferme, 
ou  Vabonnement  avec  l'administration  des  Contributions 
indirectes.  —  La  régie  simple  est  l'octroi  perçu  sous  l'ad- 
ministration immédiate  des  maires.  —  La  régte  intéressée 
est  la  perception  par  un  régisseur,  qui  doit  rendre  un 
prix  fixe,  et  abandonner  une  part  déterminée  dans  les 
produits  excédant  le  prix  principal  et  la  somme  yersée 
pour  les  frais,  laquelle  ne  doit  pas,  autant  que  possible, 
dépasser  12  p.  100  du  prix  fixe  du  bail  :  il  y  a  partage 
des  bénéfices  à  la  fin  de  chaque  année,  et,  à  l'expiration 
du  bail,  répartition  définitive  suivant  l'année  moyenne. 

—  La  ferme  est  l'adjudication  pure  et  simple  des  pro- 
duits d'un  octroi,  moyennant  un  prix  invariable,  tous 
les  frais  de  perception  restant  à  la  charge  du  fermier.  — 
Quel  que  soit  le  mode  de  perception,  on  n'admet  comme 
adjudicataires  que  les  personnes  reconnues  solvables, 
d'une  moralité  et  d'une  capacité  constatées  par  le  maire. 
Aucun  fermier  de  l'octroi  ne  doit  être  attaché  à  l'admi- 
nistration des  contributions  indirectes,  ni  aux  adminis- 
trations civiles  ou  aux  tribunaux  ayant  une  surveillance 
ou  juridiction  quelconque  sur  l'octroi.  Le  prix  du  bail 
doit  être  payé  de  mois  en  mois,  et  d'avance;  l'adjudica- 
taire choisit  lui-même  ses  préposés.  Si  le  Conseil  muni- 
cipal a  décidé  que  le  mode  de  perception  sera  Vabonnê- 
ment  avec  la  régie  des  Contnbutions  indirectes,  cette 
perception  est  remise  entre  les  mains  des  employés  ordi- 
naires de  ces  Contributions,  et  les  receveurs  versent  le 
montant  de  leurs  recettes,  pour  le  compte  de  l'octroi, 
dans  la  caisse  municipale,  sous  la  déduction  des  frais  de 
perception  convenus  par  le  traité.  —  Tout  préposé  de 
l'octroi  doit  être  âgé  de  21  ans  au  moins,  fournir  un  cau- 
tionnement, être  toujours  porteur  de  sa  commission,  et 
la  présenter  toutes  les  fois  qu'il  en  est  requis  ;  nul  ne 
peut  faire  le  commerce  des  objets  compris  au  tarif.  -^ 
La  régie  des  Contributions  indirectes  a,  sous  l'autorité  du 
ministre  des  finances,  la  haute  surveillance  sur  la  per- 
ception et  l'administration  des  octrois. 

En  1830,  le  produit  total  des  octrois,  établis  alors  dans 

84 


ODE 


1330 


ODJ 


0OS  communes  ayant  ensemble  une  population  de  \ 
6,bOû,000  &me8,  était  de  67  millions;  la  taxe  par  tète 
ressortait  de  i  fr.  50  Jusqu'à  30  fr.  En  1841, 1420  com- 
munes perçurent  75  millions;  en  1847,  88,612,209  fr., 
dont  36  millions  pour  les  boissons,  et  24  pour  la  viande. 
En  1850,  1436  octrois  perçurent  95,176,602  fr.  43,  dont 
42  millions  à  peu  près  pour  les  boissons.  Avant  Tannexion 
à  Paris  de  sa  banlieue,  en  18G0,  Toctroi  de  cette  ville 
était  pour  les  4/5  du  revenu  local ,  et  les  octrois  consti- 
tuaient le  tiers  environ  des  recettes  ordinaires  des  com- 
munes de  France.  Les  frais  de  perception  absorbent,  en 
général^  un  dixième  du  produit  brut.  —  Dans  le  Finistère 
et  quelques  autres  départements,  on  trouve  un  certain 
nombre  d*octrois  dits  ruraux^  dont  les  produits,  frappant 
seulement  les  liauides,  sont  perçus  par  les  agents  des 
Contributions  inoirectes  dans  leurs  tournées. 

Est-îi  Juste  que  des  citoyens  réunis  en  agglomérations 
urbaines,  dans  leur  intérêt  commercial,  agricole  et  indus- 
triel f  payent  les  objets  de  consommation  plus  cher  que 
ceux  qui  sont  rassemblés  en  un  moindre  nombre  ?  Oui, 
parce  que  cette  agglomération  est  la  cause  d^avantages 
sociaux  très-réels,  qui  peuvent  motiver  des  charges  cor- 
respondantes ;  elle  produit  des  besoins  spéciaux,  communs 
à  tous  les  habitants  d*une  même  ?ille  prise  à  part.  C*est 
donc  à  cette  ville,  et  non  à  la  nation,  à  en  porter  le  far- 
deau. D'ailleurs,  IMmpôt  indirect,  impôt  de  consomma- 
tion, n*étant  payé  que  par  celui  qui  peut  consommer,  ne 
doit  pas  paraître  plus  onéreux  que  toute  autre  taxe.  La 
Révolution  de  1830  et  celle  de  1848  ont  attaqué  en  vain 
les  octrois.  Si  Ton  supprimait  ces  taxes,  qui  satisfont  aux 
dépenses  considérables  que  les  villes  supportent  pour  leur 
entretien,  leur  embellissement,  leur  assainissement,  l'État 
en  serait  réduit  à  céder  aux  communes,  pour  les  soute- 
nir, une  certaine  portion  de  ses  revenus,  qa*il  lui  fau- 
drait récupérer  d*une  autre  façon.  Cest  ce  qui  vient 
d'avoir  lieu  en  Belgique  :  il  y  avait  dans  ce  pays  78  com- 
munes à  octrois;  un  décret  de  Juin  1860  a  aboli  ce  sys- 
tème d'impôts  ;  mais,  pour  suppléer  aux  fonds  dont  cette 
suppression  a  privé  les  villes,  1  État  leur  alloue  annuelle- 
ment 12  millions  portés  au  budget,  et  résultant  de  la 
poste  et  de  l'accise  augmentées. 

L*impôt  municipal  de  consommation  existe  dans  la 
inoitié  des  communes  de  Hollande  ;  dans  quelques  loca- 
lités môme,  les  droits  d'octroi  excèdent  les  sommes  levées 
Îar  l'État  sur  les  mêmes  matières.  La  loi  communale  de 
851  a  cependant  restreint  la  tolérance  à  cet  égard.  — 
L'Allemagne  est,  après  la  Hollande,  un  des  pays  qui 
comptent  le  plus  d'accises  municipales.  On  y  remarque 
néanmoins  une  tendance  assez  générale  à  remplacer  les 
droits  de  consommation  par  les  Impôts  directs  sur  le  re- 
venu; c*est  ce  qui  existe  dans  certaines  villes  de  Prusse, 
et  Ton  sait  que  Frédéric  U  avait  organisé  le  premier  sur 
cette  base  (contribution  de  nature  directe)  le  système 
financier  de  la  Silésie.  —  En  Autriche,  les  octrois  consti- 
tuent la  plus  grande  partie  des  revenus  municipaux.  — 
Parmi  les  villes  libres,  Hambourg  perçoit  des  accises  qui 
montent  à  environ  un  million  sept  cent  mille  francs  Qa 
douane  non  comprise;.  Enfin  les  villes  importantes  de  la 
Grande-Bretagne  supportent  de  même  des  taxes  de  con- 
sommation :  le  charbon,  par  exemple,  paye  à  Londres  un 
droit  considérable;  mais,  en  général  «  en  Angleterre,  les 
taxes  locales  affectent  plutôt  dans  leur  ensemble  le  carac- 
tère d*impôt  direct.  —  V.  Biret,  Manuel  des  octrois  et  au- 
tres contributions  directes,  1837,  in-18;  Allouard,  Traité 
général  des  droits  d'entrée  et  d^octroi  de  la  ville  de  Pans, 
2«  édit,  1834,  in-8<>;  Dareste,  Code  des  octrois  munici- 
paux, 1840,  in-8<*;  Girard,  Tableaux  des  contraventions 
et  des  peines  en  matière  de  contributions  indirectes,  die 
tabacs,  d*octrois^  etc,^  revus  par  Froma^^,  6*  édit., 
1841 ,  in-8%  et  Manuel  des  Contributions  inidirectes  et 
des  Octrois^  refondu  par  Dareste,  1857,  in-S»;  Manud 
de  remployé  de  VOctroi,  1853,  2  vol.  in-8o;  Annales  des 
Octrois,  complément  du  Manuel  de  l'employé  de  l*Octroi, 
1853,  3  vol.  in-8°;  Gharpillet,  De  l'administration  des 
octrois  municipaux^  1855,  in-8°;  Braff,  Des  Octrois  mu- 
nicipaïuœ,  résumé  des  lois,  décrets,  ordonnances,  etc., 
1857,  in-8«.  V.  PaopyLéBS  db  Paris.  J.  G. 

OCULAIRE  (Clavecin).  V.  Clavecin. 

OCULI,  nom  qu'on  donne,  dans  la  Liturgie  catholique, 
•n  3*  dimanche  du  Carême.  C'est  le  premier  mot  de  l'in- 
troit  de  la  messe  de  ce  Jour. 

ODAUSQUE.  V.  notre  Dtc^  de  Biogr.  et  S  Histoire. 

ODE  (du  grec  ôdè,^  chant),  nom  que  les  anciens  Grecs 
donnaient  à  toute  pièce  de  vers  qu'on  chantait  en  s*ao- 
compagnant  de  la  lyre,  et  en  y  Joignant  même  la  danse. 
Le  mot  était  donc  synonyme  de  poésie  lyrique,  L'Ode 


était  généralement  composée  de  trois  parties,  la  slroph*^ 
Vanttstrophe,  et  Vépode  CV.  ces  mots).  —  Pour  les  Mo- 
dernes, comme  pour  les  Romains,  l'Ode  n'a  plus  rien  de 
commun  avec  la  musiq[ue  :  c'est  une  forme  lyrique,  une 
pièce  partagée  d'ordinaire  en  strophes  ou  stances  égales, 
et  à  laquelle  on  donne,  suivant  le  caractère  que  le  poëte 
lui  a  imprimé,  les  qualifications  de  sacrée  ou  religieuse, 
héroïque  ou  pindarique,  badine  ou  anacréontique ,  phi- 
losophiaue  ou  morale^  etc.  Ronsard  a  le  premier  employé 
le  mot  Ode  en  français.  V,  Gbccqob  (Littérature),  Lyrique 
(Poésie). 

ODÉON  (du  grecddtfion,  dérivé  de  ôdè,  chant),  édifice 
où  les  poètes  et  les  musiciens ,  chez  les  anciens  Grecs, 
soumettaient  leurs  ouvrages  au  Jugement  du  public. 
L'Odéon  çue  Péridès  fit  construire  à  Athènes  était  dans 
le  Céramique;  il  fut  élevé,  ditron,  sur  le  modèle  de  la 
tente  de  Xerxès,  et  on  présume  qu'il  était  d'ordre  dorique. 
D'abord  ^  ciel  ouvert,  on  le  couvrit  ensuite  d'un  toit  fait 
avec  les  m&ts  et  les  vergues  des  navires  pris  aux  Perses. 
Au  temps  de  Pausanias,  on  y  voyait  les  statues  de  la 
plupart  des  rois  d'Egypte  de  la  famille  des  Lagides.  Il  y 
avait  encore  deux  autres  Odéons  dans  la  même  ville. 
Pausanias  mentionne  ceux  de  Corinthe  et  de  Patras.  Ce- 
lui de  Smyrne,  en  Asie  Mineure,  contenait  un  tableau 
d'Apelle.  Les  voyageurs  Pococke  et  Chandler  ont  cru  re- 
connaître à  Éphèse  et  à  Laodicée  les  débris  de  monu- 
ments de  ce  genre.  Rome  eut  aussi  ses  Odéons  :  l'un  fut 
construit  par  Domiton,  l'autre  par  ApoUodore.  On  en  a 
trouvé  un  également  à  Pompéi.  B. 

ODéoN,  l'un  des  théâtres  de  Paris,  construit  pour  la 
Comédie-Française, 'sur  les  plans  de  De  Wailly  et  de 
Peyrc,  près  du  palais  du  Luxembourg,  et  ouvert  en  1782, 
sous  le  nom  de  Théâtre-Français,  Les  comédiens  fran- 
çais y  Jouèrent  Jusqu'au  4  sept.  1793,  et  c'est  là  aue 
furent  donnés  le  Clujrles  IX  de  M.-J.  Chénier,  les  Vic- 
times cloîtrées  de  Monvel,  VAmi  des  lois  de  Laya,  et 
Paméla  de  François  de  Neufch&teau.  Fermé  à  cause  de 
cette  dernière  pièce,  l'Odéon  rouvrit  après  le  9  thermi- 
dor, sous  la  direction  de  la  D''^*  Montansier,  et  avec  le 
nom  de  Théâtre  de  l'Égalité;  mais  les  artistes  de  la  Co- 
médie-Française se  dispersèrent  bientôt,  et  l'entreprise 
échoua.  La  salle  servit,  en  1796,  à  des  bals,  qu'on  appela 
thiases  (d'un  nom  grec  signifiant  chœur  de  danses),  et 
reçut  elle-même  le  nom  grec  d'Odéon.  On  y  donna  en- 
suite des  banquets  et  l'on  y  tint  des  réunions  politi- 
ques. Le  Conseil  des  Cinq-Cents  y  siégeait,  lorsqu'il  fit 
le  coup  d'État  du  18  fructidor.  Reconstitué  en  thé&tre 
à  la  fin  de  1798,  il  fut,  quelques  mois  iq>rès,  ruiné 
par  un  incendie.  Quand  il  rouvrit  en  1868  sous  la  dé- 
nomination de  théâtre  de  l'Impératrice,  on  y  Joua  prin- 
cipalement les  pièces  d'Alexandre  Duval  et  de  Picard  ; 
les  acteurs  fhinçais  Jouaient  quatre  fois  la  semaine,  et 
une  troupe  italienne  les  autres  Jours.  En  1816,  l'Odéon, 
qui  avait  pris  le  nom  de  Second  Théâtre  Français, 
était  tombé  en  une  telle  décadence,  qu'on  n'y  donnait 
plus  que  des  ballets;  une  petite  subvention  l'aidait  à 
renaître,  lorsqu'il  fut  encore  incendié  en  1818.  Dès  l'an- 
née suivante  on  put  en  reprendre  possession ,  et  C.  De- 
lavigne  y  remporta  ses  premiers  succès  dramatiques. 
En  1825,  permission  fut  accordée  de  Joindre  l'opén  au 
répertoire  ordinaire,  et  l'Odéon  eut  une  fortune  passa- 
gm  avec  le  FreyschiUz  de  Weber,  arrangé  par  Castil- 
Blaze  pour  la  scène  fhmçaise  sous  le  nom  de  Robin  des 
bois.  Fermé  en  1828,  rouvert  en  1829,  il  servit  à  diverses 
exploitations,  puis  la  Comédie-Française  et  l'Opéra-Co- 
nuque  y  donnèrent  alternativement  des  représentations 
Jusqu'en  1834.  La  première  Joua  encore  deux  fois  par 
semaine,  de  1836  à  1838,  et  enfin  il  n'v  eut  plus  que  de 
loin  en  loin  des  représentations  à  bénéfice.  Les  Ittliens 
se  réfugièrent  quelque  temps  à  l'Odéon  après  l'incendie 
de  la  sidle  FavarU  Depuis  1841,  l'Odéon  a  sa  compagnie 
dramatique  particulière,  et,  à  part  quelques  déconfitures 
momentanée,  il  n'a  cessé  dêtre  ouvert.  Il  figure  au 
nombre  des  théâtres  nationaux,  et  reçoit  une  subvention 
annuelle  de  100,600  tr.  C'est  à  l'Odéon  que  l'on  fit  les 

{iremiers  essais  de  l'éclairage  à  l'huile  en  1784,  et  de 
'éclairage  au  gaz  en  1822.  B. 

ODÉOPHONE,  instrument  de  musique  inventé  à  Lon- 
drw  par  Vanderburg,  de  Vienne  en  Autriche.  Ce  n'était 
qu'une  modification  du  davi-cylindre  de  Chladni  :  le  son 
se  tirait  de  petits  morceaux  de  métal,  au  moyen  d'un 
davier  et  d'un  cylindre. 

ODJAK.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire, 

ODJl  (Idiome),  un  des  idiomes  de  la  Guinée.  Presaue 
tous  les  changements  destinés  à  marquer  les  modes,  lec 


ODY 


1331 


ODY 


temps,  les  liombres,  les  voix,  les  déclinaisons,  s'opèrent 
à  l'iiide  de  préfixes.  Les  voix  des  verbes  sont  nombreuses. 
L^cinploi  dos  mots  répétés  avec  un  sens  fréquentatif  est 
assez  ordinaire.  Une  Grammaire  de  cet  idiome  a  été  pu- 
bliée par  Riis. 

ODYSSÉE,  Tun  des  deux  grands  poémés  attribués  à 
Homère  {V.  Iliade).  Cest  le  récit,  en  24  chants,  des  aven- 
tares  d'Ulysse  (en  grec  OdyssetAs)  après  la  ruine  de  Troie. 
Tous  les  chefs  grecs  étaient  rentrés  dans  leurs  États; 
01ysse,en  butte  à  la  colère  de  Neptune,  emdt  depuis 
iO  ans  sur  les  mers,  sans  pouvoir  atteindre  son  royaume 
d'Ithaque.  Cependant  d'injustes  ravisseurs  dissipaient  ses 
biens,  et,  affirmant  qu'il  était  mort,  voulaient  contraindre 
Pénélope,  sa  femme,  à  se  choisir  un  nouvel  époux  parmi 
eux.  Cest  à  ce  moment  que  commence  le  poème.  Sur 
l'avis  de  Uinerve,  Télémaque,  fils  d'Ulysse,  part  à  la  re- 
cherche de  son  père,  chez  les  princes  qui  avaient  pris 
part  au  siège  de  Troie  (ch.  2,  3,  4).  Pendant  ce  voya^ 
bij'SBe,  retenu  dans  l'Ile  de  Calypso,  obtient  d'en  partir, 
se  rembarque  sur  un  radeau  qu'il  construit  lui-même, 
et,  poursuivi  par  la  colère  de  Neptune,  essuie  une  tem- 
pête qui  le  Jette  sur  le  rivage  de  Skhérie ,  lie  des  Phéa- 
dens  (ch.  5, 6,  7, 8).  Ceux-ci  lui  donnent  un  navire  qui  le 
transporte  à  Ithaque  (ch.  13),  où  il  débarque  chez  le  vieil 
Eumée,  le  gardien  de  ses  troupeaux  (ch.  44).  Là  survient 
Télémaque,  de  retour  de  son  voyage;  Ulysse  se  fait  re- 
connaître de  lui,  et  ils  se  concertent  pour  chasser  les  pré- 
tendants (ch.  17, 18).  Ceux-ci  célèbrent  un  grand  festin 
dans  le  palais  d'Ulysse,  qui  vient  se  placer  à  la  porte 
comme  un  mendiant.  Un  des  convives  lui  Jette  un  esca- 
beau au  visage.  Pénélope  fait  appeler  le  mendiant,  qu'elle 
ne  reconnaît  pas,  et  qui  lui  dit  que  son  époux  est  encore 
virant  Le  lendemain,  les  prétendants  étant  réunis  dans 
la  salle  du  festin,  Pénélope,  inspirée  par  Minerve,  promet 
sa  main  à  celui  qui  pourra  tendre  l'arc  d'Ulysse.  Tous  y 
échouent.  Alors,  Télémaque  ordonne  de  présenter  l'arc  à 
son  père,  toujours  déguisé  en  mendiant.  Ulysse  tend  l'arc 
sans  effort,  montre  son  adresse  à  lancer  une  flèche,  puis, 
se  dépouillant  de  ses  haillons,  se  tourne  vers  les  pré- 
tendants, et  les  tue  l'un  après  l'autre  (ch.  21,  22). 
Alors  il  se  fait  reconnaître  à  Pénélope,  à  son  vieux  père 
Laôrte;  il  s'apprêtait  à  résister  aux  parents  des  préten- 
dants, accourus  pour  les  venger,  loi^ue  Minerve,  sous 
les  traits  de  Mentor,  intervient  et  rétablit  la  concorde.  — 
VOdyssée  ne  dure  que  40  jours,  car  l'action  du  poème 
ne  remplit  que  les  derniers  chants;  les  autres  se  com- 
posent d'épisodes  où  le  poète  a  fait  entrer  le  récit  des 
aventures  du  héros  depuis  le  départ  de  Troie.  C'est  Ulysse 
lui-même  qui  fait  ce  récit  aux  Phéaciens,  lorsqu'il  est 
jeté  dans  leur  lie,  où  il  fut  accueilli  par  Nausicaa  ou  Nau- 
sicaé,  fille  du  roi  AlcinoOs  (ch.  6)  :  il  leur  raconte  son 
aventure  dangereuse  chez  lesCyclopes  (ch.  0),  son  arrivée 
chez  les  Lestrygons  anthropophages  et  chez  la  magicienne 
Circé  (ch.  10) ,  son  voyage  dans  les  pays  ténébreux  où  il 
va  consulter  les  morts  (ch.  11),  le  chant  des  Sirènes,  le 
naufiraçe  entre  Charybde  et  Scylla  (ch.  12),  etc. 

Le  heu  où  VOdyssée  fut  composée  n'est  indiqué  d'une 
manièie  certaine  par  aucun  témoignage  de  l'antiquité  ; 
on  ne  peut  le  connaître  que  d'après  le  poème  lui-même. 
La  langue  employée  i>ar  le  poète  est  un  idiome  mêlé,  in- 
diquant une  population  voyageuse  et  commerçante,  en 
contaa  avec  les difiTérentes  tribus  helléniques;  cependant 
la  prédominance  évidente  des  formes  ioniennes  nous  porte 
à  penser  que  VOdyssée  est  une  épopée  des  Ioniens,  race 
éminemment  mobile,  et  qui,  fixée  principalement  sur 
les  côtes  d'Asie,  couvrait  de  ses  marins  la  Méditerranée. 
La  nature  des  événements  racontés  dans  le  poème  s'ac- 
corde avec  cette  opinion,  puisque  VOdyssée  pourrait  être 
définie  l'épopée  de  la  mer.  Lorsque  l'on  compare  à  ces 
deux  points  de  vue  VOdyssée  avec  VHiade,  où  sont  prin- 
cipalement retracés  les  faits  de  la  guerre  de  Troie,  et  où 
le  dialecte  éollen  domine  constamment,  on  est  conduit  à 
admettre  que  les  deux  ouvrages  sont  de  deux  pays  et 
de  deux  époques  difiérentes.  Cette  opinion  se  confirme 
quand  on  étudie,  dans  l'un  et  dans  l'autre,  Tétat  des 
esprits,  les  croyances  religieuses,  les  idées  métaphy- 
siques, les  institutions  sociales  et  les  mœurs,  toutes 
choses  qui  marquent  dans  VOdyssée  une  civilisation  qui 
t  marché  pendant  un  ou  deux  siècles  peut-être. 

Le  sujet  de  VOdyssée  parait  n'être  qu'on  fragment  d'un 
poème  immense,  car  le  23*  chant  annonce  une  suite  de 
-longue  haleine.  Ce  poème  a-t-il  existé?  Non  sans  doute, 
au  moins  avec  une  unité  poétique  comparable  à  celle 
de  VOdyssée  ou  de  Vlliade  ;  mais  la  période  des  aèdes 
"ayant  duré  plasieura  siècles,  et  ces  chantres  prenant  leurs 
sujets  dans  ce  cycle  troyen,  il  est  très-vraisemblable  que 


ce  cycle  tout  entier  avait  été  chanté  dans  ces  fragmen* 
séparés,  «t  qu'une  main  a  manqué  pour  en  constituer  le 
récit  dans  son  ensemble.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  n'est  guère 
douteux  aujourd'hui  que  VOdyssée  n'ait  été  compoc^  de 
cette  manière,  à  une  époque  où  l'écriture  n'existait  pas 
encore,  et  où  la  mémoire  d'un  seul  homme  i)ouvait  dififi- 
cilement  retenir  tout  un  grand  poème.  Quelle  fut  l'œuvre 
de  l'Homère  qui  composa  Tépopée  d'Ulysse  ?  On  peut 
croire  qu'elle  consista  principalement  à  rassembler  les 
fragments  épars  du  cycle  héroïque,  reUtifs  au  retour  de 
ce  héros  dans  son  lie.  Nous  ferons  observer  à  ce  sujet 
que  l'unité  des  épopées  antiques  n'a  rien  de  rigoureux; 
que  VOdyssée,  telle  que  nous  la  possédons,  c-à-d.  re- 
maniée et  épurée  à  diverses  reprises  par  les  Anciens , 
oflTre  encore  un  tissu  si  élastique,  qu'elle  pourrait  rece- 
voir un  grand  nombre  d'épisodes  sans  paraître  rien  perdre 
de  son  ensemble,  de  même  qu'on  en  pourrait  retrancher 
beaucoup  de  récits,  sans  nuire  à  la  clarté  ou  à  la  marche 
du  poème.  Homère  est- 11  l'auteur  de  ces  épisodes, 
par  exemple,  de  celui  de  Nausicaé,  de  l'évocation  des 
morts,  etc.?  Ou  bien  y  a-t-il  eu  une  Odyssée  primitive 
plus  courte  que  la  nôtre,  et  (jui  aurait  été  le  cadre  pr^ 
mier  dans  lequel  des  récits  vanés  sont  venus  tour  à  tour  se 
ranger?  Cette  question  a  été  résolue  par  l'école  allemande 
de  Wolf,  de  manière  à  ôter  à  Homère,  pièce  à  pièce, 
VOdyssée  tout  entière,  et  à  présenter  ce  poème  comme 
l'œuvre  commune  d'une  génération.  D'autres  critiques  et 
presque  toute  l'antiquité  ont  adopté  une  solution  entière- 
ment opposée.  Nous  pensons  aue  la  vérité  est  entre  ces 
deux  excès.  Qu'un  premier  aèoe  ^'alt  pas  composé  une 
Odyssée ,  c'est  ce  que  prouvent  les  exemples  xités  par 
VOdyssée  même,  où  paraissent  plusieurs  aèdes  donnant 
des  preuves  de  ce  qu'ils  savaient  faire.  Que,  d'autre  part, 
apré»  l'époque  où  l'on  place  généralement  la  composi- 
tion de  VOdyssée,  il  y  ait  eu  de  nouveaux  chants  épiques 
sur  des  sujets  analogues  et  pouvant  la  grossir,  c'est  ce 
que  prouve  l'état  actuel  de  cette  épopée,  où,  de  l'aveu  de 
tous  les  critiques,  il  y  a  plusieurs  interpolations  :  tel  est 
le  24«  chant  et  la  moitié  du  23«;  tel  est  le  11«,  où  est 
renfermée  l'évocation  des  morts  ;  tel  est  peut-être  l'épi- 
sode des  Phéaciens  tout  entier.  Les  Homérides  (F.  ce 
mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'His» 
toire)  ne  se  faisaient  donc  point  scrupule  de  ranger 
leurs  propres  poésies  sous  le  nom  du  maître.  Ces  résul- 
tats de  la  critique,  généralement  admis  il  v  a  trente 
ans,  ont  été  fortement  confirmés  par  U  connaissance  des  • 
épopées  indiennes,  composées  dans  des  conditions  ana- 
logues à  celles  des  Grecs,  et  dont  l'histoire  générale  est 
aujourd'hui  bien  éclaircie  (V.  Mahabhabata).  Lorsque 
Selon  recueillit  VOdyssée  avec  Vlliade,  il  ne  fit  vraisem- 
blablement qu'éditer  par  écrit  ces  épopées  qui  n'exis- 
taient encore  que  dans  la  mémoire  des  rapsodes  de 
rionie  et  du  peuple.  Les  diascévastes  de  Pisistrate  com- 
plétèrent l'œuvre  de  Selon.  Des  éditions  diverses  es 
furent  faites  dans  la  suite,  et  lorsqu'elles  vinrent  entre 
les  mains  des  savants  d'Alexandrie,  VOdyssée  et  Vlliadt 
étaient  encore  surchargées  d'interpolations  que  ces  der» 
niera  s'appliquèrent  à  faire  disparaître,  au  2*  siècle  avant 
notre  ère.  Leur  édition,  revue  et  modifiée  dans  quelques 
détails,  constitua  une  Vulgate,  arrêtée  au  y*  siècle  après 
J.-C,  et  qui  n'est  autre  que  VOdyssée  classique  de  nos 
jours. 

C'est  dans  Homère  que  Ton  doit  chercher  la  vraie 
figure  d'Ulysse;  et  ici  elle  est  d'autant  plus  vraie,  que, 
tout  en  conservant  la  dignité  de  son  caractère,  le  fils  de 
Laèrte  n'en  est  pas  moins  accessible  aux  sentiments  de 
la  nature  et  siget  à  ses  faiblesses.  —  Après  Ulysse,  la 
plus  grande  figure  de  VOdyssée  est  celle  de  Pénélope  :  en 
elle  se  personnifie  l'épouse  et  la  mère,  telle  que  les  Hel- 
lènes de  ces  temps  se  la  figuraient.  Fidélité  ooi^uçale, 
amour  constant  et  prudent,  modestie,  pudeur,  vie  retirée, 
soumission  à  la  volonté  de  son  fils,  devenu,  en  l'absence 
de  son  père,  le  maître  de  la  maison,  telles  sont  les  grandes 
qualités  qui  ont  fait  de  Pénélope  un  type  encore  vivant 
aujourd'hui.  Télémaque,  Nausicaé  et  les  antres  person- 
nages secondaires  de  VOdyssée,  composent  une  sorte  de 
galerie  de  portraits,  pleins  de  variété  et  de  vie. 

VOdyssée  repoie-trelle  sur  un  fond  réel  et  historique? 
Quelle  que  aoit  la  part  du  poète  et  du  merveilleux  tradi- 
tionnel dans  les  épopées  antiques,  on  ne  saurait  raison- 
nablement contester  que  les  Grecs  aient  fait  une  grande 
et  longue  expédition  sur  les  rivages  de  l'Asie,  ni  pré- 
tendre que  la  parfaite  coïncidence  des  récits  de  VHtade 
avec  l'aspect  des  lieux  tel  qu'il  peut  être  constate  aulour* 
d'hui  même  no  soit  qu'un  effet  du  hasard.  Mais  il  est 
plus  difficile  de  prouver  qu'un  guerrier  nommé  Ulysse  aiâ 


CEUV 


1332 


OFF 


eu  rôellemeot  même  une  seule  des  aventures  racontéer. 
dans  VOdyssée.  Toutefois,  qu'il  y  ait  eu  jadis  un  établis- 
sement princier,  une  yieille  cité  héroïque  dans  Tile 
dltba^ue,  c'est  ce  que  prouvent  d'une  manière  évidente 
les  ruines  encore  existantes,  et  dont  ni  le  caractère,  ni 
Tépoque,  ni  Torigine  ne  sauraient  être  méconnues.  On  doit 
observer  en  outre  que  Thistoire  d'Ulysse  s'est  toujours 
présentée  aux  yeux  des  anciens  Grecs  comme  une  tradi- 
tion^ et  non  comme  une  pure  invention  poétique;  or,  une 
tradition  repose  toi^ours  sur  un  fondement  réel  ;  elle  est 
d'autant  moins  transformée  qu'elle  est  plus  voisine  de  sa 
source.  Ou  peut  donc  admettre  qu'un  ensemble  de  faits 
réels  a  donné  lieu  primitivement  à  la  légende  d'Ulysse, 
comme  à  celles  des  autres  héros  troyens. 

F.  VOdyssée,  de  Nitzsch,  dans  la  Bibliotheca  grœca  de 
Jacobs  et  Rost;  HistoriaHomeri,  de  Nitzsch,  Gotha,  in-4'*; 
Histoire  de  la  littérature  grecque,  de  Schœll,  Paris,  2  vol., 
1813;  Ulysse-Homére,  de  Constantin  Koliades  (Lecheva- 
lier),  Paris,  1829;  Schreiber,  Ithaca,  Leipzig,  1829;  Gan- 
dar.  De  Ulyssis  Ithaca,  Paris,  1854;  Dugas-Montbel  a 
donné  une  traduction  estimable,  en  prose,  de  VOdyssée, 
Paris,  nouv.  édit.,  1861,  in-12.  Em.  B. 

OECUMÉNIQUE.  F.  Concile,  {  dans  notre  Diction,  de 

OECUS.  F.  Maison  romaine,  (      Biogr.  et  d'Histoire. 

OEIL,  terme  de  Typographie.  F.  Caractères  d'iupri- 

HERIB. 

OEIL,  en  d'Architecture,  ouverture  ronde  ou  ovale,  pra- 
tiquée dans  un  comble,  un  dôme,  un  attique,  un  entre- 
GOionnement,  un  dessus  de  porte,  un  tympan  de  fronton , 
ou  dans  les  reins  d'une  voûte.  Les  Anciens  n'ont  employé 
les  baies  de  ce  genre  qu'avec  discernement  et  bon  goût; 
un  certain  noaàbre  de  leurs  édifices  recevaient  le  Jour 
par  des  œils  placés  à  leur  sommet,  comme  on  le  voit  en- 
core au  Panthéon  de  Rome,  et  les  Modernes  les  ont  sou- 
vent imités  en  ce  point.  On  peut  citer,  par  exemple,  la 
Halle  aux  blés  de  Paris,  U  grande  salle  du  palais  du 
Corps  législatif,  beaucoup  de  chapelles,  etc.  A  l'époque 
de  la  Renaissance,  on  prodigua  les  œils  dans  les  attiques 
et  même  dans  les  parties  inférieures  des  façades,  comme 
motifs  à  ornements,  et  on  en  fit  un  plus  grand  abus  en- 
core au  xvin*  siècle.  On  appelle  œû-de^on^  ordinaire- 
ment ce  genre  de  fenêtre,  très-souvent  ovale.  —  L'œil 
placé  au  centre  des  dômes,  et  qui  a  quelquefois  de 
mndes  dimensions,  est  recouvert  le  plus  souvent  d'une 
.  lanterne.  Des  œils  sont  pratiqués  au-dessus  des  piles  de 
certains  ponts  (par  exemple,  aux  ponts  Fabricius  et 
Gestius  à  Rome,  à  celui  de  Bordeaux,  au  Pont- Neuf 
de  Toulouse),  pour  faciliter  l'écoulement  des  eaux  pen- 
dant les  gnindes  crues.  On  donne  aussi  le  nom  d'œi/s 
aux  petites  lucarnes  d'un  dôme,  comme  on  en  voit  à 
l'Institut,  à  la  Sorbonne,  aux  Invalides,  au  Val-de-Gr&ce, 
ou  encore  au  dôme  de  S^Pierre  de  Rome,  qui  en  compte 
48  disposées  en  3  étages.  —  On  appelle  ceu  de  volute  le 
petit  cercle  décrit  au  milieu  de  la  volute  du  chapiteau 
ionique,  servant  à  déterminer  les  centres  par  le  moyen 
desquels  on  trace  ses  circonvolutions.  L'œtf  de  tailloir 
est  la  petite  rose  sculptée  sur  chaque  côté  de  l'abaque.  B. 

OBIL-DE-BOEUF.  F.  Œil. 

OEUFS  DE  PAQUES.  F.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

OEUVRE,  terme  d'Architecture ,  se  prend,  dans  cer- 
taines expressions,  pour  construction,  bâtiment.  Ainsi, 
mettre  en  ceuvre,  c'est  employer  une  matière  quelconque, 
lui  donner  la  forme  et  U  place  qu'elle  doit  avoir.  Les 
mots  dans  oeuvre  et  hors  csuiore  s'appliquent  aux  me- 
sures prises  de  l'intérieur  ou  de  l'extérieur  d'un  édifice. 
Reprendre  en  sous-^swvre,  c'est  bâtir,  sous  la  partie  su- 
périeure d'une  construction,  une  construction  nouvelle, 
opération  qui  se  fait  au  moyen  de  forts  étais  placés  de 
manière  à  supporter  la  construction  supérieure  sans 
qu'elle  éprouve  ni  tassement  ni  dérangement.  Amener 
des  matériaux  d  pied  Sœuvre,  c'est  les  placer  à  proximité 
du  b&timent  que  l'on  construit.  Au  moyen  ftge,  un  maître 
de  Vceuvre  était  un  architecte,  et  il  y  avait  toujours,  à 
côté  des  grands  édifices  religieux,  une  maison  de  tcBuvre, 
où  logeaient  l'architecte  et  Tes  maîtres  ouvriers,  chargés, 
de  père  en  fils,  de  la  continuation  des  travaux.  Par  suite, 
œuvre  a  signifié  la  fabrique  d'une  église,  le  revenu  affecté 
à  l'entretien  des  bâtiments  et  aux  nrais  du  service  divin. 

OEUVRE,  en  termes  de  Joaillerie,  chaton  sur  lequel  une 
pierre  est  ench&ssée. 

OBOVRB,  au  masculin,  se  dit  des  ouvrages  d'un  compo- 
siteur de  musique  :  le  premier^  le  second  OBUvre,  etc.  n 
signifie  aussi  le  recueil  des  estampes  d'un  graveur. 

OEUVRE  (Banc  d*).  F.  Banc  d'oeuvre. 

OBi'VRE  (Chef  d').  F.  Chef-d'geuvre. 


OEUVRE  (Hors  d').  F.  Hors  d'oeuvre. 

OEUVRE  (Main  d*).  F.  Main  d'oeuvre. 

OEUVRES,  terme  de  Marine.  On  nomme  fBuvres  vvœSf 
toute  la  partie  de  la  carène  d'un  bâtiment  qui  est  su^ 
mergée  ;  oduvtes  mortes,  celle  qui  est  hora  de  l'eau  ;  grossn 
osuvres,  les  cabestans,  les  roues  de  gouvernail,  etc.; 
OBuvres  de  marée,  le  travail  de  radoub  ou  de  carénage 
auquel  on  se  livre  quand  la  mer  est  basse. 

OEUVRES  ET  LES  JOURS  (Les),  titre  d'un  anUqao 
poëme  grec,  unanimement  reconnu  comme  l'œuvre  d'Hé- 
siode. Il  se  compose  de  826  vers,  partagés  en  quatre  par- 
ties, qui  n'ont  presque  pas  de  lien  entre  elles  et  ont  été 
ranj^  dans  un  ordre  arbitraire  dès  les  temps  les  plus 
anciens.  Après  une  courte  invocation,  dont  rauthenticité 
est  douteuse,  et  sans  doute  ajoutée  par  quelque  rapsode 
en  l'honneur  d'un  dieu  dans  la  fête  duquel  il  devait 
chanter,  le  poète  trace  le  parallèle  des  deux  Discordes 
l'une  est  la  Jalousie,  ({ui  soufifle  partout  la  guerre,  et 
l'autre  VÉmulation,  qui  excite  l'homme  indolent  au  tra- 
vail. Il  remonte  ensuite  à  l'origine  du  mal  sur  la  terre , 
et  l'explique  d'une  façon  dramatique  par  les  fables  de 
Prométhée  et  de  Pandore.  Comme  développement  à  ces 
mythes,  il  trace  le  tableau  de  la  dégradation  successive 
de  la  race  humaine  :  ce  qu'il  dit  de  VAge  d*or,  de  Yàge 
d'argent  et  de  VAge  d'airain  est  conforme  aux  descrip- 
tions des  autres  poètes;  mais  il  imagine  un  Age  fiéroique, 
dans  lequel  Jupiter,  essayant  de  régénérer  le  monde, 
crée  les  néros  ou  demi-dieux,  qui  ont  péri  devant  Thèbes 
ou  sous  les  mura  de  Troie.  Cette  sève  nouvelle  fut  bien- 
tôt épuisée,  et  l'on  est  arrivé  dans  VAge  de  fer,  dans 
lequel  Hésiode  se  plaint  d'avoir  reçu  la  vie.  Quoique  ce 
tableau  des  diverses  générations  de  l'humanité  ne  soit 
qu'une  ébauche  poétique,  on  ne  peut  v  méconnaître  une 
tentative  hardie,  inspirée  par  le  génie  de  l'histoire,  et 
qui  en  présage  déjà  le  développement  chez  les  Grecs.  — 
La  corruption  de  l'Age  de  fer  amène,  de  la  part  d'Hésiode, 
une  série  de  conseils  ou  de  reproches ,  qui  semblent 
inspirés  quelquefois  par  les  circonstances  de  sa  vie.  Le 
souvenir  d'un  procès  dans  lequel  son  frère  Perses  l'a 
emporté  sur  lui  contre  toute  justice ,  lui  dicte  ses  pré- 
ceptes sur  les  devoira  des  juges,  et  c'est  peut-être  aussi 
le  ressentiment  qu'il  en  a  conservé  qui  lui  suggère  la 
fable  de  l'Épervier  et  du  Rossignol.  En  général,  on  sent 
partout  dans  le  poème  les  impressions  personnelles  qui 
se  mêlent  aux  p];^eptes  généraux.  —  Dana  une  3*  partie, 
Hésiode  donne  une  sorte  de  manuel  des  travaux  des 
champs,  et  descend  aux  plus  minutieux  détails  de  l'agri- 
culture. Il  y  a  un  charme  infini  dans  ces  tid>leaux  qui 
répondent  au  titre  du  poème,  dans  la  peinture  de  ce  que 
Fénelon  a  si  bien  appelé  l'aimable  simplicité  du  monde 
naissant  La  vie  de  famille  de  ces  temps  reculés  nous  est 
décrite  dans  ses  secrets  les  plus  intimes;  les  préceptes 
sur  le  mariage  et  sur  toutes  les  convenances  domestiques 
semblent  être  le  fruit  d'une  expérience  consommée.  — 
La  dernière  partie  de  l'ouvrage  d'Hésiode  est  une  sorte 
de  calendrier  rustique,  un  almanach  des  supentitioDs 
champêtres.  B. 

OFFENSE ,  mot  employé  dans  le  langage  vulgure 
comme  synonyme  ^injure  et  &outrage  (F.  ces  mots}^  et 
qui  s'applique  en  un  sens  spécial  à  l'injure  publique 
enven  la  personne  de  l'Empereur.  Cette  injure  est  punie 
d'un  emprisonifement  de  6  mois  à  5  ans,  et  d'une  amende 
de  500  fr.  à  10,000  fr.  ;  le  coupable  peut  en  outre  être 
interdit  de  certains  droits  civiques,  civils  et  de  famille, 
pendant  un  temps  égal  à  celui  de  l'emprisonnement  au- 
quel il  a  été  condamné.  L'injure  envera  un  membre  de 
la  famille  impériale  est  punie  d'un  emprisonnement  d'an 
mois  à  5  ans,  et  d'une  amende  de  100  fr.  à  5,000  fr. 

OFFERTOIRE,  partie  de  la  Messe.  F.  notre  l>ic(ioi»- 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

oppERTOiRB ,  nom  qu'on  donnait  autrefois  au  linge  ou 
autre  morceau  d'étofié  dans  lequel  les  diacres  reoevaicat 
les  off^randes  des  fidèles. 

OFFICE  (du  latin  offlcium),  terme  qui  implique  l'idée 
de  service  à  rendre,  et  qui  est  synonsnme  de  devoir  (F.  ce 
mot).  C'est  en  ce  sens  que  l'on  doit  entendre  le  Traité 
des  Offices  de  Cicéron. 

opncE ,  charge  ou  fonction.  F.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

opncE,  terme  de  Palais.  Un  juge  d'office  est  celui  qai 
informe  sans  en  être  requis  et  par  le  seul  devoir  de  sa 
charge.  Uavocat  d'office  est  celui  qu'une  Cour  ou  un  tri- 
bunal désigne  pour  la  défense  d'un  accusé  qui  n'a  pas 
fait  choix  d'un  défenseur.  Autrefois  on  appelait  procu', 
reur  d'office  le  magistrat  qui  remplissait  les  fonctions  du 
ministère  public 


OFF 


1333 


OGI 


omcB ,  mot  par  lequel  on  désigne ,  dans  les  palais  et 
!es  grands  hôtels,  Tensemble  des  pièces  qui  forment  le 
département  de  la  bouche^  telles  que  les  cuisines,  le 
^arde-manger,  les  salles  du  commun.  Chez  les  particu- 
liers, Tofficc  est  une  pièce  voisine  de  la  salle  à  manger 
et  où  Ton  renferme  tout  ce  qui  dépend  du  service  de 
la  table. 

OFncE ,  en  termes  de  Droit  canonique,  bénéfice  sans 
Juridiction.  Il  était  dit  claustral ,  sMl  était  donné  à  un 
religieux  pour  avoir  soin  de  rinârmerie,  de  la  sacristie , 
do  la  panneterie,  du  cellier,  des  aumônes,  etc. 

OFFicB  DIVIN,  nom  qu*on  donne  aux  prières  publiques 
de  rÊglise,  à  celles  que  les  fidèles  font  en  commun.  Le 
mode  de  célébration  est  déterminé  par  la  Liturgie  (V.  ce 
tnot).  La  distribution  de  TOffice  en  Heures  a  été  partout 
à  peu  près  la  môme.  Selon  le  degré  de  solennité  du  di> 
manche,  de  la  fête,  du  mystère  ou  du  saint,  les  Offices  se 
distinguent  en  solennels  nwjeurSf  solennels  mineurs, 
doubles,  semi-doubles,  et  simples.  Il  y  a  des  Offices  pro- 
pres à  une  fête  on  à  un  saint,  et  des  Offices  communs  à 
plusieurs. 

OFncB  (Saint-).  F.  iNQoisrnoN  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

OFFICES  EN  FRANCE  (Vénalité  des).  Jusqu'à  Louis  XII, 
tous  les  emplois  avaient  été  accordés  gratuitement  et  à 
vie;  dans  un  moment  de  détresse,  en  1512,  ce  prince  les 
fit  vendre  :  mais  son  projet  était  de  les  racheter  plus  tard. 
François  I**  trafiqua  de  tous  les  emplois,  et  cet  abus  ne 
fit  qu'augmenter  sous  ses  successeurs.  Bientôt  les  em- 
plois de  finances  furent  confiés  à  deux  et  même  trois 
agents ,  dits  :  V ordinaire,  Valtematif,  et  le  triennal.  Ils 
étaient  tour  à  tour  en  charge,  et,  sous  Henri  II,  tous  trois 
payés  à  la  fois  ;  ainsi,  le  trésorier  de  l'épargne  en  fonc- 
tions recevait  20,000  livres  par  an  ;  et  son  substitut  en 
expectative,  Valternatif,  10,000  livres.  En  1574,  le^ gou- 
vernement déclara,  pour  la  deuxième  fois,  que  tous  les 
officiers  publics  qui  auraient  payé  le  tiers  de  la  valeur  de 
leurs  charges  (dont  le  prix  total  avait  déjà  été  acquitté) 
auraient  droit  de  désigner  leur  successeur.  Sur  la  récla- 
mation de  rassemblée  des  notables  de  1596,  se  plaignant 
vivement  du  désordre  causé  par  l'hérédité  des  charges , 
Henri  IV  ordonna,  le  30  Juin  1598,  que  toutes  les  survi- 
vances seraient  révoquées  successivement.  Mais  en  1604, 
Sully  fit  rendre  un  édit,  dont  il  borna  la  durée  à  9  ans , 
et  en  vertu  duquel  les  titulaires  des  offices  pourraient  les 
assurer  à  leurs  veuves  ou  héritiers  en  payant  un  droit 
annuel  du  60*  denier  de  la  finance  à  laquelle  ces  offices 
avaient  été  évalués.  Comme  il  est  impossible  de  borner 
un  abus,  celui-ci  traversa  tout  le  règne  de  Louis  XIII,  et 
il  florissait  encore  si  bien  à  l'époque  de  la  minorité  de 
Louis  XIV,  que  le  surintendant  Émery  ayant  manifesté' 
l'intention  de  l'abolir,  comme  il  en  avait  le  droit,  puisque 
sa  durée  légale  était  expirée  depuis  longtemps,  les  récla- 
mations violentes  des  officiers  publics  auprès  de  la  ré- 
gente Anne  d'Autriche  le  firent  renvoyer.  Bien  longtemps 
encore  après,  sous  la  Régence,  Law  ayant  fait  rendre  un 
édit  pour  rembourser  la  valeur  de  toutes  les  charges  de 
présidents  et  de  conseillers  des  parlements,  il  y  eut  une 
telle  explosion  de  mécontentement,  que  le  fameux  finan- 
cier vit  ses  jours  menacés.  De  tels  abus,  et  bien  d'autres 
eocore^  sont  de  nature  à  excuser  les  plus  violentes  tem- 
pêtes de  la  Révolution  ;  seules  elles  ont  pu  préparer  la 
régénération  sociale  et  administrative  dont  la  France  avait 
tant  besoin  :  la  force  des  rois  et  celle  des  ministres  y 
eassent  été  toujours  impuissantes.  C.  D — y. 

OFFICIAUTÉ.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire. 

OFFICIANT,  prêtre  qui  préside  à  une  cérémonie  reli- 
gieuse. Il  ne  faut  pas  le  confondre  avec  le  célébrant,  qui 
dit  la  messe  :  tout  célébrant  officie,  mais  tout  officiant 
ne  célèbre  pas.  —  Dans  les  couvents  de  femmes,  on  nomme 
1)/?tctante  la  religieuse  qvd  est  de  semaine  au  chœur. 

OFFICIEL,  se  dit  de  tout  ce  c[ui  est  déclaré  expressé- 
ment par  une  autorité  reconnue,  de  tout  ce  qui  émane 
d'un  souverain  ou  du  chef  d'une  administration  publique. 

OFFICIER ,  celui  qui  possède  un  office,  une  charge,  ou 
exerce  une  fonction.  On  distingue  les  Officiers  civils  et 
les  Officiers  militaires.  Font  partie  des  officiers  civils  : 
1"  les  officiers  de  VéUU  civil;  ce  sont  les  maires  et  les 
adjoints  ;  2o  les  officiers  municipaux,  c-à-d.  les  mem- 
bres des  municipalités;  ^^  les  officiers  de  police  judi- 
ciaire, comprenant  les  Juges  d'instruction,  les  Juges  de 
paix,  les  procureurs  impériaux  et  leurs  substituts,  les 
maires  et  les  adjoints,  les  officiers  de  gendarmerie ,  les 
commissaires  de  police,  les  gardes  champêtres,  les  gardes 
forestiers,  etc.;  4*  les  officiers  ministériels,  notaires, 


avoués,  greffiers,  huissiers,  commissaires-priseurs,  agents 
de  change,  courtiers.  —  Dans  l'Administration  militaire, 
on  donne  le  nom  générique  d'Officiers  aux  militaires  qui 
sont  commissionnés  par  le  souverain,  depuis  le  grade  de 
sous-lieutenant  Jusqu'à  celui  de  maréchal  de  France,  et 
celui  de  sous^fflders  aux  militaires  qui  tiennent  leur 
titre  du  chef  de  corps.  Les  premiers  se  divisent  en  offi- 
ciers généraux  (général  de  division ,  général  de  brigade), 
officiers  supérieurs  (colonel,  lieutenant-colonel ,  chef  ae 
bataillon  ou  d'escadron,  major),  et  officiers  proprement 
dits  (capitaine,  lieutenant,  sous-lieutenant).  Les  seconds 
comprennent  les  adjudants-sous-officiers,  les  sergents- 
majors,  les  sergents,  les  maréchaux  des  logis,  les  four- 
riers, les  tambours -majors  et  les  trompettes -mt^ors. 
Dans  la  Marine,  on  nomme  officiers  mariniers  les  maî- 
tres, les  contre-mattres  et  les  quartiers-maîtres  ;  officiers 
de  port ,  les  capitaines  et  les  lieutenants  qui  font  la  po- 
lice des  ports  et  des  rades.  Sous  le  nom  d'Officiers  d'adr 
ministration  on  comprend  les  membres  de  l'Intendance 
militaire,  du  commissariat  de  marine,  de  Tadministration 
des  subsistances  militaires. 

ornciER  DE  roHTUNE,  nom  que  l'on  donnait  avant  1789, 
quand  les  gentilshommes  avaient  seuls  les  emplois  d'offi- 
ciers, à  un  petit  nombre  de  sous-officiers  sans  naissance 
qu'on  élevait  Jusqu'au  grade  de  capitaine. 
^  OFFICIER  DE  PAIX ,  nom  de  certains  employés  de  la  po- 
lice parisienne  subordonnés  aux  commissaires.  Leur  sur- 
veillance s'étend  sur  toutes  les  branches  de  la  police 
administrative,  mais  ils  ne  sont  pas  officiers  de  police 
Judiciaire.  Leurs  procès -verbaux  ne  valent  que  comme 
rapport,  et  ne  font  pas  foi  Jusqu'à  inscription  de  faux. 

opnciER  DB  SANTE,  nom  que  l'on  donne,  dans  l'Armée, 
aux  médecins,  chirurgiens  et  pharmaciens  (  V.  Médecins 
MiuTAiREs).  Au  civil,  ce  sont  ceux  qui  peuvent,  après 
avoir  rempli  certaines  conditions  d'étude,  exercer  la  mé- 
decine et  la  chirurgie,  quoique  n'étant  pas  pourvus  du 
diplôme  de  docteur:  l'exercice  de  leur  ministère  est 
limité  au  département  où  lis  ont  reçu  leur  grade  univer- 
sitaire ;  il  est  certaines  opérations  qu'ils  ne  peuvent  pra- 
tiquer hors  la  présence  d'un  docteur  en  médecine  ou  en 
chirurgie. 

opnciER  d'ordonnance.  V.  Ordonnance. 

OFFRANDE  (du  latin  '  offerenda),  présent  offert  à  la 
Divinité.  L'usage  des  offrandes  est  aussi  ancien  que  la 
relision;  elles  ont  consisté,  chez  la  plupart  des  peuples, 
en  fruits  de  la  terre,  pain,  vin,  huile,  sel,  etc.  Dans 
l'Église  chrétienne,  la  partie  de  l'office  divin  qui  porte  le 
nom  d'Offrande  ou  Offertoire  a  été  consacrée  pour  rece- 
voir les  dons.  L'o&^a^ton  (  V.  ce  mot  ),  qui  est  un  sacri- 
fice et  se  fait  à  Dieu  seul,  ne  doit  pas  être  confondue 
avec  l'offrande,  qui  n'est  point  un  sacrifice,  et  qui  se  fait 
aux  saints,  aux  ministres  du  culte,  aussi  bien  qu'à  Dieu. 
Les  prêtres  ont  primitivement  vécu  des  offrandes.  C'est 
à  l'Offrande  qu'on  présente  le  pain  bénit  {V.  ce  mot). 

OFFRE  et  demande,  mots  par  lesquels  on  désigne 
le  rapport  qui  existe  sur  le  marché  entre  les  marchan- 
dises offertes,  c-à-d.  celles  que  les  producteurs  ofl^nt 
de  vendre,  et  la  demande  de  ces  marchandises,  c-à-d. 
celles  que  les  consommateurs  d^irent  acheter.  L'offre  et 
la  demande  exercent  une  action  déterminante  sur  le  prix 
des  produits,  la  demande  étant  l'expression  de  l'utilité 
qu'v  attache  l'acheteur,  l'offre  celle  de  l'utilité  qu'y  at- 
tache le  vendeur  ou  de  l'abondance  des  produits  sur  le 
marché.  Par  suite,  la  valeur  est  en  raison  directe  de  la 
demande  et  en  raison  inverse  de  l'offre,  c-à-d.  qu'un 
produit  se  vend  d'autant  plus  cher  qu'il  est  plus  demandé, 
d'autant  moins  cher  qu'il  est  plus  offert.  L'offre  est  la  loi 
du  travail  et  la  règle  du  salaire. 

OFFRE  RÉELLE,  en  termes  de  Pratique,  offre  faite  de 
la  somme  ou  de  la  chose  due  par  le  débiteur  à  son  créan- 
cier. Elle  met  le  créancier  en  demeure  de  recevoir,  et 
libère  le  débiteur  si  elle  est  suivie  de  consignation.  S'il 
s'agit  d'une  somme  d'argent,  l'offre  n'est  valable  que  si 
elle  comporte  la  totalité  de  la  dette.  Toute  offre  réelle 
doit  être  faite  par  ministère  d'huissier.  V.  le  Code  Napo- 
léon, art.  12i6-47,  1257-63,  et  le  Code  de  Procédure  ci- 
vile, art.  812-828. 

OGIF.R  LE  DANOIS ,  pofime  en  douze  chants  composé 
par  Raimbert  de  Paris,  et  qui  fait  partie  du  cycle  carlo- 
vingien.  Beaudouin,  fils  d'Oser,  est  tué  après  une  partie 
d'échecs  par  Chariot,  fils  de  l'empereur.  Ogier  jure  de 
tuer  lui-même  le  meurtrier.  Il  se  retire  chez  Didier,  roi 
des  Lombards;  trahi  par  ce  prince,  il  s'enferme  dans  le 
château  de  Castelfort  sur  le  Rhône,  où  11  soutient  un  siège 
de  sept  ans.  Enfin,  seul,  sans  nourriture,  il  s'échappe  de 
la  place,  et  traverse  le  camp  de  l'empereur;  mais  il  est 


061 


1334 


OGI 


fait  prisonnier  par  Turpin  pendant  son  sommeil.  Bientôt 
Charles,  attaqué  par  les  païens,  est  réduit  à  implorer 
l'aide  d'Ogier.  Celui-ci  exige  qu'on  lui  livre  d'abord  Cliar- 
lot.  Le  flis  de  l'empereur  est  sauvé  par  Tintervention  de 
S^  Ifichel,  au  moment  où  Ogier  va  lui  trancher  la  tète. 
Le  Danois  bat  tous  les  ennemis  de  Charles;  ensuite  il 
épouse  la  fille  d'Angart  (Edgard),  roi  d'Angleterre,  et 
reçoit  de  l'empereur  le  comté  de  Hainaut  et  le  duché  de 
Brabant.  Ogier  fut  enterré  dans  l'église  de  S^-Faron  à 
Meauz,  où  l'on  a  conservé  longtemps  une  grande  ^ée  et 
on  lourd  épieu  qui,  suivant  la  tradition,  auraient  été  les 
armes  d'Ogier.  La  chevalerie  Ogier  de  Danmarche ,  par 
Raimbert  de  Paris,  a  été  publiée  par  M.  J.  Barrois, 
Paris,  1812;  l'éditeur  pense  qu'il  faut  direOçier  d'Arden- 
marche  ou  de  l'Ardennois.  Les  Enfances  Ogier  en  ont  été 
tirées  par  Adenès.  K.  HisUnrs  littéraire  de  la  France , 
U  XXIL  H.  D. 

OGIVALE  (Architecture),  style  d'architecture  carac- 
térisé principalement  par  l'emploi  systématique  de  l'ogive 
{V,  eemot),  non-seulement  comme  procédé  de  construc- 
tion, mais  encore  comme  ornementation,  et  qui ,  succé- 
dant au  style  romano-byzantin,  fut  en  usage  depuis  la  fin 
du  xn*  siècle  Jusqu'au  milieu  du  xvi*.  Palladio  et  quel- 
ques autres  architectes  italiens  de  la  Renaissance  don- 
nèrent à  cette  architecture,  dont  ils  n'avaient  pas  l'intel- 
ligence complète  et  le  sentiment,  les  qualifications  de 
tidesque  et  de  gothique  :  ce  n'était  pas  qu'ils  l'attribuas- 
sent aux  Allemands  on  aux  Goths,  mais  les  deux  expres- 
sions étaient,  dans  leur  pensée,  synonymes  de  barbare , 
et  ils  regardaient  les  monuments  du  style  ogival  comme 
le  produit  de  la  barbarie  dans  les  arts.  Plus  tard,  le  mot 
gothique  fut  pris  à  la  lettre,  et  on  supposa,  par  erreur  ou 
Ûpnorance,  que  l'architecture  du  moven  &ge  venait  des 
Goths,  sans  songer  qu'un  peuple  qui  disparut  de  l'Italie 
au  VI*  siècle,  de  l'Espagne  et  de  la  Gaule  au  vin*,  ne  pou- 
vait avoir  exercé  d'influence  sur  une  forme  architecturale 
qui  a  pris  naissance  seulement  au  xii*.  Néanmoins,  les 
mots  architecture  gothique,  bien  que  parfaitement  im- 
propres, ont  reçu  de  l'usage  une  espèce  de  consécration. 
On  a  supposé  quelquefois  que,  les  Goths  ayant  été  habiles 
dans  l'architecture,  le  nom  de  gotfûque  avait  été  appliqué 
à  toute  belle  construction ,  et  qu'on  l'aurait  ainsi  donné 
aux  monuments  de  style  ogival.  Quelques  auteurs  ont 
distingué  le  vieux  gothique  et  le  gothique  mod^ne,  en- 
tendant par  le  premier  l'architecture  postérieure  à  l'inva- 
sion des  Barbares  et  plus  convenablement  appelée  archi- 
tecture de  style  latin  ou  roman,  et  par  le  second  l'archi- 
tecture ogiviâe  :  mais  ce  sont  là  des  qualifications  vagues 
et  qui  ne  précisent  rien  pour  l'esprit.  On  doit  également 
éviter  d'appeler  sarrasins  l'architecture  ogivale,  parce  que 
c'est  un  mot  qui  implique  l'origine  arabe  de  l'ogive,  la- 
quelle est  trè»-contrâtable. 

Les  monuments  du  style  gothique,  tant  ancien  que 
moderne,  ont  été  quel([uefois  clarâés  par  rapport  aux 
races  ou  aux  nations  q^ui  les  élevèrent.  A  ce  point  de  vue, 
on  a  distineué  le  gothique  du  Nord,  comprenant  le  bre^ 
ton  ou  anglais  t  le  flamand  et  le  normand;  le  gothique 
germam,  subdivisé  en  saxon,  ti*desque  et  lonAard;  le 
gothique  du  midi,  avec  des  espèces  fort  variées;  le  go- 
thique  asiatique,  où  l'on  distingue  le  s'^rien,  Varabe, 
le  sarrasin  et  le  moresque.  Outre  qu'elle  n'a  rien  de 
scientifique,  outre  au'elle  ne  repose  pas  sur  les  carac- 
tères intrinsèques  aes  monuments,  cette  classification 
confond  des  styles  trôs-divers.  —  Par  rapport  à  l'exécu- 
tion artistique  ^  on  a  imaginé  encore  les  divisions  sui- 
vantes :  le  gothique  à  trèfle,  qui  aurait  fleuri  du  ix*  au 
XI*  siècle;  le  gothique  rosé  et  fuselé,  dans  lequel  les  vi- 
traux sont  disposés  en  roses  ou  corolles  aplaties,  et  les 
piliers  composés  d'un  gros  fût  principal  et  de  nombreuses 
colonnettes  en  fuseaux  ;  le  gothique  ondulé  et  panaché, 
char^  de  galbes,  d'ondulations,  de  clefs  pendantes;  le 
gothique  flamboyant  et  le  gothique  fleuri,  développement 
ou  exagération  du  précédent.  C'est  là  encore  une  classifi- 
cation peu  précise,  et  qui  s'appuie  trop  souvent  sur  des 
détails  accessoires. 

L'architecture  ogivale  ne  resta  pas  stationnaire  :  elle 
subit  différentes  modifications,  formant  autant  de  carac- 
tères qui  servent  à  faire  reconnaître  les  monuments  et  à 
les  classer  chronologiG[uement.  La  première  période  de 
son  développement,  qui  embrasse  le  xii*  et  le  xni*  siècle, 
offre  le  style  ogival  primitif  ou  à  lancette  ;  la  deuxième, 
comprenant  le  xiv*  siècle,  le  style  ogival  secondaire  ou 
rayonnant;  la  troisième,  embrassant  le  xv*  siècle  et  la 
première  moitié  du  xvi*,  le  style  ogival  tertiaire  ou 
Hamboyant,  Ces  styles  se  distinguent  par  des  diflié- 
repces  dans  la  disposition  générale  de  Tédifice,  dans 


quel<raes  dispositions  partielles,  et  dans  l'ornementation» 
L  Style  d  lancette.  —  Le  plan  général  adopté  pour  l» 
construction  des  grandes  églises  de  style  romano-byzantin 
reçoit  seulement  nuelques  changements  dans  la  premit^re^ 
période  de  l'architecture  ogivale  :  le  chœur  et  les  nefs 
s'agrandissent;  les  collatéraux,  formant  déambulatoire, 
tournent  autour  du  sanctuaire;  les  chapelles  absidales, 
se  multipliant ,  atteipent  quelquefois  le  nombre  do 
quinze  (à  Tours),  et  si  l'on  trouve  d'autres  chapelles  sur 
les  flancs  des  nefo  mineures  (Reims,  Chartres,  Amiens}, 
on  peut  affirmer  qu'elles  ont  été  ajoutées  postérieurement 
au  xni*  siècle  ;  dans  quelques  cathédrales  (Paris,  Bourges), 
les  bas  côtés  ont  été  doublés,  disposition  qui  a  été  aussi 
pratiquée  quelquefois  plus  tard;  plusieurs  églises,  dé- 
pourvues d'absides  et  de  chapelles  absidales  (I^n,  Dol), 
se  terminent  par  une  muraille  plane,  percée  d'une  ou  de 
plusieurs  fenêtres  ogivales;  la  chapelle  de  la  S^-Vierge, 
au  fond  de  l'abside,  reçoit  parfois  de  très-grandes  dimen- 
sions (Coutances,  Le  Bfans,  Rouen).  —  Dans  la  construc« 
tion,  le  petit  appareil  régulier,  ou  à  losange,  ou  en  arêtes 
de  poisson,  a  disparu.  Le  moyen  appareil,  assez  rare,  ne 
peut  fournhr  d'indications  chronolc^ques.  On  se  sert  de 
pierres  de  gnmd  appareil,  communraient  plus  longue» 

Sue  hautes,  bien  posées  sur  d'épaisses  couches  de  mor- 
er.  —  Les  colonnes  se  groupent  autour  des  piliers  qui 
soutiennent  les  voûtes,  de  manière  que  les  trois  quarts 
de  leur  fût  restent  apparents  ;  il  en  est  (à  Laon,  à  Can- 
torbéry)  qui   sont  complètement  détachées  du  pilier 

?u'elle8  accompagnent,  et  quelquefois  garnies  d'annelet» 
V.  ce  mot).  Les  proportions  en  hauteur  et  en  diamètre 
varient  suivant  les  édifices,  et  aussi  selon  les  intention» 
particulières  de  chaque  architecte.  V.  Basb,  Chapitbad^ 
Abaqob.  —  L'ogive  règpne  à  peu  près  exclusivement  dans 
les  arcades.  Si  l'on  rencontre  encore  le  plein  cintre  ei> 
quelques  endroits,  c'est  par  exception,  et  il  apparaît  en- 
touré des  moulures  et  des  ornements  du  style  ogival.  — 
Les  entablements  présentent  des  dents  de  sicie,  comme- à 
la  fin  de  la  période  romano-byzantine,  et  aussi  des  feuil- 
lages à  crochets.  —  Des  galeries,  avec  ou  sans  balus- 
trades, sont  pratiquées  au-dessus  des  collatéraux  :  tantôt 
elles  en  ont  toute  la  largeur ,  tantôt  ce  ne  sont  que  de 
simples  couloirs  de  passage  (7.  Galerie  ).  —  Les  fenêtres 
sont  très-allongées,  assez  étroites,  à  ébrasements  forte- 
ment prononcés,  avec  ou  sans  ornements  :  elles  ressem- 
blent à  un  fer  de  lance,  d'où  est  venue  l'expression  de 
fenêtres  à  lancette.  Dans  les  églises  d'une  grande  impor- 
tance, les  lancettes  sont  souvent  géminées,  c.-à-d.  réu- 
nies deux  à  deux  et  encadrées  dans  une  ogive  principale, 
et  une  rose  habilement  découpée  les  surmonte  :  le  me- 
neau central  est  taillé  en  biseau  sur  ses  angles,  on  soo- 
tient  une  colon  nette  placée  en  application,  et  une  mou- 
lure toriaue  suit  toutes  les  circonvolutions  des  têtes 
d'ogive.  Vers  le  milieu  du  xiii*  siècle,  les  fenêtres  pren- 
nent de  plus  grandes  proportions ,  et  sont  divisées  par 
deux  ou  trois  meneaux;  le  réseau  supérieur  est  formé 
de  plusieurs  trèfles  ou  quatre-feuilles  superposés.  Aux 
façades,  on  place  assez  communément  un  triplet  (V.  ce 
mot).  Les  compartiments  des  grandes  roses  sont  en 
forme  d'ogives  trilobées,  ou  bien  ce  sont  des  trèfles,  de» 
ouatre-feuilles  et  des  rosaces  entremêlés  avec  beaucoup 
d'art.  —  Les  vitraux  peints  sont  d'abord  composés  de 
médaillons  de  difl'érentes  formes,  disposés  symétrique- 
ment sur  un  fond  de  mosaïque,  avec  bordures  de  feuil- 
lages; le  bleu,  le  rouge  et  le  vert  y  dominent.  Puis,  à 
partir  du  milieu  du  xiii*  siècle,  on  commence  à  voir  pa- 
raître les  grands  personnages.  On  se  servit  également  de 
vitraux  en  grisaille.  —  Le  pavage  des  églises  fat  le  plus 
souvent  très-simple  :  quelques  églises,  surtout  dans  1» 
partie  du  chœur  et  du  sanctuaire,  furent  pavées  en  car- 
reaux émaillés,  dont  on  formait  des  dessins,  et  l'on  y  rit 
ensuite  employer  les  pierres  tombales  et  les  dalles  hi»-^ 
toriées.  —  liOs  voûtes,  traversées  par  des  nervures  saiW 
làntes  qui  les  soutiennent  et  les  affermissent,  n'ont  que 
15  à  20  centimèt.  d'épaisseur;  elles  sont  construites  en' 
petites  pierres  mêlées  avec  beaucoup  de  mortier.  Comme 
leurs  arceaux  se  réunissent  et  reposent  sur  les  massifs 
qui  séparent  les  fenêtres,  des  arcs-boutanU  soutenu» 
par  des  contre-forts  (V.  ces  mots^  appuient  à  l'extérieur 
ces  mêmes  massifs,  sur  lesquels  s'exerce  la  poussé» 
entière  des  voûtes.  Ces  contre-forts,  ainsi  que  ceux  quf 
sont  appliqués  contre  les  murs  quand  il  n'y  a  pas  de  col- 
latéraux, présentent  des  pilastres  de  forme  carrée,  di- 
risés  en  étages  par  des  corniches,  et  diminuant  progres- 
sivement de  la  oase  au  sommet.  —  Dans  les  portails  oi> 
façades,  il  faut  toujours  distinguer  l'œuvre  de  l'archi- 
tecte ,  qui  établit  un  ensemble  de  lignes  avec  la  sévérité 


ÙGI 


133S 


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qui  conrient  à  la  yéritable  science  de  la  construction,  et 
rœavre  des  sculpteurs  et  des  statuaires,  qui  font  souvent 
disparaître  les  lignes  sous  la  richesse  des  ornements. 
Quelques  portails  sont  précédés  d*un  porche  plus  ou 
moins  saillant  (  K  Porchb).  Dans  les  églises  qui  ne  sont 
pas  trës-ornées,  les  voussures  des  portes  sont  garnies 
teulement  de  tores,  et  les  parois  latémles,  de  colonnes  : 
ailleurs,  on  y  voit  des  statues  et  des  bas-reliefs.  C*est  à 
l»rtir  du  xiii*  siècle  que  Touverture  de  la  porte  prin- 
cipale fut  partagée  en  deux  par  un  pilier  qui  soutient  le 
tympan  ( K.  ce  mot).  —  (Test  surtout  au  xm*  siècle  que 
les  architectes  réussirent  à  élever  des  clochers  gigantes- 
ques :  mais  comme  ces  constructions  lassaient  la  patience 
et  épuisaient  les  ressources  des  générations,  il  n*est  pas 
rare  de  voir  ces  tours  imparfaites  et  dépourvues  de  leurs 
flèches.  On  ne  s*est  pas  toujours  contenté  de  deux  tours 
établies  sur  les  flancs  du  portail  principal  ;  on  en  a  placé 
aux  portails  latéraux  et  au-dessus  de  l'entre-croisement 
des  transepts  {V.  Clocher).  —  Parmi  les  ornements 
usités  durant  la  première  période  du  style  ogival ,  nous 
mentionnerons  les  trèfles,  les  quatr^-feuilles,  les  fleu- 
rons, les  rosaces,  les  guirlandes  de  feuillages.  Les  sta- 
tues, moins  allongées,  moins  roides,  mieux  drapées  que 
dans  le  style  romano-byzantin,  ont  aussi  plus  d'expres- 
sion et  de  vie;  elles  sont  souvent  rehaussées  de  couleurs 
et  de  dorures,  et  accompagnées  de  dais  et  de  pinacles. 
Quelques  ornements  de  l'fige  précédent  sont  encore  en 
usage,  tels  que  zigzags,  étoiles,  billettes,  etc.  La  peinture 
à  fresque  fut  habituellement  employée  à  la  décoration 
intérieure,  et  Ton  en  a  retrouvé  des  traces  sous  le  badi- 
geon des  siècles  suivants. 

II.  Style  rayonnant,  —  La  limite  qui  sépare  le  style  à 
lancette  du  style  rayonnant  est  difficile  à  déterminer,  et 
la  transition  s*est  opérée  de  Tun  à  l'autre  d'une  manière 
j)eu  sensible.  Toutefois,  dans  un  grand  nombre  d'édifices, 
le  style  rayonnant  présente  des  caractères  qui  lui  sont 
propres  et  qu'il  a  acquis  par  un  développement  particu- 
lier. Dès  le  commencement  du  xiv*  siècle,  le  plan  des 
^ndes  églises  reçoit  une  modification  grave,  par  l'addi- 
tion de  chapelles  le  long  des  collatéraux  depuis  les  tran- 
septs jusqu'au  portail  occidental.  Dans  les  piliers ,  le  fût 
des  colonnes  s^amincit,  et  les  feuilles  des  chapiteaux 
sont  plus  petites  et  plus  nombreuses.  Les  fenêtres  de- 
riennent  de  plus  en  plus  grandes,  avec  des  meneaux 
plus  nombreux,  et  leur  amortissement  est  formé  de  figures 
rayonnantes,  de  quatre- feuilles,  de  quintefeuilles  et  de 
rosaces  ;  extérieurement  elles  sont  souvent ,  comme  les 
portes,  surmontées  de  fh>ntons  aigus.  Les  roses  des  por- 
tails augmentent  leur  diamètre  et  la  richesse  de  leurs 
compartiments.  Les  clochetons  qui  s'élèvent  au-dessus 
des  contre-forts  extérieurs  s'allégissent  et  s'évident,  ou' 
sont  remplacés  par  des  aiguilles  garnies  de  crochets.  Les 
clochers  sont  placés  assez  arbitrairement  dans  diverses 
parties  de  l'édifice.  Les  balustrades  des  galeries  aban- 
donnent les  arcades  trilobées  pour  les  trèfles,  les  quatre- 
feuilles  et  les  quintefeuilles  encadrés.  Quant  à  l'orne- 
mentation, si  les  sujets  ont  beaucoup  d'analogie  avec  ceux 
de  Tàge  précédent,  on  remarque  des  différences  notables 
dans  l'exécution  et  dans  les  détails  :  les  moulures  toriques 
sont  moins  prononcées  et  les  profils  plus  maigres;  la  star- 
tuaire  a  plus  de  finesse  et  de  régularité;  les  supports  en 
encorbellement  commencent  à  s'orner  de  figures  bizarres, 
quadrupèdes,  reptiles,  etc. 

m.  Style  flamboyant.  —  n  a  été  ainsi  appelé ,  parce 
que  les  meneaux  qui  forment  des  compartiments  dans 
les  ^ndes  fenêtres  se  contournent  en  sens  divers ,  de 
inanière  à  former  des  espèces  de  flammes  (  V.  les  flg.  au 
mot  Arc,  p.  195).  C'est  à  ce  style  qu'on  a  aussi  donné  le 
nom  de  (Uthiqiie  fleuri.  Il  n'y  a  pas  de  changements  à 
noter  dans  le  plan  des  édifices  :  le  stvie  flamboyant  se 
caractérise  par  les  modifications  apportées  aux  piliers,  aux 
fenêtres,  et  à  l'ornementation.  Les  anciennes  colonnes 
cylindriques,  isolées  ou  cantonnées,  passent  à  l'état  de 
colonnettes,  de  tores,  de  baguettes,  de  minces  nervures 
prismatiques  :  les  piliers  les  plus  massifs  sont  couverts 
de  ces  nervures  sur  toutes  leurs  faces  ;  mais  si  le  travail 
en  est  compliqué  et  délicat,  l'œil  ne  peut  le  percevoir  à 
distance,  et  reflet  général  de  la  perspective  a  perdu  quelque 
chose  de  sa  beaul>S.  Souvent  les  nervures  des  piliers  sui- 
Tent  le  contour  des  arcades,  ou  s'élèvent  le  long  des  mu- 
nulles  jusqu'aux  voûtes,  qu'elles  traversent  pour  se  réunir 
^  la  clef.  Les  chapiteaux  ont  disparu,  et  font  place  à  des 
bouquets  de  feuilles  frisées,  à  une  ou  deux  guirlandes  de 
feuillages.  L'ogive  équi latérale  est  encore  en  usage  au 
commencement  du  xv*  siècle  :  mais  bientôt  parait  Togive 
iurbaissée,  puis,  surtout  aux  portes,  l'arcade  en  accolade 


ou  en  doucine  ;  au  xvi*  siècle,  cette  arcade  règne  partout, 
aux  baies  des  clochers,  aux  fenêtres,  aux  arcatures,  etc. 
Souvent  l'arcade  des  portes  est  encadrée  dans  un  vaste 
fironton,  dont  la  surface  est  ornée  de  panneaux  ou  d^ 
coupée  à  jour.  Les  sommets  des  ogives  et  des  pignons 
sont  couronnés  par  un  bouquet  épanoui ,  et  leurs  cOtés 
garnis  de  feuilles  et  de  crochets.  Les  dais  des  niches  sont 
surmontés  de  pinacles  dentelés,  découpés  à  jour  et  ornés 
de  feuillages.  Les  nervures  des  voûtes  se  croisent  suivant 
des  dessins  très-variés,  et  à  chaque  point  d'intersection 
sont  appliquées  des  figures  en  relier,  des  emblèmes  ou 
des  armoiries  ;  quelquefois  la  clef  s'allonge  en  volumi^ 
neux  pendentif.  Lorsque  les  tours  du  xv*  siècle  sont  sur- 
montées de  flèches,  celles-ci  sont  bâties  avec  la  plus 
grande  élégance  ;  mais  le  plus  souvent  elles  sont  carrées, 
soutenues  aux  angles  par  des  éperons  garnis  de  niches, 
et  décorés  à  leur  sommet  d'une  balustrade  finement  dé- 
coupée. A  la  même  époque  appartiennent  la  plupart  des 
clochers  pyramidaux  en  charpente,  couverts  d'ardoise, 
comme  on  en  trouve  un  grand  nombre  dans  les  églises 
rurales.  Quant  à  l'ornementation,  elle  devient  de  plus  en 
plus  riche  :  ce  ne  sont  que  bouquets  fleuris,  guirlandes 
de  feuillages,  dentelures  à  jour,  festons,  niches,  statues, 
dais,  pinacles,  petits  sujets  assez  ordinairement  satiriques 
et  grotesques;  en  un  mot,  la  science  a  fait  des  progrès 
dans  les  procédés  de  l'exécution  matérielle,  mais  on  ob- 
serve partout  Tafféterie  et  l'exubérance,  indicés  d'un  art 
en  décadence. 

Telles  ont  été  les  grandes  phases  du  développement 
de  l'architecture  ogivale  dans  les  diverses  contrées  où 
elle  fut  en  vig[ueur.  D'où  est  venu  ce  style  particulier  à 
la  seconde  moitié  du  moyen  âge  ?  Quelques-uns  pensent 
qu'il  fut  importé  d'Orient  en  Europe  à  l'époque  des  Ôroi- 
sades  :  mais  les  églises  gothiques  de  la  Palestine  ont  été 
construites  au  plus  tôt  par  les  derniers  croisés,  c.-à-d« 
au  XIII*  siècle,  et,  quant  aux  monuments  de  la  Perse  où 
l'on  a  trouvé  des  o^pves,  rien  ne  prouve  qu'ils  soient  an- 
térieurs au  XV*.  D'autres  donnent  à  l'architecture  ogivale 
une  origine  arabe,  sarrasine  ou  moresque,  en  s'appuyant 
sur  la  présence  de  quelques  ogives  au  palais  de  la  Ziza 
près  de  Palerme ,  et  dans  plusieurs  monuments  élevée 
par  les  Musulmans  en  Espagne  :  d'après  cette  opinion,  et 
style  ogival  aurait  été  apporté  de  Sicile  par  les  Normands 
au  XI*  ou  au  xii*  siècle,  ou  serait  venu  d'Espagne  en 
France.  C'est  ce  que  les  faits  sont  loin  de  confirmer.  Le 
palais  de  la  Ziza ,  qu'on  dit  avoir  été  bàU  du  ix*au  xi*siècle 
par  les  Sarrasins,  ne  daterait,  d'après  les  recherohes  des 
archéologues,  c(ue  de  l'an  1279,  et  l'emploi  de  l'ogive  se- 
rait, au  contraire,  une  importation  des  Normands  en  Si- 
cile. D'un  autre  côté,  les  Arabes  ont  élevé  leurs  monu- 
ments dans  le  goût  byzantin  ;  il  n'y  a  aucun  air  de  famille 
entre  Tare  en  fer  à  cheval  et  l'are  ogive,  entre  la  coupole 
à  minarets  et  la  flèche  gothique  ;  les  ogives  de  la  mos- 
quée de  Gordoue  n'appartiennent  pas  à  la  construction 
primitive,  mais  à  des  remaniements  ultérieurs,  et  l'Al- 
hambra  de  Grenade,  qui  est  bien  en  ogives,  a  été  hkû  à 
la  fin  du  xiii*  siècle,  longtemps  après  que  l'ogive  eut  été 
adoptée  dans  toute  l'Europe.  Si  l'ogive  était  venue  d'Es- 
pagne en  France,  on  ne  comprendrait  pas  au'elle  n'eût 
point  été  employée  tout  d'abord  dans  le  Sud  de  ce  der- 
nier pavs,  où,  au  contraire,  elle  a  paru  plus  tard  que  dans 
le  Nord. 

Il  faut  donc  admettre  que  le  style  ogival  est  européen. 
Certains  écrivains  l'ont  fait  naître  d'abord  en  Italie,  où  il 
est  constant,  au  contraire,  qu'il  fut  assez  mal  accueilli,  et 

aue  les  monuments  qui  s'y  rapportent  ont  été  bâtis  par 
es  Allemands  ou  des  Français.  D'autres  attribuent  à 
l'Angleterre  le  développement  primitif  de  l'architecture 
ogivale:  mais  l'étude  comparative  des  monuments  prouve 
que  les  églises  gothiques  de  France  sont  plus  anciennes 
que  celles  de  l'Angleterre.  L'Allemagne  ne  peut  pas  non 
plus  prétendre  à  la  priorité.  L'emploi  de  l'ogive  n'y 
apparaît  qu'au  milieu  du  xu*  siècle,  tandis  qu'on  la 
trouve  dès  le  commencement  de  ce  siècle  à  SWacques  de 
Compiègne,  à  S^-Jean-des-Vignes  et  à  la  cathédrale  de 
Soissons,  à  S*-J^n  de  Lyon,  à  S*-Gatien  de  Tours,  etc. 
D'ailleurs,  le  baron  allemand  de  Roisin,  dans  un  travail 
sur  la  cathédrale  de  Trêves  (1861),  reconnaît  que  les 
moines  de  Ctteaux  ont  été  les  missionnaires  de  l'art  go- 
thique sur  le  Rhin  et  au  delà,  et  que  l'église  ogivale  de 
Trêves ,  qui  a  fait  école  en  Allemagne,  a  eu  pour  proto- 
type l'église  de  S*-Yved,  à  Braisae  (Soissonnais).  La 
France  est,  à  n'en  pas  douter,  le  berceau  du  style  ogival, 
et  c'est  au  nord  de  la  Loire  que  ce  style  a  donné  ses  pre- 
miers et  ses  plus  beaux  monuments.  Le  style  de  transi- 
tion, c-à-d.  l'architecture  de  fusion  entre  le  style  ro- 


OGI 


1336 


OGI 


mano-byzantin  aui  finit  et  le  style  ogival  qui  commence, 
n^apparalt  dans  le  Midi  et  sur  les  bords  du  Rhin  qu'au 
xin*  siècle ,  et,  en  Allemagne  principalement,  quand  les 
architectes  se  décidèrent  à  adopter  le  système  ogival,  ils 
le  prirent  dans  Tétat  où  il  était  déjà  parvenu,  à  sa  période 
rayonnante. 

L'architecture  ogivale  a  puisé  ses  inspirations  dans  la 
foi  chrétienne  ;  elle  convient  essentiellement  à  Texpres- 
ftion  de  la  pensée  religieuse.  De  tous  côtés,  dans  le  plan 
et  dans  les  détails,  ce  ne  sont  que  pieux  symboles  (  V»  Stm> 
bolismb).  Le  prodigieux  élancement  des  colonnes,  Téléva- 
tion  vertigineuse  des  voûtes,  l'immensité  et  la  mystérieuse 
obscurité  du  sanctuaire,  ces  forêts  de  clochetons  et  de 
pinacles,  ces  tours  colossales  et  ces  flèches  aériennes,  tout 
élève  les  idées  et  exalte  les  sentiments,  a  II  n'est  &me  si 
revêche,  dit  Montaigne,  qui  ne  se  sente  touchée  de  quelque 
révérence.  »  V.  Essais  sur  Varchitecture  gothique .  par 
Warton,  Bentam,  Grose  et  Milner,  en  anglais,  1808, 
in-8°;  Uawkins,  Histoire  de  l'origine  et  de  l  établisse- 
ment de  Varctïitecture  gothique,  en  anglais,  1813,  in-8*>; 
UsX\^  Essai  sur  Vorigine^  Vhistoireet  les  principes  de  Car- 
chitecture  gothique,  en  anglais,  Edimbourg,  1813,  in-S**; 
Gunn,  Recherches  sur  Vorigine  et  l'influence  de  l'archi- 
tecture gothique,  en  anglais,  1817,  in-8<*;  A.  Lenoir,  Obser- 
vations sur  Vongineet  l'emploi  de  l'ogive  dans  l'architec- 
ture, Paris,  1819  ;  deCaumont,  Hist»  sommaire  de  l'archi- 
tecture religieuse,  Paris,  1841,  in-8°;  Rickman,  Essai  sur 
Varchitecture  gothique,  en  anglais,  1835,  in-8°.       B. 

OGIVE,  on  laUn  du  moyen  âge  augiva,  nom  qu'on  a 
donné,  Jusqu'au  xix*  siècle,  aux  nervures  saillantes  qui, 
allant  d'un  angle  de  travée  à  l'autre,  se  croisent  diago- 
nalement  dans  les  voûtes,  et  y  produisent  des  comparti- 
ments angulaires.  Cette  disposition  s'appelait  croisée 
d'ogives,  parce  qu'elle  présentait  la  forme  d'une  croix. 
De  notre  temps,  certains  littérateurs,  prenant  ce  mot 
croisée  pour  synonyme  de  fenêtre ,  ont  omployé  le  mot 
ogive  comme  déterminatif,  et,  à  leur  suite,  les  archéo- 
logues et  les  architectes  ont  dit  une  porte,  une  arcade^ 
une  fenêtre  en  ogive.  En  ce  sens,  qui  est  maintenant  ac- 
cepté généralement,  l'ogive  est  une  arcade  formée  par 
deux  arcs  de  cercle  d'un  rayon  égal,  qui  se  croisent  à  leur 
sommet  et  forment  un  angle  curviligne;  c'est  pour  cela 
que  les  Anglais  désignent  Te  style  ogival  sous  le  nom  de 
style  aigu  (pointed  style).  On  a  fait  venir  le  mot  ogive  du 
latin  ovum  (œuf),  parce  que  la  voûte  en  ogive  ressemble 
à  peu  près  à  la  moitié  d'un  œuf  coupé  dans  sa  largeur; 
ou  de  l'allemand  aug  (œil),  parce  que  les  arcs  de  la  voûte 
en  ogive  forment  des  angles  curvilignes  semblables  à 
ceux  du  coin  de  l'œil ,  quoique  dans  une  position  diffé- 
rente ;  ou  enfin  du  latin  augere  (augmenter),  parce  que, 
dans  la  croisée  d'ogive,  les  voûtes  sont  augmentées,  ren- 
forcées par  ces  nervures  saillantes. 

On  distingue  quatre  sortes  principales  d'ogives  :  1°  le 
plein  cintre  brisé,  ou  ogive  obtuse  ou  mousse,  arcade 
presque  circulaire,  dont  le  sommet  présente  un  angle 
très-ouvert  et  à  peine  sensible  ;  c'est  l'espèce  la  plus  an- 
ciennement usitée,  et  on  la  rencontre  dans  les  monuments 
de  lafi  n  du  xii*  siècle; — ^^  Vogive  en  lancette  ou  pointue^ 
formée  par  deux  arcs  qui  ont  leur  centre  au  delà  des  points 
de  retombée  ;  le  rayon  est  plus  grand  que  l'ouverture  de 
l'arcade,  dans  laquelle  on  peut  inscrire,  par  conséquent,  un 
triangle  isocèle.  Cette  ogive  domina  à  la  fin  du  xii«  siècle 
et  au  XIII*,  et  on  l'employa  encore  aux  âges  suivants  dans 
les  espaces  resserrés,  par  exemple  aux  arcades  en  hémi- 
cycle des  sanctuaires  et  aux  portes  des  forteresses;  — 
3®  V arcade  en  tiers-point  ou  ogive  équilatérale ,  formée 
par  deux  arcs  qui  ont  leur  centre  chacun  à  la  naissance 
de  l'arc  de  cercle  qui  lui  est  opposé,  et  qui  sont  décrits 
avec  un  rayon  égal  en  longueur  à  l'ouverture  que  doit 
avoir  l'arcade;  celle-ci  peut  servir  de  base  à  un  triangle 
équilatéral,  dont  l'angle  supérieur  aboutit  au  point  d'm- 
tersection  des  deux  arcs.  Cette  ogive,  la  plus  élégante  de 
toutes,  a  été  surtout  en  usage  au  xiv'  siècle  ;  —  4*^  Vogive 
surbaissée^  formée  par  deux  arcs 'décrits  avec  un  rayon 
plus  court  que  l'ouverture  de  l'arcade,  et  qui  a  été  prin- 
cipalement usitée  au  xv*  siècle.  —  Ces  diverses  sortes 
d'ogives  peuvent  être  surhaussées,  c-à-d.  que  les  deux 
arcs  qui  les  forment  peuvent  se  prolonger  inférieurement 
au-dessous  de  la  ligne  de  leur  centre,  suivant  deux  lignes 
droites  qui  deviennent  parallèles.  —  On  appelle  ogive 
lancéolée  celle  qui  est  formée  de  deux  arcs  dont  la  cour- 
bure se  prolonge  au  delà  de  la  ligne  des  centres.  Vogive 
arabe  ou  moresque  n'est  autre  chose  que  l'arc  en  fer  à 
cheval  brisé. 

On  a  beaucoup  discuté  sur  l'origine  de  l'ogive,  parce 
qu'on  a  attaché  trop  d'importance  à  des  faits  isolés.  Autre 


chose  est  l'emploi  accidentel  de  Togive  dans  quelques 
vieux  monuments,  autre  chose  le  système  ogival.  On  a 
pu  signaler  la  présence  de  l'ogive  à  l'ouverture  de  l'aque- 
duc de  Tusculum,  à  la  porte  de  Segni,  dans  les  tombeaux 
helléniques  de  la  Sicile,  au  Trésor  d'Atrée  à  Mycènes, 
aux  murs  de  Tirynthe,  au  Trésor  de  Mlnyens  près  d'Or- 
chomène,  au  tombeau  de  Tantale  à  Smyrne ,  dans  cer- 
taines constructions  de  l'Egypte,  dans  les  ruines  de  Ninive, 
et  jusqu'au  Mexique  :  mais  ce  n'est  là  qu'un  hasard,  un 
accident,  une  sorte  d'irrégularité.  L'ogive  n'est  point  une 
forme  qu'on  ait  inventée  à  un  moment  donné  ;  pour  la 
connaître ,  il  suffisait  d'avoir  tracé  deux  cercles  qui  se 
coupent,  d'avoir  vu  se  briser  une  baguette  ployée  circu- 
lairement;  elle  était  une  figure  géométric^ue,  aussi  bien 
que  le  cercle,  le  triangle  et  le  carré.  Milizia  et  Chateau- 
briand ont  remarqué  que  l'entr^-croisement  des  sapins 
dans  les  forêts  du  Nord  ou  des  palmiers  en  Orient  donne 
des  ogives  naturelles;  toutefois  ce  n'est  pas  une  raison 
de  croire  avec  eux  que  la  contemplation  des  bois  ait  sus;- 
géré  si  tardivement  aux  hommes  l'idée  de  construire  dus 
édifices  où  l'ogive  tint  la  principale  place.  De  la  connai*;- 
sance  de  ces  faits  à  celle  des  propriétés  de  résistance  de 
l'arc  en  ogive  et  à  l'emploi  raisonné  de  cet  arc,  il  y  a  un 
abime.  Noua  croyons  que  cet  emploi  n'a  pas  été  un  fait 
instantané ,  mais  le  résultat  de  longs  tâtonnements.  Au 
moyen  âge,  en  beaucoup  de  pays  de  l'Europe,  on  man- 
quait de  matériaux  de  ^nde  dimension,  on  avait  perdu 
le  secret  de  la  fabrication  des  mortiers  romains,  et  l'on 
ne  disposait  plus  d'une  grande  quantité  d'argent  et  de 
bras.  11  fallut  s'ingénier  pour  tirer  parti  du  peu  que  l'on 
possédait.  La  construction  des  voûtes  fut  le  problème 
principal  sur  lequel  s'exercèrent  les  architectes,  et  elle 
engendra  une  foule  d'essais  malheureux,  de  conceptions 
avortées.  On  commença  par  faire  des  voûtes  en  berceau, 
suivant  la  tradition  antique;  mais  comme  on  n'avait  plus 
ces  masses  inébranlables  sur  lesquelles  les  Romains  ap- 
pujraient  leurs  arcs,  on  ne  pouvait  donner  aux  voûtes  la 
résistance  nécessaire;  delà  la  nécessité  de  perfectionner 
le  système  même  de  la  construction  des  arcs.  Or^  un  arc 
en  plein  cintre  exerce  sa  poussée  sur  les  murs  qui  le 
poitent,  en  raison  de  son  diamètre  et  de  son  poids.  Le 
résultat  de  cette  poussée  est  d'écarter  les  murs  de  leur 
aplomb,  de  les  repousser  au  dehors,  ce  qui  entraine  la 
rupture  de  l'arc.  Cette  rupture  s'opère  invariablement  en 
trois  points  :  la  clef,  c-à-d.  le  claveau  du  sommet  de 
l'arc,  s'abaisse  plus  ou  moins,  et  les  reins  de  l'arc, 
c-à-d.  le  sommet  de  chaque  quart  de  cercle  à  droite  et  à 
gauche  de  la  clef,  se  disjoignent,  en  sorte  que  la  rupture 
est  plus  ouverte  à  l'extrados  qu'à  l'intrados.  Il  était  na- 
turel qu'on  portât  des  palliatifs  sur  ces  trois  points  évi- 
demment trop  faibles.  Pour  empêcher  la  clef  de  s'abais- 
ser, les  architectes  imaginèrent  de  la  surélever  ;  pour 
que  les  deux  quarts  de  cercle  ne  se  brisassent  pas  aux 
reins,  on  redressa  la  courbe,  afin  de  rendre  l'arc  plus 
rigide  et  de  contrarier  le  mouvement  toujours  observé  à 
la  même  place.  Qu'arrive-t-il  si  l'on  surélève  la  clef  d'un 
arc  à  plein  cintre,  et  si  l'on  diminue  la  flèche  de  ses  deux 

3uarts  de  cercle?  On  trace  une  ogive.  Telle  a  été  l'origine 
e  l'emploi  systématique  de  l'ogive  comme  moyen  de 
construction.  En  tout  pays,  on  peut  observer  ces  t&ton* 
nements  :  les  plus  anciennes  ogives  ont  une  forme  incer- 
taine, et  ressemblent  à  des  pleins  cintres  redressés;  elles 
n'ont  point  été  tracées  régulièrement  au  moyen  de  deux 
centres,  comme  on  le  pratiqua  plus  tard  après  de  nou- 
veaux progrès.  Il  est  évident,  d'ailleurs,  que  l'ogive  n  out 
pas  tout  d'abord  une  Influence  très-sensible  sur  l'archi- 
tecture :  dans  les  idées  des  architectes  du  xji*  siècle,  le 
plein  cintre  fut  encore  la  forme  noble,  la  seule  qui  eut 
place  dans  la  décoration.  On  n'employa  l'ogive  que  par 
nécessité ,  pour  les  arcs  à  grande  portée  :  certains  édi- 
fices, comme  l'ancienne  cathédrale  de  Vaison  (Vaucluse), 
offrent  des  arcs  en  ogive,  sans  cesser  d'appartenir  à  Tar- 
chitecture  romane,  et  d'autres,  qui  sont  de  style  ogival , 
présentent  des  arcs  en  plein  cintre  à  côté  d'arcs  en  ogive; 
dans  ceux  où  les  deux  formes  se  montrent  simultané- 
ment, l'ogive  est  réservée  pour  les  portées  considérables, 
tandis  que  le  plein  cintre  ne  paraît  que  dans  les  arca- 
tures  de  médiocre  diamètre.  Ainsi ,  l'ogive  fut  l'expres- 
sion d'un  besoin.  Un  autre  perfectionnement  fut  ensuite 
ajouté  aux  voûtes  :  les  constructeurs  du  moyen  ftge,  qui 
connaissaient  déjà  l'arc  doubleau,  et  qui  s'en  servaient 
pour  consolider  leurs  voûtes  en  berceau,  imaginèrent  de 
renforcer  ces  voûtes  avec  d'autres  arcs  se  croisant  entre 
les  arcs  doubleaux  ;  la  voûte  se  déploya  sur  les  arcs  dia- 
gonaux, formant  des  supports  permanents,  comme  la 
toile  d'une  tente  sur  les  piquets  qui  en  sont  l'armature. 


OLI 


1337 


OME 


Oo  fut  amené  de  cette  façon  à  la  croisée  d*ogives ,  et  on 
€ut  la  solution  d'un  grand  problème,  couvrir  à  peu  de 
frais  le  plus  vaste  espace  possible.  A  Taide  du  système 
de  nervures  qui  retombaient  sur  les  piliers,  à  Taide  des 
étais  fort  minces  que  l'emploi  des  arcs  en  ogive  permet- 
tait de  substituer  aux  lourdes  colonnes  romanes,  on 
obtint  les  mêmes  effets  de  solidité  que  quand  on  recou- 
rait à  des  corps  épais  de  maçonnerie.  Ces  innovations 
étaient  indispensables  pour  des  édifices  dont  l'élévation 
était  exagéra  relativement  à  leur  largeur,  et  elles  ont 
entraîné  comme  conséquence  l'emploi  des  conir^-forts  et 
des  arcS'bouiants  {V,  ces  mots). 

En  résumé,  l'ogive,  ayant  été  une  nécessité  de  con- 
struction, a  pu  naître  en  quelque  sorte  simultanément 
dans  les  divers  pays  de  l'Europe  occidentale  et  septen- 
trionale, où  elle  avait  une  convenance  parfaite  avec  la 
nature  des  matériaux  et  la  pauvreté  des  ressources. 
D'&illeurs,  les  premiers  constructeurs  furent  des  moines: 
dès  au'un  perfectionnement  ét^t  trouvé,  il  était  connu 
et  adopté  aussitôt  à  de  grandes  distances ,  grâce  aux 
communications  que  les  chefs-lieux  d'ordres  monasti- 
ques avaient  avec  les  maisons  de  leur  obédience.  C'est 
ce  qui  explique  comment  on  rencontre  si  souvent  en 
France  des  monastères  étrangers  par  leur  architecture  à 
la  province  où  ils  ont  été  b&tis  :  ce  sont  des  copies  exé- 
cutées d'après  un  modèle  transmis  par  un  abbé  à  son 
prieur.  B. 

OIE  (Jeu  de  T),  jeu  qui  se  joue  avec  deux  dés  sur  un 
tableau  représentant  63  cases  et  figures,  parmi  lesquelles 
des  oies  sont  disposées  de  9  en  9.  On  gagne  la  partie, 
lorsqu'on  arrive,  par  le  chiffre  des  points,  au  n°  63,  qui 
est  rote  royale;  mais  il  n'est  pas  si  facile  qu'on  le  pense 
d'atteindre  le  but,  parce  que  divers  accidents  hâtent  ou 
retardent  la  marche.  Ainsi,  quand  en  jetant  les  dés  on 
amène  9  par  4  et  5,  il  faut  aller  se  placer  à  la  case  54; 
ai  c'est  par  6  et  3,  à  la  case  26  ;  (^uand  le  point  amené 
fait  arriver  le  joueur  à  Tune  des  oies  placées  de  9  en  9 , 
il  avance  encore  d*une  quantité  égale  à  ce  point  ;  si  l'on 
amène  G,  dont  la  case  représente  un  pont,  on  paye  une 
amende,  et  l'on  se  place  à  12  ;  si  l'on  arrive  pai'  les  points 
à  12,  qui  est  une  hôtellerie,  on  paye,  et  l'on  se  repose 
jusqu'à  ce  que  chacun  des  autres  joueurs  ait  joué  deux 
fols;  si  l'on  arrive  à  32,  qui  est  un  puits,  ou  à  52,  qui 
est  une  prison,  on  paye,  et  Ton  attend,  pour  pouvoir  re- 
jouer, qu'un  autre  joueur  y  soit  tombé  à  son  tour  ;  on 
paye  encore  à  la  case  40,  qui  est  un  labyrinthe,  et  on 
retourne  à  30  ;  si  l'on  tombe  dans  la  case  où  est  figurée 
une  tête  de  mort,  il  faut  recommencer  tout  le  jeu  ;  enfin, 
^i,  par  le  point  amené,  on  dépasse  G3,  on  rétrograde  du 
nombre  de  points  que  l'on  a  en  trop.  —  Le  jeu  de  l'oie 
remonte,  dit-on,  aux  anciens  Grecs;  il  a  été  fort  &  la 
mode  au  xviu*'  siècle. 

OIL  (Langue  d').  V.  Langue  d'oïl. 

OIRON  (Faïences  d').  V,  le  Supplément. 

OKAZH.  V,  nou-e  Dict.  de  Biogr,  et  d'Histoire. 

OKEL,  nom  qu'on  donne  en  Orient  à  une  espèce  de 
portique  où  les  marchands  de  passage  exposent  leurs 
marchandises. 

OKYGRAPHÎE  (du  grec  ôkhus,  rapide,  et  graphéin, 
écnTe)y  sorte  de  sténographie,  où  l'on  n'emploie  que  trois 
caractères  dont  la  valeur  change  suivant  leur  position 
sur  trois  lignes  parallèles. 

OLÉRON  (Rôles  d*).  >  V.  ces  mots  dans  notre  Z)ic£ton- 

OLIFANT.  S      naire  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

OLIGARCHIE  Mu  grec  oligos,  qui  est  en  petit  nombre, 
axarUiè,  pouvoir),  gouvernement  dans  lequel  le  pouvoir 
est  entre  les  mains  de  quelques  individus  ou  de  quel- 
ques  familles.  C'est  une  aristocratie  limitée.  Le  gouver- 
nement des  douze  Égyptiens  que  renversa  Psammétichus, 
celui  des  Trente  tyrans  à  Athènes  et  des  Décemvirs  à 
Rome,  celui  du  Conseil  des  Dix  à  Venise,  ont  été  des 
gOQTemements  oligarchiques. 

OUK  ou  OULIK ,  monnaie  d'argent  de  Turquie,  va- 
lant 10  aspres,  ou  environ  25  centimes. 

OLUtl  {L^).  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire,        , 

OUYE ,  en  termes  d'Architecture,  ornement  en  forme 
^  grain  oblong,  qu'on  taille  sur  les  baguettes  et  les  as- 
tragales. 

OLIVIER,  arbre  que  les  anciens  Grecs  avaient  con- 
^>cré  à  la  déesse  Minerve,  et  dont  ils  avaient  fait  le  sym- 
bole de  la  sagesse  et  de  la  paix.  Pendant  un  temps  on 
n'employa  que  des  vierges  et  des  hommes  purs  pour  le 
cultiver,  et,  dans  quelques  contrées,. on  exigea  un  ser- 
ment de  chasteté  de  ceux  qui  récoltaient  les  olives. 
L'Aréopage  nommait  des  inspecteurs  chargés  de  surveiller 


les  plantations,  et  jugeait  les  délits  commis  contre  Tarbre 
sacré.  Chez  les  Romains,  les  possesseurs  d'oliviers  ne 
pouvaient  en  disposer  pour  des  usages  profanes  ;  celui 
qui  en  altérait  un  pied  dans  un  bois  consacré  à  Minerve 
était  puni  d'exiU  B. 

OLOGRAPHE.  V.  Testament. 

OLYMPIADES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

OLYMPION ,  temple  élevé  à  Athènes  en  Thonncur  de 
Jupiter  Olympien.  C'était,  au  rapport  de  Pline,  le  plus 
bel  édifice  de  la  ville  ;  il  avait  quatre  stades  de  tour.  Sa 
construction ,  commencée  par  Pisistrate,  interrompue  et 
reprise  à  différentes  époques,  ne  fut  entièrement  terminée 
que  sept  siècles  après,  sous  Tempereur  Adrien.  Rien  de 
plus  beau  que  les  ruines  de  ce  temple.  Les  colonnes,  en 
marbre  blanc ,  ont  plus  de  2  met.  de  diamètre  :  la  façade 
en  avait  10,  et  chaque  côté  21  ;  sur  les  côtés  elles  étaient 
à  double  rang.  La  longueur  de  l'édifice  était  de  près  de 
130  met. 

OLYMPIQUES,  titre  d*un  livre  d'odes  triomphales 
écrites  par  le  poète  grec  Pindare  en  l'honneur  de  ceux 
qui  avaient  remporté  des  prix  aux  Jeux  Olympiques. 

OLYNTHIENNES,  titre  sous  lequel  on  comprend  trois 
harangues  prononcées  par  Démosthène  pour  exhorter  les 
Athéniens  à  ne  pas  laisser  tomber  la  ville  d'OIynthe  au 
pouvoir  de  Philippe,  roi  de  Macédoine.  Les  critiques  ne 
sont  pas  d'accord  relativement  à  Tordre  dans  lequel  on 
doit  les  ranger. 

OMAGUAS  f  Langue  des),  une  des  langues  indigènes 
du  Brésil,  parlée  en  plusieurs  dialectes.  La  plupart  des 
mots  simples  sont  monosyllabiques,  et  le  même  mot,  ac- 
centué difl'ércmment,  a  plusieurs  significations  difi'é- 
rentes.  La  déclinaison  manque  de  genres,  mais  elle 
distingue  les  nombres  et  les  cas.  La  conjugaison  est  très- 
simple.  On  peut,  en  ajoutant  aux  substantifs  la  particule 
ta,  les  changer  en  autant  de  verbes  qui  expriment  une 
action  ou  un  mode  d'existence  analogue  à  la  signification 
de  ces  substantifs.  Les  verbes  réciprojques  se  forment  en 
ajoutant  la  syllabe  ca  aux  verbes  ordinaires. 

OMBRELLE  (du  latin  umbella,  diminutif  d'umbra^ 
ombre),  petit  parasol  en  soie  ou  en  taffetas,  que  portent 
les  dames  pour  se  mettre  à  l'abri  des  rayons  du  soleil. 

OMBRES,  en  termes  de  Peinture,  les  endroits  les  moins 
éclairés,  les  plus  obscurs  d'un  tableau ,  servant  à  relever 
l'éclat  des  autres.  V.  Clair-obscur. 

OMBRES  CHINOISES,  spectaclo  de  fantasmagorie  dans  le- 
quel on  fait  agir  des  figures  découpées  en  carton  noir  der- 
rière une  surface  transparente,  qui  n'est  le  plus  souvent 
que  du  papier  huilé.  Ce  spectacle,  qui  a  été  de  tout  temps 
un  plaisir  favori  des  Orientaux,  fut  imité  d'abord  en  Al- 
lemagne sous  le  nom  de  SchcUtenspiel  ;  on  l'introduisit 
en  France  en  1767,  mais  il  ne  prit  faveur  qu'à  partir  de 
1784,  époque  où  Séraphin  s'établit  à  Pcris,  dans  les  ga- 
leries .nouvellement  construites  du  Palais-Royal. 

OMBRIENNE  (Langue),  une  des  langues  italiques  an- 
térieures à  la  formation  du  peuple  romain.  Tout  ce  qui 
nous  en  reste  se  borne  aux  inscriptions  des  Tables  Eugu- 
bines  {V.  ce  mot)^  qui  ne  suffisent  pas  pour  établir  avec 
certitude  un  grand  nombre  de  faits.  Les  Ombriens  écri- 
vaient de  droite  à  gauche,  co'nme  les  Étrusques.  Gro* 
tefend  pense  que  les  valeurs  phonétiques  représentées 
par  leur  système  graphique  étaient  au  nombre  de  20, 
tandis  qu'Aufrecht  et  Kirchhoff  n'en  comptent  que  19, 
dont  4  voyelles.  Niebubr  a  cru  reconnaître  dans  les  textes 
ombriens  quelques  expressions  latines,  et  Micali  a  signalé 
une  grande  conformité  apparente  entre  l'étrusque  et 
l'ombrien.  De  son  côté,  Lanzi  remarqua  moins  de  régu- 
larité dans  l'ombrien  que  dans  l'étrusque;  Grotefend 
partage  cette  opinion,  et  l'appuie  sur  ce  que  les  Ombriens 
auraient  eu  toute  liberté  d'admettre  ou  de  rejeter  cer- 
taines lettres  finales,  tant  dans  la  conjugaison  que  dans 
la  déclinaison.  Outre  les  six  cas  du  latin,  il  croit  en  re- 
trouver deux  qui  répondent  à  1  Instrumental  sanscrit  et 
au  narratif  arménien.  V.  Lepsius,  De  Tabulis  Eugt^inis, 
Berlin,  1833,  in-8°,  et  Inscriptiones  linguœ  umbricœ  et 
oscœ^  Leipzig,  1841  ;  Ch.  Lassen,  Supplément  à  Vexplica^' 
tion  des  Tables  Eugubines,  en  allem.,  Bonn,  1833,  in-S»; 
Grotefend,  Budimenta  lingtUB  umbricœ  ex  inscriptionibus 
anliquis  enodata^  Hanovre,  1835-39,  in-4o;  Aufrecht  et 
Kirchhoff,  Sur  les  monuments  de  la  langue  ombrienne, 
en  allem.,  Berlin,  1849-51,  2  vol.  in-4». 

OMER  (Église  Notre-Dame,  à  Saint-).  Cette  église, 
autrefois  cathédrale,  est  située  à  l'extrémité  occidentale 
de  la  ville,  sur  le  plateau  de  la  colline  Sithiu,  du  côté 
opposé  aux  ruines  de  l'abbaye  de  S^-Bertin.  De  la  lenteur 
de  la  construction,  qui  s'est  prolongée  du  xi*  au  xvi*  aie* 


OMN 


1338 


OMN 


de,  il  est  résulté  un  mélange  de  difTérents  styles  d*ar- 
chitecture.  A  Tintersection  des  transepts  s'élevait  une 
flèche,  qu'un  ouragan  a  renversée  en  1606;  il  ne  reste 
plus  que  la  tourelle  qui  la  supportait.  La  grosse  tour 
carrée  que  Ton  voit  au  portail  occidental  a  été  bâtie  vers 
la  fin  du  XV*  siècle;  elle  a  50  nnèt.  de  hauteur  :  aux 
angles  du  sommet  il  y  avait  des  tourelles,  dont  une  seule 
subsiste  aujourd'hui.  Le  portail  le  plus  digne  d'attention 
est  celui  du  midi.  Élevé  sur  sept  degrés,  il  est  surmonté 
d'une  voûte  en  ogive,  et  décoxîs  de  colonnes  qui  reçoi- 
vent à  leur  retombée  les  nervures  de  cette  voûte,  enri- 
chies de  fleurons  légèrement  évidés.  Entre  les  colonnes 
se  trouvent  six  statues  d'Anges  tenant  des  phylactères  et 
couronnés  de  larges  dais  d'un  travail  délicat.  Au-dessus, 
entre  les  nervures,  50  petites  figures,  avec  leurs  dais  par- 
ticuliers, sont  malheureusement  mutilées.  La  porte, 
élevée  sur  4  degrés,  est  divisée  par  un  trumeau  en 
pierre,  orné  d'une  statue  de  la  Vierge  :  un  Jugement 
dernier  est  sculpté  en  grand  relief  dans  le  tympan.  La 
galerie  massive  qui  pèse  sur  ce  portail  ogival  est  toute 
moderne;  elle  a  remplacé  une  galerie  à  jour  que  surmon- 
taient des  clochetons  dentelés.  Au-dessus  de  la  rose  est 
un  cadran  solaire,  aui  date  de  1610.  Le  pignon  qui  ter- 
mine la  façade  est  décoré  de  trois  niches  accolées,  dont 
deux  abritent  encore  des  statues  mutilées.  A  l'intérieur 
de  l'église,  sous  la  tour,  on  voit  un  groupe  de  trois  figures 
colossales  qui  proviennent  de  l'ancienne  église  de  Thé- 
rouanne  :  la  plus  grande,  près  de  laquelle  les  deux  autres 
sont  agenouillées,  et  qui  est  devenue  populaire  sous  le 
nom  du  grand  Dteu  de  Thérouanne,  a  été  regardée,  soit 
comme  un  Jupiter,  soit  comme  une  divinité  gauloise; 
mais  sa  tête  couronnée  d'épines  et  ses  mains  levées  en 
signe  de  bénédiction  montrent  évidemment  que  c'est  une 
image  du  Christ  ;  les  autres  statues  représentent  la  Vierge 
et  S^  Jean  ;  le  travail  parait  se  rapporter  au  xii*  siècle.  A 
l'entrée  de  la  chapelle  de  SWean-I'Évangéliste,  contre  un 

{ailier,  on  remarque  un  ex-voto  du  doyen  Syderack  de  Lal- 
ainç,  élevé  en  1534  :  c'est  un  monument  partie  d'alb&tre, 
partie  de  pierre  blanche  comme  le  marbre,  composé  d'un 
bas-relief  dont  le  sujet  est  la  scène  des  trois  jeunes 
hommes  dans  la  fournaise,  et  d'un  encadrement  un  peu 
lourd  dans  le  style  de  la  Renaissance.  V.  Walict,  Descrip^ 
tion  de  l'ancienne  cathédrale  de  Sainl-Omer,  1840,  in-4*. 
OMERTI.  V.  Indien  (Art).  « 

O.MNIBUS  DE  PARIS,  grandes  voitures  à  4  roues  et 
à  S  chevaux,  pour  le  transport  en  commun  du  public 
dans  l'intérieur  de  la  ville.  Les  voyageurs  y  sont  face  à 
Ace  sur  2  banquettes  longitudinales,  munies  de  coussins, 
et  ayant  7  places,  dont  les  4  du  fond  sont  divisées  en  ma- 
nière de  stalles  par  de  petits  bras  de  fauteuils.  La  voi- 
ture a  5  vasistas  de  chaque  côté,  3  vitrés,  et  2  en  panneaux 
d'ëbénisterie.  On  monte  dans  l'omnibus  par  derrière,  au 
moyen  d'un  grand  marchepied  fixe;  la  baie  de  la  por- 
tière n'a  point  de  porte,  afin  de  ne  pas  gêner  la  circula- 
tion des  voyageurs  enti^nt  ou  sortant.  Outre  les  14  places 
d'intérieur,  la  voiture  en  a  encore  10  en  plein  air,  sur 
l'impériale,  et  réservées  seulement  aux  hommes.  Un 
double  banc  de  bois,  sans  coussin,  règne  dans  toute  la 
longueur  de  la  voiture,  et  au  milieu ,  pour  ne  pas  nuire 
à  son  centre  de  gravité.  Les  voyageurs  y  sont  assis  dos  & 
dos.  Un  marchepied,  échelonné  sur  le  côté  de  celui  des 
voyageurs  d'intérieur,  conduit  à  ces  places  aériennes, 
qu'entoure  une  légère  rampe  de  fer.  —  Chaque  omnibus 
est  affecté  au  service  d'un  parcours,  toi^ours  le  même,  et 
qu'on  appelle  sa  ligne.  L'indication  des  deux  points 
extrêmes  de  son  service  est  écrite  en  grosses  lettres  sur 
un  tableau  long  attaché  à  la  rampe  de  l'impériale.  En 
outre,  sur  la  ceinture  de  sa  caisse,  les  principaux  points 
du  parcours  sont  indiqués  en  lettres  très-lisibles.  Enfin , 
pour  la  nuit,  la  voiture  a  3  lanternes,  2  en  tète,  et  une 
derrière,  munies  de  verres  de  couleur  servant  de  fanaux 
indicateurs,  car  chaque  ligne  a  sa  couleur  ou  son  agen- 
cement particulier  de  couleurs. 

Le  service  de  la  voiture  en  circulation  est  fait  par 
2  hommes  qui  ont  un  costume  d'ordonnance  :  un  co- 
cher, dont  le  siège  est  juché  sur  l'impériale,  et  un  con- 
ducteur, constamment  debout  sur  le  marchepied  de  la 
portière,  nour  recevoir  les  voyageurs,  recueillir  le  prix 
de  leurs  places,  les  marquer  par  un  compteur  à  timbre 
et  à  cadran,  fixé  à  l'entrée  de  la  voiture,  et ,  quand  quel- 
qu'un veut  monter  ou  descendre,  avertir  le  cocher  d'ar- 
rêter, en  tirant  un  cordon,  et  le  prévenir  de  même  pour 
repartir.  Au  point  de  départ,  à  celui  d'arrivée,  et  de 
place  en  place  sur  toute  la  longueur  de  la  ligne,  il  y  a  de 
petits  bureaux  où  le  public  peut  venir  attendre  le  départ 
ou  le  passage  de  la  voiture.  Us  sont  tenus  par  un,  et 


quelquefois  deux  contrôleurs,  qui,  à  chaque  omnibus  non 
complet  s'arrêtant  à  leur  bureau ,  regardent  le  nombre 
de  voyageurs  indiqué  par  le  compteur,  et  le  pointent  sut 
une  feuille  de  route  imprimée,  que  le  conducteur  a  pour 
toute  sa  journée.  —  Dans  les  faubourg  du  Temple, 
S*-Martin,  S^-Denis,  Montmartre,  et  Poissonnière,  au 
nord;  puis,  vers  le  milieu  du  boulevard  de  Sébastopol, 
rive  gauche,  et  vers  le  haut  de  la  rue  S*-Jacques,  au  sud, 
les  voies  publiques  étant  montueuses,  parce  que  là  com- 
mence le  relief  de  la  vallée  de  la  Seine,  un  3*  cheval  est 
attelé  en  arbalète  à  la  flèche  de  la  voiture  pour  franchir 
ces  passages.  Le  cheval ,  en  station  perpétuelle  au  point 
manqué,  est  désigné,  de  son  service,  par  le  nom  de  mon- 
tagnard, ainsi  que  son  conducteur. 

31  lignes  d*omnibus  desservent  Paris  dans  tous  les 
sens,  beaucoup  allant  d'une  barrière  à  l'autre.  La  lon- 
gueur moyenne  de  chaque  ligne  est  de  5  à  7  kilomètres. 
Quel  que  soit  le  parcours,  le  prix  de  la  place  est  toujours 
le  même  :  30  cent,  pour  l'mtérieur,  et  15  cent,  pour 
l'impériale.  En  outre,  les  voyageurs  de  l'intérieur  peuvent 
demander  au  conducteur  un  petit  bulletin  impnmé,  dit 
correspondance,  qui  donne  droit  de  monter  gratis  dans 
Tomnibus  d'une  autre  ligne,  de  sorte  que  pour  30  cent 
on  peut  foire  une  course  de  13  à  14  kilomètres  environ. 

liB  service  est  arrangé  de  manière  qu'une  voiture, 
sur  chaque  ligne,  part  des  bureaux  de  stationnement 
toutes  les  6  ou  8  minutes.  Sur  la  ligne  des  boulerards  in- 
térieurs du  Nord,  la  plus  fréquentée  de  toutes,  les  départs 
ont  lieu  toutes  les  3  minutes. 

L'omnibus  est  une  invention  françûse  :  on  l'attribue 
à  Pascal ,  qui  Imagina  aussi  le  nom ,  mot  latin  signifiant 
«  à  tous,  »  ou  «  pour  tous  »  ;  cependant  ce  ne  fut  que 
dix  ans  après  sa  mort  que  l'on  tenta  l'application  de  son 
idée  :  en  1672,  un  certain  nombre  de  carrosses  de  trans- 
port en  commun  roulèrent  dans  I^is;  le  prix  de  la 
place  était  de  6  sous.  L'entreprise  ne  dura  que  peu  d'an- 
nées, et  l'idée,  sans  doute  prématurée,  ne  fut  reprise 
qu'un  siècle  et  demi  après  :  en  1819,  un  M.  Godot  de- 
manda au  préfet  de  police  l'autorisation  d'établir  un  ser- 
vice d'omnibus  sur  les  boulevards  et  sur  les  quais;  on  Is 
lui  refusa  :  c'eût  été ,  dit-on ,  pour  la  voie  publique  un 
embarras,  que  ces  voitures  s'y  arrêtant  continuellement. 
La  même  autorisation ,  sollicitée  par  d'autres  entrepre- 
neurs en  1824  et  1826,  fut  également  refusée;  enfin  eg 
1828,  un  nouveau  solliciteur,  plus  heureux,  obtint  une 
concession  pour  les  boulevards  intérieurs  du  Nord  seule- 
ment. Il  les  divisa  en  deux  parcours  :  le  carrefour  de  la 
rue  de  Lancry  ei  du  boulevard,  près  la  Porte  S^-Martin, 
fut  le  point  de  départ  commun  ;  un  service  allait  i  la 
Bastille  et  l'autre  à  la  Bfadeleine.  Les  départs  avaient  lieu 
à  peu  près  tous  les  quarts  d'heure;  une  orgue,  placée 
sous  les  pieds  du  cocher,  qui  la  mettait  en  action  par  une 
pédale,  donnait  le  signal  en  jouant  une  petite  fanfare  de 
trompettes  pour  appeler  les  voyageurs.  Le  prix  de  la 
course  fut  d'abord  de  25  centimes,  puis,  peu  après,  de 
30  cent.  Cette  entreprise  démocratisait  l'équipage  ;  aussi 
une  prévention  défavorable  l'accueillit  d'abord.  Cepen- 
dant, la  jeune  duchesse  de  Berry  ayant  fait  la  gageure  de 
s'y  montrer,  incognito,  il  est  vnu,  et  ne  s'étaut  à  demi 
révélée  qu'en  donnant  au  conducteur  un  billet  de  banque 
de  500  fr.  pour  sa  place,  alors  que  les  places  étaient  en- 
core à  5  sous,  cette  petite  anecdote,  qrui  fut  bien  vite  sue, 
rendit  une  foule  de  gens  moins  dédaigneux,  et  le  procès 
des  omnibus  fut  gagné  près  du  public.  Bientôt  d'autress 
lignes  furent  sollicitées,  concédées,  et  desservies. 

Chaque  ligne  était  tenue  par  une  compagnie,  et  prenait 
un  nom  pour  se  faire  reconnaître,  ainsi  qu'une  couleur 
spéciale  pour  ses  voitures.  La  ligne-  des  boulevards  prit 
et  conserva  le  nom  û'Omnibus;  il  y  eut  ensuite  les  Dames 
blcmches,  les  Béarnaises,  les  Tricycles  (de  ce  que  les  voi- 
tures étaient  à  3  roues),  les  Constantines,  les  Batignol- 
laises,  etc.  En  1855,  toutes  les  compagnies  se  réunirent 
en  une  seule;  l'administration  municipale,  qui  favorisa 
cette  fusion,  accorda  à  la  compagnie  générale  un  privilège 
de  24  ans,  mais  en  même  temps  lui  imposa  diverses 
charges,  entre  autres  :  la  prolongation  de  plusieurs  lignes 
jusqu'à  l'enceinte  bastionnée  de  Paris  agrandi  ;  l'établis- 
sement de  places  d'impériale  sur  toutes  les  voitures,  afin 
de  rendre  l'omnibus  accessible  aux  plus  petites  bourses; 
un  tarif  exceptionnel  de  15  cent.,  pour  toutes  places,  en 
faveur  des  sous-oflSciers  ou  soldats  en  uniforme;  enfin , 
une  contribution  annuelle  de  640,000  fr.  à  verser  dans  la 
caisse  municipale.  En  1860,  ce  privilège  fut  augmenté  de 
26  ans,  pour  finir  au  31  mai  1910,  mais  à  la  charge'par 
la  compagnie  de  porter  à  un  million  de  francs  la  contri- 
bution annuelle  payée  à  la  ville  de  Paris* 


ONO 


in9 


ONT 


Depuis  le  i"  Janvier  1861,  le  nombre  des  lignes  d'om- 
nibus a  été  porté  à  31,  rayonnant  à  tous*  les  orients  de 
Paris,  et  le  service  Journalier  ordinaire  est  fait  par 
M5  voitures,  qui  commencent  leurs  courses  à  8  heures 
du  matin,  et  les  finissent  à  11  heures  et  demie  du  soir, 
n  y  a  03  bureaux  de  station,  et  120  d*attente  ou  de  cor- 
respondance espacés  sur  les  diverses  lignes.  Un  registre 
est  tenu  dans  ces  bureaux  pour  recevoir  les  plaintes  des 
voyigeurs,  et  chaque  jour  le  coDimissaire  de  |>oIice  du 
quartier  et  Tadministration  centrale  de  Tentreprise  pren- 
nent connaissance  des  plaintes.  Les  omnibus  de  Pans  ont 
transporté  67  millions  76(^96  voyageurs,  en  1860,  et 
la  recette  brute  a  été  de  12  milHêns  983,000  fr.,  ou,  par 
joomée  de  voiture,  82  fr.  19  cent.  L'ensemble  du  par- 
cours général  quotidien  équivaut  à  59,740  kilomètres. 
L'effectif  des  chevaux,  pour  un  service  aussi  considérable, 
dépasse  6,000.  —  Les  omnibus  sont  maintenant  un  be- 
soin pour  toutes  les  classes  de  la  société,  et  on  ne  pour- 
rait plus  s*en  passer.  On  a  appliqué  le  service  de  rom- 
nibas  aux  chemins  de  fer  :  à  Paris,  chaque  chemin  a  ses 
omnibus  stationnant  dans  divers  lieux,  recevant  les 
voyageurs  et  les  bagages  pour  les  transporter  à  la  gare 
de  départ,  où  les  prenant  à  la  gare  d*amvée,  et  les  con- 
duisant à  leur  porte,  en  desservant  une  circonscription 
dans  la  ville.  C.  D— t. 

OMNIUM,  terme  de  Finances.  Quand  un  gouvernement 
fait  un  emprunt ,  il  traite  pour  la  totalité  avec  un  petit 
nombre  de  banquiers ,  qui  s'engagent  à  verser  le  mon- 
tant, par  portions,  dans  un  espace  de  temps  déterminé, 
eontre  une  certaine  quantité  d'effets  publics,  de  diffé- 
rentes natures.  L'ensemble  de  ces  effets,  négocié  indivi- 
sément, s'appelle  omntum, 

ONAGRE.  >  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

ONCE.       I      Biographie  et  d^ Histoire, 

ONCHETS.  V.  Jonchets. 

ONCIALE  (Écriture).  V.  ÉcarroRE. 

ONCLE,  frère  du  père  ou  de  la  mère  par  rapport  à  leur 
enfant;  la  tante  est  la  sœur  du  père  ou  de  la  mère.  L'oncle 
et  la  tante  sont  les  plus  proches  parents,  en  ligne  colla- 
térale, après  les  frères  et  sœurs;  ils  sont,  avec  leurs 
nereux  et  nièces ,  au  3«  degré  (Code  Napol.,  art.  738  ); 
le  Droit  canon,  différant  en  cela  du  Droit  civil ,  les  place 
même  au  second  degré.  L'oncle  ne  peut  épouser  sa  nièce, 
ni  la  tante  son  neveu,  sans  une  dispense  du  souverain 
ilbid.,  163-164)  et  de  l'autorité  religieuse.  A  défaut 
d'héritiers  directs  ou  de  frères  et  de  sœurs,  les  oncles  et 
les  tantes  sont  appelés  en  première  ligne  à  la  succession 
de  leurs  neveux  et  nièces  (art.  753).  —  On  nomme  oncle 
ou  Umte  à  la  mode  de  Bretagne  le  cousin  germain  ou  la 
cousine  germaine  du  père  ou  de  la  mère. 

ONCTION,  en  termes  de  Théologie,  action  d'oindre, 
c-à-d.  d'étendre  sur  certains  endroits  de  la  peau  une 
huile  sainte.  Le  mot  onction  est  devenu  synonyme  de 
comécration  :  l'iiuîle  imprime  un  caractère  sacré  aux 
hommes,  aux  lieux  et  aux  objets  consacrés  au  culte. 
Chez  les  Hébreux,  les  grands  prêtres  et  les  rois  rece- 
vaient par  l'onction  sainte  la  dignité  que  Dieu  leur  con- 
férait; on  oignait  les  vases  employés  au  service  divin. 
L'Eglise  chrétienne  a  conservé,  comme  symbole,  l'usage 
des  onctions  dans  ses  cérémonies,  par  exemple,  au  Bap- 
tême, à  la  Confirmation ,  à  l'Ordination ,  à  l'Extrème- 
Onction  (K  ces  mots);  elle  les  emploie  également  pour 
le  sacre  des  rois. 

ONDOIEMENT,  baptême  sans  les  cérémonies  de  l'Église. 
Lorsqu'un  enfant  nouveau-né  ne  peut  être  porté  à  l'église, 
on  le  fait  ondoyer  par  le  prêtre  ;  mais  pour  que  le  bap- 
tême ainsi  administré  soit  valide,  il  faut  que  la  matière 
et  la  forme  soient  exactement  gardées  (V.  B.vptémb).  Hors 
le  cas  de  nécessité,  on  ne  doit  pas  ondoyer  sans  une  per- 
mission expresse  de  l'évêque. 

ONÉOS.  V.  Chevelure. 

ONGLET,  bande  de  papier  ou  de  parchemin,  ou  repli 
d'en  feuillet,  sur  lequel  les  relieurs  collent  dans  un  livre 
les  estampes ,  les  cartes  et  les  cartons.  —  Feuillet  simple 
i]outé  à  un  livre,  pour  remplacer  un  feuillet  que  l'on  en- 
lève et  qui  contient  soit  quelque  faute,  soit  quelque 
rédaction  à  changer.  On  l'appelle  onglet,  parce  que  l'ou- 
îrier  l'appuie  avec  l'ongle,  en  le  collant  dans  le  livre. 

ONGLËTTE ,  petit  burin  plat  dont  se  servent  les  gra- 
îeors. 

ONOBIASTICON,  titre  d'un  recueil  de  noms  (communs) 
ou  de  mots  chez  les  anciens  Grecs.  Ce  genre  de  compila- 
tion a  dû  être  l'objet  de  bon  nombre  d'ouvrages  depuis 
Tépoqae  alexandrine,  c.-à-d.  depuis  la  diffusion  do  la 
hngue  et  de  la  littérature  grecque  en  Asie,  en  Afrique,  et 
dans  les  parties  de  l'Empire  romain  qui  n'étaient  pas 


d'origine  hellénique.  Le  seul  recueil  qui  nous  soit  par 
venu  porte  le  nom  de  Julius  Pollux,  contemporain  des 
empereurs  Marc-Aurèle  et  Commode.  La  disposition  do 
ce  travail  est  bizarre,  capricieuse,  souvent  confuse:  lo 
1*'  livre  traite  des  dieux ,  de  leurs  différentes  qualifica- 
tions, des  termes  relatifs  au  culte  et  aux  édifices  religieux, 
puis  des  mots  qui  se  rapportent  à  la  royauté.  Le  2%  con- 
sacré à  l'homme,  énumère  les  termes  qui  se  rapportent 
a!'.x  parties  visibles  et  invisibles  du  corps  humain  ^  sujet 
qui  se  poursuit  dans  le  3«,  où  sont  compilés  tous  les  mots 
relatifs  à  la  naissance ,  à  la  parenté  de  tous  les  degrâs , 
au  mariage,  au  célibat,  aux  relations  entre  citoyens  ou 
étrangers,  entre  amis  et  ennemis,  entre  maîtres  et  es- 
claves, au  patriotisme,  etc.  Le  4*  livre  expose  tous  les 
termes  usités  pour  exprimer  les  connaissances  matérielles, 
intellectuelles  et  morales  auxquelles  on  était  alors  par- 
venu. Le  5*  est  relatif  à  la  chasse,  le  6*  aux  repas,  le  7« 
aux  métiers,  le  8*  aux  termes  de  Justice;  le  9'  énumère 
les  noms  donnés  aux  villes ,  les  termes  relatifs  à  leur  fon- 
dation, à  leur  organisation,  et  ceux  par  lesquels  on  dési- 
gnait les  environs  des  villes,  les  bourgades,  les  villages, 
les  champs,  les  prairies,  les  maisons  de  campagne,  etc. 
Enfin  le  10*  nous  offre  une  longue  liste  de  tous  les  usten- 
siles'en  usage  à  l'époque  de  Pollux,  et  de  tous  ceux  dont 
on  trouvait  le  nom  ou  la  description  dans  les  anciens 
écrivains  à  partir  d'Homère.  Une  disposition  claire  ferait 
de  VOnomasticon  un  excellent  manuel  pour  ceux  qui  s'oc- 
cupent de  l'antiquité  ;  car  il  renferme  des  renseignements 
extrêmement  précieux.  11  s'en  faut  beaucoup  que  l'auteur 
manque  de  critique  ;  il  n'admet  aucun  terme  au  hasard  ; 
il  s'en  rapporte  d'abord  à  l'usage,  et  cite  un  nombre  con- 
sidérable d'auteurs  et  de  passages  à  l'appui.  —  Plusieurs 
écrivains  modernes  ont  donné  à  leurs  ouvrages  le  titre 
d*Onomasticon.  Ainsi  l'on  a  VOnomasticon  historiœ  ro~ 
manœ  de  Glandorp  (Francfort,  1589)s  catalogue  des  noms 
et  des  familles  de  l'ancienne  Rome;  VOnomasticon  litte^ 
rarium  de  Saxe  (1775-1803, 8  vol.),  précieux  pour  l'his- 
toire de  la  littérature;  VOnomasticon  Tullianum  d'Orelli 
et  de  Baiter  (Zurich,  1836-38  ) ,  contenant  les  noms  géo- 
graphiques et  historiques  cités  par  Cicéron ,  la  liste  des 
lois  qu'il  invoque,  celle  des  expressions  ginecques  qu'il 
emploie ,  etc.  P. 

ONOMATOPÉE  (du  grec  onoma,  nom,  eipoiéin,  faire) ^ 
formation  d'un  mot  dont  le  son  est  imitatif  de  la  chose 
qu'il  signifie.  Ces  sortes  de  mots  ai>ondent  dans  toutes  Tes 
langues,  surtout  à  leur  origine  :  l'instinct  du  peuple  les 
a  formés  pour  la  plupart.  Tels  sont  en  français  trictrac, 
tic'tac,  glouglou,  coucou,  cliquetis,  coq,  gronder ^  cror- 
cher,  briser,  applaudir,  claquer,  siffler,  glousser,  tinta-- 
marre,  brouhiAa,  etc.  Il  existe  un  Dictionnaire  des  ono^ 
matopées  par  Ch.  Nodier,  1808,  in-8°.  P. 

ONTOLOGIE.  Ce  nom,  d'invention  toute  moderne, 
malgré  sa  physionomie  et  son  étymologie  grecques,  dé- 
signe ,  d'une  part ,  la  science  de  l'être  par  opposition  k 
la  science  des  phénomènes ,  et  de  l'autre  la  science  de 
la  pensée.  Philosophie  et  Logique  ;  c'est  surtout  à  ce  der- 
nier point  de  vue  que  TOntologie  mérite  d'attirer  l'atten- 
tion. Tandis  que  la  Psychologie  et  la  Logique  s'attachent 
exclusivement  à  l'élément  subjectif  de  la  connaissance, 
l'Ontologie  considère  les  objets  mêmes  de  nos  idées,  et 
se  donne  pour  but  d'en  approfondir  la  nature  et  d'en 
mesurer  la  réalité.  Entreprise  facile  à  mener  à  bien  lors- 

Su'on  laisse  en  dehors  de  toute  contestation  le  principe 
e  la  légitimité  de  l'entendement;  toute  chimérique  ai» 
contraire  lorsque  l'on  part  de  cette  donnée  sceptique  et 
négative,  que  l'idée  que  nous  avons  d'une  chose  n'est 
Jamais  une  sûre  garantie  de  la  réalité  objective  do  cette 
chose.  Si  l'idée  que  J'ai  des  corps  n'entraîne  d'abord 
avec  elle  la  conviction  que  les  corps  existent  réellement, 
si  les  concepts  du  temps  et  de  l'espace  ne  sont  c[ue  des 
formes  subjectives  de  la  sensibilité,  aucun  artifice  de 
raisonnement  ne  pourra  me  rendre  la  croyance  au  monde 
ext^eur,  au  temps,  à  l'espace,  et  il  en  sera  de  même  de 
la  loi  morale,  de  Dieu,  etc.  Tel  est  l'écueil  auquel  sont 
venues  se  heurter  deux  écoles  célèbres,  celle  de  Descartes 
et  celle  de  Kant;  l'une  et  l'autre,  pour  avoir  non-seule- 
ment distingué  (ce  qui  est  Juste),  mais  absolument  séparé 
Vidée  de  Vétre,  la  Psychologie  et  l'Ontologie,  ont  été  con- 
damnées ensuite  à  faire  en  vain  d'incroyables  efforts  pour 
revenir  de  l'une  à  l'autre  par  différents  artifices  de  lo- 
gique, que  ce  n'est  point  ici  le  lieu  d'expliquer.  Ajoutons 
que  l'Ontologie,  entendue  dans  le  sens  le  plus  raison- 
nable, n'étant  qu'une  partie  de  la  Métaphysique  (F.  c& 
mot)y  et  la  limite  qui  sépare  les  questions  ontologique» 
proprement  dites  des  autres  questions  métaphysiques 
étant  assez  arbitraire  et  flottante,  ni  le  nom,  ni  la  chose 


OPE 


1340 


opn 


ne  nous  paraissent  appelées  à  laisser  des  traces  dorables 
dans  la  philosophie.  B — e. 

ONYX,  variété  d*agate  dont  on  se  sert  pour  les  camées. 
On  taille  les  onvx  de  manière  c[ue  la  figure  soit  dessinée 
dans  la  partie  de  la  pierre  qui  est  de  couleur  brillante  ; 
celle  dont  la  teinte  est  obscure  forme  le  fond.  Dans  la 
Symbolique  chrétienne,  l'onyx  figure  Tinnocence,  la  can- 
deur; on  Tassigne  au  patriarche  Manassé  et  à  Tapôtre 
S*  Philiope. 

ONZIÈME,  intervalle  musical,  ainsi  appelé  parce  qu*il 
faut  former  onze  sons  diatoniques  pour  le  parcourir.  C'est 
la  réplique  ou  l'octave  de  la  quarte. 

OPATA  (lAngue).  V.  Mexique  (Langues  du). 

OPÉRA,  genre  de  composition  dramatique,  qui  serait, 
comme  Tindique  son  nom,  Vœuvre  suprême,  Touvrage 


beautés  de  la  poésie,  émouvoir  le  cœur  par  le  charme  et 
la  puissance  de  la  musique,  éblouir  les  yeux  par  le  prestige 
de  la  décoration  ;  et  la  danse  peut  encore  y  ajouter  ses 
séductions.  Il  est  de  toute  évidence  que  la  musique  est  la 
partie  essentielle  d'un  opéra,  et  que  les  autres  éléments 
sont  plus  ou  moins  secondaires.  Toutefois ,  il  ne  faut  pas 
aller  Jusqu'à  prétendre  que  le  poëvM  qui  sert  de  matière 
au  musicien,  et  que  nous  appelons  livret  (en  italien  {(- 
bretto)^  satisfait  à  toutes  ses  conditions  quand  la  structure 
générale  en  est  bonne  et  qu'il  fournit  des  situations  va- 
riées et  intéressantes  :  Apostolo  Zeno  et  Métastase  ont 
fourni  de  bons  poômes  aux  compositeurs  itafiens  ;  les  vers 
de  YArmide  de  Quinault,  qui  n'ont  Jamais  passé  pour 
mauvais ,  n'ont  point  empêché  Giack  d'écrire  une  admi- 
rable musique,  et  Ton  a  vu  d'heureuses  inspirations  mu- 
sicales périr  par  Tinsuffisance  des  poèmes  auxquels  elles 
étaient  appliquée^.  Certains  compositeurs  ont  partap^é 
l'opinion  qu'on  ne  peut  écrire  de  bonne  musique  sur  de 
beaux  vers  :  s'ils  n'ont  pas  produit  des  œuvres  de  génie, 
ce  n'est  pas  qu'ils  aient  manqué  de  mauvais  poètes. 

Les  Italiens  distinguent  deux  aortes  d'opéra,  le  sérieux 
(opéra  séria)  et  le  gai  {opéra  buffa).  De  cette  dernière 
qualification  est  venu  le  nom  de  Bouffes  donné  aux 
chanteurs  du  théâtre  italien  de  Paris.  Nous  avons  aussi 
deux  genres ,  le  grand  opérât  chanté  d'un  bout  à  l'autre, 
et  Vopéra  comique,  où  le  chant  se  mêle  au  dialogue  parlé  : 
c'est  une  désignation  peu  rigoureuse,  car  le  caractère 
d'une  pièce,  et  non  la  manière  dont  ses  parties  sont  coor- 
données, devrait  la  placer  dans  l'une  ou  l'autre  catégorie  ; 
et  l'on  voit  des  pièces  courtes,  rien  moins  qu'héroïques 
par  le  sujet ,  décorées  du  nom  fastueux  de  grand  opéra , 
tandis  que  d'autres,  avec  un  caractère  sérieux,  sont  ran- 
gées dans  l'opéra-comique. 

Les  premiers  essais  d'opéra  remontent  au  xvi*  siècle 
(V.  Italie  —  Musique  en).  Pendant  longtemps  la  mu- 
sique ne  fut  qu'une  mélopée  languissante,  au  moyen  de 
laquelle  les  auteurs  prétendaient  reproduire  le  chant  des 
anciens  Grecs  :  on  ne  songeait  guère  qu'à  combijier  des 
sons,  et  la  mélodie,  à  laquelle  l'harmonie  devait  s'appli- 
quer, était  laissée  dans  l'oubli  ;  dans  ces  premières  œu- 
vres, on  ne  voit  pas  trace  d'idées  élevées,  d'expression 
et  de  passion.  On  se  bornait  à  des  récits,  quelquefois 
mesurés,  quelquefois  libres  de  toute  mesure,  et  qui  pri- 
rent le  nom  de  récitatifs  (  V.  ce  mot).  Dans  VEuridice  de 
Péri  et  Caccini  (  1600  ) ,  un  personnage  chante  des  stances, 
qu'on  peut  considérer  comme  l'origine  de  l'air  :  une  petite 
ritournelle  les  précède,  et  les  mouvements  de  la  basse 
suivent  note  pour  note  ceux  de  la  voix,  tandis  que  dans 
le  récitatif  la  basse  faisait  souvent  des  tenues.  Le»  airs  se 
perfectionnèrent  peu  à  peu  :  dans  un  drame  musical 
d'Etienne  Landi,  H  Santo  Alessio  (1634),  on  en  trouve 
un  qui  a  du  rhytlime,  et  qui  contient  même  un  trait  de 
vocalisation.  Du  reste,  les  airs  d'opéra,  coupés  en  cou- 
plets comme  ceux  de  nos  vaudevilles  ou  comme  nos  ro- 
mances ,  avaient  alors  une  grande  monotonie,  et  ils  con- 
tenaient de  fréquents  changements  de  mesure  et  de  temps. 
On  voit  encore  par  les  œuvres  de  Cavalli  que  les  airs 
étaient  placés  au  commencement  des  scènes,  et  non, 
comme  dans  les  opéras  modernes,  vers  la  fin.  Les  formes 
de  l'air  ont  été  bien  souvent  modifiées  Jusqu'à  nos  Jours 
{V,  Ain,  Rondeau,  Cavatinb).  Le  duo  dramatique,  le 
tno ,  le  finale  (  V.  ces  mots) ^  ont ,  comme  l'air,  une  ori- 
gine italienne;  mais  c'est  en  France  que  le  chceur  (  V.  ce 
moi)  a  produit  ses  premiers  modèles.  Dans  ce  pays, 
l'opéra,  précédé  par  des  ballets  où  les  danses  étaient  en- 
tremêlées de  dialogues  (  V,  Ballet)  ,  ne  fit  son  apparition 
ouç  pendant  la  minorité  de  Louis  aIV,  grâce  au  cardinal 
Mazariu  (  K.  France  —  Musique  en)  ;  accucill    avec  fa- 


veur par  la  cour,  sifflé  par  les  bourgeois,  qui  n'y  trouvaient 

Sue  de  l'ennui ,  il  se  releva  ouand  Lulli  eut  pris  la  direc- 
on  de  l'Académie  royale  de  Musique  en  1672.  Toute- 
fois, les  œuvres  de  ce  compositeur  sont  encore  très-mo- 
notones ,  moins  peut-être  à  cause  de  l'insuffisance  de  son 
génie  que  pour  les  difficultés  qu'opi)osait  l'incapacité  des 
exécutants.  Beaucoup  de  gens  aussi  étaient  de  l'avis  du 
maître  à  chanter  de  M.  Jourdain ,  «  que  de  tout  temps  la 
musique  a  été  affectée  pour  la  vraisemblance  aux  ber- 
gers,  par  cette  raison  qu'il  n'est  pas  naturel  que  des 
princes  et  des  bourgeois  chantent  leurs  passions.  »  Cétiit 
donc  une  opinion  générale,  que  la  musique,  impropre  à 
exprimer  les  grands  mouvements  de  Time,  n'était  de 
proportion  qu'avec  les  paisibles  et  tendres  bergeries  dont 
on  avait  le  goût  à  cette  époque.  Des  esprits  sérieux  con- 
testaient les  conditions  mêmes  de  la  musique  dramatique, 
et  repoussaient  la  convention,  aujourd'hui  acceptée,  sur 
laquelle  elle  repose.  Ce  qui  choque  Saint-Évremond,  par 
exemple,  c'est  que  a  l'on  chante  toute  la  ^ièce,  depuis  le 
commencuoient  jusqu'à  la  fin,  comme  si  les  personnes 
qu'on  représente  s'étaient  ridiculement  ajustées  pour 
traiter  en  musique  et  les  plus  communes  et  les  plus  im- 
portantes affaires  de  leur  vie.  Peut-on  s'imaginer,  ajoute- 
t-il,  qu'un  maître  appelle  son  vale^^  ou  qu'il  lui  donne 
une  commission  en  chantant;  qu'un  ami  fasse,  en  chan- 
tant, une  confidence  à  son  ami;  qu'on  délibère,  en  chan- 
tant, dans  un  conseil;  qu'on  exprime  avec  des  chants  les 
ordres  qu'on  donne,  et  que  mélodieusement  on  tue  les 
hommes  à  coups  d'épée  et  de  javelot  dans  un  combat 
{Au  duc  de  Buckingham^  Sur  les  Qpércu)?  x  Qu'eût  dit 
cet  adversaire  du  langage  musical,  s'il  eût  connu  les  pre- 
miers opéras  de  l'Allemagne?  Ils  étaient  écrits  en  deux 
langues  :  les  airs,  les  duos,  tout  ce  qui  exprimait  les 
sentiments  se  chantait  en  italien ,  et  l'on  employait  l'ul- 
lemand  pour  les  récitatifs,  pour  tout  ce  qui  devait  aider 
à  débrouiller  l'intrigue  du  drame.  L'esprit  français  ne  se 

Çassionna  pour  l'opéra  qu'au  xviii*  siècle,  à  partir  de 
733,  lorsque  Rameau  fit  u.^  révolution  nouvelle.  Rameau 
poursuivait  le  beau  naturel,  comme  on  disait  alors;  muis 
il  n'entendait  point  par  là  le  chant  ou  la  mélodie  :  à  ^es 
yeux,  tout  le  charme  et  toute  l'énergie  de  la  musique 
étaient  dans  l'harmonie.  Il  n'en  fit  pas  moins  faire  un 
grand  pas  à  l'opéra,  par  l'emploi  d'un  grand  nombre  de 
moyens  nouveaux ,  dont  l'art  devait  profiter.  C*est  prin- 
cipalement depuis  GlQck  que  la  variété  d'accents  et  de 
mouvements,  aussi  nécessaire  à  la  musique  que  la  va- 
riété des  couleurs  et  des  nuances  Test  à  la  peinture, 
devint  une  loi  du  drame  musical  en  France  ;  cette  loi 
avait  été  déjà  observée  en  Italie  par  un  grand  nombre  de 
compositeurs,  entre  autres  Carissimi,  Scarlatti  et  Per- 
golèse.  —  V,  Ménétrier,  Des  représentations  en  musiqui, 
Paris,  1681,  in-12  ;  Riccoboni,  Lettres  à  Af^^*  la  marquise 
de  P...  sur  Vopéra,  Paris,  1741,  in-12;  De  Chassiroo, 
Réflexions  sur  les  tragédies-opéra,  Paris,  1751,  io-lS; 
De  Chastellux,  Essai  sur  l'union  de  la  musique  et  de  la 
poésie,  1705;  Algarotti,  Saggio  sopra  V Opéra,  Livourne, 
1763;  Planelli,  DelV  opéra  in  musica,  Naples,  177^; 
Sutherland,  Histoire  de  VOpéra^  en  anglais,  1861,  3  vol. 
in-8°,  et  les  articles  de  ce  Dictionnaire  consacrés  à  lliis- 


K  notre  Dictionnaire  de  BiO' 


toire  de  la  musique  dans  chaque  pays. 

op^RA  DE  PARIS.         i  V.  notre  Dict 

OPÉRA-COMIQUE.  S     graphie  et  d'Histoire. 

OPÉRATION  (du  latin  opus,  œuvre),  se  dit,  en  Philo- 
sophie, de  tout  travail  de  l'esprit  dirigé  par  la  volent/' 
vers  un  but.  —  En  termes  de  Stratégie,  le  mot  opération 
désigne  les  mouvements  généraux  des  arm^.  Le  plan 
d'opérations  est  l'ordre  général  des  entreprises,  arrêté 
avant  l'ouverture  de  la  campagne.  On  nomme  ligne  d'opé- 
rations la  ligne  que  suit  une  armée  pour  se  porter  de  n 
base  vers  son  objectif  ou  point  décisif  qu'elle  veut  at- 
teindre; base  d'opérations,  le  territoire  avec  lequel  Tar- 
mée  doit  rester  en  communication  pour  en  tirer  ses 
ressources  et  ses  renforts,  ou  B*y  réfugier  en  cas  de  revers. 

OPÉRETTE,  c-à-d.  petit  opéra^  nom  que  les  Alle- 
mands donnèrent  au  xviu*  siècle  à  des  espèces  de  drames 
à  couplets,  avec  quelques  duos  et  trios,  mais  plus  humbles 
dans  leurs  prétentions  que  les  plus  légers  opérss-comi- 
ques.  Il  est  passé  en  France  de  nos  Jours,  et  a  été  spé- 
cialement appliqué  aux  pièces  du  répertoire  des  Folies- 
Nouvelles  et  des  Bouffes-Parisiens^  à  Paris. 

OPHICLÉIDE,  c-à-d.  serpent  à  clefs  (du  grec  ophis. 
serpent,  et  kléis,  clef)i  instrument  de  musique,  à  vent  et 
en  cuivre,  qui  se  joue  avec  un  bocal  ou  embouchure 
ouverte.  11  est  d'invention  hanovrienne,  et  on  ne  le  coq* 
naît  guère  en  France  ^ue  depuis  1815.  Introduit  en  18:^ 
dans  la  musique  militaire,  il  y  a  remplacé  le  serpent 


OPI 


13Ji 


OPT 


(F.  00  mot],  comme  il  devait  aussi  le  faire  plus  tard  à 
l'église.  Les  facteurs  Labbaye,  Halary,  et  Sax  l'ont  pro- 
pagé et  perfectionné.  On  distingue  Vophicléide'têÎMr, 
ïophidéide-€Uto,  et  Vophicléide-basse,  qui  forment  une 
famille  avec  le  cor  à  clefs;  leur  étendue  est  à  peu  près 
celle  des  voix  auxquelles  ils  correspondent.  La  longueur 
totale  d'an  ophicléide-ténor,  non  compris  Tembouchure, 
est  de  3°*,48;  le  corps  de  Tinstrument  a  2"\i4;  le  tube 
qui  reçoit  et  modifie  le  son  a  il  millimèt.  à  son  embou- 
chure, et  2  décimèt.  quand  il  arrive  au  pavillon.  Cet  ophi> 
cléide,  dont  la  partie  s'écrit  sur  la  clef  de  fa,  peut  jouer 
k  partie  de  basse ,  puisque  son  étendue  est  du  si  bémol 
au-dessous  de  la  portée  de  la  clef  de  fa  Jusqu'au  la  et 
même  Vut  au-dessus  des  2*  et  3*  lignes  de  la  def  de  soi. 
Les  opliicléides  en  si  bémol,  dont  on  se  sert  dans  la  mu- 
oque  militaire,  sont  d'un  ton  plus  bas  que  le  précédent, 
et  ont  toujours  par  conséquent  dans  l'exécution  deux  bé- 
mols de  moins  à  la  clef.  L'ophicléide-alto  a  la  même 
étenSue  que  l'ophicléide- ténor,  mais  transportée  une 
quarte  plus  haut  ;  on  écrit  sa  partie  sur  la  clef  a*ut  3*  ligne 
ou  sur  la  clef  de  sol.  L'ophicléid&-basse  est  à  la  quinte 
inférieure  de  Tophicléide-ténor,  et  par  consécpient  une 
octave  au-dessous  de  l'ophicléide-alto.  L'ophicléide  est 
farni  de  neuf  clefs,  dont  la  première  se  ferme  à  volonté 
au  moyen  d'une  bascule;  les  autres  sont  bouchées.  Dans 
rophlcléide-basse,  les  clefs  sont  remplacées  par  trois  pis- 
tons, qui  en  rendent  le  maniement  plus  facile.  Il  existe 
des  méthodes  d'ophicléide  par  Cornette  et  par  Schiltz.  B. 
OPINION,  lugement  que  porte  l'esprit  en  matière  con- 
tingente, probable  ou  douteuse.  On  oppose  Vopinion  à  la 
«iencê. 

OPINION  PUBLIQUE,  puissance  invisible,  mystérieuse, 
incertaine,  capricieuse,  que  nul  pouvoir  lie  saurait  arrêter 
ni  comprimer  ;  tout  au  plus  un  gouvernement  peut-il, 
pendant  un  temps,  en  suspendre  les  effets  qu'il  redoute. 
Cest  comme  une  conscience  de  tous,  d'autant  plus  ab- 
solue qu'elle  croit  toujours  bien  juger,  suivant  les  prin- 
cipes de  la  saine  morale  et  de  la  saine  politique.  Un  sage 
gouremement  ne  méprisera  Jamais  l'opinion,  lui  résistera 
quelquefois,  cherchera  toujours  h  l'éclairer  quand  elle 
s'égare,  et  même  ira  au-devant  de  ses  égarements  en  la 
dirigeant,  autant  que  possible.  Bien  que  l'opinion  soit 
l'expression  du  sentiment  du  grand  nombre,  cependant 
elle  n'est,  d'ordinaire,  que  l'œuvre  d'une  minorité  plus 
ou  moins  grande.  Les  témoignages  de  l'histoire,  et  no- 
tamment ceux  de  nos  Révolutions,  prouvent  cpie  ce  n'est 
presque  toujours  que  la  minorité  de  la  population  qui  se 
laisse  emporter  d'abord  par  les  passions  sous  lesquelles 
les  gouvernements  succombent.  Les  esprits  les  plus  ar- 
dents, ceux  qui  se  croient,  ou  qui  ont  l'art  de  se  faire 
passer  pour  les  plus  éclairés,  se  font  écouter  de  la  foule, 
et  comme  on  a  toujours  raison  quand  on  parle  seul, 
comme  il  y  a  toujours  plus  d'esprits  faux  ou  de  pauvres 
d'esprit  que  d'esprits  Justes,  ils  persuadent  avec  des 
raisonnements  captieux  ou  spécieux,  et  forment  ainsi  ce 
qu'on  pourrait  appeler  une  fausse  opinion  publique.  Voilà 
pourquoi  il  est  du  devohr  des  gouvernements  de  diriger 
Topinion;  s'ils  restent  impassibles,  la  majorité  prend  leur 
inertie  pour  rembarras  d'une  mauvaise  conscience,  et  de- 
vient pour  les  séditieux  un  auxiliaire  qui,  même  inerte, 
leur  (ait  la  partie  belle  et  prive  le  pouvoir  de  tout  appui. 
—  Cependant,  il  y  a  certaines  conditions  que  doit  rem- 
plir un  gouvernement  qui  veut  diriger  l'opinion,  c'est  de 
^  montrer  honnête,  moral,  préoccupé  des  intérêts  et  de 
!â  gloire  de  la  nation,  ferme  et  habile  ;  «  mais  lorsqu'une 
'lêplorable  faiblesse  et  une  versatilité  sans  fin  se  mani- 
rei>tent  dans  les  conseils  du  pouvoir  ;  lorsque,  cédant  tour 
à  tour  à  l'influence  des  partis  contraires ,  et  vivant  au 
jour  le  Jour,  sans  plan  fixe,  sans  marche  assurée,  il  a 
donné  la  mesure  de  son  insuffisance,  et  que  les  citoyens 
les  plus  modérés  sont  forcés  de  convenir  c^ne  l'État  n'est 
plus  gouverné;  lorsque  enfin  à  sa  nullité  au  dedans 
Padministration  joint  le  tort  le  plus  grave  qu'elle  puisse 
vroïT  aux  yeux  d'un  peuple  fier,  Je  veux  dire  l'avilisse- 
ment au  dehors,  alors  une  inquiétude  vague  se  répand 
dans  la  société,  le  besoin  de  sa  conservation  l'agite,  et, 
promenant  sur  elle-même  ses  regards,  elle  semble  cher- 
cher un  homme  qui  puisse  la  sauver.  »  Ce  tableau,  tracé 
P&r  Napoléon  l*',  est  celui  du  gouvernement  Directorial 
de  la  France  vers  la  fin  de  1709,  et  montre  admirablement 
ce  que  nous  voulons  prouver,  que  l'abandon  de  l'opinion 
publique,  même  inerte,  est  encore  un  immense  danger  pour 
iiQ  gouvernement.  Celui  qui  vient  de  Juçer  le  Directoire, 
^  grand  moraliste  comme  en  grand  pohtique,  vit,15  ans 
plus  tard,  l'abandon  de  l'opinion  publique  devenir  une 
<l«s  causes  puissamtes  de  la  chute  du  1*'  Empire  français. 


Là  encore  ce  fut  la  miT^crit^  qui  fit  la  loi  ;  la  majorité 
resta  passive,  parce  que  son  opinion  s'était  retirée  du 
gouvernement,  et  l'homme  le  plus  fait  pour  être  souve- 
rain put  être  mis  au  ban  des  souverains  par  des  haines 
et  des  Jalousies  royales,  parce  que  l'opinion  publique  ne 
le  soutenait  plus.  V.  Popolarité.  C.  D— t. 

OPISTHODOME,  OPISTHION  ou  OPISTHGNAOS, 
nom  donné  par  les  anciens  Grecs  à  la  partie  postérieure 
d'un  temple,  opposée  au  Pronaos,  et  où  n'entrait  pas  le 
public.  Les  Romains  l'appelaient  Posticum. 

OPISTflOGRAPHE  (du  grec  opisthen,  par  derrière,  V 
graphéin,  écrire),  nom  qu'on  donne  en  Diplomatiqur 
à  une  charte  écrite  des  deux  côtés.  En  général,  jusqu'au 
xrv*  siècle,  les  actes  n'ont  été  écrits  que  sur  le  recto,  et, 
s'il  y  a  quelque  chose  au  verso,  ce  sont  des  notes  ajoutées 
après  coup.  Les  opisthographes  sont  d'ailleurs  très-rares. 
—  Dans  le  Bas- Empire,  on  appela  Opisthographe  tout 
livre  où  l'on  écrivait  sur-le-champ,  pour  revoir  et  amen- 
der plus  tard;  les  corrections  et  additions  se  faisaient  au 
verso  de  chaque  feuillet. 

OPLITES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d'Histoire. 

OPPOSÉES  (Têtes),  têtes  qui,  sur  des  pierres  gravées 
ou  des  médailles,  ont  la  face  tournée  à  l'opposé  l'une  de 
l'autre. 

•  OPPOSITION,  en  termes  de  Droit,  obstacle  mis  par 
qiielau'un  à  quelque  chose.  On  forme  opposition  aux 
scellés,  à  une  vente,  à  un  payement,  à  un  mariage.  L'op- 
position ne  peut  être  levée  que  par  le  consentement  de 
l'opposant,  ou  par  jugement.  —  On  se  sert  de  l'opposi- 
tion pour  se  pourvoir  contre  les  jugements  rendus  par 
défaut;  elle  doit  être  formée  dans  la  huitaine  qui  suit  la 
signification  faite  à  l'avoué  de  la  partie  condiamnée;  à 
défaut  d'avoué,  elle  est  recevable  jusqu'à  l'exécution  du 
jugement  {Code  de  Procéd.y  art.  155-165).  —  La  tierce 
opposition  est  celle  que  forme  une  personne  à  un  Juge- 
ment préjudiciable  à  ses  droits,  et  lors  duquel  ni  elle,  ni 
ceux  qu'elle  représente,  n'ont  été  appelés.  Si  l'opposant 
succombe,  il  y  a  amende  de  50  fr.  au  moins,  sans  préju- 
dice des  dommages-intérêts  {Ibid.^  474-479). 

OPPOSITION,  en  matière  de  gouvernement,  nom  que  l'on 
donne,  dans  les  assemblées  législatives,  aux  membres 
qui  désapprouvent  systématiquement  la  marche,  les 
actes,  les  tendances  du  gouvernement  et  ^e  l'administra- 
tion. Dans  les  gouvernements  parlementaires  bien  assis, 
l'opposition  est,  en  réalité,  une  guerre  de  personnes  ou  de 
partis  pour  s'arracher  le  pouvoir;  dans  ce  cas,  ceux  qui 
succombent,  et  qrui  représentaient  le  parti  gouvernemen- 
tal, deviennent,  le  lendemain  de  leur  chute,  le  parti  de 
l'opposition.  —  Dans  les  gouvernements  nouveaux,  que 
le  temps  n'a  pas  encore  consolidés,  l'opposition  se  com- 
pose d'ennemis  du  gouvernement,  poursuivant,  non  pas 
seulement  un  changement  de  ministère,  mais  une  révo- 
lution. Si  les  opposants  se  voient  en  minorité,  ils  se 
coalisent  dans  un  Dut  commun  de  renversement,  (quittes 
ensuite  pour  recommencer  la  lutte  entre  eux  lorsqu'ils  au- 
ront abattu  le  gouvernement  qui  fait  obstacle  à  leur  am- 
bition ou  à  leurs  sympathies.  Il  parait  de  principe,  dans 
toutes  les  oppositions,  de  ne  Jamais  rien  approuver,  même 
les  meilleures  lois  et  les  plus  sages  mesures  prises  par 
l'administration  ou  le  gouvernement  que  l'on  combiEit: 
dans  ces  cas,  la  plus  grande  marque  de  mansuétude  est 
le  silence  absolu,  quand  il  n'y  a  pas  moyen  de  formuler 
un  blâme  sans  s'exposer  à  soulever  contre  soi  la  con- 
science publique.  Le  parti  doit  aussi  se  discipliner  pour 
voter  toujours  avec  ses  chefs,  sans  qu'aucun  membre  se 
dirige,  à  l'occasion,  suivant  ses  impressions  personnelles. 
Quoi  qu'il  en  soit,  l'opposition,  quand  elle  se  tient  dans 
des  limites  légales,  peut  éclairer  le  gouvernement,  le 
stimuler  au  besoin,  bien  servir  la  cause  de  l'intérêt  pu- 
blic en  signalant  les  abus,  et  même  en  jugeant  les  af- 
faires sous  leurs  côtés  les  plus  défavorables,  car  il  sort 
toujours  quelque  chose  d'utile  des  discussions  contradic^ 
toires.  C.  D— y. 

OPTATIF  (du  latin  optare,  yuhaiter),  mode  de  la  con 
jugaison  grecque,  ainsi  appelé  parce  que  très-souvent  il 


caractéristiques 

au  moyen  aiumv,  etuiYiv,  oiiJLr,v.  La  terminaison  of/;v  ca* 


OPT 


1342 


OR 


nctérise  assez  souvent,  suru^^t  dans  les  verbes  contractes, 
le  présent  de  Toptatif,  et,  dans  toutes  les  conjugaisons,  la 
terminaison  aiu.i  de  Taoriste  l*'  actif  est  souvent  rem- 
placée par  eta  (eia;,  eie,  etc.). 

L'optatif,  employé  isolément,  est  représenté  en  fran- 
çais quelquefois  par  le  subjonctif  du  verbe  pouvoir  con- 
jugué interrogativement  et  suivi  de  Tinfinitif,  et  ordi- 
nairement par  les  circonlocutions  plaise  au  ciel,  pliU  au 
uel  que,  suivies  du  subjonctif.  —  Outre  cette  significa- 
tion qui  lui  a  valu  son  nom,  Toptatif  exprime  en  général 
ridée  de  possibilité,  de  vraisemblance,  et,  par  consé- 
quent, celle  dincertitude.  Dans  ce  cas,  il  est  très-souvent 
accompagné  de  la  particule  ôv  (ou  xi  en  poésie),  et  ré- 
pond à  notre  conditionnel  ou  à  nos  diverses  formes  du- 
bitatives. Il  exprime  aussi,  joint  à  la  même  particule, 
une  assertion,  mais  en  la  pr&entant  sous  forme  de  con- 
jecture, et  par  conséquent  avec  modestie  et  politesse;  ou 
une  conclusion,  à  laquelle  on  donne  ainsi  un  ton  moins 
tranchant;  une  affirmation  ayant  rapport  à  Tavenir,  mais 
qui  se  trouve  ainsi  adoucie;  un  impératif,  sous  forme 
d'invitation  polie.  —  Un  des  rôles  les  plus  importants  de 
Voptatif  est  celui  qu'il  Joue  dans  les  propositions  subor- 
données, lorsque  celles-ci  expriment  une  action  apparte- 
nant au  passé,  qaoi  que  soit  d'ailleurs  le  temps  du  verbe 
principal  :  «  Il  lui  ordonna  de  se  retirer,  et  de  ne  point 
l'irriter,  afin  qu'il  s*en  retournât  sain  et  sauf  chez  lui.  » 
Aussi  l'optatif  s'emploie-t-il  souvent  après  une  proposi- 
tion dont  le  verbe  est  au  présont  historique  ou  de  narra- 
tion mis  pour  le  passé.  Lorsque  l'on  rapporte  ou  allègue 
qu'une  personne  a  dit  quelque  chose,  ou  que  l'on  veut 
donner  à  entendre  qu*elle  a  eu  telle  ou  telle  jpensée,  l'op- 
tatif est  encore  employé.  On  s'en  sert  ennn  après  les 
conjonctifs,  lorsque  ces  mots  se  trouvent  dans  une  pro- 
position exprimant  une  action  réitérée. 

En  résumé,  l'optatif  est  une  véritable  variante  du  sub- 
jonctif; il  exprime  l'idée  de  subordination,  mais  avec 
une  nuance  dubitative  un  peu  plus  marquée.  Ses  temps 
-sont  secondaires  du  subjonctif;  car  tous,  même  le  pré- 
sent, le  futur  et  le  parfait,  ont  les  signes  des  temps  se- 
condaires, tandis  qu'au  subjonctif  l'aoriste  même  a  les 
formes  des  temps  principaux.  Ainsi ,  dans  leurs  rapports 
les  plus  généraux  avec  le  français,  les  temps  de  l'optatif 
correspondent  à  rimparfait  et  au  plus-que-parfait  du 
«ubjonctif  de  cette  langue.  P. 

OPTATION  (du  latin  optatio,  vœu),  figure  de  Rhé- 
torique par  laquelle  on  énonce  un  vœu,  un  vif  désir, 
mais  toujours  en  bonne  part  (ce  en  quoi  elle  se  distingue 
de  rimprécation  ).  Elle  commence  ha[oituellement  par  ces 
mots  :  Fasse  le  ciel  !  Plût  à  Dieu  quel.,,  Puissiez-vous  I 

OPTIMISME,  mot  c^ui,  dans  le  sens  vulgaire,  désigne 
vaguement  une  certaine  disposition  à  prendre  toutes 
choses  par  le  meilleur  côté,  à  voir  tout  en  beau.  L'opti- 
misme philosophique  garde  sans  doute  quelque  chose  de 
•cette  disposition,  mais  il  précise  et  transforme  par  la 
réflexion  ce  qui  n'était  d'abord  que  sentiment  et  intuition 
confuse.  —  L'optimisme,  tliéorie  métaphysique  et  morale 
■à  la  fois,  est  une  des  solutions,  et,  lorsqu'il  est  bien  com- 
pris, la  meilleure  des  difficultés  que  suscite  le  fait  incon- 
testable de  l'existence  du  mal,  mis  en  présence  de  la 
croyance  si  naturelle  et  si  puissante  à  l'existence  d'un 
être  parfait.  «  Si  Dieu  existe,  d'où  vient  le  mal  ?  s'il 
n'existe  pas,  d'où  vient  le  bien?  »  Ce  n'est  pas  résoudre 
la  question  ;  c'est  la  supprimer  arbitrairement  que  de  nier 
soit  l'existence  de  Dieu,  soit  celle  du  mal.  Nous  n'avons 
point  à  parler  ici  des  systèmes  qui  font  du  mal  l'expia- 
tion des  fautes  d'une  vie  antérieure  (  V,  MéTEMPSYCoss, 
Platonisme,  Préexistence  dks  âmes),  ni  de  ceux  qui  font 
de  l'univers  le  théâtre  d'une  lutte  éternelle  entre  deux 
principes  également  puissants  :  le  principe  du  bien  et  le 
principe  du  mal  (  F.  notre  article  Ddausmb)  ;  Topti- 
misme,  dont  nous  acceptons  volontiers  la  formule,  si  sou- 
vent tournée  en  ridicule,  que  «  tout  est  pour 'le  mieux 
dans  le  meilleur  des  mondes  possible ,  »  doit  être  en- 
tendu dans  ce  sens  :  non  pas  que  tout  y  est  bien ,  au 
regard  des  individus  et  des  espèces ,  même  au  regard  de 
la  portion  limitée  de  la  cré&tion  qu'il  nous  est  donné  de 
connaître;  mais  que  l'univers,  pris  dans  son  ensemble, 
présente  la  plus  grande  somme  de  bien  possible  et  la 
plus  petite  somme  de  mal.  A  priori  ^  comment  en  serait^ii 
autrement?  L'univers  n'est^il  pas  l'œuvre  d'un  être  par- 
fait? Mais  cet  être  ne  pouvait,  sans  se  reproduire  lui- 
même  dans  son  œuvre,  communiquer  au  monde  sa  per- 
fection absolue.  L'imperfection  est  une  condition  de  toute 
oature  créée.  Dès  lors,  il  ne  s'agit  plus  que  d'examiner 
les  principales  formes  du  mal  physique  et  du  mal  moral, 
tous  !esquelles  se  manifeste  cette  imperfection  de  nature. 


ou  mal  métaphysique,  et  de  trouver,  si  l'on  peut,  ]| 
secrète  harmonie  qui  fait  de  chacune  d'elles  un  élémeol 
de  l'ordre  de  choses  le  meilleur  possible  dans  son  ensemi 
ble.  On  reconnaîtra  le  plus  souvent  que  ce  qui  parait  m 
mal,  ce  qui ,  pris  en  soi-même  et  isolément,  en  est  an 
en  effet,  ne  laisse  pas  de  faire  partie  d'un  système  d'où 
il  ne  pourrait  disparaître  sans  entraîner  la  perte  d'uo 
l)ien  beaucoup  plus  grand.  Tel  est  notamment  le  carac- 
tère des  fautes  et  des  vices  des  hommes,  lesquelles  sup- 
posent la  liberté  de  se  résoudre,  condition  de  toute  vertu. 
Or,  un  monde  où  régnerait  de  toute  nécessité  une  inno< 
cence  forcée,  ne  serait-il  pas  de  beaucoup  inférieur  au 
monde  tel  qu'il  est?  Ajoutons  bien  vite  que  quand  notre 
vue  bornée  ne  parviendrait  pas  à  découvrir  la  raison 
cachée  de  tel  ou  tel  mal,  ce  ne  serait  pas  un  motif  de 
renonœr  à  notre  conviction.  Ajoutons  encore  qu'il  vaut 
mieux,  en  ceci ,  comme  dans  la  question  des  causes  finales, 
qui  présente  avec  celle-ci  tant  de  rapports,  s'abstenir  de 
toute  explication,  que  de  risquer  des  explications  dou- 
teuses et  peu  satisfaisantes  que  les  adversaiies  de  l'opti- 
misme peuvent  facilement  retourner  contre  ses  partisans. 
On  trouve  un  certain  nombre  de  ces  explications  dans 
Leibniz  à  côté  des  idées  profondes  et  ingénieuses  qu'il 
a  accumulées  sur  ce  sujet.  Eu  effet,  si  quelques  vues 
optimistes  n'ont  pas  fait  défaut  aux  philosophes  anté- 
rieurs, on  sait  que  c'est  Leibniz  qui,  dans  sa  Théodicèe, 
c-à-d.  dans  ses  Essais  sur  la  bonté  de  Dieu,  la  liberté 
de  Vhomme  et  Vorigine  du  mal ,  a  formulé  et  développé 
l'optimisme  en  un  véritable  système  philosophique.  C'est 
là  qu'il  doit  être  étudié.  A  côté  de  ces  longues  et  savantes 
études,  il  ne  nous  paraît  pas  hors  de  propos  de  rappeler 
une  des  plus  charmantes  fables  de  notre  incomparable 
La  FonUine,  le  Gland  et  la  Citrouille,  petit  traité  d'op- 
timisme en  action  i 

«  DlcD  ta\t  bien  ce  qa*ll  Hit.  n  Sans  en  chercber  la  preaTe, 
Eu  tout  cet  uniTers ,  et  l'aller  parcourant , 
Dans  les  citrouilles  Je  la  treure. 


Dieu  ne  Ta  pas  roulu  :  sans  douta  11  eut  raison, 

OPnON  (du  latin  optio),  en  termes  de  Droit,  faculté 
de  choisir  entre  deux  choses,  entre  deux  partis.  Le  droit 
d'option  se  rattache  à  une  foule  de  contrats^  et  forme 
même  la  condition  essentielle  des  obligations  alternatives 
{V,  Obugation).  En  vertu  du  droit  d'option,  la  femme 
peut  renoncer  à  la  communauté  !q>rès  la  dissolution  du 
mariage. 

OR,  un  des  métaux  précieux,  employé  comme  instro- 
ment  d'échange  sous  forme  de  monnaie,  et  qui  sert  aussi 
de  matière  aux  travaux  d'orfèvrerie  et  de  bijouterie.  L'or 
a  été  connu  de  tout  temps  :  les  peuples  les  plus  anciens 
et  les  plus  sauvages  en  faisaient  usage.  Abraham  payait 
avec  do  l'or  le  tombeau  de  sa  femme  ;  les  héros  d'Ho- 
mère, comme  les  indiens  avant  la  découverte  de  l'Amé- 
rique, portaient  des  ornements  d'or.  Dans  l'antiquité, 
l'Asie  produisait  et  possédait  une  grande  quantité  d'or  : 
on  évalue  le  trésor  amassé  par  les  rois  de  Perse  en  lin- 
gots d'or  à  S  milliards  environ  de  notre  monnaie.  En  Asie, 
le  mont  Tmolus  et  le  Pactole,  le  pays  des  Ghalybes  et 
celui  des  Soanes,  dans  le  voisinage  du  Caucase,  les  monts 
Émodes  dans  le  voisinage  de  Caspatyre,  l'Inde,  la  Cber- 
sonèse  d'or,  l'Arabie,  principalement  dans  l'Yémen,  et, 
au  delà  de  ces  régions  connues  des  Anciens,  le  pays  des 
Massagètes  et  des  Scythes,  produisaient  de  l'or.  En  Grèce 
et  en  Macédoine,  on  trouvait  des  mines  ou  des  lavages 
aurifères  sur  les  bords  de  l'Uèbre,  à  Crénides,  à  Daton , 
à  Scaptô-Hylè,  à  Thasos,  près  du  lac  Prasias,  dans  Hle 
de  Siphnos,  au  mont  DamasUus  en  niyrie,  dans  li  ré- 
gion des  Alpes ,  chez  les  Dal mates,  chez  les  Taurisques, 
chez  les  Salasses  et  près  de  VerceiL  En  Gaule,  les  Pyré- 
nées et  le  pays  des  Tarbelliens  en  renfermaient  ;  en  Es- 
pagne, qui  depuis  les  Phéniciens  Jusque  vers  les  der- 
niers temps  de  rr<inpire  romain,  resta  la  source  la  plus 
{)roductive  de  métaux  précieux,  l'or  se  rencontrait  dans 
es  rivières  de  l'Asturie,  de  la  Gallécie,  du  canton  des 
Artabres  et  de  la  Lusitanie  ;  on  exploitait  de  riches  filons 
dans  les  montagnes  qui  forment  U  vallée  supérieure  du 
Bétis,  chez  les  Orétans,  les  Bastitans,  à  Cotines.  Les 
mines  de  Scapté-Hylè  produisaient  annuellement  80  ta- 
lents (444,800  fr.),  et  celles  de  Thasos  200  à  300  talents 
(1,112,000  fr.  à  1,668,000  fr.).  Les  Asturies  et  la  Galice 
rendirent  à  certaines  époques  plus  de  3,000  kilogr.  d'or 
par  an  (environ  6,000,000  de  fr.).  Néaiimoins,  la  pro- 
duction totale  du  monde  ancien  était  assez  peu  considé- 
rable relativement  à  la  production  actuelle. 


OR 


J343 


OU  A 


A  répoque  de  l'invasion  des  Barbares,  beaacoap  de 
miiies  furent  abandonnées;  la  production  diminua,  et 
lesta  assez  faible  jasau'au  temps  de  la  découverte  de 
rAfflériqae.  Des  calculs,  d*ailleurs  très-hypotbétiques , 
fixent  à  4,106  kilogr.  (de  12  à  13  millions  de  fr.)  la  produc- 
tion annuelle  de  Tor  en  Europe,  en  Asie  et  en  Afnaue  au 
iT*  siècle.  Les  principales  mines  alors  exploitées  étaient 
celles  de  Siderocapso  (Macédoine),  de  Cbemnits,  de 
Kremnitz  et  de  Facebajer  (Hongrie),  de  Joacbimsthal 
'Bohème),  du  Hartz  et  de  Schneeberg  (Saxe).  La  pro- 
doctioD  était  loin  d'être  régulière;  par  exemple,  les  mines 
du  Hartz,  découvertes  dans  le  cours  du  x*  siéM:le ,  furent 
Abandonnées  à  la  suite  d'une  famine  en  4006;  reprises 
en  1116,  abandonnées  de  nouveau  de  1186  à  1209,  puis 
en  1353,  elles  restèrent  inactives  pendant  un  siècle. 

La  découverte  de  rAmérioue  augmenta  considérable- 
ment la  quantité  de  Tor.  Le  pillage  des  trésors  du  Mexique 
et  du  Pérou  produisit  plus  de  7,000  kilogr.  (environ 
23  millions  de  fr.).  L'exploitation  des  mines  de  Parco, 
d'Qraro,  de  Pachuca,  et  la  découverte  des  mines  du  Po- 
tosi,  de  Zacatecas,  de  Huaneavelina,  portèrent  la  produc- 
tion annuelle  à  12,590  kilogr.  (environ  36  millions  de  fr.) 
pendant  le  xvii*  et  le  xvm*  siècle.  D'après  les  recher- 
ches de  Tooke,  corroborées  par  Alex,  de  Humboldt,  de 
Jacobs,  de  Michel  Chevalier,  l'ancien  monde  ne  possé- 
dait, lors  de  la  découverte  du  nouveau,  que  300  millions 
d'or: en  1800,  l'Europe  disposait  de  8  milliards  850 
militons.  —  Malgré  le  ralentissement  du  travail  en  Amé- 
rique au  commencement  du  xn*  siècle,  la  production 
annuelle  s'éleva  à  18,000  kilogr.  (59,400,000  fr.)  de  1810 
i  1825;  à  37,500  (79,750,000  fr.)  de  1825  à  1828.  Les 
mines  de  Russie  ont  contribué  en  grande  partie  à  cette 
augmentation;  elles  ne  sodt  exploitées  que  depuis  1704. 
De  1810  à  1825  elles  n'avaient  rendu  que  16,435  kilogr. 
(51,215,000  fr.);  de  1825  à  1818  elles  en  ont  rendu 
231,548  kilogr.  (  764,000,000  fr.).  Vers  1848  les  mines 
d'Amérique  produisaient ,  en  moyenne  : 

États-Unis,    1,800  kilogr.  valant    5,040,000  fr. 


Mexique,  3,606 
N.-Orenade,  4,954 
Pérou,  750 

BoUvie,  444 

Brésil,  2,500 

ChiU,  1,071 


12,197,000 
15,160,(K)0 
4,475,000 
1,465,000 
8,250,000 
3,534,000 


15,215  kilogr.  valant  51,021,000  fr.  environ. 

La  Sibérie  rendait  à  elle  seule  27,000  kilogr.,  ou  en- 
viron 89  millions  de  francs.  En  y  Joignant  les  3,000  kilogr. 
des  mines  de  Hongrie,  de  Transylvanie,  des  lavages  du 
Piémont,  et  des  exploitations  espagnoles,  une  quantité 
d'environ  2,000  à  3,000  kilogr.  auxquels  on  peut  approxi- 
mativement évaluer  ce  que  l'Afrique  et  les  lies  de  la 
Sonde  fournissent  au  commerce  européen ,  on  a  un  total 
d'environ  150  millions  de  francs.  La  circulation  américo- 
«uropéenne  de  l'or  en  1848  a  été  évaluée  à  14  milliards. 

Depuis  1848,11  s'est  accompli  dans  la  production  de  l'or 
nne  révolution  plus  grande  que  celle  qu'avait  produite  la 
découverte  de  l'Amérique.  Deux  nouvelles  contrées  sont. 
Tenues  alimenter  le  marché  de  l'or,  la  Californie  et'l'Aus- 
analie.  L'or  fut  découvert  en  Californie  vers  la  fin  de  fé- 
vrier 1848,  sur  les  bords  de  l'American-Fork,  affluent  du 
Sacnunento.  Un  an  après,  il  y  avait  déjà  21,000  hommes 
travaillant  dans  les  placers  ou  gîtes  aurifères.  Voici  les 
chiffres  de  la  production  annuelle  : 


1848 
1S49 
1850 
1851 
1852 
1853 


8,100 
53,400 
74,700 
75,600 
90,900 
95,400 


1854  107,100 

1855  120,600 

1856  120,600 

1857  118,000 

1858  129,000 


kilogr.  valant    26,730,000  fr. 

—  176,200,000 

—  246,510,000 

—  249,480,000 

—  299,970,000 

—  314,820,000 

—  353,430,000 

—  397,980,000 

—  397,980,000 

—  389,400,000 

—  455,700,000 


989,400  kilog.  valant  3,308,200,000  fr.  environ. 

L'or  fut  découvert  en  Australie,  en  1851,  par  un  cer- 
(un  Hargraves,  qui,  ayant  travaillé  quelque  temps  en 
Californie,  avait  remarqué  une  srande  ressemblance 
entre  la  nature  des  roches  dans  les  deux  pays.  L'exploita- 
tion commença  le  3  avril  dans  le  district  de  Bathurst,  et 
ft'éteodit  le  long  des  rivières  Abercrombie  et  Macquarie. 


En  août  1851,  de  nouveaux  gîtes  étaient  découverts  au 
sud,  près  de  Melbourne,  dans  le  lit  de  la  rivière  d'An- 
derson,  et  en  octobre  commençait  l'exploitation  du  mont 
Alexandre.  Au  commencement  de  1852,  il  y  avait  déj.\ 
40,000  travailleurs  dans  les  environs  de  cette  montagne. 
Voici  les  chiffres  de  la  production  annuelle  de  l'Australie  t 


1851 
1852 
1853 
1851 
1855 
1856 
1857 
1858 


18,000  kHogr. 

118,000  — 

90,000  — 

«8,200  — 

90,000  — 

103,500  — 

90,090  — 

89,000  — 


ou  59,400,000  fr. 
389,400,000 
297,000,000 
291,060,000 
297,000,000 
341,550,000 
237,000,000 
293,700,000 

680,700  kilogr.  ou  2,266,110,000  fr. 


L. 


OR  (Évaluation  monétaire  de  1').  Les  économistes  év^ 
luent  le  kilog.  d'or  converti  en  notre  monnaie  à  3,300  fr. 

oa  (Statues  en  ).  Il  y  en  eut  chez  les  divers  peuples  de 
l'antiquité.  Le  temple  de  Bélus  à  Babylone  en  contenait 
plusieurs;  les  auteurs  anciens  mentionnent  des  statues 
d'or  chez  les  Phéniciens,  en  Egypte,  en  Sicile.  Les  Hé- 
breux dans  le  désert  adorèrent  un  veau  d'or,  et  ce  furent 
deux  veaux  d'or  que  Jéroboam  érigea,  quand  il  eut  aban- 
donné le  culte  du  vrai  Dieu.  Les  Grecs  employèrent  sou- 
vent l'or  avec  l'ivoire  {V.  CmJstiAPRKKTmE  —  Sta- 
tuaire). Luculius  avait  à  son  triomphe  une  statue  d^ 
Mithridate,  en  or,  de  2  met.  de  hauteur,  et  des  lits  d'ot. 
Au  triomphe  de  Pompée,  on  vit  également  des  statues,  un 
lit,  un  trône  et  des  sceptres  d'or.  Une  statue  d'or  fut 
élevée  en  l'honneur  d'Agnppine  ;  Néron  en  consacra  deux, 
&  l'occasion  de  l'accouchement  de  Poppée. 

OR,  monnaie  de  compte  de  Perse,  valant  environ  8  fr. 

OR ,  un  des  deux  métaux  de  l'écu ,  dans  le  Blason.  Il 
est  figuré  par  la  couleur  laune.  On  le  représente  en  gra- 
vure par  une  foule  de  petits  points. 

OR  CORONAIRE.  F.  uotro  DicL  de  Btogr,  et  dTHistoire, 

ORACLES.  V,  Oracles  et  Sibyluns,  dans  notre  010» 
tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

ORAISON  (du  latin  oratio,  discours).  Ce  mot  a  été  em- 
ployé en  Grammaire  pour  désigner  l'expression  vocale  do 
la  pensée,  le  système  des  sons  articulés,  et  l'on  a  donné 
aux  différentes  espèces  de  mots  le  nom  de  parties  dorai' 
son  ou  parties  du  discours  (V.  ce  mot)»  Par  extension , 
Oraison  a  signifié  Discours  prononcé  en  public,  comme 
quand  on  dit  les  Oraisons  de  Démosthène,  de  Cicéron,  etc. 

ORAISON,  en  termes  de  Liturgie,  est  synonyme  de  Prière. 
L'oraison  est  vocale,  quand  elle  est  faite  à  haute  voix; 
mentale,  quand  on  la  dit  intérieurement  ;iacujato)r6  (du 
latin  jacmari,  darder,  lancer),  quand  c'est  une  sorte 
d'élan ,  une  demande  adressée  avec  ferveur.  —  Dans  un 
sens  spécial,  l'Oraison  est  la  prière  propre  à  l'office  du 
Jour  ou  aux  commémorations  des  fêtes  et  fériés;  elle  est 
précédée  d'une  antienne  ou  d'un  verset ,  et  termine  les 
Laudes,  Prime,  Tierce,  Sezte,  None  et  les  Vêpres. 

ORAisoif  DOMDiiCALB.  V,  DoMUfiGALB,  dsns  notro  DiC" 
tionnaire  de  Biographie  et  éP Histoire, 

ORAisoif  FONtesB ,  dlscours  solennel  prononcé  pour  ho- 
norer la  mémoire  de  quelque  défunt  illustre,  soit  au  mi- 
lieu de  ses  obsèques,  soit  dans  une  cérémonie  funéraire 
qui  suit  de  près  sa  mort.  Les  oraisons  funèbres  sont  l'ex- 
pression la  plus  riche  et  la  plus  élevée  de  l'éloquence  dé- 
monstrative. Elles  participent  de  l'histohne,  par  l'exposi- 
tion des  faits;  de  la  politique, . par  l'appréciation  des 
événements  ;  de  la  morale,  par  la  peinture  des  caractères 
et  les  leçons  qu'elles  donnent  aux  vivants;  de  la  religion 
enfin ,  au  nom  de  laquelle  elles  proclament  à  la  fois  le 
néant  de  l'homme  et  sa  dignité,  une  telle  grandeur,  que 
la  doctrine  chrétienne  surtout  communique  à  ces  œuvres, 
a  naturellement,  dans  les  temps  modernes,  mis  l'élo- 
quence démonstrative,  le  genre  le  moins  goûté  des  An- 
ciens, au-dessus  du  genre  délibératif  et  du  genre  Judi- 
ciaire. Bossuet  n'est  peut-être  pas  on  plus  grand  orateur 
que  Cicéron  ni  que  Démosthènes;  mais  les  matières  qu'il 
a  traita  sont  d'un  ordre  autrement  élevé  :  son  éloquence 
a  sa  source  au  ciel,  tandis  que  celle  de  ses  rivaux  de  l'An- 
tiquité n'a  d'autre  aliment  que  les  intérêu  et  les  pas- 
sions terrestres. 

On  voit  apparaître  l'oraison  funèbre  dès  les  temps  les 
plus  anciens  :  dans  la  vieille  Egypte,  selon  Diodore,  les 

{irêtres,  en  présence  du  peuple  assemblé,  prononçaient 
'éloge  des  monarques  défunts.  On  la  retrouve  plus  tard 
dans  les  cités  grecques  ;  mais  là  une  démocratie  orgueii- 
leuse  et  jalouse  la  contraignait  d'adresser  ses  louanges 


ORÀ 


I3ii 


ORA 


moins  à  la  mémoire  d*un  grand  homme  en  particulier 
Ma*à  l*État.  L*oraison  funèbre  des  Anciens  demeura  étran- 
gère à  la  pensée  d*une  autre  vie,  à  la  perspective  conso- 
knte  d'un  bonheur  éternel.  Sans  compter  le  Ménéxènêàe 
Platon,  qui  ne  se  rapporte  à  aucune  arconstance  précise, 
Périclès  loua  les  premiers  Athéniens  qui  moururent  dans 
la  guerre  du  Péloponèse  ;  Lysias,  ceux  qui  succombèrent 
pour  affranchir  la  Grèce  de  la  tyrannie  Spartiate;  Dé- 
mosthène,  les  glorieux  vaincus  de  Chéron^;  Hypéride, 
les  victimes  de  la  guerre  Lamiaque.  La  patrie  et  la  liberté 
remplissaient  ces  discours,  et  suffisaient ,  à  défaut  de  la 
religion ,  pour  inspirer  encore  çà  et  là  aux  orateurs  les 
accents  de  la  grande  éloquence.  Mais  il  n'en  fut  pas  de 
même  &  Rome  :  si  Ton  excepte  la  xiv*  Philippiquef  où 
Cicéron  a  célébré  la  fameuse  légion  de  Mars,  décimée, 
dans  la  lutte  contre  Antoine ,  pour  la  cause  de  la  liberté 
expirante,  Toraison  funèbre  fut  exclusivement  réservée 
aux  particuliers,  à  des  hommes  illustres,  &  des  femmes 
de  grande  naissance  :  on  la  prononçait  sur  le  Forum,  du 
haut  des  Rostres.  La  première  oraison  funèbre  fut  celle 
de  Brutus  par  Yalérius  Publicola  ;  plus  tard,  Appius  Clau- 
dius  Cœcus  prononça  Tâoge  de  son  père,  César  celui  de 
sa  tante  Juhe  et  celui  de  sa  femme  Cornélie;  Antoine  fit 
Toraison  de  César,  Tibère  celle  d'Auguste,  Caligula  celle 
de  Tibère,  Néron  celle  de  Claude;  Anton  in  fut  loué  par 
BIan>-Aurèle.  Rien  n*a  survécu  de  ces  œuvres,  dont  Tor- 
gueil  de  famille  faisait  souvent  tous  les  frais. 

Il  appartenait  au  christianisme  de  donner  à  cette  élo- 
quence son  véritable  caractère  :  Toraison  funèbre,  telle 
Sue  le  goût  et  Timagination  aiment  à  la  concevoir,  ne 
ate,  en  effet ,  que  du  jour  où  Torateur,  au  nom  de  la  re- 
ligion, donne  à  son  auditoire  la  double  leçon  de  Fautel  et 
du  tombeau ,  ces  deux  symboles  de  notre  vanité  présente 
ei  de  notre  glorieux  avenir;  elle  n*est  vraiment  digne  de 
son  nom  qu'à  la  condition  de  promettre  aux  vertus  du 
mort  un  autre  salaire  que  le  souvenir  des  hommes  et 
cette  gloire  que  les  Anciens  se  proposaient  comme  la  ré- 
munération suprême  d'une  vie  bien  remplie.  Quel  ensei- 
Snement  est  plus  conforme,  mieux  assorti  au  caractère 
'un  semblable  discours,  que  celui  qui,  devant  cette  ter- 
rible puissance  de  la  mort,  détourne  la  pensée  de  la  terre 
et  la  reporte  vers  le  ciel?  En  cela  consiste,  dans  le  genre 
démonstratif,  la  supériorité  des  Modernes  sur  les  Andens. 
a  Rappelez  dans  votre  Éloge,  disait  Cicéron,  la  noble 
naissance  de  votre  héros,  sa  beauté,  sa  force,  ses  richesses  ; 
si  de  tels  avantages  sont  par  eux-mêmes  peu  dignes  de 
louange,  c'est  un  mérite  d'en  avoir  bien  usé  ;  vantez  ses 
vertus,  et  celles  qui  furent  surtout  utiles  à  lui-même, 
et  celles  qui  tournèrent  au  profit  des  autres  hommes, 
les  unes  parce  qu'elles  produisent  l'admiration ,  les 
autres  parce  qu'elles  excitent  la  reconnaissance;  célé- 
brez surtout  les  belles  actions  accomplies  par  le  courage 
sans  espoir  de  récompense;  louez  même  le  bonheur 
comme  un  don  des  immortels.  »  Quelle  différence  avec  le 
langage  de  Bossuet  ou  de  Massillon  I  «  Dieu  seul  est 
grand,  s'écriera  Massillon  devant  la  tombe  à  demi  fermée 
de  Louis  XIV.  —  La  piété,  dira  Bossuet ,  voilà  le  tout  de 
l'homme;  sans  elle,  toutes  les  autres  qualités  de  l'esprit 
et  du  cœur,  toutes  les  grâces  de  la  personne,  tous  les 
avantages  de  la  naissance  et  de  la  fortune  ne  sont  rien , 
ou  même  tournent  en  ruine  à  ceux  qui  en  sont  ornés, 
puisque  enfin  il  faut  mourir.  »  Ceux4à  ont  bien  raison 
qui  disent  que  la  plus  belle  oraison  funèbre  est  1  oraison 
la  plus  religieuse.  8^  Grégoire  de  Nazianze,  S^  Grégoire 
de  Nysse  et  S^  Ambroise  composèrent,  dès  le  iv*  siècle 
de  notre  ère,  pour  des  particuliers  ou  des  princes,  des 
('lo^  funèbres  que  Bossuet  lui-même  n'a  pas  dédaigné 
d'imiter.  Mais  c'est  le  xvu*  siècle  qui  conservera  l'hon- 
neur d'avoir  porté  le  genre  à  son  plus  haut  degré  de  per- 
fection. Alors  les  chefs-d'œuvre  se  pressent  et  se  multi- 
plient :  Bossuet  compose  ses  oraisons  funèbres  d'Henriette 
de  France,  d'Henriette  d'Angleterre,  de  Marie-Thérèse, 
d'Anne  de  Gonzague,  de  Le  Tellier  et  du  grand  Condé; 
Bourdaloue,  celle  du  même  prince  ;  Mascaron ,  celle  de 
Turenne;  Fléchier,  celles  de  Tnrenne,  de  M"**  de  Mon- 
tausier,  de  M.  de  Lamoignon ,  de  Marie-Thérèse,  de  Le 
Tellier,  et  plusieurs  autres  encore;  Massillon,  celles  du 
Dauphin  et  de  Louis  XIV.  Au-dessous  d'eux ,  mais  à  un 
rang  très-honorable,  brillèrent  le  P.  de  La  Rue  et  M.  de 
Beauvais.  Un  siècle  où  U  voix  de  l'orateur  était  assurée 
de  trouver  un  écho  dans  l'àme  de  son  auditeur,  où  l'un 
et  l'autre  étaient  volontiers  d'accord ,  dans  la  commu- 
vnuté  de  leurs  croyances,  pour  appeler  sur  le  mort  la  ré- 
compense précise  et  déterminée  qne  la  foi  assigne  à  la 
vertu,  où  les  assistants  tournaient  assez  docilement  en 
exemple  pour  eux-mêmes  le  modèle  de  piété  qu'on  pro- 


posait autant  à  leur  imitation  qu'à  leur  admiration,  un 
tel  siècle  devait  être  Tàgo  d'or  de  ce  genre  d'éloqnence.  » 

Depuis  le  temps  de  Louis  XIV,  l'oraison  funèbre  n'a 
fait  que  déchoir  :  on  ne  trouve  plus  à  mentionner,  au 
xvw*  siècle,  que  M.  de  Boismont  et  l'évêque  de  Senez; 
dans  notre  siècle,  le  P.  Lacordaire  a  prononcé  les  élogec 
funèbres  d'O'Connell ,  du  général  Drouot,  de  M.  de  For* 
bin-Janson,  et  l'abbé  Cœur,  évêque  de  Troyes,  celui  de 
Jérôme  Bonaparte.  Cette  décadence  est  toute  naturelle. 
D'abord  la  matière  était  épuisée;  comment  revenir  sur  d« 
semblables  sujets,  avec  une  originalité  vigoureuse  et  de 
bon  aloi,  aprà  des  Massillon,  des  Bourdaloue,  des  Mas- 
caron ,  des  Fléchier,  des  Bossuet  1  Et  quel  changement 
dans  les  dispositions  d'esprit  et  de  cœur  de  l'audJtoire  ! 
Le  scepticisme  a  chassé  la  foi ,  et  Torateur  sacré  monte 
dans  la  chaire  avec  cette  pensée  bien  faite  pour  refroidir 
et  glacer  l'éloquence,  que  ses  auditeurs  viennent  chercher 
dans  son  discours,  non  pas  une  leçon  de  piété,  mais 
quelques  traces  do  talent  oratoire,  et  crue,  si  les  oreilles 
et  les  yeux  apprécieront  diversement  la  beauté  du  débit  et 
de  l'expression,  les  cœurs  resteront  fermés  aux  émotions 
et  aux  enseignements  de  la  foi.  Le  doute  seul  eût  suffi 
pour  dessécher  la  source  où  l'oraison  funèbre  puisait  ses 
plus  sublimes  inspirations  ;  deux  causes  étrangères  à  la 
religion  achevèrent  ce  que  le  doute  avait  commencé. 
Bossuet,  dit-on,  n'avait  point  abordé  sans  répugnance  ni 
scrupule  un  genre  dont  les  conditions  essentielles  for- 
çaient l'orateur  à  s'écarter  de  la  vérité,  soit  en  atténuant 
les  fautes,  soit  en  exagérant  les  mérites  du  héros.  Toute- 
fois les  lumières  et  les  dispositions  favorables  d'un  audi- 
toire, qui,  dans  un  éloge  écouté  avec  bienveillance  et 
plaisir,  savait  faire  la  part  des  nécessités  du  genre  et 
celle  du  vrai,  avaient  eu  pour  effet,  au  xvii*  siècle,  de 
rejeter  dans  l'ombre  ce  défaut  inhérent  à  l'oraison  funèbre. 
II  n'en  a  plus  été  ainsi  depuis  :  l'esprit  philosophique, 
portant  une  investigation  plus  libre  et  plus  hardie  dans 
la  vie  publique  et  privée  des  hommes  illustres,  a  fait 
succéder  aux  entraînements  d'une  admiration  complai- 
sante les  jugements  froids  et  sévères  de  la  raison,  et  la 
mode  du  dénigrement  à  celle  de  l'éloge.  Au  xvii*  siècle, 
les  panégyristes  de  Turenne  avaient  célébré  sa  conver- 
sion comme  un  acte  de  bonne  foi  généreuse;  au  xviti*. 
Voltaire  l'attribuait  à  l'ambition,  et  n'y  voyait  que  le  désir 
de  porter  le  bâton  de  maréchal.  De  telles  dispositions 
sont  antipathiques  à  l'oraison  funèbre,  qui  requiert, 
presque  autant  que  la  poésie  lyrique,  l'enthousiasme,  et, 
de  plus,  la  foi  au  désintéressement  de  la  vertu  et  à  l'élé- 
vation naturelle  de  certaines  âmes  d'élite.  Ajoutons  que 
l'esçrit  de  parti,  qui,  depuis  1789,  a  divisé  la  France  en 
factions  ennemies,  a  rendu  plus  difficile  encore  et  peut- 
être  impossible  l'accord  des  opinions  sur  le  mérite  de 
quelques  srands  hommes  que  le  siècle  a  produits.  Les 
droits  de  l'imprévu  réserva,  on  peut  dire  que  l'oraison 
funèbre  est  morte  avec  Louis  XIV.  F.  Yillemain ,  Essa» 
sur  VOraison  funèbre,  A.  H. 

ORANGE  (Arc  d'),  le  plus  remarquable  des  arcs  hono- 
raires romains  qui  existent  en  France.  B&ti  en  dehors  de 
la  ville,  il  a  21  met.  de  longueur  à  sa  base,  19  met.  de 
hauteur,  et  est  percé  de  trois  portes,  dont  l'arc  est  à  plein 
cintre  :  celle  du  milieu  a  9  met.  sous  clef  et  5  met.  d'ou- 
verture, les  deux  autres  ont  7  met.  sur  3.  Tout  le  monu- 
ment est  en  pierre  de  taille.  Quatre  colonnes  corinthiennes 
cannelées  décoraient  chaque  face;  les  deux  colonnes  qui 
flanquent  l'arc  ou  la  porte  sur  chacune  des  faces  princi- 
pales soutiennent  un  fronton  triangulaire,  au-dessus  du- 
quel règne  un  attique  couronné  par  une  belle  corniche, 
lia  face  septentrionale  est  la  mieux  conservée  :  au-dessus 
(le  chacune  des  portes  latérales  sont  groupées  des  armes 
offensives  et  défensives;  des  deux  côtés  du  fronton  se 
trouvent  des  trophées  composés  d'attributs  maritimes;  le 
bas-relief  de  l'attique  représente  un  combat  de  fantassins 
et  de  cavaliers;  les  arcnivoltes,  les  pieds-droits  et  les 
voûtes  des  trois  portes  offrent  de  précieux  modèles  d'or- 
nementation. La  façade  méridionale  de  l'arc  a  beaucoup 
souffert  :  deux  des  anciennes  colonnes  ont  disparu  ;  il  ne 
reste  presque  rien  des  bas-reliefs  de  l'un  des  côtés  do 
fronton,  ni  des  trophées  militaires  dont  l'une  des  petites 
portes  était  surmontée.  Le  bas-relief  de  l'attique  repré- 
sente aussi  un  combat.  La  face  orientale  de  l'arc  est 
décorée  de  A  colonnes  corinthiennes,  supportant  une  cor- 
niche et  une  frise  qui  régnaient  autrefois  autour  do  m(^ 
nument  ;  au-dessus  est  un  fronton  triangulaire,  dans  le 
tympan  duquel  on  voit,  sous  une  arcade,  le  buste  nvon- 
nant  du  Soleil,  et,  en  dehors  de  l'arcade,  deux  cornes 
d'abondance;  au-dessus  de  la  corniche  du  fh)nton,et  des 
deux  côtés,  sont  des  Néréides;  dans  les  trois  entroTTo- 


ORA 


134» 


ORC 


tenemenu  il  y  a  trois  trophées,  et,  au  pied  de  chacun 
de  ceux-ci ,  deux  captifs.  Ces  sculptures  sont  très-muti- 
lées. U  face  occidentale  de  Tare  avait  sans  doute  la 
même  décoration,  mais  on  n'y  voit  plus  que  les  restes  de 
deux  colonnes  et  de  deux  trophées.  —  Des  antioualres 
ont  pensé  que  l'Arc  d'Orange  était  un  souvenir  de  la  vic- 
toire de  Cn.  Domitius  Ahenobarbus  sur  les  Allobroges 
(Fan  122  av.  J.-C),  ou  de  la  défaite  des  Teutons  par 
Marins  (Fan  102);  d'autres  ont  cru  y  reconnaître  un 
monument  commémoratif,  soit  des  victoires  des  Romains 
dans  tonte  la  Gaule  Narbonnaise,  soit  de  la  conquête  de 
J.  César;  il  en  est  qui  l'attribuent  à  l'empereur  Auguste. 
Des  études  faites  sur  ce  monument,  en  1861,  par  M.  Her- 


6sule  cbevelue  rendues  tributaires  par  ce  prince;  les 
bas-reliefs  sont  des  trophées  de  la  défaite  des  Gaulois, 
et  des  vaincus  d'Actium.  Les  princes  d'Orange  avaient 
enfermé  l'arc  dans  un  édifice,  et  bâti  une  tour  sur 
sommet;    ces  constructions  ont  été   démolies  en 


^on 


1721.  V.  U'  Beuf,  L'Arc  (TOrange,  dans  les  Mém.  de 
l'Acad.  des  Inscriptions,  t.  xxv;  Raban,  Us  Antiquités 
de  la  ville  et  cité  d^Orange,  1656  ;  de  Gasparin ,  Hist,  de 
la  ville  dVrange,  1815,  in-12;  Artaud^  VArc  d'Oranae: 
\m,  in-S»;  J.  Boustet,  Notice  historvmB  et  archéolo- 
gkueiur  Orange,  1841,  in-8°  ;  Caristie,  Mmuments  an^ 
tiques  d'Orange,  1856,  in-fol.;  Herbert,  l'inscrtptton  de 

l'Arc  d'Orange,  Paris,  1862,  in-8".  ,^  ; 

ORANGE  ^rtieatre  a  ),  monument  improprement  appelé 
le  Cirque,  et  par  corruption  le  Grand  Qiré,  11  est  «tué  | 
sur  le  penchant  d'une  montaene.  La  partie  demi-circu- 
laire dans  laquelle  se  trouvaient  les  sièges  des  specta- 
teurs est  taillée  dans  l'escarpement.  Les  deux  extrémités 
da  demi-cercle  se  liaient  à  la  scène  par  des  constructions 
nécessaires  au  service  du  théâtre.  Le  mur  qui  termine  la 
scène  ou  en  fait  le  fond  est  assez  bien  conservé;  il  a 
35  met.  de  hauteur,  et  plus  du  triple  de  longueur  ;  il  est 
décoré  de  deux  rangées  d'arcades  et  d'un  attique.  On  a 
fait  disparaître  de  nos  Jours  les  hai>itations  dont  les  princes 
d'Orange  avaient  laissé  remplir  ce  théâtre. 

oiANGB  (La  Prise  d'),  7*  branche  de  la  chanson  de 
Gmlkmme  au  etmrt  JVex.  Guillaume  s'ennuie  dans  sa  ville 
de  Nismes.  Un  chevalier  échappé  des  prisons  d'Orange 
Tient  lui  vanter  la  beauté  de  cette  ville  et  les  charmes 
de  la  belle  Orable.  Guillaume  se  rappelle  qu'il  a  eu  autre- 
fois l'intention  d'épouser  la  princesse.  Il  part  donc  sous 
un  déguisement  avec  le  prisonnier,  et  pénètre  dans 
Orange;  il  est  reconnu  et  va  périr,  quand  il  est  sauvé 
par  Orable,  qui  livre  la  ville  aux  chrétiens.  U  fait  bap- 
tiser sa  libératrice  et  l'épouse.  —  Ce  roman  existe  à  la 
Bibliothèque  nationale  de  Paris  dans  cinq  manuscrits  du 
un*  siècle.  V,  Hist:  Utt.  die  la  France,  t.  xxii.         H.  D. 

ORANIENBADM  (Château  d*},  à  12  kilom.  O.  de  S^Pé- 
tersbourg,  sur  le  golfe  de  Finlande,  en  face  de  la  forte- 
resse de  Cronstadt.  Ce  ch&teau,  construit  par  le  prince 
Menschikoif,  favori  de  Pierre  le  Grand,  sur  le  penchant 
d'une  colline  longeant  le  rivage,  se  compose  de  trois  corps 
de  b&timent  reliés  entre  eux  par  des  galeries  ornées  de 
soloonades.  U  est  de  tous  côtés  entouré  de  Jardins,  à  tra- 
rers  lesquels  on  a  creusé  un  canal  allant  Jusqu'au  golfe. 
Dans  un  bois  de  sapins  qui  est  près  de  là  se  trouve  le 
petit  château  de  Solitude,  qu'on  nomme  aussi  Ha,  à  cause 
du  cri  de  surprise  qu'il  arrache  à  ceux  qui  le  voient  pour 
la  première  fois. 

ORANTES  (do  latin  orare,  prier),  figures  symboliques 
de  la  prière  chrétienne,  peintes  ou  sculptées  dans  les 
Catacombes. 

ORARIUM.  V.  ÉtOLE. 

ORATEUR ,  nom  qu'on  a  donné  d'abord  à  quiconque 
parlait  en  public,  mais  que  l'on  réserve  maintenant  à 
ceux  dont  la  parole  éloquente  sait  convaincre,  toucher  et 
passionner  leurs  auditeurs.  —  En  Angleterre,  on  appelle 
Orateur  {speaker)  le  président  de  la  Chambre  des  com- 
.*nunes;  élu  à  la  pluralité  des  voix,  c'est  lui  qui  expose 

s  aftaires.  Dans  les  cérémonies  publiques,  on  porte  de- 
vint lui  une  masse  d'or  couronnée. 

ORATOIRE  (du  latin  orare,  prier),  petite  pièce,  endroit 
retiré  dans  un  appartement,  où  peuvent  se  faire  dans  le 
i^cueillement  les  prières  particulières.  L'oratoire  n'a  point 
l'&uiel,  mais  on  simple  prie-Dieu,  un  Christ,  un  béni- 
Uer,  etc.  Les  canons  de  l'Église  défendeot  d  y  célébrer 


la  liturgie  et  d'y  baptiser.  Les  chantreries  (  V,  cê  fnof« 
ont  été  quelquefois  nommées  oratoires,  ainsi  que  les  pe^' 
tites  chapelles  des  cimetières  et  des  propriétés  privées* 
V,  Gattico,  De  Oratoriis  domestUns,  Rome,  1746. 
ORATOIRE  (Accent).  V,  Accent. 
ORATOIRE  (Art),  art  d'employer  les  ressources  de  l'élo- 
quence. U  résulte  de  l'observation  et  de  l'expérience,  mais 
il  ne  saurait  se  réduire  en  formules.  L'art  oratoire,  c.-i-d. 
une  certaine  manière  d'être  éloquent,  ne  doit  pas  être 
confondu  avec  la  Rhétorique,  qui  donne  une  sorte  d'élo- 
quence aitificielle  à  ceux  oui  n'en  ont  pas,  et  qui  com- 
munique quelaue  chose  de  lactice  &  l'éloquence  naturelle: 
dans  Démosthène  et  Bossuet  il  y  a  un  grand  art,  il  n'y 
a  pas  de  rhétorique. 
ORATOIRE  (Genre).  V,  Éloqoence. 
ORATORIO,  pièce  de  musique  religieuse,  ainsi  ap« 
pelée  parce  que  les  premières  œuvres  de  ce  genre  furent 
exécutées  au  xvi«  siècle  à  Rome  dans  l'église  de  l'Oro- 
toire,  sur  la  demande  de  S^  Philippe  de  Néri.  Ce  fonda- 
teur de  l'ordre  des  Oratoriens,  voyant  les  fidèles  déserter 
l'église  pour  les  spectacles  mondains,  imagina  de  faire 
composer,  non  pas  des  drames  pieux  dans  le  genre  des 
anciens  Mystères,  pour  les  Jouer  sur  un  tiié&tre  avec 
costumes  et  décors,  mais  des  espèces  d'intermèdes  ou  de 
cantates  à  plusieurs  personnages,  dont  le  sujet  était  puisé 
dans  l'Écriture  sainte,  et  qui  s'exécutaient  comme  mu- 
sique de  concert,  soit  à  l'éÂlise,  soit  au  thé&tre.  Les  Ora- 
torios, qu'on  appela  aussi  arames  fleuris,  prirent  dans  la 
suite  plus  de  développement,  et  acquirent  les  proportions 
d'un  vrai  drame,  sauf  la  pompe  thé&trale.  On  n'en  exé- 
cute plus  aujourd'hui  que  dans  les  grandes  solennités 
musiôdes,  ou,  par  fragments,  dans  les  concerts  spirituels. 
Sans  parler  des  anciens  compositeurs  italiens,  Carissimi, 
Léo,  Jommelli,  Caldara,  Colon  na,  Alex.  Scarlattl,  qui  se 
sont  plus  ou  moins  distingués  d  ms  l'Oratorio,  les  plus 
célèbres  compositeurs  qui  ont  illustré  ce  genre  sont  Haen« 
del  {le  Messie^  Judas  Machabée,  Athaliej  Samson)^ 
J.-S.  Bach  {la  Passion)y  Gimarosa  {le  Sacrifice  d'Abror 
kam)^  Haydn  (la  Création,  les  Saisons)^  Mozart  {David 
pénitent),  Beethoven  {Jésus  au  mont  des  Oliviers)  ^  Men- 
delssohn  (Êlie,  Paulus)^  etc.  B. 

ORBEVOIE,  vieux  mot  signifiant  une  fausse  arcade  ou 
fenêtre. 

ORCHESTIQUE  (do  grec  orkheisthai,  danserj,  une  des 
formes  de  la  danse  ches  les  anciens  Grecs.  C'était  la  danse 
noble  et  régulière,  sans  gestes  exagéra. 

ORCHESTRATION,  art  d'employer  les  instruments 
d'orchestre  dans  on  but  déterminé.  V.  Instruventation. 
ORCHESTRE,  partie  la  plus  basse  des  thé&tres  dans 
l'Antiquité,  espace  vide  autour  duouel  se  courbaient  les 
gradins ,  et  qui  s'étendait  Jusqu'à  ravant-scène.  Chez  les 
Grecs,  l'orchestre  devait  avoir  le  demi-diamètre  de  tout 
l'édifice;  sa  largeur  était  double  de  sa  longueur.  Il  se 
divisait  en  trois  parties  :  la  première,  où  des  mimes  et 
danseurs  venaient,  dans  les  entr'actes  et  à  la  fin  des  re- 
présentations, exécuter  leurs  exercices,  avec  des  masques 
orchestriques,  plus  naturels  et  plus  agréables  que  ceux 
des  acteurs  de  la  scène,  portait  particulièrement  le  nom 
d'orchestre  {d'orkheisthai,  danser);  la  deuxième,  où  se 
plaçaient  les  chœurs,  s'appelait  thymélè  (autel,  estrade)  ; 
la  troisième,  dite  hyposcénion  (soos-scène),  était  la  place 
des  musiciens.  Le  plancher  de  tout  l'oTcnestre  était  de 
bois,  afin  de  donner  de  l'élasticité  aux  pieda  des  dan- 
seurs, et  d'ajouter  à  la  sonorité  des  voix  et  des  instru^ 
ments.  Chez  les  Romains,  l'orchestre  n'eut  pas  la  même 
destination  :  légèrement  Incliné  vers  la  scène,  pavé  de 
carreaux  ou  de  marbre,  11  fut  garni  de  sièges  pour  les  sé- 
nateurs, les  édiles  et  les  Vestales.  B. 

ORCHESTRE ,  partie  des  thé&tres  modernes  où  se  tien- 
nent les  musiciens.  On  l'établit  sur  une  voûte;  la  caisse 
sur  laquelle  les  exécutants  sont  placés  doit  être  d'an  bois 
léger  et  résonnant,  comme  le  sapin,  de  manière  à  pro- 
duire des  vibrations  ainsi  que  la  table  d'harmonie  des 
instruments.  —  L'espace  qui  s'étend  entre  l'orchestre  et 
le  parterre,  eti qu'on  remplit  de  sièges  où  l'on  paye  un 
prix  assez  élevé,  s'appelle  également  orchestre.  En  cer- 
taines localités,  on  le  nomme  parquet,  B. 

ORCHESTRE,  ensemble  des  musiciens  Instrumentistes 
qui  exécutent  des  morceaux  symphoniques  ou  qui  accom- 
pagnent la  voix  des  chanteurs.  L'histoire  des  révolutions 
de  l'orchestre  n'est  rien  moins  que  celle  de  la  musique 
Instrumentale  elle-même.  Au  xvi«  siècle,  lora  de  la  créa- 
tion du  drame  musical,  les  instruments  en  usage  ne  pou- 
vaient former  que  des  orchestres  très-doux  :  c'étaient  les 
différentes  espèces  de  violes  (V.  ce  mot)^  le  concert  de 
dûtes  {V.  Cê  wioOt  et  accidentellement  le  clavecin,  la 

8^ 


ORC 


1316 


ORD 


guitare,  le  téorbe  et  la  harpe;  le  tIoIoii  était  encore 
pea  répandu,  et  l'orgue  tenait  lieu  d'instruments  à  vent  ; 
certains  instruments  de  cuirre  (trompette,  bombarde, 
cor  ou  cornet  à  bouquin,  saqaebute  on  trombone}  ne 
servaient  que  pour  exprimer  des  mouvements  guemers. 
Le  plus  ancien  monument  de  la  composition  d'un  or- 
chestre se  trouve  en  tête  de  la  partition  de  VOrfêo  de 
Monteyerde,  en  1607  : 

IhKn  gravi  cembali  (2  clavecins)  ; 

Duoi  contrabassi  da  viola  (2  contre-basses  de  viole)  ; 

Dieci  violé  da  braxzo  (10  dessus  de  viole)  ; 

Un'  arpa  doppia  (une  liarpe  double)  ; 

Duoi  violini  piccoli  alla  Fronces»  (2  petits  violons 
français); 

Duoi  chitaroni  (2  guitares)  ; 

Duoi  organi  di  legno  (2  orgues  de  bois,  c.-àrd.  un 
bourdon); 

Tre  bas$i  da  gamba  (3  basses  de  viole)  ; 

Qualro  tromboni  (4  trombones)  ; 

Un  régale  (un  jeu  de  régale,  petit  orgue)  ; 

Duoi  cometti  (2  cornets)  ; 

Un  flautino  alla  vigesima  teœnda  (un  flageolet,  à  la 
triple  octave  aigufi  du  tuyau  d'orgue  de  quatre  pieds)  ; 

Un  clarino  con  tre  trombe  sordine  (un  clairon  avec 
3  trompettes  à  sourdine). 

Ces  mstruments  ne  jouaient  pas  tous  à  la  fois,  mais 
étaient  en  auelque  sorte  affectés  à  tel  ou  tel  personnage, 
k  l'expression  de  tel  ou  tel  sentiment.  Ainsi,  dans  ce 
drame  d'Orfeo.  les  clavecins  jouent  les  ritournelles;  les 
contre-basses  de  viole  accompagnent  Orphée,  et  les  des- 
sus de  viole  Eurydice;  la  harpe  double  sert  à  l'accom- 
pagnement d'un  chœur  de  Nymphes,  les  guitares  à  celui 
du  chant  de  Caron  ;  l'Espérance  est  annoncée  par  les  vio- 
Ions  ;  le  chcaur  des  Esprits  infernaux  est  accompagné  par 
les  orgues  de  bois,  Proserpine  par  les  basses  de  viole, 
Pluton  par  les  trombones,  Apollon  par  la  régale,  et  le 
chœur  final  des  bergers  par  le  flageolet,  les  cornets,  le 
clairon  et  les  trompettes  a  sourdine.  L'orchestre  de  Mon- 
teverde  osait  à  peine  s'écarter  de  la  voix,  et  la  soutenait 
humblement  par  des  accords  plaqués.  Plus  tard  on  réunit 
les  instruments  en  masses  plus  imposantes,  mais  on 
écarta  presque  tous  les  instruments  à  vent.  Le  drame 
d'Etienne  Landi,  //  santo  Alessio  (1634),  offre  3  parties 
distinctes  de  violons,  de  harpes,  de  luths,  de  téorbes, 
de  basses  de  viole,  et  de  clavecins  pour  la  basse  continue. 
L'orchestre  de  Cavalli,  de  Carissimi,  de  LuUi,  se  compose 
principalement  de  violons,  de  violes  de  différentes  gran- 
deurs, de  basses  de  viole,  et  de  violoni  ou  doubles  basses 
de  viole.  Lulli  ajouta  quelques  parties  de  flûtes,  de 
hautbois ,  de  bassons ,  de  fagots  et  de  trombes  ;  on 
lui  doit  aussi  Tintroduction  des  timbales.  L'orchestre 
était  déjà  plus  varié  qu'au  temps  de  Monteverde,  mais 
ne  faisait  toujours  que  suivre  la  voix  ;  les  ritournelles 
Boules  offraient  de  plus  libres  allures.  11  en  fut  ainsi  jus- 
qu'au temps  de  Rameau  en  France  et  de  Pergolèse  en 
Italie.  Léo  et  Durante,  sans  augmenter  le  nombre  des 
instruments,  surent  les  premiers  mettre  dans  l'orchestre 
un  intérêt  particulier,  et  ils  furent  bientôt  surpassés  par 
Alajo  et  Jommelli.  L'invention  de  la  clarinette,  l'admis- 
sion de  la  flûte  traversière  dans  les  orchestres ,  les  per- 
fectionnements du  cor,  fournirent  de  nouveaux  effets  aux 
compositeurs,  et  l'habileté  plus  grande  des  exécutants 
permit  de  varier  les  formes  mélodiques  des  parties  in- 
strumentales. Les  progrès  de  Vopera  buffa  en  Italie  don- 
nèrent naissance  aux  morceaux  dans  lesquels  le  principal 
intérêt  est  jeté  dans  l'orchestre,  tandis  que  sur  la  scène 
les  acteurs  se  bornent  à  une  sorte  de  conversation  rhyth- 
mée;  Paisiello,  Gimarosa,  Gugllelmi,  trouvèrent  des 
effets  charmants  en  ce  genre.  Mozart  a  mis  dans  son  in- 
strumentation an  degré  d'intérêt  dont  il  n'y  avait  point 
eu  d'exemple  avant  lui,  et  le  point  où  il  s'est  arrêté 
semble  ne  pouvoir  être  dépassé  sans  que  le  chant  en 
souffre  et  sans  qu'il  en  résulte  de  la  fatigue  pour  l'audi- 
teur. Méhul  et  Cherubini  ont  ajouté  aux  ressources  créées 
par  Mozart  les  perfectionnements  de  l'instrumentation 
de  cuivre;  Rossini  a  encore  augmenté  le  nombre  des  par- 
ties d'orchestre,  et  fait  un  usage  à  peu  près  constant  de 
la  grosse  caisse,  aes  cymbales  et  du  triangle.  Mais  la 
multiplication  des  instruments  bruyants  a  rompu  les 
proportions  de  l'orchestre. 

II  est  nécessaire,  en  effet,  que  le  nombre  des  instru- 
ments à  cordes,  à  vent,  et  de  percussion ,  soit  en  rap- 
port convenable  avec  leur  sononté.  Or,  deux  parties  de 
violon,  tme  ou  deux  parties  d'alto ,  le  violoncelle  et  la 
contre-basse,  forment  aujourd'hui  la  base  de  toute  mu- 
sique à  grand  orchestre;  le  système  général  des  instru- 


ments à  vent,  dans  une  ouverture  ou  dans  on  autre 

fand  morceau  symphonique  ou  dramatique ,  comprend 
flûtes ,  2  hautbois,  2  clarinettes,  2  ou  4  cors,  2  trom» 
pettes,  3  trombones,  2  bassons,  2  timbales,  et  on  ajoute 
quelquefois  le  bugle  ou  trompette  à  clefs,  le  cornet  à 
pistons,  l'ophicléide,  la  grosse  caisse,  la  caisse  roulante, 
les  cymbales ,  le  triangle.  Pour  tenir  tête  à  cette  masse 
d'instruments  à  vent,  les  instruments  à  archet  sont 
presque  partout  en  nombre  InsuflBsant ,  et  cependant , 
quoi  qu'on  fasse,  ce  sont  eux  qui  peuvent  donner  les 
effets  les  plus  vigoureux,  les  plus  brillants  et  les  plus 
variés  :  24  violons ,  8  altos,  10  violoncelles  et  8  contre- 
basses sont  nécessaires  pour  faire  équilibre  aux  autres* 
instruments.  Les  orchestres  du  Conservatoire  de  mu- 
sique et  de  l'Opéra  de  Paris  sont  maintenant  les  premiers 
du  monde.  B. 

ORCHESTRINO.  V,  Orph^n. 

ORCHESTRION,  nom  de  deux  instruments  k  clavier  : 
l'un,  construit  à  Amsterdam  en  1780  sur  les  plans  de  l'abbé 
Vogler,  était  un  orgue  portatif  composé  de  4  claviers, 
chacun  de  63  touches,  et  d'un  clavier  de  pédales  de 
30  touches,  avec  un  mécanisme  d'expression;  l'autre, 
inventé  à  Prague  en  1706  par  Thomas-Ant.  Kunz,  était 
un  piano  uni  à  quelques  registres  d'orgue. 

ORCEIESTRIQUE,  nom  sous  lequel  les  Anciens  com- 
prenaient la  Choristique,  l^Cybisttque,  et  la  Sphéristique 
(  V.  ces  mots), 

ORDINAIRE  (L'),  en  Droit  canon,  supérieur  ecclésias- 
tique qui  a  juridiction  dans  une  certaine  circonscription 
de  territoire.  C'est,  par  exemple^  un  évêque  diocésain. 

ORDINAIRE  ou  ORDO ,  OU  tormos  de  Liturgie ,  livre  qui 
indique  pour  chaque  Jour  la  manière  de  dire  l'office  divin 
{V.  Bref).  —  On  appelle  Ordinaire  de  la  messe  la  partie 
de  la  messe  qui  ne  change  jamais,  quelle  que  soit  la  fête 
qu'on  célèbre. 

ordinaire,  mot  qui,  dans  le  langage  de  l'armée,  s'ap- 
plique à  Talimentation  des  caporaux  et  des  soldats, 
chargés  de  choisir,  d'acheter,  de  préparer  eux-mêmes 
leurs  mets,  à  l'exception  du  pain  de  munition,  qui  leur 
est  fourni  par  l'État  à  raison  de  750  grammes  par  homme 
et  par  jour.  Le  pain  de  soupe,  qui  est  du  pain  blanc, 
s'achète  des  deniers  de  l'ordinaire  :  il  en  est  attribué  en- 
viron 125  grammes  par  repas  k  chaque  homme,  avec  des 
légumes,  un  litre  de  bouillon,  et  de  140  à  160  grammes 
de  bœuf  ou  d'autre  viande.  Une  décision  ministérielle  du 
26  avril  1821  autorise  le  capitaine  k  fournir  aux  grands 
mangeurs  le  supplément  de  pain  nécessaire,  aoit  en  les 
faisant  travailler,  soit  en  leur  faisant  faire  un  service 
extraordinaire  qui  puisse  ajouter  k  leur  solde,  soit  en 
imputant  la  dépense  sur  les  fonds  de  l'ordinaire,  et  même 
en  y  affectant  une  partie  de  l'excédant  de  masse  qui  re- 
viendrait, chaque  trimestre,  à  ces  soldats.  Chaque  caporal 
ou  soldat  verse  à  l'ordinaire  18  centimes  par  jour  avec 
les  vivres  de  campagne  ;  33  avec  le  pain  en  garnison  ; 
43  avec  le  pain  en  marche.  Le  capitaine  charge  le  ser- 
gent-migor  de  donner  chaque  jour  l'argent  nécessaire 
pour  les  dépenses  du  lendemain,  désigne  alternativement 
l'un  des  caporaux  pour  être  chef  de  l'ordinaire,  acheter 
les  denrées  et  surveiller  la  distribution,  provoque  la  con- 
currence entre  les  bouchers,  boulan^rs,  épiciers  et  autres 
fournisseurs,  et  empêche  toute  remise,  tout  arrangement 
iHicite  entre  ces  fournisseurs  et  le  chef  d'ordinaire.  Lors- 
que la  compagnie  ne  forme  qu'un  ordinaire,  le  lieutenant 
en  a  la  direction  ;  en  son  absence,  ou  quand  il  commande 
la  compagnie,  c'est  le  sous-lieutenant;  si  la  compagnie 
forme  plusieurs  ordinaires,  chaque  officier  dirige  les  or- 
dinaires de  sa  section.  Il  contrôle  le  Hvret  d'ordinaire  que 
tient  le  caporal,  et  exige  que  les  fournisseurs  soient  pavés 
tous  les  jours.  Aucun  caporal  ou  soldat  ne  peut  être  dis- 
pensé de  manger  habituellement  à  l'ordinaire,  qu'en 
vertu  d'une  permission  du  capitaine  :  cette  permisùon 
ne  peut  être  refusée  à  l'homme  marié,  dont  la  femme  a 
été  autorisée  à  rester  au  régiment. 

ORDINAL,  nom  que  les  Anglais  donnent  à  un  livre 
composé  sous  le  règne  d'Edouard  VI,  et  qu'ils  ont  sub- 
stitué au  Pontifical  romain.  Il  contient  le  détail  des  céré- 
monies du  service  divin. 

0RDINAI4D,  en  latin  ordinandfis,  celui  qui  doit  rece- 
voir les  ordres  sacrés.  Il  subit  un  examen  concernant  la 
foi  et  la  doctrine. 

ORDINANT,  évêque  qui  confère  les  ordres  sacrés. 

ORDINATION ,  cérémonie  par  laquelle  on  confère  les 
ordres  sacrés.  Chez  les  catholiques ,  pour  ordonner  un 
prêtre,  l'évêque  impose  les  mains  sur  la  tête  de  l'ordi- 
nand  {V,  iMPOsmoN  ),  avec  des  prières  propres  k  la  cir- 
constance ;  nuis  il  le  revêt  des  ornemaats  du  sacerdoce* 


ORD 


1347- 


ORD 


tni  consacre  les  mains  avec  l'huile  des  catéchumènes,  et  \ 
.ui  confère  le  droit  d'offrir  le  saint  sacrifice  en  lui  faisant 
(oacher  le  calice  plein  de  yin  et  la  patène  avec  le  pain. 
U  nouveau  prêtre  célèbre  après  Tévêque  ;  et,  après  la 
communion,  Vévèque  lui  impose  de  nouveau  les  mains 
0t  lai  donne  le  pouvoir  de  remettre  les  péchés.  L'ordina- 
don  des  ordres  inférieurs  se  fait  sous  des  formes  analo- 
^és  ;  seulement  il  n'y  a  d*imposition  des  mains  que  sur 
(es  diacres.  Les  Grecs,  les  Arméniens,  les  Nestoriens,  les 
lacobites,  pratiquent  l'ordination  comme  les  catholiques. 
L'ordination  des  évèques  s'appelle  sacre  ou  consécration. 
Le  concile  de  Rome  tenu  en  744  a  prescrit  de  ne  faire  les 
ordinations  qu'au  1"',  au  4*,  au  7*  et  au  10*  mois,  c.-&-d. 
lux  Qnatre-Temps.  Le  pape  Alexandre  II  (ÉpU.  32)  a 
condamné  les  ordinations  per  saltum,  c-à-d.  qu'on  ne 
doit  pas  conférer  un  ordre  à  celui  qui  n'aurait  pas  reçu 
tes  ordres  inférieurs.  Le  concile  de  Meaux  en  845  interdit 
tonte  ordincUion  absolue ,  c-àrd.  celle  d'un  clerc  qui 
o'avait  point  de  titre  ou  bénéfice  ;  il  fallut  autrefois  avoir 
ane  église  pour  être  ordonné  prêtre.  —  Pour  les  Protes- 
tants, l'ordination  n'est  pas  nécessaire;  c'est  une  simple 
cérémonie  d'installation,  rendant  la  vocation  du  pasteur 
plus  authentique.  Ils  la  nomment  consécration,       B. 

ORDINATION  (Ban  d').  V,  Ban. 

ORDO.  V.  Ordinaire. 

ORDONNANCE.  Sans  parler  du  sens  que  Ton  donnait 
à  ce  mot  dans  l'ancienne  monarchie  française  {V.  On- 
DO?n«AivcES,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire)^  il  désigne  :  1®  toute  décision  du  Conseil 
d'État,  quand  elle  est  revêtue  de  l'approbation  du  souve- 
rain; 2^  toute  décision  rendue  en  matière  criminelle  par 
les  tribunaux  de  1*^  instance  réunis  en  la  Chambre  du 
conseil  et  sur  le  rapport  du  juge  d'instruction  ;  3**  l'ordre 
ou  autorisation  que  donne  un  Juge  au  bas  d'une  requête, 
à  la  suite  d'un  procès-verbal,  comme  pour  assigner  à 
bref  délai,  commettre  un  rapporteur,  autoriser  une  saisie, 
homologuer  une  sentence  arbitrale;  4°  l'ordre  de  mise  en 
liberté  d'un  accusé  déclaré  non  coupable  par  le  Jury. 

ORDONNANCE,  cavalier  placé  pendant  la  durée  d'une 
garde  chez  un  officier  général,  pour  porter  ses  dépèches. 
En  campagne,  les  généraux  ont  à  leur  quartier  plusieurs 
ordonnances,  qui  leur  servent  en  même  temps  d'escorte, 
et  qu'on  ne  relève  qu'après  un  nombre  de  Jours  indéter- 
miné. On  nomme  of/iciers  d^ordonnance  les  officiers  pris 
dans  l'infanterie  et  dans  la  cavalerie  pour  remplir  sous 
les  ordres  des  généraux  les  fonctions  d'aides  de  camp,  à 
défaut  d'officiers  du  corps  d'état-major.  Le  roi  Louis- 
Philippe  avait  attaché  à  sa  personne  il  officiers  d'ordon- 
nance; Napoléon  III  en  eut  14,  comme  Napoléon  I"« 

ORIX)NNANC£MENT,  formalité  d'AdministraUon  qui 
consiste  &  vérifier  l'accomplissement  des  services  ou 
Texécation  des  marchés,  et  à  en  ordonner  le  payement. 
Les  ordonnances  de  payement  des  divers  départements 
ministériels  sont  adressées  au  Ministre  des  finances,  qui 
fait  acquitter  toutes  les  dépenses  de  l'État. 

ORDONNATEURS ,  fonctionnaires  des  divers  départe- 
ments ministériels  qui  font,  par  délégation  des  Ministres, 
les  ordonnancements  de  dépenses.  Leur  signature  est, 
an  moment  de  leur  entrée  en  fonctions,  accréditée  auprès 
des  payeurs.  Ils  inscrivent  par  ordre  de  date  toutes  leurs 
opérations,  puis  les  reportent  sur  un  sommier  ou  grand- 
li^Te  de  comptes  ouverts  par  ordre  de  matières  et  sui- 
vant les  divisions  du  budget  ;  ils  envoient  les  comptes 
mensuels  à  leur  Ministère ,  et ,  au  terme  fixé  pour  la 
clôtore  de  chaque  exercice,  un  relevé  général  et  aéfinitif. 

Om)RE ,  une  des  divisions  admises  dans  les  classifi- 
cations. Ainsi,  dans  l'Histoire  naturelle,  les  classes  sont 
divisées  en  ordres,  qui  eux-mêmes  se  subdivisent  en 
familles, 

ORDRE,  intelligente  distribution  de  toutes  les  parties 
d'ane  œuvre,  harmonie  entre  la  fin  de  chaque  être  et  les 
moyens  qu'il  possède  d'y  atteindre.  La  conception  de 
Tordre  est  une  conception  rationnelle,  nécessaire,  qui  se 
manifeste  dans  le  monde  physique  et  dans  le  monde  mo- 
ral à  mesure  que  nous  y  pénétrons  par  l'observation  ;  le 
principe  des  causes  finales  (  V.  ce  mot)  trouve  dans  l'ordre 
sa  satisfaction  ;  la  croyance  à  l'ordre  du  monde  est  le 
fondement  de  toute  généralisation  dans  les  sciences  phy- 
siques et  naturelles  et  dans  les  sciences  morales.  La 
réalisation  de  l'ordre  pour  un  être,  c'est  l'accomplisse- 
ment de  sa  fin. 

ORDRE,  le  sixième  des  Sacrements  de  l'Église  catho- 
lique, celui  qui  confère  le  caractère,  le  pouvoir,  le  mi- 
nistère ecclésiastique.  L'Église  en  voit  l'institution  divine 
uns  ces  paroles  de  Jésus-Christ  à  ses  Apôtres  :  «  Comme 
BOD  Père  m'a  envoyé ,  Je  vous  envoie,  —  Recevez  le 


S'-Esprit  ;  les  péchés  seront  remis  à  ceux  auxquels  voue 
les  remettrez,  et  seront  retenus  à  ceux  auxquels  vous  les 
retiendrez.  »  Les  Ap6tres  communiquèrent  à  leur  tour 
les  dons  du  S^-Esprit,  la  mission  et  le  ponvohr  qu'ils 
avaient  reçus.  Les  évêqnes  peuvent  seuls  administrer  le 
Sacrement  de  l'Ordre  :  l'imposition  des  mains  est  la  ma- 
tière de  ce  Sacrement,  la  prière  qui  l'accompagne  en  est 
la  forme  (K.*ORDmATiONl.  Le  caractère  cpe  l'Ordre  im- 
prime à  ceux  mii  le  reçoivent  est  indélébile. 

ORDRE,  association  de  religieux  qui,  bien  que  dispersés 
souvent  dans  divers  monastères,  sont  soumis  à  une  même 
règle.  On  appelle  chef  d^ordre  le  monastère  principal , 
celui  où  réside  le  supérieur  général  de  l'ordre. 

ORDRE,  mot  souvent  employé  pour  désigner  les  classes 
d'une  nation.  Chez  les  anciens  Romains,  on  disait  TOrdrtf 
des  patriciens ,  VOrdre  équestre  ou  des  Chevaliers , 
VOrdre  des  plébéiens.  Dans  l'ancienne  monarchie  fran- 
çaise, on  distinguait  aux  États  généraux  trois  Ordres,  la 
noblesse,  le  clergé,  et  le  tiers  état.  Nous  disons  encore 
VOrdre  judiciaire ,  VOrdre  des  avocats. 

ORDRE,  en  termes  de  Jurisprudence ,  déterminaUon  du 
rang  suivant  lequel  chaque  créancier  hypothécaire  ou 
privilégié  doit  être  payé  sur  le  prix  provenant  de  la  vente 
dea  biens  immobiliera  du  débiteur  commun.  Cest  une 
dérogation  an  principe  général  qui  veut  que  les  biens 
d'un  débiteur  soient  le  gage  commun  de  ses  créancien , 
et  qu'en  cas  d'insufiîsanceTeprix  s'en  distribue  entre  eux 
par  contribution ,  au  marc  le  franc  de  leura  créances. 
V,  le  Code  Napoléon,  art.  2,0d2,  2,093;  et  le  Code  de 
Procédure  civile ,  art.  749  et  suiv.  ;  Grosse  et  Rameau , 
Commentaire  ou  application  au  point  de  vue  pratiquf! 
de  la  loi  du  8f  mai  48Ô8  sur  la  procédure  d^ordre,  Paris, 
4858,  2  vol.  in-8*». 

ORDRE  (Billet  &)•  y.  Billet. 

ORDRE  (Conseil  de  1').  V.  Discipune  (Conseil  de), dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

ORDRE  (Mot  d').  V,  Mot  d'ordre. 

ORDRE  DE  BATAILLE ,  disposition  qu'uu  général  donne  à 
ses  troupes  sur  un  champ  de  bataille.  Il  convient  d'y 
distinguer  trois  choses  :  \^  l'ordre  dans  lequel  sont  ran- 
gées les  troupes  de  chaque  arme,  en  raison  du  service 
auquel  elles  sont  destinées  ;  2°  l'ordre  relatif  dans  lequel 
les  différentes  armes  doivent  être  placées,  c.-&-d.  la  place 
que  chacune  doit  occuper  dans  l'ordre  général  ;  3°  la 
figure  et  la  direction  du  front  de  bataille.  L'ordre  dans 
lequel  ont  été  rangé»  les  troupes  légères,  l'infanterie  et 
la  cavalerie,  a  varié  selon  les  révolutions  de  l'art  mili- 
taire; mais  le  même  principe  proportionnel  a  toujours 
existé  entre  elles,  c-à-d.  que  la  cavalerie  a  toujours  été 
rangée  dans  un  ordre  moins  profond  que  l'infanterie,  et 
les  troupes  légères  dans  l'ordre  le  moins  profond.  Vordre 
profond  était  celui  des  Égyptiens  et  de  tous  les  anciens 
peuples  de  l'Asie;  on  formait  de  grandes  masses  desti- 
nées à  se  heurter  de  front  :  ainsi,  les  Peraes  combattaient 
en  carrés  de  100  de  profondeur  sur  100  de  front  L'ordre 
profond  fut  aussi  adopté  par  les  Grecs,  chez  lesquels  le 
mot  phalange  désigna  cet  ordre  en  général,  bien  qu'il 
y  eût  quelque  différence  dans  la  formation.  Ainsi,  les 
Spartiates  combattaient  sur  8  et  sur  12  de  hauteur,  les 
Athéniens  quelquefois  sur  30,  les  Macédoniens  au  temps 
de  Philippe  et  d'Alexandre  sur  16.  La  cavalerie  et  les 
troupes  légères  n'eurent  Jamais  plus  de  8  rangs  de  pro- 
fondeur. —  Chez  les  Romains,  la  légion  s'établit  primi* 
tivement  sur  3  lignes,  de  10  manipules  chacune  :  dans 
les  deux  premières  lignes,  les  manipules  avaient  12 
hommes  de  front  et  10  de  profondeur  ;  dans  la  troisième, 
il  n'y  avait  que  6  hommes  de  front  sur  10  aussi  de  pro- 
fondeur. La  distance  entre  les  lignes  était  égale  à  la  pro- 
fondeur d'un  manipule,  et  dans  chaque  ligne  l'intervalle 
d'un  nuinipule  à  l'autre  était  égal  au  front  de  ces  der- 
niers. La  seconde  ligne  était  placée  de  manière  que  ses 
pleins  correspondaient  aux  vides  des  deux  autres,  et 
qu'en  front  elle  les  dépassait  de  tout  le  firent  d'un  mani- 
pule. La  cavalerie  était  divisée  en  turmes  de  8  cavaliers 
de  front  sur  A  de  profondeur.  Sous  l'Empire,  cet  ordre 
fut  modifié  :  l'ordre  de  bataille  fut  établi  sur  deux  lignes 
de  cinq  cohortes  chacune,  et  leur  profondeur  varia  de  6 
à  10  hommes.  —  L'invasion  des  Barbares  de  la  Germanie 
rejeu  l'art  militaire  dans  l'enfance.  Les  Francs,  les  Goths, 
les  Vandales  combattaient  en  grandes  masses.  Pendant 
les  temns  féodaux,  les  batailles  se  livrèrent  encore  par 
masses  de  chevaux  portant  des  hommes  couverts  de  fer, 
auxquels  les  fantassins  ne  pouvaient  ni  résister,  ni  ser- 
vir d'auxiliaires.  L'invention  de  la  poudre  rendit  &  l'in- 
fanterie son  importance;  mais,  tant  que  l'usage  des 
armes  &  feu  fut  restreint  et  mêlé  à  celui  des  armes  de 


ORD 


134S 


ORD 


encore  adopté  aujourd'hui. 

Quant  au  placement  relatif  des  différents  corps  dans  la 
ligne  de  bataille ,  11  a  subi,  comme  Torfonnance  de 
chaque  arme,  direrses  modifications.  Tant  que  dura 
remploi  exclusif  des  armes  de  main ,  les  batailles  ayant 
lieu  par  le  choc  direct  des  corps  et  la  lutte  individuelle 
des  hommes  qui  les  composaient,  la  cavalerie  ne  put 
trouver  place  entre  les  masses,  et  fut  placée  sur  les  ailes. 
Cependant  cette  disposition  théorique  pouvait  n*6tre  pas 
constamment  observée  :  Alexandre  à  Arbelles  et  Césûr  à 
Pharsale  s*écartèrent  du  principe  général.  —  Dans  les 
temps  où  la  stratégie  dirige  les  opérations,  que  la  tac- 
tique se  borne  à  exécuter,  et  où  la  victoire  n'est  plus 
uniquement  le  résultat  d'un  carnage  de  pied  ferme,  mais 
souvent  celui  de  l'occupation  de  certains  points,  le  mé- 
lange  des  armes  est  devenu  une  nécessité.  La  cavalerie 
peut  avoir  à  couvrir  plusieurs  fronts;  l'infanterie,  l'ar- 
tillerie peuvent  préparer  des  résultats  que  complétera  la 
cavalerie,  et  réciproquement.  Tout  dépend  de  l'expérience 
et  des  combinaisons  du  général. 

La  figure  et  la  direction  du  front  de  bataille  n'ont  pas 
moins  varié.  Les  Grecs  avaient  plusieurs  combinaisons  : 
dans  l'ordre  antistomê^  la  phalange  offrait  un  double 
front;  dans  Vhétérostome ,  elle  s'avançait  en  colonne; 
dans  le  plinthe,  elle  formait  un  carré.  Ou  bien  elle  pre- 
nait, pour  attaquer,  la  forme  d'un  coin  ou  tête  de  porc , 
et,  pour  se  défendre,  elle  se  formait  en  rond,  en  triangle, 
en  demi-lune.  On  trouve  dans  Végèce  (III,  19)  sept  ordres 
différents,  qui  étaient  en  usage  chez  les  Romains.  L'em- 

{»ereur  Léon  les  réduisit  à  quatre,  appelés  le  scythiqtu, 
'aUanique,  Vafricain  et  VUalique,  Par  le  premier,  on 
forme  une  ligne  pleine  dont  les  ailes  s'inclinent  en  avant 
pour  cerner  l'ennemi  ;  dans  le  second,  des  parties  de 
tonte  la  ligne  s'avancent  pour  attaquer,  Jaissant  des  in- 


précédente  na  lieu  qu 
l'armée  se  forme  sur  deux  lignes,  ayant  des  corps  séparés 
pour  couvrir  ses  flancs,  et  des  réserves  pour  garder  ses 
derrières.  —  Qiez  les  modernes,  les  Suisses  ont  imaginé 
des  ordres  en  croix,  à  dents  de  scie,  octogone,  en  héris- 
son, etc.  ;  ce  sont  des  ordres  de  parade  plutôt  que  de 
guerre.  Au  xvm*  siècle,  Chevert  excellait  à  dessiner  sur 
le  tonrain  une  fleur  de  lis,  ou  à  y  écrire  Vive  le  roù 
Toutes  ces  merveilles  n'avaient  rien  de  sérieux.  L'ordre 
sur  deux  lignes,  appuyé  d'une  réserve,  et  entrecoupé  d'in- 
lervalles  à  canons,  est  seul  efficacement  employé  de  nos 
jours.  La  direction  de  la  ligne  de  bataille,  son  parallé- 
lisme ou  son  obliquité  par  rapport  à  Tennemi,  dépendent 
de  la  nature  des  opérations  à  exécuter  et  de  la  configura- 
tion du  sol.  Ce  qu'il  y  a  d'important  en  tout  cas,  c'est  que 
la  ligne  de  bataille  soit  parallèle  à  la  base  d'opérations  et 
perpendiculaire  aux  Ugnes  de  communication  avec  cette 

Dans  la  Marine  militaire ,  la  formation  des  ordres  est 
tout  l'art  des  évolutions.  La  ligne  qui  s'approche  le  plus 
du  point  d'où  souffle  le  vent,  et  au'on  nomme  pour 
cette  raison  ligne  du  plus  près,  est  la  plus  favorable  à 
l'attaque  et  à  la  défense  :  les  vaisseaux  s'y  maintiennent 
facilement  à  la  suite  les  uns  des  autres;  l'ennemi  ne  peut 
l'aborder  qu'avec  pdne  et  en  s'exposant  à  tout  le  feu  de 
ses  canons.  Cette  ligne  sert  principalement  lorsqu'on  se 
bat  en  courant.  Quand  les  armées  navales  s'arrêtent  pour 
se  combattre  à  outrance,  on  se  range  en  bataille  suivant 
la  perpendiculaire  du  vent  B. 

ORDRE  DU  MARCHE,  OU  tonues  de  Marine,  position  assi- 
gnée aux  b&timents  d'une  flotte  qui  navigue.  On  reconnaît 
plusieurs  ordres  de  marche  :  1*^  l'armée  sur  une  ligne  du 

S  lus  près  :  tous  les  vaisseaux  se  maintenant  sur  cette 
gne  les  uns  par  rapport  aux  autres  font  des  lignes  pa- 
Rillèles  ;  2»  l'armée  sur  la  perpendiculaire  du  vent  :  les 
vaisseaux  sont  tous  face  au  veut;  3°  l'armée  perpendicu- 
laire à  la  route  ordonnée  ;  4<*  les  b&timents  sur  les  deux 
lignes  du  plus  près,  le  général  au  centre  et  sous  le  veut; 
5*  l'armée  sur  six  colonnes  parallèles  ;  6<*  Tannée  sur 
trois  colonnes. 

ORDRE  DU  JOUR,  injonction  transmise  par  écrit  à  une 
rmée  nu  A  un  corps  de  troupes  a^  la  part  d'une  autorité 
upérleure.  Il  contient  ou  une  communication  d'actes 
égaux,  ou  une  intimation  des  devoirs  à  remplir,  ou  une 
explication  du  genre  de  service  à  accomp'.ir,  ou  un  récit 


succinct  d'événements  qui  intéressent  les  militaires.  Le» 
ordres  du  jour  sont  transcrits  sur  des  registres  spéciaux. 
—  Quelquefois  des  généraux  en  chef  font  de  l'ordre  du 
jour  une  sorte  de  proclamation  à  leur  armée,  pour  ce  qui 
tient  à  l'honneur  militaire  ou  à  la  gloire  du  drapeau. 
En  179S,  le  général  Beau  vais,  connu  depuis  comme 
écrivain  militaire,  étant  employé  à  l'armée  d'Egypte, 
donna  sa  démission  à  la  suite  d'une  altercation  très-vive 
avec  le  général  en  chef  Bonaparte.  Ce  dernier  l'accepta, 
et  la  mit  à  l'ordre  du  Jour  en  l'accompagnant  de  la 
réflexion  suivante  :  «  Un  officier  qui,  se  portant  bien, 
offre  sa  démission  au  milieu  d'une  campaf^ie,  ne  peut 
être  dans  l'intention  d'acquérir  de  la  gloire  et  de  con- 
courir au  grand  but  de  la  paix  générale.  Il  n'est  pas 
digne  des  soldats  que  Je  commande.  »  —  Kléber  chargé 
du  commandement  de  l'armée  d'Egypte,  se  croyant  aban- 
donné de  son  pays,  conclut,  le  24  janvier  1800,  la  con- 
vention d'El-Arisch,  par  laquelle  il  devait  ramener  son 
armée  en  France.  Déjà  il  avait  remis  aux  Turcs  plu- 
sieurs postes  importants ,  et  il  s'acheminait  pour  s'em- 
barquer, quand  il  reçoit  de  l'amiral  anglais  Keith  une 
lettre  qui  lui  déclare  que  le  roi  d'Angleterre,  allié  des 
Turcs,  s'oppose  à  la  convention,  et  exige  que  l'année 
française  se  rende  prisonnière  de  guerre.  Kléber  s'in- 
dÎKne;  il  met  à  l'ordre  du  jour  la  lettre  entière  de  l'ami- 
ral anglais,  et  la  fait  suivre  de  ces  simples  mots  :  «  Sol- 
dats, on  ne  répond  à  de  telles  insolences  que  par  des 
victoires  ;  préparez-vous  à  combattre.  »  Le  lendemûn  il 
ç;agna  la  bataille  d'Héliopolis,  où,  avec  20,000  hommes, 
il  anéantit  l'armée  du  grand  vizir,  forte  de  80,000  hommes. 
Dans  les  Assemblées  délibérantes,  l'Ordre  du  jour  est 
l'indication  des  objets  de  la  délibération  de  chaaue  jour, 
dans  l'ordre  où  l'on  doit  s'en  occuper.  Passer  a  l*ordr& 
du  jour,  c'est  cesser  de  s'occuper  d'une  question  pour 
passer  à  celle  qui  vient  après  dans  le  programme  de  la 
séance.  G.  D — i. 

«   ORDRE  BN  COLONNE.   V.  COLONNE, 

ORDRES  D'ARCHITECTURE ,  terme  par  lequel  on  dé- 
signe certaines  dispositions  données  anx  parties  essen- 
tielles d'un  édifice,  de  manière  à  composer  un  ensemble 
harmonieux  et  régulier.  Ainsi ,  l'ordre  d'un  monument , 
en  fixant  les  formes  et  les  proportions  qu'il  doit  recevoir, 
détermine  non-seulement  la  hauteur  et  l'ornementation 
des  colonnes,  mais  encore  celles  de  leur  piédestal,  et  de 
l'entablement  qui  les  surmonte.  On  reconnaît  cinq  ordres 
classiques  en  Architecture,  dont  trois  d'origine  grecque, 
te  Dorique,  V Ionique,  le  Corinthien,  et  deux  autres  nés 
en  Italie,  le  Toscan  et  le  Composite  (V.  ces  mots).  On 
a  encore  distingué  l'ordre  Atttque,  employé  aa  couron- 
nement des  édifices  ;  l'ordre  Caryatide,  dans  lequel  des 
caryatides  servent  de  colonnes;  l'ordre  composé,  qui 
désigne  toute  création  architecturale  faite  en  dehors  des 
règles  ordinaires.  C'est  par  la  forme  du  chapiteau  des 
colonnes  que  l'on  fait  le  plus  aisément  et  à  première  vue 
la  différence  des  ordres.  Le  chapiteau  dorique  est  le  plus 
simple  :  il  consiste  en  un  abaque  épais  et  saillant,  trois, 
quatre  ou  cinq  filets,  une  échine  qu'on  tailla  d'abord  en 
biseau,  puis  en  quart  de  rond  et  presque  en  tore,  et  un 
congé  ou  gorgerin  ;  la  hauteur  du  chapiteau  est  ordinai- 
rement la  moitié  du  diamètre  pris  en  bas  du  fût  de  la 
colonne.  Le  chapiteau  ionique  est  orné  de  volutes  dispo- 
sées de  façon  qu'aux  faces  antérieure  et  postérieure  on 
voit  leun  circonvolutions,  tandis  que  les  deux  côtés  pré- 
sentent seulement  un  rouleau  sur  lecjuel  sont  souvent 
sculptés  quelques  feuillages.  Le  chapiteau  corinthien, 
qui  a  en  hauteur  le  diamètre  entier  du  pied  de  la  co- 
lonne, a  la  forme  d'une  cloche  renversée  ;  deux  volutes 
soutiennent  chaque  angle  de  l'abacpie  ;  deux  autres  plus 
petites  s'accolent  dans  chaque  miheu  ;  l'intervalle  entre 
l'abaque  et  l'astragale  est  garni  de  deux  rangs  de  fenilles 
d'acanthe.  Le  chapiteau  toscan  diffère  peu  du  dorique  t 
sa  hauteur  est  divisée  en  trois  parties,  l'abaque,  l'échin^, 
et  le  gorgerin  surmonté  d'un  astragale.  Le  chapiteau  com- 

f>osite  se  distingue  du  corinthien  par  l'addition  de  la  v(»» 
ute  ionique.  — Plusieurs  ordres  sont  souvent  assembles, 
c-à-d.  placés  l'un  sur  l'autre,  pour  orner,  par  exemple, 
un  portail  ou  une  façade.  En  ce  cas,  deux  règles  sont 
prescrites  ;  la  première  veut  que  Tordre  le  plus  fort  sup» 
porte  celui  dont  les  formes  sont  plus  délicates;  ainsi, 
l'ionique  s'élève  sur  le  dorique,  le  corinthien  sur  l'io- 
nique, et  Vitruve  exige  que  les  axes  des  colonnes  des 


quart  que 

constinc^de  localité  et  de  destination,  les  lois  de  h 
perspectiVti-le  goût  de  l'architecte,  peuvent  modifier  ce» 


ORF 


1349 


ORG 


règles,  qui  n*ont  rien  d*absola.  F.  Golonhb,  Base,  Enta- 
wmnuT,  B. 

ORDRES  DB  CREVALBIHB.    V,  D£C01IATI0flS. 

ORDRES  SACRés.  V,  Dotre  Dictionnaire  de  Biographie  9t 
iB'utoirë. 

OREILLER,  coussin  de  forme  et  de  matière  variables, 
SOT  lequel  on  pose  la  tète  pour  dormir.  Dans  les  pays 
très-chauds,  on  Mi  des  oreillers  de  bois  ou  de  pierre, 
baats  de  iO  à  15  centimèt.,  et  creusés  de  façon  &  recevoir 
Il  tôte.  On  en  voit  en  ivoire  dans  le  Musée  égyptien  du 
LooTre. 

OREMUS,  mot  latin  qui  signifie  prions ,  et  par  lequel 
le  prêtre  commence  une  oraison.  Par  extension ,  on  lui 
donne  le  sens  d'oraison,  de  prière  :  Dire  des  Oremus. 

ORESTTE,  titre  collectif  donné,  dès  l'Antiauité,  à  trois 
tragédies  d'Eschyle,  Agamemnon,  les  ChoépnoreSt  et  l$s 
Eménides,  où  sont  exposées  les  destinées  d'Oreste. 
V,  Psdn,  Etudes  sur  les  tragiques  grecs.  3  vol.  in-8®. 

ORFEVRERIE ,  art  de  I*orfévre  ou  fabricant  d'objets  en 
or  et  en  argent,  et,  par  extension,  produit  de  cet  art. 
L'orférraie  comprend  plusieurs  spécialités  :  la  bijoute- 
rit,  la  joaUlerie  (  V.  ces  mots  ) ,  et  Yorfévrerie  propre- 
ment dite  ou  grosserie.  Celle-ci  consiste  dans  la  fabri- 
catioQ  de  la  vaisselle,  des  couverts,  des  coupes,  des 
ornements  d'église,  et,  en  général ,  de  tous  les  ouvrages 
d'un  certain  volume  qui  servent  à  la  décoration  ou  à 
rameoblement  des  habitations  particulières  et  des  édifices 
pablics.  —  L'origine  de  l'orfèvrerie  remonte  à  des  temps 
trèi-recalés.  Les  Hébreux,  lors  de  la  sortie  d*Égypte, 
emprantèrent  aux  Égyptiens  une  grande  quantité  de  vases 
d'or  et  d'argent,  et  les  bijoux  Qu'ils  offrirent  à  Moïse  dans 
le  désert  furent  convertis  en  objets  nécessaires  au  service 
dîTio.  Dans  VOdyssée  d'Homère,  Hélène  reçoit  en  pré- 
sent une  quenouille  d'or  et  une  corbeille  d'argent  aux 
bords  artistement  travaillés.  La  description  du  bouclier 
d'Achille  dans  le  môme  poète  montre  qu'on  savait  déjà 
mélanger  sur  les  métaux  la  couleur  des  différents  objets. 
L'épée  d'Agamemnon  avait  une  poignée  d'or,  le  sceptre 
d*AchilIe  des  cloos  d'or.  Les  femmes  d'Athènes  portaient 
dans  leurs  cheveux  des  cigales  d'or,   pour  indiquer 
qu'elles  étaient  indigènes  en  Grèce.  L'arçenterie  de  Délos 
fut  célèbre  à  Rome.  Sous  l'Empire  romain,  les  vases  d'or 
et  d'argent  ciselé,  les  patères,  les  coupes,  devinrent  assez 
communs.  Il  reste  encore,  entre  autres  choses,  pour  Juger 
le  mérite  des  oeuvres  antiques,  les  vases  du  cardinal  Âl- 
l^i  représentant  l'expiation  d'Oreste  et  les  travaux 
d'IIercule,  le  plateau  connu  sous  le  nom  de  bouclier  de 
Scipion  {V.  BooglierV  la  patère  d'or  trouvée  à  Rennes 
et  représentant  un  défi  entre  Hercule  et  Bacchus,  etc. 
Lesœayres  de  l'orfèvrerie  ont  pris,  dans  tous  les  temps, 
les  caractères  des  arts  contemporains.  Ainsi ,  dans  les 
pièces  grecques  et  romaines  qui  nous  sont  parvenues,  se 
retroQTent  fa  simplicité  de  composition,  les  lignes  nettes 
et  pares  de  Tart  antique.  L'orfèvrerie  byzantine,  comme 
l'trchitectnre,  a  des  formes  moins  sévères,  mais  plus  de 
spontanéité,  de  liberté  et  d'abandon.  Au  vii«  siècle,  en 
France,  S^  Éloi  se  fit  un  nom  par  son  habileté  dans  l'or- 
rârrerie.  Pendant  le  moyen  âge,  on  a  surtout  fabriqué  des 
cbâsses,  des  reliquaires,  des  tabernacles,  des  ostensoirs, 
descradflx,  des  retables,  des  chandeliers,  etc.  ;  les  artistes 
y  ont  reproduit  les  formes  architecturales  x  ainsi.  Jus- 
qn'aa  milieu  du  xii*  siècle,  les  arcatures  et  les  baies  dé- 
coratives sont  en  plein  cintre,  les  figures  allongée,  les 
<intperies  roides  et  verticales,  les  costumes  couverts  de 
l»]oux,  tandis  que  plus  tard  l'ogive  domine,  les  person- 
nages se  raccourcissent ,  les  plis  deviennent  plus  amples, 
le  laire  plus  large  et  plus  vrai.  C'est  au  xiv*  siècle  qu'on 
a  repris  la  fabrication  de  l'orfèvrerie  de  table.  Parmi  les 
œuvres  d'orfèvrerie  du  moyen  âge  qui  sont  arrivées  Jus- 
<TQ'à  nous,  on  peut  citer  :  les  couronnes  de  Guarrazar 
(V.  c$  mot)^  la  couronne  de  Charlemagne;  le  magnifique 
antel  d'or  éd  la  basilique  S'-Ambroise  à  Milan  ;  la  cou- 
rertoTB  du  livre  d'Heures  de  Charles  le  Chauve;  le  re- 
table d'or  de  la  cathédrale  de  Bàle,  qui  est  actuellement 
au  musée  de  Clany,  à  Paris;  le  calice  de  l'abbaye  de 
Wdngarten  en  Souabe;  la  ch&sse  d'Aix- la- Chapelle  « 
donnée  par  Frédéric  Barberousse;  l'autel  d'or  de  la  cha- 
pelle rmle  à  Munich  ;  la  ch&sse  des  Rois  Mages  à  Co- 
logne; les  chasses  de  S^  Héribert  à  Deutz,  de  S^  Taurin  à 
tvreax.,  de  S^  Romain  à  Rouen,  de  S^  Calmine  à  Mau- 
tae,  etc.;  une  Vierge  avec  l'enfant  Jésus,  en  or,  donnée 
par  Jeanne  d'Évreux  à  Pabbaye  deS^-Denis  en  1830,  et 
jni  est  an  musée  du  Louvre;  le  b&ton  cantoral,  daté  de 
1394,  qui  a  longtemps  passé  pour  le  sceptre  de  Charle- 
magne. Un  des  plus  fameux  orfèvres  fut  Raoul,  que 
Philippe  ni  anoblit  —  A  l'époque  de  la  Renaissance, 


l'orfèvrerie,  de  religiense  qu'elle  avait  été,  se  fit  profane  t 
tout  en  cherchant  à  reproduire  les  formes  du  style  an- 
tique, elle  y  i^outa  les  rameaux  de  feuillage,  de  fruits  et 
de  fleurs,  et  modela  le  corps  humain  avec  une  ^^e  ha- 
bileté. Dans  le  même  temps,  l'art  de  l'orfèvre  se  partage 
en  plusieurs  branches  :  les  procédés  de  fabrication  de- 
venant plus  savants,  il  est  nécessaire  qu'on  s'y  consacre 
exclusivement,  et  désormais  la  composition  des  modèles 
est  le  plus  souvent  l'œuvre  d'artistes  particuliers.  Beau- 
coup dwistes  italiens  s'illustrèrent  par  des  travaux  d'or- 
fèvrerie, entre  autres  Donatello,  Brunelleschi,  Ghiberti, 
Ant.  del  Pollaiuolo,  Maso  Finiguerra,  Amerighi,  Verro- 
chio,  Piero  Giovanni,  Michelagdolo  da  Pinzidimonte, 
Romolo  del  Tavolacdno,  Stefano  Saltaregli,  Zanobi  del 
Lavacchio,  Bastiano  Cennini,  Piero  di  Nino,  Antonio  di 
Salvi,  Salvadore  Pilli,  Lorenzo  délia  Golp^ja,  etc.  Biais 
ce  fut  surtout  Benvenuto  CelUni  qui  eut  la  plus  grande 
influence  sur  l'orfèvrerie  du  xvi*  siècle.  On  doit  citer, 
après  lui,  Caradosso  de  Milan  et  Lautizîo  de  Pérouse. 
Etienne  de  Laulne,  Jean  Cousin  (différent  du  peintre), 
et  François  Briot,  furent  aussi  des  orfèvres  distingua 
de  cette  époque  en  France.  Au  xvu*  siècle,  la  variété  des 
ornements  et  la  délicatesse  de  la  main-d'œuvre  font  place  à 
un  art  qui  vise  à  la  majesté  :  sous  l'influence  du  cavalier 
Bernin  et  de  Lebrun,  l'orfèvrerie  devient  fastueuse;  il  y  a 
cependant  d'heureuses  exceptions,  entre  autres  De  Lau- 
nay  et  les  Ballin.  Pendant  le  xviii*  siècle,  reparaissent 
les  libertés  et  les  caprices  :  les  œuvres  de  l'orfèvrerie, 
quelquefois  ravissantes  de  fantaisie,  n'ont  plus  rien  do 
i^^ulier;  ce  sont  toutes  fom^  antigéométriques,  toutes 
surfaces  ondulées,  contournées,  indescriptibles.  Les  Ger- 
main produisent  des  ouvrages  délicats,  très-étudiés,  et 
d'un  grand  mérite  d'ajustement;  ils  r^ent  le  goût  de 
l'époque,  tout  en  y  cédant.  Après  la  période  de  la  Révo- 
lution, l'orfèvrerie,  un  instant  arrêtée,  reprend  sa  marche  t 
Auguste,  Odiot  pèie,  Thomire,  Biennais,  la  représentent 
sous  le  règne  de  Napoléon  I*';  pendant  la  Restauration, 
Odiot  fils  (dont  on  voit  de  beiaux  spécimens  au  musée 
du  Luxembourg)  et  Cahier  restent  fidèles  aux  formes  sé- 
rieuses, tandis  que  Fauconnier,  Fossin,  les  ft-ëres  Marrel, 
Lenglet,  et  plus  tard  Froment-Meurice  se  composent  une 
sorte  d'originalité  par  des  emprunts  faits  au  moyen  âge, 
à  la  Renaissance  et  au  xviii*  siècle.  C'est  cet  éclectisme 
qui  caractérise  l'orfèvrerie  actuelle,  repr^ntée  par  Vet- 
che,  Rudolphi,  Wiese,  Bapst,  Bftaurice  Mayer,  les  frères 
Fannière,  Rouvenat,  Hayet,  Mention,  Wagner,  Morel, 
Bachelet,  Duponchel,  Christofle,  etc.  On  pourrait  encore 
citer  aujourd'hui  Garrard  et  Hancock  en  Angleterre;  de 
Meyer  et  Salm  en  Hollande,  Friedebere  en  Prusse,  etc. 
V.  Séré  et  Paul  Lacroix,  Histoire  de  VOrfévrerie-JoaU' 
lerie,  Paris,  1850,  in-8°.  B. 

ORFÈVRES  (du  latin  auri  faber,  ouvrier  qui  travaille 
l'or),  ancienne  corporation,  déjà  importante  au  milieu  du 
XIII"  siècle,  et  formant  à  Paris  le  6*  corps  des  marchands. 
Le  fameux  Etienne  Marcel ,  prévôt  des  marchands  sous  le 
régne  de  Jean  le  Bon,  en  était  sorti.  L'apprentissage  était 
de  8  années,  et  on  ne  pouvait  le  commencer  avant  l'âge  de 
9  ans  ni  après  16.  Le  compagnonnage  durait  3  ans.  Pour 
obtenir  la  maîtrise,  il  fallait  avoir  20  ans  accomplis,  savoir 
lire  et  écrire,  subir  un  examen,  et  présenter  un  chef- 
d'œuvre;  chaque  nouveau  maître  était  tenu  de  faire  rece- 
voir à  la  Coar  des  monnaies  un  poinçon  à  son  nom  et 
devise,  pour  marquer  ses  ouvrages.  Le  brevet  coûtait 
186  livres,  et  la  maîtrise  1 ,350  livres.  La  corporation  nom- 
mait tous  les  deux  ans  trois  maitres  et  gardes.  Elle  était 
honorée  d'armoiries,  consistant  en  une  croix  d'or  dentelée 
en  champ  de  gueules,  accompagnée  de  deux  couronnes 
et  de  coupes  d'or  à  la  bannière  de  France  en  chef.  Elle 
fonda,  en  1390,  une  chapelle  et  un  hôpital  pour  les  ou- 
vriers malades.  C'était  l'usage  qu^  le  1^  mai,  elle  ofiTrlt 
un  tableau  &  l'église  Notre-Dame.  K.  Mai.  B. 

ORFROI,  en  italien  orifrigio,  en  latin  du  moyen  &ge 
aurifrisium,  aurifrigia,  aurifrisia,  aurifrisa,  aurifrasus, 
aurifriams^  broderie  d'or,  d'argent  ou  de  soie,  dont  on 
orne  les  vêtements,  et  particulièrement  les  ornements 
d'église.  On  croit  que  le  mot  vient  d'aurunn  phrygium, 
parce  que  les  Phrygiens  auraient  été  les  inventeurs  de 
cette  broderie,  ou  a^aurum  fractum,  or  brisé. 

ORGANISER,  terme  de  l'ancienne  Musique.  C'était 
marier,  comme  dans  l'orgue,  des  voix  différentes.  On  fai- 
sait une  organisation  simple,  quand  on  se  bornait  à  in- 
troduire la  tierce  sur  la  note  sensible,  à  la  terminaison 
du  chant;  une  organiscUion  double,  quand  on  accompa* 
gnait  le  chant  en  quarte  ou  en  quinte.  Le  triplum  et  le 
quadruplum  furent  d'autres  façons  d'organiser.  Autre- 
fois, dans  quelques  églises,  on  appelait  organistes  dr 


ORG 


1350 


ORG 


VAU9Îuta  qaatre  chantres  qui  orgaoisaSent,  c-à-d.  chan- 
taient en  parties  V Alléluia,  V,  Organum. 

ORGANISTE ,  celui  qui  toache  Torgue.  Il  doit  réunir 
une  science  musicale  étendue,  l'habitude  de  la  composi- 
tion, une  imagination  riche,  et  du  goût.  Le  premier  orga- 
niste célèbre  dont  le  nom  se  soit  conservé  est  Francesco 
Landino,  surnommé  Ci>co  (rAveugle),  qui  vivait  à  Venise 
au  XIV*  siècle  ;  la  Bibliothèque  impénale  de  Paris  possède 
quelques-unes  de  ses  pièces,  remarquables  pour  répoque 
où  elles  furent  écrites.  On  cite  ensuite  Squarcialupi,  or- 
ganiste à  Florence  en  1430  ;  Francisco  Corteccia,  Ales- 
sandro  Striggio,  Paul  Hofhaimer  ou  HoAThaimer,  Michel- 
Ange  Tonti,  Antonio  degli  Organi  ;  le  Français  Milleville, 
qui  suivit  à  Ferrare  la  fille  de  Louis  XII;  Claude  Mé- 
rulo;  les  deux  Gabrielli;  Arauxo,  organiste  de  Séville; 
Bernard  Schmitt,  organiste  à  Venise;  John  Bull,  orga- 
niste de  la  reine  Elisabeth  d'Angleterre.  Au  commence- 
ment du  XVII*  siècle,  Frescobaldi,  organiste  de  S^Pierre 
de  Rome,  excita  un  enthousiasme  général  ;  ses  compo- 
sitions sont  des  chefs-d*œuvre  de  science.  Répandues  et 
goûtées  en  France,  elles  y  suscitèrent  des  organistes  de 
talent,  les  Champion,  les  Couperin ,  Roberday,  d'Angle- 
b6rt,^Lebègue,  Ni  vers,  Titelouze,  Gigault,  Raison.  A  la 
même  époque,  Samuel  Scheidt  illustrait  à  Hambourg 
l'école  allemande,  qui  devait,  pendant  le  xvm"  siècle,  pro- 
duire des  organistes  de  premier  ordre,  Froberger,  de  Kerl, 
Buxtehude,  Reinken,  Pachelbel,  la  famille  des  Bach,  Han- 
del,  Kittel,  etc«  A  ces  maîtres,  la  France  ne  put  opposer 
que  des  hommes  secondaires,  Daquin,  Calvière,  Balbàtre, 
Blarchand,  tous  fort  au-dessous  de  la  réputation  dont  ils 
ont  Joui.  Depuis  Rameau  Jusqu'à  Beethoven,  presque  tous 
les  compositeurs  ont  étudué  l|orgue  :  Mozart,  Havdn,  Ni- 
cole, Méhul,  Grétry,  Bofeldieu,  ont  été  organistes,  et 
l'on  pourrait  encore  mentionner  de  nos  Jours  Adolphe 
Adam,  Hipp.  Monpou,  Niedermayer,  Fétis,  etc.  L'orgue  a 
été  spécialement  cultivé  au  xix*  siècle,  en  Allemaigne, 

Kar  l'abbé  Vogler,  Rberlin,  Albrechtsberger ,  Schneider, 
ink,  Knecht,  Neukomm,  Hess;  en  France,  par  Beau- 
varlet-Charpentier,  Séjan,  Danjou,  Miné,  Simon ,  Fessy, 
Boeiy,  Benoist ,  I^fébure-Wély  ;  en  Belgique,  par  Lem- 
mens.  B. 

ORGANISTRUM,  instrument  de  musique  du  moyen 
âge,  dont  on  voit  la  figure  parmi  les  sculptures  de  l'église 
S*-Georges  de  Bocherville  (Seine -Inférieure).  C'était 
une  énorme  guitare,  percée  de  deux  ouïes,  et  montée  de 
trois  cordes  mises  en  vibration  par  une  roue  à  manivelle  : 
hnit  filets  mobiles,  se  relevant  et  s'abaissant  à  volonté 
le  long  du  manche,  formaient  comme  autant  de  touches 
destinées  à  varier  les  sons.  Il  est  vraisemblable  qu'on 
pouvait  produire  des  sons  simultanés.  L'oreanistrum  se 
plaçait  sur  les  genoux  de  deux  musiciens,  dont  l'un  fai- 
sait mouvoir  les  touches  ou  filets,  et  l'autre  la  manivelle. 
—  Organistrum  s'est  dit  aussi  du  lieu  de  l'église  où  sont 
placées  les  orgues.  B. 

ORGANO,  mot  dont  les  Italiens  se  servent  pour  dési- 

Sier  la  basse  continue  chiffrée,  parce  qu'ils  la  Jouent  or- 
nairement  sur  l'orgue. 

ORGANO-LYRICON,  sorte  de  piano  qui  faisait  en- 
tendre distinctement  la  flûte,  le  fiflre,  le  hautbois,  le 
basson,  le  cor,  la  trompette  et  la  contre-basse.  Il  fut  in- 
venté à  Paris,  en  1810,  par  Saint-Pem. 


meni 

logiques    

mmeuma  ou  Traité  de  VlfUerprétatUm,  /et  Premiers  Ana- 
lytiques, les  Derniers  Analytiques,  les  Topiques,  et  la 
Réfutation  des  Sophismes.  On  ne  sait  au  Juste  ni  quand, 
ni  par  qui,  ce  mot  d'On^anon  a  été  employé  précisément 
dans  ce  sens;  Aristote  s'en  sert  bien  dans  quelques  pas- 
sages, mais  sans  y  attacher  d'autre  sens  que  le  sens 
flffuré  qu'il  comporte  habituellement  :  «  La  science  est 
rlnstrument  de  l'intelligence;  »  —  «  Les  moyens  {organa) 
de  nous  procurer  des  syllo^smes  sont  au  nombre  de 
quatre,  etc.  »  Plus  tard,  on  voit  ses  interprètes  discuter  la 
question  de  savoir  si  la  logique  est  une  partie  réelle  de 
la  philosophie,  ou  si  elle  en  est  seulement  l'instrument. 
Mus  il  résulterait  des  recherches  érudites  auxquelles 
s'est  livré  M.  Barthélémy  Saint^Hilaire,  dans  son  livre 
De  la  Logique  d'Aristote,  que  c'est  du  v*  au  vi*  siècle 
qpie  s'est  introduit  l'usage  d'appeler  la  Logique  péripaté- 
ticienne VOrganicon,  et  On;anofi  la  réunion  aes  écrits 
oui  la  contiennent.  Sans  entrer  dans  les  détails  et  dans 
ri^ipréciation  de  la  doctrine,  nous  ferons  remarguer 
que  tel  est  Tenchalnement  des  différentes  parties  dé  rOr- 
ganon ,  que  la  pensée  de  les  réunir  a  dû  se  présenter 
tout  naturellement  aux  successeurs  d'Aristote,  rOrganon, 


tel  que  nous  le  possédons,  embrassant  la  théorie  com« 

{>lète  du  raisonnement  démonstratif,  depuis  ses  éléments, 
es  formes  générales  de  la  pensée  (Catégories)^  et  les 
mots  dans  leurs  rapports  avec  la  pensée  (Traité  de  l'In- 
terprétation)^ Jusqu'à  la  formation  définitive  des  argo* 
ments  par  l'invention  du  moyen  terme  (Topiques)^  et 
Jusqu'à  la  réfutation  des  arguments  sophistiques.  Sur 
l'authenticité  de  VOrganon,  son  histoire,  etc.,  V.  le  Uvre 
cité  plus  haut  de  M.  Barthélémy  Saint-Hilaire.    B — e. 

ORGANUM,  mot  dont  on  s^est  servi,  à  partir  des 
n*  et  X*  siècles,  pour  désigner  une  harmonie  d'une  na* 
ture  particulière,  qui  consistait  en  des  successions  de 
quartes,  de  quintes  et  d'octaves.  Elle  fut  principalement 
répandue  par  Hucbald.  H  y  avait  deux  sortes  &organum . 
1®  accompagner  un  chant  par  une,  deux  ou  trois  parties 
qui  le  suivaient  par  mouvement  direct  à  l'octave,  à  la 
(Quinte  ou  à  la  quarte  ;  2*  accompagner  par  plusieurs  par- 
ties suivant  toute  espèce  de  mouvement,  direct,  oblique 
ou  contraire,  et  ofljrant  d'autres  intervalles  que  ceux  de 
quinte,  de  quarte  et  d'octave.  Suivant  Jean  Cotton,  écri- 
vain du  XI*  siècle,  l'exécution  simultanée  d'intervalles 
différents  aurait  été  nommée  organum,  parce  qae  la  voix, 
exprimant  d'une  manière  convenable  des  sons  dissem- 
blables, ressemble  à  l'instrument  de  ce  nom*        F.  C. 

ORGANUlf  (NoVUm).  F.  NOVOM  ORGANUM. 

0RG13E,  le  plus  considérable  des  instruments  de  mu- 
sique, le  plus  puissant  en  sonorité,  le  plus  complet  par 
l'étendue  de  son  diapason,  puisqu'il  embrasse  nuit  oc- 
taves et  demie.  Il  est  à  lui  seul  un  concert  d'instruments 
variés,  et  résume  dans  son  unité  tout  un  orchestre  ;  c'est 
l'instrument  par  excellence,  organon.  Il  se  compose  : 
1*  d'un  grand  nombre  de  tuyaux  de  différentes  grandeurs, 
dont  les  uns  sont  faits  en  étain  fin,  d'autres  avec  un  mé- 
lange d'étain  et  de  plomb,  d'autres  en  bois,  et  qui  for- 
ment un  certain  nombre  iejeux  (V.  te  fnot);  le  plus 
grand  tuyau  peut  avoir  32  pieds  d'élévation ,  le  plus  petit 
n'a  que  quelques  centimètres;  on  dénomme  un  orgue  par 
son  plus  grand  tuyau  :  on  dit  un  trente-deua^pieds^  un 
seije-pieds  [V,  Tuyaox  d'obgdb)  ;  —  2*  de  ideux,  trois  ou 
quatre  claviers  à  main  superposés  ;  —  3<>  d'un  clavier  d$ 
pédales,  dont  les  touches  sont  en  bois,  et  que  l'organiste 
fait  mouvoir  avec  les  pieds  l  V.  Clavibb  )  ;  —  4**  d'une 
soufflerie,  qui  fournit  le  vent  (V,  Sodpflbrib); — 5®  d'une 
chambre  d'air  appelée  sommier,  et  dans  laquelle  le  vent 
est  contenu  (  V,  Sommier)  ;  —  6*  d'un  mécanisme  nommé 
abrégé,  qui  met  en  communication  le  mouvement  des 
claviers  avec  les  soupapes  des  sommiers.  L'orgue  est  en- 
fermé dans  un  grand  corps  de  menuiserie  appelé  buffet 
(  V,  ce  mot) ,  qui  est  souvent  divisé  en  deux  parties, 
dont  l'une,  placée  en  avant,  et  de  plus  petite  dimension, 
a  reçu  le  nom  de  positif  (  r .  ce  mot).  Pour  donner  une 
idée  de  la  composition  d'un  grand  orgue,  voici  le  tableau 
des  Jeux  que  contient  celui  de  la  cathédrale  de  Rouen, 
construit  récemment  par  Merklin,  Schultze  et  O*  : 

Au  premier  clavier,  positifs  54  notes  de  Vut  au  fa 

1.  Flûte  de  8  pieds.  9.  Fourniture  de  cinq  rangs 

2.  Flûte  de  8  pieds,  42  de  tuyaux. 

notes.  10.  Cymbale. 

3.  Bourdon  de  16  pieds.  il.  Cornet. 

4.  Bourdon  de  8  pieds.  12.  Première  trompette» 

5.  Prestant  de  4  pieds.  13.  Deuxième  trompette 

6.  Nasard.  14.  Cromorne. 

7.  Doublette.  15.  Euphone  de  8  pieds. 

8.  Kéraulophone.  10.  Qairon  de  4  pieds. 

Au  deuxième  clavier,  grand  orgue,  54  notes  de  l'ut 
au  fa  * 

1.  Montre  de  8  pieds.  11.  Dessus   de    flûte,   29 

2.  Montre  de  10  pieds.  tuyaux. 

3.  Flûte  de  8  pieds.  12.  Grosse  fourniture. 

4.  Dessus   de   flûte,    37  13.  Petite  fournitore. 

tuyaux.  14.  Cymbale. 

5.  Bourdon  de  16  pieds.  15.  Première  trompette. 

6.  Bourdon  de  8  pieds.  16.  Deuxième  trompette» 

7.  Prestant  de  42  notes.  17.  Premier  clairon.  . 

8.  Gambe  de  8  pieds.  18.  Deuxième  clairon. 

9.  Nasard.  19.  Cornet. 
10.  Doublette. 

Au  troisième  davier,  dit  clavier  de  bombarde,  54  notes 
de  l'ut  au  fa  : 

1.  Trompette  de  8  pieds.       3.  Clairon  de  4  pieds. 

2.  Bombarde  de  10  pieds,     i.  Cornet. 


ORG 


1351 


ORG 


An  qo&trième  clavier,  récit  expressif,  54  notes  de  VtU 

lu  fa  : 

i.  Flûte  harmonique  de  8  6.  Trompette  harmonique. 

pieds.  7.  Trompette  de  16  pieds. 

1  Flûte  de  4  pieds.  8.  Cor  anglais  de  16  pieds. 

3.  Gambe  de  8  pieds.  9.  Hautbois,  avec  suite  de 

4.  Bourdon  de  8  pieds.  basson. 

5.  Prestant  de  4  pieds.  10.  Voix  humaine. 

Clamer  de  pédales;  Jeux  de  fonds  et  d'anches  ;  27  no- 
tes de  Vut  au  ré  : 

1.  Sous-bosse  de  32  pieds.  6.  Bombarde  de  16  pieds. 

2.  Flûte  de  16  pieds.  7.  Première  trompette. 

3.  Flûte  de  8  pieds.  8.  Deuxième  trompette. 

4.  Flûte  de  4  pieds.  9.  Clairon. 

5.  Bombarde  de  3S  pieds. 

Pédales  â^ accouplement  si  de  combinaison 

1'*  pédale  :  Accouplement  du  1**  clavier. 
2*     —       Appel  des  Jeux  du  2*  davier. 
3*     —       Accouplement  du  3*  clavier. 
4*     —       Accouplement  du  4*  clavier. 
5*  Levier  pneumatiqtte  sur  le  3*  davier. 
6*  Appel  des  Jeux  d'anches  et  de  mutation  sur  le  2*  clavier. 
7«       Id,  —  sur  le  3«  clavier. 

8*       /d.  —  sur  le  4*  clavier. 

9*    Pour  les  fonctions  de  la  boite  expressive. 
10*  Disposant  le  clavier  de  pédales  en  tirasse  sur  la  basse 
du  2*  clavier. 

Cet  orgue  se  compose  de  58  Jeux  formant  ensemble 
3,823  tuvaux.  H  v  en  a  de  plus  considérables  i  celui  de 
l'église  S^-Eustache,  à  Paris,  compte  90  jeux;  celui  de 
S^Michel^  à  Hambourg,  88;  celui  de  S^*-Marie,  à  Franc- 
fort-eui^le-Mein,  84;  celui  de  S'-Denis,près  de  Paris,  71. 
On  dte  encore  les  orgues  de  S^*- Elisabeth  à  Breslau,  de 
Sculptée  à  Paris,  de  S^Paul  à  Londres,  de  S^-Étienne  à 
Caen,  des  cathédrales  de  Beauvais  et  de  Fribourg,  du 
temple  protestant  de  Strasbourg,  de  Harlem  en  Hollande, 
de  Birmingham,  etc.  Depuis  le  xvi«  siècle,  les  principaux 
facteurs  d'orgues  ont  été  :  en  Italie,  Antegnau,  Azzolino 
délia  Ciaja,  Gristoforo  Valvasora,  Nanchini,  Callido,  Jo- 
seph Senssi,  les  Trond,  Biroldi,  J.-B.  Ramai;  en  Alle- 
magne, Erard  Schmidt,  Fréd.  Krebs,  Nicolas  MuUner, 
Rodolphe  Agricola,  Scheibe,  Siibermann,  J.-J.  et  Michel 
Wasner,  Seuifert,  Gabier,  Schroeter,  Bfarx,  Tauscher, 
Hildebrand,  Aloys  Mooser,  et  Sommer;  en  Fhtnce,  Mou- 
cherel.  Soyeuse,  Bliculs,  Isnard,  Cochu,  Thieny,  Lénine, 
Dalleiy,  et  Glicauot;  en  Angleterre,  Dallans,  Bndge, 
Schnetzier,  B^field,  Green,  Harris,  Flight,  Russel,  Lin- 
cohi,  Graj,  Rishop,  Bevington,  Robson,  Schmidt.  De  nos 
jours,  la  facture  d'orgues  est  dignement  représentée  par 
Cavaillé-CoU,  Daublaine-CalUnet,Dallery  fils,  Ducroquet, 
Stein,  Merklin,  Schulue  et  Barker;  par  Hill  à  Londjres  et 
Kalker  à  Louidx>nrg. 

Les  Méthodes  d'orgue  les  plus  estimées  sont  celles 
d'Amerbach,  de  TQrk  (Ldpzig,  1787),  de  Knecht,  de 
Vogler,  de  Kittel,  de  Martini,  de  Wermer,  de  MQlIer,  de 
Schneider,  et  de  Rink,  dont  Choron  a  publié  une  édition 
française.  On  doit  au  bénédictin  Dom  Bedos  de  Celles 
l*Art  du  facteur  d'orgues  (1766-78),  et  à  M.  Hamel 
un  Massuel  du  facteur  S  orgues  (  Paris,  1849). 

Suivant  une  tradition  généralement  adoptée,  l'inven- 
tion de  l'orgue  ne  daterait  que  du  viii«  siècle,  et  le  pre- 
mier instrument  de  ce  genre  aurait  été  envoyé  en  757  à 
Pépin  le  Bref  par  l'empereur  grec  Constantin  Copronyme, 
et  placé  dans  l'église  de  S*-Corneille  à  Compiègne.  Mais 
l'orgue  existait  bien  longtemps  avant  de  porter  le  nom 
^crganum,  mot  oui  fut  d'abord  employé  pour  signifier 
un  instrument  quelconque.  On  a  pensé  que  la  cornemuse, 
appelée  tibia  uiricularis^  avait  pu  donner  l'idée  de 
l'orgue.  D'autres  trouvent  plutôt  le  germe  de  cette  idée 
dans  la  flûte  de  Pan  ou  synnx  :  il  ne  s'agissait,  en  effet, 
que  de  recueillir  l'air  dans  un  récipient,  et  de  l'y  conser- 
ver avant  son  introduction  dans  les  tubiss;  du  jour  où  il 
fut  reconnu  qu'on  pouvait  remplacer  le  souffle  humain 
par  l'air  arUfidel  d'un  soufflet,  l'orgue  fût  constitué,  et 
l'on  n'eut  plus  qu'à  chercher  les  moyens  d'obtenir  des 
tuyaux  produisant  des  sons  différents,  non  plus  seule- 
ment an  point  de  vue  de  la  tonalité,  mais  aussi  quant  au 
timbre.  Dans  la  12*  Pytkique  de  Findare  (vi*  siècle  av. 
J.-C) ,  il  est  question  d'un  instrument  grossier  dont  les 
perfeddonnements  successifs  ont  formé  l'orgue  :  «  Pallas, 
dit  le  poete^  inventa  une  flûte  qui  produisait  une  multi- 


tude de  sons...  Elle  nomma  cette  flûte  V instrument  à  plU' 
sieurs  têtes;,.,  ses  sons  s'échappent  à  travers  un  mince 
airain  et  des  roseaux.  »  11  s'agit  évidemment  ici  de  plu- 
sieurs tuyaux,  dont  quelques-uns  étaient  en  métal.  Nonnus 
{Dionys.,  xxni)  attribue  également  à  Minerve  l'invention 
d'un  instrument  composé  de  plusieurs  flûtes  assemblées 
avec  ordre.  Le  scolîaste  de  Pindare  dit  qu'un  acddent 
survenu  pendant  que  Midas  d'Agrigente  jouait  de  cet 
instrument  l'obligea  à  le  renverser,  et  à  jouer  avec  les 
seuls  tuyaux,  à  la  manière  de  la  syrinx;  ce  qui  nous 
montre  que  la  flûte  de  Pan  avait  été  placée  sur  une  es- 
pèce de  coffre,  où  s'adaptait  quelque  soufflet. 

Au  temps  des  Ptolémées,  l'orgue.  Jusque-là  appelé  flûte, 
prit  le  nom  d*hydraule  (du  grec  udAr,  eau,  et-  aulos, 
flûte,  tuyau),  parce  qu'on  proiduisit  les  sons  au  moyen 
de  l'eau,  procédé  attribué  à  Ctésibius  d'Alexandrie.  Vi- 
truve  (X,  13)  en  a  essayé  une  description  très-détaillée, 
qu'il  ne  nous  est  pas  aisé  de  comprendre  :  on  ne  sait  si 
l'eau  produisait  directement  le  son  dans  les  tubes,  ou  si 
elle  servait  uniquement  d'agent  pour  un  mouvement  mé- 
canique. Quoi  qu'il  en  soit,  Pétrone,  Tertullien,  Claudien, 
parlent  de  l'ox^e  hydraulique  de  manière  à  ne  laisser 
aucun  doute  sur  la  multitude  des  tuyaux  et  la  force  des 
sons.  On  se  servait  encore  de  cet  instrument  en  Angle- 
terre au  XII*  siècle.  Quel  avait  été  l'emploi  de  l'hydraule 
chez  les  Andens?  C'est  ce  qu'il  serait  diffidle  de  déter- 
miner. On  sait  seulement  qu'elle  était  placée  dans  les 
grandes  enceintes ,  au  Cirque,  dans  les  théâtres;  an  rap- 
port de  Pétrone,  les  gladiateurs  et  les  athlètes  combat- 
taient au  son  de  l'hydraule;  Sidoine  Apollinaire  loue 
Théodoric ,  rei  des  Wisigoths ,  de  n'en  avoir  pas  admis 
dans  son  palais. 

L'orgue  pneumatique,  destiné  à  détrôner  l'orgue  hy- 
draulique, parait  avoir  eu  déjà,  au  iv«  siède  de  notre  ère, 
une  certaine  importance.  On  lit  dans  une  épigramme  de 
l'empereur  Julien  t  «  Je  vois  id  une  tout  autre  espèce 
de  tuyaux;  ils  ont  pria  radne  dans  un  sol  de  bronze; 
leurs  sons  bruyants  ne  sont  pas  produits  par  notre  souf- 
fle, mais  le  vent,  s'élançant  d'un  antre  formé  de  peaux 
de  taureau,  pénètre  dans  tous  les  conduits ,  tandis  qu'un 
artiste  promène  ses  doigts  sur  les  touches  qui  y  corres- 
pondent, et  produit  aussitôt  des  sons  mélodieux.  »  Une 
lettre  attribuée  à  S*  Jérôme  dit  qu'il  y  avait  à  Jérusalem 
un  orgue  à  12  soufflets  oui  s'entendait  à  mille  pas  de 
distance.  On  reconnaît  aeux  Instruments  de  ce  genre 
parmi  les  sculptures  de  l'obélisque  érigé  àConstantinople 
sous  Théodose  le  Grand.  Théodoret,  Cassiodore,  S^  Au- 
gustin, Isidore,  ont  connu  l'orgue  pneumatique  dans  des 
pays  différents.  L'usage  profane  de  l'orgue  empêcha  long- 
temps les  chrétiens  de  l'admettre  dans  leurs  églises. 
L'évèque  de  Poitiers,  Fortunat,  dans  une  lettre  adressée 
vers  la  fin  du  vi*  siède  au  clergé  de  Paris,  met  cet  instru- 
ment au  nombre  de  ceux  dont  on  se  servait  pour  accom- 
pagner les  voix;  mais  son  emploi  dans  les  cérémonies 
du  culte  ne  fut  solennellement  consacré  qu'en  660,  par 
un  décret  du  pape  Vitalien.  L'orgue  envoyé  à  Pépin  le 
Bref  était  très-petit  et  portatif,  comme  cdui  qui  fut  con- 
struit par  un  Arabe  nommé  Giafar  et  qui  fût  envoyé  à 
Charlemagne  par  le  calife  de  Bagdad.  Un  prêtre  vénitien, 
nommé  George,  construisit  l'orgue  qu'on  plaça  à  Aix-la- 
Chapelle  par  les  ordres  de  Louis  le  Débonnaire.  Au 
X*  siècle,  la  cathédrale  de  Winchester  possédait  un  orgue 
de  400  tuyaux,  et  les  26  soufflets  qui  les  remplissaient 
d'air  exigeaient  les  efforts  de  70  hommes,  tant  la  struc- 
ture et  la  disposition  de  l'Instrument  étaient  encore  im- 
parfaites. Le  savant  Gerbert,  qui  devint  pape  sous  le  nom 
de  Sylvestre  II ,  imagina  des  orgues  à  vapeur  s  c'est  un 
fait  qui  semble  difiicile  à  croire  pour  un  temps  si  reculé, 
et  cependant  les  témoignages  de  Guillaume  de  Bialmes- 
bury  et  de  Vincent  de  Beauvais  sont  positifs.  Le  premier, 
qui  avait  vu  un  de  ces  orgues  dans  l'éslise  de  Reims,  dit 
que  «  le  souffle  produit  par  la  force  de  l'eau  bouillante 
remplissait  les  cavités  de  l'instrument.  »  Le  second  donne, 
à  propos  de  l'orgue  de  l'abbaye  de  S^-Bertin  en  Artois , 
une  description  analogue.  Le  fond  de  ces  témoignages  est 
parfaitement  Intelligible,  si  la  clarté  manque  dans  le  dé- 
tail :  on  peut  supposer  qu'un  courant  de  vapeur  était 
substitué  au  courant  d'air  ordinaire,  ou  bien  que  Gerbert 
faisait  de  la  vapeur  un  moteur  de  soufflerie.  Les  orgues 
du  moyen  âge  furent  informes  et  grossières  :  les  touches 
avaient  5  ou  6  pouces  de  largeur,  et  c'était  avec  les  mains 
garnies  de  moufles  ou  gros  gants  qu'on  les  frappait  pour 
les  faire  parler,  tant  les  soupapes  en  étaient  dures.  Ce  ne 
fut  guère  qu'à  partir  du  xtii*  siècle  qu'elles  rendirent  les 
denu-tons.  Le  premier  jeu  d'orgues  de  Paris  fut  dresse 
dans  l'église  S*-Sôverin,  sous  le  règne  de  Jean  le  Bon. 


ORG 


1352 


ORl 


L'orgue  ne  fut  composé,  pendant  bien  longtemps,  que  du 
•eul  jeu  d'anches  appelé  régale,  et  l'instrument  s'ap- 
pelait, pour  ce  motif,  regabellum  ou  rigabdlum.  Quand 
on  se  mit  à  organiser  {V,  ce  mot)^  l'addition  de  plu- 
sieurs Jeux  devint  nécessaire,  et  on  vit  paraître  successi- 
▼ement  des  Jeux  accordés  à  l'octave,  à  la  quinte,  à  la 
tierce,  etc.,  de  sorte  que  chaque  touche  fit  entendre  un 
accord  complet  :  telle  fut  l'origine  des  jeux  de  mulatton 
IV,  ce  mot),  A  la  fin  du  xiv*  siècle  etpendant  le  xv*,  l'orgue 
fit  encore  de  nouveaux  progrès.  Il  existe  dans  l'église 
Notre-Dame  d'Anvers  un  orgue  construit  par  Philippe  de 
Lannoy  en  1394  pour  un  couvent  d'AugusÛns  de  la  môme 
ville  :  bien  qu'on  l'ait  plusieurs  fois  réparé  et  complété, 
il  fait  encore  aujourd'hui  la  base  du  clavier  de  récit. 
Dans  cet  or^e,  on  ne  trouve  pas  d'abrésés  (  V,  ce  mot)^ 

2ue,  du  reste,  le  petit  nombre  de  Jeux  et  le  peu  d'étendue 
e  l'instrument  ne  rendaient  pas  nécessaires;  les  Jeux 
étaient  :  Vopenfluit  (flûte  ouverte  de 4  pieds),  le  dtUcian 
(bourdon  de  4  sonnant  le  huit  pieds),  Voctaœ  (doublette 
de  2  pieds  ) ,  le  rerefluit  (flûte  de  6  pieds,  commençant  à 
<ol),  le  qtUntadun  (flûte  sonnant  la  quinte),  lèses- 
qvialter  (Jeu  composé  de  l'octave  aigué  du  cornet  et  d'une 
petite  tierce),  [a mixture  (plein-Jeu  de  3  tuyaux) ,  et  la 
régale  (jeu  d'anches  avec  de  courts  tuyaux  de  quelques 
pouces).  En  1470,  un  Allemand  nommé  Bernhani,  orga- 
niste à  Venise,  inventa,  dit-on,  le  clavier  des  pédales, 
mais  en  réalité  ne  fit  que  retendre.  Ce  fut  aussi  dans  le 
XV*  siècle  qu'on  ajouta  à  l'orgue  les  Jeux  de  cromome, 
de  voix  humaine,  de  hautbois,  de  basson,  de  trompette, 
et  qu'on  établit  la  mesure  des  32,  des  16,  des  8,  des  4 
pieds,  pour  les  tuyaux.  Les  registres  (F.  ce  mot)  furent 
rendus  indépendants  les  uns  des  autres,  et  distingués 
par  des  noms  particuliers.  L'orgue  le  plus  ancien  ^ui 
existe  aujourd'hui  en  France  est  celui  de  Solliès-Vule 
(Var)  ;  il  remonte  au  xv*  siècle.  Celui  de  Gonesse,  près 
de  Paris,  porte  la  date  de  1508  ;  mais  il  ne  reste  plus  que 
quelques  tuyaux  de  la  construction  primitive.  En  1570, 
un  Allemand ,  Jean  Lobsînger,  imagina  les  soufflets  à 
éclisses.  C'est  au  xvn*  siècle  qu'on  a  commencé  à 
donner  aux  orgues  une  grande  puissance  de  son ,  et  à 
y  introduire,  non-seulement  ces  personnages  de  la  dé- 
coration extérieure  du  buffet  qui  Jouaient  de  divers  in- 
struments, mais  des  jeux  imitant  la  voix  des  animaux , 
le  chant  des  oiseaux,  le  bruit  de  la  grêle,  le  tonnerre,  etc. 
En  1684,  un  facteur  allemand,  Christian  Ferner,  in- 
tenta la  balance  pnêumatiqus  pour  régler  la  force  du 
vent  nécessaire  à  chaque  tujrau  et  donner  aux  difTérents 
registres  leur  véritable  harmonie.  L'architecte  Claude 
Perrault  songea  le  premier  à  rendre  l'orgue  expressif, 
et  exprima  son  idée  dans  une  note  de  sa  traduction  de 
Vitruve.  Eà  1736,  un  Tacteur  d'orgues  français,  Jean  Mo- 
reau,  construisit  à  Gouda  un  orgue  où  l'on  pouvait  enfler 
et  diminuer  le  son  au  moven  de  la  pression  des  doigts. 
Gerber  dit  que  Schrœter  k  Nordhausen  en  1740,  et  les 
frères  Buron  à  Angers,  en  1769,  trouvèrent  des  procédés 
pour  rendre  l'orgue  expressif,  mais  ils  ne  les  ont  pas  fait 
connaître.  On  doit  de  nouveaux  essais  à  Stein,  en  1772. 
A  son  tour  Sébastien  Érard  construisit,  pour  la  reine 
Marie-Antoinette,  un  piano  organisé  ^  dans  lequel  les 
tons  étaient  expressifs  par  la  pression  du  doigt  sur  la 
touche.  En  1810,  Grenié  fit  un  petit  orfpie  de  chan^iure, 
où  l'expression  résidait  dans  la  disposition  et  l'action 
des  soufflets  subissant  des  pressions  variables ,  sys- 
tème perfectionné  depuis  par  Muller,  son  élève.  Érard 
adopta  un  autre  système  d'expression ,  dans  lequel  une 
pédale  agissait  sur  deux  daviers,  et  les  doigts  sur  un 
troisième  ;  l'orgue  auquel  il  l'appliqua,  et  qui  fut  construit 

Sar  John  Abbey  pour  la  chapelle  royale  de  France,  fut 
risé  à  la  Révolution  de  1830.  Bien  que  le  goût  des  or- 
gues expressives  (  V,  Boites  D'BXPaBssioN)  se  soit  répandu 
depuis,  cette  innovation  est  médiocrement  heureuse: 
elle  fait  perdre  à  l'orgue  le  calme,  la  majesté  qui  convien- 
nent au  style  religieux,  pour  lui  communiquer  quelque 
Aose  de  passionné  et  de  mondain;  et  d'ailleurs  VexpreS' 
tion  ne  produit  pas  l'effet  qu'on  en  attend  dans  les  vastes 
édifices.  V,  Schott,  De  organis  hydraulicis ,  dans  sa  M^ 
chanica  hydraulica,  1657,  in-4®;  Meister,  De  veterum 
hydraulo,  dans  le  t.  Il  des  Mém,  de  la  Société  scientifique 
de  GoBttingue;  Buttmann,  Essai  sur  Vorgue  hydraulique, 
en  allem.,  dans  les  Mém,  de  l*Acad.  de  Berlin;  Ante- 
gnati,  Arte  organica,  Brescia,  1608;  Musica  practica  y 
theoretica  di  Organo,  par  Arauxo,  Alcala,  1616,  in-fol.  ; 
Michel  Pnotorius,  Organographia,  1619,  in-4o;  Kirdier, 
Musurgia,  1650;  Mersenne,  Traité  des  instruments^ 
1670;  Mûller,  Mémoires  historiques  et  pMlosophujues 
sur  les  orgues,  letur  origvne  et  leur  usage  dans  V Église, 


Dresde,  1748;  Mittag,  Traité  historique  de  VortgtneH 
du  perfectionnement  des  orgues,  Lunebourg,  1756,  in-4'^; 
Sponsel,  Histoire  de  TorigiM,  Nuremberg,  1771,  in-S*'; 
Martini,  École  (Forgue,  Paris,  1805,  in-fol.;  De  Cous- 
seroaker.  Essai  sur  les  instruments  de  musique  au 
moyen  âge;  Antony,  Exposition  historique  de  V origine 
et  des  perfectionnements  de  Vorgue,  en  allem..  Munster, 
1832,  in-8».  F.  C.  et  B. 

ORGUE,  sorte  de  herse  avec  laquelle  on  ferme  une  porte 
de  forteresse.  Elle  diffère  de  la  herse  ordinaire,  en  ce 

Qu'elle  est  composée  de  plusieurs  grosses  pièces  de  bois 
étachées  l'une  de  l'autre,  et  qui  tombent  d'en  haut  sépa- 
rément. 

ORGOB  (  Buffet  d').  V.  BornsT. 

ORGUE  ( Point  d').  F.  Point  d'orgue. 

ORGUE  A  CYUNDRB,  instrument  de  musi(^e  composé  de 
tuyaux  d'étain  ou  de  bois,  d'une  soufflerie,  et  d'un  cy- 
lindre. On  adapte  à  ce  cylindre  des  pointes  disposées 
dans  un  certain  ordre  :  en  le  faisant  tourner  an  moyen 
d'une  manivelle,  les  pointes  lèvent  des  bascules  qui  ser- 
vent de  touches  et  font  parler  les  tuyaux.  Le  cylindre 
fait  également  mouvoir  le  soufflet.  Lorsque  les  orgues  à 
cylindre  sont  de  petite  dimension,  on  les  appelle  seri- 
nettes et  merlines.  Vorgue  de  Barbarie  (ainsi  nommé  par 
dérision)  est  une  serinette  perfectionnée  qui  se  compose  de 
plusieurs  Jeux.  Il  renferme  un  bourdon,  un  prestant,  une 
quinte,  une  doublette,  et  quelquefois  une  tierce.  Dans  les 
orgues  d'Allemagne,  on  trouve  souvent  un  ou  deux  Jeux 
d'anches.  On  fabrique  une  grande  quantité  de  ces  instru- 
ments portatifs  dans  les  Vosges.  Le  facteur  Davrainville 
a  construit  des  orgues  à  cylindre  qui,  au  moyen  d'un  mé- 
canisme très-ingénieux,  exécutent  seuls  des  morceaux  de 
musique  longs  et  compliqués.  Deux  abbés,  MM.  Cabias  et 
Larroque,  ont  imaginé  d'adapter  des  cylindres  aux  orgues 
d'église.  F.  C. 

ORGUE  DE  BOIS ,  uom  qu'on  donnait  autrefois  à  un  Jeu 
de  flûte  bouché,  ou  bourdon,  tel  qu'on  ie  fait  dans  nos 
grandes  orgues. 

ORGUE  DE  MORT,  ancienne  arme  employée  à  la  défense 
des  brèches  d'une  place  assiégée,  et  qui  consistait  en  un 
assemblage  de  canons  de  mousquet  Joints  ensemble  et 
dont  les  lumières  se  communiquaient.  La  machine  infer^ 
nale  de  Fieschi  était  une  orgue. 

ORGUE  DES  SAVEURS.    V,  GlAVECIN  DBS  SAVEURS. 

ORGUB  EXPRESSIF,  orguo  saus  tuyaux,  à  clavier  et  & 
anches  libres,  dont  les  sons  peuvent  varier  dlnteosité 
selon  la  pression  de  l'air.  11  tire  son  origine  da  Jeu  de 
Régale  (  K.  ce  mot).  Ses  dimensions  se  réduisent,  en  lar- 
geur, à  l'étendue  du  cUvier,  et,  en  liauteur,  à  ceUes 
d'une  table  ordinaire.  11  se  compose  de  lames  ou  lan- 
guettes métalliques  mises  en  vibration  par  une  soufflerie 
qu'on  fait  agir  avec  les  pieds.  Le  petit  instrument  appelé 
giùmbarde  donne  une  idée  exacte  de  l'action  du  vent  sur 
l'anche  libre.  Ce  fut  vers  1810  oue  Grenié  imagina  des 
Jeux  d'orgues  à  anches  libres.  On  en  fabriqua  aussi  en 
Allemagne  sous  les  noms  de  Physhisrmonica ,  Molo» 
dium ,  etc.  Cavaillé-Coll  y  ajouta  quelques  perfectionne- 
ments et  en  fit  le  PoikUorgue.  D'une  autre  forme  donnée 
à  cet  instrument  résultèrent  V Harmonica  et  V Accordéon, 
qui ,  perfectionnés,  devinrent  le  Concertina,  YOrganino, 
et  enfin  l'Orgue  expressif.  On  applique  à  l'orgue  expres- 
sif le  système  des  registres  employé  dans  les  orgues  à 
tuyaux.  Ces  registres  font  parler  des  Jeux  de  timbres  dif- 
férents. Les  timbres  principaux  de  l'orgue  expressif  sont: 
le  bourdon ,  la  clarinette,  le  basson ,  le  hautbois,  le  clai- 
ron, le  fifre,  le  violoncelle,  la  flûte,  la  musette.  Ces  Jeux 
peuvent  être  réunis  au  moyen  d'un  mécanisme,  et  for- 
ment alors  une  sorte  d'orchestre  :  le  vent,  faisant  vibrer 
la  lame  métallique  trop  lentement  pour  pouvoir  exécuter 
des  morceaux  de  musique  dans  un  mouvement  rapide, 
M.  Martin  de  Provins  introduisit  dans  cet  orgue  des 
marteaux  qui ,  frappant  sur  les  languettes,  les  font  parler 
instantanément;  ce  système  porte  Te  nom  de  percussion. 
Harmonium,  Uélodium,  sont  différents  noms  sous  les- 
quels on  désigne  l'orgue  expressif.  Les  facteurs  qui  ont 
le  plus  contribué  aux  développements  de  l'orgue  à  anches 
libres  ou  expressif  sont  Grenié ,  Fourneaux,  Màrthi  de 
Provins,  Alexandre  père  et  fils,  Merklin,  et  Deâbaîn.  F.  C. 

ORGUEIL,  l'un  des  sept  péchés  capitaux.  C'est  un 
amour  déréglé  de  soi-même,  une  aveugle  persnasioii  de 
sa  propre  excellence,  oui  engendre  le  dàir  des  louanges, 
Tambition,  la  manie  de  se  louer  soSnaième,  Tobstination 
en  son  propre  sens. 

ORIEL,  vieux  mot  désignant  un  petit  oratoire  pratiqué 
dans  l'épaisseur  d'un  mur. 

ORIENTAUSTE,  celui  qui  se  livre  à  l'étode  de«  !3i> 


ORL 


1353 


ORP 


fiies  orientales,  telles  que -le  sanscrit,  le  chinois,  le  per- 
san ,  Tarabe,  Tarménien ,  le  turc,  etc. 

ORIENTATION ,  disposition  du  plan  des  églises  de  mar 
nière  que  le  sanctuaire  soit  tourné  du  c6té  de  TOrient. 
Les  temples  païens  étaient  généralement  tournés  vers 
rodent  :  Û  faut  excepter  ceux  des  Dorions.  Le  chris- 
tianisme naissant,  voulant  rompre  avec  tons  les  usages 
da  Anciens,  disposa  les  églises  à  contre-sens,  c-à-d.  que 
Ton  plaça  le  sanctuaire  à  l'Occident;  mais  alors  le  prêtre 
officiant ,  au  lieu  de  tourner  comme  aujourd'hui  le  dos 
sox  fidèles,  se  plaçait  de  l'autre  cAté  de  Tautcl ,  et  faisait 
ftce  aux  assistants  ainsi  qu'à  TOrient  Plus  tard ,  cepen- 
dant, on  reprit  Torientadon  des  églises,  à  laquelle  le 
moyen  âge  fut  fidèle,  et,  quoique  ce  ne  soit  pas  une  règle 
iriTariable,  c'est  un  usage  qu'il  est  bon  de  respecter.  Dans 
les  temps  modernes,  on  en  a  peu  tenu  compte.  Le  sys- 
tème des  absides  circulaires  est  préférable  à  celui  des 
mors  plats,  afin  que  les  premiers  rayons  du  soleil  vien- 
nent toujours  éclairer  l'autel.  Les  musulmans  ont  aussi 
une  orientation  (V.  MosQuis).  E.  L. 

ORIFLAMME.  V,  ce  mot  dans  notre  Dki\onnair9  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

ORIGINAL ,  tout  ouvrage  oui  n*a  point  eu  de  modèle, 
et  qui  n'est  pas  une  copie  (V.  ce  mot).  L'original  d'un 
acte  est  la  minute  qui  reste  en  dépôt ,  et  dont  on  délivre 
des  copies  à  qui  de  droit.  En  Littérature,  on  dit  d*un  au- 
teur qu'il  est  original,  lorsque  ses  écrits  ne  ressemblent, 
par  les  pensées  ou  la  forme,  à  aucun  de  ceux  d'autrui , 
lorsqu'ils  ont  un  cachet  tout  particulier,  qu'on  ne  saurait 
iiniter. 

ORIGINE  (Certificats  d'),  nom  qu'on  donne  à  deux 
sortes  de  certificats,  qui  ont  pour  objet  :  l'un,  de  constater 
l'origine  de  la  propriété  d'une  inscription  de  rente  sur 
rètat;  l'autre,  de  constater  la  provenance^  de  marchan- 
dises importées  en  France.  Le  l*',  délivré  par  le  Trésor 
sur  demande,  est  nécessaire  lorsqu'il  s'agit,  par  exemple, 
de  reconnaître,  dans  le  cas  de  dissolution  de  commu- 
nauté, si  une  rente  est  un  conquèt  ou  un  bien  propre. 
Le  2*,  exigé  en  matière  de  commerce  maritime  et  de 
douanes,  émane  d'un  consul;  il  constate  que  les  mar- 
chandises ne  sont  pas  prohibées. 

ORIGINFX  (  Péché).  V.  Picai. 

ORILLON ,  partie  de  la  face  d'un  bastion,  ordinaire- 
ment arrondie,  s'avançant  au  delà  de  l'épaule,  et  destinée 
à  protéger  le  reste  des  flancs  contre  les  coups  de  ricochet. 
Les  oriUons,  d'invention  espagnole,  fréquemment  em- 
ployés par  Vauban,  Cohom  et  les  ingénieurs  militaires  du 
même  temps,  sont  peu  usités  aujourd'hui. 

ORISSA  (Dialecte),  un  des  dialectes  de  l'Inde  moderne 
issus  du  sanscrit.  Sutton  en  a  donné  une  Grammaire  et 
on  Dictionnaire,  Kattak,  1841-43,  3  vol. 

ORLB  (de  l'italien  orlo,  ourlet),  listel  ou  filet  placé 
lous  l'ove  d'un  chapiteau.  Lorsau'un  orle  est  dans  le  haut 
OQ  dans  le  bas  du  fût  de  la  colonne,  on  le  nomme  cetn- 
ture;  dans  le  premier  cas,  il  s'appelle  aussi  coiarin. 
L'orie  de  parement  de  la  volute  ionique  est  dit  également 
œintwe,  —  Dans  le  Blason,  orle  est  synonyme  de  filière 
(F.  ce  mot). 

ORLÉANS  (Cathédrale  d*).  Cette  église,  placée  sous 
l'invocation  de  la  S^"  Croix,  est  de  construction  moderne, 
bien  qo'^e  présente  généralement  les  caractères  de  l'ar- 
chitecture ogivaJe.  Elle  occupe  l'emplacement  d'un  mo- 
nument antérieur,  commencé  en  1281,  ruiné  par  les  cal- 
vinistes en  1567,  et  dont  il  ne  reste  que  quelques  parties 
du  chevet.  La  première  pierre  en  fut  posée  par  Henri  IV 
en  1601  ;  mais  les  constructions,  lentement  exécutées, 
n'ont  été  finies  que  de  nos  jours.  Les  architectes  Barbet, 
Mansart,  Decoste,  Gabriel,  Trouard,  Legrand,  et  Paris , 
qui  dirigèrent  successivement  les  travaux,  ont  adopté 
le  style  ogival  tertiaire.  Sans  qu'on  doive  partager  l'en- 
thoQsiasme  de  quelques  historiens  d'Orléans  et  placer 
leur  cathédrale  au  nombre  des  plus  belles  œuvres  de  l'ar- 
chitecture religieuse,  elle  occupe  une  place  distinguée 
parmi  les  monuments  français.  Vue  de  l'extérieur  et  à 
distance,  elle  a  de  la  noblesse  et  de  la  grandeur  :  l'éten- 
due des  proportions,  la  légèreté  de  la  flèche  centrale, 
l'originalité  des  tours  du  portail,  l'élégance  et  la  multi- 
plicité des  galeries,  des  arca-boutants,  des  contre-forts  et 
des  clochetons,  tout  concourt  à  composer  une  ordon- 
naoce  pittoresque.  La  façade  principale  est  remarquable 

ET  son  étendue  et  par  la  richesse  de  son  ornementation, 
le  a  51  mètres  de  largeur,  et  est  percée  de  5  portes 
donnant  accès  dans  un  triple  vestibule.  Les  tours  pré- 
sentent, aa-dessus  de  la  grande  et  belle  galerie  à  claire- 
voie  qui  forme  toute  la  partie  supérieure  du  portail,  trois 
étages  à  quatre  faces  semblables,  superposés  pyrami- 


dalement.  Le  premier,  décoré  de  statues  et  d'une  fe- 
nêtre, est  flanqué  aux  angles  de  quatre  charmants  esca- 
liers en  spirale  surmontés  de  campaniles  d'une  surprenante 
légèreté.  Les  deux  autres  sont  ornés  d'arcades  gracieuses, 
et  couronnés  par  une  galerie  découpée  en  trèfles.  Tout 
au  sommet,  à  une  hauteur  de  80  met.,  se  dressent  onatre 
statues  colossales  d'Anges.  Ce  portail  occidental ,  oàti  à 
une  époque  où  l'art  était  entièrement  païen ,  est  une 
imitation  fidèle  de  l'art  du  moyen  âge  :  mais,  ailleurs, 
les  architectes  ont  parfois  oublié  cette  tradition  salutaire, 
pour  placer  des  ornements  en  style  de  la  Renaissance,  et 
même  des  parties  de  style  grec.  Ainsi ,  le  portail  méri- 
dional offre  des  colonnes ,  des  chapiteaux  et  un  entable- 
ment corinthiens.  Celui  du  Nord,  au  contraire,  est  d'une 
grande  pureté  de  style.  —  A  l'intérieur,  la  cathédrale 
d'Orléans  a  130  met.  de  longueur,  2Ô'",66  de  lareeur, 
32'",50  de  hauteur  ;  le  transept  est  long  de  54<",60.  Le 
plan  général  est  à  cinq  nefs.  B. 

ORNEMANISTE,  artiste  sculpteur  qui  fait  les  orne- 
ments destinés  à  l'arcîittecture,  spécialement  ceux  qui 
peuvent  se  fabriquer  à  part  et  s'appliquer  après  coup. 
y.  Goldmann,  Traité  sur  les  ornements  d^architecture  ^ 
en  allem.,  Aug&bourg,  1720,  in-fol.  ;  iCrubsach,  Héflexwns 
sur  V origine,  les  progrès  et  la  décadence  des  ornements 
dans  les  BeauiD-Arts,  en  allem.,  Leipzig,  1750  et  1773, 
iu-8<^;  Voch,  Sur  les  ornements  d'architecture^  Augs- 
bourg,  1783,  ln-8<*;  Moritz,  Prolégomènes  d'une  tfiéorie 
des  ornements,  Berlin,  1793,  in-8<*;  Antonini,  ManucUe 
di  vart  omamentt.  Rome,  1777-81,  4  vol.  in-4*;  Desflo- 
rennes,  ReciieU  itomements ^  Paris,  1840-43,  in-fol.; 
HeideloflT,  Ornements  du  moyen  âge,  Nuremberg,  1843, 
in-4<^;  Plantard  et  Peyre,  RecueU  d'ornements^  Paris, 
1844,  in-fol.  Il  existe  un  Guide  de  VOmemaniste^  par 
Gh.  Normand,  1826. 

ORNEMF.NTS,  tout  ce  qui ,  sans  faire  partie  intégrante 
d'un  objet,  peut  y  être  adapté  pour  le  rendre  plus 
agréable  ou  plus  riche.  Ce  sont,  en  Architecture,  les 
feuilles,  les  oves,  les  grains,  les  enroulements,  les  vo- 
lutes, les  rinceaux,  les  fleurons  et  festons,  les  ruden- 
tures,  les  guirlandes,  les  rosaces,  les  palmettes,  les  con- 
soles, les  denticules,  les  caissons,  les  cartouches,  les 
bas-reliefs,  etc.  Des  statues  et  des  vases  sont  des  orne- 
ments cour  un  Jardin ,  comme  des  glaces,  des  tableaux, 
des  tapis  pour  les  intérieurs.  —  On  nomme  Ornements 
les  vêtements  qui  servent  à  la  célébration  du  serrice 
divin,  tels  que  chasubles,  tuniques,  étoles,  manipules, 
chapes,  etc.  Les  omemenis  pontificaux  sont  la  mitre,  la 
crosse,  l'anneau ,  la  croix  pectorale.  —  Les  ornements 
royaux  sont  le  manteau,  la  couronne,  le  sceptre,  l'épée, 
la  main  de  Justice,  le  globe.  —  Dans  le  Blason ,  les  Orne» 
nwnts  sont  tout  ce  qui  ne  fait  pas  partie  intégnmte  d'une 
armoirie  et  se  trouve  en  dehors  de  l'écn,  comme  les 
timbres,  les  cimiers,  les  lambrequins,  les  supports,  les 
colliers,  les  manteaux. 

OROGRAPHIE  (du  grec  oros,  montagne,  et  çraphéin, 
décrire),  partie  de  la  Géographie  physique  am  s'occupe 
de  l'étude  des  montagnes,  et ,  en  générâil ,  de  toutes  les 
parties  solides  du  globe.  C'est  une  étude  iàiportante;  car 
la  considération  de  la  hauteur  et  de  la  direction  des  mon- 
tagnes, l'examen  comparé  de  Pétendue  des  phiteaux  et 
des  plaines,  expliquent  le  climat  d'un  pays,  la  distribu- 
tion des  eaux  sur  la  surface  du  sol,  sa  fertilité,  et,  par 
suite,  sa  richesse.  C.  P. 

ORPHELIN  (du  grec  orp^ft05,  orphelin),  enfant  oui, 
avant  d'avoir  atteint  l'âge  de  minorité  fixé  par  la  loi,  a 
perdu  son  père  et  sa  mère.  Il  était  ordonné  aux  Hébreux 
de  laisser  aux  orphelins  une  partie  des  fruits  de  la  terre, 
de  les  admettre  aux  repas  des  fêtes  et  des  sacrifices,  et  le 
trésor  des  aumônes,  ff^rdé  dans  le  Temple,  était  princi- 
palement destiné  à  leur  entretien.  A  Athènes,  les  enfants 
dont  les  pères  avaient  péri  en  combattant  pour  la  patrie 
étaient  élevés  dans  le  Pr^tanée  aux  frais  de  l'État.  Sous 
l'influence  du  christianisme,  de  nombreux  établissements 
ont  été  fondés  dans  tous  les  pays  pour  recueillir  les  oi- 
phelins.  En  France,  la  plupart  des  nospices  en  reçoivent. 
Certaines  classes  d'orphelins  ont  été  l'objet  de  fondation.^ 
spéciales:  ainsi,  sous  Louis  XIV,  la  maison  de  S^yr 
reçut  les  Jeunes  filles  nobles;  la  République  établit,  pour 
les  fils  de  militaires,  le  Prytanée  de  La  Flèche;  sous  Na- 
poléon I^,  des  bourses  furent  créées,  en  faveur  des  orphe* 
lins,  dans  les  lycées  et  autres  établissements,  et  dans  les 
maisons  de  la  Légion  d'honneur  pour  des  orphelines 
dont  les  pères  avuent  été  légionnaires;  enfin,  en  185U, 
les  fonds  d'une  souscription  offerte  à  l'Impératrice  Eu* 
génie  et  au  prince  imptiial,  son  fils,  accrus  d'une  forre 
dotation ,  et  augmentés  par  des  dons  particuliers,  ont  été 


ORT 


1354 


OSU 


^lestiDÔs  par  Napoléon  in  àrentretien  d*on  certain  nombre 
d'orphelins  placés  dans  des  familles  d'ouvriers.        B. 

ORPHÉON  (d'Orphée)^  instrument  demusiaue  en  forme 
de  petit  piano,  dont  on  fait  résonner  les  cordes  à  boyau, 
soit  par  le  moyen  d'une  roue,  soit  à  l'aide  d'un  clavier. 
Poulleau ,  qui  fabriqua  un  de  ces  instruments  à  Paris 
au  commencement  de  notre  xn*  siècle,  lui  donna  le  nom 
d'Orchestrino. 

ORPHéoif ,  nom  qui  fut  appliqué  en  1833  par  le  musi- 
cien Wilhem  à  la  réunion  générale  des  enfants  qu'il  in- 
struisait par  groupes  séparés  dans  les  écoles  primaires  de 
Paris.  Cette  réunion  avait  pour  but  l'exécution  de  chants 
sans  accompagnement  par  des  masses  considérables.  Une 
méUiode  et  des  recueils  de  morceaux  furent  composés 
pour  les  membres  de  l'Orphéon,  auxquels  s'adjoignirent 
peu  à  peu  des  ouvriers  et  des  amateurs.  Les  Orphéonistes 
ont  été  dirigés,  après  Wilhem ,  par  Hubert  et  Gounod.  — 
Des  orphéons  se  sont  formés  plus  tard  dans  divers  dépar- 
tements. 

ORPHÉORÉON,  ancien  instrument  de  la  fiunille  des 
luths,  armé  de  8  cordes  en  métal. 

ORPHICÂ,  instrument  à  clavier,  inventé  par  Rœllig. 
Les  touches  en  sont  si  étroites,  qu'il  ne  peut  être  Joué 
que  par  des  enfants. 

ORPHIQUES ,  titre  sous  lequel  les  Anciens  compre- 
naient une  quarantaine  de  poèmes  plus  ou  moins  éten- 
dus, dont  la  composition  était  attribuée  à  l'aèd^prophète 
Orphée.  Parmi  ceux  qui  nous  sont  parvenus,  les  plus 
importants  sont  des  hymnes,  un  traité  sur  les  vertus  ma- 
giques des  pierres,  une  relation  des  aventures  des  Argo- 
nautes :  aucun  de  ces  ouvrages  ne  porte  le  caractère 
d'une  haute  antiquité,  mais  on  y  trouve  des  traces  soit 
de  la  langue,  soit  des  idées  de  1  époque  alexandrine.  La 
versification  offre  des  analogies  frappantes  avec  celle  de 
Nonnus  et  de  Quintus  de  Smyrne.  une  preuve  plus  cer- 
taine du  peu  d'antiquité  de  ces  prétendues  poésies  or- 
phiques, c'est  le  ton  déclamatoire  qui  y  règne,  la  profu- 
sion des  ornements  poétiques,  un  Yrequent  emploi  de 
l'archaïsme  et  du  néologisme,  et  même  des  hébraismes. 
Toutefois,  il  est  certain  qu'avant  l'époque  alexandrine  on 
connaissait  en  Grèce  des  poèmes  mis  sous  le  nom  d'Or- 
phée, dont  la  composition  ne  remontait  pas  Jusqu'au 
siècle  éloi|;né  où  l'on  suppose  que  vécut  cet  aède,  mais 

3ui  pouvaient  bien  être  1  œuvre  de  poètes  contemporains 
e  Solon  et  de  Pisistrate.  Platon,  Aristote,  Diodore,  Pline, 
Plutarque,  plusieurs  Pères  de  l'Eglise  font  allusion  à  ces 
poèmes;  trois  fragments  surtout,  relatifs  à  Jupiter  con- 
sidéré comme  principe  et  maître  universel,  cités  l'un 
par  Aristote,  les  deux  autres  par  Justin  le  Martyr,  ont  un 
caractère  manifeste  d'antiquité;  cependant  encore,  les 
poèmes  d'où  ces  morceaux  ont  peutr^tre  été  détachés 
étaient  de  beaucoup  postérieurs  à  Orphée.  Brontinus, 
Gercops,  Onomacrite,  sont  les  trois  principaux  poètes  du 
VI*  siècle  av.  J.-C.  auxquels  on  rapportait  un  certain 
nombre  de  poèmes  orphiques,  qui  plus  tard  furent  modi- 
fiés, dénaturés,  multipliés,  surtout  à  l'époque  de  la  lutte 
ardente  du  Christianwme  et  de  la  philosophie  néoplato- 
nicienne. *  P. 

ORT,  monnaie  d'argent  de  Norvège,  valant  1  fr.  12  c« 

ORTHIEN  (Nome).  V.  Nome. 

ORTHODOXIE  (du  grec  orthos ,  droit,  et  doxa, 
croyance),  conformité  de  la  croyance  à  la  règle  de  la  foi, 
à  la  doctrine  et  à  l'enseignement  de  l'Église.  On  l'op- 
pose à  V Hétérodoxie  et  à  V Hérésie  (V.  cês  mots).  Les 
conciles  et  le  souverain  pontife,  prenant  l'avis  de  la  Con- 
grégation de  l'Index,  prononcent  sur  l'orthodoxie  des 
écrits  et  des  opinions.  —  L'Église  gréco-russe  et  l'Église 
anglicane  prétendent,  aussi  bien  que  l'Église  catholique, 
être  orthodoxes. 

ORTHOGRAPHE,  partie  de  la  Grammaire  qui  donne 
des  règles  pour  peindr0  (en  grec  grapftéin)  ou  Mrire  car" 
rectêtnent  (orthâs"^  les  mots  d'une  langue,  c-à-d.  pour  en 
représenter  régulièrement  les  sons  par  des  caractères.  II 
suit  de  là  que  l'orthographe  n'est  rigoureusement  exacte 
que  si  les  mots  s'écrivent  comme  ils  se  prononcent,  que 
s'il  y  a  entre  la  parole  et  l'écriture  une  concordance  par- 
faite, comme  dans  curé,  amitié,  cataracte^  caractère,  6i- 
jouteriê,  etc.  Or,  cette  concordance  absolue  n'existe  peut- 
être  dans  aucune  langue  :  elle  ne  parait  pas  avoir  existé 
dans  les  langues  anciennes,  puisque  Quintilien,  pour  ne 
parler  que  du  latin ,  blâme  les  prétentions  de  certains 
puristes  de  son  temps ,  qui  voulaient  que  tous  les  mots 
s'écrivissent  comme  ils  se  prononçaient  Toutefois  les 
Italiens  sont  parvenus  à  mettre  dans  leur  lansue  l'écri- 
ture à  peu  près  en  rapport  avec  la  prononciation.  Un 
principe  de  la  langue  allemande,  c'est  que  toute  lettre 


écrite  doit  se  prononcer.  Aussi,  la  prononciation  âeTits- 
lien  et  celle  de  l'allemand  s'apprennent-elles  asaex  vite. 
et  l'orthographe  des  mots  de  ces  deux  langues  n'offre* 
tpelle  point  de  difficultés  sérieuses,  soit  aux  nationaux, 
soit  aux  étrangers.  Il  n'en  est  pas  de  même  du  srec  mo- 
derne, de  l'anglais  et  du  français;  ces  deux  dernières 
langues  offrent,  dans  leur  orthographe  comparée  avec  la 
prononciation,  de  nombreuses  et  étranges  anomalies.  Le 
principe  de  la  dérivation  et  de  l'étymologie  Joue  et  doit 
Jouer,  du  moins  en  français,  un  très-grand  rêle  dans  la 
représentation  des  mots  par  l'écriture;  c'est  lui  qui  a 
maintenu  dans  notre  langue  tant  de  lettres  qui ,  depuis 
longtemps,  ont  cessé  de  se  prononcer.  L'orthographe  ne 
doit  donc  pas  être  définie  la  peinture  exacte  delà  parole, 
mais  plutôt  l'art  d'écrire  les  mots  d'une  langue  correcte- 
ment, c.-à-d.  d'une  manière  conforme  aux  règles  de 
l'étymologie,  et  de  plus  aux  règles  établies  par  l'usage 
des  personnes  qui  ont  le  mieux  écrit,  et  consacrées  par 
la  Gramm^re  (  V,  NéooaAPHs).  P. 

ORTHOGRAPHIE  (du  grec  orthos,  droit,  et  graphéin, 
décrire),  dessin  ou  représentation  d'un  édifice  sur  un 
plan  d'une  véritable  proportion.  Les  largeurs  et  les  hau- 
teurs y  sont  proportionnelles  aux  largeurs  et  aux  hau- 
teurs réelles.  C'est  ce  qu'on  nomme  aussi  une  Élévation 
géométrcUe»  —  Orthographié  sionifle  encore  le  profil  ou 
la  coupe  perpendiculaire  d'un  édifice. 

ORTHOSTADE,  ample  tunique  des  Anciens,  à  manches 
longues,  et  descendant  Jusqu'aux  pieds.  Elle  était  ainsi 
appelée  à  cause  de  ses  plis  droits. 

ORVIETO  (Le  Dôme  d'),  dans  les  Étato  de  l'Église. 
Cette  église  cathédrale  est  une  des  œuvres  les  plus  inté- 
ressantes de  l'architecture  ogivale  en  Italie.  Commencée 
en  1290  par  Lorenzo  Maitani,  de  Sienne,  elle  ne  fut  ache- 
vée que  troif  siècles  après  :  33  architectes,  152  sculp- 
teurs, 68  peintres,  90  mosaïstes  se  succédèrent  dans  les 
travaux,  en  sorte  que  l'édifice  offre  un  résumé  des  pro- 
grès de  l'art  moderne.  La  façade  est  ornée  des  statues 
des  Apôtres,  de  sculptures  dont  les  sujets  ont  été  em- 
pruntés à  l'Ancien  Testament,  et  qui  paraissent  être  de 
Giovanni  de  Pise  et  de  ses  élèves,  enfin  de  mosaïques 
qui  représentent  l'histoire  de  la  Vierge.  A  l'intérieur  de 
l'église,  on  remarque  :  les  statues  colossales  en  marbre 
blanc  des  Apôtres,  dont  l'une,  S*  Matthieu,  a  été  faite 
par  Jean  de  Bologne;  près  du  maltre-autel,  un  groupe 
de  l'Annonciation,  sculpté  par  Mocchi;  les  stalles  en 
marqueterie  du  chcsur,  ouvrage  de  Pietro  di  Minella;  les 
vitraux,  peints  au  xiv*  siècle  par  Andréa  Vanni  et  Fr.  di 
Antonio;  les  deux  autels  des  transepts,  dont  l'un,  repré- 
sentant l'Adoration  des  Mages,  a  été  sculpté  par  Simone 
Mosca,  et  l'autre,  qui  a  pour  sujet  la  Visitation,  par  son 
fils  Moschino,  sur  les  dessins  de  San-Micheli;  la  chaire, 
œuvre  de  Scalza  ;  la  chapelle  de  la  Madone  de  S^  Brice, 
peinte  à  firesque  par  Fra  Angelioo,  Beifoszo  Gosioll,  Lnca 
Signorelli,  et  où  l'on  voit  un  singulier  mélange  d'idées 
chrétiennes  et  de  souvenirs  païens;  un  reliquaire  en 
argent  massif,  qui  renferme  le  saint  corporal  de  Bolsena, 
et  qu'un  orfèvre  siennols  du  xnr*  siècle,  Ugolin  Vieri,  a 
décoré  d'ornements  et  de  peintures  en  émail.  F.  Della 
Valle,  Storia  del  duomo  dOrvieto,  Rome,  1791,  ln-4*; 
Les  bas-reliefs  du  dame  d^Orviêto,  gravés,  sur  les  des- 
sins de  Pontani,  par  Ascani,  Baitocdni,  et  Gruner,  Leip- 
zig, 1858,  in-fol. 

OSCILLA,  espèces  de  masques  consacrés  à  Bacchus 
ou  à  d'autres  dieux,  et  que  les  Anciens  suspendaient  aux 
arbres  pour  se  rendre  ces  dieux  favorables.  Leur  nom 
vient  sans  doute  de  ce  qu'ils  étaient  agités  par  le  vent. 

OSELLA,  monnaie  de  Venise;  en  or,  elle  vaut  47  tti 
60  c;  en  argent,  2  fir. 

OSQUE  (Langue),  une  des  langues  italiques,  parlée 
dans  la  péninsule  avant  la  fondation  de  Rome.  Le  sabio,. 
le  vieux  latin  et  le  samnite  en  étaient  des  dialectes.  Malte- 
Brun  donnait  à  l'osoue  une  origine  ibérienne.  Selon 
Niebuhr,  11  avait  avec  l'ombrien  une  grande  affinité,  et  ce 
dernier  était  comme  le  chaînon  intermédiaire  qui  ratta- 
chait l'osque  à  l'étrusque.  L'osaue  se  maintint  comme 
langue  littéraire  dans  le  Samnium  et  la  Campanie,  au 
temps  même  des  Romains;  les  AteilaneslF.  ee  mot) 
étaient  écrites  en  osque.  Les  modernes  n'ont  pu  étudier 
cette  langue  que  sur  un  petit  nombre  de  monuments, 
par  exemple  sur  le  Cippus  abollanus,  découvert  à  la  fin 
du  xvn*  siècle  dans  les  ruines  d'Abolla,  et  sur  la  TaMa 
bantina,  qu'on  a  trouvée  en  1793  près  de  l'emplacement 
de  Bantia  (Apulle).  Les  murs  de  Pompé!  ont  aussi  foumr 
quelques  Inaicriptions.  7.  Passeri,  Linguœ  oseœ  spécimen' 
singulare,  Rome,  1774,  In-foL;  Dœderlein ,  Cbmm«fi<o» 
tio  de  vocum  àliquot  latinarum,  sabinarum,  mmbriak- 


oss 


dS5ô 


OTI 


mm,  tuscarum  eognatione  grmcà,  Erlangen,  1837;  He- 
iioch,  De  linguâ  tabinà,  Âltona,  1837:  Janelli,  Veterum 
Ckcorum  inscriptiones,  Naples,  1841;  Avellino,  Iscri' 
xtoni  sannite,  Naples,  1841;  Lepsius,  RudifMnta  <tn- 
guœ  oscm,  1841 ,  et  Inscriptiones  urnbricœ  et  oscœ, 
Leipzig,  1846;  Mommsen,  Études  osques,  en  allem.,  Ber- 
lin, 1845|  in-8^;  le  même,  Inscriptions  messapiennes^ 
en  allem.,  Rome,  1848,  et  Dialectes  de  la  basse  Italie, 
Leipzig,  1850;  Effuschke,  Monumenti  di  lingua  oscae 
sabellu:a,  1856. 

OSSATURE  (de  l'italien  ossatura,  squelette^  carcasse), 
charpente  d'une  voûte  ou  d'un  vitrail.  Dans  une  voûte, 
rossatuie  est  l'ensemble  des  nervures,  arcs-doubleaux, 
formerets,  croisées  d'ogive.  Dans  les  vitraux,  c'est  la  char- 
pente en  fer  qui  se  modifie  à  chaque  siècle.  Aux  xi*  et 
xu*  siècles,  les  compartiments  et  médaillons  de  la  fenêtre 
sont  dessinés  par  l'armature  en  fer,  et  les  plombs  ne 
Tiennent  que  dans  les  détails.  Au  1II1^  l'ossature  en  fer 
80  simplifie;  elle  indique  bien  encore  dans  la  plupart  des 
cas  toutes  les  grandes  divisions  de  la  vitre,  mais  elle 
laisse  un  plus  large  champ  aux  plombs ,  et  de  grandes 
barres  de  fer  Indépendantes  du  sjrstème  de  décoration 
commencent  &  paraître  pour  soutenir  la  fenêtre.  Au  xiv*, 
Possature  du  vitrail  présente  un  assemblage  de  forts  bar- 
reau de  fer  croisés,  mais  très-écartés,  destinés  à  soutenir 
la  fenêtre  indépendamment  de  sa  construction,  et  un 
grand  cadre  en  fer  plus  mince,  traçant  encore  quelques 
grandes  divisions,  mais  laissant  aux  plombs  tout  le  soin 
da  dessin.  Aux  xv*  et  xvi*,  même  distribution,  si  ce  n'est 
qne  la  séparation  est  complète  entre  le  treillis  de  fer  et 
les  plombs;  la  vitre,  entièrement  formée  par  les  plombs, 
s'applique  et  se  soude  sur  le  treillis  de  fer,  qui ,  à  son 
tour,  se  fixe  sur  les  forts  croisillons  de  fer.  Au  xvu*,  chan- 
gement complet,  abandon  presque  général  des  plombs; 
les  carreaux  de  la  fenêtre  s'assemblent  carrément  dans 
an  léger  treillis  en  fer,  et  on  peint  sur  les  vitres  ainsi 
unies,  comme  on  le  ferait  sur  une  toile  ou  sur  un  mur. 
De  nos  Jours  on  a  compris  Tlmportance  des  plombs,  et 
on  a  repris  les  procédés  habiles  du  moyen  âge.    E.  L. 

OSSEG  ou  OUSSAS,  lieu  de  la  cale  d'un  navire  où 
les  eaux  s'assemblent,  au  bas  de  la  pompe,  et  d'où  on  les 
extrait  avec  un  seau  à  main. 

OSSELETS  (Jeu  d*).  7.  notre  Dictionnatre  de  BioQra- 
pkie  ei  d'Histoire. 

OSSÈTE  ou  IRON  (Idiome),  idiome  parlé  par  les  Os- 
sètes,  petite  tribu  du  Caucase.  11  est  de  la  famille  iranienne, 
et  offre  trois  dialectes,  Vossète,  le  digoriên,  et  le  iagaoure. 
On  n'y  trouve  ni  genres  ni  article.  La  déclinaison  se  fait 
par  flexion.  La  conjugaison,  assez  riche  en  temps,  em- 
ploie les  verbes  auxiliaires;  elle  a  4  modes  dlflérents  de 
négation,  et  exprime  les  rapports  des  noms  à  l'aide  de 
pr^ositions  qui  les  suivent  ou  les  précèdent.  En  général, 
la  construction  suit  l'ordre  naturel.  La  pronondimon  est 
gutturale  et  sifflante.  V,  SJOgren,  Grammaire  et  Die- 
iiùnnaire  ossète,  en  allemand,  S^-Pétersbourg ,  1844; 
Rosen,  De  la  langue  ossète^  en  allemand,  Lemgo  et  Det- 
mold,  1846. 

OSSIAN  (Poésies  d*).  Il  a  existé  et  11  existe  encore  dans 
la  bouche  des  montagnards  de  l'Ecosse  certains  chants 
gaéliques  qui  remontent  à  des  temps  anciens,  et  qu'on 
attribue  à  un  barde  du  nom  d'Ossian.  On  n'a  pas  de  rai- 
son sérieuse  de  révoquer  en  doute  l'existence  de  ce  pei^ 
Bonnage,  et  l'opinion  la  plus  générale  le  place  au  m*  siècle 
de  notre  ère.  Mais  les  poésies  ossianlques  ont  soulevé  en 
Angleterre  les  plus  vives  controverses.  Celles  que  liac- 
pherson  publia  en  1760  ne  sont  qu'un  pastiche;  on  com- 
prend difficilement  aujourd'hui  au'elles  aient  excité  tant 
de  passion  :  proclamées  authentiques  par  le  D'  Smith, 
Blair,  Gray,  et  lordKalmes,  elles  furent  attaquées  avec  vio- 
lence par  Shaw,  et  surtout  par  Samuel  Johnson;  Lalng, 
dans  son  Histoire  d'Êcoue,  en  combattit  aussi  l'authen- 
ticité. Une  commission,  spécialement  nommée  en  1797 
pour  élucider  le  débat,  conclut,  par  l'organe  d'Henri  Mac- 
kensie,  qu'one  partie  des  poèmes  d'Ossian  était  authen- 
tique, mais  que  la  forme  sous  laquelle  Macpherson  les 
avait  présentés  était  son  propre  ouvrage;  qu'on  devait 
les  attribuer,  non  à  un  seul  barde,  mais  à  plusieurs;  et 
que  Jamais  ces  poèmes  n'avaient  composé  un  seul  tout, 
un  poênfë  épique  entier.  En  1807,  la  Société  écossaise  de 
Londres  fit  Imprimer  tous  les  textes  gaéliques  que  l'on 
avait  pu  recueillir;  on  y  trouve  une  vigueur  native  et 
fruste,  dont  Macpherson  n*a  pas  respecté  le  caractère.  Les 
chants  ossianlques  sont  originaires  d'Irlande,  et  l'on  y 
voit  figurer  des  Saints  irlandais,  notamment  S^  Patrick  ; 
la  forme  en  est  embarrassée  et  difiicile,  et  l'on  y  trouve 
Deaocoup  d'allitérations  et  d'assonances.  Il  est  impossible 


de  les  faire  remonter  plus  haut  que  le  vi«  siècle,  et  il  se 
peut  qu'ils  ne  datent  même  que  de  quelques  siècles  plus 
tard.  Ce  sont  les  pastiches  de  Macpherson  que  Letoumeur 
a  traduits  en  français,  et  dont  Raour-Lormian  a  tiré  ses 
imitations  en  vers.  K .  M"*  Robinson ,  La  Fausseté  des 
poésies  dVssian,  et  de  VOssian  de  Macpherson  en  parti-' 
culier,  Leipzig,  1840. 

OSSUAIRE,  lieu  où  l'on  range  les  ossements  des  morts. 
On  a  souvent  donné  ce  nom  aux  reliquaires,  aux  char* 
niers  et  aux  cimetières  {V,  ces  mots).  Il  existe  dans  un 
couvent  de  Franciscains,  à  Madère,  une  curieuse  chapelle 
dont  on  a  fait  un  ossuaire.  V,  Morat,  dans  notre  Diction^ 
naire  de  Biographie  et  d^Ristoire, 

OSTEAU ,  vieux  mot  désignant  le  grand  cercle  placé 
dans  la  partie  supérieure  d'une  fenêtre  à  meneaux.  Il  a 
signifié  aussi  rosace  et  médaillon. 

OSTENSOIR  ou  MONSTRANCE  (du  latin  ostendere„ 
monstrare^  montrer),  pièce  d'orfèvrerie  en  or,  en  argent, 
en  vermeil,  ou  simplement  en  plaqué^  représentant  d'or- 
dinaire un  soleil  rayonnant  élevé  sur  un  pied,  et  au  centre 
duquel  est  une  lunule^  boite  de  cristal  qui  renferme  une 
hostie  consacrée.  L'usage  de  cet  ornement  d'église  ne 
remonte  qu'au  xii*  siècle.  Au  xiv*,  on  en  fit  en  forme  de 
croix  creuse,  ou  de  statuette  portant  la  sainte  hostie.  Sou* 
vent  il  est  enrichi  d'émaux  et  de  pierres  fines.  L'osten- 
soir se  place  à  certaines  fêtes  au-dessus  du  tabernacle,, 
et  on  le  porte  aussi  dans  des  processions.  Parmi  les 
œuvres  de  ce  genre,  on  remarque  l'ostensoir  en  vermeil 
de  la  cathédrale  de  Barctione.  On  a  fait  autrefois  des 
ostensoirs  en  forme  de  tours  et  de  oroix;  il  y  en  a  un^  du 
xm*  siècle,  dans  le  Trésor  de  la  cathédrale  de  Reims.  B. 

OSTIAKS  (Idiome  des),  idiome  sibérien.  Castrèn  l'a 
fait  connaître  dans  un  Essat  sur  la  langue  ostiake^  publié 
en  allemand  à  S^Pétersbourg,  1850,  in-8*. 

OSTRACiryNDA,  Jeu  des  anciens  Grecs,  le  même  que 
notre  Jeu  de  barres  (F.  ce  mot), 

OSTRACISME.  K.  ce  mot  dans  notre  Dicttonnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

OSYMANDIAS  (Colosse,  Tombeau  d*).  7.  Thèse» 
(Ruines  de). 

OTAGE  (du  latin  barbare  hospUagtum,  dérivé  d'hospes, 
hôte),  penonne  livrée  comme  garantie  de  l'exécution 
d'une  promesse  ou  d'un  traité.  Chez  les  Anciens,  un  dé- 
biteur livra  souvent  ainsi  à  son  créancier  l'un  de  ses  en- 
fants ou  de  ses  proches  Jusqu'à  libération  de  la  dette. 
Puis  on  ne  donna  plus  d'otages  que  dans  les  relations 
politiques.  De  nos  Jours  encore,  11  arrive  quelouefoia 
qu'après  la  signature  d'un  traité,  un  ou  plusieurs  officiers 
restent  chez  l'ennemi  Jusqu'à  complète  exécution  de  ce 
qui  a  été  stipulé  :  en  cas  d*inexécuuon  des  engagements^ 
les  otages  peuvent  être  considérés  comme  prisonniers  de 
guerre.  Dans  les  temps  barbares,  on  les  mettait  à  mort. 

—  Sous  le  gouvernement  du  Directoire,  on  appela  Loi  des 
otages  une  Toi  rendue  le  24  messidor  an  vu  (12  Juill.  1709),. 
et  en  vertu  de  laquelle  les  parents  des  éimigrés  étaient 
responsables  de  la  fuite,  des  complots  et  des  actes  d'a^es- 
sion  de  cenx-d  t  on  pouvait  les  arrêter,  les  détenir  en 
prison,  et  même,  en  certains  cas,  les  déporter.  Cette  loi 
odieuse  fut  abolie  le  23  brumaire  (13  nov.)  de  la  même 
année.  B. 

OTELLE,  nom  d'une  espèce  de  lance  au  moyen  fige. 

—  Dans  le  Blason,  c'était  un  des  meubles  de  l'écu,  con- 
sistant en  une  petite  figure  ovale  et  pointue,  aue  quel- 
ques-uns croient  être  une  amande,  et  non  une  lance. 

OnNEL,  chanson  de  eeste  qui  appartient  au  cycle  des 
romans  carlovingiens  (K.  ce  mot),  et  l'une  des  dernières 
productions  de  notre  poésie  héroïque  du  moyen  âge.  Elle 
parait  avoir  été  écrite  dans  la  seconde  moitié  du  xm*  siècle. 
L'auteur,  qui  nous  est  inconnu,  suppose  que  Charlemagne> 
de  retour  en  France  après  la  prise  de  Pampelune,  se  dis- 
posait à  retourner  en  Espagne,  quand  arriva  à  sa  cour  un 
neveu  de  Ferragus,  Otinel,  chargé  par  le  Sarrasin  Garsile 
ou  Marslle,  conquérant  de  Rome  et  de  la  Lombardie,  de 
le  sommer  de  rendre  hommage  et  d'abjurer  la  foi  chré- 
tienne. Par  un  miracle  soudain,  c'est  Otinel  qui  renie  la 
loi  de  Mahomet;  filleul  de  Cbarlemagne,  qui  le  fiance  à 
sa  fille  Relisent,  et  rangé  parmi  les  douze  Pairs,  il  marche 
avec  eux  contre  Garsile,  et,  après  avoir  contribué  à  sa 
défaite,  reçoit  la  couronne  de  Lombardie.  —  Otinel  ne 
figure  nulle  part  ailleurs  dans  le  cycle  carlovlngien,  tandis 
que  les  autres  personnages  de  la  Chanson  sont  parfaite- 
ment connus.  Cette  Chanson  n'a  guère  plus  de  2,100  vers.. 
Il  en  existe  deux  traductions  libres  ou  Imitations  en  vers 
anglais,  sous  le  titre  de  Sir  Otuel;  elles  sont  analysées 
par  EUis  dans  ses  Spedmens  of  early  english  metrical 
roinaficM(édit.  de Halllwel,  Londres,  1848),  et  l'une  d'elles- 


OITR 


135C 


ouv 


a  été  publiée  par  Nicholson  à  Edimbourg,  en  1830.  La 
Chanson  d*Otinel  est  entrée,  sous  la  même  forme  Otuêl^^ 
dans  le  recueil  islandais  qui  a  pour  titre  Saga  Karla 
Magnusar  og  Kappa  Hans,  Un  petit  poème  populaire 
italien,  Istaria  di  Ottinello  e  Giutia,  n*a  aucun  rapport 
«?ec  le  nôtre.  On  ne  connaît  que  deux  manuscrits  de  la 
Chanson  d*Otinel,  en  dialectes  différents,  conservés,  Tun 
à  Rome,  dans  la  bibliothèque  du  Vatican  (il  provient  de 
notre  abbaye  bénédictine  de  Fleury),  Tautre  à  Middlehill, 
dans  la  bibliothèque  de  sir  Thomas  Phillips  ;  ils  ont  servi 
à  la  publication  qu*en  ont  faite  MM.  Guessard  et  Miche- 
lant  dans  la  collection  des  Anciens  poètes  de  la  France, 
Paris,  1859,  in-16.  B. 

OTOMT  (Lan{^e).  V,  Mexique  (Langues  du). 

OTTAVA  RIMA.  V.  Italienne  CVersiflcation). 

OTTOBIANE,  sorte  de  divan  ou  de  sofa,  ainsi  nommé 
des  Ottomans  ou  Turcs  qui  en  font  grand  usa^. 

OUBLIES.         i  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

OUBLIETTES.  S      de  Biographie  et  d^Histoire. 

OUDËNARDE  ou  AUDENARDE  (Hôtel  de  Ville  d*}.  Ce 
monument,  de  petites  dimensions,  est  un  des  plus  cé^ 
lèbres  de  la  Belgique.  Bâti,  de  1527  à  1530,  par  Henri  van 
Peede,  il  oflïre  certains  points  de  ressemblance  avec  les 
hôtels  de  ville  de  Bruxelles,  de  Louvain,  et  de  Courtrai.  Il 
a  la  forme  d'un  trapèze,  isolé  sur  trois  de  ses  côtés  :  la 
façade  a  25  met.  de  développement,  le  côté  gauche 
21  met.,  le  côté  droit  12  met.;  la  partie  postérieure  est 
adossée  à  une  ancienne  halle,  transformée  en  salle  de 
spectacle.  L'intérieur  est  d'une  simplicité  qui  contraste 
avec  la  riche  décoration  du  dehors  :  on  y  remarque  ce- 
pendant rentrée  de  la  salle  des  échevins,  chef-d^œuvre 
de  sculpture  en  bois  exécuté  en  1531  par  Paul  Van  der 
Schelden,  et  la  cheminée  de  cette  salle,  sculptée  par  le 
même  artiste. 

OUGAB,  instrument  de  musique  à  vent  des  anciens 
Hébreux.  La  forme  en  est  inconnue.  Les  uns  y  ont  vu  une 
«q>èoe  de  cornemuse,  composée  d'une  peau  enflée  et  de 
deux  flûtes;  les  autres,  une  flûte  de  Pan,  formée  de  7 
tuyaux  de  longueur  différente  et  proportionnée. 

OUGRO-JAPONAISES,  OUGRO-TARTARES  (Langues). 

V,  OORALO-ALTAlQlJBS. 

ouïes,  nom  donné  quelquefois  aux  grandes  baies  à 
abat-vent  ou  abat-son  des  tours  d'églises. 

OUKASE  «  OULÉMAS.  V.  Ukase,  Ulémas  ,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 

OULIK,  monnaie.  V.  Ouk. 

OUOLOF  (Idiome).  V.  Wolof. 

OUPANISHADS.  V.  Upanishads. 

OURALO-ALTAIQUES  (Langues),  dites  aussi  Cfugro- 
iaponaises,  Ougro-tar tares,  Ftnno^artares ,  ou  simple- 
ment Tartares ,  grande  famille  de  langues,  composée  de 
quatre  groupes  :  1»  le  groupe  ougrien,  comprenant  Vos- 
ttake,  le  samoyéde^  le  vogoul,  etc.;  2?  le  groupe  tartare, 
dont  font  partie  le  mongol,  le  mandchou,  le  turc;  3*  le 
groupe  japonais ,  comprenant  le  japonais  et  le  con^; 
éfi  le  groupe  finnois  ou  tchoude,  auquel  appartiennent  le 
suomt  ou  finlandais,  le  lapon,  Vesthimien;  5^  le  magyare 
ou  hongrois.  Il  est  aisé,  dit  Kellgrèn,  de  découvrir  entre 
tous  ces  idiomes  comme  une  affinité  primitive  dans  une 
multitude  de  racines  communes  ;  peut-être  même  serait- 
il  possible  de  ramener  à  un  seul  et  même  thème  primitif 
la  plupart  des  suffixes  grammaticaux  d*an  emploi  ana- 
logue. Dans  toutes  ces  langues,  consonnes  et  voyelles  res- 
tant en  regard  Tune  de  l'autre  dans  la  syllabe  avec  une 
même  importance,  et  les  voyelles  ne  pouvant  être  absor- 
bées par  les  consonnes,  la  rencontre  de  plusieurs  con- 
sonnes dans  une  syllabe  est  un  fait  anormal.  Dans  toutes, 
la  racine  est  invariable  et  immuable,  et.  dans  la  fusion 
d'un  suffixe  avec  la  racine,  c'est  le  premier  qui  s'harmo- 
nise et  au  besoin  se  modifie  ;  le  radical,  toujours  placé 
devant,  gouverne  les  autres  parties  composantes  du  mot. 
Aucune  de  ces  langues  n'admet  de  préfixes,  et,  dans  la 
plupart  d'entre  elles,  Taccent  déterminant  du  mot  repose 
invariablement  sur  la  première  syllabe,  c-àrd.  sur  le 
radical  ;  les  syllabes  qui  viennent  ensuite  perdent  leur 
propre  accent,  et  se  soumettent  au  radical  qui  domine  le 
mot.  Dans  toutes  aussi,  règne  la  loi  de  Vharmonie  voceUe, 
€.-à-d.  que  le  mot  devient  un  tout ,  un  ensemble  dont 
toutes  les  parties  se  fondent  dans  un  seul  ton,  et  que  les 
voyelles  rudes  et  les  douces  ne  doivent  Jamais  se  trouver 
réunies  dans  le  même  mot.  Toute  signification  détournée 
du  radical ,  tout  rapport  nouveau  du  mot  constitutif  est 
indiqué  par  l'adjonction  d'un  nouveau  suffixe  ;  ces  suffixes 
se  rangent  régulièrement  l'un  après  l'autre,  chacun  à  sa 
place  déterminée,  et  se  fondent  selon  les  lois  des  sons. 
Jamais  le  sens  du  mot  n'est  mo<tiflé  d'une  façon  emblé- 


matique par  un  changement  dans  le  radical.  Les  sub- 
stantifs n'y  ont  pas  de  genre.  Ces  langues  n'ont  toutes 
qu*un  très-petit  nombre  de  psrticules,  défaut  compensa 
par  une  grande  richesse  de  formes  dérivatives  du  verbe, 
de  participes,  de  gérondifs  et  de  formes  infinitives.  Mèmer 
lois  dans  la  formation  des  périodes  :  les  propositions  ne 
s'y  enchevêtrent  pas  les  unes  dans  les  autres,  comme  cela 
a  lieu  dans  les  langues  indo-européennes  ;  mais  cliaque 
proposition  se  Joint,  en  quelque  sorte  à  la  manière  d'un 
suffixe,  à  celle  dont  elle  forme  le  complément  immédiat, 
ce  qui  produit  une  chaîne  continue  de  membres  de 
phraôes  s'engrenant  les  uns  dans  les  autres  et  se  succé- 
dant dans  l'ordre  naturel  de  la  pensée.  Enfin ,  Gaatrèa 
comparant  les  vieux  chants  de  peuples  si  distants  les  unf 
des  autres,  y  trouve  une  inspiration  identique.  V,  Abe 
Rémusat,  aecherches  sur  les  langues  tartares;  Schott 
Essai  sur  les  langiies  tartares,  en  alleoL,  Berlin,  1836, 
et  Mémoire  sur  les  langues  alteOques  ou  finno-tartares, 
analysé  dans  les  Nouvelles  Annales  des  Voyages,  5*  série, 
t.  XVI  ;  Castrèn,  De  affixis  personalUbus  linguarum  altak- 
carum,  Hetsingfors,1831  ;  Kellgrèn,  Les  Finnois  et  la  race 
ouraloHiltiUqiie,  ouvrage  traduit  dans  les  Nouvelles  An^ 
nales  des  Voyages,  5*  série,  t.  xv. 

OURANIA  (du  grec  ouranos,  ciel).  Jeu  de  l)alle  des  an* 
ciens  Grecs.  Un  des  loueurs  jetait  une  balle  vers  le  ciel, 
et  les  autres  cherchaient  à  la  saisir  avant  qu'elle  eût  tou- 
ché la  terre.   C'est  à  peu  près  la  soûle  de  Bretagne. 

OURCEL,  ORCEL  ou  ORCEAU,  vieux  mot  signifiant 
bénitier, 

OURDOU  (Dialecte).  V,  IvDicNfiBs  (Langues). 

OURM  ou  URNI.  V.  Indien  (Art). 

OUSSAS.  V.  OssEC. 

OUTRAGE  (du  latin  agere  ultra,  passer  outre,  dépasser 
le  droit),  injure  de  fait  ou  de  parole  contre  les  grands  corps 
de  l'État,  les  officiers  ministériels,  les  fonctionnaires  pu- 
blics, dans  l'exercice  ou  à  l'occasion  de  leurs  fonctions. 
11  est  puni  plus  ou  moins  sévèrement,  selon  la  gravité 
des  circonstances.  —  L'outrage  à  la  morale  publique  et 
religieuse,  par  discours,  cris  et  menaces  proférés  dans  des 
lieux  publics,  par  des  écrits,  des  imprimés,  des  dessins, 
des  peintures  et  emblèmes  vendus  ou  distribua,  par  des 
placards  ou  affiches,  est  puni  d'un  emprisonnement  d'un 
mois  à  un  an,  et  d'une  amende  de  16  fir.  à  500  fr.  {Code 
pénal,  art.  222-225;  loi  du  17  mai  1819).  L'outrage  pu- 
blic à  la  pudeur  est  puni  d'un  emprisonnement  de  trois 
mois  à  un  an,  et  d'une  amende  de  16  fk*.  à  200  f^. 

OUVERTURE,  symphonie  qui  sert  de  début  à  un  opér^ 
ou  à  un  ballet.  Elle  n'est  pas  destinée  à  réunir  tous  les 
caractères  exprimés  dans  la  pièce,  et  à  présenter,  comme 
on  le  croit  souvent,  l'assemblage  des  principaux  motifs 

au'on  entendra  plus  tard  :  son  but  est  de  disposer  le  cœur 
es  spectateurs  au  genre  d'intérêt  etd'émotion  qui  domine 
dans  l'œuvre  entière.  C'est  donc  par  la  couleur  générale 
ou'elle  doit  se  conformer  an  drame.  Ainsi,  l'ouverture 
au  Démophon  de  Vogel  exprime  le  délire  impétueux  des 
passions;  il  règne  une  muesté  patriarcale  dans  celle  du 
Joseph  de  Méhul  ;  le  Don  Juan  de  Mozart  s'ouvre  par  une 
svmphonie  qui  a  quelque  chose  de  bizarre  et  de  fantas- 
tique, bien  approprié  au  drame  qu'elle  précède;  l'ouvei^ 
ture  de  la  Chasse  du  jeune  Henri,  par  Méhul,  représente 
toutes  les  circonstances  d'une  chasse  au  cerf;  celle  de 
Jean  de  Paris,  par  Boleldieu,  a  une  couleur  chevale- 
resque ;  dans  l'ouverture  de  Guillaume  Tell ,  Rossini  a 
peint  le  calme  de  la  vie  champêtre,  troublé  par  une  fan- 
fare de  trompettes  oui  appelle  les  paysans  suisses  à  la 
conquête  de  la  liberté.  Parmi  les  ouvertures  célèbres,  on 
peut  encore  citer  celles  de  VIphigéniê  en  Aulide  et  d( 
ilphigénie  en  Tauride  par  Gluck;  de  la  Caravane  etd6 
Panurge  par  Grétry;  du  Mariage  secret  par  Qmarosa; 
de  la  Clémence  de  Titus ,  des  Noces  de  Figaro  et  de  la 
FliUe  enchantée  par  Mozart;  de  Montano  et  Stéphanie 
par  Berton  ;  de  Joconde  par  Nicole  ;  de  VHôt^lerie  portu- 
gaue  et  d*Anacréon  par  Cherubini  ;  dé  la  Dame  manche 
par  Boleldieu  \  du  Pré  aux  clercs  et  de  Zampa  par  Hé- 
rold  ;  de  Fidelto,  de  Promélhée,  de  Coriolan,  et  d'Egmont 

Car  Beethoven  ;  du  Barbier  de  SévUle.  de  Sémiramis,  de 
'ancréde,  d*Otello,  et  de  la  (kuxa  laara  par  Rossini;  da 
Chalet  par  Adam,  etc.  Les  compositeurs  n'ont  que  rare* 
ment  réussi  à  faire  de  belles  ouvertures  par  une  sorte 
de  récapitulation  des  meilleurs  motifs  de  leurs  opéits  : 
il  faut  pourtant  excepter  celles  du  Preysc^iUx,  d^Ewriante 
et  dVberon  par  Weoer;  de  la  Muette  de  Pcrtici  par  Au- 
ber,  et  en  général  toutes  les  ouvertures  de  ce  composi- 
teur :  le  Maçon,  la  Sirène,  les  Diamants  de  la  couronne, 
le  Domino  noir,  Fra  Diaiolo,  etc.  La  disposition  la  plus 
ordinaire  d'une  ouverture  d'opéra  sérieux  présente  d'abord 


OVA 


1357 


OXF 


QDe  courte  introdaction  d*un  mouvement  grare,  puis  an 
oilêgro  brillant  ou  passionné  :  dans  l'opéra  comique,  on 
débute  souvent  par  Vo/^Tfo,  sans  préparation.  BÛiucoup 
d'ouvertures  sont  écrites  dans  le  ton  de  ré^  qui  est  écla- 
tant et  propre  aux  grands  effets  d'orchestre.  De  nos  Jours, 
il  n'est  pas  rare  qu'un  opéra  soit  privé  d'ouverture,  et 
débute  par  une  simple  Introduction  {V,  es  mot),     fi. 

OUVRAGE,  en  termes  de  Fortification,  travail  avancé 
en  dehors  d'une  place.  Vouvrage  à  corne,  ou  simple- 
ment corne,  placé  ordinairement  devant  une  courtine  et 
gaelquefois  devant  un  bastion,  se  compose  d'un  front  de 
lortiflcation,  c-à-d.  d'une  courtine  et  de  deux  demi-bas- 
tions Joints  à  la  place  par  deux  longs  côtés,  dits  ailes  on 
branches.  Il  y  a  des  cornes  à  double  flanc ,  c-à-d.  qu'à 
partir  du  demi-bastion  les  ailes  sont  à  retour,  au  lieu 
d'être  parallèles  entre  elles  ;  elles  se  dirigent  vers  le  mi- 
lieu d'une  des  courtines  de  la  place,  et  s'y  brisent  à  peu 
de  distance  du  chemin  couvert.  Il  y  a  eu  des  cornes  trian* 
gnlaires  qui  étaient  à  bastion  entier,  au  lieu  d'être  à  de^ 
mi-bastîon.  Au  xvn*  siècle,  on  appelait  cornes  couronnées 
celles  qui  avaient  leur  front  couvert  par  une  défense  en 
forme  ae  bastion,  accompagné  de  deux  petites  courtines; 
quelquefois  aussi  elles  étaient  couvertes  par  une  demi- 
lune.  —  Vouvrage  à  couronne  a  on  front  composé  d'un 
bastion  auquel  s'adjoignent  deux  courtines,  terminées 
chacune  par  un  demi-bastion  ;  ses  ailes  se  dirigent  Jus- 
qu'à leur  demi-gorge  vers  la  place  dont  il  dépend.  H  v 
a  des  ouvrages  à  couronne  double  qui  se  construisent  à 
trois  fironts.  —  Le»  ouvrages  de  campagne,  ordinaire- 
ment en  terre,  quelquefois  palissades,  sont  les  redoutes 
ou  blockhaus,  les  fortins,  les  flèches,  les  redans,  etc. 

OUVRIER  (du  latin  operartus),  celui  qui  se  livre  à  un 
travail  manuel  pour  le  compte  d'autrui  et  en  vue  de  ga- 
gner an  salaire.  Il  travaille  à  façon,  quand  on  lui  fournit 
les  matériaux  et  qu'il  les  met  en  œuvre,  soit  chez  lui, 
soit  daÂs  l'atelier  du  maître;  à  ses  pièces,  s'il  est  payé 
en  raison  du  travail  qu'il  exécute;  a  la  journée,  quand 
il  reçoit  chaque  Jour  un  prix  déterminé.  Il  existe  certaines 
lois  spéciales  qui  régissent  les  ouvriers  (V,  Apprentis- 
sage, Enfants  dans  les  vANDPAcnmBS,  Atbubr,  Livkbt, 
CoAunoN,  Prud'hommes).  F.  aussi  Arts  et  métiers,  Sa- 
laire, AssocuTiON,  Compagnonnage,  Soqalisme,  Tra- 
vail. 

ouvriers  d'administration.  F.  Administration. 

ouvriers  maritimes,  nom  sous  lequel  on  comprend  les 
charpentiers  de  navires,  les  perceurs,  les  calfata,  les 
voiliers,  les  poulieurs,  les  tonneliers,  les  cordiers,  et  les 
scieurs  de  long,  h»  individus  exerçant  une  de  ces  pro- 
fessions dans  les  ports  de  mer  ou  autres  lieux  maritimes, 
sont  portés  au  rôle  de  l'Inscription  maritime,  et,  en  cas 
de  guerre  ou  préparatifs  de  guerre,  peuvent  être  appe- 
lés dans  les  arsenaux  de  la  marine  impériale.  lia  sont 
eiempts  de  toute  autre  réquisition,  et  notamment  du 
service  militaire.  La  loi  du  i  brumaire  an  iv  (25  octobre 
170!^  el  une  ordonnance  du  3  mai  1839  ont  réglé  leur 
situation. 

oormiERS  MiLiTAiRBS,  ouvriers  chargés,  dans  les  armées, 
de  l'exécution  matérielle  des  détails  relatifs  aux  services 
des  subsistances  et  de  l'habillement  et  campement. 

OUVROIR,  salle  où,  pendant  le  moyen  âge,  quelques 
ouvrières  se  réunissaient  pour  travailler.  Les  couvents 
de  femmes  avaient  tous  une  salle  de  ce  genre  pour  les 
travaux  de  couture  ou  de  broderie.  Plusieurs  commu- 
nautés établirent  des  ouvroirs  publics  pour  les  ouvrières 
sans  travail.  De  nos  Jours,  les  ouvroirs  créés  par  des  so- 
ciétés charitables  n'ont  pas  réussi  pour  les  femmes,  mais 
ont  été  utiles  aux  Jeunes  filles.  Ils  ont  l'inconvénient  de 
faire  une  concurrence  ruineuse  aux  ouvrières  de  pro- 
fession. 

OVATION,  r.  ce  mot  dans  notre  Z>tc(tomiatr9  de  Bio- 
graphie et  ^Histoire. 

OVATIOM  DBS  AUTEURS  DRAMATIQUES  ,  droIt  quO  lO  publlC 

^arroge  d'appeler  sur  la  scène,  à  la  suite  d'un  grand  suc- 
cès, on  poète  dramatique  dont  il  vient  d'applaudir  l'ou- 
vrage. En  1718,  Voltaire,  après  la  l*"*  représentation  de 
ion  OEdipe^  appelé  à  grands  cris  par  les  spectateurs,  avait 
été  obligé  de  se  montrer  dans  une  loge.  Trente  ans  plus 
tard,  en  1748,  la  Mérope,  du  même  poète,  excita  tant 
d'enthousiasme  à  la  1**  représentation,  quil  fut  encore 
obligé  de  se  montrer  au  public,  et  parut  dans  la  loge  du 
tu  «  pleioe  de  personnes  de  sa  connaissance.  Plus  tard 


cet  appel  dégénéra  en  coutume,  et  ce  Ait  sur  la  scèn» 
même  que  l'auteur  dut  venir  recevoir  les  applaudîâao- 
ments  du  public  Vers  le  milieu  du  xvui*  siècle,  la  coutunM 
était  en  pleine  vigueur;  Laharpe,  Ducis,  et  quelques 
autres,  reçurent  cette  ovation,  même  plusieurs  fois  :  La- 
harpe,pour  ses  tragédies  de  Warwick,  en  1763,  et  de  Co- 
rtofon^en  1784.  A  cette  dernière  occasion,  il  a  fait,  dans  sa 
Correspondance  littéraire,  la  réflexion  suivante,  pleine  de 
Justesse  x  «  J'ai  cédé  aux  instances  des  comédiens  [pour 
répondre  à  l'appel  du  public,]  quoique  J'aie  toujours 
pcôisé  qu'il  n'éûut  pas  convenable  ôu'un  auteur  parût  sut 
le  théâtre,  si  ce  n'est  à  un  premier  ouvrage,  quand  le 
public  semble  adopter  sa  Jeunesse,  et  lui  donner  pour 
ainsi  dire  la  robe  virile.  »  Aujourd'hui,  la  coutume  des 
ovations  de  ce  genre  subsiste  encore,  mais  elles  sont 
rares,  le  public  ayant  le  bon  goût  de  ne  les  pas  prodiguer 
aux  poètes  dramatiques.  C»  D— t. 

OVE  (du  latin  ovum,  œuf),  nom  donn<!,  <m  Architec- 
ture :  1*  à  la  moulure  convexe  formée  d'un  quart  de 
cercle,  et  qu'on  appelle  aussi  quart  de  rond;  2«  à  l'échiné 
du  chapiteau  dorique;  3<*  à  un  ornement  en  forme  d'œul« 
sculpté  sur  une  moulure  ronde,  et  entouré  de  nervures 
gracieuses. 

OVIEDO  (Cathédrale  d').  Cette  église,  construite  de 
1380  à  152S,  est  une  des  plus  belles  de  l'Espagne,  Le 
portail  se  compose  de  trois  grandes  arcades,  qui  corres- 
pondent aux  nefs  de  Tinténeur;  elles  sont  richement 
ornées  de  fleurons  et  de  guirlandes,  mais  on  n'y  voit  pas 
une  statue  :  seulement,  au-dessus  de  la  porte  prindpate, 
on  a  placé  les  6  personnages  de  la  Transfiguration,  et  les 
bustes  des  rois  FroUa  et  Alphonse  le  Chaste.  Une  tour, 
assise  sur  les  quatre  piliers  de  l'arcade  de  droite,  s'élève 
à  une  hauteur  de  80  met,  et  se  détache  de  l'édifice  dès 
son  2*  corps  :  ce  corps  et  le  3*,  que  couronne  un  riclie 
balcon  à  ornements  gothiques,  sont  percés  d*nne  fenêtre 
ogivale  sur  chaque  face;  un  4*  corps  laisse  apercevoir  le 
style  de  la  Renaissance  dans  ses  fenêtres,  et  au  5*  repa- 
raît l'art  gothique;  le  tout  se  termine  par  une  pyramide 
octogone,  creuse,  hérissée  de  feuillages  sur  ses  arêtes. 
Des  faisceaux  de  sculptures  enveloppent  de  bas  en  haut 
les  angles  de  cette  magnifique  construction.  L'intérieur  de 
l'église  n'a  que  67  met.  de  longueur  et  22  met.  de  lar- 
geur ;  mais  les  proportions  en  sont  parfaites.  Au-dessus 
des  arcades  règne  une  galerie,  dont  les  croisées  en  ogive 
sont  placées  deux  à  deux  entre  chaque  pilier;  puis,  d'im- 
menses fenêtres,  divisées  en  six  compartiments  par  des 
meneaux,  s'élèvent  Jusqu'à  la  voûte.  Dans  le  bras  sep- 
tentrional du  transept,  la  Chapelle  dite  d^Alphonse  le 
Chaste  contient  neuf  urnes  où  sont  les  cendres  de  neuf 
rois  des  Asturies;  dans  le  bras  méridional,  la  Chapelle 
siànte  renferme  un  grand  nombre  de  reliques.  On  voit 
dans  le  chœur  des  stalles  habilement  sculptées,  où  des 
sujets  très-profanes  se  mêlent  aux  scènes  de  l'Ancien 
Testament.  La  Grande  chapelle  occupe  l'abside  :  elle  a  un 
très-beau  retable  doré,  dont  les  figures  en  relief  repré- 
sentent la  Vie  et  la  Passion  de  J.-C.  Sur  le  flanc  méridio- 
nal de  l'église  se  trouve  un  cloître  de  petites  dimensions, 
mais  d'une  riche  architecture  :  chaque  côté  est  percé  de 
cpiatre  grandes  fenêtres  ogivales;  les  chapiteaux  des  pi- 
liers ont  une  curieuse  ornementation  de  feuillages,  d'ara- 
besques, et  de*  scènes  historiques. 

OXFORD  (Cathédrale  d').  Ce  monument,  oui  date  du 
xn"  siècle,  mais  dont  plusieurs  parties  Indiquent  des 
additions  ou  des  restaurations  postérieures,  est  construit 
sur  un  plan  très-irrégulier.  La  nef,  composée  seulement 
de  quatre  travées,  est  accompagnée  de  collatéraux;  le 
chœur  a  une  nef  collatérale  d'un  côté,  il  en  a  deux  de 
l'autre,  ayant  à  leur  suite  une  autre  nef  assez  lai^ge,  qu'on 
appelle  la  Chapelle  latine.  Ce  qu'il  y  a  de  plus  remar- 
quable, ce  sont  les  voûtes  en  bois,  d'um»  ''x>nstruction 
hardie  et  élégante,  et  dont  les  nombreuses  nervures  re- 
tombent sur  de  gracieux  pendentifs.  La  longueur  de 
l'édifice  est  de  50  met.,  qui  se  partagent  presone  égale- 
ment entre  la  nef  et  le  chœur;  le  transept  a  3â  met  de 
longueur,  et  la  nef  17  met  de  largeur,  y  compris  les 
collatéraux.  La  vue  extérieure  ofl^  peu  d'intérêt;  la  tour 
centrale,  surmontée  d'une  flèche,  n'est  ni  riche  ni  élevée. 
La  cathédrale  d'Oiford  a  une  belle  salle  capltulaire,  de 
style  ogival  primitif,  voûtée  en  pierre,  et  soutenue  sur 
des  faisceaux  de  colonnettes  dont  les  chapiteaux  sont  d4> 
Ucatement  ouvragés.  3. 


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PAG 


P 


P,  la  10'  lettre  de  notre  alphabet,  et  la  12*  de  noa 
consonnes.  C*est  une  labiale,  dont  l'articulation  manque 
dans  certains  idiomes,  par  exemple  en  arabe,  en  Japo- 
nais,  en  suédois;  les  mots  commençant  par  un  P  dans 
cette  demi^  langue  sont  d'origine  étrangère.  Beaucoup 
d'Allemands  ont  quelque  peine  à  employer  le  P,  et  le 


mots  où  on  ne  le  prononce  pas ,  comme  baptême,  coup, 
beaucoup,  drap,  camp,  champ,  exempt,  loup,  sept,  temps, 
dompter,  etc.  11  existe  quelque  affinité  entre  le  p  et  le  v  : 
ainsi,  loup  fait  au  féminin  louve;  rat?e  dérive  du  latin 
râpa;  père  se  dit  en  latin  pater  et  en  allemand  vater. 
Notre  groupe  PH  n^est  une  lettre  composée  que  par  rap- 
port à  sa  forme,  car  il  représente  rarticulation  simple 
F.  —  Dans  les  inscriptions  latines,  P  est  une  abréviation 
pour  Publius,  Paulus,  proconsul,  pontifex,  plebs,  pa- 
tronus,  pius,  perpetuus,  posuit,  pondus,  ponendum, 
post,  etc.  PP  signifie  pater  patriœ ,  proprœtor,  prœposi- 
tus,  primipilus;  P.  C,  patres  conscripti;  P,  K.,  pridiè 
kalendas;  S.  P.  Q.  R.,  senatus  populiuque  romanus. 
Aujourd'hui ,  P  devant  les  noms  propres  signifie  Pierre 
ou  Paul;  Ph.,  Philippe,  Devant  un  nom  de  religieux,  P. 
signifie  Père.  Au  bas  d'une  lettre,  P.  S.  veut  dire  post- 
scriptum.  Dans  le  commerce,  P  est  pour  protesté;  p.  Vo 
«ignifie  pour  cent.  Sur  une  partie  de  musique,  p  est  pour 
ptano  (doux),  et  pp  pour  pianissimo.  Sur  les  sceaux  du 
pape,  S.  P.  S.  P.  sont  les  initiales  des  noms  de  S^  Pierre 
et  S^  Paul.  —  Autrefois,  P  était  la  marque  monétaire  de 
la  ville  do  Dijon.  —  Chez  les  Grecs ,  le  pt  (II) ,  employé 
comme  lettre  numéfale,  valut  d'abord  5,  parce  qu'il  était 
l'initiale  de  pente  (cinq);  plus  tard,  tr'  représenta  80,  et 
.ic  80,000.  Chez  les  Latins,  P  valut  7  selon  les  uns,  100 
selon  les  autres;  quelques-uns  lui  ont  donné  la  valeur 
de  400,  et.  en  le  surmontant  d'un  trait  horizontal  (ô), 
celle  de  4,000,  de  40,000  ou  de  400,000. 

PACAGE  (Droit  de).  K.  Parcours. 

PACHA.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  D'iogra^ 
pfûe  et  d^ Histoire. 

PAC0T1LX.E,  autrefois  Paquotille  {de  paquet),  cer- 
taine quantité  de  marchandises  assorties,  qu'on  emporte 
dans  un  pays  lointain,  afin  d'en  faire  le  commerce.  Par 
déni^ement,  le  mot  s'applique  aux  marchandises  de 
qualité  inférieure. 

PACTA  CONVENTA.  V.  ce  mpt  dans  notre  Z)ic(tofi- 
wUre  de  Biographie  et  d*Histoire. 

PACTE  (du  latin  pactum^  convenu),  terme  aujourd'hui 
synonyme  de  contrat ,  de  convention. 

PACTE  COMMISSOIRB.    V.  COUMISSOIAB. 
PACTE  DE  RACHAT.    V,   RACHAT. 

PADICHAH.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnatre  de 
Biographie  et  d^Histoire. 

PADOGGS.  V.  Baguettes. 

PADOUAN  (Dialecte),  un  des  dialectes  italiens,  inter- 
médiaire entre  le  vénitien  et  le  lombard.  Il  supprime 
nombre  de  voyelles,  et  change  fréquemment  les  consonnes. 
C'est  peut-être  des  dialectes  de  l'Italie  le  plus  difilclle  à 
comprendre. 

PADOUANES,  nom  donné  à  certaines  médailles  qui 
ont  été  parfaitement  contrefaites  d'après  l'antique  par 
Louis  Léon,  Jean  Cavino  et  Alexandre  Baniano,  graveurs 
de  Padoue.  Leurs  coins,  que  possédaient  autrefois  les 
chanoines  de  S^'-Geneviève,  sont  aujourd'hui  au  Cabinet 
des  médailles  de  la  Bibliothèque  impériale  de  Paris.  Des 
padouans  ont  été  faits  aussi  par  Michel  Dervieu,  de  Flo- 
rence, dit  le  Parmesan ,  par  Carteron ,  de  Hollande,  et 
par  Gogonnier,  de  Lyon. 

PADOUE  (Église  S^-Antorie,  à).  Cette  église,  une  des 
plus  belles  de  l'Italie,  a  été  construite  sous  l'influence 
des  idées  byzantines.  Commencée  en  1255  par  Nicolas 
de  Plse,  elle  fut  achevée  en  1307  ;  toutefois,  ses  huit  cou- 

5 oies  et  clochers  furent  ajoutés  dans  le  xv*  siècle.  Au- 
essus  de  la  grande  porte  d'entrée  sont  deux  célèbres 
figures  de  S^  Bernardin  et  de  S^  Antoine,  peintes  par 


Mantegna,  mais  g&tées  par  des  retouches.  L'intérieur  de 
l'édifice,  dont  beaucoup  de  parties  ont  été  refaites  à  Is 
suite  de  divers  incendies,  est  riche  en  œuvres  d'art;  du 
côté  gauche,  on  remarque  :  une  Madone  peinte  sur  uc 
pilier,  et  attribuée  à  Stefano  de  Ferrare  (xiv*  siècle)  ;  le 
monument  d'Alexandre  Contarini,  exécuté  sur  les  dessini 
de  San-Micheli  ;  la  chapelle  de  S^-Antoine,  dont  l'archi- 
tecture est  de  Sansovino,  et  qui  est  entièrement  revêtue 
de  bas-reliefs  en  marbre  blanc,  représentant  la  vie  du 
saint.  Du  côté  droit  se  trouve  la  chapelle  de  S^-Félix, 
couverte  de  fresques  du  xiv*  siècle,  et  la  chapelle  du 
S^-Sacrement,  dont  l'autel  a  été  sculpté  par  Donatello. 
Le  chœur,  entouré  de  12  bas-reliefs  de  bronze,  où  Dona- 
tello a  représenté  des  faits  de  l'Ancien  Testament,  con- 
tient un  magnifique  crucifix  de  bronze  par  le  même 
artiste,  et  un  grand  candélabre  pour  le  cierge  pascal, 
admirablement  travaillé  par  André  Riccio.  Dans  une 
vaste  chapelle  située  derrière  le  chœur,  on  conserve  de 
nombreuses  reliques  :  les  armoires  qui  les  contiennent 
sont  surmontées  d'une  statue  de  S'  Antoine  dans  une 
gloire,  groupe  énorme  taillé  dans  tm  seul  morceau  de 
marbre. 

PADOciB  {Église  S^MosTiNE,  à).  Cette  église  fut  élevée, 
dit-on,  sur  l'emplacement  d'un  temple  de  la  Concorde,  et 
plusieurs  fois  détruite  :  on  prétend  que  les  deux  çriffons 
du  porche  actuel  proviennent  de  l'édifice  primitif.  Le 
monument  actuel  fut  commencé  en  1521  par  André  Ric- 
cio, et  achevé  en  1549  par  Morone.  Il  est  remarquable 
par  la  grandeur  de  la  nef,  la  simplicité  et  la  hardiesse 
des  proportions;  l'aspect  en  est  malheureusement  g&té 
par  le  nadigeon  :  les  murs  sont  blancs,  les  chapiteaux 
des  colonnes  sont  gris,  les  arcs-doubleaux  et  les  caissons 
des  voûtes  Jaunes.  Le  tableau  du  maître-autel,  représen- 
tant le  martyre  de  S**  Justine,  est  un  des  chefs-d'œuvre 
de  Paul  Véronèse.  Dans  une  chapelle,  on  conserve  un 
cercueil  de  bois,  qu'on  dit  avoir  renfermé  les  restes  de 
S*  Luc. 

PADOUE  (Palais  de  Justice  de).  Ce  monument  fut  com- 
mencé en  1172  par  Pierre  Cozzo.  Quand  les  fondations 
furent  sorties  de  terre,  on  abandonna  le  travail  jusqu'en 
1209.  Il  fut  voûté  en  1219;  on  le  recouvrit  en  plomb  en 
1306.  Un  incendie  consuma  la  voûte  en  1420;  le  Sénat 
de  Venise  la  fit  reconstruire.  Alors  on  démolit  deux  murs 
intérieurs,  et  on  l'on  obtint  cette  immense  salle  d'au- 
dience dite  Salone,  oui  est  la  plus  vaste  de  l'Europe  : 
elle  a  100  met.  de  longueur,  sur  une  largeur  et  une 
hauteur  de  33  met.,  sans  autre  soutien  que  les  morailles. 
Colles-ci  sont  couvertes  de  peintures*  On  conserve  dans 
U  salle  le  prétendu  monument  de  Tite-Live. 

PiEAN.  V,  P^Aiif  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d'Histoire. 

Pi£NULA,  manteau  romain.  V,  notre  Dictionnaire  dé 
Biogra/phie  et  d^Histoire. 

P^ESTUM  (Monuments  antiques  de),  à  40  kilom.  S.-E. 
de  Naples.  Ces  monuments  en  ruines,  c[ue  l'on  considère 
comme  les  plus  parfaits  que  les  Grecs  aient  laissés  en  Ita- 
lie, sont  au  nombre  de  trois,  et  construits  tout  en  pierre  : 
celui  du  milieu,  ancien  temple  périptère  de  Neptune, 
forme  un  carré  long  et  présente  6  colonnes  doriques  can- 
nelées sur  chacune  de  ses  façades,  14  de  chaque  côté.  Les 
colonnes  qui  formaient  le  portique  supportent  encore  le 
fronton  ;  celles  de  l'enceinte  sont  seulement  réunies  par 
une  corniche.  Les  deux  autres  édifices  sont  :  un  temple 
de  Gérés,  hexastyle  et  périptère,  avec  13  colonnes  de 
côté  ;  et  une  basilique,  dont  il  reste  9  colonnes  de  face  et 
18  sur  chacun  des  flancs.  On  voit  encore  à  Psestum  de;: 
restes  d'une  enceinte  carrée,  faite  de  gros  blocs  tailléf 
et  posés  sans  ciment,  et  coupée  à  distances  égales  par 
8  tours,  plus  récentes  que  les  murs  :  des  quatre  portes 
dont  elle  était  per^e,  il  n'y  a  plus  de  traces  que  de  celle 
de  l'Est.  On  a  retrouvé  enfin  quelques  vestiges  d'un  aque- 
duc, d'une  fontaine,  d'un  théâtre,  d'un  amphithéâtre 
d'un  logement  de  soldats,  etc. 

PAGAIE  (de  l'indien  pagaM),  petit  aviron  court,  avec 
lequel  les  sauvages  font  marcher  leurs  pirogues. 


PA! 


1359 


PAI 


PAGANIGA.  K.  Balle  (  Jeaz  de) ,  dans  notre  IHctum- 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

PAGE  (du  latin  pagina)^  en  termes  de  Typographie, 
l'un  des  côtés  d*un  feuillet,  et  rimpression  qui  y  est 
contenue. 

PAGES  (Mise  en).  F.  GoMPOsmoif. 

PAGINATION,  série  des  nombres  ou  numéros  qui  le 
trouTont  en  tête  des  pages  d*un  livre,  pour  marquer  Tor- 
dre relatif  de  celles-ci.  Paginer,  c'est  numéroter  les  feuil- 
lets. Les  préfaces,  les  introductions  se  paginent  ordi- 
nairement en  chiflTres  romains,  parce  que  ces  parties 
furmeni  une  espèce  de  hors-d'œuvre,  et  ne  s'impriment 
que  quand  l'ouyrage  est  fini  et  paginé  en  chiffres  arabes; 
on  prend  alors  alors  des  chiffres  romains  pour  éviter  la 
confusion.  Dans  les  premiers  temps  de  l'imprimerie,  on 
paginait  à  la  main  après  l'impression  ;  le  Tacite  de  Jean  de 
Spire,  publié  à  Venise  en  1469,  est  le  premier  livre  dans 
lequel  les  chiffres  des  pages  aient  été  imprimés.  V.  Magné 
de  Marolles,  Hecherches  sur  Voriginê  et  le  premter  usage 
des  registres,  des  signatures,  des  réclames  et  des  chiffres 
de  pages  dans  Us  livres  imprimés,  Paris,  1782,  in-S». 

PAGNE  (du  latin  pannus)^  morceau  d'étoffe  dont  les 
nègres  et  les  Indiens  qui  vont  nus  s'enveloppent  le  corps 
depuis  la  ceinture  Jusqu'aux  genoux. 

PAGODE  (du  persan  pout ,  idole,  et  gheda,  maison? 
ou  de  l'hindou  bnagavati,  maison  sainte  )t  nom  donné 
par  les  Européens  aux  temples  construits  en  plein  air  par 
les  Hindous  et  autres  peuples  de  l'Asie  méridionale.  Ces 
monuments  sont  en  brique  ou  en  pierre,  avec  des  in- 
crustations de  marbre,  de  porcelaine,  etc.,  et  quelquefois 
en  bois  peint  Ils  sont  généralement  surmontés  d'une 
construction  pyramidale,  dont  la  forme  est  très -tour- 
mentée. Les  idoles  du  sanctuaire,  auxquelles  on  donne 
aussi  le  nom  de  pagodes,  sont  pour  la  plupart  en  terre 
brunie,  de  formes  grossières  et  bizarres,  mais  richement 
ornées.  Cest  par  comparaison  avec  ces  idoles  qu'on  a 
appelé  pagodes ,  au  siècle  dernier,  les  magots  ou  figures 
çrotesques  dont  on  ornait  les  cheminées  et  les  consoles. 
V.  iHoiEif  (Art). 

PAGOOB ,  monnaie  d*or  des  Indes.  La  pagode  au  crois- 
sant vaut  9  fr.  46  c.  ;  la  pagode  à  Vétotle,  9  fr.  35  c.  ;  la 
pagode  de  Pondiehéry,  8  fr.  32  c. 

PAIE,  PAIEMENT,  V.  Pâte.  Payement. 

PAILE,  vieux  mot  q^ui  signifiait  manteau^  dais,  po- 
otl/ofi,  et  qui  désignait  aussi  une  étoffe  de  soie  rayée 
provenant  d'Alexandrie  en  Egypte. 

PAILLASSE  (de  l'italien  pagliaccto,  homme  de  paille), 
bouffon  populaire,  ainsi  appelé  parce  qu'il  est  habillé  ae 
cette  toile  à  carreaux  dont  on  recouvre  les  paillasses  de 
lit.  C'est  l'acteur  principal  des  parades  Jouées  sur  des 
tréteaux  en  plein  vent,  le  comique  des  spectacles  d'acro- 
bates, dont  il  parodie  grotesquement  les  sauts  et  les 
gambades. 

PAILLETTES ,  petits  disques  d'or,  d'argent  ou  d'acier, 
percés  au  centre,  et  que  l'on  coud  sur  une  étoffe  pour 
Tomer.  On  en  voit  sur  certains  vêtements  sacerdotaux 
et  sur  des  costumes  d'acteurs. 

PAILLON ,  petite  feuille  de  cuivre  battu,  trte-mince 
et  colorée  d'un  côté,  que  les  joailliers  mettent  au  fond 
des  chatons  des  pierres  précieuses  pour  en  augmenter 
l'éclat. 

PAIN.  Le  pain  étant  un  aliment  de  première  nécessité, 
les  gouvernements  en  ont  souvent  surveillé  la  fabrication 
et  le  prix.  Au  moyen  âge,  le  pain  de  première  qualité 
s'appelait patfi  de  Chaillg,  et  le  pain  commun,  pain  de 
brode*  Les  règlements  ne  prescrivaient  rien  sur  le  poids 
du  pain,  que  l'usage  seul  déterminait;  mais  ils  fixaient 
les  prix ,  et  défendaient  de  vendre  des  pains  de  plus  de 
deux  deniers  ou  de  moins  d'une  obole.  Les  puns  mal 
faits  on  rongés  par  les  rats  ne  pouvaient  être  ni  mis  en 
étalage  dans  la  boutioue  ni  portés  le  samedi  à  la  halle  ; 
ils  devaient  être  vendus  au  rabais  sur  un  marché  parti- 
culier, qui,  à  Paris,  se  tenait  le  dimanche  entre  le  parvis 
Notre-DÎume  et  l'église  S^-Christophe.  Les  prud'hommes 
faisaient  la  visite  chez  les  boulangers  pour  s'assurer  si 
les  pains  étaient  bons  t  les  mauvais  étaient  saisis,  et  le 
grand-panelier  condamnait  le  délinquant  à  une  amende 
(6  deniers  an  xm*  siècle).  Au  mois  de  Juillet  1372,  on 
décida,  après  plusieurs  cuissons  d'essai,  que  le  patn  de 
Chailly  d'un  denier  pèserait  tout  cuit  neuf  onces  un  quart 
{à quinze  onces  la  livre) ,  le  pain  bourgeois  ou  de  secocde 
qualité  douze  onces,  le  pain  de  brode  ou  pain  bis  vinat- 
quatre  onces.  Les  pains  de  deux  deniers  pesaient  le  double. 
Le  froment  de  première  qualité  valait  alors  douze  sous  à 
Paris;  à  chaque  augmentation  de  trois  sous  sur  le  marché, 
pains  dévident  diminuer  de  poids,  celui  de  Chaillir 


d'une  demi-once,  les  deux  autres  d'une  once  ;  à  chaque 
diminution  de  trois  sous,  ils  devaient  augmenter  d'un 
poids  équivalent.  L'échelle  de  proportion  fut  modifiée  la 
même  année  après  la  moisson  ;  mais  le  principe  resta  le 
même.  Ce  système  pouvait  produire  de  dangereuses  illu- 
sions pour  la  foule,  qui  ne  s'apercevait  pas  tout  d'abord 
des  changements  qui  survenaient  dans  les  conditions  de 
son  existence  parce  que  le  prix  du  pain  ne  changeait  pas*  , 
Au  XV*  siècle  (U39),  on  changea  de  système,  et  le  poids 
du  pain  resta  invariable.  C'est  ce  qui  a  lieu  de  nos  Jours. 
Jusqu'en  1817,  on  n'a  fixé  que  le  prix  du  pain  de  première 
qualité;  jusqu'en  1823,  la  taxe  était  faite  à  des  époques 
indéterminées;  jusqu'en  1840  (16  nov.),  on  taxait  le  pain 
de  2  kilogrammes,  et  on  était  obligé  dWorder  une  tolé- 
rance de  poids  à  la  fabrication.  Aujourd'hui  la  taxe  donne 
régulièrement  toutes  les  quinzaines  le  prix  du  kilogramme 
de  première  et  de  seconde  qualité  :  on  part  de  ce  principe, 
que  le  sac  de  farine  pesant  net  157  kilogr.  doit  produire 
294  kil.  de  pain,  et  que  la  fabrication  coûte  11  francs.    L. 

pAm  a  chantes,  PAm  d'aotel,  ou  paui  sacramentel, 
pain  azyme  ou  sans  levain,  réduit  en  feuille  mince,  coupé 
en  grands  ronds  sur  lesquels  se  trouve  empreinte  la  figure 
de  J.-C. ,  et  dont  on  fait  des  hosties  pour  la  consécration. 
Le  nom  de  pain  à  chanter  vient  de  ce  que  ce  pain  sert  à 
chanter  la  messe. 

PAm-AssiETTE,  pslu  d'uuo  pàto  épalsso  et  solide,  fabri- 
qué aux  xni*  et  xiv«  siècles,  et  dont  on  faisait  des 
assiettes.  On  en  servait  une  à  chaque  convive,  qui  y  dé- 
coupait ses  morceaux,  et  qui  la  mangeait  quand  elle  était 
imprégnée  de  sauce  et  du  Jus  des  viandes.  Le  pain- 
assiette  se  nommait  aussi  tranchoir. 

PAIN.  BéNrr.  Le  jour  du  Sabbat,  les  Hébreux  offraient 
à  Dieu  dans  le  Temple  12  pains  sans  levain,  dits  pains 
de  proposition  ou  d'offrande,  et  que  les  prêtres  seuls  pou- 
vaient manger.  Ces  pains  étaient  une  allusion  aux  12  tri- 
bus d'Israël.  Chez  les  premiers  chrétiens,  du  pain  bénit 
était  offert  aux  catéchumènes  avant  leur  baptême,  à  la 
place  du  pain  de  l'Eucharistie,  auquel  ils  n^étaient  pas 
encore  Jugés  dignes  de  participer.  Plus  tard ,  un  pain  du 
même  genre  fut  distribué  à  tous  les  fidèles,  comme  un 
gage  de  leur  mutuelle  affection.  On  dit  que  l'usage  de 
cette  distribution  fut  établi  par  un  concile  de  Nantes, 
en  655.  Ai:^ourd'hui,  le  pain  oénit  est  offert  tour  à  tour 
par  les  fidèles  de  chaoue  paroisse,  le  dimanche,  à  la 
grand'messe,  pendant  l'Offertoire;  celui  qui  va  à  l'offrande 
porte  un  cierge  allumé,  au'il  donne  à  l'officiant,  sans 
doute  pour  indiquer  oue  les  fidèles  doivent  pourvoir  à 
l'entretien  du  luminaire,  et  le  prêtre  lui  fait  baiser  la 
patène.  B. 

PAIR,  en  termes  de  Commerce,  égalité  de  change  qui 
résulte  de  la  comparaison  du  prix  d'une  monnaie  dans  un 
pays  avec  celui  qu'elle  a  dans  un  autre.  Le  change  est  au 
pair,  quand  pour  une  somme  qu'on  donne  en  un  lieu  on 
reçoit  la  même  somme  en  un  autre  lieu  sans  aucune  re- 
mise. —  A  la  Bourse,  une  valeur  est  au  pair,  quand  elle 
se  vend  et  s'achète  au  prix  de  sa  création. 

PAIR  ET  iMPAia,  Jeu  qui  se  Joue  avec  trois  dés  comme 
le  passe-dix  (  V,  ce  mot  ). 

PAIR  ou  NON ,  Jeu  dans  lequel  on  donne  à  deviner  si  un 
nombre  d'objets  qu'on  tient  dans  la  main  est  pair  ou  im- 
pair. 

PAIRLE,  en  termes  de  Blason ,  une  des  pièces  hono- 
rables de  reçu.  Sa  forme  est  celle  de  l'Y;  c'est  un  com- 
posé du  chevron  renversé  et  du  pal  abaissé.  Le  mot  vient 
du  latin  parilis,  parce  que  le  pairie  est  formé  de  trois 
branches  de  longueur  égale. 

PAIRS,  PAIRIE.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

PAIRS  ET  IMPAIRS  (Modos),  qualifications  données,  dans 
le  Plain- Chant,  aux  modes  plagaux  et  authentiques 
{V.  ces  mots). 

PAISSON,  mot  synonyme  de  Panage  {V.  ce  mot), 

PAIX  (du  latin  pax),  se  dit  de  l'état  d'une  nation  qui 
n'a  pas  d'ennemis  à  combattre,  et  du  traité  qui  met  fin  à 
une  guerre  {V,  TaArri).  L'idée  de  faire  régner  à  Jamais 
la  paix  entre  les  hommes  a  germé  plusieurs  fois  dans 

Suelques  têtes  :  au  commencement  du  xvm*  siècle,  l'abbé 
e  Saint-Pierre  rêva  la  Patx  perpétuelle  :  une  société  s'est 
formée  à  New- York,  en  1815,  dans  le  but  d'établir  cette 
paix,  et  une  autre  en  1816;  des  Congrès  de  la  paix  se 
sent  tenus  k  Londres  en  1843,  à  Bruxelles  en  1848,  à 
Paris  en  1849,  à  Londres  encore  en  1851. 

PAIX,  déesse  allé^rique.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bto^ 
graphie  et  d*Histo%re, 

PAIX,  en  latin  osculaiorium,  petite  plaque  de  métal  cise- 
lée, éinaiilée  ou  niellée,  sur  laquelle  on  a  représenta  a 


PAL 


13«« 


PAL 


craciOxion»  U  uiote  face,  la  Vierge  avec  renfimi  Jésus,  ou 
f  Agneau,  et  dont  on  fait  usage  dans  TÉglise  catholique  à 
la  grand*me88e.  Le  célébrant  rayant  baisée  à  VAgnus  Dei, 
an  acolyte  Ta  la  présenter  à  tous  ceux  qui  assistent  dans 
le  chœur  à  l'office  divin,  et,  en  la  leur  faisant  baiser, 
prononce  ces  mots  :  Pax  tecum  (La  paix  soit  avec  yous). 
Cet  usage  remonte  au  pontificat  d'Innocent  I"',  dans  le 
V*  siècle  :  il  rappelle  le  bauer  de  paix  que  les  fidèles  des 
temps  précédents  se  donnaient  mutuellement  avant  d'aller 
receyoïr  la  communion. 

PAIX  (  Ju^  de  ).  V.  Jdgb  db  pas,  dans  notre  Diction- 
naire ao  Biographie  et  â^ Histoire. 

PAIX  (Pierre  de  la],  nom  qu'on  donnait  autrefois,  dans 
les  églises,  à  un  siège  de  pierre,  placé  ordinairement  près 
de  l'autel,  et  ^kA  servait  de  lieu  d'asile. 

PAL  (  du  latin  palum  ),  pieu  aiguisé  par  un  bout.  L'em- 
palement  ou  supplice  du  pal ,  usité  chez  presque  tous  les 
peuples  de  l'antiquité,  et  encore  en  usage  chez  les  Turcs, 
les  Persans  et  les  Siamois,  consiste  à  enfoncer  le  pieu 
dans  le  corps  du  condamné,  qu'on  laisse  mourir  dans  cet 
état.  L*empalement  a  exista  en  Russie  ;  ce  fut  la  tzarine 
Elisabeth  qui  le  supprima  au  siècle  dernier. 

PAL,  en  termes  de  Blason ,  une  des  pièces  honorables 
de  l'écu.  Il  en  occupe  perpendiculairement  le  milieu. 
Quand  il  y  a  plus  de  trois  pals,  ils  prennent  le  nom  de 
verpetiês*  Le  pal ,  effilé  à  sa  partie  supérieure,  est  dit  ai- 
Quisi;  à  sa  partie  inférieure,  11  est  fiché  ;  si  Teffilement 
est  onduleux  en  haut,  le  pal  est  flamboyant;  ti  c'est  en 
bas ,  il  est  comété.  On  rencontre,  mais  rarement ,  des 
pAlfl-bandes,  des  pals-barres,  des  pals-fasces  et  des  pals- 
chevrons. 

PALADIN.  K.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
^Histoire. 

PALAIKA.  r.  BalaIka. 

PALAIS ,  du  latin  palatium ,  signifiant  maison  sur  le 
mont  Palatin,  à  Rome,  et,  par  suite,  demeure  des  empe- 
reurs romains.  On  a  plus  tard  appelé  Palais  la  demeure 
vaste  et  somptueuse  des  souverains;  tels  sont,  à  Paris, 
les  palais  des  Tuileries  et  du  Louvre.  Le  même  nom  a  été 
appliqué  à  des  édifices  où  s'exercent  les  grandes  fonctions 
de  Tadministration  publique,  comme  le  Palais  du  Sénat , 
le  Palais  du  Corps  Législatif,  etc.  A  Tétranger,  et  parti- 
culièrement en  Italie,  le  nom  de  Palais  est  donné  aux  mai- 
sons des  grands  personnages  ;  en  France,  par  un  senti- 
ment de  convenance  délicate,  on  nomme  Hotels  les  palais 
des  grands  personnages. 

PALAIS  DE  JUSTICE ,  lieux  où  siègent  les  tribunaux. 
On  appelle  jours  de  Palais  les  Jours  d^audience,  ceux  où 
l'on  plaide  au  Palais.  Les  Juges,  avocats,  avoués,  huis- 
siers, etc.,  se  nomment  gens  de  Palais.  Les  formules  et 
les  termes  dont  on  se  sert  dans  les  actes  Judiciaires  ou 
dans  les  plaidoiries  constituent  le  style  du  Palais, 

PAïAis  DE  JUSTICE  DB  PARIS.  /  V.  cos  mots  dsus  uotro  Die- 

PALAIS-ROYAL.  S  tion.  de  Biog.  et d^ Histoire. 

PALAIS-ROYAL  f  Théâtre  du),  théâtre  qui  fut  occupé  Jus- 
qu'en 1789  par  aes  enfants  qu'on  appelidt  les  petits  co- 
médiens de  H.  le  comte  de  Beaujolais.  Une  actrice,  la 
llontansier,  s'v  établit  à  la  Révolution  avec  une  troupe 
dramatiaue ,  dont  faisaient  partie  Brunet  et  Tiercelin. 
Quand  elle  alla  occuper  une  autre  salle  sur  la  place  Lou- 
vois  en  1703,  le  thé&tre  du  Palais-Royal,  qu*on  avait 
ippelé  Théâtre  de  la  Montagne,  fut  abandonne  aux  acro- 
bates Furioso  et  Ravel,  puis,  sous  le  nom  de  Théâtre  des 
ieux  forains ,  à  des  marionnettes,  et  enfin  à  des  chiens 
savants.  On  le  transforma  encore  en  Café  de  la  Paix, 
ivec  autorisation  de  faire  chanter  des  ariettes  et  Jouer  de 
petites  scènes  de/ant  les  consommateurs.  En  1831,  le 
rhé&tre  du  Palais-Royal  fut  rétabli ,  et  il  s'est  consacré 
depuis  cette  époque  au  genre  comique  et  grivois.  Il  a 
:ompté  dans  sa  troupe  Samson,  Régnier,  Philippe,  Le- 
jeintre  aîné,  Achard,  Levassor,  Alclde  Tousez,  Sain  vil  le, 
Leménil,  Grasset,  Ravel,  Hyacinthe,  Amal,  M"*«  Dé- 
azet,  Fargueil,  etc.  De  18m  à  1852,  on  lui  donna  le 
jom  de  Théâtre  Montansier.  B. 

PALAN ,  en  termes  de  Marine,  assemblage  de  poulies, 
io  moufles  et  de  cordages,  dont  on  se  sert  sur  les  b&ti- 
cnents  pour  enlever  des  fardeaux  ou  exécuter  des  ma- 
aœuvres.  Un  petit  palan  se  nomme  palanqmn. 

PALANCHE  ou  PALAGHE ,  ancienne  arme  tenant  de 
la  lance  et  de  l'épée,  que  les  hussards  portaient  à  leur 
selle. 

PALAN ÇONS,  en  termes  de  Maçonnerie,  morceaux  de 
Dois  qui  retiennent  les  torchis. 

PALANQUIN  (en  hindou  palky)^  sorte  de  chaise  ou  de 
dtiâre,  ordinairement  découverte  et  surmontée  d'un  dais, 
dont  on  s^Mrt  en  Chine,  dans  l'Inde,  dans  les  parties  les 


plus  chaudes  de  l'Amérique,  etc.  Quatre  porteurs  son- 
uennent  le  palanquin  sur  leurs  épaules. 

PALATALES  (du  latin  palcUum,  palais),  consonnes 
produites  par  les  mouvements  de  la  langue,  qui  va  tou- 
cher le  palais.  Ce  sont  d,  t,l,n,  r. 

PALATIN.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio* 
graphie  et  d^Histoire. 

PALATINE,  fourrure.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio* 
graphie  et  d'Histoire,  au  Supplément. 

PALATHiE  (École).  V.  ÉcoLB  DD  PALAIS,  daus  iiotre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire. 

PALE  (du  latin  pala,  pelle),  carton  carré,  garni  en 
dessous  de  toile  blanche,  en  dessus  de  divers  onuementa, 
et  qui  sert  à  couvrir  le  calice  pendant  la  messe. 

PALE,  petite  vanne  qui  sert  à  ouvrir  et  à  fermer  la 
chaussée  d'un  étang,  le  biez  d'un  moulin,  ou  à  faire 
arriver  l'eau  sur  la  roue  du  moulin  ou  à  la  retenir. 

PALE ,  en  termes  de  Blason,  se  dit  d'un  écu  divisé  et» 
six  pals  égaux  par  cinq  lignes  perpendiculaires,  dont  trois 
pals  d'un  émail,  trois  d'un  autre;  un  de  métal,  l'autre 
de  couleur  alternativement.  Il  y  a  aussi  des  écua  paies  de 
huit  pièces.  Un  écu  est  contrepalé,  lorsqu'il  est  coupé,  et 
que  les  demi-pals  du  chef,  quoique  d'émaux  semblables 
à  ceux  de  la  pointe,  sont  nànmoins  différents  à  leur  ren- 
contre, de  sorte  que  si  le  premier  du  chef  est  de  métal , 
celui  oui  luH  répond  au-dessous  est  de  cooleur.  Un  écu 
est  palissé,  quand  il  y  a  des  pals  aiguisés. 

PALÉE  (de  pal,  pieu),  rang  de  pieux  boulonnés  de 
chevilles  de  fer  et  enfoncés  avec  le  mouton  pour  former 
une  digue,  soutenir  des  terres,  porter  quelle  fardeau  de 
maçonnerie  ou  les  travées  d*nn  pont  de  bois. 

PALEFROI.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio* 
graphie  et  d'Histoire. 

PALENCA  (Dialecte).  V.  CaraIbb  (Langue). 

PALENQUÉ  (Ruines  de).  V.  AiiihticAui  (Art). 

PALÉOGRAPHIE  (  du  grec  palaios,  ancien ,  et  gn^è, 
écriture),  science  des  écntures  andennes.  Tandis  que  la 
Diplomatique  (F.  ce  mot  ^étudie  les  caractères  intrin- 
sèques des  manuscrits  et  des  chartes,  elle  en  envisage  les 
caractères  extrinsèques,  qui  sont  :  la  substance  ou  la  ma- 
tière sur  laquelle  on  a  écrit  (pierre,  brique,  métaux, 
ivoire,  bois,  peaux,  feuilles  et  écoroe  des  arbres,  papyrus, 
étoffes,  cire,  parchemin,  papier,  etc.);  la  composition ,  la 
forme  et  la  reliure  des  livres  ;  les  instruments  dont  on 
s^est  servi  pour  écrire  (pinceaux,  styles,  calâmes  ou  ro- 
seaux, plumes,  encres,  etc.);  les  différents  genres  d'écri- 
ture, avec  les  signes  de  ponctuation  et  de  correction ,  les 
abréviations,  les  monogrammes,  les  lettres  conjointes,  etc. 

V.     CALUGRAPHIB,    ÉCRITDRB,   ABRiVIATIOlfS ,    DlPLÙMB, 

Chartb,  Inscriptions. 

PALERME  (Cathédrale  de).  Cette  église,  commencée  en 
1166  sur  les  ruines  d'une  ancienne  cathé(hra]e  dont  les 
Sarrasins  avaient  fait  une  mosquée,  fut  consacrée  en 
1185.  Depuis,  elle  a  subi  des  changements  considérables, 
et  il  ne  reste  plus  que  de  faibles  portions  de  l'édifice 
du  xn*  siècle.  La  façade,  établie  sur  le  flanc  méridional, 
a  été  construit  de  1426  à  1450;  elle  offre  un  mélange  de 
style  normand  et  d'ornementation  moresque,  et  un  long 
feston  qui  lui  sert  de  couronnement  découpe  ses  dente- 
lures sur  le  ciel.  Des  coupoles  s'élèvent  au-dessus  de  la 
nef  et  des  bas  côtés.  L'intérieur,  restauré  à  la  moderne 
par  Fernando  Fuga,  n*est  remarquable  que  par  l'orne- 
mentation. Un  grand  nombre  de  colonnes  de  granit  sup- 
portent les  voûtes.  Le  chœur,  pavé  de  mosaïques  de 
porphyre  et  de  vert  antique,  est  décoré  de  statues  en 
marbre  blanc  d'Antonio  Gagini,  et  de  fresques  par  Ua- 
riano  Rossi.  Le  transept  ^e  gauche  contient  des  peintures 
de  Velasquez  et  de  Pietro  Novelli,  et  une  table  de  marbre 
sur  laquelle  est  gravée  en  caractères  romains  une  lettrs 
que,  suivant  la  tradition  populaire,  la  S^*  Vierge  aoiait 
adressée  aux  habitants  de  Messine.  Dans  la  dbapelle  de 
S^*-Rosalie  est  un  autel  d'argent  massif,  ainsi  que  le  sar- 
cophage de  la  sainte,  également  en  argent.  La  catbéMe 
de  Palerme  renferme  enfin  les  tombeaux  du  roi  Roger  II, 
des  empereurs  Henri  VI  et  Frédéric  H,  du  roi  d'i^on 
Pierre  II,  etc.  —  Le  beffroi  est  joint  à  la  cathédrale  par 
une  arcade  colossale.  Le  palais  archiépiscopai,  situé  près 
de  la  porte  occidentale,  appartient  au  milieu  du  xv^aiéde. 
V.  Fr.  Daniele,  /  regali  sepolcri  del  duomo  di  PaierwOt 
Naples,  1784,  in-fol. 

PALERME  (Eglise  de  Santa-Maria  di  Martorara,  à), 
église  fondée  en  1143  par  Geoi^ges  d*Antioche,  amind  db 
roi  Roger.  Le  plan  en  est  grec.  Une  ancienne  tour  s'élève 
en  avant  de  la  grande  nef,  au-dessus  d'une  galerie  aotr^ 
fois  détachée  de  ('église,  et  qu*on  a  reliée  à  celle-ci  pour 
l'sKrandir.  Les  arceaux  des  trois  nefs  de  la  Blaitonna 


PâL 


1361 


PAL 


reposent  sur  des  colonnes  de  (granit  oriental  à  chapiteaux 
dorés.  Les  murs  et  les  plarondi  sont  couverts  de  pein- 
tures et  de  mosaïques  très-curieuses,  panni  lesquelles 
00  trouve  la  représentation  du  roi  Roger  couronné  par  le 
Christ  Un  monastère  a  été  ijouté  à  Fégiise  en  1604  par 
GeolEroy  Martorana. 

PALBaME  (Le  Palais-Royal,  à).  Ce  monument  passe  i>our 
avoir  été  élevé  sur  les  ruines  d*nne  forteresse  sarrasine. 
C'est  une  réunion  d*édifices  de  difiTérents  styles;  la  partie 
centrale,  qui  est  la  plus  régulière,  date  de  1610.  A  Hn- 
térienr,  é»  galeries,  disposées  à  chaque  étage,  donnent 
tor  ane  grande  cour  carrée.  La  chapelle,  bfttie  en  1129 
dans  le  style  ogival,  est  toute  revêtue  de  marbre  blanc, 
de  porphyre,  de  mosaïques;  les  arceaux  retombent  sur 
des  dDloones  de  granit  a  chapiteaux  dorés.  Dans  les  ap- 
partements du  palais,  on  remarque  les  portraits  des  vice- 
rois,  one  salle  décorée  de  mosalqiies,  un  observatoire 
construit  en  1701  par  Joseph  Piazzi,  et  deux  béliers  an- 
tiques en  bronze  d  un  très-beau  travail. 

PALESTINE.  V,  Caractèses  d'imprimehie. 

PALESTRE.  7.  Gymnasb,  dans  notre  DictUmnain  d$ 
Biographie  et  éTilisiovre. 

PALET  (Jeu  du  )•  On  le  nommait,  chez  les  Anciens, 
le  jeu  du  disque  (k.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biçraphie  et  (TÛistoire).  Nos  enfants  s*y  livrent  encore, 
mais  avec  des  palets  de  pierre  de  bien  moindre  dimen- 
sion. Une  variété  de  ce  Jeu  est  le  Jeu  du  bouchon,  dans 
leqael  on  place  sur  un  bouchon  de  liège  les  mises  des 
Joueurs,  qui  cherchent  tour  à  tour  à  l'abattre  en  lançant 
on  décime  ou  une  pièce  de  5  fr.,  et  qui  recueillent  l'argent 
tombé  le  plus  près  de  leur  pièce. 

PALET,  terme  de  Blason.  V.  Besart. 

PALETOT  (du  latin  palla,  manteau,  et  du  breton  toc, 
chapeau?),  nom  donné  Jadis  à  une  espèce  de  casaque  à 
capuchon,  qui  fut  tour  à  tour  un  surtout  militaire,  un 
habillement  de  laquais,  un  costume  de  marin  ou  de  pé- 
cheur. On  en  a  fait  le  mot  paietoquet,  appliqué  en  signe 
de  mépris.  Aujourd'hui  le  paletot  est  un  vêtement  à  la 
mode,  sans  capuchon,  et  moins  flottant  qu'autrefois. 

PALETTE,  planchette  en  bois,  en  ivoire  ou  en  porce- 
laine, de  forme  ovale  et  fort  mince,  percée,  vers  le  bord, 
d*un  trou  qui  sert  à  y  passer  le  pouce  de  la  main  gauche 
pour  la  tenir,  et  sur  kîquelle  les  peintres  placent  et  mé- 
langent leurs  couleurs.  On  dit  qu'un  tableau  est  fait 
d'one  seule  palette,  quand  on  n'y  aperçoit  pas  les  reprises 
do  travail  ;  qu*il  sent  la  palette,  quand  les  couleurs  en 
«ont  crues  et  sans  accord.  Un  peintre  a  une  palette  bril- 
lante, une  riche  palette,  quana  il  est  bon  coloriste. 

PàLETTE.  V.  Bougeoir. 

PALI  on  BALI  (Idiome),  ancien  idiome  de  l'Inde, 
tombé  à  l'état  de  langue  morte,  mais  qui  subsiste  à 
Ceyian  et  dans  rindo-Qiine  comme  langue  de  la  religion 
et  de  la  science,  et  qui  sert  de  lien  entre  des  peuples 
bouddhistes  dont  les  idiomes  vulgaires  sont  souvent  très- 
différents  les  uns  des  autres.  Bumouf  et  Lassen  pensent 
qu'il  prit  naissance  dans  i'Hindoustan,  d'où  il  fut  chassé 
avec  les  doctrines  bouddhiques  dont  il  était  Tinterprète; 
quissu  du  sanscrit,  il  offre  le  degré  de  déformation  que 
ceue  langue  avait  atteint  an  v*  siècle  de  notre  ère;  que 
ses  altérations  à  lui-même  donnèrent  naissance  au  prft- 
crit  (F.  ce  mot);  et  que  les  modifications  successives  du 
sanscrit  antique  ont  été  le  résultat  d'un  travail  intérieur, 
non  de  l'influence  d'aucun  idiome  étranger.  Le  pâli  abrège 
les  voyelles  longues  du  sanscrit,  et  tend,  par  une  sorte 
de  compensation,  à  redoubler  les  consonnes.  Il  opère 
aussi  de  fréquentes  contractions.  Il  conserve  les  cas  du 
aaoacrit,  et  n'altère  les  terminaisons  de  la  déclinaison  et 
do  la  conjugaison  que  ouand  elles  ofTrent  des  alliances  de 
lettres  qu'une  prononoation  affaiblie  ne  peut  plus  arti- 
culer. Il  a  rejeté  le  nombre  duel,  mais  gardé  les  trois 
genres,  ainsi  que  le  système  à  peu  près  complet  àee  pro- 
noms. L'emploi  de  la  voix  passive  est  devenu  rare,  la  voix 
mienne  a  dispam ,  et  aiûsi  les  modes  précatif  et  con- 
ditionnel, n  existe,  pour  écrire  le  pâli,  plusieurs  alpha- 
Itets;  les  Birmans  se  servent  d'un  caractère  carré;  les 
Siamois  ont  le  caractère  khohmen,  formé  de  petites  lignes 
disposées  entre  elles  angulairement ,  et  un  autre  alpha- 
bet plus  cursif.  Ces  diverses  écritures  paraissent  dériver 
d'un  ancien  alpha^t  bouddhique,  formé  sur  le  modèle 
du  dévanâgan  brahmanique,  et  dont  quelques  éléments 
ont  disparu ,  tandis  que  d  autres  lettres  ont  été  chargées 
d'accents  pour  reorésenter  les  nuances  de  la  prononcia- 
^on  usitée  dans  Vlndo-Qiine.  —  Il  existe  beaucoup  de 
libres  bouddhiques  en  paii.  Les  Européens  ont  lu  et 
^ipliqué  plus  on  moins  complètement  divers  poèmes 
dèûgnés  ious  le  nom  de  Tchdritas;  le  Rasavahini,  re- 


cueil de  légendes;  une  Chronique  intitulée  âtahâuanxa, 
composée  par  Mahanama  et  continuée  par  Dhamniakitti  ; 
le  Boromat,  traité  de  théologie  et  de  philosophie;  le 
Divapansa  et  le  Dhatadhatufxmsaf  ouvrages  historiques 
en  vers;  le  Kamtnouva^  code  des  cérémonies  à  observer 
pour  élever  un  prêtre  de  Bouddlia  aux  ordres  supérieurs  ; 
le  Kammawakya,  rituel  du  culte  bouddhique,  publié  par 
Spiegel,  Bonn,  1841  ;  le  Phatimvkkha,  corps  des  règles  h 
suivre  pour  arriver  an  salut  V.  Clougb,  Poli  grammar, 
with  a  copious  vocàfnUary,  Colombo,  1824,  in-8<*;  Eug. 
Bumouf  et  Lassen,  Effat  sur  le  Poli,  Paris,  1826,  in-8<>; 
E.  Bumouf,  Observations  grammaticales  sur  qu^ques 
passages  de  V Essai  sur  le  Poli,  1826,  in-8*;  Spiegel,  iln«o- 
dota  Paiica.  Uipzig,  1845. 

PAUCARES.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaùre  de 
Biographie  et  d*  Histoire. 

PALIER.  F.  EsCAUER. 

PAUMBACCHIUS.  V.  Antiiuccbids. 

PALIMPSESTE.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

PALINDROME  (  du  grec  palin,  de  nouveau,  à  rebours, 
et  dromos,  course,  parcours  ),  nom  donné  à  des  vers  cpii 
présentent  toi^ours  le  même  sens,  qu*on  les  lise  de 
droite  à  sauche  ou  de  gauche  à  droite.  Tel  est  cet  hexa- 
mètre qu'on  a  mis  dans  la  bouche  du  Diable: 

Signa  te,  signa,  temerb  me  tangis  et  angSs, 

c^i  signifie,  de  quelaue  côté  qu'on  le  Use  :  «  Signe-toi, 
signe-toi,  c'est  en  vain  que  tu  me  touches  et  que  tu  me 
tourmentes.  »  Le  vers  palindrome  est  une  variété  de 
ranacyclique  (F.  ce  mot). 

PALINGÉNÉSIB  (du  grecjKsiMi,  de  nouveau,  et  gM- 
siSf  naissance),  régénération  où  renaissance  des  êtres. 
D'après  les  livres  sacrés  des  Indiens,  les  mondes  se  for« 
ment,  se  détruisent,  et  se  reforment;  leur  commencement 
et  leur  fin  se  succèdent  sans  interruption.  La  métempsy- 
cose (V.  ce  mot )  est  une  palingénésie  d*une  espèce  par- 
ticulière. Les  Stoïciens  admettaient  une  nalingéntefe  uni- 
verselle. Les  Gaulois  croyaient  que  l'univers  devait  périr 
par  le  feu,  puis  renaître  de  ses  cendres.  Cest  sans  doute 
une  opinion  de  ce  genre  qui  était  allégoriquement  figurée 
par  la  fable  du  phénix.  La  résurrection,  qui  est  un  dogme 
dans  un  grand  nombre  de  religions,  peut  être  appelée 
une  palingénésie.  —  Au  xvui*  siècle.  Ch.  Bonnet,  de  Ge- 
nève, a  formulé  un  nouveau  système  palingénésique. 
Suivant  lui ,  le  germe  d'une  espèce,  une  fois  créé,  con- 
tient les  germes  de  tous  les  individus  qui  forment  le  dé- 
veloppement successif  de  l'espèce;  notre  globe  a  déjà 
subi  des  révolutions  successives,  à  mesure  que  les  es- 
pèces qui  y  sont  placées  ont  en  elles-mêmes  leur  déve- 
loppement, qui  consiste  dans  an  plus  grand  nombre  de 
sens  et  de  facultés;  l'homme,  transporté  plus  tard  dans 
un  séjjour  mieux  approprié  à  ses  facultés  nouvelles,  lais- 
sera cette  terre  au  singe  et  à  Téléphant  arrivés  à  une  autre 
période  de  leur  développement ,  et  les  autres  êtres  s'élè- 
veront à  leur  tour,  par  une  suite  de  révolutions,  dans  la 
hiérarchie  générale  de  la  nature  organisée.  —  Sous  le 
nom  de  Palingénésie  sociale ,  Ballanche  a  imaginé  un 
système  d'après  lequel  les  mêmes  formes  sociales  doivent 
se  reproduire  indéfiniment  dans  un  ordre  donné.       B. 

PALINOD.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  (THistoire. 

PALINODIE  (du  grec  ôdè  palin ,  chant  en  arrière,  en 
sens  contraire).  Selon  la  Fable,  Stésichore,  ayant  dit  du 
mal  d'Hélène  au  début  d'un  poème,  l'eut  à  peine  achevé, 
quMl  fut  frappé  de  cécité  par  les  Dioscures,  frères  de  cette 
princesse;  xnais  il  n'eut  pas  plutôt  compris  la  cause  de 
son  malheur,  qu*il  remplaça  les  vers  imurieux  par  drs 
paroles  élogieuses,  et  Hélène,  satisfaite,  lui  fit  rendre  la 
vue.  Ce  chant  fut  depuis  célèbre  sous  le  nom  de  PaUnu- 
dUe.  L'ode  d'Horace  à  Tyodaris  [Odes,  I,  16)  est  une 
charmante  palinodie.  Chanter  ta  palinodie  est  devenu 
une  expression  proverbiale  pour  exprimer  l'action  de  dire 
le  contraire  de  ce  qu'on  avait  dit  d^abord,  de  se  rétracter 
complètement.  P. 

PALISSADE  (du  latin  palum,  pieu),  en  termes  de 
Fortification ,  assemblage  de  pièces  de  bois  triangulaires, 
enfoncées  en  terre,  terminées  en  pointe  par  le  haut,  et 
saraissant  certains  ouvrages  de  défense.  La  fraise  et  l'c^- 
bâtis  (  V.  ces  mois)  sont  des  espèces  particulières  de  palis- 
sades, —  Dans  le  Jardinage,  on  nomme  palissades,  des 
arbres  touffus  et  feuillus  par  le  pied,  taillés  en  forme  de 
mur  le  long  des  allées  encontre  les  murailles  d'un  Jardin • 

PALLA,  —  PALLADIUM,  —  PALLIUM.  F.  notre 
Dict,  de  Biographie  et  d'Histoire. 
PAUSSY  (Faïences  de).  V.  au  Supplément. 

86 


PAM 


1362 


PAN 


PÂLMA  (La  Bourse  de),  dans  IMle  Majorque.  Cet  édi- 
iicet  qu'on  nomme  en  espsNgnol  la  Lonja,  serrait  autrefois 
aux  réunions  de  marchands;  on  y  donne  aujourd'hui  des 
fêtes.  A  part  ses  créneaux,  qui  sont  arabes,  il  offre  un  des 
modèles  les  plus  purs  du  style  ogiyal  appliqué  k  Tarchi- 
tecture  civile.  Bàtl  de  1420  à  1448,  il  a  la  forme  d'un 
^arré  long.  Sa  disposition  intérieure  consiste  en  une  salle 
unique  d  une  grande  étendue,  dont  la  Yoûte  surbaissée 
est  soutenue  par  6  légères  colonnes  cannelées  en  spirale* 

PALMA  (  Cathédrale  de),  belle  église  de  style  ogival , 
commencée  sous  Jaime  le  Coaquérant,  et  terminée  en 
1601.  Sa  façade  principale  est  k  VO.  ;  mais  rentrée  méri- 
dionale, bien  qu'inachevée,  est  beaucoup  plus  remar- 
quable. Le  clocher  placé  à  gauche  de  la  façade  est  appelé 
la  Torre  del  Angel,  L'intérieur  de  la  cathédrale  est  divisé 
en  3  nefs,  dont  les  voûtes  sont  soutenues  par  deux  rangs 
de  7  colonnes  extrêmement  légères.  Demère  le  maltre- 
autel,  la  Chapelle  roycUe,  longue  de  24  met.,  fut  destinée 
a  la  sépulture  des  rois  de  Majorque  :  on  y  remarque  sur- 
tout le  sarcophage  de  Jaime  II.  Du  maltre-autel  au  grand 
portail  il  y  a  une  distance  de  75  met.  ;  la  largeur  de 
l'église,  y  compris  les  chapelles,  est  de  40  met. 

PALME ,  branche  du  palmier.  Chez  les  Égyptiens,  elle 
désignait  la  fécondité,  parce  que  le  palmier  vit  longtemps 
et  fructifie  jusqu'à  la  mort.  Symbole  de  victoire,  elle 
orne  ordinairement  la  main  des  triomphateurs  et  des 
martyrs.  Dans  les  pays  où  Ton  n'a  pas  de  buis,  ce  sont 
des  palmes  qu'on  lait  bénir  au  dimanche  des  Rameaux, 
qui  prend  de  là  le  nom  de  Dimanche  des  Palmes,  La 
sculpture  s'est  emparée  de  la  palme  comme  ornement;  on 
fait  aussi  des  palmes  en  vignettes,  en  broderies,  et  l'on 
en  trouve  sur  des  mécfaiilles. 

PALMIER  (Colonne  du).  V,  Colonnes  monomentalbs, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Bistoire. 

PALMYRE  (Ruines  de  ].  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire» 

PALMYRIEN ,  un  des  dialectes  du  syriaque,  parlé  au- 
trefois à  Palmyre. 

PALONNIER,  pièce  du  train  d'un  carrosse  qui  est 
Jointe  au  train  de  devant  ou  à  la  volée,  et  sur  laquelle 
les  traits  des  chevaux  sont  attachés.  Il  est  fait  ordinaire- 
ment en  bois  de  frêne;  depuis  quelques  années,  on  en 
fait  aussi  en  fer  forgé. 

PALUDAMElNTUM.  I  V.  ces  mots  dans  notre  Diction- 

PAMPAS.  i     naire  de  Biogr,  et  d'Histoire, 

PAMPELUNB  (Cathédrale  de).  Cette  église,  dédiée  à  la 
S^*  Vierge  sous  le  nom  de  Notre-Dame  du  Sanctuaire, 
fut  bâtie  au  xv*  siècle,  sur  les  ruines  d'un  édifice  du  xu*  ^ 

2ui  s'était  écroulé.  La  façade  actuelle  ne  date  que  de  la 
n  du  xvui*,  et  son  style  grec  contraste  péniblement  avec 
le  style  ogival  qui  règne  partout  ailleurs.  Un  portique  co- 
rinthien, surmonté  d'un  fronton,  occupe  le  centre  de 
cette  façade  ;  le  tympan  a  pour  ornement  un  écu  d'armes, 
et  aux  extrémités  se  dressent  quatre  statues  de  saints. 
Deux  tours,  de  50  met.  d'élévation,  flanquent  le  portique: 
d'abord  canrées,  elles  deviennent  octogones  au  3*  étage  ; 
elles  se  terminent  par  8  colonnes  corinthiennes  qui  sou- 
tiennent une  coupole,  et  que  surmonte  une  corniche 
supportant  8  urnes.  La  cathédrale  de  Pampelune  est  en 
forme  de  croix  latine  et  à  5  nefs.  Le  chœur  est  fermé  par 
ane  grille,  chef-d'œuvre  de  serrurerie  exécuté  en  1507, 
par  Guill.  Crœnat,  et,  à  l'entrée,  on  voit  le  tombeau  de 
Charles  III  de  Navarre  et  de  sa  femme  Léonore  de  Cas- 
tille.  Cent  stalles,  sur  deux  rangs,  ont  été  sculptées  en 
chêne  d'Angleterre,  par  Michel  Anchetea,  en  1530.  Le 
maître-autel,  eu  bols  doré,  est  de  style  gréco-romain.  On 
conserve,  dans  la  sacristie,  une  motte  de  terre  sur  la- 
quelle la  tradition  dit  que  la  S**  Vierge  a  posé  le  pied, 
et,  dans  la  salle  capitulaire,  une  image  de  la  Vierge,  dont 
on  fait  remonter  l'existence  aux  temps  apostoliques.  Par 
le  croisillon  méridional,  une  très-belle  porte  donne  accès 
dans  un  cloître  magnifique.  Là  se  trouvent  :  une  Adora- 
tion des  Mages,  due  au  ciseau  de  Jacques  Pérut;  les  tom- 
beaux du  général  Mina  et  du  comte  de  Gages;  la  chapelle 
Barbazana  (du  nom  de  l'évêque  Barbazano) ,  contenant 
de  précieuses  reliques;  la  Salle  précieuse,  ainsi  nommée 
de  ce  que  les  chanoines,  en  s'y  rendant  pour  tenir  cha- 
pitre, chantaient  le  cantique  Pretiosa  in  coiispectu  ttu), 
et  qui  servait  autrefois  à  la  réunion  des  Certes  du  royaume 
de  Navarre  ;  la  chapelle  de  la  S**-Ooix,  où  l'on  voit  une 
grille  formée  de  fragments  des  chaînes  de  fer  par  les- 
quelles les  Arabes  s'étaient  liés  les  uns  aux  autres  à  la 
bataille  de  Las  Navas  de  Tolosa  (1212). 

PAMPUILE ,  Jeu  de  cartes  qui  a  beaucoup  de  rapport 
aTec  celui  de  la  Mouche  {V.  ce  mot)  ;  le  valet  de  trèflot 
feiius  le  nom  de  PamphUe,  est  le  principal  atout. 


PAMPHLET,  mot  d'origine  assez  moderne,  dérivé  sof^ 
du  grec  pamphlectos  (qui  brûle  tout),  soit  du  hollandais 
pamphier  (papier^,  et  qui  désigne  une  brochure  sati- 
rique plus  ou  moins  violente.  L'esprit  de  parti  qu'on  y 
trouve  presaue  toujours  a  fadt  attacher  au  mot  pamphlè- 
tmre  une  idée  défavorable.  Les  auerelles  religieuses  et 
politiques  du  xvi*  siècle  firent  écjore  un  grand  nombre 
de  pamphlets  :  il  n'en  est  pas  de  plus  célèbre  que  la  Sa- 
tire Ménippée  (F.  ce  mot).  Au  xvu*  siècle,  le  Jansénisme 
et  la  Fronde,  au  xvm*  les  différends  des  Parlements  et 
des  Encyclopédistes,  puis  les  luttes  de  la  Révolution  firan- 
çaise,  ne  furent  pas  des  sources  moins  fécondes,  et,  dans 
des  temps  plus  rapprochés  de  nous,  sous  le  gouverne- 
ment de  la  Restauration,  on  remarqua  encore  les  pam- 
phlets de  P.-L.  Courier  et  de  M.  de  Cormenin.  Un  des 
Journaux  démagogiques  de  1848  s'était  intitulé  le  Pam- 
phlet. V.  Libelle. 

PAN,  face  d'un  ouvrage  de  maçonnerie.  Ainsi  l'on  dit  : 
une  tour  à  6  ou  8  paps.  On  nomme  pan  coupé  la  surface 
qui  remplace  l'angle  à  la  rencontre  de  deux  pans  de  mur  : 
on  fait  des  salons  à  pans  coupés;  un  pan  coupé  à  l'encoi- 
gnure d'une  rue  facilite  le  tournant  des  voitures.  Lps 
côtés  de  la  couverture  d'un  comble  s'appellent  pans  d» 
comble. 

FAN  (Flûte  de).  F.  Flutb  de  Pan. 

PANABAT,  monnaie.  V,  Banabat. 

PANACHE,  touffe  de  plumes  flottantes  qu'on  portait 
autrefois  sur  les  casques  et  les  chapeaux.  Le  panache  a 
été  généralement  remplacé  dans  les  troupes  par  le  plu- 
met, l'aigrette,  ou  le  pompon.  On  le  voit  encore  sur  la 
coiffure  des  tambours-majors.  Sur  les  chapeaux  de  fem- 
mes, ce  sont  les  plumes  d'autruche  qui  servent  à  faire  les 
panaches.  Enfin  il  y  a  des  panaches  d'ornement  sur  les 
dais,  sur  certaines  voitures  de  gala,  sur  les  chars  mor- 
tuaires, et  sur  la  tète  des  chevaux  qui  les  traînent. 

panache,  partie  inférieure  d'une  lampe  d'église. 

PANACHE,  terme  d'Architecture.  V.  Pbxdentif. 

PAN  AGE  (Droit  de),  du  latin  panagium;  droit  de 
mener  des  porcs  dans  les  bois  et  forêts  de  l'État,  pour 
s'y  nourrir  de  glands  et  de  faînes.  Il  est  mis  en  adjudi- 
cation, pour  un  nombre  déterminé  d'animaux;  les  adju- 
dicataires ne  peuvent  abattre  ou  emporter  des  glands  et 
des  faînes,  sous  peine  d'amende  {Coaeforest.,  art.  54-57). 

PANAULON,  flûte  traversière  qui  descend  Jusqu'au  sol 
grave  du  violon.  Elle  a  été  inventée  à  Vienne,  par  Trex- 
1er,  vers  1820.  Une  partie  du  tube  est  recourbée,  et  elle 
a  17  clefs,  ce  qui  en  rend  le  maniement  difficile;  les  sons 
les  plus  bas,  sourds  et  même  rauques,  ont  peu  de  rap- 
port avec  les  sons  plus  élevés. 

PANCIÈRE,  nom  donné,  dans  le  moyen  ftge,  au  pcc^ 
tond  ou  partie  antérieure  de  la  cuirasse. 

PANCRACE.    (  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

PANDECTES.  (      de  Biographie  et  d  Histoire. 

PANDÉMONIUM  (du grec  pan,  tout, et  daimân^ démon)» 
mot  créé  par  Milton  dans  son  Paradis  perdu  pour  dési- 
gner le  palais  où  Satan  appelle  en  conseil  toutes  les  puis- 
sances infernales.  On  l'emploie  pour  désigner  un  lieu  où 
régnent  les  mauvaises  passions  et  le  désordre. 

PANDORE  ou  PANDCRE  (du  latin  pandura)^  instru- 
ment de  musique  à  cordes,  de  la  famille  du  luth,  mais 
dont  les  cordes  étaient  de  laiton,  les  touches  en  cuivre, 
le  chevalet  oblique,  et  le  dos  plat. 

PANDORION,  ancien  instrument  de  musique  à  rent» 
dont  la  nature  n'est  pas  bien  connue.  Les  uns  croient  que 
c'était  une  trompette,  les  autres  une  flûte. 

PANDOURS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

PANDROSION.  V.  Acropole. 

PANDURE.  V.  Pandore. 

PANÉGYRIQUE,  mot  qui  signifia,  chez  les  Grecs,  une 
assemblée  du  peuple  entier,  et  aussi  tout  discours  pro- 
noncé devant  elle  dans  le  but  d'exalter  la  gloire  nationale 
ou  de  faire  ressortir  les  avantages  de  quelque  entreprise. 
Ainsi,  dans  son  Panégyrique  d'Athènes,  prononcé  vers 
l'an  386  avant  notre  ère,  Isocrate  s'est  proposé  de  per- 
suader aux  différents  peuples  de  la  Grèce  de  se  réconcilier 
pour  tourner  contre  les  Perses,  leur  ennemi  commun, 
leurs  forces  réunies  :  seulement,  comme  Lacédémone 
prétendait  conserver  le  droit  exclusif  de  commander  les 
Grecs,  il  entreprend  de  prouver  qu'Athènes,  par  toute 
son  histoire,  est  mieux  fbndée  à  réclamer  l'hégémonie. 
Le  sujet  avait  de  la  'grandeur;  malheureusement  Isocrste 
se  préoccupa  beaucoup  plus  du  style  que  des  pensées,  et 
passa  dix  ou  quinze  années  à  ajuster  ses  périodes;  c^était 
neaucoup  plus  de  temps  qu*il  n'en  eût  fallu  à  la  Porse 
n^tir  asservir  les  Crocs,  si  elle-même  n'eût  pas  été  (4us> 


PAN 


1363 


PAN 


malade  encore  que  ses  adversaires. — En  Grèce,  on  louait 
la  Uépublique  :  à  Rome,  le  Panégyrique,  réservé  d*abord 
pour  les  morts  illustres,  devint  bientôt  Télosedu  prince 
vivant.  Les  premiers  Césars  se  virent  et  s^entendirent 
presque  tous  décerner  l'apothéose,  soit  dans  des  Panégy- 
riques proprement  dits,  soit  par  incident,  an  milieu 
d'ouvrages  où  leur  personnage  et  leur  nom  n'avaient 
que  faire;  louanges  odieuses  et  révoltantes,  quand  elles 
s'adressent  à  un  Tibère,  à  un  Néron,  à  un  Domitien.  Le 
Panégyrique  de  Trajan  Tut  du  moins  composé  par  on 
écrivain  honnête  homme  pour  an  prince  honnête  homme, 
r  MoD  premier  dessein,  dit  Pline  le  Jeune  {lett.;  lU,.  |8)» 
a  été  de  faire  aimer  à  l'empereur  ses  propres  vertus  par 
tes  cbarmes  d'une  louange  naïve.  J'ai  ^oulu  en  môme 
temps  tracer  à  ses  successeurs,  par  son  exemple  mieux 
que  par  aucun  précepte,  la  route  qu'ils  devaient  suivre 
pour  arriver  à  la  même  gloire.  •  II  était  sincère  quand  il 
tenait  ce  langage,  et  son  héros  n'en  était  pas  indigne.  Ce 
n'est  pas  que  la  déclamation,  les  subtilités  et  le  ridicule 
ne  tiennent  leur  place  dans  cette  œurre  d'un  élégant, 
rhéteur,  souvent  plus  occupé  des  mots  que  des  choses  ; 

3uand  on  lit  les  puérilités  incroyables  qu'un  3*  consulat 
'abord  refusé,  puis  accepté  par  Trajan,  inspire  à  l'ora- 
teur, on  comprend  que  Corneille  ait  dit  un  Jour  qu'il 
n'avait  Jamais  pu  lire  plus  de  guatre  pages  de  suite  d'un 
Éloge,  pas  même  du  Panégyrique  du  Trajan;  que  Vol- 
taire, dans  une  Lettre  sur  les  Panégyriques  (1767),  ait 
plaisanté  Pline  d'avoir  eu  la  patience  de  louer  Trajan 
pendant  trois  heures,  et  Trajan  d'avoir  eu  celle  de  l'écou- 
ter. Mais  le  caractère  magnanime  et  modéré  et  les  actes 
de  lïajan,  qui  fut,  après  tout,  le  plus  grand  des  empe- 
reurs romains,  méritaient  et  soutenaient  à  la  fois  les 
louanges  que  lui  prodiguiût  son  panégvriste.  —  Les  imi- 
tateurs ne  manquèrent  pas  à  Pline.  De  quatre  discours 
que  Dion  Chrysostome  composa  sur  les  devoirs  des  rois, 
l'un  peut  passer  pour  un  vâritable  Panégyrique  de  Tra- 
jan. Puis  un  Grec  de  Mœsie,  Aristide,  loua  Marc-Aurèle, 
qui  eut  (teut^être  à  subir  aussi  le  même  honneur  de  la 
part  de  son  précepteur  Fronton.  Sous  Dioclétien,  ce 
furent  des  rhéteurs  gaulois  qui  eurent  le  triste  privilège 
de  se  distinguer  dans  ce  genre  oratoire  :  parmi  eux  bril- 
lèrent Eumône  d'Autun,  qui  composa  le  Panégyrique  de 
Constance  Chlore,  Nazaire  de  Bordeaux,  un  premier  Ma- 
mertin,  qui  eut  l'effronterie  de  louer  le  vieux  Maximien. 
Constantin  le  Grand  fut  accablé  de  Panégyriques,  dont  le 
principal  est  celui  d'Eusèbe,  évêque  de  Césarée.  Julien 
i'Apo^at,  qui  se  piquait  d'éloquence ,  loua  l'impératrice 
fiuiébie,  sa  bienfaitrice,  et  Constance,  son  persécuteur, 
qu'il  compare  à  Achille  pour  la  vaillance,  à  Ulysse  pour 
la  sagesse,  à  Nestor  pour  le  talent  oratoire.  A  son  tour  il 
fut  loué  par  Libanius  d'Antioche,  par  un  second  Ma- 
mertin,  enfin  par  Thémiste  de  Constantinople  :  oelui-d, 
parmi  ses  émules,  mérite  une  place  à  part  ;  Thomaa,  dans 
aon  Essai  sur  les  Éloges,  lui  rend  la  Justice  de  n'avoir 
adressé  la  parole  aux  princes  que  pour  leur  rappeler  de 
nobles  yérités.  Il  a  consacré  vingt  Panégyriques  à  la 
louange  de  Constance,  de  Julien,  de  Valens,  de  Valenti- 
nien,  di  Gratien  et  de  Théodose.  Loués  en  gprec  par  Thé- 
miste, Gratien  et  Théodose  le  furent  encore  en  latin,  le 
premier  par  Ausone  de  Bordeaux,  le  second  par  Pacatus 
DrepaniuB,  autre  rhéteur  bordelais,  par  S^  I^ûlin,  évêque 
de  Noie,  et  par  Svmmaque,  l'illustre  préfet  de  Rome. 
L'invasion  des  Barbares  ne  put  fermer  la  bouche  aux 
panégyristes.  Claudien,  le  spirituel  et  raffiné  poète 
d'Alexandrie,  et  Sidoine  Apollinaire,  de  Lyon,  compo- 
sèrent dea  Éloges  en  vers,  parmi  lesçiuels  on  cite  de  pré- 
férence celui  de  Stilicon,  par  Qaudien.  Enfin  Ennodius, 
évêque  de  PaWe,  mais  originaire  des  Gaules,  prononça, 
en  510,  le  Pan^rique  de  Théodoric,  roi  des  Ostrogoths, 
comme  si  les  dermers  mots  du  latin,  avant  de  tomber 
dans  la  barbarie  du  moyen  Age,  devaient  être  une  flatterie 
en  l'honneur  des  destructeurs  de  l'Empire  romain,  de  ses 
institutions  et  de  sa  langue. 

On  voit  le  Panégyrique  renaître  au  xv*  siècle  avec  les 
lettres  latinea  et  grecques,  et  fleurir,  presque  sans  inter- 
ruption. Jusqu'à  notre  temps.  François  I*',  Henri  II, 
Charles  IX,  Henri  III,  furent  loués  de  leur  vivant,  et, 
suivant  Thomas,  on  compterait  plus  de  500  Panégyriques 
en  l'honneur  d'Henri  IV,  en  vers  comme  en  prose,  pen- 
dant sa  vie  et  après  sa  mort.  Ils  ne  manquèrent  pas  non 
plus  à  Louis  XIU,  à  Richelieu,  à  Mazarin,  et  on  les  pro- 
digua à  Louis  XIY  durant  tout  son  règne  :  tandis  que  les 
crands  écrivains  saisissaient  ou  faisaient  naître  l'occasion 
de  Texalter  dans  leurs  œuvres,  le  clergé  célébra  en  chaire, 
dans  des  Panégyriques  proprement  dits,  la  gloire  ot  les 
vertus  du  grand  roi.  Pellisson  lai-mème,4'anden  ami  de 


fouquet,  mêla  sa  voix  au  concert  de  louanges  dont  on 
saluait  de  toutes  parts  la  grandeur  de  Louis,  et  écrivit 
son  Panémicrae.  Voltaire  enfin,  tandis  qu'il  écrivait 
l'Oraison  TunèDre  des  officiers  français  morts  dans  la 

Suerre  de  la  succession  d'Autriche,  y  joignit,  à  propos 
es  mêmes  événements,  le  Panégyrique  de  Louis  XV. 

Il  appartenait  à  la  religion  chrétienne  de  transformer 
et  de  sanctifier,  en  quelque  sorte,  le  Panégyrique  comme 
rOraîson  funèbre,  par  les  hauts  enseignements  que  l'ora- 
teur en  fait  sortir.  De  bonne  heure,  les  Pères  de  l'Église 
mêlèrent  un  genre  à  l'autre.  C'est  ainsi  que  S^  Jean 
Chrysostome  insén  dans  la  plupart  de  ses  œuvres  le 
Panégyrimie  de  S^  Pierre  et  de  S^  Paul.  On  loua  les 
Saints  le  jour  anniversaire  de  leur  fête;  mais  ce  fut  moins 
pour  les  louer  eux-mêmes  que  pour  inviter  to^é  les  chré- 
tiens à  imiter  leurs  vertus,  et  pour  célébrer  les  heureux 
effets  de  la  religion  sur  les  âmes.  Les  grands  prédica- 
teurs du  xvu*  et  du  xviii*  siècle  se  distinguèrent  dans  le 
Panégyrique  presque  autant  que  dans  l'Oraison  funèbre, 
et  y  déployèrent  les  qualités  respectives  de  leur  génie. 
On  compte  16  Panégyriques  deBourdaloue;  Bossuet  com- 
posa ceux  de  S^  François  de  Sales,  de  S^  François  de 
Paule,  de  S^  iternard,  de  S^  Paul,  de  S^*  Thérèse,  etc.  ; 
Fénelon,  ceux  de  S*  Charles  Borromée,  de  S^*  Catherine 
de  Bologne,  et,  sous  le  nom  de  Sermons,  ceux  de  S^* 
Thérèse  et  de  S*  Bernard;  Fléchier  et  Massillon,  ceux  de 
S<  Bernard  et  de  S^  Louis;  l'abbé  Maury,  ceux  de  S<  Au- 
gustin, de  S^  Vincent  de  Paul,  de  Fénelon  et  de  S^  Louis, 
que  louèrent  aussi  l'abbé  Couturier,  MC  de  Beauvais, 
Cambacérès,  l'abbé  Poulie,  etc.  A.  H. 

PANETIER  (du  latin  panis,  pain),  mot  nui  fut  autrefois 
synonyme  de  boulanger.  Il  n'est  plus  appliqué  au*à  cekd 
qui,  dans  les  communautés,  les  hospices,  les  collées,  etc., 
est  chargé  de  la  garde  et  de  la  distribution  du  pain. 

PANETIER  vGrand-).  F.  uotre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d^  Histoire, 

PANGUAYS,  grandes  embarcations  des  naturels  des 
lies  Comores.  Eues  sont  relevées  des  deux  cêtés  avec  des 
roseaux  et  des  branches  d'arbres  fortement  liés  ensemble 
et  enduits  de  bitume  pour  empêcher  l'eau  de  pénétrer. 
Le  màt  est  muni  d'une  voile  ou  de  deux,  en  feuilles  de 
cocotier. 

PANHARMONICON  (du  grec  pan,  tout,  et  harmonicos, 
harmonique),  c-i^.  qui  produit  l*harmonie  universelle; 
espèce  d'orgue  à  cylindre  qui  imite  divers  instruments, 
la  flûte,  la  clarinette,  la  trompette,  le  cor,  le  basson,  le 
serpent,  et  même  la  voix  humaine.  Il  fut  inventé  par 
Maelzel. 

PANIER  (Anse  de).  V.  Arc. 

PANIERS,  Jupons  aamis  d'osier,  de  bal^e  ou  de  fer, 
que  les  femmes  portaient  an  xtiu*  siècle  pour  relever  et 
étendre  démesurément  leurs  robes.  On  les  nommait  aussi 
vertugadins  fde  l'espagnol  verHiMdo^  gardien  de  vertu). 
Il  y  en  eut  ne  toutes  sortes  de  formes,  qu'on  appela  la 
gouraandinê,  le  boute-en-train,  la  culbuté,  etc.  Rien 
n'était  plus  incommode  pour  tout  le  monde,  particulière- 
ment à  table,  en  voiture,  au  théâtre,  dans  la  fouleb 
M^*  Qairon  fit  tomber  cette  mode  en  osant  la  première 
paraître  sur  la  scène  sans  paniers.  On  vit  plus  tard  re- 
paraître les  paniers  sous  le  nom  de  bêtises,  mais  pour 
peu  de  temps.  De  nos  Jours,  en  1856,  on  a  imagine  les 
crinolines,  ridicule  du  même  genre. 

PANIONIUM.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

PANMÉLODICON,  instrument  inventé  à  Vienne,  en 
1810,  par  Leppich.  Il  consiste  en  un  cylindre  conique  mû 
par  une  roue,  oui  met  en  vibration  de  petits  morceaux 
de  métal  courbés  à  angle  droit,  lesquels  sont  touchée  lé- 
gèrement au  moyen  d'un  clavier. 

PANNE,  terme  de  Charpenterie.  V.  Comblb. 

PANNE,  en  termes  de  Marine,  temps  d'arrêt  produit  sur 
un  navire  en  marche  par  une  disposition  particulière 
donnée  à  ses  yoiles,  les  unes  tendant  h  le  faire  avancer, 
les  autres  à  le  faire  reculer.  On  met  en  panne,  soit  pour 
attendre  un  canot  ou  un  bâtiment,  soit  pour  sauver  un 
homme  tombé  à  la  mer,  soit  pour  sonder,  soit  pour  com- 
battre. 

PANNE,  nom  donné  anciennement,  dans  les  églises,  à 
une  poutre  qui  traversait,  d'une  colonne  à  l'autre,  l'en- 
trée du  sanctuaire,  et  où  l'on  plantait  des  cierges  dans  les 
fêtes  solennelles. 

PANNEAU,  partie  d'un  ouvrage  d'arohitecture,  de  me- 
nuiserie, d'orievrerie,  etc.,  gui  offire  un  champ,  c-à-d. 
une  surface  enfermée  dans  une  bordure  ou  ornée  de 
moulures.  —  On  donne  le  même  nom  à  chacune  des  facei 
d'une  pierre  taillée,  ainsi  qu'à  de  grands  polygones  irré- 


PAN 


1364 


PAN 


gulicnde  pierre  meulière  destinés  à  composer  des  meules 
de  moulins  à  blé. 

PANNBAo,  piège  ou  filet  à  prendre  les  lièvres,  les  lapins 
et  autres  animaux  de  petite  taille. 

Panneton,  partie  saillante  sur  le  corps  d*une  espa« 
gnolette,  et  qui  sert  à  fermer  ou  à  ounîr  les  volets  d'une 
fenêtre;  —  partie  d'une  cler  qui  entre  dans  la  serrure. 

PÂNNIGULUS,  personnage  des  Atellanes  (K.  e$  mo{)^ 
habillé  de  pièces  et  de  morceaux  comme  notre  Arlequin. 

PANONCEAU  (du  latin  panntu,  drap,  étoffé),  enseigne 
des  seigneurs  qui  n'avaient  pas  droit  de  *  porter  pennon 
ou  bannière;  —  girouette  armoriée  dont  les  seigneurs 
ornaient  le  faite  de  leurs  tours;  —  écusson  d'armoiries 
qu*on  mettait  sur  une  affiche  pour  lui  donner  plus  d'au- 
torité, ou  sur  un  poteau  comme  marque  de  Juridiction. 
On  nomme  aujourd'hui  panonceaux  les  écussons  dorés 
aux  armes  de  France  placés  comme  insignes  à  la  porte 
des  notaires,  et  les  plaques  dorées  mises  aussi  &  la  porte 
ou  aux  fenêtres  des  huissiers,  etc. 

PANOPLIE  (du  grec  pan,  tout,  et  oplon,  arme),  nom 
donné  ]adîs  à  l'armure  complète  d'un  chevalier,  et  au- 
jourd'hui à  un  trophée  d'armes  qu'on  suspend  aux  murs 
d'un  arsenal  ou  d'un  musée.  —  L'empereur  Alexis  a  fait 
composer,  sous  le  nom  de  Panoplie  dogmatique,  une  ex- 
position et  une  réfutation  de  toutes  les  hérésies. 

PANORAMA  (du  grec  pan,  tout,  et  orama,  vue,  spec- 
tacle), vaste  tableau  circulaire,  développé  sur  la  pÎEiroi 
intérieure  d'une  rotonde  couverte  d*un  comble  en  cou- 
pole ou  en  cône;  il  imite  tout  à  fait  l'aspect  général 
d'une  ville  ou  d'un  site,  vu  à  tous  les  orients,  et  Jus- 
qu'aux profondeurs  des  lointains  où  l'œil  cesse  de  rien 
distinguer.  Les  Panoramas  sont  des  spectacles  de  Jour, 
éclairto  par  en  haut,  au  moyen  d*une  grande  zone  de 
vitres  dépolies,  ménagée  dans  la  partie  inférieure  du 
comble,  et  versant  sa  lumière  spécialement  sur  le  tableau. 
Le  spectateur  est  placé  au  centre  de  la  rotonde,  sur  une 
tribune  ou  galerie  circulaire,  qui  est  censée  une  tour, 
jne  colline  ou  une  éminence,  et  dont  la  hauteur  est  cal- 
culée de  manière  que  l'œil  du  spectateur  debout  se 
trouve  de  niveau  avec  l'horizon  du  tableau.  On  vaste  pa- 
rasol, suspendu  au  comble,  à  3  mètres  environ  au-dessus 
de  la  tribune,  la  couvre  entièrement  et  la  déborde  de 
son  demi- diamètre,  de  façon  à  ne  point  laisser  voir 
d'où  vient  la  lumière,  et  k  tenir  le  spectateur  un  peu 
dans  une  pénombre.  On  arrive  à  cette  tribune  par  des 
corridors  peu  éclairés,  afin  de  faire  trouver  plus  brillante 
la  lumière  répandue  sur  la  peinture.  Dans  le  même  but,  le 

Fiarasol  est  d'un  ton  gris  foncé,  qui  contraste  avec  les  tons 
umineux  du  ciel.  Le  parasol  cache  la  lisière  supérieure 
du  tableau,  et  le  diamètre  de  la  tribune  cache  la  lisière 
inférieure,  ce  qui  laisse  dans  l'imagination  du  spectateur 
l'idée  d'une  profondeur  immense.  Divers  avant-corps  en 
iclief  ou  demi-relief  relient,  par  l'eiTet  de  la  perspective, 
le  plateau  de  la  tribune  aux  premiers  plans  de  la  compo- 
sition. Les  Panoramas  sont  peints  à  l'huile,  sur  une  toile 
à  tableau,  préparée  à  trois  couches.  Un  fort  cercle  de 
bois  retient  cette  toile  par  en  haut;  elle  s'enroule  par  en 
bas  sur  une  immense  bague  de  fer,  d'où  pendent  des 
poids  qui  rendent  sa  tension  constante.  Un  panneau  de 
cette  volée  prenant  toujours  vers  son  milieu  une  cour- 
bure convexe  prononcée,  la  bague  a  un  peu  moins  de 
diamètre  que  le  cercle;  cela  ramène  un  peu  en  avant  la 
partie  inférieure  de  la  toile ,  et  diminue  l'effet  d'ombre 
qui  s'y  produit,  le  jour  tombant  d'en  haut. 

Le  Panorama  est  une  invention  étrangère  ;  mais  les 
principaux  perfectionnements  qui  l'ont  élevé  au  ran^  de 
prande  peinture  d'art  sont  d'origine  française.  Robert 
Parker,  peintre  de  portraits  à  Edimbourg,  inventa  la 
chose  et  le  nom,  et  s'en  assura  la  propriété  par  un  brevet 
pris  à  Londres  en  1 796.  Néanmoins  ce  ne  fut  que  3  ou 
4jans  après  qu'il  exposa  son  premier  panorama ,  gui  re- 
présentait la  Ville  de  Londres,  Depuis  il  donna  la  Vue  de 
ia  ville  et  du  port  de  Portsmouth,  celles  de  plusieurs 
autres  villes  d'Angleterre,  des  marines,  des  actions  na- 
vales, etc. — L'Américain  Fulton,  depuis  si  célèbre  comme 
-ngénieuT^mécanicien,  et  qui  était  peintre ,  importa  en 
France  le  panorama,  et  prit,  à  cette  occasion ,  un  brevet 
d'invention  et  de  perfectionnement,  daté  du  6  floréal  an  vu 
^26  avril  1799).  On  lui  construisit  une  rotonde  de  14  met. 
le  diamètre,  sur  le  boulevard  Montmartre,  à  côté  du 
passage  qui  garde  encore  le  nom  des  Panoramas,  parce 
que,  peu  après,  une  2*  rotonde  fut  élevée  en  parallèle, 
puis  une  3*.  Là,  Fulton  exposa  son  1**  panorama,  qui 
était  xmeVue  de  Paris,  prise  de  la  plate-forme  supérieure 
du  pavillon  central  desTu.leries.  Cette  exposition  obti.it 
un  très-grand  succès.  Fulton  dirigea  l'cxécutiou,  qui  fut 


l'œuvre  des  peintres  Fontaine,  Prévost,  et  Constant  Boui- 
geois.  Le  3*  Panorama  fut  la  Vue  d»  Toulon ,  prise  du 
haut  du  fort  Lamalgue,  en  1793,  au  moment  où  les  An- 
glais étaient  obligés  d'abandonner  cette  place,  en  incen- 
diant la  flotte  et  le  port.  Prévost  et  Bourgeois  peignirent 
ce  Panorama,  qui  fut  Jugé  supérieur  à  celui  de  Paria. 
Prévost  peignit  ensuite  les  Panoramas  du  Camp  â$  Bovh 
logne,  de  lilsiU,  de  la  bataUle  de  Wagram,  de  Home, 
d^ Amsterdam,  de  Naples;  ces  derniers  et  le  Camp  de 
Boulogne  demeurèrent  exposés  à  la  fois  jusqu*en  1814, 
dans  les  rotondes  du  bonlevaitl  Montmartre,  et  les  Pano- 
ramas de  Roms  et  de  Naples,  Jusqu^en  1831 ,  époque  où 
on  les  dtoiolit.  Vers  1810,  Prévost,  pour  augmenter  l'effet 
du  Panorama,  fit  bâtir  une  rotonde  de  31  mètres  de  dia- 
mètre et  16  d'élévation,  sur  le  boulevard  des  Capucines, 
{>rè8  la  rue  de  la  Paix,  et  y  exposa,  au  mois  de  mai  ISii, 
a  vilUf  le  port^  et  les  ckantters  d'Anvers  ;  ensuite  il  y 
montra,  en  1821,  Jérusalem;  en  1824,  Athènes,  etc.  Ces 
deux  derniers  surtout  obtinrent  un  immense  succès. 

L'année  même  où  disparaissaient  les  petits  Panoramas 
du  boulevard  Montmartre,  le  colonel  Langlois,  pehitrc 
de  batailles,  en  entreprit  un  plus  grand  même  que  le 
dernier  de  Prévost,  et  choisit  le  sujet  de  la  Bataûle  de 
Navarin,  Il  l'exécuta  dans  une  rotonde  de  38  mètres  de 
diamètre  et  15  de  hauteur,  b&tie  à  Paris,  rue  des  Bfaraisf 
S^-Martin.  L'exposition  eut  lieu  en  1831 ,  et  il  eut  l'idée 
tr^neuve,  trè»-heureuse  et  très-hardie,  de  placer  les 
spectateurs  dans  l'action  même  du  tableau  :  la  tribune 
fut  la  dunette  d*un  vaisseau  de  haut  bord,  et  l'on  pou- 
vait s'avancer  Jusqu'au  mât  d'artimon;  de  là,  divers  ob» 
jets  en  relief,  demi-relief,  ou  peints  en  trompe-l'œil, 
reliaient,  de  degré  en  degré,  l'extrémité  du  navire  au 
tableau  développé  tout  autour.  BL  Langlois  a  continué 
de  pratiouer  ce  système  dans  toutes  ses  autres  vues  pa- 
noramatiaues.  Il  exposa,  dans  la  même  rotonde,  les  Pa- 
noramas i* Alger,  en  1833,  et  de  la  Bataille  de  la  Mos- 
kowa,  en  1835;  puis,  dans  une  nouvelle  rotonde  élevée 
près  du  ci-devant  grand  carré  des  Champs-Elysées,  et  un 
peu  plus  grande  encore  que  la  précédente  (40  met.  sur  15), 
il  flt  voh:,  en  1839,  Y  Incendie  de  Moscou  pendant  l'occu- 
pation (hmçaise  en  1812,  tableau  d'un  effet  saisissant; 
en  1843;  la  Bataille  d*Eylau,  et,  en  1853,  la  BataiOe  dei 
Pyramides,  où  l'on  admirait  la  vérité  de  l'action  et  celli 
du  site.  Cette  rotonde  ayant  été  prise  pour  l'exposition 
universelle  de  l'industrie,  en  1855,  et  démolie  ensuiti*, 
M.  Langlois  en  a  fait  élever  une  3*  de  mêmes  dimensions 
en  18G0,  près  et  à  l'Ouest  du  Palais  de  l'Industrie,  am 
Champs-Elysées,  dans  lequel  il  a  peint,  avec  sa  vérité 
habituelle,  la  Bataille  et  la  Prise  de  Sébaslopol,  en  1855, 
par  une  armée  anglo-française. 

Les  premiers  Panaromas  étaient  exécutés  d'une  ma- 
nière un  peu  mécanique,  et  plusieurs  de  leurs  effets  les 
plus  surprenants  s'obtenaient,  en  parUe,  par  des  moyens 
étrangers  à  l'art  du  peintre.  On  peut  croire  avec  tooiit 
vraisemblance,  bien  qu'on  ne  puisse  pas  l'affirmer,  que 
les  procédés  employés  pour  le  primitif  Panorama  de 
Paris,  et  probfd>Iement  pour  celui  de  Londres,  fureut  les 
mêmes  que  Fulton  dut  indiquer  à  Prévost ,  et  qui  sont 
ceux-ci  :  sur  une  toile  de  canevas,  on  collait  du  papier 
qui,  après  un  léger  ponçage,  recevait  la  peinture.  Ia-s 
tons  du  tableau  se  faisaient  par  une  soixantaine  (te 
gammes  de  couleur,  appliquées  par  bandes  horizontales 
&  la  manière  des  impressions  du  papier  de  tenture,  pui> 
la  brosse  fondait  les  deux  nuances  posées  bord  à  bord.  Lrs 
effets  de  jour,  les  accidents  de  lumière,  les  veloutés  ou 
les  tons  chauds  d'atmosphère  s'obtenaient  en  couvrant  la 
zone  vitrée,  alors  en  verres  non  dépolis,  de  couches  plus 
ou  moins  transparentes  de  blanc,  sur  les  points  où  cela 
semblait  nécessaire.  Mais  afin  que  le  contraste  de  cette 
lumière  factice  ne  pût  être  remarqué  du  spectateur,  il 
n'arrivait  dans  le  Panorama  que  par  de  longs  couloirs 
entièrement  privés  de  jour,  où  la  lueur  crépusculaire  do 
quelques  petites  lampes  éclairait  un  peu  les  ténèbres. 
Aussi,  pour  voir  ces  Panoramas,  il  fallait  un  ciel  très- 
clair;  et  lorsque  le  temps  devenait  sonore  ou  qu'il  y  avait 
du  brouillard,  on  fermait  ou  on  n'ouvrait  pas  l'ex position. 
— Ensuite  les  Panoramas  Fuhon-Prévost  étaient  toujours 
des  vues  prises  à  vol  d'oiseau,  ce  qui  dispensait  des  pre- 
miers plans,  grande  difficulté  des  Panoramas  perfec- 
tionnés par  M.  Langlois,  qui  sont  éclairés  par  la  lumière 
naturelle  uniformément  tamisée  à  travers  une  vitredépo- 
lie.  —  Enfin,  la  convexité  de  la  toilOi  que  le  Panorama  ac- 
tuel dissimule  avec  les  seules  ressources  du  pinceau,  état 
un  avantage  dans  les  anciens  Panoramas,  parce  qu»'  U 
courbure  leur  donnait  des  fuyants  naturels,  et  des  tons 
dégradés  qui  aidaient  à  la  peVspeclive,  prise  de  si  haut. 


PAN 


13C5 


PAN 


Le  tableau  en  Panorama  est  la  plus  grande  peinture, 
et ,  par  sa  facilité  à  être  comprise,  la  plus  populaire  que 
Ton  ait  Jamais  imaginée.  Napoléon  1*'  étant  yenu  voir 
le  Panorama  de  Tilsitt,  rers  1810  ou  1811,  jugea  aussitôt 
que  de  pareils  tableaux  pourraient  servir  à  populariser 
sa  gloire  :  il  commanda  qu'un  projet  lui  fût  présenté 
pour  éle\'er,  dans  le  grand  carré  des  Cbamps-Elysées , 
sept  Panoramas,  dont  les  sujets  auraient  représenté  les 
grands  faits  de  son  règne.  Le  gouvernement  devait  se 
réserver  le  droit  d'accjuérir  chaque  tableau  au  prii  de 
45,000  fr.,  pour  en  faire  répéter  Texposition  dans  les 
principales  villes  de  TEmpire.  L'architecte  Célérier  dressa 
le  projet  demandé  par  l'empereur  ;  mids  vinrent  les  dés- 
astres de  1812  et  anné»  suivantes,  et  rien  ne  fut  exé- 
cuté. —  L'invention  des  Panoramas  surpasse  de  beau- 
coup tout  ce  que  les  Anciens  ont  rapporté  de  leur  grande 
peinture  murale.  Un  tableau  de  120  met.  de  développe- 
ment, sur  14  ou  15  de  hauteur,  comme  ceux  du  colonel 
Unglois,  exigerait  36  ans  de  la  vie  d'un  artiste,  s'il  vou- 
lait l'exécuter  seul  ;  lorsqu'il  a  fait  son  étude  et  ses  es- 
quisses, il  lui  faut  environ  14  mois,  avec  des  auxiliaires, 
pour  peindre  le  tableau  à  sa  grandeur  d'exécution.  Quant 
à  l'effet  général ,  dA  à  une  profonde  entente  de  la  per- 
spective linéaire  et  aérienne,  à  un  sentiment  parfait  de  la 
couleur  dans  ses  milliers  de  tons,  il  est  d'une  telle  puis- 
sance, que  plus  on  regarde  un  Panorama,  plus  1  illu- 
sion augmente,  plus  on  s'imagine  avoir  la  réalité  devant 
80i.  C.  I>— T. 

MxoRAïf  A ,  nom  donné  à  l'édifice  même  dans  lequel  on 
expose  un  tableau  en  panorama.  C'est  une  rotonde,  avec 
une  tribune  au  centre  pour  les  spectateurs,  ainsi  qu'il 
rient  d'être  dit  dans  l'article  précédent.  Les  plus  grandes 
et  les  plus  belles  rotondes  de  Panoramas  ont  été  faites  à 
Paris,  aux  Champs-Elysées,  par  UM.  Hittorff,  membre  de 
Ilnstitut,  et  Daviout,  architecte  de  la  ville  de  Paris. 
M.  Hittorff,  dans  le  Panorama  de  1828,  démoli  en  1855, 
et  qui  avait  40  met.  de  diamètre,  introduisit,  à  la  de- 
mande de  M.  Langlois,  pour  qui  il  construisait  ce  Pano- 
rama, une  grande  innovation  :  il  supprima  un  pilier  de 
rond,  que  l'on  mettait  toujours  au  centre  de  la  tribune 
pour  soutenir  la  charpente  du  comble,  et  supporta  cette 
cliarpente  sur  des  c&bies  de  fil  de  fer  retenus  à  12  contre- 
forts, sortant  d'une  galerie  extérieure,  large  de  5  met, 
qui  enveloppait  son  Panorama.  Ce  procédé  très-ingé- 
nieux, imité  des  ponts  de  chaînes,  fut  appliqué  avec  une 
idence  si  sûre,  et  une  expérience  si  habile,  qu'il  en  ré- 
sulta pour  l'ouvrage  une  solidité  à  toute  épreuve.  —  Le 
Panorama  actuel ,  œuvre  de  M.  Daviout ,  fut  construit  en 
1^.  Il  n'a  qu'une  rotonde,  sans  galerie  extérieure  ;  ses 
dimensions  sont  celles  du  Panorama  de  M.  Hittorff  :  il  est 
couvert  par  une  coupole  en  charpente,  posant  tout  d'une 
volée  siir  les  murs  extérieurs,  et  sans  point  d'appui  cen- 
tral Cette  charpente  a  été  exécutée  par  M.  Bellu.  C.  D— y. 

PANOROGRAPHE,  instrument  inventé  en  1824  par 
Puissant,  ingénieur-géographe,  pour  obtenir  immédiate- 
ment, sur  une  surface  plane,  le  développement  de  la  vue 
perspective  des  objets  qui  entourent  l'horizon  du  spec- 
tateur, et  qui  seraient  représentés  à  la  manière  des  pano- 
ramas. V.  le  BtUl9tw  dé  la  SociiU  de  Géographie,  t.  IV. 

PANSLAVISME,  mot  d'origine  récente  et  qui  s'est  in- 
troduit dans  le  langage  de  la  Politiçiue  pour  désigner 
l'asphntion  qu'on  remarque  dans  les  diverses  populations 
slaves  à  former  un  seul  corps  de  nation.  La  Russie  favo- 
rise, dit-on,  cette  tendance,  dans  l'espoir  de  réunir  un 
jour  sous  son  sceptre  tous  les  Slaves. 

PANTALÉON,  instrument  auquel  Louis  XIV  a  donné 
le  nom  de  l'artiste  qui  le  fit  entendre  à  sa  cour  en  1705, 
Pantaléon  HebenstrelL  II  parait  qu'un  certain  Freislich 
en  jouait  encore  à  Dresde  vers  le  milieu  du  xvni*  siècle. 
C'était  un  instrument  à  cordes  du  genre  du  tympanon , 
ayant  l'étendue  du  clavecin,  et  monté  de  deux  rangs  de 
cordes,  les  unes  en  métal,  les  autres  en  boyau. 

PANTALON,  personnage  de  la  comédie  italienne ,  qui 
partageait  avec  le  Docteur  l'emploi  des  pères.  Tandis  que 
celui-ci  était  toujours  immolé  A  la  risée  publique.  Panta- 
lon, vieillard  amoureux  et  dupé,  avare,  père  fantasque, 
était  parfois  un  bon  père  de  famille,  un  honnête  com- 
merçant, un  homme  de  sens  et  de  raison.  Le  Docteur 
était  Bolonais ,  et  Pantalon  Vénitien ,  et  ils  parlaient  le 
dialecte  de  leur  pays.  Pantalon  portait  une  longue  culotte 
tenant  avec  les  oek,  un  habit  à  larges  boutons,  oui  avait 
été  primitivement  rouge,  mais  noir  en  signe  de  deuil 
depuis  la  perte  de  Négrepont,  et  une  longue  robe  de  des- 
•us  appelée  xùnare.  Quand  des  acteurs  italiens  vinrent 
jouer  la  comédie  à  Paris,  Pantalon  parla  français  comme 
les  autre»  personnages,  mais  conserva  son  costume  na- 


tional. Alborchetti,  Véronèse  et  Colalto  se  distinguèrent 
dans  ce  rôle.  B. 

PANTALON,  partie  de  l'habillement  masculin,  dérivée  du 
costume  de  l'acteur  Pantalon,  et  qui,  depuis  la  Révolu- 
tion, a  remplacé  la  culotte  courte. 

PANTALONNADE,  mot  appliqué  d'abord  aux  farces 
dans  lesouelles  figurait  l'acteur  Pantalon,  et  qui  a  dési- 
gné ensuite  toute  chose  burlesque. 

PANTCHA-TANTRA.  V.  Indienne  (Uttérature)  et  Hi« 

TÔPADEÇA. 

PANTÈNE,  sorte  de  filet  dont  on  se  sert  pour  pécher 
l'anguille. 

PANTENNE  (Être  en),  se  dit,  en  termes  de  Blarine, 
d'un  bftUment  où  toutes  les  parties'  du  gréement  sont 
en  désordre,  mal  orientées,  brisées  par  le  vent  ou  par  un 
combat.  Quand  un  capitaine  meurt,  on  met,  en  signe  de 
deuil,  les  vergues  de  son  navire  en  pantenne. 

PANTHÉES,  nom  donné  en  Archéologie  à  des  statues 
ou  des  figures  qui  portent  des  signes,  des  symboles  de 
plusieurs  divinités  x^unies. 

PANTHÉISME  (du  grec  pan,  tout,  et  théos,  dieu),  sys- 
tème métaphysioue,  qui,  au  point  de  vue  le  plus  général, 
peut  se  résumer  dans  les  termes  suivants  :  «  Dieu  est  tout,  u 
Précisons  le  sens  de  cette  formule,  en  remontant  aux  ori- 
gines du  Panthéisme.  L'idée  de  l'infini  est  si  naturelle  à 
l'esprit  humain,  que,  dès  la  plus  haute  antiquité,  elle  se 
fit  jour,  non-seulement  dans  les  religions  positives,  mais 
aussi  dans  les  systèmes  philosophiques  dès  qu'ils  appa- 
rurent. Cette  idée  une  fois  conçue,  de  quelque  nom  qu'on 
l'appelât,  l'Infini,  Dieu,  Être  ou  Substance,  une  question 
devait  se  présenter,  et  se  présenta  en  effet,  assez  claire- 
ment et  assez  impérieusement  pour  provoquer  les  efforts 
les  plus  marqués  de  l'esprit  philosophique  :  c'était  celle 
des  rapports  de  l'Infini  et  du  Fini.  Comment  le  Fini 
coexiste-t-il  avec  l'Infini?  Réponse  :  Le  Fini  dépendant  de 
l'Infini,  en  d'autres  termes,  les  phénomènes  dépendant 
de  l'Être ,  les  Substances  contingentes  de  la  Substance 
absolue;  le  Monde  et  la  Nature  dépendant  de  Dieu, 
comme  l'effet  dépend  de  sa  cause,  en  vertu  de  la  toute- 
pulssànee  qui  les  a  créés,  et  qui  les  conserve,  on  s'ex- 
plique parfaitement  que  le  Fini  coexiste  avec  l'Infini,  et 
en  reste  distinct  sans  le  limiter  en  quoi  que  ce  soit.  Mais 
cette  solution  restait  cachée  dans  les  livres  sacrés  du 
petit  peuple  auquel  il  avait  été  dit  :  «  Au  commence- 
ment. Dieu  créa  le  Ciel  et  la  Terre,  a  Nulle  part  ailleurs, 
ni  dans  les  systèmes  théologîques,  ni  dans  les  systèmes 
philosophiques,  l'esprit  de  l'antiquité  ne  s'éleva  jusqu'à 
l'idée  de  la  Création  proprement  dite.  De  là  tant  de  sys- 
tèmes où  les  rapports  du  Fini  et  de  l'Infini  sont  pré- 
sentés de  la  manière  la  plus  étrange;  ici  la  matière  coé- 
temelle  avec  Dieu;  ici  la  nature  divinisée;  là  enfin 
l'existence  du  Fini  ou  niée  absolument,  ou  absorbée  dans 
l'Infini.  C'est  en  cela  que  consiste  proprement  le  Pan- 
théisme. Nous  ne  croyons  pas  que  ce  nom  convienne  aux 
doctrines  qui ,  pour  céder  à  une  nécessité  de  la  raison , 
et  accorder  une  place  quelconque  à  l'idée  religieuse,  con- 
sentent, en  s'enfermant  dans  la  contemplation  de  la  na- 
ture, à  la  considérer  comme  divine,  et  ne  reconnaissent 
d'autre  Dieu  que  le  Grand  Tout;  au  contraire  le  véritable 
Panthéisme  part  exclusivement  de  l'idée  de  l'Infini ,  de 
l'Être  absolu,  de  Dieu,  et  rencontrant  à  peu  près  inévita- 
blement sur  son  chemin  l'idée  du  Fini,  des  phénomènes, 
du  monde,  il  absorbe  et  engloutit  pour  ainsi  dire  celle- 
ci  dans  celle-là,  soit  au'il  trute  le  Fini  de  simples  appa- 
rences sans  réalité  (Panthéisme  éléatique);  soit  qu'il 
fasse  du  monde  le  développement  fatal  du  principe  qui 
l'anime,  ràme,réther  primitif  (Panthéisme  stoïcien);  soit 
qu'il  le  considère  comme  le  résultat  d'une  émanation  ou 
d'une  suite  d'émanations  successives  (Panthéisme  alexan- 
drin), ou  comme  la  forme  nécessaire  sous  laquelle  se 
manifestent  les  modes  infinis  de  l'Étendue  et  de  la  Pen- 
sée, prises  elles-mêmes  pour  deux  des  attributs  infinis 
de  Dieu  :  la  nature  naturée,  identique  au  fond  à  la  nature 
naturante  (Spinozisme)  ;  soit  enfin  qu'en  vertu  d'un 
principe,  qui  demanderait  à  lui  seul  de  longues  explica- 
tions, il  pose  l'identité  absolue  de  l'Être  et  de  l'Idée 
comprenant  à  la  fois  Dieu,  la  nature  et  l'homme  (  sys- 
tème de  l'identité  absolue  de  Hegel).  Dans  une  étude  ap- 
profondie du  Panthéisme  et  de  son  histoire,  il  ne  serait 
pas  difficile  de  le  montrer  se  glissant  là  où  on  le  soup- 
çonnerait le  moins.  Cest  qu'en  effet  il  a  un  air  de  gran- 
deur et  de  simplicité,  bien  fait  pour  séduire  au  premier 
abord  les  âmes  élevées,  nous  dirions  presque  les  âmes 
religieuses.  Mais  examiné  de  plus  près,  il  ne  soutient  cet 
examen  ni  dans  ses  principes,  ni  dans  sa  méthode,  ni 
dans  ses  déductions,  ni  dans  ses  conséquences,  surtout 


PAP 


136C 


PAP 


d»ns  les  conséqueiicei  morales,  qui  sont  l*abdlcat1on  la 
pïu8  complète  de  la  personnalité  et  le  fatalisme  le  plus 
kbeola.  B  —  E. 

PANTHÉON.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  &t  d^  Histoire, 

PANTHÈRE.  Cet  animal  était  an  attribut  de  Bacchus, 
et  indiquait  Torigine  indienne  de  ce  Dieu.  On  en  fit  aussi 
un  symbole  de  I^n. 

PANTIÈRE  (du  grec  panihérion,  qui  prend  toutes  sortes 
de  bâtes),  filet  qu*on  tend  yenicalement  pour  prendre  les 
oiseaux  qui  volent  par  troupes;  —  sac  à  mailles  où  les 
cnasseors  mettent  leurs  provisions  de  bouche  et  leur 
cibler. 

PANTIN  {d^nfantin:  on  de  Titallen  fantocewo,  pou- 
Dée),  petite  fi^re  en  carton,  découpée  et  coloriée,  dont 
tin  fait  mouvoir  les  membres  à  Taide  d*un  fil.  Les  pantins 
eurent  une  grande  vogue  dans  la  haute  société  en  1725 
et  en  1746  ;  le  peintre  Boucheron  peignit  qui  se  vendirent 
fort  cher.  Chacun  avait  son  pantin  dans  sa  poche,  et  Ton 
s*en  amusait  dans  les  salons,  dans  les  spectacles,  dans 
les  promenades. 

PANTOGRAPHE  (du  grec  pan,  tout,  et  graphéin, 
écrire),  instrument  qui  sert  à  copier  mécaniquement  les 
dessins,  et  même  à  en  faire  des  réductions  ou  des  am- 
plifications. On  fixe  sur  une  table  le  modèle,  avec  la 
feuille  de  papier  qui  doit  recevoir  la  copie  ;  puis  on  place 
le  pantographe  dessus,  et  on  suit  avec  un  calquoir  ou 
pointe  mobile  les  traits  du  dessin  qu*on  veut  reproduire. 
Par  la  disposition  des  pièces  de  Tinstrument,  les  mouve- 
ments imprimés  au  calquoir  se  transmettent  à  un  crayon, 
soit  en  les  laissant  teis  qu'ils  sont,  soit  en  les  diminuant 
ou  en  les  accroissant  dans  un  rapport  donné.  Le  crayon 
laisse  sur  le  papier  des  traces  qui  forment  une  figure 
exactement  srâiblable  au  modèle.  Le  pantographe  était 
connu  dès  le  xvii*  siècle  ;  on  en  trouve  la  description  dans 
un  livre  intitulé  :  PantograpfUa^  seu  ars  delineandi  res 
quas  libet,  Rome,  1631.  En  1743,  l'Académie  des  Sciences 
de  Paris  approuva  un  nouveau  pantographe  présenté  par 
le  mécanicien  Canivet.  L'instrument  fut  encore  peri'ec^ 
tienne  par  Langlois,  puis  par  Lafond  en  1816.  Le  Dia- 
graphe  (K.  ce  mot)  de  Gavard  est  une  forme  du  panto- 
graphe. 

PANTOMÈTRE,  instrument  à  Talde  duquel  on  grave 
d*après  nat^ire  des  portraits  de  profil.  Il  fut  présenté  à 
TAcadémie  des  Sciences  de  Paris,  en  1752,  par  un  abbé 
Louvrier.  Le  Mémorial  de  l'Europe  parle  d*un  autre  pan- 
tomètre imaginé  en  1787  par  un  musicien  de  Versailles. 

PANTOMIME.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^Histoire, 

PANTOPHONE  (du  grec  pan,  tout,  et  phônè,  voix), 
instrument  inventé  en  Italie  par  Joseph  Masera,  et  à 
Taide  duquel  on  rend  exactement  toute  la  musique  qu'on 
peut  exécuter  sur  un  piano,  à  la  difTérence  des  instru- 
ments qui  ne  Jouent  qu'un  certain  nombre  d'airs  dépen- 
dant des  dimensions  de  leur  cylindre.  Le  même  artiste 
a  imaginé  le  Musicographef  qui  sert  à  écrire  la  musique 
tandis  qu'on  l'exécute,  et  qui  conserve  les  mesures,  la 
valeur  aes  notes,  les  accidents,  les  silences,  avec  tant  de 
précision  qu'en  appliquant  l'instrument  au  Pantophone, 
celui-ci  reproduit  parfaitement  le  morceau. 

PANTOUFLE  (de  l'italien  pantufola,  ou  de  l'allemand 
pantoffel)^  chaussure  de  chambre,  dont  la  forme  et  la 
matière  ont  varié  selon  les  temps  et  les  lieux.  On  en  fidt 
en  cuir,  en  bois,  en  liège,  en  feuilles  de  palmier  ou  de 
papyrus,  en  écorce  de  tilleul,  en  paille  d'Italie,  en  paille 
de  riz ,  en  cordes  de  chanvre,  en  tapisserie,  etc.  En  Tur- 
ciuie,  on  laisse  ses  pantoufles  à  la  porte  des  mosquén,  à 
rentrée  des  appartements  où  l'on  a  étendu  une  natte  ou 
un  tapis  ;  une  femme  mande  son  mari  en  lui  envoyant 
sa  pantoufle.  La  plus  grande  injure  qu'on  puisse  faire  à 
un  Musulman  est  de  lever  sur  lui  une  pantoufle. 

PAOLO ,  monnaie  d'argent  des  États  de  l'Église  et  de 
Toscane,  équivalant  à  10  baïoques  ou  à  un  dixième  de 
scudo.  Le  paolo  avarié  de  valeur,  entre  54  et 60  centimes 
de  notre  monnaie.  Son  nom  dérive  de  celui  de  plusieurs 
papes,  qui  s'appelèrent  Paul.  Il  y  a  des  pièces  de  2,  3,  6 
et  lOjpaoli. 

PAON ,  oiseau  consacré  par  les  Anciens  à  Junon.  En 
grande  estime  au  moyen  âge,  il  était  1^  nourriture  des 
preux,  et  l'on  faisait  sur  lui  des  vœux  et  des  serments 
tolennels.  *>  Sur  les  monuments  romains,  le  paon  est 
l'emblème  de  l'apotliéose  des  impératrices. 

PAPA.  ) 

pape!         ^    ^'  ^^  ™^^  ^^"^  notre  Dictionnaire  de 

PAPEGAI.    S       Biographie  et  d'Histoire, 

PAPËLONNE,  en  terme  de  Blason,  se  dit  de  l'écu  où 


Ton  a  représenté  des  écailles  ou  des  demi-cercles  oomrae 
plusieurs  rangées  de  tuiles  sur  un  toit, 

PAPETIERS,  corporation  dont  les  statuts  remontent 
au  mois  d'avril  1509,  et  furent  revisés  >en  1659  el  en 
1723.  Leur  patron  était  SUean  Porte-Latine. 

PAPETTO,  c.-à-d.  petit  pape,  monnaie  d'argent  des 
États  de  l'Église,  le  5«  de  l'écu  ou  20  baioques  (1  fr.  8  e.). 

PAPIER.  Les  Anciens,  qui  ont  écrit  sur  toutes  sortes 
de  substances  (pierre,  brique,  marbre,  métaux,  écorccs 
d'arbres,  bois,  feuilles,  intestins  et  peaux  d'animaux, 
étoffes,  etc.),  ne  connurent  que  le  papier  de  papyrus  ou 
papier  d'Egypte,  On  en  fabriqua  dès  la  plus  haute  anti- 
quité :  le  musée  de  Turin  en  possède  un  fragment  trouvé 
par  Champollion  et  qui  a  3600  ans  d'existence.  On  par- 
tageait la  tige  du  papyrus  {cyperus  esctUentus)  eh  rubans 
très-minces,  mais  aussi  larges  que  possible  {philura)  ;  on 
couvrait  une  table  humectée  d'eau  de  bandes  de  papyrus, 
disposées  longttudinalement,  et  mises  les  unes  à  côté  des 
autres  alternativement  par  les  bases  et  par  les  sommets; 
sur  ces  bandes  longitudinales  {philurœ  adlitœ  ),  dont  la 
réunion  s'appelait  scheda,  on  en  superposait  d'autres 
transversalement,  ce  qui  formait  une  seconde  scheda  ;  la 
réunion  de  ces  deux  schedœ  composait  une  feuille,  pla^ 
gula;  20  plagulm,  assemblées  et  roulées,  formaient  une 
main  de  papier,  sceeptis.  On  les  mettait  alors  en  presse, 
on  les  faisait  sécher  au  soleil,  et,  après  avoir  collé  ce  pa* 
pier,  on  l'amincissait  avec  le  maillet,  on  le  collait  de 
nouveau,  on  en  déridait  les  parties  crispées,  et  on  le  po- 
lissait avec  la  pierre  ponce.  Après  ces  diverses  opérations, 
le  papier  était  aussi  fin  que  la  batiste.  Les  Anciens  distin- 
guaient plusieurs  espèces  de  papier  :  1°  le  papier  Auguste 
ou  royal  {charta  Augusta  ou  regia)^  tellement  fin  qu'on 
ne  pouvait  écrire  que  d'un  côté  ;  2**  le  papier  Limen  ou 
de  Livie  {charta  Lwiana  ou  Liviœ\  ainsi  nommé  de  Li- 
vie,  femme  d'Auguste,  et  qui  avait,  comme  le  précédent, 
une  lareeur  de  treize  doigts  (0'",251)  ;  3**  le  papier  hiéra- 
tique {charta  hieratica)^  réservé  pour  la  composition  des 
livres  sacrés,  et  large  de  onze  doigts  (0",  212)  ;  l'adulation, 
nous  dit  Pline,  lui  a  donné  le  nom  d'Auguste,  et  sa  dé- 
nomination ne  s'applique  plhs  qu'au  papier  de  troisième 
2ualité  ;  4**  le  papier  Claudien  {charta  Claudiana)^  qui 
épassa  à  son  tour  le  papier  Auguste  ;  5<*  le  papier  Fannten 
(charta  Fanni\  large  de  dix  doigts  (0"\193),  et  ainsi 
nommé  d'un  Fannius  qui  en  fabriqua  ;  6*  le  papier  am- 
phithéàtrique  {charta  amphitheatrica)^  large  de  Aeuf  doigts 
(0'',174K  et  qu'on  fabriquait  à  Alexandrie  dans  le  quar- 
tier de  l'amphithéâtre  ;  1^  le  papier  de  SaXs  (charta  Sai- 
tica)  ;  S*'  le  papier  ténéotique  ou  de  Tanis  {charta  teneo- 
ticau  ainsi  nommé  d'un  quartier  d'Alexandrie  où  on  le 
fabriquait;  9^  le  papier  Cornélien  {charta  Comeliana); 
\0^  le  papier  emporétique  ou  marchand  (^charta  empore- 
tica)^  large  de  six  doigts  (0*,  116),  et  qui  était  le  papier 
du  commerce.  Il  résulte  d'un  travail  de  M.  Egger  Skir  le 
prix  du  papier  dans  l'antiquité,  qu'une  feuille  coûtait 
alors  aussi  cher  qu'un  beau  volume  de  nos  jours,  'c-àrd. 
de  4  fr.  50  à  5  fr.  11  en  existait  pourtant  de  grandes 
fi^riques.  Le  papier  de  papyrus  devint  rare  à  partir  du 
IV*  siècle,  ainsi  que  l'attestent  S^  Augustin  et  Grégoire  de 
Tours  ;  au  vu*,  il  n'était  pour  ainsi  dire  plus  en  usage,  et, 
après  le  x*,  on  n'en  trouve  plus  de  trace. 

11  parait  que,  dès  la  fin  du  i*'  siècle  de  notre  ère  ou  le 
commencement  du  ii*,  les  Chinois  connaissaient  l'art  de 
/éduire  des  écorces  d'arbres,  de  vieux  chiffons  de  soie,  de 
chanvre  ou  de  coton,  en  une  sorte  de  bouillie  ou  de  pàto 
liquide,  pour  en  former  des  feuilles  de  papier.  La  Biblio- 
thèque impériale  de  Paris  possède  un  manuscrit  eo 
5  feuillets,  provenant  de  l'anbaye  de  S*-Germain-des- 
Prés,  et  que  l'on  dit  être  en  papier  d'écorce;  mais  ces 
feuillets  pourraient  bien  être,  comme  plusieurs  vieux  di- 
plômes des  Archives  impériales,  formés  de  débris  de  pa- 
pyrus collés  ensemble.  Le  papier  de  coton,  connu  sous  les 
noms  de  charta  bombycina  ou  bambacina,  cuttunea,  do- 
mascena ,  fut  connu  des  Arabes  après  la  conquête  de  la 
Boukharie,  au  commencement  du  viii*  siècle,  et  l'usage 
en  devint  bientôt  général  parmi  eux  :  vers  la  fin  du  i% 
ils  l'importèrent  en  Espagne,  et  établirent  des  manufac- 
tures à  Septa  (Ceuta),  à  Xativa  (San-Felipe)  et  à  Tolède. 
Les  Grecs,  que  le  commerce  mettait  en  relation  avec  les 
Arabes,  puisèrent  chez  eux  la  connaissance  de  la  flibrica- 
tien  du  papier  ;  les  Vénitiens  l'apportèrent  à  leur  tour  en 
Italie.  Les  princes  normands  de  Naplcs  et  de  Sicile  firent 
un  fréquent  usage  du  papier  de  coton  pour  leurs  di- 
plômes; on  a  employé  la  même  substance  en  France  pour 
certains  manuscrits  du  xi*  siècle,  et  pour  des  registres  de 
minutes  notariées.  Vers  la  même  époque,  on  trouva  les 
moyens  de  fabriquer  du  papier  de  lin.  En  1189,  Raymond- 


PAP 


1367 


PAR 


Guillaume,  éwèqne  de  Lodève,  permit,  moyennant  un  cens 
annuel ,  de  construire  sur  l'Hérault  plusieurs  moulins  à 
papier.  Des  papeteries  de  chiffons  furent  établies  en  Alle- 
magne en  1312,  à  Padoue  en  1360,  à  Darsford  en  Angle- 
terre (Kent)  en  1388,  à  Ni:remberg  en  1300,  àBMe  en 
1470.  Le  document  le  plus  ancien  que  nous  possédions 
sur  le  nouveau  papier,  c'est  une  lettre  de  Joinville  à 
Louis  X  en  1315;  on  cite  ensuite  le  testament  d'Othon, 
comte  de  Boulogne,  en  1402.  las  papeteries  de  Troyes  et 
d'Essonne  étaient  déjà  célèbres  au  xiv<  siècle.  Charles  IX, 
par  lettres  patentes  du  14  août  1565,  exempta  le  papier 
de  tous  droits  et  impôts,  libéralité  que  Henri  IV  devait 
renouveler  le  15  nov.  1595.  L'exemption  ne  fut  sans  doute 

rs  maintenue,  puisqu'un  arrêt  du  Conseil ,  en  date  du 
mars  1630,  la  renouvela.  On  revint  encore  sur  cette 
décision,  car  la  Correspondance  administrative  sous  le 
règne  de  Louis  XIV  contient  une  requête  dés  proprié- 
taires de  moulins  à  papier  de  la  Normandie,  qui  deman- 
dent, en  1670,  une  diminution  des  droits  dont  leur  in- 
dustrie est  frappée.  Sur  la  demande  de  Colbert,  un  arrêt 
du  Conseil,  en  date  du  3  août  1671,  modéra  les  droits  de 
marque  et  de  contrôle  des  papiers  qui  seraient  façonnés 
dans  l'Angoumois.  En  1654,  on  avait,  à  l'imitation  de  TEs- 
pagne  et  de  la  Hollande,  établi  un  droit  de  marque  sur  le 
papier  et  le  parchemin  employés  pour  les  actes  de  Jus- 
tice et  de  commerce  :  en  1074,  des  nécessités  de  finances 
poussèrent  le  gouvernement  à  imposer  tout  le  papier  et 
tout  le  parchemin  sortant  des  fabriques;  mais,  sur  les 
réclamations  de  la  librairie  et  de  l'imprimerie,  on  révo- 
qua l'édit  quelques  mois  après.  En  1725,  de  nouveaux 
droits  furent  établis  sur  le  papier.  Vers  le  milieu  du 
xviii*  siècle,  on  ne  se  contenta  plus  du  papier  de  linge  et 
de  coton,  on  fit  des  essais  pour  employer  le  chanvre, 
l'ortie,  les  feuilles  d'arbres  et  la  paille.  Les  premiers  par 
pi  ers  vélins  ont  été  fabriqués  en  Angleterre  par  Basker- 
ville  vers  1750,  et  en  France  par  Montgolfier,  à  Annonay, 
en  1785.  En  1799,  un  employé  de  la  papeterie  d'Essonne, 
Louis  Robert,  imagina  la  machine  à  papier  continu,  qui 
ne  fut  cependant  rendue  tout  à  fait  pratique  que  depuis 
1816  :  trois  hommes,  travaillant  à  la  main,  pouvaient  à 
peine  fabriquer  par  Jour  4,000  petites  feuilles  de  paçier; 
maintenant  ils  peuvent  en  produire  60,000.  V.  Guilan- 
dini,  Papyrus,  hoc  est  Commentarius  in  tria  C.  Plinii 
majoris  depapyro  capita,  Venise,  1572,  in-4°;  Undner, 
DissertcUio  de  charta,  Leipzig,  1647;  Kirchmayer,  Dis- 
strtatio  philologica  ae  papyro  veterum^  Wittemberg, 
1666,  in-4<';  Montfaucon,  Dissertation  sur  la  plante  ap- 
pelée papyrus,  sur  le  papier  d' Egypte,  sur  le  papier  de 
coton,  et  sur  celui  dont  on  se  sert  aujourd'hui,  dans  le 
t.  VI  des  Mém.  de  lAcad.  des  Inscript,  et  Belles-Lettres; 
Ciylns,  Mémoire  sur  le  papyrus  et  sur  sa  fabrication, 
dans  le  tome  XXIII  de  la  même  collection.  B. 

PAPIER-MONNATE,  papier  créé  par  un  gouvernement 
pour  faire  office  de  monnaie.  Il  ne  faut  pas  le  confondre 
avec  la  monnaie  de  papier  :  celle-ci  naît  des  contrats, 
elle  est  librement  acceptée  ou  refusée  dans  les  paye- 
ments, et  échangeable  contre  espèces  à  la  demande  du 
porteur  ;  le  papier-monnaie  émane  du  pouvoir  poIitic[ue, 
a  cours  forcé,  et  ne  représente  pas  des  valeurs  équiva- 
lentes qu'on  puisse  réaliser  à  volonté.  Un  papier-mon- 
naie prendrait  peut-être,  dans  l'intérieur  d'un  État,  la 
place  de  la  monnaie  métallique,  ai  le  gouvernement  in- 
spirait assez  de  confiance,  et  si  la  contrefaçon  des  billets 
n'était  pas  trop  facile  :  mais,  au  dehors,  il  perd  son  cours 
forcé.  Les  gouvernements ,  qui  emploient  ce  papier 
comme  expédient  dans  les  circonstances  critiques,  sont 
enclins  à  en  exagérer  l'émission  :  dans  ce  cas,  l'inquié- 
tude se  produit ,  le  papier  se  déprécie  d'une  manière 
eftrayante.  —-  Connu  en  Chine  dès  la  fin  du  x*  siècle , 
le  papier-monnaie  n'a  guère  été  usité  en  Europe  que 
depuis  Louis  XIV.  On  y  a  eu  recours  en  France  au  temps 
de  Law  et  pendant  la  Révolution  {V,  Assignats  ,  Man- 
dats TERRiToaiAux).  L'Angleterre  en  1797,  et,  dans  des 
temps  plus  rapprochés  de  nous,  la  Russie  et  l'Autriche, 
ont  suivi  cet  exemple.  Les  effets  toujours  désastreux  de 
semblables  expériences  paraissent  en  avoir  dégoûté  les 
États,  au  point  même  que  la  fabrication  et  la  mise  en 
circulation  de  la  monnaie  de  papier  ont  été  réservées 
plus  on  moins  exclusivement  dans  chaque  pays,  si  ce 
n'est  en  Allemagne,  à  un  seul  et  même  établissement,  à 
une  Banque  privilégiée. 

PAPIERS  DE  BORD,  actes  écrits  qui  constatent  la  na- 
tionalité d'un  navire  et  l'exécution  des  conditions  impo- 
sées aux  armateurs  et  aux  capitaines  pour  Jouir  des 
avantages  attachés  à  cette  nationalité.  En  France,  les  pa- 
piers de  bord  sont  :  l'acte  de  propriété,  l'acte  de  fran- 


cisation, le  rôle  d*é|quipage,  et  le  congé  de  navigations 
On  y  Joint  d'ordinaire  le  certificat  de  visite  du  navire  et 
la  patente  de  santé. 

PAPIER  PEINT  ou  DE  TENTURE.  Il  parait  que,  dès 
un  temps  très-reculé,  les  Chinois  ont  fabriqué  des  pa- 
piers imitant  les  indiennes.  Mais  l'idée  de  les  substituer 
aux  étoffes  ou  aux  tapisseries  pour  recouvrir  les  murs  in- 
térieurs des  appartements  ne  date  pour  les  Européens  que 
du  xvn*  siècle.  Les  Anglais,  qui  revendiquent  la  priorité 
de  la  fabrication  des  papiers  peints,  allèguent  une  patente 
délivrée  en  1634  par  Charles  l^  pour  rexercice  de  cette 
industrie  à  Londres.  Mais  des  essais  avaient  été  déjà  faits 
à  Rouen  en  1620  par  un  certain  François.  Une  manufac- 
ture fut  établie  à  Paris  par  Jean  Papillon,  en  1688.  Tou- 
tefois, l'industrie  du  papier  peint  ne  s'y  constitua  que  vers 
1780,  époque  où  une  maison  fut  fondée  par  Arthur  et 
Robert.  L'établissement  de  Réveillon,  dans  le  faubourg 
S'-Antoine,  porta  cette  industrie  à  une  grande  perfection. 
La  fabrication  commença  en  1790  en  Alsace,  où  les  mai- 
sons Zuber  et  Mader  acquirent  beaucoup  de  célébrité. 

PAPILLON ,  la  voile  la  plus  élevée  de  la  tête  des  mâts 
dans  un  bâtiment  de  haut  bord. 

PAPILLON ,  animal  qui  était,  pour  les  Anciens,  le  sym- 
bole de  r&me.  Posé  sur  une  tête  de  mort,  il  exprimait 
l'immortalité. 

PAPILLOTAGE,  en  termes  d*Imprimerie,  s*emploie 
pour  indiquer  que  le  caractère  a  marqué  double,  ou  laissé 
des  taches  noires  aux  extrémités  des  pages  et  des  lignes. 

PAPIIXOTES,  nom  qu'on  donnait  autrefois  aux  pail- 
lettes d'or  et  d'ar^nt  dont  on  relevait  les  habits  en  bro- 
derie, et  qui  désigne  aujourd'hui,  soit  les  morceaux  de 
papier  dont  les  femmes  enveloppent  leurs  cheveux  mis 
en  boucles  pour  les  faire  friser,  soit  les  boucles  elles- 
mêmes  qui  tombent  sur  le  front  ou  le  long  des  Joues. 

PAPIRIEN  (Code).  V.  Code,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire. 

PAPPOSILÈNES,  c-à-d.  vieux  Silènes,  personnages 
narbus  et  entièrement  velus  qui  Jouaient  un  rôle  dans  le 
drame  satyrique  des  Anciens. 

PAPPUS,  personnage  des  Atellanes  (V.  ce  mot).  Cest 
un  vieillard  ambitieux,  trompé  par  tout  le  monde,  le 
type  du  Cassandre  moderne. 

PAPYRUS.  V.  Papier. 

PAQUE  (La).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire. 

PAQUEBOT  (de  l'anglais  pociS^e^  paquet,  et  ho(U,  ba- 
teau), b&timent  léger  et  fin  voilier,  destiné  au  service  de 
la  poste  et  au  transport  des  voyageurs.  Ce  fut  en  1836 
qu'un  paquebot  anglais,  h".  Great  Western,  fit  pour  la 
première  fois  la  traversée  de  l'Atlantique,  de  Liverpool  à 
New-York,  en  employant  U»  vapeur,  ce  qui  réduisit  nota- 
blement la  durée  du  paroofrs. 

PARA,  monnaie  de  cti  vre  de  Turquie  et  d*Ëgypte,  va- 
lant 4  centimes. 

PARABASE,  intermë'lo  de  la  Vieille  Comédie  grecque, 
dans  lequel  le  chœu^,  resté  seul  sur  la  scène,  se  tournait 
vers  les  spectateurs,  et,  s'adressant  à  eux,  faisait  l'apolo- 
gie du  poôte,  attaquait  ou  même  livrait  au  ridicule  ses 
rivaux,  proposait,  sous  forme  badine  ou  sérieuse,  des 
mesures  politiques,  prenait  la  défense  d'une  classe  de  la 
société,  etc.  La  parabase,  comme  l'indique  son  nom,  était 
une  digression,  qui  contenait  des  observations  étran- 
gères, il  est  vrai,  au  sujet  de  la  comédie,  mais  non  aux 
circonstances  qui  avaient  pu  en  inspirer  l'idée  au  poète. 
Elle  était  souvent  pleine  de  hardiesses  :  aussi  était-elle 
considérée  comme  le  morceau  capital  de  la  pièce  par  le 
public,  dont  elle  était  attendue  avec  impatience  (V.  un 
Mémoire  de  Lebeau,  dans  les  Mém.  de  VAcad.  des  Inscrip- 
tions et  Belles-Lettres),  Elle  comprenait  7  parties  :  1°  le 
Kommation  {parcelle;  de  koptô,  couper),  petit  fragment 
qui  annonce  la  Parabase  ;  2*  la  Parabase  proprement  dite  ; 
3°  le  Makron  (long),  composé  de  di mètres  anapestiques 
qui  se  débitaient  d'une  seule  haleine;  4"  la  Strophe, 
morceau  lyrique  chanté  par  un  demi-chœur;  5**  rÊpir- 


'Antépirrhème.  Ces  7  parties  ne  se  trouvent  pas 
Jours  intégralement.  D'autres  fois,  au  contraire,  les  Pa* 
rabases  sont  doubles,  par  exemple  dans  la  Paix  et  dans 
les  Nuées  d'Aristophane.  Deux  comédies  du  même  poëte, 
les  Oiseaux  et  Lysistrate,  présentent  ce  qu'on  peut  ap- 
peler de  fausses  parabases,  c.-à-d.  des  Parabases  dont  la 
disposition  est  toute  différente,  et  qui  de  plus  sont  mêlées 
au  dialogue  et  à  l'action.  —  De  même  que  le  nom  de  Pa- 
rabase s'étendait  à  l'intermède  entier,  de  même  on  le  dé- 
signait souvent  par  le  nom  d^ Anapestes ,  parce  que  ce 


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136S 


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mètre  y  dominait.  Le  nom  d'AnapesUs  lui  était  donné 
lors  même  qu'il  n'aurait  renfermé  aucun  Ters  de  cette 
espèce.  Deux  pièces  d'Aristophane  n'offrent  aucune  trace 
de  Parabase  :  ce  sont  Y  Assemblée  publique  des  femmes  et 
Plutus;  ce  qui  prouve  que  ces  deux  pièces,  telles  du 
moins  qu'elles  nous  sont  parvenues,  sont  postérieures  au 
décret  qui  supprima  cet  intermède,  c-à-d.  à  Tannée  404 
av.  J.-  C.  La  Comédie  Nouvelle  n'offre  rien  qui  rappelle 
les  Parabases  de  la  Vieille  Comédie,  P. 

PARABATES.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

PARABOLE  (en  grec  parabole,  comparaison],  allégorie 
qui  renferme  quelque  vérité  importante.  Le  mot  ne  s'em- 
ploie guère  qu'en  parlant  de  l'Écriture  sainte,  où  l'on 
trouve  bttiucoup  de  ces  instructions  détournées,  de  ces 
sentences  morales  sous  fonne  de  comparaison,  c'est- 
à-dire  enveloppées  de  figures  et  d'emblèmes.  Les  para- 
boles, n'étant  pour  l'ordinaire  que  la  traduction  symbo- 
le qoe  de  vérités  déjà  promulguées,  servaient  à  les  graver 
I  lus  profondément  dans  la  mémoire,  à  les  communiquer 
<  L  à  les  répandre  plus  aisément.  Les  ignorants  n'enteu- 
•  ont  rien  à  une  doctrine  abstraite,  tandis  qu'il  n'est  per- 
-^onne  qui  ne  comprenne  la  parabole  du  Bon  Pasteur  et 
<-o!le  de  V Enfant  prodigue.  Le  génie  des  Hébreux,  comme 
< le  tons  les  peuples  de  l'Orient,  se  prêtait  d'ailleurs  à 
i  •.tte  expression  figurée  de  la  pensée  morale.  —  Parmi  les 
inodemes,  les  Allemands  ont  seuls  réussi  à  écrire  des 
paraboles,  particulièrement  Andréas,  Leasing,  Herder, 
Krummacher.  G. 

PARACHRONISME.  V.  Arachroiiismb. 

PARADE,  scène  burlesque  Qu'on  Joue  en  plein  air 
sur  les  tréteaux  des  spectacles  forains,  pour  attirer  les 
b:idauds  et  leur  annoncer  ensuite  les  détails  de  la  repré- 
sentation. Les  parades  eurent  leurs  sièges  principaux,  & 
Paris,  sur  le  Pont-Neuf,  aux  foires  S*-Germain  et  S*-Lau- 
font,  puis  aux  théâtres  de  Nicolet  et  de  l'Ambigu-Co- 
Diique.  Le  père  Rousseau,  Bobèche  et  Galimafré  ont  été 
'les  paradistes  fameux.  Certains  écrivains  ont  composé 
des  Parades,  qu'on  a  réunies  en  3  vol.  sous  le  titre  de 
Théâtre  des  parades  y  avec  un  4*  vol.  i^outé  plus  tard  : 
vn  y  remarque  la  Vérité  dans  le  vin  par  Collé ,  Isabelle 
par  Fagan,  la  Petite  saillie  de  gaieté  par  La  Chaussée,  et 
u/Z/e^,  garçon  pointu,  par  PoinsineL 

p<\aAPB,  dans  le  Langage  militaire,  réunion  des  troupes 
qui  deivent  monter  la  garde  du  Jour  et  relever  celles  de 
lu  veiti*.  Les  officiers  et  les  soldats  doivent  y  être  en 
grande  tenue. 

PARADIASTOLE  (du  grec  para,  entre,  et  diastole,  dis- 
tinction), nom  que  donnent  certains  rhéteurs  à  une 
Figure  de  pensée  oui  consiste  à  distinguer  l'une  do 
l'autre  des  idées  analogues  et  voisines,  afin  de  les  déter- 
miner d'une  manière  précise,  et  de  prévenir  la  confusion 
que  pourrait  occasionner  leur  ressemblance. 

PARADIGME  (du  grec  paradéigma,  modèle],  terme 
de  Grammaire  qui  désigne  les  modèles  de  déclinaison  et 
de  conjugaison  pour  toute  une  classe  de  noms  et  de  verbes. 
Ce  mot  s'applique  surtout  aux  langues  anciennes.  Ainsi, 
Dominus  est  le  paradigme  des  noms  masc.  et  fém.  de  la 
2*  déclinaison  latine;  amare,  des  verbes  actifs  de  la 
1'*  conjugaison.  Aimer,  finir,  recevoir,  rendre,  sont  en 
français  les  paradigmes  des  verbes  réguliers  dont  la  termi- 
naison à  l'infinitif  est  semblable  à  celle  de  ces  verbes.  P. 

PARADIS  (du  grec  paradéisos.  Jardin,  lieu  de  délices), 
nom  que  l'on  donne,  chez  les  peuples  chrétiens ,  au  sé- 
jour où  les  âmes  des  Justes  Jouissent  de  la  béatitude 
éternelle.  Selon  l'Église  catholique,  ce  séjour  leur  est  ou- 
vert aussitôt  après  la  mort;  Luther,  Calvin,  et  plusieurs 
schismatiques  grecs  et  arméniens,  prétendent  qu'elles 
n'y  entreront  qu'après  le  Jugement  dernier.  L'idée  du 
Paradis  est  fondée  sur  la  croyance  à  l'immortalité  de 
l'&me  et  à  la  Justice  divine  :  elle  se  retrouve  dans  toutes 
les  religions.  Les  Indiens  comptent  Jusqu'à  27  lieux  de 
d(Hioe8,  placés  les  uns  au-dessus  des  autres,  et  où  les 
âmes  sont  unies  à  Dieu.  Les  Hébreux,  peuple  à  tète  dure 
{(Utrœ  cervicis)^  comme  l'appelle  Moïse,  étaient  surtout 
frappés  par  la  promesse  des  biens  terrestres,  par  la  me- 
nace des  malheurs  de  ce  monde,  et,  si  l'Ancien  Testament 
leur  parle  de  la  vie  future,  il  n'en  décrit  pas  la  nature  : 
c'est  seulement  dans  le  Talmud  qu'on  trouve  la  peinture 
du  Paradis,  plutôt  encore  que  celle  des  félicités  que  l'on 
▼  goûte.  Les  tribus  aborigènes  de  l'Amérique,  les  popula- 
10  ns  celtiques,  les  anciens  Germains,  se  faisaient  du  Para- 
dis une  idée  subordonnée  au  degré  de  développement  de 
leur  intelligence  :  c'était  une  région  délicieuse  où  l'homme 
retrouvait  tout  ce  qui  avait  fait  sa  Joie  ici-bas  (  K.  Wal- 
iiALLA,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogr,  et  d'tlistoirt). 


Les  peintures  de  la  vieille  Egypte  nous  offrent  les  Ames 
des  Justes  errant  en  société  avec  les  Dieux.  La  niytholode 
grecque  a  aussi  ses  séjours  enchantés,  les  lies  Fortunées 
et  les  diamps  Élysées,  où  sont  transportés  après  la  mort 
les  hommes  vertueux.  Mahomet,  <{ui  s'adressait  à  des 
hommes  de  sensualité,  leur  a  promis  un  Paradis  où  les 
sens  reçoivent  des  plaisirs  infinis.  Dans  le  chrisûanisnie 
même,  la  vie  future  a  été  longtemps  tonçue  avec  tout  un 
cortège  d'idées  et  d'images  terrestres  :  le  Paradis  était 
comme  une  forteresse  située  à  l'Orient,  avec  trois  portes 
que  défendaient  les  Anges  et  dont  S*  Pierre  gardait  l'en- 
trée; les  élus,  placés  sur  des  trOnes  d'or  et  de  pierreries, 
revêtus  de  rones  d'une  éclatante  blancheur,  mêlaient 
leur  voix  à  celle  des  Chérubins  et  des  Séraphins  pour 
chanter  les  louanges  de  Dieu,  s'accompagnaient  de  divers 
instruments ,  étaient  admis  à  la  table  divine,  etc.  Toutes 
ces  figures  de  langage  prenaient  un  corps  dans  les  bas- 
reliefs  et  dans  les  peintures  des  églises.  V.  Cul,  et, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire,  l'art 
Paradis  tbbbbstrb.  B. 

PARADIS  PERDD  (Le),  poGme  épique  anglais,  en  douze 
chants  et  en  vers  blancs,  composé  par  Milton.  Le  sujet 
est  la  déchéance  du  premier  homme.  'Satan ,  chassé  du 
ciel ,  précipité  dans  les  enfers  avec  les  Anges  compagnons 
de  sa  révolte,  se  réveille  au  milieu  du  lac  de  feu.  Dans 
un  conseil  des  légions  rebelles,  il  rappelle  qu'un  ancien 
oracle  annonçait  la  naissance  d'un  monde  nouveau  et  la 
création  d'une  race  nouvelle.  Un  Pandémonium  ou  palais 
de  Satan  est  construit,  où  l'on  délibère  :  il  y  a  partage 
sur  la  question  d'une  autre  bataille  contre  le  Ciel  ;  mais 
la  proposition  de  Satan  d'aller  à  la  recherche  de  ce  monde 
annoncé,  de  le  détruire  ou  de  le  corrompre,  est  acceptée. 
Il  part,  rencontre  la  Mort  et  le  Péché,  se  fait  ouvrir  les 
portes  de  r{J)lme,  et  traverse  le  Chaos,  qui  lui  indique 
la  route  vers  le  lieu  qu'il  cherche.  Dieu  voit  Satan,  et 
prédit  la  faute  et  la  rédemption  de  l'homme  à' son  Fils 
qui  s'offre  comme  victime  expiatoire.  Satan  découvre  la 
création,  et  passe  dans  l'orbe  du  soleil,  où  Uriel  lui  dé- 
signe l'endroit  habité  par  l'homme.  Arrivé  sur  la  terre, 
il  voit  nos  premiers  parents  dans  l'Éden,  et  est  touché  de 
leur  beauté  et  de  leur  innocence  ;  en  épiant  leurs  discours, 
il  connaît  la  défense  concernant  le  fruit  de  l'arbre  de  la 
science.  Cependant  Uriel  avertit  Gabriel,  chargé  de  la 
garde  de  l'Éden,  que  Satan  y  a  pénétré;  deux  Anges  sont 
envoyés,*qui  surprennent  Satan  occupé  à  tenter  Eve  dans 
un  songe;  ils  veulent  l'amener  à  Gaoriel ,  mais  il  dispa- 
raît. Dieu  envoie  Raphaël  pour  maintenir  nos  premiers 
parents  dans  l'obéissance;  le  messager  raconte  à  Adam  la 
révolte  des  mauvais  Anges,  fruit  de  la  jalousie  qu'ils  ont 
conçue  de  l'annonce  faite  par  le  Père  qu'il  avait  engendré 
son  Fils  et  lui  remettait  tout  pouvoir  ;  il  décrit  les  com- 
bats livrés  dans  le  ciel  entre  Satan  et  les  anges  Gabriel 
et  Michel,  jusqu'à  ce  crue  Dieu  envoie  son  Fils,  qui  pré- 
cipite ses  adversaires  oans  l'abîme.  A  la  prière  d'Adam , 
Raphaël  lui  retrace  l'œuvTe  de  la  Création ,  lui  en  indique 
le  Dut ,  et  lui  annonce  l'envoi  du  Fils  pour  l'accomplir. 
Adam  lui  fait  à  son  tour  l'histoire  de  sa  propre  création  et 
de  celle  de  sa  compagne.  Raphaël  retourne  au  ciel.  Eve  se 
laisse  séduire  par  le  serpent,  et  goûte  au  fruit  défendu; 
Adam  lui  en  adresse  des  reproches,  puis  imite  sa  faute 
afin  de  mourir  avec  elle.  Les  Anges  chai^gés  de  la  garde 
du  Paradis  remontent  au  ciel  pour  Justifier  leur  vigilance. 
Le  Fils  de  Dieu  prononce  le  Jugement  des  coupaSles;  le 
Péché  et  la  Mort  se  rendent  sur  la  terre.  Satan  raconte  à 
ses  compagnons,  dans  le  Pandémonium,  le  succès  de  sa 
ruse.  Adam  pleure  amèrement,  Eve  le  console,  et  tous 
les  deux  forment  le  projet  d'apaiser  la  divinité.  Le  Fils 
intercède  pour  eux  ;  Dieu  se  laisse  fléchir,  mais  à  la  con- 
dition qu'ils  seront  chassés  du  Paradis,  sentence  que 
l'archange  Michel  leur  si^ifie  ;  dans  une  vision  ,  Adam 
découvre  tout  ce  qui  doit  arriver  Jusqu'au  déluge.  Ud> 
récit  du  même  An^  expose  les  suites  de  la  faute  d'Adam 
et  les  événements  qui  s'accompliront  Jusqu'à  l'incama- 
tion  du  Fils,  dont  la  mort  doit  racheter  tous  les  hommes. 
Adam  et  Eve  sont  expulsés  du  Paradis,  dont  des  légions 
de  Chérubins  gardent  les  avenues. 

Milton  conçut  ce  sujet  en  1665;  il  eut  d'abord  l'idée  de 
le  traiter  dans  une  tragédie  :  ses  manuscrits,  déposés  au 
collège  de  la  Trinité,  donnent  le  nom  des  personnages 
et  la  distribution  de  la  pièce,  en  cinq  actes,  avec  un 
chœur,  et  une  foule  de  personnages  muets  et  allégoriques. 
Disgracié  comme  républicain  lors  de  la  Restauration  des 
Stuarts  en  1660,  il  se  retira  à  Bunhill-Row,  où,  quoiaue 
aveugle,  il  s'occupa  activement  de  son  Paradis  perdu, 
sa  femme  et  ses  filles  écrivaient  sous  sa  dictée.  Le  poème, 
qui  lui  fut  payé  10  liv.  stcrl.,  parut  en  1667,  et  n'eut 


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point  d^&bord  de  succès  :  le  patronage  du  comte  de  Dorset, 
une  édition  in-folio  que  lord  Sommera  tit  paraître  en 
1688,  des  articles  d*Aadison  dans  le  SpecttUeur  au  corn- 
meDoement  du  ivm«  siècle,  assurèrent  enfin  la  fortune 
de  l'cBuvre.  —  Ici  le  merveilleux  est  le  sujet,  et  non  la 
macbine  du  poème;  Milton  a  donné  un  démenti  à  Boi- 
ledii,  qui  trouvait  que  les  mystères  du  christianisme 
étaient  impropres  au  merveilleux  épique.  Pour  la  pre- 
mière fois  aussi,  une  épopée  finit  par  le  malheur  du 
priocipal  personnage,  sans  que  Toeuvre  soit  moins  belle, 
i  cause  des  beauté  supérieures  qu*elle  emprunte  à  la 
religion.  Parmi  les  plus  beaux  passages,  on  peut  citer 
ccQX  où  Satan  apostrophe  le  Soleil  (en.  nr),  où  Adam 
l'éveille  à  la  vie,  où  Eve  lui  est  donnée  pour  compagne 
[ch.  viii),  où  ils  mangent  le  fruit  détendu  (ch.  ix),  où 
ils  8*endonnent  après  leur  faute  (ch.  xi},  où  ils  sont 
Tisités  par  le  Fils  et  implorent  la  miséricorde  de  Dieu 
(ch.  x).  Les  caractères  sont  admirables  :  Adam  est  sim- 
ple et  sublime  ;  rien  de  plus  auguste  que  cette  étude  du 
CŒor  de  Thomme  à  sa  naissance ,  dont  le  premier  senti- 
ment est  de  chanter  TÊtre  suprême,  et  le  premier  besoin 
de  s'adresser  à  lui.  Eve  a  une  séduction  inexprimable; 
eile  respire  à  la  fois  Tinnocence  et  le  plaisir.  Dieu  le 
Père  est  obscurément  tracé  :  il  semble  que  le  poète  ait 
craint  de  lui  prêter  une  parole  mortelle,  tant  il  a  soin 
de  ne  mettre  dans  sa  bouche  que  des  discours  consacrés 
par  le  texte  des  livres  saints.  Le  caractère  du  Fils  est  une 
tsavre  parfaite  :  il  y  a  en  lui  un  mélange  de  Thomme  et 
de  Dieu;  sa  tendresse  ineffable  ne  se  dément  Januds; 
quand  il  prononce  l'arrêt  rendu  par  son  père,  c*est  sans 
reproches  et  avec  douceur;  il  sert  d'intercesseur  cour 
présenter  à  son  Père  les  prières  des  coupables.  Parmi  les 
Anges,  Raphaël  est  Tange  ami  de  Thomme;  Michel,  chef 
des  milices  du  ciel,  a  la  forme  humaine  et  rhabillement 
d'un  guerrier,  comme  il  est  représenté  dans  les  tableaux 
des  grands  peintres.  Satan  est  une  création  incompa- 
Ràble;  ses  monologues  le  peignent  en  traits  ineffaçables. 
Les  personnages  allégoriques,  la  Mort  et  le  Péché,  sont 
ierenus  deux  êtres  réels  et  formidables.  —  Outre  les 
oeaatés  du  fond,  il  y  a  dans  le  Paradis  perdu  une  foule 
de  beautés  de  détail ,  qui  tiennent  au  mérite  de  Texpres- 


obscurités  grammaticales  sans  nombre;  il  traite  sa  lan- 
gue en  tyran,  sans  respect  pour  les  règles.  Il  abuse  de 
l'ellipse  et  des  changements  de  construction  ;  il  forge  une 
foule  de  mots  ;  il  est  rempli  dliébraîsmes,  d'héllénismes 
et  de  latinismes;  il  affecte  remploi  des  vieux  mots,  et 
prolonge  les  périodes  outre  mesure.  Les  Anglais  eux- 
mêmes  ne  sont  pas  toujours  d'accord  sur  le  texte  et  sur 
le  sens,  comme  le  prouvent  leurs  commentaires.  La  cécité 
du  poète  a  dû  nuire  à  la  correction  de  son  œuvre  :  le  pre- 
mier jet  de  ses  vers,  transcrits  la  nuit  par  sa  famille, 
quand  parlait  Tinspiration,  est  resté  à  peu  près  tel  qu*il 
est  sorti  de  son  esprit;  delà  ces  phrases  inachevées,  ces 
sens  incomplets,  ces  verbes  sans  régime,  ces  noms  et  ces 
pronoms  relatifs  multipliés,  qu*on  trouve  dans  tout  Tou- 
rrage. 

Le  sujet  adopté  par  Milton  n'était  pas  nouveau  :  dès  les 
premiers  temps  du  christianisme,  la  création  du  inonde, 
le  Paradis  terrestre,  la  chute  d'Adam  et  d'Eve,  furent 
célébrés  par  les  poètes.  Au  v"  siècle,  l'Espagnol  Dracon- 
tias  écrivit  un  Éexaméron,  ou  GEuvre  des  six  Jours,  en 
vers  latins.  Au  vl^  S'  Avit,  évêque  de  Vienne  en  Dau- 
phiné,  composa  en  latin  des  petits  poèmes  détachés  sur 
lo  Création ,  le  Péché  originel ,  le  Jugement  de  Dieu  ou 
l'Ej^lsion  du  Paradis;  Csedmon,  moine  saxon,  donna 
dans  sa  langue  nationale  un  grand  poëme  sur  la  création, 
resté  dans  l'oubli  Jusqu'en  1655,  où  Junius  le  fit  impri- 
mer à  Amsterdam.  Un  Mystère  français,  la  Conception, 
>frre  des  situations  analogues  à  celles  du  Paradis  perdu, 
*ïltalien  Folengo  (Merlin  Cocoûe)  publia  en  1533  un 
poème  sur  V Humanité  du  Christ,  En  1590,  Erasme  de 
Valvasone  fit  paraître  à  Venise  VAngéléide,  épopée  en 
frois  chants  sur  le  combat  des  bons  et  des  mauvais  Anges, 
u  où  figure  la  malheureuse  idée,  reproduite  par  Milton, 
le  l'emploi  de  l'artillerie  dans  la  bataille  céleste.  Le  poème 
latin  de  Zarotti,  le  Combat  des  Anges  (Venise,  1642),  et 
le^  drames  de  Lucifer  et  ù^Adam  par  le  Hollandais  Vondel 
(^>->i),  ont  encore  traité  des  sujets  voisins  de  celui  de 
Hilton,  qui  a  pa  y  puiser  des  idées,  sans  les  copier  ser- 
i^ilement.  Lui-même  enfin,  dans  un  voyage  en  Italie  en 
1638,  assista  à  une  représentation  de  VAdam  d'Andréini, 
mystère  en  cinq  actes  et  en  vers  libres,  mêlé  de  chœurs  et 
de  chants,  où  les  principaux  interlocuteurs  sont  à  peu 


près  tous  ceux  du  Paradis  perdu,  et  où  se  trouTe  un 
monologue  de  Lucifer  à  la  vue  du  jour,  qui  rappelle 
l'apostrophe  de  Satan  au  Soleil.  On  pourrait  encore  ajou- 
ter à  cette  liste  V Enfer  du  Dante,  la  Jérusalem  délivrée 
du  Tasse,  la  Semaine  de  Dubartas,  paraphrase  des  récita 
de  la  création,  la  Christiade  de  Vida  en  vers  latins.  Mais 
la  gloire  de  Milton  ne  doit  point  en  souffirlik 

Le  Paradis  perdu  a  été  traduit  en  vers  français  par 
Leroy,  curé  de  S*-Herbland,  de  Rouen,  au  xvm*  siècle , 
et  par  Delille,  en  1805;  en  prose,  par  Dupré  de  Saint- 
Maur  en  1720,  Louis  Racine  en  1755,  Salgues,  Chateau- 
briand en  1837.  V.  dans  le  Spectateur,  dix-huit  articles 
d^Addison  ;  ObservaJtions  sur  la  Sarcothée.  en  tète  de  la 
réimpression  de  la  Sarcotis,  poème  latin  de  Jacques  Ma- 
sen,  que  le  critiaue  G.  Lauder  prétendait  avoir  été  pillé 
par  luilton.  Pans,  1771;  Voltaire,  Essai  sur  la  poésie 
épique,  article  Milton;  Blair,  Cours  de  Rhétorique  et  de 
Belles-Lettres,  t.  III;  Villemain,  Essai  historique  sur 
Milton;  Chateaubriand,  Génie  du  christianisme,  2*  partie, 
chap.  III,  Paradis  perdu^  et  Essai  sur  la  littérature 
anglaise,  en  tête  de  sa  traduction;  Delille,  Remarques, 
à  la  suite  de  sa  traduction  ;  Sainte-Beuve,  Points  de  con- 
tact entre  Milton  ti  Jansénius,  dans  son  Port-Royal, 
t.  m.  F.  B. 

PARADIS ,  mot  employé  au  moyen  âge  dans  le  sens  de 
chambre  de  parade, 

PARADIS ,  nom  donné  dans  nos  théâtres  aux  loges  des 
combles,  en  raison  de  leur  hauteur.  C'était  un  nom  iro- 
nique ;  on  les  a  appelées  avec  plus  de  Justesse  le  pou- 
lanler, 

PARADOXE  (du  grec  para,  contra,  etcio^sa,  opinion}, 
proposition  contraire  à  l'opinion  commune,  qu'elle  soit 
ou  ne  soit  pas  vraie.  C'est,  par  exemple,  un  paradoxe 
do  dire  que  la  pauvreté  est  préférable  aux  richesses.  Cer- 
taines idées  aujourd'hui  admises,  à  savoir  :  que  la  terre 
tourne,  qu'elle  est  ronde,  qu'il  y  a  des  antipodes,  ont 
été  longtemps  regardées  comme  paradoxales.  QuancT  les 
Éléates  niaient  la  diversité  des  êtres  et  le  mouvement  « 
({uand  Pyrrhon  prétendait  qu'on  devait  douter  de  tout, 
ils  soutenaient  des  paradoxes.  Clcéron  a  dévelpppé  dans 
ses  Paradoa^  certaines  opinions  des  Stoïciens ,  comme  : 
«  Le  sage  est  seul  libre,  seul  riche,  seul  beau,  etc.  » 
J.- J.  Rousseau  a  été  un  esprit  souvent  paradoxal.  Laro- 
mignière  nous  a  laissé  un  écrit  sur  les  Paradoxes  dp 
CondUlac.  Il  y  a  eu  même  des  paradoxes  en  géométrie  : 
on  les  trouve  réunis  dans  VApianum  de  Mario  Bettino. 

PARADOXISME,  figure  de  pensée  qui  consiste  à  réu- 
nir, sur  le  même  sujet,  des  attributs  qui,  au  premier 
coup  d'œil,  semblent  inconciliables  et  contradictoires. 
C'est  une  imitation  du  paradoxe.  Ainsi,  Thomas  a  dit  de 
Sully  :  «  n  se  vengea  de  ses  ennemis,  car  il  ne  perdit 
aucune  occasion  de  leur  faire  du  bien,  a  Boileau  a  dit 
d'un  noble  ruiné,  qui  se  mésallie  pour  redevenir  riche , 
qu'il  rétablit  son  honneur  à  force  d'm/amie. 

PARAFE  ou  PARAPHE  (  du  çrec  paragraphe^  suscrip- 
tion  ou  signature),  marque  faite  d'un  ou  de  plusieurs 
traits  de  plume  et  qui  accompagne  la  signature,  dont  elle 
peut  aussi  tenir  lieu.  Au  Palais,  quand  on  dépose  aa 
greflÎB  une  pièce  arguée  de  faux,  le  déposant,  le  magistrat 
et  le  grefiier  y  mettent  leurs  parafes ,  pour  constater 
l'identité  de  cette  pièce,  ne  varietur  (pour  Qu'elle  ne 
puisse  être  changée).  Les  lustres  de  l'état  civil  et  les 
actes  notariés  doivent  être  parafés  sur  chaque  feuillet, 
pour  qu'on  ne  puisse  substituer  une  feuille  à  une  autre 
et  supposer  des  actes  qui  n'auraient  pas  été  écrits  à  leur 
date.  C'est  à  l'aide  de  parafes  qu'on  approuve  les  ratures, 
les  renvois  et  les  intercalations  dans  tous  ]es  contrats  et 
les  actes  judiciaires  sur  papier  timbré.  Dans  les  inven- 
taires, on  parafe  par  première  ou  dernière.  Les  fonction- 
naires dont  la  signature  est  sujette  à  légalisation  remet- 
tent, avant  d'entrer  en  fonction ,  leur  signature  et  leur 
parafe  aux  magistrats  supérieurs  chargés  de  les  légaliser. 

PARAGE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bi'j^ 
graphie  et  d* Histoire, 

PARAGOGE  (du  grec  paragôgè ,  allongement),  méta- 
plasme  ou  figure  de  Grammaire  consistant  à  aHonger  un 
radical  ou  un  mot  déjà  formé.  Ainsi,  en  latin,  ey-met  pour 
ego,  memet  pour  me,  ipsemet  pour  ipse,  hicce  pour  hic, 
amarier,  invertier,  pour  amari,  inverti,  pofestur  pour 
potest.  En  français,  et,  là,  da,  dans  cWui-ct,  ceiut-là, 
oui-da,  sont  des  paragoges.  II  en  est  de  même  de  Vs  dan.<' 
guères,  jusques,  Le>  grammairiens  grecs  se  servaient 
aussi  du  mot  Prosparaiepse,  qui  avait  le  même  sens  que 
Paragoge.  P. 

PARAGRAP'^E  (du  grec  para,  proche,  et  graphe. 
'  j'écris],  nom  que  ies  anc>ns  Grecs  donnaient  aux  burins 


PAU 


1370 


PAR 


marginales  par  lesquelles  ils  distinguaient  certaines  par- 
ties de  paraoase  ou  de  chœur  qui  correspondaient  entre 
elles.  II  désigne  aujourd*hul  une  petite  division ,  une 
section  de  chapitre.  En  Typographie,  on  le  figure  par  ce 
signe  :  S- 

PâHALIENNE  (Galère).  (   K.   notre  Dictionnaire  de 

PÂRALIPOMÈNES.         )      Biographie  et  (THistoire. 

PARALIPSE.  V.  Paériiirnoif. 

PARALLÈLE,  rapprochement  qu'établit  un  écrivain 
entre  deux  personnages  importants,  pour  faire  ressortir 
leurs  qualités  semblables  ou  opposées.  L*écaeil  de  ces 
sortes  de  comparaisons  est  Tabus  de  Tantithèse.  On  peut 
citer  comme  modèles  'de  parallèles  ceux  de  Turonne  et  de 
Condé  par  Bossuet  {(h-aison  funèbre  du  prince  de  Condé, 
3*  partie),  de  Corneille  et  de  Racine  par  La  Bruyère 
{Caractères,  ch.  i^des  Ouvrages  de  Vesprit)^  de  Riche- 
lieu et  de  Mazarin  par  Voltaire  (dans  la  Benriade^ 
ch.  vu),  de  Sully  et  de  Colbert  par  Thomas  {Éloge  de 
Sully,  3*  part.),  de  Bossuet  et  de  Fénelon  par  La  Harpe 
{Éloge  de  ^Fénelon,  2«  part.  ),  de  Linné  et  de  Buffon  par 
Cuvier  (Éloge  de  Buffon).  Le  nom  de  Parallèles  a  été 
aussi  appliqué  à  des  notices  biographiques  comparées  : 
telles  sont  les  Vies  parallèles  de  Plutan^ue  et  celles  de 
Cornélius  Népos. 

PARALLÈLES,  en  termes  de  Fortification,  lignes  de 
fossés  creusées  par  des  assiégeants,  et  presque  putdlèles 
aux  ouvrages  auHls  atta<^uent.  Un  siège  en  forme  de- 
mande généralement  trois  parallèles.  Ce  moyen  d*at- 
taque  fut  employé  par  les  Turcs  à  Candie  en  1068;  mais 
Vauban  est  le  premier  qui  en  ait  fait  un  bon  emploi  au 
siège  de  Maastricht  en  1073.  V,  Demi-Parallèles. 

PARALLÈLES,  en  tCTmes  de  Géographie,  petits  cercles 
de  la  sphère  terrestre  parallèles  à  Téquateur. 

PARALLÉLISME.  T.  HébraIque  (Versification). 

PARALOGISME  (du  grec  para,  contre,  mal,  et  logi- 
s^m,  raisonner),  raisonnement  faux,  argument  vicieux , 
conclusion  mal  tirée  ou  contraire  aux  règles.  Le  paralo- 
t^isme,  aussi  bien  que  le  sophisme,  induit  en  erreur; 
mais  ils  diffèrent  Tun  de  Tautre  par  leur  oriçinc;  le  so- 
phisme suppose  la  mauvaise  foi  chez  celui  qui  remploie, 
e*est  un  irtiflce  destiné  à  tromper  ;  le  paralogisme  naît 
de  la  faiblesse  naturelle  de  l'esprit.  L'homme  qui  fait  un 
paralogisme  trompe  les  autres  ;  mais  il  le  fait  de  bonne 
foi,  car  en  même  temps  il  se  trompe  lui-même.  Les  prin- 
cipaux paralogismes  sont  :  l'erreur  sur  la  cause,  Terreur 
de  Vaccident,  le  dénombrement  imparfait,  Vignorance  du 
sujet,  la  pétition  de  principe,  le  cercle  vicieux,       H.  D. 

PARAMOS ,  mot  qui  veut  dire  campagnes  incultes,  et 
par  lequel  on  désigne,  dans  l'Amérique  méridionale,  cer- 
tains districts  montagneux,  couverts  d'arbres  rabougris, 
exposés  aux  vents,  presque  toujours  enveloppés  de 
brouillards,  et  où  règne  sans  cesse  un  froid  humide. 

PARANGON.  V,  Caractères  d'impriuerie. 

PARANGONNER,  en  termes  d'Imprimerie,  faire  qu'un 
caractère  différant  d'épaisseur  de  corps  s'aligne  bien  avec 
celui  dont  on  se  sert,  en  y  ajoutant  des  espaces,  des  ca- 
drats,  des  interlignes. 

PARtVNOMASIE ,  nom  que  les  rhéteurs  latins  don- 
naient à  la  consonnance  résultant  du  Jeu  des  mots  par  la 
différence  de  quelques  lettres.  Il  y  en  a  une  dans  cette 
phrase  de  VAndrienne  de  Térence  :  Inceptio  est  amen- 
tium ,  haud  amantium, 

PARANYMPHE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  i* Histoire, 

PARAPEGMA,  mot  grec  qui  signifie  affiche,  tableau. 
On  l'appliquait  spécialement  aux  tables  sur  lesquelles  on 
inscrivait  les  lois,  les  ordonnances,  et  tout  ce  qui  inté- 
ressait le  public. 

PARAPET  (de  l'italien  parapetto ,  pare-poitrine) ,  en 
termes  de  Fortification,  partie  supérieure  d'un  rempart, 
destinée  à  protéger  ceux  qui  le  défendent.  C'est  une  élé- 
vation en  terre,  en  forme  de  glacis,  haute  de  2  met.  du 
côté  de  la  place,  et  de  1"*  et  i/2  seulement  du  côté  de  la 
campagne  ;  elle  permet,  par  conséquent,  de  tirer  de  haut 
en  bas  dans  le  fossé  ou  sur  la  contrescarpe.  Pour  cela,  la 
hauteur  du  parapet  est  divisée  en  deux  par  un  degré 
nommé  banquette,  sur  lequel  monte  le  soldat.  Il  a  aussi 
des  embrasures,  pour  qu'on  puisse  tirer  le  canon.  —  On 
donne  encore  le  nom  de  Parapet  à  toute  muraille  ou 
balustrade  élevée  à  hauteur  d'appui  le  long  d'une  ter- 
rasse, d'un  quai«  d'un  pont,  etc.,  pour  servir  de  garde- 
corps  ou  garde-fou.  B. 

PARAPHE.  V.  Parafe, 

P.iRAPHERNAUX  (du  grec  para,  au  delà,  et  phemè, 
dot  ),  en  termes  de  Droit,  se  dit  des  biens  de  la  femme 
mariée  KouA  le  régime  dotal  qui  ne  font  point  partie  do 


sa  dot,  soit  qu'elle  les  ait  réservés  en  se  mariant,  soit 
qu'ils  lui  arrivent  durant  le  mariage,  par  succession, 
donation  ou  autres  voies.  Ces  biens  appartiennent  exclu- 
sivement à  la  femme.  Le  mari  ne  peut  les  aliéner,  sans 
son  concours  ou  son  consentement,  même  pour  lui  pro- 
curer la  libération  de  ses  dettes  ;  mais  elle  ne  peut  non 
plus  les  aliéner,  ou  paraître  en  Justice  à  raison  d'eux, 
sans  avoir  obtenu  l'autorisation  de  son  mari  ou  celle  de 
la  Justice.  Dans  le  cas  oti  tous  les  biens  de  la  femme 
seraient  paraphernaux,  elle  serait  tenue,  mftme  en  l\ib- 
sence  de  clause  à  cet  effet  dans  le  contrat,  de  contribuer 
aux  charges  du  mariage  Jusqu'à  concurrence  du  tiers  de 
ses  revenus.  Le  mari  peut  administrer  les  biens  para- 
phernaux avec  procuraUon  de  sa  femme,  mais  à  la  charge 
de  rendre  compte  des  fruits  ;  et,  s'il  y  a  stipulation  ex- 
presse, il  est  tenu  vis-à-vis  d'elle  comme  un  mandataire 
à  l'égard  de  son  mandant,  et  responsable  des  fautes  qu'il 
a  pu  commettre.  S'il  Jouit  des  biens  paraphernaux,  sans 
mandat  exprès,  mais  simplement  parce  que  la  femme 
n'y  fait  pas  opposition  (droit  qu'elle  peut  toujours  exer- 
cer), il  n'est  tenu,  lors  de  la  dissolution  du  mariage  ou 
à  la  première  demande  de  sa  femme,  qu'à  la  représenta- 
tion des  fruits  existants;  ceux  qui  ont  été  consommés 
sont  censés  avoir  été  employés  dans  les  dépenses  du 
ménage.  Le  mari  est  responsable  du  défaut  d  emploi  du 
prix  de  l'immeuble  parapheroal  qu'il  a  autorisé  sa  femme 
à  aliéner.  Pour  sûreté  des  reprises  qu'elle  peut  avoir 
à  exercer  relativement  à  ses  oiens  paraphernaux,  la 
femme  a  sur  tous  les  biens  de  son  mari  une  hj'pothèqoe 
légale,  indépendante  de  toute  inscription.  K.  Benoit, 
Traité  des  biens  paraphernaux,  1846,  in-8®. 

PARAPHONIE,  nom  que  les  Anciens  donnaient  aux 
consonnances  musicales  ae  quinte  et  de  quarte,  par  op- 
position à  Vantiphonie,  qui  était  la  réplique  des  mème« 
sons,  et  à  Vhomophonie^  qui  était  l'unisson. 

PARAPHRASE  (  du  grec  paraphrasis,  interprétation^, 
explication  plus  ou  moins  étendue  d'un  texte  qui  a  besoin 
d'être  éclairci.  Elle  s'attache  à  rendre  le  sens  de  l'auteur, 
et  non  ses  paroles;  ce  qui  la  distingue  de  la  glose,  qui 
explique  mot  à  mot,  et  du  commentaire,  qui  donne  des 
renseignements  et  des  détails  complémentaires  sur  l'in- 
tention de  l'écrivain,  plutôt  qu'il  ne  cherche  à  la  repro- 
duire. —  On  a  donné  spécialement  le  ,nom  de  Para- 
phrases à  certaines  interprétations  de  l'Écriture  sainte  : 
nous  citerons,  par  exemple,  le  Targum,  ancienne  version 
de  la  Bible  en  langue  chaldéenne,  la  Paraphrase  d*Énsme 
sur  le  Nouveau  Testament,  les  Paraphrases  de  MassilloD 
sur  les  Psaumes, 

PARAPLUIE  (de  parer  à,  et  de  pluie).  Les  premiers 
parapluies  furent  faits  de  cuir,  de  taffetas,  de  bouracsn , 
de  toile  cirée.  Les  Chinois  en  ont ,  depuis  bien  des 
siècles,  en  papier  huilé  et  verni  ;  ils  en  font  même  de 
feuilles  d'arbres.  Le  parapluie  n'a  été  employé  que  fort 
tard  en  Europe  ;  il  en  est  fait  mention  pour  U  première 
fois  en  France  dans  les  Œuvres  de  Tabarin,  en  16:22. 
Longteoips  les  femmes  seules  s'en  servirent. 

PARASANGE.  {  F.  ces  mots  dans  notre  Dictionnairt 

PARASITE.      (      de  Biographie  et  d'Histoire. 

PARASOL  (de  parer  à,  et  de  sole^).  Chez  les  Orien- 
taux, le  parasol  a  toujours  été  une  marque  de  dignité,  i 
laquelle  on  reconnaît  la  puissance  humaine  ou  divine. 
Sur  plusieurs  bas-reliefs  de  Persépolis,  le  roi  et  qudques 
grands  personnages  sont  représentés  sous  des  parasols 
tenus  par  des  Jeunes  filles.  Dans  l'ancienne  Grèce,  aui 
fêtes  de  Bacchus,  de  Cérès,  et  de  Minerve,  on  portait  des 
parasols  comme  insignes  de  ces  divinités,  et  on  célébrait 
au  commencement  du  printemps,  sous  le  nom  de  ScirO' 
phorion ,  une  fête  des  parasols.  Chez  les  peuples  chré- 
tiens, le  dais  a  remplacé  le  parasol  comme  marque  dlion- 
neur.  De  nos  Jours  encore ,  l'empereur  du  Maroc  a  seul 
le  droit  dans  ses  Ititats  de  se  servir  d'un  parasol  ;  on 
retend  sur  sa  tête  quand  il  donne  des  audiences  et  dans 
tous  les  actes  solennels.  Chez  nous,  le  parasol  n'est  plus 
qu'un  instrument  d'utilité  commune,  dont  les  femmes 
font  usage  sous  le  nom  d^ombrelle,  B. 

PARASTATE,  terme  d'Architecture.  V,  km, 

PARATIQUE.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire. 

PARATITLES  (du  grec  para,  à  côté,  et  du  latin  titvr 
lus,  titre),  nom  qu'on  a  donné  à  certains  abrégés  ou 
sommaires  de  Jurisprudence,  indiquant  avec  pr^sioo 
les  titres  et  les  décisions.  On  met  souvent  des  paratitle3 
dans  les  volumineux  recueils  de  droit  ancien  ;  il  y  en  s. 
par  exemple,  dans  le  Code  Théodosien  édité  par  Jacquet 
Godpfroi. 

PARATORIUM.  V.  Prothèse. 


PAR 


1371 


PAR 


PARAVENT  (de  parer  à,  et  de  vent)^  meuble  composé  ! 
He  plasieurs  châssis  en  bois  léger,  recouverts  de  papier, 
d0  tapisserie  ou  d^étofle,  assemblés  par  des  charoiëres, 
poQTsot  se  replier  les  uns  sur  les  autres  ou  se  déployer, 
et  dont  on  se  sert  dans  les  appartements  p^ur  se  g^ntir 
du  yent.  On  fkit  des  paravents  dont  les  cuassis  sont  gar- 
nis de  glaces  sans  tain,  pour  ne  pas  priver  de  Jour  Tes- 
pace  quils  enveloppent.  Les  paravents  paraissent  être 
origipaires  de  la  Chine,  où  on  les  fait  ordinairement  en 
laque. 

PARAY-LE-MONIAL  (Église  de),  dans  le  département 
de  Saône-ct-Loire.  Cette  église,  autrefois  abbatiale,  et 
dédiée  à  la  S^*  Vierge  et  à  S^  Jean-Baptiste,  fut  con- 
struite au  commencement  du  xi*  siècle,  mais  rebâtie 
au  xn*  dans  de  plus  vastes  proportions  et  sur  le  modèle 
de  celle  de  Cluny.  Elle  est  en  forme  de  croix  latine  ; 
mais  les  bras  du  transept  sont  si  développés,  que  Tédiflce 
ressemble  presque  à  une  croix  grecque.  Comme  les  au- 
tres églises  des  Bénédictins  en  Bourgogne,  celle  de  Paray- 
le-Moaial  est  précédée  d*un  narthex  ou  porche  fermé,  à 
deux  étages,  où  Ton  entre  par  une  petite  porte  bâtarde, 
et  qu^accompagnent  deux  tours  carrées,  dont  la  partie 
supérieure  est  décorée  d^arcatures  et  de  fenêtres  cintrées. 
Le  milieu  du  transept  est  surmonté  d*une  autre  tour  à 
huit  pans,  dont  l'étage  supérieur  est  percé  d*arcades  ogi- 
vales. La  porte  qui  ourre  du  narthex  dans  la  nef  princi- 
pale est  rehaoasée  de  sculptures  byzantines  d*un  beau 
traTsiL  La  longueur  de  Téglise  à  Tintérieur  est  de  49",30, 
et  la  hauteur  sous  voûte  de  27™;  la  largeur  de  la  grande 
nef  est  de  7'",33.  Plusieurs  parties  sont  du  style  de  tran- 
sition, et  présentent,  comme  la  cathédrale  d'Autun,  des 
piliers  ornés  de  pilastres  cannelés.  La  voûte  du  sanc- 
tuaire s*appuie  sur  des  colonnes  rondes  très-élancées,  ce 
qui  donne  k  cette  partie  du  monument  une  grande  légè- 
reté. Le  collatéral  qui  entoure  le  sanctuaire  renferme 
trois  chapelles  rayonnantes.  On  remarque,  dans  la  cha- 
pelle de  la  S**-Vierge,  le  tombeau  des  barons  de  Digoine, 
bienfaiteurs  de  Tabbaye. 

PARAZONIUM,  arme.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d*Histoire. 

PARC,  vaste  étendue  de  terrain  entourée  de  murs  ou 
de  palissades ,  plantée  de  bois  en  totalité  ou  en  grande 
partie,  et  qui  sert  à  la  promenade  ou  aux  plaisirs  de  la 
chasse.  Ccst  Taccompagnement  ordinaire  des  demeures 
royales,  des  ch&teaux,  des  grandes  propriétés.  On  peut 


loene  (oepuia  qu'on  eh  à  changé  l'ancien  caractère),  ete.; 
eu  Angleterre,  HydePark  et  St-Jamee-Park  à  Londres, 
les  parcs  de  Greenwicb  et  de  Windsor;  en  Allemagne, 
ceux  de  Wœrlitz  et  de  Schweixingen ;  en  Belgique,  le 
parc  de  Bruxelles»  entre  le  palais  du  roi  et  celui  des 
Eiats-Gônéiaux. 

PABc  terme  d'Art  miliUîre.  Un  parc  d'artiUerie  eei  la 
réunion  des  bouches  &  feu,  des  fourgons  ou  caissons 
cliargés  de  projectiles,  des  voilures,  des  chevaux,  et  de 
toutes  les  munitions  présumées  nécessaires  pendant  une 
campagne  à  une  armée  ou  &  un  corps  d'armée.  11  y  a 
aussi  des  parce  de  siège,  des  parcs  de  ponts  ou  f>ontons, 
àes parce  de  vivres  et  fourrages,  des  parcs  du  génie*  Un 
^nrc  de  réserve,  placé  à  proxinfîté  des  mouvements  stra- 
tégiques, est  destiné  à  alimenter  les  autres  parcs. 

PARC\G£  (Droit  de),  redevance  que  le  seigneur  féodal 
prélevait  sur  les  vassaux  qui  clôturaient  des  bestiaux 
dans  un  pare. 

PARGUEMIN,  corruption  de  Pergamin  en  latin  charta 
Pergamena,  papier  de  Pergame  C'est  de  la  peau  de  mou- 
toQ  ou  de  chèvre  convenablement  préparée,  polie  avec  la 
pierre  ponce,  et  destinée  à  recevoir  l'écriture.  Les  rois 
d'Egypte  ayant  interdit  l'exporUtion  du  papyrus,  Eu- 
méoe  IL  roi  de  Pergame,  imagina,  dit-on,  le  parchemin, 
vers  Tan  160  av.  J.-G.  Les  anciens  distinguaient  deux 
sortes  de  parchemin  :  l'un,  desUné  aux  rouleaux  (volu* 
mtna),  et  sur  lequel  on  n'écrivait  que  d'un  cAté;  l'autre, 
destiné  aux  livres  carrés  (codices),  sur  lequel  on  écri- 
vait des  deux  côtés,  et  qu'on  appelait  pour  cette  raison 
opisihographe.  Le  parchemin  de  Pergame  était  jauoAtre, 
ei  on  le  recherchait  &  cause  de  cette  teinte  favorable  à  la 
^ua;  celui  des  Homains  eut  une  blancheur  éclatante. 
Lors  de  l'invasion  des  Barbares,  le  parcbemin  devint  fort 
rare,  et,  pour  remédier  à  celte  disette,  on  gratta  les  an- 
ciennes écritures,  afin  de  transcrire  sur  lea  manuscrits 
des  légendes  ou  des  prières.  C'est  à  ce  funeste  usage  qu'il 
fcui  attribuer  la  perle  de  tant  d'ouvrages  de  l'antiquité. 
Au  vp  siècle^  le  parchemin,  réserve  jusque-là  pour  les 


livres,  commença  à  être  employé  pour  les  chartes  et  les 
diplômes.  Après  Pinvention  du  papier  de  chiffon,  il  seryft 
encore  pour  les  expéditions  des  actes  et  pour  les  manu- 
scrits de  quelque  importance.  B. 

PARCHEMINIERS,  ancienne  corporation  qui  fabri- 
quait le  parchemin.  Elle  avait  pour  patron  S*  Jean  PÉvan- 
géliste.  un  statut  de  l'Université,  en  1201,  exi^it  de» 
parcheminîers  le  serment  d'agir  sont  fraude  m  maltce. 
Des  lettres  patentes  de  Charles  V,  en  date  du  5  nov.  1368, 
nous  apprennent  qu'il  y  avait  alors  18  parcheminîers 
jurés,  chargés  de  visiter,  d'admettre  ou  de  rebuter  le 
parchemin  qui  arrivait  à  Paris,  et  qu'ils  étaient  exempts 
du  guet  et  de  la  garde  des  portes.  En  4488,  on  les  rédui- 
sit à  huit.  L'Université  avait  un  droit  rectoral  sur  le  par- 
chemin, dont  on  se  pourvoyait  surtout  aux  foires  du  Len- 
dit et  de  S'-Lazare.  B. 

PARCIVAL.  V.  Pkrceval. 

PARCLOSE,  V.  STAL1.B. 

PARCOURS  ET  ENTRECOURS  (Droit  de),  nom  donné 
dans  les  temps  féodaux  à  un  droit  résultant  de  traités 
faits  entre  seigneurs  voisins,  et  en  vertu  duquel  leurs 
vassaux  libres  pouvaient  passer  d'une  seigneurie  dans 
une  autre  sans  craindre  d'être  asservis.  En  vertu  du 
même  droit,  les  serfs  de  seigneuries  différentes  pouvaient 
contracter  entre  eux  des  mariages  valables. 

PARCOURS  ET  VAJNE  PATURE.  On  appelle  parcoure 
la  .faculté  que  possèdent  deux  ou  plusieurs  communes 
voisines  d'envoyer  réciproquement  leurs  troupeaux  sur 
leurs  territoires  respectifs;  et  vaine  pâture,  la  faculté 
appartenant  à  tous  les  habitants  d'une  même  commune 
d'envoyer  ^eurs  troupeaux  en  p&turage  sur  les  terres 
vaines  et  vagues,  et,  après  l'enlèvement  des  récoltes,  sur 
les  champs  cultivés.  On  dit  aussi,  pour  l'un  et  l'autre 
cas,  droit  de  pacage.  Le  droit  de  parcours,  qui  avait  son 
origine  dans  les  âges  féodaux,  était,  bien  avant  1789, 
condamné  comme  contraire  au  droit  commun.  Mais  le 
droit  de  vaine  p&ture  semblait  tellement  respectable, 
que  personne  ne  pouvait  clore  ses  héritages,  et  que  cette 
faculté  ne  fut  accordée  que  par  un  édit  de  1669.  Le  Code 
rural  de  1701  maintint  le  parcours,  lorsque  cette  servi- 
tude se  fondait  sur  un  titre  ou  sur  une  possession  auto- 
risée par  les  coutumes  et  usages  locaux  ;  il  conserva  éga- 
lement le  droit  de  vaine  p&ture.  L'un  et  l'autre  droit 
subsistent  encore  aujourd'hui  dans  un  certain  nombre  do 
localités.  Dans  aucun  cas  et  dans  aucun  temps  ils  ne  po»- 
vent  s'exercer  sur  les  prairies  artificielles  oo  sur  une , 
terre  ensemencée. 

.  PARDAO  monnaie  d'argent  en  usage  dam  la  Barbarie, 
et  valant  1  flr.  55  c.  environ..  ,      .         ,  .^  ^, 

PARDO  (Château  ,du),  résidence  royale,  située  &  12  kl- 
lomôires  de  Madrid,  sur  lo  Maazanarès.  Pardo  signitie 
pré  en  espagnol.  (!e  ch&teau,  anciec  rendez-vous  de 
chasse  hâii  par  Henri  III,  réôdiflé  par  Charles-Quint,  et 
embelli  sous  &es  successeurs, est  un  grand  b&timent  carré, 
flanqué  de  quatre  tours,  et  composé  de  quatre  corps  de 
logis  qui  communiquent  par  des  galeries  extérieures.  L'in- 
térieur offre  beaucoup  de  fresques  exécutées  par  Gaspard 
Becerra,  et  des  tapisseries  fabriquées  &  Madrid  d'après 
des  dessins  originaux  de  Goya  ou  des  copies  de  David 
Teniers.  La  chapelle  contient  quelques  belles  peintures 
de  Moialès  et  de  Lucas  Giordano.  Le  chàleau  est  précédé 
d'un  Jardin  planié  d'arbres  fruitiers,  et  au  delà  s'élendent 
des  bois  entourés  d'un  mur  en  mAçonnerie  qui  a  près 
de  80  kilomèt.  de  développement.  Dans  celte  vaste  en- 
ceinte, à  4  kilomèt.  du  château,  s'élève  la  Zarzuela^ 
Jolie  habitation  à  un  seul  éUge,  où  l'on  a  Joué  les  pre- 
miers opéras-comiques  espagnols,  appelés  pour  celto 
raison  zarztielas. 

PARDON.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

PARÉCHÈSB,  nom  que  les  rhéteurs  de  l'ancienne 
Grèce  donnaient  à  une  Figure  de  diction  consistant  dans 
la  répétition  fréquente  d'une  môme  syllabe  ou  d'une 
même  articulation. 

PAREMENT,  nom  donné  autrefois  à  des  morceaux 
d'étoffe  riches  et  voyants,  qui  servaient  à  parer  les  man- 
ches des  habiU  d*homme  et  le  devant  des  robes  de 
femme.  Aujourd'hui  ce  n'est  plus  que  le  retroussis  du 
bout  des  manches,  lequel  est  souvent,  chez  les  militaires, 
d'une  couleur  différente  de  celle  de  l'habit,  et  sert  &  dis- 
tinguer les  corps.—  On  nomme  Parement  d'autel  ce  que 
les  auteurs  liturgiques  appellent  Devant  ou  Couverture 

d^auteL 

PAREMEifT,  côté  d'une  pierre  ou  d'un  mur  qui  parait 
au  dehors.  En  Fortidcation,  le  mot  s'emploie  comme 
synonyme  de  rempart  et  de  parapet* 


PAR 


1372 


PAR 


PARÉHIAQCE  (Vers),  vers  des  Grecs  et  des  Latins, 
tfnsi  nommé  du  grec  parùfmia  (proverbe] ,  parce  qu'ap- 
paremment beaucoup  de  proverbes  avaient  reçu  cette 
forme  chez  les  Grecs.  C*est  un  anapestique  dimètre  ca- 
talectique.  Il  sert  habituellement  de  clausule  aux  sys- 
tèmes anapestiques  dimètres,  purs  ou  mêlés.  Lorsqu'il 
sert  de  clausule  à  une  série  de  procéleusmatiques,  c'est 
un  signe  que  ceux-ci  ne  sont  que  des  solutions  d'ana- 
pestes, les  longues  étant  changées  en  deux  brèves.  Quel- 
quefois le  parémiaque  commence  la  série  d'anapestes, 
surtout  lorsqu'ils  sont  mêlés  à  d'autres  mètres;  on  en 
trouve  aussi  deux,  ou  même  plusieurs  de  suite. 

Le  vers  parémiaque  ne  se  trouve  nulle  part  employé 
en  systhne  dans  ce  qui  nous  reste  de  la  poésie  grecque; 
mais  nous  savons  par  le  grammairien  Héphestion  que 
Cratinus,  contemporain  d'Aristophane,  l'avait  employé 
ainsi.  Le  grammairien  latin  Diomède  cite  deux  vers  que 
l'on  regarde  comme  un  fragment  d'un  poète  du  temps 
de  la  République.  Ansone  et  Boéce,  poètes  de  la  déca- 
dence, ont  laissé  des  pièces  composées  de  parémiaques; 
mais  les  anciens  tragiques  latins  en  avaient  fait  le  même 
usage  que  leurs  modèles  grecs.  Plaute  a  usé  plusieurs 
fois  du  parémiaque  ;  mais  fi  ne  le  manie  pas  avec  beau- 
coup de  délicatesse;  les  spondées  y  sont  trop  multi- 
pliés. P. 

PAAÉMIOGRAPHIE  ou  PARÉMIOLOGIE  (du  grée  par- 
roimia,  proverbe),  étude  ou  explication  des  proverbes 
(K.  ce  mot), 

PARÊNÉTIQUE  (du  grec  paraïnésis,  exhortation), 
partie  de  l'éloquence  de  la  chaire  qui  touche  à  la  mo- 
rale. Elle  comprend  les  sermons,  les  homélies  et  les 
prônes. 

PARENTÉ  (du  latin  parère,  engendrer  J,  rapport  qui 
existe  entre  les  personnes  unies  par  les  liens  du  sang. 
Outre  la  parenté  naturelle,  on  distingue  :  la  parenté  lé- 
gale, produite  par  l'adoption;  la  parenté  civile  ou  affi- 
nité^ contractée  par  mariage;  la  parenté  spiritimlle^  qui 
résulte  du  parrainage.  Les  parents  sont  ou  ascendants 
(le  père  et  la  mère,  et  tous  les  auteurs  plus  éloignés),  ou 
descendants  (les  enfants,  les  petits-enfants,  etc.),  ou 
collatéraux  (frères  et  sœurs,  oncles  et  tantes,  neveux  et 
nièces,  cousins  et  cousines]  ;  ces  derniers  sont  divisés  en 
agnats,  collatéraux  du  côté  paternel,  et  cognats,  collaté- 
raux du  côté  maternel.  La  proximité  de  parenté  s'établit 
par  le  nombre  des  générations  ;  chaque  génération  s'ap- 
pelle un  degré;  la  suite  des  degrés  forme  la  ligne  de  pa- 
renté, La  ligne  est  directe,  quand  elle  est  la  suite  des 
degrés  entre  des  personnes  qui  descendent  l'une  de 
l'autre;  elle  est  collatérale,  quand  elle  est  la  suite  des 
degrés  entre  des  personnes  qui  ne  descendent  pas  l'une 
de  l'autre,  mais  qui  ont  une  souche  commune.  En  ligne 
directe,  on  compte  autant  de  degrés  qu'il  y  a  de  généra- 
tions entre  les  personnes  :  ainsi,  le  fils  est  à  l'é^d  du 
père  au  i»'  de^,  le  petit-flis  au  2^,  l'arrière-petit-fils 
au  3*.  En  ligne  collatérale,  les  degrés  se  comptent  aussi 
par  générations,  depuis  l'un  des  parents  Jusques  et  non 
compris  l'auteur  commun,  et  depuis  celui-ci  Jusqu'à 
l'autre  parent  ;  ainsi,  deux  frères  sont  au  S"  degré, 
l'oncle  et  le  neveu  au  3%  les  cousins  germains  au  4*.  Il 
n'y  a  donc  point  de  f  degré  dans  la  ligne  collatérale. 
En  Droit  canon,  au  lieu  de  compter  en  ligne  collatérale 
les  générations  des  deux  parents,  on  compte  seule- 
ment les  degrés  do  l'un  des  parents  Jusqu'à  la  souche 
commune  :  d'après  ce  système,  deux  frères  sont  au 
^er  degré,  parce  qu'il  n'y  a  qu*une  génération  depuis 
l'un  des  frères  Jusqu'au  père,  qui  est  la  souche  com- 
mune. — Dans  notre  législation,  et  suivant  nos  codes,  la 
parenté  produit  tantôt  des  droits,  tantôt  des  oblifi;ations, 
tantôt  des  prohibitions.  V.  Sdccession,  Famille  (Conseil 
de),  Alivents,  Mariage. 

PARENTHi^SE,  c.-à-d.  en  grec  interposition,  mot  qui 
signifie  tout  à  la  fois  une  proposition  ou  pensée  isolée 
qu'on  insère  dans  une  phrase  aont  elle  suspend  la  mar- 
che, et  les  signes  (  )  par  lesquels  on  indique  cette  inter- 
calation.  On  ne  doit  produire  en  forme  de  parenthèse  que 
des  idées  dignes  de  fixer  l'attention,  et  qu'on  ne  saurait 
différer  d'exprimer.  Toute  parenthèse  doit  être  courte  et 
vive,  autrement  le  style  devient  embarrassé  et  traînant. 

PARÈRE  ^d'un  mot  italien  signifiant  opinion^  ce  qui 

f)araU)^  certificat  donné  par  des  négociants  notables  et 
nstruits  pour  des  questions  de  commerce  débattues  en 
Justice,  afin  d'établir  l'usage  quand  la  loi  est  muette,  obs- 
cure ou  insuffisante. 

PARÉS  (Actes),  actes  qui  contiennent  le  même  préam- 
bule que  les  lois,  et  qui  sont  terminés  par  un  mande- 
ment du  souverain  aux  ofiiciers  de  Justice.  Le  terme 


vient  de  oe  qu'autrefois  les  actes  de  cette  nature  por- 
taient le  mot  \eX\npareatis  (obéissez). 

PARESSE,  l'un  des  sept  péchés  capitaux,  qui  a  pour 
origines  le  plaisir  et  l'oisiveté,  pour  conséquences  te 
dégoût  du  travail,  la  mendicité,  le  vol,  etc. 

PARFAIT,  inflexion  particulière  des  verbes  pour  expri- 
mer une  des  nuances  du  temps  passé.  Ce  temps,  dans 
les  langues  modernes,  a  une  forme  composée  :  lai  lu,  etc.* 
en  latin  également,  mais  seulement  à  la  voix  passive  : 
lectus  sum,  et  par  conséquent  dans  les  verbes  déponents 
et  semi-déponents  :  imitatus  sum^  ausus  sum.  A  la  voix 
active,  il  est  terminé  en  avi,  evi,  ivi,ovi,  ud,  ui,  $i,  i,  etc.  : 
amam,  fievi,  audivi,  cognovi,  adjuvi,  monui,  repsi, 
legi,  etc.  Le  parfait  latin  correspond  au  parfait  des  lan- 
gues modernes,  souvent  aussi  au  passé  défini  français,  et 
à  l'imparfait  des  langues  germaniques  employé  comme 
temps  historique  ;  et  il  exprime  simplement  une  action 
accomplie  ou  un  état  entièrement  passé.  Il  n'en  est  pas 
de  même  du  parfait  grec.  Ce  temps,  caractérisé  à  la 
i'*  personne  de  l'indicatif  par  les  terminaisons  a,  xa, 
9a,  x«  à  l'actif,  (lai  au  passif  et  au  moyen,  exprime  bien 
une  action  accomplie,  mais  dont  le  résultat  se  prolonge 
dans  le  temps  présent.  Il  sert  souvent,  par  suite,  à 
exprimer  vivement  une  action  future,  dont  le  résultat, 
subordonné  à  une  autre  action  future,  est  regardé  comme 
infaillible,  si  celle-ci  s'accomplit.  P« 

PARFArr  (Accord).  V.  Accoan. 

PARFAITE  (Cadence,  Consonnance).  V»  Cadetice,  Coh- 

SOIfNANCE. 

PARFAITS  CTons  ou  Modes),  tons  ou  modes  du  Plain- 
Chant  qui  atteignent,  dans  le  morceau  de  chant  qui  les 
constitue,  les  deux  notes  extrêmes  de  leur  échelle  diato- 
nique. Ainsi,  une  pièce  du  i"  ton  sera  dite  parfaite,  si 
elle  ofl^  un  ré  grave  et  un  ré  aigu,  ou,  en  d'autres 
termes,  si  elle  monte  jusqu'à  l'octave  de  sa  note  finale. 
Une  pièce  du  2*  ton  sera  parfaite,  si  elle  a  une  octave 
d'étendue  à  partir  de  la  quarte  au-dessous  de  sa  finale. 
Chaque  ton  peut  monter  d'un  degré  au-dessus  des  limites 
de  son  échelle  diatonique  et  descendre  d'un  degré  au- 
dessous,  sans  cesser  d'être  parfait;  mais,  dans  oe  cas,  il 
est  à  la  fois  parfait  et  surahondant  (  V,  ce  moi),     F.  C 

PARFUM  (du  latin  per,  par,  et  (umus,  fumée,  émana- 
tion), odeur  aromatique,  agréable,  plus  ou  moins  forte, 
qui  se  détache  d'une  substance  naturelle  ou  artificielle. 
L'usage  des  parfums  remonte  à  la  plus  haute  antiquité. 
Moïse  donne  la  composition  de  celui  qu'on  ofl'rait  à  Dieu, 
et  de  celui  qui  servait  à  oindre  le  grand  prêtre  et  ses  fils, 
le  tabernacle  et  les  vases  sacrés.  Êzéchias  conservait  des 
parfums  exquis  dans  ses  trésors.  Judith  en  employa  pour 
captiver  Holopheme.  Les  Êgjrptiens  se  servaient  de  par- 
fums, surtout  pour  embaumer  les  morts.  Les  Arabes,  les 
Babyloniens,  et,  en  général,  tous  les  Orientaux,  aimèrent 
à  en  porter.  Les  Grecs  et  les  Romains  regardèrent  les 
parfums  non-seulement  comme  un  hommage  dû  aux 
dieux,  mais  encore  comme  un  signe  de  leur  présence  : 
chez  les  poètes,  les  divinités  annoncent  leur  apparition 
en  répandant  autour  d'elles  une  odeur  d'ambroisie.  A 
Lacédémone,  le  luxe  des  parfums  ne  parvint  pas  à  s'éta- 
blir :  les  parfumeurs  furent  chassés,  comme  gàcheon 
d'huile.  Il  en  fut  autrement  à  Athènes,  bien  que  Solon 
eût  interdit  les  parfums,  ^  pour  les  contenir,  on  fabri- 
qua toutes  sortes  de  boites,  ae  flacons  et  de  vases  pré- 
cieux. Chaque  partie  du  corps  avait  une  essence  ou  une 
huile  qui  lui  était  propre  :  la  menthe  était  recommandée 
pour  les  bras,  l'huile  de  palmier  pour  la  bouche  et  la 
poitrine;  on  gpraissait  les  sourcils  et  les  cheveux  avec  an 
onguent  extrait  de  la  marjolaine,  les  ^noux  avec  l'es- 
sence du  lierre  terrestre,  etc.  On  attribuait,  d'ailleurs, 
aux  parfums  des  propriétés  singulières  :  l'odeur  de  ceux 
que  les  convives  se  faisaient  verser  sur  la  tête  combat- 
tait victorieusement,  croyait-on,  celle  des  vins  et  des 
mets,  et  permettait  de  boire  sans  redouter  l'ivresse;  le 
p^um  des  feuilles  de  vigne  donnait  de  la  lucidité  à 
l'esprit;  celui  des  violettes  blanches  favorisait  la  diges- 
tion, etc.  Les  riches  ne  furent  pas  les  seuls  à  se  serrir 
de  parfums,  puisque  Socrate,  bl&mant  ceux  qui  se  psr- 
fumaient,  disait  :  «  Un  esclave  et  un  citoyen  parfumés 
ont  la  même  odeur.  »  L'abus  engendra  des  conséquences 
funestes;  Aristote  prétend  que  la  quantité  de  chevelures 
grises  qu'on  voyait  de  son  temps  provenait  de  l'influença 
brûlante  des  épices  contenues  dans  les  onguents.  A  Rome, 
la  vente  des  parfums  fut  d'abord  défendue  sévèrement; 
puis  on  en  fit  un  usage  extravagant.  Avant  et  après  les 
combats,  on  parfumait  les  aigles;  on  brûlait  des  parfums 
sur  les  tombeaux;  l'Arabie  ne  produisit  pas  en  une 
année  autant  d'encens  que  Néron  voulut  en  mettre  au 


PAR  13 

tkher  fiiaéraira  de  Poppte.  La  principale  me  ds  C^ioub  i 
n'tuit  occupa  que  par  dei  iiurnimeun.  Cependant,  les  | 
ïomaies  qui  n  narTamafaDt  flnireac  par  tin  jugùs  avec 
léiinti;  ondltâlt  :  IIaUoi*t<iuibtn*  oltt,  béni  oiit  qui 
nAil  d1<I.  —  Chei  les  Hiiderne*,  U  pasilon  des  parrums 
(  beincoup  diminué.  Elle  ■  été  néanmoins  fort  vive  an 
ivi>  siècle,  et  les  Italiens  eicell6rent  I  la  satis Paire.  Au- 
jourd'hui, il  n'y  a  plus  guère  que  les  feoiméa  qui  se 
pirlnmetit.  "- 

PARI  ou  GAGEURE,  promeise  réciproque  par  laquelle 
deui  aa  plusieurs  peraonnas  soutenant  des  avis  con- 
traires s'engageât  i  payer  une  certaine  Bomme  k  celle 
qui  u  trouïera  «voir  raison.  Les  andeos  jariBconaullas 
r«ginlaient  tee  gageures  comme  permises  ou  détendues, 
uIdd  qae  leur  objet  était  boa  ou  mauTSis,  leur  cause 
honnéle  ou  illicite;  de  plus,  en  Franco,  on  eKlgealt 
qu'elles  fussent  suivies  de  con  si  g  calions.  Notre  Loda  aç- 
loel  n'accorde  aucune  action  pour  le  payomeol  d"uo  psri. 
Toolo  action  est  aussi  refusée  pour  un  mardié  i  lerma 
ï  la  Itourse.   V.  MàbCR£  a  tesiiB. 

fAKlAGOTO  (Dialecte).  V.  CauIbr. 

PARIS  CLOACAl-  C'est  le  Paris  soutarraln,  aussi  mei^ 
veilleni  dâu  son  genre  que  le  Paris  épanoui  au  soleil, 
qui  lui  doit  son  assainissement,  sa  propreté  constante, 
ime  partie  île  aa  splendeur.  Dès  les  premiers  siècles,  tes 
Paiiuens  eutreienaleot  des  rigoles  Jt  ciel  ouvert,  pour 
tconjer  lea  eaux  usagères  dt  pluviales  vers  la  Seine,  vers 
au  ruisseau  dit  de  ilëait.lloi)taDt,  au  N.  de  la  ville,  et 
^'im  a ,  longtemps  wrii,  appela  Grtmd  égoùt  da  etin- 
tara,-  enfla,  dani  la  Bièvre,  peUla  rivière  qui  traverse 
in  ccdn  de  1»,  partie  S,  Au  ii*  siècle,  lorsque  Isa  Parisiens 
fortiaèrent  leur  ville,  les  fossé*  eilérieun,  creusés  au 
pied  des  murailles,  servirent  aussi  de  réceptacles  aux 
aoi  de  toutes  sortes.  Des  rigoles,  des  ruisseaux,  des 
fouëi  sont  partout  les  égouti  rudimeottures ,  mais  en 
même  temps  des  causes  d'infection  sous  l'action  de  l'air 
on  do  soleil.  Au  ivi*  siècle,  la  demeure  des  rois  de 
France,  l'hatel  des  Tournelles,  situé  sur  uns  partie  de 


l'emplacBQieDl  actuel  de  la  Placé-Royate,  était  : 

.,  ___ ^_._. -jtides  "  -   ' 

nnoants.  ~ 


commode  par  les  eittalalsons 


it  io- 
des éginiu  envi- 
La  premier  égout  veAtâ  tut  construit  ven  1371,  dans 
1«  quikitiar  Hontmartre.  On  avait  trouvé  le  remède  au 
mal;  mais  on  l'appliqua  arec  une  telle  lenleur,  qu'en 
1963  Paria  n'avait  encore  que  I.SOT  toises  (S,352  met.) 
d'igoats  couverta.  Cependant  on  cheminait,  car  au  com- 
mencement du  m*  siècle  la  ville  en  compta  33,531)  met., 
et,  t  la  fin  de  tS3fl.  euviron  Sl.DOO  met.,  non  comprit 
\a  égouta  découverts  K  rives  et  h  radier  maçonnés  ou 
non  t  le  dernier  ds  ces  fossés  Infects  n'a  disparu  qu'en 
IU3.  La  longneor  totale  dea  égouia  équivalait  alors  ï 
IGSUlomètrea. 

I  l'frnmvpHtanmfnl  général  des  égouta  était  un  très- 
ïnndréaultat;  mais,  depuis  le  iiv*  siècle,  tant  d'admi- 
nistrations différentes  mirent  la  main  ï  la  vaste  entreprise 
ia  cloaques,  od  la  conduisit  avec  tant  de  lenteur,  qu'il 
as  fnl  guère  posalble  de  concevoir  un  plan  d'ensemble. 
Ks  1S5!,  l'administration  municipale  reconnut  que  la 
cualiiation  aouterraine  de  Paris  avait  besoin  d'èlre  sys- 
tématisée et  conaldérablement  améliorée.  Las  ingénieurs 
proposèrent  un  plan  général-pour  écouler  rapidement, 
al  tans  Inondation  posaibU  dai  rues,  comme  cela  arrivait 
»Ki  souvent  dans  nlasieura  quartiers,  toutes  les  eaux 
néDigèrea,  iDdusIrielles  ou  pluviales  de  Paria.  Le  grand 
Eïoul  dt  etintur»  était  alors  la  principale  cloaque  :  il 
siait  été  ToQié  vers  1740,  passait  au  pied  des  coteaux  qui 
•e  développent  dans  les  faubourgs  au  N.-E.,  au  F4.  et  an 
N.-O.,  en  partant  de  la  rue  de*  Coutures  S'-Gervais,  et 
tbooiissait  à  la  Seine,  en  léte  du  qua!  de  Bllly.  Son  par- 
cours était  de  6,800  met.  environ,  et  il  recueillait  toutes 
let  eaui  des  quartiers  supérieurs  et  une  partie  de  relies 
iks  quartien  M*.  Quoique  mal  appliquée  i  cause  de  la 
Inp  faible  section  de  cette  galerie,  l'idée  était  heureuse. 
Le  sol  de  Paria  fut  dirisé,  suivant  les  iné^Iités  de  son 
Rlief,  en  cinq  bassina,  à  l'instar  des  bassins  géograplii- 
tpKa;  ta  rive  droite  en  eut  trois  :  l'un,  bassin  de  Cha- 
ninné,de  Bellerille,  de  Montmartre,  embrassa  le  N.-E. 
«  la  N.j  —  )e  second,  tout  (t  fait  central,  comprit  les 
qnsrtien  S'-Anloine,  du  Temple,  S'-Hartin  et  S'-Denis, 
1  l'E.  et  aa  N.,  et  ceux  du  Palala-Royal  et  des  Tuile- 
ries, à  l'O.  ;  —  le  troisième  sa  composa  des  coteaux  de 
Cbaillot,  ireitrème  Ouest;  —  te  quatrième  et  te  cin- 
quième, sur  la  rive  gauche,  surent,  au  S.-E.,  le  bassin 
M  la  Bièvre,  et,  an  S.-O.,  celui  du  Luxembourg,  de  S*- 
l>enHain-<tos'PréB  et  du  Gras-Caillou. 
Ui  divisions  adoptée*,  le  projet  de  canalisation,  au- 


3  !■*" 

qnel  on   aa  mit  avec  activité,  conaidCra  le  sol   de 

Paris  comme  un  ctiump  qu'il  FiUluit  di'sscclier  par  in 
drainage,  dont  les  druns  seraient  des  galeries  cloacalm. 
Un  décret  du  20  mars  1853  arrèu  qu'aucunes  eaux  mt^ 
nagères,  usagères  ou  d'égout  des  maison*  ne  devaient  gc 
répandra  sur  la  voix  publique,  et  que  chsque  rue  aurait 
son  égout  souterrain  où  les  maison*  riveraines  condut- 
ralent  leur*  eaux,  quelle  qu'eu  fût  l'ori^^na.  L'adminl*- 
tratlon  voulut,  en  outre,  poursuivre  l'insalubrité  ]osque 
dans  la  Seine  même,  où  tous  les  égouts  se  dL^vorsaienti 
elle  imagina  de  les  faire  aboutir  dans  six  gnindrs  galeries 
principales,  coupant  la  ville  h  peu  pré*  en  quatre  parties, 
et  ayant  pour  afDueots  13  ou  15  autres  galeries  secon- 
daiiês,  recevant  elles-mêmes  les  eaux  d'une  foule  d'anires 
^eriea  moins  grandes,  creusées  dans  toute*  les  direc- 
tions. Trois  des  maltresses  galeries  furent  construites 
pour  les  quartiers  de  la  rive  droite  :  la  ('■pandeTeiiré- 
mité  S.  du  bassin  de  la  Baatille,  et  suit  les  quais  Jusqu'à 
ta  place  de  la  Concorde  :  longueur,  4,000  met.;  —  la  i* 
descend  le  boulevard  de  Sébaslopol,  depuis  sa  nninirnnru. 
et  rdoint  le  précédant  au  pont  au  Change  :  longueur, 
t  ,K!M)  mât;  —  la  3*  vient  de  U  place  de  la  Bastille,  suit  la 
rue  S^Antoine,  puis  la  rue  de  HiroU  Jusqn'k  la  place  de 
la  Concorde:  longueur,  3,800  met. 

Des  iTois  maîtresse*  galerie*  de  la  rive  eanche.  la 
1"  prend  la  ligna  de*  qu^s,  depul*  le  poat  d'AoslerliU 
jusqu'au  pont  d'iéna  :  longueur,  6,Û0  mèL;  —  la  2* 
descend  le  boulevard  de  Sébastopol,  k  partir  de  sa  ren- 
contre avec  le  boulevard  du  Uont-Pamaase,  et  r^oint  la 
précédente  au  pont  S'-Michel  :  longueur,  1,'IHI  met.;  — 
—  enBn  la  3',  sous  la  boulevard  3<-Gennain,  commence 
&  l'extréuité  E.  de  ce  boulevard,  près  l'Entrepèt  des 
vins,  et  se  jetia  dans  l' égout  de  Si^bastopol,  au  point  d'in- 
tersection  de  ces  doux  boulevards  :  longueur,  1,100  mi>t.| 
puis,  se  prolonge  au  delli,]usqu'i  Urue  des  Saints-Pères, 
dana  une  longueur  de  plus  de  1,000  met 

Un  point  très-important  consistait  à  donner  aux  égouu 
des  proportions  en  rapport  arec  l'élandue  des  quartiers 
auxquels  lis  devaient  snrrlr  d'exutoice*  :  on  paitit  de  c* 
principe,  [bndé  sur  l'observation,  que  pour  100  hectares 
de  saperflcie  il  faut  un  égout  de  2  i  3  met  carrés  de  sec- 
tion mouillée,  c.-à-d.  pouvant  recevoir  une  petite  rivière 
pasaant  dans  une  ouverture  de  2  ii  3  met  carré*.  Dam 
cette  vue,  on  choisit  13  types  d'égouts,  dont  le  plus  petit 
a  S^.IS  de  hauteur  sur  l'élis  de  largeur;  et  te  plus 
grand,  {".U  de  hauteur  sur  5*° ,COda  largeur.  —  La  petit 
égout  est  de  forme  ovoïde,  avec  sa  grande  section  pair  en 
haut,  ce  qui  permet  à  un  ouvrier  de  s'y  mouvoir  san'4 
peina  pour  procL^er  au  curage,  ainsi  que  la  fut  voir  la 
flg.  ci- dessous. 


POU  «oui  timple. 

Le*  maîtresses  branches  de  ce  vaste  sjatème  ont  reçu 
de  leur  destination  spéciale,  le  nom  d'EflOult  collKlmr* 
tel  est  te  nom  adminisiratif  des  trois  grands  égouts  di'i 

Ïiartiers  de  la  rive  droite  ds  la  Seine,  el  des  trois  de  la 
ra  gauche,  décrits  plus  haut,  1"  et  S»  alinéa.  Cen 
égouta  ont  un  caractère  de  magnificence  qui  nous  a  inspiré 
le  nom  de  Paris  cloacai,  parce  qu'ils  rappellent  la  célèbre 
Ctoagtu  Maxime  de  Rome  ancienne,  en  pensée  néan- 
moins plus  qu'en  réalité;  car  par  leur  importance,  leurs 
proportions,  leur  étendue,  leur  aménagement  deserrice 


PAR 


1374 


PAR 


et  de  neltoTige,  Ils  li  surpuient  loBnlment.  «t  rien 
n'empêche  de  conjecturer  qua  leur  durée  égalera  celle  du 
Célèbre  ouvrage  de»  Tarquins.  —  Nous  «lion»  entrer 
msintensnl  dans  quelques  descripiloni  pin»  précises  sur 
leun  proportions  et  leur  construction. 

Le  Colleeteur  da  boulevard  dt  Sibattopot  (rive  droile) 
est  à  plein  cinire;  il  mesure  *"",27  de  hauteur,  5",!0  de 
largeur;  s«  eunette,  large  de  1",20,  profonde  de  0",e2, 
cjt  bordée  de  deui  banquettes  de  0",80  chacune.  La  flp. 
ci-dessous  le  représenta  en  coupe  et  en  perspeclite  tout  à 
la  fols.  Au-dessus  de  ses  banquette»,  et  portées  par  des 
colonnes  de  fonie  terminée»  en  croissant,  courent  deu» 
conduites  d'eau  de  foniaine.  Tune  k  droite,  de  1"',10  de 
dlamâtre,  l'autre  ^  gauche,  de  O^.SO.  Ce  collecteur  peut 
absorbée  en  'emris  d'averse  la  pli 


de  la  moitié  de»  quartier*  de  la  rire  droite,  et,  en  m 
d'engorgement,  dérerser  son  trop-plein  dans  ta  Seine, 
sans  JamuB  laisser  refluer  le  torrent  cloacal  mtma  dans 
les  rues  où  sont  lea  boocbei  d'absorption. 

Le  CoUielear  dtt  fluaw,  tantût  t  pldn  dntie,  taniat 
ellipsoïde,  suivant  l'état  et  le*  aiigences  de  ni* esa  de  is 
voie  publique,  forme  nne  galerie  de  3",15  ou  3",Î0  ■}« 
hsuteur,  sur  un  diamètre  da  4  mètres.  S*  eunette  s  f.-li 
de  largeur,  1  mèlre  da  profondeur,  entre  deui  banquette.* 
de  O^.TO  chacune,  La  Bgure  d-deesoua  le  représerit 
avec  un  petit  wagon  de  curage  roulant  sur  des  rail» 
scellé»  dan»  le  fond  mSme  de  la  eunette  :  noua  parlerons 
nlu»  bas  de  ce  curage.  A  droite,  on  voit,  sur  des  en- 

,_ _.._.     iorbellements  de  fer,  une  conduits  d'eau  de  foni«ne,de 

abondante,  les  éaiu  |  0°'.G0  de  diamètre. 


■  CelltiUm-  (hi  bmlna> 
[fl(w  divi 

j|«cl«ur  da  boulevard  i 

.ecMons:  l'une  du  Sud,        . 

Sud,  qui  flnic  au  boulevard  S'-Germain,  est  de  forma 
oTOldale,  haute  de  3™, 15,  large  da  2'",5II,  arec  une  eu- 
nette large  de  0'",79.  profonde  de  0'",40,  Oaûquée  de  ban- 
quettes de  0"',M  d'un  cûté,  et  de  0'",!M)  de  l'autre  :  cette 
dernière  supporte,  sur  de  petites  colonnes  de  fonte,  une 
conduite  d'eau  de  Cantaine  de  I^.IO  de  diamètre.  —  Ia 
section  du  Nord  commence  h  la  renrontre  du  boulevard 
S '-Germain,  et  aboutit  au  pont  S '-HicheU  ici,  la  galerie 
est  également  ovoldale,  et  mesure  3", 70  en  hauteur  et  en 
lar^ur.  Sa  eunette,  de  l",?!)  de  largeur,  0'",S0  de  pro- 
fondeur, est  canionnée  de  "i  banquettes  de  1  met.,  dont 
celle  de  droile  porte  une  conduite  d'eau  de  fontaine  da 
l'.lO  de  diamètre. 

'Tous  lea  quartiers  au  bas  de*  cotesui  de  la  rive  droite, 
uiureles  faubourg» S'-DenI*  et  S*-Aot4ilns, sont  desservi* 
par  on  Collecteur  semblable  b  celui  de  la  partie  Sud,  dé- 
crite ci-dessus. 

L'Êgoul  dt  ta  nu  d»  Bn<oli,  de  forme  légèr«ment 
ovoldale,  a  3",^  de  hauteur,  2™ ,40  de  largeur,  ft  la  nais- 
sance de  la  TOùte,  avec  nne  eunette  ou  canal  d'eau  de 
i'",30  de  largeur,  sur  0',SO  de  profondeur,  entre  deux 
banquettes,  larges  da  0",40  chacune.  Il  doit  Être  ausil 
compté  parmi  lea  grands  collecteur»,  en  raison  de  la  forte 
section  de  ta  cunelle;  en  effet,  il  reçoit  dan»  son  long 
parcours  une  multitude  d'embranchements,  plu»  ou 
moin*  contidérahlei,  qui  lut  versent  une  notable  partie 
de»  eaui  fournies  par  le*  quartiera  de  la  rive  droite  de 
la  Seine. 

Les  égouls  Intèrleun  de  piâmier  ordre,  et  la  plupart 
de*  égonts  secondaires,  renferment  une  ou  daui  conduites 
d'eau  de  fontune,  dont  les  moindres  diamètres  sont  de 
0^,30.  En  outre,  toute  ^erle  flanquée  de  deux  ban- 
pnettea  a  les  arêtes  aupéneures  de  sa  eunette  munie*  de 
rails  pour  la  circulation  d'un  wagon  de  curage. 

Tous  les  égouts,  grandi  ou  petits,  sont  construits  en 
pierre  meulière  et  ebaui  hydraulique,  avec  enduits  inté- 
rieurs en  ciment  romain.  Lea  loQtes.à  la  fols  solides  et 
légères,  u'ont  que  30  Ou  iO  centim.  d'épaisseur  pour  les 
petites  ou  les  moyennes  galeries,  et  ii  ou  iO  pour  les 


Collteltiff  da  fuoii  Ji  Ja  Srinr. 

pluH  grandes.  La  plupart  des  anciens  égouls,  mat  établis. 

Les  égouls  collecteurs  aboutissc^L  i  la  place  de  la 
Concorde,  où  Us  se  déversent  dans  un  CoUictcur  général. 
dont  nous  parlerons  tout  à  l'bcurc.  Une  grande  dilhcultii 
se  présentait  pour  leCoUecteurdesqusisdelarivegauclie, 
celui  qui,  peut-être ,  reçoit  le  plus  d'eaui  sales,  infectes, 
corrompues,  et  le  plus  constamment;  car  depuis  ISO'2  oo 
;  a  fait  entrer  la  rivière  de  Bièvre,  qui,  auparavant, 
tombait  dan»  la  Seine,  au  pied  et  en  amont  du  poni 
d'Austertiti.  Or  ce  petit  cours  d'eau  dessert  toutes  les 
mégisseries,  teinturerie»,  tannerie»,  etc.,  du  fauboun: 
S'-Marcel,  de  sorte  qu'il  n'est  plus,  en  réalité,  tpi'un  vé- 
ritable égout  des  plu»  immondes.  SI  l'on  avait  fait  dé- 
gorger dans  la  Seine  le  Collecteur  des  quais  de  ce  cAté  d« 
r»  ville,  on  n'aurait  débarrassé  le  deuve  de  tant  d'impu- 
retés SOT  un  point  que  pour  les  reverser  un  peu  plu»  bai 
*ar  an  autre.  Il  fallait  éviter  ce  grave  inconvénient ,  et 
pour  cela  faire  déboucher  ce  Collecteur  au  même  point 
que  le»  autres.  Alora  on  conçut  l'Idée  hardie  de  la  lancer 
t  travers  la  Seine,  dan*  un  aqueduc  passant  sous  le  lit 
mïma  du  fleuve.  Cet  aqueduc  est  un  immense  tuyau- 
alphon,  en  fer  battu,  ayant  I  mèl.  de  diamètre  à  l'inté- 
rieur, et  près  de  200  met.  de  longueur.  11  est  immergé  k 
3  met.  au-dessous  des  basses  eaui,  un  peu  en  amont  do 
pont  da  la  Concorde. 

Hai»  la  plus  belle,  la  plus  mW»trale  de  ns  grandes 
cloaques  est  te  CoII«cesur  général,  qui,  partant  de  la 

6 lace  de  la  Concorde,  chemine  dans  la  direction  du  N.- 
.-O.,  et  vient  tomber  dans  la  Seine  à  une  centaine  da 
mètres  en  aval  du  pont  d' A  sni  ères.  On  a  été  chercher  aussi 
loin  le  dégorgement  de  cette  cloaque,  alla  da  pouvoir  lui 
donner  plus  de  profondeur,  et,  par  suite,  k  tous  les  autre» 
égout»!  parce  que,  dan»  l'anden  système,  l'inondation  de 
certains  quartien  venait  du  manque  de  profondeur  de» 
égoula,  dont  U  niveau  le  plu*  bas  *e  trouvidt  au  débouché 
du  grand  égout  de  ceinture  dans  la  Seine,  k  Î30  met.  tn 
ivaldu  pont  de  l'Aima.  Parce  changement,  on  a  pu  ga- 
gner BOcentim.de  profondeur  de  plus  ;  cardelMusqu'iD 
peut  d'Asnières,  le  Oeuie,  en  fuyant,  se  replie  en  nn 
vaste  ruban  long  de  20  lùlomètres. 


Le  CoOeeleuT  général  ast  une  loris  de  tuanel,  voAti 
«aatc  (urbtieaé  dit  en  atiBe  de  paolsr;  il  a  5  mètres  da  i 
htutaur  sur  i^.SÛ  de  largeur  6  ion  aie;  ta  cuoette  me-  | 
■lire  3'i50  de  largeur,  sur  {•',3b  de  prorondeur.  eatre 
detu  banquette!  de  Ô'fiO  ebacune.  La  longueur  da  ce 
canal  est  de  b  kilométrée  et  demi  eniiron,  ea  une  linne  . 
presque  droite,  aaut  nn  coude  près  du  départ,  i 


PAR 


..     .  _  .   _...      _  I.  prise  i  plusieurs  centaina«  de 
mètres  aTant  Bon  emboncharedans  lu  Seine. 

Tous  les  grands  égouls  sont  construits  en  pierre  msu- 
lière,  soigneuseoieDl  équarrle;  par-daasua  la  voûte  cat 
une  ma^Querle  de  blocage,  puis,  entlit,  une  cliape  en 
:lmeot  romain  qui  la  recouvre  tout  entière  et  la  prouSge 


I  Ik  '■  contre  les  inBltratioi 


e  de  l'église  de  la  Haiileleine.  Ia  Ogure  ci-dessous     ègouts  ont  leur  voûta  si 


e  petili 


ir  giaéral  da  fyanii  di  Paru. 


Lfî  Collecteur  gi^nérsl  se  cura  de  la  manièro  suivante  : 
«jr  SCS  eaui  noires,  vaseuses  et  grasses,  que  les  Anciens 
auraient  com pariées  &  l'Achéron,  est  un  bateau,  maintenu 
a  Ilot  en  tout  temps  au  moyen  do  vannes  mobiles,  hermé- 
lïqucs,  espacées  dans  toute  sa  longueur,  el  pouvant 
f<'rmer  écluses.  L'avant  du  bateau  pone  une  vanne,  ma- 
HŒUvrëe  par  un  engrenage,  et  qui,  abaissée,  remplit 
bute  la  Kciton  mouillée  de  la  cunette  ;  on  descend  cette 
vanne  jusqu'h  0'',15  du  fond;  le  flot  s'accumule,  et,  dès 
qu'il  atteint  0°',&0  de  surélËvation  en  amont,  le  poids  de 
l'eau  SUT  la  ranne  produit  une  chasse  si  puissante,  que 
la  vase,  les  sables,  les  pierres  mSme,  sont  roulés  et 
lancés  i.  100  met.  de  distance,  où  le  bateau  va  les  ro- 
prendre  jusqu'h  ce  qu'il  les  ait  conduits  à  l'embouchure 
de  l'émusaire.  Il  faut  10  Jours  pour  curer  ainsi  le  canal 
d'un  bout  i  l'autre.  Quatre  baieaoi  font  ce  aervice. 
L'émissaire  est  renlité  de  place  en  place  par  des  regards, 
dont  les  mura  sont  munia  d'échelles  de  Ter,  par  où  leaou- 
trieis  pouveot  toulouis  remonter.  Des  lampes  k  buile. 


appliquées  sur  un  cflté,  éclairent  la  cloaquaa  Trempa 
ordinaire,  le  Collecteur  cénéral  débite  3.0W  mût.  cubes 
d'eau  i  l'heure,  soit  86,000  en  24  heures  i  e,  temps  dV 
ra^ie,  il  peut  en  écouler  cinq  ou  sii  fois  autanî^ 

Dans  les  Collecteura  secondaires,  le  wagOEL  ir^ls  tient 
lieu  du  bateau,  qui  ne  pourrait  flotter  sur  la  cnn-tl»,  or- 
dinairement  trop  peu  fournie  d'eau  ;  k  cet  efTel,  l'»»ant 
du  wagon  porte  une  vanne  qui  s'abaiase  Jusque  dans  la 
cunetle,  dont  elle  remplit  toute  la  section  mouillée;  li' 
hommes,  aidés  un  peu  par  le  courant  de  l'égout,  pui- 
sent le  wagon  en  aval ,  et  la  vanne  chasse  alnit  touCa  la 
vase  detant  elle. 

Que  l'on  compara  maintenant  ia  Tameuse  Cloaque 
Maa^m*  de  Rome  ancienne,  dont  il  existe  eocore  un 
quart  environ  ,  avec  ce  CotltcUur  général ,  et  l'on  recou- 
n^tra  combien  l'ouvrage  moderne  surpasse  l'ancien.  La 
Cloaque  romaine  esl  construite  en  pierres  de  tsillei  elle 
a  10  met.  environ  de  hauteur,  k  partir  du  lond,  mais  sa 
largeur  n'est  que  de  4"',47,  et  l'on  conjecture  iiue  ■•  plu- 


^i 


(^Dde  langueur  i 

t-i-d.  T  à  8  roi«  ,— -,—.  --  .---  -       ,      ,  . 


Ae  la  Cloaque  Muime  est  complètement  btitné  par 
reau  :  nulle  banquette  pour  y  pÉnétrer,  nulle  unuoniiité 
dan*  la  voûte,  tantôt  haute,  lantOt  très-basse  :  nulle  dis- 
position pour  y  faire  passer  des  conduites  d'eau  de  fon- 
iiUne  :  aucan  moyen  de  curwe  ^ile  ;  [uisti  la  laissaitHja 
■évaser,  et,  quand  e^e  était  eDUiremeot  olstruëe,  on 


m  radier,  ni  pour  les  services  qu'elle  de- 


obstruée,  sans  beaucoup  d'ineonvénieot ,  lusqo  h  la  nais- 
sance de  la  TOÛle.  —  Les  flg-  d-desaous  représentent  Is 
tue  extérieure  de  la  bouche  de  la  Cloaqut  Maxim*  dans 
le  Tibre,  ei  celle  du  CallecUur  générai  dnn»  la  Seine. 
l'uDD  et  l'autre  des^nécs  k  la  mCme  échelle. 


«S 


Coucht  du  Collfclf II 


DoudH  lit  la  Cloa^t  J/oxfou  A 


Les  Cloaques  de  Paris,  depuis  le  tyslàme  d'ensemble 
appliqué  A  leur  consiructioa ,  todt  calculées  pour  ab- 
sorber toujours  les  plus  abondantes  pluies  d'orage  qui 
peuvent  tomber  sur  la  ville,  et  la  quantité  en  est  quel- 
querois  très-considt^rable  i  ainsi ,  le  8  Juin  1840,  un  orage 
qui  n'a  duré  qu'une  heure  a  leti,  sur  les  quartiers  où  il 
aéièle  plus  fort,  450  met.  cultes  d'eaa  par  aectare. Dans 
les  égouts  antérieurs  à  notre  temps,  on  n'aralt  considéré 
que  les  moyennes,  et  encore  empiriquement;  de  Ik  des 
inondations,  l'absorplion  ne  se  Taisant  pas  toujoun  aa»ei 
rite  ;  tandis  que  les  ingénieurs  de  nos  Jours  ont  calculé 
les  maasima,  constaté»  par  l'obseniOion  tdeoUQque. 

En  rétumù,  Paris  cluacul  uiTrit,  dé*  l'année  1»62,  un 
parcours  du  ISi)  kiloiiiaiius;  duits  |iou  d'unoéus,  il  sa 
composera  d'autant  de  amaui  que  la  ville  compte  de 
rues.  Alors  ces  deui  Paris  superposés  offriront  chacun  un 
parcours  deiJtiO  kilom.,  et,  suivant  les  probabilités  tou- 
chant l^dffViaBement  ds  la  viabilité  de  la  ville,  cette 
prepntidWlra  un  Jour  h  540  kilomèt.,  qui  auront  coûté 

SvrfSR^  millions  de  francs!  Tout  le  système  actuel  de 
^  cloacol  a  été  étudié,  tracé  et  exécuté  par  U.  Bel- 
smod ,  ingénieur  en  chef  du  service  municipal  de  la  ville 
P^aiParis,  ou  sous  sa  direction,  et  pendant  l'administ ration 
4^^i^  U.  Hauiamann,  préfet  de  la  Seine. 
:'§!      nien  n'approche  d'une  pareille  encrepriae,  ni  dans  l'an- 
V.    liquiié,  ni  [±ei  aucune  des  )dus  puissante!  nations  mo- 
7       derues;  on  n'a  jamais  vu,  et  on  ne  voit  encore  aucune 
'i4        construction  de  ce  genre  qui  toit  aussi  bien  entendue 
*'         dans  son  ensemble,  aussi  sagement  et  savanmient  ordon- 
née dans  ses  détails,  aussi  monumentale  dans  son  eiécn- 
tion ,  aussi  grandiose  dans  son  aspect.  Et  ce  ^li^ntesque 
trariiil  am-u  été  exécuté  et  complflé  en  moins  d'un  dcmi- 


aiècle!  V.  Prnnter  et  stcniid  mémoire  sur  It*  «aMX  d» 
Paru,  prci«ntef  par  U  préfet  dt  la  Seini  au  Coninl  mu- 
nicipal, Paris,  'ig&8-59,  3  vol.  in-4°,  dont  un  de  plan- 
ches. An.  H.  et  C.  D— r. 

FAais  (Uanuments  public*  de)  au  point  de  vue  admi- 
nistratif. —  L'antiquité,  si  souvent  prise  pour  modèle 
dans  nos  monuments  public*,  ne  nous  a  nen  appris  de 
aa  propre  histoire  touchant  le  point  analogue  a  celui 
dont  nous  allons  poiler.  On  trouve  dans  Vitruve  quelque* 
brefs  détails  sur  les  réglementa  relatifs  aux  édifices  pri- 
vés, mais  rien  sur  les  monument*  publics,  pris  aa  seni 
moderne!  nous  faisons  cette  diatincdon  parce  que  tous 


.     .  , - .  étaient  des 

idividudles,  et  gardaient  toujours  ce  caractère; 
leur  appellation  le  disait;  par  exemple,  It  Rome,  la  Bas!  - 
lique  de  Paulus,  le  Théâtre  de  Potnp^,  le  Cirque  Flami- 
nius,  le  Portique  d'Octavie,  l'AmphitbéAtre  de  StaUlius 
Taurui,  l'Ampbi théâtre  Flavien,  etc.,  granlet  construc- 
tions qui,  chei  les  Uodernes,  «e  seraient  appelées  dr^ 
monumenti  publics.  A  Rome,  elles  n'avalent  de  publie 
que  le  terrain  où  elles  s'élevaient,  et  leur  destination, 
consacrée  au  tervice  ou  aux  plaisirs  do  peuple.  L,es 
Temples  mâmes  étaient  presque  anssi  connus  par  le  nom 
des  édiHcateurs  que  par  celui  de  leur  divinité,  tels  que  : 
le  Cspiiole  d'Horaiius  Pulvillus,  puis  de  Sylla,  puis  de 
Vespasien,  puis  de  Domitien ,  le  temple  de  la  Concorde, 
Gb  Camille,  pois  de  Tibère;  le  Panthéon  d'Agrlppa,  le« 
Sepla  Julia,  les  Septa  Agrjpplana,  etc.  Ces  monuments 
étalent  si  bien  considères  comme  des  édifices  priréa,  ton- 
jours  la  propriété  de  eettx  qui  les  avaient  élevé*  on  de 
leur*  descendants,  que  si  ces  dernier*  ne  les  enïre  t«naien'i 


PAR 


1377 


PAR 


pus,  on  168  laissait  se  dégrader  ]usqu*à  deyenir  raines 
tout  à  fait ,  à  moins  qu'une  main  généreuse  ne  les  re»- 
taurftt. 

Dans  nos  États  modernes,  et  particulièrement  en 
France,  la  science  de  l'administration,  très^imparfaite- 
ment  connue  des  Anciens,  a  établi ,  au  profit  de  Tait  et 
iQ  profit  de  tous,  une  tradition  tout  à  fait  différente; 
d'abord  les  monuments  publics  sont  distincts  des  monu- 
ments prÎT^  :  on  qualifie  monuments  publics  les  édifices 
élevés  pour  la  gloire  de  la  nation,  le  service,  la  jouissance 
oa  l'agrément  de  tous  les  citoyens  en  général ,  en  un  mot 
da  public^  qui  est  littéralement  chez  nous  ce  que  le  peuple 
était  dans  les  sociétés  antiques,  et  notamment  dans  la 
Bodété  romaine,  à  toutes  ses  époques.  Ce  qui  distingue 
encore  les  monuments  publics,  c'est  qu'ils  sont  érigés 
aux  dépens  du  public,  c-à-d.  sur  des  fonds  provenant 
des  impôts  généraux  ou  spéciaux  payés  par  tous  les 
citoyens. 

Au  point  de  vue  de  l'édification,  de  la  dépense,  de  la  con- 
Ber^-ation,  de  l'entretien,  de  la  perpétuité  des  monuments, 
l'organisation  moderne  dépasse  de  beaucoup  l'espèce  de 
\ibre  arbitre,  l'initiative  isolée  et  toute  personnelle  des  An- 
ciens. Nous  avons  déjà  parlé,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire,  du  Conseil  des  b&timents  civils, 
siéent  à  Paris,  et  chargé  d'examiner  les  projets  et  les 
devi*^  concernant  les  constructions  de  tous  les  bâtiments 
cirils  de  l'Empire  :  un  corps  d'architectes  les  exécute,  et 
l'administration  attache  toujours  un  et  souvent  deux  de 
ces  artistes  à  chaque  édifice  en  construction,  ou  même  an- 
cien. Paris,  petit  État  dans  l'État,  peut  servir  de  modèle 
en  ce  point  :  il  a,  pour  ses  monuments  publics,  un  Ser- 
vice  des  travaux  d'architecture  du  département  de  la 
Seine  et  de  la  ville  de  PariSy  réorganisé  par  arrêté  pré- 
fectoral du  31  mars  1860,  et  ainsi  composé  :  un  archi- 
tecte directeur,  centralisant  toutes  les  parties;  quatre  ar- 
chitectes en  chef,  de  1"  et  de  2"  classe,  pour  les  édifices 
communaux  ou  départementaux;  un  contrôleur  en  chef; 
deux  architectes  ordinaires,  chargés,  sous  les  ordres 
immédiats  de  l'architecte  directeur,  l'un  des  travaux  de 
l'Hôtel  de  Ville  de  Paris,  l'autre  de  tout  ce  qui  se  rap- 
porte aux  beaux-arts;  dix  architectes  ordinaires  attachés 
à  des  sections  territoriales  déterminées,  et  chargés,  sous 
l'autorité  des  architectes  en  chef,  de  tout  ce  qui  concerne 
les  édifices  eommunaux  ou  départementaux  situés  dans 
leurs  sections  respectives;  enfin  des  inspecteurs,  des 
contrôleurs,  des  sons-inspecteurs,  des  contrôleurs-ad- 
joints, des  conducteurs,  etc.;  l'ensemble  du  service 
forme  un  efTcctif  de  40  personnes,  non  compris  un  ser- 
vice extraordinaire  à  peu  près  aussi  considéxâble. 

Tout  ce  service  reçoit  des  appointements  fixes.  Les  ar- 
chitectes ne  peuvent  faire  ou  faire  faire  aucun  travail  en 
dehors  de  leurs  attributions  sans  une  autorisation  spé- 
ciale et  par  écrit  du  Préfet  de  la  Seine.  Leurs  honoraires, 
augmentés  quelquefois  d'allocations  éventuelles,  sont 
ainsi  fixés  :  l'architecte  directeur,  de  12,000  à  15,000  fr.; 
l€s architcotes  de  i'*  et  de 2« classe,  de  10,000  à  12,000  fr., 
et  dft  8,000  à  10,000  fr.  ;  le  contrôleur  en  chef,  de  8.000  à 
10,000  fr.  ;  les  architectes  ordinaires,  de  5,000  à  7,000  fr.  ; 
les  in<;pecteurs,  de  3,000  à  4,500  fr.,  etc.  En  outre,  des 
frais  de  bureaux  sont  alloués  :  à  l'architecte  directeur 
6,000  fr.  ;  h  chacun  des  architectes  en  chef  et  au  contrô- 
l'ur  en  chef,  3,000  fr. ;  à  chacun  des  architectes  ordi- 
na  rp^,  2,000  fr. 

Les  monuments  de  la  France  sont  placés  sous  deux 
sorte»  d'au  ion  tés  :  celle  du  gouvernement  et  celle  de  la 
couiinune.  Le  gouvernement  a  daus  ses  attributions 
direcies  les  palais  nationaux,  les  musées,  les  hôteU  des 
miui:»tted,  dus  grandes  admiiiistratious,  les  églises  et  les 
«diiices  diocésains ,  les  arcs  de  triomphe ,  les  colonnes 
monumentales,  les  statues,  etc.;  la  seconde  catégorie 
enibraa&e  les  monuments  qui  n'intéressent  que  les 
villes.  A  Paris,  les  édifices  diocésains,  parmi  lesquels 
sont  rangés  l'église  métropolitaine  de  ^otre-Dame,  la 
bau>iliqu<;  S**-Geaeviève,  laS^-Chapelîedu  Palais,  l'arche- 
vteiié  ei  les  séminaires,  font  partie  du  domaine  de  TEtat. 

Le  Conseil  dos  bâtiments  civils  exerce  son  contrôle 
s>tr  tous  les  cUiiices  de  Paris,  et  sur  ceux  du  reste  de  la 
Iriauce,  mais  seulement  lorsque  ce  contrôle  est  demandé 
r^r  le  préfet.  Certains  monuments,  remarquables  par 
les  souvenirs  qui  s'y  rattachent,  ou  qui  sont  des  œuvres 
d'art,  sont  placés  sous  la  surveillance  d'une  Commission 
ies  monuments  historiques,  créée  vers  1830,  et  chargée 
de  rechercher  les  antiquités  et  de  veiller  à  la  conserva-: 
ion  des  monuments  qui,  après  examen,  sont  déclarés 
wtoriques;  alors,  en  principe,  leur  restauration,  et  tous 
^  travaux  qu'on  y  fait,  sont  k  la  charge  de  l'État,  er 


quelque  lieu  de  la  France  que  soient  situés  ces  monu- 
ments; mais  ce  principe  soutfre  bien  des  exceptions,,  par 
exemple,  quand  les  villes  et  les  communes  peuvent  sup- 
porter les  frais  à  faire,  et  Paris  est  toujours  rangé  dam 
.  cette  catégorie.  Un  inspecteur  général  seconde  et  dirige 
les  travaux  de  la  commission,  composée  d'architectes, 
d'antiquaires,  d'administrateurs,  et  présidée  par  le  Mi- 
nistre des  Beaux-Arts* 

L'administration,  si  bien  entendue,  si  bien  organisée 
pour  l'édification,  l'entretien  ou  la  restauration  des  mo- 
numents de  Paris  en  particulier,  et  de  la  France  en  gé- 
néral, doit  en  prolonger  la  durée  pendant  bien  des  siècles; 
c'est  comme  une  lutte  incessamment  victorieuse  contre  un 
climat  naturellement  peu  conservateur,  et  par  suite  un  vé- 
ritable service  rendu  à  l'art  et  à  la  civilisation.    G.  D — t. 

UONDUENTS   DB   PARIS. 


V.  Clotildb  (S'«-).  \ 
Notae-Dahb. 
Notre-Dahe-de- 

I/>RBTTB. 

Madeleit«b  (La). 
Panthéon, 
sorbonne. 
SoLPiCE  (Saint-). 
Vincent- DE -Paol 
(Saint-). 


L  Églises» 

«.«»       F.  AOGCSTIN  (S*-) 
^-^  Chapelle  HLa  S**-). 

EUSTACHB  (S*-). 
Étibnne-du-Mont  (S'-' 
GERUAiN-DBS-Pnés  ;S*-) 
Germain  -  l'Auxerrois, 

(S*-). 
Gervais  (S»-). 


.2  6,    . 
e  ^  ^ 

ai 


■S 


RocH  (S»-) 

(La). 


Trinité  (] 


n.  Paiais. 


I 


s-s. 


F.  Éltsi^ 

Inoustrie  (Pa- 
lais del'). 

lNSTrrDT(P£uais| 
de  1'). 

LOOVRB. 

Luxembourg. 
Palais  du  Con- 
seil d'État. 
F.  Beaux-ârts  (Palais  des). 
Bourse  (Palais  de  la). 


F. 


fi  K  s»? 

Q 


Palais  DU  CoRPs^ 
Législatif. 

Palais  de  Jus- 
tice. 

Palais  DE  LA  LÉ-}  o'§  ^«^ 


GION     D'HoN 
NECR. 

Palais-Royal. 

Toileries. 


Q 


I  Dans  le  présent  oumrage. 


m.  Monuments  civils. 


F.  Abattoirs. 

Carnavalet  (Hôtel). 

Catacombes. 

Colonnes  monumen- 
tales. 

Greniers  de  ré-1 
serve. 

Grenelle  (Puits  de) .  | 

Halles. 

HÔTEL-DE-ViLLX. 

Invaudes. 
Jacqubs-la-Booche-I 

RiB  (Tour  de  s»-). 
La-Chaisb  (Cime-| 

tière  du  P.-). 

BlARCUÉS. 

MÉDECINE  (École  de). . 
MiuxAULE  (École).    / 


F.  Monnaies  (Hôt^  des).  1^3 
Nesle  (Tour  de). 
Observatoire. 
Opéra. 

Opéra-Cohiqub. 
Thermes. 

Vins  (Entrepôt  des). 
Val-de-Gracb. 


si 


Bastillb. 

Carrousel  (Arc  du). 
Étoile  (Arc  de  1'). 
Fontaines. 
Porte  S^-Antoimb. 
Porte  S*-Bernard. 
Porte  S^Denis. 
Porte  S^-Martoi. 
Propylées. 


1 5» 

-si 


IV.  Musées. 
F.  Artillerie,  Louvre,  Luxembourg. 

V.  Promenades. 

F.  Boulogne  (Bois  de),  dans  le  présent  Dictumnatrê, 
et,  Champs-Elysées,  Jardin  des  Plantes,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

VI.  Places. 

F.  Louis  XV,  Royale,  Vendôme.  Victoires,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  S  Histoire. 

PARISE  LA  DUCHESSE,  chanson  de  geste  qui  s'an- 
nonce dans  les  premiers  vers  comme  un  poème  carloviu- 
gien  (F.  ce  mot  ),  mais  où  il  n'est  question  ni  de  Charle- 
magne,  ni  de  ses  pairs,  ni  de  ses  conquêtes.  La  donnée 
est  la  même  que  celle  des  romans  de  Berte  aux  grans 
pies  et  de  la  Violette  :  c'est  une  femme  innocente  et  per- 
sécutée, dont  la  vertu  finit  par  triompher.  Raymond,  duc 
de  Saint-Gilles,  a  épousé  Parise,  fille  de  Gamier  de  Nan<- 
teuil,  qui  a  été  assassiné  par  des  chevaliers  félons. 
Ceux-ci,  craignant  la  vengeance  de  Parise,  cherchent  h 


PAR 


1378 


PAR 


Tempoisonner,  et,  par  on  sort  fatal,  BeuTe,  frère  de  Ray- 
mona,  ayant  été  leur  victinie,  ils  accusent  la  duchesse  de 
ce  crime.  Chassée  par  son  époux,  Parise  s'éloigne  avec 
dix  chevaliers  qui  se  dévouent  à  son  service,  et,  arrivée 
dans  une  forêt  de  la  Hongrie,  met  au  monde  un  enfant 
que  des  brigands  lui  enlèvent  et  portent  au  roi  du  pays. 
Elle  est  réduite  à  devenir  nourrice  dans  la  maison  dn 
comte  de  Cologne,  où  elle  demeure  pendant  15  ans.  Son 
fils  Hugues,  élevé  h  la  cour  du  roi  de  Hongrie,  tue  quatre 
barons  jaloux  de  sa  fortune  et  qui  voulaient  le  faire  périr  : 
Teffroi  que  lui  cause  sa  victoire  et  le  désir  de  retrouver 
ses  parents  le  poussent  à  partir  furtivement.  Après  avoir 
rencontré  sa  mère  k  Cologne,  il  lui  rend  son  époux  et 
son  duché,  puis  accepte  lui-même  la  fille  et  le  royaume 
du  roi  de  Hongrie.  —  Ce  roman ,  dont  Tauteur  est  in- 
connu, parait  remonter  aux  dernières  années  du  xu'  siècle. 
Il  est  un  de  ceux  qui  marquent  la  transition  entre  le  pre- 
mier et  le  second  ftge  de  notre  littérature  romanesque  : 
par  le  choix  des  personnages,  et  surtout  par  la  forme,  qui 
est  la  tirade  monorime  et  le  vers  alexandrin ,  il  tient  à  la 
catégorie  des  Chansons  de  geste,  des  récits  épiques  puisés 
à  la  source  nationale;  par  Te  fond  et  par  les  moeurs,  par 
une  foule  d'épisodes  et  d'incidents  variés,  il  se  rapproche 
des  poômes  d'aventures.  Le  style  en  est  inculte  et  rude  ; 
mais  la  simplicité,  qui  ne  lui  manaue  jamais,  le  rend 
néanmoins  agréable.  Il  y  a  peu  d'art  dans  la  composition, 
mais  les  sentiments  sont  nobles,  élevés,  délicats.  On  re- 
marque certains  emprunts  faits  aux  romans  d^Ogier  le 
Danois  et  de  Gaydon.  U  n'existe  qu'un  seul  manuscrit  de 
Parise  la  duchesse  ;  il  est  à  la  Bibliothèque  nationale  de 
Paris  (fonds  Colbert),  et  contient  3,107  vers.  Il  a  été  pu- 
blié par  De  Martonne,  Paris,  1836,  in-8°,  et  par  Guessard 
et  Larcl^y  dans  la  collection  des  Anciens  po9Us  de  la 
France»  Paris,  1860,  in-16.  H.  D. 

PARISIENNE  (La),  chant  populaire,  presque  impro- 
visé par  C.  Delavigne,  immédiatement  après  la  Révolution 
de  Juillet  1830.  La  pièce  est  en  sept  strophes  avec  un  re- 
fram,  et,  sans  être  d'un  ordre  bien  élevé,  a  une  sorte  de 
chaleur  qui ,  répondant  à  la  passion  du  jour,  lui  donna 
une  petite  vogue  éphémère.  Elle  fut  écrite  sur  un  chant 
musical  qui  existait  dans  l'œuvre  du  compositeur  Auber, 
et  qui  devint  dès  lors  comme  la  Marseillaise  officielle  et 
habituelle  des  fanfares  de  la  royauté  de  Juillet. 

PARISIENNE.  K.  Caragtèubs  d'imprimerie. 

PâRISIS.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bto~ 
graphte  et  â^Histoire. 

PARISYLLABIQUE ,  se  dit,  en  grec  et  en  latin,  des 
noms  qui  n*ont  pas  plus  de  syllabes  au  génitif  et  aux  cas 
qui  s'en  forment  au'au  nominatif.  K.  Imparisyllabique. 

PARJURE,  se  dit  du  faux  serment  et  de  l'homme  qui 
le  commet.  Chez  les  Hébreux,  l'homme  parjure  devait 
offrir  en  expiation  de  son  crime  une  brebis,  ou  une 
chèvre,  ou  deux  tourterelles,  ou  une  certaine  mesure  de 
farine.  Les  lois  romaines  édictaient  diverses  peines  contre 
le  pariure,  telles  que  le  fouet,  le  bannissement,  l'infa- 
mie. D'après  les  Capitulaires  de  Charlemagne  et  de  Louis 
le  Débonnaire,  la  peine  devait  être  la  perte  de  la  main 
droite.  Plus  tard,  la  jurisprudence  fut  très-variab}e,  et  la 
peine  du  parjure  dépendit  des  circonstances  :  on  trouve 
des  condamnations  au  bannissement,  à  l'amende  hono- 
rable, au  payement  d'une  aumône  déterminée,  etc.;  le 
coupable  ne  pouvait  plus  être  admis  en  témoignage  ;  une 
ordonnance  rendue  par  Louis  IX  en  1254  lui  refusait,  en 
matière  civile,  le  bénéfice  de  l'appel.  Toutefois,  on  ne 

{>ouvait,  bien  qu'on  prétext&t  le  parjure,  faire  rétracter 
e  jugement  rendu  sur  le  serment  déféré  aux  parties. 
Notre  Code  pénal  dispose  que  celui  qui  aura  fait  un  faux 
serment  en  matière  civile  sera  puni  de  la  dégradation 
civique;  que,  si  la  dégradation  est  prononcée  comme 
peine  principale,  elle  peut  être  accompagnée  d'un  em- 
prisonnement dont  la  durée  n'excédera  pas  cinq  ans; 
que,  si  le  coupable  est  un  étranger  ou  un  Français  ayant 
perdu  la  qualité  de  citoyen,  la  peine  de  l'emprisonne- 
ment doit  to^jours  être  prononcée  (arL  35,  366,  466).  Ces 
dispositions  ne  sont  applicables  qu'aux  parties  qui  sont 
en  contestation  entre  elles.  Quant  aux  tiers  qui  seraient 
appelés  à  déposer  dans  un  procès  civil  ou  criminel,  ils 
sont  passibles  des  peines  du  faux  témoignage  (V.  ce  mot), 

PARLANTES  (Armes).  V.  Blason,  dans  notre  Diction' 
noire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

PARLANTES  (Mounaies),  monnaies  qui  ont  pour  iyjpe  un 
'  ijet  dont  le  nom  a  du  rapport  avec  celui  de  la  ville  où 
(' 'es  sont  frappées.  Ainsi,  une  rose  est  sur  les  médailles 
(i>.*  Rhodes,  un  cœur  sur  celles  de  Cardia,  etc. 

PARLEMENT.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionniare  de 
iHographie  et  d!' Histoire. 


PARLEfifENTAIRE,  individu  qu'un  général  charge  de 
dépêches  ou  de  missions  verbales  auprès  d'un  général 
ennemi.  Il  part  avec  un  tambour  ou  un  trompette; 
arrivé  aux  avant-postes  ou  sur  les  glacis  d'une  place,  il 
fait  battre  ou  sonner  pour  qu'on  le  reconnaisse;  après 
quoi  on  lui  bande  les  yeux,  et  il  est  conduit  auprès  de 
l'ennemi.  Il  est  ramené  de  la  même  manière.  La  per- 
sonne d'un  parlementaire  est  inviolable  doit  être  sacrée,  à 
moins  qu'il  n'abuse  de  sa  mission  pour  faire  l'office  d'es- 
pion. 

PARLEMERTAiRB  (Langage), type  de  l'urbanité  politique.  Il 
nous  vient  de  l'Angleterre  avec  le  parlementarisme,  et  re- 
pose sur  un  sous-entendu  éminemment  social,  que  tout 
homme  bien  élevé  doit  admettre  en  venant  siéger  dans  un 
parlement  :  c'est  qu'il  n'y  peut  rencontrer  que  d'honnêtes 
gens,  pleins  de  conscience,  sans  parti  pris  d'avance  pour  oa 
contre  telle  opinion  ou  telle  affaire,  sans  autre  ambition 
que  de  bien  servir  le  pays,  enfin  plein  d*honoràbUitéf  beau 
barbarisme  créé  pour  rusage  spécial  des  parlements.  Le 
langage  parlementaire  n'admet  ni  la  franchise  trop  fran- 
che, ni  les  vérités  trop  crues,  ni  les  antipathies  trop  pro- 
noncées. Si,  dans  la  chaleur  des  discussions,  quelque 
membre  oublie  ces  prescriptions  tacites,  son  langi^  n'est 
pas  parlementaire  ;  et  s'il  y  manque  trop  ouvertement,  et 
ne  retire  pas  immédiatement  ses  paroles,  comme  on  dît, 
bien  qu'il  ne  soit  guère  possible  de  rattraper  des  paroles 
envolées,  alors  le  président  de  l'assemblée  le  rappelle  à 
l'ordre.  Enfin  le  langage  parlementaire  est  à  la  politique 
ce  que  le  langage  académique  est  à  la  littérature,  un 
euphémisme  uti4e,  et  peut-être  plus  nécessaire,  dans  une 
société  très-civilisée,  que  ne  le  croient  certains 'esprits 
misanthropiques.  C.  D — y. 

PARLOIR  AUX  BOURGEOIS,  nom  qu'on  donna  d'abord 
aux  hôtels  de  ville,  parce  qu'ils  se  réduisaient  à  une 
grande  pièce  avec  quelques  dépendances  où  les  bourgeois 
venaient  causer  de  leurs  affaires  et  de  celles  de  la  com- 
mune. 

PARMA.  V.  BoucuER. 

PARME  (École  de),  une  des  écoles  italiennes  de  pein- 
ture que  l'on  comprend  sous  la  dénomination  générale 
d'École  lombarde.  Elle  ne  remonte  guère  plus  haut  que 
l'année  14C2,  où  l'on  trouve  deux  tableaux  attribués  à 
Barthélémy  et  à  Jacques  Loschi,  son  gpndre.  C'est  le 
Corrége  qui  lui  a  donné  toute  sa  célébrité  au  xm*  siècle: 
il  forma  son  fils  Pomponio  Allegri,  F.  Capelli,  Ant.  Ber- 
nieri,  Rondani,  Anselmi,  Bernardo  Gatti,  Gandini,  Maz- 
zuoli  dit  le  Parmesan,  etc.  Dans  le  siècle  suivant,  l'école 
tomba  en  décadence,  et  l'on  ne  trouve  alors  k  mentionner 
que  Lan  franc  et  Badalocchi. 

PARODIE  (c.-à-d.  contre-chant;  du  grec  para,  contre, 
et  ôdè,  chant),  imitation  burlesque  d'un  ouvraçe  sérieux. 
La  parodie  nous  vient  des  Grecs;  des  érudits  en  ont 
attribué  l'invention  au  poète  Archiloque,  ou  à  Hipponax; 
mais  la  Batrachomyomachie  attribuée  à  Homâre  était 
déjà  une  parodie  de  Ylliadê.  Le  Cyclope  d'Euripide  pa- 
rodiait le  9*  chant  de  VOdyssée.  Les  Silles  (K.  ce  mot) 
appartiennent  au  même  genre  de  plaisanterie.  Chez  les 
Modernes,  Berthelot  parodia  quelques  belles  strophes  de 
Malherbe  ;  Scarron  travestit  V Enéide.  —  La  parodie  des 
ouvrages  dramatiques  remonte,  dit-on,  à  Hégéaion  de 
Thasos,  et  celle-là  surtout  a  prospéré  :  les  comédies 
d'Aristophane  sont  remplies  de  traits  où  il  parodie  Eschyle 
et  surtout  Euripide.  Mais  les  Anciens  n'eurent  pas  de 
pièces  parodiant  d'autres  pièces  d'un  bout  à  Tautre;  ce 
genre  de  composition  appartient  aux  Modernes.  Si  l'in- 
tention de  la  parodie  peut  être  innocente,  et  même  servir 
les  intérêts  de  l'art  en  éclairant  le  public  sur  les  défauts 
d'un  ouvrage,  elle  a  aussi  des  résultats  regrettables  :  tra- 
vestir, par  exemple,  une  œuvre  dramatique,  c'est  lui  en- 
lever presque  infailliblement  le  prestige  qui  tient  aux 
illusions  de  la  scène;  on  n'entend  plus  avec  la  même  dis- 
position d'esprit  un  langage  dégradé  par  la  parodie,  on  ne 
s'abandonne  plus  aux  effets  de  situations  dénaturées  par 
le  burlesaue.  Si  la  parodie  n'est  qu'une  forme  adopta 
par  la  méaiocrité  envieuse  pour  avilir  les  productions  du 
génie  ou  du  talent,  ou  si  elle  s'attaque  aux  personnes, 
elle  ne  mérite  que  le  mépris.  Dans  tous  les  cas,  si  elle  a 
quelque  esprit,  on  lui  fait  généralement  accueil,  parce 
qu'il  est  dans  la  nature  ou  dans  le  rôle  de  beaucoup  de 
gens  de  ne  rien  admirer,  et  de  n'être  pas  f&chés  qu'on 
livre  à  leur  risée  tout  ce  qui  leur  est  supérieur.  Au 
xvu*  sièNcle,  Subligny  donna,  sous  le  nom  de  la  Folle 
querelle,  une  parodie  de  VÂndromaque  de  Racine.  An 
xvm«,  le  Théâtre  de  la  Foire  et  la  Comédie-Italienne  pa- 
rodièrent la  tragédie  et  l'opéra;  Fuzelier,  Domeval,  Ft^ 
vart,  Lesage,  Dominique,  Romagnesi,  se  sont  particu 


PAR 


1379 


PAR 


lièrement  distingués  dans  ce  genre.  On  citera  toujours 
comme  modèles  V Agnès  de  Chaillotf  parodie  de  Vlnès  dé 
Castro  de  Lamotte;  le  Mauvais  ménage,  parodie  de  la 
Marianne  de  Voltaire  ;  la  Petite  Iphigénie  ou  les  Rêveries 
renouvelées  des  Grecs,  parodie  d'Iphwénie  en  Tauride  de 
Guimond  de  La  Touche;  les  Petites  uanaides  de  Désau- 
giers,  parodie  de  Topera  des  Danaïdes;  le  Roi  Là  de 
Parisot,  parodie  du  Roi  Lear  de  Ducis.  On  peut  ridicu- 
liser, au  lieu  d'un  ouvrage  spécial,  un  genre  tout  entier; 
c'est  ainsi  qu'on  a  parodié  le  mélodrame  dans  le  Retour 
iu  Croisé,  ou  la  Femme  innocente,  malheureuse  et  per- 
iécutée, 

La  parodie  n'a  pas  toujours  l'importance  d'un  ouvrage 
complet  :  elle  se  borne  souvent  à  employer  dans  un 
cadre  différent  les  mêmes  moyens  dont  on  s'est  servi 
pour  arracher  des  larmes,  à  changer  en  bouffonnerie  une 
pensée,  un  sentiment,  une  expression  sérieuse.  Ainsi, 
Racine,  jouant  sur  un  mot,  a  parodié  un  vers  de  Cor- 
neille, quand  il  appliquait  à  un  huissier  dans  ses  Plai- 
deurs (],  5)  ce  qu'on  dit,  dans  le  Cid  (I,  1),  du  vieux 
père  de  Rodrigue  : 

Ses  rides  sur  son  front  ont  grarë  sei  exploUt, 

Racine  et  Boileau  ont  parodié  quelques  scènes  du  Cid 
dans  leur  Chapelain  décoiffé.  V.  Burlesque,  HéROî-Co- 

HIQUE. 

La  parodie  s'est  aussi  exprimée  en  chansons,  sur  le 
ton  burlesque  et  môme  grivois;  Désaugiers  a  presque 
créé  ce  genre  dans  sa  parodie  de  l'opéra  la  Vestale,  La 
parodie  est  un  genre  assez  facile.  A  la  renaissance  de 
l'esprit  de  société  en  France,  au  commencement  du 
XIX*  siècle,  on  usa  et  l'on  abusa  de  la  parodie  :  au 
xviii*  siècle,  on  ne  parodiait  que  les  ouvrages  sérieux, 
telles  que  les  tragédies;  sous  le  l*'  Empire  français,  les 
parodistes  s'en  prirent  même  aux  comédies;  ainsi  la 
comédie  les  Deux  Gendres,  par  Etienne,  fut  parodiée 
dans  un  vaudeville  intitulé  Cadet  Roussel  beau-père.  De 
notre  temps,  la  liberté  de  l'esprit  critique  a  fait  tort  à  la 
parodie  :  elle  parait  moins  piquante,  et  l'on  en  use  plus 
sobrement  ;  elle  ne  se  montre  plus  guère  que  dans  cer- 
taines pièces  en  vaudevilles,  jouées  sur  les  théâtres  se- 
condaires au  renouvellement  de  l'année,  et  dites  Revues, 
parce  qu'on  y  passe  en  revue  certains  événements,  les 
modes,  et  surtout  les  principaux  ouvrages  dramatiques 
représentés  sur  les  théâtres  de  Paris  pendant  le  cours  de 
l'an  écoulé.  Chacun  a  sa  petite  part  dans  cette  parodie  en 
bloc  :  c'est  une  espèce  de  carnaval  littéraire,  qui  amuse 
quand  il  est  spirituel,  mais  sans  tirer  à  conséquence,  car 
ses  meilleures  critiques  et  ses  gaietés  les  mieux  venues 
n'ont  jamais  fait  tort  à  un  ouvTage  de  quelque  valeur. 

PARODIE,  en  Musique,  air  de  chant  sur  lequel  on  a  fait 
de  nouvelles  paroles.  Au  xviii*  siècle  on  appelait  Paro- 
dies les  vaudevilles  faits  sur  les  airs  d'opéra  de  LuUi  et 
de  Rameau.  Parodier,  c'est  encore  adapter  des  paroles  à 
une  musique  instrumentale,  ou  transcrire  pour  instru- 
ment un  air  de  chant. 

PAROISSE  (du  grec  paroïkia,  réunion  d'habitations 
voisines),  mot  qui  désigna,  jusqu'au  v*  siècle  de  notre 
ère,  l'ensemble  des  communautés  chrétiennes  placées 
sous  l'autorité  d'un  évèq[ue.  Il  était,  par  conséquent,  sy- 
nonyme de  diocèse.  Puis  il  fut  restreint  au  territoire 
desservi  par  un  prêtre  particulier.  Aujourd'hui  les  pa- 
roisses sont  cures  ou  succursales.  V.  ces  mots. 

PAROISSE  (La),  nom  que  prit  la  société  littéraire  formée 
au  xviii'  siècle  par  M"^*  Doublet,  et  dont  faisaient  partie 
Piron,  les  frères  Lacume  de  S^^'-Palaye,  Mirabaud,  Mai- 
'an,  d'Argental,  Falconet,  Voisenon,  etc. 

PAROLE,  langage  des  sons  articulés,  particulièrement 
('eaidné  à  l'expression  de  la  pensée,  comme  les  gestes 
(Ont  l'expression  particulière  de  la  volonté,  et  les  sons 
naturels  celle  de  la  sensibilité.  Ce  n'est  pas  que  la  parole 
ne  puisse  exprimer  aussi  un  acte  de  volonté  ou  un  fait 
de  sensibilité;  mais,  pour  cela,  elle  les  revêt  d'une  forme 
intellectuelle,  elle  les  convertit  en  jugements,  qui  peu- 
vent être  traduits  par  des  propositions.  Tous  les  éléments 
de  la  pensée  doivent  se  réfléchir  dans  la  parole,  qui  est 
son  instrument  spécial.  Or,  la  forme  la  plus  générale  de 
la  pensée  étant  le  jugement,  et  le  Jugement  se  compo- 
lant  de  trois  idées,  celles  d'une  substance,  d'une  qualité 
ou  d'un  phénomène,  et  d'un  rapport  qui  lie  entre  elles 
la  qualité  et  la  substance,  il  est  facile  de  reconnaître  la 
même  composition  dans  la  parole  :  le  jugement  est  tra- 
duit par  la  proposition,  dans  laquelle  le  substantif 
exprime  Tidée  de  substance,  Vad^ecttf  celle  de  qualité,  et 
le  verbe  celle  du  rapport  qui  les  lie.  Le  rapport  que  l'es- 


prit établit  entre  une  substance  et  une  autre  substance, 
efatre  une  qualité  et  une  autre  qualité,  est  représenté 
dans  le  langage  par  la  préposition;  le  rapport  d'un  juge- 
ment avec  un  autre  jugement,  par  la  conjonction.  D'autres 
éléments  de  la  pensée  s'expriment  par  les  nombres,  les 
genres,  les  temps,  les  modes,  etc.  La  const9*u(iion  natur 
relie  de  la  phrase  représente  la  marche  ordinaire  des 
idées,  le  développement  régulier  de  l'intelligence;  la  con- 
struction  inverstve  est  accommodée  au  mouvement  varié 
des  passions.  V.  Langage. 

PAROLI,  terme  de  jeu  qui  s'employa  d'abord  au  Pha- 
raon, pour  indiquer  une  manière  de  jouer  sur  parole  : 
après  le  gain  du  premier  coup,  le  joueur  faisait  à  sa  carte 
une,  deux,  trois  ou  quatre  cornes,  pour  annoncer  qu'il 
risquait  le  double,  le  triple,  le  quadruple  ou  le  quin- 
tuple de  l'enjeu.  Aux  jeux  du  Trente  et  Quarante  et  de  la 
Roulette,  le  paroli  consiste  à  doubler  son  gain  jusqu'à  ce 
qu'on  juge  à  propos  de  s'arrêter;  c'est  le  contraire  de  la 
martingale,  où  l'on  double  la  perte  jusqu'à  ce  qu'on  ren- 
contre une  chance  heureuse. 

PAROMOLOGIE  (du  grec  para  et  omo/o(7^m ,  avouer), 
nom  donné  par  certains  rhéteurs  à  la  Concession.  V.  ce 
mot. 

PARONOMASE  (du  grec  para,  près,  et  onoma,  nom), 
c.-à-d.  proximité  ou  ressemblance  de  nom,  figure  de  dic- 
tion qu'on  appelle  aussi  Annomination  (  V.  ce  mot)^  et 
par  laquelle  on  se  sert  à  dessein  de  mots  dont  le  son  est 
a  peu  près  le  même,  mais  dont  le  sens  est  différent.  On 
en  trouve  des  exemples  dans  certains  nroverbos  :  Qui 
vivra  verra:  Qui  se  ressemble  s'assemble.  Dans  le  vers 
suivant  du  Cid  de  Corneille  (II,  2  ),  la  paronomase  con- 
tient une  figure  de  pensées  : 

Ton  bras  est  invaincu,  mais  non  pas  iwHncibU. 

PARONOMASIE,  ressemblance  entre  les  mots  de  diffé- 
rentes langues  qui  peut  marquer  une  origine  commune. 
Telle  est  celle  qui  existe  entre  le  français  balle,  ballon,  et 
lô  grec  balléin  jlancer). 

PARONYMES  (du  grec  para,  près,  et  onoma,  nom), 
mots  qui  ont  une  commune  étymologie  :  ainsi,  anonyme, 
homonyme,  pseudonyme  et  synonyme;  diorama  et  pa- 
norama. 

PAROS  (Marbres  de).  T.  notre  DictionncUre  de  Biogror 
phie  et  d*  Histoire. 

PAROXYTONS  (Verbes),  verbes  grecs  qui  portaient  un 
accent  aigu  (oa:;t«tonta)  sur  l'avant-derniere  syllid)e.  On 
les  appelait  aussi  Barytons  (  V.  ce  mot).  Les  verbes  con- 
tractes ou  périspomènes  n'étaient  autres  que  des  verbes 
paroxytons  dont  la  pénultième  s'était  fondue  avec  l'ul- 
tième.  Les  futurs  seconds,  périspomènes  chez  les  Atti- 
ques,  étaient  paroxytons  chez  les  Ioniens.  P. 

PARPAING.  V.MuR. 

PARQUET  (de  parc^  enclos,  clôture),  espace  compris 
entre  les  sièges  des  juges  et  le  banc  des  avocats,  et  dans 
lequel  les  témoins  font  leurs  déi)ositions.  Autrefois  les 
membres  du  Ministère  public  y  siégeaient;  de  là  le  nom 
d'officiers  du  parquet  ou  simplement  de  parquet^  em- 
ployé pour  désigner  ce  corps.  Par  extension,  on  a  appelé 
parquet  le  lieu  où  se  tiennent,  hors  des  audiences,  les 
membres  du  Ministère  public  pour  recevoir  les  commu- 
nications et  vaquer  aux  soins  de  l'administration  qui  leur 
est  confiée  {parquet  du  procureur  général,  parquet  du 
procureur  impérial).  —  L'enceinte  où  se  réunissent  les 
agents  de  change  pour  constater  le  cours  de  la  Bourse  se 
nomme  aussi  parquet. 

PAnQDET,  partie  d'une  salle  de  spectacle  qui  est  com- 
prise entre  l'orchestre  des  musiciens  et  le  parterre,  et 
où  se  place  un  certain  nombre  de  spectateurs.  Le  nom 
d'orchestre  est  plus  usité  aujourd'hui. 

PARQDET,  assemblage  à  compartiments  de  feuilles  de 
bois  minces,  clouées  sur  des  lambourdes,  et  formant 
un  plancher.  La  parqueterie  était  encore  inconnue  au 
xvi*  siècle.  Parquet  se  dit  anssi  de  l'assemblage  de  bois 
sur  lequel  les  glaces  sont  appliquées  ou  fixées  au  moyen 
d'une  Dordure  d'çncadrement  Ce  nom  vient  de  ce  que 
les  assemblages  de  cette  menuiseiîe  sont  croisés,  à  la 
manière  de  la  clôture  d'un  parc 

PARQUET,  en  termes  de  Marine,  compartiment  pratiqué 
dans  la  cale  ou  sur  les  côtés  d'un  navire  pour  contenir 
les  grains,  le  lest,  etc. 

PARQUET  (Jeu  du),  petite  table  garnie  d'un  rebord  et 
contenant  o4  ou  100  petits  carrés  mi-partis ,  avec  les- 
quels on  forme  toutes  sortes  de  combinaisons.  On  peut 
consulter  sur  ces  combinaisons  un  Mémoire  du  P.  Truchet 
(dans  les  Mémoires  de  l' Académie  des  Sctences,  1704),  et 


PAR 


1380 


PAU 


la  Méthode  pour  faire  une  infinité  de  dessins  différents 
avec  des  carreaux  mi-partis,  par  le  P.  Douât,  1722. 

PARRAIN  (du  latin  pararius,  cautioD,  répondant), 
celui  oui  tient  un  enfant  ou  un  nouveau  converti  sur  les 
fonts  ae  baptême,  et  qui  répond  pour  lui  devant  Dieu  à 
ce  moment  solennel.  Dans  les  premiers  temps  du  chris- 
tianisme, les  néophytes  ayant  T&ge  de  raison  et  compre- 
nant l'engagement  quMIs  allaient  prendre,  les  parrains 
n'étaient  que  les  témoins  du  baptême;  ils  s'engageaient 
à  servir  de  guides  et  de  soutiens  au  nouvel  élu.  Plus 
tard,  dans  le  but  de  soustraire  les  enfants  au  danger  de 
mourir  sans  être  entrés  dans  la  communion  chrétienne, 
on  leur  conféra  le  baptême  après  leur  naissance  :  le 
parrain  ne  fut  plus  que  le  père  spirituel  de  l'enfant 
Daptisé,  et,  pour  que  cette  parenté  fictive  eût  plus  d'ana- 
logie avec  la  parenté  naturelle,  on  exigea  une  Marraine, 
qui  servit  de  seconde  mère  à  l'enfant.  Les  deux  pater- 
nités ne  durent  pas  se  confondre  :  il  ne  fut  pas  permis 
au  père  d'être  le  parrain  de  son  enfant,  ni  à  la  mère 
d'être  sa  marraine.  L'alliance  spirituelle  que  la  tenue 
d'un  enfant  sur  les  fonts  baptismaux  établit  entre  le 
parrain  et  la  marraine  fut  longtemps  un  empêchement 
au  mariage.  Le  parrain  et  la  marraine  s'appellent  vul- 
gairement, l'un  par  rapport  à  l'autre,  compère  et  com- 
mère. Les  religieux  ou  religieuses,  les  excommuniés,  les 
hérétiques,  ne  peuvent  servir  de  parrains  ou  de  mar- 
raines. Il  ne  convient  pas  que  l'évêque  dans  son  diocèse 
et  le  curé  dans  sa  paroisse  fassent  les  fonctions  de  par- 
rain. L'assistance  du  parrain  et  de  la  marraine  n'est  point 
nécessaire;  il  suffit  rigoureusement  de  l'un  d'eux.  Ils 
doivent  avoir  l'âge  de  raison,  et  même,  en  général,  avoir 
fait  leur  première  communion  et  reçu  la  confirmation  : 
le  frère  ou  la  sœur  de  l'enfant  baptisé  peuvent  être 
admis  plus  jeunes.  Autrefois,  en  France,  on  prenait  com- 
munément deux  parrains  et  une  marraine  pour  les  gar- 
çons, deux  marraines  et  un  parrain  pour  les  filles.  Dans 
l'Église  d'Orient,  il  y  a  un  parrain  et  une  marraine  pour 
les  garçons,  mais  on  prend  seulement  une  marraine  pour 
les  filles.  —  Autrefois  la  présence  d'un  parrain  et  d'une 
marraine  était  requise  pour  le  sacrement  de  Confirma- 
tion. Cette  condition  subsiste  encore  pour  la  bénédiction 
des  cloches.  Les  prélats  qui  assistent  un  évêque  au  mo- 
ment de  sa  consécration  sont  appelés  ses  parrains*     B. 

PARRAINS  D'ARMES,  ceux  qui,  dans  les  ordres  mi- 
litaires, assistent  un  chevalier  pour  la  cérémonie  de  sa 
réception. 

PARRAINS  DU  DUEL,  coux  qui,  daus  les  anciens  combats 
singuliers,  réglaient  les  conditions  de  la  lutte  et  en  res- 
taient les  témoins,  pour  que  tout  se  passât  loyalement 

PARRHÉSIE,  terme  de  l'ancienne  musique  qui  dési- 
gnait l'art  d'éviter  les  relations  non  harmoniques. 

PARRICIDE,  meurtre  des  père  ou  mère  légitimes,  na- 
turels ou  adoptifs,  ou  de  tout  autre  ascendant  légitime. 
On  appelle  paiement  parricide  celui  qui  commet  ce 
crime.  Notre  Code  met  sur  la  même  hgne  l'attentat 
contre  la  vie  ou  la  personne  du  souverain.  Le  coupable 
est  puni  de  mort  :  on  le  conduit  sur  le  lieu  de  l'exécution 
pieds  nus,  en  chemise,  et  un  voile  noir  sur  la  tête,  et, 
du  haut  de  Téchafaud,  un  huissier  fait  lecture  de  l'arrêt 
au  peuple  ;  Jusqu'en  1832,  l'ablation  du  poignet  droit 
précéda  l'exécution. — Les  anciens  Égyptiens  enfonçaient 
des  roseaux  pointus  dans  toutes  les  parties  du  corps  du 
parricide,  puis  le  jetaient  sur  un  monceau  d'épines,  au- 
quel on  mettait  le  feu.  A  Athènes,  Selon  ne  fit  pas  de  loi 
contre  le  parricide,  parce  qu'il  croyait  ce  crime  impos- 
sible. A  Rome,  où  l'on  donnait  également  le  nom  de 
parricide  au  meurtre  commis  par  les  père  et  mère  sur 
leurs  enfants,  par  le  mari  sur  sa  femme,  par  le  frère  sur 
son  frère,  le  coupable  était  fouetté  jusqu'au  sang,  puis 
enfermé  dans  un  sac  de  cuir  avec  un  chien,  un  singe, 
on  coq,  et  une  vipère,  et  jeté  à  l'eau.  Plus  tard,  on  le 
brûla  vif,  ou  on  l'exposa  aux  bêtes.  Dans  l'anciesne 
France,  le  parricide  était,  après  une  amende  honorable, 
rompu  vif  sur  la  roue;  puis  on  brûlait  son  corps,  et  l'on 
en  jetait  les  cendres  au  vent.  B. 

PARSI  (Idiome).  V,  Farsi. 

PARSISME ,  culte  des  sectateurs  de  Zoroastre,  pra- 
tiqué par  les  Parais  de  l'Inde. 

PART  (du  latin  par  tus  )^  en  termes  de  Droit,  signifie 
enfant  nouveau-né.  V.  SoBSTmiTioN,  SopposmoN,  Sup- 
pression. 

PARTAGE,  division  ou  distribution  d'une  chose,  d'un 
bien,  entre  plusieurs  cohéritiers  ou  copropriétaires.  Nul 
ne  peut  être  contraint  à  demeurer  dans  l'indivision 
{V.  ce  mot).  On  peut  convenir  de  suspendre  un  partage 
pendant  5  ans.  Lopsque  les  parties  sont  majeures,  le  par- 


tage peut  se  faire  à  l'amiable;  pour  être  valide,  Tacte 
doit  être  notarié.  S'il  y  a  des  mineurs,  le  partage  doit 
avoir  lieu  en  Justice.  L'action  en  partage  k  l'é^^urd  des 
mineurs  ou  des  interdits  peut  être  exercée  par  leurs  tu- 
teurs, avec  l'autorisation  du  Conseil  de  famille.  Un  mari 
peut,  sans  le  concours  de  sa  fenune,  provoquer  le  psr- 
tage  des  biens  à  elle  échus  qui  tombent  dans  la  commu- 
nauté; pour  ceux  qui  ne  tombent  pas  en  communauté, 
le  concours  est  nécessaire.  L'action  en  partage,  et  les 
contestations  qui  s'élèvent  dans  le  cours  des  opérafions, 
sont  portées  devant  le  tribunal  du  lieu  où  la  succession 
est  ouverte.  Si  la  chose  commune  ne  peut  être  partagé! 
commodément  et  sans  perte,  la  vente  s'en  fait  aux  en- 
chères, et  le  prix  est  partagé  (K.  Licitation).  Toute  per- 
sonne, même  parente  du  défunt,  qui  n'est  pas  son  suc- 
cessible,  et  à  laquelle  un  cohéritier  aurait  cédé  son  droit, 
peut  être  écartée  du  partage,  en  lui  remboursant  le  prix 
de  la  cession.  Les  copartageants  sont  garants,  les  uns 
envers  les  autres,  des  troubles  et  évictions  qui  provien- 
draient d'une  cause  antérieure  au  partage.  La  rescision 
du  partage  peut  être  demandée  pour  cause  de  dol,  d'er- 
reur de  droit,  ou  de  lésion  de  plus  d'un  quart.  —  Les 
mêmes  règles  s'appliquent  aux  partages  entre  associés. 
V.  Partage  d'ascendants,  Succession. 

PARTAGE  DES  EAUX.  V.  LiGNB. 

PARTANCE,  en  termes  de  Marine,  est  synonyme  de 
départ,  et  exprime  le  moment  où  un  navire  prêt  à  partir 
cesse  toute  communication  avec  la  terre.  Le  coup  de  par- 
tance est  le  coup  de  canon  qu'on  tire  pour  appeler  les 
retardataires;  le  pavillon  de  partance  est  celui  qu'on 
met  à  la  poupe  pour  avertir  l'équipage  qui  est  à  terre. 

PARTENOPEUS  ou  PARTENOPEX  DE  BLOIS,  roman 
de  chevalerie  du  xui*  siècle.  Partenopeus  est  neveu  de 
Clovls,  roi  des  Francs.  Mélior,  reine  de  Constantinople, 
s'éprend  de  lui  sur  le  simple  récit  de  sa  merveilleuse 
beauté.  Comme  elle  est  magicienne,  elle  l'attire  facile* 
ment  de  la  forêt  des  Ardennes  à  Constantinople,  se  fait 
connaître  à  lui  sans  permettre  qu'il  la  voie,  et  lui  dit 
qu'elle  le  choisira  pour  époux,  si  pendant  deux  ans  il  ne 
cède  pas  k  la  curiosité.  Cependant  Partenopeus  revient 
dans  sa  patrie  ;  pressé  de  questions  par  sa  mère,  il  lui 
apprend  tout,  et,  armé  d'une  lanterne  enchantée  qu'elle 
lui  donne,  retourne  à  Constantinople,  où  il  peut  con- 
templer l'incomparable  beauté  de  Mélior.  Mais  cette  im- 
prudence a  détruit  le  pouvoir  magique  de  la  reine; 
Partenopeus,  chassé»  se  retire  dans  la  forêt  des  Ardennes. 
Un  jour  qu'il  exhalait  sa  douleur  au  bord  de  la  mer,  ses 
plaintes  sont  entendues  d'un  navire  qui  longeait  le  ri- 
vage ;  une  femme  en  descend  ;  c'est  Urraque,  sœur  de 
Mélior,  qui  l'emmène  à  Constantinople;  et  là,  sans  se 
faire  connaître,  il  triomphe  dans  un  tournoi  dont  Mélior 
est  le  prix.  Alors  son  bonheur  est  complet.  —  Ce  roman, 

2ui  est  une  heureuse  imitation  de  la  fable  de  Psyché,  se 
istingue  des  ouvrages  du  même  si^le  par  la  déjjcatesse 
du  sentiment  et  de  l'expression  :  c'est  l'œuvre  de  Denys 
Piram,  qui  vivait  à  la  cour  de  Henri  III,  roi  d'Angle- 
terre. Il  fut  traduit  dès  le  xiii*  siècle  en  espagnol,  en  ca- 
talan, en  allemand  et  en  danois.  M.  Stewart-Rose  en  a 
rublié  une  version  abrégée  en  vers  anglais,  Londres, 
810.  La  Bibliothèque  nationale  de  Paris  possède  plu- 
sieurs manuscrits  du  roman  de  Partenopeus;  la  biblio- 
thèque de  l'Arsenal  n'en  possède  qu'un,  mais  c'est  le 
plus  exact,  bien  qu'il  soit  incomplet.  Aucun  de  ces  ma- 
nuscrits ne  porte  le  nom  de  l'auteur;  c'est  dans  une 
bibliothèque  de  Londres  que  M.  Francisque  Michel  a 
trouvé  le  nom  de  Denys  Piram  en  tête  d'une  légende  en 
vers  sur  la  vie  de  S*  Edmond  par  le  même  auteur.  Par^ 
tenopeus  a  été  publié  par  Crapelet,  Paris,  1824,  2  vol. 
in-8«.  V.  V Histoire  littéraire  de  la  France,  X.  XIX  ;  Ro- 
quefort, Notice  historique  et  critique  du  roman  de  Par* 
tenopeus  de  Blois,  Paris,  1811.  H.  D. 

PARTERRE,  partie  d'un  jardin  spécialement  consacrée 
k  la  culture  des  fleurs  et  des  plantes  d'agrément.  Son 
dessin  varie  selon  l'étendue  et  la  disposition  du  sol,  et 
selon  le  goût  du  possesseur  :  tantôt  ce  sont  des  figures 
taillées  dans  des  Luis  nains,  des  rinceaux,  des  fleurons 
entourés  de  plates-bandes;  tantôt  des  parterres  à  bro- 
derie, dont  la  mode  est  passée;  tantôt  des  pièces  coupéex 
ou  compartiments  plus  ou  moins  symétricjues,  garnies 
d'arbustes,  de  plantes,  de  vases,  de  bassins,  etc.  Ou 
bien,  et  ce  sont  des  parterres  à  l'anglaise,  tapis  de 
gazon  peu  découpés,  entourés  d'une  plate-bande  de 
fleurs. 

PARTERRE,  partie  d'une  salle  de  spectacle  située  en  face 
et  au-dessous  du  niveau  de  la  scène,  entre  les  places 
d'orchestre  ou  de  parquet  et  le  pourtour  dea  baignoires 


PAR 


1381 


PAR 


3«  loges  du  rez-de-cbaussée.  Les  places  y  sont  d*un  prix 
oeu  élevé.  Longtemps  les  spectateurs  du  parterre  furent 
debout  ;  cet  usage,  aboli  à  Paris  avant  la  fin  du  xvm*  siè- 
cle, puis  dans  la  plupart  des  villes  de  province,  s'est 
maintenu  dans  quelques  villes,  notamment  k  Rouen.  G*est 
au  parterre  qu'on  place  la  claque. 

PÂRTHÉNON.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire,  et,  dans  le  présent  ouvrage,  le 
mot  Acropole. 

PARTI  (du  latin  partitus^  divisé),  en  termes  de  Bla- 
son, se  dit  de  Técu,  divisé  perpendiculairement  en  deux 
parties  é^les  :  parti  d'or  et  d^argent.  Un  écu  parti  en 
sautoir  est  un  écu  trancbé  et  tdllé;  parti  et  coupé  de  six 
pièces,  il  a  trois  pièces  en  cbef  et  trois  en  pointe;  parti 
de  Vun  en  Vautre,  il  offre  un  meuble  qui,  à  moitié, 
change  réciproquement  d'émail  avec  le  champ. 

PARTiaPATION  (Sociétés  en).  V.  Sociérés  coMiiBa- 

aALBS. 

PARTICIPE ,  un  des  modes  impersonnels  des  verbes, 
qui  tire  son  nom  de  ce  qu'il  participe  à  la  fois  du  verbe^ 
comme  étant  susceptible  d'inflexions  temporelles  et  gou- 
vernant le  même  r^me  aue  le  verbe  auquel  il  appartient, 
et  de  Vadjectif,  en  ce  qu'il  s'accorde  en  genre  et  en  nom- 
bre, et  dans  certaines  langues  en  cas,  avec  le  nom  ou 
pronom  auquel  il  se  rapporte.  Plusieurs  grammairiens  en 
ont  fait  une  partie  spéciale  du  discours,  ce  qui  nous  paraît 
une  superfétation.  Le  participHea  deux  temps  en  français  : 
le  présent,  terminé  en  ant  {aimant,  tombant)^  et  lepa^5^ 
{ayant  aimé,  étant  tombé).  Quant  au  passif ,  ait?»^,  étant 
aimé,  ayant  été  aimé,  la  signification  de  ces  formes,  sauf 
la  dernière,  qui  se  rapporte  toujours  au  passé,  est  par 
elle-m6me  si  peu  précise,  qu'il  est  difficile  d'en  détermi- 
ner le  temps.  Les  autres  langues  modernes  ont  également 
un  participe  présent  et  un  participe  passé.  Dans  toutes,  le 
futur  se  forme  par  circonlocution  ;  en  français  on  a  recours 
au  verbe  devoir  :  devant  aimer,  devant  tomber.  —  Les 
langues  anciennes  sont  beaucoup  plus  riches  et  beaucoup 

{>lus  précises ,  surtout  la  grecque,  qui  possède  à  toutes 
es  Yoix  un  participe  présent ,  un  participe  futur,  un  par- 
ticipe aoriste,  et  un  participe  parfait.  En  latin,  le  participe 
a  le  présent  et  le  futur  à  Taaif  ;  au  passif,  il  n^a  que  le 
passe,  car  la  forme  verbale  en  andus  ou  endus,  qu'on 
appelle  ordinairement  futur  de  l'infinitif,  exprime  moins 
îe  futur  que  l'idée  d'obligation,  de  devoir,  de  nécessité. 
Les  Terb^  déponents  ont  cela  de  remarquable,  qu'ils  ont 
à  la  fois  le  participe  présent,  le  participe  futur  et  le  par- 
ticipe passé,  et  que,  dans  un  certain  nombre,  le  participe 
passé  a  tout  à  la  fois  le  sens  actif  et  le  sens  passif. 

Le  participe  présent  français  employé  comme  épithète, 
c-à-d.  comme  adjectif  verbal,  suit  la  règle  d'accord  de 
tous  les  adjectifs  :  «  Un  homme  charmant ,  des  femmes 
charmantes  ;»  mais,  employé  comme  verbe,  il  est  toujours 
invariable.  Il  n'en  était  pas  encore  ainsi  il  y  a  deux  siè- 
cles ;  car  La  Fontaine  a  écrit  :  a  Les  petits,  voletants,  se 
culbutants.  »  Employé  seul,  ou  avec  le  verbe  être  à  la 
ooDJagaison  passive,  ou  avec  le  même  auxiliaire  dans  les 
temps  composés  de  certains  verbes  neutres ,  le  participe 
pasaé  est  considéré  comme  adjectif,  et  suit  toutes  les 
règles  de  l'adjectif.  Mais  lorsqu'il  est  accompagné  du  verbe 
avoér  dans  les  verbes  actifs,  et  dans  ceux  des  verbes  neu- 
tres qui  prennent  cet  auxiliaire,  ou  du  verbe  être  dans 
;e3  Terbes  pronominaux,  voici  les  principes  qu'il  faut 
suivre  :  i*  le  sujet  n'influe  en  rien  sur  le  genre  ou  le 
nombre  que  doit  prendre  le  participe  ;  2*  le  participe  ne 
peut  s'accorder  en  nombre  et  en  genre  qu'avec  son  com- 
plément direct,  pourvu  que  celui-ci  le  précède;  3*  dans 
les  verbes  pronominaux,  il  faut  reconnaître  soigneuse- 
ment si  le  pronom  complément  (me,  te,  se,  nous,  voiis, 
se)  est  complément  direct  ou  indirect,  et  considérer  le 
verbe  être  comme  équivalant  au  verbe  avoir.  Ainsi  :  «  Nous 
vivons  acheta  «n«  maison,  des  livres;  la  maison  que  nous 
avons  achetée  n'est  pas  chère;  les  livres  que  nous  at;one 
9dbetés  sont  bien  imprima;  les  livres  que  vous  vous  êtes 
procura*;  vous  êtes-vous  procura  des  livres?  Nous  nous 
sommes  laisse'  prendre.  Ils  les  ont  laissés  fuir,  etc.  »  P. 
PARTICULE ,  petite  partie  du  discours  qui  est  invar 
riable  et  ordinairement  d'une  seule  syllabe  :  telles  sont 
la  plupart  des  prépositions,  conjonctions  et  interjections. 
A,  de,  pour,  par,  sans^  sur,  et,  ou,  ni,  mais,  Jonc,  si, 
quand,  que,  ah/  6!  fil  etc.,  sont  des  particules.  La  langue 
grecque  a  plus  au'aucune  autre  langue  un  grand  nombre 
de  particules  adverbiales  et  conjonctives  exprimant  des 
nuances  fines  et  délicates  «  qui  ne  peuvent  se  rendre  dans 
les  autres  langues  que  par  des  périphrases  traînantes,  et 
qu'il  faut,  pour  cette  raison,  la  plupart  du  temps  sacri- 
flcr  dans  la  traduction.  Les  plus  remarquables  et  les  plus 


caractéristiqnes  sont  (Uv  et  dé,  ys,  8i^,  Tt,  ^,  |x^,  toi, 
âpa,  dcv. 

Le  nom  de  Parttcute  s'applique  plus  exactement  à  des 
petits  mots  qui  ne  peuvent  point  être  employés  seuls,  et 
qui  s'unissent  à  un  radical  pour  le  modifier  et  former  un 
seul  mot  avec  lui,  comme  en  français  très  {très-bon)  ; 
dé^  dés  {défaire,  désobéira  mé,  mes  {méprise,  mésintel^ 
ligence,  médire,  fnestiser);  in,  dont  la  finale  se  modifie 
suivant  la  lettre  initiale  du  mot  auquel  on  la  prépose 
[immobile,  impossible, illisible, inintelligible,  irrationnel , 
incomprétiensible,  inconsolable,  insupportable,  intoléra- 
ble, indicible,  ineffable,  inattaqtuûile,  infortuné,  etc.)  ;  et, 
là  {ceci,  cela,  cetut-ct.  celui-là,  vbici^  voUày  ces  hommes^ 
là,  ce  temps-ci);  ex  (ex-député);  extra  (extralégal,  ex- 
traordinaire,  etc.);  —  en  latin  :  am,  an{amplector,  an- 
quiro);dis,  di  {disjungo,  dilatus,  differo);  ri  {repellOj^ 
redeo,  reddo);  se  {sepono,  seduco);  sus  {sustineo);  ve 
(vecors,  vesanus  )  ;  tn  et  ne  négatifs  {injustus,  improbus, 
tgnarus,  nescio,  nequeo,  nef  as,  nullus  pour  ne-ullus, 
nemo  pour  ne-homo,  nolo  pour  ne-tH7lo);  —  en  grec,  a  ou 
av  privatif,  8uç,  vs  ou  vy)  négatifs,  api,  spi/  pou,  ppi,  Sa 
ou  ta,  qui  augmentent  la  force  du  simple.  P. 

PARTICULE  NOBiUAiRB,  Syllabe  que  les  nobles  placent 
devant  leur  nom  comme  marque  distinctive.  C'est  de  en 
français,  von  en  allemand,  van  en  hollandais  et  en  fla- 
mand, mac  en  écossais,  0'  en  irlandais,  don  en  espagnol. 
—  Originiirement,  la  particule  cte  indiquait  un  seigneur 
terrien,  un  maître  de  place  ùa  de  province.  Sous  Louis  XIV 
on  voit  la  particule  nobiliaire  toujours  appliquée  ainsi  : 
Le  marquis  de  Seignelay,  M.  de  Malesherbes,  etc.  ;  on 
disait  :  M.  Colbert,  M.  Fouquet,  etc. 

PARTIDAS  (Les  Sietb).  K.  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d'Histoire. 

PARTIE,  en  termes  de  Palais,  celui  qui  plaide  contre 
quelqu'un,  soit  en  demandant,  soit  en  défendant.  On 
nomme  Partie  publique,  le  magistrat  chargé  du  ministère 
public,  et  oui  seul  a  le  pouvoir  de  prendre  des  conclu- 
sions pour  la  punition  des  crimes;  Partie  civile,  l'indi- 
vidu qui  agit  en  son  propre  nom  contre  l'accusé  pour 
obtenir  une  réparation  pécuniaire.  La  partie  civile  est 
toujours  tenue  du  payement  des  frais,  sauf  son  recours 
contre  les  condamnés. 

PARTIE  (Prise  à).  V.  Prise  a  partie. 

PARTIE,  en  termes  de  Musique,  chacune  des  mélodies 
dont  la  réunion  forme  l'harmonie  ou  le  concert.  On 
nomme  partie  récitante,  celle  qui  exécute  le  sujet  prin- 
cipal, dont  les  autres  sont  l'accompagnement;  parties 
concertantes,  celles  qui  s'exécutent  chacune  par  plusieurs 
musiciens.  —  Partie  se  dit  aussi  du  cahier  ou  du  papier 
sur  lequel  est  écrit  ou  gravé  ce  que  l'on  exécute. 

PARTIE,  en  termes  de  Jeu,  totalité  de  ce  qu'il  faut  faire 

f»our  qu'un  des  joueurs  ait  gagné.  On  joue  en  parties 
t^es^quand  on  est  obligé  de  gagner  deux  parties  de  suite, 
ou  au  moins  deux  parties  sur  trois;  lorsque  chacun  des 
joueurs  a  gagné  une  partie  et  qu'on  joue  la  3%  celle-ci  se 
nomme  la  dette. 

PARTIES  DU  discours.   V.  DlSCOURS. 

PARTIMEN.  V.  Tensow. 

PARTIMENTI ,  nom  que  donnent  les  Italiens  aux  exer- 
cices de  la  basse  chiffrée  (  V.  ce  mot),  Fenaroli  et  Sala 
en  ont  écrit  qui  sont  célèbres. 

PARTISANS,  nom  que  l'on  donna  sons  Henri  III  aux 
gens  de  finance,  parce  qu'ils  avançaient  une  partie  de 
l'impôt  pour  avoir  la  ferme  du  tout,  ou  qu'ils  soumis- 
sionnaient la  perception  de  telle  ou  telle  partie  des  im- 
pôts. Sous  le  r^gne  de  Louis  XIV,  La  Bruyère  les  a  dési- 
gnés mystérieusement  par  les  lettres  P.  T.  S. 

PARTITIF ,  nom  donné  aux  substantifs  collectifs  qui 
n'expriment  qu'une  partie  des  individus  compris  dans 
une  réunion.  Ils  expriment  souvent  une  quantité  vague 
et  indéterminée,  et  sont  ordinairement  précédés  de  un 
ou  ^  une  en  français,  comme  dans  ces  phrases  :  «  Une  foule 
de  soldats,  une  quantité  de  volumes.  »  La  plupart,  la  mino- 
rité, la  maiorité,  la  pluralité,  tf  moitié,  le  tiers,  le  quart, 
assez  de,  peu  de,  trop  de,  etc.,  sont  encore  des  partitifs. 
Lorsqu'un  substantif  collectif  partitif  est  suivi  d'un  com- 
plément pluriel ,  l'adjectif,  le  pronom,  le  participe  et  le 
verbe  qui  peuvent  suivre  s'accordent  avec  ce  complément, 
excepté  lopoue  le  partitif  est  le  mot  le  plus  important  et 
renferme  l'idée  dominante  :  a  Une  nuée  de  traits  obscurcit 
l'air;  une  nuée  de  critiques  s'est  élevée  contre  cet  écri- 
vain ;  «ne  partie  du  camp  était  d4jà  prise.  »   V.  Coi/- 

LECTIF.  P. 

PARTITION,  réunion  synoptique  de  toutes  les  parties 
.concertantes  d'un  morceau  de  musique,  notées,  sur  autant 
de  portées  distinctes,  avec  la  clef  qui  convi<>nt  à  chacnne, 


PAS 


1382 


PAS 


et  disposées  les  unes  au-dessus  des  autres  de  façon  que 
Toeil  en  puisse  saisir  Tensemble  d*un  seul  coup.  Dans  ces 
parties  diverses  les  mesures  se  correspondent,  au  moyen 
de  lignes  qui  les  séparent  du  haut  en  bas  des  pages. 
Lorsqu'il  s*agît  de  voix  ou  d'instruments  de  même  nature, 
la  manière  la  plus  naturelle  de  disposer  les  parties  est  de 
placer  les  voix  ou  les  instruments  les  plus  aigus  en  haut 
de  la  page,  et  de  descendre,  portée  par  portée,  jusqu'à  la 
basse,  qui  doit  être  toujours  au-dessous  de  tout.  Mais, 
quand  la  partition  comprend  des  instruments  de  diverses 
espèces,  et  surtout  un  orchestre  complot,  on  fait  trois 
masses  séparées ,  dans  chacune  desquelles  on  commence 
toujours  par  les  partiâ  les  plus  aiguôs  pour  finir  par  les 
plus  graves  :  Vkarmonie  ou  la  masse  des  instruments  à 
vent  occupe  le  haut;  on  place  au  milieu  le  chant  ou  la 
masse  des  voix  ;  le  bas  est  occupé  par  le  quatuor  ou  la 
masse  des  instruments  à  cordes.  Quelquefois  on  a  divisé 
les  instruments  à  cordes,  en  plaçant  les  violons  au-des- 
sus de  l'harmonie,  les  altos  au-dessus  du  chant,  et  les 
basses  au-dessous,  ce  qui  n'est  ni  clair  ni  rationnel.  Cer- 
taines partitions  portent  au  bas  une  réduction  au  piano. 
—  Le  mot  Partition  se  prend  aussi  pour  l'œuvre  môme 
du  compositeur.  B. 

PARTITION ,  règle  pour  accorder  l'orgue  et  le  piano  par 
tempéramenu  Elle  consiste  à  ajuster  tous  les  tuyaux  ou 
toutes  les  cordes  comprises  dans  l'étendue  d'une  octave 
ou  d'une  douzième,  qu  on  prend  vers  le  milieu  du  clavier, 
et  sur  laquelle  on  accorde  les  autres  notes  de  l'instru- 
ment. La  partition  est  bien  faite  lorsque  la  douzième,  sol 
dièse  ou  la  bémol,  fait  une  quinte  à  peu  près  juste  avec 
le  mi  bémol  résultant  de  l'accord  par  quintes  d'une  autre 
douzième  prise  au  grave  de  la  première.  Il  existe  des 
partitions  toutes  faites,  composées  de  diapasons  ajustés 
d'après  le  système  tempéré,  et  au  moyen  desquelles  il 
est  facile  d'accorder  soi-même. 

PARTITIONS,  en  termes  de  Blason,  manières  dont  l'écu 
est  coupé  en  deux  parties  égales,  n  y  en  a  quatre  :  le 
parti,  le  cotti>^,  le  tranché,  et  le  taille  (V.  ces  mots), 

PARTITIONS  ORATOIRES,  titre  d'uu  ouvrago  de  Cicéron 
qui  traite  de  la  Rhétorique.  11  est  écrit  par  demandes  et 
par  réponses;  ces  fréquentes  coupures  lui  ont  valu  son 
nom.  Îa  Rhétorique  à  Hérennius,  le  traité  de  V Invention 
et  les  Topiques ,  ouvrages  du  même  orateur,  s'y  résument. 

PARTURE.  V,  Jbo-Parti. 

PARVIS  (du  latin  pervius,  ouvert  aux  passants),  place 
devant  la  grande  porte  d'une  église,  principalement  d'une 
catliédrale.  Le  mot  Parvis  vient,  sielon  c^uelques-uns,  du 
latin  paradisus,  parce  que  le  parvis  était  une  image  du 
Paradis  terrestre,  par  lequel  il  faut  passer  pour  arriver 
au  Paradis  céleste,  figuré  par  l'église.  V.  Aitre. 

PAS,  en  termes  de  Danse,  diverses  manières  de  mar- 
cher, de  sauter,  de  pirouetter.  On  distingue  :  le  Pas  droit, 
qui  se  fait  en  ligne  droite;  le  Pas  grave  ou  ouvert,  qui 
se  fait  en  écartant  un  pied  de  l'autre  en  demi-cercle  ;  le 
Peu  battu,  qui  se  fait  en  tournant  une  des  jambes  par- 
dessus l'autre  ou  par-dessous  avant  de  poser  le  pied  à 
terre,  et  qu'on  nomme  jeté-battu  s'il  est  accompagné  de 
jetés  ;\e  Pas  tourné,  qu'on  fait  en  décrivant  un  cercle  avec 
le  pied;  le  Pas  omc  mouvement,  qu'on  fait  avec  plis  des 
genoux;  le  Pas  relevé,  qui  se  fait  lorsque,  après  avoir  plié 
les  genoux  au  milieu  du  pas,  on  se  relève  en  le  finissant;  le 
Pas  coupée  qu'on  fait  après  un  pas  de  mouvement  et  qui 
est  plus  lent;  le  Pas  balancé,  qui  se  fait  lorsqu'on  se 
jette  à  droite  sur  la  pointe  du  pied  pour  faire  ensuite  un 
coupé;  le  Pas  dérobé,  où  les  deux  pieds  se  meuvent  en 
même  temps  dans  un  sens  opposé  ;  le  Pas  ch€usé,  où  l'on 
plie  avant  de  mouvoir  le  pied;  le  Ptis  tombé,  où  l'on  ne 
plie  qu'après  avoir  posé  le  pied  qu'on  a  fait  mouvoir.  — 
Le  nom  de  Pas  se  donne  aussi  à  certaines  danses  parti- 
culières :  Pas  de  bourrée,  P<u  de  basque,  Pas  de  menuet, 
Pas  de  gavotte,  etc. 

PAS,  dans  l'Art  militaire,  diverses  manières  de  mar- 
cher qui  ont  été  réglées  pour  les  troupes.  On  distnigue 
le  Peu  ordinaire,  le  Pas  accéléré,  le  Pas  de  route,  le 
Pas  de  charge,  le  Pas  gunnastique.  Marquer  le  pas , 
c'est  le  simuler,  c'est  observer  la  cadence,  mais  sans 
avancer.  Le  tambour,  le  clairon,  ou  la  musique,  accom- 

Eagnent  souvent  le  pas.  Avec  l'accompagnement  du  tam- 
our,  on  part  du  pied  gauche. 
PAS  d'armes.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d^Ristoire, 

PAS  DB  sooRis,  en  termes  de  Fortification,  désigne  les 
degrés  qui  descendent  au  fond  des  fossés  secs. 

PAS  RBDODBLé,  moTceau  de  musique  dont  la  mesure 
â  2/4  ou  à  C/8  est  appropriée  au  pas  des  troupes.  Le 
mouvement  en  est  rapide.  Oc  peut  citer  comme  exemple 


le  Pas  redoublé  qui  est  dans  l'opérarcomique  les  Deux 
Journées ,  de  Cherubini. 

PASIGRAPHIE  (du  grec  pas,  tout,  et  grcephéin,  dé- 
crire), écriture  universelle.  Le  mot  peut  s'entendre  soit 
d'un  alphabet  possédant  assez  de  signes  pour  exprimbr 
tous  les  sons  possibles ,  soit  d'un  art  d'écrire  de  façon  à 
être  lu  et  compris  par  tous  les  peuples.  En  ce  dernier 
sens,  la  Pasigraphie  est  une  chimère  aussi  bien  que  la 
langue  universelle  (  V,  Langage).  Parmi  ceux  cnii  s'en 
sont  occupés,  nous  citerons:  ^sA/sr^  Pasigraphie,  Weissen- 
fels,  1705;  le  major  de  Maimieux,  Pasigraphie,  ou  Élé- 
ments d*un  nouvel  arU-science,  Paris,  1707;  Wolke,  Pos- 
sibilité de  la  Pasigraphie,  Leipzig,  1707  ;  Schmidt ,  Essai 
de  Pasigraphie,  Vienne,  1815. 

PASQUIN.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  liio' 
graphie  et  d'Histoire. 

PASQUINADES,  nom  donné  d'abord  aux  placards  sa- 
tiriques qu'on  trouvait  attachés  à  la  statue  de  Pasquin , 
et  qui  s'est  étendu  à  toute  raillerie  lancée  contre  le  pu- 
blic ou  contre  les  puissances. 

PASSACAILLE,  espèce  de  chaconne  d'un  caractère  un 
peu  mélancolique  et  d'un  mouvement  modéré  à  3  temps, 
commençant  d'ordinaire  en  levant.  Elle  était  en  vogue  au 
xvu*  siècle.  Sa  mélodie,  composée  de  8  mesures  sans  re- 

f irises,  était  variée  dans  ses  répétitions.  I^  mot  vient  de 
'espagnol  passacaile  ( passe-rue) ,  parce  que  cet  air,  de- 
venu fort  commun,  courait  les  rues. 

PASSADOUX.  V.  Flèche.- 

PASSAGE ,  galerie  couverte  unissant  deux  rues  Tune 
à  l'autre  et  où  ne  circulent  que  des  piétons. 

passage  (Droit  de).  Le  droit  de  passage  sur  une  pro- 
priété voisine  est  une  servitude  qui  ne  peut  exister  que 
par  un  titre  {Code  Napol.^  art.  601);  il  s'éteint  par  le 
non-usage  pendant  un  laps  de  30  ans. 

passage  (Note  de).  V,  Note. 

PASSAVANT  ou  PASSE-AVANT,  passage  établi  sur  le 
pont  de  chaque  cùté  d'un  grand  navire  de  guerre,  pour 
servir  de  communication  entre  les  deux  gaillards. 

PASSAVANT,  en  termes  de  Douanes,  acte  qui  autorise  à 
transporter  d'un  lieu  dans  un  autre  une  denrée  qui  a 
déjà  payé  le  droit  ou  qui  en  est  exempte.  Il  doit  être  visé 
k  tous  les  bureaux  de  passage  et  être  présenté  à  toute 
réquisition.  Le  passavant  est  timbré  à  5  centimes. 

PASSE,  en  termes  de  Finances,  appoint  en  petite  mon- 
naie qui  complète  une  somme  payée  en  billets  de  banque, 
ou  en  or,  ou  en  pièces  de  5  fr.  Autrefois  on  entendait 
également  par  Passe  l'appoint  avec  lequel  on  ramenait  à 
sa  valeur  nominale  une  pièce  de  monnaie  que  le  gouver- 
nement avait  réduite  à  sa  valeur  intrinsèque  :  ainsi,  quand 
l'écu  de  6  livres  ne  valut  que  5  fr.  80  c,  on  ajoutait 
20  centimes  pour  la  passe.  On  appelle  Passe  du  sac  ce 
qu'on  paye  pour  le  prix  du  sac  où  est  renfermée  une 
somme  qu'on  reçoit  :  cette  passe  fut  longtemps  de  15  cen- 
times; elle  n'est  plus  que  de  10  depuis  185^. 

PASSE,  terme  employé  dans  plusieurs  jeux.  Au  billard 
et  au  mail ,  la  passe  est  une  petite  arcade  en  fer  sous 
laquelle  doit  passer  la  bille  dans  des  conditions  détermi- 
nées; dans  les  jeux  de  cartes,  c'est  la  mise  courante  ou 
l'enjeu  de  chaque  joueur.  A  certains  jeux,  tirer  sa  passe, 
c'est  faire  la  vole.  A  la  bouillotte,  voler  la  passe,  c'est 
faire  gros  jeu  pour  intimider  les  adversaires  et  les  faire 
passer,  tout  en  ayant  de  mauvaises  cartes.  A  la  roulette, 
pcuse  est  l'opposé  de  manque;  on  désigne  par  manque 
tous  les  numéros  jusqu'à  18,  et  pu  passe  tous  les  autres 
à  partir  de  10. 

PASSE  (Mains  de),  mains  de  papier  qu'on  délivre  à 
l'ouvrier  imprimeur  en  sus  de  chaque  rame,  pour  servir 
à  la  mise  en  train,  et  pour  suppléer  aux  feuilles  qui  se^ 
raient  gâtées  ou  qui  manqueraient  dans  la  rame.  On 
compte  ordinairement  2  mains  de  passe  par  rame.  Les 
éditeurs  n'en  pavent  pas  le  tirage,  et  bénéficient  ainsi  de 
quelques  exemplaires  de  plus. 

PASSÉ,  un  des  trois  temps  de  la  conjugaison  des 
verbes.  Dans  la  langue  française,  il  offre  à  l'indicatif 
6  modifications,  qui  prennent  les  noms  d'Imparfait,  de 
Passé  défini,  de  Pcusé  indéfini,  de  Passé  antérieur,  de 
Plus-que^arfait,  et  de  Futur  passé  ou  Futur  antérieur. 
Le  conditionnel ,  l'infinitif  et  le  participe  ont  aussi  un 
temps  passé  ;  le  subjonctif  en  a  trois,  imparfait,  parfait 
ou  prétérit,  et  plus-que-parfait.  L'allemand,  l'anglais,  le 
latin  ont  l'imparfait,  le  parfait,  le  plus-que-parfait,  le  fu- 
tur antérieur  de  l'indicatif:  pour  les  autres  modes,  il  y  a 
peu  de  différence  avec  le  français.  La  langue  grecque  est 
la  plus  riche  en  inflexions  exprimant  le  passé  :  elle  a 
l'imparfait,  l'aoriste,  le  parfait,  le  plus-<^ue-parfait  «  le 
futur  antérieur,  à  l'indicaiif  de  ses  trois  voix  ;  l'aoriste  et 


PAS 


1383 


PAS 


le  parfait  à  Timpémlif,  au  subjonctif;  Taoriste,  le  parfait 
et  le  futur  antérieur,  k  Toptatif,  à  Tinfinitif  et  au  participe. 
V.  PRÉTÉRrr.  P, 

PASSE-AVANT.  V.  Passavant. 

PASSE-DEBOUT,  en  termes  de  Contributions  indi- 
Tectes,  permis  de  passage  délivré  aux  marchands  et  aux 
roituriers  pour  les  boissons  et  autres  objets  de  consom- 
mation qui,  ne  faisant  que  traverser  un  territoire  si^'et 
aax  droits  d*entrée,  n*y  doivent  pas  payer  de  droits. 

PASSE-DIX,  jeu  de  dés.  Le  ban(^ier  agite  3  dés  dans 
un  cornet,  puis  les  lance  :  si  le  point  amené  dépasse  10, 
il  ramasse  les  enjeux,  et  continue  à  tenir  les  dés;  si  le 
point  est  10  ou  au-dessous,  il  double  Penjeu  de  chacun , 
et  passe  les  dés  à  son  voisin  de  droite. 

PASSEMENTIERS,  ancienne  corporation  qui  embras- 
sait aussi  celles  du  boutonnier,  du  plumassier,  du  fleu- 
riste, de  Téventailliste,  du  fabricant  de  masques,  etc. 
S' Louis  en  était  le  patron. 

PASSE-PARTOUT,  planche  de  bois  ou  de  cuivre  sur 
taquelle  on  a  gravé  quelque  ornement  en  forme  de  bor- 
dure, et  dont  Te  milieu  est  vide,  pour  recevoir  une  autre 
planche  à  laquelle  elle  sert  de  cadre  ;  —  cadre  avec  glace, 
dont  le  fond  s*ouvre  &  volonté,  pour  recevoir  tel  dessin 
qu'on  veut  y  placer. 

PASSE-PIED,  ancien  air  de  danse  k  3  temps,  d'un 
mouvement  fort  vif,  à  deux  reprises  de  8  mesures  cha- 
cune, jadis  employé  dans  les  ballets  et  les  opéras. 

PASSE-PORT,  mandement  délivré  par  Tautorité  pour 
recommander  aux  autorités  de  laisser  circuler  librement 
la  personne  qui  en  est  munie.  Dans  les  temps  féodaux, 
les  seigneurs  empêchaient  les  habitants  de  leur  domaine 
d'aller  demeurer  ailleurs,  et  pouvaient  les  réclamer  en 
quelque  lieu  qu'ils  fussent  :  ce  droit  n'était  plus  exercé 
longtfémps  avant  la  Révolution  de  1789  ;  cependant  c*est 
dans  la  Constitution  de  1701  qu'on  trouve  pour  la  pre- 
mière fois  consacrée  pour  tout  homme  la  liberté  d'aller 
et  de  venir,  sauf  certaines  conditions  en  vue  de  l'ordre  et 
de  la  sûreté  sociale.  Les  passe-ports  sont  détachés  de 
registres  k  souche,  auxqpiels  ils  sont  conformes;  ce  sont 
des  feuilles  timbrées,  que  fournit  l'administration  de  l*En- 
registrement.  Ils  ne  sont  valables  que  pour  un  an,  à  par- 
tir de  leur  délivrance.  On  distingue  les  passe-ports  à 
VirUérintry  les  pctsse-ports  pour  les  colonies^  et  les  pctssê- 
ports  à  V étranger,  La  loi  du  28  mars  1702,  dont  la  plu- 
part des  dispositions  sont  aujourd'hui  tombées  en  désué- 
tude, mais  qui  n'est  pas  abrogée,  décide  que  tout  citoyen 
qui  vent  voyager  en  France  hors  du  canton  de  son  domi- 
cile est  tenu  de  se  munir  d'un  passe-port,  dont  le  coût 
est  de  2  fr.  ;  que  les  passe-ports  sont  donnés  exclusive- 
ment par  les  officiers  municipaux ,  et  doivent  contenir  le 
nom  des  voyageurs ,  leur  âge,  leur  profession ,  le  lieu  de 
leur  domicile,  et  leur  si^nsdëment;  que  ceux  auxquels  on 
les  délivre  doivent  les  signer,  et  que,  dans  le  cas  où  ils 
ne  sauraient  le  faire,  mention  en  est  faite  sur  le  passe- 
port et  sur  le  registre  ;  que,  s'ils  ne  sont  pas  connus  per- 
sonnellement de  l'officier  municipal,  ils  doivent  être  ac- 
compagnés de  deux  personnes  connues  ;  que,  s'ils  veulent 
changer  en  route  le  but  de  leur  voyage,  consigné  sur  le 
passe-port,  il  leur  faut  se  présenter  à  l'administration 
municipale  du  lieu  où  ils  se  trouvent,  pour  faire  donner 
à  leur  feuille  un  nouveau  visa,  qui  est  gratuit.  Le  passe- 
port est  individuel  ;  toutefois,  un  même  passe-port  peut 
servir  au  mari,  à  la  femme,  et  aux  enfants  au-dessous 
de  15  ans.  Un  mineur  au-dessus  de  cet  &ge  et  une  femme 
mariée  ne  peuvent  obtenir  un  passe-port  sans  le  consen- 
tement, l'un  de  ses  parents  ou  de  son  tuteur,  l'autre 
de  son  mari.  Un  soldat  de  la  réserve  a  besoin  d'une  au- 
torisation de  Tautorité  militaire.  Les  étrangers  ne  sont 
admis  à  voyager  et  séjourner  en  France  qu'en  vertu  d'une 
autorisation  du  ministre  de  l'Intérieur  (Instruction  du 
^  août  1816),  délivrée  après  dépôt  de  leur  passe -port  à 
la  municipalité  de  la  première  commune  où  ils  se  sont 
présentés.  Si  rien  n'a  fait  obstacle  k  cette  autorisation, 
ie  maire  délivre  xm^ passe  provisoire,  qui  est  échangée 
contre  un  passe-port  au  lieu  d'arrivée.  Sont  exceptés  de 
ces  mesures  les  courriers  extraordinaires  et  les  chargés 
de  misaion  auprès  du  gouvernement.  La  loi  du  23  mes- 
sidor an  m  (11  juillet  4795]  permet  de  donner  des  au- 
torisations provisoires  aux  négociants  des  pays  alliés  ou 
neutres,  à  charge  d'en  informer  immédiatement  le  mi- 
nistre. Nul  ne  peut  obtenir  des  chevaux  de  poste  au  pre- 
mier relais  par  lequel  il  commence  sa  route,  s'il  n'a  pas 
on  paaae-port  délivré  ou  visé  depuis  huit  jours  au  plus 
par  l'autorité  du  lieu.  Si,  k  l'entrée  des  viUes  de  guerre 
ou  des  villes  de  la  frontière,  on  exige  que  les  voyageurs 
remettent  leurs  passe-ports,  il  leur  est  délivré  une  carte  de 


dépôt,  indiquant  l'autorité  auprès  de  laquelle  ils  devront 
les  réclamer  :  partout  ailleurs,  on  ne  peut  les  obliger  de 
s'en  dessaisir.  —  Les  pass&-ports  délivrés  pour  passer 
dans  les  colonies  n'ont  d^effet  qu'après  avoir  été  viséi 
par  le  ministre  de  la  Marine  (Arrêté  du  19  vendémiaire 
an  vni  —  11  oct.  1799).  —  Les  passe-ports  à  l'étranger 
sont  délivrés  par  les  préfets,  sur  1  avis  motivé  des  maires  ; 
l'instruction  de  1810  exigeait  une  autorisation  préalable 
du  ministre  de  l'Intérieur,  mais  cette  formalité  n'est  plus 
en  usage.  En  1858,  les  sous-préfets  de  certains  départe- 
ments frontières  ou  maritimes  ont  été  autorisés  à  déli- 
vrer des  passe -ports  pour  l'étranger.  Le  prix  de  ces 
passe-ports  est  de  10  fr.  (Décret  du  18  sept.  1809).  Ceux 
qui  en  sont  porteurs  sont  autorisés  à  réclamer  en  pays 
étranger  la  protection  de  l'agent  qui  représente  la  nation 
à  lamielle  ils  appartiennent.  Un  avis  du  Conseil  d'État, 
du  12  déc.  1811,  permet  de  délivrer  des  passe-ports  gra- 
tuits aux  indigents  ;  mais,  sUl  y  a  des  secours  de  route, 
cette  délivrance  appartient  exclusivement  aux  préfets 
(Circulaires  du  22  nov.  1825  et  du  24  oct.  1833).  Les  faux 
commis  dans  les  passe-ports  sont  punis  d'un  emprison- 
nement de  1  à  5  ans  {Code  pénal,  art.  153).  Celui  qui 
prend  un  passe-port  sous  un  nom  supposé  est  puni  d'un 
emprisonnement  de  3  mois  à  1  an,  ainsi  que  les  témoins 
qui  s'y  sont  prêtés.  L'officier  public  qui  délivre  un  passe- 
port a  un  inconnu  et  sans  la  présence  de  témoins  est 
passible  d*un  emprisonnement  de  1  à  6  mois.  S'il  le  dé- 
livre sciemment  sous  un  nom  supposé ,  il  encourt  le 
bannissement.  —  Les  passe-ports  ont  été  supprimés,  en 
1860,  entre  la  France  et  la  Belgique,  et,  en  1861,  entre 
la  France  et  l'Angleterre.  En  Allemagne,  le  visa  qu'il  faut 
obtenir  presque  à  chaque  ville  donne  lieu  à  une  foule 
d'exactions.  B. 

PASSE-VOLANT,  nom  qu*on  donnait  autrefois  à  celui 
qui,  sans  être  enrôlé,  venait  se  présenter  dans  une  revue 
pour  grossir  une  compagnie,  et  toucher  la  p^ye  au  profit 
du  capitaine.  Ce  nom  s*applique  encore  dans  la  Bfarine 
à  quiconqpie  est  porté  en  fraude  sur  le  rôle  d'un  ^uipage. 

PASSIF,  nom  donné  au  verbe  qui  a  l'inflexion  par 
laquelle  on  marque  la  passion,  c-à-d,  Vaction  soufferte. 
Cette  inflexion,  qui  est  \uli  en  grec,  or  en  latin,  n'existe 
pas  dans  les  langues  modernes  de  l'Europe  :  elles  se 
servent  d'un  participe,  fait  du  verbe  actif  qui  se  prend 
en  sens  passif,  avec  le  verbe  auxiliaire  je  suis  :  comme 
je  suis  aimé,  etc.  Souvent  un  verbe  a  le  sens  passif  et 
n'en  a  pas  la  forme  :  ainsi ,  périr,  succomber,  changer, 
tourner;  de  même  en  latin,  perire,  succumbere,  mutare, 
vertere.  Cesi  encore  ainsi  que  nous  disons  :  «  une  cou- 
leur voyante,  une  rue  passante,  n  Réciproquement,  beau- 
coup de  verbes,  dans  les  langues  anciennes,  avec  la  forme 
passive,  ont  le  sens  actif  (K.  Déponent,  Pronominaux). 

La  syntaxe  des  verbes  passifs  est  très-simple  en  fran- 
çais et  dans  les  autres  langues  modernes  :  leur  complé- 
ment se  marque  par  la  préposition  par  ou  la  préposition 
de,  —  En  latin,  le  régime  se  met  k  l'ablatif,  lorsqu'il  est 
maraué  par  un  nom  de  chose  inanimée;  à  l'ablatif  avec 
a,  ao,  abs,  lorsque  c'est  un  nom  d'être  animé.  On  trouve 
aussi  quelquefois  le  datif.  En  grec,  on  emploie  pour  ré- 
gime du  verbe  passif  soit  le  datif  sans  préposition,  soit  le 
génitif  avec  l'une  des  prépositions  ôic6,  icapà,  npoç,  èx, 
quelquefois  8id,  imô.  Cette  svntaxe  s'étend  aux  verbes 
qui,  sans  être  passifs  par  la  forme,  le  sont  par  le  sens. 
Ainsi,  Casimir  Delavigne  a  dit  :  «  Ceux  ;>ar  gui  vous  sou/'- 
frez.  »  De  même  en  latin  chez  Ovide  :  Perire  ab  hoste, 
Perire  a  discipulo  suo» 

Les  noms  et  les  adjectifs  sont,  comme  les  verbes,  sus- 
ceptibles d'une  signification  passive.  Ainsi,  en  grec,  tous 
les  noms  neutres  en  \ut,  sont  des  noms  passifs;  car  ils 
expriment  toujours  un  résultat  obtenu,  et  semblent 
d'ailleurs  se  rattacher  par  leur  forme  à  la  l'*  personne 
du  parfait  passif.  En  français,  bénéfice,  maladie,  résultat, 
sont  des  noms  passifs;  inutue,  stérile ^  inerte,  épineux, 
sont  des  adjectifs  passifs.  Quelquefois  le  même  mot  est 
susceptible  des  deux  sens.  Ainsi,  dans  :  V amour  de  Dieu 
est  nécessaire  au  salut,  amour  de  Dieu  a  un  sens  passif  < 
mais  si  l'on  dit  :  L'amour  de  Dieu  n'a  pas  de  bornes  et 
s'étend  sur  toute  créature,  amour  de  Dieu  est  actif.  Ce 
double  sens  de  certains  mots  se  retrouve  dans  toutes  le^ 
langues.  Quant  à  l'expression  la  crainte  de  Dieu,  elle  est 
toiijours  passive,  puisqu'il  ne  peut  être  question  que  de 
la  crainte  éprouvée  par  les  hommes.  P. 

PASsir,  en  termes  de  Commerce,  ensemble  des  fraisi 
des  charges  et  des  dettes  d'un  négociant,  d'une  société, 
d'une  succession,  d'une  faillite.  On  l'oppose  à  VAcUj 
{V,  Cêmot). 

PASSION  (du  ^cpaskein,  souffrir;  en  latin  pati).  Danv 


PAS 


1384 


PAS 


quelque  force  extérieure.  Mais  on  entend  plus  ordinaire- 
ment, par  Passion,  une  autre  disposition  complexe,  et 
fort  mêlée  d'activité,  dont  les  phénomènes  de  la  sensi- 
bilité sont  le  point  de  départ,  et  restent  Télément  prin- 
cipal. Le  plaisir  et  la  souffrance  éveillent  en  nous  natu- 
rellement des  sympathies  et  des  répugnances  si  fortes , 
que  rintelligence  est  portée  d'abord  à  se  mettre  en  quête 
des  causes  qui  les  provoquent,  et  des  objets  dont  l'action 
a  produit  sur  nous  de  tels  effets.  Ces  objets  une  fois 
connus,  nous  ressentons  &  leur  égard  des  affections,  des 
goûts  positifs  ou  négatifs,  qui,  de  leur  nom  le  plus  gé- 
néral, peuvent  être  appelés  Amour  ou  Haine.  L'Amour  et 
la  Haine ,  c.-&-d.  la  connaissance,  Jointe  à  l'expérience 
de  la  sensation,  des  objets  propres  à  nous  apporter  un 

{>laisir  et  une  souffrance,  tels  sont  les  premiers  degrés  de 
a  passion.  L'Amour  et  la  Haine  sont  suivis  du  Désir 
«  qui  nous  pousse  à  rechercher  ce  que  nous  aimons,  »  et 
de  l'Aversion  qui  nous  pousse  «  à  empêcher  ce  que  nous 
haïssons  de  nous  approcher  »  (Bossuet,  De  la  Connais- 
sance de  Dieu  et  de  soi-même,  i,  6),  et  ces  passions 
fondamentales,  opposées  et  parallèles,  compliquées  de 
circonstances  accessoires,  engendrent  à  leur  tour  la  Fran- 
chise, l'Espérance,  la  Colère,  etc..  Il  serait  superflu 
d'essayer  de  donner  la  liste  exacte  des  Passions;  mais  il 
faut  s'attacher  à  -cette  remarque,  que  toutes  ont  pour 
principe  la  sensibilité.  Bossuet  montre  fort  bien  {loc,  cit.) 
que  toutes  les  Passions  se  rapportent  à  l'amour  :  «  Otez 
ramour,  il  n'y  a  plus  de  Passions,  et  posez  l'amour,  vous 
les  faites  naître  toutes.  »  Hais  comme  l'amour  lui-même 
A  pour  origine  le  Plaisir  (nous  aimons  les  choses  parce 
qu'elles  nous  plaisent,  nous  les  haïssons  parce  qu'elles 
nous  déplaisent),  c'est  bien  effectivement  la  sensibilité, 
c.-èk-d.  la  faculté  d'éprouver  le  plaisir  et  la  souffrance, 

Îui  donne  naissance  aux  Passions.  Une  loi  générale  des 
assions,  c'est  qu'elles  s'affaiblissent  à  mesure  qu'on 
s'éloigne  du  moment  où  l'on  a  ressenti  le  plaisir  ou  la 
souffrance  qui  en  ont  été  l'origine.  Certains  moralistes, 
les  Stoïciens  entre  autres,  ont  prétendu  que  nous  devons 
nous  efforcer  d'anéantir  en  nous  les  Passions,  à  cause 
de  leurs  dangers  :  c'est  une  erreur  ;  nous  devons  faire  en 
sorte  d'eu  rester  toujours  maîtres,  et  de  les  subordonner 
h  la  Raison  pour  les  tourner  vers  le  bien  ;  ainsi  dirigées, 
loin  d'entraver  le  développement  de  la  vie  morale,  elles 
lui  donnent  plus  d'activité,  et  forment  une  des  parties  de 
cette  belle  harmonie  de  toutes  les  facultés  humaines  que 
Platon  {République,  liv.  IV)  représente  avec  raison  comme 
l'idéal  de  la  perfection  humaine.  L'étude  des  Passions 
est  une  mine  inépuisable,  qu'ont  exploitée,  chacun  à 
leur  manière,  les  écrivains  les  plus  différents  :  mora- 
listes, poètes,  et  romanciers.  Parmi  les  écrits  où  ce  sujet 
est  traité,  au  point  de  vue  purement  spéculatif  et  philo- 
sophique, Qous  citerons  seulement  :  Aristote,  Traité  de 
l'âme;  Descartes,  Des  Passions;  Bossuet,  De  la  Connais- 
sance de  Dieu  et  de  soi-même.  V.  aussi,  ne  fùtrce  qu'à 
titre  de  curiosité,  la  Théorie  des  passions,  dans  les  écrits 
de  Cil.  Fourrier.  B — e. 

PASSION  DE  N.-s.  J.-G.  (La).  V.  uotro  Dictionnaire  de 
BiograpMe  et  d'Histoire, 

PASSION  (Confrères  de  la).  V,  Mystères. 

PASSIONS,  en  termes  de  nhétorique,  émotions  diverses 
que  l'orateur  reçoit  de  son  sujet  et  qu'il  communique 
aux  autres  par  le  discours.  Il  les  emploie  pour  toucher 
ses  auditeurs.  L'art  d'exciter  les  passions  se  nomme  le 
PatJiétique  (du  grec  pathos,  passion).  Aristote  blâme 
l'usage  des  passions  dans  l'éloquence;  il  voudrait  que 
l'orateur  du  barreau ,  par  exemple,  laissât  les  Juges  se 
prononcer  avec  une  entière  liberté  d'esprit,  et  ne  fit  pas 
en  quelque  sorte  violence  à  leur  suffrage  en  s'adressant 
à  leur  cœur.  C'est  là  une  sévérité  exagérée  :  il  ne  peut 
être  interdit  à  l'orateur,  convaincu  d'une  vérité,  épris  de 
l'amour  du  bien,  d'inspirer  à  ceux  qui  l'écoutent  les 
sentiments  qu'il  éprouve  lui-même,  quand  bien  même 
il  arriverait  à  d'autres  d'abuser  de  la  parole  pour  exciter 
des  passions  mauvaises.  Toutes  les  passions  oratoires 

Î)euvent  se  ramènera  deux,  l'amour  et  la  haine  :  on  excite 
'amour,  en  donnant  à  l'objet  des  couleurs  agréables;  la 
\iaine,  en  le  représentant  sous  des  traits  repoussants. 
Hais  pour  faire  naître  ces  sentiments  dans  l'âme  de  l'au- 
diteur, il  faut  en  être  ému  soi-même;  c'est  dans  son 
propre  cœur  que  l'orateur  doit  étudier  les  passions  et  les 
moyens  de  les  éveiller.  Il  a  besoin,  pour  cette  étude,  de 
rimagination,  de  la  sensibilité,  et  du  discernement.  Par 
l'imagination,  il  se  met  à  la  place  de  ceux  qu'il  fait  par- 


ler; par  la  sensibilité,  il  retrouve  en  lui-même  les  sen* 
timents  dont  ils  ont  été  agités;  par  le  discernement,  il 
apprend  dans  quelle  mesure  et  de  quelle  manière  il  doit 
user  des  passions,  et  quelles  convenances  il  doit  observer. 
L'orateur  dénué  de  sensibilité  ne  saurait  être  éloquent; 
tout  son  rôle  se  borne  à  convaincre.  Sans  discernement, 
il  est  exposé  à  faire  un  emploi  ridicule  ou  malséant  du 
Pathétique.  On  distingue  le  Pathétique  direct  et  le  Po- 
thétique  indirect  ou  réfléchi  :  le  pathétique  direct  est  celui 
par  lequel  l'orateur  communique  aux  autres  les  passions 
dont  il  est  animé;  le  pathétique  est  indirect,  quand  l'ora- 
teur présente  des  tableaux  ou  des  objets  propres  à  exciter 
les  passions,  de  sorte  que  l'auditeur  s'émeuve  de  lui- 
même.  Lorsqu'on  est  parvenu  à  exciter  les  passions,  il 
faut  prendre  garde  de  fatiguer  en  insistant  trop  long- 
temps; Cicéron  l'a  dit:  Niliit  lacryma  citius  arescit.  Rien 
ne  sèche  plus  vite  que  les  larmes.  H.  D. 

PASSIONNEL,  nom  que  l'on  donnait,  dans  les  pre- 
miers siècles  de  l'Église,  à  un  livre  contenant  les  passions 
des  martyrs. 

PASSIVITÉ,  en  termes  de  Philosophie,  état  de  l'âme 
subissant  les  phénomènes  de  la  sensibilité  et  de  l'enten- 
dement. Quand  l'âme  soufl're,  jouit  ou  connaît  sa  peine, 
son  plaisir,  sa  connaissance  résulte  d'une  cause  qui  n'est 
pas  elle  ;  en  ce  sens  elle  est  passive,  V.  Activité. 

PASSOIRE,  instrument  concave,  percé  de  petits  trous 
au  fond,  et  à  l'aide  duquel,  dans  le  saint  sacrifice  de  la 
messe,  on  versait  autrefois  le  vin  et  l'eau  des  burettes 
dans  le  calice,  afin  que  rien  d'impur  n'y  fût  mélangé.  On 
en  trouve  l'existence  en  France  dès  le  commencement  du 
VII"  siècle,  et  il  en  est  question  encore  au  xv*.  Quelques 
monastères,  entre  autres  celui  de  S*-Denis,  conservèrent 
l'usage  de  la  passoire  jusqu'au  xviii*  siècle. 

PAST  (Droit  de).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

PASTEL  (de  paste,  pour  pâte) ,  crayon  fait  avec  de  la 
terre  de  pipe  réduite  en  poudre  extrêmement  fine ,  mé- 
langée intimement  avec  des  substances  colorantes,  et 
mise  en  pâte  avec  une  eau  de  gomme.  On  nomme  Pein^ 
ture  au- pastel  un  genre  de  dessin  exécuté  au  moyen  de 
crayons  en  pastel.  Ces  crayons  remplissent  en  partie  l'of- 
fice de  pinceaux  ou  d'estompé  ;  mais  c'est  avec  le  bout 
des  doigts  principalement  que  l'on  étend  les  couleurs  : 
après  les  frottis,  on  donne  les  dernières  touches,  les 
finesses,  les  rehauts,  en  se  servant  du  pastel  comme  du 
crayon  ordinaire.  La  peinture  au  pastel  a  cela  de  com- 
mode qu'on  peut  la  quitter,  la  reprendre  et  la  retoucher 
à  volonté,  puisque  la  couleur  est  sèche  ;  elle  donne  aussi 
un  coloris  plein  de  vivacité ,  de  fraîcheur  et  d'éclat,  qui 
ne  Jaunit  ni  ne  noircit  comme  la  peinture  à  l'huile,  et 
son  velouté  rend  parfaitement  la  nature.  Mais  la  pous- 
sière colorante  du  pastel  se  détache  facilement  du  fond 
de  papier,  de  vélin,  de  parchemin  ou  de  taffetas,  sur 
lequel  les  couleurs  ont  été  étendues.  Si ,  pour  les  fixer, 
on  applique  derrière  le  dessin  une  eau  gommée  ou  col- 
lée, la  légèreté  et  le  velouté  de  l'œuvre  disparaissent.  Un 
moyen  de  conserver  le  pastel ,  c'est  de  le  recouvrir  d'un 
verre.  —  Le  dessin  au  pastel  ne  parait  pas  remonter  au 
delà  de  168.5;  on  en  attribue  l'invention  à  Thiele,  d'Er- 
furt,  ou  à  M^*  Heid ,  de  Dantzig.  Ce  genre  a  été  fort  à  la 
mode  au  xviii*  siècle,  surtout  pour  les  portraits  de  fem- 
mes. On  a  de  très-beaux  pastels  par  La  Tour,  IJotard 
dit  le  Peintre  turc,  Russel,  Rosalba  Carriera,  Naticr, 
Vigée,  Tocqué,  Mengs,  Benedetto  Luti.  De  nos  jours,  on 
a  fait  application  du  pastel  au  paysage,  aux  oiseaux,  aux 
fruits,  etc.;  parmi  les  artistes  qui  se  sont  livrés  à  ce 
genre,  on  remarque  Fiers,  Michel  Bouquet,  Eug.  Giraud, 
Eug.  Tourneux ,  Antonin  Moine,  Cordouan ,  Vidal ,  Ma- 
réchal (  de  Metz),  Ricsener,  Lrochard,  etc.  B. 

PASTEUR,  en  latin  Pastor  (de  po^ct,  faire  paître ;., 
se  dit,  au  figuré,  de  celui  qui  exerce  une  autorité  pater- 
nelle sur  une  réunion  d'hommes.  Homère  appelait  les 
rois  les  pasteurs  des  peuples.  Chez  les  peuples  chrétiens, 
Po^^eur veut  dire  gardien  des  âmes;  en  ce  sens,  Jésus- 
Christ  est  appelé  le  Bon  Pasteur,  —  Les  Protestants 
nomment  Pasteur  le  ministre  qui  a  charge  d'âmes.  II 
faut,  dans  l'Église  calviniste,  trois  degrés  pour  arriver  à 
cette  charge.  L'étudiant  en  théologie  ayant  atteint  la 
3*  année  de  ses  études  se  nomme  proposant,  et  peut 
occuper  la  chaire,  avec  l'agrément  du  consistoire.  Quand 
il  a  terminé  ses  études,  subi  ses  examens  et  soutenu  sa 
thèse  de  bachelier  en  théologie,  il  reçoit  de  la  Faculté 
protestante  dont  il  a  suivi  les  cours  un  certificat  d'ap- 
titude ;  il  peut  alors  se  présenter  devant  une  réunion  do 
pasteurs  pour  recevoir  la  consécration  qui  lui  donne  le 
droit  d'administrer  les  sacrements  ;  il  devient  ainsi  my- 


PAS 


138S 


PAS 


ntstre.  Le  synode  de  Paris  en  1559  avait  décidé  que  )a 
présence  de  deux  ou  trois  pasteurs  était  nécessaire  pour 
une  consécration;  celui  de  Saint-Maixent,  en  1609,  en 
exigeait  sept  :  aujourd'hui  il  est  reçu  que  le  concours  de 
trois  pasteurs  valide  la  consécration.  Autrefois  il  était 
obligatoire  de  signer  la  Confession  de  foi  calviniste  ;  cet 
usage  a  été  abandonné  comme  dérogatoire  à  la  liberté 
d'examen,  et  Ton  se  contente  maintenant  du  serment  de 
prêcher  la  parole  de  Dieu  telle  qu'elle  est  contenue  dans 
les  livres  révélés  de  TAncien  et  du  Nouveau  Testament. 
Un  ministre  n*est  dénonmié  pasteur  que  quand  il  a  une 
église  à  desservir.  B. 

PA5TF.DR  (Le  Bon).  V.  Bon  Pasteur. 

PASTICHE  (de  Htalien  pasticcio,  p&té),  se  dit,  en 
Littérature,  de  limitation  affectée  du  style  d'un  écri- 
rain,  moulé,  pour  ainsi  dire,  comme  une  p&te  sur  un 
modèle.  11  y  a  des  pastiches  sérieux,  qui  sont  les  mau- 
vais, et  des  pastiches  faits  par  jeu  d'esprit,  qui  sont  les 
bons  dans  ce  dernier  genre.  On  peut  citer  deux  Lettres 
de  Boileau,  parmi  ses  Œuvres  diverses,  où  il  a  imité  le 
style  de  Balzac  et  celui  de  Voiture.  —  En  Peinture,  le 
mot  Pastiche  s'applique  à  un  tableau  peint  dans  la  ma- 
nière d'un  grand  maître  ;  soit  qu'on  s'attache  à  faire  une 
copie  exacte,  en  contrefaisant  l'ordonnance,  le  coloris  et 
l'expression  du  maître.  Jusqu'à  tromper  les  connaisseurs; 
soit  qu'on  veuille,  dans  un  tableau  de  composition  nou- 
velle, rappeler  la  manière  de  tel  ou  tel  maître  dont  les 
oorrages  sont  devenus  classiques.  Jordaens,  Boullonpe, 
Bourdon,  ont  été  habiles  dans  le  pastiche.  Teniers  imi- 
tait, à  s'y  tromper,  les  tableaux  des  Bassan.  —  En  Mu- 
sique, un  Pastiche  est  un  opéra,  un  oratorio  ou  tout 
autre  ouvrage  composé  de  morceaux  de  différents  maîtres, 
ou  empruntés  k  plusieurs  œuvres  du  même  auteur. 
F.  Cbxtox.  g. 

PASTILLARIA,  nom  donné,  dans  l'ancienne  Université 
de  Paris,  à  la  thèse  qu'un  licencié  soutenait  pour  être 
reçu  docteur  en  médecine,  parce  qu'il  donnait  primitive- 
ment aux  anciens  docteurs  un  déjeuner  consistant  en 
petits  pâtés. 

PASTOPUORIA,  nom  latin  des  deux  petites  absides 
qui  flanquaient  souvent  l'abside  principale  des  basiliques, 
et  où  l'on  renfermait  les  restes  du  pain  consacré. 

PASTORALE  (Poésie),  poésie  qui  peint  les  moeurs  pas- 
torales. On  lui  a  donné  aussi  le  nom  de  Poésie  biwolique, 
parce  que  les  personnages  qu'elle  a  mis  en  scène ,  au 
moins  dans  ses  origines,  étaient  des  bouviers  (en  grec 
boukolos)^  des  b^ers,  des  chevriers.  Elle  retrace  les 
douceurs  de  la  vie  champêtre,  telle  surtout  que  se  la 
représentent  les  habitants  des  grandes  cités,  qui  aiment 
à  transporter  au  sein  des  paisibles  campagnes,  des  prai- 
ries émaillées,  et  sous  l'ombre  des  bois  touffus  et  frais, 
l'idéal  de  la  tranquillité  incompatible  avec  le  tourbillon 
du  monde,  le  tumulte  des  affaires  et  les  embarras  de  la 
ville.  Quelle  que  soit  la  forme  qu'on  adopte,  idylle, 
iglogiêe  ou  drame,  ce  qui  sied  avant  tout  aux  composi- 
tions de  cette  espèce,  c  est  la  simplicité  et  la  gr&ce.  Les 
Kotiments  des  personnages  doivent  être  naïfs,  et  leur 
langa^  aussi  éloigné  du  ton  fastueux  que  de  la  trivialité, 
ce  qui  ne  l'empêche  pas,  si  la  nature  du  sentiment  le 
permet,  de  s'élever  Jusqu'à  la  noblesse. 

II  ne  faat  pas  confondre  la  poésie  pastorale,  genre 
distinct  de  Littérature,  où  l'on  peint  la  vie  des  champs 
sous  sa  forme  la  plus  attrayante  et.  dans  son  heureuse 
simplicité,  avec  toute  description  dé  la  Nature,  dont  le 
sentiment  peut  se  trouver,  à  des  degrés  divers,  dans  les 
auties  [genres  littéraires.  La  Nature  occupe  trop  de  place 
dans  l'histoire  de  l'homme,  pour  être,  k  aucune  époc[ue, 
oubliée  par  les  poètes.  Ainsi,  l'Inde  a  son  Gita^ovinda 
(V,  cemot)^  la  Judée  son  livre  de  Ruth  et  son  Cantique 
des  canCiques,  l'Arabie  ses  Moallakats;  VOdyssée  d'Ho- 
mère et  les  OEuvres  et  Jours  d'Hésiode  abondent  en 
descriptions  champêtres  ;  le  drame  satvrique  des  Grecs, 
avec  ses  Faunes,  ses  Satyres,  ses  Silènes,  offrait  fré- 
quemment la  peinture  de  la  vie  des  champs,  et  il  en  fut 
rraîsemblablenient  de  même  d'un  grand  nombre  de  co- 
médies dont  nous  n'avons  plus  que  les  titres,  les  Bouyiers 
de  Cratînus,  le  Paysan  de  Ménandre,  etc.;  la  Paix 
d'Aristophane  est  écrite  avec  un  sentiment  bien  vif  du 
calme  de  la  campagne  ;  Platon  lui-même  cherche  sou- 
vent à  encadrer  les  plus  belles  de  ses  discussions  philo- 
sophiques dans  les  plus  splendides  scènes  de  la  Nature. 
Le  sentiment  de  la  Nature  est  de  tous  les  temps  ;  mais  il 
n'en  est  point  ainsi  de  la  poésie  pastorale  proprement 
dite,  née  du  contraste  de  la  vie  des  champs  avec  les  raf- 
finements de  la  civilisation,  et  du  besoin  que  les  âmes 
éprouvent  de  se  retremper  dans  quoique  vallée  solitaire. 


loin  du  bruit  et  de  l'agitation,  sous  un  beau  ciel,  devant 
la  belle  et  simple  Nature. 

Il  n'est  peut-être  pas,  en  effet,  de  genre  littéraire  qui 
suive  une  loi  plus  constante  :  en  parcourant  l'histoire  de 
ce  genre,  depuis  Théocrite,  qui  en  est  généralement  re- 
gardé comme  l'inventeur,  jusc^u'à  nos  Jours,  on  voit  la 
{)oésie  pastorale  s'épanouir  uniformément  dans  la  vieil- 
esse  des  civilisations.  Quand  elle  se  montre,  tout  a  été 
moissonné  dans  le  champ  de  l'imagination.  L^  esprits 
conservent  cependant  de  la  vigueur;  les  besoins  littéraires 
subsistent.  Pour  distraire  ces  civilisations  ennuyées,  appa- 
raît la  poésie  pastorale.  Afin  de  détourner  l'homme  de  la 
contemplation  de  lui-même,  elle  lui  offre  le  spectacle  de 
la  nature.  A  des  âmes  blasées  par  l'expérience,  saturées 
d'analyse  et  de  réflexion,  elle  présente  avec  industrie  le 
tableau  de  mœurs  innocentes  et  primitives  ;  elle  rafraî- 
chit, en  quelque  sorte,  les  imaginations  fatiguées  au  par- 
fum des  bois  et  des  champs. 

Lamotte,  Fonteneile,  Marmontel ,  Heyne,  croient  devoir 
rapporter  la  naissance  du  çenre  pastoral  à  un  &ge  d'or 
fabuleux,  qui  n'a  jamais  existé  que  dans  leur  imagina- 
tion. Si  l'on  veut  parler  d'une  sorte  de  poésie  simple  et 
grossière,  qu'on  appellerait  la  Pastoreue  naturelle,  on 
peut  admettre,  sur  la  foi  d'antiques  traditions,  que  les 
vallées  heureuses  de  l'Arcadie  ou  de  la  Sicile  ont  produit 
ce  genre  de  poésie,  et  croire  à  la  oréation  spontanée  de 
ces  rudiments  de  poésie  pastorale,  que  traduisit  sans 
doute  Théocrite,  en  les  ornant,  sans  les  altérer,  de  toutes 
les  grâces  de  son  esprit  et  de  son  goût.  Il  y  eut  peutrêtre 
un  Daphnis,  sorte  d'Homère  pastoral,  entouré,  comme  ce 
dernier,  de  grandeur  et  de  mystère.  La  Pastorale  titté' 
raire  serait  donc  sortie  de  thèmes  grossiers  et  primitifs, 
comme  la  satire  romaine  du  dialogue  fescennin,  comme 
la  tragédie  et  la  comédie  grecque  des  chants  improvisés 
aux  fêtes  de  Bacchus  et  de  Cérès.  Mais,  l'histoire  et  la 
critique  littéraire  le  prouvent,  la  poésie  n'arrive  à  la 
pastorale  que  par  un  long  détour,  et  après  avoir  succes- 
sivement passé  par  les  genres  héroïques,  par  l'ode,  le 
drame  et  l'épopée.  C'est  au  milieu  de  la  cour  savante 
d'Alexandrie,  au  sein  d'une  société  qui  a  tout  connu,  tout 
usé,  que  Théocrite  a  eu  l'heureuse  idée  d'introduire  les 
chants  populaires  de  sa  patrie,  les  rustiques  chansons 
recueillies  dans  les  campagnes  d'Enna,  non  loin  des  bords 
de  l'Aréthuse.  Ainsi  l'on  vit,  au  milieu  des  disputes  du 
xvm*  siècle,  l'Anglais  Macpherson  donner,  sous  le  nom 
d'un  barde  d'Ecosse,  les  vieux  chants  gaéliques  des  mon- 
tagnes de  Morven.  Le  succès  fut  le  même,  préparé  qu'il 
était  par  les  mêmes  causes.  Il  rendait,  pour  ainsi  dire, 
un  échantillon  de  la  nature  à  des  hommes  qui  depuis 
longtemps  ne  la  regardaient  plus.  Bion  et  Moschus,  con- 
temporains et  successeurs  de  Théocrite,  répondirent  au 
même  besoin,  tout  en  s'éloignant  un  peu  de  la  simplicité 
de  leur  maître.  —  Quand  parurent  à  Rome  les  Bucoliques 
de  Virgile,  une  vieillesse  prématurée  avait  atteint  la  so- 
ciété romaine.  On  conçoit  avec  quel  bonheur  elle  dut  se 
reposer  sur  ces  peintures  de  la  vie  champêtre,  qui  l'arra- 
chaient au  sentiment  de  ses  douleurs  par  la  poétique 
image  d'une  ignorance  heureuse  et  d'un  repos  dont  elle 
avait  tant  besoin.  Virgile  fit  subir  k  la  poésie  pastorale 
une  grave  altération  :  par  lui  l'églogue  commença  à  deve- 
nir ce  qu'elle  n'a  cessé  d'être  depuis,  un  èadre  convenu , 
une  forme  allégorique,  destinée  k  recevoir  et  k  exprimer 
des  choses  souvent  étrangères  aux  champs ,  aux  mœurs 
et  à  la  vie  des  bergers.  Cest  le  commencement  de  la 
décadence  d'un  genre  par  lui-même  assez  borné.  Virgile 
s'y  met  presque  toujours  en  scène  avec  ses  sentiments 
particuliers ,  ses  amours  et  ses  répugnances  ;  il  y  intro- 
duit ses  rivaux  et  ses  amis  «  et,  à  propos  d'églogue,  nous 
entretient  des  gi'ands  intérêts  qui  s'agitent  dans  Rome, 
de  l'astre  des  Jules ,  et  des  présages  de  la  grandeur  de 
celui  qui  doit  bientêt  tout  gouverner. 

Peu  de  genres  ont  eu  plus  de  fortune  que  la  Pastorale  ; 
sous  prétexte  que  les  bergers  sont  agréables,  disait  Fon- 
teneile, on  en  a  quelquefois  abusé.  Lui-même  aurait  pu 
commencer  par  s'appliquer  cette  observation.  Nous  ne 
rappellerons  que  pour  mémoire  les  églogues  de  Calpur- 
nius  et  de  Némésien,  et  les  idylles  d*Ausone;  nous  ne 
nommerons  Pontanus,  le  Mantouan,  Sannazar,  Vida,  que 
pour  montrer  jusqu'où  peut  être  porté  l'abus  de  ce  genre, 
dans  ce  qu'on  a  appelé  le  second  &ge  de  la  Pastorale  latine* 
Au  XIV*  et  au  xv*  siècle,  la  Pastorale  n'est  plus  qu'un  dé- 
guisement de  fantaiiîe  pour  habiller  toute  espèce  d'idées, 
pour  donner  un  air  et  un  tour  villageois  à  des  traits  sati- 
riques, littéraires,  politiques,  et  même  religieux.  Fonte- 
neile a  rappelé  cette  pi6rr  oi'i  le  Bfantouan  imapine  de 
faire  soutenir  à  des  Lcrgurs,  qui  sont  aussi  des  moi  net 


PAS 


1386 


PAT 


«oKUBdns,  ane  dispute  théologique  devant  un  cardinal, 
qui ,  par  précaution,  les  eng^ige  a  déposer  préalablement 
leurs  houlettes ,  de  peur  quMls  ne  se  battent. 

A  répoque  où  la  Pastorale  tomba  dans  les  langues  mo- 
dernes ,  ce  genre  subit  une  nouvelle  transformation  : 
dans  Virgile,  dans  Théocrite  même,  mais  plus  sobrement, 
des  limites  resserrées  Tavaient  contraint  à  s*allier  sou- 
vent à  d'autres  formes;  à  Télégie,  dans  V Alexis,  la  Phar- 
mac9utria,  Gallus;  à  l'épopée  et  au  genre  didactique, 
dans  Silène  et  Pollion;  presque  partout,  au  drame.  Il 
devient  maintenant  le  drame  pur,  et  ensuite  le  roman , 
ce  dont  Longus  avait  toutefois  donné  un  exemple  dans 
Daphnis  et  Chloé  (F.  ce  mot).  Les  troubles  religieux  et 
politiques  qui  remplirent  le  xv*  et  le  xvi*  siècle  expli- 
quent d^ailleurs  le  succès  prodigieux  qu'obtinrent,  parmi 
bien  d'autres  productions  du  même  genre,  VAminte  (  V.  ce 
mot)  du  Tasse,  le  Pastor  /ido  (V,  ce  mot)  de  Guarini , 
lesquels,  avec  VAstrée  { V.  ce  mot)  d'Honoré  d'Urfé,  ser- 
virent de  modèle  aux  pastorales  de  Segrais,  aux  poésies 
de  Bacan  et  de  M*"'  Deshoulières.  Sous  prétexte  de  ber- 
geries, nos  Français  expriment  des  sentiments  quelque- 
fois délicats  et  vrais  ;  mais  le  faux  règne  dans  les  mœurs 
et  dans  tout  le  reste.  Les  bergers  héroïques  de  d'Urfé,  de 
Segrais,  de  Bacan,  de  Fontenelle,  de  Florian,  n'ont  jamais 
existé  dans  aucun  pays,  et  sont  particulièrement  incon- 
nus à  l'Antiquité.  C'est  pour  la  forme  qu'ils  possèdent  un 
chien  et  des  moutons ,  et  ils  ne  portent  guère  la  houlette 
que  par  contenance.  André  Chénier  a  pu  donner  seul  à 
ses  idylles  un  coloris  et  un  parfum  empruntés  aux  poètes 
de  l'ancienne  Grèce. 

S'il  était  possible  de  concevoir  la  Pastorale  indépen- 
damment de  la  versification,  il  semble  que  le  roman  de 
PatU  et  Virginie,  de  Bernardin  de  S*-Pierre,  devrait  seul 
mériter  ce  nom  parmi  nous.  Aux  deux  extrémités  de 
l'histoire  de  ce  genre  se  reproduisent  des  circonstances 
tellement  analogues,  qu'il  est  impossible  de  n'en  être 
point  frappé  :  en  1788,  la  France,  comme  la  Grèce  des 
Ptolémées,  n*a-t-elle  pas  épuisé  tous  les  genres  de  gloire 
littéraire?  Dogmes  religieux  et  croyances  politiques  sont 
également  affaiblis.  Une  analyse  ardente,  audacieuse,  a 
montré  le  côté  vulnérable  des  institutions  humaines;  un 
siècle  s'est  écoulé  tout  rempli  par  le  raisonnement  :  c'est 
dans  cette  lassitude  générale  qu'apparaît  l'histoire  simple, 
pathétique,  de  Paul  et  Virginie,  si  propre  à  distraire  de 
leur  ennui  des  esprits  fatigués  de  tragédies  héroïques, 
rassasiés  des  Jouissances  de  la  civilisation. — De  nos  Jours, 
on  a  vu  renaître,  avec  M'"*  Sand  et  d'autres  ^ri vains 
beaucoup  moins  célèbres ,  sinon  la  poésie  pastorale,  au 
moins  le  goût  des  tableaux  champêtres.  Ce  ne  sont  que 
scènes  bretonnes  ou  provençales,  scènes* du  Languedoc 
ou  du  Jura,  de  la  Normandie  ou  du  Bocage,  formant  un 
contraste  piquant  avec  les  idées  positives  du  siècle.  Ne 
serait-ce  pas  aussi  qu'après  les  ouragans  de  passions  dé- 
chaînés depuis  si  longtemps  dans  la  littérature,  surtout 
dans  le  roman ,  on  a  besoin  de  paysages  tranquilles  et 
d'émotions  honnêtes? 

Les  autres  pays,. comme  la  France,  ont  eu  des  écrivains 
du  genre  pastoral.  Sans  parler  des  ouvrages  d^à  cités 
plus  haut,  l'Italie  peut  mentionner  la  Favoladi  Orfeo  de 
Politien,  drame  pastoral  Joué  dès  1484,  l'égloffue  de 
Tirsis  par  Castiglione,  divers  ouvrages  de  Tansfllo ,  de 
Beccari ,  de  LoUio ,  la  Filli  di  Sciro  de  Bonarelli ,  VAlceo 
d'Ongaro ,  et,  au  xix*  siècle,  les  églogues  de Meli,  écrites 
dans  le  dialecte  sicilien.  —  En  Espagne,  Boscan  et  Bia- 
nuel  <ie  Villega  naturalisèrent  l'idylle  ;  Montemayor  pu- 
blia une  Diane,^  et  Cervantes  une  Galatée,  Au  commence- 
ment de  notre  siècle,  Melendez  Valdez  a  laissé  des  églogues 
et  des  romances  pastorales  qui  le  placent  au-dessus  de 
ses  devanciers.  —  Le  Portu^l  compte  parmi  les  poètes 
bucoliques  Saa  de  Miranda,  Berniurdino  Bibeira,  Cbristo- 
val  Falçam,  Antonio  Ferreira,  Bodriguez  Lobo,  Diego  Ber- 
nardez,  Andrade  Caminha,  Alvar&  do  Oriente.  —  En 
général ,  l'Angleterre  n'a  point  brillé  dans  le  genre  pas- 
toral. Le  Calendrier  de  Spencer  contient  des  églogues 
pour  tous  les  mois;  Milton  fit  une  pastorale,  Lycidas  ;  on 
a  une  Arcadie  de  Philippe  Sidnev,  quelques  morceaux 
bucoliques  de  Pope,  de  Collins,  de  Gregory,  etc.  —  En 
Allemagne,  Gessner  a  voulu  étendre  les  limites  naturelles 
du  genre,  en  lui  donnant  un  intérêt  plus  moral  ;  il  a  écrit 
en  prose.  On  place  après  lui  Voss  et  Kleist.  —  Les  Hol- 
landais parlent  avec  éloge  des  idylles  de  Tollens. 

PASTORALE,  en  termes  de  Musique,  air  qui  rappelle  la 
nature  champêtre.  On  a  de  délicieuses  pastorales  dans 
le  Don  Juan  de  Mozart  et  le  Joconde  de  Nicolo.  Certains 
morceaux  d'orgue  et  de  musique  d'église,  exécutés  par- 
ticulièrement a  la  fête  de  Noël,  portent  le  nom  de  Pas- 


torales. Beethoven  a  composé  une  célèbre  et  très-belle 
Symphonie  pastorale,  \ 

PASTOB  FIDO  (II),  c.-à-d.  le  Berger  lidèle,  œuvre  dn 
genre  pastoral,  composée  par  Guarini  à  l'imitation  de 
VAminte  du  Tasse.  Ls  poète  voulut  fondre  divers  genres 
en  un  seul,  et  donna  à  son  poème  le  nom  de  Tragi-co- 
médie pastorale.  Il  devait  résulter  de  cet  assemblage  une 
grande  irrégularité  dans  le  plan,  et  de  l'invraisemblance 
dans  les  détails.  L'ouvrage  est  divisé  en  5  actes,  qui  se 
passent  dans  l'Arcadie.  Une  peste  désole  le  pays,  et 
l'oracle  consulté  répond  que  les  maux  de  l'Arcadie  fini- 
ront par  le  dévouement  d'un  bercer  fidèle.  Pour  obéir  à 
cet  oracle,  le  poète  a  imaginé  une  intrigue  trop  complexe 
pour  être  expliquée  ici.  Le  péril  de  mort  où  se  trouve 
l'innocente  Amaryllis;  le  généreux  dévouement  de  Mirtil, 
qui  s'offre  à  mourir  à  sa  place,  quoique  les  apparences  la 
lui  fassent  croire  infidèle;  les  préparatifs  de  ce  sacrifice; 
les  éclaircissements  imprévus  qui  font  reconnaître  dans 
la  victime  le  fils  du  sacrificateur;  les  interprétations  pro- 
phétiques qui  rétablissent  le  vrai  sens  de  l'oracle  et  déli- 
vrent Mirtil  ;  l'insensible  chasseur  Silvio  qui  blesse  sans 
le  vouloir  d'un  de  ses  traits  la  tendre  Donne,  et  est 
amené  par  la  pitié  à  lui  accorder  un  amour  qu'il  n'avait 
pu  Jusqu'alors  sentir  pour  elle,  tous  ces  ressorts  appar- 
tiennent h  la  tragédie.  Le  sujet  n'appartient  à  la  comédie 
que  par  quelques  accessoires  qui  pourraient  en  être  re- 
tranchés, et  à  la  pastorale  que  par  la  qualité  des  person- 
nages, dont  il  serait  d'autant  plus  facile  de  relever  la 
condition  qu'elle  se  trouve  le  plus  souvent  au-dessous 
de  leurs  sentiments  et  de  leur  langage.  —  Outre  les  imi- 
tations de  VAminte,  on  trouve  dans  le  Pastor  fido  de 
nombreux  souvenirs  du  thé&tre  grec  :  Guarini  a  introduit 
dans  son  ouvrage  le  chœur  antique,  chanté  avec  accom- 
pagnement d'instruments.  Le  Pastor  fido  fut  composé 
vers  158Î,  et  imprimé  en  1590,  in-4^  Il  obtint  un  pro- 
digieux succès.  Malgré  le  manque  de  naturel  de  quelques- 
uns  des  incidents  et  la  recherche  du  style,  il  renferme 
plusieura  morceaux  d'une  rare  beauté  :  on  y  remarque 
une  grande  richesse  d'imagination,  surtout  dans  les  des- 
criptions. On  lui  reproche  la  subtilité,  les  sentiments 
alambiqués,  de  l'affectation  dans  le  style,  et  la  licence  de 
beaucoup  de  passages.  Le  Pastor  fido  a  été  traduit  dans 
toutes  les  langues  de  l'Europe;  il  en  existe,  entre  autres 
traductions  françaises,  une  de  Pecquet,  avec  le  texte  ita- 
lien, Paris,  1733-1759,  2  vol.  in-12.  E.  B. 

PASTOUBAUX,  nom  donné  quelquefois  aux  pierres 
cubiques  qui  forment  le  petit  appareil  dans  les  monu- 
ments antérieurs  au  xi*  siècle. 

PASTOU  BELLES ,  espèces  de  poésies  pastorales,  d'églo- 
gues  dialoguées  entre  un  troubadour  et  un  berger  ou  une 
bergère.  On  les  nommait  aussi  Vaqueyras  (Vachères]. 
Les  plus  remarquables  sont  celles  de  Giraud  Biquier,  de 
Jean  Estève  de  Béziera,  et  de  Paulet  de  Marseille.  Plu- 
sieura pastourelles  du  moyen  fiLge  roulent  sur  Robin  et 
Marion,  type  des  amoure  de  village. 

PAT  (de  l'italien  pattare,  faire  quitte),  terme  du  Jeu 
d'échecs,  se  dit  loraqu'un  des  deux  joueura,  n'ayant  pas 
son  roi  en  échec,  ne  peut  plus  Jouer  sans  se  mettre  en 
prise.  Quand  on  est  pat,  la  partie  devient  nulle. 

PATACHE  (de  l'italien  patascia)^  sorte  de  voiture  pu- 
blique à  deux  roues  et  non  suspendue,  qui  est  encore  en 
usage  dans  quelques  localités.  Certaines  patacbes  sont 
appelées  patachons,  nom  qu'on  donne  également  au  con- 
ducteur. On  en  voit  où  les  voyageurs,  au  nombre  de  4 
ou  de  6,  sont  assis  dos  à  dos,  la  voiture  se  trouvant  ou- 
verte des  deux  côtés,  et  ils  ont  les  Jambes  placées  dans  des 
espèces  de  panien  ballants. 

PATACHE,  b&timent  léger,  autrefois  employé  au  service 
des  grands  navires  pour  aller  à  la  découverte  ou  porter 
des  nouvelles.  Le  mot  est  resté  pour  désigner,  soit  un 
vieux  navire  approprié  pour  la  police  d'un  arsenal ,  soit 
ces  bâtiments  de  la  douane  ou  de  l'octroi  ancrés  dans  les 
ports  ou  dans  les  rivières  pour  percevoir  les  droits  de 
sortie  ou  d'entrée  sur  les  marehandises  et  empêcher  la 
fraude. 

PATAGIATA,  nom  qu'on  donnait  chez  les  Bomainsà 
une  tunique  parsemée  de  fleura  d'or  et  de  pourpre ,  et 
ornée  de  riches  franges. 

PATAGON  (Idiome).  11  est  guUural ,  difficile  à  pronon- 
cer, et  plein  de  sons  que  nos  lettres  ne  sauraient  exprimer. 
Il  est  pius  riche  en  noms  de  nombre  que  beaucoup  d'au- 
tres langues  de  l'Amérique. 

PATAGON,  PATAQUE,  PATAB,  monnaies.  F.  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

PATANI  (Dialecte).  K.  Afghans  (Langue  des). 

PATAVINITÉ  (de  Patavium,  nom  laUn  de  Padouej, 


PAT 


1387 


PAT 


défaat  dont  les  Romains  faisaient  reproche  à  Tite-Live, 
mais  sur  la  nature  duquel  on  n'est  pas  d*accord  :  selon 
lés  uns,  c'était  une  orthographe  vicieuse;  selon  les  au- 
tres, ane  prononciation,  un  accent  de  province;  ou  bien, 
certaines  tournures  de  phrases  particulières  aux  Padouans. 
On  a  même  imaginé  que  le  mot  Pataviniié  était  une  allu- 
sion aux  opinions  politiques  de  Tite-Live,  qui,  comme 
Padouan,  aurait  été  partisan  de  Pompée.  V.  Morhof, 
De  Patavinitate  Livianà,  Leyde,  1G85. 

PATE,  ensemble  des  couleurs  d'un  tableau.  Peindre 
dans  la  pâte,  c'est  charger  la  toile  de  masses  épaisses  de 
couleurs,  qu'on  fond  ensuite  les  unes  dans  les  autres,  au 
lieu  de  couvrir  le  trait  d'une  ébauche  légère,  puis  de 
touches  successives.  Cette  pratique  est  celle  de  beaucoup 
de  coloristes;  mais, elle  ne  convient  pas  aux  peintres  des- 
sinateurs, parce  qu'elle  empêche  de  suivre  les  lignes  du 
trait  et  d'arrêter  les  contours. 

PATELIN  ou  PATHELIN  (Maître  Pierre),  farce  célè- 
bre, le  meilleur  et  l'un  des  plus  anciens  monuments  du 
gàiie  comique  de  la  France.  Ni  l'auteur,  ni  la  date  de  cette 
pièce  ne  sont  connus.  On  l'a  attribuée  à  Pierre  Blanchet 
et  à  Antoine  de  I^  Sale,  l'auteur  de  la  Chroniqw  du 
petit  hhan  de  Saintré.  La  1'*  édition  imprimée  date  de 
1474.  Un  avocat  décrié  et  mis  au  pilori  s'entretenant 
avec  Guillemette,  sa  digne  épouse,  des  moyens  de  mettre 
à  neuf  leurs  habits  us&  ;  l'avocat  leurrant  de  belles  pa- 
roles le  drapier,  son  Toisin,  pour  se  faire  donner  du  drap 
à  crédit ,  puis  employant  un  grossier  artifice  pour  ne  pas 
le  payer  ;  le  drapier  se  félicitant  d'avoir  trompé  Patelin 
en  lui  vendant  24  sous  ce  qui  n'en  vaut  que  20  ;  le  berger 
Thibaud  Agnelet  volant  le  drapier,  son  patron,  et  trou- 
vant Patelin  prêt  à  plaider  pour  lui  ;  le  berger  enfin  trom- 
pant l'avocat  qui  lui  a  fait  gagner  une  mauvaise  cause, 
tournant  contre  lui  la  ruse  qu'il  lui  a  enseignée  contre  sa 
partie,  et  ne  répondant  à  sa  demande  d'honoraires  que 
par  le  cri  de  ses  bétes  à  laine  ;  tel  est  l'ensemble  de  la 
pi^ce.  Sans  compter  beaucoup  d'expressions  qui  sont  de- 
meurées proverbiales,  le  nom  de  Patelin  est  devenu  dans 
notre  langue  le  synonyme  de  flatteur  et  de  fourbe.  La 
farce  de  l'avocat  Patelin  a  été  mise  en  vers  latins  par 
Alexandre  Connibert  en  1543,  et  rajeunie  par  Brueys  et 
Palaprat,  qui  en  firent  une  comédie  en  3  actes  en  prose, 
jouée,  en  1706,  au  Thé&tre-Français,  où  elle  obtint  en- 
core un  succès  nouveau.  On  l'a  mise  de  nos  Jours  en 
opéra-comique  (musique  de  Bazin).  La  meilleure  édition 
de  l'œuvre  originale  est  celle  qu'a  donnée  Génin,  sous  ce 
titre  :  Maître  P.  Patelin,  avec  une  introduction  et  des 
notps,  Paris,  1854,  in-8».  B. 

PATELLE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d*  Histoire. 

PATÈNE,  vase  sacré  en  or  ou  en  argent,  en  forme  de 
petit  plat  rond,  et  qui  sert,  pendant  la  messe,  à  recouvrir 
le  calice  et  à  recevoir  les  parcelles  de  l'hostie.  Tout  unie 
à  lïntérieur,  pour  que  rien  ne  s'oppose  à  la  purification 
que  le  prêtre  doit  en  faire  en  certames  circonstances,  la 
patène  porte  le  monogramme  de  J.-C.  gravé  à  l'extérieur. 
Cependant,  on  en  connaît  une  marquée  par  un  artiste  alle- 
mand des  initiales  gothiques  E.  S.,  avec  la  date  de  1466  : 
eUe  représente  au  milieu  S^  Jean-Baptiste  assis  ;  le  tour 
est  orné  d'enroulements  dans  lesquels  se  trouvent  8  mé- 
daillons renfennant  quatre  Pères  de  l'Église  et  les  ani- 
maui  symboliques  des  quatre  Évangélistes.  L'officiant  fait 
baiser  la  patène  aux  personnes  qui  vont  à  l'offrande.  Pri- 
mitiveoicnt,  la  patène  était  plus  grande  qu'ai:^ourd*hui, 
parce  qu'on  s'en  servait  pour  donner  la  communion  aux 
fidèles;  le  ciboire  ne  fut  employé  à  cet  usa^e  que  vers  le 
X*  siècle.  V,  Barraud,  Noivce  sur  les  calices  et  les  par 
tàes.  Caen,  1842. 

PATENOTRES  (du  latin  Pater  noster)^  nom  que  l'on 
donna  d'abord  à  l'Oraison  dominicale,  et  qui  s'est  ensuite 
étendu  à  toutes  sortes  de  prières ,  puis  au  chapelet  et  aux 
grains  qui  le  composent.  —  En  termes  de  Blason ,  on 
Appelle  Patenôtres  une  dizaine  de  chapelet  ou  le  chape- 
let tout  entier,  dont  on  entoure  les  écus.  En  Architec- 
ture, ce  sont  des  ornements  en  forme  de  grains  ronds  ou 
orales,  qui  se  mettent  au-dessus  des  oves. 

PATENTES  (Contribution  des),  droit  que  l'on  paye 
pour  exercer  une  industrie  ou  un  commerce  :  tout  habi- 
tant de  la  France,  citoyen  ou  étranger,  y  est  assujetti. 
Par  cette  contribution,  on  a  voulu  faire  participer  l'État 
&u  bénéfice  que  le  commerce  retire  des  capitaux  mobiliers. 
La  patente  se  compose  d'un  droit  fixe  et  d'un  droit  pro- 
portionnel. D'après  la  loi  du  25  avril  1844,  le  droit  fixe 
tsi  établi ,  pour  la  plupart  des  professions,  eu  égard  à  la 
population  et  d'après  un  tarif  général  qui  comprend  huit 
clasae8;eQ  égard  à  la  population  pour  certaines  autres 


professions,  mais  d'après  un  tarif  exceptionnel;  sans  avoir 
égard  à  la  population  pour  certaines  grandes  manufac- 
tures, telles  que  les  filatures,  dont  la  patente  est  fixée  en 
raison  composée  du  nombre  d'ouvriers,  de  broches,  de 
machines,  etc.  Le  droit  proportionnel  est  ét&bli  d'après 
la  valeur  locative  de  l'établissement  et  d'après  sa  nature. 
La  nature  de  l'établissement  détermine  six  catégories  : 
la  1^*  paye  le  quinzième  de  la  valeur  locative  de  la  mai* 
son  d'habitation  seulement;  la  2*,  le  vingtième  sur  la 
maison  d'habitation  ;  la  3«,  la  4*  et  la  5*,  le  vingtième  sur 
la  maison  d'habitation  et  sur  diverses  parties  de  la  mai- 
son de  commerce;  la  6%  le  quarantième.  Plusieurs  pro- 
fessions sont  exemptes  de  tout  droit  proportionnel. 

Les  patentables  ^ui  exercent  plusieurs  commerces ,  in- 
dustries ou  professions,  même  dans  des  communes  diffé- 
rentes ,  doivent  seulement  la  patente  pour  l'industrie,  le 
commerce,  la  profession  qui  donne  lieu  au  plus  fort  droit 
fixe.  Sont  exempts  de  tout  droit  de  patente  :  les  fonction- 
naires publics,  les  professeurs  et  les  instituteurs,  les  écri- 
vains publics,  les  employés  salariés,  les  artistes,  les  édi- 
teurs de  feuilles  périodiques,  les  laboureurs  et  cultivateurs, 
les  concessionnaires  de  mines  ou  de  marais  salants,  les  pê- 
cheurs, les  sociétés  en  commandite,  les  caisses  d'épargne, 
les  assurances  mutuelles,  certains  marchands  ambulants. 
Aucune  demande  ne  doit  être  faite  en  justice,  aucun  acte 
extra-judiciaire  ne  doit  être  signifié,  aucune  obligation 
notariée  ne  doit  être  souscrite,  sans  que  l'officier  public 
qui  en  est  chargé  fasse  mention  de  la  patente  du  com- 
merçant pour  lequel  il  agit,  ou  sans  mentionner  qu'il 
n'en  a  pas,  &  peine  de  500  fr.  d'amende. 

La  patente,  qui  a  remplacé  ce  qu'on  appelait  sous  Tan- 
cienne  monarchie  les  Aiaes  (  V,  ce  mot  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d'Histoire)^  fut  instituée  par  la 
loi  des  2-17  mars  1791.  Cette  loi  n'imposait  qu'une  con- 
tribution proportionnelle  au  loyer  des  habitations,  bou- 
tiques ,  magasins  et  ateliers  ;  il  n'y  avait  aucune  distinction 
de  classes  eu  égard  à  la  population  des  localités;  aucune 
demande  ou  défense  en  justice,  aucun  acte,  traité  ou 
transaction  en  la  forme  auUientique,  aucun  enregistrement 
d'acte  sous  seing  privé,  ne  pouvaient  avoir  lieu  sans  pro- 
duction de  la  patente;  les  contrevenants  à  la  loi  étaient 
frappés  d'une  amende  quadruple  du  prix  de  la  patente, 
et  de  la  confiscation  des  marchandises;  toute  personne 
patentée  pouvait  faire  saisir  les  marchandises  fabriquées 
ou  vendues  par  des  non-patentés,  et  la  moitié  des  confis- 
cations ou  amendes  lui  appartenait.  Un  timbre  fut  ajouté 
à  la  patente  par  décret  des  10-17  juin  1791.  Le  décret 
des  17-20  septembre  de  la  même  année  interdit  l'énon- 
ciation  d'aucune  profession  sur  la  patente,  dans  la  crainte 
que  cette  mention  ne  ressemblât  à  une  délimitation  indi- 
recte de  la  liberté  d'industrie  :  il  distingua  seulement . 
d'après  l'élévation  du  droit,  les  patentes  supérieures,  qui 
donnaient  le  droit  d'exercer  tous  les  états ,  les  patentes 
simples,  et  les  demi-patentes ,  ces  dernières  appartenant 
aux  boulangers  seulement.  Un  décret  de  la  Convention, 
des  20-21  mars  1793,  supprima  les  droits  de  patente;  ils 
furent  rétablis,  pour  le  négoce  ou  commerce  seulement , 
par  décret  du  4  thermidor  an  m  (22  juillet  1795) ,  et  tout 
marchand  ou  négociant  fut  tenu,  sous  peine  de  confisca- 
tion, d'afficher  au  devant  de  sa  maison  la  nature  de  son 
commerce;  en  même  temps  le  droit  proportionnel  au 
loyer  fut  transformé  en  un  droit  fixe,  variable  suivant 
l'importance  de  la  population.  La  loi  du  6  fructidor  an  v 
(23  août  1706)  divisa  les  droits  de  patente  en  droit  fixe  et 
droit  proportionnel  ;  elle  embrassa  dans  ses  dispositions 
non-seulement  ceux  qui  exerçaient  le  commerce  et  l'in- 
dustrie, mais  encore  diverses  professions  désignées  dans 
un  tableau  annexé,  tels  que  les  notaires,  les  architectes, 
les  officiers  de  santé,  les  dentistes,  etc.  ;  elle  exempta  du 
droit  proportionnel  le  patenté  dont  le  droit  fixe  ne  s'éle- 
vait pas  à  40  fr.  La  loi  du  9  frimaire  an  v  (30  nov.  1705) 
dispensa  de  la  patente  les  citoyens  travaillant  chez  eux^ 
pour  le  compte  d'autrui ,  n'employant  pas  d'ouvriers ,  et' 
n'exposant  point  en  vente  les  produits  de  leur  industrie. 
Les  lois  du  11  germinal  an  v  et  du  7  brumaire  an  vi 
(31  mars  et  28  oct.  1797)  eurent  pour  objet  d'écarter  ou 
de  prévenir  les  difficultés  d'exécution  des  lois  précédentes. 
Ces  lois  furent  coordonnées  par  une  autre  loi  du  1*''  bru- 
maire an  vn  (22  ocL  1798).  L'arrêté  du  26  brumaire 
an  X  (19  nov.  1801)  remit  aux  percepteurs  le  recc<i- 
yrement  de  l'impôt  des  patentes,  Jusoue-là  confié  aux 
receveurs  de  l'enregistrement,  et  accoroa  aux  patentés  la 
faculté  de  se  libérer  par  douzièmes,  de  mois  en  mois.  La 
loi  du  13  floréal  de  la  même  année  (4  mai  1802)  ajouta 
5  centimes  par  franc  h  l'impôt  précédemment  fixé,  pour 
former  un  fonds  de  dégrèvement  et  de  non-valeurs.  La  lof 


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1388 


PAT 


éu  25  mars  1817  attribua  aaz  Conseils  de  préfecture  le 

iugement  des  réclamations  des  contribuables,  et  organisa 
e  droit  fixe  des  fabriques  et  manufactures,  sans  égard  k 
la  population.  Une  loi  du  20  juillet  1837  ayant  afiTranchi 
les  commerçants  de  Timpôt  du  timbre  des  livres  de  com- 
merce, on  ajouta  3  centimes  par  franc  au  principal  de  Ta 
contribution  de  la  patente.  La  loi  des  25  ayril  et  7  mai 
1844  est  notre  règle  aujourd'hui  en  matière  de  patentes. 
Toutefois,  la  loi  du  18  mai  1850  a  soumis  à  la  patente 
eertaines  professions  que  la  loi  de  1844  en  avait  affhm- 
chies  :  telles  sont  celles  des  médecins,  des  chirurgiens,  des 
Tétérinaires,  des  notaires,  avocats,  agréés,  avoués,  huis- 
siers, greffiers,  commissaires-priseurs,  maîtres  de  pen- 
sion, lesquels  payent  un  droit  proportionnel,  fixé  au  15* 
du  loyer.  F.  Balmelle,  Code  des  patentes,  1844  ;  Lanier, 
Tarif  général  des  patentes,  1844;  Laine,  Manuel  des  pa- 
tentés, Paris,  1845,  inS\  L.  et  B. 

PATENTE  DE  SANTÉ,  passo-port  et  Certificat  de  santé  qui 
se  délivre  dans  les  ports  de  mer  aux  navires  en  partance. 
La  patente  est  nette,  quand  elle  atteste  que  le  b&timent 
est  parti  d'un  pays  non  infecté;  brute,  quand  elle  atteste 
le  contraire  ;  suspecte,  lorsque  le  navire  a  rel&ché  dans 
un  port  ou  communiqué  avec  des  b&timents  dont  Tétat 
sanitaire  est  douteux.  Cest  d'après  les  termes  de  la  pa- 
tente qu^on  motive  la  libre  admission  du  navire,  ou  qu'on 
le  met  en  quarantaine. 

PATÈQUES,  nom  que  les  Anciens  donnaient  à  des 
figures  de  petits  nains  au  corps  trapu  et  au  ventre  proé- 
minent, images  des  dieux  Cabires.  V,  Morin,  Sur  les 
Dieux  patèques,  dans  le  t.  I*'  des  Mémoires  de  VAca- 
demie  des  Inscriptions. 

PATÈRE ,  coupe.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

PATÈRE,  ornement  en  cuivre  doré  ou  en  bois,  qui  est 
originairement  à  peu  près  de  la  forme  d'une  patère  an- 
tique, et  sur  lequel  on  tient  écartés  et  drapés  les  rideaux 
d*un  lit  ou  d'une  fenêtre. 

PATERNELLE  (Puissance).  V.  Père. 

PATERNITÉ ,  état  ou  qualité  de  père.  On  distingue  :  la 
paternité  légitime,  qui  est  la  conséquence  du  mariage  ;  la 
paternité  naturelle,  résultant  de  la  reconnaissance  d'un 
enfant  né  d'une  femme  à  laquelle  on  n'est  attaché  par 
aucun  lien  légal  ;  la  paternité  civile,  créée  par  l'adoption. 
La  paternité  adultérine  ou  incestueuse  existe  de  fait; 
mais  la  loi  ne  la  reconnaît  ni  ne  la  nomme.  L'Église 
admet  une  paternité  spirituelle,  espèce  d'alliance  qui  se 
contracte  entre  le  parrain  et  le  filleul  ou  la  filleule.  Le 
Droit  romain  avait  dit  :  Is  pater  est  quemjustœ  nuptiœ  de- 
monstrant,  «  Celui-là  est  le  père,  qui  est  désigné  par  des 
noces  légales.  »  Le  Code  Napoléon  (art.  312]  accepte  cette 
maxime,  et  lui  donne  plus  de  rigueur  encore  :  «  L'enfant 
conçu  pendant  le  mariage  a  pour  père  le  mari.  »  Toute- 
fois, la  loi  admet  le  Désaveu  de  paternité,  si  le  mari 
prouve  une  absence  ou  une  impossibilité  pendant  un 
temps  suffisant,  ou  encore  lorsqu'à  la  circonstance  d'adul- 
tère se  joindrait  le  mystère  qu'on  lui  aurait  fait  de  la 
naissance  de  l'enfant,  ou  enfin  si  l'enfant  naît  prématu- 
rément dans  le  mariage,  c-à-d.  moins  de  180  jours  après 
la  célébration.  Dans  ce  dernier  cas,  l'action  en  désaveu 
ne  serait  pas  admise,  si  le  mari  avait  été  averti  avant  le 
mariage,  ou  s'il  avait  assisté  à  l'acte  de  naissance,  ou  si 
l'enfant  n'est  pas  déclaré  viable.  L'exercice  du  droit  de 
désaveu  est  circonscrit  dans  un  délai  très-court  :  si  le 
mari  est  sur  le  lieu  de  la  naissance  de  l'enfant ,  le  dés- 
aveu doit  avoir  lieu  dans  le  mois;  s'il  est  absent,  le  délai 
est  de  deux  mois  après  son  retour.  Si  on  lui  a  fait  mys- 
tère de  la  naissance  de  l'enfant,  le  délai  est  aussi  de  deux 
mois.  Dans  le  cas  où  le  mari  mourrait  pendant  le  délai 
légal,  les  héritiers  ont,  pour  exercer  l'action  en  désaveu, 
un  dâai  de  deux  mois,  à  partir  du  jour  où  l'enfant  aurait 
été  mis  en  possession  de  l'héritage,  ou  do  celui  où  il  les 
aurait  troublés  dans  cette  possession.  Hors  du  mariage,  la 
recherche  de  la  paternité,  permise  par  notre  ancienne 
législation  et  par  les  lois  de  quelques  peuples  modernes, 
est  absolument  interdite  (Code  NapoL^  art.  340).  \\  De- 
molombe.  De  la  Paternité  et  de  la  FilicOion,  in-8^ 

PATHELIN.  V,  Patelin. 

PATHÉTIQUE.  V.  Passions, 

PATHOS  (  du  grec  pathos,  passion),  fut  employé  pri* 
mitivement  par  les  rhéteurs,  en  opposition  avec  ithos, 
qui  veut  dire  moeurs,  pour  désigner  les  mouvements  et 
les  passions  qu'on  s'efforce  d'exciter  dans  l'àme  des  audi- 
teurs. L'abus  de  ce  moyen  oratoire  finit  par  ridiculiser  le 
mot  et  le  faire  prendre  en  mauvaise  part  :  il  n'exprime 
plus  qu'une  chaleur  affectée,  un  enthousiasme  factice  et 
ridiciue.  En  1672,  quand  Molière  donna  sa  comédie  les 


Femmes  savantes,  il  fit  dire,  en  forme  d'éloge,  par  le  p6 
dant  Vadius  au  pédant  Trissotin  (HI,  5)  : 

On  voit  partout  chez  tous  VWtos  et  le  pathos, 

ce  qui  prouve  que  le  mot  avait  perdu  sa  signification  sé- 
rieuse. 

PATIENCE  (du  latin  pati,  souffrir),  vertu  qui  consiste 
à  supporter  sans  murmure  les  incommodités  de  la  vie, 
la  douleur,  l'injustice,  les  adversités  de  toute  sorte.  Les 
Stoïciens  ramenident  toute  la  morale  à  ce  seul  précepte  : 
Sustine  (supporte),  et  le  Manuel  d'Épictète  n'est  qu'une 
lon^e  leçon  de  patience.  Le  christianisme  a  donné  à  la 
patience,  sous  le  nom  de  résignation ,  un  caractère  plus 
élevé,  en  présentant  les  maux  de  cette  vie  comme  une 
épreuve  salutaire,  comme  un  mérite  auprès  de  Dieu. 

patience.  V.  Stalle. 

patience  (Jeu  de).  V.  Gasse-téte. 

PATIENCE ,  combinaison  quelconque  d'un  Jeu  de  csrtes, 
au  moyen  de  laquelle  une  personne  seule  arrive  à  un  ré- 
sultat qu'elle  s'esi  proposé. 

PATIENCE  RUSSE.  V,   NiGADD. 

PATIENT,  terme  de  l'ancienne  musique.  V,  Agett. 

PATIN  (du  grec  patéin,  marcher?),  nom  d'une  sorte 
de  soulier  dont  la  semelle  était  fort  épaisse ,  et  que  les 
femmes  prenaient  pour  se  grandir  :  cette  mode  était  da 
temps  de  Louis  XIV,  et  c'est  sans  doute  pour  cela  que 
Dancourt ,  dans  sa  comédie  le  Chevalier  à  la  mode,  jouée 
en  1687,  a  nommé  une  bourgeoise  ridicule  et  coquette 
3/nie  Patin;  —  chaussure  supportée  par  un  cercle  de  fer 
et  par  deux  petits  montants ,  et  destinée  à  préserver  les 
pieds  de  toute  humidité;  —  forte  semelle  de  bois,  avec  ou 
sans  charnière,  et  sur  laquelle  était  cloué  jusqu'à  la 
moitié  un  chausson  de  laine.  —  On  appelle  plus  partico- 
lièrement  Patins  une  chaussure  dont  on  se  sert  pour 
glisser  sur  la  glace  :  elle  est  formée  d'une  semelle  de  bois, 
au  milieu  et  dans  toute  la  longueur  de  laquelle  est  fixée 
une  lame  d'acier  droite  au  talon  et  recourbée  à  la  pointe; 
elle  se  fixe  sous  chaque  pied  à  l'aide  de  courroies  et  de 
boucles.  C'est  par  préjugé  qu'on  a  dit  que  le  patin  est 
l'exercice  des  gens  du  Nord  ;  dans  les  régions  septentrio- 
nales, le  sol ,  encombré  de  neiges,  n'est  accessible  qu'aux 
traîneaux  :  on  y  patine  peu  et  mal ,  et  le  patinage  ep 
quelque  sorte  commercial ,  (jui  a  pour  but  de  pourvoir 
aux  nécessités  de  la  vie,  n'a  nen  de  commun  avec  l'exer- 
cice auquel  se  livrent  les  patineurs  aux  États-Unis,  en 
Angleterre,  en  Hollande,  en  Russie,  en  France,  etc.  Il  en 
est  de  même  des  évolutions  auxquelles  certains  soldats 
norvégiens  se  livrent  sur  la  glace,  à  l'aide  de  deux  plan- 
chettes de  sapin  fixées  à  leurs  pieds,  et  en  s'appuyant  sur 
un  long  pieu  armé  de  fer.  L'art  du  patin ,  comme  on  le 
pratique  par  plaisir,  a  des  adeptes  fort  habiles  :  on  les 
voit  simuler  les  figures  de  la  danse,  tourner  avec  adresse 
et  rapidité,  écrire  sur  la  glace  toutes  les  lettres  de  l'al- 
phabet ,  dessiner  des  oiseaux,  des  portraits,  etc.  En  1819, 
on  inventa  des  patins  où  la  lame  d'acier  était  remplacée 
par  trois  roulettes  de  cuivre  ;  malgré  des  essais  heureux 
sur  les  boulevards  et  dans  différents  jardins  de  Paris,  ce 
genre  d'amusement  n'a  pas  eu  une  longue  faveur.  Plus 
tard,  deux  artistes  chorégraphes,  les  époux  Dumas,  se 
servirent  de  patins  à  roulettes  sur  la  scène  du  théâtre  de 
la  Porte-S*-Martin.  Cette  épreuve  a  été  renouvelée  en 
grand  à  l'Opéra  de  Paris,  dans  le  ballet  des  patineurs  du 
Prophète,  opéra  de  Meyerbeer.  B. 

PATIN ,  en  termes  de  Charpenterie,  pièce  de  bois  posée 
de  niveau  sur  une  assise  de  pierre  et  servant  de  base  à 
^  charpente  d'un  escalier.  —  Dans  l'Architecture  hydrao* 
lique,  on  nomme  patins  les  pièces  de  bois  que  l'on  couche 
sur  des  pieux  dans  les  fondations  où  le  terrain  n'est  pas 
solide,  et  sur  lesquelles  on  assure  des  plates-formes  pour 
bâtir  dans  l'eau. 

PATINE.  V.  Bronze. 

PATISSIERS.  Les  cabaretiers,  traiteurs,  et  rôtisseurs, 
qui  donnaient  à  manger  chez  eux,  vendirent  d'abord  b 

Î&tisserie,  et  X/)uis  IX  leur  donna  des  règlements  en 
270.  Mais,  en  1567,  les  pâtissiers  furent  mis  en  commu- 
nauté particulière,  dans  laquelle  on  distin^a  les  ou- 
blayeurs  ou  fabricants  d'oubliés,  et  les  pâtissiers  de  pain 
d'épice.  L'apprentissage  fut  de  5  ans  pour  les  premiers, 
de  4  ans  pour  les  seconds.  La  corporation  avait  pour  pa- 
tron S^  Michel.  Jusqu'à  la  fin  du  xvni^  siècle,  les  pâtis- 
siers eurent  à  leur  porte  des  lanternes  vives,  sortes  de 
falots  fermés  et  transparents,  ornés  de  figures  grotesques. 
PATOIS,  mot  d'étymologie  inconnue,  ({ui  désigne  le  lan- 
gage du  peuple  et  des  paysans  particulier  à  chaque  prtr- 
vince  de  France  ou  à  chaque  sous-division  des  diverses  pro- 


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PAT 


vir.cGs.Les  patois  principaux' dont  on  retrouve  aujourd'hui 
des  traces  importantes  sont  :  au  nord,  le  wallon,  le  lorrain^ 
le  champenois,  le  picard,  le  normand  ;  à  Test ,  le  franc- 
comtois  et  le  bourguignon  ;  ils  sont  des  rameaux  de  la 
\ang\ke  d^oU  (  V,  ce  mot).  Au  centre,  le  poitevin,  Vauver- 
qnai,  le  limousin,  le  périgourdin;  au  midi,  le  dauphi- 
nois, le  provençal,  le  languedocien,  le  gascon,  le  béar- 
nais, sont  les  principaux  débris  de  Tancienne  langue  d'oc 
[V,  ce  mot).  Les  patois  tendent  à  disparaître,  gr&ce  à  la 
facilité  toujours  croissante  des  communications  entre 
Paris  et  les  départements.  Les  progrès  lents,  mais  conti- 
nuels, de  la  centralisation  sous  l'ancienne  royauté,  Tin- 
fluence  des  gouverneurs  envoyés  dans  les  provinces, 
avaient  refoulé  peu  à  peu  dans  le  tiers-état  les  langages 
locaux,  tandis  que  Taristocratie  et  même  la  partie  éclairée 
de  la  bourgeoisie  adoptaient  le  langage  parisien  :  Torga- 
DÎsation  de  la  France  depuis  la  Révolution ,  la  suppres- 
sion des  provinces  féodales,  renvoi  de  fonctionnaires 
essentiellement  temporaires  dans  les  nouvelles  circon- 
scriptions administratives,  pour  Tordre  politique,  mili- 
taire, judiciaire,  industriel ,  ou  pour  renseignement  pu- 
blic; la  concentration  à  Paris  des  principales  écoles 
couvernementales  et  des  examens  dans  les  diverses 
branches  du  haut  enseignement,  enfin  rétablissement 
des  chemins  de  fer,  tout  cela  a  porté  aux  patois  des  coups 
décisifs.  Ils  s^effaceront  partout  devant  l'inévitable  domi- 
oation  de  la  langue  française,  qui  dès  aujourd'hui  est  au 
moins  comprise  sur  presque  tous  les  points  du  territoire. 
11  n'y  a  plus  que  dans  les  campagnes  écartées  des  grands 
centres  de  population  que  les  patois  se  maintiennent 
encore. 

La  connaissance  des  patois  est  précieuse  et  souvent  in- 
dispensable pour  l'intelligence  complète  de  la  langue 
française,  et  surtout  de  ses  irrégularités  :  elle  est  d'un 
secours  très-puissant  pour  comprendre  les  écrivains  du 
moyen  âge  et  ceux  du  xvi*  siècle.  Les  patois  nous  donnent 
aussi  la  clef  d'une  foule  d'étymologies,  qui  souvent  sans 
cela  demeurent  fort  obscures.  Ainsi ,  le  nom  bourguignon 
ba\s  nous  explique  comment  baisser  existe  à  côté  de  l'ad- 
jectif bas;  gremde  (du  latin  grandis)^  en  picard,  nous 
explique  le  comparatif  greindre  ou  greinior,  greignor,  de 
nos  écrivains  du  moyen  âge.  Le  mot  ramon  du  même 
dialecte  (un  balai  1  nous  révèle  Tétymologie  du  nom  ra- 
moneur et  du  verne  ramoner,  La  préposition  dins  rap- 
pelle mieux  que  dans  l'étymologie  latine  de-in.  Elle  feime 
(la  femme)  est  une  trace  de  l'origine  de  l'article  français 
IV.  Articlb^,  et  le  second  mot  nous  explique  comment 
femme  rimait  au  moyen  &ge  avec  aime. 

V,  Champollion-Figeac ,  Nouvelles  recherches  sur  les 
patois  ou  idiomes  vulgaires  de  la  France,  Grenoble,  1809, 
in-12;  Mélanges  sur  les  langues^  dialectes  et  patois,  ex- 
traits des  Mémoires  de  la  Soctété  des  Antiquaires  de 
France,  \  voL  in-S"  ;  Bottin ,  Recherches  sur  les  patois^ 
1^3;  Peignot,  Essai  sur  V origine  de  la  langtie  fran- 
çaise, 183a  ;  Schnackenburç,  Tableau  synoptique  et  com- 
paratif des  idiomes  vulgaires  ou  patois  de  la  France, 
Berlin,  1840;  Pierquin  de  Gembloux,  Histoire  littéraire 
ft  philologique ,  et  bibliographie  des  patois  français, 
Paris,  184i,  in-8®;  Escallier,  Remarques  sur  le  patois, 
1857,  Douai,  i  voL  gr.  in-8».  P. 

PATOLA ,  instrument  de  musique  des  Birmans.  C'est 
une  sorte  de  guitare,  qui  a  la  forme  bizarre  d'un  alligator. 

PATOUILUS ,  instrument  de  musique,  le  même  que  le 
daque-bois  (  F.  ce  mût), 

PATRAT.  ) 

PATRIARCHES.  (  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

PATRICKS.  i      de  Biographie  et  d'Histoire. 

PATRICIENS.       J 

PATRIE,  pays  où  Ton  a  vu  le  jour,  où  sont  les  proprié- 
tés, les  traditions,  les  affections  et  les  espérances  de  la 
famille,  où  se  groupent  des  familles  alliées  par  la  com- 
munauté d'origine,  de  mœurs,  de  religion,  et  des  com- 
munautés unies  par  les  mêmes  droits,  les  mêmes  de- 
voirs, la  même  législation. 

PATRIMES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  ^Histoire. 

PATRIMOINE  (du  latin  palrimonium)^  ensemble  des 
biens  qui  viennent  de  la  famille,  et  spécialement  du 
père  ou  de  la  mère.  Dans  notre  ancien  Droit,  les  biens 
provenant  de  succession  de  famille  portaient  le  nom  de 
rropres  (et  l'on  disait  le  Propre  paternel,  le  Propre  ma~ 
ternel)x  ceux  qu'on  acquérait  par  son  industrie  person- 
nelle s'appelaient  Acqiiéts,  On  nomme  aujourd'hui  Sépa- 
ration des  patrimoines  l'opération  judiciaire  qui  a  pour 
objet  d'empêcher  que  les  biens  composant  une  succession 
œ  se  confondent  avec  ceux  de  Phéntier  qui  l'a  recueillie 


et  que  les  créanciers  personnels  de  cet  héritier  ne  soient 
payés  sur  les  biens  de  la  succession  au  préjucûce  des 
créanciers  et  des  légataires  du  défunt.  Cette  opération  est 
réglée  par  le  Code  Napoléon  (art.  878-881  ).  V,  Blondeau, 
Traité  de  la  séparation  des  patrimoines,  considérée  à 
Végarddes  immeubles,  1840,  in-8<^;  Dufresne,  Traité  de 
la  séparation  des  patrimoines,  suivant  les  principes  du 
Droit  romain  et  du  Code  civil,  1842,  in-8**. 

PATRIOTISME,  sentiment  qui  consiste  non-seulement 
dans  l'amour  de  la  patrie,  du  pays  et  de  la  nation  aux- 
quels on  appartient  par  sa  naissance,  mais  dans  la  subor- 
dination et  le  sacrifice  de  l'intérêt  particulier  à  l'intérêt 
général.  Ce  sentiment  peut  être  poussé  jusmi'à  la  super- 
stition, jusqu'au  fanatisme.  Plus  les  individus  possèdent 
d'occasions  de  prendre  part  aux  affaires  publiques,  plus 
le  patriotisme  a  d'éléments  de  développement  :  mais  il 
n'est  pas  vrai  qu'il  soit  exclusivement  inhérent  à  telle  ou 
telle  forme  de  constitution  politique. 

PATRISTIQ13E  ou  PATROLOGIE,  nom  donné  en  Alle- 
magne, et  quelquefois  en  France,  à  la  connaissance  des 
ouvrages  et  des  doctrines  des  Pères  de  l'Église. 

PATRON,  mot  qui ,  sans  parler  des  acceptions  qu'il  eut 
dans  l'ancienne  Rome  et  au  moyen  ftge  (V.  Patron, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire)^ 
s'appli^e  :  1**  au  saint  dont  on  porte  le  nom ,  ou  sous  la 
protection  duquel  on  s'est  placé;  ^^  à  tout  homme  qui 
remplit  envers  quelqu'un  le  rôle  de  protecteur;  2^  au 
maître,  par  rapport  a  ses  ouvriers;  A^  au  commandant 
d'un  canot,  d'une  chaloupe  ou  d'un  très-petit  bâtiment; 
5®  au  modèle  d'après  lequel  travaillent  certains  artisans, 
et  qui  figure  les  différentes  parties  de  leurs  ouvrages. 

PATRONAGE  (Sociétés  de),  sociétés  de  bienfaisance 
qui  enveloppent  en  quelque  façon  l'individu  pauvre  et 
souffrant,  l'accompagnent  et  le  soutiennent  parmi  les  si- 
tuations les  plus  diverses,  et  lui  constituent  comme  une 
nouvelle  famille.  Le  patronage  ne  saurait  être  exercé  par 
l'administration  publique,  laquelle  ne  peut  remplacer  le 
zèle  de  la  charité  privée.  11  s'est  formé  des  sociétés  de 
patronage  pour  les  apprentis,  les  jeunes  ouvrières,  les 
orphelins,  les  jeunes  détenus,  etc. 

PATRONYMIQUES  (Noms),  (du  ^cecpatér,  père,  et 
onoma,  nom);  substantifs  propres  à  la  langue  grecque, 
qui  désignent,  à  l'aide  d'un  suffixe  particulier,  un  fils  ou 
une  fille,  et  qui  sont  dérivés  des  noms  propres  du  père  et 
quelquefois  de  la  mère.  Ils  sont  terminés  en  C2tic,  (ci>v, 
iâ2Y)ç,  eCfiYic,  àdYi(;,  b>v8aCf  pour  le  masculin  ;  en  uic,  {;, 
CvY),  covY],  pour  le  féminin  (quelquefois  en  âç  et  en  Ixi;). 
Les  noms  patronymiques,  surtout  les  masculins,  ne  s'ap- 
pliquent pas  seulement  au  fils,  mais  à  toute  la  descen- 
dance: ainsi,  le  nom  d'Êaoide  a  été  souvent  donné  à 
Achille,  petit-fils  d'Éaque,  et  à  Néoptolème  ou  Pyrrhus, 
son  arrière-petit-fils.  Certains  noms  propres  ont  la  forme 
patronymique,  sans  en  avoir,  du  moins  en  apparence,  la 
valeur  réelle  :  tels  sont  Miltiade,  Caméade,  Aristide,  Eu- 
ripide, Simonide,  Léonidas,  Brasidas,  Plulippide,  etc.;  il 
est  toutefois  vraisemblable  que  ces  noms  ont  été  patro- 
nymiques dans  l'ori^ne,  car  il  y  avait  des  personnages 
du  nom  d*Aristée,  Simon,  Léon,  Philippe,  etc.  La  termi- 
naison ifieuç,  qui  s'appliquait  aux  petits  des  animaux  dont 
le  nom  est  masculin,  et  la  terminaison  iç  aux  petits  de 
ceux  dont  le  nom  est  féminin,  peuvent  être  considérées 
comme  patronymiques;  il  y  en  a  d'ailleurs  fort  peu 
d'exemples.  On  peut  également  rattacher  ces  mots  à  la 
classe  des  diminutifs,  comme  l'indiquent  les  suflSxes  iSiov 
et  lov ,  qui  ont  généralement  une  valeur  diminutive.  — 
La  langue  latine  n'a  point  de  noms  patronymiques  qui 
lui  soient  propres  :  elle  s'est  approprié  presque  tous  ceux 
qui  sont  employés  dans  les  poèmes  grecs,  et  en  a  formé 
par  imitation  quelques-uns  qui  ne  sont  que  des  syno- 
nymes du  nom  de  famille  (Memmiadès  et  Scipiadès, 
pour  Memmius  et  Scipio),  ou  même  d'un  nom  de  peuple, 
tels  que  ^neadœ  pour  Trojani,  Romulidœ  pour  Romani 
(proprement  fUs  d'Énée,  de  Romulus)^ à  peu  près  comme 
les  Hébreux  disaient  les  fUs  d'Israël  ou  de  Jacob  pour 
se  désigner  eux-mêmes,  et  comme  nous  disons  les  fus  de 
Danaiîs  pour  traduire  le  mot  AovooC  des  poèmes  homé- 
riques. —  La  langue  française  est  tout  à  fait  impropre  à 
former  des  noms  patronymiques  à  l'aide  d'un  suffixe 
particulier.  Nous  avons  emprunté  quelcpies-uns  des  noms 
grecs,  comme  les  Atrides,  les  Héracltdes,  les  DanaJides, 
les  Pélopides,  les  Séleucides,  les  Lagides,  les  Sassa- 
nides.  Les  seules  traces  de  noms  patronymiques  que  l'on 
trouve  chez  nous  sont  les  noms  de  dynasties,  comme  Mé» 
rovinaiens  (descendants  de  Mérovée),  Carlovingiens  ou 
Carolingiens  (descendants  de  Cari  ou  Charles)^  Capé^ 
tiens  (descendants  de  Capet).  Au  reste,  si  les  noms  pa- 


PAU 


1390 


PAU 


tronymiques  sobt  rares  en  latin ,  et  impossibles  en  fran-  | 
çais,  on  peut  dire  qu'ils  y  sont  en  môme  temps  inutiles, 
puisqu'en  France,  comme  autrefois  à  Rome,  le  père 
transmet  son  nom  de  famille  à  tous  ses  enfants,  ce  qui 
n'avait  pas  lieu  en  Grèce,  où  il  était  fort  naturel  qu*Atrée 
fût  surnommé  Pélopide  ou  flls  de  Pélops,  Agamemnon  et  , 
Bld'nélas  Atrides  ou  enfants  d*Atrée,  etc.  P. 

PATROUILLE  (de  patrouiller,  agiter  Teau,  marcher 
dans  la  boue],  marche  nocturne  exécutée  par  des  hommes 
de  garde,  suivant  un  itinéraire  déterminé,  dans  le  but 
d'obserrer  ce  qui  se  passe,  de  prévenir  ou  de  réprimer 
tout  désordre.  Le  nom  de  Patrouille  s'applique  égale- 
ment audétachement  qui  fait  cette  ronde. 

PATTÉE,  nom  donné  jadis  à  la  portée  do  quatre  lignes 
du  Plain-Chant,  parce  qu'avant  rimprimerie  on  la  traçait 
avec  une  plume  à  quatre  pieds  faite  en  forme  de  patte. 

PATURE  (Vaine).  V.  Parcours. 

PAU  (Ch&teau  de).  Ce  château,  dont  la  phjrsionomie 
féodale  a  été  profondément  altérée  par  des  restaurations, 
e&t  situé  à  l'extrémité  occidentale  de  la  ville,  sur  un  rocher 
ILaillé  à  pic,  et  présente  une  réunion  de  tours  liées  par  des 
bâtiments  plus  modernes.  Il  fut  entièrement  reconstruit 
par  Gaston  Phœbus  en  1350.  On  y  arrive  par  un  pont 
étroit;  après  avoir  passé  sous  une  longue  voûte,  on  entre 
d-ms  une  cour  de  forme  irrégulière,  autour  de  laquelle 
sont  groupées  les  différentes  parties  de  l'édifice  :  à  gauche 
est  une  tour  massive  et  carrée  en  briques,  dont  l'inté- 
rieur ne  reçoit  de  Jour  que  par  de  longues  et  étroites 
meurtrières  ;  à  droite  est  un  beau  puits,  de  50  met.  de 
profondeur.  Au  Nord  s'élève  la  tour  Alontauzet.  de  forme 
carrée,  haute  de  30  met.,  et  où  il  n'a  existé,  durant  des 
siècles,  qu'une  ouverture  sur  l'une  des  faces,  à  13  met. 
du  sol  :  on  présume  que  cette  tour,  dont  la  partie  sou- 
terraine renfermait  de  petites  cellules  pratiauées  dans 
l'épaisseur  des  murailles,  a  dû  servir  d*ouoliettes,  et 
qu'on  y  descendait  les  malheureux  destinés  à  périr,  à 
l'aide  a*ane  corde  et  d'une  poulie  dont  on  croit  voir  le 

f^oint  d'attache  sur  une  poutre  transversale.  C'est  dans 
'aile  méridionale  que  naquit  Henri  IV  :  cette  partie  du 
ch&teau  est  ornée  avec  tout  le  luxe  de  la  Renaissance;  on 
admire  surtout  plusieurs  tapisseries  des  Gobelins,  la  salle 
à  manger,  la  chapelle  ornée  de  vitraux,  et  le  grand  esca- 
lier, dont  la  voûte,  les  parois  et  la  rampe  sont  sculptées 
eu  rosaces,  losanges,  chiffres,  entrelacs  et  médaillons. 
On  montre  la  carapace  de  tortue  qui  servit  de  berceau  à 
Henri  IV. 

PAUL  (Église  de  Saint-)  ,  à  Londres.  Deux  églises  pré- 
cédèrent le  monument  actuel.  L'une,  élevée  par  l'ordre 
d'Éthelbert,  roi  de  Kent,  fut  incendit^e  en  1083;  l'autre, 
dont  la  construction  dura  de  1086  à  1312,  perdit  en  1561 
par  un  coup  de  tonnerre  la  flèche  de  iOO  met.  qui  la 
surmontait,  et  périt  tout  entière  dans  l'incendie  de  1666. 
L'église  moderne,  que  les  Anglais  ont  trop  ambitieuse- 
ment comparée  à  S^Pierre  de  Rome,  à  S^*- Marie  de  Flo- 
rence, et  à  S^*-Geneviève  de  Paris,  a  été  b&tie  de  1675 
à  1710  par  Christophe  Wren.  Elle  est  entourée  d'un  mur 
à  hauteur  d'appui,  sur  lequel  est  scellée  une  très-belle 
grille  de  fer  ;  l'espace  qui  existe  entre  ce  mur  et  l'église, 
et  où  l'on  voit  une  statue  de  la  reine  Anne  par  Bird,  est 
appelé  le  Cimetière.  Le  plan  de  la  cathédrale  de  S^-Paul 
est  en  forme  de  croix  latine,  dont  le  grand  bras  est  long 
de  152  met.,  et  le  petit  de  68.  La  nef  centrale  a  33'",50  de 
hauteur.  La  grande  façade  occidentale  a  un  développement 
de  54",85.  Le  portique,  auquel  on  monte  par  22  marches 
de  marbre  noir,  est  composé  de  12  colonnes  corinthiennes 
accouplées;  un  second  portique,  de  8  colonnes  compo- 
sites, s'élève  sur  le  premier.  Le  fronton  contient  un  bas- 
relief  de  Bird,  représentant  la  conversion  de  S^  Paul  ;  au 
sommet  se  dresse  une  statue  colossale  de  ce  saint,  et,  sur 
les  côtés,  les  statues  de  S*  Pierre,  de  S^  Jacques  et  des 
quatre  Évangélistes.  Deux  tours  s'élèvent  à  droite  et  à 
gauche  du  portique  ;  elles  sont  terminées  par  de  petits 
dûmes  surmontés  d'une  pomme  de  pin  dorée  :  celle  du 
Sud  renferme  l'horloge,  celle  du  Nord  le  beffroi.  Â  cha- 
cune des  extrémités  du  transept  est  un  portiG[ue  demi- 
circulaire,  éclairé  par  une  voûte  que  soutiennent  6 
colonnes  d'ordre  corinthien,  et  surmonté  de  statues 
représentant  les  Apôtres.  Le  fronton  latéral  du  Nord  re- 
présente les  armes  d'Angleterre  soutenues  par  des  Anges. 
Les  murs  latéraux  de  rédiflce  sont  ornés  de  deux  ran- 
gées de  pilastres  ;  ceux  du  bas  sont  d'ordre  corinthien, 
et  ceux  du  haut,  d'ordre  composite  :  l'intervalle  entre  les 

1)ilastres  est  occupé  par  des  lenètres.  On  bl&me  génén^ 
ement  l'assemblage  des  deux  ordres  corinthien  et  com- 
posite, parce  Qu'ils  ont  une  égale  importance.  Il  on  est 
de  même  de  U  multiplicité  des  vides,  qui  rompt  les 


lignes  architecturales,  détruit  l'effet  du  la  perspective,  et 
altère  l'unité  de  l'ordonnance.  A  l'inu^r^ection  de  la  nef 
et  du  transept,  s'élève  jusqu'à  une  hauteur  de  110  met. 
un  dôme  assez  majestueux.  Il  repose  sur  un  soubasse- 
ment  de  6"*,50  de  hauteur,  et  est  entouré  de'32  colonnes 
corinthiennes  :  les  entre-colonnes,  de  quatre  en  quatre, 
sont  remplis  de  maçonnerie,  pour  caclier  les  arcs-bou- 
tants  et  les  pieds-droits  de  la  coupole,  et  servir  de  niches 
d'ornement.  L'entablement  de  la  colonnade  soutient  une 
galerie  entourée  d'une  balustrade,  et  sur  cette  galerie 
s'appuie  un  attique  orné  de  pilastres  et  de  fenêtres. 
Enfin,  l'entablement  de  cet  attique  donne  naissance  à  U 
coupole,  près  du  sommet  de  laquelle  règne  une  autre 
galerie;  du  milieu  de  celle-ci  s'élève  la  lanterne,  en- 
tourée de  colonnes  corinthiennes,  et  surmontée  d'une 
boule  de  2  met.  de  diamètre  sur  laquelle  est  plantée  une 
croix  dorée. 

Toute  la  nef  de  la  cathédrale  de  S'-Paul  est  pavée  de 
pierres  blanches  et  noires,  lesquelles,  aux  abords  du 
maltre-autel,  sont  entremêlées  de  porphyre.  Autour  de 
cette  nef  sont  suspendus  des  drapeaux  conquis  par  les 
armées  de  terre  et  de  mer.  Les  peintures  de  la  coupole, 
représentant  des  scènes  de  la  vie  de  S^  Paul,  sont  de 
James  Thornhill.  Le  jubé,  en  fer  ciselé,  supporte  l'orsue. 
Dans  le  chœur  on  remarque  30  stalles,  sculptées  par  Gib- 
bons. La  chaire  et  le  pupitre  du  clerc  sont  aussi  d'une 
grande  beauté.  Un  assez  grand  nombre  de  statues  déco- 
rent l'intérieur  de  S^-Paul  ;  les  plus  dignes  d'attention 
sont  celles  de  John  Howard  et  du  D'  Johnson  par  Bacon, 
de  l'évëque  Hebcr  par  Chantrey,  de  Reynolds  par  Flax- 
man,  qui  est  aussi  l'auteur  du  monument  élevé  à  la  mé- 
moire de  Nelson.  V,  Aikin,  Plans,  élévations..,  of  the 
cathedrai  church  of  S^-Paul^  Londres,  1813,  in-4'.    B. 

PAULBTTE.  y.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  dt 
Biographie  et  d'Histoire. 

PAUME,  Jeu  de  balle  dans  lequel ,  en  un  lieu  préparé 
exprès,  les  joueurs  se  renvoient  une  balle  avec  la  paum; 
de  la  main  ou  un  gantelet,  avec  une  raquette  ou  un  bat- 
toir. La  longue  paume  est  celle  à  laquelle  on  joue  dans 
un  long  espace  de  terrain  ouvert  de  tous  côtés;  la  courte 
paume  ou  trinquet  est  celle  à  laquelle  on  joue  dans  un 
carré  long,  fermé  de  murailles,  et  souvent  couvert  — 
Le  jeu  de  paume  remonte  à  la  plus  haute  antiquité  :  les 
Grecs  l'appelaient  Sphéristique,  et  les  Romains  Pila.  Hé- 
rodote en  attribuait  l'invention  aux  Lydiens.  Il  est  fait 
mention  de  ce  Jeu  dans  V Odyssée  (ch.  vi  et  viii].  Cn 
France,  on  s'v  adonna  depuis  le  xv*  siècle,  et  il  n  y  eut 
presque  pas  de  quartier  à  Paris  qui  n'eût  son  Jeu  de 
courte  paume.  On  avait  joué  d'abord  avec  la  main  nue, 
puis  avec  des  gantelets  ;  la  raquette  parut  sous  Henri  lY. 
La  paume  perdit  une  partie  de  sa  vogue  à  partir  de 
Louis  XIII,  tout  en  se  maintenant  à  la  cour  et  chez  les 
grands  ;  elle  est  à  peu  près  abandonnée  aujourd'hui. 
Néanmoins,  l'Empereur  Napoléon  III  a  fait  construire 
pour  lui,  en  1861,  un  Jeu  de  paume  dans  le  Jardin  des 
Tuileries,  à  l'extrémité  occidentale  de  la  Terrasse  des 
Feuillants.  B. 

PAUMIERS,  ancienne  corporation  d'artisans  qui  fabri- 
quaient et  vendaient  les  balles,  raquettes  et  autres  instru- 
ments servant  au  jeu  de  paume.  L'apprcntissa^  était  de 
3  ans;  le  brevet  coûtait  30  livres,  et  la  maîtrise  COO. 
S^*  Barbe  servait  de  patronne  aux  Paumiers. 

PAUPÉRISME,  mal  social  qui  consiste  en  ce  qu'un 
certain  nombre  d'hommes  ne  peuvent  pourvoir  à  leur 
nourriture  et  à  leur  entretien  sans  recourir  à  l'assistance 
publique.  Le  mot  est  d'origine  récente,  mais  la  chose  est 
fort  ancienne,  et  ce  serait  une  erreur  de  croire  que  le 
paupérisme  est  un  vice  inhérent  à  l'organisation  écono- 
mique et  industrielle  des  temps  modernes.  Si  l'on  en 
cherche  les  origines  dans  l'antiquité,  il  ne  faut  pas  trop 
se  préoccuper  de  l'esclavage  :  car  l'esclave,  qui  était  une 
valeur  que  le  maître  avait  intérêt  à  conserver,  n'était  gé- 
néralement pas  voué  à  une  misère  complète.  Mais  le  tn- 
vail  servile  faisait  une  concurrence  terrible  au  travail 
des  hommes  libres  :  ce  fut  aux  besoins  de  ces  derniers 
que  l'État  dut  pourvoir.  A  Athènes,  où  l'on  professait  ce 
principe,  qu'aucun  citoyen  ne  devait  être  nécessiteux,  le 
trésor  public,  alimenté  en  grande  partie  par  les  alliés  et 
les  vaincus,  fut  employé  non-seulement  pour  les  besoins 
collectifs  de  la  population,  mais  encore  pour  les  dépenses 
de  chaque  particulier  :  la  libéralité  dont  les  citoyens 
usaient  envers  eux-mêmes  multiplia  le  nombre  des  im- 
prévoyants et  des  oisifs,  et ,  depuis  le  temps  de  Périrlès, 
tous  ces  hommes  devinrent  autant  de  rentiers  de  TÉtat, 
que  l'épuisement  des  revenus  publics  après  la  guerre  da 
Péloponèse  réduisit  à  la  plus  profonde  misère.  H  fallut 


P\U 


1391 


PAU 


éublir  ane  véritable  taxê  aes  patwres,  —  Le  paupérisme 

Êrit  une  extension  effrayante  dans  le  monde  romain, 
l'une  part^  une  aristocratie  implacable  exploitait  par 
l'usure  ces  pauvres  plébéiens,  désignés  par  le  nom  de 
prolétaires,  comme  s'ils  ne  devaient  avoir  d'autre  desti- 
née que  de  donnei  des  enfants  à  la  patrie,  et  les  mettait 
dans  la  nécessité  de  lui  tendre  la  main  ;  de  Tautre,  l'ha- 
bitude de  vivre  aux  dépens  des  nations  vaincues  détour- 
nait les  citoyens  des  voies  régulières  du  travail.  Le  sys- 
tème des  distributions  gratuites  de  blé,  et  quelquefois  de 
rin  et  d'huile,  devint  permanent,  et  toute  une  population 
le  trouva  ainsi,  pour  ses  besoins  journaliers,  à  la  merci 
d'un  petit  nombre  de  familles  opulentes.  Un  tel  système 
ne  pouvait  qu'aboutir  à  un  appauvrissement  universel  : 
eu  effet,  dans  les  derniers  temps  de  l'Empire,  la  misère 
était  devenue  eff'royable;  les  pauvres  augmentaient  à  pro- 
portion des  affranchissements  provoqua  par  renseigne- 
ment chrétien  ;  ils  accouraient  vers  Rome  dans  les  mo- 
ments de  disette,  et,  repoussés  avec  dureté,  mouraient 
par  milliers  alentour.  Les  sociétés  antiques  ont  donc 
connu  le  paupérisme,  et  l'on  peut  dire  que  ce  mal  y  fut 
plus  grave  que  chez  les  modernes,  parce  (}ue  la  pauvreté 
n'était  pas  le  fait  de  circonstances  exceptionnelles,  mais 
le  résultat  de  l'organisation  sociale  elle-même.  Ce  qui 
caractérise  le  paupérisme  moderne,  c'est  la  concentration 
de  la  misère  dans  certaines  localités  et  chez  certaines  ca- 
tégories sociales  ;  d'où  résulte  la  formation  de  foyers  où 
la  d^énération  physique  et  morale  de  l'espèce  humaine 
a  fait  des  progrès  effrayants.  Mais  les  mesures  prises 
contre  la  mendicité  (K.  ce  mot)^  concertées  avec  les  pra- 
tiques de  l'assistance  {V.  ce  mot)^  ont  été  un  frein 
presque  toujours  suffisant  pour  arrêter  le  débordement 
du  paupérisme.  Certaines  révolutions  économiques,  cer- 
taines crises  industrielles,  amènent  des  perturbations; 
mais  elles  sont  passagères.  Si  le  paupérisme  s'est  déve- 
loppé en  Angleterre  plus  que  dans  les  autres  pays 
{Y.  Taxe  des  pauvres,  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire)^  il  faut  l'attribuer  aux  institutions 
politiques,  qui  ont  concentré  la  puissance  et  les  capitaux 
dans  les  mains  d'une  aristocratie;  au  climat,  dont  les 
rigueurs  augmentent  les  besoins  des  populations;  aux 
habitudes  que  crée  une  grande  prospénté  industrielle,  et 
aux  privations  qui  peuvent  résulter  pour  les  travailleurs, 
soit  d'une  concurrence  nouvelle,  soit  d'un  temps  d'arrêt 
dans  la  production  ;  mais  ces  causes  sont  susceptibles 
de  se  modifier  avec  le  progrès  des  institutions  et  des 
mœurs. 

Il  est  très-difficile  de  déterminer  dans  une  société  la 
limite  où  commence  l'indigence,  et,  par  conséquent, 
retendue  du  paupérisme  :  l'indigent  de  nos  villes,  avec 
une  dose  de  bien-être  plus  grande  que  l'habitant  des 
campagnes,  est  en  réalité  plus  misérable,  et  on  peut  le 
regarder  comme  riche  en  comparaison  du  sauvage;  la 
pauvreté  de  l'ouvrier  anglais  serait,  pour  beaucoup  d'Ir- 
landais, presque  de  l'opulence,  tandis  que  l'aisance  de 
l'ouvrier  français  serait  pour  beaucoup  d'Anglais  presque 
an  dénùment.  Necker,  le  premier  qui  ait  donné  des  ren- 
seignements statistiques  sur  la  misère  en  France,  évaluait 
&  7,000  le  nombre  des  mendiants  enfermés  dans  les  dé- 
pit$,  à  110,000  celui  des  malheureux  recueillis  dans  les 
iiôpitaux  publics  et  dans  les  établissements  de  la  charité 
privée,  à  6,000  celui  des  malades  admis  dans  les  hôpi- 
taux militaires;  il  comptait,  en  outre,  40,000  enfants 
trouvés,  40,000  infirmes  ou  vieillards  présumés  hors  d'état 
de  gagner  leur  vie,  25,000  malades  secourus  à  domicile. 
La  Rochefoocauld-Liancourt,  rapporteur  d'un  comité  que 
l'Assemblée  constituante  avait  chargé  de  proposer  des 
mesures  pour  l'abolition  de  la  mendicité,  estima  la  po- 
pulation souffrante  à  3,248,691  individus,  ainsi  décom- 
posés: infirmes  et  vieillards,  804,775;  pauvres  valides, 
515,362;  enfants  de  pauvres  au-dessous  de  quatre  ans, 
1,886,035;  malades,  42,519.  D'après  Barrère,  en  1794,  la 
proportion  des  indigents  était  de  5  pour  100.  Fourcroy  la 
portait,  en  1809,  à  7  pour  100.  En  1819,  elle  était,  selon 
Laborde,  de  2  1/2  p.  100,  tandis  que  De  Morogues  l'éva- 
luait à  6,  De  Gérando  à  20  dans  les  villes  et  à  2  dans  les 
campagnes,  Balbi  seulement  à  3.  En  1829,  Villeneuve-Bar- 
gemont  adoptait  le  chiffre  de  5  pour  100,  et  Schoen  celui 
de  14.  Toutes  ces  divergences  attestent  les  incertitudes  de 
la  question.  —  En  1847,  M.  de  Watteville,  dans  un  Rap- 
port sur  V administration  des  bureaux  de  bienfaisance  et 
sur  la  sitiMtion  du  paupérisme  en  France,  a  constaté 
les  faite  suivante  :  1,329,659  individus,  formant  483,681 
familles,  étaient  inscrite  sur  les  contrôles  des  bureaux  de 
bienfaisance,  ce  qui  donnait  la  proportion  de  1  indigent 
âur  12  habitante,  c-àni.  8  pour  100.  Les  départemente 


du  nord  comptaient  1  indigent  sur  9  habitants;  ceuxide 
l'est,  1  sur  i4;  ceux  de  l'ouest,  1  sur  11;  ceux  du  sud, 
1  sur  18;  les  départemente  de  la  frontière  de  terre,  1  sur 
8;  ceux  des  frontières  maritimes,  1  sur  10;  les  départe- 
mente manufacturiers,  1  sur  8  ;  les  départemente  agri- 
coles, 1  sur  14.  Certains  départements  étaient  favorisés: 
le  Var,  par  exemple,  n'avait  que  1  indigent  sur  42  habi- 
tante ;  les  Landes,  1  sur  38  ;  Seine-et-Marne,  1  sur  37  ; 
Tarn-et-Garonne,  1  sur  32  ;  l'Yonne,  1  sur  30,  etc.  Mais 
il  en  était  d'autres  d'une  situation  plus  sombre  :  le  Nord, 
1  sur  5;  les  Côtes-du-Nord,  1  sur  6;  le  Pas-de-Calais  et 
rille-ct-Yilaine,  1  sur  7  ;  l'Aisne,  1  sur  8  ;  la  Somme, 
l'Orne,  la  Sarthe,  1  sur  9,  etc.  Plusieurs  communes, 
telles  que  Vitré  (llle-et-Viiaine)  et  Ârmentières  (Nord), 
avaient  1  indigent  sur  2  habitante. 

A  Paris,  on  comptait  1  indigent  sur  12  habitante,  à 
Lyon  1  sur  10,  à  Marseille  et  à  Bordeaux  1  sur  7,  à  Rouen 
1  sur  3i,  à  Toulouse  1  sur  33,  à  Nantes  et  à  Strasbourg 
1  sur  8 ,  à  Lille  1  sur  3.  En  prenant  pour  base  les  listes 
des  bureaux  de  bienfaisance,  M.  de  Watteville  n'a  fait  ses 
calculs  que  pour  la  population  à  laquelle  ces  institutions 
s'appliquent  ;  mais  le  chiffre  des  indigents  doit  être  moins 
élevé  dans  les  localités  où  l'on  n'a  pas  Jugé  utile  de  créer 
des  éteblissemente  charitables.  M.  de  Watteville  porte  le 
nombre  des  mendiante  à  337,838,  dont  242,907  domici- 
liés, et  94,871  livrés  au  vagabondage  :  la  moyenne  est  de 
1  mendiant  sur  104  habitante  pour  63  départemente; 
23  départemente  sont  au-dessus.  Dans  le  nord  de  la 
France,  on  compte  11  mendiante  sur  62  habitants;  dans 
l'est,  1  sur  181  ;  dans  l'ouest,  1  sur  lOi)  ;  dans  le  centre, 
1  sur  122  ;  dans  le  sud,  1  sur  130.  Il  n'y  a  pas  de  men- 
diante dans  le  Doubs  et  le  Loiret;  tandis  que  la  Charente 
en  compte  1  sur  1,214  habiUnts,  Indre-et-Loire  1  sur 
1,069,  les  Bouches-du-Rhône  1  sur  917,  Seine-et-Oise 
1  sur  663;  il  n'y  en  a  que  1  sur  49  dans  la  Manche,  1  sur 
38  dans  le  Nord,  1  sur  26  dans  la  Somme,  1  sur  22  dans 
le  Pas-de-Calais,  etc.  Dans  les  départements  manufactu- 
riers, il  y  en  a  1  sur  71  habitante;  dans  les  départements 
agricoles,  1  sur  111.  —  Paris  en  compte  1  sur  397,  Lyon 
1  sur  542,  Marseille  1  sur  1,429,  Toulouse  1  sur  810,  Liile 
1  sur  307. 

Gerteins  philanthropes  ont  donné  au  paupérisme  des 
proportions  alarmantes  :  il  semblerait,  à  les  entendre, 
que  la  prospérité  sociale,  le  repos  du  monde  et  la  civili- 
sation elle-même  seront  en  péril  dans  un  avenir  plus  ou 
moins  prochain.  Ils  allèguent  l'exemple  de  l'Angleterre, 
où  la  taxe  des  pauvres  s'est  toujours  accrue  :  mais  cet 
accroissement  a  été  la  suite,  non  pas  d'une  augmentation 
dans  le  nombre  réel  des  nécessiteux,  mais  la  conséquence 
des  erreurs  commises  dans  l'application  des  lois  sur  les 
pauvres;  la  taxe  était  devenue,  pour  ceux  qui  en  profi- 
taient ,  un  supplément  au  salaire ,  au  lieu  d'être  un  se- 
cours dans  les  besoins  urgente.  Après  la  réforme  des  lois 
sur  les  pauvres  en  1834,  le  nombre  des  indigente  prenant 
part  à  la  taxe  diminua  de  plus  de  moitié,  et  l'on  obtient 
toujours  de  semblables  effete  en  maintenant  des  restric- 
tions fermes  aux  secours  publics.  Le  paupérisme  ne  fait 
pas  d'autres  progrès  que  celui  qui  résulte  naturellement 
d'une  augmentetion  de  la  population  générale.  Le  nombre 
des  indigente  inscrite  aux  secours  publics  a  diminué,  à 
Paris,  de  près  de  moitié  en  50  ans,  quoique  la  population 
de  cette  cité  ait  presque  doublé.  La  mendicité  a  disparu 
dans  plusieurs  Étate,  et  elle  est  fort  diminuée  dans  quel- 
ques autres.  Les  pauvres  eux-mêmes  sont ,  en  général , 
mieux  vêtus  et  mieux  nourris.  Enfin,  ce  qui  établit  d'une 
manière  frappante  une  réduction  progressive  de  la  masse 
de  la  misère,  c'est  l'abaissement  progressif  et  général  de 
la  mortalité,  la  prolongation  de  la  vie  moyenne. 

Divers  remèdes  ont  été  proposés  contre  le  paupérisme  t 
les  utopies  socialistes,  qui  préconisent  une  or^nisaticn 
fondée  sur  la  négation  de  la  propriété  ou  de  la  famille,  ou 
de  la  liberté  du  travail ,  conduiraient  à  une  misère  uni- 
verselle et  à  la  dissolution  de  la  société  (F.  Sociaushe). 
L'intervention  de  l'Étet  est  insuffisante  et  souvent  dange- 
reuse {V,  CoARiré  LÉGALE ).  L'idée  de  faire  refluer  vers 
l'agriculture  les  travailleurs  et  les  capitaux  que  l'industrie 
manufacturière  en  a  détournés,  séduit  beaucoup  d'esprite^ 
mais  les  moyens  de  la  réaliser  sont  encore  à  découvrir. 
Le  problème  du  paupérisme  n'est  pas  résolu  :  il  faudrait 
peut-être  en  chercher  la  solution  dans  une  certaine  action 
a  exercer,  par  la  loi  ou  autrement,  sur  les  dispositions 
morales  et  sur  les  habitudes  de  la  classe  ouvrière,  et  dans 
une  certaine  manière  de  pratiquer  la  charité  envers  les 
indigente.  V.  De  Morogues,  Du  Paupérisme  et  de  la 
merâicitéy  Paris,  1834;  P.  Schmidt,  Essais  sur  lapopu^ 
lotion,  les  salaires  et  le  paupérisme,  en  allem.,  Leipzig, 


PAV 


13ft2 


PAV 


1836;  Eug.  Buret,  De  la  misère  des  classes  laborieuses  en 
Angleterre  et  en  France,  Paris,  1840,  2  vol.  in-8®;  Mo- 
reau-Gliristophe,  Du  problème  de  la  misère  et  de  sa  solU' 
tion  chez  les  peuples  anciens  et  modernes,  3  vol.  in-8®; 
Bécbard,  Le  Paupérisme  en  France,  1853;  Gberbulliez, 
Études  sur  les  causes  de  la  misère  et  sur  les  moyens  d'y 
porter  remède,  1853;  E.  Laurent,  Le  Paupérisme  et  les 
associations  de  prévoyance,  1860,  in-8**. 

PAUSE  (du  grec  pausis^  venant  de  pauô,  faire  cesser), 
en  termes  de  Musique,  signe  de  silence  pendant  une 
mesure.  11  est  figuré  par  un  trait  épais  placé  horizonta- 
lement sous  la  4*  ligne  de  la  portée.  Daiis  une  mesure  à 
quatre  temps,  la  pause  est  le  silence  d*une  ronde;  la 
demi-pause,  figurée  par  un  gros  trait  au-dessus  de  la 
3*  ligne  de  la  portée,  est  le  silence  d'une  blanche,  mais 
ne  s'emploie  que  dans  cette  mesure.  Si  le  silence  doit  se 

{)rolonger  pendant  un  certain  nombre  de  mesures ,  on 
'indique  par  un  chiffre  au-dessus  de  la  pause,  ou  Ton  se 
sert  de  grosses  barres  verticales  qui  signifient  3  ou  4 
pauses  et  que  Ton  répète  autant  de  fois  qu'il  est  néces- 
saire (7.  Baton).  B, 

PAUVRES  (Avocat  des).  V.  AvockT, 

PAUVRES  (Droit  des),  droit  prélevé  en  France  en  faveur 
des  hôpitaux  sur  les  recettes  des  spectacles,  concerts, 
bals  et  autces  amusements  publics.  On  n'imposa  primi- 
tivement aux  directeurs  et  enti'epreneurs  qu'une  aumône 
volontaire;  ce  fut  Louis  XIV  qui,  en  1699,  rendit  la  con- 
tribution obligatoire,  et  la  fixa  au  6*^  des  recettes.  Le 
droit  des  pauvres,  abandonné  pendant  les  premières  an- 
nées de  la  Révolution,  fut  rétabli  à  titre  provisoire  et 
pour  6  mois  par  la  loi  du  7  frimaire  an  v  ,28  nov.  1796), 
et  fixé  à  un  décime  par  franc  du  prix  de  chaque  billet,  ou 
au  quart  de  la  recette,  selon  la  nature  de  l'établissement; 
il  subsista  par  prorogations  successives  jusqu'au  5  dé- 
cembre 1809,  époque  où  la  perception  en  fut  déchirée 
indéfinie.  L'administration  des  hospices  perçoit  son  droit 
sur  la  recette  brute,  même  quand  elle  ne  couvre  pas  les 
frais. 

PAUVRES  (Taxe  des).  V,  Taxe  des  pauvhes,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 

PAVAGE ,  revêtement  placé  sur  le  sol  aux  endroits  où 
passent  fréquemment  les  hommes  ou  les  animaux.  Pour 
être  bon,  il  doit  :  1®  s'opposer  aux  infiltrations  d'eau  qui 
affouilleraient  le  sol  ;  z°  être  formé  de  matériaux  .issez 
durs  et  assez  solides  pour  résister  au  poids,  aux  chocs, 
et  à  l'usé;  3<*  présenter  une  surface  unie  quand  les 
hommes  seuls  doivent  y  marcher,  et,  si  les  chevaux  doi- 
vent le  parcourir,  certaines  aspérités  qui  facilitent  la 
traction  des  voitures.  Il  y  a  plusieurs  espèces  de  pa- 
vages ;  le  pavage  ordinaire,  fait  de  cubes  de  pierre,  par- 
ticulièrement de  grès,  qui  ont  de  15  à  25  centimètres  de 
côté,  et  qu'on  pose  sur  une  couche  de  sable  de  15  à  20 
centimèt.  d'épaisseur  ;  c'est  celui  des  rues  dans  les  villes, 
des  cours  d'habitation ,  et  de  certaines  chaussées  ;  —  le 
cailloutis  ou  empierrement  (  V.  ce  mot)^  employé  généra- 
lement pour  les  grandes  routes;  —  le  pavage  en  briques, 
fait  avec  des  briques  placées  de  champ,  (]ui  se  touchent, 
et  dont  les  Joints  sont  garnis  de  mortier;  on  en  voit 
dans  certaines  localités  où  la  pierre  manque  ;  à  Venise 
et  en  Hollande,  les  rues  sont  pavées  ep  briques  ;  —  le 
pavage  en  asphalte  ou  bitume,  reposant  sur  une  fondation 
de  béton  :  on  en  a  un  exemple  à  Paris  dans  la  rue  S^- 
Honoré,  devant  le  Palais-Royal  ;  —  le  pavage  en  bois,  pra- 
tiqué depuis  ({uelques  années  seulement,  aux  endroits  où 
il  est  nécessaire  d'éviter  le  bruit  des  w>itures,  comme  aux 
abords  des  églises,  des  tribunaux,  des  théâtres,  sous  les 
portes  cochères  de  quelques  hôtels.  Ce  pavage  a  été  em- 
ployé pour  la  première  fois  dans  les  rues  à  S^-Pétersbourg, 
vers  1834,  puis  en  Angleterre,  et  on  en  a  fait  des  essais  à 
Paris  en  1842,  dans  les  rues  Croix-des-Petits-Champs  et  de 
Richelieu,  au  quai  de  l'Horloge,  etc.  Il  est  en  bois  de  bout, 
et  l'on  y  pratique  des  rainures  pour  empêcher  les  che- 
vaux de  glisser.  Son  avantage  est  d'amortir  le  bruit,  de 
ne  pas  permettre  l'accumulation  de  la  boue  ni  de  la 
poussière ,  et  de  diminuer  considérablement  le  Urage  ; 
mais  il  ne  dure  pas  aussi  longtemps  que  le  pavage  en 
grès,  et,  quand  il  a  besoin  d'être  relevé,  les  bois  ne  peu- 
vent plus  servir,  tandis  qu'on  peut  retailler  les  pavés. 
L'ingénieur  Polonceau  a  proposé  d'employer  des  pavés 
en  terre  cuite,  au  lieu  de  grès.  Les  Anglais  ont  essayé 
des  pièces  de  fonte,  et  même  du  caoutchouc,  dans  les  écu- 
ries, les  allées  et  les  jardins.  On  a  trouvé  en  France  le 
moyen  d'utiliser  les  grès  de  nature  tendre  et  friable,  en 
les  saturant,  au  préalable,  de  bitume. 

Les  Carthaginois  sont  regardés  comme  les  premiers 
qui  pavèrent  les  rues  de  leurs  villes.  Celles  de  Rome 


commencèrent  à  être  pavées  sous  le  consulat  d'an  Af^ 
plus  Claudius,  l'an  32 1  avant  J.-G.  La  première  route 

fiavée  fut  construite  sous  le  consulat  d'Aurélins  Cotta, 
'an  241  av.  J.-C.  Cordoue  fut  la  première  ville  moderue 
3ui  reçut  un  pavage  régulier,  en  850.  On  ne  commença 
e  paver  Paris  que  sous  le  règne  de  Philippe-Auguste, 
en  1185;  deux  rues  seulement  furent  pavées  alors,  et, 
comme  elles  se  croisaient  au  centre  de  la  ville,  on  les 
appela  la  croisée  de  Paris.  En  1832,  en  creusant  l'égout 
de  la  rue  S^-Denis,  on  a  retrouvé  des  restes  de  ce  pavage, 
qui  consistait  en  larges  dalles  de  pierre  calcaire  dure. 

PAVANE,  ancienne  danse,  dont  le  nom  vient,  selon  les 
uns,  de  l'italien  padovana  (padouane),  parce  qu'on  l'au- 
rait empruntée  à  la  ville  de  Padoue,  et,  selon  les  autres, 
du  latin  pavo  (paon),  parce  que  les  danseurs  étendaient 
les  bras  et  les  mantes  en  faisant  la  roue  comme  les 
paons.  La  pavane  était  une  danse  grave  et  sérieuse,  ré- 
servée aux  gens  de  qualité  ;  les  darnes  y  figuraient  en 
robes  longues  et  traînantes,  les  hommes  avec  la  cape  et 
l'épée.  Elle  cessa  d'être  à  la  mode  au  milieu  du  xvii*  siècle. 

PAVESADE  (de  l'italien  pavese,  pavois),  étoffé  qu'on 
tendait  en  dehors  et  autour  des  bords  d'une  galère ,  le 
jour  du  combat,  pour  cacher  à  l'ennemi  les  dispositions 
que  l'on  prenait.  —  Pavesade  s'employait  aussi  dans  le 
sens  de  notre  mot  Bastingage  {V.  ce  mot). 

PAVEURS,  ancienne  corporation  qui  reçut  ses  pre- 
miers statuts  en  1501.  L'apprentissage  était  de  3  ans;  le 
brevet  coûtait  24  livres,  et  la  maîtrise  500.  S*  Roch  était 
le  patron  des  Paveurs. 

PAVIE  (La  Chartreuse  de),  le  monastère  peut-être  le 
plus  somptueux  du  monde,  à  6  Idlomèt.  de  Pavie.  Jean- 
Galéas  Visconti  en  fut  le  fondateur  en  1390.  Après  avoir 
franchi  la  porte  extérieure  et  un  vestibule  orné  de  deux 
fresques  de  B.  Luini,  on  entre  dans  une  cour  de  100  met. 
de  long,  sur  laquelle  est  l'église.  On  dit  que  Parchitecte  do 
cette  église  fut  Henri  de  Gmfind,  le  même  qui  commença 
la  cathédrale  de  Milan  :  mais  la  façade  fut  dessinée  en 
1472  par  Ambrogio  da  Fossano,  dit  Borgognonc,  et  termi- 
née seulement  en  1542;  elle  ne  le  cède  en  richesse  qu'à 
celle  de  l'église  S'-Marc  à  Venise.  La  partie  inférieure  de 
cette  façade  offre  des  sculptures  d'une  merveilleuse  déli- 
catesse; la  partie  supérieure  est  plus  particulièrement  un 
travail  de  mai'queterie  en  marbre.  L'église  de  la  Char- 
treuse est  en  forme  de  croix  latine,  d'une  longueur  de 
76  met.  sur  53  met.  de  large;  elle  est  divisée  en  trois  nefs 
à  arcades  ogivales,  et  surmontée  d'une  coupole.  De  chaque 
cut^  de  l'édifice  sont  sept  chapelles  fermées  par  des 
grilles,  mais  communiquant  entre  elles  par  une  porte 
percée  dans  chaque  mur  de  séparation  :  elles  sont  ornées 
de  sculptures  en  marbre  et  en  pierre  dure,  exécutées 
pendant  trois  siècles  par  la  famille  Sacchi,  et  de  pein- 
tures dont  quelques-unes  appaitiennent  au  Borgognono. 
au  Guerchin,  et  au  Pérugin.  Une  très^belle  grille  siëpare 
la  nef  du  transept  :  on  voit,  dans  le  croisillon  de  gauche, 
une  chapelle  peinte  par  Daniel  Crespi,  et,  dans  celui  de 
droite,  le  tombeau  de  Jean-Gai éas  par  Pellegrini,  lequel 
rappelle  pour  le  style  le  mausolée  de  François  I"  à  S*- 
Denis.  Les  stalles  du  chœur  sont  un  travail  remarquable 
de  sculpture  et  de  marqueterie,  exécuté  en  1485  par  Bar- 
tolomeo  da  Pola.  Le  maître -autel,  en  albâtre,  se  dis- 
tingue par  la  profusion  de  ses  ornements.  La  vieille  s:^ 
cristie,  qui  s'ouvto  sur  le  transept  septentrional  par 
une  porte  de  marbre  sculptée  et  garnie  de  médaillons  des 
ducs  et  des  duchesses  de  Milan,  contient  un  ti'iptyque  en 
dent  d'hippopotame;  dans  la  nouvelle,  attenante  au  tran* 
sept  méridional,  se  trouvent  plusieurs  peintures  d'Andr» 
Solari.  Du  même  côté  sont  situés  :  le  Lavoir  des  moines, 
orné  d'une  charmante  fresque  de  Luini  ;  le  petit  cloître 
dit  de  la  Fontaine,  couvert  de  bas-reliefs  en  stuc,  et  où 
sont  des  fresques  de  Crespi,  g&tées  par  l'humidité;  le 
grand  cloître  (1 25  met.  sur  101),  avec  portiques  à  colonnes 
de  marbre  surmontées  d'ornements  en  terre  cuite. 

PAVILLON  (du  latin  papUio,  qui  signifie  à  la  fois  tenté 
et  papillon)^  s'est  dit  primitivement  de  tout  logement 
portatif,  rond  ou  carré,  terminé  en  pointe  par  le  haut,  et 
qui  servait  au  campement  des  gens  de  guerre.  Le  mot  a 
été  ensuite  appliqué  aux  tourelles  des  châteaux,  aux- 
quelles un  comble  élevé  donne  de  la  ressemblance  avec 
des  tentes.  Il  s'est  dit  enfin  des  petits  b&timents  isolés , 
couverts  d'un  seul  comble,  ainsi  que  des  corps  de  bâti- 
ment liés  à  d'autres  constructions  en  retraite. 

PAVILLON ,  tour  de  lit,  plissé  par  en  haut  et  suspendu 
au  plancher.  On  le  nomme  aussi  CotÂTonne» 

PAVILLON,  étoffe  dont  on  recouvre  le  tabernacle  et  le 
ciboire  dans  une  église. 

PAVILLON ,  en  termes  de  Blason,  ce  qui  enveloppe  les 


PAY 


1393 


PAY 


armoiries  des  sourerains.  Là  pavillon  de  France  était 
d'azuTf  semé  de  fleurs  de  lis  d'or,  fourré  d^hermine ,  et 
surmoDté  de  la  couronne  royale. 

PAVILLON ,  en  termes  de  Marine,  drapeau  qui  fait  con- 
naître la  nation  à  laquelle  appartient  un  b&timent.  Dans 
ce  cas,  il  s'arbore  à  la  corne,  au  m&t  de  Tarrière.  Sur  les 
navires  de  TÉtat,  il  reste  déployé  tant  que  le  soleil  est 
sur  l'horizon.  Le  pavillon  sert  encore  à  indiquer  le  rang 
de  l'officier  qui  est  à  bord  :  il  est  placé  au  beaupré  pour 
un  capitaine,  au  m&t  d'artimon  pour  un  contre-amiral , 
au  m&l  de  misaine  pour  un  vice-amiral  ;  les  canots  por- 
tent jgavillon  sur  poupe,  déployé  pour  le  capit^ne  de 
vaisseau,  relevé  à  la  queue  pour  le  capitaine  de  frégate , 
roulé  sur  le  m&t  pour  les  grades  au-dessous.  Des  pavil- 
lons servent  aussi  de  signaux  ;  dans  ce  cas,  ils  sont  de 
fantaisie,  et  à  couleurs  variées.  Hisser  ou  arborer  pa- 
villon, c'est  défier  l'ennemi  au  combat;  assurer  son  par 
Villon^  c'est  tirer  un  coup  de  canon  en  le  hissant.  Baisser 
ou  amener  pavillon,  c'est  se  rendre.  Mettre  le  pavillon 
en  berne,  c'est  le  plier  dans  sa  liauteur  de  manière  qu'il 
ne  fasse  qu'un  faisceau,  pour  rappeler  ceux  de  l'équipage 
qui  sont  à  terre,  ou  pour  demander  un  pilote  ;  c'est  aussi 
un  signe  de  deuil  :  appuyé  d'un  coup  de  canon,  le  pa- 
villon en  berne  est  un  signal  de  détresse.  —  Les  bâti- 
ments marchands  ne  peuvent  arborer  le  pavillon  national 
qu'à  la  poupe.  Ils  ont,  en  outre,  depuis  1817,  des  pavil- 
lons qui  indiquent  les  arrondissements  maritimes  aux- 
quels ils  appartiennent  :  de  Dunkerque  \  Honfleur,  cor- 
nette à  4  bandes  horizontales  bleues  et  blanches  ;  de 
Uonfleur  à  Granville,  pavillon  triangulaire  à  3  bandes 
verticales,  deux  bleues,  une  rouge  au  milieu;  de  Gran- 
ville à  Morlaix,  cornette  à  4  bandes  verticales  bleues  et 
jaunes;  de  Morlaix  à  Quimper,  pavillon  triangulaire 
jaune  et  bleu  ;  de  Quimper  à  Lorient,  cornette  à  3  bandes 
iiorizon taies,  deux  bleues,  une  rouge  au  milieu  ;  de  Lo- 
rient à  Paimbeuf,  pavillon  triangulaire  divisé  horizonta- 
lement en  deux  pai'ties,  bleue  et  rouge;  de  Paimbeuf  ^ 
Royan,  cornette  à  3  bandes  horizontales,  deux  bleues, 
une  blanche  au  milieu  ;  de  Royan'  à  la  frontière  d'Es- 
pagne, pavillon  triangulaire  blanc,  avec  un  losange  bleu 
horizontal  ;  de  la  frontière  d'Espagne  à  Marseille,  cor 
Dette  k  4  bandes  horizontales  blanches  et  rouges  ;  de 
Marseille  à  la  frontière  d'Italie,  pavillon  triangulaire 
blanc,  avec  losange  horizontal  rouge;  colonies  occiden- 
tales ,  pavillon  quadrangulaire  à  4  bandes  bleues  et 
jaunes;  colonies  africaines,  asiatiques  et  océaniennes, 
pavillon  quadrangulaire  coupé  verticalement  en  2  parties, 
rouge  et  jaune. 

PAVILLON,  partie  évasée  en  forme  d'entonnoir  qui  ter- 
mine une  trompette,  un  cor,  une  trompe  de  chasse,  un 
hautbois,  une  clarinette,  un  trombone,  un  porte-voix  etc. 

PAVILLON   CHINOIS.    V   ChAPEAU  CHINOIS. 

PAVILLON  d'or,  monnaie  émise  par  Philippe  VI  de  Va- 
lois en  1330,  et  ainsi  appelée  parce  que  le  roi  y  était 
représenté  assis  sous  un  pavillon.  Elle  était  d'or  tin  à  la 
taille  de  18,  et  valait  30  sous. 

PAVOIS,  bouclier.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  ^Histoire. 

PAVOIS,  en  termes  de  Marine,  décorations  que  prend 
un  bâtiment  en  signe  de  fête,  et  particulièrement  les  pa- 
villons et  flammes  de  toutes  sortes  qu'on  hisse  à  la  tète 
des  mâts  et  au  bout  des  vergues. 

PAYE.  V.  Solde  et  Salaire. 

PAYEMENT,  acquittement  d'une  dette  ou  d'une  obli- 
gation. Pour  être  valable  en  Droit  et  pleinement  libéra- 
toire, il  exige  la  capacité  dans  la  partie  qui  paye  et  dans 
la  partie  qui  reçoit  ;  la  loi  admet  toutefois  des  excep^ 
lions.  Le  créancier  ne  peut  être  contraint  de  recevoir  ni 
une  autre  chose  que  celle  qui  lui  est  due,  la  valeur  de  la 
chose  offerte  fût-elle  même  plus  grande,  ni  une  partie 
seulement  de  la  dette.  Le  payement  doit  être  effectué 
dans  le  lieu  désigné  par  la  convention  :  si  cette  désigna- 
tion n'existe  pas,  il  a  lieu,  en  général,  au  domicile  du 
débiteur.  Toutefois,  si  l'obligation  est  d'un  corps  certain 
et  déterminé,  le  payement  doit  être  fait  dans  le  lieu  où 
était,  au  temps  de  l'obligation,  la  chose  qui  en  est  l'omet. 
I^  frais  du  payement  (par  exemple,  dans  le  cas  ù' offres 
réelles)  et  les  frais  de  quittance  notariée  sont  à  la  charge 
du  débiteur.  Un  payement  n'est  pas  valable,  s'il  est  fait 
au  mépris  d*une  opposition  régulière;  le  débiteur  qui 
reut  se  libérer  en  prince  d'une  opposition  peut  se 
faire  autoriser  par  Justice  à  verser  ses  fonds  dans  la 
caisse  des  Dépôts  et  consignations,  ou  à  remettre  la 
those  qu'il  doit  livrer  dans  les  mains  d^n  séquestre 
judiciaire.  S'il  existe  plusieurs  dettes,  il  y  a  lieu  à  im- 
putatton  de  payement  (F.  Imputation).  En  matière  ci- 


vile, le  défaut  de  payement  au  temps  convenu  ne  donnp 
ouverture  aux  intérêts  de  la  somme  due  qu'à  partir  du 
|our  de  la  demande,  à  moins  de  stipulation  contraire 
[Code  Napol,^  art.  1153  et  suiv.);  en  mati^  commer- 
ciale, auand  il  s'agit  de  lettres  de  change  ou  de  billets  à 
ordre,  les  intérêts  courent  à  partir  du  protêt.  La  cessa- 
tion de  payements  d'un  simple  particulier  s'appelle  dé- 
confiture, et  celle  d'un  commerçant, /ai7/ife( F.  ces  motsu 
II  est  arrivé,  à  la  suite  de  certaines  commotions  politi- 
ques, que  le  gouvernement,  dans  un  intérêt  public,  A 
accordé  un  sursis  aux  commerçants  contre  les  poursuite *« 
de  leurs  créanciers.  La  novatton,  la  compensation  et  la 
confusion  {V.  ces  mots)  sont  des  pavements  dans  les- 

2uel3  il  n'y  a  pas  numération  d'espèces  ou  délivrance 
'objets  déterminés.  La  preuve  du  payement  se  fait,  soit 
par  titre  ou  quittance,  soit  par  témoins. 

PAYEMENT  (Certificat  de),  pièce  délivrée  à  un  entrepre- 
neur de  travaux  publics  par  l'ingénieur  en  chef,  dans  le 
but  d'attester  qu'il  y  a  lieu  de  lui  payer  une  certaine 
somme  pour  des  travaux  accomplis.  Le  mode  à  suivre 
pour  la  délivrance  de  ces  certificats  a  été  réglé  par  une 
instruction  du  directeur  général  des  ponts  et  chaussées 
du  30  juillet  1811,  et  par  un  règlement  annexé  à  una 
circulaire  ministérielle  du  27  août  1833. 

PAYEUR,  fonctionnaire  établi  dans  chaque  départe- 
ment pour  y  acquitter,  en  vertu  des  autorisations  légales, 
les  dépenses  des  services  de  l'État  et  les  dépenses  dépar- 
tementales. Les  payeurs,  institués  par  décret  du  12  oc- 
tobre 1791 ,  relevaient  du  ministre  des  finances.  Ils  n'é- 
taient pas  des  agents  purement  passifs,  appelés  à  solder 
les  mandats  qui  leur  étaient  remis,  ou  à  les  viser  pour 
qu'ils  fussent  soldés  par  les  percepteurs;  ils  vérifiaient  si 
ces  mandats  se  renfermaient  dans  les  limites  des  ordon- 
nances de  délégation  qui  autorisaient  leur  délivrance,  et 
constataient  la  réalité  des  services  et  l'identité  des  por- 
teurs de  mandats.  Par  conséquent,  ils  pouvaient  refuser 
de  payer,  lorsqu'ils  reconnaissaient  une  omission  ou  une 
irrégularité  matérielle  dans  les  pièces  Justificatives;  dans 
ce  cas,  ils  remettaient  au  porteur  de  l'ordonnance  ou  du 
mandat  la  déclaration  écrite  et  motivée  de  leur  refus. 
Si,  néanmoins,  l'ordonnateur  requérait,  par  écrit  et  soua 
sa  responsabilité,  qu'il  fût  passé  outre  au  payement,  lo 
payeur  y  procédait  sans  délai,  mais  eu  informant  immé- 
diatement le  ministre  des  finances.  Les  fonds  nécessaires 
aux  payeurs  leur  étaient  remis ,  au  fur  et  à  mesure  du 
service ,  par  les  receveurs  généraux  et  par  le  caissier 
central  du  Trésor.  Les  ordonnances  et  mandats  de  paye- 
ment ne  pouvaient  plus  être  acquittés  par  les  payeurs 
,après  laclôture  de  l'exercice.  Il  y  avait  quatre  classes  de 
payeurs  départementaux,  au  traitement  de  10,000,  8,000, 
7,000  et  6,000  fr.  Leurs  fonctions  ont  passé,  en  1864. 
auxreceveurs  généraux. 

PAYSAGE,  genre  de  peinture  ou  d«  dessin  qui  repré- 
sente quelque  aspect  de  la  campagne  ou  He  la  nature 
muette.  On  distingue  le  Paysage  historique,  héroïque  ou 
académique,  qui  vise  au  noble  et  au  grand,  emprunte  ses 
sujets  à  la  plus  riche  nature,  préfère  les  sites  ornés^  de 
temples,  de  fontaines,  de  statues,  etc.,  et  les  anime 
mêiLO  par  quelque  scène  tirée  de  la  Fable  ou  de  Tliis- 
toire;  le  Paysage  x>.oétique  ou  idéal,  où  tout  est  de  la 
composition  de  l'artiste,  qui  tend  moins  à  reproduire 
qu'à  interpréter  la  nature  ;  le  Paysage  réaliste,  qui  ne 
cherche  que  l'aspect  vrai  et  l'accent  particulier,  qui 
prend  la  campagne  comme  elle  s'offre  le  plus  souvent  à 
nous,  dans  la  pauvreté  de  sa  ligne  générale,  dans  la  cou- 
leur monotone  de  sa  végétation,  avec  les  accidents  vul- 
gaires de  ses  terrains.  —  Les  Anciens  n*ont  réellement 
pas  pratiqué  le  paysage  :  s'ils  voulaient  représenter  une 
montagne  ou  une  source,  ils  la  personnifiaient  dans  la 
figure  de  quelque  Dieu.  Les  fresques  d'Herculanum  et  de 
Pompéi  ne  donnent  que  des  vues  d'édifices,  où  la  cam- 
pagne tient  une  place  tout  à  fait  accessoire.  La  personni- 
fication de  la  nature  au  moyen  de  formes  humaines  sq 
retrouve  encore  pendant  les  premiers  siècles  du  moyen 
âge  :  par  exemple,  au  baptême  de  J.-C,  on  représentait 
le  Jourdain  sous  la  figure  d'un  homme  tenant  une  urne. 
Plus  tard,  les  sujets  sacrés  eurent  un  arrière-plan  sans 
perspective,  où  les  maisons,  les  villes,  les  torrents,  les 
montagnes  s'étageaient  comme  dans  une  épaisse  tapis- 
serie. Les  frères  Van  Eyck,  en  Flandre,  exécutèrent  les 
premiers  le  paysage  en  observant  la  perspective  aérienne  : 
toutefois.  Jusqu'à  la  fin  du  xv«  siècle,  le  paysage  ne  forma 
pas  un  genre  à  part;  il  resta  subordonné  et  accidentel 
dans  les  compositions.  Ce  furent  encore  deux  Flamands» 
Joachim  Patenier  et  Henri  de  Bless,  qui  osèrent  faire  des 
tableaux  où  le  paysage  fut  le  si^et  principal.  Depuis  ce 

88 


PÉA 


1394 


PÈC 


rridment  une  nombreuse  école  se  forma  dans  les  Pays- 
Bas,  à  la  tète  de  laquelle  figurèrent  Pierre  Breughef  et 
ses  Ûls,  Roland  Savn,  David  Vinckebooms,  Hondekœter, 
Josse  de  Momper,  etc.  Elle  se  partagea  au  xvn*  siècle  en 
^ux  camps  :  d*un  côté,  Paul  Bril,  Adam  Elzbeimer, 
Swaoevelt,  Both,  Pynacker,  Zacbtleven,  Asselyn,  Poelen- 
Durg,  Pierre  do  Laar,  se  préoccupèrent  surtout  de  la 
composition  et  du  style,  de  la  science  des  lignes  et  des 
masses  ;  de  l'autre.  Van  der  Neer,  Van  Goyen,  Waterloo, 
Bergbem,  Karel  Dujardin,  Ruysdaei,  Hobbema,  Paul 
Potter,  Van  Everdingen,  Van  der  Heyden,  Wouwermans, 
Van  der  Velde,  Moucheron,  Van  Artois,  A,  Cuyp,  Wy- 
nants,  Huysmans,  peignirent  avec  un  sentiment  plus 
juste  et  dans  le  sens  du  naturalisme.  Au  xvm*  siècle,  il 
y  eut  décadence  :  on  ne  peut  plus  guère  citer  que  Die- 
trich.  Van  Os,  et  Schweichardt.  De  nos  Jours,  le  réalisme 
domine  en  Hollande  avec  Kœkkœk  et  Schoter.  —  Parmi 
les  paysagistes  allemands,  on  remarque,  au  xvm*  siècle, 
Wertsch,  Hackert  et  Kobell,  qui  suivirent  une  direction 
réaliste,  Tischbein  et  J.  Kock,  qui  opérèrent  une  réaction 
idéaliste.  Aujourd'hui  l'école  allemande  est  revenue  pres- 
que au  génie  du  moyen  ftge  pour  la  simplicité  de  l'ex- 
position; elle  recherche  dans  l'ensemble  l'expression 
d'une  pensée  poétique  ou  môme  fantastique  :  tel  est  le 
caractère  de  Lessing,  d'Aschenbach ,  de  Scheuren,  de 
Rottmann.  On  en  peut  dire  autant  des  artistes  norvé- 
giens Gude ,  Leu  et  DohI.  A  Genève,  Diday  et  Calame 
cherchent  à  rendre  les  impressions  terribles,  les  scènes 
désolées  et  sauvages  des  régions  alpestres.  —  En  Angle- 
terre, Turner,  Fielding,  Stanfleld,  Martin,  etc.,  sont  des 
paysagistes  très-distingués. —  L'Espagne  n'a  guère  fourni 
que  Velasquez  de  Silva  et  Francesco  Collantes.  —  En 
Italie,  le  paysage  commença,  comme  fond  des  tableaux, 
dans  les  écoles  de  Florence  et  de  Venise,  vers  la  fin  du 
xv*^  siècle;  il  apparut  plus  libre  dans  les  oeuvres  des  Bel- 
lini  et  de  Léonard  de  Vinci.  Le  Titien  et  Dossi  furent  les 
premiers  qui  traitèrent  le  paysage  indépendamment  de 
toute  action.  Mais,  en  général,  ce  fut  un  élément  secon- 
daire dans  la  peinture  italienne  ;  les  seuls  noms  impor- 
tants que  l'on  puisse  mentionner  sont  :  Annibal  Carrache, 
Salvator  Rosa,  le  Dominiquin,  le  Guaspre,  Canaletti, 
Guardi,  Panini  et  Servandoni.  —  En  France,  l'école  de 

faysa^  s'ouvre  au  xvn*  siècle  par  deux  grands  noms  :  le 
oussm,  maître  incomparable  du  style  héroïque,  et  Claude 
Lorrain,  qui,  par  le  charme  suprême  de  la  lumière  et  de 
la  couleur,  est  resté  le  modèle  achevé  du  style  poétique. 
Le  paysage  de  style  fut  ensuite  cultivé  par  Laurent  de 
I^  Hire,  Sébastien  Bourdon,  Allegrain,  Patel  père  et  fils, 
Jacques  Courtois  et  Joseph  Parrocel.  Au  xvni*  siècle, 
VVatteau,  Lancret,  Fïvgonard,  représentent  le  goût  faux 
et  maniéré  de  leur  temps,  dont  Lantara,  Hubert  Robert, 
Boissieu,  Le  Barbier  et  Joseph  Vernet  surent  mieux  -se 
préserver.  Dans  notre  siècle,  l'école  historique  a  eu  pour 
représentants  Bertin,  Valenciennes,  Taunay,  Le  Pnnce, 
Michallon,  Bidault,  Flandrin,  Aligny,  Desgofe,  Bénou- 
ville;  une  école  nouvelle,  que  l'on  pouvait  prévoir  dans 
les  œuvres  de  Watelet,  s'est  fait  connaître  par  un  senti- 
ment plus  naïf,  plus  original  de  la  nature,  et  elle  a  pro- 
duit Théodore  Rousseau,  Jules  Dupré,  Fiers,  Paul  Huet, 
Français,  Diaz,  Coignet,  Troyon,  Hostein,  Lapito,  Daid)i- 
gny,  Achard,Loubon,  Léon  Fleury,  Blanchard,  Gh.  Leroux, 
etc.  Quelques  artistes  sont  allés  demander  à  l'Orient  un 
soleil  plus  éclatant,  et,  parmi  eux,  Decamps,  Marilhat, 
Fromentin,  Dauzats,  Théodore  Frère,  de  Fontenay,  Bor- 
get,  Karl  Girardet,  etc.  On  pourrait  trouver  chez  Corot  et 
Cabat  une  tendance  éclectique.  V.  Lecarpentier ,  Essai 
sur  le  paysage,  AMI  y  in-S"»;  Deperthes,  Théorie  du 
paysage,  1818,  et  Histoire  de  Vart  du  paysage,  1822. 

PAYSANS.  V.  Agricoles  (Classes). 

PAZEND,  nom  qu'emploient  les  auteurs  persans  dans 
la  désignation  des  anciennes  langues  de  leurs  ancêtres. 
On  ne  sait  s'il  désigne  une  forme  corrompue  ou  popu- 
laire du  zend  (F.  ce  mot). 

PÉAGE  {éepayage,  pour  payement) ^  droit  qu'on  per- 
çoit pour  le  passage  sur  un  chemin,  une  chaussée,  un 
pont,  etc.  Les  péages  étaient  très-multipliés  autrefois,  et 
faisaient  partie  des  droits  seigneuriaux.  Les  rois  durent 
prendre  des  précautions  pour  remédier  aux  abus  :  la  dé- 
claration de  Louis  XIV  du  31  Janvier  1663  et  l'Ordon- 
nance des  eaux  et  forêts  de  1660  déterminèrent  les  droits 
à  percevoir  et  le  mode  de  perception  ;  tout  prétendant  à 
la  Jouissance  de  ces  droits  dut  produire  ses  titres,  et  un 
tribunal  Ait  institué  pour  en  Juger  la  validité.  Un  arrêt 
du  Conseil,  en  date  du  15  août  1779,  réduisit  le  nombre 
et  la  quotité  des  droits,  et  ordonna  une  nouvelle  véri- 
fication des  titres.  L'Assemblée  constituante,  par  une  loi 


du  15  mars  1790,  essaya  de  réprimer  les  abus  qui  exis- 
taient encore.  Le  17  Juillet  1793,  la  Convention  lup- 
Erima  sans  indemnité-tous  les  droits.  Comme  on  manqua 
ientôt  de  ressources  pour  entretenir  les  ponts  et  les 
routes,  on  imagina  d'établir  partout  des  barrières,  qa*on 
ne  pouvait  franchir  sans  payer.  Ce  système,  beaucoup 
plus  intolérable  que  le  précédent,  fut  aboli  par  Napon- 
léon  l*',  et  la  création  des  droits  d'octroi  pourvut  aux 
dépenses  des  communes.  Aujourd'hui  les  péages  ne  sont 
plus  guère  que  des  impôts  limités  au  temps  néc^sairs 
pour  le  recouvrement  des  sommes  employées  aux  coo- 
structions  ou  aux  réparations.  Les  militaires  passant  pour 
cause  de  service  ou  avec  feuille  de  route  sont  exempts 
des  droits  de  péage,  ainsi  que  les  fonctionnaires  publics 
dans  l'exercice  de  leurs  fonctions.  Les  contestations  sur 
l'application  des  tarifs  sont  Jugées  par  les  Conseils  de 
préfecture,  sauf  pourvoi  devant  le  Conseil  d'État.  Le  refus 
de  payer  le  droit  est  Justiciable  du  tribunal  de  police, 
qui  peut,  outre  la  condamnation  au  payement,  infliger 
une  amende  de  la  valeur  d'une  à  trois  Journées  de  tra- 
vail, et,  en  cas  de  récidive,  un  emprisonnement  d'un  à 
trois  Jours.  S'il  y  a  eu  injures,  menaces  ou  voies  de  fait 
envers  les  agents  de  la  perception,  le  tribunal  correc- 
tionnel prononce  une  amende  de  1  à  100  fr.  et  un  em- 
prisonnement de  3  mois  au  plus,  sans  préjudice  des 
dommages-intérêts.  Les  préposés  qui  auraient  exigé  un 
droit  trop  élevé  subissent  les  peines  infligées  au  refus  de 
payement  (Lois  du  6  frimaire  an  vu,  du  2  vendémiaire, 
du  27  frimaire  et  du  28  pluviôse  an  viii.  —  36  nov.  1798, 
24  sept.,  18  nov.  1799,  et  17  fév.  1800). 

PÉAN,  hymne.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d*Histoire. 

PEAUSSIERS,  corporation  dont  les  statuts  dataient  de 
1357,  et  qui  fut  réunie  en  1776  aux  tanneurs-hongproyeurs, 
corroyeurs,  mégissiers  et  parcheminiers.  L'apprentissage 
était  de  5  ans,  et  le  compagnonnage  de  2.  La  maîtrise 
coûtait  600  livres.  Les  peaussiers  recevaient  des  chamoi- 
seurs  et  des  mégissiers  les  peaux  préparées,  et  leur  don- 
naient diverses  couleurs.  Leur  patron  était  S^  Jean-Bap- 
tiste. 

PÊCHE,  amusement  et  industrie  qui  ont  existé  de 
temps  immémorial.  Par  rapport  aux  instruments  qu'on  y 
emploie,  on  distingue  la  Pèche  à  la  ligne  ou  à  l'hameçon 
et  la  Pêche  au  filet;  pour  quelques  espèces  de  poissons, 
on  se  sert  du  harpon,  de  la  flèche,  et  même  de  projec- 
tiles. Eu  é^ard  aux  lieux  où  l'on  pêche,  on  distingue  la 
Pèche  fluviale  et  la  Pécfie  maritime.  Celle-ci  se  subdivise 
en  Grande  pêche,  oui  est  celle  de  la  baleine,  de  la  mo- 
rue, etc.,  exigeant  de  grandes  expéditions  maritimes;  et 
Petite  pêche,  qui  comprend  la  Pêcfte  côtière,  et  la  Pêche  à 
pied  le  long  du  littoral.  Le  droit  de  pêche,  que  les  lois  ro- 
maines abandonnaient  à  tout  le  monde,  passa  au  moyen  Age 
entre  les  mains  des  seigneurs  féodaux.  II  fut  réglementé 
pour  la  première  fois  dans  des  ordonnances  royales  de 
1407, 1515, 1554, 1572  et  1507.  En  1669,  l'État  se  réserva 
le  droit  de  pêche  dans  les  fleuves  et  les  rivières  navigables^ 
et  le  laissa  aux  seigneurs  dans  les  rivières  non  navi- 
gables. Un  décret  du  8  frimaire  an  ii  (28  nov.  1793)  pro- 
clama la  liberté  absolue  de  la  pêche;  mais  cette  liberté 
entraîna  de  si  graves  abus,  qu'un  arrêté  du  6  messidor 
an  VI  (16  Juillet  1798)  remit  en  vigueur  quelques  articles- 
de  l'ordonnance  de  1669.  La  loi  du  14  floréal  an  x  (4  mai 
1802)  a  restitué  à  l'État  le  droit  exclusif  de  pêche  dans 
les  cours  d'eau  navigables  et  flottables,  sauf  la  pêche  à  la 
ligne,  qui  est  restée  libre;  dans  tous  les  autres  cours 
d'eau,  ainsi  que  dans  les  étangs,  la  pêche  appartient  aux 
propriétaires  riverains.  La  loi  du  15  avril  1829,  qui  est  le 
Code  de  la  pêche,  détermine  la  forme  et  la  dimension 
des  instruments  à  employer,  les  lieux  et  les  temps  où 
la  pêche  est  prohibée  dans  l'intérêt  de  la  conservation  et 
de  la  reproduction  du  poisson,  la  pénalité  attachée  aui 
contraventions,  etc.  La  police  de  la  pêche  fluviale,  qui 
était  dans  les  attributions  de  l'administration  des  Eaux  et 
Forêts,  a  été  donnée  aux  Ponts  et  Chaussées  par  décret 
du  29  avril  1862.  —  Les  principes  généraux  en  matière 
de  pêche  maritime  ont  été  posés  par  le  titre  5  de  l'or- 
donnance de  la  marine  du  mois  d'aodt  1681,  qui  déclare 
la  pêche  libre,  tant  en  pleine  mer  que  sur  les  grèves,  et 
qui  trace  certaines  règles  relatives  aux  filets  qu'il  est 
permis  d'employer,  aux  temps,  saisons  et  heures  pendant 
lesquels  la  pêche  est  prohibée.  Depuis  cette  époque,  les 
principales  lois  qui  concernent  la  pêche  maritime  sont 
celles  du 22  avril  1832,  du  25  juin  1841,  du  23  juin  18 i6. 
du  7  août  1850,  du  22  août  1851,  du  9  janvier  18ôi 
(complétée  par  le  règlement  du  4  Juillet  1853),  et  du 
31  mal  1865.   K.  Duhamel  du  Monceau  >  Traité  des 


J 


PÉC 


1395 


PÊD 


pénhêSt  Paris,  1769,  4  vol.  in-fol.  ;  No€]  de  La  Morinière, 
Histoire  générale  des  pêches  anciennes  et  modernes,  1815, 
iD-4«;  Baudriliart,  Dictionnaire  des  pèches  fluviales  et 
maritimes,  1827,  in-4o  et  atlas,  et  Code  de  la  pêche  /lu- 
viole ^  1829,  2  vol.  iD-12;  Brousse,  Code  de  la  pèche 
fluviale,  1829,  in-8<>;  Hautefeuille,  Code  de  la  pêche  ma' 
ritime.  1844,  in-8<^;  Rogron,  Codes  forestier,  de  la  Pêche 
(luviaie  et  de  la  Chasse,  expliqués^  2«  édit.,  1856. 

PÉCHÉ  (de  l'hébreu  peschab^  ou  du  latin  peccatum)^ 
transgression  de  la  loi  de  Dieu.  Les  théologiens  distin- 
guent le  péché  actuel,  qui  est  une  action  ou  une  omission 
contraire  à  la  loi  divine  {péché  de  commission  et  péché 
d'omission)^  et  le  péché  habituel  ou  état  de  péché,  qui  est 
la  privation  de  la  gr&ce  sanctifiante  par  TelTet  d'une  faute 
grave.  On  péché  est  véniel  (du  latin  venia,  pardon),  quand 
il  affaiblit  seulement  la  grt^e  sanctifiante  ;  il  ne  mérite 
pas  une  peine  éternelle,  et  est  susceptible  d'être  par- 
donné. Un  péché  est  mortel,  lorsqu'il  donne  en  quelque 
sorte  la  mort  à  T&me,  en  la  privant  de  la  gr&ce  sancti- 
fiante. Sept  péchés  mortels  ont  reçu  le  nom  de  péchés 
capitaux,  parce  qu'ils  sont  la  source  de  tous  les  autres  ; 
ce  sont  Vorgueil,  la  eolère^  Venvie,  la  luocure,  la  gour- 
mandise, Vavarice  et  la  paresse.  Les  péchés  s'effacent  par 
le  Sacrement  de  la  Pénitence  {V.  ce  mot). 

vicEi  ORIGINEL,  nom  que  les  théologiens  donnent  à  la 
tache  que  tout  homme  apporte  dans  le  monde  en  nais- 
sant, par  suite  de  la  désobéissance  d'Adam  et  d'Eve,  et 
qui  est  effacée  par  le  Baptême  (F.  ce  mot),  La  nature  du 
péché  originel  ne  consiste  ni  dans  une  substance  mau- 
vaise créée  par  le  démon,  comme  le  prétendaient  les 
Manichéens,  ni  dans  la  concupiscence,  comme  le  pensent 
généralement  les  Protestants,  ni  dans  une  certaine  con- 
dition vicieuse  du  corps  et  de  T&me;  c'est  la  communi- 
cation du  péché  du  premier  homme  et  la  privation  de  la 
Justice  originelle.  Le  péché  originel  a  introduit  dans  le 
monde  une  multitude  de  peines  :  pour  le  corps,  les  ma- 
ladies, les  misères  de  toute  sorte,  la  mort;  pour  l'&me, 
l'ignorance,  la  malice,  la  concupiscence.  Les  enfants  qui 
meurent  avec  le  péché  originel,  parce  qu'ils  n'ont  pas 
reçu  le  baptême,  sont  privés  de  la  vision  béatiflque  de 
Dieu  ;  mais  il  n'est  pas  certain  qu'ils  souffrent  la  peine 
do  sens,  et  les  théologiens,  ainsi  que  les  Pères,  sont  par- 
tagés sur  ce  point. 
PÊCHEUR  (Anneau  du).  V.  Auneau. 
PÉCILE  ou  POECILE  (du  grec  poikilos,  varié),  célèbre 
portique  d'Athènes,  situé  vers  le  milieu  de  l'Agora  (V.  ce 
mot),  11  se  composait  de  4  murs  parallèles,  entourés 
d'une  colonnade,  probablement  d'ordre  dorique,  comme 
toos  les  grands  monuments  d'Athènes,  et  formant  des 
portiques,  où  se  tenaient  les  philosophes,  que  la  foule 
entourait  pour  les  écouter,  et  où  se  rendaient  les  poètes 
pour  y  réciter  leurs  poésies  au  public.  Ce  fut  là  que  Zenon 
ouvrit  la  fameuse  école  qui  prit  le  nom  de  Stoïcienne  ou 
du  Portique  (du  groc  stoa,  portique).  La  paroi  des  murs 
était  couverte  de  peintures  représentant  des  sujets  natio- 
naux, tels  que  la  guerre  de  Th^ée  contre  les  Amazones, 
les  secours  fournis  par  les  Athéniens  aux  Héraclides,  leurs 
victoires  sur  les  Lacédémoniens  à  QBnoé,  sur  les  Perses  à 
Marathon,  etc.  La  plupart  de  ces  tableaux  furent  exécutés 
par  Polygnote,  M^con,  Pamphile,  et  Panœnus,  frère  de 
Phidias.  On  voyait  aussi  suspendus  dans  le  Pécile  les 
boucliers  des  Scioniens  de  la  Thrace,  et  ceux  qu'on  avait 
enlevés  aux  Spartiates  dans  l'Ile  de  Sphactérie.  A  l'entrée 
on  remarquait  une  statue  de  Selon.  Les  vieilles  murailles 
qui  se  trouvent  près  de  l'église  de  Panagia  Fanaromeni 
paraissent  être  les  restes  du  Pécile.  V,  dans  la  Revue  ar^ 
chéologûjue,  août  1854,  un  Mémoire  de  M.  Hanriot  sur 
Athènes.  H. 

PEGTIS,  instrument  de  musique  à  cordes  des  Andens. 
On  en  attribuait  l'invention  aux  Lvdiens. 
PECTORAL.  V.  Cancbl  et  Cuibasse. 
PECTORAL,  partie  du  costume  du  grand  prêtre  des  Juifs, 
qn'on  appelait  aussi  Rational,  V,  ce  mot  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d*Histoire, 

PECULAT,  en  termes  de  Jurisprudence  criminelle  des 
Romains,  yol  de  deniers  publics  par  ceux  oui  en  avaient 
la  perception,  le  maniement  ou  l'administration.  Les 
crimes  de  péculat  devinrent  très-nombreux  dans  les  deux 
derniers  siècles  de  la  République,  et  on  vit  se  succéder 
plusieurs  lois  destinées  à  les  réprimer  {De  pecuniis  repe- 
l^tfidis),  La  peine,  qui  consistait  d'abord  en  une  simple 
i^titution,  dont  la  honte  avait  paru  être  un  ch&timent 
suffisant,  fut  portée  ensuite  au  double,  au  quadruple  ;  on 
y  attacha  aussi  l'interdiction  de  certains  droits  civiques, 
comme  celui  d'être  témoin  ou  Juge;  l'exil  fut  même  pro- 
noncé. V,  CONCDSSMm. 


PÉCULE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire, 

PÉDAGOGIE  (du  grec  paXs,  paidos,  enfant,  et  agôgè, 
conduite),  art  d'élever  les  enfants.  Le  mot  n'a  été  em- 
ployé en  ce  sens  que  par  les  Modernes,  surtout  en  AIle« 
magne,  et  il  s'applique  h  la  fois  à  l'éducation  physique, 
à  l'éducation  intellectuelle,  et  à  l'éducation  morale.  Les 
Grecs  donnaient  le  nom  de  Pédagogues,  pris  seulement 
dans  son  sens  propre,  aux  esclaves  chargés  de  conduire 
les  enfants  de  leurs  maîtres  aux  écoles  et  de  les  ramener; 
et  ils  prenaient  d'ordinaire  pour  cet  office,  ainsi  que  nous 
l'apprend  Plutarque  dans  son  traité  De  VÊducation,  les 
esclaves  qu'on  avait  achetés  le  moins  cher  et  qu'on  ne 
pouvait  employer  plus  utilement  à  autre  chose.  Le  hasard 
seul  amenait  de  bons  choix.  Chez  les  Romains,  le  rôle  de 
l'esclave  pédagogue  se  modifia  :  cet  esclave  accompagnait 
l'enfant,  veillait  sur  ses  mœurs,  dirigent  sa  conduite,  se 
plaçait  près  de  lui  dans  les  thé&tres,  entremêlait  de  ses 
réflexions  les  pièces  qu'on  y  jouait;  mais,  dans  tous  les 
cas,  son  influence  ne  laissait  pas  d'être  dangereuse.  Vers 
la  fin  du  paganisme,  le  mot  pédadogue  était  devenu  sy- 
nonyme dHnstituteur  et  de  sophiste.  Au  moyen  âge,  les 
Pédagogues  furent  les  directeurs  des  établissements  d'in- 
struction; par  suite,  le  nom  désigna  tout  homme  qui 
enseignait,  et  il  a  fini  par  ne  plus  être  pris  qu'en  déri- 
sion, en  l'appliquant  à  un  pédant  plein  de  morgue.  Mais 
le  mot  Pédagogie  a  été  créé  et  s'est  conservé  pour  dési- 
gner la  science  de  l'éducation. 

On  trouverait  déjà  les  éléments  de  cette  science  épars 
dans  les  législateurs  et  les  philosophes  de  l'antiquité  : 
Moïse,  Manou,  Lycurgue,  Solon,  Pythagore,  Platon,  en 
ont  posé  les  principes,  nécessairement  variables  selon  les 
moeurs  et  les  institutions  sociales  de  leur  temps.  Les 
écrits  de  Quintilien  et  de  Plutarque  fourniraient  aussi  de 
précieux  renseignements  sur  la  pédagogie  de  l'antiquité. 
Mnéas  Sylvius  au  xv*  siècle,  Érasme  et  Sadolet  au  xvi*, 
Fénelon  et  Locke  au  xvu*,  Rollin,  J.-J.  Rousseau,  Ba- 
sedow  et  Pestalozzi  au  xvin%  et  enfin,  de  nos  Jours, 
Niemeyer  en  Allemagne,  le  P.  Girard  en  Suisse,  ont  été 
les  plus  illustres  théoriciens  en  matière  d'éducation.  D 
faut  avouer  que,  malgré  leurs  efforts,  la  pédagogie  est 
une  science  encore  peu  avancée. 

Son  but  est  de  donner,  par  les  méthodes  les  plus  avan- 
tageuses, Vinstruction  et  Véducation  {V.  ces  mots).  Ces 
deux  parties  qui  composent  son  domaine,  elle  doit  en 
traiter  selon  qu'elles  sont  publiques  ou  privées.  Il  lui  faut 
montrer  le  de^  qui  convient  a  chacune  d'elles  pour  les 
diverses  conditions  et  catégories  de  la  société,  c-à-d. 
l'instruction  et  l'éducation  nécessaires  anx  garçons  et  aux 
filles,  aux  professions  libérales  et  aux  professions  ma- 
nuelles, etc.  Les  mœurs  et  les  institutions  d'un  peuple 
étant  données,  la  Pédagogie  déterminera  le  caractère  qui 
convient  à  l'éducation  nationale,  et  spécialement  à  l'édu- 
cation populaire.  Il  y  a  donc  là  une  science  vaste  et  se* 
rieuse,  qui  n'a  Jusqu'à  présent  fait  l'objet  d'aucun  ensei- 
gnement public.  Après  la  Révolution  de  1848,  un  cours 
de  Pédagogie  fut  institué  à  Paris,  à  l'École  normale  su- 
périeure; mais  il  n'a  pas  été  conservé.  F.  Schwartz, 
Pédagogie,  Leipzig,  1820;  Fritz,  Essai  d^un  système  com^ 
plet  d'éducation^  et  Histoire  de  la  Pédagogie,  Strasbourg 
et  Paris,  1840-43;  le  P.  Girard,  de  l'Enseignement  ré- 
gulier de  la  langue  maternelle,  dans  les  écoles  et  dans  les 
famUles,  Paris,  1844,  in-S»  et  in-12  ;  3«édit.  1853,  in-i2. 

PÉDALE  (du  latin  pes,  pedis^  pied),  en  termes  de  Mu- 
sique, tenue  prolongée  à  la  basse  pendant  un  certain 
nombre  de  mesures,  et  sur  laquelle  on  fait  plusieurs  ac- 
cords successifs,  étrangers  pour  la  plupart  à  la  note  sou- 
tenue. Les  meilleures  pédales  sont  celles  dont  la  tenue 
devient  alternativement  note  réelle  et  note  accidentelle 
des  accords  sous  lesquels  elles  se  prolongent.  Ce  ({u'on 
nomme  improprement  pédale  supérieure  et  pédcUe  inter- 
médiaire n  est  autre  chose  qu'une  tenue  qui  entre  dans 
la  combinaison  des  accords,  soit  comme  note  réelle  ou 
note  de  passage,  soit  comme  suspension.  La  pédale  a  lieu 
sur  la  tonique  ou  sur  la  dominante.  Son  nom  vient  de  ce 
que,  dans  rorigine,  elle  n'était  emplo]^ée  aue  dans  la 
musique  d'église  par  les  organistes,  qui  la  laisaient  en- 
tendre dans  le  clavier  de  pédale.  B. 

PÉDALE,  touche  de  bois  ou  de  métal  qu'on  fait  mouvoir 
avec  les  pieds,  soit  pour  modifier  l'intensité  du  son, 
comme  dans  le  piano,  soit  pour  hausser  ou  baisser  le  ton, 
comme  dans  la  harpe,  soit  pour  faire  parler  les  grands 
tuyaux  de  l'orgue,  qui  rendent  les  sons  les  plus  graves. 

FÉDALB  (Jeux  de).  Jeux  d'orgue  correspondant  au  clavier 
de  pédale,  et  qu'on  Joue  avec  les  pieds  ;  tels  sont  :  parmi 
les  Jeux  à  bouche,  les  bourdons^  les  flûtes,  le  prestant,  la 


l'EI 


1396 


PEI 


grosse  tierce^  le  nasard^  très-rarement  la  quarte  de  na- 
sard,  et  la  tierce;  parmi  les  jeux  d*anche  :  la  bombarde, 
ia  trompette  et  le  clairon,  F.  G. 

PÉDANT  (de  l'italien  pédante)^  celui  qui  fait  parade  de 
science,  qui  entasse  à  tort  et  à  travers  les  citations,  les 
critiques  et  les  observations,  qui  affecte  en  toute  chose 
Texactitude  et  la  rigidité. 

PÉDAUQUE  (La  reine).  V,  Bbrtb  aux.  grans  pi£s. 

PÉDICULE,  petit  pilier  qui  supporte  un  objet,  comme 
un  bénitier  ou  des  fonts  baptismaux;  —  partie  par  la- 
quelle se  terminent  les  arcs  à  talon,  et  que  surmonte  un 
bouquet  ou  un  cul-de-larape. 

PÉDUM,  b&ton  pastoral  recourbé  par  le  haut.  On  le 
voit  entre  les  mains  de  Pan,  des  Faunes,  des  Satyres,  de 
P&ris,  etc.  Les  acteurs  comiques  de  l'antiquité  le  por- 
taient, parce  que  Thalie,  muse  de  la  comédie,  était  aussi 
la  muse  de  Talgriculture. 

PEGMA.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d* Histoire. 

PEHLVI  (Idiome),  idiome  qui  fut  longtemps  parlé  dans 
une  grande  partie  de  TEmpire  persan,  après  que  le  zend 
{V,  ce  mot)  eut  été  réduit  à  l'état  de  langue  sacrée.  Aban- 
donné de  la  cour  et  des  hautes  classes  sous  le  règne 
d'Artaxerxès  Longue-Main,  il  perdit  à  son  tour  son  im- 
portance, et,  au  v«  siècle  de  notre  ère,  il  avait  cessé  d'être 
une  langue  vulgaire  :  on  l'employa  encore  dans  les  livres 
jusqu'à  la  conquête  arabe.  Les  Guèbres  ou  Parsis,  secta- 
teurs de  Zoroastre,  l'ont  conservé  plus  longtemps.  Le  mot 
pefUvi,  selon  Anquetil-Duperron,  signifie  côté,  force;  il 
désignerait  en  auelque  sorte  la  langue  des  forts  ou  des 
héros.  D'autres  le  font  dériver  du  nom  des  Pahlvans,  qui 
habitent  le  Pahlu,  un  des  cantons  de  la  Perse.  Quoi  qu'il 
en  soit,  E.  Quatremère  regardait  le  pehlvi  comme  la 
langue  nationale  des  Parthes.  D'autres  ont  pensé  que 
c'était  Pidiome  des  Mèdes,  employé  dans  le  second  des 
trois  systèmes  d'écriture  cunéiforme  (  F.  ce  mot).  Là  pehlvi 
se  rapproche  du  zend  par  son  vocabulaire,  et  des  langues 
sémitiques  par  sa  grammaire.  Il  est  à  la  fois  moins  riche 
en  voyelles  et  plus  poli  que  le  zend.  Il  s'écrit  de  droite 
à  çauche  i»vec  un  alphabet  de  26  lettres,  qui  dérivent 
évidemment  de  celles  du  zend  ;  cet  alphabet,  malgré  son 
analogie  avec  le  syriaque,  permet  d'écrire  les  voyelles 
aussi  bien  que  les  consonnes,  mais  il  est  défectueux  en 
ce  qu'on  y  fait  souvent  usage  d'un  môme  signe  pour  re- 
présenter plusieurs  sons  différents.  —  Le  Boundehech 
(F.  ce  mot)  est  écrit  en  pehlvi.  Cette  langue  est  employée 
sur  les  médailles  et  dans  les  inscriptions  des  monuments 
des  Sassanides  :  Silvestre  de  Sacy  et  M.  de  Longpérier 
en  France,  Olshausen  à  Copenhague,  Dorn  à  S^-Péters- 
bourg,  se  sont  occupés  de  les  déchiffrer.  Les  manuscrits 
d'Anquetil-Duperron,  conservés  à  la  Bibliothèque  impé- 
riale de  Paris,  contiennent  des  fragments  d'une  Gram- 
maire et  d'un  Vocabulaire  du  pehlvi.  V.  Maller,  Essai 
sur  la  langue  peklifi,  dans  le  Journal  Asiatique  d'avril 
1839;  Euçéne  Bore,  Considérations  sur  les  inscriptioiis 
pehlvies,  ibid.,  juin  1841. 

PEIGNE  (du  latin  pecten).  Les  Anciens  avaient  des 
peignes  d'ivoire  ou  de  buis  comme  les  nôtres,  pour  se 
nettoyer  la  tête.  Les  peignes  d'ivoire  faisaient  partie  du 
mobilier  de  la  primitive  Église,  parce  les  prêtres  étaient 
dans  l'usage  de  peigner  leurs  cheveux  avant  de  s'appro- 
cher de  l'autel  :  plusieurs  de  ces  peignes  ont  été  con- 
servés dans  les  Trésors  des  églises;  ainsi,  on  possède  à 
Sens  le  peigne  de  S*  Loup,  orné  de  pierres  précieuses  et 
d'animaux  symboliques.  —  Le  peigne  est  aussi  un  orne- 
ment de  la  toilette  des  femmes,  servant  à  retenir  et  à 
fixer  les  cheveux  :  la  forme  et  la  matière  en  ont  beaucoup 
varié  ;  on  en  a  fait  un  riche  objet  d'orfèvrerie. 

PEIGNOIR,  vêtement  de  toile,  de  calicot,  d'indienne 
ou  de  mousseline,  dont  les  femmes  se  couvrent  les 
épaules  lorsqu'elles  sont  à  leur  toilette  du  matin.  On  en 
a  fait  un  objet  de  parure,  garni  de  dentelles.  —  Le  pei- 
gnoir est  encore  une  sorte  de  robe  à  manches  dont  on 
s'enveloppe  après  le  bain. 

PEINE,  châtiment  apposé  à  l'infraction  d'une  loi.  Juri- 
diquement, c'est  le  mal  moral  ou  physique  infligé  comme 
sanction  des  prescriptions  de  la  loi  à  celui  qui  n'a  pas 
fait  ce  que  la  loi  ordonnait,  ou  qui  a  fait  ce  qu'elle  dé- 
fendait. Tantôt  elle  consiste  dans  une  souffrance  corpo- 
relle qui  peut  quelquefois  aller  jusqu'à  la  privation  de  la 
vie,  tantôt  dans  la  privation  perpétuelle  ou  temporaire 
des  facultés  naturelles,  des  droits  civils,  etc.,  ou  même 
dans  le  pavement  d'une  amende  ou  le  dessaisissement  de 
certains  biens  par  la  confiscation.  Suivant  Rossi,  le  prin- 
cipe sur  lequel  est  fondé  le  droit  de  punir  implique  une 
idée  de  supériorité;  suivant  Beccaria,  une  convention 


primitive.  Bentham  l'a  voulu  chercher  dans  l'utilité  so- 
ciale, dans  la  nécessité,  principe  arbitraire  et  faux  dont 
les  conséquences  seraient  effrayantes.  On  a  invoqué  le 
droit  de  légitime  défense,  qui,  lui  aussi,  suppose  un 
pacte  social,  ce  qui  n'est  pas  vrai  :  d'ailleurs,  au  moment 


'exagération  des  pénalités, 
semble  plus  naturel  de  chercher  avec  Rossi,  dans  la  jus- 
tice elle-même,  dans  la  loi  morale,  le  fondement  du  droit 
de  punir.  La  société  est  la  loi  de  l'homme  :  les  lois  qui 
maintiennent  cet  ordre  doivent  être  respectées  ;  elles  ne 
peuvent  l'être  qu'à  l'aide  des  punitions  qui  frappent  les 
infractions.  Aussi  la  peine  est-elle  acceptée  comme  une 
nécessité  sociale,  parce  qu'elle  satisfait  la  conscience  pu- 
blique, et  sa  justice  est  reconnue  par  celui-là  même 
qu'elle  atteint.  Le  but  de  la  peine  n'est  pas  seulement 
d'intimider  et  de  punir,  ou  de  réformer  le  condamné, 
mais  encore  de  maintenir  l'ordre  social ,  et  d'affermir 
l'idée  de  justice  par  le  spectacle  de  l'expiation. 

La  peine  doit  remplir  certaines  conditions  :  il  faut 
qu'elle  soit  proportionnée ,  exemplaire,  réformatrice, 
instructive,  morale,  personnelle,  divisible,  égale,  répa- 
rable. De  ces  qualités,  l'une  des  plus  difKciles  à  atteindre, 
c'est  la  proportionnalité.  A  cet  égard,  chaque  criminaliste 
propose  son  principe;  Bentham  estime  que  le  mal  infligé 
doit  surpasser  le  profit  tiré  du  délit  ou  des  délits  pr^u- 
més.  Il  admet  une  exception  au  cas  où  un  délit  est  très- 
nuisible,  comme  moyen  de  le  prévenir.  Ne  semble-t-il 
pas  plus  rationnel  et  plus  juste  de  dire,  avec  Rossi,  que 
la  proportionnalité  de  la  peine  se  trouve  établie  par 
l'étude  du  sentiment  intime?  Le  législateur  n'a  plus  alors 
qu'à  fixer  le  maximum  et  le  minimum  entre  lesquels  se 
meut  la  répression;  ce  sera  à  la  conscience  du  juge  de 
chercher  dans  un  examen  sérieux  ce  qu'exigent  les  né- 
cessités de  la  répression. 

Notre  Code  pénal  divise  les  peines  en  criminelles,  correC' 
tionnelles  ou  de  police.  Les  peines  criminelles  sont  dites 
afflictives  et  infamantes,  ou  simplement  infamantes.  Les 
peines  af&ictives  et  infamantes  sont  :  la  mort,  les  travaux 
forcés  à  perpétuité,  la  déportation,  les  travaux  forcés  à 
temps,  la  détention,  la  réclusion.  Les  peines  infamantes 
sont  le  bannissement  et  la  dégradation  civique.  Les  peines 
correctionnelles  sont  :  l'emprisonnement  à  temps  dans 
une  maison  de  correction,  l'interdiction  à  temps  de  cer- 
tains droits  civils,  civiques  et  de  famille,  l'amende.  — 
Sont  communs  aux  crimes  et  aux  délits,  le  renvoi  sous  la 
surveillance  de  la  haute  police,  la  confiscation  du  corps 
du  délit,  appartenant  au  condamné,  ou  des  choses  pro- 
duites par  le  délit  ou  destinées  à  le  commettre.  —  Les 
peines  de  simple  police  sont  l'emprisonnement  de  i  à  5 
Jours,  l'amende, et  la  confiscation  de  certains  objets  saisis. 

L'ancien  Droit  était  à  cet  égard  bien  autrement  fécond  : 
il  avait  cinq  peines  capitales  appliquées  suivant  la  gra- 
vité des  cas  :  l'écartèlement,  le  feu  vif,  la  roue,  la  po- 
tence ou  gibet,  la  décollation;  dix- sept  peines  corpo- 
relles, la  question  ou  torture,  les  galères  perpétuelles,  les 
galères  à  temps,  le  fouet  sous  la  custode  (dans  la  pri- 
son) appliqué  aux  enfants,  le  fouet  ordinaire  donné  pu- 
bliquement, la  langue  coupée  ou  percée,  le  poing  coupé, 
l'assistance  à  la  potence,  le  tralnement  sur  la  claie  (du 
corps  des  suicidés),  la  suspension  sous  les  aisselles,  la 
promenade  par  les  rues,  le  carcan,  le  pilori,  l'amende  ho- 
norable publique,  l'amende  honorable  sèche  (en  chambre 
du  Conseil).  Quant  aux  peines  purement  aflUctires,  il  y 
avait  le  bannissement  à  vie  ou  à  temps,  l'authentique 
pour  les  femmes  adultères,  la  réclusion  dans  une  maison 
de  force  remplaçant  pour  les  femmes  les  galères  et  le 
bannissement,  enfin  la  prison  perpétuelle.  —  Les  peines 
infamantes  de  droit  étaient  alors  la  mort  civile,  la  con- 
damnation de  la  mémoire,  le  blâme,  la  dégradation  de 
noblesse,  l'interdiction  perpétuelle  d'office,  le  plus  am- 
plement informé  indéfini.  Les  peines  infamantes  de  fait 
étaient  l'admonition,  l'abstention  des  lieux,  l'interdiction 
à  temps,  le  plus  amplement  informé  à  temps,  le  hors 
de  cour.  —  On  comptait  aussi  quatre  peines  pécu- 
niaires :  la  confiscation,  l'amende,  l'aumône,  et  la  répam  - 
tion  civile.  Le  Droit  actuel,  en  simplifiant  les  peines  <*: 
laissant  moins  de  liberté  à  l'appréciation  du  juge,  a  rC.i- 
lisé  un  progrès  vers  l'application  plus  rigoureuse  de  ré<;a- 
lité  pénale.  V.  Beccaria,  Traité  des  délits  et  des  peines. 
1764, 1  vol.  in-12;  J.  Bentham,  Théorie  des  peines  et  des 
récompenses^  Paris,  1818, 2  vol.  in-8**,  trad.  par  Dûment; 
Saint-Edme,  Dictionnaire  de  la  pénalité  dans  toutes  fet 
parties  du  monde  connu^  1818, 5  vol.  in-8";  Rossi,  Trattf 
de  Droit  pénal,  1829,  3  vol.  in-8°i  De  Molènes,  De  l'hu^ 


PEI 


1397 


PEI 


manilé  dans  les  lois  criminelles,  1830,  in-8<*;  Alauzet, 
Essai  sur  les  peines,  1842.  R.  d*E. 

PBINB  CAPITALE  OU  PEINE  DE  UORT.  Sa  légitimité  a  été 

f)ias  d'une  fois  mise  en  doute  :  suivant  les  uns,  parce  que 
'homme,  n'avant  aucun  droit  sur  sa  vie,  n'avait  pu  le 
céder;  suivant  les  autres,  parce  que  le  droit  ii  Texistence 
étant  inviolable,  la  société  ne  peut  l'ôter.  Ces  généralités 
Bont  sans  valeur;  tous  les  jours  elles  reçoivent  un  écla- 
tant démenti.  La  légitime  défense  de  soi-même  ou  d*au- 
trui,  de  Thonneur  de  sa  femme,  la  gueire,  prouvent  que 
lo  droit  d'ôter  la  vie  à  son  semblable  est  parfois  justifié. 
On  peut  donc  admettre  qu'il  existe  en  principe,  et  que 
son  exercice  est  seulement  subordonné  à  la  justice  de  la 
cause.  La  cause  est  juste  quand  elle  a  pour  but  de  pro- 
téger Tordre  social,  de  sauvegarder  les  droits  des  inno- 
cents. La  peine  de  mort  est  usitée  chez  tous  les  peuples, 
à  tous  les  degrés  de  civilisation  ;  elle  ne  soulève  donc  pas 
la  conscience  humaine.  Le  droit  à  la  vie  est-il  d'ailleurs 
plus  sacré  que  le  droit  à  la  liberté,  et  ne  voit-on  pas  ce- 
pendant de  combien  de  restrictions  celui-ci  est  justement 
passible  lorsqu'il  s'agit  de  protéger  et  de  défendre  l'ordre 
social?  Sans  doute  la  peine  de  mort  ne  prévient  pas  tous 
les  crimes;  mais  est-ce  à  dire  que  ce  soit  un  frein  im- 
paissant, et  l'expérience  ne  montre-t^elle  pas  tous^  les 
Jours  que  c'est  le  seul  frein  capable  d'arrêter  certaines 
natures  perverties?  Elle  a  d'ailleurs  au  plus  haut  point 
plusieurs  des  mérites  d'une  bonne  pénalité  :  exemplaire 
au  premier  chef;  réformatrice,  au  moins  quant  à  la  con- 
science du  coupable,  que  l'approche  du  dernier  jour 
appelle  au  repentir;  instructive,  morale,  personnelle. 
Ses  graves  inconvénients  sont  d'être  indivisible,  inégale, 
et  surtout  irréparable.  Montesquieu,  Mably,  Kant,  J.-J. 
Rousseau,  de  Maistre,  Filangieri,  Rossi,  Merlin,  ont  sou- 
tenu sa  parfaite  légalité. 

Disons  quelques  mots  des  vicissitudes  qu'a  subies 
à  cet  égare!  la  législation.  L'article  1*'  de  la  loi  du 
4  brumaire  an  iv  (2G  octobre  1795)  proclamait  l'aboli- 
tion de  la  peine  de  mort  «  h  dater  du  jour  de  la  pu- 
blication de  la  paix  générale.  »  Lo  Code  pénal  de  1810 
l'appliqua  avec  plus  de  rigueur  que  jamais;  de  là  une 
réaction  que  l'institution  du  jury  rendit  plus  sensible. 
Après  1830,  la  Chambre  des  députés  tout  entière  votait 
l'abolition  de  la  peine  de  mort,  sur  la  proposition  d'un  de 
ses  membres;  vote  sans  suite,  mais  qui,  lors  de  la  révi- 
sion du  Code  pénal  en  1832,  la  fit  retrancher  dans  un 
bon  nombre  de  cas,  et  qui,  par  l'admission  des  circon- 
stances atténuantes  abandonnée  au  jury,  lui  permit 
d'abaisser  la  peine  à  un  degré  inférieur.  Dans  tous  les 
cas,  elle  fut  restreinte  aux  crimes  qui  compromettent  la 
▼ie  des  personnes,  et  n'est  plus  applicable  aux  crimes  de 
fausse  monnaie,  de  contrefaçon  du  sceau  de  l'État,  ou  des 
billets  de  banque,  aux  vols  commis  avec  la  réunion  des 
don  circonstances  aggravantes.  —  La  Constitution  de 
1818  proclama  son  abolition  en  matière  politique,  où  la 
déportation  la  remplaça  (Loi  du  8  juin  1850)  ;  elle  ne  fut 
rétablie,  plus  tard,  que  pour  réprimer  les  attentats  di- 
rigés contre  la  vie  ou  la  personne  de  l'Empereur,  et 
contre  la  vie  des  personnes  de  la  famille  impériale.  Au- 
jourd'hui la  peine  de  mort  ne  s'exécute  que  par  un  seul 
mode,  la  décapitation  au  moyen  de  la  guillotine,  et  n'est 
accompagnée  d'aucune  aggravation  de  souffrances.  La 
mutilation  du  poing,  infligée  aujparricïde  par  le  Code  de 
1810,  a  été  supprimée  en  1832.  K.  Bossange,  Des  crimes 
et  dis  peines  capitales,  1822,  in-8°;  Lucas,  Du  système 
pmal  et  du  système  répressif  en  général,  et  de  la  peine  de 
mort  en  partictUier,  1827,  in-8<*  ;  Ducpétiaux,  De  la  peine 
de  mort,  Bruxelles,  1827;  Guizot,  De  la  peine  de  mort  en 
matière  politique,  18S8,  in-8'^;  Urtis,  Nécessité  du  matn- 
ficn  de  la  peine  de  mort,  1831  ;  Si  1  vêla,  Du  maintien  de 
la  peine  de  mort,  1832;  Roumieu,  Plus  d'échafaudi 
Abolition  de  la  peine  de  mort,  1833.  R.  d'E. 

PEINTRE  DU  ROI  (Premier),  titre  donné  sous  l'an- 
cienne monarchie  française,  et  jusqu'à  Tépoque  de  la 
Hévolution,  à  un  peintre  ordinairement  distingué.  Des 
fonctions  étaient  attachées  à  ce  titre  :  c'étaient  celles  d'or- 
donnateur de  tous  les  ouvrages  de  peinture  et  de  sculp- 
ture ^e  le  roi  commandait;  le  premier  peintre  se  trou- 
vait ainsi  en  position  d'être  le  protecteur  des  artistes,  et 
d'influer  sur  la  direction  du  goût.  Les  peintres  du  roi  de- 
puis Louis  XIV  ont  été  :  Lebrun,  nommé  en  1662;  Mi- 
gnard  pierre),  en  1690;  Carie  Vanloo,  en  1695;  Boucher, 
en  1765;  Pierre,  en  1770.  Sous  le  1*'  Empire  français, 
David  fut  peintre  de  l'empereur.  A  la  Restauration , 
Louis  XYIII  donna  le  titre  de  son  premier  peintre  à  Gé- 
rard. Ce  titre  n'a  plus  été  accordé  a  aucun  artiste  depuis 
la  révolution  de  {830.  C.  D— t. 


PEINTURE,  art  qui,  à  l'aide  de  lignes  et  de  couleurs, 
reproduit  l'infinie  variété  des  objets  de  la  nature,  et  qui, 
franchissant  même  les  limites  du  monde  matériel  pour 
s'élever  aux  plus  hautes  régions  de  la  pensée  et  de  l'ima- 
gination, exprime  le  beau  par  des  formes  visibles.  Les 
connaissances  nécessaires  au  peintre  sont  le  dessin,  Vana- 
tomie,  ItL  perspective  linéaire,  la  perspective  aérienne,  et 
le  clair-obscur.  Pour  réaliser  les  efiets  qu'il  ambitionne, 
il  lui  faut  le  génie  de  Vinvention,  la  science  de  la  compo- 
sition, et  une  grande  pratique,  c.-à-d.  tout  ce  qui  tient 
à  l'exécution,  au  travail  de  la  main.  On  doit  encore  ap- 
porter un  grand  soin  au  broiement  et  k  la  composition 
des  couleurs,  à  la  préparation  de  la  matière  sur  laquelle 
ces  couleurs  seront  appliquées.  O^dqu^  peintres  pré- 
parent sur  la  palette,  avant  de  peindre,  les  teintes  qui 
leur  sont  nécessaires  :  d'autres  les  font  avec  le  pinceau 
au  fur  et  à  mesure  de  leurs  besoins,  ce  qui  produit  plus 
de  variété  dans  le  coloris.  —  Au  point  de  vue  des  pro- 
cédés matériels,  on  distingue  la  Peinture  à  Vhuile ,  à 
fresque,  à  Vencat^tique,  en  détrempe,  en  miniature,  à 
V aquarelle,  au  lavis,  à  la  gouache,  au  pastel,  en  camaïeu, 
en  mosaSque  (V.  ces  mots).  Par  rapport  aux  matières  sur 
lesc[uelles  on  peint,  on  distingue  la  Peinture  murale,  sur 
bois,  sur  toile,  sur  ivoire,  sur  émail,  sur  porcelaine,  sur 
verre f  etc.  Eu  égard  aux  sujets  représentés,  on  distingue 
la  Peinture  d*histoire,  de  batailles,  de  portraits,  de  genre, 
de  paysages,  de  marines,  d'animaux,  de  fleurs,  de  na* 
ture  morte,  d'arabesques,  de  grotesques  (F.  ces  mots). 
—  Le  peintre  Dufresnoy  a  composé  un  poôme  latin  sur 
la  peinture  {De  arte  graphicà).  V.  Théophile,  Schedula 
diversarum  artium,  Paris,  1843,  in-8<»;  L.-B.  Alberti, 
Z)e  ptcturd,  Bâle,  1540,  in-S»;  Robert  Fludd,  Tractatus 
de  arte  picturœ,  Francfort,  1624,  in-fol.;  J*  Schefl'er, 
Graphice,  ûl  est  de  arte  pingendi,  Nuremberg,  1669; 
A.-F.  Doni,  //  Disegno,  Venise,  1549,  in-8<^;  Lomazzo, 
Trattato  delV  arte  délia  pittura^  Milan,  1585,  in-4<>; 
Léonard  de  Vinci,  Trattato  délia  pittura,  trad.  en  fran- 
çais par  Fréart  de  Chambray,  1051,  1716  et  1724;  Alga- 
rottiy  Saggio  sopra  la  pittura,  traduct.  en  français  paf 
Pingeron,  Paris,  1769,  in-12;  Roger  de  Piles,  Cours  de 
peinture  par  principes,  Paris,  1708  et  1720,  in-12;  War 
tclet,  VArt  de  peindre,  1760,  in-4'>;  Liotard,  Traité  des 
principes  et  des  règles  de  la  peinture,  Genève,  1 781,  in-8°; 
Gérard  de  Lairesse,  Le  Grand  Livre  des  peintres,  Paris, 
1787,  2  vol.  in-8®;  Richardson,  Traité  de  la  peinture, 
traduct.  de  l'anglais  par  Rutgers,  Amsterdam,  1728, 
3  vol.  in-8°;  Reynolds,  Discours  sur  la  peinture,  traduct. 
de  l'anglais  par  Janssen,  1788  et  1806,  2  vol.  in-8o;  Ha- 
gedom.  Réflexions  sur  la  peinture,  traduct.  de  l'allemand 
par  Huber,  Leipzig,  1775,  in-8°;  l'abbé  de  Marsy,  Dic- 
tionnaire abrmé  de  peinture  et  d'architecture,  Paris, 
1746,  2  vol.  in-5<';  Pernetty,  Dictionnaire  de  peinture,  de 
sculpture  et  de  gravure,  Paris,  1757,  in-8<*;  Watelet  et 
Lévesque,  Dictionnaire  de  peinture,  de  sculpture  et  de 

Çravure,  Paris,  1792,  5  vol.  ln-8o;  Paillot  de  Montabert, 
Yaité  complet  de  la  Peinture,  1828-1851,  9  vol.  in-8' 
et  atlas. 

Pour  l'histoire  de  la  Peinture,  nous  renvoyons  aux  ar- 
ticles qui  lui  ont  été  consacrés  pour  chaque  pays  dans  le 
présent  Dictionnaire ,  et  en  outre  des  ouvrages  indiqués 
dans  ces  articles,  aux  suivants  :  Bulenger,  De  Pictura, 
plastice  et  st€Uuaria  veterum,  L^de,  1627,  in-8<>  ;  Bellori, 
Délia  Pittura  antica,  Venise,  1697  ;  Junius,  De  Picturà 
Veterum,  traité  publié  par  Gnevius,  Rotterdam,  1694 1 
Durand,  Histoire  de  la  Peinture  ancienne,  Londres,  1 725  ; 
Turnbull,  Traité  sur  Vancienne  Peinture,  en  anglais, 
Londres,  1740:  Requeno,  Saggi  stU  ristabilimento  deW 
antica  arte  de  Grecie  de'  Romani  pittori,  Parme,  1787, 
in-4<*;  Letronne,  Lettres  d^un  antiquaire  à  un  artiste 
sur  remploi  de  la  peinture  historique  murcUe  dans  la 
décoration  des  temples  chez  les  Grecs  et  les  Romains, 
Paris,  1836,  in-8«;  Raoul-Rochette ,  Peintures  antiques 
inédites,  Paris,  1836 ,  in-4<'  ;  Vasari,  Vite  de  piii  eœcel- 
lenti  pittori,  Florence,  1550,  traduit  en  français  par  Jean- 
ron  et  Léclanché,  Paris,  1840,  10  vol.  in-80î  Dati,  Vite 
de*  pittori  antichi,  Florence,  1667,  in-4®;  Dezallier  d*Ar- 
genville.  Abrégé  de  la  vie  des  plus  fameux  peintres, 
Paris,  1762,  4  vol.  in-8°;  Séroux  d'Agincourt,  Histoire  de 
Vartpar  les  monuments,  1809-23,  6  vol.  in-fol.;  Denon, 
Monuments  des  arts  du  dessin  chex  les  peuples  anciens 
et  modernes,  1809, 4  vol.  in-fol.  ;  Ch.  Blanc,  Histoire  des 
peintres  de  toutes  les  écoles,  depuis  la  Renaissance  jus- 
qu'à nos  jours,  Paris,  1849-62,  gr.  in-4«. 

PEniTURB  (Académies  de).  Sans  parler  des  confréries 
d'artistes  qui  se  placèrent  sous  le  patronage  de  S*  Luc 
(F.  ce  moQ,  la  première  Académie  de  peinture  fut  fondée 


PËL 


1398 


PÊN 


à  Milan  Ten  1484  par  Ludovic  le  Maure,  et  placée  sous 
la  direction  de  Léonard  de  Vinci.  Des  institutions  du 
même  genre  furent  créées  à  Florence  vers  1561,  à  Padoue 
en  1710,  à  Bologne  en  1712,  à  Panne  en  1716,  à  Man- 
toue  en  1769,  à  Turin  en  1777.  —  En  France,  VAcctdémie 
de  peinture  et  de  sculptutw,  dont  Tidée  appartient  à  I^e- 
bnin,  fut  autorisée  en  1648,  et  constituée  définitivement 
en  1655.  Le  chancelier  Séguier  et  Mazarin  en  furent  les 
premiers  protecteurs;  parmi  les  membres  primitifs,  on 
distingue  Lebrun,  Lesueur,  Sébastien  Bourdon,  LaHyre; 
Louis  Boullongne,  Sarrasin,  etc.  L*Académie  avait  déjà 
occupé  plusieurs  maisons,  lorsque  Louis  XIV  lui  alloua 
une  pension  et  un  logement  au  Collège  de  France.  Une 
organisation  nouvelle  lui  fut  donnée  par  Colbert  en  1663, 
et  des  modifications  y  furent  encore  apportées  en  1777; 
à  cette  même  époque  on  rétablit  au  Louvre.  Elle  avait  un 
corps  de  dignitaires  comprenant  un  directeur,  un  chan- 
celier, 4  recteurs,  2  adjoints  à  recteur,  16  honoraires 
(dont  8  amateurs  et  6  associés  libres),  12  professeurs  de 
peinture  et  de  sculpture,  6  adjoints  à  professeur,  un  pro- 
fesseur de  géométrie  pour  donner  des  leçons  d'architec- 
ture et  de  perspective,  un  professeur  d'anatomie,  8  con- 
seillers, un  trésorier,  et  un  secrétaire  perpétuel.  Ces  titres 
étaient  conférés  par  l'élection,  excepté  ceux  de  professeur 
de  géométrie  et  d'anatomie,  que  donnait  le  directeur  gé- 
néral des  bâtiments  du  roi.  Quant  au  nombre  des  mem- 
bres, d*où  les  femmes  n'étaient  pas  exclues,  il  était  illi- 
mité, mais  il  ne  s'éleva  pas  au-dessus  de  120  à  130: 
pour  y  être  admis,  il  fallait  présenter  un  morceau  de 
réception^  et  obtenir  le  tiers  des  suffrages.  La  direction 
des  Gobelins,  celle  de  la  manufacture  de  Sèvres,  la  garde 
des  tableaux  du  roi  à  Versailles,  la .  conservation  des 
sculptures  des  maisons  royales,  étaient  confiées  à  des 
Académiciens.  En  1701,  les  statuts  de  l'Académie  furent 
refondus;  mais  le  décret  du  8  août  1793  la  supprima 
avec  toutes  les  autres  Académies.  La  collection  complète 
de  ses  procès-verbaux  depuis  1648  est  conservée  dans  les 
archives  de  l'École  des  Beaux-Arts  (7.  Beacx-Arts  — 
^Académie  des).  V.  Vitet,  VAccuiémie  royale  de  peinture 
et  de  sculpture.  Étude  historique^  Paris,  1861,  in-8°.  — 
Plusieurs  provinces  curent  des  Académies  de  peinture 
aussi  bien  que  Paris  :  nous  citerons  celles  de  Nancy  (171 1), 
de  Toulouse  (1751),  de  Marseille  (1753),  de  Bordeaux 
(  1763),  de  Reims,  de  Dijon  (1767),  de  Pau,  de  Metz,  de 
Clermont-Ferrand,  d'Amiens,  etc.  —  L'Espagne  possède 
une  Académie  de  j^einture  fondée  à  Madrid  en  1752.  On 
en  a  créé  à  Ëd  t)ourg  en  1754,  à  Londres  en  1768,  à 
Copenhague  en  1738,  à  S*-Pétersbourg  en  1757.  L'Alle- 
magne possède  les  Académies  de  Nuremberg  (1662),  de. 
Berlin  (1694),  de  Dresde  (1697),  d'Augsbourg  (1712),  de 
Vienne  (1726),  de  Mayence  et  de  Manheim  (1757),  de 
Stuttgard  (1761),  de  Munich  (1770),  de  Cassel  (1775),  de 
Weimar  (1777),  de  Francfort  (1781),  etc.  B. 

PÉJORATIF.  V.  DiHiNUTiF. 

PÉLASGIQUE  (Religion).  V,  Grecque  (Religion),  et, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire^  le 

mot  P&ASGES. 

PéLASGIQDES  (Laugues).   V,  iNDO-EUROPéEmiES. 

péLASGiQUES  (Monuments).  F.  Cyclopéens  (Murs)  et 
Grecque  (Architecture). 

PÈLERIN  (Le  Voyage  du).  V.  Voyage  do  Pèlerin. 

PÈLERINAGE  (du  latin  pêregrinatio)^  voyage  de  dévo- 
tion que  l'on  fait  à  des  lieux  saints  pour  obtenir  une 
gr&ce  ou  s'acquitter  d'un  vœu.  Au  moyen  &ge,  les  signes 
distinctifs  du  pèlerin  étaient  le  bourdon,  l'escarcelle,  le 
cliapeau  à  larges  bords,  et  le  froc  de  laine  souvent  orné 
de  quelques  coquillages  plats,  attachés  sur  la  poitrine. 
Les  lieux  de  pèlerinage  les  plus  célèbres  pour  les  chré- 
tiens sont  le  Saint  Sépulcre  à  Jérusalem,  les  tombeaux  de 
S^  Pierre  et  de  S^  Paul  à  Rome,  l'église  Notre-Dame  de 
Lorette  dans  les  États  de  l'Église,  le  tombeau  de  S^  Benoit 
au  mont  Cassin,  S'  Jacques  de  Compostelle  en  Espagne, 
le  tombeau  de  S^  Thomas  Becket  à  Cantorbéry,  ceux  de 
S'  Martin  de  Tours,  de  S^*  Radegonde  à  Poitiers,  et  de 
S*«  Geneviève  à  Paris,  le  Mont  S*-Michel,  Notre-Dame- 
de-Bon-Secours  près  de  Rouen,  Notre-Dame-de-Liesse 
(Aisne),  S'«-Anne-d'Auray  (Morbihan),  etc.  Les  Mahomé- 
tans  ont  aussi  leur  pèlerinage  à  La  Mecque  ;  ils  doivent  le 
faire  au  moins  une  fois. 

PELERINE,  sorte  de  grand  collet  rabattu  qui  tombe 
par-dessus  la  robe  des  femmes,  et  couvre  la  poitrine  et 
les  épaules  comme  le  collet  des  pèlerins.  Elle  est  tantôt 
en  étolTe  de  laine,  tantôt  en  linge,  suivant  la  saison.  A 
la  fin  du  xviii*  siècle,  les  hommes  avaient  des  pèlerines 
attachées  à  leurs  redingotes,  et  l'on  finit  par  bp  mettre 
aussi  aux  manteau  Xo 


PÉUGAN.  L'image  de  cet  oiseau  représente  symboli- 
quement la  charité,  le  dévouement  de  soi-même  à  l'in- 
térêt des  autres,  et  la  rédemption  de  l'homme  par  le  sang 
de  J.-C.  On  ne  sait  d'où  vient,  chez  les  Anciens,  la  fable 
que  le  pélican  s'ouvrait  la  poitrine  avec  son  bec  pour 
nourrir  ses  petits  de  son  sang.  Le  pélican  a  été  employé 

Suelquefois  à  la  place  de  l'aigle-pupitre  dans  le  chœuT 
es  églises  d'Angleterre. 

PELISSE  (du  latin  pellis,  p^u,  enveloppe),  manteau 
ou  mantelet  de  femme,  ordinairement  doublé  ou  garni 
de  fourrures.  On  donne  le  même  nom  à  la  veste  galonnéo 
et  bordée  de  fourrures,  que  les  hussards  en  grande  tenue 
laissent  pendre  sur  leurs  épaules  par-dessus  la  veste  or- 
dinaire d'uniforme.  Chez  les  Turcs,  la  pelisse  s'appellt 
cafetan  {V,  ce  mot). 

PELLETERIES  ou  FOURRURES.  Les  peaux  de  bêtes 
ont  été  les  premiers  vêtements  de  l'homme  ;  la  Genèse 
nous  apprend  qu'Adam  et  Eve  s'en  couvrirent.  Les  poètes 
grecs  représentent  leurs  demi-dieux  ou  leurs  héros  en- 
veloppés de  peaux  de  lions,  de  tigres  et  de  loups;  c'était 
aussi  le  costume  des  Amazones.  Les  peuples  du  lÛdi,  ha- 
bitant sous  un  climat  chaud,  adoptèrent  de  préférence 
les  éto£res  légères;  mais  ceux  du  Nord  portèrent  de  tout 
temps  des  vêtements  fourrés.  Les  Barbares  qui  envahirent 
l'Empire  romain  étaient  pour  la  plupart  couverts  de  peaux 
d'ours.  Pendant  le  moyen  ftge,  la  mode  des  fourrures  fut 
très-répandue;  on  en  garnissait  les  manteaux,  les  cottes, 
les  capes,  les  chaperons  et  les  robes  ;  les  seigneurs  por- 
taient des  vêtements  fourrés,  et  l'hermine  resta  long- 
temps en  Occident  ce  qu'elle  est  encore  dans  quelques 
pays  de  l'Orient,  un  signe  de  supériorité  ou  de  comman- 
dement. Il  y  eut  une  telle  fureur  de  porter  des  pelleteries, 
que  des  édits  de  Philippe  le  Bel  en  France  et  de  Henri  II 
en  Angleterre  eurent  pour  but  de  la  réprimer  ;  au 
xiv*  siècle,  l'usage  des  fourrures  fut  interdit  aux  Anglais 
qui  n'avaient  pas  100  liv.  sterl.  de  revenu.  Par  un  ana- 
chronisme commun  dans  ces  temps-là,  les  auteurs  des 
vignettes  des  manuscrits  et  les  peintres  verriers  ont  re- 
présenté avec  des  fourrures  les  anciens  chefs  des  Franks 
et  même  les  personnages  de  l'antiquité.  Les  fourrures 
variaient  suivant  les  conditions  sociales  :  aux  nobles  ap- 

{>artenaient  l'hermine  et  le  vair  ;  aux  bourgeois,  la  martre, 
a  loutre,  l'écureuil  et  l'agneau;  aux  gens  de  la  campagne 
et  aux  moines,  le  lapin,  le  chat,  le  blaireau,  etc.  On 
faisait  même  en  fourrures  les  couvertures  de  lit.  Dès  le 
xii*  siècle  l'art  de  les  teindre  était  connu.  L'abstinence 
de  pelleteries  semblait  être  une  grande  mortification  : 
Philippe-Auguste  et  Richard  Cœur-de-Lion,  à  leur  départ 
pour  la  Croisade,  Jurèrent  de  n'en  plus  porter;  Louis  IX 
fit  de  même,  par  motif  de  piété.  Plusieurs  termes  du  Bla- 
son, fxiir,  gueules,  hermine,  sable,  sinople,  pourpre^ 
furent  empruntés  aux  fourrures. 

PELLETIERS  ou  FOURREURS,  un  des  six  grands  corps 
de  métiers  de  Paris.  Aux  entrées  des  rois  et  des  reines, 
ils  portaient  le  dais  royal.  Leurs  statuts  remontaient  au 
XIII*  siècle. 

PELOTE  (Jeu  de  la),  Jeu  de  paume  auquel  se  livraient, 
le  jour  de  P&ques,  dans  la  cathédrale  d'Auxerre,  les  cha- 
noines et  les  magistrats,  soutane  et  robe  retroussées.  Ce 
singulier  usage  fut  aboli  en  1531. 

PELOTON,  terme  d'Art  militaire  qui  a  eu  diverses  ac- 
ceptions :  au  XVI*  siècle,  quand  on  mélangeait  les  armes 
de  pied  et  de  cheval ,  le  peloton  était  un  groupe  d'une 

3uarantaine  d'arquebusiers,  répartis  entre  les  escadrons 
'hommes  d'armes.  Au  xvii*,  on  appela  demi-quart  de 
manche,  demi-quart  de  rang,  une  fraction  d'infanterie  à 

feu  près  comparable  au  peloton  actuel.  L'ordonnance  de 
766  emploie  le  mot  peloton  pour  signifier,  tantôt  double 
division,  tantôt  demi-division.  Depuis  1774,  il  a  une  si- 
gnification précise  :  le  peloton  est  au  point  de  vue  de  la 
tactique  ce  qu'est  la  compagnie  au  point  de  vue  de  l'ad- 
ministration. Un  bataillon  sur  le  champ  de  bataille  ou 
en  marche  est  divisé  en  pelotons,  égaux  en  force  autant 
que  possible,  ce  qui  n'a  presque  Jamais  lieu  dans  la  divi- 
sion par  compagnies.  Peloton  est  un  terme  de  comman- 
dement, compagnie  n'en  est  jamais  un.  Le  capitaine 
d'une  compagnie  commande  toujours  les  mêmes  hommes; 
celui  d'un  peloton  peut  ne  pas  les  avoir  tous  ou  en  avoir 
un  plus  grand  nombre  sous  ses  ordres,  si  l'équilibre 
tactique  exige  que  des  soldats  soient  admis  ou  retranchés 
momentanément.  Dans  Vécole  de  peloton,  on  s'exerce  à 
la  manœuvre  du  peloton. 
PELTASTES.  i  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 
PELTE.  )      de  Biographie  et  d'Histoire, 

PÉNAL  (Code\  celui  de  nos  Codes  où  sont  contenues 
les  dispositions  répressives  des  crimes,  des  délits  et  des 


PEN 


1399 


PEN 


coQtraTentions.  Il  a  dissipé  Tobscuritë  de  Tancienne  lé-  \ 
gislation,  dont  les  dispositions  compliquées  et  confuses 
laissaient  trop  de  place  à  Parbitraire  du  Juge.  L* Assem- 
blée constituante  avait  posé  un  principe  fécond  en  décr6- 
tant  régalité  de  la  peine  pour  tous.  Un  premier  essai  de 
codification  fut  tenté  en  1701,  par  la  Loi  des  25  sept,  et 
6  oct.,  dont  le  tort  était  de  n*édicter  que  des  peines  fixes, 
que  le  juge  ne  pouvait  abaisser.  Puis  vint  le  Gode  du 
3  brumaire  an  iv  (25  oct.  1795),  sous  le  titre  de  Code  des 
délits  et  des  peines  :  une  part  trop  large  y  était  faite  à 
(instruction  criminelle.  Sous  le  Consulat,  une  commis- 
sion fut  nommée  pour  jeter  les  bases  d*une  codification 
nouvelle  ;  mais  la  discussion  des  articles  fut  interrompue 
en  Tan  xiii  (1805)  pour  ne  reprendre  qu'en  1808.  Le  8  Jan- 
vier fut  présenté  au  Conseil  d*État  le  nouveau  projet, 
divisé  en  deux  codes  distincts,  le  Code  d'Instruction 
crimineile  et  le  Code  pénal.  Ce  dernier  commença  à  être 
discuté  le  i  octobre  1808,  et  Texamen  continua  Jusqu'au 
18  janvier  1810.  Il  fut  mis  en  vigueur  à  partir  du  l'^*  Jan- 
vier 1811,  et  comprend  IV  livres  et  484  articles.  Le  pre- 
mier livre  traite  des  peines  en  matière  criminelle  et 
correctionnelle,  et  de  leurs  effets;  le  second,  des  per- 
sonnes punissables,  excusables  ou  responsables  pour 
crimes  et  délits;  le  troisième,  des  crimes  et  des  délits, 
et  de  leur  punition  ;  le  quatrième,  des  contraventions  de 
police,  et  de  leur  répression.  Le  Code  pénal  subit  quel- 
ques modifications  pendant  la  Restauration;  mais  les 
Ci  us  importantes  sont  le  résultat  de  la  loi  du  28  avril 
832,  qui  en  remania,  pour  les  adoucir,  près  de  80  ar- 
ticles. V.  Bavoux,  Ijeçons  préliminaires  sur  le  Code  pé" 
naly  1821,  in-8<*;  Legraverend,  Traité  de  la  législation 
criminelle  en  France,  revu  par  Duvergier,  1832,  2  vol. 
in-4*;  Carnot,  Commentatre  sur  le  Code  pénal,  2*  édit., 
1836,  2  vol.  in-4»;  Brissot-Warville,  Théorie  des  lois 
erimmelles,  1836,  2  vol.  io-8«;  Rauter,  Traité  théorique 
et  pratique  du  Droit  criminel  français^  1836, 2  vol.  in-8<>; 
Ro^n,  Codes  d^instruction  criminelle  et  pénal  expli- 
ques, 4*  édit,  1849,  2  vol.  in-8<*;  Bonnin,  Commentaire 
du  Code  pénal,  1845,  in-8«;  Chauveau  et  Faustin  Hélie, 
Théorie  du  Code  pénal,  3«  édit.,  1853,  6  vol.  in-8*;  Tré- 
butien.  Cours  élémentaire  de  Droit  criminel,  1854, 2  vol. 
in-8*;  F.  Berriat  Saint-Prix,  Analyse  du  Code  pénal, 
1855,  gr.  in-8*;  Bertauld,  Cours  de  Code  pénal  et  Leçons 
de  législation  criminelle,  2*  édit.,  1850,  in-^«;  A.  Blanche, 
Études  pratiques  sur  le  Code  pénal,  1861,  in-8\    R.  d'E. 

p^AL  (Droit).  V.  DnoiT  cruiinel. 

PÉNALE  (Clause).  V.  Clause. 

PÉNALES  (Colonies).  V.  Colonies,  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d'Histoire. 

PÉNALITÉ ,  système  de  peines  établies  par  les  lois. 
V,  Peike. 

PENCE.  V»  Penny. 

PENCHANTS,  inclinations  du  caractère  à  telles  ou  telles 
actions.  Ils  sont  distincts  des  appétits,  en  ce  qu'ils  vien- 
nent, non  du  corps,  mais  du  cœur,  et  appartiennent  à  la 
vie  morale,  non  à  la  vie  des  sens  ;  puis  des  passions,  en  ce 
quMIs  sont  primitifs  et  ne  s'allument  ni  ne  s'éteignent  au 
courant  de  la  vie,  mais  nous  font  descendre  une  pente 
douce  et  facile.  Ils  sont  inhérents  à  notre  nature,  mais  ne 
dépendent  pas  des  organes  corporels  {V.  Phr6«ologib). 
Les  penchants  nous  poussent  vers  un  but,  mais  sans  nous 
déterminer  fatalement  à  des  actes  nécessaires,  comme  le 
fait  l'instinct  chez  les  brutes.  Pour  y  r^ister,  nous  avons 
la  volonté,  Téducation ,  quelquefois  la  crainte  d'un  mal 
ou  d'un  châtiment. 

PENDAISON,  genre  de  supplice  capital  qui  était  usité 
en  France  avant  1789,  pour  les  condamnés  à  mort,  et  qui 
existe  encore  en  Angleterre,  aux  États-Unis,  et  en  Es- 
pagne. 

PENDENTIF,  terme  d'Architecture.  On  l'applique  : 
1*  dans  une  voûte  sphérique  percée  de  baies  cmtrées, 
aux  parties  qui  se  trouvent  entre  ces  baies  ;  2**  dans 
une  voûte  d'arête,  aux  espaces  compris  dans  les  angles 
qu'elle  forme  à  ses  points  de  naissance;  3*  dans  une  tour 
carrée  que  couronne  une  coupole,  aux  encorbellements 
placés  dans  les  angles,  et  qui  sont  destinés  à  soutenir 
jne  partie  de  la  coupole.  Dans  ce  dernier  cas ,  le  pen- 
lentif  est  formé  par  un  petit  arc,  ou  disposé  en  trompe; 
quelquefois  c'est  un  simple  plan  incliné  :  on  lui  donne 
lussi  les  noms  de  panache  et  de  fourche.  On  peut  citer 
:omme  modèles  de  pendentifs  ceux  des  Invalides  de 
l^aris,  dont  les  surfaces  sont  taillée»  de  sculptures  repré- 
lentant  les  Évangélistes,  et  ceux  du  Panthéon  (S^*^-Genc- 
Tîève),  peints  par  Gérard.  —  Les  pendentifs  de  moderne 
«ont  les  portions  triangulaires  de  voûtes  ogivales  com- 
prises entre  les  arcs-doubleaux,  les  formerets,  et  les  ner- 


vures.—  las  pendentifs  de  Valence  sont  ceux  en  manière 
de  cul-de-four  qui  couvrent,  par  exemple,  les  croisées  des 
églises  S'-Sulpice  et  S*-Roch  à  Paris  ;  leur  nom  vient , 
dit-on,  d'un  monument  funéraire  de  Valence  en  Dauphiné, 
où  l'on  en  prit  le  modèle.  —  Le  mot  pendentif  s'emploie 
aussi  comme  synonyme  de  cul-de-lampe  et  de  clef  pen- 
dante {V.  ces  mots), 

PENDJABI,  dialectp  Indien  dérivé  du  sanscrit,  et  parlé 
dans  le  PendlJàb.  Cest  celui  dans  lequel  sont  écrits  les 
livres  saints  des  Seykhs.  On  en  a  des  Grammaires  par 
Carey  (Serampour,  1812),  et  par  Leach  (Bombay,  1838), 
et  un  Dictionnaire  par  Starkey  (Calcutta,  1850). 

PENDULE,  horloge  de  chambre  ou  de  salon,  qu'on 
place  d'ordinaire  sur  la  cheminée.  Son  nom  lui  vient  de 
ce  que  la  marche  en  est  réglée  par  un  pendule.  Le  mou- 
vement est  enveloppé  d'une  caisse  en  alb&tre,  en  marbre, 
en  bronze,  en  cuivre  doré,  ou  en  ébénisterie,  surmontée 
de  sujets  variés.  Au  xvn*  siècle,  et  même  au  xviii«,  on 
plaçait  souvent  les  pendules  sur  un  pied  ou  console  fixé 
au  mur  de  l'appartement. 

PÉNICHE  (de  l'anglais  pinnace,  second  canot  d'un 
vaisseau),  nom  donné  à  toute  embarcation  de  b&timent  de 
guerre,  généralement  fine  et  légère,  plus  propre  à  aller  à 
la  voile  qu'à  la  rame.  On  emploie  comme  garde-côtes  des 
péniches  bordant  beaucoup  d'avirons,  gréées  comme  un 
lougre,  et  munies  de  pierriers,  parfois  d'un  canon  en 
coursive. 

PÉNITENCE  (du  latin  poenitentia,  repentir),  l'un  des 
Sacrements  de  l'Église  catholique,  celui  par  lequel  le 
prêtre  remet  les  péchés  à  ceux  qui  se  confessent  à  lui.  Il 
embrasse  la  contrition^  la  confession,  Vabsolution,  et  la 
satisfaction  (V.  ces  mots).  Le  tribunal  de  la  pénitence 
est  le  lieu  ou  le  prêtre  reçoit  la  confession  du  pénitent 
On  nomme  Psaumes  de  la  pénitence  sept  psaumes  de 
David  que  l'Église  a  choisis  pour  servir  de  prières  à  ceux 
qui  demandent  à  Dieu  pardon  de  leurs  péchés.  —  La  Pé- 
nitence est  encore  la  peine  expiatoire  que  le  prêtre  im- 
pose an  pénitent  pour  la  satisfaction  des  fautes  dont  il 
l'absout ,  par  exemple,  une  prière,  un  jeûne,  une  aumône, 
un  pèlerinage,  etc.  Les  Juifs  faisaient  pénitence  avec  le 
sac,  la  cendre  et  le  dlice.  L'interdiction ,  VexcommuniF- 
cation,  Vamende  honorable  {V.  ces  mots)^  peuvent  être 
rangées  au  nombre  des  pénitences. 

pàirTENCB  (Canons  de  la).  F.  Canons. 

PÉNITENCERIE ,  tribunal  ecclésiastique  de  la  cour  de 
Rome,  dans  lequel  s'examinent  les  c€U  réservés  au  souve- 
rain pontife,  et  se  délivrent  les  bulles,  gr&ces  et  dispenses 
concernant  la  conscience,  comme  les  dispenses-  de  vie  re- 
ligieuse, de  certains  empêchements  au  mariage,  les  aJ^so- 
lutions  de  censures,  etc.  Il  est  composé  d'un  cardinal  pré- 
sident, appelé  grand  pénitencier,  d'un  auditeur  de  la 
Rote  appelé  régent,  d'un  dataire,  de  3  procureurs  ou  se- 
crétaires, de  2  consulteurs,d'un  officier  c|[ui  signe  et  scelle, 
d'un  correcteur  qui  revise,  et  de  3  écrivains.  Les  pièces 
qu'il  délivre  sont  gratuites,  et  portent  les  mots  pro  Deo 
(pour  Dieu);  elles  ne  sont  pas  remises  à  l'impétrant,  mais 
à  un  prêtre  que  celui-ci  a  choisi ,  et  qui  les  brûle,  aprè» 
l'avoir  confessé  et  absous. 

PÉNITENCIER ,  prêtre  auquel  l'évêque  donne  le  pou- 
vohr  d'absoudre  des  cas  réservés  dans  tout  le  diocèse. 

pÉNrTENCiER,  prisou  OÙ  sout  appliqués  les  différents  sys- 
tèmes de  l'emprisonnement  individuel.  Le  mot  n'est  ap- 
pliqué en  France  qu'aux  prisons  militaires  de  cette  espèce, 
créées  par  ordonnance  du  3  déc.  1832,  telles  que  celles 
de  Lyon,  de  Metz,  de  Besançon,  d'Alger,  et  autrefois  de 
S^-Germain-en-Laye,  où  Ton  envoie  les  condamnés  à 
plus  d'un  an  de  prison.  V.  au  Supplément. 

PÉNITENT,  celui  oui  a  recours  au  sacrement  de  la  Pé- 
nitence, ou  qui  a  quelque  exercice  de  pénitence  à  accom- 
plir. On  donne  le  même  nom  aux  membres  des  confré- 
ries qui  font  profession  de  certaines  pénitences,  et  qui , 
surtout  dans  les  pays  du  Midi,  vont  en  procession  couverts 
d'une  espèce  de  sac  et  d'un  capuchon  ne  laissant  voir  que 
les  yeux. 

PÉNITENTIAIRE  (Système },  système  qui  a  pour  but  de 
prévenir  les  inconvénients  de  l'emprisonnement  commun 
et  de  réformer  les  coupables.  Autrefois  l'incarcération  des 
prisonniers  n'était  qu'un  acte  de  vindicte  publique,  avec 
divers  degrés  de  ch&timent:  aujourd'hui,  on  veut  que 
l'expiation  infligée  par  la  société  ait  le  double  but  de  punir 
et  de  moraliser.  Le  système  d^Aubum ,  appliqué  en  1816 
dans  la  ville  de  ce  nom  aux  États-Unis,  consiste  &  isoler 
les  détenus  dans  des  cellules  pendant  la  nuit,  à  les  faire 
travailler,  manger  et  se  promener  en  commun  pendant  le 
jour,  en  observant  le  silence  le  plus  rigoureux  ;  toute  dis- 
traction, toute  communication  des  prisonniers  par  pa* 


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PEN 


1400 


PEk 


rôles,  par  gestes,  par  regards,  sont  instantanément  pu- 
nies d*an  certain  nombre  de  coups  de  nerf  de  bœuf.  Ce 
système  a  le  tort  d*exposer  le  condamné  à  une  tentation 
continuelle.  Il  a  été  appliqué  en  France  aux  pénitenciers 
militaires.  Le  système  pensylvanien  ou  de  Pliiladelphie, 
diaprés  lequel  on  enfermait  nuit  et  jour  le  prisonnier 
dans  une  cellule  où  n'arrivait  aucun  bruit  du  dehors,  et 
cela  sans  travail,  sans  promenade,  sans  échange  de  pa- 
role ou  de  regard  avec  qui  que  ce  fût,  a  dû  être  aban- 
donné :  au  lieu  de  punir  et  de  moraliser,  il  abrutissait, 
il  rendait  fou ,  il  tuait.  Un  système  mixte  fut  introduit 
dans  les  maisons  centrales  de  France  par  arrêté  ministé- 
riel du  10  mai  1830  :  les  détenus  couchaient  séparément 
dans  des  dortoirs  communs,  éclairés  et  surveillés;  pour 
tout  le  reste,  la  discipline  était  la  même  que  dans  les 
prisons  américaines  :  ce  système  ne  produisit  pas  les 
fruits  qu*on  en  attendait  La  loi  sur  la  réforme  des  pri- 
sons, votée  en  184i,  établit  le  système  celtulaire,  consis- 
tant à  renfermer  les  prisonniers  dans  des  cellules  isolées , 
mais  à  leur  donner  la  distraction  du  travail ,  des  prome- 
nades individuelles,  et  d'un  contact  journalier  avec  les 
employés  de  la  maison  et  avec  les  personnes  honnêtes  du 
dehors  admises  à  les  visiter,  ainsi  qu'une  instruction 
scolaire,  morale  et  religieuse.  On  n'a  appliqué  ce  système 
qu'à  un  petit  nombre  de  prisons,  entre  autres,  celles  de 
la  Roquette  et  de  iMazas  à  Paris.  En  Angleterre,  le  système 
pénitentiaire,  après  avoir  traversé  bien  des  vicissitudes, 
embrasse  ai^ourd'hui  trois  périodes  distinctes  :  1<*  Yem- 
prisonnement  celltUcUref  qm  est  d'un  an  au  plus,  dans 
les  prisons  de  Pen  ton  ville  et  de  Milbank;  le  calme  de 
cette  vie  nouvelle,  le  travail,  les  lectures  choisies,  les 
consolations  et  les  encouragements  du  chapelain,  la  ré- 

fularité  des  exercices,  doivent  transformer  le  condamné; 
°  la  vie  en  commun  dans  des  ateliers  de  travatuc  pu- 
blics, pendant  un  temps  proportionné  à  la  durée  de  la 
peine  entière;  ces  ateliers  sont  dans  la  presqu'île  de 
Portland  (Dorset);  les  travaux  exigeant  une  grande  dé- 
pense de  force,  les  condamnés  reçoivent  une  nourriture 
substantielle,  sont  bien  vêtus  et  confortablement  couchés; 
on  développe  leur  instruction  morale  et  religieuse  par  un 
enseignement  élémentaire,  des  lectures,  des  chants  en 
chœur;  la  nuit,  ils  sont  en  cellule;  3<*  la  transportation 
dans  une  colonie.  Les  femmes  ne  sont  pas  soumises  aux 
travaux  publics,  et  on  ne  transporte  que  celles  auxquelles 
leur  constitution  physique  permet  de  supporter  ce  genre 
do  peine.  Les  enfants  condamnés  à  la  transportation  su- 
bissent l'emprisonnement  cellulaire  et  le  travail  public  à 
Parkhurst,  dans  l'Ile  de  Wight.  V.  Lucas,  Du  système 
pénitentiaire  en  Europe  et  aux  États-Unis,  1828-31, 
3  vol.  in-8«  ;  Blosseville,  Histoire  des  colonies  pénales  de 
V Angleterre  en  Australie,  1831 ,  in-8o;  Aylies,  Du  sys- 
tème pénitentiaire  et  de  ses  conditions  fondamentales , 

1836,  in-8<>;  Marquet-Vasselot.  Examen  historique  et  cri- 
tique des  diverses  théories  pénitentiaires,  1836,  3  vol. 
in-8<^;  Bérenger,  Des  moyens  propres  à  généraiiser  en 
France  le  système  pénitentiaire,  4*  édit.,  1837,  in-8'*,  et 
De  la  répression  pénale,  de  ses  formes,  de  ses  effets,  1855, 
2  vol.  in-8<*;  Julius,  Du  système  pénitentiaire  américain , 

1837,  in-8<^;  Ducpétiaux,  Du  progrès  et  de  Vétat  actuel 
de  la  réforme  pénitentiaire  et  des  institutions  préventives 
aux  États-Unis,  en  France,  en  Suisse,  1838, 3  vol.  in-18; 
Léon  Faucher,  De  la  réforme  des  prisons,  1838,  in-8*»; 
Grillet-Wammy,  Manuel  des  prisons,  ou  Exposé  histo- 
rique, théorique  et  pratique  du  système  pénitentiaire, 

1838,  in-8^;  Alauzet,  Essai  sur  les  peines  et  le  système 
pénitentiaire,  1842,  in-8<^  ;  Allier,  Études  sur  le  système 
pénitentiaire  et  les  sociétés  de  patronage,  1842,  in-8<^; 
fi^umont  et  Tocqueville,  Du  système  pénitentiaire  aux 
États-Unis,  et  de  son  application  en  France,  1832,  in-8'^; 
Lafarelle,  Coup  d'œil  sur  le  régime  répressif  et  péniten" 
tiaire  de  Vancien  et  du  nouveau  monde,  1846,  iaS^  ;  Le- 
pelletier  (de  la  Sarthe),  Système  pénitentiaire,  1854, 
gr.  in-8*'.  V.  aussi  Prisons. 

PÉNITENTIEL,  livre  qui  renferme  les  canons  de  la  pé- 

PENNE  ou  PENNAGE ,  en  termes  de  Blason,  se  dit  des 
plumes  (en  latin  pennœ)  adaptées  à  un  chapeau  sur 
un  écu. 

PENNE,  se  disait,  au  moyen  &ge,  des  créneaux  d'une 
muraille  de  ch&teau ,  et  du  château  même. 

PBNNB,  en  termes  de  Marine,  extrémité  supérieure 
d'une  vergue  à  antenne.  Faire  la  penne,  c'est  apiquer 
Tantenne  de  manière  que  la  partie  inférieure  soit  appli- 
quée au  m&t. 

PENNILUONS,  pièces  de  chant  des  Gallois,  improvi- 
iées  par  le  chanteur  sur  les  modulations  d'un  harpiste. 


PENNING,  monnaie  de  compte  de  Hollande,  valant  le 
6*  du  sou  ou  un  denier. 

PENiNON.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d*  Histoire, 

PENNY,  au  pluriel  pence  (de  l'allemand  pfennig )n 
monnaie  anglaise,  jadis  d'argent,  aujourd'hui  de  cuivre, 
et  qui  vaut  12  centimes  1/2.  Il  en  entre  12  au  schelling, 
et  240  à  la  livre  sterling.  Le  haXf-penny  est  un  demi- 
penny,  et  le  farthing  un  quart  de  penny. 

PÉNOMBRE,  en  termes  de  Peinture,  point  où  l'ombre, 
s'associant  à  la  lumière,  établit  le  passage  du  clair  à 
l'obscur. 

PENON  (pour  pennon)^  sorte  de  girouette  composée 
d'un  b&ton,  garni,  à  sa  partie  supérieure,  de  petites 
tranches  de  liège,  sur  lesquelles  sont  plantées  des  plumes 
qui  indiquent  la  direction  du  vent. 

PENORCON,  espèce  de  pandore  (  V.  ce  mot)  qui  était 
en  usage  au  xvu*  siècle.  Il  avait  un  large  manche  garni 
de  9  cordes. 

PENSÉE.  C'est  tantôt  le  principe  intelligent  lui-même 
(F.  Intelligence),  tantôt  et  plus  souvent  l'acte  dans  le- 
quel il  se  manifeste,  pris  dans  le  sens  le  plus  général ,  et 
sans  acception  d'objet  ni  de  degré.  On  veut  dire  par  là 
que  le  nom  de  pensée  désignera  aussi  bien  un  souvenir 
qu'une  perception  présente ,  un  jugement  qu'une  simple 
conception.  Descartes  va  plus  loin  :  en  donnant  pour 
point  de  départ  à  sa  philosophie,  et  pour  base  à  toute 
certitude,  le  fait  de  l'existence  personnelle,  je  suis,  attesté 
par  la  conscience,  je  pense,  il  est  tout  disposé  à  enve- 
lopper sous  cette  désignation  commune  toutes  les  formes 
de  l'activité  morale,  et  même  k  faire  de  la  pensée  le  fond 
même  de  notre  être  :   «  Qu'est-ce  que  je  suis?  dit-il 
(2«  Médit.)  ;  une  chose  qui  pense.  Qu'est-ce  qu'une  chose 
qui  pense?  C'est  une  chose  qui  doute,  qui  entend,  qui 
conçoit,  qui  affirme,  qui  nie,  qui  veut,  qui  ne  reut  pas, 
qui  imagine  aussi ,  et  qui  sent.  »  Qu'on  dise  que  c'est  le 
même  principe  qui  sent,  pense  et  veut,  à  la  bonne 
heure  ;  mais  c'est  confondre  mal  à  propos  les  différentes 
fonctions  de  ce  principe  que  de  les  ramener  ainsi  à  un 
type  unique.  Toute  science  vit  de  distinctions,  et  les  dis- 
tmctions  les  meilleures  sont  celles  qui  correspondent  le 
plus  exactement  aux  difT^nces  que  présentent  dans  la 
nature  les  phénomènes  ou  groupes  principaux  de  phéno- 
mènes. Or,  quoi  de  plus  différent  qu'une  sensation,  une 
pensée,  une  résolution  volontaire?  La  même  nécessité 
d'analyse  doit  faire  distinguer  dans  la  Pensée,  suivant 
la  nature  des  objets  auxquels  elle  s'applique  et  les  con- 
ditions dans  lesquelles  elle  s'exerce,  les  modes  secondaires 
de  la  Conscience,  de  la  Perception  extérieure,  de  la 
Mémoire ,  de  la  Raison ,  et  les  différentes  fonctions  du 
Raisonnement;  à  un  autre  point  de  vue,  les  opérations 
de  plus  en  plus  compliquées  de  la  simple  Conception,  du 
Jugement  et  du  Raisonnement  (F.  ces  mots).  —  Attribut 
essentiel  de  l'&me  humaine,  la  pensée  a  été,  à  juste  titre, 
considérée  par  les  métaphysiciens  les  plus  exacts,  comme 
un  de  ceux  que  l'on  doit  concevoir  portés  &  la  perfection 
dans  la  nature  divine.  C'est  par  une  exagération  de  ce 
principe,  que,  dans  la  théodicée  péripatéticienne,  on 
suppose  qu'en  Dieu  la  pensée  parfaite  ne  peut  penser 
qu'un  objet  parfait ,  c-à-d.  elle-même  ;  et  c'est  ainsi  qu'il 
faut  expliquer  cette  fameuse  et  bizarre  formule  :  «  La 
pensée  est  la  pensée  de  la  pensée.  »  Bornons-nous  à 
croire  avec  Fénelon  que  a  Dieu,  qui  nous  a  faits  et  qui 
nous  a  donné  l'être  pensant ,  n'aurait  pu  nous  le  donner 
s'il  ne  l'avait  pas.  Il  pense  donc,  et  il  pense  infiniment; 
puisqu'il  a  la  plénitude  de  l'être,  il  faut  qu'il  ait  la  pléni- 
tude de  l'intelligence,  qui  est  une  sorte  d'être.  »  {De 
Vexistençe  de  Dieu,  u*  part.  art.  5).  B — ^e. 

PENSÉES,  nom  donné  à  certains  ouvrages  composé» 
de  réflexions  philosophiques  ou  morales  sur  des  sujets 
détachés.  Outre  les  recueils  qu'on  a  formés  d'extraits  d& 
différoDta  auteurs,  il  existe  quatre  principaux  recueila 
qui  ont  le  titre  de  Pensées,  et  que  nous  ont  laissés  Marc- 
Aurèle,  Pascal ,  Montesquieu,  et  Joubert. 

Les  Pensées  de  Marc-Aurèle  sont  des  réflexions  écrites 
en  grec  au  jour  le  jour,  par  un  prince  qui ,  toute  sa  vie^ 
même  au  milieu  des  préoccupations  dp  pouvoir,  trouva  de 
la  douceur  à  cultiver  la  philosophie.  Le  recueil  qu'il  inti- 
tula :  Pour  lui-même  comprend  12  livres  :  le  l*'  est  une 
énumération  touchante,  dictée  par  la  reconnaissance,  des 
leçons  que  Marc-Aurèle  devait  aux  différents  membres  de 
sa  famille  ou  à  ses  maîtres,  et  des  biens  que  lui  avaient 
accordés  les  Dieux  ;  les  onze  autres  ressemblent  à  nu 
journal  où  cet  empereur,  dans  ses  moments  de  loisir.  s<% 
plut  à  déposer,  sans  beaucoup  d'ordre,  les  pensées  n'\e 
lui  suggéraient  les  événements  de  son  règne  et  se^  lat^ 


PEN 


1401 


PEN 


ditations  assidues.  On  est  saisi  de  surprise  et  comme  de 
vénération,  lorsqu'on  parcourt  ces  entretiens  d'une  &me 
d'élite  avec  elle-même,  et  Ton  ne  sait  qui  le  plus  ad- 
mirer, de  l'homme,  du  philosophe,  ou  du  prince.  L'homme 
se  tient  en  garde  contre  la  haine,  la  colère,  l'impatience 
même,  et  se  rappelle  à  la  mansuétude  envers  tous  ses 
semblables,  qu'il  nomme  des  amis  naturels.  Le  philo- 
sophe parle  tour  k  tour  en  stoïcien  et  en  chrétien  :  stoï- 
cien, il  se  promet  de  ressembler  au  promontoire  contre 
lequel  se  brisent  les  vagues  impuissantes,  ou ,  quand  les 
objets  extérieurs  l'ont  un  instant  troublé  malgré  qu'il  en 
eût,  de  revenir  promptement  à  lui-même  et  de  rétablir 
rharmonie  dans  son  tme\  en  présence  des  ténèbres,  du 
néant ,  du  flux  étemel  de  la  matière  et  du  temps,  il  se 
soutient  par  sa  propre  vertu,  et  attend  sans  impatience 
le  terme  marqué  à  sa  vie,  car  il  sait  que  rien  n'arrive 
qui  ne  soit  dans  les  convenances  de  la  nature  univer- 
selle; il  se  défend  du  découragement  et  de  la  plainte 
dans  les  épreuves;  il  les  accueille  avec  complaisance, 
parce  qu'elles  servent  au  bien  général ,  et  que  ce  qui  sert 
à  l'essaim  sert  aussi  à  l'abeille.  Chrétien  à  son  insu ,  il 
veut  que  l'accomplissement  du  bien  soit  désintéressé; 
pour  lui,  tout  ce  qui  tient  du  corps  est  un  fleuve  qui 
s'écoule,  tout  ce  qui  tient  de  l'&me  n'est  que  songe  et 
fumée,  la  vie  est  un  combat  et  un  exil,  et  la  gloire 
posthume  un  oubli;  la  Justice,  les  actions  utiles  au  genre 
humain,  voilà  ce  qui  a  du  prix;  Tinjustice,  le  mensonge, 
la  recherche  des  voluptés,  la  crainte  des  épreuv&s,  autant 
d'impiétés.  Empereur,  il  se  recommande  la  modération 
et  la  clémence,  la  persévérance  dans  les  desseins  mûre- 
ment étudiés,  le  mépris  de  la  fausse  gloire  et  l'amour  du 
travail ,  la  simplicité  de  cœur  avec  ses  amis,  la  haine  de 
la  flatterie  et  des  délations,  l'équité,  le  respect  du  mé- 
rite, la  modestie  et  la  docilité  de  quelque  part  que  vien- 
nent les  bons  avis,  la  pratique  des  mœurs  anciennes  sans 
ostentation  ni  apparat ,  l'épargne  des  deniers  publics,  le 
iévouement  infatigable  à  la  prospérité  de  tout  l'État. 

Les  Pensées  de  Pascal  sont  les  fragments  ou  |)Iutôt  les 
matériaux  d'un  ^nd  ouvrage  que  le  pieux  solitaire  de 
Port-Royal  méditait  en  l'honneur  et  pour  la  défense  de 
la  religion.  J]  se  proposait  de  confondre  les  ennemis 
:ommuns  des  Jansénistes  et  des  Jésuites,  les  esprits  forts, 
les  sceptiques  et  les  impies.  L'ouvrage  eût  été  didac- 
tique; mais,  pour  ne  perdre  aucun  moyen  d'agir  sur  ses 
lecteurs,.pour  prévenir  la  monotonie  inhérente  aux  écrits 
de  cette  sorte,  Pascal  eût  sans  doute  mis  en  usage  tous 
les  artifices  du  style  :  en  effet,  on  trouve  çà  et  là,  parmi 
les  PenséeSj  des  traits  d'histoire  ancienne  et  moaeme, 
des  dialogues  d'un  tour  singulièrement  vif  et  original , 
une  prosopopée  dont  l'accent  inspiré  rappelle  celle  de 
Lucrèce  ou  la  Nature  gourmande  l'homme  qui  s'effraye  et 
s'indipe  de  mourir  (art.  xn,  p.  175);  en  un  mot,  toute 
une  nche  et  saine  rhétorique.  Quant  à  l'ordonnance  du 
livre,  Pascal  l'avait  fait  connaître  lui-même  dans  un  En- 
tretien dont  nous  possédons  l'abrégé  ;  le  plan  renfermait 
deux  parties  :  1^  peindre  l'homme  en  présence  du  monde 
extérieur,  en  lui-même,  et  dans  la  société,  et,  par  le 
tableau  des  contradictions  de  sa  nature,  lui  inspirer  le 
désir  de  connaître  enfin  qui  il  est,  d'où  il  vient,  et  où  il 
va;  ^  montrer  que  ni  les  philosophies  ni  les  religions 
anciennes  ne  lui  donnent  le  mot  de  l'énigme,  mais  que 
la  religion  chrétienne,  prouvée  par  les  destinées  extraor- 
dinaires du  peuple  Juif ,  par  les  saintes  Écritures,  les  mi- 
racles et  les  prophéties,  par  la  doctrine  et  la  vie  de  J.-G., 
par  les  apôtres,  les  martyrs  et  les  saints,  peut  seule  dis- 
siper l'incertitude  de  son  esprit  et  calmer  les  angoisses 
de  son  &me.  —  Nous  connaissons ,  ]>ar  V  Entretien  avec 
M.  de  Sacy  sur  Êpictite  et  Montaigne,  la  doctrine  de 
Pascal.  Là,  aprto  avoir  exposé  ce  qu'il  considère  comme 
le  côté  solide  ou  ie  côté  faible  de  l'une  et  l'autre  école,  il 
conclut,  en  vrai  Janséniste,  que  la  source  de  leurs  erreurs 
est  «  de  n'avoir  pas  su  que  l'état  de  l'homme  à  présent 
diffère  de  celtii  de  sa  création  ;  de  sorte  que  l'une,  remar- 
quant quelques  traces  de  sa  première  grandeur  et  igno- 
rant sa  corruption,  a  traité  la  nature  comme  saine  et  sans 
besoin  de  réparateur,  au  lieu  que  l'autre,  éprouvant  la 
misère  présente  et  ignorant  la  première  dignité,  traite  la 
nature  comme  nécessairement  infirme  et  irréparable... 
La  doctrine  de  l'Évangile  accorde  seule  ces  contrariétés  : 
car,  tandis  que  les  sages  du  monde  placent  les  contraires 
dans  un  même  sujet ,  la  foi  apprend  à  les  mettre  en  des 
sujets  diflérents,  ce  qu'il  y  a  d'infirme  appartenant  à  la 
nature,  ce  qu'il  y  a  de  puissant  appartenant  à  la  grâce.  » 
L'argumentation  de  Pascsd  tend  à  prouver  que  l'homme, 
•^ndamné  à  l'erreur  par  sa  nature  décnue,  ce  que 
B'aralent  pas  vu  les  Stoïciens,  mais  capable  aussi  de  la 


vérité  par  la  gr&ce,  ce  que  n'a  pas  remarqué  Montaigne, 
doit  s'humilier  pour  obtenir  l'assistance  divine,  et  qu'ainsi 
la  foi  est  l'unique  refuge  où  il  puisse  trouver  une  lumière 
pour  son  espnt  et  une  règle  pour  sa  conduite.  Les  Pen^ 
sées  ne  sont  que  le  développement  de  ce  système.  Pas- 
cal, mettant  l'homme  en  présence  de  la  nature,  entre 
l'infini  et  le  néant,  comme  entre  deux  abîmes,  le  réduit 
à  n'apercevoir  que  quelque  apparence  du  milieu  des 
choses,  dans  un  désespoir  éternel  de  connaître  ni  leur 

Ï principe  ni  leur  fin.  Il  est  vrai  qu'après  avoir  ainsi  jeté 
'homme  comme  un  atome  dans  l'immensité  de  la  na- 
ture, il  le  proclame  supérieur  à  l'univers  par  la  pensée  ; 
mais  c'est  pour  aboutir  à  cette  triste  conclusion  :  s'il  se 
vante.  Je  l'abaisse;  s'il  s'abaisse,  Je  le  vante,  et  le  con- 
tredis toujours,  jusqu'à  ce  qu'il  comprenne  ({u'il  est 
un  monstre  incompréhensible.  Considérez  maintenant 
l'homme  en  lui-même,  avec  ses  dispositions  à  l'orgueil 
et  à  la  vanité  ;  étudiez  la  puissance  de  l'imagination  sur 
sa  conduite,  sur  ses  jugements  et  ses  opinions  ;  observez 
ses  occupations  et  ses  divertissements  ;  examinez  les  di- 
verses facultés  de  son  intelligence  ;  enfin ,  jetez  les  re- 
gards sur  la  société,  et  méditez  sur  les  spectacles  que 
vous  offrent  l'inégalité  des  conditions,  les  lois,  la  justice, 
la  force  et  le  gouvernement;  tout,  selon  Pascal,  vous 
attestera  la  corruption  présente  de  la  nature  humaine,  et 
la  nécessité  de  chercher  en  Dieu,  en  Dieu  seul ,  la  vérité 
et  le  bonheur.  En  vain  rend-il  hommage  à  la  raison  ;  en 
vain  dit-il  quelque  part  qu'elle  nous  commande  plus 
impérieusement  qu'un  maître,  parce  qu'en  désobéissant 
à  l'un  on  est  malheureux,  et  qu'en  désobéissant  à  l'autre 
on  est  un  sot;  il  semble  qu'il  n'établisse  la  puissance  de 
la  raison  que  pour  lui  assurer  le  droit  de  se  démontrer  à 
elle-même  son  insuffisance.  Et  telle  est  sur  ce  point  la 
hardiesse  de  conviction  de  Pascal ,  telle  est  en  cela  sa  res- 
semblance Uvec  Montaigne,  qu'il  a  pu  émre  certaines 
pensées  qui  vont  jusqu'à  blesser  le  sens  commun  et  la 
notion  naturelle  de  la  justice  par  une  apparence  singu- 
lière d'audace  sophistique,  de  déraison,  et  même  d'ini- 
quité. Qu'on  lise  ce  qu'il  dit  des  médecins  et  de  leurs 
bonnets  carrés  (art.  m,  p.  34),  de  l'égalité  des  biens  <^'il 
proclame  Juste  (art.  vi,  p.  74),  de  la  Justice  que  fait  et 
défait  la  mode  (art.  m,  p.  37;  v,  73);  qu'on  le  voie 
mettre  sur  la  même  ligne,  pour  les  poursuivre  de  son 
persiflage,  les  soldats  de  Mahomet ,  les  voleurs,  les  héré- 
tiques, etc.  (art.  vi,  p.  93),  et  approuver  les  erreurs  com- 
munes qui  fixent  l'esprit  des  hommes,  sous  prétexte  qu'il 
ne  leur  est  pas  si  mauvais  d'être  dans  l'erreur  que  dans 
une  curiosité  inquiète  des  choses  qui  leur  échappent 
(  art.  VII ,  p.  107  )  ;  qu'on  l'entende  enfin  s*écrier  que  se 
moquer  de  la  philosophie,  c'est  vraiment  philosopher 
(t&.,  p.  115)  :  et  l'on  conviendra  qu'il  est  difficile  de  con- 
tredire plus  ouvertement  les  inspirations  du  bon  sens, 
au  moins  en  écrit ,  ou  de  toucher  de  plus  près  au  scep- 
ticisme universel.  Seulement ,  tandis  que  Montaigne  s'ar- 
rête à  ce  point,  et  proclame  que  le  doute,  ou,  comme 
il  dit  lui-même,  l'ignorance  et  l'incuriosité  sont  deux 
doux  oreillers  pour  une  tête  bien  faite,  Pascal  suit  son 
chemin  pour  aller  chercher  ailleurs  le  repos  et  la  félicité. 
La  conclusion  de  Montaigne  n'est  plus  ^ue  la  prémisse 
de  Pascal  :  «  Que  sais-Je?  »  Voilà  le  dernier  mot  des  con- 
naissances humaines;  tenons-nous-y,  dit  l'un;  deman- 
dons à  Dieu  la  vérité,  dit  l'autre.  Pascal  était  profondé- 
ment convaincu  de  la  vérité  de  sa  religion,  et  si  sa 
confiance  en  la  raison  fut  quelque  peu  ébranlée  par  lus 
arguments  de  Montaigne,  sa  foi  ne  le  fut  pas.  Mais  comme 
il  composait  son  ouvrage  pour  les  incrédules,  c'est  par  la 
raison,  dont  il  avait  battu  en  brèche  l'autorité  (art.  ni, 
p.  50;  VII,  p.  104;  x,  p.  152),  ju'il  prétendit  les  con- 
fondre, et  il  crut  possible  son  triomphe.  On  ne  peut  le 
nier,  il  y  a,  dans  ses  preuves,  de  quoi  surprendre  et 
forcer  à  la  méditation,  sinon  convaincre  le  sceptique.  Et 
pourtant,  chose  étrange  dans  Pascal  qui  veut  faire  aimer 
la  religion  avant  d'en  établir  le  caractère  divin,  la  sienne 
est  plus  propre  à  troubler  l'àme  et  à  la  terrifier  qu'à 
l'encourager  et  l'affermir.  Y  a-t-il  donc  une  grande  dou- 
ceur à  penser  que  la  justice  envers  les  réprouvés  est 
moins  énorme  que  la  miséricorde  envers  les  élus  (art.  x, 
p.  144),  et  qu'ainsi  l'éternité  des  récompenses  est  plus 
incompréhensible  que  celle  des  châtiments?  la  cœur  et 
la  raison  ne  répugnent-ils  pas  à  croire  qu'il  faille  définir 
la  religion  chrétienne  «  une  religion  contre  nature,  contre 
le  sens  commun,  contre  nos  plaisirs  »  (art.  xi,  p.  170); 
qu'il  faille,  pour  son  salut ,  fuir  la  société  de  ses  sem- 
blables, et  répéter  avec  le  janséniste  :  «  On  mourra  seul , 
il  faut  donc  faire  comme  si  on  était  seul  »  (  art.  xiv, 
p.  188)?  Peutron  admettre  sans  effroi  que  la  grâce,  con- 


PEN 


1402 


PEN 


dition  nécessaire  du  salut,  est  toute  gratuite,  qu*elle 
souffle  où  il  lui  plaît,  et  que  les  impies  peuvent  être  ainsi 
en  peu  de  temps  plus  remplis  de  foi  que  les  croyants,  et 
ceux-ci  au  contraire  tomber  dans  Taveuglement  où  sont 
les  autres?  (art.  ix,  p.  141  ;  cf.  492-03). 

Tel  est  le  système  de  Pascal.  Contrairement  à  Des- 
cartes qui  sépara  nettement  la  religion  de  la  philosophie, 
et  qui  fit  bien,  Pascal  subordonne  la  philosophie  à  la  re- 
ligion, ou  plutôt  à  sa  religion,  au  Jansénisme:  hors  de  là 
point  de  salut,  ni  de  vérité  inébranlable.  Ce  fut  sa  con- 
viction, mais  aussi  son  tourment.  Tandis  que  Descartes, 
pour  avoir  distingué  les  vérités  de  la  raison  des  dogmes 
de  la  foi ,  pour  s'être  enfermé  de  parti  pris  dans  le  do- 
maine de  l'intelligence  pure,  y  gagna  de  pouvoir  se  livrer, 
au  sein  d'une  inaltérable  quiétude,  à  ses  méditations  sur 
l'àme  et  sur  Dieu,  Pascal,  pour  avoir  entrepris  de  prouver 
la  révélation  comme  une  vérité  de  raisonnement,  vécut 
au  milieu  des  angoisses  :  comme  si  ce  n'était  pas  assez, 
pour  agiter  sa  vie»  de  l'incertitude  cruelle  où  le  tenaient 
les  doctrines  jansénistes  sur  son  propre  sort,  il  prit  en 
quelque  façon  charge  d'&mes  ;  il  osa  former  le  dessein  de 
rendre  désormais  le  doute  impossible  en  matière  reli- 
gieuse, et  d'assurer  à  jamais,  par  la  rigueur  de  sa  dé- 
monstration, à  tous  les  hommes  de  bonne  volonté  la  paix 
et  la  sécurité  dans  la  foi.  De  son  argumentation  allait  dé- 
pendre peutrètre  le  bonheur  ou  le  malheur  éternel  de 
quiconque  se  fierait  à  ses  lumières.  De  là  les  efforts  opi- 
niâtres de  sa  pensée,  toujours  active  et  Jamais  satisfaite. 
Quoi  d'étonnant ,  si  sa  vie  fut  un  long  martyre,  et  si  son 
style,  qui  reflète  tous  les  mouvements  de  son  &me,  attei- 
gnit une  désespérante  perfection?  Descartes  avait  intro- 
•duit  dans  notre  idiome  la  Justesse,  la  netteté,  la  lumière; 
Pascal ,  outre  la  force  et  la  rigueur  géométrique,  lui  donna 
l'éclat  et  la  passion.  —  Quoique  toutes  les  pensées  de 
Pascal  aient  rapport  à  la  religion,  cependant  le  plan  quMl 
8*était  tracé  n'était  pas  tellement  étroit  auMl  n'ait  su  y 
Jeter  des  aperçus,  souvent  d'une  originalité  ou  d'une  har- 
diesse extraordinaire,  sur  tous  les  sujets  qui  intéressent 
les  hommes.  Précurseur  de  Bossuet  en  histoire,  dans 
trois  lignes  il  résumait  d'avance  le  Discours  sur  l'histoire 
universelle  (art  xix,  p.  250^.  Précurseur  de  Fénelon  en 
critique,  il  a  donné  l'exemple  de  juger  avec  une  liberté 
respectueuse  les  Anciens  (Fragm.  aun  traité  du  vide, 
p.  436),  et  il  n'a  pas  craint  de  relever  les  fausses  beautés 
de  Cicéron  (art.  vu,  p.  115).  A  demi  précurseur  de  Racine 
<en  ce  qui  touche  les  effets  de  l'amour  (car  Racine  a  peint 
l'amour  surtout  chez  les  femmes),  il  a  écrit  sur  ce  sujet 
des  observations  dont  la  grâce  égale  la  finesse  ou  parfois 
la  profondeur  (Discours  sur  les  pcusions  de  l'amour, 
p.  505).  Précurseur  du  xviii"  siècle  en  politique,  tandis 
que  ses  contemporains  ont  généralement  pour  règle  de 
s'accommoder  à  ce  qui  est  établi,  il  semble  prévoir  déjfi 
les  principes  nouveaux  que  les  publicistes  de  l'&ge  suivant 
feront  prévaloir  (art.  vi,  p.  95^.  Dans  les  incrédules  de 
son  temps,  sa  pénétrante  sagacité  avait  deviné  la  philo- 
sophie sceptique  de  la  génération  prochaine,  et  senti  la 
nécessité  de  tourner  d'avance  contre  elle  tous  ses  coups 
(art.  XXIV,  p.  354). 

Entre  les  Pensées  diverses  de  Montesquieu  et  celles  de 
Pascal ,  tout  diffère  :  l'intention  qui  les  dicte  et  l'impor- 
tance que  leur  assigne  le  dessein  de  l'auteur,  l'esprit  qui 
les  conçoit  et  le  cœur  qui  les  inspire,  la  plume  qui  les 
ôcrit,  les  matières  mêmes  qui  les  fournissent.  Plaçai  mé- 
ditait un  grand  ouvrage  dont  ses  Pensées  sont  les  maté- 
riaux ;  Montesquieu  se  distrait  de  ses  grands  ouvrages  en 
rédigeant  chaque  soir,  par  délassement ,  ses  observations 
de  la  journée.  Pascal  veut  déterminer  le  chrétien  à  laisser 
là  toute  affaire  pour  songer  unic^ement  à  son  salut; 
Montesquieu,  en  dédiant  ses  Pensées  à  son  fils,  lui  pré- 
sente plusieurs  carrières  à  parcourir,  et  lui  permet  l'am- 
bition ,  parce  que  l'ambition ,  bien  dirigée,  est  un  senti- 
ment mis  en  nous  par  Dieu ,  utile  à  la  société,  et  que  la 
sagesse  consiste  à  régler  les  sentiments,  non  à  les  détruire. 
Le  recueil  des  Pensées  de  Montesquieu,  assez  court  d'ail- 
leurs, se  divise  en  huit  chapitres.  Dans  le  1'',  l'auteur  se 
feint  lui-même,  et  l'on  voit  que  Jamais  homme  n'a  vécu 
dans  un  pareil  contentement  de  son  sort  et  de  soi-même, 
mais  que  personne  aussi  n'a  reçu  de  la  nature  une  hu- 
meur mieux  faite  pour  Jouir  de  la  paix  de  l'esprit  et  du 
cœur.  Chaque  matin,  il  revoit  la  lumière  avec  une  sorte 
de  ravissement  qui  lui  dure  tout  le  jour;  il  dort  dès  qu'il 
Mt  au  lit ,  et  il  passe  la  nuit  sans  s'éveiller.  Assez  sen- 
sible pour  éprouver  de  la  Joie,  trop  peu  pour  s'affliger, 
aucun  attachement  ne  lui  a  coûté  à  rompre.  Une  heure 
de  lecture  dissipe  ses  plus  forts  chagrins  ;  amoureux  de 
ramitié,  il  a  conservé  tous  ses  amis,  sauf  un  seul ,  et  il  a 


I  vécu  avec  ses  enfants  comme  avec  des  amis.  Il  n'a  ni 
I  haine  ni  rancune;  cela  détruirait  son  contentement: 
d'ailleurs,  à  la  conscience  légitime  de  sa  supériorité  so 
mêle  un  certain  dédain  pour  les  hommes,  et  l'on  ne  hait 
guère  qui  l'on  méprise.  Telle  est  cependant  son  imper- 
turbable modération  de  sentiment ,  que  nulle  part  il  ne 
se  fait  prendre  en  flagrant  délit  de  vanité;  il  avait,  aa 
reste,  l'Ame  naturellement  grande,  et  il  était  sincère 
quand  il  se  flattait  d'avoir  de  Tamour  pour  le  bien  et 
l'honneur  de  sa  patrie,  et  de  sentir  une  joie  secrète  lors- 
qu'on faisait  quelque  ré^ement  qui  allait  au  bien  com- 
mun. —  Le  2*  chapitre  traite  des  Anciens,  et  le  3'  des 
Modernes.  Grand  admirateur  de  l'antiquité,  Montesquieu 
la  goûte  en  critique  et  la  comprend  en  publiciste.  11  ap- 
partenait à  l'auteur  de  V Esprit  des  lois  de  dire  que,  pour 
avoir  une  Juste  idée  des  mosurs  et  des  lois  des  Grecs,  il 
faut  la  chercher,  non  dans  leurs  histoires,  mais  dans  la 
Rhétorique  d'Aristote  et  la  République  de  Platon.  Il  a  dé- 
passé, dans  ses  Jugements  sur  les  Modernes,  ce  juste-mi- 
lieu qu'il  tient  partout  ailleurs  :  indulgent  à  Texcès  pour 
Crébillon  et  La  Motte,  rivaux  de  Voltaire  en  tragédie,  il 
cède  aux  suggestions  de  la  Jalousie  ou  se  montre  singu- 
lièrement aveugle  quand  il  apprécie  Voltaire  lui-m^me. 
En  revanche,  il  a  été  enchanté  et  attendri  en  lisant  Roi- 
lin ,  et  il  l'appelle  l'abeille  de  la  France.  Vient  ensuite  un 
chapitre  sur  les  grands  hommes  de  France;  on  y  recon- 
naît la  plume  qui  a  écrit  le  livre  De  la  grandeur  et  de  la 
décadence  des  nomains.  De  même  on  retrouve  le  philo- 
sophe du  xvui*  siècle,  mais  sans  les  intempérances  de 
ses  successeurs,  dans  les  réflexions  sur  la  religion,  sur  la 
dévotion,  sur  le  pape  et  sur  les  Jésuites,  etc.  Diderot 
niera  Dieu  :  Montesquieu,  avant  Rousseau,  proclame 
Dieu  et  l'immortalité  de  l'âme.  Une  comparaison  des 
Français  et  des  Anglais,  équitable  d'ailleurs,  rappelle  en- 
suite l'observstear  bienveillant  et  favorablement  prévenu 
de  l'Angleterre.  Enfin,  dans  un  dernier  chapitre,  intitulé 
Variétés,  parce  que  les  Pensées  s'y  succèdent  sans  aucun 
rapport  entre  elles,  il  semble  qu'on  voie  revivre  à  la  fois 
l'homme  avec  son  caractère,  et  l'écrivain  avec  les  parties 
diverses  de  son  riche  et  beau  génie.  —  Les  deux  qualités 
principales  de  Montesquieu ,  la  profondeur  et  Tesprit, 
brillent  autant  dans  ses  Pensées  que  dans  ses  grands 
ouvrages;  malheureusement  aussi  le  raffinement  s'y  est 
glissé  :  il  dit  quelquefois  trop  et  au  delà. 

En  lisant  les  Pensées  de  Joubert,  on  doit  s^  rappeler 
qu'il  ne  fut  que  moraliste  ;  mais  il  le  fut  toute  sa  vie  : 
toujours  il  s'appliqua  et  prit  plaisir  à  exprimer  en  de 
beaux  mots  ses  réflexions  sur  les  arts  et  les  lettres,  sur 
la  politique,  la  religion ,  les  mœurs  des  hommes  de  son 
siècle  et  de  tous  les  temps.  Un  besoin  extraordinaire 
d*exquise  perfection  l'empêcha  de  rien  achever;  mais, 
quel  moyen  de  construire  un  monument ,  lorsqu'on  re- 
(carde  comme  le  plus  beau  triomphe  de  Part  de  mettre  un 
livre  dans  une  page,  une  page  dans  une  phrase,  une 
phrase  dans  un  mot?  Joubert  a  été  au  xix*  siècle  un  type 
original  de  ce  qu'on  appelle  les  délicats  ;  lui-même  an- 
nonçait à  de  Fontanes  qu'il  expirerait  quelque  jour  au 
milieu  d'une  belle  phrase  et  d'une  belle  pensée.  Voyez-le 
décrire  son  cerveau,  et  se  peindre  par  ce  petit  mot  ei- 
pressif  :  «  Mon  &me  chasse  aux  papillons,  et  cette  chasse 
me  tuera,  n  II  porte  la  même  délicatesse 'dans  l'apprécia- 
tion des  beaux-arts.  Élève  de  Diderot,  qui  lui  conimo- 
niqua  sa  hardiesse,  il  corrigea  ce  qu'il  y  avait  d'intem- 
pérant dans  le  goût  de  son  maître  par  un  vif  sentiment 
de  la  beauté  antique.  11  aime  et  comprend  la  Grèce  au- 
tant qu'André  Chénier,  mais  il  est  bien  autrement  pla- 
tonicien et  idéaliste.  Chateaubriand  l'avait  surnommé 
«  un  Platon  à  cœur  de  La  Fontaine.  »  Quoi  d'étonnant 
qu'il  ait  fait  consister  la  poésie  surtout  dans  la  spiri- 
tualité des  idées;  qu'il  appelât  la  lyre  un  instrument 
ailé;  qu'il  voulût  que  la  philosophie  ne  fût  ni  qua- 
drupède, ni  bipède,  mais  portée  sur  des  ailes,  et  chan- 
tante? Bialbeureusement,  un  homme  de  tant  de  goût 
pèche  souvent  par  affectation  :  à  force  de  vouloir  rendra 
exquis  le  sens  commun ,  et  conunun  le  sens  exquis,  Jou- 
bert est  tombé  parfois  dans  la  prétention  et  la  bizarrerie. 
En  sait-on  bien  long  sur  Bernardin  de  Saint-Pierre  et 
Chateaubriand,  quand  il  a  dit  que  «  l'un  écrit  au  clair  de 
lune,  et  l'autre  au  soleil?  »  Au  reste,  la  délicatesse  mo- 
rale égale  chez  lui  la  délicatesse  de  l'esprit  :  la  pudeur, 
la  chasteté,  la  sainteté  sont  choses  dont  il  est  épris,  et. 
lorsqu'il  veut  en  parler,  les  mots  ne  lui  paraissent  Jamat« 
assez  lumineux,  ou ,  si  l'on  peut  s'exprimer  ainsi ,  asseï 
spiritualistes.  Les  sarcasmes  impies  de  Voltaire  le  bles- 
saient, autant  qiie  le  charmaient  ses  saillies  et  ses 
grâces.  De  là  ces  deux. mots  qui  rappellent  le  hideux  stm- 


l' EN 


1403 


PÉO 


rire  dont  a  parlé  Airrrd  de  Musset  :  «  Voltaire  a,  comme 
le  singe,  les  mouvements  charmants  et  les  traits  hideux.  » 
-«  Voltaire  avait  T&me  d*un  singe  et  Tesprit  d*un  ange.  » 
Joubert  était,  en  effet,  chrétien  sincère  ;  après  avoir  res- 
senti, comme  toute  sa  génération,  les  atteintes  du  scep* 
licisme,  il  en  était  sorti  comme  d'un  état  dont  souffraient 
ion  intélli^nce  et  son  cœur.  En  politique,  les  excès  de 
la  Révolution  ayant  donné  un  douloureux  démenti  à  ses 
espérances  et  à  ses  rêves,  il  réclamait  avec  les  sages 
Punité  dans  le  pouvoir,  et  laissait  la  multitude  aimer  la 
multitude  et  la  pluralité  dans  le  gouvernement  des 
hommes.  V,  Maxim  b5ï. 

Les  meilleures  éditions  des  ouvi  a^^s  ci-dessus  analjrsés, 
sont,  pour  les  Pensées  de  Marc-Aurèle,  celles  de  Gataker, 
Londres,  1707,  in-8";  et  de  Schnli,  Slesvvig,  1802,  in-8o; 
il  y  en  a  des  traductions  françaises  par  Dacier,  Paris,  1 601 , 
i  vol.  in-12  ;  par  de  Joly,  Paris,  1 778,  in-S*"  ;  par  M.  A.  Pier- 
ron,  qui  a  fait  mieux  que  ses  devanciers ,  en  profitant  de 
leurs  travaux,  Paris,  1843,  gr.  in-18  ;  —  Pensées  de  Pas^ 
cal,  publiées  dans  leur  texte  atUhentiquef  précédées  d'une 
ét\td$  littéraire  et  accompagnées  d'une  étude  suivie,  par 
M.  E.  Havet,  Paris,  185*2,  in-S»;  —  Pensées  diverses  de 
Montesquieu;  elles  font  partie  de  ses  OEuvres  diverses,  où 
elles  occupent  de  35  à  40  pages  seulement; —  Pensées  de 
Joubert,  dans  le  t.  I"  de  ses  Pensées,  Essais,  Maxi- 
mes, etc.,  Paris,  1850,  S"  édit,  2  vol.  in-8o.        A.  H. 

Ltt  Recueils  de  Pensées  sont  les  macédoines  de  Tes- 
prit;  ils  n'exigent  aucun  travail ,  aucune  réflexion  :  tout, 
on  presque  tout,  est  le  résultat  d*une  improvisation,  d'une 
inspiration  instantanée.  Le  désordre  où  naissent  les  pen- 
sées, le  pèle-méle  où  elles  sont  enregistrées ,  excluent 
toute  idée  de  composition  littéraire;  des  essais  de  classi- 
fication tentés  par  quelques  éditeurs  le  prouvent  de  reste, 
car  ils  sont  toujours  bien  imparfaits  et  indécis»  excepté 
pour  quelques  grandes  idées  générales.  C'est  que  des 
i^nsées  ne  sont  point  un  livre,  mais  seulement  des  ma- 
lu^riaux,  indiqués,  et  pas  même  ébauchés,  d'où  l'on  pour^ 
mit  tirer  une  foule  de  livres  ou  de  traités.  Or,  là  gît  la 
grande  difficulté  :  on  extrait  sans  trop  de  peine  des  pierres 
<i'une  carrière,  mais  en  ffdre  ensuite  un  palais  comme  le 
Imvn  de  Pierre  Lescot ,  une  statue  comme  la  Vénus  de 
Médicis,  c'est  tout  autre  chose.  Les  écrivains  de  Pen- 
nies, s'ils  montrent  la  sagacité,  l'ingéniosité  de  leur 
esprit,  prouvent  en  même  temps  leur  impuissance  à  faire 
un  ouvrage  :  des  aperçus,  ils  en  ont  sur  tout;  mais  le 
cénie  qui  généralise  ou  qui  applique,  qui  compose  ou 
qui  écrit;  cette  suite  dans  les  idées;  cette  vue  de  l'esprit 
fjui  découvre  tous  les  horizons  d'un  sujet,  quelle  que  soit 
<a  grandeur;  cette  force  du  talent  qui  permet  de  les  em- 
iirasser,  de  les  déduire  l'un  après  Tautre  dans  un  ordre 
logique  pour  en  faire  sortir  un  grand  enseignement  utile, 
t'élit  cela  manque  aux  faiseurs  de  Pensées.  Ils  sont  les 
ibeilles  de  leur  propre  esprit;  ils  le  butinent  de  droite 
et  de  gauche,  mais  ils  ne  savent  pas,  comme  l'abeille,  faire 
un  gâteau  de  miel  de  leur  butin.  Ces  réflexions  s'appli- 
quent directement,  mais  avec  quelQ[ues  restrictions  néan- 
moins, aux  recueils  de  Pensées  ci -dessus  analysés.  — 
Pifical  n'est  pas  responsable  de  son  recueil  de  Pensées  : 
c'était  un  commencement  de  matériaux  pour  un  grand 
oavnge  qu*il  méditait,  et  que  Chateaubriand  a  tenté 
d'exécuter  en  partie  dans  son  Génie  du  christianisme. 
Les  amis  de  Pascal,  recueillant  l'informe  amas  de  notes, 
sans  suite  et  sans  ordre,  entassées  pour  le  grand  ouvrage 
dont  il  les  avait  entretenus,  y  trouvèrent  des  choses  si 
sublimes,  qu'ils  finirent,  en  1670,  huit  ans  après  la  mort 
de  Pascal,  par  en  extraire  les  fragments  les  plus  termi- 
nés, et  les  publièrent  sous  le  titre  de  Pensées.  Si  Pascal 
avait  vécu,  nous  n'aurions  pas  ce  recueil,  mais,  à  la  place, 
un  livre  digne  de  toute  la  vipueur  de  son  génie. 

Les  Pensées  de  Montesquieu  sont  plutôt  des  espèces 
de  confidences  autopsychologiques,  si  l'on  peut  employer 
(0  terme,  et  il  ne  faudrait  pas  attacher  plus  d'importance 
qu'il  n'a  voulu  en  mettre  lui-même  à  ce  mince  recueil. 

Nous  appliquons  aux  Pensées  de  Joubert,  quel  que  soit 
leur  mérite  d'ailleurs,  en  tant  que  pensées,  ce  que  nous 
disions  tout  à  l'heure  :  elles  dénotent  complètement  l'im- 
puissance de  faire  un  livre;  cela  est  ici  d'autant  plus 
clair,  que  ni  l'instruction,  ni  le  talent  de  l'écrivain,  ne 
manquèrent  &  Joubert  :  mais  il  n'était  pas  de  ces  esprits 
fermes  et  courageux  qui  savent  édifier  ;  son  tempérament 
et  son  caractère  se  contentaient  d'aperçus,  et  il  n'a  Jamais 
été  au  delà.  Ses  pensées  sont  des  fleurs  charmantes,  qui 
n'ont  Jamais  abouti  à  un  fruit.  —  En  somme,  il  ne  faut 
user  des  recueils  de  Pensées  que  pour  de  courtes  lec- 
tures :  comme  elles  sont  tout  essence  et  toute  substance, 
l'esprit  le  Catigue  vite  dessus;  elles  font  l'effet  du  miroi- 


tage  sur  la  vue:  elles  éblouissent  sans  éclairer.  CD — t. 

PENSION  (du  latin  pendere,  payer),  somme  qu'on 
paye,  à  des  intervalles  périodiques,  pour  être  logé  e!t 
nourri  chez  autrui.  On  donne  le  nom  de  Pensions  Bout' 
geoises  à  des  maisons  où  l'on  ne  donne  même  que  des 
repas  communs  à  heure  fixe.  —  Par  extension,  le  mot 
Pension  désigne  le  prix  payé  pour  la  nourriture,  le  loge- 
ment et  l'instruction  d'un  enfant  dans  une  maison  d'édu- 
cation ;  cette  maison,  quand  elle  n'est  ni  lycée  ni  collège, 
reçoit  aussi  le  nom  de  Pension  ou  Pensionnat,  et  la  per- 
sonne qui  la  dirige  est  dite  maître  ou  maîtresse  de  pen» 
sion  (  V.  Institution  ).  L'élève  qui  y  reste  à  demeure  est 
un  pensionnaire;  l'élève  qui  y  reste  la  Journée  seulement 
et  prend  au  moins  un  re^as  est  un  dimi -pensionnaire. 
—  Une  Pension  alimentaire  est  la  somme  qu'on  paye  à 
une  personne  pour  assurer  son  existence  (  V.  Aliments  ), 
ou  au'un  créancier  est  tenu  de  payer  pour  la  nourriture 
du  débiteur  qu'il  a  fait  incarcérer. 

PENSION ,  somme  annuelle  que  TÉtat  paye  à  certaines 
personnes,  soit  à  titre  de  don  gratuit  ou  d'encouragement 
(écrivains  ou  artistes),  soit  à  titre  de  récompense  natio- 
nale (membres  de  la  Légion  d'honneur,  grands  inventeurs, 
veuves  de  maréchaux,  etc.),  soit  à  titre  de  retraite. 
V.  Retratte  (Pensions  de).  Toute  administration  qui  a 
une  caisse  de  retraite  sert  aussi  des  pensions  à  ses  em- 
ployés et  à  leurs  veuves.  Les  pensions  à  la  charge  de 
l'État  sont  incessibles  et  insaisissables,  sauf  les  cas 
déterminés  par  la  loi  (Arrêté  du  7  thermidor  an  x ,  — 
26  juillet  1802  ;  Ordonnances  des  27  août  1817  et  30  avril 

PENSIONNAIRE.         )  ^  ^    ,  *      n-  * 

PENSUM  }  ^*  ^^  ^^^  ^°^  notre  Dict, 

PENTACÔNTARQUE.  )      ^  ^^^'  «*  d^Histoire. 
PENTACORDE  (du  grec  pente,  cinq,  et  khordè,  corde), 
lyre  à  cinq  cordes.  On  a  donné  le  même  nom  à  un  ordre 
ou  système  de  cinq  sons  ;  c'est  en  ce  sens  que  la  quinte 
a  été  quelquefois  appelée  pentacorde. 
PENTACOSIARQUE.  (     V.  ces  moUdans  notre 

PENTACOSIOMEDIMNES.  i  Dict.  de  Biogr.  et  d'Hist. 
PENTACROSTICHE.  V.  Acrostiche. 
PENTADRACHME,  monnaie  d'argent  de  Grèce,  valant 
5  drachmes,  ou  4  fr.  47  c. 

PENTAMETRE  (Vers) ,  vers  de  5  pieds,  ou  de  5  me- 
sures (du  grec  pente,  cinq,  etmétron,  mesure).  Ce  nom 
s'applique,  chez  les  Anciens  :  1<*  au  vers  ^giaque;  2°  à 
certain  vers  dactylique  dit  éolique;  3°  au  grand  asclé- 
piade;  ¥  à  certains  vers p^onieiu  (F.  Ascl^piade,  Été- 

GIAQDB,  ÉOUQOE,   PÉON).  P. 

PENTARCHIE  (du  grecjMfito',  cinq,  ziarkhè,  gouver- 
nement), forme  de  gouvernement  dans  laquelle  Te  pou- 
voir executif  est  confié  à  cinq  individus.  Tel  a  été,  en 
France,  le  Directoire.  —  On  désigne  quelquefois  par  le 
nom  de  Pentarchi»  la  prépondérance  qu'exercent  en  Eu- 
rope les  cinq  grandes  puissances,  Angleterre,  Autriche, 
France,  Prusse  et  Russie. 

SiSÎ^TO??^*^'  \  y*  CCS  mots  dans  notre  Dictionn. 

PENTECOm       )     ^  Biographie  et  d'Histoire. 

PENTERIS,  navire  à  cinq  rangs  de  rames  chez  les  Aà* 
ciens. 

PENTHÉMIMÈRE,  nom  d^une  césure  des  anciens  Grecs 
(F.  C^sorb),  appelée  par  les  Latins  semiquinaire.  Les 
grammairiens  donnent  fréquemment  au  vers  élégiaque 
(F.  ce  mot)  le  nom  de  double  penthémimère,  d'où  est 
venue  la  manière  dont  on  le  scande  dans  nos  écoles.  Ils 
appellent  aussi  penthémimère  le  vers  archiloquien,  qui 
ressemble  à  une  seconde  partie  du  vers  élégiaque.    P. 

PENTURES ,  bandes  de  fer  forgé  assu)etties  aux  vantaux 
d*une  porte  pour  les  consolider,  et  terminées  par  un  œil 
dans  lequel  entre  le  gond  autour  duquel  tourne  la  porte. 
Les  pentures  furent  un  gracieux  ornement  dans  les  époques 
romano-byzantine  et  ogivale,  où  on  les  couvrit  de  feuil- 
lages, de  fleurs  et  de  fruits.  Les  plus  anciennes  que  l'on 
connaisse  remontent  au  x*  siècle  :  on  en  voit  de  très- 
remarquables  aux  portes  de  l'abbaye  de  S'-Denis,  de 
Notre-Dame  de  Paris,  dans  le  Musée  de  Cluny  à  Paris, 
à  l'hôpital  S^-Joan  d'Angers,  aux  cathédrales  de  Rouen, 
de  Beauvais,  de  Chartres,  de  Laon,  à  la  chapelle  de 
Windsor,  etc.  Vers  le  xv*  siècle,  on  se  mit  à  orner  les 
portes  de  sculptures  en  relief,  et  les  pentures  furent  aban- 
données. On  en  a  repris  l'usage  de  nos  Jours.      E.  L. 

PÉNULE.  V.  PyENULA,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

PÉON  ou  PÊAN,  pied  de  4  syllabes,  composé  d*une 
longue  et  de  trois  brèves ,  la  longue  pouvant  occuper  une 
place  quelconque.  On  en  attribuait  Tinvention  à  un  poète 


PER 


U04 


PER 


du  nom  de  Péon.  Lorsque  la  longue  est  la  l**  syllabe  du 
pied,  il  est  dit  Péon  i»';  Péon  2%  si  elle  est  la  2«,  etc. 
Le  péon  1*''  et  le  péon  A*  sont  les  plus  usités.  Le  péon  1*' 
est  l'équivalent  du  crétique  (-www=-w-);les  péons  2« 
et 4%  dubacchius  C^^^Z^  ^-  -);  lepéon  3%  del'an- 
tibacchius  (w«j— =s  —  w).  Les  tragiques  grecs  ont  com* 
posé  des  vers  péoniens  formés  de  péons  4«"  ;  les  comiques 
employaient  de  préférence  le  péon  i*'.  Les  anciens  rhé- 
teurs enseignaient  les  effets  d*harmonie  que  remploi 
Judicieux  du  péon  !•''  et  du  péon  4"  pouvait  produire  dans 
le  style,  surtout  dans  le  style  oratoire.  K.  VOrator  de 
Cicéron,  lxiv,  215-219;  son  De  oratore^  liv.  3,  xlvii,  183; 
Quintilien,  n,  4.  P. 

PÉOTTE,  chaloupe  vénitienne  très-légère. 

PEPLOS,  PEPLUM  ou  PEPLUS,  espèce  de  surtout 
sans  manches,  d*un  tissi^fin  et  léger,  que  les  femmes  de 
Tancienne  Grèce  portaient  par-dessus  leur  tunique,  et 
qui,  retenu  sur  les  épaules  par  des  agrafes,  descendait 
jusqu'à  la  ceinture  en  formant  deux  pointes  par-devant. 
Il  enveloppait  l'épaule  gauche,  et  laissait  à  découvert  les 
mains  et  Tépaule  droite.  —  On  donnait  le  même  nom  au 
voile  broché  d'or  dont  on  ornait  les  statues  des  déesses. 
Sur  celui  de  Minerve,  à  Athènes,  on  avait  figuré  les  actes 
de  cette  déesse,  de  Jupiter,  et  de  plusieurs  héros  en  re- 
nom. Les  matrones  romaines  offraient  tous  les  cinq  ans 
un  péplos  à  Minerve.  Ce  nom  a  été  appliqué  par  Sophocle 
à  la  tunique  fatale  que  Déjanire  envoya  à  Hercule,  et  par 
Synésius  à  la  robe  triomphale  des  Romains.  B. 

PERCEFORÊT,  un  des  romans  de  la  Table  Ronde. 
Après  avoir  passé  en  revue  les  rois  de  la  Grande-Bre- 
tagne depuis  Brut,  prétendu  petit-fils  d'Énée,  Jusqu'à  un 
certain  Pyr,  contemporain  d'Alexandre  le  Grand,  l'au- 
teur nous  transporte  dans  l'Inde,  où  le  conquérant  macé- 
donien fait  une  promenade  sur  mer.  Une  tempête  étant 
survenue ,  Alexandre  est  Jeté  sur  la  côte  de  la  Grande- 
Bretagne  s  il  donne  les  trônes  d'Angleterre  et  d'Ecosse  à 
deux  de  ses  chevaliers^  Bétis  et  Gadifer.  Bétis  veut  b&tir 
un  palais  et  un  temple  au  vrai  Dieu,  avec  le  bois  d'une 
forêt  enchantée  qi^'habite  le  magicien  Damant:  pour 
accomplir  son  dessein,  il  combat  et  met  à  mort  Damant; 
les  Bretons  lui  donnent  le  nom  de  Perceforét.  Cependant 
Alexandre,  inquiet  du  sort  de  Bétis,  se  met  à  sa  recherche  : 
à  la  suite  de  plusieurs  rencontres  où  il  montre  sa  valeur; 
il  est  blessé,  et  recueilli  dans  le  ch&teau  de  la  belle  Sé- 
bile, dite  la  Damé  du  Lac,  à  laquelle  il  inspire  et  pour 
laquelle  il  éprouve  une  vive  passion.  En  eux  se  mêle  le 
sang  macédonien  à  celui  des  rois  bretons,  d'où  doit  naître 
un  Jour  Arthur.  Alexandre  rejoint  ensuite  Perceforêt,  et 
alors  commence  une  longue  série  de  guerres  contre  la 
famille  de  Damant,  et  ceux  des  Bretons  qui  n'avaient  pas 
^  encore  fait  leur  soumission.  Quand  la  pacification  de  llle 
est  complète,  et  avant  qu'Alexandre  se  rende  à  Babylone, 
Perceforêt  fonde  un  ordre  du  Franc  Palais,  et  donne  un 
ma|;nifique  tournoi.  Ici  le  roman  est  véritablement  achevé; 
mais  il  a  reçu  un  appendice  mal  ajusté.  Douze  chevaJiers 
de  l'ordre  nouveau  offrent  leurs  hommages  aux  douze 
nièces  du  vieil  ermite  Pergamon,  qui  était  venu  en 
Grande-Bretagne  avec  Brut  et  les  Troyens.  Pergamon  a 
encore  douze  neveux,  tous  chevaliers,  dont  les  aventures 
se  combinent  d'une  façon  assez  bizarre.  Dans  cette  se- 
conde partie  du  roman ,  il  est  question  de  la  conquête 
de  l'Angleterre  par  J.  César.  On  y  voit  aussi  Gadifer  et 
Perceforêt  achever  paisiblement  leur  règne  :  le  dernier 
arrive  à  une  longue  vieillesse  (400  ans  environ),  car  il 
est  instruit  selon  la  loi  chrétienne,  et  meurt  entre  les 
bras  d'un  évêque  issu  de  Joseph  d'Arimathie. 

PERCEPTEUR ,  agent  de  l'administration  des  Finances, 

3ui  exige  directement  du  contribuable  les  sommes  par  lui 
ues,  et  les  verse  entre  les  mains  du  receveur  particu- 
lier. Il  fait  parvenir  aux  contribuables  les  avertissements 
de  payement.  Pour  compléter  le  recouvrement  des  contri- 
butions de  chaque  exercice,  il  lui  est  accordé  un  délai 
fixé  au  30  novembre  de  l'année  qui  suit  celle  de  cet  exer- 
cice. Il  peut  être  tenu  de  faire  ses  versements  chez  le  re- 
ceveur tous  les  dix  jours.  Les  percepteurs  sont  nommés 
par  le  Ministre ,  et  fournissent  un  cautionnement  égal 
au  12*  du  montant  des  contributions  qu'ils  recouvrent; 
ils  ont  une  remise  de  2  centimes  par  franc.  Les  com- 
munes importantes  ont  an  ou  plusieurs  percepteurs  ;  dans 
beaucoup  de  cas,  il  n'y  a  qu'un  percepteur  pour  plusieurs 
communes.  F.  Durieu,  Formulaire  de  la  comptabilité 
des  percepteurs  et  des  receveurs,  1842,  in-8%  et  Manud 
des-percevteurs  et  des  receveurs  des  communes,  in-i2. 

PERCEPTION,  mode  et  fonction  de  l'intelligence;  fa- 
culté de  connaître  appliquée  aux  phénomènes.  La  Per- 
ception, dans  le  sens  le  plus  étendu  de  ce  mot,  embrasse 


la  Perception  des  faits  intellectuels  et  moraux.  Percep- 
tion intérieure ,  Conscience  ou  Sens  intime  (  V.  Cox- 
scienge),  et  la  Perception  des  phénomènes  physiques  ou 
Perception  ea>térieure,  dont  nous  nous  occupons  ici  exclu- 
sivement. 

La  Perception  extérieure  est  un  fait  complexe  dans 
lequel  l'homme  physique  et  l'homme  moral  sont  égale- 
ment intéressés  ;  mais  comme  nous  n'en  voulons  faire  ici 
que  l'histoire  philosophique,  nous  ne  parlerons  des  phé- 
nomènes organiques  que  pour  fixer  exactement  la  limite 
où  ils  s'arrêtent  et  font  place  aux  phénomènes  intellec- 
tuels. La  Conscience  marque  cette  hmite.  Tous  les  anté- 
cédents de  la  Perception  que  la  science  est  parvenue  à 
connaître  par  d'autres  moyens,  impression  faite  par  les 
objets  sur  les  i^parells  organiques  qui  correspondent  soi 
différents  sens,  transmission  de  cette  impression  par  les 
nerfs  au  cerveau,  sont  aatant  de  faits  que  la  Conscience 
ignore,  dans  lesquels  elle  n*a  rien  à  voir,  qui  sont  les 
conditions  de  la  Perception,  mais  qui  n'en  font  pas  partie 
intégrante,  si ,  par  Perception,  l'on  entend  le  phénomène 
intellectuel.  Mais,  en  vertu  des  mystérieuses  lois  de  l'union 
du  physique  et  du  moral,  une  fois  que  l'impression  or- 
ganique a  été  portée  jusqu'au  centre  nerveux,  cette  im- 
pression venant  à  changer  de  nature,  ou,  pour  mieui 
dire,  donnant  lieu  à  une  impression  d'une  autre  nature, 
l'intelligence  se  trouve  avertie  de  la  présence  des  objets, 
et  informée  d'une  manière  plus  ou  moins  complète  de 
leur  existence  et  de  leurs  propriétés.  En  effet,  toutes  les 
qualités  des  objets  (  Vr  QuAurés  paeinëRES  et  QuAun^ 
secondes)  non-seulement  ne  produisent,  ni  sur  les  orga- 
nes, ni  sur  l'esprit,  des  impressions  semblables  (  V,  Seks  ), 
mais  encore  elles  ne  nous  instruisent,  ni  au  même  titre, 
ni  au  môme  degré,  de  leur  existence.  Tantôt  nous  sommes 
simplement  affectés  d'une  modification  interne,  et  cette 
disposition  subjective,  perçue  par  la  Conscience,  porte  le 
nom  de  Sensation  (  K.  ce  mot).  Tantôt  à  la  sensation  se 
joint  la  Perception  proprement  dite,  par  laquelle  noos 
sommes  directement  informés  de  l'existence  et  de  la  pré- 
sence d'un  corps  différent  de  nous-mêmes.  Il  y  a  Sensa- 
tion et  Perception  tout  à  la  fois,  et,  par  suite,  connais- 
sance immédiate  de  l'extérieur  et  du  corporel ,  lorsque 
nous  touchons;  car  alors,  en  même  temps  que  nous 
éprouvons,  au  contact  du  corps,  une  sensation  de  ré- 
sistance plus  ou  moins  forte,  de  chaleur  ou  de  froid,  etc., 
c'est  bien  réellement  hors  de  nous  que  nous  percevons 
son  étendue  et  sa  solidité.  La  Perception  proprement  dite 
fait  défaut,  lorsque  nous  sentons  une  odeur  ou  que  noos 
entendons  un  son;  seulement,  la  nécessité  d'assigner 
une  cause  à  la  modification  que  nous  éprouvons ,  l'habi- 
tude d'exercer  à  la  fois  plusieurs  sens  et  d'en  associer  le5 
données  respectives,  les  relations  observées  entre  les  im- 
pressions et  la  prépence  de  certains  objets,  nous  appren- 
nent bien  vite  à  localiser  dans  les  corps  en  général  et  dans 
certains  corps  en  particulier  les  causes  inconnues  de  nos 
sensations,  et  à  conclure  de  ces  dernières,  par  une  induc- 
tion si  rapide  qu'elle  en  devient  insaisissable,  la  présence 
de  tel  ou  tel  corps,  alors  môme  que  nous  ne  le  perce- 
vrions pas  autrement.  Grâce  à  cette  espèce  d'éducation 
mutuelle,  les  sens  peuvent  jusqu'à  un  certain  point  se 
substituer  les  uns  aux  autres  :  par  le  bruit,  nous  jugeons 
de  la  distance,  du  mouvement,  du  volume  des  corps;  par 
l'odeur  et  la  saveur,  de  leur  nature  intime;  par  la  vue,  de 
leur  solidité,  de  leur  température,  etc.,  et  cela  nous 
épargne  bien  du  temps  et  bien  des  expériences.  On  ap- 
pelle Perceptions  acquises,  par  opposition  aux  Percep- 
tions  naturelles  et  directes,  ces  jugements  indirects, 
opérations  complexes,  mais  rapides  et  rendues  faciles  par 
la  pratique.  Les  perceptions  naturelles  de  la  vue  ont  pour 
objet  l'étendue  plane,  la  grandeur  apparente,  la  figure 
perspective,  la  couleur;  ses  perceptions  acquises  ont  pour 
objet  leur  volume  et  leur  distance,  leur  grandeur  et  leur 
figure  réelle,  toutes  choses  qui,  directement,  relèvent 
du  sens  du  toucher. 

Les  perceptions  proprement  dites  noua  faisant  seules 
connaître  le  dehors,  confondre  la  Perception  avec  la  Sen- 
sation, réduire  à  celle-ci  la  Perception  tout  entière,  et, 
à  plus  forte  raison,  toutes  les  opérations  de  l'Intelligence, 
comme  l'a  fait  expressément  Condillac,  c'est  rompre,  par 
un  procédé  analogue  à  celui  de  l'Idéalisme  {V.ce  mot)^ 
toute  communication  entre  l'esprit  et  les  objets  exté- 
rieurs. Le  rôle  que  les  uns  font  jouer  à  l'idée,  les  autres 
le  font  Jouer  à  la  sensation  ;  voilà  toute  la  différence. 
La  sensation  est  fort  différente  de  Tidée,  de  nature  et  d'ori- 
gine ;  mais  l'une  et  l'autre  s'interposent  également  entre 
l'esprit  et  les  objets,  et  le  sensualisme  de  Condillac,  poussé 
à  ses  conséquences  logiques,  nous  laisse  tout  aussi  igno- 


PER 


1405 


PÈR 


rants  da  monde  physique  que  Tidéalisme  cartésien. 
On  peut  analyser  la  Perception,  en  décrire  les  diffé- 
rentes phases,  en  signaler  les  éléments  variés  ;  mais  on 
ne  Texplique  pas,  en  ce  sens  qu*on  ne  montre  pas  com- 
ment les  corps  ou  les  propriétés  des  corps  agissent  sur 
Tesprit,  comment  un  phénomène  physique  détermine  un 
phénomène  intellectuel.  Des  systèmes  qui  ont  pris  à  tâche 
d'apporter  cette  explication,  impossible  dans  l'état  actuel 
(le  nos  connaissances,  les  uns,  fondés  sur  des  considéra- 
tions toutes  physiques,  n'ont  pas  pénétré  jusqu'à  la  partie 
itiieJiectuelle  du  phénomène  ;  les  autres,  qui  se  rattachent 
à  la  grande  famille  de  l'idéalisme,  en  créant  sous  le  nom 
à'Idm  différents  intermédiaires  entre  Tesprit  et  les  corps, 
ont  déplacé  la  difficulté  sans  la  résoudre,  et,  parfois, 
Tont  doublée.  La  Perception ,  comme  la  Conscience ,  la 
Mémoire  et  la  Raison,  est  une  fonction  primitive  de  Tin- 
telligence,  dont  nous  recueillons  le  bénéfice  sans  en  pouvoir 
connaître  les  plus  intimes  ressorts.  «  L*esprit  de  l'homme, 
<  dit  Fénelon,  porte  en  lui  de  quoi  s'étonner  et  se  sur- 
■  passer  infiniment  lui-même.  » 

Le  nom  de  Perception,  comme  celui  de  la  plupart  des 
modes  de  l'intelligence,  s'applique,  suivant  les  circon- 
stances, tantôt  à  la  faculté  de  percevoir,  tantôt  à  l'opéra- 
tion de  cette  faculté,  tantôt  enfin  au  résultat  de  cette 
opération.  V.  Malebranche,  Recherche  de  la  vérité,  1.  I, 
des  Sens;  Locke,  Essais  sur  l'Entendement  ,1.  II;  Leib- 
niz, iVot^t^eaua^Es^aû^urrj^nfffmfem^ntyL  II;  Condillac, 
Traité  des  Sensations  ;  Reid,  Recherches  sur  V  Entende- 
ment humain,  et  Essais  sur  les  Facultés  de  l'Esprit  hu- 
main, Essai  il;  Dugald  Stewart,  Éléments  de  la  Philo- 
sophie de  l'Esprit  humain,  ch.  I,  et  Essais  philosophiques, 
letll.  B  — E. 

pERCEPTiozi,  terme  qui,  dans  la  philosophie  de  Leibniz , 
désigne  «  l'état  passager  qui  enveloppe  et  représente  une 
multitude  dans  l'unité  ou  dans  la  substance  simple,  » 
c-à-d.  tout  changement  produit  dans  les  monades  par 
leur  activité  interne,  et  en  rapport  avec  le  milieu  dans 
lequel  elles  sont  placées.  La  Perception  est  le  fait  de 
toutes  les  substances  simples,  corporelles  ou  spirituelles, 
et  diffère  en  cela  de  VAperception^  réservée  aux  âmes  rai- 
sonnables, et  qui  est  la  conscience  qu'elles  ont  de  leurs 
Perceptions.  B — e. 

pEiicEPTiOFf,  recette  ou  recouvrement  de  deniers,  de 
fruits,  de  revenus,  d'impositions  ;  —  emploi  de  percep- 
teur (r.c«  mot)» 

PERCEVAL  ou  PARDYAL  LE  GALLOIS ,  roman  du 
XII*  siècle.  Perceval,  fils  d'un  illustre  seigneur  du  pays 
de  Galles,  n'avait  que  deux  ans  quand  il  perdit  son  père 
et  ses  frères,  tués  dans  des  tournois;  sa  mère  se  retira 
avec  lui  dans  une  forêt ,  avec  le  dessein  de  l'élever  dans 
rignorance  de  la  cheviderie.  Mais  bientôt  le  Jeune  Per- 
cerai rencontre  deux  chevaliers,  les  interroge  sur  leur 
manière  de  vivre ,  et  déclare  à  sa  mère  qu'il  veut  suivre 
Aussi  le  métier  des  armes.  Il  part ,  et ,  après  quelques 
exploits,  il  obtient  l'ordre  de  chevalerie.  Il  arrive  chez  le 
iDi  Peschéor  ou  Pécheur,  qui  était  malade  des  suites  de 
plusieurs  blessures,  et  qui  ne  pouvait  être  guéri  que 
lorsqu'on  jeune  chevalier  lui  aurait  fait  diverses  ques- 
tions au  sujet  d'une  lance,  d'un  plat  et  d'un  tailloir  qu'il 
possédait  POTceval  voit  ces  objets,  mais  s'éloigne  sans 
faire  aucune  question  &  son  hôte.  Dans  la  suite,  ayant 
appris  que  le  roi  Pêcheur  est  son  oncle,  il  entreprend  de 
reut)uver  son  ch&teau;  il  n'y  arrive  qu'après  de  nom- 
breuses aventures.  Le  roi  Pêcheur  est  guéri  ;  mais  il  était 
vieux.  Perceval  lui  succède  bientôt,  règne  sagement  du- 
rant quelques  années,  et  se  retire  enfin  dans  un  ermi- 
^1  emportant  le  tailloir,  la  lance  et  le  plat  merveilleux 
qui  n'était  autre  que  le  saint  GraaJ  (F.  ce  mot).  Le  jour 
de  sa  mort,  tous  ces  objets  furent  enlevés  au  ciel.  —  Il 
existe  trois  manuscrits  de  ce  poëme,  deux  à  la  Biblio- 
thèque nationale  de  Paris,  et  le  3*  à  la  bibliothèque  de 
I^Arsenal.  Il  n'est  pas  tout  entier  de  Chrestien  de  Troyes  : 
Sautiers  de  Denet,  et,  après  lui ,  Manessier,  le  complé- 
lèrent  ou  y  ajoutèrent  de  nouveaux  épisodes.  On  en  a 
(ait  au  XV*  siècle  une  traduction  en  prose,  imprimée  à 
(^aris  en  1530.  Nous  avons  un  poëme  épique  allemand  de 
?arcival,  composé  de  1205  à  1215  par  Wolfram  d'Ës- 
tiienbach  Cet  auteur  parle  du  Parceval  de  Chrestien  de 
Troyes  comme  non  terminé;  il  dit  ne  s'en  être  point 
icrvi ,  parce  qu'il  en  connaissait  un  autre  dont  Chrestien 
ivait  fait  usage  librement ,  et  qui  avait  été  composé  par 
Kyot  ou  Guyot ,  romancier  provençal.  V,  V Histoire  litté- 
raire de  la  France,  U  xv  ;  G.-A.  Heinrîch ,  Le  Parcival 
de  Wolfram  d'Eschenbach  et  la  légende  du  S^  Graal, 
Paris,  1855,  in-8*.  H.  D. 

PERCHES,  ancien  nom  des  colonnettes  adossées  aux 


piliers  des  nefs,  et  qui,  partant  du  sol,  filent  jusqu'à  ta 
naissance  des  maltresses  voûtes,  et  reçoivent,  souvent  sur 
un  petit  chapiteau,  la  retombée  de  leurs  arcs-doubleaux 
et  de  leurs  croisées  d'ogives. 

PERDUELLION.  F.  notre  Dict,  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

PÈRE ,  nom  que  porte  l'homme  par  rapport  à  l'enfant 
qu'il  a  engendre.  Celui-ci  a  pour  grand-pere  le  père  do 
son  père,  lequel  se  nomme  aussi  aïeul  paternel ,  et  qui 
est  son  parent  au  2*  degré  dans  la  ligne  ascendante.  Dans 
TAnticTuité,  le  père  possédait  sur  toute  la  famille  une  au- 
torité oien  autrement  étendue  que  chez  les  Modernes.  Il 
eut ,  en  beaucoup  de  pays,  un  droit  de  vie  et  de  mort  sur 
sa  femme  et  ses  enfants.  La  loi  de  Moïse  apporta  quel- 
ques restrictions  à  cette  puissance  paternelle  :  le  père  ne 
devait  voir  dans  sa  femme  qu'une  égale  et  une  com- 
pagne ;  il  lui  était  interdit  de  mettre  à  mort  ses  enfants, 
mais  il  pouvait  les  vendre,  les  garçons  jusqu'à  Tàge  de 
14  ans,  les  filles  jusqu'à  12  :  seulement  il  fallait  <}u'il  y 
fût  contraint  par  l'inexorable  nécessité  de  vivre,  et  il  était 
tenu  de  consacrer  à  leur  rachat  les  premiers  biens  dont 
il  pouvait  disposer.  A  Rome,  la  puissance  du  père  fut 
illimitée  :  il  était  le  maître  absolu  de  sa  femme  et  de  ses 
enfants,  tout  aussi  bien  que  de  ses  esclaves;  originaire- 
ment, et  avant  les  tempéraments  que  le  progrès  des 
mœurs  apporta  aux  antiques  usages,  il  lui  était  loisible, 
sans  aucune  forme  légale,  sans  exprimer  ses  motifs,  de 
se  séparer  de  sa  femme,  et  d'en  épouser  une  autre  ;  il 
pouvait  la  tuer,  si  elle  avait  dérobé  les  clefs  de  la  mai- 
son, ou  bu  du  vin.  S'il  lui  naît  un  fils,  on  le  dépose 
à  ses  pieds  :  le  relever  de  terre,  c'est  l'accepter  et  lui 
donner  la  vie;  le  laisser  à  terre,  c'est  le  condamner,  et 
l'enfant,  déposé  à  quelque  carrefour,  y  mourra  si  la  pitié 
ne  le  recueille.  L'autorité  du  père  ne  finissait  qu'avec  sa 
vie ,  ou  par  la  perte  du  titre  de  citoyen  ;  et  il  l'exerçait , 
non-seulement  sur  ses  propres  enfants,  mais  sur  toute 
leur  descendance.  Ni  l'<^e,  ni  le  mariage,  ni  les  plus 
hautes  fonctions  dans  l'Etat,  ne  pouvaient  soustraire  le 
fils  à  l'autorité  paternelle.  Le  père  avait  droit  de  pro- 
priété et,  par  conséquent,  de  vente  sur  tous  les  membres 
de  la  famille,  sur  leur  personne  comme  sur  leurs  biens. 
—  Tout  le  titre  ix  du  Code  Napoléon  est  relatif  à  la  puis- 
sance paternelle.  L'enfant  doit ,  à  tout  âge,  honneur  et 
respect  à  ses  père  et  mère;  mais  les  droits  que  confère  la 
puissance  paternelle  sont  plus  ou  moins  étendus,  suivant 
que  les  enfants  sont  mineurs,  majeurs,  ou  mineurs 
émancipés.  Sur  l'enfant  majeur  ou  mineur  émancipé ,  la 
puissance  paternelle  ne  s'exerce  que  par  des  conseils  ;  sur 
l'enfant  mineur,  elle  se  manifeste  par  un  droit  relatif  à 
la  personne  ou  droit  de  correction  (V.  cemot)^  et  par  un 
droit  relatif  aux  biens,  c-à-d.  le  droit  de  jouissance  ou 
usufruit ,  sous  certaines  conditions  d'entretien  et  d'édu- 
cation. Les  enfants  ne  peuvent  quitter  la  maison  pater- 
nelle sans  la  permission  de  leur  père,  si  ce  n'est  à  20  ans, 
pour  enrôlement  volontaire.  Le  consentement  des  père 
et  mère  est  nécessaire  aux  enfants  pour  contracter  ma- 
riage (V.  Mariage).  La  tutelle  des  enfants  mineurs,  après 
la  dissolution  du  mariage,  appartient  de  plein  droit  au 
survivant  des  père  et  mère;  le  père  peut  nommer  à  la 
mère  survivante  un  Conseil,  sans  l'avis  duquel  elle  ne 
peut  faire  aucun  acte  de  tutelle  (V.  Tutelle).  Dans  notre 
ancien  Droit,  les  père  et  mère  avaient  le  droit  de  déshé- 
riter les  enfants  :  aujourd'hui ,  les  libéralités  par  actes 
entre-vifs  ou  par  testament  ne  sont  permises  que  sous 
certaines  restrictions  et  réserves,  et  le  père  peut  seule- 
ment avantager  tel  de  ses  enfants  ou  le  priver  d'une  part 
de  sa  succession.  Le  père  a  droit  à  des  aliments  de  la  part 
de  ses  enfants,  s'il  est  dans  le  besoin  (  V,  Aliments  ).  De 
son  côté,  il  leur  doit  l'éducation  ;  mais  sous  ce  mot  on  ne 
comprend  point  l'établissement  par  mariage  ou  autre- 
ment, et  l'enfant  ne  peut  exercer  d'action  à  cet  égard 
contre  ses  père  et  mère.  F.  Chardon,  Traité  des  trois 
puissances,  paternelle,  maritale  et  tutélaire,  3  vol.  in-8<*  ; 
Chrestien  de  Poly,  Essai  sur  la  puissance  paternelle, 
1820,  2  vol.  in-i^;  Viaud,  De  la  puissance  maritale, 
1855,  in-8«. 

PÈRE  (Abbaye  de  saint-),  à  2  kilom.  de  Vézelay  (Yonne). 
Cette  église  est  précédée  d'un  vestibule  ou  narthex,  bâti 
au  xm*  siècle,  et  reconstruit  en  partie  au  xiv"  et  au  xv*. 
Trois  arcades  ogivales  occupent  la  partie  inférieure  de  ce 
porche:  celle  du  milieu,  qui  sert  d'entrée,  a  des  pieds- 
droits  formés  de  colonnettes,  avec  stylobates  délicate- 
ment sculptés,  chapiteaux  historiés,  voussure  et  tympan 
remplis  de  figurines  abritées  sous  des  dais;  les  deux 
autres,  moins  élevées,  sont  de  fausses  portes,  en  partie 
murées.  Des  pilastres  surmontés  d'aiguilles  ou  pinacles 
à  crochets  séparent  ces  arcades  et  se  réunissent,  à  la 


fÈR 


1406 


PÉR 


naissance  da  toit,  i>ar  une  galerie  évidée  à  jour.  Des 
Biches  pratiquées  dans  ces  pilastres  sont  vides  de  leurs 
statues.  Le  porche  est  éclairé  sur  chaaue  flanc  par  deui 
(Oiuides  fenêtres  ogivales.  A  rextréoiité  de  son  toit ,  se 
développe  une  rose  circonscrite  dans  une  vaste  arcade 
gothique,  aujourd'hui  bouchée,  et  correspondant  à  la  nef 
de  réglise  :  elle  est  surmontée  d*un  fronton  triangulaire, 
décoré  par  iO  statues  disposées  en  groupe  pyramidal.  Au 
fond  et  sur  la  gauche  du  porche,  est  un  beau  clocher,  de 
forme  carrée  pour  les  deux  premiers  étages,  octogone  au 
troisième,  et  terminé  par  une  flèche  en  ardoise; il  est 
orné,  sur  chaque  face,  de  colonnettes  annelées  et  accou- 
plées deux  à  deux,  et  percé,  dans  les  entre-colonnements, 
de  longues  ogives  trilobées,  partagées  en  deux  segments 
par  un  meneau  vertical.  L*abbaye  de  Sûnt-Père  a  la 
forme  d'une  croix  latine:  sa  longueur  dans  œuvre,  y 
compris  le  narihex,  est  de  46">,30;  sa  largeur,  de  i2'",76. 
On  descend  par  deux  marches  des  collatéraux  dans  les 
transepts;  les  collatéraux  se  prolongent  autour  du  chœur, 
et  le  séparent  des  cinq  chapelles  ansidales.  Les  arcades 
de  la  nef  reposent  sur  des  piliers  de  deux  grosseurs  dif- 
férentes alternativement.  Le  chœur  a  une  voûte  plus  éle- 
vée que  celle  de  la  nef,  et  des  arcades  plus  algues. 

pèns  ÉTERNEL  (Imsges  du).  V,  Dieo  le  Père. 

PÈRE  NOBLE,  omploî  do  théâtre,  celui  des  pères  dans 
la  tragédie  et  la  haute  comédie.  Le  rôle  de  Don  Di^^ne 
dans  le  Cid  de  Corneille  et  celui  d'Harpagon  dans  i' Avare 
de  Molière  appartiennent  à  cet  emploi. 

PÈRES  DE  L'ÉGLISE,  docteurs  de  la  primitive  Église, 
qui  fleurirent  du  ii*  au  vi«  siècle,  et  dont  les  écrits  font 
règle  en  matière  de  foi.  Leur  histoire  est  celle  de  la  con- 
quête de  l'Empire  romain  par  la  doctrine  chrétienne.  De- 
puis l'origine  du  christianisme  jusqu'au  règne  de  Con- 
stantin, les  Pères  apologistes  luttent  contre  le  paganisme  : 
de  Constantin  à  l'invasion  des  Barbares ,  l'Église,  victo- 
rieuse des  croyances  païennes,  tourne  ses  efforts  contre 
les  sectes  dissidentes,  et  poursuit  sa  constitution  défini- 
tive; c'est  l'ouvrage  des  Pères  dogmatiques. 

Primitivement,  comme  pour  mieux  faire  éclater  la 
vertu  propre  de  la  doctrine  chrétienne,  l'œuvre  de  la 
propa^nde  avait  été  confiée  à  des  hommes  presque  tous 
illettrés  :  l'enthousiasme  et  le  martyre  avaient  suppléé  à 
l'éloquence.  Mais  le  christianisme  prétendait  établir  aussi 
sa  domination  sur  les  classes  éclairées,  et  contraindre 
même  les  intelligences  d'élite  à  s'humilier  devant  le  mys- 
tère de  Jésus  crucifié  ;  aussi ,  dès  le  n*  siècle,  la  prédica- 
tion chrétienne  eut  ses  docteurs  et  ses  philosophes.  Héri- 
tiers de  S^  Luc  et  de  S^  Paul ,  les  Méliton,  les  Aristide, 
les  Athénagoras,  les  Théophile,  les  Justin  et  leurs  pre- 
miers successeurs  défendirent  la  religion,  non-seulement 
contre  les  superstitions,  les  calomnies,  les  instincts  de 
cruauté  d'une  vile  multitude,  et  les  persécutions  poli- 
tiques des  empereurs,  mais  encore  contre  la  doctrine 
rivale  d'une  école  philosophique  qui  se  faisait  religieuse 
pour  combattre  plus  avantageusement  avec  le  nouveau 
culte.  Tel  fut  le  rôle  des  Pères  apologistes.  A  la  plèbe  ils 
disaient  :  «  Non ,  nous  n'immolons  point  d'enfants  dans 
d'abominables  sacrifices;  venez  et  voyez;  compat'ez  nos 
mœurs  avec  les  vôtres,  et  jugez.  »  Aux  empereurs  et  à 
leurs  représentants  ils  disaient  :  «  Non,  nous  ne  sommes 
pas  de  mauvais  citoyens;  nous  payons  l'impôt,  nous  bat- 
tons avec  vous  les  ennemis  de  l'Empire  ;  nos  avis  dans 
vos  Sénats  sont  ceux  de  la  sagesse.  Que  vous  importe  en- 
suite que  nous  n'attachions  aucun  prix  aux  biens  do  la 
terre,  et  que  nous  aspirions  à  la  féliciu';  du  ciel?»  Et, 
comme  S^  Cyprien,  quand  un  consul  leur  lisait  leur  arrêt 
de  mort,  ils  répondaient  :  «  Dieu  soit  béni  !  »  et  mou- 
raient sans  récrimination  ;  l'admiration  de  leurs  vertus 
couronnées  par  le  martyre  multipliait  leurs  sectateurs. 
Mais  la  lutte  contre  les  philosophes  alexandrins  était  plus 
difficile  :  ceux-ci,  unissant  dans  un  imposant  éclectisme 
les  doctrines  orientales  avec  les  systèmes  de  la  philoso- 
phie grecque,  présentaient  le  christianisme  comme  un 
rameau,  détaché  par  l'imposture,  de  la  souche  primitive 
rù  venaient  se  confondre  toutes  les  religions  humaines. 
Is  opposaient  au  Christ  Orphée,  et  prétendaient  démon- 
trer  que  le  Nazaréen  n'était  que  le  plagiaire  du  prêtre 
'hrace.  Enfin,  ils  cherchaient  à  convaincre  le  christia- 
nisme de  ne  rien  enseigfier,  soit  en  métaphysique,  soit 
m  morale,  qui  ne  se  trouv&t  dans  le  Stoïcisme  et  dans 
J^laton.  C'est  contre  ces  redoutables  adversaires  que  les 
Pères  apologistes,  S^  Justin,  Arnobe,  S^  Clément,  Lac- 
t&nce,  épuisèrent  tous  les  traits  de  leur  dialecti(jue  et  de 
leur  éloquence.  Et  ce  fut  à  leurs  risques  et  pénis,  puis- 
qu'on voit  Origène  retranché  de  la  communion  catho- 
lique pour  s'être  laissé  eatralner  involontairement,  au 


milieu  des  péripéties  de  la  lutte,  en  dehors  de  TorthiK 
doxic,  et  S^  Cyprien  ne  racheter  qu'au  prix  du  martyrs 
une  hérésie  sincèrement  professée  sur  le  baptême. 

Quand  toutes  les  résistances  furent  vaincues,  l'œuvre 
des  Pères  de  l'Église  prit  un  autre  caractère  :  les  ennemis 
du  dehors  réduits  à  l'impuissance,  il  restait  à  triompher 
des  ennemis  du  dedans,  à  détruire  les  hérésies  du  pré- 
sent, à  prévenir  les  divisions  pour  l'avenir,  à  réaliser 
enfin  l'unité  catholique  ;  ce  fut  la  tftche  des  Pères  dog- 
matiques et  du  IV*  siècle.  Non  pas  que  les  hérésies  aient 
attendu,  pour  éclater,  la  défaite  de  l'ennemi  commun; 
TertuUien,  notamment,  avait  passé  avec  éclat  dans  la 
secte  des  Montanistes,  puis  quitté  leur  camp  pour  de- 
venir lui-même  chef  de  secte.  Mais  les  plus  redoutables 
sectaires,  ceux  qui  firent  courir  à  la  religion  nouvelle  les 
périls  les  plus  retentissants  et  les  plus  graves,  les  Ariens, 
les  Donatistes,  datent  du  iv*  siècle.  Au  commencement 
du  V*,  le  pélagianisme  allait  nier  la  pàce  divine  au  profit 
de  la  liberté  humaine ,  comme  l'ananisme  avait  nié  la 
divinité  du  Christ.  Tels  furent  les  objets  des  discussiont 
de  cette  époque  ;  âge  d'or  de  la  littérature  chrétienne,  où 
l'éloquence  des  Pères  brilla  d'une  splendeur  plus  écla- 
tante en  raison  même  de  la  décadence  de  tout  le  reste; 
«  moment  extraordinaire,  où  les  questions  les  plus  abs- 
traites se  personnifiaient  par  la  chaleur  de  la  discussion 
et  la  vérité  du  langage,  où  le  merveilleux  et  l'incompré- 
hensible étaient  devenus  l'ordre  naturel  et  la  r^Iité.  » 
(Villemain.)  —  A  lire  les  Pères  dogmatiques,  et  surtout 
S^  Augustin ,  on  sent  que  l'Église  est  sur  le  point  d'at- 
teindre enfin  son  unité;  en  elle  s'absorberont  bientôt 
toutes  les  dissidences,  les  hérésies  comme  la  philosophie 
païenne,  et  dans  son  organisation  entrera  la  société  tout 
entière.  Deux  moyens  opposés  établirent  enfin  cette 
unité,  la  parole  et  le  glaive,  les  innombrables  écrits  des 
docteurs  de  l'Église  et  l'appui  du  pouvoir  temporel. 

L'Orient  et  l'Occident  eurent  chacun  leur  part  du  tra- 
vail et  du  succès.  Ce  n'est  pas  un  des  moins  remar- 
3uables  triomphes  du  christianisme,  à  cette  époque  de 
écadence  profonde  pour  les  lettres  païennes,  aue  d'avoir 
produit  à  la  fois,  de  toutes  parts,  parmi  ses  défenseurs  et 
ses  interprètes,  tant  de  génies  divers.  En  Orient,  Césaréc, 
Nazianze,  Nysse,  Édesse,  Antioche,  Salaraine  de  Chypre, 
Bethléem,  Alexandrie  et  Ptolémals;  en  Occident,  Car- 
thage,  Madauro,  Rome,  Milan ,  Noie,  Poitiers,  furent  au- 
tant de  foyers  puissants  d'où  rayonnait  sur  tous  les 
points  de  l'Empire  la  nouvelle  doctrine.  En  Orient,  où 
les  Pères,  épris  de  la  beauté  des  écrivains  profanes,  ap- 
pellent à  leur  secours  jusqu'aux  artifices  du  talent  ora- 
toire, et  cherchent  à  reproduire  la  langue  de  Platon,  on 
croit  voir  luire  de  nouveau  le  génie  grec  avec  ses  grice^ 
et  ses  délicatesses,  altéré  toutefois,  sinon  gâté,  par  la  re- 
cherche et  le  luxe  affecté  d'une  exubérance  asiatique.  En 
Occident,  les  imaginations,  naturellement  plus  sobres, 
semblent  se  tenir  généralement  en  garde  contre  les  sub- 
tilités, les  allégories  et  la  métaphysi(jue  raffinée  que  les 
Orientaux  mêlent  volontiers  à  l'exposition  et  à  la  discus- 
sion des  dogmes.  Du  reste,  la  décadence  de  Rome  et  de 
l'Italie,  la  civilisation  récente  et  toute  latine  de  la  Gaule 
et  de  l'Espagne,  enfin  l'éloignement  de  la  cour  impériale, 
dont  Constantin  avait  transféré  les  pompes  et  les  splen- 
deurs à  Byzance,  étaient  peu  faits  pour  encourager  l'essor 
du  génie  occidental ,  et  le  privaient  bien  plutôt  des  se- 
cours que  le  mélange  des  lettres  ^ecques  avec  les  livres 
saints  offrait  aux  docteurs  de  l'Onent.  Les  Pères  les  plui 
célèbres  en  Orient  sont ,  parmi  les  apologistes  :  S' Justin, 
S^  Clément  d'Alexandrie  et  Origène;  et,  parmi  les  Pères 
dogmatiques  :  S^  Athanase ,  S^  Grégoire  de  Nazianze, 
S'  Basile,  S^  Grégoire  de  Nysse,  S'  Jean  Chrysostome, 
S^  Éphralm ,  S^  Épiphane  et  Synésius.  En  Occident ,  les 
Pères  apologistes  les  plus  renommés  furent  :  TertuUien , 
Arnobe,  Lactance  et  S'  Cyprien;  et  les  Pères  dogma- 
tiques: S^  Hilaire  de  Poitiers,  S^  Ambroise  de  Milan, 
S^  Paulin  de  Noie,  S^  Jérôme  et  S^  Augustin.  V.  Fénelon, 
Dialogties  sur  l'éloquence,  3*  dialogue  ;  Villemain,  TMeau 
de  l'éloquence  chrétienne  au  iv*  siècle,  gr.  in-i8.  A.  H. 
PÉREMPTION  (du  latin  perimere,  anéantir,  détruire), 
perte  ou  anéantissement  d'une  procédure,  d'un  jugement 
ou  de  certains  actes  judiciaires,  par  suite  d'une  inaclioo 
prolongée  pendant  un  temps  défini.  Dans  le  premier  cas, 
c'est  de  la  péremption  d  instance  qu'il  s'agît  :  elle  est 
prévue  et  régie  par  les  art.  397-401  du  Code  de  proc^un 
civile;  elle  s'acquiert  par  la  discontinuation  de  poursuites 
pendant  trois  ans,  qu'il  y  ait  ou  non  constitution  d'avoué. 
Dans  le  second,  on  a  la  péremption^  i^  des  jugements  par 
défaut,  lorsqu'ils  ne  sont  pas  exécutés  dans  les  six  moii 
de  leur  obtention;  2^  des  commandements ^  dans  ccr- 


PÊR 


1407 


PER 


taines  matières  prévues  par  la  loi,  telles  que  la  contrainte 
par  corps,  les  ventes  judiciaires  d*imineuble3;  3»  des  in- 
scriptions hypothécaires,  si  elles  ne  sont  pas  renouvelées 
dans  les  dix  ans.  V.  Reynaud  et  Dalloz,  Traité  de  la  pé- 
remption d'instance  en  matière ctvi/c,  1837, in-8<».  R.  d*E. 

PÉREMPTOIRE  (Exception).  V.  Exception. 

PERFECTIBILITÉ.  V.  Progrès. 

PERFECTIONNEMENT  (Brevets  de).  V.  Brevets  d'in- 

VK?ITI0I«. 

PERGOLA,  nom  oue  les  anciens  Romains  donnaient  : 
!**  à  toute  construction  ajoutée  en  appentis  sur  une  face 
d'édifice  ;  2*  à  un  balcon  superposé  aux  colonnades  d'un 
Forum;  3°  à  toute  salle  où  les  peintres  exposaient  leurs 
œayres,  et  qui  servait  à  un  enseignement  quelconque  ; 
4'  à  une  galerie  placée  au  srmmet  d*une  maison. 

PÉRI,  terme  de  Blason.  F.  Bâton. 

PÉRIâCTOS,  machine  de  théâtre  des  Anciens.  C'éUit 
un  assemblage  de  trois  châssis  joints  en  forme  de  prisme 
et  portant  chacun  une  décoration  différente  ;  il  tournait 
à  volonté  sur  un  pivot,  quand  on 'voulait  changer  le  lieu 
de  l'action.  Il  y  avait  un  périactos  de  chaque  côté  de  la 
scène.  L'emploi  de  pes  machines  permet  de  penser  que 
los  poètes  dramatiques  n'observaient  pas  dans  leurs 
pièces  l'unité  de  lieu  avec  autant  d'exactitude  qu'on  le 
sunprt^p.  ordinairement. 

PERIBOLE,  nom  que  les  Anciens  donnu:cnt  â  Ten- 

tnnte  de  leurs  temples,  séparés  par  un  mur  des  terrains 

eoTironnants.  Le  péribole,  où  Ton  plaçait  des  statues  et 

des  autels,  était  quelquefois  assez  vaste  pour  contenir  un 

bois  sacré  ou  de  petits  édifices. 

PÉRICOPES  (du  grec  périkopè,  division),  passages  des 
lÎYTes  saints  qui  sont  prescrits  pour  la  lecture  à  l'autel  et 
comme  textes  de  sermons.  Le  choix  de  ces  passages,  qui 
était  originairement  laissé  au  prêtre,  fut,  dans  le  iv*  siècle, 
limité  aux  livres  canoniques  de  l'Ancien  et  du  Nouveau 
Testament.  Puis,  le  pape  Grégoire  le  Grand  composa  un 
Lectionnaire,  contenant  les  évangiles  et  les  épltres  pour 
chacun  des  dimanches  et  des  jours  fériés  de  Tannée.  Lu- 
ther a  maintenu  les  péricopes  de  ce  pontife,  mais  les  pré- 
dicateurs calvinistes  sont  libres  de  prendre  leurs  textes 
3ù  ils  veulent.  Dans  l'Église  catholique,  les  péricopes  lus 
^  l'autel  sont  restés  invariables  ;  la  liberté  laissée  aux 
âennonnaires  dépend  des  évêques. 

PÉRIDROME  (du  grec  péri,  autour,  et  dromos,  course), 
galerie  ou  espace  couvert,  servant  de  promenade  autour 
d'un  édifice. 

PÉRIÉGÈSE  (du  grec  périégèsts,  action  de  conduire  au- 
tour), nom  que  les  anciens  Grecs  donnaient  &  toute  des- 
cription de  pays  présentée  sous  forme  de  voyage.  On 
l'appliquait  aux  ouvrages  d'Hécatée,  de  Denys  le  Périé- 
gète,  de  Pausanias,  etc. 

PÉRIÉLÈSE  (du  grec  périeilèsis,  action  de  rouler  au- 
tour), terme  de  Plain-Chant  qui  désiçne  une  sorte  de 
cadence  presque  inséparable  des  intonations.  La  périélèse 
se  fait  de  trois  manières  :  par  circonvolution,  par  inter- 
cidence  ou  diaptose,  et  par  d\»plication,  La  circonvolu- 
tion se  fait  en  ajoutant,  avant  la  note  qui  termine  Tinto- 
ostion,  une  note  au-dessus  et  deux  notes  au-dessous,  qui 
se  lient  à  cette  dernière  note  du  mot,  ce  qui  donne  un 
contour  formé  d*une  tierce  avant  de  toucher  la  finale.  \a 
diaptose,  qui  est  beaucoup  plus  rare,  s'emploie  quand  la 
dernière  syllabe  de  Tintonation  est  chargée  d'une  tierce, 
d'une  quarte  ou  d'une  quinte ,  intervalle  qui  exige  un 
élancement  de  la  voix  :  elle  consiste  à  ajouter,  après  la 
Dote  finale  ainsi  atteinte,  une  note  en  dessous,  et  à  répé- 
ter la  finale.  La  simple  duplication  consiste  à  doubler  la 
oote  pénultième  de  Fintonation,  et  s'emploie  lorsque  la 
dernière  syllabe  est  chargée  de  plusieurs  notes  par  de- 
grés conjoints. 

PÉRIGUEUX  (Église  S*-Front,  à),  ancienne  abbatiale, 

?u  a  remplacé  comme  église  cathédrale  celle  de  S^- 
tienne.  C'est  un  des  monuments  les  plus  anciens  et  les 
plus  curieux  de  notre  architecture  religieuse.  Quelques 
écrivains  l'ont  reg^u^é  comme  antérieur  au  x*  siècle; 
mais  la  ressemblance  qu'il  présente  avec  l'église  S^-Marc 
de  Venise,  dont  il  est  une  imitation  quant  au  plan  et  à  la 
construction  générale,  ne  permet  pas  de  le  faire  remonter 
au  delà  de  la  première  moitié  du  xi*  siècle;  et  encore  ne 
'^'explique-t-on  pas  à  cette  époque  la  présence  de  l'o- 
rive  dans  les  grands  arcs.  La  ressemblance  de  l'église 
S'-Front  avec  celle  de  S*-Marc  ne  saisit  pas  au  premier 
coup  d'œil  ;  elle  est  intime,  et  ne  devient  évidente  que 
par  Tanalyse  :  la  différence  d'aspect  résulte  des  adjonc- 
tions ou  des  restaurations  successives  qui  ont  altéré  le 
^ractère  primitif  des  deux  édifices,  et  de  l'abandon  que 
i'irchitecte  de  S*-Front  a  fait  de  l'ornementation  byian- 


tine.  On  retrouve  à  S^-Front  les  dispositions  essentiolîet 
de  S'-Marc,  le  plan  en  forme  de  croix  grecque,  la  toiture 
en  terrasses  dallées,  les  cinq  coupoles  au  centre  et  aux 
branches  de  la  croix,  le  développement  excessif  des  piliers 
qui  supportent  les  grands  arcs  des  coupoles,  et  leur  évi- 
dement  intérieur.  Mais  la  hardiesse  et  l'élégance  de  la 
construction  vénitienne  ont  fait  place  à  la  lourdeur  et  â 
la  nudité  :  les  murailles  sont  planes,  et  percées  de  rares 
fenêtres  ;  tout  autour  de  l'église  règne  un  entablement 
continu,  sur  lequel  s'appuient  12  frontons  couronnant 
les  12  pans  du  mur  qui  forment  le  développement  exté^ 
rieur  de  la  croix  grecque  ;  les  8  piliers  qui  marquent  les 
extrémités  de  cette  croix  se  terminent  par  des  pyramides 
qui  encadrent  les  frontons  et  accompagnent  les  coupoles. 
Les  fenêtres  de  S^-Front  ont  beaucoup  plus  de  dévelop- 
pement que  celles  des  monuments  byzantins,  modifica- 
tion motivée  sans  doute  par  la  différence  des  climats,  le 
ciel  de  l'Occident  n'ayant  pas  l'éclat  de  celui  de  l'Orient. 
Les  grandes  coupoles  byzantines  sont  éclairées  à  leur 
base  par  une  couronne  de  fenêtres  ;  ici ,  ces  fenêtres  sont 
réduites  à  quatre.  La  coupole  du  centre  s'élève  à  66°",60. 
Le  système  d'ornementation  de  S^-Front  n'est  point  en 
rapport  avec  l'idée  principale  du  monument  :  c'est  une  dé- 
coration antique,  analogue  â  celle  des  autres  édifices  con- 
tempondoc  en  France.  Les  églises  byzantines  n'ont  pas  de 
cryptes  :  léglise  S^-Front  en  possède  une,  mais  depuis 
longtemps  obstruée.  Cette  église  a  les  dimensions  sui- 
vantes :  longueur  de  la  croix,  60  met.;  hauteur  des  piliers, 
13"*,30;  hauteur  des  coupoles,  28°*,66;  hauteur  des  grands 
arcs   19"*  60.  B 

pÊRIL  en  la  DEMEURE,  terme  de  Droit  indiquant 
que  le  moindre  retard  peut  occasionner  une  perte,  un 
dommage.  Quand  on  pense  qu'il  y  a  péril  en  la  demeure, 
il  faut  recourir  à  l'intervention  de  la  justice,  pour  qu'elle 
décide,  tout  au  moins  à  titre  provisoire,  des  mesures  qui 
doivent  être  prises  pour  prévenir  le  danger.  En  pareil 
cas,  un  tribunal  peut ,  par  exemple,  permettre  d'assigner 
aux  jours  et  heures  interdits  en  général  pour  les  signifi- 
cations, ordonner  soit  un  séquestre,  soit  un  dépôt  on 
toute  autre  mesure  conservatoire,  autoriser  l'exécution 
d'un  jugement  par  défaut,  nonobstant  opposition,  etc. 

PÉRIMÉ.  V.  PéREMPTIOll. 

période  ,  en  termes  de  Gtironolog^e,  espace  de  temps 
déterminé  par  le  retour  d'un  phénomène  qui  revient  à 
époque  fixe  (  V,  Calendrier  ,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire]  ;  —  tempe  compris  entre  deux 
époques  {V.  ce  mot), 

PERIODE  (du  grec  périodos,  route  autour,  chemin  de 
ronde,  circuit),  suite  de  phrases  qui,  sans  être  parties  in- 
tégrantes les  unes  des  autres,  sont  tellement  liées  en- 
semble, que  les  unes  supposent  nécessairement  les  autres 
pour  la  plénitude  du  sens  ;  et  comme ,  à  la  fin  du  sens, 
l'esprit  se  reporte  vers  la  première  phrase  de  toute  cette 
série,  on  a  parcouru  véritablement  un  cercle,  on  a  fait  un 
circuit,  et  c'est  pourquoi  les  rhéteurs  çrecs  se  sont  servis 
du  mot  de  période^  qui  se  traduirait  bien  en  français  par 
celui  de  contour.  Les  phrases  partielles  que  contient  la 
période  s'appellent  membres.  Voici  une  période  à  deux 
membres  :  «  Chrétiens,  que  la  mémoire  d'une  grande 
reine,  fille,  femme,  mère  de  rois  si  puissants,  et  souve-' 
raine  de  trois  royaumes,  appelle  de  tous  côtés  à  cette 
triste  cérémonie,  |  ce  discours  vous  fera  paraître  un  de 
ces  exemples  redoutables  qui  étalent  aux  yeux  du  monde 
sa  vanité  tout  entière.  »  (Bossuet,  Oraison  funèbre  de 
Henriette  de  France,  Exorde.) .--  La  suivante  en  a  trois: 
«  Quand  Dieu  laisse  sortir  du  puits  de  l'abîme  la  fumée 
qui  obscurcit  le  soleil ,  selon  l'expression  de  l'Apocal^se, 
c.-à-d.  l'erreur  et  l'hérésie;  |  quand,  pour  punir  les 
scandales,  ou  pour  réveiller  les  peuples  et  les  pasteurs 
il  permet  à  l'esprit  de  séduction  de  tromper  les  &mes 
hautaines  et  de  répandre  partout  un  chagrin  superbe, 
une  indocile  curiosité  et  un  esprit  de  révolte;  |  il  dé« 
termine  dans  sa  sagesse  profonde  les  limites  qu'il  veut 
donner  aux  mnlheureux  progrès  de  l'erreur  et  aux  souf- 
frances de  son  Église.  »  (Bossuet,  /ôûf.,  !■*  part.)  —  Selon 
les  rhéteurs,  la  période  doit  contenir  de  deux  à  quatre 
membres  :  mais  il  ne  faut  pas  attacher  à  cette  règle  une 
importance  excessive  et  pour  ainsi  dire  superstitieuse. 
Le  nombre  des  membres  n'.est  pas  ce  qui  constitue  la 
la  vraie  régularité  ni  la  vraie  beauté  d'une  période;  il 
faut  y  chercher  surtout  l'art  avec  lequel  l'écnvain  a  en- 
chaîné les  phrases  qui  la  composent,  et  l'harmonie  qu'il 
a  su  mettre  entre  la  pensée  ou  le  sentiment  et  le  tour 
donné  à  l'ensemble  des  expressions.  Convenons,  au  reste, 
que  le  précepte  de  ne  pas  donner  plus  de  quatre  mem- 
bres à  une  période  est  plein  de  sagesse  :  il  est,  en  effet; 


PER 


H08 


PÉR 


dangereux,  excepté  pour  les  hommes  supérieurs,  de  dé- 
passer cette  limite,  au  delà  de  laquelle  rembarras  de 
i*écrivain  ou  do  Torateur,  et  la  fatigue  du  lecteur  ou  de 
Tauditeur  ne  manquent  pas  de  se  faire  sentir  bientôt. 

La  période  proprement  dite  n'appartient  qu*au  genre 
oratoire  et  à  la  poésie  héroïque  ;  encore  celle-ci  rem- 
ploie-t-elle  plus  fréquemment  dans  les  discours  que  dans 
les  récits,  à  moins  que  l'élévation  des  pensées  ou  la  gran- 
deur des  événements  racontés  par  le  poëte  n^exige  ou 
n*autorise  une  certaine  pompe  de  style  et  Tampleur  de 
la  forme  oratoire.  Tel  est  le  début  du  3*  livre  de  VÊtiéidef 
qui  commence  par  une  période  de  3  membres  renfer- 
mant 7  vers.  La  période  ne  convient  pas  également  à 
toutes  les  parties  d'un  discours  ni  même  à  tous  les  genres 
de  discours  :  elle  est  surtout  bien  placée  dans  les  exordes 
des  grandes  causes,  où  il  faut  éveiller  la  sollicitude,  Tin- 
térôt,  la  pitié  ;  dans  les  lieux  communs  et  dans  tous  les 
genres  d'amplifications,  surtout  dans  l'Éloge  et  le  Pané- 
gyrique. Elle  est  aussi  très-appropriée  aux  péroraisons; 
enfin ,  selon  l'observation  de  Quintilien ,  dans  les  causes 
judiciaires,  lorsque  le  juge,  instruit  et  persuadé,  se  livre 
à  l'orateur  et  ne  se  souvient  plus  que  du  plaisir  de  l'en- 
tendre ,  c*est  alors  plus  que  jamais  qu'elle  doit  étaler 
toute  sa  pompe  et  sa  magnificence.  P. 

PÉRIODE,  en  termes  de  Musique,  union  de  plusieurs 
phrases  mélodiques  qui  forment  ensemble  un  sens  com- 
plet. A  la  fin  de  ce  sens  il  faut  une  cadence  parfaite. 

PÉRIODIQUE  (Style),  genre  de  style  où  l'on  recherche 
avant  tout  le  nombre,  l'harmonie,  et  qui  offre  une  suite 
de  périodes  travaillées  avec  art  et  destini^es  à  captiver 
l'attention  par  le  charme  de  l'oreille.  C'est  l'opposé  du 
style  coupe.  Le  style  de  Buffon  est  ordinairement  pé- 
riodique. 

PÉRIOECIENS  (du  grec  péri,  autour,  et  oikos,  habita- 
tion ),  en  termes  de  Géographie,  peuples  qui  ont  la  même 
latitude,  mais  des  longitudes  opposées.  Placés  sous  le 
même  parallèle,  à  même  distance  de  Téquateur  et  du 
pôle,  ils  ont  les  mêmes  saisons,  la  même  longueur  des 
jours  et  des  nuits;  mais  les  uns  ont  midi  quand  les 
autres  ont  minuit,  parce  qu'il  y  a  toujours  entre  eux  une 
différence  de  12  heures  à  l'E.  ou  à  TO.  En  ce  sens,  ce 
qui  est  au  couchant  pour  les  uns  est  au  levant  pour  les 
autres.  Aux  équinoxes,  le  soleil  se  lève  pour  les  uns 
quand  il  se  couche  pour  les  autres.  B« 

PÉRIPATÉTiaENNE  (Doctrine)  (du  grec  PeripaUin, 
se  promener),  nom  donné  à  la  doctrine  d'Aristote,  parce 
que  ce  philosophe  avait  l'habitude  d'enseigner  en  se  pro- 
menant dans  les  galeries  du  Lycée.  Pour  résumer  la  phi- 
losophie d'Aristote,  et  la  saishr  dans  ses  traits  généraux, 
il  faut  d'abord  bien  entendre  la  théorie  qui  la  domine 
It  qu'il  a  exposée  dans  le  traité  connu  sous  le  nom 
de  Métaphysique.  Il  est  nécessaire  à  qui  veut  avoir,  de 
quelque  chose  que  ce  soit,  une  science  accomplie,  d'en 
connaître  :  1°  la  substance  ou  matière  première,  c-à-d. 
ce  dont  la  chose  est  faite;  2®  la  forme  ou  essence,  qui 
détermine  la  matière  ;  3°  la  cause  par  laquelle  la  chose 
dont  il  s'agit  a  été  produite,  la  cause  du  mouvement  que 
nous  appelons  maintenant  cause  efficiente  ;  ^^  la  cause 
pour  laquelle  elle  a  été  produite,  son  but  ou  sa  cause 
finale.  Ainsi,  d'une  statue,  nous  savons  tout  ce  que  nous 
en  pouvons  savoir  lorsque  nous  en  connaissons  la  ma- 
tière, la  forme,  l'auteur,  la  destination.  Comme  cela  est 
également  vrai  des  plus  grands  et  des  plus  vastes  objets, 
et  du  monde  entier,  toute  science  en  définitive  se 'résout 
dans  la  science  des  principes,  et  tel  est  en  effet  le  carac- 
tère, telle  est  la  nature  de  la  philosophie  première.  Elle 
est  la  science  des  premières  causes  et  des  premiers  prin- 
cipes. Les  principes  sont  au  nombre  de  quatre  :  la  Ma- 
tière, la  Forme,  la  Cause  motrice  ou  efficiente,  la  Cause 
finale.  Mais  en  y  regardant  de  plus  près,  on  voit  qu'ils 
sont  susceptibles  de  simplification;  effectivement,  si  la 
matière  existe  indépendamment  delà  forme  ;  si  le  marbre, 
avant  de  devenir,  sous  la  main  du  sculpteur,  Dieu,  table 
ou  cuvette  (La  Fontaine), existait  à  l'état  de  bloc  informe, 
la  forme  que  celui-ci  lui  communique  n'est  indépendante 
ni  de  son  travail,  ni  de  la  pensée  dans  laquelle  il  l'a  exé- 
cuté. Donc,  en  réalité,  le  nombre  des  principes  doit  être 
réduit  de  quatre  à  deux  :  1<*  la  Matière  par  elle-même 
indéterminée;  2°  la  Cause,  dont  l'opération  la  détermine 
à  devenir  ceci  ou  cela.  En  raison  de  cette  aptitude  à  de- 
venir indifféremment  tel  ou  tel  objet,  Arlstote  nomme  la 
matière,  considérée  dans  son  universalité,  la  Puissance 
des  contraires ,  ou  simplement  la  Puissance;  la  cause 
qui  lui  donne  l'être  actuel ,  il  la  nomme  VActe.  Tout  ce 
qui  existe  réellement  (et,  disons-le  en  pas<%ant,  ce  qui 
existe  réellement,  suivant  Aristote,  et  contrairement  à 


l'opinion  de  Platon,  ce  sont  les  êtres  individuels)  existe 
par  l'union  de  l'Acte  et  de  la  Puissance.  C'est  en  cela  que 
Cionsiste  VEntéléchie  péripatéticienne  (V.  ce  mot).  —  Ces 
principes  posés,  il  s'agit  d'en  saisir  les  rapports,  et  d'en 
suivre  les  développements  dans  la  nature,  dans  les  ani- 
maux, dans  l'homme,  dans  son  àme,  dans  les  différente! 
fonctions  de  celle-ci.  De  là  une  physique,  une  histoire 
naturelle,  une  psychologie,  une  logique,  une  morale,  une 
politique,  toutes  en  relation  plus  ou  moins  étroite  avec  la 
métaphysique  :  c'est  la  métaphysique  qui  fait  le  lien  et 
l'unité  de  toute  la  doctrine  péripatéticienne.  La  physique 
d'Aristote,  trop  systématique,  trop  en  dehors  de  l'obser- 
vation ,  a  fini  par  perdre  tout  crédit.  (K.  l'art.  Aristote 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire,)  Il 
n'en  est  pas  de  même  de  la  philosophie  proprement  dite  ; 
le  Traité  de  Vdme  et  les  petits  écrits  qui  s'y  rattachent, 
les  écrits  logiques  réunis  sous  le  nom  d'Organon  (  V.  ce 
mot.)^  les  deux  traités  de  morale  dédiés  à  Eudème  et  à 
Nicomaque,  la  Métaphysique  surtout,  contiennent  des 
parties  acquises  à  tout  jamais  à  la  science  philosophique. 
Telle  a  été  d'ailleurs,  en  durée  et  en  puissance,  l'autorité 
du  Péripatétisme,  que  ses  erreurs  mômes  sont  de  celles 
dont  il  faut  tenir  compte.  Nous  indiquerons  ici  un  petit 
nombre  de  résultats  positifs,  les  solutions  données  par 
ce  système  aux  questions  fondamentales  de  la  philoso- 
phie :  sur  Id  ^^ature  de  l'âme,  elleest,non-seulement  dans 
l'homme,  mais  dans  tout  être  vivant,  le  principe  intérieur 
du  mouvement  et  de  la  vie,  a  l'acte  d'un  corps  naturel 
qui  a  la  vie  en  puissance  ».  C'est  à  elle  surtout  qu' Aris- 
tote applique  le  nom  d'Entéléchie.  Distincte  du  corps 
sans  pouvoir  en  être  séparée,  elle  préside  aux  fonctions 
de  la  nutrition  et  de  la  génération,  de  la  sensibilité,  de 
l'intelligence,  sans  qu'on  puisse  affirmer  bien  décidément 
(c'est  up.  des  côtés  les  plus  faibles  de  la  philosophie 
d'Aristote)  si  Ton  doit  entendre  qu'il  y  a,  dans  l'homme 
par  exemple,  trois  &mes  différentes  :  une  âme  nutritive, 
une  &me  sensible,  une  àme  raisonnable;  ou  seulement 
trois  fonctions  du  même  principe.  Môme  incertitude  eu 
ce  qui  concerne  rimmortaIité,qui,  en  tout  cas,  ne  serait 
le  partage  que  de  l'àme  raisonnable.  Les  parties  vraiment 
expérimentales  de  la  Psychologie  péripatéticienne,  la 
description  de  la  sensibilité,  des  appétits,  des  passions^, 
de  la  raison,  etc.,  sont  plus  satisfaisantes,  u  Aristote,  dit 
M.  H.  Martin,  a  signalé  l'entendement  et  le  libre  arbitre 
comme  conditions  de  la  Morale.  Mais,  au  lieu  de  s'adres- 
ser à  l'entendement  et  à  la  conscience,  qui  lui  auraient 
donné  le  devoir  comme  principe  de  la  moi*ale ,  il  a  de- 
mandé le  principe  à  l'empirisme,  et  il  a  cru  le  trouver 
dans  le  désir  du  bonheur.  Suivant  lui,  le  bonheur,  et 
par  conséquent  le  devoir  de  l'être  intelligent,  c'est  de 
faire  passer  autant  que  possible  toutes  les  facultés  de  I:i 
puissance  à  l'acte;  c'est  de  les  développer  complètement 
et  simultanément.  Ce  développement  des  facultés  doit 
résulter,  non  d'efforts  isolés,  mais  d'une  habitude  du- 
rable, qui  est  la  vertu.  Aristote  distingue  des  vertus  in- 
tellectuelles et  des  vertus  morales.  Il  fait  consister  tout4^ 
ces  dernières  dans  un  juste  milieu,  entre  deux  excès  cou* 
traires ,  ce  qui  exclut  du  nombre  des  vertus  morales  \c 
désintéressement  absolu  et  le  dévouement  sans  bornes. 
Pourtaiit  :ta.  n:orale  se  recommande  par  d'excellentes  ob- 
^rvations  et  de  profondes  analyses.  —  Sa  Politique  est 
fondée  de  môme  empiriquement  sur  le  principe  de  l'utile. 
Elle  est  la  conclusion  de  sa  morale,  où  il  s'est  proposé 
moins  de  donner  des  règles  de  conduite  que  de  montrer 
quelles  sont  les  qualités  qu'il  faut  développer  dans 
l'homme.  Dans  sa  Politique ,  il  enseigne ,  d'une  part, 
comment  l'ordre  social  sert  à  ce  développement;  d'autre 
part,  comment  l'homme  politique  doit  se  conduire  sous 
diverses  formes  de  gouvernement,  pour  en  tii*er  le  meil- 
leur parti  possible,  et  non  pour  le  réformer.  Il  approuve 
l'esclavage  comme  un  fait  utile  et  consacré  par  l'usage  ; 
il  semble  même  le  considérer  comme  un  fait  fondé  sur 
la  nature.  Aristote  érige  ainsi  en  lois  des  faits  condam- 
nables. »  —  Comme  doctrine  philosophique,  c'est  incon- 
testablement dans  la  Théodicée  qu'Aristote  a  été  le  plus 
loin  et  le  plus  haut;  non  pas  que  sa  science  soit  parfaite 
et  irréprochable  de  tout  point;  nous  allons  en  signaler 
les  principales  erreurs  :  la  matière  y  est  indépendante 
de  Dieu  pour  son  existence;  elle  est  éternelle  comme 
Dieu.  Dieu,  quoique  moteur  universel,  reste  enfermé  dans 
sa  pensée  solitaire,  parce  qu'il  meut,  c.-à-d.  gouverne  le 
monde,  non  comme  cause  efficiente,  par  un  acte  exprès 
de  volonté,. mais  comme  cause  finale  et  comme  objet  de 
désir,  toutes  choses  gravitant  vers  lui  comme  vers  leur 
fin  et  leur  bien  suprême.  Mais  en  réduisant  la  matière 
1  à  n'ûtro  ([uo  la  puissance  des  contraires,  c.-à-d.  en  U 


PÉR 


1409 


PER 


rapprochant  autant  que  possible  du  non-être ,  en  répé- 
tant sans  cesse  que  Dieu  est  le  premier  moteur,  malgré 
la  fausse  interprétation  que  Ton  vient  de  signaler,  en 
affirmant  enfin  de  la  manière  la  plus  explicite  Tidcntité 
de  Dieu,  du  bien  et  de  la  cause  finale,  Aristote  a  propagé 
dans  la  philosophie  des  idées  qui  ne  devaient  plus  être 
dépassées  que  par  la  Métaphysique  chrétienne  qu*elles 
préparaient  sur  quelques  points  ;  de  là  son  immense  et 
durable  influence;  de  là  cette  tradition  qui,  après  avoir 
exercé  son  action  sur  les  autres  écoles  anciennes,  modifié 
le  Platonisme,  pénétré  chez  les  Épicuriens,  les  Stoïciens, 
les  Alexandrins,  s'étendit  avec  tant  de  force  à  la  scolas- 
tique  et  à  la  philosophie  arabe  (  V,  dans  notre  Dictiori' 
noire  de  Biographie  et  (T Histoire  les  articles  Arabes, 
AvERRofes,  elc.)«  et  provoqua,  au  moment  de  la  Renais- 
sance, des  luttes  furieuses;  qui,  enfin,  malgré  la  réaction 
dont  elle  devint  alors  Tobjet ,  loin  de  s'eiTacer  dans  la 
philosophie  moderne,  a  fait  naître  encore  une  foule  de 
savantes  et  excellentes  recherches  qui  résument,  con- 
densent, rectifient,  tant  au  point  de  vue  historique  qu'au 
point  de  vue  dogmatique,  tout  ce  que  les  générations 
précédentes  ont  entassé  sur  Aristote  d'interprétations,  de 
commentaires  et  de  polémiques.  V.^  pour  les  indications 
biblioçaphiques,  Tart.  Aristotb,  de  M.  H.  Martin,  dans 
notre  uictionnatre  de  Biographie  et  d* Histoire,      B  -  e. 

PÉRIPÉTIE,  du  çrec  péripéteia ,  accident  inopiné, 
changement  subit,  imprévu,  d'une  fortune  bonne  ou 
mauyaise  en  une  autre  contraire,  éprouvé  par  un  ou  plu- 
sieurs personnages  d'un  poème  dramatique,  d'une  épo- 
pée, ou  d'un  roman.  Dans  les  pièces  de  théâtre,  la  pé" 
ripétie  est  presque  toujours  voisine  de  l'action ,  et  c  est 
d'elle  que  doit  résulter  le  dénoûment.  Ainsi,  dans  VAthalie 
de  Racine,  la  proclamation  solennelle  du  jeune  Joas,  ius- 
que-Ià  pauvre  et  méconnu,  amène  la  catastrophe;  dans 
les  Femmes  savantes  de  Molière,  les  deux  lettres  ap- 
portées par  Ariste  ,  et  dont  la  lecture  change  tout  à 
coup  les  sentiments  de  Trissotin ,  forment  la  péripétie, 
et  amènent  le  triomphe  du  bon  sens  sur  la  sottise  des 
pédantes.  Dans  VHiade  d'Homère,  la  péripétie  est  au 
19*  chant  :  la  mort  de  Patrocle  semblait  mettre  le  combla 
aux  malheurs  des  assiégeants  ]  mais  elle  a  pour  effet  de 
déterminer  le  retour  d'Achille  sor  le  champ  de  bataille;  sa 
colère,  en  se  reportant  d'Agameronon  sur  Hector,  fait  re- 
tomber sur  les  Troyens  les  périls  auxquels  étaient  exposés 
les  Grecs  depuis  la  prise  du  camp,  et  prépare  la  cata- 
strophe du  poème,  qui  est  la  mort  d'Hector.  Toute  péri- 
pétie, quelque  soudaine  qu'elle  »>it,  doit  ^tre  la  consé- 
quence naturelle,  logique,  vraisemblable,  des  événements 
antérieurs  on  des  passions  qui  animent  les  personnages. 
A  cet  égard,  Il  n'en  est  pas  do  plus  parfaite  que  celle  de 
Vlliade.  Les  péripéties  des  comédies  et  des  romans  sont 
amenées  sonvent  par  une  reconnaissance  de  personnes, 
de  signes  ou  d'objets;  ce  moyen  est  employé  quelque- 
fois aussi  avec  succès  par  la  tragédie  et  par  l'épopée 
(K.  REcomvAissAfiCB).  Chez  les  Modernes,  le  mot  Pm- 
pétie,  consacré  surtout  pour  les  ouvrages  de  Tantiquité 
grecque,  est  souvent  remplacé  par  le  mot  Révolution,  P. 

PÉRIPHÈRES,  ornements  en  relief  autour  des  vases. 
V.  Gbdstjs. 

PÉRIPHRASE  (du  grec  péri,  autour,  et  phrazô,  Je 
parle  ),  figure  de  Rhétorique  par  laquelle  à  une  expres- 
sion simple  on  substitue  une  définition  ou  une  descrip- 
tion qui  donne  au  style  plus  de  noblesse  et  d'élé^mce. 
Telle  est  cette  magnifique  périphrase  que  Bossuct  {Oraison 
funèbre  de  Henriette  de  France,  exorde)  emploie  au  lieu 
du  mot  Dieu  :  «  Celui  qui  règne  dans  les  deux ,  et  de 
qui  relèvent  tous  les  empires,  à  qui  seul  appartient  la 
gloire,  la  mi^esté  et  l'indépendance,  etc.  »  La  périphrase 
est  souyent  nécessaire  pour  remplacer  un  terme  trivial 
oo  bas;  ainsi.  Racine  nous  montre  Junie  (Britanni- 

Dans  le  simple  appareil 
D*aiie  betnté  qu'on  vient  d'arracher  au  sommeil. 

L'abus  de  la  périphrase  rend  le  style  lourd,  préten- 
tieux, bizarre,  et  même  inintelligible.  C'est  ce  qui  a  fait 
dire  à  Pascal  {Pensées)  :  «  Il  y  en  a  qui  masquent  toute 
la  nature.  II  n'jr  a  point  de  roi  parmi  eux,  mais  un  auguste 
monarque;  point  de  Paris,  mats  une  capitale  du  royaume. 
Il  y  a  des  endroits  où  il  faut  appeler  Paris  Paris,  et  d'au- 
tres où  il  faut  rappeler  capitale  du  royaume,  n  Les  poètes 
descriptifs  ont  fait  souvent  abus  de  la  périphrase,  qui  de- 
vient alors  une  sorte  de  logogriphe  à  deviner  par  le  lec- 
teur. Blair  cite  les  paroles  d'un  gentilhomme  qui ,  pour 
ordonner  à  son  laquais  de  lui  ûter  ses  bottes,  lui  disait  : 
tkiïou!»  viens  Ici  oonr  me  servir^  délivre  les  colonnes  mo- 


biles qui  soutiennent  mon  individu  de  cette  dépouille 
d'un  bœuf  mort  »•  F.  Circonlocution.  H.  D. 

PÉRIPLE  (du  grec  péri,  autour,  et  pléô,  je  navigue), 
nom  que  les  anciens  Grecs  donnaient  aux  voyages  do 
circumnavigation,  comme  celui  que  des  PhéAiciens  exé- 
cutèrent ^  dOit-on ,  autour  de  l'Afrique  par  ordre  de  Né- 
chao,  roi  d'Egypte.  On  appela  également  Périples  les 
relations  de  voyages  maritimes.  Nous  possédons  celui  du 
Carthaginois  Uannon  sur  les  côtes  d'Afrique;  celui  de 
Scylax,  Grec  de  Carie ,  sur  les  côtes  de  l'Europe  et  do 
l'Asie  ;  et  les  Périples  du  Pont-Euxin  et  de  la  mer  Ery- 
thrée par  Arrien.  V.  les  Geographice  vêler is  scriplores 
Grœci  deDodwelI,  Oxford,  1703-1712. 

PÉRIPTÈRE  (du  grec  péri,  autour,  et  ptéron,  aile), 
édifice  dont  le  pourtour  extérieur  présente  sur  toutes  ses 
faces  un  rang  isolé  de  colonnes,  éloignées  du  mur  d'en- 
ceinte à  distance  d'un  entre-colonnement.  Le  pseudo-pé- 
riptère  n'a  que  des  colonnes  engagées  dans  son  mur 
d'enceinte.  Le  monoptère  et  le  aiptère  (K.  ces  mots) 
sont,  en  réalité,  des  périptères;  mais  les  Anciens  ne 
leur  donnaient  pas  ce  nom.*  B. 

PÉRISCÉUS ,  sorte  do  bracelet  que  les  femmes  de 
l'anc.  Grèce  portaient  au-dessus  de  la  cheville  du  pied. 

PERISQENS.  V,  Amphisciens. 

PÉRISPOMÈNE,  nom  grec  de  l'accent  circonflexe.  Il 
8'appli({ue  à  l'accent  et  aussi  aux  mots  qui  le  portent  sur 
la  dernière  syllabe.  Si  l'accent  circonflexe  est  sur  l'avant- 
dernière,  le  mot  s'appelle  propérispomène,  P. 

PÉRISSOLOGIE  (du  grec  périsses,  superflu,  et  logos, 
discours),  nom  que  quelques  rhéteurs  donnent  à  la  répé- 
tition inutile  d'une  même  idée. 

PÉRISTËRIUM,  sorte  de  baldaquin  placé  au-dessus 
des  tabernacles  et  des  vases  servant  à  conserver  l'hostie. 

PÉRISTYLE  (du  grec  péri,  autour,  et  sttUos,  colonne^, 
mot  désignant,  chez  les  anciens  Grecs,  un  édifice  envi- 
ronné en  son  pourtour  intérieur  d'un  rang  de  colonnes 
isolées  et  parallèles  aux  murs.  Les  Romains  rappliquèrent 
à  toute  galerie  en  colonnades  construite  autour  d'une 
cour.  Les  Modernes  ont  appelé  péristyle,  tantôt  l*édifice 
qui  a  un  entourage  extérieur  de  colonnes  (alors  il  est  sy- 
nonyme de  périptère)y  tantôt  l'ensemble  de  colonnes  qui 
forme  le  frontispice  d'un  monument.  E 

PERIYALIOM,  mot  latin  par  lequel  on  désignait  au- 
trefois le  chœur  des  chantres,  ou  les  stalles  de  ce  chœur. 

PERLES ,  une  des  parures  les  plus  recherchée»  dans 
tous  les  temps.  On  employait  les  perles  dans  l'Inde  bien 
longtemps  avant  que  le  commerce  les  eût  fait  connaître 
aux  Grecs  st  aux  Romains.  Ces  peuples  en  ornèrent  les 
agrafes,  les  chaussures,  les  colliers,  les  boucles  d'o- 
reilles, et  y  consacrèrent  des  sommes  considérables. 
J.  César  donna  h  Servilia,  sœur  de  Caton  d'Utique,  une 

Çerle  qu'il  avait  payée  0,000  grands  sesterces  (environ 
2,000  fr.);  celle  que  la  reine  Cléopàtre  avala,  dit-on, 
après  l'avoir  fait  londro  dans  du  vinaigre,  avait  coûté 
10,000  grands  sesterces  (20,000  fr.);  Lollia  Pauline, 
femme  de  l'empereur  Caligula,  portait  dans  sa  parure 
pour  plus  de  40  millions  de  sesterces  (8  millions  de  fr.) 
en  perles  et  en  pierres  précieuses.  Néron  chargea  de 
perles  les  sceptres,  les  masques  et  les  lits  do  ses  his- 
trions. La  mode  des  perles  a  commencé  en  France  sous 
le  règne  de  Henri  IIJ.  Il  y  a  parmi  les  joyaux  de  la  cou- 
ronne de  France  une  collection  de  408  perles,  toutes  très- 
belles,  et  pesant  chacune  iO  grammes;  elle  est  évaluée 
500,0(K)  fr.  Les  principaux  endroits  où  l'on  pèche  les 
huîtres  à  perles  sont  la  mer  Rouge,  le  golfe  Persique,  le 
détroit  de  Manaar,  près  de  IMle  de  Ceylan,  le  golfe  du 
Bengale,  celui  du  Mexique,  et  la  mer  Vermeille.  Les  belles 
perles  sont  parfaitement  sphériques,  blanches,  opaques, 
ou  d'une  transparence  opaline,  avec  un  éclat  changeant 
et  diapré  que  les  joailliers  appellent  Varient,  Il  y  a  aussi 
des  perles  allongeiBS  en  forme  de  poire:  elles  sont  égale- 
'ment  recherchées  quand  cette  forme  est  parfaite.  Les 

féeries  sont  sujettes  à  mourir;  on  reconnaît  cet  état  quand 
eur  émail  est  détruit  ou  endommagé.  B. 

PERLES,  en  Architecture,  petits  grains  ronds  taillés 
dans  les  moulures. 

PERMIS  DE  CHASSE.  V,  Chasse. 

PERMIS  DE  sÉroDR.  Aux  tormos  d'un  arrêté  du  12  messi- 
dor an  viii  (l"^juill.  1800),  une  permission  était  nécessaire 
à  tout  voyageur  qui  voulait  séjourner  plus  de  trois  jours 
à  Paris.  Une  ordonnance  de  police  du  8  sept.  1851  porte 
que  tout  étranger  qui  arrive  dans  le  département  de  la 
Seine  avec  l'intention  d'y  résider  ou  d'y  exercer  une  indus- 
trie, doit  se  présenter,  dans  les  trois  jours  de  son  arrivée* 
à  la  préfecture  de  police,  pour  y  obtenir,  s'il  y  a  lieu,  un 
permis  de  séjour,  a  peine  d'expulsion  du  territoire. 

89 


PER 


UIO 


PER 


PERMISSION,  figure  de  Rhétorique  par  laquelle  on 
feint  de  pennettre,  on  demande  même  avec  instance,  ce 
qu*on  ne  ?eut  pas,  ce  qu'on  sait  bien  qu'on  n'obtiendra 
pas.  Quinte-Curce  fait  ainsi  i>arler  Alexandre  à  ses  sol- 
dats (X,  2)  :  «  Que  les  chemins  soient  libres  pour  ceux 
qui  veulent  me  quitter;  faites-leur  place;  moi-même, 
avec  les  Perses,  je  protégerai  leur  retraite.  Je  ne  retiens 
personne;  éloignez-vous  de  mes  yeux,  citoyens  ingrats; 
vos  pères,  vos  enfants  vous  accueilleront  avec  joie,  quand 
vous  reviendrez  sans  votre  roi  ;  ils  iront  au-devant  des 
déserteurs  et  des  transfuges.  »  Cette  figure  tient  de 
Tironie  ;  mais  elle  est  toujours  adaptée  à  des  pensées  sé- 
rieuses. B. 

PERMUTATION,  en  termes  de  Grammaire,  change- 
ment d*une  lettre  en  une  autre  qui  appartient  au  même 
organe.  —  Dans  l'armée,  on  nomme  permutation  le  chan- 
gement d'emploi  entre  deux  officiers  de  môme  grade.  La 
permutation  doit  être  autorisée  ;  elle  est  considérée 
comme  une  faveur,  et  fait  généralement  retarder  la  pro- 
motion à  un  grade  supérieur. 

PÉRORAISON  fdu  latin  jnerorafto),  dernière  partie, 
conclusion  d'un  aiscours.  Elle  a  pour  but  de  rappeler 
brièvement  à  l'auditeur  la  substance  du  discours,  et  de  l'en- 
traîner par  un  dernier  effort  du  sentiment.  La  récapitula- 
tion consiste  à  réunir  ensemble  toutes  les  raisons  dissé- 
minées dans  le  corps  du  discours,  de  manière  à  les  faire 
embrasser  d'un  seul  regard.  Tantôt  il  faut  reprendre  les 
parties  de  la  Division,  et  rappeler  les  points  qu'on  a  pro- 
mis de  traiter  ;  tantôt  &  ses  propres  raisons  on  joint  celles 
de  l'adversaire  et  leur  réfutation.  On  rappelle  ainsi  en 
quelques  mots  à  l'auditeur  la  Confirmation  et  la  Réfuta- 
tion. Une  grande  variété  de  st^le  est  ici  nécessaire  pour 
éviter  la  sécheresse  et  l'ennui.  La  seconde  partie  de  la 
Péroraison  consiste  dans  l'emploi  du  pathétique  pour 
achever  de  produire  la  persuasion  chez  l'auditeur.  Les 
Anciens  la  divisaient  en  deux  parties  :  Vindignation  et  la 
plainte.  L'indignation  a  pour  objet  d'amasser  beaucoup 
de  haine  sur  un  individu,  ou  de  défaveur  sur  un  fait  ; 
Cicéron  (  De  Inventions ,  1  )  expose  les  règles  particulières 
de  ce  moyen  oratoire,  qui  se  tire,  dit-il ,  de  quinze  lieux. 
La  plainte  consiste  à  émouvoir  la  compassion  du  juge  ;  elle 
doit  être  amenée  par  des  réflexions  graves  et  tristes  sur 
l'inconstance  de  la  fortune,  la  faiblesse  de  l'homme,  etc.; 
elle  se  tire  de  seize  lieux.  La  rhétorique  moderne  n'a 
pas  maintenu  toute  la  doctrine  de  Cicéron  sur  l'emploi 
des  lieux  dans  la  Péroraison  ;  mais  elle  a  conservé  les 
règles  qui  s'appliquent  à  tous  les  temps,  c'est  gue  la  Pé- 
roraison doit  être  brève  et  animée.  La  Péroraison  n'est 
pas  nécessaire  dans  tous  les  discours  ;  elle  se  rencontre 
ordinairement  dans  les  plaidoyers  étendus,  dans  l'oraison 
funèbre,  dans  le  sermon,  et  dans  les  discours  politiques. 
Nous  en  avons  de  beaux  modèles  dans  les  discours  de 
Cicéron  pour  Milon  et  pour  Ligarius,  dans  l'oraison  fu- 
nèbre du  prince  de  Condé  par  Bossuet,  dans  le  3*  dis- 
cours 4e  Mirabeau  sur  la  banqueroute.  H.  D. 

PÉROU  (Arts  au).  V,  Péruvien  (Art). 

PÉROU  (Langues  du).  V,  Péruviennes  (Langues). 

PERPENDICULAIRE  (Style).  V.  Angleterre  (Archi- 
tecture en  ). 

PERPIGNAN  (Église  S'-Jeaii,  à).  Cette  église  cathé- 
drale, dont  on  posa  la  première  pierre  en  1324,  demeura 
plus  de  deux  siècles  en  construction  ;  elle  fut  élevée  uni- 
quement avec  le  produit  des  aumônes  des  fidèles,  et, 
lorsque  le  concile  de  Trente  eut  jugé  nécessaire  de  pro- 
voquer de  nouvelles  libéralités,  on  ne  put  encore  b&tir 
la  façade  qu'avec  une  extrême  simplicité.  Le  corps  de 
l'édifice  est  de  style  ogival  secondaire  ;  les  voûtes  et  les 
détails  appartiennent  au  style  tertiaire;  le  portail  est 
moderne.  Iji  tour  qui  accompagne  ce  portail  est  lourde 
et  sans  grâce  :  on  a  placé  au-dessus,  en  1744,  une  cage 
en  fer,  haute  de  15  met.  environ,  d'une  disposition  har- 
die ,  et  qui  contient  les  cloches  de  l'horloge.  L'édifice  a 
78  met.  de  longueur,  19'",50  de  largeur,  et  27  met.  de 
hauteur  sous  voûte.  Il  n'offre  qu'une  seule  nef,  de  pro- 
portions nobles  et  imposantes  ;  la  voûte,  d'une  belle  exé- 
cution, n'a  pour  suppoit  que  des  arceaux  de  pierre 
appuyés  sur  les  murs  de  séparation  des  chapelles.  Le 
transept  offre  une  particularité  remarquable  :  au  lieu  de 
se  terminer  carrément,  11  a  une  abside  percée  d'un  écran, 
et,  à  la  partie  supérieure  de  chacun  de  ses  croisillons, 
une  seconde  abside  pentagonale  qui  forme  chapelle.  La 
chapelle  de  droite,  consacrée  à  la  S**  Vierge,  contient  un 
retable  décoré  de  peintures  de  la  fin  du  xv*  siècle.  A  la 
clef  de  voûte  du  sanctuaire  sont  sculptées  les  armes  de 
France.  Le  maltre-autel  a  un  célèbre  retable  en  marbre 
blimc,  dont  Iw  bas-relief»  wu%  séparé»  les  uns  de» 


autres  par  des  pilastres  chargés  de  figures.  En  sortant  de 
l'église  par  la  porte  latérale,  on  trouve  une  chapelle  dite 
du  Crucifix,  bâtie  au  xvi*  siècle  pour  recevoir  un  cru- 
cifix sculpté  en  1525.  —  A  la  gauche  de  l'église  SWean 
se  trouve  une  église  plus  ancienne,  appela  le  Vieux 
S^-Jean,  construction  romano-byzantine.  B. 

PERQUISITION  (du  latin  perquirere^  rechercher),  ac- 
tion de  rechercher  et  de  saisir  au  domicile  d'un  individu 
prévenu  d'un  crime  ou  d'un  délit  les  objets  qui  peuvent 
servir  à  la  manifestation  de  la  vérité.  Le  droit  de  perqui- 
sition appartient,  en  cas  de  flagrant  délit,  au  procureur 
impérial  et  à  ses  auxiliaires  (juges  de  paix,  officiers  de 
gendarmerie,  maires,  commissaires  de  police),  et,  dans 
tous  les  cas,  au  juge  d'instruction,  qui  peut  le  délé^er 
par  une  ordonnance  dite  mandat  de  perquisition  {Code 
dinstruction  criminelle,  art.  36-62).  Les  perquisitions 
doivent  être  faites  en  présence  du  prévenu  ou  de  son 
fondé  de  pouvoir.  Chaque  autorité  ne  peut  faire  de  per- 
quisition que  dans  son  ressort;  néanmoins,  la  loi  auto- 
rise les  présidents  de  Cour  d'assises,  les  procureurs  géné- 
raux ou  leurs  substituts,  les  juges  d'instruction  et  les 
juges  de  paix,  à  continuer  hors  de  leur  ressort  les  visites 
n£essaires  chez  les  personnes  soupçonnées  d'avoir  fabri- 
qué, introduit,  distribué  de  faux  papiers  de  l'État,  de 
faux  billets  de  la  Banque  de  France,  ou  de  la  fausse  mon- 
naie. —  Les  gardes  forestiers  et  les  préposés  dos  douanes 
peuvent  faire  des  perquisitions  pour  trouver  les  objets 
qui  ont  été  soustraits  aux  droits  dus  à  l'État.  Les  em- 
ployés des  Contributions  indirectes  peuvent  faire  des 
perquisitions  chez  les  débitants  de  liquides.  Les  voitures 
de  messageries  et  toutes  personnes  qui  font  habituelle- 
ment des  transports  sont  soumises  à  des  perquisitions 
dans  l'intérêt  de  l'administration  des  postes. 

PERRON  ( pour  pierron,  construction  en  pierre),  esca- 
lier extérieur  et  découvert,  composé  d'un  peUt  nombre 
de  marches,  construit  sur  un  massif  au  devant  de  l'en- 
trée d'un  étage  peu  élevé  au-dessus  du  rez-de-chaussée, 
ou  pour  arriver  à  quelque  terrasse  dans  un  jardin.  Un 
perron  peut  être  carré,  ou  cintré,  ou  à  pans  ;  il  est  simple, 
s'il  n'a  qu'une  rampe,  et  double,  s'il  en  a  deux. 

PERROQUET,  en  termes  de  Marine,  voile  carrée  d«i 
toile  légère  (^ui  surmonte  les  huniers.  La  vergue  qui 
porte  cette  voile  s'appelle  vergue  de  perroquet.  Il  y  a  un 
grand  perroquet,  qui  surmonte  le  grand  hunier;  un 
petit  perroquet ,  sur  le  petit  hunier;  et  un  3*  perroquet, 
dit  perruche.  Ces  voiles  servent  dans  les  beaux  temps. 
On  nomme  Perroquets  d'hiver  des  perroquets  plus  pe- 
tits que  ceux  qu'on  porte  dans  la  belle  saison.  —  Le  mât 
de  perroquet  est  le  3*  m&t  en  élévation  ;  porté  par  le  mât 
de  hune ,  il  supporte  lui-même  le  m&t  de  cacatois. 

PERRUQUES.       l  V.  ces  mots  dans  notre  Dictioï^ 

PERRUQUIERS.  \      naire  de  Biogr.  et  d: Histoire. 

PERSE  (Arts  de  la).  Les  monuments  d'architecture  des 
anciens  Perses  n'avaient  point  d'analogie,  comme  le  pen- 
sait le  comte  de  Caylus,  avec  ceux  de  l'Egypte  ;  ils  foi^ 
maient ,  ainsi  que  ceux  de  la  Médie,  une  branche  de  l'art 
assyrien  (V.  ce  mot).  La  cause  en  est  ({ue  l'Empire  as- 
syrien s'étendit  sur  la  plus  grande  çarbe  de  l'Iran.  Les 
constructions  antérieures  à  Cyrus  doivent  être  cherchées 
dans  la  Médie  :  le  ch&teau  d'Ecbatane,  b&tî  sur  une  hau- 
teur en  forme  de  terrasse,  et  dont  les  sept  enceintes  cré» 
nelées,  s'élevant  les  unes  au-dessus  des  autres,  étaient 
revêtues  d'un  enduit  de  sept  couleurs  différentes  (  pro- 
bablement de  briques  coloriées),  contenait  un  palais  et 
un  temple  dont  le  toit  était  formé  de  tuiles  d'argent 
massif,  et  dont  les  colonnes,  les  poutres,  les  caissons  en 
bois  de  cèdre  et  de  cyprès,  étaient  revêtus  de  lames  d'or 
et  d'argent.  Le  palais  de  Suse,  que  les  Grecs  nommaient 
Memuonia,  était  d'architecture  babylonienne,  ce  que 
prouvent  non-seulement  les  témoignages  de  l'Antiquité, 
mais  encore  les  amas  de  briques,  quelquefois  coloriées, 
qu'on  trouve  aujourd'hui  à  Schus.  Dans  la  Perse  propre- 
ment dite,  on  pourrait  citer,  à  Pasargade,  un  palais  des 
Achéménides  et  le  tombeau  de  Cyrus;  mais  le  seul  mo- 
nument qui  subsiste  est  le  palais  de  Persépolis  (F.  ce 
mot  dans  notre  Dictionnaire  ae  Biographie  et  d'Histoire), 
A  Persépolis  se  trouvaient  également  les  monuments  fu- 
néraires des  Achéménides;  on  suppose  qu'un  de  ceux  qui 
ont  été  trouvés  au  mont  Rachmed  est  le  tombeau  de  Da- 
rius. Le  palais  de  Persépolis  et  les  bas-reliefs  de  Bisou- 
toun  (  V.  ce  mot  dans  notre  Dtc^tonnatr^  de  Biographie  et 
d'Histoire)  peuvent  aussi  donner  une  idée  de  la  sculp- 
ture des  Perses.  Ce  peuple  fabriquait  des  tapis  orués  de 
personnages;  mais  rien  ue  prouve  que  ces  fibres  aient 
été  bien  exécutées,  et  Ton  ignore  sUl  y  eut  véritablement 
en  Perse  un  talent  quelconque  de  peintoro.  Les  Penu» 


PER 


un 


PER 


n'aimaient  pas  la  musique;  ils  la  considéraient  comme 
dangereuse  pour  l'&me,  et  l'on  n'entendait  que  rarement 
des  hymnes  en  Thonneur  des  dieux  ou  des  rois.  La  danse 
leur  paraissait  ^^ement  nuisible  aux  bonnes  mœurs. 
Mais  le  contact  des  Mèdcs  fit  disparaître  cette  barbarie 
primitive,  et  la  musique  devint  chez  les  Perses,  non-scu- 
Icmcnt  ono  auxiliaire  de  la  poésie  et  de  la  mimir^ue, 
mais  un  art  indépendant.  K.  Silvestre  de  Sacy,  Mémoires 
sur  diverses  antiquités  de  la  Perse,  Paris,  1793;  lloeck, 
Veteris  Mediœ  et  Persiœ  monumenta,  Gœttingue,  1818, 
in-4*;  Maurice,  Observations  on  the  ruins  of  Dabylon 
and  Persepolis,  Londres,  1816-18,  2  vol.  in-4°  ;  Bucking- 
ham,  Travels  in  Assyria,  Media  and  Persia,  Londres, 
1830,  2  vol.  in-8«;  Texier,  Description  de  V Arménie,  de 
la  Perse  et  de  la  Mésopotamie,  Paris,  1842,  in-fol.; 
Flandin  et  Coste,  Voyage  en  Perse,  Paris,  1850,  2  vol. 
in-S"  et  6  vol.  d'atlas  in-fol.  ;  Fergusson ,  The  palaces  of 
^'ineveh  and  Persepolis  restored,  Londres,  1851,  in-S**. 

PEKSB  ^Langues  de  la),  groupe  de  langues  indo-euro- 
péennes (K  ce  mot)  parlées  entre  le  Tigre  et  l'Iudus.  Ce 
groupe  comprend  le  send,  le  peMvi,  le  déri,  le  far  si  ou 
parsi  (V.  ces  fnots)^  qui  ont  été  en  usage  à  diverses 
époques  de  l'Antiquité  dans  TEmpire  des  Perses,  et  le 
persan  moderne,  formé  par  le  mélange  d'éléments  indi- 
gènes avec  un  élément  arabe  apporté  par  la  conquête  mu- 
sulmane. Adelung  regardait  le  persan  -primitif  ^zend, 
pehlvi,  farsi)  comme  aussi  ancien  que  le  sanscnt,  et, 
selon  Othmar  Franck,  il  lui  aurait  m^me  donné  nais- 
sance; mais  ces  opinions  n'ont  pas  été  admises  par  les 
linguistes,  et  l'on  s'accorde,  avec  W.  Jones  et  Fréd.  de 
Schlegel,  pour  voir  dans  le  persan  un  dérivé  du  sans-' 
crit.  Le  persan  moderne  a  fait  subir  au  zend  et  au  pehlvi 
des  altérations  notables  :  par  exemple,  il  en  a  contracté 
les  voyelles  médiales  et  supprimé  les  finales,  rejetant 
ainsi  la  plupart  des  longues  terminaisons  de  ces  deux 
langues.  Sa  constitution  grammaticale  présente  des  rap- 
ports nombreux  avec  celle  du  sanscrit ,  malgré  certaines 
simplifications  de  formes«  Les  termes  arabes  qui  s'y  sont 
introduits  ont  fait  perdre  une  partie  de  la  nomenclature 
primitive,  mais  sans  modifier  notablement  les  règles  de 
la  grammaire  et  de  la  syntaxe.  Ces  termes  sont  d'autant 
plus  nombreux  dans  les  écrivains  qu'on  se  rapproche  da- 
vantage de  notre  époque.  Les  savants  de  l'Allemagne  ont 
remarqué  que  le  persan  ressemble  plus  qu'aucune  autre 
langue  orientale  aux  langues  germaniques  :  c'est  une 
preuve  nouvelle  qu'il  n'a  point  été  fondamentalement 
transformé  par  l'invasion  des  locutions  arabes  et  de  celles 
qu'il  a  encore  empruntées  aux  Turcomans.  Le  persan  ne 
distingue  pas  de  genres  dans  les  substantifs  et  dans  les 
adjectifs  ;  il  manque  d'article  défini.  Comme  le  turc  et  les 
langues  sémitiques,  il  peut  remplacer  par  de  simples 
aifixes  les  adjectifs  possessifs.  La  terminaison  an  est  la 
terminaison  ordinaire  du  pluriel  et  de  l'infinitif,  comme 
m  en  allemand.  Un  seul  temps,  le  prétérit ,  est  suscep- 
tible de  prendre  des  flexions  différentes  dans  des  verbes 
différents;  les  autres  suivent  tous  une  môme  conjugaison. 
Dans  les  temps  secondaires  de  la  voix  active  et  dans  tous 
les  temps  de  la  voix  passive,  on  emploie  un  système 
d'auxiliaires  analogue  à  celui  des  Allemands  et  des  An- 
glais. Les  modes  conditionnel  ou  optatif  et  subjonctif 
manquent;  on  ^  supplée  par  l'indicatif  accompagné  de 
particules.  Ainsi  que  le  sanscrit,  le  grec  et  l'allemand, 
le  persan  peut  former  des  composés  de  toute  espèce  par 
la  simple  juxtaposition  des  radicaux.  Il  a  aussi  un  nomnre 
considérable  d'idiotismes  qui  se  traduisent  littéralement 
en  autant  d'idiotismes  germaniques.  Des  21  à  23,000  mots 
qu'on  trouve  dans  les  meilleura  dictionnaires  persans,  il 
y  en  a  1,500  dans  le  zend,  et  environ  4,000,  avec  plus  ou 
moins  de  changement,  dans  le  vocabulaire  allemand.  La 
prononciation  du  persan  est  douce  et  harmonieuse  :  l'ac- 
cent, placé  d'ordinaire  sur  la  dernière  syllabe  des  mots, 
peut  être  suffisamment  varié  pour  ne  point  engendrer  la 
monotonie.  C'est  une  langue  euphonique,  pleine  de  figures 
et  d'images,  éminemment  propre  à  la  poésie  :  bien  qu'elle 
ne  soit  guère  en  usage  aujourd'hui  à  la  cour,  où  règne 
une  dynastie  turcomane,  elle  conserve  le  rang  de  langue 
officielle  dans  les  audiences  solennelles  des  princes,  dans 
les  cours  de  Justice,  dans  les  actes  émanant  de  l'autorité, 
et  on  la  parle  même  dans  l'Inde  entière  parmi  les  mu- 
sulmans de  qualité.  Les  règles  de  la  versification  persane 
ont  été  empruntées  à  l'arabe. -L'écriture,  qu'on  appelle 
taalik  (  suspendue  ),  est  une  variété  légère  et  hardie  de 
l'écriture  arabe  :  seulement ,  il  est  8  lettres  arabes  qui 
ne  trouvent  pas  leur  place  dans  les  mots  de  pure  origine 
persane,  et  les  Persans  en  ont  créé  4  nouvelles,  pour  n>* 
présenter  de»  sons  particalierB  de  leur  prononciation. 


K.  Louis  de  Dieu ,  Rudimenta  linguœ  perstcœ ,  Leyde, 
1629  ;  Gravius,  Elementa  linguœ  persicœ^  Londîres,  1641, 
in-8^;  Burton,  H istoria  veteris  linguœ  perstcœ,  Londres, 
1657;  CastelU,  I^exicon  persicum,  ibid.^1660,  in-fol.; 
Meninski,  Lexicon  arabico-persico-turcicum.  Vienne, 
1680,  in-8^;  Ange  de  La  Brosse  de  SaintKloseph ,  Gazo- 
phylacium  linguœ  persicœ,  Amst.,  1684,  in-fol.;  Ignatius 
à  Jesu,  Grammatica  linauœ  perstcœ,  Rome,  1601,  in-4<'; 
Anauetil-Duperroo,  Rechercnes  sur  les  anciennes  lançues 
de  la  Perse,  dans  les  Mém,  de  l*Acad,  des  Inscriptions, 
t.  XXXI;  Reland,  De  reliquiis  veteris  linguœ  persicœ, 
dans  ses  Dissertationes  miscellaneœ,  t.  Il;  W.  Jones, 
Grammar  of  the  Persian  language,  Oxford,  1*771,  trad. 
en  français  par  Garcin  de  Tassy,  1845;  J.  Richardson, 
Dictionary  persian,  arabùs  and  english^  Oxford,  1777, 

2  vol.  in-fol.,  et,  avec  augmentations  de  Johnson,  Lon- 
dres, 1829;  Gladwîn,  Persian  Vocabulary,  1780;  Fr.  de 
Dombay,  Grammatica  lingtiœ  persicœ,  Vienne,  1804, 
in-4®;  Wilken,  Institutiones  ad  fundamenla  linguœ  per-* 
sicœ,  Leipzig,  1805,  in-8<^  ;  O.  Franck,  De  Persidis  lingua  et 
ingenio,  Nuremberg,  1800;  Lumsden,  A  Grammar  ofthe 
persian  langtuige,  Calcutta,  1810,  2  vol.;  Beft  Kulsum, 
ou  les  Sept  mers,  dictionnaire  imprimé  par  ordre  du 
sultan  d'Oude,  Lacknau,  1822,  7  vol.;  Handjeri,  Diction* 
naire  français,  arabe,  persan  et  turc,  Moscou,  1840-42, 

3  vol.  in-4<'  ;  Wullera.  institutiones  linguœ  persicœ  cum 
sanscrUa  etxendica  lingua  comparatœ,  Gies&en,  1840; 
Rosen,  Elementa  persica,  Berlin,  1843,  in* -8°;  Duncau 
Forbes,  A  Grammar  of  the  persian  language,  Londres, 
1844;  Geitlin,  Principia  grammatices  neo-persicœ,  Hel- 
slngfora,  1845 ,  in-8<*;  Mirza-Ibrahim ,  Grammaire  de  la 
langue  persane,  traduite  en  allemand  par  Flcischer,  Leip- 
zig, 1847,  in-8<*;  WuMerSy  Lexicon  persico-latinum,  Bonn, 
1853;  Bérésine,  Recherches  sur  les  dialectes  persans, 
Kazan,  1853,  in-8». 

PERSE  (Littérature  de  la).  Quand  les  Arabes  firent  la 
conquête  de  la  Perse  au  vu'  siècle  de  notre  ère,  ils  dé- 
truisirent par  l'eau  et  le  feu  les  livres  historiques  et  It 
plupart  des  livres  religieux  du  pays.  Tout  ce  qui  nous  est 
resté  de  ^l'antique  littérature  consiste  dans  les  livres 
zends.  Les  lettres  se  ranimèrent  au  ix*  et  au  x*  siècle, 
sous  la  dynastie  des  Samanides.  La  poésie  fut  alora  inau- 
gurée par  Roudégui,  traducteur  du  livre  de  Calila  et 
Dimna  (7.  ce  mot)^  et  par  Balami,  qui  écrit  une  version 
persane  de  la  Chronique  arabe  de  Tabari,  publiée  en 
français  par  Dubeux  (18351.  Pendant  la  domination  des 
Gaznévides,  parut  Ferdousi,  l'auteur  du  Schah-Nâmeh 
(  V,  ce  mot).  Vinrent  ensuite  :  Anwari,  qui  vivait  vers 
1150,  et  composa  des  odes  ;  Nis&mi,  auteur  d'une  Chamssé 
ou  collection  de  cinq  grands  poèmes  romantiques  ; 
Chak&ni,  poète  lyrique,  qui  fleurit  vera  l'an  1200  ;  Ferid- 
ed-din  Att&r,  auteur  du  Pend-Nàméh  (Livre  du  bon 
conseil),  publié  avec  traduction  française  par  Sacy  en 
1819,  et  du  Mantik  Utlaïr  (le  Langage  des  oiseaux),  pu- 
blié par  Garcin  de  Tassy  en  1857  ;  Djel&l-ed-din-Rûmi, 
considéré  comme  le  plus  grand  des  poètes  mystiques  ; 
Saadi,  Hafiz,  Djàmi,  placés  au  premier  rang  parmi  les 
poètes  de  la  Perse;  Feisi,  qui  prit,  au  xvi*  siècle,  dans  le 
Mahâbharata,  l'épisode  de  Nala  pour  en  faire  le  sujet 
d'une  épopée.  On  a  fait,  dans  des  temps  très-rapprochés 
de  nous,  de  vastes  poèmes  historiques,  tels  que  le  Livre 
des  Rois,  cnii  raconte  l'histoire  moderne  de  la  Perse,  et 
le  George-Ndmeh,  consacré  à  la  conquête  de  l'Inde  par 
les  Anglais.  Il  existe  enfin  une  poésie  populaire,  dont  on 
peut  se  faire  une  idée  par  l'ouvrage  d'A.  Chodxko,  Spe- 
cimens  of  the  popvdar  poetry  of  Persia,  Londres,  1822. 

Les  Persans  sont  le  seul  peuple  mahométan  oui  ait 
cultivé  la  poésie  dramatique.  Les  pièces  de  leur  tjié&tre 
ne  sont  pas  sans  analogie  avec  nos  anciens  Mystères. 
V,  Chodzko,  Sur  la  littérature  dramatique  des  Per* 
sans,  Paris,  1841,  in-8<*.  Parmi  les  nouvelles,  romans, 
contes,  etc.,  fort  nombreux  dans  la  littérature  persane, 
nous  citerons  :  Anwari  Soheili,  imitation  des  fables  in- 
diennes de  Bidpal;  Bfihàri-Danisch  (Printemps  de  la  Sa- 
gesse), par  Inajet-Allah,  que  Scott  a  traduit  en  anglais 
sous  le  titre  de  Garden  of  Knowledge  (1700,  3  vol.);  le 
Tûti-Nâmeh  (Livre  du  Perroquet),  publié  en  anglais  par 
Hadley,  en  persan  par  Iken  et  Kosegarten  (Stuttgard, 
\%22);  Bakiijdr'Nàmeh  (Histoire  du  prince  Baktijar), 
publié  en  anglais  par  Ousely  (  Paris,  1830  ). 

La  littérature  historique  persane  est  très-riche;  mais 
on  n'en  connaît  encore  en  Europe  qu'une  très -faible 
partie.  Parmi  les  livres  imprimés,  on  remarque  :  ïHiS" 
toire  des  Mongols,  écrite  vera  l'an  1320  par  Ruchid- 
Eddin,  et  traduite  en  français  nar  Quatremère  (  Paris, 
1836];  VHisloin  de  Tmour  (Tamerlan),  par  Scherif* 


PER 


1412 


PER 


Eddin-Jesdi,  traduite  par  Pétis  de  La  Croix^  Parig,  1734. 
D*une  grande  Histoire  universelle  de  Mirkhond,  on  a 
extrait  lei  ouvrages  suivants  :  Histoire  des  Samanides, 
publiée  par  Defrémeiy,  Paris,  1845;  Histoire  des  Gainé- 
vides  et  Histoire  des  BotUdeSj  par  Wilken,  Berlin,  1832 
et  1835;  Histoire  des  Sassantdes,  que  Sacy  a  traduite  en 
français,  Paris,  1793  ;  Histoire  des  Ismaélites^  publiée 
par  Jourdain,  Paris,  1812;  Histoire  des  Sel^oucides, 
par  Wullers,  Giessen,  1837;  Histoire  de  Gengis-Khan, 
par  Jaubert,  Paris,  1841  ;  Histoire  des  sultans  du  Khor 
risnif  par  Defirémery,  Paris,  1842.  Nous  clouterons  V His- 
toire de  VInde  de  Ferischta,  traduite  en  anglais  par 
Briggs,  Londres,  1820, 4  vol.  ;  les  Institutions  de  Timour, 
publiées  en  anglais  par  White,  Oxford,  1783;  les  Wà- 
kiâti  Babûri,  ou  la  vie  de  Babour  racontée  par  lui-même, 
traduct  anglaise  d'Ëi-skine,  Edimbourg,  1826;  la  Des- 
cription de  VEmpire  du  Mogol  dans  l'Inde  sous  Akbar, 
publiée  en  anglais  par  Gladwin,  Calcutta,  1783,  2  vol.; 
V Histoire  de  Nadir-Schah,  publiée  en  français  par  Jones, 
I.ondres,  1770;  V Histoire  des  Afghans  de  Neamet- 
tlllah,  trad.  en  anglais  par  Dorn,  Londres,  1829,  2  vol.  ; 
VHistoire  de  VInde  de  1705  à  1782,  par  Gholam-Husafn- 
Khan,  trad.  anglaise,  Calcutta,  1780,  3  vol.;  le  Measiri 
SuUanijje,  bistoire  deja  dynastie  actuellement  régnante, 
trad. 
hlâm^ 

renseignements 
bistân,  exposition  de  toutes  les  religions  de  l'Asie,  trad. 
en  anglais  par  Troyer,  Londres,  1843,  3  vol. 
PERSE  (Faïences  de  la).  V.  au  Supplément. 
PERSE  (Religion  de  la).  V.  Zbnd-Avesta. 
PERSES  (Monnaies).  Les  Perses  paraissent  s'être  servis 
de  la  monnaie  principalement  dans  leurs  relations  avec 

des  mercenaires  et 
les  peuples  mari- 
times de  l'Empire 
dont  on  prenait  les 
navires  a  louage , 
car  il  ne  parait 
point  que  les  Per- 
ses aient  Jamais  eu 
une  marine  à  eux.  Ils  employaient  les  métaux  précieux 
pour  réchange  à  l'intérieur,  mais  au  poids.  Dans  le  tré- 
sor de  Darius,  Tor  monnayé  était  en  très-petite  quantité. 
Darius,  fils  d'Hystaspes,  fit  (hipper  les  premières  monnaies 
perses  qui ,  de  son  nom,  furent  appelées  Dariques,  En 
voici  une  dont  le  droit  montre  le  roi  traîné  dans  un  char, 
et  le  revers  la  ^lère  phénicienne  portée  sur  les  flots. 

D'antres  Dariques  frappées  par  Xerxès  représentent  le 
roi,  tantôt  en  sagittaire  avec  la  tiare  sur  la  tête,  le  genou 
3n  terre,  et  l'arc,  emblème  du  rang  souverain ,  comme 

ci-contre  ;  tantôt  sur  le  char.  Hé- 
rodote nous  montre  le  grand  roi 
porté  en  litière,  mais  montant 
sur  un  chariot  pour  traverser  les 
villes  et  les  endroits  populeux. 
Sur  certaines  Dariques  figure,  à 
la  proue  des  navires,  le  Patèque, 
divinité  phénicienne,  mais  dif- 
forme :  elles  portent  souvent  des 
légendes  phéniciennes.  On  a 
frappé  des  Dariques  en  or  et  en 
argent,  de  simples  et  de  doubles  Dariques. 

Les  Cyzicènes,  monnaies  de  Cyzique,  le  plus  grand 
centre  oriental  de  fabrication  monétaire,  parafesent  s'être 
substituées  peu  à  peu  aux  Dariques,  qui  avaient  une 
grande  réputation  de  pureté.  Les  plus  anciennes  Cyzi- 
cènes  peuvent  être  attribuées  à  Crésus  :  on  a  cru  lire  sur 
plusieurs  le  nom  de  Cyrus ,  qui  aurait  été  substitué  à 
celui  de  Crésus  après  la  conquête  de  la  Lydie.         D. 

PERSÉPOUS  (Ruines  de).  V,  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d*Bistotre, 

PERSIENNE,  sorte  de  Jalousie  fixe,  dont  les  lames  in- 
clinées sont  assemblées  dans  un  cb&ssis.  Les  persiennes, 
dont  le  nom  vient  sans  doute  de  ce  qu'on  les  suppose 
originaires  de  la  Perse,  sont  placées  en  dehors  des  fe- 
nêtres pour  garantir  du  soleil  l'intérieur  des  apparte- 
ments; elles  s'ouvrent  à  un  ou  deux  vantaux,  se  repliant 
encore  quelquefois  sur  eux-mêmes,  au  moyen  de  char- 
nières. Les  persiennes  se  font  en  bois  de  chêne  ou  de 
sapin.  Any  Halles  centrales  de  Paris,  les  baies  des  parties 
hautes  de  chaque  pavillon  sont  garnies  de  persiennes 
fixes  en  lames  de  cristal  dépoli,  pour  laisser  passer  le 
jour  en  abritant  des  rayons  solaires.  B. 

PËR8IQUES  (Colonnes),  nom  donné  par  les  anciens 
Grecs  à  des  colonnes  doriques  dans  lesquelles  le  fût  était 


remplacé  par  des  figures  d'esclaves  perses,  qui  suppcff^i 
talent  un  entablement. 

PI^RSONNAUTÉ,  caractère  en  vertu  duquel  un  être 
mérite  le  nom  de  personne.  Le  sentiment  de  la  person- 
nalité entraîne  la  responsabilité»  L'exagération  de  ce  sen- 
timent est  VégOUsme.  —  Dans  un  autre  sens,  une  per- 
sonnalité est  un  trait  piquant,  injurieux  et  personnel 
contre  quelqu'un. 

PËRSONNAT,  en  termes  de  Droit  canonicpe,  bénéfice 
qui  donnait  quelque  prérogative  ou  prééminence  dans 
une  église,  dans  un  chapitre,  mais  sans  juridiction. 

PERSONNE,  être  qui  a  conscience  de  son  existence  et 
de  son  individualité.  Le  minéral,  le  végétal,  l'animal 
même  sont  des  choses;  l'homme  est  une  personne,  —  En 
Droit,  la  dénomination  de  personne  civile  s'applique  : 
1^  à  l'État;  2<'  aux  départements,  aux  communes  et  à 
leurs  sections,  aux  lycées,  évêchés,  cures,  teoaples,  éta- 
blissements publics ,  en  ce  sens  qu'ils  jouissent  de  cer- 
tains droits  civils,  tels  que  ceux  d'acquérir,  de  posséder, 
de  vendre,  etc.  ;  3*'  aux  sociétés  scientifiques  ou  de  bien- 
faisance déclarées  établissements  d'utilité  publique; 
4°  aux  sociétés  en  nom  collectif  ou  en  commandite;  5®  aux 
sociétés  anonymes. 

PERSONNE  (du  \9,i\n  persona,  personnage,  rôle),  per- 
sonnage, rôle  que  joue  dans  le  discours  le  nom  ou  le 
pronom.  Il  y  a  trois  personnes  :  la  1^  est  celle  qui  parle, 
la  2*  celle  à  qui  l'on  parle,  et  la  3*  celle  de  qui  l'on 
parle.  La  1'*  personne  se  désigne  en  français  par  le  pro- 
nom je,  nous;  la  2*  par  le  pronom  tu^  votis;  la  3*,  soit 
par  le  nom  même,  soit  par  le  pronom  il,  ils  au  masculin, 
elle,  elles  au  féminin.  Les  langues  anciennes  suppriment 
habituellement  les  pronoms  personnels  employas  comme 
sujets,  l'inflexion  du  verbe  déterminant  avec  une  préci- 
sion su£Qsante  le  rôle  du  sujet;  elles  ne  les  expriment 
3ue  pour  donner  du  relief  à  l'expression  de  la  pensée,  ou 
ans  les  situations  animées,  ou  lorsqu'il  y  a  une  opposi- 
tion, un  contraste  à  faire  ressortir.  V,  Pronom.        P. 

PERSONNELLE  (Contribution),  une  des  contributions 
directes.  Elle  se  compose  de  la  weur  de  trois  Journées 
de  travail.  Le  Conseil  génâral,  dans  chaque  département, 
doit,  sur  la  proposition  du  Préfet,  déterminer  le  prix 
moyen  de  la  journée  de  travail  pour  chaque  ^mmune^ 
sans  pouvoir  le  fixer  au-dessous  de  50  centimes,  ni  au- 
dessus  de  1  fr.  50  c.  La  taxe  personnelle  »t  due  dans  la 
commune  du  domicile  réel  partout  habitant.  Français  ou 
étranger,  de  '^out  sexe.  Jouissant  de  ses  droits  et  non  ré- 
puté indigent.  Sont  considérés  comme  jouissant  de  leurs 
droits  :  les  veuves,  et  les  femmes  séparées  de  leurs  maris; 
les  garçons  et  les  filles,  majeurs  ou  mineurs,  ayant  des 
moyens  particuliers  et  sufiisants  d'existence,  lors  même 
qu'ils  habitent  avec  leur  père,  mère,  tuteur  ou  curateur. 
Les  domestiques  logés  et  nourris  chez  leurs  maîtres  ne 
sont  pas  imposables;  mais  les  précepteurs,  les  dames  ie 
compagnie,  les  hommes  d'affaires,  les  concierges,  les 
gardes  particuliers,  les  personnes  logées  comme  pension- 
naires, supportent  la  taxe. 

PERSONNIFICATION,  figure  de  Rhétorique  qui  con- 
siste à  faire,  d'un  être  inanimé  ou  d'une  pure  abstraction, 
un  personnage  réel,  doué  de  vie  et  de  sentiment.  Ainsi, 
La  Fontaine  a  dit  (vi,  fab.  Si)  : 

Sar  les  ailes  da  Terni»  la  Triitesae  t*enTole. 

L'Allégorie  et  la  Prosopopée  supposent  le  plus  souvent 
une  personnification. 

PERSPECTIVE  (du  latin  perspicere,  voir  clairement), 
art  de  représenter  sur  une  surface  plane  ou  courbe  les . 
corps  ou  les  objets,  tels  qu'ils  paraissent  vus  à  une  di- 
stance et  dans  une  position  données.  Elle  comprend  le 
dessin,  c.-à-d.  l'ensemble  des  lignes  qui  déterminent  le 
contour  du  tout  et  des  parties,  le  clair-obscur,  qui  en 
fait  sentir  le  relief,  et  le  coloris,  qui  en  montre  la  vé- 
ritable apparence.  Bornée  au  dessin,  la  perspective  est 
dite  linéaire,  et  c'est  la  géométrie  descriptive  qui  ea 
fournit  les  règles;  quand  les  ombres  ou  les  couleurs  sont 
jointes  au  dessin ,  on  la  dit  aérienne,  parce  qu'elle  a 
pour  objet  la  modification  de  la  lumière  et  de  l'ombre 
en  raison  de  la  masse  d'air  qui  se  trouve  entre  le  des- 
sinateur et  l'objet  qu'il  représente.  Dans  une  longue 
guérie,  les  lignes  de  bSilJments,  au  lieu  de  demeurer 
pour  l'œil  telles  qu'elles  sont  réellement,  et  d'être  pa- 
rallèles, semblent  se  rapprocher  l'une  de  l'autre  à  pro- 
portion de  la  distance  où  elles  sont  du  spectateur.  Ces 
phénomènes  sont  ceux  que  la  perspective  enseigne  à  re- 
produire. Elle  donne  aussi  les  règles  de  la  reproduction 
des  ombres  portées  par  les  objets,  des  figures  réfléchici, 
des  raccourcis,  des  plafonds  et  des  voûtes»  etc.  Les  ta* 


PÊR 


1413 


PÉR 


bleauz  peints  en  panorama  sont  la  plus  saisissante  ap-  I 
pUeadon  de  la  perspective  linéaire  et  aérienne.  ! 

La  perspectiVe  était  connue  des  Anciens.  Le  poète 
Eschyle,  au  rapport  de  Vitruve,  enseignait  an  peintre 
Âgatharque  à  mettre  en  perspective  les  décorations  des- 
tinées à  ses  tragédies  :  Agatharque  fit  même  sur  ce  sujet 
an  traité,  que  Démocrite  et  Anaxagore  complétèrent; 
leurs  écrits  ne  nous  sont  pas  parvenus.  Les  peintures 
d'Herculanum  et  de  Pompéi,  les  bas-reliefs,  les  médailles, 
prouvent  que  la  perspective  était  pratiquée  chez  les  Ro- 
mains. Biais  cette  science  n*a  été  poussée  Jusqu^à  la  per- 
fection que  par  les  Modernes.  Pietro  del  Bozzo,  Albert 
DQrer,  Balthazar  Peruzzi ,  Guido  Ubaldi ,  en  ont  donné 
les  règles.  K.  D.  Barbaro,  Praitica  délia  prospettiva, 
Venise,  4559,  în-fol.;  J.  Cousin,  Livre  de  perspective, 
Paris,  1560,  in-fol.;  André  Du  Cerceau,  Leçons  de  per^ 
spective,  1576,  in -fol.;  André  Alberti,  Traité  de  Perspec- 
tivcy  eu  allemand  et  en  latin,  Nuremberg,  1623  et  1670, 
in-fol.;  le  P.  Nicéron,  Perspective  cwrieusey  Paris,  1652; 
Abraham  Bosse,  Manière  universelle  de  M,  Desargues 
pour  pratiquer  laperspecHve,  1648,  2  vol.  ;  Ozanam,P0r5- 
pective  théorique  etpratique,  1711,  in-8<*;  Amato,  Nuova 
pratica  dt  Prospettiva,  Palerme,  1736,  in-fol.;  Monge, 
Théorie  des  ombres  et  ie  laperspective  (dans  sa  Géométrie 
descriptive)  ;  Yalenciennes,  Êlemetits  de  perspective  pra- 
tique, 2«  écUt,  Paris,  1820,  in-4<>;  Thibault,  Aj^lication 
de  la  Perspective  linéaire  aux  arts  du  dessin,  Paris, 
1827,  in-4®;  Ch.  Normand,  Parallèle  des  diverses  mé- 
thodes de  Perspective,  diaprés  les  auteurs  anciens  et 
modernes,  Paris,  1833,  in-4°;  les  Traités  de  Perspective 
por  Lant  et  par  J.-B.  Cloquet  ;  les  Principes  de  permec- 
tive  linéaire  par  Bouillon  ;  la  Nouvelle  Théorie  simplifiée 
de  la  Perspective  par  Sutter,  in-4o. 

PERSUASION,  adhésion  de  Tesprit  à  ce  qui  lui  a  été 
pn^nté  comme  vrai.  Déterminée  le  plus  souvent  par  des 
raisons  qui  s'adressent  au  cœur  et  gui  peuvent  tromper, 
elle  se  distingue  en  cela  de  la  Conviction,  fondée  sur  des 
preuves  d*nne  évidence  irrésistible.  La  Persuasion  peut 
être  plus  ou  moins  forte  :  la  Conviction  n*est  pas  suscep- 
tible de  degrés  ;  elle  est,  ou  elle  n*est  ^s. 

PERTIGÂ,  nom  latin  qu'on  donnait  autrefois  à  des 
poutres  placées  derrière  Tautel  ou  sur  les  côtés,  et  qui 
servaient  à  suspendre  des  reliques  les  jours  de  grande  fête. 

PERTUIS  (du  latin  pertusus,  percé,  ouvert),  nom 
donné,  en  Géographie,  l»  à  certaines  passes  de  TOcéan 
sur  les  côtes  occidentales  de  la  France,  comme  le  Per- 
tuis  d'Antioche,  entre  les  lies  de  Ré  et  d'OIéron,  et  le 
Pertuis  Breton ,  entre  l'île  de  Ré  et  le  continent  ;  %^  à 
un  passage  étroit  entre  des  montagnes,  comme  le  Pertuis 
Boston  dans  les  Alpes,  près  de  Bnançon.  —  On  nomme 
encore  Pertuis  un  passage  étroit  pratiqué  dans  une  ri- 
vière, au  moyen  de  deux  batardeaux,  pour  élerer  le 
niveau  de  l'eau  et  faciliter  ainsi  la  navigation. 

PËRTUISANE,  arme.  V,  ce  mot  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d'Histoire. 

PÉRUVIEN  (Art).  Les  Péruviens,  avant  Tarrivée  des 
Espagnols,  possédaient  des  monuments  d'Architecture. 
Au  milieu  des  plaines,  sous  un  ciel  doux  et  pur,  les  habi- 
tations pouvaient  être  légères  et  mal  closes;  elles  consis- 
taient en  buttes  rondes,  couvertes  de  branchages  et  de 
terre,  comme  sont  maintenant  celles  des  Indiens  du  pavs. 
Mais,  dans  la  région  montagneuse,  où  les  pluies  sont  fré- 
quentes et  le  froid  assez  vif,  il  fallait  des  demeures  plus 
solides,  et  un  assez  grand  nombre  de  ces  maisons  se  sont 
conservées  jusqu'aux  temps  modernes.  Elles  sont  ordi- 
Durement  de  forme  carrée,  hautes  de  2  à  3  met.,  faites 
de  briques  durcies  au  soleil,  et  dépourvues  de  fenêtres; 
la  porte  d'entrée  est  étroite  et  basse.  —  Le  talent  des  ar- 
chitectes péruviens  s'est  surtout  révélé  dans  la  construc- 
tion des  temples  et  des  palais.  Les  descriptions  pom- 
peuses que  les  écrivains  espagnols  ont  faites  de  ces 
édifices  pourraient  passer  pour  mensongères  ou  exagérées, 
si  des  ruines  parfaitement  conservées  n'attestaient  leur 
véracité.  Les  Péruviens,  ignorant  l'usage  de  la  poulie  et 
des  autres  moyens  mécaniques  inventés  dans  l'ancien 
monde,  et  ne  pouvant,  par  conséquent,  élever  à  une 
grande  hauteur  les  pierres  énormes  dont  ils  se  servaient, 
ne  donnèrent  à  aucune  muraille  plus  de  4  met  de  hau- 
teur, ei  l'on  ne  sait  même  pas  comment  ils  pouvaient 
élever  les  pierres  jusque-là;  car  Acosta  en  a  mesuré  qui 
avaient  10  met.  de  lonp,  6  met.  de  large  et  2  met.  d'épais- 
seur. Les  pierres  destinées  aux  grands  b&timents  ne  re- 
cevaient généralement  point  de  l'ouvrier  une  forme  qui 
les  rendit  plus  faciles  à  placer  et  à  consolider;  on  les 
employait  telles  qu'elles  tombaient  des  montagnes  ou 
sortaient  des  carrières,  et  il  fallait  un  grand  art  pour  ap- 


pareiller des  masses  carrées,  triangulaires,  sphériques  oa 
polygonales,  de  manière  à  former  un  ensemble  homogène. 
Cette  idée  de  ne  point  égaliser  les  surfaces  des  blocs 
s'explique  aisément  :  n'ayant  ni  ciment  ni  mortier,  les 
Péruviens  pensaient  avec  raison  qu'ils  obtiendraient  plus 
de  solidité  en  construisant  leurs  murs  de  pierres  iné- 
gales, mais  parfaitement  jointes  et  s'équilibrant  les  unes 
avec  les  autres.  Du  reste,  on  ne  s'en  tint  pas  toujours  à 
ce  mode  de  construction  ;  car,  dans  plusieurs  monuments 
de  Cuzco,  ainsi  qu'au  palais  de  Caf^ar,  décrit  par  La  Con- 
damine  {Mém*  de  l'Âcad.  de  Berlin,  1746),  il  y  a  des 
assises  exactement  parallèles  et  de  hauteur  égale,  si  bien 
unies  qu'on  en  distingue  difficilement  les  joints.  On  a 
pensé  que  les  Péruviens  s'étaient  servis  d*argile  pour 
joindre  ainsi  leurs  blocs  de  pierre.  Les  grands  édifices, 
pas  plus  que  les  maisons  particulières,  ne  paraissent 
avoir  eu  de  fenêtres;  les  pièces,  ne  recevant  de  jour  que 
par  la  porte,  devaient  être  fort  obscures,  à  moins  qu'eAes 
ne  fussent  éclairées  par  le  haut,  ce  dont  il  n'est  pas 
possible  de  s'assurer  aujourd'hui.  Les  outils  grossiers  et 
tout  à  fait  insuffisants  des  Péruviens  ne  permettent  pas 
de  croire  qu'ils  aient  été  habiles  dans  la  charpenterie  ;  et, 
comme  ils  ne  connaissaient  pas  la  voûte,  comme  ils 
ignoraient  l'usage  des  cintres,  on  ne  saurait  dire  de 
quelle  façon  ils  couvraient  leurs  monuments.  —  Parmi 
les  restes  de  l'antique  architecture  péruvienne,  on  re- 
marque le  temple  de  Pachacamac,  le  palais  de  l'Incaet  la 
forteresse  de  Cuzco,  qui  occupaient  ensemble  une  super- 
ficie de  3  kilomèt.  de  circuit;  Is  temple  de  Cayambo  ;  les 
ruines  d'une  très-grande  ville,  près  de  Caxamarca;  le 
portique  monolithe  d'un  temple,  à  Tiguanaco  ;  un  tom- 
beau de  chef  dans  la  province  de  Carangas,  et  les  ruines 
d'un  temple  des  Incas  dans  une  tle  du  lac  Titicaca  (Bo- 
livie) ;  le  palais  ou  forteresse  de  Cahar,  muraille  en  ovale 
régulier  dont  le  grand  axe  a  35  met.  de  longueur,  et  au 
centre  duquel  se  trouvent  les  ruines  d'une  petite  maison; 
enfin,  près  de  Latacunga,  sur  le  versant  du  Cotopaxi,  le 
Paneculo  (Pain  de  sucre),  tumulus  conique  qui  a  dû  servir 
de  sépulture  à  un  grand  personnage,  et  la  Maison  de 
l'Inca,  vaste  b&timent  carré  où  Ton  voit  encore  4  grandes 
portes  extérieures,  8  chambres,  18  niches  distribuées 
avec  symétrie.  Les  écrivains  espagnols  ont  fait  un  grand 
éloge  dès  deux  routes  que  les  Incas  avaient  construites 
de  Cuzco  à  Quito,  sur  une  longueur  de  2,000  kilomèt., 
Tune  à  travers  les  parties  intérieures  et  montagneuses  du 
Pérou,  l'autre  dans  les  plaines  qui  s'étendent  le  long  de 
l'Océan.  Il  est  vrai  que,  dans  les  autres  parties  de  l'Amé- 
rique, même  au  Mexique,  les  indigènes  n'ont  point  établi 
de  semblables  voies  de  communication,  et,  à  cet  égard, 
les  Péruviens  étaient  plus  civilisés  :  mais  l'exécution 
même  des  routes  des  Incas  était  imparfaite  ;  elles  n'avaient 
que  5  met.  de  largeur,  et  étaient  si  peu  solides,  qu'on 
ne  peut  en  beaucoup  d'endroits  retrouver  leur  direction  ; 
quelques  vestiges  se  retrouvent  dans  les  parties  mon- 
tueuses  du  pa^s.  Les  Péruviens  n'ont  point  eu,  pour 
traverser  les  rivières,  de  ponts  en  bois  ou  en  pierre  :  ils 
jetaient  d'une  rive  à  l'autre  6  gros  c&bles,  faits  d'osier 
et  de  lianes,  et  les  fixaient  solidement  à  chaque  extré- 
mité; puis  ils  les  réunissaient  au  moyen  de  cordes  plus 
petites,  assez  rapprochées  pour  former  une  espèce  de 
filet;  ils  recouvraient  le  tout  de  branches  d'arbres  et 
ensuite  de  terre,  que  l'on  battait  pour  en  faire  une  sur- 
face dure  et  unie.  On  obtenait  ainsi  des  ponts  solides,  • 
quoique  oscillants,  et  sur  lesquels  les  mules  pouvaient  ' 
passer  toutes  chargées. 

Les  Péruviens  n'avaient  pas  fait  de  grands  progrès 
dans  la  sculpture,  si  l'on  en  juge  par  leurs  statues,  qui 
toutes  ont  les  membres  attacha  au  corps.  Mais  ceux  de 
leurs  vases  qu'on  a  trouvés  dans  les  ruines  ou  dans  les 
tombeaux  feraient  penser  le  contraire  :  on  y  voit  des 
figures  qui  annoncent  l'entente  du  dessin.  Les  Péruviens 
avaient  poussé  assez  loin  l'art  de  fondre,  de  ciseler  les . 
métaux,  et  de  leur  donner  des  formes;  car  on  sait  que« 
dans  le  butin  qui  fut  partagé  entre  les  premiers  conque* 
rants  espagnols,  se  trouvait  une  splendide  image  du. 
soleil,  arrachée  au  temple  de  Cuzco. 

La  musique  avait  sa  place  dans  les  réjouissances  pu- 
bliques ou  privées  des  Péruviens;  mais  elle  dut  être 
d'une  grande  monotonie.  L'instrument  le  plus  usité  était  « 
une  sorte  de  flûte  de  Pan,  formée  de  4  ou  5  tuyaux  de. 
roseau,  rendant  un  son  chacun.  Il  y  arait  des  airs  de 
chanson  très-variés,  mais  qui  ne  nous  sont  point  par- 1 
venus.  La  danse  s'associait  à  la  musique  dans  les  céré*  > 
monies  ;  chaque  province  avait  sa  danse  particulière,  avec 
des  pas  et  un  rhythme  traditionnels.  B. 

PÉRUVIENNES  (Langues).  Il  pwslt  que  les  Incas,  qui  > 


PÉR 


14U 


PÊT 


régnaient  sar  le  Pérou  avant  la  conquête  espagnole,  et 

3ui  représentaient,  non  pas  une  famille  en  possession 
u  pouvoir,  mais  une  race  originairement  distincte  de 
celle  sur  laquelle  ils  exerçaient  Tautorité,  ont  eu  une 
langue  particulière,  inintelligible  pour  leurs  sujets.  Au- 
cun Européen  n*en  a  obtenu  connaissance.  On  distingue 
aujourd'hui  dans  la  population  péruvienne  indigène 
quatre  races  principales,  les  Quichuas,  les  Aymaras,  les 
Moxos  et  les  Ghi^uitoSfet  par  conséquent  quatre  langues. 

Le  quickua,  lien  commun  de  toutes  les  populations , 
présente  cinq  dialectes  principaux  :  le  cuzci*cano  ou  lan- 
gage de  Cuzco,  qui  est  le  plus  pur,  et  que  les  classes 
élevées  se  piquent  de  parler  avec  élégance  ;  le  quitegna^ 
parlé  à  Quito,  remarquable  par  sa  dureté,  par  l'altéra- 
tion de  ses  flexions,  et  par  l'abondance  des  mots  étran- 
gers gui  s'^  sont  introduits;  le  lamanOf  usité  à  Truxillo  ; 
le  chinchaisuyo,  à  Lima;  le  calchaqui,  à  Tucuman.  Le 
quichua  manque  de  nos  articulations  6,  d,  f,  g,  L  v; 
mais  il  en  a  d'autres  qui  nous  sont  inconnues,  et  dont 
quelques-unes ,  saccadée ,  dures ,  tirées  du  fond  de  la 
gorge,  ressemblent  à  des  croassements.  La  déclinaison  a 
trois  cas  ;  les  rapports  autres  que  ceux  exprimés  par  ces 
flexions  se  rendent  à  l'aide  de  prépositions.  La  conju- 
vaison  est  riche  en  temps,  en  modes  et  en  voix;  aucun 
gerbe  n'est  irrégulier,  pas  même  le  verbe  substantif, 
qui  est,  comme  dans  la  plupart  des  langues  européennes, 
l  auxiliaire  de  la  voix  passive.  La  construction  est  fixe  et 
très-simple  :  le  verbe  se  place  uniformément  à  la  fin  de 
la  proposition.  —  Les  Péruviens  ont  eu  une  littérature  : 
ils  composaient  des  poèmes  en  l'honneur  des  grands 
hommes,  des  apologues  moraux,  des  chroniques  en  vers, 
des  œuvres  dramatiques,  etc.  Ces  productions  se  perpé- 
tuaient par  la  tradition  orale;  car  l'écriture  était  ignorée, 
et  l'on  n'y  suppléait  que  très-imparfaitement  par  les  qui- 
pos  {V.  ce  mot  dans  notre DictionruUre  de  BwgrapMe  et 
d'Histoire),  V,  Domingo  de  Saint-Thomas,  Grammatica 
0  arte  de  la  lengua  genertUe  de  los  Indios  de  los  reynos 
del  Peru  Uamada  Quichua,  Valladolid,  1560,  in-S»,  et 
Arte  y  VocabtUario,  Lima,  1586  ;  Diego  de  Terres  Rubio, 
Grammatica  y  Vocabulario  en  la  lengua  générale  del 
Peru  Uamada  Quichua,  Séville,  1603  ;  Diego  Gonzalez 
Holguin,  GrammtUica  y  arte  nueva  de  la  lengua  Qui- 
chua 0  del  Inca,  Lima,  1607,  et  Vocabulario,  1608  ; 
Alonzo  Huerta,  Arle  de  la  lengua  Quichua,  Lima,  1616; 
Diego  de  Olmos,  Grammatica  de  la  lengua  gênerai  del 
Peru,  Lima,  1633,  in-4°;  Mexio  y  Ocon,  Arte  de  la  len- 
gua quichua,  Lima,  1648  ;  Estevan  Malgar,  Arte  quichua, 
Lima,  1691. 

La  langue  aymara,  parlée  dans  le  pays  de  La  Paz,  a  en 
commun  avec  le  quichua  un  vingtième  de  ses  mots,  quel- 
ques formes  grammaticales,  la  richesse  des  verbes,  et  la 
dureté  de  la  prononciation.  Les  rapports  des  noms  s'y  in- 
diquent par  des  postpositions.  V.  Bertonio,  Arte  y  Gram- 
matica de  la  lengua  aymara,  Rome,  1613,  in-8<*  ;  Diego 
de  Terres  Rubio,  Arte  de  la  lengua  aymara,  Lima,  1616. 

Le  mooDO^  en  usage  dans  une  portion  de  la  Bolivie,  ne 
parait  pas  se  rattacher  aux  deux  langues  précédentes, 
mais  plutôt  au  maypure  (F.  ce  mot)^  parlé  dans  la  vallée 
de  rOrénoque.  Il  est  doux  et  harmonieux,  ne  double 
jamais  les  consonnes,  et  manque  des  articulations  d,  f,  L 
On  y  remarque  une  grande  variété  de  formes  dans  la  voix 
passive,  qui  emploie  comme  auxiliaires  une  foule  de 
verbes  exprimant  des  nuances  de  souffrance  ou  de  con- 
trainte. F.  Pedro  Marban,  Arte,  catecismo  y  vocabulario 
mojo,  Lima,  1701. 

I^  langue  chiquito,  parlée  en  Bolivie,  a  un  certain 
nombre  d'articulations  nasales  et  gutturales,  et  cependant 
moins  de  rudesse  que  le  quichua  et  l'aymara.  Elle  manque 
du  verbe  substantif;  faute  de  noms  de  nombre,  elle  em- 
prunte ceux  de  l'espagnol.  On  lui  reconnaît  une  grande 
richesse  d'expressions  destinées  à  rendre  les  nuances  des 
rapports  physiques.  Le  langage  des  femmes  diffère  de 
celui  des  nommes  par  un  certain  nombre  de  mots  et  de 
formes  ;  comme  les  hommes  en  font  usage  pour  s'adresser 
à  la  divinité  et  à  ceux  envers  qui  ils  -marquent  du  res- 
pect,  on  peut  en  conclure  que  ces  mots  et  ces  formes  ont 
simplement  un  caractère  révérencieux,  et  ne  s'expliquent 
point ,  comme  danâ  d'autres  parties  de  l'Amérique,  par 
la  supposition  que  les  femmes  seraient  les  débris  d'une 
population  dont  les  mâles  auraient  été  exterminés. 

Indépendamment  des  quatre  langues  précédentes,  on 
trouve  encore,  dans  la  région  du  Chaco,  celles  des  Abipons 
et  des  Mocobis.  L'abipon  possède  Vô  des  Allemands  et  l'fl 
des  Espagnols  ;  il  est  harmonieux,  et  pauvre  en  monosyl- 
labes; plusieurs  mots  identiques  signifient  des  choses 
différentes,  à  l'aide  d'accents  différents.  Dans  U  construc- 


tion, les  prépositions  précèdent  leurs  réagîmes.  —  Le  mo- 
cobi  manque  des  articulations  f,  ke,  ki,  H,  r,  s,  v.  Des 
particules  servent  à  distinguer  les  nombres,  à  former  des 
diminutifs  et  des  augmentatifs.  Dans  les  verbes,  le  pré- 
sent seul  est  fait  par  flexion;  les  autres  temps  se  forment 
à  l'aide  de  particules. 

PESCHITO.  V.  Bible. 

PESÉE  DES  AMES.  V.  Pstchostasie. 

PESETA.  V.  Piécette. 

PESO ,  c.-&-d.  poids,  monnaie  de  compte  de  l'Espagne, 
la  même  que  la  piastre  forte. 

PESSIMISME  (du  latin  pessimu^,  le  plus  mauvais), 
opinion  de  ceux  qui  croient  que  le  mal  domine  dans  le 
monde  :  c'est  le  contraire  de  l'optimisme  (F.  ce  mot).  Les 

Eessimistes,  à  la  vue  des  phénomènes  qui  semblent  trou- 
1er  l'ordre  général ,  à  l'aspect  des  misères,  des  vices  et 
des  crimes  de  ce  monde,  pensent  que  tout  est  livré  à  une 
puissance  aveugle,  à  la  fatalité,  au  hasard  ;  ou,  du  moins, 
que  l'ordonnateur  suprême  circonscrit  sa  providence  au 
maintien  des  lois  générales,  sans  se  soucier  de  la  multi- 
tude des  êtres  créés.  Dans  la  société,  ils  exagèrent  les 
maux  dont  ils  ont  été  les  témoins  ou  les  victimes,  ne 
croient  à  aucune  vertu ,  ne  prévoient  que  des  malheurs; 
ce  sont  des  esprits  chagrins  et  mélancoliques.  V,  Misan- 
thropie. 

PÉTALISME.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d*Histoire. 

PÉTARD,  machine  dont  on  se  servit ,  après  l'invention 
de  la  poudre,  pour  crever  et  renverser  la  porte  d'une  en- 
ceinte fortifiée.  C'était  une  sorte  de  petit  canon  en  bois, 
on  fer  ou  en  bronze,  de  30  à  40  centimètres  de  long  et 
de  20  centimètres  d'ouverture,  qu'on  remplissait  de 
poudre  et  de  terre  bourrées  et  tamponnées,  et  qu'on 
fermait  solidement  par  un  madrier.  On  allait  clouer  ce 
madrier  contre  la  porte,  et  on  mettait  le  feu  au  pétard 
comme  à  un  canon,  mais  de  plus  loin ,  à  cause  de  l'ex- 
plosion. Les  pétardiers  se  garantissaient,  au  moyen  de 
pavois,  contre  les  projectiles  des  assiégés.  Quand  ceux-ci 
eurent  creusé  des  fossés  extérieurs  pour  défendre  l'ap- 
proche des  portes,  on  se  servit  du  pétard  à -escale  {V.  ce 
mot).  On  employa  le  pétard  à  l'attaque  de  Dieppe  en 
1444. 

PÉTASE ,  coiffure.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

PÉTAUDS  fdu  latin  pes,  pied),  nom  donné  au  moyen 
ftge  à  une  espèce  de  fantassins,  puis,  sans  doute  par  suiu 
de  leurs  désordres,  à  des  troupes  de  brigands. 

PÉTERHOF,  ch&teau  impérial  de  Russie,  sur  les  bords 
du  golfe  de  Kronstadt,  à  28  kilom.  S.-O.  de  S^Péters- 
bourg.  Il  fut  b&ti  sous  Pierre  le  Grand,  vers  1720,  sur  les 
dessins  de  l'architecte  Lcblond.  La  façade  principale  re- 
garde les  jardins  :  elle  se  compose  d'un  frontispice  à  trois 
étages,  dominant  un  terrassement  à  gradins,  de  2  ailes  à 
un  étage  et  un  peu  en  arrière  de  l'alignement,  et,  à 
chaque  extrémité,  d'un  grand' pavillon  en  forme  de  dôme. 
Devant  le  château  règne  une  vaste  terrasse  soutenue  par 
des  voûtes  d'où  s'échappent  deux  masses  d'eau  considé- 
rables :  celles-ci  forment  plusieurs  cascades,  et  vont  se 
réunir  dans  un  bassin  de  marbre,  pour  aller,  après  avoir 
alimenté  une  foule  de  Jets  d'eau,  se  perdre  dans  la  mer. 
L'édifice  est  riche  en  souvenirs  de  toutes  les  Coques  :  on 
y  voit,  dans  son  état  primitif,  la  chambre  à  coucher 
de  Pierre  le  Grand  et  les  vêtements  de  ce  souverain  ; 
une  tapisserie  des  Gobelins,  donnée  par  Louis  XVITI  à 
Alexandre  P',  et  représentant  Pierre  le  Grand  assailli 

Ear  Ib  tempête  au  milieu  du  lac  Ladoga;  plusieurs  ta- 
leaux  de  Hackert  représentant  la  victoire  navale  des 
Russes  sur  les  Turcs  à  Tschesmé.  Si  Péterhof  le  cède  h 
Versailles  pour  la  grandeur  du  style,  il  l'emporte  par 
l'abondance  des  eaux.  Dans  l'enceinte  des  Jardins,  on  re- 
marque plusieurs  dépendances  dont  le  nom  rappelle  des 
construcUons  célèbres,  telles  que  Marly  et  Monplaisir, 
dans  ce  dernier  b&timent  se  trouve  une  belle  collection 
de  tableaux.  B. 

PÉTERSBOURG  (Église  S^-ISAïc,  à  Saint-),  église  ca- 
thédrale, située  sur  la  place  de  ce  nom ,  et  bâtie  en  gra- 
nit ,  en  marbre,  en  bronze  et  en  fer  ;  son  plan  est  en 
forme  d«  croix  grecque;  un  dôme  s'élève  au  centre,  et 
quatre  chapelles  carrées,  surmontées  de  campaniles,  sont 
établies  aux  angles.  La  longueur  totale  est  de  94  met.,  et 
la  largeur  de  31.  Les  quatre  portiques  qui  s'élèvent  aux 
quatre  bras  de  la  croix  offrent  chacun  12  colonnes  mono- 
lithes en  granit  rouge  de  Finlande,  hautes  de  plus  de 
18  met.,  et  du  plus  de  2  met  de  diamètre.  Chaque  por- 
tique est  couronné  d'un  fronton,  dont  les  bas-reliefs  ont 
été  exécutés  par  Lemaire  et  Vitali.  Chaque  fronton  est 


PÉT 


1415 


PHA 


sarmonié  de  trois  âgures  en  bronze  :  au  sommet,  an  des 
Éyangélistes,  et,  à  chaque  coin,  un  Apôtre.  Des  Anges 
aeenouillés,  également  en  bronze,  sont  placés  sur  des 
pikstres  cannelés,  à  chaque  angle  du  toit ,  dont  ils  ter- 
minent la  décoration.  Le  dôme,  avec  ses  fenêtres  en  ar- 
cade, rappelle  beaucoup  celui  de  S^-Pierrc  de  Romtf  ;  sa 
base,  en  marbre  gris  comme  les  murs,  porte  24  colonnes 
corinthiennes  de  granit,  au-dessus  desquelles  règne  une 
galerie  ornée  d*une  balustrade  en  bronze  que  décorent 
h  figures  d'Anges  du  même  métal;  la  coupole  et  la  lan- 
terne sont  couTertes  en  cuivre  doré,  et  on  y  a  employé 
217  livres  d*or  pur.  La  hauteur  du  dôme  au-dessus  du  sol 
est  de  118  met.;  son  diamètre,  de  23  met.  Les  portes  de 
réglise  de  S^-Isaac,  tout  en  bronze,  ont  une  riche  orne- 
mentation ;  celle  qui  forme  la  grande  entrée,  sous  le  por- 
tique occidental,  ne  mesure  pas  moins  de  16  met.  de 
haut  sur  l'",30  de  large.  A  Tintérieur  de  Tédifice,  les 
murs,  recouverts  de  marbre  blanc,  portent  des  incrusta- 
tions de  toute  espèce  et  de  toute  couleur;  le  sol  est  en 
marbre  gris,  arrangé  comme  un  parquet,  et  qui  se  déve- 
loppe sur  4,500  met.  carrés,  pour  se  réunir  au  milieu  en 
une  magnifique  rosace  de  diverses  couleurs.  On  estime 
à  plus  de  3.50  millions  de  francs  la  dépense  des  construc- 
tions et  de  Tomementation  de  SMsaac.  —  Pierre  le 
Grand  avait  conçu  le  projet  d'ériger  une  église  en  T hon- 
neur de  S^  Isaac  le  Dalmate,  parce  qu'il  était  né  le  Jour 
que  les  Grecs  consacrent  k  la  lète  de  ce  saint.  Mais  ce  fut 
seulement  Catherine  II  ^ui  Jeta  les  fondements  de  Tédi- 
flce,  en  1768.  Souvent  interrompus,  les  travaux  furent 
repris  en  1820,  sous  la  direction  de  l'architecte  français 
Montferrand,  et ,  dix  ans  après,  la  croix  fut  inaugurée  au 
sommet  du  dôme.  Il  fallut  ensuite  20  ans  pour  achever 
les  œuvres  d'ornementation.  B. 

p^ERSBODRo  (La  Bourse  de  Saint-).  V,  Bourse. 

PETITE-OIE,  nom  que  l'on  donna,  pendant  le.xvn®  siè- 
cle, en  France,  à  tout  ornement  accessoire  de  l'habit,  sur- 
tout aux  coques  de  rubans. 

PÉTITION  (du  latin  petitio,  demande),  demande  par 
écrit  formée  près  d'une  autorité.  Avant  1789,  toute  de- 
mande de  ce  genre  s'appelait  placet  ou  supplique.  Aux 
termes  de  la  loi  du  13  brumaire  an  vu,  rigoureusement 
remise  à  exécution  depuis  18iO,  les  pétitions  doivent  èti'o 
rédigées  sur  papier  timbré,  excepté  celles  qui  sont  adres- 
sées à  l'Emporeur,  au  Sénat,  ou  qui  ont  pour  objet  des 
demandes  de  congés  ou  de  secours,  des  réclamations  sur 
les  contributions  personnelle  et  mobilière  pour  une  taxe 
au-dessous  de  30  fr.  Une  loi  de  1807  exemptait  aussi  les 
pétitions  au  sujet  des  résultats  de  l'expertise  cadastrale. 
—  Ld  Droit  de  pétition  aux  assemblées  législatives  tut  re- 
connu par  TAssemblée  constituante  de  1789;  mais  comme 
chaque  citoyen  pouvait,  soit  prendre  pour  intermédiaire 
quelque  représentant  du  peuple,  soit  se  présenter  lui- 
môme  à  la  barre,  il  y  eut  bientôt  de  graves  abus;  car 
l'émeute,  soua  prétexte  de  pétition,  exerça  plusieurs  fois 
une  grande  pression  sur  les  diîlibérations.  La  loi  dut  dé- 
fendre la  présentation  des  pétitions  à  la  barre.  La  Con- 
stitution de  l'an  viii  accoroa  à  toute  personne  le  droit 
d'adresser  des  pétitions  par  écrit  aux  autorités  constituées, 
et  notamment  aux  Chambres.  Ce  droit  fut  consacré  par 
les  Chartes  de  1814  et  de  1830  :  une  commission  nommée 
par  les  bureaux,  et  renouvelée  tous  les  mois,  était  chargée 
de  leur  examen,  et  on  en  faisait  le  rapport  à  une  séance 
publiauede  chaque  semaine.  La  Constitution  de  1852^  a 
enlevé  au  Corps  législatif  le  droit  de  recevoir  et  d'exami- 
ner des  pétitions,  pour  le  réserver  au  Sénat,  et  la  presse 
ne  peut  en  rendre  d'autre  compte  que  celui  qui  est  con- 
signé dans  les  procès- verbaux  de  cette  assemblée.  En 
Angleterre,  le  droit  de  pétition  au  Parlement  est  un  des 
plus  anciens  et  des  plus  respectés  ;  toutes  poursuites  et 
toutes  accusations  à  raison  de  l'exercice  de  ce  droit  sont 
illégales  :  la  première  pétition  adressée  à  la  Chambre  des 
communes  date  du  règne  de  Henri  VII. 

PÉTITION   D'HéR^DITé.    V.   HéRéDlTé. 
PéTmO?!   DB  PRINCIPE.    V.   PRINCIPE. 

PÉTITOIRE  (Action),  demande  faite  en  justice  à  l'effet 
de  ressaisir  la  propriété  d'une  chose.  C'est  une  action  ac- 
cordée au  propriétaire  dont  le  droit  a  été  ignoré,  mé- 
connu ou  usurpé.    V,  POSSESSOIRE. 

PETORRITUM.  (  V,  ces  mots  dans  notre  Dictwnnatre 
PETRINAL.  S  de  Biographie  et  d'Histoire, 
PÉTROVSKOI  (Château  de),  près  de Moscou.Co  château 
Impérial,  bâti  en  1770  par  ordre  de  Catherine  IL  se  com- 
pose de  deux  parties  distinctes,  un  massif  principal  sur- 
monté d'un  large  dôme  peu  élevé  dont  le  pourtour  est 
percé  de  fenêtres,  et  un  autre  massif  en  fer  â  cheval  qui 
le  développe  autour  du  premier.  C'est  dans  la  partie 


circulaire  que  se  trouve  l'entrée  du  château,  décorée  de 
deux  tours  couvertes  de  petits  dômes.  Deux  autres  tours 
s'élèvent  à  l'endroit  où  finit  le  fer  â  cheval  :  polygonales 
par  la  base,  circulaires  dans  la  partie  supérieure,  elles  se 
terminent  en  terrasses  crénelées.  Tout  l'édifice  est  bâti 
en  briques,  et  afi'ecte  les  formes  arabes  et  byzantines.  Les 
Jardins,  qui  s'étendent  en  arrière  du  château,  sont  fort 
simplement  disposés,  et  ne  contiennent  que  de  grands 
massifs 

PETTÉU.  K.  MéLOPÉB. 

PEULS  (Langue  des).  7.  Foolah  (Langue). 

PEULVANS.  K.  CsLTiQOES  (Monuments). 

PEUPLE,  mot  employé  aujourd'hui  comme  synonyme 
de  Nation  (  V»  ce  mot).  Chez  les  Anciens  il  avait  la  même 
valeur.  La  formule  :  Le  Sénat  et  le  Peuple  romain  signi- 
fiait le  corps  dirigeant  et  toute  la  nation  ;  ce  n'est  que  par 
une  mauvaise  intelligence  de  ce  mot ,  que  les  modernes 
ne  l'ont  attribué  qu'aux  classes  inférieures,  et  l'ont  fait 
synonjrme  de  plébéien  chez  les  Romains.  Cette  dénomi- 
nation admise,  peuple,  par  rapport  â  la  fortune  et  â  l'in- 
struction, a  désigné  la  partie  la  moins  notable  de  la 
population,  les  classes  inférieures,  la  multitude,  et,  au- 
jourd'hui encore,  c'est  l'acception  assez  générale. 

PEOTINGKR  (Carte  ou  Table  de).  K.  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d'Histoire. 

PEZZA,  monnaie  de  compte  de  Toscane,  valant  4  fr. 
82  c;  —  monnaie  effective  d'or,  valant  5  fr.  17  c. 

PFENNIG,  monnaie  de  compte  d'Allemagne,  le  quart 
du  kreuzer,  c.-àr-d.  un  centime.  V.  Albds. 

PFUND,  monnaie  de  compte  d'Allemagne,  valant 
14  fr.  14  c. 

PHAÉTON,  voiture  très-légère,  découverte,  â  deux 
roues,  ainsi  nommée  par  allusion  au  char  que  Phaéton , 
fils  du  Soleil,  conduisit  si  mal,  et  aux  dangers  que  cou- 
rent ceux  qui  vont  si  rapidement  dans  de  telles  voitures. 

PHALiE.         l  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

PHALANGE.  |      de  Biographie  et  d'Histoire. 

PHALANSTÈRE,  nom  donné,  dans  le  Fourriérîsme 
(F.  ce  mot)^  â  l'édifice  qu'habite  une  phalange  ou  com- 
mune sociétaire.  Cet  édifice,  destiné  à  contenir  de  1,500 
à  1,800  individus,  contient  des  logements  pour  toutes  les 
conditions  et  tous  les  goûts  ;  les  ménages  habitent  sépa- 
rément, quoique  réunis  dans  l'ensemble.  11  y  a,  en  outre, 
des  quartiers  pour  l'enfance  et  pour  les  études,  des  salles 
de  bains,  de  banquets,  de  réceptions,  de  bals  et  de  con- 
certs, un  théâtre,  un  temple,  une  Bourse,  un  Jardin ,  des 
serres,  des  promenades  couvertes,  etc.  Les  Fourriéristes 
n'ont  pas  nu  élever  un  seul  phalanstère  en  Europe  ;  celui 
qui  a  été  établi  aux  États-Unis,  dans  le  New-Jersey,  a  été 
bientôt  abandonné. 

PUALARIQUE.  V,  Falariqub,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

PHALÉCIEN  ou  PHALEUCE  (Vers),  vers  grec  ou  latin, 
ain&i  appelé  d'un  poète  nommé  Phalœcius.  Il  est  composé 
d'un  trochée  ou  d'un  spondée,  d'un  choriambe,  d'un 
dilambe  et  d'une  syllabe  supplémentaire,  qui  forment 
un  dochmius.  L'ïambe  et  le  tribraque  au  premier  pied 
sont  rares.  Si  on  rattache  ce  vers  au  système  choriam- 
bique,  il  n*a  que  trois  pieds  ;  si  on  le  rattache  au  système 
dactylique,  il  en  a  cinq.   V.  Hendécastllabb  ,  et  Lo- 

GAJSblQVE.  P. 

PHALÈRES,  collier.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d'Histoire. 

PHAUSQUE  ou  FALISQUE  (Vers),  vers  tétramètre 
dont  les  3  premiers  pieds  sont  dactyles,  et  le  4*  un 
ïambe  ou  un  pyrrhique  : 

Fâlcè  rû\bôs  stlï\cêmquè  rè\sècèt. 

BoàcB. 

Il  est  ainsi  nommé  du  poète  Phaliscus.  Quelquefois  le 
1er  dactyle  est  remplacé  par  un  spondée»  P. 

PHARAON,  jeu  de  cartes  qui  se  Joue  avec  un  jeu  com- 
plet, et  qui  admet  un  nombre  indéterminé  de  pontes  ou 
de  joueurs,  plus  un  banquier.  Chacun  ponte  (pointe)  une 
carte,  c.-â-d.  qu'il  y  met  un  enjeu.  D'un  autre  jeu  le 
banquier  tire  2  cartes,  qu'il  met  l'une  â  sa  droite,  l'autre 
â  sa  gauche  :  la  i^^  lui  fait  gagner  les  enjeux  des  cartes 
pareilles,  tandis  qu'il  double  les  sommes  aventurées  sur 
la  2*.  S'il  amène  un  doublet,  c-â-d.  2  cartes  de  même 
rang  (2  as,  2  neuf,  2  rois,  etc.),  il  ramasse  tout  l'argent 
de  la  carte  de  droite,  et  la  moitié  des  sommes  couvrant 
la  carte  de  gauche.  Arrivé  à  fond  de  taille,  c.-â-d.  au 
26®  coup,  il  ne  double  point  les  enjeux  de  la  dernière 
carte,  les  pontes  retirent  seulement  la  mise.  —  Les  jeux 
de  Bassette,  de  Barbacole,  de  Hoca,  sont  des  variétés  da 
Pharaon. 


PHA 


U16 


PHA 


PHARE,  toar  élevée  sur  un  littoral,  ot  portant  à  son 
lommet  un  feu  qui  sert  à  guider  pendant  la  nuit  la 
marche  des  navires,  aui  approches  des  côtes,  et  à  les 
avertir  de  leur  position. 

L^usage  des  feux  pour  aider  à  la  navigation  remonte  aux 
temps  les  plus  reculés  :  les  tours  de  Sestos  et  d'Abydos, 
sur  le  Bosphore,  et  celle  de  Tile  de  Pharos,  dans  Tan- 
eienne  Egypte,  près  d*Alexandrie,  et  dont  le  nom  est  resté 
à  toutes  les  constructions  de  ce  genre  (V.  Phare,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire)^  étaient 
de  vérital)les  phares.  Il  y  avait,  au  rapport  de  Denys  de 
Byzance,  un  phare  célèbre  à  Tembouchure  du  Chry- 
sorrhoas,  qui  débouchait  dans  le  Bosphore  de  Thrace. 
lies  Romains  ont  élevé  un  grand  nombre  de  phares,  quel- 
ques-uns à  l'imitation  de  celui  d'Alexandrie  :  tel  était 
celui  d'Ostie,  b&ti  sous  Tempereur  Claude.  Il  y  en  avait 
un  autre  à  TUe  de  Caprée,  qu'un  tremblement  de  terre  fit 
écrouler  peu  de  temps  avant  la  mort  de  Tibère.  Pline 
l'Ancien  parle  des  phares  de  Ravenne  et  de  Pouzzoles.  Ils 
en  avaient  aussi  construit  sur  les  côtes  de  la  Gaule; 
par  exemple,  un  à  Icius  Portus  (BouIogne-sur-Mer),  qui 
subsistait  encore  en  1G43  :  il  se  composait  d'une  tour  oc- 
togone à  12  étages,  avec  autant  de  galeries  supportées  par 
des  entablements  ;  chaque  entablement,  porté  sur  l'épais- 
seur du  mur  de  dessous,  formait  un  petit  promenoir  large 
d'un  demi-mètre,  et  le  tout  allait  se  rétrécissant  de  ma- 
nière à  donner  à  la  tour  la  forme  d'une  pyramide.  Ce 
pliare  s'appelait  Turris  ordens  ou  ordensis,  d'où  les  Bou- 
lonnais avaient  fait  Tour  d'ordre  ou  d'odre  :  on  croit  que 
ce  mot  vient  du  celtique  odr  ou  odre  (limite,  rivage] 
Vis-à-vis  de  Calais,  à  Douvres,  il  y  avait  un  phare, 
attribué  à  César,  et  dont  on  voit  encore  les  ruines.  —  A 
Capio,  en  Espagne,  à  l'embouchure  du  Guadalquivir,  il 
y  eut  aussi  un  fort  beau  phare. 

Phares  chei  les  Modernes,  —  A  l'époque  de  Is  Renais- 
sance on  construisit  des  phares  remarquables,  la  Tour  de 
Cordouan,  à  l'embouchure  de  la  Gironde  (V.  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d^ Histoire) ^  et  la  Tour  de 
Gênes,  à  l'entrée  du  port  de  cette  ville.  Mais  les  plus 
beaux  travaux  de  ce  genre  ont  été  faits  de  nos  Jours  par 
le  corps  des  ingénieurs  des  ponts  et  chaussées.  Nous 
citerons  le  phare  de  Barfleur,  sur  la  pointe  de  Gat- 
teville  (Manche).  Bâti  de  1829  à  1835  par  l'ingénieur 
Delarue,  il  est  tout  en  granit,  et  s'élève  en  forme  de  co- 
lonne au-dessus  d'un  soubassement  rectangulaire  et  jus- 
qu'à une  hauteur  de  70  met.  Celui  du  cap  La  Hague,  sur 
un  llotde  rochers  presque  à  (leur  d'eau,  au  N.-E.  de  Cher- 
bourg, est  une  tour  du  môme  genre,  construite  de  1835 
à  1837  par  le  môme  ingénieur.  Le  phare  de  Bréhat^  près 
de  Tréguier  (  Côtes-du-Nord  ),  fait  de  1836  à  1839  par 
Reynaud;  il  n'a  d'égal  en  aucun  lieu  du  monde  :  il  se 
compose  d'une  tour  en  maçonnerie  pleine,  enchâssée  dans 
la  roche  de  porphyre  sur  laquelle  repose  l'édifice;  cette 
tour  a  13'",70  de  diamètre  à  sa  base,  8"%60  à  son  som- 
met, et  son  pied  est  à  1  met.  au-dessus  du  niveau  des 
plus  hautes  mers;  elle  supporte  une  autre  tour  plus  lé- 
gère, dont  l'intérieur  est  divisé  en  plusieurs  étages,  et 
dont  le  mur  a  1"',30  d'épaisseur  dans  le  bas,  0"',85  dans 
le  haut;  la  lanterne  est  à  une  hauteur  de  50  met.  Il  n'a 
été  employé  aucun  bloc  de  granit  pesant  moins  de 
1,000  kilogr.,  sauf  dans  le  centre  du  massif  inférieur,  et 
plusieurs  sont  du  poids  de  3,500  k.  —  En  Angleterre,  le 
phare  d^Eddystone,  dans  la  Manche,  vis-à-vis  de  Ply- 
mouth,  sur  des  rochers  à  fleur  d'eau,  élevé  en  1696,  ren- 
versé 3  ans  après  par  une  tempête,  remplacé  par  une 
tour  en  charpente,  puis  réconstruit  de  1757  à  1759,  par 
Smeaton,  fut  cité  longtemps  comme  une  merveille  :  nos 
constructions  modernes  Font  bien  surpassé.  Néanmoins, 
c'est  encore  un  beau  travail  :  il  t  30  met.  d'élévation,  et 
est  divisé  en  quatre  étages,  tu-dessus  desquels  règne  une 
galerie  où  le  (anal  se  trouve  placé. 

On  a  imaginé,  de  nos  Jours,  de  construire  des  phares 
en  fonte  de  fer,  plus  économiques  que  ceux  en  maçonne- 
rie, et  en  môme  temps  beaucoup  plus  légers,  ce  qui  per- 
met de  les  installer  partout,  môme  sur  de  mauvais  ter- 
rains. Autrefois,  on  ne  plaçait  de  phares  qu'à  l'entrée 
des  ports  ;  aujourd'hui,  on  les  élève  aux  lieux  les  plus 
utiles  pour  la  navigation.  Il  y  a  des  phares  en  fonte  dans 
l'Amérique  et  dans  les  Indes  anglaises,  à  Bahama,  à 
Cuba,  aux  Bermudes,  aux  États-Unis,  en  Turquie  dans 
le  Bosphore,  etc.  Celui  des  Bermudes,  dressé  à  Gordon, 
a  35  met.  de  hauteur  et  revient  à  92,000  fr.  ;  celui  de 
Bahama,  haut  de  41  met.  et  à  7  étages,  coûte  200,000  fr. 

Jusqu'au  xvm*  siècle,  les  phares  furent  éclairés  avec 
des  feux  de  bois  ou  de  charbon  :  Borda  eut  le  premier 
l'UMe  d'employer  les  lampes  à  réflecteur;  et,  pour  donner 


aux  navigateurs  un  moyen  de  ne  pas  confondre  la  lumière 
d'un  phare  avec  celle  d'une  étoile  de  première  ^ndeur« 
ou  môme  d'un  autre  phare,  il  proposa  de  faire  disparaître 
la  lumière  après  des  intervalles  égaux,  ^n  employant  des 
feux  tournants  et  à  éclipses.  En  1784,  le  Dieppois  Le- 
moyne  imagina  de  faire  tourner,  non  le  feu,  mais  des 
écrans  qui,  au  moyen  d'un  mouvement  d*iiorlogerie,  s*in« 
terposeraient  devant  lui,  et  produiraient  une  suite  régu- 
lière d'éclipsés;  et,  afin  d'obtenir  plus  de  lumière,  il  em- 
ploya les  lampes  d'Argant  à  double  courant  d'air.  D'autres 
progrès  ont  été  encore  obtenus  depuis  cette  époque  t  des 
réflecteurs  paraboliques  ont  été  substitués  aux  miroirs. 
Mais  c'est  de  1822  que  datent  les  grands  progrès:  alors 
Augustin  Fresnel  calcula  que  la  réfraction  devait  être 
bien  plus  puissante  à  travers  des  lentilles  de  cristal  que 
la  réflexion  sur  des  surfaces  polies  et  métalliques;  il 
imagina  la  lenUlle  à  échelons,  qui,  faite  par  l'assemblage 
d'anneaux  concentriques,  peut  atteindre  à  toutes  les 
grandeurs  de  rayons.  Pour  obtenir  un  fo^er  lumineux  en 
rapport  avec  la  puissance  des  lentilles,  il  fit  de  la  lampe 
Carcel  un  appareil  à  3  et  4  mèches  concentriques,  qui, 
dans  les  phares  les  plus  importants,  donne  un  éclat  équi- 
valant à  celui  de  600,  et  jusçju'à  4,050  becs  de  lampes 
Carcel.  Désormais  ces  appareils  furent  adoptés  partout, 
môme  à  l'étranger,  et  ce  n'est  pas  un  des  moin(bres  ser- 
vices que  la  France  ait  rendus  à  l'humanité. 

Les  phares  sont  divisés  en  six  catégories  i  i^  d  /eu 
fixe,  lumière  constaLte;  2°  à  éclats^  lumière  qui  montre 
alternativement  5  éclats  et  5  éclipses  ou  plus,  dans  Tin- 
tervalle  d'une  minute;  3^^  fixe  à  éclats,  lumière  fixe  qui 
montre  un  éclat  blanc  ou  rouge,  précédé  oii  suivi  de 
courtes  éclipses  et  à  des  intervalles  qui  varient  de  10, 
30  ou  60  secondes  ;  4°  tournant,  feu  dont  la  Icmière  aug- 
mente d'une  manière  graduelle.  Jusqu'à  ce  qu'elle  jette 
sa  plus  grande  clarté,  et  qui  décroit  ensuite  graduelle- 
ment Jusqu'à  s'éclipser  à  des  intervalles  égaux  de  1,  2, 
3  minutes,  et  quelquefois  trois  fois  dans  une  minute; 
5^  intermittent,  c-à-d.  dont  la  lumière,  qui  parait  tout  à 
coup,  reste  visible  pendant  un  certain  lape  de  temps  et 
s'éclipse  pendant  un  court  intervalle;  6*  alterr^alif,  lu- 
mière qui  parait  rouge  et  blanche  alternativement  sans 
éclipse  intermédiaire.  —  Quant  au  mode  de  leur  éclai- 
rage, les  phares  et  fanaux  des  côtes  de  France  se  divisent 
en  deux  catégories  essentiellement  distinctes  :  la  pre- 
mière comprenant  les  nouveaux  établissements  éclairés 
par  des  appareils  lenticulaires  ou  dioptriques,  et  la  se- 
conde, les  phares  et  fanaux  à  réflecteurs  ou  caiolptriq^es, 
Dans  l'un  et  l'autre  système,  la  condition  principale  à 
remplir  est  de  diriger  vers  l'horizon  les  nurons  émanés 
d'un  ou  de  plusieurs  foyers  de  lumière.  Les  appareils 
lenticulaires  sont  classés  en  quatre  ordres  principaux  : 
les  trois  premiers  comprennent  les  phares  de  35  à  50 
milles  marins  de  portée  (65  à  93  kil.,  environ),  et  le  qua- 
trième ordre,  les  simples  fanaux,  dont  la  portée  n'excède 
pas  9  à  12  milles  (17  à  22  kil.  environ).  Quant  aux  i^pa- 
reils  à  réverbères,  on  ne  les  divise  conununément  ou'en 
deux  ordres,  selon  qu'ils  sont  disposés  pour  l'édairage 
des  phares  proprement  dits,  ou  des  simples  Ouianz  d'en- 
trée de  port. 

Les  phares  dépendent  du  ministère  de  l'agriculture,  du 
commerce  et  des  travaux  publics,  i>rès  duquel  est  un  di- 
recteur, secrétaire  d'une  Commission  des  phares.  Dans 
les  départements,  les  ingénieurs  des  ponts  et  chaussées 
surveillent  les  ]&hares  de  leur  ressort.  L*éclairage  et  le 
soin  sont  confiés  à  des  gardiens  allumeurs,  qui  habitent 
dans  les  phares  mômes,  et  dont  le  nombre  est  ^nérale- 
ment  fixé  ainsi  :  3  ou  4  gardiens  pour  les  phares  de 
1*'  ordre  ;  2  pour  ceux  de  2*  et  de  3*  ordre;  1  pour  ceux 
de  4*,  5*  et  6*  ordre.  Ils  sont  soumis  à  des  règlements  et 
des  instructions  que  presque  tous  les  pays  étrangers  ont 
adoptés.  En  France,  on  ne  paye  pas  de  droit  de  phare.  Ce 
service  coûte  à  l'État  environ  500,000  fr.  Il  y  a  aujourd'hui 
(1862)  250  phares,  y  compris  ceux  d'Algérie;  on  n'en 
comptait  que  15  en  1825.  Ce  service  est  si  bien  conçu  et 
si  bien  organisé,  que  les  marins  aiment  mieux  atterrir  les 
côtes  de  France  de  nuit  que  de  Jour.  —  Il  existe  à  Psris 
un  Atelter  central  des  phares,  placé  sous  la  direction  d'un 
ingénieur  de  l'administration,  et  où  l'on  monte  et  vârifie 
les  appareils  avant  de  les  expédier  à  destination  ;  on  v  en 
fabrique  môme  quelques-uns,  surtout  lorsqu'il  s  agit 
de  mettre  à  exécution  quelque  amélioration  nouvelle. 
V,  Annales  des  ponts  et  chaussées,  année  1836,  mai  et 
Juin  ;  Fresnel,  Mémoire  sur  le  nouveau  système  d'éclat 
rage  des  phares,  Paris,  1822  ;  Goulier,  Description  gêné' 
raie  des  phares  et  fanaux,  à  Vusage  dês  namgateun, 
i2e  édit.,  Paris,  1855,  in-12.  F.au  SuppUmnt. 


PHÀ 


1417 


PHÊ 


niAHB,  nom  par  lequel  les  mariDS  désignent  quelque- 
fois un  màt  et  tout  ce  qu'il  porte  ou  qui  y  tient  :  le  phare 
ffavant,  le  phare  d*arrière^  c.-à-d.  les  voiles,  m&ts,  ver- 
gues, cordi^es,  du  màt  de  misaine  ou  grand  m&t. 

PHARE,  nom  donné,  pendant  le  moyen  &ge,  aux  chan- 
deliers d*église  qui  portaient  drculairement  plusieurs 
cierges,  et  appelés  aussi  couronnes  de  lumière, 

PHARB  DB  CIMETièRE.   V.  FaNAL. 

PHARMACIE  (Écoles  de).  V,  Écoles,  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d* Histoire, 

PHARMACIENS,  ceux  qui  préparent  et  vendent  les 
médicaments.  Ils  ont  succédé  aux  apothicaires  (F.  ce 
mot).  Aux  termes  d*un  décret  du  21  août  1854,  il  y  a  des 
pharmaciens  de  l'*  et  de  2*  classe.  Les  pharmaciens  de 
l'*  classe  sont  ceux  qui  ont  été  reçus  par  rune  des  écoles 
supérieures  de  pharmacie  de  Paris,  de  Strasbourg  ou  de 
Montpellier;  ils  peuvent  exercer  leur  profession  dans 
toate  rétendue  du  territoire  français.  Pour  s^irer  au 
titre,  il  faut  avoir  fait  3  ans  d'études  dans  une  Ecole  su- 
périeure et  3  ans  de  stage  dans  une  pharmacie  ;  une  seule 
année  d'études  est  exigée  des  candidats  c|[ui  auraient  pris 
1 0  inscriptions  dans  une  École  préparatoire  de  médecine 
et  de  pharmacie.  En  1844,  on  exigea  de  quiconque  vou- 
lait prendre  sa  1^  inscription  le  diplôme  de  bachelier 
es  lettres;  depuis  1852,  on  ne  demande  que  le  baccalau- 
réat es  sciences.  Les  droits  à  payer  s'élèvent  à  1,390  fr. 
Les  pharmaciens  de  2*  classe  sont  ceux  qui  ont  été  reçus, 
jusqu'en  1855,  par  un  Jury  médical,  et  depuis  cette 
époque  par  une  école  préparatoire  de  médecine  et  de 
pharmacie  sous  la  présidence  d'un  professeur  de  l'une 
des  écoles  supérieures  de  pharmacie.  Ils  ne  peuvent 
exercer  que  dans  le  département  pour  lequel  ils  ont  été 
reçus.  Pour  aspirer  au  titre,  il  faut  justifier  de  6  années 
de  stSjge  en  pharmacie,  de  4  inscriptions  dans  une  école 
supérieure  ou  de  6  dans  une  école  préparatoire;  2  ans  de 
stage  peuvent  être  compensés  par  4  inscriptions  dans  une 
école  supérieure  ou  £  dans  une  école  préparatoire,  mais 
sans  que  le  stage  puisse  être  réduit  à  moins  de  4  années. 
Les  droits  à  payer  s'élèvent  à  460  fr.  D'après  U  loi  du 
21  germinal  an  xi  et  l'ordonnance  du  29  octobre  1846, 
les  pharmaciens  sont  responsables  des  méprises  qui  peu- 
vent avoir  lieu  dans  leurs  officines  ;  Ils  ne  peuvent  vendre 
certaines  drogues  que  sur  ordonnance  de  médecin,  et 
doivent  copier  cette  ordonnance  sur  un  livre  spécial. 
Chaque  pharmacie  doit  être  visitée  une  fois  l'an.  V,  Gui- 
bourt,  Manuel  légal  des  Pharmaciens,  1852;  Pellault, 
Code  des  Pharmaciens,  1858. 

PHARMAUENS  iiiUTAiRES,  uno  dos  troîs  soctious  du  ser- 
vice de  santé  dans  l'armée  française.  Il  existe  des  phar- 
maciens militaires  dans  les  hôpitaux  et  aux  arméâi  de- 
puis 1591.  Leroy  et  Bayen  portèrent  les  premiers  le  titre 
de  pharmaciens  en  chef  des  camps  et  armées  du  roi.  Le 
service  de  santé  comprend  :  /  pharmacien  inspecteur, 
5  pharmaciens  principaux  de  l'*  classe  et  5  de  2'^, 
48  pharmaciens  majors  de  l'*  classe  et  34  de  2«,  50  phar- 
nutciens  aides-majors  de  l'*  classe  et  50  de  S^  Pour  le 
service  de  la  marine,  il  y  a  5  premiers  pharmaciens  en 
chef,  3  seconds  pharmaciens  en  chef,  5  pharmaciens  pro- 
fessewrs,  et  43  pharmaciens  {9  de\^  classe,  14  de  2*,  et 
20de3«).    • 

PHARMACOPÉE.  V.  Codex. 

PHAKSALE  (La),  poème  latin  de  Lucain,  dont  le  sujet 
est  la  guerre  civile  entre  César  et  Pompée,  et  dont  le 
titre  est  emprunté  de  Pharsale,  ville  de  Thessalie,  où 
César  triompha  de  Pompée.  II  s'ouvre  par  une  trop  cé- 
lèbre apothéose  de  Néron  ;  puis,  après  l'énumération  des 
causes  particulières  et  générales  de  la  guerre  civile,  le 
poète  entre  dans  le  rédt  des  faits,  qu'il  poursuit  pendant 
dix  chants;  il  s'arrête,  d'une  façon  assez  inexplicable,  au 
moment  où  les  É^^àens  se  soulèvent  contre  Cléop&tre 
et  C^ar,  et  sans  qu'on  sache  qui  des  deux  partis  l'em- 
portera. Ou  range  d'ordinaire  la  Pharsale  parmi  les 
poômes  épiques;  mais  ce  n'est  qu'une  histoire  mise  en 
▼ers.  Quelques  fictions  épiques  y  sont  bien  mêlées  au 
récit  âis  faits  ;  cependant,  à  côté  du  merveilleux  homé- 
rique, qu'est-ce  que  la  transformation  d'une  matrone 
romaine  en  Pythonisse  (ch.  I),  la  description  mystérieuse 
et  sombre  de  la  forêt  de  Marseille  (ch.  III),  et  la  résur- 
rection magique  d'un  cadavre  par  une  sorcière  thessa- 
fienne  (ch.  VI)?  Si  le  merveilleux  est  l'essence  même  de 
l'épopée,  la  Pharsale,  avec  toute  sa  nécromancie,  n'est 
plus  ou'une  épopée  dégénérée.  Quoi  qu'il  en  soit,  l'œuvre, 
coosiaérée  en  elle-même,  a  de  grandes  beautés  mêlées  à 
de  graves  défauts.  Le  récit,  généralement  froid,  est,  de 
plus,  souvent  plein  de  recherche,  d'enflure  et  de  décla- 
mation ;  on  rencontre  çà  et  là  de  beaux  traits  d'élo- 


quence, des  tableaux  énergiques,  des  sentiments  élevés, 
enfin  l'émotion  sincère  et  communicative  d'une  &me 
qu*exaltaient  à  la  fois  la  doctrine  stoïcienne,  la  haine  du 
despotisme,  et  l'enthousiasme  républicain.  Aussi  Lucain 
a-t-il  eu  ses  admirateurs  et  ses  panégyristes  :  Montaigne 
le  goûtait  vivement;  Malherbe  lui  enviait  sa  force;  Cor- 
neille le  préférait  à  Virgile,  et,  pour  le  plaisir  de  lïmiter, 
composa  la  Mort  de  Pompée;  Voltaire  prétendait  que  le 
Discours  de  Caton  à  Labiénus,  devant  le  temple  d'Am- 
mon  (ch.  IX),  valait  mieux  que  toute  la  philosophie  de 
l'antiquité.  Aujourd'hui,  on  est  généralement  d'accord 
pour  reconnaître  que  Lucain  a  de  la  grandeur,  mais  sans 
naturel,  sans  vérité,  et  qu'il  n'est  au  premier  rang  que 
parmi  les  auteurs  de  second  ordre  et  les  écrivains  de  la 
décadence.  a.  H. 

PHASÈLE,  navire  des  Anciens,  ainsi  nommé  de  la  ville 
de  Phasélis,  où  on  l'inventa.  C'était  un  bâtiment  léjo^r, 
marchant  à  voiles  et  à  rames,  et  tenant  le  milieu  entre 
les  navires  marchands  {rotundœ  naves)  et  les  navires  de 
guerre  {longœ  naves). 

PHÉAQUES.  F.  AoRiGENTB  (Ruines  d'). 

PHÉBUS,  défaut  du  style  qui  consiste  dans  la  préten- 
tion et  l'obscurité.  On  y  tombe  par  le  néologisme,  par 
l'emploi  d'épithètes  chatoyantes  ou  de  comparaisons  ri- 
diculement poétiques,  par  ces  fourrés  de  mots  et  de 
phrases  où  ne  perce  point  la  pensée.  Le  mot  phébus 
vient,  dit-on,  d'un  ouvrage  sur  la  chasse  écrit  par  Gaston 
Phébus,  comte  de  Foix,  dans  un  style  empnatique  et 
embrouillé. 

PHELLOPLASTIQUE  (du  grec  phellos,  liège,  etplassô, 
je  forme),  art  inventé  à  Rome,  vers  1780,  par  Agostino 
Rosa,  et  qui  consiste  à  reproduire  en  liège,  sur  une 
échelle  réduite,  les  monuments  de  l'architecture.  Cet  art 
a  été  perfectionné  par  Mey  d'Aschaffenbourg  et  par  Sta- 
maty  de  Marseille.  Il  y  en  a  quelques  beaux  spécimens 
au  palais  des  Beaux-Arts  à  Pans. 

PHÉLONION,  vêtement.  V,  Archimandrite. 

PHÉNIGEN  (Art).  Les  temples  phéniciens  paraissent 
avoir  été  bÀtis  sur  de  petites  dimensions  :  c'est  ce  qu'on 
peut  du  moins  conjecturer  d'après  celui  d'Astarté  à  Pa- 
phos,  dans  l'Ile  de  Chypre,  connu  par  les  ruines  actuelles 
et  par  les  figures  de  pierres  précieuses  et  de  monnaies. 
Quant  à  l'ordonnance  et  au  plan  de  ces  édifices,  ils  du- 
rent être  les  mêmes  qu'au  Temple  de  Jéruudem ,  sur 
la  construction  duquel  l'art  phénicien  a  certainement 
exercé  une  çrando  influence.  L'usage  de  revèàr  de  lames 
d'or  les  cloisons  ou  les  lambris  des  murs  était  très-ré- 
pandu chez  les  peuples  sémitiques.  Dans  la  statuaire,  les 
Phéniciens  employèrent,  de  préférence  à  la  pierre,  le 
bois  revêtu  de  lames  de  métal  battues  au  marteau  :  l'ab- 
sence de  monuments  de  ce  genre  ne  permet  pas  de  juger 
aujourd'hui  quel  en  était  le  goût  artistique  ;  mais  les 
écrivains  de  l'antiquité  nous  apprennent  que  la  figure 
humaine  y  était  souvent  associée  avec  les  animaux,  et 
que  souvent  on  symbolisait  l'essence  merveilleuse  de  la 
divinité  par  des  formes  monstrueuses.  Les  Phéniciens 
exécutèrent  des  vases  élégants  et  souvent  de  grandeur 
colossale. 

PHÉNICIENNE  (Langue).  Peu  de  monuments  de  cette 
langue  nous  sont  parvenus;  ce  sont  des  inscriptions  et 
des  médailles.  Les  opinions  relatives  à  la  nature  et  à 
l'origine  du  phénicien  sont  très-variées  :  S*  JMme,  dans 
son  Commentaire  sur  Isaîe,  dit  que  la  langue  de  Canaan, 
qu'il  assimilait  à  l'hébreu,  tenait  le  milieu  entre  l'hébreu 
et  l'égvptien;  Bochart  donne  comme  appartenant  aux 
Phéniciens  tous  les  mots  hébreux  qu'il  cite  dans  sa 
Géographie  sacrée;  Adelung  pense  que  la  langue  des  Ca- 
nanéens des  bords  de  la  Méditerranée,  c-i-d.  celle  des 
Phéniciens,  se  partageait  en  deux  diiUectes,  celui  de  Pa- 
lestine et  celui  de  Syrie;  selon  Heeren,  les  Phéniciens  et 
les  Arabes  parlaient  des  dialectes  dérivés  d'un  même 
idiome,  et  pouvaient  se  comprendre  mutuellement.  Au- 
jourd'hui il  est  généralement  admis  qu'en  substance  le 
phénicien  était  de  l'hébreu  ;  que  les  deux  idiomes,  selon 
toute  vraisemblance,  n'en  formaient  qu'un  seul  dans 
l'origine,  mais  qu'ils  s'écartèrent  ensuite  l'un  de  l'autre, 
par  l'efiet  des  circonstances  diverses  dans  lesquelles  les 
Phéniciens  et  les  Juifs  furent  placés;  que  les  trois  quarts 
des  mots  phéniciens  des  inscriptions  se  retrouvent  dans 
l'hébreu;  que,  si  l'on  voit  dans  ces  inscriptions  une 
partie  seulement  des  pronoms  et  des  conjugaisons  des 
Hébreux,  l'unique  cause  en  est  peut-être  dans  l'insuffi- 
sance des  monuments  phéniciens  arrivés  jusqu'à  nous; 
que  les  relations  commerciales  ont  introduit  dans  le  phé- 
nicien certains  mots  syriaques,  arabes,  coptes,  etc.,  qui 
ne  se  trouvent  pas  dans  l?  Bible,  ou  qui  n'y  ont  pas  le 


PHË 


1418 


PHI 


même  sens  ;  qu^o'ti  y  rencontre  enfin,  non-sealement  des 
mots  dérivés,  mais  encore  des  racines,  qui  n^existent 
plus  ou  n*ont  jamais  existé  dans  l*hébreu,  à  moins  que 
les  livres  saints,  par  lesquels  nous  connaissons  cette  der- 
nière langue,  ne  contiennent  pas  tous  les  vocables  du 
peuple  qui  la  parlait.  Les  navigateurs  phéniciens  por- 
tèrent leur  langue  dans  les  divers  pays  qu'ils  visitèrent  : 
en  Afrique  elle  devint  la  langue  carthaginoise  (K.  ce 
mot)^  et  Ton  en  a  retrouvé  aussi  les  traces  à  Malte  (V.  Mal- 
tais —  Idiome)  et  en  Espagne  {V,  Espagne  —  Langues 
de  r).  —  Les  traditions  de  TAntiquité  attribuaient  aux 
Phéniciens  l'invention  de  récriture  (  F.  Alphabet).  Les 
seize  lettres  que  Cadmus  avait  portées,  disait-on,  de 
Phénicie  en  Grèce,  sont  identiques  pour  le  nombre  et 
analogues  pour  la  forme  avec  celles  de  l'alphabet  hé- 
braïque connu  sous  le  nom  de  samaritain*  L'analyse  des 
monuments  phéniciens  fournit  plusieurs  alphabets;  car 
chaque  lettre  offre,  selon  l'époque  et  l'emplacement  des 
monuments,  des  variantes  assez  notables.  V.  Guill.  Pos- 
tel,  De  PhoBniciMh  litteris,  1552,  in-1'2;  May,  Spécimen 
linguœ  punicœ,  Marbourg,  1718,  in-8°;  Barthélémy,  Ré- 
flexions sur  quelques  monuments  phéni9iens,  et  sur  les 
alphabets  qui  en  résultent,  Paris,  1730,  in-8°,  et  Sur  les 
rapports  des  langues  égyptienne,  phénicienne  et  grecque, 
dans  le  t.  XXXIl  des  Mém,  de  VAcad.  des  Inscriptions; 
Perez  Bayer,  Dissertation  sur  la  langue  et  Valphabet  des 
Phéniciens,  Madrid,  1772  ;  Fortia  d'Urban,  Sur  la  langue 
phénicienne,  dans  le  Journal  asiatique  de  luin  1828;  Ma- 
•maker,  Miscellanea  Phœnicia,  Leyde,  1828;  Gésénius, 
Sur  les  langues  phénicienne  et  punique,  en  allemand, 
Leipzig,  1815,  et  Études  paléographiques  sur  Vécriture 
phénicienne  et  punique,  ibid.,  1835;  le  même,  Scripturœ 
linguœque  Phœniciœ  monumenta  quotquot  supersunt, 
1837;  Judas.  Étude  démonstrative  de  la  langue  phéni- 
cienne et  de  la  langue  Ubt/que^Pans^  1847,  in-4<';  l'abbé 
Bourgade,  Toison  d'or  de  la  langue  phénicienne,  2*  édlt., 
Paris,  in-fol. 

phÂiiciennb  (Littérature).  Les  Phéniciens  ont  eu  de 
bonne  heure  une  littérature.  Sanchoniathon  écrivit  sur 
la  théogonie  et  les  antiquités  de  sa  nation  un  ouvrage  qui 
fut  traduit  en  grec  par  Philon  de  Byblos,  et  dont  Eusèoe 
et  Porphyre  nous  ont  conservé  en  cette  langue  quelques 
fragments;  il  fut,  selon  quelques  auteurs,  le  contempo- 
rain de  Sémiramis;  d'autres  le  placent  seulement  au 
XII*  siècle  avant  notre  ère.  Moschus  de  Sidon  fut  le  pre- 
mier philosophe  qui  écrivit  sur  la  formation  du  monde 
par  les  atomes. 

PHÉNiaENNES  (Monnaies).  On  trouve  des  légendes 
en  langue  phénicienne,  non-seulement  sur  des  monnaies 
d'argent  et  de  bronze  qui  proviennent  de  Tyr,  de  Sidon, 
de  Béryte,  de  Laodicée,  mais  sur  les  monnaies  de  Cilicie, 
de  Carthaige  et  des  villes  de  Sicile,  de  Numidîe,  et  d'Es- 
pagne, avec  lesquelles  les  Phéniciens  étaient  en  relations 
habituelles  de  négoce.  Le  développement  de  l'usage  do  la 
monnaie,  sa  généralisation,  est  surtout  due  aux  nations 
maritimes  ;  et  il  parait  que  les  rois  perse»  ne  frappaient 
guère  de  monnaies  que  pour  payer  leurs  mercenaires,  et 
particulièrement  les  Phéniciens  qui  leur  fournissaient 
une  marine.  Avant  que  M.  Renan  rapport&t  de  sa  mission 
en  Asie  des  monuments  phéniciens,  il  n'existait  dans  nos 
musées  d'autre  vestige  de  cette  civilisation  qui  a  joué  un 
si  grand  rôle  dans  l'antiquité,  que  les  monnaies  phéni- 
ciennes. Encore  les  légendes  qu'elles  portent  sont-elles  si 
imparfaitement  déchiffres,  qu'on  peut  dire  que  l'écriture 
des  iavcnteurs  de  l'écriture  est  restée  une  énigme  dont 
les  savants  cherchent  encore  le  dernier  mot  au  milieu  de 
divers  systèmes  d'interprét&tion.  D. 

PHÉNOMÈNE  (du  grêc  phainoménon,  ce  oui  apparaît 
clairement),  mot  qui,  dans  le  langage  vulgaire,  désigne 
tout  ce  qui  est  insolito  et  extraordinaire,  mais  qu'on  ap- 
plique, en  Philosophie,  à  tout  fait  observable,  c.-àr-d. 
perceptible  par  les  sens  ou  par  la  conscience.  Les  phéno- 
mènes sont  les  qualités  de  la  substance  (K.  ce  mot). 

PHÉRÉCRATIEN  (Vers),  vers  lyrique  des  Grecs  et  des 
Latins.  C'est  un  glyconiauecatalectique(-w».  w  ^  -  ^)  : 

il  sert  de  clausule  dans  les  systèmes  glyconiques.  Souvent 
le  trochée  initial  est  remplacé  par  un  spondée.  Quelque- 
fois le  phérécratien  commence  par  un  choriambe  et  finit 
par  un  amphibraque.  Il  a  été  surnommé  heptasyllabe; 
le  nombre  de  7  syllabes  est  cependant  dépassé,  lorsque 
l'on  résout  la  première  du  trochée  et  celle  du  choriambe 
en  deux  brèves.  Le  vers  phérécratien  ajouté  au  glyco- 
nique  produit  le  vers  priapéen  (F.  ce  mot).  Lq  vers  phé- 
récratien forme  le  3*  vers  des  Odes  d'Horace  14,  21 
(I*'  liv.)  et  13  (m«  liv.),  où  il  est  précédé  de  deux  asclé- 
piadcs  et  suivi  d'un  glyconique,  P 


PHILANTHROPIE  (du  groc  philanthr^ia^  amour  des 
hommes),  La  philanthropie  est  une  vertu  moderne,  qui 
a  son  point  de  départ  dans  la  fraternité  prèchéo  par  le 
christianisme.  La  fameuse  phrase  do  Téreuce  :  «  Je  suis 
homme,  et  rien  de  ce  qui  touche  l'homme  ne  m'est 
étranger,  »  était  l'expression  d'une  pensée  tout  indi- 
viduelle; pour  les  Anciens,  le  cercle  des  affections  hu- 
maines s'arrêtait  à  l'étroite  enceinte  de  la  cité,  et  le 
nom  d'étranger  était  synonyme  d'ennemi.  Au  fond,  la 
ciiarité  et  la  philanthropie  sont  une  môme  chose,  elles 
reposent  sur  un  même  sentiment  :  mais  la  charité  est  un 
amour  pour  les  hommes  avivé  par  la  foi  religieuse,  un 
amour  qui  s'enflamme  à  proportion  de  l'ardeur  avec  la- 
quelle on  se  prépare  à  la  vie  future,  tandis  que  la  phi- 
lanthropie est  une  conséquence  naturelle  de  l'instinct  de 
sociabilité,  une  affection  indépendante  de  tout  retour 
vers  le  Ciel,  puissante  néanmoins  sur  certains  hommes, 
et  en  quelque  sorte  raisonnée.  A  cet  égard,  il  a  fallu 
dix-huit  siècles  pour  faire  prévaloir,  non  pas  la  pratique, 
mais  la  théorie  de  la  philanthropie.  Car  les  philanthropes 
font  de  l'amour  du  prochain  une  véritable  science,  une 
partie  de  TÉconomie  politique  ;  ils  s'appliquent  à  l'étude 
des  misères  sociales,  et  en  recherchent  les  remèdes  les 
plus  efficaces;  ils  prétendent  échapper  aux  entraînements 
d'une  charité  aveugle,  sans  bornes  et  sans  discernement. 
La  philanthropie  n'est  pas  un  mot  inventé  pour  débap- 
tiser la  charité  et  pour  dépouiller  de  son  caractère  reli- 
gieux une  vertu  essentiellement  chrétienne;  elle  est 
quelque  chose  de  réel.  On  a  pu  abuser  de  la  philanthro- 
pie ,  et  patronner  des  œuvres  de  bienfaisance  pour  en 
retirer  un  lucre  personnel;  ce  sont  les  torts  de  Quelques 
hommes,  mais  les  œuvres  subsistent.  Ainsi,  on  doit  aux 
philanthropes  l'abolition  de  la  traite  des  nègres,  la  pro- 
pagation de  l'instruction  primaire,  les  salles  d'asile,  les 
crèches,  l'amélioration  du  sort  des  aliénés  et  des  prison- 
niers. Une  Société  philanthropiqiie,  fondée  à  Paris  en 
1780,  et  réorganisée  en  1799,  livre  des  aliments  au  plus 
bas  prix  aux  indigents,  donne  des  consultations  gratuites 
et  des  médicaments  aux  malades,  encourage  certaines 
sociétés  de  prévoyance  et  de  secours  mutuels,  etc. 

PHILIPPE,  monnaie.  /  V,  notre  Dictionnaire  de  Bio* 

PHILIPPIQUES.  S     oraphie  et  d'Histoire. 

PHILOLOGIE  (du  grec  philos,  ami,  et  logos,  discours, 
savoir),  science  qui  embrasse  diverses  parties  des  belles- 
lettres,  et  qui  en  traite  principalement  pour  ce  qui  re- 
garde l'érudition,  la  critique  des  textes,  et  la  grammaire. 
Le  but  général  de  ces  études  est  d'acquérir  la  connais- 
sance exacte  et  précise  de  la  signification  des  termes, 
pour  arriver  à  celle  des  faits  et  des  choses.  Dans  l'étude  de 
l'Antiquité,  dont  les  ouvrages  ne  nous  sont  parvenus  qu'à 
travera  une  foule  de  transcriptions,  causes  d'erreun  de 
toutes  sortes,  et  môme  de  mutilations,  la  philologie  com- 
mence par  l'épuration  et  la  restitution  des  textes;  dans 
les  langues  vivantes,  son  but  est  l'étude  de  la  formation 
et  des  variations  du  langage,  de  sa  signification  propre  à 
des  &ges  différents,  et  de  son  application  aux  faits,  aux 
événements,  aux  choses.  Tout  cela  est  si  changeant,  dans 
une  société  en  pleine  existence ,  que,  ai  la  philologie 
interrompait  son  travail,  on  aurait,  en  moins  d'un  siècle, 
autant  de  peine  &  comprendre  une  foule  d'expressions, 
d^allusions  ou  d'énonciations,  qu'on  en  a  pour  interpréter 
bien  des  endroits  des  plus  anciens  écrivains  de  1  Anti- 
quité, poètes  ou   prosateurs.   Au    commencement   du 
xvtii*  siècle,  Fénelon  constatait  qu'on  était  obligé  d'ex- 
pliquer le  langage  de  Villehardouin  et  de  Joinville,  et 
demandait  que  ce  travail  fût  étendu  à  nos  écrivains  pins 
modernes,  par  l'Académie  elle-même.  Son  conseil  a  été 
peu  suivi,  du  moins  d'une  manière    sérieuse;  aussi 
n'avons-nous  que  quelques  rares  travaux  de  ce  genre  sur 
un  petit  nombre  de  nos  grands  auteura  du  xvn*  et  du 
xviu*  siècle;  par  exemple,  sur  Corneille,  on  ne  cite  guère 
que  le  Commentaire,  bien  imparfait,  de  Voltaire,  et,  tout 
récemment,  le  Lexique  comparé  de  la  langue  de  Corneille, 
par  M.  Godefroy,  Paris,  1862, 2  vol.  ln-8<*,  travail  vraiment 
sérieux  ;  sur  Racine,  on  a  des  Commentaires  de  Laharpe 
et  de  Geoffroy  ;  sur  Molière,  un  Lexique  comparé  de  Gé- 
nin,  et  un  travail  analogue,  couronné  par  l'Acaidémie  fran- 
çaise, mais  encore  inédit,  de  M.  Guessard  ;  sur  Pascal,  des 
travaux  de  M.  Cousin,  de  M.  Faugère,  et  surtout  de  H.  Na- 
vet, qui  a  donné  une  édition  des  Pensées,  avec  un  com- 
mentaire suivi.  La  plupart  des  travaux  Bér^.eux,  mais  par- 
tiels, ont  été  faits,  en  ce  genre,  par  de  Jeunes  professeon 
de  notre  Univeraité  :  sur  les  Oraisons  funèbres  de  Bo«- 
suet,  par  M.  A.  Didier;  sur  les  Dialogues  surVÊlo^iience, 
la  Lettre  à  V Académie,  et  le  Télémaque  de  Fénelon,  par 
M.  Despoîs  pour  les  premiers  ouvrages,  et  M.  GoUncamp 


PHI 


1419 


PHI 


poar  le  3*;  sur  La  Bruyère  {Caractères)  par  M.  Hémardin- 
quer;  sur/.-i?.  Rousseau,  par  M.  Manuel;  surle  Charles  XII 
de  Voltaire,  par  M.  Geffroy,  etc.  Il  est  certaia  qu*à  moins 
d'études  spéciales,  ou  sans  le  secours  de  travaux  philo- 
logiques de  ce  genre,  bien  peu  de  personnes  peuvent  se 
vanter  de  n'ôtre  Jamais  arrêtées  dans  la  lecture  des  écri- 
vains moralistes  ou  peintres  de  mœurs,  y  compris  les 
orateurs  sacrés.  De  même  que  dans  l'antiquité,  par 
exemple,  Horace  est  souvent  obscur  pour  nous  sans  un 
commentaire  spécial,  de  même,  parmi  nous,  il  faut  un 
guide  savant  pour  lire  avec  fruit  nos  auteurs  des  deux 
derniers  siècles.  Nous  n'étonnerons  personne  en  disant 
qu'il  n'existe  pas  une  seule  histoire  de  notre  Révolution 
qui  n'ait  déjà  nesoin  d'un  commentaire  de  ce  genre  ;  bien 
plus,  Béranger  même,  si  populaire,  ne  peut  guère  être  com- 
pris de  la  génération  actuelle,  pour  tout  ce  qui  se  rapporte 
aux  temps  de  la  Restauration,  c-à-d.  un  espace  de  moins 
de  50  ans.  Enfin,  indépendamment  des  variations  de  la 
langue  et  des  choses,  il  se  rencontre  quelquefois  dans  les 
livres  des  expressions  d'un  autre  langage  ;  ainsi,  tout  le 
monde  sait  qu'il  y  a  le  langage  des  sciences,  celui  des 
arts  (peinture,  architecture,  sculpture,  etc.),  celui  du 
droit,  des  usages,  des  modes,  etc.  lit  encore  l'intervention 
du  philologue  est  nécessaire.  Sans  pousser  plus  loin  ces 
exemples,  on  voit  l'utilité  bien  réelle  de  la  philologie; 
cette  utilité  fut  de  tous  les  temps;  aussi  comptaitron  beau- 
coup de  philologues  dans  l'Antiquité,  qui  les  confondait 
assez  volontiers  avec  les  grammairiens.  La  liste  de  leurs 
noms  serait  fastidieusement  stérile,  sans  l'indication  de 
leurs  travaux,  impossible  ici,  car  iû  formeraient  une  bi- 
bliothèque considérable;  cependant,  pour  en  donner  une 
idée,  nous  allons  en  nommer  plusieurs,  parmi  ceux  dont 
les  ouvrages  sont  parvenus  jusqu'à  nous  en  totalité  ou  en 
partie  :  dans  la  langue  grecque,  Aristarque  a  laissé  des 
Scholies  sur  V Iliade;  Eustathe,  des  Commentaires  sur 
Homère;  Suidas,  un  Lexique  historique,  biographique  et 
géographique;  PoUux,  un  Onomasticon,  vocabulaire  des 
mois  par  séries  d'idées  anaJogues,  etc.  —  En  latin,  nous 
avons  de  Verrius  Flaccus  un  Traité  de  la  signification 
des  mots;  d'Asconius,  un  Commentaire  sur  quelques 
Discours  ae  Cicéron  ;  d'Aulu>Gelle,  sous  le  titre  de  Nuits 
attiques^  de  petites  dissertations  de  grammaire,  de  cri- 
tique, d'histoire,  de  biographie,  d'antiquités;  de  Macrobe, 
un  recueil  de  même  genre,  qu'il  a  intitulé  Saturnales  ; 
de  Donat,  un  Commentaire  sur  Térence;  d'Acron,  un 
Commentaire  sur  Horace;  de  Nonius  Marcellus,  un  re- 
cueil De  la  propriété  des  termes;  de  Servius,  un  Com- 
mé'itaire  sur  Virgile,  etc.  Les  philologues  modernes  des 
œuvres  de  l'Antiquité  sont  presque  innombrables  :  ils 
n'ont  pu  guère  que  répéter  ce  qu'avaient  dit  leurs  de- 
vanciers anciens,  quant  au  fond  des  choses;  mais  ils  se 
sont  beaucoup  exercés  sur  la  langue,  et  plusieurs  avec 
une  témérité  tout  à  fait  blâmable  et  très-peu  utile.  Leur 
race  commence  au  xv*  siècle,  et  elle  est  si  considérable, 
que  nous  ne  pouvons  en  nommer  que  quelques  som- 
mités :  Gasparino,  de  Bergame,  éditeur  des  Institutions 
de  Quintilien  et  des  traités  de  Rhétorique  de  Cicéron  ; 
Le  Pogge,  qui  découvrit  plusieurs  Discours  de  Cicéron, 
Columelle,  Vitruve,  Ammien  Marcellm,  Végèce,  etc.; 
Laurent  Vall a,  qui  écrivit  un  traité  De  l'Élégance  latine; 
Ange  Politien,  qui  fit  un  Commentaire  sur  les  Pan- 
dectes,  etc.  —  Au  xvi"  siècle,  les  Aide,  Érasme,  Budé, 
Scaliger,  les  Estienne,  Lambin,  Turnèbe,  Muret,  Jf .  Lipse, 
Putsch,  Pitbou,  Casaubon,  etc.,  marchèrent  dans  la  voie 
tracée  par  leurs  devanciers  ;  au  xvit*  siècle,  on  trouve 
Voss,  Saumaise,  Heinsius,  Goesius,  Gronovius,  Jacques 
Godefroy,  Du  Caiige,  Hardouin,  Dacier,  etc.;  au  xvm*  siè- 
cle, cette  race,  quelquefois  plus  patiente  que  sagace,  se 
continue  dans  Bentley,  Toup,  Tyrwhitt,  Wesseling,  Hems- 
terhuys,  Facciolati,  Ernesti,  Reiske,  Heyne,  Schutz, 
Schneider,  Larcher,  etc.  Au  xix*  siècle,  la  philologie  a 
poursuivi  sa  marche  sans  beaucoup  se  préoccuper  du 
mouvement  d'idées  qui  se  faisait  autour  d'elle;  l'Alle- 
magne, qui  semblait  son  pays  de  prédilection,  a  fourni 
Brunck,  Matthiie,  Jacobs,  Bekker,  Bœckh,  Buttmann,  Pas- 
sow,  Bopp,  Griihm,  Grotcfend,  MQller,  Lindemann,  etc.; 
la  Suisse,  Orelli  ;  la  France,  Schweighsuser,  Villoison, 
Coray,  Vauvilliers,  et,  de  nos  jours,  avec  plus  d'esprit  et 
d'intérêt,  par  l'art  d'écrire  et  de  composer,  que  le  genre 
ne  semblait  comporter,  Boissonade,  Letronne,  Raoul 
Rochette,  Nodier,  sans  parler  de  ({uelques  vivants.  On 
voit  que  la  philologie  est  une  science  réelle,  et  une 
grande  science,  puisqu'elle  se  lie  à  l'histoire  et  à  la  vie 
des  nations,  contribue  à  les  faire  connaître,  et  peut  assez 
souvent  en  éclairer  les  parties  obscures.  C.  D— t. 
PHILOSOPHIE  (du  ffec philos ^  smi^sophia,  sagesse}. 


Chez  les  Grecs,  ce  fut  d'abord  la  science  universelle,  ou 
du  moins  le  tronc  auquel  se  rattachait  l'ensemble  des 
connaissances  humaines.  Plus  tard,  elles  s'en  détachèrent 
quand  on  eut  reconnu  que  chaque  connaissance  avait  un 
objet  assez  spécial  pour  former  une  branche  distincte  do 
la  science  universelle.  La  Philosophie,  bien  que  restreinte 
par  ces  ébranchements  successifs ,  n'a  péri  ni  de  nom  ni 
de  fait.  Ce  serait  même  une  erreur  de  croire  qu'elle  n'a 
gardé  dans  ses  attributions  que  ce  (^ue  les  autres  sciences 
ont  bien  voulu' lui  laisser.  En  ceci  comme  en  tout  le  reste, 
la  marche  de  l'esprit  humain  a  été  déterminée  par  cer- 
taines convenances  naturelles,  dont  il  faut  se  rendre 
compte,  et  qui  feront  comprendre  ce  (]ue  c'est  au  juste, 
que  cette  science,  sur  l'objet  et  sur  les  limites  de  laquelle 
les  philosophes  eux-mêmes  semblent  si  peu  d'accord.  — 
Le  monde  physique  d'une  part,  les  êtres  dont  il  se  com- 
pose, les  phénomènes  développés  dans  ces  êtres,  les  lois 
et  les  forces  q^i  les  régissent,  sont  l'objet  d'un  certain 
nombre  de  sciences,  celles  que  nous  appelons  sciences 
physiques  et  Milurelles;  les  propriétés  et  les  rapports  des 
divers  ordres  de  quantités,  telles  que  la  raison  les  conçoit, 
nombre,  étendue,  force,  etc.,  donnent  naissance  aux 
mathématiques;  Vhistoire  raconte  le  développement  exté- 
rieur des  sociétés  humaines.  L'homme,  être  éminemment 
complexe,  appartient  déjà  par  certains  côtés  à  la  physique, 
à  l'histoire  naturelle,  à  l'histoire  proprement  dite.  Mais, 
à  quelque  opinion  qu'on  s'arrête  sur  le  principe  des  phé- 
nomènes dont  nous  allons  maintenant  parler,  on  ne  peut 
méconnaître  que  la  vie  animale  et  les  actes  extérieurs 
sont  loin  d'être  l'homme  tout  entier.  Respirer,  digérer, 
se  reproduire,  aller,  venir,  ne  sont  que  les  conditions  ou 
les  conséquences  d'autres  actes  que  tout  le  tnonde  connaît, 
et  crue  tout  le  monde  nomme  sentir^  penser,  entendre , 
vomoir,  etc....  Ne  préjugeons  donc  rien  sur  les  principes 
de  ces  phénomènes ,  dont  l'ensemble  constitue ,  à  côté 
de  la  vie  animale,  une  autre  vie  que  nous  avons  bien 
le  droit  de  nommer  vie  morale ,  et  dont  la  conscience 
du  moi,  la  libre  disposition  de  nous-même^,  la  concep- 
tion des  vérités  éternelles ,  la  notion  de  Dieu ,  sont  les 
éléments  les  plus  saillants  et  les  plus  considérables  : 
le  moi ,  centre  et  sujet  commun  de  toutos  les  con- 
naissances; Dieu,  cause  suprême  de  tout  ce  qui  est; 
deux  termes  bien  différents ,  et  cependant  en  relation  in- 
time :  l'un,  principe  de  toute  connaissance,  l'autre,  prin- 
cipe de  toute  existence.  Or,  le  connaître  ne  fait  que  tra- 
duire l'être,  et  ce  dont  nous  n'aurions  aucune  idée  serait 
pour  nous  absolument  comme  s'il  n'était  pas.  Nous  insis- 
tons sur  ces  considérations ,  parce  qu'il  ne  serait  pas 
possible,  sans  cela,  de  comprendre  comment  une  même 
science  peut  être  à  la  fois  (sans  que  son  unité  s'en  trouve 
compromise)  la  science  ue  l'homme  moral,  la  science 
de  Dieu,  et,  par  cela  même,  celle  des  vérités  générales 
ou  des  principes  par  lesquels  tout  le  reste  s'explique.  Or, 
tel  est  effectivement  le  caractère  de  la  Philosophie.  «  Elle 
consiste,  dit  avec  raison  Bossuet,  à  rappeler  l'esprit  à 
soi-même,  pour  s'élever  ensuite  comme  par  un  de^  sûi 
jusqu'à  Dieu,  n  Et  encore  :  «  La  sagesse  consiste  à  con- 
naître Dieu,  et  à  se  connaître  soi-même.  La  connais- 
sance de  nous-mêmes  nous  doit  élever  à  la  connaissance 
de  Dieu.  »  Entre  ces  deux  éléments  extrêmes,  il  y  a  place, 
on  le  comprend  sans  peine,  pour  plusieurs  grandes  ques- 
tions; disons  plus,  pour  des  divisions  de  la  science, 
qu'on  pourrait  à  la  rigueur  considérer  elles-mêmes  comme 
autant  de  sciences  distinctes  :  l'analyse  de  l'esprit  humain 
et  de  ses  différentes  fonctions  (Psychologie),  —  la  dé- 
termination des  lois  spéciales  de  l'entendement ,  et  leur 
application  à  la  recherche  de  la  vérité  (Logique),  —  celle 
des  principes  C[ui  doivent  déterminer  la  volonté  (Morale), 
—  celle  des  principes  encore  plus  généraux  dont  la  notion 
tend  de  plus  en  plus  à  se  confondre  dans  la  notion  uni- 
que de  Dieu  (Métaphysique  ou  Théodicée),  etc.  Il  est 
souvent  arrivé  que  les  philosophes,  suivant  leurs  incli- 
nations et  la  tournure  particulière  de  leur  esprit,  se  sont 
inégalement  préoccupés  des  divers  points  de  vue  sous 
lesquels  la  philosophie  peut  être  considérée,  et  qu'ainsi, 
les  uns  en  ont  fait  presque  exclusivement  une  métaphy- 
sique, tandis  que  d'autres  l'ont  réduite  à  n'être  <ju'une 
sorte  d'histoire  naturelle  expérimentale  de  l'espnt  hu- 
main. Mais  la  Philosophie  doit  réunir  et  concilier  ces 
différents  caractères  :  spéciale  dans  son  point  de  départ, 
universelle  dans  ses  tendances  et  dans  ses  rapports;  c'est 
à  ce  titre  qu'elle  conserve  une  sorte  de  suprématie  sur 
les  autres  sciences ,  et  que,  sans  se  confondre  avec  elles, 
elles  les  domine  et  les  éclaire  toutes,  comme  fattestent 
ces  expressions  Philosophie  de  Vhistoire^  Philosophie  des 
sciences ,  qui  s'appliquent  non  plus  aux  recherches  spé- 


PHI 


1420 


pni 


eialas  de  èhacane  d'elles,  mais  à  Texposition  des  prin- 
cipes généraax  qai  en  coordonnent  les  différentes  parties, 
et  qui  les  coordonnent  elles-mômes,  les  unes  par  rapport 
aux  antres. 

En  renvoyant,  pour  les  développements,  aux  nombreux 
articles  que  contient  ce  Dictionnaire  sur  les  différentes 
parties  de  la  Philosophie  (  K.  surtout  Psychologie,  Lo- 
gique, MORALB,  MÉTAPHYSIQUE,  Tut^ODICéB  ,  ÂME,  IdI^.ES, 

PÊfséÉ,  Raison,  MrirqpDB,  Dieu,  Libre  ARarrRE,  etc.), 
nous  tenons  à  bien  faire  entendre,  en  quelaues  lignes , 
rintérét  qui  s'attache  aux  études  philosophiques.  Nous 
ne  le  chercherons  pas,  comme  on  le  fait  quelquefois,  dans 
les  parties  les  plus  pratic[ues  de  la  Philosophie ,  quoique 
assurément  nous  ne  deyions  pas  rester  indifférents  aux 
perfectionnements  très-réels  que  Tétude  bien  faite  de  la 
Logique  et  de  la  Morale  peut  porter  dans  Texercice  habi- 
tuel des  facultés  ;  mais  nous  croyons  que  si  le  perfection- 
nement de  l'intelligence  et  du  cœur  est  en  effet  le  but 
qu'il  s'agit  d'atteindre,  c'est  moins  par  les  méthodes  et 
par  les  règles  pratiques  que  la  Philosophie  nous  y  con- 
duit, que  par  les  lumières  qu'elle  projette  sur  toutes 
choses ,  par  les  horizons  étendus  c][u'elle  ouvre  à  l'esprit, 
par  l'amour  de  la  vérité  qu'elle  lui  inspire,  par  les  habi- 
tudes de  réflexion  qu'elle  lui  communique,  par  la  culture 
désintéressée  de  la  Raison.  Aristote  a  supérieurement 
exprimé  ceci  :  «  Parmi  les  sciences,  dit-il ,  celle  à  laauelle 
on  s'applique  pour  elle-même,  et  dans  le  seul  but  de  sa- 
fxnr,  est  plus  philosophie  que  celle  qu'on  étudie  à  cause 
de  ses  résultats...  Connaître  et  savoir,  dans  le  but  unique 
de  savoir  et  de  connaître,  tel  est  par  son  excellence  le 
caractère  de  la  science  de  ce  qu'il  y  a  de  plus  scienti- 
fique »  {Métaphysique,  I,  i,  2).  —  Ajoutons  encore  que 
la  Philosophie  est  et  doit  rester  l'œuvre  de  la  libre  ré- 
flexion, la  science  la  plus  haute  à  laquelle  l'homme  puisse 
s*élever  par  ses  propres  forces,  mais  après  tout  une  science 
humaine  comme 'les  autres;  science  faillible,  discutable 
dans  les  solutions  qu*e]le  oppose  aux  problèmes  qu'elle 
agite.  C'est  de  là  que  lui  viennent  le  mouvement,  la 
vie  et  le  progrès,  et  si  elle  se  rencontre  sur  quelques 
points  avec  la  Théologie,  dont  les  voies  sont  toutes  dif- 
férentes, il  n*en  est  pas  moins  vrai  qu'elle  doit  en  rester 
profondément  distincte;  car  elle  ne  saurait,  sans  cesser 
d'être,  lui  emprunter  sa  méthode  ou  s*engager  à  sa  suite 
dans  la  recherche  des  vérités  inaccessibles  h  la  seule 
Raison.  B— i. 

PHILOSOPHIE.    V,  CARACrfcRBS  d'iMPRIMERIB. 

PHILOSOPHIE  DE  l'histoire,  idée  générale  ou  ensemble 
de  principes  sous  l'influence  desquels  un  historien  con- 
çoit, dispose  et  exécute  son  œuvre.  Pour  qu'une  philoso- 
phie de  l'histoire  soit  possible,  il  faut  que  l'historien 
{misse  embrasser  un  g^nd  nombre  de  faits,  qu'une 
ongue  expérience  permette  de  les  Juger,  et  que  l'esprit 
critique  ait  pris  de  larges  développements. 

Longtemps  on  se  contenta  de  raconter  :  ainsi,  chez  les 
Grecs,  Hérodote  décrit  ce  qu'il  a  vu,  observé  et  appris 
dans  ses  voyages,  sans  beaucoup  se  préoccuper  des  causes 
des  événements.  Thucvdide,doué  d'un  esprit  plus  philo- 
sophicnie,  s'est  attache  à  peindre  les  personnages,  à  ca- 
ractériser les  gouvernements  et  les  peuples  oui  prirent 
part  à  la  guerre  du  Péloponèse;  il  a  expliqué  les  causes 
et  les  suites  des  faits  par  les  vertus  ou  par  les  vices  de 
ces  personnages,  de  ces  gouvernements  et  de  ces  peuples. 
Xénophon  est  plus  remarquable  par  son  style  que  par  sa 
méthode  historique.  Polybe  crée  l'histoire  raisonnée;  il 
explique  les  origines,  les  circonstances  et  les  résultats 
des  faits,  il  sème  de  réflexions  son  ouvrage,  et  force  ses 
lecteurs  à  penser.  Toutefois,  la  philosophie  de  l'histoire 
n'existe  pas  encore  :  car  "Thucydide  n'ordonne  pas  les 
faits  sous  les  idées,  et  d'ailleurs  son  livre  ne  comprend 
que  2i  ans  de  guerre  entre  deux  peuples  ;  Polybe  explique 
bien  la  conquête  du  monde  par  la  faiblesse  et  les  fautes 
des  vaincus,  par  la  force  et  la  sagesse  des  vainqueurs, 
mais  son  histoire  ne  comprend  qu'un  siècle  et  ne  con- 
tient que  des  événements  politiques.  Nul  des  historiens 
grecs  n'a  vu  l'humanité  derrière  la  petite  république  qui 
l'intéresse. 

Les  Romains,  formés  à  l'école  des  Grecs,  ne  sont  pas 
allés  plus  loin  qu'eux.  Les  Commentaires  de  César  n'of- 
frent que  dea  matériaux  pour  l'histoire;  l'auteur  expose 
les  faits.  Il  ne  ressent  ni  n'exprime  des  émotions.  Sal- 
luste,  plein  de  l'esprit  de  parti,  faisant  des  portraits  d'ap- 
parat, arrangeant  les  discours,  ne  saurait  avoir  rencontré 
la  vraie  méthode  historique.  Tite-Live,  doué  avant  tout 
du  génie  de  l'éloquence,  transforme  l'histoire  en  discours 
qui  résument  et  expliquent  les  faits,  les  révolutions,  le 
fouvernement  et  les  guerres,  et  où  la  corruption  des 


moBurs  est  présentée  comme  la  loi  dominante  de  This- 
toire  romaine  :  mais  il  n'y  a  pas  là  de  science  régulière, 
obligé  qu'il  est,  pour  les  besoins  de  sa  thèse,  d'omettre 
un  grand  nombre  de  lois  et  de  cacher  les  autres  sous  la 
forme  de  motifs  oratoires.  D'ailleurs,  la  disposition  des 
faits  année  par  année  est  un  ordre  que  la  science  n'ad- 
met pas.  Tacite  fait  revivre  ses  personnages,  dont  il  trace 
d'admirables  portraits  en  mettant  leur  cœur  à  nu,  en 
scrutant  leurs  motifs  les  plus  secrets  :  mais  cette  résur- 
rection du  passé,  toute  saisissante  qu'elle  est,  ne  saurait 
offrir  une  saine  théorie  de  l'histoire.  Chez  tous  ces  histo- 
riens, la.  philosophie  consiste  à  croire  que  Rome,  par  sa 
vertu  et  par  sa  destinée  divine,  a  dû  conquérir  le  monde, 
et  que  les  autres  peuples  ne  sont  par  rapport  à  elle  que 
des  esclaves  ou  des  barbares.  —  Remarquons  encore  que 
la  grande  affaire  des  temps  anciens  étant  la  Rhétorique  ou 
l'art  de  parler,  et  non  pas  l'art  de  composer,  l'art  d'écrire 
sur  un  sujet  quelconque,  on  ne  trouve  pas  davantage  une 
philosophie  de  l'histoire  chez  les  écrivains  qui  ont  traité 
incidemment  ou  spécialement  du  genre  historique  :  ils 
se  bornent  à  donner  des  préceptes  sur  les  qualités  mo- 
rales et  littéraires  ((ui  conviennent  à  l'historien;  ainsi  fait 
Cicéron  dans  son  dialogue  De  VOrateur  (liv.  II,  13),  sous 
la  forme  d'une  digression,  par  la  bouche  d'Antoine.  Pline 
le  Jeune  ne  va  pas  au  delà  dans  sa  lettre  à  Capiton 
(liv.  V,  8),  n'attachant  que  très-peu  d'importance  au  style 
historiaue.  Denys  d'Halicamasse,  dans  son  Jugement  sur 
Thucydide,  se  préoccupe  surtout  du  style  et  de  ses  orne- 
ments, et  fait  de  la  critique  littéraire  sur  Thucydide 
plutôt  qu'un  traité  en  forme.  L'opuscule  de  Lucien,  De 
la  manière  décrire  V  Histoire,  est  plutôt  une  critique  des 
historiens  antérieurs,  un  exposé  des  défauts  à  éviter  et 
des  qualités  littéraires  à  rechercher,  qu'un  traité  philo- 
sophique sur  la  matière,  apportant  des  vues  et  des  idées 
autres  que  celles  de  ses  devanciers.  Ainsi,  les  écrivains 
didactiques,  pas  plus  que  les  historiens  de  l'Antiquité, 
n'avaient  rien  donné  ae  sérieux  sur  les  principes  de  la 
science  historique. 

La  première  idée  d'une  philosophie  de  l'histeire  est 
contemporaine  des  grandes  invasions  des  Barbares  dans 
l'Empire  romain.  La  nouvelle  de  la  prise  de  Rome  par 
Alaric,  en  410,  vînt  trouver  S'  Augustin  pendant  qu'il 
prêchait  à  Carthaçe;  il  entreprit  alors  de  répondre  aux 
plaintes  du  paganisme  imputant  aux  chrétiens  les  mal- 
heurs de  l'Empire.  Il  le  fit  dans  sa  Cité  de  Dieu,  livre  où 
l'ancienne  société  est  condamnée  an  nom  de  la  société 
naissante,  à  laquelle  la  Providence  avait  depuis  long- 
temps préparé  les  voies;  ce  ne  sont  plus  les  vices  ni  les 
vertus  des  gouvernements  et  des  hommes,  ce  n'est  plus 
la  faveur  de  la  Fortune  ou  de  Jupiter  qui  donne  l'empire, 
c'est  la  Providence  universelle  qui  gouverne  les  États  et 
les  peuples  du  monde  romain,  comme  elle  gouverne  le 
ciel  et  la  terre.  La  Cité  de  Dieu  est  le  premier  monu- 
ment de  la  philosophie  de  l'histoire,  c'est-à-dire  la  pre- 
mière explication  sérieuse  des  événements  dont  le  monde 
a  été  le  théâtre  (K.  Cité  db  Dirl).  —  Pendant  le  moyen 
âge,  elle  resta  ensevelie  dans  l'oubli  :  les  moines,  qui 
compilaient  sans  choix  les  traditions  populaires,  nos  pre- 
miers chroniqueurs  et  historiens,  pâles  copistes  de  l'An- 
tiquité, ne  songeaient  nullement  à  rechercher,  pour 
l'histoire,  des  lois  qu'ils  ne  trouvaient  pas  chez  leurs  de- 
vanciers et  qu'ils  ne  soupçonnaient  pas  eux-mêmes.  Il 
faut  traverser  même  la  Renaissance  et  arriver  Jusqu'à  la 
fin  du  XVI*  siècle  pour  que  François  Beaudoin,  dans  ses 
Prolégomènes  historiques^  impose  aux  historiens  la  né- 
cessité d'être  Jurisconsulte,  à  cause  de  l'importance  do 
Droit  dans  la  vie  des  nations;  pour  que  Jean  Bodin,  dans 
la  Méthode  facile  pour  la  connaissance  de  V Histoire,  leur 
recommande  d'observer  les  mœurs  et  les  habitude  des 

{peuples,  les  constitutions  des  empires  et  le  caractère  des 
ois,  et  de  tenir  compte  des  révolutions  qui  les  ont  mo- 
difiées. Mais  ce  ne  sont  là  que  quelques  idées  Jetées  en 
passant,  sans  développement  suivi  et  sans  action  immé- 
diate. Il  en  fut  de  même  des  principes  posés  par  Bacon 
au  commencement  du  xvu*  siècle  :  le  second  livre  de  sa 
Grande  Restauratton  des  sciences  proclamait  la  nécessité 
de  comprendre  l'histoire  littéraire  d'un  peuple  dans  le 
tableau  de  ses  destinées;  sans  cela,  disait-il,  l'histoire 
ressemblait  à  Polyphème  privé  de  son  œil.  Ses  idées  ne 
furent  pas  acceptées  par  les  historiens  contemporains. 
•  Chez  nous,  Bossuet  est  le  premier  qui,  en  théorie  et  en 
pratique,  ait  demandé  aux  faits  ce  qu'ils  signifient,  l'idée 

Su'ils  expriment,  le  rapport  qu'ils  soutiennent  avec  l'esprit 
e  l'époque  au  sein  de  laquelle  ils  se  sont  accomplis.  Son 
Discours  sur  V Histoire  universelle  (1681)  développe  la 
chatue  immense  des  événements  deptds  l'origine  du  numde 


PHI 


1421 


PHt 


Jusqu'à  Charlemagne,  et  montre  les  desseins  de  la  Provi- 
dence sur  l^Êglise,  dont  les  Empires  ne  servent  qu'à  assurer 
le  triomphe.  G*est  la  doctrine  de  S'  Augustin  ;  seulement 
roriginalité  de  fiossuet  est  d*avoir  insisté  sur  la  recherche 
des  causes  qui  ont  amené  le  progrès  ou  la  décadence  des 
Empires,  et  d'avoir  généralise  le  point  de  vue  de  Tévèque 
d'Hippone  en  le  transportant  du  monde  romain  à  tous 
les  États  de  la  terre,  faisant  de  la  religion  le  commence- 
ment et  la  fin  d*une  véritable  histoire  de  Thumanité. 

A  côté  de  la  religion,  ritalien  Vico  vint  placer  TÉtat, 
qui,  par  les  lois,  les  institutions  politiques,  le  gouverne- 
ment, a  une  influence  profonde  sur  la  vie  des  peuples. 
Les  Principes  d*un9  science  nouvelle  relative  à  la  nature 
commune  des  nations  (1725)  rattachent  le  mouvement 
des  sociétés  humaines  a  un  plan  supérieur  et  invariable, 
qui  fait  parcourir  à  chaque  peuple  Vâge  divin  ou  du 
prêtre,  Vâge  hérùiique  ou  des  guerriers,  et  Vàge  humain 
ou  de  la  civilisation.  C'est  Pintroduction  d*un  point  de 
vue  humain  dans  l'histoire,  pour  rapporter  ensuite  les 
destinées  de  l'humanité  à  la  Ffrovidence.  Mais  Vico  eut  le 
tort  d'emprisonner  chaque  peuple  dans  son  cercle,  ne 
tenant  pas  compte  des  progrès  incessants  de  l'humanité 
que  Pascal  avait  si  bien  constatés  dans  son  Traité  sur  le 
fndê. 

Montesquieu,  par  son  Esprit  des  lois  (4748),  eut  aussi 
sa  part  d*influeuce  dans  la  manière  de  concevoir  l'his- 
toire, en  attribuant  une  grande  action  au  climat  sur  les 
hommes,  et  sur  toutes  les  institutions,  toutes  les  lois  qui 
les  régissent,  politiques,  civiles,  religieuses,  militaires. 
Il  v  a,  selon  lui,  une  certaine  harmonie  entre  la  terre  et 
celui  qui  l'habite,  entre  l'homme  et  la  nature  (V.  Cli- 
mat). —  Voltaire,  dans  son  Siècle  de  Louts  XIV  (1751  ), 
eut  aussi  le  mérite  d'une  pensée  philosophique  :  il  peint 
plutôt  l'histoire  de  l'esprit  humain  que  la  vie  d'un  prince, 
que  l'histoire  d'un  règne.  Son  principe,  c'est  qu'il  faut 
s'occuper  de  nos  mœurs,  de  nos  lois,  de  nos  coutumes, 
de  notre  esprit;  c'est  qu'il  faut  faire  entrer  dans  le  cadre 
de  l'histoire  l'état  de  la  religion,  du  commerce,  de  l'in- 
dustrie, le  Jeu  de  l'administration  et  des  finances,  le  mou- 
vement des  lettres  et  des  arts,  en  un  mot,  la  vie  entière 
de  la  société  ou  du  peuple  qui  fait  la  matière  de  l'histoire. 
Cest  un  principe  tout  nouveau  qu'il  appliqua  en  grand 
dans  V Essai  sur  lesmceurset  Vesprit  des  nations  (1757  ). 
Si  l'exécution  de  cet  ouvrage  n'en  vaut  pas  toulours  la 
méthode,  il  n'en  est  pas  moins  le  premier  modèle  de  la 
critique  historique  s'appuyant  sur  les  deux  sources  d'in- 
formation les  plus  sûres,  la  mérité  par  le  témoignage  des 
contemporains  éclairés,  et,  à  défaut  de  la  vérité,  la  vrai- 
semblance. 

Enfin,  la  philosophie  de  l'histoire  se  compléta  par 
l'œuvre  de  l'Allemand  Herder  :  Idées  sur  la  philosophie 
de  Vhumanité  (1784).  Son  principe  est  de  rendre  compte 
de  tous  les  éléments  de  l'humanité,  ainsi  que  de  tous  les 
temps  et  de  toutes  les  époques  de  l'histoire.  On  y  trouve 
la  religion  et  l'État,  comme  chez  Bossuet  et  Vico  ;  les 
arts,  la  poésie,  l'industrie,  le  commerce,  la  philosophie, 
comme  le  demandaient  Bacon  et  Voltaire.  Les  races,  les 
langues,  les  gouvernements  n'y  sont  pas  oubliés.  Herder 
a  tenu  compte  du  progrès  perpétuel  de  l'humanité  en 
tous  sens  et  dans  toutes  les  directions.  Le  théâtre  de 
l'histoire  a  aussi  attiré  son  attention,  non  moins  que  l'in- 
fluence des  climats  et  des  lieux,  comme  chez  Montes- 
quieu. Son  ouvrage  est  le  plus  grand  monument  élevé  à 
l'histoire  de  l'humanité  depuis  les  temps  les  plus  anciens 
jusqu'à  nous;  on  peut  dire  qu'avec  Herder  la  philosophie 
de  l'histoire  est  faite,  et  qu'on  ne  fera  plus  qu'appliquer 
ses  principes,  décomposer  son  œuvre,  en  approfondissant 
certaines  parties,  mais  en  suivant  toujours  la  route  qu'il 
avait  frayée,  sans  arriver  à  des  découvertes  nouvelles. 

A  côté  de  ces  grands  noms,  la  France  vit  une  foule 
d'écrivains  s'occuper  péniblement  à  tracer  les  qualités 
intellectuelles  et  morales  imposées  à  l'historien;,  tels 
furent  La  Mothe-Jjsvayer,  dans  un  Discours,  à  propos  de 
la  Vie  de  Charles-Quint  par  Sandoval  (1636)  ;  Cordemoy, 
Observations  sur  Hérodote;  Saint-Réal,  De  l'Usage  de 
VHistoire  (1671  ).  Le  P.  Lemoyne  {Traité  de  V Histoire, 
1670)  veut  quei'historien  soit  poète,  et  que  la  vérité  soit 
sa  religion;  le  P.  Rapin  {Réflexions  sur  VHistoire,  1675) 
copie  les  prescriptions  des  Anciens.  Saint-  Évremond , 
dans  son  Discours  sur  les  Historiens  français,  est  nova- 
teur éclairé,  en  demandant  d'abord  l'exposé  des  lois,  des 
mœurs,  des  coutumes  d'un  pays,  et  en  y  répandant  quel- 
ques idées  saines,  qui  ne  font  pas  corps  de  doctrine. 
Fénelon,  dans  sa  Lettre  à  V Académie  française  (1716),  a 
donné,  aa  §  Vm,  un  projet  de  Traité  sur  l'Histoire,  qui 
renferme  une  excellente  méthcte  de  composition,  et 


quelques  principes  destinés  à  faire  partie  de  la  philoso- 
phie de  l'histoire,  et  dont  Fréret,  Voltaire  et  notre  siècl'^ 
ont  pu  profiter.  Rollin  parla  à  peu  près  de  même,  en 
exposant  les  Règles  et  principes  pour  Vétude  de  l  His- 
toire profane  {Traité  des  études,  III'  partie,  liv.  VI).  Dans 
ses  Héfteosions  sur  VHistoire  (1761),  d'Alembert  imposa 
aux  historiens  des  lois  philosophiques  qui  n'avaient  rien 
de  bien  nouveau.  Le  long  traité  de  Blably,  De  la  manière 
d* écrire  l'histoire  (1782),  donne  des  recettes  littéraires 
qui  se  réduisent  à  l'imitation  des  Anciens,  insistant  lon- 
guement sur  les  études  et  les  qualités  nécessaires  à  l'his- 
torien, sans  jamais  s'élever  a  des  principes  généraux. 

Au  commencement  de  notre  siècle.  Chateaubriand  en 
comprit  quelques-uns  dans  celui  des  livres  du  Génie  du 
Christianisme  qu'il  consacre  à  l'histoire  (III*  partie, 
liv.  5),  mais  surtout  dans  la  Préface  de  ses  OEuvres  his- 
toriques, où  il  Ju^  les  écoles  historiques  qui  se  sont 
élevées  sous  l'inspiration  de  la  philosophie  de  l'histoire, 
dont  il  critique  les  maîtres,  Vico  et  Herder,  pour  assurer 
la  suprématie  à  Bossuet.  —  Pendant  que  Daunou,  de 
1819  à  1830,  professait  au  Collège  de  France  son  Cours 
d'études  historiqtAes,  traité  complet  de  la  manière  d'écrire 
l'histoire,  au  point  de  vue  de  l'étude  des  sources,  de  leur 
classification,  de  leur  critique,  et  de  leur  mise  en  œuvre 
par  l'exposition  des  faits,  déclarant  nettement  qu'il  n'y 
avait  qu'à  choisir  dans  les  méthodes  des  devanciers  pour 
trouver  la  vraie  méthode  historique,  Aug.  Thierry  contri- 
buait à  l'établissement  de  la  philosophie  de  l'histoire  par 
ses  Lettres  sur  l'Histoire  de  France  (1820),  où  il  mon- 
trait la  futilité  et  le  ridicule  de  nos  prétendus  historiens. 
De  son  côté,  M.  Guizot,  par  son  enseignement  à  la  Sor- 
bonne,  opéra  sur  les  esprits  la  révolution  historique  que 
les  promoteurs  de  la  philosophie  de  l'histoire  avaient 
signalée  comme  une  nécessité,  et  la  consacra  dans  ses 
Essais  sur  VHistoire  de  France  et  dans  son  Histoire  de 
la  civilisation  en  Europe,  Plus  tard,  M.  Taine,  dans  un 
Essai  sur  Tit&-Live,  couronné  par  l'Académie  française 
(1855),  envisageant  l'histoire  comme  une  science  et 
comme  un  art,  a  tracé  tous  les  devoirs  de  l'historien,  au 
point  de  vue  de  la  critique,  de  la  philosophie,  des  carac- 
tères et  du  style,  en  écnvain  doué  du  sens  philosophique 
et  s'inspirant  à  la  grande  école  historique  moderne.  Enfin 
M.  Thiers,  en  tête  du  XII«  vol.  de  son  Histoire  du  Con- 
sulat et  de  V Empire  (1855),  a  mis  un  Avertissement  au 
lecteur,  où  il  donne  une  théorie  de  l'art  d'écrire  l'his- 
toire. Comme  qualité  de  l'esprit,  il  ne  veut  que  le  don  de 
l'intelligence,  qui  suffira  à  tout  ce  (|u'on  est  en  droit 
d'attendfre  de  l'historien  ;  comme  devoir,  il  lui  impose  le 
seul  amour  de  la  vérité  ;  de  ces  deux  sources  découleront 
tous  les  mérites.  F.  B. 

PHILOSOPHIQUE  (Poésie) ,  poésie  qui  se  propose  de 
prêter  aux  matières  de  la  philosophie,  fût-ce  les  plus 
abstraites  et  les  plus  rebelles ,  le  charme  des  vers.  Ces 
sortes  de  tentatives  provoquent  d'abord  l'étonnement,  et 
l'on  se  demande  Jusqu'à  quel  point  le  langage  poétique 
peut  sufiire  et  convenir  aux  exigences  de  la  v&ité  philo- 
sophique. La  poésie,  en  effet,  est  toute  dans  les  images, 
les  sentiments  et  les  mouvements  passionnés  ;  elle  recher- 
che la  variété,  la  souplesse  des  formes  et  la  vivacité  des 
couleurs  ;  elle  sait  s'accommoder  même  d'un  stjrle  vasue 
et  nuageux,  s'il  est  musical;  c'est  un  art  :  la  philosophie 
exige  la  précision  rigoureuse  qui  convient  à  l'analyse,  à 
l'abstraction ,  à  la  généralisation,  et  semble  requérir  plu- 
tôt la  prose  exacte,  aride  même,  du  géomètre  ;  c'est  une 
science.  Et  pourtant,  à  l'origine,  l'art  et  la  science  ont 
parlé  la  même  langue.  Les  premiers  philosophes  de  la 
Grèce  ont  bégayé  leurs  systèmes  dans  l'idiome  des  poètes  : 
Xénophane,Parménide,  Empédocle,  empruntèrent  le  vers 
homâique  pour  exposer  leurs  idées  sur  la  nature;  Pytha- 
i;ore,  ou  plutôt  quelqu'un  de  ses  disciples,  composa  lus 
Vers  dores,  où  la  morale  religieuse  domine  déjà  la  mé- 
taphysique. Il  y  a,  en  effet,  dans  la  philosophie,  certaines 
matières  qui  semblent  appeler  d'elles-mêmes  toutes  les 
richesses  et  les  magnificences  du  langage  poétique.  Com- 
ment mieux  parler  qu'en  vers  de  l'Etre  qui  préside  à 
l'ordre  du  monde,  des  mystères. de  notre  destmée,  des 
aspirations,  des  craintes  et  des  espérances  que  le  senti- 
ment religieux  excite  dans  l'ftme  humaine?  Aussi  loin 
qu'on  remonte  dans  l'histoire  de  la  littérature  grecque, 
même  avant  Homère,  on  retrouve  des  chants  de  philo- 
sophie religieuse,  des  hymnes  que  les  légendes  attribuent 
aux  personnages  mystiques  et  sacrés  d'Orphée,  de  Musée, 
des  Eumolpides.  Ces  premiers  interprètes  des  dieux, 
comme  Horace  les  appelle,  ont  pour  successeurs  les  Gno- 
miques  (  V,  ce  mot).  Au  m*  siècle  avant  notre  ère,  l'hymne 
de  Cléanthe  à  Jupiter  est  une  des  sublimes  inq;>iratioiis 


PHO 


1122 


PHO 


du  Stoïcisme  ;  Jamais  runitô  de  Diea  D^avait  étô  proclamée 
chez  les  païens  dans  un  langage  à  la  fois  plus  précis  et 
plus  élevé.  A  leur  tour,  les  Alexandrins,  notamment  Pro- 
dus,  et  un  chrétien  qui  ne  sépara  jamais  des  doctrines 
du  christianisme  les  idées  platoniciennes ,  Synésius,  évo- 
que de  Ptolémaîs,  composèrent  des  chants  où  la  philoso- 
phie se  confond  avec  la  religion.  Ce  genre  de  poésie  n'existe 
pas  chez  les  Latins,  où  Lucrèce  (  V.  Natorb — Poëme  de 
la  )  représente  seul  la  poésie  philosophique.  Mais ,  dans 
les  temps  modernes ,  on  peut  citer  le  poCme  de  la  Ueli- 
gion,  de  Louis  Racine,  et  surtout  les  Méditations  et  les 
Harmonies  poétiqiMs  de  M.  de  Lamartine,  tant  admiré  de 
Jfouffroy,  pour  avoir  su,  le  premier  peut-être,  dans  des 
vers  dont  le  mouvement  et  l'éclat  sont  parfois  incompa- 
rables, discuter  les  problèmes  les  plus  ardus  do  la  méta- 
physique. —  On  peut  rattacher  élément  à  la  poésie 
philosophique  les  Êpttres,  les  Satires,  les  Contes  mêmes 
où  l'auteur  se  complaît  à  développer  quelque  pensée  mo- 
rale. V,  DmACTiQUE  (Poésie),  Moralistes.         A.  H. 

PHOCAS  (  Colonne  de).  K.  Colonniss  monumentales  , 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

PHOEBUS.  F.  PHéBOS. 

PHQENIX,  monnaie  d'argent  en  usage  en  Grèce  dans 
les  premiers  temps  de  l'indépendance.  Elle  valait  environ 
0  fr.  83  c. 

PHQNAGOGUE ,  mot  d'origine  grecque  signifiant  con- 
ducteur du  son,  et  par  lequel  on  désignait  autrefois  le 
thème  de  la  fugue  (V.  ce  mot), 

PHONASQUE  (du  gtecphonè,  voix,  son),  professeur 
qui,  chez  les  Anciens,  développait  le  volume  de  la  voix, 
et  apprenait  à  bien  prononcer.  11  y  avait  aussi  ancienne- 
ment, dans  rÉglise,  un  pkonasque  chargé  de  régler  les 
intonations  des  chantres  :  on  ne  sait  s'il  s'aidait  d'un  in- 
strument pour  donner  le    on. 

PHONÉTIQUE.   V.  ÉcarreRE. 

PHONOGRAPHIE  (du  grec  phônè,  son,  et  graphô, 
J'écris) ,  mot  qui  a  été  employé  comme  synonyme  de  no- 
tation musicale,  F.  Notation. 

PHONOMINE ,  instrument  de  musique ,  inventé  vers 
4834  par  un  mécanicien  de  Vienne  en  Dauphiné.  U  a 
l'apparence  d'un  piano-orgue  :  le  clavier  n'a  guère  plus 
d'étendue  qu'à  l'ancien  clavicorde  (F.  ce  mot)^  et  Ton 
obtient  les  sons  à  l'aide  de  tuyaux;  mais,  par  l'effet  d'un 
mécanisme  particulier,  ces  sons  ont  une  analogie  frap- 
pante avec  la  voix  de  l'homme.  Le  phonomine  a  4  regis- 
tres, la  basse,  le  baryton,  le  ténor  et  le  fausset,  en  sorte 
qu'on  croit  entendre  un  chœur  d'hommes. 

PHORBÉION ,  nom  que  les  Grecs  donnaient  au  capis- 
trum  (F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire), 

PHORMINX,  instrument  de  musique  des  Anciens,  qui 
ne  parait  pas  avoir  différé  de  la  cithare;  cor  Homère  dit 
cithariser  avec  laphorminx  eiphormiser  avec  la  cithare. 

PHOTINX.  F.  Flctk. 

PHOTOGRAPHIE  ou  HÉLIOGRAPHIE  (du  a^ecphôs, 
photos,  lumière,  ou  hélios^  soleil,  et  de  graphe,  j'écris) , 
art  de  produire  et  de  fixer  les  images  des  objets  par  l'ac- 
tion de  la  lumière  sur  certaines  substances.  Dans  la 
Daguerréotypie,  l'image  se  forme  sur  une  planche  mince 
de  cuivre  plaqué  d'argent,  exposée  d'abord  à  la  vapeur 
d'iode  et  rendue  plus  sensible  à  l'aide  d'une  solution  de 
brome;  après  sa  sortie  de  la  chambre  noire,  cette  image 
est  rendue  apparente  par  les  vapeurs  mercurielles,  et  fixée 
par  un  lavage  dans  une  solution  d'hyposulfite  de  soude, 
ou  plutôt  de  chlorure  d'or,  comme  l'a  indiqué  M.  Fizeau. 
L'appareil  d'optique  à  l'aide  duquel  on  fixe  les  images 
dans  la  chambre  noire  se  nomme  Daguerréotype.  —  Les 
anciens  alchimistes  savaient  que  toute  image  produite 
au  moyen  d'une  lentille  sur  une  couche  de  chlorure  d'ar- 
gent ,  qu'ils  appelaient  argent  corné ,  s'y  fixait  en  noir 
pour  les  parties  éclairées ,  en  gris  pour  les  demi-teintes, 
et  en  blanc  pour  les  parties  que  ne  frappait  aucune  lu- 
mière. C'est  un  fait  constaté  par  le  livre  de  Fabricius , 
De  rébus  metallicis,  1566.  Selon  Johard  {Les  Nouvelles 
inventions  aux  Expositions  universelles,  1857,  in-S»), 
on  a  récemment  trouvé  en  Russie  un  livre ,  traduit  de 
l'allemand  depuis  300  ans,  et  qui  contient  très-claire- 
ment l'explication  de  la  photographie.  Dans  un  livre  pu- 
blié en  1760  sous  le  titre  de  Giphantie,  par  un  certain 
Tiphaigne  de  La  Roche,  on  trouve  la  description  de  cet 
art,  reproduisant  non-seulement  les  images,  mais  même 
les  couleurs.  Vers  la  fin  du  xvm*  siècle,  le  physicien 
Charles  se  servait  d'un  papier  recouvert  d'un  certain  en- 
duit, qu'il  ne  fit  pas  connaître,  pour  engendrer  des  sil- 
houettes à  l'aide  de  l'action  de  la  lumière.  En  1802 , 
Wedgwood  employa  un  papier  enduit  de  cbloruiA  an  de 


nitrate  d'arçent,  pour  la  reproduction  des  vitraux  des 
églises ,  mais  n'obtint  que  des  images  qui  noircissaient 
presque  aussitôt.  Depuis  1813,  Niepce,  propriétaire  aux 
environs  de  Chàlon-sur-Saône ,  se  livra  à  de  nouvelles 
recherches;  un  Mémoire  qu'il  présenta  en  1827  à  la  So- 
ciété «royale  de  Londres  prouve  qu'avant  tout  le  monde 
il  obtint  sur  métal  des  reproductions  de  gravures  que 
n'altérait  plus  la  lumière.  En  1829,  il  s'associa,  à  Paris, 
avec  Daguerre,  qui  s'occupait  aussi  de  fixer  les  images  de 
la  chambre  noire,  et,  après  dix  ans  de  recherches,  le 
procédé  qui  sert  encore  aujourd'hui  fut  trouvé;  on  put 
reproduire  sur  plaaue,  non-seulement  les  gravures,  mais 
les  monuments  et  les  tableaux,  et  exécuter  des  portraits. 
Depuis  1839,  tous  les  perfectionnements  ont  eu  pour  but 
d'opérer  avec  plus  de  rapidité,  et  de  donner  aux  images 
plus  de  netteté  et  de  vigueur;  résultats  que  l'on  a  ob- 
tenus par  divers  procédés,  dus  à  Claudet  de  Lyon ,  Gan- 
din, Fizeau,  Lerebours,  Martens,  Foucault,  etc. 

Les  images  da^erriennes  ont  l'inconvénient  de  miroi- 
ter. On  y  a  obvié,  en  remplaçant  la  plaque  métallique 
par  une  plaque  de  verre  ou  par  du  papier  convenablement 
préparés.  C'est  là  proprement  la  photographie.  L'image 
qu'on  obtient  est  négative;  les  teintes  y  sont  renversées, 
les  ombres  de  l'objet  étant  représentées  par  des  clairs  et 
réciproquement.  Un  Anglais,  Talbot,  a  eu  l'idée  de  s'en 
servir  comme  d'un  type  pour  obtenir  des  images  positi- 
ves, où  les  teintes  sont  ramenées  à  leur  ordre  naturel. 
Les  divers  procédés  de  la  photographie  sur  papier  ont 
été  successivement  trouvés  par  Bayard,  Talbot,  et  Blan- 
quart-Évrard,  de  Lille  ;  ceux  de  la  photographie  sur  verre, 
par  Niepce  de  Saint- Victor,  neveu  du  premier  inventeur. 
Chaaue  jour  apporte  des  perfectionnements  à  la  photo- 
graphie :  ainsi ,  les  frères  Moyer  et  Pierson  ont  découvert 
le  moyen  de  fixer  les  traits  d'un  tableau  ou  d'un  portrait 
sur  une  toile  préparée  pour  la  peinture  à  l'huile,  de  sorte 
qu'un  artiste  n'a  que  le  coloris  à  donner.  E.  Becquerel 
a  trouvé  une  substance  impressionnable  t^ui  reproduit  les 
couleurs  aussi  bien  que  les  ombres  des  objets ,  mais  on 
n'est  pas  encore  parvenu  à  les  fixer.  Beaucoup  d'épreuves 
photographiques  s'altèrent  sous  l'action  prolongée  des 
rayons  lumineux  ;  on  est  arrivé  à  en  révivifier  les  tons , 
mais  non  encore  à  empêcher  la  décoloration  dans  un 
temps  plus  ou  moins  long. 

En  considérant  l'inimitable  perfection  de  détails  que 
présentent  les  dessins  photographiques,  on  serait  tent('> 
de  placer  ces  œuvres  au  rang  des  plus  belles  productions 
des  arts  :  mais  l'art  ne  réside  pas  dans  la  stricte  imita- 
tion de  la  nature;  l'impression  provoquée  en  nous  par  la 
peinture  ne  résulte  pas  de  la  vérité  avec  laquelle  les 
objets  sont  reproduits  sur  la  toile;  les  œuvres  des  maîtres 
vivent,  non  par  l'exactitude  de  la  reproduction  maté- 
rielle, mais  par  la  pensée  qu'elles  expriment,  par  les  sen- 
timents qu'elles  éveillent.  L'art  n'imite  pas,  dans  toute 
la  rigueur  du  mot,  il  transforme  ;  pour  traduire  la  na- 
ture, il  s'en  écarte;  pour  copier,  il  invente;  pour  repro- 
duire, il  crée.  Quand  un  artiste,  par  exemple ,  exécute 
un  portrait,  ce  qu'il  cherche,  avant  tout,  c'est  la  physio- 
nomie, ce  je  ne  sais  quoi  composé  de  mille  nuances 
mobiles ,  changeantes ,  fuyantes ,  que  ne  donnent  pas 
quelques  secondes,  qu'il  ne  saisit  et  ne  devine  souvent 
qu'après  plusieurs  séances  où  il  aura  fait  poser  son  mo- 
dèle moralement,  pour  ainsi  dire ,  autant  que  physique- 
ment :  or,  il  faut  une  &me  pour  sentir  et  rendre  cela.  Et 
puis,  au  point  de  vue  de  l'effet  général,  il  n'a  garde  de 
reproduire  avec  un  soin  minutieux  tous  les  plis  des  vête- 
ments, tous  les  dessins  de  la  draperie,  tous  les  enjolive- 
ments du  fond  ;  il  éteint  les  détails  inutiles ,  pour  con- 
centrer l'intérêt  sur  les  traits  du  visage.  La  photographie 
n'a  aucun  de  ces  artifices  salutaires  qui  sont  l'indispen- 
sable condition  de  l'art  ;  elle  est  inexorable  et  brutale 
dans  sa  vérité;  elle  accorde  une  importance  égale  aux 
grandes  masses  et  aux  plus  imperceptibles  accidents.  Son 
vice  principal  est  donc  un  défaut  absolu  de  composition: 
elle  ne  compose  pas,  elle  donne  une  copie,  un  fac-similé 
de  la  nature  ;  or,  une  œuvre  d'art  vit  tout  entière  par  la 
composition.  De  là  résulte  qu'au  fond  la  photographie  ne 
donne  même  pas  de  la  nature  une  représentation  aussi 
exacte  qu'on  se  l'imagine.  En  effet,  lorsque  nous  recevons 
l'impression  d'un  paysage,  par  exemple,  tous  les  détails 
de  la  vue  extérieure  viennent  sans  doute  s'imprimer  au 
fond  de  notre  œil  ;  cependant  ces  mille  sensations  parti- 
culières ne  sont  aucunement  perçues,  et  elles  sont  pour 
notre  àme  comme  si  elles  n'existiiient  pas  ;  nous  ressen- 
tons, non  pas  l'impression  isolée  des  divers  aspects  du 
f>aysage,  mais  seulement  l'effet  général  qui  résulte  de 
eur  ensemble.  Or,  la  photographie  reproduit  impitoya- 


PHR 


1123 


PHR 


blement  les  plus  inutiles  détails  de  la  scène  extérieure  : 
elle  donne  donc  une  traduction  inexacte  des  sensations 
qu'excite  en  nous  Taspect  de  la  nature.  Une  autre  im- 
])errection  des  images  photographiques,  c'est  que  les  tons 
de  la  nature  y  sont  souvent  altérés  :  tel  ton  vigoureux 
sur  le  modèle  est  peu  sensible  sur  Tépreuve  daguer- 
rienne,  et,  au  contraire,  une  nuance  lumineuse  a*une 
faible  valeur  dans  la  nature  se  trouve  accusée  sur  la 
plaque  avec  un  éclat  exagéré  ;  aussi  la  plupart  des  demi- 
teintes  sont-elles  forcées,  et  répreuve  est  habituellement 
dure.  Les  épreuves  où  les  rapports  naturels  des  teintes 
sont  conservés  avec  harmonie  se  rencontrent  rarement  ; 
c'est  le  fait  de  quelques  circonstances  fortuites  qu'il  est 
impossible  de  provoquer  et  de  reproduire  à  volonté.  A 

3uoi  tient  ce  regrettable  efTet  de  la  photographie?  Sans 
oute  à  ce  que  les  différentes  couleurs  des  oojets  exté- 
rieurs ont  une  action  propre  et  variable  sur  les  sub- 
stances chimiques  qui  recouvrent  la  plaque,  action  qu'il 
est  aossi  impossible  de  prévoir  que  de  diriger.  Il  est  re- 
connu, par  exemple,  que  les  couleurs  verte.  Jaune, 
lilas,  etc.,  présentent  de  grandes  difficultés  à  la  repro- 
duction photographique.  Une  autre  remarque  à  faire, 
c'est  que,  si  l'on  reproduit  par  le  daguerréotype  des  ta- 
bleaux à  l'huile,  les  copies  n'ont  de  valeur  et  de  vérité 
que  lorsque  les  tons  du  modèle  sont  peu  nombreux  et  très- 
voisins  les  uns  des  autres  :  une  peinture  de  tons  uni- 
formes et  sobres  donne  sur  la  plaque  une  image  d'une 
ressemblance  parfaite  dans  les  tons;  mais  si  elle  est 
riche  de  couleurs  variées  et  papillotantes,  l'épreuve  pho- 
tographique est  d'une  fausseté  criante.  Nous  ajouterons 
qu'avec  la  photographie  la  perspective  linéaire  et  la  per- 
spective aérienne  sont  sensiblement  faussées.  L'altération 
de  la  perspective  linéaire  est  la  conséquence  presque 
inévitaole  de  l'appareil  optique  qui  forme  les  images  :  les 
objets  placés  à  des  distances  inégales  ont,  en  effet,  des 
foyers  lumineux  distincts  les  uns  des  autres,  et,  quelle 
que  soit  la  perfection  de  l'objectif,  il  est  impossible  qu'il 
fasse  converger  en  un  même  point  les  rayons  lumineux 
émanant  d'onjets  fort  éloignés  entre  eux  ;  par  exemple , 
dans  un  portrait  photographique,  si  les  mains  se  trou- 
vent placées  dans  un  plan  sensiblement  antérieur  au 
plan  du  visage,  elles  viennent  toujours  d'une  dimension 
exagérée.  L'altération  de  la  perspective  aérienne  est  aussi 
la  conséquence  presque  forcée  du  procédé  photogra- 
phique :  la  substance  qui  reçoit  l'impression  de  la  lu- 
mière étant  relativement  plus  sensible  c[ue  notre  œil 
même,  il  en  résulte  que  les  aspects  lointams,  les  objets 
situés  à  l'extrémité  de  l'tiorizon,  sont  reproduits  avec 
plus  de  netteté  qu'ils  n'en  présentent  à  nos  yeux,  con- 
trairement aux  effets  habituels  de  la  perspective  aérienne. 

Conchions  que,  dans  son  état  actuel,  la  photographie' 
donne  des  copies  admirables,  dont  la  perfection  dépasse 
assurément  tout  ce  que  la  main  de  l'homme  exécutera  ja- 
mais; et  pourtant  Tunique  sentiment  que  ces  calques  mer- 
veilleux puissent  exciter  en  nous  est  la  curiosité  :  ils  par- 
lent aux  sens,  ils  charment  l'œil  armé  de  la  loupe;  mais 
r&me  reste  froide.  Le  daguerréotype  a  été  une  conquête 
presque  inutile  pour  l'étude  et  le  perfectionnement  des 
beaux-arts  ;  les  artistes  n'en  ont  rien  appris,  rien  recueilli. 
Du  reste,  l'invention  d'un  instrument  capable  d'accomplir 
avec  perfection  toutes  les  opérations  manuelles  de  la 
peinture,  d'exécuter  tout  ce  que  comporte  l'imitation  ab- 
solue de  la  réalité,  aura  été  une  démonstration  sans  ré- 
plique du  spiritualisme  de  l'art  :  car  ce  n'est  pas  h  un  tel 
résultat  que  s'emploie  le  génie  des  maîtres,  et  la  foule 
elle-même  ne  peut  confondre  leurs  sublimes  créations 
avec  ces  produits  mécaniques.  Il  est,  toutefois,  certaines 
études  auxquelles  la  photographie  apporte  de  précieuses 
ressources;  telle  est  celle  de  la  nature  morte  et  des  monu- 
ments de  l'architecture.  La  photographie  a  aussi  enfanté 
plusieurs  arts  nouveaux,  tels  que  la  gravure  héliogra- 
phique  et  la  litluhphotographie  (  F.  ces  mots),  —  V.  Da- 
guerre.  Historique  des  procédés  du  daguerréotype,  1839; 
Ch.  Chevalier,  Nouvelles  instructions  sur  Vusage  du  da- 
guerréotype, 4841;  Gaudin  et  Lerebours,  Derniers  per- 
fectionnements apportés  au  daguerréotype,  4842;  les 
TrcUtés  de  photographie  par  Valicourt,  L^ray,  Gouçpier, 
Legros,  ABelloc,Blanquartr-Évrard;  Aubrée,  Traité  pra- 
tique de  pîiotographie  sur  papier,  sur  plaque  et  sur  verre, 
1851;  Barreswill  et  Davanne,  Chimie  photographique, 
ie<54,  in-8«;  Disdéri,  VArt  de  la  Photographie,  1802. 

PHOTOSCULPTURE.  V.  au  Supplément. 

PHRASE  (da  geecphrasis,  action  de  s'exprimer),  en- 
semble de  mots  concourant  à  exprimer  un  ensemble 
d'idées,  un  sens  suivi  et  complet.  Toute  phrase  est  bor- 
née par  le  sens,  c.«2i-d«  qa^ollo  commence  et  finit  avec  ' 


lui  ;  et,  selon  qu'il  est  plus  ou  moins  composé,  elle  a  plus 
ou  moins  de  parties.  La  phrase  qui  ne  renferme  que  les 
trois  termes  nécessaires  pour  l'expression  d'un  jugement 
s'appelle  proposition;  mais  il  ne  laut  pas  confondre  une 
phrase  avec  une  proposition  :  la  proposition  est  essen- 
tiellement philosophique,  et  n'a  rapport  qu'au  fond  même 
de  la  pensée  et  aux  trois  termes  de  tout  Jugement;  la 
phrase  a  surtout  rapport  à  la  forme,  elle  est  purement 
grammaticale  et  littéraire.  Considérée  grammaticalement, 
elle  se  compose  du  sujet  et  de  ses  dépendances,  du  verbe 
et  de  ses  compléments  directs,  indirects,  circonstanciels, 
et  peut  renfermer  des  mots  appartenant  à  toutes  les  par- 
ties du  discours;  ces  mots  sont  soumis  à  certaines  réigles 
de  construction  et  de  syntaxe.  Considérée  littérairement, 
la  phrase  doit  être  claire,  nette,  élégante,  harmonieuse; 
elle  pourra  prendre  dans  l'occasion  un  tour  oratoire,  une 
couleur  poétique,  être  lente  ou  vive ,  pesante  ou  légère. 
La  phrase  française,  et  en  général  la  phrase  moderne, 
diffèrent  des  phrases  grecques  et  latines  quant  à  l'ordre 
des  mots  :  elles  ont  moins  de  liberté  (V.  Construction, 
Inversion).  —  On  appelle  phrase  faite  une  façon  de  par- 
ler particulière  qui  est  consacrée  par  l'usage  et  à  laquelle 
il  n'est  pas  permis  de  rien  changer.  Hors  de  ces  locu- 
tions, il  est  permis  à  tout  écrivain  de  créer  des  phrases; 
mais  ces  phrases  nouvelles  doivent  être  composées  avec 
les  mots  déjà  connus,  dont  il  ne  faut  point  altérer  le  sens 
établi.  Telles  sont  les  phrases  :  Éclater  en  reprocnes. 
Haïr  à  cceur  ouvert,  créées  par  Racine.  —  Le  moi  phrase 
se  prend  souvent  dans  un  sens  défavorable;  on  dit,  en 
parlant  d'une  phrase  sonore  et  vide  :  c^est  une  phrase;  en 
paralnt  d'un  homme  habitué  à  se  payer  de  mots  vagues 
sans  s'inquiéter  du  fond  des  choses  :  c*est  un  faiseur  de 
phrases.  Le  mot  phrase  s'emploie  aussi  dans  un  sens  défa- 
vorable pour  désigner  une  phrase  embarrassée,  chargée  de 
mots  et  boursouflée.  P. 

PHRASE,  en  Musique,  suite  de  sons  dont  l'ensemble 
forme  un  sens  mélodique.  Toute  phrase  est  renfermée 
dans  un  certain  nombre  de  mesures.  Les  phrases  de  deux 
mesures  sont  très-rares,  et  deux  mesures  ne  font  ordi- 
nairement qu'un  membre  de  phrase.  Les  phrases  com- 
plètes de  trois  mesures  sont  peu  usitées  dans  les  mesures 
à  2  ou  à  4  temps;  on  n'en  fait  habituellement  usage  que 
dans  les  mesures  à  trois  temps  et  pour  les  romances  :  le 
mieux  est  que  la  phrase  se  compose  de  deux  membres 
formés  chacun  de  trois  mesures,  parce  qu'on  arrive  au 
chiffre  de  six  mesures  et  qu'une  phrase  doit  finir  sur  un 
nombre  pair.  La  phrase  la  plus  commune  est  celle  de 
quatre  mesures.  La  phrase  de  cinq  mesures  s'emploie 
rarement,  et  toujours  une  phrase  de  trois  ou  de  cinq  lui 
répond,  ce  qui  donne  une  phrase  complète  de  huit  ou  de 
dix  mesures.  Les  phrases  de  six  mesures  sont  ou  complètes 
par  elles-mêmes,  ou  formées,  dans  un  morceau  à  3  temps, 
de  deux  membres  de  trois  phrases  chacun.  On  ne  fait  point 
de  phrases  de  sept  mesures.  V.  Carrure  des  phrases. 

PHRASÉOLOGIE  (du  grecphrasis,  expression,  locu- 
tion, et  logos,  traité),  terme  qui  désignait,  chez  les  An- 
ciens, un  recueil  de  mots,  de  locutions.  Les  Modernes 
en  ont  modifié  le  sens,  et  il  signifie  :  manière  de  s'expri- 
mer et  de  construire  les  mots  et  les  phrases  particulière 
à  une  langue ,  ou  même  à  un  écrivain.  Ainsi,  la  langue 
grecque,  considérée  en  elle-même  et  dans  son  ensemble, 
offre  des  constructions  qu'on  ne  trouve  dans  aucune 
autre  langue;  et,  de  plus,  elle  présente  à  cet  égard  des 
phrases  diverses  suivant  les  époques  :  la  phraséologie 
d'Homère  est  différente  de  celle  do  Sophocle,  et  toutes 
deux  de  celle  de  Théocrite  ;  Hérodote  et  Plutarque  sem- 
blent écrire  chacun  dans  une  langue  différente,  tant  leurs 
expressions  et  leurs  tours  de  phrase  se  ressemblent  peu. 
De  même  chez  nous ,  Pascal  procède  dans  ses  construc- 
tions d'une  manière  toute  différente  de  Montesquieu  ;  la 
phraséologie  de  VEssai  sur  les  mœurs  ne  ressemble 
point  à  celle  du  Discours  sur  VHistoire  universelle.  Le 
x\i*,  le  xvu*,  le  xviii»  et  le  xix*  siècle  nous  montrent  la 
langue  sous  quatre  aspects  différents,  qui  se  reconnais- 
sent de  la  manière  la  plus  tranchée  dans  les  œuvres  de 
Montaigne,  de  Fénelon,  de  Voltaire,  de  Chateaubriand.  ~ 
Appliqué  à  un  écrivain  en  particulier,  le  mot  phraséo- 
logie se  confond  quelquefois  avec  le  mot  style,  mais  ce- 
lui-ci a  toujours  un  sens  plus  étendu.  —  Enfin  ce  terme 
emporte  souvent  une  idée  de  dénigrement,  et  désigne 
l'enflure,  les  mots  vides  de  sens,  la  sonorité  des  phrases 
sous  lesquelles  l'esprit  ne  découvre  aucune  idée  sérieuse 
ou  originale.  P. 

PHRATRIE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dusttomaurê  de 
Biographie  et  d^Histoire, 

PHRÉNOLOGIE  (du  grec  phrèn,  àme,  cœur,  eiprit,  ei 


pna 


1424 


PHR 


logos,  science  ),  nom  sous  lequel  on  connaît  la  doctrine 

2ue  le  médecin  Gall  commença  de  préconiser  en  France 
es  1807.  Cette  prétendue  science  de  Thomme  qu'il  a 
voulu  fonder,  lui  et  ses  disciples,  pour  remplacer  la  psy- 
chologie et  la  métaphysique ,  a  fait  beaucoup  de  bruit, 
surtout  dans  le  monde  des  salons  et  même  des  Acadé- 
mies; sa  vogue  est  passée;  Tappui  de  quelques  noms 
célèbres,  comme  Broussais,  ne  lui  a  pas  manqué;  mais 
elle  n*a  Jamais  pu  trouver  crédit  auprès  des  vrais  sa- 
vants ni  des  vrais  philosophes.  Aujourd'hui,  sauf  quel- 
qu(â  rares  adeptes  qui  Paltérent  en  la  modifiant,  elle  est 
généralement  abandonnée.  Les  derniers  travaux  sur  Tana- 
tomie  du  cerveau  et  le  système  nerveux  Tont  ruinée. 
Mais  à  cause  de  la  célébrité  qui  Tentourc  encore,  il  est 
bon  de  Texaminer  dans  ses  hases,  dans  sa  méthode^  et 
dans  ses  résiUtats* 

I.  Bases  de  la  Phrénologte.  — 1<*  La  phrénologie,  se 
proposant  pour  but  de  déterminer  la  fonction  des  or- 
ganes affectés  à  la  vie  intellectuelle  et  morale,  part  de  ce 
principe  qu'il  existe  en  effet  une  corrélation  intime  entre 
les  facultés  et  les  organes.  Ce  principe  est  incontestable 
tant  qu*il  ne  dépasse  pas  ses  limites  ;  mais  entre  le  phy- 
sique et  le  moral  la  dépendance  est  réciproque;  si  la  dé- 
pendance du  moral  est  absolue,  c*est  le  matérialisme.  Les 
phrénologistes,  et  Gall  en  particulier,  n*ont  pas  su  garder 
cette  mesure.  —  2®  Les  facultés  intellectuelles  et  morales 
ont  pour  siéj^  particulier  et  exclusif  le  cerveau.  Ce  prin- 
cipe, fort  antérieur  à  la  doctrine  de  Gall,  est  encore  vrai. 
Gall  a  eu  le  mérite  de  le  préciser  et  de  le  démontrer; 
mais  ce  qu^il  n*a  pas  vu,  et  ce  qui  déjà  contredit  son  sys- 
tème, c'est  que  le  cerveau  tout  entier  n'est  pas  le  siège  des 
facultés  morales,  et  de  l'intelligence  en  particulier,  mais 
seulement  la  partie  antérieure  (les  hémisphères  céré- 
braux) :  le  cervelet  et  les  tubercules  quadrijumeaux  pré- 
sident à  d'autres  fonctions  (à  la  locomotion  et  aux  mou- 
vements de  la  respiration^.  C'est  ce  que  M.  Flourens  a 
établi  d'une  manière  certaine  dans  ses  Recherches  expé- 
rimentales  sur  les  propriétés  et  les  fonctions  d»  système 
nerveux,  —  3**  Mais  tout  cela  n'est  ni  la  doctrib'e  propre 
de  Gall,  ni  le  principe  sur  lequel  elle  se  Tonde.  Ce  prin- 
cipe, le  voici  :  le  cerveau  n'est  pas  un  organe  unique, 
mais  multiple;  il  est  un  assemblage  d'organes  particuliers 
et  distincts,  auxquels  correspondent  autant  de  facultés, 
de  penchants,  d'instincts,  ou  de  forces  morales  également 
distinctes  les  unes  des  autres.  Or,  voilà  justement  ce 
qu'il  n'a  pu  établir  :  l'anatomie,  la  physiolo^e,  la  ps]^- 
chologie  conspirent  pour  renverser  ce  principe.  Jamais 
Gall  n'a  pu,  anatomiquement,  rendre  visible  aucun  de 
ces  prétendus  organes  qui  viendraient  tous,  selon  lui,  se 
distribuer  à  la  surface  du  cerveau.  L'anatomie  sur  ce 
point  est  restée  muette  ou  stérile.  La  méthode  de  dépiis- 
sement  du  cerveau  inventée  par  Gall  tend  plutôt  à  dé- 
poser contre  son  hypothèse.  Il  est  aujourd'hui  prouvé 
(  V,  Flourens)  que  la  partie  la  moins  importante  du  cer- 
veau est  la  portion  superficielle  où  devraient  r^ider  les 
organes,  car  on  peut  enlever  une  portion  notable  de  la 
matière  blanche  et  de  la  matière  grise  qui  la  composent 
sans  enlever  ni  altérer  les  fonctions  intellectuelles.  — 
4^  Le  cerveau  n'étant  pas  immédiatement  observable, 
Gall  et  les  phrénologistes  sont  obligés  de  substituer  à 
l'observation  directe  l'inspection  du  crâne,  qui  en  est 
l'enveloppe,  et  de  ses  formes  ou  protubérances.  De  là  la 
crànioscopie.  Or,  elle  suppose  :  1^  que  les  organes  sont 
logés  à  la  surface  du  cerveau,  sous  la  lame  interne  du 
crâne;  2**  que  la  lame  externe  correspond  parfaitement  à 
la  lame  interne;  ^°  que  le  tissu  spongieux  c(ui  sépare  les 
deux  lames  est  le  même  chez  tous  les  individus;  4^  que, 
nulle  part,  le  parallélisme  des  lames  interne  et  externe 
n'est  faussé;  5°  que  le  tissu  vasculaire  d'artères  et  de 
veines,  et  les  enveloppes  du  cerveau,  n'altèrent  pas  les 
empreintes  que  celui-ci  a  déposées  sur  la  surface  inté- 
rieure du  crâne.  Aucune  de  ces  conditions  n'existe,  au 
moins  avec  l'exactitude  que  réclament  le  système  et  sa 
méthode. 

La  physiologie  n'est  pas  plus  favorable  que  l'anatomie 
à  la  doctrine  de  Gall;  pour  ne  citer  qu'un  exemple,  est- 
il  vrai  que  le  volume  de  l'organe  partout  et  toujours  dé- 
termine et  mesure  l'énergie  et  le  développement  de  la 
faculté  correspondante?  Ce  principe,  tout  matérialiste, 
fût-il  d'accord  avec  une  saine  psychologie,  la  physiologie 
elle-même  le  repousse  comme  absolu  :  sans  cela  il  fau- 
drait qu'elle  admit  que  la  perfection  d'un  organe  ne  dé- 
pend que  de  son  volume  et  nullement  de  sa  structure, 
de  la  finesse  et  de  la  délicatesse  de  ses  fibres,  de  l'énergie 
de  la  force  vitale  qui  l'anime ,  de  sa  juste  proportion  et 
de  son  rapport  avec  d'autrw  organes.  Un*  système  peut 


nier  ou  négliger  tout  cela,  mais  la  science  ne  te  peut  pas. 
Gall  et  ses  disciples  sont  obligés  d'omettre  ou  d'atténuer 
ces  conditions  au  point  de  les  rendre  nulles  dans  la  pra- 
tique. 

Voilà  ce  que  disent  l'anatomie  et  la  physiologie  des 
bases  de  ce  système.  Si  l'on  consulte  la  psychologie  ou  la 
métaphysique,  les  objections  ne  sont  m  moins  fortes  nî 
moins  graves. 

Pour  Gall  et  son  école,  le  cerveau  est  un  assemblage 
d'organes  distincts  et  séparés  ;  les  facultés  Jouissent  de  la 
même  existence  réelle,  mdividuelle.  Mais  comment  con- 
cilier toutes  ces  entités  avec  Vunité  du  moi  ?  Gomment 
même  les  concilier  avec  l'unité  des  grandes  facultés, 
telles  que  l'intelligence,  la  volonté,  la  sensibilité,  dont 
les  autres  facultés  sont  de  simples  modes?  Cette  objec- 
tion capitale  renverse  tout  le  système  de  Gall.  Aussi 
s'estril  acharné  à  soutenir  que  l'intelligence,  la  mémoire, 
la  volonté  ne  sont  pas  de  vraies  facultés,  mais  seulement 
les  modes  des  facultés  réelles,  qui  seraient  alors  les  ca- 
pacités, les  instincts,  les  penchants,  appelés  par  lui 
forces  fondamentales;  thèse  absurde,  car  il  en  n^ul te- 
nd t  que  la  mémoire,  le  jugement,  etc.,  étant  les  modes 
de  ces  facultés  ou  de  ces  forces,  il  y  a  autant  d'êtres  qui 
se  souviennent.  Jugent,  raisonnent,  veulent,  ou  de  per- 
sonnes, qu'il  y  a  d'organes  dans  le  cerveau  ;  ce  qui  a  fait 
dire  spirituellement  que  le  cerveau  était  une  république 
démocratique.  Or,  ce  n'est  pas  un  détail,  une  pièce  dé- 
tachée de  l'édifice,  c'est  l'édifice  même  ou  sa  clef  de  voûte. 
Comment  encore  concilier,  dans  cette  doctrine,  la  liberté 
morale  avec  la  dépendance  absolue  où  le  moi  est  des  or  • 
gaues,  et  avec  la  proportion  exacte  entre  la  faculté  et  le 
volume?  Passons  à  la  méthode. 

U.  Méthode  Phrénologique,  —  C'est,  d'une  part,  la 
crànioscopie,  de  l'autre  une  psychologie  faite  d'avance 
ou  purement  hypothétique,  et  qui  se  crée  en  même  temps 
qu'on  observe  le  crâne  des  individus  dans  les  divers  états, 
professions,  etc.  Rien  n'est  moins  précis  ni  moins  scien- 
tifique. Pour  qu'une  telle  méthode  fût  exacte,  il  faudrait 
d'abord  que  les  conditions  précédentes  fussent  remplies. 
Les  protubérances  du  crâne  n'ont  de  valeur  et  ne  signi- 
fient quelque  chose  qu'autant  qu'elles  représentent  fidèle- 
ment les  organes  cérébraux;  mais  leur  existence  même 
est  problématique.  Il  faudrait,  s'ils  existent,  qu'ils  fussent 
distribués  tous  à  la  surface  du  cerveau,  et  non  enfoncés 
dans  la  masse  encéphalique;  Cfie  ces  signes,  expression 
exacte  des  organes  cachés  à  l'intérieur,  fussent  clairs  et 
distincts;  que  les  facultés  attachées  aux  organes,  et  que 
ces  signes  annoncent,  fussent  observées  avec  soin,  analy- 
sées, distinguées  avec  précision.  Rien  de  tout  cela  n'axiste 
ou  n'est  établi  nettement.  Pour  s'en  tenir  aux  signes  crà- 
nioscopiques,  rien  de  plus  vague,  de  plus  arbitraire,  de 
plus  mal  délimité.  Cette  topographie  du  crâne  est  artifi- 
cielle, obscure  et  problématique.  11  en  résulte  qu'on  peut 
li^  tout  ce  qu'on  veut  sur  le  crâne,  et  quand  un  fait 
semble  contredire  la  doctrine,  il  y  a  toujours  moyen  de 
se  tirer  d'affaire;  rien  qui  favorise  plus  l'illusion,  l'en- 
gouement, la  crédulité,  et  aussi  le  charlatanisme.  Cest 
ce  qui  explique  la  vogue  dont  a  joui  la  phrénologie,  son 
succès  auprès  des  gens  du  monde,  mais  en  même  temps 
son  peu  de  crédit  auprès  des  savants,  des  esprits  judi- 
cieux et  sévères.  —  Au  premier  abord,  cette  méthode  a 
quelque  chose  d'imposant  :  elle  s'environne  d'une  foule 
d'expériences,  procède  par  l'expérimentation  sur  la  plus 
vaste  échelle;  elle  examine  une  infinité  de  sujets  pris  à 
tous  les  degrés  de  l'espèce  humaine  et  même  animale  ; 
elle  observe  dans  toutes  les  classes  de  la  société,  compare 
les  individus  de  tous  âges,  de  tout  sexe,  de  toute  condi- 
tion, etc.  Mais  qu'on  examine  de  près  ses  procédés,  on 
verra  combien  la  manière  d'observer  et  d'expérimenter 
est  superficielle  et  fausse. 

La  matière  de  l'expérimentation  consiste  dans  deux 
ordres  de  faits  qu'il  s  agit  de  comparer  pour  en  saisir  le 
rapport,  savoir  :  d'une  part,  les  formes  extérieures  de  la 
tête  humaine,  les  protubérances  du  crâne,  qui  sont  cen- 
sées représenter  les  organes  du  cerveau  ;  d'autre  part,  les 
faits  moraux  correspondants,  qu'il  s'agit  de  reconnaître 
et  de  définir  avec  précision. 

Or,  on  a  vu  combien  le  signe  crânioscopique  est  vague, 
incertain,  mal  délimité  dans  sa  forme;  de  plus,  par  lui- 
même  il  est  muet.  Pour  savoir  ce  qu'il  signifie,  il  faut 
saisir  la  faculté  correspondante,  et  cela  non  vaguement, 
mais  d'une  façon  précise.  Comment  s'étudie  et  se  dé- 
couvre ce  second  terme,  qui  est  plutôt  le  premier,  l'autre 
n'étant  que  son  signe?  C'est  là  surtout  qu'apparaît  le  vice 
de  la  méthode  phrénologique  sur  ce  point  capital.  Le 
plirénologistc  observe  l'hommo,  ou  nlutôt  les  hommes. 


PHY 


1425 


PIÂ 


dans  le  langnge,  les  actions,  les  situations  diverses  de  la 
Tie.  n  note  ce  qui  est  caractéristique  dans  chaque  indi- 
Tida.  Kn  observant  ainsi  les  hommes  on  acquiert  une 
certaine  sagacité  et  du  talent  pour  ce  genre  d'observar 
tioo;  09  obtient  quelques  renseignements  précieux  sur  le 
caractère  et  le  genre  d*esprit  des  individus;  mais  qu*on 
puisse  Jamais  arriver  à  connaître  ainsi  les  facultés  fon- 
damentales de  l'homme,  les  tendances  primitives  de  sa 
nature,  à  déterminer  exactement  leur  caractère,  leur 
nombre,  leurs  fonctions,  il  faut  être  naïf  pour  le  croire. 
Aussi  les  résultats  de  cette  méthode  sont  parfaitement 
d'accord  avec  ce  qu*on  doit  en  attendre.  Lm  voici  dans 
leur  généralité. 

m.  RésultaU.  —  Gall  dresse  nne  liste  de  37  organes 
et  de  21  facultés  qui  leur  correspondent  1 1*  instmet  dé 
la  propagation;  S*  amour  de  la  progéniture;  3*  nutinct 
d$  la  iifmtê  de  $oi^mém$;  4<»  hutinct  camauiâr;  5*  tsti- 
(ifiMia  de  la  propriéU;  0"  amitié;  1^  rusê;  99  oroueil; 
9*  vanité;  10*  ctrcompectton;  il*  m^otr»  dês  choses; 
13*  msmotr»  dês  mots;  13*  f«tu  des,  localités;  14*  sens 
des  personnes;  15^  sens  du  langage:  10*  sens  du  rapport 
des  couleurs;  17*  sens  du  rapport  des  sons;  .18*  sens  du 
rapport  des  nombres;  19*  sens  de  la  mécanique:  SO*  sa- 
gactté  comparative;  21*  esprit  métaphysique;  22*  esprit 
caustique;  23*  talent  poétique;  24*  bienveÛlance;  25*  mi- 
mûiue;  26*  sens  de  la  religion;  27*  fermeté.  —  Spur- 
zheim,  le  collaborateur  de  Gail  et  son  continuateur,  donne 
une  autre  liste,  où  il  cherche  à  ranger  les  facultés  dans  un 
ordre  plus  méthodique,  et  en  i^oute  de  nouvelles  qui  en 
portent  le  nombre  à  35.  D'autres  phrénologistes  en  ajou- 
tent encore,  et  l'on  voit  pulluler  les  facultés  et  les  or- 
ganes. M.  Vimont,  un  des  phrénologistes  postérieure,  en 
compte  Jusqu'à  52  sur  le  crâne  d'une  oie  ;  cela  promet- 
tait pour  la  tête  humaine.  Aussi  la  science  ne  s'arrête 
plus.  Elle  s'enrichit  tous  les  Joun  de  nouvelles  facultés. 
Quand  on  vient  à  comparer  toutes  ces  listes,  on  voit  gue 
la  confusion  est  partout,  ainsi  que  l'arbitraire.  La  variété 
des  mots  recouvre  une  bien  plus  grande  divergence 
d'idées  et  d'opinions.  N'importe,  dans  sa  phase  ascen- 
dante la  Phrénologie  se  propage  avec  rapidité  dans  le 
Vieux  et  le  Nouveau  Monde.  Les  adeptes  se  multiplient; 
des  chaires  s'élèvent,  des  sociétés  se  fondent,  des  Jour- 
naux la  propagent.  L'Angleterre,  la  France,  FAllemagne, 
les  États-Unis  se  couvrent  de  sociétés  phrénoIogic[ues. 
Elle  pénètre  dans  les  Académies,  comme  elle  envahit  les 
salons.  L'École,  arrivée  à  son  apogée,  décline  ensuite  peu 
à  peu;  les  savants  l'abandonnent,  d'autres  lui  portent 
des  coups  mortels  ;  elle  tombe  enfin  pour  ne  plus  se  rele- 
ver. C'est  l'histoire  de  toutes  ces  erreura  qui,  par  leur 
nouveauté  et  leur  côté  spécieux,  trompent  et  séduisent 
un  instant  le  public,  puis  passent  comme  des  météores. 

—  Presque  tout  ce  qu'il  y  a  de  vrai  dans  la  phrénolode 
était  connu  avant  elle  et  lui  survit.  Le  seul  servioe  qu'elle 
ait  rendu,  c'est,  comme  pour  l'alchimie  et  l'astrologie, 
d'avoir  provoqué  des  travaux  sérieux  sur  l'anatomie  et  la 
pli}:tiologie  du  cerveau,  sur  les  races  et  les  variétés  de 
Tcspèce  humaine.  Quant  à  la  doctrine  phrénologique 
proprement  dite,  voici,  comme  dernière  conclusion,  le 
jugement  qu'en  porte  un  des  plus  grands  phrénologistes 
du  siècle,  idûller  :  «  On  ne  peut  s'empêcher,  dit-il,  de 
repousser  du  sanctuaire  de  la  science  ce  tissu  d'assertions 
arbitraires  qui  ne  reposent  sur  aucun  fondement  réel.  » 

—  V,  Flourens,  Examen  de  la  Phrénologie,  2*  édit. , 
Paris,  1845,  in-12,  écrit  trèsHM>urt,  mais  capital;  Lélut, 
QWest'Ce  que  la  Phrénologie?  Paris,  1830,  in-8«;  Du 
poids  du  cerveau  dans  ses  rapports  avec  le  développe- 
ment de  l'intelligence,  1837,  in-8*;  Examen  comparatif 
de  la  lofigueur  et  de  la  largeur  du  crâne  chez  les  voleurs 
homicides,  dans  le  Journal  unwersel  de  médecine,  1831  ; 
De  l*Organe  phrénologique  de  la  destruction  chez  les 
animaux,  1836,  in-8*;  De  la  Phrénologie  :  son  histoire, 
tes  systèmes  et  sa  condamnation,  1858,  in-8*,  etc.    B~d. 

PHRYGIEN  (Mode),  un  des  modes  de  la  musique  des 
anciens  Grecs ,  intermédiaire  entre  le  mode  lydien  et  le 
mode  dorien.  Le  caractère  en  était  fier  et  impétueux,  et 
il  convenait  aux  combats.  Le  satyre  Marsyas  en  fut,  dit- 
on,  l'inventeur. 

PHYLACTÈRE  (du  grec  phulassô,  le  garde,  je  con- 
serve) ,  nom  donné  :  1*  aux  espèces  d'amulettes  ou  de 
préservatifs  que  portaient  les  Anciens  pour  se  garantir 
des  accidents;  2*  aux  bandes  de  peau  ou  de  parchemin 
sur  lesquelles  les  Hébreux  écrivaient  des  passages  du 
pécalogue,  et  mi'ils  enroulaient  à  leure  bras  ou  sur  leur 
tiens;  3*  aux  cn&sses  dans  lesquelles  les  premien  chré- 
froDt  conservaient  des  reliques  ;  4*  aux  nanderoles  ac- 
compagnéos  d'une  inscription  Que  tiennent  divers  per- 


sonnages dans  certaines  peintures  ou  sculptures  do 
moyen  âge. 

PHYSHARMONICA, Instrument  de  musique  à  touches, 
inventé  en  1821  par  Ant.  Hasckel ,  de  Vienne,  et  dans  le- 
quel les  sons  sont  produits  par  des  languettes  de  métal 
que  fait  vibrer  le  vent  ama^  au  moyen  d'une  pédale. 
Un  brevet  de  perfectionnement  et  d'importation  en  France 
fut  prison  1829  par  Grucker  et  Schott,  de  Strasbourg. 

PHYSICO- THÉOLOGIE.  V.  Éthico-théologii. 

PHYSIOCRATES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d^ Histoire. 

PHYSIOGNOMONIE  (du  grec  phusis^  nature,  carac- 
tère, et  gn&mân,  indicateur),  art  de  connaître  ht  nature 
d'un  homme  d'après  sa  physionomie,  c-à-d.  d'après  les 
traits  du  visage,  l'attitude  du  corps,  la  démarche,  etc« 
Aristote  est  le  premier  qui  ait  exprimé  quelques  vues 
systématiques  sur  l'interprétation  des  traits  de  la  figure  :  il 
supposait  que  les  hommes  dont  la  physionomie  offrait  quel- 
que rapport  avec  les  traits  de  certains  animaux  avaient 
des  inchnations  et  des  habitudes  analogues  à  celles  de 
ces  animaux.  De  là  est  sorti  le  système  physiognomonique 
de  J.-B.  Porta,  De  humanà  physiognomicâ,  Naples,  1586. 
Le  peintre  Lebrun  a  laissé  une  série  d'esquisses  qui  mon- 
trent aussi  le  rapport  de  la  figure  humaine  avec  celle  de 
divera  animaux.  D'autres  ont  mesuré  le  degré  de  l'intelli- 
gence par  l'ouverture  de  l'angle  facial  :  c'est ,  en  parti- 
culier, le  système  de  Camper.  La  physiognomonie,  trou- 
vant un  complément  ou  un  auxiliaire  dans  la  phrénologie, 
eut  une  vogue  nouvelle  à  la  fin  du  xvw*  siècle,  lorsque 
Lavater  eut  publié  ses  Essais  physiognomoniques,  1775- 
1778.  L'expression  de  la  figure,  les  mouvements  corporels, 
le  ton  de  la  voix,  la  texture  de  la  fibre,  la  coloration  du 
teint,  la  nature  des  cheveux,  telles  sont  les  bases  des 
jugements  physiognomoniques.  V.  CAMACitaB,  PHaéno- 
Loon. 

PHYSIONOTRACE,  instrument  à  l'aide  duquel  on  des- 
sinait mécaniquement  des  portraits  sur  nature.  11  fut 
inventé  à  Paris  en  1788  par  Chrétien  et  Quenedey- 

PHYSIONOTYPE ,  instrument  inventé  à  Paris  par  Sau- 
vage, en  1835,  et  à  l'aide  duquel  on  prend  une  empreinte. 
C'est  une  plaque  métallique  peroée  de  petits  trous  trës- 
rapprochés,  dans  lesquels  passent  des  tiges  mobiles  et  à 
pointe  mousse  :  quand  on  l'applique  sur  un  objet,  les 
tiges  cèdent  à  la  pression  des  diverses  parties  de  cet  objet, 
de  manière  à  en  offrir  le  moule  en  creux.  Les  tiges  ayant 
été  fixées,  ce  moule  transmet  l'empreinte  au  plfttre,  au 
stuc,  au  carton,  à  la  porcelaine  ou  au  bronze.  On  essaya 
de  se  servir  de  cet  instrument  pour  faire  des  portraits  sur 
les  personnes  vivantes;  mais  les  tiges,  pressées  par  le 
visage,  y  produisaient  une  sorte  de  petit  chatouillement 
qui  le  faisait  contracter  plus  ou  moins  légèrement,  et 
les  portraits  sortis  de  ce  type  n'avaient  pas  la  physio- 
nomie naturelle  du  modèle. 

PI,  instrument  de  musique  des  Siamois.  Cest  une 
espèce  de  chalumeau  dont  le  son  est  fort  aigu. 

PIANO ,  instrument  de  musique  à  cordes  et  à  clavier, 
qui  a  succédé  au  clavecin  (  V.  ce  mot).  Ce  n'est  pas,  comme 
on  l'a  dit,  un  clavecin  perfectionné;  car,  dans  le  davedn, 
les  cordes  étaient  pincées  par  un  appareil  mécanique, 
tandis  que  dans  le  piano  elles  sont  tnppées.  Cet  instru- 
ment est  donc  plutôt  un  tympanon  perfectionné  (  V.  Ttm- 
panon).  Le  clavier  se  compK)se  de  touches  blanches  en 
ivoire  pour  les  tons  naturels  de  l'échelle  musicale,  et  de 
touches  noires  en  ébène  pour  les  notes  diésées  ou  bémo- 
lisées.  L'extrémité  de  chaque  touche  met  en  Jeu  un  mar- 
teau de  bois  garni  de  peau,  qui  frappe  sur  une  corde 
métallique,  ou  mieux  sur  deux  et  trois  cordes  mises  à 
l'unisson.  Les  cordes  sont  fixées  à  l'aide  de  chevilles  sur 
un  sommier,  pièce  de  bois  sur  laquelle  passent  les  cordes, 
et  qui  lui-même  supporte  une  table  pour  augmenter  le 
volume  du  son.  Afin  que  les  vibrations  des  cordes  ne 
produisent  pas,  en  se  prolongeant,  la  confusion  dnns  les 
sons,  des  etouffoûrs  ou  pièces  de  bois  garnies  de  drap 
retombent  sur  les  cordes  quand  les  doi^  de  l'exécutant 
abandonnent  les  touches.  A  l'aide  de  pédales^  on  peut  à 
volonté  augmenter  ou  diminuer  le  volume  du  son.  C'est 
cette  facilité  de  Jouer  doucement  ou  fort  (en  italien  piano 
ou  forte)  qui,  dans  l'origine,  fit  donner  à  l'instrument  le 
nom  de  piano-forte  ou  forte-piano.  Tout  le  mécanisme 
de  l'instrument  est  enfermé  dans  une  caisse,  de  forme 
et  de  dimensions  variables.  On  nomme  Piano  carré,  celui 
dont  la  caisse  est  rectangulaire,  portée  sur  quatre  pieds, 
et  la  table  horizontale;  Piano  à  queue,  celui  dont  la 
caisse  est  en  forme  de  harpe  couchée  horizontalement;,  et 
portée  sur  trois  pieds;  Piano  droite  celui  dont  les  cordes 
ont  ]f>  position  dugonaJe.  Le  piano  carré  n*a  d'autre  avan- 


PIA 


1426 


PIA 


tage  qa*  sa  disposition  symétriqae,  qui  lui  permet  de 
figurer  avantageusemeDt  dans  un  salon.  Le  piano  à  queue 
est  celui  que  Ton  doit  préférer  :  les  dimensions  de  la 
eaisse,  le  volume,  la  longueur  et  l'écartement  des  cordes, 
permettent  d'obtenir  des  vibrations  plus  fortes  et  plus 
prolongées;  les  basses  acquièrent  une  puissance  excep- 
tionnelle; il  est  possible  d'exécuter  des  mélodies  lar^ 
et  d*un  beau  style,  tandis  que  de  petits  pianos  on)  moms 
de  son  à  cause  du  peu  d'étendue  de  leurs  cordes.  On  est 
arrivé  cependant  à  fabriquer  des  pianos  droits,  qui  sem- 
blent ne  le  céder  guère  aux  pianos  à  queue.  L'étendue 
da  piano,  qui  avait  été  d'abord  de  4  octaves,  a  été  portée 
jusqu'à  7,  et  leur  clavier  a,  par  conséquent,  86  touches. 
On  accorde  les  pianos  par  tempérament  (F.  ce  mot)  ;  di- 
vers mécanismes  ont  clé  inventés  pour  faciliter  cette 
opération  (F.  Accordeur,  CHROVAiitTnB).  —  Le  piano  a 
obtenu  de  bonne  heure  un  très-grand  succès,  car  il  don- 
nait des  moyens  d'expression  de  la  pensée  Jusqu'alors  in- 
connus dans  les  instruments  à  clavier.  Cette  vogue  s'est 
maintenue,  et  l'on  ne  vend  pas  moins  de  25,000  pianos 
chaque  année  en  France  seulement.  Le  piano  a  pénétré 

{>artout,  et  chez  les  personnes  de  toute  condition;  dans 
es  salons  il  a  l'immense  avantage  de  former  à  lui  seul 
une  harmonie  complète;  il  est  pour  le  compositeur  une 
ressource  précieuse,  pour  le  chanteur  un  incomparable 
soutien.  Enfin  le  piano  est  de  tous  les  instruments  celui 
qui  a  le  plus  contribué  à  répandre  le  goût  de  la  musique 
et  à  en  faciliter  l'étude. 

On  a  longtemps  attribué  l'invention  du  piano  h  Gode- 
froi  Silbermann,  facteur  d'orgues  à  Freyberg  (Saxe),  qui 
fabriqua  son  premier  modèle  vers  1740.  Hais,  dès  1716, 
Marius,  facteur  à  Paris,  avait  inventé  un  clavecin  à  mail- 
lets; on  cite  également  le  clavecin  à  marteaux  (cemhaio 
martelato)  fabriqué  en  1718  par  Gristofori  de  Padoue. 
Amédée  Sclirœter,  organiste  de  Nordhausen,  fit  un  instru- 
ment du  même  genre,  en  1721  ;  ce  fut  lui  qui  imagina  de 
le  désigner  par  le  nom  de  piano-forte.  Ces  divers  essais 
ne  paraissent  pas  avoir  été  très-heureux,  pas  plus  que 
ceux  de  Verbes  et  de  L'Épine,  car  les  clavecinistes  n'aban- 
donnèrent pas  leur  instrument.  Un  facteur  d'Augsbourg, 
Jean-André  Stein,  fabriqua  les  premiers  pianos  à  queue. 
Sébastien  Érard  et  son  frère  vinrent  de  Strasbourg  s'éta- 
blir à  Paris,  vers  1775,  et  livrèrent  au  commerce  des  pia- 
nos carrés  à  deux  cordes  et  à  5  octaves  ;  ils  substituèrent 
des  pédales  aux  registres  dont  les  facteurs  précédents 
s'étaient  servis  pour  modifier  la  force  et  la  qualité  du  son. 
Le  mécanisme  du  piano  était  alors  fort  simple  :  un  pilote 
attaché  verticalement  à  la  touche  poussait  a  la  corde  un 
marteau  court  et  léger,  suspendu  par  une  charnière  en 
peau,  et  guidé  par  une  tige  mince  qui  passait  par  son 
centre.  Ce  système  avait  l'inconvénient  de  tenir  le  mar- 
teau près  de  la  corde  quand  on  appuyait  trop  fort.  Aussi, 
après  que  les  facteurs  anglais  et  allemands  eurent  fa- 
briqué, vers  1700,  les  premiers  pianos  à  trois  cordes, 
Érard,  qui  adopta  cette  innovation,  s'empressa-t-îl  de 
chercher  un  nouveau  mécanisme,  au  moyen  duquel  on 
pût  obtenir  une  plus  frrunde  intensité  de  son.  Le  pilote, 
au  lieu  de  pousser  directement  le  marteau  à  la  corde, 
rencontra  un  faux  marteau  suspendu  par  une  charnière 
en  peau,  et  portant  un  double  pilote  qui  agissait  sur  le 
marteau  véritable  à  la  manière  du  pilote  simple;  l'incli- 
naison du  faux  marteau  était  calculée  pour  que,  sous 
l'action  du  pilote  de  la  touche,  il  pût  retomber  d'une  ligne 
et  demie,  laisser  le  même  Jeu  au  marteau  véritable ,  et 
conséquemment  donner  plus  de  liberté  aux  vibrations  de 
la  corde.  Mais  ce  résultat,  tout  avantageux  qu'il  fût,  n'était 
obtenu  qu'au  prix  de  frottements  et  de  ballottements  mul- 
tipliés des  marteaux  vrais  et  faux.  Stein  les  évita  en  ima- 
ginant le  système  d'échappement  simple,  qui  a  conservé 
le  nom  de  mécanisme  allemand^  et  dont  on  se  sert  encore 
beaucoup  en  Allemagne.  Ce  système  se  propagea  en  An- 
gleterre, où  les  facteurs  Stumpfz  et  Tomkinson  donnèrent 
aux  marteaux  une  course  plus  longue,  afin  d'obtenir  plus 
de  force  dans  la  production  du  son.  Désormais  les  pia- 
nistes purent  se  faire  une  manière  plus  chantante;  Cle- 
menti.  Cramer  et  Dussek  se  mirent  à  la  tète  de  cette 
révolution. 

De  son  côté,  Érard  trouvait  un  mécanisme  à  échappe- 
ment plus  compliqué,  mais  plus  précis  que  celui  de  Stein, 
et  obtenait  encore  plus  de  son.  Mais,  dans  l'un  comme 
dans  l'autre,  l'enfoncement  de  la  touche  avait  grandi  pro- 
portionnellement à  la  longueur  du  levier,  ce  qui  exigeait 
plus  d'énergie  dans  l'attaaue  du  clavier,  par  suite  plus 
de  lourdeur  et  de  lenteur  oans  le  Jeu.  La  France  préféra 
le  mécanisme  à  pilote  sans  échappement,  à  cause  de  la 
ftMsilité  du  clavier;  l'Angleterre, comme  l'Allemagne,  adopta 


le  mécanisme  à  échappement,  et  le  système  d'Érard, 
appliqué  par  Broadwood  et  les  autres  facteurs,  reçut  même 
le  nom  de  mécanisme  anglais»  En  1808,  Énurd  fit  le  pre- 
mier piano  avec  clavier  en  saillie,  qui  laissait  voir  les 
mains  de  l'exécutant,  au  lieu  de  les  enfermer  dans  une 
caisse  selon  l'ancien  modèle;  tous  les  facteurs  s'appro- 
prièrent aussitôt  cette  forme.  Dans  le  même  instrument, 
Érard  était  parvenu,  au  moyen  d'un  levier  intermédiaire 
placé  entre  la  touche  et  la  bascule  qui  faisait  agir  le 
marteau,  à  éviter  un  trop  grand  enfoncement  de  la  touche 
sans  rien  perdre  de  la  force  du  mécanisme  à  échappe- 
ment :  mais  on  s'aperçut  qu'après  avoir  servi  quelque 
temps,  le  mécanisme,  par  suite  d'un  certain  ballottement, 
mêlait  au  son  des  cordes  un  bruit  désagréable. 

Vers  1800,  deux  facteurs  de  Paris,  Petzold  et  Pfeiflîer, 
en  prolongeant  la  table  d'harmonie  sur  toute  la  longueur 
du  piano  et  en  se  servant  de  cordes  plus  grosses,  obtin- 
rent des  sons  plus  intenses.  Cette  innovation  augmenta 
le  tirage  des  cordée,  et  l'on  s'aperçut  que  la  caisse  du 
piano  fléchissait  :  ^rard  y  remédia  par  un  double  barrage 
en  fer  en  dessus  et  en  dessous.  Ce  fut  encore  Erard  qui 
inventa,  en  1823,  le  système  d'échappement  dotible,  une 
des  merv^lles  de  la  facture  du  piano.  Dans  les  anciens 
systèmes,  aussitôt  que  l'échappement  a  fait  son  eff^et,  le 
marteau  retombe,  et  le  doigt  ne  peut  le  relei'er  qu'après 
avoir  quitté  la  touche  pour  la  frapper  de  nouveau  :  par 
le  nouveau  mécanisme  d'Erard,  l'abaissement  du  mar- 
teau, après  qu'il  a  frappé  la  corde,  est  proportionnel  au 
degré  d'enfoncement  où  le  doigt  maintient  la  touche,  et, 
quel  que  soit  cet  enfoncement,  il  est  toujours  possible  de 
faire  frapper  de  nouveau  le  marteau  sans  relever  absolu- 
ment le  doigt;  de  sorte  que  le  pianif.te  peut  donner  au 
son  tel  degré  d'intensité  qu'il  Juge  convenable,  et  répéter 
la  note  sans  quitter  la  touche. 

De  nouveaux  progrès  dans  la  fabrication  du  piano  furent 
encore  obtenus  par  Henri  Pape.  Jfusquc-là,  dans  les  pia- 
nos carrés  et  les  pianos  à  queue ,  les  cordes  étaient  frap- 
pées en  dessous  par  les  marteaux,  et,  pour  laisser  un 
passage  aux  marteaux ,  les  facteurs  étaient  contraints  à 
séparer  la  table  d'harmonie  du  sommier  des  chevilles  par 
un  intervalle  plus  ou  moins  considérable.  On  ne  pouvait 
douter  qu'en  frappant  les  cordes  dans  le  plan  de  la  table 
au  lieu  de  les  soulever  de  leurs  points  d'appui  par  la 
percussion,  on  obtiendrait  des  sons  plus  purs.  Cette  idée 
donna  d'abord  naissance  aux  pianos  verticaux;  puis, 
Streicher,  facteur  à  Vienne  en  Autriche,  fit  profiter  de 
l'avantage  qu'on  obtenait  les  pianos  à  queue,  on  établis- 
sant le  méôinisme  des  marteaux  au-dessus  des  cordes,  ce 
qui  permit  d'appuyer  la  table  sur  le  sommier.  Seulement 
son  moyen  rendit  le  clavier  plus  lourd,  plus  difficile  à 
manier.  Pape  trouva,  pour  l'application  du  même  prin- 
cipe, un  procédé  meilleur,  un  mécanisme  aussi  prompt 
à  articuler  que  l'ancien  svstème  d'échappement.  Le  pro- 
blème du  mécanisme  en  dessus  fut  complètement  résolu, 
et  les  pianos  à  queue,  plus  tard  les  pianos  carrés,  don- 
nèrent des  sons  aussi  purs  et  aussi  moelleux  que  ceux  des 
pianos  verticaux,  sans  rien  perdre  de  la  force  qui  manque 
a  ceux-d.  — Un  premier  succès  conduisit  Pape  à  un  se- 
cond :  la  fatigue  occasionnée  à  l'instrument  par  le  tirage 
des  cordes ,  et  à  laquelle  on  avait  obvié  ptf  des  barrages 
en  fer,  résultait  de  ce  que  le  tirage  agissait  sur  la  partie 
supérieure  de  la  caisse  et  loin  de  son  point  de  résistance, 

2U1  est  auprès  du  fond  :  la  place  nécessaire  au  mécanisme 
es  marteaux  en  dessous  empêche  d'établir  ailleurs  ce 
tirage.  Avec  le  mécanisme  en  dessus,  la  table  d'harmonie 
put  être  descendue  dans  l'intérieur  de  la  caisse  autant 

2u'il  fut  nécessaire  pour  assurer  la  solidité;  le  tirage, 
tant  très-près  du  fond,  fut  diminué;  on  put  alors  suppri' 
mer  les  barrages  qui  rendaient  les  instruments  fort  pe- 
sants, et  même  percer  à  Jour  le  fond,  afin  de  faciliter  la 
propagation  des  vibrations  au  dehors. 

Nous  avons  dit  que  le  mécanisme  anglais  avait  été 
d'abord  repoussé  en  France,  parce  qu'il  exigeait  chez  le 
pianiste  une  trop  grande  éneiîgie  des  aoigts;  Oamille  Pleyel 
entreprit  de  le  mettre  en  vogue.  Il  a  su,  en  effet,  par  le 
perfectionnement  dans  l'exécution  du  mécanisme,  donner 
au  clavier  toute  la  sensibilité  désirable.  11  introduisit  aussi 
le  sommier  prolongé  en  fer,  qu'il  substitua  à  l'ancienne 
disposition  du  sommier  ordinaire,  comme  Clementi  l'avait 
déjà  fait  à  Londres  ;  à  l'exemple  de  Broadwood,  11  plaça, 
dans  les  pianos  carrés,  les  chevilles  sur  le  sommier  des 
étoufToirs;  enfin,  il  imagina  de  faire  en  placage  les  tables 
d'harmonie.  11  a  été  moins  heilreux  en  portant  l'étendue 
du  piano  à  7  octaves  ;  on  n'obtient  ainsi  à  l'aigu  que  des 
sons  maigres,  à  peine  appréciables  à  l'oreille,  et  d'iio  antre 
timbre  que  celui  de  l'instrument. 


PIA 


1427 


PIC 


Le  piano  droit  ajrant,  par  sa  forme,  le  plus  contribué 
k  {Mpulariser  l'instrament  et  à  le  rendre  pour  ainsi  dire 
oniverself  nous  allons  en  donner  rhistorique.  Lorsque  le 
piano  à  qtutte,  qui  est  le  véritable  piano,  parce  qu*il  a 
la  forme  naturelle  de  ce  genre  dMnstrument,  et  le  piano 
carré  eurent  complètement  réussi,  on  reconnut  qu'ils 
étaient  toujours  plus  ou  moins  encombrants  pour  une 
foule  de  personnes,  qui  se  trouvaient  forcées  de  s*en  pri- 
ver. On  eut  alors  Tidée,  en  Allemagne  et  en  Angleterre, 
de  fabriquer  ce  qu*on  appela  des  pianos  verticaux  ou  de 
cabinet.  C'était  le  piano  carré  mis  debout,  avec  un  chan- 
gement dans  la  position  du  clavier.  Ces  hauts  pianos  ne 
pouvaient  être  placés  que  contre  un  mur,  comme  des 
armoires,  de  sorte  que  rexécutant  tournait  le  dos  à  son 
auditoire.  Les  facteurs  cherchèrent  à  diminuer  cet  in- 
convénient un  peu  maussade  en  diminuant  la  hauteur  du 
piano,  de  manière  que  celui  qui  le  Jouait  pût  voir  par- 
dessus, et  alors,  tournant  son  instrument,  se  trouver 
face  à  face  avec  les  auditeurs  et  les  auditrices  qu'il  char- 
mait de  ses  mélodies.  Mais  cette  réforme,  inspirée  par  la 
flus  civile  dos  politesses,  ne  se  fit  qu'aux  dépens  de 
harmonie,  car  en  s'abaissant  le  piano  perdit  beaucoup 
de  sa  sonorité  et  de  son  agrément,  ses  cordes  ayant  été 
raccourcies  de  toute  la  hauteur  retranchée  à  Tinstru- 
ment.  Néanmoins,  les  pianos  verticaux  parurent  si  com- 
modes, que  Ton  continua  d'en  faire,  et  Ton  passait  sur 
leur  imperfection  obligée. 

Cependant  un  facteur  fran^is,  M.  Roller,  pensa  que 
cette  imperfection  n'était  pas  incorrigible;  il  imagina  de 
tendre  les  cordes  diagonalement  dans  une  caisse  verti- 
cale, et  par  cette  simple  combinaison  il  obtint  21  là  où 
l'on  n'avait  que  15;  en  outre,  il  espaça  les  cordes  beau- 
coup plus  que  dans  les  pianos  carrés  ;  au  fond  plein  il  sub- 
stitua un  fond  en  barrage,  placé  dans  la  direction  des  cor- 
des, de  sorte  que  le  son  trouvut  une  facile  issue;  enfin  il 
perfectionna  l'ancien  mécanisme,  et  l'exécutant  obtint  sans 
peine  les  effets  les  plus  variés,  depuis  les  tons  les  plus 
énergiques  Jusqu'aux  nuances  les  plus  délicates.  Ce  fut 
en  1820  que  Roller  livra  au  public  son  premier  piano 
droit  (nom  qu'U  lui  donna).  Cet  instrument  ne  mesurait 
guère  plus  de  1  mètre  de  hauteur,  1"*,50  de  longueur  et 
0™,45  d'épaisseur,  y  compris  la  saillie  du  clavier.  Par  la 
puissance  et  la  qualité  des  sons,  il  égalait  les  meilleurs 
pianos  carrés.  Présenté  à  l'Exposition  de  l'industrie  fran- 
çaise de  1827,  on  l'accueillit  froidement;  mais  admis  à 
l'Exposition  de  1834,  il  y  remporta  une  médaille  d'or. 
Dès  ce  momenv  tous  les  facteurs  fabriquèrent  des  pianos 
droits,  et  peu  d'années  après  le  piano  carré  avait  disparu 
non-seulement  eH  France,  mais  encore  à  l'étranger.  — 
Le  piano  Roller  a  fait  aussi  une  révolution  commerciale  : 
approprié  à  l'exi^Ité  de  la  plupart  des  appartements  du 
Paris^  moderne»  il  put  trouver  sa  place  partout,  ce  qui 
n'avait  pas  lieu  avec  le  piano  carré.  V.  Piano  «  dans  le 
Supplément. 

Outre  les  facteurs  déjà  cités,  on  peut  mentionner  :  en 
France,  Freudenthaler,  Lemme,  Dietz,  Klepfer,  Boisselot, 
Herz,  Kriegelstein  ;  en  Angleterre,  Stoddart,  Collard;  en 
Allemagne,  Schatz,  Brodmann,  Zeitter,  Womum,  Ma- 
thias  Muller,  Graf,  etc. 

Les  plus  célèbres  pianistes  ont  été,  dans  notre  siècle  : 
Ifoschelès,  Ries,  Pixis,  Czerny,  Hummel,  DOhler,  Listz, 
Thalberg,  Chopin,  Pradher,  Kialkbrenner,  Zimmermann, 
Prudent,  Dreyschock,  Goria,  Ravina,  Herz,  M"»»  Pleyel, 
H"«Tardieu  (de  Malleville},  Ritter,  Diéiner,Huhin8tein. 

n  existe  un  nombre  considérable  de  méthodes  de  piano. 
Les  plus  importantes  sont  celles  de  Ch.-Ph.-Em.  Bach 
(1753),  Marpurg,  Dussek,  Clementi,  Steibelt,  Cramer, 
Hummel ,  Czerny,  Adam,  Lemoine,  Zimmermann,  Rie- 
ger,  Kalkbrenner.  Montai  a  publié  VArt  d'cKCorder  son 
piano  soinnéme,  1836,  in-8*. 

Des  inventions  plus  ou  moins  ingénieuses  ont  eu  leur 
principe  dans  le  succès  du  piano  :  dès  1780,  un  Allemand 
nommé  Beyer  fit  un  piano  à  cordes  de  verre,  d'une  exces- 
sive fragilité;  en  1781,  Gœrmans  construisit  un  piano  oui 
avait  21  touches  par  octave  (7  pour  les  sons  naturels, 
7  pour  les  dièses  et  7  pour  les  bémols  ) ,  système  qui  ren- 
dait l'accord  et  le  doigté  d'une  difficulté  excessive.  On  at- 
tribue à  Philippe  de  Girard  un  piano  trémolophone,  où 
le  trémolo  peut  être  obtenu  sans  oue  le  doigt  fasse  autre 
chose  que  d'appuyer  sur  la  toucne,  et  un  piano  octc^ 
vùmt,  donnant,  au  moyen  d'un  mécanisme  mû  par  une 
pédale,  Toctavo  de  la  note  que  l'on  touche.  Des  instru- 
ments de  ce  dernier  genre  ont  été  aussi  exécutés  par 
Boisselot  en  1834,  puis  par  Blondel.  Lenz  et  Houdard  ont 
produit,  vers  1856,  un  piano  scandé,  qui  donne  simul- 
tanément, dus  les  diverses   parties  du  clavier,   les 


nuances  les  plus  diverses.  Roller  a  imaginé  un  piano 
transpositeur,  dans  lequel  chaque  tour  d'une  clef  de  pen- 
dule fait  avancer  ou  reculer  d'un  demi-ton  le  mécanisme 
entier  du  clavier  sous  les  cordes.  A  plusieurs  reprises , 
mais  sans  arriver  à  un  résultat  satisfaisant,  des  pianos 
mélographes  ont  été  tentés,  dans  lesauels  les  notes  se  se- 
raient imprimées  par  l'action  même  des  touches.  Un  An- 
glais, nommé  Creed,  passe  pour  avoir  fait  le  premier,  en 
1747,  un  essai  de  ce  genre;  cette  priorité  lui  a  été  dis- 
putée par  Ungher,  conseiller  de  Justice  à  Brunswick.  Un 
moine  appelé  Engramelle  exécuta,' dit-on, «vers  1770,  une 
machine  à  écrire  la  musique;  la  description  qu'on  en  a 
faite  est  fort  obscure.  Un  piano  mcUographe  a  été  présenté 
en  1827  à  l'Institut  de  France  par  Carreyre.  B. 

PIANO  éoLiQDB,  instrument  de  musique  Inventé  par 
Kieselstein  et  Schwartz,  de  Nuremberg,  et  qui  ne  se  dis- 
tingue du  Physharmonica  (  V.  ce  mot)  que  parce  qu'il  a 
6  octaves  et  des  sons  plus  forts. 

PIANOTYPE,  machine  do  composition  typographique, 
inventée  par  Delcambre  et  Young.  Elle  se  compose  d'un 
clavier  et  d'autant  de  réservoirs  qu'il  y  a  de  caractères 
dans  une  casse  d'imprimerie  ordinaire.  l!es  touches  du  cla- 
vier sont  marquées  de  la  lettre  ou  du  signe  auquel  elles  cor- 
respondent :  quand  on  les  touche,  les  caractères  s'échap- 
pent des  réservoirs,  et  glissent  sur  un  plan  incliné  pour 
venir  se  ranger  dans  un  long  composteur.  Celuin^i  aboutit 
à  l'appareil  de  Justification ,  où  la  composition  produite 
est  arrangée  en  lignes ,  puis  en  pages.  A  cette  machine 
est  annexée  une  machine  à  distribuer,  dans  laquelle  les 
caractères  vont  se  ranger  par  sortes  dans  des  réservoirs 
qui,  une  fois  remplis,  sont  détachés  et  superposés  à  ceux 
du  pianotype.  Le  pîanotvpe  fut  admis  aux  Expositions  de 
l'industrie  à  Paris,  en  1844  et  1849.  Il  abrège  le  temps, 
et  réduit  le  prix  de  la  main-cl'œuvre;  mais  la  machine 
est  d'un  prix  élevé»  et  les  frais  de  correction  sont  consi- 
dérablement augmentés. 

PIASTRE,  monnaie.  V.  notre  Dictionnaire  (Z0  Biogror 
phie  et  d'Histoire. 

PIATTI,  nom  italien  des  cymbales. 

PIBLË,  en  termes  de  Marine,  mât  d'un  seul  morceau, 
dans  lequel  il  n'y  a,  par  conséquent,  ni  hune,  ni  barre 
de  perroquet,  mais  seulement  des  noix  carrées,  pour  ar- 
rêter le  capelage  des  haubans. 

PIC ,  terme  du  Jeu  de  piquet.  V,  Piqdet. 

PICADOR,  c.-à-d.  en  espagnol  piqueur,  cavalier  qui 
attaque  avec  la  pique  le  taureau  après  le  toréador  et  avant 
le  matador. 

PICAILLON.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire. 

PICARD  (Idiome).  La  langue  celtique  en  usage,  avant 
la  conquête  romaine,  dans  la  contrée  qu'on  appela  Picar- 
die vers  le  xii«  ou  le  xiti*  siècle,  y  reçut  l'empreinte  de 
la  langue  des  vainqueurs  moins  profondément  qu'au  midi 
de  la  Gaule,  soit  par  l'influence  du  climat,  qui  rendait 
l'oreille  des  habitants  moins  sensible  et  leurs  organes 
vocaux  moins  souples,  soit  à  cause  de  la  permanence  des 
relations  commerciales  avec  les  peuples  de  la  Grande- 
Bretagne.  Du  mélange  des  idiomes  celtique  et  latin  sortit 
une  langue  dite  rusitque  {rustica,  ruralts) ,  où  l'élément 
celtique  fut  toujours  dominant,  et  où  le  latin  subissait  de 
profondes  altérations.  Le  tudesque ,  apporté  par  les  Francs 
au  V*  siècle,  et  parlé  auprès  de  leurs  rois  de  la  première 
race  qui  avaient  fait  de  Soissons  une  de  leurs  capitales, 
ne  put  la  détrôner  :  elle  lui  survécut,  non  toutefois  sans 
avoir  gardé  de  son  contact  des  traces  sensibles.  Les  in- 
cursions des  Normands  l'obligèrent  aussi  de  s'assimiler 
beaucoup  de  mots  des  langues  septentrionales ,  mais  dans 
une  moindre  proportion.  La  langue  rustique,  modifiée 
par  le  temps  non  moins  oue  par  les  influences  étrac^ères, 
donna  naissance  au  wallon  (  V.  ce  mot)  et  au  picard. 
La  marque  de  ces  influences  se  retrouve  plus  particuliè- 
rement dans  les  noms  de  lieux  ;  ainsi,  les  noms  suivants 
sont  celtiques  :  Barly^  de  har-ly,  bois  clos  ;  Brouchy,  de 
bmch,  marécage;  Calais,  de  caleh,  h&vre;  Isques,  de 
isc,  lieu  bas;  Upen,  de  upen,  tertre,  etc.  D'autres  sont 
tudesques, comme  :  Bourg,  de  burg,  lieu  fortifié;  Hem 
ou  Ham,  de  hem,  habitation,  hameau,  village;  Hailu,  de 
hail,  buisson;  aamy  de  hem,  terre  inculte;  Wingles, 
de  toinkel,  lieu  écarté,  etc.  Les  origines  latines  sont  fort 
nombf^uses  :  Abbeville  {abbatis  vitla) y  Avesne  {avesna)^ 
Castelet  {casteUum)^  Estrées  {strata)^  Locdieu  (locus 
Dei)y  Vk-sur-Aisne  (vtctu),  etc.  Quelques  noîhs  tels 
que  Agrona,  Leuconaus,  Maya,  ont,  dit-oa,  une  origine 
grecque,  «ouvenir  d'une  colonie  masâilienne  établie  près 
de  l'embouchure  de  la  Somme  pour  le  trafic  de  l'étain. 

Le  picard,  un  des  grands  dialectes  de  la  langue  d*iXl 


PIC 


1428 


PIE 


(F.  ce  mot)^  fut  parlé  dans  TAmiénois,  le  Ponthiea,  le 
Boulonais,  le  Vimea,  le  Santerre,  le  VermandoiSf  la  Thié- 
rache,  le  Pays-reconquis,  le  Toarnaisis,  l'Artois,  le  Var- 
lois,  le  Laonnais,  le  pays  de  Senlis  et  de  Soissons.  Dès 
le  TLU*  siècle,  il  se  distingue  par  sa  tendance  à  syncoper 
les  mots ,  par  la  permutation  du  c  doux  en  cA,  et  du  ch 
français  en  k  (chés  keminSf  ces  chemins),  et  par  une 
prononciation  pleine,  lourde  et  sonore.  S^  formes  do- 
minantes sont  les  diphthongues  eu  et  oi  (prononcé  oèy 
ouait  comme  actuelleinent)  ;  son  voisin  le  normand  avait, 
au  contraire,  un  caractère  de  sécheresse  et  de  maigreur, 
parce  qu*aux  formes  mouillées  picardes  il  substituait  des 
voyelles  simples,  usage  qui  prévalut  définitivement  au 
XVII*  siècle  (V.  Normand).  Le  picard  ancien  est  riche  en 
écrits  de  tous  genres,  tels  que  pofimes,  romans,  lais, 
fabliaux,  contes,  chants  guerriers,  chansons,  coutumiers, 
cartulaires,  etc.  On  a  prétendu  que  le  célèbre  roman 
d*Amadis  (  V.  ce  moi  )  primitivement  publié  en  espagnol 
n'était  que  la  traduction  libre  d'un  manuscrit  en  dialecte 
picard,  que  LAcurne  de  Sainte-Palaye  dit  exister  au  Vati- 
can. La  Bibliothèque  impériale  de  Paris  possède  un  autre 
manuscrit  intitulé  le  Renart  futur,  dont  Tauteur  est  Go- 
belin  d'Amiens;  c'est  une  suite  du  fameux  roman  du 
Benart  (  V.  ce  mot).  Outre  ces  productions  utiles  pour 
l'étude  des  mœurs  et  l'histoire  de  notre  langue,  la  Picardie 
a  fourni ,  plus  qu'aucune  autre  province,  des  proverbes, 
des  dictons  historiques,  héraldiques  et  commerciaux,  re- 
latifs à  chaque  localité.  Les  Picards  ont  aussi  excellé  dans 
les  rébus  (  K.  ce  mot) .  au  point  qu'on  a  baptisé  de  leur 
nom  ce  bizsrre  Jeu  a'esprit,  et  qu'on  a  dit  les  rébus  de 
Picardie  :  il  existe  à  la  Bibliothèque  impériale  de  Paris 
deux  recueils  qui  portent  ce  titre,  et  qui  datent  de  la  fin 
du  XV*  siècle. 

Le  picard  moderne,  c-îmI.  le  patois  qui  représente  les 
débris  du  l'ancienne  langue  picarde  avec  les  modifications 
apportées  par  le  temps,  est  parlé  dans  les  départements 
de  la  Somme  et  du  Pas-de-Calais,  et  dans  une  grande 

{)artie  de  TOise  et  de  l'Aisne.  La  prononciation,  l'accent, 
'emploi  des  mots,  varient  souvent  d'un  village  à  l'autre, 
quelquefois,  dans  une  môme  ville,  d'un  faubourg  à  l'au- 
tre, comme  à  Amiens.  Ces  variétés  de  langage  se  dessi- 
nent plus  fortement  en  raison  de  Téloi^nemeat  des  lieux  : 
ainsi ,  le  vocabulaire  du  Boulonais  n'est  pas  le  même  que 
celui  de  l'Amiénois;  le  langage  du  Ponthieu  s'éloigne 
beaucoup  de  celui  du  Ycrmandois.  Les  dégradations  du 
picard  sont  surtout  sensibles  vers  les  limites  de  la  pro- 
vince, où  il  se  mêle  avec  les  idiomes  voisins  :  ainsi,  l'ar- 
tésien se  combine  avec  le  rouchi  et  le  wallon  ;  la  partie 
orientale  du  Valois  subit  l'influence  du  champenois;  le 
patois  de  Beauvais  et  de  Senlis  transige  avec  le  français 
de  rile-de-France.  Souvent,  dans  un  même  village,  on 
emploie  plusieurs  synonymes  pour  rendre  la  même  idée  : 
dans  le  département  de  la  Somme,  l'action  de  «  battre,  » 
de  «  donner  des  coups,  »  est  exprimée  par  une  quaran- 
taine de  mots  différents,  dont  q[uelque8-un8,  exterminer, 
gif  fier,  donner  une  giroflée  à  ctnq  feuilles,  une  pile ,  une 
roulée,  ont  cours  partout  depuis  longtemps  dans  le  lan- 
gage populaire.  On  remarque  pour  certains  mots  la  même 
analogie  de  composition  que  dans  le  grec  et  l'allemarid  : 
ainsi  le  verbe  flfier  (ficher,  mettre)  compte  un  grand 
nombre  de  composés,  entre  autres  lafflker  (asséner), 
comifUiêr  (  donner  un  coup  de  cornej,  inflker  ^ficher  dans), 
surfiker  (ficher  sur) ,  etc.  Le  picara  est  prodigue  de  com- 
paraisons .  qui  pour  la  plupart  ont  été  adoptées  dans  le 
français  familier,  telles  que  :  alerte  comme  ein  cat  (alerte 
comme  un  chat) ,  amer  comme  d*el  suie  (amer  comme 
de  la  suie),  rouche  comme  ein  co  (rouge  comme  un 
coq  J ,  etc.  il  admet  aussi  un  grand  nombre  de  mots  en- 
fantins, qui  sont  fournis  par  la  répétition  d'un  mono- 
syllabe, tels  que  :  mamache  (fromage),  mimine  (chat), 
nounou  (genou),  pipique  ^épingle),  tutures  (confi- 
tures), etc.  Il  est  pauvre,  et  il  a  cela  de  commun  avec 
d'autres  patois,  quand  il  s'agit  d'exprimer  des  idées  qui 
sortent  de  Tordre  matériel  :  ainsi ,  il  n'a  aucun  mot  spé- 
cial pour  traduire  »  fantaisie,  fécondité,  perfection,  ten- 
dresse, »  etc.  Il  a  du  nombre,  de  l'harmonie,  de  l'éner- 
gie, mais  les  mots  poétiques  lui  font  défaut.  Les  sujets 
badins,  enjoués,  et  où  la  raillerie  domine,  sont,  par  con- 
séquent, les  seuls  qu'il  soit  propre  à  traiter;  ce  sont 
aussi  à  peu  près  les  seuls  qui  composent  sa  littérature. 
^  Les  écrits  en  pur  patois  picard  depuis  la  déchéance  des 
dialectes  provinciaux  sont  moins  nombreux  et  moins  im- 

{ sortants  que  ceux  qui  ont  contribué  à  former  et  à  enrichir 
a  langue  française  pendant  le  moyen  âge  :  ils  consistent 
en  chansons  et  autres  pièces  de  circonstance,  soit  impri- 
mées, soit  manuscrites,  et  dont  les  plus  anciennes  ne 


remontent  pas  au  delà  de  1649.  Les  plus  remarquables 
ont  été  réunies  dans  un  ouvrage  intitulé  :  Recueil  de 
poésiesy  sermons  et  discours  picards,  Abbeville,  an  vi, 
ln-12  ;  c'est  là  que  se  trouve  l'édition  la  moins  rare  de  la 
Satyre  d'un  curé  picard  sur  les  vérités  du  temps,  par  le 
R.  P***,  Jésuite,  publiée  pour  la  première  fois  en  1750. 
Un  autre  recueil  :  Pièces  récréatives,  ou  le  Patois  picard, 
1823,  in- 18,  souvent  réimprimé  à  Amiens  et  à  Beauvais, 
contient  :  1*  Dialogue  curieux  et  intéressant  entre  deux 
Picards  concernant  la  cathédrale  d'Amiens;  2<*  Sermon  de 
messire  Grégoire  sur  ce  texte  :  Reddite  quœ  sunt  Ccesaris 
Cœsari;  3®  Dialogue  entre  deux  petites  paysannes  et  un 
médecin.  Le  sermon  doit  être  du  xvni*  siècle,  car  mea- 
sire  Grégoire  se  plaint  de  ce  qu'on  ne  lui  paye  pas  la 
dlme,  et  de  ce  que  les  femmes  vont  à  l'église  avec  dea 
masques  de  velours;  mais  le  texte  primitif  a  dû  être 
altéré^  et  on  y  a  fait  des  additions  dans  les  éditions  mo- 
dernes, où  figurent  les  noms  de  Mirabeau  et  de  La 
Fayette.  A  partir  de  1830,  les  éditeurs  picards  ne  se  sont 
plus  bornés  à  des  réimpressions  ;  ils  mettent  au  Jour  des 
productions  nouvelles ,  inspirées  par  les  événements  con- 
temporains ;  ainsi ,  les  Anciennes  et  nouvelles  Lettres  pi- 
caraes,  par  Pierre-Louis  Gosseu,  paysan  de  Vermand 
(S*-Quentin,  1847,  in-8<*),  dictées  par  un  esprit  incisif 
et  mordant,  ont  pour  sujets  principaux  la  réforme  élec- 
torale, les  lois  de  dotation ,  la  prison  de  Ham ,  les  fêtes 
de  Juillet,  l'opéra  de  la  Juive^  la  loi  sur  la  chasse,  le 
droit  de  visite,  l'indemnité  Pritchard,  les  élections,  etc. 
fje  Journal  VAbbevillois  a  publié,  après  la  révolution  de 
Février  1848,  une  série  de  Lettres  picardes,  par  Jacques 
Croedur  et  Jean  Pronieux,  qui  roulent  principalement 
sur  les  faits  politiques  accomplis  depuis  rétablissement 
de  la  République  :  elles  se  distinguent ,  comme  les  pré- 
cédentes, par  leur  verve  malicieuse.  On  trouve  enfin 
chaque  année,  dans  les  almanachs  édités  en  Picardie, 
des  dialogues  et  des  chansons  en  patois  picard.  —  V,  Mé^ 
moire  sur  Vorigine  des  patois  picards,  par  Grég.  d'Essi- 
gny,  Pérou  ne,  1811  ;  Glossaire  étymologique  et  comparatif 
du  patois  picard  ancien  et  moderne,  par  l'abbé  Jules 
Corblet,  Amiens,  1851,  in-8<^;  Des  Variations  du  langage 
français  depuis  le  xii*  siècle,  par  F.  Génin,  Paris,  1845, 
in-8o;  Histoire  littéraire  et  philologique,  et  bibliographie 
des  patois,  par  Pierquin  de  Gembloux,  Paris,  1841,  in-8*; 
Ancien  coutumier  inédit  de  Picardie^  en  dialecte  picard 
du  XIV*  siècle,  publié  par  Marnier,  Paris,  1840,  in-8<>; 
Recherches  sur  les  formes  grammaticales  de  la  langue 
française  et  de  ses  dialectes  au  xni*  siècle,  par  G.  Fallot, 
in-8°,  Paris,  1849.  P— s. 

PICARESQUE  (Genre).  F.  page  83S,  col.  2. 

PICCOLO.  V.  Flotb  (Petite). 

piccoLO,  terme  du  jeu  de  boston  (F.  ce  n^ot), 

PICHIER,  vieux  mot  désignant  un  pot  à  eau  et  à  via. 

PICK-POCKET,  c.-à-d.  en  anglais  pique^oche,  nom 
qu'on  donne  en  Angleterre  aux  voleurs  à  la  tire. 

PICOTEUX ,  bateau  long  de  5  met.  environ ,  et  qui  ne 
peut  porter  que  deux  ou  trois  personnes. 

PICTE.  F.  PiTE. 

PIÈCES ,  en  Procédure ,  différentes  grosses  ou  actes 
originaux  qui  sont  les  éléments  d'un  procès.  Dans  un 
procès  criminel  ou  correctionnel,  on  nomme  Pièces  de 
conviction  les  objets  déposés  au  greffe  et  qui  sont  produits 
à  la  charge  do  l'accusé.  La  destruction  volontaire  de  pi^es 
est  punie  de  la  réclusion  s'il  s'agit  d'actes  de  l'autorité 
publique,  d'effets  de  commerce  ou  de  banque,  et,  pour 
toute  autre  pièce,  d'un  emprisonnement  de  2  à  5  ans  et 
d'une  amende  de  100  à  300  fr.  {Code  pénal,  art.  439). 

pifecEs,  terme  de  Blason.  F.  Blason,  dans  notre  DiC' 
tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

PIÈCES  JDSTincATivES,  documcuts  publiés  à  la  fin  d*an 
ouvrage  pour  appuyer  un  fait  ou  une  opinion. 

PIÉCETTE  (diminutif  de  pièce) ^  en  espagnol  peseta, 
monnaie  d'argent  d'Espagne,  valant  1  fr.  30  c.  ;  c*cst  le 
quart  de  la  piastre.  On  l'appelle  aussi  recU  de  deux.  — 
A  Alger,  la  piécette  est  ane  monnaie  de  compte  valant 
0  fr.  47  c. 

PIED,  dans  la  versification  grecque  et  latine,  désigne 
la  combinaison  d'un  certain  nombre  de  syllabes  de  même 
quantité  ou  de  quantité  différente,  de  manière  à  former 
une  mesure  ;  ainsi  sûb  èôs ,  sûb  nos,  haie  n6vik,  pèrïtt, 
forment  autant  de  pieds.  Les  pieds  les  plus  usités  sont 
le  dactyle,  le  spondée,  Vïambe,ie  trochée,  Vanapeste,  le 
tribraque^  lepyrrhique,  leprocélettsmatique,  etc.  (F.  ces 
mots).  —  Dans  la  versification  française,  on  appelle  Pied 
la  réunion  de  deux  syllabes  ;  ainsi  l'on  dit  qne  ralexandrin 
a  6  pieds,  le  décasyllabe  5  pieds,  etc.  P. 

PIED-DROIT,  partie  du  trumeau,  ou  du  lambagc  d'une 


PIE  U 

Cl  on  d'une  fenêtre,  qui  comprcDd  le  bftndeaa  ou  cbam- 
le,  Is  tableau,  la  feuillarci  l'embraaure  et  l'écoinçoD. 

PIEDESTAL,  base  qui  supporta  une  colonne,  une  sta- 
tue, un  buste,  un  vase,  un  candélabre,  ou  tout  autre  objet 
d'ui  et  d'ornement.  Un  piédestal  te  compose  géoéraïs' 
ment  d'une  partis  ioTérieure  ou  socU,  ornée  de  quelques 
mouluroa;  d'uo  corps  ma«sir  qui  repose  sur  le  socle  et  se 
Domme  di;  et  d'une  partie  supérieure  ou  corniche,  enri- 
chie de  moulure*  sailkotes.  Le  plus  souvent  on  lui  donne 
en  bautaur  le  double  de  sou  épusseur.  Le  piédestal  tos- 
can a  pour  base  uae  plinttie  et  un  Blet,  un  dé  dont  la 
partie  inférieure  se  termine  en  adoucissement,  et  pour 
coraicbeun  taloneiun  réglet.  —  Le  piédestal  dorique  a  sa 
bue  composée  d'une  plinthe,  d'un  tore,  et  d'un  met  sur- 
monta d'kin  caveti  son  dé  est  couronné  d'une  cornicbe 
composée  d'un  cavet  avec  son  fltet  au-dessus,  d'un  lar- 
mier surmonté  d'un  Blet,  et  d'un  quart  de  rond.  — Le 
piédestal  ionique  a  sa  base  composée  d'une  plinthe,  d'un 
Blet  surmonté  d'une  doucine,  au-dessus  de  laquelle  ost 
un  autre  fliet  avec  son  congé;  son  dé  se  Joint  à  la  cor- 
nicbe  par  un  congé,  et  un  petit  flIet  surmonté  d'un 
astragale,  au-dessus  duquel  est  une  frise,  qui,  par  un 
congé,  se  réunit  au  fllett  celui-ci  porte  un  quart  de  rond, 
ensuite  un  iarniiercouronnéd'un  tolonavecsonBlet.— Le 
piàiescai  corinthien  a  une  base  composée  d'une  plinthe, 
d'un  tore,  d'un  fllet,  d'une  gorge  et  d'un  astragale  ;  le  dé 
Bnit  001"  un  adoucissement  et  un  Jlleli  dans  la  corniche 
on  distingue  uu  astragale,  une  (Hse,  un  Blet,  puis  un 
autre  astragale,  un  ove,  un  larmier  taillé  en  demi-creui, 
el  un  talon  couronné  d'un  fllot.  —  Le  composite  est  lem- 
blable,  en  proportion,  au'  piédestal  corinthien;  mais  sa 
corniche  est  formée  d'uu  Blet  avec  son  congé,  d'un  gras 
astragale,  d'une  doucine  avec  son  lilet,  d'un  larmier,  et 
d'un  talon  avec  son  HIct.  —  L'architecture  chrétienne  a 
donné,  comme  l'architecture  gréco-romaine,  des  piédes- 
taux aux  colonocs;  mais  ils  n'ont  pas  les  mêmes  pro- 
(tonions  que  ceui  des  ordres  classiques.  Ils  sont  souvent 
formés  d'un  simple  socle  à  plusieurs  pans,  et  quelquefois 
de  plusieurs  dés  superposes,  réunis  les  uns  aux  autres 
par  des  glacis.  —  Ou  nomme,  chez  les  Hodcmes,  piidei- 
lof  cotnpof^,  celui  qui  est  indifféremment  en  carré  long, 
en  orale,  à  pans  («upés  ou  arrondis;  piidaital  conJmu, 
celui  qui  porte  une  rangée  de  colonnes  sans  faire  saillie 
ni  retraite;  piidsttat  doubU,  celui  qui  porte  deux  co- 
loonea accouplées;  piédeilat  en  adtnicisiemint, celai  dont 
la  dé  a  la  forme  d'une  gorge  ou  d'une  scotie;  piédeslal 
irrë/julier,  celui  dont  les  faces  ne  sont  pas  d'équerro  ou 
parallèlei,  et  dont  les  angles  ne  sont  pas  droits  ;  piédestal 
lianqui,  celui  dont  les  encoignures  sont  contournées  ou 
ornées  de  pilastres,  de  consoles,  de  ligures;  piédaslal 
orné,  celui  qui  a  des  moulures  taillées  d'ornements,  et 
des  faces  fouillées  ou  revêtues  d'ornements  Baillants.  On 
distingue  aussi  les  piédestaux  ronds ,  carrés,  Iriangu- 
lairei,  ea  batuitr»,  en  JoJtu,  etc.  V,  Soubassement,  Stt- 
Lostm  B. 

PIËDOQCHB  (de  l'italien  piduccio,  petit  pied},  pié- 
destal de  très-petite  dimension,  qui  sert  de  support  k  do 
petits  objets.  I^  forme  qu'on  lui  donne  le  plus  ordinaire- 
ment  est  celle  d'un  grand  cavet,  avec  des  moulures  en 
baut  et  en  bas;  sur  une  face  est  un  cartel  destiné  1  re- 
cevoir une  inscription, 

PIEDS  (Bai sèment  des).  V.  Baisement. 

PIEDS  (Lavement  desj.  V.  Lwturtn  des  pieds,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Ilistoirt. 

PIÉPOItT,  étalon  monétaire  d'un  poids  quadruple  des 
pièces  qu'on  doit  fabriquer. 

PIËUOMTAIS  (Dialecte),  dialecte  mélangé  do  français 
et  d'italien,  avec  une  prononciation  particulière  ^ui  con- 
tribue k  le  rendre  peu  intelligible  à  quiconque  ne  connaît 
que  l'italien  classique.  Dans  le  vocabulaire,  il  a  de  nom- 
breui  rapports  avec  te  provençal.  Il  possède  les  voyelles 
«it  et  u,  les  sons  an,  in,  on,  un,  et  la  consonne  j,  valeurs 
phonétiques  appartenant  au  français.  Il  Tait  un  fréquent 
ns^e  des  constractions  {btogn  pour  bisogno,  etc.). 

PIÉHONTAISË  (ËcolB],  école  italienne  de  peinture,  qui 
tient  de  très-pris  à  celle  de  Hilan.  Le  plus  ancien  maître 
qui  la  représente  est  Georges  Solarl,  né  i.  Alexandrie 
ilans  le  iTi*  dicle.  On  cite  ensuite  jscques  ftosignoli, 
ludore  Caracca,  Guillaama  Caccia,  dit  le  Moacatvo, 
Agnelli,  et  Terio. 

l-lt^RHE  ou  PIERRE  CALCAIRE,  nom  sous  lequel  on 
comprend  toutes  les  variétés  de  pierres  k  Mlir,  les  mar- 
bres, le  pifttre,  etc.,  qu'on  eiploile  dans  des  carrières  à 
ciel  ouvert  ou  souterraines.  En  termes  de  Construction, 
on  disdnguB  les  pitrres  de  bat  ou  de  haut  appareil,  sui- 
vant qu'ellua  ont  moins  ou  plus  de  0°',3D  d'épaiueur.  l.a 


!9  PIE 

pierre  dure  est  celle  qui  résiste  le  mieux  aux  fardeaux  si 

aux  injures  du  temps;  il  y  a  cependant  de  la  pierre 
tendre  qui,  dégagée  de  son  eau  de  carrière,  devient  excel- 
lente. La  pierre  poreuse  et  coquilleuse  ne  gèle  pas  aussi 
facilement  que  la  pierre  pleine,  parce  qu'elle  rejr'tle  plus 
aisément  l'humidité  dont  elle  est  imprégnée.  Les  pierres 
dont  la  couleur  tire  sur  le  noir  ou  le  bleu  sont  plus  dures 
qun  les  grises,  et  celles-ci  que  les  blanches  ou  les  rousses. 
Ctlles  qui  ont  les  couleurs  les  plus  claires  sont  ordinai- 
rement moins  fortes  et  moine  pesantes.  Les  pierres  dont  le 
grain  est  homogène  et  la  texture  uniforme  sont  plus  fortes 
que  celtes  dont  le  grain  est  mélangé,  quoique  ces  der- 
nières soient  quelquefois  plus  dures  et  plus  pessntea. 
Dans  les  charniers,  on  nomma  pierre  de  taille  toute 
pierre  dure  ou  tendre  qui  peut  être  équorrle  ou  taillée 
avec  parement,  ou  même  avec  architecture,  pour  la  soli- 
dité ou  la  décoration  des  bâtiments;  pierre  fiére,  une 
pierre  dure,  sèche,  difficile  à  travailler;  pterrs /Vonc/ie, 
une  pierre  parfaite  en  son  espèce,  qui  ne  lient  ni  de  la 
dureté  de  la  roche,  ni  du  tendre  du  moellon;  pierre 
gelise  vtrte,  uno  pierre  nouvellement  tirée  de  la  carrière 
et  qui  n'a  pas  encore  Jeté  son  eau;  pierrs  pleine,  une 
pierre  dure,  qui  n'a  ni  cailloux,  ni  coquillages,  ni  troua; 
pierre  débitée,  celle  qui  est  sciée;  pierre  d'échantillon, 
un  bloc  commandé  d'une  grandeur  déterminée  aux  car- 
rières; pierr»  en  chantier,  une  pierre  calée  et  disposée 
pour  la  taille;  pierre  estuyée,  une  pierre  grossièrement 
équarrie  pour  être  employée  dans  le  garni  des  gros  murs; 
pierre  faile,  une  pierre  entièrement  taillée  et  qu'on  peut 
mettre  en  place.  Un  ouvrage  à  pierre  perdue  est  celui 
qu'on  élève  dans  l'eau,  en  y  Jetant  de  gros  quartiers  de 
pierre,  comme  dans  les  fondations  de  la  plupart  dJss  di- 
gues. On  appelle  pierres  sèches  celles  qui  sont  posées 
l'une  sur  l'autre,  sans  être  liées  par  aucun  ciment. 

TIEHaK  DE  ^0HS£CnjtT[On.    V.  AUTEL. 
PIEESE  DS  LA  PAIX.    V.    pAIX. 

PIERRE  DE  nOHB  (Église  de  Saint-).  Sous  le  pontlBcat 

de  Sylvestre,  en  321,  une  premitVe  basilique  de  SoJnt- 
Pierre  fut  fondée  au  Vatican  par  l'empereur  Constaatlo. 
C'était  un  vaisseau  à  S  nefs,  et  dont  la  fa;ade  regu^it 


Ancirmt  Église  ifc  Salal-Pierrt  dt  Rom. 

l'Orient.  Il  était  précédé  d'un  cloître  appelé  quadnpor- 
Ivam,  des  4  portiques  qui  l'entouraient,  et  sous  lesauels 
les  pénitents  et  les  relaps  s'agenouillaient  pour  implorer 
les  prières  des  passants.  Au  milieu  de  la  cour  s'élevait  un 
petit  temple  ï  Jour,  sur  lequel  le  pape  Symmaque  avait 
fait  mettre  une  pomme  de  pin  colossale,  en  brome,  pro- 
venant du  mausolée  d'Adrien.  En  deçà  du  clottre  régnait 
un  grand  corps  de  b&tlment,  destiné  à  l'habitation  du 
chapitre,  et  surmonté  d'un  Cocher.  On  arrivait  au  c«,ps 
du  Dfiliment  par  un  vaste  perron,  coupé  en  deux  par  un 
repos.  Sur  la  place  qui  te  précédait  se  dressait  un  grand 
obélisque  antique  monolithe  (voir  la  figure  d-dessus). 
A  l'intérieur,  l'église  était  resplendissante  de  marbres,  df 


?IE  tl 

•nosalques  et  do  peintures;  AnasUse  la  Bibtiotliécalre 
•'est  compta  k  âauinérer  les  lichewes  de  toutes  aortes 
qu'on  j  avait  accumutéea.  L'édiflce  s'éterait  k  i'enilroit 
où  S'  Anaclet,  3*  pape,  avait  iStabli  on  modeste  oratoire. 
Il  éttdt  on  forme  de  croix  latine;  ses  S  nefs  étaient  «épa- 
réea  par  06  colonnes  de  marbre,  et  II  «fait  110  met.  de 
longueur,  75  de  largeur;  li  fenêtres  y  répandaient  la 
lumière.  La  porte,  au-deasus  de  laquelle  était  une  statue 
du  Sauveur  en  ar^t  doré,  avait  des  battants  couverta 
do  lames  d'ai^nt  du  poids  de  975  livres;  un  agneau 
d'argent  formait  la  fontaine  des  fonts  baptismaux;  l'un 
des  pupitres  du  chœur  était  d'argent  massir;  la  poutre 

3ui  coupait  transverEalemeot  l'arc  triomphal  était  revêtue 
e  lames  d'argent  du  poids  de  1,352  livres.  Le  maître- 
autel,  précédé  de  IS  colonnes  torses  en  marbre  blanc  qui 
Provenaient,  disait-on,  du  temple  de  Salomon,  était  de 
irnie  carrée,  étincelant  d'or,  d'argent  et  de  pierreries,  et 
surmonté  d'an  baldaquin  de  vermeil,  que  supportaient 
♦  colonnes  de  porphyre.  Plus  tard,  l'empereur  Valenti- 
nien  III  y  plaça  un  édicale  d'or  i  il  portes,  rehaussé  de 
bas-rcliefa,  et  S' Zachario  un  upis  de  drap  d'or,  brodé  en 

Eerles  et  en  pierreries,  et  sur  lequel  on  avait  représenté 
i  Nailriié  de  Notre- Seigneur.  Au- 
deesous  de  l'autel  était  creusée  la  con- 
/Miion,  crypte  où  l'on  descendait  par 
an  escalier  de  marbre,  et  dont  de 
fortes  grilles  fermaient  l'entrée.  Elle 
était  éclairée  par  une  ouverture  prad- 
qué«dans  !e  pavé  du  sanctuairei  un 
outel  recouvrait  la  cbUsse  d'argent  de 
S' Pierre,  enveloppée  elle-mÈme  d'une 
autre  chAsse  en  bronze  doré,  et  sur- 
montée d'une  croix  d'or  fin.  pesant 
150  livres;  le  pape  Léon  III  l'entoura 
de  grilles  d'argent,  gardées  par  des 
Anges  de  même  métal.  Ht  revêtir  de 
lames  d'or  tout  le  paré,  et  orna  les 
paroiï  d'une  mostdque  représentant 
Jésus-Christ,  S'  Pierre  et  S'  Paul.  Ces 
richeases  furent  pillées  par  les  Sarra- 
sins sous  le  pontificat  de  Ser^us  II. 

La  basilique  de  S*-Pierre,  entretenue 
at  restaurée  durant  tout  le  moyen  Ige,  ■^^-.--  ^.^-^-ja 
comblée  des  dons  des  papes,  des  sou- 
Tersins  et  des  Sdèles,  ruiît  par  me- 
nacer ruina  au  iv'  siècle.  La  con- 
struction d'un  nouveau  monument  fut 
résolue  en  IISO  par  Nicolas  V,  et  Bernard  Rossellini 
commença  les  travaui  i  mais,  cinq  ans  après,  tout  fut 
abandonné.  Malgré  les  regrets  qu'inspirait  la  destruction 
de  l'ancien  temple,  Jnlea  II  voulut  qu'on  se  remit  à 
l'œuvre,  et,  eu  1500,  on  posa  la  première  pierre  de  la 
basilique  acioelle.  Bramante  avait  conçu  la  pensée  de 
réunir  en  un  tout  rimilation  des  grandes  voùles  du 
tcmpledelaPaii(au  mieux  Basilique  de  Conatanlin]  pour 
les  nefs,  et  du  Panthéon  d' Agrippa  avec  sa  coupole  de- 
vant servir  de  point  de  centre  aux  quatre  nefs.  Les  quatfo 
pillera  des^nés  i  soutenir  la  coupole  c'élerèrent,  et  les 
quatre  grands  arcs  furent  cintrés;  le  plan  général  était 
celui  d'une  croix  grecque.  Quand  Bramante  mourut,  des 
tassements  et  des  lézardes  se  manifestaient.  Raphaél,  que 
Léon  X  chargea  de  continuer  l'œuvre,  conçut  un  plan  en 
croix  latine,  que  Serlio  noua  a  conservé,  et  qui  est  bien 
supétleur  h  celui  que  l'on  s  adopté  depuis.  Sous  la  direc- 
tion  de  Raphaél,  les  architectes  GiuDano  da  San-Gallo 
et  Fra  Giocondo  fordflèrent  les  piliers,  et  leur  donnèrent 
une  solidité  Inébranlable.  La  mort  de  Haphaél  en  1530, 
les  agitations  de  la  Réformation  de  Luther,  les  dévasta- 
tions commises  dans  Rome  par  les  bandes  du  connétable  de 
Bourbon,  entravèrent  les  travaux.  Puis  Balthazar  Peruzii 
ramena  le  plan  de  l'édiBce  à  celui  d'une  croix  grecque. 
Dq  ses  mains,  la  direction  passa  dans  celles  d'Antonio  da 
Sao-Galto  jusqu'en  1546 1  cet  architecte  reprit  le  plan  de 
la  croix  latine,  et  eiécuta  un  modèle  en  relief,  qui  existe 
encore,  complication  extrême  de  clochera,  de  pyramides,  de 
dispositions  architecturales  diverses.  Vint  ensuite  Michel- 
Ange,  qui  conçut  ridée  gigantesque  d'élever  la  coupole  à 
40U  pieds  dans  les  sirs.  Il  ne  construisit  que  le  tambour 
dn  dame,  et,  en  mourant  (1561),  il  laissa  des  plans  pour 
l'achèvement  complet  de  l'édifice  en  croix  grecque. 
ï>Irro  Ligorio  et  Vtgnole  lui  succédèrent  ;  le  pape  Pie  V 
dut  éloigner  le  premier,  qui  roulait  changer  les  plaus  de 
Michel-ànee;  le  second  Bl  les  deux  coupoles  latérales. 


10  PIB 

gligé  oart^nes  distributions  intérieures  réclamées  pu  le 
service  religieux  :  Moa  te  pontificat  de  Paul  V,  on  aban- 
donna définitivement  la  forme  de  la  croix  grecque  et  la 
façade  à  colonnes  isolées  qui  devait  orner  l'entrée  de 
l'édifice,  et  Carlo  Maderno  appliqua  la  façade  actuelle  k 
ia  nef  prolongée.  Ainsi  fut  terminé,  en  IGll,  après  plus 
d'un  siècle,  ce  temple  immense,  que  chaque  année  dei»it 
ensuite  contribuer  k  embellir.  Suivant  le  compte  fait  en 
1093  par  Charles  Fontan a,  on  avait  déjï  dépensé  pour  I* 
grosse  construction  plus  de  £50  millions  de  franca.  San* 
parler  des  réparations  qu'ciigèrent  hientût  les  parties  de 
l'œuvre  exécutées  par  Michel-Ange  et  Maderno,  VanviielU 
dut  faire  cercler  de  fer  le  tambour  de  la  coupole,  qu'on  »v«t 
eu  rimprudence  de  construire  moitié  en  briques,  et  moitié 
en  pierre  de  tsjlle  pour  la  partie  extérieure;  da  Ifc  ao 
tassement  inégal  qui  fit  craindre  un  instant  que  le  dAnie 
ne  s'Écroutït,  dont  on  ne  devina  pas  d'abord  la  eauae,  et 
et  qui  cessa  quand  il  eut  été  complet,  vers  le  milieu  du 
ivin' siècle.  Enfin,  en  17Si,Pie  VIflt  bAtir  par  Uarchioni 
une  vaste  sacristie,  ([ui  masque  une  partie  du  cbxé  sud  de 
l'édifice.  Voici  les  dimenûona  de  la  basilique  :  longueur 
extérieure,  S19  met.;  longueur  Intérieure,  1S8'",50;  lon- 


iï-'^s: 


u  H  Ptaa  Saial-Pbrre  de  Rome. 

du  transept,  151'",00;  lartceur  Intérieure  de  la  nef, 
:7'",33(  hauteur  sous  voûte,  48  met. 

La  façade  de  TégliaeS'-Pierre  s'ouvre  à  l'Orient  sur  une 
très-spacieuso  place  ovale,  toute  en  colonnades,  au  mi- 
lieu de  laquelle  s'élève  un  obélisque  entre  deux  belles 
fontaines  en  Jets  d'eau,  et  qu'enveloppe  la  colonnade 
construite  en  ItiOâ  par  le  Demln  (K.  Colonnade,  et  la 
figure  ci-dessus).  De  cette  place,  par  suite  du  prolonge- 
ment considérable  de  la  nef  d'entrée,  le  dûme  ne  produit 
pas  l'effet  qu'on  en  eût  reçu  ai  le  plan  de  Michel-Ange 
avait  été  respecté,  et  cet  effet  devient  nul  quand  on  se 
rapproche  de  la  façade.  Le  dûme  a  cependant  des  pro- 
portions colossales;  il  s'élève  à  une  hauteur  de  136  met. 
Imitation  hémisphérique  de  celui  de  S"-Marie-de»-Fleura 
de  Florence,  qui  est  octogone,  il  affecte  une  forme  nu  peu 
surhaussée.  La  division  des  parties  qui  le  composent  est 
la  même  :  c'est  d'abord  un  saubaasement  h  pans,  puia  un 
soubassement  circulaire  ou  tambour  avec  une  corniche 
d'où  s'élève  une  tour,  ornée  de  10  «intre-forts  en  forme 
de  pilastres,  et  de  33  colonnes  accouplées  par  2  et  légère- 
ment engagéea;  ta  tour  est  percée  de  10  fenétrei  qua- 
dranauloires  k  frontons  alternativement  triangulaires  et 
circul^res.  Sa  circonférence  mesure  190  mèu  Celte  of- 
donnance  corinthienne  est  surmontée  d'un  attimie  sur  le- 
quel porte  la  partie  convexe  du  dCime,  revêtue  de  plomb, 
et  offrant  la  saillis  bien  prononcée  de  16  arêtes.  Pais  vient 
une  lanterne  de  18  met  de  hauteur,  un  stylobatedelO  met. 
supportant  une  boule  creuse  de  3'°,50  de  diamètre,  et 
enfin  une  croit  haute  de  5  met.  —  Un  escalier  en  limaçon 
de  m  degrés  en  salite  {V.  et  mot)  permet  de  monter 
sur  la  plate-forme  do  l'église  par  une  pente  trôs-donce, 
que  des  chevaux  peuvent  gravir.  Là  vivent  des  San  Pt- 
trini,  ouvriers  organisés  en  corporation,  et  chargés  de 
tous  les  travaux  qu'exige  la  conservation  de  l'édilice; 
une  fontaine  coule  perpétuellement  an  pied  du  dOmr 
dons  an  bassin  de  plomb   ponr  la  commodité  de  ce> 

On  s'accorde  généralement  II  faire  à  la  façade  etécnlée 
par  Maderno  quelques  graves  critiques  i  elle  n'a  pas  Is 


PIE 


1431 


PIE 


eunctère  de  grandeur  qui  eonyiendrait  à  un  tel  édifice  : 
par  la  vulgarité  de  son  ordonnance  et  la  lourdeur  de  ses 

{iroportions ,  par  ses  fenêtres  multipliées  Jusque  dans 
'attique,  elle  éveille  Tidée  d*un  palais,  d'une  Dourse,  plu- 
tôt que  d'un  temple;  elle  a  aussi  le  défaut  de  s'étendre 
bien  au  delà  de  la  largeur  réelle  de  Tédifice.  On  accède  à 
l'entrée  par  un  vaste  perron  à  trois  repos,  aux  angles  du- 

3ttel  Pie  IX  a  fait  placer  doux  statues  colossales  modernes 
e  S^  Pierre  et  de  S^  Paul,  en  remplacement  de  celles  que 
Hino  da  Fiesole  avait  exécutées  en  1460,  et  qu'on  a  trans- 
portées dans  la  sacristie.  La  façade  a  123  met  de  largeur 
et  50  met.  de  hauteur;  elle  est  formée  d'un  grand  ordre 
corinthien,  dont  les  colonnes  unies  ont  près  de  30  met. 
d'élévation  sur  3  met.  de  diamètre,  percée  de  fenêtres,  et 
ornée  de  statues  placées  dans  des  niches;  l'attique  est 
couronné  des  13  statues  colossales  de  J.-G.  et  des  Apôtres. 
Aux  extrémités  sont  deux  horloges  dessinées jpar  Valadier, 
et  placées  sous  le  pontificat  de  Pie  VI.  —  On  entre  par 
cinq  portes  dans  un  magnifique  vestibule,  régnant  dans 
toute  la  largeur  de  la  façade;  là  sont,  à  chaque  extrémité, 
les  statues  équestres  de  Constantin  le  Grand  par  le  fier- 
nin,  et  de  Gharlemagne  par  Cornacchini.  Au-dessus  de  la 
porte  da  milieu,  vis-à-vis  de  l'entrée  principale  de  hi  nef, 
est  la  Navicella  (la  nacelle  de  S' Pierre),  célèbre  mosaïque 
exécutée  en  1208  par  Giotto  et  Cavallini  pour  l'ancienne 
basilique,  et  qui  a  été  refaite  en  grande  partie.  Cinq 
portes  communiquent  du  portique  dans  l'intérieur  de 
réglise  :  celle  du  milieu,  en  bronze,  exécutée  sous  Eu- 
gène IV,  en  1440,  appartenait  à  l'ancien  édifice;  elle  est 
couverte  de  bas -reliefs  empruntés  à  l'histoire  sainte, 
avec  bordure  de  sujets  mythologiques,  et  surmontée  d'un 
bas-relief  du  Bermn.  La  première  porte  à  droite,  dite 
PorU  sainUy  ne  s'ouvre  oue  dans  l'année  du  Jubilé  : 
hors  ce  temps,  elle  est  murée.  Les  bénitiers  à  l'entrée  de 
l'édifice  sont  deux  coquilles  de  marbre  Jaune  antique, 
ajustées  devant  une  draperie  de  marbre  bleu  turquin,  et 
supportées  par  des  Anges  de  2  met.  de  proportion. 

Malgré  sa  penpective  grandiose,  l'intérieur  de  S*- 
Piem  de  Rome  paraît,  au  premier  coup  d'œil,  moins 
vaste  qu'il  ne  l'est  en  réalité  :  Michel-Ange,  ayant  afl'ecté 
partout  les  proportions  les  plus  colossales,  a  rempli  toute 
la  longueur  de  la  nef,  du  portiaue  au  transept,  c-à-d.  plus 
de  100  met.,  par  3  arcades  seulement  ;  ces  ô  arcades,  sans 
contrastes  qui  saisissent  d'abord  la  vue,  rapetissent  les 
espaces.  L'effet  est  encore  affaibli  par  une  lumière  trop 
vive  pour  6tre  rellçieuae.  Il  faut  un  çen  de  temps  pour 
apprécier  l'immensité  du  vaisseau,  qui,  dès  que  l'atten- 
tion a  commencé  de  le  saisir,  vous  apparaît  dans  toutes  ses 
énormes  proportions,  qui  n'ont  d'égales  dans  aucun  autre 
temple.  La  grande  nef  est  séparée  des  collatéraux  par  les 
pieds-droits  dea  arcades;  celles-d  répondent  à  autant  de 
chapelles.  Chaque  pied-droit  est  orné  de  deux  pilastres 
cannelés  d'ordre  corinthien,  qui  ont  2*,6tf  de  largeur  et 
26  met.  de  hauteur,  y  compris  la  base  et  le  chapiteau; 
ils  soutiennent  un  entablement  de  6  met.  de  hauteur, 

3ui  règne  tout  autour  de  l'église.  Entre  les  pilastres  sont 
eux  rangs  de  niches,  qui  renferment  les  statues  de 
marbre  des  saints  fondateura  d'Ordres,  hautes  de  5  met. 
Sur  l'archivolte  des  arcades  sont  deux  figures  en  stuc,  de 
5  met.  de  haut,  représentant  des  Vertus.  Les  contre- 
pilastres  qui  correspondent  sous  les  arcs  sont  ornés  de 
deux  médaillons,  soutenus  séparément  par  deux  Anges 
de  marbre  blanc,  et  renfermant  les  portraits  de  différents 
papes;  entre  ces  médaillons,  deux  enfants  portent  les 
attributs  pontificaux  :  le  tout  a  été  sculpté  en  baa-relief 
BOUS  la  direction  du  Bernin.  En  général,  les  statues  co- 
lossales des  pilien  ne  sont  pas  d'un  goût  pur. — ^La  grande 
Toute  est  à  plein  cintre,  et  décorée  de  caissons  et  de  ro- 
saces en  Stac  doré.  Le  pavé  a  été  formé  de  beaux  mar- 
bres, assemblés  sous  la  direction  de  Jacques  délia  Porta 
et  du  Bisrnin.  Entre  ce  pavé  et  celui  de  l'ancienne  basi- 
lique conservé,  il  y  a  un  intervalle  de  4  met.  qui  forme 
souterrain  :  le  Bernin  y  a  dessiné  quatre  petites  cha- 
pelles, dont  les  autels  sont  ornés  de  tableaux  en  mo- 
siJque  d'après  André  Secchi;  on  y  voit  aussi  le  sarco- 
phage de  Junius  Bassus,  préfet  de  Rome  au  iv*  siècle,  et 
diven  tombeaux,  entre  autres  ceux  des  papes  Adrien  IV, 
Booiface  Vm,  Nicolas  V,  Urbain  VI,  et  Pie  II,  de  l'empe- 
reur Othon  n,  du  prétendant  Charles-Edouard,  etc. 

La  coupole  qui  s'élève  à  l'intersection  des  transepts  a 
42'>>,22  de  diamètre.  Sur  les  quatre  pillera  et  les  grands 
arcs  oui  la  soutiennent,  règne  un  très-bel  entablement, 
dans  &  frise  duquel  sontpeintes,  en  mosaïque,  les  paroles 
suivantes  du  Christ  au  fondateur  de  son  Église  :  Tu  es 
Pêtrtu,  et  tup9r  hanc  petram  œdificabo  EccUsiam 
meam;  $t  tibi  dabo  elavêt  rêoni  cjidorum.  Dans  les  pen- 


dentifs des  arcs,  les  quatre  Évangélistes  sont  représentés 
en  mosaïque.  Le  maltre-autel,  isolé  au-dessous  de  la 
coupole,  est  placé  sous  un  énorme  baldaquin,  exécuté 
d'après  les  dessins  du  Bernin  (  K.  Baldaqoim),  et  qui  a  le 
défaut  de  n'être  pas  en  proportion  avec  le  monument,  et 
d'altérer  l'unité  de  la  penpectivo  en  s'interposant  entre 
la  nef  et  le  chœur.  Il  recouvre  rancienné  Confession  de 
S'  Pierre,  où  l'on  descend  par  un  double  escalier,  et  qui, 
décorée  par  Bladerno,  entourée  d'une  balustrade  d^ 
marbre,  constamment  éclairée  par  121  lampes  d'argent 
renferme,  outre  le  tombeau  du  premier  des  Apôtres, cela, 
de  Pie  VI,  avec  la  statue  de  ce  pontife  par  Canova.  —  Au 
dernier  pilier  de  la  grande  nef,  à  droite,  on  voit  une 
statue  en  bronze  de  S^  Pierre  assis,  ouvrage  du  v*  siècle, 
mais  qui  n'est  pas,  comme  on  l'a  dit  souvent,  une  an- 
cienne statue  de  Jupiter.  Au  fond  de  la  nef,  à  55  met. 
en  arrière  du  maltre-autel,  se  trouve  la  Tribune  :  là,  sur 
un  autel,  est  la  Chaire  de  5*  Pierre,  monument  de 
bronze  doré  soutenu  par  les  statues  colossales  de  S'  Au- 
gustin, 8'  Ambroise,  S^  Athanase,  et  S' Jean  Chrysostome, 
et  qui  renferme  la  chaire  en  bois  dont  se  servirent 
S'  Pierre  et  ses  première  successeura;  c'est  une  œuvre 
du  Bernin.  Sur  les  côtés  de  la  Tribune  s'élèvent  les  su- 
perbes tombeaux  de  Paul  III  et  d'Urbain  VIII  :  le  pre- 
mier, exécuté  par  Guillaume  délia  Porta,  offre  la  statue 
en  bronze  du  pontife,  et  les  statues  en  marbre  de  la  Pru- 
dence et  de  la  Justice;  le  second,  œuvre  du  Bernin, 
présente,  avec  l'image  du  pape,  les  statues  de  la  Justice 
et  de  la  Charité. 

Dans  le  transept  du  Sud  sont  trois  autels,  avec  tableaux 
en  mosaïque,  de  8"* ,50  de  haut,  sur  S" ,25  de  large  en- 
viron, d'après  le  Guide,  Camuccini,  et  Roncalll.  Le  tran- 
sept du  Nord  contient  aussi  trois  autels,  avec  tableaux, 
en  mosaïque,  d'après  Valentin,  le  Poussin,  et  Caroselli  ; 
on  y  voit  le  tombeau  de  Clément  Xill,  magnifique  ou* 
vrage  de  Canova.  Les  bas  côtés  ressemblent  à  des  galeries, 
relativement  étroites,  séparant  la  grande  nef  des  cha- 
pelles latérales,  qui  sont,  au  Sud  :  1*^  la  chapelle  Clémen- 
tine, construite  sous  Clément  Vlil,  et  où  se  trouve  le 
tombeau  de  Pie  VII  par  Thorwaldsen  ;  2*  la  chapelle  du 
chœur,  où  le  chapitre  célèbre  l'office  quotidien,  et  près  de 
laquelle  est  le  tombeau  en  bronze  d'Innocent  VllI  par 
An  t.  PollaJuolo  ;  S**  la  chapelle  de  la  Présentation,  ainsi 
nommée  de  son  tableau  d'autel  en  mosai([ue  d'après 
Fr.  Romanelli,  et  qui  contient  lia  tombeaux  des  Stuarts  ; 
4<*  la  chapelle  des  Fonts  Baptismaux.  Au  Nord  on  voit  : 
1<^  la  chapelle  du  Crucifix  ou  de  la  Pitié,  avec  un  célèbre 
groupe  en  marbre  de  la  Vierge  tenant  le  Christ  mort  sur 
ses  genoux,  par  Michel-Ange;  2<*  la  chapelle  de  S*-Sébas^ 
tien,  où  sont  les  tombeaux  de  Léon  XII,  de  la  reine 
Christine  de  Suède,  d'Innocent  XII,  et  de  la  grande  com- 
tesse Biathilde;  3^  la  chapelle  du  S^-Sacrement,  contenant 
un  riche  tabernacle  dessiné  par  le  Bernin,  une  Trinité 
peinte  à  fresque  par  Pierre  de  Cortone,  une  copie  en  mo- 
saïque de  la  Descente  de  croix  de  Michel-Ange  de  Cara- 
vage,  et  le  tombeau  en  bronze  de  Sixte  IV  par  PollaJuolo  ; 
4<^  la  chapelle  de  la  Vierge  ou  Grégorienne,  bâtie  sous 
Grégoire  XIII,  et  contenant  les  tombeaux  de  Benoit  XIV 
et  de  Grégoire  XVI. 

En  somme,  l'église  de  S*-Pierre,  malgré  ses  propor- 
tions colossales  et  sa  magnificence ,  malgré  sa  riche  or- 
nementation, où  il  entre  748  colonnes,  dont  239  de 
marbres  fins,  et  389  statues,  ne  satisfait  pas  complète- 
ment :  à  sa  physionofnie  vague  et  indéterminée,  à  son 
manque  d'unité  dans  le  plan,  au  mélange  de  l'art  an- 
tique et  des  traditions  chrétiennes,  on  reconnaît  qu'elle 
n'est  pas  le  produit  d'une  seule  pensée  directrice.  On  y 
sent  du  désordre  et  de  la  contradiction,  parce  qu'il  n'y  a 
pas  eu  de  principe  fixe  et  soutenu  dans  la  construction, 
pas  d'espnt  de  suite  dans  les  travaux.  V.  Costaguti,  Ar- 
chitettura  ddla  bctsilica  di  San  Petro  in  ^aticano,  Rome, 
1674,  in-foU  ;  Maderni ,  dit  Lazzari ,  Architettura  délia 
basilica  di  San  Petro  in  Vaticano,  Rome,  1(584,  in-fol.  ; 
Rossi,  Descrixione  di  Roma  antica  e  modema,  Rome, 
1G97,  2  vol.  in-8*;  Fontana,  Recueil  des  plus  belles  églises 
de  Rome,  1833, 4  vol.  in-fol.  ;  Valentini,  Les  quatre  prin* 
cipales  basiliques  de  Rome,  1836,  in-fol.;  Piranesi,  An- 
tiquités romaines,  in-fol.,  etc.  B. 

PIERREFONDS  (Château  de),  à  16  kilomèt.  S.-E.  de 
Compiègne,  à  l'extréadté  orientale  de  la  forôt  de  ce  nom. 
Construit  en  1390  pour  Louis  d'Orléans,  frère  de  Char- 
les VI,  il  était  à  la  fois  une  somptueuse  résidence  et  une 
forteresse  redoutable;  sons  Louis  XIII,  le  cardinal  de 
Richelieu  le  fit  démanteler.  Les  ruines,  vendues  en  1798 
comme  propriété  nationale  pour  la  somme  de  8,000  fr. , 
furent  rachetées  en  1812«  au  prix  de  5,000  fr.,  par  Naoo- 


PIG 


1132 


PIL 


léon  I*';  depuis  ce  temps,  le  château  appartient  à  la  cou- 
ronne. Une  restauration,  commandée  par  l'empereur  Na- 
K)lôon  in,a  été  entreprise  de  nos  Jours  par  M.  VioUet-Le- 
uc.  Le  ch&teau  de  I^errefonds,  d*un  plan  irrégulier,  et 
d*une  superfleTle  3,276  met.  carrés,  avait  4  faces  :  la  face 
méridionale  était  plus  étendue  que  celle  du  Nord;  les 
trois  côtés  du  Nora,  de  TOuest  et  de  TEst  dominent  des 
escarpements  au  bas  desquels  s'étend  le  bourg  de  Pierre- 
fonds.  Huit  tours  de  35  met.  de  hauteur  le  flanquaient, 
dont  une  à  chaque  coin,  et  une  au  milieu  de  chaque  côté. 
L'entrée  était  au  Sud,  près  de  la  tour  du  milieu,  dont  les 
murs  n'ont  pas  moins  de  4™,60  d'épaisseur.  Cette  tour  se 
relie  au  donjon  proprement  dit,  de  forme  carrée,  composé 
d'un  étage  de  caves,  d'un  rez-deH:haussée  voûté  qui  devait 
servir  de  magasins  ou  de  dépôt  de  provisions,  et  de  trois 
étages  de  salles  munies  de  cheminées.  Le  donjon  lui- 
môme,  où  habitait  le  seigneur,  avait  au  N.-R.  une  tour 
carrée,  qui  communiquait  par  l'un  de  ses  angles  avec  la 
tour  centrale  de  l'enceinte  orientale,  où  se  trouvait  la 
chapelle.  La  tour  du  S.-O.  contient  des  oubliettes.  Le 
corps  de  b&timent  occidental  contenait  les  salles  où  se 
rendait  la  Justice,  et  sous  lesquelles  sont  pratiquées  de 
vastes  caves.  Celui  du  Nord  servait  au  logement  de  la 
inmison.  F.  Viollet-Le-Duc,  Description  du  château  de 
Pierrefonds,  2*  édit.,  Paris,  1861,  in-8°.  B. 

PIEBAES  (Assemblage,  —  Coupe  des).  F.  Assemblage, 

COOPB. 

PIERRES  ALIGNÉES,  —  BRANLANTES,  —  COUVERTES,  —  DE- 
BOUT OU  DROITES,  —  nCHADES,  HCHES,  FITTES,  FlXiSS  OU 
rRITTBS,  —  LATTES,  LEVÉES.   F.  CELTIQUES  ^OnumeUts). 

PIERRES  GRAVÉES.    F.   GLYPTIQUE. 

PIERRIER,  mot  qui  désigna  d'abord  les  canons  de  fonte 
à  l'aide  descruels  on  lançait  des  boulets  de  pierre.  On 
l'applique  aujourd'hui  :  1<^  à  une  espèce  de  mortier  dont 
on  se  sert  pour  la  défense  des  places,  et  avec  lequel  on 
lance  des  pierres;  'i?  à  un  petit  canon  de  bronze,  monté 
sur  un  pivot  à  l'avant  des  navires,  et  destiné  à  tirer  à 
mitraille  ou  à  balles. 

PIERROT.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d^Histoire. 

PIÉTAGE,  en  termes  de  Ifarine,  chiffres  placés  sur 
l'étambot  et  sur  l'étrave  pour  connaître  le  tirant  d'eau 
du  navire. 

PIÉTÉ,  vertu  religieuse  comprenant  tout  à  la  fois  le 
sentiment  de  respect,  de  reconnaissance  et  d'amour  qui 
est  dû  à  la  Divinité,  les  œuvres  de  repentanoe  et  de  cha- 
rité, l'accomplissement  des  devoirs,  et  les  pratiques  exté- 
rieures du  culte.  Les  Anciens  donnaient  aussi  le  nom  de 
Piété  à  la  tendresse  des  parents  pour  leurs  enfants,  aux 
soins  respectueux  des  enfants  envers  leurs  parents,  à 
l'affection  des  hommes  pour  leurs  semblables  ;  les  Mo- 
dernes n'ont  conservé  que  rexpression  de  piété  filiale. 

PIÉTR AILLE,  nom  de  mépris  qu'on  donnait  h  l'infan- 
terie pendant  le  moyen  âge. 

PIFFERARI ,  musiciens  ambulants  d'Italie,  ordinaire- 
ment couverts  d'amples  manteaux  de  drap  brun,  et 
coiffés  d'un  chapeau  pointu.  Ils  ont  pour  instruments  des 
musettes  et  des  pifferi  Tespèces  de  hautbois).  Dans  les 
concerts  qu'ils  donnent  devant  les  images  de  la  Madone, 
la  musette,  secondée  d'un  grand  piffero  soufflant  la  basse, 
fait  une  harmonie  de  deux  ou  trois  notes,  sur  laquelle  un 
double  piffero  de  moyenne  longueur  exécute  la  mélodie  ; 
et,  au-dessus  de  tout  cela,  deux  petits  pifferi  très-courts 
tremblotent  des  cadences  et  brodent  des  ornements  sou- 
vent grotesques.  Les  Pifferari  se  donnent  le  nom  de  Zam- 
pognari  (de  xampognare,  chBliimeaxi),  B. 

PIFFERO,  Jeu  d'orgue.  Ses  tuyaux  ont  le  diapason  du 
prestant  ;  ils  sont  bouchés  au  pied,  et  l'on  n'y  fait  qu'un 
très-petit  trou  ;  siu*  la  môme  touche ,  on  en  place  deux 

2ui  sont  accordés  de  manière  à  produire  un  nettement, 
e  Jeu,  qui  sevt  de  tremblant  et  demande  à  être  Joué 
lentement,  n'existe  que  dans  les  deux  octaves  supé- 
rieures; on  le  continue  plus  bas  par  une  flûte  douce 
quand  il  n'y  a  qu'un  clavier  dans  l'orgue. 

PIGACES,  chaussuret  à  pointe  recourbée,  en  usage 
au  moyen  âge. 

PIGEONNIER.  F.  Colombier. 

PIGEONS.  Ces  oiseaux  doivent  être  tenus  renfermés 
dans  les  colombiers  aux  époques  fixées  par  les  coutumes 
locales;  s'ils  en  sortent,  chacun  peut  les  tuer  comme 
gibier,  et  ceux  qui  les  ont  laissés  vaguer  encourent  une 
amende  (Codé  pénal,  art.  475,  479).  Les  pigeons  qui, 
sans  avoir  été  attirés  par  fraude  ou  artifice,  passent  dans 
un  autre  colombier,  appartiennent  au  propriétaire  de  ce 
dernier. 

PIGNÈRE ,  vieux  mot  qui  désignait  un  étui  renfer- 


mant les  peignes^  rasoln,  ciseaux,  miroirs  et  antres  ol4^ 
de  toilette. 

PIGNON  (  du  latin  pinna,  sommet),  partie  supérieure 
d'un  mur  qui  se  termine  en  pointe,  et  dont  le  sommet 
porte  le  bout  du  faîtage  d'un  comble  à  deux  égouts.  Dans 
certaines  villes  d'Allemagne  et  du  nord  de  l'Europe,  le 
pignon  des  édifices  est  à  redents,  c-à-d.  découné  en 
forme  de  degrés  d'escalier.  Le  fronton  et  le  gable  (K.  ces 
mots)  sont  des  sortes  de  pignons.  Dans  beaucoup  de 
eranas  édifices  du  moyen  âge,  et  môme  quelques-uns  de 
la  Renaissance,  il  y  a  de  beaux  pignons  sculptés. 

PIGNON,  en  termes  de  Blason,  fragment  de  muraille 
fait  en  forme  de  degrés.  C'est  une  figure  assez  commune 
en  Allemagne. 

PIGNORATIF  (du  latin  pignus,  gage),  se  disait  autre- 
fois d'un  contrat  qui  avait  pour  objet  de  cacher  la  mise 
en  gage  d'un  immeuble  sous  la  forme  d'une  vente,  et  qui 
transportait  du  débiteur  au  créancier  la  propriété  de 
l'immeuble.  Relocation  était  faite  au  débiteur  par  le 
même  acte  pour  une  somme  équivalente  aux  intérêts 
qu'il  avait  à  paver  h  son  créancier,  et  on  stipulait  un  délai 
pendant  lequel  il  pouvait  racheter  sa  propriété  en  rem- 
boursant le  capital  prêté.  C'est  à  peu  près  ce  que  nous 
appelons  une  vente  a  réméré. 

PIGOU,  en  termes  de  Marine,  chandelier  qu'on  fixe, 
au  moyen  d'une  pointe  aiguô  et  recourbée  qui  le  supporte, 
sur  la  muraille  d'un  navire,  sur  un  montant,  etc. 

PIGODLIÈRE,  bateau  maçonné  intérieurement,  garni 
de  fourneaux  pour  faire  chauffer  le  brai  et  le  goudron, 
et  ({u'on  envoie  sur  rade  aux  navires  qui  font  des  répa- 
rations et  ne  veulent  pas  entrer  dans  le  port. 

PILASTRE  (du  latin  pt7a,  pile),  en  termes  d'Architec^ 
ture,  désigne  en  général  tout  coips  élevé  sur  une  base 
carrée,  et  spécialement  des  colonnes  quadrangulaires 
adossées  à  un  mur,  et  se  rapportant  aux  divers  Ordres 
par  leurs  proportions,  leurs  piédestaux,  leurs  chapiteaux 
et  leurs  ornements.  Les  constructions  d'une  haute  anti- 
quité et  les  monuments  grecs  offrent  peu  d'exemples  de 
remploi  des  pilastres;  ils  sont,  au  contraire,  prodigués 
dans  les  constructions  romaines  et  dans  celles  de  la  Re- 
naissance. Les  pilastres,  par  cela  même  qu'ils  font  corps 
avec  le  mur  d'un  édifice,  en  dégagent  peu  la  masse,  et 
font  beaucoup  moins  d'effet  sur  une  façade  qu'une  ordon- 
nance de  colonnes  ;  ils  réussissent  siieux  dans  un  inté- 
rieur de  petite  dimension,  où  ils  occupent  moins  d'espace 
que  les  colonnes ,  et  où  ils  peuvent  servir  de  décora- 
tion. On  est  convenu  de  leur  donner  autant  de  largeur 
en  haut  qu'en  bas  ;  il  y  a  cependant  des  architectes  qui , 
quand  ils  en  placent  derrière  des  colonnes,  les  diminuent 
comme  celles-ci  par  le  haut.  Appliqués  sur  les  pieds- 
droits  des  grandes  portes  dans  les  hôtels  du  xviii*  siècle, 
les  pilastres  reçoivent,  au  lieu  de  chapiteaux,  des  con- 
soles destinées  à  soutenir  un  balcon.  Il  v  a  aussi ,  dans 
quelques  édifices,  des  colonnes  carrées  qu^on  peut  appeler 

Silastres.  F.  Propylées  de  Paris  ,  —  Barrière  Saint- 
farlin,  B. 

PILATE  (Actes  de).  F.  Actes. 

PILE ,  massif  de  maçonnerie  qui  soutient  les  arches 
d'un  pont  (F.  ce  mot). 

pile,  côté  d'une  monnaie  opposé  à  la  face.  Selon  les  an- 
tiquaires, pile  serait  un  mot  gaulois  signifiant  navire, 
et  l'on  aurait  figuré  anciennement  un  navire  sur  les 
monnaies. 

PILE  (du  latin  pUum,  dard  ou  trait  ),  en  termes  de  Bla- 
son, pal  aiguisé  en  forme  d'obélisque  renversé. 

PILE  DE  CINQ-MARS.   F.  CiNQ-MARS. 

PILENTUM ,  char  romain.  (  F.  notre  Dictionnaire  de 

PILEUM,  coiffure.  {      Biogr.  et  d* Histoire. 

PILIER  (du  latin  pila),  cçrps  isolé  et  massif  qui  sert 
de  support,  dans  l'ensemJsle  d'un  édifice,  à  une  charge 
de  cmu^ente  ou  de  maçonnerie.  Les  arcades,  les  voûtes, 
les  plafonds,  sont  soutenus  par  des  piliers,  auxquels  le 
goût  et  le  caprice  des  architectes  peuvent  donner  des 
figures  diverses.  Les  piliers  ronds  reçoivent  le  nom  de 
colonnes.  Ceux  des  constructions  ogivales  ont  des  formes 
très-variées,  et  se  composent  de  colonnettes  groupées  au- 
tour d'un  massif  central.  On  nomme  pUim'outtanl  tout 
corps  de  maçonnerie  qui  soutient  la  poussée  d'un  arc  ou 
d'une  voûte.  B. 

PILLAGE  (de  l'italien  pigliare^  prendre),  un  des 
crimes  tendant  à  troubler  l'État  Quiconque,  soit  pour 
envahir  des  domaines  ou  des  deniers  publics,  4ie&  maga- 
sins, arsenaux,  bâtiments  et  autres  propriétés  de  l'État, 
soit  pour  piller  ou  partager  des  biens  appartenant  à  une 

généralité  de  citoyens,  se  met  à  la  tête  de  bandes  armées, 
oit  être  ppni  de  mort.  U  en  est  de  même  do  ceux  qui 


PIL 


1433 


PIO 


Auraient  dirigd  rassociation,  levé  ou  organisé  les  bandes, 
OQ  qui  leur  auraient  sciemment  et  volontairement  fourni 
des  armes,  des  munitions,  des  vivres,  etc.  (Cod»  piruU, 
art.  96  ).  Les  immeubles  des  particuliers  sont  protégés 
contrç  rincendie  par  les  art.  43i  et  suiv.  du  môme  Code, 
et  contre  la  deatruction  ou  le  renversement  par  Tart.  437. 
Tout  pillage  et  dég&t  de  propriétés  mobilières,  commis  en 
bande  et  à  force  ouverte,  est  puni  des  travaux  forcés  à 
temps  (art.  440),  et  d*une  amende  de  200  à  1,000  fr.  pour 
cbacun  des  coupables  ;  ceux  qui  auraient  été  entraînés 
par  des  provocations  ou  sollicitations  peuvent  n^ètre  punis 
que  de  la  réclusion.  Si  ce  sont  des  denrées  alimentaires 
qu*on  a  pillées  ou  détruites,  les  chefs,  instigateurs  ou 

5>rovocateur8,  sont  condamnés  au  maximum  des  travaux 
brcés  à  temps  et  de  Tamende.  Le  citoyen  qui  aurait  re- 
fusé ou  négligé  de  prêter  le  secours  dont  il  aurait  été  re- 
quis en  cas  de  brigandage  ou  de  pillage,  encourt  certaines 
pdnes  de  police  (art.  475,  478).  Aux  termes  de  la  loi  du 
10  vendémiaire  an  iv  (2  oct.  1795),  la  commune  entière 
est  responsable  envers  ceux  qui  ont  souffert  le  pillage, 
s'il  est  prouvé  qu'elle  aurait  pu  s'y  opposer. 

Dans  les  armées,  le  mot  pillage  ne  fut  pas  toujours  pris 
en  mauvaise  part,  parce  que  vivre  de  la  guerre  et  de  ce 
que  l'on  prenait  était  chose  reçue.  Chez  les  Romains,  le 
pillage  était  licite,  quand  le  général  en  avait  fait  donner 
le  signal,  consistant  dans  Texhibition  d'une  lance  san- 
e;lante  {hasta  cruentatay  Au  moyen  &go,  les  villes  pou- 
vaient se  racheter  du  pillage  à  pnx  d'argent.  Par  ordon- 
nance du  3  nov.  1500,  Henri  IV  défendit  que  le  pillage 
des  villes  prises  d'assaut  durât  plus  de  2i  heures.  En 
1701  parurent  les  premières  dispositions  légales  pour  em- 
pêcher et  punir  le  pillage.  La  loi  du  21  brumaire  an  v 
punit  de  mort  tout  militaire  convaincu  de  pillage  à  main 
armée.   V,  Butin. 

piLi^GE  (Droit  de),  droit  qui ,  dans  la  Coutume  de  Bre- 
tagne, appartenait  au  fils  aîné  roturier  de  prendre  sur  le 
lot  d'un  de  ses  puînés  la  principale  maison  en  chacune 
des  successions  de  ses  père  et  mère. 

PILORL  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire. 

PILOTA,  nom  latin  du  Jeu  de  la  Pelote  {V,  ce  mot), 

PILOTAGE  (du  vieux  mot  pt79,  navire),  science  du 
pilote.  Cette  science  embrasse  aujourd'hui  toutes  les  con- 
naissances nécessaires  pour  conduire  et  diriger  un  na- 
vire, déterminer  la  latitude  et  la  longitude ,  mesurer  le 
sillage,  faire  des  relèvements  et  des  sondages,  etc. 

PILOT-BOAT,  embarcation  de  l'Amérique  du  Nord ,  à 
m&ts  très-longs  et  flexibles,  gréée  à  peu  près  comme  la 
goélette,  mais  plus  chargée  de  voiles. 

PILOTE,  celui  qui  exerce  le  pilotage.  On  distingue  en 
France  trois  classes  de  pilotes  :  1°  les  pilotes  des  vais- 
seaux, officiellement  appelés  premiers  maîtres  de  timon- 
nerie,  qui  doivent  posséder  à  un  assez  haut  degré  les  con- 
naissances générales  du  pilotage;  2^  les  pilotes  câtiers, 
marins  qui  ont  une  connaissance  spéciale  de  certaines 
côtes  et  de  certaines  parties  de  la  mer;  3"  les  pilotes  la- 
maneurs,  qui  possèdent  à  fond  la  connaissance  pratique 
d'une  portion  de  côte,  et  qui  se  chargent  de  diriger  les 
navires  dans  les  limites  de  cette  localité.  Pour  être  reçu 
pilote-lamaneur,  il  faut  avoir  24  ans,  compter  6  ans  de 
navigation,  dont  deux  campagnes  au  service  de  l'État,  et 
avoir  subi  un  examen,  tant  sur  la  manœuvre  que  sur  la 
connaissance  des  marées,  courants,  bancs,  écueils  et 
autres  empêchements  uni  peuvent  rendre  difficiles  l'en- 
trée et  la  sortie  des  rivières,  ports  et  havres  de  la  localité 
où  Ton  veut  exercer.  L'insigne  du  pilote-lamaneur  est 
une  petite  ancre  d'argent  à  la  boutonnière.  Son  salaire 
a  été  réglé  par  décret  du  12  novembre  1806.  Il  y  avait, 
avant  1701,  sur  les  b&timents  du  rot ,  des  pUotes  hautu- 
riers,  chargés  de  diriger  la  navigation  en  haute  mer,  et 
qui  ne  pouvaient  devenir  officiers,  parce  qu'ils  n'étaient 
pas  de  race  noble;  leurs  fonctions  sont  aujourd'hui  ré- 
parties entre  les  officiers  selon  leur  grade.  —  Par  exten- 
sion, on  a  donné  le  nom  de  PUotes  aux  atlas  contenant 
des  cartes  et  plans  de  côtes,  avec  des  instructions  pour 
servir  à  diriger  les  navigateurs. 

PILOTES,  petites  tringles  qui,  dans  l'orgue,  trans- 
mettent le  mouvement  des  touches  du  clavier  du  positif 
aux  soupapes  de  son  sommier.  On  les  emploie  aussi  dans 
le  mécanisme  des  pianos. 

PILOTIN,  nom  donné,  dans  la  Marine  marchande,  aux 
Jeunes  gens  qui  se  destinent  au  grade  de  capitaine,  et  qui 
sont  attachés  à. la  timonnerie.  Dans  la  Marine  militaire, 
on  les  appelle  Novices,  Ils  veillent  l'horloge ,  aident  à 
faire  des  signaux,  à  Jeter  le  loch,  à  sonder,  etc. 

PILOTIS,  réunion  de  pUots  ou  gros  pieux  enfoncés  en 


terre  pour  solidifier  un  sol  inconsistant,  et  destinés  à  as- 
seoir les  fondements  d'une  conf^truction.  Les  pilots  ont  la 
pointe  armée  d'un  sabot  en  fer  ou  en  fonte,  et  la  tête 
garnie  d'une  frette  ou  cercle  de  fer  qui  les  ^mipêche 
d'éclater  sous  les  coups  du  mouton  (F.  SoNNEtra).  Les 
ponts,  Jes  quais,  les  digues,  sont  toujours  construits  sur 
pilotis.  Des  villes  entières,  comme  Amsterdam  et  Venise, 
reposent  sur  pilotis. 

PILUM,  arme.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
â^Histoire, 

PIMA  (Langue).  V,  Mexiqub  (Langues  du). 

PIN,  arbre  consacré  à  Cybèle  chez  les  Anciens.  Les 
extrémités  des  thyrses  des  Corybantes  étaient  des  pommes 
de  pin.  La  pomme  de  pin  figurait  également  dans  les  sa- 
crifices de  Bacchus.  Le  dieu  Sylvain  tient  quelquefois  une 
branche  de  pin  à  la  main. 

PINACLE  (du  latin  pinnaculum,  faite),  nom  que  les 
Anciens  donnaient  au  comble  terminé  en  pointe  dont  ils 
surmontaient  leurs  temples,  pour  les  distinguer  des  édi- 
fices profanes  et  des  maisons  particulières,  qui  avaient  un 
toit  plat.  On  le  donna  aussi  à  la  galerie  qui  régnait  au- 
tour du  toit  plat  du  temple  de  Jérusalem ,  et  à  la  tourelle 
bâtie  au-dessus  du  vestibule.  Les  Modernes  appellent 
pinacle  tout  amortissement  ou  couronnement  ouvragé,  &u 
sommet  des  toits  coniques,  des  frontons,  des  cloche- 
tons, etc» 

PINACOTHÈQUE.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d* Histoire. 

PINASSE  (de  pin),  nom  donné  autrefois  à  de  grands 
bâtiments  à  poupe  carrée,  fort  en  usage  dans  les  ports 
de  Hollande  surtout,  et  aujourd'hui  à  une  embarcation 
de  forme  allongée  et  étroite,  marchant  à  voiles  et  à 
rames.  Chez  les  Anglais,  c'est  le  canot  d'état^major  bor- 
dant 8  avirons  à  pointe,  et  souvent  gréé  en  goélette. 

PINCEAU  (  du  latin  penicillum  ),  faisceau  de  poils  dont 
se  servent  les  peintres  pour  étendre  les  couleurs.  Pour  le 
lavis  et  la  miniature,  on  emploie  des  pinceaux  de  poils 
fins  et  doux,  comme  ceux  du  petit-gris  ;  dans  la  peinture 
à  l'huile,  les  pinceaux  sont  faits  en  poils  de  porc  ou  de 
blaireau. 

PINDARIQUE  (Dialecte),  nom  donné  au  dialecte  que 
Pindare  se  forma  par  le  mélange  du  dorisme,  de  l'éo- 
lisme  et  de  la  langue  épique.  La  langue  épiaue  domine,  à 
cause  des  sujets  traités  par  le  poète  ;  du  dialecte  dorien 
il  empruntait  ce  qui  pouvait  contribuer  â  la  gravité,  à 
l'éclat,  à  la  commodité  des  nombres,  et  du  dialecte  tolien 
les  mesures  vives  et  rapides.  Le  dialecte  pindarique  est 
aussi  appelé  éolo-dorien;  il  serait  peutr-être  plus  Juste  de 
le  nommer  épico-lyriqtje,  P. 

PINGRE,  vieux  mot  signifiant  longue  épingle.  Au  moven 
âge,  on  accusait  les  Jfuifs  de  crucifier  les  enfants  pendant 
la  nuit  du  vendredi  saint,  et  de  leur  enfoncer  des  pingres 
dans  la  chair.  De  là  le  nom  de  pingres  fut  donné  aux 
Juifs,  et  par  suite  à  tous  les  usuriers. 

piNGRB,  navire  portant  une  petite  poupe  en  cul-de- 
poule,  et  gréé  à  trait  carré.  Il  n'a  pas  de  guibre. 

PINNOSA,  nom  que  l'on  donnait,  dans  l'ancienne  Mu- 
sique, au  signe  représentant  le  crescendo  et  le  decres- 
cendo '  — «=^  T::^'^ .  Ce  signe  parait  avoir  été  à  la  fois 
un  signe  de  nuance  comme  pour  nous,  et  un  signe  de 
notation  tenant  la  place  de  deux  notes  ascendantes. 

PINQUE ,  petit  navire  à  trois  antennes  et  â  varangues 
plates.  Il  tient  du  chebec,  et  ne  se  voit  que  dans  la  Mé- 
diterranée. 

PIO-CLÉMENTIN  (Musée).  V.  Vatican. 

PION  (pour  piéton  y  homme  de  pied),  la  plus  petite 
pièce  du  jeu  d'échecs  (F.  ce  mot).  On  donne  le  même 
nom  aux  petits  disques  dont  on  se  sert  au  Jeu  de  Dames 
(F.  ce  mot). 

PIONNIER,  mot  qui ,  Jusqu'à  l'époque  de  François  l^y 
fut  à  peu  près  synonyme  de  fantassin.  On  l'appliqua 
aussi  â  tout  mercenaire  non  combattant,  employé  â  aplanir 
les  chemins,  à  creuser  les  tranchées,  à  remuer  et  â  trans- 
porter la  terre.  Les  pionniers,  dans  cette  dernière  accep- 
tion, s'appelaient  encore  fosseurs,  fessiers,  picteurs, 
terrailleurs ,  iranchéours;  ils  dépendirent  d'abord  du 
grand  maître  des  arbalétriers,  puis  du  grand  maître  de 
rartillerie.  Les  grenadiers  à  cheval  de  la  Maison  mili- 
taire de  Louis  XiV,  et  les  dragons  armés  de  pelles,  et  de 
haches,  étaient  de  véritables  pionniers,  comme  aujour- 
d'hui nos  sapeurs.  Les  Russes  ont  des  régiments  de  pion- 
niers à  cheval,  liais  la  dénomination  de  pionniers  n'a  pu 
durer  en  France,  à  cause  de  l'idée  défavorable  qui  s'y 
attachait  ;  on  l'a  même  appliquée  aux  soldats  des  com- 
pagnies de  discipline.  Cest  l'arme  du  génie  qui  fait  ao- 
tndlement  les  travaux  des  pionnier».  B. 


PIQ 


UU 


PIS 


PIONNIERS.,  nom  donné  en  Amérique  à  oeax  qui 
s'avancent  dans  des  pays  nouveaux  pour  y  défricher  le 
terrain.  On  les  appelle  aussi  Badavooasmen  (hommes  des 
bois  de  derrière),  et  Sqtuittêrs  (de  Tanglais  to  squat, 
B*accroupir,  se  blottir).  Leurs  mœurs  ont  été  décrites  par 
le  romancier  Fenimore  Cooper. 

PIPEAU  (du  latin  pipa),  se  disait  autrefois  du  chalu- 
meau ou  flûte  champêtre,  mais  ne  s'emploie  plus  avec  ce 
sens  qu'en  poésie. 

PIPÉE,  chasse  dans  laquelle,  à  l'aide  d'un  pipeau  ou 
avec  la  voix,  on  imite  le  cri  d'un  oiseau  pour  attirer  les 
autres  oiseaux  dans  un  piège. 

PIPIL' (Idiome).  F.  BIsxique  (Langues  du). 

PIPPE,  vieux  mot  aui  désigne,  non  pas,  comme  on  l'a 
dit,  le  bouton  fixé  sur  le  plat  d'un  livre  et  auquel  s'adapte 
le  fermoir,  mais  une  tige  de  métal  à  laquelle  s'attachaient 
les  sinets  ou  signaux. 

PIQUE ,  nom  générique  de  toute  lance  maniée  par  une 
in&nterie. 

PIQUE,  l'une  des  deux  couleurs  noires  du  Jeu  de  cartes. 
Sa  forme  rappelle  celle  d'un  fer  de  pique. 

PIQUÉES  (Notes),  en  termes  de  Musique,  notes  sur- 
montées de  points  allongés,  et  qu'on  doit  attaquer  légè- 
rement et  en  les  détachant  avec  l'archet. 

PIQUET,  en  termes  d'Art  militaire,  jalon  fiché  en  terre 
pour  prendre  un  alignement,  pour  tendre  ou  retenir  les 
cordages  d'une  tente.  De  là  sont  venues  les  expressions 
ph  \ter  le  piquet  pour  camper,  lever  le  piquet  pour  dé- 
camper, —  Le  Piquet  a  été  aussi  une  punition  usitée 
dans  la  cavalerie  :  le  patient  était  attaché  par  un  poignet 
à  un  pi^et ,  et  posait  à  nu  le  pied  du  côté  opposé  sur  un 
pieu  pomtu  ;  il  lui  fallait  rester  dans  cet  équilibre  pen- 
dant deux  heures.  —  On  appelle  enfin  Piquet ,  dans  le 
service  de  garnison,  une  troupe  qui  se  tient  prête  à  mar- 
cher au  premier  ordre,  et,  dws  te  service  de  campagne, 
un  service  expectant. 

PIQUET  (Jeu  de),  jeu  qui  se  joue  le  plus  ordinairement 
à  deux,  avec  un  jeu  de  32  cartes.  L'as  est  la  plus  forte 
carte  et  vaut  11  points;  les  figures  valent  10,  et  les  autres 
cartes'  le  nombre  de  points  qu'elles  portent.  La  partie  so 
joue  en  un  nombre  convenu  de  points.  Chaque  joueur 
reçoit  12  cartes,  distribuées  par  deux  ou  par  trois  :  sur 
les  8  qui  restent ,  le  premier  en  cartes  peut  en  prendre  5, 
et  le  second  3,  en  Change  de  celles  qu'il  veut  écarter;  on 
est  tenu  d'en  prendre  au  moins  une  ;  le  second  en  cartes 
doit  prendre  d'abord  celles  que  le  premier  a  laissées. 
S'il  en  laisse  et  les  regarde ,  le  premier  peut  aussi  les 
voir  après  avoir  joué  sa  première  carte.  L'écart  fait ,  on 
annonce  le  paint,  qui  se  compose  de  cartes  de  la  même 
couleur,  et  le  joueur  qui  l'emporte  compte  autant  de 
points  qu'il  a  de  ces  cartes  :  si  les  deux  joueurs  ont  le 
même  point,  personne  ne  le  compte.  On  annonce  ensuite 
les  séquences  *  la  tierce  vaut  3  points,  la  quarte  4,  la 
quinte  15,  la  seizième  16,  etc.;  si  des  séquences  sem- 
blables sont  chez  les  deux  joueurs,  elles  sont  payées,  et 
ne  se  comptent  pas  ;  si  elles  ne  se  composent  pas  des 
mômes  cartes,  celle  qui  commence  par  la  carte  la  plus 
forte  est  seule  comptée.  Viennent  enfin  les  quatorze  (4  as, 
4  rois,  4  dames,  4  valets,  ou  4  dix),  qui  comptent  chacun 
pour  14  points  ;  si  chacun  des  adversaires  a  un  quatorze, 
celui  qui  l'a  en  cartes  supérieures  l'emporte.  Quand  on 
a  ainsi  tout  compté,  on  joue  pour  faire  des  levées  ;  chac^ue 
levée  compte  1  point,  la  dernière  en  vaut  2.  Celui  qui  a 
fait  plus  de  six  levées  compte  10  points,  celui  qui  fait 
capot  en  compte  40.  Si  le  premier  en  cartes  arrive  en 
jouant  à  30  points,  sans  aue  le  second  ait  rien  compté, 
il  compte  60  au  lieu  de  âO;  c'est  ce  qui  s'appelle  faire 
pic.  S'il  arrive  à  30  sans  jouer,  rien  qu'en  comptant  ce 

3u'il  a  dans  la  main ,  il  fait  repic,  et  compte  90  au  lieu 
e  30  ;  ce  que  peut  faire  également  le  dernier  en  cartes. 
Si  Ton  arrive  à  120  en  jouant,  sans  que  l'adversaire  ait 
fait  une  levée,  on  compte  160.  Tout  joueur  qui  a  12  cartes 
sans  figures  avant  son  écart,  les  montre  et  compte  10  ;  il 
empêche  en  outre  les  coups  de  60  et  de  90.  Le  joueur  qui 
a  gardé  plus  de  IS  cartes  compte  à  la  muette,  c.-Ji-<l.  qu'il 
ne  marque  rien  pendant  le  coup,  tandis  que  l'adversaire 
compte  tout  ce  qu'U  a. 

Dans  le  Piquet  à  trois  ou  Piquet  normand,  chaque 
joueur  reçoit  10  cartes  :  celui  qui  a  donné  peut  écaiter 
deux  oertes  et  prendre  celles  qui  restent;  il  est  tenu  d'en 
prendre  au  moins  une.  Tout  se  passe  comme  au  piquet  à 
deux  :  seulement,  si  l'un  des  Joueurs  est  capot,  chacun 
de  ses  deux  adversaires  compte  20;  si  deux  sont  capots, 
celui  qui  fait  toutes  les  levées  compte  40.  Celui  qui  arrive 
à  20  points  en  Jouant,  compte  00;  celui  qui  a  20  points 
dans  la  main  compte  00  :  le  second  ou  le  troiaiàme  Joueur 


peut  arriver  aussi  à  60 ,  si  les  premiers  n'ont  pas  Joué  ds 
cartes  marquantes.  Quand  le  joueur  qui  a  le  point  n'est 
pas  le  premier  à  jouer,  celui-d ,  après  avoir  fait  les  le- 
vées qu'il  peut  ou  veut  faire,  est  tenu  de  jouer  dans  le 
point.  Si  le  jeu  annoncé  permet  d'espérer  un  capot ,  il 
est  de  règle  de  jouer  de  façon  à  le  faire* 

Dans  le  Piquet  à  quatre  ou  Piquet  voleur,  on  Joue 
deux  contre  deux,  et  chaque  joueur  a  huit  cartes.  Les 
points  des  associés  se  cumulent.  On  arrive  à  60  et  à  IH) 
comme  dans  le  Piquet  à  trois.  Il  est  de  règle  que  le  par- 
tenaire qui  ne  peut  pas  fournir  sur  une  couleur  s'en  aille 
de  la  couleur  opposée  à  celle  qu'il  désire. 

PIQUEUR,  valet  à  cheval  dont  la  fonction  est  de  suivre 
et  de  diriger  une  meute  de  chiens;  —  domestique  à  che- 
val qui  précède  la  voiture  d'un  souverain  ou  d'un  prince. 

PIQUEUR ,  en  latin  punctator,  celui  qui ,  dans  les  an- 
ciens chapitres,  était  chargé  de  pointer  les  chantres  qui 
s'absentaient  du  chœur. 

PIQUEUR,  nom  d'agents  subalternes  des  ponts  et  chaus- 
sées, chargés  de  seconder  les  conducteurs.  Il  y  en  a  de 
4  classes,  dont  le  traitement  est  de  1000,  800,  600  et 
400  fr.  Ils  sont  nommés  par  le  préfet,  sur  la  proposition 
de  l'ingénieur  en  chef.  Pour  être  nommé,  il  faut  avoir 
plus  de  18  ans  et  moins  de  28  (les  militahres  libérés  ont 
jusqu'à  32  ans),  et  avoir  satisfait  à  on  examen. 

PIQUIERS.  i  V.  ces  mots  dans  notre  Dictûmnaure  ds 

PIQUINIS.   )      Biographie  et  d'Histoire. 

PIRATERIE  (du  grec  peiraô,  attaquer),  déprédation 
commise  sur  mer,  et  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  b 
course  {V.  Corsaire).  On  consid^  comme  pirates  les 
individus  qui  composent  l'équipage  d'un  b&timent  armé 
et  naviguant  sans  passe-port  ni  rôle  d'équipage  ou  com- 
mission. Ils  sont  punis  de  mort  ou  des  travaux  forcés, 
suivant  les  cas  (Loi  du  10  avril  1825). 

PIROGUE ,  embarcation  longue  et  plate  des  peuplades 
sauvages  d'Afrique ,  d'Amérique  et  d'Océanie.  Elle  est 
faite  le  plus  souvent  d'un  tronc  d'arbre  creusé,  ou  d'écorces 
cousues,  quelquefois  recouvertes  d'une  peau  d'animaL 

PIROUETTE ,  en  termes  de  Danse,  tour  qu'on  fait  de 
tout  le  corps  sur  la  pointe  d'un  pied.  —  Autrefois  il  y 
avait  en  Angleterre  un  genre  de  ch&timent  appelé  la 
Pirouette,  et  infligé  surtout  aux  Juifs,  aux  querelleurs, 
aux  vivandières.  On  enfermait  le  patient  dans  une  cage 
de  fer  plantée  verticalement  sur  un  pivot,  et  que  les  pas- 
sants faisaient  tourner  à  leur  gré  ;  ce  mouvement  causait 
des  vertiges,  des  maux  d'estomac,  et  même  la  mort. 

PISCINE  (du  latin  piscis,  poisson),  réservoir  où  Ton 
nourrit  et  conserve  du  poisson  {V.  Vivier).  On  donnait 
le  même  nom,  dans  l'Antiquité,  atout  bassin  placé  au 
milieu  d'une  salle  de  bain.  Chez  les  Hébreux,  la  Piscine 
probatique  était  un  réservoir  d'eau  voisin  du  parvis  du 
Temple  à  Jérusalem ,  et  où  on  lavait  les  animaux  (pro* 
bâta)  destinés  aux  sacrifices.  Depuis  le  christianisme,  la 
Pisctne  a  été  la  cuve  dans  laquelle  on  immergeait  les 
néophytes,  pour  leur  administrer  le  baptême,  aux  pre- 
nûers  siècles  de  l'Église.  On  appela  encore  Piscine, 
dans  certains  monastères ,  la  fontaine  du  réfectoire  où 
les  religieux  se  lavaient  les  mains  avant  on  après  le 
repas.  Le  nom  en  est  resté,  1*  à  l'endroit  des  sacristies 
où  l'on  Jette  l'eau  qui  a  servi  à  nettoyer  les  vases  sa- 
crés et  les  linges  servant  à  l'autel  ;  2^  à  un  petit  vase 
plein  d'eau,  placé  d'ordinaire  sur  l'autel  auprès  du  taber- 
nacle, et  dans  lequel  le  prêtre,  après  avoir  donné  la  com- 
munion, trempe  les  doigts  qui  ont  touché  l'hostie  consa- 
crée. Primitivement,  la  piscine  était  une  colonne,  un  pé- 
dicule isolé,  placé  priés  de  l'autel,  et  portant  une  cuvette 
dont  le  fond  se  continuait  en  un  canal  conduisant  l'eau 
sous  le  pavé  de  l'église;  plus  tard  elle  fut  adhérente  à  une 
muraille,  ou  même  creusée  dans  son  épaisseur.  On  voit 
des  piscines  du  xn*  siècle  dans  l'église  de  Surg^-es  (dio- 
cèse de  Poitiers)  et  à  la  cathédrale  de  Lausanne  ;  il  y  en 
a  une  du  xiu*  siècle  à  Semur,  et  une  du  xiv*  à  l'église 
S^- Urbain  de  Troyes,  toutes  deux  remarquablement 
sculptées.  B» 

PISE  (Baptistère  de).  V.  BAPnsrtRB. 

PISE  (Campanile  de).  V,  Tours  PENCHéBS. 

pisB  (Le  Campo-Santo  de).  V.  Campo-Sarto. 

PiSE  (Le  Dôme  de).  Commencée  en  1064  par  l'archi- 
tecte Buschetto,  continuée  par  Rainaldo,  cette  église  ca- 
thédrale fut  consacrée  en  1118  par  le  pape  Gélase  II.  Un 
incendie  en  dévasta  plusieurs  parties  en  1506.  C'est  un 
monument  unique  pour  son  époque,  et  qui  resta  long- 
temps sans  rival  :  Il  remit  en  honneur  les  Ordres  de 
l'arcnitecture  grecque,  et  fut  le  précurseur  de  la  Renais- 
sance ;  les  bases,  les  chapiteaux  des  colonnes,  les  cor- 
niches,  etc.,  sont  des  fragments  antiques  employés  par 


PIS 


1435 


PLA 


rarchhecte  avec  une  rare  habileté.  Le  plan  de  Tédifioe 
est  en  forme  de  croix  latine  et  à  cinq  nefs.  Il  a  05  met. 
de  longueur,  33  met.  de  largeur  (72  met.  au  transept),  et 
38  met.  de  hauteur.  Les  assises  altematlYes  de  marbre 
blanc  et  noir  à  Textérieur  produisent  un  eflet  plutôt 
étrange  qu*agréable  :  c*est  une  marqueterie  xpii  éblouit  le 
regard,  et  qui  a  l'inconvénient  de  rompre  les  lignes  ar- 
chitectiirales.  La  façade,  disposée  en  cinq  ordres  super- 
posés, oflBre  58  colonnes  et  4  galeries  ouvertes;  les  portes 
de  bronze  ont  été  exécutées  en  1602  par  divers  artistes 
sur  les  dessins  de  Jean  de  Bologne,  et  les  mosaïques  qui 
les  surmontent  sont  de  Paladini.  Sur  le  faite  de  ut  façaide 
8*élève  une  statue  en  marbre  de  la  Vierge  avec  Tenfant 
Jésus,  ouvrage  de  Jean  de  Pise.  A  Tinténeur  de  Téglise, 
24  colonnes  corinthiennes  en  granit  rouge  et  monolithes 
soutiennent  la  srande  nef;  des  arcs  en  plein  cintre  re- 
posent sur  les  chapiteaux  de  ces  colonnes,  et  au-dessus, 
séparé  par  une  architrave,  règne  un  second  rang  de  co- 
lonnes plus  nombreuses  et  plus  petites,  qui  forment  une 
galerie  ou  triforium.  Les  bas  côtés  sont  voûtés;  mais 
Ut  grande  nef  a  un  plafond  en  bois,  avec  de  grands 
caîssona  dorés.  La  coupole  sur  pendentifs  b&tie  au 
centre  du  transept  est  portée  sur  quatre  piliers  massifs 
et  sur  quatre  arceaux  ti%s-ouverts;  elle  a  été  restaurée  et 
peinte  par  Riminaldi,  au  commencement  du  xvii*  siècle. 
Les  objeta  d'art  qui  remplissent  la  cathédrale  de  Pise  font 
de  ce  monument  un  véritable  musée  chrétien.  Une  cé- 
lèbre chaire,  que  Jean  de  Pise  avait  sculptée,  fut  ruinée 
par  la  chute  du  toit  lors  de  Tincendie  de  1596  :  quelques 
statuettes  que  Ton  sauva  ornent  la  chaire  actuelle.  La  tra- 
dition veut  que  les  12  autels  aient  été  dessinés  par 
Michel-Ange;  mds  la  composition  n'en  est  pas  assez  sa- 
tisfaisante ()our  qu'on  admette  cette  opinion,  et  ce  qu'ils 
offrent  particulièrement  de  remarquanle,  ce  sont  les  or- 
nements exécutés  par  Staggi  de  Pietra-Santa.  La  marqu&- 
terie  des  stalles  du  chœur  est  un  admirable  travail  ;  les 
vitraux,  dont  quelques  sujets  ont  été  empruntés  aux  pein- 
tures du  Campo-^to,  sont  du  xiv*  et  du  xv*  siècle  ;  on 
voit  encore  dans  le  chœur  plusieurs  fresques  de  Becca- 
fumi,  de  Ghirlandajo,  et  d'André  del  Sarto.  Le  maltre- 
autel ,  derrière  lequel  est  un  Sacrifice  d* Abraham  par  le 
Sodoma,  est  incrusté  de  pierres  précieuses,  ainsi  que  la 
balustrade  en  marbre  qui  le  sépare  du  chœur  ;  les  deux 
statues  et  le  crucifix  en  bronze  sont  de  Jean  de  Bologne. 
En  avant  du  chœur,  sur  le  pilier  de  droite,  est  la  célèbre 
S^*  Agnès  d'André  del  Sarto.  Au-dessus  des  portes  des  sa- 
cristies et  au-dessous  des  orgues,  on  voit  des  bas-reliefs 
de  F.-G.  Agnelli,  qui  appartenaient  autrefois  à  la  façade 
et  à  une  chaire  de  S^-Michel-in-Borgo.  Une  grande  lampe 
de  bronze  est  suspendue  dans  la  nef:  on  prétend  que  ses 
oscillations  mirent  Galilée  sur  la  voie  de  la  théorie  du 
pendule.  Les  bras  du  transept  contiennent  deux  cha- 
pelles :  l'une  renferme  le  sarcophage  de  S'  Renier  par 
Foggini ,  et  une  statue  antique  de  Mars;  dans  l'autre  est 
un  ciboire  d'argent  d'un  travail  précieux.  B. 

PISÊ  (du  latin  pinsere,  piler},  construction  en  terre  qui 
consiste,  soit  à  fabriquer  sur  place,  avec  de  la  terre  ar- 
gileuse foulée  dans  un  moule  en  bois,  des  espèces  de 
grosses  briques  qu'on  pose  par  assises  et  qu'on  relie 
entre  elles  avec  de  la  même  terre  délayée  en  forme  de 
ciment  ;  soit  à  jeter,  dans  un  encaissement  de  bois  ap- 
pelé banche,  de  la  terre  ou  de  l'argile  naturellement  hu- 
mide, à  l'étendbre  et  à  la  fouler  par  assises  pour  lui  don- 
ner la  consistance  nécessaire.  Quand  la  construction  est 
sèche,  on  la  recouvre  d'un  enduit  en  mortier  ou  d'un  ba- 
digeon en  lait  de  chaux.  Dans  les  pays  pauvres,  le  pisé 
est  fréquemment  employé  pour  les  murs  de  clôture,  les 
granges,  les  étables,  et  même  pour  les  maisons  d'habita- 
tion dans  les  localités  où  la  pierre  manque  :  il  est  solide 
et  peu  coûteux,  n'offre  aucun  danger  d'incendie,  et  ne 
laisse  pénétrer  ni  l'humidité,  ni  les  animaux  nuisibles  ; 
s'il  se  lézarde  par  suite  de  vétusté,  il  ne  faut  pas  songer 
à  le  réparer,  mais  Tabattre  et  reconstruire.  B. 

PISTEUR.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

PISTOLE.  S     Biographie  et  S  Histoire. 

PISTOLET,  arme  ^,  suivant  Henri  Estienne,  tira  son 
nom  de  la  ville  de  Plstoia,  en  Italie,  où  on  la  fabriquait. 
C'était  d'abord  un  petit  poignard  ;  puis  on  en  transporta 
le  nom  à  une  petite  arme  à  feu.  Les  argoulets  furent 
armés  de  pistolets  dès  le  temps  de  Louis  XI;  dans  la  se- 
conde moitié  du  xvi*  siècle,  le  pistolet  commença  de  pré- 
valoir sur  la  lance  dans  la  cavalerie  légère;  en  1610,  il 
fut  donné  à  la  grosse  cavalerie;  qui  l'a  toujours  conservé 
depuis.  En  1867,  en  France,  on  l'a  enlevé  aux  corps  ar- 
més du  fu-il. 

PISTRINE.  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  d'Histoire, 


PITANCE,  portion  distribuée  à  chaque  membre  d'uni 
communauté  pour  son  repas.  Autrefois,' dans  les  cou- 
vents, la  Pitancêris  était  un  service  dirigé  par  le  Pitan» 
cier.  Ces  mots  viennent  du  latin  pittacium,  désignant  le 
bon  de  vivres  que  le  soldat  romain  présentait  à  l'étapi^ 

PITE  ou  PICTE,  en  latin  Pictavina,  petite  monnaie  de 
cuivre  des  anciens  comtes  de  Poitou,  vahint  une  demi- 
maille  ou  un  quart  de  denier. 

PITON,  terme  de  Géographie,  emplojré  principalement 
dans  les  Antilles  pour  désigner  la  pointe  élevée  d'une 
montagne. 

PITRE,  farceur  des  foires,  qui  ne  diffère  j^  du  Pail- 
lasse (F.  ce  mot).  Son  nom  est  celui  d'ime  hqueur  forte 
qui  ne  convient  qu'aux  palais  émoussés. 

PITTORESQUE  (de  l'italien  pittx)re,  peintre),  se  dit  de 
ce  oui  fait  ou  peut  faire  de  l'effet  en  peinture,  et,  par 
analogie,  de  tout  ce  qui  forme  une  image,  de  tout  ce  qui 
peint  pour  l'esprit.  De  nos  Jours,  on  a  qualifié  de  pitto* 
resques  certains  ouvrages  ornés  de  gravures. 

PIZZICATO,  c-^d.  pincéy  mot  italien  qu'on  emploie 
en  Musique,  afin  d'indiquer,  dans  certains  passages  écrits 
pour  instruments  à  cordes,  que  les  notes  doivent  ôtre 
pincées  avec  les  doigts,  et  non  attaquées  avec  l'archet. 

PLACAGE,  recouvrement  des  ouvrages  d'ébénistcrie, 
fait  avec  des  lames  minces  de  bois  durs  et  précieux. 
C'est  particulièrement  l'acijou  ou'on  emploie  à  cet  usage. 
Quand  le  placage  est  composé  ne  pièces  formant  des  or- 
nements ou  des  dessins  quelconques,  on  le  nomme  Mar^ 
queterie,  V»  Ébénistebib,  Marqueterie. 

PLACARD,  écrit  ou  imprimé  qu'on  affiche  dans  un  lieu 
public  (K  Affiches);  —  épreuve  de  typographie  impri- 
mée en  colonnes  et  d'un  seul  côté  de  la  feuille,  et  des- 
tinée à  recevoir  les  corrections;  —  ensemble  des  pièces 
qui  composent  le  chambranle  et  l'ornement  d'une  baie 
de  porte  ;  —  boiserie  qui  forme  le  devant  d'une  armoire 
pratiquée  dans  l'épaisseur  d'un  mur. 

PLACE  (Commandant,  —  Major  de)-.  V.  Cohvahdant, 
Major. 

PLACE  d'armes,  nom  donné  :  1^  dan;  les  villes  de  guerre 
ou  de  garnison,  à  un  emplacement  central  où  leA  troupes 
se'réunissent  les  jours  de  grande  parade  et  de  revue,  ou  en 
cas  d'alerte,  pour  y  recevoir  des  ordres;  2°  dans  les  lieux 
fortifiés,  à  tout  espace  ménagé  près  des  points  d'action, 
pour  recevoir  les  troupes  qui  doivent  défendre  ces  points. 

PLAGE  FORTE.    V.  FORTERESSE. 

PLACEMENT  f  Bureaux  de),  bureaux  établis  dans  cer- 
taines grandes  villes  pour  s'occuper,  moyennant  rétribu- 
tion, du  placement  des  employés  et  des  domestiques.  Un 
décret  du  25  mars  1852  interdit  d'ouvrir  un  bureau  de 
placement  sans  une  permission  du  préfet  ;  un  registre, 
visé  par  le  maire  ou  par  le  commissaire  de  police,  doit 
être  tenu  dans  chaque  bureau,  pour  y  recevoir  les  noms, 
prénoms,  &ge,  lieu  de  naissance,  domicile  et  profession 
des  personnes  à  placer,  et  le  prix  de  l'inscription  ne  doit 
pas  dépasser  50  centimes. 

PLACET,  supplique  qu'on  adresse  au  souverain,  à  un 
ministre  ou  à  des  juges,  pour  leur  demander  une  gr&c  , 
une  faveur,  ou  Justice.  Autrefois  les  demandes  de  ce 
genre  commençaient  par  le  mot  latin  placeat,  qu'il  plaise 
a.  •. 

PLACET,  meuble  du  xvii*  siècle.  C'étiut  une  sorte  de 
tabouret,  un  petit  siège  de  femme  ou  d'enfant,  sans  bras 
ni  dossier. 

PLAFFERT.  V.  Blaffert. 

PLAFOND  (de  fond  plat)^  corps  de  matériaux,  droit  ou 
cintré,  qui  forme  le  cid  d'un  appartement  ou  de  tout  lieu 
couvert.  Pour  la  forme  cintrée,  usitée  seulement  dans  les 
grands  édifices,  on  emploie  la  brique  ou  la  pierre.  Les 

{)lafonds  droits  sont,  en  général,  faits  d'un  lambris  do 
attes  attachées  sur  la  charpente,  et  de  trois  couches  de 
pl&tre  qui  les  recouvrent  :  la  dernière  est  toujours  faiie 
en  plâtre  tamisé.  Dans  les  planchers  à  solives  de  fer,  da 
petit  carillon  de  fer,  posé  en  entretoise  d'une  solive  à 
l'autre,  reçoit  la  couche  de  plâtre  qui  forme  le  noyau  du 
plafond.  Il  existe  des  plafonds  de  pierre  dans  un  très- 
grand  nombre  d'édifices  antiques;  la  plupart  sont  des 
dalles  de  pierre,  portées  par  des  épistyles,  poutres  de 
pierre  tenant  lieu  de  poutres  de  bois,  mais  de  petite 
portée.  On  voit,  à  Pans,  des  plafonds  de  ce  genre  an 
portique  de  l'église  S^Sulpice,  à  la  colonnade  du  Louvre, 
aux  galeries  du  Palais- Royal  :  mais  les  épistyles  sont 
en  plates- bandes,  et,  au  Palais- Royal,  en  charpenio 
enduite  de  pUtre.  Quand  on  veut  décorer  un  plafomî, 
on  le  divise  presque  tOH|ours  en  compartiments  symé- 
triques, qu'on  appelle  caissons,  tympans  ou  voussures 
(V.ces  mots).  Les  Anciens  paraissent  n'avoir  peint  sur 


PLA 


1436 


PLA 


les  plafonds  que  des  arabesqnes,  des  figures  chimé- 
riques, des  fleurs  et  des  fruits,  tandis  que  les  Modernes 
ir  ont  souvent  représenté  de  vastes  sujets  historiciues  : 
es  compositions  de  ce  genre  exigent  une  connaissance 
approfondie  de  la  perspective  et  du  raccourci,  car  il  s'agit 
de  faire  paralu«  debout  et  sur  des  lignes  perpendiculaires 
des  personnages  qui  sont  physiquement  couchés  sur  un 
plan  horizontal  ou  sur  une  courbe  plus  ou  moins  irrégu- 
lière. On  voit  au  Louvre  de  très -beaux  plafonds  de  ce 
genre.  ~-  On  nomme  plafond  dé  corniche  la  surface  de 
dessous  du  larmier  d'une  corniche.  B. 

PLAGAL,  nom  d'un  mode  ou  ton  du  Plain-Ghant,  dont 
le  pape  S^  Grégoire  le  Grand  admit  l'usage  dans  la  com- 
position des  chants  sacrés.  Tiré  du  grec  plagias  (oblique, 
transversal),  il  a  été  appliqué  aux  tons  pairs,  probable- 
ment à  cause  de  la  quarte  grave  qui  les  distingue  et  qui 
est  le  produit  du  renversement  de  ia  quinte  de  V Authen- 
tique (V,  ce  mot).  Le  plagal,  appelé  aussi  inférieur  ou. 
collatéral,  a  pour  note  finale  la  note  la  plus  grave  de  la 
quinte;  il  a,  par  conséquent,  la  quinte  au-dessus  de  la 
finale  et  la  quarte  au-dessous.  Les  tons  plagaux,  ancienne- 
ment au  nombre  de  six,  ont  été  réduits  à  quatre,  qui  sont 
le  2*,  le  4*,  le  6'  et  le  8«.  Le  !«''  ton  plagal  était  nommé 
hypodorien,  le  2«  hypophrygien,  le  3«  hypolydien,  le  ï« 
hypomixolydien,  ou  bien  subjugaiis  proti,  subjugàlis 
deuteri,  sitbjiigalis  triti,  et  subjugaiis  tetrardi,  —  Lors- 
que le  ton  plagal  atteint,  dans  le  morceau  do  chant  au! 
le  constitue,  les  deux  notes  extrêmes  de  son  échelle  dia- 
tonique, il  est  parfait;  lorsqu'il  ne  descend  pas  à  la 
quarte  au-dessous  de  sa  finale,  il  est  imparfait;  lorsqu'il 
descend  de  plus  d'une  quarte  au-dessous  de  sa  finale, 
il  est  surtibondant  ;  lorsqu'il  emprunte  plusieurs  notes  à 
son  authentique,  par  exemple  lorsqu'il  monte  plus  d'une 
sixte  au-dessus  de  sa  finale,  il  est  mixte;  lorsqu'il  se 
termine  par  sa  note  finale  régulière,  il  est  régulier;  dans 
le  cas  contraire,  il  est  irrégulier.  F.  G. 

PLAGALI£  (Cadence).  K.  Cadencb. 

PLAGE  (du  latin  pla>ga,  dérivé  du  grec  plax,  chose 
plate  et  unie),  rivage  de  la  mer  plat  et  découvert,  formé 
de  galets  ou  cailloux,  de  sable  ou  de  vase.  On  dit  aussi 
estrade. 

PLAGIAIRE,  nom  par  lequel  les  anciens  Romains  dé- 
signaient celui  qui  était  condamné  au  fouet  (ad  plagas) 
{)our  avoir  vendu  des  hommes  libres  comme  esclaves.  On 
'applique,  chez  les  Modernes,  à  l'écrivain  qui  s'approprie 
les  pensées  d'autrui.  S'approprier  un  ouvrage  entier 
n'est  pas  un  plagiat,  mais  une  contrefaçon  {V.  ce  mot). 
Les  compilateurs  ne  sont  pas  des  plagiaires,  parce  qu'ils 
ne  s'attribuent  pas  le  mérite  de  l'mvention  de  ce  qu'ils 
ont  recueilli.  Toute  rencontre  de  pensée  ne  peut  pas  non 
plus  être  qualifiée  de  plagiat  :  cette  rencontre  est  inévi- 
table, et,  lorsqu'un  écrivain  fait  quelque  application 
neuve  d'une  pensée  déjà  exprimée,  lorsqu'il  lui  donne 
une  empreinte  plus  nette,  plus  forte,  plus  durable,  il  ne 
fait,  comme  Molière,  que  prendre  son  bien  où  il  le  trouve; 
c'est  de  l'imitation  féconde,  et  non  du  plagiat.  Le  vrai 
plagiat,  c'est  composer  aux  dépens  d'autrui,  reproduire 
sans  aucune  marque  personnelle  un  travail  antérieur, 
quoi  qu'il  vaille;  c'est,  selon  les  expressions  de  Bayle, 
enlever  les  meubles  de  la  maison  et  les  balayures  aussi, 
prendre  le  grain,  la  paille,  la  balle,  la  poussière  en 
même  temps.  Il  y  a  eu  des  plagiats  célèbres  :  Porphyre, 
cité  par  Eusèbe,  nous  apprend  qu'on  trouvait  dans  l'his- 
torien Éphore  des  passages  de  3,000  lignes  copiées  mot 
pour  mot  ;  le  poète  Bathylle  se  déclara  l'auteur  du  dis- 
tique Nocte  pluit  totà^  etc.,  composé  par  Virgile,  qui  se 
vengea  par  son  fameux  Sic  vos  non  vobis...  A  l'époque 
de  la  Renaissance,  Leonardo  Bruni  d'Arezzo  publia  sous 
son  nom  une  Histoire  des  Goths,  qu'on  reconnut  plus 
tard  être  une  simple  traduction  de  Procope.  Le  P.  Barre, 
dans  son  Histoire  S  Allemagne,  s'est  approprié,  en  chan- 
geant les  personnages,  une  partie  de  V Histoire  de  Char- 
les XII  par  Voltaire.  K.  Ch.  Nodier,  Du  plagiat;  de  la 
supposition  d'auteur;  des  Supercheries  qui  ont  rapport 
aux  lit^res,  2«  édit.,  Paris,  1828,  in-8o. 

PLAGUL/E,  bandes  d'étoffe  richement  travaillées  et 
servant  d'ornement  à  la  dalmatique  dans  les  premiers 
siècles. 

PLAID,  terme  Judiciaire.  V.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

PLAID,  grande  écharpe  de  laine  à  carreaux  de  diverses 
couleurs,  particulièrement  rouges,  gris,  et  verts,  dont  les 
Écossais  se  couvrent,  et  qu'ils  croisent  sur  la  poitrine. 

PLAIDOIRIE,  PLAIDOYER.  Ces  deux  mots,  auxquels 
on  donne  aujourd'hui  dans  le  langage  habituel  un  sens  à 
peu  près  identique,  ont  eu  autrcfuis  des  significations 


différentes.  La  Plaidoirie  était  l'art  de  plaider,  et  par 
suite,  l'exercice  de  cet  art,  la  profession;  le  Plaidoyer 
était  le  discours  prononcé  à  l'audience.  C'est  ce  discours 
que  nous  nommons  Plaidoirie,  tandis  que  le  Plaidoyer 
est  spécialement  la  défense  écrite,  lue  devant  les  juges. 

PLAIN-CHANT  (du  latin  planus  cantus),  chant  simple, 
uni,  majesteux,  qui  est  en  usage  dans  toutes  les  églises 
d'Occident  depuis  S^  Grégoire  le  Grand  {V.  Ambrosien, 
GRéGORiEif).  Les  notes  employées  dans  le  Plain- Chant, 
appelé  aussi  chant  romain  et  chant  grégorien^  sont  au 
nombre  de  sept,  que  l'on  désigne  par  les  lettres  A,  B,  G, 
D,  E,  F,  G;  elles  servent  de  base  chacune  à  une  octave 
formée  de  cinq  tons  et  de  deux  demi-tons.  Chaque  oc- 
tave s'y  divise  en  harmonique  et  en  arithmétique,  et  y 
constitue  deux  modes  ou  tons,  Vauthentique  ou  prin- 
cipal^ et  le  plagal  ou  inférieur  (V.  ces  mots).  Les  modes 
ou  tons  du  chant  ecclésiastique,  qui  étaient  autrefois  au 
nombre  de  douze,  ont  été  réduits  à  huit,  parce  que  le 
bémol  accidentel  employé  dans  les  1*',  2«,  5*  et  6'  tons 
les  rendait  semblables  aux  9",  10*,  11*  et  12*.  Le  moine 
Alcuin,  précepteur  de  Charlemagne,  avait  déjà  adopté  le 
système  des  huit  tons,  ainsi  qu'il  le  déclare  dans  son 
Traité  de  musique.  On  peut  même  en  faire  remonter 
l'adoption  à  S^  Grégoire  le  Grand,  qui,  d'après  la  tradi- 
tion, i^outa  les  quatre  tons  plagaux  aux  quatre  tons  au- 
thentiques. La  notation  du  Plain-Chant  est  actuellement 
composée  de  gros  points  carrés  et  de  points  ayant  la 
forme  d'un  losange.  On  se  sert  des  clefs  d^ut  et  cie  fa,  et 
d'une  portée  de  quatre  lignes. 

On  a  donné  le  nom  dfe  Plain^hant  musical  à  des 
compositions  sans  goût  qui  ont  été  introduites  depuis  le 
XVII*  siècle  au  milieu  des  chants  grégoriens,  et  où  la  tona- 
lité moderne,  avec  ses  tons  majeurs  et  mineurs,  ses  mo- 
dulations, sa  phraséologie,  ses  cadences,  a  été  sub' 
stituée  à  ia  tonalité  grave  et  unitonique  des  modes  du 
Plain-Chant.  «  On  peut  dire,  remarque  J.-J.  Rousseau, 
qu'il  n'y  a  rien  de  plus  ridicule  et  de  plus  plat  que  ces 
plains^hants  accommodés  à  la  moderne,  prétintaillés 
des  ornements  de  notre  musique,  et  modulés  sur  les 
cordes  de  nos  modes  ;  comme  si  Von  pouvait  jamais  ma- 
rier notre  système  harmonique  avec  celui  des  modes  an- 
ciens, qui  est  établi  sur  des  principes  tout  différents,  a  Le 
plain-chant  musical  a  eu  pour  premiers  propagateurs,  en 
France,  Lulli,  dont  on  chante  dans  le  Midi  une  messe 
appelée  la  Baptiste^  du  prénom  de  son  auteur;  Dumont, 
l'auteur  de  la  fameuse  if  esse  royale;  et  surtout  l'orga- 
niste Nivers.  Vint  ensuite  La  Feillée,  dont  la  Méthode  de 
plain-chant  musical  a  donné  une  vogue  déplorable  à  des 
monstruosités.  Le  Plain-Chant  musical  a  toujours  du 
succès  en  Italie,  et  il  a  commencé  plus  tôt  qu'en  France; 
on  l'y  nomme  canto  fratto  (chant  brisé),  pour  le  distin- 
guer du  canto  fermo  ou  Plain-Chant  proprement  dit.  Les 
livres  de  chœur  des  ordres  religieux  contiennent  un 
grand  nombre  de  ces  conceptions  bâtardes. 

Le  Plain-Chant  est  la  seule  musique  que  l'Église  ait 
adoptée  par  la  voix  de  ses  papes,  de  ses  conciles  et  de 
ses  évèques.  II  a  une  allure  grave,  comme  il  convient  aux 
pensées  qu'il  exprime,  et  un  peu  lente,  afin  que  tous 
puissent  suivre  et  réunir  leurs  voix;  toujours  calme,  il  ne 
réveille  pas  les  sens,  quoiqu'il  se  serve  de  leur  concours. 
11  a  des  accents  doux,  suaves,  onctueux,  tristes,  humbles, 
énergioiies,  pour  exprimer  tour  à  tour  la  prière,  l'espé- 
rance, l'amour,  la  compassion,  la  crainte  et  l'admiration. 

V.  Jean  Bona,  De  divine  Psalmodia,  Rome,  1653, 
in-8<*;  Cionacci,  Dell*  origine  e  progressi  del  canto  eccle- 
siastico,  1655,  in-8°;  Dom  Jumilhac,  la  Science  et  la 
Pratique  du  Plain-Chant,  Paris,  1672,  în-4o;  Scheibel, 
Histoire  de  la  musique  d*église  dans  les  temps  anciens  et 
modernes^  en  allemand,  Breslau,  1738,  in-8<*;  l'abbé  Le- 
bœuf^  Traité  historique  et  pratUrue  sur  le  chant  ecclé- 
siastique, Paris,  1741,  in-8°;  Poisson,  Traité  théorique 
et  pratique  du  Plain-Chant^  Paris,  1750,  in-8«;  Gerbert, 
De  cantu  et  musicâ  sacra  à  prima  Ecclesiœ  œtate  usque 
ad  prœsens  tempus,  1774, 2  vol.  ln-4*,  et  Seriptores  ec- 
clesiastici  de  musicâ  sacra,  1784,  3  vol.  in -4*;  Lam- 
billotte.  De  Vunité  dans  le  chant  liturgique,  1851  ;  Jouve, 
Du  chant  liturgique,  Avignon,  1854,  in-8<»;  Félix  Clé- 
ment, Méthode  complète  de  Plain-Chant,  Paris,  1854, 
in-18;  D'Orti|ue,  Dictionnaire  du  Plain-Chant  et  de  la 
musique  d* église,  1854, 1  vol.  gr.  in-8^  F.  C 

PLAIN-CHANT  (Accompagnemeut  du).    F.  AGGOMPAGim- 

MENT. 

PLAINE,  terme  de  Blason.  V.  Champagne. 

PLAINTE  (du  latin  planctus^  lamentation,  doléance), 
déclaration  par  laquelle  on  défère  à  la  Justice  quelque 
injure  ou  dommage  qu'on  a  souffert  de  la  part  dVuitmi. 


PLA 


1437 


PLA 


Elle  doit  être  reçue  par  le  jage  d'instruction,  on  par  le 
procureur  impérial,  ou  par  Tun  des  officiers  de  police 
qui  sont  ses  auxiliaires.  On  peut  être  plaignant  sans  être 
partie  cwile^  mais  on  ne  peut  être  partie  civile  sans  être 
plaignant.  Le  plaignant  n'est  pas  réputé  partie  civile,  sMl 
ne  le  déclare  formellement,  soit  par  la  plainte,  soit  par 
acte  subséquent.  La  qualité  de  plaignant  n*entraine  pas  le 
payementr  des  frais  envers  TÉtat,  tandis  que  la  partie  ci- 
eile  est  toujours  tenue  au  remboursement  de  ces  frais, 
sauf  son  recours  contre  les  condamnés.  On  peut  se  dé- 
sister de  la  quali^.é  de  partie  civile,  et  néanmoins  persister 
dans  la  plainte.  V,  Désistement. 

PLAISANTERIE.  «  Le  Plaisant  est  TelTet  de  la  sur- 
prise réjouissante  que  nous  cause  un  contraste  frappant, 
singulier  et  nouveau,  aperçu  entre  deux  objets,  ou  entre 
un  objet  et  Tidée  hétéroclite  qu'il  fait  naître.  Cest  une 
rencontre  imprévue  qui,  par  des  rapports  inexplicables, 
excite  en  nous  la  douce  convulsion  du  rire.  »  Cette  défi- 
nition, assez  juste,  est  de  Ifarmontel,  et  l'on .  peut  en 
tirer  la  conclusion,  déjà  connue,  qu'il  n'y  a  pas  de  pré- 
cepte à  donner  pour  la  plaisanterie.  En  Firance,  la  bonne 
plaisanterie,  et  la  seule  digne  de  ce  nom,  puisque  c'est 
la  seule  qui  plaise  généralement,  est  toujours  spirituelle. 
Juste,  décente,  et  marquée  au  coin  du  bon  sens.  En  1796, 
un  chevidier  de  Pannat,  voyant  à  Londres  la  cour  des 
princes  français  émigrés,  où  l'on  ne  rêvait  que  le  pur 
rétablissement  de  tout  ce  que  la  Révolution  venait  de 
détruire,  écrivait  à  un  ami  :  «  Personne  n'est  corrigé, 
personne  n'a  su  rien  oublier,  rien  apprendre.  »  Lors  de 
la  Restauration  de  1814,  le  mot  revécut  de  lui-même,  et 
fut,  dès  le  commencement,  le  iugement  et  la  condamna- 
tion des  restaurés.  —  Gromwell  ayant  rappelé  un  débris 
du  Long-Parlement,  débris  qu'il  composa  seulement  de  70 
membres,  les  royalistes  api^l^nt  cette  chambre  Rump- 
farliament,  c-ènd.  «  Parlement  croupion,  »  plaisanterie 
assez  grossière,  comme  on  voit.  —  Après  la  Journée  du 
9  thermidor,  le  public  appela  les  anciens  terroristes,  re- 
grettant leur  chef,  «  la  queue  de  Robespierre.  »  L'expres- 
sion n'était  pas  bien  spirituelle,  mais  du  moins  elle  était 
vraie  sans  être  grossière.  —  Sous  la  Restauration,  pen- 
dant le  ministère  de  Villèle,  en  1824,  un  député  du 
centre  s'étant  écrié»  dans  une  séance  de  la  Chambre, 
qu'ils  étaient  300  dévoués  au  ministère,  on  les  surnomma 
aussitôt  «  les  trois  cents  Spartiates.  »  —  Il  y  a  dans  la 
plaisanterie  française  un  sentiment  si  naturel  de  décence 
en  même  temps  que  d'esprit,  qu'on  en  retrouve  des 
traces  Jusque  dans  l'argot,  cette  langue  de  tout  ce  qu'il 
y  a  de  plus  bas  dans  la  société  ;  le  juge  qui  interroge,  et 
qui  dans  ce  langage  est  le  curieux;  la  pince,  destinée  à 
forcer  toutes  les  portes,  et  qui  est  un  monseigneur,  de- 
vant lequel  les  portes  s'ouvrent  d'elles-mêmes,  sont 
certainement  des  termes  aussi  plaisants  que  justes  et 
décents  (  V.  Aroot].  Nous  en  dirons  autant  des  expres- 
sions ;  chevaliers  a*industrie,  chevcUiers  du  lustre,  qui, 
à  force  de  servir,  à  cause  de  leur  Justesse  plaisante,  ont 
passé  presque  dans  le  langage  sérieux.  Patrouille  et  par 
trouUter,  mots  aujourd'hui  de  la  langue  militaire  sé- 
rieuse, furent  dans  l'origine  une  plaisanterie,  car  faire 
patrouille  signifie  proprement  :  «  agiter  l'eau,  marcher 
dans  la  boue.  » 

La  plaisanterie  est  comme  une  monnaie  qui  s'use  vite; 
elle  commence  à  se  démonétiser  lorsqu'elle  devient  trop 
répandue,  et  il  faut  en  frapper  d'autre  :  mais  il  y  a  tou- 
jours en  France  des  monétaires  disposés  à  faire  ce  tra- 
vail, qui  n'en  est  pas  un  pour  ces  esprits  fins,  délicats  et 
gais  avec  urbanité. 

Quand  on  parle  de  l'esprit  français,  il  serait  difficile 
d'oublier  celui  du  soldat,  car  il  n'en  a  pas  moins  que  les 
classes  les  plus  cultivées;  cet  esprit  a  un  caractère  tout 
particulier  de  franchise,  de  naturel,  et  surtout  de  philo- 
sophie résiçnée,  gaiement  frondeuse,  qui  est  un  des  fruits 
de  la  discipline,  à  laquelle  le  militaire  se  soumet  sans 
peine,  en  grognant  un  peu,  sans  peine  aussi.  Il  puise 
cette  philosophie  dans  son  caractère  toujours  porté  à  la 
gaieté.  Pendant  la  célèbre  campagne  du  général  Bonaparte 
en  Egypte,  après  le  désastre  naval  d'Aboukir,  qui  blo- 
qua pour  ainsi  l'armée  française  dans  le  pays  qu'elle 
venait  conquérir,  et  v  causa  un  grand  découragement 
moral,  la  mauvaise  humeur  des  soldats  s'exhalait  en 
plaisanteries;  ils  en  voulaient  au  général  Cafifarelli,  qui 
passait  pour  avoir  conseillé  l'expédition  ;  or,  comme  ce 
général  avait  perdu  une  jambe  en  faisant  la  guerre  sur  ie 
Rhin,  ils  s'amusaient  à  dire  tout  haut  quand  il  passait  : 
«  Celui-là  se  moque  de  ce  qui  arrivera,  il  est  toujours 
bien  sûr  d'avoir  un  pied  en  France.  »  —  Dans  des  scènes 
militaires,  si  bien  observées  et  rendues  par  le  crayon 


de  Gharlet,  on  trouve  une  foule  de  mots  qu'il  a  reeaeHIifl 
et  Jamais  inventés;  en  voici  quelqne»-uns.  La  nuit,  par 
un  temps  de  neige,  et  en  rase  campagne,  un  lancier, 
posté  en  vedette,  et  gelé  par  la  bise,  se  dit,  pour  prendre 
patience  :  «  Chauffé  et  éclairé  par  son  gouvernement 
c'est  une  grande  douceur.  »  —  Un  fantassin,  de  cuisiné 
au  bivouac,  regarde  dans  sa  marmite  suspendue  sur  le 
feu,  et  sans  doute  plus  fournie  de  légumes  que  de  viande, 
et  fait  cette  réflexion  :  «  Faudrait  un  crâne  maître  d'ar- 
mes pour  crever  un  œil  à  mon  bouillon.  »  —  Le  vieux 
sous-officier  est  naturellement  goguenard  lorsqu'il  s'agit 
de  répondre  à  une  observation  de  son  subordonné;  en  voici 
un  exemple  :  deux  Jeunes  fantassins  ont  été  commandés 
pour  la  corvée  du  quartier;  Tun  d'eux,  son  bonnet  de 
police  à  la  main ,  et  debout  devant  un  sergent  à  che- 
vrons assis  sur  un  banc,  lui  adresse  respectueusement 
une  réclamation;  voici  la  réponse  qu'il  reçoit  du  gro- 
gnard :  «  Au  commandement  de  pas  d'observation  !  tu 
renfonces  simultanément  ton  discours,  en  partant  vive- 
ment du  pied  gauche,  la  pointe  du  pied  basse,  le  Jarret 
tendu,  et  les  genoux  d'aplomb  sur  les  hanches.  »  C.  D— t. 

PLAISIR.  Le  Plaisir  est  un  de  ces  phénomènes  que 
tout  le  monde  connaît,  et  qu'en  raison  de  leur  simplicité 
même  on  ne  saurait  définir.  Opposé  à  la  douleur,  il  est, 
conune  elle,  le  résultat  le  plus  immédiat  du  développe- 
ment de  notre  sensibilité  (  F.  ce  mofu  et  sert,  dans  l'ordre 
naturel,  de  signe  à  la  satisfaction  des  tendances  primi- 
tives (K.  Instuvcts).  Les  différents  plaisirs  sont,  comme 
les  penchants  auxquels  ils  se  rattachent,  ou  physiques 
ou  moraux  ;  ce  sont  ou  des  sensations  ou  des  sentiments 
aj^réables  ;  mais,  quelle  que  soit  à  cet  égard  leur  diver- 
sité, quelle  que  soit,  par  exemple,  la  diflférence  que  nous 
remanjuons  entre  le  plaisir  d'avoir  fait  une  bonne  action 
et  celui  de  goûter  un  vin  exquis,  il  n'en  est  pas  moins 
vrai  qu'entre  ces  deux  phénomènes  il  existe  un  trait  de 
ressemblance  essentielle  qui  nous  porte  invinciblement 
à  les  réunir  sous  une  désignation  commune.  Le  plaisir 
est  un  phénomène  éminemmemt  relatif;  on  veut  dire  par 
là  que  ce  qui  agrée  à  l'un  peut  déplaire  à  l'autre,  et  que, 
suivant  la  disposition  du  moment,  un  même  objet  peut 
devenir  pour  une  même  personne  l'occasion  d'un  vif 
plaisir,  d'un  plaisir  moindre,  ou  même  d'une  peine.  A  cet 
égard,  mobilité  extrême,  et  nulle  règle  possible.  Chacun 
prend  son  plaisir  où  il  le  trouve.  C'est  une  des  princi- 
pales raisons  qu'on  doit  invoquer  contre  les  systèmes  de 
morale  qui  font  du  plaisir  le  but  suprême  de  notre  vie, 
et  de  la  recherche  du  plaisir  la  loi  de  nos  déterminations. 
En  effet,  outre  que  ce  principe  est,  à  d'autres  égards, 
tout  à  fait  insuffisant,  il  n'a  ni  la  fixité,  ni  l'autorité 
nécessaire  pour  constituer  une  loi.  Épicure  veut  que 
l'homme  cherche  le  plaisir,  et  il  le  trouve  pour  son 
compte  dans  la  pratique  de  la  vertu,  non  parce  que  la 
vertu  est  bonne  en  elle-même,  mais  parce  qu'elle  nous 
préserve  des  troubles  et  des  agitations  qui  s'opposent  au 
plaisir  paisible  et  durable  de  l'àme.  C'est  là,  sans  doute, 
une  morale  bien  étroite,  mais  dans  laquelle  cependant 
l'application  prévient  Jusqu'à  un  certain  point  les  fu- 
nestes conséquences  du  principe.  Mais  que  tel  disciple 
d'Épicure,  s'emparant  de  quelques  paroles  échappées 
au  maître,  fasse  consister  le  plaisir  non  plus  même 
dans  cette  vertu  intéressée  que  recommandait  Épicure, 
mais  dans  la  satisfaction  des  appétits  les  plus  grossiers, 
des  penchants  les  plus  déréglés,  que  dans  une  école  voi- 
sine (V.  École  CYRéNAiQUB}  Aristippe  professe  ouverte- 
ment la  supériorité  des  plaisirs  du  corps  sur  les  plaisirs 
de  l'esprit,  de  quel  droit  contestera-t-on  la  légitimité  de 
cette  doctrine,  si  l'on  n'a  posé  comme  loi  morale,  bien 
au-dessus  du  plaisir,  chose  mobile,  relative,  individuelle, 
ridée  du  bien  absolu  qu'il  n'appartient  à  personne  d'in- 
terpréter à  son  gré?  Il  faut  en  dire  autant  des  moralistes 
modernes,  tels  que  Smith  et  Hutcheson,  qui  ont  fait  du 
sentiment  moral  (V.  ce  mot)y  c-à-d.  des  plaisirs  qui  dé- 
rivent de  l'exercice  de  la  bienveillance  et  de  la  sympa- 
thie, la  base  de  leur  doctrine.  Bien  qu'inspirées  par  mi 
esprit  généreux,  et  moins  éloignées,  en  fait,  de  la  véri- 
table morale  que  ne  le  sont  les  précédentes,  ces  doctrines 
manouent  cependant  d'autorité  et  de  sanction.  En  un 
mot,  te  plaisir,  de  quelque  source  ^u'il  vienne,  n'est  pas 
bon  par  cela  seul  qu'il  est  le  plaisir;  et  si  les  plaisirs 
moraux  se  recommandent  plutôt  que  les  plaisirs  phy- 
siques aux  aspirations  de  l'homme  de  bien,  ce  n'est 
pas  parce  qu'ils  sont  plus  nobles  ou  plus  délicats,  c'est 
parce  qu'ils  sont  la  suite  et  le  signe  des  devoiiB  accom- 
plis. B— E. 

PLAN,  en  termes  d'Architecture,  représentation,  sur 
un  plan  horizontal ,  d'un  objet  qui  y  serait  placé  dans  sa 


PLA 


1438 


PLA 


position  naturelle.  On  y  con^enre  h  toutes  les  parties  de 
robjet  les  rapports  de  gprandeur  qu'elles  ont  réellement. 
En  Peinture,  le  mot  plan  est  employé  pour  signifier  le 
plus  ou  moins  d'éloignement  où  sont ,  par  rapport  au 
spectateur,  les  objets  ou  les  figures  d*un  tableau,  éloigne- 
ment  qui  est  un  eflet  de  la  perspective.  Dans  les  décora- 
tions de  théâtre,  les  plans  sont  les  espaces  marqués  par 
les  séries  de  coulisses  parallèles  au  rideau  de  fond. 

PLAN,  en  termes  de  Littérature,  distribution  arrêtée 
d'avance  des  parties  d'un  sujet  que  Ton  veut  traiter. 
On  trouverait  assez  d'hommes  capables  de  composer 
des  morceaux  satisfaisants  et  de  réussir  dans  les  dé- 
tails; mais  donner  à  un  tout  une  belle  ordonnance,  con- 
sidérer un  vaste  sujet  dans  son  ensemble,  en  combi- 
ner les  parties ,  c*est  le  propre  d'un  esprit  élevé  et  étenda. 
Un  plan  est  juste,  s'il  embrasse  tout  le  sujet \  net,  si 
toutes  les  parties  en  sont  bien  distinctes  et  n'offrent  au- 
cune confusion  ;  il  a  de  la  proportion ,  quand  les  parties 
sont  en  harmonie  et  reçoivent  les  développements  que 
réclame  leur  importance;  il  a  de  Vunilé,  quand  toutes 
los  parties  concourent  au  même  but.  Le  Plan  est  la  base 
indispensable  de  la  composition.  V.  Buflbn,  Discours  sur 
Is  style, 

PLANCHER ,  assemblage  horizontal  de  planches  ou  de 
barres  de  fer  séparant  les  étages  d'une  maison.  On  le 
recouvre  d'un  parquet  ou  d*un  carrelage. 

PLANÈTE.  K.  Chasuble. 

PLANISPHÈRE  (du  latin  planus,  plan,  et  du  grec 
sphaïra^  sphère) ,  projection  d'une  sphère  sur  un  plan. 
Dans  la  mappemonde  ou  planisphère  terrestre,  on  suppose 
la  terre  partagée  par  le  méridien  en  deux  hémisphères 
qu'on  projette  l'un  à  côté  de  l'autre  ;  dans  le  planisphère 
céleste,  on  fait  la  section  de  la  sphère  céleste  par  le  plan 
de  l'équateur. 

PLANTON ,  sous-oflicier  ou  soldat  de  service  auprès 
d'un  officier  général  ou  d'un  officier  supérieur,  pour  trans- 
mettre ses  ordres  et  porter  ses  dépèches.  On  met  quel- 
quefois des  plantons  à  la  porte  des  casernes,  pour  en 
surveiller  la  police  extérieure,  et  empêcher  que  personne 
n'y  entre  ou  n*en  sorte  sans  en  avoir  la  permission  ou 
le  droit.  Le  planton  à  cheval  s'appelle  ordonnance  (V.  ce 
mot). 

PLAQUE,  ancienne  monnaie  d'argent  de  Flandre  et  de 
France.  Louis  XTV  en  fit  battre  à  Tournai  qui  contenaient 
68  grains  d'argent  fin. 

PLAQUÉ,  produit  d'une  branche  de  l'orfèvrerie  qui 
s'occupe  de  fabriquer  des  objets  de  luxe  avec  du  cuivre 
rouge  revêtu  d'une  plaque  mince  d'un  métal  précieux. 
Dans  la  dorure  et  Vargenture,  les  métaux  précieux  sont 
en  feuilles  excessivement  minces,  et  ne  sont  placés  à  la 
surface  des  objets  qu'après  l'entière  confection  de  ceux-ci  ; 
dans  le  plaqué,  ces  métaux  sont  en  plaques  d'une  épais- 
seur appréciable,  placées  sur  le  cuivre  avant  toute  autre 
mise  en  œuvre.  Dans  le  doublé,  l'or  et  l'argent  sont  fixés 
sur  le  cuivre  au  moyen  d'une  soudure  avec  un  métal  fu- 
sible ;  le  plaqué  s'exécute  sans  aucune  fusion,  en  forçant 
les  métaux  à  adhérer  en  les  passant  au  laminoir.  On  se 
sert  de  plaqué  de  platine  pour  faire  certains  vases  em- 
ployés dans  les  laboratoires  de  chimie.  L'invention  du 
plaquaçe  ne  remonte  guère  plus  haut  que  le  milieu  du 
xviu*  siècle;  la  première  fabrique  de  plaqué  fut  fondée  à 
Slieffleld  en  1742  par  Thomas  Bolsover,  qui  fit  des  bou- 
tons et  des  tabatières;  quelques  années  après,  un  cou- 
telier de  la  même  ville,  Joseph  Hancok,  fabriqua  de  la 
vaisselle  plate,  des  théières  et  des  flambeaux.  L'industrie 
du  plaqué  fut  ensuite  transportée  à  Birmingham,  où  elle 
prit  des  développements  considérables;  elle  s*est  intro- 
duite en  France  vers  i785.  Aujourd'hui  elle  est  concen- 
trée ti  Paris.. Les  fabricants  sont  tenus  de  marquer  sur 
leurs  articles  le  titre  du  plaqué. 

PLAQUETTE,  ancienne  monnaie  de  Belzique,  faite 
d'un  alliage  d'argent  et  de  cuivre,  et  valant  0  fr.  29  c. 

PLASTIQUE  (du  grec  plastikos,  de  plassô,  former), 
en  termes  de  Philosophie  scolastique,  ce  qui  a  la  puis- 
sance de  former. 

PLASTIQUE  (Médiateur).  V,  Amb,  pag.  108,  col.  2. 

PLASTIQUES  (Arts) ,  arts  qui  s'occupent  de  reproduire 
la  forme;  ce  sont  la  sculpture,  l&  statuaire,  l'art  de  faire 
des  figures  avec  des  matières  molles,  telles  que  l'argile, 
la  cire  le  Dl&tre    etc 

PLASTRON  (de  l'italien  piastrone)^  partie  de  la  cui- 
rasse qui  couvre  la  poitrine;  —  pièce  de  cuir  rembour- 
rée et  matelassée  dont  les  maîtres  d'armes  se  couvrent  la 
poitrine  pour  amortir  les  coups  de  fleuret. 

PLATA,  monnaie  d'anrent  du  Mexique,  valant  5  fr.  38  c. 

PLAT- BORD.  V.  Bohd, 


PLATE  (de  l'espagnol  plata,  argent),  s'emploie  dans 
le  Blason  pour  besant  (  V.  ce  mot), 

PLATE,  en  termes  de  Marine,  embarcation  de  pêche  à 
fond  plat ,  dont  on  se  sert  dans  la  Méditerranée. 

PLATEAU,  en  termes  de  Géographie,  terrain  plus  ou 
moins  plat  et  fort  étendu,  au  sommet  de  la  partie  monta- 
gneuse d'un  pays. 

PLATE -BANDE,  en  termes  de  Jardinage,  "espace  de 
terre  uni  et  étroit  qui  borde  les  compartiments  d'un  par- 
terre, et  qui  est  ordinairement  garni  de  fleurs  ou  d'ar- 
bustes. —  En  termes  d'Architecture,  une  plate-bande  est 
une  moulure  plate  et  unie,  qui  a  plus  de  liurgeur  que' de 
saillie;  —  ou  un  assemblage  horizontal  de  claveaux  for- 
mant l'épistyle  d'une  colonne;  cela  se  pratique  ainsi  dans 
tous  les  monuments  modernes.  La  plate-bande  est  ren- 
forcée à  l'intérieur,  par  une  armature  en  fer,  qui  retient 
récartement  des  claveaux. 

PLATÉE,  crépi  de  maçonnerie  qu'on  fait  sur  toute 
l'étendue  des  fondations  d'un  b&timent  arrasé  à  fleur  du 
sol.  Sur  ce  crépi  on  trace  la  position  très-exacte  des  murs 
à  construire  en  élévation,  afin  que  les  ouvriers  maçons 
ne  puissent  pas  se  tromper. 

PLATE -FORME,  toit  plat  qui  couvre  les  b&timents 
sans  comble.  —  Dans  l'Art  militaire,  c'est  un  ouvrage  en 
forme  de  terrasse,  destiné  à  recevoir  une  batterie.  —  En 
termes  de  Marine,  c'est  un  plancher  volant.  Dans  un 
vaisseau,  on  distingue  la  plate -forme  du  chirurgien, 
dressée  dans  la  cale  hors  de  l'atteinte  des  boulets,  et  où 
l'on  place  les  blessés,  et  les  plates-formes  de  la  soute 
aux  poudres,  de  la  cambuse,  du  magasin  général,  etc. 

PLATES,  nom  qu'on  donna,  pendant  le  xiv*  siècle,  à 
de  petites  plaques  de  métal  qu'on  clouait  l'une  h  côté  de 
l'autre  sur  des  carcasses  en  baleine,  assujetties  elles- 
mêmes  après  diverses  pièces  de  rhtd)illement ,  telles  que 
gants,  chausses.  Justaucorps,  etc. 

PLATES  (Rimes).  V.  Rime. 

PLATINE,  mot  employé  autrefois  dans  le  sens  de  pa- 
tène et  de  palette, 

PLATONiaENNE   (Philosophie)   ou   PLATONISME. 
Platon,  disciple  de  Cratyle,  puis  de  Socrate,  initié  par  le 
premier  à  la  doctrine  d'Heraclite,  dont  le  fond  est  que 
tout  s'écoule  perpétuellement,  qu'il  n'y  a  rien  de  fixe, 
partant  point  de  science  possible,  chercha,  dans  la  mé- 
thode du  second,  un  correctif  à  ce  scepticisme  où  la  phi- 
losophie de  l'école  ionienne  avait  fini  par  se  résoudre. 
Or,  en  quoi  consistait  la  méthode  de  Socrate?  En  ceci 
principalement,  qu'il  laissait  de  côté  la  contemplation  du 
monde  physique,  pour  s'attacher  de  préférence  à  l'étude 
de  l'homme  intérieur  ;  et  que,  dans  tout  sujet,  il  s'effor- 
çait de  dégager,  sous  forme  de  définitions,  les  idées  géné- 
rales. Du  compromis  et  de  la  fusion  de  ces  doctrines 
naquit  une  philosophie  très-détachée  des  faits  et  de  l'ex- 
périence sensible,  très-spiritualiste,  très-élevée  dans  ses 
aspirations  souvent  chimériques,  et  ayant  pour  principal 
défaut  de  prendre  pour  des  réalités,  bien  plus,  pour  la 
seule  réalité,  des  conceptions  abstraites  de  l'esprit,  les 
idées,  base  du  système,  dont  il  faut ,  avant  tout ,  t&cher 
de  bien  comprendre  la  nature  et  le  rôle,  au  sens  où  Platon 
les  a  entendues.  — Tout  s'écoule,  tout  change  perpétuel- 
lement, avait  dit  Heraclite.  Cela  est  vrai ,  u  l'on  consi- 
dère les  êtres  et  les  phénomènes  dans  leur  individualité  ; 
mais  comparez  les  individus,  vous  trouverez  dans  chacun 
d'eux  des  caractères  qui  lui  sont  propres,  caractères  mo- 
biles et  transitoires;  et  puis,  à  côté  de  cela,  vous  trou- 
verez dans  tous   un  certain  nombre  de  caractères  com- 
muns et  immuables  :  chez  les  hommes,  par  exemple,  tel 
est  grand,  tel  autre  petit;  l'un  est  en  santé,  l'autre  est 
malade,  Socrate  est  philosoplie,  Périclès  homme  d'État; 
mais  tous  ont  certains  caractères  communs  qui  les  font 
hommes  malgré  leura  différences  individuelles  et  malgré 
les  transformations  que  chacun  d'eux  peut  subir.  Qu'estrce 
que  cela  suppose?  Une  essence,  une  forme  commune. 
Forme  se  dit  en  grec  Eidos  ou  Idea.  Vidée  est  la  forme 
ou  l'essence  commune  des  êtres  et  des  phénomènes  de 
même  espèce.  Il  faut  bien  remarquer  ici  au'il  ne  s'agit 
point  de  la  forme  en  tant  qu'elle  est  dans  les  individus. 
Les  caractères  généraux  oui  sont  dans  l'objet  ne  sont  pas 
encore  l'Idée.  L'Idée  est  le  principe  de  ces  caractères  :  si 
tous  les  cercles  se  ressemblent,  si  tous  les  hommes  se 
ressemblent,  c'est  qu'il  y  a  le  cercle  en  soi ,  l'homme  en 
soi ,  autrement  dit  l'Idée  du  cercle,  l'Idée  de  l'homme, 
oue  tous  les  cercles,  que  tous  les  hommes  imitent,  ou 
oont  ils  participent,  pour  reproduire  les  expressions  de 
Platon  qui ,  d'ailleurs,  s'en  tient  h  cette  indication  vaçœ 
sans  expliquer  nulle  part  en  quoi  consiste  la  participatioo 
ou  imitation  des  objets  relativomcnt  h  leun  Idées  respe^ 


PLA 


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PLA 


tf  yes.  Lldée  n*est  donc  pas  ce  qui  est  dans  les  objets  ; 
r*est  ce  qui  est  en  soi  et  d*une  manière  absolue;  c'est 
Tcsscnce  des  objets  individuels.  Ce  n'est  pas  une  abstrac- 
tion de  notre  esprit,  une  forme  de  notre  entendement 
que  nous  appliquons  aux  choses  ou  que  nous  en  tirons 
par  voie  d'abstraction  :  c'est  on  être,  et  mtme  c'est  l'être 
par  excellence;  tout  le  reste  n'a  mie  l'apparence  de  Tètre. 
Si  l'on  pouvait  douter,  après  avoir  lu  les  principaux  dia- 
logues dans  lesquels  Platon  s*est  expliqué  sur  le  compte 
des  Idéea,  Phèdre,  Théélète,  Parménide,  quelques  parties 
de  la  République,  que  tel  est  le  sens  qu'il  leur  donne, 
le  néoplatonisme  se  chargerait  d'en  donner  la  preuve.  On 
y  verrait  S^rianus  et  Proclus  montrer  que  les  Idées  pos- 
sèdent l'existence  substantielle,  qu'elles  ne  sont  pas  des 
mots,  comme  Chrysippe,  Ârchédème  et  la  plupart  des 
Stoïciens  l'avaient  dit;  ni  des  univcrsaux  {V.  ce  mot) 
tirés,  par  l'abstraction,  des  choses  particulières,  selon 
l'opinion  de  Boéthus  le  péripatéticien  et  du  stoïcien  Cor- 
nutus;  ni  de  simples  conceptions  de  l'&me  humaine, 
comme  l'avaient  pensé  Cléanthe  et  même  Longin,  disciple 
des  néoplatoniciens;  ni  enfin  des  notions  résidant  éter- 
nellement dans  r&me  universelle.  Les  Idées  ne  sont  pas 
seulement  les  objets  étemels  de  rintelligence  divine,  ni 
les  conceptions  qu'elle  en  a;  elles  en  forment  la  sub- 
stance, elles  en  constituent  l'être  {V.  V Essai  sur  la  mé^ 
taphysique  d'Aristote  par  M.  F.  Ravaisson  ).  Telles  sont 
les  Idées;  ce  sont  elles  qui  sont  l'objet  de  la  science,  car 
elles  réunissent  les  conditions  que  l'objet  de  la  science 
doit  réunir  :  elles  échappent  à  l'ihstabilité  des  faits  sen- 
sibles et  individuels;  et,  en  même  temps,  elles  sont  dis- 
tinctes les  unes  des  autres,  et  à  ce  titre  susceptibles  de 
définitions. 

A  ce  dernier  point  de  vue,  cependant ,  il  ne  faudrait 
pas  trop  presser  la  doctrine  de  Platon  pour  en  faire  sor- 
tir le  svsteme  de  l'unité,  de  l'être  absoln,  tel  que  l'avaient 
compris  avant  lui  les  Éléates,  et  que  le  reproduisirent 
les  néoplatoniciens  do  l'école  d'Alexandrie  (  V.  École 
ÉL^ATiQUB  et  NâoPLATONisuB).  La  Dialectique^  c.-à-d.  la 
méthode  qui  consiste  à  parcourir  la  série  des  objets  in- 
telligibles, en  en  recueillant  les  caractères  de  plus  en 
plus  généraux,  aboutit,  de  généralisation,  en  généralisa- 
tion ,  à  l'idée  de  l'être  ou  de  l'un ,  qui  est  le  véritable 
Dieu  et  le  Tout  de  la  philosophie  platonicienne.  Si  l'on 
B*enferme  dans  ce  point  de  vue,  on  peut  donc  adresser  à 
Platon  le  reproche  d'avoir  déplacé  arbitrairement  les 
conditions  de  l'existence  pour  les  attribuer  à  des  abstrac- 
tions, et  pour  aboutir,  en  dernière  analyse,  au  pan- 
théisme. Mais  Platon ,  par  bonheur,  n'est  pas  un  de  ces 
esprits  tout  d*une  pièce,  qui  se  soucient  moins  de  la  vé- 
rité que  de  l'enchaînement  logique  de  toutes  les  parties 
de  leur  système.  A  cêté  de  la  métaphysique  plus  que 
contestable  que  nous  venons  d'esquisser,  on  trouve  çà  et 
lâchez  lui  les  éléments  d'une  théodicée  plus  en  harmonie 
avec  les  faits,  d'une  psychologie  souvent  fort  pénétrante  et 
fort  exacte,  d*une  morale  toujours  fort  pure  et  fort  élevée. 
Ainsi  Dieu  n*est  pas  seulement  l'Idée  suprême  dans  la- 
quielle  toute  existence  vient  s'absorber  et  se  confondre, 
(l'est  encore  le  Bien ,  le  soleil  du  monde  moral  (  népU" 
l)lique,  liv.  ^ii  ).  Le  Timée  et  le  x*  livre  des  Lois  nous  le 
montrent  comme  le  premier  moteur,  comme  l'artisan 
(Démiurge)  qui  arrange  et  dispose  la  matière  sur  le  mo- 
dèle des  Idées.  La  matière  est  coéternelle  à  Dieu.  On  sait 
que  nulle  philosophie,  au  sein  du  paganisme,  n'a  pu 
s'élever  Jusqu'au  dogme  complet  de  la  création  ;  c'est  un 
point  sur  lequel  il  faut  passer  condamnation,  et  l'insuf- 
fisance, h  cet  égard,  de  la  tliéodicée  de  Platon  ne  doit  pas 
en  faire  oublier  les  grandes  et  belles  parties. 

En  psychologie,  Platon  a  fait  deux  choses  très-impor- 
tantes :  il  a  établi  par  des  considérations  très-diverses 
et  d'une  inégale  valeur,  les  unes  très-solides,  les  autres 
subtiles  et  tant  soit  peu  sophistiques  (  V.  le  Pliédon)^  la 
distinction  de  l'àme  et  du  corps  et  rimmortalité  de  T&me. 
11  en  a  énoméré  et  caractérisé  les  diverses  facultés;  sur 
la  question  de  l'immortalité,  à  ne  considérer  que  les 
résultats,  il  est  bien  plus  netqu'Aristote  (V.  notre  art  Pé- 
aiPATénsus).  Sa  théorie  des  Facultés,  quoique  confuse 
encore  en  certains  points,  ne  laisse  jtas  d'offrir  dans  ses 
grands  traits  et  dans  la  distinction  de  l'Intelligence  (not»), 
ae  la  Force  {thumos)  et  de  la  Passion  {spilkumèttcon)^ 
les  éléments  principaux  et  faciles  à  mieux  coordonner  de 
la  sensibilité,  de  l'intelligence,  et  de  la  volonté.  Mention- 
nons encore,  à  propos  de  psychologie,  la  théorie  toute  pla- 
tonicienne de  la  réminiscence  (  V,  ce  mot)  par  laquelle  Pla- 
ton prétend  cxpli()uer  toutes  les  conceptions  supérieures 
à  l'eipérience  aui  se  présentent  à  notre  esprit.  Ces  con- 
osptions  no  seraient,  suivant  lui ,  quo  des  réminiscences 


d'une  vie  antérieure  où  nous  aurions  eu  une  vue  complète 
et  plus  distincte  de  la  vérité  (  F.  Phéexistencb).  Ceci  n'est 
qu'une  hypothèse;  mais  ce  qui  présente  un  caractère  tout 
autrement  sérieux,  et  ce  qu'il  y  a  de  plus  durable  dans 
la  Philosophie  de  Platon,  ce  sont  ses  vues  sur  la  morale. 
Ici  la  théorie  des  Idées  se  réduit  presque  à  un  symbole. 
L'âme  tend  à  s'élever  vers  les  Idées,  vers  la  région  cé- 
leste où  elle  peut  contempler  le  Beau,  le  Vrai,  le  Bien  en 
soi.  Telle  est  la  fonction  de  la  Raison.  Mais  elle  est  dé- 
tournée de  cette  contemplation  sereine  par  les  mouve- 
ments turbulents  des  passions.  Apaiser  ces  mouvements, 
se  détacher  des  objets  sensibles ,  se  dégager  des  ténèbres 
où  la  foule  des  hommes  reste  plongée,  tel  est  le  but  des 
efforts  du  sage.  Plus  il  s'éclaire,  plus  il  devient  vertueux. 
Ce  n'est  d'ailleurs  que  par  degrés  que  l'on  s'élève  à  la 
science  véritable.  L'esprit  part  de  la  sensatioif ,  traverse 
l'opinion ,  et  ne  parvient  qu'en  dernier  lieu  à  la  science 
ou  connaissance  rationnelle.  C'est  alors  qu'en  présence 
des  Idées  du  Vrai,  de  l'Ordre,  et  du  Beau,  triple  manifes- 
tation de  l'Essence  suprême,  de  Dieu  ou  du  Bien  qui 
ne  sont  qu'un ,  T&me  dédaignant  le  plaisir  prend  pour 
modèles  ces  Idées  et  les  reproduit  en  elle  au  moyen  des 
trois  facultés  dont  elle  est  douée.  Chacune  de  ces  facul- 
tés, bien  dirigées,  peut  en  efiet  engendrer  une  vertu.  Sa- 
gesse, Courage,  et  Tempérance.  Ou  plutôt  l'Intelligence 
est,  de  sa  nature,  sagesse,  et  par  conséquent  vertu.  Mais 
il  n'en  est  pas  de  même  de  la  force,  qui  peut,  selon 
qu'elle  est  bien  ou  mal  dirigée,  devenir  Courage  ou  Féro- 
cité ;  ni  de  la  Passion,  qui  est  vice  de  sa  nature,  et  qui  ne 
devient  vertu  qu'autant  qu'elle  est  domptée  par  le  cou- 
rage mis  au  service  de  la  Raison.  Il  y  a  là  une  lutte  dans 
laquelle  les  instincts  bas  et  grossiers  l'emportent  souvent 
sur  les  efforts  réunis  des  autres  facultés.  Cest,  dans  le 
langage  figuré  de  Platon,  le  cheval  noir  qui  entraîne  le 
char,  emblème  de  l'àme,  en  dépit  du  cheval  blanc  son 
compagnon  et  en  dépit  du  cocher,  et  qu'on  ne  peut 
dompter  qu'à  force  de  coups  et  de  châtiments. 

Outre  la  Sagesse,  le  Courage  et  la  Tempérance,  Pla- 
ton parle  d'une  quatrième  vertu  qu'il  appelle  la  Jus- 
tice. La  Justice  est  l'harmonie  des  autres  vertus;  et  cela 
dans  l'ordre  politique  aussi  bien  que  dans  l'ordre  pure- 
ment moral.  Car,  aux  veux  de  Platon,  la  morale  et  la 
politique  ne  sont  pas  deux  choses  difi'érentes.  La  poli- 
tique n'est  autre  cnose  que  la  morale  étendue  à  un  sujet 
plus  vaste,  c'est  à  savoir  l'État,  au  lieu  de  l'individu.  C'est, 
pour  nous  servir  de  l'ingénieuse  comparaison  de  Platon , 
la  même  inscription  en  plus  gros  caractères,  par  consé- 
quent plus  facile  à  lire.  Cela  posé,  il  établit  que,  dans  un 
État  bien  constitué,  l'on  doit  trouver  la  vertu  et  les  di- 
verses parties  de  la  vertu.  La  sagesse  sera  l'attribution 
des  magistrats  chargés  du  gouvernement  de  l'État;  le 
courage,  celle  des  guerriers.  Quant  à  la  tempérance,  c'est 
une  manière  d'être  bien  ordonnée,  l'empire  qu'on  exerce 
sur  ses  passions;  dans  l'État  elle  sera  représentée  par  le 
pouvoir  que  ses  gardiens,  magistrats  et  guerriers,  exer- 
cent sur  la  multitude.  Enfin,  comme  la  Justice  individuelle 
consiste  dans  l'harmonie  des  autres  vertus  et  de  toutes 
les  facultés  de  l'àme,  la  Justice  dans  l'État  consiste  à  ce 
que  chaque  citoyen  n'accomplisse  que  les  fonctions  aux- 
quelles il  est  propre,  sans  que  les  rôles  soient  intervertis, 
et  en  vue  de  l'unité  la  plus  complète  possible.  Le  meilleur 
gouvernement  pour  Platon ,  c'est  une  aristocratie  fondée 
sur  la  vertu  d'abord ,  et  ensuite  sur  la  naissance,  autant 
qu'elle  sert  à  transmettre  les  vertus  et  les  talents.  Nous 
ne  saurions  entrer  ici  dans  l'examen  des  institutions  plus 
ou  moins  idéales  à  l'aide  desquelles  Platon  a  cru  que  cet 
ordre  pouvait  être  réalisé.  C'est  l'objet  principal  des  deux 
grands  dialogues  de  la  République  et  des  Lois, 

Nous  avons  dit  que  Platon  professait  très-nettement  le 
dogme  de  l'immortalité  de  l'àme  ;  ajoutons  due  ce  dogme 
paraît  avoir  été  inséparable,  pour  lui ,  de  celui  d'une  ré- 
munération équitable  des  bonnes  et  des  mauvaises  actions. 
Ce  dernier  point  n'est  nulle  part  précisément  l'objet  d'une 
discussion  scientifique,  mais  se  trouve  très-clairement 
indiqué  dans  les  récits  allégoriques  qui  terminent  le 
Gorguu  et  la  République,  La  vérité  y  côtoie  différentes 
opinions  superstitieuses  empruntées,  à  ce  qu'il  semble, 
au  Pythagorisme  et  aux  mvthologiei;  orientales,  sur  la 
préexistence,  sur  la  transmigration  des  âmes,  etc.  Ce  qui 
domine  néanmoins,  c'est  un  sentiment  élevé  de  la  Justice 
divine  et  de  la  responsabilité  des  agents  moraux. 

La  doctrine  philosophique  de  Platon,  telle  qu'on  vient 
de  Pesquisser,  bien  que  fixée  dans  des  écrits  dont  (sauf 
quelques  dialogues  peu  importants)  on  ne  conteste  pas 
l'authenticité,  ne  laissa  pas  de  subir,  immédiatement  après 
la  mort  de  son  auteur,  diverses  transformations  qui  eurent 


PLI 


1440 


PLD 


pour  résultat  de  ramoindrîr.L*éco1e  platonicienne  se  par- 
tage (  V,  Acadùiie)  :  Speusippe,  neveu  et  successeur  im- 
médiat de  Platon,  lui  resto  encore  assez  fidèle  ;  mais  la 
tradition  platonicienne  s'affaiblit  rapidement  avec  Xéno- 
crato,  Polémon,  Cratés,  Crantor.  Dans  la  Nouvelle  Aca- 
démie (  V,  ce  mot)  il  n^en  resto  presque  plus  rien.  Elle 
ne  se  ravive  que  dans  le  néoplatonisme  alexandrin  où 
elle  se  complique  d'éléments  nouveaux  (  V.  comme  com- 

Elément  de  cet  article  et  surtout  pour  les  indications  bi- 
iioçraphiques  relatives  à  la  Philosophie  platonicienne 
l'article  Platon  du  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^His- 
toire,)  B— -I. 

PLATONIQUE  (Amour).  V.  Amodb. 

PLATRES,  en  tormes  oe  Beaux -Arts,  ouvrages  mou- 
lés en  pl&tre,  particulièrement  d*après  Tantique;  —  légers 
ouvrages  «n  plâtre  d'un  bâtiment,  tols  qu'enduits,  lam- 
bris, corniches,  plinthes,  frises,  rosaces  de  plafond, 
festons,  eto. 

PLAUSTRUM.  l  F.  ces  mots  dans  notre  Diction,  de 

PLÉBICISTE.    S    Biographie  et  d'Histoire. 

PLECTRO-EUPHONE,  instrument  de  musique  in- 
venté en  1838  par  MM.  Gama,  de  Nantes.  C'était  un 
instrument  à  clavier,  dans  lequel  les  cordes  étaient  atta- 
quées par  des  archets. 

PLECTRUM.  l  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

PLÉIADE.       S    Biographie  et  d'Histoire. 

PLEIGE  ou  PLÉJURE  (du  latin  barbare  plegium,  dont 
les  Anglais  ont  (ail  pledge)^  ancien  terme  de  Pratique, 
qui  signifiait  caution. 

PLEIN,  en  tormes  de  Blason,  se  dit  de  l'écu  rempli 
d'un  seul  émail.  On  nomme  armes  pleines  les  armoiries 
sans  écartolure  ni  brisure;  ce  sont  gén^iUement  celles 
de  la  branche  aînée  de  chaque  maison. 

PLEIN  CINTRE.  V.  Aac ,  page  194,  col.  2. 

PLEIN  JEU.  V.  Jeu. 

PLEIN  RELIEF.  V.  Bas-reuef. 

PLÉJURE.  V.  Pleige. 

PLÉNIÈRE  (Cour).  V.  Cour,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d^nistoire, 

PLÉNIPOTENTIAIRE,  c-à-d.  ayant  plein  pouvoir. 
V.  Ministre. 

PLENUM,  mot  latin  eqiployé  en  Allemagne  pour  dési- 
gner une  assemblée  plénière  ou  générale. 

PLÉONASME  (du  grec  pleonasmos^  abondance),  figure 
de  langage  qui  consiste  à  employer,  pour  donner  plus  de 
force  à  la  phrase,  des  mots  inutiles  au  sens  et  que  la 
Grammaire  rejetterait  comme  superflus.  Tel  est  ce  pas- 
sage de  Molière  (  Tartufe,  v,  3)  : 

Je  l'ai  vu,  dis-Jo,  tm,  do  mes  propres  yeux  vu. 
Ce  qu'on  appelle  vu 

Le  pléonasme  peut  n'être  qu'une  redondance  de  mots, 
comme  montw  en  haut,  descendre  en  bas,  car  en  effet, 

PLÉORAMA  (du  grec  pléô^  Je  navigue,  et  orama,  vue), 
spectacle  inventé  en  1831  par  Langhaus,  de  Breslau.  Ce 
sont  des  paysages  en  mouvement;  les  points  de  vue 
changent  a  chaque  instant,  et  se  montrent  fuyant  à  peu 
près  comme  lorsqu'on  s'éloigne  dans  une  barque. 

PLEUREUSE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

PLEXI-CHRONOMÈTRE.  V.  Chronomètre. 

PLINTHE  (du  grec  plinthosy  brique),  membre  d'ar- 
chitecture plus  large  que  haut,  qui  se  met  sous  les  pié- 
destaux des  colonnes ,  des  statues  ou  des  vases.  Il  leur 
sert  comme  de  chaussure,  d'où  lui  est  venu  aussi  le 
nom  de  socle  (du  latin  socculus,  diminutif  de  soccus^ 
brodequin).  Une  plinthe  est  dite  ravalée ^  quand  elle  a 
une  petite  table  refoulée,  quelquefois  avec  des  ornements. 
On  nomme  plinthe  de  mur,  une  moulure  plate  et  haute 
qui,  dans  les  murs  de  face,  indique  la  ligne  des  planchers. 

PLIQUE,  signe  de  notation  musicale  ancienne.  C'était 
une  aueue  montante  ou  descendante  accolée  à  la  gauche 
ou  à  la  droite  d'une  note,  et  qui  semblait  faire  à  cette 
note  un  pii  (en  latin pHca).  Il  ne  faut  point  y  voir,  comme 
on  l'a  dit,  un  signe  de  trille,  ou  une  ligature  indiquant 
quelque  retard,  mais  une  sorte  d'appogiature  qui  s'exé- 
cutait toujours  après  la  note  et  un  peu  aux  dépens  de  sa 
durée.  La  note  pliquée  se  divisait  donc  en  deux  sons  :  si 
elle  était  à  l'unisson  de  la  note  suivante,  l'appogiature  se 
faisait  à  une  seconde  supérieure  ou  inférieure,  suivant 
que  la  plique  était  ascendante  ou  descendante ,  si  les 
deux  notes  réelles  étaient  à  la  distance  d'une  seconde, 
d'une  tierce,  d'une  quarte,  d'une  quinte,  la  petite  note 
de  la  pliaue  se  faisait  à  l'unisson  de  la  2*  note;  si  l'on 
montait  d'une  note  à  l'autre,  et  que  la  plique  fût  descen- 
diàDte,  l'appogiature  se  faisait  à  la  seconde  au-dessous  de 


la  1"  note;  si  la  plique  était  descendante,  tandis  que  Kl 
deux  notes  réelles  descendaient,  la  petite  note  se  fusait 
à  une  seconde  au-dessus  de  la  l**  note  réelle. 

PLOMBAGE ,  apposition  de  sceaux  en  plomb  faite  par 
les  employés  des  Douanes  aux  frontières  sur  les  marchan- 
dises admises  en  transit  ou  qui  ne  doivent  être  visitas 
qu'à  leur  arrivée  à  destination.  On  évite  ainsi  qu'elles: 
soient  soustraites  ou  échangera.  Il  est  payé  un  droit  à  la 
Douane  pour  cette  opération. 

PLOTT,  monnaie  d'argent  de  Suède,  valant  1  fr.  89  c. 

PLOUSTRË,  vieux  mot  signifiant  cadenas  et  peut-être 
serrure. 

PLUMASSIERS,  ancienne  corporation  dont  les  statuts^ 
octroyés  par  Henri  IV  en  Juillet  1599,  furent  confirmés 
par  Louis  XIII  en  1612  et  par  Louis  XIV  en  1644.  Les 
charges  des  Jurés  de  cette  corporation  furent  érigées  en 
titres  d'office  en  1691.  Le  patron  des  plumaasiers  était 
S^  Georges. 

PLUMATILE,  vêtement  des  anciens  Romains,  dont 
l'étoffe  noire  était  peinte  de  manière  qu'en  la  regardant 
sous  un  certain  Jour,  on  croyait  voir  des  plumes  d'oiseaux. 

PLUME  (Avoir  la).  C'était,  sous  Louis  XIV,  savoir 
contrefaire,  à  s'y  méprendre,  l'écriture  du  roi,  et  être 
employé  aux  écritures  que  celui-ci  ne  prenait  pas  la 
peine  de  faire.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire  au  mot  :  Secrétaires  de  la  MAriv. 

PLUMES  A  ÉCRIRE.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

PLUMET,  bouquet  dé  plumes  qu'on  porte  au  chapeau, 
soit  pour  ornement,  comme  dans  la  coiffure  des  femmes, 
soit  pour  signe  dlstinctif ,  comme  les  plumets  militaires. 
V.  Panache. 

PLUMITIF,  en  termes  de  Palais,  feuille  d'audience  sur 
laquelle  on  écrit,  aussitôt  qu'ils  sont  rendus,  la  minute 
des  arrêts  et  des  jugements.  Le  greffier  au  plumitif  est 
celui  qui  tient  la  plume  aux  audiences.  Le  plumitif  doit 
porter  en  marge  les  noms  des  conseillers,  des  Juges,  et 
des  membres  du  ministère  public  qui  ont  été  présente;  le 
magistrat  qui  a  présidé,  ou,  en  cas  d'impossibilité  par 
accident,  le  plus  ancien  des  Juges,  doit  vérifier  et  signer 
le  plumitif  à  l'issue  de  l'audience  on  dans  les  24  heures; 
le  greffier  signe  également. 

PLURIEL,  terme  de  Grammaire,  nombre  qui  indique 
la  pluralité.  Le  pluriel  des  noms  français,  ordinairement 
semblable  au  singulier  pour  l'oreille,  s'en  distingue  la 
plupart  du  temps  pour  l'œil  en  ce  qu'on  ajoute  s  à  la  ter- 
minaison du  singulier;  Quelquefois  l's  est  remplacé  par 
X.  Ces  deux  règles  s'étendent  naturellement  aux  adjectifs. 
Dans  un  grand  nombre  de  noms  et  d'a^lectifs  en  al ,  VI 
se  change  en  u  au  pluriel ,  et  c'est  toujours  Vx  qu'on 
emploie  (V,  Girault-Duvivier,  Grammaire  des  gram- 
maires,  pages  135-170,  171-205,  et  236-24Ô  de  l'édiUon 
revue  par  Lemaire).  Dans  les  verbes ,  le  pluriel  est  plus 
distinct  :  on  le  reconnaît  à  la  terminaison  ons  pour  la 
l'*  personne,  ez  pour  la  2\ent  (muet  devant  les  consonnes) 
pour  la  3'.  Le  passé  défini  a  pour  caractéristiques  àm^s, 
(mes,  ûmes,  inmes;  Ates,  (tes,  ûtes,  intes;  èrent,  trente 
urent,  inrent.  Le  pluriel  est  souvent  employé  pour  le 
singulier.  Par  exemple,  le  nom  des  hommes  célèbres  prend 
la  marque  de  ce  nombre  :  les  Hercules,  les  Thésées,  les 
ScipUms,  les  Césars.  On  dit  fréquemment  nous  pour  je. 
L'usage  du  pluriel  vous  en  s'adressant  à  une  seule  pei^ 
sonne  est  particulier  aux  peuples  modernes,  chez  les- 
quels il  exprime  habituellement  une  déférence  respec- 
tueuse. Entre  personnes  habitua  à  se  tutoyer,  il  est, 
au  contraire  un  signe  de  mépris  ou  de  mécontentement 
passager  :  dans  ce  cas,  les  adjectifs  ni  les  participes  ne 
doivent  prendre  la  marque  du  pluriel ,  quoique  les  verbes 
la  prennent;  il  en  est  de  même  avec  le  pronom  de  la 
1'*  personne  en  français.  Sur  l'emploi  du  pluriel  avec 
les  collectifs,  V.  Collectif,  Parthip,  Syllepse.      P. 

PLUS-QUE-PARFAIT,  une  des  variétés  du  temps  pass 
dans  la  conjugaison.  Dans  les  langues  modernes,  il  se 
forme  à  l'aide  d'auxiliaires  {être  ou  avoir)  mis  à  l'impiir- 
fait  et  Joints  au  participe  passé  des  différents  verbes  que 
l'on  veut  conjuguer.  U  en  est  de  même  en  latin  dans  les 
verbes  passifs,  déponents  et  semi-déponents.  Biais,  dans 
les  verbes  de  forme  active,  ce  temps  a  pour  caractéris- 
tique eram  à  l'indicatif,  issem  au  subjonctif,  isse  à  Hn- 
finitif.  En  grec,  sa  terminaison  active  est  etv,  passive  et 
moyenne  i&tiv;  il  a  de  plus  pour  caractéristique  le  redou^ 
hlement  précédé  et  suivi  de  Vaugment  (V.  ces  mots).  — 
Le  plus-que-parfait  tire  son  nom  de  ce  qu'i^  exinîme 
doublement  le  passé  :  en  effet,  par  lui-même  il  a  rapport 
à  un  fait  accompli  maintenant,  mais  qui  de  plus  i'étîdt 
déjà  par  rapport  à  un  autre  fait  également  passé.  Ccst  C€ 


POË 


U4I 


POË 


«l'eiprime  très-bien  la  forme  de  ce  temps  en  grec  : 
ridée  du  fait  accompli  est  exprimée  par  le  redoublement, 
et  celle  de  Tantériorité  de  ce  fait  par  rapport  à  un  autre 
fait  passé  Test  par  Taugment  initial.  Au  point  de  vue  de 
la  syntaxe,  ce  temps  ne  s^emploie  en  grec  et  générale- 
ment en  latin  que  dans  le  sens  rigoureux  de  sa  définition, 
au  lieu  qu'en  français  nous  remployons  souvent  abusive- 
ment pour  le  passé  défini.  Aussi  notre  plus-que-parfait  se 
trouve-t-il  correspondre  maintes  fois  à  Taoriste.  Le  plus- 
que-parfait  grec  est  une  des  formes  verbales  qui,  Jointes 
à  la  particule  dcv,  expriment  le  conditionnel  passé.    P. 

PLUS-VALUE,  somme  que  vaut  une  chose  au  delà  de 
ce  qu*on  Ta  prisée  ou  achetée.  Dans  le  cas  d'éviction,  si 
la  chose  vendue  a  augmenté  de  valeur,  le  vendeur  est 
tenu  de  payer  à  l'acheteur  ce  qu'elle  vaut  au-dessus  du 
prix  de  la  vente  {Codé  Napol,.,  art.  1633).  Dans  les  expro- 
priations,  lorsque,  par  suite  de  l'exécution  des  travaux 
d'utilité  publique,  le  restant  d'une  propriété  partielle- 
ment expropriée  doit  augmenter  de  valeur,  cette  augmen- 
tation est  prise  en  considération  par  le  jury  dans  l'éva- 
luation de  l'indemnité  (Loi  du  6  mai  iS41). 

PLUTRUM.  /  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

PLUTEUS.  S     Biographie  «t  S  Histoire. 

PLUTOGRAHE  (du  grec  ploutos^  richesse,  et  cratéia, 
domination),  gouvernement  ou  état  social  dans  lequel 
l'influence  et  le  pouvoir  appartiennent  aux  riches. 

PLUVIAL.  V.  Chape. 

PNEUMA,  mot  grec  qui  veut  dire  souffle,  et  par  exten- 
sion esprit.  Il  désigne,  dans  hi  cosmologie  des  Gnostiques, 
le  germe  vital  intellectuel  dans  le  monde,  provenant  du 
Dieu  sui>rôme,  éternel  et  bon,  par  opposition  à  H  Psyché, 
germe  vital  physique,  œuvre  du  Démiurge,  et  à  YHylè, 
qui  est  la  matière,  siège  du  mal.  Selon  les  Gnostiques, 
les  païens  étaient  sous  la  domination  de  VHylè,  et  les 
Juifs  sous  celle  du  Démiurge;  les  chrétiens  seuls  avaient 
le  souffle  divin,  ils  étaient  pneumatiques, 

PNEUMATOLOGIE,  c-t-d.  science  des  esprits,  nom 
donné  :  1"  à  la  partie  do  la  Métaphysique  qui  traite  de  l'àme 
humaine  et  de  Dieu,  et  qui,  à  raison  de  ce  double  objet, 
le  divise  en  Psychologie  et  Théologie  naturelle  ;  on  y 
traite  aussi  quelquefois  des  Anges  et  de  l'àme  des  hôtes  ; 
2*>  à  la  science  chimériaue  des  Esprits  ou  des  Génies, 
êtres  imaginaires  qui,  dans  certaines  religions,  forment 
la  liaison  entre  l'homme  et  la  divinité. 

PNYX.  I  K.  ces  mots  dans  notre  Dicttofitiatré 

POBLAaONES.  <  Biographie  et  d^Histoire. 

POCHADE  peinture  faite  vivement,  pour  représenter, 
par  exemple,  un  sujet  qui  a  plu,  une  tète  d'un  certain 
caractère,  etc.  C'est  comme  une  saillie  ou  un  impromptu 
en  Peinture,  sans  recherche  ni  étude,  sans  préoccupation 
de  la  correction  du  dessin  ou  de  l'élégance  de  la  touche; 
mais  il  faut  quo  la  vérité  et  l'esprit  y  soient, 

POCHETTE,  petit  violon  de  poche  dont  se  sei  rent  les 
maîtres  de  danse  pour  donner  leurs  leçons.  Il  souie  l'oc- 
tave aigué  du  violon  ordinaire. 

POCHLINA^  genre  de  timbre  employé  en  Russie  pour 
les  papiers  sur  lesquels  on  écrit  les  requêtes,  les  sen- 
tences Juridiques,  les  demandes  d'appel,  les  actes  de  vente 
d'immeubles ,  les  passe-ports,  etc. 

POCHON  ou  POÇON,  vieux  mot  signifiant  écuelle  et 
cuiller  à  pot, 

POCILLATOR.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d*Histoire, 

POCOaiAN  ou  POCOiNCUI  (Idiome).  F.  Mexique  (Lan- 
gues du). 

PODATUS,  signe  de  notation  neumatique  par  lequel 
on  exprimait  des  groupes  de  sons  liés  par  progression 
ascendante.  C'était  un  trait  calligraphique  dont  Te  déve- 
loppement plus  ou  moins  grand  indiquait  si  la  ligature 
était  de  seconde,  de  tierce,  de  quarte,  ou  de  quinte. 

PODBRA,  riche  vêtement  en  lin  des  femmes  de  l'an- 
denne  Grèce,  découpé  en  forme  de  dents  de  scie. 

dRS^Ï^^*  )  V.  ce»  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 
PO^HJB*  '  S     ^^oorapf^ie  et  d'Histoire. 

POÊLE  (corruption  du  latin  palltum,  manteau?  ),  voile 
qu'on  tend  sur  la  tète  des  mariés  pendant  la  bénédEiction 
nuptiale,  et  dont  les  bouts  sont  ordinairement  tenus  par 
des  jeunes  gens,  parents  du  marié  et  de  la  mariée.  Le 
mot  Poêle  s'emploie  aussi  comme  svnonyme  de  dais  do 
procession,  et  de  drap  mortuaire  (y.  ces  mots), 

poÉLs,  appareil  de  chaufliage.  C'est  un  fourneau  de 
terre  cuite,  de  fidence,  de  tôle  ou  de  fonte,  dont  la  forme 
^  très-vaôriable.  Loi  poêles  en  métal  procurent  une  cha^ 
leor  prompte  et  vive;  mais,  quand  ils  arrivent  à  un  cer- 
^^  degré  de  température,  ils  dépouillent  l'air  de  la 


pièce  où  ils  sont  placés  d'une  grande  partie  de  son 
oxygène.  Cest  ce  qui  fait  préférer  les  poêles  de  briques 
ou  de  faïence,  dont  la  chaleur  est  d'ailleurs  plus  douce 
et  plus  égale.  Autrefois  on  appelait  Poêle  la  chambre 
chauffée  par  un  appareil  de  ce  genre. 

POEME,  nom  générique  de  tout  ouvrage  de  Poésie. 

POÉSIE,  mot  difficile  à  définir,  parce  qu'on  le  prend 
en  différents  sens,  qui  se  substituent  souvent  l'un  à 
l'autre  dans  l'analyse  ou  dans  la  discussion.  Tantôt  il 
désigne  un  certain  genre  d'ouvrages,  que  l'on  distinguo 
des  autres  productions  de  l'esprit  humain  ;  on  dit,  en  ce 
sens,  que  la  Poésie  est  plus  ancienne  que  l'Histoire  et 
que  l'Éloquence.  Tantôt  on  entend  par  poésie  un  certain 
talent  d'une  espèce  particulière,  qui  se  manifeste  dans 
les  conceptions  et  dans  le  style,  comme  quand  on  dit  que 
la  Poésie  diffère  de  la  Versification,  qu'il  peut  y  avoir  des 
vers  sans  poésie,  et  de  la  poésie  sans  vers.  Si  l'on  parle 
enfin  de  la  poésie  qui  se  trouve  dans  les  spectacles  de  la 
nature,  dans  les  tableaux  de  Raphaël,  dans  la  musique 
de  Mozart,  le  mot  Poésie  éveille  l'idée  d'une  sorte  de 
vertu  ((u'ont  certains  objets  qui  frappent  nos  sens,  pour 
produire  dans  notre  àme  une  impression  particulière. 

La  poésie  est  née  de  la  sensibilité  et  de  l'imagination. 
Les  émotions  vives  et  fortes,  les  conceptions  hardies  et 
originales,  c^uand,  pour  la  première  fois,  elles  trouvèrent 
leur  expression  dans  le  langage,  furent  des  ouvrages  de 
poésie.  Le  mot  grec  pOiêsis,  adopté  par  les  Latins,  signifie 
simplement  travail,  et  poïêtês  (le  poète)  ne  veut  dire 
qu'autsur  ;  le  poète  était  donc  l'auteur  par  excellence,  et 
la  poésie  l'ouvrage  par  excellence.  De  même  le  mot  épos, 
que  nous  traduisons  par  vers,  signifiait  parole  :  le  vers 
était  la  parole  par  excellence.  Les  premiers  hommes,  do- 
minés par  les  sens  et  l'imagination,  heureux  de  sentir, 
de  penser  et  de  tout  dire,  trouvaient  tout  intéressant, 
tout  précieux  :  mais,  plus  tard,  on  s'aperçut  qu'il  y  avait 
des  objets  et  des  idées  propres  à  la  Poésie,  lorsqu'à  côté 
d'elle  se  formèrent  d'autres  genres.  Ainsi,  la  recherche 
des  vérités  abstraites  et  générales  donna  naissance  à  la 
Philosophie;  le  récit  véridique  des  faits  accomplis  forma 
l'Histoire;  la  discussion  passionnée  des  intérêts  publics 
et  privés  derint  l'Éloquence;  la  représentation  des  ob- 
jets, des  idées  et  des  sentir*; >nts  trouva  des  moyens  nou- 
veaux, et  la  Musique,  U  Sculpture,  la  Peinture,  tous  les 
^tts  qui  s'adresseut  aux  yeux  et  aux  oreilles,  restrei- 

Snirent  le  domaine  de  la  Poésie,  dont  il  devint  nécessaire 
e  fixer  les  limites.  Mais  ces  limites  ne  sont  pas  aussi 
nettes  qu'on  pourrait  le  croire  :  la  philosophie,  quand 
elle  cherche  à  concevoir  l'Être  suprême,  emprunte  le 
secours  de  l'imagination,  et  arrive  à  se  confondre  avec  la 
poésie;  c'est  ainsi  que  les  premiers  philosophes  de  la 
Grèce,  en  traitant  de  la  Nature,  ont  pris  le  style  et  la 
forme  des  poètes.  L'histoire,  devenue  un  récit  animé  des 
temps  passai,  ressemble  fort  à  la  poésie  ;  et  lorsque  la 
poésie  expose  des  événements  vrais  dans  leur  ensemble, 
elle  se  rapproche  beaucoup  de  l'histoire  :  Homère  était 
pour  les  Grecs  un  historien,  prcsç[ue  autant  qu'un  poète  ; 
Hérodote,  dans  sa  véracité  historique,  a  le  charme  de  la 
poésie.  Considère-t-on  l'éloquence  :  ce  même  Homère 
était  regardé  par  les  rhéteun  de  l'Antiquité  comme  le 
premier,  au  moins  en  date,  des  orateurs  grecs.  Parmi 
nous,  on  pourrait  dire  que  Corneille  est  par  moments 
le  plus  éloquent  de  nos  orateur*.  —  Du  côté  des  arts 
proprement  dits,  la  limite  peut  quelquefois  aussi  paraître 
indécise,  car  Lessing  a  écrit  un  important  traité  sur  les 
limites  de  la  poésie  et  de  la  peinture,  son  Laocoon;  c'est 
que  la  poésie  a  un  but  commun  avec  les  arts,  à  savoir, 
rexpression,  ou  plutôt  la  production  du  beau  :  mais  ce 
qui  marque  en  quoi  la  poésie  diffère  des  arts,  ce  sont  les 
moyens.  La  musique  s^adr^»e  à  l'àme  par  l'ouie  et  par 
les  sens  ;  la  peinture  et  la  sculpture,  par  la  vue,  au  moyen 
des  couleurs  et  du  relief;  la  poésie  s'adresse  à  Tàme  par 
le  langage,  qui  est  l'expression  la  plus  directe  de  la 
pensée,  et  le  plus  sûr  moyen  de  communiquer  entre  deux 
esprits.  Elle  est  de  la  nature  des  arts  par  la  fin  qu'elle  se 
propose;  cependant  on  conteste  qu'elle  soit  un  art,  parce 
que,  dit-on,  le  propre  d'un  art  est  de  présenter  un  en- 
semble de  préceptes  pour  arriver  à  une  fin,  et  que  la 
poésie  n'a  pas  de  théorie  et  ne  peut  en  avoir,  puisque 
tout  y  dépend  de  l'inspiration  du  génie.  Dans  cette  opi- 
nion, on  prend  le  mot  poésie  dans  le  sens  du  talent  na- 
turel et  tout  personnel  que  le  poète  déploie;  mais  alors 
on  pourrait  dire  aussi  qu'il  n'y  a  pas  d'art  de  la  musique, 
de  la  peinture,  ni  de  la  sculpture,  attendu  qu'il  nj  a 
pas  de  préceptes  qui  puissent  donner  du  génie  au  musi- 
cien, an  peintre  ou  au  sculpteur.  D'autre  part,  si  les 
règles  trop  strictes  sont  gênantes  pour  le  génie  des  ai»^ 

94 


POÉ 


un 


poff 


tean,  il  ne  s^ensuit  pas  qu*il  n*y  ait  pas  an  ensemble  de 
préceptes  que  le  poète  doit  nécessairement  pratiquer,  et 
qui  l^Lident  à  gouverner  son  génie.  On  ne  saurait,  en 
effet,  citer  en  aucun  pays  aucun  grand  poOte  dont  les 
chefs-d*œuYre  n*aient  été  ou  le  résultat  d*une  théorie  de 
la  poésie,  ou  le  résumé  de  tentatives  faites  avant  lui  par 
d'autres  poètes  qui  sont  depuis  tombés  dans  Tobscunté. 
Les  préceptes,  pour  être  mis  en  exemples,  n'en  sont  pas 
moins  des  leçons;  et  les  essais  infructueux  sont  aussi  une 
théorie  pour  le  génie  qui  sait  en  tirer  des  enseignements. 
La  Poésie  est  donc  un  art  ;  et  quant  à  son  but  et  ses' 
moyens,  on  peut  la  définir  :  «  L'art  d*émouvoir  et  de 
charmer  Tesprit  au  moyen  du  langage  et  des  vers.  » 

Quelques  tentatives  heureuses  dans  nos  littératures 
modernes  nous  ont  fait  voir  que  les  vers  ne  sont  pas  ab- 
solument essentiels  à  la  poésie;  néanmoins  ils  lui  sont 
propres,  et  forment  un  de  ses  caractères  distinctifs.  A 
rorigine  il  n*y  eut  pas  de  poteie  sans  vers  :  les  prêtres, 
les  initiateurs,  parlant  comme  inspirés,  et  donnant  leurs 
pensées  comme  des  révélations  divines,  les  ont  entourées 
d*un  appareil  en  quelque  sorte  surnaturel,  c.-à-d.  le  chant 
et.  les  vers,  étroitement  unis  entre  eux  ;  adroit  calcul,  car 
\(L  singularité  même  d*une  phrase  rhythmée  communique 
flu  langage  un  caractère  solennel,  annonçant  qu'il  ne 
s'agit  point  de  pensées  ordinaires.  Pendant  bien  des 
siècles,  les  pofltes  ont  considéré  les  vers  comme  une 
partie  essentielle  de  la  poésie,  si  bien  que  la  poésie  s'est 
appelée  VArt  des  vers.  Les  poèmes  en  prose  ne  vinrent 

3ue  très-tard,  et  peut-être  y  fut-on  préparé  par  les  tra- 
uctions  en  prose  d'Homère  et  de  Virgile.  Le  Télémaqtte 
est  le  premier  ouvrage  fameux  que  la  France  ait  eu  en 
ce  genre  ;  il  a  servi  à  autoriser  la  prose  poétique.  Aupara- 
vant, on  pouvait  bien  rencontrer  de  temps  en  temps, 
dans  l'éloquence  et  dans  l'histoire,  quelques  inspirations 
dignes  des  poètes  ;  dans  les  Oraisons  funèbres  de  Bos- 
suet,  on  trouve  plus  d'un  passage  que  la  poésie  ne  sau- 
rait surpasser  :  mais  ce  n'étaient  que  dos  exceptions,  et 
l'on  ne  se  serait  pas  avisé  d'écrire  tout  un  ouvrage  de 
ce  style.  L'exemple  une  fois  donné,  la  prose  poétique  a 
obtenu  drbit  de  cité  dans  ta  littérature.  Toutefois,  on  ne 
saurait  nier  que  la  versification  n'ait  sur  la  prose  d'incon- 
testables avanta^  :  elle  communioue  au  style  un  charme 
analogue  k  celui  de  la  musique;  elle  distribue  avec  art 
les  accents  et  les  silences,  et  s'efforce  de  peindre  les 
idées  par  le  son  et  le  mouvement  des  vers.  Elle  double 
l'énergie  et  la  vivacité  du  style,  en  obligeant  l'auteur  à 
resserrer  les  tours  languissants  ;  elle  proscrit  toute  ex- 
pression faible,  et  invite  l'écrivain  à  nien  faire,  en  ré- 
compensant son  travail,  car  elle  grave  ses  pensées  dans 
la  mémoire  bien  mieux  que  la  plus  belle  prose. 

Le  style  de  la  poésie,  fût^il  même  privé  de  la  versifi- 
cation, a  encore  des  caractères  particuliers  qui  en  font 
comme  une  seconde  langue  dans  la  langue  d'un  pays; 
souvent  même,  le  principal  mérite  d'un  ouvrage  poé- 
tique réside  dans  le  style,  si  bien  que  l'on  prend  quel- 
quefois le  mot  de  poésie  dans  le  sens  restreint  de  style 
poétique.  Cette  poàie  du  style  se  compose  de  trois  élé- 
ments :  les  termes  poétiques  ,  l'usage  poétique  des 
termes,  et  les  tours  poétiques.  Il  n'y  a  pas  de  langue  qui 
n'ait  des  termes  réservés  à  la  poésie,  et  d'autres  qui  en 
sont  bannis.  Ces  derniers  sont  ordinairement  ceux  qui 
expriment  des  objets  ou  des  idées  désagréables  ou  indif- 
férants pour  l'imagination  :  tels  sont  les  termes  scientifi- 
ques ou  techniques,  et  ceux  dont  on  se  sert  pour  les  usages 
vulgaires  de  la  vie.  Au  x\ii*  siècle,  on  attribuait  volon- 
tiers aux  mots  une  noblesse  ou  une  bassesse  intrinsècpie  : 
il  faut  cependant  reconnaître  que  ces  qualités  ne  sont  pas 
dans  les  termes,  mais  dans  les  choses  qu'ils  désignent, 
et  qu'ordinairement,  quand  le  mot  ne  peut  être  souffert, 
c'est  que  la  chose  elle-même  répugne.  Il  arrive  néan- 
moins quelquefois  que  c'est  le  mot  que  l'on  proscrit  de 
la  poésie,  et  non  la  chose  :  alors,  s'il  devient  nécessaire 
de  désigner  l'objet  dans  un  ouvrage  poétique,  on  l'ex- 
prime par  un  terme  différent  de  celui  du  langage  vul- 
gaire, et  qu'on  appelle  synonyme  poétique.  Ia  langue 
grecque,  l'anglais,  l'allemand,  sont  riches  en  termes 
poétiques;  la  langue  française  en  est  pauvre  :  notre  poésie 
fait  sa  langue  par  élimination,  et  rejette  la  plupart  de 
ceux  de  la  langue  commune;  elle  est  à  la  fois  pauvre  et 
dédaigneuse.  —  A  défaut  de  mots  qui  lui  soient  propres, 
et  même  lorsqu'elle  a  un  vocabulaire  particulier,  la  poésie 
s'approprie  les  mots  de  la  langue  ordinaire,  en  leur  don- 
nant une  valeur  qu'ils  n'ont  pas  par  eux-mêmes.  Elle  les 
associe  entre  eux  de  manière  h  leur  donner  des  signiflcar 
tions  nouvelles,  à  les  relever  les  uns  par  les  autres,  à  leor 
prêver  une  grScè  et  une  énergie  accidentelles  qui  font  îl« 


lusion  sur  leur  valeur  accoutumée.  Cest  ce  qn'ensdgne 
la  théorie  des  figures  (  V.  ce  mot)^  qu'on  rattacha  ordi- 
nairement à  la  Rhétorique,  quoiqu'elle  soit  d'un  plus 
grand  usage  dans  la  poésie  que  dans  l'éloquence.  En  gé- 
néral, la  poésie  cherche  les  expresdoos  qni  représen- 
tent la  pensée  à  l'imagination  sous  une  forme  sensible  : 
car,  pour  s'emparer  de  l'esprit,  il  faut  lui  faire  voir  et 
sentir  les  choses  dont  on  lui  parle.  —  Enfin,  la  poésie 
se  donne  une  allure  particulière  par  la  hardiesse  et  la 
liberté  avec  laquelle  elfe  s'affiranchit  de  certaines  entraves 
de  la  ^mmaire.  Cette  hardiesse,  quoique  encore  très- 
restremte,  est  plus  remarquable  en  français  que  dans  les 
autres  langues,  précisément  parce  que  notre  construction 
ordinaire  est  assujettie  à  un  ordre  pr^èsque  invariable. 
La  suppression  des  liaisons  et  des  répétitions,  les  ellipses 
hardies,  quelques  inversions  réglées,  msAi  dont  on  peut 
tirer  un  heureux  parti  avec  beaucoup  d'art,  telles  sont 
les  libertés  autorisées  de  notre  poésie.  De  nos  Jours, 

3uelques  écrivains  audacieux  ont  essayé  d'en  introduire 
e  nouvelles,  et  le  défaut  de  discrétion  a  compromis  leurs 
réformes. 

On  dit  souvent  que  la  poésie  est  une  création.  Qu'est- 
ce  que  créer?  Cest  faire  de  toutes  pièces  ;  c'est  produire 
aussi  bien  le  fond  que  la  forme.  En  ce  sens,  l'homme  ne 
crée  rien,  pas  même  ses  idées  :  il  ne  fiut  qu'arranger  et 
composer  différents  matériaux  d'après  des  idées  ^que 
lui  suggère  l'observation,  et  qu'il  combine  de  manière 
à  en  former  de  nouvelles.  On  dit  qu'il  crée,  quand  ses 
combinaisons  sont  assez  neuves  pour  qu'on  n'en  puisse 
renébntrer  le  modèle  ni  dans  la  nature,  ni  dans  les 
œuvres  de  l'art.  Il  est  vrai  que  la  plupart  des  oarrages 
poétiques  exigent  cette  espèce  de  eréatum;  mais  le  mot  a 
le  défaut  d'être  vague  et  équivoque.  Si  la  poésie  était 
d'autant  plus  haute  que  la  création  est  plus  complètement 
originale,  il  s'ensuivrait  que  la  poésie  fontastique  serait 
le  plus  haut  degré  de  la  poésie  :  de  sorte  que  les  plus 
grands  de  tous  les  poètes  ne  seraient  pas  les  Homère, 
les  Sophocle,  les  Virgile,  les  Corneille,  mais  les  Apulée, 
les  Perrault  et  les  Hoffmann.  La  poésie  ne  crée  qu'en 
imitant  la  nature;  voilà  pourquoi  Aristote  dit  que  tous 
les  genres  de  poésie  sont  des  imitations.  Ce  grand  esprit 
n'a  pas  été  lui-même  assez  explicite  :  car,  en  poussant 
l'imitation  h  ses  dernières  limites,  on  arrive  au  réalisme, 
qui  est  le  contraire  de  la  poésie.  Le  véritable  objet  de 
la  poésie  est  l'idéal  des  sentiments ,  des  actions,  des  ca- 
ractères, c-à-d.  la  nature  dégagée,  par  l'imagination,  de 
cette  complexité  des  circonstances,  de  ce  mélange  d'élé- 
ments divers  qui  nuit  à  l'unité  de  l'impression.  Ainsi, 
quand  on  veut  admirer  dans  un  homme  une  verra,  on  la 
trouve  déparée  par  une  faiblesse;  quand  on  est  frappé 
d'un  grand  vice,  on  le  voit  corrigé  par  une  bonne  qualité; 
un  beau  visage  a  des  imperfections;  une  action  généreuse 
en  apparence  peut  avoir  des  motifs  intéressés;  et,  ainsi, 
il  est  rare  qu'un  esprit  attentif  n'aperçoive  pas  à  la  fois, 
dans  un  même  objet,  des  traits  qui  se  nuisent  récipro- 
quement. Lu  poésie  sépare  les  traits  disparates,  de  ma* 
nière  à  rendre  l'impression  plus  forte  en  la  simplifiant 
Voilà  comme  elle  imite,  comme  elle  doit  imiter.  En  même 
temps  elle  rassemble  dans  ses  types  les  traits  de  diffé- 
rents modèles,  de  manière  adonner  à  un  objet  particulier 
un  caractère  général,  et  par  cela  même  idéal.  On  peut 
donc  dire  que  la  poésie  crée  en  idéalisant  la  nature,  ou 
que  la  poésie  est  la  représentation  de  la  nature  idéalisée; 
c'est  Apelles  empruntant  à  vingt  modèles  di^'ers  les  per- 
fections qu'il  devait  donner  à  une  image  de  Vénus. 

Les  différents  genres  de  poésie  correspondent  aux  dif- 
férents objets  d'imitation  ou  aux  différentes  manière» 
d'imiter.  La  poésie  lyrique  exprime  la  situation  de  l'âme 
d'un  homme  en  qui  débordent  des  sentiments  passion- 
nés, qu'il  manifeste  avec  toute  l'énergie,  la  hardiesse  et 
le  désordre  d'une  imagination  qui  ne  se  possède  plus  ; 
l'enthousiasme  en  est  l'essence.  —  La  poésie  épique  o 
Vépopée  peint  les  actions  et  les  mœurs  héroïques,  au 
moyen  du  récit,  auquel  se  mêlent  des  discours  et  des 
descriptions.  —  La  poésie  dramatique  imite  les  passions, 
les  mœurs  et  les  aventures  des  hommes,  en  faisant  pa- 
raître des  personnages  sur  un  théâtre  où  leur  histoire 
s'accomplit  devant  nos  yeux,  et  où  ils  nous  font  eux- 
mêmes  confidence  de  leurs  sentiments  les  plus  secrets. 
—  Ce  sont  là  les  trois  genres  principaux  de  la  poésie  ;  ils 
peuvent  se  diviser  en  plusieurs  espèces,  et  l'on  y  ajoute 
encore  des  genres  accessoires  ou  formés  du  mélanse 
des  principaux.  Ainsi^  à  la  poésie  lyriqae  se  rattache  la 
poésie  élégiaque ,  qui  en  est  une  variété  ;  la  poésie  dra- 
matique se  divise  en  tragédie,  comédie,  et  drame,  com- 
positidDs  qui  ont  elles-mêmes  lenrs  subdiviaiofis  et  leois 


POÉ 


1443 


POÉ 


lariétés.  —  Lft  poésie  didactique,  qui  ne  vaut  guèro  que 
par  la  Tersiflcation  et  le  style^  est  un  enseignement  orné 
des  formes  de  la  poésie.  —  La  poésie  légère,  avec  la 
grande  variété  de  ses  formes,  peut  quelquefois,  suivant 
la  nature  des  sujets  ou  la  manière  de  les  traiter,  rap- 
peler en  petit  les  différents  genres  de  la  poésie  ;  mais,  le 
plus  souvent,  ce  n'est  au'un  amusement,  un  caprice, 
soumis  seulement  aux  règles  les  plus  générales  et  les 
plus  libres  du  style  et  de  Ta  versification  {V.  les  articles 
consacrés  à  ces  genres,  )  G. 

POÉTIQUE,  méthode  pour  conduire  les  poètes  à  la 
perfection  de  leur  art.  Elle  ne  fait  pas  de  poètes,  mais 
elle  vient  en  aide  à  la  nature,  en  réglant  remploi  des  dons 
naturels  qui  font  le  poète,  ti  faut  distinguer  la  Poétique 
générale,  qui  pose  certains  principes  universels,  immua* 
bies,  des  Poétiques  particulières ,  applicables  à  telle  ou 
telle  Littérature,  et  même  à  tel  ou  tel  genre  littéraire. 
Tous  les  grands  siècles  littéraires  ont  eu  leur  Poétique  : 
ainsi,  Âristote  a  écrit  la  Poétique  du  siècle  de  Périclès , 
Horace  celle  du  siècle  d'Auguste,  Vida  celle  du  siècle  de 
Léon  X,  Boileau  celle  du  siècle  de  Louis  XIY.  Ce  n*est 
pas  que  les  poètes  expliquent  Jamais  d'après  quelles  idées 
ils  ont  créé;  mais  des  esprits  plus  calmes  recueillent  ces 
idées ,  et  les  formulent. 

L  Poétique  d^ Aristote, — Aristote  traite  la  poésie  comme 
un  objet  de  science,  parce  qu'elle  naît  d'une  faculté  de 
notre  &me,  soumise,  ainsi  que  les  autres,  à  des  lois  na- 
turelles. Suivant  son  maître  Platon,  on  n'est  pas  poëte 
sans  être  possédé  d'un  Dieu  et  en  délire  :  Aristote  soumet 
le  délire  poétique  à  une  métbode;  il  observe  les  œuvres 
qu'a  produites  la  pofeie,  et  cherche  par  quels  caractères 
distinctifs  elles  appartiennent  à  la  poésie  plutôt  qu'à 
tout  autre  genre.  La  poésie  une  fois  définie,  il  en  compte 
les  espèces,  divise  chacune  en  ses  éléments,  qu'il  subdi- 
vise encore,  et,  prenant  ensuite  ces  parties  une  à  une,  il 
règle  la  conduite  que  doit  tenir  le  poète.  Cette  méthode 
serait  excellente,  si  la  nature  de  l'imagination  admettait 
des  catégories  aussi  limitées  que  celles  de  la  Logique,  et 
si  les  études  de  l'observateur  avaient  pu  s'étendre  sur 
tous  les  essais  des  différents  pays  et  des  différents  temps. 
Mais  Aristote  ne  connaît  que  la  littérature  grecque,  et  il 
ne  lui  vient  pas  à  l'esprit  qu'un  autre  peuple  puisse 
avoir  un  génie  différent  du  génie  grec,  ni  que,  chez  la 
race  hellénique  elle-même,  des  circonstances  nouvelles 
puissent  faire  naître  des  genres  nouveaux.^  Heureusement 
le  modèle  au'il  étudie  peut  suppléer  à  beaucoup  d'autres  : 
l'esprit  philosophique  que  les  Grecs  ont  porté  en  toutes 
choses  a  communiqué  a  leur  poésie  môme  un  caractère 
de  généralité  par  lequel  elle  s'accommode  aux  génies  des 
peuples  les  plus  divers,  quoique  par  le  détail  elle  soit 
trop  grecque  pour  convenir  en  tout  à  d'autres  nations. 
Tous  les  principaux  genres  poétiques  ont  été  inventés  par 
le  peuple  grec ,  et  c'est  lui  qui  leur  a  imposé  les  noms 
qu'ils  portent  encore  aujourd'hui,  même  après  s'être  mo- 
difia. Ils  sont  nés  comme  spontanément  de  la  religion 
et  des  mœurs  de  la  nation  ;  mais  c'est  la  réflexion  philo- 
sophique qui  les  a  perfectionnés  peu  k  peu,  en  démêlant 
leur  essence  des  conditions  accidentelles  do  leur  déve- 
loppement, et  en  excitant  les  poètes  à  se  rapprocher  tou- 
jours d'un  idéal  de  beauté  qu'enseigne  la  métaphysique 
de  l'art.  Et  comme  aucune  race  du  genre  humain  n'a  été 
mieux  douée  pour  la  métaphvsique  et  la  pratique  à  la 
fois  que  la  race  hellénique,  elle  a  pu  atteindre  et  par  la 
pensée  et  par  l'exécution  Jusqu'à  un  idéal  au-dessus  du- 
quel rien  n'a  été  ni  produit  ni  conçu  depuis. 

Aristote  admet,  au  moins  implicitement,  qu'on  peut 
être  poète  par  la  seule  puissance  de  la  nature,  puisqu'il 
dit  que  les  hommes  qui  font  ce  qui  est  le  propre  de  la 
poésie  le  font  les  uns  par  art  et  les  autres  par  /ia6i- 
tude  (ch.  i)  ;  et  encore,  que  «  le  talent  poétique  exige  un 
heureux  naturel  ou  un  esprit  en  délire  »  (ch.  xvu).  Mais 
de  savoir  si  la  métliode  est  un  bien  ou  un  mal  pour  la 
poésie,  c'est  une  question  qu'il  ne  pose  même  pas.  Les 
Grecs  sentaient  si  bien  l'avantage  qu'il  y  a  pour  le  génie  à 
marcher  dans  une  voie  tracée,  où  les  forces  ne  se  perdent 
pas  en  vaines  explorations,  qu'ils  ont  cherché  dans  tous 
les  arts  bien  plus  à  travailler  d'après  un  idéal  une  fois 
trouvé,  qu'à  revendiquer  l'indépendance  absolue  du  génie 
personnel  t  c'est  à  cette  sagesse  que  nous  devons  les 
œuvres  si  parfaites  qu'ils  nous  ont  laissées.  Aristote  dé- 
finit la  poésie  une  imitation  (dont  le  modèle  est  évidem- 


Sires  que  ceux  qui  se  voient  dans  la  réalité  »  (ch.  m). 
1  ijoate  que,  «  puisque  la  tragédie  est  l'imitation  de 


f personnages  meilleurs  que  la  réalité,  il  nous  faut  imiter 
es  bons  peintres  de  portraits  ;  car,  en  rendant  les  traits 
propres  du  modèle,  et  en  donnant  la  ressemblance.  Ils 
peignent  plus  beau  que  nature  »  (ch.  xv);  et  encore,  que 
«  le  poète,  en  imitant  des  hommes  de  tel  ou  tel  carac- 
tère,  doit  en  faire  comme  des  modèles  de  ce  caractère  » 
{ibid.).  On  peut  affirmer  qu* Aristote  appliquait,  dans 
sa  pensée ,  ces  principes  à  tous  les  genres  de  poésie,  et 
que  l'imitation,  en  prenant  la  nature  pour  modèle,  doit 
l'embellir  sans  l'altérer;  ce  qu'elle  fait  en  représentant 
non  les  singularités  d'une  personne,  mais  les  traits  géné- 
raux des  passions,  qui  sont  comme  Tidéal  des  passions 
particulières.  Aristote  préfère  le  faux  qui  est  vraisembla- 
ble au  vrai  qui  ne  l'est  pas  (ch.  ix,  xxv),  ce  qui  com- 
plète la  théorie  de  la  poésie  classique  relativement  à 
la  manière  d'imiter  la  nature.  Par  la  recherche  de  l'idéal , 
elle  s'éloigne  du  réalisme  ;  par  la  recherche  du  général 
et  du  vraisemblable,  elle  est  l'opposé  du  romantisme. 

Aristote  distingue  les  différents  genres  de  poésie,  c.-à-d. 
d'imitation,  par  la  nature  des  moyens,  de  la  matière,  et 
de  la  manûre.  Les  movens  d'imitation  sont  :  le  langaige, 
les  vers,  la  musique  ;  la  matière  de  l'imitation ,  ce  sont 
les  actions  et  les  caractères  des  hommes;  la  différence  de 
la  manière  consiste  à  imiter  ou  par  le  récit,  ou  par  la 
représentation  des  personnages  en  action.  Ces  éléments, 
combinés  de  différentes  façons,  constituent  les  genres 
poétiques.  Les  moyens  d'imitation  ne  suffisent  pas  pour 
déterminer  le  genre  de  poésie.  L'usage  s'était  établi,  chez 
les  Grecs,  de  désigner  certains  genres  de  poésie  et  de 
poètes  par  le  nom  du  genre  de  vers  dont  ceux-ci  se  ser- 
vaient :  de  là  ces  noms  d^épopée,  d'élégie,  etc.,  qui  ne  dé- 
signent rien  qu'une  certaine  espèce  de  vers,  laquelle  peut 
s'applicpier  à  plus  d'un  genre  de  poème.  C'est  ce  qu* Aris- 
tote blâme  avec  raison,  tant  son  esprit  s'appliquait  à 
distinguer  l'essence  des  choses  de  leurs  circonstances 
accidentelles.  Malgré  cette  hauteur  de  vues,  il  lui  est 
arrivé  de  poser  en  lois  des  usages  qui  n'avaient  d'autre 
fondement  que  la  tradition;  par  exemple,  il  décrit  le  rôle 
du  chœur,  ses  parties,  etc.,  avec  la  même  assurance  que 
si  le  chœur  était  un  élément  essentiel  de  la  tragédie 
(ch.  XII  ),  quoiqu'on  ait  pu  faire  depuis  des  tragédies  où 
l'absence  de  chœurs  ne  se  fait  nullement  sentir,  et  que 
les  chœurs  soient  devenus  une  partie  d'un  genre  tout 
différent,  l'opéra.  Il  insiste  de  même  sur  les  reconnais- 
sances (ch.  XVI ),  comme  si  l'on  ne  pouvait  faire,  sans  ca 
moyen,  de  tragédie  parfaite.  —  Quelquefois  aussi,  des 
observations  Justes  le  conduisent  à  des  conséquences  trop 
exclusives  ;  ainsi ,  ayant  observé  que  la  tragédie  agit  le 
plus  souvent  sur  nos  âmes  par  la  pitié  et  par  la  terreur, 
il  place  ces  deux  sentiments  dans  la  définition  de  la  tra- 
gédie (ch.  vil  ),  comme  si  elle  ne  pouvait  trouver  d'autres 
moyens  de  nous  intéresser.  Cependant  déjà  les  Perses 
d'Eschyle  devaient  exciter  dans  rame  des  AUiéniens  l'en- 
thousiasme patriotique  beaucoup  plus  que  la  terreur  et 
la  compassion;  chez  rous,  Corneille  a  fait  de  l'admira- 
tion le  ressort  principal  de  plusieurs  tragédies,  telles  que 
Cinna^  Pompée,  Ntcomèae.  —Aristote  prétend  encore 
qu'un  petit  nombre  de  familles  sont  seules  propres  à 
fournir  des  sujets  de  tnu;édies  (ch.  xm);  d'où  il  est  ré- 
sulté que  les  tragiques  mmçais  sont  alite  trop  souvent 
chercher  leurs  sujets  dans  les  familles  des  Atrides  et  des 
Labdacides,  qui  nous  sont  étrangères,  au  lieu  de  les 
prendre  dans  notre  histoire.  — -  On  a  souvent  exagéré, 
surtout  en  France,  la  rigueur  des  principes  d'Aristote,  et 
on  lui  a  prêté  des  docânes  qu'il  n'a  Jamais  énoncées; 
ainsi,  dans  la  théorie  de  la  tragédie,  nos  auteurs  ont  éta- 
bli ,  comme  une  règle  absolue,  ce  qu'on  appelle  les  trois 
unUés  :  cependant  Aristote  n'a  rien  dit  de  l'unité  de  lieu, 
n'a  dit  qu'un  mot  assez  obscur  de  l'unité  de  temps,  sans 
l'imposer,  et  n'a  prescrit  que  l'unité  d'action  (ch.  viu, 
XXIV,  v),  qui  est  en  effet  une  loi  d'art  et  de  bon  sens. 

Il  y  aurait  donc  beaucoup  de  restrictions  à  faire  sur 
l'autorité  absolue  des  préceptes  d'Aristote;  mais  un  grand 
nombre  de  ses  prescriptions  n'ont  pas  vieilli  et  ne  peuvent 
vieillir,  parce  qu'elles  sont  la  philosophie  même  de  la  poé« 
sie.  Malheureusement,  l'ouvrage  que  nous  possédons  sous 
le  titre  de  Poétique  n'est  qu'une  ébauche  de  la  pensée  d'Aris- 
tote, un  recueil  de  notes  écrit  vraisemblablement  vers  la 
fin  de  la  vie  de  l'auteur,  ou  peutrêtre  pour  servir  de  pro- 
gramme à  un  traité  qui  est  perdu.  £e  génie  d'Aristote  s'y 
montK}  tout  entier  dems  la  profondeur  des  vues;  mais  le 
talent  de  l'écrivain  ne  s'y  montre  qu'en  germe  :  l'expres- 
sion est  souvent  obscure,  comme  celle  d'un  homme  qui 
n'écrit  ouepour  lui-même  ;  l'ordre,  Indiqué  seulement  pour 
l'ensemole,  manque  souvent  dans  le  détail;  les  questions 
principales  ne  sont  résolues  qu'en  abrégé;  dee  questions 


POÉ 


un 


FOÉ 


accessoires,  au  contraire,  reçoivent  immédiatement  tout 
le  développement  dont  elles  ont  besoin.  Enfin ,  de  tous 
les  genres  poétiques,  deux  seulement  sont  traités  avec 
quelque  détail ,  la  tragédie  et  Tépopée  :  il  est  vrai  qu'Aris- 
tote,  voyant  dans  la  tragédie  comme  le  résumé  et  Tessence 
de  tous  les  genres,  a  pu*,  en  s*étcndant  sur  celui-là,  in- 
diquer ses  principales  idées  sur  la  poésie  en  général. 
Toutefois,  il  serait  injuste  de  juger  un  pareil  livre  comme 
Tcxpression  complète  et  définitive  de  la  critique  d*Âristote, 
et  de  lui  reprocher  certaines  lacunes,  comme  on  le 
pourrait  faire  pour  un  ouvrage  auquel  Tauteur  aurait 
mis  la  dernière  main.  V.  Eggcr^  Essai  sur  Vhistoire  de 
la  crUi(itte  chez  les  Grecs,  suivi  de  la  Poétique  d'Ans- 
toic,  Paris,  1849,  in-go. 

II.  Art  poétique  d'Horace.  — -  Entre  Aristote  et  Horace 
se  placeraient  un  grand  nombre  de  travaux  sur  les  poètes 
et  sur  la  poésie  dans  les  écoles  philosophiques  de  la 
Grèce  et  les  écoles  littéraires  d'Alexandrie  et  de  Pergame  : 
mois  ces  travaux  ont  été  perdus;  nous  citerons  seule- 
ment Néoptolème  de  Parium ,  en  Troade,  auteur  d'une 
Poétique,  où  Horace  a  puisé,  au  dire  d'un  de  ses  com- 
mentateurs. Cet  auteur  n'a  donc  pas  le  mérite  de  l'in- 
vention originale.  Il  n'a  pas  davantage  le  mérite  de  la 
méthode  :  elle  répugnait  à  son  génie,  le  plus  savant  et 
le  plus  réfléchi  des  génies  capricieux.  N'attendez  donc  de 
lui  ni  définitions,  ni  déductions,  ni  divisions  philoso- 
phiques; il  substitue  aux  théories  abstraites  des  exem- 
ples, et,  au  lieu  de  doctrines  générales,  énonce  des  pré- 
ceptes particuliers.  Sa  Poétique  est  éminemment  pratique; 
ses  conseils  sont  ceux  d'un  pointe  de  grande  expérience, 
d'une  raison  infaillible,  d'un  goût  exquis,  d'une  autorité 
discrète  et  tolérante.  «  Pour  moi,  dit-il,  je  ne  vois  ni  ce 
que  peut  faire  l'étude  sans  une  riche  veine  poétique,  ni 
ce  que  peut  faire  le  naturel  sans  culture.  »  Il  voue  au  ri- 
dicule ces  prétendus  hommes  de  génie,  qui  croient  qu'on 
ne  peut  être  poète  sans  avoir  l'esprit  un  peu  dérangé,  et 
sans  affecter  des  manières  étranges.  Quant  aux  études 
qu'il  recommande  aux  poëtes,  il  veut  qu'ils  s'instruisent 
à  fond  dans  la  philosophie  morale.  Ses  préceptes  géné- 
raux sont  les  lois  mômes  du  bon  sens  appliqué  à  la 
poésie  :  «  La  poésie  n'admet  pas  la  médiocrité  ;  —  Les 
petites  se  proposent  ou  l'utilité  ou  le  plaisir  des  lecteurs; 
on  n'obtient  tous  les  suffages  qu'en  mêlant  l'utile  à 
l'agréable;  —  Il  faut  travailler  d'après  nature;  —  Pour 
bien  écrire,  il  faut  avoir  l'esprit  nourri  de  pensées  so- 
lides ;  —  L'imagination  du  poôte  a  toute  liberté,  mais  à 
condition  de  mettre  de  l'harmonie  dans  ses  conceptions  ; 
—  Avant  d'entreprendre  un  ouvrage,  il  faut  bien  con- 
naître ses  forces;  —  Si  l'on  ne  force  pas  son  talent,  on 
ne  trouvera  pas  de  difficulté  à  écrire;  —  Le  mérite  de 
détail  n'est  nen,  sans  l'à-propos,  la  convenance  des  par- 
ties, et  la  beauté  de  l'ensemble  ;  —  A  chaque  genre  de 
poésie  convient  un  certain  genre  de  vers  et  un  certain  ton 
de  style,  etc.  »  On  pourrait  multiplier  ces  excellents  pré- 
ceptes, dont  il  existe  un  admirable  commentaire  dans  le 
Projet  de  Poétique  de  Fénelon  {Lettre  sur  les  occupations 
de  l'Académie  française).  Quant  aux  moyens  de  relever 
la  poésie  romaine,  ils  se  bornent  à  imiter  savamment  la 
poésie  grecque  :  Horace  ne  tient  nul  compte  des  traditions 
romaines;  quelque  faible  que  fût  l'art  original  de  ses  com- 
patriotes, il  méritait  une  mention  ;  mais  au  siècle  d'Au- 
guste on  l'avait  oublié  pour  suivre  l'exemple  des  Grecs. 

Les  genres  auxquels  Horace  s'attache  de  préférence,  à 
l'exemple  d* Aristote,  sont  la  tragédie  et  l'épopée  :  tous  ses 
exemples  sont  tirés  des  tragiques  grecs,  ou  d'Homère,  et 
des  poètes  cycliques  de  la  Grèce.  Il  n'imagine  rien  hors 
de  ces  modèles.  Quand  il  fait  l'histoire  de  la  poésie  en 
général,  ce  n'est  que  l'histoire  de  la  poésie  grecque  qu'il 
raconte  :  il  semble  qu'il  ne  puisse  pas  y  en  avoir  d'autre. 
On  croirait  même  qu'on  n'y  peut  rien  changer,  ni  rien 
en  retrancher  :  le  cliœur,  avec  son  accompagnement  mu- 
sical, lui  parait  si  bien  de  l'essence  de  la  tragédie,  qu'il 
ne  lui  vient  pas  à  l'esprit  de  remarquer  que,  chez  les 
Grecs  mêmes,  l'importance  du  chœur  a  toujours  été  en 
diminuant,  et  que  la  tragédie,  en  s'éloignant  de  son  ori- 
gine, devait  finir  par  se  débarrasser  entièrement  des 
langes  de  son  enfance.  On  est  plus  surpris  encore  de  la 
longueur  de  ses  développements  sur  le  drame  satyrique, 
genre  exclusivement  atuque,  et  qui  ne  pouvait  en  aucune 
façon  convenir  au  génie  romain;  mais  il  faut  que  toute 
la  littérature  grecque  passe  à  Rome.  Pour  l'invention  des 
■ujets,  c'est  encore  à  la  Grèce  qu'il  faut  emprunter.  II  vaut 
mieux  mettre  en  actes  quelque  partie  de  ïIHade  que  de 
hasarder  sur  la  scène  un  sujet  nouveau  et  inconnu  ;  em- 
pruntez à  la  tragédie  grecque  qûelau'une  de  ses  fables  ; 
donnez  aux  personnages  le  caractère  que  la  tradition 


poétique  a  consacré.  Les  préceptes  sur  l'épopée  ne  soat 
guère  autre  chose  que  l'analyse  des  mérites  d'Homère,  et 
des  défauts  des  poètes  cycliques  :  Horace  enseigne  à  faire 
des  poèmes  sur  le  modèle  de  VIliade  et  de  VOdyssée, 
Ainsi,  non-seulement  le  sujet,  mais  le  plan  même  doit 
être  emprunté  des  Grecs.  Il  faut  leur  prendre  encore 
leurs  différentes  espèces  de  vers  et  leur  sévérité  de  ver- 
sification. Si  la  langjue  romaine  est  trop  pauvre,  pour 
l'enrichir  on  ira  puiser  à  la  source  de  la  langue  grec- 
que. Ce  qui  donne  seulement  un  caractère  romain  à  la 
Poétique  d'Horace,  ce  sont  les  reproches  qu'il  adresse  à 
ses  concitoyens  :  il  réprimande  la  négligence  des  poètes 
et  l'indulgence  ignorante  du  public;  la  grossièreté  de 
certains  écrits,  notamment  des  comédies  de  Plaute,  qu'il 
traite  avec  une  rigueur  souverainement  injuste;  les  pré- 
tentions des  riches,  que  leurs  flatteurs  érigeaient  en 
poëtes;  l'amour  du  lucre,  C[ui  avait  toujours  été  la  pas- 
sion dominante  et  antipoétique  du  caractère  romain,  etc. 
En  un  mot,  l'œuvre  d'Horace  est  en  maint  passage  une 
satire.  Il  n'avait  écrit  qu'une  simple  Êpttre  aux  Pisons, 
avec  cette  liberté  de  plan,  cette  variété  de  ton,  cette  vi- 
gueur, cette  concision,  et  ce  bonheur  d'expression  qui 
lui  sont  propres.  C'était  une  conversation  sur  la  poésie. 
Comme  elle  renfermait  une  Poétique,  on  lui  en  a  donné 
le  nom  ;  mais  il  n'y  faut  pas  chercher  ce  qu'il  n'a  pas 
voulu  y  mettre,  une  forme  méthodique  et  didactique  : 
c'est  un  modèle  de  l'urbanité  mordante  des  Romains,  et 
non  de  la  parole  grave  et  compassée  d'un  maître.  V.  Feys, 
LArt  poétique  d'Horace  considéré  dans  son  ordonnance, 
1850,  in-8». 

III.  Art  poétique  de  Vida.  —  Le  savant  versificateur  de 
Crémone  enseigne  l'art  d'emprunter  aux  Anciens,  et  sur- 
tout à  Virgile,  leurs  pensées  et  jusqu'à  leurs  expressions  : 
il  a  fait  une  excellente  Poétique  de  collège,  et  rien  de 
plus.  Il  montre  aux  écoliers  de  grande  espiérance  à  faire 
passer  Virgile  et  Horace  dans  leurs  vers,  non  en  pla- 
giaires, mais  en  disciples  ingénieux.  Les  trois  livres  de  son 
poème  prêchent  d'exemple  ;  ce  sont  de  très -habiles  pas- 
tiches des  maîtres  de  la  poésie  latine.  Mais  de  théories 
nouvelles,  il  ne  lui  en  faut  pas  demander.  Vida  voudrait 
que  la  poésie  italienne  de  son  temps  ne  fût  autre  chose 
que  la  poésie  du  siècle  d'Auguste  ressuscitée.  Poète  du 
XVI*  siècle,  prélat  chrétien,  il  ne  semble  pas  se  douter  de 
la  chute  de  Jupiter  et  de  l'Olympe  antique,  tant  il  in- 
voque de  bonne  foi  les  dieux  Indigètes  de  Rome  et  Apol- 
lon père  de  Tnote,  tant  il  se  persuade  aisément  que  le 
pape  Léon  X  est  le  prêtre  des  dieux  et  même  leur  reje- 
ton. Au  moins  a-t-il  écrit,  ou  plutôt  compilé,  en  très-bon 
latin  moderne,  un  traité  d'éducation  qui  pourrait  être 
utile,  bien  que  tout  ce  qu'il  contient  de  meilleur  se  re- 
trouve ailleurs,  chez  des  écrivains  plus  originaux. 

Un  contemporain  de  Vida,  Jules  Scaliger,  a  composé 
aussi  un  Art  poétique  en  huit  chants,  qui  n'intéresse  que 
les  érudits.  Le  Tasse  a  écrit  des  Discours  et  des  Lettres 
sur  la  Poétique.  En  France,  plusieurs  Poétiques  parurent 
au  XVI*  siècle,  entre  autres  celles  de  Thomas  Sébilet , 
de  Claude  Boissière,  de  Jacques  Pelletier,  et  de  Pierre 
de  Loudun;  Vauquelin  de  La  Fresnaye  publia  son  Art 
poétique  en  1G04.  Citons  encore  la  Poétique  de  Jules 
de  La  Mesnardière  (4640) ,  et  VArt  poétique  de  Golletet 
(1658). 

IV.  Art  poétuiue  de  Boileau.  —  Lorsque  Boileau  entre- 
prit do  donner. des  lois  au  Parnasse  français,  le  désordre 
y  régnait.  Deux  hommes  de  génie  avaient,  il  est  vrai, 
créé  la  tragédie  et  la  comédie,  mais  le  goût  public  n'était 
nullement  formé.  La  littérature  d'une  nation  ne  s'alTermit 
dans  sa  véritable  voie  que  lorsque  la  théorie  se  joint  aux 
exemples.  On  savait  encore  si  peu,  dans  le  second  tiers 
du  XVII*  siècle,  ce  qrue  devait  être  la  poésie  française, 
qu'on  applaudissait  les  imitations  italiennes  et  espa- 
gnoles. Boileau  marqua  la  voie  du  génie  français  avec 
une  énergie  et  une  précision  merveilleuses.  L'esprit  fran- 
çais aime  la  méthode  et  la  règle;  il  prise  plus  le  bon 
sens  que  la  fantaisie,  et  la  passion  vraie  que  l'audace  de 
l'imagination  :  c'est  ce  que  Boileau  a  vu  et  enseigné 
mieux  que  personne,  et  nul,  plus  que  lui,  n'a  contribué 
à  faire  de  la  poésie  française  une  poésie  classique,  c-à-d. 
un  type  de  perfection  dans  un  cèrtdn  genre.  —  H  com- 
mence par  écarter  du  Parnasse  une  foule  de  malheureux 
écrivains  oui  prennent  «  pour  génie  un  amour  de  rimer  •# 
A  l'exemple  d'Horace,  il  trouve  (ch.  I*')  qu' 


Il  faut 
genre 


n  n'est  point  de  degrés  du  médiocre  an  pire 

que  l*hoinme  né  pour  être  poète  sache  pour  quel 
la  nature  l'a  fait,  et  mesure  son  ambition  à  em 


POÉ 


1145 


POl 


forces.  —  Il  se  montre  dès  Vahord  (ch.  i)  le  poSte  de  la 
nddOD,  6t  (lit  : 

Aimez  donc  la  nlion  :  que  toq}oiir*  ^oa  écrits 
Empruntent  d'elle  seule  ec  leur  luttre  et  leur  prix. 

à  prendre  ces  vers  à  la  lettre,  on  pourrait  dire  qu'il  ban« 
nit  de  la  po^ie  la  poésie  eUo-mème,  dont  la  nature  est 
autre  que  celle  de  la  raison;  mais  Boileau  s'adresse 
aux  poètes  qui  sacrifient  la  raison  à  la  rime,  et  c'est  par 
antithèse  qu'il  leur  parle  ainsi.  Il  sous-entend  Timaginar 
tion,  et  s'arr6te  sur  ce  qui  avait  besoin  d'être  fortement 
enseigné,  le  bon  sens  et  le  bon  goût.  Il  bl&me  les  faux 
brillants  de  l'Italie,  la  pompe  vaine  du  gongorisme,  les 
pointes  des  Précieuses,  et  même  les  agréments  de  détail 
qui  nuisent  à  l'ensemble;  en  un  mot,  tous  les  abus  du 
bel  esprit,  symptômes  de  décadence,  et  qui  venaient  chez 
nous  d'un  défaut  de  maturité. 

Ce  qui  ne  lui  parait  pas  moins  précieux  que  le  bon 
sens,  c^est  la  passion  vraie.  Son  poème  est  tout  rempli 
de  préceptes  sur  ce  sujet;  il  ne  craint  rien  tant  que  la 
froideur.  Il  veut  (ch.  m)  que  partout 

La  passion  émue 
Aille  chcrcber  le  cœur,  l'échauffé  et  le  remue. 

Très-sévère  sur  les  qualités  morales  du  poète,  il  ne  le 
met  pas  au-dessus  de  la  société  ;  il  ne  lui  attribue  pas 
une  sorte  de  royauté  de  droit  divin  ;  mais,  avec  plus  de 
modestie,  il  exige  qu'il  soit  honnête  homme,  dans  tous 
les  sens  qu'on  donnait  alors  à  ce  mot  (ch.  iv)  : 

Que  votre  ftme  etroe  mœurB,  peintea  dans  tm  ouvraget, 
N*oltrent  Jamais  de  vous  que  de  nobles  Images... 
Cultlrex  Toa  amis,  soyes  bomme  de  foi  : 
C'est  pen  d*etre  agréable  et  charmant  dans  an  llrre; 
Il  faat  ssTOir  encore  et  couTerser  et  vivre. 

Boileau  impose  au  poète  les  mêmes  études  prélimi- 
naires qu'Horace,  mais  il  insiste  plus  que  l'auteur  ro- 
main sur  la  correction  de  la  langue  :  c'est  crue  la  langue 
poétique  de  la  .France,  même  après  Corneille,  n'était  pas 
formée;  elle  avait  dit  d'admirables  choses,  elle  ne  savait 
pas  tout  dire;  elle  travaillait  à  se  fixer,  et  était  encore 
un  peu  flottante. 

Quant  aux  genres  poétiques,  personne,  avant  Boileau, 
n'en  avait  fait  une  revue  aussi  complète,  ne  les  avait 
aussi  bien  caractérisés,  n'avait  donné  sur  chacun  des  pré- 
ceptes aussi  étendus  ni  aussi  pratiques.- Il  ne  se  contente 
pas  de  transporter  en  France  des  genres  et  des  préceptes 
étrangers  :  il  analyse  les  genres  qui  existent  dans  la  na- 
ture, sans  dédaigner  les  inventions  des  modernes,  et  il 
en  donne  les  lois,  moins  d'après  l'autorité  des  Anciens  mie 
d'aprte  celle  de  la  raison,  qui  est  de  tous  les  temps.  Ce- 
pendant, il  y  a  plus  d'une  erreur  à  regretter  dans  cette 
belle  théorie  des  genres  poétiques.  On  remarque  d'abord 
l'absence  de  l'apologue,  qui  méritait  bien,  au  moins  de- 
puis La  Fontaine,  de  trouver  une  place  dans  une  énumé- 
ration  où  l'épigramme  et  le  madrigal  en  tiennent  une 
aussi  considérable,  et  où  le  sonnet  prend  une  importance 
démesurée.  On  trouve  un  Jugement  plus  que  discutable 
sur  Molière  (ch.  m),  qui 

Peut^tre  de  son  art  eût  remporté  le  prix, 

apparemment  s'il  se  fût  enfermé  dans  la  noble  discrétion 
de  Térence.  Le  Tasse  est  traité  avec  une  sévérité  qui 
n'est  pas  de  la  justice.  Corneille  ne  reçoit  pas  tout  l'hon- 
neur qu'il  mente;  on  sent  que  Boileau  est  trop  l'ami  de 
Racine.  La  théorie  même  de  l'art  dramatique  est  faite  en 
partie  pour  ce  dernier,  car  il  dit  de  l'amour  (ch.  m)  : 

De  cette  passion  la  sensible  peinture 

Est  pour  aller  an  oœnr  la  ronte  la  plus  sûre. 

Et  le  patriotisme  fanatique  du  vieil  Horace,  et  la  clé- 
mence d'Auguste,  et  le  pieux  resi>ect  de  César  pour  son 
ennemi  vaincu,  et  toutes  les  passions  viriles  en  un  mot, 
n'onv-elles  rien  qui  puisse  émouvoir  le  cœur?  Boileau 
écrit  pour  une  cour  plante,  et  ne  voit  pas  au  delà  du 
goût  de  son  temps.  Or,  les  héros  amoureux  de  Racine 
ont  bien  plus  pâJi  que  les  fiers  caractères  de  Corneille. 
—  Dans  sa  «béorie  dn  pofime  épique,  Boileau  proscrit  le 
merveilleux  chrétien,  et  veut  qu'on  lui  substitue  le  mer- 
veilleux païen,  qui  ne  peut  être  chez  nous  cpi'un  orne- 
ment d'emprunt  :  mais  là  encore  il  a  suivi  le  goût  de 
son  temps,  qui  voulait  que  dans  tous  les  arts  les  fictions 
inythologiques  se  mêlassent  aux  scènes  de  la  vie  réelle.— 
Il  n'est  pa*  non  plus  seul  responsable  de  la  rigueur  avec 


laquelle  il  a  imposé  aux  poètes  tragiques  la  règle  des 
trois  unités;  il  a  suivi  Corneille,  qui  s'était  tourmenté 
toute  sa  vie  pour  établir  sur  lui-même  ce  ioug  plus  gê- 
nant qu'utile.  Personne  alors  ne  songeait  a  contester  ni 
l'autonté  d'Aristote,  ni  l'utilité  de  la  r^le.  Si  les  auteurs 
se  trouvaient  à  la  torture,  ils  n'en  accusaient  que  leur  peu 
de  génie  ;  heureux  temps  pour  les  auteurs  de  Poétiques  ! 
—  On  trouve  aussi  dans  VArt  poétique  des  passages  dont 
la  faiblesse  étonne;  ce  sont  ceux  où  l'auteur  raconte 
l'histoire  de  la  poésie  française  :  les  erreurs  et  les  faux 
jugements  y  fourmillent.  Quant  à  l'histoire  de  la  poésie 
antique,  il  l'a  presque  entièrement  traduite  d'Horace, 
dont  il  a  répété  les  erreurs  avec  une  docilité  un  peu  trop 
crédule.  —  On  a  reproché  enfin  à  Boileau  d'avoir  omis 
l'invention  poétique  :  mais  art-on  bien  établi  qu'il  y  ait 
quelque  chose  à  enseigner  sur  ce  sujet?  Le  poète  pensait 
sans  doute  qu'il  n'y  a  pas  de  préceptes  qui  puissent  tenir 
lieu  du  génie  créateur,  et  que  le  rôle  de  la  Poétique  n'est 
pas  d'apprendre  à  trouver,  mais  d'apprendre  à  faire 
usage  de  ce  qu'on  a  trouvé. 

Quant  à  la  forme  de  VArt  poétique,  on  s'accorde  géné- 
ralement à  la  reconnaître  pour  excellente.  Le  plan  est 
large  et  bien  conçu.  Dans  le  V  chant,  Tauteur  expose  ses 
idées  d'ensemble  sur  les  qualités  intellectuelles  qu'exige 
la  poésie,  et  sur  les  grands  principes  de  composition,  de 
style  et  de  versification  qui  s'appliquent  à  tous  les  genres. 
Dans  les  chants  II  et  III,  il  donne  les  règles  particulières 
à  diaque  genre,  en  commençant  par  les  plus  humbles  et 
finissant  par  les  plus  élevés.  Enfin,  dans  le  IV"  chant,  il 
fait  en  quelque  sorte  l'éducation  morale  du  poète.  La  sé- 
vérité des  leçons  est  souvent  adoucie  par  des  épisodes  ou 
de  narration,  ou  de  description,  ou  de  discussion,  qui  don- 
nent du  mouvemenjt  et  ae  l'intérêt  à  l'ouvrage.  Le  style 
est,  eh  général,  le  modèle  du  style  didactique  :  justesse 
profonde  des  pensées,  naturel  et  brièveté  de  l'expression  ; 
on  ne  trouverait  nulle  part,  pas  même  dans  Horace,  un  plur 
grand  nombre  de  ces  expressions  de  génie  auxquelles  oa 
ne  pourrait  rien  changer.  On  objecte  le  nombre  dci 
imitations;  mais  on  ne  songe  pas  que  l'imitation ,  d'une 
langue  à  une  autre,  est  création  quant  au  st^le.  Horace  a 
eu  beaucoup  de  traducteurs  en  vers  depuis  Boileau;  il  n'en 
est  pas  un  dont  les  vers ,  comme  ceux  de  notre  auteur, 
soient  devenus  proverbes.  Ce  que  l'on  conteste  le  plus  à 
l'auteur  de  VArt  poétique,  c'est  la  poésie  de  l'expression  : 
on  veut  bien  reconnaître  que  son  style  est  pur,  ferme, 
plein  de  sens,  mais  on  déclare  aue  c'est  de  la  prose 
rimée.  Si  l'on  se  fait  de  la  poésie  dans  le  style  une  idée 
invariable,  d'après  tel  ou  tel  poète,  Boileau  peut  n'être 
pas  poète  :  la  hardiesse  chez  lui  est  toi^ours  mesurée; 
l'éclat  de  l'expression  est  tempéré;  l'harmonie  de  l'en- 
semble ne  soufi're  pas  les  beautés  ambitieuses.  Mais  de 
quelque  façon  que  l'on  qualifie  le  st^ie  de  Boileau,  il  faut 
bien  reconnaître  qu'il  n\  pas  de  pair  dans  notre  langue. 
Son  grand  malheur,  c'est  qu'on  le  sait  par  cœur  dès  l'en- 
fance :  combien  citerait-on  d'écrivains  qui  pussent  résis- 
ter à  cette  épreuve? — En  résumé,  quelles  que  soient 
les  imperfections  de  notre  Art  poétique,  c'est  un  livre 
dont  l'autorité,  en  certaines  parties,  durera  autant  (|ue 
la  langue  française.  On  ne  peut  tenter  aucune  révolution 
dans  la  poésie  sans  commencer  par  s'en  prendre  à  lui. 
Dans  le  grand  débat  littéraire  de  l'époque  de  1830,  il  s'est 
trouvé,  au  bout  de  quelque  temps,  que  les  cl€ttstques  et 
les  romantiques  auraient  pu  être  définis,  avec  une  cer- 
taine justesse,  les  défenseurs  et  les  adversaires  de  Boi- 
leau. 

Marmontel  a  écrit  en  prose  une  Poétique  française, 
qui  est  un  ouvrage  de  bon  sens,  mais  pâle  et  de  peu 
d'autorité.  —  K  Tabbé  Battcux,  les  Quatre  Poétiques, 
Paris,  1771  ;  A.  Nisard,  Examen  des  Poétiques  éCAristote, 
(THorace  et  de  Boileau,  S*-Cloud,  1845.  C. 

POIDS  ET  MESURES.  La  France  conserva  jusqu'à  la 
Révolution  les  poids  et  mesures  qu'avaient  autrefois  les 
différents  États  dont  elle  s'est  formée  par  voie  d'adjonc- 
tion ou  de  conquête;  souvent  même  des  termes  sem- 
blables désignaient  des  mesures  diverses.  Un  pareil  état 
de  choses  entravait  le  commerce,  gênait  la  circulatioc 
favorisait  la  fraude,  et  jetait  de  la  confusion  dans  toutes 
les  relations  de  vente  et  d'échange.  Il  a  pourtant  fallu 
dix  siècles  de  préparation,  de  tâtonnement,  pour  arrivcf 
à  l'uniformité  desjMids  et  mesures.  En  8!^5  déjà,  an 
4«  concile  de  Paris,  on  la  demandait  comme  chose  ur- 
gente ;  en  1322,  Charles  IV  le  Bel  rendit  une  ordonnance 
dont  le  but  était  de  préparer  cette  unité,  rêvée  aussi  par 
son  prédécesseur  Philippe  V  le  Long.  Louis  XI  fit  vaine- 
ment un  nouvel  effort  pour  l'établir.  L'uniformité  des 
poids  et  mesures  fut  encore  nmvœu  des  États  Généraux 


POI 


lUi 


PO! 


de  1560.  On  en  reprit  !*idôe  boqb  Louis  XVI,  et  elle  fut 
enfin  décrétée  par  la  Convention,  le  18  germinal  an  ni 
(7  anil  1795).  Toutefois,  on  toléra  encore  la  traduction. 
BuiTant  Tancien  système,  des  mesure  décimales;  remploi 
exclusif  de  ces  mesures  est  dcvenn  obligatoire  par  la  loi 
du  4  Juillet  1837.  —  L*ancien  Droit  fhmçais  punissait  gé- 
néralement comme  faussaire  Quiconque  employait  ou 
fabriouait  de  faux  poids  et  de  fausses  mesures.  Depuis 
rétablissement  du  système  décimal,  on  %  de  môme  dé- 
crété une  pénalité  contre  les  possesseurs  de  poids  et  de 
mesures  non  conformes  à  la  nouvelle  fixation.  Quiconque, 
par  usage  de  faux  poids,  a  trompé  sur  la  quantité  des 
choses  vendues,  est  puni  d*un  emprisonnement  de  3  mois 
ai  an,  et  d*une  amende  de  50 fr.  au  moins;  les  détenteurs 
de  faux  poids  sont  punis  d'une  amende  de  11  à  15  fr.,  et 
d*un  emprisonnement  de  5  jours  an  plus  {Codé  pénal, 
arL  423  et  470).  Les  objets  du  délit  sont  confisqués 
et  brisés.  La  loi  du  27  mars-l"'  avril  1851  punit  égale- 
ment  ceux  qui  emploient  des  manœuvres  ou  procédés 
tendant  à  fausser  l'opération  du  pesage  et  du  mesurage.  Si 
le  vendeur  et  l'acheteur  ont  employé,  dans  leur  marché, 
d'autres  poids  et  mesures  que  ceux  établis  par  la  loi, 
l'acheteur  est  privé  de  toute  action  contre  le  vendeur  qui 
l*a  trompé,  mais  sans  préjudice  de  l'action  publique  pour 
la  punition  de  cette  fraude  et  de  l'inobservance  de  la 
loi.  —  Bien  crue  tout  officier  de  police  ait  le  droit  de 
constater  et  ae  faire  punir  les  contraventions  en  cette 
matière,  il  existe  dans  chague  arrondissement  un  fonc- 
tionnaire spécial,  appelé  vérificaUur  des  poids  $t  me- 
sures (de  1,200  à  1,500  fr.  de  traitement),  et  chargé 
de  faire  exécuter  la  loi  d'uniformité  et  d'exactitude. 
Quand  le  service  est  confié  à  plusieurs  vérificateurs,  le 
préfet  leur  assigne  des  résidences,  et  fixe  les  circonscrip- 
tions où  ils  exercent  leurs  fonctions.  Le  décret  de  décen- 
tralisation de  mars  1852  a  donné  aux  préfets  la  nomina- 
tion des  vérificateurs;  mais  leur  traitement  est  déterminé 
par  le  ministre  de  l'agriculture,  du  commerce  et  de^ 
travaux  publics.  Ces  fonctionnaires  doivent  être  âgés  de 
25  ans  au  moins  et  de  40  ans  au  plus,  prêter  serment,  et 
subir  des  examens  spéciaux  ;  il  leur  est  défendu  d'exercer 
aucune  autre  fonction  publique  ou  asst^ettie  à  la  vérifi- 
cation; agents  du  gouvernement^  ils  ne  peuvent  être 
poursuivis  devant  les  tribunaux  sans  Tautorisation  du 
Conseil  d*État.  Le  ministère  de  l'agriculture  donne  en 
dépôt  à  chaque  bureau  de  vérification  un  assortiment 
complet  de  prototypes  préalablement  poinçonnés.  Une 
circulaire  de  1839  dit  encore  qu'il  doit  v  avoir  dans 
chaque  commune  une  collection  des  principaux  étalons 
des  poids  et  mesures  décimaux  :  les  maires  et  autres 
officiers  de  police  ont  ainsi  perpétuellement  sous  la  main 
des  instruments  de  comparuson  qui  facilitent  la  surveil- 
lance, et,  d'autre  part,  les  instituteurs  primaires  peuvent 
mettre  sous  les  veux  des  élèves  auxquels  Ils  enseignent 
le  système  métrique  l'ensemble  des  pièces  qui  le  consti- 
tuent légalement.  Chaque  vériAcation  nouvelle  est  con- 
statée pur  l'apposition  d'un  poinçon  nouveau.  Cette  loi 
s'étend  aux  poids  et  mesures  employés  dans  les  halles, 
les  foires  et  les  marchés,  dans  les  étalages  mobiles,  les 
bureaux  d'octroi,  les  bureaux  de  poids  publics,  les  hos- 
pices et  hèpitaux,  les  prisons,  les  établissements  de  bien- 
faisance, et  tous  les  autres  établissements  publics.  Les 
fabricants  et  marchands  de  poids  et  mesures  ne  sont  assu- 
jettis à  la  vérification  périodique  oue  pour  ceux  dont  ils 
font  usage  dans  leur  commerce;  les  poids,  mesures  et 
instruments  de  pesage  et  mesurage  neufs  doivent  seule- 
ment être  marqués  du  poinçon  de  la  vérification  pri- 
mitive. J.  G. 

POIGNARD,  arme  courte,  pointue  et  tranchante,  dont 
il  a  existé  un  grand  nombre  de  variétés.  Ce  fut  une  arme 
de  guerre  avant  l'invention  des  armes  à  feu,  et  on  la 
conserva  même  en  Espagne  jusqu'au  xvii*  i^ècle.  Les 
soldats  romains,  principalement  depuis  l'Empire,  por- 
tèrent un  poignard  qu'on  appelait  parcuone,  parce  qu'il 
s'attachait  à  la  ceinture  (ad  zonam).  Les  chevaliers  du 
moyen  âge  en  eurent  un  aussi  à  la  ceinture,  pour  égorger 
les  vaincus,  et  l'appelèrent  par  antiphrase  miséricorde 
ou  mercL  Les  armes  tranchantes  avec  lesquelles  les  cou- 
tiliers  et  les  archers  achevaient  les  blessés,  étaient  des 
espèces  de  poignards,  aussi  bien  aue  la  dague  des  sei- 
gneurs. On  s'est  servi  de  poignaras  empoisonnés,  non- 
seulement  chei  les  Asiatiques,  mais  encore  en  Italie,  où 
on  les  perçait  à  jour  de  mille  trous  pour  loger  de  l'arsenic 
amalgamé  dans  de  la  graisse.  Au  xvi*  siècle,  les  seigneurs 
de  France,  en  habits  de  cour,  portaient  des  poignards 
éléfisunment  engainée.  Les  femmes  italiennes  et  espa- 
gnolei  en  passaient  autr^ois  dans  leur  Jarretière.     B. 


poiGNASD  (Sabhb-).  V,  Sabbb-Poignaiii. 

POIKTLORGOE,  instrument  à  clavier  et  à  %ncYms  li- 
bres, du  genre  de  Vorgue  expressif  (V.  ce  mot)^  inventé 
par  CavaiUé-ColI. 

POINÇON,  instrument  servant  à  marquer  les  objeti 
d'or  et  d'argent.  On  distingue  le  poinçon  du  fabricant, 
et  celui  du  titre  et  du  bureau  de  garantie.  U  existe  aussi 
un  poinçon  pour  les  ouvrages  provenant  de  Pétranger. 
un  poinçon  d'exportation,  un  poinçon  dit  de  remarqué 
pour  les  chaînes,  et  un  autre,  dit  de  recense,  que  l'auto- 
rité publique  fait  appliquer  quand  elle  craint  quelque 
infidélité  relative  au  titre  et  aux  poinçons.  Les  lingots 
affinés  sont  marqués  d'un  poinçon  particulier.  Il  y  avait 
enfin  autrefois  le  poinçon  des  ouvrages  de  hasard.  —  Ce 
fut  une  ordonnance  de  Philippe  le  Bel,  en  Juin  1313,  qui 
astreignit  les  orfèvres  à  poinçonner  leurs  ouvrages.  En 
1470,  Louis  XI  les  autorisa  à  employer,  seulement  pour 
les  reliquaires^  de  l'or  et  de  l'argent  à  bas  titre,  en  in- 
scrivant dessus  :  Non  venundetur,  afin  de  certifier  que 
ces  objets  n'étaient  pas  destinés  au  commerce.  Une  or- 
donnance rendue  par  Louis  XII  à  Blois  (novembre  1506) 
leur  enjoignit  de  faire  contre-marquer  leurs  ouvrages  par 
les  maltres-jurés,  gardiens  du  contre-poinçon  de  Ta  Mai- 
son commune,  et  ce  contre-poinçon  devait  être  changé 
tous  les  ans^  enregistré  k  la  Cour  des  monnaies,  et  em- 
preint sur  la  table  de  cuivre  où  l'on  gravait  les  noms  des 
maîtres  en  charge.  La  contrefaçon  des  poinçons  est  punie 
par  notre  Code  pénal  (art.  140).  B. 

POINÇON,  terme  de  Monnayage.  V,  Com. 

POINÇON,  terme  de  Charpenterie.  V,  Combli. 

POINT,  signe  de  ponctuation  qui  marque  la  fin  d'une 
phrase  ou  d'une  proposition.  Il  y  a  le  point  final  (.),  le 
point  d'êxclamatton  (1),  le  point  d'interrogation  (?).  On 
emploie  le  point  et  virgule  (;)  pour  indiquer  la  fin  d*une 
proposition  accessoire  annexée  à  la  proposition  princi- 
pale, et  les  deux  points  (:)  pour  marquer  la  liaison  entre 
une  phrase  et  celle  qui  la  suit.  Le  point  ae  place  aussi 
sur  l't  et  le  j  minuscules.  V,  Ponctdation. 

poniT  (Faire  le),  en  termes  de  Marine,  c'est  calculer 
la  route  déjà  faite  par  un  bâtiment,  et  marquer  sa  posi- 
tion sur  la  carte  par  un  point.  Les  déterminations  plus 
ou  moins  rigoureuses  de  cette  position  'expliquent  1^ 
expressions  de  point  §stimé,  point  observé,  point  corrigé, 
pomt  vrai,  etc. 

POINT  (Mise  au).  V,  Miss  au  point. 

POINT,  en  Musique,  indi<{ue,  quand  il  est  placé  après 
une  note,  que  cette  note  doit  être  augmentée  de  la  moitié 
de  sa  valeur  normale.  Une  note  surmontée  d'un  point 
doit  être  détachée  dans  l'exécution.  —  Le  point  d'orgue 
placé  sur  une  note  indiquf  un  point  d'arrêt  plus  on 
moins  long,  pendant  lequel,  la  mesure  étant  suspendue, 
un  exécutant  brode  des  ornements  que  lui  suggère  son 
goût  ou  que  le  compositeur  a  écrits.  Les  points  d'orgue 
sont  placés  à  la  terminaison  d'une  cadence.  Leur  nom 
vient  de  ce  qu'à  l'origine  l'orgue  soutenait  la  note  sur 
laquelle  avait  lieu  le  repos.  —  Le  point  d'arrêt  est  le 
signe  du  point  d'orgue  placé  sur  un  silence  qu'on  doit 
prolonger  au  delà  de  sa  durée  régulière. 

POINT,  terme  de  Typographie.  F.  CARAcrfeRBS  d'ivpbi- 

yBRlB. 

POINT,  dans  les  Jeux  de  cartes,  se  dit  du  nombre  qu'on 
attribue  à  chaque  carte.  L'as  vaut,  selon  les  jeux,  un  ou 
onze  pointa;  les  figures  valent  dix,  et  les  autres  cartes 
le  nombre  qu'elles  marquent.  Au  Piquet,  on  nomme 
Point  l'ensemble  des  points  que  composent  plusieurs 
cartes  de  même  couleur.  On  appelle  enfin  Points  les 
nombres  qu'on  marque  après  chaque  coup  de  Jeu  ou 
chaque  partie. 

POINT,  en  termes  de  Rhétorique,  s'entend  des  divisions 
d'un  sermon. 

POINT,  en  termes  de  Jurisprudence,  est  synonyme  de 
qwstion,  comme  quand  on  dit  un  potnl  de  Droit,  un 
pomi  de  fait, 

POINT  d'honrbub,  ce  qu'on  regarde  comme  intéressant 
l'honneur.  Louis  XIV  institua  un  Tribunal  du  point 
d*honneur,  composé  des  maréchaux  de  France,  pour  dé- 
cider si  telle  offense  valait  ou  non  la  peine  de  se  battre. 
Un  édit  du  13  janvier  1771  établit  près  de  chaoue  séné- 
chaussée un  ConseU  du  point  d'honnêw,  dont  les  mem- 
bres s'appelaient  Officiers  dupoinl  Shonneur,  et  Jugeaient 
les  différends  survenus  entre  gentilshommes.  Ces  institu- 
tions disparurent  à  la  Révolution. 

ponvT  DB  vob,  se  dit,  en  Perspective,  du  point  <iue  le 
peintre  ou  le  dessinateur  choisit  pour  mettre  les  objets 
en  perspective. 

POINTS,  en  termes  de  Blason  •  divisions  carrées  de 


POI 


1447 


POI 


reçu,  dont  tes  unes  sont  dVn  émail,  et  les  autres  d*uQ 
autre  émaiU 

pomrs-voYBLLES.  F.  HûiraIque  (Écriture). 

POINTAGE,  action  de  diriger  une  bouche  à  fen  de 
manière  que  le  projectile  atteigne  un  but  déterminé. 
II.  Page  a  publié  une  Théorie  du  pointage. 

POINTE,  Instrument  d*acier  à  Tusage  des  graYeurs. 
Pour  graver  à  Teau-forte,  on  dessine  avec  la  pointe  sur  le 
remis  dont  la  planche  est  enduite,  et  on  découvre  ainsi 
les  parties  où  Tacide  doit  mordre.  On  grave  à  la  pointe 
tâche,  lorsqu'on  forme  des  traits  ou  des  hachures  sans 
recourir  à  l'eau -forte  :  dans  ce  cas,  la  pointe  ouvre  le 
cuivre  sans  en  rien  détacher. 

POINTE  DB  DIAMANT.  V.  DlAMANT. 

POINTILLÉ,  manière  de  peindre  qui  consiste  à  poser 
les  couleurs  par  petits  points,  au  moyen  d*un  pinceau 
bien  appointé.  On  emploie  le  pointillé  surtout  dans  la  mi- 
niature, et  pour  les  chairs.  On  dessine  aussi  au  pointillé, 
avec  la  pierre  noire  ou  Tencre  de  Chine.  Enfin  il  y  a  une 
gravure  au  pointillé.  V.  Gravure. 

POINTURES,  en  termes  de  Typographie,  petites 
pointes  de  fer  attachées  au  tympan,  lesquelles,  perçant, 
dans  les  blancs  du  milieu,  la  feuille  de  papier  qu'on  im- 
prime d'un  côté,  servent  à  la  poser  parfaitement  en  re- 
gistre quand  on  imprime  l'autre  côté. 
POIRE  D'ANGOISSE.  V.  Angoisse. 
POISSON.  Il  est,  dans  ITconographie,  l'emblème  de 
la  qualité  de  chrétien,  parce  que  le  mot  grec  IX6TS 
(uMthue)^  qui  veut  dire  poisson,  renferme  les  initiales 
des  mots  Jésus  Christus  Dei  fUius  salvator.  Le  pois- 
son, parce  qu'il  vit  dans  l'eau,  est  aussi  l'emblème  du 
baptême. 

POISSY  (Caisse  de),  caisse  qui  servait  autrefois  à  payer 
comptant  les  achats  faits  par  les  bouchers  de  Paris  sur 
les  marchés  aux  bestiaux  de  Sceaux  et  de  Poissy.  Elle 
fut  instituée  par  édit  du  10  novembre  1733,  confirmée  en 
1743,  1744  et  1755,  supprimée  en  1776,  rétablie  en  1779, 
abolie  encore  avec  toutes  les  corporations  en  1701 ,  et 
reconstituée  par  décret  du  6  février  1811.  Le  fonds  de  la 
caisse  était  formé  avec  les  cautionnements  des  bouchers, 
s'élevant  à  1,50:),(M)U  fr.  Elle  percevait  d'abord  sur  le 
montant  des  ventes  un  droit  dfe  3  1/2  p.  100,  mis  à  la 
charge  des  producteurs  ;  plus  tard  ce  fut  un  droit  fixe 
par  tôte  de  bétail,  10  fr.  pour  un  bœuf,  6  f^.  pour  une 
vache,  2  fr.  40  c.  pour  un  veau,  0  fr.  70  c.  pour  un  mou- 
ton, droit  acquitté  par  les  bouchOiS.  Les  prêts  de  la  caisse 
étaient  faits  à  l'intérêt  de  5  p.  100  l'an;  les  bouchers 
souscrivaient  des  engagements  emportant  contrainte  par 
corps.  La  caisse  de  Poissy  a  été  supprimée  en  1858. 

FoissY  (Église  de).  Cette  église,  autrefois  collégiale,  et 
qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  une  abbaye  démolie  en 
1802,  pi-ésente  un  assemblage  de  constructions  de  diffé- 
rentes époques,  mais  qui  n'en  sont  pas  moins  intéres- 
santes. La  nef,  le  chœur,  les  chapelles  des  deux  côtés  du 
chœur,  une  partie  du  bas  côté  méridional,  la  tour  cen- 
trale et  la  tour  occidentale,  sont  en  style  roman  du  xi*  et 
du  xu*  siècle;  le  collatéral  du  nord  est  en  style  ogival 
du  XIV*;  les  chapelles  des  collatéraux  i^partiennent  au 
xv«,  et  le  porche  méridional  au  commencement  du  xvi*. 
De  nombreuses  réparations  ont  été  faites  plus  tard  à  tout 
l'édifice,  mais  en  conservant  les  anciennes  formes  :  ainsi, 
au  xvu"  siècle,  on  rebâtit  la  tour  occidentale  et  les  pre- 
mières travées  de  la  nef,  et  on  refit  le  grand  comble. 
D'importantes  restaurations  ont  été  aussi  exécutées  de 
nos  Jours.  L'église  de  Poissy  a  68  met.  de  longueur,  et 
33  met.  de  la^ur,  et  est  dépourvue  de  transept.  On  y 
remarque  quelques  débris  des  fonts  baptismaux  sur  les- 
quels Louis  XI  a  été  baptisé,  et,  dans  la  chapelle  de 
S^-Barthélemy,  de  belles  boiseries  du  xvii*  siècle.  La 
tour  oui  s'élève  au-dessus  de  la  dernière  travée  de  la 
nef,  à  rentrée  du  chœur,  est  une  des  plus  belles  et  des 
plus  pures  du  style  roman  :  aux  angles  de  sa  base  carrée 
se  dressent  quatre  pinacles  massifs;  le  beffroi  est  un  oc- 
togone irrégulier,  percé  d'arcades  Jumelles  sur  les  grands 
cdtés  et  d'arcades  simples  sur  les  petits;  la  flèche  est  en 
charpente. 

POITEVIN  (Dialecte),  un  des  dialectes  de  la  Langue 
^oc  {V,  ce  mot).  On  y  distingue  deux  variétés,  le  lan- 
gage du  haut  Poitou ,  qui  est  plus  doux ,  et  celui  du  bas 
Poitou,  qui  se  ressent  du  voisinage  de  la  Bretagne.  La 
prononciation  du  poitevin  est  lente,  monotone,  très-ac- 
centuée. Parmi  les  œuvres  écrites  dans  ce  dialecte,  on 
remar({ue  le  recueil  intitulé  La  gente  poitevine,  dont  il 
existait  déjà  plusieurs  éditions  k  la  fin  du  xvi'  siècle,  et 
l^  MijaiUe  d  Tauny  (La  Gageure  d'Antoine),  comédie 
Mr  Jean  Drouet,  apothicaire  à  Saint-Maixent,  1651.  Le 


langage  de  la  Saintonge,  de  l'Âunis  et  de  l'Angoumois  est 
une  variété  du  poitevin.  Dans  la  Gavacherie  (enclave  des 
arrondissements  de  Liboume,  de  la  Réole  et  de  Mar- 
mande),  on  parle  le  saintongeois;  c'est  que  des  colons  de 
la  Saintonge  y  furent  appelés  aux  xV  et  xvi«  siècles. 
V,  De  La  Fontenelle  de  Vaudoré,  Recherches  sur  la  langi* 
poitevine.  B. 

POITIERS  (Église  S^-Pieriie,  à),  église  cathédrale 
commencée  en  1162  par  Henri  II,  roi  d'Angleterre,  sur 
les  instances  de  sa  femme  Éléonore  d'Aquitaine,  à  l'em- 
placement de  plusieurs  édifices  antérieurs,  et  consacrée 
seulement  en  1370.  Dans  cet  intervalle,  l'architecture 
religieuse  modifia  plusieurs  fois  ses  principes,  et  l'on  en 
trouve  la  preuve  dans  les  diverses  parties  de  l'édifice, 
qui,  entrepris  en  style  romano-byzantin,  est  arrivé  au 
style  o^val  secondaire.  L'extérieur  de  la  cathédrale  de 
Poitiers  est  assez  lourd  :  on  n'y  voit  ni  ces  combles  aigus, 
ni  ces  frontons  pyramidaux  qui  donnent  de  l'élancement 
à  l'ensemble,  ni  ces  tours  et  ces  flèches  qui  dominent  les 
constructions  environnantes  avec  tant  d'élégance  ou  de 
majesté  ;  tout  parait  écrasé.  Le  portail,  large  de  38  met., 
fut  construit  de  1307  à  1312  :  il  est  percé  de  trois  portes 
surmontées  de  frontons  peu  développés,  et  dont  les 
voussures  sont  garnies  de  statuettes  d'Anges  et  de  Saints 
abritées  de  dais;  mais  les  niches  latérales  n'ont  plus 
leurs  statues  de  princes  et  d'évêques,  qui  ont  été  dé- 
truites à  la  Révolution.  Les  sculptures  des  tympans 
sont  bien  conservées  :  au-dessus  de  la  porte  centrale  on 
a  représenté,  en  trois  compartiments  superposés,  la  Ré- 
surrection des  morts,  la  Séparation  des  Justes  et  des  mé- 
chants, et  Jésus-Christ,  entouré  d'Anges,  prononçant  le 
dernier  jugement;  les  deux  autres  tympans  sont  chargés 
de  sculptures  relatives  à  la  S^'  Vierge  et  à  S'  Pierre.  Une 
grande  rose  centrale,  endommagée  par  un  incendie  en 
1681,  et  deux  fenêtres  surmontent  les  portes.  La  façade 
est  flanquée  de  deux  tours  peu  décorées,  et  dont  la  partie 
supérieure  porte  les  caractères  de  l'art  du  xv^*  siècle; 
celle  de  droite  a  34  met.  de  hauteur,  et  celle  de  gauche 
32  met.  Sur  le  flanc  gauche  de  l'édifice,  près  du  transept, 
et  abritée  sous  un  auvent  disgracieux,  est  la  porte  S^- 
Michel,  que  décorent  de  belles  sculptures.  Au-dessus  du 
chœur  s'élevait  Jadis  une  flèche  de  plus  de  100  met.;  en- 
dommagée par  la  foudre  en  1713,  on  la  démolit  en  1769. 
—  A  l'intérieur,  où  l'on  descend  par  un  escalier  de 
4  marches,  la  cathédrale  de  Poitiers  a  04"*,50  de  lon- 
gueur, 30*" ,30  de  largeur  dans  la  nef,  et  56™,50  à  la 
croisée,  20"*,50  de  hauteur  sous  la  voûte  principale ,  et 
24",20  dans  les  bas  côtés.  Pour  ajouter  à  la  fuite  des 
lignes  et  à  la  profondeur  de  la  perspective,  l'architecte  a 
diminué  la  largeur  des  nefs  et  abaissé  les  voûtes  vers  le 
chevet.  Les  arâdes  de  la  grande  nef  sont  en  ogive,  avec 
des  moulures  toriques;  mais  les  arcatures  décoratives 
des  nefs  latérales  sont  à. plein  cintre.  Les  piliers  qui  sou- 
tiennent les  voûtes  sont  très-espaces,  et  l'on  n'en  compte 
que  six  de  chaque  côté;  ce  sont  des  massifs  entourés  de 
colon  nettes  groupées  en  faisceaux.  Les  voûtes,  établies 
sur  de  belles  nervures  rondes,  sont  légèrement  surélevées 
en  coupoles,  et  partagées  en  compartiments  nombreux. 
Parmi  les  fenêtres,  les  unes  sont  romanes,  les  autres 
ogivales  ;  une  grande  partie  des  vitraux  peints  a  été  dé- 
truite par  les  calvinistes.  L'abside  est  terminée  carré- 
ment par  une  muraille  droite,  percés  de  trois  fenêtres 
romano-byzantines.  L'autel,  au  lieu  d'être  au  fond  de 
l'église^  est  placé,  depuis  1623,  sous  la  grande  voûte  du 
transept.  La  cathédnUe  de  Poitiers  a  subi  plusieurs  fois 
des  restaurations  inintelligentes  ;  on  remtutiue  surtout 
le  mauvais  goût  qui  présida^  pendant  le  xvui*  siècle,  à 
l'én^ction  d'une  ^erie  à  balustres  autour  de  l'édifice. 
Les  fonts  baptismaux,  la  chaire,  le  chemin  de  la  croix, 
un  certain  nombre  de  statues,  de  peintures  et  d'orne- 
ments modernes,  choquent  Clément  la  vue.  V.  l'abbé 
Auber,  Histoire  de  la  cathédrale  de  Poitiers ,  2  vol. 
in-8'>.  B. 

POITIERS  (Église  Notrb-Damb,  à^,  monument  très-inté- 
ressant de  l'architecture  romano-oyzantine  du  xti*  siècle, 
surtout  à  cause  de  son  grand  portail,  dont  la  décoration 
couvre  tout  le  mur  de  face.  Le  sommet  de  ce  portail  se 
termine  en  pignon  interrompu^  et  est  accompagné  de 
deux  tourelles  a  toit  conique  et  appareillé  en  écailles  de 
poisson  :  au  milieu  du  piffâon,  un  cadre  creux,  en  forme 
d'amande,  contient  le  Chnst  bénissant,  et  près  de  lui  les 
attributs  des  Évangélistes.  Au-dessous  est  une  grande 
fenêtre,  formée  d'une  ancienne  rose,  et  flanquée  de  denx 
rangs  de  niches.  Plus  bas  se  trouve  la  grande  porte  en 
plein  cintre,  et,  à  ses  côtés,  deux  fausses  portes  en  ogive 
obtuse.  Les  scènes  sculptées  dans  les  archivoltes  em- 


POL 


un 


POL 


brassent  toate  rhistolre  sacrée  :  on  y  rencontre  Adam  et 
Eve,  Nabuchodonosor  et  les  quatre  grands  prophètes,  la 
Visitation,  la  Nativité,  etc.  La  nef  de  l'église  Notre-Damo 
est  voûtée  en  bercean,  et  Tabside  en  cul-de-four;  les 
piliers  sont  lourds  et  trapus;  les  collatéraux,  étroits  et  à 
voûte  d'arête  se  prolongent  autour  du  sanctuaire.  Pon- 
dant le  XVI'  siècle,  on  a  ajouté  des  chaçelles  au  bas  côté 
(çauche,  et  un  portail  au  midi.  L'église  a  une  petite 
Grypte. 

raiTiERS  (Tenfple  de  S*-Jban,  èi],  Tun  dos  plus  anciens 
monuments  roligieux  qui  existent  en  France.  Après  avoir 
été  considéré  comme  un  temple  élevé  sous  l'empereur 
Auguste,  ou  au  m'  siècle,  et  même  comme  un  simple 
tombeau  romain,  il  pisse  aujourd'hui  pour  une  construc- 
tion chrétienne,  pour  un  baptistère  du  vi«  siècle.  Cest 
un  corps  de  b&timent  en  forme  de  carré  long  (13  met. 
sur  8),  auquel  une  addition  a  été  faite  pendant  le  xi*  ou 
le  xu'  siècle,  parallèlement  au  grand  côté  du  carré  qui 
est  au  S.-O.  Les  petits  côtés  du  carré  sont  terminés  par 
un  pipnon  ou  gable  à  double  égout,  dont  le  centre  est 
rempli  par  trois  grandes  pierres  sculptées.  La  pierre  du 
milieu,  qui  est  la  plus  haute,  présente  un  carré  enca- 
drant une  rosace,  et  surmonté  d'un  petit  fronton  trian- 
gulaire dont  le  centre  est  orné  d'un  fleuron  ;  les  deux 
autres  pierres  sont  en  forme  de  tiiangle,  comprenant  un 
fleuron  à  6  feuilles  formées  de  briques  incrustées.  Une 
corniche  supportée  par  des  modillons  règne  au-dessous 
du  gable,  et  plus  bas  se  trouvent  plusieurs  rangs  alternés 
de  briques  et  de  pierres  de  taille  :  on  a  placé  dans  cette 
partie  du  mur,  entre  deux  frontons  triangulaires  dans  le 
môme  goût  que  ceux  du  gable,  une  arcade  cintrée,  re- 
couvrant une  croix  grecque.  Ces  divers  ornements  repo- 
sent sur  une  autre  corniche,  soutenue  par  quatre  pilastres 
courts  et  peu  saillants,  et,  au  pied  de  ces  pilastres,  s'ou- 
vrent deux  fenêtres.  Le  Jjas  de  la  construction  est  un 
mur  droit  pour  l'un  des  petits  côtés,  et  une  espèce 
d'avant-corps  semi-circulaire  pour  l'autre.  —  A  l'inté- 
rieur de  l'édifice,  plusieurs  arcades  reposent  sur  des  co- 
lonnes en  marbre,  de  grosseur  et  de  hauteur  inégale, 
et  qui  paraissent  avoir  été  arrachées  &  des  monuments 
plus  anciens.  Les  chapiteaux,  très-endommagés,  diffèrent 
presaue  tous  les  uns  des  autres,  et  s'adaptent  assez  mal 
avec  tes  fûts.  Sous  le  centre  de  l'édifice  existe  un  caveau, 
qu'on  croit  avoir  servi  de  piscine. 

POITIERS  (Les  Arènes  de),  amphithéâtre  romain,  con- 
struit sons  les  empereurs  Adrien  et  Antonin,  et  qui  était 
déjà  détruit  au  vi*  siècle.  Il  n'en  reste  aujourd'hui  que 
des  ruines.  Plus  considérable  auc  celui  de  Nîmes,  il 
avait  i55"*,80  sur  son  grand  axe,  130"\50  sur  le  petit,  et 
27™,G4  d'élévation;  les  constructions  avaient  41 '",73 
d'épaisseur.  On  a  calculé  que,  sur  les  60  gradins,  on 

fouvait  placer  au  moins  50,000  personnes.  Il  y  avait 
24  vomttoires  pour  les  sorties. 

POITRINAL,  arme.  F.  notre  Diclionnaire  de  Biogra- 
phie et  d*  Histoire. 

POLA  (Amphithéâtre  de),  en  Istrie.  Ce  monument 
romain  est  bMi  près  de  la  mer,  sur  le  penchant  d'une 
colline,  et  la  moitié  des  gradins  de  l'étage  inférieur  a  été 
aillée  dans  le  roc.  L'élévation  de  l'amphithéâtre  se  com- 
pose d'un  soubassement,  percé  de  baies  carrées  dans  les 
parties  où  l'inclinaison  du  sol  l'a  permis  :  au-dessus  sont 
deux  étages  de  galeries,  de  72  arcades  chacun,  entre  les- 
quelles sont  des  contre-forts  ou  espèces  de  pilastres  dont 
les  chapiteaux  n'appartiennent  à  aucun  ordre;  le  tout 
est  appareillé  en  bossages.  Un  3"  étage,  formant  attiquc, 
est  percé  de  croisées;  il  y  a,  dans  la  partie  haute  de  cet 
attique,  des  ouvertures  beaucoup  plus  larges  que  longues, 
qui  semblent  avoir  été  pratiquées  pour  éclairer  une  divi- 
sion de  plancher  dont  on  voit  encore  les  scdllements.  On 
pense  que  le  2*  étage  était  couvert  d'un  portique  inté- 
rieur, et  que  tous  les  gradins  étaient  en  charpente.  Le 
grand  diamètre  de  l'amphithéâtre  est  de  138  met.,  et  le 
petit,  de  108  met.;  la  masse  des  constructions  comprises 
entre  la  face  extérieure  et  le  podium  est  de  34  mèL  Une 
particularité  qu'on  ne  trouve  pas  dans  les  autres  édifices 
de  ce  genre,  ce^i  que  le  périmètre  extérieur  est  flanqué 
lie  4  avant-corps,  percés  de  deux  arcades  chacun,  et  dans 
lesquels  étaient  pratiqués  les  escaliers.  V,  Stancovichy 
Dello  anfUeatro  di  Pola,  Venise,  1822,  in-8<>. 

POLACCA  (Alla).  V.  Polonaise. 

POLACRË  (de  l'italien  polacra),  bâtiment  en  usage 
dans  la  Méditerranée.  Il  a  un  éperon  comme  celui  des 
chebecs,  deux  m&ts  à  pible,  c-à-d.  d'un  seul  morceau, 
et  un  ar^mon  portant  une  hune  et  un  hunier,  avec  un 
IlOttt  de  beaupré.  Il  porte  ordinairement  des  voiles  car- 
nJMf  et  quelquefoii  une  voile  eo  pointe  qu'on  nomme 


aussi  polacre*  Une  petite  polacre  8*appeUe  an  poiaeron 
POLAIRES  (Cercles).  >  V,  notn  Dictionnaire  de  Bîo» 
POLDERS.  )     graphie  et  d'Histoire. 

POLÉMIQUE  (du  grecpo/^mo«,  guerre,  combat),  s'em- 
ploie, comme  adjectif,  pour  qualifier  an  écrit,  un  ou- 
vrage de  discussion,  et,  substantivement,  pour  désigner 
l'art  de  discuter,  surtout  les  questions  politiqiies,  scien- 
tifiques ou  littéraires.  Les  pamphlets,  les  journaux,  etc., 
sont  des  écrits  polémiques. 
POLES.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Cnettonnaire  d$ 
POLÈTES.  )  Biographie  et  d'Histoire. 
POLICE  (du  çrec  polis,  ville).  C'est  le  gouvernement, 
la  bonne  administration  de  la  cité,  la  mission  de  proté- 
ger, do  défendre  et  de  rassurer,  la  conséquence  de  la  réu- 
nion des  hommes.  Définie  par  la  loi  du  3  brumaire  an  iv 
(25  oct.  1795),  la  Police  est  instituée  pour  maintenir 
l'ordre  public,  la  liberté,  la  propriété,  la  sûreté  indivi- 
duelle. Elle  pourvoit  à  l'abondance  et  à  la  propreté  dans 
l'enceinte  des  villes,  à  la  poursuite  des  fraudes  sous  quel- 
que forme  qu'elles  se  présentent.  Son  caractère  principal 
est  la  vigilance  ;  aussi  a-t-elle  un  œil  pour  écusson.  De- 
vant s'exercer  par  la  conciliation,  la  bienveillance,  la 
persuasion,  et  au  besoin  par  l'emploi  de  la  force,  les  per- 
quisitions et  les  arrestations,  efle  ne  peut  porter  om- 
brage aux  gens  honnêtes.  Elle  doit  se  trouver  partout 
sans  rester  toujours  ostensible,  protéger  les  individu? 
dans  l'intérêt  général ,  empêcher  ce  qui  peut  troubler  la 
paix  intérieure,  prescrire  des  mesures  pour  l'exécution 
des  lois,  pour  prévenir  les  crimes  et  délits,  ou  pour  saisir 
les  coupables.  La  Police  se  divise  en  police  administra' 
tive  et  police  judiciaire. 

La  Police  administrative,  démembrement  du  pouvoir 
législatif,  se  subdivise  en  police  générale  et  police  muni- 
cipale. Elle  est  exercée  dans  la  France  par  le  ministre  de 
l'intérieur  pour  les  mesures  générales,  et  dans  chaque 
dépaitement  par  les  préfets,  sous-préfets  et  maires,  qui 
peuvent  faire  des  règlements  sur  les  matières  dévolues  à 
l'autorité  municipale,  en  rappelant  et  interprétant  les 
lois  organiques;  ils  ont,  dans  les  commissaires  et  agents, 
des  auxiliaires  d'exécution.  La  Police  administrative  est 
réglementée  par  les  lois  et  ordonnances  concernant  :  la 
viabilité  pour  les  voies  de  communication  ;  la  police  ru- 
rale pour  les  campagnes  ;  la  police  de  la  presse  pour  la 
politique;  celle  des  manufactures,  des  ateliers  insa- 
lubres, des  poids  et  mesures,  de  la  garantie  des  métaux 
pour  l'industrie;  la  police  médicale  et  la  police  des 
mœurs  pour  les  personnes.  C'est  une  institution  protec- 
trice, destinée  à  empêcher,  par  des  règles  et  des  précau- 
tions locales,  la  perpétration  des  mauvaises  actions,  h 
surveiller  ceux  dont  la  conduite  peut  devenir  préjudi- 
ciable aux  autres,  à  rendre  à  tous  les  citoyens  une  bonne 
et  prompte  justice,  à  contenir  certains  abus  dans  les 
bornes  de  la  nécessité,  à  cacher  ce  qu'il  vaut  mieux 
ignorer  que  punir,  enfin  à  éclairer  le  pouvoir  sur  l'opi- 
nion, les  désirs ,  les  craintes  et  les  espérances  de  la  po- 
pulation. La  Police  générale  a  pour  base  rarrêté  du 
5  brumaire  an  ix  (27  oct.  1800)  et  le  décret  du  25  mars 
1811  ;  cllcj  comprend  notamment  les  passe-ports,  et  les 
ports  d'armes,  la  mendicité  et  le  va^ondage,  les  pri- 
sons, la  recherche  des  déserteurs,  les  cultes,  la  librairie 
et  l'imprimerie.  Les  lois  des  16-24  août  1790  et  10-2â 
juillet  1791  ont  déterminé  ainsi  les  attributions  de  la  Po- 
lice municipale  :  la  petite  voirie,  la  liberté  de  la  voie 
publique,  les  voitures,  la  salubrité,  les  incendies,  inon- 
dations et  déb(icles,  les  accidents  et  suicides,  la  Morgue, 
les  exhumations;  la  police  de  la  bourse,  de  la  chasse; 
la  sûreté  du  commerce,  les  patentes  et  taxes,  les  livrets 
d'ouvriers;  les  abattoirs;  les  hôteliers;  la  surveillance 
des  condamnés  libérés,  et  des  établissements  ou  lieux  pu- 
blics, tels  que  thé&tres,  bals,  billards,  etc.;  les  approvi- 
sionnements; la  navigation;  la  conservation  des  monu- 
ments; les  aliénés,  les  nourrices,  et  les  enfants  trouvés; 
les  extraditions;  l'affichage  et  le  colportage;  les  postes 
militaires,  les  armes,  les  poudres,  etc.  Le  service  de  la 

Eolice  dans  les  villes  dont  la  population  excède  40,000  ha- 
itants,  a  été  organisé  par  la  loi  du  5  mars  1855  et  les 
décrets  des  26  sept  1855  et  27  nov.  1859. 

La  Police  judiaaire,  ayant  pour  objet  l'exécution  des 
lois  et  l'application  des  peines  légales,  s'exerce  sous  l'au- 
torité des  Cours  d'appel  suivant  les  dispositions  du 
Code  d'Instruction  criminelle  pour  la  recherche  des 
crimes,  délits  et  contraventions,  pour  en  rassembler  les 
preuves  et  en  livrer  les  auteurs  aux  tribunaux.  .Lçs  offi- 
ciers de  Police  judiciaire  sont  :  les  procureurs  delà  Rép., 
les  juges  d'instruction,  les  juges  de  paix,  les  commis- 
saires de  police,  les  maires  et  les  adjoints,  les  offidait 


POL 


144» 


POL 


ie  gendarmerie,  les  gardes  champêtres  ou  forestiers. 
V.  Delamtrre,  TraUé  de  la  police,  Paris,  1707-1719, 4  vol. 
!n-roI.  :  le  4*  fut  publié  en  1738  par  Lcclerc  du  Briliet; 
Do  La  Poix  de  Fréminvllle,  Dictionnaire  ou  Traité  de  la 
police  des  villee,  bourgs,  paroisses  et  seigneuries  de  la 
campagne,  Paris,  1758,  ia-4»;  Guichard,  Code  de  police, 
1791  et  1794;  Peuchct,  Collection  des  lois,  ordonnances 
et  règlements  de  police  depuis  le  xiii*  siècle  jusqu'à  l'an- 
née 1818,  Paris.  1819,  8  vol.  iii-8<»;  Léopold,  Dictionnaire 
général  de  police  administrative  et  judiciaire  de  la 
l-rance,  3"  édit.,  1822,  in-8«;  Allctz,  Dictionnaire  de  po- 
lice moderne  pour  toute  la  France,  2»  ôdit,  1823, 4  vol. 
in-8«;  Boucher  d'Argis,  Code  de  simple  police,  1831, 
in*8*;  Trébuchot,  El  ou  in  et  Labat,  Nouveau  Diction- 
naire  de  police,  1835,  2  vol.  in-8»;  De  Molènes,  Des 
fonctions  d'officier  de  police  judiciaire,  1834,  in-8o; 
C.  Berriat  Saint-Prix ,  Manuel  de  police  jiédiciaire  et 
municipale,  3«  édit.,  1850,  in-18;  Allain,  Code  formulaire 
des  officiers  de  police  judiciaire,  1853,  2  vol.  in -12; 
Truy,  Manuel  de  police  de  la  France,  1853,  in-18;  Jocglé 
et  Mauny,  Manuel  de  police,  1853,  in-18;  Paul  Gère, 
àlanuel  du  fonctionnaire  chargé  de  la  police  judiciaire, 
administrative  et  municipale,  1853,  in-18;  Miroir  et 
Brissot-Warvillc,  Traité  de  police  municipale  et  rurale, 
184i,  2  vol.  in-8<»;  De  Champagny,  Traité  de  la  police 
municipale,  1844-47,  3  vol.  in-8o;  Frégier,  Histoire  de 
l'administration  de  la  police  de  Paris  depuis  Philippe- 
Auguste,  1850,  2  vol.  in-8<>;  Bacqua,  Code  annoté  de  la 
police  administrative,  judiciaire  et  municipale,  1850-57, 
in-8o;  Collet-Meigrct,  Code  de  la  police  administrative, 
judiciaire  et  municipale,  1850,  in-8®;  Pionin,  Diction- 
naire de  police,  1850,  in-8».  T— y. 

POLICE  (Agents  de),  nom  sous  lequel  on  comprend  les 
sergents  de  ville,  appariteurs,  inspecteurs  de  police, 
officiers  de  paix,  gardes  de  ville,  etc. 

poLicB  f  Bonnet  de).  K.  Bonnet. 

POUCE  (Commissaires  do>,  fonctionnaires  chargés  de 
veiller  à  la  tranquillité  puolique,  de  faire  observer  les 
lois  urbaines  et  de  sûreté.  Leur  origine  est  fort  ancienne. 
Au  Gli&telet  de  Paris,  leur  oITlce  était  devenu  héréditaire; 
ils  étaient  alors  les  premiers  juges  des  contraventions, 
dont  actuellement  ils  ont  seulement  la  constatation  et  la 
poursuite  ;  ilp  s'occupaient  de  la  police  relativement  aux 
mœurs,  à  la  santé,  aux  vivres,  à  la  voirie,  à  la  sûreté 
publique,  an  commerce,  aux  sciences  et  arts  libéraux, 
aux  domestiques  et  aux  pauvres ,  recevaient  les  plaintes, 
faisaient  les  informations  et  interrogatoires.  La  loi  dos 
21-29  sept.  1791  a  prescrit  Tinstitution  de  commissaires 
do  police  dans  toutes  les  villes  où  on  le  Jugerait  néces- 
saire. De  nos  Jours,  la  plus  grande  partie  des  attributions 
judiciaires  quMls  ont  eues  longtemps  à  titre  de  Com- 
misscûres-enquéteurs,  est  dévolue  aux  Juges  dMnstruc- 
tion;  mais  ils  ont  conservé,  à  Paris  surtout,  Finitiativo 
des  informations,  en  agissant  immédiatement  comme 
sentinelles  avancées  de  la  JusUco  pour  empêcher  ou 
constater  les  écarts  contraires  aux  bonnes  mœurs,  à 
Tordre  et  &  la  probité.  Ils  procèdent  la  nuit  et  le  jour, 
donnant  des  soins  non  interrompus  aux  intérêts  sociaux, 
à  la  sûreté  des  personnes  et  des  propriétés,  intervenant 
lors  des  incendies,  des  épidémies,  des  inondations,  des 
suicides  et  des  accidents.  Ainsi,  dans  ces  attributions 
variées,  leur  caractère  est  complexe;  car,  d'une  part, 
d'après  la  loi  du  22  Juillet  1791,  ils  ont,  indépendamment 
de  la  qualité  de  fonctionnaires  de  l'ordre  Judiciaire,  celle 
do  fonctionnaires  de  l'ordre  administratif,  comme  les 
préfets  et  les  maires  qu'ils  représentent,  étant  les  dcMé- 
Rués  permanents  du  pouvoir;  et,  d'autre  part,  d'après 
le  Code  d^ Instruction  criminelle,  ils  sont  magistrats  lors- 
qu'ils procèdentjudiciairement,  principalement  en  cas  do 
flagrant  délit,  comme  auxiliaires  du  procureur  de  la 


le  nettoiement  des  rues;  2*  de  la  solidité  des  bâtiments; 
3o  de  la  salubrité  des  comestibles,  et  de  la  régularité 
des  poids  et  mesures  ;  4»  de  l'usage  des  passe-ports  par 
les  voyageurs,  et  de  leur  inscription  sur  les  registres 
des  hôteliers.  Ils  participent  à  la  saisie  des  contrefa- 
çons; ils  ont  une  surveillance  dans  les  théâtres  et  au- 
tres lieux  publics  de  réunion  ;  ils  assistent  les  huissiers 
pour  les  séquestres  quand  les  portes  on  les  meubles 
sont  fermés,  les  gardes  champêtres  et  les  employés  de 
la  réçie  ou  de  la  douane  quana  il  s*agit  de  pénétrer  ju- 
diciairement dans  le  domicile  des  habitants;  ils  peu- 
vent enfin  arrêter  les  délinquants,  décerner  des  man- 
dats d*am#Der,  et  faire  des  perquisitions. 


D'abord  élus  au  scrutin  populaire  pour  deux  années 
aux  termes  d'une  loi  du  8  juin  1792  qui  leur  donnait  pour 
marque  distinctivo  un  chaperon  aux  trois  couleurs ,  ils 
furent  ensuite  soumis  à  la  désignation  de  diverses  autorités; 
aujourd'hui ,  conformément  à  la  Gonstitution  et  au  décret 
du  25  mars  1852,  ils  sont  nommés  pour  Paris  et  les  villes 
au-dessus  de  0,090  &mes  par  le  chef  do  l'État  sur  la  pré- 
sentation du  ministre  de  l'intérieur  et  la  proposition  du 
préfet ,  et  pour  les  autres  localités  par  le  préfet  directe- 
ment. Les  commissaires  prêtent  serment  entre  les  mains 
des  préfets;  ils  sont  onSciellemcnt  installés,  et  portent 
exceptionnellement  un  costume  désigné  au  décret  du 
31  août  1852;  la  ceinture  tricolore  reste  leur  signe  dis^ 
tinctif  dans  le  service  habituel.  Leur  compétence  s'étend 
dans  la  commune  où  ils  sont  établis,  quel  que  soit  leur 
arrondissement  particulier,  et  comprend  souvent  un  ou 
plusieurs  cantons.  Un  commissaire  central,  établi  dans 
certaines  grandes  villes,  et  subordonné  direct  du  préfet, 
a  une  autorité  sur  les  autres  commissaires  et  sur  leurs 
agents.  Les  commissaires  reçoivent  les  plaintes,  recher- 
chent les  infractions  aux  lois  pénales,  en  rassemblent  les 
preuves,  et  en  livrent  les  auteurs  aux  tribunaux  ;  leurs  pro- 
cès-verbaux font  foi  Jusqu'à  preuve  contraire.  Le  traite- 
ment et  les  frais  de  bureau  des  commissaires  do  police 
ont  été  réglés  :  par  le  décret  du  20  oct.  1859  pour  ceux 
de  province,  divisés  en  5  classes  (de  1,500  à  4,800  fr.,  y 
compris  les  frais  de  bureau)  ;  par  le  décret  du  8  déc.  1859 
pour  ceux  de  Paris,  divisés  en  3  classes  (0,000,  5,500  et 
5,000  fr.,  et  de  1 ,200  à  1 ,500  fr.  do  frais  de  bureau);  et  par 
le  décret  du  17  déc.  1859  pour  ceux  des  autres  communes 
du  département  de  la  Seine,  divisés  en  deux  classes.  I<cs 
commissaires  sont  les  subordonnés  des  procureurs  ^né- 
raux  et  des  procureurs  de  la  Uép.  pour  leurs  fonctions 
I  judiciaires  ;  us  sont,  pour  leurs  fonctions  administratives, 
I  les  subordonnés  du  préfet  de  police  à  Paris,  des  préfets, 
sons-préfets,  et  maires  dans  les  départements,  selon 
\  l'importance  de  chaque  localité  ;  ils  peuvent  être  suspen* 
dus  disdplinairement  par  les  préfets,  et  révoqués  par 
le  chef  de  l'Etat  ou  le  p^fet  qui  les  a  nommé».  L  outrajre 
par  paroles,  par  écrit  ou  par  gestes,  la  rébellion ,  les  vio- 
lences envers  un  commissaire  de  police,  sont  punis  par 
les  art.  222  et  suiv.  du  Code  pénal,  d'un  emprisonnement 
plus  au  moins  long  selon  que  ce  roagistra(>  exerçait  ses 
fonctions  judiciaires  ou  administratives.  —  V,  Ancest, 
Code  des  commissaires  de  police,  1829,  in-8°;  Rabassc, 
.  Manuel  des  commissaires  de  police^  1837,  in-12;  Sorbet, 
Dictionnaire-Formulaire  du  commissaire  de  police,  1855, 
in-8°;  Durand  de  Valley,  Mémento  du  commissaire  de 
police,  1857,  in -8®;  Bellanger,  Manuel  anatytiqtie  à 
l'usage  des  commissaires  de  police,  1858,  in-8°.      T— y. 

POLICE  (Lieutenant  général  de).  V,  Lieutenant,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

POLICE  (Ministère  de  la).  V,  MimsTÈnE,  dans'notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire. 

POUCE  (Préfet  de].  V,  Préfet,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

POLICE  (  Salle  de  ) ,  local  affecté  dans  une  caserne  aux 
hommes  punis  pour  des  fautes  ordinaires  contre  la  dis- 
cipline. Ils  ne  sont  dispensés  d'aucun  service,  reprennent 
leur  punition  au  retour,  assistent  aux  classes  ordinaires 
d'instruction,  et  sont  en  outre  exercés  deux  fois  par  jour, 
et  pendant  deux  heures,  au  peloton  de  punition.  Les  sim- 
ples soldats  sont  employés  à  toutes  les  corvées  du  quar- 
tier. Les  salles  de  police  des  sous-officiers  sont  distinctes 
(le  celles  des  soldats.  L'absence  à  un  appel ,  la  désobéis- 
sance, quelques  mauvais  propos,  une  querelle,  l'état 
d'ivresse,  etc.,  sont  des  motifs  d'envoi  h  la  salle  de  police. 

POUCE  (Tribunaux  de).  Dans  tous  les  cantons  de  France, 
un  Juge  de  paix  présidant,  un  commissaire  de  police 
remplissant  les  fonctions  du  ministère  public,  et  un  gref- 
fier, composent  le  tribunal  de  police  institué  par  les  Codes 
pour  connaître  de  toutes  les  contraventions.  Dans  les 
communes  non  cantonales,  les  maires  connaissent,  con- 
curremment avec  les  Juges  de  paix,  de  certaines  contra- 
ventions seulement.  Les  contraventions  sont  des  manque- 
ments aux  prescriptions  qui  ont  pour  but  de  prévenir  les 
malheurs,  les  accidents  ou  les  crimes,  de  prêter  l'intérêt 
général,  la  sûreté  publique,  l'ordre,  les  convenances 
même,  les  personnes  et  les  propriétés,  d'entretenir  la 
propreté,  la  salubrité,  la  liberté  de  circulation  dans  la 
cité.  Ce  sont  des  faits  de  négligence,  d'omission ,  d'oubli 
ou  d'erreur,  punissables  par  cela  même  qu'ils  ont  existé, 
et  les  tribunaux  do  police  ne  peuvent  admettre  aucune 
excuse,  pas  même  Tignorance  et  la  bonne  foi.  Le  livre  IV 
du  Code  pénal  a  séparé  en  trois  classes  les  principales 
contraventions  du  ressort  des  tribunaux  de  pouce.  La  pre- 


POL 


i450 


mière  claMe,  dont  la  pénalité  est  de  i  à  5  fr.,  comprend 
les  négligences  pour  Tentretien  des  cheminées,  réchenil- 
lage,  le  tir  de  pièces  d*artiâce,  Téclairage,  le  nettoiement, 
rembarras  des  rues,  la  réparation  des  édifices,  le  Jet 
d'immondices,  l'abandon  d'objets  dont  puissent  abuser 
les  malfaiteurs,  le  maraudage  des  fruits,  les  glanages, 
r&telages  ou  çtippillages  prohibés,  les  injures  proférées 
sans  proYOcatioD,  le  passÎEige  illicite  sur  le  terrain  d'au- 
trui ,  enfin  l'inexécution  des  prescriptions  imposées  par 
les  règlements  publiés  ou  notifiés.  La  seconde  classe,  ayant 
pour  pénalité  6  à  10  fr.  d'amende,  atteint  ceux  qui  contre- 
viennent aux  bans  des  vendanges;  les  hôteliers  n'inscri- 
vant pas  régulièrement  leurs  locataires;  les  conducteurs 
de  voitures  qui  violent  les  ordonnances  les  concernant; 
les  individus  qui  ont  établi  publiquement  des  jeux  de 
hasard  ;  ceux  qui  laissent  divaguer  des  fous  ou  des  ani- 
maux malfaisants,  qui  jettent  des  corps  durs  ou  des  im- 
mondices, qui  passent  sur  les  terrains  chargés  de  récoltes, 
qui  refusent  de  recevoir  la  monnaie  légale,  ou  de  prêter 
secours  lors  des  accidents,  incendies,  inondations  ou 
tumultes;  enfin  ceux  qui  dérobent  les  récoltes  encore  sur 
pied.  La  troisième  classe  punit  de  11  à  15  fr.  d'amende 
ceux  qui  ont  causé  un  dommase  aux  propriétés  mobi- 
lières, ou  causé  la  mort  ou  la  blessure  d^knimaux  ;  les 
commerçants  détenteurs  de  poids  et  mesures  illégaux  ; 
les  boulangers  et  les  bouchers  qui  vendent  au  delà  de  la 
taxe  ;  les  auteur»  et  complices  de  bruits  injurieux  ou  de 
tapages  nocturnes  ;  ceux  qui  ont  méchamment  enlevé  les 
affiches  de  l'administration  ;  ceux  qui  mènent  des  bes- 
tiaux sur  les  terrains  garnis  de  récoltes  ;  enfin  ceux  qui 
ont  dégradé  ou  usurpé  les  chemins.  La  condamnation  t^ux 
frais  et  la  confiscation  des  objets  saisis  sont  la  cons<^ 

3uence  forcée  de  la  pénalité  d'amende  ;  mais  l'adjonction 
e  l'emprisonnement  pour  certaines  contraventions  (il  ne 
peut  d^asser  5  jours)  reste  facultative,  comme  celle  des 
dommages-intérêts,  dont  le  chifi're  est  illimité.  Indépen- 
damment des  contraventions  punies  par  le  Code  pwud , 
les  tribunaux  de  police  répriment  celles  prévues  par  di- 
verses lois  spéciales,  notamment  sur  le  travail  des  enfants 
dans  les  manufactures,  sur  les  contrats  d'apprentissage 
et  les  livrets,  sur  les  mauvais  traitements  envers  les 
animaux,  sur  le  roulage,  l'affichage,  etc.  Les  Jugements 
rendus  par  les  tribunaux  de  police  sont  en  dernier  res- 
sort, quand  ils  prononcent  seulement  une  amende  n'excé- 
dant pas  5  fr.,  et  ne  peuvent  dès  lors  être  attaqués  que 
par  un  recours  en  cassation.  L'appel  des  Jugements  ren- 
dus en  premier  ressort  est  porté  devant  les  tribunaux  cor- 
rectionnels. La  prescription  des  contraventions  s'acquiert 
après  une  année  de  leur  date  s'il  n'est  pas  intervenu  de 
condamnation  définitive,  et  après  deux  années  lorsqu'il 
y  a  eu  jugement  irrévocable  mais  non  exécuté.  —  V.  Bost 
et  Daussy,  Législation  et  jurisprudence  des  tribunaux  de 
simple  police,  1841,  in-8*;  Vuatiné,  Code  annoté  et  Guide 
spécial  des  tribunaux  de  simple  police,  1858,  in-12.  T— y. 
poucB  CORRECTIONNELLE  (Tribunal  de).  Chambre  du 
tribunal  civil  qui  est  chargée  de  la  répression  des  délite 
entraînant  plus  de  5  jours  d'emprisonnement.  Cette  Cham- 
bre connaît  en  outre  des  délits  forestiers  qui  sont  pour- 
suivis à  U  requête  de  l'administration,  et  dos  contraven- 
tions en  matière  de  contributions  directes  et  de  douanes. 
Elle  juge  aussi  les  appels  des  tribunaux  de  simple  police. 
Trois  juges  suffisent  pour  prononcer.  Pour  des  délits  qui 
n'entraînent  pas  la  peine  de  l'emprisonnement ,  le  pré- 
venu peut  se  faire  représenter  par  un  avoué;  néajimoins, 
le  trinunal  peut  ordonner  sa  comparution  en  personne. 
L'instruction  est  publique,  à  peine  de  nullité.  Le  juge- 
ment est  prononcé  immédiatement,  ou  au  plus  tard  à 
l'audience  qui  suit  celle  où  l'instruction  a  été  terminée. 
Une  loi  de  1856  a  conféré  aux  Cours  impériales  la  con- 
naissance des  appels  des  Jugements  rendus  par  tous  les 
tribunaux  de  police  correctionnelle  de  leur  ressort. 

POLICE  D'ARwés ,  poUco  faîto  au  milieu  des  troupes.  En 
campagne,  elle  appartient  à  la  gendarmerie.  Ce  corps  est 
BOUS  les  ordres  d'un  grand prwôl  dans  une  armée,  et 
d'un  prévôt  dans  une  division.  Il  est  chargé  de  la  sur- 
veillance des  délits ,  de  la  poursuite  et  de  l'arrestation 
des  coupables,  du  maintien  de  l'ordre;  il  écarte  des 
troupes  les  femmes  de  mauvaise  vie,  surveille  l'exécution 
des  règlements  relatifs  aux  prohibitions  de  chasse  et  aux 
Jeux  de  hasard,  protège  les  habitants  des  pays  que  l'on 
traverse,  arrête  les  pillards,  fait  rejoindre  les  traînards,  etc. 
La  police  des  places  de  guerre  est  sous  la  responsabilité 
des  commandants  de  place.  La  police  des  corps  s'exerce 
sous  la  surveillance  des  colonels. 

POLICE,  en  termes  de  Droit,  est  sjrnonyme  de  contrat,  1 
Le  mot  vient  alors  du  latin  pollicitatio  (promesse).  C'est  ! 


ainsi  qu'on  dit  une  poltce  d*affrétemênt ,  une  police  d^oM^ 
surance  (  V,  ces  mots)^  une  police  de  chargement  {V.  Cou- 

NAISSEMEFET). 

POLICE  SANrrAIRB.   V.  PATENTE   DE  SANTIÎ,  QOAaANTAniE 

POLICEMAN.        i  V.  ces  mots  dans  notre  Diction- 

POLICHINELLE.  S    natre  de  Biographie  et  d'Histotr  t. 

POLITIQUE  (do  grec  polis ,  cité),  science  du  gouver* 
nement.  Elle  comprend  le  Droit  politique,  le  Droit  ad 
ministratif  et  le  Droit  international.  Sa  règle  est  la  j  us- 
tice,  et  son  but  l'intérêt  des  peuples.  Mais  il  n'en  a  pa.* 
toujours  été  ainsi  dans  la  pratique;  certains  théoriciens 
même,  comme  Hobbes,  ont  donné  pour  base  à  la  Poli- 
tique l'utile  ou  l'intérêt,  et  Machiavel  a  été  Jusqu'à  auto- 
riser chez  les  gouvernants  l'emploi  de  tous  les  moyens 
pour  arriver  à  leur  but  {V,  Prince).  La  Politique  a  eu 
trop  souvent  en  vue  des  intérêts  qui  ne  sont  pas  ceux  des 
gouvernés.  Les  Traités  de  Politique  les  plus  célèbres  sont 
la  République  et  les  Lois  de  Platon ,  la  Politique  d'Aris- 
tote,  la  République  et  les  Lois  de  Ctcéron,  la  République 
de  Bodin ,  la  Politique  tirée  de  VÉcriture  sainte  de  Bos- 
suet,  V Esprit  des  Lois  de  Montesquieu,  le  Contrat  50- 
ctoi  de  J.-J.  Rousseau,  le  Cours  de  Politique  constitution^ 
nelle  de  Benjamin  Constant. 

POLITIQUE  (Droit,  —  Économie).  V.  Droit,  Économie. 

pouTiQOE  (Éloquence),  genre  d'éloquence  qui  a  pour 
objet  les  grands  at^bats  financiers,  les  discussions  sur  les 
obligations  réciproques  de  l'État  et  des  citoyens,  la  dé* 
fense  ou  l'attaque,  par  les  partis  contraires,  des  lois  en 
vigueur,  les  délibérations  sur  la  paix  et  la  guerre,  en  un 
mot,  toutes  les  questions  intéressant  un  pays,  soit  dans 
sa  constitution  intérieure,  soit  dans  ses  rapports  avec  les 
nations  étrangères.  Elle  forme  ce  que  la  Rhétorique  a 
nommé  le  genre  délibératif.  A  ne  considérer  que  les  res- 
sources Qu'elle  offre  à  l'art  oratoire,  on  comprend  que  les 
Anciens  lui  aient  généralement  préféré  le  genre  judi« 
claire,  et  que  la  critique  moderne,  en  présence  des  ser- 
mons et  des  oraisons  funèbres  du  xvn*  siècle,  l'ait  mise 
après  le  genre  démonstratif.  En  effet,  dans  l'Antiquité, 
et  surtout  à  Rome,  l'éloquence  Judiciaire  se  développa 
dans  de  tout  autres  conditions  que  chez  les  Modernes. 
L'importance  des  causes,  souvent  compliquées  d'élé- 
ments politiques  :  témoin  les  VerHnes,  où  se  débattait, 
avec  la  question  de  droit,  celle  de  savoir  si  les  chevaliers 
raviraient  aux  sénateurs  le  privilège  de  Juger  les  gouver- 
neurs accusés,  et  de  partager  avec  eux,  une  fois  absous, 
le  fruit  de  leurs  rapines;  —  l'importance  des  personnages 
qui  figuraient  au  procès  comme  accusés  :  il  n'était  pas 
rare  de  voir  un  intrigant  audacieux  citer  devant  le  tri- 
bunal les  chevaliers  ou  les  sénateurs  les  plus  considéra- 
bles, que  venaient  défendre,  au  moins  par  leur  prteence, 
soit  les  membres  de  leur  ordre,  soit  les  députations  des 
villes  et  des  provinces  que  des  liens  de  patronage  et  de 
clientèle  intéressaient  à  leur  fortune  ;  —  la  libcsrté  sans 
limites  que  les  lois  laissaient,  en  l'absence  d'un  prési- 
dent et  d'un  ministère  public,  aux  violences  et  aux  em- 
portements de  l'accusateur  ou  du  défenseur  ;  —  enfin  le 
lieu  des  audiences,  qui  était  la  place  publique  même, 
le  Forum  (du  moins  jusqu'au  principat  d'Auguste),  de 
sorte  que  c'était  au  peuple,  autant  qu'aux  juges,  que 
l'orateur  s'adressait  :  toutes  ces  circonstances  réunies 
donnaient  aux  luttes  Judiciaires,  bieii  plus  qu'aux  dé- 
bats politiques,  une  pompe  et  un  éclat  extraordinaires. 
D'autre  part ,  peut-on  concevoir  une  éloquence  plus  su- 
blime que  celle  d'un  Massillon  faisant  descendre  JésuF- 
Christ  pour  juger  ses  auditeurs  et  le  prêtre  qui  lei  r 
parle;  ou  d'un  Bossuet  nous  introduisant  aux  Cieuz 
pour  y  admirer,  dans  son  éblouissante  beauté,  l'unité 
divine,  image  et  modèle  de  l'unité  de  l'Église?  £n  re- 
vanche, si,  dans  la  comparaison  des  trois  genres ,  on 
envisage  moins  la  richesse  et  la  beauté  littéraire  des 
œuvres  que  leur  utilité  immédiate  et  pratique  pour  un 
État,  ou  si  l'on  aime  mieux  considérer  les  avantages  et 
la  dignité  de  la  vie  présente  que  l'intérêt  beaucoup  plus 
élevé,  mais  plus  lointain,  des  destinées  que  la  mort  nous 
réserve,  on  cesse  d'être  d'accord  sur  le  véritable  prix  de 
l'éloquence  politique.  Elle  a  eu  ses  détracteurs,  parce, 
que  les  passions  l'ont  jetée  dans  les  excès.  Le  sage  et 
libéral  Tacite  lui-même,  au  souvenir  du  dernier  siècle  de 
la  République  romaine,  avouait  que  la  grande  éloquence 
est  pareille  à  la  flamme,  quo  cest  en  brûlant  qu'elle 
jette  de  l'éclat;  qu'elle  est  fille  de  la  licence,  compagne 
de  la  sédition,  et  l'aiguillon  des  fureurs  populaires  ;  in- 
capable de  condescendance ,  impatiente  de  tout  frein , 
rebelle,  téméraire,  arrogante,  incompatible  enfin  avec  les 
constitutions  bien  ordonnées;  que  Lacédémone  et  la 
Crète,  si  vantées  pour  la  sagesse  de  leurs  lois  «I  la  léfé- 


POL 


1451 


POL 


rite  de  lears  institations,  n'avaient  point  connu  les  ora- 
teurs ;  que  Téloquence  des  Gracques  ne  Talait  pas  d*ôtre 
achetée  par  leors  lois,  et  que  celle  de  Cicéron  n*avait 
point  été  an  dédommagement  de  sa  mort.  D'autres  ont 
accusé  cette  même  éloquence  de  dégénérer  souvent  en  un 
verbiage  stérile,  sinon  nuisible  &  la  marche  des  aflCûres 
pobiiqaes.  Ses  défenseurs  répondent  que  le  même  feu 
qai  cause  les  incendies  est  Tun  des  plus  indispensables 
^axiliaires  de  IMndustrie  humaine,  et  que  la  parole,  par 
«es  vertus  contraires,  ressemble  à  toutes  les  forces  de  la 
nature  ;  que  partout  où  se  résoudra  le  grand  problème 
des  sociétés  modernes,  la  conciliation  de  Tordre  avec  la 
liberté,  l'éloquence  politique,  interprète  de  l'opinion, 
sera  lans  aucun  doute  le  plus  utile  instrument  et  le 
guide  le  plus  sûr  des  hommes  d'État;  que  la  cause  de 
la  vérité  et  du  bons  sens  finit  par  triompher  tôt  ou  tard 
de  l'erreur  et  du  mensonge;  que  si  les  peuples  ont  le 
droit  de  discuter  la  conduite  de  leurs  afiTaires,  les  luttes 
de  la  parole,  dans  une  assemblée  politique,  sont  le  mode 
le  plus  retentissant  de  cette  discussion,  et  le  contrôle  le 
plus  efficace  d'un  bon  gouvernement;  qu'il  ne  s'agit  là, 
comme  en  toutes  choses,  que  d'empêcher  que  l'usage  oe 
dégénère  en  abus,  usage  qui  doit  se  régler  suivant  le 
tempérament  de  chaque  peuple. 

L'Éloquence  politique  a  eu,  dans  tous  les  âges,  de  glo- 
rieux représentants.  Dans  Athènes,  depuis  la  constitu- 
tion de  la  République  jusqu'à  la  guerre  du  Péloponèse , 
c-à-d.  à  l'époque  la  plus  brillante  de  la  démocratie,  on 
voit  les  premiers  citoyens  unir  le  talent  oratoire  au  génie 
de  la  guerre  et  de  la  politique.  C*est  le  temps  où  Solon 
guérissait,  par  son  éloquence  autant  que  par  sa  poésie  et 
ses  lois,  les  plaies  des  divisions  intestines;  où  Pisistrate 
Taisait  accepter  sa  tyrannie  ;  où  Miltiade  déterminait  ses 
concitoyens  à  repousser  les  injonctions  insolentes  du 
Grand  Roi,  et  à  livrer  la  bataille  de  Marathon  ;  où  Thé- 
mistode  leur  persuadait  d'abandonner  leurs  biens  et 
leurs  foyers,  pour  construire  cette  flotte  qui,  à  Salamine, 
sauva  la  civilisation  ;  où  Aristide  rivalisait  avec  Thémis- 
tocle  d'influence  à  la  tribune,  comme  de  valeur  au  com- 
bat. Au-dessus  d'eux  s'élève  bientôt  Périclès,  que  les 
poètes  comiones,  ses  contemporains,  comparèrent  à  Ju- 
piter Olympien  lançant  des  éclairs,  roulant  son  tonnerre, 
bouleversant  la  Grèce,  et  dont  l'impartial  Thucydide  a  dit 
«  qu'il  contenait  la  multitude  par  le  simple  ascendant,  de 
sa  pensée...  S'il  voyait  les  Athéniens  se  livrer  hors  de 
•aison  à  une  audace  arrogante,  il  rabattait  leur  fougue 
par  ses  discours,  et  les  frappait  de  terreur;  tombaient-ils 
mal  à  propos  dans  la  crainte,  il  relevait  leur  abattement 
et  ranimait  leur  audace.  »  Malheureusement,  il  ne  nous 
reste  à  peu  près  rien  de  ces  premiers  orateurs  politiques. 
—  Aprra  eux,  vinrent  les  Sophistes,  qui  tinrent  école  et 
furent  professeurs  d'éloquence.  Il  y  eut  un  art  propre- 
ment dit;  et  dès  lors  on  mêla  aux  inspirations  de  la  na- 
ture les  artifices  des  Rhéteurs  ;  on  cultiva  en  même  temps 
le  genre  Judiciaire  et  le  genre  politique;  on  parla  pour 
soi-même,  on  prononça  ou  l'on  écrivit  des  plaidoyers 
pour  les  autres,  quelquefois  pour  les  deux  parties  ad- 
verses. Ainsi  naquirent  les  avocats.  Antipbon,  Andocide, 
Lysias,  inaugurèrent  cette  période,  et  en  furent  les  prin- 
cipaux reprâentants.  L'éloquence  conserva  désormais  ce 
caractère  complexe.  Enfin,  au  iv*  siècle  avant  notre  ère, 
il  semble  crue  la  profession  d'orateur  reçut  une  oiganisa- 
tioQ  nouvelle  ;  il  y  eut ,  pour  ainsi  dire ,  les  conseillers 
attitrés  du  peuple,  à  peu  près  seuls  en  possession  de  mon- 
ter à  la  tribune;  et  cela  fut  le  sujet  fréquent  de  plaintes 
et  de  récriminations  rives  de  la  part  de  Démosthone.  De 
même  que  les  citoyens  avaient  cessé  de  faire  campagne 
et  confiaient  à  des  mercenaires  l'exécution  de  leurs  dé- 
crets, les  orateurs  avaient  cessé  d'être  des  hommes  d'État, 
et,  au  grand  dommage  de  la  République,  on  distinguait 
alors  les  hommes  de  parole  des  hommes  d'action.  Pho- 
cioo  seul  unit  encore  les  deux  mérites,  et  fit  souvent,  et 
avec  succès,  les  expéditions  qu'il  avait  blâmées  sur  la 
place  publique.  Au  reste.  Jamais  les  Athéniens  n'avaient 
vil  tant  de  rivaux  se  disputer  leurs  suflîrages  :  c'étaient 
IsiKrxte,  qui  écrivit,  avec  tous  les  raMnements  de  l'art, 
les  Discours  qu'une  inrincible  timidité  l'empêchait  de  dé- 
biter en  public;  Isée,  le  maître  de  Démosthène;  le  ver- 
tueux Lycnrgue  ;  Hypéride,  C[ui  paya  d'un  supplice  bar- 
bare sa  haine  de  la  Macédoine;  Dinarque,  Alddamas, 
Hégésippe,  Démade,  Eschine,  et,  par-dessus  tous,  l'au- 
teur des  (Hj/nthimnes  »  des  PhUippiques,  du  Discours 
pour  la  CourofÊM,  l'adversaire,  opiniâtre  Jusqu'à  la 
nort,  de  Philippe,  d'Alexandre,  et  d'Antipater,  rbomme 
Avec  qui  moururent  l'éloquence  et  la  liberté  de  la  Grèce, 
DémosUiène,  enfin,  sur  le  génie  duquel  les  critiques  de 


tous  les  temps  ont  épuisé  les  formules  de  la  plus  vive 
admiration. 

Des  causes  non  moins  puissantes  et  Técondes  dvori- 
sèrent,  à  Rome,  le  développement  de  Téloquenoe  poli- 
tique. On  peut  en  assigner  trois  principales,  qui  corres- 
pondent aux  trois  âges  de  la  République  :  d^ibord ,  la 
conquête,  par  les  Pl&éiens  sur  les  Patriciens,  de  la  triple 
égalité  civile,  politique,  et  religieuse;  puis,  la  succession 
des  guerres  qui  valurent  au  peuple  romain  la  domina- 
tion du  monde,  et  la  nécessité  de  régler,  pour  le  plus 
grand  avantage  et  la  sécurité  entière  des  vainqueurs,  le 
sort  des  nations  vaincues;  enfin  la  lutte  de  la  liberté 
contre  le  despotisme  militaire,  de  la  République  contre 
l'Empire.  11  ne  nous  est  rien  parvenu  des  luttes  oratoires 
où  un  Voléro,  un  Térentillus  Arsa,  un  Canuléius,  un 
licinius  Stolon,  arrachaient  à  leurs  orgueilleux  adver- 
saires leurs  privilèges;  rien  de  ces  séances  du  Sénat  où, 
en  présence  de  Cinéas,  après  deux  défaites,  Appius  Clau- 
dius  Giecus  rappelait  les  Pères  Conscrits  à  la  fermeté,  au 
respect  des  anciennes  maximes  et  de  la  majesté  ro- 
maine :  mais  on  peut  s'en  donner  le  spectacle  dans  les 
belles  narrations  de  Tite-Uve,  où  la  perfection  du  lan- 
gage et  les  raffinements  de  l'éloquen/^e,  bien  qu'étant  un 
anachronisme,  n'en  font  pas  moins  revivre  sous  nos  yeux 
ces  antiques  générations  avec  leurs  passions  et  leurs  co- 
lères. L'historien  ne  reproduit  pas  avec  une  moindre 
vraisemblance  ces  solennelles  dâibérations  de  la  Curie 
où  Fabius  Maximus  et  Scipion,  devant  l'assemblée  indé- 
cise, délibéraient  sur  le  péril  ou  la  nécessité  de  passer 
en  Afrique,  quand  AnniLal  occupait  encore  l'Italie.  De 
cette  époque,  il  reste  du  moins  quelques  discours  mutilés 
de  Caton  l'Ancien.  A  la  rigueur,  ils  suffiraient  pour  ex- 
pliquer les  éloges  que  Tite-Uve  et  Cicéron  prodiguèrent 
à  son  éloquence  rude,  incisive,  attique  par  le  bon  sens 
et  la  simplicité.  Avec  les  Gracques,  dont  nous  possédons 
aussi  quelques  fragments,  commence  la  période  des  trou- 
bles civils,  illustreÎB  par  le  génie  des  Galba,  des  Catulus, 
des  Sulpicius,  des  Crassus,  des  Antoine,  des  Hortensius, 
prédécesseurs  ou  contemporains  *de  Cicéron,  qui,  dans 
son  BrtUus  et  son  De  Oratare^  a  tracé  leurs  portraits , 
en  homme  qui  se  sent  supérieur  à  ceux-là  même  dont  il 
vante  le  plus  complaisamment  le  talent  oratoire.  Il  les 
surpassa  en  efibt;  car  il  réunit  toutes  les  perfections  que 
la  nature  avait  distribuées  entre  seë  devanciers,  et  eut 
en  quelque  sorte  le  droit  de  se  peindre  lui-même  pour 
peindre  l'orateur  accompli.  Toutefois,  telle  était  alors  la 
situation  de  la  République,  qu'en  dépit  de  son  éloquence 
il  ne  Joua  généralement  qu'un  rùle  secondaire,  et  fut 
éclipsé  par  les  hommes  dWion.  Les  Gracques  avaient 
comoattu  pour  leur  propre  cause;  Cicéron  agit  et  parla 
tour  à  tour  pour  Pompée  et  pour  César,  et  ne  fut  Jamais 
chef  de  parti.  Même  dans  les  CatUinair$s.  il  fut  plutôt 
encore  rloterprète  de  ropinion,  qu*il  ne  détermina,  par 
son  ascendant  et  sa  volonté,  l'action  du  Sénat.  A  la  fin 

Kurtant,  lorsqu'il  fallut  lutter  contre  Antoine,  il  derint 
me  de  cette  crande  assemblée,  et  les  quatorze  discours 
que  sa  verte  vieillesse  écrivit  ou  prononça  contre  l'en- 
nemi de  la  liberté  romaine  méritaient  de  porter  le  nom 
de  PhUippique$,  comme  les  harangues  de  Démosthène 
contre  l'ennemi  de  la  liberté  grecque.  La  liberté  mourut 
avec  son  courageux  défenseur,  et  Téloquence  avec  la  li- 
berté. Sous  les  premiers  Césars,  il  est  mi,  un  Marcellus 
se  fit  une  triste  célébrité  par  la  violence  passionnée  de 
ses  accusations  contre  Tbrûéas  ;  sous  les  Antonins,  Pline 
et  Tacite  parurent  avoir  retrouYé ,  dans  des  discours  Ju- 
diciaires, quelques  accents  de  l'ancienne  éloquence  poli- 
tique; enfin  la  politique  fut  anssi  quelquefois  intéressée 
dans  les  œuvres  des  Pères  de  l'Église  :  mais  ces  excep- 
tions, sur  lesquelles  encore  il  faudrait  fidre  des  réserves, 
ne  sauraient  détruire  cette  allégation.' Gomme  Démos- 
thène en  Grèce,  Cicéron  fut  à  Rome  le  dernier  orateur 
politique  {V.  JonictAiBB.  —  Éloquence).  —  Sur  les  Frag- 
ments des  orateurs  latins,  K.  H.  Meyer,  Oratorum  ro- 
manorum  fragmenta,  ab  Àppio  inds  Cvbco  usque  ad  Q, 
Aurelwm  ^ytnmacfttim ,  édition  DObner,  Parb,  1837, 
in-8*;  Egger,  Laiim  urmonk  rAvmuB  uiâUœ,  Paris, 
1843,  in^o. 

Il  était  réservé  k  TAngleterre  de  voir  reoittre,  dans  les 
temps  modernes,  l'éloquence  délibérative  »  parfois  avec 
son  éclat  des  anciens  Jours,  mais  sans  les  proscriptions 
et  les  meurtres  qui  avaient  ensanglanté  la  pfsce  publique 
et  la  tribune  de  Rome  ou  d*Athènes.  Une  fois  les  pas- 
sions religieuses  et  politiques  calmées,  et  la  race  des  pré- 
tendants éteinte,  le  tenûkéranient  de  la  n^tàsm  et  son 
gouvernement  la  préseryirent  généralement  des  excès  « 
et  loi  assurèrent  la  bonne  fortmie  de  recueillir  les  avan* 


POL 


1452 


POL 


lages  des  institutions  parlementaires  sans  en  ressentir 
ffresque  les  inconTénients.  L'éloquence  8*y  dô?eloppa 
d*abord  sous  Tinfluence  théologique  :  Prm ,  Hampden , 
Falkland,  Gromwell,  Sidnev,  StraiTord,  représentent 
cette  premier»  période.  Puis  vint  répoque  de  Guil- 
laume m ,  de  la  reine  Anne,  et  de  Georges  I**,  où  bril- 
lèrent Swift,  Steele,  Bolingbroke,  Pulteney,  lord  Carteret, 
Windbam,  et  Walpole.  A  cet  âge,  Téloquence  anglaise, 
quoique  déjà  toute  politique,  se  renferme  encore  dans 
des  débats  intérieurs ,  et  se  montre  plus  puissante  par 
Tbabileté  que  par  le  talent  Enfin  Fâge  d'or  arrive  avec 
ta  fin  du  xviii*  siècle.  Deux  ordres  de  questions  vont 
alors  passionner  et  ennoblir  les  diseussions  du  Parle- 
ment :  les  questions  de  conquête,  de  domination,  et  les 
questions  d*humanité,  de  Justice,  auxquelles  la  politique 
était  Jusoue-là  demeurée  étrangère.  Les  écrits  philoso- 
phiques au  xvrn*  siècle,  la  guerre  de  Sept  Ans  et  celle 


des  colonies,  toutes  ces  circonstances  communiquent  aux 
orateurs  anglais  une  srandeur  et  une  élévation  encore 
inconnues.  Alors  rivalisent  au  Parlement  les  deux  Pitt , 
Wilkes,  Burke,  Fox,  Shéridan,  Grattan,  et,  dans  des  procès 
qui  touchaient  à  la  politique,  Erskine  et  Hackintosh. 
L'héritage  de  ces  grands  hommes  a  été  recueilli  par  des 
élèves  et  des  imitateurs  dont  quelques-uns  vivent  encore 
et  se  glorifient  de  perpétuer  leurs  traditions  à  la  Chambre 
des  Lords  et  dans  celle  des  Communes  :  nous  mention- 
nerons Ganning,  lord  Brougham,  Robert  Peel,  lord  Rus- 
scll.  Citons  à  part  «  le  grand  agitateur  »  irlandais,  Da- 
niel O'Connell,  «  le  libérateur  »,  qu'un  critique  français, 
dans  son  enthousiasme,  représente  «  debout  sur  le  sol 
de  sa  patrie,  ayant  les  cieux  pour  dôme,  la  vaste  plaine 
pour  tribune,  un  peuple  Immense  pour  auditoire,  et  pour 
sujet  ce  peuple,  toujours  ce  peuple,  et  pour  écho  les  ac- 
clamations universelles  de  la  multitude,  pareilles  aux 
frémissements  de  la  tempête  et  au  roulement  des  vagues 
sur  les  sables  et  les  rivaj^  de  TOcéan.  » 

1.IM  scéues  tumultueuses  et  tra^ques,  les  proscriptions 
des  partis  par  les  partis  contraires,  les  massacres  en 
masse,  reparurent  autour  de  la  tribune  fhmçaise,  et 
imprimèrent  à  l'éloquence  des  mauvais  Jours  de  notre 
Révolution  un  caractère  violent  et  sanguinaire,  que  n'a 
point  connu  l'éloquence  anglaise.  Hais  aussi,  d'un  autre 
côté,  les  délibérations  de  l'Assemblée* Constituante,  et 
môme  de  l'Assemblée  Législative  et  de  la  Convention , 
sous  l'influence  des  théories  politiques  et  sociales  des 
philosophes  du  xvm*  siècle,  dans  la  hardiesse  de  tant  de 
spéculations  môme  êhimériques  pour  le  bonheur  de  l'hu- 
manité, atteignirent  &  une  hauteur  oCl  ne  s'était  Jamais 
élevée  l'Antiquité,  où  ne  s'élevèrent  Jamais  les  Chambres 
anglaises.  *0n  discuta  des  principes  d'où  devait  sortir 
tout  un  monde  nouveau;  au  lieu  que  chex  nos  voisins, 
môme  à  cette  Révolution  qui  mit  Guillaume  d'Orange  & 
la  place  des  Stuarts,  les  débats  du  Parlement  n'eurent 
d'autre  objet  (pie  l'établissement  d'une  dynastie  protes- 
tante, les  privilèges  respectifs  des  deux  pouvoirs,  et  la 
confirmation  de  certaines  libertés  depuis  longtemps  éta- 
blies dans  le  droit  commun  de  l'Angleterre.  La  person- 
nification la  plus  complète  et  la  plus  extraordinaire  de 
cette  éloquence  firançaise.  Jusque-là  inconnue,  fut  Iflra- 
beau,  au-dessous  de  qui  brillèrent,  à  des  distances  iné- 
gales et  dans  des  camps  différents,  Bamave,  Meunier, 
Tabbé  Hauiy,  Cazalès,  en  attendant  Vergniaud,  Isnard, 
et  tous  les  Girondins,  et  Danton,  à  la  parole  triviale, 
hyperbolique,  farouche,  mais  singulièrement  énergique, 
et  non  moins  audacieuse  que  ses  actes  et  ses  motions. 
—  Sous  le  Directoire,  le  Consulat  et  rEmpire,  l'élo- 
quence délibérative  fût  remplacée  par  l'éloquence  mili- 
taire dans  la  personne  de  Napoléon  I*'  ;  mais,  sous  la 
Restauration,  quand  il  s'agit  de  fonder  le  gouvernement 
constitutionnel,  elle  reprit  son  éclat  avec  Manuel,  Ben- 
jamin Constant,  de  Scûrre,  Camille  Jordan,  de  Villèle, 
Royer-Collard,  Casimir  Périer,  le  général  Foy,  et  de  Mar- 
tignac  Pendant  la  monarchie  de  1830,  elle  ne  brilla  pas 
d'une  moins  vive  lumière  dans  la  parole  puissante  et 
animée  des  BeRyer,  des  Thiers,  des  Guixot,  des  Dopin, 
des  Ôdilon  Barfot«  des  Lamartine,  des  MontalemberL 
Cet  orateurs  ont  eu^  depuis  185S,  au  Sénat  et  an  Corps 
Législatif,  des  successeurs  qui  honorent  également  la 
tribune  firançaise,  MM*  Billault,  Baroche,  Rooher,  Jules 
Pa^re.  «tn-  ^  ^  A.  H. 

pouTiQua  (Langue),  terme  qui  signifiait,  chez  les  an- 
ciens Grecs,  la  langue  civile,  usuelle,  courante  {àepoliSf 
cité),  par  opposition  à  la  langue  oratoire,poétique,  litté- 


raire. Saétone  emploie  dans  le  môme  sens  l'axpressioft 
latine  imfno  dvUts,  «  discours  civil  ».  P. 

pouixQOB  (Vers).  On  appelait  ainsi  primitivement, 
chei  les  Grecs,  un  vers  héroïque  qui  n'avait  rien  de  poé- 
tionie,  et  ne  formait  qu'une  ligne  mesurée;  tel  est  le  vers 
d'Homère,  qui  signifie  :  Et  cent  cmquanU  caoàUs  blondn. 
—  Au  moyen  âge,  on  appela  du  môme  nom  des  vers  com- 
posés à  l'usage  du  vulgure  ignorant  qui  ne  comprenait 
plus  l'ancienne  versification,  et  où  l'on  tenait  plus  de 
compte  des  accents  que  de  la  quantité  métricfue  des  svl- 
labes.  Les  pieds  du  vers  politique  sont  ordinairement  des 
ïambes  ou  des  trochées,  et  le  vers  n'a  jamais  plus  de 
15  syllabes,  dont  la  dernière  est  toujours  grave  et  l'avant- 
dernière  toujours  accentuée.  Il  y  avait  aussi  des  vers  po- 
litiques de  13  syllabes,  soumis  aux  mômes  règles  de 
Taccent,  et  qui  sont  une  altération  de  l'ancien  lambique 
scazon ,  surtout  tel  qu'on  le  trouve  dans  les  fables  éso- 
piques  de  Babrius.  Enfin  le  roman  de  Nicétas  Eugénianus 
[Cnark'Us  bI  DrosUla)  est  écrit  en  trimètres  îambiques 
pontiqii.es  de  12  syllabes,  dont  les  deux  premières  sont 
toujours  longues,  et  hi  il*  constamment  accentuée.      P. 

POLICA,  danse  qui  tire  son  nom,  selon  les  uns,  de 
polacca  (polonaise),  et,  selon  les  autres,  du  bohème 
fnUka  (moitié),  parce  que  c'est  une  danse  à  deux  temps. 
Elle  se  produisit  à  Prague  vers  1835,  à  Vienne  en  1839, 
et  fit  sii  première  apparition  à  Paris  sur  le  théâtre  de 
rOdéoik  en  1840.  Les  salons  l'adoptèrent  avec  fureur.  Sa 
forme  i.'est  beaucoup  modifiée  ;  on  en  a  fait  une  espèce 
de  vala4  &  4  temps,  et  elle  s'est  rapprochée  de  la  mo- 
xurka  «st  de  la  ichoUisck.  On  voit  par  le  poème  que  John 
Davis  fHiblia  sur  la  danse,  en  io96,  qu'une  danse  du 
nom  de  volte  avait  beaucoup  d'analogie  avec  la  polka  de 
nos  Jours.  B. 

POUé.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiogrO' 
phiê  et  d'Histoire, 

POUJCITATION  (du  latin  pollicitaiio,  promesse),  en 
termes  de  Droit,  promesse  non  encore  acceptée  par  celui 
à  qui  eille  a  été  faite.  D'après  le  Droit  romain,  elle  opé- 
rait un  lien  Juridique;  dans  notre  Droit  actuel,  elle  ne 
produit  pas  d'obligation. 

POLI  JNCTEURS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Bioçiraphie  €t  d  Histoire, 

POLOGNE  (Arts  en).  Les  arts  se  sont  éveillés  en  Po- 
logne aa  XVI*  siècle,  époque  où  l'on  fit  venir  d'Italie  une 
foule  d'artistes  distingués.  Les  édifices  religiei:hL  et  civils 
furent  ulors  restaurés,  embellis  par  des  élèves  de  Michel- 
Ange  ei  de  Rapbaôl ,  tels  que  Carralius  et  Bartholo,  dont 
les  œuvres  ont  été  malheureusement  détruites  en  partie 
par  le  lemps  et  les  guerres.  Dans  le  môme  temps,  le  roi 
Sigismond  I*'  faisait  exécuter  en  Flandre  de  superbes 
tapisseries  d'après  les  dessins  de  Raphaël.  Le  xvu*  siècle 
fut  à  peu  près  stérile  ;  mais,  au  xviii*,  on  remarque  les 
peintres  Simon  Cxechowicz,  François  Smuglewicz,  Bac* 
ciarelli ,  le  sculpteur  Jean  Lebrun,  et  l'architecte  Albert 
Gncewid.  —  Les  monuments  de  la  musique  sont  plus 
anciens  que  ceux  des  autres  arts.  On  a  conservé  des 
chants  religieux  ou  nationaux,  tels  que  l'hymne  de 
S*  Adalbert  à  la  Vierge  (x*  siècle),  le  Betowr  du  rot  Ca- 
simir !•'  (1041  ),  la  Sfort  de  la  reine  Luitgarde  (1^3). 
Au  XVI*  siècle,  Nicolas  Gomolka  mit  en  musique  les 
psaumes  de  Kochanowski.  Alors  les  grands  seigneurs  en- 
tretenaient des  troupes  de  chanteurs  et  d'instrumen- 
tistes. Dès  1533,  la  musique  devint  l'auxiliaire  de  l'art 
dramatique  dans  les  pièces  Jouées  à  Cracovie  ches  les 
Dominicains  et  les  Jésuites;  mais,  môme  dans  les  repré- 
sentations profanes,  on  s'en  tint  longtemf»  aux  opéras 
français.  Kaminski  donna,  en  1778,  le  premier  opéra  avec 
une  musiaue  nationale,  et,  deux  ans  après,  un  profes- 
seur parisien,  nommé  Ledoux,  vint  former  un  corps  de 
ballet.  Malgré  les  elTorts  de  L^sel  et  de  Jean  Stefani , 
l'opéra  national  ne  put  rivaliser  encore  avec  le  répertoire 
italien.  En  1810,  une  école  de  chant  et  de  déclamation 
fut  créée  à  Varsovie,  et  se  transforma,  en  1820,  en  Con- 
servatoire de  musique  et  de  déclamation  sous  la  direc- 
tion d'Elsner.  Avec  ce  compositeur,  Charles  Kurpinski  s 
relevé  l'opéra  national.  Parmi  les  artistes  <^i  depuis  cette 
époque  se  sont  fait  connaître  dans  TOcadent,  on  dis- 
tingue les  pianistes  compositeurs  Albert  Sowinski  et  Cho- 
pin. D««  airs  caractéristiques  nous  sont  venus  de  la 
Pologne,  tels  que  les  polonaises,  les  maswreks,  les  kra» 
ktwiah;  etc. 

POLiONAISE 
de  Pokjgne, 
celui  ë'4  menuet  1 
10  meiiares.  La  2*  note  du  1**  temps  est  toujours  synco- 
pée, el  la  cadenoe  finale  du  motiûr  tombe  aor  le  temps 


POL 


WS3 


POL 


faible.  Un  morceau  de  musique  instrumentale  c-<t  écrit 
ëlla  polacca  (à  la  polonaise),  quand  il  est  cans  le 
rliythme  et  le  mouvement  des  polonaises.  On  n  aussi 
donné  le  nom  de  Polonaises  à  certains  morcemx  de 
chant;  il  en  existe  dans  le  Faust  de  Spohr  et  dann  la  Jé- 
rusalem de  Verdi  :  mais  ces  morceaux  n*ont  pas  le  vrai 
caractère  de  la  danse,  ils  sont  plus  sémillants  •f.t  plus 
cliargés  d*ornements.  B. 

POLONAISE,  sorte  de  redingote  courte,  ornée  dit  bran- 
debourgs. 

POLONAISE  (Langue)  ou  lekhiqce,  une  des  langues 
slaves,  par!ée  par  dix  millions  d'hommes  environ,  depuis 
rOder  Jusqu'à  la  Duna  et  au  Dnieper,  et  depuis  la  mer 
Raltique  Jusqu'aux  Karpathes,  c.-à-d.  dans  la  Pologne 
russe,  le  duché  de  Posen,  la  Galicie,  une  partit  )  de  la 
Silésie,  de  la  Prusse  occidentale  et  de  la  Poméranie.  De 
iiombreu<ics  colonies  Tont  encore  portée  dans  diverses 
parties  des  Empires  autrichien  et  russe,  notamment  dans 
la  Bessarabie.  Le  polonais  se  distingue  des  autres  langues 
slaves  par  l'emploi  très-fréquent  des  chuintante?-  et  des 
si  niantes,  qui  s'adoucissent  pourtant  un  peu  dans  la  pro- 
nonciation. Assez  semblable  originairement  au  bohème, 
qu'il  a  toujours  surpassé  en  consonnes  composées,  il  s'en 
est  ensuite   éloigné  pour   prendre  un  dévelop;!>ement 
propre.  Riche  de  mots  et  de  formes,  il  est  essentiel  iement 
flexible,  il  crée  à  volonté  des  augmentatifs  et  des  di- 
minutifs, il  tire  de  son  propre  fonds  certaines  nomen- 
clatures que  d'autres  idiomes  empruntent  aux  langues 
classiques,  par  exemple  celles  de  l'histoire  naturelle  et 
de  la  chimie.  Ce  n'est  pas  qu'on  n'y  trouve  point  de  vo- 
cables étrangers,  latins ,  allemands  et  russes  ;  mais  ils  y 
ont  été  introduits,  les  premiers  par  le  clergé  depuis  la 
prédication  du  christianisme  en  Pologne  au  x"  siècle,  les 
autres  par  l'effet  du  voisinage  et  des  rapports  pol  .tiques. 
~  L'étude  du  polonais  est  difficile,  même  pour  l&i  autres 
Slaves,  à  c^use  de  la  multiplicité  et  de  la  complication 
de  ses  flexions.  Sa  grammaire,  toute  slave  quVdle  est 
dans  son  ensemble,  a  beaucoup  de  rapports  avec  ]n  gram- 
maire latine.  Il  possède  trois  genres;  on  a  cru  recon- 
naître quelques  traces  du  nombre  duel  dans  les  rerbes. 
Les  sutetantifs  et  les  adjectifs  se  déclinent  :  oa  distingue 
sept  cas,  parce  que  l'ablatif  latin  a  été  partagé  ea  deux, 
l'instrumental  et  le  locatif;  de  plus,  à  certains  ca?,  la  dé- 
clinaison varie  suivant  que  le  nom  exprime  un  ètrts  animé 
ou  une  chose  inanimée.  La  déclinaison  des  substantifs 
change  encore  selon  que  le  thème  du  nom  finit  par  une 
voyelle  ou  par  une  consonne,  par  une  consonne  dure  ou 
une  consonne  molle.  A  plusieurs  cas  des  adjer;tifs,  il 
existe,  outre  les  flexions  qui  distinguent  les  genres,  cer- 
taines variantes  selon  la  déclinaison  particulière  des  sub- 
stantifs auxcjuels  ils  se  rappohent.  Les  pronoms  cmt  éga- 
lement plusieurs  formes  pour  chaque  cas.  Le  polonais  a 
trois  conjugaisons,  qui  admettent  toutes  l'emploi  des 
auxiliaires  ;  en  outre,  on  classe  les  verbes  en  pairfaits  et 
imparfaits,  selon  qu'ils  expriment  un  fait  actuel  ou  un 
fait  iiabitucl.  Ce  qui  augmente  encore  les  difficultés  de  la 
langue  polonaise,  c'est  le  grand  nombre  d'exceptions  que 
comportent  les  déclinaisons  et  les  conjugaisons.  La  con- 
struction est  inversive,  comme  en  latin.  —  Certains  au- 
teurs nient  au'il  existe  des  dialectes  en  polonais  ;  d'autres 
distinguent  le  langage  de  la  Grande-Pologne ,  le  craco- 
vien  ou  idiome  de  la  Petite-Pologne,  le  polonais  de  la 
Prusse  orientale,  et  celui  de  la  Silésie.  Il  n'y  a  là  guère 
autre  chose  que  des  difi^érences  de  prononciation  :  ainsi , 
dans  la  Grande-Pologne,  on  traîne  les  voyelles.  Toute- 
fois, on  peut  citer  comme  caractère  du  dialecte  de  la  Pe- 
tite-Pologne la  suppression  de  la  distinction  des  genres. 
Le  cassowe,  parlé  en  Poméranie,  est  un  mélange  inculte 
de  polonais  et  d'allemand.  Le  mazovien,  en  usage  dans 
la  Mazovie  et  la  Podlachie,  n*est  pas  moins  corrompu  : 
il  adoucit  les  consonnes  sifflantes,  et  change  sch  en  s,  isch 
en  ts,  etc. 

Le  polonais  s'écrit  avec  l'alphabet  latin ,  auquel  on  a 
ajouté  deux  voyelles  figurées  par  les  caractères  a  et  e 
avec  une  cédille  pour  représenter  les  sons  on  et  in,  le  w 
allemand  qui  a  le  son  de  notre  v,  et  une  l  barrée  pour 
rendre  une  articulation  particulière  aux  Polonais.  Les 
règles  de  l'orthographe  sont  basées  sur  la  prononciation. 
Celle-ci  est  momfiée  par  des  accents,  qui  affectent  les 
consonnes  aussi  bien  que  les  voyelles.  L'accent  sur  une 
consonne  la  rend  mouillée^  c-k-i,  qu'il  la  fait  suivre  d'un 
y  faiblement  prononcé.  Les  vers  polonais  sont  rimes.  La 
f^e  générale  de  la  prosodie  est  de  placer  une  longue  sur 
b  pénultième  des  polysyllabes. 

V.  Roter,  CUf  de$  languet  polofMtse  et  allemande, 
Bmlau,  1016,  in-8*;  Cnapius  (Knapgki),  Theiourus  po- 


lono-latino-grœcus,  Cracovie,  1643;  Hesgnien  (Meninski), 
Institutio  polonicœ,  italicat  et  gallicœ  linguœ,  Dantzig^ 
1649,  in-8<>;  Malczewski,  Nova  et  mrtkodica  institutio 
in  linguam  polontcam,  1690;  le  même.  Idée  générale 
de  la  langue  polonaisef  en  allem.,  Riga,  168/;  Kop- 
czynski.  Essai  de  grammaire  polonaise,  pour  les  Fran* 
çais^  1807,  in-8°;  Bucki,  Méthode  pour  apprendre  la 
langue  polonaise,  Berlin,  1797,  '2  vol.  in-8<*;  Trabczynski, 
Grammaire  raisonnée  ou  Principes  de  la  langue  polo- 
naise, Varsovie,  1798,  in-12;  Trotz,  Dictionnaire  fran- 
çais-allemand et  polonais,  Leipzig,  1799-1803,  4  vol. 
in-8<^,  et  Nouveau  Dictionnaire  polonais- allemand  et 
français,  4«  édit.  revue  par  Moszczenski ,  Breslau ,  1832, 
3  vol.  in-4<*;  Uautepierre,  Grammaire  française  et  polo- 
naise, Varsovie  et  Breslau,  1800,  in-8*;  Linde,  Diction- 
naire du  polonais  et  des  treize  dialectes  de  la  langue  sla- 
vone,  Varsovie,  1807-1814,  6  vol.  in-4*»;  Litwinski, 
Vocabulaire  polonais-latin- français^  Varsovie,  1815,  2 
vol.  in-8<';  Kaulfuss,  Tableau  de  l'esprit  de  la  langue 
polonaise.  Halle,  1804;  Mrongovius,  Grammaire  polo- 
naise, Kœnigsberg,  1805,  in-8<*  ;  le  même.  Dictionnaire 
polonais-allemand  y  ibid. ,  1835,  et  Dictionnaire  alle- 
mand-^lonais,  1847;  Bandtkie,  Dictionnaire  polonais^ 
allemand,  Breslau,  1800,  in-8*»,  et  Grammaire  polonaise, 
1824  ;  Vater,  Grammaire  abrégée  de  la  langue  polonaise. 
Halle,  1807,  in-8°;  Mrozinski,  Grammaire  polonaise,  Var- 
sovie, 1822;  PopJinski,  Grammaire  polonaise.  Lissa, 
1820;  Schmidt,  Dictionnaire  polonais-ru^se-allemand, 
Breslau ,  1834-36, 2  vol.  in-8°,  et  Nouveau  Dictionnaire 
portatif  français-polonais  et  polonais- français,  Leipzig, 
in-16;  Polil,  Grammaire  théorique  et  pratique  de  la 
langue  polonaise,  3"  édit.,  Breslau,  1839;  Bronikowski, 
Grammaire  polonaise  pour  les  Français,  Paris,  1848; 
Srzcniavva,  Traité  des  étymologies  de  la  langue  polonaise, 
en  allem.,  Lcml)erg,  1848, 2  vol.  in-8^ 

POLONAISE  (Littérature).  De  tous  les  peuples  slaves,  les 
Polonais  sont  ceux  qui  possèdent  la  littérature  la  plus 
riche.  Antérieurement  à  l'introduction  du  christianisme, 
il  existait  des  chants  et  des  légendes  populaires,  dont  les 
fragments  ont  été  recueillis  de  nos  jours  avec  soin.  Le 
plus  ancien  monument  qui  soit  arrivé  complet  jusqu'à 
nous,  c'est  l'hymne  en  vers,  Ooga  Bodzica^  qu'on  attribue 
à  l'évèque  S'  Adalbert  f  fin  du  x*  siècle),  et  qui  est,  sous 
forme  d'invocation  à  la  Vierge,  un  véritable  chant  de 
guerre.  —  Ces  premiers  germes  de  la  littérature  polo- 
naise furent  étouffés  par  la  civilisation  latine,  qui  avait 
pénétré  dans  le  pays  avec  l'Évangile.  Pendant  cinq  siècles, 
ce  fut  en  latin  qu'on  écrivit  tous  les  ouvrages  destinés  à 
l'Europe  savante.  Au  xii*  siècle,  les  lettrés  de  la  Pologne 
connaissaient  à  fond  la  littérature  romaine,  et  lui  fai- 
saient de  nombreux  emprunts;  les  écoles  et  les  biblio- 
thèques pouvaient  rivaliser  avec  celles  des  peuples  de 
l'Occident  ;  la  jeunesse  allait  compléter  ses  études  dans 
les  Universités  de  France  et  d'Italie,  où  l'on  vit  même 
plusieurs  Polonais  professer  :  Nicolas  de  Cracovie,  Jean 
Grot  do  Slupcé,  Przeclaw,  etc.  De  nombreuses  Chro- 
niques latines  furent  rédigées  durant  cette  période,  entre 
autres,  celles  de  Martin  Gallus  (en  polonais  Kurek,  coq)^ 
de  Mathieu  Cholewa,  de  Vincent  Kadiubek,  de  Boguphal, 
et  de  Martin  Strzepski ,  dit  Polonus,  Vitelio  (Ciolek)  de- 
vint célèbre  comme  physicien  et  mathématicien. 

Une  ère  meilleure  pour  la  littérature  nationale  com- 
mença avec  la  seconde  moitié  du  xiv*'  siècle.  En  1347,  le 
roi  Casimir  III  donna  un  Code  de  lois  connu  sous  le  nom 
do  Statut  de  Wislica,  et  rédigé  en  polonais,  et  fonda  en 
1364  l'Université  de  Cracovie,  qui  toutefois  ne  fut  com- 
plètement organisée  c^u'en  1400  par  Ladislas  Jagellon, 
dont  la  femme,  Hedwige,  avait  naguère  obtenu  du  pape 
Boni  face  X  l'autorisation  d'y  adjoindre  une  Faculté  do 
Théologie.  Cette  Université,  constituée  sur  le  modèle  do 
celle  de  Paris,  soutenue  par  Jaroslas  Skotniçki,  arche- 
vêque de  Gnesne,  devint  le  foyer  des  sciences  et  des 
lettres  en  Pologne  :  ses  docteurs  figurèrent  avec  éclat  au 
concile  de  BAle  en  1431  ;  féconde  aussi  en  illustres  ma- 
thématiciens, elle  eut  la  gloire  de  former  Copernic.  Mat- 
thieu do  Cracovie  devint  recteur  des  Universités  de 
Prague  et  de  Paris.  Grégoire  de  Sanok  se  distingua  comme 
philosophe  et  comme  naturaliste.  La  première  impri- 
merie qu'il  y  ait  eu  en  Pologne  fut  établie,  en  148d,  à 
Cracovie,  par  un  certain  Haller.  Parmi  ceux  qui  contri- 
buèrent à  l'élan  que  prit  alors  la  culture  des  sciences,  il 
faut  surtout  mentionner  Jean  DIupsz,  dont  on  a  une 
flistoire  de  Pologne,  en  latin ,  précieuse  pour  l'histoire 
de  son  temps. 

Le  xvi"  siècle  a  été  appelé  l'âge  d'or  de  la  littératurt 
poionnifio.  La  tolérance  dont  on  Jouissait  dans  le  royauinf 


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1454 


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y  attirait  des  milliers  d^étrangcre,  poursuivis  pour  leurs 
doctrines  en  Allemagne,  en  Italie,  en  Espagne,  en  Angle- 
terre et  en  Suède;  une  égale  tolérance  était  laissée  au 
catholicisme,  au  protestantisme,  au  schisme  grec  et  au 

{udaîsme.  Le  talent  pouvait  prétendre  à  tous  les  emplois  : 
^historien  Kromer,  fils  d*un  paysan,  et  le  poôte  Dan- 
tiscus,  fils  d*un  brasseur,  se  succédèrent  dans  révéché 
de  Warmie  ;  Érasme  Ciolek,  fiU  naturel  d*un  musicien 
ambulant  et  d*une  cabareti^,  fut  évèque  de  Ploçk  ;  Ja- 
niçki ,  fils  d*an  voiturier,  reçut  du  pape  la  couronne  de 
poète;  un  cardinal  d*origine  très-obscure,  Stanislas  Ho- 
sius,  fut  Tun  des  présidents  du  concile  de  Trente.  Il  était 
rare  alors  de  rencontrer  un  Polonais  qui  ne  parl&t  pas 
plusieurs  langues.  Des  imprimeurs  célèbres,  tels  que 
Scharfenberger,  Viétor,  Piotrkowczyk,  etc.,  rivalisaient 
de  goût  pour  se  rendre  dignes  d'un  tel  siècle  :  80  villes 
polonaises  possédaient  des  imprimeries,  et  on  en  comp- 
tait 50  à  Cracovie  seulement.  Enfin  les  luttes  de  la  Réfor- 
mation religieuse  imprimèrent  aux  esprits  une  activité 
salutaire.  —  Sous  Tinfluence  de  ces  causes  diverses,  la 
littérature  prit  un  grand  essor.  Nicolas  Rey,  de  Naglowiç, 
peut  être  considéré  comme  le  père  de  la  poésie  polo- 
naise ;  on  lui  doit  une  traduction  en  vers  des  Psaumes, 
des  poésies  satiriques  écrites  dans  une  langue  énergique, 
mais  souvent  grossière,  et  un  Miroir  de  tous  les  Etats, 
précieux  pour  l'histoire  des  mœurs.  Jean  Kochanowski 
composa  des  odes  et  des  élégies  touchantes,  des  épi- 
grammes,  des  satires,  un  drame  conçu  dans  le  système 
des  anciens  Grecs,  et  une  magnifique  traduction  des 
Psaumes;  son  frère,  André,  traduisit  V Enéide,  et  son 
neveu,  Pierre,  la  Jérusalem  délivrée  et  le  Roland  furieux, 
Rybinski,  Szarzynski  et  Grochowski  se  distinguèrent 
comme  poètes  lyriques.  André  Krzycki  écrivit  en  latin  des 
satires,  des  élégies,  et  divers  traites  en  prose.  Szymono- 
wicz,  dit  Sim^mideSt  mérita  par  ses  odes  latines  le  sur- 
nom de  Pindare  latin,  et  composa  de  charmantes  idylles 
polonaises  sur  le  modèle  de  celles  de  Théocrite.  Zimoro- 
wicz  suivit  ses  traces  dans  la  poésie  pastorale,  tandis  que 
Dambrowski  et  Miaskowski  composaient  des  hymnes  re- 
ligieux. L'éloquence  politique  fut  cultivée  avec  succès  par 
Orzechowski ,  lanuszowski  et  Gornicki,  l'éloquence  sacrée 
par  Skarga  et  Vuieck.  Des  Annales  furent ,  comme  pré- 
cédemment, écrites  en  latin  par  Miechow,  Kromer, 
Hodrzewski,  etc.;  mais  la  langue  polonaise  fut  aussi 
appliquée  à  Thistoire  par  Martin  Bielski  et  son  fils  Joa  • 
chim ,  par  Gornicki  (  Histoire  de  la  couronne  de  Pologne), 
Stryikowski  (Chronique  de  Lithuanie,  Kœnigsberg,  1852), 
Paprocki,  auteur  d'ouvrages  chronologiques  et  héral- 
diques, pour  la  plupart  en  vers.  Ajoutons  aux  noms  qui 
précèdent  ceux  de  Jean  Flachsbinaer,  Jean  Turzo,  poètes 
et  prosateurs  Versés  dans  la  langue  latine;  Stanislas  Za- 
borowski ,  grammairien  et  légiste  ;  Bernard  Wapowski , 
historien  et  mathématicien  ;  uroicki ,  Herburt ,  Warsze- 
wicki  Grzebski,  Spiczynski  Siennik,  Sendziwoy,  célèbres 
à  divers  titres  scientifiques.  Siémionowicz  fit  paraître  sur 
Tartillerie  un  ouvrage  qu'on  traduisit  en  français  et  en 
allemand.  Arciszewski  alla  construire  en  Amérique  les 
forteresses  de  Rio-Janeiro,  de  Pernambouc  et  de  Bahia. 
Les  œuvres  de  Bernard  de  Lublin  et  de  Jean  de  Pilzno 
sur  la  Jurisprudence  offrent  une  étonnante  analogie  d'idées 
avec  celles  que  publièrent  au  xvui*  siècle  en  Italie  Bec- 
caria  et  Filangieri. 

A  cette  période  de  gloire  succède  un  siècle  de  déca- 
dence, qui  coïncide  avec  la  domination  des  Jésuites. 
Avec  cet  ordre  religieux,  un  latin  incorrect  prévaut  dans 
la  littérature  et  les  sciences  sur  l'idiome  national;  la 
langue  polonaise  perd  elle-même  sa  pureté  par  l'invasion 
du  mauvais  goût ,  et  les  mots  se  chargent  de  désinences 
latines,  italiennes  ou  françaises.  Les  dissertations  théo- 
logiques et  le  genre  affecté  du  panégyrique  prennent  la 
place  des  œuvres  de  Tinvention  originale.  Quatre  impri- 
meries seulement  se  maintiennent  dans  toute  la  Pologne, 
et  la  plupart  des  écoles  se  ferment.  II  faut  ajouter  à  ces 
calamités  les  invasions  des  Suédois,  des  Russes  et  des 
Turcs,  qui  achèvent  de  disperser  et  de  détruire  les  mo- 
numents des  lettres  et  des  arts.  Toutefois,  on  peut  en- 
core mentionner  quelques  hommes  distingués  :  le  Jésuite 
Casimir  Sarbiewski ,  auteur  de  remarquables  poésies  la- 
tines; Twardovroki,  poète  héroïque;  Kochowski,  à  qui 
l'on  doit  des  odes  estimées;  Opallnski,  auteur  de  pi- 
quantes satires,  écrites  malheureusement  avec  trop  de 
négligence  ;  Chroscynski ,  traducteur  de  Lucain  ;  le  jésuite 
Nasurczewski,  traducteur  de  V Iliade  d'Homère  et  des 
Égîogues  de  Virgile  ;  Niesiecki ,  laborieux  biographe. 

Vers  le  milieu  du  xvui*  siècle,  la  littérature  prit  un 
touvel  essor,  grâce  à  l'influence  exercée  par  la  Fninoe  et  I 


ses  mœurs,  et  aux  encouragements  que  les  lettres,  aooi 
le. règne  de  Stanislas-Auguste,  reçurent  des  Czartoryiskf, 
des  Jablonowski  et  autres  seigneurs  polonais.  Un  prêtre 
piariste,  Stanislas  Konarski,  eut  la  plus  grande  part  à 
cette  rénovation ,  par  la  fondation  d'une  foule  d'écoles, 
et  par  la  publication  d'excellents  ouvrages  pédagogiques 
ou  littéraires.  Il  traduisit  en  polonais  diverses  pièces  dra- 
matiques françaises,  et  fit  établir  à  Varsovie,  en  1765, 
un  tné&tre  permanent.  Il  fut  secondé  dans  cette  noble 
t&che  par  les  deux  évoques  Zaluski ,  qui  parcoururent  la 
Pologne,  l'Allemagne  et  l'Italie,  pour  rochercher  les  livres 
et  les  manuscrits  polonais  que  les  invasions  avaient  dis- 
persés, et  qui  parvinrent  &  former  une  bibliothèque  de 
300,000  vol.,  dont  ils  firent  don  à  l'État.  Une  Commission 
^éducation  ncUionale  fut  formée  en  1775,  pour  diriger 
et  perfectionner  l'instruction  publique.  Parmi  les  écri- 
vains de  cette  époque,  on  distingue  :  Rzewuski,  renommé 
pour  son  talent  poétique  ;  le  Jésuite  Bohomolic,  qui  tra- 
duisit un  grand  nombre  de  pièces  du  théâtre  français;  le 
prince  Adam  Czartoryiski ,  a  qui  l'on  doit  les  premiers 
drames  vraiment  nationaux;  Szymanowski  etTrembecki, 
chantres  gracieux  d'idylles  et  d'éléfdes  ;  Naruszewirz,  quo 
ses  poésies  lyriques,  sa  traduction  de  Tacite,  etson  Histoire 
de  la  nation  polonaise  placent  au  premier  rang;  Krasicki, 
remarquable  par  sa  verve  et  sa  finesse,  auteur  de  la 
Guerre  de  Cfioczim,  de  plusieurs  satires  spirituelles,  et 
d'une  bonne  traduction  d'Ossian  ;  Wegierski ,  poète  épi- 
grammatique,  qui  a  imité  le  Lt^^nn  de  Boileau  ;  Kniaznin, 
célèbre  par  ses  chansons  anacréontiques;  Ludwik  Omski, 
traducteur  de  Corneille;  Boguslawski,  auteur  du  drame 
les  Cracoviens  et  les  Gorales,  Lachowski,  prédicateur  de 
la  cour,  relQva  l'éloquence  de  la  chaire.  La  diète  de  1788 
vit  se  produire  des  talents  oratoires,  entre  autres,  Ignace 
Potocki',  promoteur  de  l'affranchissement  des  serfs,  et 
son  frère  Stanislas  Potocki ,  Judicieux  critique,  dont  on 
a  un  Traité  sur  le  style. 

Malheureusement  la  Pologne,  déjà  morcelée  par  les 
partages  de  1772  et  de  1793,  devint  en  1705  la  proie  de 
ses  voisins  ;  les  lettres  furent  la  consolation  des  bons 
esprits  sous  la  domination  étrangère.  Dés  1801,  l'historien 
Thadeusz  Czacki ,  Franciszek  Dmochowski  et  l'évêque  Al- 
bertrandy  fondèrent  à  Varsovie  une  Société  des  Amis  des 
sciences;  l'Université  de  Wilna,  restaurée  en  1803>  et  le 
lycée  de  Krzeminiecz,  fondé  en  1805,  firent  tout  ce  qui 
était  en  leur  pouvoir  pour  maintenir  la  langue  nationale 
et  propager  l'instruction.  Un  habile  ministre,  Stasziç, 
seconda  ce  mouvement.  L'érudition  classique  fut  repré- 
sentée avec  éclat  par  Przybylski  et  Felinski,  auteurs 
d'excellentes  traductions  en  vers.  Karpinski  écrivit  des 
pastorales  renommées  et  une  brillante  imitation  des 
Psaumes  ;  Kozmian  et  Tomaszewski ,  des  poèmes  didac- 
tiques; Ozinski  et  Brodzinski,  des  poésies  lyriques; 
Gurski,  des  poésies  légères;  Woronicz,  sa  Sibylle  et  sa 
Lechiade;  Venzyk,  sa  tragédie  de  Glinski,  Niemcewicz, 
génie  universel ,  se  distingua  par  ses  chants  historiques 
et  ses  drames  nationaux ,  par  ses  odes  et  ses  élégies ,  par 
ses  traités  d'histoire  et  de  littérature.  Kollontay  se  mon- 
tra savant  publiciste;  l'évêque  Karpowicz  releva  l'élo- 
quence de  la  chaire;  Bantkie,  Linde,  Ossolinski,  don- 
nèrent d'utiles  travaux  sur  la  philologie  et  sur  l'histoire; 
Bentkowski  composa  un  Cours  de  littérature.  Puis,  une 
nouvelle  école  littéraire  se  forma,  nourrie  des  poètes  an- 
glais et  allemands,  et  hostile  au  classicisme  français. 
A  côté  de  Mickiewicz,  qui  en  fut  le  chef,  se  placent 
des  poètes  que  la  Révolution  de  1831  contraignit  pour 
la  plupart  de  fuir  à  l'étranger  :  Malczeski,  Zaleski,  Pa- 
dura ,  Ostrowski  ;  Odysnec ,  'traducteur  de  la  Fiancée 
d*Abydos,  de  lord  Byron,  et  de  la  Dame  du  lac,  de  Walter 
Scott;  Korsak,  poète  lyrique  et  élégiaque;  Chodzko, 
traducteur  d'un  grand  nombre  de  poèmes  orientaux; 
Garczynski ,  auteur  d'un  poème  épique  ;  Siowacki ,  le 
plus  fécond  des  poètes  [Polonais  modernes.  En  même 
temps ,  une  direction  nouvelle  a  été  imprimée  à  l'his- 
toire par  Lelewel,  et  sur  ses  traces  ont  marché  Bandski, 
Maciejowski ,  le  comte  Raczynski ,  le  comte  Piater,  Moc> 
kacki ,  Karl  Hoffmann,  Wrotnowski.  On  a  de  Narbutt  une 
excellente  histoire  de  la  Lithuanie;  de  Lucaszewicz,  le 
récit  de  la  dernière  guerre  de  l'indépendance,  et  des 
matériaux  pour  l'histoire  de  la  Réformation  en  Pologne. 
Michel  Czajkowski  (  Michel- Zadik- Pacha)  est  l'un  des 
mellleura  romanciers  de  sa  nation  ;  dans  le  même  oenre 
s'est  distin{;uée  la  princesse  Czartoryiska  de  Wurtenc&erg, 
auteur  de  Malvina. 

POLTIN,  monnaie  d'argent  de  Russie,  valant  un  demi 
rouble  ou  2  fr. 

POLYAMATYPIE  (du  grec po/uf,  multiple,  orna,  eo* 


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lenible,  et  tupot,  caractère),  procédé  oa!  consiste  à  fondre 
ensemble  plusieurs  caractères  d'impnoierie  à  la  fois,  au 
lieu  de  les  fondre  un  à  un,  comme  cela  se  pratique  géné- 
ralement. Henri  Didot  en  est  l'inventeur. 

PQLYANDRION ,  nom  que  les  anciens  Grecs  donnaient 
au  tombeau  commun  d*un  certain  nomrbre  de  guerriers. 

POLYCHROMIE  (du  grec  polus,  multiple,  et  khrâma, 
couleur  ),  procédé  consistant  à  enluminer  de  oouleun  va- 
riées les  ouvrages  de  sculpture  et  les  monuments  d*ar- 
chitecture.  L*usage  de  colorier  les  statues  est  aussi  ancien 
que  la  statuaire  :  les  Éthiopiens  peignaient  leurs  divi- 
nités avec  du  minium  ;  les  Assyriens  les  revêtaient  d'un 
vernis  coloré  ;  les  Phéniciens,  les  Babyloniens  et  les  Perses 
les  ornaient  en  outre  d'or,  d'argent,  d'ivoire,  de  pierre- 
ries, déchaînes  précieuses,  etc.  Il  en  fut  de  même  chez 
les  Grecs,  non.  que  l'art  fût  dans  l'enfancet  mais  pour 
donner  satisfaction  k  un  goût  encore  peu  épuré.  Les  sta- 
tues et  les  bas-reliefs  en  marbre  blanc  du  célèbre  tom- 
beau de  Mausolo  étaient  peints  :  le  fond  des  bas-reliefs 
en  azur,  et  le  reste,  ainsi  que  la  figure  de  Mausolo,  en 
rouge,  ainsi  qu'on  peut  le  voir  aux  ruines  qui  en  ont  été 
apportées  au  British  Muséum  de  Londres.  On  voit  au  mu- 
sée des  études  à  Naples  un  Apollon  en  marbre  dont  les 
cheveux  portent  la  trace  d'une  peinture  blonde,  et  dont 
le  bas  de  la  draperie  est  orné  de  bandes  rouges  avec  de 
petites  fleurs  blanches.  Il  existe  à  Munich  une  statue  de 
Leucothée,  où  l'on  remarque  des  traces  de  la  dorure  des 
cheveux^  et  de  dessins  routes  et  verts  qui  ornaient  les 
draperies.  Un  buste  d'AntinoOs,  au  Louvre,  était  enduit 
d'une  légère  cooche  de  peinture,  et  les  yeux  étaient  figu- 
rés par  des  diamants  que  l'artiste  y  avait  enchftssés.  Ce 
fut  seulement  depuis  le  siècle  de  Périclès  que  les  ar- 
tistes cessèrent  d'employer  la  couleur  pour  ràhausser  la 
valeur  de  leurs  œuvres.  Mais  Jamais  les  Grecs  ne  renon- 
cèrent à  peindre  les  édifices  publics  ou  privés  :  ils  ap- 
pliquaient les  coulcun  aux  frises  et  aux  moulures  en 
fierai.  Dans  l'ordre  dorique,  on  faisait  souvent  usage 
des  dorures  :  l'architrave  du  Parthénon  était  ornée  de 
boucliers  d'or.  —  La  polychromie  passa  des  Grecs  aux 
Romains  :  à  Herculanum  et  à  Pompéi,  les  colonnes  et  les 
murailles  extérieures  des  édifices  sont  enduites  d'une 
couche  de  peinture;  la  colonne  Trajane  à  Rome  était  re- 
nommée pour  les  brillantes  couleurs  dont  elle  était  revê- 
tue. Sous  les  empereurs,  ce  fut  une  mode  de  peindre  les 
façades  des  édifices  de  manière  à  imiter  les  ornements 
architectooiques.  Les  Byzantins  et  les  Arabes  ont  aussi 
adopté  la  polychromie.  On  l'adopta  pour  les  églises  de 
l'Occident,  surtout  aux  xu*  et  xrii*  siècles,  mais  on  y  re- 
nonça complètement  au  xvi*.  Elle  est  aujourd'hui  fort  à 
la  mode  pour  la  décoration  des  édifices  religieux ,  même 
de  ceux  qui  ne  la  comportent  guère.  V,  Hittorff,  V Ar- 
chitecture polifchrâme  chez  les  Grecs,  Paris,  1830,  in-8*. 

POLYCORDE,  instrument  de  musique  à  archet,  in- 
venté en  1799  par  Hilmer,  à  Leipzig.  Il  ressemble  à  la 
contre-basse,  mais  est  monté  de  10  cordes. 

POLYGAMIE  (du  grec  polus,  multiple,  eigamos,  ma- 
riage), état  d'un  homme  qui  a  plusieun  femmes.  La 
polygamie,  fondée  sur  l'inégalité  sociale  et  l'esclavage  des 
femmes,  a  été  en  usage  parmi  tous  les  peuples  sauvages. 
Chez  les  Hébreux ,  où  l'exemple  des  patriarches  Tautori- 
sait,  elle  ne  fut  point  détruite  par  la  loi  de  Moïse.  En 
Grèce,  la  loi  athénienne  permettait  d'avoir  deux  femmes, 
et  Socrate  lui-même  en  profita.  Chez  les  Romains,  le 
polygame  fut  noté  d'infkmie.  Les  Barbares  de  la  Germa- 
oie,  au  moment  de  leura  invasions,  étaient  monogames  ; 
mais  lenn  chefs  pouvaient  prendire  plusieurs  femmes 
comme  marque  d'honneur.  La  polygamie  a  été  interdite 
par  la  loi  chrétienne  :  néanmoins  les  Protestants  ont  cru 
devoir  la  tolérer  chez  les  nouveaux  chrétiens  de  l'Inde. 
Mahomet,  cherchant,  non  à  faire  disparaître  la  polyga- 
mie, mais  à  la  régler,  reconnut  à  ses  sectateun  le  droit 
de  prendre  quatre  femmes  légitimes.  Les  Mormons  de  nos 
Jours  ont  adopté  la  polygamie.  Dans  notre  ancienne  Juris- 
prudence, le  polygame  était  puni  de  mort;  aujourd'hui  la 
pluralité  des  manages  légalement  contractés  entraîne  la 
peine  des  travaux  forcés.  V.  Bioamib.  B. 

POLYGLOn*E  (du  giec  polus,  multiple,  et  glôtta, 
langue  ),  se  dit  de  toute  personne  qui  sait  plusieurs  lan- 

K es,  et  de  tout  ouvrage  écrit  ou  imprimé  en  plusieun 
ignes.  H  existe  diverses  Bibles  polyglottes  :  les  Hexa- 
pies  (F.  ce  mot)  d'Origène;  la  Bibh  de  Ximinès,  dite 
aussi  Bible  d'Aleala  ou  Bible  Complute  (CompltUwn  est 
le  nom  latin  d'Aleala) ,  imprimée  de  1514  à  1517  à  Alcala, 
par  ordra  du  cardinal  Ximénès,  en  hébreu,  en  chaldéen , 
en  grec  et  en  latin  ;  la  Bible  de  Justmiant,  1518,  dans 
les  mêmes  langues  que  la.  précédente,  plus  l'arabe  ;  la 


Bible  royale,  copie  de  celle  de  Ximénès,  augmentée  do 
syriaque,  imprimée  à  Anven  en  1572,  aux  frais  de  Phi- 
lippe II,  sous  la  direction  d'Arias  Montanus;  la  Bible  de 
Butter f  imprimée  à  Hambourg  (1500)  en  12  langues, 
hébreu,  chaldéen,  grec,  latin,  allemand,  saxon  ou  bohème, 
italien,  espagnol ,  anglais,  français,  danois,  polonais  ou 
slavon  ;  la  Bible  de  Le  Jay,  publiée  à  Paris  (lo45)  en  sept 
langues,  hébreu,  chaldéen,  samaritain,  syriaque,  arabe, 
grec  et  latin  ;  la  Bible  de  Wallon,  imprimée  à  Londres 
en  1057,  où  se  trouvent  quelques  parties  en  éthiopien  et 
en  persan.  VOraison  dominicale  a  été  imprimée  à  Paris, 
en  1805,  dans  90  langues.  Calepin  est  auteur  d'un  Dic- 
tionnaire (1551  et  1081)  en  sept  langues,  latin,  hébreu, 
grec,  français,  italien,  allemand,  espagnol  et  anglais.  Les 
traductions  polyglottes  des  auteun  anciena  sont  assez 
nombreuses. 

POLYGONE  (du  grec  polus,  multiple,  et  gânia,  angle), 
en  termes  de  Fortification,  figure  qui  détermine  la  forme 
^nérale  d'une  place  de  ^erre.  —  On  nomme  encore 
Polygone  le  lieu  où  les  artilleura  s'exercent,  en  temps  de 
paix,  au  tracé  et  à  la  construction  des  batteries,  au  tir  da 
canon,  au  Jet  des  bombes  et  des  obus,  etc.  Une  butte  en 
terre,  à  plusieura  côtés,  sert  de  point  de  mire  aux  pro- 
jectiles. Il  y  a  un  polygone  à  chaque  école  d'artillerie. 

POLYGRAPHE  (du  mcpolus,  multiple,  et  graphéin^ 
écrire),  auteur  qui  a  écrit  sur  plusieura  matières.  Tels  sont, 
chez  les  Grecs,  Aristote,  Platon,  Xénophon,  Plutarque  et 
Lucien  ;  chez  les  Romains,  Cicéron,  Varron,  Sénèque;  en 
France,  Fontenelie,  Voltaire,  Montesquieu,  J.-J.  Rous- 
seau, Diderot,  Chateaubriand,  etc.; en  Allemagne,  Leibniz, 
VVieland,  Gœthe. 

POLTGSAPHB ,  machine  qui  fait  mouvoir  simultanément 
plusieurs  plumes  à  écrire.  C'est  une  invention  anglaise, 
transportée  en  France  par  Rochette  en  1805. 

POLYGRAPHIE,  art  d'écrire  de  plusieun  manières 
secrètes,  qui,  pour  être  lues,  supposent  une  clef  ou  la 
connaissance  d'un  chiffre  convenu.  V.  CaYFrocRAPniB, 
Chiffres. 

POLYMNIE  (du  grec  polus,  multiple,  et  de  umnos, 
hymne,  ou  de  mnéia,  mémoire),  une  des  Muses.  Sur  des 
monuments  antiques,  elle  est  représentée  debout,  la  main 
droite  élevée,  enveloppée  dans  sa  draperie  et  son  menton 
reposant  dessus,  dans  l'attitude  de  la  méditation.  Parfois 
elle  a  une  simple  couronne  dans  les  cheveux,  parfois  des 
perles.  Elle  tient  aussi  un  sceptre  de  la  main  gauche. 
Chez  les  Latins ,  on  lui  donna  un  volume  ou  rouleau,  sur 
lequel  étaient  écrits  les  noms  de  Démosthènes  et  de  Cicé- 
ron, ou  le  mot  suadêre  (penuader).  Quand  elle  a  un 
maaque  à  ses  pieds,  elle  est  la  Muse  de  la  pantomime.  Le 
nmsée  du  Louvre  possède  une  gracieuse  statue  de  Po- 
lymnie,  haute  de  1™,86. 

POLYNÉSIENNES  (Langues),  groupe  de  lanffues  de 
rOcéanie,  dont  les  plus  importantes  sont  le  néozélan" 
dais,  le  tonga,  le  taitten,  le  marquésan,  le  sandwich 
{V.  ces  mots).  Ces  langues,  qui  paraissent  être  nées  de 
l'altération  graduelle  du  malais,  sont  pauvres  de  formes  ; 
l'onomatopée  y  est  fréquente;  les  catégories  gramma- 
ticales sont  faiDlement  accusées,  et  le  même  mot  appar- 
tient souvent  &  difiTérentes  parties  du  discours.  Il  arrive 
que  le  genre  et  le  nombre  ne  sont  môme  pas  indiqués. 
La  structure  des  mots  est  fort  simple  :  la  syllabe  ne  peut 
être  terminée  par  une  consonne,  ni  en  renfermer  deux; 
elle  se  compose  toujoura  d'une  consonne  suivie  d'une 
voyelle,  ou  n'est  formée  que  d'une  seule  voyelle.  Les 
langues  polynésiennes  ont  fréquemment  recoure  à  la  ré- 
pétition d'une  même  svllabe  pour  former  des  mots  nou- 
veaux. Elles  sont  privéas  de  siflQantes,  et  tendent  à  faire 
disparaître  les  consonnes  qui  ont  une  individualité  trop 
prononcée.  On  y  remarque  une  double  forme  du  pluriel, 
indiquant  si  la  personne  &  laquelle  on  s'adresse  est  com- 
prise dans  le  nous,  ou  en  est  exclue,  n  y  a  de  même  un 
double  duel. 

POLYPLECTRON,  instrument  à  clavier,  en  forme  de 
piano,  dont  les  sons  imitent  ceux  de  plusieura  instru- 
ments à  archet.  Il  ftit  Inventé  par  Dietz,  à  Paris,  en  1828. 

POLYPTOtE  (du  grec  polus,  multiple,  eiptôsis,  chute, 
désinence),  figure  de  diction  qui  consiste  à  employer  un 
même  mot,  dans  la  même  période,  sous  plusieura  des 
formes  grammaticales  dont  il  est  susceptible.  Ex.  :  «  Tout 
ce  que  vous  avez  pu  et  dû  faire  |>our  prévenir  ou  pour  pa- 
cifier les  troubles,  vous  l'avez  fait  dès  le  commencement, 
vous  le  faites  encore  tous  les  Joun,  et  l'on  ne  doute  pas 
que  vous  ne  le  fassiez  Jusqu'à  la  fin.  » 

POLYPTYQUE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictumnaire  dé 
Biographie  et  d'Histoire, 

POLYSYLLABE  (du  grec  jK><iM,  nombreux,  et  suUabè, 


POM 


145C 


POM 


^llabe) ,  mot  renfermant  plus  de  deux  on  trois  syllabes, 
eomme  proportion,  constitutionnel,  etc.  On  appelle  aussi 
de  ce  nom  un  pied  métrique  composé  de  plus  de  trois 
syllabes,  comme  sont  les  chorlambes,  les  péons,  les  épi- 
tritcs,  les  ioniques,  les  procéleusmatiques.  Considérés 
par  rapport  à  l'accent  toniaue,  les  polysyllabes  ne  peu- 
vent le  recevoir  au  delà  de  la  "i*  avant-dernière  dans  les 
langues  anciennes,  et  ils  n*en  peuvent  porter  deux  que 
dans  certains  cas  où  suit  un  enclitique.  Dans  les  vers 
dactyliques  grecs ,  tout  polysyllabe  peut  se  placer  à  la  fin  ; 
ainsi  certains  vers  d*Homere  se  terminent  par  des  mots 
de  7  syllabes;  la  versification  latine  ne  s*accommodait  pas 
de  CCS  longs  mots,  et  no  tolérait  généralement,  à  cette 
place,  que  des  dissyllabes  et  des  trisyllabes.  On  ne  sui- 
vait le  système  grec  que  pour  les  noms  propres  tirés  de 
cette  langue  {Alpheswœus,  Tyndaridarum ,  Alcimedon- 
Us) ,  et  dfans  les  vers  spondalques.  P. 

POLYSYNDÊTON  (du  grec  polus,  nombreux,  et  sun- 
detos,  lié  ensemble,  conjoint),  terme  de  Rbétorique 
ancienne  ;  figure  de  mots  consistant  dans  la  répétition  de 
la  même  conjonction  au  commencement  de  plusieurs  in- 
cises ,  ou  lorsqu'on  veut  marquer  arec  plus  de  force  une 
énumération.  P. 

POLYSYNTHÉTIQUES  (  Langues  ),  c.-à-d.  composées 
d^éléments  multiples,  variété  des  langues  qui  procèdent 
par  agglutination  (  k.  ce  mot).  Elles  se  rencontrent  cbez 
la  plupart  des  anciennes  peuplades  américaines.  Ce  qui 
les  caractérise,  c'est  qu'un  seul  mot ,  souvent  d'une  in- 
croyable longueur,  y  exprime  des  idées  très-complexes. 
Ainsi,  un  heptasyllabe,  comprenant  18  lettres,  rend  les 
1 1  mots  français  suivants  :  Ùeu  où  les  hommes  pleurent 
parce  qite  l'eau  est  rouge;  et  c'est  le  nom  d'une  ancienne 
ville  mexicaine  chez  les  Acolhues  :  AchichillMhocan  (pro- 
prement Eau-rouge-homme-^leurer).  D'autres  fois,  un 
mot  très-simple  dans  nos  langues  européennes  est  exprimé 
par  plus  do  20  lettres  :  tel  est  celui  qui,  sur  les  bords  de 
i'Orégon,  correspond  à  langue,  et  celui  qui  en  mexicain 
signifie  fagot»  Les  dialectes  mexicains  offrent  des  mots 
qui  ont  Jusqu'à  14  syllabes,  et,  par  conséquent,  une 
trentaine  de  lettres  au  moins.  Notre  locution  port  de  lettre 
s'y  exprime  par  un  mot  de  12  syllabes  contenant  33  lettres. 
On  en  trouve  dans  le  groenfandais  qui  ont  38  lettres; 
on  de  CCS  mots  é<|uivaut  à  ces  4  propK)sitions  :  H  dit 
aussi  I  que  tu  veux  également  \  aller  là  bien  vite  \  acheter 
un  beau  couteau.  Une  autre  différence  bien  profonde  entre 
nos  idiomes  et  ceux  de  la  plupart  des  peuplades  améri- 
caines, c'est  l'influence  exercée  sur  la  forme  des  verbes, 
non  pas  par  la  personne  qui  parle,  à  qui  on  parle,  ou 
dont  on  parle,  c.-à-d.  par  le  sujet,  mais  par  la  nature 
du  régime.  Si  celui-ci  est  une  personne  ou  un  animal  de 
tel  ou  tel  sexe,  ou  une  chose  inanimée  de  telle  ou  telle 
couleur,  dans  ces  différents  cas,  le  verbe  prendra  une 
forme  particulière  :  ainsi ,  je  vois  un  grand  rocher,  je 
vois  un  homme ,  je  vois  une  petite  fille ,  s'expriment  par 
trois  formes  verbales  différentes,  quoique  le  sujet,  le 
temps,  le  mode,  soient  les  mêmes  dans  chacune  de  ces 
propositions.  Le  verbe  manger  varie  autant  de  fois  qu'il 
y  a  de  choses  comestibles  différentes  énoncées  dans  la 
phrase,  c-à-d.  dans  le  mot.  Il  y  a  également  trois  verbes 
spéciaux  pour  exprimer  Tidée  se  servir  de,  selon  que  la 
chose  dont  on  se  sert  est  à  soi ,  ou  à  celui  à  qui  Ton  parle 
ou  de  qui  l'on  parle.  V.  AMéniCAiNES  (  Langues  ).      P. 

POLYTECHNIQUE  (École).  V,  École  poLYTecHiiiQDE, 
dans  notre  Dictionnaire  de  biographie  et  d'Histoire, 

POLYTHÉISME.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

POLYTYPAGE  (du  grec  polus,  multiplie,  ^Xiupos, 
type,  caractère),  nom  que  l'on  donna  aux  premiers  essais 
de  la  stéréotypie  (V.  ce  mot), 

POMÉRANIEN  (Idiome).  Cest  du  polonais  trè»-oor- 
rompu. 

POMME  DE  PIN,  ornement  fréquemment  employé 
dans  les  arts.  Sur  beaucoup  de  bas-reliefs  antiques,  une 
pomme  de  pin  termine  les  thyrses  qui  décorent  les  frises. 
On  la  voit  seule  dans  les  angles  des  plafonds,  des  cor- 
niches doriques  et  ioniques.  Elle  couronne  les  couvercles  j 
des  vases;  elle  forme  l'amortissement  des  édifices  circu- 
laires terminés  par  une  couverture  voûtée.  Une  pomme 
de  pin  colossale,  en  bronze,  surmontait  le  mausolée  de 
l'empereur  Adrien,  à  Rome;  on  la  voit* aujourd'hui  à  [ 
Textrémité  d'une  cour  du  Vatican. 

POMOBRIUM.  \  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

POMONE.        S     de  Biographie  et  d'Histoire. 

POMPE,  nom  donné,  dans  le  cor  et  la  trompette,  à  un 
fragment  de  tujrau  en  forme  de  fer  à  cheval,  qui  s'emboUe 
ptf  88t  extrémités  sur  les  bouts  formés  par  une  section 


faiteversle-milieudn  corps  de  Tin strument;  en  enfon- 
çant plus  ou  moins  cette  pompe,  on  élève  ou  on  baisse  le 
ton.  La  pompe  du  trombone  aies  branches  très-longues 
et  c'est  par  la  manière  dont  on  la  tire  ou  l'enfonce 
qu'on  obtient  les  différents  degrés  de  réchelle.  Dans 
la  flûte,  la  clarinette,  et  le  basson,  la  pompe  est  une 
embolture  en  métal   placée  entre   les  principales 

Pièces  pour  les  réunir,  et  qui  sert  aussi  à  allonger 
instrument,  ce  qui  baisse  son  intonation. 
POMPEE  (Colonne  de).  K.  Coijopinbs  mondhentales, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 
page  634.  col.  1. 

POMPEIA  ou  POMPÉI  (Ruines  de).  Cette  ville,  située 
à  24  kil.  S.-E.  de  Naples,  et  l'une  do  celles  quo  réruptios 
du  Vésuve  engloutit,  en  l'an  70  de  J.-C.,  fous  une  coucha 
de  cendres  de  plus  de  5  à  0  mètres  d'épaisseur,  fut 
complètement  oubliée  Jusqu'au  milieu  du  xvni*  siècle. 
Cependant,  en  4592,  l'architecte  Dominique  Fontana, 
chargé  d'amener  les  eaux  du  Samo  à  Torre  dcU*  Annun- 
ziata,  fit  creuser  un  canal  à  tntvers  l'emplacement  de 
Pompéi  ;  mais  l'incurie  de  Tadministration  espagnole  em- 
pêcha toute  recherche  d'antiquités  si  précieuses.  Un  siècle 
après,  Joseph  Macrini  reconnaissait  quelques  restes  de 
murs  et  des  maisons  entières,  sans  éveiller  davantage  la 
curiosité  publique.  En  1748,  des  paysans,  creusant  un 
fossé  dans  le  sol  garni  de  vignes  qui  recouvre  encore 
maintenant  une  partie  do  la  ville,  découvrirent  des  ob- 
jets d'art  ;  en  1755,  le  roi  Charles  III  fit  entreprendre 
des  fouilles,  que  l'on  poursuivit  avec  plus  d'activité  sous 
le  gouvernement  de  Joseph  Bonaparte,  puis  de  MuraL 
Les  travaux,  continués  Jusqu'à  nos  Jours  avec  de  fré- 
quentes interruptions,  ont  mis  à  découvert  à  peu  près  le 
tiers  de  la  cité  romaine.  On  a  ici  la  vue  de  l'antiquité 
dans  sa  réalité  matérielle,  bien  que  tout  le  faite  des  édi- 
fices soit  détroit  ;  les  objets  mobiliers  ont  tous  été  trans- 
portés au  musée  de  Naples.  —  Pompéi  était  défondue  par 
un  double  mur  de  8  à  10  met.  de  hauteur,  en  assises 
horizontales  de  blocs  de  marbre  sans  ciment,  avec  terre- 
plein  assez  large  pour  être  parcouru  par  trois  chars  de 
front.  De  distance  en  distance  sont  des  restes  de  tours 
carrées,  à  plusieurs  étages,  et  qui  paraissent  être  de 
sonstruction  plus  récente.  L'entrée  principale  àiie  Porte 
c/7/erct</anum,  con  siste  en  trois  arcades  bâties  en  briq  ues 
et  e^n  lave;  les  deux  latérales,  pour  les  piétons,  sont  pe- 
tites et  étroites:  il  y  avait  une  double  porte  en  bois;  ccUo 
jproxiôricur  se  fermaitèfldescendantdansdes  rainures 
profondes ,  encore  visibles.  Les  rues  sont  généralement 
droites,  irrégulièrement  pavées  eu  lave,  bordées  de  trot- 
toirs élevés,  et  fort  étroites,  ce  qui  les  rendait  moins  ac- 
cessibles au  soleil  ;  on  y  voit  des  ornières,  traces  de  la 
roue  des  chars,  des  degrés  en  pierre  pour  aider  à  monter 
à  cheval ,  et  des  fontaines  d'où  l'eau  était  distribuée  par 
des  conduits  de  plomb  dans  les  maisons  particulières  et 
dans  les  édifices  publics.  Les  habitations  privées,  encore 
debout  quelquefois  Jusqu'au  premier  étage  «  en  avalent 
deux  pour  la  plupart;  construites  toutes  sur  le  même 
plan,  elles  ne  comprennent  aue  de  petites  pièces.  On  y 
a  trouvé  du  charbon,  mais  pomt  de  traces  de  cheminées, 
excepté  devant  le  four  d'une  boulangerie.  Nulle  part  on 
n'a  reconnu  d'écuries  ni  d'étables;  des  squelettes  de  che- 
vaux gisaient  dans  les  cours.  Les  maisons  portent,  au 
lieu  de  numéros,  les  noms  des  propriétaires;  sur  quel- 
ques-unes, des  inscriptions  pointes  à  la  grosse  brosse 
remplacent  nos  écriteaux  de  location ,  ou  des  peintures 
servent  d'enseigne.  Une  des  plus  vastes  habitations  est  la 
Villa  de  Diomêde,  exemple  rare  d'une  maison  à  trois 
étages,  où  Ton  a  recueilli  quelques  restes  de  verre  des 
fenêtres,  des  amphores  avec  du  vin  desséché  par  le  temps, 
des  monnaies ,  des  bijoux ,  un  certain  nombre  de  sque- 
lettes, etc.  Nous  citerons  encore  :  la  Villa  de  Cicèron,  plus 
belle  que  la  précédente,  et  qui  a  été  recouverte  après 
qu'on  en  eut  retiré  les  peintures  et  les  mosaïques  ;  la 
maison  des  Vestales,  qui  contenait  des  peintures  peu 
conformes  à  l'idée  que  cette  dénomination  éveille;  la 
^maison  des  Dansettëes,  ainsi  nommée  des  charmantes* 
peintures  qui  en  décoraient  l'atrium;  hi  maison  de  ATar- 
cisse,  d'où  provient  la  fameuse  statue  d'Apollon  en  bronze 
du  musée  de  Naples  ;  la  maison  de  Sallustius  ou  é* Action 
l'une  des  plus  élégantes,  entourée  de  boutiques  et  de  ta- 
vernes; la  maison  de  Polybe,  qu*on  croit  avoir  été  um 
hôtellerie  ;  la  vaste  maison  de  Pansa,  qui  forme  une  iU 
{insula)  à  elle  seule;  la maMon  du  Poète  tragique,  dont 
les  belles  peintures  et  les  mosaïques  sont  au  musée  df 
Naples;  la  maison  de  Méléagre^  dont  le  Jardin  conser» 
vait  encore  quelles  arbustes  au  moment  do  la  décoavertf 
en  1830 1  la  matson  des  Néréides,  qui  a  uo  pâria^le  di 


POM 


1457 


PON 


14  colonnes,  et  où  Ton  •  troaTé  14  ytam  d'argent,  dont 
plusieurs  d*an  poids  considérable;  la  maison  de  Castor 
9t  Mlux  on  d$8  Dioicures,  dont  I*omementatioQ  est  aussi 
riche  nna  variée;  la  maison  du  Faune,  d*où  Ton  a  tiré  la 
célèbre  bataille  en  mosaïque  qui  est  au  musée  de  Naples; 
la  maisok  du  Labyrinthe,  ainsi  appelée  d'une  mosaïque 
qui  représente  Thésée  tuant  le  Minotaure;  la  maison  de 
Lucretius  ou  des  Suonatrici  (musiciennes),  ouest  un 
petit  théâtre  de  marionnettes,  dont  les  acteurs  sont  figu- 
rés par  de  petites  statuettes,  etc.  Sur  plusieurs  routes, 
aux  portes  même  de  la  ville,  on  remarque  des  tombeaux, 
entre  autres,  ceux  de  Neyoléia  Tyché,  d'Aricius  Scaurus, 
de  CaWentius  Quietus,  enrichis  de  bas -reliefs  moulés 
en  stuc. 

L*archltectore  des  édifices  publics  est  une  corruption 
de  Tarchitecture  grecque.  Le  Temple  de  la  Fortune,  d*ordre 
corinthien ,  situé  pré»  du  Forum ,  contenait  une  statue 
peinte  avec  un  mélange  de  pouipre  et  de  violet,  et  qu'on 
croit  être  celle  de  Gcàron.  Le  Forum,  pavé  de  marbre, 
était  d^roré  de  statues,  dont  plusieurs  piédestaux  subsis- 
tent, et  entouré,  sur  trois  côtés,  de  portiques  &  colonnes 
doriques  de  marbre  blanc.  Alentour  sont  rangés  les  édi- 
fices suivants  :  — Sur  un  soubassement  s'élève  le  Temple 
de  Jupiter,  avec  portique  de  12  colonnes  corinthiennes , 
soutenu  à  Tintérteur  par  un  double  rang  de  colonnes  io- 
niques. Le  Temple  de  Vénus,  le  plus  vaste  de  tous,  était 
entouré  de  porûques  soutenus  par  48  colonnes  doriques, 
changées  en  corinthiennes  au  moyen  d'un  stuc,  La  Basi- 
lique était  entourée  de  péristyles  formés  de  28  colonnes 
ioniques  :  celles-ci  offrent  cette  singularité,  qu'elles  sont 
composées  d'un  noyau  de  briques  rondes,  entourées  de 
briques  pentagonales  dont  les  angles  extérieurs  forment 
les  arêtes  d'autant  de  cannelures.  V Édifice  d^Eumachia, 
consacré  à  la  Concorde  et  k  la  Piété,  était  en  forme  de 
basilique,  avec  péristyle  à  4  portiques  formé  de  48  co- 
lonnes en  marbre  de  Paros,  et  avec  galerie  intérieure  de 
trois  côtés.  Le  Temple  de  Mercure  ou  de  Quirinus ,  con- 
struit sur  un  plan  très-irrégulier,  sert  aujourd'hui  de 
dépôt  pour  les  objets  provenant  des  fouilles.  Le  Panthéon 
ou  Temple  d* Auguste  offrait  au  milieu  d'une  cour  ouverte 
un  autel  entouré  de  IS  piédestaux  qui  supportaient  sans 
doute  des  statues;  un  des  côtés  de  cette  cour  est  occupé 
par  12  chambres  qu'on  suppose  être  celles  des  Augustals 
ou  prêtres  d'Auguste.  Plusieurs  Arcs  de  triompne  sont 
bàtis  en  briques  et  en  lave,  recouvertes  de  marbre. —  Le 
Grand  Théâtre^  assis  sur  le  tuf  même  d'une  colline  qui 
dominait  la  ville,  avait  à  l'intérieur  68  met.  de  diamètre  : 
on  y  accédait  par  0  escaliers ,  divisant  les  gradins  en 
cinq  parties  {cunei  )  ;  ces  gradins,  au  nombre  de  20,  étaient 
partagés  en  trois  étages  par  deux  précinctions,  et  pou- 
vaient recevoir  5,000  spectateurs.  Sur  deux  des  côtés  d'un 
Forum  qui  précède  ce  théAtre,  il  v  avait  des  portiques 
fermés,  de  00  colonnes  doriques,  ou  les  spectateurs  pou- 
vaient se  réfugier  pendant  la  pluie.  Tout  près  de.  là,  le 
QiuiWt0r  des  soldats  est  formé  d'un  carré  long,  avec  por- 
tique à  colonnes  revêtues  de  stuc  peint  en  rouge  et  en 
jaune;  il  y  a  un  double  étage  de  chambres,  où  l'on  a 
trouvé  beaucoup  d'armes.  Un  Petit  Théâtre  ou  Odéon 
pouvait  contenir  1,500  spectateurs.  Au  milieu  d'un  atrium 
entouré  de  portiques  à  colonnes,  s'élève  un  petit  Temple 
(Tlsis ,  au-dessus  d'un  soubassement  de  7  degrés  :  on  y 
trouva  le  squelette  d'un  prêtre  à  table,  avec  des  restes 
de  poisson,  de  poulet  et  d'œufs.  Citons  encore  V Amphi- 
théâtre, situé  assez  loin  des  autres  constructions  :  il  est 
de  forme  elliptique,  et  pouvait  contenir  de  15  à  20,000 
spectateurs  ;  au-dessus  des  35  ranss  de  gradins  partagés 
en  trois  étages ,  on  voit  un  rang  de  loges  pour  les  femmes. 
Enfin  on  a  reconnu  dans  les  débris  de  Pompéi  un  srenier 
pnblic,  des  thermes,  des  prisons,  une  école,  etc.  K.  Ha- 
milton  et  de  Murr,  Descrixione  délie  nuove  scoperte  in 
PompQa,  1770,  in-4*;  E.  Hamilton,  Essai  sur  les  décou- 
vertes de  Pompéi,  en  anglais,  Londres,  1777,  in-4<>;  Mil- 
lin,  Description  des  tombeaux  découverts  à  Pompéi, 
Naples,  1813,  in-8^;  Hazois,  Ruines  de  Pompéi,  Paris, 
1^^-38,  4  vol.  gr.  in-fol.,  fig.;  Geldicutt,  Spécimens  of 
ancierU  décorations  from  Pompeii,  Londres,  1825^  in-8®; 
Cockburns  et  Donaldson ,  Pompeij  illustrated  unth  pic- 
turesque  views^  Londres,  1827,  9  vol.  in-fol.;  Bonucci, 
Pompât  décrite,  Naples,  1828,  in-8°;  W.  Gell  et  Gandy, 
Pompeiana,  or  ObserwUions  on  the  topography,  édifices 
and  omaments  of  Pompeii,  Londres,  1817-32,  gr.  in-8«i 
Wilkîpg,  Views  of  Pompeia,  Londres,  1832;  W.  Qarke, 
Pompéi ,  Londres ,  1833,  in-^<*;  Raoul  Rochette,  Pompéi, 
Choix  ^édifices  inédits,  Paris,  1828-30,  in-fol.,  et  Choix 
des  peintures  de  Pompéi,  1844-48,  in-fol.;  Fausto  et 
Féhee  Nkeolini,  Le  easeimonwmenti  di  Pompéi  disegnëU 


e  deseritti:  Gamicd ,  Inscriptions  gravées  on  irait  sur 
les  murs  ae  Pompéi,  Paris,  1856,  in-4"  ;  E.  Breton,  Pom- 
péia,  Paris,  1854,  gr.  in-8*;  Fiorelli ,  Monumenta  epigror 
phica  Pompejana  ad  fidem  archetyporum  expressa, 
Naples,  1854.  B. 

POMPÉION,  vaste  monument  de  l'ancienne  Athènes, 
où  l'on  conservait  les  objets  sacrés,  et  où  se  préparait  la 
pompe  des  Panéçrries.  Il  était  à  l'entrée  de  la  vieille 
ville,  du  côté  de  Phalère. 

POMPES  FUNÈBRES  (Administration  des],  adminis- 
tration privée  qui,  à  Paris  et  dans  les  erandes  villes,  se 
charge,  à  l'entreprise  et  d'après  des  tanfs  approuvés  par 
l'autorité,  du  service  des  inhumations  et  pompes  funèbres. 
Avant  1780,  le  soin  de  régler  les  funérailles  appartenait  à 
des  officiers  appelés  crieurs  de  corpsy  qui  avaient  en  outre 
la  fonction  de  crier  les  vins,  les  légumes  et  les  viandes 
dans  les  marchés,  les  enfants  et  les  chiens  perdus  dans 
les  rues.  Tout  se  faisait,  d'ailleurs,  très-simplement  :  les 
corps,  recueillis  à  domicile,  étaient  transportés  à  bras,  ou 
bien  cinq  ou  six  ensemble,  dans  des  voitures  communes; 
les  indigents ,  placés  dans  des  cercueils  banaux ,  étaient 
jetés  nus  dans  une  fosse  commune.  Il  n'était  pas  rare  de 
voir  les  porteurs  abandonner  leur  fardeau  dans  la  rue, 
pour  entrer  au  cabaret.  Dans  quelques  localités ,  les  hos- 
pices avaient  reçu  le  droit  de  placer  les  tentures  aux  fu- 
nérailles. Un  décret  du  23  prairial  an  xn  (1*'  Juin  1803) 
transféra  aux  fabriques  des  ^lises  et  des  consistoires  le  pri- 
vilège de  faire  les  fournitures  funéraires,  interdit  les  trans- 
Krts  à  bras  (sauf  pour  les  corps  d'enfants),  et  imposa 
mploi  de  chars  à  deux  chevaux ,  accompagnés  d'un  ordon- 
nateur et  de  trois  porteurs  en  costume.  Les  entrepreneurs 
de  pompes  funèbres ,  qui  n'avaient  perçu  d'abord ,  pour 
l'exécution  du  service  commun,  que  le  produit  d'une  taxe 
d'inhumation  payée  par  les  riches,  obtinrent  l'autorisa* 
tion  de  traiter  de  gré  à  gré  avec  les  familles  à  l'égard  de» 
accessoires  qu'elles  voudraient  idouter  pour  l'éclat  des 
funérailles,  un  arrêté  du  11  vendémiaire  an  xm  (3  oct 
1804)  leur  assura  le  droit  exclusif  de  faire  les  transports 
et  les  fournitures,  à  la  charge  de  faire  aux  fabriques  une 
remise  réglée  amiàblement;  un  arrêté  du  25  pluviôse 
de  la  même  année  (4  fév.  1805)  dressa  le  tarif  des  droits 
à  percevoir  sur  les  familles.  Un  décret  du  18  mai  1806, 
confirmé  par  un  2*  du  18  août  1811,  distingua  6  classes 
de  services,  ayant  chacune  leur  tarif.  Une  ordonnance  dn 
25  luin  1832  établit  0  classes  pour  Paris.  Les  sept  pre- 
mières ont  été  divisées  en  deux  sections ,  l'une  à  tarif 
invariable,  qu'il  faut  prendre  sans  y  rien  igouter  ni  rien 
retrancher,  l'autre  à  tarif  variable.  Les  indigents  sont 
inhumés  ^tuitement.  B. 

POMPIERS  (Sapeurs-).  V,  Sapbcss,  dans  notre  Dto- 
tionnaire  de  Biographie  et  d^Histdre, 

PONCHO,  c.-à-d.  en  espagnol  paresseux,  nom  d'un 
vêtement  du  Chili.  C'est  un  morceau  d'étoffé  quadrilatère, 
percé  d'une  ouverture  au  centre  pour  y  passer  la  tête, 
et  sans  manches  ni  boutonnières.  Il  sert  de  manteau  pen- 
dant le  Jour  et  de  couverture  pendant  la  nuit. 

PONCIS ,  et  par  corruption  Poncif,  dessin  dont  tous  les 
traits  ont  été  piqués  de  trous  d'épingles  très-rapprocbés, 
et  sur  lequel  on  passe,  soit  un  petit  sachet  appelé  ponce, 
rempli  de  charbon  pilé,  si  l'on  opère  sur  une  surface  blan- 
che, de  craie  en  poudre  ou  de  plâtre  fin  si  c'est  une 
surface  noire,  soit  une  poncette  formée  de  morceaux  de 
feutre  imprégna  d'une  poudre  de  résine  mêlée  avec  du 
noir  de  fumée  ou  du  blanc  de  céruse.  On  se  sert  de  pon- 
cis  pour  les  décors,  pour  marquer  les  dessins  sur  la 
faïence,  sur  les  abat^our  de  lampes,  sur  les  étoffes  qu'on 
doit  broder,  etc.  —  Par  extension ,  on  appelle  Ponça  les 
dessins  dans  lesquels  on  remarque  un  type  convenu  ei 
routinier,  un  calque  ou  une  copie  trop  apparente.      B. 

PONCTUATION  (Signes  de),  signes  accessoires  d'écri- 
ture, faisant  partie  de  l'orthographe,  et  destinés  k  mar- 
âuer  les  divisions  essentielles  d'une  phrase  et  les  repos 
e  la  voix  dans  la  prononciation.  Cet  utile  auxiliaire  de 
la  lecture  n'a  été  ima^né  que  longtemps  après  l'inven- 
tion de  récriture.  Primitivement,  les  mots  n'avaient  même 
aucune  séparation  ;  ce  qui  était  une  source  de  nombreuses 
confusions  pour  le  copiste  et  pour  le  lecteur.  Enfin,  au 
n*  siècle  av.  J.-C,  comme  la  langue  grecque  se  répandait 
de  plus  en  plus  dans  l'Orient ,  et  pénétrait  même  à  Rome, 
Aristophane  de  Byzance  imagina  trois  signes  pour  mai^ 
quer  la  division  du  discours  ;  c'étaient .  le  point  parfait , 
qui  se  pli^çait  à  la  pointe  droite  de  la  dernière  lettre  d'un 
mot  pour  désigner  l'entier  achèvement  du  sens;  le  point 
moyen,  à  mi-hauteur  de  la  dernière  lettre,  pour  indiquer 
un  sens  très-légèrement  suspendu  ;  le  âous-point,  en  bas  de 
la  demièrt  lettre  (comme  notre  point),  pour  indiquer  la 

99 


PON 


1458 


PON 


iuspcnsion  d*une  phrase  non  encore  complète.  Ces  signes  ' 
n^eurcnt  pas  toujours  cette  valeur,  et  le  nombre  en  varia; 
ainsi  quelques  grammairiens  en  établirent  huit.  Le  signe 
d'interrogation  (  ;  )  semble  être  du  ix"  siècle  après  J.-C.  La  ' 
virgule  se  trouve  aussi  au  lieu  du  point  en  bas,  et  de  plus 
elle  serrait  à  distinguer  des  mots  qui,  sans  ponctuation, 
auraient  pa  Ctre divisés  autrement,  aux  dépens  du  sens; 
ainsi,  6,  tt  et  6Tt.  Les  règles  de  ponctuation  paraissent 
avoir  été  peu  mises  en  pratique  dans  TAntiquité,  malgré 
le  soin  avec  lequel  on  les  enseignait  dans  les  écoles  ;  on 
croit  que  les  points  n'étaient  mis  que  dans  les  éditions 
de  luxe  et  dans  les  livres  destinés  aux  écoliei's.  Dans  les 
inscriptions,  la  ponctuation  est  ou  nulle  ou  marquée 
entre  chaque  mot;  ou  bien  les  mots  étaient  séparés  par 
des  signes  de  forme  très-variée,  tels  qu'un  triangle ,  un 
c^rré,  un  losange,  un  cercle,  un  demi-cercle,  une  rosace, 
«lie  croisctte,  un  cœur,  un  feuillage,  etc.  Souvent  les 
points  n'étaient  mis  qu'après  les  signes  ou  mots  abrégés; 
quelquefois  on  les  introduisait  dans  les  mots  composés, 
entre  une  préposition  et  un  radical.  Dans  les  premiers 
temps  du  christianisme,  on  imagina  de  revenir  à  un 
système  qui  avait  été  déjà  pratiqué,  et,  au  lieu  de  ponc- 
tuer les  manuscrits ,  d'isoler  chaque  sens  par  un  alinéa^ 
c-à-d.  de  faire  dos  versets ,  usage  aujourd'hui  conservé, 
même  dans  les  imprimés,  pour  les  Livres  saints.  D'autres 
fois  on  se  contentait  d'isoler  les  mots  par  des  blancs.  Los 
Romains  n'apportèrent  aucune  amélioration  au  système 
de  ponctuation  imaginé  par  les  Grecs;  ils  l'adoptèrent 
ainsi  que  le  s^'stèmc  des  versets. 

Dans  la  plus  grande  partie  du  Moyen  ftge,  on  volt  sur 
ce  sujet  beaucoup  de  désordre  et  d'incertitude  :  les  plus 
anciens  manuscrits  en  lettres  capitales  ou  onciales  sont 
dépourvus  de  signes  de  ponctuation,  ainsi  que  lei  chartes 
et  les  diplômes;  Ters le  temps  de  Charlemagne,  on  en- 
treprit n'y  en  ajouter  :  on  reconnaît  ces  additions  à  la 
difTéronce  des  encres.  Depuis  cette  époque  on  ne  trouve 
plus  guère  de  manuscrits  qui  ne  soient  ponctués.  Enfin, 
peut-être  faut-il  attribuer  à  l'imprimerie  une  grande  in- 
fluence dans  la  fixation  de  notre  système  moderne,  qui 
a  définitivement  admis  la  séparation  nette  des  mots,  ainsi 
que  les  alinéas,  et  réglé  les  signes  de  ponctuation,  qui 
sont  au  nombre  d«  dix  :  le  point  (en  bas},  la  virgule,  le 
point  virgule,  les  deux  points,  le  point  d'intetTogation,  le 
point  d'exclamation,  la  parent nèse^  le  tiret,  les  points 
suspensifs,  et  les  guillemets.  L'usage  de  ces  signes  est  à 
peu  près  uniforme  dans  les  langues  néo-latines  et  germa- 
niques. Pour  le  grec,  on  a  conservé  les  signes  usités  dans 
les  manuscrits  du  xv*  siècle  :  le  point  en  bas,  ayant  le 
môme  usage  que  le  nôtre;  le  point  en  haut,  répondant  à 
nos  deux  points  et  souvent  à  notre  point  et  virgule;  la 


les  autres  le  rejettent. 

11  semblerait  que  la  ponctuation,  étant  une  inspiraUon 
ae  la  logique  naturelle,  devrait  être  partout  la  même  chez 
les  peuples  lettrés,  surtout  en  Europe  :  cependant  il 
existe  encore  des  difl'érences  de  nation  à  nation.  Chez 
-nous,  dans  notre  propre  langue,  beaucoup  d'écrivains, 
môme  parmi  ceux  qui  écrivent  le  plus  correctement,  se 
préoccupent  peu  de  la  ponctuation,  et  font  un  fréquent 
usage  du  point  final,  là  où  il  faudrait  deux  points  ou 

{»oint  et  virgule.  11  semble  que  cela  ète  de  l'ampleur  à 
eur  style,  et  ce  point,  en  coupant  les  périodes,  cff'ace 
presque  les  nuances  de  la  pensée  ;  en  effet,  pour  les  bien 
marquer,  la  ponctuation  soignée,  c.-à-d.  scrupuleuse- 
ment raisonnée,  est  toujours  un  utile  auxiliaire.  Les 
grands  écrivains  des  xvii"  et  xviii*  siècles  la  regardaient 
comme  le  complément  d'un  bon  style;  nous  citerons, 
entre  autres,  Bossuet,  et  surtout  Dufl'on,  dont  les  ou- 
vrages, en  ce  genre  aussi,  pounnient  servir  de  modèles. 
Mais  on  dirait  que  beaucoup  de  nos  écrivains  contempo- 
rains aiTectent  de  ne  pas  mettre  la  ponctuation,  comme, 
avant  la  Révolution,  les  grands  soigneurs  afiectaient  de 
ne  point  écrire  l'orthographe  P. 

PONDÉRATION   DES  POUVOIRS.    V.  Balance  des 

POUVOIRS. 

PONT,  ouvrage  élevé  d'un  bord  à  l'autre  d'une  rivière 
ou  d'un  canal,  pour  en  faciliter  le  passage.  Les  ponts, 
placés  au  premier  rang  parmi  les  travaux  d'utilité  pu- 
blique, ne  peuvent  être  établis  et  conservés  que  par 
beaucoup  de  soins  et  d'habileté ,  à  cause  de  leur  situa- 
tion au  milieu  des  eaux ,  et  de  l'efl'ort  produit  sur  eux 
par  le  courant.  On  distingue  les  ponts  fixes  et  les  ponts 
iMbiles,  Les  ponts  fixes  comprennent  ;  les  ponts  propre- 
UQDt  ditr,  ncccsdbles  aux  pi(îtoDs  et  aux  voitures  ;  les  paS" 


serelles,  qui  ne  servent  qu'aux  piétons  ;  les  ponte-aque- 
ducs, destinés  à  amener  les  eaux  d'un  Heu  à  un  autre; 
les  ponts-canaux ,  qui  font  franchir  à  un  canal  soit  une 
rivière,  soit  une  vallée,  soit  une  route  quelconque.  Sous 
le  nom  de  ponts  mobiles,  on  range  les  ponts  de  oateaux, 
les  ponts-levis ,  les  ponts  roulants,  et  les  ponts  tour- 
nants. —  Autant  que  possible,  un  pont  doit  être  con- 
struit perpendiculairement  à  la  rivière;  les  piles  s'af- 
fouillent  moins  que  celles  d'un  pont  biais,  qui  sont 
d'ailleurs  plus  coûteuses  à  cause  des  difficultés  de  l'ap- 
pareil des  pierres.  La  largeur  d'un  pont  est  ordinaire- 
ment la  même  que  celle  de  la  route  ou  de  la  rue  à  la- 
quelle il  fait  suite  ;  elle  dépend  également  de  la  population 
plus  ou  moins  grande  des  localités  qu'il  s'agit  de  des- 
servir. Elle  doit  permettre  aux  voitures  de  se  croiser,  et 
comprendre,  outre  la  voie,  des  trottoirs  pour  garantir  les 
piétons.  Le  débouché,  c.-à-d.  le  vide  qui  existe  evtre  les 
piles,  se  détermine  d'après  la  vitesse  et  le  volun^o  des 
grandes  eaux.  Si  le  cours  d'eau  n'est  pa>  navigable ,  ni 
sujet  à  de  fortes  crues ,  on  préfère  les  petites  arches , 
parce  que  la  dépense  est  moins  considérable  que  celle 
des  grandes;  daiis  le  cas  contraire,  il  faut  de  grandes 
arches,  afin  que  rien  ne  gène  soit  l'écoulement  des  eaux, 
soit  le  passage  des  corps  flottants,  soit  la  navigation,  ei 
l'on  restreint  aussi  de  cette  manière  le  nombre  des  piles, 
dont  les  fondations  sont  toujours  difiiciles  et  coûteuses. 

I.  Ponts  en  maçonnene,  —  C'est  l'espèce  de  ponts  la 
plus  ordinaire,  et  celle  qu'on  adopte  quand  la  circulation 
doit  y  être  importante.  Si  le  pont  n'a  qu'une  seule  arclic, 
il  se  compose  d'une  voûte,  et  de  deux  culées,  qui  résis- 
tent à  la  poussée  latérale  de  cette  voûte  (  V,  Culée)  ;  si  le 
pont  est  à  plusieurs  arches,  Ù.  se  compose,  en  plus,  de 
piles  élevées  dans  le  lit  de  la  rivière,  entre  les  arches, 
pour  les  porter.  On  commence  par  opérer,  sur  l'empla- 
cement des  massifs,  un  sondage  à  une  assex  grande  pro- 
fondeur, afin  de  reconnaître  la  nature  du  sol  sur  lequel 
les  fondations  seront  assises.  Si  le  terrain  est  formé  de 
roches  et  de  tufs  assez  solides  pour  supporter  immédia- 
tement le  poids  de  l'ouvrage,  et  si  la  profondeur  de  l'eau 
ne  dépasse  pas  2  met.,  on  drague  jusqu'à  ce  que  l'em- 
placement du  massif  à  élever  ait  été  mis  à  nu,  on  l'en- 
vironne d'un  biUardeau  {V.  ce  mot)^  qu'on  épuise  au 
moyen  de  pompes  ou  de  la  vis  d'Archimède,  et,  après 
avoir  arasé  ou  aplani  le  sol,  on  construit  comme  sur  uii 
terrain  ordinaire.  Lorsque  la  profondeur  de  l'eau  dépasse 
2  met.,  on  emploie,  au  lieu  de  batardeaux«  des  caisses 
étanches  que  l'on  fait  descendre  avec  précaution  jusqu'au 
fond,  et  dans  lesqu(;lles  on  commence  la  maçonnerie,  ou 
des  caisses  non  étanches  qu'on  emplit  de  béton  jusqu'à 
la  surface  de  l'eau.  Si  le  terrain  est  incompressible,  mais 
aflbuillable,  comme  celui  qui  est  formé  de  sable,  de  gra- 
vier et  de  certaines  argiles,  on  emploie  indifféremment 
la  fondation  sur  pilotis  ou  la  fondation  par  encaissement 
{V,  ces  mots).  Avec  un  terrain  compressible  et  afibuiU 
lable ,  comme  la  vase  et  la  tourbe,  on  a  recours  à  deux 
artifices  qui  ont  pour  objet  de  répartir  la  pression  sur 
une  plus  grande  surface  :  on  établit  un  radier  (K.  ce 
mot },  ou  un  grillage  en  fortes  pièces  de  bois,  dans  les 
vides  desquels  on  enfonce  des  pieux  aussi  profondément 
que  possible,  et  sur  lequel  on  pose  la  première  assise.  — 
Les  culées  et  les  piles  se  font  indistinctement  en  pierres 
de  taille,  en  moellons  ou  en  meulières.  Les  piles  ont 
d'ordinaire  à  leur  base  un  peu  plus  de  largeur  que  le 
pont,  afin  de  former  en  amont  un  avant-bec  et  en  aval 
un  arrière-bec,  qui  leur  donnent  plus  de  solidité  et  les 
protègent  contre  le  choc  des  eaux  ou  des  corps  flottants. 
La  forme  des  arrière-becs  est  à  peu  près  indifférente. 
Autrefois  on  donnait  aux  avant-becs  la  forme  d'un  angle 
aigu,  ce  qui  produisait  un  remous  et  était  dangereux 
pour  la  navigation  :  aujourd'hui  ils  reçoivent  la  forme 
circulaire,  qui  résiste  mieux  aux  glaces  et  cause  peu  de 
perturbation  dans  le  cours  de  l'eau.  Jadis  les  piles,  par 
leur  excessive  épaisseur,  rétrécissaient  trop  le  débouché 
de  l'eau  et  gênaient  la  navigation;  on  ne  leur  donne 
maintenant  que  l'épaisseur  nécessaire  pour  qu'elles  puis- 
sent supporter  les  voûtes  ou  arches.  Les  voûtes  furent 
d'abord  à  plein  cintre,  celle  du  milieu,  dite  arche  mari- 
nière, étant  plus  haute  que  les  autres  :  il  en  résultait  des 
f>entes  roides,  comme  jadis  au  Pont-Neuf  et  au  Pont  dr 
a  Toumelle,  de  Paris.  Ensuite,  on  adopta  l'arc  en  an^ 
de  panier  (V.  ce  mot),  qui  présente  des  difficultés  d'ap- 
pareil, et  souvent  produit  un  mauvais  effet  à  la  vue.  On 
s'est  arrêté  enfin  à  l'arc  de  cercle,  dont  on  met  la  re- 
tombée beaucoup  au-dessus  de  la  corde  de  son  diamètre  ; 
cela  permet  de  donner  aux  ponts  les  bauteors  les  plus 
petites  pouible,  mais  oblige  à  aroir  des  cnlôot  «l'une 


PON 


1459 


PON 


crës-grande  force;  les  ponts  ae  la  Concorde  et  d*Iéna,  à 
Paris,  et  le  magnifique  pout  de  Neuilly,  sont  en  arcs  de 
cercle.  On  nomme  Léiss  de  la  voûte  les  deux  faces  laté^ 
raies  qui  regardent  Tamont  et  Taval  ;  tympans,  les  par- 
ties de  maçonnerie  qui  se  trouvent  au-dessus  des  piles 
entre  les  arches.  Les  tympans  sont  surmoutés  d*un  oaii- 
(Uau  oc  d*une  comiclie  qui  règne  dans  toute  la  longueur 
du  pont,  et  qui  sert  de  base  au  garde-corps  ou  parapet. 
Quand  ces  constructions  sont  achevées,  on  pose  la  chape, 
couche  de  mortier  de  chaux  hydraulique,  de  10  à  15  cen- 
timètres d*épaisseur,  qu*on  étend  sur  toute  la  partie  su- 
périeure des  voûtes,  et  qu*on  recouvre  quelquefois  d'une 
couche  mince  de  bitume.  £nûn  on  exécute  la  cluiiusée 
pavée. 

U.  Ponts  9ff  tnaçonneriâ  et  en  charpente.  —  Ce  système 
mixte  convient  pour  le  passage  d'une  route  ordinaire  qui 
n'est  pas  très-fréquentée,  parce  que  les  reparutions  sont 
assez  rares  et  par  conséquent  peu  coûteuses  ;  avec  une 
grande  circulation,  le  plancher  ou  tablier  en  bois  s'use- 
rait rapidement.  L'inconvénient  des  ponts  do  charpente 
est  qu'ils  peuvent  être  détruits  par  le  feu,  et  que  les  bois 
peuvent  s'échauiTer  et  se  détruire.  Les  piles  et  les  culées 
sont  toujours  en  maçonnerie,  les  arches  seulement  sont 
en  bois.  Ces  arches,  toujours  eu  arcs  de  cercle,  sont 
faites  en  pièces  épaisses  de  charpente,  et  mieux  en  ma- 
driers de  5  à  6  centimèt.  d'épaisseur,  fortement  assem- 
blés. Le  tablier  se  compose  de  poutres  longitudinales , 
supportées  par  le  sommet  de  l'arc,  par  des  moïses  pen- 
dantes, et  par  des  consoles  fixées  dans  les  piles;  de  pou- 
tres transversales,  qui  reposent  sur  les  poutres  longitu- 
dinales; et,  par-dessus  tout,  de  madriers  cloués.  On  peut 
citer  comme  modèle  de  ce  genre  de  construction  le  pont 
d'ivry,  près  de  Paris. 

IIL  Ponts  en  pierre  et  en  fer.  —  Dans  les  ponts  de  ce 
système,  qui  sont  plus  solides  et  d'un  entretien  moins 
coûteux  que  ceux  du  système  précédent,  mais  dont  les 
frais  d'établissement  sont  un  peu  plus  grands,  les  piles 
■ont  en  maçonnerie  et  les  arches  en  métal.  Le  plus  an- 
cien pont  de  fer  fut  construit  en  1793  k  Sunderland,  sur 
le  Wear  ;  mais  des  projets  avaient  été  présentés  en  France 
en  1719  par  Garin,  et  eu  1755  par  Goissons  et  Vincent  de 
Montpetit.  Le  fer  fondu  a  été  employé  à  Paris  pour  le 
pont  des  Arts,  et,  en  18G2,  pour  le  pont  de  l'Archevêché; 
le  pont  d'ArcoIe,  vis-à-vis  la  place  de  l'Hôtel  de  Ville,  à 
Paris,  et  d'une  seule  arche  sur  le  grand  bras  de  la  Seine, 
est  en  fer  forgé.  On  peut  encore  citer,  en  Angleterre, 
comme  emploi  de  fer  fondu,  les  ponts  du  Vauxhull  et  de 
Southwark  à  Londres,  et  ceux  de  Bristol  et  de  Wear- 
mouth.  V.  Molinos  et  Pronier,  Traité  tliéorique  et  pra- 
tique de  la  constriKtion  des  ponts  métalliques,  Paris, 
1857,  in-4*>  et  atlas. 

IV.  Ponts  en  charpente.  —  Ce  sont  ceux  (^ui  ont  le 
moins  de  solidité  et  de  durée.  On  n'en  construit  c^ue  dans 
les  pays  où  le  bois  est  à  bas  prix,  et  sur  les  rivières  où 
l'on  n*a  point  k  craindre  les  grandes  crues  et  les  débâcles 
de  glaces.  Le  plancher  s'établit  sur  des  poutres  portées 
par  les  poteaux  qui  ont  été  enfoncés  dans  l'eau;  on  y 
met  quelquefois  des  bandes  de  fer  pour  recevoir  les  roues 
des  voitures.  Le  pont  Morand  à  Lyon  et  le  pont  de  Bon- 
pas  sur  la  Durance  appartiennent  à  cette  catégorie.  On 
en  voit  un  aussi  sur  le  Rhin,  à  SchafiThouse,  qui  a  deux 
travées  de  50  met.  chacune  ;  un  autre  sur  la  Kandel,  près 
de  Berne,  d'une  portée  de  50"*,70;  celui  de  Vettingen, 
sur  laLimmat,  n'a  pas  moins  de  118"*  d'ouverture,  d'une 
seule  portée. 

V.  Ponts  suspendus.  —  Ces  ponts,  plus  avantageux 
que  tous  les  autres  sous  le  rapport  de  l'économie  et  de  la 
facilité  de  l'établissement,  se  composent  de  chaînes  ou  de 
câbles  en  fer,  qu'on  tend  d'une  rive  à  l'autre,  et  suppor- 
tant, au  moyen  de  tiges  de  suspension,  un  tablier  qui 
donne  passage  aux  piétons  et  aux  voitures.  Les  cables 
sont  formés  de  fils  de  fer  enroulés  en  échevaux  autour 
d'une  croupière,  et  reliés  de  distance  en  distance  par  des 
ligatures  ;  les  fils  ont  été  préalablement  trempés  dans  de 
l'huile.'  de  lin  pour  empêcher  l'oxydation ,  et ,  après  la 
pose ,  on  leur  applique  plusieurs  couches  de  peinture. 
L'inconvénient  du  système  des  c&bles  est  l'impossibilité 
de  tendre  Clément  tous  les  fils,  de  sorte  que  tout  l'effort 
peut  être  supporté  par  quelques-uns,  ce  qui  amène  leur 
rupture  et  peut-être  la  chute  du  pont.  Les  chaînes  se 
composent  de  barres  de  fer  forgé,  reliées  entre  elles  par 
des  boulons  :  il  suffit  d'un  défaut  dans  l'une  d'elles  pour 
occasionner  la  chute  du  pont.  Afin  d'obvier  au  danger,  on 
fait  soutenir  le  pont  par  2,  3  ou  4  câbles  ou  chaînes  de 
chaque  côté,  de  sorte  que,  si  l'un  vient  à  manquer,  il  en 
nsio  pour  supporter  le  tablier.  Les  tisos  do  suspension 


sont  en  tigçs  de  fer  ou  en  chaînes,  selon  le  système  qu'on 
a  adopté.  Des  traverses,  dites  pièces  de  pont,  soutenues 
aux  deux  bouts  par  les  tiges  de  suspension,  et  espacées 
de  1"*,25  k  1"',50,  supportent  deux  planchers,  Ànt  l'uu 
pour  la  chaussée  et  l'autre  pour  les  trottoirs,  qui  sont 
iX)rdés  extérieurement  d'un  garde-corps.  L'effo**^  ^ue  les 
chaînes  ont  à  supporter  est  d'autant  moins  considérable 
qu'elles  décrivent  une  courbure  plus  grande  :  abssi 
donne-t-on  à  leurs  points  d'appui  beaucoup  d'élévation. 
Ces  points  d'appui  sont  disposés  de  deux  manières  : 
tantôt  il  y  en  a  trois,  dont  deux  sur  les  rives,  et  le  troi- 
sième, appelé  pile,  plus  élevé  que  les  autres,  au  milieu 
de  la  rivière  ;  tantôt  il  n'y  a  que  ceux  des  rives,  ils  con- 
sistent en  massifs  de  maçonnerie  ou  en  colonnes  de 
fonte.  Les  chaînes  s'infléchissent  au  delà  de»  points  d'ap- 
pui des  rives,  et  se  prolongent  jusque  dans  le  sol,  où 
elles  sont  solidement  fixées  dans  des  culées.  On  éprouve 
la  solidité  des  ponts  suspendus  au  moyen  d'une  sur- 
charge de  200  kilogr.  par  mètre  carré  de  superficie  pen- 
dant trois  jours.  Les  ponts  suspendus  les  plus  remar- 
quables sont  :  celui  de  Fribourg  en  Suisse,  qui  n'a  qu'une 
seule  travée,  de  205  met.  de  longueur,  et  dont  les  cnaines 
sont  amarrées  dans  le  roc  au-dessus  d'une  profonde 
vallée;  celui  de  Cubzac  en  France  {V.  Cobzac);  celui  de 
Genève,  qui  présente  cette  particularité  que  le  tablier  est 
placé  au-dessus  des  chaînes;  ceux  de  Beaucaire  sur  le 
Rhône  (450  met.  de  longueur),  de  La  Roche-Bernard  sur  la 
Vilaine,  de  Jarnac  sur  la  Charente;  celui  de  l'Ile  Barbe, 
près  de  Lyon  ;  celui  de  Tnel,  sur  la  Seine  ;  celui  de  Rouen, 
offrant  au  milieu  une  arche,  où  le  tEd)lier  peut  se  lever 
pour  laisser  passer  les  navires.  —  Outre  les  ponts  de 
chaînes,  on  comprend  dans  la  catégorie  des  ponts  sus- 
pendus les  ponts  tubulaires,  formés  dUmmenses  tubes 
en  fer  battu,  solidement  rivés  les  uns  dans  les  autres,  et 

âui  servent  notamment  au  passage  des  chemins  de  fer. 
»n  cite  dans  ce  genre  le  Pont  Britannia,  sur  le  détroit 
de  Menai;  le  Pont  Victoria,  au  Canada,  sur  le  fleuve 
Si-Laurent;  le  Pont  de  la  Quarantaine,  k  Lyon,  réunis- 
sant les  deux  gares  des  chemins  de  fer. 

VI.  Ponts  de  bateaux.  —  Ces  ponts  consistent  en  une 
suite  de  bateaux  amarrés  à  une  certaine  distance  l'un  de 
l'autre  et  liés  entre  eux  par  des  poutrelles,  sur  lesquelles 
sont  établis  un  plancher  et  des  ^de-corps.  Pour  donner 

fiassage  à  la  uavigLition,  on  fait  dériver  sur  le  côté,  à 
'aide  du  gouvernail,  un  ou  deux  bateaux,  qu'on  replace 
ensuite,  il  y  a  là  un  travail  fréquent  de  manœuvre ,  in- 
commode pour  la  circulation.  Le  tablier  montant  et  des- 
cendant avec  le  niveau  de  la  rivière,  le  plan  incliné  qui  y 
donne  accès  doit  être  mobile.  Le  système  des  ponts  de 
bateaux  est  abandonné  de  jour  en  jour;  Rouen  possédait 
un  grand  pont  de  ce  çenre  il  y  a  une  trentaine  d'années, 
bel  ouvrage  d'un  morne  augustin  nommé  Nicolas  ;  il  en 
existe  encore  sur  le  Rhin,  à  Mayence,  et  à  Coloçne. 

VII.  PontS'levis.  —  Ils  consistent  en  un  tablier,  d'une 
seule  volée  ou  de  deux,  mobile  autour  d'un  axe  horizon- 
tal, et  qu'on  lève,  soit  avec  un  contre-poids  à  l'extrémité 
d'une  chaîne  qui  passe  sur  une  poulie,  soit  avec  un  quart 
de  cercle  denté,  fixé  à  la  volée,  et  un  cric  à  engrenage 
multiple  qui  le  commande.  Une  volée  ne  peut  avoir  plus 
de  4  à  5  mètres. 

VIII.  Ponts  roulants.  —  Dans  ces  ponts,  qui  convien- 
nent principalement  sur  les  canaux,  le  tablier  est  retiré 
en  arrière  par  un  mouvement  de  translation  horizontale. 
Ils  ont  l'avantage  de  ne  pas  gêner  les  manœuvres  de  ha- 
lage,  mais  l'inconvénient  d'occuper  beaucoup  de  place  ; 
les  rouleaux  sur  lesquels  ils  se  meuvent  exigent  aussi  un 
grand  entretien. 

IX.  Ponts  tournants.  —  Us  conviennent,  comme  les 
précédents ,  aux  canaux,  et  sont  les  plus  employés  des 
ponts  mobiles.  Us  pivotent  horizontalement  sur  un  axe , 
de  manière  à  ouvrir  le  passage  en  décrivant  un  quart  de 
cercle.  On  en  voyait  un  grand  nombre  sur  le  caiial  S^- 
Martin,  à  Paris,  avant  qu'il  fût  voûté,  en  1862. 

Histoire.  —  Les  premiers  ponts  dont  il  soit  fait  men- 
tion dans  les  auteurs  de  l'Antiquité  sont  attribués  à  Me- 
nés, roi  d'Egypte,  qui,  selon  Hérodote,  en  fit  b&tir  un  sur 
un  des  bras  du  Nil,  et  à  Sémiramis,  auteur  d'un  poin 
magnifique  sur  l'Euphrate  à  Babylone.  Ceux  que  Darius 
et  Xerxès  construisirent  lors  de  leurs  expéditions  contre 
les  Scythes  et  les  Grecs,  destinés  à  un  service  temporaire, 
étaient  sans  doute  en  bois.  Les  Grecs  parajbseut  avoir  con- 
struit des  ponts  en  pierre;  mais  les  Romains  donnèrent  à 
ces  constructions  uu  caractère  monumental,  et  y  employè- 
rent les  matériaux  les  plus  solides ,  les  soins  les  mieux 
entendus;  ils  portèrent  une  telle  perfection  dans  la  taillt 
des  pierre»,  que  trè9-»ouveut  luurs  pouls  sont  coustrulu 


PON 


1460 


PON 


sans  ciment.  II  existe  encore  un  certain  nombre  de  ponts 
romains;  ce  sont,  à  Rome  :  1^  le  Pont  JantcuU,  sur  le 
Tibre,  relevé  en  1478  par  Sixte  IV,  dont  il  porte  mainte- 
nant le  nom  ;  il  a  3  arches  de  25  met.  d'ouverture,  et  a 
23"*,40  de  largeur;  2*  le  Pont  des  Sénateurs,  aujourd'hui 
Ponte  RoitOf  construit  l'an  127  av.  J.-C,  reconstruit  par 
Grégoire  XII/  l'an  1575  de  notre  ère,  en  grande  partie 
renversé  par  une  crue  du  Tibre  en  1598,  et  dont  il  ne 
reste  plus  que  3  arches  sur  5,  parce  qu'il  n'est  point 
perpendiculaire  au  cours  du  fleuve;  3<*  le  Pont  jElius, 
aujourd'hui  Pont  S^-Ange ,  construit  par  l'empereur 
Adrien,  long  de  IGO  met.,  large  de  15'",50;  les  piles 
étaient  surmontées  de  colonnes,  qui  furent  détruites  pen- 
dant les  guerres  du  moven  àse  ;  le  pape  Clément  IX  fit 
rétablir  les  parapets,  en  1 668,  d'après  les  dessins  du  Ber- 
nin,  qui  les  orna  de  piédestaux  de  marbre  blanc  suppor- 
tant 10  statues  demi-colossales  d'Anges.  Il  y  a  encore  les 
ponts  de  l'Ile  du  Tibre,  d'autres  aux  environs  de  Rome, 
et  dans  diverses  parties  de  l'Italie;  tous  ont  des  arches 
en  plein  cintre.  Les  Romains  en  bàUrent  aussi  un  grand 
nombre  dans  les  provinces  :  celui  que  Trajan  fit  Jeter  sur 
le  Danube,  par  Apollodore  de  Damas,  et  que  détruisit 
Adrien,  était  le  plus  beau  de  l'Empire;  il  avait  20  arches 
de  55  met.  d'ouverture,  et  une  largeur  de  26  met.; 
l'épaisseur  des  piles  était  de  19"*,50,  et  leur  hauteur  de 
50  met.  On  voit  encore  les  restes  de  deux  de  ces  piles 
près  de  Gerneti  (Czernetz).  En  Espagne,  le  pont  de  Sala- 
manque,  dont  il  ne  reste  plus  que  des  ruines,  est  aussi 
attribué  à  Trajan;  il  avait  26  arches  de  23  met.  de  dia- 
mètre; l'épaisseur  des  plies  était  de  8  met,  et  la  largeur 
du  pont  de  21  met.  Il  y  avait  aussi  en  Portugal,  à  Alcan- 
tara  (Norba  Cassarea^,  un  pont  construit  sous  le  môme 
prince  (V.  Alcantara).  Le  pont  de  Mérida  (Emerita  Au- 

§usta),  sur  la  Guadiana,  tout  en  pierres  de  taille,  avait 
58  met.  de  longueur,  et  se  développait  sur  64  arches. 
Parmi  les  ponts  romains  qui  subsistent  encore  en  France, 
on  peut  citer  le  pont  de  S'-Chamas  et  le  pont  du  Gard 
{V,  ces  mots). 

Les  invasions  des  Barbares  ayant  renversé  la  plupart 
des  constructions  romaines,  on  ne  franchit  plus  les 
rivières  qu'à  l'aide  de  bateaux  ou  de  bacs.  Les  ponts 

3ue  Charlemagne  fit  construire  sur  le  Rhin  et  sur 
'autres  fleuves  étaient  en  bois.  Un  pont  de  pierre,  de 
22  arches,  établi  sur  la  Seiue  à  Pont- de- l'Arche,  au 
temps  de  Charles  le  Chauve,  a  été  partiellement  emporté 
par  les  eaux  en  185G,  et  tout  à  fait  abattu  depuis.  On 
voit  encore,  dans  les  basses  eaux,  les  fondations  de  quel- 
ques piles  d'un  pont  construit  à  Rouen  par  l'impératrice 
Blathilde,  fille  de  Henri  1",  roi  d'Angleterre  et  duc  de 
Normandie.  C'était  l'usage  alors  de  fortifier  les  extré- 
mités des  ponts  par  des  constructions  militaires;  le  pont 
Valendré,  à  Cahors,  en  est  encore  un  modèle  existant  : 
plus  tard  on  b&tit  aussi  des  maisons  sur  les  ponts  eux- 
mêmes,  quelquefois  des  chapelles.  Au  xii*  siècle,  on  vit 
se  former  en  France  et  en  Allemagne  une  association  dite 
des  Frères  Pontifices,  dans  le  but  de  rétablir  les  ponts  les 
plus  importants.  Le  premier  au'ils  construisirent  fut 
celui  de  la  Durance,  au-dessous  ae  l'ancienne  Chartreuse 
de  Bonpas.  Ils  firent  ensuite  le  pont  d'Avignon  (1177), 
celui  de  Pont^Saint-Esprit  (1265),  le  pont  de  la  Guillo- 
tiôre  à  Lyon,  et  celui  du  Saut  du  Rhène,  sur  le  chemin 
de  Vienne  à  Genève,  remarquables,  sinon  par  leur  style, 
au  moins  par  leur  étendue.  Les  ponts  d'une  seule  arche 
furent  très-nombreux  ;  on  distingue  ceux  de  Céret,  de 
VilIeneuvo-d'Agen,  de  Castellane,  de  Nyons,  etc.,  qui  ont 
de  30  à  35  met.  d'ouverture  :  celui  de  Brioude  (1454)  a 
5i  mèL  d'ouverture.  En  1545,  le  cardinal  de  Tournon  fit 
construire  le  pont  du  Doubs,  près  de  Tournon.  Il  n'y  a 
rien  de  monumental  dans  ces  divers  travaux,  exécutés 
avec  une  grande  économie  et  en  vue  de  communications 
peu  actives.  En  Allemagne ,  un  des  plus  curieux  monu- 
ments du  moyen  âge  est  le  pont  de  Ratisbonne  sur  le 
Danube,  bâti  en  pierre,  de  1135  à  1146,  probablement 
par  la  Confrérie  des  ponts  (BrUckenbrUder), 

Au  commencement  du  xv*  siècle,  Paris  n'avait  encore 
que  des  ponts  en  bois,  fréquemment  emportés  par  les 
inondations  et  les  débâcles  :  le  premier  pont  en  pierre, 
élevé  en  1412,  et  bientôt  emporté  aussi,  fut  remplacé 
en  1507  par  le  pont  dit  de  Isotre-Dame,  œuvre  de  Fra 
Giocondo,  et  «démoli  en  1848.  Le  Pont  A^euf/ entrepris 
en  1578,  fut  achevé  en  1606;  puis,  dans  l'espace  d'un 
demi-siècle,  on  éleva  le  pont  S*-Blichel,  celui  de  l'Hôtel- 
Dieu,  le  Pont  Marie,  celui  de  la  Tournelle,  et  le  Pont 
Royal.  —  Les  provinces  suivirent  l'impulsion  donnée  par 
la  capitale»  Aux  ponts  de  Chàtellerault  et  de  Toulouse, 
l'anse  de  panier  remplaça  pour  la  première  fols  le  plein 


cintre.  En  1666,  on  bâtit  le  pont  de  Saintes.  En  1720,  on 
éleva  le  pont  de  Blois,  où  Ton  fit  usage  de  cintres  re- 
troussés, et  où  l'on  commença  d'employer  la  méthode  de 
fonder  par  caissons,  due  à  l'ingénieur  La  Bélie.  Du  môme 
temps  a  peu  près  datent  les  ponts  d'Orléans,  de  Tours, 
de  Moulins  et  de  Saumur.  Le  pont  de  Pesmes  est  le  pre- 
mier où  l'on  ait  donné  aux  voûtes  la  forme  d'un  arc  de 
cercle  moindre  ({ue  la  demi-circonférence.  Sur  la  route 
de  Calais  à  Saint- Omer,  l'ingénieur  Beffora  a  exécuté 
en  1750,  d'après  l'idée  de  l'ingénieur  Barbier,  un  pont 
à  quatre  branches,  qui  réunit  quatre  canaux  et  le  pas- 
sage d'une  grande  route.  De  1770  à  1700,  l'ingénieur 
Perronet  éleva 'les  ponts  de  Pont-Sainte-Maxence  et  de 
Neuilly,  et  celui  dit  de  la  Concorde,  à  Paris,  qui  comptent 
parmi  les  plus  belles  et  les  plus  hardies  constructions 
de  ce  genre.  Un  pont  très-remarquable  encore  est  celui 
de  la  Basse-Terre  (Guadeloupe),  construit  en  1773,  d'wie 
seule  arche,  sur  la  rivière  du  Galion.  Depuis  1800,  on  a 
élevé  les  ponts  d'Iéna  à  Paris,  de  Sèvres,  de  Rouen,  de 
Bordeaux  {V.  ce  mot)^  en  maçonnerie;  ceux  de  Bonpas 
(sur  la  Durance),  d'Agen,  d'Avignon,  en  charpente;  ceux 
dits  des  Saints -Pères,  des  Arts,  à  Paris,  en  fer  fondu. 
L'invention  des  ponts  suspendus  appartient  aux  Améri- 
cains ;  un  des  premiers  qui  furent  construits  en  Europe 
est  celui  de  la  Tess,  en  Angleterre  (1741).  L'essai  en  fut 
fait  pour  la  première  fois  en  France,  en  1826,  par  les 
frères  Séguin,  sur  le  Rhône,  entre  Tain  et  Tournon.  Les 
ponts  de  chaînes  se  propagèrent  rapidement;  mais  un 
accident  survenu  à  celui  d'Angers,  en  1850,  qui  se  rompit 
pendant  le  passage  du  11*  régiment  d'infanterie  légère, 
jeta  des  doutes  sur  leur  solidité,  et,  depuis,  on  a  presque 
partout  renoncé  à  en  construire. 

La  science  de  la  construction  des  ponts  a  fait  de  grands 
progrès  de  nos  Jours,  même  sous  le  rapport  de  l'écono- 
mie. D'abord,  on  les  fonde  généralement  sans  pilotis,  sur 
une  masse  de  béton,  qui  ne  forme  plus  que  comme  un 
seul  banc  de  pierre;  si  Ton  ne  rencontre  pas  le  bon  ter- 
rain à  une  profondeur  ordinaire,  on  descend  des  caisses 
hermétiques,  vraies  cloches  de  plongeur,  au  fond  de 
Teau,  et,  avec  une  machine  à  vapeur  placée  sur  le  rivage, 
on  refoule  l'air  dans  ces  caisses,  de  manière  à  en  chasser 
toujours  l'eau;  les  ouvriers  peuvent  ainsi  travailler  et 
creuser  le  sol  sans  Jamais  être  incommodés.  A  quelque 
profondeur  que  soit  le  bon  terrain,  on  va  le  chercher  en 
descendant  au-dessous  du  lit  du  fleuve,  où  l'on  peut  tou- 
jours enfoncer  de  gros  tubes  de  fonte,  que  l'on  remplit 
de  béton  quand  ils  sont  sur  le  bon  sol  ;  de  cette  façon  le 
pont  est  fondé  sur  des  colonnes  de  pierre  revêtues  d'une 
enveloppe  de  fer.  C'est  ainsi  que  l'ingénieur  Fleur-Saint- 
Denis  a  procédé  au  pont  du  Rhin,  à  Strasbourg,  où  les 
piles  de  béton  sont  à  20  met.  en  contre-bas  du  fond  du 
fleuve.  Le  système  des  fondations  tubulaires,  employé  de 
temps  immémorial  dans  l'Inde,  a  été  introduit  en  Europe 
par  les  Anglais  :  Brunel  s'en  servit  en  1825  pour  la  con- 
struction du  puits  de  Rothertithe  ({ui  donne  accès  au 
tunnel  de  la  Tamise;  mais  l'ingénieur  français  Triger 
l'a  perfectionné  en  1841.  —  Comme  économie,  nos  ingé- 
nieurs actuels  ont  diminué  de  moitié  au  moins  l'épais- 
seur des  arcs,  et  ils  prétendent  que  ces  arcs  ont  la 
même  force  que  dans  les  anciens  ponts.  Ensuite,  ils  ont 
employé  la  meulière  équarrie  pour  des  arcs  de  très- 
grande  dimension,  se  contentant  d'une  simple  tête  de 
pierre  de  taille  en  aval  et  en  amont,  et  quelquefois 
même  n'employant  que  de  la  meulière  nue  ou  couverte 
d'un  enduit  de  ciment  romain.  —  Le  point  où  ils  sont 
très-inférieurs  à  leurs  devanciers,  c'est  celui  de  l'orne- 
mentation. Rien  de  plus  pauvre,  sous  ce  point  de  vue, 
que  les  ponts  actuels ,  et  notamment  tous  les  ponts  de 
Paris  construits  depuis  1850.  Les  ingénieurs  semblent 
avoir  voulu  négliger,  de  parti  pris,  tout  ce  qui  pouvait 
ajouter  à  l'agrément  et  à  l'élégance  de  leur  travail  :  les 
corniches  sont  d'une  maigreur,  d'une  sécheresse,  d'unt 
nudité  sans  exemple;  pas  la  moindre  idée  de  varier  Tor- 
nementation  ;  ainsi,  partout  les  parapets  sont  en  gros  ba- 
lustres  quadrangulaires  ;  partout  les  piles  sont  découpées 
en  refends,  ainsi  que  tous  les  claveaux  de  tête;  ce  qui, 
pour  les  unes  et  les  autres,  parait  un  contre-sens  :  aux 
piles,  les  refends  offrent  à  l'eau  des  moyens  d'affouille- 
ment  pour  détruire  les  Joints  ;  aux  cintres,  ils  Dlessent 
la  vue,  et  semblent  une  désagr^tion  là  où  l'œil  a  besoin 
d'être  rassuré  par  un  plein  aspect  de  force.  Enfin  il  n'y 
a  pas  Jusqu'au  chiffre  de  l'Empereur,  taillé  au-dessus  des 
piles,  qui  ne  soit  dans  ce  système,  car  il  est  en  relief,  ce 
qui  l'expose  à  une  prompte  destruetion,  tandis  qu*eo 
creux  il  aurait  duré  autant  que  la  mur^Ue  même  qui  le 
porte.  On  peut  dire  de  notre  école  de  ponts  d'aajourd'bal 


PON 


1461 


PON 


qne,  malgré  les  mérites  incontestables,  il  lui  manque 'une 
qualité  très-io^nde  et  très-estimée  en  France,  celle  du 
sentiment  de  Tart.  B.  et  C.  D— t. 

PONT,  en  termes  de  Marine,  plancher  d*un  b&timent, 
fait  en  fortes  planches  de  chêne  et  de  sapin.  Les  petits 
b&timents  n^ont  qa'un  pont;  les  corvettes  et  les  frégates 
en  ont  deux,  les  vaisseaux  de  ligne  en  ont  trois,  séparés 
entre  eux  par  un  espace  dit  entre-pont  (  V,  ce  mot).  Le 
premier  pont,  ou  franc-tillac^  est  celui  qui  est  le  plus 
près  de  Feau.  Le  pont  le  plus  élevé,  tout  à  découvert  et 
de  plain-pied,  est  appelé  pont  sur  gueule  ou  pont  cou- 
rant. C'est  sur  les  ponts  que  s'établissent  les  batteries  de 
canons.  On  nomme  ponf  coupé  celui  oui  n*a  que  Tacas- 
tillage  de  Tavant  et  de  Tarrière,  sans  régner  entièrement 
de  la  proue  à  la  poupe.  Un  faux  pont  est  un  espace  pra- 
tiaué  entre  la  cale  et  le  1«'  pont,  et  où  sont  logés,  dans  des 
cabines ,  les  derniers  officiers,  Tagent  comptable,  Taumô- 
nier,  les  chirurgiens  et  les  maîtres;  les  élèves  occupent 
le  milieu,  depuis  le  grand  m&t  Jusqu'au  màt  d*artimon. 

PONT  (  Équipage  de).  V.  Ponton. 

PONT  A  BASCULE,  machine  dont  on  s*est  servi  pour  peser 
les  voitures  publiques  et  s'assurer  si  leur  cnargement 
n'excédait  pas  le  poids  déterminé  par  les  règlements.  C'est 
un  tablier  qui  pèse  sur  des  ressorts  disposés  dans  un 
caveau  inférieur,  et  auxquels  correspond  un  indicateur 
précisant  la  force  de  pression  supérieure,  et  conséauem- 
ment  le  poids.  Les  ponts  à  bascule,  établis  à  l'entrée  des 
villes  par  une  loi  du  29  floréal  an  x,  ont  été  supprimés 
par  la  loi  du  30  mai  1851. 

PONT-AUDBMER  (Église  S'-Odbn,  à),  édifice  incom- 
plet et  inachevé,  dont  les  parties  appartiennent  à  diffé- 
rentes époques,  et  qui  présente,  malgré  l'absence  d'unité, 
un  certain  intérêt.  Le  chœur,  vestige  d'une  église  plus 
ancienne,  a  les  caractères  de  l'architecture  du  xi*  siècle  : 
il  est  bas  et  étroit,  les  colonnes  de  ses  arcades  sont  tra- 

Îues  et  grossièrement  exécutées.  La  nef,  commencée  vers 
470,  est  un  morceau  très-remarquable;  les  colonnes 
étaient  autrefois  ornées  de  statues,  dont  il  ne  reste  plus 
que  les  consoles;  la  décoration  des  arcades  et  de  la  ga- 
lerie qui  les  surmonte  est  riche  et  élégante  :  mais  tout 
ce  travail  fut  entrepris  dans  des  proportions  bien  au- 
dessus  des  ressources  de  la  localité,  et,  au  lieu  des  belles 
et  larges  fenêtres  :.qui  devaient  garnir  la  partie  supé- 
rieure des  travée,  on  ne  voit  que  d'étroites  ouvertures  à 
la  naissance  d'une  voûte  en  bois.  Les  collatéraux  et  leurs 
chapelles  sont  voûtés  en  pierre  :  ces  chapelles  ont  de 
superbes  verrières  du  xvi*  siècle.  A  la  même  époque  ap- 
partiennent les  fonts  baptismaux,  près  desquels  on  con- 
serve l'ancien  maltre-autel,  œuvre  du  temps  de  Henri  IV. 
L'église  avait  un  Jubé  en  bois,  que  l'on  a  détruit  à  la 
Révolution.  Son  portail  et  les  deux  tours  qui  l'accompa- 
gnent ont  été  interrompus  avant  le  xvi*  siècle. 

PONT-DE-L'ARCHE  (Église  de),  Joli  spécimen  du  style 
ae  transition  qui  appartient  encore  à  l'architecture  ogi- 
vale tertiaire,  et  qui  se  ressent  déjà  des  influences  de  la 
Renaissance.  L'église,  massive  du  côté  des  anciennes 
fortifications  de  la  ville,  offre,  vers  le  midi,  la  richesse 
des  constructions  du  xv*  siècle.  Elle  est  inachevée;  les 
collatéraux,  qui  devaient  faire  le  tour  du  chœur,  s'ar- 
rêtent à  la  hauteur  du  maltre-autel.  On  remarque  les  clefs 
pendantes  des  voûtes  et  quelques  vitraux  du  xvi*  siècle, 
la  menuiserie,  du  buffet  d'orgues  et  le  retable  en  bois 
sculpté,  qui  datent  du  xvii*. 

PONTE ,  nom  donné,  dans  les  ]eux  de  cartes  où  il  y  a 
un  banquier,  à  tout  Joueur  qui  Joue  contre  lui. 

PONTENAGE.  )  K.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

PONTIFES.      I    de  Biographie  et  d'Histoire. 

PONTIFICAL,  livre  contenant  toutes  les  règles  que 
doivent  suivre  les  papes  et  les  évêquos  dans  les  cérémo- 
nies. Il  est  attribué  aux  papes  Gélase  et  S'  Grégoire. 

PONTIGNY  (Église  de),  dans  le  département  de 
l'Ydnne,  le  type  le  plus  pur  des  constructions  de  l'ordre 
de  Citeanx.  C'est  une  ancienne  abbatiale,  fondée  en  1114, 
et  remarquable  par  l'unité  du  plan  et  la  sévérité  de 
l'ornementation.  Elle  a  108  met.  ae  longueur,  22  met.  de 
largeur  y  compris  les  collatéraux,  50  met.  au  transept,  et 
21  met.  de  hauteur  sous  voûte.  La  nef  est  précédée  d'un 
narthex  bas  et  lourd,  dont  la  porte  est  encore  garnie  de 
ses  ferrures  <fu  xn*  siècle.  Les  collatéraux  n'ont  point  de 
chapelles,  mais  il  y  en  a  onze  autour  de  l'abside,  dont 
les  huit  colonnes  sont  monolithes,  et  quatre  dans  le  tran- 
sept. Les  fenêtres,  simples,  étroites,  sans  meneaux,  sont 
dépourvues  de  vitraux  peints.  Des  anciens  bâtiments  de 
Tabbave,  il  ne  reste  plus  qu'un  vaste  corps  de  logis  du 
un*  siècle,  renfermant  de  grandes  salles  voûtées,  et  les 
esIJiers  dea  moines. 


PONTIQUES,  épltres  qa'Ovide  écrivit  pendant  son 
exil  sur  les  bords  du  Pont-Euxin.  Elles  forment  A  livres, 
contenant  46  élégies  dont  le  fond  roule  toi^ours  sur  les 
malheurs  de  son  exil. 

PONT-LEVIS.  V.  Pont. 

PONT-NEUF,  nom  donné  aux  airs  de  chansons  vul- 
gaires et  de  vaudevilles ,  parce  qu'au  xvu«  siècle  les  mar- 
chands de  ces  chansons  se  plaçaient  sur  le  Pont-Neuf,  à 
Paris. 

PONTOISE  (Église  S'-Maclod,  à).  Cette  église  présenu 
l'assemblage  de  plusieurs  styles  :  le  chœur  et  les  cha- 
pelles environnantes,  de  style  roman,  paraissent  remon- 
ter &  la  fin  du  XI*  siècle  ou  au  commencement  du  xu* , 
le  transept  est  de  la  fin  du  xii*  ;  la  grande  nef,  le  grand 
portail  et  la  tour  appartiennent  au  xv*,  les  collatéraux  et 
ta  chapelle  de  la  Passion  au  xvi*.  Les  sculptures  du  por- 
tail ont  beaucoup  souffert  des  injures  du  temps  et  des 
hommes.  L'intérieur  de  l'édifice  manque  de  symétrie  : 
non-seulement  il  n'y  a  qu'un  bas  côté  au  midi,  tandis 
qu'il  y  en  a  deuT^  au  nord,  mais  ces  bas  côtés  ne  sont  pas 
parallèles  à  la  nef,  ils  s'élar^ssent  en  s'approchant  du 
chœur.  La  chapelle  de  la  Passion,  ornée  de  beaux  vitraux, 
-  contient  des  boiseries  remarquables,  un  Christ  au  tom- 
beau et  une  Résurrection,  monuments  de  sculpture  de 
la  Renaissance. 

PONTON,  nom  qu'on  donne,  dans  l'Art  militaire,  à 
des  bateaux  qui ,  placés  sur  des  rivières  à  des  distances 
déterminées,  et  Joints  ensemble  par  des  poutrelles  et 
des  madriers,  composent  un  pont  pouvant  donner  passage 
à  des  troupes  et  à  leur  matériel.  On  en  faisait  autrefois 
en  osier  poissé  recouvert  de  toile  cirée,  en  cuir  bouilli, 
en  fer-blanc,  en  cuivre.  Les  pontons  se  transportent  sur 
des  voitures  appelées  hoquets;  mais,  quand  on  peut  les 
faire  arriver  par  eau,  on  les  assemble  par  ouatre  ou  par 
huit*  afin  d'employer  moins  d'hommes  &  les  conduire. 
Un  Équipage  de  pont  se  compose  de  35  baquets,  35  cha- 
riots de  parc,  4  forges  de  campagne;  en  tout,  74  voitures 
à  six  chevaux  de  trait  chacune.  Les  corps  d'armée  ne  sont 
pas  toi^ours  pourvus  d'un  équipage  de  pont  :  dans  ce 
cas,  on  utilise,  pour  traverser  les  rivières,  les  ressources 
locales,  bateaux,  tonneaux,  etc.  Les  ponts  de  chevalets 
sont  ceux  qu'on  établit  sur  des  cours  d'eau  tranquilles  et 
peu  profonds,  à  l'aide  de  corps  do  support.  On  désigne 
sous  le  nom  de  pont  volant  une  portion  de  pont  con- 
struite le  plus  ordinairement  sur  deux  grands  bateaux  : 
elle  est  fixée  &  un  long  cordage  ou  à  une  chaîne  qui  a  son 
point  d'attache  dans  le  lit  même  de  la  rivière,  et  la  force 
seule  du  courant  fait  passer  le  pont  volant  d'une  rive  à 
l'autre. 

PONTON,  en  termes  de  Harine,  grand  b&timént  à  fond 
plat  et  à  quatre  faces  droites,  un  peu  plus  long  que  large, 
portant  un  m&t  au  milieu,  un  cabestan  à  clûtque  extré- 
mité, et  dont  on  se  sert  dans  les  ports  militaires  pour 
toutes  les  opérations  de  l'intérieur.  Les  pontons  pour  le 
carénage  sont  de  vieux  vaisseaux  rasés  Jusqu'au  premier 
pont,  munis  de  cabestans,  m&ts  de  redresse,  palans,  etc., 
et  qui  servent  à  coucher  sur  le  côté  les  navires  dont  on 
veut  découvrir  les  parties  submergées.  On  appelle  cure- 
mole  ou  ponton  à  cuillers  une  espèce  de  ponton  garni  de 
roues,  de  grandes  cuillers  et  de  chaînes ,  qu'on  emploie 
à  curer  les  ports.  On  a  enfin  donné  le  nom  de  pontons  à 
de  vieux  jvaisseaux  de  ligne  désarmés,  grillés  à  tous  les 
sabords,  où  les  Anglais,  pendant  leurs  guerres  contre 
Napoléon  I*',  entassaient  les  prisonniers  français. 

PONTONNIERS ,  corps  affecté  au  service  des  pontons, 
et  à  l'établissement  des  ponts  militaires.  Ce  service  fut 
fait  d'abord  par  l'artillerie.  En  1795,  les  pontonniers 
furent  organisés  en  un  bataillon  composé  de  8  compa- 
gnies  à  72  hommes  chacune  ;  quoique  réduit  à  6  compa- 
gnies sous  le  roi  Louis- Philippe,  ce  bataillon  reçut  le 
nom  de  régiment.  Il  fait  aujourd'hui  partie  de  l'arme  de 
l'artillerie,  et  se  compose  de  16  compagnies. 

PONTS  ET  CHAUSSÉES,  nom  qu'on  donne  en  France 
à  l'ensemble  des  travaux  d'utilité  publique  se  rapportant 
aux  voies  de  communication.  Le  corps  des  ingénieurs 
chargés  de  la  direction  et  de  la  surveillance  de  ces  tra- 
vaux ne  date  que  du  siècle  dernier.  Auparavant,  on  choi- 
sissait dans  chaque  Généralité  les  hommes  qui  avaient 
fait  preuve  de  talent  dans  la  pratique  des  constructions  ^ 
ils  n'avaient  eu  d'autre  préparation  &  leur  emploi  que 
des  études  isolées ,  souvent  incomplètes ,  ne  possédaient 
même  parfois  aucune  connaissance  théorique,  et  sortaient 
rarement  de  leur  province.  En  1739,  il  se  forma,  sous  U 
érection  de  TVudaine,  intendant  des  finances,  et  de  Tin- 
génieur  Perronnet,  une  administration  régulière  des 
Ponts  et  chaussées ,  dont  l'existence  fiit  sancnonnée  par 


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nn  arrêté  da  Conseil  du  0  Juillet  et  par  lettres  patentes 
du  17  août  1750  :  on  établissait  i  arcliitccte  premier  in- 

génieur,  4  Inspecteurs  généraux  ,  1  directeur  du  bureau 
os  géograpbes  et  dessinateurs,  25  ingénieurs  en  commis- 
Bion  pour  les  pays  d'élection ,  et  un  certain  nombre  de 
sous-inspecteurs  pour  suivre  les  ouvrages  ;  les  pays  d'États 
avaient  leurs  ingénieurs  ou  agents  particuliers.  Un  arrêté 
du  Conseil  de  1770  créa  trois  nouveaux  ingénieurs  pour 
la  Généralité  de  Paris,  érigea  les  sous-inspecteurs  en  in- 
specteurs, en  fixa  le  nombre  à  50,  et  institua  3  ingénieurs 
pour  les  turcics  et  levées,  1  inspecteur  et  1  ingénieur 
pour  le  pavé.  La  loi  du  iO  janvier  1791  fit  passer  l'admi- 
nistration des  Ponts  et  chaussées  do  la  direction  du 
ministre  des  Finances  sous  celle  du  ministre  do  l'Inté- 
rieur; elle  créa,  1**  uT)(i  Administration  centrale,  compo- 
sée d*un  premier  ingénieur  et  de  8  inspecteurs  généraux  ; 
2«  une  Assemblée  aes  Ponts  et  chaussées,  formée  du 
i*''  ingénieur,  des  8  inspecteurs  généraux,  des  ingénieurs 
en  clicf  inspecteurs  de  département,  et  des  ingénieurs 
présents  à  Paris;  3<*une  École  des  Ponts  et  chaussées, 
pour  former  les  ingénieurs  nécessaires  au  recrutement 
du  corps.  Des  modifications  de  détail  furent  apportées  k 
cette  or^nisation  par  une  autre  loi  du  18  août  179).  Le 
décret  impérial  du  7  fructidor  an  xii  (25  août  180i) 
constitua  le  corps  des  Ponts  et  chaussées  à  peu  près  comme 
il  est  aujourd'hui,  et  régla  tout  ce  qui  concerne  le  ser- 
vice, les  nominations  et  les  avancements.  L'ordonnance 
royale  du  19  oct.  1830  en  modifia  quelques  dispositions; 
mais  elle  fut  abrogée  par  celle  du  8  juin  1832.  C'est  donc 
toujours  le  décret  de  1804  qui  fait  loi,  sauf  les  cbange- 
monts  ou  additions  que  contiennent  les  décrets  du  13  oct. 
1851  et  du  17  juin  1854. 

Cliaquc  département  possède  un  Ingénieur  en  chef  de 
l'*  ou  de  2«  classe  (5  à  0,000  fr.  et  4,500  fr.  de  traite- 
ment), ayant  sous  ses  ordres  un  nombre  variable  d'Ingé- 
nieurs ordinaires,  de  1",  2«  ou  3*  classe  (3,000,  2,500  et 
1,800  fr.).  Ceux-ci  ont  sous  eux  des  agents  appelés  Con- 
ducteurs (  V,  ce  mot)  et  Piqueurs,  Les  ingénieurs  ont,  en 
outre,  des  frais  de  bureau,  et  perçoivent  des  honoraires 
pour  les  travaux  dont  ils  sont  chargés  par  les  départe- 
ments et  les  communes.  Ils  ne  peuvent  devenir  entre- 
preneurs ni  concessionnaires  de  travaux  publics.  D'après 
une  loi  du  30  novembre  1 850,  le  corps  des  ingénieurs  se 
recrute  partie  parmi  les  élèves  sortant  de  l'École  des  Ponts 
et  chaussées,  partie  parmi  los  conducteurs.  Des  Inspec- 
teurs divisionnaires  parcourent  tous  les  deux  ans  une 
des  10  circonscriptions  dans  lesquelles  la  France  est  di- 
visée pour  eux.  Un  certain  nombre  de  ces  Inspecteurs  et 
les  Inspecteurs  généraux  (12,000  et  10,030  fr.  de  traite- 
ment) forment  le  Conseil  général  des  Ponts  et  chaussées. 
En  1836,  l'administration  des  Ponts  et  chaussées  avait 
été  distraite  du  ministère  de  l'Intérieur  et  annexée  à 
celui  du  Commerce;  elle  passa  au  ministère  des  Travaux 
publics  en  1839,  et  dépend  aujourd'hui  du  ministère 
de  l'Agriculture,  du  Commerce  et  des  Travaux  publics. 
V.  Ravinet,  Code  des  Ponts  et  cJiaussées  et  des  Mines , 
2^  édit.,  1847,  4  vol.  in-8<^;  Couderc,  Essai  sur  Vadminis- 
tration  et  le  corps  royal  des  Ponts  et  chaussées,  1829. 

PONTS  ET  CHAusséKS  (Écolo  dos).  Cette  école,  placée  & 
Paris,  a  pour  mission  de  former  des  ingénieurs  destinés 
au  recrutement  du  corps  des  Ponts  et  chaussées.  Elle  a 
un  inspecteur  général  directeur,  un  ingénieur  en  chef 
inspecteur  des  études,  et  un  Conseil  de  direction.  Les 
conditions  d'admission  ont  été  réglées  par  un  arrêté  mi- 
nistériel du  18  février  1852  :  l'École  ne  reçoit  en  qualité 
d'élèves  ingénieurs  que  des  élèves  de  l'École  polytechni- 
que ayant  terminé  leur  cours  d'études  et  satisfait  à  cer- 
taines conditions,  mais  elle  admet  des  élèves  internes, 
français  ou  An^ngers,  à  participer  aux  travaux  intérieurs  ; 
elle  en  admet  d'autres  à  suivre  les  leçons  orales.  Les 
études  durent  3  ans  :  pendant  quelques  mois  de  Tannée, 
les  élèves  sont  envoyés  dans  les  départements  auprès  des 
ingénieurs  pour  s'exercer  à  la  pratique.  Au  sortir  de  l'École, 
ils  ont  le  grade  d'aspirant  ingénieur.  —  L'École  fut  insti- 
tuée en  1747,  supprimée  de  fait  à  la  Révolution,  et  rétablie 
Car  décret  de  l'Assemblée  nationale  en  date  du  17  janv. 
791.  La  loi  du  30  vendémiaire  an  iv  r22  oct.  1795)  et  le 
décret  du  7  fhictidor  an  xn  (24  août  1804)  Torganisèrent 
sur  des  bases  plus  étendues.  Elle  a  reçu  encore  de  nou- 
veaux développements  par  le  décret  du  13  oct.  1851. 

POPE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d^ffistoire, 
POPOLOUQOE  (Idiome).  V.  Mexique  (Langues  du). 
POPULARITÉ,  crédit  dont  on  Jouit  aupres  du  peuple. 
C*e8t  le  résultat  d'un  entraînement  irréfléchi  ou  d'un 
■mitiment  sya^pathique  de  ce  peuple  pour  son  souve- 


rain,  ou  plus  souvent  ponr  un  citoyen  éminent  par  ses 
talents,  son  innuence,ou  sa  position,et  auquel  il  s'attache 
parce  qu'il  en  attend,  qu'il  en  reçoit,  ou  qu'il  en  a  reçu 
des  services.  La  popularité  ou  vient  spontanément,  ou  se 
se  gagne  honnêtement,  et  c'est  la  bonne,  la  vraie  ;  ou  elle 
se  capte  par  des  moyens  détournés,  ou  se  poursuit  par 
une  basse  flatterie  qui  s'asservit  à  tous  les  désir  ,  à  toutes 
les  passions  de  la  multitude  :  c'est  la  mauvaise,  la  fausse 
popularité,  dont  il  ne  saurait  sortir  de  bons  fruits.  La 
première  peut  exister  dans  les  monarchies,  quand  le 
souverain  s'occupe  du  sort  des  masses,  par  le  sentiment 
de  son  devoir  et  des  intérêts  publics,  au  point  de  vue  de 
la  grandeur  et  de  la  gloire  de  la  patrie.  Henri  IV,  dans 
l'ancienne  monarchie  française,  fut  populaire  sous  ce 
double  rapport.  Napoléon  I''  le  fut  aussi  :  ses  services 
et^  sa  gloire  militaire  commencèrent  sa  popularité,  et 
lui  valurent  d'être  porté  au  pouvoir  par  l'opinion  des 
masses,  oui  ne  cessèrent  de  voir  en  lui  le  représentant 
de  cette  Révolution  dont  elles  tenaient  leur  affranchis- 
sement et  l'égalité  politique.  Jamais  Napoléon  -ne  flatta 
le  peuple;  cependant  sa  popularité  fut  si  réelle,  si  pro- 
fonde, que  ses  plus  grands  revers  ne  purent  la  lui  faire 
perdre;  elle  survécut  même  à  sa  mort,  et  s'attacha  à 
son  nom  par  un  instinctif  sentiment  de  gratitude  pour 
l'immense  gloire  dont  il  avait  rempli  les  annales  du 
pays,  et  qui  formait  comme  une  auréole  à  sa  mémoire. 
Après  la  Révolution ,  où  l'on  avait  voulu  tout  faire  par  le 
peuple.  Napoléon  avait  mis  en  pratique  la  maxime  con- 
traire :  «  Tout  pour  le  peuple,  rien  par  le  peuple,  s  c.-à-d« 
rien  par  les  masses  ignorantes  et  aveugles,  que  des  so- 
phismes  ou  de  perfides  suggestions  peuvent  entraîner  si 
facilement.  Pendant  sa  captivité  à  S^*-Hélène,  faisant  un 
retour  sur  ce  passé  d'hier,  où  il  avait  tenu  une  si  grande 
place,  à  partir  du  siège  de  Toulon  et  de  la  Journée  du 
1 3  vendémiaire,  il  disait  :  «  Rien  n'est  plus  dangereux 
que  de  flatter  le  peuple;  s'il  n'a  pas  ensuite  tout  ce  quMl 
veut,  il  s'irrite,  et  pense  qu'on  lui  a  manqué  de  parole; 
si  alors  on  lui  résiste,  il  naît  d'autant  plus  qu'il  se  dit 
trompé.  »  —  L'histoire  de  toutes  les  Révolutions  abonde 
en  exemples  de  ce  fait  ;  nous  en  citerons  deui  seulement 
pris  dans  la  nôtre  :  le  général  La  Fayette  fut  l'idole  du 
peuple  en  1789;  deux  ans  après  il  en  était  l'exécration,  et 
tomba  devant  sa  tentative  de  révolte  contre  une  déma- 
gogie avide  de  tout  bouleverser.  Mirabeau  Jouit  d*une  po- 
pularité plus  immense  encore,  et,  lorsqu'il  mourut,  elle 
lui  échappait  déjà,  parce  qu'on  le  soupçonnait  de  vouloir 
arrêter  la  chute  de  la  monarchie.  La  Fayette  et  Mirabeau 
avaient  été  des  courtisans  de  popularité,  et  ils  finirent 
comme  tous  les  courtisans  de  ce  terrible  souverain  qu'on 
appelle  le  peuple,  d'autant  plus  despote  qu'il  a  son  trùne 
dans  la  rue.  Jamais  rien  de  grand,  ni  de  noble,  ni  de 
stable,  n'est  sorti  des  coureurs  de  popularité.  Tout  gou- 
vernant ,  ou  aspirant  à  gouverner,  qui  a  le  sentiment  de 
sa  propre  dignité  ou  de  sa  force,  et  qui  aime  vraiment  le 
peuple,  doit  attendre  que  la  popularité  vienne  le  cher- 
cher, et  savoir,  en  même  temps,  la  sacrifier  à  ce  que  lui 
dictent  son  devoir  et  ses  propres  lumières.  Cela  est  du 
principe  pour  les  honnêtes  gens,  même  dans  les  ^uver- 
nements  démocratiques,  où  la  popularité  joue  un  si  grand 
rôle.  Un  des  fondateurs  de  la  liberté  américaine,  Alexandre 
Hamilton,  a  très-bien  dit  le  compte  que  Ton  doit  faire  de 
la  fausse  popularité  ;  il  l'a  dit  au  peuple  lui-même,  dans 
le  journal  le  Fédéraliste,  où  il  s'exprimait  ainsi  : 

«  Il  y  a  des  gens  près  desquels  le  pouvoir  exécutif  ne 
saurait  mieux  se  recommander  qu'en  se  pliant  avec  ser- 
vilité aux  désirs  du  peuple  ou  dp  la  l^slature;  mais 
ceux-là  me  paraissent  posséder  des  notions  bien  gros- 
sières sur  l'objet  de  tout  gouvernement ,  ainsi  que  sur  les 
vrais  moyens  de  produire  la  prospérité  publique. 

«  Que  les  opinions  du  peuple,  quand  elles  sont  raison- 
nées  et  mûries,  dirigent  la  conduite  de  ceux  auxqpiels  il 
confie  ses  affaires,  c'est  ce  (fui  résulte  de  l'établissement 
d'une  constitution  républicaine  ;  mais  les  principes  répu- 
blicains n'exigent  point  qu'on  se  laisse  emporter  au 
moindre  vent  des  passions  populaires,  ni  qu*on  se  hâte 
d'obéir  à  toutes  les  impulsions  momentanées  que  la  mul- 
titude peut  recevoir  par  la  main  artificieuse  des  hommes 
qui  flattent  ses  préjugés  pour  trahir  ses  intérêts. 

«  Le  peuple  ne  veut,  le  plus  ordinairement,  qu'arriver 
au  bien  public,  ceci  est  vrai  ;  mais  il  se  trompe  souvent 
en  le  cherchant.  Si  on  venait  lui  dire  qu'il  juge  toujours 
sainement  les  moyens  à  employer  pour  produire  la  pro- 
spérité nationale,  son  bon  sens  lui  ferait  mépriser  de  pa- 
reilles flatteries  ;  car  il  a  appris  par  expérience  quHl  lui 
est  arrivé  quelquefois  de  se  tromper  ;  et  ce  dont  on  doit 
s'étonner,  c'est  qu'il  ne  se  trompe  pas  plus  souvent. 


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1463 


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poorsBivt  «omme  il  Fest  toc^oura  par  les  rases  des  para- 
sites et  des  sycophantes,  environ  aé  par  les  pièges  que 
lui  tendent  sans  cesse  tant  d*hommes  avides  et  sans  res- 
sources, déçu  chaque  Jour  par  tes  artifices  de  ceux  qui 
possèdent  sa  confiance  sans  la  mériter,  ou  qui  cherchent 
plutôt  à  la  pos$?éder  qu'à  s*en  rendre  dignes. 

a  Lorsque  les  vrais  intérêts  du  peuple  sont  contraires 
h  ses  désirs,  le  devoir  de  tous  ceux  qu'il  a  préposés  à  la 
•^de  de  ces  intérêts  est  de  combattre  Terreur  dont  il  est 
momentanément  la  victime,  afin  de  lui  donner  le  temps 
de  se  reconnaître  et  d'envisager  les  choses  de  sang-froid. 
Et  il  est  arrivé  plus  d'une  fois  qu'un  peuple,  sauvé  ainsi 
des  fatales  conséquences  de  ses  propres  erreurs,  s'est 
plu  à  élever  des  monuments  de  sa  reconnaissance  aux 
hommes  qui  ont  eu  le  magnanime  courage  de  s'exposer 
à  lai  déplaire  pour  le  servir.  » 

Voilà,  certes,  de  nobles  et  fières  paroles,  inspirées  par 
un  grand  caractère,  une  profonde  sagesse,  et  le  vrai  seii- 
dment  d'un  homme  d'État.  C.  D— t. 

POPULATION ,  universalité  des  individus  qui  habitent 
la  terre,  une  contrée,  un  pays,  une  ville,  sans  distinction 
de  sexe  ni  d'âge.-  On  nomme  population  absolue  le 
nombre  d'habitants  d'un  pays  quelconque,  abstraction 
Taite  de  l'étendue  du  terrain  qu'ils  occupent;  et  populO" 
tion  relcUive  ou  spécifique,  la  quantité  moyenne  d'indi- 
vidus qui  sont  censés  vivre  sur  une  étendue  donnée,  par 
exemple  sur  un  kilomètre  carré.  Par  mouvement  de  la  po* 
jnUatian  on  entend  les  phénomènes  relatifs  à  l'accroisse- 
ment ou  à  la  diminution  de  la  population,  et  les  rapports 
qui  existent  entre  les  divers  éléments  dont  elle  se  com- 
pose, comme  le  nombre  des  naissances  et  des  décès,  celui 
des  mariages,  celui  des  naissances  masculines  et  fémi- 
nines, légitimes  et  naturelles,  etc. 

Si  l'on  connaît  généralement  la  population  d*un  pays 
civilisé,  comme  la  France  et  l'Angleterre,  il  est  très-diffi- 
cile d'éraluer  celle  de  la  plupart  des  régions  du  globe. 
Aussi  les  estimations  de  la  population  totale  de  la  terre 
ne  peuvent-elles  être  qu'approximatives,  et,  par  consé- 
quent, très-variables.  Volney  comptait  moins  de  450  mil- 
lions d'habitants  sur  la  surface  de  notre  globe;  Malte- 
nrun  en  supposait  650  millions,  Balbi  737,  Letronne 
000,  Hassel  9i0.  H.  de  Reden  estimait  de  la  manière  sui- 
vante rétendue  et  la  population  de  la  terre  ferme  : 

Asie,  43,832,152  kilom.  carrés,  763,000,000  hab. 

Europe,      10,064,951  —  206,543,000 

Amérique,  41,414,401  —  56,000,000 

Afrique,      30,019,393  —  46,000,000 

AustraUe,     9,042,731  —  3,945,000 

n  y  aurait  donc  1,135,488,000  hab.  sur  la  terre.  Un 
autre  statisticien,  Dieterici ,  membre  de  l'Académie  des 
sciences  de  Berlin,  croit  pouvoir  porter  à  1,283  millions 
d'habitants  le  chiffre  total  de  la  population  de  la  terre, 
dont  272  millions  pour  l'Europe,  750  pour  l'Asie,  59  pour 
l'Amérique,  200  pour  l'Afrique,  2  pour  l'Australie.  Ce 
dernier  chiffre,  si  par  Australie  l'auteur  a  entendu  l'Océa- 
uie,  est  évidemment  fort  au-dessous  de  la  vérité.  C'est  la 
population  de  l'Europe  qui  a  le  plus  augmenté  :  elle  était, 
en  1787,  d'après  un  travail  ordonné  par  Louis  XVI,  de 
150  millions  d'habitants,  et,  en  1805,  elle  atteignait  à 
peine  200  millions.  Il  est  remarquable  aussi  que  l'hémi- 
sphère boréal  de  la  terre  est  beaucoup  plus  peuplé  que 
l'hémisphère  austral ,  et  que  la  masse  de  la  population 
de  l'ancien  monde  se  trouve  réunie  à  ses  deux  extrémités, 
c-ànd.  dans  les  pays  occidentaux  de  l'Europe  et  dans  les 
régions  orientales  de  l'Asie. 

11  y  a  des  différences  notables  entre  les  divers  pays  par 
rapport  à  raccroissement  de  la  population,  il  parait  qu'en 
1066  l*Angleterre  proprement  dite  ne  comptait  c|ue  2  mil- 
lions d'habitants;  elle  en  a  aujourd'hui  18  millions.  La 
Gaule  en  avait  4  millions  au  temps  de  J.  César,  9  mil- 
lions à  la  fin  de  l'Empire  romain;  la  population  de  la 
France  était  de  20  millions  en  1700,  de  25  en  1790,  de 
29  en  1806,  de  32  en  1831,  de  37  en  1861.  D'après  l'examen 
des  tables  dressées  depuis  un  certain  nombre  d'années, 
les  statisticiens  ont  observé  que  l'augmentation  moyenne 
annuelle  de  la  population  française  est  de  la  213"  partie 
de  cette  population,  et  que,  si  l'accroissement  reste  le 
même,  il  (aadra  148  ans  pour  qu'elle  devienne  double  de 
ce  qu'elle  est  niaintenant.  La  France  est ,  par  conséquent, 
le  pays  de  l'Europe  où  la  population  croit  avec  le  plus 
de  lenteur'  ar,  d'après  Moreau  de  Jonnès,  la  période 
moyenne  de  doublement  de  la  population  est  établie 
comme  il  suit  :  Suisse  et  Portugal ,  97  ans;  Russie,  95; 
Wurtemberg,  91  ;  Hanovre,  84  ;  Danemark,  83  ;  Bohême, 


Bavière,  Angleterre  proprement  dite,  77;  Prusse,  70; 
Autriche,  68;  Italie,  65;  Turquie,  6i;  Stiède«  50:  Ecosse 
et  Espagne,  57;  Saxe,  54;  Grèce,  51  ;  Irlande,  50;  Bel- 
gique, 42  ;  Bade,  34,  etc.  La  population  a  augmeuté  dans 
les  Etats-Unis  de  l'Amérique  du  Nord  bien  plus  rapi- 
dement que  partout  ailleurs,  soit  en  vertu  de  sa  propre 
force  expansive,  soit  à  cause  de  l'arrivée  des  émigrants 
européens  :  depuis  1790  Jusqu'à  ce  Jour,  elle  a  presque 
doublé  dans  chaque  période  de  20  années. 

C'est  une  loi  constatée,  qu'à  parité  de  circonstances,  la 
population  s'accroît  en  raison  inverse  de  sa  densité.  Dans 
les  pays  qui  ont  encore  peu  d'habitants,  comme  la  plus 
grande  partie  du  Nouveau  Monde,  cet  accroissement  est 
très-rapide;  il  est  lent,  en  général,  dans  les  contiées  de 
l'Ancien  Monde,  où  le  nombre  des  habitants  est  fort 
grand  par  rapport  à  la  place  qu'ils  occupent.  On  trouve 
en  Belgique  158  habitants  par  kilom.  carré,  68  en  France, 
3  seulement  dans  certaines  parties  de  la  Russie. 

En  France,  on  compte  100  naissances  pour  85  décès,  ou 
100  décès  pour  117  naissances.  Le  nombre  des  naissances 
annuelles  des  garçons  surpasse  d'un  seizième  le  nombre 
des  naissances  des  fllles;  mais  les  décès  annuels  mascu- 
lins dépassent  les  décès  féminins.  Sur  10,000  naissances, 
il  y  a  en  France  719  enfants  naturels,  tandis  que  la  pro- 
portion est  729  en  Prusse,  745  en  Belgique,  81 2  en  Da- 
nemark, 939  dans  le  Hanovre,  1,070  en  Autriche,  1,102 
dans  le  Wurtemberg,  1,3G9  en  Saxe,  2,083  en  Bavière. 

Un  fait  incontestable,  c'est  que  la  fécondité  générale 
des  populations  diminue  en  raison  directe  de  leur  pro- 
spérité matérielle  :  ainsi ,  en  Prusse,  c'est  la  Silésie.  la 
province  la  plus  affligée  par  le  paupérisme,  qui  produit 
le  plus  de  naissances;  en  Belgique,  ce  sont  les  deui 
Flandres,  placées  dans  une  situation  économique  ana- 
logue; en  France,  les  départements  formés  de  l'ancienne 
Bretagne,  où  le  niveau  de  l'aisance  générale  s'élève  si 
lentement;  en  Angleterre,  quelques-uns  des  comtés  du 
pays  de  Galles.  C'est  au  sein  des  grandes  villes  que  l'in- 
fluence du  bien-être  sur  la  diminution  de  la  fécondité  se 
fait  surtout  sentir  ;  dans  les  Quartiers  habités  par  les 
classes  ouvrières  et  peu  aisées,  le  rapport  des  naissances 
à  la  population  est  très-élevé  ;  il  l'est  sensiblement  moins 
dans  les  quartiers  où  domine  la  classe  moyenne  (  négo- 
ciants, marchands,  rentiers,  etc.),  et  iJ  est  extrêmement 
faible  dans  les  quartiers  riches.  Cela  est  facile  à  expli- 
quer :  dans  l'état  do  misère,  l'homme  perd  promptement 
le  sentiment  de  l'ordre,  de  l'économie,  do  la  prévoyance, 
celui  de  sa  dignité  morale  et  de  sa  responsabilité,  tandis 
au'au  milieu  des  classes  plus  élevées  les  Jouissances  de 
resprit  prennent  une  plus  grande  part  dans  les  plai- 
sirs de  l'homme,  et  les  préoccupations  de  l'avenir  sont 
plus  vives. 

Jusqu'à  la  fin  du  xvui*  siècle,  ce  fut  une  opinion  uni- 
versellement admise  que  tout  accroissement  de  popula- 
tion est  un  bien ,  que  la  puissance  et  la  prospérité  des 
États  se  mesurent  par  le  nombre  de  leurs  habitants,  et 
que  les  gouvernements  doivent  encourager  les  nom- 
bi*euses  familles.  Mais  alors  une  théorie  nouvelle,  qui  eut 
un  grand  retentissement,  et  dont  on  compte  encore  au- 
jourd'hui beaucoup  de  partisans,  fut  émise  par  Maltlius  ; 
cet  économiste  posa,  au  sujet  de  la  population,  la  loi  sui- 
vante :  «  Lorsque  la  population  n'est  arrêtée  par  aucun 
obstacle,  elle  va  doublant  tous  les  25  ans,  et  croit  de  pé- 
riode en  période  suivant  une  progression  géométrique.  » 
Se  demandant  ensuite  s'il  existait  entre  l'accroissement 
de  la  population  et  celui  des  moyens  de  subsistance  une 
correspondance  parfaite,  il  crut*  qu'en  raison  de  l'étendue 
limitée  des  terres  et  du  haut  degré  de  culture  qu'elles 
ont  déjà  atteint,  il  était  impossible  d'en  tirer  un  produit 
qui  augmentât  suivant  une  progression  géométrique,  et 
que  «  les  moyens  de  subsistance,  dans  les  circonstances 
les  plus  favorables,  ne  peuvent  Jamais  augmenter  que 
selon  une  progression  arithmétique.  »  La  population  ten- 
dant de  plus  en  plus  à  dépasser  la  limite  des  subsis- 
tances, il  faut ,  suivant  Malthus,  attribuer  à  la  reproduc- 
tion excessive  de  l'espèce  humaine  la  gêne,  la  misère  et 
tous  les  maux  contre  lesquels  luttent  les  individus  et  les 
soci(3tés.  Par  quel  moyen  faut-il  j  remédier?  Comment 
conjurera-t-on  les  périls  de  l'avenir?  Ifalthus  résume  ses 
conseils  par  les  mots  morai  restraint^  qu'on  a  traduits 
en  français  par  contrainte  morale  :  il  veut  d'abord  que 
l'homme  ne  contracte  mariai^e  que  lorsau'il  a  les  moyens 
actuels  de  nourrir  une  famille  et  des  chances  suffisantes 
de  l'élever  convenablement  ;  et  ensuite  crue,  dans  le  ma- 
riage, la  raison  domine  l'instinct,  que  l'iaée  de  la  respon- 
sabilité modère  les  entraînements  des  sens,  et  que  la  popu- 
lanoD  reçoive  par  la  continence  une  limitation  voiontairei 


POP 


1464 


POR 


La  th^forie  de  Malthus,  dégagée  de§  ralionnementsai^é- 
cieux  et  des  faits  intéressants  dont  il  Tavait  entourée,  est 
inexacte.  Sa  loi  du  développement  continu  et  général  de 
la  population  est  loin  d*être  incontestable  :  pour  raison- 
ner sur  la  population  avec  quelque  certitude,  il  faut 
d'autres  prémisses  que  les  faits  relatifs  à  un  coin  du  globe 
placé  dans  des  circonstances  exceptionnelles.  Malthus  a 

fris  le  tableau  de  la  population  anglaise  depuis  Tannée 
688,  époque  où  ''Angleterre  n'était  guère  qu'une  puis- 
sance de  second -ordre;  ce  pays  a  grandi  Jusqu'à  nos 
Jours,  mais  il  parait  être  arrivé  à  son  apogée  politique  et 
commercial,  et  il  est  désormais  impossible  que  sa  popu- 
lation croisse  aussi  rapidement  que  par  le  passé.  D'un 
autre  côté,  les  causes  qui  modifient  la  population  sont 
nombreuses  et  complexes  ;  elles  agissent  de  telle  sorte 
qu'en  téalité  la  population  ne  se  développe  qu'avec  beau- 
coup de  lenteur  comparativement  à  la  puissance  tliéo- 
rique  de  reproduction  dont  l'espèce  est  douée.  A  certains 
moments  le  genre  humain  procrée  en  abondance,  en 
d'autres  instants  il  semble  frappé  de  stérilité;  ici  la  po- 
pulation gonfle,  là  elle  se  contracte  ;  dans  le  même  pays 
telle  classe  s'éteint,  telle  autre  est  restreinte  par  une 
force  invisible;  si  l'on  voit  des  peuples  nouveaux  surgir 
de  temps  en  temps  dans  la  suite  des  siècles,  il  en  est 
d'autres  qui  périssent.  —  La  lot  d'accroissement  des  sub- 
sistances, telle  que  Maithus  l'a  formulée,  n'est  pas  mieux 
fondée  que  celle  de  l'accroissement  de  la  population. 
D'abord,  l'économiste  anglais  n'a  pas  tenu  compte  des 
avantages  réels  qui  résultent  d'une  certaine  densité  de 
la  population,  au  point  de  vue  de  l'augmentation  de  la 
production  elle-même.  Ensuite,  tous  les  perfectionna 
ments  des  machines,  des  procédés  et  des  arts  nouveaux, 
les  sciences  qui  les  éclairent  et  les  dirigent,  la  surabon- 
dance des  produits ,  viennent  infailliblement  à  la  suite 
du  développement  de  la  population  :  dans  la  Grande- 
Bretagne,  la  population  n'a  été  que  doublée  depuis  un 
siècle,  tandis  que  dans  le  même  espace  de  temps  le  pro- 
duit des  manufactures  est  devenu  mille  fois  plus  grand  ; 
les  moyens  de  subsistance  ont  donc  progressé  plus  vite 
encore  que  la  population.  Si  la  loi  de  Blalthus  était  Juste, 
la  quantité  moyenne  de  subsistances  dont  un  homme  dis- 
pose serait  moindre  aujourd'hui  qu'il  y  a  un  siècle  :  il 
est  notoire,  ^m  contraire,  que  le  genre  humain  est  plus 
sainement  et  plus  abondamment  nourri,  mieux  logé, 
mieux  vêtu,  et  que  le  confort,  l'aisance,  et  môme  le  luxe, 
vont  toujours  croissant  au  lieu  de  se  restreindre.  D'âpre 
Moreau  de  Jonnès,  la  production  de  la  France  en  cérâiles 
fournissait,  en  1700, 354  litres  par  habitant,  et,  en  18i4, 
457  litres,  bien  qu'entre  les  deux  époques  la  population 
eût  presque  doublé.  Sans  doute,  la  surface  du  globe  ne 

Eeut  produire  qu'une  quantité  limitée  d*ali ments,  et,  k 
i  rigueur,  si  la  population  augmentait  simultanément 
sur  tous  les  points  avec  rapidité,  si  la  guerre,  la  peste, 
le  désordre  des  idées  et  la  corruption  des  mœurs,  les  ré- 
volutions et  les  mauvais  gouvernements,  ne  venaient  pas 
défaire  dans  certaines  contrées  et  k  certaines  époques  ce 
que  font  en  d'autres  lieux  et  en  d'autres  temps  les  habi- 
tudes d'ordre  et  de  travail,  la  sainteté  du  mariage ,  le 
sentiment  religieux,  et  les  bons  gouvernements,  les  pré- 
visions de  Malthus  seraient  réalisées  un  Jour.  Mais  ce 
Jour  luira-t-il  Jamais?  La  surface  du  globe,  ou  seulement 
celle  de  l'Europe,  n'approche  pas  de  son  maximum  de 
culture  et  de  produit.  On  s'accorde  k  reconnaître  qu'en 
France  il  serait  possible  d'élever  les  subsistances  au  ni- 
veau d'une  population  double  et  même  triple;  or,  la 
superficie  de  ce  pays  étant  de  54  à  55  millions  d'hectares, 
et  celle  des  terres  de  notre  globe  de  13  milliards  d'hec- 
tares, on  trouve  qu'en  réduisant  même  ce  dernier  chiffre 
à  9  milliards  k  cause  des  terres  polaires  et  des  déserts,  il 
reste  une  superficie  habitable  170  fois  plus  grande  que 
la  France;  si  celle-ci  peut  nourrir  75  millions  d'habi- 
tants seulement,  c-à-d.  le  double  de  sa  population  ac- 
tuelle, la  terre  en  nourrirait  12  milliards,  c-à-d.  dix  fois 
plus  qu'aujourd'hui.  Si  donc  l'état  de  l'Europe  a  inspiré 
des  alarmes  à  certains  économistes,  ils  ont  eu  tort  de  s'en 
prendre  à  la  surabondance  de  la  population  ;  l'Espagne , 

Soi  est  relativement  dépeuplée,  se  trouve  dans  une  posi- 
on  cent  fois  pire  que  l'Angleterre,  la  Belgique,  et  U 
Hollande ,  où  la  population  est  serrée  et  se  condense 
chaque  jour  davantage.  La  population  parait  excessive 
seulement  parce  qu'à  certains  moments,  à  cause  de  l'im- 
prévoyance des  individus  et  des  sodétés,  à  cause  de  l'im- 
perfection de  l'organisation  industrielle  et  des  règles  qui 
président  aux  relations  internationales,  le  silence  succède 
dans  les  ateliers  à  une  activité  démesurée,  et  que  les  bras 
se  tnKiv<8iil  sans  emploi,  sans  que  rien  ait  été  ^paré 


pour  subvenir  aux  besoins  de  l'ouvrier  pendant  les  inlsîw 
ruptions  du  travail. 

y.  FranlLlin,  Obsmvatwns  iur  VaccrotssimaU  du 
hommes,  sur  lé  peuplement  dês  pays,  etc.,  Philadelphie, 
1751,  in-8«;  le  marquis  de  Mirabeau,  VAmides  h/ommes, 
ou  Traité  sur  la  population ,  Avienon,  1756-00,  3  vol. 
in-4<>$  SQssmilch ,  VOrdre  divin  des  mouvements  de  la 
population  prouvé  par  la  comparaison  des  naissances  et 
des  décès,  en  allem.,  4*  édit.,  Berlin,  1775-76,  3  vol.; 
Herrenschwand,  De  l'Économie  politique  moderne.  Dis- 
cours fondament€U  sur  la  population,  Londres,  1786, 
in-8°;  Ortes,  Réflxtions  sur  la  population  dans  ses  rap- 
ports avec  l* Économie  nationcUe,  en  ital.,  Venise,  1700  ; 
Malthus,  Essai  sur  le  principe  dépopulation,  Londres, 
1798;  Gray,  Becherches  sur  le  principe  depopulatum  et 
sur  la  productionj  1800  ;  Sumner,  Essai  pour  démontrer 
Vac-cord  du  principe  de  population  avec  la  sagesse  et  la 
bonté  de  Dieu,  Londres,  1815,  2  voL;  W.  Godwin,  Re- 
cherches sur  la  population  et  sur  la  faculté  d'accroisse- 
ment de  l'espèce  humaine,  trad.  de  l'anglais  par  Con- 
stancio,  Paris,  1821,  2  vol.  in-S"";  A.  Everett,  Nouvelles 
idées  sur  la  popuUUion,  trad.  de  l'anglais  par  Ferry, 
1826;  Weinhold,  De  la  population  et  de  ^industrie,  Leip- 
zig, 1828;  Horel-Vindé,  Sur  la  population,  ou  Observa- 
tions sur  le  système  professé  par  Malthus  et  ses  disciples, 
Paris,  1829;  Saddler,  La  loi  de  la  population,  en  an- 
glais, Londres,  1830,  2  toL  in-8«;  Schmidt,  Recherches 
sur  la  population,  les  salaires  et  le  paupérisme,  en 
allem.,  Leipzig ,  1836  ;  Archibald  Alison ,  U  principe  de 
population  dans  ses  rapports  avec  le  bonheur  humain, 
en  anglais,  Londres,  1840, 2  vol.  in-8*  ;  Prichard,  Recher- 
ches sur  Vhistoire  physuiue  des  populations ,  en  anglais, 
4*  édit.,  Londres,  1841-44, 4  vol.  in-8«;  Thornton,  VEx- 
cès  de  population  et  remèdes  à  y  apporter,  en  anglais , 
Londres,  1846,  in-8«;  Doubleday,  La  vraie  loi  de  popu- 
lation,  en  anglais,  2*  édlL,  Londres,  1847,  in-8«;  Her- 
bert Spencer,  Théorie  de  la  popiUation,  en  anglais,  Lon- 
dres, 1852  ;  Guillard,  Éléments  de  statistique  humaine, 
ou  Démographie  comparée,  Paris,  1855,  in-8«;  Joseph 
Gamier,  Du  principe  de  la  poptUation,  Paris,  1857. 

PORC.  Cet  animal  impur,  frappé  de  réprobation  par 
les  Hébreux  et  les  Égyptiens,  est  devenu,  dans  les  lé- 
gendes chrétiennes,  l'image  du  démon.  PUcé  aux  pieds 
d'un  saint,  il  signifie  les  voluptés  vaincues,  asservies. 

PORCELAINE,  poterie  fine  à  pâte  grenue,  translucide, 
ne  se  laissant  pas  entamer  par  l'acier,  et  susceptible  de 
recevoir  une  couverte,  un  vernis  ou  émail  brillant  et  dur. 
La  porcelaine  dure  a  pour  base  le  kaolin,  terre  argileuse 
blanche,  et  le  pétunsé  ou  feldspath  pur,  remplacé  quel- 
quefois  par  un  mélange  de  craie,  de  sable  et  de  feldspath. 
On  peut  appliquer  des  couleurs  ou  de  la  dorure,  soit  sur 
la  p&te,  soit  sur  la  couverte,  en  les  fondant  avec  ceUe-d 
à  la  même  température,  su  en  les  faisant  adhérer  par 
une  température  plus  douce  à  l'aide  d'oxydes  ou  fondants 
métalliques.  La  porcelaine  tendre  est  un  mélange  d'ar- 
gile marneuse  et  de  minium  :  elle  ne  va  point  au  feu,  se 
raye  facilement,  et  ne  supporte  guère  la  orusque  tnmsi- 
tion  du  chaud  an  froid;  mais  les  peintures,  la  dorure  et 
les  ornements  de  toute  espèce  v.font  plus  bel  efTet,  les 
couleurs  s'y  fondent  mieux,  s'y  imbibent,  et  conservent 
plus  de  vivacité.  La  peinture  sur  porcelaine  a  été  prati- 
quée avec  suçote  à  la  manufacture  de  Sèvres;  parmi  ceux 
3ui  s'y  distinguèrent  pendant  les  règnes  de  Louis  XV  et 
e  Louis  XVI,  sous  la  direction  de  Genest,  on  remarque  : 
les  peintres  de  fleurs  Bouillat,  Parpette,  Micaud,  et  Pi- 
thou;  les  peintres  d'oiseaux  Armand,  et  Castel;  les 
peintres  d'arabesques  Chulot,  et  Laroche;  les  peintres  de 
paysages  Rosset,  et  Évans;  les  peintres  de  figures  Dodin, 
et  Caton.  Sous  le  premier  Empire,  Isabey,  Swebach,  Pa- 
rent, Chenavard,  Fragonard,  portèrent  à  une  grande 
perfection  l'art  du  peintre  en  porcelaine.  Depuis  la  Rea- 
t.iuration,  nous  citerons,  pour  la  peinture  d'histoire  : 
I^guay,  Constantin,  Béranger,  Georget,  M"**  Ducluzeau 
et  Jaquotot;  pour  le  paysage  :  Robert,  Langhicé,  Lebel, 
Poupart;  pour  les  fleurs  et  les  fruits  :  Drouet,  Scliilt, 
Van  Os,  Jacobber;  pour  les  camées  :  Degault;  pour  les 
coquillages  :  Philippine;  pour  la  peinture  de  çenre  :  De- 
velly.  Le  mot  porcelaine  n'est  pas  chinois ,  il  vient  du 
IH>rtugais  porçolana,  signifiant  vaisselle  ou  poterie  de 
terre.  V.  les  articles  Céramique;  Cnn» —  porcelaine;  et 
A.  Jacquemart  et  E.  Le  Blant,  Histoire  artistique,,  in- 
dustrielle et  commerciale  de  la  porcelaine,  Parii^ ,  1861- 
1862,  in-4». 

PORCHE,  mot  dont  on  a  fait  un  qrnonyme  de  péri- 
style et  de  portique  en  l'appliquant  à  tout  vestibule  ou 
lieu  ooavert  placé  en  avant-oorpi  d*iiaê  fiiçadt,  nuia  qai 


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défigne  proprement  cette  construction  au  devant  d'une 
entrée  dVglise.  Les  églises  seules  ont  eu  primitivement 
des  porches  (  K.  Nartbbx),  et  c'est  par  imitation  qu'on  en 
fit  aux  palais,  aux  hôtels,  et  même  aux  maisons  particu- 
lières. L'église  S'-Germain-l'Auxerrois,  k  Paris,  a  un  por- 
che. On  voit  à  l'église  Délia  Race,  à  Rome,  un  porche  cir- 
culaire, construit  sur  les  dessins  de  Pietro  di  Cortone. 
Les  porches  ne  furent  pas  élevés  seulement  dans  un  but 
de  décoration,  mais  aussi  dans  un  but  d'utilité  :  ils  dé- 
fendaient l'entrée  de  l'église  contre  les  injures  de  l'air; 
on  y  rendit  la  Justice,  on  s'y  rassembla  pour  causer  d'af- 
faires; couronnés  de  m&chicoulis  et  de  créneaux,  ils 
offraient  ane  défense  militaire;  quand  ils  étaient  sur- 
montés d'un  étage,  on  y  plaçait  une  sacristie,  une 
école,  etc.  Il  y  avait  quelquefois  une  fontaine,  où  les 
fidèles  se  lavaient  les  mains  avant  d'entrer  dans  l'église. 
On  y  faisait  encore  l'exorcisme  avant  d'admettre  les  en- 
fants au  baptême.  V,  Thiers,  Dissertation  sur  les  porches 
des  églises,  Orléans,  1679,  in-12.  B. 

PORBECTION,  en  latin  Porrectio  {de  porrigere,  pré- 
senter), cérémonie  en  usage  dans  l'Église  cathohque 
quand  on  confère  les  ordres  mineurs,  et  qui  consiste  k 
présenter,  à  faire  toucher  aux  ordinands  les  objets  qu'ils 
auront  à  employer  dans  leur  ministère. 

PORT  (du  latin  portiu),  lieu  où  la  mer,  s'enfoncent 
dans  les  terres,  offre  aux  b&timents  un  abri  contre  les 
vents  et  les  tempêtes.  Il  est  naturel ,  quand  la  nature  a 
tout  fait;  artificiel,  quand  il  est  formé  par  des  môles  ou 
Jetées  en  mer.  Un  port  de  toute  marée  est  celui  où  les 
navires  peuvent  entrer  en  tout  temps,  parce  qu'il  y  a 
toujours  assez  d'eau;  un  port  de  barre  est  celui  dont 
l'entrée  est  fermée  par  un  banc  de  sable  ou  de  roche,  et 
où  l'on  ne  peut  entrer  qu*avec  la  marée.  Tout  port  à 
marées,  où  la  mer,  en  se  retirant,  laisse  à  sec  les  na- 
vires, est  dît  port  d^échouage.  Dans  les  ports  dotés  de 
bassins,  la  partie  servant  d'entrée,  et  dans  laquelle  se 
font  sentir  les  effets  4é  la  marée,  reçoit  le  nom  d*avant- 
port.  —  Par  extension,  on  appelle  port  tout  lieu  où  les 
navires  abordent,  chargent  et  déchargent  des  marchan- 
dises. On  distingue  les  ports  militaires  ou  de  guerre,  et 
les  ports  marchands  ou  de  commerce.  Un  port  franc  ou 
libre  est  celui  où  les  marchandises  ne  payent  point  de 
droits,  tant  qu'elles  n'entrent  pas  dans  l'intérieur  du  pays. 
Le  mouvement  d'un  port  est  le  nombre  de  navires  qui  y 
pntrent  et  en  sortent  chargés  de  marchandises,  et  dont 
on  évalue  le  tonnage  ou  la  capacité  en  tonneaux  au  moyen 
d'un  jaugeage  basé  sur  le  poids  et  le  volume  de  ces  mar- 
chandises. 

POST  (Capitaine,  —  Maître,  ~  Officiers  de).  V,  Capi- 
tahib,  HarraB,  Orncisa. 

posT,  prix  qu'on  paye  pour  les  transports  de  colis  par 
voitures,  messageries,  chemins  de  fer,  bateaux,  etc.,  et 
pour  les  lettres  mises  à  la  poste. 

PORT  d'armes.  Le  droit  de  porter  des  armes,  pouvant 
entraîner  des  dangers  pour  la  vie  des  citoyens,  a  été  de 
tout  temps  réglementé.  Le  port  d'armes  était  interdit 
dans  les  rues  à  Athènes  et  à  Rome.  Après  l'invention  des 
armes  à  feu,  la  prohibition  devint  plus  sévère  :  Fran- 
çois I*'  fit  défense,  même  aux  gentilshommes,  d'en  por- 
ter, sous  peine  de  la  corde.  La  défense  fut  renouvelée 
par  ordonnances  de  Juillet  1607,  de  septembre  1609,  du 
ïo  mars  1728,  du  25  août  1737.  Aujourd'hui ,  à  moins 
d'être  vagabond  ou  ancien  condamné,  chacun  peut  porter 
des  armes  pour  sa  sûreté,  sauf  les  exceptions  déterminées 
par  la  loi  ÇV,  Armes  PROHuéES  ).  Il  y  a  aussi  des  disposi- 
tions spéciales  quant  au  port  d'armes  dans  un  attroupe- 
ment (  V.  Attroopehbnt).  —  'On  donne  quelquefois  le 
nom  de  port  d'armes  au  permis  de  chasse,  V,  Êhassb. 

PORT  des  lettres.  V.  Taxe. 

PORT  DB  VOIX,  manière  d'articuler  deux  sons  ea  mon- 
tant; elle  consiste  à  les  unir  par  une  liaison  du  gosier. 

PORTAGE ,  nom  donné  en  Amérique  à  l'espace  com- 
pris entre  deui  cours  d'eau  navigables,  parce  qu'en  voya- 
geant on  y  porte  son  canot  d'une  rivière  à  l'autre  pour 
abr^r  le  chemin.  On  appelle  aussi  portage  tout  endroit 
d'un  fleuve  où  se  trouve  une  chute,  qui  oblige  à  porter  les 
canots  sur  le  bord  pour  la  franchir. 

portage,  droit  féodal.  F.  notre  Dictionnaire  de  BiO" 
graphie  et  d^Bistoire, 

PORTAIL,  désignation  qu'on  applique  à  tout  frontia* 
pice  d'architecture,  à  toute  élévation  servant  de  façade  on 
d'entrée  principale  à  un  grand  édifice,  quels  que  soient 
le  caractère  de  son  style  ou  la  nature  de  ses  ornements. 
Mais  elle  oonrient  spécialement  à  l'entrée  monumentale 
d'une  église  f  car  il  n'existe  pas,  dans  les  monuments  de 
riBtfapStA»  éè  fiçadM  qui  poiaseat  recevoir  le  nom  de 


portails,  et  ce  sont  les  constructions  de  rarchitectore 
chrétienne  oui  en  ont  donné  les  premiers  exemples.  Les 
rangs  de  colonnes  espacées  que  présentent  les  faces  des 
temples  gréco-romains  ne  forment  pas  des  portaUs,  mais 
des  péristyles  ou  des  portiques.  Une  église  peut  avoir 
trois  portails,  l'un  k  l'entrée  des  nefs,  les  autres  aux 
extrémités  du  transept.  Ceux-ci  n'ont  jamais  qu'une 
porte,  celui-là  en  a  presque  toujours  trots.  Un  portail 
comprend  tout  ce  qui  encadre  et  surmonte  les  portes, 
voussures,  tympans,  galeries,  roses,  tours,  etc  il  ne 
doit  pas  être  confondu  avec  un  porche  (  V,  ce  mot),  avant- 
corps  ou  appentis  se  détachant  tout  k  fait  des  princinales 
lignes  d'une  façade.  —  On  appelle  Avant-Portail  un 
avant-corps  isolé,  placé  k  distance  d'un  portail  dans  cer- 
taines églises  :  tel  est  celui  qu'on  voit  en  avant  du  Por» 
tail  des  libraires  de  la  cathédrale  de  Rouen.  B. 

PORTE,  mot  qui  désigne  k  la  fois  l'ouverture  ou  la 
baie  pratiquée  de  plain-pied  dans  une  muraille  pour 
servir  de  dégagement  et  d'is'^ue,  et  l'ouvrage  mobile  de 
bois  ou  de  métal  destiné  à  la  clore.  Celui-ci  emprunte  sa 
forme  à  celle-là.  Certains  peuples,  comme  les  Chinois  et 
les  Arabes,  ont  donné  à  leurs  portés  des  configurations 
singulières,  telles  que  le  trèfle  ouvert,  l'arc  surbaissé  ou 
chargé  de  dentelures  :  ce  sont  là  des  fantaisies  contraires 
au  bon  goût  et  à  la  solidité.  Les  formes  adoptées  en  ar- 
chitecture, selon  les  styles,  sont  le  quadrangle,  le  cintre 
et  Vogive.  La  forme  quadrangulaire  a  été  employée  la  pre- 
mière, en  raison  de  sa  simplicité  logique,  et  de  l'usage 
facile  des  matériaux  les  plus  grossiers  :  une  porte  de  ce 
genre  se  compose  de  deux  jambages  ou  pieds^droits,  sur 
lesquels  repose  un  linteau.  Vitruve  a  distingué  trois  es- 
pèces de  portes  quadrangulaires  dans  les  temples  :  l'io- 
nique, la  dorique,  et  la  corinthienne.  L'emploi  des  cintres 
en  maçonnerie  marque  dans  l'art  de  construire  une  pé- 
riode nouvelle,  dont  la  date  chez  les  Anciens  ne  saurait 
être  déterminée  d'une  manière  précise.  Vitruve  n'a  point 
parlé  des  portes  cintrées,  mais  les  architectes  modernes 
ont  cherché  à  en  fixer  les  proportions  :  dans  l'ordre  tos- 
can, une  porte  doit  avoir  en  hauteur  deux  fois  sa  lar- 
geur ;  dans  le  dorique,  deux  fois  et  un  sixième  ;  dans  l'io- 
nique, deux  fois  et  un  quart  ;  dans  le  corinthien,  deux 
fois  et  demie.  Au  moyen  âge,  la  forme  ogivale  des  ar- 
cades, l'élancement  des  voûtes,  l'usaj^e  des  frontispices 
en  pignon  triangulaire,  la  difficulté  de  trouver  d'asseï 
grands  linteaux  d'un  seul  bloc  de  pierre,  firent  aban- 
donner les  portes  quadrangulaires  pour  les  portes  en 
ogive,  qu'on  peut  construire  avec  de  petits  matériaux. 
Les  portes  des  grandes  façades  d'église  sont  souvent  cou- 
pées en  deux  par  un  pilier  vertical ,  sur  lequel  porte  un 
tympan  (V.  ce  mot).  Au  temps  de  la  Renaissance,  on  re- 
vint à  l'arc  en  plein  cintre  ou  à  l'arc  surbaissé,  en  anse 
de  panier,  mais  en  lui  donnant  une  ornementation  beau- 
coup plus  riche  que  dans  l'Antiquité.  Au  xviii*  siècle,  on 
employa,  dans  la  composition  des  portes  de  palais,  les 
colonnes,  les  plates-bandes  sculptées,  les  frontons;  on 
orna  de  trophées  les  pieds-droits,  de  bas-reliefs  les  enta- 
blements :  de  pareilles  entrées  ressemblent  plutôt  à  des 
Krtiques  qu'à  des  portes.  Telles  sont,  à  Pans,  celles  du 
lais-Royal ,  du  palais  de  la  Légion  d'honneur,  du  palais 
du  Corps  Législatif.  Dans  les  maisons  particulières,  les 
portes  se  distinguent  en' portes  cochères  et  portes  bâ- 
tardes^ selon  c|u'elle8  peuvent  ou  non  laisser  passer  une 
voiture. — A  l'intérieur  des  édifices,  les  portes  qui  servent 
d'entrée  et  de  communication  aux  difi'érentes  pièces  pré- 
sentent, sauf  quelques  accessoires,  les  mêmes  formes  et  la 
même  décoration  que  celles  du  dehors.  Elles  sont  souvent 
encadrées  de  chambranles^  avec  des  moulures  en  plâtre  ou 
en  bois  ;  quelquefois  elles  sont  surmontées  de  panneaux 
ou  de  tableaux  appelés  dessus  de  porte.  Dans  les  palais, 
la  hauteur  des  plafonds  permet  l'emploi  des  colonnes  ou 
des  pilastres,  des  frontons,  des  plates-bandes  supportées 
par  des  consoles,  des  couronnements  en  sculpture,  etc. 

L'ouvrage  servant  de  clôture  dans  une  porte  se  compose 
d'un  ou  de  deux  battants  ou  vantaux.  Les  plus  simples 
portes  en  bois  sont  arasées,  et  présentent  une  surface 
lisse.  Quand  les  portes  sont  à  compartiments,  elles  com- 
portent des  ornements  de  tout  genre,  figures,  mascarons, 
moulures  en  ove,  en  perle,  en  feuille  d'eau,  etc.  Dans  les 
ridies  intérieurs,  on  les  fait  en  placages  de  bois  précieux. 
Ltt  portes  des  maisons  de  l'ancienne  Grèce  s'ouvraient 
en  dehors,  et  ceux  qui  voulaient  sortir  de  Uiez  eux  frap- 
paient un  coup  du  dedans,  pour  avertit  les  passants 
qu'ils  eussent  à  se  mettre  à  distance.  Les  portée  des  Ro- 
mains s'ouvraient  comme  les  nôtres;  on  les  ornait  d'in- 
■criptions,  de  dépouilles  d'ennemis  vaincos  ou  d'animaux 
toéa  à  la  chassa;  auxjoun  de  fêta*  «n  Im  oooronnaii 


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de  guirlandes  de  fleun  et  de  feuillages;  aux  Jours  de 
deuil,  on  y  suspendait  des  cyprès.  Les  Anciens  ne  met- 
taient des  portes  qu'aux  baies  extérieures;  les  baies  in- 
térieures étaient  fermées  par  des  voiles  ou  des  tapis.  Au 
moyen  âge  et  à  la  Renaissance  surtout,  les  portes  en  bois 
ont  servi  de  champ  aux  sculpteurs,  qui  les  ont  couvertes 
de  Agures  en  bas-relief.  On  peut  citer,  parmi  les  monu- 
ments de  ce  genre  :  plusieurs  portes  des  I^ges  du  Vatican, 
sculptées  par  Jean  Barile  diaprés  les  dessins  de  Raphaël  ou 
de  quelqu'un  de  ses  élèves  ;  les  portes  de  Téglise  S^-Maclou, 
à  Rouen,  qu'on  attribue  à  Jean  Goujon  ;  dans  les  galeries 
du  Louvre,  plusieurs  battants  sculptés  sur  les  dessins  de 
Lebrun;  la  porte  principale  de  Notre-Dame  de  Paris,  faite 
BOUS  la  direction  de  Soufflet.  La  peinture  a  servi  égale- 
ment k  décorer  les  compartiments  des  portes.  Des  bat- 
tants en  bois  ont  été  aussi  recouverts  de  métal  plaqué, 
comme  ceux  de  la  porte  antique  du  Panthéon  d'Agrippa, 
à  Rome.  Quant  aux  portes  de  bronze,  elles  ne  remontent 
pas  au  delà  du  xi*  siècle,  époque  où  furent  fondues  à 
Constantinople,  par  Staurachios  Tuchitos  de  Chio,  celles 
qui  ornèrent  la  basilique  de  S*-Paul.  Cest  de  Constanti- 
nople que  furent  apportées,  au  xiii*  siècle,  les  portes  de 
réglise  S*-Marc  à  Venise.  Mais  déjà,  en  1180,  Bonanno, 
artiste  de  Pise,  avait  fondu  les  portes  de  la  cathédrale  de 
cette  ville.  Celles  de  la  cathédrale  de  Novogorod  en  Russie 
sont  de  la  même  époque  et  de  fabrication  byzantine.  Le 
chef-d'œuvre  en  ce  genre,  ce  sont  les  portes  du  baptis- 
tère de  Florence.  Parmi  les  ouvrages  modernes,  on  peut 
mentionner,  k  Paris,  la  porte  qui  sert  d'entrée  à  la  cour 
du  Louvre  par  le  côté  de  la  Colonnade,  celles  de  la  galerie 
d'Apollon  dans  le  même  palais,  et  la  porte  de  l'église  de 
la  Madeleine. 

Les  portes  pratiquées  dans  les  enceintes  des  grandes 
villes  ont  été  généralement  des  constructions  monumen- 
tales, surmontées  de  bâtiments  ou  garnies  de  tours.  On  en 
voit  des  restes  grandioses  en  Egypte.  Comme  modèle  ro- 
main en  France,  on  peut  citer  la  porte  d'Arroux,  à  Autun 
{V.  ce  mot).  Il  ne  faut  pas,  pour  les  constructions  de  ce 
genre,  employer  indifféremment  les  noms  de  Porte  et 
d'i4rc  de  Tiiomphe  :  dans  les  portes^  il  y  a  deux  ouver- 
tures ou  arcades  égales;  dans  les  monuments  triom- 
phaux, il  n'y  a  qu'une  arcade,  ou  bien  une  grande  arcade 
accompagnée  de  deux  plus  petites.  Cependant  l'usage  a 
souvent  confondu  les  deux  termes,  et  de  véritables  portes 
ont  été  bâties  par  les  Modernes  dans  le  style  consacré 
aux  arcs  de  triomphe  :  telles  sont,  à  Berlin,  la  porte  dite 
de  Brandebourg  (V.  Berlin)  ;  telles  étaient,  à  Paris,  les 
portes  S*-Antoine  et  S^-Bernard  (7.  plus  bas).  Récipro- 
quement, on  a  donné  le  nom  de  portes  aux  arcs  élevés 
en  l'honneur  de  Louis  XIV  à  l'entrée  des  rues  S^-Denis  et 
S»-Martin  {V.  plus  bas). 

Dans  les  villes  de  guerre,  au  temps  de  la  fortification 
dominante  et  avant  l'emploi  des  ouvrages  extérieurs,  les 
portes  étaient  flanquées  de  deux  tours,  et  on  en  défendait 
les  approches  à  coups  de  flèches.  Lorsque  l'assiégeant  se 
fut  préservé  des  traits  au  moyen  de  la  tortue,  et  qu'il 
put,  soit  battre  les  portes  avec  le  bélier,  soit  les  attaquer 
par  le  feu ,  on  les  fortifia  par  des  garnitures  de  métal ,  on 
les  recouvrit  de  cuirs  saignants,  on  établit  des  ouvertures 
pour  pouvoir  inonder  les  foyers  incendiaires.  Puis,  au 
lieu  de  placer  les  portes  entre 'deux  tours  rondes,  on  les 
mit  au  milieu  d'une  tour  carrée ,  surmontée  de  mâchi- 
coulis ;  la  baie  fut  garnie  de  doubles  portes  et  de  herses. 
Quand  l'artillerie  permit  d'attaquer  de  loin  et  avec  succès 
ces  défenses,  les  portes  furent  protégées  par  de  larges 
fossés,  des  ponts-levis  et  des  barbacanes,  par  des  palis- 
sades, des  braies  et  des  bretèches.  L'attaque,  perfection- 
nant aussi  ses  moyens,  se  semt  de  pétards  (k.  ce  mot), 
contre  lesquels  on  a  su  se  défendre  encore,  en  cachant 
les  portes  k  la  vue  du  dehors,  en  les  perça  tt  dans  un 
ravelin  ou  une  demi-lune,  en  en  couvrant  les  abords  par 
des  éperons,  etc.  B. 

l'ORTB  (La  Sublime).  V,  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d'Histoire. 

PORTE  SAiNT-ANTOiNB ,  sorte  d'arc  de  triomphe  qui  fut 
élevé  à  Paris,  sous  Henri  III,  en  1585.  Il  était  percé  d'une 
seule  arcade.  Au  temps  de  Louis  XIV,  l'architecte  Blon- 
del  y  ajouta  deux  autres  arcades,  à  peu  près  de  même 
dimension  et  du  caractère  de  celui  qu'il  conservait  au 
centre.  Deux  Fleuves  qui  décoraient  les  impostes  de  l'arc 
avaient  été  exécutés  par  Jean  Goujon  ;  il  y  avait  dans  des 
niches  d^  statues  par  Anguier,  et  trois  sur  le  couronne- 
ment, par  Van  Onstal.  La  porte  S*- Antoine  ayant  été 
démolie  en  1778,  les  figures  de  Fleuves  furent  placées  sur 
)a  place  du  jardin  de  Beaumarchais.  B. 

fPnTB  saint-bernardy  arc  triomphal  élevé  à  Louis  XIV, 


sur  le  qusi  du  môme  nom,  par  la  ville  de  Paris.  Constnût 
en  1674  par  Blondel,  il  était  percé  de  deux  arcades  sem- 
blables, et  décoré  de  bas-reliefs  par  Tuby. 

PORTE  SAnn^DEifis,  monument  triomphal  élevé  en  1G73 
par  la  ville  de  Paris  k  Louis  XIV.  La  composition  est  de 
François  Blondel ,  et  présente  beaucoup  d'imperfections. 
Il  y  a  une  disproportion  évidente  de  la  face  latérale  de 
ce  monument  avec  la  grandeur  imposante  de  son  éléva- 
tion. Il  est  percé  d'un  grand  arc,  et  do  deux  petites  portes 
pratiquées  dans  des  piédestaux  accolés  aux  pieds-droits. 
Du  côté  de  la  ville,  au-dessus  de  ces  piédestaux  qui 
ne  semblent  pas  appartenir  au  sujet  principal,  s'élè- 
vent des  obélisques  chargés  de  trophées  d'armes,  et  qui 
sont  engagés  sur  la  surface  des  pieds-droits  Jusqu'à 
la  hauteur  de  l'entablement  de  l'édifice;  les  obélisques 
étaient  alors  appropriés  plutôt  à  la  décoration  des  tom- 
beaux qu'à  celle  des  arcs  de  triomphe.  A  leur  pied,  deux 
figures  assises ,  sculptées  sur  les  dessins  de  Lebrun,  re- 
présentent les  Provinces-Unies  sous  la  forme  d'une  femme 
consternée,  et  le  Rhin  sous  celle  d'un  homme  vigoureux 
appuyé  sur  un  gouvernail.  Entre  l'archivolte  et  l'enta^ 
blement,  un  bas-relief,  placé  dans  une  table  rentrante 
qui  coupe  l'imposte ,  représente  Louis  XIV,  vêtu  à  l'an- 
tique, commandant  le  passage  du  Rhin.  Du  côté  du  fau- 
bourg, un  bas-relief  représente  l'entrée  du  même  prince 
dans  Maestricht.  Dans  la  frise  de  l'entablement ,  on  lit 
l'inscription  suivante  en  lettres  de  bronze  doré  :  Luno- 
vico  Magno.  Ce  qu'on  peut  admirer  sans  réserve  dans  la 
porte  S^Denis,  ce  sont  les  sculptures,  commencées  par 
Girardon,  achevées  par  Michel  Anguier.  Le  monument  a 
24'",G5  de  hauteur,  25  met.  de  largeur,  5  met.  d'épaisseur; 
l'arcade  a  15'",35  sous  clef,  et  8  met.  d'ouverture;  les  pe- 
tites portes  ont  3'",30  sur  1™,70.  Il  a  été  restauré  en  1807 
par  Célérler,  et  gratté  il  y  a  peu  d'années.  B. 

PORTE  SAINT -UARTiii,  monumout  triomphal  élevé  à 
Louis  XIV  par  la  ville  de  Paris,  en  1674,  sur  les  dessins 
de  Pierre  Bullet,  et  en  mémoire  de  la  conquête  de  la 
Franche-Comté.  Conçu  dans  les  plus  heureuses  propor- 
tions, il  est  percé  d'une  grande  arcade  et  de  deux  petites. 
Sa  hauteur  et  sa  largeur  sont  chacune  de  17'*,55,  son 
épaisseur  de  4'",50;  l'arcade  du  milieu  a  9"*,70  sous 
clef,  et  4'",85  d'ouverture;  les  petites  arcades  ont  5"»,75 
sur  3",50.  Les  pieds-droits  sont  travaillés  en  bossages 
vermiculés.  Entre  le  bandeau  de  l'imposte  de  la  grande 
arcade  et  l'entablement,  se  trouvent  des  bas-reliefs  d'une 
exécution  assez  faible,  œuvre  de  Desjardins,  de  Marsy, 
de  Lehongre  et  de  Legros  :  du  côté  de  la  ville,  une 
femme  à  genoux  présente  le  traité  de  la  Triple  Alliance 
à  Louis  XIV  assis  sur  son  trône,  et  le  même  prince,  sous 
la  figure  d'Hercule,  est  couronné  par  la  Victoire;  du  côté 
du  faubourg,  on  a  représenté  aussi  sous  des  formes  allé- 
goriques la  prise  de  Limbourg  et  la  défaite  des  Alle- 
mands. La  frise  est  ornée  de  consoles,  placées  sous 
chacun  des  modillons  de  l'entablement  qui  la  divisent 
par  métopes,  dans  lesquels  sont  des  armes  de  guerre.  Sur 
l'attique  on  lit  ces  mots  :  Ludovico  Magno,  Vesontione 
Sequanisque  bis  captis,  et  fractis  Germanorum,  His- 
panorum  et  Batavorum  exercilibus,  Prœfec,  et  œdil, 
poni,  C.  C.  Les  parties  d'angle  et  les  archivoltes  des  trois 
portes  sont  en  bossages  vermiculés.  Ia  Porto-Saint- 
Martin  a  été  réparée  sous  la  Restauration.  B. 

PORTE  SAINT-MARTIN  (Tliéàtre  de  la).  Construit  d'ur- 
gence, comme  salle  provisoire  pour  remplacer  celle  de 
l'Opéra  qui  venait  d'être  brûlée,  il  fut  élevé  en  8G  jours 
par  Alexandre  Lenoir,  et  inauguré  le  27  oct.  1781.  Toute 
la  construction  était  en  pans  de  bois.  Ce  théâtre  servit  aux 
représentations  de  l'Opéra  jusqu'au  8  tbenuiaor  nu  n. 
Fermé  pendant  8  ans,  il  rouvrit  en  1802  sous  le  nom  de 
Jetujc  Gymniques,  et  l'on  y  donna  des  pièces  à  grand 
spectacle,  des  comédies  et  des  ballets.  Après  le  décret  de 
1807,  il,  fut  interdit  d'avoir  plus  de  deux  acteurs  par- 
lant sur  la  scène,  les  autres  devant  se  borner  à  la  pan- 
tomime. Un  pareil  spectacle  ne  tarda  pas  à  être  aban- 
donné. Le  théâtre  rouvrit  en  1814,  sous  le  nom  qu'il 
porte  aujourd'hui,  et  obtint  de  grands  succès  avec  le 
mélodrame  et  le  ballet,  avec  des  acteurs  tels  que  Fre- 
derick Lemaltre,  Bocage,  Potier,  Mazurier  et  M"*  Georges. 
De  cette  période  datent  le  Solitaire,  le  '^ampire,  le 
Moine,  Mandrin,  Trente  ans  ou  la  Vie  d'un  joueur,  les 
Petites  Danatdes,  les  ballets  du  Meunier  et  de  Jocko,  etc. 
Puis  la  tragédie  y  fit  une  apparition  heureuse  avec  K) 
Marino  Fatiero  de  C.  Delavigne.  Mais  le  drame  moderne 
conquit  bientôt  le  premier  rang  :  aux  anciens  artistes 
s'ajoutèrent  ou  succédèrent  Ligier,  Prévost,  Mélingue, 
Chilly,  Laferrière,  M"*  Dorval.  Parmi  les  pièces  à  succès 
de  cette  nouvelle  période,  on  remarque  Richard  d'Ar- 


POR 


1467 


POR 


(ttiatofi,  la  Tour  â$  NesU,  Angèle,  Marte  Tudor,  Lucrèce 
Borgia,  la  Nonne  sanglante,  les  Sept  enfants  de  Lara, 
la  Duchesse  de  La  Vaubalière,  etc.  Fermé  momentané- 
ment en  1840,  et  rouvert  à  la  fin  de  la  même  année,  ce 
thé&tre  attira  de  nouveau  le  public  avec  les  Deux  serru- 
riers de  Félix  Pyat  et  la  féerie  de  la  Biche  au  Bois,  Il  y 
eut  encore  un  moment  de  graves  embarras  en  1851.  De- 
puis cette  époque^  il  eutquelgues  brillants  succès.  La 
salie^  brûlée  en  1871,  a  été  reédifiée  près  delà* 

PORTE  SAINTE.    V.  BASILIQUE. 

PORTE-BALLE.  V.- Colporteur. 

PORTE-DRAPEAU  dans  un  régiment.  Cest  un  sous- 
lieutenant,  qui  fait  partie  de  Tétat^major.  Avant  Napo- 
léon I*"',  c*était  un  sergent. 

PORTÉE,  en  termes  d'Architecture,  étendue  libre 
d*une  pierre  ou  d*une  pièce  de  bois  qui  est  placée  hori- 
zontalement dans  une  construction  et  soutenue  par  des 
points  d'appui.  Quand  la  portée  est  trop  grande,  la  pierre 
peut  se  briser  et  la  poutre  plier. 

poRTés,  distance  où  peut  atteindre  une  arme  de  Jet. 
Dans  les  armes  à  feu,  elle  dépend  de  la  nature  de  ces 
armes,  de  la  charge,  de  la  qualité  de  la  poudre,  de  la  na- 
ture du  projectile,  et  de  Tangle  de  projection. 

PORTÉE,  en  termes  de  Musique,  assemblage  de  5  lignes 
horizontales  et  parallèles,  sur  lesquelles  ou  entre  les- 
quelles on  place  les  notes.  On  les  compte  à  commencer 
par  la  plus  basse.  Comme  ces  lignes  ne  suffisent  pas  à 
toutes  les  notes  qu'on  peut  avoir  besoin  de  placer,  on 
ajoute,  au-dossus  ou  au-dessous  de  la  portée,  des  lignes 
supplémentaires  dites  lignes  accidentelles  ou  fausses 
lignes,  mais  en  ne  leur  donnant  que  la  longueur  néces- 
saire à  chaque  note.  A  la  fi r  du  xvii*  siècle  et  au  com- 
mencement du  XVIII*,  la  portée  était  composée  de  8  lignes 
pour  la  musique  d'orgue  et  de  clavecin.  —  La  portée  du 
plain-chant  avait,  dit-on,  primitivement  8  lignes,  une 
pour  chaque  degré  de  la  gamme  :  elle  n'en  a  plus  que  4, 
généralement  suffisantes  pour  des  mélodies  qui  n'em- 
brassent guère  que  retendue  d'une  octave.  Ce  n'est  point 
parce  que  la  portée  porte  les  notes  qu'on  lui  a  donné  ce 
nom,  mais  parce  qu'elle  est  la  portés  et  l'étendue  d'une 
voix  ordinaire.  B. 

PORTEFAIX,  ouvrier  qui  fait  métier  de  transporter 
des  fardeaux.  Les  portefaix  des  halles  se  nomment  forts 
de  la  halle  (  V,  ce  mot).  L'expression  de  crocfieteur,  dé- 
rivée des  crochets  dont  se  servent  certains  portefaix  pour 
porter  à  dos  leurs  fardeaux,  n'est  employée  que  comme 
injure.  Il  existe  à  Marseille  une  nombreuse,  riche  et 
très-honorable  corporation  de  portefaix,  qui  remonte  à 
une  haute  antiquité;  ils  ont  le  monopole  du  chargement 
et  du  déchargement  des  navires.  F.  A.  Rondelet,  les 
Portefaix  de  Marseille,  dans  la  Revue  contemporaine  du 
30  avril  1862. 

PORTEROOLLE,  nom  qu'on  donnait  à  une  espèce  de 
régisseur  dans  les  représentations  des  Mystères  {V.  ce 
mot).  Il  avait  pour  mission  de  parler  au  public,  et  faisait 
aussi  l'office  du  souffleur.  On  l'appelait  encore  protocole^ 
mattre  ou  meneur  du  jeu. 

PORTES  ET  FENÊTRES  (Contribution  des},  une  des 
quatre  principales  Contributions  directes,  établie  sur  les 
portes  et  fenêtres  qui  donnent  sur  les  rues,  cours  ou  Jar- 
dins des  b&timents  et  des  usines.  Elle  a  été  créée  par  la 
loi  du  4  frimaire  an  vii  (24  nov.  1798).  On  en  exempte  les 
portes  et  fenêtres  servant  à  aérer  les  granges,  bergeries, 
étables,  greniers,  caves,  et  autres  locaux  non  destinés  à 
Thabitation  des  hommes  ou  employés  à  des  services  pu- 
blics. Elle  est  exigible  contre  les  propriétaires,  fermiers 
ou  locataires  principaux,  sauf  leur  recours  contre  les 
sous-locataires.  La  quotité  de  l'impôt  varie  suivant  le 
nombre  des  ouvertures  de  la  maison,  suivant  la  popula- 
tion de  la  commune,  et  suivant  l'étage  auquel  sont  situées 
les  fenêtres.  La  moindre  taxe  est  celle  d'une  maison  à 
une  ouverture  dans  une  commune  de  5,000  &mes  au  plus  : 
elle  est  de  0  fr.  30  c.  La  plus  forte  est  celle  d'une  ouver- 
ture (porte  ou  fenêtre  ordinaire)  située  au  rez-de-chaus- 
sée, à  l'entre-sol,  au  premier  ou  au  second  étage,  dans  une 
▼ille  de  plus  de  100,000  âmes  :  elle  est  de  1  fr.  80  c.  Les 
portes  cochères,  charretières,  et  de  magasin,  payent  une 
taxe  qui  varie,  suivant  la  population,  de  1  fr.  60  c.  à 
18  fr.  80  c«  L. 

PORTE-VOIX,  ino^jument  de  cuivre  ou  de  fer-blanc, 
en  forme  de  trompette,  largement  évasé  par  sa  partie  in- 
férieure, et  dans  lequel  on  parle  en  portant  à  la  bouche 
la  petite  extrémité.  Les  Anciens  s'en  servaient  dans  les 
batailles,  pour  faire  entendre  au  loin  le  commandement, 
et  les  Arabes  en  trouvèrent  en  Chine  au  ix*  siècle,  ce  qui 
o'empâchs  pa»  l'Anglais  Samuel  Morland  et  le  P.  Kircher 


de  s'en  disputer  l'invention.  Il  y  a  plusieurs  espèces  de 
porte-voix  de  marine  :  le  braillard,  employé  à  la  main 
pour  le  commandement  des  manœuvres  sur  les  bâtiments 
de  moyenne  dimension  ;  le  giieulard,  qui  s'allonge  à  vo- 
lonté comme  une  lunette,  se  pose  ordinairement  sur  un 
support,  et  k  l'aide  duquel  on  se  fait  entendre  d'un  bâ- 
timent à  un  autre;  le  porte-voix  de  combat,  qui  est  a 
demeure  sur  le  pont  et  descend  verticalement  dans  les 
batteries.  C'est  aussi  un  porte-voix  vertical  qu'on  em- 
ploie sur  les  navires  k  vapeur  pour  donner  des  ordres  au 
mécanicien.  On  fait,  avec  des  tuyaux  en  caoutchouc,  des 
espèces  de  port&-voix  dans  les  habitations  et  les  ateliers, 
pour  porter  la  parole  d'une  pièce  ou  d'un  étage  à  un 
autre.  B. 

PORTIER,  celui  qui  a  soin  d'ouvrir,  de  fermer  et  de 
garder  la  principale  porte  d'une  maison.  Aujourd'hui 
presque  tous  les  portiers  ont  pris  le  nom  de  Concierges, 
oui  n'appartenait  autrefois  qu'à  ceux  qui  avalent  la  garde 
d'une  maison  royale  ou  seigneuriale,  d'un  hôtel  de  ville, 
d'une  prison.  Le  propriétaire  est  responsable  des  'consé- 
quences pécuniaires  des  délits  et  contraventions  do  son 
portier,  <pour  les  actes  auxquels  il  l'a  préposé  ou  qui  font 
partie  de  ses  fonctions  ordinaires.  Les  locataires  sont  en 
dxoit  de  faire  condamner  le  portier  (et  par  suite  le  pro- 
priétaire) à  des  dommages-intérêts,  s'il  refuse  d'ouvrir  à 
toute  heure  du  Jour  ou  de  la  nuit,  de  recevoir  les  lettres 
et  paquets,  etc.  V,  Poetibr,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^  Histoire, 

PORTIER-CONSIGNE.  V.  Consignb. 

PORTIÈRE,  panneau  mobile  fermant  l'entrée  d'une 
voiture.  C'est  aussi  une  pièce  d'étofl'e  fermant  une  baie  do 
porte  intérieure;  ornement  en  usage  de  tout  temps  en 
Orient,  chez  les  anciens  Romains,  et  aussi  en  France 
pendant  le  xvni*  siècle.  Aujourd'hui  on  met  souvent  des 
pottières  en  tapisserie,  ou  en  étoffes  plus  ou  moins  ri- 
ches, par -dessus  les  portes,  comme  supplément  de 
clôture,  surtout  pour  l'hiver, 

PORTION  CONGRUE.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d^  Histoire, 

portion  disponible.  V.  Quotité  disponible. 

PORTIQUE  (du  latin  porticus)^  galerie  couverte,  sou- 
tenue par  des  colonnes,  des  piliers  ou  des  arcades.  On 
donne  aussi  le  nom  de  Portique  à  toute  disposition  do 
colonnes  dégagées  en  forme  de  prostyle  ou  de  péristyle. 
Chez  les  Anciens,  les  Portiques  furent  fort  en  usage  :  il  y 
en  avait  autour  des  grands  temples,  des  théâtres,  des 
stades,  des  gymnases,  des  marchés.  A  Athènes,  V Acadé- 
mie, le  LycéS,  le  Cynosarge  avaient  des  portiques;  c'était 
sous  le  Pœcile  que  se  rassemblaient  les  disciples  de  Ze- 
non, d'où  leur  est  venu  le  nom  de  Stoïciens  (du  grec  stoa, 
portique).  Dans  l'ancienne  Rome,'  on  remarqua  les  Por- 
tiques de  Livie,  d'Octavie,  de  Philippe,  de  Pompée,  les 
Septa  Julia  de  Lépide,  les  Septa  Agrippiana  d'Agrippa, 
VHécatonstylon,  etc.  On  voyait  aussi  des  portiques  au- 
tour des  cours  intérieures  des  riches  habitations.  Les 
cloîtres  {V,  ce  mot)  du  moyen  &ge  étaient  de  véritables 
portiques.  Au  nombre  des  constructions  modernes  on 
peut  citer  les  portiques  de  la  place  S^-Marc  à  Venise,  la 
vaste  enceinte  de  la  cour  du  Vatican  à  deux  rangs  de  por- 
tiques par  Bramante,  la  cour  des  Loges  du  même  palais 
construite  sur  les  dessins  de  Raphaël,  le  Bazar  du  com- 
merce à  S^-Pétersbourg,  et  enfin,  à  Paris,  les  galeries  de 
la  place  Royale,  de  la  cour  des  Invalides,  du  Palais-Royal, 
des  rues  Castiglione,  de  Rivoli,  des  Colonnes,  etc.    B. 

PORTLAND  (Vase  de),  ou  vase  Barber  in,  fameuse  urne 
cinéraire,  trouvée  dans  un  caveau  souterrain  à  Rome, 
pendant  le  pontificat  d'Urbain  Vm  (de  la  famille  Barbe- 
rini),  et  une  l'on  croit  avoir  contenu  les  cendres  de  l'em- 
pereur Alexandre  Sévère  et  de  sa  mère  Julia  Mammsa. 
Le  sarcophage,  en  marbre  pentélique,  où  était  renfermé 
ce  précieux  monument,  se  trouve  au  Musée  du  Capitole; 
le  vase,  après  avoir  servi  d'ornement  à  la  bibliothèque 
Barberini,  fut  acheté,  au  siècle  dernier,  par  W.  Hamilton; 
il  passa  ensuite  au  duc  de  Portland,  et  il  est  aujourd'hui 
au  Musée  britannique  de  Londres.  C'est  un  vase  de 
30  centimètres  de  hauteur  sur  16  de  diamètre,  en  verre 
bleu  foncé,  qui  parait  noir  quand  on  ne  le  présenta  pas 
à  la  lumière,  et  offrant  un  relief  de  figures  d'un  fini 
parfait,  en  verre  blanc  et  opaque.  Ces  figures,  exécutées 
au  touret,  sont  du  travail  le  plus  exquis,  et  sont,  au 
Jugement  des  antiquaires,  d'une  époque  antérieure  k 
Alexandre  le  Grand.  Winckelmann  crut  aue  le  sujet  re- 
présentait la  fable  de  Thétls,  qui  prit  ai  verses  formes 
pour  échapper  aux  poursuites  de  Pelée.  Veltheim  voulidt 
y  voir  l'histoire  d'Alceste,  qu'Hercule  ramena  des  Enfers  k 
Admète.  Wedgwood  pensa  que  c'était  la  représentation 


POR 


1468 


POR 


âllégoriqae  de  la  mort  d*un  personnage,  appui  de  sa  fa- 
mille, au  moment  où  II  passe  de  la  vie  à  rimmortalité. 
En  iK45,  le  vase  de  lN>rtIand  fut  renversé  de  son  piédestal 
et  brisé  par  un  sot  ou  un  fou,  qui  voulait  par  là  sMm- 
mortaliser  h  la  manière  d*Érostrate  :  on  a  remédié  aux 
suites  de  cet  accident  avec  tant  d'habileté,  qu'on  peut  à 
grand*peine  s*en  apercevoir.  B. 

PORTO  RIO  M.  r.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  fVfflstoire, 

PORTRAIT  (du  vieux  français  pour-traict)^  imitation 
trait  pour  trait,  image  ressemblante  d'une  personne  re- 
produite par  les  arts  du  dessin.  Un  portrait  sculpté  s^ap- 
pelle  buste  (K.  ce  mot)^  sMl  est  en  ronde-bosse;  médatl- 
Ion,  s'il  est  en  bas -relief.  On  fait  des  portraits  à  la 
plume,  au  crayon,  au  pastel,  à  Thuile,  à  Taquarelle,  en 
miniature,  sur  émail,  sur  porcelaine,  en  ^vure,  en 
lithographie,  au  daguerréotype,  etc.  Chez  les  Anciens,  si 
Ton  excepte  une  femme,  Lala  de  Cyzique,  qui  vivait  au 
dernier  siècle  avant  Tère  chrétienne,  il  n*y  avait  pas  d'ar- 
tistes adonnés  exclusivement  au  portrait;  cette  partie  de 
Tart  était  exercée  par  les  peintres  d'histoire,  et  Apelles 
fut  celui  qui  y  obtint  la  plus  grande  célébrité.  Jusau'au 
XVII*  siècle,  ce  furent  également  les  grands  peintres  ahis- 
toire  qui  excellèrent  dans  le  portrait,  Raphaël,  le  Titien, 
Holbein,  Léonard  de  Vinci,  Paul  Véronèse,  Van  Dyck, 
Rubens,  Rembrandt,  Velasquez,  etc.  A  partir  du  siècle 
de  Louis  XIV,  il  y  eut  des  portraitistes  proprement  dits, 
qui  étudièrent  avec  un  soin  tout  particulier  l'expression 
de  la  phjrsionomie,  mais  qui  se  perdirent  aussi  trop  sou- 
vent dans  les  accessoires;  tels  furent  Rigaud,  Mignard, 
lATgillière  et  Latour  en  France,  Gainsborough  et  Rey- 
nolds on  Angleterre.  C'est  à  peine  si,  au  temps  de 
Louis  XV,  on  se  soucia  de  la  ressemblance  :  les  hommes 
aimaient  à  se  faire  peindre  en  Mars  ou  en  Apollon,  les 
femmes  en  Diane,  en  Flore,  en  Vénus,  avec  de  grands 
yeux,  de  petites  bouches,  des  Joues  roses  et  rondes. 
M"*"  Vigée-Lebrun  et  David  ramenèrent  la  pureté,  l'exac- 
titude et  le  bon  goût  dans  cette  partie  de  l'art.  Depuis 
cette  heureuse  révolution,  certains  peintres  d'histoire  ont 
encore  traité  le  portrait  de  main  de  maître  :  nous  cite- 
rons Gros,  Gérard,  Ingres,  Scheffer,  Paul  Delaroche« 
L.  Cogniet,  Horace  Vcrnet,  Court,  Flandrin,  etc.  Les  plus 
célèbres  portraitistes  du  xix*  siècle  sont  M*""  de  Blirbel , 
Pérignon,  Dubufle,  Winterhalter,  etc.  B. 

ponTRAiT,  terme  de  Littérature.  V,  CARAcrfeiiE. 

PORT-ROYAL.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

PORTUGAISE  (Langue),  une  des  langues  néolatines 
(V.  ce  mot)^  celle  peut-être  qui  a  conservé  pour  le  fond, 
sinon  pour  l'apparence,  le  plus  de  ressemblance  a^  ec  la 
mère  commune.  Elle  sort  presque  int^ralement  du  latin, 
au  point  que  des  érudits  ont  pu  faire  de  l'Hugues  pièces 
de  vers  latins  avec  des  mots  exclusivement  portugais  : 
mais  c'est  un  latin  très-gravement  altéré  par  fa  pronon- 
ciation des  antiques  Lusitaniens.  Cette  altération  consiste 
principalement  dans  un  système  de  contraction  qui  tient 
sans  doute  à  la  dureté  de  l'idiome  antérieurement  em- 
ployé; ainsi,  les  Portugais  font  mor  pour  mai^or,  ma 
pour  mala,  ceo  pour  cielo,  te  pour  tiene,  na  pour  en  /a, 
somente  pour  solamente,  etc.  Ils  remplacent  Vr  par  l,  et 
disent  regra  pour  régla,  branda  pour  blanda,  branca 
pour  blanca^  etc.  —  Un  second  caractère  spécial  de  la 
langue  portugaise  est  le  son  nasal  contracté  par  lequel 
est  rendue  avec  une  seule  émission  de  voix-la  finale  ion, 
dérivée  de  Vio  latin.  Ainsi,  pour  mmcion,  ils  disent 
mençâp;  pour  resolwion,  resoluçâo;  pour  Camoens, 
Camoés^  etc.  Cette  contraction  est  indiquée  dans  l'ortho- 
graphe (d'ailleurs  conforme  à  la  prononciation)  par  un 
trait  porté  sur  les  deux  dernières  lettres,  et  qui  s'appelle 
tu,  —  Bien  que  conquis  par  les  And)es  avec  le  reste  de  la 
péninsule,  les  Lusitaniens  n'ont  conservé  aucune  des 
consonnes  gutturales  que  l'arabe  a  imposées  au  castillan. 
Le  g  guttural  castillan  se  remplace  en  portugais  par  Ih 
mouillé  :  ainsi ,  pour  escoger  (choisir),  ils  disent  escolhêr. 
Le  II  mouillé  des  Castillans  est  rendu  dans  certains  cas 
par  Ih,  dans  d'autres  par  ch  :  au  lieu  de  llegar  (arriver), 
ils  disent  chegar;  au  lieu  de  haliar  (  trouver),  ils  disent 
achar,  etc.  Cette  absence  de  sons  gutturaux  rend  le  por- 
tugsds  plui  doux  à  l'oreille  que  le  castillan  ;  plus  concis 
d'ailleurs  et  moins  efféminé  oue  l'italien ,  il  tient ,  sous 
le  rapport  de  l'harmonie,  le  milieu  entre  les  deux 
idiomes.  Il  a  gardé  la  concision  énergique  du  latin ,  et 
demeure  une  langue  à  la  fois  riche,  noble  et  gracieuse, 
qui  possède  la  familiarité  aimable  du  castillan,  sans  en 
admettre  les  tons  quelquefois  trop  libres.  La  richesse  du 
Vortii(aii  eit  tdk»  qo'un  auteur  fécond,  Ytes  Lois  de 


Souza,  n'use  pas  d'an  seul  mot  emprunté  à  une  langni 
étran^re.  —  Les  Portugais  se  vantent  de  posséder  un 
certain  nombre  de  mots  qui  leur  sont  propres.  Ils  doi- 
vent aussi  aux  conquérants  germains  qnelques  Tocables 
d'origine  teutonique,  comme  hosque,  jaraim,  eanusa, 
alvergar,  esgrimir,  etc.  André  de  Resende  {De  Antiqut- 
tatibus  Lwitaniœ)  a  recueilli  500  mots  d'origine  grecque. 
On  calcule  que  le  portugais  renferme  environ  un  tiers 
de  moins  de  mots  arabes  ({ue  le  castillan. 

La  grammaire  portugaise,  comme  celle  des  autres 
lanp;ues  néolatines,  possède  les  auxiliaires  et  l'articlo; 
mais,  par  un  phénomène  qui  lui  est  particulier,  elle 
supplée,  dans  certains  cas,  l'auxiliaire  du  passif  par  les 
pronoms  personnels  me,  ù,  te,  etc.  :  en  latin  appdlor, 
appellaris,  en  portugais  chamo  me,  chamas  te;  moveor, 
movo  mê;  vestior,  visto  me^  etc.  Le  portugais  a  des  su- 
perlatifs :  bonissimo,  christianissimo.  II  a  aussi  de  nom- 
breux dérivés  :  on  en  compte  15  formés  da  seul  mot 
pedra,  là  où  le  latin  n'en  a  nue  6.  La  conjugaison  portu- 
^ise  a  cela  de  particulier  qu'elle  applique  la  flexion  à  son 
infinitif  même,  pour  distinguer  la  personne  grammati- 
cale à  laquelle  appartient  l'auteur  de  l'acte  qu'exprime  le 
verbe.  —  Un  autre  remarquable  phénomène,  c'est  que 
le  portugais  offre  plus  d'analogie  avec  le  roman  actuel 
du  midi  et  l'ancien  provençal  qu'avec  le  castillan  ;  ainsi , 
les  Portugais  disent  pai,  mai,  au  lieu  de  padre,  madré; 
eu,  pour  yo.  Ils  emploient  abrandar,  (Arasar,  ouvir, 
hums,  outros,  qui  sont  du  roman  pur.  Faut^-il  expliquer 
cette  identité  par  le  lien  qu'établissait  la  mer  entre  la 
Lusitanie,  la  ôalice  et  le  S.-O.  de  la  Gaule?  Il  est  re- 
connu que  le  galicien  et  le  portugais  ne  différaient  pas  à 
l'origine.  Le  second  n*a  dû  sa  politesse  et  ses  développe- 
nt imIs  ultérieurs  qu'à  l'établissement  d'une  cour  et  à  la 
formation  d'une  nationalité. 

L'âge  de  la  plus  grande  pureté  de  la  langne  portugaise 
B'étend  de  1540  à  Iti'iO,  c-à-d.  de  l'épooue  où  fut  recon- 
stituée par  Jean  III  l'Université  de  Colmnre  jusqu'au  mo- 
ment où  parut  la  l'*  partie  de  V Histoire  de  S*  Dominique 
par  Frey  Luis  de  Souza.  Plus  tard,  elle  eut  à  souffrir  de 
deux  événements  funestes  :  la  conquête  espagnole,  qui  en- 
traîna l'oppression  de  la  pensée;  puis,  l'influence  des  idées 
et  de  la  uttérature  françaises.  i  langue  dégénéra  d'un 
côté  par  l'introduction  du  gongorisme,  de  l'autre  par 
l'imitation  du  français.  L'effacement  de  la  langue  portu- 
gaise suivit  l'affaiblissement  de  la  nationalité. 

V,  J.  de  Barres,  Grammatica  da  lingua  poriuguesa, 
Lisbonne,  15  iO,  ixk-A^  ;  Nunez  de  Liao,  Ortographia  da  lin- 
gua portugueza,  Lisbonne,  1576,  in-4\  et  Origem  da 
lingua  portugueza,  1606,  in-4°  ;  Pereira,  Àrs  grammatica 
pro  lingua  liuitanà,  lfî72,  in-S**;  De  La  Rue,  GreÊmmaire 
française  et  portugaise,  Lisbonne,  1766,  in-8°;  Jean  de 
Souza,  Vestigios  da  lingua  arabica  em  portugueza.  Lis* 
bonne,  1789,  in-4°;  José  de  Figueira,  Artê  da  gramma- 
tica portiÂgueza,  Lisbonne,  1700;  Siret,  Grammaire 
française  et  portugaise,  Paris,  1800,  in-8<*;  Ant.  de  Mo- 
raes  Silva,  Epitome  da  granda  lingua  portugueza,  Lis- 
bonne, 1806,  in-8°  ;  Lobado,  Arte  da  grammatica  da  Im- 
gua  portugueza,  Lisbonne,  1814,  in-4<^;  Hamonièrc, 
Grammaire  portugaise,  Paris,  1820,  in-12;  Soares  Bar- 
boza,  Grammatica  phUosophÛM  da  lingua  portugueza, 
2*  édit.,  Usbonne,  1830;  Constancio,  Grammatica  ana- 
lytica  da  lingua  portugueza,  Paris,  1831,  in-i2;  Fon- 
seca.  Éléments  de  la  grammaire  portugcûse,  1838,  in-12; 
Pereira,  Thesauroda  lingua  portugueza,  Lisbonne,  1G70, 
in-fol.;  le  P.  Bluteau,  Vocabulario  portuguez  e  latino, 
1712-28, 10  vol.  in-fol.;  Marquez^  Nouveau  dictionnaire 
des  langues  portugaise  et  française,  Lisbonne,  1756, 
2  vol.  in-fol.;  José  da  Fonseca,  Diccionario  portugitez  e 
latino,  Lisbonne,  1772,  in-4°;  Moraes  Silva,  Dictionnaire 
portugais  et  latin,  Lisbonne,  1789, 2  vol.  in-4°;  Da  Costa 
et  Sa,  Dictionnaire  portugais,  français  et  latin,  Lisbonne, 
1794,  in-fol.;  Santa-Rosa  de  Viterbeo,  Elucidar'u>  dos  par 
lavras^  termes  e  frases,  que  em  PortugcU  antiguamente 
se  usarào,  Lisbonne,  1798-00,  2  vol.  ;  Da  Cnnha,  Dic- 
tionnaire français-'portugais ,  Lisbonne,  1811,  in-4"; 
Francisco  de  Santo-Luiz,  Glosario  das  pcUavras  e  frases 
da  lingua  francesa  que  se  tem  introduzida  na  locuçao 
portugueza  modema,  Lisbonne,  1827;  le  même,  Ensato 
sobre  alguns  synonjfmos  da  lingua  portugueza,  1828, 
2  vol.  ;  Constancio,  Dictionnaire  des  langues  portugaise 
et  française,  Paris,  1830,  2  vol.  in-i6;  Fonseca  et  Ro- 
quette, Nouveau  Dictionnaire  français'portugais  et  por- 
tugais-français^ 1841, 2  vol.  in-8^  -    E.  B. 

poaTDGAisE  (Littérature).  —  Preiméiv  période,  —  L*an* 
tipathie  des  Portugais  et  des  Espagnols  semble  accuser 
entre  eux  une  différence  de  race;  néanmoins  Isconfor- 


POR 


1469 


POR 


mit6  des  conditionB,  des  influences  sous  lesquelles  se  sont 
développés  la  langue  et  le  génie  des  nations  néo-latines, 
n*a  pas  permis  à  la  littérature  portugaise  d*aToir  une 
physionomie  très-distincte  de  la  littérature  espagnole, 
Italienne  o«  provençale,  surtout  k  Torigine.  Jusqu'à  Tavé- 
nement  du  roi  Diniz  (1279),  et  même  encore  à  cette 
époque,  la  langlie  portugaise  est  confondue  avec  le  gali- 
cien, <jui  lui-môme  n*est  pas  fort  distinct  du  provençal 
littéraire.  Les  mômes  causes  qui  arrêtèrent  si  longtemps 
le  développement  du  castillan  agirent  avec  plus  de  forcé 
encore  dans  Tàncienne  Lusitanie,  où  probablement  la 
civilisation  romaine  agit  moins  qu*en  Espagne.  Dans  les 
troubles  de  Tinvasion  arabe,  le  portugais  se  dégage  pé- 
niblement du  latin  décomposé,  pour  former,  on  prose 
des  chroniques,  en  vers  des  chants  de  troubadours,  où 
la  Provence  lui  sert  de  modèle.  Bernard  de  Yentadour, 
Raîmbaud  d'Orange,  sont  attirés  dans  ce  pays  avec  le 
môme  empressement  qu*à  la  cour  de  Castille  ;  les  rois  et 
les  grands  seigneurs  donnent  l'exemple  de  Timitation 
des  chants  limousins  et  provençaux.  Les  plus  anciennes 
de  ces  compositions  sont  celles  d'Egaz  Moniz  Coelho, 
gouverneur  d'Alphonse  Henriquez  (1125),  et  celles  de 
Gonzalo  Hermiguez.  Les  poésies  du  roi  Diniz,  que  l'on 
savait  exister  sous  le  titre  de  CantigcUt  ont  été  recueillies 
en  1847  par  le  vicomte  de  Carreira  sous  celui  de  CanciO" 
neiro.  Ce  recueil  contient  aussi  les  poésies  d'un  fils  illé- 
gitime de  Diniz,  don  Pedro,  comte  de  Barceilos;  elles 
traitent  en  général  de  sujets  moraux.  Un  autre  don  Pèdre, 
l'amant  d'Inez  de  Castro,  voulut  éterniser  en  vers  son 
amour  malheureux  :  on  lui  attribue  une  ou  deux  pièces 
qui  roulent  sur  la  mort  d'Inez.  —  Ainsi,  durant  cette  pé- 
riode,  les  Portugais  furont  simplement  imitateurs  en 
poésie.  —  La  prose  ne  produisît  que  de  simples  chro- 
niques; dans  les  études  théologiques,  scientifiques  et  mé- 
dicales, cultivées,  comme  en  Espagne,  sous  les  auspices 
des  Arabes,  on  ne  se  servait  que  du  latin.  Les  rois  insti- 
tuèrent de  bonne  heuro  des  chroniqueurs  d'office.  Fernâo 
Lopes  (1380-1449)  fut  l'un  des  premiers  gardiens  4i  pré- 
cieux dépôt  d'archives  réunies  à  la  Torre  do  Tombe. 
Écrivain  remarquable  par  l'exactitude,  par  les  qualités 
du  style,  il  a  laissé  la  Chronique  de  ce  don  Pedro  sur- 
nommé le  Cruel  pour  les  vengeances  terribles  qu'il  tira 
des  meurtriers  d'Inez,  et  celle  du  roi  Ferdinand  IX.  Nous 
avens  de  Gomez  Eannès  de  Azurara^  qui  hérita  de  l'em- 
ploi de  Lopes,  une  Chronique  du  rot  fean  /*',  une  Chro- 
nique du  comte  don  Pedro  de  Menesès,  une  Chronique 
de  la  découverte  et  conquête  de  Guinée,  Ruy  de  Pina  fut 
chargé,  avec  Duarte  Galvam,  d'une  rédaction  nouvelle 
des  chroniques  nationales,  parmi  lesquelles  il  faut  noter 
celle  du  comte  don  Henrique;  on  a  aussi  de  lui  un  Mé- 
moire du  plus  haut  intérêt  sur  l'arrivée  de  Christophe 
Colomb  à  son  pramier  retour  du  Nouveau-Monde.  Le 
comte  de  Barceilos  ne  se  borna  pas  à  la  culture  de  la 
poésie  :  il  devint  un  des  créateurs  de  l'histoire  en  Por- 
tugal, par  un  Nobiliaire,  où  les  historiens  ont  trouvé  les 
origines  les  plus  précises,  comme  les  renseignements  les 
plus  curieux.  Enfin  les  rois  eux-mômes  cultivèrent  la 
prose  avec  succès.  Tel  fut  don  Duarte,  qui  écrivit  sur  la 
morale  et  sur  VArt  du  cavcUier  :  le  premier  de  ces  ou- 
vrages, où  le  prince  a  déposé  d'une  manière  touchante  ses 
pensées  les  plus  intimes,  montre  une  grande  instruction 
pour  le  temps,  et  le  style  en  est  souvent  remarquable;  il 
est  intitulé  El  lecU  Conselheiro,  et  n'a  été  publié  qu'en 
1843,  par  M.  Roquette.  Alphonse  Y  non-seulement  en- 
couragea l'étude  de  l'histoire,  mais  écrivit  lui-môme  sur 
la  tactique  et  sur  l'astronomie.  Son  Traité  de  la  milice 
fait  connaître  la  manière  de  combattre  des  anciens  Por- 
tugiiis.  C'est  encore  à  lui  qu'est  dû  le  premier  Corps  de 
Droit  qu'ait  possédé  le  royaume.  Le  roi  Diniz  fonda,  en 
1290,  la  célèbre  Université  de  Coîmbre;  il  est  permis  de 
croire  qu'un  Français,  précepteur  de  ce  prince,  Aymeric 
d'Ébraid,  né  à  Cahors,  n'y  fut  pas  étranger.  De  cette  Uni- 
versité, réformée  par  Jean  III,  qui  sut  y  attirer  des 
hommes  comme  Diego  de  Teive,  les  frères  Gouvea,  et  Bu- 
chanan,  sortiront  Ferreira,  Sa  de  Miranda,  Barros  et 
Camoens. 

Deuxième  pénode*  —  Le  grand  siècle  de  la  littérature 
portugaise  commence  avec  le  règne  de  don  Manoel ,  et 
s*étend  Jusqu'à  la  conquête  du  pays  par  les  Espagnols.  La 
poésie  pastorale,  alors  cultivée  avec  éclat ,  nous  offre  de 
gracieux  modèles.  Sous  le  beau  ciel  de  la  Lusitanie,  les 
bergers,  plus  nombreux  que  les  laboureurs,  ressem- 
blaient aux  bergers  de  la  Sicile;  leurs  loisirs,  leurs 
richesses,  les  noms  qu'ils  portaient,  leur  donnaient  quel- 
que chose  de  plus  poétique  que  dans  le  Nord.  Les  égloçies 
portagalses  présentent  d'ailleurs  une  heureuse  variété 


I  dans  les  scènes  et  dans  les  personnages^  les  productions 
du  bord  de  la  mer  y  sont  décrites  comme  celles  du  rivaxe 
des  fleuves;  le  pêcheur  conte  ses  périls  au  berger,  et  le 
berger  vante  à  son  tour  les  moissons  du  laboureur.  C'est 
à  l'éslogue  que  lé  Tage  doit  sa  renommée  poétique.  Un 
gentilhomme  de  la  chambre  d'Emmanueî,  Bernardin 
Ribeiro,  a  donné  cinq  églogues,  et  il  a  placé  ses  bergers 
sur  les  bords  du  Tage  et  du  Mondego.  Il  se  complaît  à  re- 
tracer sans  cesse  le  lent  désespoir  d'un  amour  malheu- 
reux ;  mais  le  poôte  sait  varier  ses  tableaux  et  charmer 
par  les  grâces  de  sa  poésie.  Un  habitant  de  Madère,  Chris- 
toval  Falcam ,  remarquable  par  la  naûveté  touchante  de 
ses  œuvres,  dont  la  plupart  ont  péri,  a,  dans  une  longue 
églogue,  rappelé,  sous  un  nom  supposé,  les  malheurs 
d'une  captivité  de  cinq  années,  qu'il  subit  pour  s'être 
marié  contre  le  gré  de  ses  parents.  Sa  de  Bliranda,  An- 
tonio Ferreira,  Camoens,  cultivèrent  aussi  avec  bonheur 
la  poésie  pastorale  :  Sa  de  Miranda  y  fait  paraître  une 
admirable  naïveté.  —  D'autres  se  distinguèrent  encore 
au  xvi*  siècle  dans  la  poésie  bucolique  ou  le  roman  pas- 
toral ;  on  ne  trouve  pas  chez  eux  la  naïveté  du  siècle  pré- 
cédent, mais  ils  ont  plus  d'harmonie,  plus  d'élégance,  et 
plus  d'idées.  Diogo  Bemardes  a  été  surnommé  le  prince 
de  la  poésie  pastorale  :  son  principal  ouvrage  est  intitulé 
O  Lyma;  ce  sont  20  églogues  où  l'amour  des  concetti  dé- 
pare trop  souvent  ses  vers;  mais,  par  l'inimitable  har- 
monie du  style,  il  s'est  placé  sur  la  même  ligne  que  les 
plus  grands  poètes  de  son  pays.  Diogo  Bemardes,  qu'on 
a  accusé  de  s'être  approprié  quelques-uns  des  sonnets  de 
Camoens,  a  laissé  aussi  des  poésies  religieuses.  Les  vers 
d'Andrade  Caminha  se  distinguent  surtott  par  le  charme 
de  la  diction,  l'harmonie  et  l'élégance,  mais  ils  sont 
froids;  ses  ouvrages  demeurèrent  inédits  Jusqu'en  1791. 
Andrade  Caminha  a  donné  un  grand  nombre  d'épitaphes, 
et  c'est  là  peut-être  qu'il  déploie  le  plus  de  talent.  Fer- 
nand  Alvares  do  Oriente  a  composé  un  ouvrage  célèbre 
sous  le  nom  de  Lusitania  transformada,  pastorale  mêlée 
de  prose  et  de  vers,  où  la  beauté  des  tableaux  s'unit  au 
charme  de  la  versification.  Rodriguez  Lobo  a  été  sur- 
nommé le  Tliéocrite  portugais.  Ses  principales  pastorales, 
mêlées  de  prose  et  de  vers,  sont  le  Printemps,  le  Désa- 
busement,  et  le  Berger  voyageur,  La  prose  de  Rodriguez 
Lobo  a  souvent  la  recherche  qui  commençait  à  s'intro- 
duire de  son  temps  dans  la  littérature  portugaise  :  on  le 
voit  dans  son  petit  ouvrage  de  morale  intitulé  :  La  Cour 
au  village  ou  les  Nuits  d*hiver.  Manuel  de  Veiga  ferme 
la  liste  des  poètes  bucoliques  :  l'ouvrage ,  aujourd'hui 
très- rare,  qu'il  donna  au  public,  parut  sous  le  titre  de 
Laura  de  Enfrydo;  on  lui  reproche  son  peu  de  correction. 
L'impulsion  donnée  aux  lettres  par  Jean  III  parut 
dans  les  genres  élevés  de  la  poésie.  Sa  de  Miranda  et 
Antonio  Ferreira  sont  moins  célèbres  encore  comme 
poètes  lyriques  que  comme  législateurs  du  Parnasse  por- 
tugais; par  une  étude  approfondie  des  Anciens,  ils  par- 
vinrent à  épurer  le  langage  et  à  le  rendre  harmonieux  ; 
cela  explique  l'espèce  de  culte  que  les  littérateurs  por- 
tugais ont  voué  à  ces  deux  auteurs,  qui  ne  brillent 
peut-être  pas  autant  que  leurs  successeurs.  Sa  de  Mi- 
randa a  donné  des  sonnets,  des  épltres,  des  hymnes  à 
la  Vierge,  des  Cançaôes,  Il  déplora  par  une  touchante 
élégie  la  mort  de  son  fils.  On  lui  doit  une  infinité  de 
combinaisons  métriques,  de  nouvel los  lois  pour  la  cé- 
sure :  c'est  lui  qui  fit  de  l'hendécasyllabe,  jusqu'alors  à 
peu  près  inconnu,  l'instrument  principal  de  la  poésie 
portugaise.  —  Ferreira,  surnommé  l'Horace  du  Portu« 
gai ,  en  est  plutôt  le  Malherbe  ;  car,  si  dans  ses  odes  on 
retrouve  trop  les  pensées  d'Horace,  on  remarque  sans 
cesse  de  nouvelles  formes  introduites  dans  le  langage,  à 
l'exclusion  de  ces  locutions  orientales  qui  avaient  de 
bonne  heure  envahi  le  portugais  et  l'espagnol.  Les  Poemas 
lusUanos  de  Ferreira,  publiés  en  1598,  sont  bien  des  poé- 
sies nationales,  écrites  exclusivement  pour  le  pays  au- 
3uel  elles  s'adressent;  on  y  trouve  des  épltres,  des  odes, 
es  sonnets,  des  élégies,  où  l'imagination  n'est  pas  toujours 
la  qualité  la  plus  saillante  ;  on  en  fait  cependant  grande 
estime  chez  un  peuple  que  cette  imagination  a  quelque- 
fois égaré,  et  qui  la  voit  soumise  alors  par  un  homme  d'un 
vrai  talent,  chez  lequel  la  sagesse  n'était  point  de  l'im- 
puissance. Dans  les  ÔEuvres  diverses  de  Camoens  se  trou* 
vent  un  grand  nombre  de  poésies  lyriques,  odes,  cao* 
çàôes,  sextines,  élégies,  sonnets  ;  à  part  les  concetti ,  qu! 
se  montrent  trop  souvent  quand  le  cœur  cesse  de  parler 
(défauts  dus  au  siècle),  on  y  retrouve  le  poète  tout  entier, 
l'homme  aux  nobles  impressions,  aux  fortes  pensées. 

Dans  la  poésie  épique,  Camoens  s'éleva  au  «dessus 
des  autres  poètes  du  Portugal ,  par  son  poème  des  £«- 


POR 


1470 


POR 


stades  (V.  09  mot).  Il  fut  un  de  ces  hommes  de  génie  qui 
fixent  une  langue  par  le  charme  de  leur  style,  et  qui  ont 
le  privilège  d'animer  tout  un  peuple  par  une  grande  pen- 
sée. Si  Ton  considère  la  poésie  du  côté  de  son  heureuse 
influence  sur  le  moral  des  nations,  aucun  poète  ne  doit 
être  loué  à  Tégal  de  Camoens  ;  car  son  œuvre  respire 
cet  ardent  amour  de  la  patrie  qui  élève  les  cœurs  et 
leur  donne  un  noble  enthousiasme.  —  Un  autre  poète, 
Cortereal ,  entreprit  de  célébrer  en  vers  épiques  la  gloire 
du  Portugied.  Son  premier  ouvrage,  le  Siège  de  Diu,  n*eut 
pas  grand  succès,  bien  quMl  contienne  des  beautés  ;  on  y 
retrouve  toujours  le  guerrier  observateur,  le  grand  peintre 
de  la  nature.  Il  fut  plus  heureusement  inspiré  dans  le 
Naufrage  de  Sepulveda,  histoire  de  deux  époux,  qui, 
après  s*ètre  unis  dans  les  Indes,  voulurent  retourner  en 
Europe,  firent  naufrage  sur  les  côtes  d'Afrique,  et  errèrent 
longtemps  parmi  des  hordes  barbares,  avant  que  la  mort 
vint  terminer  leur  existence.  Cet  ouvrage,  traduit  en  fran- 
çais par  0.  Fournier  (Paris,  1844),  nous  choque  par  un 
mélange  incohérent  de  la  m^hologie  avec  les  pensées  du 
christianisme  ;  mais  il  contient  bien  des  détails  heureux 
et  des  développements  pathétiques.  Cortereal  a  donné  en- 
core, mais  en  espagnol,  une  Austriadaf  en  Thonneur  de 
don  Juan  d'Autnche.  —  Les  poètes  épiques  du  Portugal 
sont  éminemment  nationaux;  quand  la  patrie  est  asservie, 
lis  cherchent  à  faire  revivre  son  antique  gloire.  Mouzinho 
Quebedo  de  Castello-Branco  a  choisi  pour  sujet  de  ses 
chants  Alphonse  l'Africain,  conquérant  d'Arzila  et  de 
Tanger.  Parmi  bien  des  récits  de  batailles  et  des  descrip- 
tions de  paysages  qui  remplissent  ce  poème  en  12  chants, 
nous  signalerons  la  manière  touchante  dont  le  poète  rap- 
pelle rhéroïsme  de  Tinfant  don  Femand,  qui,  tombé  au 
pouvoir  des  Mores  dans  une  campagne  malheureuse,  ne 
voulut  point  Qu'on  le  rachetât  par  une  énorme  rançon , 
et  préféra  subir  une  longue  captivité;  la  catastrophe 
d'Alcazar-Kébir  a  inspiré  aussi  à  Quebedo  un  morceau 
digne  des  plus  grands  maîtres.  Le  poème  a  les  défauts 
communs  à  tous  les  épiques  portugais  :  incohérence, 
absence  d'unité,  merveilleux  pauvre  et  bizarre  ;  mais  le 
style  est  plein  de  grandeur  et  d'énergie.  —  Dans  une 
ulyssea,  Gabriel  Pereira  de  Castro  a  chanté  la  fondation 
de  Lisbonne,  qu'une  tradition  fabuleuse  fait  remonter  au 
siège  de  Troie,  en  l'attribuant  k  Ulysse.  Un  autre  monu- 
ment élevé  à  la  gloire  nationale,  c'est  la  Conquête  de 
Malacca,  par  Francisco  de  Sa  e  Menezès.  Le  héros  du 
poème  est  Albuquerque,  conquérant  des  Indes  et  d'une 
partie  de  la  Perse.  Il  a  appris  la  trahison  ourdie  contre 
les  Portugais  par  les  Andjes  de  Malacca;  le  complot  a 
reçu  un  commencement  d'exécution  :  Albuquerque  part 
de  Goa  pour  punir  les  Arabes  de  l'injure  q[u*ils  ont  faite 
à  la  nation  portugaise.  Une  imagination  brillante,  singu- 
lièrement excitée  par  les  succès,  les  découvertes,  l'esprit 
d'aventure  de  l'époque,  la  lecture  des  fictions  chevale- 
resques du  temps,  et  l'imitation  de  l'Italie,  ont  permis  à 
Sa  e  Menezès  de  tirer  tout  un  poème  épique  d'une  simple 
expédition  militaire.  L'auteur  a  eu  le  goût  de  mettre  le 
merveilleux  chrétien  à  la  place  du  merveilleux  mytholo- 
gigue.  Le  style  manque  un  peu  de  correction  ;  les  des- 
criptions de  batailles  sont  trop  multipliées;  mais  il  y 
a  une  heureuse  opposition  des  mœurs  portugaises  et  des 
mœurs  orientales,  beaucoup  de  couleur  locale  et  de  vé- 
rité dans  les  tableaux.  —  Braz  Mascarenhas  est  auteur 
d'un  poème  épique  dont  Viriate  est  le  héros.  Cet  ou- 
vrage, assez  défectueux,  fait  connaître  parfois  d'une  ma- 
nière intéressant n  cet  épisode  des  guerres  romaines  dans 
la  Péninsule.  —  Luiz  Pereira  Brandam  a  célébré  la  bataille 
d'Alcazar-Kébir  dans  un  poème  héroïque  en  18  chants, 
intitulé  :  Elegiada;  il  avait  assisté  comme  combattant  k 
cette  grande  catastrophe. 

La  littérature  du  Portugal ,  surtout  à  ses  débuts ,  pré- 
sente tant  d'analogie  avec  celle  de  l'Espagne,  qu'il  est 
permis  d'attribuer  une  origine  commune  à  l'art  drama- 
tique dans  les  deux  pays.  Les  premiers  divertissements 
publics  sont  des  jeux  guerriers  ou  chevaleresques  :  ces 
jeux  sont  le  behourdis,  des  exercices  équestres,  un  peu 
plus  tSLrd  les  tournois,  les  danses,  et  en  particulier  celles 
que  le»  Portugais  nommaient  judarias,  mourarias,  em- 
pruntées aux  populations  moresques  et  juives.  L'art  dra- 
matique est  né  moins  de  ces  jeux  que  des  débris  du 
paganisme,  de  ses  pompes,  de  ses  fêtes,  conservés  par 
les  habitudes  populaires  au  milieu  des  sociétés  chré- 
tiennes. Le  clergé,  voyant  l'inutilité  des  efforts  qu'il 
dirigea  contre  ces  souvenirs  païens,  imagina  de  les  sanc- 
tifier en  les  appliquant  aux  fêtes  du  christianisme  :  les 
représentations  scéniques  firent  partie  des  cérémoniet 
rairiieases,  et  soaveot  elles  eurmit  li«u  diu»  le§  églises, 


après  la  célébration  du  culte  divin.  D'abord  toat  se  borna 
à  des  dialogues  rusticjues,  où  des  bergers  s'entretenaient 
des  fêtes  qu'on  devait  célébrer,  ordinairement  de  celle 
de  Noèl.  Plus  tard,  on  appliqua  ces  dialogues  k  Ues  sujets 
tirés  de  la  vie  commune  ;  en  sorte  que,  dès  le  commen- 
cement ,  le  thé&tre  se  divisa  en  drame  religieux  et  drame 
profane.  Mais  ces  deux  branches  ne  furent  pas  cultivées 
tout  à  fait  parallèlement  comme  en  Espagne;  le  théâtre 
profane  finit  par  prendre  le  dessus.  Les  Portugais  regar- 
dent iGil  Vicente  comme  le  père  de  leur  théâtre;  mais 
il  fut  un  disciple  de  l'Espagnol  Jean  de  la  Encina ,  lui- 
même  élève  de  l'Italie.  Il  cultiva  à  la  fois  le  genre  reli- 
gieux et  le  genre  profane  ;  il  fit  des  autos,  des  drames  et 
des  comédies.  Dans  un  de  ses  autos,  intitulé  a  Feyra  (la 
Foire),  on  retrouve  l'idée  du  Voyage  du  pèlerin  de  Bu- 
nyan.  Sa  de  Miranda,  enthousiasmé  des  Anciens,  leur  sa- 
crifia son  originalité.  Il  n'a  laissé  que  deux  comédies ,  les 
Etrangers  {os  Estrangeiros)^  et  os  Vilhalpandos ;  celle-ci 
offre  de  fréquentes  intentions  comiques,  et  le  style  en  est 
encore  admiré  des  Portugais.  Antonio  Ferreira  donna  en 
Europe  la  première  comédie  de  caractère  dans  le  Jaloitœ 
(Cioso)y  imitation  assez  naïve  des  Anciens  :  il  n'y  a  pas 
de  plan  régulier,  mais  le  style  en  est  varié,  souvent  co- 
mique, et  empreint  d'une  forte  couleur  locale.  Ferreira 
avait  déjà  composé,  à  riniitation  des  Italiens,  une  comé- 
die intitulée  le  Dristo,  bien  inférieure  au  Jaloux  pour  la 
marche.  S'il  est  au-dessous  de  Sa  de  Miranda  dans  le  style 
comique,  il  le  surpassa  dans  la  tragédie  à!Inès  de  Castro, 
od  Ton  retrouve  quelque  chose  de  la  gravité  et  de  l'élé- 
vation morales ,  de  l'élégance  passionnée,  de  l'expression 


langage  d'AIfieri.  Vlnès  est  la  seconde  tragédie,  .wp. 
qui  ait  paru  en  Europe;  la  première,  la  Sophontsbe  du 
Trissin,  ne  lui  est  antérieure  que  de  bien  peu  d'années. 
Il  faut  lire  la  scène  pathétique  où  la  malheureuse  Inès 
comparait  devant  Alphonse,  et  observer  comment  un  au- 
teur du  milieu  du  xvi"  siècle  a  traité  cette  situation  qui 
fit ,  chez  nous ,  la  fortune  de  la  tragédie  de  La  Motbe. 
hiès  de  Castro  a  été  traduite  en  français  par  Nicolas  de 
Grouchy,  et,  en  1835,  par  M..  Ferd.  Denis,  dans  la  collec- 
tion des  tlié&tres  étrangers.  —  Camoens  écrivit  trois  pièces 
de  thé&tre,  qui  n'ont  pas  ajouté  beaucoup  à  sa  gloire  :  ce 
sont  les  Amphitryons,  Séleucus,  et  Filodème.  Vers  le 
même  temps,  Jorge  Ferreira  composa  YUfrosina,  VUly^ 
sippo,  VAtuografiai  trois  comédies  d'une  longueur  inter- 
minable, mais  qui  purent  concourir  aux  progrès  du  lan- 
gage dans  le  style  comique.  —  Malgré  les  efforts  de  ces 
différents  auteurs,  les  autos  et  les  farças,  où  le  sacré 
s'alliait  au  profane,  l'extravagance  à  une  naïveté  quelque- 
fois heureuse,  continuèrent  à  avoir  le  plus  grand  succès 
pendant  tout  le  xvi«  siècle.  Les  comédies-féeries  (  corne- 
dias  magicas)  eurent  aussi  alors  une  vogue  extrême;  elles 
enchantèrent  par  la  multitude  de  tableaux  qu'elles  of- 
fraient aux  regards,  mais  on  y  observait  encore  moins 
de  vraisemblance  que  dans  les  autos,  Simon  Blachado  fut 
le  chef  de  cette  nouvelle  école,  qui  eut  de  l'influence  jus- 
que dans  le  xviii*  siècle,  et  qm  fit  repousser  l'excellent 
comique  des  auteurs  français ,  que  les  gens  instruits  pro- 
posaient pour  modèle. 

Les  historiens  portugais  racontent  avec  un  véritable 
talent  les  exploits,  les  conquêtes,  les  découvertes  de  leurs 
compatriotes  ;  on  est  surpris  de  leur  verve,  de  leur  tact 
à  saisir  les  usages,  et  de  l'instruction  qu'ils  déploient  à 
une  époque  où  il  y  en  avait  si  peu.  Hieronymo  Osorio, 
évêque  de  Sylves,  a  écrit  en  latin  une  Vie  d'Emmanuel, 
très-remarquable  par  la  haute  raison ,  l'indépendance,  la 
tolérance  et  les  lumières  qu'elle  suppose  chez  son  auteur, 
qui  n'hésite  pas  à  condamner  la  persécution  que  ce  roi 
dirigea  contre  les  Juifs.  Quand  Don  Sébastien  préparait 
la  malheureuse  expédition  qui  amena  la  ruine  de  la  pa- 
trie, il  lui  adressa  les  plus  vives  remontrances ,  tout  en 
gardant  ses  paroles  les  plus  sévères  pour  le  confesseur 
du  roi ,  Luiz  Gonzalvès,  fatal  conseiller  de  cette  déplora- 
ble entreprise.  Ces  Discours,  publiés  avec  quelques  autres 
pièces  sous  le  titre  de  Lettres ,  resteront  comme  des  mo- 
dèles d'une  noble  éloquence  et  les  preuves  du  plus  beau 
caractère.  —  Jean  de  Barres ,  qui  devait  mériter  le  sur- 
nom de  Tite-Live  portugais,  commença  sa  carrière  litté- 
raire par  un  roman  de  chevalerie,  l'Empereur  Clarimond, 
plus  remarquable  par  le  style  que  par  l'imagination. 
Toutefois,  on  pouvait  prévoir  que  Vautour  étal*  destiné  à 
écrire  l'histoire  d'une  manière  brillante  plutôt  que  sage, 
chevaleresque  plutôt  que  philosophique,  mais  en  même 
temps  singulièrement  utile,  parce  qu'elle  se  ferait  lirt 
ftvec  ardeur  et  développerait  l'esprit  oatiooâL  Barros  vou« 


POR 


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POR 


lait  racontar  les  découvertes  et  les  conquMes  des  Portu- 
gais  ;  mais  11  dut  se  borner  à  rhistoire  de  la  conquête 
des  Indes,  et  sa  vie  ne  suffit  même  point  à  cet  ouvrage, 
qui  est  demeuré  inachevé.  L'Histoire  de  Barros  n*est  pas 
Tœuvre  d'un  simple  chroniqueur  :  une  certaine  critique 
a  présidé  an  choix  des  documents.  Ce  fut  lui  qui ,  le  pre- 
mier, A%  b)^  connaître  Tlnde  aux  Européens.  Comme 
écrivain ,  il  Justifie  Tenthousiasme  que  les  Portugais  ont 
pour  lui  :  il  réunit  l'élégance  à  Ténergie,  et,  pour  la  pureté, 
il  fait  toujours  autorité.  —  Diogo  de  Couto  continua  l'œu- 
vre de  Barros,  et  sut  néanmoins  garder  son  originalité. 
On  a  de  lui  aussi  des  Obsârvations  sur  les  causes  de  la 
décadence  des  Portugais  en  Asie.  —  Un  fils  naturel  du 
conquérant  des  Indes,  Alphonse  Braz  de  Albuquer(|ue, 
publia  les  Commentaires  d  Alphonse  d'Albuquerque,  livre 
très-rare,  où  il  a  mis  en  œuvre  les  Lettres  de  ce  capitaine 
au  roi  Don  Manoel.  —  Damian  de  Goes,  ambassadeur 
de  Jean  III  en  Flandre  et  en  Pologne,  visita  la  Suède, 
le  Danemark,  la  France,  et  a  laissé  sur  ces  pays  de  nom- 
breux ouvrages  en  latin.  Nommé  intendant  de  la  Torre 
do  Tombe  et  historioeraphe  du  royaume,  il  écrivit  la 
Chronique  du  roi  Don  Manœl ,  et  la  Chronique  du  prince 
Don  Juan  (  depuis  Jean  11  ).  Son  style  est  remarquable  par 
une  certaine  hardiesse  philosophique,  dont  il  avait  sans 
doute  puisé  les  principes  dans  ses  relations  avec  les 
hommes  éminents  du  Nord,  Érasme,  OlaQs  Wormius,etc. 
C'est  lui  qui  donna  k  Nicot  les  premiers  plants  de  tabac, 
oui ,  envoyés  à  Catherine  de  Hédicis,  fructifièrent  si  bien 
dans  Paris  et  dans  toute  la  France.  —  Fernknd  Lopes  de 
Castanheda,  garde  des  archives  de  l'Université  de  Coim- 
bre,  est  auteur  d'une  Histoire  de  la  découverte  et  de  la 
conquête  des  Indes  par  les  Portugais,  et  Diogo  Bemardo 
Cruz ,  d'une  Chronique  du  roi  Don  Sébastien, 

L'archéologie  étant  une  branche  de  l'histoire,  nous 
placerons  ici  André  de  Resende,  le  plus  grand  antiquaire 
du  xvi«  siècle;  il  s'appliqua  à  l'étude  des  monuments 
romains  et  de  ceux  des  anciens  peuples  do  la  Lusitanie. 
Ses  ouvrages  sont  intitulés  :  De  antiquitatWus  Lusitaniœ, 
et  Delicim  Lusitanorum. 

Ijbs  voyageurs  fournissent  une  autre  espèce  de  maté- 
riaux à  rhistoire  :  ils  étendent  ou  rectifient  les  limites  de 
la  science  géographique.  Aucune  nation  n'en  posséda  plus 
que  les  Portugais.  On  ne  connaît  cependant  qu'un  petit 
«nombre  de  relations  remarquables,  mais  beaucoup  de 
manuscrits  sont  enfouis  dans  les  archives.  Nous  nomme- 
rons Vas  de  Caminha,  compagnon  de  Cabrai ,  auteur  d'une 
Lettre  au  roi  de  Portugal  sur  la  découverte  du  Bré- 
sil ;  Magellan ,  et  surtout  Mendez  Pinto,  qui  parcourut 
rÉthiopie,  l'Arabie  heureuse,  la  Chine,  la  Tartane,  et  la 
plus  grande  partie  de  l'Archipel  oriental.  La  relation  de 
ses  voyages  ne  parut  qu'en  1614  ;  sous  le  rapport  du  style, 
il  est  mis  au  nombre  des  classiques,  et  son  expression  a 
une  originalité  que  l'étude  ne  saurait  donner. 

Le  Portugal,  dans  cette  période  de  gloire,  eut  ausei 
des  moralistes  :  Frey  Hector  Pinto  écrivit  des  Dialogues, 
célèbres  encore  par  le  charme  du  style  et  les  principes 
enjoués  d'une  morale  pure.  Il  est  classique,  et  fait  auto- 
rité parmi  les  meilleurs  auteurs  portugais.  —  Amador 
Arraiz,  évoque  de  Portalègre,  donna  aussi  des  Dialogues 
remplis  des  meilleures  idées,  et  remarquables  par  l'élé- 
gance des  expressions. 

L'exubérance  d'imagination  que  l'on  remarque  dans  les 
relations  de  voyages ,  et  Jusque  dans  les  ouvi'ages  histo- 
riques des  Portugais,  doit  faire  penser  qu'ils  étaient 
éminemment  propres  au  genre  romanesque  :  en  effet, 

Ïiandant  quelque  temps,  plusieurs  des  romans  de  cheva- 
erie  les  plus  célèbres  ont  été  attribués  à  des  écrivains 
de  cette  nation.  De  ce  nombre  est  VAmadis  de  Gaule , 
dont  les  historiens  de  la  littératui-e  font  honneur  à  Vasco 
de  Lobeira  (  V.  Auadis  ).  —  Francisco  Moraès  a  p<ssé 
aussi  pdur  l'auteur  original  du  Palmerin  d^ Angleterre, 
dout  la  l*^*  édition,  selon  les  Portugais,  serait  antérieure 
à  1547;  mais  ils  n'ont  pu  la  produire.  Moraès  lui-même 
ne  donna  son  ouvrage  que  comme  une  traduction  du 
français  de  Jacques  Vincent  du  Crest.  Il  ebt  démontré 
que  ce  célèbre  roman  appartient  à  l'Espagnol  Luis  Uur- 
tado,  du  moins  pour  la  l'*  et  la  2*  partie,  et  qu'il  faut 
laisser  aux  Portugais  les  quatre  dernières  (  V.  Opusctdo 
acerca  do  Palmerin  Je  Ingleterra  e  do  su  autor,  par 
Manuel  Odorico  Mendès,  Lisb.,  i860,in-8<*).  —  Palmerin 
d'Olive,  ce  roman  ci  estimé  de  Cervantes,  est  également 
regardé  comme  d'origine  portugaise;  cependant  on  ne 
connaît  que  la  Yorsion  espagnole.  M.  Ferdinand  Wolf 
l'attribue  à  une  dame  de  Burgos,  oui  en  aurait  écrit 
la  première  oontiQuation,  le  Primaléon.  —  Bernardin 
Rjbolro,  entre  ses  églogucs,  laissa  un  roman  iutltuié 


Menina  e  Moça,  production  fort  remarquable  pour  le 
style,  et  justement  célèbre.  —  Femand  Lopes  de  Cae- 
tanheda  écrivit  aussi  une  sorte  de  roman  de  chevalerie, 
désigné  sous  le  titre  vague  de  lÀvro  de  cavcdlena  :  une 
des  aventures  qui  y  sont  rapportées  a  été  transcrite  dans 
la  3*  partie  du  Palmerin  ^Angleterre. 

Troisième  période,  ^Vtxpéditioa  de  Don  Sébastien  en 
Afrique  et  le  désastre  d'Alcazar-Kébir  anéantirent  les  res- 
sources du  Portugal ,  et  préparèrent  son  asservissement  à 
l'Espagne  (1580-1640).  La  décadence  des  lettres  ne  fut  pas 
aussi  prompte  que  celle  des  armes;  mais  telle  fut  l'in- 
fluence des  circonstances,  que  les  éoivains  préférèrent 
souvent  adopter  le  langage  des  vainqueura,  et  qu'on  ne 
sait  maintenant  dans  quelle  littérature  les  classer. 

Un  homme  dont  la  pensée  était  plus  vaste  que  le  génie 
n'était  lumineux,  Bernardo  Brito,  entreprit  d'écrire  l'Iiis- 
toire  du  Portugal  depuis  l'origine  du  monde  Jusqu'à 
l'époque  où  il  vivait  :  mais  il  mourut  avant  d'avoir  pu 
traiter  les  temps  modernes.  Son  ouvrage  nous  a  conservé 
des  documents  précieux  ;  cependant  il  manque  de  critique, 
principalement  en  ce  qui  concerne  les  débuts  de  la  mo- 
narchie. Sa  Monarchia  Lusitana  parut  de  1597  k  1690. 
On  a  du  même  historien  un  autre  ouvrage,  plus  consulté 
que  le  précédent,  bien  que  moins  important  :  Éloges  des 
rots  de  Porti^fol  (Lisbonne,  1603,  in-4°).  Les  travaux 
de  Bernardo  Brito  lui  ont  valu  une  réputation  beaucoup 
trop  grande  au  xvu*  siècle,  et  on  l'a  peut-être  trop  ra- 
baissé depuis  j  il  compte  parmi  l^s  classiques,  et  a  laissé 
quelques  poésies.  —  Fray  Duarte  Nunez  de  Laio  est  au- 
teur de  plusieun  ouvrages,  parmi  lesquels  on  distingue 
sa  Description  du  royaume  de  Portugal ,  et  la  l'*  partie 
des  Chroniques  de  ses  rois  :  son  style  est  pur,  simple,  et 
quelquefois  très-noble.  Il  a  puisé  à  de  bonnes  sources,  et 
mérite  beaucoup  de  confiance.  Freyre  d'Andrade  n'écrivit 
qu'une  Biographie^  celle  de  Jean  de  Castro;  c'était,  pour 
un  patriote,  une  belle  histoire  à  retracer  que  celle  de  ce 
vice-roi  des  Indes.  —  Fray  Luis  de  Souza  est  au  nombre 
des  classiques  à  cause  de  l'élégance  et  de  la  pureté  de  son 
style.  Il  écrivit  la  Vie  de  S^  Dominique  et  celle  de  Frey 
Bartholomeu  dos  Martyres,  archevêque  de  Braga.  —  Faria 
de  Souza  a  laissé  une  immense  ouantité  d'ouvrages;  mais 
il  écrivit  surtout  en  castillan.  Ses  «ouvres  historiques , 
imprimées  longtemps  après  sa  mort,  sont  :  Europa  por* 
tugueza,  Lisb.,  1667  ;  Asiaportugueza,  1666, 1674, 1675; 
Afnca  portugueza,  1681.  V America  portugueza  fut, 
dit-on,  achevée  par  l'historien,  mais  ne  put  pas  être  im- 
primée. On  a  de  lui  encore  un  vaste  commentaire  sur  les 
poésies  de  Camoens,  500  ou  600  sonnets,  et  une  multi- 
tude û*églogues.  Pour  avoir  écrit  ordinairement  en  espa- 
gnol ,  il  manque  parfois  de  Justesse  quand  il  ose  de  sa 
propre  langue.  —  Jean  de  Lucena  a  été  l'auteur  élégant 
d'une  Vie  de  S*  François-Xavier. —  Antonio  Boccaro  donna 
une  suite  aux  ouvrages  de  Diogo  de  Couto  sous  le  titro 
de  Décades^  et  conduisit  l'histoire  de  l'Asie  jusqu'à  l'an- 
née 1617  :  il  est  classé  parmi  les  bons  écrivains.  Enfin, 
Brito  trouva  un  habile  continuateur  dans  Antonio  Bran- 
dam.  —  Lu  Bibliothèque  impériale  de  Paris  possède  un 
grand  nombre  de  manuscrits  portugais  roulant  sur  l'his- 
toire, et  dont  la  liste  a  été  donnée  dans  les  Annales  des 
sciences,  par  le  vicomte  de  Santarem. 

On  vit  paraître  à  cette  époque  un  homme  d'un  génie 
bizarre,  connu  par  sa  prodigieuse  fécondité,  et  qui  a  sou- 
vent montré  un  véritable  talent,  le  P.  Maceao.  Après 
une  vie  fort  agitée,  il  s'établit  à  Venise,  disputa  avec  les 
savants  de  omni  re  scibili,  et  proclama  pendant  huit 
jours  ses  fameuses  conclusions  connues  sous  le  nom  de 
Rugissements  littéraires  du  lion  de  S^-âfarc.  Elles  rou- 
laient sur  une  multitude  de  matières,  et  surprirent  les 
hommes  les  plus  accoutumés  à  ces  sortes  de  discussions, 
où  l'on  mêlait  le  sacré  au  profane  et  les  sciences  à  la 

goésie.  II  doit  y  avoir  des  erreurs  dans  la  liste  €[ue  Bar- 
osa  donne  des  ouvrages  du  P.  Macedo  ;  on  y  voit  figurer 
48  poëmes  épiques,  110  odes,  et  2,600  poèmes  héroïques. 
Ce  prodigieux  polygraphe  rendit  peu  de  services  à  la  lit- 
térature de  son  pays,  car  il  a  presque  toujours  écrit  en 
latin ,  en  espagnol  ou  en  italien. 

La  littérature  portugaise  avait  déjà  beaucoup  produit; 
la  critique  se  forma,  mais  sans  aucun  goût.  MÛioel  Faria 
Severim  Jouit  dans  ce  genre  d'une  grande  célébrité  au 
xvu*  siècle;  on  peut  le  regarder  comme  supérieur  à  son 
temps,  bien  qu'il  en  eût  les  défauts,  c-à-d.  une  érudition 
pédantesque  qui ,  au  lieu  de  s'attachei  aux  faits  Traiment 
importants,  ne  roule  que  sur  des  mots. — Parmi  les  <f cri- 
vains  illustres  de  ce  temps,  il  faut  nommer  encore  Fran- 
cisco Bfanoel  de  Mello,  auteur  de  VBistoire  des  troubles 
êtdêkk  séparation  de  la  Catalogne»  dont  il  fut  témoio  eo 


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bien  det  ooeailont,  et  qu*n  écrivit  en  espagnol.  Il  a  Udssé 
d*autre8  ouvrages,  la  plupart  inédits,  parmi  lesquels  on 
cite  des  poëmes,  un  grand  nombre  de  tragi-comédies,  de 
comédies  4e  farces,  d*au/05,  écrits  presque  tous  en  por- 
tugais, la  Scienria  cabcUa,  la  Carta  de  qtfia  de  Casados, 
excellent  livre  de  morale  enjouée.  Il  était  ami  de  Que- 
vedo,  qu'il  semble  avoir  pris  pour  modèle  dans  ses  Apo* 
loguês  et  Dialogues,  Au  point  de  vue  historique,  on 
recherche  encore  de  lui  la  relation  de  la  campagne  faite  en 
1649  dans  le  Brésil. —  Le  prosateur  le  plus  extraordinaire 
du  xvii*  siècle,  dont  il  fut  le  plus  grand  prédicateur,  est 
sans  contredit  le  Jésuite  Antonio  Vieira,  auteur  de  six  ca- 
téchismes en  diverses  langues  pour  les  catéchumènes  du 
Nouveau-Monde.  On  peut  le  comparer  à  Bossuet  :  il  en 
a  souvent  la  hardiesse  et  Ténergie.  Raynal  a  traduit  en 
français  un  des  plus  remanjuables  monuments  de  sa  m&le 
éloquence.  —  Le  dominicain  Fra  Antonio  Veto  fut  aussi 
un  grand  prédicateur;  une  partie  de  ses  œuvres  ont  été 
traduites  en  français  par  Hezecques,  sous  le  titre  de  : 
Doctes  et  rares  sermons  pour  tous  les  jours  de  Carême. 

Les  écrivains  en  prose  de  ce  temps,  vivant  k  l'abri  du 
cloître,  se  dérobèrent  assez  bien  à  Tinfluenoe  désastreuse 
qu'exerçait  sur  les  lettres  l'état  politique  du  Portugal.  Il 
n'en  fut  pas  de  même  des  poètes  :  la  poésie  vit  d'inspira- 
tion ;  or,  quelle  était  la  poésie  possible,  là  où  tous  les 
sentiments  vraiment  nobles  étaient  comprimés?  Le  des- 
potisme religieux  et  politique  eut  en  Portugal  les  mêmes 
résultats  funestes  qu'en  Espagne.  Un  peuple  peut  être 
réduit  k  perdre  l'enthousiasme;  mais,  comme  il  ne  sau- 
rait perdre  son  imagination ,  ne  pouvant  l'appliauer  à  des 
conceptions  généreuses,  il  la  répand  sur  des  choses  in- 
différentes ou  futiles.  On  vit  donc  en  Portugal  toutes  les 
erreurs  d'imagination ,  toutes  les  extravagances  de  lan- 
gage dont  l'Espagnol  Gongora  avait  donné  l'exemple,  et 
3ue  Balthazar  Gracian  réduisit  en  système.  Le  seul  titre 
es  ouvrages  annonçait  la  décadence  du  goAt;  c'étaient  : 
le  Phénix  ressusdti^  les  Échos  rendus  par  la  trompette 
de  la  Renommée,  postillon  d^Apollon,  etc.  Une  femme. 
Violante  de  Geo,  et  Francisco  Vasconcellos  se  distinguèrent 
dans  ce  genre  d'extravagances.  On  vit  paraître  cependant 
un  genre  nouveau  de  poésie,  qui  tient  de  l'élégie,  et  est 
appelé  saudades,  Antonio  Barbosa  Bacellar  le  mit  en 
vogue  le  premier:  il  l'a  traité  heureusement,  malgré  la 
recherche  et  la  prétention  qui  étaient  à  la  mode.  Comme 
historien,  les  services  qu'il  a  rendus  sont  plus  réels;  il 
publia  le  Journal  du  siège  et  de  la  prise  de  Recife,  par 
Francisco  Barreto  (Lisbonne,  1654).  —  Le  seul  ouvrage  de 
ce  temps  où  il  y  ait  quelque  émanation  du  cœur,  quelque 
poésie,  ce  sont  les  Lettres  portugaises,  qu'une  religieuse 
de  l'AlentéJo ,  jtfarianne  d'Alcofarrada ,  adressa  k  un 
officier  français,  et  que  l'on  peut  comparer  à  celles 
d'HéloIse. 

Quatrième  période,  —  La  révolution  produite  en  Es- 
pagne par  l'avènement  de  la  maison  de  Bourbon  fut 
opérée  en  Portugal  par  la  re«tauration  de  la  maison  de 
Bragance.  Rendu  à  l'indépendance,  ce  pays  sembla  vou- 
loir renaître  par  l'esprit.  Une  Académie  d^ histoire  fut 
créée  sous  Jean  V,  mais  ses  travaux  restèrent  à  peu  près 
sans  utilité.  Par  une  analogie  de  plus  avec  l'Espagne,  le 
Portugal  apcepta  l'ascendant  littéraire  de  la  France.  Le 
comte  d'Ericevra  était  l'ami  de  Boileau  ;  son  esprit  élé- 
gant comprit  les  avantages  de  la  pureté  du  langage,  mais 
il  n'alla  pas  plus  loin.  Il  donna  VHenriqudiaa,  poème 
épique,  dont  Henii  de  Bourgogne  est  le  héros,  et  l'expul- 
sion 4^  Maures  l<>  sujet  ;  il  manqua  d'invention  et  d'ori- 
ginalité, bien  qu'il  s'agit  d'une  gloire  nationale.  Son 
talent  le  rendait  plus  propre  à  écrire  l'histoire,  et  son 
ouvrage  De  la  restauration  du  Portugal  est  encore  fort 
estimé. 

Pendant  que  le  Portugal  s'essayait  à  renaître  à  la  vie 
littéraire,  un  nouveau  désastre  vint  encore  arrêter  pour 
quelque  temps  le  progrès  des  esprits  :  dans  l'effrojn&ble 
tremblement  de  terre  de  1755,  un  grand  nombre  de 
oibliothèques  furent  brûlées,  une  foule  d'ouvrages  pré- 
cieux périrent.  On  eut  encore  recours,  pour  relever  la 
littérature,  au  remède  d'une  Académie,  celle  des  Arcades^ 
en  1756.  Un  homme  remarquable  par  la  force  de  sa  pen- 
sée. Luis  Antonio  Viruez,  eut  peut-être  plus  d'influence  ; 
mais  en  rappelant  l'attention  vers  les  auteurs  contempo- 
rains de  Camoens,  l'Académie  des  Arcades  exerça  une 
certaine  action  sur  l'esprit  de  la  nation.  On  vit  paraître 
des  poètes  lyriques  de  sens  rassis,  des  imitateurs  d'Ho- 
race et  de  Pétrarque;  ce  sont:  Gar^,  Diniz  da  Gruz, 
Domingo  dob  Reis.  II  règne  une  plaisanterie  assez  heu- 
reuse dans  le  Goupillon  de  Diniz  da  Cruz ,  qui ,  prenant 
pour  guide  le  Lutrin  de  Boileau  et  la  Boucle  de  cheveux 


enlevée  de  Pope,  a  sa  tirer  beaucoup  de  sa  propre  I 
nation.  —  Il  n'y  avait  plus  de  poésie  :  mais  Jamais  on  ne 
fut  plus  capable  de  dire  en  quoi  elle  consistait.  Francisco 
Diaz  Gomé  est  considéré  par  quelques  écrivains  com  me 
le  seul  critique  digne  de  ce  nom  qu'ait  eu  le  Portugal.  Ses 
poésies  sont  accompagnées  de  notes  et  de  courtes  disser- 
tations, petits  chef»-d*œuvre  de  philolojgie.  Il  existe  en- 
core de  lui  une  dissertation  étendue  qui  est  un  vrai  mo- 
dèle de  critique  littéraire. 
La  restauration  des  lettres  fut  pins  heureuse  dans  le 

genre  dramatique.  Il  y  avait  eu  à  peine  un  thé&tre  à  Lis- 
onne  sous  la  domination  étrangère  :  on  donnait  de 
temps  k  autre  des  drames  espagnols,  auxquels  on  préféra 
bient6t  des  pièces  du  théâtre  français.  Enfin  parut  un  au- 
teur original ,  Antonio  José,  talent  irrégulier,  mais  point 
ennuyeux.  Il  ne  tirait  que  de  lui-même  sa  gaieté,  sou- 
vent triviale,  et  sa  vivacité  fait  absoudre  ses  extrava- 
rinces.  Ses  pièces  étaient  des  espèces  d'opéras-comiques 
grand  spectacle. — Les  imitateurs  d'Antonio  José,  paj'mî 
lesquels  on  distingue  S.  Sylveiro,  eurent  ses  défauts 
plutôt  que  ses  qualités.  Garçao  et  Diniz  da  Cnu  es- 
sayèrent en  vain  de  combattre  le  goût  exclusif  que  sem- 
blait montrer  la  nation  pour  le  genre  de  spectacle  dont 
A.  José  offrait  le  modèle  ;  mais  leurs  pièces  n'étaient  que 
médiocres.  On  goûtait  aussi  les  comédies  de  Molière  : 
Manoel  de  Souza  donna  en  1769,  avec  quelques  modifica- 
tions, la  traduction  de  Tartufe  et  celle  du  Bourgeoit 
gentilhomme;  U  Malade  imaginMre  fut  imprimé  en 
1741. 

La  décadence  des  littératures  est  l'ère  des  faiseurs  de 
classifications,  des  compilateurs  biographes  et  lexico- 
graphes. Un  ouvrage  des  plus  estimables  en  ce  genre  est 
la  Bibliotheca  lusitana  par  Diego  Barbosa  :  l'auteur  est 
exact;  il  a  en  à  sa  disposition  des  documents  nombreux, 
mais  il  n'est  purement  que  bibliographe.  Un  autre  ou- 
vrage devenu  fort  rare,  et  qui  a  beaucoup  servi  à  Bar- 
bosa, c'est  le  Theatrwn  Lusitania  litterarum,  etc.,  œuvre 
de  critique,  où  l'on  trouve,  en  général ,  des  Jugements 
exacts  et  concis.  Citons  encore  VAgiologio  lusitano  de 
Jorge  Cardoso,  ouvrage  plein  de  renseignements  intéres- 
sants. —  Les  conquêtes  des  Portugais  dans  les  Indes  et 
en  Afrique  développèrent  chez  eux  le  besoin  de  connaître 
les  langues  orientales,  et  k  cet  é^rd  peu  de  nations  ont 
rendu  plus  de  services,  notamment  en  ce  qui  concerne  \e  , 
chinois  et  le  Japonais.  Les  orientalistes  trouveront  de? 
indications  précieuses  dans  la  Bibliotheca  de  Barbosa.  It 
en  est  de  même  pour  les  divers  idiomes  africains,  ceux 
d^  lies  Canaries  et  du  Brésil.  On  estime  les  travaux  de 
Joîo  de  Souza  sur  l'arabe. 

Les  ouvrages  en  prose  indiquent  seuls  le  moovemen* 
des  esprits  dans  une  nation.  Pour  mesurer  dans  quel  éw 
le  régime  espagnol  avait  mis  le  Portugal ,  il  suffit  de  dire 
que  le  xvni*  siècle  ne  produisit  pas  un  seul  livre  remar- 

2uable  en  prose.  A  défaut  d'ouvrages  originaux,  l'Aca- 
émie  des  Sciences,  fondée  sous  Joseph  V,  fit  rassembler 
dans  les  couvents  un  grand  nombre  de  chronicjues  et  de 
documents,  dont  quelques-uns  ont  été  publiés.  Cette 
compagnie  fit  écrire  aussi  les  Éloges  des  grands  hommes 
de  la  nation,  et  l'on  admire  les  parallèles  ingénieux  que 
Mcllo  de  Castro  fit  du  roi  Alphonse  avec  Yasco  de  Garoa, 
et  du  roi  Sanche  I"*"  avec  Edouard  Pacheco.  L'Académie 
entreprit  aussi  un  grand  Dictionnaire  de  la  langue,  dont 
il  parut  un  volume  en  1793,  et  qui  n'a  pas  été  continué. 
Cette  Académie  a  publié  une  collection  de  Mémoires 
dignes  d'estime. 

Le  XIX*  siècle  a  produit  en  Portugal  des  poètes,  dont 
les  plus  connus  sont  Francisco  Manoel  do  Nascimento, 
le  docteur  Da  Cunha,  Maximiano  Torrès  Azevedo,  Souza 
da  Camara,  élégant  et  fidèle  traducteur  des  meilleures 
tragédies  de  Voltaire  ;  tous  poètes  estimables,  sans  avoir 
rien  de  bien  original.  Il  faut  tjouter  à  ces  noms  Manoel 
Barbosa  Du  Bocage,  plutôt  improvisateur  que  poète,  che£ 
d'une  école  dite  elmanisme,  du  nom  d'Elmano  qu'il  prit 
4ans  ses  œuvres.  La  langue  portugaise  était  pour  Du  Bo- 
cage l'objet  d'un  véritable  culte  :  persuadé  (qu'elle  convient 
à  tous  les  genres  de  poésie,  il  ne  voulut  nen  emprunter 
k  l'Antiquité ,  et  se  renferma  dans  la  connaissance  des 
chers-d'œuvre  nationaux.  Il  a  laissé  des  poésies  très-po- 
pulaires, et  trois  tragédies  à  peine  ébauchées,  Viriatus, 
Alphonse  Henriquei ,  et  Vtuco  de  Gama. 

Les  Portugais  considèrent  VOrient  d'AgostInho  de  Hia* 
cedo  comme  la  première  épopée  moderne,  Jugement  fort 
contestable;  le  sujet  est  le  même  que  celui  des  Lusiades. 
Il  y  a  encore  d'autres  épopées,  comme  la  BragancMa  de 
M.  Roque  Carvalho  Moreira.  Almeida  Garrett  a  composé 
an  poème  à  la  gloire  de  Camoens,  et  un  roman  poétique 


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intitulé  Adozinda.  Mouzinho  de  Albuqnerque  s^est  fait 
an  nom  par  ses  Géorgiqties  portugaises,  et  J.-^.  de  Ma- 
galhaens  par  ses  Soupirs^  poétiqties,  —  Dans  le  genre  dra- 
matique, nous  ne  pouvons  signaler  que  la  Nova  Castro, 
tragédie  de  J.-B.  Gomez,  considérée  maintenant  comme  le 
chef-d'œuvre  du  théâtre  portugais,  et  le  Triomphe  de  la 
nature,  drame  de  M.  Pedro  Nolaseo.  Avant  que  Gomez 
eut  donné  son  Inès  de  Castro,  on  regardait  Osmia  comme 
la  première  tragédie  moderne  :  cette  pièce ,  conçue 
d'après  l'école  française,  est  de  la  comtesse  de  Vimieiro. 
Enfin,  par  des  tentatives  plus  nombreuses  que  distin- 
guées, M.  Pimenta  de  Agusà  a  essayé  d'être  national 
dans  deux  ouvrages  :  la  Conquête  du  Pérou,  et  Viriatus, 
qui  ont  été  traduits  en  français  par  H.  Ferdinand  Denis, 
dans  la  Collection  des  théâtres  étrangers. 

Si  Ton  veut  avoir  une  idée  exacte  de  la  situation  où  se 
trouvent  maintenant  et  les  sciences  et  la  littérature  en 
Portugal,  on  consultera  les  Mémoires  de  l'Académie;  on 
y  verra  qu'une  nation,  que  l'on  a  cru  arrêtée  dans  ses 
progrès,  continue  les  plus  importants  travaux  avec  un 
zèle  que  l'Europe  n'apprécie  peut-être  pas  assez.  A  la 
tèto  des  hommes  de  talent  qui  contribuent  à  la  rédaction 
de  ces  Mémoires,  doit  être  placé  l'éminent  administrateur 
de  la  Bibliothèque  nationale  de  Lisbonne,  M.  Herculano, 
auteur  d'une  très-remarquable  Histoire  du  Portugal, 

V,  Blachado  Barbosa,  Bibliotheca  lusitanica,  Lisbonne, 
1741-52,  4  vol.  in-fol.;  Andrès,  De  l'origine,  des  progrès 
et  de  Vétat  CKtuel  de  la  littérature,  en  ital.,  Parme,  1782, 
7  vol.  in-4<*  :  le  Catalogtêê  des  auteurs  portugais  qui  est 
en  tête  du  Dictionnaire  de  r Académie  de  Lisbonne,  1793; 
Bouterweck,  Histoire  de  la  poésie  et  de  l'éloquenee  chez 
les  peuples  modernes,  en  allem.,  1801-1819, 12  vol.  in-S'^  ; 
Robert  Southey,  Notice  sur  la  poésie  portugaise;  Costa 
e  Sylva,  Essais  biographiques  et  critiques  sur  les  meil- 
leurs poëtes  portugais^  en  portugais  ;  Sismondi ,  Histoire 
des  littératures  du  mtdi  de  V Europe,  1813,  4  vol.  in-8*>; 
Ferdinand  Denis,  Résumé  de  V histoire  littéraire  du  Por- 
tugal,  Paris,  1826,  in-18;  Adrien  Balbi,  Statistique  du 
Portugal ,  Paris,  1834,  2  vol.  in-S»  ;  J.-F.  da  Sylva,  Dic- 
tionnaire bibliographique^  Lisbonne,  1801, 5  «oî.    Ë.  B. 

PORTUGAISE  (Numismatiaue).  Les  monnaio»  des  pre- 
miers temps  de  la  monarchie  portugaise  sont  rares.  Il  y 
en  avait  deux  principales  :  la  livre  d'ai^geni ,  qui  étal;; 
d'origine  française,  et  que  le  prince  Henri  de  Bourgogne 
introduisit  dans  les  États  à  lui  concédés  par  le  roi  de  C^ 
tilie  ;  et  le  maravédis  d'or,  dont  l'usage  était  passé  des 
Arabes  chez  les  chrétiens,  et  qui  parait  avoir  valu  2  livres 
et  demie.  La  livre  se  divisait  en  20  soldos  ou  sous,  pièces 
de  billon  dont  on  distinguait  deux  sortes  :  les  soldos 
brancos  (  sous  blancs  ),  dans  lesc|uels  entrait  de  l'étain , 
et  qui  contenaient  chacun  12  deniers;  et  les  soldos  pretos 
(sous  noirs),  tout  en  cuivre.  Il  est  également  question 
de  maravédis  d'argent,  valant  15  deniers.  Ces  diverses 
monnaies  eurent  cours  Jusqu'au  règne  d'Alphonse  V.  Ce 
prince  fit  fabriquer  des  pièces  nouvelles  d'argent,  qu'on 
désigne  par  le  nom  d*alfonsim ,  et  auxquelles  fut  donnée 
la  valeur  nominale  des  monnaies  anciennes,  bien  que 
leur  poids  métallique  fût  moindre.  Sous  le  roi  Diniz,  les 
monnaies  d'or  furent  appelées  dobras  cruzadas  (dou- 
blons à  la  croix  ).  Il  en  fallait  60  pour  faire  un  marc  ; 
cell^  qu*on  fabriqua  sous  Pierre  1*'  représentèrent  le 
50*  du  marc.  Le  même  prince  émit,  à  l'imitation  des 
monnaies  de  France,  des  tomeze  (  tournois  )  et  des  meio 
tomese  (demi-tournois),  dont  il  y  avait  65  au  marc  d'ar- 
gent, et  d'autres  tomeze  plus  petits,  dont  il  fallait  130 
pour  former  le  marc.  A  son  tour,  dans  la  seconde  moitié 
du  xrv*  siècle,  le  roi  Ferdinand  frappa  plusieurs  mon- 
naies :  le  gentil ,  dont  il  y  eut  plusieurs  types  représen- 
tant 4  livres  1/8,  3  livres  1/2,  et  3  livres  5  sous  ;  la  bar- 
buda,  monnaie  d'argent  avec  beaucoup  d'alliage,  à  laquelle 
on  donnait  la  valeur  d'une  livre,  et  qui  empruntait  son 
nom  k  une  sorte  de  casque  qu'on  y  avait  gravé;  le  grave 
(lance)  et  le  pilarte,  également  d'argent,  mais  à  très-bas 
titre,  et  qui  recevaient  aussi  une  valeur  nominale  exces- 
sive. Le  désordre  continua  sous  Jean  P'^,  où  l'on  émit  des 
réaux  d'argent  valant  9  deniers,  et  dont  72  faisaient  un 
mar&i  puis  d'autres  réaux  qui  ne  furent  plus  qu'au  titre 
de  5  et  de  4  deniers,  tout  en  conservant  la  même  valeur, 
et  enfin  des  sextiis,  qui  valaient  la  0*  partie  d'un  réal. — 
Une  révolution  monétaire  dut  être  opérée  par  le  roi 
Duarte  (Edouard).  Ce  prince  fit  frapper  des  reaes  bran- 
cos (réaux  blancs),  monnaie  de  cuivre  avec  un  alliage 
d'un  autre  métal,  ayant  la  valeur  d'un  sou  ancien,  et  des 
reaes  pretos  (réaux  noirs),  qui  n'en  représentaient  que 
la  10*  partie.  Ses  écus  d'or  furent  de  bas  aloi.  Du  r^gne 
d'Alphonse  V  datent  la  cruzade,  dont  l'or  est  si  fin  qwoa 


le  rechercha  longtemps  pour  dorer  ;  le  rodtsto,  réal  on 
était  figurée  une  roue  de  moulin  ;  et  Vespadim ,  monnaie 
de  cuivre  et  d'argent,  destinée  à  perpétuer  le  souvenir  de 
l'ordre  de  la  Tour  et  de  l'Épée. 

Avec  les  découvertes  en  Afrique  et  en  Orient,  les  va^ 
leurs  monétaires  changèrent  nécessairement.  En  1490, 
Emmanuel  le  Fortuné  fit  frapper  des  portugaises,  au  titre 
de  24  carats,  et  valant  10  cruzades,  puis  une  monnaie 
d'argent  portant  le  nom  d'indios,  et  dont  il  fallait  70  pour 
le  marc;  dans  les  dernières  années  de  ce  règne,  la  croix 
de  l'ordre  du  Christ,  qui  figurait  sur  les  pièces  d'or  et 
d'argent ,  fit  place  à  une  sphère,  d'où  vint  à  ces  pièces  le 
nom  d'espheras.  Au  règne  de  Jean  III  se  rapportent  des 
monnaies  d'or  portant  l'image  de  S^  Vincent  ou  celle  de 
S^  Thomas,  apôtre  des  Indes,  ainsi  (|ue  les  calvarios, 
pièces  d'or  de  2  cruzades,  où  l'on  avait  gravé  une  croix 
sur  un  calvaire.  Par  ordonnances  du  27  juin  1558  et  du 
22  ami  1570,  Don  Sébastien  ordonna  que  l'on  battrait  en 
argent  des  testons  (il  en  fallait  24  pour  un  marc),  de^ 
d^i-iestons,  des  vtnteiis  et  des  demi-vintens,  et  que  la 
monnaie  de  cuivre  appelée  patacâo,  qui  valait  10  reis, 
n'en  vaudrait  plus  que  3.  —  Pendant  la  domination  espa- 
gnole, des  monnaies  d'or  valant  4  cruzades  circulèrent 
en  Portugal.  Après  le  triomphe  de  la  maison  de  Bra- 
gance,  Jean  IV  fit  fabriquer  des  cruzades  d'argent  valant 
100  reis,  des  demi-cnizades,  des  testons  et  des  demi-tcs* 
tons,  puis  une  monnaie  d'or  qui  valut  Jusqu'à  12,000  reis. 
Sous  Alphonse  VI,  il  y  eut  émission  de  pièces  d'or  de 
2,000  et  de  4,000  reis  ;  les  monnaies  d'argent  valurent 
2  testons,  1  teston,  et  4  vintens.  On  a  quelques  pièces  de 
billon  frappées  au  temps  où  Pierre  II  n'était  que  régent 
du  royaume  :  devenu  roi ,  il  émit  des  moedas,  monnaies 
d'or  de  4,400,  4,000,  2,000  et  1,000  reis,  et  des  cruzades 
d'argent  de  MO  et  480  reis.  En  1688,  une  loi,  qui  devait 
rester  longtemps  en  vigueur,  fixa  le  titre  légal  de  l'or  à 
22  carats.  En  1700,  on  commença  de  frapper  des  mon- 
naies particulières  pour  le  Brésil;  elles  eurent,  d'ailleurs, 
la  même  valeur  que  celles  de  la  métropole.  A  partir  du 
xvni*  siècle,  les  monnaies  du  Portugal  ont  été  fixées. 

PORTUGAISE,  monnaie  d'or  en  usage  dans  le  PortugaL 
Elle  vaut  un  demi-dobrao  ou  6,400  reis. 

PORTUGAL  (Architecture  en).  Les  pjus  anciennes 
construcfivns  que  l'on  trouve  en  Portugal  offrent  une 
grande  ressemblance  avec  les  monuments  celtiques  de  la 
France  (  V,  Celtiqdes).  Ce  sont  :  les  Antas,  espèces  de 
cromlechs  qu'on  trouve,  par  exemple,  entre  Pegôes  et 
Vendas-Novas  et  près  d'Arrayolos;  les  Castros  ou  CrcLS' 
tos,  enceintes  circulaires  de  pierres  dont  il  y  a  un  grand 
nombre  dans  le  pays  de  Tras-os-Montes,  et  qu'on  a  re- 
gardées à  tort  comme  des  restes  de  châteaux  b&tis  par  les 
chrétiens  pour  se  défendre  contre  l'invasion  des  Maures; 
les  Mamoas  ou  Modorras,  élévations  circulaires  de  terre, 
indiquant  les  tombes  de  quelques  chefs.  La  domination 
romaine  a  laissé  des  traces  durables  en  Portugal  :  nous 
citerons  les  restes  d'amphithé&tre  trouvés  à  lisbonn^ 
les  bains  de  Cintra,  que  les  habitants  appellent  la  citerne 
des  Maures,  et,  à  Évora,  non  pas  raq[ueduCo  qui  a  été 
rebâti  complètement  sous  Jean  III,  mais  un  temple  co- 
rinthien qu'on  croit  avoir  été  dédié  à  Diane,  et  une  tour 
carrée  dite  de  Sertorius.  Il  existe  aussi  des  constructions 
chrétiennes  d'une  grande  antiquité  :  la  cathédrale  de 
Coimbre  remonte  au  temps  des  Goths;  ses  murailles, 
qui  ressemblent  extérieurement  à  celles  d'un  vieux  chft>- 
teau,  paraissent  être  tout  ce  qui  reste  de  cette  époque.  A 
la  période  gothique  appartiennent  également  la  cathé- 
drale de  Braga,  dont  on  ne  peut  cependant  déterminer  la 
date  précise,  et  l'église  de  Cedofeita  (la  bientôt  faite),  à 
Porto,  fondée  en  5d6.  Parmi  les  monuments  d'architec- 
ture sarrasine  ou  moresque,  on  cite  le  château  de  Feira, 
celui  de  Pombal,  où  l'on  remarque  aussi  une  chapelle 
dite  des  Templiers,  les  châteaux  d'Alcoba^  et  de  Cbam. 
—  Quand  le  Portugal  forma  une  monarchie  particulière, 
les  arts  prirent  un  grand  essor.  Sous  le  prince  Henri 
furent  fondées  les  cathédrales  de  Viseu  et  de  Porto,  et 
l'on  voit  encore  à  Guimaraens  les  vestiges  d'un  palais 
du  même  prince.  Pendant  le  xii*  siècle,  on  éleva  le  cé- 
lèbre monastère  d'Alcobaça  {V,  ce  mot)^  et  le  couvent  de 
Santa-Cruz  à  Coimbre.  Vinrent  ensuite  le  couvent  du 
Christ,  à  Thomar  (V.  ce  mot)^  la  catliédrale  de  Lisbonne, 
les  couvents  de  Batalha  et  de  Belem  {V,  ces  mots)y  le 
palais  royal  de  Cintra,  celui  de  Mafra  (V.  ce  mot)^  etc., 
qui  représentent  les  divers  âges  de  I  architecture  du 
moyen  &ge  et  des  temps  modernes. 

PORTUGAL  (Musique  en),  La  musioue  des  Portugais  pré- 
sente une  grande  analogie  avec  celle  des  Espagnols.  Ui 
ont  un  grand  nombre  d'airs  nationaux  d'une  assez  haute 


■■h'        — .- 


POS 


1474 


POS 


antiquité,  et  quils  appellent  ladunes  et  modinhas  :  mais 
lia  ont  éLbandonnô  de  bonne  heure  leur  style  national, 
pour  adopter  la  manière  italienne.  Un  opéra  italien  fut 
établi  à  Lisbonne  au  xviii*  siècle  par  Jommelli.  Les  com- 
positeurs les  plus  connus  de  Tépoque  actuelle  sont  Bon- 
tempo,  Portogallo,  José  Mauncio  (mulâtre  brésilien), 
Da  Costa,  Franchi  et  Schiopetta. 

PORTULAN.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

POSAUNE,  nom  que  les  Allemands  donnaient  autre- 
fois au  trombone.  Ils  l'appliquent  encore,  dans  Torgue, 
à  la  bombarde  de  16  pieds  et  de  32  pieds,  et  k  la  trom- 
pette de  pédale. 

POSITIF,  en  Grammaire,  se  dit  des  mots  qui  énoncent 
la  réalité,  par  opposition  aux  mots  négatifs  :  ainsi,  égal  est 
un  positif,  et  son  contraire  inégal  un  négatif.  Il  se  dit  éga- 
lement des  phrases;  ainsi.  Faites  le  bien,  voilà  une  phrase 
positive;  Ne  faites  pas  le  mal  est  une  phrase  négative. 
C'est  par  analogie  qu*on  dit,  en  parlant  de  quelqu'un 
qui  n'a  pas  de  défauts,  qu'il  a  des  qualités  négatives; 
tandis  que  les  qualités  positives  consistent  en  vertus 
réelles.  —  Dans  les  adjectifs  et  dans  les  adverbes,  on  ap- 
pelle absolument  le  positif  la  forme  que  prennent  ces 
mots  lorsqu'ils  ne  renferment  aucune  idée  de  comparai- 
son, d'augmentation,  de  diminution  actuelle,  lorsqu'ils 
gardent  leur  signification  primitive  et  fondamentale  sans 
aucun  rapport  au  plus  ou  au  moins  dont  ils  sont  suscep- 
tibles, soit  absolument,  soit  relativement.  Ainsi,  un  bon 
livre,  les  bons  livres;  il  lit  bien,  il  marche  lentement,  etc. 
V.  Comparaison  (Degrés  de).  P. 

POSITIF,  buffet  d'orgue  plus  petit  (jue  le  grand  buffet, 
et  qui  a  son  clavier  particulier,  ainsi  que  son  abrégé.  II 
est  ordinairement  placé  sur  le  devant  du  grand  orgue; 
mais  quelquefois  il  n'a  pas  de  buffet  particulier,  et  il  est 
mis  dans  le  soubassement  du  grand  buffet.  Les  jeux  que 
l'on  peut  employer  au  positif  sont  :  le  cornet,  le  près- 
tant,  les  bourdons,  la  flûte  de  quatre  pieds,  le  huit-pieds 
ouvert,  le  nasard,  la  quarte  de  nasard,  la  dou blette,  la 
tierce,  le  larigot,  la  fourniture,  la  cymbale,  la  trompette, 
le  clairon,  le  cromorne,  et  la  voix  humaine.  Ces  jeux, 
dont  le  diapason  et  le  nombre  sont  moindres  que  ceux 
du  grand  orgue,  servent  spécialement  à  accompagner  le 
chœur.  F.  C. 

POSITION,  nom  que  l'on  donne,  dans  le  jeu  des  in- 
struments à  manche,  au  lieu  où  la  main  se  pose,  selon  le 
ton  dans  lequel  on  veut  jouer.  Quand  la  main  est  tout 
au  haut  du  manche  contre  le  sillet,  en  sorte  que  l'index 
pose  à  un  ton  de  la  corde  à  vide,  c'est  la  position  natu- 
relle. Quand  on  démanche,  on  compte  les  positions  par 
les  degrés  diatoniques  dont  la  main  s'éloigne  du  sillet. 

POSITIVISME,  opinion  qui  n'admet  de  vrai  et  de  cer- 
tain que  ce  qui  est  mathématiquement  démontré  ou  ce 
qui  tombe  sous  l'observation  sensible.  Avouée  ou  non, 
cette  manière  de  voir  est  aujourd'hui  celle  du  grand 
nombre  des  savants.  Au  fond,  c'est  le  matérialisme  et  le 
scepticisme  moral.  Elle  a  été  réduite  en  système,  ré- 
gulièrement exposée  et  formulée  par  Auguste  Comte. 
L'école  dont  il  est  le  chef  s'appelle  école  positiviste;  sa 
philosophie,  philosophie  positiviste.  Elle  a  un  assez  grand 
nombre  d'adhérents,  et  s'accorde  très-bien  avec  les  habi- 
tudes d'un  siècle  matérialiste  et  sceptique.  Peu  d'hommes 
cependant  ont  assez  de  hardiesse  pour  en  professer  les 
principes  et  en  adopter  toutes  les  conséquences.  A  côté 
de  ce  système,  on  trouve  un  autre  positivisme  moins  net, 
moins  précis,  qui  offre  différentes  formes;  il  se  caracté- 
rise lui-môme  en  proscrivant  tout  ce  qui,  selon  lui,  est 
absolu  :  c'est  une  sorte  de  scepticisme  déguisé.  Quelque- 
fois il  professe  le  prubabilismc,  ou  il  fait  appel  au  sen- 
timent. Plein  d'inconséquences  et  d'équivoques,  il  est 
insaisissable,  à  cause  du  va^ue  dont  il  s'enveloppe  et  des 
nuances  dont  se  pare  sa  subtilité.  Il  y  a  ainsi  un  positi- 
visme issu  de  toutes  les  écoles,  du  sensualisme,  de  l'idéa- 
lisme, du  panthéisme,  et  du  mysticisme,  qui  est  ce  qu'il 
y  a  de  moins  positif.  —  Un  trait  commun  rapproche 
toutes  ces  sectes,  c'est  le  rejet  de  la  métaphysique  comme 
n'appaitenant  pas  au  domaine  de  la  science  et  agitant  des 
problèmes  insolubles  à  Tcsprit  humain.  Mais  encore  ici 
1rs  cspriis  ne  s'entendent  pas  :  les  uns  rejettent  les  faits 
de  l'ordre  intellectuel  et  les  font  rentrer  dans  les  faits 
physiques;  les  autres  les  accueillent  et  leur  font  une 
place  à  part;  seulement  ils  se  divisent  encore,  ren- 
voyant les  uns  à  l'histoire  ou  à  la  philologie  comparée, 
ou  à  l'étude  des  langues,  les  autres  à  l'observation  de  la 
conscience.  —  Quoi  qu'il  en  soit  de  ces  dissidences  au 
iQin  du  positivisme,  voici  les  faits  principaux  de  la  phi- 
losophie positive  Uilie   que   Texposout   Comlo,  cl  son 


principal  disciple,  M.  Littré,  qui  a  consacré  à  cet  aposto 
lat  son  érudition  et  sa  plume. 

L'histoire  de  l'esprit  humain  offre  trois  époques  dis* 
tinctes  et  principales  :  1°  le  règne  de  la  Théologie  ou  dei 
croyances  religieuses  ;  2"  le  rè^e  de  la  Métaphysique  oc 
des  systèmes  ;  3*  le  règne  de  la  Science,  L'humanité  en 
est  à  ce  dernier  degré,  son  âge  mûr.  Ainsi  les  croyances 
religieuses,  comme  les  systèmes,  ont  fait  leur  temps;  la 
science,  qui  a  pour  objet  les  faits  positifs  et  les  lois  qui 
les  régissent  ou  les  coordonnent,  doit  désormais  guider 
riiumanité,  régler  les  mœurs  et  les  institutions,  comme 
elle  préside  aux  arts  utiles  et  à  l'industrie.  Elle  doit 
fonder  même  une  religion  et  un  art  nouveaux.  Seulement 
il  faut  que  la  science  embrasse  tous  les  ordres  de  faits, 
les  faits  moraux  et  sociaux  comme  les  faits  physiques  ; 
aux  sciences  mathématiques  et  physiques  s'sgoutent  la 
biologie  et  la  sociologie. 

Tout  en  excluant  la  métaphysique,  cette  école  n'en 
donne  pas  moins  une  solution  à  tous  les  problèmes  phi- 
losophiques :  i**  elle  a  même  sa  métaphysique,  toute  né- 
gative, il  est  vrai,  qui  rejette  comme  insolubles  toutes 
les  questions  agitées  par  les  philosophes  sur  la  matière  et 
l'esprit,  la  substance  des  êtres,  sur  Dieu,  le  t«mps« 
l'espace,  les  causes,  l'&me,  le  libre  arbitre  ou  la  liberté 
morale,  etc.  Les  faits  seuls  que  l'observation  sensible 
atteste,  les  lois  qui  les  généralisent  ou  les  coordonnent, 
voilà  l'unique  domaine  de  la  science.  Le  reste  est  en  de- 
hors de  la  portée  de  l'esprit  humain.  Ce  résultat  nette- 
ment formulé,  c'est  le  scepticisme  et  l'athéisme,  et,  si  la 
négation  formelle  de  l'esprit  n'est  énoncée,  la  confusion 
de  la  matière  et  de  l'esprit  équivaut  au  matérialisme  ; 
c'est  aussi  le  fatalisme,  car  les  lois  qui  régissent  la  libertâ 
humaine  sont  semblables  à  celles  de  la  Nature.  Voilà 
pour  la  métaphysique.  —  2"  La  cosmologie  ou  la  phy- 
sique se  compose  des  principaux  résultats  des  sciences 
mathématiques  et  physiques  coordonnés  par  certaines  hy- 
pothèses ou  lois  générales.  —  3**  La  biologie  aboutit  à  une 
science  de  l'homme  (ou  anthropologie),  où  les  facultés,  k 
peine  observées,  sont  confondues  avec  les  organes,  en 
sont  les  fonctions.  L'&me  est  un  mot;  elle  n'est,  comme 
la  vie,  qu'une  fonction  du  cortjs,  un  résultat  de  forgani- 
sation  ;  elle  périt  avec  le  corps.  —  4*  La  logique  positi- 
viste, n'admettant  d'autre  instrument  de  connaissance 
certaine  que  l'observation  sensible  et  ce  que  le  raisonne- 
ment en  infère  ou  en  déduit,  se  borne  à  constater  les 
opérations  de  l'esprit  qui  offrent  les  procédés  de  cette 
méthode  :  l'abstraction  ou  l'analyse,  la  généralisation  on 
la  synthèse,  l'induction  empirique  ou  comparative,  et  la 
déduction.  —  5»  La  morale  est  celle  de  Vintérét,  qui  est 
censé  engendrer  tous  nos  devoirs.  Seulement,  à  l'intérêt 
particulier  s'ajoute  l'intérêt  général,  et  aux  passions 
éifoïstes  les  passions  désintéressées,  altruistes,  pour 
parler  comme  cette  école.  La  sociologie  ou  science  sociale 
complète  la  morale,  et  représente  ici  la  politique  et  la 
législation.  Elle  donne  la  solution  de  tous  les  problèmes 
sociaux  conforme  à  la  destinée  de  l'humanité,  qui  est  la 
plus  grande  somme  de  bien-être  matériel  et  moral  des 
individus,  cette  destinée  étant  toute  renfermée  dans  le 
cercle  de  la  vie  actuelle.  — 6"  Ce  système,  où  l'on  professe 
l'athéisme,  a  cependant  aussi  sa  religion  et  son  culte  :  le 
culte  de  V humanité.  Mais  l'humanité  étant  un  être  abs- 
trait, la  collection  de  tous  les  individus  de  l'espèce  hu- 
maine, dans  le  passé,  le  présent  et  l'avenir,  au  culte  de 
l'humanité  on  substitue  celui  des  grands  hommes  qui  la 
représentent.  La  religion  et  ses  cérémonies  ont  aussi 
pour  but  de  conserver  le  souvenir  des  morts  dans  la  mé- 
moire des  vivants.  —  7*  La  vraie  théorie  de  Vart,  dans 
ce  système,  devrait  être  la  reproduction  ou  Vimitaiion 
servile  du  réel,  le  réalisme,  on  lui  donne  pour  but  plus 
élevé  un  certain  idéal  qui  est  l'humanité,  et  pour 
mission  d'exciter,  d'exalter  l'amour  de  l'humanité.  Ce 
système  se  réfute  déjà  sufHsamment  par  ses  consé- 
quences. B — D. 

POSPOLITE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  d9 
Biographie  et  d'Histoire. 

POSSESSIF,  terme  de  Grammaire,  appliqué  aux  pro- 
noms et  aux  adjectifs  qui  servent  à  marquer  la  posses- 
sion des  personnes  ou  des  choses  qu'ils  représentent. 
Ainsi  :  «  Voilà  ma  part,  et  voici  la  vôtre:  »  ma  est  ad» 
jectif,  et  la  vôtre  pronom  :  en  effet,  ma  détermine  part, 
comme  forait  tout  autre  adjectif;  mais  la  vôtre  rappelle 
ce  même  substantif,  et,  à  ce  tiu^,  il  est  pronom.  Los 
adjectifs  possessifs  sont,   en   français,  mon,  ma,  mes. 


POS 


1475 


POS 


défini  ou  indéfini:  aujourdUiui, ces  adjectifs  ne  sont  plus 
employés  que  comme  pronoms  possessifs  avec  l'article 
défini  :  le  mien,  la  mienne,  les  tiens,  les  siennes,  etc. 
Toutefois,  on  dit  encore  familièrement  un  mien  ami,  un 
sien  oncle.  Les  autres  pronoms  possessifs  sont  :  le  nôtre, 
la  nôtre,  les  nôtres;  le  vôtre,  la  vôtre,  les  vôtres;  le  leur, 
la  leur,  les  leurs.  Comme  les  adjectifs  possessifs  dé- 
rivent, par  le  sens  aussi  bien  que  par  la  forme,  des 
pronoms  personnels,  on  les  appelle  souvent  adjectifs 
pronominatix  possessifs.  —  En  latin  et  en  grec,  il  n'y  a 
aucune  distinction  de  forme  entre  les  adjectifs  possessifs 
et  les  pronoms  possessifs.  Ce  qui  caractérise  le  grec, 
c^cst  que  l*adjectif  ou  le  pronom  possessif  est  très-sou- 
vent remplacé  par  le  génitif  du  pronom  personnel;  et 
Tadjectif  ou  pronom  de  la  3*  personne  est  même  fort  peu 
Dsité  en  prose.  En  latin,  il  n'y  a  point  de  pronom  ni 
d'adjectif  possessif  à  la  3*  personne,  si  ce  n'est  dans  le 
sens  réfléchi;  autrement,  on  emploie  le  génitif  de  l'un 
des  pronoms  de  la  3*  personne,  jnotamment  ejus,  eorum, 
earum.  En  grec,  lorsque  le  nom  est  déterminé,  le  pos- 
sessif est  toujours,  du  moins  en  prose,  accompagné  de 
rarticle.  Dans  l'une  et  l'autre  langue,  un  démonstratif 
peut  même  accompagner  le  possessif.  —  En  français,  on 
met  l'article,  et  non  p&s  l'adjectif  pronominal  possessif, 
avant  un  nom  en  régime,  quand  un  des  pronoms  per- 
sonnels sujet  ou  régime  y  supplée  suffisamment,  ou  que 
Ijs  circonstances  ôtent  toute  équivoque  :  «  J'ai  mal  à  la 
Xvie;  —  Il  a  reçu  un  coup  au  bras.  »  —  Dans  la  plupart 
des  langues,  c'est  un  adjectif  possessif  qui  exprime  ce  qui 
est  rendu  en  français  par  le  pronom  personnel  accom- 
pagné de  d;  ainsi  :  «  Cette  maison  est  à  moi,  à  toi,  à  lui, 
à  nous,  à  vous,  à  eux,  à  elles.  »  au  lieu  de  :  «  est  mienne, 
tienne,  sinme,  nôtre,  vôtre,  leur.  »  —  11  y  a  des  adjec- 
tifs composés  qui  ne  prennent  pas  le  nom  de  possessifs, 
mais  qui  cependant  expriment  la  possession  :  ainsi,  en 
latin,  tgntcomtt^,  qui  a  une  chevelure  rayonnante;  ce/e- 
rtpes,  qui  a  des  pieds  rapides;  multicolor,  qui  a  beau- 
coup de  couleurs;  mulliforis,  qui  a  beaucoup  d'ouver- 
tures ;  tricolor,  qui  a  trois  couleurs.  Quelquefois  c'est 
un  sufiîxe  qui  indique  lidée  de  possession;  tel  est  tg  en 
allemand.  P. 

POSSESSION,  en  Théologie,  état  d'une  personne  dé- 
moniaqtie  ou  possédée  par  le  démon.  Dans  la  possession, 
le  démon  agit  en  dedans,  tandis  que  dans  Vobsession  il 
agit  du  dehors.  V.  le  cardinal  de  Bérulle,  Traité  des 
énergumènes,  Paris,  1631,  in-12  ;  Thyroeus,  Dœmoniaci, 
hoc  est  de  obsessis  à  spiritibus  dœmoniorum  hominibus, 
Lyon,  17SG,  in -12;  Semler,  Commentatio  de  dœmo- 
macis  quorum  in  Novo  Testamento  fit  mentio,  Halœ, 
1770,  in-12;  Farmer.  An  Essay  on  the  demoniaci  ofthe 
New  Testament^  Londres,  1775,  in-8*;  Gruner,  Commen- 
taiio  de  dœmontacis  à  Christo,  léna,  1775,  in-4*. 

POSSESSION,  en  termes  de  Droit  civil,  détention  on  pos- 
session d'une  chose  ou  d'un  droit  que  nous  tenons  ou 
exerçons  par  nous-mème,  ou  par  un  autre  qui  l'exerce 
en  notre  nom  {Code  Napol.^  art.  2228).  La  plupart  du 
temps,  la  possession  se  confond  avec  le  droit  de  pro- 
priété; mais  comme  ce  dernier  peut  être  contesté,  il  était 
nécessaire  que,  jusqu'à  la  solution  de  la  contestation,  la 
première  ne  fût  ni  vacante  ni  incertaine.  La  possession 
est  juste  ou  vicieuse,  elle  est  aussi  de  bonne  ou  de  mau- 
vaise foi.,  suivant  que  le  possesseur  a  reçu  la  chose  en 
vertu  d'un  titre  légal,  vente,  donation  ou  legs,  et  dans 
riçnorance  qu'elle  n'appartenait  pas  à  son  auteur,  ou 
suivant  qu'il  avait  cette  connaissance.  Dans  le  premier 
cas,  le  possesseur  fait  les  fruits  siens,  et  la  loi  respecte 
ses  actes  d'administration  ou  de  disposition.  La  posses- 
sion prolongée  pendant  un  certain  temps  produit  des 
effets  importants  :  au  bout  d'un  an ,  le  possesseur  de 
bonne  ou  de  mauvaise  foi  peut  se  faire  maintenir  dans  sa 
possession  Jusqu'à  la  fin  du  liti^;  prolongée  pendant 
dix  ans  avec  juste  titre,  elle  devient  une  présomption 
léçile  de  propriété,  et  même  sans  juste  titre,  lorsqu'elle 
a  auré  plus  de  trente  ans  (V,  Prescriphon).  La  posses- 
sion 8*acauiert  par  l'appréhension  de  la  chose.  Jointe  à 
la  volonté  de  posséder;  cette  volonté  se  maintient  tant 
ou*une  volonté  contraire  n'est  pas  manifestée.  Le  Code 
Napoléon  pose  ce  double  principe  :  1*  qu'en  fait  de  meu- 
bles possession  vaut  titre,  sauf  le  droit  qui  appartient  an 
propriétaire  d'un  objet  perdu  ou  volé  de  le  revendiquer 
pendant  trois  ans  contre  celui  dans  les  mains  duquel  il 
le  trouve,  et  dans  ce  cas  le  détenteur  a  recours  contre 
celui  qui  lui  a  transmis  l'objet;  2*  que  si  l'objet  a  été 
acheté  dans  ane  foire,  un  marché,  une  vente  publique, 
ou  d'un  marchand  vendant  choses  semblables,  le  pro- 
priétaire ne  peut  se  le  faire  restituer  qu'en  remboursant 


au  possesseur  le  prix  d'acquisition,  hors  le  cas  oft  celui-ci 
est  de  mauvaise  foi  (art.  2279  et  2280).  Les  dépenses  faites 
par  le  possesseur  de  bonne  foi  pour  la  conservation  de  la 
chose  doivent  lui  être  remboursées  avec  les  frais  et  autres 
loyaux  coûts.  V.  Savigny,  Traité  de  la  possession  en  Droit 
romain,  trad.  de  l'allemand  par  Faivre  d'Audelange,  1841, 
in-8<'  ;  Bélime,  Traité  du  droit  de  possession  et  des  ao 
tions  possessoires,  1842,  in-8*>;  Alauzet,  Histoire  de  /& 
possession  et  des  actions  possessoires  en  Droit  français, 
1840,  in-8«;  Molitor,  Traité  de  la  possession,  1851,  in-8<>i 
Gamier,  Traité  de  la  possession  et  des  actions  posses* 
soires,  1847-52,  2  vol.  in-8».  R.  d'E. 

POSSESSION.  Y.  Envoi. 

POSSESSION  D*éTAT.  C'cst  la  possessiou,  par  un  individu, 
des  qualités  qui  constituent  son  état  politique  ou  civil, 
dans  la  société  ou  dans  la  famille;  ainsi,  sa  nationalité,  sa 
filiation  légitime  ou  naturelle,  sa  position  d'homme  marié 
ou  non  marié.  A  défaut  d'actes  de  l'état  civil  ou  de  re- 
connaissance authentique,  la  possession  d'état  suffit  lé- 
galement pour  justifier  la  filiation  légitime.       R.  d'E. 

POSSESSOmE  (Action),  action  personnelle  qui  a  pour 
objet  la  revendication  de  la  possession  d'an  héritage  ou 
d'un  droit  réel  immobilier,  soit  qu'on  en  ait  été  privé, 
soit  qu'on  n'en  Jouisse  pas  paisiblement  et  sans  trouble. 
Dans  le  premier  cas,  l'action  prend  le  nom  spécial  de 
réintégrande ;  dans  le  second,  celui  de  complainte.  Elle 
s'appelle  dénonciation  de  nouvel  œuvre,  si  elle  est  dirigée 
contre  un  propriétaire  qui  fait  sur  son  fonds,  contre  l'an* 
cienne  disposition  des  lieux,  un  ouvrage  préjudiciant  à 
l'héritage  voisin,  et  si  ce  voisin  demande  la  cessation  du 
trouble  ainsi  fait  à  sa  propriété  ou  à  l'exercice  de  son 
droit  réel.  Les  actions  possessoires  ne  sont  recevables 
qu'autant  qu'elles  ont  été  formées  dans  l'année  du  trouble 
par  ceux  qui,  depuis  une  année  au  moins,  étaient  en 
possession  paisible  {Code  de  Procéd.y  art.  23).  Le  posses- 
soire  et  le  pétitoire  (V.  ce  mot)  ne  peuvent  être  cumulés 
(art.25),c.-4t-d.  que  le  demandeur  au  possessoire  ne  peut, 
une  fois  l'instance  engagée,  et  avant  le  jugement  de  ce 
premier  procès,  réclamer  pair  l'action  pétitoire  le  droit  de 
propriété  :  réciproquement,  le  défenseur  au  possessoire 
ne  pourrait  Justifier  le  trouble  ou  la  violence  dont  il 
aurait  usé  pour  s'emparer  de  la  possession,  en  offrant  la 
preuve  de  sa  qualité  de  propriétaire,  parce  qu'avant  toute 
décision  sur  le  fond  du  droit,  le  respect  dû  à  la  posses- 
sion exige  qu'elle  soit  rétablie  ou  maintenue  telle  qu'elle 
existait  antérieurement  à  la  violence  ou  au  trouble.  Les 
mêmes  principes  veulent  que  le  demandeur  au  pétitoire, 
s'i*  ^Jioue  dans  sa  demande,  c.-à^d.  s'il  est  jugé  n'être 
pas  propriétaire,  ne  puisse  revenir  par  la  voie  possessoire 
contester  la  possession  du  défendeur;  il  ne  saurait  pré- 
tendre à  se  faire  investir  de  la  possession,  qui  n'est  par 
elle-même  que  la  manifestation  du  droit  de  propriété. 
V.  Possession,  et  les  ouvrages  suivants  :  Aulanier,  rrat(^ 
des  actions  possessoires,  1829,  in-8°;  Curasson,  Traité 
des  actions  possessoires,  1842,  in-8<';  Crémieu,  Des  ac* 
tions  possessoires  en  Droit  romain  et  en  Droit  français^ 
1846,  in-8°;  De  Parieu,  Études  historiques  et  critiques 
sur  les  actions  possessoires,  1850,  in-S^';  Bliroy,  Théorie 
des  actions  possessoires,  1852,  in-8^';  Carou,  Principes 
ou  Traité  théorique  et  pratique  des  actions  possessoires, 
3*  édit.,  1857,  in-8». 

POSTAGE ,  ensemble  des  pièces  gravées  et  des  porte-' 
vents  qui,  dans  un  orgue,  font  parler  les  tuyaux  placés 
ailleurs  que  sur  les  sommiers.  On  emploie  le  postage  lors- 
que les  tuyaux  sont  trop  grands  ou  tiennent  trop  de  place 
pour  être  mis  sur  les  trous  des  chapes;  tels  sont  les 
tuyaux  de  la  montre,  tant  au  positif  qu'au  grand  orgue, 
les  tuyaux  en  bois  comme  les  flûtes  et  les  bourdons,  au 
moins  dans  leur  partie  grave,  le  cornet  à  cinq  rangs,  et 
plusieurs  autres  Jeux.  L^  porte-vents  sont  en  plomb,  et 
sont  fixés  par  une  de  leurs  extrémités  au  trou  de  la  chape 
et  par  l'autre  à  la  pièce  cravée  qui  porte  le  tuyau.   F.  C. 

POSTCOMMUNION  (du  latin  post ,  après,  et  commu- 
nio,  communion),  antienne  que  le  prêtre  dit,  à  la  Messe, 
immédiatement  après  la  prière  appelée  Communion.  Elle 
renferme  une  action  de  grâces,  et  rappelle  l'objet  de  la 
fête  du  Jour. 

POSTDAM.   V.  POTSDAM. 

POSTDATE  (du  latin  post,  après,  et  du  ftunçais  date)^ 
date  fausse  et  postérieure  à  la  vraie  date  d'an  acte,  d'une 
lettre,  etc. 

POSTE,  lieu  occupé  par  un  corps  de  troupe,  qui  en't 
la  défense  ou  la  garde.  Dans  les  villes,  chaque  poste  a  des 
consignes  particulières  ;  il  existe  une  consigne  générale 
commune  peur  les  cas  d'alerte,  d'incendie,  etc.  Le  chef 
de  poste  est  responsable  de  l'exécution  des  condgnet,  àinii 


POS 


1476 


POT 


9[om  des  objets  contenus  dans  les  corps  de  garde.  A  Tar- 
mée,  on  distingue  les  postes  fortes  et  les  postes  d'obser- 
twUton.  Les  postes  avancés  sont  généndement  occupés  par 
les  voltigeurs.  On  appelle  postes  d'honneur  ceux  qi^l  sont 
^  fournis  par  les  compagnies  d'élite  aux  princes  et  aux 
officiers  généraux ,  et  ceux  où  le  péril  est  Jugé  le  plus 
grand.  kT  Atant-postes. 

)  poste  (Maître  de),  celui  qui  tient  une  Poste  aux  che- 
vaux, c.-&-d.  un  de  ces  relais  de  chevaux  établis  de  dis- 
tance en  distance  pour  le  service  des  voitures  publiques 
ou  des  particuliers  qui  veulent  voyager  avec  célérité. 
Une  poste  est  de  2  lieues  anciennes  ou  8  kilomètres. 
1  POSTË-AUX>CHODX,  petit  canot  affecté  à  la  provision 
V  Journalière  pendant  le  séjour  en  rade  d'un  naviio. 

POSTES  (Administration  des),  grande  administration 
qui  dépend  en  France  du  Ministère  des  Finances,  et  qui 
est  chargée,  par  privilège,  du  transport  des  lettres.  Jour- 
naux et  imprimés.  Elle  accepte  aussi  les  sommes  d'argent 
déposées  à  découvert,  et  en  échange  desquelles  elle  dé- 
livre des  mandats  pour  un  bureau  quelconque,  ainsi  que 
les  papiers  de  commerce  et  d'affaires,  les  échantillons,  et 
les  valeurs  cotées.  Les  Postes  ont  un  directeur  général 
(20,000  fr.  de  traitement),  aidé  de  deux  administrateurs 
(12,000  fr.).  Le  service  se  fait  par  des  directeurs,  assistés 
de  commis,  et  par  des  facteurs,  chargés  de  la  levée  des 
boites^  et  de  la  distribution  des  lettres  à  domicile.  Des 
inspecteurs  (de  3,000  à  8,000  fr.  de  traitement)  ont  mis- 
sion de  surveiller  le  service.  Le  transport  se  fait  sur 
routes  ordinaires  par  des  malles-poste,  et  sur  les  chemins 
de  fer  par  des  bureaux-wagons.  Dans  le  budget  de  1862, 
le  produit  des  postes  est  évalué  à  62,076,000  fr.,  et  les 
frais  d'exploitation  à  45,449,589  fr.  On  transporte  an- 
nuellement environ  265  millions  de  lettres.  V,  Poste, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d* Histoire ,  et, 
dans  le  présent  ouvrage,  les  articles  Appranchissement, 
AviSt  Cartes  de  visite.  Échantillons,  iMPiuués,  Let- 
tre, Taxe,  Timbre-poste^  Valeurs  cotées. 

postes,  nom  qu'on  donne,  en  Architecture,  à  un  dessin 
d'enroulements  placés  à  la  suite  les  uns  des  autres  et  qui 
semblent  se  poursuivre. 

POSTHUME  (du  latin  post^  après,  et  humus,  terre), 
se  dit  de  l'enfant  né  après  la  mort  de  son  père.  Il  n'est 
reconnu  légitime  par  la  loi  qu'autant  que  300  jours  ne  se 
sont  pas  écoulés  entre  sa  naissance  et  la  mort  du  père. 
Un  enfant  posthume  rompt  par  sa  naissance  le  testament 
de  son  père  dans  lequel  il  est  passé  sous  silence. 

POSTICUM.   V.  Anticom. 

POSTILLON,  homme  attaché  au  service  de  tai  poste 
aux  chevaux  pour  conduire  les  voyageurs. 

POSTIiBilNIE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

POSTLUDE,  nom  donné  quelquefois  au  morceau  Joué 
par  les  organistes  à  la  fin  de  l'office,  et  qu'on  appelle 
aussi  une  sortie, 

POSTSCENIUM,  partie  d*un  thé&tre  romain  qui  était 
derrière  la  scène,  celle  où  se  retiraient  les  acteurs  pour 
changer  de  costumes,  et  où  se  plaçaient  les  décors  et  les 
machines. 

POST-SCWPTUM,  c-àrd.  en  latin  écrit  après  coup, 
ee  qu'on  i^oute  à  une  lettre  après  la  signature.  On  le 
marque  par  Tabrévlation  P.  S. 

POSTSIGNAM,  soldats  romains  de  la  2*et  de  la  3*  ligne 
de  bataille,  derrière  (post  )  la  première  où  étaient  les 
enseignes  {signa), 

POSTULANTS  (du  latin  postulare,  demander) ,  nom 
donné,  dans  l'Enregistrement  et  les  Domaines,  à  ceux 
que,  dans  d'autres  administrations,  on  appelle  Aspirants 
ou  Surnuméraires. 

POSTULAT,  en  latin  Postulatum,  terme  de  Philoso- 
phie, qui  désigne  ce  que  l'on  demande  à  son  adversaire, 
au  commencement  d'une  discussion,  comme  fait  reconnu 
ou  axiome.  Il  y  a  dans  la  philosophie  de  Kant  trois  pos^ 
tulats  :  ceux  de  la  liberté,  de  l'immortalité  de  l'àme,  et 
de  l'existence  de  Dieu. 

POSTULATION,  en  termes  de  Droit,  action  d'occuper 
pour  une  partie  devant  un  tribunal.  Le  droit  de  postula- 
tion est  exclusivement  attribué  aux  avoués.  L'usurpation 
de  ce  droit  est  punie  d'une  amende,  de  la  confiscation 
du  produit  de  l'instruction  au  profit  de  la  Chambre  des 
avoués,  et  dé  dommages-intérêts  au  profit  des  parties 
lésées.  On  nomme  délit  de  postulation  le  concert  frau- 
duleux entre  plusieurs  personnes  pour  exploiter  les  béné- 
fices d'une  étude  d'avoué.  —  Dans  le  Droit  canonique,  la 
Postulation  est  une  demande  adressée  k  un  supérieur 
qui  a  droit  de  confirmation,  pour  qu'il  veuille  bien  pour- 
voir d'une  dignité  élective  telle  personne  qui,  pour  dé- 


faut d'âge,  d'ordre  ou  de  naissance,  ne  peut  être  élue. 

POT  A  AUMONES.  F.  Aumoke. 

POT  A  FEU ,  pièce  d'artifice  en  forme  de  pot  ou  de 
vase,  dont  on  se  sert  dans  les  sièges  de  villes. 

POT-DE-VIN,  ce  qui  est  donné  en  manière  de  présent, 
après  un  marché,  un  bail ,  une  transaction  quelconque, 
en  sus  du  prix  convenu,  par  l'une  des  parties  intéressées 
à  l'autre  partie.  Le  même  nom  s'appliqua  m  la  gratificap 
tion  ofierte  à  un  tiers  par  qui  une  afi'aire  8*est  conclue  ; 
dans  les  transactions  privées,  ce  pot-de-vin,  offert  ouver- 
tement, est  licite;  mais,  s'il  est  donné  clandestinement 
et  dans  le  but  de  corrompre  un  mandataire  ou  un  fonc- 
tionnaire public,  il  constitue  le  crime  de  corruption  (  K.  ce 
mot), 

POTENCE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d Histoire. 

POT-EN-TÊTE,  ancien  casque  d'infanterie,  qui  ne 
couvrait  que  le  haut  de  la  tête. 

POTENTIEL,  en  termes  de  Philosophie  scolastique, 
s'oppose  k  actuel,  et  désigne  ce  qui  n'existe  qu'en  puis- 
sance et  non  réellement.  —  Dans  la  Grammaire  grecque, 
la  particule  àv  est  dite  potentielle,  parce  qu'elle  indique 
d'ordinaire  que  l'action  du  verbe  auquel  on  la  Joint  est 
considérée  comme  possible,  douteuse  ou  hypothétique. 

POTEQUIN  ou  POTKIN,  vieux  mot  qui  signifiait  petit 
pot. 

POTERIE,  mot  qui  désigne  à  la  fois  l'industrie  du 
potier  et  tout  vase  fait  d'argile  ou  autre  matière  inférieure 
(V.  Céramique,  Vases).  — Les  anciens  Romains,  pour 
économiser  le  temps  et  la  matière,  la  charge  et  la  dépense, 
plaçaient  de  distance  en  distance,  dans  les  voûtes  épaisses 
et  dans  les  masses  de  maçonnerie,  des  pots  de  terre  qui 
formaient  naturellement  comme  de  petits  arcs  de  dé- 
charge. On  voit  de  ces  pots  à  Rome,  au  cirque  de  Cara- 
calla.  —  Aujourd'hui  on  fait  des  plafonds  entiers  en  po- 
terie; on  l'emploie  surtout  dans  les  planchers  à  solives 
de  fer,  où  les  entrevous  sont  considérables. 

POTERNE  (  du  bas  latin  postema,  s.-ent.  porta,  porte 
de  derrière),  fausse  porte  placée  dans  le  milieu  ou  dans 
l'angle  d'une  courtine  et  sur  le  terre-plein  du  rempart, 
pour  donner  issue  dans  les  fossés  et  faciliter  les  sorties 
sans  être  vu  des  assiégeants.  Des  fossés  on  arrive  par  les 
pas-de-souris  au  chemin  couvert  et  aux  glacis. 

POTICHE,  nom  donné  aux  vases  en  porcelaine  de  Chine 
et  du  Japon.  Il  y  a  quelques  années,  vers  i858,on  appela 
Potichomanie  l'engouement  avec  le(^uel  on  imitait  cette 
porcelaine  en  collant  des  papiers  peints  à  l'intérieur  de 
vases  en  verre. 

POTIERS ,  nom  de  deux  anciennes  corporations,  for- 
mées vers  1260.  Il  y  avait  les  Potiers  détain,  sous  le  pa- 
tronage de  S^  Fiacre  :  Tapprentissa^  était  de  6  ans,  et  le 
compagnonnage  de  3  ans;  la  maîtrise  coûtait  500  livres; 
les  derniers  statuts  de  cette  corporation  dataient  de  1631  ; 
et  les  Potiers  de  terre,  ayant  pour  patron  S^  Bon,  et  qui 
firent  renouveler  leurs  statuts  par  Charles  VII,  en  1456, 
et  Henri  IV,  en  1607.  Cette  corporation  fut  réunie,  en 
1776,  à  celle  des  faïenciers  et  des  vitriers. 

POTKIN.  V.  PoTEQom. 

POT -POURRI,  production  littéraire  composée  de  mor- 
ceaux rassemblés  sans  ordre,  sans  liaison,  et  le  plus  sou- 
vent sans  choix  ;  —  morceau  de  musique  formé  d'une 
suite  d'airs  difi'érents  et  connus.  Le  nom  est  celui  d'un 
ragoût  composé  de  plusieurs  sortes  de  viandes  et  de  lé- 
gumes, et  servi  dans  le  pot  même  où  il  avait  cuit. 

POTSDAM  (Château  royal  de),  en  Prusse.  Ce  château, 
situé  sur  la  rive  droite  de  laHavel,  fut  commencé  en  IfiGO 
par  Philippe  de  Chiese,  continué  par  Menhard  et  Nehring, 
et  achevé  en  1701  par  De  Bodt.  Il  a  trois  étages,  et  forme 
un  carré  long.  On  y  montre  les  appartements  du  grand 
Frédéric,  tels  qu'ils  étaient  de  son  temps.  En  avant  du 
ch&teau  se  trouve  le  Lustgarten,  composé  de  deux  parties  : 
la  place  de  la  Parade,  entourée  de  colonnades  construites 
en  1745  par  Boumann  ;  et  le  Jardin,  où  l'on  remarque  un 
bassin,  long  de  113  met.,  large  de  47,  au  milieu  duquel 
se  dresse  un  groupe  colossal  de  Vénus  et  de  Neptune  en« 
tourés  de  Tritons. 

POTSDAM  (Le  château  de  Sans-Sooci,  à),  ch&teaa  con- 
struit de  1745  k  1747,  sur  les  plans  que  donna  Frédéric  II 
lui-môme,  avec  le  secours  de  l'architecte  Knobelsdorf. 
C'est  un  bâtiment  à  un  étage,  long  de  97  met.,  profond 
de  16™,33,  et  haut  de  0«*,33;  ses  deux  ailes,  à  deui 
étages,  ont  été  reconstruites  par  Persius  en  1841-42,  et 
servent,  l'une  aux  cuisines,  l'autre  aux  hôtes  étrangers  et 
aux  dames  de  la  cour.  Dans  les  appartements  royaux  on 
visite  la  bibliothèque  de  Frédéric  H,  sa  chimbre  à  cou- 
cher, le  fauteuil  où  il  est  mort,  diverses  pièces  ornées  de 


POU 


1477 


POU 


tableaux  de  prix,  et  une  salle  circulaire  soutenue  par 
16  colonnes  monolithes  de  marbre  blanc.  Dans  la  ter- 
rasse qui  est  en  avant  de  la  façade  du  ch&teau,  Frédéric  II 
a?ait  fait  creuser  un  caveau,  où  il  voulait  être  enseveli, 
et  il  disait,  en  le  montrant  au  marquis  d'Argens  :  «  Quand 
je  serai  là,  Je  serai  sans  souci.  »  Telle  est  Torigine  du 
nom  de  cette  résidence.  Au  bas  de  cette  terrasse  est  un 
grand  bassin  de  marbre,  de  43  met.  de  diamètre,  en- 
touré de  statues  et  de  groupes  mythologiques  en  marbre, 
et  du  milieu  duquel  jaillit  un  jet  d*eau  à  une  hauteur  de 
39  met.  A  la  droite  du  ch&teau  se  trouve  un  édifice  qui 
contient  une  galerie  de  tableaux,  et,  plus  loin,  le  moulin 
à  vent  qui  est  devenu  historique;  à  gauche,  le  Cavct^ 
lierhaus,  qui  a  servi  tour  à  tour  de  théâtre  et  d^orangerie. 
Une  colonnade  de  88  colonnes  corinthiennes  se  déve- 
loppe en  demi-cercle  par  derrière  le  ch&teau.  Jjd  vaste 
parc  de  Sans-Souci  contient  un  autre  château,  dit  N<n^ 
veau  Palais,  b&ti  de  1763  à  1769  d'après  les  dessins  de 
Brûning,  et  dont  la  façade,  longue  de  227  met.  et  percée 
de  322  fenêtres,  se  compose  d*un  corps  de  b&timent  prin- 
cipal et  de  quatre  ailes.  On  remarque  dans  ce  palais  la 
Salle  de  marbre,  longue  de  33  met.,  large  de  20,  haute 
de  13,  et  dont  le  plafond  a  été  peint  par  Vanloo.  Dans  le 
parc  se  trouvent  également  :  le  Mausoleum  ou  Temple 
des  antiques,  pastiche  de  la  Rotonde  ou  Panthéon  de 
de  Rome,  et  qui  renferme  une  belle  statue  de  la  reine 
Louise,  en  marbre,  par  Rauch;  le  Temple  de  V Amitié, 
bâti  en  marbre,  et  contenant  la  statue  de  la  margrave  de 
Bayreuth,  sœur  de  Frédéric  II;  une  Maison  japonaise; 
un  Bain  romain;  Iq  petit  ch&teau  de  Charlottenhof,  bâti 
en  1826  sur  le  modèle  d'une  villa  italienne,  et  environné 
d'un  jardin  de  roses;  une  Faisanderie;  une  Tour  chi- 
noise; le  Ruinenberg  (montagne  des  ruines),  hauteur  au 
sommet  de  laquelle  on  a  construit  des  ruines  artificielles, 
pour  cacher  le  réservoir  de  50  met.  de  diamètre  et  de 
4  met.  de  profondeur,  dont  les  eaux  alimentent  tous  les 
Jets  d'eau  et  les  bassins. 

POUCETTES,  corde  ou  chaînette  à  cadenas,  avec  la- 
quelle on  attache  ensemble  les  deux  pouces  d'un  pri- 
sonnier. 

POUCHTOD  (Langue).  V,  Afghans. 

POUDRE  A  CANON.       )  y  .    ^  ^ .  . 

POuFlLÉ.^  P^^^^E^j  ^rCr.tM'SiW^^ 

POULAILLERS,  ancienne  corporation  qui  existait  déjà 
au  temps  de  Louis  IX,  pour  vendre  la  volaille,  le  gibier, 
les  agneaux,  et  les  cochons  de  lait.  On  distinguât  les 
fioulaUlers  de  la  vUle  et  les  poulaillers  forains. 

POULAINE  (de  l'italien  pulena)^  en  termes  de  Marine, 
assemblage  de  pièces  de  bois  formant  une  portion  de 
cercle  terminée  en  pointe  et  faisant  partie  de  l'avant  d'un 
vaisseau. 

poDuuNB  (Souliers  à  la).  V.  noire  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d* Histoire. 

POtJLE ,  terme  de  jeu  ;  réunion  des  mises  de  tous  les 
Joueurs ,  laquelle  appartient  à  celui  qui  gagne  la  partie. 

POUPE  (du  latin  puppis)^  extrémité  de  l'arrière  d'un 
navire,  la  partie  opposée  â  \^ proue  (  F.  Arrière).  Dans 
les  anciens  bâtiments,  elle  était  fort  élevée  (  V.  Dunette, 
Château  )  ;  dans  les  vaisseaux  de  ligne,  elle  est  décorée 
d'une  ou  de  deux  galeries.  C'est  â  la  poupe  qu'est  inscrit 
le  nom  du  navire. 

POUPÉE  (du  latin  pupa,  petite  fille),  petite  figure 
humaine  de  bois,  de  carton,  de  porcelaine  ou  de  cire, 
que  les  petites  filles  s'amusent  â  habiller.  Les  jouets  de  ce 
genre  étaient  connus  des  Perses  et  des  Romains;  on  en  a 
trouvé  dans  des  tombeaux.  A  Rome,  (juand  les  jeunes  filles 
étaient  devenues  nubiles,  elles>  allaient  suspendre  leurs 
poupées  aux  autels  de  Vénus. — Les  modistes  et  les  tailleurs 
d'habits  se  servent  de  grandes  poupées  pour  essayer  les 
chapeaux  et  les  vêtements  ;  les  modistes  surtout  en  font  qui 
sont  des  merveilles  d'élégance;  elles  les  expédient  â 
rétranger,  tout  habillées,  dans  des  caisses  contenant  les 
toilettas  commandées,  afin  de  faire  voir  comment  chaque 
pièce  de  vêtement  doit  être  sjustée  et  portée.  Cette  ingé- 
nieuse coutume  date  du  xiv*  siècle  :  la  reine  Isabeau  de 
Bavière  envoyait  déjà,  en  1391,  à  la  reine  d'Angleterre, 
Isabelle,  sa  fille,  femme  de  Richard  II,  des  poupées  habil- 
lées â  la- dernière  mode  de  France;  en  1496,  Anne  de 
Bretagne,  «emme  de  Charles  VIII,  fit  un  semblable  cadeau 
k  la  célèbre  Isabelle  de  Castille.  Au  xvu"  siècle  et  au  xviii*, 
les  envols  de  poupéra  de  ce  genre  continuèrent;  c'était 
un  b^oin  si  réel  pour  les  grandes  dames  étrangères  qui 
les  recevaient,  que,  pendant  la  fameuse  guerre  de  la  suc- 
cession d'Espagne  (1701-1713),  il  y  eut  entre  l'Angleterre 
et  la  France,  parties  belligérantes,  une  convention  toute 


spéciale  pour  laisser  passer  des  poupées  d'albâtre  qui,  de 
temps  en  temps,  portaient  à  Londres  les  modes  de  la 
cour  de  France.  On  voit  aussi  de  nos  jours,  dans  la  montre 
des  coiffeurs,  des  poupées  en  buste  ou  à  mi-corps,  dont 
le  visage  est  de  cire. 

POURANAS.  y.  PuRANAS. 

POURPOINT  (du  bas  latin  perpunctum,  fait  â  points  do 
couture),  nom  donné  à  un  vêtement  de  g^uerre  qui  cou- 
vrait la  poitrine  et  le  dos,  et  se  mettait  sous  la  cuirasse  : 
il  était  fait  de  laine  ou  de  coton  piqué  entre  deux  étoffes 
(  V,  Gambison).  Plus  tard,  on  appela  pourpoint  un  vêle- 
ment de  ville  ayant  un  collet,  des  manches,  et  même  des 
basques,  et  en  usa^e  surtout  aux  xvi'  et  xvii*  siècles.  Les 
pourpoints  taillades  vinrent  d'Espagne.  —  Une  corpora- 
tion de  Pourpointiers  fut  fondée  à  Paris  en  1323. 

POURPRE.  7.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d'Histoire, 

POURSUITE,  en  termes  de  Jurisprudence,  mise  en 
action  d'un  droit,  ensemble  des  actes  d'exécution  qui  se 
font  contre  quelqu'un  pour  le  contraindre  à  respecter  une 
obligation  ou  le  punir  de  l'avoir  enfreinte.  Tout  fait  qui 
blesse  un  intérêt  protégé  par  un  contrat  ou  par  une  loi 
peut  donner  lieu  â  une  poursuite.  La  poursuite  d'un  dé- 
lit est  distincte  de  Vinstruction,  car  elle  se  prolonge  après 
le  jugement  pour  arriver  à  l'exécution  (  V.  Action  ,  Pro- 
céDURB^.  On  nomme  poursuivant  celui  qui  exerce  des 
poursuites,  particulièrement  en  matière  de  saisie,  d'ex- 
propriation forcée  et  de  vente. 

POURVOI,  en  termes  de  Droit,  se  dit  de  la  voie  de 
recours  contre  une  décision  judiciaire  rendue  en  dernier 
ressort  :  ainsi,  on  dit  pourvoi  en  cassation,  pourvoi  au 
Conseil  d'Etat;  cependant,  dans  ce  dernier  cas,  le  mot  le 
plus  usité  est  recours. 

D'après  la  loi  du  6  juin  1862,  le  délai  du  pourvoi  en 
matière  civile  est  de  deux  mois  à  compter  du  jour  où  la 
signification  de  la  décision  objet  du  pourvoi  a  été  faite  à 
personne  ou  â  domicile.  Ce  délai  est  augmenté  de  huit 
mois  pour  les  demandeurs  absents  du  territoire  français 
de  l'Europe  ou  de  l'Algérie  pour  cause  de  service  et  de 
navigation.  Il  est  augmenté  d'un  mois  lorsque  le  deman- 
deur est  domicilié  en  Corse,  en  Algéae,  dans  les  lies  Bri- 
tanniques, en  Italie,  dans  le  royaume  des  Pays-Bas,  dans 
les  États  ou  Confédérations  limitrophes  de  la  France;  de 
deux  mois  lorsqu'il  est  domicilié  dans  les  autres  États  de 
l'Europe,  ou  du  littoral  de  la  Méditerranée  et  de  la  mer 
Noire;  de  cinc[  mois  s'il  est  domicilié  hors  d'Europe  en 
deçà  des  détroits  de  Malacca  et  de  la  Sonde,  ou  en  deçà 
du  cap  Hom  ;  de  huit  mois  s'il  demeure  au  delà.  Ces 
délais  sont  doublés  pour  les  pays  d'outr&-mer  en  cas  de 
guerre  maritime.  Les  délais  sont  francs,  et  compta»  sui- 
vant le  calendrier  grégorien.  —  En  matière  d'expropria- 
tion, le  délai  du  pourvoi  contre  le  jugement  qui  prononce 
l'expropriation  est  de  trois  jours  à  partir  de  la  notifica- 
tion; il  est  de  quinze  jours  contre  la  décision  du  jury  à 
partir  de  la  décision.  —  En  matière  criminelle,  il  est  de 
trois  jours  francs  contre  les  arrêts  de  la  Cour  d'assises  à 
partir  de  la  prononciation;  de  cinq  jours  contre  les  arrêts 
de  la  Chambre  des  mises  en  accusation  ;  et  de  trois  jours, 
par  application  du  principe  général,  contre  les  jugements 
de  police  correctionnelle  et  de  simple  police.  —  Quant 
aux  colonies,  il  existe  des  règlements  d'administration 
spéciale.  F.  Cassation.  R.  d'E. 

POURVOI  EN  GKACE.  V.  RECOURS. 

POURVOIRIE.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnatr^ 
POU -SA.         t     de  Biographie  et  d:  Histoire, 
^POUSSÉE,  en  termes  d'Architecture,  effort  que  font 
les  terres  d'un  rempart,'  d'un  auai  ou  d'une  terrasse 
contre  le  revêtement  de  maçonnerie  qui  les  soutient.  C'est 
aussi  l'effort  que  fait  un  arc  ou  une  voûte  pour  écarter 
les  pieds-droits  de  l'aplomb  où  on  les  a  élevés.  On  y  ré- 
siste par  des  éperons,  des  contre-forts,  des  arcs-boutants, 
et  des  culées. 
POUSSE -PIED.  F.  AccoN. 

POUTRE  (jadis  poullre,  du  bas  latin  pulpetrtm)^ 
grosse  pièce  de  bois  équarri,  placée  en  travers  sur  des 
murs  pour  supporter  les  solives  d'un  plancher.  On  s'en 
sert  aussi  dans  la  construction  des  ponts  de  navire.  Depuis 
quelques  années,  des  poutres  de  fer  laminé  sont  substi- 
tuées avec  succès  au  bois.  F.  Charpente  en  fer. 

POUVOIR,  faculté  de  faire  et  d'agir.  En  DroH,  le  mot 
pouvoir  signifie  la  capacité  de  faire  une  chose,  ou  encore 
il  est  synonyme  de  mandat  et  de  procuration  (  F.  ces 
mots).  C'est  aussi  en  ce  dernier  sens  que,  dans  une  Cham- 
bre législative,  on  procède  à  la  véri^ation  des  pouvoirs 
des  députés  nouvellement  élus.  En  Politique,  Pouvoir 
signifie  autorité,  droit  de  commander  :  le  Pouvoir  est  dit 


POU 


1478 


PRA 


absolu,  qaand  il  n*a  ni  limitos  ni  contrôle.  On  distingue 
lo  Pouvoir  législatifs  le  Pouvoir  eocécutifet  le  Pouvoir 
iudicicùrê.  Le  Pouvoir  législatif  est  celui  de  qui  émanent 
ifes  lois  :  dans  les  États  despotiques,  il  réside  dans  la  per- 
sonne du  monarque  seul  ;  dans  les  monarchies  tempérées 
qu  représentatives,  il  est  partagé  entre  le  prince  et  un  ou 
plusieurs  corps  délibérants ,  car  le  prince  donne  aux  actes 
de  ces  corps  la  sanction  qui  consomme  la  loi  ;  dans  les 
républiques,  il  est  dans  le  peuple  ou  dans  ses  représen- 
tants. Le  Pouvoir  exécutif  est  celui  qui  est  chargé  de  faire 
exécuter  les  lois ,  de  gouverner,  de  veiller  au  maintien  de 
l'ordre  et  de  la  tranquillité  publique,  de  commander  les 
forces  de  terre  et  de  mer,  de  nommer  aux  fonctions  pu- 
bliques, d'entretenir  des  relations  avec  les  puissances 
étrangères  :  il  peut  être  confié  à  un  seul  homme  (empe- 
reur, roi ,  pr^ident,  etc.  ),  ou  à  plusieurs  (  le  Conseil  exé- 
cutif de  i793,  le  Directoire  de  1795-99,  les  Consuls  de 
1799-1802,  la  Commission  executive  de  1848,  etc.)-  Le 
Pouvoir  législatif  ne  doit  pas  être  dans  les  mêmes  mains 
que  le  pouvoir  exécutif  :  il  serait  à  craindre  que  la  puis- 
sance législative ,  chargée  des  difficultés  de  Texécution , 
ne  nt  dès  lois  pour  chaque  circonstance,  ou  que  la  puis- 
sance executive,  préoccupée  des  prévoyances  de  la  légis- 
lation, n*appliqu&t  la  loi  future  au  lieu  de  la  loi  présente. 
Le  Pouvoir  judiciaire  est  celui  qui  rend  la  justice  et  pour- 
suit les  infractions  à  la  loi.  11  émane  du  souverain,  prince 
ou  nation;  tantôt  il  a  sa  source  dans  Télection,  tantôt 
il  possède  IMnamovibilité  comme  garantie  d'indépendance. 
—  Eu  égard  à  la  nature  de  Tautorité  exercée,  on  distingue 
encore  le  Pouvoir  temporel  et  le  Pouvoir  spirituel.  Le 
premier  s*applique  aux  intérêts  purement  terrestres;  c'est 
le  gouvernement  civil  et  politique.  Le  second  s'exerce  sur 
les  consciences  au  nom  de  la  religion  ;  sa  mission  est 
d'enseigner  les  vérités  de  la  foi  et  de  les  défendre.     B. 

POUVOIR  DlSCRÉriONIIAlRB.    V.  DlSCRéTIONNAIRE. 

POUVOIRS  GRAQBUX,  en  termes  de  Droit  canonique,  pou- 
voirs qui  ne  sont  pas,  comme  ceux  de  célébrer  la  messe, 
de  prêclier  et  de  confesser,  inhérents  au  sacerdoce,  mais 
qu'on  a  reçus  par  octroi  spécial,  tels  que  ceux  d'absoudre 
des  cas  réservés,  d'indulgencier  les  croix  et  les  chape- 
lets, de  bénir  les  ornements  et  les  linges  sacrés,  etc. 

POUZZOLES  (Antiquités  de).  Cette  ville  des  anciens 
États  napolitains  contient  beaucoup  de  débris  intéres- 
sants de  l'art  romain.  Sans  parler  do  nombreux  tombeaux 
qui  ont  été  découverts  aux  environs  sur  les  routes  de 
Naples  et  de  Rome,  et  de  deux  temples  de  Neptune  et 
des  Nymphes,  aue  la  mer  recouvre  aujourd'hui  presque 
complètement  de  ses  eaux,  la  cathédrale,  consacrée  à 
S^  Procule,  a  été  faite  d'un  temple  que  L.  Caipurnius 
avait  consacré  à  l'empereur  Auguste.  Pour  abriter  le  port 
contre  les  vents  du  Sud,  les  Romains  construisirent  un 
môle,  formé  de  piliers  massifs  liés  par  des  arches,  et 
supportant  un  portique  pour  les  marchands  :  il  en  reste 
iC  piliers,  qu'on  a  eu  tort  de  confondre  avec  le  Pont  de 
Ccdigula,  formé  de  bateaux  réunis  ensemble  et  couverts 
d'un  terre-plein.  On  a  découvert,  en  1838,  les  beaux 
restes  d'un  temple  qu'on  croit  avoir  été  élevé  à  AntinoQs. 
Près  de  la  ville  est  un  amphithéâtre  qu'on  appelle  Co- 
lisée^  par  imitation  de  celui  de  Rome,  auquel  il  est  peut- 
être  antérieur  :  il  a  4  entrées,  et  on  estime  qu'il  pouvait 
contenir  30,000  spectateurs;  les  gradins  sont  soutenus 
par  trois  rangs  d'arcades.  Mais  la  principale  curiosité  de 
Pouzzoles  est  le  temple  de  Jupiter-Sérapis,  qui  fut  long- 
temps enfoui  sous  des  terres  et  des  broussailles,  et  qu'on 
a  dégagé  en  1750;  depuis  ce  temps  on  en  a  enlevé  ce  qui 
était  transportable,  colonnes,  statues,  vases,  etc.  C'est 
aujourd'hui  une  enceinte  carrée  de  45  met.  sur  38,  qui 
était  intérieurement  garnie  d'un  portique  à  colonnes  co- 
rinthiennes, ayant  chacune  une  statue  en  avant.  Autour 
de  cette  espèce  d'atrium  étaient  distribuées  des  chambres 
Servant  de  bains,  alimentés  par  des  eaux  minérales  dont 
Iks  sources  existent  encore;  au  centre,  sur  une  élévation 
de  quatre  gradins,  était  un  temple  rond  de  16  colonnes, 
dont  il  ne  reste  plas  que  trois,  et,  au  milieu  de  ce  temple, 
une  cuve  octogone,  qui  servait  sans  doute  aux  grandes 
ablutions.  Les  colonnes,  de  13  met.  d'élévation,  sont 
d'un  seul  bloc.  A  une  hauteur  de  plus  de  3  met.,  leur 
fût  a  été  rongé  par  les  pholades;  comme  ces  animaux, 
dont  on  trouve  encore  les  coquillages  dans  les  trous  qu'ils 
ont  pratiqués,  se  tiennent  à  la  surface  de  la  mer,  et  ne 
demeurent  ni  dans  le  fond,  ni  dans  les  pierres  au-dessus 
au  niveau  do  l'eau,  il  est  certain  que  la  mer  baignait  à 
hnc  certaine  époque  les  parties  corrodées.  Or,  comme  la 
bermanence  de  son  niveau  depuis  2000  ans  est  un  fait 
Irabli,  il  faut  admettre  que  le  sol  du  temple  a  été 
foliaussé  par  quelque  révolution  souterraine,  probable- 


ment lors  du  tremblement  de  1538,  qui  donna  naissance 
au  Monte-Nuovo.  Le  même  sol  paraît  être  entré  dans  une 
période  d'abaissement  ;  car  le  pavé  du  temple,  qui  était 
à  sec  en  1807,  est  actuellement  sous  les  eaux. 

PRACRIT.  V,  Prakrit. 

PRyEFÉRICULE.  ) 

PRiEMUMRE.      (  V,  ces  mots  dans  notre  Diciûmnaire 

PRiETENTURA.    i     de  Biographie  et  d'Histoire. 

PRAGBIATIQOE.  } 

PRAGCE  (Le  ch&teau  royal  de).  Ce  château  est  situé 
sur  le  Hradschin,  montagne  qui  domine  au  N.-O.  la 
ville  de  Prague,  et  qu'on  en  regarde  comme  l'Acropole  ou 
le  Capitole.  Commencé  par  le  roi  de  Bohême  Charles  IV, 
en  1333,  sur  le  modèle  de  notre  vieux  Louvre,  modifié 
et  agrandi  par  Wladislas  II,  il  fut  incendié  en  1541 .  Fer- 
dinand P'  l'ayant  reconstruit,  il  eut  à  subir  les  dévasta- 
tions des  Bavarois  en  1C20,  des  Saxons  en  1631,  des 
Suédois  en  1048,  et  des  Prussiens  en  1757  :  Marie-Thé- 
rèse et  Joseph  II  le  firent  réparer  par  l'architecte  Loragho, 
de  1758  à  1775.  L'ex-roi  de  France  Charles  X  y  habita 
en  1831-32,  et  l'empereur  d'Autriche  Ferdinand  après 
son  abdication  en  1849.  Un  incendie  l'a  encore  fort  en- 
dommagé en  1855.  Le  ch&teau  de  Prague  enveloppe  trois 
cours,  dont  l'une  est  ornée  d'une  statue  équestre  de 
S^  Georges,  fondue  en  1373;  il  contient  440  chambres, 
trois  grandes  salles,  et  plusieurs  galeries.  On  remarque 
la  Cluimbre  de  l'hommagef  où  les  nobles  de  la  Bohême 
prêtaient  serment  d'obéissance  à  leur  souverain  après 
son  couronnement,  et  la  Chambre  des  États,  où  se  passa 
en  1618  la  fameuse  défenestration  qui  fut  le  signal  de  la 
guerre  de  Trente  ans.  Dans  le  jardin  se  trouve  un  belvé- 
dère, où  l'astronome  Tycho-Brahé  observait  les  astres 
avec  l'empereur  Rodolphe  II.  B. 

PRAGUE  (Église  métropolitaine  de  S*-VErr,  à).  Cette 
église,  commencée  en  134i,  et  qui  rappelle  dans  quel- 
ques parties  la  cathédrale  de  Cologne,  n'a  pas  été  ache- 
vée; Peter  Arler  de  GmOnd  l'amena,  en  1385,  au  point 
où  elle  est  encore  actuellement.  Beau  modèle  d'art  ogi- 
val ,  étonnante  par  sa  solidité,  son  élégance  et  sa  har- 
diesse ,  elle  s'arrête  un  peu  au-dessous  du  transept.  Sa 
tour  a  128  met.  d'élévation.  L'intérieur  de  l'édifice  est 
éclairé  par  47  fenêtres  ;  alentour  sont  12  chapelles,  dé- 
signées chacune  par  un  nom  de  roi  ou  de  seigneur  bo- 
hème. Dans  celle  de  S'  Wenceslas,  située  près  de  l'en- 
trée, et  que  décorent  quelques  tableaux  byzantins  et  des 
fresques  sur  fond  d'or  peintes  par  Thomas  de  Mutina  et 
Nicolas  Wurmser,  on  montre  une  colonne  faite  avec  le 
cuivre  de  canons  pris  sur  les  Hussites,  ainsi  que  le  casque 
et  la  cuirasse  de  Charles  IY;'la  chapelle  communique , 
par  une  porte  de  fer  à  sept  serrures  dont  les  clefs  sont 
confiées  à  la  garde  des  sept  personnages  les  plus  consi- 
dérables de  la  Bohême ,  avec  une  salle  où  sont  conservés 
le  sceptre  d'or  et  la  couronne  des  anciens  rois.  Au  milieu 
de  la  nef  de  l'église,  et  entouré  d'une  grille  d'un  beau 
travail,  s'élevait  un  mausolée  en  alb&tre,  construit  en 
1580  par  Alexandre  Colin  de  Nuremberg,  sur  l'ordre  de 
Rodolphe  II;  on  l'a  transporté  dans  une  chapelle.  Un 
autre  monument  a  été  consacré  à  S^  Jean  Népomucène, 
patron  du  pays  :  la  châsse  qui  renferme  les  reliques  du 
saint  est  en  argent;  le  baldaquin  qui  la  surmonte  est 
supporté  par  quatre  anges,  aussi  d'argent,  et  qui  pèsent 
910  marcs  ;  alentour  sont  suspendues  23  lampes  d'ar- 
gent et  une  lampe  d'or.  Le  chœur,  long  de  48  met. , 
large  de  44  met.  avec  les  bas  côtés,  n'a  pas  moins  de 
44  met.  de  hauteur  ;  le  tombeau  de  S'  Veit  est  derrière 
le  mattrc-autel.  La  sacristie,  ornée  de  portraits  d'arche- 
vêques, conduit  au  Trésor,  où  l'on  conserve  diverses  reli- 
ques de  la  Passion  de  J.-C,  la  langue  de  S^  Jean  Népo* 
mucèue,  les  statues  d'or  de  S^  Adalbert,  de  S^  Wenceslas, 
de  S^  Veit  et  de  S'  Ludmilla,  un  grand  nombre  de  mitres 
et  de  chasubles  précieuses,  etc.  B. 

PRAKRIT,  mot  indien  qui  signifie  dérivé,  inférieur, 
imparfait ,  et  par  lequel  on  désigna  la  langue  vulgaire- 
ment parlée  dans  l'Inde  depuis  le  m*  siècle  environ 
avant  l'ère  chrétienne.  Quelques  linguistes  ont  pcjisé  que 
cette  langue  était  un  reste  des  idiomes  antérieurs  &  l'in* 
troduction  du  sanscrit  {V.  ce  mot)  par  les  Br&hmanes; 
mais  on  s'accorde  généralement  à  la  regarder  comme  un 
sanscrit  altéré  et  corrompu  dans  la  boudie  des  castes 
inférieures.  Dans  les  drames  indiens,  les  personnages 
distingués,  les  princes  et  les  br&hmanes,  ne  parlent  que 
le  sanscrit,  tandis  que  les  personnages  du  peuple  et  les 
femmes  emploient  le  pr&krit.  Le  pr&krit  a  cessé  à  son 
tour  d'être  langue  vulgaire  ;  mais  il  est  resté  langue  reli- 
gieuse chez  les  Djainas,  et  il  est  sorti  de  lui  plusieurs 
dialectes  modernes,  tels  que  le  paxçachif  le  maghadi,  lo 


PRE 


H79 


PRÉ 


mahratle,  etc.  Certaines  compositions  littéraires  de  l'Inde 
offrent  la  réunion  de  plasicurs  idiomes  :  les  dieux  y  par- 
lent le  sanscrit,  les  génies  bienfaisants  le  pràkrit ,  les 
démons  le  paîçachi ,  les  gens  des  plus  basses  classes  le 
magadhi.  Il  existe  aussi  des  poëmes  composés  unique- 
ment en  prùkrit,  tels  que  le  Selu  Bandha  ;  la  mesure  des 
vers  et  dos  stances  y  varie  plus  que  dans  la  poésie  san- 
scrite. F.  Colebrooke,  On  the  Sanscrit  and  Pracrit  lan- 
guages,  Jins  le  t.  VII  des  Hecherches  Asiatiques;  le 
même ,  Oti  Sanscrit  and  Pracrit  pœtry,  dans  le  t.  X  ; 
Bopp ,  Analyse  comparée  du  sanscrit  et  des  langues  qui 
s'y  rapportent,  en  allem. ,  1824,  in-4°;  Hœfer,  Depra- 
krita  dialecto  lib.  11,  Berlin,  1836,  in-8°;  Lassen,  /f?s/t- 
tutiones  linguœ  prakriticœ,  Bonn,  1837,  in-8<^;  Delius, 
Radices  pracriticœ,  Bonn,  1839,  in-8*». 

PRAMË ,  grand  et  fort  bateau  à  fond  plat ,  tirant  peu 
d'eau,  allant  à  la  voile  et  à  la  rame,  et  pouvant  trans- 
porter de  Tartillerie  ou  tous  objets  très-pesants. 

PRATICIEN,  mot  dérivé  du  latin  pragmaticus  (homme 
d*actioD  ) ,  et  qui  s'applique  à  quiconque  possède  une 
grande  expérience  dans  un  art.  Il  désigne  spécialement 
Touvrier  qui  dégrossit  les  blocs  du  sculpteur  et  met  au 
point  ses  statues. 

PRATIQUE  (du  latin  pragmatica)^  exécution  des  prin- 
cipes et  des  règles  d'un  art  ou  d'une  science.  On  l'oppose 
à  la  théorie  (V.  ce  mot)^  avec  laquelle  elle  doit  avoir  un 
rapport  plus  ou  moins  direct,  sans  quoi  ce  ne  serait  que 
routine.  Ce  qui  est  exact  dans  la  pratique  ne  peut  pas 
être  faux  dans  la  théorie  ;  mais  ce  c[ui  est  vrai  en  théorie 
peut  être  inexécutable  dans  la  pratique.  —  En  termes  de 
Palais,  la  Pratique  est  la  connaissance  des  formalités  de 
la  Procédure,  et  du  style  des  actes  faits  par  les  officiers 
ministériels.  —  Dans  l'ordre  moral  et  religieux.  Pra- 
tique signifie  l'exercice  d'une  vertu,  l'accomplissement 
d'un  devoir. 

PRATIQUE,  terme  de  Marine  signifiant  accès.  Un  navire 
est  admis  à  la  libre  pratique,  quand  il  lui  est  permis 
d'aborder,  de  communiquer  avec  la  terre. 

PRATIQUE,  petit  instrument  de  métal  qu'on  se  met  dans 
la  bouche  pour  déguiser  la  voix.  Ceux  qui  montrent  les 
marionnettes  s'en  servent  pour  faire  parler  Polichinelle. 

PRATISAKHYAS,  nom  donné,  dans  la  Littérature  in- 
dienne, aux  traités  spéciaux  sur  la  grammaire  védique. 

PRÉALABLE  (Question).  V.  Question. 

PRÉAMBULE  (du  latin  prœ,  devant,  et  ambulo,  je 
▼ais),  espèce  d'cxorde  qui  précède  certains  écrits,  et  où 
l'on  donne  au  lecteur  quelques  explications  destinées  à 
lui  faire  mieux  comprendre  ce  qui  va  suivre,  à  le  faire 
entrer  dans  l'esprit  qui  a  présidé  à  la  composition  de 
Touvrage,  à  rendre  compte  des  difficultés  du  sujet,  ou  à 
exciter  d'avance  l'intérêt  et  l'attention.  Le  Préambule 
diffère  de  la  Préface  proprement  dite  en  ce  que,  d'ordi- 
naire, il  ne  se  détache  pas  du  récit  même,  et  qu'il  doit 
être,  avant  tout,  court  et  précis.  Il  y  a  des  préambules 
purement  littéraires  :  dans  les  ouvrages  de  longue  ha- 
leine, divisés  en  livres  ou  en  grandes  sections,  ils  sont  un 
moyen  de  jeter  un  peu  de  variété  dans  la  composition,  à 
laquelle  on  les  rattache  toujours;  ils  exigent  un  grand 
art  et  beaucoup  de  tact.  Dans  les  poèmes  didactiques, 
par  exemple,  les  préambules  bien  choisis,  adroitement 
rattachés  à  chaque  sujet  que  l'on  va  traiter,  aident  à  dis- 
simuler la  monotonie  de  la  matière.  Le  Roland  furieux 
de  l'Arioste  a,  pour  chaque  chant,  des  préambules  qui 
comptent  parmi  les  parties  les  plus  charmantes  de  ce 
poème.  —  Chez  les  Anciens,  la  plupart  des  Dialogues  de 
Platon  sont  précédés  de  préambules  gracieux,  animés, 
pittoresques  ;  Cicéron  les  a  imités  avec  beaucoup  de  bon- 
heur, dans  plusieurs  de  ses  ouvrages  didactic|ues  ou  phi- 
losophiques, et  surtout  au  début  de  son  traité  Des  Lois, 
—  Chez  les  historiens,  le  préambule  forme  souvent  une 
courte  introduction  où  l'on  présente,  soit  le  résumé  de 
certains  événements  nécessaires  à  l'intellisence  du  récit, 
comme  dans  les  livres  I  et  V  de  V Histoire  ae  Charles  XII 
par  Voltaire,  et  au  I*'  livre  de  VHistoire  du  Consulat  et 
de  V Empire  de  M.  Thiers;  soit  le  tableau  général  des 
événements  qui  vont  être  développés,  comme  au  début 
des  Histoires,  chez  Tacite;  soit  l'impression  qu'ils  ont 
faite  sur  l'esprit  de  l'historien,  par  exemple ,  dans  VHis' 
toire  romaine  de  Tite-Live  (liv.  I  et  XXI),  et  chez  Tacite, 
au  début  de  la  Vie  d^Agricola,  VHistoire  naturelle  de 
Pline  renferme  un  grand  nombre  de  préambules  écrits 
avec  vigueur  et  non  sans  éloquence.  Buffon  les  a  multi- 
pliés dans  les  nombreuses  sections  de  son  Histoire  des 
animaux,  et  là  brille  son  art  profond  de  la  composition 
litténûre.  Les  préambules  qui  forment  l'entrée  en  ma- 
tière d'un  assez  grand  nombre  des  Vies  des  hommes 


illustres  de  Plutarque  semblent  au  premier  abord  des 
hors-d'œuvre  ;  mais,  presque  tous  roulant  sur  un  point 
de  philosophie  morale,  ils  sont  bien  placés  dans  un  ou- 
vrage où  l'auteur  se  propose  non-seulement  de  raconter 
la  vie  d'un  grand  homme,  mais  encore  de  donner  des 
leçons  de  morale  et  de  conduite. 

La  partie  préliminaire  des  lois,  édits,  ordonnances , 
dans  laquelle  le  législateur  expose  son  intention,  ses 
vues,  la  nécessité  ou  l'utilité  du  nouveau  règlement,  s'ap- 
pelle aussi  Préambule.  Deux  sont  particulièrement  célè- 
bres :  1^  celui  des  lois  de  Zaleucus,  législateur  de  Locres 
(vu*  siècle  av.  J.-C),  composé  de  maximes  élevées  sur  la 
nécessité  de  la  piété,  sur  la  pratique  de  toutes  les  vertus 
morales,  sur  l'oubli  des  injures,  sur  l'humanité  envers 
les  ennemis,  sur  la  modération  nécessaire  au  magis- 
trat, etc.  ;  2*  celui  de  la  loi  Salique  de  Dagobert,  remar- 
quable par  un  accent  poétique  tout  germain  :  c'est  un 
éloge  animé  des  vertus  militaires  et  religieuses  de  la  na- 
tion franke;  il  se  termine  par  un  Vivat  en  l'honneur  du 
Christ  et  par  une  invocation  où  le  législateur  prie  Dieu 
d'inspirer  et  de  protéger  les  rois.  La  Constitution  de  1 701 
et  celle  de  1793  avaient  pour  préambule  une  Déclaration 
des  droits  de  Vhomme  et  du  citoyen,  imitée  de  celle  qui 
précède  la  Constitution  américaine.  La  Charte  de  1814 
et  la  Constitution  de  1848  ont  aussi  des  préambules. 
V,  Avant-Propos,  Inthoddgtion,  PRéPACs,  ProjEub,  Pro- 
logue. P. 

PRKAMBULB,  terme  de  Diplomatique.  F.  Diplôue. 

PRÉAU ,  c-à-d.  petit  pré,  espace  découvert  au  milieu 
d'un  cloître;  —  cour  d'une  prison,  où  les  détenus  peu- 
vent prendre  l'air. 

PRÉBENDE.  >    V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

PRÉCAIRE.    S    Biographie  et  d'Histoire. 

PRÉCAUTIONS  ORATOIRES,  ménagements  que  l'ora- 
teur doit  prendre  pour  ne  pas  blesser  son  auditoire  ; 
tours  étudiés,  adroits,  insinuants,  dont  il  se  sert  pour 
dire  certaines  choses  qui,  autrement,  paraîtraient  dures 
et  choquantes.  S'agit-il,  par  exemple ,  de  faire  passer  un 
mot,  une  réflexion  qu'on  pourrait  prendre  en  mauvaise 
part,  il  les  adoucira  en  les  faisant  précéder  d'une  sorte 
d'excuse,  comme  pour  ainsi  dire,  si  j'ose  ainsi  parler, 
passez-moi  cette  expression,  etc.  Doit-il  parler  de  ma- 
tières délicates,  dont  la  pudeur  pourrait  être  blessée,  il 
se  servira  de  termes  généraux  et  indirects,  et  couvrira 
sa  pensée  d'un  voile  que  ceux-là  seuls  qui  ont  conscience 
du  mal  peuvent  pénétrer.  Quelquefois  il  préviendra  ou 
apaisera  un  mécontentement,  en  protestant  de  la  droiture 
de  ses  intentions,  en  alléguant  la  pénible  nécessité  où  le 
place  un  indispensable  devoir.  Si  c'est  un  fils  qui  plaide 
contre  son  père,  un  inférieur  contre  son  supérieur,  ils 
s'efforceront  de  concilier  la  défense  de  leurs  droits  avec 
les  égards  que  demande  la  personne  de  l'adversaire.  Ci- 
céron, dans  son  discours  pour  Marcellus,  faisant  l'éloge 
de  la  clémence  et  de  la  générosité  de  César,  le  mettait 
dans  l'impossibilité  d'abuser  de  sa  victoire  et  de  com- 
mettre un  acte  de  vengeance.  Bossuet,  pour  ne  pas  pro- 
duire une  impression  f&cheuse  en  rappelant  de  tristes 
souvenirs,  se  contentait,  en  faisant  l'oraison  funèbre  de 
la  reine  d'Angleterre,  d'une  simple  allusion  à  la  mort  de 
Charles  l*'.  Bourdaloue,  par  l'histoire  du  roi  David  et  du 
prophète  Nathan,  fit  sentir  à  Louis  XIV  le  scandale  qu'il 
donnait  à  sa  cour.  Les  grands  orateurs  ont  eu  souvent 
recours  aux  précautions  oratoires,  et  ils  ont  porté  jus- 
qu'au scrupule  la  crainte  de  déplaire  à  leurs  auditeura  : 
Périclès,  à  ce  que  rapporte  Quintilien,  priait  les  Dieux, 
toutes  les  fois  qu'il  allait  monter  à  la  tribune,  de  ne 
pas  lui  laisser  dire  un  mot  qui  pût  offenser  le  peuple 
athénien.  B. 

PRÉCEINTE  (du  latin  prœcingere,  entourer),  ceinture 
de  bordages  épais  placée  dans  un  navire  au-dessous  de 
chaque  rangée  de  sabords.  La  grande  préceinte  corres- 
pond à  la  hauteur  du  premier  pont;  la  2«  préceinte  ré- 
pond au  deuxième  pont  ;  la  3*,  dite  tribord  ou  lisse  de 
jf>lat-bord,  répond  au  pont  des  gaillards;  la  4*,  ou  lisse 
de  rabattue ,  répond  au  pont  de  la  dunette. 

PRÉCEPTE ,  règle,  leçon  ou  maxime  à  laquelle  il  faut 
se  conformer  pour  réussir  dans  un  art.  En  matière  reli- 
gieuse, un  précepte  est  ce  qu'il  faut  pratiquer. 

PRÉCEPTEUR,  celui  qui  est  chargé  de  l'instruction  e> 
de  l'éducation  d'un  jeune  homme. 

PRÉCEPTION.  I  V.  ces  mots  dans  notre  Diction* 

PRÉCEPTORIALE.  )    naire  de  Biographie  et  d'Hist. 

PRÉCHANTRE  ^du  latin  prœcantor)^  chanoine  qui, 
dans  certaines  églises  cathédrales  ou  collégiales,  remplit 
les  fonctions  de  grand  chantre.  On  le  nomme  aussi  pa- 
raphoniste,  archiparaphoniste.  F.  Chantre,  et,  dans 


PRÉ 


1480 


PRÉ 


notre  Dicttonnaire  de  Biographie  et  d^Histoure,  les  art. 
Capiscol,  Éoolatrk,  Primicier. 

PRÊCHE,  se  dit  da  fiermon  prononcé  par  un  ministre 
protestant,  et,  par  extension,  du  lieu  où  les  Protestants 
s'assemblent  pouf  célébrer  leur  culte.  Hs  n'emploient 

Eas  ce  mot,  qu'ils  regardent  comme  injurieux  dans  la 
oucbe  des  catholiques,  si  ce  n'est  quand  il  s'agit  du 
prêche  dans  le  désert  au  temps  des  persécutions. 

PRÉCIEUSES  (Les),  nom  donné,  dans  la  première 
moitié  du  xvn*  siècle,  aux  dames  qui  fréquentèrent  l'hô- 
tel de  Rambouillet.  II  n'eut,  dans  l'origine,  rien  que 
d'honorable,  puisqu'il  indiquait,  chez  celles  qui  le  por- 
taient, l'amour  des  entretiens  polis,  des  nobles  études,  et 
des  sentiments  délicats  et  distingués.  La  marquise  de 
Rambouillet,  femme  qui  Joignait  à  l'élération  du  cœur  la 
distinction  de  l'intelligence,  blessée  par  la  dépravation 
et  le  ton  goguenard  qui  régnaient  à  la  cour  de  Henri  IV, 
ouvrit,  vers  1608,  sa  chambre  bleue  aux  nobles  &mes  et 
aux  beaux-esprits  faits  pour  aimer  encore,  en  dépit  des 
habitudes  générales,  la  pureté  des  mœurs,  le  culte  de  la 
décence  et  de  la  vertu,  les  conversations  sérieuses  de  lit- 
térature et  de  morale,  et  le  beau  langage.  Là  se  rencon- 
trèrent, avec  quelques  grands  seigneurs  et  les  gens  de 
lettres  les  plus  en  renom,  des  dames  spirituelles  et  gra- 
cieuses, qui  formèrent  autour  de  la  marquise  et  de  sa 
fille,  Julie  d'Angennes,  comme  une  brillante  couronne. 
La  princesse  de  Condé  et  sa  fille,  qui  devint  plus  tard  la 
célèbre  M"»«  de  Longueville,  M»«  de  Sablé,  M"«  Paulet, 
la  lionne  de  l'hôtel  et  l'une  des  correspondantes  de  Voi- 
ture, Madeleine  de  Scudéry,  etc. ,  telles  furent  les  pre- 
mières Précieuses.  Ce  petit  cercle  d'élite  n'a  pas  seule- 
ment Jeté  comme  un  vernis  d'élégance  sur  la  corruption 
que  les  habitudes  soldatesques  du  xvi*  siècle  avaient  lé- 
guée à  la  société  du  temps  de  Louis  XIII;  il  prit  une  part 
notable  à  la  formation  de  notre  langue  classique.  On  a 
pu  dire  que  Malherbe  et  Corneille  avaient  créé  la  poésie, 
Descartes  et  Pascal  la  prose  :  cette  vérité  n'ôte  pas  aux 
Précieuses  le  mérite  d'avoir  recommandé  et  répandu  le 
goût  du  langage  choisi,  et  enrichi  notre  idiome  d'expres- 
sions qui  leur  ont  survécu.  Â  leur  insu,  elles  recommen- 
cèrent l'œuvre  avortée  de  la  Pléiade  ;  comme  l'école  de 
Ronsard,  elles  résolurent  de  déwdgariser  la  langue  :  seu- 
lement elles  eurent  le  bonheur  d'ignorer  assez  le  grec  et 
le  latin  pour  ne  pouvoir  point  appeler  k  leur  aide  ces 
langues  mortes,  et  elles  eurent  le  tact  de  faire  sortir  leur 
dictionnaire  d'objets  connus  et  d'images  ordinaires.  Elles 
trouvèrent  qu'on  pouvait  dire  :  laisser  mourir  la  con- 
verscUùm;  le  mot  me  manque;  revêtir  ses  pensées  d'ex- 
pressions nobles;  elles  donnèrent  cours  au  mot  urbanité, 
que  leur  avait  fourni  Balzac;  de  l'avis  de  Voiture,  elles 
préférèrent  le  mot  car  à  la  locution  pour  ce  que;  elles 
appelèrent  les  cheveux  roux  des  cheveux  d'un  blond 
hardi ,  pour  adoucir  une  vérité  désagréable  particulière- 
ment à  leur  sexe;  avant  Molière,  elles  appelèrent  l'hypo- 
crisie le  masque  de  la  vertu.  En  môme  temps ,  elles 
s'appliquaient  à  l'orthographe,  et  retranchaient  de  cer- 
tains mots  les  lettres  parasites ,  écrivant  tête  au  lieu  de 
teste,  éclat  au  lieu  d*esclat.  Enfin,  elles  éclairèrent  de 
leurs  critiques  les  écrivains  qui  leur  soumettaient  leurs 
œuvres  avant  d'affronter  l'écueil  de  l'impression  ;  si  elles 
se  trompèrent  sur  Polyeucte,  elles  avaient  applaudi  aux 
autres  chefs-d'œuvre  de  Corneille,  commenté  le  Discours 
de  la  Méthode,  et  l'on  pourrait  sans  injustice  attribuer 
quelques-unes  des  Maximes  de  La  Rochefoucauld  à  M™*  de 
Sable  et  à  ses  amies.  —  Malheureusement  les  choses  ne 
tardèrent  pas  à  se  g&ter.  Dès  l'origine,  les  concetti  ita- 
liens, le  gongorisme  espagnol ,  et  Veuphuisme  anglais 
avaient  mêlé  l'afféterie  à  lagr&ce,  et  le  raffinement  au 
naturel.  Pour  n'avoir  pas  voulu  s'encanailler,  pour  avoir 
trop  évité  de  contrôler  leurs  propres  Jugements  par  des 
comparaisons  salutaires  avec  le  goût  du  grand  public,  les 
Précieuses  ne  s'aperçurent  pas  qu'elles  suostituaient 
l'empire  de  la  mode  et  de  l'esprit  de  camaraderie  à  celui 
du  sens  commun.  Bientôt,  selon  l'expression  de  La 
Bruyère,  «  elles  laissèrent  au  vulgaire  l'art  de  parler 
d'une  manière  intelligible;  une  chose  dite  entre  elles  peu 
clairement  en  entraîna  une  autre  encore  plus  obscure, 
sur  laquelle  on  enchérissait  par  de  vraies  énigmes,  tou- 
jours suivies  de  lon^  applaudissements.  »  Il  eût  fallu, 
pour  prévenir  ce  pénl,  accepter  l'épreuve  de  la  publicité, 
courir  la  risque  des  moqueries  même  brutales  du  vul- 
gaire, et  les  Précieuses  n'eurent  garde  de  s'y  exposer.  Le 
mal  fût  bientôt  à  son  comble,  lorsque  se  furent  formées, 
%UT  le  modèle  de  l'hôtel  de  Rambouillet ,  les  ruelles  de 
Clievreuse,  de  Scudéry,  etc.,  et  ces  alcôves  de  province 
où  l'on  n'était  admis  qu'à  la  condition  de  connaître  le  fin 


des  choses,  le  grand  fln^  le  /in  du  fin.  Alors  on  appela  an 
miroir  le  conseiller  dies  grâces,  et  un  fauteuil  les  commO' 
dites  de  la  conversation  :  en  supposant  que  Molière  ait 
prêté  gratuitement  aux  Précieuses  ces  termes  ridicules, 
elles  furent  capables  d'en  créer  d'équivalents.  Attaquées 
par  Desmarets  dans  sa  comédie  des  Visionnaires  dès 
l'année  1637,  puis  par  l'abbé  de  Pure,  les  Précieuses  suc- 
combèrent sous  les  coups  que  leur  porta  Molière  dans 
ses  Précieuses  ridicules,  en  1659,  et  dans  ses  Femmes 
savantes,  en  1672.  Sous  l'influence  du  grand  comique , 
on  sembla  dès  lors  reconnaître  généralement  qu'une 
femme  en  sait  toujours  assez, 

Quand  la  capacitë  de  son  esprit  ae  hauaae 

A  oonnattre  un  ponrpolnt  d'arec  an  haat-de-chansae. 

Us  Femmes  tarantes,  III,  T. 

Mais  est-ce  bien  là  le  dernier  mot  de  notre  civilisation  sur 
l'éducation  des  femmes ,  et  faut-il  entièrement  y  sous- 
crire? Au  reste,  les  Précieuses  ont  péri;  mais  la  mode 
des  salons,  des  ruelles  et  de  la  conversation,  dont  l'hôtel 
de  Rambouillet  a  le  premier  donné  le  modèle,  leur  a  sur- 
vécu. Causer  n'est-il  pas  un  besoin  et  comme  un  privilège 
du  Français?  V,  Rambouillet  (Hôtel  de),  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  dnistoire;  Rœderer,  Histoire 
de  la  société  polie  en  France,  Paris,  1835  ;  Somaize,  Grand 
Dictionnaire  des  Précieuses,  1661,  2  vol.  in-8%  redite 
par  Livet,  1856,  2  vol.  in-18;  Livet,  Précieux  et  Pré' 
cieuses,  Paris,  1859,  in-8*».  A.  H. 

PRÉaNCTlON.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d' Histoire, 

PRÉGIPUT  fdu  latin  prœ,  avant,  et  capere,  prendre) , 
en  termes  de  Droit,  prélèvement  d'une  certaine  portion 
sur  un  tout.  Ainsi,  l'un  des  héritiers  d'un  défunt  peut, 
par  disposition  testamentaire  faite  en  sa  faveur,  prélever 
une  part  sur  la  succession,  indépen^mment  de  celle  que 
la  loi  lui  défère  :  ce  préciput  ne  peut  excéder  la  quotité 
disponible  (V,  Quotité);  il  peut  être  retenu  même  par 
l'héritier  qui  renonce  à  la  succession  ^Code  Napolwm^ 
art.  910).  On  nomme  préciput  conventionnel  l'avantage 
que  le  contrat  de  mariage  reconnaît  sur  les  biens  de  la 
communauté  à  celui  des  époux  qui  survivra  (  Ibid, , 
1515-20). 

pRéciPOT,  traitement  supplémentaire  accordé  à  certains 
fonctionnaires,  par  exemple,  aux  doyens  des  Facultés. 

PRÉCISION ,  qualité  de  la  pensée  et  du  style,  qui  con- 
siste à  séparer  les  idées  qui  ne  doivent  pas  être  réunies, 
à  écarter  celles  qui  sont  étrangères  ou  inutiles  au  sujet, 
et  à  exprimer  celles  qui  sont  nécessaires,  dans  leur  tota- 
lité, sans  longueur  comme  sans  Insuffisance.  La  Précision 
est  un  élément  de  la  clarté  ;  elle  a  en  outre  le  mérite  de 
donner  à  la  phrase  de  la  rapidité  et  du  mouvement. 

PRÉCONISATION  (du  latin  prœcontum^  proclama- 
tion), acte  par  lequel  un  cardinal,  et  (quelquefois  le  pape 
lui-même,  déclare  en  plein  consistoire  que  tel  sujet, 
choisi  pour  un  évêché  par  son  souverain,  et  dont  la  no- 
mination est  soumise  à  l'agrément  du  Saint-Siège,  pos- 
sède les  qualités  requises.  A  la  suite  de  la  préconisation, 
le  souverain  pontife  décerne  les  bulles  d'institution  ca- 
nonique, 

PRÉDESTINATION,  en  termes  de  Théologie,  dessein 
que  Dieu,  selon  quelques  docteurs,  aurait  formé  de  toute 
éternité  de  conduire  par  sa  grâce  certains  hommes  au 
salut  éternel.  Les  Thomistes,  prétendant  s'appuyer  de 
l'autorité  de  S^  Augustin,  admettaient  la  prédestination 
absolue  et  antécédente,  c-à^d.  purement  gratuite  et  non 
subordonnée  à  la  i)révision  des  mérites  de  l'ftme  prédes- 
tinée. Les  Congruistes  étaient  pour  la  prédestination 
conditionnelle  et  conséquente,  c-à-d.  fondée  sur  la  pré- 
vision des  mérites.  Calvin  soutint  la  prédestination  ab- 
solue, qui  fut  décrétée  aussi  par  le  synode  de  Dordrecht; 
mais  beaucoup  de  Protestants  l'ont  abandonnée  depuis. 
La  question  fut  vivement  débattue  au  concile  de  Trente 
par  les  Dominicains  et  les  Franciscains.  —  Les  Musul- 
mans entendent  la  prédestination  dans  le  sens  le  plus 
large,  comme  un  arrangement  nécessaire  et  immuable 
des  événements  de  ce  monde  :  Ce  qui  est  écrit,  disent- 
ils,  est  écrit,  La  prédestination  n'est  alors  autre  chose 
que  le  fatalisme.  v\  Grâce,  Congruisme,  Fatausme,  Dé- 
terminisme. 

PRÉDÉTERMINATION  ot  PRÉMOTiON  ,  nom  que 
donnaient  les  Thomistes  à  l'action  de  Dieu  qui,  suivant 
eux,  meut  et  prévient  la  volonté  de  l'homme,  en  la  déter' 
minant  à  agir. 

PRÉDICAMENT  ou  PRÉDICAT ,  terme  de  Pbiloeophit 
scolastique.  V.  Athubdt* 


PRÉ 


1481 


PRÉ 


PRÉDICANT,  dénomination  Jetée  par  dénigrement  au 
ministre  protestant  dont  la  fonction  est  de  prêcher. 

PRÉDICATION  (du  latin  prœdieare,  publier,  proclamer, 
parler  en  public),  action  de  prêcher,  c-à-d.  d*annoncer 
en  chaire  la  parole  de  Dieu  et  les  vérités  de  la  religion. 
Jésus-Christ  confia  à  ses  Apôtres  le  ministère  de  la  pré- 
dication ;  ceux-ci  le  transmirent  aux  évêques,  qui,  dans 
les  premiers  siècles  de  TÉglise,  en  furent  exclusivement 
chargés.  Les  premiers  exemples  que  Ton  connaisse  de 
prêtres  autorisés  à  prêcher  sont  ceux  d'Origène  et  de 
S^  Jean  Chrysostome  en  Orient,  de  S^  Félix  de  Noie  et  de 
S^  Augustin  en  Occident.  Aujourd'hui,  dans  l'Église  ro- 
maine, il  faut  être  au  moins  diacre  pour  avoir  le  pouvoir 
de  prêcher.  Le  droit  d'autoriser  les  prédicateurs  dans  un 
diocèse  n'appartient  qu'à  l'évêque;  les  curés  exercent  ce 
droit  dans  leur  paroisse.  Certains  ordres  religieux  se 
sont  particulièrement  consacrés  à  la  prédication  :  tels 
sont  les  Dominicains,  surnommés  Frères  prêcheurs,  les 
Franciscains,  les  Carmes,  les  Augustins,  les  Jésuites,  etc. 
La  prédication  suppose,  non-seulement  le  talent  de  la 
parole,  mais  une  étude  approfondie  de  l'Écriture  sainte 
et  des  Pères  de  l'Église,  une  connaissance  suffisante  du 
cœur  humain  et  des  mœurs  do  la  société  {V,  Chaire  — 
Éloquence  de  la).  B. 

PRÉDICTION,  divination  et  déclaration  nette  d'événe- 
ments futurs,  qui  sont  au-dessus  de  la  pénétration  ordi- 
naire de  l'esprit  humain ,  ou  hors  du  cours  de  la  nature. 
Elle  se  distingue  de  la  prévision,  qui  a  sa  raison  dans 
des  connaissances  acquises;  du  pressentiment,  dont  le 
principe  est  une  sensation ,  une  aperception  plus  ou  ' 
moins  vague  ;  de  la  prophétie,  (jui  est  inspirée  par  Dieu  ; 
et  du  pronostic,  fondé  sur  certaines  observations  qui  font 
présager  d'ordinaire  tel  ou  tel  résultat. 

PREEMPTION.  V.  Douanes. 

PRÉEXISTENCE,  existence  antérieure  à  la  vie  pré- 
sente, et  dont  l'idée,  impliquée  dans  toutes  les  théologies 
et  les  mythologies  qui  admettent  la  métempsycose,  est 
devenue  pour  Platon,  qui  l'avait  empruntée  aux  Pythago- 
riciens, l'objet  d'un  dogme  philosophique.  La  préexistence 
des  &mes  se  rattache,  dans  Platon,  à  la  théorie  de  la  Ré- 
miniscence (F.  ce  mot)^  et  à  l'explication  du  mal.  L'&me, 
en  concevant  les  vérités  éternelles  que  Platon  appelle 
Idées  (K.  ce  mot\  ne  ferait  que  se  ressouvenir  de  ce 
qu'elle  aurait  appris  dans  cette  vie  antérieure  ;  en  même 
temps,  le  mal  que  l'homme  subit  en  ce  monde  ne  serait 
que  la  punition  du  mal  commis  précédemment.  Sur  le 
premier  point,  le  reproche  le  plus  grave  qu'on  puisse 
faire  à  la  doctrine  de  Platon,  c'est  qu'elle  est  absolument 
hypothétique  ;  sur  le  second,  d'autres  considérations  non 
moins  graves  viennent  s'ajouter  à  cette' objection  fonda- 
mentale. Elle  ne  fait  que  reculer  la  difficulté;  car  si  le 
mal,  en  ce  monde,  est  la  punition  de  fautes  commises 
antérieurement,  ces  fautes  qui  sont  elles-mêmes  un  mal, 
il  reste  à  savoir  quelle  en  est  l'origine  et  la  cause.  En 
outre,  il  nous  parait  que  la  punition  qu'on  suppose  man- 
querait son  but  de  Juste  et  utile  expiation,  en  nous  frap- 
pant pour  des  fautes  dont  nous  aurions  complètement 
perdu  le  souvenir.  V.  surtout  dans  Platon  les  Dialogues 
mtitulés  Ménon  et  Phèdre.  B—b. 

PRÉFACE  (du  latin  prœ,  avant,  et  fan,  parler),  dis- 
cours qu'un  auteur  met  ordinairement  en  tête  d'un  livre 
qu'il  publie,  pour  donner  au  lecteur  quelques  indications 
nécessaires  sur  le  contenu  ou  le  plan  de  ce  livre,  ou 
pour  le  prévenir  favond)lement  Une  préface  est  sou- 
vent un  peu  apologétique;  elle  doit  répondre  à  certaines 
préoccupations  de  l'esprit  public,  combattre  des  préjugés, 
repousser  ou  discuter  la  critique  envieuse,  enfin  s'im- 
poser d'elle-même  au  lecteur  par  son  ii-propos.  Les  Pré- 
faces de  Racine  pour  les  tragédies  de  Britannicus  et 
d*Iphigénie,  de  Molière  pour  le  Tartufe,  de  Voltaire  pour 
la  Henriade,  OEdipe,  Mérope,  VHistoire  de  Charles  XII, 
sont,  à  divers  titres,  des  modèles  du  genre;  ces  grands 
écrivains  ont  su  les  rendre  très-intéressantes,  et  ils  y  ont 
laissé  l'empreinte  de  leur  génie.  Notre  littérature  compte 
encore  deux  chefs-d'œuvre  dans  la  Préface  de  Dalembert 
en  tête  de  Y  Encyclopédie,  et  dans  celle  dont  M.  Villemain 
a  fait  précéder,  en  1835,  la  6*  édition  du  Dictionnaire  de 
VAcaaémte  française^  De  nos  Jours  encore  on  peut  citer 
les  Préfaces  de  Chateaubriand,  dans  diverses  parties  de 
ses  OEuvres  complètes  j  celles  de  C.  Delavigne,  pour  sa 
tragédie  de  Marino  Faiiero;  de  V.  Hugo,  pour  son  drame 
de  Cromwell,  etc.  P. 

PRÉFACB,  partie  de  la  Messe  qui  précède  le  Canon,  au- 
quel elle  sert  de  préambule.  Elle  commence  par  ces  mots  : 
Sursùm  corda.  On  la  trouve  dans  les  plus  vieux  sacra- 
mcntaires,  dans  les  plus  anciennes  liturgies,  et  l'usage 


en  parait  remonter  au  temps  des  Apôtres.  H  y  a,  dans  I^ 
sacramentaire  de  S^  Grégoire,  des  préfaces  propres  pour 
presque  toutes  les  messes  :  le  missel  romain  n'en  a  gardé 
que  neuf.  A  la  grand'messe,  la  préface  est  chantée  par 
le  célébrant  :  le  chant  est  uniformément  le  même  pour 
toutes  les  circonstances.  Les  Grecs  n'ont  qu'une  Préface. 

PRÉFECTURE,  mot  dont  l'acception  était  différente 
chez  les  Anciens  de  celles  qu'on  lui  donne  aujourd'hui 
(V.  Préfecture,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire)^  et  qui  désigne  pour  nous,  soit  la  charge  de 
préfet,  soit  le  lieu  où  il  réside,  soit  le.  département 
soumis  à  sa  Juridiction.  Par  décret  du  28  mars  1852,  les 
préfectures  ont  été  divisées  en  trois  classes,  dont  les  titu- 
laires ont  des  traitements  de  40,000,  30,000  et  20,000  fr. 
Le  préfet  de  la  Seine  reçoit  50,000  fr.  Les  préfets  peu- 
vent être  mis  à  la  retraite  à  i'àge  de  65  ans;  ceux  qui 
cessent  d'être  en  activité,  et  qui  n'offrent  pas  les  condi- 
tions voulues  pour  obtenir  une  pension  de  retraite,  peu- 
vent recevoir,  pendant  6  ans,  un  traitement  de  disponi- 
bilité, qui  est  de  8,000  fr.  pour  les  préfets  de  l'*  classe, 
de  6,000  fr.  pour  les  autres.  Les  Conseillers  de  préfec" 
ture  sont  aussi  de  trois  classes,  aux  traitements  de  3,000, 
2,000  et  1,600  fr.;  ceux  du  département  de  la  Seine  ont 
8,0(J0  fr.  Un  secrétaire  général  de  préfecture  a  rempli 
pendant  quelque  temps,  avant  1854,  les  fonctions  do 
sous -préfet  dans  l'arrondissement  chef-lieu  des  plus 
grands  départements  ;  il  peut  toujours  être  chargé  par 
délégation  d'une  partie  de  l'administration  départemen- 
tale. —  Chaque  arrondissement  forme  une  Sous -Pré" 
fecture;  le  traitement  des  sous -préfets  est  de  8,000, 
6,000,  et  4,500  fr.  Ces  fonctionnaires  sont  admis  à  la  re- 
traite à  r&ge  de  62  ans  :  s'ils  n'ont  pas,  en  cessant  leur 
service,  les  conditions  requises  pour  l'obtention  d'une 
pension,  ils  ont  droit  pendant  6  ans,  pourvu  qu'ils  aient 
au  moins  6  ans  de  service,  à  un  traitement  de  non- 
activité,  fixé  pour  ceux  de  l^^  classe  à  3,000  fr.,  pour  les 
autres  à  2,400  fr. 

PRÉFECTUiiE  (Conseil  de).  V.  Préfet  de  nipARTEVENT, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

PRÉFÉRICULE.  V,  Prjef^ricule,  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d^Histoire. 

PRÉFET.  )  y  uQ^jj^  Dictionnaire  de  Biogra- 

PRÉFET  MARITIME.    î      phie  et  d'Histoire. 

préfet  de  POUCE.    )        *^ 

PRÉFETS  DO  PALAIS,  foUctionnalres  de  la  maison  de  l'Em- 

{>ereur  des  Français.  Ils  étaient  au  nombre  de  quatre: 
eurs  fonctions  consistaient  dans  un  service  d'honneur, 
la  surveillance  d'une  partie  de  l'administration  sous 
les  ordres  du  grand  maréchal  du  palais.  Ils  suivaient 
TEmpereurdans  ses  voyages.  Cette  charge  existait  sous 
le  !<'  Empire  français  ;  elle  disparut  lors  de  la  Res- 
tauration, et  le  2«  Lmpire  l'a  réiastituée. 

PRÊFIX,  en  termes  de  Palais,  ce  qui  est  fixé  à  l'avance. 
On  dit  un  jour  pré/lx,  un  terme  préfix,  un  douaire 
pré/ix,  une  somme  préfixe, 

PRÉFIXE,  partie  accessoire  d'un  mot,  qui  en  précède 
la  racine  ou  du  moins  le  radical.  Le  préfixe  consiste  en 
une  préposition  ou  en  une  particule  inséparable  qui  mo- 
difie habituellement  le  sens  originel  et  fondamental  du 
mot  :  in-utûe,  inrcommode,  dissemblable,  dé-faveur, 
mé-connattre ,  mé-créant,  re-tenir.  On  peut  compter 
parmi  les  préfixes  l'augment  des  verbes  grecs  et  du  par- 
ticipe passé  allemand,  le  redoublement  des  parfaits  grecs 
et  de  quelques  parfaits  latins.  La  connaissance  des  pré- 
fixes est  très-utile  pour  l'intelligence  du  grec,  de  l'alle- 
mand, et  aussi  du  latin.  Quant  aux  langues  néolatines, 
elles  emploient  généralement  les  mêmes  préfixes  que  la 
langue  latine,  et  n'en  ont  qu'un  très-petit  nombre  qui 
leur  soient  particuliers.  V,  Afftxe.  P. 

PREGADT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Htstoire, 
PRÉJUDiaELLE  (Question).  V.  Question. 
PRÉJUGÉ  (du  latin  prœ-judicata)^  opinion  conçue  à 
l'avance  sur  des  questions  que  l'observation  et  l'expé- 
rience devraient  seules  résoudre.  Les  préjugés  sont  une 
des  causes  les  plus  fréquentes  de  nos  erreurs  :  ils  agis- 
sent sur  nous  de  la  même  manière  que  les  passions,  avec 
lesquelles  ils  font  souvent  alliance;  et  telle  est  leur  puis- 
sance, qu'ils  faussent  non- seulement  nos  jugements  et 
nos  appréciations,  mais  aussi  nos  observations  elles- 
mêmes,  en  nous  faisant  voir  dans  les  choses,  non  ce  qui 
y  est  effectivement,  mais  ce  que  nous  désirons  y  voir.  Ils 
ont  pour  causes  et  pour  origine  un  assez  grand  nombre 
de  circonstances,  dont  les  principales  sont  l'amour-propre, 
l'esprit  de  parti,  de  secte,  de  système,  les  habitudes  ac- 
quises par  l'éducation,  le  milieu  dam  lequel  on  a  véctu 


PRE 


U82 


PRÉ 


Il  est  peu  de  Logiciens  et  de  Moralistes  qui  niaient  plus 
ou  moins  insisté  sur  les  préjugés  et  sur  leur  influence 
pernicieuse.  On  lira  avec  un  intérêt  et  un  profit  tout  par- 
ticulier, sur  ce  sujet,  nn  des  meilleurs  chapitres  de  la 
Logique  de  Port-Royal  :  Des  mauvais  raisonnements  que 
Von  commet  dans  la  vie  civile  et  dans  les  discours  ordi- 
naires {Logiqtie^  IIP  partie,  ch.  19).  B~e. 

PRÉLART,  toile  goudronnée  qui  sert  dans  les  ports  à 
couvrir  les  objets  et  à  les  mettre  à  Tabri  de  la  pluie.  On 
remploie  aussi  pour  fermer  les  écoutilles  des  navires. 

PRÉLAT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire. 

PRÉLATION  (du  latin  prœlattOt  préférence),  terme  de 
notre  ancienne  Jurisprudence,  désignant  :  1°  le  droit 
qu*avait  le  roi  de  prendre  une  terre  seigneuriale  en  rem- 
boursant Tacquéreur,  avant  que  celui-ci  eût  fait  serment 
de  foi  et  d*hommage;  2®  le  droit  qu'avait  le  bailleur  em- 
phytéotique d*Ôtre  préféré  à  tout  autre  dans  Tacquisition 
de  ce  que  le  preneur  voulait  aliéner;  3°  le  droit  pour 
Tenfant  d^avoir  par  préférence  les  charges  que  son  père 
avaient  possédées. 

PRÉLIMINAIRES  (du  latin  prœ,  avant,  et  limen,  seuil, 
entrée),  ce  qui  précède,  ce  (|ui  doit  être  examiné  avant 
d*aborder  une  matière  principale.  Ainsi,  en  Diplomatie, 
les  préliminaires  sont  des  points  généraux  qui  doivent 
être  réglés  avant  d*entrer  dans  la  discussion  des  intérêts 
particuliers.  On  nomme  préliminaires  de  paix  un  traité 
provisoire  conclu  par  un  général  d'armée  ou  par  un  di- 
plomate, dans  lequel  est  insérée  la  clause  qu'il  sera,  dans 
un  délai  déterminé,  remplacé  par  un  traité  définitif  entre 
les  souverains  :  si  cette  condition  n'est  pas  remplie,  les 
préliminaires  n'ont  d'autre  effet  que  ceux  d'une  simple 
suspension  d'armes.  En  Jurisprudence,  le  préliminaire 
de  conciliation  est  la  tentative  que  la  loi  prescrit  de  faire 
devant  le  Juge  de  paix  pour  mettre  d'accord  les  parties 
qui  sont  sur  le  point  d'engager  un  procès. 

PRÉLUDE  (du  latin  prœ,  avant,  et  ludere,  Jouer),  mot 
qui  désigna  d'abord,  soit  ce  que  nous  appelons  en  Mu- 
'  si<jue  Introduction,  et  même  Ouverture  {V.  ces  mots)^ 
soit  une  improvisation  sur  l'orgue,  et  qui  ne  s'applique 
plus  guère  qu'aux  pièces  écrites  dans  un  style  de  fan- 
taisie pour  servir  d'exercices  sur  un  instrument  quel- 
conque, ou  aux  traits  qu'un  exécutant  fait  entendre  pour 
essayer  un  instrument,  ou  pour  annoncer  le  ton  du  mor- 
ceau qu'il  va  Jouer.  Bach,  Handel,  Albrechtsberger , 
Vanhall,  Steibeit  ont  publié  des  recueils  de  préludes. 
Les  Italiens  donnent  aux  morceaux  de  ce  genre  le  nom 
de  ricercari,  c.-à-d.  pièces  recherchées  dans  leurs  com- 
binaisons. B. 

PRÉMÉDITATION,  en  termes  de  Droit  criminel,  des- 
sein réfléchi  d'ex^uter  un  attentat  contre  les  personnes. 
C'est  une  circonstance  aggravante,  qui  entraîne  une  aug- 
mentation de  peine  :  ainsi,  le  meurtre  prémédité  devient 
assassinat, 

PRÉMICES  (du  latin  primiliœ)^  premier  produit  de  la 
terre  ou  du  bétail.  Les  Hébreux  les  offraient  à  Dieu 
chaque  année,  et  elles  se  prenaient  depuis  la  30*  jusqu'à 
la  5U*  partie  :  ces  prémices  appartenaient  à  la  tribu  de 
Lévi.  Les  Grecs  offraient  aussi  des  prémices  à  Cérès  et  à 
Diane,  les  Romains  aux  Dieux  Lares.  Dans  les  premiers 
siècles  de  l'Église,  les  prêtres  vécurent  d'oblations,  mais 
sans  qu'il  y  eût  à  cet  égard  de  disposition  légale.  Le  pape 
Alexandre  II  fit  du  don  des  prémices  un  précepte  reli- 
gieux. Un  concile  de  Bordeaux  (1255)  en  fixa  la  quotité 
depuis  la  30*  Jusqu^à  la  40*  partie  du  tout;  un  concile  de 
Tours  (1282),  à  la  60*  partie. 

PRÉMISSES,  en  latin  Prœmissœ  {à^prasmittere^mçXiTt 
en  avant),  propositions  que  l'on  met  en  avant  dans  un  rai- 
sonnement pour  en  tirer  une  conséquence  ou  conclusion. 
On  emploie  ce  mot  pour  toute  espèce  de  principes,  mais 
plus  spécialement,  et  dans  un  sens  rigoureusement  tech- 
nique, pour  les  principes  du  raisonnement  déductif.  11 
désigne  alors  la  majeure  et  la  mineure  des  syllogismes, 
c.-à-d.  les  propositions  dans  lesquelles  on  compare  suc- 
cessivement le  grand  terme,  ou  attribut  de  la  conclusion, 
et  le  petit  terme,  sujet  de  la  conclusion,  au  moyen  terme, 
pour  en  opérer  indii*cctement  le  rapprochement.  V.  Ma- 
jeure, Mineure,  Syllogisme.  B— e. 

PRÉMOTION.  V.  PRÉDéTERMmATION. 

PRÉNOM  (du  latin  prœnomen,  formé  de  prœ,  avant, 
et  nomen,  non;),  nom  qui  se  met  avant  le  nom  de  la  fa- 
mille, pour  distinguer  l'individu  qui  le  porte.  Chez  les 
anciens  Romains,  les  gens  de  condition  libre  avaient  seuls 
le  droit  d'avoir  un  prénom  :  dans  les  premiers  temps,  on 
le  leur  donnait  à  l'âge  de  puberté,  14  ans  selon  les  uns, 
17  ans  sftkiD  les  autres,  c.-à-d.  au  moment  où  ils  pre- 


naient la  robe  virile;  plus  tard  la  coutume  s'établit  de 
le  donner  le  neuvième  Jour  après  la  naissance,  et  cet 
acte  était  précédé  d'une  cérémonie  lustrale.  Selon  Vai- 
ron, il  y  avait  environ  30  prénoms.  Le  fils  aine  rece- 
vait ordinairement  le  prénom  du  père,  le  second  fils  ce- 
lui du  grand-père,  et  les  suivants  ceux  des  ancêtres.  Les 
femmes  n'en  portèrent  pas  dans  le  principe;  puis  elles 
prirent  en  se  mariant  celui  de  leur  époux,  en  lui  donnant 
une  terminaison  féminine;  enfin  elles  en  reçurent  un  le 
8*  Jour  après  leur  naissance.  —  Chez  les  peuples  chrétiens, 
les  prénoms,  empruntés  au  calendrier  des  Saints,  se  con- 
fondent avec  les  noms  de  baptême.  Sous  la  l'*  Répu- 
blique française,  on  les  remplaça  par  des  noms  de  plantes, 
de  légumes,  et  d'instruments  aratoires.  La  loi  du  11  ger- 
minal an  XI  (1*^  avril  1803)  et  le  décret  du  20  juillet  1808 
défendent  de  donner  aux  enfants  d'autres  prénoms  que 
ceux  qui  sont  pris  dans  les  calendriers  reconnus,  ou  qui 
sont  einpmntés  aux  personnages  connus  de  l'histoire  an- 
cienne; les  officiers  de  l'état  civil  ne  peuvent  en  admettre 
aucun  autre  dans  leurs  actes.  B. 

PRÉPARATION,  en  termes  de  Musique,  une  des  règles 
de  l'emploi  des  dissonances  (V.  ce  mot).  Elle  consiste 
à  faire  entendre  comme  consonnant  dans  l'accord  précé- 
dent le  son  qui  va  devenir  dissonant.  La  préparation 
doit  au  moins  égaler  en  valeur  la  durée  de  la  disso- 
nance ;  d'après  ce  principe,  elle  s'opère  toujours  par  une 
syncope.  B. 

PREPOSITIF,  terme  employé  quelquefois  comme  sy- 
nonyme de  Préfixe  {V.  ce  mot). 

PRÉPOSITION  (du  latin  prœ,  devant,  et  positus, 
placé),  particule  ainsi  appelée  de  la  place  qu'elle  occupe 
ordinairement  devant  les  noms,  pronoms  ou  verbes.  Les 
prépositions  servent  à  exprimer  les  rapports  indirects  qui 
unissent  deux  mots  entre  eux  :  «  Le  livre  de  Pierre  ;  j'ai 
donné  un  habit  à  ce  pauvre;  je  ferai  cela  pour  vous;  il 
est  arrivé  avant  moi  ;  posez  ce  livre  sur  la  table,  etc.  » 
D'après  Port-Royal,  les  principaux  rapports  exprimés 
par  les  prépositioiiS  sont  ceux  de  lieu  {à,  auprès,  autour, 
chez,  jusque,  près,  par,  proche,  ver«,  etc.)  ;  de  temps 
{durant,  pendant);  de  lieu  et  de  temps  à  la  fois  {dans, 
dès,  en,  depvis,  sous,  vers);  d'ordre  {avant,  après, devant, 
derrière,  entre,  etc.)  ;  de  la  cause  efficiente  (maison  bâtie 
par  un  architecte),  matérielle  (maison  de  brique),  finale 
(maison  bàtle  pour  y  loger  des  pauvres)  ;  d'union  et  de 
conformité  {avec,  selon,  suivant)  ;  de  séparation,  d*excep- 
tion,  d'opposition  {excepté,  hors,  hormis,  sans,  sauf, 
contre,  malgré,  nonobstant)^  etc.  Il  s'en  faut  beaucoup 
que  chacun  de  ces  rapports  soit  exprimé  par  une  prépo- 
sition spéciale;  un  même  rapport  peut  être  exprimé  par 
plusieurs  prépositions  (il  est  dans  Paris,  en  Italie,  à 
Rome)  ;  et  une  même  préposition  peut  marquer  divers 
rapports  (il  est  en  France,  il  va  en  Italie,  il  viendra  en 
trois  jours,  il  est  tombé  en  courant).  —  L'emploi  des  pré- 
positions est  d'autant  plus  fréquent  qu'il  y  a  moins  de 
cas  ou  absence  totale  de  cas  dans  une  langue,  puisque  les 
cas  sont  destinés  à  signifier  les  rapports  des  noms,  ad- 
jectifs et  pronoms  avec  les  mots  qui  les  accompagnent.  Il 
semble  d'abord  que  les  langues  pourvues  de  cas  devraient 
se  passer  de  prépositions;  mais  les  cas  étant  infiniment 
moins  nombreux  que  les  prépositions,  les  rapports  qu'ils 
marquent  sont  encore  plus  étendus  et  plus  vagues.  Aussi 
le  grec,  le  latin,  l'allemand  surtout,  font  un  fréquent 
usage  des  prépositions,  afin  de  donner  aux  cas  plus  de 
précision,  et  de  rendre  le  langage  plus  net  et  plus  clair. 
Le  mot  qui  suit  la  préposition  s'appelle  son  complément, 
parce  qu'il  en  complète  le  sens;  ou  son  régime,  terme 
qui  convient  surtout  aux  langues  anciennes  et  à  l'alle- 
mand, parce  qu'elle  semble  imposer  tel  ou  tel  cas  au 
mot  complémentaire.  —  Les  prépositions  servent  encore  à 
former  avec  les  autres  mots,  surtout  avec  les  verbes,  des 
mots  composés  qui  contribuent  beaucoup  à  la  brièveté 
et  quelquefois  à  l'énergie  du  langage  :  conréisciple.  dé- 
tourner, par-achever,  par-faire.  —  Outre  les  prépositions 
simples,  les  diverses  langues  emploient  des  prepositiont 
composées  ou  locutions  prépositives,  formées  de  la  réu- 
nion de  plusieurs  mots;  telles  sont,  en  français,  à  tra* 
vers,  à  cause  de,  etc.  —  Les  mots  excepté^  nonobstant, 
concernant,  touchant,  que  l'on  cl&sse  parmi  lea  préposi- 
tions, ne  sont  que  de  fausses  prépositions  :  ce  sont  des 
participes  auxquels  la  force  de  l'usage  et  une  apparence 
trompeuse  ont  fait  donner  ce  nom  :  cependant,  comme 
on  peut  les  remplacer  exactement  par  des  prépositions 
synonymes,  il  est  plus  commode,  dans  la  pratique,  de 
les  considérer  comme  telles. 

Aux  prépositions  il  convient  de  rattacher  certaines  par- 
ticules qui  ne  s'emploient  Jamais  seules,  mais  s'attachent 


PRE 


1483 


PRE 


à  la  1**  syllabe  du  mot  où  elles  entrent  comme  modifica- 
tirs,  et  qu*on  appelle  pour  cette  raison  particules  insépa- 
rables. Les  Anciens  leur  donnaient  le  nom  de  préposi- 
tions, à  cause  de  la  place  qu'elles  occupent  constamment; 
les  Modernes  les  appellent  souvent  préfixes»  Les  princi- 
pales sont»  en  grec  :  a,  Suc;  en  latin,  in,  dis;  en  français, 
w,  dé,  diif  mé,  etc.  V.  PaérixE.  P. 

PRÉROGATIVE,  mot  qui  exprime  un  avantage  parti- 
CQlier,  un  privilé^  quelconaue  attaché  à  certaines  fonc- 
tions, à  certaines  dignités,  sous  la  monarchie  constitu- 
tionnelle, on  appelle  Prérogative  royale,  Prérogative 
wrlementaire,  les  droits  et  les  pouvoirs  que  la  Consti- 
tution accorde  au  roi,  aux  Qiambres  législatives.  Les 
ambassadeurs  Jouissent,  dans  les  pays  ou  ils  sont  en- 
vovés,  de  trois  préi-ogatives  principales,  Texterritorialité 
(K.  ce  mot)  ^  rinviolabilité,  et  Timmunité  ou  exemption 
de  la  Juridiction  ordinaire. 

PRESAGE,  signe  d'après  lequel  on  juge  de  Tavenir. 
Les  Anciens  tiraient  des  présages,  soit  des  paroles  for- 
tuites (les  présages  s'appelaient  alors  omtna),  soit  du 
chant  et  du  vol  des  oiseaux  (c'était  roifono«cop/«),  soit  des 
volatiles  (auspices,  augures)^  soit  des  entrailles  des  vic- 
times {aruspices).  Ils  interprétaient  encore  les  tintements 
d*oreilIcs,  les  étemuments,  les  chutes  imprévues,  la  ren- 
contre de  certains  hommes  ou  de  certains  animaux,  les 
noms,  les  éclairs,  la  foudre,  etc. 

PRÉSANCTIFIÉE  (Messe),  messe  sans  consécration, 
mais  dans  laquelle  on  communie  avec  des  hosties  pré- 
sanctifiées, c.-à-d.  consacrées  la  veille  ou  quelques  jours 
auparavant.  Dans  TÉglise  latine,  il  n*y  a  de  messe  de  ce 
genre  que  le  Vendredi  Saint;  dans  TÉglise  grecque,  on 
en  dit  pendant  tout  le  Carême,  excepté  le  samedi  et  le 
dimanche. 

PRESBYTÈRE  (du  grec  presbuteros,  prêtre],  maison 
servant  à  Thabitation  d*un  curé  ou  d'un  desservant.  Dès 
les  premiers  temps  du  christianisme,  les  paroissiens  don- 
nèrent un  logement  à  leur  curé  :  plusieurs  conciles  en 
firent  une  obligation,  et  leur  décision  a  été  confirmée  par 
le  concile  de  Trente.  Un  décret  de  1809  oblige  les  com- 
munes à  fournir  à  leur  curé  ou  desservant  un  pres- 
bytère, un  logement,  ou  une  indemnité  pécuniaire.  Les 
contestations  à  ce  sujet  rcssortissent,  non  aux  tribunaux, 
mais  à  Tautorité  administrative.  —  S^  Paul  donnait  le 
nom  de  Presbytère  à  l'assemblée  des  prêtres.  On  appliqua 
aussi  ce  nom  au  chceur  des  églises,  parce  qu'ancienne- 
ment les  prêtres  seuls  avaient  droit  d'y  prendre  place. 

PRESBYTÉRIENS.  V,  ce  mot  dans  notre  ûictumnaire 
de  Biographie  et  d*Histoire, 

PRESCIENCE,  connaissance  certaine  et  infaillible  de 
l'avenir,  comprise  dans  l'attribut  divin  de  sagesse  su- 
prême. Incapables  que  nous  sommes  de  faire  sur  les 
futurs  événements  autre  chose  que  de  simples  conjec- 
tures, nous  ne  pouvons  avoir  de  cette  prescience  infail- 
lible qu'une  idée  bien  incomplète;  mais  si  nous  ne 
comprenons  pas  clairement  comment  elle  s'opère,  du 
moins  concevons -nous  clairement  qu'elle  est  un  élé- 
ment nécessaire  de  la  perfection  divine.  Nous  croyons 
donc,  et  nous  i^rmons  de  la  manière  la  plus  positive, 
que  Dieu  connaît  certainement,  de  toute  éternité,  les 
événements  futurs  jusque  dans  leurs  plus  petits  détails. 
On  a  dit  souvent  que  «  l'Intelligence  infinie  connaissant 
l'infinie  et  universelle  vérité  par  un  seul  re£pd,  où  il  n'y 
a  ni  progrès,  ni  succession,  ni  distinction,  ni  divisibilité» 
(Fénelon,  De  l'Existence  de  Dieu)^  il  n'y  a  pour  Dieu  à 
proprement  parler  ni  passé,  ni  futur.  Cela  nous  parait  plus 
subtil  que  véritablement  satisfaisant.  On  tombe  d'ac- 
cord que  tous  les  êtres  et  tous  les  événements  qui  sont, 
qui  ont  été,  ou  qui  doivent  être,  bien  qu'embrassés  si- 
multanément par  Dieu  dans  un  acte  unique,  permanent 
et  étemel,  d'intelligence,  ne  laissent  pas  de  lui  app»- 
raltre  comme  étant  les  uns  présents,  «  les  autres  devant, 
les  autres  après,  par  le  rapport  qu'ils  ont  entre  eux  »  ;  dès 
lors,  et  malgré  la  supériorité  infinie  de  cet  acte  unique 
sur  nos  conceptions  successives,  il  n'en  reste  pas  moins 
que  Dieu  voit  et  sait  les  choses  comme  futures,  et  nous 
ne  sommes  pas  plus  avancés  qu'auparavant.  Cest  qu'en 
pflTet  la  prescience  divine  est  une  des  vérités  qu'une  loi 
de  notre  intelligence  nous  fait  concevoir  et  croire  sans 
les  comprendre  —  En  tant  qu'elle  a  pour  objet  les  ac- 
tions humaines,  on  l'oppose  au  Libre  Arbitre,  et  l'on  dit  : 
«  Comment  peut-il  se  faire  que  l'homme  garde  la  libre 
disposition  d'actes  que  Dieu  a  prévus  de  toute  éternité? 
Ou,  si  l'homme  est  libre  jusqu'au  moment  de  sa  décision 
et  jusque  dans  sa  décision  même,  comment  Dieu  peut-il 
avoir  prévu  certainement  de  toute  éternité  les  détermi- 
nationr  quil  prendrait?  »  A  prendre  les  choses  dans  ces  ! 


termes,  et  toutes  réserves  faites  sur  la  ouestion  du  gou- 
vernement exercé  par  Dieu  sur  le  monac,  ceci  n'est,  ni 
dans  un  sens,  ni  dans  l'autre,  une  difficulté  véritable,  et 
l'on  peut  dire  que  si  la  Prescience  divine  et  te  Libre  Ar- 
bitre de  l'homme  sont  considérés  comme  se  faisant 
obstacle  l'un  à  l'autre,  cela  tient  à  la  confusion  de  cer- 
tains mots,  de  certaines  formes  de  langage,  qui  expriment 
deux  choses  bien  différentes,  tantôt  la  simple  futurition, 
et  tantôt  la  nécessité.  Ainsi  :  «  cette  chose  doit  être  » 
peut  signifier,  ou  :  «  telle  chose  sera ,  »  ou  :  «  il  est  né- 
cessaire que  telle  chose  soit.  »  Dieu,  comme  intelligence 
parfaite,  sait  bien  que  telle  chose  sera,  bien  qu'il  n'y  ait, 
à  ce  qu'elle  soit,  aucune  nécessité.  Il  en  est  de  même  des 
mots  certain  et  déterminé.  Il  est  certain,  absolument 
parlant,  qu'entre  différents  partis  il  en  est  un  que  je 
choisirai  ;  mais  cette  espèce  de  certitude  n'est  pas  ce  qui 
détermine  mon  choix,  lequel  reste  jusqu'au  dernier  mo- 
ment à  ma  disposition.  Une  intelligence  imparfaite  ignore 
ce  qu'il  en  sera.  Moi-même  j'ignore  longtemps  quel  parti 
je  prendrai.  Dieu,  au  contraire,  a  prévu  comment  je  choi- 
sirais. Mais  sa  prévision,  bien  qu'antérieure,  en  fait,  à 
naa  décision,  ne  laisse  pas  de  lui  être  logiquement  posté- 
rieure, puisqu'on  réalité  ce  n'est  pas  ma  décision  qui  se 
règle  sur  sa  prévision,  mais  au  contraire  sa  prévision  qui 
a  été,  de  toute  éternité,  formée  sur  mon  choix  futur.  En 
un  mot,  la  certitude  avec  laquelle  Dieu  prévoit  les  ac- 
tions libres  des  hommes  no  leur  ôtc  pas  plus  leur  carac* 
tère  que  ne  le  fait  aux  actions  passées  la  certitude  de  nos 
souvenirs.  Voilà,  en  résumé,  ce  qu'on  peut  répondre  aux 
objections  contre  le  Libre  Arbitre,  tirées  exclusivement 
do  la  Prescience  divine.  Quant  à  celles  qui  font  interve- 
nir la  Providence,  elles  exigent  une  autre  réponse,  et 
seront  examinées  dans  un  article  subséquent  (V.  Provi- 
dence). Sur  l'un  et  l'autre  sujet,  V.  Bossuet,  Traité  du 
Libre  Arbitre,  et  Leibniz,  Essais  de  Théodicée.    B— e. 

PRESCRIPTION  CIVILE.  Le  Code  Napoléon  (art.  2219) 
définit  la  prescription  «  un  moyen  d'acquérir  ou  de  se 
libérer  par  un  certain  laps  de  temps  et  sous  les  condi- 
tions déterminées  par  la  loi.  »  Elle  est  donc  rangée  par 
lui  dans  les  moyens  d'acquérir  la  propriété,  parce  que, 
aux  yeux  du  législateur,  elle  repose  sur  la  présomption 
d'une  acquisition  ou  d'une  libération  antérieures.  La 
prescription  ne  peut  être  suppléée  d'office  par  le  juge; 
elle  doit  être  opposée  par  la  partie  qui  l'invoque.  Elle 
peut  l'être  en  tout  état  de  cause.  La  prescription  ne 
peut  atteindre  les  choses  qui  ne  sont  pas  dans  le  com- 
merce, l'état  civil  des  citoyens,  les  droits  contraires  à 
l'ordre  public,  ni  même  les  droits  facultatifs  ;  de  même 
le  domune  public  et  ses  dépendances. 

Il  y  a  deux  obstacles  à  la  prescription,  une  possession 
précaire  ou  contraire  au  titre,  La  possession  précaire  est 
la  possession  de  ceux  qui  détiennent  pour  autrui  ;  ainsi 
le  fermier,  le  dépositaire,  l'usufruitier,  l'emphytéote, 
l'usager,  l'engagiste.  Ces  détenteurs  ne  peuvent  prescrire 
que  si  leur  titre  se  trouve  interverti  soit  par  une  cause 
venant  d'un  tiers,  soit  par  la  contradiction  qu'ils  ont 
opposée  au  droit  du  propriétaire.  Quant  au  titre  contre 
lequel  on  ne  peut  prescrire,  c'est  celui  en  vertu  duquel 
on  exerce  des  droits  sur  une  chose. 

La  prescription  est  interrompue,  soit  naturellement, 
lorsque  le  détenteur  est  privé  pendant  plus  d'un  an  de  la 
jouissance  de  la  chose,  soit  civilement,  en  vertu  d'une 
citation  en  justice,  d'un  commandement  ou  d'une  saisie 
signifiés  à  celui  qu'on  veut  empêcher  de  prescrire.  Il  en 
est  de  même  de  la  citation  en  conciliation,  lorsqu'elle  est 
suivie  d'une  assignation  en  justice  dans  les  délais  de 
droit,  c-ii-d.  dans  le  mois  de  la  non-comparution  ou  non- 
conciliation.  L'interruption  est  regardée  comme  non  ave- 
nue, si  l'assignation  est  nulle  pour  vice  de  forme,  ou  s'il 
La  désistement  du  demandeur  ou  péremption  d'instance, 
i  prescription  est  également  interrompue  par  la  recon- 
naissance que  fait  le  détenteur  ou  débiteur  du  droit  du 
propriétaire  ou  du  créancier. 

La  prescription  est  suspendue,  quand  le  créancier  ne 
peut  agir,  soit  pour  des  causes  personnelles^  soit  pour 
des  causes  extrinsèques.  Ainsi,  sauf  certaines  exceptions, 
elle  ne  court  pas  contre  les  mineurs  et  les  interdits.  Elle 
ne  court  pas  contre  les  femmes  mariées  sous  le  répime 
dotal,  à  l'égard  de  l'aliénation  d'un  fonds  constitué  selon 
ce  régime.  Elle  ne  court  pas  non  plus  contre  les  femmes 
mariées  dans  les  cas  où  l'action  ne  pourrait  être  exercée 
qu'après  une  option  à  faire  sur  l'acceptation  ou  la  renon- 
ciation à  la  communauté,  et  dans  celui  où  l'action  ne 
pourrait  être  exercée  sans  réfléchir  contre  le  mari.  Ella 
est  suspendue  au  profit  des  militaires  ou  défenseurs  de 
la  patrie.  Les  causes  extrinsèques  de  suspension  sont  te 


PRÉ 


1484 


PRÈ 


jondition  apposée  à  l'existence  d'une  créance,  Jusqu'à  ce  { 
qu'elle  se  réalise;  à  l'égard  d*une  action  en  garantie, 
l'événement  de  Tévictiou  ;  à  l'égard  d'une  créance  à  Jour 
fixe,  l'arrivée  du  terme. 

La  prescription  se  compte  par  jours,  et  non  par  heures; 
elle  est  acquise  lorsque  le  dernier  jour  du  terme  est 
arrivé. 

Le  temps  de  la  prescription  est  de  trente  ans  pour 
toutes  les  affaires  tant  réelles  que  personnelles,  sans 
qu'il  y  ait  obligation  de  rapporter  un  titre,  ou  que  l'ex- 
ception de  mauvaise  foi  puisse  être  opposée.  Il  est  de  dix 
ans  en  faveur  de  celui  qui  acquiert  un  immeuble  de 
bonne  foi  et  par  Juste  titre,  si  le  véritable  propriétaire 
demeure  dans  le  ressort  de  la  Cour  où  est  situé  l'im- 
meuble ;  de  vingt  ans  dans  le  cas  contraire.  On  entend 
par  juste  titre  un  titre  habile  à  transférer  la  propriété.  Le 
même  délai  de  dix  ans  exonère  les  architectes  et  entre- 
preneurs de  la  responsabilité  pour  constructions  et  gros 
ouvrages  qu'ils  ont  dirigés. 

Il  existe  en  outre  d'autres  prescriptions  particulières 
qui  ont  pour  caractère  spécial  de  courir  contre  les  mineurs 
et  les  interdits,  sauf  leur  recours  contre  leurs  tuteurs  : 
la  prescription  de  six  mois,  contre  les  maîtres  et  institu- 
teurs, les  hôteliers,  traiteurs,  ouvriers  et  gens  de  travail  ; 
la  prescription  d'un  an,  contre  les  médecins,  pharmaciens, 
huissiers,  marchands,  maîtres  de  pension,  domestiques; 
la  prescription  de  deux  ans,  contre  les  avoués,  pour  le 
payement  de  leurs  frais;  la  prescription  de  trois  ans, 
pour  assurer  la  possession  des  meubles,  pour  décharger 
du  payement  de  l'impôt  foncier,  pour  les  arrérages  des 
pensions  dues  par  l'État  Les  juges,  avoués,  huissiers, 
sont  déchargés  des  pièces  cinq  ans  après  le  Jugement  des 
procès.  La  prescription  de  cinq  ans  s'applique  aux  arré- 
rages des  rentes  perpétuelles  ou  viagères,  pensions  ali- 
mentaires, loyers  des  maisons,  prix  de  ferme  de  biens 
ruraux,  intérêts  des  sommes  prêtées,  et  à  tout  ce  qui  est 
payable  par  année  ou  à  des  termes  périodiques  plus 
courts.  La  prescription  est  de  huit  ans  pour  les  lettres  et 
objets  non  réclamés  à  l'administration  des  postes  (Loi 
du  5  mai  1855). 

PRESCRIPTION  CRIMINELLE,  droit  accordé  par  la  loi  à  l'au- 
teur d'un  fait  délictueux  de  ne  pas  être  poursuivi,  et, 
s'il  a  été  condamné,  de  ne  pas  subir  sa  peine  après  un 
certain  laps  de  temps  écoulé.  De  là  deux  prescriptions, 
la  proscription  du  droit  d'action,  et  la  prescription  de  la 
peine.  En  cette  matière,  le  moyen  de  prescription  est 
d'ordre  public,  il  doit  être  suppléé  par  le  Juge.  Le  dies 
à  Qito  est  compris  dans  la  computation  du  temps.  Le 
délai  se  suppute  date  par  date.  Quand  il  s'agit  de  crimes, 
les  peines  se  prescrivent  par  vingt  ans;  par  cinq  ans, 
quand  il  s'agit  de  délits;  par  deux  ans,  quand  il  s'agit  de 
contraventions.  Le  point  de  départ  est  toi^ours  la  déci- 
sion qui  a  prononcé.  L'action  publique,  au  contraire,  se 
prescrit  par  dix  ans  dans  le  premier  cas,  par  trois  ans 
dans  le  second,  à  partir  du  jour  où  le  crime  et  le  délit 
ont  été  commis  ;  elle  se  prescrit  par  un  an  en  matière  de 
contraventions  de  police.  L'action  civile  se  prescrit  par 
les  mêmes  délais;  c'est  aux  juges  civils  qu'il  appartient 
alors  de  statuer  sur  la  qualification  à  donner  au  fait  dé- 
lictueux. La  prescription  est  interrompue  par  les  actes 
d'instruction  et  de  poursuite,  c-à-d.  ayant  pour  objet, 
Boit  de  rechercher  les  preuves  de  la  culpabilité  du  pré- 
venu, soit  de  s'assurer  de  sa  personne.  Il  y  a  en  outre 
un  certain  nombre  de  prescriptions  spéciales  qui  se  trou- 
vent indiquées  aux  matières  qu'elles  concernent.  V.  De- 
laporte,  traité  des  Prescriptions,  4810,  in-8°;  Vazeille, 
Traité  des  Prescriptions,  2«  édit.,  1832,  2  vol.  in-8°; 
Bousquet,  Dictionnaire  des  Prescriptions  en  matières 
ctvile,  commerciale,  criminelle,  etc.,  1838,  in-S»;  Trop- 
long,  Commentaire  du  titre  XVIII  du  livre  II!  du  Code 
civil.  De  la  Prescription,  3«  édit,,  1841,  2  vol.  in-8°; 
Bernât  Saint-Prix,  Mémoire  sur  la  durée  et  sur  la  sus- 
^  pension  de  la  Prescription,  1841,  in -8®;  Royer,  De  la 
'  Prescription  considérée  comme  moyen  d^acquérir  la  pro^ 
priété,  1853,  in-8o.  '   IL  ©'E. 

PRÉSÉANCE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

PRÉSENCE  (Droit  de  ),  rétribution  accordée  aux  mem- 
bres de  certaines  compagnies  ou  associations ,  lorsqu'ils 
assistent  aux  assemblées.  Les  jetons  de  présence  sont  les 
médailles  qui  représentent  cette  rétribution. 

pRÉSBifCE  RÉELLE,  dogmo  do  l'Église  catholique  qui  en- 
seigne que  Jésus-Christ  est  réellement  présent  dans  le 
sacrement  de  l'Eucharistie,  et  oue  c'est  ion  corps  et  son 
sang  que  le  fidèle  consomme  dans  l'acte  de  la  commu- 
nion sous  les  espèces  du  pain  et  du  vio  consacrés.  Les 


Calvinistes  nient  la  présence  réelle;  les  Luthériens,  qui 
l'admettent,  repoussent  la  Transsubstantiation  (F.  ce 
mot)^  et  croient  à  la  coexistence  de  Jésus-Christ  et  des 
espèces  dans  le  sacrement ,  ce  qu'ils  appellent  consub- 
stantiation  et  impanation,  V.  Cohhcnion,  Eocharistie. 
PRÉSENT,  temps  de  la  conjugaison  marquant  qu'une 
chose  est  ou  se  fait  dans  le  moment  de  la  parole  :  «  f  écris 
une  lettre.  »  Il  marque  aussi  l'état  habituel  du  sujet,  ou 
bien  les  choses  qui  sont  et  seront  toujours  vraies  :  a  hs 
lion  est  fier  et  généreux.  »  Le  présent  s'emploie  abusive- 
ment pour  le  futur,  surtout  pour  un  futur  prochain,  afin 
de  donner  plus  de  vivacité  au  discours .:  n  Je  suis  de 
retour  dans  un  moment,  »  De  même  pour  le  futur  passé  : 
a  S'il  bouge,  il  est  mort  (c.-à-d.,  s'il  bougera,  il  sera 
mort).  »  Avec  la  conjonction  si,  le  présent  s'emploie  con- 
stamment en  français  au  lieu  du  futur  :  «  Si  vous  venez, 
vous  me  ferez  plaisir.  »  On  met  aussi  le  présent  de  l'in- 
finitif après  certains  verbes  qui,  impliquant  une  idée 
d'avenir,  demanderaient  logiquement  le  futur  :  «  J'espère 
venir,  »  c.-à-d.  que  je  viendrai.  Un  usage  fréquent  fait 
employer  le  présent  à  la  place  du  passé  dans  le  style  de 
la  narration,  afin  de  réveiller  l'attention,  et  de  frapper 
l'imagination  en  lui  présentant  les  faits  comme  dans  un 
tableau  :  a  Gourville  se  moqua  de  lui  ;  Vatel  monte  à  sa 
chambre,  met  son  épée  contre  la  porte,  et  se  la  passe  au 
travers  du  cœur.  »  Dans  les  propositions  subordonnées 
à  des  temps  passés,  mais  exprimant  elles-mêmes  quelque 
chose  de  durable  ou  d'éternellement  vrai,  le  verbe  se  met 
au  présent  :  «  Je  vous  disais  bien,  je  vous  ai  toujours 
dit.  Je  vous  avais  averti  qyie  les  flatteurs  sont  à  craindre.» 
Au  subjonctif,  ce  mode  n'ayant  pas  de  forme  spéciale 
pour  le  futur,  le  présent  en  tient  lieu  :  a  Faites  en  sorte 
que  cela  se  fasse  demain.  »  —  Les  différents  emplois  du 
présent,  que  nous  venons  de  mentionner,  ont  donné  lieu 
à  certains  grammairiens,  particulièrement  à  Beauzée, 
d'imaginei  des  dénominations  métaphysiques,  plus  ingé- 
nieuses qu'utiles;  ainsi,  ils  ont  distingué  :  le. présent 
actuel  ou  proprement  dit  (je  vous  vois,  J'écris  )  ;  le  pré- 
sent antérieur,  c.-à-d.  employé  pour  le  passé;  le  présent 
postérieur,  c-à-d.  employé  pour  le  futur;  le  présent 
général  ou  indéfini,  c.-à-d.  exprimant  des  propositions 
d'éternelle  vérité  ;  le  présent  simultané  (je  suis  heureux 
quand  je  vous  vois)  ;  le  présent  d'habitude  (Je  passe  l'étô 
à  la  campagne  et  l'hiver  à  la  ville),  etc..  P. 

PRÉSENTATION,  ancien  terme  de  Droit,  désignant 
l'acte  par  lequel  un  procureur  déclarait  se  présenter  pour 
telle  partie.  On  dit  aujourd'hui  constitutiofi  d'avoué. 

PBÉSENïOIRE,  sorte  d'ancien  vase  pour  le  service  de 
table. 

PRÉSIDENT,  titre  que  prend  le  chef  du  pouvoir  exé- 
cutif aux  États-Unis  de  l'Amérique  du  Nord  et  dans  quel- 
ques républiques  de  l'Amérique  du  Sud.  Il  y  eut  aussi  en 
France  un  Président  de  république,  de  1848  à  lSo2; 
le  même  titre  a  été  rétabli  en  1671.  Celui  qui  dirige 
les  débats  d'une  Assemblée  législative  porte  aussi  le  nom 
de  Président.  Les  Cours  et  les  tribunaux  ont  des  Pré- 
sidents: celui  d'une  Cour  a  le  li Ire  de  premier  prési- 
dent; chaque  Chambre  d'une  Cour  a  un  président  pa-- 
liculier,  iïl  président  de  chambre ;\eB  présidents  des 
assises  sont  des  conseillers  de  Cour  d^appel  chsrgûs 
temporairement  de  diriger  les  assises.  Les  attributions 
de  ces  divers  magistrats  ont  été  déterminées  parle  Code 
de  Procédure  civile  (art.  138,  239,  325,  751),  parla  ioi 
du  20  avril  1810,  par  les  décrets  des  6  juillet  et  18  août 
1810.  —  Tout  membre  d'une  Académie,  Société  ou 
Compagnie  quelconque,  qui  a  été  élu  pour  diriger  les 
discussions  et  veillera  l'observation  des  statuts  et  rè- 
glements, porte  aussi  le  nom  de  Président. 

PRÉSIDES.    \  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 
'  PRÉSIDIAL.  }    Biographie  et  d'Histoire, 

PRÉSOMPTION  (en"  latin  prœsumptio;  de  prœsumere, 
prendre  d'avance,  présumer,  conjecturer),  en  termes  de 
Droit,  conséquence  (jue  la  loi  ou  le  magistrat  tire  d'un 
fait  connu  à  un  fait  inconnu.  On  distingue  la  Présomp- 
tion légale  et  la  Présomption  simple.  La  Présomption 
légale  est  celle  nui  est  attachée  par  une  loi  spéciale  à 
certains  actes  et  à  certains  faits,  qui  dès  lors  sont  pré- 
sumés vrais;  tels  sont:  1°  les  actes  que  la  loi  déclare 
nuls,  comme  présumés  faits  en  fraude  de  ses  dispositions, 
par  exemple  ceux  qui  sont  faits  à  des  personnes  présu- 
mées interposées  ;  2^  les  cas  dans  lesquels  la  loi  déclare 
la  propriété  ou  la  libération  résulter  de  certaines  circon- 
stances déterminées ,  telles  que  la  présomption  de  mi- 
toyenneté ;  3°  l'autorité  que  la  loi  attribue  à  la  chose 
jugée  ;  4®  la  force  que  la  loi  attache  à  l'aveu  de  la  partie 
ou  à  son  serment.  La  Présomption  légale  dispense  de 


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1485 


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jouie  preuve  celui  aa  profit  daquel  elle  existe,  à  moins 
quo  la  loi  elle-même  D*ait  réservé  la  preuve  contraire. 
Le  législateur  ne  pouvant  ni  tout  prévoir,  ni  appliquer 
des  principes  absolus  à  des  intérêts'  très-divers  et  à  des 
circonstances  variables,  les  Présomptions  simples  sont 
celles  qu*il  a  abandonnées  aux  lumières  et  à  la  prudence 
du  raag;istrat  :  elles  doivent  être  graves,  précises  et  con- 
cordantes; elles  ne  sont  d'ailleurs  autorisées  que  dans 
les  cas  où  la  loi  admet  la  preuve  testimoniale,  ou  bien 
lorsqu'un  acte  est  attaqué  pour  fraude  ou  dol. 

PSésOUPTION  d'absence.  V,  ABSENCE. 

PRESQU'ILE,  étendue  déterre  entourée  d'eau,  à  l'ex- 
ception d'un  seul  côté  par  lequel  elle  tient  au  continent. 
lÀa  Grecs  disaient  chersonèse,  et  les  Romains  péninsule; 
ce  dernier  mot  est  encore  employé  aujourd'hui,  mais 
pour  désigner  une  presqu'île  considérable,  l'Italie,  l'Eft- 
Datme,  par  exemple. 

~  Presse  ,  mot  qui  s*entend  de  tous  les  produits  de  la 
presse  à  imprimer,  c.-à-d.  de  tous  les  ouvrages  impri- 
més. Les  Journaux  et  les  Revues  constituent  la  Presse 
périodiqtAe,  Par  Liberté  de  la  pi-esse,  on  entend  la  liberté 
de  mettre  au  jour,  par  la  voie  de  l'impression,  ses  idées 
et  ses  opinions  sur  toutes  sortes  de  matières,  sans  être 
obligé  de  les  soumettre  à  la  censure  et  sans  être  inquiété. 
C'est  un  droit  aujourd'hui  reconnu  par  la  plupart  des 
l^uvernements,  mais  qui  a  passé  par  bien  des  alterna- 
tives de  compression  et  de  faveur.  Toute  liberté  a  des 
bornes  :  attaquer  l'ordre  social,  les  lois  établies,  les  pou- 
voirs légitimes,  les  principes  de  toute  morale,  l'honneur 
individuel,  n'est  pas  liberté,  mais  licence,  sédition  ou 
folie.  Ni  la  société  ni  le  pouvoir  ne  peuvent  être  désar- 
més. Seulement,  quand  il  s'agit  de  déterminer  la  limite 
qui  sépare  la  liberté  et  la  licence,  le  droit  et  l'abus ,  on 
cesse  d'être  d'accord  :  ce  qui  est  liberté  aux  États-Unis 
ou  en  Angleterre  est  licence  à  Paris,  et  la  liberté  des 
Français  est  licence  en  Autriche  ou  en  Russie.  Pour  ré- 
gulariser l'exercice  de  la  liberté  de  la  presse,  les  gouver- 
nements ont  admis  deux  moyens  de  répression  :  l'un , 
in-éventif,  est  la  censure  ;  l'autre,  pénal,  suit  la  perpétra- 
tion du  délit.  La  censure  a  été  plus  particulièrement  em- 
ployée sous  l'ancienne  monarchie  française  (V.  Censeur 

aOYAL,  Cl^:NSEUnS  DRAMATIQUES,  CENSEURS  DES  JOURNAUX). 

Aujourd'hui,  elle  n'existe  pas;  cependant  on  retrouve 
véritablement  le  système  préventif  dans  les  conditions  de 
l'inipripierie  et  de  la  liorairie  concédées  par  brevet, 

Imisque  les  imprimeurs  peuvent  refuser  d'imprimer,  et 
es  libraires  refuser  de  vendre  les  ouvrages  dont  la  pu- 
blication entraînerait  peut-être  pour  eux  le  retrait  de 
leur  privilège  ou  des  condamnations.  K.  Imprdiebib,  Li- 
brairie. 

Aucun  livre  ne  pouvait  être  publié  autrefois  en  France 
sans  une  approbation  spéciale  (F.  Approbation  des  li- 
vres ),  donnée  dans  le  principe  par  l'Université,  plus  tard 
par  le  roi,  en  vertu  d'un  édit  d'Henri  II  ^11  déc.  1547  h 
et  cette  approbation  constituait  un  pnvilége  pour  le 
libraire  qui  l'avait  obtenue.  Une  ordonnance  du  iO  sept. 
1553  défendit,  sous  peine  de  la  corde,  de  publier  aucun 
suvrage  sans  la  permission  du  roi.  Un  édit  de  1557  pu- 
nit de  mort  les  «  auteurs,  imprimeurs  et  colporteurs  de 
livres  tendant  à  attaquer  la  religion ,  à  émouvoir  les  es- 
prits, et  à  troubler  la  tranquillité  de  l'État  »  L'ordon- 
nance de  Moulins  (1566)  diminua  les  rigueurs  contre  la 
presse  ;  mais  on  les  vit  reparaître  sous  le  ministère  du 
cardinal  de  Richelieu,  et,  depuis  cette  époque  jusqu'à  la 
Révolution  française,  la  liberté  d'écrire  fut  tres-limitée 
et  très-précaire.  L'Assemblée  Constituante  de  1789  inau- 
gura un  régime  nouveau  :  la  liberté  de  la  presse  fut  pro- 
clamée par  les  Constitutions  de  1791,  de  1793  et  de 
l'an  m  (1795).  Mais  les  excès  des  journaux  rendirent  une 
réaction  nécessaire,  et  elle  devait  à  son  tour  dépasser  le 
but.  Les  lois  des  19  fructidor  an  v  et  9  fructidor  an  vi 
(5  sept.  1797  et  26  août  1798)  placèrent  les  journaux  et 
les  feuilles  périodiques  sous  l'inspection  de  la  police.  La 
Constitution  de  Tan  vui  (1799)  ne  fit  plus  mention  de  la 
liberté  de  la  presse  ;  un  arrêté  du  8  pluviôse  de  cette 
année  (28  janvier  1800)  fixa  le  nombre  des  journaux,  et 
autorisa  les  Consuls  à  supprimer  ceux  qui  énonceraient 
des  doctrines  contraires  aux  principes  du  gouvernement  ; 
un  autre  arrêté,  du  4  vendémiaire  (26  septembre),  décida 
au'aucun  libraire  ne  pourrait  vendre  un  ouvrage  avant 
Qo  l'avoir  présenté  à  une  commission  de  révision.  La 
ctnsure  fut  rétablie  par  décret  du  5  fév.  1810,  et  un  autre 
d(!cret,  du  3  août  suivant,  réduisit  la  presse  périodique  à 
un  seul  Jonmal  par  département  à  l'exception  <Ib  Paris, 

?ui  en  compta  quatre.  La  Charte  de  1814  reconnut  aux 
rançais  «  le  droit  de  publier  et  de  faire  imprimer  leurs 


opinions,  en  se  conformant  aux  lois  qui  devaient  répri- 
mer les  abus  de  cette  liberté.»  Néanmoins,  l'ordonnance 
du  10  juin  1814  maintient  provisoirement  la  législation 
ant^Srieure,  et  une  loi  du  21  octobre  rétablit  la  censure. 
Quiconque  publiait  un  journal  dut  soumettre  chaque  soir 
l'épreuve  de  la  feuille  qui  devait  paraître  le  lendemain 
matin,  et  la  censure  y  efi'açait  tout  ce  qui  lui  déplaisait. 
Puis  on  vit  se  succéder  la  loi  du  17  mai  1819  sur  la  ré- 
pression des  crimes  et  délits  commis  par  la  voie  de  la 
presse,  la  loi  du  26  mai  1819  relative  à  la  poursuite  de 
cea  crimes  et  délits,  la  loi  du  9  juin  1819  sur  la  publi- 
cation des  journaux.  Aux  rigueurs  qu'elles  contenaient  « 
la  loi  du  25  mars  1822  ajouta  que  l'autorisation  préa- 
lable du  gouvernement  serait  nécessaire  pour  fonder 
toute  espèce  de  journal  ou  de  recueil  périodique  s'occu- 
pant  de  matières  politiques  et  paraissant  plvls  d'une  fols 
par  mois.  Après  l'arrivée  de  M.  de  Martignac  aux  affîaires, 
en  1827,  la  censure  fut  supprimée,  et  une  loi  du  18  juillet 
1828  fixa  à  nouveau,  et  dans  un  sens  plus  libéral,  les  con- 
ditions de  la  publication  des  journaux.  Les  ordonnances 
de  juillet  1830  rétablissaient  la  censure,  mais  la  Révolu- 
tion qui  suivit  en  empêcha  l'exécution.  La  Charte  de 
1830  rendit  à  la  pres^  toute  sa  liberté,  et,  d'après  la  loi 
du  8  oct.  de  la  même  année,  les  délits  commis  par  la  voie 
de  la  presse,  rentrant  dans  le  droit  commun,  furent  sou- 
mis au  jugement  du  Jury  :  seulement,  des  dispositions 
pénales  particulières  furent  prises  pour  la  répression  des 
attaques  contre  le  roi  ou  contre  les  Chambres  législa- 
tives. Mais,  à  la  suite  de  l'attentat  de  Ficschl  (1835),  les 
lois  dites  de  Septembre  frappèrent  de  peines  très-sé- 
vères les  crimes  et  les  délits  de  presse,  lesquels,  dans 
certains  cas  graves ,  furent  soustraits  à  la  connaissance 
du  Jury  et  soumis  au  Jugement  de  la  Cour  des  Pairs. 

Après  la  Révolution  du  24  fév.  1848,  la  presse  eut  un 
nouvel  instant  de  liberté  et  même  de  licence  :  un  décret 
du  6  mars  abrogea  les  lois  précédentes.  Les  sanglantes 
journées  de  Juin  suivant  firent  comprendre  aux  gouver- 
nants la  nécessité  de  mettre  un  terme  au  débordement 
des  mauvaises  passions.  Le  général  Cavaignac,  investi  de 
la  dictature,  suspendit  un  grand  nombre  de  journaux  po- 
litiques ;  le  rétablissement  du  cautionnement  et  du  timoré 
eii  fit  disparaître  une  foule  d'autres;  des  mesures  contre 
les  excès  de  la  presse  furent  édictées  par  les  lois  du 
27  Juillet  1849  et  du  16  Juillet  1850;  cette  dernière  pres- 
crivit de  signer  les  articles  politiques.  Au  coup  d'État 
du  2  décembre  1851,  d'autres  Journaux  cessèrent  encore 
de  paraître.  Le  décret  du  17  février  1852  soumit  les 
journaux  à  l'obligation  d'une  autorisation  préalable,  du 
ministre  de  l'Intérieur^  au  cautionnement  et  au  timbre^ 
à  la  formalité  du  dépôt  avant  publication, les  rendit 
justiciables  des   tribunaux  de  police  correctionnelle, 
permit  de  les  suspendre  après  deux  avertissements, 
et  les  supprima  après  une  condamnation  pour  crime 
commis  par  la  voie  de  la  presse,  ou  deux  condamna- 
tions pour  contraventions  et  délits  dans  l'espace  de 
deux  années.  Après  une  seule  condamnation,  le  gou- 
vernement avait  la  faculté  de  prononcer  la  suspension 
ou  la  suppression   du  journal.  Le  journal  pouvait 
encore  être  supprimé,  sans  condamnation  préalable^ 
par  mesure  de  sûreté  générale,  en  vertu  d'un  dé- 
cret de   l'Empereur.  L'autorisation  ne  pouvait  être 
accordée  qu'à  un  Français  majeur,  jouissant  de  set 
droiis  civils  et  politiques;  elle  était  nécessaire  aussi 
pour  tous  changement  dans  le  personnel  des  gérants, 
rédacteurs  en  chef^  propriétaires  ou  administrateurs 
du  journaL  Toute  publication  sans  autorisation  était 
punie  d'une  amende  de  100  fr.  à  2»D00  fr.  pour  chaque 
numéro^  et  d'un  emprisonnement  d'un  mois  à  2  ans  : 
celui  qui  avait  publié  le  journal  et  l'imprimeur  étaient 
solidairement  responsables,  et  le  journal  cessait  de 
paraître.  Une  feuille  politique  ou  d'économie  sociale 
publiée  à  l'étranger  ne   pouvait  circuler  en  France 
qu'en   vertu  d'une  autonsation   du  gouvernement: 
tout  introducteur  ou  distributeur  d'un  journal  non  au- 
torisé était  puni  d'un  emprisonnement  d'un  mois  à 
un  an  et  d'une  amende  de  100  à  5,000  fr.  Il  était  in- 
terdit aux  journaux,  sous  peine  d'une  amende  de  50 
h  1^000  fr.^  de  rendre  compte  des  procès  pour  délits 


pouvaient  interdire  le  compte  rendu  du  procès  ;  mais 
cette  interdiction  ne  pouvait  s'appliquer  au  jugement. 
On  ne  pouvait,  sous  peine  d'une  amende  de  100  à 
2,000  fr.,  publier  les  actes  d'accusation  et  aucun  aoted» 
procédure  criminelle,  avant  qu'ils  eussent  été  lut  en  au« 


PUE 


1486 


PRE 


diencc  publique:  en  cas  de  récidive  dans  l'année,  l'a- 
mende pouvait  être  doublée,  et  le  coupable  condamné 

ÎÎP-  ®"^P''*isonnemenl  de  10  jours  à  6  mois.  Il  était  in- 
terdit de  reodre  compte  des  procès  pour  outrages  ou 
injures,  et  dee  procès  de  diffamation  où  la  preuve  des 
faits  diffamatoires  n'est  pas  admise  par  la  loi  :  on  pou- 
vait seulement  annoncer  la  plainte^  sur  la  demande  du 
plaignant;  on  pouvait  publier  le  jugement.  Il  était  in- 
terdit, sous  peine  d'une  amende  de  200  à  3,000  fr.  fie 
double  pour  la  récidive),  de  publier  les  noms  des  jurés, 
excepté  dans  le  compte  renau  de  l'audience  où  le  jury 
avait  été  oonstitué,  et  de  rendre  compte  des  délibéra- 
tions intérieures,  soit  des  jurés,  soit  des  Cours  et  tri- 
bunaux. Left  journaux  ne  pouvaient  d'abord,  sous  peine 
d'une  amende  de  1,000  à  5,000  fr..  donner  d'autre 
compte  rendu  des  séances  du  Corps  législatif  que  lare- 
production  du  procès-verbal  officiel;  depuis  186i,  ils 
furent  autorisés  à  publier  les  débals  complets,  sous 
condition  de  donner  intégralement  une  discussion  tout 
entière.  Ils  reproduisaient  éfçalement  les  comptes  r«n- 
du9  officiels  des  séances  du  Sénat.  Les  gérants  étaient 
tenus  d'insérer,  en  tête  du  journal  et  gratuitement,  les 
documents,  relations,  renseignements,  réponses  et  rcc- 
tiflcations  que  leur  adressait  un  dépositaire  de  l'autorité 
publique,  à  peine  d'une  amende  de  60  à  1,000  fr.,  et  le 
journal  pouvait  en  outre,  à  raison  des  faits  qui  avaient 
nécessite  cette  intervention,  être  suspendu  pendant  15 
jours  au  plus.  Si  la  publication  d'un  journal  supprimé 
ou  suspendu  était  continuée  sous  le  même  titre  ou  sous 
un  titre  supposé,  les  auteurs  gérants  ou  imprimeurs 
étaient  punis  d'un  emprisonnement  d'un  mois  à  2  ans,  et 
solidairement  d'une  amende  de  500  h  3,000  fr.  par  chaque 
numéro.  La  publication  d'un  articte  politique  ou  d'é- 
conomie sociale  émanant  d'un  individu  condamné  à 
une  peine  nfOictive  ou  inTamante  était  passible  d'une 
amende  de  1,000  à  5,000  fr.  Les  éditeurs  d'un  journal 
étaient  tenus  d'y  insérer  la  réponse  de  toute  per- 
sonne nommée  et  désignée  dan?  le  journal  :  l'inser- 
tion était  gratuite  lorsque  la  réponse  ne  dépassait  pas 
le  double  de  la  longueur  de  l'article  qui  l'avait  provo- 
quée; dans  le  cas  contraire,  le  prix  d'insertion  était  dû 
pour  le  surplus.  Dans  les  trois  jours  de  tout  juge- 
ment ou  arrêt  déflnitif  de  contravention  de  presse,  le 
gérant  devait  acquitter  le  montant  des  condamnations 
encourues.  V.  au  Supplément, 

En  Angleterre,  la  presse  jouissait  de  fort  peu  de  liberté 
au  xvit«  siècle  :  elle  était  alors  placée  dans  les  attribu- 
tions de  la  Chambre  étoilée,  qui  fixait  le  nombre  des 
imprimeurs  et  des  presses  qu'ils  pouvaient  avoir,  et  nom- 
mait un  commissaire  surveillant  sans  l'autorisation  du- 
quel ils  ne  devaient  rien  imprimer  ;  les  peines  appliquées 
aux  délits  de  presse  étaient  arbitraires  et  cruelles.  En 
1641 ,  la  Chambre  étoilée  ayant  été  supprimée,  la  con- 
naissance des  délits  de  presse  Tut  attribuée  au  Parlement. 
Celui-ci  remit  le  droit  de  censure  aux  autorités  locales, 
qui  finirent  par  en  abuser.  —  L'Angleterre  étant  le  pays 
modèle  et  toi^ours  cité  pour  la  liberté  de  la  presse,  c'est 
surtout  à  dater  de  1689  qu'il  faut  examiner  à  quel  régime 
elle  fut  soumise  ;  nous  aJlons  donc  pr^nter  un  résumé 
de  l'histoire  de  cette  presse,  et  dire  ce  qu'elle  est  aujour- 
d'hui légalement'  et  de  fait.  Nous  emprunterons  ce  ré- 
sumé à  une  célèbre  circulaire  que  M.  le  comte  de  Persigny 
adressa  aux  préfets,  lorsqu'il  rentra  au  ministère  de  lln- 
térieur,  en  décembre  18ti0,  après  son  ambassade  de 
Londres. 

« Jusqu'à  l'anéantissement  complet  du  parti  des 

Stuarts,  la  législation  anglaise  sur  la  presse  ne  paraît 
avoir  eu  qu'un  seul  objet  :  défendre  la  nouvelle  dynastie 
contre  ses  ennemis  politiques  ou  religieux,  et  interdire, 
au  nom  de  la  liberté,  en  quelque  sorte,  les  armes  et  les 
instruments  de  la  liberté  aux  adversaires  des  nouvelles 
institutions  du  pays.  De  1602,  déjà  sous  Guillaume 
il'Orange,  jusqu'à  la  chute  du  parti  des  Stuarts,  à  la 
place  de  la  censure  qui  avait  eu  Heu  quelque  temps  sous 
Guillaume,  mais  qui  n'était  qu'une  douce  mesure  auprès 
de  ce  qui  suivit,  le  régime  de  la  presse,  des  livres,  des 
journaux,  des  publications  de  tout  genre,  fut  soumis  à  la 
luridiction  du  Common  Lato, 

«  Pour  comprendre  le  caractère  de  cette  juridiction,  il 
faut  savoir  qu'à  la  différence  du  Statute-Law,  qui  est  la 
loi  écrite  et  votée  par  le  Parlement,  le  Common  Lcuo  est 
la  loi  non  écrite,  lex  non  scripta,  qui  demeure  dans  la 
mémoire  et  la  conscience  des  juges  Interprétant  les  tra- 
ditions du  passé  ;  que  cette  loi  donne  pouvoir  discrétion- 
naire aux  juges  de  la  couronne  pour  les  peines  à  pro- 
IpoDoer  après  la  déclaration  du  fait  par  lejuiy  t  et  qu'atnid, 


f rendant  tout  le  temps  que  la  maison  de  Hanovre  eut  à 
'intérieur  des  ennemis  politiques  ou  religieux,  c.-à-d. 
pendant  toute  cette  période  de  passions  et  de  violence, 
les  luges  de  la  couronne  ont  exercé  le  droit  rigoureux  de 
condamner  toute  personne  coupable  d'avoir  écrit,  publié 
ou  imprimé  des  attaques  contre  la  couronne  et  contre 
l'État,  non-seulement  à  l'amende,  à  la  prison,  an  fouet 
et  au  pilori,  mais  même  à  la  peine  de  mort,  et  cela  non 
pas  comme  aujourd'hui  sur  une  déclaration  du  jury  por- 
tant sur  l'offense  même,  mais  sur  la  simple  déclaration 
du  fait  :  Un  tel  est-il  l'auteur,  on  l'éditeur,  ou  l'impri- 
meur de  tel  écrit? 

«  Or,  si  l'on  son^e  que  les  juges  nommés  par  la  cou- 
ronne étaient  choisis  parmi  lc>  plus  zélés  partisans  de  la 
maison  de  Hanovre  et  même  révocables  par  la  couronne 
iusqu'en  1760,  on  peut  s'imaginer  ce  qu'a  dû  être  la 
liberté  de  la  presse  pour  les  partisans  des  Stuarts,  pour 
les  jacobites,  pour  les  catholiques  ou  papistes,  comme  on 
disait  alors,  et  autres  ennemis  de  l'État.  Ce  n^est  qu'à 
la  fin  du  xviii*  siècle,  quand  déjà  depuis  longtemps  la 
maison  de  Hanovre  était  consolidée,  le  parti  des  Stuarts 
anéanti  et  celui  des  catholiques  soumis,  que,  l'opiniou 
réclamant  un  adoucissement  à  cette  rigoureuse  législa- 
tion. Fox  obtint  un  bill  du  Parlement  pour  appliquer  le 
verdict  du  jury,  non  plus  au  fait  seul,  mais  au  caractère 
de  l'écrit  séditieux  ou  du  libelle,  ce  qui  introduisit  na- 
turellement un  tempérament  considérable  dans  cette  lé- 
gislation. 

a  Ici  je  ne  veux  pas  m'appesantir  sur  les  détails  en 
fouillant  dans  l'arsenal  ^c  la  législation  anglaise  tient  à 
la  disposition  du  pouvoir;  mais  je  citerai  deux  circon- 
stances caractéristiques  qui  serviront  à  mettre  dans  tout 
son  jour  l'esprit  de  nos  voisins  en  matière  de  presse. 

«  Vingt-cinq  ans  après  le  bill  de  Fox,  quand  l'Angle- 
terre se  voyait  parvenue  au  plus  haut  d^gré  de  puissance 
et  croyait  pouvoir  désormais  jouir  en  paix  de  ses  libertés, 
il  arriva  qu'à  la  suite  d'une  grave  crise  économique, 
causée  par  la  cherté  des  subsistances  et  l'énormité  des 
taxes  après  la  guerre,  et  favorisée  d'ailleurs  par  l'impo- 
pularité du  prince  régent,  il  arriva,  dis-je,  qu'une  sorte 
de  doctrine  républicaine,  se  répandant  dans  le  pays, 
donna  de  graves  inquiétudes  à  l'ordre  établi,  et  que  le 
jury,  intimidé  ou  gi^né  par  la  doctrine  nouvelle,  usant 
largement  des  dispositions  du  bill  de  Fox,  enlevait  sou- 
vent aux  juges  de  la  couronne  la  faculté  d'appliquer  aux 
délinquants  la  législation  du  Common  Law. 

«  Dans  ces  circonstances  nouvelles,  le  Parlement  an- 
glais n'hésita  pas  à  donner  au  gouvernement  les  moyens 
de  forcer  le  jury  à  la  défense  de  l'État  ;  et,  en  consé- 

2uence,  on  fit  une  loi  en  1819  qui  frappa  d'amende, 
'emprisonnement  et ,  en  cas  de  récidive,  de  bannisse- 
ment, l'auteur,  l'éditeur  et  l'imprimeur  de  tout  écrit  ou 
libelle  séditieux  contre  le  roi,  la  famille  royale,  le  régent, 
le  gouvernement,  la  Constitution  et  l'une  ou  l'autre  des 
deux  Chambres,  et  à  l'aide  de  dispositions  tellement  dé- 
taillées, tellement  précises,  qu'il  n'était  presque  plus  pos- 
sible à  la  conscience  du  jury  de  se  dérober  aux  nécessités 
de  l'État. 

«  Mais  lorsque  arriva  la  crise  de  1848,  et  avec  elle  de 
nouvelles  émotions,  de  nouveaux  partis  hostiles  à  Tordre 
établi ,  on  éprouva  encore  des  difficultés  de  la  part  du 
jury.  On  sentit  alors  la  nécessité  de  préciser  encore  plus 
clairement,  plus  minutieusement,  les  attaques  dont  l'État 
pouvait  être  l'objet,  et  une  nouvelle  loi  intitulée  :  Acte 
pour  mieux  assurer  la  sécttritè  de  la  couronne  et  du 
gouvernement,  enrichit  encore  le  terrible  arsenal  de  la 
législation  anglaise.  Cette  fois,  le  succès  est  complet; 
l'arme  a  été  si  finement  aiguisée  qu'elle  triomphe  du  jury 
irlandais  lui-même,  et,  sur  son  verdict,  deux  journa- 
listes coupables  d'écrits  séditieux,  John  Mitchell  et  John 
Iftachin,  sont  condamnés  par  les  juges  de  la  couronne  à 
quatorze  années  de  déportation  avec  travaux  forcés. 

«  Et  maintenant,  croit-on  que  si  ces  expédients  judi- 
ciaires, conformes  au  génie  de  la  race  anglo-normande , 
ne  réussissaient  pas,  l'Angleterre  s'arrêterait  devant  des 
théories?  Non  certainement.  Toujours  fidèle  à  son  grand 
principe,  (fu'avant  d'être  un  peuple  libre  il  faut  être  un 
peuple  uni,  qu'avant  d'être  un  État  libre  il  faut  être  un 
État  fort,  l'Angleterre,  qui  n'a  reculé  devant  rien  quand 
il  s'agissait  de  défendre  dans  le  dernier  siècle  la  dynastie 
de  son  choix,  ne  reculerait  pas  davantage  ai^oard'bui  é 
un  nouveau  péril  menaçait  l'État. 

«  En  résumé,  l'esprit  delà  législation  anglaise, en  ma 
tière  de  presse,  peut  se  formuler  ainsi  :  liberté  com* 
plète  pour  tout  oe  qui  est  un  avantage  et  n'est  pas  un 
danger  pour  l'Etat,  et  négation  de  toute  liberté  dôe  qu'il 


PRE 


1487 


PRE 


h'i^i  d*aitaquer  TÉtai <  cîé  sorte  que  la  liberté  anglaise, 
dont  la  presse  Joait  si  complètement,  n*est  en  réalité  que 
I  expression  de  la  situation  politique  et  sociale  du  pays. 
Comme  il  n*y  a  aujourd'hui  aucun  parti ,  aucun  homme 
sérieux  qui  songe  un  instant  à  renverser  ou  la  reine,  ou 
le  gouvernement,  ou  le  Parlement,  ou  la  Constitution, 
personne  n*a  à  se  préoccuper  en  quoi  que  ce  soit  de  la 
liberté  de  la  presse,  qui  n*est  alors  qu'un  avantage  pour 
Dus.  Mais  qu'un  parti  quelconque  vienne  à  se  proposer 
le  renversement  de  TÉtat  au  profit  d'une  autre  dynastie 
ou  de  toute  autre  doctrine,  alors,  à  l'instant  même,  la  li- 
berté de  la  presse  n'existe  plus  pour  ce  parti » 

On  voit  d'après  ce  lucide  exposé  que  la  liberté  de  la 
presse  repose  sur  un  principe  politique,  pratiqué  de  tout 
temps  par  les  peuples  les  plus  sages,  Salus  popvui  suprema 
lex  esto,  c.-à-d.  :  «  la  Nation  avant  tout.  »  Aujourd'hui 
tout  Anglais  peut  avoir  des  presses  et  faire  un  Journal  : 
nul  cautionnement  à  fournir,  nulle  autorisation  à  de- 
mander, nulle  formalité  dilatoire  à  subir.  11  suPit  de  faire 
devant  les  commissaires  du  timbre  une  déclaration  qui 
énonce  les  matières  qu'on  veut  traiter,  les  noms  et  de- 
meures de  rimprimeur,  de  l'éditeur  et  de  2  propriétaires 
du  journal.  La  liberté  de  la  presse  n'implique  pas  licence 
de  tout  dire  :  on  applique  aux  journaux  les  lois  de  libelle. 

En  Belgique,  la  Constitution  garantit  aux  citoyens  la 
liberté  de  la  presse,  sous  l'observation  des  lois  spéciales 
qui  la  régissent.  —  En  Suède,  cette  liberté  est  garantie 
aussi  par  la  Constitution,  et  mise  sous  la  sauvegarde  des 
Étais.  Le  Jury,  inconnu  pour  les  causes  ordinaires ,  est 
appliqué  au  jugement  des  délits  de  presse.  —  En  Alle- 
magne, la  diète  de  Spire  (1520^  soumit  à  la  censure  préa- 
lable tout  ce  qui  devait  s'imprimer.  Au  xvin*  siècle,  il  se 
forma  une  législation  particulière  de  la  presse  dans  cer- 
tains États;  la  censure  la  plus  rigoureuse  exista  en 
Prusse  après  Frédéric  11 ,  et  en  Autriche  sous  Bilarie-Thé- 
rèse.  Le  congrès  de  Vienne,  en  1815,  régla  la  situation 
de  la  presse  d'une  manière  à  peu  près  uniforme  pour 
tous  les  États  de  la  Confédération  germanique.  En  1810, 
au  lieu  de  consacrer  la  liberté  proclamée  en  1813,  la 
Diète  soumit  à  la  censure  préalable  tous  les  écrits  au- 
dessous  de  20  feuilles  d'impression.  Le  contre-coun  de  la 
Révolution  de  France  en  1830  donna  un  peu  plus  de  vie 
à  la  presse  allemande,  qui  s'affranchit  complètement  en 
18i8.  Mais,  depuis  cette  époque,  le  triomphe  de  la  réac- 
tion a  replacé  presque  partout  les  journaux  sous  un  ré- 
gime qui  leur  impose  de  nombreuses  entraves. 

V,  Peignot,  Essai  historique  sur  la  liberté  d^écrtre 
chez  les  Anciens  et  au  moyen  âge,  sur  la  liberté  de  la 
presse  depuis  le  xv*  siècle,  1832,  in-8°;  Leber,  De  Vital 
de  la  presse  et  des  pamphlets,  depuis  François  /*'  jusqu'à 
Louis  XIV  ^  1834,  in-8°;  Ludovic  Lalanne,  Curiosités 
bibliographiques,  1845,  in-18;  Eug.  Hatin,  Ristoire po- 
litique et  littéraire  de  la  Presse  en  France,  1859-<60, 
8  vol.  in-8^  et  in-12  ;  —  H.  Colliez,  Code  annoté  de  la 
presse,  1835,  in-8*;  Parant,  Jjns  de  ta  presse,  1838, 
in-8°;  Pégat,  Code  de  la  presse  annoté^  1837,in-4<*; 
Grattier ,  Commentaire  des  lois  de  la  presse  et  de  totis 
les  autres  moyens  de  publicité,  1839-45,  2  vol.  in-8^; 
Bonnin,  Commentaire  des  lois  de  la  presse,  1845,  in-8o; 
Rories  et  Bonassies,  Dictionnaire  pratique  et  complet 
de  la  presse,  1852,  3  yol.  in-8«;  Chassan,  Traité  des  dé- 
lits et  contraventions  de  la  parole,  de  Vécriture  et  de 
la  presse,  3"  édit.,  1846-51,  3  vol.  in-S*';  Hipp.  Dubois, 
Code  manuel  de  la  presse,  1851,  in-12;  Gustave  Rousset, 
Nouveau  Code  annoté  de  la  presse,  1856,  in-4<^.       B. 

PRESSE  DES  MATELOTS.  F,  notro  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d^Histoire. 

PRESTANT,  un  des  jeux  à  bouche  de  Torgue.  C'est  un 
quatre-pieds  ouvert,  de  moyenne  taille,  et  en  étain  fin. 
Le  prestant ,  auquel  on  donne  toute  l'étendue  du  clavier, 
parle  une  octave  plus  haut  que  le  huit-pieds  et  une  oc- 
tave plus  bas  que  la  doublette  ;  il  est  ordinairement  placé 
dans  le  positif.  Ce  jeu  est  ainsi  nommé  du  latin  prœstare, 
non  pas  à  cause  de  la  supériorité  de  son  harmonie,  mais 
parce  que,  tenant  le  milieu  dans  son  étendue  entre  les 
BOUS  les  plus  graves  et  les  sons  les  plus  aigus  des  autres 
jeux,  il  sert  à  les  accorder.  Lorsqu'il  est  employé  à  la  pé- 
dale, le  prestant  prend  le  nom  de  pédale  de  flûte  de 
vuatre^teds;  il  doit  alors  être  fait  en  étoffe,  et  être  de 
plus  crosse  taille.   '  F.  C. 

PRESTATiON  ^du  latin  prMstare,  fournir),  redevance 
anno3lle  en  grains,  denrées,  volailles,  etc.  La  prestation 
ennature,d  un  usage  très  fréquent  dans  les  contrats  féo- 
daux, est  encore  employée  aujourd'hui  dans  les  baux  à 
ferme.  De  pi  us,  elle  est  consacré  dans  la  langue  du  Droit 
administrptifen  matière  de  réparations  dos  cnemins  vid* 


naux.  Les  prestations  de  ce  genre  sont  perçues  en  cen- 
times  additionnels  au  principal  des  quatre  ooatribtttioiii 

directes,  ou  en  Journées  de  travail,  dont  le  nombre  ne 
peut  excéder  trois  par  an,  et  qui  sont  touiours  racho* 
tables.  Aux  termes  de  la  loi  du  21  mai  1838,  tout  habi«> 
tant,  chef  de  famille  ou  d'établissement,  à  titre  de  pro- 
priétaire, de  régisseur,  de  fermier  ou  de  colon  partiaire, 
porté  au  rôle  des  contributions  directes,  pourra  être 
appelé  à  fournir  chaque  année  une  prestation  de  trois 
Jours,  1®  pour  sa  personne  et  pour  cliaque  individu  màlo, 
valide,  âgé  de  18  ans  au  moins  et  de  60  ans  au  plus, 
membre  ou  serviteur  de  la  famille,  et  résidant  dans  la 
commune;  2^  pour  chacune  des  charrette^  ou  voitures 
attelées,  et  en  outre  pour  chacune  des  bètes  de  somme, 
de  trait,  de  selle,  au  service  de  la  famille  ou  de  l'établis- 
sement dans  la  commune.  L. 

PRESTIDIGITATEUR  (de  l'italien  presto,  preste,  et  du 
latin  digitus,  doigt),  celui  qui  fait  des  tours  subtils  avec 
les  doigts.  C  est  un  nom  plus  relevé  que  celui  d'escamo- 
teur (d'escamoté^  petite  balle  de  liège).  L'abus  que  quel- 
ques-uns ont  fait  de  leur  adresse  a  valu  au  mot  esca* 
moter  le  sens  de  tromper,  de  voler,  La  prestidigitation 
est  un  talent  qui  tient  jusqu'à  un  certain  point  aux  con- 
naissances physiques  et  chimiques.  Parmi  ceux  qui  s'y 
sont  livrés  avec  succès,  on  cite  Pinetti,  Bienvenu,  Oli- 
vier, Ledru  dit  Comus,  Bosco,  Comte,  Robert  Houdin,  etc. 

PRESTIAIONIË ,  en  termes  de  Droit  canonique,  revenu 
affecté  par  un  fondateur  à  l'entretien  d'un  prêtre,  sans 
qu'il  y  ait  érection  en  titre  de  bénéRce. 

PRÊT,  acte  par  lequel  on  cède  la  jouissance  temporaire 
d'une  chose  que  l'on  possède.  Le  contrat  de  prêt  peut 
être  unHatéral  et  de  bienfaisance,  ou  synallagmatique  et 
commutatif.  U  doit  être  fait  par  une  personne  capable  ; 
toutefois,  le  prêt  fait  par  un  incapable  astreint  l'emprun- 
teur à  restitution,  non  pas  en  vertu  du  contrat ,  qui  n'est 
pas  valable,  mais  en  vertu  de  l'obligation  naturelle  à  la- 

3uelle  il  a  donné  lieu.  Il  y  a  trois  sortes  de  prêts  :  le  Prêt 
usage  ou  Commodat  (du  latin  commodare,  prêter),  le 
Prêt  de  consommation,  et  le  Prêt  à  intérêt. 

Par  le  Prêt  à  usage,  une  des  parties  livre  gratuitement 
à  l'autre  une  chose  non  fongible,  mobilière  ou  immobi- 
lière, à  charge  de  la  rendre  après  s'en  être  servi.  L'em- 
prunteur, qui  a  reçu  l'usage,  et  non  la  propriété  de  la 
chose  prêtée,  doit  :  l"  veillei,  en  bon  père  de  famille,  à 
la  garde  et  à  la  conservation  de  cette  c^ose;  2»  ne  s'en 
servir  que  pour  l'usage  déterminé  par  la  convention  ou 
la  nature  de  la  chose  ;  3^  rendre  la  chose  prêtée  au  terme 
convenu,  ou,  à  défaut  de  convention,  après  qu'elle  a  servi 
à  l'usage  pour  lequel  elle  avait  été  empruntée.  Faute  du 
soin  nécessaire,  il  répond  de  toute  perte  et  de  tout  dom- 
mage arrivés  à  la  chose  prêtée.  Le  prêteur  est  tenu  de  res* 
tituer  à  l'emprunteur  les  dépenses  que  ce  dernier  aurait 
faites  pour  la  conservation  de  la  chose,  pourvu  qu'elles 
aient  été  extraordinaires,  nécessaires,  et  assez  urgentes 
pour  que  le  prêteur  n'ait  p;i  être  prévenu.  L'emprunteur 
ne  peut  retenir  la  chose  prêtée  en  compensation  de  ce 
que  le  prêteur  lui  doit.  Ce  qm  concerne  ce  genre  de  prêt 
est  r^é  par  le  Code  Napoléon,  art.  1874  et  suiv. 

Dans  le  Prêt  de  consommation  ou  simple  prêt,  une 
partie  livre  à  l'autre  une  certaine  quantité  de  choses 
qui  se  consomment  par  l'usage.  Les  Romains  appelaient 
ce  prêt  mutuum  (parce  que  l'objet  devient  ex  meo  tuum, 
de  mien  tien).  Ici  l'emprunteur  devient  propriétaire  de 
la  chose  prêtée;  elle  périt  pour  son  compte,  de  quelque 
manière  que  la  perte  arrive,  et  même  avant  qu'il  ait  pu 
en  user.  Il  est  tenu  de  rendre  au  terme  convenu  la  quan- 
tité de  choses  prêtées,  dans  la  même  espèce  et  qualité,  ou 
bien  leur  valeur.  Le  prêteur  garantit  contre  l'éviction ,  et 
est  responsable  du  préjudice  que  les  défauts  de  la  chose 
prêtée  auraient  causé  a  l'emprunteur. 

Le  Prêt  de  consommation  n'est  pas  essentiellement  gra- 
tuit :  s'il  perd  son  caractère  de  oienfaisance  et  devient 
intéressé,  il  se  nomme  Prêt  d  intérêt.  Il  se  rapproche 
alors  du  lowige,  sous  le  rapport  du  profit  revenant  au 
prêteur;  mais  il  en  diffère  en  ce  que  la  propriété  de  la 
chose  passe  à  l'emprunteur  du  moment  de  la  livraison, 
et  que  le  profit  du  prêteur  reste  le  même,  quoi  que  de- 
vienne la  chose  prêtée.  Le  prêt  à  intérêt  doit  être  stipulé 
expressément  et  par  écrit  :  la  dette  des  intérêts  ne  pour* 
rait  être  prouvée  autrement,  ni  par  témoins,  ni  par  les 
livres  et  registres  du  créancier.  L'argent  est  l'objet  le 
plus  fréquent  du  prêt  à  intérêt.  F.  iNnteta. 

Un  prêt  peut  être  fait  sur  immeubles  ;  il  donne  lieu  à 
hypothèque  (  V,  ce  moty  II  peut  aussi  avoir  lieu  avec  ga* 
rantie  sur  choses  mobilières  ;  alors  il  s'appelle,  8alva(4 
les  droonstances,  Prêt  sur  dépôt  ou  consignation  de 


PRE 


148S 


PRE 


chandises  (V,  Consignation^  Prêt  sur  gaqe,  FrH  à  la  1 
grosse.  Le  Prêt  sur  gage  est  un  prêt  garanti  par  un  nan- 
tissement, par  un  objet  d'une  valeur  le  plus  souvent  su- 
périeure à  la  somme  prêtée.  Autrefois  il  était  loisible  à 
tout  particulier  d'ouvrir  des  maisons  de  prêt  sur  gage  : 
aujourd'hui,  aucun  établissement  de  ce  genre  ne  peut 
exister  sans  l'autorisation  du  gouvernement,  sous  peine 
d'emprisonnement  et  d'amende  {Code  pénal,  art.  411). 
Les  maisons  de  prêt  ont  été  remplacées  par  les  Monts-d&- 
piété  {V,  ce  mot).  —  Le  Prêt  à  la  grosse  (sou»-ent. 
aventure)  est  fait  sur  des  objets  exposés  à  la  fortune  de 
mer,  avec  cette  condition  que,  s'ils  arrivent  heureuse- 
ment ,  le  prêteur  obtiendra,  outre  le  remboursement  de 
ses  avances,  une  somme  à  titre  de  profit ,  et  qu'en  cas  de 
sinistre  il  ne  pourra  rien  réclamer,  sinon  la  valeur  que 
ces  objets  auront  conservée.  Dans  une  convention  de  ce 
genre,  Tintérêt  doit  être  plus  élevé  que  dans  le  prêt  or- 
dinaire, puisqu'il  y  a  des  chances  particulières  de  perte. 
Le  prêteur  à  la  grosse  a  un  privilège  sur  les  onjets, 
pourvu  que  son  contrat  soit  prouvé  par  écrit,  et  enre- 
gistré dans  les  six  jours  de  sa  date  au  greffe  du  tribunal 
de  commerce.  Tout  emprunt  à  la  grosse,  fait  pour  une 
somme  excédant  la  valeur  des  objets  sur  lesquels  il  est 
affecté,  est  déclaré  nul  à  la  demande  du  prêteur,  s'il  est 
prouvé  qu*il  y  a  fraude  de  la  part  de  l'emprunteur;  s'il 
n'y  a  pas  fraude,  il  est  valable  jusqu'à  concurrence  seu- 
lement des  objets  affecta  Ce  qui  concerne  ce  genre  de 
prêt  est  réglé  par  le  Code  de  commerce,  art.  311-331. 
V.  Troplong,  Commentaire  des  titres  X,  XI  et  XII  du 
Code  cml,  du  Prêt,  du  Dépôt  et  du  Séquestre,  1831, 
2  vol.  in-S». 

pRftr,  terme  d'administration  militaire.  V.  Solde. 

PRÊTS  d'honneur  (Bauques  de),  institutions  recom- 
mandées aux  préfets  par  une  circulaire  du  ministre  de 
l'intérieur,  en  date  du  20  février  1850.  Elles  ont  pour 
but  de  venir  en  aide,  par  des  prêts  d'argent  dont  le 
maximum  est  ordinairement  fixé  à  200  fr.,  aux  besoins 
légitimes  des  claies  laborieuses,  et  de  combattre  les 
abus  de  l'usure  qui  ruine  les  campagnes  et  les  petites 
industries.  On  écrit  sur  deux  registres  distincts  les  noms 
des  emprunteurs  qui  ont  remboursé  et  ceux  des  débi- 
teurs de  mauvaise  foi  :  c'est  là  toute  la  sanction.  Quel- 
ques banques  de  prêts  d'honneur  ont  été  formées  par  des 
particuliers;  «lies  ont  eu  peu  de  succès. 

pR^s  DB  l'enfangb  (Sooiété  des).  V,  au  Supplém, 

PRÊTE-NOM,  celui  qui  prête  son  nom  à  autrui,  et 
qui,  agissant  pour  le  compte  d'un  tiers,  se  présente 
comme 'intéressé  apparent  dans  une  affaire.  Un  prête- 
nom  couvre  une  interposition  de  personnes,  et  réalise 
une  stipulation  défendue  par  la  loi.  Toutefois,  il  est 
licite  d'y  recourir  dans  une  déclaration  de  command 
{V,  ce  mot), 

PRÉTÉRIT,  du  lann  prœteritum  {tempus)^  temps 
passé.  C'est  le  nom  que  Varron  et  Quintilien  donnent 
au  temps  passé  de  la  conjugaison  latine,  celui  que  nous 
appelons  parfait  {V.  ce  mot).  Le  terme  de  prétérit  est 
plus  généralement  employé  dans  notre  langue.  On  a 
donné  le  nom  de  prétérit  imparfait  à  la  forme  verbale 
qui  sert  à  marquer  le  passé  avec  rapport  au  présent 
(V.  Imparfait);  celui  de  prétérit  parfait  défini,  ou  sim- 
plement prvWt't  défini^  à  l'inflexion  verbale  qui  indique 
une  action  ou  un  état  passés  absolument  et  ayant  eu  lieu 
dans  un  temps  déterminé  :  «  La  bataille  d'Aupterlitz  se 
livra  à  la  fin  de  1805;  n  celui  ù^prétérit  {parfait)  indé- 
fini, à  la  forme  particulière  de  conjugaison  indiquant 
une  chose  entièrement  accomplie,  mais  dont  l'époque 
peut  être  ou  ne  pas  être  déterminée  :  a  L'Empire  romain 
a  été  renversé  par  les  Barbares  du  Nord  ;  »  celui  de  pré- 
térit  antérieur,  à  la  forme  qui  signifie  une  chose  passée, 
mais  considérée  p>ar  rapport  à  une  autre  qu'elle  a  nré- 
cédée  :  «  Lorsque  feus  terminé  mon  discours,  l'assemblée 
se  retira.  »  Enfin  on  appelle  prétérit  plus-que^arfait  la 
forme  verbale  qui  exprime  doublement  le  passé  (V.  Plus- 
qub-parfait).  Au  lieu  de  dire  futur  prétérit  ^  on  ait  fiUur 
passé  ou  antérieur;  on  dit  également  coTiditionnel  passé, 
passé  de  Vinflnitif,  Au  subjonctif,  on  dit  passa  ou  prétérit 
et  plus-que-parfait.  —  Le  prétérit  défini  correspond  à 
l'aoriste  des  Grecs  ;  le  prétérit  indéfini ,  tantôt  à  ce  temps, 
tantôt  au  parfait.  Le  parfait  latin  équivaut  à  ces  deux 
formes  de  la  conjugaison  française.  P. 

PRÉTÉRITION  ou  PRÉTERMISSION  (du  latin  prœter- 
ttus,  passé,  ou  prœtermissus,  omis),  ou  PARALIPSE  (du 
grec  paraléïpéin,  laisser  de  côté),  flpre  de  Rhétorique 
par  laquelle  on  feint  de  passer  sous  silence  ou  de  ne  tou- 
cher que  légèrement  des  choses  sur  lesquelles  néanmoins 
on  insiste  avec  force.  Ainsi,  dans  VÀthalie  do  Racine 


(acte  m,  se.  3  ) ,  le  grand-prêtre  Mathan  dit  à  Nabalt 

Qu*est-ll  besoin ,  Nabal ,  qa%  tes  yeux  Je  rappelle 
De  Joftd  et  de  moi  U  ûunease  querelle  ?... 

C'est  un  moyen  adroit  de  faire  valoir, en  les  groupant,  en 
les  rapprochant,  des  preuves  ou  des  circonstances  secon- 
daires qui,  isolées,  ne  produiraient  que  peu  d'effet; 
moyen  puissant  surtout  lorsque,  par  une  progression 
habilement  ménagée,  on  les  fait  suivre  de  raisons  fortes 
et  concluantes.  G. 

paérÉRiTioN,  en  termes  de  Droit  romain  et  dans  nos 
anciens  pays  de  Droit  écrit,  omission  d'instituer  héritiers 
ceux  à  qui  le  testateur  devait  au  moins  une  portion  légi- 
timaire.  Elle  entraînait  la  nullité  du  testament. 

DRii'TK^Y'rî?   f  r.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 
PRÉTOIRE.'  )     ^«Vrap/ite  et  d^Histoire. 

PRÊTRE ,  en  latin  presbyter  (du  grec presbytéros,  plus 
ancien,  vieillard),  se  dit,  en  général,  de  tout  ministre 
du  culte,  et  spécialement,  dans  l'Église  catholique,  de 
l'ecclésiastique  revêtu  de  la  prêtrise  {  V.  ce  mot).  Toute 
religion  a  eu  ses  prêtres.  Ceux  de  l'ancienne  Egypte  for- 
maient la  classe  la  plus  élevée  dans  l'État  :  après  avoir 
gouverné  au  nom  des  Dieux,  ils  furent  encore,  depuis 
l'institution  de  la  royauté,  les  interprètes  de  leur  volonté 
dans  la  loi,  les  modérateurs  des  souverains;  ils  eurent 
l'administration  de  la  Justice,  l'exercice  des  fonctions  pu- 
bliques les  plus  importantes,  et  à  la  puissance  que  leur 
donnait  une  instruction  refusée  aux  autres  classes  ils 
ajoutaient,  comme  possesseurs  du  tiers  du  pays,  la  force 
qui  appartient  d'ordinaire  aux  maîtres  de  la  propriété. 
Chez  les  Hébreux ,  au-dessous  du  Grand-Prêtre  (  V,  ce 
mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogr.  et  d'Histoire  ) ,  les 
autres  membres  de  la  famille  d'Aaron  constituaient  les 
prêtres,  chargés  des  divers  sacrifices,  et  les  lévites  avaient 
dans  leurs  attributions  l'entretien  du  Temple,  l'explica- 
tion de  la  loi,  l'administration  de  la  Justice  et  l'instruc- 
tion du  peuple.  En  Grèce,  les  rois  firent  primitivement 
l'office  de  sacrificateurs;  les  prêtres  chargés  spécialement 
des  fonctions  du  sacerdoce  étaient  appelés  néchores  ;  d'au- 
tres croient  que  les  néocores  étaient  seulement  gardiens 
des  temples.  Quelquefois  des  familles  entières  étaient 
vouées  à  un  sacerdoce  particulier  ;  chaque  divinité  avait 
ses  prêtres.  A  Rome,  les  fonctions  sacerdotales  ne  furent 
confiées  d'abord  qu'à  des  patriciens;  puis,  les  plébéiens  y 
furent  admis.  Les  Anciens  attribuèrent  aussi  une  part  dn 
sacerdoce  à  des  prêtresses,  tantôt  vierges,  comme  celles 
de  Diane,  de  Minerve,  et  de  Vesta,  tantôt  mariées,  comme 
celles  de  Junon.  Les  prêtres  des  Gaulois  se  nommaient 
Druides,  et  ceux  des  peuples  du  Nord,  DroJ/es;  là  aussi  il  y 
avait  des  prêtresses.  —  Dans  les  premiers  temps  du  chris- 
tianisme, on  donna  le  nom  de  Prêtres  aux  anciens  qui 
expliquaient  aux  fidèles  les  saintes  Écritures,  aussi  bien 
qu'à  ceux  qui  avaient  reçu  le  pouvoir  de  célébrer  la  messe 
et  d'administrer  les  sacrements.  Aucune  exclusion  n'existe 
dans  l'Église  pour  le  sacerdoce  :  il  est  accessible  aux 
hommes  de  toute  condition.  Les  prêtres  de  l'Église  d'Orient 
portent  le  nom  de  papcu  ou  popes  (pères).  Chez  les  Pro- 
testants, les  ministres  du  culte  sont  dits  ministres  ou 
pasteurs.  Les  prêtres  des  Indiens  s'appellent  brâhmines 
ou  brahmanes;  ceux  de  la  religion  de  Bouddha,  bonxes  • 
Les  Musulmans  distinguent  les  muphtis,  les  imans,  les 
mollahs,  les  derviches.  B. 

PRÊTRISE ,  le  plus  élevé  des  trois  ordres  mineurs  dans 
le  sacerdoce  catholique,  celui  que  confère  le  sacrement 
de  l'Ordre  (  V.  Ordre,  Ordination).  F^ur  être  ordonné 
prêtre,  il  faut  être  &gé  de  25  ans  au  moins,  et  avoir  passé 
un  an  dans  le  diaconat. 

PREUILLY  (Église  S'-Pierre,  à),  dans  le  département 
d'Indre-et-Loire.  Cette  ancienne  abbatiale  bénédictine^ 
b&tie  de  1001  à  1009,  a  servi  de  type  pour  un  grand  nom<* 
bre  d'églises  de  la  Touraine.  Elle  est  en  forme  de  croix  la* 
tine,  avec  collatéraux,  et  déambulatoires  autour  de  rab« 
side  :  sa  longueur  est  de  57"*,50,  sa  largeur  de  18"  (^°*  an. 
transept),  et  sa  hauteur,  de  lO^^ôO  à  la  nef  principale. 
15™  aux  bas  côtés.  A  la  naissance  de  chacun  des  croisil- 
lons était  bâti  un  clocher;  un  seul,  de  22"',50  d'élévation, 
est  aujourd'hui  apparent.  Les  toitures  actuelles  n'offrent 
pas  la  disposition  des  couvertures  qu'elles  ont  remplacées  : 
il  y  a  lieu  de  croire  que  le  comble  primitif  était  presque 
plat  et  couvert  en  dalles.  La  nef  et  l'abside  ont  chivcune 
cinq  travées;  il  faut  ajouter  une  travée  pour  le  chœur,  et 
une  autre  pour  l'intertransept;  trois  chapelles  sont  pra- 
tiquées dans  l'abside*  Les  paliers  de  la  nef,  carrés  dans 
la  masse,sont  cantonnés  de  quatre  colonnettes  arrondies; 
les  bases  se  rsDorocheat  beaucoup  du  genre  atàque,et  les 


PRE 


1489 


PRI 


chtptteaax  présentent  beaucoup  de  richesse  et  de  variété. 
U  voûte  est  à  plein  berceau  dans  la  grande  nef,  et  en 
arc-boutant  dans  les  nefs  latérales;  la  grande  trayée  du 
cbœur  est  seule  voûtée  avec  nervures.  Une  crypte,  main- 
tenant remplie  de  décombres,  existe  sous  le  sanctuaire. 
La  façade  occidentale  est  remarquable  par  la  science  de 
l'appareil  :  à  la  partie  inférieure  s*ouvre  la  porte  d*entrée, 
ornée  avec  sobriété;  au  l*'  étage,  une  large  fenêtre  est 
flanquée  de  deux  plus  petites;  au  2*  s*étend  une  série  de 
petits  arcs  cintrés,  surmontée  d*une  fenêtre  géminée 
donnant  du  Jour  sous  la  voûte  de  la  nef;  le  tout  est  cou- 
ronné par  un  pignon  aigu.  B. 

PREUVE,  démonstration  directe  ou  indirecte  de  la  vé- 
rité (F.  DiMONCTRATioN ,  Argcment).  —  En  Jurispru- 
dence, le  Juge  n'est  pas  tenu  d*aller  lui-même  à  la  re- 
cherche des  preuves;  c'est  aux  parties  en  cause  à  les 
produire,  et,  en  règle  générale,  la  charge  de  la  preuve 
tombe  entière  sur  le  demandeur;  s'il  ne  la  fournit  pas, 
il  est  déclaré  non  recevable.  Nulle  preuve  n'est  admise 
contre  les  présomptions  légales  ni  le  serment  décisoire. 
La  loi  admet,  selon  la  nature  des  actions,  diverses  sortes 
de  preuves  :  en  matière  civile ,  les  preuves  se  font  par 
titres  ou  par  témoins;  en  matière  criminelle,  elles  se 
font  surtout  par  témoins.  La  Preuve  par  titres  ou  Preuve 
littérale  résulte  d'un  acte  écrit  qui  constate  que  tel 
fait  a  eu  lieu,  que  telle  convention  a  été  arrêtée  et  con- 
clue :  quand  cet  acte  a  été  dressé  par  un  officier  pu- 
blic, la  preuve  est  dite  authentique,  et  ne  peut  être 
attaquée  que  par  l'inscription  de  faux  ou  autres  voies 
extraordinaires;  si  l'acte  est  sous  seing  privé,  la  preuve  a 
la  même  force,  du  moment  que  les  parties  ont  déclaré  ne 
pas  méconnaître  leur  signature.  En  Tabsence  de  titres 
formels,  il  n'y  a  plus  que  des  demi-preuves,  pouvant 
donner  lieu  à  un  commencement  de  preuve  par  écrit  :  tels 
sont  les  écrits  soussignés  des  parties,  les  lettres  missives, 
les  papiers  domestiques,  les  copies  de  titres,  etc.  —  La 
Preuve  testimoniale  n'est  point  admise  en  matière  civile 
pour  choses  qui  ont  pu  faire  l'objet  d'un  contrat  et  dont  la 
somme  ou  valeur  excède  150  fr.,  à  moins  qu'il  n'existe  déjà 
un  commencement  de  preuve  par  écrit,  ou  qu'il  ait  été 
impossible  de  se  procurer  la  preuve  littérale  ou  de  conser- 
ver celle  qu'on  avait  obtenue.  Ainsi,  la  preuve  par  témoins 
est  admise  pour  les  obligations  qui  naissent  des  quasi- 
contrats,  des  délits  ou  des  quasi-délits  ;  pour  les  aép6ts 
faits  en  cas  d'incendie,  ruine,  tumulte,  naufrage,  ou  par 
les  voyageurs  dans  les  hôtelleries  ;  pour  le  cas  où  le  créan- 
cier a  perdu  son  titre  par  force  majeure.  En  Droit  com- 
mercial ,  les  juges  admettent ,  quand  ils  le  croient  néces- 
saire, la  preuve  testimoniale  pour  les  achats  et  les  ventes. 
En  matière  de  contraventions  et  de  délits,  la  preuve  se 
fait  par  procès-verbaux  ou  rapports  et  par  témoins.  V.  Des- 
quiron,  Traité  de  la  preuve  par  témoins  en  matière  civile 
et  en  mcUière  criminelle ,  1811,  2  vol.  in-8<*;  Bentham, 
Traité  des  preuves  judiciaires,  1830,2  vol.  ln-8<*;  Gabriel, 
Essai  sur  la  nature  des  preuves,  revu  par  Selon,  1845, 
in-S**  \  Hittermaîer,  De  la  Preuve  en  matière  criminelle, 
trad.  de  l'allemand  par  Alexandre,  1848,  in-8®;  Bonnier, 
Traité  tfiéorique  et  pratique  des  Preuves  en  Droit  civil 
et  en  Droit  criminel,  2«  édit.,  1852,  in-8o. 

Dans  les  premiers  siècles  de  la  monarchie  française, 
on  admit  en  Justice  ces  preuves  étranges  qu'on  appelait 
Jugements  de  Dieu  (  V.  Épreuves  jddiciairbs,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire).  C'est  ce  c^u'on 
appelait  la  Purgation  vulgaire,  opérée  de  six  manières 
différentes  :  par  l'eau  froide,  par  l'eau  bouillante,  par  le 
feu,  par  le  fer  rouge,  par  le  combat  en  champ  clos,  par 
la  croix  et  par  l'Eucharistie  ;  ajoutons  aussi  la  cruen^ 
talion,  c.-à-d.  lorsqu'il  découlait  du  sang  de  la  plaie  de 
rhomme  homicide,  en  présence  de  celui  qui  était  accusé 
du  meurtre.  La  Purgation  canonique  se  faisait  par  le 
serment,  et  consistait  à  produire  un  certain  nombre  de 
témoins  (V.  Coiudratedrs,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire),  On  employa  encore  trois 
preuves  aussi  vagues  que  les  précédentes,  celles  qui  ré- 
sultaient de  la  probabilité  du  fait  {evidentia  facti)^  du 
bruit  commun  (fama  publica)^  et  de  la  fuite  {fuga),  A 
mesure  que  la  civilisation  fit  des  progrès,  ces  usages  se 
perdirent.  Dans  l'état  du  Droit  criminel  en  1789,  on  ad- 
mettait quatre  sortes  de  preuves  :  la  preuve  testimoniale, 
gui  se  rormaii  de  la  déposition  des  témoins;  la  preuve 
instrumentale,  qui  se  tirait  des  écrits;  la  preuve  vocale, 
résultant  de  l'aveu  des  accusés  ;  et  la  preuve  conjectU' 
raie,  qui  résultait  des  indices  et  présomptions. 

PREUVES,  raisons  sur  lesquelles  l'orateur  s'appuie  pour 
convaincre.  Elles  seules  peuvent  donner  du  corps  et  du 
nerf  au  discours;  ell^  font  l'office,  dit  Cicéron,  de  chair. 


de  muscles  et  d'os.  Il  n'est  pas  toujours  nécessaire  de 
plaire  et  de  toucher,  il  l'est  toujours  d'instruire  et  de 
convaincre  ;  il  y  a  même  des  circonstances  où  la  preuve 
suffit  pour  amener  les  juges  au  sentiment  de  l'orateur. 
Les  Preuves  prennent  différents  noms  suivant  leur  na- 
ture, leur  origine  et  leur  valeur.  La  preuve  de  fait  s'ap- 
pelle cause;  la  preuve  de  droit,  question,  £lle  est  in^rtn- 
sèque,  quand  elle  est  tirée  du  fond  même  «m  sujet ,  ou 
des  circonstances  qui  en  dépendent;  extrinsèque,  q^uand 
elle  est  prise  hors  du  suiet  ou  de  ses  accessoires.  Aristote 
appelle  celle-ci  artificielle,  et  celle-là  na^urella.  La  preuve 
est  péremptoire,  ouand  elle  produit  l'évidence;  probante, 
lorsque,  tout  en  démontrant  la  vérité,  elle  peut  encore 
être  contestée;  prob<ible  ou  approchante,  quand,  au  lieu 
de  la  certitude,  elle  amène  la  plus  grande  probabilité; 
hypothétique,  quand  elle  repose  sur  une  hypothèse;  per- 
sonnelle  {ad  Aotntnem),  quand  elle  ne  convient  qu'à  une 
seule  personne;  spécieuse,  quand  elle  n'a  que  l'apparence 
de  la  vérité;  sophistique,  quand,  étant  fausse,  elle  est 
employée  avec  intention  de  tromper.  L'orateur  ne  saurait 
donner  trop  de  soin  au  choix  et  à  la  disposition  des 
preuves  ;  de  l'ordre  qu'il  suit  dépend  souvent  le  succès  de 
son  discours  (  V,  CoNnaiiATioN).  Les  rhéteurs  distinguent 
les  preuves  elles-mêmes  et  la  manière  de  les  trouver, 
c-à-d.  le^  arguments  et  les  lieux  des  arguments  ou  lieux 
communs  (  V.  ces  mots),  H.  D. 

PRÉVARICATION  (du  latin  prœvarican,  s'écarter  de 
la  ligne  droite),  action  de  trahir  la  cause  qu'on  doit 
soutenir,  de  manquer  par  mauvaise  foi  aux  devoirs  de  sa 
charge,  aux  obligations  de  son  ministère.  Dans  notre 
ancien  Droit,  ce  mot  désignait  principalement  l'infraction 
des  officiers  de  justice  à  leurs  devoirs.  La  prévarication 
comprend  les  crimes  et  délits  connus  aujourd'hui  sous 
les  noms  de  forfaiture ^  déni  de  justice,  concussion,  cor» 
ruption,  abus  iautortté  (F.  ces  mots), 

PRÉVENTION,  préoccupation  d'esprit  qui  ne  permet 
pas  d'apprécier  les  choses  à  leur  véntable  point  de  vue, 
de  les  juger  avec  impartialité. 

pETONTiON,  en  termes  de  Droit,  état  de  l'individu  que 
la  Chambre  du  conseil  a  renvoyé  devant  le  tribunal  de 
police  correctionnelle  à  raison  d'un  délit,  ou  devant  la 
Chambre  des  mises  en  accusation  à  raison  d'un  crime. 
«Cet  individu  prend  alors  le  nom  de  prévenu,  —  Prévenu 
tion  signifie  aussi  l'action  de  devancer  l'exercice  du  droit 
d'un  autre  :  ainsf,  pour  la  recherche  des  contraventions, 
les  commissaires  de  police  ont  prévention  à  l'égard  des 
^des  champêtres.  —  En  Droit  canonique,  la  Préven» 
tion  en  cour  de  Rome  était  le  droit  qu'avait  le  pape  de 
prévenir  les  coUateurs  dans  la  nomination  aux  bénéfices, 
en  nommant  par  lui-même. 

œ^ÂLES  (COU»).  l'^ToSS^aA^^df^ii 

PRIAMELN  (du  latin  preambulus,  préambule),  nom 
qu'on  donne  en  Allemagne  à  des  recueils  de  sentences 
morales  des  xiv*,  xv"  et  xvi*  siècles,  curieuses  à  étudier 
comme  expression  des  mœurs  et  du  caractère  de  l'époque* 
C'étaient  comme  les  préambules  de  la  sagesse  populaire. 

PRIAPÉE,  en  latin  Priaipeia,  nom  donné  à  toute  collée 
tion  de  poèmes  épigrammatiques,  à  tout  ouvrage  peint  o« 
sculpté,  dont  Priape  est  le  sujet. 

PRIAPÉEN  (Vers} ,  espèce  de  vers  grec  et  latin  consa* 
cré  aux  chants  en  rhonneur  de  Priape  :  c'est  la  réunion 
du  glyconique  et  du  phérécratien ,  c.-à-d.  nue  le  l**"  pied 
est  trochée  ou  spondée  f  plus  rarement  ïambe,  tribraque, 
dactyle),  le  2*  un  chonambe  ou  un  ditrochée,  le  3*  un 
Sambe,  le  4*  un  trochée  ou  un  spondée,  le  5*  un  cho< 
riambe  suivi  d'une  syllabe  indifférente  : 

Talis  I  Sate  mena  |  stnpor  Hnil  vl|det,  nihll  an  j  dit  (Catvllb). 

Quelquefois  le  choriambe  prend  la  3*  place;  alors  le 
2*  pied  est  ou  un  spondée  ou  un  trochée.  Le  vers  pria- 
péen  était  asynartète,  comme  on  le  voit  par  l'exemple 
suivant  de  Catulle,  où  la  dernière  syllabe  du  glyconique 
doit  compter  comme  longue  malgré  la  voyelle  qui  suit  : 


Nutrivl  :  magia  et  magia  [)  ut  beata  quotannla. 


P. 


PRIE -DIEU,  meuble  d'église,  d^oratoire,  ou  de  cham- 
bre à  coucher.  C'est  une  chaise  basse  sur  laquelle  on 
s'agenouille,  et  qui  est  garnie  d'un  support  ou  pupitre  à 
hauteur  d'appui.  Au  xvi*  siècle  on  a  fut  en  menuiserie 
des  prie-Dieu  fort  élégants,  délicatement  sculptés,  et, 
quand  ils  étaient  destinés  à  s'appliquer  contre  un  mur, 
on  les  surmonta  d*un  retable  à  volets,  formant  ce  qu'oa 
appelait  un  autel  domestique, 

94 


PRI 


1490 


PRI 


PRIÈRE,  acto  do  culte  par  lequel  on  adore  ou  invoque 
Dieu.  La  prière  peut  ôtre  mentale  ou  orale.  Chez  les 
Hébreux ,  il  n'y  eut  d'abord  aucune  prière  accompagnant 
les  sacrificea ,  et  ^  pour  la  prière  particulière,  Mofae  l'aban- 
donnait au  sentiment  individuel  et  à  l'inspiration  du 
moment.  Le  Pentatcuque  ne  renferme  que  trois  formules 
de  prière  :  la  bénédiction,  que  les  prêtres  prononçaient 
sur  le  peuple  {Nombres,  vi,  24-20)  ;  les  actions  de  grâce, 
qu'on  devait  réciter  en  offrant  les  prémices  (  Deutéro- 
nome,  xxvi,  5-10);  et  la  prière,  qùMl  fallait  prononcer  en 
présentant  la  seconde  dime  (/6{(i.,  13-15).  Esdras  ordonna 
deux  prières  pour  les  jours  ordinaires  (le  matin  et  le  soir), 
trois  pour  le  jour  du  sabbat,  et  composa  18  bénédictions 
que  chaque  Israélite  devait  dire  chaque  jour.  Les  Grecs 
personnifièrent  les  Prières,  et  en  firent  des  filles  de  Jupi- 
ter :  ils  les  représentaient  boiteuses,  timides,  et  marchant 
après  riDjure,  pour  guérir  les  maux  qu'elle  a  faits.  Les 
Romains  priaient  généralement  debout,  la  tête  voilée,  en 
touchant  de  la  main  l'autel,  ou  en  la  portant  à  la  bouche; 
ou  bien  ils  embras.s:uent  les  genoux  des  dieux.  Chez 
les  Chrétiens,  Tensenible  des  formules  de  prières  appro- 

{)riées  aux  diverses  cérémonies  s'appelle  la  Liturgie.  Ma- 
lomet  avait  d'abord  imposé  k  ses  sectateurs  la  prière 
cinquante  fois  par  jour;  puis,  en  raison  de  la  faiblesse 
humaine,  il  réauisit  les  prières  à  cinq ,  et  elles  se  font 
avant  le  lever  du  soleil ,  à  midi ,  avant  et  après  le  coucher 
du  soleil,  enfin  à  la  première  veille  de  la  nuit  :  pour 
qu'elles  soient  elTicaces,  la  loi  musulmane  exige  l'état  de 
propreté,  la  décence  dans  le  vêtement,  la  direction  du 
corps  vers  le  temple  de  la  Mecque,  et  la  volonté  ou  l'in- 
tention. Les  prières  peuvent  être  faites  en  particu- 
lier chez  soi,  ou  en  plein  air,  ou  en  commun  dans  une 
mosquée  sous  la  direction  d'un  iman  ;  l'heure  en  est  in- 
diquée chaque  fois  par  les  muezzins.  Tout  musulman  doit 
parler  sa  prière,  parce  que  la  prière  mentale  est  de  nulle 
valeur.  B. 

PRIEUR.  \ 

PRIEURÉ.  (  F.  ces  mots  dans  notre  Dict.  de 

PRIMAIRES  (Écoles).  (     Biographie  et  d'Histoire, 

PRIMAT.  / 

PRIME  (du  latin  prima  pars,  part  prélevée),  somme 
accordée  par  l'État  à  titre  d'encouragement  pour  quelque 
opération  hasardeuse  nu  onéreuse  de  commerce,  d'indus- 
trie, d'agriculture.  Tclies  sont  les  primes  pour  la  pèche 
de  la  baleine  et  de  la  morue,  pour  l'exportation  de  cer- 
taines marchandises.  Le  drawback  {V.  ce  mot)  est  une 
espèce  de  prime.  On  donne  aussi  des  primes  pour  la  des- 
truction des  animaux  malfaisants. 

PRIME,  terme  de  Liturgie.  V,  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

PRIMB  (Marché  à).  F.  Bodrsb. 

PRiHB,  somme  convenue  entre  un  assuré  et  un  assu- 
reur pour  le  prix  des  risques  garantis  par  ce  dernier. 

PRIMICIER.        )  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

PRIMIPILAIRE.  i     de  Biographie  et  d'Histoire. 

PRIMITIF,  mot  d'où  d'autres  sont  formés.  Il  s'oppose 
à  dérivé.  Tel  est  le  mot  cfiar,  par  rapport  à  chariot,  char- 
retier,  etc.  On  ne  saurait  toujours  remonter  à  la  source 
primitive  d'un  mot,  car  la  plupart  des  mots  s'altèrent  par 
le  Ions  usage,  ou  perdent  leur  véritable  signification  par 
suite  d'une  foule  de  circonstances  diverses;  aussi  donne- 
t-on  généralement  le  nom  de  primitifs,  dans  les  langues 
déjà  vieillies,  aux  mots  qui  ne  paraissent  dériver  d'aucun 
autre.  Il  est  vraisemblable  que  la  plupart  des  mots  ont  été, 
à  l'origine,  purement  monosyllabiques,  ou  formés,  par 
onomatopés,  de  la  répétition  plus  ou  nftoins  exacte  du 
même  son  dans  deux  ou  trois  syllabes  :  tels  sont  les  mots 
imit&tifs  coucou,  murmure,  tictac,  cascade^  etc.  F.  Ra- 
cine, Radical.  P. 

PRINCE ,  titre  de  dignité.  F.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

PRINCE  (Le  Traité  du),  ouvrage  de  peu  d'étendue, écrit 
en  1514,  par  Machiavel,  pour  l'adresser  à  Julien  de  Médi- 
cis,  l'un  des  fils  de  Laurent  le  Magnifique,  et  frère  de 
Pierre  II.  L'auteur  discute  ce  que  c'est  que  la  principauté, 
combien  il  y  en  a  d'espèces,  comment  elles  s'acquièrent, 
comment  elles  se  maintiennent,  et  pourquoi  elles  se 
perdent.  Le  but  du  gouvernement,  selon  Machiavel,  est 
de  durer,  et  cela  n'est  p(M»ible  qu'à  l'aide  de  rigueurs, 
«  attendu  que  les  hommes  sont  généralement  ingrats, 
faux,  turbulents;  d'où  il  suit  qu'il  faut  les  contenir  par 
la  peur  du  châtiment.  »  Les  cruautés  sont  nécessaires 
dans  un  gouvernement  nouveau  ;  et  il  faut  plutôt  se  faire 
craindre  que  se  faire  aimer,  quand  on  ne  peut  obtenir 
Ton  et  l'autre.  Le  prince  doit  avoir  sans  cesse  à  la  bouche 
l9iâ  szctB  de  justice,  de  loyauté,  de  clémence,  de  religion, 


mais  ne  pas  s'inquiéter  de  leur  donner  un  démoDii  tr»tm 
les  fois  que  son  intérêt  l'exige.  Quant  à  savoir  si  ce  qui 
est  bien  doit  être  préféré  à  ce  qui  est  mal ,  c'est  une 
question  qu'il  faut  lûsser  débattre  à  des  moines.  —  Cet 
aflTreuses  maximes,  et  une  foule  d'autres  du  môme  senre, 
qui  composent  ce  qu'on  a  appelé  la  politique  machiavé- 
lique, sont  exposées  sans  passion ,  comme  choses  natu- 
relles; en  calculant  froidement  les  moyens  él  le  but,  en 
présentant  comme  idéal  César  Borgia,  Machiavel  ne  donne 
pas  le  mal  comme  bien,  mais  comme  utile.  La  tranquillité 
avec  laquelle  il  pose  ses  principes  prouve  qu'il  n'y  avait 
rien  là  qui  répugnât  à  ropinion  courante,  et  <{u'il  a  re- 
tracé simplement  ce  qui  était  alors  d'une  pratique  com- 
mune, au  lieu  d'avoir  été  l'inventeur  de  l'art  qui  a  reçu 
de  lui  son  nom  :  le  livre  parut  avec  une  autorisation  et 
un  privilège  du  pape  Clément  VII.  On  a  cru  à  tort  que 
Machiavel  avait  écrit  ironiquement,  pour  faire  haïr  aux 
peuples  l'autorité  d'un  seul,  ou  pour  que  les  Médlcis  en 
vinssent  par  leurs  excès  à  convertir  la  patience  des  Flo- 
rentins en  fureur  :  une  lettre  adressée  en  1513  à  l'un  de 
ses  amis,  François  Vettori ,  prouve  au  contndre  que  l'in- 
digence le  poussait  à  se  charger  de  l'emploi  de  pervertir 
les  princes  pour  arriver  à  leur  plaire.  D'ailleurs,  il  est 
impossible  d'apercevoir  l'intention  satirique  dans  le  traité 
du  Prince;  le  sang-froid  de  la  leçon  en  redouble  l'atrocité. 
F.  V Anti-Machiavel  de  Frédéric  II,  et  le  livre  de  H.  de 
Bouille,  Commentaires  politiques  et  historiques  sur  le 
Traité  du  prince  de  Machiavel,  et  sur  VAnti-Machiavd 
de  Frédéric  II,  Paris,  1827,  in-8«.  B. 

PRINCIPAL,  terme  universitaire.  F.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

PRINCIPAL,  nom  qu'on  donne,  surtout  en  Allemagne,  au 
jeu  le  plus  important  de  l'orgue.  On  en  fait  les  tuyaux 
en  étain  le  plus  pur,  et  on  en  place  les  plus  grands  en 
montre.  Cest  une  flûte  ouverte,  dont  le  timbre  varie 
selon  la  place  qu'elle  occupe.  Chaque  clavier  a  son  Prin- 
cipal, auquel  on  donne,  ainsi  ^'aux  jeux  qui  lui  sont 
annexés,  une  qualité  de  son  difl'érente  des  autres  jeux 
de  môme  espèce.  La  grandeur  de  l'orgue  se  détermine 
ordinairement  d'aprte  celle  du  Principal  :  ainsi,  un  orgue 
de  32  pieds  est  celui  qui  a  un  Principal  de  32  pieds. 
Quand  on  désigne  un  Principal  comme  ayant  24  pieds, 
cela  signifie  ou  que  le  jeu  ne  descend  que  jusqu'au  fa, 
ou  que  les  tuyaux  au-dessous  de  ce  fa  sont  plaicés  dans 
l'intérieur. 

PRINCIPE  (du  latin  principium,  commencement), 
vérité  générale  et  fondamentale  qui  sert  de  point  de  de- 
part  et  d'explication  à  d'autres  vérités.  Les  principes 
peuvent  être  considérés,  soit  séparément,  soit  simulta- 
nément, sous  un  double  point  de  vue  :  ou  en  eux-mômes, 
ou  dans  l'intelligence  qui  les  conçoit.  Ainsi,  c'est  un  prin- 
cipe que  tout  phénomène  a  une  cause  (principe  de  cau- 
salité); et  cela  doit  s'entendre,  et  du  fait  lui-même,  et 
de  la  connaissance  que  nous  en  avons.  Autre  exemple  en- 
core plus  concluant  :  Dieu  est  le  principe  de  tout  ce  qui 
est ,  et  rid6s  que  nous  avons  de  Dieu  est  le  principe  d'un 
grand  nombre  de  nos  connaissances.  Ce  sont  ces  deux 
points  de  vue  que  l'on  désignait  dans  l'École  sons  les 
noms  de  Principium  essen£  et  de  Principium  cognos- 
cendi.  Absolument,  et  en  lui-môme,  le  principe  est  tou- 
jours antérieur  à  ses  conséquences.  D  n'en  est  pas  de 
môme  de  la  connaissance  des  principes  ;  tantôt  elle  est 
antérieure,  et  tantôt  postérieure  :  antérieure ,  quand  il 
s'agit  des  vérités  prenuères  et  évidentes  par  elles-mêmes, 
des  axiomes  méti4)hyBiques,  logiques,  moraux,  mathé- 
matiques, que  l'entendement  conçoit  d'abord  et  néces- 
sairement dans  toute  leur  universalité;  postérieure,  lors- 
qu'il s'agit  des  lois  de  la  nature,  qu'il  ne  peut  découvrir 
qu'à  travers  les  faits  particuliers  dans  les({ueb  elles 
trouvent  leur  application  et  auxquels  elles  impriment 
une  forme  commune.  —  Dans  un  sens  un  peu  différent. 
Principe  se  dit  des  vérités  sur  lesquelles  s'appuie  la  dé- 
monstration {V.  DâlONSTRATlON  ,  RAISONNEMENT,  SYLLO- 
GISME ),  et  désigne  parfois  encore,  il  est  vrai ,  des  vérités 
évidentes  par  elles-mêmes,  mais  parfois  aussi  des  vérités 
qui ,  démontrées  par  un  raisonnement  antérieur,  servent 
à  leur  tour  de  point  de  départ  à  une  démonstration  nou- 
velle. B— B. 

panvciPB  (Pétition  de),  sophisme  qui  consiste  à  sup- 
poser prouvé  ce  qui  est  en  question ,  ou  à  définir  un 
objet  par  le  mot  qui  a  besoin  d'être  défini.  Par  exemple  : 
«  Pourquoi  l'opium  fait^-il  dormir  T  —  Parce  qu'il  a  une 
vertu  dormitive;  »  ou  cet  autre  pris  également  dans  Mo- 
lière :  «  Je  touche  au  but  du  premier  coup,  et  je  vous 
apprbods  que  votre  fille  est  muette.  —  Oui  ;  mais  je  vou- 
'  drais  bien  que  vous  puissiex  me  di/%  d'où  cela  vient.  — 


PRI 


1491 


PRI 


n  n*est  rien  de  plus  aisé  ;  cela  vient  de  cê  qu'elle  a  perdu 
ia  parole.  —  Fort  bien;  mais  la  cause,  s'il  tous  plaît, 
qui  fait  qu'elle  a  perdu  la  parole?  —  Tous  dos  meilleurs 
auteurs  tous  diront  que  c'est  l'empêchement  de  l'action 
de  sm  langue.  »  Le  remède  à  ce  sophisme  est  la  définition 
claire  et  précise  de  tous  les  termes.  H.  D. 

PRISE  A  PARTIE,  action  civile  dirigée  contre  un  juge 
ou  un  greffier,  pour  le  faire  déclarer  responsable  des  torts 
qu*il  a  causés  dans  Texercice  de  ses  fonctions,  dans  les 
cas  de  déni  de  Justice,  dol,  fraude,  concussion,  etc.  La 
prise  à  partie  contre  les  juges  de  paix,  les  juges  des  tri- 
bunaux de  commerce  ou  de  l'*  instance,  les  conseillers 
de  Cour  impériale,  est  portée  à  la  Cour  du  ressort;  la 
prise  à  partie  contre  une  Goilr  d'assises  ou  une  Cour 
d'appel  est  portée  à  la  Haute  Cour.  Aucun  juge  ne  peut 
être  pris  à  partie  sans  la  permission  préalable  du  tribunal 
devant  lequel  la  cause  sera  portée;  une  autre  section  ou 
une  autre  Cour  d'appel  que  celle  qui  aura  autorisé  la 
partie  juge  sur  le  fond.  Si  le  demandeur  est  débouté,  il 
est  condamné  à  une  amende  de  300  fr. ,  au  moins,  sans 
préjudice  des  dommages-intérêts ,  s'il  y  a  lieu. 

PRiSB  d'bad  ,  action  de  détourner  d'un  cours  d'eau  gé- 
néral une  certaine  quantité  d'eau  pour  les  besoins  de 
l'agriculture  ou  de  l'industrie.  Les  prises  d'eau  se  règlent 
par  titres ,  par  la  jouissance,  et  aussi  par  des  considéra- 
tions d'utilité  publique. 

pusB  DE  CORPS,  action  de  saisir  un  homme  au  corps 
pour  quelque  affaire  criminelle,  en  vertu  d'un  mandat  du 
juge  ;  —  action  de  mettre  la  main  au  nom  de  la  loi  sur  un 
débiteur,  pour  le  forcer  à  payer.  V.  Contrainte  par 

CORPS. 

prise  o'HABrr,  acte  de  revêtir  l'habit  religieux,  et  céré- 
monie dans  laquelle  s'accomplit  cette  consécration. 

PRISÉE,^  action  d'apprécier,  de  mettre  à  prix.  C'est, 
en  particulier,  le  nom  qu'on  donne  à  un  état  de  lieux 
d'usine,  et  au  ptii  que  les  conunissaires-priseurs  mettent 
aux  choses  inventoriées.  V,  Estimation. 

PRISES  (Conseil  des).  V.  Conseil  des  prises,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Bwgraphie  et  d'Histoire. 

PRISMATIQUES  (Moulures),  moulures  affectant  la 
forme  d'un  prisme.  (Test  un  ornement  de  l'architecture 
romano-byzantine,  qu'on  rencontre  assez  fréquenunent 
dans  les  archivoltes  des  portails, 

PRISONS  (du  bas  latin  prisio,  corruption  deprehensio, 
action  d'arrêter),  lieux  où  l'on  enferme  les  accusés  et  les 
condamnés.  On  en  distingue  aujourd'hui  cinq  espèces 
différentes.  Les  Maisons  de  police  municipale,  établies 
dans  chaque  arrondissement  de  juge  de  paix,  et  dans 
les  villes  où  il  y  a  une  maison  d'arrêt,  sont  desti- 
nées à  recevoir  les  individus  condamnés  à  l'emprisonne- 
ment par  les  tribunaux  de  simple  police;  dans  l'usage,  les 
gardes  nationaux  y  subissent  aussi  les  peines  dont  lisant 
été  frappés.  — Lss  Maisons  dairét ,  établies  dans  chaque 
arrondissement ,  revivent  :  1®  les  inculpés,  contre  les- 
quels une  information  est  dirigée;  2o  les  prévenus,  jus- 
qu'à ce  que  le  tribunal  correctionnel  ou  la  Chambre  des 
mises  en  accusation  ait  statué  sur  leur  sort  ;  3<*  les  con- 
damnés à  un  emprisonnement  oui  ne  dépasse  point  un 
an.  —  Les  Maisons  de  justice,  placées  au  chef-lieu  judi- 
ciaire de  chaque  département,  reçoivent  :  1**  les  individus 
qui  se  pourvoient  en  appel  devant  les  tribunaux  de  chef- 
lieu  ou  devant  les  Cours  impériales;  2®  les  individus  con- 
damnés par  le  tribunal  ou  la  Cour  à  un  emprisonnement 
de  très-courte  durée  ;  3°  les  individus  sous  le  poids  d'une 
ordonnance  de  prise  de  corps  et  renvoyés  devant  la  Cour 
d'assises  en  attendant  leur  jugement.  —  Les  Maisons  de 
correction  reçoivent  les  enfants  enfermés  en  vertu  de  la 
puissance  paternelle,  et  ceux  condamnés  d'après  les 
art  66  et  67  du  Code  pénal.  Elles  sont  peu  nombreuses 
en  France,  et  ordinairement  les  maisons  d'arrêt  en  tien- 
nent lieu.  —  Les  Maisons  de  détention  ou  de  force,  dites 
aussi  MeUsons  centrales,  reçoivent  les  individus  con- 
damnas correctionnellement  à  plus  d'un  an  de  prison, 
ceux  qui  ont  été  condamnés  par  les  Cours  d'assises  à  la 
réclusion,  les  femmes  condamnées  aux  travaux  forcés,  les 
condamnés  aux  travaux  forcés  &gés  de  plus  de  60  ans.  Il 
y  en  a  20  en  France  :  12  de  ces  maisons  ne  renferment 
que  des  hommes,  6  sont  occupées  par  des  femmes,  et  2 
(  Clairvaux  et  Limoges)  sont  mixtes. — Quant  aux  Baignes, 
leur  suppression  a  été  décrétée,  et  cette  mesure  a  reçu  en 
grande  partie  son  exécution.  V.  Bagne. 

Les  différentes  espèces  de  prisons  répondent  aux  diffé- 
rents genres  de  peines  établies  par  les  lois  :  mais,  en  ce 
^^  concerne  les  Maisons  d'arrêt  et  les  Maisons  de  jus- 
tice, la  spécialité  de  leur  destination  n'est  pas  toujours 
observée,  l'Administration  pouvant  avoir  des  motifs  pour 


transférer  les  prisonniers  d'une  maison  dans  une  autre. 
En  beaucoup  de  chefs-lieux  de  département,  une  seule 
prison  sert  à  la  fois  de«  Maison  d'arrêt  et  de  Maison  de 
justice.  C'est  l'Administration  qui  est  chargée  de  l'entre- 
tien des  bâtiments,  de  la  police  intérieure,  de  la  nomi- 
nation des  employés,  et  de  l'exécution  des  peines  pronon- 
cées. Les  magistrats  veillent  sur  la  liberté  individuelle, 
et  s'assurent  que  les  prisonniers  ne  sont  pas  détenus 
illégalement  ;  mais  ils  ne  peuvent  s'immiscer  dans  l'éco- 
nomie réglementaire  des  prisons.  Les  permissions  de 
communiquer  avec  les  prisonniers  sont  accordées  :  pour 
un  inculpé,  par  le  ju^  chargé  de  l'information  ;  pour  an 
prévenu,  par  le  ministère  public;  pour  un  condamné, 
par  l'Administration. 

La  prison ,  a':  $eu  d'agir  avec  efficacité  sur  l'esprit  de 
ceux  qui  la  subissent,  ne  fait  le  plus  souvent  que  les  per- 
vertir davantage.  Dans  les  Maisons  d'arrêt  et  de  justice, 
les  prévenus  et  les  condamnés,  les  innocents  et  les  cou- 
pables, ont  des  communications  et  des  conversations  fré- 
quentes. Le  travail  n'y  est  pas  et  ne  peut  pas  être  orga- 
nisé d'une  manière  suivie  :  les  prévenus  ne  sauraient 
être  assujettis  aux  labeurs  assidus  et  réguliers  auxquels 
les  condaînnés  doivent  se  soumettre.  Le  régime  des  Mai- 
sons de  détention  est  plus  régulier;  la  discipline  y  est 
mieux  entendue.  Les  détenus  sont  occupés  à  divers  tra- 
vaux, dont  le  salaire,  proportionné  à  la  nature  de  la  con- 
damnation ,  diminue  à  mesure  qu'elle  s'accroît  en  gra- 
vité. La  moitié  du  salaire  est  pour  les  détenus;  une  partie 
leur  est  délivrée,  dans  l'intârieur  de  la  prison,  sous  le 
nom  de  deniers  de  poehe^  et  peut  être  dépensée  ;  le  reste 
forme  une  masse  de  réserve  qu'ils  retrouvent  à  l'époque 
de  leur  libération.  Le  port  d'un  costume  pénal  est  obli- 
gatoire pour  eux,  aussi  bien  que  le  travail.  On  les  punit 
en  les  mettant  au  pain  et  h  ruau ,  en  leur  infligeant  la 
cellule  ou  le  cachot,  et,  en  cas  de  violences,  les  fers. 
Pour  les  détenues,  la  surveillance  est  exercée  par  des 
femmes,  laïques  ou  religieuses.  Un  aumônier  est  attaché 
à  chaque  pnson  :  il  dit  la  messe  les  dimanches  et  fêtes, 
fait  une  instruction  religieuse  une  fois  par  semaine  au 
moins,  et  enseigne  le  catéchisme  aux  jeunes  détenus.  Il  y 
a  des  instituteurs  dans  toutes  les  maisons  où  la  popula- 
tion est  assez  considérable  pour  appeler  cette  mesure. 

Le  régime  des  prisons  a  fréquemment  varié.  Dans 
l'Antiquité,  et  bien  longtemps  encore  dans  les  temps  mo- 
dernes, la  prison  a  été  considérée,  non  comme  un  moyen 
de  correction,  mais  comme  un  lieu  de  supplice  et  une 
vengeance  :  les  prisonniers  étaient  enfermés  dans  un  es- 
pace étroit,  privés  d'air  et  d'exercice,  et  livrés  à  la  bru- 
talité des  geôliers.  Avec  le  christianisme,  on  commença 
de  s'occuper  d'améliorer  leur  condition.  Le  concile  de 
Nicée,  en  325,  chargea  les  procureurs  des  pauvres  da 
visiter  les  détenus,  et  de  travailler  à  leur  délivrance.  Ec 
1557,  Henri  II,  considérant  qup  les  prisons,  «  qui  ont  été 
faites  pour  la  garde  des  prisonniers,  leur  apportaient  plus 
grande  peine  qu'ils  n'avaient  mérité,  »  autorisa  les  ma- 
gistrats (la  loi  leur  en  fait  aujourd'hui  un  devoir)  à  veiller 
par  eux-mêmes  à  ce  qu'ils  y  dissent  traités  humaine- 
ment ;  mesure  aui.  n'eut  pas  grande  efficacité.  Une  or- 
donnance de  1560  proscrivit  les  cachots  souterrains,  en 
défendant  de  loger  les  détenus  au-dessous  du  rez-de- 
chaussée.  La  nourriture  des  prisonniers  était  générale- 
ment compilée  de  pain  et  d'eau.  Un  arrêt  du  18  juillet 
1717  déci(hfe  «  qu'on  fournirait  tous  les  quinze  jours  de  la 
paille  fraîche  à  ceux  qui  étaient  enfermés  dans  des  car 
chots  noirs,  et  tous  les  mois  à  ceux  qui  se  trouvaient 
dans  des  cachots  clairs.  »  H  y  avut  alors  différentes 
espèces  de  prisons  :  les  prisons  ordinaires,  servant  aux 
individus  qui  n'appartenaient  à  aucune  juridiction  spé- 
ciale; les  prisons  d'Etat,  où  l'on  renfermait  ceux  qui 
avaient  conspiré  contre  la  sûreté  de  l'État,  et  plus  sou- 
vent les  malheureux  sacrifiés  à  la  haine  ou  à  l'intérêt  de 
personnages  puissants;  les  ^snns  des  officialités  (V.  ce 
mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  ffEiS" 
totra),  les  prisons  militaires,  et  les  prisons  pour  dettes.  Au 
xvn"  siècle.  S*  Charles  Borromée  et  S'  Vincent  de  Paul , 
inspirés  par  la  religion ,  se  consacrèrent  au  soulagement 
des  captifs,  et,  au  xvui«,  J.  Howard,  Beccaria,  Bentham, 
au  nom  de  la  philanthropie,  poursuivirent  la  réforme  des 
prisons.  Notre  siècle  est  entré  avec  ardeur  dans  la  même 
voie,  et  a  tenté,  pour  l'amélioration  du  sort  des  prison- 
niers, toutes  sortes  de  moyens,  dont  le  plus  célèbre,  le 
système  cellulaire,  organisé  en  France  en  1847,  est  au- 
jourd'hui presque  complètement  abandonné  dans  tous 
les  pays  (  K.  PéNBZNBuiRB  —  Système).  Après  la  Révolu- 
tion française  de  1848,  le  gouvernement  provisoire  sup- 
prima, par  décret  du  4  mars,  le  travail  dans  les  prisena* 


PRI 


1492 


PRO 


qui  était  QD«  loi  depuis  1819;  cette  mesure,  inspirée  par 
nne  préoccupation  trop  lire  du  préjudice  causé  au  tra- 
▼ail  libre  par  le  travail  forcé,  portait  atteinte  aux  textes 
du  Gode  pénal  qui  avaient  imposé  le  travail  comme  une 
des  conséquences  de  la  peine;  la  cessation  du  travail 
exerça  les  plus  funestes  effets  sur  la  santé  des  condam- 
nés. II  fallut  le  rétablir  par  une  loi  du  9  Janvier  1849, 
modifiée  en  certains  points  dé  détail  par  décret  du  25  fé- 
vrier 185^.  Un  arrêté  du  ministre  de  Tlntérieur,  du 
25  mars  1854,  a  organisé  un  système  de  récompenses  et 
de  panitions  qui  a  pour  base  Taugmentation  ou  la  réduc- 
tion des  profits  du  travail.  V,  Howard,  Dm  prisons  et  des 
maisons  de  force  (en  anglais),  1777,  in-4o,  trad.  en  fran- 
çais par  H"*  de  Keralio,  1788,  S  vol.  in-8«  ;  Villermé,  Des 
prisons  telles  qu'elles  sont  et  telles  (lu'elUs  deurcùent  être, 
18^,  in-8*;  Danjou,  Des  prisons  et  de  leur  régime,  1821, 
in-8®;  Julius,  Leçons  sur  les  prisons,  trad.  dePallemand, 
1831, 2  vol.  in-8o;  Appert,  Bagnes,  prisons  et  criminels, 
1836,  4  vol.  in-8o;  Horeau  (Christophe),  De  Vétat  actuel 
des  prisons  en  France,  1837,  in-8«,  et  Code  des  prisons, 
ou  HttcueH  des  lois  et  ordonnances  concernant  leur  ré^ 
gime  intérieur,  économique  et  disciplinaire,  de  1670  à 
1856,  S  vol.  in-8<^;  Léon  Faucher,  De  la  réforme  des  pri- 
sons, 1838,  in-8o;  Watteville,  Du  travail  dans  les  prn 
sons  et  les  établissements  de  bienfaisance^  1850,br.  in-12  ; 
Perrot,  Statistique  des  prisons  et  établissements  péniten- 
tiaires, 1855-56, 2  vol.  in-4o.  B. 

PRIVATIF  ou  PARTIGCLE  PRIVATIVE,  nom  que  l'on 
donne,  en  Grammaire,  à  certains  préfixes  qui  indiquent 
que  le  mot  où  ils  entrent  comme  partie  composante  perd 
tout  ou  partie  de  la  signification  du  radical.  Telle  est  la 
particule  a  en  grec  (boulé,  conseil;  abotilos,  irréfléchi  1; 
m  en  latin  (munia,  ch&rges;  tm-mufiM,  exempt  ne 
charges)  ;  mé  en  français  (prendre,  se  méprendre;  con- 
naître, méconnaître);  fin  en  anglais  (aole,  capable; 
unable,  incapable).  Certaines  prépositions  Jouent  le  rôle 
de  particules  inséparables  :  ainsi ,  apo  en  grec  {phémi , 
Je  dis,  J*aflfirme;  apophémi.  Je  nie.  Je  me  dédis);  de  en 
latin  [color,  couleur;  decolor,  privé  de  sa  couleur);  dé 
en  français  (d^uvrir,  cféfaire,  déposséder).  F. 

PRIVILÈGE  (du  latin  privata  lex,  loi  privée),  nom 
que  les  anciens  Romains  donnaient  à  une  loi  qui  n'était 
pas  d'un  intérêt  général ,  mais  qui  ne  concernait  que  des 
individus.  On  l'applique  maintenant  :  1**  à  la  faculté  con- 
cédée à  un  individu  ou  à  une  corporation  de  faire  une 
chose  ou  de  jouir  d'un  avantage  qui  n'est  pas  de  droit 
commun  ;  2^  à  l'acte  qui  contient  cette  concession  ;  3®  à 
tout  avantage,  droit  on  prérogative  de  certains  emplois  ou 
états. 

pRiviLiGB ,  autorisation  crue  donnait  autrefois  le  roi  de 
publier  un  livre,  et  garantie  de  propriété  donnée  à  l'au- 
teur ou  à  l'éditeur. 

PRiviLéGB,  en  termes  de  Jurisprudence,  droit  que  donne 
la  qualité  de  la  créance  à  un  créancier  qui  en  est  investi 
d*ètre  préféré  aux  autres  créanciers,  même  hypothécaires 
(art.  2095,  Code  NapolX  II  dérive  donc,  non  de  la  con- 
vention, mais  du  fait  ^  où  est  née  la  créance.  Entre  les 
créanciers  privilégiés,  le  rang  est  déterminé,  non  par  la 
date,  mais  par  la  cause  de  la  créance.  On  distingue  d'abord  : 

I.  Les  privilèges  généraux  sur  les  meitbles.  — Voici  dans 

?[uel  ordre  ils  se  présentent  :  1*  frais  de  justice;  2»  frais 
unéraires;  3*  frais  quelconques  de  dernière  maladie; 
4^  salaires  des  gens  de  service  pour  Tannée  échue  et  ce 
qui  est  dû  pour  l'année  courante;  5*  fournitures  de  sub- 
sistances faites  pendant  les  six  derniers  mois  par  les 
marchands  en  détail,  boulangers,  bouchers  et  autres,  et 
pendant  la  dernière  année  par  les  maîtres  de  pension  et 
marchands  en  gros. 

n.  Les  privilèges  spéciaux  sur  certaws  meubles.  — 
Ce  sont  :  1<*  les  levers  et  fermages  des  immeubles,  sur  les 
fruits  de  la  récolte  de  l'année,  le  prix  de  tout  ce  qui 
garnit  la  maison  louée  ou  la  ferme,  et  tout  ce  qui  sert  à 
l'exploitation  de  la  ferme  ;  2«  les  sommes  dues  pour  se- 
mences, frais  de  récolte  et  ustensiles;  3®  la  créance  sur 
le  gage  dont  le  créancier  est  saisi  ;  4<^  les  frais  faits  pour 
la  conservation  de  la  chose;  5^  le  prix  d'effets  mobiliers 
non  payés,  sur  les  objets  vendus,  tant  qu'ils  sont  en  la 

{>ossesâon  du  débiteur,  et  suivant  diverses  conditions  que 
a  loi  spécifie;  6*  les  fournitures  des  aubergistes  sur  les 
^ets  des  vovageurs  transportés  dans  l'auberge;  7*  en 
fkveur  du  voiturier,  les  frais  de  voiture  et  les  dépenses 
accessoires  sur  la  chose  voiturée;  8<*  les  créances  résul- 
tant d'abus  et  de  prévarications  commis  par  les  fonction- 
D^res  publics  dans  l'exerdce  de  leurs  fonctions,  sur  les 
fonds  de  leur  cautionnement. 
IQ.  Les  privilèges  spéciaux  sur  certains  immeubles. 


—  Ainsi  :  1*  le  privilège  accordé  an  vendeur  sor  rim- 
meuble  vendu  pour  le  pavement  du  prix  ;  2®  celui  des 
cohéritiers,  sur  les  immeubles  de  la  succession,  pour  la 
g^ffantie  des  partages  faits  entre  eux  et  des  soultes  ou  re- 
tours de  lots;  3*  le  privilège  des  architectes,  entrepre- 
neurs, maçons  et  autres  ouvriers,  sur  let  b&timents, 
canaux  ou  ouvrages  quelconques  qu'ils  ont  édifiés,  re- 
construits ou  réparés;  ce  qui  ne  s'entend  que  des  ouvrages 
d'art,  et  non  pas  en  général  des  travaux  d^agricnlturet 
cependant  la  foi  du  17  juillet  1856  a  fait  une  exception  à 
cet  égard  pour  le  drainage  :  ce  privilège  des  entrepre- 
neurs est  soumis  à  des  conditions  spéciales.  —  De  ces 
trois  privilèges  en  découlent  subsidiairement  deux  autres 
nui  n*en  sont  à  vrai  dire  que  la  conséquence  :  1*  celai 
des  prêteurs  de  deniers  ayant  servi  soit  à  payer  Tacqui* 
sition  d'un  immeuble,  soit  à  rembourser  des  ouvriers;  Il 
vient  alors  au  lieu  du  privilège  appartenant  aux  créan- 
ciers désintéressés;  la  loi  en  subordonne  l'existence  à  la 
constatation  autiientiqne  de  la  réalité;  2<^  le  privilège  des 
cessionnaires  de  créances  privilégiées  qui  viennent  au  lieu 
et  place  de  leurs  cédants. 

IV.  Les  privUéges  qui  s'étmdent  sur  les  meubles  et  sur 
les  immeubles,  —  Ge  sont  tous  ceux  du  S  ^"^  ^  cause  de 
leur  faveur  spéciale.  Il  existe  encore  d'autres  privilèges 
établis  soit  par  le  Code  de  Commerce  dans  l'intérêt  des 
commissionnaires,  pour  la  sûreté  des  contrats  mari- 
times, etc.,  soit  par  des  lois  spéciales  en  matière  de 
mines,  marais,  travaux  publics,  marchés  de  fournitures. 

Le  Trésor  public  jouit  aussi  de  certains  privilèges, 
pour  le  recouvrement  des  contributions  directes,  sur  les 
fruits  et  revenus  des  immeubles,  et  sur  la  généridité  des 
meubles  ;  le  premier  assure  le  recouvrement  de  Timpùt 
foncier,  le  second  celui  de  la  contribution  personnelle  et 
mobilière.  Il  en  est  d'autres  pour  assurer  le  payement 
des  droits  de  timbre,  des  mutations  par  décès,  des  droits 
de  douane  et  des  contributions  indirectes,  les  frais  de 
justice  criminelle  et  les  adjudications  administratives. 

Quant  à  la  classification  de  ces  divers  privilèges,  c'est- 
à-dire  au  rang  qu'il  faut  leur  attribuer  respectivement, 
elle  a  soulevé  tant  de  difficultés  dans  la  tiiéorie  et  dans 
l'application,  qu'elle  ne  peut  être  indiquée  que  dans  les 
tnutés  spéciaux. 

Les  privilèges  sur  les  meubles  n'existent  qu*aiitant  que 
les  meubles  sont  en  la  possession  du  débiteur.  Les  pri- 
vilèges sur  les  immeubles  ne  se  conservent  que  par  leur 
inscription.  V,  Battur,  Traité  des  Privilèges  et  Bvpo- 
thàques,  2*  édit..  1823,  4  vol.  in-8-;  Favard  de  Langlade, 
Traité  des  Primlèges  et  Hypothèques,  1812,  !n-8*{  Heiw 
vieu.  Résumé  de  jurisprudence  sur  les  Privilèges  et  By- 
pothiques,^  édit.,  1846,  in-4«;  Valette.  De  l'effet  ordinaire 
de  VInscription  en  matière  de  Privilèges  sur  les  immeu- 
blés,  2«  édit.,  1843,  in-8«;  Troplong,  Commentaire  du 
titre  XVIII  du  livre  ïll  du  Code  civil.  Des  Privilèges  et 
Hypothèques,  5«  édit.,  4  vol.  in-8*;  Mourlon,  Examen 
critique  et  pratique  du  CommentcUre  de  M.  T^roplong  sur 
les  Privilèges,  1855, 2  vol.  in-8";  Taillefer,  Des  PrivUéges 
sur  les  meubles,  1852,  in-8*.  B.  d'E. 

PRIVILÉGIÉES  (Ghisses),  chisses  d'une  nation  dont  la 
supériorité  sociale  et  politique  est  consacrée  par  les  lois, 
et  qui ,  pourvues  de  prérogatives  exceptionnelles,  sont 
encore  exonérées  de  charges  ou  de  prohibitions  qui  pèsent 
sur  les  autres  citoyens.  Telles  étaient  en  I^rance,  avant 
1789,  la  noblesse  et  le  clergé. 

PRIVILÉGIÉS  (  Gas  ].    Y.  Gas  roiviLfoi^s. 

PRIX,  en  termes  d'Économie  politique,,  valeur  d'une 
chose  qui  est  dans  le  commerce.  On  nomme  prix  eow- 
rant  le  prix  auquel  en  chaque  lieu  une  chose  trouve  des 
acquéreurs.  Par  rapport  à  la  monnaie,  le  prix  est  la  me- 
sure de  la  valeur.  Si  l'on  achète  un  produit  avec  la  mon- 
naie que  l'on  tire  de  la  vente  d'un  autre  produit ,  ce  qu'il 
coûte  est  son  prix  relatif;  si  on  l'achète  avec  ce  que  l'on 
paye  pour  ses  frais  de  production ,  c'est  son  prix  réel  ou 
originaire.  Les  variations  dans  le  prix  relatif  changent  la 
richesse  réciproque  des  possesseurs  des  différents  pro- 
duits :  ainsi ,  quand  le  sucre  renchérit  par  rapport  an 
prix  des  autres  produits,  les  propriétaires  de  sucre  sont 
plus  riches,  mais  les  propriétaires  des  autres  produits 
sont  plus  pauvres  d'autant.  Les  variations  dans  le  prix 
réel  ou  originaire  diminuent  les  richesses  des  nations 
quand  le  prix  hausse,  et  les  accroissent  quand  11  baisse. 

PRIX  D&BNNAUX.  V*  notTo  Dictionnmre  de  Biogra^iàe 
et  d'Histoire, 

PROAUUON,  mot  qui  désignait,  ches  les  anciens  Grecs, 
le  vestibule  d'un  éduce  quelconque,  et  auni  un  pré- 
lude de  flûte. 

PROBABILISME ,  en  termes  de  Théologie,  système  de 


PRO 


1493 


PRO 


érection  moralot  fondée  sur  ce  principe  qu*entre  deux 
opinions  probables,  même  à  des  defprés  différents,  il  est 
permis  de  choisir  en  se  dirigeant  soit  par  la  raison,  soit 
par  Tautorité.  La  conscience  et  la  loi  religieuse  fixent  les 
grandes  vérités,  les  principes  fondamentaux  de  la  mo- 
rale ;  mais  il  est  des  circonstances  particulières  que  la 
loi  ne  peut  prévoir,  et  dont  la  complication  est  pour  la 
conscience,  môme  la  plus  droite,  une  source  d'embarras 
et  d'hésitations  ;  c'est  alors  que  le  Probabilisme  trouve 
ion  application.  «  Sans  doute,  à  côté  de  l'usage  légitime,  il 
y  a  Tabus  ;  à  force  de  disputer  sur  les  règles  de  la  morale 
et  sur  les  actes  humains,  on  peut  obscurcir  ce  qui  était 
clair,  absoudre  des  actions  coupables,  incriminer  des 
choses  indifférentes,  substituer  aux  autorités  les  plus 
graves  l'opinion  d'un  docteur.  »  —  C'est  là  le  Probabi- 
lisme auquel  Pascal  s'est  attaqué  dans  les  Provinciales. 
—  «  Mais  si  l'on  se  renferme  dans  de  Justes  limites,  si 
l'on  exige  d'abord  qu'une  opinion  vraiment  probable  ne 
soit  contraire  ni  à  l'Écriture  Sainte,  ni  aux  décisions  de 
l'Église,  ni  à  une  raison  évidente,  ni  au  sentiment 
commun  des  Écoles;  si  l'on  se  tient  prudemment  dans 
une  ligne  moyenne,  également  éloigné  d'un  rigorisme 
qui  désespère  et  d'un  relâchement  qui  corrompt,  on 
n'est  pas  i^préhensible,  et  le  Probabilisme,  entendu  dans 
ce  sens,  n'a  pas  été  et  ne  sera  jamais  condamné  par 
l'Église.  L'Église  s'est  contentée  d'en  réprimer  les  abus, 
et  n'en  a  interdit  l'usage  que  pour  certains  cas  réservés, 
où  il  y  a  obligation  de  n'agir  qu'avec  des  moyens  sûrs  ; 
notamment  pour  les  Juges  dans  leurs  sentences,  pour^es 
médecins  dans  leurs  remèdes,  pour  les  prêtres  dans  l'ad- 
ministration des  sacrements,  ou  bien  encore  quand  il 
s'agit  d'empêcher  le  dommage  du  prochain.  »  (  Essai  sur 
la  Méthode  dans  les  sciences  théologiques,  par  M.  l'abbé 
fiourquard.) 

PROBABILITÉ  (du latin  proba,  preuve,  et  habilitas, 
disposition),  apparence  de  vérité.  La  probabilité  a  des 
degrés,  la  certitude  n'en  a  pas. 

,  PROBATION  (du  latin  probare,  prouver),  temps  d'é- 
preuve qui  précède  le  noviciat  des  religieux,  et  quelque- 
fois le  noviciat  lui-même. 

PROBATIQUE  (Piscine).  V.  Pisqne. 

PROBLÉMATIQUE  (Jugement).  V.  Apodictiqub. 

PROBLÈME  (du  grec  proballein ,  Jeter  en  avant,  pro- 
poser), question  à  résoudre,  ou  bien,  question  sur  la- 
quelle on  n*a  que  des  données  contradictoires,  ou  qui  est 
entourée  d'obscurité. 

PROCÉDURE  (du  latin  procedere,  marcher),  ensemble 
des  règles  h.  suivre,  des  actes  à  faire  pour  obtenir  une 
décision  Judiciaire,  ou,  dans  certains  cas,  le  moyen  de 
parvenir  amiablement  au  règlement  de  certains  droits. 
On  distingue  la  Procédure  judiciaire  et  la  Procédure 
extrajudiciairê,  selon  que  la  question  en  litige  est  ou 
n'est  pas  soumise  au  jugement  des  tribunaux.  La  Procé- 
dure judiciaire  se  divise  en  Procédure  civile^  quand  elle 
tend  à  obtenir  une  décision  de  la  Juridiction  civile;  Pro" 
cédure  commerciale,  auand  elle  procède  devant  les  tri- 
bunaux de  commercé  (les  règles  de  ces  deux  Juridictions 
sont  réunies  dans  le  Code  de  Procédure  civile);  Procédure 
criminelle,  réglementée  par  le  Code  d^lnstruction  crimi- 
nelle^ et  Procédure  ofiministrative,  qui  se  trouve  fixée 
par  des  lois  différentes  non  codifia. 

PROciouRB  aviLB  (Codo  de).  L'instruction  des  affaires 
civiles  était  réglementée,  avant  1789,  par  l'Ordonnance 
de  1667,  qui  avait  réalisé  d'énormes  progrès  sur  la  lé- 
gislation antérieure.  Quelques  obscurités  de  termes, 
l'absence  de  netteté  dans  ses  classifications,  faisaient  dé- 
sirer sa  réforme.  L'Assemblée  constituante  l'avait  dé- 
crétée par  la  loi  du  24  août  1790,  art.  2.  Le  Décret  du 
3  brumaire  an  ii  (24  octobre  4793),  promulgué  par  la 
Convention,  vint,  sous  prétexte  de  simplification,  jeter 
le  plus  grand  désordre  dans  cette  matière,  et  hâta  la 
nomination  d'une  commission  chargée  de  l'élaboration 
d'un  Code.  La  discussion,  ouverte  le  30  germinal  an  xii 
(19  avril  1803),  fut  terminée,  après  23  séances^  le  29  mars 
4806.  Notre  Code  de  Procédure  civile  se  compose  de 
1,042  articles.  La  première  partie,  intitulée  Procédure 
devant  les  tribunaux,  comprend  l'instruction  des  affaires 
devant  les  Justices  de  paix,  les  tribunaux  inférieurs  et  les 
Cours  d'appel,  ainsi  que  les  voies  extraordinaires  pour 
attaquer  les  Jugements,  et  les  moyens  de  les  exécuter.  La 
secende  est  consacrée  à  la  réglementation  de  procédures 
diverses,  tant  celles  relatives  à  l'ouverture  d'une  succes- 
sion que  celles  relatives  aux  autorisations,  séparations, 
interdictions,  etc. 

Le  Code  de  Procédure  civile  n'a  subi  que  fort  peu  de 
Bodiflcatiooa  :  les  plus  importantes  résultent  des  lois  des 


25  mai  1838, 11  avril  1838,  3  mars  1840  et  2  luin  184i. 
Sa  dernière  révision  officielle  est  du  8  octobre  1842. 
F.  Boucher,  Traité  de  la  Procédure  çivUe  et  des  tribu- 
naux de  commerce,  1808,  in-4*;  Lepage,  Nouveau  traité 
et  style  de  la  Procédure  cinUe,  1811,  in-4°;  Locré,  Esprit 
du  Code  de  Procédure  civile,  1816,  5  vol.  in-8';  Auger, 
Traité  élémentaire  de  Procédure  civile,  1828,2  vol.  in-S**: 
Demiau,  Explication  du  Code  de  Procédure  civile,  1828, 
in-8<^;  Thomines-Desmazures,  Commentaire  sur  le  Code 
de  Procédure  civile,  1832,  2  vol.  in-4^;  Rauter,  Cours  de 
Procédure  civile,  1834,  in-8o  ;  Chardon,  Béformes  dési- 
rables sur  la  Procédure,  1837,  in-8'*;  Chauveau,  Dtc- 
tionnaire  général  et  complet  de  Procédure,  1837,  in-8°; 
Boncenne  et  Bourbeau,  Théorie  de  la  Procédure  civile, 
2«édit.,  1837-1844,  6  vol.  in-8«»;  J.  Berriat  Saint-Prix, 
Cours  de  Procédure  civile  et  criminelle,  1835-56,  3  vol. 
in -8^;  Pigeau,  la  Procédure  civile  des  tribunaux  de 
France,  édit.  de  Crivelli,  1838, 2  vol.  in-4**,  et  Introduc- 
tion d  la  Procédure  civile,  édit.  de  Poncclet,  1841,  in-i8; 
Cardon  et  Péchard,  Formulatre  général,  ou  Modèles 
d'actes  duCode de  Procédure  civile,  5« édit,  1842,  2  vol. 
în-8**;  P.  Bonnin,  Commentaire  de  la  Procédure  civile, 
1845,  in-8**;  Delzers,  Cours  de  Procédure  civile  et  crimi- 
nelle, 1844-61,  2  vol.  in-8®;  Rodière,  Cours  de  Procédure 
civile,  1850, 3  vol.  in-8°;  Rogron,  Code  de  Procédure  civile 
eocpliquéj  9*  édit.,  1853,  2  vol.  in-8°  ;  Bonnier,  Éléments 
de  Procédure  civile,  1853,  in-8o;  Chauveau  et  Glandaz, 
Formulaire  général  et  complet,  Traité  pratique  de  Pro- 
cédure civile  et  commerciale,  1853, 2  vol.  in-8o;  Jeannin, 
Formulaire  complet  de  Procédure  civile  et  commerciale, 

1854,  in-8'';  Carré  et  Chauveau,  les  Lois  de  la  Procédure 
civile,  1854-55,  7  tomes  en  8  vol.  in-8<*,  et  la  Procédure 
administrative,  1  vol.  in-8°;  Seligman,  Quelles  sont  les 
réformes  dont  notre  Procédure  civUe  est  susceptible? 

1855,  in-8<'  ;  Gilbert,  Code  de  Procédure  annoté  de  Sirey, 
1857,  in-8^;  Mourlon,  Répétitions  écrites  sur  le  Code  de 
Procédure  civile,  1857-58,  in-8<*;  Bordeaux,  Philosophie  de 
la  Procédure  civUe.  1857,  in-8^;  Boitard  et  Colmet-Daage, 
Leçons  sur  toutes  tes  parties  du  Code  de  Procédure  ci-' 
vt7e,  1858,  2  vol.  in-8<*;  Biocbe,  Dictionnaire  de  Procé- 
dure civile  et  commerciale,  1858,  6  vol.  in-8'*;  le  même. 
Formulaire  de  Procédure  civile  et  commerciale,  1858, 
in-8<^,  et  Journal  de  Procédure  civile  et  commerciale,  qui 
se  publie  depuis  1835.  R.  d'E. 

PROCÉLEUSMATIQOE  (du  grec  prokéleuéin,  exciter 
d'avance),  pied  de  la  versification  grecque  et  latine,  ainsi 
appelé  peut-être  parce  qu  on  l'employait  dans  les  chan- 
sons piur  lesquelles  les  rameurs  s'excitaient  au  travail.  U 
est  composé  de  4  brèves,  et,  par  conséquent,  équivaut 
soit  au  spondée,  soit  au  dactyle,  soit  à  l'anapeste,  soit  à 
Tamphibraque.  On  le  trouve  par  licence  dans  les  vers 
îambiques  de  la  comédie  latine  et  dans  ceux  de  Sénèque  : 
Plante  et  Térence  l'emploient  aussi  dans  les  tétramétres 
Iambiques.  Chez  les  Grecs,  on  le  rencontre  quelquefois 
dans  les  systèmes  dochmiaques,  où  deux  procéleusmati- 

3ues  équivalent  alors  à  un  dochmius.  On  en  trouve  aussi 
es  exemples  dans  les  systèmes  anapestiques,  surtout  di- 
mètres.  Dans  les  systèmes  dactyliques ,  il  n'était  guère 
admis  que  pour  les  noms  propres;  Pindare  en  offre  quel- 
ques exemples.  —  Il  y  eut,  chez  les  Anciens,  des  vers 
procéleusmatiques  de  différentes  mesures.  P. 

PROCÈS  (du  latin  processus,  marche),  instance  de- 
vant un  juge  ou  un  tribunal  sur  un  différend  élevé  entre 
deux  ou  plusieurs  parties.  Tout  procès  commence  par 
une  demande,  se  continue  et  s'explique  par  une  instruc- 
tion, et  finit  par  un  jugement.  Dans  un  Procès  civil ,  le 
demandeur  poursuit  une  réparation  purement  civile  ;  un 
Procès  criminel  a  pour  but  de  faire  prononcer  une  peine 
contre  l'auteur  d'un  fait  quaKfié  crime  par  la  loi.   ^ 

PROCESSION,  cérémonie  reli^euse.  V.  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d* Histoire. 

PAOCESsiON  DU  S*  ESPRIT,  productiou  étemelle  du  S^  Es- 
prit, qui  procède  du  Père  et  du  Fils  selon  l'Église  ro- 
maine, du  Père  seulement  selon  l'Église  grecque. 

PROCESSIONNAL,  livre  d'église,  contenant  les  chants 
des  Processions 

PROCÈS-VERBAL,  acte  par  le({uel  un  magistrat,  un 
officier  public,  un  agent  de  l'autonté,  un  arbitre,  un  ex- 
pert, rend  compte  de  ce  qu'il  a  fait  dans  l'exercice  de  ses 
fonctions,  de  ce  qu'il  a  vu,  de  ce  qui  s'est  fait  ou  dit  en 
sa  présence.  En  matière  civile,  les  procès-verbaux  sont 
destinés  à  constater  d'une  manière  authentique  les  faits 
qui  doivent  servir  de  base  aux  discussions  d'intérêt 
privé  :  ils  sont  dressés  par  les  notaires,  les  huissiers,  les 
greffiers,  les  Juges  de  paix,  ou  par  des  Juges  qu'un  tri- 
bunal a  commis  à  cet  effet,  et  font  foi  de  ce  qu'ils  coH" 


PRO 


1494 


PRO 


tiennent  Jusqu'à  inscriptioD  de  faux.  En  matière  de 
police,  en  matière  correctionnelle  et  criminelle ,  les  pro- 
cès-verbaaz  ont  pour  but  d'assurer  l'exécution  des  lois 
répressives  :  ils  sont  dressés  par  les  officiers  de  police 
judiciaire,  les  gendarmes,  les  gardes  champêtres,  les 
préposés  des  Douanes,  Je  la  régie  des  Contributions  in- 
directes, de  la  direction  des  Domaines,  du  timbre  et  de 
l'enregistrement,  etc.  La  preuve  contraire  par  témoins 
ou  par  écrit  est  admise  contre  les  procès-verbaux  de  ceux 
des  agents  de  l'autorité  auxquels  la  loi  n'accorde  pas  le 
droit  d'être  crus  jusqu'à  inscription  de  faux.  Les  procès- 
verbaux  judiciaires  doivent  être  affirmés  (V.  Apfiiima- 
TioN^  ;  l'absence  de  cette  formalité  les  vicie.  F.  Mangin , 
Traité  des  procès-verbatix  en  matière  de  délits  et  de  con-- 
travmitions ,  1840,  in-8°  ;  Gotelle,  Traité  des  procès-ver- 
baux de  contravention  en  matière  administrative,  1848, 
in-8«. 

PBOcks-vBRBAL  DB  coMPARUTioif ,  acte  dressé  soit  par  un 
notaire,  soit  par  un  juge  commis  pour  recevoir  les  décla- 
rations des  parties.  Il  a  pour  but  de  préciser  leurs  pré- 
tentions réciproques  et  les  points  de  contestation. 

PROCHRONISMË.  V.  ÀNACHROinsHB. 

PROCLAMATION,  allocution  adressée  dans  des  cir- 
constances solennelles,  soit  par  un  chef  d'armée  à  ses 
soldats  ou  aux  populations  chez  lesquelles  il  porte  la 
guerre,  soit  par  un  gouvernement  à  ses  administrés  ou  à 
ceux  d'un  gouvernement  ennemi.  On  nomme  encore 
Proclamation  l'acte  par  lequel  on  porte  à  la  connaissance 
du  public  un  fait  nouveau,  comme  l'installation  d'un 
gouvernement,  la  nomination  d'un  haut  fonctionnaire, 
un  traité  de  paix,  une  amnistie,  une  fête  nationale,  etc. 
,  Autrefois  les  Proclamations  se  faisaient  par  la  voix  des 
hérauts  ;  aujourd'hui  on  emploie  les  affiches. 

PROCLITIQUE ,  c-à-d.  en  grec  qui  a  la  propriété  de 
se  pencher  en  avant  (de  pro  et  de  klinô)^  se  dit  des  par- 
ticules qui,  n'ayant  pas  d'accent  propre,  s'appuient  sur 
le  mot  suivant.  Telles  sont  la  conjonction  ei,  la  préposi- 
tion ix,  les  articles  é,  Vj,  cl,  «t,  en  grec;  la  plupart  des 
prépositions  monosyllabiques  en  latin  et  en  français, 
l'article  français,  les  pronoms  personnels  précédant  le 
verbe,  l'adverbe  n^tif  ne.  Dans  ce  vers  de  Racine 
(Phèdre,  IV,  2)  : 

Ig  Jour  n'eit  pas  plia  pur  que  le  fond  de  mon  eorar, 

les  mots  en  italiques  sont  proclitiques.  En  grec  ,  les 
proclitiques  peuvent  s'accentuer  dans  certains  cas,  par 
exemple  lorsqu'ils  sont  suivis  immédiatement  d'un  mot 
susceptible  de  per^  son  accent.  K.  Encutiqub.      P. 

PROCONSUL.       i  V.  ces  mots  dans  notre  Diction- 

PROCURATEUR.  (      notre  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

PROCURATION  (du  latin  curare  pro,  prendre  soin 
pour  un  autre),  acte  par  lequel  une  personne  donne  à 
une  autre  le  pouvoir  d'agir  en  son  nom  comme  elle  pour- 
rait le  faire  elle-même.  La  procuration  peut  être  donnée 
sous  seing  privé;  mais  elle  doit  l'être  par  acte  public, 
quand  il  s'a^t  de  représenter  une  partie  dans  un  acte  de 
rétat  civil,  de  récuser  un  juge,  d'accepter  une  donation , 
de  répudier  une  succession,  de  toucher  les  arrérages  de 
rentes  sur  l'État.  V.  Mandat. 

PROCUREUR,  mot  par  lequel  on  désignait  surtout, 
avant  1789,  les  officiers  ministériels  qui  s'appellent  au- 
jourd'hui Avoués  {V.  PaocDREuas,  dans  notre  Dictionr 
naire  de  Biographie  et  d* Histoire)^  et  qui  ne  s'applique 
plus  qu'à  certains  membres  du  Parquet  exerçant  les  fonc- 
tions de  îdinistère  public  {V.  ce  mot)  près  les  Cours  et 
tribunaux,  n  y  a  un  Procureur  général  près  la  Cour  de 
cassation  {V.  ce  mot),  et  un,  près  de  chaque  Lour 
d'appel.  Celui-ci  a  sous  sa  direction  des  avocats  gé' 
nérauœ.  chargés  le  plus  souvent  du  service  des  audien- 
ces, et  «es  substituts,  chargés  du  service  du  Parquet. 
Il  porte  la  parole  aux  chambres  assemblées,  aux  aumen- 
ces  solennelles,  et  aux  audiences  des  chambres  quand  il 
le  juge  convenable.  Il  exerce  l'action  de  la  justice  crimi- 
nelle dans  toute  l'étendue  du  ressort,  veille  au  maintien 
de  l'ordre  dans  tous  les  tribunaux,  et  a  la  surveillance 
de  tous  les  officiers  de  police  judiciaire  et  des  officiers 
ministériels.  Sous  la  dépendance  hiérarchique  du  Procu- 
reur général  sont  les  Procureurs  de  la  République  (au- 
tteioieProcureurs  du  roi  etProcureurs  impériaux), 

2ui  exercent  les  mêmes  fonctions  près  les  tribunaux  de 
'•  instance,  et  qui  ont  aussi  des  substituts.  Nul  ne  peut 
être  nommé  Procureur  de  la  Rép.  s'il  n'a  25  ans,  Procu- 
reur général  s'il  n'a  30  ans.  Ces  magistrats,  institués  par 
la  loi  du  28  floréal  in  xii  (18  mai  1804)  pour  remplacer 
i«s  Accusateurs  publics  et  les  Commissaires  du 


gouvernement,  sont  nommte  par  le  chef  de  l'Eut,  «t 
amovibles.  F.  Massabiau,  Manuel  du  Procureur 
impérial  et  du  substitut,  1857,  3  vol.  in-8«. 

PRODICTATEUR.  V.  ce  mot  dans  notre  DictUmnatre 
de  Biographie  et  d^ Histoire. 

PRODIGUE  (du  latin  agerepro,  chasser  devant  soi), 
celui  qui  manque  de  mesure  dans  ses  dépenses.  La  pro- 
di^lité  était,  oans  notre  ancienne  législation,  une  cause 
dHnterdiction  ;  ai^ourd'hui  elle  donne  seulement  lieu  à 
la  nomination  d'un  Conseil  judiciaire  (K.  ce  mot). 

PRODOHOS,  nom  donné  quelquefois  à  la  façaae  anté- 
rieure d'un  temple,  et  au  porche  d'une  église. 

PRODROME  (du  grec  pro,  devant,  et  dromos,  course), 
nom  donné  à  certains  ouvra^  qui  sont  comme  les  avants 
coureurs  d'autres  ('écrits  destines  à  paraître  plus  tard  et 
dont  ils  donnent  une  idée. 

PRODUCTION,  dans  le  langage  de  l'économie  politique, 
création  des  valeurs  considér&s  indépendamment  de  leur 
distribution  et  de  leur  consommation.  L'homme  ne  crée 
pas  un  atome  de  matière;  mais  il  transforme  la  matière 
de  mille  manières ,  pour  l'approprier  à  tous  les  besoins 
de  sa  vie.  La  Nature  lui  fournit  tous  les  élémente;  mais 
ces  éléments,  avant  d'être  combinés,  élaborés  par  son  in- 
telligence et  son  activité,  ne  lui  sont  aue  d'une  bien 
faible  utilité.  Mille  sauvages  vivent  misérables  et  meu- 
rent quelquefois  de  faim  au  milieu  d'une  nature  riche  ei 
belle,  dans  un  canton  de  plusieurs  lieues  de  superfide  ; 
un  désert  de  la  même  étendue,  transformé  par  l'activité 
hutnaine,  nourrit  plusieurs  millions  d'hommes  au  sein 
de  l'abondance  et  dans  toutes  les  jouissances  de  la  civi- 
lisation. Ce  qui  accomplit  ces  merveilles,  c'est  la  pro- 
duction de  la  richesse,  c-à-d.  la  transformation  de  la 
matière  première  en  un  produit,  en  une  valeur  propre  à 
satisfaire  nos  besoins.  Cette  transformation  est  un  chan- 
gement, un  mouvement,  et,  par  conséquent,  ne  peut  se 
faire  que  par  l'application  d'une  force  quelconque  à  la 
matière  inerte.  Or,  l'application  de  cette  force  ne  peut 
être  faite  que  par  un  être  ayant  intelligence  et  rolonté , 
que  par  l'homme.  L'homme  est  donc  l'agent  de  la  pro- 
duction, dont  il  est,  par  conséquent,  le  principe,  comme 
il  en  est  la  fin  ;  l'homme  est  le  seul  producteur  véritable, 
et  il  intervient  sans  cesse  dans  le  phénomène  de  la  pro- 
duction, à  trois  titres  gui  se  trouvent  le  plus  souvent 
réunis  à  des  degrés  divers  par  une  même  personne  : 
1°  comme  savant;  2°  comme  entrepreneur;  3^  comme 
ouvrier. 

L'homme  seul  en  fhce  de  la  matière  brute,  c'est  le  sau- 
vage grossier,  se  faisant  à  grande  peine  un  arc  et  des 
flèches  pour  diasser,  et  couvrant  sa  nudité  de  plumes  ou 
de  peaux.  Mais  cette  matière  brute,  il  ne  tarde  pas,  par 
ses  premi^^s  tentatives  de  production,  à  la  transformer, 
à  se  faire  des  haches,  des  couteaux,  à  amasser  des  pro- 
visions, à  les  échanger  avec  ses  voisins  ;  et,  avant  même 
qu'il  ne  soit  parvenu  à  un  degré  de  civilisation  bien 
avancé,  il  a  déjà  de  nombreux  instruments  pour  l'aider 
à  produire.  La  matière  brute  apparaît  moins,  et  se 
confond  dans  la  classe  des  instruments  de  production. 
On  distingue  ces  instruments  en  instruments  directs , 

?ui  sont  :  les  agents  naturels ,  le  capital  et  le  travail 
V.  ces  mots  )  ;  et  instruments  indirects ,  qui  sont  :  1'^ 
change t  la  circulation,  la  monnaie  (V.  ces  mots),  aux- 
quels il  faut  ajouter  le  gow)emement,  qui,  par  de  bonnes 
lois,  peut  faciliter  la  production  et  les  échanges,  et  l'iii- 
strwtion,  qui  crée  le  capital  moral,  l'instrument  le  plus 
puissant  et  le  plus  fécond  de  la  production. 

Trois  instruments  servent  directement  à  la  production  : 
les  agents  naturels,  le  capital,  et  le  travail.  Cest  entre 
eux  aussi  que  se  partagent  les  profits  de  la  production. 
L'homme ,  le  producteur  universel ,  n'intervient  pas  en 
personne  dans  le  compte  du  partage;  mais  il  est  en  r^- 
lité  tout  entier  sous  le  second  et  sous  le  troisième  chef, 
puisque  le  capital  n'est  que  du  travail  accumulé,  et  que 
le  travail  n'est  rien  autre  chose  que  l'homme  agissant  : 
sous  ces  trois  chefs,  il  n'y  a  donc  comme  toujours  que 
l'homme  et  la  matière  ;  à  la  matière  le  premier  chef  et 
une  partie  du  second,  à  l'homme  la  meilleure  partie  du 
second  et  le  troisième  tout  entier.  Void  à  quel  titre  se 
répartissent  les  profits  de  la  production  :  les  agents  na- 
turds,  dont  le  principal  est  la  terre,  prélèvent  leur  part 
à  titre  de  rente  IV.  ce  mot).  Le  capital  prélève  la  sienne, 
1*  à  titre  dHntérét  (V,  ce  mot)-,  2^  à  titre  de  profU, 
quand  le  capital  a  fait  des  avances  dont  il  doit  être  rem- 
boursé, ou  quand  il  doit  être  amorti  dans  un  temps 
donné.  Cest  ce  (pie  fait  un  négociant,  lorsque,  établissant 
son  inventaire,  il  compte,  pour  une  machine  qui  lui  a 
coûté  100,000  fr.,  5,000  tr,  comme  intérêt  de  son  capHal, 


PRO 


1495 


PRO 


plus  10,000  fr.  comme  dépréciation  de  son  capital,  parce 
qu*il  calcale  qu'au  bout  de  dix  ans  la  machine  sera  usée, 
et  que,  s'il  ne  prélevait  pas  tous  les  ans  10  p.  0/0  de  dé- 
préciation, son  capital  serait  consommé  et  perdu.  Le 
travail  prélève  aa  part  des  profits  :  1°  à  titre  de  salaires, 
quand  il  s'agit  d*un  ouvrier,  d'un  employé,  qui  ne  met 
dans  Tentreprise  que  ses  bras,  et  qui,  assuré  de  sa  rétri- 
bution, ne  court  pas  de  chances  de  pertes  ;  2®  à  titre  de 
profits,  quand  il  s'agit  A'un  entrepreneur  qui  hasarde 
son  capital,  qui  met  à  la  fois  dans  l'entreprise  son  temps, 
son  intelligence  et  ses  espérances,  ou  d'une  personne 
qui,  sans  éâ«  l'entrepreneur  même,  court  cependant  avec 
lui  les  chances  de  perte  et  de  gain  de  l'entreprise  (  V,  Sa- 
laire )• 

L'industrie  est  la  grande  source  des  produits.  Voici  les 
différentes  branches  dans  lesquelles  on  l'a  divisée  : 
'  Extractive  (mines,  pêcheries,  etc.)* 
Yoiturièro;  c.-&-d.  le  commerce  qui  trans- 
porte les  produits. 

Industrie  (  Manufacturière;  c.-à-d.  l'industrie  pro- 
prement dite. 
Apicole. 
Libérale  (beaux-arts,  sciences,  etc.). 

Un  produit  nouveau  n'est  pas  toujours  une  augmenta- 
tion nouvelle  de  richesses.  Voici  les  phénomènes  écono- 
miques qui  peuvent  résulter  de  la  création  d'un  produit: 
1^  si  le  proauit  brut  n'a  cas  une  valeur  suffisante  pour 
rembourser  les  avances  faites  par  les  agents  naturels,  le 
capital  et  le  travail,  il  y  a  perte  pour  la  société  et  dimi- 
nution de  richesse;  2^  si  le  produit  brut  sufiSt  juste  pour 
rembourser  ces  avances,  il  n'v  a  ni  perte  ni  profit,  et  la 
richesse  reste  la  même  ;  3^  si  le  produit  brut,  après  avoir 
remboursé  toutes  les  avances,  laisse  un  excédant,  il  y  a 
profit,  et  cet  excédant,  qui  constitue  le  produit  net,  est 
une  augmentation  de  richesse.  L. 

PROÈME.  F.  Prooeuiou. 

PROFANATION  (  du  latin  pro,  devant,  et  fanwn,  tem- 
ple), irrévérence  commise,  soit  volontairement,  soit  par 
oubli  ou  ignorance,  envers  les  choses  consacrées  par  la 
religion.  Elle  se  distingue  du  sacrilège,  crime  commis 
avec  intention  envers  la  Divinité  même  :  toutefois,  dans 
la  religion  catholique,  la  profanation  des  saints  mystères 
est  un  sacrilège,  parce  que  la  présence  de  Dieu  en  fait  un 
attentat  contre  lui. 

PROFANE,  qualification  donnée  par  les  Anciens  à  qui- 
conque n'était  pas  initié  aux  Mystères,  et  restait  pour 
ainsi  dire  en  dehors  du  temple.  —  En  Littérature,  on 
oppose  les  auteurs  profanes  ou  piUens  aux  auteurs  sor- 
crès  ou  chrétiens.  —  Par  extension  et  au  figuré,  le  nom 
de  profane  s'applique  à  celui  qui  ne  possède  pas  une 
science  ou  un  art  quelconque. 

PROFECTICES  ^iens).  V.  Biens. 

PROFÈS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dicttonnatre  de  Bio- 
graphie  et  d^  Histoire. 

PROFESSEUR  (du  latin  pro^f en ,  déclarer  publique- 
ment, enseigner),  celui  qui  fait  profession  d'enseigner 
une  science  ou  un  art.  Le  titre  de  professeur  n'apparte- 
nait autrefois  qu'à  ceux  qui  donnaient  leurs  leçons  dans 
certains  établissements  publics,  tandis  que  les  maîtres  de 
toute  sorte  le  prennent  aujourd'hui.  Dans  l'ancienne  Uni- 
versité, il  n'y  avait  de  professeurs  que  ceux  qui  occu- 
paient des  chaires  en  Théologie,  en  Droit,  et  au  Collège 
de  France;  les  professeurs  en  Droit  joignaient  à  ce  titre 
celui  é^assesseurs ,  et  les  professeurs  royaux  celui  de 
lecteurs.  Les  professeurs  de  la  Faculté  de   médecine 
étaient  dits  docteurs  régents.  Les  professeurs  des  collèges 
s'appelaient  régents,  et  ce  n'était  qu'après  20  ans  de  ser- 
vice qu'ils  s'intitulaient  officiellement  professeurs  émé- 
rites.  —  Dans  les  lycées  actuels,  \e^  professeurs  sont 
ceux  qui,  pourvus  du  titre  d'agrégé,  sont  titulaires 
d'une  chaire  :  ils  étaient  divisés  en  trois  classes,  au 
traitement  de  2,400  fr.,  2,200  fr.  et  2^000  fr.  dans  les 
départements,    de  4,500    fr.,  4,000  fr.  et  3,500  fr.    à 
Paris  et  à  Versailles,  non  compris  un  éventuel  (  V.  ce 
mot)  dont  le  minimum  était  alors  fixé  à  800  fr.  ;  au- 
jourd'hui, l'éventuel  est  supprimé,  et.  par  compensa- 
tion, le  traitement  a  été  augmenté.  Si  le  nombre  des 
élèves  exige  que  les  classes  soient  divisées,  les  maî- 
tres chargés  de  ces  divisions  prennent,  s'ils  sont  agré- 
gés, le  nom  de  professeurs  divisionnaires,  et,  s'ils  ne  le 
sont  pas,  celui  de  chargés  de  cours;  le  traitement  de  ces 
deux  sortes  de  fonctionnaires  est  le  même  (K.  Chargés 
DB  cours).  Le  costume  des  professeurs  des  lycées  est 
U  robe  d'étamine  noire,  la  toque  noire  bordée  de  ve- 
lours, le  rabat  blanc  à  petits  plis,  la  chausse  ou  épitoge 
(K.  ce  mot),  et  une  palme  en  or  pour  les  officiers  de 


l'Instruction  publiçiue,  en  argent  pour  les  officiers 
d'Académie,  en  soie  violette  pot^r  les  autres.  Ils  sont 
tous  nommés  par  le  ministre  de  l'instruction  publique. 

PROFESSION.  Ce  mot,  qui  désigne  tout  état  ou  emploi 
de  la  vie,  s'entend  aussi  d'une  déclaration  publique  pnr 
laquelle  on  se  lie  ;  et,  dans  ce  cas,  s'il  s'agit  de  religion 
ou  de  principes  politiques ,  c'est  une  profession  de  foi. 
Dans  le  langage  ecclésiastique,  on  nomme  spécialement 
profession  l'acte  solennel  par  lequel  on  fait  des  vœux  de 
religion  (V.  V<xu  ). 

PROFESSIONNEL  (Enseignement).  11  existe  deux 
sortes  d'enseignements  professionnels  :  l'un ,  presque  ex- 
clusivement pratique,  et  qui  consiste  à  apprendre  aux 
enfants  un  métier,  en  même  temps  qu'on  leur  dispense 
l'instruction  élémentaire  ;  cet  enseignement ,  donné  dans 
des  établissements  tels  que  l'asile  Fénelon  à  Vautours  et 
l'école  S*-Nicolas  à  Paris,  est  essentiellement  du  domaine 
primaire  ;  —  l'autre,  c^ui  ne  forme  pas  des  artisans  pour 
tel  ou  tel  métier,  mais  des  hommes  instruits  pour  les 
carrières  agricole ,  industrielle ,  commerciale ,  et  qui  est 
donné,  par  exemple,  dans  l'école  Turgot  à  Paris;  il  fait 
partie  de  l'enseignement  secondaire. 

PROFIL,  autrefois  Porfil,  se  dit,  en  Architecture, d'un 
dessin  offrant  la  coupe  ou  section  perpendiculaire  d'une 
construction,  qui  en  laisse  voir  l'intérieur,  c.-à-d.  la  hau- 
teur, la  largeur,  la  profondeur,  l'épaisseur  des  mu- 
railles, etc.  C'est  encore  le  contour  d  un  membre,  cor- 
niche, base,  chapiteau.  On  fait  aussi  des  profils  pour  les 
travaux  de  fortification  et  de  terrassement.  —  En  Pein- 
ture, le  Profil  est  le  contour  des  objets.  Le  mot  s'emploie 
presque  exclusivement  en  parlant  d'une  tète  vue  de  côté, 
comme  sur  une  médaille. 

PROFITS  ET  PERTES,  nom  donné,  dans  la  tenue  des 
livres  en  partie  double,  à  l'un  des  comptes  généraux  qui' 
représentent  le  négociant  sur  les  livres  duquel  ils  figu- 
rent. Le  nom  de  ce  compte  indique  les  écritures  qui  doi- 
vent y  figurer  :  tels  sont  les  escomptes ,  les  bonifica- 
tions, etc.  C'est  à  l'aide  du  compta  de  profits  et  pertes 
que  se  solde  le  compte  de  capital.    K.  Balance  des 

UVRES. 

PROGRAMME ,  c.-à-d.  ce  qui  est  écrit  auparavant  (du 

fec  pro,  avant,  et  gramma,  écrit),  nom  donné  autrefois 
tout  avis  afiiché  ou  répandu  à  la  main,  dans  le  but- 
d*adresser  un  appel  au  public.  Aujourd'hui,  c'est  l'indi- 
cation brève  des  pièces  jouées  dans  un  spectacle ,  des 
morceaux  exécutés  dans  un  concert,  des  lectures  qui  se- 
ront faites  au  milieu  .d'une  société  savante.  Programme 
est  aussi  employé  comme  synonyme  de  Sommaire.  C'est 
encore  un  écrit  où  l'on  indique  le  sujet  et  les  principales 
conditions  d'un  ouvrage  qu'il  s'agit  de  composer  et 
d'exécuter,  par  exemple  d'un  ouvrage  mis  au  concours. 

PROGRES  (du  latin  progressa) ^  avancement  vers  le 
mieux.  La  propriété  qu'ont  les  individus  et  les  sociétés 
de  se  rapprocher  de  la  perfection  se  nomme  Perfectibw 
lité.  L'avancement  dans  le  bien-être  est  un  progrès  mO' 
tériel;  l'avancement  dans  la  science,  un  progrès  intellect 
tuel;  l'avancement  dans  le  bien,  un  progrès  moral.  Les 
progrès  de  l'individu  sont  nécessairement  bornés  par  la 
faiblesse  de  ses  organes  et  par  la  durée  de  sa  vie  ;  mais 
la  société,  qui  dure  toujours,  peut  faire  des  progrès  in- 
définis. Le  progrès  ne  peut  être  le  même  en  toutes  choses  : 
il  est  clair  que  l'homme  est  impuissant  à  changer  les  con- 
ditions naturelles  de  sa  vie  physique  ;  les  périodes  d'en- 
fance, de  jeunesse,  de  maturité  et  de  vieillesse,  que  cette 
vie  peut  contenir,  sont  au-dessus  de  sa  volonté,  et  il  ne 
dépend  pas  plus  de  lui  de  grandir  que  d'atteindre  à  un 
âge  avancé.  Tout  ce  qu'il  peut  faire,  c'est  de  donner  par 
l'exercice  à  ses  membres  la  souplesse  et  la  force,  et  de 
concourir  à  sa  santé  par  une  hygiène  bien  entendue. 
Dans  le  domaine  des  lettres  et  des  beaux-arts,  qui  dé- 
pendent de  l'inspiration  individuelle,  le  travail  d'un 
homme  ne  peut  aussi  ajouter  ({ue  fort  peu  de  chose  à 
celui  de  ses  devanciers  :  il  serait  difficile,  par  exemple , 
de  soutenir  qu'il  y  a  de  plus  grands  postes  qu'Homère, 
de  plus  grands  philosopnes  que  Platon,  de  plus  grands 
orateurs  que  Démosthènes,  de  plus  grands  sculpteurs 
que  Phidias.  Lorsqu'il  s'agit  de  progrès  littéraire  et  ar- 
tistique, on  ne  doit  pas  songer  aux  individus,  sous  peine 
d'engager  d'insolubles  querelles,  comme  celle  qu'on  sou- 
tint autrefois  sur  les  Anciens  et  les  Modernes  (K.  Anciens 
ET  Modernes).  Il  en  est  autrement  des  sciences  et  des 
arts  industriels  :  il  y  a  là  des  principes  reconnus ,  des 
faits  acquis,  des  procédés  éprouvés ,  dont  la  tradition  se 
transmet  d'âge  en  âge,  et  qm,  dispensant  d'entreprendre 
les  mêmes  recherches  et  les  mêmes  expériences,  permet- 
tent de  marcher  toi^ours  à  des  conquêtes  nouvelles. 


PRO 


U96 


PRO 


Quant  aa  progrès  non-seulement  d'une  société  pendant 
le  cours  de  son  existence,  mais  encore  des  sociétés  suc- 
cessives les  unes  sur  les  autres,  il  est  de  toute  évidence  : 
le  progrés  de  la  Grèce  sur  Tanàque  Orient  et  des  temps 
modernes  sur  la  société  gréco-romaine  est  manifeste  dans 
la  religion,  dans  les  institutions  politiques,  dans  les  con- 
ditions de  la  vie  sociale,  dans  la  moralité  publiq^ue  et 
privée,  dans  l'industrie,  dans  les  sciences.  Ceux  qui  con- 
testent ce  progrès  objectent  que  les  génies  des  temps  mo- 
dernes ne  surpassent  point  ceux  de  l'Antiquité  :  il  en 
peut  être  ainsi  ;  mais  c'est  dans  la  société  en  général 

3u'il  faut  chercher  la  trace  d'un  perfectionnement  con- 
nu, et  l'on  ne  saurait  nier  que  la  diffusion  des  lumières 
est  plus  grande,  le  niveau  commun  des  intelligences  plus 
élevé  chez  les  peuples  chrétiens  que  chez  les  païens , 
au  XIX*  siècle  que  pendant  le  moyen  ftge.  On  dira,  pour 
combattre  la  doctrine  du  progrès,  que  la  civilisation  était 
plus  avancée  dans  les  derniers  temps  de  rEm|)ire  ro- 
main que  durant  les  siècles  qui  suivirent  sa  ruine  ;  ce 
fait  est  incontestable  :  nuis  on  ne  peut  rien  conclure  d'un 
tel  rapprochement;  de  même  que  Ton  ne  comparerait 
pas  un  enfant  avec  un  homme  parvenu  à  l'âge  mûr,  il 
n'y  a  pas  lieu  d'opposer  une  société  qui  commence  à  une 
société  qui  finit.  L'hunumité  peut  bien,  d'ailleurs,  re- 
culer à  certains  égards  ;  car,  selon  la  remarque  ingé- 
nieuse de  M™*  de  Stafil,  elle  n'avance  pas  en  ligne  droite, 
mais  en  spirale.  Le  moyen  &ge,  inférieur  à  l'Antiquité 
sur  beaucoup  de  points,  la  surpasse  par  la  religion  et  par 
le  sentiment  moral.  On  nie  enfin  le  progrès,  en  allé- 
guant certains  pays,  comme  l'Asie  Mineure  et  le  Nord  de 
l'Afirique,  qui  sont  loin  d'être  aussi  florissants  que  dans 
les  temps  anciens  :  mais  ces  pertes  ont  été  très-large- 
ment réparées;  le  domaine  de  la  civilisation  n'est  plus 
restreint  aux  contours  de  la  Méditerranée  ;  la  Russie,  la 
Scandinavie,  la  plus  grande  partie  de  l'Allemagne,  l'Amé- 
rique, l'Océiuiie,  sont  des  conquêtes  de  la  civilisation 
moderne. 

Un  des  personnages  d'Homère  disait  :  «  Nous  valons 
mieux  que  nos  pères,  et  nos  enfants  vaudront  mieux  que 
nous.  »  Cette  pensée  n'avait  pas  la  valeur  d'une  doctrine, 
car  l'Antiquité  n'a  jamais  possédé  l'idée  du  progrès  et  de 
la  perfectibilité  humaine.  Peutrètre  n'existait-il  pas  der- 
rière elle  une  assez  grande  quantité  de  faits  dont  l'ob- 
servation pût  lui  révéler  le  lien  qui  les  unissait  et  les 
faisait  concorder  tous  vers  un  même  but.  D'ailleurs,  les 
Anciens  avaient  une  préoccupation  trop  vive  de  l'in- 
fluence qu'exerçaient  les  individus  dans  la  vie  sociiJe, 
pour  n'être  point  détournés  de  chercher  la  loi  des  évé- 
nements; ils  étaient  anim^  d'un  égolsme  de  cité,  qui  ne 
tenait  aucun  compte  des  nations  étrangères  dans  le 
tableau  des  destinées  humaines.  Or,  l'idée  du  progrès 
exclut  tout  développement  isolé  et  indépendant;  elle  sup- 
pose l'humanité,  c-à-d.  la  communauté  d'or^nisation, 
d'affections  et  de  but  de  tous  les  hommes  entre  eux.  C'est 
au  christianisme  que  le  monde  doit  cette  sympatiiie  qui 
a  confondu  dans  une  même  affection  tous  les  membres 
de  l'espèce  humainej,  et  qui  a  pu  les  fidre  considérer 
comme  un  seul  être  vivant  à  travers  les  siècles  {V.  S^  Au- 
gustin, Cité  de  Dieu,  X,  141.  L'idée  du  progrès  est  une 
idée  chrétienne  et  toute  moderne.  François  Bacon  est  un 
des  premiers  qui  l'aient  hautement  exprimée  (De  Augm. 
scient,^  liv.  II  et  YIII),  mais  il  l'appliqua  uniquement  à 
l'histoire  des  lettres  et  des  sciences.  Pascal  a  formulé 
avec  une  admirable  précision  la  loi  de  la  perfectibilité, 
lorsciu'il  a  traité  De  l'atUarité  en  matière  de  philosophie  : 
il  s'indigne  ^e  l'on  puisse  croire  que  les  Anciens  ne  nous 
ont  plus  laissé  de  vérités  à  connaître,  et,  distinguant 
nettement  les  vérités  qui  dépendent  de  la  religion  et 
celles  qui  dépendent  des  sens  et  du  raisonnement,  il  dé- 
clare que  les  premières  ne  peuvent  être  changées  et 
augmentées  par  l'homme.  La  loi  de  la  perfectibilité  lui 
sert,  non  pas  à  nier  le  christianisme  révélé  et  immuable, 
mais  à  établir  les  limites  respectives  de  la  religion  et  de 
la  science.  Il  déplore  l'aveuglement  dos  gens  qui  repous- 
sent les  découvertes  physiques  au  nom  de  l'autorité,  et 
innovent  au  nom  de  la  raison  dans  les  vérités  religieuses. 
L'idée  du  progrès  ne  se  présente  pas  chez  Malebranche 
avec  l'étendue  et  l'originalité  qu'elle  possède  dans  Pascal  : 
elle  n^t  du  sentiment  de  supériorité  que  donnait  aux 
hommes  du  xvii*  siècle  un  magnifique  mouvement  des 
lettres,  des  arts  et  des  sciences;  elle  est  plutôt  l'expres- 
sion de  l'orgueil  des  Modernes  qui  se  révolte  contre  l'An- 
tiquité, que  la  conscience  d'une  loi.  C'était  une  des 
vérités  dont  Leibniz  était  le  plus  convaincu,  que,  dans 
la  nature,  tout  est  nécessairement  enchaîné,  progressive- 
ment gradaé.  H  est  le  premier  qui  ait  formulé  l'idée  du 


progrès  par  la  loi  ds  continuité  (V,  ce  mot)^  cette  for- 
mule, généralisée  depuis,  a  Joué  un  grand  rôle  dans  les 
systèmes  panthéistes  modernes;  elle  a  enfanté  VwUté 
continue  de  Geoffroy  Saint-Hilaire  et  le  progrèe  continu 
des  rédacteurs  de  la  Revue  encyclopédique,  Charles  Per- 
rault est,  après  Pascal,  celui  qui  a  eu  la  conscience  la 
plus  claire  et  la  plus  large  de  la  loi  de  nerfectibilité  :  il 
développa  ses  idées  à  l'occasion  de  la  querelle  sur  les 
Anciens  et  les  Modernes;  mais,  à  la  différence  de  Pascal, 
qui  se  gardait  de  conclure  du  monde  physique  au  monde 
moral,  et  d'i^pliauer  à  la  religion  sa  loi  de  la  marche 
des  sciences,  il  généralisa,  et  confondit  sous  une  même 
loi  la  vie  terrestre  et  animale,  la  vie  de  l'humanité,  aux- 
quelles il  reconnaissait  des  ^es  successifs  d'enfance,  de 
Jeunesse,  de  virilité  et  de  vieillesse.  Vico  imagina  trois 
&ges  de  développement  dans  la  vie  de  chaque  peuple; 
mais  il  parut  méconnaître  le  progrès  des  peuples  les  uns 
sur  les  autres  (  F.  Philosophie  de  l'histoire).  Cest  h 
Turgot  qu'appartient  la  gloire  d'avoir  donné  à  l'idée  du 
progrès  toute  son  Importance  :  il  l'a  présentée  avec  la 
puissance  absolue  d'un  axiome,  et  en  a  fait  l'applicatipc 
la  plus  nette  à  l'histoire,  à  la  politique,  à  la  morale,  aux 
rehgions,  à  l'industrie,  aux  lettres,  aux  sciences,  aux  arts, 
en  un  mot  à  toutes  les  manifestations  de  l'activité  hu- 
maine. Désormais  la  philosophie  possède  une  formule 
claire  et  précise,  féconde  en  applications.  L'Allemagne 
l'emprunte  à  la  France  :  Kant  proclame  à  son  tour  que 
les  phénomènes  sociaux,  comme  tous  les  autres  phéno- 
mènes de  la  nature,  peuvent  être  ramenés  à  des  lois; 
Herder,  avec  la  magie  de  sa  magnifique  imagination  et 
l'enthousiasme  de  sa  belle  &me,  embrasse  l'histoire  uni- 
verselle au  point  de  vue  de  la  perfectibilité,  mais  il  se 
laisse  aller,  avec  Bonnet,  à  un  système  de  transfor- 
mation progressive  des  êtres  (K.  PALmcéNésœ)  qui  fait 
que  son  histoire  de  la  création  entière  est  un  panthéisme 
confus,  où  l'humanité  n'a  que  la  vie  fatale  d'un  des 
règnes  de  la  nature;  Leasing,  partant  de  cette  idée  que 
les  religions  doivent  se  modifier  à  mesure  que  l'humanité 
se  transforme,  n'accorde  aux  révélations  de  l'Ancien 
Testament  et  de  l'Évangile  qu'un  caractère  transitoire,  et 
prophétise,  au  nom  de  la  perfectibilité,  une  révélation 
nouvelle.  Par  un  autre  genre  d'erreur,  Condorcet  a  sou- 
tenu qu'il  n'existe  pas  de  terme  assignid)le  au  prog^ 
humain  :  pour  lui ,  les  facultés  de  l'homme  doivent  se 
perrectionner  indéfiniment,  les  maladies  disparaître,  la 
vie  se  prolonger,  l'égalité  parfaite  s'établir  entre  les  na- 
tions, entre  les  classes,  et  même  entre  les  sexes,  une 
langue  universelle  servir  de  lien  à  tous  les  peuples,  et 
fin^ement  l'homme  atteindre  à  l'immortalité  sur  une 
terre  immortelle.  Telle  est  la  marche  qu'a  suivie  l'idée 
du  progrès  dans  les  temps  modernes.  B. 

PROHIBITION  (du  latin  prohibere,  empêcher,  dé- 
fendre), défense  faite  par  une  loi  ou  un  décret.  Ainsi, 
dans  les  temps  de  disette,  on  prohibe  à  la  sortie,  cnà-d. 
on  défend  d'exporter  les  denrées  alimentaires;  en  cas  de 
gjuerre,  on  prohibe  aussi  à  la  sortie  les  armes,  les  muni- 
tions de  guerre,  les  chevaux,  etc.  D'autres  prohibi- 
tions sont  fondées  sur  des  considérations  d'ordre  public 
(F.  Armes  prohibées,  DéiENnoN  d'armes],  ou  sur  la  né- 
cessité de  protéger  les  intérêts  fiscaux  (tabac,  cartes  à 
Jouer,  etc.).  Les  prohibitions  à  l'entrée,  c-àrd.  la  défense 
d'importer  les  marchandises  étrangères,  ont  pour  objet 
de  protéger  le  travail  national  :  elles  peuvent  être  abso- 
lues, ou  résulter  de  l'élévation  des  droits  qui  frappent  ces 
marchandises  et  rendent  impossible  leur  écoulement  sur 
le  marché.  C'est  un  des  moyens  du  système  protecteur 
(F.  ce  mot). 

PROJECTION.  F.  Cartes  géographiqobs. 

PROLATION,  en  termes  de  Musique  ancienne,  manière 
de  déterminer,  après  la  clef,  là  valeur  des  notes  semi- 
brèves  sur  celle  de  la  brève,  ou  la  valeur  des  minimes 
sur  celle  de  la  semi-brève.  Lorsque,  dans  la  composition, 
la  semi-brève  valait  trois  minimes,  la  prolation,  dite 
parfaite,  se  marquait  par  un  point  dans  un  cercle  pour 
le  mode  ma)eur,  par  un  point 'dans  un  demi-cercle  pour 
le  mode  mineur;  si  la  semi-brève  ne  i^ait  que  deux 
minimes,  la  prolation,  dite  imparfaite,  se  «naztmait  par 
un  cercle  ou  un  demi-cercle  sans  poidC  —  Dans  le 
Plain-Chant,  la  Prolation  est  un  groupe  de  plusieurs 
notes  de  suite  sur  une  même  syllabe  et  une  même  corde, 
pour  indiquer  que  le  son  doit  être  tenu  plus  longtemps. 
Prolation  a  signifié  aussi  le  rapport  des  syllabes  brèves 
avec  les  longues,  comme  quand  on  disait  :  «  Chanter 
avec  une  bonne  prolation  et  mesure,  »  B. 

PROLÉGOMÈNES  (du  grec  pro,  avant,  et  légâ,  ]e  dis), 
sorte  d'Introduction  placée  au  commencement  d'un  livrai 


PRO 


U97 


PRO 


et  contenant  les  notions  nécessaires  à  Tintelligence  des 
matières  qui  y  sont  contenues. 

PROLEPSE.  V.  Antéoccupation  et  Akticipatioti. 

PROLÉTAIRES,  ceux  qui,  dans  l'ancienne  Rome<,  com- 
posaient la  dernière  des  6  classes  instituées  par  Servius 
Tullius,  c-à-d.  le«  pauvres,  ceux  qui  ne  contribuaient  à 
la  force  de  TÉtat  que  par  leur  progéniture  (•groUt  en 
latin),  et  qu'on  exemptait  de  la  plupart  des  charges  pu- 
bliques. Lee  Modernes  ont  applique  le  même  nom  aux 
hommes  qui  ne  possèdent  rien  en  propre  et  vivent  au 
|our  le  Jour  du  travail  de  leurs  mains. 

PROLIXITÉ,  défaut  du  style,  opposé  à  la  brièveté,  et 

3ui  consiste  à  charger  le  récit  de  détails  superflus,  et  à 
élayer  le  discours  en  vaines  circonlocutions.  Au  lieu  de 
dire  :  a  Je  m'embarquai,  »  on  peut  décomposer  la  pensée 
ainsi  :  «  J'arrivai  sur  le  port.  J'aperçus  un  navire.  Je  de- 
mandai le  prix  du  passage,  je  fis  marché,  je  montid,  on 
leva  l'ancre,  on  mit  à  la  voile,  nous  partîmes.  »  La  pre- 
mière manière  est  brève  et  concise;  la  seconde  est  pro- 
lixe, car  elle  rapporte  des  détails  inutiles  et  fastidieux, 
que  l'auditeur  ne  peut  manquer  de  supposer.  Ia  prolixité 
rend  le  stvle  lâche  et  languissant.  Scudéry,  dans  son 
poôme  d'i4(arfc,  donne  un  exemple  curieux  de  prolixité; 
il  ne  lui  faut  pas  moins  de  cinquante  vers  pour  la  des- 
cription d'tin  palais.  H.  D. 

PROLOGUE  (  du  grec  "pro^  avant,  et  Xoqo^.^  discours  ; 
avant-discours,  avant-propos  ).  Ce  terme  désignait,  chez 
les  Anciens,  ce  que  nous  appelons  préface,  préambule, 
avant-propos,  introduction.  Il  s'appliquait  spécialement 
ï  la  littérature  dramatique,  et  désignait  la  scène  où  se 
fait  l'ouverture  du  sujet,  et  où  l'on  instruit  le  spectateur 
de  tout  ce  qui  s'est  passé  avant  le  commencement  de 
l'action,  de  tout  ce  qu'il  faut  qu'il  sache  pour  comprendre 
ce  qu'il  va  voir.  C'est,  autant  que  possible,  un  person- 
nage important  qui  explique,  en  s'entretenant  avec  le 
chœur  ou  avec  un  autre  personnage,  le  sujet  de  la  pièce. 
Eschyle  et  Sophocle  excellaient  dans  cette  partie  du 
drame,  qui  n'est  autre  chose  que  ce  que  la  critique  mo- 
derne appelle  Exposition,  Dans  les  tragédies  d'Euripide, 
le  prologue  est  souvent  dans  la  bouche  d'un  personnage 
isolé,  quelquefois  d'un  personnage  fantastique  ou  d'un 
Dieu  amené  sur  la  scène  à  l'aide  d'une  machine.  —  Dans 
la  comédie  latine,  on  trouve  fréquemment  aussi  un  Pro- 
logue détaché  du  reste  de  la  pièce;  il  est  même  quelque- 
fois récité  par  un  personnage  étranger  à  l'action,  et  qui 
ne  parait  que  dans  la  protase  on  scène  d'exposition 
(  V.  Protasb).  Ce  personnage  s'appelait  lui-même  Pro- 
logue, comme  on  le  voit  par  VHécyre  et  VHéautontinhô- 
roumenos  de  Térence.  Les  comètes  de  ce  poète  sont 
parfois  précédées  d'un  prologue  apologétique,  qui  n'est 
pas  sans  analogie  avec  la  Parabase  de  la  Vieille  Comédie. 

Chez  les  Modernes,  le  prologue  reparaît  dès  l'enfance 
de  l'art  thé&tral  :  on  le  trouve  au  début  des  Mystères^ 
sous  forme  d'exhortation  pieuse  ou  de  prière  adressée  à 
Dieu  en  faveur  de  l'auditoire.  Dans  les  Moralités,  Sotties 
et  Farces,  tantôt  il  forme  l'exposé  du  sujet,  tantôt  c'est 
une  harangue  aux  spectateurs,  dont  on  cherche  à  captiver 
l'attention  et  la  bienveillance;  plus  souvent  encore  c'est 
one  facétie  détachée,  où  l'on  faisait  rire  les  spectateurs  à 
leurs  propres  dépens,  et  qui  était  débitée  par  un  person- 
nage appelé  Gros-Guillaume,  Gauthier-Garguille,  Guillot- 
Gorjn,  Bruscambille,  Turlupin.  Elle  recevait  alors  les 
noms  de  prologue  drôlatif  ou  d'avant-jeu,  pouvait  être 
dialoguée,  et  fermer  une  petite  action  à  part.  Le  prologue 
de  VAmphitryon  de  Molière  rappelle  ceux  des  anciennes 
farces  ;  mais  il  a  une  perfection  de  style  <pn  l'élève  in- 
finiment aa-dessus  de  ces  grossiers  essais  du  thé&tre 
naissant,  et  il  a  de  plus  le  mérite  de  se  rattacher  étroite- 
ment au  sujet  même  de  la  pièce.  A  l'époque  de  Molière, 
l'usage  des  Prologues  était  à  peu  près  consacré  dans  les 
opéras  :  on  remarque  celui  de  YAmadis  de  Quinault. 
Dans  la  tragédie  classique,  il  n'y  a  d'autre  exemple  de 
Prologue  que  celui  qui  précède  VEsther  de  Racine  :  il 
n'a  aucun  rapport  à  l'action,  mais  il  prépare  et  fait 
naître  en  quelque  sorte  avec  beaucoup  d'art  les  senti- 
ments au'éprouvera  le  spectateur  en  voyant  se  dérouler 
devant  lui  les  événements  de  la  fable  ;  le  poète  a  su  y 
faire  entrer  délicatement  de  magnifiques  éloges  du  roi, 
de  M°**  de  Maintenon,  et  de  la  communauté  de  S*-Cyr. 
Au  xvm*  siècle,  on  fit  des  prologues  dialogues  entre  l'au- 
teur et  un  ami ,  le  comédien  et  un  ennemi  de  l'auteur,  le 
directeur  de  thé&tre  et  un  spectateur  qui  cherche  à  se 
placer  dans  la  salle,  etc.  :  ce  fut  le  prologue  des  pièces  de 
Regnard  pour  le  Théâtre-Italien ,  le  prologue  de  Lesage, 
de  D'Allainval,  etc.  Les  dramaturges  de  nos  Jours  ont 
recouru  fréquemment  au  Prologue  séparé^  dont  ils  font 


comme  une  pièce  préliminaire  où  sont  rapportés  tous 
les  faits  antérieurs  à  l'action  même  qui  fait  le  sujet;  mais 
ce  sj^stème  est  peu  conforme  à  l'art  :  un  pareil  prologue 
ne  dispense  pas  l'auteur  de  faire  l'exposition  du  caractère 
et  de  la  situation  actuelle  des  personnages  au  moment 
où  l'action  commence,  en  sorte  que  la  pièce  a  réellement 
une  double  exposition.  On  peut  rattacher  au  genre  des 
Prologues  certaines  épltres  adressées  au  public;  telles 
sont  celles  que  C.  Delavigne  écrivit  en  1810  pour  l'inaui 
guration  du  second  Thé&tre-Français,  en  1825  pour  celle 
du  thé&tre  du  Havre,  et  celle  aussi  qu'il  a  mise  en  tête 
de  sa  comédie  le  ConseUler  rapporteur. 

En  dehors  de  l'art  dramatique,  le  terme  Prologue  s'ap- 
plique particulièrement  à  certains  travaux  de  S^  Jérôme 
sur  les  livres  sacrés,  au  préambule  de  la  loi  Salique,  à 
plusieurs  préfaces  des  livres  du  Gargantua  et  du  Panta" 
gruel  de  Rabelais.  La  Fontaine  fit  également  précéder  la 
plupart  de  ses  recueils  de  fables  d'avant- propos  auxquels 
on  peut  donner  le  nom  de  Prologues,  puisqu'il  a  terminé 
son  sixième  livre  par  un  petit  morceau  qu'il  appelle 
Épilogue  :  quelques-uns  sont  des  prologues  apologéti- 
ques, notamment  celui  par  lequel  il  commence  son  livre 
second,  et  qui  est  le  plus  piquant  de  tous;  d'autres  sont 
des  espèces  de  dédicaces  en  vers.  P. 

PROLONGATION  DE  CONSONNANCES.  V.  Accoan. 

PROLONGE,  chariot  servant  au  transport  des  muni- 
tions, des  agrès,  ou  des  effets  militaires.  On  donne  en* 
core  le  nom  de  prolonges  aux  cordages  dont  les  artilleurs 
se  servent  dans  la  manœuvre  des  pièces  de  campagne, 
pour  les  traîner  à  bras  d'une  batterie  à  l'autre. 

PROLDSIONS,  en  termes  de  Littérature,  composi- 
tions que  fait  un  auteur  pour  exercer  ses  forces  et  essayer 
son  génie.  Le  grammairien  Diomède  donnait  ce  nom  au 
Moucheron  de  Virgile  et  à  ses  autres  opuscules. 

PROMENOIR,  vaste  local  couvert  et  bien  aéré,  ménagé 
sur  le  pourtour  extérieur  ou  dans  l'intérieur  même  d'un 
monument,  pour  servir  de  refuge  contre  la  pluie,  de  salle 
d'attente  ou  de  dégagement. 

PROMESSE,  assurance  donnée  de  vive  voix  ou  par 
écrit  de  faire  ou  de  livrer  une  chose.  Une  promesse 
prouvée  ou  reconnue  forme  un  engagement.  La  promesse 
écrite  peut  ètfe  faite  par  acte  authentique  ou  sous  seing 
privé.  Dans  ce  dernier  cas,  elle  doit  être  tout  entière  de 
la  main  de  celui  qui  la  souscrit,  ou  du  moins  porter, 
outre  la  signature,  un  bon  ou  approuvé  portant  en  toutes 
lettres  la  chose  promise  :  il  y  a  exception  pour  les  mar- 
chands, artisans,  laboureurs,  vignerons,  gens  de  journée 
et  de  service.  Une  promesse  de  vente  vaut  vente  lorsqu'il 
y  à  consentement  des  deux  parties  sur  la  chose  et  le  prix. 
Une  promesse  n'oblige  pas  quand  elle  porte  sur  des  choses 
qui  ne  peuvent  faire  l'objet  d'un  contrat.  L'inexécution 
d'une  promesse  entraîne  des  dommages-intérêts. 

PROMÉTHÉE.  Le  mythe  de  Prométhée  (  F.  ce  mot  dans 
notre  Dictionn.  de  Biogr,  et  d'Histoire)  j  formé  de  tradi- 
tions confuses,  contradictoires  et  de  diverses  époques , 
remonte  aux  temps  fabuleux  de  la  Grèce.  La  Théogonie 
d'Hésiode  est  le  livre  le  plus  ancien  qui  nous  le  fasse 
connaître.  Cinq  siècles  après,  Eschyle  composa  trois  tra- 
gédies dont  Piôméthée  était  !e  sujet  :  Prométhée  ravis* 
seiMT  du  feu,  Prométhée  enchainé,  Prométhée  délivré, 
La  seconde  seule  nous  est  parvenue;  Prométhée  y  parait 
comme  le  père  de  toute  civilisation  :  il  a  donne  aux 
hommes  le  feu  qui  leur  fera  trouver  beaucoup  d'arts  ;  il 
leur  a  enseigné  a  se  construire  des  habitations ,  à  obser- 
ver les  astres,  à  distinguer  les  saisons,  à  accoupler  les 
animaux  sous  le  Joug ,  à  atteler  les  coursiers ,  à  exploi- 
ter les  mines;  il  a  inventé  l'éariture,  la  science  des  nom- 
bres, la  médecine,  l'art  nautique,  la  divination.  Des  lé- 
gendes postérieures  nous  le  représentent  ouvrant  de  son 
marteau  le  cr&ne  de  Jupiter  pour  en  faire  sortir  Minerve, 
l'emblème  de  la  civilisation ,  ou  créant  les  hommes  avec 
le  concours  de  cette  déesse;  sur  quelques  monuments 
antiques,  on  voit  Minerve  donner  la  vie  aux  statues  d'ar- 
gile façonnées  par  le  Titan,  en  posant  sur  leur  tête  un  pa- 
gillon,  symbole  de  l'àme.  C'est  encore  le  créateur  des 
ommes  que  le  Protagoras  de  Platon  et  un  apologue 
attribué  à  Ésope  nous  montrent  dans  Prométhée;  Ménan* 
dre  et  Lucien  en  font  le  créateur  de  la  femme,  de  Pandore, 
ouvrage  de  Vulcain  selon  Hésiode.  Il  appartenait  surtout 
à  Athènes,  la  ville  de  Minerve  et  des  arts,  d'honorer  la 
mémoire  de  Prométhée:  il  avait,  selon  Pausaniaa,  un 
autel  duis  l'Académie;  une  fête  annuelle  lui  était  consa- 
crée (V,  Lampadopborus,  dans  notre  Dictionn.  de  Biogr. 
et  d'Histoire)  ;  de  nombreux  tableaux  rappelaient  le  sup- 
plice qu'il  avait  enduré  sur  le  Caucase;  les  Athéniens 
donnaient  le  nom  de  Prométhées  aux  sculpteurs ,  aux 


PRO 


1498 


PRO 


potiers,  à  tous  les  gens  qui  pétrissaient  Targile.  Le  mythe 
de  Prométhée  a  Jeté  des  racines  yastes  et  profondes  : 
les  habitants  de  la  région  du  Caucase  prétendirent  long- 
temps qu*on  voyait  dans  leurs  montûnes  les  os  d*un 
géant  brisé  par  la  colère  divine,  et  on  lit  dans  Pbilostrate 
qu'ils  faisaient  une  rude  guerre  aux  aigles,  pour  venger 
Prométhée  (c'était  l'aigle,  et  non  le  vautour,  qui,  dans 
les  traditions  primitives,  dévorait  le  foie  du  Titan).  Il  y 
a  une  sorte  de  Prométhée  dans  la  poésie  de  l'Orient  ;  ce 
nom  se  trouve  dans  les  Védas  {PramcUhi,  épithète 
d^Agni).  Il  y  en  a  un  aussi  dans  la  poésie  du  Nord  :  ce 
héros  des  Sagas,  qui  va,  sur  la  montagne  de  feu,  déro- 
ber au  Dragon  le  secret  de  la  métallurgie,  n'est^il  pas  le 
Prométhée  Scandinave? 

Il  n'est  pas  de  mythe  qui  ait  donné  lieu  à  plus  d'inter- 
prétations :  selon  Diodore  de  Sicile,  Prométhée  est  un  roi 
ou  un  gouverneur  éj^ptien  qui ,  en  lutte  contre  les  inon- 
dations du  Nil ,  alors  appelé  Aigle  à  cause  de  la  violence 
de  ses  eaux ,  fut  délivré  du  fléau  par  Tintervention  d'Her- 
cule. Théophraste  considère  Prométhée  comme  un  sage 
oui  a  fait  part  aux  hommes  de  la  philosophie.  La  tra^ 
die  d'Eschyle  a  principdement  exercé  la  sagacité  des  m- 
terprétateurs;  amsi,  les  quatre  fils  de  Japet  sont  les 
quatre  grands  types  moraux  de  l'humanité  :  Atlas ,  la 
force  patiente,  mais  dépourvue  d'initiative;  Ménctius, 
l'homme  dont  Prométhée  et  Épiméthée  figurent  la  dou- 
ble nature  :  le  premier,  c'est  l'intelligence,  dans  son  prin- 
cipe le  plus  pur  et  le  plus  élevé,  aux  prises  avec  la  matière 
et  les  obstacles  extérieurs  ;  le  second,  qui  épouse  Pandore, 
c'est  aussi  l'intelligence,  mais  dans  un  degré  inférieur, 
et  troublée  par  la  passion,  les  faiblesses  de  l'&me  et  les 
misères  de  la  vie.  Ou  bien,  les  aventures  de  Prométhée 
sont  une  image  des  luttes,  des  épreuves,  des  progrès  de 
l'humanité;  Prométhée  enchaîné  sur  son  rocher,  c'est 
l'esprit  se  consumant  dans  les  liens  indestructibles  qui 
retiennent  son  essor;  le  vautour  qui  déchire  les  flancs  du 
Titan  représente  le  travail  de  la  pensée  qui  dévore  sans 
cesse  le  cerveau  du  poëte,  de  l'artiste,  du  philosophe,  du 
savant,  et  lui  fait  acheter  cher  ses  triomphes  et  ses  jouis- 
sances ;  la  victoire  de  Jupiter  sur  Prométhée ,  c'est  celle 
de  la  révélation  religieuse  sur  les  penchants  matériels  de 
l'homme,  celle  aussi  des  lois  de  la  nature,  de  l'ordre 
éternel  de  l'univers,  de  la  puissance  infinie,  sur  la  force 
libre  et  insoumise,  mais  finie,  du  génie  humain.  Quoique 
ce  mythe  soit  profondément  paien,  on  a  voulu  encore  y 
voir  des  analogies  avec  la  révolte  de  Satan,  la  chute 
d*Adam,  et  la  rédemption  du  Christ.  Pour  ce  dernier 
rapprochement,  Lactance  et  TertuUien  s'appuient  sur 
cette  ressemblance  qui  existe  entre  le  Christ  et  Promé- 
thée, aue  tous  deux  se  sont  dévoués  pour  le  bonheur  du 
genre  humain.  Depuis  le  xvi*  siècle,  divers  commenta- 
teurs d'Eschyle  et  des  fables  antiques  ont  présenté  Pro- 
méthée comme  le  précurseur  et  l'image  du  Christ;  ce 
sont  Garbitius,  Stanlev,  l'abbé  Banier,  etc.  Joseph  de 
Maistre  {Soirées  de  S^-Pétersbourg)  a  suivi  la  même  voie 
et  expliqué  le  mythe  de  Prométhée  en  faveur  des  croyances 
catholiques.  —  Parmi  les  interprétations  scientifiques,  il 
en  est  une  qui  fait  d'Atlas  portant  le  ciel ,  et  de  Promé- 
thée enchaîné  sur  le  Caucase,  des  observateurs  attentifs 
au  spectacle  des  phénomènes  célestes.  Une  autre  plus 
récente  veut  que  les  alchimistes  aient  retrouvé  dans  la 
fable  de  Prométhée  les  mystères  de  leur  science.  —  Enfin, 
dans  une  dissertation  sur  le  Prométhée  d'Eschyle  (18*20), 
Andrieux  essaye  de  prouver  que  l'intention  du  poète  a  été 
de  cacher,  sous  le  voile  transparent  d'une  fable  intéres- 
sante, de  grandes  leçons  de  morale  et  de  politique  :  Jupi- 
ter serait  Te  type  du  tyran  qui  redoute  les  lumières,  et 
persécute  dans  la  personne  de  Prométhée  ceux  qui  les 
répandent.  Eschyle  aurait  songé  à  ^oppression  des  Pisis- 
tratides,  et  aurait  eu  pour  but ,  en  rendant  Jupiter  odieux 
et  en  donnant  à  sa  victime  une  &me  fière,  libre,  inflexi- 
ble, d'entretenir  dans  l'&me  des  Athéniens  la  haine  de  la 
tyrannie  et  la  ferme  volonté  d'en  empêcher  le  retour. 
Cette  interprétation  se  trouve  aussi  dans  le  commentaire 
de  Schûtz. 

Le  mythe  de  Prométhée  oAhiit,  par  son  obscurité  môme, 
trop  d'éléments  d'inspiration ,  pour  que  les  poètes  mo- 
dernes ne  fussent  pas  tentés  de  l'interpréter  à  leur  tour; 
l'Espagnol  Calderon  a  composé  une  comédie  intitulée  la 
EstcUua  de  Prometeo  :  ce  n'est  pas  le  Prométhée  impie 
et  révolté  qui  est  ici  mis  en  sôàne,  c'est  le  Prométhée 
bienfaiteur  des  hommes.  Il  a  élevé  un  autel  à  Minerve,  et 
fait  une  statue,  qui  n'est  autre  que  Pandore.  La  déesse 
reconnaissante  lui  fournit  le  moyen  de  dérober  un  rayon 
du  soleil  pour  animer  sa  création.  Épiméthée  s'éprend  de 
U  statue  vivante,  et  la  dispute  à  bon  ficru  Qui  Tempor^ 


tera  de  l'esprit  ou  de 'la  matière?  L'esprit  triomphe  à  la 
fln^  et  Prométhée  épouse  Pandore,  qui  est  l'image  même 
de  l'humanité.  Tel  est  le  sens  élevé  et  chrétien  de  cette 
comédie  allégorique,  qui  est  très-remarquable,  malgré  la 
bizarrerie  de  sa  conception.  Gœthe  avait  projeté  une 
grande  composition  mythologique  sur  la  colère  qu'inspire 
à  Jupiter  la  création  de  l'homme  par  Prométhée  ;  il  ne 
reste  de  cette  ébauche  qu'un  prologue  en  trois  petits  actes 
(1773).  Ce  poème  date  presque  de  la  même -époque  que 
les  premières  scènes  du  Faust ,  et  c'est  peut-être  à  cetit 
coïncidence  qu'il  faut  attribuer  l'analogie  qui  existe  entre 
Faust  et  le  Prométhée  de  la  tradition ,  en  tant  qu'ils  re- 
présentent l'un  et  Vautre  la  science  humaine.  Le  charme 
que  les  poésies  de  Gœthe  exerçaient  sur  Beethoven  a  pu 
lui  inspirer  l'idée  de  composer  son  ouverture  de  Promé- 
thée, Un  autre  Allemand,  Falk,  poète  satirique,  a  écrit 
sur  Prométhée  un  drame  (1803)  où  il  a  développé,  non 
sans  talent,  les  idées  philosophiques  de  son  temps  et  les 
siennes  propres.  Nul  sujet  ne  pouvait  être  plus  sym- 
pathique à  lord  Byron  que  celui  de  Prométhée  ;  il  avoue 
dans  ses  Mémoiresi'influence  que  l'œuvre  d'Eschyle  exerça 
sur  lui,  et  reconnaît  la  ressemblance  qui  existe  entre  son 
Manfred  et  le  héros  du  poète  grec.  Une  Ode  d  Prométhée 
(1816) ,  qu'on  trouve  dans  ses  Mélanges^  prouve  encore 
combien  le  symbole  grec  le  préoccupait  :  il  compare  le 
supplice  de  Prométhée  à  celui  d'une  &me  fière  et  blessée 

3ui  aime  mieux  souffrir  dans  le  silence  et  l'isolement  que 
'exciter  la  pitié;  il  glorifie  le  Titan  d'avoir  diminué  la 
misère  humaine  par  ses  enseignements,  et  appris  à 
l'homme  aux  prises  avec  la  destinée  à  ne  puiser  sa  force 
que  dans  son  esprit.  On  doit  à  Shelley,  l'ami  de  Byron, 
un  drame  en  quatre  actes  qui  a  pour  sujet  le  supplice  et 
la  délivrance  de  Prométhée  :  c'est  moins  une  œuvre  dra- 
matique qu'un  traité  de  métaphysique  d'après  les  idées 
panthéistes  et  mystiques  de  l'auteur;  les  personnages  sont 
des  abstractions  et  n'ont  aucune  vie  qui  leur  soit  propre. 
En  France,  on  ne  peut  citer  au  xvm*  siècle  que  trois  œu- 
vres qui  soient  tirées  du  mythe  grec  :  une  tragédie  lyrique 
de  Voltaire,  connue  sous  le  nom  de  Pandîorê,  et  qu'il 
appelle  aussi  Prométhée;  un  opéra  de  LeCranc  ie  Pom- 
pignan ,  portant  le  même  titre,  et  où  Voltaire,  comme 
représentant  la  philosophie  du  xviii*  siècle,  est  mis  en 
scène  sous  le  nom  de  Prométhée,  pour  avoir  enseigné  les 
arts  aux  hommes  et  leur  avoir  appris  à  mépriser  les  dieux; 
les  Hommes  de  Prométhée  (1774) ,  petit  poôme  de  Colar- 
leau ,  dans  le  genre  descriptif,  et  donV  tout  l'intérêt  re- 
pose sur  l'union  du  premier  homme  avec  Pandore,  la 
première  femme,  l'un  et  l'autre  sortant  des  mains  créa- 
trices de  Prométhée  qui  a  ravi  le  feu  céleste  pour  animer 
leur  argile.  De  nos  jours  le  côté  sérieux  et  philosophique 
de  la  fiS>!e  antique  a  été  mieux  compris  et  a  donné  nais- 
sance à  des  œuvres  d'une  plus  haute  portée.  La  plus  consi- 
dérable est  le  Pr^améthée  de  M.  Edgar  Quinet  (1838,  in-8°), 
poème  sous  forme  dramatique,  divisé  en  trois  par  ties  qui 
répondent,  comme  dans  la  trilogie  d'Eschyle,  aux  trois 
époques  de  la  vie  du  Titan  :  la  1**  nous  montre  Promé- 
thée apportant  aux  hommes  le  feu  céleste,  c.-à-d.  les  arts, 
la  civilisation ,  l'industrie  ;  le  supplice  du  Caucase  est  le 
sujet  de  la  2*  ;  dans  la  3*,  le  Dieu  nouveau  qui  délivre 
Prométhée  en  renversant  Jupiter,  c'est  le  Christ ,  c'est  la 
religion  chrétienne  s'établissant  sur  les  ruines  du  paga- 
nisme. L'œuvro  ne  manque,  dans  son  ensemble,  ni  d'ori- 
ginalité, ni  de  grandeur,  mais  la  forme  ne  répond  pas  à 
la  hauteur  de  l'idée;  le  vers  est  correct,  mais  froid  et 
monotone  ;  le  rhythme  semble  être  une  lourde  entrave 
pour  l'imagination  de  l'auteur  qui,  en  effet,  a  plus  de 
chaleur  et  d'élan  dans  la  prose.  Nous  citerons  encore  un 
poème  sur  Prométhée  qui  fait  partie  d'un  recueil  de  poé- 
sies intitulé  les  Victimes ,  par  M.  Lodin  de  Lalaire  (Paris, 
1838);  un  Prométhée  délivré  de  M.  L.  de  Senneville 
(Paris,  1844);  un  autre  Prométhée  délivré,  drame  en 
trois  actes,  par  H.  Edouard  Grenier  {Revue  nationale, 
avril  1859  ).  Ce  dernier  a  adopté  le  dénoûment  chrétien 
de  M.  Quinet;  son  vers  plus  souple  et  plus  coloré  fait  lire 
son  œuvre  avec  intérêt. 

La  grande  figure  de  Prométhée  n'a  pas  moins  occupé 
les  arUstes  que  les  poètes  :  il  nous  reste  de  précieux  mo- 
numents de  l'art  ancien  qui  reproduisent  les  faits  les  plus 
importants  de  son  histoire  fabuleuse;  Prométhée  est  re- 
présenté soit  seul,  soit  entouré  de  personnages  symbo- 
liques, sur  des  vases  peints,  des  bas-reliefs,  des  pierres 
gravéeûs,  des  médailles,  etc.  Les  artistes  modernes  que  oe 
sujet  a  inspirés  sont,  entre  autres,  Flaxman,  à  qui  Ton 
doit  une  suite  de  dessins  d'après  les  tragédies  d'Eschyle, 
et  Pradicr,  dont  on  a,  dans  le  jardin  des  Tuileries,  une 
statue  de  Protnéthée  délivré,  V.  V Antiquité  expliquée  par 


PIIO 


1499 


PRO 


MontfaacoQ,  1. 1"';  Religions  de  Vantiquité,  par  Creuzer, 
t.  IV  ;  Musée  de  sculpture  par  de  Clarac,  1826-52,  6  toI. 
iD-8'';  Études  sur  tes  tragiques  grecs,  par  H.  PatÎD, 
Paris,  1858,  3  vol.  in-S*;  OBuvres  choisies  d'Andrieux , 
Paris,  1862,  îii-8*.  P— s. 

PROMONTOIRE.  V.  Cap. 

PROMOTEUR.  V,  ce  mot  d^s  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

PROMOTION,  nomioation  à  un  rang,  à  ane  dignité 
plus  haute  que  celle  qifon  possédait  déjà.  On  nomme  pro- 
nwtion  per  scUtum  (par  saat)  celle  qui  est  faite  d*un 
ordre  ou  d*Qn  degré  supérieur,  sans  avoir  passé  par  le 
degré  on  Tordre  inférieur. 

PROMPTUAIRE  (du  latin  promptuarium,  dérivé  de 
proimre,  extraire),  titre  qu*on  donna  autrefois  à  des  re- 
cueils ou  abrégés,  principalement  d*ouvrages  de  Droit. 

PROMULGATION,  acte  par  lequel  les  lois  sont  pu- 
bliées avec  les  formalités  requises,  et  qui  les  rend  im- 
médiatement exécutoires,  sauf  les  délais  exigés  par  les 
distances  (K.  Distance  légale).  La  promul^tion  des  lois 
résulte  de  leur  Insertion  au  Bulletin  des  Lots,  —  Chez  les 
Hébreux,  les  lois  étaient  publiées  devant  le  peuple  assem- 
blé, et  déposées  entre  les  mains  des  Lévites,  qui  en  fai- 
saient tous  les  sept  ans  une  nouvelle  publication.  En 
Grèce  et  à  Rome,  on  grava  les  lois  sur  des  tables  de  bois, 
de  pierre  ou  d*airain ,  qui  furent  exposées  sur  la  place 
publique  :  c'était  comme  une  promulgation  permanente. 
Dans  rancienne  France,  les  lois  furent  promulguées  dans 
les  assemblées  générales,  puis  dans  les  assemblées  de 
provinces;  après  la  création  des  parlements,  les  ordon- 
nances royales  furent  enregistrées  jiar  ces  compagnies, 
et  cette  formalité  les  rendit  exécutoires.  Ce  fut  la  Con- 
vention qui  ordonna  la  publication  des  lois  dans  un  Bul- 
letin officiel  :  à  cette  insertion  elle  ajouta  la  publication 
i  son  de  trompe  et  de  tambour,  qui  a  été  supprimée 
depuis.  B. 

PRONAOS.  V.  Narthex. 

PRONE.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  ^Histoire. 

PRONOM,  Tune  des  parties  du  discours,  à  laquelle  on 
a  donné  ce  nom  parce  que  les  mots  dont  elle  se  compose, 
ia,  fiM,  mot,  nous,  vous,  les,  leur,  etc.,  tiennent  la  place 
ou  d'un  nom  précédemment  exprimé  et  dont  on  évite  la 
répétition,  ou  d'un  nom  propre  qu'il  n'est  point  d'usage 
d'exprimer  comme  sujet  lorsau'il  appartient  à  la  per- 
sonne qui  parle  on  à  celle  à  qui  l'on  s'adresse  :  «  Je  vous 
ai  écrit  :  quand  répondrez-txms  ?  »  Défini  d'une  manière 

!)lus  philosophique,  le  pronom  est  un  mot  qui  désigne 
es  êtres  animés  ou  inanimés  comme  jouant  dans  le  dis- 
cours un  des  trois  rôles  marqués  par  les  trois  personnes 
(V,  ce  mot)^  ou,  en  d'autres  termes,  comme  étant  une 
des  trois  personnes  du  discours.  Tels  sont,  en  fhui- 
çais,  je  et  nous  pour  la  1**  personne,  tu  et  vous  pour 
la  2%  U,  Us,  elle,  elles  pour  la  3".  En  latin,  en  alle- 
mand, les  pronoms  se  déclinent;  dans  d'autres  langues,  la 
déclinaison  est  «uppléée  par  l'emploi  de  diverses  prépo- 
sitions. Les  pronoms  de  la  l'*  et  de  la  2"  personne  n'ont 
aucane  variation  de  genres,  ceux  de  la  3*  ont  des  genres 
distincts.  —  Outre  les  pronoms  personnels  proprement 
dits,  il  y  a  des  pronoms  personnes  réfléchis,  qui  servent 
i  exprimer  le  retour  de  l'action  exprimée  peir  un  verbe 
attributif  sur  le  sujet  même  qui  la  fait,  comme  quand  on 
^t:  m  Je  me  vois,  tu  te  vois,  il  se  voit.  »  Le  pronom  per- 
sonnel réfléchi  se  distingue  des  trois  autres  en  ce  que, 
dans  les  langues  à  déclinaison,  il  n'a  que  les  cas  indi- 
rects, c-à-d.  ceux  qui  marquent  un  complément,  cette 
espèce  de  pronom  étant  toujours  l'objet  d'une  action  et 
par  conséquent  toujours  complément.  Il  ne  varie  pas  selon 
le  genre. 

Outre  les  Pronoms  personnels,  il  y  a  encore  :  1®  des 
Pronoms  démonstratifs,  au  moyen  desquels  on  désigne 
les  personnes  ou  les  choses  en  les  montrant  (F.  Dé- 
MONSTRATiv};  2*»  dos  Pronoms  possessifs  ^F.  Possessif)  ; 
3<>  des  Prtmoms  relatifs  ou  conjonctifs  (F.  ce  mot); 
4"  des  Pronoms  interrogatifs  (F.  ce  mot);  5**  des  Pro^ 
noms  indéfinis  {plusieurs,  certains,  nul,  aucun,  td, 
tous,  etc.,  lorsqu'ils  sont  employés  sans  être  Joints  à  un 
nom;  Vun,  Vautre,  répétés,  lorsqu'ils  ne  rappellent  aucun 
nom  déterminé).  On  Joint  souvent  à  cette  dernière  caté- 
gorie les  mots  français  on,  personne  (n«),  rien  (ne\  au- 
trui, chacun^  quelqu*un;  mais  ce  sont  plutôt,  surtout 
les  quatre  p'remiers,  des  substantifs  indéfinis  que  des 
pfononM,  car  ils  ne  tiennent  réellement  la  place  d'aucun 
nom.  P. 

PRONOMINAUX  (Verbes),  verbes  qui  se  conjuguent 
toujours  avec  an  pronom  complément     «  L'orgueilleux 


se  loue;  le  coupable  se  repent.  »  D'où  il  suit  qu'à  la 
!*•  et  à  la  2*  personne  il  y  a  toujours  deux  pronoms  dans 
la  conjugaison  de  ces  verbes  :  ^Je  me  repens ,  tu  te 
vantes,  nous  nous  retirons,  vous  vous  moquez,  etc.  » 
Lorsque  le  verbe  pronominal  est  formé  d*un  verbe  actif  « 
le  2*  pronom  est  complément  direct;  s'il  vient  d'un 
verbe  neutre,  ce  2*  complément  est  indirect;  ainsi: 
«  Vous  vous  vantez  (c.-à-d.  rous  vantez  vous)  ;  nous 
nous  succédons  (c-à-a.  nous  succédons  à  nous),  »  Il  y  a 
des  verbes  pronominaux  accidentels,  comme  les  deux  qui 
viennent  d'être  cités,  et  des  verbes  pronominaux  essen- 
tiels, c.-à-d.  qui  n'existent  que  sous  cette  forme  :  ainsi 
les  verbes  repentir,  abstenir,  emparer,  ne  sont  d'aucun 
usage  en  dehors  de  la  forme  pronominale  se  repentir, 
s^abstênir,  s'emparer.  Dans  les  verbes  pronominaux  es- 
sentiels, le  pronom  complément  est  toujours  considéra 
comme  complément  indirect,  si  ce  n'est  dans  le  verbe 
s*arroger,  qui  est  pour  arroger  à  soi.  —  Certains  verbes 
devenus  accidentellement  pronominaux  doivent  être  con- 
sidérés comme  des  verbes  pronominaux  essentiels,  lors- 
que la  forme  pronominale  a  modifié  leur  signification  et 
leur  syntaxe  :  ainsi  apercevoir  une  chose  et  s'apercevoir 
d'une  chose  expriment  deux  nuances  de  sens;  féliciter 
quelqu'un,  se  féliciter  de  quelque  chose  semblent  égale» 
ment  deux  verbes  différents  ;  comporter  et  se  comporter, 
attendre  et  s'attendre,  etc.,  donnent  lieu  à  des  observa- 
tions analogues.  —  Tous  les  verbes  pronominaux  con- 
juguent les  temps  composés  à  l'aide  du  verbe  être.    P. 

PRONONCIATION,  manière  d'articuler  les  mots.  La 
prononciation  doit  être  pure  ou  corrects,  distincte,  me- 
surée ou  rhythmique.  Elle  est  pure,  quand  on  n'y  recon- 
naît aucun  accent  vicieux  ou  étranger,  aucun  cachet  pro- 
vincial, mais  l'accent  des  hommes  instruits  et  de  la 
bonne  compagnie,  quand  elle  est  conforme  aux  règles  de 
la  grammaire  et  de  l'usage.  On  prononce  distinctement, 
lorsqu'arrivent  successivement  à  l'oreille,  non-seulement 
tous  les  mots,  mais  toutes  les  syllabes,  sans  précipitation 
ni  lenteur.  La  prononciation  est  mesurée,  si  l'on  donne 
aux  syllabes  la  durée  relative  qui  leur  convient,  si  l'on 
ne  fait  pas  longues  les  syllabes  brèves,  et  brèves  les  syl- 
labes longues.  Pour  être  bien  entendu,  une  voix  forte  et 
élevée  est  beaucoup  moins  utile  qu'une  bonne  prononcia- 
tion. Il  y  a  une  prononciation  conventionnelle  pour 
chaque  langue,  et  qui  dépend  du  climat,  de  la  conforma- 
tion des  organes  vocaux,  et  des  habitudes  nationales. 
F.  Mathieu,  Traité  de  la  parole,  1847,  in-H*";  Morin  (de 
Clagny),  Traité  de  prononciation,  2«  édit.,  1852,  in-8°. 

PRÔNUNCIAMENTO.  F.  ce  mot  dans  notre  Diction- 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

PROODE.  F.  Strophe. 

PROOEMIUM  (du  grec  proùtmion,  composé  de  pro, 
avant,  et  aHmè,  chant),  espèce  de  prélude  par  lequel  cer- 
tains Aèdes  ou  Rapsodes  commençaient  la  récitation  de 
leurs  compositions  épiques,  pour  se  concilier  la  faveur  et 
attirer  l'attention  des  auditeurs,  avant  d'en  venir  à  leur 
sujet  môme.  C'est  à  peu  près  ce  qu'on  appelle  en  français 
un  préambule,  en  latin  exordium.  F.  Exordb,  PriUm- 

BULB.  P. 

PROPAGANDE  (Congrégation  de  la).  F.  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire. 

PROPAGATION  DE  LA  FOI  (Association  pour  la), 
société  religieuse  établie  en  France  pour  l'extension  des 
Missions  catholiques.  Elle  publie  des  AnncUes  tous  les 
deux  mois. 

PROPERTY-TAX,  c-à-d.  en  anglais  taxe  de  la  pro- 
priété,  contribution  établie  en  1708  en  Angleterre  pen- 
dant le  ministère  de  William  Pitt,  supprimée  en  1815, 
et  rétablie  en  1843.  Elle  frappe  non-seulement  la  terre  et 
les  immeubles,  mais  toutes  les  valeurs  quelconques,  telles 
que  l'intérêt  des  capitaux,  etc. 

PROPHÈTES.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

PROPHÉTIE  (du  grec  pro,  avant,  et  phémi,  je  parle), 
prédiction  des  choses  futures  par  inspiration  divine. 

PROPITIATION.    l  V.ccà  mots  dans  notre  Diction" 

PROPITIATOIRE.  (      naire  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

PROPORTIONS,  en  termes  de  Beaux-Arts,  rapport 
qu'ont  entre  elles  les  dimensions  des  diverses  parties  d'un 
tout.  La  Justesse  des  proportions  est  une  des  conditions  de 
la  beauté.  Qiaque  Ordre  d'Architecture  a  ses  proportions 
particulières  (F.  Module).  Les  peintres  et  les  sculpteurs 
mesurent  toutes  les  dimensions  de  la  figure  humaine  par 
longueurs  de  tête  ou  par  longueurs  de  face;  ainsi ,  les  ar- 
tistes anciens  donnaient  à  leurs  sujets  7  ou  8  longueurs 
de  tète;  les  Modernes  comptent  de  préférence  par  lon- 
gueurs de  face,  et  en  donnent  10,  ainsi  réparties  :  du 


PRO 


1500 


PRO 


•ommet  de  la  tête  à  la  naissance  des  cheye^,  un  tien  de 
face;  de  la  naissance  des  cheveux  au  bas  du  menton, 
une  face;  du  menton  à  la  fossette  entre  les  clavicules, 
2  tiers  de  face;  de  cette  fossette  au-dessous  du  sein,  une 
face;  le  ventre,  2  faces;  des  jambes  au  haut  du  genou, 
S  faces;  du  haut  du  genou  au  coude-pied,  2  faces  1/2; 
du  coude-pied  au-dessous  de  la  plante  du  pied,  une 
demi-face. 

PROPOSANT.  V.  Pasteur. 

PROPOSITION ,  expression  d'un  iugement.  Elle  a  trois 
termes  :  le  sujet,  le  verbe  et  rattribut,  mais  ils  ne  sont 
pas  nécessairement  exprimés  par  trois  mots  distincts. 
Quelquefois  le  verbe  et  l'attribut  sont  renfermés  en  un 
seul  et  même  mot  ;  ainsi  :  «  Je  dors,  »  D'autres  fois  les 
trois  termes  sont  contenus  dans  un  seul  mot,  ce  qui  est 
presque  constant  en  grec  et  en  latin,  et  se  voit  quelque- 
fois en  italien ,  surtout  en  poésie  :  dans  le  latin  dormio, 
on  trouve  ego  siun  dormiens^  je  suis  dormant.  Quelque- 
fois le  sujet  seul  ou  l'attribut  seul  se  trouve  exprimé  : 
alors  il  V  a  ellipse  des  deux  autres  termes;  mais  il  faut 
pour  cela  que  1  on  puisse  les  suppléer  facilement  d'après 
ce  qui  précède.  Ainsi ,  dans  Corneille,  la  confidente  de 
Médée  (I,  5)  demande  à  cette  reine  : 

Dam  un  si  grand  rcTers  qne  voaa  reste- t-il?  —  Uoi, 

répond  Médée.  Ailleurs,  le  même  poète  fait  dire  par  Pru- 
sias  à  Nicomède  (lY,  3)  : 

Et  que  doia«Je  être?  —  Roi , 

*  répond  Nicomède.  Dans  le  premier  cas,  le  verbe  et  Tat- 
tribut  reste  doit  être  suppléé;  dans  le  second,  c'est  le 
sujet  et  le  verbe  :  Vow  êtes  (  devant  être  roi)»  —  Chacun 
des  termes  de  la  Proposition  peut  avoir  dans  sa  dépen- 
dance des  mots  qui  le  déterminent  ou  l'expliquent ,  et 
qui  font  en  quelque  sorte  paitie  du  mot  par  lequel  le 
terme  est  exprimé.  La  bonté  de  Dieu  est  grande  est  une 
proposition  dont  les  termes  essentiels  sont  exprimés  car 
les  mots  bonté  est  grande;  le  mot  la,  les  mots  de  Dieu 
sont  des  dépendances  du  sujet,  et  ces  quatre  mots  réunis, 
la  bonté  de  Dieu^  ne  constituent  qu'un  terme,  le  siiget. 
Les  mots  accessoires  qui  allongent  ainsi  l'expression  de 
la  pensée  en  la  précisant  s'appellent  compléments.  Quand 
le  sujet  ou  l'attribut  n'ont  pas  de  complément,  ils  sont 
dits  incompteoces ;  s'ils  en  ont,  ils  sont  dits  compleoces,  — 
Deux  ou  plusieurs  propositions  unies  entre  elles  à  l'aide 
de  conjonctions  ou  d'adjectifs  conjonctifs  sont  dites  coor- 
données. Si  les  propositions  sont  tellement  enchaînées, 
que  l'une,  sans  le  secours  de  l'autre,  n'exprime  pas  une 
pensée  complète,  l'une  est  principale  et  l'autre  subor- 
donnée. Loroqu'une  proposition  subordonnée,  annoncée 
par  un  adjectif  conjonctif  ou  par  une  conjonction,  ou  par 
un  participe,  est  insérée  dans  la  proposition  principale  ou 
dans  l'une  des  pro]>ositions  subordonnées  dont  elle  fait 
partie,  elle  est  dite  incidente.  V,  Incidente.  P. 

pROPosmoN,  'eu  termes  de  Rhétorique,  deuxième 
partie  du  discours.  C'est  l'exposé  clair,  net  et  précis  du 
sujet.  La  Proposition  se  place  après  l'Exorde  ;  quand  on 
a  éveillé  et  captivé  l'attention  de  l'auditeur,  il  faut  lui 
faire  comprendre  le  sujet  dont  on  veut  l'occuper.  La  Pro- 
position est  simple,  quand  elle  ne  renferme  qu'un  point 
à  prouver;  composée,  quand  elle  en  renferme  plusieurs, 
et  alors  elle  amène  naturellement  la  Division,  c-à-d.  la 
séparation  du  sujet  en  ses  diverses  parties.  La  Proposi- 
tion et  la  Division  (  V,  ce  mot)  forment  le  plan  du  dis- 
cours. H.  D. 

PROPOSITION  (Pains  de),  V,  Pain,  dans  notre  Dictton- 
naire  de  Biographie  et  d  Histoire. 

PROPOSITIONS  (Les  cinq).  V.  Jansénisme,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

PROPRE,  l'un  des  cinq  Universaux  de  l'École;  attri- 
but nécessairement  lié  avec  l'attribut  essentiel  qui  forme 
la  Différence.  Par  exemple,  avoir  le  carré  de  l'hypoténuse 
égal  à  la  somme  des  carrés  des  deux  autres  cètés,  est  le 
propre  du  triangle  rectangle,  comme  suite  de  ce  dernier 
caractère,  avoir  un  angle  droit  qui  est  la  différence  spé- 
cifique. V.  Dniversadx,  Genre,  Espèce,  DiFFiRENcs, 
AcaoENT.  B — E. 

PROPRE,  en  termes  de  Liturgie,  office  particulier  de 
certains  jours,  de  certaines  fêtes.  Il  y  a  le  Propre  du 
temps  et  le  Propre  des  saints.  On  nomme  Propre  d'une 
église  l'office  particulier  à  cette  église. 

PROPRES  (Biens),  en  termes  de  Droit,  biens  immeu- 
bles qui  proviennent  de  succession.  On  a  donné  le  même 
nom  aux  biens  du  mari  et  de  la  femme  qui  n'entrent  pas 
ians  la  communauté  conjugale. 


PROPRÉTEUR.  V.  ce  mot  dauii  notre  Dictionnaire  d* 
Biographie  et  d* Histoire. 

PROPRIÉTAIRE ,  celui  qui  possède  en  propre  un  objet 
quelconque,  et  à  qui  la  loi  reconnaît  le  droit  de  propriété. 
Dans  l'usage,  le  mot  s'entend  principalement  de  ceux  qai 
possèdent  le  sol  et  les  constructions  qu'il  supporte.  La  loi 
accorde  au  propriétaire  un  privilège  sur  les  meubles  de  son 
fermier  ou  locataire,  sur  tout  ce  qui  sert  à  l'exploitation  de 
la  ferme,  et  sur  les  fruits  de  la  récolte  de  l'année,  pour  les 
loyers  et  fermages  des  immeubles,  pour  les  réparations  lo- 
catives ,  et  pour  tout  ce  qui  concerne  l'exécution  du  bail 
(Code  NapoL,  art.  2102;  Code  de  Procéd,,  819  et  suiv.). 
En  France,  il  y  a  1  propriétaire  foncier  sur  9  habitants  ; 
en  Angleterre,  1  sur  40.  V.  Toussaint,  Code  de  la  Pro- 
priété, 1833,  2  vol.  in-8^;Agnel,  Code-Manuel  despro- 
priétaires,  1848,  in-12. 

PROPRIÉTÉ,  chose  que  l'on  possède  en  propre,  et 
droit  d*en  jouir  et  d'en  disposer.  La  propriété  se  trans- 
met et  s'acquiert  par  succession,  par  aoncUion  entre  vifs 
ou  testamentaire,  et  par  l'effet  des  obligations;  elle  peut 
s'acquérir  encore  par  accession ^  par  occupation,  par 


port  à  la  nature  de  Tobjet  possédé,  la  propriété  est  mo' 
hilière  ou  immobilière,  foncière,  wdustrielle,  lUtéraire, 
et  artistique. 

L'homme  a  été  jeté  sur  la  terre  avec  une  propriété 
qu'on  ne  saurait  méconnaître,  la  propriété  de  ses  bras, 
de  ses  forces  et  de  ses  facultés  ;  car  son  &me  et  son  corps, 
c'est  lui-même,  c'est  son  individualité  distincte.  Dire 
qu'il  peut  vouloir  et  agir  pour  son  compte,  c'est  admetr 
tre  que  ce  qu'il  produira  ne  sera  qu'une  dépendance  de 
son  individualité,  et  devra  lui  appartenir  :  il  j  a  quelque 
chose  de  lui  dans  l'œuvre  que  sa  main  fabrique  sous  la 
direction  de  son  esprit,  dans  le  champ  qu'il  ensemence, 
et  qu'il  féconde  de  ses  sueurs.  Ses  facultés  et  ses  organes 
sont  bien  à  lui  ;  l'emploi  qu'il  en  fait  lui  assure  la  pro- 
priété de  leurs  créations.  Le  travail  est  l'origine  de  toute 
propriété.  La  propriété  est  donc  de  droit  naturel;  elle 
résulte,  non  d'une  convention  ou  d'une  loi,  mais  de  la 
constitution  même  de  notre  être,  et  de  nos  différentes 
relations  avec  les  objets  qui  nous  environnent.  Aussi  la 
trouve-tron  établie  comme  un  fait  chez  tous  les  peuples, 
quelque  grossiers  qu'ils  soient,  et  le  droit  existe,  sinon 
sous  une  forme  rationnelle  dans  l'esprit,  au  moins  à 
l'état  d'instinct.  Le  sauvage  chasseur  se  regarde  comme 
propriétaire  de  son  arc,  de  ses  flèches,  du  gibier  qu'il  a 
tué;  le  nomade  qui  a  élevé  de  nombreux  troupeaux  en 
échange  les  produits  contre  ceux  qu'un  agriculteur  a  fait 
naître  du  sol ,  et  tous  deux  entendent  bien  avoir  la  pro- 
priété de  ce  qu'ils  donnent  ou  reçoivent.  Toutefois,  en  ce 
qui  concerne  la  terre,  il  y  a  plutôt  possession  que  pro- 
priété pour  les  ftges  primitifs  :  l'homme  ne  fait  que  pas- 
ser sur  le  sol  ;  il  ne  le  conserve  qu'autant  quïl  le  tient 
et  qu'il  a  la  force  de  le  défendre  ;  c'est  alors  surtout  que 
la  possession  vaut  titre. 

Le  droit  de  propriété  n*existe  avec  des  garanties  que 
dans  les  sodétés  régulièrement  organisées;  c'est  la  so- 
ciété qui  assure  la  jouissance  de  la  propriété,  et  la  consti- 
tue ce  qu'elle  est  dans  les  différents  pays^et  dans  les 
différents  âges.  L'homme  peut  alors  s'éloigner  de  sa  chose 
sans  perdre  ses  droits  sur  elle  ;  sa  propriété  a  été  mar- 
quée d'un  signe  propre  qui  sert  à  la  reconnaitre  et  à  la 
i^éclamer  sur  la  preuve  de  l'identité.  En  ce  sens,  la  pro- 
priété est  de  droit  social.  Mais  on  ne  peut  accepter  l'opi- 
nion que  J.-J.  Rousseau,  Montesquieu,  T^ochet  et 
Mirabeau  soutenaient  d'une  manière  absolue,  à  savoir  : 
que  la  propriété  est  une  émanation  du  Droit  civii ,  et  que 
la  volonté  politique  donne  seule  à  la  jouissance  d*un  petit 
nombre  un  titre  qui  appartient  à  tous.  La  propriété  a  pu, 
dans  certains  temps  et  dans  certaines  contrées ,  sous  la 
domination  de  pouvoirs  despotiques,  être  attribuée  au 
chef  de  l'État  comme  représentant  de  la  Divinité,  de  telle 
sorte  que  la  Jouissance  d'une  partie  de  la  terre  ou  de  la 
I  richesse  par  les  sujets  était  réputée  une  pure  tolérance; 
elle  a  pu,  ailleurs,  procéder  de  la  conquête  et  de  Tusur- 
1  pation.  Mais  ces  faits  n'infirment  point  le  droit  naturel 
que  possédaient  sur  la  terre  à  l'origine  des  choses  les 
premiers  occupants,  et  que  possèdent  encore  aujourd'hui 
tons  les  hommes  sur  les  fruits  de  leur  travail. 

La  société  donne  une  garantie  à  la  propriété  indiri- 
duelle  :  en  retour  elle  impose  à  ceux  oui  la  possèdent 
certaines  obligations,  qui  varient  selon  les  conditions  de 
l'organisation  sociale  :  tel  est,  par  exemple,  l'impôt  pro- 
portionné à  l'étendue  et  à  la  qualité  des  bieaa«  aorte  dt 


PRO 


1501 


PRO 


trihat  mwé  à  la  société  toat  entière  ;  telles  sont  les  limites 
que  la  loi  apporte  an  droit  d*user  et  d'abaser,  qaand  elle 
interdit  le  prodigue  pour  sauvegarder  les  intérêts  de  ceux 
qui  pourraient  souflnr  de  ses  folies,  quand  elle  prescrit 
à  la  Jouissance  de  la  richesse  certains  modes  qui  ne  met- 
tent pas  la  masse  des  citoyens  en  dausger  de  disette  ou  de 
raine;  tels  sont  encore  les  droits  de  mutation  et  de  suc- 
cession perçus  au  profit  de  TÉtat.  La  société  se  réserve 
lovJouTs,  si  l'intérêt  public  Texige,  la  faculté  d*expro- 
priation  (K.  es  mot)^  moyennant  une  indemnité  raison- 
nable. 

L'homme  a  la  propriété  des  fruits  de  son  travail  ;  comme 
conséquence,  il  en  possède  la  libre  disposition.  Il  peut 
consommer  sa  propriété,  raffermer,  l'échanger,  la  donner. 
Les  lois  positives  ont  consacré  ce  nouveau  droit,  et,  quant 
à  la  transmission  des  biens  après  décès,  elles  ont  pris 
encore  un  sage  parti,  en  établissant  l'hérédité  directe, 
qui  est  conforme  à  l'instinct  de  la  nature.  Ces  conditions 
de  la  propriété  sont  indispensables  au  développement  de 
l'individu,  de  la  famille,  et  de  la  civilisation.  Par  la  pro- 
priété, l'individu  est  en  pleine  possession  de  sa  person- 
nalité et  de  sa  liberté;  en  elle  il  trouve  un  puissant 
stimulant  à  son  activité.  Ce  n'est  pas  pour  lui  seul  qu'il 

L aspire,  mais  pour  la  famille  dont  il  est  le  chef,  et,  en 
poursuivant ,  il  n'a  pas  seulement  en  vue  la  stricte 
•satisfaction  des  besoins,  mais  le  bien-être  et  l'aisance. 
Les  peuples  à  leur  tour  grandissent  par  l'élévation  gra- 
duelle des  familles,  par  l'accroissement  de  leur  fortune  et 
de  leurs  lumières.  Sans  la  propriété,  le  travail  n'a  pas 
plus  de  but  que  de  résultat 

La  propriété,  atuquée  aux  différentes  époques  de  l'his- 
toire pu*  les  doctrines  communistes  (  V.  Gommonisme  ) ,  a 
trouve  de  nos  Jours  un  adversaire  original  par  la  nar- 
dlesse  et  la  crudité  de  ses  aphorismes.  Sa  fameuse  for- 
mule: La  propriété,  <fest  le  voi,  A  on  la  prenait  au 
sérieux,  serait  un  brutal  défi  à  toutes  les  opinions  reçues, 
à  toutes  les  idées  de  Justice,  au  sens  commun  lui-même. 
L'auteur  en  a  pins  tard  donné  la  valeur  véritable  ;  c'était 
■  une  machine  de  guerre,  bonne  pour  l'insurrection,  » 
et  qui  ne  peut  plus  servir  «  qu'à  contrister  les  pauvres 
gens,  »  un  de  ces  coups  bruyants  par  lesquels  on  attire 
l'attention  du  vulgaire.  Au  fond,  M.  Proudhon  n'a  rien  nié, 
ni  la  propriété  des  fruits  par  le  travail,  ni  le  droit  de 
vente  et  d'échange,  ni  l'hérédité  :  tout  se  borne  à  une 
chicane  subtile  sur  une  définition,  à  une  substitution  de 
mots  qui  ne  peut  pas  changer  la  nature  des  choses  ;  ce 
qu'on  nomme  propriété,  il  l'appelle  possession,  et  lepro- 
priéUUre  n'est  plus  qu*un  usttfruitier. 

Histoire,  —  La  propriété  a  subi  bien  des  vicissitudes. 
En  Orient,  et  particnlièrement  dans  l'Inde,  il  n'y  a  qu'un 
propriétaire,  parce  qu'il  n'y  a  qu'un  être  libre,  à  savoir, 
l'État  ou  le  Prince.  Cette  identification  de  la  propriété 
avec  le  Prince  est  dans  l'ordre  civil  ce  oue  le  panthéisme 
est  en  religion.  La  propriété  individuelle  est  l'exception, 
et  U  propriété  domaniale  la  règle.  Les  fonds  ruraux 
dans  rinde  sont  annuellement  distribués  entre  les  habi- 
tants de  chaque  village,  en  proportion  des  moyens  de 
travail  que  chacun  d'eux  possède  :  un  fonctionnaire,  gé- 
néralement héréditaire,  a  la  haute  main  dans  toutes  les 
afiiûres  de  la  communauté,  répartit  les  charges,  touche 
les  revenus  communs,  et  en  fait  la  distribution.  Il  v  a 
donc  communauté  de  la  propriété  foncière,  et  indivi- 
dualité de  la  propriété  mobilière;  la  propriété  foncière 
repose  entre  les  mains  du  chef  qui  régit  l'ensemble  du 
territoire.  Le  régime  de  la  communauté  est  dans  les 
mœurs  de  l'Inde,  et  on  ne  le  trouve  dans  l'État  que  parce 
qu'il  existe  dans  l'intérieur  de  la  famille.  La  primogé- 
niture,  en  effet,  constitue  un  droit  et  un  privilège  :  le 
droit  à  l'héritage  paternel  est  indivis,  et  c'est  le  premier 
né  qui  régit  la  communauté.  Seul  il  est  apte  à  contracter 
et  à  passer  tous  les  actes  qui  ont  rapport  à  la  propriété 
collective;  dispensé  de  rendre  aucun  compte  de  sa  ges- 
tion, il  peut,  de  sa  pleine  autorité,  hypothéquer  les  im- 
meubles de  la  succession,  et  vendre  même  les  valeun 
mobilières;  seul  il  a  le  droit  de  rompre  le  lien  social,  et 
de  restituer  à  ses  frères  la  libre  Jouissance  de  la  part 
qui  leur  ravient.  Une  telle  organisation  de  la  propriété 
explique  û  mine  des  États  asiatiques.  Pourquoi  tra- 
vailler, pourquoi  améliorer  et  bien  entretenir  la  terre, 
quand  on  peut  être  dépossédé  par  le  maître? 

La  loi  de  Moïse,  en  partageant  les  terres  éhtre  les  Hé- 
breux, voulut  piiâvenir  les  grandes  inégalités  que  le 
temps  amène.  La  possession  fut  limitée  à  un  demi-siècle. 
A  chaque  terme  ainsi  fixé,  une  répartition  nouvelle  de- 
vait rétablir,  autant  que  possible,  l'égalité  primitive  des 
panages.  Mais,  comme  l'inégalité  des  facultés  et  la  vio- 


I  lence  des  passions  poussent  les  uns  à  leur  ruine,  les 
autres  à  l'envahissement,  l'équiMbre  était  bientôt  dé- 
rangé, et  le  Jubilé  avait  tous  les  inconvénients  de  l'insta- 
biliti§,  sans  aucun  avantage  bien  réel.  La  loi  mosaïque 
proclamait  la  légitimité  des  héritages  :  «  Vous  ne  re- 
muerez point  les  bornes  posées  pour  séparer  les  héri- 
tages... Maudit  soit  celui  qui  déplace  les  bornes  de  l'hé- 
ritage de  son  prochain  !  »  (DetUéron.^  iO  et  27.) 

En  Grèce,  la  liberté  politique  fut  grande,  excessive 
même;  mais  la  liberté  civile  subit  bien  des  entraves,  et, 
sous  prétexte  c^ue  le  citoyen  est  comptable  de  soi-même 
envers  la  patrie,  l'État  pénétra  dans  la  famille  pour  sur- 
veiller les  personnes  et  régler  les  actes  ou  les  mœurs.  Il 
eut  la  prétention  d'être  l'origine  de  la  propriété,  le  sur- 
veillant de  ses  évolutions,  et  se  crut  maître  de  restreindre 
le  droit  du  possesseur  du  sol.  Platon  proclame  ce  prin- 
cipe, dont  toute  la  législation  grecque  ne  fut  qu'une 
application  :  u  Que  nos  citoyens  partagent  entre  eux  la 
terre  et  les  habitations,  et  <|u'ils  ne  lalraurent  point  en 
commun,  puisque  ce  serait  en  demander  trop  à  des 
hommes  nés,  nourris  et  élevés  comme  ils  le  sont  aujour- 
d'hui ;  mais  que  chacun  se  perauade  que  la  portion  qui 
lui  est  échue  n'est  pas  moins  à  l'État  qu'à  lui.  »  {Lots, 
liv.  V.)  Et  ailleun  :  «  Je  vous  déclare,  en  ma  qualité  de 
législateur,  que  je  ne  vous  regarde  pas,  ni  vous,  ni  vos 
biens,  comme  étant  à  vous-mêmes,  mais  comme  apparte- 
nant à  votre  fiunille,  et  toute  votre  famille,  avec  ses  biens, 
comme  appartenant  encore  plus  à  l'État.  »  (/6.,  liv.  XL) 
De  cette  philosophie  de  la  propriété  découlait  naturelle- 
ment un  préjuffé  dangereux,  à  savoir,  que  l'État  est  chargé 
de  présider  à  la  répulition  des  richesses  entre  les  ci- 
toyens :  par  conséquent,  on  le  rendait  responsable  de 
l'inégalité  des  fortunes,  et  on  exigeait  du  législateur 
qu'il  arrivât  par  ses  règlements  à  l'égalité  des  biens, 
a  Pour  les  législateurs,  dit  Aristote  (Politique) ^  le  point 
capital  est  l'organisation  de  la  propriété,  source  unique 
des  révolutions;  »  et  ce  philosophe  nous  montre  com- 
ment les  États  grecs  se  sont  consumés  en  efforts  per- 
pétuels pour  maintenir  des  proportions  égales  dans  la 
possession  du  sol  et  des  biens.  Les  révolutions  naissaient 
tour  à  tour  de  l'envie  des  pauvres  d'avoir  autant  que  les 
riches,  et  de  l'irritation  des  hommes  supérieura  en  acti- 
vité, en  industrie,  en  talents,  de  n'avoir  que  la  part 
commune.  De  là  toutes  ces  lois  qui  avaient  pour  but  de 
bannir  le  luxe,  de  faire  régner  la  frugalité,  la  simplicité 
et  une  égalité  chimérique.  L'humanité  s'est  Jouée  de  ces 
vaines  entraves  :  en  fait,  l'inégalité  des  fortunes  régna 
dans  toute  la  Grèce,  à  Sparte  plus  qu'ailleura,  malgré 
les  précautions  de  Lycurgue. 

Le  monde  romain  nous  offre  de  nouveau  l'immixtion 
de  l'État  dans  la  propriété,  mais  avec  de  tout  autres  ca- 
ractères :  Rome  reconnut,  dans  le  territoire  qu'elle  con- 
quit {ager  romanus)^  deux  sortes  de  propriété  :  la  pro- 
priété privée  (ager  prtwUt»),  provenant  d'une  première 
occupation,  ou  de  partages  eiSectués  entre  les  citoyens 
après  les  conqruêtes,  ou  de  conventions  et  contrats;  et  la 
propriété  publique  {ager  ptU)lieus)<t  domaine  propre  de 
l'État,  ou'il  affermait  par  lots  et  temporairement  à  des 
particuliera  moyennant  redevance,  laquelle  servait  à  ses 
besoins  d'administration  et  de  guerre.  Par  ce  système 
d'une  double  propriété,  l'État  ne  dépendait  pas  de  la 
propriété  particulière,  à  laquelle  il  ne  demandait  rien  ; 
il  était  assez  riche  par  lui-même,  et  rien  ne  le  gênait 
dans  ses  opérations;  il  pouvait  prévenir  la  misère  des 
citoyens  dépourvus  de  propriété  privée,  en  leur  donnant 
du  travail  et  des  aliments.  La  propriété  privée,  qu'on 
appelait  le  domaine  quiritaùre,  était  souveraine;  elle 
conférait  le  droit  politique,  la  domination  dans  la  cité 
{dominium)^  la  quiùité  de  quirite  ou  de  citoyen  romain. 
Elle  ressentit  peu  les  prescriptions  arbitraires  de  l'État  et 
sa  propension  à  la  réglementer  :  sans  doute  il  y  eut,  à  cer- 
taines époques,  des  impôts  ruineux  ou  des  confiscations 
terribles,  mais  on  ne  vit  en  aucun  temps  proclamer  un 
droit  de  l'État  à  déposséder  les  particuliers.  Lei  contrats 
par  lesquels  la  propriété  se  meut  et  se  déplace  furent 
suffisamment  libres;  la  succession  régla  son  coun  sur 
des  raisons  de  parenté  ;  le  testament  fut  un  acte  de  sou- 
veraineté individuelle.  Dans  les  lois  autant  que  dans  les 
mœun,  le  droit  de  l'État  sur  la  propriété  alla  peu  à  peu 
se  perdre  dans  l'oubli,  et  Cicéron  déclarait  déjà  que  la 
propriété  avait  son  origine  dans  la  loi  même  de  la  so- 
ciété humaine.  La  propriété  publique  agitait  en  même 
temps  rapprochée  des  conditions  de  la  propriété  privée  t 
malgré  les  lois  agraires  qui  en  avaient  réclamé  le  par- 
tage entre  les  pauvres,  elle  resta  entre  les  mains  d'uns 
aristocratie  puissante,  et,  sans  toutefois  que  le  droit  de 


PRO 


1502 


PRO 


l'État  fût  prescrit,  elle  devint  susceptible  de  veum, 
d'échange,  de  donation,  d'hypothèque,  de  transmission 
Héréditaire,  c.-à-d.  qu'elle  réunit  par  le  fait  tons  les  ca- 
ractères de  la  propriété  privée.  Le  christianisme  con- 
tribua ,  comme  les  Jurisconsultes  romains ,  à  établir  la 
véritable  nature  de  fa  propriété  :  car,  d'après  lui,  la  pro- 

{)riété  émane  de  Dieu,  c-à-d.,  pour  parler  la  langue  des 
ois,  du  droit  naturel  ;  elle  est  le  fruit  d'une  occupation 
première  et  du  travail,  et  non  pas  une  concession  de 
i'homme  à  l'homme;  elle  est  inhérente  à  la  nature  hu- 
maine, et  le  droit  de  l'individu  n'est  tempéré  que  par  le 
devoir  d'être  largement  charitable. 

Autant  qu'on  on  peut  Juger  par  les  Commentaires  de 
César  (VI,  13-i7),  toute  propriété  était  considérée,  dans 
l'ancienne  Gaule,  comme  dérivant  des  dieux,  et  se  dis- 
tinguait par  sa  destination  en  sacrée  et  profane.  La  pro- 
priété sacrée  était  réservée  aux  Druides;  ceux-ci  Jugeaient 
seuls  toute  question  de  revendication  et  de  bornage,  et 
c'était  dans  un  sacrifice  que  le  vol  était  puni  de  mort. 
L'État  pourvoyait  à  ses  besoins  par  des  impôts  ou  des 
prélèvements  sur  la  fortune  privée.  Les  Romains  appor- 
teront en  Gaule  leur  système  de  propriété  :  tout  en  lais- 
sant aux  individus  l'usage  immédiat  et  la  Jouissance  des 
biens,  l'État  se  réserva  la  propriété,  c.-à-d.  un  droit  de 
domination,  en  vertu  duquel  tout  lui  était  permis,  sur- 
veillance, direction  économique,  imposition  indéfinie.  Les 
invasions  des  Barbares  au  v*  siècle  modifièrent  de  nou- 
veau la  situation  de  la  propriété.  Quelques  terres,  laissées 
aux  vaincus  et  grevées  de  charges,  portèrent  le  nom  de 
terreft  tributaires  ou  censives.  Celles  que  s'arrogèrent  les 
vairit|ueurs  furent  de  deux  sortes,  les  alleux  et  les  béné- 
fices  (  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire)  ;  ces  terres  finirent  par  se  confondre  sous 
le  nom  de  /lefs,  et  cette  transformation  fut  complète 
après  Cbarlemagne.  Le  système  féodal  eut  sa  base  dans 
la  propriété  foncière,  a  Point  de  seigneur  sans  terre,  n 
disait-on  à  cette  époque  ;  c-à-d.  que  la  souveraineté  était 
intimement  unie  avec  la  propriété,  et  que  quiconque 
n'avait  point  de  terre  ne  pouvait  posséder  ni  titre,  ni 
pouvoir.  Un  autre  caractère  de  cette  organisation  sociale, 
c'est  que  le  seigneur  était  propriétaire  originaire  de  tous 
les  biens  situés  dans  le  ressort  de  sa  souverainté  :  de  là 
ces  contributions  qu'il  prélevait,  non-seulement  sur  les 
prodoits,  mais  sur  les  mutations  de  la  propriété  dépen- 
*dante,  par  exemple,  le  relief,  la  mainmorte,  etc.  Les  plus 
grandes  précautions  furent  prises  pour  immobiliser  la 
propriété  dans  le^  familles  sei^euriales  :  ainsi,  le  droit 
d'aînesse  en  assura  la  transmission  intégrale  ;  le  retrait 
féodal  permit  au  suzerain  de  racheter  la  terre  aliénée  par 
son  vassal.  Quant  aux  anciennes  terres  censives  et  aux 
constructions  élevées  par  les  roturiers,  elles  furent  expo- 
sées à  toutes  sortes  de  ravages  ou  d'usurpations  pour 
l'avantage  ou  le  plaisir  des  nobles. 

Cependant,  les  progrès  de  l'industrie  au  moyen  &ge 
créèrent  une  nouvelle  propriété,  la  propriété  mobilière, 
que  devaient  augmenter  plus  tard  les  métaux  précieux  de 
l'Amérique,  et  qui  ne  tarda  pas  à  lutter  contre  la  pro- 
priété foncière  ou  territoriale.  Elle  avait  sur  sa  rivale 
l'avantage  d'ôtre  mobile,  divisible,  accessible  à  tous;  elle 
permit  encore  plus  tard  d'acheter  la  propriété  du  sol.  La 
propriété  mobilière  n'eut  point,  dès  ses  premiers  Jours, 
rindépendance  qui  appartient  à  toute  propriété  :  elle  ne 
se  produisait  que  dans  le  milieu  des  corporations  indus- 
trielles, et  elle  dut  se  plier  aux  règles  de  ces  corpora- 
tions; comme  les  conditions  de  l'apprentissage  et  de  la 
maîtrise,  la  cjualité  des  produits  et  les  prix  de  vente 
étaient  déterminés,  la  richesse  mobilière  ne  put  se  livrer 
à  une  exploitation  égoïste,  asservir  les  travailleurs,  acca- 
arer  par  la  concurrence  le  monopole  de  la  production. 
D'un  autre  cèté,  l'Église,  par  ses  anathèmes  contre  le 
prêt  à  intérêt,  gêna  pour  longtemps  l'emploi  de  la  pro- 
priété mobilière. 

Quand  !es  rois  eurent  abaissé  la  féodalité,  ils  affichèrent 
les  mêmes  prétentions  que  les  seigneurs  en  matière  de 
propriété.  Parmi  les  griefs  du  Parlement  anglais  contre 
Richard  II,  à  la  fin  du  xiv«  siècle,  était  celui  de  s'être  dé- 
claré le  maître  des  propriétés  de  ses  sujets.  En  France, 
toute  une  école  de  Jurisconsultes  soutenait  <me  le  roi  est 
présumé  avoir  le  domaine  direct  de  toutes  les  terres  de 
son  royaume.  Ce  principe  fut  posé  dans  le  Code  Marillac 
(art.  383),  en  1629.  Louis  XIV  le  formula  avec  plus 
d'énergie  dans  un  édit  du  mois  d'août  4692.  La  Sorbonne, 
consultée  sur  un  impôt,  lui  répondait  que  les  biens  de 
ses  sujets  étaient  les  siens.  On  lit  dans  le  Testament  po- 
Utique  de  Louvois  :  «  Tous  vos  sujets,  quels  qu'ils  soient, 
vous  doivent  leur  personne,  leurs  biens,  leur  sang,  mi» 


avoir  droit  de  rien  prétendre.  En  vous  sacrifiant  toat  es 
qu'ils  ont,  ils  font  leur  devoir,  et  ne  vous  donnent  rien, 
puisque  tout  est  à  vous.  »  Dans  un  Mémoire  anonyme 
publié  à  Amsterdam  en  1689,  et  qui  fait  partie  d'an  re- 
cueil intitulé  les  Soupirs  de  la  France  eselaw,  il  est  dit 
que,  sous  le  ministère  de  Colbert,  on  délibéra  si  le  roi 
ne  se  mettrait  pas  en  possession  de  toutes  les  terres,  si 
on  ne  les  réunirait  point  toutes  au  domaine  royal,  pour 
en  Jouir  et  les  a0éraier  à  qui  la  cour  Jugerait  à  propos. 
Ce  qui  est  hors  de  doute,  c'est  la  conviction  personnelle 
de  Louis  XIV,  exprimée  dans  ses  instructions  au  Dau- 
phin :  a  Tout  ce  qui  se  trouve  dans  l'étendue  de  nos 
États,  de  quelque  nature  qu'il  soit,  nous  appartient  au 
même  titre.  Vous  devez  êlre  bien  persuadé  que  les  rois 
sont  seigneurs  absolus,  et  ont  naturellemeot  la  disposi- 
tion pleine  et  libre  de  tous  les  biens  qui  sont  possédés, 
aussi  bien  par  les  gens  d'église  que  par  les  sëenUers, 
pour  en  user  en  tout  comme  de  sages  économes.  »  Oetta 
théorie  monstrueuse  a  été  renvenée  par  la  Révolution 
française,  avec  les  privilèges  attachés  aux  propriétés  no- 
bles ou  ecclésiastiques,  et  le  principe  de  l'égalité  de  tous 
,  devant  la  loi,  proclamé  par  l'Assemblée  constituante,  a 
servi  de  base  au  Code  Napoléon,  Désormais  en  France  la 
propriété  est  inviolable,  accessible  à  tous,  et  lea  cbarges 
qu'elle  supporte  sont  les  mêmes  pour  tons. 

Chez  les  peuples  musulmans,  le  droit  de  propriété  est 
aussi  incontestable  que  chez  les  chrétiens.  Le  Koran  a 
dit  :  a  La  terre  appartient  à  Dieu;  il  la  donne  à  l'iman, 
et  l'iman  la  répartit  ensuite  suivant  son  bon  plaisir.  » 
Mais  c'était  seulement  chez  l'infidèle  qcd  le  muaulman 
regardait  la  terre  comme  un  don  passager  ipn  pouvait 
être  pris  par  les  ministres  de  Dieu.  Chez  lui,  chez  ses 
frères,  dans  sa  cité,  la  propriété  a  un  caractère  invio- 
lable. Les  Arabes  ont  une  grande  répugnance  à  se  dé- 
{ mouiller  de  leurs  terres,  même  par  des  transactions.  Chez 
es  Turcs,  la  confiscation  n'a  Jamais  été  l'exercice  ni  d'un 
droit  politique,  ni  d'une  loi  religieuse,  mais  une  mesure 
pénale,  destinée  à  ch&tier  une  révolte  ou  une  trahison. 

V.  G.  Garnier,  De  la  Propriété  dans  ses  rapports  avec 
le  Droit  politique,  1792,  in-12;  De  Savigny,  Du  droit  de 
propriété,  1803,  in-8<>;  Comte,  Traité  de  la  Propriété, 
1834,  2  vol.  in-8«;  Troplong,  De  la  Propriété  diaprés  le 
Codecivtlj  1830,  in-S»;  Proudhon,  Traité  du  domaine 
de  Propriété,  1839, 3  vol.  in-8<>;  Agnès,  De  la  Propriété 
considérée  comme  principe  de  conservation^  1840,  3  vol. 
in-8<*;  Ghavot,  Traité  de  la  Propriété  mobtlière  suivant 
le  Code  civil,  1839, 2  vol.  in-8*;  Du  Puynode,  EsseU  sur  la 
Propriété  territoriale ^  1843,  in-8°;  LeWstier,  De  la  pro- 
priété et  de  son  principe,  1844,  in-8°;  Fréd.  Baatiat,  Pro- 
priété  et  Loi,  1848,  br.  in-16;  G.  deMolinari,  les  Soirées 
de  la  rue  S^Lazare,  Entretiens  sur  les  lois  économiques 
et  Défense  de  la  Propriété,  Paris,  1849,  gr.  in-8«;  Tbiers, 
De  la  Propriété,  Paris,  1849,  gr.  in-18;  Burdet,  Considà- 
rations  sur  la  nature  du  droit  de  Propriété,  1851 ,  in-8°  ; 
Rivière,  Examen  de  la  Propriété  mobilière  en  France, 
1854,  in-8^;  Demolombe,  Distinction  des  biens,  Propriété, 
1856. 2  vol.  in-8°;  Lesenne,  De  la  Propriété  avec  ses  dé- 
membrements, 1858,  in-8°;  Pellat,  Exposé  des  principes 
du  Droit  romain  sur  la  Propriété,  2*  édit.,  1853.  in-8«; 
Giraud,  Recherches  sur  le  droit  de  Propriété  diez  Us 
Romains,  Aix,  1838,  in-8®;  Lescaret,  De  la  Propriété  pei^ 
dant  Vépoque  féodale,  1851,  in -8»;  Laboulave,  Ëistoire  du 
droit  de  Propriété  foncière  en  Occident,  1839,  in-8<>. 

PROPRiéré  (  Certificat  de  ) ,  acte  par  lequel  un  officier 
public  atteste  le  droit  de  propriété  ou  de  jouissance  d*une 
ou  de  plusieurs  personnes  sur  le  capital  et  les  arrérages 
d'une  rente,  d'une  pension  viagère  de  l'État,  sur  un 
cautionnement,  sur  des  actions  de  Ta  Banque  de  France,  etc. 
Pour  les  rentes  et  les  pensions  viagères,  il  doit  être  pro- 
duit dans  les  six  mois  du  décès  du  titulaire  ou  du  pen- 
sionnaire, à  peine  de  déchéance.  Le  certificat  est  déuvré 
par  un  notaire,  lorsqu'il  y  a  un  inventaire  ou  partage  par 
acte  public,  ou  donation  entre-vifs,  ou  transmission  tes- 
tamentaire ;  par  le  Juge  de  paix  du  domicile  du  décédé, 
sur  l'attestation  de  deux  témoins,  s'il  n'existe  aucun  des- 
dits actes  authentiques  ;  par  le  greffier  du  tribunal ,  lors- 
que la  mutation  résulte  d'un  Jugement.  Il  doit  être  timbré, 
enregistré  et  légalisé. 

PROPRiiTÉ  DU  STTLB,  rapport  parfait  du  mot  et  de  la 
pensée.  «  Parmi  toutes  les  dilTérentes  expressions  qui 
peuvent  rendre  une  seule  de  nos  pensées,  dit  La  Bruyère, 
il  n'y  en  a  qu'une  qui  soit  la  bonne  :  on  ne  la  rencontre 
pas  toi;^ours  en  panant  ou  en  écrivant.  Il  est  vrai  néaa- 
moins  qu'elle  existe,  <][ue  tout  ce  qui  ne  l'est  point  eM 
faible  et  ne  satisfait  point  un  homme  d'esprit  qui  veot  ae 
faire  entendre.  »  Le  terme  propre  rend  l'idée  tout  entière  | 


PRO 


1503 


PRO 


nn  terme  pou  propre  ne  la  rend  qu*à  demi  ;  an  terme 
impropre  la  défigure.  On  pèche  souvent  contre  la  pro- 
priété par  l'emploi  de  mots  qui  paraissent  synonymes  : 
chaque  idée  ayant  son  signe  propre,  il  ne  peut  y  avoir 
des  termes  entièrement  synonymes.  On  doit  toujours 
chercher  16  mot  propre  :  cependant  la  bienséance  veut 
4u*oD  révite  quand  il  est  obscène,  dégoûtant  ou  bas.  II 
faut  encore  Téviter  quand  il  est  technique,  ou  du  moins 
l'expliquer,  lorsque  Ton  s'adresse  à  des  hommes  peu  versés 
dans  rétttde  des  sciences.  H.  D. 

PROPRléTÉ  INDUSTRIELLE.    V.  BREVETS  D'iNVERTION,  BIAR- 
QCES  DE  FABRIQUE,  CONTREFAÇON. 

PROPRliré  LITTÉRAIRE  ET  ARTISTIQUE,  droit  quO  lOS  écrl- 

vains  et  les  artistes  possèdent  sur  leurs  œuvres.  La  loi, 
qui  garanti!  à  tous  la  propriété  perpétuelle  des  biens 
meubles  et  immeubles,  s*est  montrée  moins  libérale  pour 
les  productions  littéraires  et  artistinues.  Dans  l'ancienne 
monarchie  française,  la  propriété  était  reconnue  à  per- 
pétuité ou  k  temps,  selon  le  bon  plaisir  du  souverain,  qui 
pouvait  d'ailleurs  s'y  refuser  absolument,  ou  subordonner 
sa  garantie  à  diverses  conditions.  Ordinairement  aucune 
limitation  n'était  fixée.  L'ordonnance  de  Moulins  de  1566, 
une  déclaration  de  Charles  IX  en  1571,  et  des  lettres  pa- 
tentes de  Henri  ITI,  constituent  toute  la  vieille  législation 
en  cette  matière.  Un  auteur  n'était  investi  à  perpétuité  de 
la  propriété  de  son  œuvre  qu'à  condition  de  ne  la  point 
céder  à  un  libraire  :  en  cas  de  cession,  son  droit  finissait  à 
sa  mort,  et  l'œuvre  tombait  dans  le  domine  public.  Une 
loi  du  24  Juillet  1793  donna  à  la  propriété  une  durée  de 
M)  ans  apr(^s  la  mort  des  auteurs.  Un  décret  du  5  février 
1810  étendit  cette  durée  à  toute  la  vie  de  la  veuve,  et  en 
outre,  après  elle,  à  20  ans  pour  tous  les  descendants  de 
l'auteur.  Cest  la  loi  du  8  mars  1854  qui  régit  aujourd'hui 
la  propriété  littéraire  et  artistique.  Elle  décide  que  les 
auteurs  d'écrits  en  tous  genres,  les  compositeurs  ae  mu- 
sique, les  artistes,  et  leurs  veuves.  Jouissent,  durant  leur 
vie  entière,  du  droit  exclusif  de  vendre  ou  de  faire 
vendre  leurs  ouvrages,  et  d'en  céder  la  propriété  en  tout 
ou  en  partie  ;  après  eux,  les  enfants  en  Jouissent  pendant 
30  ans;  si  l'auteur  ne  laisse  pour  héritiers  que  des  ascen- 
dants ou  des  collatéraux,  la  jouissance  est  réduite  pour 
ceux-ci  à  10  ans.  Le  cession naire  des  droits  de  l'auteur 
ou  de  S08  héritiers  en  jouit  pendant  tout  le  temps  con- 
cédé par  la  loi  à  ceux-ci,  à  moins  que  l'acte  de  cession 
n'ait  fixé  un  temps  plus  court.  Les  propriétaires  d'ou- 
vrages posthumes  sont  assimilés  en  droit  aux  auteurs. 
Des  lois  et  règlements  ont  déterminé  la  quotité  des  droits 
que  perçoivent  les  auteurs  sur  les  pièces  de  thé&tre  re- 
présentées {V,  AUTEUR  —  Droits  d').  Leurs  intérêts  sont 
également  protégés  contre  la  contrefaçon  (F.  ce  mot).  En 
érigeant  en  délit  l'introduction  en  France  d'ouvrages 
contrefaits  à  l'étranger,  le  législateur  ne  donnait  pas  aux 
intéressés  une  arme  suffisante  contre  les  coupables;  il 
fallait  fermer  aux  contrefacteurs,  à  l'aide  de  traités  inter- 
nationaux, les  débouchés  qu'ils  trouvaient  dans  les  di- 
vers pays.  Le  gouvernement  français  n'est  entré  que  tard 
dans  cette  voie  :  le  premier  traité  de  garantie  réciproque 

{>our  la  propriété  littéraire  et  artistique  a  été  conclu  avec 
a  Sardaigne  en  1843.  Depuis  cette  époque,  des  conven- 
tions semblables  ont  été  faites  avec  un  (prand  nombre 
d'États. 

La  Belgique,  qui  a  été  longtemps  le  centre  des  contre- 
façons, suit  aujourd'hui  la  loi  française,  ainsi  cpe  la 
Hollande.  En  Angleterre,  la  propriété  est  garantie  aux 
auteurs  pendant  42  ans  à  dater  de  la  publication  des 
ouvrages,  et  s'éteint  7  ans  après  leur  mort.  En  Prusse, 
en  Autriche,  en  Bavière,  en  Saxe,  dans  le  Wurtemberg, 
ei,  en  général,  par  toute  la  Confédération  germanique, 
enfin  en  Italie  et  en  Portugal,  le  droit  s'éteint  30  ans 
après  le  décès  ;  le  terme  est  de  25  ans  en  Russie,  avec 
10  ans  de  plus  si  une  nouvelle  édition  a  été  publiée  dans 
les  cinq  dernières  années  du  premier  délai;  il  est  de 
15  ans  en  Grèce,  et  de  50  en  Espagne.  En  Danemark,  il 
est  de  30  ans,  pourvu  que  les  rééditions  soient  au  moins 
quinquennales,  sinon  l'ouvrage  tombe  dans  le  domaine 
public  Aux  États-Unis  d'Amérique,  le  droit  est  de  14  ans; 
il  se  prolonge  de  14  autres  années  en  faveur  de  l'auteur 
vivant  ou  de  sa  veuve,  de  ses  enfanta  ou  de  ses  petita- 
enfants. 

V.  Beuchot,  Méflextons  sur  les  lois  concernant  la  pro' 
priété  littéraire^  1817,  in-8*;  Auger,  Observations  sur  la 
nature  de  la  propriété  littéraire,  1826,  in-4°;  Lemercier, 
Principes  et  développements  sur  la  nature  de  la  prO' 
priété  littéraire,  1826,  in-4»;  Pinard  et  Lévesoue,  Traité 
de  la  propriété  littéraire  et  inditstrielle,  1835,  in-8«; 
Reaouard,  Traité  des  droits  d'auteur  dans  la  littéro" 


ture,  les  saenees  et  les  beaux-arts,  1838,  2  vol.  In-8»t 
Nion,  Droits  civils  des  atUeurs,  artistes  et  inventeurs, 
1846,  in-8o;  Villefort,  De  la  Propriété  littéraire  et  ar- 
tistique au  point  de  vue  international,  1851,  in-8*';  Jobard, 
la  Propriété  intellectuelle,  Bruxelles,  1851  ;  Muquardt, 
la  Propriété  littéraire  internationale,  1851;  Blanc  et 
Beaume,  Code  de  la  Propriété  industrielle,  littéraire  et 
artistique,  1854,  in-8**;  Breulier,  Du  droit  de  perpétuité 
de  la  Propriété  intellectuelle,  1854,  in-8**;  Calmels,  De  la 
Propriété  et  de  la  Contrefaçon  des  oeuvres  de  Vintelli' 
gence,  1856,  in-8**;  Cappellemans,  De  la  Propriété  litté" 
raire  et  artistique  en  Belgique  et  en  France,  in-12;  G.  de 
Champagnac,  Étude  sur  la  Propriété  littéraire  et  artis^ 
tique,  in-12;  Pataille  et  Huguet,  Code  international  de 
la  Propriété  indwtrielle,  artistique  et  littéraire,  1858, 
in-8*;  Delalain,  Législation  française  et  belge  de  la  PrO' 
priété  littéraire  et  artistique,  1858,  in-8*;  Laboulaye, 
Etudes  sur  la  Propriété  littéraire  en  France  et  en  Angle-' 
terre,  1858,  in-8**;  Laboulaye  et  Guiffrey,  la  Propriété 
littéraire  au  xvni*  siècle,  1860,  in-8*>;  Gastambide,  HiS" 
torique  et  théorie  de  la  Propriété  des  auteurs,  Paris, 
1862;  Oscar  Comettant,  la  Propriété  intellectuelle  au 
point  de  vue  de  la  morale  et  du  progrès,  3*  édition, 
Paris,  1862.  B. 

PROPYLÉES  D'ATHÈNES.  V.  ce  mot  dans  notre  Oto- 
tionnaire  de  Biographie  et  d*Histoire, 

PROPTLéES  DE  PARIS  (Los),  uom  douué  par  de  Calonne, 
contrôleur  général  des  finances,  aux  anciennes  Barrières 
de  Paris.  Voici  quelle  fut  leur  origine  :  le  grand  chimiste 
Lavoisier,  qui  était  en  même  temps  fermier  général, 
avait  calculé  que  le  nombre  habituel  des  habitants  de 
Paris  requérait,  proportionnellement,  en  objets  consom- 
mables, un  cinquième  de  plus  que  la  quantité  atteinte 
par  l'impôt  de  l'octroi,  ce  qui  faisait  dans  les  taxes  un 
déficit  de  près  de  six  millions  de  francs.  Il  communi-^ 
qua  son  observation  et  ses  calculs  au  gouvernement,  par 
un  rapport  qui  resta  enfoui  plus  de  deux  ans  dans  les 
cartons  du  Contrôle  général  des  finances.  Un  premier 
commis,  Mollien  (qui  fut  ministre  du  Trésor  sous  Napo- 
léon I^),  l'en  tira,  et  Joly  de  Fleury,  alors  contrôleur 
général,  ordonna  d'en  suivre  Texécnuon.  Les  prépara^ 
tiens  préliminaires  conduisirent  Jusqu'en  1784,  et  de 
Calonne,  successeur  de  Joly  de  Fleury,  fit  mettre  la  main 
à  l'œuvre.  Il  voulut  que  l'on  profit&t  de  l'occasion  pour 
donner  aux  portes  de  la  capitale  de  la  France  un  carac* 
tère  monumental,  qui  rappel&t  les  célèbres  Propylées 
d'Athènes.  Mollien  imagina,  comme  complément  du  mur 
de  clôture,  le  boulevard  extérieur,  en  vue  de  faciliter  les 
communications,  d'éclairer  la  surveillance  des  commis  de 
l'octroi,  et  de  diminuer  la  circulation  des  grosses  voi- 
tures affluant  dans  la  ville,  en  les  obligeant  à  suivre  cette 
voie  le  plus  longtemps  possible  avant  de  franchir  les 
Barrières  pour  arriver  à  leur  destination.  Ces  boulevards 
devaient  sjouter  à  l'effet  des  modernes  Propylées,  qui 
reçurent  ce  nom  parce  qu'elles  devaient  être  élevées,  et 
le  furent  en  effet,  en  dehors  du  mur  d'enceinte  destiné 
à  déjouer  la  flraude  sur  les  octrois. 

11  y  eut  soixante  Propylées  ou  b&timents  de  Barrières, 
dont  la  moitié  au  moins  ne  se  composait  que  d'un  seul  bà^ 
timent,  élevé  sur  le  côté  de  la  route,  qui  était  barrée  par 
une  grille  de  fer  avec  doubles  portes,  et  tenant  d'un  côté 
au  b&timent,  de  l'autre  à  une  grosse  guérite  de  pierre.  Les 
Barrières  les  plus  importantes  avaient  un  bâtiment  en 
parallèle  de  chaque  côté  de  la  route.  Ces  constructions, 
ainsi  que  le  mur  d'enceinte,  coûtèrent  25  millions  de 
francs.  Commencées  en  1784,  sur  les  plans  et  sous  la 
direction  de  l'architecte  Ledoux,  la  plupart  étaient  ache> 
vées  vers  la  fin  de  1787  ;  mais  alors  un  avis  du  Conseil 
royal  des  finances,  provoqué  par  Loménie  de  Brienne, 
qui  succédait  à  de  Calonne,  fit  arrêter  les  travaux, 
comme  ruineux  dans  un  temps  où  le  Trésor  était  déjà 
obéré.  Le  contraste  des  nouvelles  constructions  avec  ce 
qui  existait  ressortait  d'autant  plus,  qu'un  mur  de  moel- 
lons, chaperonné  d'une  épaisse  dalle  de  pierre,  rempla- 
çait une  misérable  clôture  de  planches  de  sapin,  ébré- 
chées  par  le  temps,  et  que  les  Propylées  succédaient  à  de 
pauvres  cabanes  de  bois,  montées  sur  des  galets  de  bois, 
qui  même  avaient  valu  pendant  longtemps  aux  Barrières 
ae  Paris  le  nom  de  nmettes.  Les  travaux  furent  donc 
abandonnés,  et,  quatre  ans  après,  l'Assemblée  consti- 
tuante ayant  supprimé  les  octrois,  tout  devint  inutile, 
b&timents  et  mur  d'enceinte.  On  ne  les  acheva  qu'en 
l'an  vn  (1798)  et  années  suivantes,  après  le  rétablisse- 
ment de  l'octroi  par  le  gouvernement  directorial. 

Les  Propylées  de  Ledoux  occupèrent  beaucoup,  dans 
le  tempiu  l'attention  du  public  et  des  artistes;  elles 


PRO  1! 

Mimnlel  coDseiTèreiittoDjMin  une  certaine  célébrité  pir 
le  caraclAre  moaumnital  des  plus  gnndM,  par  l'ond- 
Dtlilé,  la  biivrerte,  ou  l'tléganM  de  lODtee.  Eltee  D'eili- 
lentplua  depui»l86D,  époque  où  Paria  leçut  pour  limita 
M  munllle  Mstioanéieiilendonc  InléraMant,  an  poiat 
de  rue  de  l'art,  de  eonierver  le  ■oatenir  de  ne  cooitni^ 
tiona,  car,  dt  qaeiquo  manière  qu'on  tel  }nge,  «!!«• 
marquent  un  elîort,  plue  d'une  fêla  heureni,  pour  lortir 
dei  aentien  battas.  Peu  de  bïtlrnsnts  ont  été  autant  crl- 
liquét  et  blkmés  dans  leur  conception  :  lis  aTaient  ce- 

KQdant  certaine*  qualité*  ifenieinDle,  qui  auraient,  au 
MJD,  prouTé  que  Ledoui  n'était  paa  un  arcliilecte 
nlgaire.Au  piui  Tort  du  déchaînement  contre  cet  artiate 
Dotataur,  Qoatremèra  de  Quincr.  qui  ne  préconisait  que 
tea  ordre*  greea  et  le  pur  claadque  grec,  écriTit  néan- 
motni  dana  aon  Dûtùmnoùv  tarehiteeture  \t  Jugement 
aolvant  :  ■  Lor*  de  1*  (In-madon  de*  nouTelle*  Bairlère* 
de  Paria,  rauteor  ine^iena  de  ce*  monumanti  Tanta*- 


H  pno 

tique*  ae  plut  à  j  reproduire  l'ordre  dorique  uns  but, 
qu'il  emt  propre  à  *enir  l'Idée  qu'il  a'était  faite  eu 
caractère  coDTeuable  k  dea  barrière*...  Cependant  le  ca- 
ractère Imposant  «t  grandiose  que  l'auteur  de  cet  nono- 
ntenta  sut  tirer  de  remploi  de  cet  ordre,  la  fierté  de  la 
modteature,  la  hardiesse  de*  profils,  et  l'aspect  ntaje*- 
taeai  de  qnelquea-unes  de  cea  compoiitiona,  parmi  le>- 
qaalle*  on  retrouve  quelques  rediteset  de* imiiatioos  de* 
pie*  1-  --    -  • 


«  de*  andena  temple*  doriques,  l'étrangetd  n 
uD  u>  Style,  contribuèrent  k  familiariser  lea  yeux  m»  m 
goût  et  le*  proportion*  du  dorique  grec  sans  liaaa.  ■ 

Haintenuit  nous  allons  entrer  dan*  quelques  détail*, 
et  montrer  des  spédmens. 

Les  Irais  Propylées  ci-dessous  sont  de  midlocrei,  ci 
même  de  petites  proponioi>s,  san*  néanmoins  perdre  le 
caractère  monumental  dont  Ledoui  se  préoccuiMit  balu' 
tuellement,  ei  qu'il  affecta  souvent  même  pour  se*  cen^ 
poaitions  les  motna  importantes. 


Barrlirt  âi  fïcjmt 


Danièrt  ia  Camhat. 


Tiarriètt  dtt  Uiterwtlrt 


On  trouTsra  ■  le  caractère  imposant  et  grandiose  et 
l'aspect  majestueux  •  dans  la  vue  ci-dessous.  Remarquez 
la  Bévéritè  du  soubassement,  dont  les  mura  sont  taillés  en 
refend*  profondément  fouillés  et  arrondis  en  bossages; 
observei  ces  frontons  si  larges  portés  sur  de  gros  pi- 
lastres carrés,  qui  leur  donnent  un  aspect  de  lourdeur 


d'Allemagne  fc  gaucne  :  voïlt  pourquoi  il  y  a  quatre  gué> 
rites,  deux  &  l'eilrémité  de  chaque  grille.  Ce*  guéritea  ont 
un  cvactère  de  force  remarquable,  qui  fait  presque  re^ 
sembler  teura  arcs  k  des  portes  de  forteresse.  Hais  le 
petit  pavillon  qui  les  coiCTe  fait,  par  sa  l^reté.  une  sin- 
gulière dis{Mira(e  arec  le  reste.  Le  grand  bUiment  du 
centre  subsiste  encore,  et  sert  comme  de  penpeetiTe  as 
long  baaain  de  La  Villette. 


Barriirt  Salnl-SattlM. 


On  reconnaîtra  encore  le  même  caractère  de  grandiose 
et  de  m^eaté  dans  la  vue  ci-après  de  la  Barrière  du 
Trân*  ou  ds  Vincmnvt;  les  colonnes  triomphales  qui  oc- 
cupent le  cenDv  de  la  composition  portent  les  statues  de 
ChariemagrM  et  de  S' Louis,  et  reposent  sur  un  piédestal 
qui  serrait  de  guérite.  Elles  subsistent  encore,  et  don- 
Mient  un  cachet  d'élégance  L  la  cemposition,  dont  cepen- 
dant 1*1  bâtiments  latéraux  sont  pteini  de  lourdeur. 

Nens  appliquerons  &  cette  Bani^  et  k  !*  précédenie 
le  9HI  Qnatremère  dit  eoeore  de  ooa  Propylâ*  t  ■  Ces 


édifices  olTrent  de  loin  des  masses  pyramidales  asset 
belles,  et  quelquefois  imposantes,  dont  les  dimensions 
générale*  paraissent  annoncer  dans  t'éloiimemcnt  ua 
style  large  et  grandiou.  •  —  Obtenir  cet  effet  pour  de& 
édiflces  tous  destinés  k  Atie  ?us  de  loin,  k  frapper  la  Tue 
de  plu  de  pos.'uinls  que  de  regardaiiia,  dénotait  d^'k  une 
très-Iiablle  intelligence  du  but  que  l'on  avait  dQ  se  pro- 
poser. L'architecture  est  toujours  faite  pour  être  vue  de 
loin,  et  l'artiste  qui  n'a  pas  llnlnition  de  l'effet  dus 
masses,  plus  encora  que  de  celui  de*  ligne*  (inluitiou 


ad  elles  de«deni  tlor»  se  t 

qucï-uDBi  oDt  l'aspect  de  peliu  châteaux  de  pliiunce,  I  Blanche  et  du  Route,  que 

([Uiuid  elles  élaient  tnut  à  Tut  en  vae  de  t>  campaigae;  j  ilan  le  IrouTuent  en  pleine  campagne. 


Barrlin  di  CUetf. 

ha  trote  ■p&lmeni  BsfaTét  ci-aprè^  témoignent  en- 
cors  de  la  récondité  d'imagiiiadon  de  I^oui,  qui  noa- 
Mulemeal  puisait  dune  ton  propre  fonds,  mais,  à  l'oc- 
caiioa,  s'inspirait  aussi  des  éditlccs  de  l'antiquité.  Ia 
première  de  ces  deux  vues,  celle  de  b  barrière  de 
Ikuillji.  parait  évidemment  une  aorta  de  rémlnlueiica 
du  temple  de  ClauJu,  i  Rome.  —  La  seconde,  la  barritra 


Barriirt  dt  BtlItTttlt. 

de  la  Confértnci,  a  uu  caractère  plus  original  i  jiTbi;é« 
sur  le  bord  de  la  Seine,  où  il  y  avait,  en  plein  fleuve, 
une  sorte  de  Douane,  l'arcliitacte  a  donna  k  son  édiflae 
un  peu  ce  caractère.  Une  guérite,  rormant  piédesUl  à 
une  statue  colossale  assise  de  l'Abondance,  est  lri»-heu' 
reutement  placée  sur  le  mur  du  quai.  Ce  motif  produit 
un  LeureuK  effet  daag  l'uscuccmcnt   fÉotraL  tt  prouve 


PRO  1! 

nowe  que  Ledoui  enteadait  bien  Is  dîUributlon  et  la 
pondëraiioQ  des  muiei,  chose  ti  ininorunle  en  arclil- 
lectura.  —  Quant  k  la  trciiième  barrière,  ce'le  du  Monl- 
Pamati»,  ehoUle  afln  que  l'on  ne  noua  accut&t  pas  de 
partialild  pour  l'aniste,  elle  ne  parait  guère,  matgrf  boii 
nom,  kvoir  été  Inspirde  par  le  dieu  des  boaui-arts  ;  c'c&l 
Jne  decsUei  qui,  par  leur  exi«wive  liUaireriaiOnt  dû  pro- 


certaln  point,  sans  ntanmoins  le  justifier, 
d'anatbâme  que  les  délicau  en  arclij lecture,  et  pent-^a 
au^  un  peu  les  envieui,  >e  plurent  ï  jeter  sur  les  Vre- 
pylAcs  de  Paris.  Nous  reviendrons  tout  Jk  l'Ijenre,  eo 
parlant  de  la  barrière  de  t'EloiU,  sur  co  petit  et  cn»- 
majencontrcui  édince. 


Barrlèn  dr  Heuaiy.  l 

If  barrière  Satot-Dmii  rentre  daiisle  camctèi'e  de  cli&- 
teau;  «on  portique  en  colonnes,  avec  bossages  supportant 
un  fronton,  est  d'un  effet  asaei  mile.  Ce  fronton,  ré- 
pété sur  de  petits  avant-corps  engai^  sur  les  troisautrcs 
cûtâs.  leur  donne  peut-Ëtre  trop  d'importance,  bien  que 
couronnant  un  simple  mur  percé  de  renËCres,  et  nuit  & 
la  valeur  du  portique  de  la  façade.  Ou  remarquera  la 
Euérite  massive,  placée  comme  un  avant'poste  d'obiervo- 


'o  Confin 


Darriirt  du  Uonl-Panuuie. 


tion  aur  le  boulevard,  indépendAmment  des  deux  guérites 
plus  simples  au  milieu  de  sa  grille.  —  La  burière  de 
Charenton  représente  deux  temples  doriques  grecs,  trop 
Qdèlement  inapii-és  du  Parthénon,  du  temple  de  Tliésée, 
h.  Athènes,  du  temple  de  Minerve  au  cap  Sunium,  etc.  On 
croit  que  cette  barriùre  a  été  faite,  ou  tout  su  moins  ler- 
miuée,  par  Uolinos,  architecte  de  la  ville  de  Paris  du 
temps  du  1"  Empire  ^nçais. 


tairiéit  de  CliartHlBa. 

Loi  défauts  des  Propylées  de  Paris  sont  l'exagération 
des  contrastes,  où  la  bizarrerie  est  quelquefois  poussée 
Jusqu'au  clL0i|aant;  l'abus  de  l'innovation  dans  les  pro- 
III9.  bouleversant  l'agoucement  des  membres,  met- 
tant, par  eiemple,  des  quarts  de  rond  1  la  place  des 
doucines,  et  réciproquement;  plaçant  sur  dos  colonnes 
d'un  aspect  robuste  des  tailloirs  trèi-minccs,  que  les  ar- 
chitraves semblent  devoir  dcrascr  ;  en  un  mot,  afTeclant 
couvent  un  mélange  de  force  et  do  faiblesse,  de  sévérité 
et  de  caprice,  qui  n'ont  ni  gr&ce,  ni  grandeur.  Ledoui 
remit  les  bossages  en  honneur,  msis  il  en  fit  abus,  soit 
dans  les  arcs,  dont  il  liaclia  l'arcliivolls  par  des  claveaux 
saillants  en  nombre  égal  sui  claveaux  lisses,  comme  à  la 
barrière  du  Trâa»,  par  exemple;  soit  dans  les  cliam- 
liranles  de  portes  et  de  fenétros,  où  il  procéda  de  mémo, 
et,  pour  les  fenêtres,  comprit  Jusqu'k  leurs  appuis  dans 
Mt  impitoyables  bossages,  ainsi  qu'h  la  barrière  Sainl- 
Ôinit;  soit  enfin  sur  des  colonnes,  où,  aui  bosssgea  peu 
laillants  et  k  bords  arrondis,  &  la  manière  florentine,  il 
Alla  jusqu'k  substituer  des  dés  carrés,  alternant  avec  les 
tambours  circulaires,  et  coupant  des  fûts,  tes  liérissant 
du  haut  en  bas,  de  manijre  k  leur  faire  perdre  deux  fois 
leur  forme,  de  sorte  qu'elles  ne  ressemblaient  ui  k  des 
colonnes,  ni  k  des  pilastres  {V.  la  figura  ci-aprisii 
mit,  enfin,  en  tes  accouplant  par  des  assises  boriiODtalcs, 
allant  de  l'une  li  l'autre,  ainsi  qu'on  l'a  vu  plus  haut  à  la 
tarrièreilit  Mont-Pai-aauê  ;  ceci  es<  vraiment  de  l'ox- 


narTtin  Saint-Dtna. 

travagonce.  Quant  aux  colonnes  de  la  barrière  de  l'Eloite. 
peut-être  pourrait-oii  dire  que  Ledoux  les  a  coupées  pm 
dos  dés  carnés,  parce  qu'elles  devaient  fltres'ues  de  ceiti 
immense  avenue  de  MeuiDy,  et  qu'k  distance  celte  bi- 
larreiio était  peu  sensible,  01  donnait  un  as|)BCt  de  forte 
cl  do  Eolidité  h  des  fûts  qui  auraient  pu  pû^tr?  grêles. 
C'est  là  une  cxplica^on  que  nous  ne  donnons  pas  pour 
excellente,  mais  que  uous  ne  croyons  pas  dénuée  do 
vraisemblance.  En  effet,  ai  l'on  veut  bien  examiner  uotn 
dessin,  surtout  |iaur  les  faces  vues  de  proBl,  parallèle' 
ment  à  la  roule,  lu  bizarrerie  est  bien  moins  choquante, 
et  produit  un  effet  de  lignes  qui  n'est  pas  sons  quelque 
agrément.  N'oublions  pas  non  plus  que,  quand  Lcdoui 
éleva  CCS  deux  Propylées,  l'énorme  Arc  de  l'Ëtoile  n'exis- 
tait pas  pour  faire  contraste  et  les  écraser. 

Aucun  travail  du  genre,  et  aussi  considérable  que  celui 
des  Propylées  de  Paris,  n'avait  encore  été  exécuté  en 
aussi  peu  de  temps  et  par  un  seul  artiste.  Les  qualités  et 
les  défauts  que  montra  Ledoux  dans  cette  raste  entrepris* 
influèrent  sur  le  goût  du  temps;  on  le  vit  dans  plusieun 
hùiels  construits  alors,  puis  sous  le  Consulat  et  le  f  Em- 
pire, et  dont  II  subsiste  encore  quelques-uns  k  Pari^ 

Nous  éprouvons  un  regret  tnste  en  réHéchissant  que 
cet  article  est  une  espèce  d'oraison  funèbre.  Quelques 
mois  après  le  1*'  Janvier  ISGO,  jour  néfaste  pour  nos 
l*ropylées,  qui,  malgré  de  graves  défauts,  particuli^«- 
miiut  dïiu  let  détitili,  avaient  cependant  un  nai  mérita 


]'origiiKiIité,ell«oiitdliparaduMt,fcpeapn«enTi)uic;  1  en  rolonde,  bw  Intfon  de  S'-IH.>iTe-1ii-lïoirtnH'>,  ^ 
|]  n'en  reste  plus  qua  tes  rare»  spécimens  que  nous  avons  numc;  elle  doit  son  stliitfcitpodtiOP  d>ni  le  lardiapa' 
sommas,  et  auxquels  il  Faut  aioulcr  ua  Jcs  moins  mi-  blic  dâ  UoncFidi,  dont  elle  forma  la  hlriqua  '*  P'°*  '°V 
riiants,  It,  d-àwant  barrUrt  a»  Ckartrei,  petit  temple  |  portanlc  et  la  seule  qui  porte  avec  elle  un  vraiMunauiT 


l^iU,  j)  tpFaadtde,  ai  ijiuidiuac,  si  bi'îlliini,  le  iiui> 
piillque  Psrla  âe  Tlapoljon  111,  n'a  plus  nujourd'ijui  |>iiur 
Propylées  qiie  des  cahutes  de  S  k  3  mèl.  de  liauteur,  en 
pierre  meulière,  couvertes  en  dalles,  et  accotées  au  re- 
Tïlement  intérieur  d'un  bastion,  derrière  lequel  elles  se 
cachent.  Tout  cela  est  k  peine  décent  pour  une  capitale 
qui  prétend  être  à  1&  télé  de  la  civilisation  et  des  beaux* 
arts.  11  faudra  bien  refaire  un  Jour  des  Propylées  monu- 
mentales, si  l'on  veut  donner  à  Paris  l'harmonie  de  la 
majMté  et  de  la  splendeur,  depuis  ses  eitrémités  Jusqu'à 
son  centre.  C.  D— t. 

PHOQUBSTEOR.  V.  ce  Utft  dans  notre  Dictionnaire 
i»  Biographie  si  d'Hittoiri. 

PROHATA  (AoJ,  du  lutin  pro,  pour,  et  râla,  réglée, 
sous-ent.  parti,  part  ;  synonyme  de  d  proportion.  Dans 
une  société  commerciale,  dans  une  liquidation,  3n  refoit 
au  frorata  de  sa  mise  sociale,  de  sa  créance, 

PROROGATION  (  du  latin  prorogari,  étendre),  exten- 
lion  de  temps.  En  Droit,  la  Prorogation  di  délai  est  aC' 
tardée  en  orocédure  k  raison  de  la  distance,  ta  Proroga- 
tion d»  délai  est  aussi  le  délai  da  gr&ce  qu'un  créancier 
accorde  k  son  débiteur  qui  ne  s'est  pas  libéré  lors  de 
l'écbéance;  elle  ne  décharge  pas  la  caution,  qui  peut 
tonJouTB  poursuivre  te  débiteur  {Codt  Napol.,  art.  903Q). 
On  nomme  Prorogation  d'tnquête  l'autorisation  donnée 
par  le  Juge  de  continuer,  dans  certaines  circonstances, 
l'enqueia  au  deli  di  terme  prescrit  par  ta  loi  [  Codt  dt 
ProcM.,art.Wetï19).li  j  a  Prorogation  d»  juridiction 
quand  une  partie  reconnaît  la  Juridiction  d'un  Juge  qui 
n'a  pas  droit  de  connaître  de  I  affaire;  elle  ne  peut  avoir 
lieu  qu'4  raison  d'exceptions  portant  sur  ta  quolilé  des 
persotines,  puisqu'il  faut  que  la  tribunal  saisi  soit  com- 
I>éleni  ï  raison  de  ht  matière.  —  [>ans  le  langage  poli- 
tique, on  appclla  P^ogation  l'acte  par  lequel  un  sou- 
verain déclare  les  travaux  des  assemblées  législatlvM 
suspendus  pendant  un  délai  déterminé. 

PROSAIRP.,  livre  d'église  contenant  les  Protts.  On  a 
dH  aussi  Protier. 

PROSAlSHt:,  défaut  do  poésie  dans  les  vers.  C'est  le 
tsractére  de  la  majoriliS  des  rimeurs.  Pour  éviter  le  pro- 
saïsme, il  ne  suflit  pas  d'être  bien  maître  de  la  rime  et  de 
la  mesure,  It  fuut  encore  que  les  vers  renferment  des 
pensées  nobles  et  belles,  exprimées  en  termes  beureuse- 

PllOSATEUII,  écriviûn  qui  n'emploie  que  la  prose 
(ont me  ei pression  de  sa  pensée. 

PROSCENIOM.  V.  ce  mot  dans  notre  Dielionnair»  dt 
Biographie  et  d'Hittoirt. 

PROSCRIPTION  (du  latiit  scribtre  pro,  écrire  devant 
tout  le  monde,  afficher,  publier),  condamnation  au  ban- 
nissement ou  à  la  mort,  ordinairement  prononcée  sans 
aucune  forme  judiciaire,  et  que  tout  homme  pouvait 
mettre  à  exécution.  Elle  était  sénéralenient  accompagnéa 
deUeoaSsntiondeibiïiu,  Ln&BcIeiUM&reut  un  frA- 


quciit  usage.  A  .Uiièncs,  quand  la  proscrlpilnn  avait  ei 
prononcée  par  le  peuple,  un  héraut  annonçait  dajis  tout 
les  lieux  publics  la  somme  promise  It  iiulionquc  appor- 
terait la  tétc  liu  proscrit,  et  cette  somme  était  di'-fosée 
sur  l'Agora  ou  sur  l'autel  de  quelque  divinité.  Les  Ro- 
mains distinguèrent  la  pi'OicripIion  eiuila  et  ta  proscrip- 
tion politique.  La  première  était  faite,  à  la  requête  dés 
créanciers  d'un  débiteur  qui  se  cachait  pour  n'être  point 
traduit  en  Justice,  par  un  édit  du  préleur  affiché  quatre 
fois  il  la  porte  de  ce  débiteur  i  puis,  ï  défaut  da  compa- 
rution, les  biens  étalent  partagés  entre  tes  créanciers  ou 
vendus  i,  leur  profit.  Dans  la  proscription  politique,  oa 
affichait  au  Forum  les  noms  des  proscrits,  sans  même 


Antoine,  Octave  et  Lépide.  Chei  les  Hodernee,  te 
acre  des  Armagnacs  en  France  sous  Charles  VI,  Irs 
édits  du  roi  d'I^spagne  Philippe  II  contre  Guillaume  de 
Nassau  et  ses  adhérents,  en  France  la  S'-Bsnbélemj,  I* 
révocation  de  l'édit  de  Nantes,  les  massacres  d«s  Joan 
néfastes  de  la  Révolution  française,  les  exceptions  aui 
lois  d'amnistie  rendues  par  Louis  XVIII  au  début  de  Ij 
Restauration ,  les  transportallons  de  Juin  IStS ,  ont  été 
de  véritables  proscriptions.  B. 

PROSE  (du  latin  prorta  ou  proia  oratio,  langage  di- 
rect), se  dit  par  opposition  k  vttt.  C'est  le  'japge  ordi- 
naire des  hommes,  non  gêné  par  la  mesure,  la  cadence, 
la  rime  poétloues;  aussi  les  Latins  t'appelaient-ils  •  îau- 
gage  libre  et  aég£gé  d'entraves  •  (oraljo  KÀiUa  ae  libtra\ 
Les  Grecs  l'appelaient  <  langage  pédestre  •  (en  latin 
eermo  psdsifrii),  parce  qu'ils  comparaient  sa  marche  k 
celle  dos  gens  de  pied ,  dont  le  pas  est  plus  tranquille  et 
moins  bruyant  que  celui  des  cavalier»,  La  prose  n'est 
astreinte  qu'aux  r^tes  gramraaticalea,  à  l'assMtimeot 
agréable  des  voyelles  et  des  consOBnes,  k  l'accord  1ml- 
tatif  des  mol»  avec  les  idées  et  des  périodes  avec  les 
alTeclIons  de  i'kme.  TouteTots,  elle  est  susceptible  d'une 
certaine  harmonie  qui  n'est  pas  sans  aaalogle  avec  celle 
de  la  tangue  des  vers.  Elle  admet  les  mêmes  ligures,  l«a 
mêmes  im^es  ;  mais  ses  toura  sont  moins  hardis,  et  ils 
doivent  loujoura  se  rapprocher  plus  ou  moins  de  ceux 
qu'emploie  la  conversation  familière.  Certaines  proses, 
pour  avoir  parfois  un  air  poétique,  ne  laissent  [M  que 
d'avoir  an  casactère  de  graiide  simplicité  :  telle  est  enei 
les  Grecs  la  prose  de  Platoa,  chei  les  Romalos  eelle  de 
Cicéron  et  de  Titc-Lire,  cbei  nous  celle  de  Bossuet  et  de 
Fénelon.  Celle  teinte  poétique  se  remarque  surtout  dans 
les  discours  oratoiies  dont  le  sujet  est  élevé,  dans  les 
descriptions,  dons  les  tableaux  que  les  onteura  et  In 
historiens  ont  souvent  occasion  de  mettre  sous  nos  jeux  i 
tel  est,  entre  tant  d'autres,  le  tatdeaa  de  ta  déroute  de 
Thraslmène,cheiTite-IJve,et  celui  de  la  tempête  estujée 
par  la  reine  d'Angleterre  Henriette  de  France,  dan* 
roralson  fuiièl>rt  de  cette  Driaceuc  par  Poumu  CntiiH 


PRO 


150g 


PRO 


i^^tt  de  Qcéron  offrent  une  vivicfté  de  peintore  toute 
poétique  :  par  exemple,  W  Verrtnes,  la  âaiwieHne,  le 
triaitô  des  Devoirg,  etc.,  en  contiennent  plusieurs  de  ce 
genre.  Mais  aucun  prosateur  peut-être  n*a  Jamais  réuni  à 
uo  plus  haut  degré  la  aimplicité  noble  et  familière  et  la 
richesse  des  couleurs  poétiques,  que  Platon,  dans  les 
mythes  si  ingénieux  à  la  fois  et  si  élevés  par  lesquels  il  a 
voulu  rendre  pi  us  saisissantes  pour  Tesprit  quelques-unes 
de  ses  théories  philosophiques  les  plus  neuves  et  les  plus 
abstraites.  Gicéron  semble  s*ètre  inspiré  de  ces  beaux  mo- 
dèles dans  le  célèbre  épisode  de  sa  -publique,  connu 
sous  le  nom  de  Songe  de  Scipion, 

Dans  rhistoire  littéraire,  la  prose  ,«ralt  avoir  été  par- 
tout précédée  par  le  lanrâge  poétique;  unsi,  chez  les 
Grecs,  VIliade,  V0dy8sée,\GS  chants  lyriques  sous  toutes 
leurs  formes,  les  traités  moraux  et  philosophiaues  eh 
vers,  ont  enchanté  les  imaginations,  enrichi  les  mé- 
moires, avant  qu*il  eût  encore  paru  un  bon  ouvrage  en 
prose,  et  cet  ouvrage  est  celui  d'Hérodote,  postérieur  de 
quatre  sièdes  au  premier  chef-d*œuvre  poétique  dans 
1  ordre  des  temps,  aussi  bien  que  du  mérite.  Gliez  les 
Latins,  Ennius  et  Lucrèce  sont  antérieurs  &  Gésar,  à 
Gicéron,  à  Salluste;  et  lorsque  parut  notre  Villehardouin, 
la  littérature  française  n*avait  d*autros  monuments  que 
les  chants  des  Troubadours  et  des  Trouvères.  P. 

PROSE,  terme  de  Liturgie.  )  V,  notre  Dictionnaire  de 

PROSÉLYTES.  \     BioQr.  et  d'Histoire. 

PROSÉLYTISME ,  mot  qui  ne  s'est  appliqué  d'abord 
qu*aux  efforts  des  diverses  communions  cbnHiennes  pour 
conquérir  des  àmea,  et  qu*on  a  étendu  ensuite  à  l'esprit 
de  propagande  des  partis  politiques. 

PROSKUQUE.  V,  Synagogue,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

PROSIER.  V.  Prosairb. 

PROSODIE,  mot  grec  qui  signifiait  proprement  la  pro- 
nonciation d'un  mot  selon  la  quantité  et  selon  l'accent. 
Les  grammairiens  grecs  nommaient  prosodies  les  ûgnes 
de  la  quantité  et  de  l'accentuation,  ainsi  que  ceux  qui 
représentaient  les  esprits,  et  même  l'apostrophe,  l'hy- 
phen  et  la  diastole.  Les  Latins  ont  fait  de  ce  mot  à  peu 
près  le  même  usage  que  les  Grecs.  Mais,  chez  les  Mo> 
dernes,  il  ne  s^appllque  généralement  qu'à  la  quantité 
des  syllabes,  surtout  lorsqu'il  s'agit  de  l'Antiquité;  car 
les  langues  modernes,  et  la  n6ti-e  en  particulier,  ont  une 
prosodie  bien  moins  nettement  marquée  que  les  langues 
anciennes.  En  allemand,  la  quantité  longue  se  rencontre 

{presque  toujours  avec  l'accent  tonique  sur  la  même  s^I- 
abe,  ou  plutôt  c*est  cet  accent  qui  détermine  la  quantité 
longue.  L'abbé  d'Olivet  a  composé  un  TYailé  de  la  Pro- 
sodie française,  où  il  établit  les  principes  qui  règlent  la 
prononciation  d'un  grand  nombre  de  mots.  Nous  avons 
toutefois  c(Aservé  en  partie  le  sens  ancien  du  mot  pro- 
sodie,  lorsque  nous  l'avons  appliqué  à  l'art,  non-seule- 
ment de  donner  à  chaque  son  ou  syllabe  le  ton  qui  lui 
est  propre,  mais  de  marquer  les  mesures  par  les  diffé- 
rents repos  de  la  voix ,  et  d'établir  une  juste  harmonie 
entre  la  pensée  et  le  débit  on  la  lecture  (V.  Accent,  Dé- 
CLAMATioN^.  —  Enfin  on  appelle  Prosodie  un  traité  sur  la 
quantité  des  syllabes  grecques  et  latines.  Uermann , 
Spltzner,  Matthis,  J.  Hubert,  Gonod,  ont  traité  de  la 
prosodie  grecque.  Pour  la  poésie  latine,  le  traité  élémen- 
taire le  plus  commode  est  celui  de  Lechevalier,  revu  par 
Dumas.  V*  l  Essai  philosophique  sur  le  principe  et  les 
formes  de  la  versification  par  Ed.  Duméril ,  et  la  Théoi*ie 
de  la  quantité  prosodique  par  Bergmann.  P. 

PROSODIE,  sorte  de  nome  pour  les  flûtes^  propre  aux 
chants  par  lesquels  les  anciens  Grecs  commençaient  les 
sacrifices. 

PROSÔDIUM,  ancien  nom  du  Motet  (F.  ce  mot), 

PROSOPOGRAPUIE  (du  grec  prosôpon,  face  exté- 
rieure, visage,  physionomie,  et  graphéin,  décrire),  en 
termes  de  Ilhétorique,  description  des  traits,  de  l'air,  du 
maintien  d'un  homme  ou  d'un  animal.  La  prosopographie 
du  cheval,  par  exemple,  a  été  donnée  dans  le  livre  de 
Job,  dans  les  Géorgiques  de  Virgile,  dans  Buffon,  etc.  — 
De  nos  Jours,  on  a  employé  abusivement  le  mot  Prosopo^ 
graphie  pour  désigner  la  peinture  de  la  vie  et  des  carac- 
tères des  personnages  mentionnés  ou  mis  en  scène  dans 
un  auteur  :  ainsi  Groen  van  Prinsterer  a  publié  la  ProsO" 
pographie  de  P/aton  (Leyde,  1823),  et  D'Estré  la  Proso- 
pographie d'Horace  (Amst.,  1844). 

PROSOPOPÉE  (dQ  grec  prosôpon,  personne,  et  poiéô. 
Je  fais.  Je  suppose),  figure  de  lUiétorique,  <{ui  consiste  à 
prêter  le  mouvement  et  la  vie  aux  choses  insensibles,  à 
faire  apparaître  et  parler  les  êtres  invisibles,  .abstraits, 
imaginaires,  et  tusau'aux  morts  ou*elle  évoque  de  leurs 


tombeaux.  La  Bible,  et  surtout  les  livres  daa  Prophètes, 
sont  remplis  d'admirables  prosopopées.  Dans  la  Pharsalt 
de  Lucain ,  l'image  éplorée  de  la  Patrie  apparaît  à  César 
an  bord  du  Rubicon ,  et  le  conjure  de  ne  pas  aller  plus 
loin.  On  peut  citer  encore  la  prosopopée  où  Socrate,  dans 
le  Criton ,  fait  parler  les  Lois,  qui  commandent  au  con- 
damné de  ne  pas  se  soustraire  au  supplice,  même  quand 
il  est  injuste,  fiossuet,  dans  ses  Oraisons  funèbres,  a  sou- 
vent recours  à  cette  figure,  et  l'on  peut  se  représenter 
l'effet  que  ce  grand  onteur  devait  produire  sur  son 
illustre  auditoire,  lorsque,  ranimant  la  cendre  des  morts, 
il  les  faisait  tout  à  coup  apparaître  au  milieu  de  ce  monde 
qui  les  avait  connus,  et  donnait  ainsi  par  leur  bouche 
aux  grands  et  aux  rois  d'effrayantes  et  sublimes  leçons. 
J.-J.  Rousseau  a  fait  une  belle  prosopopée,  lorsque,  dans 
son  Discours  sur  les  Lettres,  il  évoque  l'ombre  de  Fabri- 
cius  pour  opposer  aux  désordres  dos  Romains  la  pureté 
des  mœurs  de  leurs  ancêtres.  La  Prosopopée,  du  reste, 
est  une  figure  qu*il  ne  faut  employer  qu'avec  réserve,  et 
surtout  à  sa  place,  c-à-d.  dont  on  ne  doit  faire  usage 
qu'autant  que  l'importance  et  la  mijesté  du  sujet  le 
comportent^  et  qu'il  y  a  un  certain  degré  d'exaltation 
chez  l'orateur  et  dans  l'auditoire.  Les  écrivains  qui  font 
de  l'entliousiasme  à  froid  n'aiTÎvent  qu'au  ridicule,  et 
rappellent  l'emphatique  plaidoirie  de  Tlntimé,  évoquant 
la  famille  désolée  de  son  client ,  le  chien  Gitron.      G. 

PROSPARALEPSE.  V.  Paeagogb. 

PROSPECTUS  (du  latin  prospicere,  voir,  considérer), 
sorte  de  programme  qui  se  publie  avant  qu'un  ouvrage 
paraisse,  et  dans  lequel  on  en  annonce  le  sujet ,  le  ca- 
ractère, l'étendue,  le  format,  le  prix,  etc.  On  a  étendu 
le  mot  aux  avis  distribués  au  sujet  d'entreprises  quel- 
conques. 

PROSPHERA,  pains  des  oblations  dans  la  liturgie 
grecque. 

PROSTAS.  V.  AimcHAMBRB. 

PROSTHÈSE  (du  grec  prosf^xif ,  addition),  addition 
d'une  lettre  ou  d'une  syllabe  au  début  d'un  mot.  G'est 
une  espèce  de  Métaplasme  (V.  ce  mot).  Ainsi,  en  latin , 
on  a  dit  gnatus  pour  natus.  Vaugment  syllanique  était 
une  prosthèse.  On  pourrait  donner  ce  même  nom  au  re- 
doublement de  certains  parfaits  latins  {pepuli,  t^endi, 
cucurri)^  au  préfixe  ge  des  Vs^cip<»  passifs  allemands, 
aux  lettres  ajoutée  pour  l'euphonie  par  le  peuple  en 
avant  des  mots  qui  en  laUn  commencent  par  se,  sp 
(scala,  écMle,  species,  espèce),  11  y  a  une  prosthâ 
OBnn  grenouille ,  dérivé  deranuncula;  dans  nombril, 
dérivé  de  umbilicus;  dans  loisir,  venant  de  oHari  (la 
véritable  origine  de  ce  mot  est  l'oisir).  P. 

PROSTYLE  (  du  grec  pro^  en  avant ,  et  siulos ,  co- 
lonne), se  dit,  en  Arehitecture,  d'un  édifice  qui  n'a  de 
colonnes  qu'à  sa  pai'tie  antérieure,  &  sa  prinapale  faoê. 
Notre-Dame  de  Lorette,  à  Paris,  est  une  église  prostyle. 

PROSYLLOGlSBiE,  ou  Syllogisme  continué,  argument 
composé  de  cina  propositions,  formant  deux  syllogismes 
endialnés  de  telle  sorte  que  la  conclusion  du  premier  sert 
de  majeure  au  second.  Ex.  :  «  Ge  qui  nous  rond  heureux 
est  aimable;  or,  la  vertu  nous  rend  heureux;  donc  la 
vertu  est  aimable.  Or,  la  Justice  est  une  vertu  ;  donc  la 
Justice  est  aimable.  »  Le  prosyllogisme  n'est  guère  em- 
ployé :  il  a  quelque  chose  d'embarrs^sé  et  de  lourd. 

PROTAGONISTE,  le  principal  acteur  dans  une  pièce 
grecque,  celui  sur  qui  toute  la  puissance  du  drame  est 
concentrée.  Quand  une  tragédie  porte  le  nom  d'un  de 
ses  personnages,  c'est  ce  rOle  que  remplit  le  prota- 
goniste. 

PROTASE  (du  grec  protosw,  proposition),  terme  qui 
désigne  généralement  en  grec  ce  que  nous  appelons  Pro- 
position. Il  se  prend  soit  dans  le  sens  de  question  à 
démontrer,  soit  dans  celui  de  prémisse  d'tm  argument. 
Par  extension,  il  désignait,  en  Littérature,  la  partie  du 
drame  où  le  su^et  s'annonce  et  commence  à  se  développer 
(  à  peu  ppès  notre  i*'  acte)  ;  et^  en  Grammaire,  la  1'*  par- 
tie d'une  période  :  en  ce  dernier  sens  il  s'oppose  à  Apo- 
dose  (K.  ce  mot).  P. 

PROTATIQUE  (Personnage),  nom  que  les  Anciens  don- 
naient au  personnage  oui  ne  paraissait  que  dans  la  pro^ 
tase  du  drame,  comme  Dave  dans  le  Phormion,  Philotide 
et  Syra  dans  VHécyre  de  Térence,  et  qui  fiûsait  en  mnde 
partie  l'exposition  des  événements.  P. 

PROTE  (du  ^rec  prôtos,  premier),  celui  qui,  dans  une 
imprimerie,  dinge  et  surveille  l'exécution  des  cravanx. 
Il  distribue  l'ouvrage  aux  compositeurs,  lève  les  difficul- 
tés qui  s'y  rencontrent,  s'assure  que  les  fautes  marquées 
sur  les  épreuves  ont  été  corrigées,  veille  à  la  bonne  dia» 
tribution  des  blancs  et  à  l'exactitude  du  registre,  «te 


PRO 


1509 


PRO 


Dans  les  grands  établissements,  il  supijlée  le  maître,  soit 
pour  entreprendre  des  impressions,  soit  pour  en  établir 
le  prix  aTcc  les  éditeurs  i  il  distribue  la  paye  aux  ou- 
vriers, inscrit  les  feuilles  qui  ont  été  composées  ou  im- 
primées depuis  la  dernière  paye,  et  met  le  prix  à  la  fin 
de  chatte  article.  Ses  fonctions  exigent  de  rinstruction, 
de  TactiTité,  du  soin  et  de  Tordre* 

PROTECTEUR,  titre  politique.  V^  notre  Dietumnatrs 
de  BiogrtÊfiklê  et  d'Bittoin. 

pRorBCTBom  (Systèm^^  en  termes  d'Économie  noiitique, 
sTstdme  qui  consiste  a  écarter  d'un  pays,  par  des  droits 
élevéson  même  par  une  prohibition  absolue,  les  mar- 
chandises étrangères  qui  pourraient  faire  concurrence  à 
rinduatrie  nationale,  et  à  donner  des  primes  à  ceux  qui 
cultiTent  certaines  industries.  Jusqu'à  la  fin  du  moyen 
Age,  les  gouYemements  s'inquiétèrent  peu  des  importa- 
tions et  des  exportations  commerciales  i  les  impôts  qu'ils 
prélèvent  à  rentrée  et  à  la  sortie  des  marchandises 
avaient  un  but  exclusiToment  fiscal  ;  la  noblesse  avait  le 
même  mépris  pour  le  commerce  que  pour  l'Industrie,  et 
ceux  qui  se  livraient  à  ces  deux  professions  étaient  éga- 
lement accablés  de  charges  de  toute  sorte.  D'ailleurs ,  il 
y  a  un  sentiment  naturel  aux  Ages  d'ignorance  et  de  gros- 
sièreté, c'est  que  la  vente  dans  un  pays  ne  doit  apparte- 
nir qu'aux  habitants  de  ce  pays,  et  que  l'étranger  doit 
acheter  ce  droit  au  prix  d'une  forte  taxe,  ^joutons  que  le 
régime  des  corporations,  en  vigueur  au  moyen  Age,  de- 
vait entraîner  comme  conséquence  l'institution  des  Doua- 
nes :  ces  corporations,  créées  d'abord  pour  faire  obstacle 
à  la  concurrence  du  dedans,  se  liguèrent  ensuite  contre 
la  concurrence  étrangère,  et  érigèrent  en  principe  le  mo- 
.%>pole.  Enfin  ,  partant  de  cette  fausse  idée,  que,  pour 
enrichir  un  pays,  il  faut  autant  que  possible  y  attirer  les 
métaux  précieux,  on  prohiba,  non-seulement  l'exporta- 
tion de  l'or  et  de  l'argent,  maïs  encore  l'importation  des 
marchandises  qu'on  pouvait  fabriquer  dans  le  pays  même, 
et  l'on  crut  que,  si  rexportation  dépassait  l'importation , 
la  différence  devrait  se  solder  en  métaux  précieux  :  telle 
fut  l'origine  du  système  mercantile  et  de  la  baiance  du 
commercé  (V.  cet  mot»).  Ces  diverses  raisons  expliquent 
comment  Colbert  fut  amené  à  établir  un  ensemble  de  pro- 
hibitiont  et  de  tarifs  de  douanes,  qui  peuvent  se  Justifier 
comme  mesures  temporaires,  nécessaires  pour  permettre 
à  une  industrie  naissante  de  se  développer,  mais  qui  ne 
sont  pas  le  régime  normal  et  indéfini  du  commerce.  Les 
autres  États  imitèrent  la  France  Mais  on  s'aperçut  bien- 
tôt que  le  système  protecteur  se  détruisait  en  se  génâra^- 
lisant,  qu'il  isolait  les  peuplei  et  resserrait  les  relations 
commerciales.  De  là  vinrent  des  traitét  de  commerce, 
c-à-d.  des  transactions  sur  les  douanes,  et  beaucoup  de 
guerres  dans  les  temps  modernes  eurent  pour  causes  des 
publications  de  tarifs  contraires  à  ces  traités.  Les  guenes 
de  la  Révolution  et  le  Blocus  continental  (F.  notre  Dto- 
tionnaire  de  Biographie  et  dPBistoire)  de  Napoléon  I** 
donnèrent  une  nouvelle  énergie  au  système  protecteur  en 
France  (  F.  Douanes  1  :  il  faut  leur  attribuer  cette  orga- 
nisation de  l'industrie,  ce  goût  du  monopole  et  des  pro- 
hibitions, ces  habitudes  de  routine .  qui  ont  opposé  de 
nos  Jours  tant  d'obstacles  à  la  liberté  des  échanges. 

Le  système  de  la  protection  force  les  consommateurs  à 
payer  plus  cher  les  objets,  et,  par  conséquent,  il  diminue 
leurs  revenus;  l'importation  oies  marchandises  leur  est, 
au  contraire,  fiivorable,  et  leur  intérêt  passe  avant  celui 
d'un  petit  nombre  de  producteurs.  Ah  lien  d'aider  le  tra- 
vail national,  la  protection  tend  à  le  restreindre  :  plus  il 
faut  paver  pour  se  procurer  un  objet,  moins  on  dépense 
pour  s'en  procurer  d'autres.  Si  l'importation  des  mar- 
chandises étrangères  dans  un  pays  était  un  mal,  il  s'en- 
suivrait que,  quand  un  État  veut  écouler  au  dehors  ses 
prodoits,  il  veut  nuire  à  ses  voisins;  et  il  fSsudrait  ad- 
mettre encore,  comme  conséquence  du  même  principe, 
que  l'Angleterre,  en  ouvrant  ses  ports  aux  produits  étran- 
gers sur  de  vastes  proportions ,  a  dû  travailler  à  sa  pro- 
pre ruine.  Un  fait  constaté  par  l'expérience,  c'est  qu'en 
général  l'importation  des  marchandises  étrangères  chez 
un  peuple  industrieux  a  une  contre-partie  naturelle, 
l'exportation  d'une  quantité  corresponoante  de  produits 
nationaux,  si  bien  que  c'est  un  échange  qui  profite  an 
travail  chez  les  deux  parties  contractantes.  L'expérience 
montre  également  que  l'importation  n'arrête  pas  la  fa- 
brication des  produits  similaires  :  dans  les  États  du  ZoU- 
verein,  où  la  filature  est  protégée  par  des  droits  très-mo- 
dérés, elle  s'est  açtmdie,  pendant  un  délai  de  12  ans, 
de  i30  p.  0/0,  tandis  qu'en  France,  sous  le  régime  de  la 
prohibition,  elle  ne  s*est  accrue  que  dans  une  proportion 
dnq  Ibis  moindre.  La  liberté  des  échanges  n^a  pas  nul 


aux  États  qui  l'ont  pratiquée  :  ainsi,  la  Saxe,  qui  n'a 
Jamais  connu  le  système  restrictif,  a  fait  son  éducation 
industrielle  sans  tarifs  de  douanes,  et  s'est  mise  au  prer 
mier  rang  des  contrées  manufacturières;  la  Suisse,  sans 
ports,  sans  canaux,  sans  voies  de  navigation  importantes, 
et  pourtant  sans  tarifs,  sans  prohibitions,  a  développé 
prodigieusement  son  industrie;  à  Cuba,  l'entière  liberté 
du  commerce  a  produit  une  étonnante  prospérité;  les 
progrès  des  États-Unis  de  l'Amérique  du  Nord  se  mesu-* 
rent  chronologiquement  à  l'abaissement  de  leurs  tarifs  def 
douanes  et  à  la  décadence  de  l'esprit  de  prohibition* 
L'aiguillon  de  la  concurrence  étrangère  provoque  le  bon 
marché  par  le  pi'ogrès  aumiel.  il  oblige  les  chefs  d'indus- 
trie, et,  sous  l'influence  de  ce  bon  marché,  la  consom- 
mation s'accroît  si  bien,  que  le  marché  national  offre  un 
débouché  à  une  production  nationale  toujours  croissante, 
en  même  temqs  qu'à  une  certaine  masse  de  produits 
étrangers.  Une  enquête  commerciale  ordonnée  en  France 
en  1833  aboutit  au  plus  étrange  résultat,  et  fit  voir  tout 
ce  qui  se  cache,  d'égoisme  sous  la  question  de  la  prohibi-' 
tion  et  du  libre  échange  :  chaque  industrie  ayant  été 
appelée  à  faire  valoir,  à  proposer  ses  moyens,  les  inté- 
ressés prouvèrent  à  l'envi  ^u'il  fallait  supprimer  toute» 
prohibitions  et  toutes  restrictions,  excepté  celles  qui  les 
favorisaient  eux-mêmes  ;  ce  ne  furent  que  réclamations 
et  griefs  des  maîtres  de  forges  contre  les  propriétaires  de 
forêts,  des  producteurs  de  machines,  des  açriculteurs , 
des  armateurs  contrôles  maîtres  de  forges,  des  fabricants 
de  draps  contre  les  producteurs  de  laine,  des  fabricants 
de  tulle  contre  les  filateurs  de  coton,  etc.  En  un  mot,  lea 
producteurs  comptaient,  pour  s'enrichir»  sur  autre  chose 
que  leurs  talents,  leur  persévérance,  leur  économie;  ils 
bâtissaient  leur  fortune  sur  un  autre  terrain  que  celui 
du  travail,  et  constituaient  le  gouvernement,  non  pas  le. 
protecteur  de  tous  les  intérêts  sociaux,  mais  le  gardien' 
de  leurs  privilé^s.  Il  fut  évident  que  'l'on  considérait, 
dans  cette  question,  le  sort  de  quelques  intérêts,  nés  de 
la  gjuerre,  du  monopote  et  de  la  faveur,  mais  nullement 
la  richesse  et  la  prospérité  générales.  Ce  ne  fût  pourtant- 
que  20  ans  après,  à  la  suite  de  l'Exposition  universelle 
de  1855,  où  l'industrie  française  avait  elle-même  affirmé. 
ses  progrès,  qu'une  loi  fut  présentée  au  Corps  LédsUitif 
pour  la  levée  des  prohibitions.  Un  nouveau  délai  fut  en* 
core,  après  enquête,  accordé  Jusqu'en  1801,  pour  qu'on* 
eût  tout  le  temps  de  se  préparer  à  un  nouveau  r^me 
commercial.  Depuis  le  l*'  Juillet  1801,  les  prohibluons 
inscrites  dans  les  lois  douanières  ont  été  remplacées  par 
des  droits  modérés,  suffisants  pour  ménager  certaines 
positions  acquises,  et  pour  ne  pas  enlever  complètement 
au  Trésor  les  ressources  qu'il  était  accoutumé  de  trouver- 
dans  le  régime  des  douanes.  Le  jour  où  les  demièros 
traces  du  système  protecteur  pourront  dlspualtre,  cer« 
tains  intérêts  privés  seront  encore  prohibitlonnistes. 

PROTECTORAT,  appui  qu'une  gronde  puissance  donne* 
publiquement  à  un  petit  État.  Ainsi,  les  traités  de  1815 
ont  donné  à  l'Angleterre  le  protectorat  des  lies  Ioniennes.. 
La  France  a  étabu  son  protectorat  sur  les  lies  Talti,  Wal- 
lis  et  Gambier,  dans  la  Polynésie. 

PROTESTANTS.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  dei 
Biographie  et  d* Histoire, 

PROTESTATION  (du  latin  testari  pro,  être  en  témoi-^ 
gnage  de...),  action  de  déclarer  qu'on  ne  laisse  faire  une 
âiose  que  parce  qu'on  ne  peut  pas  l'empêcher,  qu'on 
tient  un  acte  pour  nul,  qu'on  entend  se  pourvoir  contre.. 
En  Droit,  les  protestations  fUtes  contre  un  acte  ou  un- 
Jugement  par  celui  à  qui  il  est  signifié,  sont  conserva-' 
toires  de  ses  droits.  Celui  qui  a  perdu  une  lettre  de* 
change  conserve  ses  droits,  en  notifiant  une  protestation* 
aux  tireurs  et  endosseurs.  —  En  Politique,  on  a  recours; 
aux  Protestations  pour  prévenir  l'établissement  d'un  prin- 
cipe avancé  par  un  État  ou  l'adoption  d'une  mesure  nui>-'- 
sible,  ou  du  moins  pour  qu'on  n'interprète  pas  le  silence* 
comme  un  acquiescement. 

PROTÊT  (de  protester)^  acte  par  lequel  le  porteur 
d'une  lettre  de  change,  d'un  billet  à  ordre,  fait  constater' 
le  refus  d'accsptotiofi  ou  de  payement  de  la  part  de  celui 
sur  qui  la  lettre  a  été  tirée  ou  par  qui  le  billet  a  été  sous- 
crit. Il  doit  être  fait  par  deux  notaires,  ou  par  un  notaire 
et  deux  témoins,  ou  par  un  huissier  et  deux  témoins,  le 
lendemain  de  l'échéance,  et,  si  c'est  un  Jour  férié  légal , 
le  Jour  suivant.  Cette  disposition  du  Code  de  Commerce 
(art  173)  a  été  modifiée  par  un  décret  du  23  mars  1848, 
qui  a  supprimé  les  témoins.  A  Paris  et  dans  les  ville>«  des 
départements  les  huissiers  seuls  font  les  protêts. 

PROTHÈSE  (du  grec  prothésis,  admtion),  en  vdu 
Oblationartum,  Paratorium ,  petite  table  qu'on  plaçait 


PRO 


1910 


PRO 


aitrafolB  toH  à  Tan  des  côtés  de  l'aatél«  soit  dans  une 
nef  latânlSf  et  oA  Ton  posait  les  vases  sacrés  et  les  of- 
Ikmndes  da  pain  et  du  Tin  nécessaires  au  sacrifice  de  la 
messe.  Elle  a  été  remplacée  par  la  crédence  (F.  a  mot). 
Dans  rÉglise  grecque,  on  pr^are  sar  une  prothèse  tout 
oe  qui  est  nécessaire  pour  la  messe,  pain,  vin,  vases,  etc., 
et  on  la  porte  en  procession  à  Tautel  où  Ton  doit  célé- 
brer. •»  uans  certaines  basiliques,  on  appelait  Proihès» 
une  petite  abside  placée  du  côté  droit,  et  où  Ton  rangeait 
les  offrandes  faites  par  les  fidèles,  les  vases  précieux  et 
les  vêtements  des  prêtres. 

PROTHYRUH.  \ 

PROTOCOLE.  I  F.  ces  moto  dans  notre  Dtcfion- 

PROTONOTAIRE.     S    notre  de  Biographie  et  cPHis- 

PROTOPAPA.  \    taire. 

PROTOSYNCELLE.  / 

PROTUTEUR,  celui  qui  tient  lieu  de  tuteur.  On  peut 
donner  un  protuteur  au  mineur  qui  possède  des  biens 
dans  un  lieu  éloigné  du  siège  de  la  tutelle;  il  doit  rendre 
compte  au  tuteur  {Code  JVopot.,  art.  417  ). 

PROUE  (du  latin  prwra),  Tavant  d*un  navire.  Chez  les 
Anciens,  la  proue  des  bàtimente  de  guerre  était  armée 
d*un  éperon  en  airain  ou  en  fer,  en  forme  de  bec  d'oi- 
seau; de  là  son  nom  de  rostrvm. 

PROVÉDITEUR.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

PROVENÇALE  (Langae),  dénomination  souvent  em- 
ployée comme  synonyme  de  Langue  d'oc  {V.ce  mot).  Le 
dialecte  provençal,  ^ui  s*est  perpétué  dans  notre  pays  de 
Provence  après  la  disparition  de  la  langue  littéraire,  en 
a  conservé  la  plupart  des  caracttees;  cependant  il  est 
plus  défiguré,  plus  rapproché  du  français  que  les  dia- 
lectes parlés  en  Languedoc  et  en  Gascogne.  V.  Pellas, 
Dictionnaire  provençal  et  français,  Avignon,  1723,  in-4°; 
Achard,  Focoôii/atr»  provençal  et  français,  Marseille, 
1785,  in-4«;  Avril,  Dictionnaire  provençal-^rançaii,  A|)t, 
1840,  ln-8®;  Honnorat,  Dictionncùre  provençal'fhmçais, 
IMgno,  1846-47,  3  vol.  io-4«;  Guessard,  Grammaires  ro- 
manes inédites  du  xiii«  siècUt^  Paris,  1840,  in-8^ 

PROVBRÇALB  (Littérature),  nom  sous  lequel  on  comprend 
les  productions  littéraires,  non  pas  seulement  de  Tan- 
clenne  Provence,  mais  aussi  du  Languedoc,  du  Limousin, 
de  TAuvcrgne,  de  TAquitaine,  et,  en  ^néral,  de  tous  les 
pays  qui  parlaient  le  roman  du  mtdi  ou  langue  d'oc 
(K.  ce  mot).  Ce  n'est  même  pas  la  Provence  qui  fournit 
les  meilleures  de  ces  productions  :  Arnaud  Daniel,  Gi- 
raud  de  Bomeilb,  Bertrand  de  Bom,  Bernard  de  Venta- 
dour,  reconnus  de  leur  temps  comme  les  plus  célèJvres 
Troubadours,  eurent  pour  patrie  le  Limousin,  et  les  Ita- 
liens, les  Espagnols,  les  Portuoaîs  désignent  la  littérature 
provençale  sous  le  nom  de  lemosina.  Il  est  facile  de 
comprendre  pourquoi  Texpresslon  de  lAttérature  pro- 
vençale a  prévalu.  Au  commencement  du  xm*  siècle,  les 
centres  littéraires  ou  écoles  de  Troubadours  qui  s'étalent 
fomvtes  auprès  des  comtes  de  Rodez,  d*Auvergne,  de 
Poitiers,  n'existaient  plus;  la  croisade  contre  les  Albi- 
geois fit  aussi  disparaître  la  cour  des  comtes  de  Toulouse. 
La  poésie  romane  du  Midi,  bien  gue  profondément  alté- 
rée dans  son  esprit,  trouva  un  dernier  refuge  en  Pro- 
vence. C'est  pour  avoir  recueilli  l'héritage  littéraire  de 
tout  le  Midi,  et  pour  avoir  représenté,  seule  en-deçà  des 
Pyrénées,  la  littérature  méridionale  pendant  deux  siècles 
et  demi,  qne  la  Provence,  dans  l'esprit  des  hommes  du 
Nord,  a  laissé  son  nom  à  cette  littérature,  cultivée  mi- 
mitivement  entre  la  Loire,  la  Sèvre-Niortaise,  TAthin- 
tlque,  les  Pyrénées,  la  Méditerranée  et  les  Alpes.  e.-à-d. 
dans  des  contrées  même  qui,  comme  le  Poitou,  la  Sain- 
tonge  et  une  partie  de  l'Anjou,  adoptèrent  plus  tard  le 
roman  du  Nord, 

Les  poésies  des  Troubadours  (F.  ce  mot)  représentent 
en  grande  ijartle  tout  ce  qui  reste  de  la  littérature  pro- 
vençale. Suivant  une  opinion  assez  générale,  ces  poésies 
ne  seraient  que  de  faaes  redites  dVunour.  Sans  doute 
l'élégie  amoureuse  tient  une  grande  place  dans  la  poésie 
provençale;  mais  il  s'en  faut  de  beaucoup  qu'à  ce  genre 
se  réduisent  les  œuvres  lyriques  des  Troubaaours,  c-à-d. 
les  pièces  composées  en  strophes  de  mètres  très-artiste- 
ment  combinés,  toujours  chantées  avec  accompagnement 
de  rebec,  et  dont  plusieurs  sont  encore  notées  en  mu- 
sique. En  effet,  il  y  a  les  sirventes  ou  pièces  satiriques, 
du  caractère  des  tamÔM  grecs;  les  plaintes  (planhs)^ 
laonsacrés  à  la  mémoire  des  braves;  les  chanto  de  guerre 
(cants)^  destinés  à  célébrer  la  poésie  des  combats;  les 
présies  (prédicansas)on  appels,  ordinairement  consacrés 
à  lelever  le  zèle  des  barons  pour  la  défense  de  la  foi  : 
Seares  lyriques  fort  distincts  de  la  poésie  amoureuse,  et 


qui  renferment  les  meilleurs  titres  des  Troubadours  à 
restime  de  la  postérité.  Certaines  de  ces  pièces  sont  re- 
marquables par  une  force  et  un  éclat  que  Ton  cherche- 
rait vainement  alors  dans  le  reste  de  l'Europe.  Un  des 
genres  favoris  des  Troubadours,  toujours  dans  le  lyrioue, 
était  encore  le  Tenson  {contentio)^  appelé  Jeu^parti  oans 
le  roman  du  Nord,  parce  que  deux  interlocuteurs  y  sont 
toujours  en  présence,  comme  dans  certaines  églogues  de 
Virgile  :  c'était  pour  eux  une  manière  de  déployer  leur 
esprit,  en  agitant  une  question  ou  an  cas  douteux.  Toutes 
ces  compositions  poétiques  étaient  néanmoins  considé- 
rées comme  secondaires  par  rapport  à  la  cansô  ou  élégie 
amoureuse.  La  suprématie  de  la  coiud  (V.  Carzqre) 
était  liée,  dans  l'esprit  des  poètes  provençaux ,  à  cer- 
taines idées  plus  raffinées  sur  la  nature  de  ramonr 
vertueux,  et  sur  ses  effets  :  ils  attribuaient  à  ce  senti- 
ment l'influence  la  plus  haute  et  la  plus  heureuse  sur 
les  faits  et  gestes  du  chevalier,  Jusqu'à  en  faire  la  source 
certaine  de  tout  mérite  et  de  toute  vertu.  Cette  théorie 
provençale  de  l'amour  étant  devenue  l'un  des  éléments 
du  système  de  sentiments  et  de  monirs  connu  sous  le 
nom  de  chevalerie,  on  a  pu  dire  que  la  chevalerie  a  eu 
sa  plus  complète  expression  dans  la  poésie  provençale» 
Une  des  formes  les  plus  gracieuses  de  cette  poésie  dans 
le  genre  amoureox  est  celle  des  chants  d^aube  (o/èos), 
pentes  pièces  destinées  à  être  chantées  sous  les  fenêtres 
des  dames  au  lever  du  Jour  {V,  Adsadb  )• 

Les  Provençaux  eurent  encore  un  certain  noeobre  de 
formes  poétiques  distinctes  des  oenres  lyriques  en  ce 
qu'elles  étalent  composées  en  tirades  monorimes,  décla- 
mées en  façon  de  récitatif,  et  non  pas  diantées.  A  cette 
classe  de  poésies,  appelées  proses,  appartiennent  les 
poèmes  chevaleresques,  les  nouvelles,  les  pastourelles 
(Pastorrias  vaquetras)^  certains  poëmes  religieux  du 
genre  didactique,  en  grande  partie  d'origine  vaudoise. 
—  Sans  être  les  inventeurs  du  roman  chevaleresque,  les 
Provençaux  s'y  sont  exercés  avec  succès.  Nous  possédons 
les  manuscrits  d'un  certain  nombre  de  romans  proven- 
çaux, tels  que  Ferabras,  Geoffroy  et  Brunissende,  Flore 
et  Blanchefieur,  Gérard  de  Roussillon,  Benaud  de  Mon- 
tauban,  Lancelot  du  Lac,  etc.,  et  les  indications  d'un 
très-fsrand  nombre  d'autres  (7.  Fàuriel,  Histoire  de  la 
poéste  provençale).  Toutefois,  la  littérature  du  Nord  est 
bien  plus  riche  dans  ce  genre  que  le  roman  du  Midi.  — 
Les  Provençaux  reprennent  l'avantage  dans  la  Pastou- 
relle, dont  Ils  paraissent  avoir  créé  le  genre.  Le  trouba- 
dour Guiraud  Riquier  (1260)  y  excella,  et  fut  souvent 
imité  des  Trouvères.  Mais  l'invention  de  ce^nre  remonte 
beaucoup  plus  haut  que  l'époque  de  Guiraud  :  on  en 
trouve  aes  exemples  dans  Cercancour,  troubadour  qui 
florissalt  avant  1150,  et  11  est  désigné  comme  auteur  de 
pastourelles  dans  le  goût  ancien, 

La  littérature  provençale  a  été  comme  le  premier  essor 
de  l'esprit  dans  une  civilisation  naissante;  ses  produc- 
tions, principalement  en  poésie,  annoncent  un  vif  senti- 
ment de  l'art.  Mais  le  temps  manqua  aux  Provençaux  : 
leur  langue,  en  tant  que  langue  littéraire,  et  leur  littéra- 
ture furent  emportées  dans  la  révolution  qui,  en  écrasant 
leur  pays,  détruisit  leur  nationalité.  Voilà  pourquoi  la 
littérature  provençale  est  moins  riche  en  prose  qu'en 
poMe.  La  prose  est  l'instrument  de  la  raison,  qui  ne 
peut  atteindre  son  développement  qu'avec  le  temps  et  à 
l'aide  de  la  civilisation.  Or,  la  nationalité  provençale  fut 
éteinte  dMis  son  printemps,  et  la  politique  prit  tous  les 
moyens  de  l'empêcher  de  revivre.  Au  premier  rang  il 
faut  placer  le  tribunal  de  l'Inquisition,  fondé  en  1229,  et 
rétablissement  de  l'Université  de  Toulouse,  imposé,  la 
même  année,  à  Raymond  vn  par  Louis  IX.  On  interdit 
remploi  de  la  Ungue  provençale  dans  les  actes  publics, 
et  on  proscrivit  les  livres  écrits  en  cette  langue.  Dans 
cette  proscription  de  tout  ce  qui  rappelait  la  nationalité 
ou  l'hérésie,  disparurent  une  grande  quantité  d'écrits 

S  l'avait  fait  naître  la  controverse  reliapeuse.  Les  matières 
éologiques  pandssent,  en  effet,  avoir  surtout  exercé  la 
plume  des  écrivains  provençaux,  et  la  bibliotlièque  de 
Cambridge  a  longtemps  possédé  beaucoup  de  Traita  vau- 
dois.  Pierre  Raimond  le  Preux  composa  un  traité  Contre 
l'erreur  des  Ariens;  Raoul  de  Gassin  traita  de  la  Doctrine 
des  Albigeois  et  Tuiohins.  On  connaît  aussi  les  titres  de 
plusieurs  ouvrages  historiques  par  Geoflh>y  Rudel,  Ber- 
trand de  Allamanos  et  Sonlello.  Ce  dernier  avait  encore 
composé  une  Somme  du  DroU.  Bastera  mentionne,  d'après 
Salviati,  une  traduction  toscane  de  Tite-Live,  empruntée 
au  provençal,  et  il  affirme  que  cette  traductièn  d'un  an- 
cien en  langue  proTonçale  est  loin  d'être  la  seule. 
L'emploi  do  la  langue  d'oc  ou  provençale  s'est  pro- 


PRO 


1511 


PRO 


Itm^  ctans  .t:s  municipalités  da  Midi  jusqa*à  Vordon- 
nance  de  François  I«'  de  1525,  rendant  obligatoire,  dans 
tons  les  actes  publics,  remploi  de  la  lan^e  française. 
Un  grand  nomoro  de  chroniques,  dinscriptions  et  de  do- 
cuments rédigés  on  provençal  font  partie  des  archives  de 
toutes  les  villes  importantes  du  Midi.  Cette  langue  est 
encore  parlée  dans  les  villes  et  les  campagnes,  et  des 
siècles  s*écouleront  avant  qu'elle  ait  totalement  disparu. 
V,  Millot,  Histoire  littéraire  des  Troubadours,  Paris, 
i774,  3  vol.  in-i2,  ouvrage  fort  médiocre,  rédigé  d*après 
les  matériaux  de  Sainte-Palaye;  W.  de  Schlegel,  Obser- 
vations sur  la  langue  et  la  littémture  provençales,  Paris, 
1818,  in-8";  Riwnouard,  Choix  des  poésies  originales  des 
Trotibadours,  Paris,  1816-21,  6  vol.  gr.  în-8»;  Sismondî, 
Histoire  des  littératures  du  midi  de  V Europe,  3*  édit, 
Paris,  1819,  4  vol.  in-8'*;  Mandet,  Histoire  de  la  langue 
romane,  Paris,  1840,  in-8*»;  Bruce- White,  Histoire  des 
tangues  romanes  et  de  leur  littérature,  Paris,  1841, 
3  vol.  in-8*;  Diez,  Poésie  des  Troubadours,  traduct.  de 
l'allemand  par  Roisio,  Paris,  1845.  in-8<*;  E.  de  Laveleye, 
Histoire  de  la  langue  et  de  la  littérature  provençales, 
Bruxelles,  1845,  in-8°;  A.  de  Glosset,  Histoire  de  la 
langue  et  de  la  littérature  provençales,  Bruxelles,  1845; 
Fauriel,  Histoire  de  la  poésie  proveriçale,  Paris,  1846, 
3  vol.  in-8';  Gatien-Âmoult,  Monunhents  de  la  littérc^ 
iure  romane  depuis  le  jvt*  sUcle,  4  vol.  gr.  in-8'»;  Nou- 
let.  Recherches  sur  Vétat  des  lettres  romanes  dans  le 
midi  de  la  France  au  xiv*  siècle,  1860,  in-8^       E.  B. 

PROVERBE,  vérité  morale  tirée  de  l'observation  et 
acceptée  comme  incontestable,  formule  heureuse  et  con- 
cise de  la  philosophie  pratique.  Le  proverbe  se  distingue 
de  la  sentence,  en  ce  qu'il  est  passé  dans  le  domaine 
populaire;  de  Vadage,  en  ce  qu*il  n'exige  que  du  sens  et 
de  la  précision,  tandis  que  l'adage  veut  de  l'esprit  et  de 
la  finesse.  Au  reste,  ces  mots  se  confondent  dans  l'usage 
ordinaire.  —  Les  Proverbes  ont  existé  de  tout  temps;  on 
les  rencontre  à  l'origine  de  toutes  les  littératures.  Salo- 
mon  les  appelle  la  voix  de  la  sagesse,  et  on  en  trouve 
une  riche  collection  dans  deux  de  ses  ouvrages,  les  Pro- 
verbes et  VEcclésiaste,  ainsi  que  dans  deux  autres  livres 
canoniques  de  l'Ancien  Testament,  la  Sagesse  et  VEcclé- 
riastique.  En  Grèce,  les  Proverbes  étaient  tenus  en  si 
e^ande  estime,  que,  pour  les  avoir  sans  cesse  présents, 
on  les  inscrivait  sur  les  monuments  publics,  sur  les 
Hermès ,  et  sur  les  bornes  des  chemins  ;  d'où  leur  nom 
de  parémies  (du  grec  para,  en^  et  tiUmos,  chemin),  c.-à-d. 
instructions  prises  sur  les  chemins  ou  recueillies  dans 
les  voyages.  Pour  cette  raison  Platon  disait  qu'an  par- 
courant l'Attique  on  pouvait  faire  un  excellent  cours  de 
morale.  Les  poètes  gnomiques  et  les  philosophes  attri- 
buaient une  extrême  importance  aux  proverbes,  généra- 
lement empruntés  aux  oracles,  aux  lois,  aux  doctrines 
des  savants  et  des  sages;  ils  les  regardaient  comme  les 
restes  de  cette  langue  qui  avait  servi  à  l'instruction  des 
premiers  hommes ,  et  que  Vico  appelle  la  «  langue  des 
Dieux.  »  Pvthagore,  Selon,  Théognis,  Pbocylide,  Socrate, 
Platon,  Anstote,  Théophraste,  Chrysippe  et  Cléanthe  en 
formèrent  des  recueils,  renfermant  de  précieuses  règles 
de  conduite  pour  la  vie  privée  et  pour  la  vie  publi<jue. 
Plutarque  a  parsemé  ses  OEuvres  morales  de  citations 
proverbiales;  il  a  comparé  les  proverbes  aux  mystères  : 
les  premiers,  selon  lui,  recelaient  un  sublime  enseigne- 
ment sons  des  expressions  vulgaires,  comme  les  seconds 
cachaient  la  divine  sagesse  sous  les  formes  en  apparence 
puériles  de  leurs  cérémonies.  Ce  furent  les  Romuns  qui 
donnèrent  aux  vérités  morales  brièvement  exprimées  le 
nom  de  Proverbes  (pro  verbo)^  parce  qu'elles  devaient 
tenir  lieu  de  longs  discours.  Caton  l'Ancien,  qui  en  a 
laissé  quelques-uns  de  sa  façon,  en  était  très-amateur. 
Jules  César  les  Jugeait  Infiniment  utiles,  à  cause  du  fré- 
quent emploi  dont  ils  lui  paraissaient  susceptibles  pour 
les  usages  de  la  société  et  pour  les  besoins  de  la  vie  ac- 
tive, (M  agendum  (d'où  fut  tiré  le  nom  d^adage).  Les 
Proverbes  tiennent  une  grande  place  dans  les  œuvres  de 
Gicéron  et  de  Sénèque  ;  11  s'en  trouve  aussi  dans  Horace. 
SotiB  l'empereur  Adrien,  ils  furent  l'objet  spécial  des 
travaux  de  deux  grammairiens,  Zénobius  et  Diogénien, 
qui  en  rassemblèrent  une  quantité  considérable.  An 
ni*  siècle  parurent  les  Distiques  de  Dionysius  Gaton, 
dans  lesquels  la  sagesse  antique  se  tronve  môlée  aux  en- 
"icignements  des  premiers  chrétiens. 

An  moyen  âge,  les  Proverbes  Jouirent  ausA  d'une 
grande  iaveur.  Tandis  que  parmi  les  populations  de  la 
Germanie  se  répandait  le  Hava-mal,  espèce  de  poème 
gnomique  des  Scandinaves,  on  vit  se  propager  en  France 
kt  Distiqu*^  ^^  Caton  traduits  en  langue  vulgaire,  ainsi 


que  d'autres  recueils  de  préceptes  puisés  dans  la  philoso- 
phie de  l'Antiquité,  dans  les  moralités  orientales  Impor- 
tées par  les  moines  voyageurs  et  par  les  Croisés.  Le 
clergé  du  xii*  siècle  fit  revivre  encore  les  traditions  de  la 
sagesse  celtique  consignées  dans  les  Triades  galloises, 
ainsi  nommées  parce  Qu'elles  présentent  les  faits  rangés 
trois  par  trois.  On  employa,  pour  désigner  les  expressions 
proverbiales,  d'abord  le  mot  respit,  plus  tard  celui  de 
réprouviez  ;  au  xiii*  siècle  on  adopta  le  mot  proverbe  des 
Latins.  Nos  usages,  nos  mœurs,  notre  histoire  on»  donné 
matière  h  un  grand  nombre  de  proverbes,  qu'on  trouve 
dans  les  chroniqueurs  et  les  poètes  du  xu*  et  du  xni*  siè- 
cle, dans  les  romans  do  chevalerie,  dans  les  poésies  de 
Villon  au  xv*  siècle,  dans  les  contes  et  les  nouvelles  du 
XVI*,  dans  les  pamphlets  satiriques,  tels  que  la  Ménippée, 
V Apologie  pour  Hérodote  d'Henri  Estienne,  et  les  C  *tes 
dÈutrapel  de  Noël  du  Fail.  Clément  Marot  et  tous-'^es 
poètes  de  son  école  firent  usage  de  nos  anciens  pro- 
verbes; Régnier  en  a  introduit  beaucoup  dans  ses  poé- 
sies. On  en  rencontre  même  dans  les  vieux  recueils  de 
notre  Droit  coutumier;  ils  étaient  accrédités  en  Justice, 
et  considérés  comme  ayant  presque  la  force  d'une  preuve 
testimoniale  :  on  ne  faisait  en  cela  qu'obéir  au  conseil 
d*Aristote  et  de  Quintilien ,  qui  recommandent  à  l'ora- 
teur de  les  invoquer,  à  cause  de  leur  caractère  de  vérité 
universellement  reconnu.  Les  proverbes  Jouèrent  enfin 
un  grand  rôle  dans  l'éducation  :  on  faisait  apprendre 
par  cœur ,  dans  l'Université ,  ceux  de  Salomon  et  dos 
écrivains  sacrés;  les  Distiques  de  Caton,  traduits,  imités 
et  paraphrasés,  furent  mis  entre  les  mains  do  la  jeu- 
nesse pendant  plusieurs  siècles.  —  Les  études  parémio- 
graphiques  prirent,  après  la  découverte  de  l'imprimerie, 
un  développement  extraordinaire  :  on  rassembla  non- 
seulement  les  proverbes  épars  dans  les  écrivains  d'Athè- 
nes et  de  Rome,  mais  encore  ceux  des  Hébreux ,  des 
Pères  de  l'Église,  des  Arabes,  des  Indiens,  et  ceux  qui 
avaient  cours  en  Allemagne,  en  Espagne,  en  Italie  et  en 
Angleterre,  dans  toutes  les  langues,  et  même  dans  les 
patois.  Les  plus  importants  de  ces  recueils  sont  le  Violier 
d'Apostolius,  le  Florilegium  ethico-politicum  de  Gruter, 
les  Adages  d'Érasme.  Il  existe  un  recueil  de  plus  de  500 
proverbes,  écrits  de  la*  main  de  Luther  ;  un  libraire  de 
Breslau  l'a  retrouvé  en  1862.  Cet  engouement  pour  les 
proverbes,  si  vif  au  commencement  du  xvi*  siècle,  dis- 
parut à  la  fin  :  on  s'occupa  moins  de  les  recueillir  que 
de  les  commenter  et  d'en  expliquer  l'origine.  Etienne 
Pasquier  a  consacré  le  8*  chapit^  de  ses  Recherches  sur 
la  France  à  cette  curieuse  étude.  Trois  autres  livres  ori- 
ginaux furent  publiés  sur  cette  matière  dans  le  cours  du 
xvu*  siècle  ;  ce  sont  :  VÉtymologie  ou  Eacplication  des 
proverbes  français,  par  Fleury  de,Belllngen,  La  Haye, 
•1656,  petit  in-S**;  les  Origines  de  quelques  coutumes  an- 
ciennes  et  de  plusieurs  façons  de  parler  triviales,  par 
Moisans  de  Brieux,  Caen,  1672,  in-18  ;  les  Curiosités  fran- 
çaises pour  servir  de  supplément  aux  Dictionnaires,  par 
Antoine  Oudin,  Rouen  et  Paris,  1656,  ln-12.  Si  les  pro- 
verbes tombèrent  dans  le  discrédit,  il  faut  l'attribuer  à 
l'abus  qu'une  foule  d'auteurs  en  avaient  fait  :  Cervantes 
semble  avoir  voulu  s'élever  contre  cet  abus  par  la  bouche 
de  Don  Quichotte,  oui,  donnant  des  conseils  à  son  écuyer 
Sancho  sur  la  conduite  qu'il  doit  tenir  dans  le  gouver- 
nement de  l'Ile  de  Barataria,  le  tance  vigoureusement 
sur  sa  manie  de  débiter  des  proverbes  à  tout  propos. 
Rabelais  est  l'auteur  qui  prodigua  le  plus  les  proverbes, 
et  qui,  sans  contredit,  contribua  le  plus  à  en  dégoûter 
notre  nation.  Une  autre  cause  motiva  cet  abandon  :  c'est 
que  le  goût  commençait  à  s'épurer.  La  comédie  des  Pro^ 
verbes,  du  comte  de  Gramail,  Adrien  de  Montluc,  publiée 
en  1616,  œuvre  pleine  de  gaieté  et  de  scènes  plaisantes, 
acheva  de  perdre  les  proverbes  dans  l'opinion  du  beau 
monde,  et  fis  furent  relégués  parmi  les  curiosités  philo- 
logiques. Malherbe  et  Balzac  lesproscririrent;  Vaugelas 
leur  ferma  l'entrée  du  Dictionnaire  de  l'Académie  fhin- 
çaise  :  les  autres  écrivains  du  même  temps,  à  l'exception 
de  Ménage  et  de  Furetière,  partagèrent  cette  antipathie. 
L'héritage  du  vieil  esprit  gaulois  fut  répudié,  et  notr« 
littérature  fut  privée  d'un  assez  grand  nombre  de  locu- 
tions originales  et  pittoresques  :  toutefois.  M"**  de  Se- 
vigne,  La  Fontaine  et  Molière,  qui  s'en  sont  servis  avec 
un  tact  infini  et  un  à^propos  des  plus  Judicieux,  les  lui 
ont  restituées  en  partie  ;  la  dernière  édition  du  Diction- 
naire de  l'Académie  (1835)  a  donné  droit  de  cité  à  quel* 
ques-unes.  Quoique  moins  estimés  que  dans  l'antiquité 
et  au  moyen  ftge,  et  bannis  en  général  de  la  langue  aca- 
démique, les  proverbes  ne  sont  pas  moins  intéressants 
et  utiles  à  étudier.  Comme  leur  style  change  arec  les 


PRO 


1512 


PRO 


liècles,  aussi  bien  que  les  opinions  dominantes  dont  ils 
sont  le  reflet,  ils  éclairent  Thistoire  des  faits  et  des  idées. 
Les  uns  expriment  des  sentiments  universels,  et  résu- 
ment Texpérience  du  genre  humain  ;  leur  cours  est  per- 
pétuel par  tous  pays,  et  le  temps  ne  fait  que  rajeunir  leur 
forme;  on  les  appelle  la  Sagêss»  det  nations.  Les  autres 
sont  particuliers  à  certaines  nations,  à  certaines  locali- 
tés, et  ils  reproduisent  la  pbysioDomie  caractéristique  du 
peuple  qui  les  a  créés.  Il  n'est  pas  une  science,ain  art,  un 
usage,  un  événement  célèbre,  qui  n*ait  donné  lieu  à  des 
proverbes  :  religion,  politiaue,  législation,  morale,  his- 
toire, astronomie.  Jurisprudence,  lettres,  médecine,  pro- 
fessions diverses,  métiers,  coutumes,  vêtements,  meubles, 
nourriture,  repas,  etc.,  tout  est  de  leur  domaine,  n  est 
à  remarquer  qu*au  milieu  de  cette  variété  de  pensées 
inspirées  par  tous  les  sentiments  qui  agitent  r&me  hu- 
maine, par  toutes  les  vicissitudes  de  la  vie,  il  ne  s'en 
trouve  pas  une  seule  qui  soit  entachée  d'athéisme  ou  dé- 
pourvue de  moralité.  V.  G.  de  Backer,  Dictionnaire  des 
proverbes  français,  Bruxelles,  1710,  in-8^;  Panckoucke, 
Dicttonnaire  des  proverbes  français^  Paris,  1758,  in-12; 
La  Mésangère,  Dictionnaire  des  Proverbes  français , 
3«  édit.,  1823,  in-8'>;  G.  de  Méry,  Histoire  ginéraie  des 
proverbes,  adages ,  sentences ^  etc.,  Paris,  1828,  3  voU 
in-8o  ;  Grapelet,  Proverbes  et  Dictons  populcUres,  1831 , 
in-8°  ;  Leroux  de  Lincy,  le  livre  des  proverbes  français, 
1842,  2  vol.  in-8<*;  Quitard,  Dictionnaire  étymdogtque , 
historique  et  anecdotique  des  proverbes  français,  1842 , 
in-8°;  le  même.  Éludes  historiques,  littéraires  et  morales 
sur  les  proverbes  français  et  le  langage  proverbial,  in-8°; 
Duplessis,  Bibliographie  parémiologiquey  Etudes  biblio- 
graplùques  et  littéraires  sur  les  ouvrajges,  fragmenti 
aouvrages  et  opuscules  spécialement  consacrés  aux  Pro- 
verbes acMS  toutes  les  langues ,  Paris,  1847,  in-8«;  le 
même,  la  Fleur  des  Proverbes  français,  Paris,  1851, 
in-32  ;  le  P.  Cahier,  Quelqw  six  mille  proverbes  et  apho- 
rismes,  en  12  langues,  Paris,  1856,  in-1 2.  II  existe  des  re- 
cueils de  Proverbes  italiens,  par  Cornazzano  ;  espagnols , 
par  Pinciano  (Madrid,  1616  et  1804);  hollandais  et  alle- 
mands, par  Gruter;  anglais,  par  Howell.  Ray.  Flelding, 
Kelly,  Bennett,  Chenevix  Trench,  etc.  P— s. 

PROVERBES  DRAMATIQUES.  AU  Commencement  du  xvn'  siô» 
cle,  lorsque  les  proverbes  furent  exclus  des  livres  sérieui 
et  do  toute  conversation  polie,  on  les  exprima  encore 
par  des  gestes,  on  les  repr&enta  en  pantomimes,  et  quel- 
quefois en  de  petites  scènes  dialoguées,  dans  lesquelles 
on  les  donnait  à  deviner.  G'est  ce  qu'on  appelait  jouer 
aux  proverbes.  De  ce  Jeu,  tantôt  mimique,  tantôt  parlé, 
fort  en  vogue  sous  Louis  XIIT,  résulta  un  nouveau  genre 
de  composition  littéraire,  le  Proverbe  dramatique,  que 
M"'*  de  Maintenon  se  plut  à  cultiver.  Le  recueil  qu'a 
laissé  cette  femme  éélëbre,  et  oui  fut  publié  pour  la  pre-, 
miëre  fois  en  1829,  contient  40  petites  pièces  à  deux  ou 
quatre  personnages  au  plus,  et  où  le  nombre  des  scènes 
varie  de  deux  à  dix,  suivant  le  développement  qu'exige  le 
proverbe  qu'elle  s'est  proposé  de  mettre  en  action;  la 
dernière  scène  est  arrangée  de  manière  à  amener  le  mot 
même  du  proverbe,  lequel  tient  11^  de  conclusion  mo- 
rale. M™*  de  Maintenon  composa  ce  livre  pour  ses  pu- 
pilles de  Saint-Cyr  :  les  voyant  près  d'échapper  à  sa 
sollicitude,  elle  voulut  leur  dépeindre  à  l'avance  et  sous 
son  véritable  Jour  ce  monde  qui  les  réclamait,  et  leur 
communiquer  un  peu  de  la  sagesse  pratiicrae  que  renfer- 
ment des  adages  tels  que  ceux-ci  :  ly'ivedle»  pas  le  chat 
qui  dort;  —  Méchant  ouvrier  n'a  jamais  bon  outil;  — 
Oui  se  fait  brebis^  le  loup  la  mange;  —  Tant  vaut 
Vhomme,  tant  vaut  la  terre;  -—  Les  femmes  font  et  dé- 
font  les  maisons,  etc.  Ces  vérités,  profondes  sous  une 
apparence  vulgaire,  lui  ont  inspiré  des  binettes  d'un  Jet 
facile  et  d'un  style  simple,  qui  n'ont  pas  le  temps  de 
fatiguer  l'enfant  à  qui  Jles  s'adressent,  mais  qui,  le 
faisant  réfléchir  sans  effort,  déposent  dans  son  esprit 
comme  une  intuition  précoce  de  la  vie  réelle.  Ces  scènes, 
/ouées  en  famille  au  lieu  d'être  lues,  exercent  les  Jeunes 
personnes  à  une  bonne  diction,  et  obligent  leur  mémoire 
a  retenir  d'excellents  conseils,  d'autant  plus  efficaces 
qu'ils  sont  donnés  indirectement  et  sous  une  forme 
aimable.  —  Des  Proverbes  de  M"^  de  Maintenon,  qui 
n'étaient  pas  destinés  à  franchir  la  pieuse  enceinte  de 
Saint-Cyr,  à  ceux  qui  devinrent  à  la  mode  vers  le  milieu 
du  xviii*  siècle,  et  oui  firent,  dans  les  salons  et  les  ch&- 
teaux,  les  délices  des  riches 'désœuvrés,  la  distance  est 
grande.  Un  paravent  pour  tout  décor  suffisait  à  la  repré- 
sentation de  ces  pièces  légères  et  sans  prétention.  On 
avait  commencé  par  les  improviser  sur  un  canevas  cou- 
rir, u  ;  mais,  les  difficultés  de  l'improvisation  n'étant  pas 


toujours  heureusement  vaincues,  il  fallut  en  venir  à 
écrire  la  pièce  d'avance.  Beaucoup  d'hommes  du  monde 
et  de  beaux  esprits  se  livrèrent  à  ce  passe-temps  :  l'oubli 
a  fait  Justice  de  leurs  productions.  Les  Proverbes  de 
Carmontelle,  qui  ont  seuls  été  respectés,  fournirent  de 
nouveaux  aliments  à  la  passion  de  Jouer  la  comédie,  qui 
s'était  emparée  de  la  haute  société;  ils  avaient  iine  si 
grande  vérité  d'observation,  une  gaieté  si  naturelle,  que 
les  auteurs  dramatiques  les  arrangèrent  pour  les  théâtres 
publics,  où  la  même  faveur  les  suivit.  Ils  soutiennent 
encore  aujourd'hui  la  lecture,  quoiqu'ils  portent  le  cachet 
d'une  époque  déjà  bien  éloignée  de  nous,  moins  par  le 
temps  que  par  la  différence  de  ses  mœurs,  beaucoup 
moins  prudes  que  les  nôtres.  —  Les  demi&res  années 
du  xvm*  siècle  et  les  premières  du  xix*  n'étaient  guère 
favorables  à  la  littérature  légère  :  le  goût  de  la  comédie 
se  ranima  un  peu  à  partir  du  Consulat,  mais  surtout 
après  1815.  Les  Proverbes  de  Gosse  (Paris,  1819, 2  voU 
in-8«)  ne  fournirent  pas  une  longue  carrière  :  trop  loués 
d'un  côté  par  le  parti  libéral,  auauel  l'auteur  apparte- 
nait, ils  furent  trop  dénigrés  de  l'autre,  sous  pi^xte 
que  les  personnages  n'y  parlaient  pas  le  langage  de  la 
bonne  compagnie;  mais  si  leur  succès  fut  éphémère,  il 
faut  l'attribuer  avant  tout  à  leur  médiocrité  même. 
Théodore  Leclercq  Ait  plus  heureux  ;  il  eut  la  vogue  et  la 
récondité  de  Carmontelle,  qu'il  surpassa  en  finesse  et  en 
distinction.  Homme  de  loisir  et  très-répandu  dans  le 
monde,  observateur  original  et  indulgent,  railleur  en- 
joué, écrivain  indépendant  et  peu  avide  de  renommée,  il 
a  peint  les  travers,  les  ridicules,  les  mesquines  passions, 
les  vices  même,  mais  vus  sous  un  aspect  comique.  Le 
cadre  de  ses  tableaux  est  étroit,  et  cependant  les  person- 
nages les  plus  différents  de  ton  et  de  caractère  s'y  meuvent 
avec  aisance  et  dans  l'attitude  qui  leur  est  propre.  Un 
grand  nombre  de  ces  esquisses  pourraient  passer  pour  de 
petites  comédies,  moins  pai  l'intrigue,  qui  ne  tient  qu'à 
un  fil,  que  par  l'intérêt  des  situations  et  le  sel  du  dialogue. 
Dans  quelques-unes  oc  remarque  une  teinte  assez  pro- 
noncée d'opposition  au  gouvernement  de  la  Restauration. 
Après  1830,  Théodore  Leclercq  continua  de  produire  avec 
autant  de  bonheur.  Cependant  le  goût  des  Proverbes, 
reflets  d'un  monde  prosaloue  et  bourgeois,  allait  s'aifoi' 
blissant ,  lorsqu'un  poète  aéià  célèbre,  Alfred  de  Musset, 
adopta  cette  forme  pour  quelques-unes  de  ses  créations. 
Ses  Proverbes  ne  furent  pas  écrits  pour  être  Joués  dans 
les  salons  ou  au  théâtre,  mais  pour  être  lus  par  un  public 
d'élite.  Parmi  ceux  qui  plus  tsûrd  ont  été  transportés  sur 
la  scène  et  qui  sont  sortis  triomphants  de  cette  éi>reuve, 
nous  citerons  deux  chefs-d'œuvre  de  grâce  et  d'él^ance  : 
Un  caprice  t  et  H  faut  qu'une  porte  soit  ouverte  ou 
fermée.  Ce  qui  a  fait  la  fortune  de  ces  compositions,  c'est 
la  délicatesse  du  dialogue,  la  finesse  de  l'observation, 
l'originalité  des  personnages,  l'absence  de  procédés  vul- 
gaires pour  provoquer  l'émotion ,  un  heureux  mélange  de 
senribilité  et  de  gaieté,  un  certain  tour  d'esprit  plein  de 
piquant  et  d'imprévu,  et  surtout  le  don  bien  rare  de  nous 
entraîner  dans  les  régions  de  l'idéal  et  de  la  fantaisie, 
tout  en  restant  dans  le  vrai.  Depuis  quelques  années,  la 
comédie  de  salon  est  redevenue  à  la  mode;  les  Proverbes 
ont  repris  faveur  :  mais  les  gens  du  monde  qui  cultivent 
ce  genre  suivent  plutôt  les  traces  de  Théodore  Leclercq 
que  celles  d'Alfred  de  Musset,  qui  sera  peut-être  long- 
temps un  modèle  inimitable.  P — s. 

PROVIDENCE.  Ce  nom,  qui  est  celui  d'un  des  attri- 
buts divins,  semble ,  d'après  son  étymologie  (pro  videre^ 
prévoir),  signifier  la  même  chose  que  Prescience.  De 
fait,  la  Prescience  est  impliquée  dans  h  Providence; 
mais  celle-ci  s'étend  beaucoup  plus  loin,  et  comprend, 
outre  la  prévision  des  événements  futurs,  le  gouverne- 
ment du  monde  en  général,  et  particulièrement  le  gou- 
vernement du  monde  moral,  c-àrd.,  en  œ  qui  nous 
concerne,  des  déterminations  de  la  volonté,  conformé- 
ment aux  lois  de  la  sagesse  et  de  la  bonté  souveraine. 
Dieu  étant  conçu  comme  l'être  parfait  (F.  Dieu — I^reuves 
de  l'Existence  de  ),  on  peut  inunédiatement  conclure  sa 
Providence  de  l'ensemble  de  ses  perfections,  n  serait 
contradictoire  que  l'être  parfait  ne  possédât  pas  la  science 
et  la  puissance  parfaites;  ou  que,  les  possédant,  il  us 
s'en  servit  pas  pour  diriger  tontes  choses  et  spécialement 
la  volonté  des  créatures  libres,  «  ce  qu'il  y  a  de  plus  ex- 
cellent dans  l'univers  »,  dit  Bossuet.  Réciproquement, 
on  peut  commencer  par  prouver  que  le  monde  est  gou- 
verné par  des  lois  qm  dénotent  une  sagesse ,  une  bonté, 
une  puissance  infimes  (  V.  le  même  art,  et  l'art.  Causes 
PWALES},  et  prouver  l'existence  de  Dieu  par  les  manifes- 
tations éclatantes  de  m  Providence.  Parmi  les  philoso- 


PRO 


1513 


PRO 


phes  de  Tantiquité,  Socrate,  Platon,  les  Stoïciens  (ceax-ci 
non  sans  auelque  inconséquence  avec  leurs  opinions  sur 
ta  destinée),  sont  ceux  qui  ont  crn  et  professé  le  plus  hau- 
tement le  dogme  de  la  Providence.  Affaibli  chez  Âristote, 
ce  dogme  est  absolument  rejeté  par  les  Épicuriens,  qui , 
s'ils  ne  nient  pas  absolument  Texistence  des  Dieux,  veu- 
lent du  moins  qu'ils  ne  se  mêlent  point  du  tout  des 
affaires  humaines  : 

tjgo  Deftm  genns  esse  semper  doxi ,  et  dloam  oœlitnir.  ; 
Sed  eot  non  enrsre  opiner  qnid  agat  humannm  genna. 
EifHxus,  in  Cicérone,  De  Divinai.,  II,  56. 

1  J*at  tonjonrs  crn  des  dienz,  et  crn  toi^onrs  aussi 
«  Que  des  faibles  mortels  ils  n'ayaient  nul  souci,  m 

n  tient  naturellement  une  grande  place  dans  la  philo- 
sophie et  dans  la  théologie  chrétiennes;  mais  il  y  a  sou- 
levé des  débats  sans  fin.  En  effet,  ce  premier  point  établi, 
que  Dieu  est  tout-puissant  et  qu'il  gouverne  toutes  choses, 
y  compris  notre  volonté,  on  se  demande  comment  celle-ci 
peut  rester  libre,  malgi^â  la  direction  c(ui  lui  est  impri- 
mée ;  et,  si  elle  n'est  pas  libre,  que  deviennent  notre  res- 
ponsabilité, nos  mérites?  Telle  est ,  dans  ses  termes  gé- 
néraux et  philosophiques,  la  question  de  l'accord  de  la 
Providence  divine  et  de  la  liberté  humaine.  Suiv%z-la 
dans  son  application  spéciale  aux  déterminations  qui  in- 
téressent le  salut  ;  ce  sera  la  grande  question  théologique 
de  l'accord  du  libre  arbitre  et  de  la  Grâce. 

Faut-il  donc,  sous  prétexte  de  sauver  la  liberté,  nier  ou 
amoindrir  l'efficacité  toute-puissante  du  gouvernement 
divin?  La  raison  et  la  foi  s'y  opposent  également.  Ferons- 
nous,  au  contraire,  bon  marché  du  libre  arbitre?  Entr^ 
rons-nous  en  défiance  du  sentiment  intime  qui  nous 
avertit  que  nous  sommes  libres,  c.-à-d.  maîtres  de 
choisir  entre  différentes  déterminations?  Et  faudra-t-il 
nous  persuader  que,  quand  nous  croyons  choisir  par 
nous-mêmes,  nous  cédons  à  notre  insu  à  une  influence 
irrésistible?  Ceci  est  également  insoutenable.  Cependant, 
comme  l'accord  et  la  conciliation  ne  sortent  d'aucun  des 
systèmes  inventés  par  les  théologiens  (V.  dans  le  Traité 
du  libre  arbitre  de  Bossuet  l'exposition  sommaire  des 
principam  d'entre  eux,  ou  directement  les  art.  Science 
moyenne,  Contempératum ,  Délectation  victorieuse,  Pré- 
motion physique)^  comme  Ils  laissent  la  balance  incliner 
plus  fortement  ou  du  côté  du  libre  arbitre,  ainsi  que 
firent  les  Pélagiens  et  les  Molinistes ,  ou  du  côté  de  la 
gr&ce,  ainsi  qu'on  le  voit  chez  les  PrédestinaUens,  les 
Calvinistes  et  les  Jansénistes;  après  avoir  posé  ce  prin- 
cipe que  nous  empruntons  à  Bossuet  :  «  La  raison  nous 
oblige  à  croire  ces  deux  choses,  quand  même  nous  ne 
trouverions  pas  le  moyen  de  les  accorder  ensemble,  » 
nous  nous  bornerons  à  suggérer  l'opportunité  d'une  dé- 
claration d'incompétence.  La  question  dont  il  s'agit  n'est- 
elle  pas  une  de  celles  qu'il  ne  nous  est  pas  donné  de 
rendre?  Précisément  parce  que  Dieu  est  tout-puissant, 
et  que  notre  intelligence  imparfaite  ne  peut  ni  imaginer 
ni  concevoir  en  quoi  consiste  la  puissance  infinie  et  les 
moyens  qu'elle  met  en  œuvre,  le  rapport  de  cette  puis- 
sance infinie  avec  notre  liberté  nous  échappe.  Estrce  une 
raison  pour  nier  l'une  ou  l'autre?  En  aucune  façon.  Nous 
ne  comprenons  et  nous  n'expliquons  pas  davantage  l'in- 
fluence réciproque  du  corps  sur  l'&me  et  de  l'&me  sur  le 
corps  :  nous  ne  les  révoquons  pas  en  doute  pour  cela.  Il 
doit  en  être  de  même  ici ,  où  nous  nous  trouvons  en  pré- 
sence, non  d'une  contradiction  absolue  et  démontrée,  mais 
seulement  de  vérités  simultanées  dont  le  rapport  nous 
échappe,  et  qui,  une  fois  établies  chacune  à  part,  avec 
le  genre  d'autorité  qu'elles  comportent ,  l'une  par  l'évi- 
dence du  sens  intime,  l'autre  par  l'évidence  de  la  raison, 
ne  sauraient^  quoi  qu'il  advienne,  se  détruire  l'une 
l'autre.  F.  Bersot,  Essai  sur  la  Providence,  Paris,  4853, 
in-8*».  B— B. 

PROVINCE.      )  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

PROVINCIAL.  >     de  Biographie  et  d'Histoire. 

PROVINCIALES  (Les),  nom  qu'on  donne  dans  l'usage 
à  un  ouvrage  de  Pascal  dont  le  véritable  titre  est  :  Lettres 
écrites  par  Louis  de  MontcUte  à  un  provincial  de  ses 
imit  et  aux  RR.  PP,  Jésuites  sur  la  morale  et  la  poli- 
tique de  ces  Pères.  Ces  Lettres,  composées  pour  soutenir 
les  solitaires  de  Portp  Royal  et  les  doctrines  Jansénistes 
contre  la  compagnie  de  Jésus,  furent  publiées  successi- 
vement depuis  le  23  janvier  4656  Jusqu'en  mars  1657,  et 
eurent  un  très-grand  succès  :  les  premières  étaient  tout 
à  fait  anonymes,  et  le  pseudonyme  Louis  de  Mowtalte 
ne  parut  que  plus  tard.  La  4  >*  et  la  S*  roulent  sur  deux 
questions  théologfques  qui  étaient  très -débattues  au 


XVII*  siècle,  le  pouvoir  prochain  et  la  grâce  suffisante 
(V.  Grâce)  :  elles  ont  perdu  pour  nous  un  peu  de  leur 
intérêt,  ainsi  c[ue  le  sujet  lui-même.  La  3*  est  relative  à 
la  condamnation  qui  avait  frappé  Antoine  Arnauld,  à 
propos  de  sa  querelle  avec  les  Thomistes  sur  la  grâce 
suffisante  et  la  grâce  efficace.  Les  Lettres  suivantes,  de- 
puis la  4*  Jusqu'à  la  18*,  cpii  est  la  dernière,  sont  dirigées 
contre  la  morale  des  casuistes.  Il  avait  été  facile  à  Pascal 
de  recueillir,  dans  des  livres  presque  oubliés,  certaines 
maximes  de  théologiens  qui  avaient  écrit  en  des  temps 
de  trouble  pour  la  pensée,  maximes  d'ailleurs  attaqua- 
bles en  droit  :  les  Jésuites  eurent  le  tort  de  ne  pas  les 
abandonner,  et,  en  essayant  de  les  défendre,  de  s'exposer 
à  l'ironie  d'un  de  nos  plus  habiles  et  de  nos  plus  grands 
écrivains.  Voltaire,  dont  le  témoignage  ne  peut  être  sus- 
pect en  cette  matière,  a  dit  dans  son  Siècle  de  Louis  XI V 
«  Tout  le  livre  {Les  Provinciales)  portait  sur  un  fonde- 
ment faux.  On  attribuait  adroitement  à  toute  la  Société 
les  opinions  extravagantes  de  plusieurs  Jésuites  espa- 
gnols et  flamands.  On  les  aurait  déterrées  aussi  bien 
chez  des  casuistes  Dominicains  et  Franciscains;  mais 
c'était  aux  seuls  Jésuites  qu'on  en  voulait.  On  tftchait 
dans  ces  Lettres  de  prouver  qu'il  y  avait  eu  dessein  formé 
de  corrompre  les  mœurs  des  hommes,  dessein  qu'aucune 
secte,  aucune  société  n'a  Jamais  eu  et  ne  peut  avoir.  Mais 
.  il  ne  s'agissait  pas  d'avoir  raison,  il  s'agissait  de  divertir 
'  le  public.  »  Ces  réserves  faites  quant  au  but  poursuivi 
par  Pascal  et  au  moyen  qu'il  employa  pour  l'atteindre, 
il  est  de  tonte  éridence  que  Les  Provinciales ,  ainsi  que 
l'a  dit  M.  Sainte-Beuve,  ont  tué  la  Scolastique  dans  la 
morale,  comme  Descartes  l'avait  tuée  dans  la  métaphy- 
sique, et  qu'elles  ont  beaucoup  fait  pour  séculariser  la 
notion  de  l'honnête,  comme  Descartes  l'esprit  philoso- 
phique. Admirables  d'exécution,  elles  effarent  au  lecteur 
des  séductions  de  tout  genre,  la  finesse  et  la  vigueur  de 
la  raillerie,  la  nouveauté  des  tours,  la  hardiesse  de  la 
dialectique,  la  grandeur  même  de  l'éloquence.  Il  paraît 
que  l'on  peut  relever  plus  d'une  inexactitude  dans  les 
assertions  de  Pascal,  qui  écrivit  plusieurs  de  ces  Lettres 
d'après  des  notes  qui  lui  étaient  fournies  à  la  hâte. 
F.  l'abbé  Majnard,  Ias  Provinciales,*.,  publiées  sur  la 
dernière  édition  revue  par  Pascal,  avec  les  variantes  de 
éditions  précédentes;  et  leur  réfutation  consistant  en 
nombreuses  notes  ^historiques,  littéraires,  et  théologir 
ques,  Paris,  4854,  2  vol.  in-8*. 

PROVISEUR,  titre  donné  autrefois  au  chef  de  cer- 
taines maisons  {V.  notre  Dictionn.  de  Biogr.  et  d*Histoire)^ 
et  qui ,  depuis  la  réorganisation  de  l'instruction  publique 
en  4802.  désigne  le  fonctionnaire  placé  à  la  tête  d'un 
Lycée  national.  Comme  l'indique  son  nom  (en  latin  pro- 
visor,  pourvoyeur),  le  proviseur  pourvoit  a  tous  les  be- 
soins de  rétablissement  :  il  surveille  l'administration, 
l'instruction  et  la  discipline,  notifie  et  fait  exécuter  les 
règlements  de  l'autorité  supérieure,  et  porte  seul  la  res- 
ponsabilité. Les  autres  fonctionnaires  lui  sont  subordon- 
nés, et  il  donne  au  recteur  des  notes  sur  leur  compte.  11 
est  amovible.  Il  a  un  traitement  de  9^000  fr.  à  Paris 
et  à  Versailles;  dans  les  départements,  s'il  est  de  1^* 
olasse,  il  reçoit 7.500,  7,000,  6^500  ou  6,000  fr.,  selon  la 
catégorie  de  lycées;  de  2n«  classe,  il  a  7,000,  6^500, 
6^000  et  6,500  fr.;  il  est,  de  pins,  logé,  éclairé  et 
chauffé.  C'est  sur  sa  proposition  que  sont  nommés  les 
maîtres  répétiteurs  et  le  médecin  de  l'établissement,  n 
nomme  directement  les  maîtres  d'art  et  d'agrément , 
ainsi  que  les  personnes  de  service.  Tous  les  trois  mois, 
il  adresse  des  notes  aux  parents  sur  la  conduite  et  le  tra- 
vail de  leurs  enfants.  Pour  devenir  Proviseur,  il  fallait 
être,  selon  le  décret  du  17  mars  4808,  docteur  es  lettres 
et  bachelier  es  sciences  ;  l'ordonnance  du  26  mars  4820 
n'exige  plus  que  le  titre  de  licencié  es  lettres  ou  es 
sciences.  B. 

PROVISION,  en  termes  de  Droit,  ce  qui  est  adjugé 
dans  le  cours  d'une  instance  à  une  partie  qui  annonce 
des  droits  sur  la  chose  demandée,  en  attendant  le  Juge- 
ment définitif,  mais  sans  préjudice  des  droits  de  l'autre 
partie  au  principal.  C'est  encore  la  somme  allouée  avant 
jugement  à  une  partie  dont  le  droit  parait  certain ,  et 
lorsqu'il  n'y  a  contestation  que  sur  la  quotité  de  la  valeur 
demandée  ;  ainsi,  dans  la  séparation  de  corps,  on  adjuge 
souvent  à  la  femme,  à  titre  de  provision,  une  somme  pour 
subvenir  à  ses  besoins  durant  l'instance.  La  Provision 
alimentaire  est  la  somme  allouée  par  les  tribunaux  aux 
veuves  ou  aux  femmes  séparées  sur  les  biens  de  leurs 
époux,  aux  pères  ou  aux  mères  sur  les  reteous  de  leurs 
enfants.  On  accorde  aussi  des  provisions  aux  faillis  ou  à 
leur  famille  sur  les  biens  meubles  ou  immeubles ,  pour 


PRU 


lal4 


PSA 


leurs  besoins  jti8qa*aa  concordat  ou  au  syndicat  définitif. 
^  En  termes  de  Banque,  la  Provision  est  la  valeur  né- 
cessaire pour  assurer  le  payement  d*une  lettre  de  change. 
Elle  doit  6tre  faite  par  le  tireur,  ou  par  celui  pour  le 
compte  de  qui  la  lettre  de  change  est  tirée,  sans  que  le 
tireur  cesse  d*6tre  personnellement  obligé.  V.  Provi- 
sions, dans  notre  Dictionnaire  dé  Biographie  et  d'Histoire. 

PROVOCATION  (du  latin  provocare,  appeler,  exciter, 
pousser  à  quelque  chose).  LÀ  prorocation  à  une  action 
qualifiée  crime  ou  délit  constitue  la  complicité  {V,  ce 
mot).  —  La  provocation  B*entend  encore  des  coups  ou 
violences  graves  que  peut  alléguer  comme  excuse  celui 
qui  est  poursuivi  pour  meurtre  ou  blessures. 

PROXÈNES.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire, 

PROXÉNÈTE  (du  grec  proxénètes,  courtier) ,  celui  qui 
s'entremet  pour  faire  conclure  un  marché,  un  mariage 
ou  quelque  autre  affaire. 

PRUDENCE  (U),  Divinité  allégorique  des  Anciens, 
représentée  tantôt  avec  une  tête  à  deux  visages  regardant 
le  passé  et  Tavenir,  tantôt  avec  iln  miroir  entouré  d*un 
serpent,  et  quelquefois  une  lampe  à  la  main.  Les  Égyp- 
tiens lui  donnèrent  pour  emblème  on  serpent  à  3  têtes, 
dont  une  de  chien  qui  flaire,  une  de  lion  dont  la  gueule 
puissante  est  près  d*agîr,  et  une  de  loup  qui  médite  une 
retraite  en  cas  de  besoin.  —  Pour  les  Chrétiens,  la  Pru- 
dence est  une  des  quatre  vertus  cardinales. 

PRUDERIE ,  affectation  de  sagesse,  de  décence,  de  déli- 
catesse, dans  le  langage  et  dans  le  maintien.  La  pruderie 
Joue  les  vertus  morales,  comme  l'hypocrisie  Joue  les  ver- 
tus religieuses. 

PRUD'HOBIMES,  mot  qui  eut  autrefois  des  acceptions 
très-diverses  [V,  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire  ),  et  qui  désigne  aujourd'hui  les  arbitres  char- 
gés de  Juger  les  contestations  entre  fabricants  et  ouvriers. 
Un  décret  du  18  mars  1806  créa  le  firemier  conseil  de 
prud'hommes  à  Lyon  :  an  règlement  du  3  Juillet  décida 
que  les  membres  de  ce  conseil ,  élus  par  les  fabricants  et 
les  chefs  d'atelier,  devraient  être  âgés  de  30  ans  au  moins, 
patentés,  et  eux-mêmes  fabricants  et  chefs  d'atelier  de- 
puis 6  ans  au  moins.  Un  décret  du  1i  Juin  1809  invita  les 
autres  villes  à  réclamer  l'institution  de  conseils  sembla- 
bles, et  admit  les  contre-mattres  et  les  ouvriers  patentés 
(travaillant  chez  eux  )  à  en  faire  partie.  Par  décret  du 
oaoût  1810,  les  prud'hommes,  qui  Jugeaient  les  demandes 
Jusqu'à  la  somme  de  60  fr.,  sans  formes  ni  frais  de  pro- 
cédure et  sans  appel,  purent  prononcer  Jusqu'à  concur- 
rence de  100  fir.;  on  leur  confia  aussi  les  mesures  conser- 
Tatoires  de  la  propriété  des  dessins  industriels  et  des 
marques  de  fabrique.  Après  la  Révolution  de  18i8,  un 
décret  des  27-29  mai  reconstitua  les  conseils  de  prud'- 
hommes sur  de  nouvelles  bases  ;  il  a  été  modifié  par  la 
loi  du  l*'  iuin  1853,  qui  est  ai^ourd'hul  en  vigueur.  Les 
présidents  et  vice-présidents  sont  nommés  par  l'Empereur 
et  peuvent  être  pris  en  dehors  des  éligibles  ;  les  secrétaires 
sont  nommés  par  le  préfet,  sur  la  proposition  du  prési- 
dent. Sont  électeurs  :  1®  les  patrons  âgés  de  25  ans  ac- 
complis, patentés  depuis  5  ans  au  moins,  et  depuis  3  ans 
dans  la  arconscription  du  conseil;  2<*  les  chefs  d'atelier, 
contre-mattres  et  ouvriers  âgés  de  25  ans  accomplis, 
exerçant  leur  industrie  depuis  5  ans  au  moins,  et  domi- 
ciliés depuis  3  ans  dans  la  droonscription.  Sont  éligibles 
les  électeurs  âgés  de  30  ans  accomplis,  et  sachant  lire  et 
écrire.  Chacune  des  deux  catégories  d'électeurs  nomme 
un  nombre  égal  de  prud'hommes.  Les  Conseils  se  re- 
nouvellent par  moitié  tous  les  3  ans;  ils  sont  rééligibles. 
Les  jugements  sont  définitifs  et  sans  appel  auaud  le  chiffre 
de  la  demande  n'excède  pas  200  fr.  en  capital;  au-dessus 
de  cette  somme  U  peut  y  avoir  appel  au  tribunal  de 
commerce.  Les  Conseils  peuvent  être  dissous  par  TEm- 

f>ereur,  sur  la  proposition  du  ministre  compétent.  F.  Mol- 
ot^  De  la  compétence  des  Conseils  de  prudf  hommes,  1842, 
in-S**  ;  Binot  de  Villiers ,  Manuel  des  Conseils  de  pru^- 
hommes,  1845;  in-12;  Durut,  Code  des  prud'hommes, 
1837,  in-12,  et  Dictionnaire  raisonné  de  la  législation 
usuelle  des  prud'hommes  et  de  leurs  justiciables,  1846, 
in-12  ;  Ungée,  Code  des  prud'hommes,  i9^,  in<42.  Le  Hir 
publie  un  Journal  des  prud^hommes. 

PRUSSIEN  (Idiome).  C'est  la  langue  allemande  qu'on 
(Murle  aujourd'hui  en  Prusse;  mais  il  y  eut  autrefois, 
entre  la  Vistule  et  le  Memel,  un  idiome  distinct,  le  bo- 
russien  ou  vieux  prussien,  qui  appartenait  à  la  branche 
lettînue  des  langues  slaves ,  et  qui  s'est  éteint  sous  la 
nommation  des  margraves  de  Brandebourg.  Il  en  reste  un 
monument  unique  :  c'est  une  traduction  du  Catéchisme 
4e  Luther,  imfirimée  en  1561  pour  quelques  communes 


rurales.  On  y  remarque  ^ue  le  nombre  des  caa  de  la  dé- 
clinaison est  plus  restremt  qu'en  lithuanien ,  et  que  le 
duel  n'existe  pas.  V,  Vater,  La  langue  des  anciens  Prus' 
siens,  en  allem.,  Brunswick,  1821  ;Nesselmann,  Lalan» 
gue  des  anciens  Prussiens,  en  allem.,  Berlin,  1845. 

PRYTANÉE,  PRYTANES.  K.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

PSALLETTE  (du  latin  psallere,  chanter),  vieux  root 
synonyme  de  Maîtrise. 

PSALBUSTE ,  auteur  de  Psaumes.  C'était  aosai  autre- 
fois le  nom  des  chantres. 

PSALMODIE,  chant  des  psaumes  de  David  et  des  can- 
tiques de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament.  Suivant 
plusieurs  Pères  des  premiers  siècles ,  entre  autres  S'  Clé- 
ment d'Alexandrie,  les  Grecs  auraient  formé  leur  mode 
dorien  d'après  les  éléments  de  la  psalmodie  des  Hébreux. 
Les  psaumes  sont  divisés  en  versets  offrant  pour  la  plu- 
part un  sens  complet.  Le  chant  du  premier  verset  d'un 
psaume  est  divisé  en  quatre  parties  distinctes  :  1^  l'inio- 
nation  proprement  dite  ou  commencement;  2<^  la  domi- 
nante; 3**  la  médiation;  4<*  la  terminaison  (  V.  ces  mots). 
Chaque  ton  du  plain -chant  a  pour  les  psaumes  une 
mélodie  qui  lui  est  propre.  Le  ton  d'un  psaume  est  subor- 
donné à  celui  de  Vantienne  (  V.  ce  mot)  qui  précède  ce 
psaume.  Dans  la  psalmodie,  les  syllabes  sont  longues, 
hrèves,  ou  communes.  Les  dernières  syllabes  d'un  mot 
suivi  d'un  monosyllabe  sont  toi]Jours  brùves,  même  lors- 
qu'elles sont  naturellement  longues;  une  syllabe  brève 
ne  peut  entrer  dans  la  formation  de  l'intonation ,  de  la 
médiation,  ou  de  la  terminaison.  Lorsqu'il  se  trouve  à  la 
médiation  des  versets  des  psaumes  un  mot  hébreu  ou  un 
monosyllabe,  on  arrête  la  médiation  sur  une  note  élevée 
d'un  ton  au-dessus  de  la  dominante,  mais  seulement  dans 
la  psalmodie  des  2*,  4«,  5*  et  8*  tons.  F.  C 

PSAL TÊRION  (  du  grec  psalléin ,  Jouer  d'un  instru- 
ment) ,  instrument  de  musique.  Les  anciens  Grecs  don- 
naient ce  nom  au  nablum  ou  nebd  (  V,  ce  mot)  dont  les 
Hébreux  accompagnaient  le  chant  de  leurs  psaumes, 
instrument  à  cordes  obliques  et  du  g^enre  de  la  harpe. 
Le  psaltérion  mentionné  par  les  écrivains  du  moyen  âge, 
et  qu'ils  appelaient  psaltere,  saltérion  et  salteire,  était 
imité  de  celui  de  TOrient.  Il  consistait  en  une  cat^o 
sonore,  carrée  ou  en  forme  de  delta  (  A) ,  sur  laquelle  était 
collée  une  table  d'harmonie  en  sapin  :  sur  cette  table  un 
certain  nombre  de  cordes  en  métal  ou  en  boyau  étaient 
tendues  par  des  chevilles,  et  accordées  de  manière  à  ren- 
dre tous  les  sons  de  la  gamme.  On  attaquait  ces  cordes 
avec  une  plume.  —  On  appela  aussi  Psaltérion  une  sorte 
de  tympanon,  qu'on  frappait  avec  de  petites  baguettes. 
Un  chœur  d'enfants  reçut  encore  le  nom  de  Psaltérion , 
et  ce  mot  était  enfin  appliqué  pendant  le  xv*  siècle, 
comme  aujourd'hui  le  mot  Violon,  à  la  prison  où  l'on 
déposait  pour  une  nuit  les  gens  arrêtés.  B. 

PSALTEUR,  vieux  mot  synonyme  de  choriste  et  de 
chantre. 

PSAUMES,  nom  sous  lequel  on  désigne  spécialement 
les  chants  religieux  et  nationaux  des  Juifs ,  contenus  dans 
l'Ancien  Testament ,  et  dont  on  attribue  la  composition 
au  roi  David ,  quoiqu'ils  ne  soient  pas  tous  de  lui.  Les 
chants  dits  psaumes  de  David,  dans  lesquels  sont  racon- 
tées les  merveilles  des  ouvrages  de  Dieu ,  sont  au  nombre 
de  150;  ils  forment  un  recueil  nommé  psautier.  Les 
titres  en  attribuent  71  à  David  ;  mais  un  certain  nombre 
de  ceux-là  même  appartiennent  à  une  époque  plus  ré- 
cente. Le  90*  psaume  porte  le  nom  de  Moise,  le  72*  et 
le  127*  celui  de  Salomon.  Plusieurs  portent  les  noms  de 
divers  lévites,  Asaph,  Ueman,  Ethan  ou  Jeduthun.  Un 
certain  nombre  qui  sont  consacrés  à  la  tristesse  pour- 
raient bien  provenir  de  prophètes  persécutés.  Les  psaumes 
119-134,'  qui  portent  le  nom  des  enfants  de  Coi*é,  sont 
appelés  graduels,  parce  que,  suivant  Dom  Calmet,  leur 
titre  hébreu  signifie  cantiques  de  la  montée,  et  qu'ils 
furent  chantés  au  retour  de  la  captivité  de  Babylone , 
quand  les  Juifs  montèrent  sur  la  colline  de  Sion.  Les 
psaumes  6,  31,  37,  50, 101,  129  et  142  sont  dits  Psaumes 
de  la  Pénitence,  parce  qu'ils  sont  consacrés  spécialement 
à  l'expression  du  repentir  du  pécheur.  Les  psaumes 
étaient,  du  temps  de  David,  chantés  par  4,000  lévites, 
avec  accompagnement  d'instruments  que  le  roi  avait  fait 
faire  pour  cet  usage.  Leurs  mélodies ,  soit  qu'elles  nous 
viennent  directement  des  Hébreux,  soit  qu'elles  nous 
aient  été  transmises  en  passant  par  les  Grecs,  sont  admi- 
r{d)les  par  leur  simplicité  et  leur  variété.  Le  pape  S^  Grc- 
golre  le  Grand,  au  vi*  siècle,  disposa  les  mélodies  des 
psaumes  dans  un  ordre  régulier,  les  appropria  au  service 
de  la  Uiurgie,  les  fit  suivre  d'une  antienne  qui  corres- 


PSY 


1515 


PST 


pondit  aree  elles  mub  le  doubla  rapport  du  texte  et  du 
ton ,  les  classa  suivant  les  exigences  des  Heures  cano- 
niales, et  en  forma  un  ensemble  parfait  (  V.  Psalmodib), 
Les  Protestants  chantent  aussi  des  psaumes  dans  leurs 
temples  :  ce  sont  des  cantiques  en  langue  vulgaire,  imi- 
tés des  psaumes  de  David.  En  France,  ils  se  servent  d*une 
traduction  commencée  par  Clément  Harot,  qui  mit  en 
vers  52  psaumes,  et  terminée  par  Théodore  de  Bèze; 
dans  les  plus  anciennes  éditions,  chaque  psaume  est  pré- 
cédé d*un  verset  en  musique  prise  d'airs  connus  ou 
composée  par  divers  maîtres ,  tels  que  Louis  Bourgeois , 
Guill.  Ftanc,  et  Claude  Goudimel.  Conrart  et  Labastide 
ont  rêva  la  traduction  au  xvn*  siècle;  de  nos  Jour*,  la 
musique  a  été  améliorée  par  Wilhem  et  Potier. 

PSCHENT,  coiiTure  des  anciens  rois  d*Én^pte,  emblème 
de  la  toute-puissance.  C*était  une  espèce  de  cône  à  som- 
met un  peu  arrondi.  Voyez-en  la  figure  sur  la  tète  du 
serpent,  à  l'article  Apis  (Taureau). 

PSÈQUES.  V.  Chevelure. 

PSEUDISODOMON.  V.  Appareil. 

PSEUDO-DIPTÈRE,  c-à-d.  faux  diptère,  ordonnance 
de  colonnes  que  les  Anciens  employaient  dans  plusieurs 
de  leurs  temples.  L'espace  entre  les  colonnes  et  le  mur 
de  la  cella  était  aussi  large  que  dans  le  diptère,  mais  ces 
colonnes  étaient  sur  un  seul  rang,  au  lieu  de  deux. 

PSEUDONYME  (du  grec  pseudos,  faux,  et  onama, 
nom),  qui  a  un  nom  faux  et  supposé.  Beaucoup  d'ou- 
vrages, dans  l'Antiauité  et  chex  les  Modernes,  ont  été  pu- 
blia sous  des  pseudonymes.  Par  exemple,  le  baron  d'Hol- 
bach mit  son  Système  de  la  Nature  sous  le  nom  du 
comte  de  Mirabaud;  Voltaire  donna  la  plupart  de  ses 
écrits  philosophiques  et  polémiques  sous  des  noms  sup- 
posés. F.  Barbier,  Dictionnaire  des  ouvrages  anonymes 
ou  pseudonymes,  2*  édit.,  Paris,  4823  ;  Quérard,  Les  Au- 
teurs déguisés  de  la  littérature  française,  1845,  br.  in-8°; 
Les  Supercheries  littéraires  déwUées,  1845-56, 5  vol.  in-8^, 
et  Les  ouvrages  polyonymes  et  anonymes ,  1848  et  suiv. 

PSEUDO-PÉRIPTÈRE.  V.  WRiprfeRE. 

PSILITES.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnmre  de  Bio^ 
graphie  et  d'Histotre, 

PSYGHË.  La  fable  de  Psyché  (  T.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire)  a  une  origine  orientale,  et  est 
postérieure  à  l'époque  mythologique  de  la  Grèce.  De  tous 
les  écrivains  grecs  et  latins  dont  les  ouvrages  nous  sont 
parvenus,  Apulée  est  le  seul  qui  la  raconte:  il  faut 
mettre  sur  le  compte  de  son  imagination  la  plu[)art  des 
détails  qu'il  a  multipliés  autour  de  la  légende  primitive, 
car  ils  ne  s'accordent  pas  avec  les  monuments  de  l'art 
grec  inspirés  par  le  mythe  d'Amour  et  Psyché,  et  bien 
antérieurs  au  siècle  d'Apulée.  Parmi  les  interprétations 
de  ce  mythe,  la  première  en  date  est  celle  de  Fulgence 
Planciade,  évèque  de  Carthage  au  vi*  siècle,  qui  l'a  expli- 
qué dans  le  sens  des  doctrines  chrétiennes  :  selon  lui ,  la 
flamme  de  la  lampe  que  tient  Psyché  symbolise  la  flamme 
de  la  passion  ;  la  goutte  d'huile  qui  brûle  l'épaule  de 
Cupidon,  c'est  le  stigmate  du  péché  qui  s'imprime  dans 
notre  chair.  Les  hypothèNMs  des  érudits  modernes  sont 
moins  arbitraires  et  moins  subtiles.  Pour  les  uns,  l'his* 
toire  d'Amour  et  Psvché  est  un  mythe  moral  qui  a  pour 
but  de  représenter  les  dangers  courus  par  la  foi  conju- 

Ssle,  la  fidélité  diversement  éprouvée  et  triomphant  en 
éfinidve  des  périls  qui  la  menaçaient.  Pour  les  autres, 
c'est  une  allégorie  de  la  destinée  de  l'âme  humaine,  oui, 
d'origine  céleste,  est,  dans  sa  prison  du  corps,  exposée  à 
Terreur;  c'est  pourquoi  des  éprouves  lui  sont  prescrites, 
afin  qu'elle  puisse  s'élever  a  une  vue  supérieure  des 
choses  et  aux  vraies  Jouissances.  On  a  cru  encore  re- 
trouver dans  cette  fable  un  dogme  pythagoricien  de  la 
chute  de  l'âme;  une  exposition  vivante  et  animée  des 
doctrines  de  Platon  sur  l'âme;  une  image  de  l'alliance 
mystique  de  l'âme  et  de  l'amour  divin  ;  une  théorie  de 
l'amour  idéal  ;  une  théorie  de  l'expiation  des  péchés,  etc. 
Queloues-uns  enfin ,  renonçant  à  pénétrer  le  sens  caché 
die  l'allégorie,  conjecturent  qu'Apulée  la  reçut  à  l'état  de 
tradition  bien  altérée,  la  modifia  encore  à  sa  guise,  et 
considèrent  la  manière  dont  il  l'a  mise  en  scène  comme 
ane  transition  du  récit  mythologique  aux  contes  de  Fées 
et  où  le  conte  domine. 

La  fable  de  Psjché  ne  se  prête  pas  seulement  aux  in- 
terprétations religieuses  et  philosophiques,  mais  mieux 
encore  aux  fantaisies  des  poStes  et  des  artistes.  Sa  popu- 
larité, en  France,  date  de  la  publication  (1669)  des 
Amours  de  Psyché  et  de  Cupidon ,  par  La  Fontaine,  sorte 
de  roman  pastoral ,  mêlé  de  prose  et  de  vers,  et  où  l'au- 
teur a  ta  se  montrer  original ,  tout  en  imitant  Apulée. 
En  1760  9  Tabbé  Aubert  donna  un  pofime  en  8  chants 


sur  le  même  sujet.  Au  rt*  chant  de  ses  Veillées  du  Par* 
nasse,  Lebrun  a  mis  dans  la  bouche  d'Apollon  s'adres- 
sant  aux  Muses  le  récit  de  l'histoire  de  Psyché,  qu'il 
regarde  comme  le  chef-d'œuvre  de  l'imagination  grecque. 
M.  de  Lamartine,  dans  son  poème  de  la  Mort  de  So- 
crate,  a  résumé  en  beaux  vers  cette  allégorie ,  en  décri- 
vant la  coupe  de  bronze  où  Socrate  va  boire  la  ciguë , 
et  sur  le  contour  extérieur  de  laquelle  la  sculpture  l'a 
représentée.  M.  de  Laprade  a  publié,  en  1841,  un  poème 
de  Psyché,  en  3  chants;  il  affirme,  dans  l'introduction, 
mais  sans  en  donner  de  preuve  positive,  la  concordance 
du  sens  de  cette  fable  avec  les  idées  de  la  Genèse  et  de 
l'Évangile.  On  a  enfin  de  H.  E.  de  Calonne  un  poème 
d'amour  et  Psyché^  qui  ne  manque  pas  d'intérêt.  — 
Ce  sujet  a  encore  donné  naissance  à  quelques  produc- 
tions dramatiques  et  musicales.  Dans  un  de  ses  Autos 
sacramentales,  le  poète  espagnol  Calderon  a  peint  l'amour 
de  l'âme  pour  Jâius-Christ  sous  le  voile  de  l'amour  de 
Psyché  et  de  Cupidon.  A  peine  le  roman  de  La  Fontaine 
fut-il  répandu,  que  Molière,  sur  l'ordre  de  Louis  XIV, 
y  puisa  le  sujet  d'une  tragédie-ballet,  qui  fut  repré- 
sentée en  1670  ;  il  en  avait  fait  le  plan,  écrit  le  i"  acte, 
la  l'*  scène  da  second,  et  la  1"  scène  du  troisième; 
le  reste  est  de  P.  Corneille  ;  LulK  composa  les  airs  de 
danse,  et  la  musique  chantée  sur  les  paroles  qu'on  devait 
à  la  collaboration  de  Quini^lt.  En  1678  parut,  sous  le 
nom  de  Thomas  Corneille,  un  opéra  de  Psyché,  en  cinq 
actes  ;  mais  Fontenelle  y  eut  la  plus  grande  part  ;  Lulli 
en  fit  aussi  la  musimie.  En  1857,  on  a  représenté  à  Paris 
un  opéra-comique  oe  Psyché,  musique  de  M.  Ambroise 
Thomas. 

Dans  les  œuvres  d'art,  Psyché  est  presque  toujours  re- 
présentée avec  des  ailes  de  papillon  ;  quelquefois  elle  est 
voilée  comme  les  Jeunes  mariées,  et  cache  un  papillon 
dans  son  sein ,  comme  pour  retenir  l'âme  de  son  époux. 
Les  statues  antiques  qui  reproduisent  son  image,  soit 
seule,  soit  formant  groupe  avec  celle  de  Cupidon,  sont 
nombreuses  dans  les  musées  de  l'Europe.  Le  Louvre  pos- 
sède un  groupe  où  l'on  voit  Psyché  implorer  à  genoux  la 
pitié  de  l'Amour,  et  une  statue  de  Psyché  persécutée  par 
Vénus.  Parmi  les  bas-reliefs,  le  plus  remarquable  est 
celui  du  Musée  Britannique  de  Londres,  représentant  une 
sorte  de  banquet  nuptial  et  d'hymen  sacré.  Un  camée, 
gravé  dans  la  collection  du  duc  de  Marlborough,  offre  une 
charmante  composition,  qui  a  le  mérite  rare  d'être  signée 
de  son  auteur,  Tryphon,  contemporain  d'Alexandre.  Parmi 
les  œuvres  modernes,  nous  citerons,  au  Louvre:  deux 
groupes  de  Canova,  Psyché  posant  un  papillon  sur  la 
main  gauche  de  l*Amour,  et  l'Amour  venant  au  secours 
de  Psyché;  une  statue  de  Pajou,  Psyché  abandonnée 
M 795);  un  autre  de  Milhomme  (1810);  une  autre  de 
Ghauoiat,  représentant  V Amour  tenant  un  papillon  et  lui 
présentant  une  rose.  —  Les  osuvrès  de  peinture  inspirées 
par  la  fable  de  Psyché  ne  sont  pas  nombreuses,  mais 
très-importantes  :  Raphaël  a  peint  cette  fable  sur  un  pla- 
fond du  palais  Famèse,  à  Rome.  Il  a  aussi  laissé  des 
dessins  qui  traduisent  toutes  les  situations  du  récit 
d'Apulée,  et  que  Marc-Antoine  Raimondi  et  d'autres  gra- 
veurs ont  reproduits  dans  32  ou  38  planches.  D'autres 
dessins  furent  composés  par  le  même  peintre  pour  les 
vitraux  que  Bemanl  Palissy  exécuta  en  1541  et  1542  au 
château  d'Écouen  {V.  ce  mot)  :  ils  ont  été  reproduits  en 
45  gravures  par  Alex.  Lenoir  ;  on  les  retrouve  en  partie, 
et  bien  mieux  exécutés,  dans  29  eaux- fortes  d'Hyaidnthe 
Langlois,  conservées  â  la  Bibliothèque  de  Rouen.  Le 
musée  du  Louvre  possède  un  tableau  de  Gérard,  Amouf 
et  Psyché^  crue  la  gravure  a  popularisé.  Prudhon  peignit 
une  Psyché  enlevée  par  les  Zéphyrs  (1808).  On  a  enfin 
de  Chaudet  un  remarquable  dessin  qui  a  pour  sujet  le 
Triomphe  de  Psyché,  à  laquelle  tous  les  peuples  viennent 
rendre  les  honneurs  divins.  M.  Renan  a  découvert,  en 
1861,  aux  environs  de  Saïda,  en  Syrie,  une  suite  de  pein- 
tures antiques,  ayant  pour  sujet  le  mythe  de  Psyché. 
V.  l'Introduction  aux  Œuvres  d'Apul&,  traduites  en 
français  par  Bétolnud,  Paris,  1862,  2  vol.  gr.  in-18;  Ful- 
gence Planciade,  Mythologiarum  libri  lit,  Lyon ,  1508, 
in-8o;  Montfaucon,  l'Antiquité  ea^liquée,  Paris,  1719, 
t.  n,  in-fol.;  Description  des  principales  pierres  gravées 
âiu  Cabinet  du  duc  ^Orléans,  Paris,  1780,  2  vol.  in-fol.; 
Alex.  Lenoir,  AffM^  des  monuments  français,  Paris,  1803, 
t.  VI;  Hirt,  Le  livre  des  figures  de  la  Mythologie,  de 
l'Antiquité  et  de  VArt,  Berlin,  1805-1816,  2  vol.  in-4»; 
Séroux  d'Agincourt,  Histoire  de  l'art  par  les  monuments, 
Paris,  1823,  4  vol.  in-fol.;  Creuser,  ReUçfions  de  Vanti" 
quUé,  trad.  par  Guigniaut,*  t.  m  et  IV,  in-8®;  le  comte 
1  de  Clarac,  Musée  de  sculpture  antique  et  moderne.  Paria, 


PSY 


1516 


PSY 


1850,  7  vol.  gr.  in-8«;  Saint-Marc  Girardin ,  Cours  de 
liltératurê  dramatiqtie,  gr.  in-18.  P — s. 

PSYCHÉ.,  grand  miroir  où  Ton  se  voit  en  pied,  et  qu'on 
peut  incliner  à  Tolonté  au  moyen  d*un  axe  qui  s'attache 
au  milieu  du  montant  d'un  chftssis. 

PSYCHOLOGIE  (du  grec  psukè^  àme,  et  â>gos,  dis- 
cours) ,  science  de  T&me.  La  chose  est  presque  aussi 
ancienne  que  la  Philosophie;  le  nom  ne  date  guère  que 
du  xvn*  siècle.  Wolf ,  s'il  n'est  pas  absolument  le  premier 
qui  s'en  soit  servi,  est  du  moins  le  premier  écrivûn  de  quel- 

3ue  célébrité  qui  ait  spécialement  désigné  par  là  une  des 
ivisions  de  la  Philosophie  (K.  Wolp,  dans  notre  Diction^ 
noir»  de  Biographie  et  d'Histoire)»  11  faut  ajouter  que,  si 
la  science  de  r&me  est  restée  longtemps  innommée,  cela 
tient  à  ce  qu'elle  n'était  point  traitée  comme  une  science 
distincte,  mais  demeurait  pour  ainsi  dire  incorporée  aux 
autres  parties  de  la  Philosophie,  dont  elle  est  le  soutien 
et  le  point  de  départ.  Que,  d'ailleurs,  l'étude  de  l'&me 
humaine  ait  attiré  presque  dès  l'origine  l'attention  des 

{philosophes;  que  Socrate,  Platon,  Aristote,  les  Stoïciens, 
es  Pères  de  l'Église,  les  ScolasUques,  aient  amassé  sur 
ce  sujet,  pour  le  transmettre  à  la  philosophie  moderne, 
un  véritable  trésor  d'observations,  qui  n'a  fait  que  s'ac- 
croître et  se  coordonner  depuis  que  Descartes  a  établi 
f»Ius  scientifiquement,  plus  méthodiquement  qu'on  ne 
'avait  fait  Jusqu'alors,  l'existence  distincte  du  principe 
pensant:  il  ne  pouvait  en  être  autrement,  suivant  l'idée 
que  nous  nous  faisons  de  la  Philosophie  (  V,  Philoso- 
phie). Dans  l'état  actuel  de  cette  dernière  seience,  disons 
la  place  que  doit  y  tenir  la  Psychologie,      à 

La  Psychologie  a  pour  objet  l'&me  humaine,  c'est-à- 
dire  sa  nature  intime,  ses  attributs  essentiels,  ses  dif- 
férentes fonctions,  les  lois  auxquelles  elle  est  soumise. 
Dès  le  premier  pas,  elle  se  trouve  en  présence  d'objections 
plus  ou  moins  spécieuses,  bien  vieilles  au  fond,  mais  sans 
cesse  renouvelées,  qui  ne  vont -à  rien  de  moins  qu'à  nier 
sa  légitimité,  son  droit  à  exister  comme  science  distincte. 
L'àme,  disaient  les  Épicuriens,  est  une  partie  de  l'homme 
au  même  titre  que  les  mains,  les  pieds  et  les  yeux  (F*.  Lu- 
crèce, de  NcUurà  renmi,  III,  ▼.  95  et  suiv.),  et  ils  en  con- 
cluaient que  c'est  à  la  Physique  au'appaitient  l'étude  de 
l'homme  tout  entier.  Avec  plus  de  science  et  moins  de 
décision,  le  matérialisme  moderne  dit,  au  fond,  la  même 
chose,  lorsqu'il  proclame  que  le  moral  n'est  aue  le  phy- 
sique retourné  (Cabanis),  que  toutes  les  racultés  de 
l'homme  sont  attachées  à  son  encéphale,  que  la  pensée 
n'est  (][u'une  sécrétion  du  cerveau  (Broussais),  et  qu'il 
revendique  à  ce  titre,  pour  la  Physiologie,  l'analyse  des 
fonctions  du  moral  humain,  que  la  Métaphysique  et 
l'Idéologie  ont  déclaré  devoir  être  de  leur  domaine  ex- 
clusif. JonflEroy,  dans  une  polémique  spécialement  diri- 
gée contre  Broussais,  a  vivement  combattu  cette  pré- 
tention j  et  établi  par  les  raisons  les  plus  fortes  la 
Légitimité  de  la  distinction  de  la  Psychologie  et  de  la 
Physiologie  :  c'est  le  titre  de  son  Mémoire  sur  ce  sujet 
Voici  le  résumé  de  son  argumentation  :  Il  ne  suffit  pas, 
pour  prouver  que  la  Psychologie  a  un  objet  qui  Im  est 

Êropre,  de  s'appuyer,  comme  on  le  fait  ordinairement,  sur 
L  différence  aes  phénomènes  de  la  vie  morale  et  de  la  vie 
animale,  et  de  conclure  de  cette  différence  celle  des  prin- 
cipes de  l'une  et  de  l'autre  vie.  La  différence  des  effets 
ne  crée,  en  effet,  qu'une  présomption  et  nullement  une 
certitude  en  faveur  de  la  différence  des  causes.  Cest  à 
celles-ci  qu'il  faut  remonter.  Or,  si  l'on  recherche  la  cause 
des  phénomènes  de  la  vie  animale,  on  en  est  réduit  aux 
hypothèses,  comme  lorsqu'il  s'a^t  des  forces  purement 
physiques.  La  respiration,  la  digestion,  etc.,  ont  une 
cause;  mais  cette  cause,  qu'es^-elle  en  ru?  Est-b!^  une 
ou  multiple?  Nous  l'ignorons. 

Il  n'en  est  pas  de  même  de  la  cause  des  pensées ,  et 
surtout  de  la  cause  des  volitions.  L'enfant  lui-même,  in- 
terrogé sur  ce  sujet,  répondrait  :  C'est  moi  qui  pense,  c'est 
moi  qui  veux.  Nous  ignorons  la  cause  des  phénomènes 
de  la  vie  animale  :  nous  avons  conscience  d'être  cause 
des  phénomènes  de  la  vie  morale,  et  cette  perception  du 
sens  intime  embrasse  à  la  fois  la  cause,  l'effet,  et  l'opéra* 
tion  par  laquelle  la  cause  produit  son  effet.  En  même 
temps,  la  conscience  de  l'activité  personnelle  est  un  fait 
permanent  et  non  interrompu.  D'où  il  suit  qu'il  y  aurait 
contradiction  à  croire  que  la  même  cause  tantôt  eût  con- 
science d'elle-même  dans  quelques-uns  de  ses  actes,  tan- 
tôt s'ignor&t  dans  d'autres  actes.  Donc  la  cause  des 
phénomènes  physiologiques  n'est  pas  identique  à  la  cause 
des  phénomènes  moraux  :  donc,  réciproquement,  celle-d 
ue  se  confond  pas  avec  cell^là;  elle  est  un  principe,  un 
être  distinct ,  -^inon  absolument  indépendant,  ayant  ses 


fonctions  et  son  activité  propre,  et,  à  ce  titre,  elle  est  et 
doit  être  l'objet  d*une  science  distincte.  Alnai  se  trouve 
établie  :  1»  la  légitimité  de  la  Psychologie,  et,  tout  à  la 
fois ,  2<^  la  portée  et  la  nature  intime  du  principe  qui  en 
est  l'objet,  l'àme  ou  le  moi.  La  Psychologie  n'embrasse 
pas  seulement,  comme  on  l'a  cm  et  répété  à  satiété,  Tétude 
des  phénomènes,  à  l'exclusion  du  sujet  de  ces  phénomènes: 
elle  pénètre  ce  sojet  Jusque  dans  sa  nature  intime.  Dire 
que  l'àme  a  conscience  de  ses  pensées  et  n'a  pas  con- 
science d'elle-même,  ou  que,  si  elle  en  a  quelque  idée,  ce 
n'est  qu'une  idée  indirecte  comme  celle  que  nous  avons 
de  la  substance  matérielle  à  propos  de  ses  qualités  per- 
çues, c'est  jouer  à  plaisir  sur  les  mots  pour  arriver  à  une 
conclusion  radicalement  fausse.  L'àme,  en  réalité,  se  cjr- 
nalt  mieux  qu'elle  ne  connaît  quelque  autre  chose  que  ce 
soit  :  elle  se  connaît  comme  une  force.  Toute  la  difficulté 
vient  de  notre  penchant,  naturel  ou  acquis,  à  vouloir  nous 
représenter  par  l'imagination  ce  qui  n'est  pas  susceptible 
de  représentation.  Ces  différents  points  fixés,  il  n'est  bien 
difficile  de  déterminer  ni  les  limites  ni  la  métliode  de  la 
Psychologie,  ni  ses  rapports  avec  les  autres  sciences  phi- 
losophiques. C'est  un  fait  que  l'àme  et  ses  modifications, 
passives  ou  actives,  sont  l'objet  d'une  perception  sui  ge- 
nertSs  que  nous  appelons  conscience  ou  sens  intime.  La 
conscience  dirigée  et  concentrée  par  la  volonté  prend  le 
nom  de  réflexion  :  la  réflexion  est  essentiellement  la 
méthode  de  la  l^ychologie.  Quant  à  ses  limites,  elles  sont 
tracées  par  cela  même.  Où  s'arrête  la  conscience,  là  devra 
s'arrêter  la  Psychologie.  «  Le  monde  interne,  dit  encore 
l'auteur  ^e  nous  citions  précédemment,  est  de  toutes 
parts  délimité  par  la  conscience,  et  avec  lui  la  Psycho- 
logie, car  l'objet  de  la  Psychologie  est  d'écbdrcir  ce  que 
la  conscience  sait  de  nous-mêmes,  et  là  où  la  conscience 
ne  pénètre  pas,  il  n'y  a  rien  à  éclaircir.  »  {^Mélanges,  Ùe 
la  science  psychologique,  )  —  La  Psychologie,  d'après  son 
objet,  est  évidemment,  non  pas  «mte  la  philosophie, 
mais  celle  des  parties  de  la  philosophie  à  laquelle  toutes 
les  autres  viennent  se  rattacher;  la  Logique  et  la  Mo- 
rale, «  dont  l'une  nous  enseigne  à  bien  raisonner,  et 
l'autre  à  bien  vouloir,  »  supposent  la  connaissance 
théorique  de  rintelligence,  des  Passions,  et  de  la  Vo- 
lonté. Il  en  est  de  même  de  la  Théodicée  :  ce  n'est  que 
par  la  connaissance  de  nous-mêmes  que  nous  pouvons 
nous  élever  à  la  connaissance  de  Dieu.  L'àme  humaine 
est,  d'ailleurs,  le  centre  commun  où  naissent  toutes  les 
idées,  où  viennent  se  réfléchir  toutes  les  connaissances. 
Elle  ne  peut  être  sûre  de  rien,  si  elle  n'est  sûre  d'elle- 
même.  Ce  ne  sont  donc  pas  seulement  les  sciences  philo- 
sophiques proprement  dites,  mais  toutes  les  sciences,  qui 
sont  en  rapport  plus  ou  moins  direct  avec  la  Psychologie. 
Partout  où  un  système  psychologique,  c.-à-d.  une  cer- 
taine solution  des  questions  psychologiques,  a  prévalu, 
les  caractères  de  ces  systèmes  se  sont  reflétés  dans  les 
autres  sciences.  Le  Ciurtésianisme ,  la  philosophie  de  la 
sensation  (Locke  et  Gondillac),  le  Kantisme,  en  ofiriraient 
les  exemples  les  plus  remarquables.  —  Il  ne  faut  pas 
songer  à  citer,  même  partiellement  et  avec  choix,  les 
ouvrages  qui  traitent  de  \sl  Psychologie.  Il  n'est  pas  un 
livre  de  philosophie,  depuis  les  Dialogues  de  Platon  et 
le  Traité  de  Vàme  d'Aristote,  qui  ne  lui  fasse  une  large 
place.  Bornons-nous  à  indiquer,  avec  les  ouvrages  des 
écoles  éminemment  psychologiques  que  nous  venons  de 
nommer,  ceux  des  philosophes  de  l'école  écossaise,  Reid, 
Du^ld-Stewart,  Adam  Smith,  et  à  rappeler,  parmi  les 
écnts  encore  plus  récents,  les  deux  opuscules  de  Jouf- 
froy  que  nous  avons  également  cités  dans  le  cours  de  cet 
article»  et  qui  contiennent  un  résumé  très-complet  et 
très-méthodi^ue  des  idées  les  plus  générale»  sur  l'objet 
et  l'organisation  de  la  Psychologie.  B — a. 

PSYCHOSTASIE,  c-à-d.  en  grec  Pesée  des  âmes,  Ia 
croyance  qu'après  la  mort  les  actions  humaines  sont  ju- 
gées avec  une  sévère  équité  a  fait  comparer  cet  examen 
à  un  pèsement,  dans  lequel  la  Divinité  met  en  balance 
le  poids  de  nos  vertus  et  celui  de  nos  fautes.  Cette  image 
de  la  rémunération  future  passant  du  langage  dans  les 
idées,  on  prit  à  la  lettre  la  pesée  des  âmes.  On  en  trouve, 
dès  la  plus  haute  antiquité,  des  preuves  écrites  ou  figu- 
rées :  sur  plusieurs  monuments  de  l'Egypte,  Anubis, 
Honis,  ou  Thméi  (déesse  de  la  justice),. pèsent  les  âmes 
dans  une  balance;  dans  la  religion  des  Hindous,  Dherma 
pèse  aussi  les  bonnes  et  les  mauvaises  actions.  La  même 
idée  métaphorique  existe  dans  l'explication  que  Daniel 
donna  des  trois  mots  écrits  par  une  main  mystérieusn 
sur  les  murs  du  palais  de  Balthazar  :  «  Voua  avex  été  pe^ 
dans  la  balance,  et  on  vous  a  trouvé  trop  léger.  »  il 
ejdste  dana  Homèro  (Iliade,  xx,  210)  et  dans  Virgile 


PUI 


1517 


PUN 


{ÊnétdBf  xn,  725)  des  allusions  à  la  Psychostasie.  Wlnc- 
keliliann  a  publié  une  patère  étrusque  en  broQze ,  sur 
laquelle  Mercure  pèse  dans  une  balance  doiiX  petites 
figures  d'hommes.  Les  premiers  chrétiens  adoptèrent  la 
balance  comme  un  symbole  du  Jugement  dernier,  et  la 
Psychostasie  est  un  sujet  que  traitèrent  fréquemment  les 
artistes  du  moyen  âge  dans  les  bas-reliefs  et  les  fresques 
des  églises,  dans  les  peintures  des  manuscrits.  On  la  voit 
représentée  aux  cathédrales  de  Paris,  Bourges ,  Chartres, 
Amiens,  Rouen,  etc.  B. 

PUBERTÉ  (du  latin  pubes,  duvet  des  Joues),  &se  où 
l'on  devient  nubile.  Chez  les  Romains ,  c'était  l4  ans 
pour  les  garçons,  et  12  pour  les  filles.  Le  Code  Napoléon 
(art  144)  établit  la  puberté,  par  la  permission  du  ma- 
riage, à  18  ans  pour  les  garçons  et  à  15  pour  les  filles. 

PUBUGAINS.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  â^ Histoire, 

PUBLIGISTE,  celui  (fui  écrit  sur  le  Droit  public,  le 
Droit  des  gens,  la  Politique,  l'Économie  sociale,  etc.  Les 
connaissances  qui  lui  sont  nécessaires  ont  été  r^umées 
dans  ItL.Bibliotnèque  de  Vhomme  public,  par  Condorcet, 
Peyssonnel  et  Lechapellier,  Paris,  1790-92,  et  dans  la 
Science  du  publiciste;  par  Fritot,  1819-23. 

PUBLICITÉ ,  mot  synonyme  de  notoriété  publique,  et 
siçniflant  également  le  caractère  de  ce  qui  est  rendu  pu- 
bhc  La  publicité  des  débats  Judiciaires  est  une  maxime 
fondamentale  de  notre  Droit  depuis  1789.  Celle  des  dé- 
bats législatifs  a  été  supprimée  par  la  Constitution  de 
1852.  Dans  le  Journalisme,  la  publicité  s'obtient  par  Van- 
nonce  {V,ce  mot), 

PUDEUR  (La),  divinité  allégorique  des  Anciens.  On  la 
représente  enveloppée  d'un  voile,  assise  dans  une  atti- 
tude modeste,  avec  un  lis  et  une  tortue  pour  symboles. 

PUERILITIA,  nom  donné  anciennement  aux  morceaux 
de  chant  qui  devaient  être  exécutés  par  des  enfants. 

PUFF,  mot  anglids  qui  désigne  tout  genre  de  publicité 
mensongère  qui  a  pour  but  d'attirer  l'argent  des  gens 
crédules.  Celui  qui  fait  des  pt/^s  s'ap))elle  puf/iste. 

PUGILAT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtctionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

PUISARD ,  endroit  souterrain  creusé  en  forme  de  puits 
et  où  se  rendent  les  eaux  inutiles  d'une  habitation  ou  les 
eaux  des  ruisseaux,  qui  se  perdent  ensuite  dans  la  terre 
ou  rejoignent  un  aqueduc.  Il  est  ordinairement  bâti  à 
pierres  sèches,  et  recouvert  d'une  pierre  trouée  ou  d'une 
grille  en  fer.  On  nomme  puisard  d'aqueduc  l'ouverture 
qu'on  pratique  dans  la  voAte  d'un  a^pieduc  pour  v  péné- 
trer, un  puisard  de  sou/rce  conduit  les  eaux  de  cette 
source  dans  le  sein  de  la  terre.  On  fait  usa|^  de  puisards 
pour  les  exploitations  minérales  :  les  eaux  qui  s'y  amas- 
sent sont  épuises  par  des  pompes  à  feu. 

PUISETTE ,  vieux  mot  signifiant  petit  seau. 

PUISSANCE,  mot  qui  s'emploie  quelquefois,  en  Psv- 
chologie,  dans  le  sens  de  faculté  :  «  les  puissances  de 
r&me  humaine.  »  —  Dans  une  acception  toute  spéciale,  et 
propre  â  la  Métaphysique  péripatéticienne,  la  Puissance 
est  opposée  à  l'Acte  et  aésigne  l'état  d'Indétermination  de 
la  matière,  avant  qu'elle  soit  passée  à  l'état  d'Entéléchie 
par  l'adjonction  de  la  Forme,  qui  constitue  l'acte  propre- 
ment dit.  V.  Acte  et  ENTÉLécHis.  B~b. 

poissauge  uaritaus,  autorité  attribuée  au  mari  sur  la 
personne  et  les  biens  de  sa  femme.  V,  Marugb,  Fehmb, 
Commun ACTé,  Dotal  (Régime). 

PUISSANCE  PATBBNBLLE,  autorité  quo  lo  père  exerce  sur 
lu  personne  et  les  biens  de  ses  enfuits.  F.  Pins. 

PUISSANCES  (Les).  V.  Angbs. 

PUITS  (du  latin  puteus),  excavation  de  forme  ordinai- 
rement circulaire,  pratiquée  dans  le  sol  pour  réunir  les 
eaux  qu'il  renferme  et  en  faire  usage.  On  revêt  de  ma- 
çonnene  la  surface  intérieure ,  afin  d'empêcher  l'ébode- 
ment  du  terrain.  Pour  puiser  l'eau,  on  se  sert  de  seaux 
auachés  à  l'extrémité  d'une  corde  qu'on  enroule  autour 
d'une  poulie,  et  qui  est  tirée  soit  à  bras,  soit  par  un  ma- 
nège ou  une  machine,  (hiand  on  creuse  des  puits  pour 
les  maisons,  il  faut  les  éloigner  des  fumiers,  des  étables, 
des  fosses  d'aisances,  de  tous  lieux  dont  les  infiltrations 
peuvent  g&ter  l'eau;  et  fl  est  bon,  malgré  quelques  in- 
convénients, de  les  laisser  découverts,  parce  que  l'eau  en 
est  meilleure.  —  Nul  ne  peut  creuser  de  puits  sur  sa 
propriété  pr^  d'un  mur  mitoyen,  d'un  mur  de  sépara- 
tion, d'une  cave,  d'un  autre  pidts  ou  d'une  fosse  d'ai- 
sances, sans  laisser  la  distance  prescrite  par  les  règle- 
ments et  usages  locaux,  ou  sans  faire  les  ouvrages  que 
ces  règlements  ordonnent. 

Il  existe  des  puits  d'un  caractère  monamental  ;  on 
en  trouve,  dans  l'Inde^  d'une  profondeur  et  d'un  dia« 


mètre  eonsidérables ,  et  entourés  de  galeries  Jusqu'au 
niveau  de  l'eau.  Le  puits  dit  de  Joseph,  au  Caire,  construit 

f)ar  nn  prince  arabe  du  nom  de  Youssouf ,  est  tsillé  dans 
e  roc,  et  a  93  met.  de  profondeur  sur  14  de  circonfé- 
rence ;  on  y  descend  au  moyen  d'un  escalier  circulaire  de 
300  marches,  séparé  du  puits  par  un  mur  qui  n'a  que 
0™,16  d'épaisseur,  et  qui  est  percé  de  petites  fenêtres 
destinées  à  éclairer  la  rampe.  A  peu  près  au  milieu  du 
puits  se  trouve  une  esplanade  avec  un  bassin  ;  là,  des 
bœufs  tournent  une  roue  qui  fait  monter  l'eau  dans  le 
bassin,  d'où  d'autres  bœufs,  placés  à  la  surface  du  sol,  lui 
font  franchir  le  reste  de  la  distance.  On  voit  à  Orvieto, 
dans  les  États  romains,  un  puits  de  S^  Patricef  construit 
par  Ant.  San-Gallo,  sur  l'ordre  du  pape  Clément  VII  :  il 
est  revêtu  en  pierres  de  taille;  des  mulets  vont  y  cher- 
cher l'eau  en  descendant  par  un  escalier  en  spirale  et  en 
remontant  par  un  autre  :  ces  escaliers,  comme  au  puits 
du  Caire,  sont  éclairés  par  des  fenêtres  pratiquées  sur 
les  parois.  Le  puits  de  Bicêtre,  près  de  Paris,  achevé 
en  1735  d'aprè»  les  plans  de  Boffrand,  a  57  met.  de 
profondeur  et  5  met  de  diamètre  :  l'eau  s'en  extrait 
au  moyen  de  deux  seaux  contenant  chacun  près  de 
270  litres  d'eau  et  pesant  600  kilogr.,  lesquels  montent 
et  descendent  au  moyen  d'une  charpente  tournante  mue 
par  8  chevaux  ;  cette  eau  est  reçue  dans  un  réservoir  qui 
en  contient  10,728  hectol.,  et  d'où  elle  est  distribuée  par 
72  conduits  dans  l'établissement  A  Coutras  (Gironde), 
là  où  était  un  château  du  xvi*  siècle,  se  trouve  un  puits 
hexagone,  recouvert  d'une  coupole  que  supportent  des 
colonnes  d'ordre  dorique,  et  que  couronne  une  petite 
lanterne  surmontée  d'une  calotte  en  écaille  et  d'un  dau- 
phin. L'architrave,  sculptée  avec  goût,  offre  alternative- 
ment, dans  ses  six  compartiments,  des  armoiries  muti- 
lées, et  un  bras  frappant  d'un  cimeterre  plusieurs  nœuds 
au-dessous  desquels  on  lit  :  Nodos  virtute  résolve  (Je 
délie  les  ncsuds  par  mon  courage).  La  hauteur  totale  de 
ce  monument  est  de  7  met.  Il  existe  à  Dijon,  sous  le  nom 
de  Puits  de  Moïse,  autrefois  Puits  des  Prophètes,  un 
ouvrage  intéressant  du  Hollandais  Claux  Sluter;  c'est  le 

f piédestal  d'une  croix  de  pierre  qu'on  a  détruite  pendant 
a  Révolution;  il  était  placé  dans  le  milieu  du  cloître  de 
la  Chartreuse,  et  élevé  sur  une  pile  de  pierre  qui  for- 
mait le  centre  d'un  puits  de  7  met  de  diamètre.  Ce  puits 
a  été  comblé,  mais  le  piédestal  a  été  conservé  avec  les 
six  statues  qui  y  sont  adossées.  Gaux  exécuta  son  travail 
de  1396  à  1402.  Le  mur  circulaire  qu'on  voit  autour  du 
puits  de  Moïse  supportait  autrefois  une  toiture.        B. 

porrs  ARTÉsiBN  ou  PUITS  FOBÉ,  trou  très-profond,  d'un 
diamètre  de  2  à  3  décimètres  seulement,  que  l'on  creuse 
au  moyen  de  sondes  ou  tarières  de  mineur.  Jusqu'à  ce 
qu'on  ait  atteint  quelque  rivière  souterraine  dont  l'eau , 
venant  d'un  sol  plus  élevé,  tende  à  remonter  au  même 
niveau.  Le  puits  livre  à  cette  eau  une  issue  par  laquelle 
elle  arrive  à  la  surface  de  la  terre.  On  peut,  sans 
chercher  de  source  Jaillissante,  forer  des  puits  pour  étu- 
dier la  nature  des  terrains  ou  trouver  des  mines.  Les 
puits  forés  sont  de  toute  antiquité;  on  en  a  creusé  en 
Egypte,  dans  les  oasis  du  Sahara,  en  Chine,  en  Perse,  en 
Médie,  en  Syrie,  etc.  L'administration  firançaifee  en  a  fait 
forer  sur  plusieurs  points  de  l'Algérie.  Le  plus  ancien 

2ue  l'on  connaisse  en  Fnuice  est  celui  d'un  couvent  de 
hartreux  à  Lillers  en  Artois  (1126};  de  là  est  venu  le 
nom  d'artésiens  donné  aux  puits  de  ce  genre.  Le  puits 
artésien  le  plus  remarquable  qu'on  ait  creusé  de  nos 
jours  est  celui  de  Grenelle.  V.  ce  mot  dans  notre  Diction^ 
nairs  de  Biographie  et  ^Histoire.  S. 

PUITS    DB    GARRIÈRB   OU    DB   HINB ,  OXCavatiOU    VOTticalS 

pratiquée  pour  l'exploitation  d'une  carrière  ou  d'une 
mine,  et  servant  au  passage  des  ouvriers  et  à  l'extraction 
des  pierres  ou  du  minerai. 

PUITS  DB  FBu,  nom  de  certaines  excavations  pratiquées 
en  Chine  pour  trouver  de  l'eau ,  et  d'où  s'échappent,  au 
contraire,  des  gaz  inflammables. 

purrs,  en  termes  d'Art  militaire,  trou  creusé  au  devant 
d'une  circonvallation  ou  d'un  retranchement,  et  qu'on 
recouvre  de  branchages  et  de  terre  pour  y  faire  tomber  la 
cavalerie  ennemie;  —  creux  pratiqué  dîans  la  terre  par 
les  assiégés  d'une  place,  pour  découvrir  et  éventer  les 
mines  des  assiégeants. 

PDJOLS.  V.  TuvuLUS. 

PULdNELLA.  V,  PoLicHmBLLB,  dans  notre  Diction» 
noire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

Sm  ^RSP*  }  V'  c«  mots  dans  notre  Dictionnaire 
POI^SarT    V    de  Biographie  et  d^Histaire. 
PUNCn,  abréviatîAn  populaire  de  Punchmelto,  mol 


PUR 


1518 


PUR 


qui  désigue  chez  les  Anglais  un  personnage  grotesque, 
analogue  à  notre  Polichinelle.  Son  nom  sert  de  titre  à  un 
^ournal  satirique  de  Londres. 

PUNCTATOR.  F.  PiQOEoa. 
9-  PUNIQUE  (Langue).  V.  Carthagoiois. 

PUPUXe  (  du  latin  pupellus,  diminutif  de  pujnu,  en- 
fant, poupon),  enfant  en  bas  âge  ou  mineur,  qui,  privé 
de  ses  père  et  mère^  ou  de  l'un  d*eux ,  est  sous  la  con- 
duite d'un  tuteur.  V.  Tutbllb,  Toteus. 

FDpnxBS  DB  LA  6ARDB  iMpiaiALB.  F.  uotro  Dtctionnoire 
de  Biographie  et  d'Histoire,  au  Supplément. 

PUPITliE,  meuble  en  bois  qui  sert  à  supporter  des 
livres,  des  papiers,  des  parties  de  musique,  etc.  A  Féglise, 
le  mot  est  svnonyme  de  LiUrin,     4» 

PURANAS,  mot  qui  pourrait  se  traduire  assez  exacte- 
ment par  Antiquités,  et  qui  désigne  certains  pofimes  in- 
diens où  sont  renfermées  des  légendes  humaines  ou 
divines,  recueillies  par  leurs  auteurs  dans  les  traditions 
nationales  et  les  anciens  écrits  des  Br&hmanes.  Ce  sont 
des  recueils  où  les  faits  relatés  sont  enchaîna  les  uns  aux 
autres  dans  un  ensemble  poétique  souvent  assez  mal  or- 
donné, entaché  même  de  contradictions  visibles.  Néan- 
moins, un  travail  critique  Judicieux  pourra,  dans  l'avenir, 
rétablir  entre  ces  faits  Tordre  que  les  poètes  n'ont  pas 
toujours  su  leur  donner,  et  recomposer  des  séries  vé- 
ritablement historiques.  Les  récits  contenus  dans  les 
recueils  pur&niques  se  rapportent  aux  plus  grandes  pé- 
riodes de  l'histoire  de  l'Inde,  antérieurement  au  boud- 
dhisme, et  remontent  souvent  Jusqu'à  la  période  primi- 
tive du  Véda  :  comme  nous  possédons  ce  dernier  recueil, 
dont  les  hymnes  sont  d'une  nature  tout  à  fait  historique 
et  positive,  les  tableaux  et  les  listes  puràniques  y  trou- 
vent naturellement  leur  contrôle,  et  servent  à  leur  tour 
à  les  coordonner  selon  leur  succession  réelle.  Les  Indiens 
attribuent  aussi  une  grande  valeur  historique  et  théolo- 
gique aux  Purànas  ;  la  lecture  du  Véda  et  des  épopées 
étant  interdite  aux  castes  inférieures,  l'enseignement 
leur  est  donné  par  les  PurAnas  »  qui  semblent  avoir  été 
composés  expressément  pour  elles.  Le  nombre  des  Purà- 
nos,  nommés  ordinairement  if aMpurdnaj,  c.-à-d.  grands 
Pur&nas,  est  de  18  :  les  principaux  sont  le  Bliâgavata- 
purâna,  le  Vishnu^purâna,  le  Mâtsya-purâna,  VAgnéya" 
purâna,  le  Mârkandéya-purdna,  le  Padma^purâna,  le 
Brahmà^uràna.  Les  18  recueils  pris  ensemble  renfer- 
ment 400,000  stances,  en  tout  1,600,000  vers;  on  est  loin, 
en  Europe,  d'en  posséder  une  traduction  complète  ;  ils  ne 
sont  pas  encore  tous  imprimés  ;  nous  n'avons  pas  même 
tous  les  manuscrits,  et ,  parmi  ceux  que  l'Inde  s'est  laissé 
ravir,  plusieurs  sont  incomplets  ou  remplis  de  fautes. 
Comme  les  Purànas  sont  généralement  très-populaires 
et  font  la  lecture  habituelle  des  femmes,  ils  ont  été  tra- 
duits en  plusieurs  dialectes  modernes,  pour  être  acces- 
sibles à  des  peuples  entrés  dans  le  système  brahma- 
nique, mais  ignorants  de  la  langue  sanscrite. 

La  tradition  attribue  la  composition  des  Purànas  à 
Vy&sa,  le  môme  auquel  on  rapporte  le  Mahâbhârata  et 
la  récollection  des  Védas.  Biais  ce  nom  de  Vyàsa  est  un 
terme  général ,  une  épithëte  que  l'on  donne  aux  auteurs 
des  collections  brahmaniques,  et  qui  n'implique  nulle- 
ment que  ces  sortes  d'éditeurs  soient  les  poètes  eux- 
mêmes  qui  ont  composé  ces-chants.  Les  Purànas  ne  sont 
ni  d'un  même  auteur  ni  d'une  môme  époque.  Il  est  diffi- 
cile, d'ailleurs,  d'admettre  qu'un  seul  homme,  après 
avoir  composé  le  grand  poème  épique,  recueilli  et  mis  en 
ordre  le  corps  entier  des  Védas,  eût  encore  trouvé  le 
temps  de  rassembler  les  antiques  traditions  de  l'Inde,  de 
les  coordonner,  et  de  composer  sur  elles  un  million  et 
demi  de  vers  :  il  y  aurait  donc  lieu  de  chercher  pour 
chaque  Purâna  le  nom  de  l'auteur  auquel  il  appartient 
véritablement.  Nous  connaissons  déjà,  selon  toute  vrai- 
semblance, plus  d'un  d'entre  eux  ;  on  peut  espérer  oue 
les  autres  seront  également  reconnus. 

Un  Purâna  contient,  en  général,  deux  sortes  de  sujets 
très-distincts  :  de  la  cosmogonie,  et  des  traditions  plus 
ou  moins  historiques.  La  cosmogonie  vient  d'abord  ;  les 
légendes  forment  les  derniers  chapitres  du  poème.  Ces 
deux  sujets  sont  rattachés  l'un  à  l'autre  sans  disconti- 
nuité :  car  la  cosmogonie  conduit  naturellement  le  poète, 
des  principes  abstraits  d'où  le  monde  est  issu ,  aux  divi- 
nités brahmaniques  qui  en  sont  les  personniilcations 
diverses,  et  de  ces  divinités  aux  familles  royales  ou  sa- 
cerdotales qui  les  reconnaissaient  nour  leurs  auteurs.  De 
plus,  comme  le  sujet  ordinaire  des  Purànas  est  Vishnu 
et  ses  incarnations  successives,  œ  Dieu  est  donné  dans  la 
cosmogonie  purànique  comme  l'auteur  de  toutes  choses 
ec  le  principe  suprême,  de  même  que,  dftos  Texposé  des 


traditions  humaines,  il  reparaît  nécessaireniAnt  plosienrt 
fois  sous  les  formes  diverses  par  lesquelles  il  s'est  mani- 
festé. C'est  donc  le  personnage  divin  de  Vishnu,  dont 
l'histoire  est  poursuivie  à  travers  ses  transfigurations,  qui 
donne  de  l'unité  à  chaque  Purâna,  et  même  peut^-être  à 
la  collection  tout  entière.  Les  doctrines  religieuses  expo- 
sées, quelquefois  très-longuement,  dans  ces  poèmes, 
appartiennent  en  majeure  partie  à  la  secte  vishnuvite, 
ou,  pour  mieux  dire,  à  la  période  de  l'histoire  de  llnde 
où  le  dieu  Vishnu  a  eu  la  prééminence  dans  les  croyances 
publiques.  L'intérêt  môme  et  la  complaisance  avec  les- 
quels les  poètes  s'attachent  à  décrire  ses  incarnations 
sont  un^  preuve  de  l'importance  qu'avait  son  culte  ao 
temps  où  les  Purànas  furent  composés.  Le  Vishnu^pu^ 
râna  et  le  Bhâgavata^purâna  renferment  non-seulement 
le  récit  de  ces  avatâras  ou  descentes  successives  du 
Dieu,  mais  de  nombreuses  tirades  de  vers  où  l'auteur 
exalte  avec  une  sorte  d'effusion  de  cœur  les  vertus  su- 
blimes et  les  attributs  métaphysiques  de  Vishnu.  C'est 
autour  de  ce  nom  que  se  groupent  les  idées  religieuses 
des  poètes,  leurs  théories  mystiques;  c'est  lui  qui  est  le 
centre  de  leurs  croyances,  l'objet  de  leur  culte  et  de  leur 
amour.  Les  PurAnas,  en  général,  appartiennent  donc 
bien  réellement  à  la  période  vishnuvite  de  la  religion 
bràhmaniaue.  —  Au  point  de  vue  philosophique,  il  est 
bien  difficile  de  démêler  dans  les  expositions  poétiques 
des  Purànas  \a  doctrine  d'une  école  déterminée,  et  de 
rapporter  ces  poèmes  soit  aux  Védântistes,  soit  au  SAn- 
khyct.  Il  semble  même  (c'est  du  moins  ce  que  prouve  la 
lecture  du  Bhàgavata^purAna)  qu'il  n'y  ait  point  Id  de 
doctrine  arrêtée,  et  que  l'auteur  flotte  pour  ainsi  dire 
entre  toutes  les  écoles.  Dans  certains  passages  on  trouve 
la  pure  métaphysique  fondée  sur  la  théologie  issue  du 
Véda;  ces  passages  sont  d'une  parfaite  orthodoxie,  et 
sembleraient  avoir  été  composés  dans  le  plus  beau  temps 
des  écoles  brahmaniques  de  l'antiquité.  Dans  d'autres,  la 
philosophie  rationaliste,  connue  sous  le  nom  de  Sânkhya, 
prend  le  dessus;  le  Véda  est  écarté  pour  un  temps;  le 
sens  privé  est  mis  à  la  place  de  l'autorité  sacrée,  et  la 
raison  au-dessus  de  la  foi.  Bien  plus,  les  doctrines  elles- 
mêmes  se  contredisent  quelquefois  de  la  manière  la  plus 
formelle,  sans  que  l'auteur  ait  paru  s'en  apercevoir  t 
Dieu,  l'homme  avec  son  moi,  le  monde  avec  ses  révolu- 
tions à  longue  et  à  courte  période,  les  sens,  l'intelligence, 
l'esprit  de  logique  et  d'examen,  la  morale  même,  tantôt 
humaine  et  pratique  comme  la  nôtre,  tantôt  mystique  et 
impraticable,  tout  ce  qui  compose  la  philosophie  de  rinde 
y  est  présenté  sous  les  Jours  les  plus  divers  et  parfois  les 
plus  opposés.  En  doit-on  conclure  que  chacun  de  ces 

{>oemes,  de  ceux  du  moins  que  nous  connaissons,  est 
'ouvrage  de  plusieurs  hommes,  de  plusieurs  écoles,  de 
plusieurs  époques?  Cette  conséquence  n'est  point  néces- 
saire. En  effet,  si  l'on  sort  des  PurAnas,  et  que  l'on  se 
reporte  aux  épopées  d'abord,  puis  aux  Védas  et  à  l'im- 
mense littérature  brahmanique  fondée  sur  eux,  on  re- 
trouve dans  ces  écrits  des  passages  entiers  que  l'on  avait 
lus  dans  les  PurAnas.  Comme  les  Védas  sont  de  beau- 
coup antérieurs  aux  épopées,  et  ^ue  celles-ci  remontent 
elles-mêmes  à  une  haute  antiquité,  on  eu  conclut  que 
c'est  l'auteur  purànique  qui  est  le  copiste,  et  que  les  pas- 
sages originaux  et  primitifs  doivent  être  cherchés  dans 
ces  anciens  écrits.  D'ailleurs,  l'extrême  diversité  qui  se 
rencontre  dans  le  style  et  même  dans  la  langue  de  ces 
divers  passages  montre  à  elle  seule  que  les  PurAnas  qui 
les  renferment  sont  des  ouvrages  de  seconde  main,  et 
pour  ainsi  dire  des  compilations.  Or,  ce  ne  sont  pas  seu- 
lement les  récits  de  faits  tout  humains,  tels  que  les  lé- 
gendes royales,  qui  renferment  de  tels  emprunts,  c'est 
aussi  la  partie  des  poèmes  où  se  trouve  la  cosmogonie 
avec  les  exposés  philosophiques  qui  s'y  rapportent.  Les 
auteurs  ont  emprunté  des  morceaux  tout  faits  à  des  ou- 
vrages qui  existaient  avant  eux  et  qui  avalent  acquis 
dans  l'Inde  une  réputation  étendue  et  une  sorte  d'auto- 
rité. Les  écoles  les  plus  opposées  ayant  tour  à  tour,  par- 
fois même  simultanément ,  Joui  de  cette  autorité  et  de  ce 
renom,  les  écrits  des  unes  et  des  autres  qui  pouvaient 
servir  au  but  de  l'auteur  lui  ont  également  fourni  des 
fragments  philosophiques,  sans  qu'il  ait  paru  se  mettre 
en  peine  d  accorder  ou  de  dissimuler  les  contradictions  : 
de  là  cette  espèce  de  syncrétisme,  souvent  grossier,  qui 
dépare  ces  grands  poèmes.  Quand  les  études  indiennes  se 
seront  portées  tour  à  tour  sur  tous  les  monuments  de  la 
littérature  sanscrite,  on  pourra  vraisemblablement  dé- 
membrer les  PurAnas,  rendre  aux  ouvrages  antiques  les 
morceaux  qui  leur  appartiennent ,  et  reconnaître  ce  qui 
est  vraiment  l'œuvre  de  leurs  auteurs.  On  pfu(  déjà  re- 


PUR 


1519 


PUR 


connaître  comme  rœayre  de  ceux-ci  des  chapitres  en- 
tiers, souvent  les  derniers  de  chaque  livre,  où  Tinspirar 
tion  religieuse  et  la  foi  du  poète,  laissant  de  côté  toutes 
les  citations  et  les  légendes,  s*ezalte  elle-même  et  s*é- 
panche  dans  la  contemplation  des  perfections  adorables 
de  Vishnu.  Ces  chapitres  sont  presque  toujours  les  plus 
beaux,  parce  qu'ils  sont  les  plus  originaux  et  les  plus 
naïfs. 

Les  conditions  où  se  sont  placés  les  poètes  pur&niques 
ne  leur  permettaient  guère  de  composer  des  œuvres  litté- 
rairement bien  faites  :  comment  écrire,  même  sur  un 
héros  unique  tel  que  Vishnu ,  un  bon  poôme  avec  des 
fragments  empruntés  à  tous  les  temps  et  à  toutes  les 
écoles?  Ils  étaient  d'ailleurs  retenus  dans  les  limites 
de  la  foi  et  de  la  tradition  philosophique  et  littéraire 
des  Br&hmanes.  Aussi  la  composition  des  Purânas  est- 
elle  ordinairement  confuse;  les  développements  sont 
diffus;  les  parties  sont  disproportionnées,  tantôt  trop 
courtes  pour  être  claires,  tantôt  trop  longues  pour  l'im- 
portance relative  des  sujets.  Les  mêmes  idées  reviennent 
souvent ,  exprimées  dans  les  mêmes  termes.  Comme  l'au- 
teur ne  nomme  pas  les  poètes  ou  les  ouvrages  qu'il  cite, 
on  n'est  point  averti,  et  tout  à  coup  l'on  est  transporté 
d'un  morceau  en  stvle  et  en  langue  épique,  emprunté  par 
exemple  au  Mahàbhdrata  ou  au  nàmâyana,  dans  un 
autre  tout  différent  de  langue  et  de  forme,  et  qui  n'est 
autre  chose  qu'un  hymne  du  Véda,  Il  n'y  a  donc  d'unité 
littéraire  ni  dans  Tensemble  ni  dans  les  parties  de  ces 
poèmes.  Le  seul  lien  qui  les  rattaclie  et  forme  un  tout  de 
ces  éléments  si  disparates,  c'est  la  foi  en  Vishnu  et  la 
pensée  qu'il  faut  Tadorer  ;  mais  c'est  là  une  unité  mo- 
rale et  non  littéraire.  —  A  un  autre  point  de  vue,  les 
Purânas  nous  offrent  de  très-beaux  modèles  de  style. 
A  l'époc^ue  où  ils  furent  composés,  les  hommes  instruits 
possédaient  non-seulement  une  langue  parvenue  à  sa 
perfection,  mais  des  connaissances  poétiques,  littéraires, 
grammaticales,  extrêmement  profondes  et  étendues.  Là 
où  Tauteur  est  redevenu  lui-même  et  exprime  ses  propres 
sentiments  comme  il  les  éprouve,  la  langue  sanscrite 
atteint  un  degré  de  perfection  que  l'on  ne  trouve  ni  dans 
les  épopées  ni  même  dans  les  drames.  Le  style  de  ces 
derniers  est  souvent  maniéré,  affecté,  déparé  par  des 
figures  de  rhétorique  qui  lui  ôtent  une  partie  de  son  na- 
turel ;  celui  des  épopées,  beaucoup  plus  simple,  a  géné- 
ralement encore  quelque  chose  de  rude  ou  du  moins  de 
positif  qui  n'indique  pas  une  longue  culture  littéraire. 
Quant  au  Véda ,  c'est  presque  un  autre  idiome  ;  ce  n'est 
pas  du  moins  le  sanscrit  proprement  dit.  Les  passages 
empruntés  aux  anciens  livres  font  dans  les  Purânas  un 
contraste  qui  fait  ressortir  encore  la  he^xité  du  style 
propre  de  leurs  auteurs,  cette  délicatesse  infinie  de  la 
pensée  qui ,  sans  perdre  sa  vigueur,  est  rendue  dans  ses 
nuances  les  plus  charmantes  ou  les  plus  touchantes.  Il  y 
a  aussi  de  fort  beaux  récits  dans  les  Purânas,  et  qui 
n'ont  rien  à  envier  à  aucune  de  nos  narrations  classiques 
les  plus  estimées.  A  ce  point  de  vue  leur  étude  offre  un 
véritable  intérêt.  Enfin,  ce  qui  caractérise  peut-être  le 
mieux  ce  genre  et  cette  époque  littéraire,  c'est  un  mé- 
lange étonnant  de  poésie  et  de  métaphysique.  La  littéra- 
ture indienne  a  toujours  uni  ces  deux  choses,  mais  à  des 
de^és  et  avec  des  succès  divers  :  dans  ces  poèmes,  la 
science  la  plus  abstraite  se  fond  avec  la  poâie  la  plus 
pénétrante.  Les  nombreux  passages  où  elles  s'imissent 
ainsi  nous  étonnent  d'abord,  puis  nous  charment  par 
degrés,  et  enfin  nous  subjuguent. 

Le  Purâna  est  le  Vêda  des  femmes  et  des  castes  non 
brahmaniques.  11  n'est  pas  non  plus  l'œuvre  des  brah- 
manes :  c'est  ce  que  prouvent  l'étude  de  ces  poèmes  et 
les  renseignements  donnés  par  les  grammairiens  et  par 
les  commentateurs.  En  effet ,  il  est  hors  de  doute  aujour- 
d'hui que  les  grands  Purânas  ont  été  précédés  par 
d'autres  beaucoup  plus  anciens,  moins  nombreux  et 
moins  étendus.  Ces  anciens  Purânas  étaient  au  nombre 
le  six  :  ils  traitaient  de  la  création,  de  la  naissance  et  du 
règne  dc^  ISanûs,  et  de  l'histoire  des  familles  qui  en  des- 
rendaient. On  peut  croire  que  les  doctrines  théoso- 
phiques  qu'ils  renfermaient  dérivaient  exclusivement  du 
Védîa;  car  ils  sont  cités  dans  le  Râmâyana,  dans  le 
Mahàbhdrata,  dans  Manê,  ouvrages  appartenant  aux 
premiers  développements  de  la  littérature  sanscrite  et  an- 
térieurs certainement  au  bouddhisme,  c.-à-d.  au  vi*  siècle 
avant  notre  ère.  Us  sont  même  cités  dans  les  Upanishads, 
lesquelles  appartiennent  à  la  littérature  du  Véda  et  sont 
par  conséquent  antérieures  aux  productions  en  langue 
sanscrite.  Il  ne  semble  pas  qu'il  reste  rien  dans  l'Inde  dp 
ces  Purânas  primitifft;  mais  ou  voit  que  leur  CQ5C60U  I 


était  sensiblement  différent  de  celui  de  nos  Purâna». 
Ceux-ci,  en  effet,  contiennent  des  doctrines  empruntées 
à  des  écoles  brahmaniques  de  beaucoup  postérieures  aux 
temps  védiques  et  même  très-modernes.  Telles  sont  les 
parues  de  ces  grands  poèmes  où  l'on  traite  de  la  disso- 
lution finale  du  monde  (pralaya)  ;  de  l'affranchissement 
ou  de  la  délivrance  par  le  moyen,  non  des  œuvres,  mais 
de  la  dévotion  ;  de  Hari  et  de  ses  perfections;  et  enfin  des 
dêvas.  Ces  sujets  ne  sont  pas  indiqués  comme  faisant 
partie  des  Purânas  primitifs,  et     %s  savons  par  le  fait 

Si'ils  ont  été  l'objet  d'études  de  x/jaucoup  postérieures, 
ais  il  y  a  toute  apparence  que  les  grands  Purânas  mo- 
dernes ont  été  faits  sur  le  modèle  des  anciens,  avec  cette 
différence  qu'ils  ont  pris  un  aspect  plus  métaphysique  et 
se  sont  surtout  attachés  à  faire  prévaloir  le  culte  sectaire 
de  Vishnu.  Dans  tous  ces  poèmes  également,  c'est  la 
forme  du  dialogue  qui  est  employée;  ou,  pour  mieux 
dire,  il  y  a  un  narrateur  et  une  personne  qui  écoute, 
n'interrompant  que  rarement,  là  où  le  récit  est  naturel- 
lement coupé.  Ce  narrateur  porte  invariablement  le  nom 
générique  de  Sûta,  qui  signifie  cocher  ou  écuyer;  mais 
le  nom  de  famille  de  cet  écuyer  n'est  pas  le  même  dans 
tous  les  Purânas.  Or,  nous  savons  que  les  Sûtes  for- 
maient dans  l'Inde  une  caste,  dont  une  des  fonctions 
principales  était  celle  de  bardes  ;  fils  d'une  br&hmanl  et 
d'un  xattriya,  ils  étaient  à  la  guerre  les  écuyers  des 
xattriyas,  et,  pendant  la  paix,  ils  mettaient  en  vers  les 
actions  béroiques  de  ces  derniers  ou  leurs  généalogies  ; 
celles-ci,  remontant  aux  dieux  eux-mêmes,  c.-à-d.  aux 
êtres  divins  qui  font  mouvoir  le  soleil  et  la  lune  et  qui 
président  à  la  vie,  conduisaient  le  poète  Jusqu'aux  temps 
de  la  création  primitive  et  aux  règnes  successifs  des 
Blanûs.  Ainsi  se  sont  composés  les  anciens  Purânas,  les- 
quels ne  pouvaient  contenir  de  théologie  et  de  métaphy- 
sique que  ce  qui  en  était  enseigné  ou  permis  à  la  caste 
des  écuyers.  Ce  fait  est  d'autant  plus  curieux,  que,  dans 
la  suite,  lorsque  des  hommes  tels  que  Vôpadêva  (auteur 
probable  du  Éhâgavaia-purâna)  composèrent  des  poèmes 
sur  les  Antiquités,  le  caractère  général  des  œuvres  an- 
tiques des  Sûtes  se  conserva,  malgré  'es  développements 
qui  furent  donnés  à  la  partie  cosmogonique.  Les  grandes 
épopées,  soit  les  itihâsas,  dont  le  Mahâbhârata  fut  le 

ÎliuA  considérable,  soit  les  kavyas,  tels  que  le  Bâmâyana, 
urent  au  contraire  l'œuvre  des  brahmanes,  et  purent  se 
développer  avec  une  richesse  de  poésie  et  une  liberté  de 
pensée  et  de  mouvement  qu'un  Pturâna  pouvait  difficile- 
ment atteindre.  Ces  faits  attestent  néanmoins  la  force  du 
génie  indien ,  qui  voyait  naître,  jusque  dans  la  caste  dé- 
classée des  écuyers,  des  poèmes  devenus  célèbres,  et  qui 
ont  été  par  la  suite  des  modèles  et  des  objets  d'étude  pour 
les  plus  savants  br&hmanes. 

Est-il  possible  de  déterminer  1  époque  où  furent  com- 
posés nos  grands  Purânas?  Lorsque  nous  posséderons, 
imprimés,  traduits  et  commentés,  les  18  recueils  purà- 
niques,  il  est  à  croire  que  l'on  aura  les  meilleurs  élé- 
ments pour  résoudre  la  question.  Toutefois,  la  date 
approximative  de  ces  ouvrages,  comme  de  tous  les  autres 
écrits  brahmaniques,  ne  sera  véritablement  fixée  que 
quand  le  corps  entier  de  la  littérature  indienne  sera 
connu  de  nous.  Dans  l'état  présent  de  la  science,  la  ques- 
tion de  date  ne  peut  être  abordée  que  pour  ceux  des  Pu- 
rânas que  nous  possédons  pleinement,  et  surtout  pour 
le  Bhâgavata-ifurâna,  Sa  rédaction  est  antérieure  au 
commencement  du  xiv*  siècle  de  notre  ère.  Cette  antério- 
rité n'est  pas  sans  doute  très-considérable;  car  la  reli- 
gion indienne  ne  s'est  concentrée  dans  le  culte  de  Vishnu 
qu'après  l'expulsion  définitive  du  bouddhisme  de  l'Inde  ; 
encore  le  développement  de  ce  culte  a-t-il  exigé  on  cer- 
tain temps.  Or,  nous  le  voyons  en  pleine  vigueur  dans  le 
Bhâgavata-purâna,  poème  dont  le  titre  est  le  nom  le 
plus  sublime  qui  ait  été  donné  dans  l'Inde  à  cette  divi- 
nité. De  plus,  la  confusion  des  doctrines  philosophiques 
dans  ce  poème  montre  que  les  écoles  avaient  depuis  long- 
temps dépassé  le  point  de  leur  plus  grand  développe- 
ment, puisque  nulle  d'entre  elles  ne  domine  exclusive- 
ment dans  la  théosophie  des  Purânas.  Si  l'on  ajoute  les 
remarques  que  peut  fournir  la  langue  ou  le  style  de  l'au- 
teur, on  est  conduit  à  considérer  son  csuvre  comme  assez 
récente  et  comme  appartenant  aux  temps  modernes.  Mais 
ce  (tât  n'ôte  rien  à  sa  valeur,  soit  comme  pièce  historique, 
soit  comme  monument  de  la  littérature  sanscrite.  Car, 
si  l'on  en  vient  à  penser  que  l'Inde  n'a  eu  en  réalité  ni 
moyen  âge  ni  âge  moderne,  et  qu'elle  en  est  encore  à  son 
antiquité,  les  œuvres  faites  il  y  a  seulement  quelques 
siècles  devront  "attre  antiaues,  aussi  bien  que  les  épo- 
pées et  les  ouvrages  SDtérieiirs  à  Tère  diréueiiiie.  Teo* 


PUR 


1520 


PUT 


toan  trèft-BapérIeure  en  civilisation  aux  barbares  qui 
l'ont  tour  à  tour  envahie,  elle  a  continué  sans  intemip- 
tion  à  développer  ses  idées,  ses  croyances  et  ses  institua 
tiens,  sans  presque  rien  emprunter  au  dehors,  tirant  tout 
de  son  propre  fonds,  même  le  bouddhisme  qui  fut  sur  le 
point  de  produire  en  elle  une  révolution  totale.  Cette 
jierpétuité  de  la  race  et  du  génie  des  Aryas  donne  à  This- 
toire  de  ce  peuple  une  unité  qui  ne  se  trouve  nulle  part 
ailleurs  ;  les  œuvres  de  littérature  faites  les  dernières,  et 
celles  même  qui  se  font  aujourd'hui,  ont  le  caractère 
antique  au  plus  haut  degré.  Tels  sont  les  Purànas;  de 
là  vient  ^ue  la  valeur  de  ces  grandes  collections  n'est 
point  dinunuée  par  leur  peu  d'ancienneté.  Au  contraire, 
il  est  beaucoup  plus  instructif  pour  nous  de  posséder  des 
œuvres  récentes  d'une  aussi  ^nde  valeur  intrinsèque, 
lorsaue  nous  avons,  pour  représenter  les  âges  antérieurs, 
les  drames,  les  ouvrages  bouddl^iques,  les  épopées,  et, 
pour  les  temps  primitifs,  le  Véda  avec  ses  développements 
poéti(}ues  ou  scolastiaues.  De  la  sorte  il  devient  possible 
de  suivre  pour  ainsi  aire  pas  à  pas  le  développement  des 
idées  et  de  la  civilisation  de  l'Inde  depuis  un  temps  qui 
remonte  au  moins  à  douze  ou  quinze  siècles  av.  J.-C. 
Jusqu'à  nos  Jours.  Les  Farânas  forment  l'un  des  der- 
niers anneaux  de  cette  chaîne  continue,  et  sont  eux- 
mêmes  le  point  de  départ  et  la  plus  belle  expression  des 
cultes  modernes  où  l'Inde  est  parvenue.  On  voit  ainsi  la 
notion  d'Âgni,  presque  physique  dans  le  Védat  s'idéa- 
liser et  s'abstraire,  se  transformer  bientôt  entre  les  mains 
des  Brahmanes,  et  devenir  l'idée  de  producteur  du  monde 
et  de  père  de  la  vie;  c'est  ensuite  Bràhma,  l'être  parfait, 
neutre,  insaisisuble  à  la  pensée  ;  alors,  pour  expliquer 
l'origine  et  la  formation  des  êtres,  la  notion  abstraite  de 
Bràlima  se  complète  et  engendre  la  doctrine  tout  in- 
dienne des  incarnations.  Cette  doctrine  était  déjà  dans 
toute  sa  vigueur  au  temps  de  Bouddha;  elle  prit  pins 
d'empire  encore  sur  les  esprits  pendant  la  lutte  de  la  ré- 
forme et  du  brahmanisme  ;  de  sorte  que,  quand  la  vic^ 
toire  fut  restée  aux  anciennes  institutions  et  que  le 
bouddhisme  eut  été  chassé  de  l'Inde,  la  foi  populaire 

{)renait  pour  centre  et  pour  objet  principal  du  cuite 
'une  ou  l'autre  des  figures  humaines  de  l'antique  divinité 
védique.  Ainsi  prévalurent  les  cultes  de  Vishnu,  de  Qiva, 
de  Krishna,  dans  lesquels  la  crédulité  d'un  peuj^le  asservi 
à  des  maîtres  étrangers  ne  vit  plus  pour  ainsi  dire  que 
des  idoles.  Mais  si  les  hommes  ignorants  étaient  conduits 
à  l'idolâtrie,  la  caste  supérieure  demeurait  fort  au-dessus 
de  ces  croyances  grossières,  et  comprenait  encore  la  va- 
leur métaphysique  des  anciens  symboles.  C'est  à  cet  état 
des  esprits  que  répondent  les  Purânas,  Depuis  lors,  ils 
sont  demeurés  en  honneur  dans  l'Inde  entière  ;  ce  sont 
eux  qui  contribuent  le  plus,  parmi  les  livres  sanscrits,  à 
maintenir  et  à  perpétuer  les  croyances  indiennes;  car  les 
Védas  et  leurs  développements  ne  sont  presque  plus  com- 
pris de  personne,  on  ne  sont  étudiés  que  pour  être  inter- 
prétés dans  un  sens  moderne  qu'ils  n'ont  Jamais  eu.  Les 
doctrines  pur&niques  ont  donc  prévalu  sur  celles  de 
l'Écriture  sainte  elle-même  ;  et  c'est  aujourd'hui  dans  les 
Purânas  qu'il  faut  chercher  le  dépôt  des  croyances  popu- 
laires de  l'Inde.  —  La  Bhàgavaùirfuràna  a  été  publié, 
avec  scelles,  à  Calcutta  en  1830,  à  Bombay  en  1839,  et, 
avec  traduction  française  par  Eug.  Bumouf,  à  Paris  en 
1840-44,  2  in-fol.  Wilson  a  traduit  en  anglais  le  Vxsknu- 
purâna,  et  donné,  dans  une  Introduction  à  cet  ouvrage, 
l'analyse  des  autres  Purànas.  F.  Nôve,  les  Pourànas, 
Paris,  1852.  En.  B. 

PURETÉ,  qualité  du  style  qui  consiste  à  n'employer 
que  des  mots  consacrés  par  l'usage  et  par  ^a^torité  des 
maîtres.  On  manque  à  la  pureté  de  deux  manières  :  par 
Varchal^sme^  quand  on  emploie  des  formes  vieillies  ;  par 
le  nédogisme ,  quand  on  emploie  des  formes  nouvelles , 
des  mots  ou  des  tours  empruntés  aux  langues  étrangères. 
On  altère  encore  la  pureté  d'une  langue  en  y  introduisant 
des  mots  techniques,  c-àrdire  qui  appartiennent  exclu- 
sivement à  une  science  ou  à  un  art,  et  qui  ne  sont  pas 
du  fonds  de  la  langue  commune.  L'affectation  de  la  pu- 
reté et  de  la  correction  s'appelle  purisme,  H.  D. 

PCJRGATION.     )  V*  ces  mots  dans  notre  Dictumnaire 

PURGATOIRE.  {      de  Biographie  et  d^Histoire. 

PURGE,  un  des  moyens  par  lesc{uels  on  purge,  c-à-d. 
on  affranchit  les  immeubles  des  privilèges  et  hypothèques 
dont  ils  sont  grevés.  Le  Code  Napoléon  (art.  2167,  2181* 
2195)  et  le  Code  de  Procédure  civUe  (art.  834  et  suiv.) 
en  ont  réglé  les  formalités.  —  Purger  une  contumace, 
c'est  anéantir,  en  se  constituant  prisonnier  ou  par  le  fait 
d'être  arrêté  avant  l'époque  de  la  prescription ,  le  jugCH 
niexzt  par  lequel  on  a  été  condamné  comme  contamax. 


Le  dâaî  pour  purger  U  contumace  est  de  5  ans  {Code 
d'instruet.  crimin.y  art.  476  et  suiv.). 

PURGEOIR,  espèce  de  filtre  en  sable  et  en  cailloux, 
qu'on  pratique  à  la  tête  d'un  aqueduc,  ou  de  distance 
en  distance  le  long  de  sa  rigole,  pour  purifier  ses  eaux. 

PURIFICATION.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

PURIFICATOIRE,  morceau  de  toile  de  lin  ou  de  chanvre 
qui  sert  à  essuyer  le  calice  après  le  saint  sacrifice  de  la 
messe.  On  le  plie  en  trois  dans  sa  lari^ur,  et  il  doit  être 
assez  long  pour  que,  placé  sur  le  calice,  ses  extrémités 
retombent  sur  le  pied  de  ce  vase. 

PURISME,  affectation  excessive  d'écrire  ou  de  parler 
avec  pureté.  Cette  prétention,  qui  ne  se  rencontre  que 
dans  des  esprits  médiocres,  donne  au  langage  et  au  style 
quelque  chose  de  sec,  de  languissant,  d'ennuyeux.  On  a 
comparé  ce  style  ou  ce  langage  sans  impureté,  mais  sans 
substance,  à  un  bouillon  d'eau  claire.  «  H  y  a  des  gens, 
dit  La  Bruyère,  qui  ont  une  fade  attention  à  ce  qu'ils 
disent,  et  avec  qui  l'on  souffre  dans  la  conversation  de 
tout  le  travail  de  leur  esprit;  ils  sont  comme  pétris  de 
phrases  et  de  petits  tours  d'expression,  concertés  dans 
leur  geste  et  dans  tout  leur  maintien  :  ils  sont  puristes,  et 
ne  hasardent  pas  le  moindre  mot,  quand  il  devrait  faire  le 
plus  bel  effet  du  monde;  rien  d'heureux  ne  leur  échappe, 
rieu  ne  coule  de  source  et  avec  liberté;  ils  parlent  pro- 
}rement  et  ennuyeusement.  »  —  «  Le  purisme  est  ten- 
eurs pauvre,»  a  dit  Voltaire;  et  Domergue  l'appelle 
'ennemi  secret  de  la  pureté.  Une  grande  connaissance  de 
U  lan^e,  jointe  à  un  esprit  Judicieux  et  élevé,  fait  éviter 
le  punsme  :  aussi  les  grands  écrivains  n'ont-ils  Jamais 
ce  défaut  ;  et  l'on  trouve  chez  eux  plus  de  fautes  contre 
les  règles  que  chez  les  écrivains  de  second  et  de  troisième 
ordre;  seulement  elles  sont  rachetées  par  de  sublimes 
beautés  dont  ceux-ci  n'offrent  presque  jamais  aucune  trace 
(V.  les  chap.  27,  28,  30,  de  la  traduction  do  Traité  du 
Sublime,  de  Longin,  par  Boileau).  —  Le  purisme  dans  la 
critique  est  un  défaut  aussi  grave  que  dans  le  langage  et 
dans  le  style  :  il  consiste  à  condamner  des  toun  vifs , 
heureux ,  plejns  d'originalité,  trouvés  par  de  grands  écri- 
vains, et  qui  ont  mieux  exprin\é  leur  pensée  que  n'aurait 
pu  le  faire  l'exactitude  rigoureuse  et  la  froide  correction. 
Le  puriste  qui  a  bl&mé  l'hémistiche  de  Racine  {Plièdre, 
V,  Cj  :  «  A  ces  mots  ce  héros  expiré,  »  n'a  pas  tenu  compte 
des  privilèges  de  la  poésie,  ni  de  l'impossibilité  où  était  le 
poète  de  s'exprimer  autrement  avec  la  même  précision 
et  la  même  vivacité.  On  a  critiqué  plus  injustement  en- 
core le  même  poète  d'avoir  dit  {Mithridate,  1, 5),  par  ui  - 
syllepse  pourtant  bien  usitée  dans  notre  langue  : 

Awumt  avec  tntiiiport,  tnali  jeUtmx  aani  retour. 
Sa  haine  va  toi^oan  plas  loin  que  ton  amour. 

Avec  le  système  de  ces  puristes,  il  n'y  aurait  presqu» 
pas  de  pages  d'Homère,  de  Sophocle,  de  Pindare,  de 
Démosthènes,  de  Cicéron,  de  Virgile,  de  Bossuet,  de 
Racine,  de  La  Fontaine,  de  Massillon,  où  il  ne  fallût  signa- 
ler des  négligences  et  des  solédsmes  (F.  Montaigne  « 
Essais,  livre  I",  chap.  25).  P. 

PURITAINS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dhlicnnatre  de 
Biographie  et  â^  Histoire. 

PURYA-MIMAMSA.  V.  Indienne  (Philosophie). 

PUSEYISME.  )  K.  ces  mots  dans  notre  Z)icfi(mitaîr«  de 

PUTÉAL.         I     Biographie  et  d'Histoire. 

PUTICULES,  sortes  de  puits  d'ensevelissement,  où  les 
anciens  Romains  jetaient  pêle-mêle  les  corps  des  esclaves 
et  des  gens  de  la  plèbe.  L'empereur  Auguste  les  fit  fermer. 

PUY  (Église  Notre-Dame,  au).  Cette  église  cathédrale, 
assise  sur  la  crête  du  mont  Anis,  appartient ,  pour  ses 
parties  les  plus  importantes,  aux  xi*  et  xii*  ailles.  On 
y  arrive  par  un  immense  escalier  de  260  marches,  tail- 
lées dans  le  roc,  un  crypto-portique,  composé  de  trois 
travées^ascendantes,  et  dont  la  voûte,  élevée  de  20  met. 
«nviron,  recouvre  un  autre  escalier  de  108  degrés, 
supporte  kl  nef  principale  de  l'église,  où  l'on  accédai i 
autrefois  par  une  ouverture  pratiauée  dans  le  pavé  du 
transept;  disposition  originale,  qui  permettait  au  prê- 
tre officiant  d'être  vu  du  peuple  répandu  sur  les  de£^  et 
jusqu'au  bas  de  la  montagne.  Deux  chapdles,  consa- 
crées à  S^  Martin  de  Tours  et  à  S^  Gilles,  sont  pratiquées 
dans  ce  vestibule  :  elles  ont  des  portes  en  bois,  couvertes 
de  sculptures  et  d'inscriptions  intéressantes.  On  y  voit 
aussi  deux  magnifiques  colonnes  en  porphyre  rouge  an- 
tique, de  chaque  côté  de  l'arcade  qui  donnait  entrée  dans 
l'église.  Aujourd'hui  l'on  sort  du  crypto-portique  par  la 
gauche,  en  continuant  de  s'élever»  et  c'est  latéralemsat 


PYG 


1521 


PYX 


Îa'oQ  pénètre  dans  Péglise.  L'intérleor  de  la  cathédrale 
u  Puy  est  divisé  en  trois  nefs,  basses  et  lourdes,  son- 
tenaes  par  de  gros  piliers.  Le  croisillon  septentrional  a 
été  supprimé,  comme  menaçant  ruine.  Les  voûtes  for- 
ment des  espèces  de  coupoles  correspondant  aux  travées, 
ce  qui  indique  une  influence  des  idées  byzantines ,  sen- 
sible également  dans  quelques  monuments  du  Midi  et 
do  l*Ouest  de  la  France.  On  aperçoit  aussi  des  traces  de 
peintures  byzantines,  particulièrement  une  figure  colos- 
sale de  S^  Michel ,  auquel  Féglise,  comme  toutes  les  con- 
structions élevées  sur  des  hauteurs ,  avait  été  primitive- 
ment consacrée.  L*orgue  et  la  chaire,  chargés  de  sculi>- 
tures,  sont  dignes  d*attention.  Sur  le  maitre-autel,  fait 
en  marbres  de  diverses  couleurs,  est  une  statue  de  la 
*^'*  Vierge,  qui  a  remplacé  celle  apportée  d*Égypte  par 
Louis  IX  et  brûlée  en  1793.  La  grande  façade  de  rédifice, 
située  aa- dessus  de  rentrée  du  crypto- portique,  est 
simple  et  sévère  :  elle  offre  quatre  ordonnances  de  co- 
lonnes supportant  des  arcades  a  plein  cintre  ;  à  la  grande 
nef  et  aux  collatéraux  correspondent  des  frontons  trian- 
gulaires ,  qui  dépassent  considérablement  la  hauteur  du 
toit.  Du  côté  de  Tévèché,  il  y  a  un  beau  porche  à  colonnes 
rudentées.  Le  clocher,  carré  jusqu'aux  deux  tiers  de  sa 
hauteur,  et  terminé  en  pyramide,  est  isolé  de  l'église. 
La  cathédrale  du  Puy  a  conservé  ses  dépendances ,  une 
salle  capitulaire  et  un  cloître.  B. 

PUT,  nom  donné,  pendant  le  moyen  âge,  à  des  com- 
pagnies littéraires  qui ,  à  certaines  époques  de  Tannée, 
se  réunissaient  dans  différentes  villes  de  France,  pour 
juger  des  concours  de  poésie.  Les  pièces  de  vers  ayant 
exclusivement  pour  objet  les  louanges  de  la  S^*  Vierge, 
ces  compagnies  étaient  appelées  Puys  Notre-Dame,  Le 
Pny  d'Amiens  fut  institué  en  1393  ;  une  copie  des  pièces 
qu'il  avait  couronnées,  faite  en  i517  pour  la  mère  de 
François  P',  existe  à  la  Bibliothèque  impériale  de  Paris. 
On  établit  à  Rouen,  en  1486,  le  Puy  de  la  Conception, 
ainsi  appelé  parce  qu'il  se  tenait  le  8  décembre,  jour  de 
la  Conception  de  la  Vierge;  l'assemblée  de  Caen  portait 
le  même  nom  ;  elle  remontait  an  xi*  siècle.  Quant  à  la 
dénomination  de  puy,  on  la  fait  généralement  dériver  du 
latin  podium  (colline),  parce  que  les  concours  auraient 
eu  lieu  à  l'origine  sur  des  hauteurs  ;  quelques-uns  ont 
imaginé  de  la  tirer  d'un  miracle  opéré  par  Notre-Dame, 
qui  aurait  sauvé  un  enfant  endormi  sur  le  bord  d'un 
puits.  —  Les  Puys  de  musique  ont  été  l'origine  des  So- 
ciétés philharmoniques  modernes.  B. 

POT-JOLT.    V,  TOMDLUS. 

PYGNOSTYLE,  le  plus  étroit  des  entre-colonnements 
employés  par  les  architectes  de  4'Antiquité.  Il  était  d'un 
diamètre  et  demi. 

PYGMALION,  sculpteur  de  l'île  de  Chypre,  qui,  selon 
la  Fhble,  fit  une  statue  de  marbre  à  laquelle  il  donna  le 
nom  de  Galatée,  et  qui,  après  avoir  obtenu  des  dieux 
qu'ils  lui  donnassent  la  vie,  la  prit  pour  femme.  Ovide 
{Métamorphoses,  liv.  X)  a  décrit  en  vers  charmants  la 
métamorphose  de  Galatée  en  femme.  On  a  va  dans  ce 


mythe  Fenthouslasme  natnrel  de  l'artiste  pour  le  produit 
de  son  intelligence,  l'effet  de  son  illusion  sur  la  valeui 
de  l'œuvre,  ou  bien  encore  la  puissance  créatrice  d« 
l'art  poussée  aux  dernières  limites  de  sa  perfection* 
J.-J.  Rousseau  a  écrit  une  scène  lyrique  intitulée  Pyg 
malion.  Goethe  a  aussi  traité  le  même  sujet.  On  a  d^ 
Falconnet,  sculpteur  français  du  xviii*  siècle,  un  Pygma. 
lion  estimé,  et  du  peintre  Girodet  un  tableau  de  Pygma* 
lion  et  Galatée  (1819),  oui  obtint  un  succès  populaire.  Un 
opéra- comique  de  iScuatée,  composition  distinguée  de 
M.  Victor  Massé,  a  été  représenté  à  Paris  en  1852.    P— s. 

PYLONE  (du  grec  pwdn,  grande  porte),  nom  donné 
à  un  double  massif  de  forme  pyramidale,  laissant  un 
passage  entre  ses  parties,  et  place  en  avant  des  temples 
égyptiens.  On  montait  au  sommet  par  des  escaliers  inté- 
rieurs. Les  faces  étaient  couvertes  d'ornements ,  comme 
les  parois  des  temples  eux-mêmes. 

PYRAMIDES.  I  V.  ces  mots  dans  notre  IHctionnaire 

PYRÉE.  \     de  Biographie  et  dHistoire. 

PYROBALISTIQUE  (du  grec  pur,  feu,  et  balléin,  lan- 
cer) ,  se  dit  de  toute  arme  ou  machine  de  guerre  qui 
lance  du  feu. 

PYROPHORBS.  V.  notre  DicL  deBiogr.  et  d^ Bistoire. 
PYROSGAPHB  (du  grec  pur,  feu,  etscaphos,  navire), 
mot  synonyme  de  bateau  à  vapeur. 
PYROS lÉRÉOTYPIE.  V.  au  .Supplément. 

PYROTECHNIE  { du  grec  pur,  feu,  et  tekhnè,  art) ,  art 
de  préparer  les  pièces  d'artifice,  soit  pour  les  feux  a'arti- 
fice,  soit  pour  les  besoins  de  l'artillerie.  Il  existe  en  France 
deux  écoles  de^iyrotechnie,  à  Metz  pour  l'armée  de  terrOf 
et  à  Toulon  pour  la  marine. 

PYRRHIQUE,  oied  de  la  versification  grecque  et  la- 
tine, composé  de  2  brèves,  comme  bônà ,  Agé,  fèrÛs,  et 
dont  le  nom  venait  de  l'usée  fréquent  que  l'on  en  faisait 
dans  les  airs  de  la  danse  pyrrhiaue«  Le  pyrrhique  se  sub- 
stituait souvent  à  l'ïambe  final  des  vers  lambiques;  ches 
les  lyriques  éoliens ,  il  précède  quelquefois  le  vers  chor« 
iambique,  auquel  il  sert  comme  de  prélude.  On  le  trouve 
aussi  à  la  fin  de  certains  hexamètres  héroïques  (  V,  Mivros). 
n  y  a  dans  les  poésies  d'Ausone  un  quatrain  composé  ae 
pyrrhiqnes ,  qui ,  scandés  deux  à  deux,  donnent  un  tétras 
mètre  procéleusmatique  catalecticjue;  scandé  parpyrrhC^ 
ques,  il  donne  des  vers  de  sept  pieds  et  demi.  P. 

PTRRHiQUB,  danse.  V,  notre  IHctionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

PYRRHONISME.  V.  Scbpticismz. 

PYTHAGORICIENNE  (Philosophie).  V.  l'article  Pr* 
THAGoatciENS,  daus  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire, 

PYTUAULB,  nom  par  lequel  on  a  désigné  autrefois  la 
musette  et  la  cornemuse. 

PYTHIEN  (Nome).  7.  Noms. 

PYTHIQUES ,  titre  d'un  recueil  d'odes  triomphales , 
consacrées  par  Pindare  à  la  louange  des  vainqueurs  dana 
les  jeux  pythiques. 

PYXIS.  F.  GiBOiRB. 


Q 


Q ,  17*  lettre  et  13«  consonne  de  notre  alphabet,  à  la- 
quelle on  donne  l'articulation  du  fc  ou  du  c  dur.  Les  an- 
ciens Grecs  l'admirent  d'abord,  sous  le  nom  de  koppa, 
au  nombre  de  leurs  signes  alphabétiques,  et  on  la  trouve 
figurée  sur  quelques  monuments;  puis,  ils  l'abandonnè- 
rent comme  faisant  double  emploi  avec  le  kappa,  mais 
ta  conservèrent  parmi  les  signes  de  numération.  La  lettre 
Q  manquait  dans  l'alphabet  primitif  des  Latins,  et  les 
mots  où  on  l'introduisit  plus  tard  s'écrivaient  par  un  C; 
Varron  ne  voulut  même  jamais  l'employer.  On  s'en  servit 
dans  les  mots  où  Vu  qui  raccompagne  formait  diph- 
thongue  avec  la  voyelle  suivante  (quum,  antiquus,  qui, 
qum,  quod,  quotidtè,  reliquus,  aqua)^  tandis  qu'on  em- 
ploya le  e  lorsque  les  deux  voyelles  conservaient  cha- 
ci  ne  leur  râleur  distincte  (ciii).  Parfois  les  poètes,  prin- 
cipalement Plante  et  Lucrèce,  employèrent  pour  un 
mi'me  mot  l'une  et  l'autre  orthographe,  afin  de  faire  une 
leuia  syllabe  oa  émi^  selon  lea  besoina  de  U  mesura» 


Au  xvi*  siècle,  les  émdita  français  supprimaient  le  son  u, 
lorsque  cette  lettre  accompa^ait  la  consonne  q  :  ils  pro- 
nonçaient, par  exemple,  kis,  kalis,  kantus,  kanmm, 
kontam,  pour  quis.  quidis,  quantus,  quanquam^  guo- 
ntam.  Ramus  soutint  l'opinion  contraire,  et  finit  par 
l'emporter  ;  Ménage  défendit  cependant  encore ,  an 
XVII*  siècle,  la  prononciation  antérieure.  En  français,  il  y 
a  deux  manières  de  prononcer  le  groupe  qu  :  il  n'a  que 
la  valeur  du  fc  ou  du  c  dur,  dans  question,  qualité,  quan* 
tité,  quatre,  quarte,  quinte,  quête,  quille,  piqûre,  etc.  ; 
on  donne  à  Vu  le  son  ou  dans  quatuor,  quadrature, 
aquatique,  aquarelle,  équation,  Quadragésime,  équtUeur, 
quadrupède,  etc.;  on  le  fait  sonner  dans  questeur  équi» 
latéral,  équitalion,  équestre.  Le  mot  Quinquagésime  oflïe 
la  réunion  des  deux  prononciations.  La  lettre  q  manque 
aux  alphabets  slavon,  anglo-saxon,  et  irlandais.  An  liée 
du  groupe  qu^  les  Anglo- Saxons  écriraient  kw,  et  les 
i4l0mtnd8  donnent  encore  an  même  groupe  la  pronoe- 


OUA 


1522 


OUA 


cUUon  kv.  En  anglais,  où  la  lottre  q  est  d*un  asscx  fré- 
quent usage,  elle  uo  termine  jamais  un  mot  ;  en  français, 
elle  est  finale  dans  coq  et  cinq,  —  Dans  les  inscriptions 
romaines,  Q  est  rabr6viation  de  Quintus,  QuincUus,  Qut- 
rinus,  Quirites,  quirinalis,  qui  ou  qiuB,  qtie  (et),  quœs- 
tor,  etc.;  Q  Q  Hgnide  qumquennalis;  QK.,  qtuBStor  c<m- 
didalus,'  Q.  U.,  qtiœstor  rêipublicœ;  Q.  Y.,  qui  ou  quœ 
vixit;  Q.  B.  V.,  quod  bene  vertat;  Q.  I.  S.  S.,  qum  infra 
scripta  sunt,  —  Signe  numéral,  lefcoppa  grec  valait  90. 
Ghes  les  Romains,  Q  valut  500,  et,  surmonté  d'un  trait 
horizontal  {J[)^  500,000.  —  Sur  les  anciennes  monnaies 
françaises,  Q  était  la  marque  de  fabrication  de  Perpi- 
gnan. B. 

QÂNON,  instrument  de  musique  des  Arabes.  Cest  une 
caisse  en  bois,  de  forme  tn^;>ézoidale,  et  surmontée  d*une 
table  sonore  :  à  Tun  des  côtés  sont  75  chenlles ,  pour  75 
cordes  en  boyau,  rangées  trois  par  trois  sur  25  rangs  et 
appuyées  sur  un  chevalet.  L'étendue  du  qftnon ,  qu'on 
peut  considérer  comme  le  germe  du  clavecin,  est  de  a  oc- 
taves et  une  auarte.  On  loue  de  cet  instrument  avec  deux 
plectres  en  écaille,  fixés  à  l'index  de  chaque  main  au 
moyen  de  dés  en  fer.  B. 

QUADRAGÉSIMË.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Diction- 

QUâDRANS.  l     naire  de  Biographie  et  d'His- 

QUADRANTAL.       )      toire. 

QUADRAT,  QUADRATIN  (dulaUn  quadratus,  carré), 
en  termes  d'Imprimerie,  petites  pièces  de  fonte  qui  sont 
dans  les  casses,  de  même  volume  que  les  lettres,  mais 
moins  élevées,  et  qu'on  met  dans  les  espaces  blancs  du 
commencement  et  de  la  fin  des  lignes,  dans  les  inter- 
valles des  titres,  etc. ,  pour  tenir  les  formes  en  état,  en 
remplissant  les  vides. 

QUADRATAIRE  (Art),  nom  qu'on  donna,  pendant  le 
moyen  &ge,  à  l'art  de  faire  des  incrustations  en  marbres 
précieux,  parce  que  les  morceaux  de  marbre  étaient 
carrés. 

QDADRTGINiniI,  en  termes  d'ancienne  Musique,  com- 
position à  4  parties. 

QUADRIGAT.  I   F.  ces  mots  dans  notre  J!>tcitoiifiatr« 

QUADRIGE.     \     de  Biographie  et  d'Histoire. 

QUADRILLE  (  de  l'italien  quadriglia).  Ce  moi,  qui  fut 
d'abord  féminin,  désigna  toute  troupe  de  gens  à  cheval 
igurant  dans  un  carrousel.  Il  y  avait  quatre  quadrilles 
nu  moins,  douze  au  plus,  distinguées  par  des  costumes  et 
£es  couleurs.  Devenu  masculin,  le  mot  Quadrille  fut  ap- 
pliqué à  tout  groupe  de  quatre  danseurs  et  quatre  dan- 
seuses, se  distinguant  aussi  des  autres  groupes  par  un 
costume  particulier.  Aujourd'hui  il  désigne  un  nombre 

Eair  de  couples  qui  exécutent  une  contredanse,  et  l'air  de 
I  contredanse  elle-môme.  B. 

QUADRIRÈBIE.   ] 

QUADRIVIUM.    (  K.  ces  mots  dans  notre  Dtctionnatre 

QUADRUPLE.     (     de  Biographie  et  d'Bietoire. 

QUiESTORIUM.  J 

QUAI,  mot  dérivé,  suivant  Scaliger,  du  bas  latin  cayare 
(contraindre,  resserrer),  et  qui  désigne  toute  levée  revê- 
tue de  maçonnerie  ou  en  pierres  de  taille,  destinée  soit  à 
contenir  les  eaux  d'une  rivière  et  à  les  empêcher  de  dé- 
border, soit  à  retenir  les  terres  de  la  berge.  Les  quais 
peuvent  recevoir,  dans  les  grandes  villes,  un  développe- 
ment considérable,  et  servir  de  lieu  de  promenade  aux 
habitants.  Les  Anciens  vantaient  la  beauté  des  quais  de 
Babylone,  le  long  de  l'Euphrate.  Ceux  de  Paris,  de  Pise 
et  de  Florence  sont  célèbres  parmi  les  modernes;  Rome 
et  Londres  n'en  ont  pas.  Les  quais  élevés  au  bord  de  la 
mer,  autour  d'un  port  ou  d'un  bassin,  facilitent  le  mou- 
vement des  voyageurs,  l'embarquement  et  le  débarque- 
ment des  marchandises.  B. 

QUAICHE,  navire.  V.  Ketch. 

QUAKERS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtetionntttre  de  Bio^ 
graphie  et  d'Histoire. 

QUALIFICATIF,  terme  de  Grammaire  qui  s'applique 
aux  mots  servant  à  marquer  les  qualités  des  personnes, 
des  animaux,  des  objets.  On  l'emploie  peu  seul  :  il  se 
joint  habituellement  au  mot  adjectif;  ainsi,  beau  est  un 
adjectif  qualificatif.  Dans  cette  phrase  :  «  Abdolonyme 
devint  roi,  »  roi  est  un  nom  qualificatif.  P. 

QUALITÉ,  manière  d'être  des  choses.  On  dit  à  peu 
près  indifféremment  dans  le  même  sens  Qualiù  ou  At^ 
trtbttt  :  cependant  Qualiti  exprime  plutôt  un  rapport 
réel,  et  Attribut  un  rapport  logique  ou  grammatical.  La 
Qualité  figure  parmi  les  Catégories  d'Anstote,  celles  des 
Stoïciens  et  celles  de  la  philosophie  indienne  (K.  Caré- 
coaiBs).  Aristote  la  définit  ce  qm  fait  Qu'on  dit  des  choses 
qu'elles  sont  de  telle  ou  telle  fofon,  et  en  distingue  quatre 
espèces  :  V  la  Capacité  et  la  Disposition;  2»  la  PaÎMaooe 


naturelle;  3*  les  Qualités  sensibles;  A^  la  Figure  et  la 
forme  extérieure  (  K.  le  Traité  des  Catégories  d' Aristote, 
et  l'Analyse  de  ce  Traité  dans  le  livre  De  la  L4)giqu9 
d'Aristole,  par  M.  Barthélémy  Saint-Hilaire).        B— b. 

QDAUT&  PaauiULES  ET  QDAUTÉS  SEGOHDBS  DES  COBPS.  — 

Les  corps  ne  nous  sont  connus  que  par  leurs  qualités; 
et  c'est  une  loi  nécessaire  de  l'Intelligence  qui  nous  fait 
concevoir,  à  ces  qualités,  un  fonds  commun,  substance 
ou  si^et  d'inhérence,  de  quelque  nom  qu'on  l'appelle, 
qui  est  ce  que  nous  avons  en  vue  quand  nous  parlons  de 
la  Blatière  (F.  ce  mot)*  Les  qualità,  agissant  par  l'inter- 
médiaire des  organes  sur  les  différents  sens,  nous  affec- 
tent chacune  d'une  manière  spéciale,  et  apportent  à 
l'esprit  des  informations  différentes  et  d'inégale  valeur. 
Quoique  l'opinion  contraire  ait  été  soutenue  avec  beau- 
coup de  force  et  d'insistance  {V,  dans  le  Dictionnaire  des 
Sciences  philosophiques  l'artide  Matière  ),  nous  croyons 
bien  fondée  la  distinction  des  Qualités  premières  et  des 
Qualités  secondes  admise  par  les  Cartésiens,  par  Locke, 
par  Condillac,  et  précisée  par  les  Écossais  et  par  Royer- 
CoUard,  les  premières  étant  pour  nous  l'onjet  d'une 

Eerception  immédiate  et  directe,  et  produisant  tout  d'a- 
ord  la  notion  de  l'extérieur,  du  non-moi  corporel ,  les 
secondes  n'élant  que  les  causes  inconnues  de  certaines 
sensations.  En  effet,  quand  on  touche  ou  que  l'on  voit, 
outre  les  modifications  internes  dont  on  se  sent  affecté, 
on  est  informé,  par  le  seul  fait  du  toucher  et  de  la  vi- 
sion, de  l'existence  d'un  objet  extérieur,  étendu,  figuré, 
solide.  Un  son,  une  odeur  apportent-ils  le  même  ensei- 
gnement? Sur  ce  point,  nous  pensons,  avec  les  Écossais, 
que  tout  se  réduit  d'abord  à  une  sensation,  c-à-d.  à  une 
modification  interne  et  par  elle-môme  toute  subjective. 
C'est  seulement  par  une  induction  rapide,  fondée  sur  l'ex- 
périence et  sur  l'association  des  idées,  que  nous  passons 
de  notre  propre  sensation  à  l'idée  d'une  cause  extérieure, 
et  que  nous  localisons  cette  cause  dans  les  corps.  Les 
Qualités  directement  perçues  sont  les  Qualités  premières  ; 
les  autres  sont  les  Qualités  secondes.  Les  Qualités  pre- 
mières sont,  selon  Locke,  la  Solidité,  V Etendue,  la  Ft- 
gure,  le  Moutfementf  le  Repos,  et  le  Nombre;  selon  Reid, 
VÉtmdue,  la  Divisibilité,  la  Figure,  le  Mouvement,  la 
Solidité,  la  Dureté,  la  Mollesse,  et  la  Fluidité,  Royer* 
CoUard  réduit  à  VËtendue  et  à  la  Solidité  la  liste  des 
Qucdités  premières.  —  Ce  qui  distingue  les  Qualités  pre- 
mières des  Qualités  secondes,  c'est,  selon  Descartes,  que 
la  notion  des  unes  est  plus  claire  que  celle  des  autres; 
selon  Locke,  c'est  que  les  Qualités  premières  sont  tout  à 
fait  inséparables  de  la  matière,  tandis  que  les  Qualités 
secondes  peuvent  en  être  séparéîes,  ce  qui  manque  d'exac- 
titude. Reid,  Stewart,  Royer-Collard  adoptent  la  distinc* 
tion  de  Descartes  et  la  précisent;  Reid,  en  disant  que 
l'inég^e  clarté  de  nos  idées  des  Qualités  vient  de  ce  que 
la  perception  des  unes  est  directe  et  celle  des  autres  re- 
lative ;  Stewart,  en  montrant  l'idée  de  l'étendue  nécesf 
sairement  renfermée  dans  toutes  les  qualités  premières; 
Royer-Collard,  en  reproduisant  l'opinion  de  Reid  dans  les 
termes  suivants  t  «  Ce  qui  sépare  les  Qualités  premières 
«  des  Qualités  secondes,  c'est  que  nous  connaissons  les 
a  unes,  tandis  que  nous  ne  savons  rien  des  autres,  sinon 
«  Qu'elles  existent  et  qu'elles  sont  les  causes  inconnues 
«  oe  certaines  sensations.  »  Cette  distinction  nous  parait 
fondée.  Biais  s'il  est  contre  la  vérité  des  faits  d'assimiler 
les  Qualités  secondes  aux  Qualités  premières,  il  est  en- 
core bien  plus  dangereux  de  faire  le  contraire,  d'assimiler 
les  Qualités  premières  aux  Qualités  secondes,  et  de  vou- 
loir que  la  Perception  des  unes  soit  tout  aussi  subjective 
que  celle  des  autres;  en  d'autres  termes,  de  confondre  la 
Perception  avec  la  Sensation  (F.  ces  mots).  Par  là,  en 
effet,  on  ôte  encore  une  fois  à  l'Intelligence  tout  point 
d'appui  pour  saisir  hors  d'elle-même  l'existence  des 
coips.  —  Les  différentes  questions  que  l'on  vient  d'indi- 
quer au  8i:^et  des  Qualités,  ainsi  que  celle  de  leur  exis- 
tence absolue  :  Les  Qualités  sont- elles  réellement  dans 
les  choses,  ou  ne  sont^lles  que  des  modes  de  notre  faculté 
de  sentir?  qui  n'a  pu  être  résolue  dans  ce  dernier  sens 
que  par  suite  d'une  confusion  de  la  Qualité  et  de  la  Sen- 
sation, c-à-d.  de  la  cause  et  de  l'effet;  cea  différentes 
Suestions,  disons-nous,  ont  été  traitées  avec  beaucoup  do 
éveloppements,  de  sens  et  d'exactitude,  par  Reid  (Essais 
sur  les  Facultés  intellectuelles  de  Vhomme^  Essai  II),  et 
par  Royer-Collard,  dans  les  fragments  de  ses  Leçons  pu- 
oliés  par  Jouffroy  dans  sa  traduction  des  Œuvres  de  Éeidj 
t.  II  et  m.  B— B. 

Qoauré  des  pbopositiors.  Les  Logidena  appellent  ainsi 
1a  propriété  que  possèdent  les  propositions  d'être  affir- 
mativet  ou  negativas.  On  rapporte  i  Alexandre  d'Aphrc^ 


OUA 


1S23 


OUA 


disie,  commentateur  d'Aristotet  l'origlue  de  cette  dôsi- 
Smuion.  B— b. 

QUANTITÉ,  ce  qui  est  susceptible  de  mesure;  en  Lo- 
gique, l'une  des  Catégories  d'Arlstote  (F.  Catégories); 
se  divise  eu  QttantUé  discrète,  quand  ses  parties  ne  sont 
point  liées,  comme  le  nombre;  et  Quantâé  concrète  ou 
continue,  quand  elles  sont  liées ,  comme  retendue  et  le 
temps  (K.  le  Traité  det  Catégories  d'Aristote,  et  l'Ana- 
lyse de  ce  Traité  dans  le  li?re  De  la  Logiqtie  d*Aristote , 
par  M.  Barthélémy  Saint-Hilaire).  B— b. 

QDAMTiTi  DBS  PBOPOsiTiORS ,  so  dit  do  la  propriété 
qu'elles  possèdent  d'être  universelles  ou  particulières. 
Cest  an  commentateur  Alexandre  d'Aphrodisie  qu'on 
rapporte  l'origine  de  la  distinction  entre  la  Qualité  et  la 
Quantité  des  Propositions.  B— e. 

QOAitrrré,  terme  de  Grammaire  et  de  Versification,  dé- 
rivé du  latin  qiumtitas  (étendue,  valeur).  C'est  le  plus 
ou  moins  de  durée  de  la  voix  sur  une  syllabe,  la  mesure 
qu'il  tàxu  observer  dans  la  prononciation  de  cette  syl- 
labe. Si  elle  se  prononce  rapidement,  la  quantité  est 
brève;  si  elle  se  prononce  avec  une  certaine  lenteur,  la 
quantité  est  longue  :  ainsi,  dans  malle ,  la  première  syl- 
labe est  brève;  dans  mâle,  elle  est  longue.  En  grec,  on 
avait  imaginé  un  caractère  particulier  pour  représenter 
e  long,  un  autre  pour  représenter  o  long  :  les  autres 
voyelles  n'ont  conservé  qu'un  seul  caractère,  qu'elles 
fussent  longues  ou  brèves;  non  distinguées  pour  l'œil, 
elles  l'étaient  pour  l'oreille.  En  latin,  en  français,  et  dans 
les  langues  modernes  en  général,  toutes  les  voyelles 
sont  dans  ce  dernier  cas;  seulement,  en  français,  lors- 
qu'elles sont  longues,  elles  sont  souvent  surmontées  de 
l'accent  circonflexe.  C'est  l'usage ,  aidé  de  certaines  rè- 
gles, qui  fait  reconnaître  la  longueur  et  la  brièveté  des 
syllabes.  Ainsi,  nous  observons  très-bien,  en  lisant  et  en 
parlant,  la  différence  de  prononciation  qui  existe  entre 
patte  et  pâte,  entre  table  et  câble^  entre  cotte  et  côte: 
nous  savons  que  i  est  bref  dans  litt  et  long  dans  lie.  Une 
différence  non  moins  sensible  existait  pour  les  Latins 
eotre  les  mots  os  (un  os),  qui  se  prononçait  bref,  et  os 
(la  bouche),  qui  se  prononçait  long;  entre  pater  (a  bref) 
et  mater  {a  long).  —  La  brève  vaut  la  moitié  de  la  lon- 
gue :  on  reste  un  temps  de  la  mesure  sur  la  brève,  et 
deux  temps  sur  la  longue.  Voilà  pourquoi  on  écrivait  pri- 
mitivement en  grec  es  pour  marquer  t  long,  oo  pour 
marquer  o  long;  en  latin  on  écrivait  aa  pour  r-  long,  et 
pareillement  en  français  :  aage,  baailler;  de  même,  r(He 
s'est  d'abord  écrit  roolle,  —  En  règle  générale,  une  syl- 
labe est  longue  ea  grec  et  en  latin,  lorsqu'elle  est  suivie 
au  moins  de  deux  consonnes.  En  français,  c'est  plutôt 
llnverse  ;  une  syllabe  suivie  d'une  consonne  redoublée 
est  très-souvent  brève;  lorsque  les  deux  consonnes  ne 
sont  pas  les  mêmes ,  il  est  difficile  de  fixer  des  règles. 
Une  règle  à  peu  près  universellement  observée  dans 
notre  laîngue,  c'est  que  toute  syllabe  terminée  par  une 
voyelle  immédiatement  suivie  d'un  •  muet  est  longue,  et 
que  toute  syllabe  mascuUne  est  toujours  longue  lors- 
qu'elle est  suivie  d'un  s  :  ainsi  je  joue;  des  sels  (  V,  la 
Prosodie  française  de  l'abbé  d'Olivet,  et  le  travail  de 
Demandre  sur  la  quantité  des  mots  en  français).  —  Il  y 
a,  dans  les  langues  anciennes,  des  syllabes  qu'on  appelle 
communes,  c-iré»  qui,  éuDs  le  même  mot,  peuvent  être 
prises  à  volonté,  surtout  en  poésie,  soit  comme  longues, 
soit  comme  brèves  ;  telle  est,  en  Utin ,  la  2*  syllabe  de 
tenebrœ,  Va  des  cas  indirects  6epater{patris,  patri) ^etc, 
Ed  français,  certaines  syllabes  naturellement  brèves  se 
piOQoncent  longues  lorscm'elles  tombent  à  la  fin  d'une 
phrase  :  ainsi  «  une  éternelle  amour,  »  mais  «  une  amour 
éUmèUe,  »  Sur  les  syllabes  naturellement  brèves,  mais 
devenant  longues  par  position,  ou  plutôt  qui  sont  comp- 
tées comme  telles  dans  la  versification,  on  peut  consulter 
les  observations  curieuses  d'Aulu-Gelle  (bv.  vi,  ch.  45; 
va,  ?  ;  IV,  17  ).  Il  résulte  de  ces  passages  que,  dans  la 
lecture  des  auteurs  en  prose  et  dans  la  conversation,  on 
ne  tenait  pas  compte,  quant  à  la  prononciation,  de  cet 
allongement  accidentel,  et  que  l'on  faisait  entendre  la 
quantité  naturelle  des  syllabes,  à  moins  ({u'il  ne  dût  ré- 
sulter du  contraire  un  effet  heureux.  Ainsi,  dans  ol^icU, 
on  prononçait  trois  brèves  ;  de  même  dans  conjicit.  La 
même  observation  s'applique  à  la  langue  grecque.      P. 

QUARANTAINE,  en  termes  de  Harine  et  d'Administra- 
tion sanitaire,  temps  penduit  lequel  les  navires  de  cer- 
taines provenances  sont  obligés,  avant  de  débarquer  leurs 
passagers  ou  leurs  marchandises,  de  rester  dans  un  iso- 
lement r^ureux,et  dans  un  lieu  destiné  à  cet  effet  (ju'on 
nomme  Laoaret  (V.  ce  mot  dans  notre  Ihctionnaire  de 
graphie  «t  df  Histoire),  Ce  temps  était  primitiveuent 


de  quarante  Jours,  d'où  vint  le  nom  de  Quarantaine.  Les 
navires  provenant  de  pays  habituellement  sains  sont,  à 
leur  arrivée  au  port  et  après  les  visites  d'usage,  admb  à 
la  libre  pratique;  ceux  provenant  de  pays  qui  ne  sont 
pas  habituellement  sains  ou  qui  sont  accidentellement 
infectés,  sont  soumis  à  une  quarantaine  plus  ou  moins 
longue,  selon  que  leur  patente  de  santé,  garantie  par  le 
capitaine  et  par  l'agent  consulaire  du  gouvernement,  est 
brute,  stAspecte  ou  nette ,  c-à-d.  selon  qu'elle  constate  lu 
présence,  le  soupçon  ou  l'absence  de  quelque  maladie 
contagieuse  parmi  les  passagers.  Le  navire  en  quaran- 
taine arbore  le  pavillon  Jaune  au  mât  de  misaine;  on  ne 
communique  avec  lui  aue  par  la  voix  ;  on  lui  fait  passer 
à  l'aide  de  perches  ce  aont  il  a  besoin;  les  lettres  et  les 
papiers  qu'on  en  reçoit  sont  passés  au  soufre  et  plongés 
dans  le  vinaigre  ;  les  marchandises  sont  déballées  et  ex- 
posées à  l'air.  S'il  se  déclare  un  cas  de  maladie,  la  durée 
de  la  quarantaine  est  doublée;  en  cas  de  peste,  les  effets 
sont  brûlés  et  le  navire  submer^.  —  Ce  furent  les  Véni- 
tiens qui  créèrent  les  premiers  établissements  réguliers 
de  quarantaine  en  4481;  les  États  commerçants  ont  dé- 
livré des  patentes  de  santé  depuis  1665  seulement.  Après 
la  peste  de  Marseille  en  1720,  la  France  établit  des  qua- 
rantaines dans  tous  ses  ports.  Les  lois  du  9  mai  1793  et 
du  9  mars  1822,  et  le  décret  du  24  déc.  1850,  ont  réglé 
la  matière.  Une  convention  internationale  de  1852  oblige 
chaque  puissance  à  établir  des  lazarets,  supprime  les  ps^ 
tentes  suspectes,  et  fixe  la  durée  des  quarantaines  :  pour 
la  peste,  10  Jours  au  moins,  15  au  plus;  pour  la  fièvre 
Jaune,  7,  5,  et  3  Jours;  pour  le  choléra,  3  jours.       B. 

QUARANTAINE-LE-ROI.  )  V.  notre  Dictionn,  de  Bio- 

QUARANTIE.  S     graphie  et  d'Histoire. 

QUARREL,  vieux  mot,  synonyme  de  carreau.  V,  ce 
mot, 

QUART,  en  termes  de  Marine,  temps  durant  leauel  la 
moitié  d'un  équipage  est  de  service,  pendant  aue  l'autre 
moitié  se  repose.  On  distinque  le  quart  de  tribord  et  le 
quart  de  bâbord  (  1^.  Bâbord).  Le  quart  est,  terme 
moyen,  de  12  heures  par  Jour  pour  les  matelots  ;  la  du- 
rée, pour  chaque  officier,  en  est  fixée  à  raison  du  nombre 
de  ceux  qui  sont  à  bord.  Le  temps  pendant  lequel  chaque 
officier  commande  sur  le  pont  se  nomme  également  quart, 
V,  Bordée. 

QUART ,  ancienne  monnaie  de  cuivre,  valant  4  deniers. 

QUART  DE  CANON,  nom  donné,  pendant  le  xvi*  siècle, 
à  un  canon  ayant  1 7  calibres  de  longueur,  pesant  1 1 25*^,86, 
dont  la  charge  était  de  3^,91  de  poudre,  et  le  boulet  de 
5^,87.  On  l'appelait  aussi  verrat. 

QUART  DE  CONVERSION ,  en  termes  d'Art  militaire, 
mouvement  par  lequel  une  des  ailes  d'une  troupe  par* 
court  un  quart  de  cercle,  tandis  que  l'autre  aile  pivote , 
de  manière  C[ue  le  front  devienne  perpendiculaire  à  la 
direction  qu'il  occupait  d'abord. 

QUART  D'ECU ,  monnaie  d'argent  frappée  en  France 
sous  le  règne  de  Henri  III ,  et  qui  eut  cours  Jusqu'en 
1646.  C'était  environ  le  quart  de  l'écu  d'or  fixé  à  60  soua 
en  1677. 

QUART  DE  ROND.  V.  Ove. 

QUARTE,  en  termes  d'Escrime,  manière  de  porter  ou 
de  parer  un  coup  d'épée  en  tournant  le  poignet  eu  de- 
hors. 

QUARTE,  ancien  vase,  d'une  capacité  variable,  ordinaire- 
ment associé  à  l'aiguière. 

QUARTE,  en  termes  de  Jeu,  série  de  4  cartes  de  même 
couleur  qui  se  suivent. 

QUARTE,  en  termes  de  Musique,  intervalle  de  quatre 
degrés  ou  deux  tons  et  demi.  Une  quarte  est  dite  simple 
ou  naturelle,  quand  elle  comprend  5  demi-tous  (de  ut  à 
fa  en  montant)  ;  fausse  ou  diminuée,  4  demi-tons  (de  ut 
dièse  à  /a)  ;  augmentée  ou  superflue,  6  demi-tons  ou 
3  tons  (d'où  le  nom  de  triton).  La  quarte  simple  est 
aussi  appelée  mineure,  et  la  quarte  augmentée  majeure, 
Quarter,  chex  les  anciens  musiciens,  c'était  procéder 
par  quartes  en  faisant  nn  accompagnement  sur  le  plaln- 
chant.  •  B, 

QUARTE,  un  des  Jeux  à  bouche  de  l'orgue.  Il  est  ouvert 
et  de  mutation,  fait  en  étoffe,  de  grosse  taille,  et  a  toute 
l'étendue  du  clavier.  Ce  ieu,  dont  le  nom  réel  serait 
quarte  de  nasard,  est  ainsi  nommé,  quoiqu'il  soit  à  l'u- 
nisson de  la  doublette,  parce  qu'il  sonne  la  quarte  au- 
dessus  du  nasard.  La  quarte  est  le  plus  souvent  mélangée 
avec  les  nasards  et  les  tierces.  On  l'emploie  au  positif  et 
à  la  pédale;  dans  le  premier  cas,  on  la  fait  de  moins 
crosse  taille,  et  on  ne  donne  à  son  premier  tcyaa  que 
65  centimètres.  P.  C. 

QUARTE  CAXo.'fiQrE,  <qaart  de  certains  biens  que  les  ctf 


OUA 


1524 


QUE 


lions  de  l*ÉgKse  sltribuaient  autrefois  à  Tévèque  et  au 
curé.  La  quarte  épiscopale  était  prise  sur  les  legn  faits 
pour  le  bien  des  âmes  des  défunts.  La  quarte  du  curé, 
dite  paroissiale  ou  funéraire,  était  payée  pour  tout  pa- 
roissien qu*on  faisait  enterrer  ailleurs. 

QUARTE-ET-QUINTE  (Accord  de),  accord  dissonant , 
composé  du  son  fondamental,  de  sa  quarte  et  de  sa 
quinte.  La  quarte  est  un  retard  de  la  tierce  de  Taccord 
suivant. 

QUARTB-ET-siYTB  (Accord  de),  accord  consonnant  qui  se 
fait  spf^cialement  sur  la  dominante,  et  qui  se  compose  de 
la  quarte  juste  et  de  la  sixte  majeure  ou  mineure.  Cest 
le  V  renversement  de  Taccord  parfait.  Si  la  quarte  est 
augmentée  et  la  sixte  majeure,  raccord  provient  du  ren- 
versement de  la  quinte  diminuée ,  et  doit  être  traité 
comme  l'accord  de  seconde,  c-à-d.  comme  le  3*  renver- 
sement de  la  dominante. 

QUARTENIËR.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
'  Biographie  et  d'Histoire. 

QUARTIER.  Ce  mot,  qui  signifie  au  propre  la  A^paftie 
d'un  tout,  a  reçu  dans  Tusage  un  grand  nombre  d*accep- 
tions  différentes.  Ainsi,  on  appelle  quartiers  les  divisions 
administratives  d'une  ville,  ou  simplement  certaines  de 
ses  parties  que  par  habitude  on  isole.  Dans  le  langage 
militaire,  tout  lieu  occupé  par  un  corps  de  troupes  se 
nomme  quartier^  et  le  quartier  général  est  le  lieu  où  se 
trouvent  les  officiers  généraux  et  leur  état-major.  A  ia 
guerre,  une  troupe  ennemie  qui  se  rend  et  qu'on  épargne 
est  reçue  à  quartier.  Dans  les  lycées  et  les  colléjscs,  les 
quartiers  sont  les  salles  d'étude,  et  le  maître  d'études 
est  dit  aussi  maître  de  quartier.  —  En  termes  de  Bla- 
son, quartier  signifie  la  4*  partie  d'un  écu  écartelé,  et 
aussi  une  des  parties  quelconques  d'un  grand  écu  qui 
contient  des  armoiries  différentes.  On  nomme  Quar- 
tiers de  noblesse  les  degrés  de  descendance  dans  une 
ligne  paternelle  ou  maternelle  :  on  ne  pouvait  être  reçu 
autrefois  dans  certains  Ordres  de  chevalerie  sans  avoir 
prouvé  un  nombre  déterminé  de-quartiers  ;  il  fallait  10 

auartiers  en  France  pour  être  admis  dans  les  carrosses 
u  roi.  B. 

QUARTIER-MAITRE ,  nom  donné  jadis,  dans  les  régi- 
ments, à  l'officior  du  rang  de  lieutenant  ou  de  capitaine 
qui  était  chargé  du  logement,  du  campement,  des  sub- 
sistances, dos  distributions,  de  la  caisse  et  de  la  compta- 
bilité. Il  était  le  secrétaire  du  Conseil  d'administration, 
et  remplissait,  en  campagne,  les  fonctions  d'offîcier  de 
l'état  civil.  L'emploi  de  quartier-mattre  fut  créé  en  1762; 
aujourd'hui  ce  mot  est  remplacé  par  celui  de  trésorier. 
Dans  quelques  ^tats,  ou  nomme  quart ier-maitre  général 
un  officier  général  qui  remplit  en  partie  les  fonctions  de 
chef  d'état-major  ^énéral.  —  Dans  la  Marine,  le  quar- 
tier-maitrej  dont  le  grade  correspond  à  celui  de  caporal 
dans  l'armée  de  terre,  est  chargé  d'aider  dans  leurs  fonc- 
tions le  maître  et  le  contre-mcatre  :  il  dirige  les  matelots 
dans  le  service  et  la  manœuvi'e  du  voilage,  veille  à  la 
propreté  du  bâtiment  et  aux  pompes,  et  fait  exécuter  les 
ordres  du  commandant.  B. 

QUARTIMIO.  V.  LisBONNiNE. 

QUASI-CONTRAT,  engagement  qui  dérive  de  certains 
faits,  et  que  néanmoins  on  ne  peut  nommer  contrat, 
parce  qu'il  n'y  a  pas  eu  convention.  Ainsi,  la  gestion  vo- 
lontaire et  sans  mandat  des  biens  d'un  absent  est  un 
âuasi-contrat  qui  oblige  à  lui  rendre  compte.  La  répéti- 
on  d'une  chose  non  due  et  payée  par  erreur  dérive  éga- 
lement d'un  quasi-contrat,  car  celui  qui  a  reçu  est  sou- 
mis à  robligation  de  restituer. 

QUASI-DÉLIT.  V.  Délit. 

QUASIMODO,  nom  du  dimanche  de  l'octaye  de  Pâques, 
de  ce  que  l'introït  de  la  messe  de  ce  jour  commence  par 
ces  mots  Quasimodo  geniti  infantes. 

QUATERNE.  V,  Loterie  et  Loto. 

QUATORZE.  V.  Piquet. 

QUATORZIÈME,  en  Musique,  réplique  ou  octave  de  la 
septième.  H  faut  former  14  sons  poiM  passer  diatonique- 
ment  d'un  de  ses  termes*  à  l'autre. 

QUATRAIN,  accouplement  de  4  vers,  de  mesure  quel- 
conque, à  rimes  plates  ou  croisées,  renfermant  un  sens 
complet.  Le  quatrain  convient  à  l'épigramme,  au  madrigal, 
aux  inscriptions  et  aux  épitaphes.  Un  sonnet  est  composé 
de  deux  quatrains  et  de  deux  tercets.  Les  auteurs  les  plus 
connus  de  quatrains  moraux  sont  Pibrac,  P.  Matthieu, et 
More!  de  Yindét  Lo  quatrain  s'applique  k  tout;  voici 
répitapiie  du  cheyaiier  de  Boufflers,  faite  par  lui-môme 
en  un  quatrain  ;     ^ 

Cl-gU  un  chevalier  qnl  mhb  eeose  courut, 

Qu>  &<<r  'ch  ^idi-.ds  ctiemins  naquit,  vécut,  mouTUt, 


Pour  prouver  ee  qn^a  dit  le 
Que  notre  rie  est  nn  passage. 


QUATRE  ARTICLES  (Les).  V,  DécLABATion  do  clbbgé, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

QUATRE-FEUILLES,  ornement  de  Tarchitecture  ogi- 
vale divisé  en  4  lobes  et  sculpté  en  creux  ou  en  relief  sor 
les  murailles.  On  donne  le  même  nom  aax  rosaces  à 
4  divisions  qu'on  voit  dans  le  réseau  des  hautes  fenêtres. 

QUATRE  FLEURS  (Jeu  des),  jeu  de  hasard,  qui  n'est 
autre  que  le  biribi  (K.  ce  mot)^  avec  cette  différence 
qu'il  y  a  80  numéros,  plus  4  fleurs  (une  à  chaque  coin) 
qui  se  jouent  comme  des  numéros. 

QUATRE-NATIONS  (Collège  des).  |  V.  notre  Diction- 

QUATRE-TEMPS.  }     naire  de  Biogr. 

QUATRIENNAUX.  )     et  d: Histoire. 

QUATUOR  (du  latin  quatuor,  quad«),  morceaa  de 
musique  vocale  ou  instrumentale  à  4  parties.  Un  qua- 
tuor, soit  vocal,  soit  instrumental,  peut,  lorsqu'il  est  con- 
certant, c-à-d.  à  4  parties  récitantes  et  obligées,  être 
accompagné  par  l'orchestre.  Le  quatuor  vocal  n'a  pas  une 
origine  ancienne  :  on  n'en  trouve  dans  les  opéras  que 
depuis  les  dernières  années  du  xviii*  siècle.  Entre  autres 
quatuors  célèbres,  on  remarque  ceux  de  Don  Juan  par 
Mozart,  de  Stratonice  et  de  XIrato  parMéhul,  de  Afa 
tante  Aurore  par  Boieldieu,  de  Joconde  par  Nicole.  Lei 
quatuors  pour  instruments  à  cordes  sont  ordinairement 
écrits  pour  2  violons,  alto  et  violoncelle,  et  se  composent 
de  4  morceaux,  un  Allegro,  un  Andante,  un  Schêrso  ou 
Menuet,  et  un  Finale.  Haydn  fut  le  créateur  de  ce  genre 
de  musique  de  chambre;  après  lui.,  Mozart,  Boccherini, 
Beethoven,  Onslow,  s'y  sont  particulièrement  distingués. 
-  En  instrumentation ,  on  nomme  Qu€ttuor  l'ensemble 
des  Instruments  à  cordes,  par  opposition  à  la  masse  des 
instruments  à  vent,  dite  Harmonie.  B. 

QUATUORVIRS.  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

QUAYAGE;  droit  nue  l'on  paye  pour  avoir  la  permis- 
sion de  déposer  des  marchandises  tur  le  quai  d'un  port 

QUEMINELS  (de  cheminée)^  anc.  mot  signifiant  chenets. 

Ql}K^^E,  ancien  vase  de  forme  allongée  et  d'une  cai- 
pacité  convenue. 

QUENOUILLE  (du  latin  canna,  roseau,  bâton,  ou  de 
columna,  colonne),  b&ton  de  fileuse,  entouré,  vers  le 
haut,  de  chanvre,  de  lin,  de  laine,  de  soie,  etc.,  que  l'on 
étire  avec  la  main.  Chez  les  Romains,  on  portait  derrière 
les  nouvelles  mariées  une  quenouille  garnie  de  laine, 
pour  signifier  leurs  occupations  futures.  La  quenouille 
était  un  attribut  des  Parques,  spécialement  de  Clotho. 
Dans  le  Blason,  elle  indique  la  ligne  féminine.  Un 
royaume  tombe  en  quenouille,  quand  les  femmes  y  snc- 
cèdent  à  la  couronne.  Le  musée  de  Cluny,  à  Paris,  ren- 
ferme un  certain  nombre  d'anciennes  quenouilles  en  bois 
sculpté  :  Tune  d'elles,  d'un  travail  florentin,  est  toute 
couverte  de  figures  représentant  les  femmes  fortes  de 
l'Écriture.  De  semblables  quenouilles  étaient,  en  général, 
le  principal  ornement  d'un  cofi^t  de  noces  au  moyeo 
âge. 

QUENTIN  (Église  de  Saint-),  remarquable  mo'^umeDt 
de  l'architecture  ogivale,  qui  avait  autrefois  titre  de  col- 
légiale. C'est  un  édifice  presque  entièrement  du  xiu*  et 
du  XIV*  siècle  ;  la  travée  qui  est  sous  la  tribune  de  Tonme 
remonte  seule  au  xn*.  Le  plan  général  est  àti*ois  nefs,  et 
en  forme  de  croix  archiépiscopale,  c-à-d.  à  deux  tran- 
septs; le  croisillon  de  gauche  du  transept  le  plus  orien- 
tal est  du  XV*  siècle.  Le  grand  portail,  construction  mo- 
derne, lourde  et  massive,  sert  en  même  temps  de  clocher. 
Le  vaisseau  a  i  10  met.  de  longueur  environ,  43  met.  de 
largeur  aux  transepts,  30  met.  de  hauteur  sous  voûte.  On 
compte  7  grandes  travées  depuis  celle  de  l'orgue  jusqu'au 
premier  transept  ;  l'une  des  extrémités  de  ce  transept 
offre  un  portail,  avec  tympan  intérieur  à  jour,  surmonté 
d'une  belle  galerie  également  à  jour  et  d'une  fenêtre  de 
style  flamboyant;  l'autre,  qui  n'a  pas  de  porte,  présente 
un  premier  étage  formé  de  deux  belles  ogives,  et,  au- 
dessus,  une  fenotre  à  trois  compartiments,  avec  une  rose 
au  sommet.  Le  long  des  bas  côtés  de  la  nef,  il  y  a  quatre 
chapelles  d'un  côté,  et  trois  seulement  de  l'autre;  celle 
des  fonts  baptismaux  a  un  curieux  retable  en  pierre.  Le 

f premier  transept  est  séparé  du  chœur  par  une  haute  ba- 
ustrade.  Le  chœur  a  4  travées  ;  vient  ensuite  un  second 
transept,  dont  les  croisillons  ne  sont  pas  percés  déportes, 
puis  une  abside  à  7  travées,  avec  5  chapelles.  A  l'ouver- 
ture de  chacune  de  ces  chapelles  sur  les  collatéraux,  il  y 
a  deux  colonnes  monocylindriques  supportant  des  re- 
tombées, ce  qui  fait  que  chaqpe  chapelle  communique 
STec  les  nefs  mineures  par  trois  oïdves;  cette  disposition. 


OUE 


1525 


QUI 


très-rare,  se  TetrooTe  dans  Téglisc  de  S*-Remi  à  Reims. 
Au-dessus  des  arcades  ogivales  règne  autour  de  Téglise 
une  galerie  aveugle,  surmontée  de  fenêtres  hautes  de 
i3"*,30,  divisées  en  deux  parties  par  un  meneau,  excepté 
dans  le  chœur,  où  elles  sont  à  3  compartiments  et  plus 
larges,  et  toutes  couronnées  par  une  rose  élégante.     B. 

QOENTiR  (Hôtel  de  Ville  de  Saint-),  édifice  élevé  sur 
Tun  des  quatre  côtés  de  la  grande  place  de  la  ville, 
spécimen  intéressant  de  transition  entre  le  style  ogival, 
qui  domine  à  la  partie  inférieure,  et  le  style  de  la  Re- 
naissance, plus  nettement  caractérisé  dans  la  partie  su- 
périeure. Il  fut  achevé  en  1509.  Le  rez-de-chaussée  est 
formé  de  7  arcades,  en  arrière  desquelles  sont  un  corps 
de  garde  et  des  bureaux.  Le  premier  étage  est  éclairé  par 
9  grandes  fenêtres,  avec  niches  dans  les  trumeaux.  Rien 
n'est  plus  original  et  plus  pittoresque  que  l'ensemble  de 
ce  monument,  dont  les  ogives,  les  corniches,  les  chapi- 
teaux et  les  frises  sont  ornés  de  figures  fantastiques. 
Trois  frontons  triangulaires  forment  son  couronnement  : 
une  élé^nte  tour  carrée,  surmontée  d*une  lanterne  à 
jour,  s*élève  au-dessus  du  fronton  central.  La  lanterne 
renferme  un  carillon.  A  Tintérieur  de  l'édifice,  on  re- 
marque la  Salle  des  Conseils,  qui  a  conservé  son  an- 
cienne décoration.  B. 

QUESTEURS.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire, 

QUESTION  (en  latin  quœstio;  de  quœrerey  chercher^. 
En  Droit,  on  nomme  question  tout  point  soumis  à  la  dé- 
cision des  juges.  Une  question  de  droit  est  un  point  de 
Droit  sujet  à  contestation  dans  Tapplication  de  la  doG- 
trine  à  Tespèce.  Une  question  de  fait  est  l'incertitude  qui 
existe  au  sujet  d*un  fait  allégué,  lequel,  quand  il  aura 
été  prouvé,  donnera  naissance  à  un  droit.  L'examen  de 
la  question  de  fait  précède  donc  logiauement  et  néces- 
sairement celui  de  la  question  de  droit.  On  nomme 
question  préjudicielle  celle  qui  s'élève  dans  le  cours  d'un 
débat,  et  dont  la  solution,  pouvant  influer  sur  le  juge- 
ment do  l'action  principale,  doit  le  précéder  :  il  est  de 
principe  que  le  même  juge  prononce,  à  moins  que  la  loi 
n'ait  expressément  attribué  à  une  autre  autorité  la  con- 
naissance du  fond  de  cette  question. 

QUESTION,  moyen  de  Procédure.  V,  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

QIESTION  DB  CABINET.    V.  CABINET. 

QOESTioN  d'État.  V.  État. 

QUESTION  PRÉALABLE,  OU  stylo  parlementaire,  formule 
par  laquelle  on  écarte  une  motion  comme  intempestive 
ou  inconstitutionnelle;  c'est  dire  qu'on  va  discuter  préa- 
lablement une  autre  question  qui  est  à  l'ordre  du  jour. 

QUESTIONS  PERPÉTUELLES.  V.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

QUETE,  autrefois  Queste  (du  latin  quœsitum,  chose 
demandée),  action  de  recueillir  des  aumônes  pour  les 
pauvres  on  pour  une  œuvre  pie.  Les  quêtes  ecclésiastiques 
ont  été  réglementées  en  France  par  un  décret  du  12  sep- 
tembre 18U6  et  par  un  autre  décret  de  1809;  les  quêtes 
des  bureaux  de  bienfaisance,  par  un  arrêté  du  25  mai 
i8t)3.  Toute  quête  à  domicile  doit  être  autorisée  par  le 
maire  de  la  commune. 

QuéTE,  en  termes  de  Marine,  inclinaison  en  dehors  de 
la  partie  de  derrière  d'un  navire  ;  elle  allonge  le  navire, 
comme  l'élancement  à  l'avant. 

QUEUE,  terme  de  Chancellerie.  Une  lettre  est  scellée 
sur  simple  queue,  quand  le  sceau  est  sur  la  partie  de 
parchemin  qu'on  coupe  en  forme  de  queue  ;  sur  double 
queue,  quand  il  est  sur  une  bande  de  parchemin  traver- 
sant la  lettre. 

QUEUE,  genre  de  coiffure.  V,  notre  DictionncUre  de  Bio- 
graphie  et  S  Histoire, 

QUEUE,  instrument  du  jeu  de  billard.  V,  Bilijird. 

Qi  EUE  d' ABONDE  OU  d'hirondk  (du  vloux  français  hironde 
ou  aronde,  hirondelle),  tenon  en  queue  d'hirondelle  fait 
'lans  une  pièce  de  bois  ou  de  fer,  et  qui  doit  entrer  dans 
une  entaille  de  même  forme.  C'est  un  puissant  moyen 
l'assemblage  pour  les  pierres  de  grand  appareil  et  pour 
i'îs  charpentes.  —  Dans  la  Fortification,  on  nomme  queue 
'Vhironde  une  sorte  de  tenaille  dont  les  branches  se  ter- 
minent en  se  rapprochant  du  côté  de  la  courtine;  quand 
les  branches  vont  en  s'élargissant,  c'est  une  contre- 
queue  d^hironde. 

QUEUES  ROUGES  (Emploi  des),  en  termes  de  Théâtre, 
rôles  de  bas  comique,  bouffons  se  n^procfaant  des  Jo- 
crisses. 

QUEURRE,  vieux  mot  signifiant  chariot, 

QUEUX.  V.  ce  met  dana  notre  Dictionnaire  de  Bio» 
graphie  M  d^Bistoinfi» 


QUICHE  (Idiome).  V,  Mexique  (Langues  dn). 

QUICHOTTE  (Don),  célèbre  roman  espagnol  de  Ceiw 
vantes  :  il  n'est  personne  qui  ne  connaisse  le  chevalier 
de  la  Manche,  à  qui  les  romans  de  chevalerie  avaient 
tourné  la  tête,  et  son  écuyer  Sancho  Pança  ;  personne  qui 
ne  se  rappelle  la  veille  des  armes  dans  l'hùteilerie,  l'aven- 
ture  des  moulins  à  vent,  la  conquête  de  l'armet  de  Mam- 
brin,  la  pénitence  de  Don  Quichotte  à  l'imitation  du  Beau 
ténébreux,  l'enchantement  de  Dulcinée,  l'administration 
de  Sancho  dans  l'Ile  de  Barataria,  et  tant  d'autres  mé- 
morables aventures  que  termine  cette  défaite  qui  ramène 
Don  Quichotte  dans  sa  patrie,  où  il  ne  tarde  pas  à  ex- 
pirer, après  avoir  recouvré  la  raison.  —  Pour  beaucoup 
d'esprits,  même  éclairés,  V Histoire  de  Don  Quichotte 
n'est  qu'une  satire  des  romans  de  chevalerie  ;  c'est  en 
méconnaître  la  véritable  portée  :  si  le  Don  Quichotte 
ne  se  proposait  que  cette  satire,  eût-il  été  traduit  dans 
toutes  les  langues  de  l'Europe?  S'il  se  lit  et  se  réim- 
prime sans  cesse,  il  faut  nécessairement  qu'à  côté  d'une 
fable  des  plus  amusantes,  se  trouve  un  fond  des  plus 
sérieux;  que  parmi  beaucoup  d'aventures  burlesques 
le  lecteur  rencontre  des  vérités  de  tous  les  temps;  qu'à 
de  faciles  bouffonneries  se  mêlent  des  réflexions  profi- 
tables à  toutes  les  époques  et  à  tous  les  hommes.  L'//ù- 
toire  de  Don  Quichotte  n'est  qu'un  cadre  où  Cervantes  a 
eu  l'art  d'introduire  ses  jugements  personnels  sur  quel- 
ques-unes des  questions  les  plus  importantes  de  la  litté- 
rature, de  la  morale  et  de  la  politique.  Là  même  n'est  pas 
la  principale  raison  de  la  vogue  extraordinaire  de  cet  in- 

Sénieux  ouvrage  :  elle  vient  de  l'opposition  du  caractère 
es  deux  héros,  et  du  jeu  symbolique  de  ces  deux  carac- 
tères sur  la  scène  du  roman  ;  car  le  Don  Quichotte  tient 
de  très-près  à  l'apologue  oriental  :  on  retrouve  avec  le 
plus  vif  intérêt,  dans  la  conduite  et  les  discours  du  che- 
valier de  la  triste  figure  et  de  son  écuyer,  la  reproduction  de 
la  nature  humaine,  et  l'image  de  la  vie,  soumise  à  deux 
mobiles  généraux,  l'imagination  et  le  bon  sens.  —  Il  faut 
noter  aussi,  pour  prendre  une  idée  complète  de  Don 
Quichotte,  un  ^nd  nombre  d'épisodes  qui  ne  tiennent 
guère  au  dessein  général  de  l'ouvrage  qu'en  supposant 
que,  tout  en  ayant  pour  but  d'écrire  un  livre  utile  à  son 
siècle,  Cervantes  se  proposait  aussi  de  le  rendre  utile  à 
son  auteur.  Tels  sont  :  l'Histoire  du  Captif,  le  Curieux 
impertinent,  les  Aventures  de  Cardenio  et  de  Lucinde, 
de  Don  Fernand  et  de  Dorothée.  On  y  trouve  aussi  de 
véritables  pastorales,  selon  la  mode  d'alors,  comme  l'His- 
tqire  de  Chrysostome  et  de  la  bergère  Marcelle,  et  les  fa- 
nïeuses  Noces  de  Gamache,  si  agréables  à  Sancho.  Tous 
ces  ornements  un  peu  disparates  n'avaient  pour  but  que 
d'attirer  des  lecteurs  à  l'ouvrage,  en  y  semant  des  pièces 
de  genres  et  de  goûts  divers. 

Toutefois,  ce  serait  nier  Tévidenoe  que  de  refuser  à 
l'auteur  de  VHistoire  de  Don  Quichotte  l'intention  de 
faire  la  satire  des  romans  de  chevalerie.  Cervantes  ne 
s'élève  pas  contre  les  romans  de  chevalerie  en  général  $ 
ce  qu'il  attaque,  ce  sont  les  détestables  imitations  des  ro-^ 
mans  primitifs,  qui,  par  l'excès  de  leurs  extravagances, 
menaçaient  la  raison  et  le  goût  en  Espagne  d'un  naufrage 
universel. 

La  1*^  partie  du  Don  Quichotte  parut  à  Madrid  en  1605. 
Cervantes  venait  d'entreprendre  la  seconde,  et  l'annonçait 
en  juillet  1613,  lorsque  fut  imprimée  à  Tarragone,  en 
1614,  une  Suite  à  l'histoire  de  Don  Quichotte,  sous  le 
nom  d'un  certain  Avellaneda,  pseudonyme  qui  cache, 
dit-on ,  le  P.  Aliaga,  confesseur  de  Phihppe  III.  Cet  ou* 
vrage,  écrit  par  un  ennemi  de  Cervantes,  reproduit, 
non  le  portrait,  mais  la  caricature  de  Don  Quichotte  et. 
de  Sancho  ;  il  a  été  traduit  en  français  par  Lesage,  et 
depuis,  par  Germond  de  Lavigne,  Paris,  1853.  Devant 
cette  impudente  contrefaçon  de  son  œuvre,  Cervantes  fit 
paraître,  en  1615,  la  2*  partie  de  l'histoire  de  Don  Qui- 
chotte, où  il  se  vengeait,  avec  autant  d'esprit  que  de 
dignité,  de  son  plat  imitateur.  —  Les  meilleures  éditions 
de  Don  Quichotte  sont,  en  espagnol,  celles  de  Pellicer, 
Madrid,  1797-08,  5  vol.  in-S",  et  de  Clemencin ,  Madrid , 
1833-39, 6  vol.  in-4°.  Ces  deux  éditions  doivent  beaucoup 
à  l'édition  donnée  en  Angleterre  par  J.  Bowle,  Salisbury, 
1781,  in-4<>.  Les  traductions  françaises  les  plus  estimées 
sont  celles  de  Filleau  de  Saint- Martin,  de  Viardot,  de 
Damas-Uinard,  et  de  Bretonne.  Furne  a  essayé  aussi  une 
traduction  dans  le  genre  de  celle  de  Florian,  qui  n'es^ 
qu'une  imitation.  E.  B. 

QUICHUA  (Langue).  V,  PéROViBNiiBS  (Langues). 

QUIDDITÉ  (du  latin  quid,  quelle  chose?',  terme 
barbare  par  lequel  les  Scolastiques  désignaient  la  nature, 
l'essence,  le  caractère  diatinctif  d'om  cnose;  en  d'autres 


QUI 


1526 


QUI 


termefl,  ce  qui  répond  à  la  question  :  Qu'est  celte  cliose  ? 

QUILSCENTES  (Lettres),  nom  que  les  hébra!sants 
<*onnent  à  certaines  lettres  de  Thébreu  qui  ne  se  pro- 
noncent pas  toujours,  et  qui  sont  alors  comme  en  repos 
(en  latin  quiescere,  se  reposer). 

QUIÉTISME.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnmre  de 
Biographie  et  ^Histoire. 

QUILANDO,  instrument  de  musique  des  habitants  du 
Congo.  C'est  une  très-grande  calebasse,  large  par  le  fond, 
fort  étroite  au  sommet,  et  qui  sert  à  faire  la  basse  du 
cassuto  (r.  ce  mot), 

QUILI5ME,  nom  d*nn  ancien  agrément  de  chant  re- 
pràenté  par  une  ligne  brisée  on  ondulée.  C'était,  selon 
les  uns,  une  sorte  de  tremblement  de  la  voix,  et,  selon 
les  autres,  un  groupe  de  3  ou  5  notes  ascendantes.  Quel- 
ques-uns identifient  le  quilisme  avec  la  plique  (F.  ce 
mot), 

QUILLAGR,  droit  que  les  navires  mardiands  payent 
dans  les  ports  de  France,  la  première  fois  qu'ils  y  entrent. 

QUILfuË,  longue  pièce  de  bois,  plus  haute  que  large, 
qui  va  de  la  poupe  à  la  proue  d*un  navire.  C'est  la  base 
sur  laquelle  on  construit  toute  la  charpente,  et,  par  con- 
séquent, la  première  pièce  qu'on  ]3lace  sur  le  chantier. 
En  comparant  la  carcasse  du  navire  à  un  squelette,  la 
quille  est  Tépine  dorsale,  et  les  couples  ou  membres 
montés  sur  elle  sont  les  côtes.  La  quille  porte  Tétambot 
à  son  arrière  et  Tétrave  à  son  avant.  Emprunter  sur  la 
quille  d*un  bâtiment,  c'est  hypothéquer  le  corps  du  bâti- 
ment en  gage  du  prêt. 

QUILLE  (FaDSSE-).   V,  FaOSSC-QuILLC. 

QUILLES  (Jeu  de),  Jeu  qui  consiste  à  abattre,  au 
moyen  d'une  grosse  boule  ou  d'un  disque  qu'on  fait 
rouler  d'une  certaine  distance,  neuf  quilles  de  bois,  ran- 
gées ordinairement  «n  carré  trois  par  trots.  —  Au  jeu 
de  Quilles  au  bâton,  on  se  sert  de  7  quilles  grosses  et 
hautes,  qu'on  plante  sur  une  même  ligne  dans  du  sable, 
et  qu'il  s'agit  d'abattre  avec  un  bâton;  pour  gagner,  il 
faut  en  renverser  un  nombre  pair.  —  Dans  le  jeu  de 
Quilles  sur  table,  un  certain  nombre  de  petites  quilles, 
pouvant  se  redresser  au  moyen  de  cordons,  sont  rangées 
sur  un  plateau  ;  on  fait  tourner  la  boule  autour  d'une 
flèche  à  laquelle  elle  est  attachée. 

QDILLES  DES  INDES.    V,  TOOPIE. 

QUIMPER  (Kglise  S^-CoREirm,  à).  Cette  église  cathé- 
drale est  le  plus  beau  monument  de  style  ogival  que 
Eossède  la  Bretagne.  Le  chœur,  ainsi  que  la  chapelle 
btre-Dame-de-la-Victoire  qui  en  était  primitivement 
séparée  et  qui  forme  actuellement  l'abside,  date  du 
xiu*  siècle;  les  troubles  du  xiv*  ajrant  suspendu  les  tra- 
vaux, on  n'entreprit  les  voûtes  du  chœur  qu'en  1408; 
le  transept,  les  nefs,  les  deux  tours  du  grand  portail, 
s'élevèrent  dans  le  cours  du  même  siècle  et  dans  les  pre- 
mières années  du  xvi*;  les  flèches  qui  surmontent  ces 
tours  ont  été  bâties  récemment.  L'édifice  a  les  dimen- 
sions suivantes  dans  œuvre  :  longueur,  92  met.  ;  largeur, 
i5'",70;  hauteur,  20'",20.  H  est  en  forme  de  croix  latine, 
et  fortement  incliné  sur  son  axe  (F.  Axe);  la  nef  est  ac- 
compagnée de  bas  côtés,  et  le  chœur  de  déambulatoires. 
Dien  que  chaque  période  ogivale  ait  laissé,  dans  la  catiié- 
dralc  de  Quimper,  des  signes  de  son  influence,  elle  est 
remarquable  par  l'unité  du  plan.  L'extérieur  a  de  la 
grâce  et  de  la  majesté;  la  façade  occidentale,  large  de 
34  met.,  offre  une  ornementation  distinguée,  où  l'on  re- 
connaît l'approche  de  la  Renaissance.  A  l'intérieur,  le 
ehœur  est  la  partie  la  plus  belle  :  les  chapiteaux  des  pi- 
liers y  sont  sculptés  avec  beaucoup  de  luxe  et  de  goût; 
an-desaus  des  arcades  se  déroule  une  frise,  dont  les  des- 
sins sont  traités  avec  une  verve  pleine  de  fantaisie,  puis 
an  triforium  d'une  disposition  originale,  et  enfin  de 
larges  fenêtres  à  trois  meneaux.  Les  arcades  de  la  nef 
sont  an  peu  surbaissées;  les  ornements  n'ont  ni  la  même 
ampleur,  ni  la  même  noblesse  ;  le  triforium  n'a  point  été 
achevé,  et  les  fenêtres  sont  un  peu  plus  larges  qu'à  l'ab- 
side. Dans  les  transepts,  de  grandes  fenêtres  à  meneaux 
flamboyants  tiennent  lieu  de  roses.  Il  ne  reste  de  ver- 
rières anciennes  qu'aux  fenêtres  les  plus  élevées  de 
l'édifice.  B. 

QUINAIRE,  monnaie.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire, 

QUINCONCE  (du  latin  quinque,  cinq),  plant  d'arbres 
espacés  et  disposés  de  manière  à  présenter  des  lignes 
droites  de  quelque  sens  qu'ils  soient  vus.  Ces  arbres  sont 
ordinairement  distribués  par  carrés  de  quatre  en  tous 
lec?,  avec  un  M  au  milieu.  Il  y  a  de  beaux  quinconces 
sur  l'esplanade  des  Invalides  â  Paris,  et  sur  la  rive  droite 
de  la  Gironde  à  Bordeaux* 


QoiNCOTfCB  (Ordre  en).  F.  ÉcHiQirnsiu 

QUINDÉCEMVIRS.  F.  ce  mot  dans  notre  Dietiùmimrê 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

QUINE.  V,  LoTEBiE  et  Loto. 

QUINEVILLE  (Cheminée  de),  à  10  kilom.  E.  de  Va- 
lognes  (  Manche).  Cest  une  sorte  de  tour,  creuse  à  l'int^ 
rieur,  sans  aucune  trace  de  plancher  ni  de  séparation, 
et  dont  l'ouverture,  placée  au  N.-E.,  s'est  agrandie  de 
plus  en  plus  par  suite  des  dégradations.  On  remarque,  à 
l'extérieur,  des  restes  de  moulures  qui  sembleraient  in« 
diquer  qu'il  existait  jadis  un  escalier.  La  base  de  la  tour 
a  environ  6  met.  de  hauteur  jusqu'au  soubassement  de 
la  colonne,  et  est  construite  en  pierre  calcaire  dans  l'ap- 
pareil réticulé.  La  circonférence,  de  iO  met.  près  da  sol, 
va  en  diminuant  jusqu'au  point  où  commence  le  soubas- 
sement. La  colonne  est  ronde,  assez  bien  conservée,  et 
ornée  de  7  pilastres  d'ordres  corinthien  et  toscan,  avec 
un  entablement  de  ce  dernier  ordre  ;  elle  est  surmontée 
d'un  dôme,  soutenu  par  18  colonnettes.  Les  antiquaires 
ne  sont  pas  d'accord  sur  l'origine  et  la  destination  de  ce 
monument  :  quelques-uns  en  font  remonter  la  construc- 
tion à  l'époque  de  J.  César;  d'autres  y  voient  un  phare, 
ou  une  reduserte  du  moyen  âge.  B. 

QUINQUAGÉSIME.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire. 

QUINQUÉ.  F.  Quintette. 

QUINQUENNAL.  F.  notre  Dictumnatre  de  Biographie 
et  d^  Histoire. 

QUINQUENNIUM,  c-â-d.  en  latin  espace  de  cinq  ans; 
nom  donné,  dans  l'ancienne  Université,  â  un  cours  d'études 
comprenant  2  années  de  philosophie  et  3  années  de  théo- 
logie. 

QUINQUENOVE  (du  latin  quinque,  cinq,  et  novem, 
neuf),  sorte  de  jeu  â  5  et  â  9  points,  qui  se  Joue  avec 
deux  dés. 

QUINQUEPORTE  (du  latin  quinque,  cinq,  etporfa, 
porte),  sorte  de  filet  ou  de  nasse  de  pêcheur,  de  forme 
cubique,  soutenu  sur  des  cerceaux ,  et  ayant  5  entrées 
qui  correspondent  â  autant  de  faces  du  cube. 

QUINQUÉVIRS.  l  V,  ces  mots  dans  notre  Dictumnaire 

QUINT.  \     de  Biographie  et  d^Histoire.     ' 

QUINTAINE  (  de  l'italien  quintana) ,  pal  ou  poteau  ser- 
vant de  but.  La  joute  à  la  quintaine,  exercice  du  moyen 
âge,  était  une  sorte  de  jeu  de  bagues. 

QUINTANA.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire, 

QUINTE  (du  latin  quintus,  cinquième),  intervalle 
consonnant,  composé  de  quatre  degrés  diatoniques.  La 

?uinte  juste  ou  naturelle  comprend  trois  tons  et  demi 
Ù!QUl  k  soi  en  montant).  Si  la  quinte  est  altérée  par  di- 
minution, elle  est  dite  mineure^  ou  mieux  diminuée  (  de 
ut  ksol  bémol) ^  et  renferme  deux  tons  et  deux  demi- 
tons;  si  elle  est  altérée  par  augmentation,  elle  est  dite 
augmentée,  et  comprend  trois  tons  et  deux  demi-tons. 
Les  dénominations  de  fausse  quinte  et  de  quinte  superflue^ 
employées  autrefois  pour  désigner  la  quinte  diminuée  et 
la  quinte  augmentée,  ne  sont  pas  rationnelles.  Dans  la 
composition  musicale,  il  est  défendu  de  faire  deux  quintes 
justes  de  suite,  et  même  deux  quintes  cachées,  entre  deux 
parties  qui  marchent  par  mouvement  semblable  ou  paral- 
lèle; cette  règle  cesse  si  la  seconde  quinte  est  diminuée. 
—  Autrefois,  en  accordant  les  orgues,  on  affaiblissait  en- 
viron onze  quintes  d'un  quart  de  comma;  comme  on  ne 
parvenait  pas  ainsi  â  l'octave  juste,  on  faisait  tomber 
tout  ce  qui  manquait  sur  une  seule  quinte,  qui  devenait 
outrée,  et  on  avait  soin  qu'elle  se  trouvât  sur  le  ton  le 
moins  usité.  Les  facteurs  l'appelaient  quinte  du  loup, 

QUINTE,  nom  donné  queiâuefois  â  l'Alto,  parce  «me 
cet  instrument  est  accordé  â  ta  quinte  inférieure  du  vio- 
lon. F.  Alto. 

QomTB,  jeu  d'orgues,  le  même  que  le  nasard  {V,  ce 
mot), 

QcmTÉ,  terme  du  jeu  de  Piquet  (  F.  ce  mot), 

QUINTEFEUILLE ,  en  termes  d'Architecture,  rosac<> 
â  cinq  divisions. 

QUINTER,  ancien  terme  de  monnayage,  qui  signifiait 
marquer  l'or  ou  l'argent,  après  l'avoir  essayé  et  avoir  fait 
payer  le  droit  du  quint,  —  Quinter  ou  quintoyer  était 
aussi  un  terme  de  l'ancienne  Musique;  c'était  procéder 
par  quintes  dans  un  accompagnement  de  plain-chant. 

QUINTESSENCE  (du  latin  quinta  essentia,  5*  essence), 
nom  que  les  anciens  philosophes  donnaient  â  Véther  (F.  os 
mot) ,  élément  plus  subtil  que  la  terre,  l'eau,  l'air  et  le 
feu. 

QUINTE -ET- SIXTE  (Accord  de),  1«'  renversement  d« 
l'accord  de  septième.  Outre  la  quinte  et  la  sixte,  il  coeh 


Ouo 


!527 


OUO 


Heat  aussi  la  tierce.  La  quinte  s'y  résout  en  descendant 
d*an  degré* 

QUINTETTE ,  autrefois  Quinque,  morceau  de  musique 
eomposâ  pour  5  Yoix  ou  5  instruments.  Les  quintettes 
pour  instruments  à  cordes  sont  ordinairement  écrits 
pour  2  Tiolons,  2  altos  et  un  violoncelle;  ou  bien,  comme 
ront  fait  Boccherini  et  Onslow,  pour  2  yiolons,  un  alto 
et  2  violoncelles.  Reicha  a  composé  des  quintettes  pour 
flûte,  hautbois,  clarinette,  cor,  et  basson.  En  général, 
le  quintette  est  divisé  en  4  parties,  comme  le  quatuor 
V.eemot),  B. 

QUINTIL,  ancien  mot  désignant  une  stance  de  5  vers, 
dans  laquelle  il  y  avait  3  vers  d'une  môme  rime,  entre- 
coupés par  la  seconde  rime. 

QUINTILLA.  V,  Espagnole  (Poésie). 

QUINTUPLE,  monnaie  d'or  de  Naples,  valant  15  du« 
cats  ou  64  fr.  95  c. 

QUINZE  (Jeu  du),  Jeu  où  l'on  emploie  deux  jeux  de 
cartes  entiers,  distribués  de  façon  que  tous  les  trèfles  et 
les  piques  sont  réunis  dans  l'un,  tous  les  cœurs  et  les 
carreaux  dans  l'autre.  Il  se  Joue  entre  2,  3,  4,  5  ou  6  per- 
sonnes, qui  ont  chacune  une  cave.  On  distribue  une  carte 
à  chaque  Joueur,  en  prenant  en  dessous  du  jeu,  et  non 
en  dessus.  H  est  loisible  alors  de  passer  ou  de  rmvier; 
dans  ce  dernier  cas,  on  demande  d'autres  cartes,  à  l'aide 
desquelles  il  faut  arriver  au  nombre  de  15  points  ou  très- 
peu  au-dessous;  si  l'on  dépasse  ce  nombre,  on  perd  sa 
mise  :  à  égalité  de  points,  la  primauté  l'emporte. 

QUINZE-VINGTS.        )  V,  notre  Dictionnaire  de  BiO' 

QUIPOS  ou  QUIPUS.  {     graphie  et  d'Histoire, 

QUIPROQUO  (du  latin  qui  pro  qiM,  l'un  pour  l'autre), 
méprise,  malentendu.  Les  médecins  du  moyen  &ge  inti- 
tulaient Quid  pro  ^uo  tout  chapitre  où  l'on  indiquait,  à 
défaut  d'une  drogue,  une  autre  drogue  de  même  vertu  ; 
ces  substitutions  donnèrent  lieu  à  des  erreurs  chez  les 
apothicaires ,  et  de  là  serait  venu,  dit-on,  le  sens  moderne 
du  mot  Quiproquo, 

QUIQlfANDAINE,  sorte  de  grand  vase,  avec  ou  sans 
anses,  qui  flgure  parmi  les  ustensiles  de  ménage  au 
moven&ge. 

QUIRâT,  en  termes  de  Droit  maritime,  part  de  pro- 
priété dans  un  navire.  Les  co-propriétaires  sont  appelés 
quirataires, 

QUIRINAL  (Palais),  à  Rome.  Commencé  par  ordre  de 
Gr^oire  XIII,  vers  1574,  d'après  les  plans  de  Flaminio 
Ponzio,  ii  fut  continué  et  achevé  sur  les  dessins  de  Mas- 
cherini  et  de  Dominique  Fontana.  Sous  le  pontificat  de 
Paul  V,  C.  Maderno  l'agrandit  ;  le  Bernin  et  Fuga  y  tra- 
vaillèrent plus  tard  encore,  et  enfin  il  a  été  restauré  au 
temps  de  Pie  VIL  La  grande  cour  a  100  met.  de  long, 
sur  55  de  large  :  trois  de  ses  côtés  sont  entourés  d'un 
portique  soutenu  par  44  pilastres  ;  le  4*  côté,  formant 
façade,  est  orné  dVme  horloge,  e'.  d'un  tableau  en  mo- 
saïque d'après  un  dessin  de  C.  Maratta.  Sous  le  por- 
tique se  développent  deux  escaliers,  qui  conduisent  à 
des  salles  ornées  de  peintures  par  le  Guerchin,  le  Corrègc, 
l'EspagnoIet ,  le  Dominiquin,  le  Guide,  Jules  Romain, 
Annibal  Carxîiche,  etc.  La  chapelle  est  de  môme  forme  et 
de  même  grandeur  que  la  chapelle  Sixtine  du  Vatican; 
elle  a  été  peinte  à  fresque  par  le  Guide.  Derrière  le  pa- 
lais sont  de  beaux  jardins,  qui  ont  environ  un  mille  de 
circuit.  On  y  remarque  une  fontaine  qui  rend  des  sons 
harmonieux  produits  par  le  jeu  des  eaux. 

QUITTANCE ,  écrit  par  lequel  un  créancier  déclare  un 
débiteur  quitte,  c.-à-d.  libéré  de  tout  ou  partie  de  son 
obligation.  Une  quittance  peut  être  donnée  sous  seing 
privé  ou  par-devant  notaire;  les  frais  sont  à  la  charge  du 
débiteur,  qui  a,  s'il  a  réclamé  une  pièce  notariée,  le  choix 
du  notaire.  Si  la  quittance  énonce  la  somme  payée,  sans 
exprisner  la  cause  de  la  dette,  le  débiteur  peut  l'imputer 
sur  la  dette  qu'il  lui  importe  le  plus  d'acquitter  ;  si  elle 
énonce  la  cause  de  la  dette  et  non  la  somme  payée,  elle 
lait  foi  du  payement  de  tout  ce  qui  était  dû  pour  la  cause 
énoncée;  si  elle  n'énonce  ni  la  somme  payée  ni  la  cause 
de  la  dette,  elle  s'étend  à  tout  ce  ((ue  pouvait  exiger  alors 
le  créancier  qui  l'a  donnée,  mais  non  aux  dettes  G[^ai 
n'étaient  pas  exigibles  à  l'époque  de  la  quittance.  La  quit- 
tance da  capital,  donnée  sans  réserve  des  intérêts,  en  fait 
présumer  le  payement. 

QUITUS  (Arrêt  de).  V.  Compte. 

QUOLIBET  (  du  latin  quod  libet,  ce  qui  plaît,  comme 
on  voud»),  plaisanterie  qui  roule  sur  une  phrase  à  sens 
folontairement  équivoque.  Sa  qualité  est  la  finesse,  l'es- 
prit, la  gaieté,  et  une  clarté  suffisante  dans  le  sens  sati- 
rique. Quelqu'un  demandait  au  célèbre  Dugazon,  acteur 
de  la  Gmnédie  Française*  ce  qu'il  pensait  d'un  de  ses  ca- 


marades qui  jouait  les  rôles  de  valets  avec  un  certain 
talent,  mais  froid,  ce  qui  lui  valait  la  réputation  d'un  ar« 
tiste  médiocre  :  «  C'est,  répondit-il,  un  excellent  comique, 
plaisanterie  à  part.  »  Un  calembour  bien  fait  est  un  vrai 
quolibet.  M.  de  Bièvre  donne  le  Séducteur,  comédie  qui 
réussit  beaucoup,  bien  que  très-imparfaite;  Laharpe  en 
fait  une  vive  cntique  dans  le  Mercure,  et,  peu  de  jours 
après,  donne  sa  tragédie  les  Brames,  qui  n'obtient  aucun 
succès.  De  Bièvre  fait  alors  courir  le  quolibet  suivant, 
comme  une  parole  de  Laharpe  :  a  Quand  le  Séducteur 
réussit,  les  Brames  tombent  (les  bras  me  tombent).  »  Un 
homme  de  qualité,  qui  faisait  profession  de  pratiquer  la 
charité  chrétienne,  avait  mis  dans  ses  armes  une  devise 
empruntée  de  S*  Augustin,  et  qui  rappelait  en  lui  la  pra- 
tique habituelle  de  cette  vertu.  Un  Jour  qu'il  oubliait  un 
peu  ses  sentiments  d'indulgence  pour  tous,  en  parlant  de 
quelqu'un  dont  il  croyait  avoir  à  se  plaindre  :  «  Monsieur  le 
comte,  lui  dit  un  de  ses  auditeurs,  cela  ne  s'accorde  guère 
avec  votre  devise  si  touchante  :  in  omnibus  caritcu  (  la 
charité  sur  tous  ).  —  C'est  possible,  repart  le  noble  in- 
terlocuteur, mais  je  ne  mets  pas  tout  le  monde  dans  mon 
omnibus,  »  ->  Autrefois  on  appelait  Quolibets  des  ques- 
tions équivoques,  émigmatiques,  quelquefois  burlesques  et 
ridicules,  qu'on  adressait  sur  des  matières  métaphysiques 
aux  étudiants  en  philosophie  ou  en  théologie,  pour  exer- 
cer leur  sagacité.  —  En  Musique,  le  nom  de  Quolibets  fut 
autrefois  donné  à  des  improvisations  à  4,  5  et  6  voix,  sur 
des  thèmes  populaires.  C.  D— t. 

QUOTE-PART.  V.  Cotb. 

QUOTITÉ  DISPONIBLE,  quote-part  de  biens  dont  un 
donateur  ou  un  testateur  a  la  libre  disposition  en  faveur 
de  qui  lui  plaît,  par  opposition  à  la  portion  de  biens  que 
le  législateur  frappe  d'indisponibilité  dans  l'intérêt  des 
successibles,  et  qui  prend  le  nom  de  Réserve  légale.  Leur 
'  fixation  a  singulièrement  varié  suivant  les  principes  qui 
prédominaient  dans  les  difiTérents  systèmes  législatifs  que 
nous  offre  l'histoire.  Elle  se  rattache  intimement  à  l'or- 
ganisation de  la  famille  et  à  la  liberté  politique  des  na- 
tions. On  peut  admettre  cependant  que,  dans  certaines 
limites,  cette  réserve  apportée  à  la  faculté  de  disposer  dé- 
coule d'un  principe  de  Droit  naturel  qui  place  au  nombre 
des  principales  obligations  de  l'homme  celle  de  pourvoir 
aux  besoins  de  ses  descendants,  ou  de  ceux  dont  il  a  tenu 
l'existence. 

Dans  notre  ancien  Droit,  les  Coutumes  admettaient 
toutes,  en  faveur  âes  enfants,  la  réserve  sous  le  nom  de 
légitime.  Mais  son  étendue  était  très-variable,  ici  de  la 
moitié,  là  du  tiers,  ailleurs  plus  ou  moins  considérable^ 
parrois  même  indéterminée,  et  fixée  par  la  seule  Juris* 
prudence.  Un  droit  analogue  était  reconnu  aux  frères  et 
sœurs,  et  même  aux  collatéraux  les  plus  éloignés,  mais 
seulement  en  ce  qui  concernait  les  propres,  dont  cette  lé« 
gislation  assurait  la  conservation  aux  familles.  Quant 
aux  pays  de  Droit  écrit,  ils  avaient  consacré  les  principes 
du  Droit  romain,  et  accordaient  une  légitime  aux  descen- 
dants, à  leur  défaut  aux  ascendants,  et  même  aux  frères 
et  sœurs,  quand  il  n'y  avait  ni  ascendants  ni  descen- 
dants. Sa  quotité  variait  du  tiers  à  la  moitié,  et  s'augmen- 
tait avec  le  nombre  des  ayants  droit. 

La  législation  intermédiaire  s'absorba  dans  le  principe 
d'égalité  absolue  que  des  esprits  extrêmes  proclamaient 
alors  comme  un  des  droits  essentiels  de  l'homme.  La  loi 
du  8  avril  1794  abolit  toutes  inégalités  résultant,  dans  les 
successions  ab  intesttU,  «  des  qualités  d'aîné  ou  de  puîné, 
de  la  distinction  des  sexes,  ou  des  exclusions  coutu- 
mières.  »  La  loi  du  7  mars  1793  abolit  la  faculté  de  dis- 
poser. Celle  du  5  brumaire  an  n,  la  complétant,  régle- 
menta les  dispositions  entre  époux,  et,  proclamant 
l'égalité  entre  enfants  ou  entre  collatéraux,  permit  la 
disposition  du  dixième  de  son  bien  si  l'on  avait  des  héri- 
tiers directs,  du  sixième  si  l'on  avait  des  héritien  colla- 
téraux, mais  &  condition  que  ces  dispositions  ne  profi- 
tassent à  aucun  des  successibles.  Il  existait  encore  de 
grandes  lacunes;  la  Convention  essaya  de  les  combler  par 
la  loi  du  17  nivôse  an  ii,  qui  maintint  en  grande  partie 
la  loi  précédente,  mais  statua  sur  des  difficultés  transi- 
toires. Elle  permettait  entre  époux  et  au  cas  d'enfants  la 
donation  usufructuaire  de  la  moitié  des  biens.  Le  Con*^ 
sttlat  présagea  le  retour  à  des  règles  plus  équitables.  La 
loi  du  4  germinal  an  vui  permit  toutes  libéralités,  pourvu 
qu'au  décès  du  disposant  elles  n'excédassent  pas  le 
quart  des  biens  s'il  laissait  moins  de  quatre  enfants,  le 
cinquième  s'il  en  laissait  quatre,  le  sixième  s'il  en  lais* 
sait  six,  et  ainsi  progressivement.  La  quotité  disponible 
était  de  moitié  s'il  n'avait  que  des  ascendants,  des  frères 
oii  sœurs,  ou  descendants  d'eux,  des  trois  quarts  s'il 


QUO 


1528 


QUO 


ii*avaH  qae  des  oocles  ou  grands-oncles,  des  consins  ger- 
mains ou  enfants  d'eux.  Â  défaut  de  ces  ordres  de  pa- 
rents, elle  était  de  la  totalité.  Les  libéralités  pouvaient 
s'appliquer  aux  successibles,  sans  être  rapportables.  Cette 
loi  du  4  germinal  fut  la  dernière  de  celles  désignées  sous 
le  nom  de  Lois  intermédiaires. 

Vint  ensuite  le  système  législatif  édicté  par  le  Cod» 
Napoléon,  Il  promulgua  la  liberté  absolue  de  disposer,  au 
cas  d'absence  d'héritiers  réservataires;  de  sorte  qu*ici  la 
quotité  disponible  e&t\ecoTo\\aiTe  de  la  réserve.  Ce  droit 
de  réserve  est  reconnu  au  profit  des  descendants  d'abord, 
6t  ensuite  au  profit  des  ascendants.  Les  droits  des  frères 
et  sœurs  ont  été  écartés.  La  réserve  des  descendants  est 
de  la  moitié  des  biens,  s'il  n'y  a  qu'un  enfant;  des  deux 
tiers,  s'il  y  en  a  deux;  des  trois  quarts,  s'il  y  en  a  trois 
ou  plus.  Toute  donation  atteignant  cette  quotité  doit  être 
réduite  comme  excessive.  La  réserve  des  ascendants  est  de 
la  moitié,  s'il  existe  des  ascendants  dans  chaque  ligne 
paternelle  et  maternelle;  du  quart,  s'il  n'en  existe  que 
dans  une  seule.  Mais  ce  droit  ne  leur  appartient  que  lors- 

Su'ils  sont  héritiers.  Cette  fixation  nous  donne  le  taux 
e  la  quotité  disponible,  qui  frappe  tout  ce  que  la  réserve 
ne  comprend  pas.  Cependant  la  quotité  disponible  entre 
époux  a  ses  règles  spéciales.  Lorsque  les  époux  n'ont  pas 
d'enfants  ni  de  descendants,  la  quotité  disponible  ordi- 
naire peut  être  augmentée  de  l'usufruit  de  la  totalité  de 
la  portion  dont  la  Toi  prohibe  la  disposition  au  préjudice 


des  héritiers.  S'ils  laissent  des  enfants,  ils  peuvent  di^o- 
ser  d'un  quart  en  propriété  et  d'un  quart  en  usufruit,  on 
de  la  moitié  de  leurs  biens  en  usufruit  seulement.  Si  l'un 
des  époux  avait  des  enfants  d'un  premier  lit,  il  ne  poui^ 
rait  donner  à  son  nouveau  conjomt  qu'une  part  d'enfant 
légitime  le  moins  prenant. 

La  disposition  d'un  usufruit  ou  d'une  rente  viagère 
dont  la  valeur  excède  la  quotité  disponible  laisse  au  ré- 
servataire l'option  ou  d'exécuter  la  disposition,  ou  de  faire 
l'abandon  de  la  propriété  de  la  quotité  disponible.  La 
valeur  en  pleine  propriété  des  biens  aliénés  à  charge  de 
rente  viagère,  à  fonds  perdu,  ou  avec  réserve  d'usufruit, 
à  l'un  des  successibles  en  ligne  directe,  s'impute  sur  la 
quotité  disponible,  et  doit,  pour  l'excédant,  être  rapportée 
à  la  masse  héréditaire.  Le  don  de  la  quotité  disponible 
peut  être  fait  en  tout  ou  en  partie  par  acte  entre  vifs  ou 
par  testament,  sans  être  sujet  au  rapport,  pourvu  qu'il 
soit  fait  par  préciput  et  hors  part  V.  Levasseur,  Portion 
disponible^  1805,  in-8<>;  Benech,  De  la  quotité  disponible 
entre  époux,  2*  édit.,  1842,  în-8<>;  Kuhlmann,  De  la  ré' 
serve  légale  en  matière  de  succession,  1846,  in-8<»;  Saint- 
Espès-Lescot,  De  la  portion  disponible  et  de  la  réduc" 
tion,  1849,  in-8^;  Jouaust,  De  la  qtwtité  disponible,  1851, 
in-8o;  Vernet,  De  la  quotité  disponible,  1853,  in-S»; 
Beautemps-Beaupré,  De  la  portion  des  biens  disponibles 
et  de  la  réduction,  1856,  2  vol.  in-8«.  R.  d'E. 


R 


îi 


RÂC 


R,  18*  lettre  et  14*  consonne  de  notre  alphabet.  C'est 
une  consonne  linguale  et  liquide,  qui  s'unit  facilement 
aux  labiales,  aux  palatales  et  aux  gutturales,  ainsi  qu'on 
le  voit  dans  bras^  priSt  front,  vrai,  crin,  trop,  dru^ 
grand.  Les  liaisons  de  l'r  final  avec  le  mot  suivant  qui 
commence  par  une  voyelle  sont  toujours  très-douces  en 
français  ;  c'est  une  lettre  muette  à  la  fin  des  infinitifs  de 
la  l'*  conjugaison ,  et  dans  beaucoup  de  finales  en  er  et 
en  ter.  Elle  correspond  au  rho  des  Grecs  (P,  p),  qui  était, 
comme  les  voyelles,  susceptible  d'aspiration,  et  se  mar- 
quait, en  conséquence ,  tantôt  de  l'esprit  doux,  tantôt  de 
resprit  rude.  On  ne  sait  si  l'aspiration  précédait  ou  sui- 
vait l'articulation  R  :  en  français,  les  mots  dérivés  des 
mota  grecs  où  le  rho  initial  portait  l'esprit  rude  com- 
mencent par  le  groupe  rh  {rhétorique,  rhythme).  Chez 
les  Romains,  Perse  a  appelé  l'R  une  lettre  canine,  à  cause 
de  l'analogie  qui  existe  entre  le  son  de  cette  lettre  et  le 
grondement  du  chien.  Les  Chinois  et  quelques  tribus 
indigènes  de  l'Amérique  ne  connaissent  pas  l'articula- 
tion que  nous  exprimons  par  la  lettre  R  ;  souvent  môme 
ils  ne  peuvent  la  prononcer  dans  les  mots  étrangers,  et 
lui  substituent  L  ou  N,  comme  font  certains  enfants  qui 
ont  quelque  difficulté  à  parler,  et  qui  disent  blaSt  glande 
plis,  au  lieu  de  bras,  grand,  pris.  Les  Espagnols  et  les 
Portugais  changent  aussi  quelquefois  en  L  l'R  de  plu- 
sieurs mots  empruntés  à  des  langues  étrangères.  Il  y  eut 
chez  les  Romains  permutation  de  l'R  et  de  TS  :  on  dit 
primitivement  asena,  lasibus,  Pusius,  Valesius,  Papi- 
sius,  au  lieu  de  arena,  laribus,  Furius,  Valerius,  Pa- 
piriui.  De  môme,  le  mot  allemand  haase  (lièvre)  est 
devenu  hare  en  anglais,  et  l'imparfait  singulier  du  verbe 
substantif  est  war  en  allemand  et  was  en  anglais.  Les 
Romains  permutèrent  aussi  R  et  L  :  on  disait  lémures  et 
remures,  latialis  et  latiaris,  Palilia  et  Parilia,  L'R 
existe  dans  les  langues  mongole  et  mandchoue,  mais 
jamais  comme  initiale.  —  Signe  d'abréviation  dans  les 
inscriptions  latines,  R  est  pour  rex,  Roma^  Bavenna, 
Regulus,  Roscius,  Rufus;  RP.  pour  respublica  ;  Rc  pour 
rescriptumc  B.C.  pour  romana  civitus;  R.  S.  pour  res- 
ponsum.  Dans  le  Commerce,  R  s'écrit  pour  reçu,  h?  pour 
recto.  En  Liturgie,  ^  est  l'abréviation  de  répons.  —  Lettre 
numérale,  le  rho  grec,  surmonté  d'un  accent  (  p'  ),  valait 
100,  et,  avec  l'accent  au-dessous  (,p),  100,000.  Chez  les 
Romains,  R  valait  80,  et,  surmonté  d'un  trait  horizontal 
fK},  80,000.  —  R  fut  autrefois  la  marque  monétaire  de 
VilMneav6-lds-ATignon  et  d'Orléans.  R. 


RABANA,  espèce  de  timbale  dont  se  servent  les  femmes 
indiennes  pour  accompagner  leur  chant. 

RABANS,  en  termes  de  Marine,  bouts  de  cordage  qu'on 
emploie  à  faire  divers  amarrages.  Les  rabans  d^enver- 
gure  ou  de  têtière  servent  à  attacher  le  c^té  d'une  voile  à 
la  vergue  <)ui  doit  la  porter;  les  rabans  d^empointure 
lient  les  coms  supérieurs  d'une  voile  à  sa  vergue;  les 
rabans  de  sabord  servent  à  maintenir  fermes  les  man- 
telets  de  sabord;  les  rabans  de  volée  tiennent  fixée  contre 
la  muraille  intérieure  du  bâtiment  la  volée  des  canons 
qui  sont  à  la  serre  ;  avec  les  rabans  de  ferlage^  on  serre 
sur  une  vergue  tous  les  plis  d'une  voile  retroussée. 

RABAT,  partie  de  l'iabillement.  Pour  les  eocl^iasti- 
ques,  c'est  un  morceau  de  toile  ou  de  crêpe  noir,  uni, 
divisé  en  deux  parties  oblongues  et  bordées  de  blanc,  et 
qui  tombe  du  cou  sur  la  poitrine.  Le  rabat  des  Frères  de 
la  doctrine  chrétienne  et  de  quelques  autres  congréga- 
tions est  blanc.  Il  représente  le  col  de  la  chemise,  qu'on 
rabattait  autrefois  sur  le  collet  de  la  soutane.  Le  rabat 
que  le  clergé  porte  aujourd'hui  ne  remonte  pas  plus  haut 
que  Louis  XV;  auparavant,  il  était  tout  blanc  et  beau- 
coup plus  large.  Les  gens  de  robe  et  les  professeurs  de 
l'Université  portent  de  longs  rabats  blancs  à  plis. 

RABBAN,  titre  d'honneur  chez  les  Juifs.  Il  ne  fut  porté 
que  par  7  docteurs  de  la  loi.  Tout  docteur  de  la  loi  s'ap- 
pelait rabbi  (maître),  titre  inférieur  à  celui  de  rabban. 

BABBIN.  y.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d^ Histoire. 

RABBINIQUE  (Langue,  —Littérature).  V.  Hébraïque. 

RACAGE ,  en  termes  de  llarine,  sorte  de  collier  qui  lie 
une  vergue  à  un  mât 

RACCORDEMENT,  en  termes  de  Beaux-Arts,  réunion 
et  ajustement  convenable  de  deux  bâtiments  non  sem- 
blables, de  deux  systèmes  différents  de  décoration  en 
sculpture  ou  en  peinture.  Les  constructions  faites  à  Paris 
pour  réunir  le  Louvre  et  les  Tuileries  sont  un  exemple  de 
raccordement. 

RACCOURCI,  en  termes  de  Peinture,  aspect  qu'offre 
une  figure  ou  une  partie  de  fiçure  qui  n'est  pas  vue  dans 
tout  son  développement.  Ainsi,  dans  un  tableau,  un  bras 
qui  vient  plus  ou  moins  directement  vers  le  spectateur 
est  vu  en  raccourci.  Les  raccourcis  sont  la  principale  con- 
dition de  la  composition  dans  les  peintures  de  plafondi 
et  de  coupoles. 

BACE  ET  FAMILLE.  V,  notre  Dictionnaire  de  Biogrm^ 
phie  et  d^Histoire. 


RAD 


1529 


RAI 


RACES  HUMAINES.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
iù  Biographie  et  d* Histoire^  et,  dans  le  présent  ouvrage. 
Tan.  Kthnographie. 

RACHAT  ou  RÉMf.RÉ  (  Faculté  de),  pacte  par  lequel 
un  nendeur  se  réserve  le  droit  de  reprendre  la  chose 
veisdue.  Réméré  vient  du  latin  rursiis  emere^  acheter  de 
nouveau,  racheter.  Dans  le  contrat  pignoratif  ou  contrat 
d'engagement ,  celui  qui  engage  conserve  la  propriété,  et 
lie  transfère  que  le  droit  de  la  posséder  et  d'en  perce- 
voir les  fruits  ;  dans  la  vente  avec  faculté  de  rachat,  celui 
qui  vend  transfère  la  propriété,  et  conserve  seulement  le 
droit  de  la  racheter.  La  faculté  de  racliat  ne  peut  être 
stipulée  pour  un  terme  excédant  5  années;  elle  passe  aux 
héritiers  du  vendeur,  et  peut  aussi  être  cédée  à  un  étran- 
ger. Faute  par  le  vendeur  d*avoir  exercé  son  action  dans 
le  délai  prescrit,  l'acquéreur  devient  irrévocablement 
propriétaire.  Si  un  acquéreur  revend  sans  révéler  le  ra- 
chat dont  Tobjet  est  susceptible,  le  nouvel  acquéreur, 
malgré  sa  ^nne  foi,  peut  être  dépossédé.  Le  vendeur 
qui  use  du  pacte  de  rachat  doit  rembourser  le  prix  prin- 
cipal, les  frais  et  loyaux  coûts  de  la  vente,  les  réparations 
nécessaires  et  celles  qui  ont  augmenté  la  valeur  du  fonds; 
(nais  il  n'est  pas  tenu  des  charges  ou  hypothèques  dont 
Tacquéreur  l'aurait  grevé.  S'il  y  a  des  récoltes  sur  pied 
au  moment  du  rachat,  elles  sont  partagées  eu  égard  au 
temps  qui  s'est  écoulé  de  Tannée  de  la  récolte.  Le  ven- 
deur qui  rentre  dsms  son  fonds  est  obligé  d'exécuter  les 
baux  faits  sans  fraude  par  l'acquéreur. 

RACHIMBOURGS.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d^Histoire. 

RACINE ,  partie  élémentaire  des  mots,  celle  qui  ex- 

f^rime  Tidée  la  plus  générale  et  la  plus  simple.  Prob  est 
a  racine  du  mot  probable  ;  corp ,  celle  du  mot  incoT" 
porer,  etc.  La  dérivation  ou  la  composition  font  souvent 
subir  aux  racines  une  altération  plus  ou  moins  sensible, 
soit  dans  la  prononciation,  soit  dans  Torthographe;  ainsi, 
les  mots  peuple^  peupler^  populeux,  populaire^  public, 
ont  pour  racine  commune  pop.  La  racine  véritable  d'un 
grand  nombre  de  mots  français  est  souvent  difficile  à  dé- 
couvrir, et  on  ne  la  trouve  d'ordinaire  qu'en  remontant 
à  la  forme  latine  de  ces  mots,  parce  que  notre  langue  est 
presque  tout  entière  dérivée  du  latin.  Par  exemple,  la 
racine  du  mot  également  n'est  pas  ég,  mais  éq  ou  œq, 
ce  mot  étant  dérivé  du  latin  œqualis ,  dérivé  lui-même 
du  mot  cequtu  ;  la  racine  du  mot  témoin  est  tem  en  ap- 
parence, mais  en  réalité  teet,  ce  mot  étant  une  altération 
du  latin  testimonium;  celle  des  mots  oeuvre,  ouvrer,  ou- 
vrier, est  dans  les  mots  latins  opera^  operari,  operaritAS, 
et,  par  conséquent,  n'est  ni  œuv  ni  ouv,  mais  op.  Au 
reste,  il  est  rarement  utile  pour  la  connaissance  pratique 
d'une  langue  de  descendre  Jusqu'à  une  analyse  aussi 
subtile,  aussi  abstraite  :  on  donne  généralement  le  nom 
de  Uacine  au  mot  le  plus  simple  d'une  famille  de  mots, 
et  Ton  ne  s'occupe  ^uère  d'en  chercher  la  racine  élé^ 
mentaire;  ainsi,  pleure  est  admis  comme  la  racine  de 
plaisir,  plaisance,  plaisanterie;  témoin,  comme  la  racine 
de  téfnotgner,  témoignage  ;  présent,  comme  celle  de  pré- 
senter, présentement^  représentation ,  etc.  Presque  tous 
nos  mots  scientifiques  ou  techniques  ont  leur  racine 
dans  la  langue  grecque  ancienne,  comme  curithmétique , 
géométrie,  physique,  astronomie,  musique,  harmonie, 
grammaire,  rhétorique,  logique,  psychologie,  anatomie, 
physiologie,  géographie,  apogée,  baromètre,  épithète, 
stratégie,   tactique,  liturgie,  etc.;  quelques-uns  dans 
l'arabe  ancien,  comme  amiral,  almanach^  alcool,  étioÂr, 
alcali,  etc.  Bon  nombre  de  termes  indus^els  sont  em- 
pruntés, soit  à  la  langue  grecque,  soit  au  latin,  à  l'an- 
glais ou  à  l'allemand,  et  c'est  là  qu'il  faut  en  aller  cher- 
cher la  racine  si  l'on  veut  se  rendre  compte  de  leur  vrai 
sens  et  de  leur  acception  en  français  :  tels  sont,  entre 
lutres,  wagon,  rail,  express,  etc.  (K.  Radical).  Le  7arc/m 
des  rticmes  grecques,  par  Lancelot  et  plusieurs  autres 
savants  de  Port-Royal,  contient  une  explication  rimée. 
Fourmont  en  1706  et  Duplan  en  1789  ont  donné  les  Ra- 
cines de  la  langue  latine.  P. 

RACOLEURS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

fÛiDK  (du  latin  ratis,  vaisseau,  ou  de  l'anglais  roacE, 
route,  rade  ),  partie  de  mer  qui  s'avance  dans  une  an- 
fhictuosité  de  côte,  et  où  les  navires  sont  abrités  des 
vents  et  des  courants.  Une  rade  est  dite  foraine,  quand 
on  y  est  exposé  aux  assauts  de  la  vague.  Parmi  les  plus 
belles  rades  de  l'fiurope,  on  cite  celles  de  Spithead ,  de 
Brest,  et  de  la  Spezzia. 

RAD£AU«  assemblage  de  pièces  de  bois,  liées  ensemble 
te  formant  une  espècs  de  plancher  où  l'on  peut  placer 


des  hommes,  des  chevaux,  des  objets  de  toute  naturs. 
On  en  fait  usage,  soit  pour  sauver  un  équipage  après  un 
naufrage,  soit  pour  opérer  des  transports  par  eau.  Dans 
les  ports,  on  se  sert  de  radeaux  régulièrement  fabriqués, 
encadrés  d'un  bordage,  pour  réparer  les  parties  infé- 
rieures de  la  coque  des  navires;  quelques-uns  ont  uoa 
petite  cale,  où  l'on  met  des  cordages,  des  palans,  etc. 

RADICAL,  partie  d'un  mot  qui  reste  après  la  suppres- 
sion, par  analyse,  de  la  terminaison,  et  qui  de  sa  nature 
est  invariable;  ainsi,  aim  est  le  radical  du  verbe  aimer 
dans  la  plus  grande  partie  de  sa  conjugaison.  Au  futur 
et  au  conditionnel  présont,  c'est  l'iufinitif  qui  sert  de 
radical  :  J'a/mer-ai  J'a  mer-ais.  Consider  sert  de  radical 
au  verbe  considérer,  à  l'adjectif  verbal  considérable,  au 
substantif  abstrait  considération,  etc.  Le  radical  n'est 
pas  la  même  chose  que  la  racine  :  celle-ci,  envisagée 
dans  son  essence,  est  monosyllabique,  tandis  que  le  ra- 
dical peut  se  composer  de  plusieurs  syllabes.  Lorsque  le 
radical  est  monosyllabique,  il  n'en  résulte  pas  toujours 
qu'il  soit  en  même  temps  la  vraie  racine.  Ainsi ,  aimer, 
aimable,  ont  pour  radical  aim;  mais  la  racice  de  ces 
deux  mots  est  am,  qui  se  retrouve  dans  ami,  amour, 
amitié^  mots  où  s'est  conservée  la  racine  latine  {am-o, 
am-eibilis,  am-icus,  am-or,  am-icitia).  Le  radical  peut 
changer  de  forme  dans  une  seule  et  même  conjugaison  ; 
ainsi,  celui  de  mourir,  en  français,  prend  tantôt  la  forme 
mor,  comme  dans  mort,  morte,  tantôt  la  forme  mou, 
comme  dans  mourir,  mourant^  mourez,  et  tantôt  la 
forme  fiMU,  comme  dans  je  meurs,  que  je  meure,  ils 
meurent.  Gatte  confusion  apparente  a  sa  source  dans 
l'analogie  ou  l'affinité  qui  existe  entre  les  trois  voyelles 
0,  ou,  eu.  Cest  ainsi  qu'on  dit  à  la  fois  probable ,  pro- 
bant, prouver,  preuve;  bceuf^  bouvier,  bovine  (race); 
voeu,  vouer,  votif;  oeuf,  oval,  ovaire;  oeuvre,  ouvrer,  etc. 
V.  Racine  et  Affinité.  P. 

RADICALISME,  système  politique  qui  pousse  toutes 
choses  Jusqu'aux  dernières  conséquences  d'un  principe,  et 
pour  ainsi  dire  Jusqu'à  sa  racine  (en  latin  radix).  On 
nomme  Radicaux  ceux  qui  professent  un  pareil  système. 
En  France,  ce  nom  a  été  souvent  donné  à  toutes  les 
espèces  ^e  Libéraux^  parce  qu'ils  veulent  opérer  une 
transformation  plus  ou  moins  complète  de  l'ordre  de 
choses  existant. 

RADIER,  construction  en  charpente  ou  en  maçonnerie^ 
immergée  au  fond  de  l'eau,  et  sur  laquelle  sont  fondas 
les  portes  ou  les  écluses  d'un  bassin,  les  piles  d'un  pont, 
les  murs  d'un  quai,  etc. 

BADOUB,  en  termes  de  Marine,  réparation  extérieure 
de  la  coque  d'un  navire.  Pour  radouber  un  bâtiment,  il 
faut  d'abord  éventer,  c.-à-d.  mettre  hors  de  l'eau  la 
partie  ordinairement  immergée;  puis  les  charpentiers  et 
les  calfata  font  les  réparations  nécessaires. 

RAFIAU ,  petit  bateau  à  voiles  et  à  rames  en  usage 
dans  la  Méditerranée. 

BAFLE,  espèce  de  filet  ou  de  tramail  contre-maillé« 
dont  on  se  sert  pour  prendre  les  petits  oiseaux  pendant 
la  nuit  ;  —  filet  ae  pêche  garni  d'ailes,  et  ayant  plusieurs 
ouvertures  à  chaque  extrémité. 

BAFLE,  coup  du  Jeu  de  dés,  dans  lequel  les  dés  amè- 
nent chacun  le  même  point. 

BAFLOUEB,  en  termes  de  Biarine,  remettre  à  flot  un 
bâtiment  échoué. 

BAGOUT,  mot  usité  en  Peinture  au  xvra*  siècle,  pour 
désigner  un  certain  effet  piquant,  provenant  de  la  viva- 
cité et  de  la  chideur  du  coloris,  d'une  certaine  facilité  de 
la  touche,  et  d'autres  agréments  propres  à  de  petits  su- 
Jets.  On  disait  un  pinceau,  un  crayon  ragoûtant,  pour 
dire  une  manière  de  peindre,  de  dessiner  avec  ragoût. 

BAGRÉEB,  en  termes  de  Marine,  polir  la  surface  ex- 
térieure, les  bordages  et  les  ponts  d'un  bâtiment  dont  la 
construction  est  achevée. — En  Architecture,  ragréer,  c'esl 
mettre  la  dernière  main  à  un  ouvrage  de  maçonnerie , 
réduire  les  superfétations,  remplir  les  vides,  en  un  moi 
faire  disparaître  les  petits  défauts  du  premier  travail. 

BAGUE ,  en  termes  de  Marine ,  petit  bloc  en  bois 
presque  sphérique,  percé  diamétralement  pour  laisser 
passer  un  cordage,  et  mii  facilite  les  mouvements  de  bas 
en  haut  et  de  haut  en  nas  d'un  racage  (V.  ce  mot).  Une 
rague  est  dite  goujée,  quand  elle  a  deux  goujures  ou  en« 
tailles  à  angle  droit  sur  sa  surface,  l'une  servant  au  pas- 
sage d'un  cordage  dormant,  l'autre  recevant  la  ligna  Qui 
fixe  la  rague  sur  le  dormant. 

BAGUVANÇA^  V.  Bamatana. 

BAIAS.  V.  Bâtas  ,  dans  notre  Dictimnatre  de  Bioara^ 
phie  et  d^Bistoire. 

BAIL,  mot  anglais  qoi  signifie  ornière,  ramure,  et  pai 


RAI 


1530 


RAM 


lequel  on  a  désignô  toute  bande  de  fer,  de  bois  ou  do 

{lierre,  destinée  à  recevoir  les  roues  des  voitures.  On 
'applique  encore  aux  bandes  de  fer  sur  lesquelles  rou- 
lent les  roues  des  locomotives,  bien  qu'elles  ne  soient 
!>In8  creusées  en  ornière,  et  que  l'on  fasse  au  contraire 
<es  roues  creuses.  Les  Anglais  nomment  les  chemins  de 
fer  rail^ways,  c.-à-d.  chemins  à  ornières. 

RÂIMONDINS,  nom  donné,  on  ne  sait  pourquoi,  aux 
pièces  de  monnaie  de  billon  que  frappaient  au  moyen  ftge 
les  évêques  d'Albi,  et  qui  valaient  environ  0  fr.  8  c.  de 
notre  monnaie.  —  C'était  aussi  le  nom  de  sous  frappés 
à  Arles  par  l'archevêque  Raimond  de  Montrond  au 
xn*  siècle.      r 

RAINOUART,  14*  branche  de  la  chanson  de  GuUlaume- 
atHiourP-nez,  Guillaume  trouve,  dans  les  cuisines  de 
l'empereur  Louis,  un  marmiton  d'une  taille  gigantesque. 
Il  découvre  qne  c'est  le  fils  de  Desramé ,  émir  de  Cor- 
doue,  et ,  par  conséquent,  le  frère  de  la  belle  Orable.  Il 
l'emmène  avec  lui ,  et  le  cluurgo  de  venger  la  mort  de 
Vivien.  Rainouart  combat  avec  un  tinel  T massue),  et  tra- 
vaille si  bien,  qu'il  finit  par  être  baptisé,  adoubé  cheva- 
lier, et  marié  à  la  belle  Aélis,  fille  du  roi  Louis,  qui  met 
au  monde  le  géant  Maillefers. — La  chanson  de  Rainouart 
est  conservée  à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris  dans 
sept  manuscrits,  à  la  suite  de  la  Bataille  d^Aleschans» 
K.  Histoire  littéraire  de  la  France^  tome  XXII.      H.  D. 

RAmooAaT  (le  Moniage),  16*  branche  de  la  chanson  de 
Guillaume-au-court-nez,  C'est  une  imitation  comique  du 
Moniage  de  Guillaume.  Rainouart ,  devenu  moine,  est  la 
terreur  du  couvent.  L'abbé  cherche  à  s'en  défaire  de  mille 
manières.  A  bout  d'expédients,  il  se  donne  à  Mahomet 
pour  livrer  Rainouart  aux  Sarrasins.  Mais  Rainouart  bat 
les  mécréants,  et  fait  la  conquête  d'Aljeste  (Alger).  Il  re- 
vient mourir  à  Brioude.  —  Il  existe  de  cette  chanson, 
dont  l'auteur  est  Guillaume  de  Bapaume,  quatre  ma- 
nuscrits à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris.  K .  Histoire 
littéraire  de  la  France,  tome  XSU,  H.  D. 

RAIS ,  en  termes  de  Blason,  b&tons  pommetés  et  fleur- 
delisés, disposés  comme  les  rayons  d'une  roue  ;  —  pointes 
qui  sortent  d'une  étoile. 

RAISON,  forme  supérieure  de  l'Intelligence.  C'est,  k 
proprement  parler,  la  faculté  de  concevoir,  à  propos  de  ce 
qui  est ,  ce  qui  doit  être  ;  à  propos  du  contingent ,  le  né- 
cessaire; du  fini,  l'infini;  de  l'imparfait,  le  parfait.  On  la 
nomme  aussi  Entendement  pur^  Intellectum  pure.  Les 
notions  qui  sont  l'objet  de  cette  faculté,  telles  que  celles 
du  Umps,  de  l'e^poc^,  de  Vétre,  de  la  substance  et  de  la 
cause  absolues,  du  vrai,  du  beau,  du  bien,  etc.,  sont  la 
base  réelle  de  toutes  nos  connaissances,  et  se  retrouvent 
dans  tous  nos  jugements  :  leur  caractère  d'universalité 
indique  celui  de  la  Raison  elle-même.  Elles  sont  imper- 
sonnelles, c-ii-d.  indépendantes  des  intelligences,  aux- 
quelles elles  s'imposent;  c'est  comme  la  lumière  qui 
éclaire  tout  homme  venant  en  ce  monde.  Il  y  a,  entre  la 
Raison  d'une  part,  la  Perception  externe  et  la  Perception 
de  conscience  de  l'autre,  la  même  différence  qu*entre  le 
contingent  et  le  nécessaire,  le  relatif  et  l'absolu.  Les  doc- 
trines matérialistes  ont  nié  cette  différence,  en  cherchant 
b  expliquer  par  l'Expérience  l'origine  des  idées  données 
par  la  Raison,  et,  par  suite,  en  niant  la  Raison  elle- 
même  comme  faculté  spéciale  :  mais  elles  ont  été  refu- 
sées de  tout  temps  par  les  plus  grands  philosophes,  de- 
puis Platon  ,  Aristote,  Descartes,  Malebranche,  Leibniz, 
fiossuet,  Fénelon,  Kant,  etc.,  jusqu'à  l'école  française  de 
notre  temps.  —  Le  mot  Raison  reçoit  encore,  dans 
l  nsage,  d'autres  significations.  Ainsi ,  il  s'entend  de  la  fa- 
culté qu'ont  tous  les  hommes  de  connaître,  de  juger,  de 
raisonner,  de  discerner  le  vrai  du  faux,  et  alors  il  est 
:ynonyme  dHntelltgence  et  de  sens  commun,  La  Raison, 
quand  elle  s'exerce  dans  le  domaine  de  la  vérité  pure  ou 
de  la  science,  est  dite  spéculative.  Dans  son  rapport  avec 
la  volonté,  et  dans  le  cercle  des  vérités  morales,  elle  s'ap- 
^  pelle  Raison  pratique.  Dans  les  jugements  qu'elle  porte 
sur  la  beauté  dans  les  ouvrages  de  la  nature  et  de  l'art , 
c'est  le  Goût  {V.  ce  mot).  V.  les  Méditations  et  les  Entre- 
iiens  métaphysiques  de  Malebranche  ;  le  Traité  de  Vexis- 
sence  de  Dieu  par  Fénelon;  V.  Cousin,  1*^  préface  des 
Fragments  philosophiques,  et  Eooamen  de  la  philosophie 
de  Locke,  cours  de  1828  ;  Bouillier,  Théorie  de  la  raison 
intpersonnelle.  R. 

RAISON  D'éTAT,  motlf  tiré  des  besoins  de  la  politique 
pour  justifier  quelque  grande  mesure. 

RAISON  SOCIALE  OU  NOM  SOCIAL,  OU  tenucs  de  Com- 
merce, s'entend  du  nom  ou  des  noms  sous  lesquels  des 
associés  indiquent  au  public  leur  association,  et  qui  figu- 
reront sur  les  lettres  missives,  billets  et  lettres  de 


change.  La  signature  du  nom  social  oblige  non-seulement 
celui  qui  ilgoe,  mais  tous  ses  associés. 

RAison  SUFFISANTS  (Principe  de  la).  V.  Caosb  finalb. 

RAISONNEMENT  (du  latin  ratiocinatio),  opération  de 
l'esprit  qui  consiste  à  faire  passer  sa  croyance  d'un  juge- 
ment à  un  autre  jugement.  On  raisonne  par  Analogie, 
par  Indiuition,  et  par  Déduction.  Raisonner  par  analogie, 
c'est  s'appuyer  sur  plusieurs  ressemblances  partielles 
entre  plusieurs  objets,  pour  affirmer  une  ressemblance 
totale;  par  induction,  c'est  observer  des  faits  particu- 
liers en  plus  ou  moins  grand  nombre,  pour  s'élever  à  la 
connaissance  des  lois  qui  les  régissent,  c'est  allefdu  pax^ 
ticulier  au  général  {V.  Analogie,  Induction).  L'opération 
contraire,  qui  consiste  à  descendre  du  général  au  parti- 
culier, constitue  le  raisonnement  déductif.  Tout  raison- 
nement  de  cette  nature  suppose  au  moins  deux  vérités 
acquises,  et,  par  conséquent ,  deux  jugements  antérieurs 
(A=3B,  et  BsssC),  de  la  comparaison  desquels  résulte 
le  troisième  (C  =s  A  ).  De  plus,  il  faut  que  les  deux  juge* 
ments  antérieurs,  au  lieu  de  quatre  termes  distincts,  n'en 
renferment  que  trois  (A,  B  et  G),  et  que  l'un  d'eux  (B) 
soit  commun  aux  deux  jugements;  sans  cette  condition, 
toute  conception  de  rapport  entre  eux  serait  impossible; 
avec  elle,  cette  conception  devient  irrésistible  et  fatale, 
et  il  se  produit  un  troisième  jugement.  Cette  conception 
résulte  d'une  application  que  fait  la  Raison  d'une  vérité 
nécessaire  :  deux  choses  (A  et  C),  éga!cs  à  une  troisième 
(B),  sont  égales  entre  elles  ;  ou  bien  :  ce  (C)  qui  est  dans 
le  contenu  (B)  est  aussi  dans  le  contenant  (A).  Cela  re- 
vient à  dire  que  la  même  chose,  substance  ou  mode,  ne 
peut  à  la  fols  être  et  n'être  pas;  le  Raisonnement  a  donc 
pour  base  le  principe  de  contradiction.  II  n'est  accompli 
que  quand  notre  raison  a  conçu  un  troisième  rapport  et 
porté  un  troisième  Jugement  implicitement  contenu  dans 
les  deux  premiers.  Il  se  compose  donc  de  trois  jugements  : 
deux  antérieurement  porté  et  comparés,  appelés  pré' 
misses;  puis  un  troisième,  déduit  de  lune  d'elles  sur 
l'indication  de  l'autre,  et  qu'on  appelle  conclusion,  ex- 
pression de  la  conséquence,  ou  rapport  entre  les  deux 
jugements  comparés.  Les  deux  premiers  jugements  ne 
renferment  que  trois  termes  distincts  (A,  B,  G),  dont 
l'un  (B)  est  commun.  II  est  encore  appelé  terme  moyen, 
parce  qu'il  sert  à  faire  saisir  un  rapport  entre  les  deux 
autres,  qui  sont  les  extrêmes,  et  qui  se  trouvent  réunis 
dans  la  conclusion  (G = A  ou  G  <  A).  Ainsi ,  trois  juge* 
ments  et  trois  termes  distincts,  dont  chacun  figure  deux 
fois,  tels  sont  les  éléments  de  tout  raisonnement  déductif 
complet.  V.  DinucnoN  et  Stllogisiib.  R. 

RAISONNEUR,  emploi  de  comédie.  Les  raisoimenni 
sont  les  personnages  qui  parlent  le  luigaee  de  la  morale 
et  du  raisonnement.  Tel  est  Philinte  dansls  Misanthrope 
de  Molière. 

RALINGUE ,  en  termes  de  Marine,  cordage  cousu  au- 
tour des  bords  d'une  voile  pour  la  fortifier.  La  ralingue 
de  têtière  ou  d'envergure  borde  la  partie  supérieure  de 
la  voile;  la  ralingue  de  fond  ou  de  bordc^e,  la  partie  in- 
férieure; les  ralingues  de  chute,  les  côtés  verticaux.  Ao- 
linguer  ou  mettre  en  ralingue,  c'est  placer  les  voiles  dans 
la  direction  du  vent,  dé  manière  qu'elles  ne  le  reçoivent 
ni  sur  l'une  ni  sur  l'autre  face. 

RALLA ,  manteau  des  anciens  Romains,  en  étoffe  claire 
ot  légère. 

RALLIEMENT  (Mot  de).  V.  Mot  d'ordrb. 

RAMADAN.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d'Histoire, 

RAMAYANA,  c.-à-<i.  en  sanscrit  Histoire  de  Râma, 
l'une  des  deux  grandes  épopées  indiennes.  RAma  était  fils 
de  Daçaratha,  roi  d'Ayôdhyà  (Oude),  sur  les  rives  de  la 
Sarayù,  l'un  des  affluents  uu  Gange  :  le  centre  des  événe- 
ments, ou  du  moins  le  point  de  départ  et  le  lieu  où  ils 
se  terminent,  est  par  conséquent  au  milieu  de  la  vallée 
principale  de  l'Inde,  dans  un  pays  où  la  culture  des 
terre,  les  arts  et  métiers,  les  parties  les  plus  élevées  de  la 
science  philosophique  et  théologique,  étaient  portés  à  un 
haut  degré  de  perfection  dès  l'époque  même  où  fut  com- 
posé le  ndmàyana.  Les  castes  y  étaient  organisées  depuis 
longtemps;  la  loi  et  les  pouvoirs  publics  veillaient  à  leur 
conservation.  On  peut  même  voir,  au  I*'  chant  de  cette 
épopée,  que  Ràma  y  accomplissait  une  sorte  de  révolution 
que  la  force  des  choses  avait  amenée,  en  confirmant  pour 
tot^jours  entre  les  mains  des  Xattryas,  c.-à-d.  des  sei- 
gneurs, l'autorité  temporelle,  dont  son  antique  prédéces- 
seur Paraçu-Ràma  avait  mis  une  grande  partie  entre  !rs 
mains  des  br&hmanes  ou  prêtres  :  ceux-ci  demeurèrent 
hiérarchiquement  les  premiers  dans  l'ordre  spirituel^ 
mais  se  montrèrent  depuis  lors  constamment  soumis  an 


RAM 


1531 


RAM 


poaTolr  d'action  de  la  royauté.  Ce  fut  là  ane  des  causes 
qui  rendirent  célèbre,  dans  la  poésie  et  dans  Thistoire  do 
rinde,  le  nom  de  notre  R&ma,  appelé  Ràma-Tchandra 
pour  le  distinguer  de  Tantique  br&hmane.  Les  événe- 
ments racontés  sons  une  forme  poétique  dans  le  Ad- 
mdyofia  contribuèrent  aussi  à  la  gloire  de  ce  person- 
nage :  il  ne  s'agit,  en  effet,  de  rien  moins  que  de  la 
conauôte  des  pays  du  Sud  par  les  Aryas,  et  de  Textension 
de  rinfluence  ftryenne  jusqu'à  Tlle  de  Ceylan.  Si  Ton  en 
Juge  par  le  poème,  que  confirment  du  reste  toutes  les 
données  antérieures  et  postérieures,  la  puissance  des 
Aryas  avait  alors  pour  limite,  au  Sud,  les  monts  Vindhya. 
Arrivés  dans  les  vallées  de  Tlndus,  ils  y  avaient  trouvé 
des  hommes  de  couleur  Jaune  ou  noire  appartenant  au 
type  chinois  et  au  rameau  dravidien,  et  ils  les  avaient 
soumis  ou  relégués  dans  les  montagnes,  où  on  les  trouve 
encore  aujourd'hui.  La  période  des  hymnes  du  Véda  nous 
montre  les  Arras  établis  dans  les  vallées  de  Tlndus,  et 
touchant  déjà  à  la  Yamunà  (Jumna),  afQuent  du  Gange; 
le  pays  de  Hastin&pura  (Delhi)  est  le  centre  des  événe- 
ments racontés  dans  le  Mahabhàrata  {V.  o»  mot)*,  le 
Bâmâyana  nous  porte  encore  plus  vers  TOrient,  de  six 
degrés  environ,  et  au  milieu  même  de  la  grande  vallée  du 
Gange.  Le  Sud  de  la  presqu'île,  occupé  par  des  hommes 
d'une  autre  race,  auxquels,  dans  le  poème,  on  donne  le 
nom  de  Singes,  à  cause  de  leur  couleur  et  de  leur  lai- 
deur, est  parcouru  pour  la  première  fois  par  Ràma,  qui 
fait  alliance  avec  eux,  parvient  jusqu'à  l'extrôme  promon- 
toire méridional,  au  lieu  appelé  aujourd'hui  Ramnad 
(Ràma^nadl,  fleuve  de  Ràma),  et,  franchissant  le  canal, 
procède  à  la  conquête  de  Ceylan.  Cette  lie  porta  le 
nom  de  Tâmrapama,  qui  a  produit  cdui  de  Taprobane, 
par  lequel  elle  est  désignée  dans  nos  auteurs  classiques. 
Si  l'on  s'en  rapporte  aux  poésies  indiennes  de  tous  ces 
anciens  temps,  les  Aryas  avaient  à  lutter  sans  cesse 
contre  une  race  d'êtres  malfaisants  nommés  Râœasas, 
parmi  lesquels  on  parait  ranger  à  la  fois  les  hommes 
ennemis  de  la  race  conquérante,  les  animaux  sauvages 
dont  on  avait  à  se  carder,  et  aussi  des  conceptions  fan- 
tastiques de  l'imagination  populaire  s  c'est  contre  ces 
puissances  hostiles  que  Ràma  et  ses  alliés  ont  à  lutter 
pendant  tout  le  cours  dn  poème. 

Issu  de  l'antique  race  d'Ixwàku,  fils  de  Manu,  Daçaratha 
régnait  dans  la  ville  d'Ayôdhyà,  et  tous  ses  sufets  étaient 
heureux  ;  les  religions  éteient  respectées,  les  brahmanes 
honorés  par  les  trois  autres  castes.  Il  avait  trois  femmes 
légitimes  qui  lui  avaient  donné  des  fils,  dont  l'atné  était 
Ràma,  fils  de  la  première  reine  Causalyà.  Le  roi  désira 
l'associer  à  l'empire.  Mais  la  seconde  épouse  Gaikêyl, 
femme  jalouse  et  violente,  réclama  l'accomplissement 
d'une  promesse  que  le  roi  lui  avait  faite  ;  elle  demanda 
l'exil  de  Ràma,  et  la  consécration  royale  pour  son  propre 
fils  Bharata.  Fidèle  à  sa  parole,  le  roi  exila  son  fils  aîné, 
qui  partit,  accompagné  de  son  jeune  frère  Laxmana  et  de 
sa  femme,  la  belle  et  vertueuse  Sttà.  Tous  trois  franchirent 
à  pied  des  forêts  impraticables,  des  fleuves  et  des  lacs,  et, 
sur  l'avis  du  sage  Bharadwàja,  s'établirent  sur  le  mont 
Tchitracûta,  où  ils  vécurent  dans  une  agréable  cabane, 
vêtus  de  peaux  de  chèvres  et  d'écorces.  Pendant  ce  temps. 
Daçaratha  mourut,  pleurant  l'absence  de  son  fils.  Poussé 
au  trône  par  de  nombreux  brahmanes  ayant  à. leur  tête 
Vasishtha,  Bharata,  plein  de  Justice,  refusa  le  pouvoir,  et 
se  rendit  auprès  de  Ràma  :  celui-ci,  dont  l'exil  n'était 
point  terminé,  repoussa  à  son  tour  l'offre  de  son  frère,  et 
lui  remit  les  chaussures,  symbole  de  la  royauté.  Bharata, 
de  retour,  établit  le  siège  du  royaume  à  Nandigràma,  at- 
tendu! t  la  fin  de  l'exil  de  son  frère  aîné.  Mais  celui-ci, 
s'éloignant  davantage,  alla  se  fixer  dans  la  forêt  Dandaka, 
qu'il  délivra  du  ràxasa  Viràdha,  prit  pour  sa  défense,  sur 
l'avis  du  sage  Agastya,  l'arc  du  dieu  Indra  avec  ses  deux 
carquois  inépuisables,  et  établit  sa  demeure  dans  le  lieu 
nommé  Pantchavatl.  Infesté  de  ràxasas  horribles  et  mal- 
faisants, ce  pays  n'avait  d'espoir  que  dans  Ràma.  Celui- 
ci,  armé  de  son  arc  invincible,  les  détruisit  au  nombre  de 
quatorze  mille.  Alors,  en  apprenant  le  sort  de  sa  race,  le 
célèbre   et  puissant  Ràvana,  ràxasa  aux  formes  chan- 
geantes, se  rendit,  malgré  les  conseils  des  siens,  à  l'er- 
mitage du  héros.  Là,  usant  de  prestiges,  il  parvint  à 
é^uer  Sttà,  s'approcha  d'elle,  l'enleva  et  disparut.  Bien 
des  événements  s'accomplissent  avant  que  Ràma  ait  pu 
découvrir  le  lieu  où  était  retenue  sa  femme;  et,  de  plus, 
il  lui  fallait  des  alliés.  D'après  l'avis  donné  par  le  corps 
^orieux  de  Kabandha,  tué  et  brûlé  par  Ràma,  celui-ci  se 
rendit  auprès  d'une  sainte  femme,  Çavar!  ;  sur  la  rive 
de  la  Pampft,  II  rencontra  le  singe  Hanumat,  et  par  son 
conteii  flt  la  connaissance  do  Sugrlva,  roi  des  singes. 


Sugrtva  lui  raconta  son  inimitié  avec  Bàli,  autre  prince 
de  la  même  race,  fit  l'épreuve  de  la  force  et  de  Tadresse 
de  Ràma,  et  contracta  avec  lui  une  alliance  solide.  Ils 
partirent  ensemble  pour  la  caverne  où  se  tenait  Bàli  ; 
Ràma  le  tua  dans  la  bataille,  et  établit  à  sa  place  Sugriva. 
Après  les  quatre  mois  de  la  saison  des  pluies,  Sugrlva 
convoqua  tous  les  Singes,  et  los  envoya  dans  toute  la 
contrée  à  la  recherche  de  Sitâ.  Sur  l'avis  du  vautour 
Sampàta,  Hanumat  traversa  la  mer  :  arrivé  dans  l'Ile  de 
Lancà  (Ceylan^,  il  vit  Sttà  pensive,  assise  dans  les  jardins 
de  Ràvana,  lui  montra  son  signe  de  reconnaissance,  lui 
fit  savoir  ce  qui  était  arrivé,  reçut  d'elle  un  signe  à  son 
tour,  et  attaqua  ceux  qui,  dans  l'Ile,  soutenaient  l'auto- 
rité du  grand  ràxasa.  Après  avoir  tué  cinq  conseillers  et 
cinq  chefs  d'armée,  et  atteint  même  le  Jeune  prince  Axa, 
il  fut  pris;  mais  s'étant  dégagé  de  ses  liens,  il  mit  le  feu 
.  à  la  ville  de  Lancà,  revit  la  belle  Sltà,  et,  l'ayant  conso- 
lée, s'en  retourna  vers  son  époux,  auquel  il  raconta  ce 
({ui  s'était  passé.  Accompagné  de  Sugriva  et  de  la  troupe 
innombrable  des  singes,  Ràma  descendit  vers  le  Sud,  et 
gagna  le  rivage  de  la  mer.  Là  il  lança  dans  l'Océan  une 
de  ses  flèches  divines;  l'Océan  se  fit  voir  à  lui,  et  lui  or- 
donna de  construire  le  pont  Nala  entre  la  grande  lie  et 
le  rivage.  Hanumat  et  la  foule  des  Singes  participèrent  à 
cette  grande  construction.  Par  là,  le  héros  d'Ayôdhyà 
marcha  vers  la  ville  ennemie,  tua  le  prince  des  Ràxasas, 
et,  dans  la  ville  même,  sacra  roi  Vibhishana,  soutenu 
par  un  parti  contraire.  Joyeux  d'une  si  grande  action,  les 
dieux,  Indra  à  leur  tête,  rendirent  honneur  au  fils  de 
Daçaratha.  Mais,  dans  le  trouble  de  la  victoire,  Ràma  fit 
à  sa  femme  un  reproche  qu'elle  ne  put  supporter;  Sltà, 
affligée,  se  Jeta  dans  les  flammes.  Aussitôt  une  brise 
s'éleva,  une  voix  incorporelle  se  fit  entendre,  les  cymbales 
des  dieux  retentirent,  une  pluie  de  fleurs  tomba  :  Sltà, 
que  le  feu  épargnait,  retourna  avec  son  époux  bienheu- 
reux. Montés  sur  un  char  paré  de  fleurs,  ils  se  rendirent 
à  Nandigràma.  Le  temps  de  l'exil  étant  terminé,  Ràma 
coupa  sa  chevelure  de  pénitent;  réuni  à  ses  frères  et  à 
sa  femme,  il  reprit  la  royauté  des  mains  de  Bharata  qui 
l'attendait,  et  gouverna  dans  Ayôdhyà  ses  peuples  heu- 
reux. 

Tels  sont  les  événements  qui  se  déroulent  dans  le  .Td- 
mdyana.  Ce  poème  est  l'œuvre  d'un  seul  homme,  Vàl- 
mlki,  dont  la  personnalité  n'a  été  contestée  ni  chez  les 
Indiens,  ni  par  la  critique  européenne;  il  y  a  unité  dans 
le  sujet  et  la  suite  des  événements,  égalité  dans  la  poésie, 
unité  de  style  et  de  langage,  accord  dans  les  traditions, 
symétrie  dans  la  composition  et  dans  la  disposition 
des  parties.  On  constate  dans  le  Ràmâyana  un  art  in- 
connu aux  auteurs  du  McMbhârata.  L'étendue  de  l'on* 
vrage  ajoute  aussi  quelque  chose  au  mérite  poétique  de 
Vàlmlki  :  car  il  ne  renferme  pas  moias  de  48,000  vers  ; 
et  néanmoins,  dans  une  action  simple  et  qui  ne  languit 

Ï^as,  se  trouvent  rassemblés  un  nombre  surprenant  de 
àits,  de  mythes,  de  traditions,  de  tableaux  de  la  nature, 
et  de  scènes  humaines  ou  fantastiques  de  l'intérêt  le 
plus  varié. 

Plusieurs  caractères  distinguent  éminemment  le  RA" 
mâyana.  D'abord  les  descriptions  des  lieux  et  des  grands 
phénomènes  de  la  nature  y  offrent  une  ampleur  et  un 
éclat  incomparables;  il  n'existe  rien  de  semblable  dans 
toute  la  poésie  grecque;  telle  est,  par  exemple,  la  des- 
cente du  Gange,  au  I*'  livre.  Ensuite  les  scènes  tou- 
chantes, les  sentiments  tendres  du  cœur  humain  sont 
rendus  avec  un  naturel  et  une  expression  pénétrante  que 
les  modernes  n'ont  point  dépassés,  ni  peut-être  atteints  : 
la  scène  entre  Ràma  et  Sltà,  lorsqu'ils  vont  partir  pour 
l'exil,  nous  semble  laisser  derrière  elle,  par  le  sentiment 
et  l'élévation  morale,  les  adieux  d'Hector  et  d'Andro- 
maaue,  dans  V Iliade;  citons  encore  l'épisode  si  touchant 
de  la  mort  de  Yajnadatta,  au  II*  livre.  —  Une  valeur 
symbolique  parait  avoir  été  donnée  par  l'auteur  aux  per- 
sonnages et  aux  événements  de  son  pofime.  Sans  compter, 
en  effet,  les  récits  de  faits  purement  mythologiques,  l'ap- 
parition d'êtres  divins  et  b  production  de  phénomènes 
surnaturels  dont  le  poème  est  comme  parsemé,  le  héros 
principal,  Ràma,  est  lui-même  une  incarnation  de  Vishnu, 
laquelle  occupe  une  place  considérable  parmi  celles  de 
ce  dieu  que  l'Inde  reconnaît.  Sltà  est  un  mot  qui  signifie 
le  sillon  du  labour.  Les  Ràxasas  sont,  dans  la  mytholo- 
gie, des  forces  hostiles  de  la  nature,  qui  se  présentent 
sous  mille  formes,  et  luttent  partout  contre  la  race  pieuse 
et  agricole  des  Aryas.  Il  serait  possible  enfin  d'identifier, 
malgré  la  tradition,  Ràma,  fils  de  Daçaratha,  avec  Bala- 
,  Ràma,  le  çorte-charrue,  et  de  ne  voir  dans  tout  le  poËme 
qu'un  récit  d'événements  symboliques  où  serait  repré* 


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1532 


RAM 


lentéd  la  propagation  de  la  culture  aryenne  vers  le  Sod  de 
THindoustan.  Telle  est  la  tendance  de  l'école  orientaliste 
allemande  aujourd'hui.  Nous  ne  nions  pas  que  cette  in- 
terprétation ait  quelque  vraisemblance;  mais-  nous 
croyons  que  le  poôme  de  V&lmiki  a  une  tout  autre  por- 
tée, et  que,  si  la  culture  de  la  terre  est  pour  quelque 
chose  dans  sa  valeur  symbolique,  il  renrcrme  aussi  le 
souvenir  d'un  des  grands  événements  de  Thistoire 
d'Orient,  l'extension  de  la  puissance  aryenne  jusqu'à 
Ceyian,  la  mer  franchie,  la  religion  védique  portée  chez 
des  peuples  qui,  par  elle,  furent  en  partie  transformés; 
de  sorte  que  R&ma,  à  l'arc  divin,  n'est  pas  seulement  un 
agriculteur,  mais  un  des  grands  propagateurs  de  la  civi- 
lisation. Par  le  fait  nous  voyons,  dans  la  suite  de  la  lit- 
térature sanscrite,  les  Aryas  établis  jusqu'au  bas  du 
Gange,  aussi  bien  que  sur  les  rivages  et  dans  les  îles, 
leur  langue  se  propager  dans  les  diverses  contrées  du 
sud,  et,  bientôt,  les  populations  prêtes  à  recevoir  et  à 
comprendre  l'enseignement  des  missionnaires  bouddhi- 
ques. Quant  au  rôle  supérieur  de  R&ma,  comme  incarna- 
tion de  Vislinu,  nous  ne  pensons  pas  qu'il  soit  nécessaire 
d'y  voir  une  influence  postérieure  et  de  regarder  comme 
des  interpolations  tous  les  vers  on  fragments  de  vers  nui 
le  désignent  de  la  sorte  :  car,  dès  les  temps  du  Vêâa, 
Vishnu  tend  à  devenir  la  personne  divine  qui  se  mani- 
feste dans  les  intelligences  supérieures,  primitivement 
issues  d'Agni  (F.  Véda').  Et,  si  l'on  tient  compte  de  la 
distance  qui  sépare  les  Hymnes  du  Ràmâyana,  tel  a  pu 
être  le  rôle  de  vishnu  dans  la  doctrine  reli|:ieuse  au  temps 
de  VâJmtki,  avant  que  Tadoration  exclusive  de  ce  dieu 
eût  engendré  la  secte  des  Vishnuvites. 

Le  caractère  moral  des  personnages  est  ici  fortement 
accusé.  Envisagés  simplement  comme  des  êtres  humains, 
R&ma,  Slt&,  Laxmana,  Bharata,  ont  leur  nature  propre 
et  celle  qui  convient  expressément  à  leur  rôle.  La  vertu 
sublime  et  inspirée  ;  cette  force  d'&me  qui  rend  un  homme 
juste,  véridi<{ue,  fidèle,  constant,  pur  dans  ses  mœurs, 
attentif  au  bien  de  tous;  ce  sentiment  réfléchi  du  devoir 
qui  fait  une  &me  courageuse  et  sereine,  grande  et  douce 
à  la  fois  ;  voilà,  avec  la  beauté  physique  qui  en  est  le 
reflet,  ce  qui  met  Ràma  au-dessus  de  tous  les  hommes 
et  l'égale  aux  dieux.  Sità  ne  lui  est  point  inférieure  :  la 
piété  pour  les  dieux,  l'admiration  soumise  pour  son 
époux,  le  dévouement  sans  bornes,  cette  entière  abné^ir 
tion  qui  rend  courageuse  et  dure  pour  elle-même  une 
jeune  femme  accoutumée  au  luxe  de  la  cour,  un  amour 
passionné  et  une  pureté  inviolable,  voilà  la  belle  et  douce 
Sità.  Laxmana  et  Bharata  ont  aussi  le  caractère  de  leur 
rôle  :  l'un,  fort,  mais  soumis,  comme  un  jeune  frère  à 
son  atné,  dévoué  à  R&ma  et  à  sa  belle-sœur,  les  servant 
dans  leur  exil  et  dans  les  batailles  ;  l'autre,  sachant  son 
devoir  et  la  limite  de  ses  droits,  cédant  avec  plaisir  un 
pouvoir  dont  il  s'est  chargé  sans  le  désirer,  parce  que  ce 
pouvoir  ne  lui  appartient  pas  et  qu'il  n'en  a  que  le  dé- 
pôt. A  ces  caractères  si  grands  et  si  touchants,  le  poète 
oppose,  dans  l'action,  R&vana,  l'ennemi  du  héros  et  en 
qui  sont  réunis  les  vices  opposés  à  ses  vertus,  les  riva- 
lités et  les  trahisons  de  Vibhlsbana  et  des  autres  R&xasas, 
et,  dans  un  monde  intermédiaire,  l'agilité,  la  force  et  la 
ruse,  tantôt  violentes,  tantôt  bienfaisantes,  de  Sugrlva, 
de  Hanumat  et  des  singes,  leurs  sujets. 

Les  Indiens  ont  rangé  le  Hâmàyana  dans  le  genre  lit- 
téraire qu'ils  nomment  kâvyas,  c.-à-d.  poèmes  épiques, 
entendant  par  ce  mot  que  chacun  de  ces  poèmes  forme 
une  unité  et  est  l'ouvrage  d'un  seul  homme.  Les  épopées 
de  cette  espèce  étaient  assez  nombreuses  :  parmi  celles 
qui  nous  restent,  outre  le  RAmàyana,  il  faut  compter  le 
Riighuvança  ou  histoire  de  la  descendance  de  Raghu  et 
particulièrement  de  R&ma,  et  le  Kumdrasambhava,  qui 
portent  tous  deux  le  nom  de  K&lid&sa.  Si  ces  deux 
poèmes  sont  bien  réellement  de  cet  auteur,  et  si  K&lid&sa 
vivait  à  l'époque  de  Vikram&ditya  ou  de  l'empereur  Au- 
guste, ils  sont  :iotablement  postérieurs  au  Râmâyana  : 
c'est,  du  reste,  ce  qui  est  indiqué  par  la  composition 
très-savante  et  par  la  langue  très-étudiée  de  ces  deux 
kâvyas,  La  langue  de  V&lmîki,  au  contraire,  bien  que 
précise  et  élégante,  est  simple  et  dépourvue  de  subtilité 
et  de  recherche.  Les  formes  grammaticales  des  mots  et 
les  tournures  des  phrases  sont  également,  dans  notre 
épopée,  d'une  époque  évidemment  plus  ancienne.  Les 
poètes  indiens  des  temps  postérieurs  ont  professé  pour  le 
style,  l'art  et  l'influence  morale  de  l'œuvre  de  V&lmîki 
une  admiration  presque  sans  bornes.  Le  Râmâyana  a  été 
regardé  par  eux  et  a  été,  en  elïét,  la  souche  d'où  sont 
sorties  un  grand  nombre  de  compositions  poétiques  de 
toute  longueur  et  de  tout  genre. 


On  doit  opposer,  comme  l'ont  fait  les  criticiues  indiensi 
le  Râmâyana  au  Mahâbhârata  d'un  côté,  et,  ae  l'autre, 
à  la  classe  de  poèmes  nommés  Purânas  (  V.  ce  mol  ).  Le 
Mahâbhârata  est  un  ensemble  de  morceaux  épiques  pins 
ou  moins  anciens,  ajoutés,  à  diverses  époques,  à  un  fono 
primitif  :  ce  fond  et  la  plupart  de  ces  morceaux  étaient 
connus  sous  le  nom  d'IUhâsas  (légendes).  Leur  réunion 
fut  l'œuvre  de  Vy&sa,  selon  la  tTcuution;  mais,  outre  que 
l'on  cite  plusieurs  Vy&sa,  ce  nom  ne  signifie  pas  autre 
chose  ici  que  compilateur.  Si  l'on  rend,  autant  que  pos- 
sible, à  chaque  époque  historique  les  morceaux  qui  lui 
reviennent,  on  trouve  un  poème  ii^tial  d'environ  12  ou 
15,000  distiques,  ne  renfermant  que  des  récits  de  ba- 
tailles dans  un  style  fort  antique,  et  qui  se  rapportent  à  la 
grande  guerre  des  Kurus  à  Hastin&pura  (Delhi).  Cest  à 
la  période,  probablement  assez  longue,  comprise  entre  la 
fin  des  Hymnes  védiques  et  l'époque  des  Kâvyas  que  se 
rapporterait  la  composition  des  Itihâsas.  Vinrent  ensuite 
les  Kâioyas,  qui  sont  aussi  des  épopées,  mais  d'une  na- 
ture toute  différente,  puisqu'ils  sont  l'œuvre  d'un  seul 
homme,  n'ont  reçu  dans  la  suite  que  de  petites  interpo- 
lations le  plus  souvent  aisé^  à  reconnaître,  et  se  distin- 
guent par  l'unité  de  l'action,  la  vérité  et  la  suite  dans  le 
développement  des  caractères,  et  un  art  de  composer  et 
d'écrire  porté  à  une  haute  perfection.  Jusqu'où  s'étend 
cette  période  des  poèmes  épiques?  Cest  cf  qu'il  est  dif- 
ficile d'apprécier,  puisque  nous  voyons  le  Raghuvança  et 
le  Kumiârasambluiva  indiqués  comme  appartenant  au 
commencement  de  l'ère  chrétienne  et  se  rapprochant 
peut-être  même  plus  encore  de  nos  jours.  Quoi  qu'il  en 
soit,  la  période  moderne  des  compositions  épiques  est  ca- 
ractérisée par  les  Purânas,  ouvrages  où  sont  réunis, 
comme  dans  le  Maliâbhârata,  des  traditions  et  des  mor- 
ceaux empruntés  aux  siècles  antérieurs  et  même  aux 
Védas,  mais  qui  sont  presque  entièrement  théologiques. 
Quoique  attribués  à  des  auteurs  particuliers,  et  dont  la 
réalité  n'est  pas  plus  douteuse  que  celle  de  V&lmîki,  ils 
n'offrent  aucune  unité  d'action,  ne  répondent  à  aucune 
époque  histori(;[ue  déterminée,  mêlent  les  faits,  les  hom- 
mea»  les  doctrines,  les  langages,  et  ne  semblent  per- 
mettre au  critique  de  laisser  à  leurs  auteurs  qu'une 
très-petite  portion  de  leur  immense  étendue.  Ces  réper- 
toires archéologiques  sont  d'un  &ge  évidemment  mo- 
derne, et  ne  remontent  pas  aux  temps  où  les  vraies  com- 
positions littéraires  se  sont  produites  dans  l'Inde.  De 
plus,  les  auteurs  des  Purânas  et  ceux  des  kâvyas  n'ap- 
partiennent pas  à  la  même  caste.  Les  premiers  sont  des 
Sûtas  (écuyers),  hommes  qui  ne  faisaient  qu'à  moitié 
partie  de  la  caste  brahmanique,  et  qui  étaient  au  service 
des  Xattriyas  ou  seigneurs.  Ils  ne  possédaient  donc 
qu'une  portion  de  la  science  sacrée,  et  n'avaient  pas  sur 
elle  un  droit  complet  d'interprétation  ni  même  d'exposi- 
tion ;  leur  rôle  était  surtout  de  recueillir  les  traditions  et 
d'en  former  des  volumes  pour  l'instruction  des  jeunes 
princes  et  des  femmes.  Le  Râmâyana  est,  au  contraire, 
l'œuvre  d'un  pur  br&hmane,  que  la  tradition  nous  re- 
présente comme  un  saint  pénitent,  vivant  au  déserl,  et 
ayant  des  relations  directes  avec  Brahm&  lui-même,  qui 
lui  apparut  et  lui  fit  connaître  R&ma.  Il  en  résulte  que 
son  poème  peut  développer  avec  une  entière  liberté  d'es- 
prit non-seulement  les  doctrines  religieuses  et  leur  fond 
métaphysique,  mais  encore  les  lois,  les  devoirs  des 
hommes,  des  castes,  des  rois  même,  et  donner  à  chacun 
des  leçons  pleines  d'autorité  pour  la  conduite  de  la  vie. 
La  tradition  non  plus  n'enchaîne  pas  l'auteur;  ne  voyant 
dans  plusieurs  personnages  de  l'antiquité  indienne  que 
des  figures  symboliques  propres  à  représenter  les  idées 
et  les  événements  qui  se  développaient  de  leur  temps,  il 
les  rapproche  sans  scrupule.  Ainsi,  il  est  hors  de  doute 
que  les  deux  R&ma  ont  vécu  à  deux  époques  fort  éloi- 
gnées l'une  de  l'autre,  puisque  celui  de  V&lmlki  régnait 
sur  la  Sarayù  et  le  Gange;  que  l'autre  est  d'un  temps  où 
les  Aryas  dépassaient  à  peine  la  SaraswaU  vers  l'Orient, 
et  qu'enfin  toute  la  période  des  événements  racontés  dans 
le  Mahâbhàrala  les  sépare.  Cependant  le  poète  fait  con- 
verser ensemble  les  deux  Ràma.  Ce  merveilleux  poétique, 
que  les  Indiens  emploient  plus  encore  que  les  Grecs, 
autorisait  V&lmiki  à  dépasser  même  cette  limite,  car  il 
fait  paraître  et  agir  dans  son  poème,  à  côté  de  R&ma  et 
avec  lui,  des  personnages  qui  appartiennent  au  Vêda  lui- 
même,  qui  ont  écrit  des  Hymnes  védiques  dont  l'authen- 
ticité n'est  point  douteuse,  et  qui  sont  antérieurs  à  l'an- 
tique Paraçu-R&ma.  Tels  sont  Viçw&mitra,  Vasishtha. 
Bharadw&ja,  et  Atri.  Cette  liberté  extrême  prise  par  le 
poète  de  rapprocher  ainsi  sur  une  même  acâie  des  per- 
sonnages d'époques  si  différentes  prouve  deux  choses  s 


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1533 


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efest  que  Vàlmlki  ne.yivait  pas  au  temps  de  Rftma,  mais 
beaucoup  après;  de  sorte  que  V&lmtki  n*a  pas  lu  son 
poëme  en  présence  du  héros,  comme  le  disent  les  brah- 
manes; et,  secondement,  ^e  les  temps  des  poëtes  vé- 
diques ci-des<(us  nommés  étaient  passés  depuis  assez 
longtemps  pour  que  leurs  figures  fussent  devenues  en 
quelque  sorte  idéales,  et  pareilles  h.  celles  des  dieux  qui 
échappent  au  temps.  Or,  si  Ton  ne  peut  guère  fixer  la 
limite  de  la  période  védique  plus  près  de  nous  que  Tan- 
née 1500  ou  1600  av.  J.-C.,  on  ne  peut  pas  non  plus  la 
reculer  indéfiniment  dans  le  passé.  Si  la  période  comprise 
entre  les  deux  R&ma  comprend  plusieurs  siècles,  et  qu*un 
assez  long  temps  se  soit  encore  écoulé  entre  notre  H&ma 
et  son  chantre  Vàlmiki,  on  voit  ^ue  Tépoque  de  ce  der- 
nier ne  saurait  guère  être  antérieure  à  celle  d*Homère. 
D*on  autre  côté,  l'on  ne  peut  guère  admettre  que  le  Râr- 
mâyana  soit  postérieur  à  Tapparition  du  bouddhisme.  La 
période  des  Kàvyas,  ou  du  i^dmdyana,  serait  ainsi  com- 
prise entre  le  milieu  du  vn*>  siècle  et  le  commencement 
du  lx^  Les  Itihâsas  ont  certainement  précédé  les  Kâ^ 
rayas;  le  Mahâbhârata  primitif  se  trouve  ainsi  placé 
entre  le  Ràmàyana  et  la  guerre  des  Kums,  qui  elle^ 
même  a  suivi  rétablissement  des  Aryas  védiques  dans 
les  hautes  vallées  du  Gange  et  de  la  YamunlL.  Cette 
guerre  serait  ainsi  reportée  à  une  date  un  peu  anté- 
rieure à  la  guerre  de  Troie.  Si  le  fond  premier  du  Ma- 
hâbhârata est  antérieur  au  Râmâyana,  il  n*en  est  pas 
de  même  de  ses  additions  postérieures  :  une  foule  d*épi- 
sodes,  des  fragments  très-lonp^s  do  morale  et  de  législa- 
tion, des  expositions  de  doctrine,  et  enfin  de  véritables 
poèmes  philosophiques,  tels  que  le  Bhagavad-Gitû  (  V.  ce 
mot)^  sont  ou  postérieurs  au  Ràmàyana^  ou  même  pos- 
térieurs au  bouddhisme.  Il  faudra  donc  démembrer  ce 
grand  hihâsa,  et  en  rendre  les  diverses  parties  aux 
siècles  auxquels  elles  appartiennent.  Un  tel  travail  ne 
sera  pas  à  faire  pour  le  poème  de  V&lmiki,  du  moins  à 
peu  d'exceptions  près,  car  il  est  presque  tout  entier 
l'œuvre  de  son  auteur  désigné. 

Diaprés  la  tradition  exprimée  en  tête  du  poème,  le  Râ- 
mâyana a  d'abord  été  composé  et  enseigné  verbalement 
par  V&Imlki  à  ses  disciples.  Malgré  ce  que  cette  tradition 
peut  avoir  de  surprenant  pour  un  poème  d'une  telle 
étendue,  elle  semble  confirmée  par  ce  fait  qu'il  existe 
dans  rinde  plusieurs  recensions  du  Râmâyana.  Ces  re- 
censions, faites  en  divers  lieux  et  indépendamment  les 
unes  d(^  autres,  s'accordent  entre  elles  quant  aux  événe- 
ments, aux  rôles  et  aux  caractères  des  personnages.  Mais 
elles  suivent  un  arrangement  différent;  elles  présentent, 
de  plus,  des  divergences  considérables  dans  les  expres- 
sions. On  en  pourrait  donc  conclure  avec  vraisemblance 
qu'en  effet  le  poème  n'a  été  fixé  par  l'écriture  qu'un 
temps  plus  ou  moins  long  après  sa  composition,  et  qu*il 
avait  auparavant  circulé  de  bouche  en  bouche  dans  une 
grande  partie  de  Tlnde.  On  sera  moins  surpris  de  ces 
'  faits  si  Ton  observe  que  renseignement  oral  et  la  réci- 
tation étaient  le  principal  exercice  des  Brahmanes,  et 
que  les  maîtres  exerçaient  les  novices  à  retenir  ainsi  par 
cœur  la  Sainte  Écriture  tout  entière,  et  cela  depuis 
l'époque  où  les  hymnes  avaient  été  composés.  La  seule 
édition  complète  que  nous  possédions  du  Râmâyana  est 
celle  de  M.  Gorresio  (Paris,  1843  et  suiv.),  où  le  texte 
comprend  5  volumes:  elle  reproduit,  sous  le  nom  de 
Gaudanaf  la  récension  du  Bengale.  Les  éditions  anté- 
rieures de  Carey  (Sérampore,  1806-1810),  et  de  Schlegel 
(avec  traduction  latine,  1829-38),  offrent  d'autres  recen- 
sions, ainsi,  dit-on,  que  les  manuscrits  de  Berlin. 

Le  nom  de  kâvya,  donné  dans  l'Inde  à  ce  genre  de 
poèmes  épiques,  dérive  du  mot  kavi^  qui  veut  dire  poëte, 
et  qui  désigne  toujours  une  personne  réelle  et  non  un 
être  collectif  tel  que  Vy&sa.  Lorsque  la  littérature  des 
iaivyas  florissait,  elle  fut  transportée  par  Témigration 
indienne  dans  l'Ue  de  B&li,  voisine  de  Yava,  et  traduite 
en  une  langue  qui  porte  le  nom  de  kam.  Nous  trou- 
vons aujourd'hui  dans  ce  pays  des  œuvres  indiennes  con- 
sidérables, traduites  du  sanscrit  en  cette  langue  :  tels 
sont  le  Raghuvança  et  le  Kumâra-Sambhava ,  ainsi 
qu'une  partie  du  Mahâbhârata  lui-même.  C'est  un  pays 
et  une  mine  qui  n'ont  pas  encore  été  suffisamment 
explorés. 

Le  Râmâyana  tient  dans  la  littérature  indienne  une 
place  très-considérable;  il  est  estimé  presque  à  l'égal  des 
livres  saints,  à  cause  des  doctrines  et  des  exemples  qu'il 
propose;  il  est  un  objet  d'études  spéciales  pour  ceux  qui 
apprennent  la  langue,  la  prosodie,  l'art  de  la  composition 
littéraire.  Pour  nous  aussi,  il  est  un  des  monuments  les 
fim  importants  ds  1»  langue  sanscrite.  Pour  le»  histo- 


riens, il  offre  un  double  intérêt  :  par  les  tnditioDt 
tiques  qu'il  renferme,  il  projette  un  Jour  très-vif  sur  les 
temps  qui  ont  suivi  la  période  du  Véda^  et  dont  les  dé- 
veloppements religieux  et  philosophiques  sont  contenus 
particulièrement  dans  les  livres  nommés  Brâhmanas; 
par  son  fond  principal,  il  nous  fait  assister,  à  travers 
mille  conceptions  merveilleuses  qu'il  faut  élaguer,  à  la 
marche  des  Aryas  vers  l'ouest  et  vers  le  sud  de  l'Hin- 
doustan,  c.-à-d.  à  Tun  des  plus  importants  mouvements 
que  notre  race  ait  exécutés  sur  la  terre  ;  on  y  voit  agir 
non-seulement  les  Aryas  conquérants  et  civilisateurs, 
mais  les  races  primitivement  établies  sur  ce  sol,  les  unes 
s'al  liant  avec  les  Aryas  et  les  aidant,  les  autres  luttant 
contre  leurs  progrès.  Après  cette  grande  expédition  du 
fils  de  DaQ^u*atha,  le  Gange  est  parcouru  et  soumis  dans 
toute  sa  longueur,  la  presqu'île  est  explorée,  la  mer  est 
ouverte  sur  une  grande  étendue  de  côtes  ;  Ccylan,  tribu- 
taire des  rois  du  continent,  va  devenir  un  point  aussi 
important  pour  le  commerce  que  pour  la  propagation  à 
travers  les  mers  des  doctrines  civilisatrices  issues  du 
V4da,  —  Outre  les  éditions  déjà  mentionnées  du  Râ- 
mâyana, et  une  traduction  française  par  M.  H.  Fauche, 
nous  en  possédons  un  épisode,  le  Yajnadattabadaf  tra- 
duit par  Chézy,  1827,  in-4<»,  et  qui  se  trouve  aussi  dans 
les  Fleurs  de  l'Inde,  Nancy,  1857  ;  le  texte  avec  traduction 
aété  publié  par  Chézy  et  H.  Burnouf,  1826.  Le  Raghuvança 
a  paru  avec  une  traduction  en  prose  anglaise  à  Calcutta, 
1832  ;  Stenzier  l'a  donné  avec  une  traduction  latine,  Lon- 
dres, 1832,  et  Galanos  avec  une  traduction  grecque, 
Athènes,  1850.  On  doit  aussi  à  Stenzier  le  Kumâra- 
Sambhava,  texte  et  traduct.  latine,  Berlin,  1838.   En.  B. 

RAMBERGE  (de  rame,  et  de  berge  pour  barque)^  an- 
cien navire  de  guerre,  dont  les  m&ts  portaient  des  ^ies 
ou  espèces  de  hunes. 

RAMBOUILLET  (Hôtel  de).  F.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire^  et,  dans  le  présent  ouvrage, 
l'art.  PaéciEDSES. 

RAME,  pièce  de  bois  dont  on  se  sert  pour  faire  avan- 
cer une  embarcation.  La  partie  qui  plonge  dans  l'eau 
se  nomme  le  plat  ou  la  polie;  celle  que  tient  le  rameur, 
manche. 

RAME  (de  l'allemand  ramen,  liasse),  quantité  de 
500  feuilles  de  papier,  divisée  ordinairement  en  20  mains 
de  25  feuilles  chacune.  Mettre  un  livre  à  la  rame,  c'est 
le  vendre  au  poids  du  papier. 

RAMONAGE  DES  CHEMINÉES.  Il  doit  se  faire  aux 
époques  déterminées  par  l'usage  des  lieux,  sous  peine 
d'une  amende  de  1  à  5  fr.,  et  est  à  la  charge  des  loca- 
taires ou  occupants. 

BAMPANT,  en  termes  de  Blason,  se  dit  des  animaux 
qui,  dans  les  armoiries,  sont  représentés  debout  et  s'éle- 
vant  comme  le  long  d'une  rampe.  On  l'oppose  à  passant. 
—  En  Architecture,  toute  ligne  inclinée  ou  en  pente  est 
un  rampant.  On  a  aussi  donné  ce  nom  aux  nervures  qui 
descendent  des  croisées  d'ogives  vers  la  partie  inférieure 
d'une  clef  pendante. 

RAMPE,  balustrade  d'appui  qui  règne  dans  toute 
l'étendue  des  escaliers.  Selon  l'importance  des  b&timents, 
on  fait  les  rampes  en  balustres  de  marbre,  de  pierre,  de 
bois  ou  de  métal  ;  on  les  couronne,  soit  par  une  plate- 
bande  plus  ou  moins  ornée,  soit  par  une  main  courante, 
corps  arrondi  et  continu  sur  lequel  la  main  s'appuie.  — 
Par  extension,  on  appelle  Rampe  un  plan  incliné  en 
pente  douce,  par  lequel  on  monte  ou  descend,  et  qui  tient 
lieu  d'escalier  dans  des  jardins,  sur  des  quais,  dans  des 
ouvrages  de  fortification ,  etc. 

RAMPB ,  rangée  de  lumières  placée  au  bord  de  la  scène 
dans  une  salle  de  spectacle,  et  qu'on  lève  ou  baisse  à  vo- 
lonté. Elle  Jette  sa  lumière  principalement  sur  la  scène 
et  les  acteurs. 

RAMS,  jeu  de  cartes  qui  se  Joue  à  4,  5  ou  6  personnes, 
avec  un  jeu  de  piquet.  Chaque  joueur  prend  un  nombre 
convenu  de  Jetons,  et  reçoit  5  cartes.  Le  donneur,  s'il 
veut  tenir  le  jeu,  échange  l'une  de  ses  cartes  contre  la 
retourne,  qui  a  déterminé  l'atout.  Il  est  loisible  de  passer  : 
si  tout  le  monde  passe,  le  donneur  fait  ramSy  et  est  dé- 
barrassé de  5  jetons.  Quand  on  Joue,  on  est  tenu  de 
fournir  et  de  forcer  sur  la  carte  jouée,  ou  de  couper,  et 
même  de  surcouper.  Celai  qui  n'a  fait  aucune  levée 
prend  cinq  jetons  de  plus,  il  est  ramsé:  chaque  Joueur 
se  débarrasse  d'autant  de  jetons  qu'il  a  fait  de  levées,  et 
le  premier  à  qui  il  n'en  reste  pas  est  le  gagnant. 

RANÇON  (de  l'italien  rancone,  crochet),  sorte  de 
pique  dont  l'extrémité  présentait  à  chacun  des  côtés  une 
courbure  en  forme  d'hameçon. 

RANÇON  (de  ritalien  ranzion)^  ce  que  l'on  paye  poui 


RAP 


1534 


RAT 


tirer  un  prisonnier  des  mains  de  Tennemi.  L'usage  de 
donner  des  rançons  a  existé  de  toute  antiquité,  et  Jusqu'à 
la  Révolution  française.  Pendant  le  moyen  ftge,  les  yas- 
■aux  étaient  obligés  de  payer  la  rançon  de  leur  suzerain; 
c'était  une  des  aides  féodales.  Louis  IX ,  prisonnier  en 
Egypte,  donna  la  ville  ie  Damiette  pour  sa  propre 
liberté,  et  400,000  besants  pour  celle  de  ses  compagnons 
de  captivité.  Jean  le  Bon  fut  racheté  aux  Anglais  au  prix 
de  3  millions  d'écus  d*or.  Dans  un  traité  conclu  en  4780 
entre  la  France  et  l'Angleterre  pour  l'échange  des  pri- 
sonniers de  guerre,  la  somme  à  payer  pour  un  simple 
soldat  ou  un  matelot  était  de  25  Ir.,  et  elle  augmentait 
en  raison  du  grade  ;  un  vice-amiral  français,  un  amiral 
anglais  commandant  en  chef,  un  maréchal  de  France,  un 
feld-maiiéchal  anglais,  étaient  estimés  60  matelots  ou 
soldats.  Aujourd'hui,  les  nations  européennes  ne  font 
plus  que  des  échanges  de  prisonniers  à  égalité  de  grade. 

RANËLAGH,  nom  emprunté  à  un  établissement  de 
divertissements  publics  des  environs  de  Londres,  et  ap- 
pliqué au  local  d'un  ancien  bal  public  du  bois  de  Boulo- 
gne à  Paris,  pjès  le  ch&teau  de  la  Muette.  Le  Ranelagh 
du  bois  de  Boulogne  a  été  détruit  vers  1852. 

RANGIER,  meuble  d'armoiries  qui  représente  le  fer 
d'une  faux.  Il  paraît  ordinairement  en  pal,  la  pointe  vers 
le  chef.  • 

RANZ  DES  VACHES ,  antique  mélodie  nationale  que 
les  bergers  de  la  Suisse  chantonnent  ou  Jouent  en  faisant 
paître  leurs  troupeaux.  On  raconte  qu'autrefois  les  Suisses 
enrôlés  comme  mercenaires  à  l'étranger  ne  pouvaient 
l'entendre  sans  éprouver  un  invincible  besoin  de  revoir 
leur  pays,  et  qu'ils  désertaient  ou  mouraient  de  langueur. 
C'était  le  souvenir  de  la  patrie  qui  donnait  au  ranz  cette 
puissance;  car  c'est  un  air  fort  simple,  sans  art,  et 
même  grossier;  il  ne  produit  son  effet  qu'au  milieu  des 
montagnes.  C'est  un  trois-huit  qui  commence  par  un 
adagio  plaintif  de  4  mesures  répétant  les  mêmes  notes  ; 
puis  vient  un  allegro,  comme  si  l'àme  secouait  sa  mé- 
lancolie; elle  y  retombe  par  un  court  adagio,  se  relève 
encore  dans  un  nouvel  allegro,  et  tout  se  termine  par  un 
adagio  de  21  mesures.  Le  ranz  n'est  pas  le  môme  pour 
toute  la  Suisse  ;  chaque  canton  possède  le  sien.  Ranz  si- 
gnifie «  suite  d'objets  qui  vont  à  la  file;  »  le  ranz  des 
vaches,  c'est  donc  la  marche  des  vaches.  En  effet,  c'est 
surtout  lorsque  les  vaches  rentrent  au  village,  à  la  fin  de 
la  belle  saison,  que  l'on  joue  cet  air.  B. 

RAOUL  DE  CAMBRAI,  vieille  Chanson  de  geste  qu'on 
peut  diviser  en  quatre  parties.  Dans  la  1'*,  Raoul  réduit 
en  cendres  l'abbaye  d'Origni  ;  dans  la  2*,  Bernier  tue 
Raoul  pour  venger  la  mort  de  sa  mère;  dans  la  3%  Ber- 
nier se  réconcilie  avec  les  parents  de  Raoul ,  et  épouse 
la  fille  de  Gerin  le  Sor  ;  dans  la  4*,  il  est  tué  par  Gerin. 
Les  faits  racontés  dans  cette  Chanson  sont  historiques,  et 
se  rapportent  à  l'an  9A^,  C'est  la  lutte  des  enfants  de 
Herbert  de  Vermandois  contre  l'usurpateur  Raoul,  comte 
de  Cambrai ,  sous  le  règne  de  Louis  d'Outre-mer.  L'au- 
teur de  la  Chanson  est  Bertolcds  de  Laon.  Son  ouvrage  est 
conservé  dans  un  seul  manuscrit  du  xiii*  siècle.  On  y  re- 
connaît un  grand  nombre  d'interpolations,  dont  la  cor- 
rection et  l'élégance  font  un  singulier  contraste  avec  la 
rudesse  et  la  simplicité  du  texte  priniittf.  Ce  roman  a  été 
publié  par  Edw.  Le  Glay,  Paris,  1840.  F.  Histoire  litté- 
raire de  la  France,  tome  XXII.  H.  D. 

RAOUT.  V.  RouT. 

RAPATRIEMENT,  renvoi  dans  leur  patrie  des  hommes 
de  tout  navire  perdu  ou  délaissé  à  l'étranger.  Il  se  fait 
par  les  soins  des  agents  consulaires,  dans  le  plus  bref 
délai  possible,  et  aux  frais  des  armateurs.  On  rapatrie 
également  los  enfants  d'origine  française  abandonnés  en 
pays  étranger,  ceux  d'origine  étrangère  abandonnés  en 
France,  etc. 

RAPIDES.  V.  Cataracte. 

RAPPE,  au  pluriel  Rappen,  monnaie  de  compte  de 
Suisse,  valant  un  centime. 

RAPPEL  (contraction  de  réappel) ^  action  par  laquelle 
on  rappelle  quelqu'un  (K.  Lettre  de  rappel).  Dans  les 
assommées  délibérantes,  on  se  sert  des  expressions  rap' 
pel  à  la  question,  rappel  à  Vordre,  qui  s'expliquent 
d'elles-mêmes. 

RAPPEL,  en  termes  de  Comptabilité,  mesure  par  la- 
quelle on  alloue  à  un  fournisseur  déjà  pavé  une  somme 
complémentaire,  à  un  fonctionnaire  un  traitement  arriéré 
ou  itjmontant  à  une  époque  antérieure  à  son  entrée  en 
fonctions. 

RAPPEL,  batterie  de  tambours  ou  sonnerie  de  clairons 
qu'on  fait  exécuter  pour  rassembler  immédiatement  une 
troupe  de  soldats. 


RAPPEL  (Association  du).  V,  Acre  B'innoii ,  dans  notn 
Dictionnatre  de  Biographie  et  d* Histoire, 

RAPPORT,  compte-rendu  ou  exposé  sommaire  que  l'on 
fait  sur  un  travail  dont  on  a^té  chargé,  sur  une  mission 
que  l'on  a  reçue. 

RAPPORT,  en  termes  de  Droit,  action  de  faire  rentrer 
dans  la  masse  d'une  succession  les  objets  donnés  par  le 
défunt  à  l'un  de  ses  héritiers,  pour  qu'ils  figurent  dkns  Ia 
partage.  Tout  héritier  est  soumis  à  l'obligation  du  rap- 
port ,  à  moins  que  les  dons  et  legs  n'aient  été  faits  e^- 
pressément  à  titre  de  ptédput  et  hors  part,  et  pourvu 
qu'ils  ne  dépassent  pomt  la  quotité  disponible.  Le  rap- 
port n'est  dû  qu'aux  cohéritiers,  et  non  aux  légataires  ou 
aux  créanciers  de  la  succession.  Les  frais  de  nourriture, 
d'entretien,  d'éducation,  d'apprentissage,  d'habillement, 
de  noces  et  présents  d'usage,  no  sont  pas  sujets  au  rap- 
port. Il  n'y  a  pas  obligation  de  rapport  pour  l'héritier 
qui  renonce  à  la  succession  (K.  le  Coà»  Napol,y  art.  843- 
869,  1468  et  1469). 

RAPPORTEUR,  celui  qui  fait  un  rapport  sur  un  tra- 
vail, sur  une  loi,  etc.,  au  nom  d'une  commission.  Dans 
les  tribunaux,  le  Juge-rapporteur  est  celui  qui  a  été 
spécialement  chargé  d'une  affaire,  d'an  règlement  de 
compte,  et  qui  en  fait  le  rapport  k  une  Chambre  ou  à 
une  Cour.  Dans  les  Conseils  de  guerre  et  de  discipline^ 
on  nomme  Rapporteur  l'officier  qui  fait  les  fonctions  de 
ministère  public. 

RAPT  (du  latin  rapttis),  enlèvement  par  violence 
(F.  Enlèvement).  L'ancienne  législation,  outre  ce  fait 
qui  emporte  toujours  pour  nous  l'idée  d'un  crime,  recon- 
naissait le  rapt  par  séduction,  parce  que  la  violence  était 
ici  exercée  contre  les  parents  ;  presque  toujours  elle  les 
punissait  l'un  et  l'autre  de  mort. 

RAQUETTE ,  instrument  dont  on  se  sert  pour  Jouer  à 
la  paume  et  au  volant;  —  nom  que  l'on  donne  chez  plu- 
sieurs peuples  à  la  fusée  de  guerre. 

RAS  DE  CARÈNE,  radeau  dont  on  se  sert  pour  les 
travaux  de  radoub  et  de  carénage. 

RAS  DE  MARéB,  élévRtlon  subito  et  bouillonnement  de 
la  mer  par  la  rencontre  de  deux  marées  ou  de  deux  cou- 
rants opposés. 

RASGADO  (de  l'espagnol  rasgar,  arpéger),  prélude 
que  les  Espagnols  exécutent  en  attaquant  successivement 
toutes  les  cordes  de  la  guitare  avec  le  pouce,  et  en  sui- 
vant la  mesure  et  le  rhythme  des  boléros  et  des  ségni- 
dilles,  dont  il  est  la  ritournelle  ordinaire. 

RASSEMBLEMENT.  V.  Attroupement,  Émbdtb. 

RASTREADOR  (de  l'espagnol  rastro,  trace  du  pied), 
nom  qu'on  donne,  dans  l'Amérique  du  Sud,  aux  Imiicrs 
de  Justice,  à  ceux  qui  cherchent  la  piste  des  coupables. 

RATELIER  (du  Latin  rastellum)^  sorte  d'échelle  atta- 
chée par  l'un  de  ses  montants  le  long  du  mur  d'une 
écurie  ou  d'une  étable,  avec  lequel  elle  forme  un  angle 
où  se  place  le  foin  ou  la  paille  qu'on  destine  aux  animaux. 
— Dans  les  corps  de  garde,  on  nomme  Râtelier  deux  pièces 
de  bois  qui  servent  à  poser  et  à  soutenir  les  fusils. 

RATIFICATION  (du  latin  ratum  facere,  rendre  cer- 
tain ),  en  termes  de  Droit ,  approbation  donnée  à  un  acte 
contre  lequel  la  loi  admettait  la  demande  en  nullité  ou  eu 
rescision  ;  —  en  Diplomatie,  confirmation  par  le  chef  de 
l'État  d'un  traité  que  ses  plénipotentiaires  ont  conclu. 

RATION ,  portion  Journalière  de  vivres ,  de  four- 
rages, etc.,  qui  se  distribue  "uix  troupes  et  aux  matelots. 
Elle  est  déterminée  par  les  règlements.  On  y  a  droit  même 
lorsqu'on  ne  la  consommerait  pas. 

RATIONAL.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictiomt^ire  de  Bio- 
graphie et  d*Histoire, 

RATIONALISME  ,  procédé  de  l'esprit  qui  consiste  dans 
l'emploi  exclusif  du  raisonnement  et  de  la  raison  dans 
l'étude  des  questions  religieuses  et  philodophiques.  Ce- 
pendant on  peut  distinguer  deux  sortes  de  Rationalistes, 
Il  en  est  qui ,  avec  l'emploi  de  la  raison,  admettent  le  fait 
d'une  révélation  primitive  et  commune  à  tout  le  genre 
humain;  en  accordant  que  la  raison  peut  s'élever  jus- 
qu'aux vérités  fondamentales,  telles  que  l'existence  de 
Dieu,  rimmortalité  de  Tâme,  etc.,  ils  Ajoutent  qu'elle 
n'est  pas  suffisante  ;  presque  tous  les  grands  docteurs  du 
moyen  &ge  étaient  rationalistes  en  ce  sens.  Mais  on 
appelle  plus  exclusivement  Rationalistes  ceux  qui  n'ad- 
mettent, au  point  de  vue  religieux,  que  la  raison,  sans 
tenir  compte  de  la  tradition  et  de  la  révélation  ;  et ,  au 
point  de  vue  philosophique,  ceux  qui  ne  voient  que  dans 
la  Raison  la  source  de  toutes  nos  connaissances.  —  On  a 
donné  le  nom  de  Rationalisme  à  un  mouvement  qui  s'est 
propagé  en  Allemagne  et  qui  a  pour  objet  llnterprétatioa 
critique  de  l'Ancien  et  du  Nouveau*Te8tamenti  comin^ 


RAV 


1535 


RÊA 


ce  mouvement  conduisit  aux  doctrines  de  Semler,  de 
Rœhr,  de  Wegscheider,  de  Paulus,  de  Genesius,  de 
Strauss,  de  Feuerbach,  doctrines  cpii  ne  vont  à  rien 
moins  qu'à  nier  toute  révélation ,  et  auxquelles  Spinoza 
avait  imprimé  une  forte  impulsion  par  son  Tractatus 
theologicQ-politicuSf  le  mot  Rationalisme  a  désigné  toute 
doctrine  qui  semblait  vouloir  marcher  sans  la  Révéla^ 
tion.  R. 

RATIONNEL,  en  termes  de  Philosophie,  ce  qui  est 
fondé  sur  la  raison  ou  sur  le  raisonnement.  Le  mot  s'op- 
pose à  empirique. 

RATISBONNE  (Église  S<-Pierre,  à],  église  cathédrale 
commencée  en  1274  par  André  Egl,  et  encore  inachevée 
aujourd'hui.  On  Ta  restaurée  en  1838.  Malgré  la  réputa- 
tion que  lui  ont  faite  les  Allemands,  elle  témoigne  de  la 
décadence  de  l'architecture  religieuse.  Ia  façade,  qui  est 
de  la  fin  du  xv*  siècle,  rappelle  plutôt  un  hôtel  de  ville 
qu'une  église,  avec  son  balcon  du  premier  étage,  sur 
lequel  s'ouvrent  deux  grandes  fenôtres,  surmontas  d'un 
pignon  aigu  dont  le  milieu  est  marqué  par  une  tourelle 
féodale.  Les  deux  tours  qui  accompagnent  ce  frontispice 
profane,  et  qui  s'élèvent  à  une  hauteur  de  70  met.,  ne 
sont  pas  terminées;  les  sculptures  qui  y  sont  répandues 
sont  de  l'ordre  le  plus  commun;  l'une  de  ces  tours,  celle 
do  Nord,  est  appelée  Tùwr  de  VAne,  parce  que  des  &nes 
furent  employés  au  transport  des  matériaux  destinés  à 
sa  construction.  La  cathédrale  de  Ratisbonnfî  a  la  forme 
extérieure  d'une  basilique,  car  la  longueur  de  la  croisée 
ne  dépasse  pas  la  largeur  de  la  nef  et  de  ses  collatéraux. 
One  autre  particularité  intéressante,  ce  sont  les  trois 
chevets  gothiques  qui  terminent  les  trois  nefs.  A  l'inté- 
rieur, l'édifice  a  111  met.  de  long,  52  de  large,  et  40  de 
haut.  On  y  remarque  :  dans  la  nef  majeure,  le  monu- 
ment en  marbre  élevé  en  1598  à  Tévèque  Ph.  Guillaume, 
avec  une  statue  en  bronze;  dans  le  collatéral  de  gauche, 
le  tombeau  du  prince-primat  Gh.  de  Dalberg,  ex&uté  en 
alb&tre  par  Zendemeneghi,  d'après  les  dessins  de  Ca- 
nova;  divers  mausolées  d'évôques,  rangés  dans  les  bas 
côtés  du  chœur;  le  maltre-autel,  en  argent  massif;  les 
vitraux,  exécutés  de  nos  jours  d'après  les  dessins  de 
Schnorr  et  de  Ruben,  etc.  Les  cloîtres  yoislns  de  la  ca- 
thédrale sont  du  XV*  siècle;  ils  renferment  des  bustes  et 
des  statues  antiques  et  du  moyen  &ge,  des  tombeaux, 
des  pierres  sépulcrales.  Sur  leurs  flancs  se  trouvent  une 
petite  église  et  un  baptistère,  antérieurs  à  la  cathédrale 
actuelle. 

RATisBONRB  (Abbayo  de  S^Emmeran,  à),  immense  amas 
d'églises  et  de  cloîtres,  qui  montre  quâ  accroissement 
cette  abbaye  bénédictine,  fondée  en  052,  agrandie  par 
Charlemagne,  et  aujourd'hui  sécularisée,  pnt  de  siècle 
en  siècle.  Une  entrée  gothi^e,  façonnée  au  xv*  siècle 
dans  un  goût  élégant,  conduit  à  une  sorte  d'avant-cloltre 
byzantin  du  xi*  siècle,  d'où  Ton  passe  sous  un  grand 
portique  roman,  qui  date  peut-être  de  la  fondadon.  On 
pénètre  ensuite  dans  trois  églises  Juxtaposée»  :  celle  du 
Nord  est  consacrée  à  S^  Rupert;  celle  du  Sud,  recon- 
struite de  1642  à  1731,  porte  le  nom  de  S^  Emmeran,  dont 
elle  contient  le  tombeau  ;  celle  du  milieu,  accompagnée 
de  bas  côtés,  offre  les  formes  byzantines,  défibrées  par 
des  constructions  et  des  ornements  du  xvm"  siècle,  et,  à 
l'une  de  ses  extrémités,  on  voit,  au-dessus  d'une  a7pte, 
un  vaste  chœur  provenant  d'une  basilique  primitive.  Les 
anciens  b&timents  de  l'abbaye  sont,  depuis  1809,  le  pa- 
lais des  princes  de  Tour-etr-Taxis,  qui  ont  fait  bâtir,  au 
milieu  des  cloîtres,  une  chapelle  gothiaue,  avec  caveau 
sépulcral  pour  les  membres  de  leur  famille. 

RATITES ,  nom  que  les  antiquaires  donnent  aux  mé- 
dailles portant  la  figure  d'une  proue  (en  latin  rates), 

RATURE  (du  bas  latin  radiotura,  action  de  rayer). 
Toute  rature  dans  un  acte  authentique  doit  être  faite  de 
façon  qu'on  puisse  compter  le  nombre  des  mots  sur  les- 
quels elle  s'étend.  Le  nombre  des  mots  annulés  doit  être 
mentionné  par  un  renvoi  à  la  marge  ou  à  la  fin  de  l'acte; 
il  faut  ({ue  toute  mention  de  ce  genre  soit  approuvée  par 
les  parties  au  moyen  d'un  parafe.  L'omission  de  ces  for- 
malités peut  entraîner  la  nullité  des  ratures,  ou  même  de 
l'acte  (Loi  du  25  nivôse  an  xi;  Code  NapoL,  art.  42). 

RAVALEMENT  {d'aval,  en  descendant),  travail  qu'on 
fait  à  un  mur,  à  une  façade,  lorsque,  après  les  avoir 
élevés,  on  les  crépit  du  haut  en  bas.  On  retouche  les 
angles  et  les  parties  apparentes  des  pierres,  pour  corriger 
les  imperfections  de  leur  taille;  on  sculpte  les  moulures 
des  bandeaux,  des  fenêtres,  et  en  général  tous  les  orne- 
ments. * 

lAVALEMENT,  terme  de  facture  des  orgues.  Il  désigne  les 
botes  ajoutées  à  l'étendue  ordinaire  des  claviers.  Un  ra* 


▼alement  aux  pédales  part  de  Vut,  et  peat  se  prolonge! 
au-dessous  de  cette  note  Jusqu'au  fa.  Les  notes  qui  ex- 
cèdent la  4"  octave  dans  les  dessus  des  claviers  à  la  main 
constituent  aussi  un  ravalement,  qui,  dans  la  plupai-t 
des  orgues,  augmente  l'étendue  ordinaire  d'une  demi« 
octave.  F.  G. 

RA VELIN.  F.  Demi-ldrb. 

RAVENNE  (Baptistère  de).  7.  BAPnsTiRB. 

RAVBNNB  (Église  S^-ViTAL,  à),  le  type  le  plus  complet  de 
l'architecture  byzantine  en  Occident.  Elle  fut  élevée  au 
VI*  siècle,  pendant  le  règne  de  Justinien,  sur  un  plan  oc- 
togone. Ses  façades  extérieures,  dénaturées  par  la  con- 
struction d'un  vestibule  moderne,  offrent  peu  d'intérêt 
aujourd'hui.  A  l'intérieur,  huit  pillera,  correspondant 
aux  huit  angles,  forment  une  espèce  de  galerie  circu* 
laire  :  entre  les  pilien  s'élèvent  deux  à  deux  des  co- 
lonnes supportant  des  arcades.  Une  galerie,  établie  au 
premier  étaige,  forme  des  tribunes  semblables  à  celles 
qui,  dans  les  églises  d'Orient,  étaient  réservées  aux 
femmes.  Une  coupole  hémisphérique,  construite  en  vases 
d'argile  emboîtés  les  uns  dans  les  autres,  couronne  le 
monument,  et  l'édaire  par  des  fenêtres  percées  dans  la 
partie  basse  de  la  voûte.  Tout  est  revêtu  de  marbre.  Les 
mosaïques  du  chœur  ont  conservé  leur  fraîcheur  primi- 
tive :  elles  représentent  Justinien  précédé  de  son  clergé 
et  an  milieu  de  sa  cour,  et  l'impératrice  Théodora  appor- 
tant avec  ses  femmes  des  ofiirandes  au  temple.  D'autres 
mosaïques,  dont  les  sujets  ont  été  tirés  de  l'Ancien  et  du 
Nouveau  Teatament,  ornent  le  reste  de  l'édifice.  On  con- 
serve, près  du  maître-autel,  on  précieux  bas-relief  en 
marbre  de  Parus,  provenant  d'un  temple  de  Neptune,  et, 
dans  la  sacristie,  un  autre  bas-relief  où  est  figurée  l'apo- 
théose d'Auguste. 

RAVITATLLEAIENT,  introduction  de  vivres  et  de  mu« 
nitions  dans  une  place  forte.  G'est  une  importante  et  dif- 
ficile opération  pour  une  armée  de  secoure. 

RAWIS,  nom  que  donnent  les  Arabes  à  des  espèces 
de  rapsodes  ou  rédtateura  qui  débitent  les  compositions 
des  poètes. 

RAYAS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dicttotmatre  de  Biogra^ 
phie  et  d'Histoire, 

RAYONNANT  (Style).  V.  Ogivale  (Architecture). 

RAZZIA.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictiormaire  de  Biogror 
phie  et  d* Histoire. 

RÉ  ou  RA,  dieu  du  soleil  chez  les  anciens  Égyptiens. 
II  est  représenté  sous  la  figure  d'un  homme  à  tête  d'é- 
pervier,  surmontée  du  pschent,on  plus  ordinairement  du 
disque  solaire. 

RiS,  note  de  musique,  appelée  D  dans  l'anrienne  solmi- 
sation.  G'est  le  2"  degré  de  notre  échelle  musicale.  —  Ou 
donne  aussi  le  nom  de  ré  à  la  3'  corde  du  violon,  à  la 
2*  de  l'alto,  du  violoncelle  et  de  la  contre-basse,  parce 
qu'elles  sonnent  l'unisson  ou  Toctave  de  la  note  ri. 

RÉACTION,  en  Politique,  action  en  sens  contraire  de  ce 
qui  se  faisait  auparavant.  Les  partis  qui  arrivent  au  pou- 
voir après  avoir  été  opprima  apportent  des  maximes  nou- 
velles ou  opposées  dans  la  conduite  des  afiîûres  :  mais  la 
réaction  ne  se  borne  pas  d'ordinaire  à  professer  et  à 
appliquer  des  principes,  elle  satisfait  des  rancunes  et  des 
vengeances. 

REAL,  monnaie.  V.  notre  DictUmnavre  de  Biographie 
et  d'Histoire. 

RÉALISME,  dans  le  langage  de  la  Littérature  et  des 
Beaux-Arts,  signifie  imitation  systématique  de  la  réalité. 
La  nature  physique  et  morale  peut  être  imitée  dans  les 
œuvres  d'imagination  et  dans  celles  des  arts  représenta- 
tifs suivant  deux  méthodes  différentes  :  ou  l'on  se  pro- 
pose de  reproduire  exactement  la  réalité,  c.-Â-d.  les  objets 
tels  qu'ils  sont  extérieurement;  ou  l'on  veut  exprimer  ce 
qu'on  y  voit,  ce  qu'on  y  sent,  quelquefois  ce  qu'on  y 
voudrait  trouver.  Dans  le  premier  cas,  c'est  la  chose 
qu'on  veut  peindre  ;  dans  le  second,  on  veut  rendre  Vidée 
qu'on  s'en  forme.  Le  réalisme  est  la  méthode  qui  ren- 
ferme l'art  dans  la  représentation  de  la  chose;  Vidées 
lisme,  si  l'on  peut  employer  ce  mot,  est  celle  qui  aspire 
à  l'expression  de  l'idée.  Contemplons,  par  exemple,  la 
mer  agitée  :  les  vagaes  se  soulèvent,  s'abaissent,  se 
succèdent,  se  choquent,  sonnent,  écument,  se  confon» 
dent ,  se  relèvent.  Qu'y  ap-tp-il  lii-dedans?  Une  chose  faite, 
il  est  vrai ,  pour  étonner  les  yeux,  étourdir  les  oreilles, 
donner  le  vertige;  mais,  si  l'on  se  borne  à  l'extérieur, 
rien  qu'une  chose.  Un  spectateur  inintelligent,  mais  doué 
des  mêmes  sens  que  vous,  la  percevrait  comme  vous. 
Essayez  de  la  repràenter  par  le  langage,  par  la  peinture, 
par  la  musique,  vous  ne  rappellerez  que  des  figures,  des' 
tons  et  des  mouvements,  vous  ne  parlerez  qu'aux  sensi  a 


RËA 


1536 


RRA 


BoIm  que,  lans  le  voaloir,  tous  n*y  mêliez  quelque  idée 
tirée  de  vous-même.  Car  il  est  presque  plus  facile,  îl  est 
au  moins  plus  naturel ,  d*animer  ce  tableau,  c.-à-d.  d*y 
introduire  quelque  chose  de  notre  imagination  toujours 
artive,  que  de  s'enfermer  strictement  dans  la  peinture  de 
Tobjet  matériel.  En  effet,  supposez  sur  ces  flots  agités  un 
▼aisj^eau  et  des  hommes  en  danger  :  aussitM  ce  désordre 
prend  un  sens,  ce  vain  mouvement  devient  une  menace. 
Peignez  une  digue  opposée  par  les  hommes  à  la  fureur 
des  flots;  que  la  mer  semble  réunir  ses  forces  pour 
s*élancer  à  Tassant  de  ce  rempart,  derrière  lequel  s*abrite 
un  peuple  :  alors  Télément  soulevé  prend  un  caractère  ; 
c*est  une  puissance  ennemie,  c*est  un  adversaire  infati- 
gable de  Thomme.  Donnez -lui  encore  un  sens  plus 
abstrait  :  qu'elle  soit  la  saisissante  image  de  la  mobilité 
et  de  la  diversité,  ou  une  sorte  d'emblème  de  Tinflui. 
Pensez,  rêvez,  sentez;  nutis  toujours  faites  en  sorte  que 
dans  un  objet  sensible  un  voie  quelque  chose  par  où  cet 
objet  parle  à  notre  esprit.  —  II  en  est  de  même  de  la  na- 
ture morale  ;  elle  peut  à  certaines  conditions  demeurer 
pour  notre  esprit  une  simple  chose,  un  objet  vide  de 
sens.  Les  phénomènes  intellectuels  et  moraux,  les  traits 
de  carat^ère  et  de  mœurs  n'ont  de  signification  qu'au- 
tant qu'ils  nous  paraissent  se  rattacher  à  l'ensemble  de 
la  nature  humaine,  telle  que  nous  la  connaissons  par 
noua-mêmes  et  par  l'ezpénence.  En  un  mot,  dans  les 
faits  psychologiques,  nous  ne  comprenons  que  ceux  dont 
nous  apercevons  la  raison.  Supposons  quelque  infirmité 
de  l'intelligence,  telle  que  l'idiotisme,  la  folie,  les  hallu- 
cinations; quelque  monstruosité  morale,  telle  que  le  goût 
du  crime  pour  le  crime  même  ;  considérons  ces  singula- 
rités en  elles-mêmes,  elles  ne  nous  offriront  aucun  sens. 
Elles  se  trouvent  pourtant  dans  la  réalité,  et  peuvent  être 
l'objet  de  l'imitation.  Mais  l'écrivain  qui  les  représentera 
devra  les  lier  avec  leurs  causes  ou  leurs  effets,  les  mettre 
en  opposition  avec  la  nature  saine,  en  faire  ressortir  des 
motifs  de  crainte,  de  haine,  de  compassion ,  enfin  leur 
trouver  quelque  raison  d'harmonie  avec  le  fond  de  nos 
pensées  et  de  nos  sentiments;  ou  bien  il  n'aura  fait 
qu'une  représentation  stérile ,  et  en  quelque  sorte  pu- 
rement mécanique,  il  n'aura  pas  mis  dldée  dans  son 
œuvre. 

Cette  absence  d'idée  est-elle  professée  systématique- 
ment? Existe-t-il  des  écrivains  ou  des  artistes  qui  se  soient 
attachés  à  reproduire  scrupuleusement  la  réalité,  sans  y 
ajouter  aucune  idée  venant  de  leur  esprit?  Si  l'on  répon- 
dait affirmativement,  peut-être  faudrait-il  citer  des  noms, 
et  des  noms  de  contemporains,  ce  dont  nous  devons  nous 
abstenir.  Peut-être  d'ailleurs  aurait-on  droit  d'objecter 
que  tel  ou  tel  nom  ne  rappelle  que  l'impuissance  d'un 
esprit  fait  pour  reproduire  comme  un  miroir  la  réalité, 
sans  avoir  la  faculté  de  la  féconder  par  la  pensée;  que  tel 
enfin  n'a  pas  une  doctrine,  mais  seulement  une  manière, 
imposée  par  la  stérilité  de  son  imagination,  et  qu'il  dé- 
guise de  prétentions  systématiques  pour  racher  la  nudité 
de  son  génie.  Laissons  donc  la  question  de  personnes,  et 
essayons  de  saisir  les  doctrines. 

Nul  ne  professe  le  mépris  de  toute  idée;  mais  plus  d'un 
croit  ta  réalité  digne  par  elle-même  d'être  l'objet  de 
l'imitation,  et  n'admet  l'idéalisme  que  dans  certaines 
limites.  Il  faut  donc  s'entendre  :  de  quelle  réalité  et  de 
quel  idéalisme  parle-t-on?  Veut-on  dire  que  l'art  (nous 
prenons  ce  mot  dans  son  acception  la  plus  étendue)  ne 
doit  pas  s'égarer  dans  le  domaine  des  rêves,  de  manière 
ft  n'être  plus  mie  Texpression  de  la  fantaisie  de  chacun; 
et  oue,  pour  rempêcher  de  dégénérer  en  caprice  indivi- 
duel, il  faut  le  ramener  à  l'étude  et  à  l'imitation  du 
réel ,  qui  est  le  seul  fondem<*.nt  solide  des  œuvres  d'ima- 
gination? Tous  les  bons  esprits  souscriront  à  cette  doc- 
trine; mais  ce  n'est  pas  la  peine  de  créer  un  nom  nou- 
veau pour  une  théorie  aussi  ancienne  que  l'art  classique. 
Il  s'agit  donc  d'autre  chose;  d'autant  plus  que  tel  écrivain 
dont  on  fait  l'apôtre  du  réalisme  ne  renonce  nullement  à 
la  liberté  de  concevoir  les  choses  à  sa  manière,  et  môme 
semble  faire  du  réalisme  une  nouvelle  forme  de  l'indé- 
pendance absolue  du  génie.  Or,  qu'est-ce  que  cette  indé- 
pendance, sinon  l'idéalisme  poussé  à  sa  dernière  limite? 
Car,  l'idée  étant  ce  qui  vient  de  l'auteur  et  ce  qu'il  im- 
posa aux  choses  sur  lesquelles  il  travaille,  plus  il  croit  ne 
relever  que  de  son  sens  propre,  plus  il  est  porté  à  mettre 
ses  idées  personnelles  à  fa  place  des  choses.  On  arriverait 
donc  à  cette  bizarre  conclusion,  que  l'école  qu'on  appelle 
réalinte  serait  la  plus  idéaliste  de  toutes  les  écoles. 

Mais  nous  sommes  égarés  par  la  rigueur  des  termes, 

'  tant  il  est  difficile  de  s'entendre  quand  les  termes  sont 

ttal  définis  s  ramenons  à  l'usage  commun  des  mots,  et  ces* 


tons  d'être  rigoureux  pour  être  plus  vrais.  —  Tous  les 
maîtres,  dans  la  poésie  et  dans  les  arts,  ont  cherché  à 
donner  à  leun  créations  une  certaine  perfection  relative 
qui  ne  se  trouve  pas  dans  la  réalité.  Nul  objet  réel  n'est 
accompli  dans  son  genre.  La  beauté  et  la  laideur,  ra  bonté 
et  la  méchanceté  ne  sont ,  dans  les  œuvres  de  la  nature, 
pour  ainsi  dire,  qu'à  l'état  d'ébauche.  L'observation  aper- 
çoit ce  qui  est ,  l'imagination  conçoit  ce  qui  manque.  Le 
propre  de  l'art  est  d'exécuter  ce  qui  est  conçu  par  l'es- 
prit ,  c.-à-d.  de  réaliser  cette  perfection  qui  n'était  aupa- 
ravant qu'une  idée.  Mais  cette  idée  de  perfection  est-elle 
quelque  chose  d'absolu,  qu'on  saisisse  du  premier  coup, 
et  au  delà  duçfuel  il  n'y  ait  plus  rien?  Nullement:  c'est 
une  limite  qui  fuit  toujoura;  on  s'en  approche  sans  cesse, 
on  ne  l'attemt  jamais,  ni  par  la  pensée  ni  par  l'exécution. 
Cette  perfection  insaisissable,  et  cependant  toujours 
pourauivie,  est  ce  qu'on  appelle  l'idéal.  11  recule  selon  la 
portée  de  l'esprit  qui  le  considère,  et  ainsi  chaque  esprit 
a  son  idéal  :  il  diffère  encore  selon  la  nature  du  génie 

gui  le  conçoit  ;  l'idéal  de  Michel-Ange  n'est  pas  celui  de 
laphafil ,  Racine  en  a  un  autre  que  Corneille.  De  même 
diffère  celui  des  simples  spectateura,  des  juges  désinté- 
ressés des  œuvres  d'art  :  aussi  chacun  a-t-il  son  écrivain, 
son  artiste  favori.  Et  cependant  un  ouvrage  fait  en  vue 
d'un  idéal,  quel  qu'il  soit,  porte  un  caractère  auquel 
aucun  bon  Juge  ne  se  méprend ,  tant  il  s'éloigne  de  la 
simple  représentation  de  la  réalité. 

Ce  oju'il  y  a  de  commun  entre  tous  ceux  qui  poursui- 
vent l'idéal,  c'est  l'aspiration  vera  la  beauté,  la  grandeur, 
la  force,  ou  vera  des  qualités  inférieures,  mais  de  même 
genre;  et,  d'autre  part,  l'averaion  pour  ce  qui  est  vul- 
gaire ou  mesquin  ;  c'est  l'enthousiasme  pour  tout  ce  qui 
peut  élever  l'àme  en  la  touchant  et  la  charmant ,  et  le 
mépris  pour  tout  ce  qui  affadit  le  cœur  et  rapetisse  l'es- 
prit. S'il  existe  une  école,  qu'on  l'appelle  réaliste  ou  au- 
trement, qui  se  déclare  contraire  à  cette  noble  manière 
de  concevoir  l'art,  elle  n'est  digne  que  de  raillerie  ou  de 
pitié.  I>roscrire  des  arts  l'idéal ,  c'est  nier  l'art  lui-même; 
déclarer  ciu'on  s'en  tient  dans  ses  œuvres  à  la  réalité, 
c'est  répudier  le  glorieux  titre  de  l'homme  d'imagination, 
celui  de  créateur  ;  s'enfermer  dans  la  reproduction  de  la 
réalité,  c'est  aspirer  au  rang  de  manœuvre.  Il  faut  sans 
doute  beaucoup  de  talent  pour  peindre  les  choses  telles 

3u'e]les  sont  ;  mais  on  en  peut  dépenser  beaucoup  dans 
es  œuvres  stériles  et  funestes,  et  alora  mieux  vaudrait 
n*avoir  rien  fait.  L'homme  qui  travaille  pour  faire  dire 
qu'il  a  du  mérite,  bien  que  son  œuvre  soit  en  elle-même 
vaine  ou  mauvaise,  n'est  pas  digne  de  l'attention  des  gens 
sensés.  Quand  vous  aurez  mis  votre  temps  et  votre  ta- 
lent à  répéter  ce  qui  ne  m'intéresse  pas  ou  me  dégoûte, 
vous  n'aurez  rien  changé  à  mes  sentiments.  Un  écrivain 
qui  a  fait  un  livre  en  faveur  du  réalisme,  en  protestant 
qu'il  ne  sait  pas  ce  que  c'est,  dit  avec  ironie  :  a  Nul  doute 
qu'à  un  moment  donné,  les  critiques,  pris  dans  leur 
proprer piège,  ne  cherchent  à  diviser  les  écrivains  en 
bons  et  en  mauvais  réalistes.  »  Nous  ne  savons  pas  en- 
core s'il  peut  y  en  avoir  de  bons  :  ce  que  nous  affirmons, 
c'est  qu'il  y  en  a  de  mauvais  ;  ceux-là  sont  les  écrivains, 
les  peintres,  les  sculpteura,  les  musiciens  qui  prennent 
sans  choix  autour  d'eux  leura  objets  d'imitation  ;  il  y  en 
a  même  qui  choisissent  le  laid,  le  bas,  le  trivial,  les  figures 
sans  expression ,  les  passions  sottes  ou  brutales,  et  qui 
s'attachent  à  reproduire  ces  objets  avec  une  indifférence 
qu'ils  prennent  pour  la  sérénité  de  l'art.  Ceux-là  sont  les 
mauvais  réalistes,  soit  qu'ils  se  parent  de  ce  nom,  soit 
qu'ils  le  répudient. 

Mais  il  y  a  une  autre  manière  de  se  séparer  de  la  grande 
tradition  de  l'art  classique,  qui  a  pour  but  l'idéal.  L'idéal 
a  un  double  caractère,  général  et  personnel  :  il  doit  plain* 
à  tous,  et  il  sort  des  méditations  d'un  seul.  Il  faut  qu*il 
n'ait  rien  d'exclusif,  et  en  même  temps  qu'il  porte  une 
empreinte  particulière;  aussi  se  form&-t-il,  d'une  part, 

£ar  voie  d'abstraction, et,  de  l'autre,  par  voie  d'invention, 
l'artiste  choisit,  dans  les  modèles  diven  que  lui  présente 
la  nature  réelle,  ce  qui  convient  le  mieux  à  son  senti- 
ment et  à  son  dessein,  et  il  néglige  le  reste.  Car  tout  se 
trouve  mêlé  dans  la  nature,  dont  le  plan  est  trop  Taste 
et  trop  complexe  pour  les  œuvres  humaines;  il  faut  donc 
choisir  et  isoler,  c-à-d.  abstraire.  D'autre  part ,  lé  génie 
de  l'auteur  anime  ces  fragments  et  ces  extraits,  en  les 
combinant  sous  une  idée  qui  vient  de  lui  ;  par  là  il  im- 
pose aux  choses  sa  manière  de  voir.  Les  représentations 
qu'il  donne  des  objets  sont  donc  en  même  temps  des  re- 
présentations de  ses  pensées  personnelles.  Or,'  il  peut 
sortir  de  ce  double  procédé  deux  exagérations  :  une 
•fattractioa  iiidiscrôte  enlèrt  à  la  natore  sa  fie  ei  aoa 


AEB 


1537 


REC 


moovemect,  ou  un  excès  du  personnalité  dans  l*0Ba?re  de 
l'artiste  en  fait,  au  lieu  d'une  imitation  de  la  nature,  une 
créaiioD  capricieuse  et  tout  à  fait  étrangère  à  la  yérité. 
L'un  de  ces  excès  mène  à  la  sécheresse  et  au  style  de 
convention,  Tautre  à  la  fantaisie  effrénée.  Le  premier  a 
produit  dans  notre  siècle  la  froideur  des  faux  classiques, 
le  second  a  donné  naissance  aux  exagérations  du  roman- 
tisme. Pour  se  placer  entre  ces  deux  extrêmes,  il  faut  se 
tenir  le  plus  près  possible  de  la  nature  réelle.  L'observa- 
tion attentive  et  intelligente  de  la  réalité  peut  seule  em- 
pêcher l'esprit  de  s'égstf^r  soit  dans  le  vide,  soit  dans  la 
fantaisie.  La  vraie  nature  est  le  correctif  de  la  fausse  nar 
cure.  Ainsi,  que  l'art,  fatigué  d'exagérations  contraires, 
qui  ont  troublé  tous  les  esprits,  revienne  au  modèle  im- 
muable de  la  réalité,  rien  de  mieux,  pourvu  quMl  n'ab- 
dique pas  ses  titres  de  noblesse.  Si  le  réalisme  n'est  pas 
autre  chose  qu'une  réaction  du  bon  sens  contre  l'oubli 
de  la  vraie  nature,  qu'il  soit  le  bienvenu  dans  le  domaine 
de  l'art. 

Un  prodigieux  génie,  qu'on  ne  dira  pas  dépourvu  du 
don  de  création,  Goethe,  fut  de  son  vivant  accusé  de 
réalisme.  11  accepta  l'accusation.  Sou  réalisme  consistait 
en  deux  points  :  ne  pas  exclure  de  ses  créations  les  pei 
sonnages  humbles  et  les  sentiments  familiers,  pourvu 
qu'ils  offrissent  des  caractères  intéressants  ;  mettre  toute 
BOL  imagination  à  créer  des  êtres  assez  complexes,  asse? 
divers,  pour  qu'ils  parussent  sortir  tout  entiers,  non  de 
l'art,  mais  de  la  réalité.  En  un  mot ,  tandis  que  les  créa- 
tions de  l'art  portent  ordinairement  le  cachet  de  leur  au- 
teur, Gœthe  a,  quand  il  l*a  voulu,  dissimulé  le  sien.  On  voit 
l'œuvre,  et  l'on  cherche  en  vain  l'auteur.  L'homme  môme, 
que  Pascal  se  réjouissait  de  trouver  dans  l'écrivain,  est 
absent  :  nulle  trace  de  ses  affections.  De  môme,  la  nature 
paraît  indifférente  aux  objets  qu'elle  enfante  :  ils  vivent, 
et  elle  continue  de  produire.  Ce  genre  de  réalisme  est  le 
secret  d'un  génie  qui  n'a  guère  de  pareils.  Tel  autre,  qui 
affecte  cette  étrange  indifférence,  obtient  du  même  coup 
Ja  nôtre,  ou  révolte  nos  affections  et  notre  honnêteté.  Ce 
modèle  est  donc  dangereux  à  suivre.  Mais  sur  le  premier 
point,  Gœthe  a  devancé  son  siècle.  Les  révolutions  de  la 
société  se  propagent  dans  les  arts.  Depuis  que  les  bar- 
rières que  la  naissance  mettait  autrefois  entre  les  hommes 
se  sont  abaissée,  l'art  est  devenu  moins  dédaigneux  dans 
le  choix  de  ses  personnages.  II  a  découvert  que  les  plus 
iiuiubles  oui  une  ùdue  et  un  cœur,  qui  valent  bien  la 
peine  d'être  analysés  et  représentés.  11  n'y  a  plus  d'ex- 
clusion de  conditions  dans  le  domaine  du  beau.  Si  tous 
les  hommes  ont  droit  à  l'attention  de  l'artiste,  l'intérêt 
qu'ils  inspirent  s'étend  nécessairement  sur  les  lieux  où 
<ls  vivent ,  sur  les  circonstances  dans  lesquelles  se  déve- 
loppent leurs  sentiments  et  leurs  pensées.  Sans  doute, 
dans  le  cadre  où  ils  sont  placés,  comme  dans  leurs  per- 
sonnes mêmes,  l'élégance  et  le  charme  des  sens  peuvent 
manquer.  L'intérêt  moral  doit  donc  suppléer  aux  agré- 
ments physiques  ;  de  là,  une  révolution  dans  l'art  :  moins 
de  grâce  extérieure,  et  plus  de  sensibilité.  De  beaux  ta- 
lents ont  donné  l'exemple  :  ils  ont  montré  l'attrait  que 
peut  offrir  la  peinture  de  la  vie  rustique,  les  drames  que 
renferme  la  condition  des  obsciuv  travailleurs,  les  sources 
de  pathétique  qui  sont  cachées  dans  des  régions  trop 
longtemps  méprisées.  C'est  en  serrant  de  plus  près  la 
réalité,  qu'ils  ont  ouvert  ces  voies  nouvelles  ;  mais,  gui- 
dés par  un  Juste  sentiment  de  l'art,  ils  ont  vu  que  cette 
réalité  sévère  avait  aussi  son  idéal ,  et  ils  l'ont  poursuivi. 
Ce  n'est  pas  à  ces  esprits,  il  est  vrai ,  qu'on  donne  le 
nom  de  réalistes  :  on  le  réserve  à  ceux  qui  croient  que  la 
réalité  toute  crue,  quelle  qu'elle  soit,  est  digne  d'imita- 
tion; qui  proscrivent  l'idéal  comme  un  mensonge;  qui 
relèguent  la  poésie  parmi  les  puérilités  passées  de  mode, 
et  qui  placent  l'avenir  de  l'art  dans  la  négation  même  de 
l'art.  Cg  réalisme-là  n'a  pas  encore  d'histoire;  il  affirme 
lui-même  n'être  qu'une  forme  transitoire  ;  il  a  raison  : 
c'est  le  cauchemar  d'une  génération  ennuyée  et  fatiguée, 
parce  cp'elle   n'a  que  des  appétits  sensuels,  avec  un 
esprit  vide  de  toute  généreuse  aspiration.  Ce  malaise  ne 
saurait  durer  longtemps,  et  peut-être  avons-nous  parlé 
trop  longuement  de  ce  qui  ne  mérite  oue  l'oubli  et  sera 
vite  oublié.  V.  Théry,  le  Génie  philosopkique  et  littéraire, 
Paris,  18C4,  în-8°,  liv.  IV,  c  2.  C. 

aéALisMB,  terme  de  philosophie  scolastique.  V.  Sco- 

LASTigUB. 

REBAB,  instrument  de  musiaue  des  Arabes.  Il  a  la 
forme  d'une  tortue  ou  d'une  sphère,  avec  un  manche 
rond,  et  est  monté  de  3  cordes  en  crin,  droites  et  non 
tressées  ;  on  en  Joue  avec  un  archet,  en  le  tenant  sur  les 
seaoox»  U  jr  a  des  rebab  montés  de  deux  cordes,  et  d'au- 


tres qui  n'en  ont  qu'une  :  on  no  peut  faire  sur  ceax-d 
que  0  notes  formant  une  sixte  mineure.  B 

REBEC  (de  l'arabe  rebab,  ou  de  l'hébreu  rebiac,  ou  du 
celtique  r«6er),  sorte  de  violon  à  3  cordes  accordées  de 
quinte  en  quinte,  mi,  la,  ré.  On  en  Jouait  avec  un  ar- 
chet. Instrument  favori  des  anciens  ménestrels,  il  avait 
la  forme  d'un  battoir  de  blanchisseuse  échancré  par  les 
quatre  angles,  au  lieu  d'être  arrondi  comme  le  violon 
moderne  ;  on  ne  trouvait  dans  sa  construction  ni  voûtes  ni 
éclisses;  la  table  d'harmonie,  au  milieu  de  laquelle  était 
une  rosace,  était  collée  à  plat  sur  les  bords  du  corps  de 
l'instrument.  11  y  eut  des  dessus,  des  hautes -contre,  des 
tailles  et  des  basses  de  rebec.  Cet  instrument  s'est  main- 
tenu en  France  jusqu'à  la  fin  du  xvii^  siècle,  et  on  le 
trouve  encore  aujourd'hui  chez  les  paysans  de  quelques 
cantons  de  l'Angleterre.  B. 

RËBEL,  un  des  noms  de  la  vielle  au  moyen  âge. 

RÉBELLION ,  résistance  avec  violence  et  voies  de  fait 
aux  officiers  ministériels,  aux  gardes  champêtres  et  fores- 
tiers, à  la  force  publique,  aux  percepteurs  des  taxes  et 
contributions,  aux  porteurs  de  contraintes,  aux  préposés 
des  douanes,  aux  officiers  et  agents  de  la  police  adminis- 
trative ou  judiciaire,  agissant  pour  l'exécution  des  lois, 
des  ordres  ou  ordonnances  de  l'autorité  publique,  des 
mandats  de  justice  ou  jugements.  Procès-verbal  de  ré- 
bellion doit  être  dre^  par  tout  officier  public  insulté 
dans  l'exercice  de  ses  fonctions.  La  rébellion  est  qualifiée 
:rime  :  1»  quand  elle  a  été  commise  par  plus  de  vingt 
personnes,  armées  ou  non  armées;  dans  le  premier  cas, 
elle  est  punie  des  travaux  forcés  à  temps;  dans  le  se- 
cond, de  la  réclusion  ;  2*  ^uand  elle  a  été  commise  par 
une  réunion  armée  de  trois  personnes  et  plus  jusqu'à 
vingt,  elle  est  alors  punie  de  la  réclusion.  Dans  les  autres 
cas,  c'est  un  simiile délit,  puni  correctionnellemeot  (Cods 
pénal,  aru  209-221).  Quand  il  y  a  rébellion  d'un  débiteur 
soumis  à  la  contrainte  par  corps,  l'huissier  peut  établir 
garnison  aux  portes  pour  empêcher  l'évasion,  et  le  débi- 
teui^est  poursuivi  conformément  à  la  loi.  ' 

RÉBUS  (  du  latin  res,  chose  ;  abl.  plur.,  rébus  ) ,  expres- 
sion tigurôe  d'une  pensée  par  une  suite  d'images,  de 
chiffres,  de  syllabes  et  de  mots.  Ainsi ,  on  représente  un 
homme  agenouillé  oui  tient  sur  sa  main  un  grand  I  peint 
en  vert,  et  on  lit  :  Un  grand  1  vert  main  dénomme  à  ge» 
noiLx  porte,  ce  qui  signifie  ;  Un  grand  hiver  maint  dom^ 
mage  nous  porte.  Ménage  appelle  les  Rébus  «  des  équi* 
voques  de  la  peinture  à  la  parole.  »  Rabelais  les  avait  en 
aversion ,  et  les  traitait  u  d'homonvmies  ineptes,  fades, 
rustiques  et  barbares.  »  Mais ,  en  dépit  de  ses  anathèmes^ 
ils  continuèrent  d'être  à  la  mode.  —  L'origine  des  Rébus 
est  fort  ancienne;  c'est  à  la  Bazoche  de  Picardie  qu'il 
faut  en  attribuer  le  perfectionnement.  Elle  composait 
chaque  année,  au  Carnaval,  des  espèces  de  libelles  inti- 
tulés :  De  rébus  quœ  geruntur^  u  des  choses  qui  se  font,  » 
c.-à-d.  récit  de  ce  qui  se  passe  dans  la  ville.  La  partie 
satirique  de  ces  récits  était  cachée  sous  des  signes  ana- 
logues à  ceux  que  nous  venons  de  citer,  afin,  sans  doute, 
de  piquer  plus  vivement  la  curiosité.  Le  goût  de  ces 
bizarres  compositions  avait  été  développé  antérieurement 
par  l'usage  de  porter  des  marques  distinctives  dans  les 
tournois,  et  par  les  Jeux  littéraires  de  la  confrérie  de 
Notre-Dame-du-Puy.  Le  Rébus  devint  populaire  dans  la 
France  septentrionale  ;  il  conquit  un  rang  dans  le  Blason, 
dont  il  égaya  les  armes  parlantes;  il  figura  sur  les  en- 
Aseignes  et  sur  les  monnaies  des  évoques  des  Fous  ;  il  se 
"glissa  même  dans  les  épitaphes.  La  Bibliothèque  impé- 
riale de  Paris  possède  deux  manuscrits  (n®*  7,618  et 
10,278)  intitulés  Rébus  de  Picardie  illuminés,  qui  datent 
de  la  fin  du  xv*  siècle,  et  parmi  lesquels  il  s'en  trouve 
en  patois  picard.  ÉUenne  Tabouret,  dans  ses  Bigarrures 
du  seigneur  des  Accords  (Rouen,  1648;  Paris,  1062), 
consacre  son  chapitre  II*  aux  Rébus  de  Picardie,  et  en 
donne  de  curieux  échantillons.  De  nos  jours,  le  Rénus  est 
redevenu  florissant  :  après  avoir  r^né  sur  les  tabatières, 
les  éventails  et  les  écrans,  il  a  étendu  son  domaine  Jus- 
qu'aux assiettes  de  faïence.  Jusqu'au  papier  qui  enve- 
loppe les  bonbons;  certains  Journaux  publient  aussi  des 
Rébus.  P — s. 

RECEL,  détention  de  choses  enlevées,  détournées  ou 
obtenues  à  l'aide  d'nn  crime  ou  d'un  délit,  avec  cette 
circonstance  qu'on  les  sait  provenir  d'une  source  illicite. 
Le  receleur  est  puni  comme  complice.  —  On  se  sert 
plutôt  du  mot  Recèlement ,  pour  l'action  de  cacher  un 
accusé  et  de  le  soustraire  à  la  Justice.  Le  recèlement  est 
punissable,  excepté  de  la  part  des  père  et  mère,  fils  on 
filles,  époux,  frères  ou  sœurs  {Code  pénal,  art.  61,  83  V. 
Aux  termes  de  la  loi  du  21  mars  1832,  celai  qui  a  recéM 

«I 


REC 


1538 


RÉC 


•u  pris  à  sou  service  un  soldat  insoumis  est  puni  d'un 
emprisonnement  dont  la  durée  ne  peut  excéder  6  mois; 
sMl  est  fonctionnaire  public,  la  peine  peut  être  portée  à 
Sans.  —  En  matière  civile,  le  Recèlement  est  l*acte  de 
soustraire  par  fraude  et  en  cachette  certains  objets  qui 
dépendent  d'une  succession  ou  d*une  communauté  au 
partage  de  laquelle  on  a  des  droits.  Si  les  objets  sont  en> 
levés  ou  détournés,  Taction  8*appelle  Dherlissement. 
L*bérltier  coupable  de  recèlement  est  privé  du  bénéfice 
d'inventaire,  du  droit  de  renoncer  à  la  succession,  et, 
dans  certains  cas,  de  sa  part  dans  les  objets  distraits 
(Code  NapoLy  art.  791,  801, 1477).  La  veuve  qui  a  diverti 
ou  recelé  quelques  eflets  de  la  communauté  est  déclarée 
commune,  nonobstant  la  renonciation  qu'elle  aurait  faite; 
il  en  est  de  même  à  l'égard  de  ses  hén tiers.  Le  mari  est 
privé  de  sa  portion  dans  les  effets  soustraits  à  la  com- 
munauté. Des  omissions  dans  l'inventaire,  faites  sciem- 
ment et  dans  un  but  firauduleux,  constituent  le  recèle- 
ment; si  la  fraude  n'est  pas  constante,  les  objets  sont 
seulement  rapportés  à  la  masse. 

RECENSE,  c.-à-<L  nouveau  cens,  nouvelle  marque  que 
l'administration  du  contrôle  applique,  chez  les  orfèvres 
et  les  bijoutiers,  sur  les  objets  d'or  ou  d'argent,  quand 
elle  change  le  poinçon,  pour  dérouter  les  faussaires  qui 
auraient  contrefait  la  marque  connue. 

RECENSERENT,  opération  administrative  qui  consiste 
à  dénombrer,  soit  la  population  d'un  État,  soit  les  indi- 
vidus auxquels  sont  imposées  certaines  obligations  par- 
culières,  comme  le  service  militaire,  le  service  de  la 

garde  nationale,  etc.  Les  anciens  Égyptiens  et  les  Ué- 
reux  faisaient  de  fréquents  dénomorements  ;  on  en 
trouve  deux  dans  la  Bible,  celui  de  Moïse  [Nombres, 
chap.  P'),  et  celui  de  David  (liv.  des  Rois).  Dans  l'an 
cienne  Rome,  le  dénombrement  de  la  population,  accom- 
pagné d'une  évaluation  des  fortunes,  s'appelait  cens  ;  il 
avait  lieu  tous  les  5  ans,  et  était  fait  par  dos  magistrats 
spéciaux,   appelés  censeurs.  C*était  une  opération  im- 

f>ortante,  puisque  les  citoyens  étaient  rangés,  d'après 
e'ur  fortune,  dans  l'une  des  classes  établies  par  Servius 
Tullius,  et  exerçaient  une  influence  politique  d'autant 
plus  grande  qu'ils  faisaient  paitie  d'une  classe  plus  éle- 
vée (JK.  Classe,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'aistoire).  En  France,  le  recensement  de  la  popula- 
tion se  fait  tous  les  5  ans  ;  en  Angleterre  et  aux  Etats- 
Unis  d'Amérique,  tous  les  10  ans  x  il  sert  h,  apprécier  les 
forces  de  l'État,  et  à  répartir  également  les  charges. 

RECENSEMENT  (Conseil  do).  V.  Conseil  de  recensement, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

RECËNSION,  en  termes  de  Bibliographie,  révision 
des  manuscrits  originaux  et  des  diverses  éditions  d'un 
livre,  dans  le  but  de  préparer  une  édition  nouvelle. 

RÉCÉPISSÉ  (mot  latin  qui  signifie  avoir  reçu),  écrit 
par  lequel  on  reconnaît  avoir  reçu  des  papiers,  des  actes, 
des  pièces  quelconques. 

RÉCEPTICES  (Biens).  V.  Biens. 

RECETTE,  mot  qui  se  dit  :  l*"  de  l'action  de  recevoir 
ou  de  recouvrer  ce  qui  est  dû  ;  2<>  de  ce  qui  est  reçu  en 
argent  ou  autrement;  3<*  du  lieu  ou  du  bureau  où  l'on 
reçoit. 

RECEVEUR,  fonctionnaire  de  l'administration  des 
finances,  chargé  de  percevoir  les  deniers  publics.  Les 
Receveurs  particuliers  résident  dans  chaque  chef-lieu 
d'arrondissement ,  réunissent  les  fonds  recueillis  par  les 
percepteurs,  et  les  versent,  tous  les  dix  jours,  ou  à  des 
(époques  plus  rapprochées,  s'il  y  a  lieu,  dans  la  caisse  du 
Receveur  général.  Ils  reçoivent  aussi  les  fonds  versés  par 
les  communes,  par  les  établissements  publics,  par  les 
corps  de  troupes,  à  titre  de  placements  au  Trésor;  ils 
sont  les  préposés  de  la  caisse  des  Dépôts  et  consigna- 
tions; ils  payent  les  mandats  émis  pour  les  dépenses  du- 
bud^t  de  l'État  et  des  départements,  sur  le  visa  des 
Payeurs.  A  la  demande  des  particuliers,  ils  achètent  et 
vendent  des  titres  de  rentes.  Ils  font  payer  aux  rentiers 
de  leur  circonscription ,  et  sans  déplacement,  les  arré- 
rages de  ces  rentes.  Ils  sont  responsables  de  la  gestion 
des  percepteurs,  vérifient  leurs  actes  dans  une  tournée 
annuelle  d'inspection,  et  peuvent  aussi  les  mander  avec 
toutes  les  pièces  nécessaires.  Ils  surveillent  aussi  les 
caisses  et  les  écritures  des  receveurs  spéciaux  des  com« 
munes  et  des  établissements  de  bienfaisance,  les  caisses 
d'épargne  et  de  prévoyance,  la  gestion  des  secrétaires 
agents  comptables  des  établissements  d'enseignement 
supérieur.  —  Us  exercent  les  fonctions  de  receveurs  mu- 
nicipaux pour  les  communes  dont  les  revenus  ordinaires 
ne  dépassent  pas  30,000  fr.  Leur  traitement  fixe  est  de 
tl|400  fr.  ;  mais  ils  ont  certaines  remises,  et  des  bonifica* 


tions  d'intérêts  sur  le  recouvrement  des  contributiooi 
directes.  —  Les  Receveurs  généraux  centralisent  aui 
chefs-lieux  de  département  toute  la  recette  des  arrondis- 
sements, répondent  des  fonds  qu'ils  ont  en  caisse  et  de 
la  gestion  des  receveurs  particuliers  et  des  percepteurs, 
sont  en  compte-courant  avec  la  caisse  centrale  du  Trésor^ 
lui  doivent  l'intérêt  de  l'argent  qu'ils  gardent ,  lui  font 
des  avances  dont  ils  prélèvent  k  leur  tour  l'intérêt,  émet- 
tent des  bons  dans  le  public,  dirigent  les  sommes  qni 
leur  sont  demandées  sur  la  Banque  de  France  ou  sur  les 
lieux  où  le  service  les  rend  nécessaires,  et  doivent,  un 
an  après  la  clôture  de  l'exercice,  représenter  à  leurs  ris- 
ques et  périls  au  compte  de  l'Etat  tout  le  montant  doF 
contributions  portées  au  rôle.  Depuis  1864,  Ils  ont  reçu 
les  attributions  des  Payeurs  et  le  nom  de  Trésoriers 
payeurs  généraux.  Leur  traitement  est  de  12,000  fr.*, 
ils  ont  des  remises  et  des  bonifications  dlntérèts.  —  In- 
dépendamment des  receveurs  généraux  et  particnliers, 
il  y  a  des  receveurs  des  douanes,  de  Venregistrement  et 
des  domaines,  des  contributions  indirectes,  des  octrois 
(  V.  ces  mots).  L. 

RECfiZ.  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

RECHANGE ,  c-à-d.  nouveau  change ,  action  de  se 
rembourser  du  principal  d'une  lettre  de  change  non  payée 
et  protestée,  ainsi  que  des  frais  de  protêt  et  autres,  sur 
le  tireur  ou  sur  l'un  des  endosseurs. 

RÉCHAUD,  récipient  en  tôle  ou  en  fer  forgé  dans  le- 
quel on  place  de  la  braise  allumée.  Autrefois  on  se  ser- 
vait de  réchauds  montés  sur  roulettes  pour  chauffer 
l'intérieur  des  appartements.  On  en  voit  un  qui  est  fort 
curieux  dans  la  sacristie  de  l'église  S*-Pierre,  à  Bcauvais. 

RÉCIDIVE  (du  latin  rectdere^  retomber),  action  de 
commettre  de  nouveau  un  crime  ou  un  délit  pour  lequel 
on  a  d^à  été  condamné.  Quiconque  commet  un  second 
crime  emportant  dégradation  civique  est  condamne  an 
bannissement;  si  le  second  crime  emporte  le  bannisse- 
ment, la  peine  est  la  détention  ;  s'il  emporte  la  déten- 
tion, la  réclusion,  les  travaux  forcés  à  temps,  on  applique 
le  maximum  de  la  peine;  s'il  emporte  la  déportation,  la 
peine  est  celle  des  travaux  forcés  à  perpétuité.  Pour  un 
délit  commis  après  une  condamnation  motivée  par  un 
crime,  on  applique  le  maximum  de  la  peine  correction- 
nelle, qui  peut  même  être  élevée  jusqu'au  double.  11  en 
est  de  même  pour  les  condamnés  correctionnellement  à 
un  emprisonnement  de  plus  d'une  année ,  quand  ils  sont 
récidivistes,  et  de  plus  ils  sont  mis  sous  la  surveillance 
pendant  5  ans  au  moins  et  10  ans  au  plus  {Codepénai, 
art.  56-58).  V.  Meynadier,  Des  récidives  en  matière  cri- 
minelle, 1836,  in-8°  ;  Bonneville,  De  la  récidive,  ou  des 
moyens  les  plus  efficaces  pour  constater,  rechercher  et 
réprimer  les  rechutes  dans  toute  infraction  à  la  loi  pé-' 
nale,  1839,  in-8°;  Hoorcbcke,  De  la  récidive,  dans  ses 
rapports  avec  la  réforme  pénitentiaire ,  Bruxelles,  1846, 
in-8». 

RÉCIPIENDAIRE,  celui  qu'on  reçoit  avec  un  certain 
cérémonial  dans  un  corps,  dans  une  compagnie. 

RÉCIPROQUE  (Pronom).  Ce  pronom  n'existe  que  dans 
la  langue  grecque,  et  est  formé  du  mot  cUlos  répété  deux 
fois  et  combiné  avec  lui-même,  de  manière  à  représenter 
d'abord  le  sujet,  puis  le  complément.  Il  a  toujours  la 
terminaison  plurielle.  Ainsi,  allèlôn,  allèlois ,  allMous. 
En  français,  pour  exprimer  l'idée  de  réciprocité,  on  se 
sert  du  pronom  réfléchi  de  la  3*  personne  avec  ou  sans 
l'addition  de  l'un  Vautre ,  les  uns  les  autres,  ou  des  ad- 
verbes entre  eux,  mutuellement,  réciproquement.       P. 

néciPROQUE  (Proposition),  proposition  telle  que  le  sujet 
peut  devenir  Tattribut,  et  l'attribut  le  sujet  :  VAsie  est  la 
plus  grande  contrée  de  Vancien  monde,  et  la  plus  grande 
contrée  de  l'ancien  monde  est  VAsie. 

RÉCIPROQUES  (Verbes).  On  appelle  ainsi,  en  français,  les 
verbes  réfléchis  dans  la  composition  desquels  entre  la 
préposition  entre  :  s^entr*aider,  s^entre-tuer^  etc.  Souvent 
le  simple  pronom  réfléchi  suffit  à  exprimer  la  récipro- 
cité :  les  Anglais  et  les  Français  se  sont  longtemps  cotn- 
battus.  P. 

RÉCIT,  en  termes  de  Rhétorique,  est  synonyme  de 
Narration  (F.  ce  mot).  —  En  Musique,  on  appelait  au- 
trefois Récit  tout  ce  qui  était  chanté  par  une  voix  seule, 
ou  exécuté  par  un  instrument  seul  :  on  se  sert  aujour- 
d'hui du  mot  italien  Solo  (seul).  On  donne  quelquefois 
le  nom  de  récit,  dans  la  symphonie,  à  l'instrument  prin- 
cipal. On  l'a  aussi  employé  comme  synonyme  de  rictUy- 
tif  {V.  ce  nMt).  B, 

Récrr  (Jeux  de),  jeux  d'orgue  oui  correspondent  au  3" 
clavier,  dit  clavier  de  récit.  Les  Jeux  oue  l'on  peut  faire 
Jouer  su^  le  wmmier  du  rédt  sont  :  le  nnit-pieds  otifert. 


RÉC 


1539 


REC 


le  bourdon  da  8  pieds,  le  cornet  de  5  tuyaux  sur  marche, 
la  musette  de  8  pieds ,  la  Toix  humaine  de  8  pieds,  la 
Qûte  octaviante  de  4  pieds,  Toctavin  de  2  pieds,  la  trom- 
pette harmonique  de  8  pieds,  le  clairon  harmonique  de 
4  pieds.  On  enferme  actuellement  ces  jeux  dans  une 
i>o(te  dite  expressive,  formée  de  jalousies  qui  peuvent 
s*ouvrir  ou  se  fermer  à  Tolonté  au  moyen  d*une  pédale 
et  donner  un  passage  plus  ou  moins  libre  au  son.  On 
obtient  ainsi  des  effets  plus  ou  moins  heureux  d^éloigne- 
ment  et  de  rapprochement  des  sonn.  F.  G. 

RÉCITATIF,  sorte  de  déclamation  musicale,  accompa- 
gnée par  Quelques  notes  d*orchebtre.  Le  Récitatif  n'est 
assujetti  m  &  la  mesure,  ni  au  rhythme;  placé  entre  les 
airs,  duos,  trios  et  ensembles  d*un  opéra,  il  se  chante 
d'une  manière  plus  ou  moins  soutenue  ;  c*est  un  langage 
de  conyention ,  qui  tient  le  milieu  entre  la  parole  et  le 
chant  :  il  repose  l'auditeur,  quu  la  continuité  des  mor- 
ceaux fatiguerait  aisément,  et  il  sert  aussi  &  faire  avancer 
nn  peu  Faction.  Il  est  syllabiqne,  c-i-d.  que  chaque  note 
porte  sur  une  syllabe  :  on  n'y  répète  point  les-  mots, 
comme  on  le  fait  dans  les  morceaux  mesurés;  les  notes 
marouent  l'intonation ,  mais  non  la  durée  des  sons,  qui 
est  anandonnée  au  goût  du  chanteur.  Le  récitatif  est  dit 
obligé f  quand  ses  interrallus  de  repos  sont  remplis  par 
des  traits  de  symphonie.  L<)  premier  emploi  du  récitatif 
est  attribué  à  Péri  et  à  Monteverde;  il  fut  ensuite  per- 
fectionné par  Garissimi  et  par  Alexandre  Scarlatti.      B. 

RÉCITATION ,  prononciation  ,  sur  un  ton  soutenu , 
d'un  discours  ou  morceau  littéraire  c^uelconque  appris 
par  cœur.  La  récitation  peut  se  défînir  une  «  déclama- 
tion simple  et  sans  geste.  »  Bien  réciter  est  aussi  rare 
q^e  bien  lire,  et  ce  talent  annonce  l'intelligence  nette  de 
Fensemble  et  des  détails  du  morceau  étudié,  l'art  d'en 
reproduire  exactement  le  i*.aractère,  le  ton,  la  couleur,  et 
de  rendre  sensibles  à  l'auditeur  jusqu'aux  nuances  les 

Ï>lus  délicatesi  Une  bonne  récitation  excite  plus  vivement 
'intérêt  que  la  lecture  la  plus  parfaite;  et,  quoique  moins 
animée ,  moins  vivante  que  le  débit  d'un  discours  per- 
sonnel ou  qu'une  improvisation,  elle  éveille  en  nous  lidée 
d'un  orateur. 

A  Home,  sous  l'Empire,  le  mot  Récitation  s'appliqua 
spécialement  à  la  lecture  que  les  beaux  esprits  faisaient 
de  leurs  ouvrages  devant  une  réunion  d'amis  ou  d'ama- 
teurs. Asinius  Pollion,  le  premier,  eut  cette  idée,  dont 
l'empereur  Auguste  encouragea  la  réalisation  ;  et  bientôt 
les  lectures  publiques  devinrent  une  mode.  On  «  récitait» 
non-seulement  chez  soi,  mais  dans  les  bains  publics, 
sur  les  marches  des  temples,  dans  toutes  les  places.  Au- 
guste assistait  à  certaines  lectures,  et  parfois  en  faisait 
lui-même.  Claude,  Néron  surtout,  l'imitèrent,  et  maintes 
fois  ce  César  bel-esprit  convoqua  le  peuple  entier  au 
thé&tre  pour  se  faire  entendre.  Sous  son  règne  les  Réci- 
tationa  devinrent  une  manie,  une  fureur  ;  non-seulement 
elles  pouvaient  durer  plusieurs  heures,  mais  souvent 
elles  86  prolongeaient  pendant  deux  ou  plusieurs  jours. 
Après  Domitien  commença  la  décadence,  et  la  vogue  des 
lectures  diminua  sensiblement  depuis  Trajan.  C'est  dans 
ces  réunions  littéraires  que  paraissent  avoir  été  «  réci- 
téeSf  »  sinon  «  déclamées,  »  les  tragédies  dites  de  Sé- 
nèque,  bon  nombre  des  Silves  de  Stace,  et  presque  toutes 
les  pièces  de  poésie  composées  pendant  le  1*'  siècle  de 
l'Empire.  Ce  système  de  récitation  a  été  funeste  au  goût  : 
il  encouragea  chez  les  écrivains  le  penchant  au  ton  dé- 
clamatoire, aux  traits  saillants  et  neufs,  aux  phrases  à 
facettes,  aux  expressions  ingénieuses  et  brillantées;  dé- 
fauts qui  séduisent  toujours  les  auditoires  nombreux.   P. 
RÉCLAME  (du  latin  reclamaref  rappeler),  en  termes 
de  Typographie,  mot  qu'on  mettait  autrefois  au-dessous 
de  la  dernière  ligne  d'une  feuille  ou  d'une  page,  et  qui 
était  le  premier  de  la  feuille  ou  de  la  page  suivante.  Le 
mot  réclame  ne  désigne  plus  guère  aujourd'hui  que  la 
note  manuscrite  qui  rappelle  au  correcteur  ou  au  metteur 
en  pages  le  dernier  mot  et  le  dernier  folio  d'une  épreuve. 
Les  réclames  facilitaient  le  travail  du  brocheur  et  du  re- 
lieur, en  leur  permettant  de  vérifier  d'un  coup  d'œil  la 
jonction  des  pages  entre  elles.  On  y  supplée  maintenant 
par  un  numéro  d'ordre,  mis  au  bas  de  chaque  feuille 
d'impression,  au  recto,  et  qui  a  reçu  le  nom  de  signa- 
ture* Il  y  a  des  réclames  dans  les  manuscrits  dès  le 
XI*  siècle,  mais  l'usage  n'en  devint  général  qu'au  xiv*. 
Le  premier  livre  où  l'on  rencontre  des  réclames  par 
mots  est  le  Tacite  de  Vindelin  (Venise,  1468  ou  1469}. 
V.  Magné  de  MarolleSj  Recherches  sur  Vorigine  et  le 
prefmitT  usage  des  regutres ,  des  signatures ,  des  ré- 
eiamê$  et  dês  chiffres  de  pages  dans  les  livres  imprimés, 
Paris,  1 782,  ia-8^  B. 


RiScLAMB ,  petit  article  inséré  dana  le  corps  d'un  jour* 
nal,  au  milieu  des  nouvelles  et  des  faits  divers,  pour  r^ 
commander  un  livre  ou  une  marchandise  dont  Vannonce 
se  trouve  plus  loin.  Séparée  de  la  partie  de  la  feuille  qui 
est  ostensiblement  consacrée  à  la  publicité  à  prix  fixe,  la 
réclame  est  censée  contenir  une  appréciation  impartiale 
et  indépendante.  Cependant  on  la  paye;  ou  bien  elle  est 
une  bonification  que  le  journal  fait  à  ceux  qui  achètent 
sa  publicité.  Dans  ce  cas,  elle  est  calculée  sur  le  pied  de 
10  p.  100,  c.-à-d.  que  celui  qui  fait  une  annonce  de  100 
lignes  a  droit  à  une  réclame  gratuite  de  10  lignes.  On 
peut  obtenir  que  la  réclame  ne  passe  que  le  lendemain 
du  jour  où  parait  l'annonce.  B. 

RÉCLAME,  terme  de  Liturgie.  V,  Répons. 

RECLUS  (du  latin  reclusus,  renfermé),  nom  donné 
autrefois  à  tout  pénitent  qui  se  condamnait  à  vivre  en- 
fermé dans  une  cellule,  ordinairement  attenante  à  une 
église  ou  à  un  monastère,  pour  s'v  livrer  à  la  prière  et  à 
la  mortification.  Il  fallait  la  permission  de  l'évèque  ou  de 
l'abbé.  On  voit  encore  une  cellule  de  ce  genre  centre  la 
chapelle  S^'-Barbe  de  la  cathédrale  de  Bourges.        B. 

RECLUSION  (du  latin  recludere,  enfermer),  peine 
afflictive  et  infamante,  infligée  par  les  Cours  d'assises, 
et  qui  consiste  à  être  détenu,  pendant  5  ans  an  moins  et 
10  ans  au  plus,  dans  une  maison  de  force,  et  à  être 
employé,  dans  l'intérieur  de  cette  prison,  à  des  travaux 
déterminés  par  les  règlements  administratifs.  Une  partie 
du  salaire  de  ces  travaux  est  réservée  aux  condamnés,  et 
leur  est  remise  au  moment  de  leur  libération.  La  réclu- 
sion est  de  droit  accompagnée  de  Vexposition  {V.  ce 
mot^j^  et  emporte  nécessairement  la  dégradation  civique 
et  l'interdiction  légale  :  il  est  donc  nommé  au  condamné 
un  tuteur,  dont  les  fonctions  cessent  avec  la  peine.  — 
Autrefois  on  appelait  Réclusion  l'action  d'enfermer  quel- 
qu'un pour  la  vie  dans  un  monastère. 

RÉCOGNITIONS.  V.  CLéMENTDiES,  dans  notre  Die* 
tionnaire  de  Biographie  et  d^Histoire, 

RÉCOLËMENT  (du  latin  recolere,  revoir,  examiner  de 
nouveau),  en  termes  de  Jurisprudence,  lecture  de  leur 
déposition  faite  à  des  témoins  qui  ont  été  entendus  dans 
une  procédure  criminelle,  pour  voir  s'ils  y  perustent; 
—  acte  constatant  qu'on  a  vérifié  tous  les  efiTets  et  meu- 
bles compris  dans  un  inventaire  ou  portés'sur  un  procès- 
verbal  de  saisie  ;  —  en  général,  toute  vérification  d'une 
opération  ou  d'un  compte  antérieur. 

RÉCOLTES.  En  Droit,  les  récoltes  pendantes  par  ra- 
cines, c.-à-d.  encore  attachées  au  sol,  sont  considérées 
comme  immeMes;  une  fois  détachées  du  sol,  et  quoique 
non  enlevées ,  elles  sont  meubles.  La  loi  accorde  privi- 
lège sur  la  récolte  de  l'année  pour  l'exécution  du  bail. 
Le  vol  et  la  tentative  de  vol  de  récoltes,  non  commis  à 
plusieurs  et  pendant  la  nuit,  sont  jugés  correctionnelle- 
ment,  et  punis  des  peines  portées  en  l'art.  401  du  Codé 
pénal;  commis  par  plusieurs  et  pendant  la  nuit,  ils 
sont  jugés  par  la  Cour  d'assises,  et  punis  conformément 
à  l'art.  388. 

RECOMBfANDATION,  terme  de  Droit  féodal.  V.  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

RECOMiiANDATioN ,  oppositiou  quo  l'ou  met  à  la  sortie 
d'un  prisonnier.  Un  créancier,  qui  a  le  droit  d'exercer  la 
contrainte  par  corps  contre  son  débiteur,  peut  le  recom^ 
mander  lorsqu'il  est  déjà  détenu  pour  un  délit  ou  pour 
toute  autre  cause,  et  même  lorsque  son  élargissement  a 
été  prononcé.  Les  formalités  à  suivre  en  cette  matière 
ont  été  réglées  par  le  Code  de  Procédure  civile  (art. 
792-7«6  ). 

RÉCOMPENSE,  en  termes  de  Droit,  indemnité  que 
l'un  des  époux  qui  sont  sous  le  régime  de  la  commu- 
nauté doit  à  l'autre,  pour  tout  ce  dont  le  premier  aurait 
personnellement  et  abusivement  profité  des  biens  du  se- 
cond. V.  le  Code  NapoL,  an.  1436-37. 

RÉCONCILIAriON ,  en  termes  de  Droit  canonique, 
acte  solennel  par  lequel  un  hérétique  est  absous  des  cen- 
sures qu'il  avait  encourues;  —  cérémonie  qui  se  fait 
pour  rendre  au  culte  une  église  profanée,  par  exemple 
quand  il  y  a  eu  meurtre  dans  le  saint  lieu,  effusion  cri- 
minelle de  sang,  inhumation  d'un  excommunié,  d'un 
hérétique  ou  d'un  infidèle,  ou  lorsque  l'église  a  été  con- 
sacrée par  un  évêquo  excommunié  ou  hérétique. 

RECONDUCTION  (du  latin  reconductio,  louage  à  nou- 
veau), renouvellement  d'une  location  ou  d'un  bail  à 
ferme.  La  reconduction  peut  être  expresse,  c-à-d.  faite 
par  écrit  ou  verbalement;  ou  tacite,  par  la  contfaraation 
de  la  jouissance  après  la  fin  du  bail,  sans  nue  le  proprié- 
taire s'y  soit  oppÎMé.  V.  le  Codé  NapoUon,  art  1760 
et  ^•"ô. 


RKC 


1540 


RÈC 


RECONNAISSANCE.  Dans  la  poésie  épique  et  drama- 
tique et  dans  les  romans,  ce  mot  désigne  le  moment  où 
nn  personnage  qni  ne  se  connaît  pas,  ou  qui  ne  connaît 
pas  celui  avec  qui  il  est  en  action,  on  n'en  est  pas  connu, 
acquiert  ou  fait  acquérir  cette  connaissance.  Ce  sont  les 
recomuMsances  de  personnes.  Il  y  a  aussi  les  reconnais- 
sances de  choses,  par  exemple,  lorsqu'on  reconnaît  que 
l*on  aTait  porté  sur  tel  ou  tel  personnage  un  faux  Juge- 
ment, lorsqu'une  accusation  injuste  est  confondue,  etc. 
Ces  diverses  Reconnaissances  doivent  naître  du  dévelop- 
pement même  de  l'action  ou  de  la  peinture  des  passions 
et  des  caractères;  elle  peuvent  être  amenées  aussi  par 
quelque  circonstance  extérieure,  par  un  souvenir  fortuit, 
une  réflexion  soudaine,  un  signe  involontaire  que  l'in- 
connu laisse  échapper  ou  apercevoir.  VOdyssée  offre  un 
bel  exemple  de  ce  dernier  genre ,  dans  la  scène  entre 
Ulysse  et  sa  nourrice  Euryclée.  En  général,  la  Reconnais- 
sance prépare  et  amène  la  Péripétie  (F.  ce  mot)  ;  quel- 
ouefois  elle  se  confond  avec  elle ,  comme  dans  VOEaipe-' 
Èoi,  de  Sophocle  ;  mais  elle  ne  doit  pas  constituer  le 
si^et  môme,  et  c'est  en  quoi  le  plan  de  VBéraclius  de 
Corneille  est  vicieux.  Elle  peut  être  simple  ou  double  : 
simple,  lorsqu'elle  n'a  lieu  que  pour  un  personnage; 
double,  lorsqu'un  personnage,  en  se  connaissant  lui- 
mdme,  en  reconnaît  un  autre,  ou  réciproquement.  Elle 
est  simple  dans  Athalie,  dans  Electre;  double  ou  mu- 
tuelle dans  OEdipe-Roi,  dans  Fphigénie  en  Tauride;  elle 
est  mixte  dans  Mérope,  car  la  reine  ne  se  fait  connaître 
d'Égisthe  qu'aseez  longtemps  après  qu'elle  a  reconnu 
elle-même  qu'il  était  son  fils.  La  Reconnaissance,  ame- 
nant la  Péripétie,  peut  influer  sur  la  Catastrophe  ;  mais 
II  n'en  est  pas  toujours  ainsi  :  dans  YHippolyte  d'Euri- 
pide et  la  Phèdre  de  Racine,  où  l'innocence  d'Hippolyte 
est  connue  trop  tard,  et  dans  ZcOre,  où  Orosmane  con- 
naît également  trop  tard  son  erreur  et  ses  soupçons  in- 
justes, la  Reconnaissance  ne  change  rien  au  dénoûment, 
mais  elle  achève  de  Jeter  de  l'intérêt  sur  les  victimes. 
Corneille,  dans  son  Héraclius,  l'a  placée  après  la  Catar 
strophe  :  c'est,  dans  sa  pièce,  un  défaut  qui  diminue  beau- 
coup l'intérêt  d'une  situation  intéressante  en  elle-même 
et  iH$pand  de  la  fh)ideur  sur  la  dernière  scène  ;  Phocas 
nne  fois  mort  jet  Héraclius  proclamé  empereur,  qu'im- 
porte que  le  vrai  Héraclius  soit  reconnu  7 

Dans  les  romans,  dans  les  drames,  et  les  œuvres  comi- 
ques, la  Reconnaissance  est  un  ressort  d'un  usage  plus 
fréquent  que  dans  l'épopée  et  la  tragédie.  Chez  les  Ân- 
ciens^  il  était  prodigué  d'une  maniera  un  peu  trop  uni- 
forme, autant  qu'on  en  peut  Juger  par  ce  qui  nous  raste 
de  leur  thé&tre  comique  et  de  leurs  romans.  Toutefois  il 
est  emplo)[é  avec  beaucoup  de  bonheur  dans  les  Captifs 
et  V Amphitryon  de  Plante ,  dans  le  Phormion  et  VAnn 
drimne  de  Térence,  et  il  y  contribue  à  l'intérêt  des  situa- 
tions. Au  reste,  les  meilleures  scènes  de  reconnadssance, 
dans  les  genres  comiques,  sont  celles  qui  deviennent  une 
source  nocivelle  de  ridicules  :  les  Précieuses  ridictdes , 
VAvaf^^m  Fourberies  de  Scapin,  V Amphitryon^  de 
Molièra;  la  Métromanie^  de  Piron;  V Avocat  Patelin,  de 
Brueys,  etc.,  en  offrent  de  bons  modèles.  Dans  le  drame, 
elles  peuvent  se  rapprocner  de  l'émotion  tragique  :  les 
deux  scènes  de  V Ecole  des  Mères,  de  La  Chaussée,  où 
M.  Argent  se  fait  connaître  à  sa  fille  llarianne,  et  celle- 
ci  à  sa  mère,  sont  à  la  fois  naturelles  et  touchantes  :  elles 
produisent  la  péripétie,  rendent  le  dénoûment  intéres- 
sant, et  contribuent  à  la  moralité  de  la  pièce.    ^       P* 

BiGONif  AissANGB,  OU  tormes  de  Droit,  acte  écrit  qui  con- 
tient l'aveu  d'un  fait  ou  d'une  obligation  antérieure.  Plu- 
Bienrs  reoonneussances  conformes,  soutenues  de  la  pos- 
session, et  dont  l'une  a  30  ans  de  date,  dispensent  de 
représenter  le  titre  primordial.  On  nomme  reconnais» 
s€tnce  de  promesse  ou  d'ecn'^rs  la  déclaration  par  la- 
quelle une  personne  reconnaît  qu'un  écrit  privé  qu'on 
lui  représente  émane  d'elle  ou  qu'elle  l'a  souscrit.  —  La 
reconnaissance  d^enfant  est  la  déclaration  faite  devant 
l'officier  de  l'état  civil  et  par  laquelle  on  reconnaît  être 
le  père  ou  la  mère  d'un  enfant  naturel  ;  elle  doit  être 
inscrite  sur  les  registres  de  l'état  civil.  L'intervention  et 
le  consentement  de  l'enfant  ne  sont  pas  nécessaires.  La 
reconnaissance  contenue  d^ns  un  testament  olographe  est 
régulière  et  valable.  Celle  qui  serait  faite  par  l'un  des 
époux  au  profit  d'un  enfant  né  avant  le  mariage  et  d'un 
antre  que  son  conjoint,  ne  peut  nuire  ni  à  celui-ci  ni 
aux  enfants  nés  de  ce  mariage  :  toutefois,  elle  produirait 
son  effet  après  la  dissolution  du  mariage,  s'il  n'en  restait 
pas  d'enfants.  L'enfant  reconnu  par  son  père  a  le  droit 
de  porter  son  nom  ;  il  suit,  sous  le  rapport  de  la  natio- 
aalitéf  la  conditiPii  de  celui  de  ses  pèire  et  mèro  qui  l'a 


reconnu.  Ses  père  et  mère  peuvent  mettre  obitacle  à  sod 
mariage,  et,  oans  certains  cas,  requérir  contre  lui  la  d^ 
tention  correctionnelle  ;  mais  leur  puissance  ne  s'étend 
pas  sur  ses  biens,  et  ils  n'en  ont  point  l'usufruit  légsl 
jusqu'à  ce  qu'il  atteigne  18  ans.  Le»  enfanta  reconnus 
ont  certains  droits  sur  les  biens  de  leurs  père  et  mère 


décédés,  mais  non  sur  les  biens  des  parents  de  ceux-d. 

t  la  totalité  de  l'héritage,  quand  il  n'y  a  point 

de  parents  au  degré  successible,  c-à-d.  au  iz*  degré; 


Ils  prennent 


si  le  père  ou  la  mère  a  laissé  des  descendants  légitimes, 
l'enfant  reconnu  n'a  qu'un  tiers  de  la  portion  d'un  en- 
fant légitime;  il  a  la  moitié,  s'il  ne  reste  que  des  ascen- 
dants ou  des  frères  et  sœurs,  et  les  trois  quarts,  s'il  n« 
reste  ni  descendants,  ni  ascendants,  ni  frères  ou  sœurs, 
ni  descendants  de  frères  et  de  sœurs.  Le  père  et  la  mère 
ne  peuvent  attribuer  à  l'enfant  reconnu,  ni  par  donation, 
entre  vifs,  ni  par  testament,  une  part  plus  forte  que  celle 
qui  lui  est  assignée;  mais  ils  peuvent  réduire  cette  part 
à  la  moitié,  si  l'enfant  a  reçu  de  leur  vivant  ce  qm  loi 
est  attribué  pour  tenir  lieu  de  ses  droits  dans  la  succes- 
sion future.  La  succession  de  l'enfant  est  dévolue  an 
père  ou  à  la  mère  qui  l'a  reconnu,  ou  par  moitié  à  tous 
les  deux. 

RBCONNAissAifCB,  OU  tormos  d'Art  militaire,  opération 
ayant  pour  but  d'examiner  le  théâtre  de  la  guerre,  on 
les  forces,  les  dispositions,  ainsi  que  la  situation  de  l'en- 
nemi. La  reconniidssance  des  lieux  est  l'œuvre  des  offi- 
ciers d'état-major. 

\  RBGOiiNAissANCB ,  OU  tormos  de  Diplomatie ,  action  de 
reconnaître  un  gouvernement  étranger  et  de  nouer  avec 
lui  des  relations  officielles. 

REGONNAissAifCB,  écrit  psT  lequel  on  constate  qu'on  a 
reçu  une  somme,  soit  par  emprunt,  soit  en  dépôt,  ou 
autrement.  Les  Monts-de-Piété  délivrent  aux  emprun- 
teurs des  reconnaissances  qui  constatent  la  nature  et  h 
valeur  des  objets  déposa,  et  la  somme  prêtée. 

RECONVENTION,  en  termes  de  Droit,  demande  qu'op- 
pose le  défendeur  à  celle  qui  a  été  formée  contre  lui.  Tel 
est  le  cas  d'un  débiteur  qui,  sans  nier  la  dette  qu'on  Ini 
réclame ,  revendique  de  son  côté  une  somme  au  moins 
égale  Que  lui  devrait  son  créancier.  La  reconvention 
n'est  aamise  que  quand  il  y  a  connexité  entre  les  deui 
demandes.  Un  luge  de  paix  peut  prononcer  sur  des  ré- 
clamations supérieures  à  celles  que  la  loi  laisse  à  sa  com- 
pétence ,  quand  il  en  est  saisi  par  une  demande  recoo- 
ventionnelle. 

RECORD.       j  r.  ces  mots  dans  notre  DicUoimaère 

RECORDER.  )    de  Biographie  et  é^Histoire, 

RECORS,  Jadis  Record  (du  vieux  français  reoorder, 
rappeler,  constater^,  nom  donné  aux  individus  dont  un 
huissier  se  fait  assister  dans  ses  actes,  pour  lui  servir  de 
témoins,  et  au  besoin  pour  lui  prêter  main  forte. 

RECOUPE ,  terme  de  Gravure.  F.  Coupe. 

RECOUPEBfENT,  en  termes  d'Architecture,  large  re- 
traite qu'on  laisse  à  chaque  assise  de  pierres  dans  les 
ouvrages  construits  sur  un  terrain  à  pente  escarpée,  ou 
dans  ceux  qui  sont  fondés  sous  l'eau ,  pour  leur  donner 
plus  d'empattement  et  de  solidité. 

RECOURS ,  en  termes  de  Droit,  action  en  garantie  oa 
en  dommages-intérêts  que  l'on  a  contre  quel(p'un.  Ainsi, 
la  loi  accorde  un  recours  au  cohéritier  qui  a  payé  an 
delà  de  ce  dont  il  était  tenu  dans  les  dettes  de  la  com- 
munauté; an  codébiteur  d'une  dette  solidaire,  qu'il  s 
payée  en  entier  ;  aux  mineurs  et  aux  interdits,  contre 
leur  tuteur  ;  aux  femmes  mariées,  contre  leurs  maris 
{V.  Code  Napol.^  art.  875,  942, 1214  et  suiv.). 

RECOURS  EN  CASSATION.   V,  CASSATION  Ot  POURVOI. 

RECOURS  EN  GRACE ,  demande  adressée  au  chef  de  l'État 
pour  obtenir  la  remise  ou  la  commutation  d'une  oeine 
infligée  par  un  Jugement  ou  un  arrêt. 

RECOUSSE,  en  termes  de  Marine,  reprise  d'un  bâti- 
ment sur  l'ennemi  par  un  autre  bâtiment  de  sa  nation. 
Le  navire  est  rendu  à  l'srmateur,  nui  paye  le  tiers  de  sa 
valeur,  comme  droit  de  recousse.  K.  PosTumifiB. 

RECRÉANCE,  nom  donné  autrefois  à  un  jugement 
provisoire  qui  maintenait  ou  envoyait  dans  la  jouissance 
d'un  bénéfice  en  litige,  pendant  la  durée  du  procès,  la 
partie  dont  les  droits  paraissaient  le  mieux  fondés. 

RECRéANCB  (Lettre  de).  F.  Lettre  de  aBCRiancEt 

RÉCRIMINATION,  en  termes  de  Rhétorique,  accusa- 
tion opposée  à  une  autre.  Ainsi  t  «  Milon  a  tué  Qodius; 
mais  Clodius  attentait  à  sa  me.  —  Oreste  a  tué  sa  mère; 
mais  Clytemnestre  avait  tué  Agamemnon  et  vivait  avec 
son  complice.  »  Les  rhéteurs  grecs  appelaient  ce  genre 
de  discussion  Anticatégorie  (de  anti,  contre,  et  IcSégO' 
rein,  accuser),  Antenclème  on  AntkUme  (de  mUi,  eoaa% 


RED 


1541 


RED 


8t  mclima,  reproche  ) ,  et  ies  Latins,  mtUtui  accusatw  ou 
(mc9riativa  oratio. 

RECRUE  (du  vieux  français  recroître,  croître  de  nou- 
Teaa),  nouTelle  levée  de  gens  de  guerre.  Par  extension , 
on  a  appelé  recrues  tous  les  Jeunes  soldats. 

REGROTEMENT,  mot  d*origine récente  (F.  Recbctb- 
HENT,  dans  notre  Dictionn,  de  Biographie  et  d^ Histoire) , 
par  lequel  on  désigne  le  mode  de  formation  de  Tannée 
en  France.  D'après  la  loi  du  21  mars  1833.  Tannée  se 
recrate  de  deux  manières,  par  engagement  {V.  ce  mot)  ^ 
ou  rarôlement  libre,  et  par  appel  ou  engagement  forcé. 
Lesenrice  militaire,  personnel  et  gratuit,  est  obligatoire 
pour  tous  les  Français  &gés  de  20  ans.  Les  jeunes  gens 
avant  atteint  cet  ftge  sont  soumis  au  recrutement  :  des 
listes  sont  dressées  à  cet  effet  dans  chaque  canton,  et 
l'ensemble  des  individus  portés  sur  ces  listes  forme  la 
e/af30  de  Vannée.  Une  loi  annuelle  détermine  le  nombre 
d'hommes  mis  à  la  disposition  du  gouvernement  (80,000 
depuis  1830, 100,000  depuis  1860).  Un  tirage  au  sort  fixe 
l'ordre  dans  lequel  les  jeunes  gens  d'une  même  classe 
seront  examinés  par  les  Conseils  de  révision,  pour  savoir 
s'ils  sont  propres  au  service.  Ceux  qui  sont  reconnus  aptes 
au  service  forment  la  liste  du  contingent  jusquà  concur- 
rence du  nombre  fixé  par  la  loi  ;  ceux  qui ,  par  le  béné- 
fice du  sort,  n'y  sont  pas  compris,  restent  dans  laréserTe, 
Outre  ceux  qid,  par  leur  taille  on  leurs  infirmités,  sont 
impropres  an  service,  la  loi  exempte  :  Talné  d'orphelins  ; 
le  fils  unique  ou  aîné,  gendre  ou  petit-fils  de  veuve,  de 
pèA  aveugle  ou  septuagénaire  ;  le  plus  âgé  de  deux  frères 
appelés  au  môme  tiraçe  ;  celui  dont  le  frère  est  sous  les 
ebupeaux  à  un  autre  titre  que  celui  de  remplaçant  ;  celui 
dont  le  frère  est  mort  en  activité  de  service,  ou  réformé 
ou  retraité  par  suite  de  blessures  reçues  à  l'armée.  Tout 
condamné  à  une  peine  afflictive  ou  infamante,  ou  même 
correctionnelle  avec  surveillance  de  la  haute  police,  est 
exclu  du  service  militaire.  Sont  considérés  comme  ayant 
satisfait  à  la  loi  :  les  élèves  des  écoles  Polytechnique  et 
Normide  supérieure,  et  ceux  des  séminaires,  pourvu 
quUls  suivent  leur  carrière  ;  les  membres  de  Tinstruction 
publique  qui  ont  signé  un  engagement  de  10  années;  les 
grands  prix  de  TInstitut;  les  prix  d'honneur  du  concours 
.'enéral  des  lycées  de  Paris,  La  loi  ne  reconnaît  plus 

Il X  soldats,  comme  aulrofois,  le  droit  do  remplace' 
ment  (  K.  ce  mot),  11  y  a,  dans  chaque  département,  un 
officier  supérieur  ou  un  capitaine  commandant  le  dépôt 
de  recrutement,  et  chargé  du  détail  des  levées;  il  est 
assisté  de  deux  sous-ofiiciers.  —  Le  recrutement  de  l'ar- 
mée de  mer  est  Tobjev  de  la  loi  du  3  brumaire  an  iv  (25 
oct.  1705)  {  V.  Inscription  haritihb,  dans  notre  Diction- 
naire de  Btographie  et  d^ Histoire).  V.  Swanton,  Diction- 
naire du  recrutement,  1838,  in-8*  ;  Pradier-Fodéré,  Lots 
sur  le  recrutement^  185i,  in-12;  Gonvot,  Manuel  du 
recrutement ,  3*  édit.,  1855  ;  Corriger,  Recueil  méthodique 
des  dispositions  qui  régissent  le  recrtUement  de  l'armée, 
1857,  in-8*.  F.  Rbcrotement,  dans  le  Supplément.  B. 

RECTEUR.  V.  ce  mot  dans  notre  Dicttonnatre  de  Bio- 
graphie et  d^  Histoire. 

RECTO.  V,  Fouo. 

RECUITE ,  opération  par  laquelle  le  peintre  sur  verre 
on  en  émail  parfond  ses  couleurs,  en  soumettant  la  pièce 
peinte  à  Taction  du  feu. 

RÉCUPÉRATEUR.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
iê  Biographie  et  (^Histoire. 

RÉCURRENT  (Vers).  V.  Anactguqdb. 

RÉCUSATION  fdu  latin  recusatio,  refus} ,  action  de 
décliner  la  compétence  d'un  tribunal  ou  d'un  Juge,  de 
refuser  un  Juré,  un  expert,  un  arbitre,  un  témoin,  etc. 
Les  causes  de  la  récusation  relatives  aux  Juges  sont  appli- 
cables au  ministère  public,  lors^'ll  est  partie  Jointe  ; 
mais  il  n'est  pas  récusable  quand  il  est  partie  principale. 
Le  Code  de  Procédure  civile  (art.  378)  et  le  Code  d'In- 
struction criminelle  (art.  332,  339)  déterminent  les  cas 
et  les  modes  de  récusation. 

RECUSES ,  monnaies  surfrappées,  c.-jh1.  qui  ont  été 
marquées  de  deux  types  l'un  sur  l'autre. 

REDAN  ou  REDI^NT  (par  contraction  du  latin  rece- 
dens^  se  retirant,  rentrant),  se  dit,  dans  la  Fortification, 
des  lignes  ou  faces  qui  forment  des  angles  rentrants  et 
saillants,  pour  se  protéger  les  unes  les  autres.  Les  redans 
se  nomment  encore  ouorages  d  scie.  —  En  Architecture, 
redan  est  synonyme  de  recoupement  (  V.  ce  mot), 

KëDMEPTION  (en  latin  redemptio,  rachat),  mot  sp6- 
talement  consacré  pour  signifier  le  rachat  du  genre 
humain  par  Jésus- Qirist,  appelé  pour  cette  raison  le 
Rédempteur.  Âutiefoia,  le  rachat  des  chrétiens  qui  étaient 
au  pouvoir  des  lafidèlm  se  nommait  aussi  rédemption. 


liÉDUIBITlGN  (en  laUn  redhibit/},  action  de  ravoir )« 
terme  de  Jurisprudence  qui  désigne  Taction  attribuée 
dans  certains  cas  à  l'acheteur  d'une  chose  mobilière  dé- 
fectueuse, pour  en  faire  annuler  la  vente.  7.  Vicbsi 

RÉDIFS,  c.-à-d.  en  turc  qui  xnennent  après,  soldats 
organisés  en  Turquie  à  peu  près  sur  la  môme  base  que  la 
landwehr  prussienne.  On  les  oppose  au  nixam  {nouvel 
ordre,  ou  promit  levée). 

REDIMICULUM,  ceinture  des  dames  romaines  qui  en» 
tourait  deux  fois  le  cou,  se  croisait  sur  la  poitrine,  pas- 
sait sur  les  côtés ,  et  faisait  quelques  tours  pour  assu- 
jettir la  robe  sur  les  reins.  Les  anciens  peintres  chrétiens 
donnèrent  cette  espèce  de  ceinture  au  Bon  Pasteur  et 
aux  Anges,  sans  doute  parce  qu'elle  oSnlt  la  figure  de  la 
croix, 

REDINGOTE  (  de  l'anglais  riding-coat,  vêtement  pour 
monter  à  cheval  ).  C'était  autrefois  une  espèce  de  casaque 
plus  ample  que  l'habit  ordinaire,  et  dont  on  se  couvrait 
en  temps  de  pluie  ou  de  gelée,  et  pour  monter  à  cheval  : 
la  France  l'emprunta  à  l'Angleterre  vers  1725,  Aujour- 
d'hid  la  redingote  est  un  vêtement  plus  long  que  l'habit, 
de  même  forme  jusqu'à  la  ceinture,  mais  dont  les  pans  en- 
tourent le  corps  et  couvrent  une  partie  des  Jambes. 

REDONDANCE,  défaut  du  style,  vicieuse  superfluité 
de  paroles  qui  nuit  à  la  netteté  du  discours.  Cest  comme 
un  bondissement  de  la  pensée  qui ,  après  avoir  frappé 
l'esprit,  rejaillit  et  retombe  avec  moins  de  force. 

REDONDILLA.  V.  Espagnols  (Poésie). 

REDORTE  (du  latin  retorta),  meuble  de  Técu  qui  re- 
présente une  branche  d'arbre  tortillée  en  quatre  cercles 
l'un  sur  l'autre,  et  dont  les  deux  bouts  se  trouvent  au- 
dessus,  vers  le  chef. 

REDOUBLEMENT,  en  termes  de  Grammaire  grecque  « 
répétition  de  la  consonne  initiale  d'un  verbe  devant  Taug« 
ment  syllabique  au  parfait  de  tous  les  modes  ;  ainsi ,  le 
verbe  basileuô  fait  au  parfait  b-e-bcuileuka.  Dans  les 
verbes  commençant  par  une  voyelle,  le  redoublement 
affecte  la  forme  de  Taugment  temporel  ;  ainsi ,  agô  fait 
au  parfait  ékha  :  cependant  certains  verbes  de  ce  genre 
ont  un  redoublement  réel,  qui  consiste  dans  la  repéti- 
tion des  deux  premières  lettres  du  radical  ;  tel  est  le  verbe 
égheirô,  dont,  le  porfaii  rigoureusement  régulier  serait 
êgherka,  mais  qui  fait  à  ce  temps  éghégherka.  Ce  redou- 
blement est  dit  attique,  quoiqu'il  fût  aussi  usité  dans 
les  trois  autres  dialectes  littéraires.  Dans  la  langue  homé- 
rique ou  épique,  le  redoublement  existe  aussi  à  l'aoriste 
second  de  certains  verbes  :  ainsi,  terpô  faisait  tétarpon 
aussi  bien  que  étarpon.  Enfin  les  verbes  dits  allongés 
prenaient  souvent  devant  leur  radical  un  redoublement; 
ainsi ,  le  verbe  ghirpnomai  (  pour  ghi-ghénomai)  est  l'al- 
longement du  primitif  ghénomai. — Certains  verbes  latins 
ofiTrent  des  particularités  analogues  :  tango  fait  au  parfait 
tetigi;  pello,  pepuli;  curro,  cucturi,  etc. 

Le  redoublement  des  consonnes  en  français  n'est  qu'un 
simple  fait  orthographique,  étymologique,  ou  de  pronon* 
ciation.  Très-souvent  le  caprice  seul  Ta  introduit,  ot  ce 
n'est  pas  Tune  des  moindres  difficultés  de  notre  langue, 
au  point  de  vue  de  l'orthographe,  même  pour  les  natio- 
naux (  V.  Ginmit-Duvivier,  Grammaire  des  Grammaires, 
paoes  944-956,  édit.  Lemaire). 

On  redouble  un  mot ,  une  expression,  lorsqu'on  veut 

Îr  attirer  l'attention  du  lecteur  ou  de  l'auditeur,  surtout 
orsque  le  sentiment  de  celui  qui  parle  a  quelaue  chose 
de  vif  et  de  passionné,  comme  dans  ce  vers  de  Racine 
(Athalie.l,  i)i 

Bompes ,  rompes  tout  pacte  aveo  Timpiété. 

Quelquefois  le  redoublement  se  fait  par  un  mot  à  peu 
près  svnonyme  :  «  Retiré  du  milieu  des  ruines  et  des  d^ 
bris  de  la  maison  rovale.  n  (IIassilloii.)  Souvent  l'idée, 
non  le  mot,  est  redoublée;  dans  ce  cas,  on  s'exprime 
d'abord  en  termes  plus  ou  moins  généraux,  plus  ou  moins 
vagues,  et  la  seconde  forme  de  la  pensée  a  quelque  chose 
de  plus  précis,  de  plus  particulier  : 

L*arclie  sainte  est  muette ,  et  ne  rend  pins  d*orades. 

(RiiciiiB,  /Mtf.) 

Dlen,  qnl  hait  les  tjrrans ,  et  qnl  dans  JesralU 

Jura  d'exterminer  Âchab  et  Jtfaabel.  (  Id.  IWd,  1.  ) 

On  bien  le  redoublement  de  Texpression  i^oute  à  la  pr»* 
mière ,  renchérit  sur  elle,  lui  donne  plus  de  force  et 
d'éclat,  comme  dans  cette  phrase  de  Massillon  t  «  Rien 
ne  lui  pandt  digne  de  récompense  dans  set  s^|et8  que  let 
talents  utiles  àla  patrie:  les  faveurs  annoncent  toi^ooTt 
le  mérite  ou  le  suwent  de  près,  a 


REF 


1542 


RÊF 


Dans  notre  ▼eniflcation,  le  mot  redoubUtnent  ft*ap- 
pliqne  aa  retour  ou  h  la  continuation  de  la  mdme  rime 
dans  le  cours  d^une  période,  quelquefois  d'une  pièce  en- 
tière. Bien  employée,  cette  licence  donne  à  an  morceau 
an  air  de  facilité,  soutient  Tharmonie,  charme  Toreille, 
et  peat  produire  on  effet  poétique;  mais  Tabus  en  est 
insipide  et  rebutant.  La  Fontaine  Ta  employée  avec  succès 
dans  la  pièce  d^euToi  qui  précède  la  fable  lé  Chat  €t  la 
Souris  (Xn,  5)  t  les  consonnances  en  u  s'entendent  douze 
fois,  mais  entremêlées  de  rimes  féminines  variées;  la 
fable  elle-même  présente  cette  rime  cinq  fois  dans  les 
9  premiers  vers.  Dans  V Homme  et  la  Puc$  (VIII,  5),  les 
rimes  en  «r  et  en  im  sont  redoublées  avec  bonheur.  La 
poésie  lyrique  offre  plusieurs  beaux  exemples  de  ces  re- 
doublements, particalièrement  les  chœurs  d*E$iher  et 
d*Athalie.  P. 

.REDOUTE  (de  l'italien  ridotto,  réduit),  en  termes  de 
Fortification,  petit  fort  détaché,  construit  en  maçonnerie 
ou  en  terre,  et  propre  à  recevoir  de  l'artillerie.  Une  re- 
doute consiste  en  un  simple  rempart  avec  fossé,  et  pré- 
sente de  3  à  8  fh>nts,  selon  les  circonstances  et  les  lieux. 
Elle  sert  à  arrêter  la  marche  de  Tennemi,  à  défendre  un 
point  stratégique,  à  prolonger  la  résistance  d'une  place. 
—  Dans  plusieurs  villes  d'Italie  et  de  France,  on  nomme 
encore  Redoute  un  endroit  public  où  l'on  se  réunit  pour 
Jouer  ou  danser. 

REDOWA,  sorte  de  valse  qui  tient  de  la  pollca  (F.  ce 
mot).  C'est  la  même  mesure  à  3  temps,  mais  avec  un 
rhythme  moins  précipité. 

RÉDUCTION,  en  termes  de  Beaux-Arts,  opération  qui 
consiste  à  copier  un  objet,  en  donnant  à  la  copie  une 
moindre  grandeur  qu'à  l'original.  Divers  procédés  méca- 
niques ont  été  inventés  pour  exécuter  cette  opération 
avec  une  précision  mathématique  (  V.  Carreaux,  Diagra- 
PBB,  Pantographb).  Vassri  parle  d'un  certain  Alberti  qui, 
au  XVI*  siècle,  avait  inventé  un  instrument  pour  copier 
les  tableaux  en  les  réduisant  à  volonté. 

Rioocnoii,  ancien  terme  de  Musique.  V.  DéovcTioiii. 

RéDOcnoR  (Action  en),  en  termes  de  Jurisprudence,  ac- 
tion dont  le  but  est  de  ramener  à  moindre  valeur  une 
libéralité,  une  disposition  dans  laquelle  a  été  excédée  la 
faculté  permise  par  la  loi.  Les  hbéralités  entre  vifs  ou  à 
cause  de  mort  qui  excèdent  la  quotité  disponible  sont 
réductibles  à  cette  quotité  lors  de  l'ouverture  de  la  suc- 
cession. L'action  en  réduction  ne  peut  être  exercée  que 
par  les  héritiers  à  réserve,  leurs  successeurs  ou  ayants 
cause.  Elle  peut  être  dirigée  et  contre  les  donataires 
entre  vifs  et  contre  les  tiers  détenteurs  des  inmieubles 
faisant  partie  de  la  donation. 

RéDocTiON  A  l'absurde,  OU  tcrmos  de  Logique,  argu- 
ment par  lequel  on  démontre  une  proposition  en  faisant 
voir  que  le  contraire  serait  impossible  ou  absurde,  ou 
conduirait  &  des  conséquences  entachées  des  mêmes  vices. 

RÉDUIT,  en  termes  de  Fortification,  poste  ménagé 
dans  l'intérieur  d'une  demi-lune  (K.  ee  mot)^  et  où  l'on 
se  retranche  quand  celle-ci  est  enlevée.  On  peut  de  là, 
par  un  feu  vivement  soutenu,  empêcher  l'ennemi  de 
s'établir  dans  la  demi-lune,  et  même  le  contraindre  de 
Tabandonner. 

RÉDUPLICATION,  nom  donné  autrefois  à  une  répéti- 
tion de  neumes  sur  le  dernier  mot  des  grands  répons. 
On  la  faisait  pour  donner  le  temps  de  rentrer  au  chœur 
après  une  station  dans  la  nef. 

RÉDUPLICATIVE  (Proposition).  V.  Causals. 

RÉFACTION  DE  DROFfS ,  réduction  des  droits  de 
douane  accordée  aux  marohandises  qui  ont  été  avariées 
par  événements  de  mer ,  et  qui  n'ont  plus  la  valeur 
fixée  par  le  prix-courant  des  mêmes  espèces  de  mar- 
chandises. 

RÉFECTOIRE ,  salle  où  les  moines  d'un  couvent,  et, 
en  général,  tous  ceux  qui  mènent  la  vie  commune,  tels 
que  les  élèves  internes  d'une  maison  d'éducation,  se 
inêunissent  pour  prendre  leurs  repas.  Il  s'y  trouve  une 
chaire,  où  quelqu'un  fait  de  pieuses  lectures. 

REFENDS,  en  termes  d'Architecture,  lignes  horizon- 
tales ou  verticales  creusées  régulièrement  sur  une  face  de 
construction,  pour  indiquer  réellement  ou  en  apparence 
la  grandeur  des  pierres  ou  les  assises,  ou  pour  empêcher 
qu'on  en  aperçoive  les  Joints.  Les  murs  de  la  Maison 
carrée  à  Nîmes,  et  ceux  de  l'église  de  la  Madeleine  à 
Paris,  sont  divisés  à  l'exturieur  par  des  refends.  Les  re- 
fends qui  suivent  les  assises  ont  pour  effet  de  les  pro* 
téger  contre  les  intempéiies;  c'est  un  contre-sens  d'en 
mettre  à  des  constructions  susceptibles  d'être  lavées  par 
des  eaux  coarantes,  telles  que  des  piles  de  ponts.  — 
^  On  nomme  Mur  de  refend  un  mur  intérieur  qui  sépare 


les  pièces  d*un  bâtiment;  Pierre  de  refend,  une  piem 
angulaire. 

RÉFÉRÉ,  recoon  exercé  devant  on  juge  dans  le  mt, 
soit  en  cas  d'urgence  do  faire  statuer  provisoirement  poui 
la  conservation  d'un  droit,  soit  de  parvenir  à  résoudre 
des  difficultés  soulevées  par  l'exécution  des  Jugements  ou 
des  actes  exécutoires.  !«  principe  de  cette  Juridiction  se 
retrouve  dans  l'Ordonnance  de  1685.  La  connaissance 
des  référés  appartient  aujourd'hui  au  président  du  tribu- 
nal de  première  instance  ou  au  Juge  qui  le  remplace.  U 
}r  a  trois  modes  de  les  introduire  :  !•  par  assignation  à 
'audience  des  référés,  <m  suivant  les  délais  ordinaires; 
2P  à  bref  délai  à  l'audience  ou  à  l'hêtel  du  président,  ou 
sur  l'heure,  mais  après  en  avoir  obtenu  l'autorisation 
préalable;  3*  par  t^ournement  sur  les  procès-verbaux 
des  Juges  de  paix,  notaires,  hidssiers,  gardes  du  com- 
merce, etc.  Les  ordonnances  ou  Jugements  de  référé 
sont  toujours  exécutoires  par  provision.  L'ordonnance 
peut  être  exécutée  sur  la  minute,  mais  toujoun  après 
signification  à  personne  ou  domicile.  Elle  peut  être  atta- 
quée par  la  voie  de  l'i^ipel,  si  la  valeur  du  litige  excède 
le  taux  du  dernier  ressort.  L'appel  doit  être  interjeté 
dans  la  quinzaine  de  la  signification.  Les.  décisions  en 
matière  de  référé  ne  sont  pas  susceptibles  de  pourvoi, 
par  ce  motif  qu'elles  n'engagent  pas  le  principal.  V.  Bil- 
bard.  Traité  des  référés,  1834,  in-8«  ;  Dèbelleyme,  Or- 
donnances sur  requêtes  et  sur  référés,  3*  édition,  1856, 
2  vol.  in-8<>.  R.  d'E. 

RÉFÉRENDAIRE.  V.  ce  mot  dans  notre  JDtcftofNUtire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

RÉFÉRENDUM,  dépêche  qu'un  agent  diplomatique 
expédie  à  son  gouvernement  pour  lui  demander  des 
instructions  nouvelles,  'orsque  les  négociations  qu'il 
poursuit  l'entraînent  bon  de  la  limite  de  ses  pouvoirs. 
En  attendant  la  réponse,  il  ne  peut  négocier  que  ad  ré- 
férendum et  sub  sperati, 

RÉFLÉCHI  (Pronom),  pronom  qui  sert  à  exprimer 
l'objet  d'une  action  lorsque  cet  objet  représente  le  sujet 
même,  comme  lorsqu'on  dit  :  t  Elmire  se  regarde;  »  se 
est  l'objet  de  l'action  exprimée  par  le  verbe  regarder,  et 
représente  le  sujet  de  cette  action  qui  est  Elmire.  Le 
pronom  réfléchi  se  distingue  du  simple  pronom  person- 
nel, en  ce  qu'il  ne  peut  Jan^ais  s'employer  que  comme 
régime.  En  français,  il  n'a  \\b  forme  spéciale  qu'à  la 
3*  personne,  se,  soi,  qui  sert  pour  les  deux  nombres  et 
les  deux  genres.  A  la  l'*  et  à  la  2*  personne,  l'idée  ré- 
fléchie est  exprimée  par  les  simples  pronoms  personnels 
répétés  sous  leur  forme  de  complément.  Quelquefois  le 
pronom  est  répété  pléonastiquement  avec  l'addition  de 
l'adjectif  même .  «  d'aimer  trop  svi-même  est  un  ridicule 
et  un  vice.  »  D  arrive  souvent  que,  même  à  la  3*  per- 
sonne, le  pronom  personnel  ordinaire  fait  fonction  de 
pronom  réfléchi,  surtout  lorsque  le  sij^et  n'est  pas  vague 
(l'Empereur  réunit  autour  de  lui  tous  les  officiers),  ou 
est  du  pluriel  (les  prisonniers  priaient  le  vainqueur 
d'avoir  pitié  d*eux)  ;  enfin,  lorsqu'il  faut  représenter  par 
un  pronom,  sous  forme  de  complément,  dans  une  pro- 
position subordonnée,  le  sujet  d'une  proposition  princi- 
pale :  «  Diogène  voulut  qu'on  l'abandonnât  sans  sépulture 
après  sa  mort.  » 

En  latin,  le  pronom  réfléchi,  dont  la  forme  est  sui  pour 
le  génitif,  sibi  pour  le  datif,  se  ou  sese  pour  l'accusatif  et 
l'ablatif  des  deux  nombres,  est  plus  fréquemment  em- 
ployé que  le  nôtre,  et  contribue  beaucoup  à  la  précision 
des  phrases.  L'emploi  en  a  lieu  invariablement  toute»  les 
fois  que  le  pronom  personnel  se  trouve  dans  la  môme 
proposition  que  le  nom  qu'il  représente,  ou  même  dans 
une  proposition  immédiatement  dépendante  de  la  prin- 
cipale où  se  trouve  ce  nom,  *'  à  comme  sujet,  soit 
comme  complément.  —  La  langue  grecque  faisait  égal^ 
ment  un  usage  très-précis  du  pronom  réfléchi  héaiUoû, 
héautés,  héautoù.  Ni  en  latin  ni  en  grec  le  pronom  r^ 
fléchi  ne  pouvait  avoir  de  nominatif.  Dans  les  deux 
langues  anciennes,  aussi  bien  que  dans  le  français,  le 
pronom  réfléchi  exprime  très-souvent  la  réciprocité.  V.  Ré- 
ciproque (Pronom).  P. 

RéFLécHi  (Verbe),  verbe  dont  le  complément,  soit  direct, 
soit  indirect,  représente  le  sujet  :  «  Vorgueilleux  aimii  à  se 
louer; — Je  me  suis  trompé; — Nous  nous  sommes  égarés,* 
Aux  temps  composés  ces  verbes  se  conjuguent  avec  l'auxi- 
liaire être;  mais  comme  cet  auxiliaire  remplace  le  verbe 
avoir,  l'accord  du  participe  se  fait,  par  une  espèce  de  syi- 
lepse,  comme  s'il  était  uni  au  verbe  avoir,  c-à-d.  que,  si 
le  pronom  complément  est  employé  comme  complément 
direct,  c'est  avec  lui  que  l'accord  du  participe  a  lieu,  el 
que,  si  ce  complément  est  indirect,  le  participe  reste  in* 


RÉF 


1543 


RÉF 


rarittbie.  —  Beaixcoap  de  verbes  françaift  sont  réfléchis 
piiT  la  forme,  mais  oot  un  sens  passif,  et  se  construisent, 
quant  à  la  syntaxe,  comme  les  ?erbes  passifs  :  «  Un  mal 
invétéré  ne  saurait  se  guérir  promptement  (c-à-d.  être 
guéri)'\  —  Les  États  se  ruinent  par  la  discorde  (c-à-d. 
sont  ruinés),  »  Un  fait  plus  étrange,  c*est  la  forme  ré- 
fléchie donnée  par  un  très-vieil  usage  à  certains  verbes 
neutres  qui  logiquement  n'en  sont  point  susceptibles  ; 
tels  sont  s*en  àler^  s'en  venir,  se  mourir,  etc.  Certains 
antres  verbes  ne  s'emploient  jamais  que  sous  la  forme 
réfléchie,  comme  s'enfuir,  se  repentir,  sHngénier,  s'ar^ 
roger,  s'obstiner,  etc.  Enfin  la  forme  réfléchie  donne  à 
certains  verbes  actifs  ou  neutres  une  nuance  de  sens 
toute  particulière;  ainsi,  se  douter  de  n'offre  qu'une  ana- 
logie très-lointaine  avec  le  verbe  douter;  s*apercevoir  de 
exprime  une  idée  un  peu  différente  de  celle  du  simple 
apercevoir.  Il  en  est  de  même  de  étudier  et  s'étudier  à, 
aviser  et  s^aviser  de,  défaire  et  se  défaire  de,  etc.  V.  Pro- 
ROMniAL  (Verbe). 

En  latin,  lorsqu'il  s'agit  de  donner  au  verbe  le  sens 
réfléchi,  on  rait  le  même  système  qu'en  français,  sinon 
que  la  conjugaison  même  du  verbe  n'y  est  jamais  modi- 
fiée. Il  en  est  de  môme  généralement  en  grec,  atec  cette 
seule  différence  que  toujours  l'adjectif  correspondant  au 
français  même  {aiUos,  autè,  auto)  est  ajouté  an  pronom 
de  chaque  personne;  ainsi  on  ne  oit  pas  en  grec  jem^aime 
{égd  mé  phild)^  mais  faime  moUméme  {égô"  émauton 
phHd)\fX  ainsi  de  suite,  tu  aimes  toi-même,  U  aime 
soi-même,  nous  aimons  notu-mémes,  etc.  Dans  un  cer- 
tain nombre  de  cas,  la  voix  moyenne  exprime  d'une  façon 
à  la  fois  concise  et  nette  l'idée  réfléchie.  V.  Motki.    P. 

RÉFLECTEUR  ACOUSTIQUE,  plaque  de  métal  con- 
cave qu'on  adapte  au  pavillon  des  Instruments  à  vent, 
et  dont  la  mobilité  permet  de  lui  faire  prendre  toutes  les 
directions  voulues.  A  l'aide  de  ce  réflecteur,  inventé 
par  Sax  en  1839,  on  peut  diriger  les  sons  vers  tel  ou  tel 
point. 

RÉFLEXION  (du  latin  reflectere,  replier),  acte  par 
lequel  l'esprit  se  replie  en  quelque  sorte  sur  lui-même 
pour  considérer  les  faits  qui  se  passent  en  lui.  La  Ré- 
flexion n'est  que  Vattention  ayant  pour  objet  un  phéno- 
mène interne;  le  géomètre  et  le  philosophe  qui  cherchent 
la  solution  d'un  problème  de  mathématiques  ou  de  mo- 
rale font  acte  de  réflexion.  Cet  acte  embrasse  les  percep- 
tions par  les  sens,  les  faits  de  la  mémoire  aussi  bien  que 
ceux  de  la  conscience  et  de  la  raison;  les  idées  qui 
proviennent  de  ces  différentes  sources  ont  besoin  du 
travail  intérieur  de  la  pensée  pour  devenir  claires,  et 
pour  que  l'esprit  puisse  les  distinguer  les  unes  des 
autres.  On  peut  donc  dire  avec  Locke  que  la  Réflexion 
est  la  connaissance  que  prend  l'&me  de  ses  différentes 
opérations,  mais  sans  en  conclure  comme  lui  qu'elle  est 
elle-même  une  source  d'idées  nouvelles.  R. 

RÉFLEXIONS  ET  MAXIMES,  titre  sous  lequel  Vauve- 
nargues  nous  a  laissé  un  certain  nombre  de  Pensées  à  la 
manière  de  La  Rochefoucauld.  Les  éditions  qu'on  en  a 
données  contiennent  aussi  plusieurs  autres  écrits  ou 
fragments  de  philosophie  morale,  où  l'on  entrevoit  é^i- 
iement  ce  qu'il  y  eut  de  tendresse  et  d'élévation  dans 
son  âme,  de  distinction  et  de  ^vité  dans  son  esprit.  Ce 
sont  :  1<>  an  Traité  sur  Vesprtt  humain,  en  trois  livres, 
oCi  l'auteur  considère  successivement  l'esprit  en  lui- 
même,  puis  les  passions,  puis  le  bien  et  le  mal  moral 
avec  les  dispositions  de  l'àme  qui  produisent  l'un  et 
l'autre;  œuvre  incomplète  et  faiblement  conçue,  mais 
qui  renferme  pourtant  quelques  vues  originales  et  fines; 
2^  des  Réflexions  d'une  certaine  étendue  sur  divers  su- 
jeis  capricieusement  rapprochés  de  philosophie,  de  litté- 
rature, de  morale  et  de  critiaue;  Z^  des  Conseils  à  un 
jeune  homme  sur  la  conduite  de  la  vie  ;  leçons  qu'on  di- 
rait parfois  dictées  par  an  stoïcien,  et  où  Vauvenargues, 
malheureux  jusqu'à  son  dernier  Jour,  affirmait  pourtant, 
en  dépit  de  ses  propres  déceptions,  qne  le  mérite  per- 
sonnel et  le  courage  finissent  par  triompher  de  tout;  qu'il 
faut  être  d'abord  soi-même,  si  Ton  veut  s'acquérir  les 
étrangers,  et  qu'une  &me  courageuse  ne  doit  demander 
qu'au  travail  une  destinée  digne  d'elle;  4^  des  Réflexions 
critiques  sur  quelques  poëtes  du  xvii*  et  du  xvm*  siècle, 
où  l'on  relèverait  aisément,  à  côté  de  plusieurs  erreurs 
sur  Corneille  et  sur  Molière,  et  de  complaisances  inévi- 
table pour  le  talent  tragique  de  Voltaire,  son  ami,  des 
jugements  d'un  bon  sens  exquis  sur  La  Fontaine,  Boi- 
leaa  et  Racine;  suit  une  page  éloquente  sur  Bossuet, 
Pascal  et  Fénelon,  puis  une  appréciation  très-solide  et 
très-éclaîrée  des  Caractères  de  La  Bruyère;  5<»  des  Co- 
iradàres  imités  de  La  Bruyère  et  de  Théophraste,  parmi 


lesquels  brille  le  portrait  de  cet  infortané  Clazomèna 
(entendez  Vauvenargues  lui-même),  «  qui  a  eu  l'expé- 
rience de  toutes  les  misères  de  l'humanité,  »  mais  qui 
n'eût  pas  voulu  changer  sa  misère  pour  la  prospérité  des 
hommes  faibles,  car  «  si  la  fortune  peut  se  jouer  de  la 
sagesse  des  gens  vertueux,  il  ne  lui  appartient  pas  de 
faire  fléchir  leur  courage;  »  &*  deui  Discours  sur  la 
gloire,  après  laquelle  Vauvenargues  soupira  toute  sa  vie, 
suivis  d'un  troisième  sur  les  plaisirs,  où  il  se  montre  le 
censeur  sévère  des  mœurs  de  son  temps  ;  7*  des  Cofist- 
dérations  sur  le  caractère  des  différents  siècles,  où  sa 
hardiesse  éclairée  et  libérale  défendait  contre  les  atta- 
ques légères  et  dédaigneuses  de  ses  contemporains  les 
mœurs  et  même  les  superstitions  des  temps  les  plus 
anciens;  puis  vient  un  Discours  sur  les  mœurs  du 
xvni*  siècle,  véritable  contre-partie  du  précédent  opus- 
cule, sorte  Nde  procès  intenté  à  tous  les  vices  de  cette 
société  corrompue.  «  bassement  partagée  entre  l'intérêt 
et  les  plaisirs,  et  aevenue  incapable  des  grandes  choses, 
depuis  qu'elle  avait  appris  le  mépris  de  la  gloire  et  de  la 
vertu  ;  »  8<>  un  Discours  sur  Vinigalité  des  richesses,  où 
Vauvenargues  défendait  la  Providence  en  disciple  de 
Pascal,  de  Bossuet  et  de  Fénelon,  peut-être  plus  encore 
qu'en  philosophe.  Le  même  sentiment  chrétien,  profond 
et  sincère,  qui  avait  animé  déjà  VÉloge  funèbre  de  cet 
Hippolyte  de  Seytres,  ravi  dès  l'&ge  de.l8  ans  par  la  guerre 
à  la  tendre  amitié  de  Vauvenargues,  a  é^ilement  inspiré 
la  Méditation  sur  la  Foi,  la  Prière  à  la  THniU,  le  Traité 
sur  le  libre  arbitre,  le  EHscours  sur  la  Liberté,  et  le  mor- 
ceau intitulé  Imitation  de  Pascal  sur  la  relipon  chré- 
tienne, sur  le  stoïcisme,  sur  les  illusions  de  l'impie  et  la 
vanité  des  philosophes.  Enfin,  au  commencement  de 
notre  siècle,  furent  publiés  18  Dialogues  des  Morts,  où 
Ton  sent  encore  l'influence  de  Fénelon  sur  Vauvenargues; 
agréables  imitations  qui  rappellent,  avec  moins  de  force, 
le  bon  sens  et  la  rimplicité  des  Dialogues  du  modèle.  Les 
relations  et  la  Correspondance  de  Vauvenar^es  avec 
Voltaire  l'ont  fait  appeler  quelquefois  son  disciple,  n  est 
vrai  qu'il  professa  toute  sa  vie  une  admiration  sincère  et 
un  tendre  attachement  pour  le  premier  génie  de  son 
temps,  qu'il  demanda  ses  avis  et  les  suivit;  il  est  vrai 
encore  qu'il  tint  du  grand  apôtre  de  la  tolérance  et  du 
chef  des  libres-penseurs  au  xvm*  siècle  la  haine  de  la 
persécution  et  le  doute  sur  le  dogme;  mais,  du  reste,  il 
appartient  plutôt  au  siècle  précédent,  non-seulement  par 
le  culte  qu'il  rendit  ouvertement  aax  oénies  chrétiens 
contre  lesquels  guerroyait  Voltaire,  mais  encore  par  la 
pureté,  l'élévation  et  le  caractère  éminemment  spiritua- 
liste  de  ses  Pensées.  Tandis  qu'autour  de  lui  la  vanité, 
le  scepticisme  moqaeur  et  la  volupté  régnaient  à  peu  près 
sans  partage,  il  vanta,  il  prêcha  presque  la  verta,  l'amour 
de  la  gloire,  la  confiance  en  Dieu  et  la  soumission  à  la 
Providence.  Il  écrivit  que  «  les  premiers  jours  du  prin- 
temps ont  moins  de  gr&ce  que  la  vertu  naissante  d'un 
jeune  homme,  %  et  que  «  les  premiers  feux  de  l'aurore 
ne  sont  pas  si  doux  que  les  premiers  resards  de  la  gloire.  » 
Il  chercha  en  Dieu  l'espérance  et  Ta  force  pour  son 
&me  triste  et  délaissée.  Plus  malheureux  en  cela  que 
Pascal,  qui  du  moins  n'eut  à  lutter  que  contre  sa  raisen, 
il  eut  a  défendre  les  croyances  où  le  portait  son  cœur,  et 
contre  son  propre,  esprit,  et  contre  les  mille  objections 
dont  l'obséaait  son  entourage.  Ce  combat  courageux  et 
perpétuel  contre  le  scepticisme,  les  petites  passions,  la 
misère,  le  découragement  et  même  le  désespoir,  qui  est 
comme  le  fonds  des  Pensées  de  Vauvenargues,  constitue 
son  originalité  dans  le  xvm*  siècle  et  son  pins  beau  titre 
de  gloire  auprès  de  la  postérité.  A.  H. 

RÉFORME  ou  RÉFORMATION,  terme  d'ffistoire  reli- 
gieuse. F.  ce  mot  dans  notre  Dictumnaire  de  BiograpkU 
et  ^Histoire, 

R^poRMi,  en  termes  d'Administration  militaire,  licen- 
ciement partiel  d'une  armée,  réduction  d'an  corps  de 
troupes  à  un  moindre  nomlKre  ;  —  renvoi  d'an  homme 
impropre  an  service,  soit  quand  il  passe  devant  le  con* 
seil  de  révision,  soit  par  congé  (F.  Gonoé);  —  position 
de  l'officier  sans  emploi ,  prononcée  pour  infirmités  incu- 
rables, ou  pour  incondmte  habituelle,  on  pour  fantes 
graves  commises  soit  dans  le  service,  soit  contre  la  dis- 
cipline, ou  pour  prolongation  au  delà  de  3  ans  de  la  po- 
sition de  non-activité.  L'officier  réformé,  n'étant  plus 
susceptible  d'être  rappelé  à  l'activité,  ne  peut  prétendre 
à  une  pension  de  retraite,  mais  seulement  à  un  traite^ 
ment  de  réforme,  pourvu  qu'il  ait  7  ans  de  service  ac- 
complis ;  s'il  a  moins  de  SO  ans  de  service,  il  reçoit,  pen- 
dant un  temps  égal  à  la  moitié  de  la  durée  de  ses 
services  effectifs,  les  2/3  da  minimum  de  la  pension  d& 


RÉF 


au 


RÉ6 


retraits  de  son  grade;  sMI  a  plus  de  20  ans  de  serffce,  la 
quotité  de  flon  traitemept  est  déterminée  par  le  minimum 
de  la  retraite  de  son  grade,  à  raison  d'un  30*  pour  chaque 
année  de  serdce  efTectif. 

b6k>bme  DBS  HoiiiiAUS.  uom  ([u*on  donnait  Jadis  à  Tacte 
de  rétablir  la  Taleur  réelle  des  espèces  dont  on  avait  fic- 
tivement snrhauMé  le  prix.  Leur  réformation  était  Tacte 
de  les  refrapper,  sans  les  fondve,  pour  en  changer  ou  la 
valeur  ou  Tempreinte. 

RÉFORlfÊES  (Éelises).  V.  Êgusbs  sépORHéBS,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  fT  Histoire. 

RÉFRAGTAIRBS.  F,  ce  mot  dans  notre  Dictumnaire  de 
Biographie  et  d^ffistoire, 

REFRAIN  (du  bas  latin  referaneus  cantus,  chant  qui 
revient  toujours],  répétition  d*un  ou  plusieurs  mots,  d'un 
ou  plusieurs  vers,  dans  les  ballades,  les  rondeaux ,  trio- 
lets, chansons,  rondes,  vaudevilles,  romances,  barcar 
roUes,  etc.  Le  refrain  des  ballades  se  composait  d*un 
même  vers  répété  à  la  fin  de  chaque  couplet  et  de  TEn- 
▼oi.  Dans  le  rondeau  ordinaire,  il  consiste  dans  la  répé- 
tition des  premiers  mots  du  1*'  couplet  &  la  fin  du  2'  et 
<lu  3*.  Dans  les  rondeaux  des  opéra^omiques,  le  refrain 
forme  une  sorte  de  couplet  iniUal,  qui  se  répète  après 
les  deux  couplets  proprement  dits.  Dans  les  triolets,  le 
refrain  était  la  reproduction  du  premier  vers  après  le 
3*,  et  des  deux  premiers  à  la  fin  de  la  pièce.  Dans  les 
chansons,  les  refrains  sont  plus  libres  et  plus  variés  : 
tantôt  on  répète  un  ou  deux  vers,  soit  au  commencement, 
soit  à  la  fin  de  chaque  couplet;  tantôt  le  premier  et  le 
dernier  vers  du  1*  couplet  reviennent  dans  les  couplets 
suivants;  quelquefois  le  môme  vers  se  répète  à  la  fois  au 
commencement  et  à  la  fin  de  chaque  couplet;  souvent 
c*est  le  couplet  initial  qui  forme  le  refrain.  Après  avoir 
répété  le  refrain  sans  aucun  changement  un  certain 
nombre  de  fois,  on  peut  le  modifier  à  la  fin  de  la  chanson, 
n  arrive  aussi  quil  ne  conserve  dans  le  cours  de  la 
chanson  qu'un  mot  ou  une  rime,  et  que  l'idée  fonda- 
mentale se  modifie  successivement  à  chaque  couplet.  Le 
refrain  peut  être  double  :  il  consiste  alors  dans  la  répé- 
tition d^un  ou  deux  vers  du  couplet  précédent  au  com- 
mencement de  chaque  couplet  et  avant  le  refrain  régulier 
et  périodique.  Dans  la  chainson  légère,  le  refrain  consiste 
souvent  dans  le  retour  de  certaines  onomatopées,  comme 
ton  ton  tontaine  ton  ton,  mironton  mirontaine,  plan  plan 
rantanplan ,  etc.  Un  refrain  peut  dans  certains  cas  se 
bisser,  ou  se  répéter  trois,  quatre  et  Jusqu'à  huit  fois. 
La  plupart  du  temps,  il  se  chante  en  chœur,  et ,  dans  les 
rondes,  on  le  chante  en  tournant.  —  Le  refrain  se  trouve 
aussi  dans  la  poésie  lyrique  élevée,  soit  dans  les  opéras, 
soit  dans  les  tragédies  où  Ton  a  essayé  d'introduire  des 
chœurs.  Les  chceurs  des  tragédies  et  des  comédies  grec- 
ques en  offrent  déjà  des  exemples;  les  épithalames,  les 
Idylles,  les  églogues,  les  pièces  pastorales  ou  erotiques, 
étaient  souvent  divisées  en  couplets  avec  retour  pério- 
dique d'un  ou  plusieurs  vers.  Mus  dans -ce  qui  nous  reste 
de  petits  poèmes  anciens,  le  refrain  ne  se  présente  nulle 
part  avec  les  formes  variées  que  lui  ont  données  nos  au- 
tenrs  de  chansons  et  de  vaudevilles.  P. 

REFRAPPÉES  (Médailles),  médailles  dont  les  contours 
du  type  sont  douoles,  par  1  effet  des  coups  redoublte  du 
marteau  et  du  mouvement  du  flan. 

REFRÉDOIR ,  vieux  mot  signifiant  mse  à  rafraichir. 

RÉFUGIÉS  POLITIQUES ,  nom  par  lequel  on  désigne 
les  étrangers  que  des  motifs,  ou  même  des  crimes  poli- 
tiques forcent  de  chercher  un  refVige  en  pays  étranger. 
Les  réfrigiés,à  leur  arrivée  sur  le  territoire  français, 
doivent  se  présenter  au  maire  de  la  première  commune, 
qui  leur  donne  une  passe  provisoire  pour  se  rendre  au 
cnef-lieu  du  département.  Là,  le  préfet  peut  leur  déli- 
yrer  un  passe-port  pour  la  résidence  qu'ils  ont  choisie , 
en  prévenant  le  ministre  de  l'Intérieur.  Ils  peuvent  ob- 
tenir des  secours  de  l'État.  Le  ministre  a  le  droit  de  les 
expulser  par  mesure  de  police  (  Règlement  du  30  mai 
1848;  Loi  du  3  déc.  1849). 

RÉFUTATION,  en  termes  de  Rhétorique,  partie  du 
discours  q^xi  se  place  ordinairement  après  la  Confirma- 
tion ,  et  qv*  a  pour  objet  de  ruiner  ou  du  moins  d'affai- 
blir les  raisons  de  l'adversaire.  Cicéron  ne  veut  pas  qu'on 
la  sépare  de  la  Confirmation  :  «  II  n'y  a,  dit-il ,  qu'un 
seul  procédé  pour  étayer  vos  preuves,  et  ce  procédé  ren- 
ferme les  deux  parties  ou'on  voudrait  disjoindre;  car 
TOUS  ne  pouvez  ni  détniire  ce  qu'on  vous  objecte,  sans 
appuyer  ce  qui  orouve  en  votre  faveur,  ni  établir  vos 
moyens,  sans  réfuter  ceux  de  l'adversaire;  ce  sont  deux 
choses  Jointes  par  leur  nature,  par  leur  but,  et  par 
r usage  qie  vous  en  faites.  *  Blalgre  l'avis  de  Cicéron,  les 


rhéteurs  ont  persisté  à  faire  de  la  Réfotation  une  partie 
distincte  du  uiscours  ;  mais  Us  laissent  au  disoemeroeot 
de  l'orateur  à  déterminer  la  place  qu'elle  doit  occuper. 
Quand  l'auditeur  est  prévenu  et  circonvenu  par  les  rai- 
sons de  l'adversaire,  il  faut  que  la  Réfutation  commence 
dès  l'Exorde,  ou  du  moins  qu'elle  précède  la  Conflrmar 
tion,  et  quelquefois  même  la  Narration;  il  y  a  enfin  une 
espèce  de  discours  qu'on  appelle  Réplùitie,  et  qui  n'est 
d'un  bout  à  l'autre  qu'une  réfutation.  Dans  cette  partie 
du  discours,  l'orateur  prend  séparément  chaque  raison 
de  l'adversaire,  la  dépouille  de  tous  ses  ornements,  la  ra- 
mène à  l'expression  la  plus  simple,  et  s'attache  à  prou- 
ver :  ou  que  le  principe  de  l'adversaire  était  faux  ;  ou  que 
d'un  principe  vrai  il  a  tiré  une  conséquence  fausse;  ou 
qu'il  a  affirmé  un  Mi  douteux.  Quand  on  ne  peut  arriver 
à  une  conclusion  aussi  précise,  on  cherche  du  moins  à 
ieter  dans  l'esprit  de  l'auditeur  quelque  doute  sur  la  va- 
leur des  preuves  de  l'adversaire.  Les  moyens  les  plus 
communs  de  la  Réfutation  sont  :  la  négation,  quand  on 
nie  absolument  le  fait;  la  distinction^  quand  on  sépare 
le  droit  du  fait ,  ou  le  fait  du  droit ,  ou  le  principe  des 
conséquences;  la  récrimination,  quand  on  montre  que 
l'adversaire  a  fait  aussi  ce  dont  il  vous  accuse,  moyen 
fort  usité  chez  les  Anciens,  mais  qui  répugne  à  la  poli- 
tesse de  nos  mœurs,  et  qui  d'ailleurs  ne  prouve  rien,  car 
on  n'est  pas  Justifié  pour  avoir  montré  qu'un  autre  est 
également  coupable;  Vévasion,  quand  on  élude  de  ré- 
pondre et  qu'on  détourne  l'attention  de  l'auditeur;  la 
compensation,  quand  à  une  action  blâmable  on  oppose 
une  action  digne  d'éloges,  ce  qu'on  appelle  chez  nous  les 
circonstances  atténuantes;  enfin,  \h  confutatUm ,  quand 
on  s'empare  du  côté  ridicule  des  raisons  de  l'adversaire, 
pour  le  railler  et  faire  rire  à  ses  dépens.  La  Réfutation 
est  la  partie  du  discours  où  l'orateur  doit  surtout  se  mon- 
trer logicien  :  il  lui  faut  une  grande  habitude  de  l'aigu- 
mentation,  une  grande  sagacité  pour  saisir  la  liaison  des 
idées,  discerner  si  elles  se  conviennent ,  et  confondre  les 
sophismes  qui  se  cachent  bien  souvent  sous  les  fleun 
d'une  éloquence  facile  et  brillante.  H.  D. 

RÉGALE  (Jeu  de),  le  plus  ancien  des  jeux  à  anche  àt 
l'orgue.  Ce  Jeu,  formé  d'anches  battantes  montées  sur 
leur  pied  et  sans  tuyaux,  était  autrefois  très-estimé;  c'est 
pourquoi  il  reçut  le  nom  de  régale  ou  jeu  royal.  Aujour- 
d'hui, il  n'est  plus  en  usage  dans  les  orgues  d'église;  il 
n'existe  que  dans  quelques  orgues  en  tables.        F.  C. 

nécALB,  instrument  de  musique,  le  même  que  le  claque- 
bois  (V.  ce  mot). 

Ri^r.ALB  (Droit  de).       >  V.  notre  DictionmUre  de  BiO' 

RÉGALIENS  (Droits).  (      graphie  et  d'Histoire. 

REGARD ,  en  termes  d'Architecture,  ouverture  maçon- 
née, pratiquée  pour  faciliter  la  visite  d'un  conduit,  d'un 
aqueduc,  d'un  égout.  On  nomme  regard  de  fontcûne  l'ou- 
verture d'un  aqueduc  où  est  établi  un  robinet  servant  à 
la  distribution  des  eaux.  —  En  Peinture,  deux  portraits 
de  grandeur  égale  ou  à  peu  près,  peints  de  taçon  que 
les  figures  se  regardent  l'une  l'autre,  sont  appelés  un 
regard. 

REGARDS ,  nom  donné  autrefois  à  de  menues  rentes 
oui  accompagnaient  les  rentes  principales.  C'étaient  or- 
dinairement des  volailles,  des  œufs,  des  pains,  etc. 

RÉGATES  (de  l'italien  regatta),  nom  donné  autrefois 
aux  joutes  de  gondoles  qui  avaient  lieu  à  Venise.  On  Ta 
étendu  à  toutes  les  courses  en  bateau  ou  en  canot.  Depuis 
1853,  le  ministère  de  la  marine  en  France  accorde  des 
prix  aux  régates  qui  ont  lieu  sur  le  littoral  de  la  mer  : 
c'est  que  ces  Joutes  déterminent  chez  les  constructeurs 
une  rivalité  dont  la  navigation  peut  recueillir  des  avan- 
tages. 

RÉGENCE  (du  latin  regere,  gouverner),  se  dit  (lu 
temps  pendant  lequel  l'administration  d'un  État  est  con- 
fiée à  une  ou  plusieurs  personnes  suppléant  le  souverain 
mineur,  empêché  ou  absent ,  et  du  pouvoir  que  ces  per- 
sonnes, dites  régents,  exercent.  En  France,  des  ordon- 
nances de  1403  et  1407  établirent  (quelques  règles  pour 
les  régences  :  les  reines-mères  devaient  être  appelées  à 
diriger  l'État  si  elles  vivaient,  ainsi  que  les  plus  prochains 
du  lignage.  La  loi  de  régence  du  30  août  1842,  rendue 
après  la  mort  du  duc  d'Orléans,  investissait  de  la  régence 
le  prince  le  plus  proche  du  trône  dans  l'ordre  de  succes- 
sion, et  parvenu  à  l'ftge  de  21  ans  accomplis.  Aux  termes 
du  sénatus-consulte  du  8  juillet  1856,  sous  un  empereur 
mineur,  dont  le  père  n'aurait  pas  réglé  la  régence  avant 
son  décès,  l'impératrice-mère  serait  régente;  elle  per- 
drait ce  droit  en  convolant  à  de  secondes  noces.  A  défont 
d'un  régent  institué  d'avance  ou  de  l'impératrire-mère, 
la  régence  appartiendrait  au  premier  des  princes  français 


RÉ6 


1545 


RËG 


dans  Tordra  de  l*hérédité  à  la  couronne,  et,  si  aucun 
prince  français  n'était  en  ftge  de  I*exercer,  le  sénat  défé- 
rerait ce  mandat.  En  tout  cas,  le  mariage  de  Tempereur, 
les  sénatus-consultes  organiques,  les  traités  de  paix,  d'al- 
liance ou  de  commerce,  devraient  être  soumis  à  la  déli- 
bération du  Conseil  de  régence,  formé  des  princes 
français  et  d*un  petit  nombre  de  personnages  chOisis  par 
l'empereur-  ou  le  sénat ,  convoqué  et  présidé  par  l'impé- 
ratrice-mère,  le  régent  ou  leurs  délégués. 

afoENCB,  nom  donné  à  Tadministration  de  certaines 
villes,  comme  Amsterdam  et  Kiel,  et  au  gouvernement 
de  certains  États,  notamment  des  États  Barbaresques. 

RÉGENT,  celui  qui  est  chargé  de  la  régence  d'un  État. 
On  donne  le  même  nom  aux  membres  du  Conseil  supé- 
rieur d'administration  de  la  Banque  de  France,  et  aux 
maîtres  chargés  de  l'enseignement  dans  les  collèges  com- 
munaux. Dans  l'ancienne  Université,  le  nom  de  régents 
était  appliqué  à  tous  les  professeurs  indistinctement,  et 
on  appelait  docteurs  régents  les  docteurs  qui  professaient 
la  théologie,  le  droit  ou  la  médecine. 

RÉGICIDE  (du  latin  rex,  roi ,  et  cœdere,  tuer),  assas- 
sinat d'un  roi ,  et  celui  qui  le  commet  ou  tente  de  le  com- 
mettre. En  France,  avant  1789,  les  régicides  étaient  écar- 
telés  ou  périssaient  sur  la  roue;  aujourd'hui  ils  subissent 
la  peine  du  parricide  (  V,  ce  mot).  On  a  aussi  donné  le 
nom  de  régicides  aux  membres  du  Parlement  qui  con- 
damnèrent à  mort  Charles  P'  en  Angleterre,  et  à  ceux  de 
la  Convention  qui  condamnèrent  Louis  XYI  en  France. 

RÉGIE  (du  latin  regere,  diriger,  gérer  ),  administration 
de  biens,  à  «la  charge  d'en  rendre  compte.  Un  particulier 
donne  ses  biens  en  régie,  quand  il  confie  à  un  régisseur, 
moyennant  salaire,  la  perception  des  revenus  qu'ils  peu- 
vent produire.  Un  collège  est  en  régie,  lorsque  le  prin- 
cipal l'administre  pour  le  compte  de  la  ville.  En  matière 
d'administration  publique,  on  nomme  Bégie  toute  admi- 
nistration chargée  de  la  perception  directe  de  certains  re- 
venus; ainsi,  ron  dit  la  Régie  des  tabacs,  la  Régie  des 
poudres  et  salpêtres,  la  Régie  des  contrioutions  indi- 
rectes. Une  régie  est  dite  intéressée,  quand  le  régisseur 
a  une  part  des  produits,  comme  cela  a  lieu  pour  les 
droits  d'enregistrement.  On  met  des  travaux  publics  en 
régie,  quand  on  les  fait  exécuter  sous  la  surveillance 
d'agents  de  l'État,  au  compte  du  soumissionnaire  qui  n'a 
jea  tenu  ses  engagements. 

RÉGIME  (du  latin  regimen,  venant  de  regere,  gouver- 
ner, conduire),  en  termes  d'Économie  sociale,  toute  ma- 
nière de  constituer  une  société,  de  gouverner  un  État. 
Ainsi  l'on  dit  le  régime  despotique,  le  régime  constitu- 
tionnel, le  régime  féodal,  etc.  En  Droit,  l'ensemble  des 
dispositions  législatives  qui  régissent  la  société  conjugale 
se  nomme  régime  dotal  ou  régime  de  la  communauté 
(F.  ces  mois). 

aéoiMB,  en  termes  de  Grammaire,  mot  immédiatement 
dépendant  d'un  autre,  et  qui  peut,  en  raison  de  cette 
dépendance,  modifier  sa  propre  forme.  Cette  modificaUon 
n'a  guère  lieu  que  dans  les  langues  riches  en  flexions 
grammaticales;  ainsi,  en  grec,  en  latin,  en  allemand, 
un  nom  qui  dépend  d'un  verbe  actif  se  met  à  l'accusatif; 
d'autres  rerbes  exigeront  qu'il  prenne  la  forme  du  datif. 
Les  noms  changent  également  de  forme  suivant  qu'ils 
sont  construits  avec  telle  ou  telle  préposition,  ou  que 
cette  préposition  est  prise  dans  un  sens  ou  dans  un 
autre.  De  là  on  dit  qu'un  nom  est  régi  au  génitif,  au 
datif,  à  l'accusatif,  etc.,  par  tel  ou  tel  mot,  ou  que  ce 
mot  régit  ou  gouverne  le  génitif,  le  datif,  etc.  Dans  les 
langues  dépourvues  de  flexions  casuelles,  le  mot  com- 
plémentj  comme  plus  général,  est  plus  juste  que  le  mot 
réginu.  On  distingue,  comme  pour  les  compléments,  le 
régime  direct  et  le  régime  indirect.  Le  direct  est  celui 
qui  modifie  sa  forme  sans  l'intermédiaire  d'aucune  pré- 
position ;  l'indirect,  celui  qui,  outre  la  modification  ca- 
suelle  qu'il  éprouve,  se  Joint  au  mot  régissant  à  l'aide 
d'une  préposition.  Ainsi,  en  grec,  les  verbes  passifs  ré- 
gissent directement  le  datif,  indirectement  le  génitif,  ce 
deniier  cas  ne  s'employant  (^'avec  la  préposition  6ic6,  oh 
Kopâ,  ou  ix,  ou  icpoc  En  latin,  scripst  ad  patrem  episto- 
km  présente  deux  accusatifs,  dont  le  premier  est  ré^me 
indirect,  le  second  direct.  Dans  vestem  dabo  paupert,  les 
deux  régimes  sont  directs,  comme  dans  doceopueros  gram- 
maticam,  hoc  te  rogo ,  etc.  Ainsi  un  mot  grec  ou  latin , 
directement  régi  à  tel  ou  tel  cas,  peut  avoir  pour  équi- 
valent dans  notre  langue  un  mot  servant  de  complément 
indirect;  comme  on  le  voit  par  la  traduction  des  exem- 

Eles  cités  :  «  J'ai  écrit  à  mon  père  ;  je  donnerai  un  ha- 
it d  ce  pauyre;  j'instruis  les  enfants  sur  la  grammaire; 
je  demande  cela  de  vous,  etc.  »  F.  CoMPLéMioiT.       P» 


RÉGIMENT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

RÉGIOLES ,  regiolœ ,  petites  portes  placées  au  devant 
de  la  confession  d'un  autel  dans  les  anciennes  églises , 
et  par  lesquelles  on  introduisait  les  linges  qu'on  voulait 
faire  toucher  aux  reliques, 

RÉGISSEUR,  celui  qui  est  chargé  de  la  régie  d'un  bien 
(F.  RéGis).  Au  théâtre,  les  foncUons  de  régisseur  con- 
sistent à  monter  les  pièces  qu'il  s'agit  de  représenter,  et 
à  répondre  aux  interpellations  du  public. 

REGISTRE ,  en  termes  d'Imprimerie ,  correspondance 
que  les  lignes  des  deux  pages  d'un  même  feuillet  ont 
l'une  avec  l'autre.  —  Autrefois  on  appelait  registre  une 
petite  table  rappelant  les  premiers  mots  des  feuillets  qui 
composent  la  moitié  de  chague  cahier  :  c'est  le  moyen 
dont  les  imprimeurs  se  servirent  d'abord  pour  régler  et 
faciliter  l'assemblage  et  la  reliure  des  livres.  Les  olus 
anciens  ouvrages  où  l'on  trouve  le  re^stre  sont  les  Phi- 
lippiquês  de  Cicéron  et  le  Tite-Live  imprimés  par  Ulrie 
Han,  en  1469  ou  1470. 

REGISTRES  DE  l'orgcb  (du  latin  regere,  régir,  gouver* 
ner),  règles  mobiles  en  bois,  percées  de  trous  h  des  dis- 
tances égales  aux  trous  du  sommier,  servant  à  ouvrir  ou 
à  fermer  les  difiérents  Jeux  ou  séries  de  tuyaux  de  l'or- 
gue. On  fait  nuu*cher  les  registres  au  moyen  des  tirants, 
tringles  carrées,  placées  à  la  droite  et  à  la  gauche  de  la 
fenêtre  du  clavier,  et  que  l'organiste  tire  ou  pousse,  sui* 
vaut  qu'il  veut  ouvrir  ou  fermer  le  vent  à  telle  ou  telle 
série  de  jeux.  —  Par  extension,  on  appelé  Begistres  de 
la  voix  les  sons  graves,  les  moyens,  et  les  aigus,  qui  for- 
ment comme  trois  jeux  dans  la  voix  humaine.  Ou  bien 
on  ne  distingue  que  deux  registres,  l'un  comprenant 
tous  les  sons  de  poitrine,  et  l'autre  les  sons  de  tête  ou  de 
fausset.  F.  C. 

RÈGLE  (en  latin  régula;  de  regere,  diriger),  tout  prin- 
cipe sur  lequel  s'appuie  la  pratique  de  la  morale,  du 
Droit,  des  sciences,  des  arts,  etc.  Il  y  a  des  règles  aux- 
quelles l'écrivain  doit  s'astreindre,  s'il  veut  perfectionner 
son  talent.  Ces  règles  sont  des  conseils  dictés  par  l'expé- 
rience, plutôt  que  des  lois  inflexibles,  et  ne  détruisent 
pas  l'indépendance  de  l'esprit  :  car,  dit  Quintilien,  si  on 
les  prenait  servilement  pour  guides,  si  l'on  s'assujettis- 
sait à  une  seule  méthode,  ce  serait  vouloir  éprouver  la 
lenteur  pénible  des  gens  qui  marchent  sur  une  corde  : 
le  chemin  public  n'est  pas  une  loi  indispensable;  nous 
le  quittons  souvent  pour  abréger  la  marche;  si  le  pont 
est  Drisé,  nous  faisons  un  circuit,  et,  si  la  porte  est  en- 
vironnée de  flammes,  nous  sortirons  par  la  fenêtre.  Les 
r^les  n'ont  pas  précédé,  mais  suivi  les  modèles;  on  ad- 
mirait les  chefs-d'œuvre  de  Sophocle  et  d'Euripide,  avant 
qu'Horace  eût  tracé  les  règles  de  l'art  dramatique  :  les 
préceptes  ont  été  puisés  dans  les  œuvres  de  ceux  qui 
écrivaient  de  manière  &  plaire  et  à  entraîner,  et  les  cri- 
tiques n'ont  fait  qu'observer  et  formuler.  Les  règles, 
comme  on  l'a  dit,  sont  l'itinéraire  du  génie. 

RÈGLE ,  ensemble  des  statuts  que  les  religieux  d'un 
Ordre  sont  tenus  d'observer. 

RÈGLEBIENT,  statut  qui  détermine  et  prescrit  ce  que 
Ton  doit  faire.  Les  décrets  impériaux  sont  des  règlements, 
qui  obligent  les  citoyens  comme  les  lois  elles-mêmes. 
Les  règlements  de  police,  prescrivant  des  mesures  rela- 
tives à  la  propreté ,  à  la  salubrité,  à  la  sûreté  et  à  la 
tranquillité  publiques,  sont  faits  par  le  préfet  de  police 
à  Paris,  par  les  préfets  dans  les  départements,  par  les 
maires  àms  les  communes,  et  sont  obligatoires  pour  les 
administrés.  On  nomme  règlements  d'administration 
publique  ceux  qui  établissent  de  quelle  manière  les 
lois,  décrets  et  ordonnances  doivent  être  exécutés.  — 
Dans  l'ancien  Droit  français ,  on  appelait  Arrêts  de  r^ 
glement  les  r^ements  ^ue  les  Parlements  rendaient 
soit  sur  la  procédure,  soit  sur  des  Questions  civiles  ou 
ecclésiastiques,  et  qui  avaient  force  de  loi  dans  les  tri- 
bunaux :  ils  ont  été  supprimés  parla  loi  du  24  août  1790. 
Ai^ourd'hui,  en  Procédure ,  le  Bèglement  de  juges  est 
l'arrêt  d'une  autorité  supérieure  décidant  devant  quels 
juges  un  proeès  sera  porté  ;  cas  oui  se  présente  lorsque 
deux  tribunaux  se  sont  déclarés  incompétents ,  ou  lors- 
qu'ils veulent  tous  deux  retenir  la  cause  (F.  le  Code  de 
Procédure  civile,  art.  363-367 ,  et  Code  d:instruction 
criminelle,  tit.  v,  ch.  1). 

RÈGLEMENT,  en  termes  de  Commerce,  remise  de  va- 
leurs destinées  à  solder  un  compte  ouvert 

RÉGLET,  petite  moulure  plate  et  droite  qui  sert,  dans 
les  compartimenta  et  les  panneaux,  à  en  séparer  les  par- 
ties, et  a  former  des  guillochés  et  des  entrelacs. 

REGNE  (dû  latin  regnum),  mot  qui  dési^  le  gouver- 


RÉH 


1546 


REI 


ncnient  d'an  senTerafn.  On  l'emploie  au  figuré  en  par- 
lant des  choses  qui  ont  de  Tautontô,  de  rinflaenoe,  de  la 
vogue,  comme  quand  on  dit  le  règne  de  la  justice,  le 
règne  des  lois ,  le  règne  de  la  mode, 

RÉGNICOLB  (da  latin  regnwn,  royaume,  et  incola, 
habitant),  se  dit,  en  Jurisprudence,  des  habitants  d'un 
royaume,  d'un  pays,  avant  droit  comme  tels  à  certains 
droits.  On  l'oppose  à  étranger. 

REGRÈS,  en  termes  de  Droit  canonique,  retour  à  un 
bénéfice  que  l'on  avait  résigné  ou  permuté. 

RÉGULIER,  religieux  soumis  à  une  règle.  Les  Ordres 
monastiques  forment  le  clergé  régulier , 

BÉGuuKR ,  se  dit ,  en  Grammaire ,  de  tout  ce  qui  est 
conforme  à  certaines  règles  établies  par  l'usage  et  consa- 
crées par  les  écrivains  les  plus  distingués.  Ce  terme  s'ap- 
plique à  la  forme  des  mots  isolà^  à  celfe  des  vers,  à  la 
composition  des  stances,  des  strophes,  à  la  syntaxe  et  à 
la  construction  des  phrases,  à  Tordonnance  des  ou- 
vrages littéraires.  On  se  sert  quelquefois,  dans  la  môme 
acception,  du  mot  normal  (du  latin  norma,  règle).  Dans 
les  langues  modernes,  le  mot  régulier  s'applique  surtout 
aux  verbes  dont  la  conjugaison  est  conforme  aux  para- 
digmes adoptés,  parce  que  cette  espèce  de  mots  y  est  la 
plus  susceptible  de  variations,  souvent  capricieuses.    P. 

RteDLiBRS  (Tons  ou  Modes^,  nom  donné  dans  le  Plain- 
Cliant  aux  tons  ou  modes  qui  se  terminent  par  leur  note 
final  A. 

REHABILITATION  (de  la  particule  re,  et  habUis,  ha- 
bile, propre  à),  en  termes  de  Droit,  rétablissement  d'un 
condamné  dans  ses  anciens  droits.  Avant  1789,  les  lettres 
de  réhabilitation  accordées  par  le  roi  anéantissaient  la 
condamnation  prononcée  contre  un  accusé,  à  qui  l'on  ne 
devait  plus  imprimer  aucune  note  d'infamie.  Il  n'en  est 
pas  de  même  ae  la  réhabilitation  actuelle  :  elle  fait  seu- 
lement cesser  les  incapacités  qui  résultaient  de  la  con- 
damnation; il  n'y  a  point  de  réhabilitation  de  la  mé- 
moire .  puisqu'il  ne  s'agit  que  de  réintégration  dans 
l'exercice  de  droits  personnels,  abstraction  faite  du  bien 
ou  mal  Juçé ,  et  sans  aucun  retour  vers  le  procès  ;  notre 
réhabilitation  est  une  récompense  de  la  bonne  conduite 
du  condamné ,  et  s'applique  à  l'innocent  comme  au  cou- 
pable. C'est  faute  d'avoir  fait  cette  distinction  qu'on  n'a 
pas  compris  l'impossibilité  de  réhabiliter  certains  con- 
damnés fameux.  Tout  condamné  qui  a  subi  sa  peine,  ou 
qui  a  été  gracié ,  peut  être  réhabilité;  pour  les  condam- 
nés aux  travaux  forcés  ou  à  la  réclusion,  la  demande  en 
réhabilitation  ne  peut  être  formée  que  5  ans  après  l'ex- 
piration de  la  peine  (ce  délai  n'est  que  de  3  ans  pour  les 
condamnés  à  une  peine  correctionnelle);  pour  les  con- 
damnés à  la  dégradation  civique,  le  délai  do  5  ans  court 
du  jour  de  l'exécution  de  l'arrêt.  Un  séjour  de  5  ans  dans 
le  même  arrondissement,  de  2  ans  dans  la  même  com- 
mune, est  encore  exigé.  La  demande  de  réhabilitation 
c^t  déposée  au  greffe,  rendue  publique,  et,  après  avis  de 
la  Cour  d'appel,  le  chef  de  l'Etat  prononce  en  Conseil 
privé  (  V.  le  Code  d^Instruct.  crxm,^  art.  tti9-634,  et 
la  Loi  du  3  juillet  1852).—  En  matière  commerciale,  le 
failli  qui  a  intégralement  acquitté  ses  dettes  peut  être 
réhabilité  par  une  décision  judiciaire;  mais  il  n'y  a 
pas  de  réhabilitation  pour  les  banqueroutiers  fraudu* 
Icux  (  V.  le  Code  de  commerce,  art.  526,  531,  604-614). 
—  Autrefois  il  y  avait  une  réhabilitation  de  mariage^ 
que  les  Parlements  ordonnaient  pour  réparer  quelque 
vice  de  forme  dont  le  mariage  avait  été  entaché;  on 
procédait  alors  à  une  nouvelle  célébration,  si  les  par» 
ties  consentaient  à  rester  unies. 

BÉHABiuTATioii  uTTÉRAmB ,  teutativo  de  Jugement  en 
appel  devant  la  postérité,  en  faveur  d'un  ouvrage  con- 
damné depuis  longtemps  par  l'opinion  publique,  et  dont 
l'auteur  est  mort.  Il  arrive  parfois  qu'un  ouvrage  n'ob- 
tient pas  le  succès  auquel  il  a  droit;  mais  s'il  a  un  vrai 
fond  de  mérite,  l'opinion  contemporaine  revient,  et  il 
prend  son  rang.  Quant  au  livre  ou  à  l'ouvrage  quelconque 
qui,  après  avoir  eu  an  succès  contemporain,  n'est 
qu'une  œuvre  médiocre,  il  finit  toigours  par  tomber. 
Quelques  parties  remarquables  ne  le  soutiendront  pas, 
et,  malgré  les  efforts,  les  fantaisies  de  bon  sentiment  de 
quelques  critiques  dans  la  postérité,  il  est  mort  et  bien 
mort,  et  on  ne  parvient  pas  même  à  le  galvaniser.  Cer- 
tains ouvrages  s'éteignent  en  conservant  an  petit  éclat , 
reste  de  leur  fortune  première,  un  écho  de  leur  réputation 
contemporaine;  semblables  &  ces  corps  ensevelis  dans  les 
catacombes  de  Rome ,  gardant  encore  leur  forme  après 
des  siècles,  mais  qui  tombent  en  poussière  dès  qu'on  lei 
touche.  Thomas  ComeUle  a  eu,  de  son  vivant,  de  très- 
grands  succès  au  théâtre,  et  aujourd'hui  on  ne  connaît 


plus  que  son  nom;  d^Âubignét  Scudéry,  Ihw'sault,  Lu- 
motte,  Dancourt,  etc.,  ont  été  dans  le  même  cas.  Vou- 
loir exhumer  de  prétendus  chefs-d'œuvre  littéraires, 
c'est  toujours  perdre  son  temps,  et  courir  après  le  plaisir 
et  l'instruction  pour  n'atteindre  que  l'ennui  et  le  dégoût. 
De  là  tant  d'auteurs  dont  les  noms  surchargent  les  bio- 
graphies, et  qui  ne  laissent  littéralement  qu'un  nom  et 
le  souvenir  d'une  réputation  entièrement  évanouie.  Les 
tentatives  de  réhabilitations  littéraires  sont  ordinaûrement 
des  fantaisies  de  critiques ,  des  thèses  paradoxales  que 
les  critiques  soutiennent  pour  faire  briller  leur  propre 
esprit.  Si  la  thèse  est  bien  faite,  cÂle  amuse,  on  y  peut 
rencontrer  quelques  parcelles  d'or  tirées  d'un  tas  de  dé- 
combres; mais  elle  ne  persuade  personne , 

Et  ravare  LUhé  ne  lâche  pas  m  proie. 


REHAUTS,  touches  vives  et  brillantes  par  lesquelles 
le  peintre  ajoute  à  l'éclat  des  plus  grandes  lumières  de 
son  tableau,  et,  par  là,  à  l'échelle  de  tons  dans  laquelle 
il  s'était  d'abord  renfermé.  Les  rehauts  du  dessinateur 
sont  des  touches  d'un  crayon  plus  blanc  que  le  papier 
dont  il  s'est  servi.  Les  décorateurs  usent,  pour  les  r^aats, 
de  feuilles  d'or  ou  d'argent,  et  de  clinquants  de  diverses 
couleurs. 

REIMS  fArc  de),  monument  romain  connu  sout  le  nom 
de  Porte  ae  Mars,  élevé ,  selon  les  uns,  en  l'honneur  de 
J.  César  au  temps  d'Auguste ,  et ,  selon  les  autres,  par 
l'empereur  Julien.  Il  servit  de  porte  de  ville  Jusqu'en 
1544  :  à  cette  époque  on  ouvrit  une  nouvelle  porte  ^  et 
l'arc  fut  enfoui  dans  le  rempart  II  fut  retrouvé  en  1505, 
puis  oublié  de  nouveau.  On  le  déblaya  en  1677,  mais 
il  est  resté  enclavé  dans  le  mur  d'enceinte,  et  ne  pré- 
sente à  la  vue  qu'une  de  ses  faces.  Il  est  percé  de  trois 
arcades,  entre  chacune  desquelles  sont  deux  colonnes 
corinthiennes  engagées,  d'un  mètre  de  diamètre,  de 
13  mètres  de  hauteur,  et  qui  reposent  sur  un  soubas- 
sement. On  voit  encore,  dans  les  entre-colonnements, 
de  grands  médaillons ,  où  étaient  des  bustes  eo  demi- 
ronde-bosse,  et  des  niches  à  fronton.  La  hauteur  de 
Tare,  non  compris  l'attique,  dont  il  ne  reste  plus  de  ves- 
tiges, est  de  11  met.;  sa  largeur,  de  28  met.  L'arcade 
principale,  dite  des  Saisons,  à  cause  des  bas-reliefs  dont  sa 
voûte  est  décorée,  a  9'",50  de  hauteur,  sur  4"",50  de  lar- 
geur; les  deux  autres,  dites  de^Romulus  et  de  Léda,  ont 
9"»  d'élévation,  sur  3™,15  d'ouverture.  B. 

RBMis  r  Église  Notrb-Damb,  àj.  Sur  l'emplacement 
d'une  église  bâtie  par  les  soins  de  S^  Nicaise  vers  401 , 
et  dans  laquelle  Clovis  reçut  le  baptême,  un  nouvel  édi- 
fice fut  élevé  au  temps  de  Louis  le  Débonnaire  par  l'ar- 
chitecte Romuald.  Flodoard,  dans  son  Histoire  de  Végliss 
de  Reims,  en  a  décrit  les  magnificences.  En  1211,  an 
incendie  dévora  une  partie  de  la  ville,  et  la  cathédrale 
dut  être  reconstruite.  On  y  travailla  dès  1212.  Robert  de 
Coucy  donna  les  dessins  du  monument  actuel,  qui  oc- 
cupe une  superficie  de  6,650  met.,  et  qui  est  une  des 
plus  belles  œuvres  de  l'architecture  ogivale  pour  la  ré- 
gularité du  plan,  l'unité  du  style,  l'ordonnance  des  par- 
ties, l'harmonie  des  détails  et  la  perfection  des  orne- 
ments. Le  chapitre  put  prendre  possession  du  chœur  en 
1241  ;  les  tours  de  la  façade  principale  furent  acherées 
en  1430.  Un  incendie,  en*  1481,  consuma  cinq  clochers 
qui  surmontaient  la  croisée;  on  ne  les  a  pas  rétablis. 
— *  Ia  cathédrale  de  Reims  est  en  forme  de  croix  la- 
tine :  elle  a  138  met.  de  longueur  et  31  mètres  de  lar- 
geur ;  la  croisée  est  large  de  50  met.  Robert  de  Coucy 
avait  conçu  son  édifice  avec  des  dimensions  colossales, 
auxquelles  on  renonça  bientôt  :  c'est  ce  que  prouve  la 
puissance  des  soubassements,  à  laquelle  les  étapes  supé- 
rieurs sont  loin  de  répondre  ;  on  reconnaît  au'on  a  di- 
minué, autant  que  possible,  le  volume  primitif  des  points 
d'appui  ;  la  base  des  contreforts  a  une  saillie  et  une  force 
que  ne  motive  pas  la  légèreté  de  la  partie  supérieure.  Le 
grand  portail  occidental,  qui  a  47  met.  de  largeur,  est 
une  merveille,  et,  dans  les  idées  populaires,  il  constitue- 
rait avec  la  nef  d'Amiens,  le  chœur  de  Beauvaîs,  la  flèche 
de  Chartres  ou  de  Strasbourg,  un  corps  véritsJilement 
parfait.  Sa  partie  inférieure,  divisée  par  trois  ouvertures, 
offre  une  certaine  ressemblance  avec  la  partie  correspon- 
dante de  la  cathédrale  d'Amiens  :  elle  a  peut-être  moias 
de  majesté  dans  l'ensemble,  mais  beaucoup  plus  de  ri- 
chesse dans  les  sculptures,  et  l'on  ne  saurait  trouver 
rien  de  plus  intéressant  que  cette  réunion  de  niches,  cr 
daia,  de  statues  et  statuettes  (au  nombre  de  530),  de  pi- 
nacles, de  feuillages,  d'aiguilles  et  de  clochetons.  Des 
trois  arcades  ea  ogive,  celle  du  milieu  est  plus  haute 


REI 


1547 


BEL 


qne  les  autres  :  elle  a  il '",66  d'oa?erture,  et  les  autres  7°*. 
Leurs  jparois  latérales  sont  décorées  de  35  statues  colos- 
aalee  (ï^JS  de  hauteur)  de  patriarches,  de  prophètes,  de 
rois,  d*évéaues,  de  vierges  et  de  martyrs,  reposant  sur  un 
stylobate  d'assez  mauvais  goût  et  qu'on  croit  avoir  été 
refait  au  xvui*  siècle.  Au  pilier  qui  partage  en  deux 
rentrée  principale  est  adossée  une  statue  de  la  S^*  Vierge, 
et  les  bas-reliefs  qui  couvrent  les  faces  de  ce  pilier  re- 
présentent la  chute  du  premier  homme.  La  voussure 
offre  cinq  rangs  de  petites  figures,  au  nombre  de  160  ;  ces 
rangs  sont'  séparés  par  des  guirlandes  de  fleurs.  Les 
voussures  des  deux  autres  portes  ont  chacune  97  sta- 
tuettes. Les  tympans  sont  à  Jour  et  vitrés.  Les  pieds-droits 
et  les  linteaux  des  trois  portes  sont  chargés  aussi  de 
sculptures  historiques  ou  allégoriques.  L*arcade  du  mi- 
lieu représente  le  couronnement  de  la  Vierge,  celle  de 
droite  le  Jugement  dernier,  et  celle  de  gauche  la  Pas- 
sion. Le  second  étage  du  portail  présente  quatre  contre- 
forts d'une  rare  élégance  :  ils  accompagnent  la  grande 
rosace ,  surmontée  d'un  arc  ogival  dont  la  voussiire  est 
ornée  de  dix  statues  ayant  rapport  ^  Thistoire  de  Da- 
vid. Le  sommet  de  la  façade  est  formé  par  la  galerie 
des  Hois^  où  4'2  statues  de  rois  de  France ,  depuis  Clo- 
vis  jusqu'à  Charles  VI,  remplissent  autant  d'arcades 
aiguës,  ornées  de  découpures  en  trèfles  et  surmontées  de 
petits  frontons  triangulaires.  Deux  tours  sveltes  et  élé- 
gantes, de  7  met.  de  côté,  complètent  cet  ensemble  :  en- 
tourées de  statues  d'évôques,  evidées  à  jour  par  de  larges 
ouvertures ,  flanquées  à  leurs  angles  de  tourelles  égale- 
ment découpées,  elles  ont  une  apparence  tout  aérienne; 
leur  hauteur  est  de  83  met.  —  Les  portails  latéraux 
offrent  aussi  de  beaux  détails  d'architecture  et  de  sculp- 
ture. Du  côté  du  Nord,  il  v  a  deux  portes  voisines  l'une 
de  l'autre,  et  de  même  dimension  que  les  petites  du 
grand  portail  :  à  Tune,  qui  est  fermée  depuis  longtemps, 
on  voit  la  résurrection  des  morts,  le  jugement  dernier, 
le  supplice  des  réprouvés,  et  les  Joies  du  Paradis;  l'autre, 
flanquée  de  3  grandes  statues  de  chaque  côté,  présente, 
é^lement  en  bas-reliefs,  le  martyre  de  S^  Nicaise  et  les 
miracles  de  S^  Rémi.  A  l'extrémité  de  l'abside  s'élève,  de 
18  met.  au-dessus  du  toit,  une'gracieuse  flèche  en  char- 
pente recouverte  de  plomb,  dite  flèche  de  l'Ange,  parce 
qu'elle  porte  à  sa  pointe  un  ange  doré  qui  tient  une  croix  : 
sa  base  est  supportée  par  8  figures  colossales,  espèces  de 
cariatides,  dont  l'attitude,  l'expression  et  les  attributs 
ont  exercé  en  vain  jusqu'ici  la  sagacité  des  archéologues. 
Toute  l'église  est  couverte  en  plomb.  Alentour  régnent 
22  contre-forts  à  doubles  arcs-boutants,  et  couronnés 
chacun  par  une  statue  d'ange  ou  de  roi. 

L'intérieur  de  la  cathédrale  de  Reims  a  un  aspect  im- 
posant. La  voûte  de  la  grande  nef  s'élève  à  une  hauteur 
de  37'",60;  elle  est  peinte  en  azur  et  parsemée  de  fleurs 
de  lis,  décoration  qui  fut  faite  pour  le  sacre  de  Charles  X. 
Les  nefs  latérales,  comme  dans  tous  les  édifices  du 
xm*  siècle,  sont  dépourvues  de  chapelles,  mais  il  y  en  a 
sept  qui  rayonnent  autour  du  chevet.  Les  piliers  sont 
ronds,  cantonnés  toutefois  de  quatre  colonnes  cylindriques 
d'un  diamètre  moins  considérable,  et  portent  d'élégants 
chapiteaux  h  volutes  recourbées,  à  feuiHages  légers  et 
gracieux,  d'où  s'élancent  des  colonnettes  qui  vont  soute- 
nir les  nervures  de  la  voûte.  Les  travées  sont  réunies  les 
unes  aux  autres  par  de  belles  galeries,  composées  de 
petites  colonnes  à  chapiteaux  et  d'ouvertures  ogivales  de 
3'",30  d'élévation.  Les  fenêtres  ont  pour  la  plupart  con- 
servé leurs  verrières  ;  les  plus  remarquables  œuvres  des 
peintres  verriers  dans  cet  édifice  sont  les  roses  des  por- 
tails, surtout  celle  du  portail  méridional,  qui  représente 
le  Père  Étemel  sous  les  traits  et  les  attributs  de  Jupiter, 
et  entouré  des  12  Apôtres.  La  rose  du  Nord  offre  les 
12  signes  du  zodiaque.  Dans  la  cathédrale  de  Reims,  le 
transept  est  beaucoup  plus  rapproché  du  chevet  que 
dans  la  plupart  des  autres  églises  du  moyen  âge  :  il  en 
est  résulté  que  le  chœur,  trop  étroit  pour  les  grandes 
cérémonies  du  sacre  des  rois  de  France,  a  été  agrandi 
aux  dépens  de  la  croisée  et  même  de  la  grande  nef, 
sur  laquelle  il  empiète  de  trois  travées.  C'est  une  dis- 
position défectueuse,  qui  a  pour  effet  de  rétrécir  les  pro- 
portions des  autres  parties:  le  chœur  proprement  dit 
et  le  sanctuaire  ont  leur  destination  naturelle  ;  mais  l'ar- 
rière-chœur, qui  renfermait  avant  la  Révolution  le  Trésor 
de  l'église,  vases  sacrés,  reliquaires,  saintes  images, 
riches  off'randes  des  rois,  des  seigneurs  et  des  prélats,  n'a 
plus  d'emploi  aujourd'hui.  Il  y  avait  autrefois  une  clôture 
de  chœur  en  pierre  sculptée  et  un  très-beau  Jubé  :  ces 
œuvres  ont  été  détruites.  L'orgue,  fût  en  1481,  réparé 
en  1647,  et  do  rouveau  par  JoUn  Abbey  en  1840 ,  est 


regardé  comme  un  chef-d'œuvre  :  il  est  haut  de  20  met., 
et  on  j  employa  7,250  kilogr.  d'étain.  Dans  le  collatéral 
de  droite,  on  voit  le  cénotaphe  en  marbre  de  Jovin,  pré- 
fet de  la  Gaule  celtique  :  c'est  un  de^  plus  beaux  mor- 
ceaux de  sculpture  antique  qu'il  y  ait  en  France.  Il  pro- 
vient d'une  église  S*-Nicaise,  détruite  à  la  Révolution.  Sa 
longueur  est  de  2™,  78,  sa  largeur  et  sa  profondeur  de 
i™,50;  le  bas-relief  représente  une  chasse  au  lion.  Au- 
dessus  de  la  sacristie  est  une  curieuse  horloge  à  figures 
mécaniques.  La  cathédrale  de  Reims  contient  de  nom- 
breuses pierres  tumulaires,  parmi  lesquelles  on  remarque 
celle  de  Hugues  Libergier,  architecte  de  S*-Nicaise;  elle 
a  quelques  précieux  tableaux  :  Jésits  et  Madeleine,  attri- 
bué au  Titien;  une  Nativité,  par  le  Tintoret;  le  Lave- 
ment des  pieds ,  par  Jérôme  Muziano  ;  le  Christ  aux 
Anges,  par  Taddeo  Zuccharo  ;  la  Manne  dçms  le  désert, 
par  le  Poussin.  Citons  encore  de  curieuses  tapisse- 
ries (F.  Tapisseries),  et  un  Trésor  qui  renferme,  entre 
autres  richesses:  le  reliquaire  de  Sanson  (xii*  siècle), 
celui  de  S*  Pierre  et  S^  Paul,  tous  deux  en  forme  de  petits 
monuments  d'architecture;  le  vaisseau  de  S^*  Ursule, 
donné  par  Henri  III  ;  le  reliquaire  de  la  sainte  Ampoule; 
les  vases  et  ornements  du  sacre  de  Charles  X;  une  croix 
byzantine,  divers  ostensoirs,  etc.  V,  Gilbert,  Desctiption 
htstoriqw  de  Véglise  métropolitaine  de  Reims,  1825, 
in -8^;  Povillon-Piérard,  Description  historiqiie  de  Té- 
glise  métropolitaine  de  Reims,  in<^®  j  Tarbé,  Notre-Dame 
de  Reims,  in-8<^;  Ch.  Cerf,  Histoire  et  description  de 
Notre-Dame  de  Reims,  Paris,  1861,  2  vol.  in-8«,  flg.    B. 

REIMS  (Église  S*-Remi,  h).  Cette  église,  la  plus  ancienne 
de  la  ville,  fut  fondée  en  1005,  sur  l'emplacement  d'une 
chapelle  dédiée  à  S^  Clément  martyr,  puis  à  S*  Chris- 
tophe, et  dans  laquelle  était  le  tomoeau  de  S^  Rémi  ;  on 
la  dédia  en  1049,  mais  elle  ne  fut  achevée  qu'au  milieu 
du  xu*  siècle.  La  partie  méridionale  du  transept  dut  être 
reconstruite  en  1481.  On  remarque,  dans  la  galerie  du 
transept  septentrional,  deux  colonnettes  en  marbre  cris , 
avec  chapiteaux  en  marbre  blanc,  et,  à  la  façade  princi- 
pale, plusieurs  colonnes  en  granit,  qui  remontent  h  une 
époque  plus  ancienne  que  le  monument  lui-même  ;  on 
ne  saurait  dire  si  elles  appartiennent  aux  constructions 
antérieures,  ou  si  elles  proviennent  de  quelque  édifice 
gallo-romain.  L'église  de  S^Remi  est  en  style  romano- 
byzantin.  Elle  a  110  met.  de  longueur.  L'extérieur  offï'e 
des  formes  monotones  et  peu  variées,  et  la  façade  est 
surmontée  de  deux  clochers  relativement  modernes,  cou- 
verts en  ardoise.  L'ordonnance  intérieure  est  pleine  de 
majesté.  De  belles  galeries  régnent  sur  toute  la  largeur 
des  collatéraux,  comme  à  S^Étienne  de  Caen  et  à  Notre- 
Dame  de  Laon  ;  elles  s'ouvrent  sur  la  nef  par  deux  arcades 
cintrées  qui  reposent  sur  une  élégante  colon  nette  centrale. 
Le  sommet  de  chaque  travée  est  éclairé  par  une  fenêtre 
à  plein  cintre  surmontée  d'un  œil  circulaire.  Dans  la  ré- 
gion absidale,  les  arcades  sont  ogivales  ;  la  galène  prin- 
cipale est  surmontée  d'une  autre  galerie,  composée  de  six 
ouvertures  étroites  à  ogive  aiguë;  au-dessus  s'ouvrent 
trois  fenêtres  à  lancette  simple.  Une  belle  rose  flamboyante 
éclaire  le  côté  méridional  du  transept,  et,  de  ce  côté,  le 
portail  extérieur  offre  une  ornementation  remarquable. 
Le  chœur,  comme  à  l'église  métropolitaine,  est  sorti  de 
ses  limites  naturelles ,  et  est  entouré  d'une  riche  clôture 
en  style  de  la  Renaissance,  laquelle  a  beaucoup  souff^ert  : 
au  fond  s'élève  un  mausolée  moderne  de  S^  Rémi ,  où  l'on 
a  employé  12  statues  de  pairs  de  France  et  un  groupe  de 
S^  Rémi  catéchisant  Clovis ,  qui  appartenaient  au  mau- 
solée ruiné  pendant  la  Révolution.  Les  cinq  chapelles 
absidsdes  offrent  une  disposition  architecturale  pleine 
d'originalité,  et  qu'on  ne  retrouve  oue  dans  la  collégiale 
de  S*- Quentin  (  K.  ce  mot)  ;  celle  de  la  &*•  Vierge,  qui  oc- 
cupe le  fond,  a  14",  28  de  longueur,  sur  7*,  50  de  largeur. 
V.  Lacatte-Joltrois ,  Essai  historique  sur  Véglise  de 
S^'Remi,  Reims,  1843,  in-12.  F 

RÉINTÉGRANDE.  V.  Possbssoirb. 

REIPDS  (de  l'allemand  reif,  corde,  courroie,  lien), 
somme  que  payait  une  veuve  pour  se  remarier,  d'après 
la  loi  Salique. 

REIS.         i  F.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

REITRES.  S     Biographie  et  d* Histoire. 

REKHTA  (Langue),  c-àrd.  mélangée,  nom  qu'on 
donne  dans  l'Inde  à  Vourdou.  F.  Indiennes  (  Langues). 

RELACHE  (Droit  de),  droit  qu'ont  les  navires ,  en  cas 
de  danger  imminent,  d'être  reçus  dans  les  ports  non  ou- 
verts au  commerce.  Des  traités  garantissent  et  règlent 
ce  droit.  —En  termes  de  théâtre,  suspension  des  repré- 
sentations pendant  un  ou  plusieurs  jours. 
I    RELAIS  (du  latki  relaxatus,  reposé),  station  de  posta 


REL 


1548 


REL 


où  Ton  peat  trouver  des  cheraux  firais,  soit  de  selle,  soit 
d'attelage. 

RBLAis ,  eD  termes  de  Fortiflcatioii ,  espace  réserré  entre 
le  pied  du  rempart  et  Tescarpe  da  fossé,  pour  recevoir 
les  terres  qui  s'éboulent 

RBLâis ,  terrain.  V.  Lais. 

RELAPS.  F.  ce  mot  dans  notre  DktMmnakre  de  Biogrtk- 
phie  et  d'Histoire. 

RELATIF,  eu  latin  Belativw  (formé  de  relatus^  parti- 
cipe de  refera,  Je  rapporte),  <pii  a  rapport  à  quelque 
chose.  Ce  mot,  en  Grammaire,  s'applique  soit  au  sens 
d'une  phrase  :  «  La  raison  doit  gouverner  les  passions 
(  la  raison  est  considérée  Ici  dans  ses  nq>ports  avec  les 
passions,  et  réciproquement)  ;  »  soit  à  la  valeur  d'un  mot  : 
ainsi  père,  mère,  fUs,  rot,  citoyen,  tujet,  vis,  mort, 
eult9,  etc.,  sont  des  mots  relatifs,  car  ils  ne  peuvent  se 
comprendre  sans  une  idée  de  relation.  Les  verbes  tran- 
sitifs sont  également  des  mots  relatifs  ;  car  aimer,  haUr, 
Umer  blâmer,  lire,  écrire,  donner,  recevoir,  gouver- 
ner, etc.,  ont  toujours  rapport  à  un  objet  quelconque  de 
l'action  ou  du  sentiment  qu'ils  expriment.  Les  noms  pro- 
pres, les  acUectifs,  les  adverbes,  les  pronoms  et  l'article, 
sont  des  mots  relatifs.  Les  grammairiens  grecs  et  latins, 
et  la  plupart  des  grammairiens  modernes  ont  donné  spé- 
cialement le  nom  de  relatif  ami  pronoms  personnels,  aux 
{pronoms  et  adverbes  conjonctifs,  à  certains  adverbes  de 
ieu  (en,  y;  inde,  ibi)  très-souvent  employés  avec  la  va- 
leur de  ]ironoms  aussi  bien  que  les  trois  conjonctifs  où 
(ubi,  9UO)i  d'aï*,  dont  {unde).  Aujourd'hui  l'usage  a 
prévalu  de  restrmndre  cette  dénomination  aux  adjectifs 
qui,  lequel;  au  nom  indéfini  de  quoi,  à  quoi  (Cest  de 

3uol  j'ai  Itesoin ,  C'est  à  quoi  Je  pense)  ;  aux  adverbes  oà, 
'où,  par  où,  dont  (ce  dernier  classé  à  tort  parmi  les 
pronoms  proprement  dits,  puisque,  venu  du  bas  latin 
ds-undtf,  il  est  absolument  synonyme  du  mot  d'où  (de- 
«M,  et  n'on  diffère  que  dans  certains  cas  par  des  nuances 

Sue  l'usage  a  consacrées).  La  dénomination  d'adjectif  ou 
'adverbe  conjonctif  et  celle  de  pronom  ou  &  adverbe  re- 
{ati^  sont  indifféremment  employées;  en  effet,  si  Je  dis  : 
«  Dieu  qui  a  créé  le  monde  est  tout* puissant,  »  le  mot 
qui,  servant  à  réimir  les  deux  pensées  Dieu  est  tout-puis- 
sant et  Dieu  a  créé  le  monde^  a  la  valeur  d'une  conjonc- 
tion ;  et  comme  il  est  susceptible  d'accord  avec  le  mot  au- 
2uel  11  se  l'apporte,  il  peut  être  considéré  comme  adjectif, 
l'autre  part,  comme  le  mot  qui  se  rapporte  au  substantif 
Dieu  et  le  représmte,  il  peut  à  ce  double  titre  s'appeler 
pronom  relatif.  Ce  dernier  terme  est  le  plus  usité 
(F.  Coiuo.'^ctif). 

Dans  l'analyse  logique  des  propositions  composées,  on 
donne  souvent  le  noitn  de  proposition  relative  à  toute  pro- 
position subordonnée  commençant  par  un  pronom  relatif. 

Dans  la  ivosodie  ancienne,  on  peut  donner  le  nom  de 
quantité  relative  à  la  quantité  des  syllabes  qui  sont  brèves 
ou  longues  suivant  l'occurrence;  ainsi,  dominus,  absolu- 
ment parlant,  a  sa  finale  brève,  mais  cette  brève  compte 
comme  longue  lorsqu'elle  est  suivie  d'un  mot  commen- 
çant par  une  consonne.  C^taines  svllabes  peuvent  donc 
être  longues  ou  brèves  relativemeiu  à  leur  position  dans 
on  vers.  P. 

RELATIF  (Mode) ,  en  termes  de  Musique,  mode  qui  offre 
à  la  clef  les  mômes  signes  de  tonalité  qu'un  autre  mode. 
Tont  mode  majeur  a  un  mode  mineur  qui  lui  est  relatif, 
et  réciproouement.  Chaque  mode  majeur  a  pour  relatif 
mineur  jelui  de  sa  6«  note,  et  chaque  mode  mineur  a 
pour  relatif  majeur  celui  de  sa  3*  note  :  ainsi,  le  mode 
de  la  mineur  est  le  relatif  du  mode  d'ut  majeur,  le  mode 
de  ré  majeur  a  pour  relatif  celui  de  si  mineur,  etc. 

RELATION,  en  termes  de  Musique,  rapport  qu'ont 
entre  eux  les  deux  sons  qui  forment  un  intervalle.  La 
relation  est  juste,  quand  les  deux  notes  forment  une 
consonnance  exacte;  fautse,  quand  la  consonnance  est 
altérée. 

RELÉGAHON.  V,  Exil,  dans  notre  Diettonnatre  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

RËLEVAILLES ,  acte  de  religion  fait  par  une  mère  après 
sa  délivrance.  Cette  cérémonie,  toute  de  dévotion  et  sans 
caractère  obligatoire,  consiste  dans  la  récitation  d'une 
antienne  et  d'un  psaume,  l'aspersion  et  le  signe  de  la 
croix  fait  par  le  prêtre,  qui  tient  son  étole  au-dessus  de 
la  tète  de  la  femme,  pendant  que  celle-ci  porte  un  cierge 
à  la  main.  Les  relevailles  rappellent  la  Présentation  de 
Jésus  par  la  S^  Vierge  au  Temple  de  Jérusalem. 

RELIEF,  ouvrage  de  sculpture  plus  ou  mohiArdevé  en 
bosse.  V.  Bas-rblosp. 

RBLiBP  (Droit  de).  F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
tt  d^Bistoire. 


RELIEURS,  ancienne  corporation,  dont  tons  les  mem- 
bres dépendaient  de  l'Université,  excepté  le  relieur  de  la 
Chambre  des  comptes.  Dans  les  cérémonies,  ils  prenaient 
rang  après  les  libraires. 

RELIGIEUX,  REUGIEUSE,  celui  et  celle  qui  se  sont 
consacrés  à  Dieu  par  un  vœu  solennel  dans  un  Ordre 
monastique. 

RELIGION.  L'idée  exprimée  par  ce  mot  repose  sur  le» 
rapports  de  l'homme  avec  Dieu.  L'homme  a  besoin  que 
Dieu  s'occupe  de  lui,  et  il  a  des  devoirs  envers  lui  ;  Tac- 
complissement  de  ces  devoirs  sous  une  certaine  forme 
appelée  culte,  constitue  Ul  religion,  du  ktin  religare, 
lier,  la  religion  étant  le  lien  qui  relie  l'homme  à  Dieu. 
La  religion  embrasse  tous  les  devoirs,  elle  les  sanctifie,  et 
en  rend  l'accomplissement  plus  facile  et  plus  sûr.  C'est 
en  quoi  elle  se  distingne  de  la  Morale,  sans  toutefois  s'en 
séparer:  la  Morale  indique  à  l'homme  ses  devoirs,  elle 
lui  dit  ce  qu'il  doit  faire  sans  égard  aux  conséquences; 
la  religion  montre  à  Thomme  ses  devoirs  et  les  suites 
inévitables  de  la  vertu  et  du  vice;  elle  lui  dit  ce  qu'il  doit 
faire,  ^e  qu'il  doit  craindre  et  ce  qu'il  peut  espérer.  La 
première  s'adresse  à  la  volonté  par  Tintelligence;  U  se- 
conde preaprit  également,  mais  elle  intéresse  le  cœur  et 
parle  à  l'&me  tout  entière  ;  elle  s'occupe  de  la  destinée  de 
l'homme  avant  et  après  cette  vie. 

Il  y  a  une  religion  naturelle,  fondée  sur  la  raison  seule, 
qui  reconnaît  l'existence  de  Dieu,  l'immortalité  de  l'àme, 
le  devoir;  mais  il  faut  qu'entre  Dieu  et  l'homme  il  y  ait 
un  rapport  direct  et  personnel  ;  ce  rapport  se  trouTe  dans 
la  religion  positive,  au  moyen  du  culte.  Aussi ,  dans  tous 
les  temps  et  chez  toutes  les  races  humaines,  on  trouve 
une  religion  positive,  mais  sous  des  formes  bien  diverses. 
Cette  différence  provient  de  l'idée  que  les  hommes  se  sont 
formée  de  la  divinité  à  différentes  époques.  Sous  ce  rap- 
port ,  les  religions  peuvent  être  divisées  en  deux  grandes 
classes  :  les  unes, fondées  sur  Iq polythéisme;  les  autres, 
sur  le  monothéisme.  Parmi  les  premières,  il  faut  citer  le 
Fétichisme,  la  plus  grossière  de  toutes  les  religions ,  et 
pratiquée  par  les  hommes  placés  au  plus  bas  deigré  de  la 
civilisation  ;  le  Sabéisme^  qui  consiste  dans  l'adoration 
des  corps  célestes,  soit  séparément ,  soit  tous  ensemble; 
le  Polythéisme  grec  et  romain.  Parmi  les  reliions  de  la 
seconde  classe,  on  compte  :  le  JudaXsme,  qui  se  divise  en 
plusieurs  sectes,  dont  les  principales  sont  ai^ourd'hui  la 
secte  des  Talmudistes ,  celle  des  Garantes,  et  celle  des 
Réchabites;  le  Christianisme,  oui  comprend  VÊglise  la- 
tine  ou  d'Occident  (c'est  VEglise  catholique)^  VÊglise 
grecque  ou  d'Orient,  et  le  Protestantisme,  dans  leqruel 
on  embrasse  les  Luthériens,  les  Zwingliens,  les  Calvi- 
nistes, les  Remontrants,  les  Presbytériins,  les  Anglicans, 
les  Mennonites  ou  Anabaptistes,  les  Qttakers,  les  Frères 
Moraves,  les  Métliodistes  ;  V Islamisme  ou  Mahométismet 
dont  les  principales  sectes  sont  celles  des  Sunnites,  des 
Chyites,  des  WcÛMbites;  le  Brahmanisme,  et  son  dérivé  le 
Bouddhisme;  le  Magisme  ou  la  Religion  de  Zoroastre. 

Voici ,  d'après  Balbi ,  le  chiffre  des  adhérents  de  cha- 
cune des  religions  qui  se  partagent  le  globe  : 

Église  latine  (  catholique  ) 139,000,000. 

Église  grecque 62,000,000. 

Églises  protestantes 59,000,000. 

Judaïsme 4,000,000. 

Islamisme 96,000,000. 

Brahmanisme 60,000,000. 

Bouddhisme 170,000,000. 

Religion  de  Confucius,  Magisme, 

Fétichisme,  etc 147,000,000. 

On  peut  consulter,  sur  la  religion  naturelU,  principale* 
ment  Locke,  Collins,  Wissovatius,  les  écrits  des  Soci- 
niens,  J.-J.  Rousseau,  et  J.  Simon,  La  Reliqionnaturdle: 
—  sur  les  religions  anciennes  :  les  Religions  de  f  anti- 
quité, par  F.  Creuzer^  le  Génie  des  religions,  par  E.  Qui- 
net;  —  sur  le  Catholicisme  :  V Exposition  de  la  doctrim 
catholique,  par  Bossuet  ;  le  Dictionnaire  de  théologie  et  le 
Traité  de  la  vraie  religion,  par  Bercer;  les  Prœlectiones 
theologicœ  du  P.  Perrone;  les  Histoires  ecclésiastiques  de 
l'abbé  Fleury,  de  Dupin,  d'Orsi,  de Rohrbacher, etc.;' 
parmi  les  écrivains  protestants,  Basnage,  Jurieu,  Mos- 
beim,  Jablonsky,  J.  Matter,  etc.  ;  —  sur  la  relidon  en 
général  :  Benjamin  Constant,  la  Religion  considérée  dasu 
sa  source,  ses  formes  et  ses  développements,  5  vol.  in-8", 
Paris,  1824-1830;  Anot  de  Merières,  Code  sacré,  esnosi 
comparatif  de  toutes  les  religions,  Versaillea,  1836, 
in-foL;  Meiners.  Histoire  critique  de  UnUes  les  rmigfons, 
Hanovre,  1806-1807  ;  Delacroix ,  Dictionnaire  historiqve 
des  cultes,  Paris,  1775  et  1821. 


REL 


1549 


REL 


«cijGioii  (  Entrer  m) ,  se  dit  des  personnes  oui  s'engi^ 
geot  par  des  rœux  à  suivre  les  règles  de  rOrdre  monas- 
tique dans  lequel  elles  Teulent  entrer.  C'est  une  appli- 
cation du  sens  étymologique  du  mot  religion  ;  c'est  encore 
en  ce  sens  qu'on  dit  la  religion  du  serment,         R. 

RELIQUAIRE,  boite,  coffiret,  vase,  de  formes  et  de 
dimensions  variables,  où  l'on  renferme  des  reliques.  Le 
rtliquaire  et  la  châsse  (  K,  ce  moi)  diffèrent  non-seule- 
meot  par  la  forme,  mais  en  ce  que  la  cb&sse  peut  contenir 
des  fnpients  d'assez  grande  proportion ,  tandis  que  le 
reliquaire  ne  contient  que  des  parcelles  toujours  minimes. 
Le  nom  de  reliquoÂre  s'appliqua  Jadis  aux  ossuaires  éle- 
vés dans  les  cimetières  catholiques.  H  existe  encore 
ai^ourd'hni  Quelques  édifices  de  ce  genre  en  Bretagne, 
par  exemple  a  Plestin,  à  Pleyben,  à  La  Roche  (près  de 
Laademeau). 

RELIQUAT  (du  bas  latin  reliquatuim^  dérivé  de  relic- 
tum,  restant),  en  termes  de  Jurisprudence,  de  Compta- 
bilité et  de  Commerce,  reste  de  compte  ou  débet.  Celui 
qui,  après  reddition  de  compte,  reste  devoir  auelque 
chose ,  est  dit  réliqueUaire.  Un  tuteur  doit  l'intérêt  du 
reliquat  à  partir  du  Jour  où  le  compte  a  été  clôturé,  et 
un  mandataire,  seulement  à  partir  du  Jour  où  il  a  été  mis 
en  demeure  {Codé  Napd.^  art.  474  et  1906). 

RELIQUES  (du  latin  rêliquiœ,  restes) ,  restes  des  coips 
des  Saints,  auxquels  l'Église  catholioue  rend  un  culte 
d'honneur  et  de  vénération.  On  étend  le  même  nom  à 
tout  ce  qu*on  a  pu  recueillir  des  instruments  de  la  Pas- 
sion. Le  culte  des  reliques  s'est  introduit  au  iv*  siècle. 
Les  Protestants  le  rejettent  absolument. 

RELIURE ,  art  d'attacher,  de  lier  ensemble  les  feuilles 
d'un  livre,  et  d'y  mettre  une  couverture,  dans  le  but  d'en 
prévenir  la  détérioration  par  le  temps  ou  par  un  fréquent 
usage.  Un  livre  entièrement  recouvert  en  peau  a  une  re- 
liure entière  ;  si  le  dos  seul  est  en  peau,  c'est  une  demi- 
reliure.  Après  avoir  mis  en  cahiers  par  le  pliage  les 
feuilles  imprimées ,  on  les  bat  sur  un  bloc  de  marbre  ou 
de  pierre  dure,  avec  un  lourd  marteau  k  tète  un  peu  con- 
vexe, et  on  les  tient  en  presse  un  certain  temps  ;  puis  on 
procède  au  grécage,  qui  consiste  en  plusieurs  incisions 
faites  en  travers  au  dos  du  volume  avec  une  scie  à  main, 
pour  guider  la  brocheuse  dans  l'opération  de  la  couture. 
On  met  alors  les  cahiers  sur  le  cot«50tr,  et  on  passe  des 
fils  autour  de  plusieurs  ficelles  qui  entrent  dans  les  in* 
ci<iions,  et  dont  les  bouts  sont  ensuite  rattachés  au  car- 
ton de  la  couverture.  On  fait  ensuite  Vendossure,  c-à-d. 
ou'on  frotte  à  plusieurs  reprises  le  dos  des  feuillets  avec 
de  la  colle  de  farine,  ou  de  la  colle-forte,  pour  qu'ils 
ne  puissent  plus  boi^ger,  et  on  le  polit  avec  un  /h>^• 
toir.  On  ébarbe,  on  rogne^  on  dore  ou  colorie  la  tran- 
che, on  pose  le  signet  et  la  tranchefUe,  et  on  procède  à 
un  second  battage.  Quand  on  a  applicjué  sur  le  dos  une 
bande  de  parchemin  mouillé  ou  de  toile,  on  colle  sur  le 
carton  la  peau,  la  toile  ou  le  papier  oui  doivent  le  recou- 
vrir. Le  rcLcinage  consiste  à  donner  a  la  peau  d'agréables 
nuances.  La  couverture  étant  faite,  il  ne  reste  plus  qu'à 
coller  les  gardes,  à  dorer  le  dos.  et  à  mettre  le  titre.  Les 
peaux  que  Ton  emploie  sont  la  hasame  ou  peau  de  mou- 
ton, le  maroq^imt  peau  de  bouc  ou  de  chèvre,  et  le  vea^. 
Au  xvm*  siècle,  le  célèbre  Hunter  fit  relier  en  peau  hu- 
maine an  Traité  sur  les  maladies  de  la  peau.  Une  Consti- 
tution de  la  République  française,  imprimée  à  Dijon  en 
1793,  et  qui  faisait  partie  de  la  bibliothèoue  de  Villenave, 
était,  d'après  une  note  de  ce  savant,  reliée  en  peau  hu- 
maine. 

Les  nianascrita  des  Anciens,  consistant  en  rouleaux 
d'écorce  d'arbre,  de  papjrrus  ou  de  parchemin,  n'ont  pu 
rc  evoir  une  reliure  pareille  à  celle  de  nos  livres  mo- 
dernes; on  se  bornait  à  mettre  les  rouleaux  dans  des  en- 
veloppes en  parchemin,  et  à  les  enfermer,  pour  les  garantir 
de  la  poussière,  dans  des  boites  cylindriques  garnies  de 
couvercles.  Quand  on  fit  des  livres  carrés,  on  réunit  les 
feuillets,  consos  ou  collés  dans  un  dos  mobile,  entre  deux 
planches  de  bois,  de  métal,  d'ivoire  ou  de  cuir,  sur  l'une 
desquelles  on  écrivit  le  titre,  car  ces  livres  furent  d'abord 
souches  à  plat  dans  les  bibliothèques.  V.  Peignot,  Essai 
historique  ei  archéologique  sur  la  reliure  des  livres  cheg 
les  Anciens,  Dijon,  1834;  Géraud,  Essai  sur  les  livres 
ions  PAntiquité,  Paris,  1839,  in-8«. 

il  est  difiBcUe  de  préciser  ce  que  fut  l'art  de  la  reliure 
pendant  le  moyen  ftge;  dès  le  v*  siècle,  les  relieurs 
avaient  recours  aux  orfèvres  et  aux  lapidaires  pour  d6- 
eorer  les  reliures.  Bélisaire  trouva  dans  le  trésor  de  Gé- 
dmer,  roi  des  Vandales,  le  livre  des  Évangiles  orné  de 
pierres  prédenses.  L'Énmgéliaire  grec  donné  à  la  basi- 
lique de  MoQza  par  Tbéooelinde^re^iie  des  Lombards,  a 


une  couverture  formée  de  deux  plaques  d'or  enrichies  de 
pierres  de  couleur  et  de  camées  antiques.  On  conserve  à 
la  bibliothèque  Laurentienne  de  Florence  un  exemplaire 
des  Pandectes  de  Justinien,  du  vi*  ou  vu'  siècle,  relié 
avec  des  tablettes  de  bois,  couvertes  de  velours  rouge  et 
garnies  d'ornements  en  argent  sur  les  plats  et  aux  angles. 
La  Bibliothèque  impériale  de  Paris  est  très -riche  en  re- 
liures de  ce  genre  ;  celle  du  Louvre  renferme  le  célèbre 
livre  d'Heures  écrit  en  lettres  d'or  sur  parchemin  de 
couleur  pourpre,  et  pourvu  d'une  couverture  en  velours 
rouge,  livre  dont  Charlemagne  fit  présent  à  la  ville  de 
Toulouse.  Ce  prince  eut  tellement  à  cœur  la  préserva- 
tion des  livres,  qu'il  accorda  aux  moines  de  Sithiu  (S^ 
Omer)  un  droit  de  chasse  illimité,  afin  de  leur  fournir  les 
moyens  de  se  procurer  des  peaux  pour  les  couvertures* 
Geoffh>y  Martel,  comte  d'Anjou,  donna  aux  moines  d'une 
abbaye  qu'il  avait  fondée  à  Saintes  la  dlme  des  cerfs  et 
des  biches  qu'on  prendrait  dans  111e  d'Oléron,  pour  servir 
à  la  reliure  de  leurs  livres.  Dans  les  contrées  maritimes 
du  Nord,  on  employait  les  peaux  de  phoque  et  de  requin  ; 
aillenra,  la  peau  de  truie.  Hugues  Capet  possédait,  dit-on^ 
un  almanach  relié  en  peau  de  serpent  avec  des  lames 
d'argent.  Aux  xi*  et  xii*  siècles,  on  fit  des  reliures  en 
cuivre  émaillé  :  le  musée  de  Cluny,  à  Paris,  possède  deux 
plaques  d'émail  incrusté,  de  la  fabrique  de  Limoges, 
qui  ornaient  sans  doute  la  couverture  d'un  livre  ;  l'une 
a  pour  sujet  l'Adoration  des  Mages;  l'antre  représente 
Etienne  de  Muret,  fondateur  de  l'ordre  de  Grandmont, 
conversant  avec  S*  Nicolas.  Les  Croisades  amenèrent  un 
progrès  dans  l'art  de  la  reliure  :  les  Arabes  apprirent 
aux  Occidentaux  à  couvrir  les  livres  avec  des  cuirs  à 
empreintes  dorées  et  argentées ,  et  ces  couvertures  re* 
curent  le  nom  d*alœ  (ailes),  à  cause  de  leur  analode 
de  position  et  d'éclat  avec  les  ailes  d'un  oiseau  à  riche 
plumage.  Les  livres  en  langue  vulgaire  se  multipliant, 
il  falliut,  d'ailleurs,  les  rendre  moins  lourds  que  les 
livres  d'église  :  on  employa  encore,  pour  les  couvrir, 
la  laine,  la  soie  et  le  velours;  des  clous  de  métal  bor- 
daient les  plats,  afin  de  pràerver  du  frottement  ces 
étoffes.  Les  plus  belles  reliures  du  xv*  siècle  sont  celles 
de  la  bibliothèque  formée  à  Bude  par  Mathias  Corvin, 
roi  de  Hongrie,  et  dont  on  trouve  la  plus  grande  partie 
aii^ourd'hui  dans  la  bibliothèque  puDli((ue  de  Munich. 
L'imprimerie  fnt  d'abord  fatale  à  l'art  de  la  reliure  :  tant 
que  les  manuscrits  avaient  eu,  en  raison  de  leur  rareté, 
une  grande  valeur,  on  les  avait  ornés  de  splendides  re- 
liures; les  livres  s'étant  multipliés  à  l'infini,  on  ne  les 
revêtit  plus  que  de  couvertures  grossières. 

Mais,  au  xvi*  siècle,  à  l'époque  de  la  Renaissance,  l'art 
de  la  reliure  prit  un  grand  essor.  Le  liviB  d'Heures  de 
Marguerite  de  Savoie  mérite  surtout  d'êtru  cité.  Le  goût 
des  reliures  artistiques  fut  très-répandu  (\n  France.  Les 
reliures  que  le  trésorier-général  Grollier  Ht  exécuter  en 
veau  et  en  maroquin  présentent  des  compartiments  et 
des  filets  d'or  mat,  d'élégants  entrelacements,  des  ara- 
besques rehaussées  d'or  et  de  couleur;  sur  l'un  des  plats 
on  voit  sa  devise  en  lettres  d'or  :  Poriio  fnea.  Dominé^ 
sit  in  terra  viventium,  «  que  ma  part,  Seipieur,  soit  sur 
cette  terre  des  vivants,  »  et,  sur  l'autre  plat,  son  nom, 
ou  les  mots  Tanquam  ventus  est  vita  m«i»,  «  ma  vie  est 
comme  le  vent.  »  Un  amateur  dont  le  nom  ne  nous  est 
point  parvenu  eut  aussi  des  reliures  imitées  de  celles  de 
Grollier;  ses  livres  portent  la  devise  suivante  :  Nulli  pltu 
fortuna  quàm  consUium  valet,  «  un  bon  conseil  vaut 
mieux  que  la  fortune.  »  Maioli,  amateur  italien  de  la 
même  époque,  fit  orner  ses  reliures  de  compartiments  en 
or  et  couleur;  quelques-unes  ont  une  ti^anche  gaufrée, 
ciselée,  ou  couverte  de  sujets  peints.  Les  reliures  à  com- 
partiments de  couleur  au  nom  et  aux  armes  de  Jacobus 
Malinfantius  sont  également  très-recherchées.  On  a  aussi 

Sielques  charmantes  reliures  d'un  amateur  appelé  Lau« 
n.  Les  reliures  italiennes  de  François  I*%  presque  tou- 
jours en  veau  fauve,  portent  son  chiflire  et  sa  devise,  la 
salamandre.  Sur  quelques  rares  volumes,  lo  nom,  le  mé- 
daillon et  la  devise  de  Charles-Quint  sont  gravés  en  or  et 
en  couleur.  Mareuerite  d'Angoulême  et  Mivguerite  de  Va- 
lois ont  laissé  plusieurs  livres  reliés  à  leur  chiffre  et  à 
leurs  armes;  ceux  de  Henri  H  et  de  Diane  de  Poitiers, 
orn^  de  croissants  et  de  chifiûres  sur  les  plats,  sont  d'une 
rare  élégance.  Catherine  de  Médicis,  les  ducs  de  Guise,  le 
cardinal  de  Bourbon,  Henri  UI  avec  sa  tel  e  de  mort  pour 
emblème,  Henri  IV  avec  l'H  couronné  semé  à  profusion 
sur  les  plats,  ont  laissé  des  reliures  précieuses  à  la  fois 
comme  exécution  et  comme  souvenirs.  Nous  ne  mention- 
nons que  pour  mémoire  les  reliures  historiées,  ornées  de 
métaux  ciselés  et  fouill^^  d'ivoire  sculpté,  de  pierres 


KEL 


1550 


RÉM 


précieuses^  et  où  le  reliear  n*a  que  le  mérite  de  l'ajaste- 
ment. 

Aa  xvm*  siècle,  l'art  subit  une  transformatioii  :  les  re- 
liures italiennes,  avec  les  arabesques  et  les  entrelacs  or 
et  couleur,  font  place  à  des  reliures  simples  et  sévères, 
mais  d*uii  excellent  goût.  L'historien  De  Thou  entra  le 
premier  dans  cette  voie,  et,  parmi  ceux  qui  l'y  suivirent, 
on  peut  citer  Richelieu,  Mazarin,  Habert  de  Montmort. 
Les  livres  aux  armes  de  Louis  XIIl  portent  presque  tou- 
jours aussi  le  chiffre  de  la  reine  Anne  d'Autriche.  Le  luxe 
des  reliures  reparut  à  la  cour  de  Louis  XTV.  Les  livres  de 
ce  prince,  reliés  par  Ruette,  et  semés  d'L  et  de  fleurs 
de  lis  d'or,  sont  généralement  assez  mal  établis;  on  en 
trouve  très-peu  oui  portent  son  emblème,  le  soleil.  Ceux 
du  chancelier  Seguier,  de  M"**  de  Gbamillart,  sont  beau- 
coup plus  recherchés.  —  Pendant  le  xvni*  siècle,  l'art 
de  la  reliure  a  Jeté  un  incomparable  éclat  :  rien  n'égale 
les  reliures  exécutées  par  Le  Guaoon,  Ënguerrand,  Pas- 
deloup,  les  Der6me,  Boyet,  Du  Seuil,  Bisiaux,  Brade!, 
Courtenval,  pour  le  duc  de  La  Vallière,  Longepierre,  le 
prince  Eugène  de  Savoie,  Marie  Leczinska,  le  comte 
d'Hoym  et  une  foule  d'autres.  Mais,  pendant  la  Répu- 
blique, le  premier  Empire  et  la  Restauration,  il  y  eut 
une  profonde  déoidence  :  seuls  quelques  artistes  d'un 
talent  consciencieux,  Purgold,  Bozerian,  Closs,  Simier, 
Thouvenin,  luttèrent  contre  le  mauvais  goût  et  contre  la 
théorie  désastreuse  du  bon  marché,  et  furent  encouragés 
par  Méon,  Cailhava,  Pixérécourt,  Didot,  Chardin,  Lan- 
glès,  Labédoyère  et  autres  amateurs  distingués.  Les 
libraires  Debure,  Renouard,  Brunet,  Merlin,  Techener  et 
Potier;  les  bibliophiles  Ch.  Nodier,  Aimé-Msrtin  etLeber, 
sont  parvenus  aepuis  à  relever  la  reliure;  les  meil- 
leurs relieurs  de  notre  époque  sont  :  Bauzonnet,  Trautz, 
Marins,  Ottmann-Duplanil,  Lenègre,  Kœhler,  Duru, 
Niédrée,  Cape,  Thompson ,  Lesné ,  Despierres,  Lortic, 
M"**  Gruel,  Lardière.  —  Certains  amateurs  ont  relié  eux- 
mêmes  leurs  livres  :  De  Tune,  bibliophile  de  La  Hâve  au 
xvEi*  siècle,  y  montra  un  véritable  talent;  mais,  si  l'on 
en  croit  une*  épigramme  de  Maynard,  M.  de  Marolles 
aurait  fait  des  reliures  aussi  mauvaises  que  ses  vers.  Pen- 
dant la  Révolution,  un  émigré,  le  duc  de  Caumont,  tint 
un  atelier  de  reliure  à  Lon(&es.  Le  roi  Louis  XVIII  aimait 
à  relier;  il  faut  bien  avouer  que  ses  essais  n'ont  aucune 
valeur. 

Le  plus  ancien  spécimen  de  la  reliure  anglaise  est  un 
psautier  latin-saxon  du  ix'  siècle,  qui  a  récemment  pris 

Îilace  dans  la  collection  Stowe.  Cest  un  volume  grossier, 
ié  avec  des  courroies  en  cuir,  et  revêtu  de  planches  de 
chêne,  dont  les  coins  sont  protégés  par  des  plaques  de 
cuivre.  Quand  la  littérature  classique  fut  remise  en  hon- 
neur ,  les  livres  devinrent  un  objet  de  luxe,  et,  dans  les 
cloltrM,  il  y  eut  une  pièce  à  part  destinée  à  la  copie  et  à 
la  reliure  des  manuscrits,  nommée  le  scriptorium.  Les 
moines  qui  se  livraient  k  ce  travail  étaient  fort  estimés; 
on  cite  surtout  le  frère  Herman,  habile  relieur  venu  en 
Angleterre  lors  de  la  conquête  normande,  et  qui  devint 
évêque  de  Salisbury.  Sous  le  règne  d'Edouard  III,  on 
mentionne  un  livre  couvert  d'or  Sntdllé,  et  enrichi  d'un 
fermoir  en  rubis  ;  sur  les  plats  brillaient  des  croix  de 
diamants  et  des  lis  en  pierres  précieuses.  Mais  le  spéci- 
men le  plus  curieux  en  ce  genre  est  un  missel,  qui  fut 
commandé  par  le  duc  de  Bedford,  oncle  d'Henri  Vi;  il  y 
a  plus  de  59  tableaux  en  miniature  avec  encadrements 
d'or,  fleurs  coloriées,  initiales  bleu  et  or. 

Il  ne  faut  pas  oublier  le  superbe  livre  d'Heures  de  la 
reine  ÉlisabeUi.  Il  est  relié  en  or  massif;  sur  la  couver- 
ture est  une  peinture  représentant  le  Jugement  de  Salo- 
mon,  et,  de  l'autre  côté.  Moïse  avec  le  serpent  d'aii-ain. 
On  y  voit  encore  l'anneau  où  s'accrochait  la  chaîne  d'or 
fixée  &  la  ceinture  de  la  reine. 

Cependant  les  relieurs  anglais  des  xvi*  et  xvn*  siècles, 
même  du  commencement  du  xvm*,  sont  bien  inférieurs 
aux  artistes  français  de  la  même  époque.  Après  Harley, 
comte  d'Oxford,  ami  de  Pope  et  favori  de  la  reine  Anne, 
dont  les  livres  se  distinguent  par  leur  reliure  invariable 
de  maroquin  rouge,  orné  de  filigranes  d'or  et  d'une  étoile 
sur  la  couverture,  vint  un  amateur  nommé  Hollis,  qui  fit 
mille  excentricités.  Un  artiste  célèbre  lui  avait  confec- 
tionné quantité  de  flgui'es  allégoriques,  telles  que  bonnet 
de  la  Liberté,  hibou  de  Minerve,  caducée  de  Mercure, 
baguette  d*Esculape,  etc.  Si  un  livre  respirait  l'ardent 
amour  du  patriotisme,  Hollis  y  faisait  appliauer  sur  les 
plats  le  bonnet  de  la  Liberté;  le  caducée  âe  Mercure  or- 
nait les  livres  d'éloouenoe;  les  traités  de  médecine  avaient 
Esculape,  et  ceux  ae  philosophie  Minerve  et  son  oiseau. 
Ces  folW  furent  bientôt  dépaÂséest  Go  ne  reliait  plus  les 


livres  sur  la  chasse  qu'en  peau  de  eerf  ;  an  fanatique  fit 
même  relier  une  histoire  du  célèbre  ministre  Fox  en 
peau  de  renard  {renard  se  dit  en  anglais  fox).  — Cest  en 
1766  que  l'art  de  la  reliure  atteignit  son  apogée  en  An- 
gleterre, avec  Robert  Payne.  Ses  reliures  sont  un  modèle 
de  bon  goût  et  d'élégance;  il  affectionnait  surtout  un 
maroquin  olivâtre,  qu'il  décorait  du  nom  de  maro(juin  à 
la  vénitienne.  Il  était  aussi  passé  maître  dans  l'art  de 
restaurer  les  vieux  livres  et  de  refaire  les  caractères  go- 
thiques. On  admire  surtout  son  Eschyle  de  Glasgow 
(dans  la  bibliothèque  de  lord  Spencer],  dont  la  reliure 
coûta  16  liv.  sterl.  Les  bibliomanes  se  disputent  ses  fac- 
tures; rien  de  plus  curieux  :  l'ouvrier  y  décrit  complai- 
samment  les  moindres  détails  de  son  travail,  entonne 
son  éloge,  et  dénigre  ses  confrères.  A  côté  de  Payne,  on 
remarque  Baumgarten,  Welcher  et  Kalthober.  Dans  notre 
XIX*  siècle,  les  meilleurs  relieurs  anglais  sont  Clarke, 
Lewes,  Hering,  Riviéro,  Halloway,  Bedford,  Leig^ton, 
Hodge  et  Ausnn.  B. 

RELOTGE,  en  latin  relotgium,  vieui  mot  signifiant 
horloge  publique. 

REMANCIPATION.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnatre 
de  Biographie  et  d^Histoire. 

REMBLAI,  en  termes  de  Construction,  opération  qui 
consiste  h  établir,  au  moyen  de  terres  rapportées,  un  sol 
factice  plus  élevé  que  le  sol  naturel  ;  par  suite,  on  donne 
le  même  nom  au  résultat  de  l'opération.  Les  remblais 
doivent  être  maintenus  par  des  murs  de  soutènement  ou 
par  des  talus. 

REMÈDES  SECRETS,  médicaments  dont  les  inven- 
teurs gardent  par  devers  eux  la  formule,  et  dont  ils  se 
constituent  une  propriété.  La  vente  et  la  distribution  de 
ces  remèdes  sont  prohibées  en  Frsnce;  c'est  un  délit  pu- 
nissable d'une  amende  de  25  h  600  fr.,  et,  en  outre, 
lorsqu'il  y  a  récidive,  d'un  emprisonnement  de  3  à 

10  Jours.  Les  inventeurs  doivent  remettre  la  formule  au 
ministre  de  l'Iut^eur,  qui  fait  examiner  le  médicament, 
et  qui  fixe,  s'il  y  a  lieu,  l'indemnité  à  payer  pour  la  di- 
vulgation de  la  découverte  (Lois  du  21  germinal  an  xi  et 
du  20  pluviôse  an  xm  — 11  avril  1803  et  18  fév.  1805; 
-r-  Décret  du  18  août  1810). 

RÉMÉRÉ.  V.  Rachat. 

REMI  (Arc  de  SAii<rr-),  dans  le  département  des  Bou- 
ches-du-Rhône.  Cet  arc  triomphal  romain,  gravement  en- 
dommagé, n'a  qu'une  seule  arcade.  Entre  ses  colonnes 
engagée,  on  voit  encore  des  bas-reliefs,  représentant 
des  esclaves  enchaînés  :  ces  figures,  de  2  met.  de  hau- 
teur, sont  mutilées,  et  deux  têtes  seulement  ont  échappé 
aux  ravages  du  temps.  Deux  bas-reliefs  représentant  des 
Renommées  ornaient,  sur  chacune  des  grandes  faces,  le 
dessus  des  impostes  :  on  n'en  voit  plus  que  des  traces 
légères  sur  la  face  occidentale  ;  elles  sont  mieux  conser- 
vées à  l'Orient.  Une  guirlande  de  feuilles  et  de  fruits 
sculptés  avec  une  grande  délicatesse  décore  l'archivolte. 
Dans  la  voûte  est  un  compartiment  de  caissons  hexagones, 
au  centre  des(|uels  sont  des  rosaces.  —  Près  de  l'arc  de 
S^-Remi  on  voit  un  mausolée  carré  de  la  même  époque. 

11  s'élève,  sur  un  socle  en  gros  quartiers  de  pierre,  à  une 
hauteur  de  19  met.,  et  forme  une  sorte  de  pyramide  com- 
posée de  trois  ordonnances  :  d'abord,  une  sorte  de  stylo- 
bate  quadrangulaire,  orné,  dans  la  partie  supérieure  de 
ses  faces,  de  4  bas-reliefs  représentant  des  combats; 
puis,  une  riche  ordonnance  de  portiaue  et  de  colonnes 
cannelées  et  engagées,  dont  les  chapiteaux  sont  corin- 
thiens; enfin,  un  petit  temple  composé  de  10  colonnes 
corinthiennes  cannelées,  qui  portent  un  entablement  sur- 
monté d'une  calotte  parabolique.  Au  milieu  de  ce  petit 
temple  à  Jour  sont  placées  deux  statues  d'hommes  re- 
vêtus de  la  toge.  Les  frises  et  les  archivoltes  sont  ornées 
de  bas-reliefs.  On  pense  que  ce  mausolée  fut  élevé  par 
trois  Romains  de  la  famille  Julia  à  la  mémoire  de  J.  César 
et  d'Auguste.  Certains  antiquaires  lui  assignent  cepen- 
dant une  date  postérieure.  V,  Lamy,  Description  de  deux 
monuments  anciens  près  de  la  vtlle  de  S^Remi,  1737, 
in-8o;  Malosse,  Monuments  antiques  de  S^^Remt  décrite 
et  expliqués,  Avignon,  1818,  in-8».  B. 

RÉMINISCENCE,  dans  son  acception  usuelle,  aussi 
bien  en  Psychologie  que  dans  le  langage  ordinaire,  dé- 
signe un  souvenir  imparfait,  une  conception  qui  se  pré- 
sente à  notre  mémoire  sans  que  nous  en  reconnaissions 
précisément  l'origine  ;  par  exemple,  un  vers  qui  nous  re- 
vient à  l'esprit  sans  que  nous  nous  rappelions  quel  en  est 
l'auteur,  un  motif  musical  que  nous  fredonnons  sans  sa- 
voir où  nous  l'avons  entendu,  l'idée  que  nous  avons  déjà 
vu  quelque  part  une  personne  que  nous  rencontrons,  etc. 
Dans  un  sens  qui  ne  s'éloigne  pas  beaucoup  du  prôcé- 


REM 


1551 


REN 


icxiv,  mais  qui  le  restreint  et  le  précise,  PlatOD  a  fait  de 
la  Réminiaoenoe  (en  grec  anamnésis)  le  principe  d'une 
théorie  qui  lot  est  propre.  Les  idées,  selon  lai,  en  tant 
que  conçues  par  Tesprit,  sont  Pobjet  de  réminiscences. 
C'est  dans  une  existence  antérieure  à  celle-ci  {V.  Pa^ 
bxistbrcb)  que  nous  avons  connu  le  bien,  le  vrai,  toutes 
les  idées  générales  et  absolues;  maintenant  nous  ne  fai- 
sons plus  que  nous  en  ressouvenir;  et  ce  souvenir  in- 
complet (car  nous  ne  nous  doutons  pas  que  nous  nous 
souvenons;  le  philosophe  seul  Ta  deviné;  et,  au  fond, 
l'objection  la  plus  sérieuse  qu'on  puisse  faire  à  son  sys- 
tème, c'est  qu'il  repose  sur  une  hypothèse  tout  à  fait  ar- 
bitraire), ce  souvenir  incomplet,  disons -nous,  cette 
réminiscence  l'éveille  en  nous  à  mesure  que  quelques 
perceptions  présentes  en  font  naître  l'occasion.  On  trouve 
partout  dans  Platon  les  traces  de  cette  théorie  ;  mais  c'est 
surtout  dans  le  Ménon  qu'il  l'a  régulièrement  exposée. 
Dans  le  Phèdre^  les  ailes  de  T&me  poussant  à  la  vue  de  ce 
qui  est  beau  pour  l'emporter  vers  les  régions  idéales  de 
la  beauté  en  soi  ont  bien  l'air  de  n'dtre  encore  qu'un 
symbole  poétique  de  la  Réminiscence.  B — e. 

REBIINISCERE,  nom  du  2«  dimanche  de  Carême.  Il 
est  ainsi  appelé  parce  gue  l'introït  de  la  messe  commence 
par  ces  mots  :  Reminiscere  miserationum  iuarum, 

REMISE,  en  termes  de  Droit,  action  de  livrer  à  un  dé- 
biteur le  titre  de  son  obligation.  La  remise  volontaire  de 
ce  titre  opère  libération  {Code  Nap.,  art.  1282-88). 

KEiiiSE,  en  termes  de  Banque,  se  dit  des  valeurs  que 
les  négociants  font  remettre  à  leurs  correspondants,  par 
lettres  de  change  ou  autrement,  pour  les  couvrir  de  leurs 
avances.  Ces  valeurs  doivent  figurer  plus  tard  en  ligne 
de  compte. 

REMISE,  lieu  o&  l'on  met  une  voiture  à  couvert.  Les  re- 
mises entrent  dans  l'ordonnance  des  b&timents  des  écuries. 

REMISES ,  en  termes  d'Administration  financière , 
sommes  qu*on  abandonne  à  ceux  qui  sont  chargés  de 
foire  les  recettes.  Elles  s'ajoutent  à  leurs  appointements 
ou  en  tiennent  lieu.  C'est  le  revenu  principal  des  Rece- 
veurs généraux  et  particuliers. 

RÉMISSION  (du  latin  remittere,  remettre,  se  rel&cher), 
s>  iioiiyuie  de  pardon  dans  le  langage  ecclésiastique  :  la 
rémission  des  péchés. 

n^issiON  (Lettres  de).  V.  Lettres  de  rémission,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

REMONTE,  achat  de  nouveaux  chevaux  pour  la  cava- 
lerie. Il  y  a  en  France  un  corps  de  remonte  générale, 
chargé  «racheter  ci  do  dresser  les  chevaux  français  propres 
au  aen  ice  ;  son  effectif  est  de  90  officiers,  avec  un  nombre 
de  sous-officiers  et  de  soldats  qui  varie  selon  les  besoins. 
L*uniforme  est  l'habit  bleu,  avec  collet,  parements  en 
)>oiiite  et  grenades  de  retroussis  garance;  retroussis, 
brides  d'épaulettes,  passe-poil  du  collet  et  des  parements 
bleu;  boutons  blancs  ayant  en  relief  un  cheval;  po- 
ches figurées  par  une  patte  à  la  Soubise;  les  épaulettes 
et  le  pantalon  garance;  le  shako  en  tissu  noir,  avec 
ganae  garance,  pompon  sphérique  &  flamme  garance;  la 
buflSeterie  blanche.  Les  officiers  ont  l'épaulette  d'argent. 
K.  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  â^Histovre, 
Farticle  France,  Armée* 

REMONTRANCES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictwnnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

REMORDS,  phénomène  complexe  de  conscience,  com- 
posé d'un  jugement  par  lequel  l'auteur  d'une  mauvaise 
action  la  condamne,  et  d'un  sentiment  de  douleur  oui 
en  est  la  suite.  C'est  une  des  sanctions  de  la  loi  morale. 
Les  artistes  ont  figuré  le  remords  par  le  vautf  ur  rongeant 
les  entrailles  de  Prométhée,  ou  par  un  hoVi.me  se  mor- 
dant les  poings  et  dont  un  serpent  déchire  le  cœur. 

REMORQUE  (du  latin  remulcum,  câtle  de  halage), 
action  de  faire  avancer  sur  l'eau  un  navire  ou  tout  autre 
corps  flottant,  au  moyen  d'une  corde  attachée  &  un  autre 
bmment  md  par  des  rames  ou  des  voiles,  par  des  che- 
vanx  ou  par  la  vapeur.  On  nomme  Remorqueurs  des 
bâtiments  à  vapeur  spécialement  destinés  à  traîner  ainsi 
des  navîn^s,  soit  sur  des  fleuves,  soit  à  l'entrée  ou  à  la 
lortie  diK  ports. 

REMPART,  tout  mur,  toute  levée  de  terre  qui  entoure 
une  place  fdHe  et  sert  à  sa  défense.  On  fit  d'abord  les 
remparts  en  maçonnerie  pleine;  mais,  depuis  l'emploi  de 
l'artillerie  dans  les  sièges,  ce  sont  des  massifs  en  ter- 
rasse, formés  de  la  terre  extraite  du  fossé  qui  est  à  leur 
pied,  revêtus  à  l'extérieur  d'en  mur  de  soutènement, 
couronnés  d'un  parapet,  terminés  intérieurement  par  un 
talus  où  l'on  pratique  des  rampes,  et  percés  de  portes  et 
de  poternes.  Ils  sont  protégés  et  presque  entièrement 
poaiqué»  par  des  ouvrages  extérieurs,  que  rassiégeoat 


doit  enlever  avant  d'arriver  au  corps  de  place*  F.  Forti- 

nCATION. 

REMPIÈTEMENT,  reprise  en  sous-oeuvre  de  la  partie 
inférieure  d'une  construction. 

REMPLACEBiENT  MIUTAIRE.  Le  remplacement,  au- 
torisé en  France  par  la  loi  du  21  mars  1832,  est  juste  en 
lui-même,  parce  qu'il  profite  à  ceux  qui  s'en  servent, 
sans  nuire  a  ceux  qui  ne  s'en  servent  pas;  il  ne  crée  pas 
une  inégalité,  il  est  seulement  ane  conséquence  de  l'iné^ 
galité  des  conditions  humaines.  A  un  autre  point  de  vue, 
rintérêt  de  l'agriculture,  de  l'industrie ,  des  professions 
libérales,  des  carrières  civiles,  des  sciences  et  des  arts, 
défend  d'imposer  à  tous  indistinctement  le  métier  de  sol- 
dat pendant  les  années  les  plus  fécondes  de  la  \ie.  Mais 
la  méthode  de  remplacement  qui  a  été  en  usage  durant 
plus  de  20  années  était  très -défectueuse  :  des  Compa- 
gnies d'assurance  contre  le  recrutement  se  chargeaient 
de  fournir  des  remplaçants  moyennant  une  somme  dé- 
battue avec  les  jeunes  conscrits;  elles  cherchaient  des 
hommes  au  meilleur  marché  possible,  déguisaient  leurs 
défauts  physiques  à  l'aide  de  ruses  infiniment  variées, 
et  ne  trouvaient  guère  que  des  débauchés,  des  vagabonds 
et  des  paresseux;  après  un  certain  temps  passé  au  corps, 
les  infirmités  de  ces  hommes  reparaissaient,  il  fallait  les 
réformer,  et  c'était  l'État  qui  supportait  les  conséquences 
de  la  Araude.  La  loi  du  26  avril  1855  a  substitué  à  ce 
mode  de  remplacement  Vexonération  et  le  rengagement 
(V.  ces  mots).  —  Le  remplacement  entre  parents  ou  par 
substitution  de  numéros,  établi  par  la  loi  de  1832,  a  été 
également  supprimé,  si  ce  n'est  entre  les  frères,  beaux- 
firères  et  parents  jusqu'au  4*  degré  ;  encore  fallait-il, 
pour  la  substitution  de  numéros,  que  ce  fût  au  tirage 
de  la  même  classe  et  dans  le  même  canton. 

REMPLACE,  en  termes  de  Construction,  blocage  en 
moellons,  en  briques  ou  en  cailloux,  dont  on  remplit, 
avec  du  mortier,  l'entre-deux  des  parements  d'un  mur 
construit  en  pierres  de  taille  ;  —  en  termes  de  Charpen- 
terie,  bois  qu'on  place  dans  un  pan  ou  une  cloison  pour 
remplir  les  vides. 

REMPLOI,  en  termes  de  Droit,  placement  de  deniers 
qui  proviennent  de  la  vente  d'un  immeuble  ou  d'une 
rente,  et  que  la  loi  oblige  de  réemployer.  Le  remploi  des 
deniers  dotaux  est  une  des  clauses  ordinaires  des  con- 
trats de  mariage  ;  celui  des  biens  en  communauté  qui 
ont  été  aliénés  durant  le  mariage  est  réglé  par  le  Code 
Napoléon  (art.  1433  et  suiv.). 

RENAISSANCE,  dénomination  qu'on  applique  pardcu* 
lièrement  à  la  période  qui  suirit  la  prise  de  Constanti- 
nople  par  les  Ottomans  (1453),  et  qu'on  appela  plus  tard 
le  siècle  de  Léon  X.  Les  Arts  et  les  Lettres,  qui  parais- 
saient avoir  péri  dans  le  même  naufrage  que  la  société 
romaine,  semblèrent  refleurir,  et,  après  dix  siècles  do 
ténèbres,  briller  d'un  nouvel  éclat  :  de  là,  comme  s'ils 
eussent  en  effet  reparu  tout  à  coup  à  la  lumière,  le  nom 
de  Renaissance,  choisi  pour  caractériser  un  événement 
qui  avait  été  pourtant  préparé  dès  le  moyen  Age.  Un  pre- 
mier réveil  des  esprits  avait  eu  lieu  sous  Charlemagne  : 
mais  les  malheurs  qui  suivirent  sa  mort  éteignirent  ce 
faible  rayon  de  politesse  naissante,  et  reculèrent  de  trois 
siècles  la  restauration  des  Lettres.  L'époque  de  Louis  IX 
vit  un  nouvel  essor  des  esprits,  plus  vigoureux  cette  fois 
et  plus  durable  :  alors  naquirent  ou  se  multiplièrent,  en 
France,  en  Angleterre,  en  Espagne,  en  Italie,  les  Univer- 
sités, qui  tirèrent  la  science,  en  quelque  sorte,  de  la 
prison  des  cloîtres  et  la  sécularisèrent.  Des  guerres 
étrangères  et  des  divisions  intestines  retardèrent  en 
Espagne,  en  Angleterre  et  en  France  le  mouvement  in- 
tellectuel; mais  en  Italie,  même  au  milieu  des  discordes 
civiles,  l'action  bienfaisante  de  Dante,  de  Pétrarque  et  de 
Boccace  lui  imprima  au  contraire  un  pins  vif  élan.  Ce  uo 
fut  pas  seulement  par  leurs  propres  œuvres  que  ces 
grands  génies  exercèrent  une  puissante  influence  sur  les 
esprits;  ils  mirent  aussi  leur  gloire  à  étudier  et  à  ré- 
pandre les  écrivains  de  l'Antiquité,  Dante  prit  Virgile 
pour  maître  et  pour  guide  dans  le  voyage  imaginaire  de 
sa  Divine  Comédie;  Pétrarque  écrivit  des  Lettres  sur  la 
recherche  des  manuscrits  anciens,  et  retrouva  lui-même 
les  Institutions  oratoires  de  Quintilien,  une  partie  des 
Lettres  et  des  Discours  de  Cicéron,  et  quelques  tragédies 
de  Sophocle.  Boccace,  dès  1360,  fit  établir  à  Florence  une 
chaire  de  lan^e  grecque  en  faveur  du  Grec  Léonce  Pi- 
late,  qui  rendit  Homère  à  l'Occident.  Ajoutons  que  les 
petites  Républiques  et  les  Principautés,  entre  lesquelles 
l'Italie  était  partagée,  se  disputaient  les  talents,  et  que  le 
mérite,  partout  accueilli,  pouvait  braver  la  persécution 
e;  Vwm^  cbftDger  de  si^our  aao»  changer  de  patridi 


REN 


15S2 


REN 


certain  de  rencontrer  toc^ourB,  auprès  da  pape,  on  du 
prince,  on  de  la  cité  libre,  des  Juges  éclairés  et  des  pro- 
tecteurs généreux.  Enfin,  les  progrès  des  Turcs  ayant 
amené  des  rapports  plus  fréquents  entre  POrient  et  l'Oc- 
cident, les  savants  de  TEmpire  grec  s*accoutumërent  à 
tenir  cbercher  en  Italie  un  asile  et  la  sécurité  pour  leurs 
études  :  Ghrysoloras  fit  ses  premières  lectures  publiques 
à  Florence  vers  1396,  et  Tenthousiasme  qu*il  excita  dé- 
termina à  un  exil  volontaire  plusieurs  de  ses  com- 
patriotes. Le  plus  célèbre  de  tous,  Bessarion,  reçut  la 
pourpre  romaine  en  récompense  de  son  mérite.  7.  Ita- 
UKfNB  (Littérature). 

La  Renaissance  ne  fut  donc  pas  une  résurrection  sou- 
daine et  imprévue  des  Lettres  anciennes  ;  seulement  la 
chute  de  Constantinople,  en  Jetant  sur  Tltalie  les  Lascaris 
et  d'autres  Grecs  qui  jusque-là  ne  s'étaient  pas  séparés 
de  leur  pays,  précipita  le  mouvement ,  et  lui  communiqua 
une  impulsion  extraordinaire.  Tandis  que  ces  fugitifs 
apportaient  à  leur  patrie  nouvelle,  pour  prix  de  son  hos- 
pitalité, les  ouvrages  des  orateurs  et  des  poètes  d'Athènes, 
on  fouilla  les  monastères  avec  une  ardeur  incroyable,  et 
Ton  en  tira  les  manuscrits  latins.  Par  un  hasard  qu'on 
peut  appeler  providentiel,  rimprimerie  fut  découverte, 
et  l'on  put  multiplier  et  perpétuer  les  chefs-d'œuvre  : 
entre  les  années  1457  et  loOtf,  on  compte  1300  auteurs 
imprimés.  C'est  alors  que  les  Juntes  et  les  Blanuces  pu- 
blièrent ces  fameuses  éditions  principes  des  clainiques, 
tant  recherchées  encore  aujourd'hui. 

Rien  ne  saurait  donner  l'idée  de  l'ardeur  avec  laquelle 
on  cultiva  alors  l'Antiquité.  Laurent  de  Médicis  donnait 
h  ses  amis,  le  Jour  de  la  naissance  de  Platon,  un  banquet 
dont  Marsile  Ficln  a  consacré  le  souvenir  ;  le  cardinal 
Bembo  ne  lisait  pas  son  bréviaire  en  latin,  de  peur  de 
g&ter  son  style;  Érasme  ne  craignait  pas  d'appeler  Gicéron 
un  saint,  et,  pour  un  manuscrit  de  Tite-Live,  Alphonse 
d'Aragon,  roi  de  Naples,  renonçait  à  faire  la  geurre  aux 
Florentins. 

Ce  culte  passionné  des  Ancien9,  qui  fut  d'abord  le 
propre  de  l'Italie,  les  Français  le  rapportèrent  de  leurs 
expéditions  dans  la  Péninsule,  mais  sans  se  douter  que 
ce  fût  là  le  plus  précieux  résultat  de  leurs  guerres.  De 
toutes  les  nations  modernes,  la  France  est  celle  où  la  Re- 
naissance littéraire  a  porté  ses  plus  beaux  fruits:  aucune 
autre  ne  s'en  est  plus  profondémenl  ressentie  {V,  Fran- 
ÇAisB  —  Littérature).  Qu'est-ce,,  à  vrai  dire,  que  notre 
littérature  du  xvn*  siècle,  sinon  une  heureuse  fusion  et 
l'union  définitivement  accomplie  de  la  forme  antique 
avec  l'esprit  moderne?  Quelques  amis  du  paradoxe  ont 
déploré  cette  invasion  de  la  France  par  l'Antiquité  :  à  les 
en  croire,  l'enthousiasme  môme  que  nos  écrivains  du 
XVI*  siècle  professèrent  pour  les  œuvres  anciennes,  et 
leurs  efforts  pour  en  reproduire  les  beautés,  détournèrent 
l'esprit  français  de  sa  voie  naturelle,  et  substituèrent  des 
qufidités  d'emprunt  et  d'imitation  à  son  originalité  primi- 
tive. Autant  vaut  se  plaindre  que  la  Grèce  conquise  par 
les  Romains  ait  subjugué  ses  farouches  vainqueurs, 
qu'Homère  ait  inspiré  Virgile,  et  la  lyre  d'Archiloque  ou 
d'Alcée  celle  d'Horace.  L'homme  peut  méditer  les  causes 
et  les  effets  des  événements,  mais  il  ne  saurait  en  arrêter 
le  cours  ;  et  les  faits  historiques  se  subissent  plutôt  qu'ils 
ne  se  discutent.  Le  Jour  où  Corinthe  tomba,  il  était  inévi- 
table que  la  civilisation  grecque  envahit  la  société  ro- 
maine; le  Jour  où  Mahomet  II  prit  Constantinople  et 
poussa  sur  l'Occident  les  vénérables  débris  de  l'ancienne 
Grèce,  il  fut  impossible  que  la  vieille  Hellade  ne  fit  pas 
la  conquête  des  peuples  c[ai  lui  donnèrent  asile.  D'ail- 
leurs, l'originalité  est-elle  mcompatible  avec  l'imitation? 
Qui  oserait  soutenir  que  VAndromaque  ou  la  Phèdre  de 
Racine,  pour  être  imitées  de  VAndromaque  et  de  l'Htp- 
polyte  d'Euripide,  ne  sont  pas  des  œuvres  profondément 
originales,  éminemment  modernes,  chrétiennes  et  fran- 
çaises? Enfin ,  on  s'accorde  à  reconnaître  que  la  malice, 
la  finesse,  la  grâce,  le  tour  ingénieux  et  piquant,  sont 
comme  le  fonds  de  l'esprit  gaulois  :  les  Grecs  et  les  Ro- 
mains ont-ils  étouffé  chez  nous  ces  qualités  aimables?  Et 
faut-il  tant  regretter  qu'ils  y  aient  ajouté  l'ampleur  de  la 
forme,  l'élévation,  la  grandeur,  l'éclat? 

La  Renaissance  eut  un  autre  effet  sur  les  destinées  du 
monde  moderne  :  elle  fut  l'occasion  et  l'une  des  causes  de 
la  Réforme.  Elle  en  fut  l'occasion  ;  car  c'est  pour  avoir 
voulu  embellir  Rome  des  chefs-d'œuvre  de  l'art,  que 
Léon  X  épuisa  son  trésor,  et  fut  réduit  à  autoriser  cette 
vente  des  indulgences  d'où  sortit  la  querelle  des  Augus- 
tins  et  des  Dominicains,  et  la  révolte  de  Luther  ;  elle  en 
fut  l'one  des  causes,  lointaines  à  la  vérité,  puisqu'on 
éveilUut  kê  esprits,  elle  les  prépara  aux  discussions  re- 


ligieuses et  à  la  liberté.  V.  Hallam ,  ntsUnre  de  la  litté^ 
rature  de  V Europe  pendant  les  xv*,  xvi*  et  xvn*  siècUs, 
traduite  de  l'anglais  par  Borghers,  1839,  4  vol.  in-tS*; 
Charpentier,  Histoire  de  la  Senatssance  des  lettres  au 
xv«  siècle,  1843.  A.  H. 

La  Renaissance  littéraire  du  zv*  et  du  xvi*  siècle 
fut  naturellement  accompagnée  d'une  Renaissance  artis- 
tique :  l'esprit  d'innovation  et  de  réforme  qui  fermentait 
dans  la  société  avait  pénétré  au  milieu  des  artistes,  aussi 
bien  que  parmi  les  politiques  et  les  théologiens;  de 
même  que  la  connaissance  plus  générale  et  plus  appro- 
fondie des  écrits  de  l'Antiquité  profane  avait  donné  une 
direction  nouvelle  au  génie  littéraire,  de  même  la  décoo- 
verte  des  manuscrits  de  Vitruve  et  les  travaux  de  Bru- 
nelleschi,  d'AIberti,  de  Palladio,  de  Vignole  et  d'autres 
architectes  italiens,  ramenèrent  les  artistes  à  l'étude  des 
modèles  grecs  et  romains.  Le  style  classique  ne  remplaça 
pas  immédiatement,  en  Architecture,  Vb  style  chrétien  du 
mojren  ftge ,  mais  il  y  eut  un  mélange,  une  combinaison 
de  formes  d'origines  différentes,  et  c'est  là  ce  qu'on 
nomme,  à  proprement  parler,  le  style  de  la  Renaissance  : 
ainsi ,  le  plein  cintre  romain  allia  sa  gravité  à  l'élégance 
de  l'ogive,  et  revêtit  les  ornements  du  style  flamboyant. 
On  entreprit  alors  une  quantité  prodigieuse  de  monu- 
ments, d'un  caractère  plutôt  privé  que  public,  car  on  fit 
beaucoup  moins  d'églises  que  de  palais,  de  châteaux  et 
d'hôtels.  Non-seulement  l'originalité  devint  plus  rare, 
puisqu'on  se  bornait  à  imiter  plus  ou  moins  heureuse- 
ment les  œuvres  de  la  Grèce  ou  de  Rome,  mais  le  senti- 
ment des  convenances  architecturales  s'amoindrit  :  à 
force  de  prendre  pour  types  les  édifices  antiques,  les  ar- 
tistes en  vinrent  à  une  sorte  d'uniformité  dans  le  plan , 
qu'il  s'agtt  de  construire  une  église,  un  palais,  une  Bourse 
ou  un  théâtre.  En  ce  qui  concerne  le  plan  des  églises,  la 
forme  de  la  croix  fut  généralement  conservée  ;  mais,  au 
lieu  de  suivre  le  modèle  adopté  depuis  bien  des  siècles 
dans  l'Occident,  on  le  modifia  suivant  une  foule  de  cir- 
constances ou  le  caprice  de  l'architecte,  et  le  transept  fut 
{>lacé  tantôt  à  la  partie  supérieure  comme  dans  la  croix 
atine,  tantôt  au  milieu  comme  dans  la  croix  grecque. 
Les  colonnes,  qui  avaient  reçu  tant  de  développement  en 
hauteur  dans  les  monuments  gothiques,  et  qu'on  avait 
composées  d'un  assemblage  de  colon  nettes ,  revinrent  à 
la  forme  sphérique,  ou  furent  remplacées  par  des  piliers 
quadrangulaires,  décorés  de  pilastres.  On  les  ramena  les 
uns  et  les  autres  aux  proportions  indiquées  par  les  An- 
ciens, en  établissant  des  rapports  assez  exacts  entre  le 
piédestal ,  le  fût ,  le  chapiteau  et  l'entablement.  Le  cha- 
piteau affecta  des  formes  antiques,  mais  on  le  couvrit 
aussi  de  dessins  capricieux.  Les  arcades  semi-circulaires 
prirent  la  place  des  arcs  en  tiers-point  ;  cependant  l'ogive 
alterna  assez  fréquemment  avec  le  plein  cintre,  surtout 
aux  portes  et  aux  fenêtres.  Le  portail  fut  souvent  cintré, 
tandis  que  les  fenêtres  conservèrent  leur  amortissement 
aigu,  et  même  les  légers  compartiments  et  le  réseau 
flamboyant  du  style  çothique  de  la  dernière  époque.  On 
continua  de  construire  d  après  les  principes  du  st^ie 
ogival  les  voûtes  de  grande  portée,  mais  en  les  surbais- 
sant ,  et  en  les  couvrant  de  culs-de-lampe  et  de  penden- 
tifs ciselés  ;  les  voûtes  plus  petites  furent  ordinairement 
cintrées,  et  leur  surface,  divisée  en  caissons  symétriques, 
reçut  des  sculptures  très-variées,  fleurs,  fruits,  emblèmes, 
têtes  humaines,  génies  ailés,  images  fantastiques,  etc.  La 
science  et  la  richesse  de  l'ornementation  sont  un  des  ca- 
ractères distinctifs  de  la  Renaissance  :  à  aucune  époque 
on  n'a  exécuté  avec  autant  de  pureté,  d'élégance  et  de 
finesse,  avec  une  telle  perfection  de  profils  et  de  contours, 
les  moulures,  les  festons,  les  rinceaux,  les  arabesques, 
les  fleurons,  les  guirlandes,  les  dentelles,  les  rosaces,  les 
médaillons  garnis  de  personnages  en  demi-relief.  Hais  on 
apporta  des  modifications  qui  ne  furent  pas  toujours  heu- 
reuses aux  principes  de  l'Antiquité  :  ainsi ,  l'on  fit  des 
entre-colonnements  inégaux,  des  pilastres  d'une  projeo> 
tion  démesurée,  des  flrontons  circulaires  ou  brisés,  etc. 

La  Renaissance  des  arts  eut  lieu  dans  le  reste  de  l'Eu- 
rope aussi  bien  qu'en  Italie  :  les  artistes  italiens  se  ré- 
pandirent en  Allemagne,  en  Espagne,  en  France  et  en 
Angleterre  (  V.  les  articles  de  ce  Dictionnaire  consacrés 
aux  arts  de  chaque  pays).  B. 

RËNART  (Le  roman  de),  poème  allégorique  et  sati- 
rique fort  célèbre  au  moyen  âge.  Les  héros  en  sont  Goupil 
(le  renard)  et  Isengrin  (le  loup),  en  qui  se  personnifient 
la  ruse  et  la  force.  Autour  d'eux  se  meut  tout  un  monde, 
qui  est  l'image  du  monde  féodal  avec  sa  hiérarchie,  ses 
castes,  ses  préjugés,  ses  mœurs  et  ses  lois  :  le  roi  Nolde, 
le  Uon,  et  dame  Orgueillevues  sa  fenme;  Brun,  Toiirti 


REN 


oo3 


REN 


^Bsviueent^  leiangner,  conseillers  darai  ;  Varchiprèlre 
Ber^iari^  Ta  ne;  BraianU  le  Uoroau  ;  le  bon  sire  Belin^ 
te  moaton;  Tardi$u,  le  limaçon,  brillant  et  preux  cbcva- 
Tallor;  Roonel,  le  m&tin  «  qui  sait  de  plusieurs  latins,  » 
u  vieux  routier;  Tabbé  Damp  Petifpas,  le  paon  ;  Chan» 
twlair,  le  coo;  frère  Tybert,  le  chat;  frère  Hubert,  Tes- 
couffle  (le  milan),  confesseur;  dame  Hersent,  la  louve, 
épouse  d*l8engrin;  Hermeline,  la  femme  de  Renart;  le 
juge  Brichemer,  le  cerf;  Grinbert,  le  blaireau,  parent 
de  Renart;  dame  Rfigu^neau,  la  guenon,  vieille  plai- 
deuse^  également  parente  de  Renart;  dom  Espinart,  le 
hérisson;  le  page  Rossel,  l'écureuil;  les  huissiers  (por- 
tiers) WankeZf  le  geai,  et  Urediel,  le  perroquet;  Martin, 
le  singe,  le  jongleur,  etc.  —  Le  commencement  du  drame 
est  la  séduction  de  dame  Hersent  par  Renart.  Isengrin 
porte  plainte  devant  le  roi  Noble,  qui  ne  semble  pas  dis- 
posé à  donner  suite  à  PalTaire.  Après  nn  débat  auquel 
prennent  part  Brun  et  Grinbert,  après  que  dame  Hersent 
a  protesté  de  son  innocence  à  la  grande  édification  de 
Bernart,  tout  va  s'arranger;  mais  Cbanteclair  et  dame 
Pinte  (la  Poule)  viennent  à  leur  tour  accuser  Renart,  qni 
a  tué  la  sœur  de  dame  Pinte.  Renart  est  condamné  an 
gibet  :  on  Vy  traîne,  etc*est  à  qui  insultera  le  plus  à  son 
malheur,  d'ailleurs  mérité.  Tremblant  à  l'aspect  de  Fin- 
stniment  du  supplice,  il  implore  la  gr&ce  d*allcr  en  pèle- 
rinage à  Jérusalem.  Le  roi  refuse  d'abord,  puis  consent, 
et  le  vaurien  échappe  an  châtiment.  Retombé  entre  les 
mains  de  la  justice,  la  reine  s'interpose,  et  le  sauve  en- 
core. Après  maintes  aventures,  Renart  prie  le  hibou  do 
recevoir  sa  confession,  et  celui-ci  lui  adresse  un  sermon, 
parodie  de  ceux  des  prêtres  et  des  moines.  Feignant 
d'être  touché  de  componction,  Renart  saute  sur  son  con« 
fesseur  et  l'étrangle.  Tel  est  le  sujet  du  Renart  primitif, 
auquel  ont  été  rattachés  toutes  sortes  d'épisodes.  La 
tendance  générale  de  ce  poème  est  la  négation  et  la 
destruction  de  l'esprit  chevaleresque  ;  il  montre  la  ruse 
triomphant  partout  du  droit  et  de  la  force.  11  raille  non- 
seulement  les  mœurs  du  moyen  &ge,  mais  trop  souvent 
aussi  ses  croyances,  enveloppant  dans  la  même  morfuerie 
les  sacrements,  les  miracles .  tes  pèlerinages ,  les  croi- 
sades, les  tournois,  les  coui's  pléniëres,  etc. 

Le  Renart  remonte  beaucoup  plus  haut  que  les  m»- 
nuscrits  qui  nous  en  ont  été  conservés,  et  qui  sont  du 
xni*,  du  XIV*  et  du  xv*  siècle  :  plusieurs  des  fables  qui 
furent  mises  en  œuvre  par  les  Trouvères  appartiennent  au 
viti*  ;  mais  on  ne  trouve  pas  avant  le  xii*  un  document 
qui  atteste  l'existence  du  roman  dans  une  langue  quel- 
conque. C'est  à  cette  époque  qu'il  faut  placer  deux  poèmes 
latins  qui  ont  pour  titres  hengrimus  et  Reinhardus,  et 
qui  paraissent  avoir  été  composés  en  Flandre.  Vers  le 
milieu  du  même  siècle,  Helnnch  de  Glichesœre  composa 
un  Renart  allemand,  dont  le  texte  n'existe  plus,  mais 
qui  servit  de  modèle  à  d'autres  poètes  de  la  même  nation. 
Enfin,  dès  les  premières  années  du  xu*  siècle,  la  tra- 
dition de  Renart  était  populaire  en  France.  L'idée  même 
de  Renart  est-elle  française  ou  germanique?  Elle  semble 
être  née  non  loin  du  Rhin  ;  mids  le  Renart  français  pa- 
raît avoir  été  l'original  du  Renart  iJiemand. 

Ce  vaste  roman ,  dont  l'ensemble  ne  foi  me  pas  moins 
de  80,000  vers,  est  divisé  en  une  trentaine  de  branches, 
qui  furent  composées  à  diverses  époques  et  par  divers 
auteurs.  Deux  sont  attribuées  à  Pierre  de  Saint-Cloud, 
qui  écrivait  au  commencement  du  xm*  siècle,  une  à 
Richard  de  Lison  (village  de  Normandie),  et  une  autre  à 
un  curé  de  la  Croix-en-Brie.  A  la  fable  primitive  les  Trou- 
vères ajoutèrent  bientôt  de  nouveaux  épisodes,  comme 
Renart  couronné,  attribué  par  Méon  à  Blarie  de  France, 
Rena^  le  Nouvel  par  Jackemars  Giélée,  Renart  le  Ses- 
tourné  par  Rutebeuf,  et  Renart  le  Contrefait  par  un 
Trouvère  champenois  du  xiv*  siècle. 

Fies  savants  allemands  qui  cherchèrent  les  premiers 
Torigine  de  la  fable  de  Renart  y  virent  une  allusion  & 
certains  événements  accomplis  dans  leur  pays.  Eckhart 
au  XVIII*  siècle,  et  M.  Mone  de  nos  jours,  ont  supposé  que 
le  loup  Isengrin  était  Zwentibold ,  fils  de  l'empereur  Ar- 
nulf  et  roi  de  Lorraine,  qui  fut  en  guerre  avec  un  ministre 
perfide  nonamé  Regpnanus  (Reinnart,  Renart),  et  issu, 
comme  lai,  du  sang  de  Charlemagne.  Cette  hypothèse 
a  ét^  combattue  par  Raynouard  dans  le  Journal  des  Sui- 
vants (Juillet  1834),  et  l'on  s'accorde  à  voir  dans  le 
Toman  ae  Renart  une  peinture  satirique  de  la  société 
féodale.  Noble  lion,  le  roi,  n'ean  pas  toujours  le  maître 
dans  sea  États;  Isengrin,  le  seigneur  fort  et  brutal,  est 
Msveni  battu  par  k»  ruses  d'un  ennemi  moina  vaillant 
et  notas  fbrt;  Bornart,  le  baudet,  c*est  la  patiei.li 
£i|lifift.  an i  vit  fw  pi'ii  avec  tout  le  monde,  et  l'on  VolteA* 


lien  des  luttes  affreuses,  des  combats  qui  divisent  et 
sanglantent  la  terre. 

Le  roman  de  Renart  a  été  publié  pur  Meon,  < .  ^ 
1826,  4  vol.  in-8';  M.  Chabuille  a  donné  une  éu;ii''i 
avec  Supplément,  Paris,  1X35,  in-i^  Il  existe  un  icMe 
flamand  du  xii*  siècle,  publié  par  J.-F.  Willems,  et  tra- 
duit par  Delepierre,  Bruxelles,  1837.  Un  texte  d'Henri 
d'Alkmaar  en  bas  savon  a  été  reproduit,  avec  plus  6u 
moins  de  fidélité,  par  Gottsched,  Scheltema,  HofTmann  de 
Fallersleben ,  etc.  Reinhardus  a  été  édité  par  M.  Mone, 
Stuttgard,  1832,  et  hengrimus  par  Grimai  dans  son  re- 
cueil du  Reinhart  Fuchs ,  Berlin,  1834.  Le  roman  de 
Renart  a  servi  de  modèle  aux  Animc^ix  parlants  de  Qisti, 
et  Gœthe  en  a  fait  une  élé^nte  imitation  dans  un  poème 
en  12  chants.  V,  V Histoire  littéraire  de  la  France, 
t.  XXII;  A.  Rothe,  Les  romans  de  Renart  examinés^ 
analysés  et  comparés  d'après  les  manuscrits  les  ptus 
anciens,  Paris,  1854,  în-8».  H.  D. 

RENCHIER,  en  termes  de  Blason,  meuble  de  l'écu  qui 
repi^sente  un  cerf  de  la  plus  haute  taille;  sa  ramure, 
aplatie  et  couchée  en  arrière,  est  beaucoup  p'iis  longue 
que  celle  du  cerf  ordinaire.  Le  rcnchier  e&i  sans  doute  le 
renne  des  Lapons. 

RENCONTRE,  en  termes  de  Blason,  tête  de  quadru- 
pède qui  paraît  de  front  dans  l'écu.  Ainsi  l'on  dit  :  un 
rencontre  de  cerf,  un  rencontre  de  bœuf,  etc. 

RENÉGAT  (du  latin  qui  renégat,  qui  renie),  celui  qui 
a  renié  la  foi  chrétienne  pour  embrasser  une  autre  reli- 
gion et  particulièrement  le  mahométisme. 

REnQAGEMENT,  rentrée  des  anciens  mililaires  au 
service.  Il  fut  substitué,  par  une  loi  de  1855,  h  l'Hucien 
système  de  remplacement  (  V,  ce  mot).  Le  rengagement 

four  sept  années  donnait  droit  :  {•  k  une  somme  de 
,000  fr.  dont  100  fr.  payables  In  jour  du  rengagement 
ou  de  l'incorporation,  200  fr.  noit  au  jour  du  ren^'age» 
nient  ou  de  l'incorporation,  soit  pendant  le  cours  du  ser- 
vice, sur  l'avis  du  Conseil  d'administration  du  corps,  et 
700  fr.  à  la  libération  du  service;  2®  h  uni*  hauie  paye 
de  10  centimes  par  jour.  Tout  rengagement  pour  moins 
de  sept  ans  donnait  droit:  l»  h  une  sumnie  de  10  Ir. 
par  an,  payable  à  la  libération  du  service;  i«  h  une  ha» le 
paye  de  10  centimes  par  jour.  Après  Uann  de  bcrvice, 
le  rengagé  ne  recevait  qu'une  Imnle  paye  de  20  centimes. 
Les  soui^-ofTiciers  nommes  oITiciers,  ou  apiielés  h  un 
des  emplois  qui  leur  sont  dévu  us  en  vertu  des  lois  et 
règlements,  avaient  droit,  sur  les  sommes  allouées  pour 
rengagements,^  une  part  proportionnelle  h  la  dure»  du 
scrv'ce  qu'ils  avaient  accompli:  il  en  étaitde  même  des 
militaires  réformés  et  de  ceux  passant  dans  un  corps 
qui  ne  se  recrute  pan  pir  la  voix  des  appels.  Les  sommes 
attribuées  aux  rengagés  après  libér;<tion  étaient  iiics- 
sibleset  in^aississables.  En  cas  de  mort,  une  part  de  ces 
sommes,  proportionnelle  h  la  durée  du  service,  était  dé- 
volue aux  héritiers; en  cas  de  désnérence,  les  sommes 
dues  profitaient  h  la  dotation  de  l'armée.  La  condamna- 
tion à  une  pi'ine  afTIictive  ou  infam.-iute,  nu  boulet,  aux 
travaux  publics,  à 'une  peine  correctionnelle  de  plus 
d'une  armée,  eniraînaii  la  déchéance  de  tout  droit  .ux  al- 
locations non  soldées  Le  r^nni  h  In  haute  paye  érailsus- 
pendu  par  l'absence  illégale,  par  l'envni  dans  une  com- 
pagnie de  discipline,  et  pendant  rempriM<inMemeni  subi 
en  vertu  d'u'  e  condamnation  rorreclioimelle.         B. 

RENIER,  17*  branche  de  la  chanson  de  Guillaume-au' 
cùurt'nei.  Renier,  fils  de  Maillefer,  a  été  enlevé  au  ber- 
ceau, et  porté  chez  les  Sarrasins  &  Venise;  devenu  grand, 
il  se  met  à  la  recherche  de  son  père,  au'il  tire  des  mains 
des  Infidèles.  —  L'auteur  de  cette  cnan<^on  y  rattache 
d'une  manière  ridicule  tous  les  événements  de  son  temps: 
on  y  voit  figurer  les  Guelfes  et  les  Gibelins,  Robert 
Guiscard ,  etc.  Il  en  existe  un  seul  manuscrit  à  la  Biblio- 
thèque nationale  de  Paris.  V.  VHistoire  littéraire  de  la 
France,  tome  XXII.  H.  D. 

RENOMMÉE  (La).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phte  et  d* Histoire, 

RENONCIATION,  en  termes  de  Droit,  action  de  répu- 
dier des  droits  acquis  ou  éventuels.  La  femme  mariée  ne 
peut  renoncer  à  la  communauté  de  biens,  et  ses  héritiers 
ne  peuvent  y  renoncer  pour  elle,  que  suivant  certaines 
formes  et  dans  certains  délais  aprèo  la  dissolution  du  ma- 
riage {Code  Napoléon,  art.  1464-60).  —  La  renonciation 
à  un  héritage  est  soumise  à  de  nombreuses  conditions 
(  Ibid^y  art.  784-793,  845, 1389)  :  ainsi ,  il  ne  dépend  pas 
d'un  héritier  d'abdiquer  une  succession  opulente  et  de 
frustrer  ainsi  ses  créanciers  du  gage  sur  lequel  ils  ont  dû 
compter,  et  ceui-ci  peuvent ,  en  cas  de  négligence  ou  de 
mauvais  vouloir  du  débiteur,  exerow  bs  dreHs  qui  nu 


REN 


1554 


RÉP 


■ppartiennent.  L*art.  181  ne  permet  pu  de  renoDcer  ft  la 
Bucc(%ssïon  d*nne  personne  vivante.  —  La  renonciation  à 
la  prescription  ne  peut  avoir  lieu  que  quand  celle-ci  est 
acquise  lart  2220-27). 

HBNTE,  se  dit  en  général  de  tout  revenu  annuel,  et 
plus  ordinairement  de  ce  qui  est  reçu  annuellement 
comme  prii  ou  intérêt  d*un  fonds,  d*un  capital  aliéné  ou 
cédé.  Avant  1789,  la  forme  des  rentes  variait  à  l'infini; 
notre  Droit  actuel  reconnaît  deui  sortes  de  rentes,  les 
rentes  perpétuelles  et  les  rentes  viagères,  toutes  deux  dé- 
clarées biens  meubles  [Code  Napoléon,  art.  529 j,  et  dont 
les  arrérages  se  prescrivent  par  5  ans  (art  2277).  Les 
rentes  perpétuelles  ont  un  nom  assez  impropre,  puis- 
qu'elles sont  rachetanles;  seulement  les  parties  peuvent 
convenir  que  le  rachat  ne  sera  pas  fait  avant  un  délai  qui 
ne  pourra  excéder  dix  ans,  ou  sans  avoir  averti  le  créan- 
cier au  terme  qu'elles  auront  déterminé  d'avance.  Le  dé- 
biteur d'une  rente  constituée  en  perpétuel  peut  être  con- 
traint au  rachat  :  1°  s'il  cesse  de  remplir  ses  obligations 
pendant  deux  années  ;  2°  s'il  manque  à  fournir  au  prêteur 
les  sûretés  promises  par  le  contrat.  Le  capital  de  la  rente 
devient  aussi  exigible  en  cas  de  faillite  ou  de  déconfiture 
du  débiteur.  La  rente  peut  s'éteindre  par  la  prescription 
trentenaire,  c.-à-d.  s'il  s'est  écoulé  30  ans  depuis  sa  créa- 
tion sans  aucun  payement  d'arrérages.  Les  rentes  viagères 
sont  celles  dont  la  durée  est  subordonnée  au  décès  d'une 
ou  plusieurs  personnes  indiquées  au  contrat;  elles  peu- 
vent être  constituées  à  titre  onéreux  ou  à  titre  gratuit. 
Elles  ne  sont  pas  limitées,  comme  les  rentes  perpétuelles, 
au  taux  légal  de  l'intérêt.  On  ne  peut  les  racheter  ;  mais 
le  créancier  peut  demander  la  résiliation  du  contrat,  si 
le  constituant  ne  donne  pas  les  sûretés  convenues.  Une 
rente  viagère  ne  peut  être  déclarée  insaisissable  dans  le 
contrat  que  lorsqu'elle  est  constituée  à  titre  gratuit.  Elle 
s'éteint  par  la  mort  naturelle ,  mais  non  par  la  mort 
civile.  V.  Pœlix  et  Henrion,  Traité  des  rentes  foncières, 
1820,  in-8^;  Menant,  Des  rentes  en  Droit  romcûn  et  en 
Droit  français,  1860,  ln-8«. 

Les  rentes  sur  l'Etat  sont  les  sommes  annuel1en.^nt 
payées  par  le  gouvernement  pour  les  intérêts  des  em- 
prunts publics  :  elles  sont  inscrites  au  Grand-Livre  de  la 
dette  publique,  et  les  titres  délivrés  aux  rentiers  s'ap- 
pellent inscriptions  de  rente.  Les  rentes  se  désignent  par 
le  taux  de  l'intérêt  qu'elles  rapportent;  ainsi  l'on  dit  le 
3,  le  4,  le  A 1/2,  le  5  p.  100.  Le  cours  de  la  rente  est  le 
le  taux  auquel  elle  est  cotée  chaque  Jour  à  la  Bourse,  et 
d'après  lequel  ont  lieu  les  achats  et  les  ventes  de  titres  ; 
ce  taux  subit  des  fluctuations  continuelles,  à  cause  de 
l'affluence  ou  de  la  rareté  des  titres  sur  la  place.  Les  évé- 
nements politiques  exercent  une  grande  influence  sur  les 
cours  de  la  rente;  on  en  Jugera  par  quelques  chiffres  re- 
présentant la  valeur  du  5  p.  100  français  à  certaines 
époques  importantes  :  en  1707,  6  fr.  95  ;  en  1800, 47  fr.; 
en  1804,  55  fr.;  en  1807,  76  fr.  40;  en  1809,  86  fr.;  en 
1812,  82  fr.;  en  1814,  51  fr.;  en  1820,  71  fr.;  en  1827, 
iOO  fr.;  en  1830, 109  fr.;  en  1831,  75  fr.;  au  commence- 
ment de  1848,  116  fr.,  et,  après  la  Révolution,  50  fr.; 
après  les  événements  de  Juin,  80  fr.;  après  le  coup  d  État 
de  1851 ,  110  fr.  Le  5  p.  lOl)  date  de  1707  ;  le  3  p.  100  et 
le  4  1/2  furent  créés  en  1825.  Pour  se  libérer,  l'État  a 
deux  moyens,  V amortissement  (  V.  ce  mot)  et  le  rem- 
boursement. Celui-ci  n'est  guère  qu'une  mesure  commi- 
natoire, pour  amener  les  rentiers  a  accepter  une  conver- 
sion, c-à-d.  une  réduction  de  rente.  La  première  opération 
de  ce  genre  eut  lieu  en  1825  :  vivement  combattue  par 
l'opposition  libérale,  elle  ne  put  être  imposée;  les  porteurs 
de  rente  5  p.  100  eurent  seulement  la  faculté  de  convertir 
.«urs  titres  soit  en  4  1/2  au  pair,  avec  garantie  de  non- 
remboursement  pendant  qu.nze  années,  soit  en  3  p.  100 
au  taux  de  75  fr.  Cette  conversion  toute  volontaire  pro- 
cura au  Trésor  une  économie  annuelle  de  6  millions.  Sous 
le  gouvernement  de  Juillet  1830,  la  Chambre  des  députés 
vota  de  nouvelles  conversions  de  rentes;  mais  la  Chambre 
des  psÀT?  les  rejeta  invariablement.  Pendant  la  Prési- 
dence de  Louis-Nupoléon ,  un  décret  du  14  mars  1852 
convertit  toute  la  rente  5  p.  100  en  4  1/2,  avec  faculté  de 
remboursement  au  pair  pour  les  rentiers  qui  le  deman- 
deraient ,  et  garantie  contre  le  droit  de  remboursement 
pendant  10  ans  pour  ceux  qui  accepteraient  la  conver- 
sion :  sur  une  dette  de  près  de  6  milliards,  les  rembour- 
sements demandés  s'élevèrent  à  peine  à  30  millions,  et 
la  conversion  fut  pour  le  trésor  une  économie  annuelle 
de  près  de  20  millions.  En  1862,  une  autre  conversion  du 
4  1/2  et  du  4  en  3  p.  100  a  été  proposée,  avec  cette  par- 
Ocularité  que  les  rentiers  devaient  payer  une  soulte  pour 
souserver  avec  leurs  nouveaux  iitr^  la  même  quantité 


de  rentes  :  ropératlon  «  en  grande  partie  réussi.  Depiris 
ce  moment,  la  dette  publique  est  presque  uniRée,  et  10 
service  des  intérêts  se  fait,  non  plus  par  semestre*  mait 
par  trimestre.  Un  autre  résultat  du  gouvernement  de  Na- 
poléon m  a  été  de  démocratiser  la  rente,  surtout  par  les 
divers  emprunts  nationaux  qui  ont  été  contractés  :  la 
rente  n'est  plus  concentrée  entre  un  nombre  restreint  de 
capitalistes,  elle  est  dans  toutes  les  mains.  En  1847,  il 
n'y  avait  que  207,000  rentiers,  dont  les  trois  quarts  à 
Paris;  dès  1854,  on  en  comptait  664,000,  dont  plus  de  la 
moitié  dans  les  départements. 

RENTOILAGE,  opération  par  laquelle  on  enlève  d'une 
toile  pourrie  ou  usée  la  peinture  à  l'huile  qui  la  recou- 
vre, pour  la  transporter  sur  un  fond  neuf.  Au  siècle  der- 
nier, Hacquin  et  Picault,  restaurateurs  de  tableaux, 
imaginèrent  le  procédé  suivant  :  au  mo^en  d'un  encollage 
fait  avec  de  la  farine  de  seigle  bien  cuite  et  une  ou  deux 
gousses  d'ail,  on  couvre  entièrement  le  tableau,  d'abord 
avec  de  la  gaze,  puis  avec  du  papier  fin,  et  ensuite  avec 
du  papier  commun,  ce  qui  se  nomme  cartonnage;  la 
peinture  étant  plus  fortement  fixée  sur  la  nouvelle  su- 
perficie que  sur  l'ancien  fond,  on  retourne  le  tableau,  et 
on  enlève  avec  précaution  la  toile;  si  quelques  parties 
sont  trop  adhérentes,  on  les  use  en  les  frottant  avec 
une  pierre  ponce.  Après  Venlevage,  on  réapplique  par 
une  opération  analogue  la  peinture  sur  un  autre  fond, 
enduit  d'un  mordant,  et  l'on  tamponne  en  allant  toujours 
du  centre  vers  les  bords,  pour  (aire  échapper  l'air  qui 
pourrait  rester  entre  les  toiles  et  y  occasionner  des  bour- 
souflures ;  puis  on  presse  sur  la  toile  neuve  avec  un  fei 
chaud,  ce  qui  rend  la  peinture  plus  adhérente  et  fait  sortir 
l'excédant  de  la  colle.  Il  ne  reste  plus  alors  qu'à  enlever 
le  cartonnage  à  l'aide  d'une  éponge,  et  le  tableau  se 
trouve  rentoilé.  On  procède  à  peu  pr^  de  mftme  pour 
sauver  les  peintures  qui  recouvrent  des  panneaux  ver- 
moulus; mais  souvent  on  amincit  le  bois  avec  de  petits 
rabots,  et,  quand  il  n'en  reste  plus  sur  la  peinture  qu'un 
épiderme  pour  ainsi  dire,  on  l'use  aussi  à  la  pierre  ponce. 
Le  ubleau  de  la  Ckarité,  peint  par  André  del  Sarto  en 
1518,  fut  rentoilé  par  Picault  en  1750;  il  est  an  musée  du 
Louvre.  Le  même  artiste  rentoila  ensuite  le  ^  MirhA  de 
Raphaël.  On  peut  citer  encore  an  autre  tableau  de  ce 
peintre,  la  Vierge  de  Poligno,  que  Hacquin  flb  rentoila 
avec  beaucoup  d'adresse.  B. 

RENTRÉE,  terme  de  Commerce  et  de  Finances,  syno- 
nyme de  recouvrement, 

RENTR^B ,  en  termes  de  Musique,  retour  du  sujet ,  sur^ 
tout  après  un  silence,  dans  une  fugue,  dans  une  imita- 
tion ,  etc.  Une  partie  qui  reprend  après  avoir  été  inter- 
rompue fait  aussi  une  rentrée,  qu'elle  itsproduise  ou  non 
le  sujet.  —  Dans  les  troupes  dramatiques  des  théâtres 
pem^anents,  les  artistes  ne  sont  pas  astreints  aux  trois 
débuts,  quand  ils  ont  été  reçus  l'année  précédente;  ils 
font  une  simple  rentrée^  après  laquelle  le  public  pro- 
nonce sur  leur  admission. 

RENVERSEMENT  DES  ACCORDS.  V,  Accord. 

RENVl ,  en  termes  de  Jeu ,  ce  qu'on  met  par-dessus 
l'enjeu. 

RENVOI,  addition  à  un  corps  d'écriture,  soit  en  mai^, 
soit  à  la  fin.  D'après  la  loi  du  25  ventôse  an  xi,  les  ren- 
vois dans  les  actes  notariés  doivent  être  écrits  en  roar^, 
approuvés,  signés  ou  parafés  chacun  par  l'oflîcier  public, 
les  parties  et  les  témoins  :  le  défaut  d'approbation  em- 
porte la  nullité  des  renvois,  mais  non  celle  de  l'acte  lui- 
même^  Dans  les  actes  sous  seing  privé,  les  renvois  doi- 
vent être  approuvés,  signés  ou  parafa  par  les  parties 
contractantes. 

RENVOI  (Demande  en).  On  appelle  ainsi,  au  dvil ,  les 
conclusions  d'une  partie  qui  demande  que  le  tribunal, 
mai  à  propos  saisi ,  la  renvoie  devant  les  juges  compé- 
tents. Au  criminel,  la  demande  en  renvoi  a  pour  objet 
d'obtenir,  soit  pour  cause  de  sûreté  publique  ou  de  sus- 
picion légitime,  soit  à  défaut  d'un  nombre  suffisant  de 
juges  pouvant  connaître  de  l'affaire,  que  le  jugement  soit 
déféré  à  un  autre  tribunal  :  c'est  la  uhambre  criminelle 
de  la  Cour  de  cassation  qui  statue  en  cette  matière. 

RÉPARATION  D  HONNEUR.  Celui  à  l'honneur  duquel 
on  a  porté  atteinte  n'a  d'autre  moven  légal  d'obtenir  ré- 
paration que  de  s'adresser  à  la  Juridiction  correctionnelle. 

REPARATIONS^  travaux  d'entretien  que  néceositenf 
les  bâtiments.  Les  grosses  réparations,  comme  celles 
des  murs,  des  planchers,  des  couvertures,  sont  à  la  charge 
des  propriétaires.  Les  menues  réparatione  ou  réparations 
locativet,  comme  celles  des  vitres,  des  carreaux,  des 
àtres,  etc.,  incombent  aux  locataires,  à  moins  ^usleâ  dé- 
gradations ne  proviennent  de  Tétusté  ou  de  force 


RÉP 


15»5 


REP 


tenre  ;  on  les  nomme  réparations  viagères  ou  d'mtr&tien, 
quand  elles  sont  à  la  charge  de  Tusufraitier. 

RÉPAiATiONS  CIVILES,  sommo  adjugée  par  an  tribunal  à 
la  partie  civile,  pour  la  dédommager  du  tort  qu'un  crime 
ou  un  délit  lui  a  causé;  —  dommages-intérêts  accordés  à 
an  individu  contre  la  personne  qui  Ta  injustement  ac- 
cusé. Les  réparations  civiles  entraînent  la  contrainte  par 
corps.      

RÉPARTITION,  opération  par  laquelle,  après  que  le 
budget  des  recettes  a  été  voté  par  le  Corps  législatif, 
Tautorité  centrale  répartit  entre  les  départements  la 
somme  à  percevoir.  La  répartition  est  faite  ensuite  par 
l'autorité  départementale  entre  les  arrondissements,  par 
^  l'autorité  d'arrondissement  entre  les  communes,  et  par 
l'autorité  communale  entre  les  individus.  —  En  matière 
de  faillite,  le  Code  de  Commerce  (art.  513)  a  réglé  le  mode 
de  répartition  de  l'actif  mobilier  du  failli  entre  ses  créan- 
ciers. Ceux  d'entre  eux  qui  n'ont  pas  fait  l'affirmation  de 
leurs  créances  ne  sont  pas  admis  au  partage  ;  la  voie  de 
l'opposition  leur  est  ouverte  jusqu'à  la  dernière  distribu- 
tion inclusivement,  mais  ils  ne  peuvent  rien  prétendre 
sur  les  répartitions  consommées.  V,  Failutb,  Distri- 
simoN,  Ordre. 

REPAS.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d*  Histoire. 

RÉPERTOIRE,  en  latin  repertoriwn  (de  repenre, 
trouver),  table,  recueil,  inventaire  où  les  choses,  les 
matières  sont  rangées  dans  un  ordre  qui  permet  de  les 
trouver  facilement.  Le  mot  s'emploie  en  Jurisprudence 
pour  désigner  les  recueils  où  l'on  enregistre  les  arrêts 
mémorables  des  Cours  et  tribunaux:  ainsi,  l'on  a  le 
Répertoire  universel  et  raisonné  de  jurisprudence  par 
Merlin  (1827-28,  18  vol.  in-4»  ou  36  voL  in-8») ,  le 
Répertoire  général  de  législation,  de  doctrine  et  de  juris- 
prudence par  Souquet  (1846,  2  vol.  gr.  in-4*),  le  Réper- 
toire de  la  l^islation  du  notariat  (  1837,  2  vol.  in-4'*), 
et  le  Répertoire  de  la  nouvelle  législation  civile,  commer- 
ciale et  administrative  par  Favard  de  Langlade  (1823, 
5  vol.  in-4*),  etc.  —  Dans  le  Commerce,  on  nomme  Ré- 
pertoire an  livre  tenu  par  ordre  alphabéticfue,  une  table 
des  noms  des  débiteurs  ou  créanciers,  qm  sert  à  trou- 
rer  avec  facilité  sur  le  grand-livre  les  divers  comptes  qui 
y  sont  portés.  —  Les  notaires,  greffiers,  huissiers,  com- 
missaires-priseurs,  ont  un  Répertoire,  registre  sur  lequel 
ils  sont  tenus  d'inscrire  sommairement  et  par  ordre  de 
date  les  actes  qu'ils  reçoivent  ou  rédigent.  —  Dans  le 
langage  du  Thé&tre,  le  Répertoire  est  la  nomenclature  des 
pièces  dont  se  compose  le  fonds  particulier  de  chaque 
théâtre. 

RÉPÉTITEUR,  nom  donné  aux  maîtres  particuliers 
qui  se  chargent  de  répéter  aux  élèves  les  leçons  des  pro- 
fesseurs de  l'enseignement  public,  de  les  exercer,  de  cor- 
riger leurs  devoirs.  Depuis  nn  décret  du  17  août  1853, 
c'est  la  qualification  des  fonctionnaires  des  lycées  qu'on 
appelait  précédemment  maîtres  d'études  ou  maîtres  de 
quartier  :  les  maitres  répétiteurs  doivent  être  pourvus  du 
diplôme  de  bachelier  (k  lettres  ou  es  sciences.  Ils  sont 
chargés  de  surveiller  les  élèves  à  l'étude,  au  réfectoire, 
an  dortoir,  pendant  les  récréations  et  aux  promenades, 
de  les  diriger  et  de  les  aider  dans  leur  travail  ;  ce  n'est 
que  par  exception  qu'ils  donnent  des  répétitions.  Ils 
peuvent  être  appelés  a  faire  les  classes  élémentaires  et  à 
suppléer  les  professeurs  absents.  Ils  sont  de  deux  classes, 
dont  le  traitement  est  de  1,000  fr.  et  de  1,200  fr.;  tous 
sont  log^  et  nourris  an  lycée.  Pour  être  élevé  à  la 
1**  classe,  le  diplôme  de  licencié  est  obligatoire.  C'est 
parmi  eux  que  Ton  prend  les  surveillants  généraux,  aux 
iq>pointements  de  1,400, 1,600  et  1 ,800  fr.  Il  y  a  des  aspi- 
rants répétiteurs,  dont  on  exige  18  ans  d'âge,  le  diplôme 
de  bachelier,  et  ojui  ont  un  traitement  de  700  fr.  Ces 
divers  fonctionnaires  sont  nommés  et  promus  par  le 
ministre  de  l'Instruction  publique,  sur  la  proposition  des 
Proviseurs  et  l'avis  des  R  ct:iurs. 

RÉPÉTITION ,  figure  de  Hhétorique  oui  consiste  à  em- 
ployer plusieurs  fois  les  mêmes  mots  ou  le  même  tour  pour 
donner  plus  d'énergie  à  la  phrase.  Fléchier  dit ,  en  par- 
lant de  la  mort  de  M"**  d'Aiguillon  :  «  Moment  fatal  pour 
tant  de  pauvres,  dont  elle  était  la  protectrice  et  la  mère  I 
Moment  heureux  pour  elle,  qui  entrait  en  possession  de 
l'éternité!  Moment  triste,  mais  utile  pour*nous,  si  nous 
apprenons  à  vivre  et  à  mourir  comme  elle.  »  On  appelle 
Conversion  les  répétitions  faites  symétriquement,  comme 
dans  ces  vers  de  P.  Corneille  relatifs  à  Richelieu  : 


Qa*on  parle  mal  on  blm  da  fameux  cardinal. 
Ma  prose  ni  met  tom  n'en  diront  Jamah  rien  : 


0  mil  ftlt  trop  do  bien ,  pour  en  dire  dn  oial; 
U  m*a  Cftlt  trop  de  mal ,  pour  en  dire  du  bien. 

Les  rhéteurs  distinguent  différentes  sortes  de  Répétition 
par  les  noms  dAnadiplose,  d^Anaphore,  et  d'Anttstrophe 
\V.  ces  mots). 

K^pérmoN  (dn  latin  repetere,  redemander),  en  termes 
de  Droit ,  action  par  laquelle  on  réclame  ce  qu'on  a  donné 
par  erreur,  ce  qu'on  a  payé  de  trop,  ce  qu'on  a  avancé 
pour  un  autre. 

RfréTiTiON ,  leçon  particulière  dans  laquelle  un  profes- 
seur répète  les  exercices  d'une  classe,  pour  les  compléter 
ou  pour  aider  l'élève  à  en  résoudre  les  difficultés. 

Rép^iTioif ,  dans  le  langage  du  Thé&tre,  essai  que  l'on 
fait  d'une  pièce  avant  de  la  représenter  en  public. 

REPIC.  y.  PiQCET. 

RÉPIT,  ancien  terme  de  Droit,  délai  accordé  aux  dé- 
biteurs de  bonne  foi.  U  s'obtenait  en  vertu  de  lettres  de 
la  grande  Chancellerie  ou  par  arrêt  du  Conseil. 

RÉPLIQUE,  en  Musique,  signifie  la  même  chose  qu'oc- 
tave. En  Composition,  on  appelle  aussi  réplique  l'unisson 
de  la  même  note  dans  deux  parties  différentes.  Quand  il 
s'agit  d'une  fugue,  la  réplique  est  la  reprise  du  sujet,  — 
On  appelle  encore  réplique  un  fragment  de  mélodie  pris 
dans  la  partie  récitante  et  écrit  en  petites  notes  sur  une 
partie  secondaire,  pour  signaler  à  celui  qui  ex^ute  celle- 
ci  l'instant  de  la  rentrée  qu'il  doit  faire  après  un  long 
silence. 

RÉPONS,  en  bas  latin  responsorium,  morceau  com* 
posé  de  paroles  empruntées  à  l'Écriture,  et  qu'on  dit  ou 
chante  après  chaque  leçon  des  matines.  Il  est  ainsi  ap- 
pelé, parce  qu'après  le  verset  qui  en  fait  partie  et  que 
chantent  deux  choristes,  le  chœur  répond  en  répétant 
une  certaine  portion  du  morceau  nommée  réclame.  On 
chante  aussi  les  répons  aux  processions,  et  avant  les 
hymnes  des  laudes  et  des  vêpres.  Outre  ces  grands  ré- 
pons, il  y  a  des  répons  brefs  ^  d'un  chant  simple  et  uni- 
forme, qui  sont  chantés  à  Tierce,  à  Sexte,  et  à  Nono. 

RÉPONSE.  V.  FuoDB. 

aiSpONses  de  nsorr,  nom  que  les  Romains  donnaient 
aux  décisions  des  jurisconsultes  sur  les  questions  qui 
leur  étaient  soumises. 

REPORT,  en  termes  de  Comptabilité,  action  de  reporter 
une  somme  ou  total  d'une  page  à  une  autre,  ou  d'un  livre 
à  un  autre.  La  somme  ainsi  reportée  se  nomme  également 
report. 

REPORT,  terme  de  Bourse.  V.  Bourse. 

REPORT  DB  PiULUTB,  fixatlou  de  l'ouvorture  de  la  fail- 
lite à  une  époque  antérieure  au  Jugement  qui  l'avait 
déclarée. 

REPORTERS,  nom  qu'on  donne  en  Angleterre  aux 
écrivains  chargés  de  rendre  compte,  dans  les  Journaux, 
des  séances  du  parlement,  des  audiences  des  cours  et 
tribunaux,  des  meetings  publics  et  des  discours  qu'on  y 
prononce.  Une  classe  inférieure  de  reporters  a  reçu  le 
nom  de  penny-a-liners  (un  sou  la  ligne);  ce  sont  ceux 
qui  recueillent  les  nouvelles  locales  et  fabriquent  ce 
qu'on  nomme  en  France  des  canards. 

REPOSOIR  I  du  latin  repositorium)^  sorte  de  chapelle 
temporairement  élevée  sur  une  place  publique,  dans  une 
rue,  ou  un  carrefour,  et  qui  est  comme  un  lieu  de  repos 
pour  les  processions  de  la  Fête-Dieu.  On  y  dépose  le  S^- 
Sacrement,  et,  après  quelques  prières,  le  prêtre  donne  la 
bénédiction  à  la  foule. 

REPOUSSÉ  (Sculpture  au),  genre  de  travail  qui  con- 
siste à  repousser  au  marteau  des  feuilles  de  métal,  de 
manière  à  leur  donner  la  forme  que  l'artiste  veut  pro- 
duire, et  à  exprimer  à  leur  surface  des  figures  ou  des 
ornements  en  relief.  Ce  procédé  est  quelquefois  désigné 
par  le  nom  de  Sphyrélaton  (d'un  mot  grec  qui  sif;nifie 
étendu  sous  le  marteau).  Il  remonte  à  une  haute  anti- 
quité :  les  objets  métalliques  dont  parle  Homère  sont 
toujours  travaillés  au  marteau.  Le  repoussé  a  été  em- 
ployé princi  paiement  dans  la  confection  des  armures  de 
luxe  et  dans  l'orfèvrerie,  dans  des  bas-reliefs  d'or  ou 
d'argent,  et  Ton  terminait  les  ouvrages  au  clselet. 

REPOUSSOIR ,  outil,  en  forme  de  long  ciseau,  dont  se 
servent  les  sculpteurs  pour  pousser  des  moulures. 

REPOUSSOIR,  en  termes  de  Peinture,  tout  objet  vigou- 
reux de  couleur  ou  très-ombré  qu'on  place  sur  le  devant 
d'un  tableau,  pour  repousser  les  autres  objets  dans  yéloi- 
gnement. 

REPRÉSAILLES,  en  latin  barbare  reprœsalia  (de  re- 
prehendere,  reprendre  ce  qui  a  été  pris),  actes  d'hostilité 
qu'on  État  exerce  contre  un  autre  ou  contre  ses  natio- 
naux, pour  obtenir  la  réparation  de  droits  méconnus 


RÉP 


1556 


RÉP 


Ta  Tiolés,  ou  pour  8*indemiii8er  d*an  dommage  qu'il  a 
éprouvé. 

REPRÉSENTANT,  celui  qui  tient  la  place  d*un  autre, 
et  qui  a  reçu  de  lui  des  pouvoirs  pour  agir  eu  son  nom. 
Les  ambassadeurs  sont  les  représentants  des  souverains 
qui  les  accréditent.  Dans  quelques  Assemblées  législa- 
tives, les  députés  prennent  le  titre  de  représentants  *  il 
en  a  été  ainsi  on  France  à  Tépoque  de  la  Convention, 
pendant  les  Cent-Jours,  et  âpres  la  Révolution  de  1848. 
—  En  Droit,  on  nomme  représentant  celui  qui  est  appelé 
à  une  succession,  du  cbef  d''me  personne  prédécédée  et 
dont  il  exerce  les  droits. 

REPRÉSENTATIF  (  Système),  système  d'organisation 
politique  dans  lequel  la  nation  entière,  ou  seulement 
une  partie  de  la  nation  offrant  plus  de  garanties  de  lu- 
mières et  d'indépendance,  est  appelée  à  élire  des  repré- 
sentants ou  députés,  chargés  de  contrôler  les  dépenses 
publiques,  de  voter  l'impôt,  et  de  concourir  à  la  confec- 
tion des  lois. 

REPRÉSENTATION,  mot  qui  signifie  :  i»  Vexhibitiony 
la  production  d'un  acte  ou  d'une  pièce  quelconque  ; 
2*  l'état  que  tiennent  certains  fonctionnaires,  et  pour 
lequel  une  somme  leur  est  allouée;  3*  l'action  de  jouer 
une  pièce  de  thé&tre,  de  donner  un  spectacle  quelconque. 

Rp.pa^.sBNTATiON  (Droit  de),  en  Jurisprudence,  subro- 
nition  légale  d'un  homme  vivant  à  un  homme  mort. 
r.  Succession. 

REPRiSsRNTATiOFi  NATioNALB,  Hom  géuériquo  SOUS  lequel 
on  désigne  les  Assemblées  représentatives. 

RÉPRIMANDE,  peine  disciplinaire  prononcée  par  les 
Conseils  de  discipline  de  l'ordre  des  avocats,  les  Cham- 
bres des  avoués  et  des  notaires,  les  Conseils  de  discipline 
de  la  garde  nationale,  les  Conseils  académiques  et  le 
Conseil  supérieur  de  l'instruction  publique,  contre  les 
manquements  légers  de  leurs  Justiciables.  Elle  peut  être 
faite  avec  ou  sans  publicité. 

REPRIS  DE  JUSTICE,  celui  qui  a  subi  une  condam- 
nation criminelle.  Quand  il  est  prévenu  d'un  délit,  il  ne 
peut  être  mis  en  liberté  provisoire  dans  le  cas  où  la  loi 
accorde  ce  bénéfice  à  d'autres  accusés. 

REPRISE,  terme  de  Droit.  La  reprise  ^instance  est 
l'acte  par  lequel  on  reprend  un  procès  contre  une  nou- 
velle partie.  On  nomme  reprises  matrimoniales  ce  que 
chacun  des  époux  a  droit,  par  lui  ou  par  ses  représen- 
tants, de  prélever  avant  partage  sur  les  biens  de  la  com- 
munauté qui  a  été  dissoute.  Les  reprises  de  la  femme 
s'exercent  avant  celles  du  mari  ;  en  cas  d'insuffisance  de 
la  communauté,  elle  exerce  ses  reprises  sur  les  biens 
personnels  de  son  époux.  V,  Jousselin,  Des  prélèvements 
et  reprises  de  la  femme  mariée,  1855,  in-8'*;  Tessier,  Le 
droit  de  reprise  de  la  femme,  1857,  in-8®. 

REPRISE,  en  termes  de  Musique,  partie  d'un  moroeau 
qui  doit  être  exécutée  deux  fois.  La  séparation  des  re- 
prises se  marque  par  deux  barres  perpendiculaires  tra- 
cées sur  la  portée  et  accompagnées  latéralement  de  deux 
points  :  lorsque  ces  points  ne  sont  marqués  que  d'un 
côté,  on  ne  répète  que  la  partie  qui  suit  ou  qui  pré- 
cède ,  selon  que  les  points  sont  à  droite  ou  à  gauche  des 
barres. 

REPRISE,  représentation  qu'on  donne  d'une  pièce  de 
théâtre  qui  n'a  pas  été  jouée  depuis  un  certain  temps. 

REPRISE,  se  dit  des  vers  d'un  rondeau,  d'une  ballade, 
d'un  couplet  de  chanson,  que  l'on  reprend,  que  l'on  ré- 
pète pour  refrain. 

REPRIS! ,  commencement  d'une  phrase  de  Plain-Chant 
dont  la  première  note  est  la  même  que  la  dernière  de  la 
phrase  précédente. 

REPRISE,  terme  employé  dans  la  faetnre  des  orgues  et 

f)articulièrement  dans  l'accord  de  certains  Jeux,  tels  que 
a  fourniture,  la  cymbale,  le  plein-Jeu,  le  clairon.  Ces 
Jeux  ne  pouvant,  au  moyen  de  la  progression  ordinaire, 
atteindre  l'acuité  des  dessus  d'un  clavier  de  54  notes  par 
exemple,  à  cause  de  la  petite  dimension  de  leurs  tuyaux 
et  de  leur  intonation  élevée,  on  reprend  plusieurs  fois 
dans  le  cours  de  la  succession  des  notes  l'intonation  de 
l'octave  précédente,  et  on  arrive  par  ce  moyen  à  la  der- 
nière note  aigué  du  clavier.  C'est  ainsi  que  le  clairon  de 
4  pieds  parlant  difficilement  à  partir  de  la  3*  octave,  on 
fait  une  reprise  de  cette  octave  pour  former  la  4*  et 
compléter  les  dessus,  de  telle  sorte  que  ces  derniers 
tuyaux  se  trouvent  à  l'unisson  de  ceux  de  la  trompette 
de  8  pieds  auxquels  ils  donnent  par  ce  moyen  plus  de 
rondeur  et  d'éclat.  F.  C. 

RÉPROBATION ,  en  termes  de  Théologie,  Jugement 
par  lequel  Diou  exclut  un  pécheur  du  bonheur  éternel , 
et  le  condamne  aux  supplice*  «^>,  l'Enfer. 


RÉPUBLIQUE  (du  latin  res  publica,  la  choie  pu- 
blique), mot  qui,  s'appliquant  à  une  forme  de  gouverne- 
ment, désigne,  dans  son  sens  le  plus  général,  un  gou- 
vernement à  la  tête  duquel  un  monarque  n'est  pas  placé. 
Ce  gouvernement  peut  reposer  sur  des  principes  divers: 
ainsi,  un  peuple  dirigé  par  un  corps  sacerdotal  est  con- 
stitué en  république  théocratique  ;  Sparte,  régie  par  uo 
Sénat,  fut  une  république  aristocratique .  au  moyen  &ge, 
Venise  forma  une  république  oligarchique  (K.  Thkocra- 
T1E,  Aristocratie,  Ougarchib);  Athènes,  où  le  pouvoir 
était  exercé  par  rassemblée  du  peuple,  était  une  répti- 
blique  démocratique  (V.  Dknocratir).  L'ancienne  Rome 
eut  un  gouvernement  républicain  mixte,  renfermant  tout 
à  la  fois  des  éléments  aristocratiques  et  des  éléments 
démocratiques.  Dans  les  temps  modernes,  les  Provlnc^cs- 
Unies,  sous  le  gouvernement  des  stathoudcrs,  avalant 
encore  un  système  républicain  d'une  nature  particulière. 
La  Suisse  et  les  États-Unis  de  TAmér  que  du  Nord  for- 
ment des  républiques  démocrati  :ues  fédératives,  c.-à-d. 
composées  de  cantons  et  d'États  indi'pendduts  quant  à 
leur  souveraineté  intérieure,  mais  unis  les  uns  aux  au- 
tres par  un  lien  fédéral,  tandis  que  la  Répultlique  fran- 
çaise, en  1792  et  en  1849,  a  été  une  et  indivisible.  Dans 
une  république  démocratique  d'une  certaine  étendue,  le 
gouvernement  est  nécessairement  représentatif,  c-à-d. 
que  chaque  citoyen,  ne  pouvant  exercer  directement  son 
droit  de  souveraineté,  le  délè^oie  à  des  repn^Nentants 
dont  la  réunion  forme  l'assemblée  nationale.  En  Franre, 
au  temps  du  Directoire,  le  pouvoir  législatif  fut  partagé 
entre  deux  corps  également  électifs,  le  Conseil  des  An- 
ciens et  le  Conseil  des  Cinq  cents;  il  en  est  ainsi  aux 
États-Unis,  qui  possèdent  un  Sénat  et  une  Chambre  des 
représentants  :  cette  division  du  pouvoir  a  été  regardée 
comme  une  garantie  d'ordre  et  de  maturité  des  délibé- 
rations. Le  pouvoir  exécutif  peut  émaner,  soit  de  l'As- 
semblée nationale,  comme  on  le  vit  en  France  au  temps 
de  la  Convention  et  du  Consulat,  soit  directement  du 
peuple  par  le  suffrage  universel,  comme  aux  États-Unis, 
et  dans  la  République  française  de  1848.  Ce  pouvoir  peut 
être  exercé  collectivement  par  plusieurs  citoyens,  ou 
confié  à  un  seul  ma:4strat,  appelé  Président  :  le  premier 
système  fut  en  vigueur  pendant  la  Convention,  le  Direc- 
toire, et  le  Consulat;  le  second,  appliqué  en  France  en 
1848,  a  toujours  été  adopté  aux  États-Unis.  La  base  de 
toute  république  démocratique  est  le  sufi'rage  universel. 

Cicéron  signalait,  dès  l'antiquité,  les  écueils  des  répu- 
bliques démocratiques  :  «  Lorsque  Tardeur  du  peuple 
s'est  enflammée  d'une  soif  intarissable  d'indépendance,  et 
que,  servi  par  des  complaisants  pervers,  il  a  bu  avide- 
ment la  coupe  remplie  de  libt^rté  sans  mélange,  alors  si 
ses  magistrats  et  ses  chefs  ne  sont  tout  à  fait  mous  et 
obéissants,  »\\s  ne  lui  versent  à  flots  la  lil^erté,  il  les 
poursuit,  les  incrimine,  les  accuse,  il  les  appelle  domi- 
nateurs, rois,  tyrans.  »  La  courte  durée  du  pouvoir, 
incessamment  renouvelé  par  l'élection,  encourage  les 
ambitieux,  et  fait  naître  les  flatteurs  des  peuples.  1^ 
multitude  choisit  trop  souvent,  en  haine  de  toutes  les 
supériorités,  des  chefs  nouveaux,  hardis,  acharnés  contre 
tout  ce  qui  est  grand.  On  ne  tarde  point  à  passer  de  la 
démocratie  à  la  démagogie,  et  l'on  ne  sort  de  celle-ci  que 
par  le  despotisme.  Loi  publicistes  n'hésitent  pas  à  re- 
connaître que  la  république  exige  des  citoyens  un  assem- 
blage bien  rare  de  qualités,  désint(^ressement,  instruction, 
patriotisme  à  toute  épreuve,  respect  absolu  de  Ul  loi, 
obéissance  aux  magistrats,  etc.  a  II  ne  faut  pas  beaucoup 
do  probité ,  disait  Montesquieu ,  pour  qu'un  gouverne- 
ment monarchique  ou  un  gouvernement  despotique  se 
maintiennent  ou  se  soutiennent.  La  force  des  lois  dans 
l'un,  le  bras  du  prince  toujours  levé  dans  Tautre,  règlent 
ou  contiennent  tout.  Mais,  dans  un  État  populaire,  il  faut 
un  ressort  de  plus,  la  vertu.  »  J.-J.  Rousseau  a  dit  à  son 
tour  :  M  Que  de  choses  diiliciles  à  réunir  ne  suppose  pas 
ce  gouvernement!  Premièrement,  un  État  très-petit,  où 
le  peuple  soit  facile  à  rassembler,  et  où  chaque  citoyen 
puisse  aisément  connaître  tous  les  autres  ;  secondement, 
une  grande  simplicité  de  mœurs,  qui  prévienne  la  mul* 
titude  d'affaires  et  les  discussions  épineuses;  ensuite, 
beaucoup  d'égalité  dans  les  rangs  et  dans  les  fortunes, 
sans  quoi  l'égalité  ne  saurait  subsister  longtemps  dans 
les  droits  et  Tautorité;  enfin,  peu  ou  point  de  luxe;  car, 
ou  le  luxe  est  l'efi'et  des  richesses,  ou  il  les  rend  nfei'S- 
saires;  il  corrompt  à  la  fois  le  riche  et  le  pauvre,  l'un 
par  la  possession,  l'autre  par  la  convoitise  ;  il  vend  la 
patrie  à  la  mollesse,  à  la  vanité;  il  ôte  à  l'État  to<is  ses 
citoyens  pour  les  asservir  les  uns  aux  autres,  et  tous  à 
l'opinion...  Ajoutons  qu'il  n'y  a  paa  de  gouvernement  d 


RÉP 


1557 


RÉS 


iajet  tan  gaerres  dviles  et  aux  agitations  intestines, 
parce  qu*il  n*y  en  a  aucun  qui  tende  si  fortement  et  si 
continuellement  à  changer  de  forme,  ni  qui  demande 

{)Ius  de  vigilance  et  de  courage  pour  être  maintenu  dans 
a  sienne...  S*il  y  avait  un  peuple  de  dieui,  il  se  gouver- 
nerait démocratiquement;  un  gouvernement  si  parfait 
ne  convient  pas  à  des  hommes  n  {Contrat  social ,  III,  4). 
népuBLiQUB  (Traité  de  la).  Nous  possédons  trois  ou- 
vrages célèbres  qui  portent  le  litre  de  République,  et 
dont  les  auteurs  sont  Platon,  Cicéron,  et  Bodin.  L'ouvrage 
de  Platon  est,  à  proprement  parler,  une  utopie  :  le  phi- 
losophe grec  bâtit  sa  république  sur  le  plan  de  sa  psy- 
chologie; distinguant  dans  T&me  un  élément  raisonnable, 
un  élément  irascible,  et  un  élément  sensuel  ou  pas- 
sionné, il  partage  TÉtat  en  trois  ordres  qui  leur  corres- 
pondent, à  savoir:  les  jti^es,  qui  gouvernent;  les  guerriers, 
qui  défendent  TÉtat;  le  peuple,  livré  aux  travaux  de 
Tagriculture  et  de  Tindustrie.  Dos  quatre  vertus  que 
comprend  la  Morale  de  Platon,  la  prudence  est  le  par- 
tage des  Juges,  le  courage  est  Tapanage  des  guerriers, 
la  tempérance  règle  Taccord  des  classes  supérieures  et 
inférieures,  la  justice  veille  à  ce  que  chaque  ordre  Joue 
le  rôle  qui  lui  appartient.  De  même  enfin  que  Platon 
compte  cinq  états  de  Tàme,  dont  Van  est  sain  et  les 
quatre  autres  dépravés,  de  même  il  distingue  cinq  gou- 
vernements ou  états  de  la  société  :  les  quatre  mauvais 
'  sont  la  timocratie,  ïoligarchie,  la  démocratie,  et  la  ty^ 
rannie^  qui  correspondent  à  Tétat  moral  de  VambitietLX, 
de  l'avare,  du  passionné,  et  du  coléreux;  le  bon  est 
VaristorreUie  ou  gouvernement  des  sages,  de  même  que 
rhommn  le  plus  heureux  est  celui  qui  obéit  à  la  raison. 
Partant  de  Tinégalité  nécessaire  et  éternelle  des  hommes, 
Platon  les  divise  en  castes  qu'il  subordonne  les  unes  aux 
autres.  A  Tharmonie  idéale  qu'il  cherche  à  établir,  il  sa- 
crifie complètement  l'individu  :  il  anéantit  en  lui  tout 
désir  qui  n'a  pas  pour  objet  le  bien  de  la  république;  il 
détruit  la  propriété,  le  mariage,  la  liberté  civile  et  poli- 
tique. Tous  les  biens  appartiennent  à  la  république; 
toutes  les  femmes  sont  communes;  les  enfants  sont  les 
enfants  de  l'État,  et  nul  n'a  le  droit  de  les  regarder 
esmme  siens.  Platon  voulait  par  là  reporter  sur  la  chose 
publique  toute  l'activité  individuelle  et  en  faire  l'unique 
passion,  l'unique  amour.  —  La  République  de  Cicéron  ne 
nous  est  point  parvenue  en  entier  :  longtemps  on  n'en 
connut  que  le  fameux  Songe  de  Scipion  qui  la  terminait, 
et  quelques  passages  cités  par  les  anciens  auteurs;  en 
182*2,  Angelo  Mai  retrouva,  sur  un  manuscrit  palimpseste, 
le  l*'  livre  presque  entier,  un  long  fragment  du  2*,  quel- 
ques parties  du  3*,  du  4*  et  du  5*.  L'ouvrage  avait  pri- 
mitivement 9  livres,  qui  furent  ensuite  réduits  à  6.  L'au- 
teur suppose  que,  pendant  les  Fériés  latines,  Scipion 
Émilien,  Lélius,  Fannius,  Tubéron,  Scévola  et  d'autres, 
discutent  sur  la  meilleure  forme  do  gouvernement.  Les 
interlocuteurs  cherchent  quelles  sont  les  conditions  de  la 
vie  politique,  comment  une  nation  doit  être  constituée 
pour  devenir  et  demeurer  puissante;  ils  signalent  les 
causes  de  la  grandeur  de  Rome,  et  les  moyens  de  sus- 
pendre une  décadence  dont  les  symptômes  commençaient 
à  se  révéler.  Cicéron  n'a  donc  point  foit  une  utopie;  son 
but  était  tout  patriotique.  —  Dans  sa  République^  publiée 
en  1570,  Jean  Bodin  examine  les  diverses  sortes  de  gou- 
vernements que  l'histoire  des  nations  nous  présente, 
s'eflorce  de  fiier  leurs  principes  et  leurs  caractères,  et, 
sans  en  condamner  aucun,  hormis  ceux  qui  sont  exces- 
sifs, tels  que  la  tyrannie  et  l'anarchie,  laisse  voir  son 
penchant  pour  la  monarchie  tempérée  par  des  lois.  Au 
lieu  d'adopter,  comme  avait  fait  Machiavel,  pour  principe 
de  la  politique  l'intérôt  des  princes,  il  prend  pour  point 
de  départ  l'intérêt  général  de  la  communauté.  La  néces- 
sité du  consentement  des  sujets  pour  lever  des  subsides, 
et  l'inaliénabilité  du  domaine  royal,  lui  paraissent  des 
garanties  des  libertés  publiques.  Il  met  la  famille  et  la 
propriété  au-dessus  du  gouvernement,  et  attaque  le  com- 
munisme de  Platon,  de  Thomas  Morus,  et  des  Anabap- 
tistes. Il  blAme  l'altération  des  monnaies  et  la  vénalité 
des  charges.  Il  conseille  d'alléger  les  droits  d'entrée  sur 
les  articles  dont  le  peuple  ne  peut  guère  se  passer,  mais 
de  les  faire  peser  sur  les  produits  manufacturés,  afin  de 
forcer  le  peuple  à  se  livrer  à  l'industrie.  11  veut  le  moins 

Eossible  d'impôts  directs,  mais  il  demande  une  contri- 
ution  sur  les  objets  de  luxe  et  sur  le  revenu.  Il  s'étonne 
que  l'impôt  ne  pèse  que  sur  le  peuple,  et  que  la  noblesse 
et  le  clergé  en  soient  exemptés.  Enfin  il  se  montre  parti- 
san de  ta  liberté  du  commerce. 

RÉPUDIATION.  V.  ce  mot  dans  notre  Dietionnawê  de 
Biographie  et  d'Histoire. 


REQUÊTE  (du  latin  requisitum,  venant  derequirere, 
réclamer  ),  demande  par  écrit  présentée  suivant  certaines 
formes  établies  k  un  tribunal  ou  à  un  magistrat.  On 
donne  le  même  nom  aux  Mémoires  fournis  par  les  avoués 
dans  les  causes  qui  sont  instruites  par  écrit,  et  à  l'acte 
par  lequel  une  partie  condamnée  par  défaut  forme  oppo- 
sition motivée  au  jugement  rendu  contre  elle.  La  ne- 
qitéte  civile  est  une  voie  ei^traordinaire  employée  pour 
obtenir  la  rétractation  d'un  Jugement  rendu  en  dernier 
ressort,  en  démontrant  au  tribunal  même  dont  il  éihane 
qu'il  a  commis  une  erreur  ;  elle  doit  être  précédée  d'une 
consultation  fournie  par  trois  avocats,  et  le  Code  de  Pro- 
cédure  civile  (art.  480  et  suiv.)  en  a  déterminé  les  cas  et 
la  forme. 

REQUÊTES  (Chambre  des).  V.  Cassatiou  (Cour  de). 

REQUETES  (Maîtres  des).  F.  notre  Dictionnaire  de  Bik*» 
graphie  et  d'Histoire, 

REQUIEM  (accusatif  du  mot  latin  requies,  repos),  nom 
donné  à  la  Messe  des  morts,  parce  que  l'introït  de  cette 
messe  commence  par  les  mots  suivants  :  Requiem  œter" 
nom  dona  eis.  Parmi  les  messes  de  Requiem  en  musique, 
on  distingue  celles  de  Palestrina,  de  Jommelli,  de  Mo- 
zart, de  Winter,  de  Cherubini,  de  Vogler,  de  Neukonim« 
de  Berlioz,  etc. 

RÉQUISITION  (du  latin  rêquirere,  demander),  en 
termes  de  Droit,  demande  incidente  formée  à  l'audience, 
par  le  ministère  public  ou  par  les  parties,  pour  obtenUr 
acte  d'une  assertion  ou  d'un  fait  articulé  dians  les  plai- 
doiries, apport  au  greffe  ou  communication  d'une  pièce* 

RÉQUISITION,  acte  de  requérir  pour  le  service  public, 
soit  des  hommes,  soit  des  denrées  et  autres  objets  ap- 
partenant à  des  particuliers.  V.  R^Quismon,  dans  notre 
Dictionnaire  de  biographie  et  d'Histoire, 

RÉQUISITOIRE,  acte  écrit  contenant  une  réquisition, 
et,  spécialement,  demande  faite  à  une  Cour  ou  à  un  tri- 
bunal par  le  Ministère  public 

RESQSION  (du  latin  rescindere,  retrancher,  annuler), 
en  termes  de  Droit,  annulation  d'un  acte.  Une  action  en 
rescision  doit  reposer  sur  des  vices  radicaux  de  l'acte 
attaqué,  tels  que  la  violence^  le  dol,  Verreur,  la  fraude , 
la  lésion.  Elle  est  arrêtée  par  la  prescription  deux  ans 
après  la  date  de  l'acte,  à  moins  qu'elle  n'ait  été  inter- 
rompue pour  cause  de  minorité  du  poursuivant.  Les 
moyens  employés  pour  obtenir  la  rescision  sont  dits  res* 
cindants,  et  la  décision  obtenue  en  vertn  de  ces  moyens 
est  dite  rescisoire.  La  rescision  peut  être  demandée  : 
1^  par  les  mineurs  non  émancipés,  pour  simple  lésion 
dans  toute  convention  qui  excède  les  bornes  de  leur  ca- 
pacité; 2<*  par  les  vendeurs  d'immeubles,  pour  dol  ou 
fraude  lors  de  la  vente,  ou  pour  lésion  d'outre  moitié; 
3*  par  les  cohéritiers  d'une  succession  à  l'occasion  du 
partage,  pour  Iteion  de  plus  d'un  quart.  Dans  ce  dernier 
cas,  le  défendeur  à  la  demande  en  rescision  peut  en  ar- 
rêter le  cours,  en  offirant  et  en  fournissant  au  demandeur 
le  supplément  de  sa  portion  héréditaire,  soit  en  nature, 
soit  en  numéraire,  les  objets  étant  estimés  suivant  leur 
valeur  à  l'époque  du  partage. 

RESCRIPTION ,  mandement  par  écrit  que  l'on  donne 
pour  toucher  une  somme  sur  quelque  fonds,  sur  quelque 
personne.  Avant  1789,  les  rescript  ions  étaient  des  man- 
dats fournis  par  les  receveurs  généraux  à  l'ordre  du  Tré- 
sor public.  En  1705,  on  appela  rescriptions  les  billets 
d'État  substitués  aux  assignats,  et  ayant  comme  eux  hy- 
pothèque sur  les  domaines  nationaux. 

RESCRIT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio» 
graphie  et  d'Histoire, 

RÉSEAU,  en  termes  d'architecture,  broderie  do  tympan 
d'une  fenêtre  ogivale. 

RÉSERVE,  nom  donné,  dans  le  langage  militaire t 
1^  à  tout  corps  de  troupes  momentanément  distrait  d'une 
armée  par  le  général  en  chef,  pour  suppléer  à  l'insuffi- 
sance des  premiers  corps  qui  ont  été  engagés,  et  se 
porter  aux  endroits  qui  ont  besoin  de  secours;  2°  à  la 
partie  des  forces  militaires  d^un  État  qui  reste  dans  ses 
foyers ,  et  qu'on  peut  appeler  sous  les  drapeaux  quand 
les  circonstances  l'exigent.  On  appelle  cadre  de  réserve, 
par  opposition  au  cadre  d'activité ,  un  cadre  sur  lequel 
sont  portés  les  intendants  militaires  et  les  généraux  de 
brigade  à  62  ans,  les  généraux  de  division  et  les  contre- 
amiraux  à  G5 ,  les  vice-amiraux  à  68  :  ces  officiers  géné- 
raux reçoivent  les  3/5  de  leur  solde,  et  ne  peuvent  plus 
être  employés  qu'en  temps  de  guerre.  Un  général  de  di- 
vision est  maintenu  au  cadre  d'activité,  s'il  a  commandé 
un  corps  d'armée,  ou  du  moins  l'artillerie  et  le  génie 
dans  une  armée  composée  de  plusieurs  corps. 

RéSBRVB,  en  termes  de  Utuigie,  saintes  espèces  qee 


RES 


1558 


RES 


roB  oomenre  pour  la  communioa  des  malades  et  celle 
des  fidèles  communiant  aux  messes  où  Ton  n'a  pas  con- 
sacré de  petites  hosties.  Les  vases  servant  à  conserver  les 
hosties,  avant  Tiavention  des  tabernacles,  s'appelaient 
aussi  réserves. 

aéSBRVB,  terme  de  l'ancien  Droit.  V*  notre  Diciioii- 
naire  de  Biographie  et  d* Histoire, 

R&SBRVB  L^GALB.    V.  QuOTrrtf  DISPONIBLB. 

RKSERVOIR,  récipient  destiné  à  tenir  en  réserve  une 
quantité  d'eau  plus  ou  moins  considérable.  S*il  est  [)ra- 
tiqué  dans  un  corps  de  b&timents ,  il  consiste  ordinaire- 
ment en  un  bassin  revêtu  de  plomb;  en  plein  air,  c'est 
un  bassin  de  forte  maçonnerie,  avec  un  double  mur  ap- 
pelé mur  de  douve,  et  glaise  ou  pavé  dans  le  fond.  Il  y  a 
de  très-vastes  réservoirs  dans  l'Inde  (K.  Indibn  — Art). 
Le  château  de  Versailles  en  a  un,  revêtu  de  lames  de 
cuivre  étamé,  soutenu  par  30  piliers  de  pierre,  et  qui  con- 
tient 1270  hectolitres.  Le  réservoir  de  Sorèze  a  1,559  mèL 
de  longueur,  780  met.  de  largeur,  et  33  met.  de  profon- 
deur. 

RES  FAGTA,  c-à-d.  en  latin  chose  faite;  on  appelait 
ainsi  au  moyen  &ge  la  musique  écrite,  par  opposition  au 
déchcMt  (  V.  ce  mot)  qu'on  improvisait  au  lutrin. 

RÉSIDENCE  (du  latin  residère ,  être  assis,  demeurer), 
demeure  ordinaire  et  habituelle  d'une  personne.  Elle 
diffère  quelquefois  du  domicile,  qui  est  la  demeure  lé- 
gale. L^  maires  délivrent  des  certificats  de  résidence 
dans  le  cas  où  il  s'agit  d'avoir  la  preuve  des  6  mois  de 
résidence  qui  établissent  le  domicile,  avant  de  procéder 
à  la  célébration  du  mariage.  —  Résidence  se  dit  aussi  du 
Béjour  actuel  et  obligé  d'un  évêque,  d'un  préfet,  d'un 
magistrat,  d'un  administrateur,  etc. ,  dans  le  lieu  où  ils 
exercent  leurs  fonctions.  Le  concile  de  Trente  a  ordonné 
la  résidence  à  tous  les  ecclésiastiques  qui  ont  charge 
d'&mcs. 

RÉSIDENT  (Ministre),  agent  dip1omati({ue  de  3*  rang, 
accrédité  auprès  d'un  Etat  de  médiocre  importance.  Il 
n'a  pss  droit  à  la  qualification  d'Excellence,  qui  appar- 
tient aux  ambassadeurs  et  aux  envoyés  extraordinaires. 

RÉSIGNATION,  entière  soumission,  sacrifice  absolu 

de  sa  volonté  à  celle  d*un  supérieur  ou  de  Dieu.  —  En 

1  Droit,  c'est  un  abandon  de  biens  ou  de  droits  en  faveur 

de  quelqu'un,  ou  la  démission  d'une  charge,  d'un  office, 

d'un  bénéfice. 

RÉSILIATION  (du  latin  resUire,  sauter  en  arrière,  se 
retirera,  annulation  d'un  acte.  En  matière  de  vente,-  il  y 
a  lieu  ^  résiliation  quand  l'acquéreur  est  victime  d'une 
éviction  assez  considérable  pour  qu'il  n'eîkt  point  acheté 
s'il  eût  pu  la  prévoir,  ou  quand  le  fonds  se  trouve  grevé 
de  servitudes  non  apparentes  et  qui  n'ont  pas  été  décla- 
rées par  le  vendeur.  Les  baux  sont  soumis  à  de  nom- 
breuses causes  de  résiliation  {V,  Rail).  La  résiliation 
d'un  marché  à  forfait  a  lieu  par  la  seule  volonté  du 
maître,  à  charge  par  lui  d  indemniser  l'entrepreneur  de 
•es  dépenses  et  de  ce  qu'il  aurait  pu  gagner  dans  l'entre- 
prise. V,  Rescision. 

RÉSILLE,  ensemble  des  filets  de  plomb  qui  réunissent 
les  verres  d'une  fenêtre. 

RÉSOLUTION,  en  termes  de  Droit,  annulation  d'un 
contrat  par  Jugement.  C*est  une  peine  que  la  loi  prononce 
contre  celle  des  parties  qui  manque  à  ses  obliptions. 
L'action  résolutoire  est  celle  qui  a  pour  but  de  faire  pro- 
noncer la  résolution. 

aïteoLDTiOFi ,  en  termes  de  Musique,  chute  d'un  inter- 
iralle  on  d'un  accord  dissonant  sur  un  intervalle  ou  un 
accord  consonnant.  Elle  s'opère  en  faisant  descendre 
d'un  degré  le  son  dissonant. 

RÉSOLUTION  (Méthode  de).  V.  Analtsb. 

RESPECT  HUMAIN ,  crainte  qu'on  a  des  discours  et 
du  Jugement  des  hommes. 

RESPECTUEUX  (Acte).  V.  Mariage. 

lŒSPONSABILITÉ ,  obligation  de  répondre  de  ses 
actes.  Tonte  sanction  des  lois  divines  et  humaines  a  pour 
base  la  responsabilité  morale  de  l'homme,  et  celle-ci  est 
kt  conséquence  naturelle  de  la  liberté.  On  nomme  re^- 
ponsabilUé  cimle  l'obligation  imposée  à  chacun  par  la  loi 
ie  répondre  du  dommage  qu'il  a  causé  à  un  tiers ,  lui 
on  les  personnes  qui  sont  sous  sa  dépendance,  ou  les 
choses  qui  Ini  appartiennent,  qui  sont  sous  sa  garde 
(V,  Sourdat,  Traité  gériéral  de  (a  responsabilité,  1852, 
S  vol.  in-8®).  Les  officiers  ministériels  sont  responsables 
envers  les  parties  dont  ils  ont  compromis  les  intérêts 
ipar  leur  faute.  Quant  à  la  responsabilité  des  agents  du 

Kuvemement,  ils  ne  peuvent  être  poursuivis  pour  des 
its  relatifs  à  leurs  fonctions  qu'en  vertu  d'une  décision 
éa  fimfiemiaent.  JAveiponBabilité  dea  ministres  diffère 


selon  que  l'État  est  absolu  ou  constitationnel  :  dans  le 
premier  cas,  les  ministres  ne  sont  responsables  qu'en- 
vers le  prince,  et  doivent  obéir  sans  restriction  à  ses 
ordres  ;  dans  le  second,  outre  la  responsabilité  à  l'égard 
dn  prince,  ils  en  ont  une  autre,  plus  importante  dans  la 
pratique,  à  l'égard  de  la  Représentation  nationale,  et 
peuvent  être  attaqués,  pour  tous  les  actea  du  gouverne- 
ment, au  lieu  du  prince  lui-même,  déclaré  irresponsable. 
En  France  depuis  1815  jusqu'en  1848,  un  Ministère  dont 
la  politique  était  blftmée  par  la  majorité  de  la  Représen- 
tation nationale  cédait  la  place  à  d'autres  hommes;  il  en 
est  toujours  ainsi  en  Angleterre.  Quand  il  s'a^t  de 
mettre  des  Ministres  en  accusation ,  c'est  d'ordinaire  la 
Chambre  élective  qui  exerce  ce  droit,  et  l'autre  Chambre 
qui  juge  ;  quelquefois  il  faut  le  concours  des  deux  Cham- 
bres, ou  bien  une  Cour  spéciale  instruit  l'affaire  et  pro- 
nonce. En  Angleterre,  l'accusation  n'est  admise  qu'à 
raison  d'actes  qui  tombent  réellement  sous  le  coup  de  la 
loi  pénale;  aux  Étata-Unis,  où  l'accusation  a  un  champ 
beaucoup  plus  large  et  s'étend  aux  simples  fautes  d'ad- 
ministration, tout  se  borne  à  faire  perdre  son  emploi  au 
ministre  reconnu* coupable  et  à  l'exclure  à  l'avenir  des 
fonctions  publiques. 

RESPONSAIRE  ou  RESPONSORIAL.  V.  AmnraoNAiRE. 

RESSAUT ,  en  termes  d'Architecture,  toute  partie  de 
construction  qui  se  projette  en  dehors  de  la  ligne  hori- 
zontale et  fait  une  saillie  sur  cette  ligne. 

RESSAVIQUE  (Idiome).  K.  Srrbb. 

RESSORT,  étendue  du  territoire  dans  lequel  nn  tri- 
bunal exerce  sa  juridiction,  ou  un  officier  public  ses 
fonctions.  Ressort  se  dit  aussi  des  degrés  de  juridiction  : 
un  arrêt  en  dernier  ressort  est  un  arrêt  non  susceptible 
d'appel  (V.  Appel). 

RESTAURANT.  V,  ce  mot  dans  notre  Dicftomuitre  de 
Biographie  et  d'ffistoire. 

RESTAURATION ,  action  de  rétablir  une  chose  dans 
son  état  primitif.  En  Politique,  une  Restauratum  est  le 
retour  à  un  régime  qui  avait  été  détruit,  le  rétablisse- 
ment de  dynasties  et  de  principes  renversés  par  des  ré- 
volutions (  V,  Restauration,  dims  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire),  Les  Restaurations  sont  des 
événements  funestes  pour  les  peuples  :  outre  qu'elles  sont 
accompagnées  de  réactions  et  de  représaillea,  elles  ne 
peuvent  réussir,  parce  qu'elles  sont,  plus  ou  moins,  un 
pas  en  arrière,  et  que  l'humanité  n'aime  pas  à  reculer.. Si 
une  société  est  arrivée  à  son  extrême  décadence,  c'est  une 
transformation  qu'il  lui  faut,  et  non  la  Restauration  d'une 
famille  princière.  Les  Restaurations  de  France  et  d'An- 
gleterre n'ont  abouti  l'une  et  l'autre  qu'à  une  nouvelle  et 
définitive  révolution.  Le  rétablissement  de  l'Empire  en 
1852  n'a  point  été  une  Restauration,  mais  la  consomma- 
tion de  la  ruine  de  la  Restauration  bourbonienne,  et  la 
prise  de  possession  définitive  de  la  Révolution  de  1789. 
—  Le  mot  Restauration  est  d'un  emploi  très-fréquent  dans 
la  langue  des  Beaux-Arts.  En  Architecture,  il  s'applique 
aux  réparations  que  l'on  fait  à  de  grands  monuments,  teb 
que  les  églises  et  les  palais.  Trop  souvent  on  détruit  sous 
prétexte  de  restaurer,  lorsque,  par  exemple,  on  recouvre  de 
badigeon  les  monuments  anciens,  ou  quand  on  fait  dispa- 
raître sous  des  couches  de  peinture  les  plus  fines  sculp- 
tures. Les  élèves  architectes  qui  ont  obtenu  le  grand  prix 
de  l'Académie  sont  obligés,  durant  le  temps  de  leur  pen- 
sionnat à  Rome,  de  restituer,  de  recomposer  par  l'étude 
et  par  des  conjectures  raisonnées  quelque  édifice  en 
ruines,  et  ce  travail  se  nomme  aussi  une  restauration. 
Dans  la  sculpture,  une  restauration  consiste  soit  à  ré- 
unir certaines  parties  brisées  et  séparées,  soit  à  réparer 
des  parties  mutilées,  soit  enfin  à  restituer  des  parties 
dont  il  ne  reste  rien.  Parmi  les  sculpteurs  oui  s'enten- 
dirent le  mieux  en  restaurations,  on  cite  Guillaume  délia 
Porta,  Sansovino  Tatta,  François-Jean  Agnolo,  Pierre 
Tacca,  Salvetti ,  etc.  ;  Michel-Ange  a  restitué  le  bras  élevé 
du  groupe  de  Laocoon,  Restaura  un  tableau,  c'est  réta- 
blir quelques  parties  enlevées,  remplir  les  craguelures, 
repiquer  les  points  où  la  toile  se  trouve  à  nn,  ndre  dis- 
paraître une  déchirure  ou  un  trou  par  le  marouflage,  etc. 
Les  restaurations  de  tableaux  à  l'aide  du  pinceau  exigent 
une  connaissance  approfondie  des  procédés  employés  dans 
les  différentes  écoles  de  peinture,  et  uue  longue  expé- 
rience pour  prévoir,  dans  le  choix  et  l'emploi  des  cou- 
leurs, ce  que  le  temps  peut  apporter  de  changement 
dans  les  teintes  nouvelles.  Le  rentoUage  (  V,  ce  mot) 
est  aussi  un  procédé  de  restauration.  La  restauration 
d'une  gravure  consiste  à  la  recoller  avec  assez  d'adresse 
pour  faire  disparaître  les  déchirures,  à  remettre  une 
petite  pièce  dans  les  anglea,  à  boucher  lea  trooa  da  nrsv 


RES 


1559 


RES 


à  donner  au  nouveau  papier  la  teinte  de  l'estampe,  a  re- 
faire quelques  tailles,  etc. 

RESTAURATION  DBS  SGENCES  (  Grands)  ,  ouvrage 
du  chancelier  Bacon,  plan  général  pour  Tétude  métho- 
dique, et,  par  suite,  le  progrès  de  toutes  les  sciences  hu- 
maines. 11  rintitula  ainsi ,  parce  que  les  méthodes  alors 
en  usage  lai  paraissaient,  avec  raison,  essentiellement 
vicieuses ,  manquer  de  fondement/  et  ne  tendre  qu*à  une 
stérile  satisfaction  de  notre  curiosité.  Bacon  voulait  une 
Kiencê  active,  c.-à-d.  qui  eût  pour  but  et  résiiltat  le  bien- 
être,  la  prospérité,  la  grandeur  de  la  race  humaine;  enfin 
ano  science  dont  découleraient  des  axiomes  qui ,  expri- 
mant les  lois  mêmes  de  la  nature  des  choses ,  permet- 
traient à  l'homme  d'approcher  le  plus  possible  de  cette 
nature,  et  de  la  soumettre  à  son  empire.  Les  moyens  qu'il 
propose  d'employer  sont  Vobsêrvation,  et  l'expérimenta- 
tion à  laquelle  il  donne  le  nom  dHnduction.  En  un  mot, 
il  veut  substituer  la  puissance  de  la  méthode  à  celle  du 
génie.  Son  ouvrage  est  conçu  en  six  parties,  dont  il  a 
tracé  le  sommaire  suivant  : 

I.  Revue  et  répartition  des  sciences;  de  leur  dignité  et 
de  leur  accroissement. 

II.  Novum  Organum,  ou  mi^thodepour  l'interprétation 
de  la  Nature. 

III.  Phénomènes  du  Monde ,  ou  histoire  naturelle  et 
expérimentale  propre  à  servir  de  base  à  la  philosophie. 

lY.  Échelle  de  l'entendement. 

V.  Science  provisoire,  prodromes  ou  anticipations  de 
philosophie. 

VI.  Science  définitive,  ou  philosophie  seconde  et 
science  active,  composée  des  vérités  découvertes  par  la 
vraie  méthode  seule,  et  qui  doit  diriger  l'homme  dans 
l'action. 

r  Le  S  '  ^^  UDO  revue  générale ,  nne  sorte  d'inventaire 
des  sciences,  au  moment  où  l'auteur  commençait  son 
ouvrage;  il  y  constate  leur  faiblesse,  montre  les  rapports 
qui  les  unissent,  les  progrès  dont  elles  sont  susceptibles, 
et  signale  leurs  lacunes. 

Le  S  H  expose  la  nouvelle  méthode  qu'il  propose.  Nous 
en  avons  parlé  au  mot  Novim  organcm. 

Bacon  n'a  pu  exécuter  que  ces  deux  premières  parties; 
il  n'a  laissé  des  autres  que  des  ébauches,  ou  même  seule- 
ment ridée.  Le  S  11  i  devait  être  une  ample  collection  de 
faits,  déduits  de  ses  observations; — le  S  IV  eût  été  consa- 
cré à  en  indiquer  les  causes,  en  tirer  Tes  conséquences, 
comme  pour  préparer  à  des  découvertes  plus  complètes  : 
c'était,  dans  sa  pensée,  comme  une  initiation,  et  voilà 
pourçfuoi  il  l'appela  Echelle  de  l'entendement.  — Le  S  V 
aurait  réuni  les  vérités  déjà  démontrées,  et,  en  outre,  les 
opinions  les  plus  généralement  admises  et  les  plus  répan- 
dues. —  Enfin  le  S  V!  devait  présenter  le  résultat  général, 
les  vérités  démontrées  par  l'induction.  Il  donnait  à  cette 
partie  le  nom  caractéristique  de  philosophie  seconde ,  en 
vue  de  l'opposer  aux  vues  intuitives  et  aux  hypothèses , 

{procédés  ordinaires  de  l'ancienne  science,  et  qui  sont,  en 
ait ,  la  philosophie  primitive  de  l'esprit  humain. 

Ce  plan  de  Bacon  était  toute  une  Encyclopédie,  et  lui- 
même  ne  devait  pas  se  dissimuler  que  son  exécution 
complète  était au-âessus  des  forces  d'un  seul  homme, 
même  quand  cet  homme  n'aurait  pas  été,  comme  lui, 
distrait  par  les  devoirs  et  les  travaux  d'une  carrière  poli- 
tique. Les  deux  parties  q^^'il  a  pu  terminer  suffisent  à  sa 
gloire.  Le  Traite  de  la  Lt^iti  et  de  V Accroissement  des 
sciences  est  en  9  livres;  on  y  trouve  toutes  les  qualités 
vraiment  encyclopédiques  de  la  belle  intelligence  du  phi- 
losopiie,  et  c'est  un  de  ses  ouvrages  les  plus  pariaits.  Il 
débute  par  venger  les  sciences,  en  général,  des  mépris  de 
leurs  détracteurs,  et  fait  voir  leur  grandeur  et  leur  utilité. 
Il  s'exprime  en  homme  de  génie  convaincu  et  ému,  et 
montre,  dans  ces  espèces  de  prolégomènes,  une  éloquence 
presque  sublime.  Après  avoir  examiné  ce  qui  a  été  fait  pour 
les  sciences  et  pour  les  savants,  tant  dans  l'antiquité  que 
dans  les  temps  modernes,  il  présente  un  tableau  de  toutes 
les  connaissance^  humaines.  Nous  l'avons  donné  page  190. 
La  description  cbressée  par  Bacon  ne  contenait  pas  seule- 
ment toutes  les  sciences  existant  de  son  temps  :  fidèle  à 
sa  promesse  de  signaler  les  lacunes,  il  fit  figurer  dans  son 
tableau  synoptique  plusieurs  sciences  dont  il  donna  l'idée, 
telles  que,  par  exemple,  l'histoire  littéraire,  l'histoire  de 
la  philosophie,  et  d'autres.  Il  déclara  la  nécessité  de  les 
comprendre  dans  le  tableau  des  destinées  d'un  peuple, 
en  leur  assignant  la  première  place,  car  c'est  l'hisiv^ire  de 
l'esprit  humain  décrit  par  ses  œuvres,  et  il  dit  de  l'histoire 
Utt&idre  en  particulier  que,  sans  elle,  l'histoire  politique 
ressemblait  à  Polvphème  privé  de  son  œil.  Ces  idées  qui 
■OUI  semblent  si  8iI^ples  aujourd'hui,  tant  elles  sont 


Justes,  ne  furent  pas  acceptées  de  ses  contemporains,  n 
voulait  aussi  rattacher  à  l'histoire  ecclésiastique  une  his- 
toire secrète  des  conseils  de  Dieu  dans  le  gouvernement 
des  aff'aires  du  monde,  cette  grande  idée  de  Bossuet  dans 
son  Discours  sur  ('Histoire  universelle.  Bacon  ne  s'en- 
ferme pas  toujours  dans  la  forme  purement  philosophique  : 
Joignant  quelcjuefois  l'exemple  au  précepte,  il  donne  des 
fragments  plems  d'intérêt  ou  d'élévation  sur  le  sujet  ((u'il 
traite,  lorsque,  dans  ses  recherches  et  ses  méditations, 
une  inspiration  impromptu  est  venue  lui  dicter  quelques 
belles  pages.  Le  livre  VIII*  se  termine  par  un  court  traité 
de  la  rédaction  des  lois  et  des  sources  du  Droit,  véritable 
chef-d'œuvre  qui  assure  à  Bacon  un  rang  éminent  parmi 
les  meilleurs  publicistes.  Il  consacre  le  IX*  livre,  qui  est 
très-court,  à  la  science  de  l*usage  légitime  de  la  raison 
humaine  dans  les  choses  divines,  et,  là  encore,  il  montre 
beaucoup  de  sagesse. 

La  classification  de  Bacon  n'est  pas  irréprochable;  ce* 
pendant  elle  parut  assez  bonne  à  Dalembort  qui  l'adopta 
pour  r£ncyc(op^(ft0,  sauf  quelques  changements  {V.  le 
Tableau  page  191).  Mais  la  Grande  Hestauratton  est  tel- 
lement pleine  d'idées  neuves  et  pratiques ,  touchant  des 
améliorations  que  le  progrès  des  lumières  a  forcé  les  gou- 
vernements à  réaliser  depuis,  que  la  classification  des 
connaissances  humaines  n'y  est  vraiment  que  d'un  inté- 
rêt secondaire,  bien  qu'elle  ait  fait  oublier  toutes  les  au- 
tres. Un  écrivain  français,  M.  Riaux,  juge  ainsi  l'œuvre 
de  Bacon  :  «  Un  pareil  ouvrage,  qui  est  presque  une  En- 
cyclopédie, et  qui  est  lui-même  une  analyse  des  plus  bril- 
lantes, ne  s'analyse  pas.  Il  faut  le  lire  pour  apprécier 
cette  raison  vaste  et  profonde  qui  a  tout  vu,  tout  pesé, 
tout  rapproché;  qui  marque  à  chaque  chose  sa  place,  à 
chaque  connaissance  son  domaine  ;  pour  y  sentir  cet  en- 
thousiasme pénétrant  pour  la  science,  cet  amour  pas- 
sionné pour  l'humanité,  ces  élans  d'une  grande  &me  qui 
défend  une  grande  cause,  qui  ont  fait  du  livre  De  la 
Dignité  et  de  l* Accroissement  des  sciences  un  des  plus 
beaux  monuments  élevés  à  la  gloire  de  l'esprit  humain.  » 

Bacon  publia  d'abord  son  ouvrage  en  anglais  en  1G05, 
et  en  deux  livres;  vers  la  fin  de  sa  carrière,  il  lui  donna 
les  développements  qu'il  a  maintenant,  le  traduisit  en 
latin  et  le  republia  en  1623,  in-fol.  Lasalle  a  tmduit  en 
français  les  OEuvres  de  Bacon ,  Dijon,  1799-1802, 15  vol. 
in-8<*;  M.  Riaux  a  donné  :  OEuvres  de  Bacon ,  traduction 
revue,  corrigée  (c'est  celle  de  Lasalle),  et  précédée  d'une 
Introduction,  Paris,  1843,  2  séries  gr.  in-iS;  La  Dignité 
et  V Accroissement  des  sciences  est  dans  la  i'*  série. 
V.  aussi  Ch.  de  Rémusat,  Bacon,  sa  vie,  son  temps,  sa 
philosophie,  et  son  influence  jusqu'à  nos  jours,  chap.  3, 
2*  édit.  Paris,  1852,  gr.  in-18.  C.  D— v. 

RESTITUÉES  (Médailles),  en  termes  de  Numisma- 
tique, médailles  d'un  empereur  romain  frappées  par 
l'ord^  d'un  de  ses  successeurs.  Elles  sont  assez  rares, 
et  entièrement  semblables,  sauf  la  légende  constatant  la 
restitution ,  aux  types  primitifs. 

RESTITUT  (Chapelle  de  SS,  près  de  S»-Paul-les-troîs- 
Chàteaux  (Drôme)  C'est  un  petit  monument  carlovingien, 
qui  s'est  conservé  Jusqu'à  nous  dans  son  état  primitif;  on 
en  rapporte  la  fondation  à  Charlemagne.  Il  offre  un  carré 
parfait,  dont  les  faces  sont  décorées  de  portiques  irrégu- 
liers.  A  une  hauteur  de  6'",14,  se  trouve  une  corniche, 
avec  une  frise  sculptée  à  personnages;  à  l'^,50  plus  haut, 
le  plan  carré  devient  octogone  au  moyen  des  quatre  pen- 
dentifs soutenus  par  des  trompes  dont  le  centre  est  orné 
d'une  coquille.  Une  seconde  corniche,  placée  à  S'f^O  de 
la  première,  pourtourne  l'octogone,  et  forme  la  naissance 
d'un  dôme  qui  couronne  la  chapelle  :  au  centre  de  ce 
dôme,  qui  est  évidemment  un  diminutif  de  celui  d'Aix- 
la-Chapelle,  on  a  percé  une  ouverture  circulaire  d'envi- 
ron un  mètre  de  diamètre.  A  l'intérieur,  la  chapelle  a 
12<",30  de  hauteur,  et  5'",85  de  côté.  Elle  est  divisée  dans 
sa  hauteur  en  deux  parties  :  la  partie  inférieure  forme 
un  caveau  voûté  en  berceau  plein  cintre,  et  contenait 
autrefois  les  restes  de  S^  Restitut  dans  un  magnifique 
sépulcre  en  marbre  gris. 

RESTITUTION,  en  termes  de  Droit,  remise,  volontaire 
ou  forcée,  de  ce  qu'on  a  indûment  exigé.  Les  causes  de 
restitution  résultent,  soit  de  la  nature  des  contrats,  soit 
de  l'incapacité  des  contractants,  soit  de  l'absence  du  libre 
consentement  des  personnes,  soit  du  dommage  dont  elles 
se  déclarent  lésées.  Celui  qui  a  reçu  de  bonne  foi  re  qui 
ne  lui  était  pas  dû  n'est  tenu  de  rendre  la  chose  qu'au- 
tant qu'elle  existe  encore  en  sa  possession,  ou  qu'il  s'en 
est  enrichi,  et  dans  l'état  où  elle  se  trouve  :  celui  qui  a 
reçu  sciemment  doit  rendre  la  chose  dans  son  intégrité, 
plus  rusufruit  pendant  tout  le  temps  qu'il  l'a  possédée. 


RÉT 


1960 


RET 


Les  officiers  publics  qui  auraient  exigé  de  plus  forts  droits 
que  ceux  qui  leur  sont  accordés  par  les  tarifs  sont  sou- 
mis à  la  restitution,  et  même,  sil  y  a  lieu^  punis  de 
rinterdiction.   V.  Dépôt,  Mineur. 

RE^rrruTiON,  terme  d'Architecture.  V.  Ubstauration. 

RESTRICTION,  terme  de  Droit,  synonyme  de  réduc- 
tion {  V»  ce  mol  ). 

SESTRicTioN  MENTALE,  réservo  d*une  partie  de  ce  que 
Ton  pense,  pour  induire  en  erreur  celui  à  qui  Ton  parle. 

RESUMPTE,  mol  désignant  autrefois,  à  la  Faculté  de 
théologie  de  Paris,  la  thèse  que  devait  soutenir  un  doc- 
teur avant  d'entrer  en  possession  de  tous  ses  droits.  Elle 
roulait  sur  la  critique  ou  Therméneutique  sacrée. 

RÉSURRECTION  (du  latin  resurgere,  se  relever),  re- 
tour d'un  mort  à  la  vie.  Ce  ne  peut  être  que  le  fait  d'un 
miracle.  Le  prophète  Élie  ressuscita  le  flis  de  la  veuve  de 
Sarepta,  et  Elisée  celui  d'une  femme  sunamite.  Le  flls 
de  la  veuve  de  Naîm  et  Lazare  furent  ressuscites  par 
Jésus-Christ;  c'est  en  mémoire  de  sa  résurrection  à  lui- 
même  que  rÉglise  célèbre  la  fête  de  Pfiques.  La  résurrec- 
tion des  mmts  pour  subir  le  dernier  Jugement  est  une 
croyance  des  Hébreux,  des  Chrétiens,  et  des  Mahométans; 
on  la  trouvo  aussi  chez  les  Parsis  ou  Guèbres,  chez  les 
Péruviens  et  quelques  autres  nations. 

RETABLE,  décoration  qui  surmonte  les  autels  des 
églises  catholiques,  surtout  ceux  qui  sont  adossa  à  une 
muraille.  Le  marbre,  la  pierre,  le  stuc  et  le  bois  sont  les 
matériaux  employés  à  ces  sortes  de  constructions.  Le 
fond  placé  au-dessus  de  l'autel,  en  manière  de  panneau 
ou  de  lambris ,  et  où  l'on  enchâsse  un  tableau,  un  bas- 
relief  ou  une  statue,  se  nomme  contre-retable.  Il  n'y  eut 
point  de  retables  fixes  avant  le  xiii*  siècle,  parce  qu'ils 
auraient  caché  le  siège  de  l'évèque,  placé  Jusqu'à  cette 
époque  au  fond  de  l'ai  side  :  mais  on  avait  des  retables 
meubles  que  l'on  posait  sur  l'autel  à  l'occasion  de  cer- 
taines solennités;  telle  est  la  célèbre  pala  d*oro  de 
l'éi^lise  S^-Marc  à  Venise;  on  peut  citer  encore  un  retable 
de  cuivre  repoussé  et  émail  lé  que  l'on  conserve  dans  la 
sacristie  de  l'église  abbatiale  de  S^-Denis,  et  celui  qui 
est  accroché  dans  le  bas  côté  méridional  du  chœur  de 
l'église  de  Westminster  à  Londres.  On  voit  d'intéressants 
retables  fixes  de  la  période  ogivale  à  Nevers,  à  Troyes,  à 
Noyon,  à  S^-Bertrand  de  Comminges,  à  La  Celle  (Eure), 
dans  la  chapelle  du  Saint-Lait  à  la  cathédrale  de  Reims, 
à  l'église  de  Brou,  aux  cathédrales  de  Cologne,  et  de  Bar- 
celone, etc.  Le  musée  de  Cluny,  à  Paris,  possède  le  re- 
table d'or  que  l'empereur  Henri  II  donna  à  la  cathédrale 
de  Bàle.  Depuis  le  xv<  siècle,  les  Italiens,  les  Espagnols 
et  les  Allemands  ont  couvert  leurs  retables  d'un  fouillis 
de  bas-reliefs,  de  niches,  de  clochetons ,  qui  s'élevèrent 
Jusqu'aux  voûtes  des  églises.  A  partir  de  la  Renaissance, 
cette  décoration  fut  exécutée  dans  un  style  quasi  païen , 
avec  colonnes,  corniches,  entablements,  etc.  La  chapelle 
de  la  Vierge,  dans  l'église  S^-Sulpice  de  Paris,  a  un  beau 
retable,  exécuté  sur  les  dessins  de  l'architecte  De  Wailly  ; 
on  remarque  aussi  les  retables  des  chapelles  latérales  de 
l'église  de  la  Madeleine,  également  à  Paris.  B. 

RÉTENTION  Droit  de),  droit  en  vertu  duquel  le  dé- 
tenteur d'un  objet  qu'il  est  tenu  de  remettre  à  un  tiers 
peut  cependant  en  conserver  la  possession ,  Jusqu'à  ce 
qu'il  ait  été  indemnisé  des  dépenses  qu'il  a  faites  dans 
l'intérêt  de  cet  objet 

RETENUE,  prélèvement  d'une  portion  d'un  traitement 
ou  d'un  salaire,  soit  pour  payer  un  remplaçant,  soit  pour 
verser  à  une  caisse  de  retraite  (  V.  ce  mot  ). 

RÉTIAIRE.  V^.  Gi^DiATEUR,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

RÉTICENCE  (du  latin  reticere^  taire),  ou  Aposiopèsb 
(du  grec  apoxiâpaâ,  s'interrompre  en  parlant,  s'arrêter 
court  ),  figure  de  Rhétorique  qui  consiste  à  s'arrêter  brus- 
quement au  milieu  d'une  phrase,  pour  taire  une  chose 
qu'on  allait  dire,  mais  que  la  colère,  la  honte,  l'horreur, 
l'inquiétude,  le  scrupule,  ou  quelquefois  simplement 
l'empressement,  le  besoin  de  passer  tout  de  suite  à  autre 
chose,  a  comme  retenue  au  passage  dans  le  gosier.  Elle 
diffère  de  l'Ellipse,  en  ce  que  la  chose  omise  laisse  l'au- 
diteur dans  l'incertitude,  ou  exigerait  de  longs  développe- 
ments, tandis  Cjue  l'Ellipse  est  l'omission  d'un  petit  nom- 
bre de  mot.s,  omission  ordinairem(;nt  consacrée  par  l'usage, 
et  qui  ne  doit  Jamais  laisser  ni  doute  ni  obscurité  dans 
l'esprit  de  l'auditeur  ou  du  lecteur  (  V,  Ellipse).  Voici 
qut^lques  exemples  de  réticence  :  —  Alceste ,  indigné  de 
l'excès  d'indulgenre  de  Philinte  pour  les  vices  de  la  so- 
ciété, s'écrie  [Le  Misanthrope,  1, 1)  : 

J^  Bt  verrai  trahir,  mettre  en  pièces ,  Toier« 


Sanê  que  Je  êoU..,,,  Morbleu  I  Je  ne  T«ax  point  parte. 
Tant  ce  ralioniiement  eit  plein  d*impertlnencet 

Britannicus,  dans  Racine,  ditàJunie  (Britannkutt 
II,  6)  : 

Néron  TOttf  plairait-il  7  Vons  eera!t-Je  odienz  t 

Aht  tije  U  eroyaiâ! An  nom  des  dienz,  madaraOy 

Edaircissex  le  trouble  oh  votu  jetei  mon  âme. 

Racine  a  dit  encore  dans  la  même  tragédie  (IV,  2)  : 

J*appélai  de  Vexil,  Je  tirai  de  Tann^ 

Et  ee  même  Sénëqne  et  ce  même  Barrlins , 

Qui  depuis Eome  alora  estimait  leart  vertos. 

Neptune,  dans  Virgile,  gourmande  les  Vents  qui  se  sont 
déchaîna  sans  ses  ordres,  et  ajoute  avec  menace,  mail 
pour  s'arrêter  tout  à  coup  {MnM,,  1, 135)  : 

Quos  ego sed  motos  prsstat  componere  flnctoa. 

<  Je  devrais mais  11  fknt  ealmer  les  tlots  dmns.  • 

Dans  la  conversation,  Tesprit  de  médisance  et  de  déni- 
grement emploie  fréquemment  la  réticence  avec  une 
adresse  et  une  jperfidie  qui  manquent  rarement  leur  effet. 
Rien  n'est  si  aisé,  ni  si  commun,  ni  si  l&che  que  de  ca- 
lomnier à  demi-mot.  P. 

RETICULAIRE  (Appareil).  V.  Appareil. 

RÉTICULE.  V,  ce  mot  dans  notre  Diciionncùre  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire, 

RETIRO  f  Ch&teau  de  Bcen-).  V,  BuEN-RETino. 

RETOMBÉE,  terme  d'Architecture.  La  retombée  d'un 
arc  ou  d'une  voûte  sont  les  claveaux  qui  sont  le  plus  près 
du  point  d'appui  horizontal,  et  dont  la  projection  est  assez 
peu  considérable  pour  qu'ils  puissent  se  soutenir  au  be- 
soin par  leur  propre  poids,  alors  que  les  autres  seraient 
tombés.  Ainsi  l'on  voit,  surtout  dans  les  églises  de  cam- 
pagne, des  nefs  non  aclievées  où  les  retombées  des  voûtes 
restent  apparentes. 

RÉTORSION  (du  latin  retorquere,  retourner),  en  ter- 
mes de  Dialectique,  emploi  que  l'on  fait,  contre  un  adver- 
saire, des  preuves  dont  il  s'est  servi  lui-même.  Certains 
rhéteurs  donnent  à  ce  genre  d'arpumentation  le  nom  de 
Conversion,  —  En  termes  de  Droit  international,  on  s'est 
quelquefois  servi  du  mot  Rétorsion  comme  synonyme  de 
neprésailles, 

RETOUCHE,  dernière  façon  qu'un  peintre  donne  après 
coup  à  son  ouvrage  pour  le  perfectionner,  ou  à  Touvrage 
d'un  élève  pour  le  corriger. 

RETOUR  (Compte  de).  V.  Compte. 

RETOUR  (Droit  de),  droit  en  vertu  duquel  un  donateur 
rentre  dans  la  possession  des  objets  par  lui  donnés,  en  cas 
de  prédécès  du  donataire  et  de  ses  descendants.  H  est  dit 
droit  de  retour  conventionnel ,  quand  il  est  stipulé  dans 
l'acte  de  donation.  On  appelle  droit  de  retour  l^al  ou 
droit  de  réversion,  le  droit  en  vertu  duquel  les  ascen- 
dants succèdent,  à  l'exclusion  de  tous  autres,  aux  choses 
par  eux  données  à  leurs  enfants  ou  descendants  décédés 
sans  postt^rité,  lorsque  ces  choses  se  retrouvent  en  nature 
dans  la  succession  ;  si  les  biens  ont  été  aliénés,  les  ascen- 
dants recueillent  le  prix  qui  peut  en  être  dû;  ils  sno> 
cèdent  également  à  l'action  en  reprises  que  pourrait  avoir 
le  donataire.  V.  le  Code  Napoléon,  arU  747,  833,  951. 

RETOURNÉS  (Vers).  V,  Akacvcuque. 

RÉTRACTATION ,  désaveu  verbal  ou  écrit  de  ce  qu'on 
a  fait,  dit  ou  écrit  précédemment.  Le  mot  s'applique 
spécialement,  en  Jurisprudence,  à  l'action  de  révoquer 
un  Jugement  rendu  par  défaut. 

RETRAIT,  en  termes  de  Droit,  action  de  reprendre  ce 
qu'on  avait  aliéné.  Avant  1789,  on  distinguait  :  i**  le 
retrait  féodal  ou  seigneuricU ,  par  lequel  le  seigneur  pou- 
vait retirer  et  retenir  le  fief  mouvant  de  lui  et  vendu  par 
son  vassal,  en  remboursant  à  l'acauéreur  le  prix  de  son 
acq[uisition  et  les  loyaux  coûts  ;  cela  s'appelait  aussi  pré- 
lation  et  retenue  féodale;  2°  le  retrait  lignager,  par  lequel, 
en  cas  de  vente  d'un  héritage,  les  parents  de  la  ligne  d'où 

{irovenait  cet  héritage  pouvaient  le  retirer  des  mains  de 
'acquéreur,  en  lui  en  remboursant  le  prix  et  dans  un  délai 
fixé;  3<*  le  retrait  conventionnel  ou  coutumier,  qui  s'exer- 
çait en  vertu  de  la  faculté  conventionnelle  de  réméré.  Ces 
différents  retraits  et  beaucoup  d'autres  ont  dispara.  La 
Code  Napoléon  reconnaît  :  1°  le  retrait  conventionnel. 
résultant  d'une  convention  stipulée  dans  le  contrat  de 
▼ente  (  V.  Rachat);  2°  le  retrait  de  droits  lUigieuX',  fa- 
culté accordée  à  celui  contre  lequel  on  a  cédé  un  droit 
litigieux  de  s'en  faire  tenir  quitte  par  le  ceeslonnaire,  eo 
lui  remboursant  le  prix  de  la  cession  ;  3*  le  rHrmU  stM»- 


BET 


1561 


RET 


CêitonU,  facalté  accordée  aux  héritiers  oa  à  l*un  d'eux 
d*écarter  du  partage  toute  personne  non  successible  qui 
le  serait  rendue  cession naire  d*une  port  de  l*hérita^,  en 
lui  remboursant  le  prix  de  la  cession.  V,  Benoit ,  TrcUU 
du  retrait  successoral,  Paris,  I8i0,  in-8\ 

RETRAITE,  en  termes  d*Art  miliuire,  mouvement  d*an 
corps  de  troupes  en  arrière  après  un  combat  désavanta- 
geux. Cest  une  opération  délicate  et  difficile,  surtout 
quand  elle  se  prolonge  ;  car,  en  môme  temps  qu'elle  in- 
quiète et  intimide  ceux  qui  TefTectuent,  elle  augmente  la 
confiance  et  l'audace  de  l'ennemi,  et  l'on  manque  des 
moyens  de  se  réorganiser.  Une  marche  en  retraite  est 
toujours  lente,  parce  que,  tout  ce  qu'on  laisse  en  arrière 
étint  perdu,  il  faut  tout  rallier,  et  proportionner  la  mar- 
che à  celle  de  ce  qu'il  y  a  de  plus  lent.  Parmi  les  retraites 
célèbres,  nous  citerons  celles  des  Dix  Mille  après  la  ba- 
taille de  Cunaxa  (401  av.  J.-C.  ),  du  triumvir  Antoine 
dans  la  guerre  contre  les  Parthes,  de  Turenne  en  Alsace 
(1674),  du  maréchal  de  Belle-lsle  (1742),  de  Jourdan  et 
de  Moreau  (179G)  en  Allemagne,  de  Napoléon  I*'  en 
Russie  (1812). 

RBTRArTB,  signal  donné  aux  militaires  par  le  tambour 
ou  la  trompette,  pour  rentrer  le  soir  au  quartier.  Dans 
les  ports  de  TÊtat,  il  y  a  un  coup  de  canon  de  retraite, 
aETRArrE ,  éloi^nement  où  l'on  se  tient  du  monde  pen- 
dant un  temps  plus  ou  moins  long,  pour  se  recueillir  et 
ne  vaquer  qu'aux  exercices  de  piété.  Ainsi ,  une  retraite 
précède  la  première  communion  ;  elle  dure  ordinaire- 
ment trois  Jours.  On  fait  des  retraites  prépsratoires  à  la 
communion  pascale.  Il  y  a  des  retraites  ecclésiastiques 
annuelles,  où  l'on  fait  venir  une  partie  des  prêtres  d'un 
diocèse. 

sETiuiTB,  en  termes  de  Banque,  signifie  noiwelle  traite. 
Cest  une  nouvelle  lettre  de  change  au  moyen  de  laquelle 
le  porteur  se  rembourse,  sur  le  tireur  ou  sur  l'un  des 
endosseurs,  du  principal  d'une  lettre  protestée,  de  ses 
frais,  et  du  nouveau  change  qu'il  paye  {Code  de  Com- 
merce^ art.  178). 

RKTRAiTB  OU  «BTRArr,  en  termes  d'Architecture ,  dimi- 
nution progressive  de  l'angle  que  le  plan  d'une  construc- 
tion inclinée  en  arrière  forme  avec  la  verticale  du  lieu. 
Un  mur  fait  souvent  retraite  sur  son  empattement.  Tout 
corps  est  en  retraite  d'un  autre,  quand  il  est  en  dedans 
du  plan  do  ce  dernier. 

RETPAiTB  (Caisses  de),  caisses  instituées  pour  recevoir 
les  sommes  versées  par  un  certain  nombre  de  sociétaires, 
et  leur  servir  un  revenu  annuel  à  un  ftge  déterminé.  Le 
calcul  des  probabilitèi,  appliqué  aux  chances  de  morta- 
lité, est  un  élément  des  opérations  de  ce  genre;  car  les 
annuités  que  pavent  les  caisses  de  retraite  sont  calculées 
non-seulement  sur  létaux  de  l'intérêt  composé  des  sommes 
versées  par  chaque  dépositaire ,  mais  encore  sur  la  part 
dont  les  prédôcédés  ont  grossi  le  fonds  social.  Dès  Tan- 
née 4635,  les  pasteurs  de  Berlin  établirent  sur  ces  don- 
nées une  caisse  au  profit  de  leurs  veuves.  Dans  la  seconde 
moitié  du  xviii*  siècle,  plusieurs  mathématiciens,  Kritters, 
Samlung,  Tetens,  Gunther  Fuss,  Euler,  essayèrent  de 
donner  une  base  scientifique  aux  institutions  de  ce  genre, 
et  l'on  vit  les  caisses  des  veuves  se  multiplier  en  Prusse, 
en  Danemark,  et  dans  tout  le  nord  de  l'Allemagne.  La 
czarine  Catherine  II  en  fonda  une  pour  toute  la  Russie, 
en  1772.  La  même  année,  Mazères,  mathématicien  fran- 
çais, publia  à  Londres  un  projet  de  constitution  de  rentes 
viagères  au  profit  des  ouvners  :  un  projet  de  loi  conforme 
à  son  plan  nit  admis  par  la  Chambre  des  communes  en 
1773,  mais  repoussé  par  la  Chambre  des  lords;  une  nou- 
velle proposition,  appuyée  sur  les  tables  de  mortalité  de 
Price,  ne  devait  pas  avoir  plus  de  succès  en  1789.  En 
1778,  une  caisse  de  retraite  générale  fut  fondée  à  Ham- 
bourg. Ces  questions  étaient  paiement  agitées  en  France  : 
dés  4754,  Chamousset  avait  tenté  d'appliquer  aux  prin- 
cipales causes  d'indigence,  à  la  maladie  et  à  la  vieillesse, 
l'association  mutuelle  et  le  calcul  des  probabilités.  Aux 
débuts  de  la  Révolution,  la  tontine  Lafarge,  celle  des 
Sans-CtUottes^  et  VAdministration  nationale  des  écono- 
mies  du  peupte,  furent  des  entreprises  déloyales,  où  l'on 
abusa  de  la  confiance  des  ouvriers  (jui  avaient  cru  s'as- 
surer par  leur  économie  une  retraite  pour  leurs  vieux 
jours.  La  Convention  se  préoccupa  d'organiser  des  caisses 
de  retraite,  et  chargea  le  mathématicien  Duvillard  de  lui 
proposer  un  plan  d'association  de  prévoyance  :  mais  les 
événements  ne  permirent  pas  de  donner  suite  à  ce  tra- 
vail, qui   fut  seulement  imprimé.   Un  Mémoire  sur  le 
même  sujet,  présenté  en  1H09  par  Mourgues  au  Conneil 
général  des  hospices  de  Paris,  n'eut  pas  plus  de  résultat. 
'■'outefols,  un  certain  nombre  de  caisses  de  secours  mu- 


tuels se  formèrent  à  Paris  et  dans  les  départements, 
pour  servir  non-seulement  des  secours  en  cas  de  ma'adie, 
mais  des  pensions  de  retraite  ;  leurs  opérations  furent  de 
courte  durée.  Sous  le  règne  de  Louis-Puilippe,  des  pro- 
jets nouveaux  furent  élaborés  en  vue  des  classes  labo- 
rieuses par  le  duc  de  Mouchy  (iMtre  sur  l'utiliié  des 
maisons  de  retraite  comme  complément  des  caisses  d'épar' 
gne,  1841),  par  l'ingénieur  Cazeau  [Statuts  d'une  caisse 
générale  de  retraite  et  de  pensions  pour  les  travailleurs 
invalides,  18i2),  par  MM.  Oliiide  Rodriçues  et  Macquet 
(  Statuts  d'une  caisse  de  retraite  pour  les  classes  labo» 
rieuses  des  deux  sexes,  1842),  par  M.  Bergson  {Aperçu 
sur  l'établissement  des  caisses  de  retraite  et  de  pré» 
voyance  pour  les  classes  laborieuses ,  lK4i),  par  M.  de 
Romanet  (  Des  pensions  viagères  pour  les  vieillards  des 
classes  ouvrières,  1847).  C'étaient  autant  de  provoca- 
tions à  l'initiative  du  gouvernement  :  aussi ,  un  projet 
de  loi  sur  les  caisses  de  retraite  venait  d'être  annoncé 
aux  Chambres,  lorsque  la  Révolution  de  1848  arriva. 
Un  rapport  sur  cette  question  fut  lu  à  l'Assemblée  consti- 
tuante, le  6  octobre  1840,  par  M.  Benoist-d'Azy  ;  mais 
ce  fut  seulement  l'Assemblée  législative  oui  fonda  la 
Caisse  des  retrutes  générale,  par  une  loi  du  18  juin  1850, 
loi  modifiée  par  celle  du  28  mai  1853,  par  un  règlement 
du  18  août  de  la  même  année,  enfin  par  une  loi  des  IG- 
26  Juin  1861. 

Pour  réserver  le  bienfait  de  la  caisse  des  retraites  à 
ceux  qui  en  ont  besoin  et  qui  ne  sauraient  en  abuser 
contre  les  intérêts  de  leur  famille,  on  a  fixé  le  maximum 
de  la  pension  viagère  à  1,000  fr.;  cette  pension  est  insaisis- 
sable  jusqu'àconcurrence  de  3()0fr.  Les  versements  doivent 
être  de  5  fr.  au  moins,  et  sans  fractions  de  francs  :  ceux 
qui  sont  effectués  au  profit  de  deux  conjoints  doivent  être 
de  10  fr.  au  moins,  et  multiples  de  2  fr.  On  peut  en  faire 
au  profit  de  toute  personne  âgée  de  trois  ans  au  moins 
et  Jouissant  des  droits  civils.  Le  versement  opéré  anté- 
rieurement au  mariage  reste  propre  à  celui  qui  l'a  fait  ; 
le  versement  fait  pendant  le  mariage  par  l'un  des  con- 
joints profite  séparément  à  chacun  d'eux  par  moitié.  Dans 
le  cas  où  l'un  des  époux  aurait  atteint  le  maximum  de 
rente  fixé  par  la  loi,  les  versements  ultérieurs  sont,  jus- 
qu'à la  même  limite,  au  profit  exclusif  de  l'autre  époux.  Les 
versements  au  coippte  d'une  même  personne  ne  peuvent 
excéder  3,000  fr.  dans  le  cours  d'une  année.  Au  premier 
versement,  il  faut  déclarer  :  1»  si  le  capital  est  abandon tié, 
c-à-d.  si ,  au  décès  du  titulaire,  le  capital  devient  la  pro- 
priété de  l'État,  ou  s'il  est  réservé  au  profit,  soit  des 
héritiers  ou  légataires  du  titulaire,  soit  d'un  tiers  dépo- 
sant; 2^  à  quel  &ge  le  titulaire  veut  entrer  en  jouissance 
de  la  rente.  Ces  circonstances  influent  nécessairement 
sur  le  montant  de  la  rente.  La  pension  ne  peut  être  liqui- 
dée avant  l'&ge,  de  50  ans;  mais,  en  cas  de  blessures 
graves  ou  d'infirmités  prématurées,  on  la  liquide  en  pro- 
portion des  versements  efi'ectués.  La  caisse  des  retraites 
emploie  le  montant  des  versements  en  acha:  de  rentes 
sur  l'État. 

L'utilité  des  caisses  de  retraite  est  incontes^ble  :  elles 
assurent  la  conservation  des  épargnes  quotidiennes,  don- 
nent un  avenir  à  des  classes  oui  vivraient  au  Jour  le  Jour 
ou  dans  l'inquiétude,  et  diminuent,  par  conséquent ,  le 
nombre  des  mendiants  et  celui  des  pauvres  admis  dans 
les  hospices;  elles  permettent  au  travailleur  dont  les 
forces  déclinent  de  suppléer  à  l'insuflisanre  de  son  saF* 
laire.  On  a  prétendu  que  les  caisses  de  retraite,  basées 
sur  le  calcul  des  chances  de  mortalité,  et  absorbant  dans 
la  masse  commune  les  mises  des  prémourants,  encoura- 
geaient les  placements  à  fonds  perdu  ,  propageaient 
l'égoîsme,  et  tendaient  à  détruire  l'esprit  de  famille,  à 
abolir  Tbi^ritage.  Mais  c'est  abuser  ici  du  sens  des  mots. 
D'une  part,  il  y  a  deux  tables  d'annuités,  l'une  avec  alié- 
nation du  capital,  l'autre  pour  le  cas  de  restitution  du 
capital  aux  héritiers  du  déposant,  et  l'option  entre  ces 
deux  tables  a  été  laissée  au  déposant.  D'autre  part,  les 
déposants  ne  sont  pas,  comme  dans  ane  tontine,  par- 
tage en  séries  et  en  classes,  dont  les  membres  ont  un 
intérêt  mutuel  à  la  mort  de  leurs  associés  :  chaque  dépôt 
constitue  un  contrat  complet,  et  le  livret  constate  le 
chifl're  de  rente  correspondant  au  capital  versé.  Loin  de 
porter  préjudice  à  lu  famille,  la  caisse  des  retraites  admet 
que  tout  versement  du  mari  ou  de  la  femme  est  supposé 
fait  dans  Tintérêt  des  deux  époux,  et  profite  par  mo'tié 
à  tous  deux  ;  elle  vient  en  aide  aux  enfants,  qui  n'au- 
raient pu  Assister  sullisumment  leurs  vieux  parents.  A  la 
difl'érence  des  sociétés  privées  d'assurances  sur  la  vie, 
elle  a  un  maximum  que  les  déposants  ne  peuvent  dé- 
passer et  qui  ne  permet  pas  les  opérations  aléatoires  « 


RET 


1562 


RET 


elle  ne  te  prèle  point  à  des  réelliations  de  contrat  qui 
favoriseraient  la  dissipation ,  et  elle  n*exige  pas  des  dé- 
posants, sous  peine  de  déchéancb,  une  continuité  et  une 
régularité  de  versements  auxquelles  il  est  impossible  d^as- 
Bujettir  TouTrier.  En  se  chargeant  de  la  gestion  des  caisses 
de  retraite,  l'État  ne  court  pas  les  risques  auxquels  Tex- 
pose  Torganisation  des  caisses  d'épargne  :  en  effet ,  la 
dette  qu'il  contracte,  an  lieu  d'être  continuellement  et 
instantanément  exi^ble,  n'est  remboursable  qu'à  longs 
termes  et  par  annuités  échelonnées:  il  jouit  donc  d'une 
grande  latitude  pour  faire  des  fonds  qu'il  a  reçus  un  em- 
ploi productir.  Quelques  économistes  oot  pensé  que  toute 
personne  vivant  de  salaire  devrait  être  assujettie  envers 
k  caisse  des  retraites  à  une  contribution  forcée  :  mais, 
outre  que  l'État  ne  pourrait  se  servir  utilement  des 
sommes  énormes  qu'une  telle  mesure  accumulerait  dans 
ses  caisses,  outre  qu'il  serait  impossible  de  percevoir  la 
contribution  dans  les  temps  de  chômage  ou  de  crise,  la 
retenue  obligatoire  supprimerait  l'effet  moral  qu'on  doit 
attendre  de  l'épargne  volontaire.  On  créerait,  d'ailleurs, 
sous  un  nom  déguisé,  une  véritable  taxe  des  pauvres, 
taxe  d'autant  plus  vicieuse,  qu'elle  serait  prélevée  sur 
le  capital  même  des  gens  peu  aisés.  Objectera-t-on  que 
les  patrons  pourraient  être  tenus  de  verser  dans  la  caisse 
des  retraites  une  contribution  égale  ou  même  supérieure 
aux  retenues  faites  à  leurs  ouvriers  ?  Dans  ce  cas,  la 
contribution  sera  prise,  soit  sur  les  bénéfices  toujours 
variables  des  patrons,  ce  qui  en  fait  une  charge  injuste- 
ment fixe  et  permanente,  et  transforme  les  annuités 
payées  par  la  caisse  des  retraites  en  un  subside  humi- 
liant, en  un  genre  d'assistance  qui  répugne  aux  senti- 
ments d'indépendance  des  ouvriers  ;  soit  sur  le  salaire 
de  ces  ouvriers,  qui  seraient  soumis  ainsi  à  une  double 
retenue,  l'une  directe,  l'autre  indirecte  ;  soit  enfin  sur  la 
▼ente  des  produits,  par  une  élévation  de  prix,  dont  souf- 
friraient encore  les  ouvriers  et  comme  consommateurs 
et  comme  producteurs,  puisqu'il  leur  faudrait  payer  les 
objets  plus  cher,  et  que  la  cherté  des  objets  en  restrein- 
drait l'écoulement  et  la  fabrication.  Les  établissements 
industriels  où  l'on  a  établi  des  caisses  spéciales  de  se- 
cours ou  de  retraite  échappent  aux  inconvénients  de  la 
retenue  obligatoire  qui  serait  faite  par  l'État  :  car  l'ou- 
vrier qui  accepte  d'y  travailler  sait  à  quoi  il  s'engage;  le 
contrat  en  vertu  duquel  il  abandonne  une  certaine  por- 
tion de  son  salaire  est  consenti  par  lui. 

L'Angleterre  a  devancé  la  France  dans  la  constitution 
des  caisses  de  retraite  :  par  deux  bills  du  10  juin  1833  et 
du  9  août  1834^  les  caisses  d'épargne  furent  autorisées 
à  acheter  au  Trésor  des  annuités  immédiates  ou  diffé- 
rées. On  exige  du  déposant  la  déclaration  qu'il  ne  jouit 
pas  d'un  revenu  de  150  liv.  sterl.;  la  pension  de  retraite 
peut  s'élever  à  30  liv.  sterl.  (750  fV.).  Toutefois,  le  succès 
de  l'opération  a  été  médiocre.  11  faut  l'attribuer,  !•  à  la 
taxe  des  pauvres,  qui  dispense  de  toute  prévoyance  la 
classe  malaisée;  ^^  à  l'existence  d'un  grand  nombre  de 
Sociétés  d'Amis,  riches  associations  qui  possèdent  des 
écoles,  des  hospices,  des  maisons  de  charité;  3°  à  la  con- 
currence des  sociétés  particulières  d'assurances  sur  la 
vie,  qui  sont  établies  solidement  et  jouissent  d'un  grand 
crc^dit.  —  Depuis  1839,  il  existe  en  Prusse  un  système 
de  retraites  fondé  par  le  gouvernement  sur  une  sorte  de 
tontines  par  séries  ou  par  classes.  —  Une  caisse  générale 
de  retraites  a  été  organisée  en  Belgique  par  une  loi 
de  18.^.  On  admet  tous  les  déposants,  sans  distinction 
de  sexe,  de  profession,  de  fortune,  et  même  les  étrangers 
résidants  :  il  faut  seulement  avoir  i8  ans,  parce  que  la 
mortalité  des  premiers  &ges  est  trop  variable  pour  que 
les  i-alculs  de  probabilité  soient  sérieux,  et  parce  qu'une 
famille,  avant  de  pourvoir  à  la  vieillesse  de  ses  membres 
naissants,  doit  consacrer  ses  ressources  à  leur  éducation. 
Le  maximum  de  la  pension  est  fixé  à  1,200  fr. 

jiETRAiTB  (Pensions  de),  rentes  viagères  attribuées  aux 
anciens  fonctionnaires,  serviteurs  et  employés  de  l'État, 
à  titre  de  droit,  et  comme  rémunération  de  leurs  travaux 
et  services.  Elles  leur  sont  dues  après  un  certain  nombre 
d'années,  abstraction  faite  des  ressources  propres  qu'ils 

f peuvent  posséder;  elles  se  gagnent  par  l'ancienneté,  par 
e  payement  des  retenues  dont  leur  traitement  d'activité 
est  passible,  et  ne  sont  ni  une  rémunération  honorifique, 
ni  un  secours  exceptionnel.  L'établissement  des  pensions 
se  justifie  sans  peine  :  il  importe  à  la  considération  de 
l'État  que  ceux  qui  l'ont  servi  ne  soient  pas  exposés  à 
l'indigence  pendant  leur  vieillesse  ou  en  cas  d'infirmités: 
leur  traitement  n'est  généralement  pas  assez  considérable 
pour  qu'ils  puissent  faire  des  épargnes  ;  le  système  des 
retraites  entretient  leur  dévouement,  écarte  d'eux  les 


tentations  dangereuses  pour  la  probité,  les  attache  à  leor 
profession,  et  leur  rend  le  service  de  l'État  préférable  à 
celui  de  l'industrie  privée.  Pour  obtenir  ces  divers  avan- 
tages, un  État  ne  doit  pas  craindre  de  s'imposer  des 
sacrifices.  —  Le  service  des  pensions  de  retraite  peut  ie 
faire  de  trois  manières  différentes  :  tantôt  les  retenues 
faites  sur  les  traitements  sont  versées  dans  de^  caisses 
spéciales,  qui  acquittent  les  pensions,  à  leurs  risques  et 
périls;  tantôt  ces  caisses  sont  subventionnées  par  rÉtat; 
ou  enfin  l'État,  confondant  les  retenues  dans  les  recettes 
du  trésor,  prend  directement  les  pensions  à  sa  charge.  Ce 
dernier  mode  est  le  plus  conforme  à  la  dignité  do  gouver- 
nement, et  le  plus  propre  à  maintenir  son  autorité  sur  les 
fonctionnaires,  à  garantir  leurs  intérêts  :  avec  des  caisses 
de  retenues  pour  chaque  administration,  il  est  presque 
impossible  de  ne  pas  avoir  un  déficit,  dont  aoufDriraient 
les  fonctionnaires  et  employés  si  l'État  ne  leur  venait  en 
aide  ;  l'octroi  des  pensions  ne  parait  être  que  la  restitu- 
tion d'un  dépôt;  le  pouvoir  exécutif  ne  peut  révoquer  ud 
mauvais  serviteur,  sans  être  accusé  de  confiscation. 

Dans  l'ancienne  monarchie  française,  il  n'y  av:ût  pas 
de  pensions  de  retraite  proprement  dites.  Le  prince  ac- 
cordait à  certains  individus,  ou  même  à  certaines  caté- 
gorie* de  personnes ,  des  ^tiflcations  qui  dépendaient 
uniquement  de  sa  générosité  :  chacun  pouvait  les  solli- 
citer et  les  obtenir,  personne  n'avait  le  droit  de  les  ré- 
clamer; elles  étaient  le  prix  de  la  flatterie,  de  la  com- 
plaisance, de  l'intrigue,  aussi  bien  que  la  récompense 
des  services;  aucune  condition  d'&ge  n'était  imposée 
pour  ces  grâces  pécuniaires,  qui  étaient  même  quelque- 
fois héréditaires.  Toutefois ,  quelques  mesures  furent 
prises  en  faveur  des  armées  de  terre  et  de  mer  :  Colbert 
créa,  en  1673,  une  caisse  des  Invalides  de  la  marine , 
dotée  de  revenus  spéciaux,  et  chargée  de  fournir  des 
pensions  aux  marins  qui  auraient  bien  mérité  de  l'État; 
une  ordonnance  de  1764  accorda  aux  officiers  et  aux  sol- 
dats infirmes  l'option  entre  l'admission  à  l'hôtel  des  In- 
valides et  la  Jouissance  au  dehors  d'un  traitement  de 
retraite  proportionné  au  grade  de  chacun.  L'organisation 
des  pensions  de  retraite  date  de  la  Révolution.  Par  la  loi 
du  22  août  1790,  l'Assemblée  Constituante  supprima 
toutes  les  concessions  antérieures,  et  fixa  les  conditions 
auxquelles  les  pensions  seraient  désormais  accordées  : 
30  ans  de  service,  50  ans  d'âge  (à  moins  de  blessures 
reçues  ou  d'infirmités  contractées  dans  le  service  pu- 
blic^, et  absence  de  ressources  personnelles.  Le  chiffre 
de  la  pension,  croissant  par  chaque  année  au  delà  du 
minimum  de  30  ans,  ne  pouvait  dépasser  le  traitement 
d'activité  ni  en  aucun  cas  excéder  10,000  fr.  Le  cumul  de 
deux  pensions  était  interdit,  ainsi  que  le  cumul  d'un 
traitement  d'activité  et  d'une  pension  de  retraite.  La 
pension  n'était  pas  réversible;  seulement,  si  le  fonc- 
tionnaire mourait  dans  le  cours  d'un  service  public  et 
sans  laisser  de  patrimoine,  sa  veuve  pouvait  obtenir  une 
pension  alimentaire,  et  ses  enfants  être  élevés  aux  dé- 
pens de  la  nation.  Une  somme  invariable  de  10  millions 
de  francs  avait  été  affectée  au  payement  des  pensions 
civiles  :  ce  fonds  ne  tarda  pas  à  être  insuffisant;  on  fut 
obligé  de  conserver  en  place,  aux  dépens  de  l'intérêt  pu- 
blic, un  certain  nombre  de  fonctionnaires  usés;  d'autres 
durent  attendre,  pour  faire  valoir  leurs  titres,  que  la 
mort  eût  créé  des  vacances  parmi  les  titulaires  des  pen- 
sions. Ces  inconvénients  suggérèrent  la  pensée  de  faire 
un  prélèvement  annuel  sur  les  traitements  d'activité,  et 
de  constituer  ainsi  un  fonds  destiné  à  fournir  les  pen- 
sions de  retraite.  Suivant  l'exemple  qui  avait  été  donné 
avant  1789  par  la  Compagnie  des  Fermes,  diverses  admi- 
nistrations générales  et  locales,  départementales  et  mu- 
nicipales, opérèrent,  à  partir  de  1 796,  des  retenues  sur 
leurs  employés,  et  il  fut  stipulé  qu'une  part  des  pensions 
serait  réversible  sur  la  tête  des  femmes  et  des  enfants. 
Ces  caisses  distinctes  de  retraite  devaient-elles  être  con- 
sidérées comme  des  institutions  exclusivement  privée^ . 
comme  des  caisses  d'épargne ,  ou  comme  des  tontines  ? 
Devaient-elles  exonérer  le  Trésor?  Ces  questions  ne  Tu- 
rent pas  même  posées,  tant  que  les  administrations 
purent  remplir  leurs  engagements  et  se  passer  de  sub- 
sides. Mais  il  n'en  pouvait  être  longtemps  ainsi  :  on  avait 
mal  calculé  le  taux  des  retenues,  le  nombre  et  la  durée 
des  pensions  à  fournir;  on  accueillit  des  titres  anté- 
rieurs à  l'établissement  de  l'association,  et  on  attribua 
ainsi  des  dividendes  à  des  actionnaires  qui  n'avaient  que 
peu  ou  point  contribué  à  l'encaisse  social.  Dès  le  temps 
du  premier  Empire,  l'État  dut  accorder  des  subsfdes  à 
plusieurs  caisses  de  retenue.  Les  événements  de  1814 
et  1815  créèrent  de  nouveaux  embarras  :  let  réactioiit 


IIET 


15G3 


RÉT 


politiqaes  maltiplièrent  les  retraites  liàtircs,  ponr  faire 
place  à  de  nouveaux  fonctionnaires;  Ai  départements 
ayant  été  détacliés  du  territoire  français,  la  plupart  des 
agents,  devenus .  inutiles,  furent  mis  à  la  charge  des 
caisses  de  retenue.  Alors  les  pensions  montèrent  de  28 
à  02  millions.  Pour  garantir  aux  fonds  de  retenue  une 
comptabilité  régulière,  une  loi  du  28  avril  4816  chargea 
la  Caisse  des  dépôts  et  consip;natioDs  de  les  administrer. 
Pciidant  tout  le  gouvernement  de  la  Restauration,  et 
BOUS  le  règne  de  Loais-Philippe,  les  allocations  récl»- 
méca  par  les  catases  de  retenue  s*accrurent  d*année  en 
année;  on  discuta  plusieurs  projets  qui  avaient  pour  but 
d'établir  an  service  de  pensions  régulier  et  uniforme, 
mais  aucun  d*eux  n'aboutit  On  réela  seulement  les 
P'^nsions  de  Tarmée  de  terre  par  la  loi  du  11  avril  1831, 
et  celles  de  la  marine  par  la  loi  du  18  avril  de  la  même 
aonée  :  ces  lois  ont  été  modifiées  par  celles  des  15  et 
4  7  juin  1861.  Les  pensions  civiles  n'oQt  été  soumises  à 
une  règle  commune  et  uniforme  que  depuis  la  loi  du  0 
Juin  18.^3,  complétée  par  un  décret  du  9  novembre  sui- 
vanL 

I.  Pensions  civiles.  —  Tons  les  agents  rétribués  par 
rÉtat,  fonctionnaires  ou  employés,  sont  soumis  au  ver^ 
lement  de  la  retenue,  flxée  au  20*  de  leur  traitement; 
quand  ce  traitement  s*accroIt,  l'augmentation  du  premier 
mois  passe  également  à  la  caisse  des  retenues.  Les  mi- 
nistres, les  sous^secrétaires  d'État,  les  préfets  et  les  sous- 
firéfets  ne  sont  point  passibles  de  la  retenue.  Le  droit  à 
a  pension  de  retraite  est  acquis  à  60  ans  d'âge  et  à 
30  ans  accomplis  de  service.  La  pension  est  calculée  sur 
la  moyenne  des  traitements  touchés  pendant  les  6  der- 
nières années  ;  elle  est  réglée,  pour  chaque  année  de  ser- 
vice, au  60"  du  traitement  moyen,  sans  pouvoir  excéder 
les  2/3  de  ce  traitement  ni  être  supérieure  à  6,000  fr.  La 
veuve  d'un  fonctionnaire  mort  en  jouissance  de  pension 
ou  en  possession  de  droiu  à  cette  pension  a  droit  an 
tiers  de  la  pension  de  son  mari. 

Ces  règles  générales  souflfrent  quelques  exceptions. 
Ainsi,  pour  les  ambassadeurs ,  dont  quelques-uns  tou- 
chent des  traitements  de  150,000  et  200,000  fr.,  le  maxi- 
mum de  la  pension  de  retraite  a  été  élevé  à  12,000  fr. 
Aux  fonctionnaires  qui  ont  passé  15  ans  dans  les  emplois 
désignés  sous  le  nom  de  service  actif,  la  loi  ne  demande 

3ue  55  ans  d'âge  et  25  ans  de  service;  et  môme  ils  sont 
ispensés  de  toute  condition  d'&ge,  s'ils  sont  reconnus 
hors  d'état  de  continuer  leurs  fonctions.  En  outre,  les 
actes  de  dévouement  accomplis  et  les  accidents  éprouvés 
par  un  fonctionnaire  dans  l'exercice  de  ses  fonctions , 
s'ils  ont  eu  pour  effet  de  le  rendre  incapable  de  con- 
tinuer son  service,  créent  en  sa  faveur  un  titre  excep- 
tionnel à  la  pension;  les  infirmités  contractées  dans 
l'exercice  des  fonctions  permettent  nimi  d'abainer  la 
limite  d'Age  et  la  durée  du  service. 

Une  loi  du  11  sept.  1807  avait  constitué  de  hautes  pen- 
sions pour  les  grands  fonctionnaires  de  l'État  et  pour 
leurs  veuves;  des  abus  criants  la  firent  abroger  en  1832, 
et,  depuis  cette  époque,  le  gouvernement,  pour  récom- 
penser des  services  exceptionnels,  dut  présenter  aux 
Chambres  des  demandes  spéciales.  Une  loi  des  2-17  Juil- 
let 1856  a  accordé  à  l'Empereur  le  droit  de  donner  des 
pensions  au  maximum  de  20,000  fr.  aux  ministres,  aux 
présidents  des  grands  corps  de  l'État,  aux  ambassadeurs, 
ainsi  qu'à  leurs  veuves  et  à  leurs  enfants^  aux  veuves  et 
aux  enfanta  des  maréchaux  et  des  amiraux  :  ces  pensions 
ne  peuvent  être  cumulées  avec  d'autres;  un  fonds  de 
500,000  fr.  pour  cet  objet  est  inscrit  chaque  année  au 
budficct.  V.  Delarooue,  Codé  des  pensions  civiles,  1854, 
in-8";  Dareste,  Code  des  pensions  civilest  2*  édit.,  1858. 

II.  Pensions  militaires,  —  Jusqu'en  1855.  deux 
choses  ont  donné  droit  à  la  pension  de  retraite  :  l»  l'an- 
cienneté {IX)  ans  accomplis  de  service  effectif  dans 
l'armée  de  terre,  et  25  dans  l'armée  de  mer,  sauf  k 
ajouter  les  années  de  campagne  et  de  service  faites 
en  sus  du  taux  légal)  ;  2»  les  blessures  graves  et  incu- 
rables, provenant  d'événements  de  guerre,  d'accidents 
éprouvés  dans  un  service  commandé,  et  les  infirmités, 
également  graves  et  incurables,  résultant  des  fatigues 
ou  des  dangers  du  service  militaire.  Le  taux  des  pen- 
sions s'échelonna,  selon  les  grades,  depuis  365  fr.,  mi- 
nimum du  soldat,  iosqu^  6,UU0  fr.,  maximum  d'un  gé- 
néral de  division.  Une  loi  du  26  avril  1855  a  augmenté 
de  165  fr.  le  maximum  et  le  minimum  de  la  pension  de 
tetraite  fixés  par  la  loi  de  1831  pour  les  sous-officiers, 
caporaux,  brigadiers  et  soldats,  et  décidé  que  le  droit 
k  h  pension  par  ancienneté  serait  acquis  k  ces  militaires 
après  25  ans  de  service  effectif.  Des  règlements  minis- 


tériels fixèrent  fkge  de  la  retraite  des  colonels  k  60  ans, 
celui  des  lieutenants-colonels  k  58  ans,  celui  des  cbefi 
de  bataillon  ou  d'escadron  k  55  ans. 

D'après  la  loi  de  1831,  les  femmes  et  les  orphelins 
de  militaire  héritèrent  du  droit  k  la  pension  acquis  par 
leur  époux  et  leur  père,  pourvu  que  te  mariage  eût  été 
contracté  deux  ans  avant  la  cessation  de  l'activité  ou 
du  traitement  militaire  ;  lea  orphelins  de  père  et  de  mère 
conservèrent,  jusqu'k  ce  que  le  plus  jeune  eût  atteint  sa 
majorité,  cette  même  pension  de  retraite,  (}ui  était  fixée 
au  quart  du  maximum  de  la  pension  d'ancienneté  affec- 
tée au  grade  dont  le  défunt  était  titulaire,  aucune  tou- 
tefois ne  pouvant  être  moindre  de  100  fr.  Une  loi  du 

26  avril  in56  éleva  cette  pension  du  quart  k  la  moitié, 
pour  les  veuves  et  orphelins  des  militaires  et  des  marins 
qui  avaient  été  tués  sur  le  champ  de  bataille  ou  dans 
un  service  commandé,  ou  qui  étaient  morts  des  suites 
de  blessures  reçues  et  de  maladies  contractées  dans 
les  mêmes  circonstances.  La  pension  des  veuves  des 
maréchaux  de  France  fut  fixée  à  6,000  fr. 

Les  pensions  furent  réglées  comme  il  soit  : 

àfiut  c  DE  TEnns. 

Alinimum.  Htzimm^, 

Général  de  division 4,000  fr.  6,000  fr. 

Général  de  brigade 3,000  4,000 

Colonel 2,400  3,000 

Chef  de  bataillon  ou  d'escadron.  .  1,500  2,000 

Capitoine 1,200  1,600 

Lieutenant 800  1,200 

Sous-lieutenant 600  1,000 

Sergent-major 465  665 

Sergent 415  565 

Caporal 385  505 

Soldat 365  465 

ARUés  DE   UER. 

Vice-amiral 4,000  fr.  6,000  fr. 

Contre- amiral 3,000       4,000 

Gapiuine  de  vaisseau 2,400       3,000 

—  de  frégate 1,800       2,400 

—  de  corvette 1,500       2,000 

Lieutenant  de  vaisseau 1,200       1,600 

—        de  frégate 800  1,200 

Élève  de  marine. 600  1,000 

llaltre  entretenu  et  conducteur  de 

travaux  de  l'*  classe 6C0  1,000 

Maître  entretenu  et  conducteur  de 

2*  et  de  3"  classe 500  700 

Second  maître  et  contre-maître.  .415  565 

Aide  et  quartier-maître 385  505 

Matelot,  novice  et  mousse 365  465 

Les  pensions  militaires,  viagères  et  personnelles,  sont 
incessioles  et  insaisissables,  mais  passibles  de  la  retenue 
du  5*  dans  certains  cas  déterminés.  —  V,  le  SuppL 

m.  Pensions  ecclésiastiqws.  —  Un  décret  du  28  juin 
1853  a  institué  une  Caisse  de  retraite  pour  donner  des  pen« 
sions  aux  ecclésiastiques  kgés,  ou  infirmes  et  nécessiteux, 
qui  Justifient  de  plus  de  30  ans  de  services  et  qui  sont  pré- 
sentés par  l'évèque  diocésain.  Les  ressources  de  cette 
caisse  se  composent  :  1*  d'une  subvention  prélevée  an- 
nuellement sur  le  budget  des  cultes  ;  2**  des  intérêts  de 
la  dotation  de  cinq  millions  accordée  par  l'Empereur  sur 
le  produit  de  la  vente  des  biens  de  l'État  que  le  décret  du 

27  mars  1852  a  affecté  k  cette  destination;  3^  des  dons  et 
legs  faits  k  cette  caisse. 

RETRANCHEMENT,  en  termes  de  Fortification,  obstacle 
naturel  ou  artificiel  dont  on  se  Tortifie  contre  une  attaque 
ou  une  surprise  de  l'ennemi.  Les  retranchements  natu- 
rels sont  les  ravins,  les  cours  d'eau ,  les  marais,  les  escar- 
pements, les  bois,  etc.  Un  retranchement  artificiel  se 
compose,  soit  d'un  talus  en  terre  formé  des  déblais  de  la 
tranchée  et  sur  lequel  on  peut  dresser  des  palissades  ou 
des  chevaux  de  frise,  soit  d'ouvrages  détachés  qui  se  flan- 
quent réciproquement. 

RÉTROACTIVITÉ  (du  latin  rétro  agere,  agir  en  arrière, 
reculer),  caractère  d'une  loi ,  d'un  décret,  d'une  ordon- 
nance ou  d'un  règlement  qui  revient  aur  le  passé.  La  loi, 
dit  le  Code  Napoléon  (art.  2),  ne  dispose  que  pour 
l'avenir  ;  elle  n'a  point  d'effet  rétroactif.  Pour  qu'un  délit 
puisse  encourir  une  pénalité,  il  faut  que  cette  pénalité 
ait  été  édictée  et  en  vigueur  k  l'époque  où  le  délit  a  été 
commis  {Code  pénal ,  art.  4)  ;  si,  avant  le  Jugement,  une 
loi  fifiiaoe  le  caractère  de  délit  on  de  crime  attribué  k  l'ao» 


REV 


♦ 


1564 


RlïV 


tion  que  hi  Justice  poursuit^  Taccusé  doit  être  absous. 
V,  Maiiher  de  Chassât ,  Traite  de  la  rétroactivité  des  lois, 
1845,2  vol.  in-8». 

RÉTROCESSION  (du  latin  retrocedere,  rebrousser 
chemin),  action  de  remettre  à  une  personne  un  bien  ou 
un  droit  qu*elle  avait  précédemment  cédé. 

RETROGRADES  (Vers).  V.  Anacycuqob. 

RETROUSSIS ,  partie  dos  pans  ou  basques  d'un  habit 
qui  est  ou  qui  semble  retroussée;  —  pièce  de  cuir  de 
couleur  jaune  qui  se  rabat  ou  parait  se  rabattre  dans  le 
haut  des  bottes  à  revers. 

RETS  (du  latin  rete),  filet  de  chasse  ou  de  pèche  fait 
de  niuilles  carrées  ou  à  losanges. 

RÉUNION  (Droit  de).  V.  Association  polittqdb. 

RÊVE,  état  de  Tesprit  plongé  dans  le  sommeil  et  pon* 
dant  lequel  il  perd  la  direction  de  ses  pensées  ;  aussi  le 
rêve  est  généralement  regardé  comme  une  folie  passa- 
gère, résultant  des  sentiments,  des  idées  et  des  actes  de 
l'état  de  veille.  La  matière  et  la  forme  des  rêves  sont 
fournies  par  Tintelligence  et  l'imagination,  mais  sans 
ordre,  au  moins  apparent;  car,  si  nous  pouvions  saisir  la 
liaison  des  idées,  nous  trouverions  moins  d'incohérence 
entre  elles.  Quoique  Tàme  paraisse  entièrement  passive 
dans  le  rêve,  elle  n*a  cependant  pas  perdu  son  activité 
originelle  ;  il  arrive  même  quelquefois  (][u'on  saisit  par- 
faitement dans  les  rêves  certaines  volitioiis  du  moi;  ce 
qui  fait  défaut,  c'est  la  réflexion,  et  c'est  la  liberté  qui 
manque  plutôt  que  la  volonté.  Ce  qui  donne  au  rêve  son 
caract(*re  le  plus  frappant,  ce  sont  des  sensiitions  fausses, 
relatives  aux  sens  externes,  et  c'est  là  que  l'imagination 
joue  son  plus  grand  rôle.  Les  sensations  du  goût  et  de 
Vodorat  sont  les  moins  fréquentes,  celle  du  toucher  se 
reproduit  souvent;  mais  celles  qui  prennent  la  plus 
grande  part  aux  drames  fantastiques  des  rêves  sont  les 
sensations  de  l'ouïe  et  de  la  vue.  II  y  a  un  rapport  évi- 
dent entre  ces  phénomènes,  l'organisme,  et  Tétat  de 
santé  ou  de  maladie  :  les  rêves  des  malades  sont  encore' 
plus  décousus  et  plu^  extravagants  que  ceux  de  l'homme 
en  santé.  On  a  demandé  si ,  pendant  le  sommeil ,  l'&me 
rêve  toujours  ;  ceux  qui  penchent  pour  l'affirmative  s'ap- 
puient sur  ce  fait  que  l'&me  ne  cesse  jamais  entièrement 
de  penser,  et  que  d'ailleurs  il  est  certain  que  pendant  le 
sommeil  nous  exécutons  une  foule  de  mouvements  qui 
ne  s'expliquent  que  par  des  sensations  oubli<^es  au  réveil. 
—  Le  rêve,  à  l'état  de  veille,  ne  signifie  plus  que  chi- 
mère, et  se  rapproche  de  la  rêverie:  celle-ci  se  distingue 
du  rêve  proprement  dit,  en  ce  qu'elle  a  lieu  pendant  la 
veille,  et  que  l'esprit  se  complaît  dans  ses  illusions,  qui 
deviennent  des  rêveries  {V,  Sommeil,  Songe,  Sohnahbu- 
USMB  ).  R. 

RÉVÉLATION  (du  latin  re  pour  rétro,  en  arrière,  et 
vélum,  voile),  connaissance  que  Dieu  donne  à  l'homme, 
par  des  moyens  surnaturels,  de  vérités  importantes  que 
celui-ci  ne  pourrait  découvrir  par  les  seules  lumières  de 
sa  raison.  Toute  religion  positive  a  pour  base  une  révéla- 
tion, et  le  bouddhisme,  le  mahométisme  prétendent  être 
des  religions  révéla,  tout  au<%si  bien  que  le  christia- 
nisme. La  révélation  a  pris  différentes  formes  dans  l'his- 
toire :  tantôt  Dieu  se  met  en  communication  directe  avec 
l'homme,  comme  lorsqu'il  parle  à  Adam  dans  le  Paradis 
terrestre  ou  à  Moïse  sur  le  mont  Sinaî;  tantôt  il  revêt  la 
figure  humaine ,  ainsi  qu'il  arriva  dans  l'incarnation  de 
Jésus-Christ;  tantôt  il  envoie  un  Ange  annoncer  quelque 
^nd  événement;  ou  bien  enfin  il  procède  par  pure 
inspiration,  comme  à  l'égard  de  ceux  qui  écrivirent  l'An- 
cien et  le  Nouveau  Testament.  Des  livres,  qui  demeurent, 
en  général,  dans  les  mains  d'un  corps  sacerdotal,  con- 
tiennent la  doctrine  révélée,  qui  peut  ainsi  se  transmettre 
d*&ge  en  âge. 

RÉVÉLATION ,  en  termes  de  Droit,  est  synonyme  de  Dé- 
nonciation, avec  ce  caractère  qu'elle  suppose  complicité 
dans  le  crime  dénoncé.  V,  Délation,  Dénonciation. 

REVENDICATION  (du  latin  rem  vindicare,  réclamer 
une  chose  qui  nous  appartient),  action  par  laquelle  le 
propriéttiire  d'une  chose  la  réclame  à  celui  qui  l'en  a  in- 
justement di^pouillé  ou  qui  eu  est  détenteur  {Code  Na" 
poléon,  art.  649  et  930).  Le  mot  est  svnonyme  de  Âe- 
pétilion  et  d^ Action  en  restitution  (K.  ces  mots).  La 
ri'vendication  de  marchandises  vendues  et  livrées  à  un 
failli ,  et  dont  le  prix  n*a  pas  été  payé,  est  soumise  à  des 
règ'^s  particulières. 

HF.VKNU,  somme  des  profits  qu'une  personne  retire 
des  fonds  productifs  qu'elle  possède,  c.-à-d.  de  ses  terres, 
de  ses  capitaux ,  de  sa  capacité  industrielle,  etc.  Le  mot 
s'emploie  comme  synonyme  do  rente  et  d*tntérét.  Le 
B0verm  public  comprend  tout  ce  que  l'État  retire,  soit  de 


ses  propriétés  (revenu  domanial)^  soit  des  contribudons 
prélevées  sur  les  citoyens  {revenu  fiscal)^  soit  de  services 
spéciaux  qu'il  rend  aux  particuliers,  comme  le  transport 
des  dépêches,  le  monnayage  des  métaux,  la  fabrication 
des  poudres  et  salpêtres,  le  commerce  des  tabacs  {revenu 
industriel). 

RKVENt;  (Impôt  sur  le).  V.  Impôt. 

RÉVERBÈRE,  grande  lanterne  en  fer  battu,  vitrée  toui 
autour  et  en  dessous,  et  contenant  une  lampe  munie  d'un 
ou  de  plusieurs  réflecteurs,  et  dont  on  se  sert  pour  l'éclai- 
rage public  dans  les  localités  où  Téclairage  au  gaz  n'a 
point  pénétré.  Les  réverbères  furent  introduits  à  Paris 
en  1766. 

RÉVÉRENCE.  F.  notre  Dictionn.  de  Biog.  et  d: Histoire, 

REVlilRS ,  côté  d'une  médaille  opposé  à  la  fttce. 

RËVERSALES  (Lettres),  déclaration  par  laquelle  an 
État  s'engage  à  ne  pas  contrevenir  à  un  usage  établi  ou  ï 
des  arrangements  antérieurement  convenus. 

RÉVERSION,  terme  de  Droit.  V.  Retour. 

REVERSiS ,  jeu  de  cartes  qui  se  joue  à  quatre  per* 
sonnes,  avec  on  jeu  complet  dont  on  a  retiré  les  dix. 
Chaque  joueur  reçoit  11  cartes,  et  il  en  reste  4  au  talon. 
La  règle  générale  est  de  ne  faire  aucune  levée ,  ou  de 
réunir  le  moins  de  points  possible  dans  celles  qu'on  s'est 
vu  forcé  de  faire.  Ces  points  se  comptent  ainsi  :  l'as  4, 
le  roi  3,  la  dame  2,  le  valet  1.  On  se  débarrasse  donc,  en 
renonce,  de  ses  plus  grosses  cartes,  ou  l'on  joue,  sur  les 
cartes  moyennes,  des  cartes  basses  de  la  m  Ame  couleur. 
La  carte  principale  est  le  valet  de  cœur,  appelé  quinola, 
il  ne  faut  ni  le  jouer  le  premier,  ni  le  donner  sur  du 
cœur,  mais  toujours  en  renonce;  si  l'on  s'en  débarrasse, 
on  gagne,  non-seulement  le  panier  des  bêtes  ou  mis  -s, 
mais  une  contribution  convenue  du  joueur  qui  Ta  reçu; 
s'il  est  placé  à  la  bonne,  c-à^i.  à  la  dernière  levée,  le 
payement  est  double;  s'il  fait  levée,  on  double  le  panier, 
et  on  donne  une  consolation  au  joueur  par  qui  l'on  a  été 
forcé.  La  réunion  des  4  as,  ou  3  as  et  le  quinola,  forment 
espagnolette,  et  donnent  le  droit  de  renoncer  en  toutes 
couleurs  pendant  les  9  premières  levées,  avantage  qui 
fait  presque  toujours  gagner  la  partie.  —  Le  rêverais  est 
d'origine  espagnole;  son  nom  vient  du  latin  reversus  (re- 
tourné ),  parce  qu'au  rebours  des  autres  jeux  on  y  gagne 
en  faisant  le  moins  do  levées. 

REVERTIER  ou  REVERQUIER ,  jeu  qui  se  joue  sur  un 
trictrac,  et  qui  consiste  à  faire  revenir  toutes  ses  dames 
dans  la  table  d'où  elles  sont  sorties. 

REVÊTEMENT,  en  termes  d'Architecture,  placage  de 
plâtre,  de  mortier,  de  bois,  de  stuc,  de  marbre,  etc., 
qu'on  fait  à  une  construction,  pour  la  rendre  plus  solide 
ou  plus  riche.  On  donne  le  même  nom  au  mur  ordinai- 
rement en  talus  qui  sert  à  fortifier  l'escarpe  ou  la  con- 
trescarpe d'un  fossé,  ou  à  retenir  les  terres  d'un  fossé» 
d'un  bastion,  d'une  terrasse. 

revêtement  (i>emi-).  V.  Deui-revAtement. 

REVINCTUM  OPUS.  V.  Appareil. 

RÉVISEURS,  officiers  de  la  Chancellerie  romaine  char- 
gés par  le  datai  re  de  réduire  aux  termes  de  Droit  les  sujh 
pliques  adressées  à  la  cour  de  Rome. 

RÉVISION ,  action  de  revoir,  d'examiner  de  nouveau. 
On  se  sert  de  ce  mot,  en  Politique,  pour  désigner  les 
modifications  que  Ton  fait  subir  par  des  voies  lé^les  aux 
traités,  aux  lois,  aux  Constitutions  dont  on  a  reconnu  les 
inconvénients.  —  En  Jurisprudence ,  la  Révision  est  an 
nouvel  examen  d'un  procès  qui  a  été  jugé  en  dernier 
ressort  II  y  a  lieu  à  révision  :  l'^  lorsque  deux  accusés 
ont  été  condamnés,  chacun  comme  unique  auteur  du 
même  crime,  par  deux  tribunaux  différents;  le  ministre 
de  ta  justice,  soit  d'ollice,  soit  sur  la  réclamation  des  con- 
damnés, ou  de  l'un  d'eux,  ou  du  procureur  générai,  fait 
dénoncer  les  deux  arrêts  à  la  Cour  de  cassation,  qui  les 
casse  et  renvoie  les  accusés  devant  une  autre  Cour; 
2"  lorsqu'après  une  condamnation  pour  homicide  on  dé- 
couvre l'existence  de  la  personne  dont  la  mort  supposée 
a  donné  lieu  à  la  condamnation  ;  si  le  condamné  n'existe 
plus,  la  Cour  de  cassation  nomme  un  curateur  à  ta  m^ 
moire,  avec  lequel  se  fait  la  nouvelle  instruction  ;  3**  lors- 
qu'une Cour,  convaincue  que  les  jurés  se  sont  tiomp-*'*» 
au  fond,  renvoie  l'affaire  à  la  session  suivante  pour  virt 
soumise  à  un  nouveau  jury,  mesure  qui  ne  peut  être 
prise  qu'en  faveur  de  l'accusé,  jamais  contre  lui. 

RévisioN  (Conseil  de).  V.  Conseil  de  révision,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d*  Histoire. 

révision  (Tribunal  de),  tribunal  permanent,  ecabli 
dans  chaque  arrondissement  maritime,  pour  juger  les 
appels  des  tribunaux  maritimes.  Il  est  composé  du  major 
général  de  la  marine,  président  «  et  de  4  Juges  :  le  préà- 


REV 


1565 


RHË 


dent  da  tribunal  de  l'«  instance,  le  procureurde  la  ré* 
publique,  un  capitaine  de  vaisseau,  et  un  commiNsair» 
de  ta  marine.  It  y  a  près  chaque  tribunal  de  révision 
an  commissaire  public,  nui  est  un  officier  supérieur 
du  corps  de  la  marine  ou  ae  celui  du  commissariat.  Si 
le  tribunal  dont  le  jugement  a  été  attaqué  était  présidé 
par  un  officier  général,  le  tribunnl  de  revision  doit  être 
[iréîiidé  par  un  ofîlcier  du  mArae  grade  ;  le  miyor  général, 
s'il  n'a.  pa.4  ce  grade,  ne  siège  que  comme  jutre,  et  le 
capitaine  de  vaisseau  ne  prend  point  part  à  l'afTaire. 

RévisioN  DE  COMPTE,  Opération  qui  se  fait  quand  il  y  a 
en  erreurs,  omissions,  doubles  emplois  ou  faux  dans  un 
compte.  La  demande  de  révision  doit  être  portée  devant 
les  mômes  Juges  qui  ont  connu  du  compte  {Code  de  Fro- 
idure civile^  art.  541  ). 

nÉVOCATION,  action  de  retirer  une  fonction  ou  des 
privilèges  concédés  soit  à  une  personne,  soit  à  une  classe 
de  citoyens.  —  En  Droit ,  une  donation  entre-vifs  peut 
être  révoquée  en  certains  cas  {V,  Donation).  Les  dona- 
tions entre  époux  faites  pendant  le  mariage  sont  toujours 
révocables  {Code  Napoléon,  art.  1090).  Il  en  est  de 
même  des  mandats  (  art.  2003  ).  Un  testament  peut  être 
révoqué.  V.  Tkstahfnt. 
RÉVOLTE.  F.  RÉBELLION. 

RÊ\0LUTION  (du  latin  revolvere,  rouler,  revenir  sur 
soi  ),  tout  changement  considérable  qui  s*opère  dans  le 
gouvernement  et  les  lois  des  nationa,  dans  les  mœurs, 
dans  les  opinions,  dans  les  sciences  et  les  arts. 

REVOLVER,  mot  anglais  qui  désigne  un  pistolet  à 
plusieurs  canons ,  inventé  aux  États-Unis  par  le  colonel 
Coït ,  et  avec  lequel  on  peut  tirer  rapidement  plusieurs 
coups  de  suite.  Les  canons  sont  tournants,  et,  quand  on 
monte  le  chien ,  cela  met  en  mouvement  un  levier  qui 
opère  la  rotation. 

REVUE ,  en  termes  d*Art  militaire,  inspection  qu*un 
offîrier  supérieur  fait  d*un  corps  de  troupe  rangé  en  ba- 
taille. Il  en  examine  la  tenue,  et  lui  fait  exécuter  quelques 
manœuvres. 

REVUE,  sorte  de  journal  périodique  qui  paraît  à  des  in- 
tervalles plus  ou  moins  rapprochés,  et  qui  a  pour  objet 
de  ptuser  en  revue  les  questions  à  l'ordre  du  jour  dans 
les  lettres,  les  scienres,  les  arts  et  la  politique.  Les  Re- 
vues ont  généralement  le  format  des  livres,  et  beaucoup 
d'écrits  ont  passé  par  elles  avant  d'être  mis  en  volum&s. 
C'est  en  Angleterre  que  ce  genre  de  publication  a  pris 
naissance,  et  ^u'il  a  conquis  aussi  la  plus  grande  impor- 
tant^' ;  à  la  différence  des  Revues  françaises,  où  la  per- 
sonnalité dpfl  auteurs  tient  une  place  considérable,  les 
Revnes  anelaises  ne  contiennent  que  des  articles  ano- 
nymes. Tandis  que  la  presse  quotidienne  ne  donne  au- 
cune considération  aux  journalistes,  les  Revues  donnent 
à  leurs  écrivains  une  position  et  parfois  la  direction  dea 
alTairuH,  |)arce  qu'elles  représentent  de  grands  partis  po- 
litiques. Elles  publient  ces  Essais  qui  forment  une  si 
notable  portion  de  la  littérature  anglaise  moderne,  et 
rintér^^t  qui  s*attache  à  elles  est  si  vif,  qu'elles  peuvent 
ne  paraître  que  tous  les  trois  mois  et  cependant  ne  point 
décourager  leurs  lecteurs.  Le  Monthly  Hevieio  date  do 
1749,  et  le  Critical  Review  de  i7;t6;  mais  ces  deux  Re- 
vues n'atteignirent  jamais  la  hauteur  où  devait  parvenir 
la  Revue  d'Edimbourg,  fondée  en  1808  par  Sidney  Smith, 
Jeffrey,  Brougham ,  Leslie  et  Playfair,  auxquels  se  joi- 
gnirent bientôt  Mackintosh,  Hazzlet,  Bamilton,  etc.  Puis 
on  vit  s'élever  la  Quarterly  Review  (1800),  la   West^ 
minster  Review ,  la  Foreign  Review,  la  London  Review, 
f^  Weekly  Review.  —  La  France  voulut  suivre  Texemple 
de  l'Angleterre;  mais  ses  Revues  ont  pris  de  jour  en  jour 
un  caractère  plus  frivole,  en  admettant  le  roman,  la 
nouvelle,  le  proverbe.  Les  plus  anciennes  se  consacrèrent 
à  peu  orès  exclusivement  à  la  critique  :  ce  furent  la  Revue 
philosophique,  qui  succéda  à  la  Décade,  et  une  Revue 
encyclopédique,  qui  subsista  de  1819  à  1831.  En  1825, 
commença  la  Revue  Britannique,  composée  d'articles 
traduits  des  diverses  Revues  anglaises,  et  qui  subsiste 
encore  aujourd'hui.  Après  la  Révolution  do  18^0,  la  Revue 
des  Deux  Mondes  et  la  Revue  de  Paris  commencèrent 
leur  brillante  existence    la  première,  dirigée  par  M.  Bu- 
lok,  èi  dont  George  Sand,  A.  de  Musset,   Mérimée, 
Sainte-Beuve,  Aug.  Thierry,  Alfred  de  Vigny,  E.  Quinet, 
Pliilarète  Cbaales,  Lerminier,  etc.,  firent  la  réputation, 
a  pris  et  conservé  la  position  la  plus  élevée;  la  seconde, 
à  laquelle  collaborèrent  Ch.  Nodier,  Balzac,  Alex.  Dumas, 
Cessa  de  paraître  en  18i5.  Une  Revue  du  Progrès,  que  le 
talent  de  Louis  Blanc  ne  put  faire  vivre,  fut  remplacée 
m  1841,  pour  le  parti  démocratique,  par  la  Revue  tndé' 
tendante,  où  travaillaient  Pierre  Leroux,  George  Sand 


et  Lamennais,  et  qui  subsista  jusqu'en  1848.  La  Revuê 
nouvelle,  entreprise  à  peu  près  vers  la  mf^me  époque, 
s'éteignit  après  un  an  d'existence,  bien  que  soutenue  par 
le  gouvernement.  Une  nouvelle  Revue  encyclopédique, 
non  politique,  parut  en  1840,  et  ne  vécut  que  deux  ans. 
Depuis  la  Révolution  de  1848,  les  seules  Revues  impor- 
tantes que  l'on  ait  fondées  sont  la  Revue  contemporaine, 
la  Revue  eurtypéenne,  qui  a  duré  deux  ans  à  peine,  la 
Revue  germanique,  la  Revue  nationale.  D'autres  recueils 
sont  étrangers  aux  questions  politiques  ;  par  exemple,  la 
Revue  philologique  de  M.  Léon  Renier,  la  /fetnie  archéolo- 
gique  de  M.  Leleux ,  diriKée  par  M.  L.  Renier  depuis 
1800,  la  Revue  numismatique  de  M.  de  La  Saussa^re,  la 
Revue  de  législation  de  M.  Wolowski ,  la  Revue  scienti- 
flque  du  D*"  Quesneville,  la  Revue  de  l'Orient ,  etc. 

REVUE,  nom  donné,  dans  le  langage  du  Théâtre,  a  aea 
pièces  de  circonstance  jouées  sur  les  thé&tres  de  vaude- 
ville vers  la  fin  de  chaque  année,  et  où  Ton  passe  en 
revue  les  événements  plus  ou  moins  comiques,  les  modes, 
les  bévues,  les  ridicules  de  cette  année.  Ce  sont,  en  gé- 
néral ,  dn  très-médiocres  compositions. 

REYNOLD  (  Code),  code  de  signaux  maritimes,  inventé 
par  Reynold  de  Chauvancy,  lieutenant  de  port  à  l'île  de 
La  Réunion,  et  rendu  obligatoire  à  bord  de  tous  les  na- 
vires de  commerce  français  depuis  1855. 

REZ-DE-CHAUSSLE,  partie  d'une  maison  qui  est  au 
niveau  du  terrain ,  immédiatement  au-dessus  des  sous- 
sols  et  des  caves. 

REZ-MUR,  surface  des  gros  murs  en  dedans  de  l'œuvre. 

RHAMESSÉUM.  V.  TnkBES. 

RHAPSODES.  (  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

RHEDA.  )     de  Biographie  et  d* Histoire, 

RHÉTEUR,  nom  qu'on  donnait  dans  l'Antiquité  à  ceux 
qui  faisaient  profession  d'enseigner  l'éloquence  et  qui  en 
avaient  laissé  des  préceptes. 

RHÉTIEN  (Idiome),  appelé  aussi  rhéto^romain,  rO" 
manche  ou  roumancJie,  idiome  parlé  dans  le  canton 
suisse  des  Grisons.  Il  appartient  au  groupe  des  langues 
romanes  ou  néo-latines,  et  s'est  formé  à  la  suite  de  l'oc- 
cupation du  pays  par  les  Romains  :  il  contient  un  cer- 
tain nombre  de  racines  celtiques,  antérieures  à  la  con- 
quête, et  des  mots  franciques  ou  tudesques  en  plus  grande 
quantité  qu'aucun  autre  idiome  du  mAme  groupe.  On  y 
distingue  deux  dialectes  :  le  rumonique,  parlé  à  Coire, 
dans  toute  la  vallée  du  haut  Rhin,  et  près  des  sources 
de  ce  fleuve,  et  le  ladinique,  dominant  dans  l'Engadine, 
sur  les  deux  rives  de  l'Inn. 

RHÉTORIQUE  (du  grec  érô  ou  rliéô,  dire),  art  de 
parler.  —  Définitions  et  caractères,  —  Quintilien,  après 
avoir  critiqué  plusieurs  définitions  de  la  Rhétorique, 
s'arrête,  à  une  formule  adoptée  généralement  apr^s  lui, 
et  la  plus  convenable,  dit-il,  d  l'essence  de  l'art  oratoire  : 
«  La  Rhétorique  est  l'art  de  bien  dire,  définition  qui 
comprend  d'un  mot  toutes  les  qualités,  et  ensemble  les 
mœurs  mêmes  de  l'orateur;  car  il  lui  est  impossible  de 
bien  dire,  s'il  n'est  homme  de  bien.  »  La  définition 
d'Aristote,  sous  une  formule  un  peu  sèche,  n'est  paa 
moins  belle  ni  moins  féconde  :  «  La  Rhétorique  est,  dit- 
il,  la  faculté  de  découvrir  tous  les  moyens  possibles  de 
persuader  sur  quelque  point  que  ce  soit.  > 

L'Éloquence  est  le  talent  de  persuader,  c-à-d.  le  don 
naturel  et  l'art  tout  ensemble.  La  Rhétorique  n'est  que 
Vart,  c-à-d.  la  réflexion  ot  la  méthode  appelées  au  se- 
cours des  dons  naturels.  «  Ses  préceptes,  fondés  sur  les 
principes  du  bon  sens  et  de  la  droite  raison ,  ne  sont 
autre  chose  que  des  observations  {udicieuses,  faites  par 
d'habiles  gens  sur  les  discours  de»  meilleurs  orateurs, 
qu'on  a  ensuite  rédigées  par  ordre  et  réunies  sous  de  cer- 
tains chefs;  ce  qui  adonné  lieu  de  dire  que  l'éloquence 
n'était  pas  née  de  l'art,  mais  que  l'art  était  né  de  l'élo- 
quence. B  (Rollin,  Traité  des  Etudes,  ni,  1.) 

Utilité  et  moralité  de  la  Hh^torique,  —  Nous  avons 
montré  ailleurs  (  V^.  Éloquence),  par  des  exemples  em- 

f^runtés  aux  œuvres  des  poètes,  que  la  Rhétorique  ou 
'art  oratoire  fait  la  supériorité  de  l'éloquence  savante 
sur  l'éloquence  naturelle.  A  plus  forte  raison  en  est-il  de 
même  chez  les  orateurs.  L'éloquence  instinctive  eût -elle 
plaidé  seule  ce  grand  procès  de  la  Couronne,  où,  dans  la 

(personne  d'Eschine  et  de  Démosthène,  étaient  en  cause 
a  politique  et  la  gloire  d'Athènes?  La  haine  eût-elle 
dicté  seule  à  Cicéron  les  Calilinaires  et  les  Philxppiques? 
Dans  l'éloquence  religieuse,  la  foi  et  la  piété  eussent- 
elles  inspiré  toutes  seules  l'ordre  merveilleux  et  la  pro- 
gression irrésistible  des  Sermons  et  des  Oraisons  /»• 
fi^6rM  de  Bossuet,  et  la  Rhétorique  admirable  que  l'on 
pourrait  tirer  de  ce  grand  homme?  On  lait  quelles  études 


RUE 


1566 


RHO 


solides  les  orateurs  de  la  Révélation  mirent  ao  serrioe 
des  idées  nouvelles  et  des  passions  ardentes  de  leur 
époque.  La  Rhétorique  est  moins  populaire  aujourd'hui. 
Les  uns,  trop  familiarisés  avec  elle,  en  connaissent  trop 
bien  les  procédés  et  le  mécanisme.  Les  autres  la  dédai- 
gnent par  une  sorte  d*insouciance  rustique,  et  croient 
parler  toujours  assez  bien  du  moment  quMls  se  font  en- 
tendre. D'autres,  admirateurs  exclusifs  des  sciences,  ne 
demandent  aux  orateurs  que  la  clarté  et  la  précision  du 
langage  scientifique,  sans  croire  que  les  sentiments  et  les 
idées  aient  rien  à  démêler  avec  les  règles  traditionnelles 
de  la  composition  et  du  style.  Ni  Thomme  ni  les  choses 
n*onr  thangé  cependant.  La  chaire,  le  barreau,  l'Aca- 
démie, renseignement,  sans  être  livrés  aux  rhéteurs, 
usent  toujours  de  la  Rhétorique.  Les  orateurs  de  nos 
assemblée  politiques  ne  se  condamnent  plus  sans  doute 
aux  études  minutieuses  demandées  par  Gicéron  et  par 
Quintilien  ;  mais  ils  n*en  obéissent  pas  moins  comme  eux, 
depuis  an  demi-siècle,  aux  lois  essentielles  de  la  logique 
et  de  l'expérience,  sur  lesquelles  la  Rhétorique  est  fon- 
dée. Les  hommes  se  succèdent  à  la  tribune  :  l'éloquence 
parlementaire  réussit  tour  à  tour  par  ta  gravité  austère 
et  puissante,  par  Tabondance  pénétrante  et  lumineuse, 
par  le  pathétique  d*un  geste  oratoire  et  d'une  voix  mélo- 
dieuse, par  l'infatigable  habileté  d'une  logique  incisive  et 
mordante.  Mais,  sous  la  variété  des  noms  et  des  talents, 
.  où  le  public  reconnaît  toujours  l'éloquence,  l'homme  de 
goût  retrouve  toujours  l'intelligence  et  la  pratique  des 
grandes  règles  oratoires.  Non,  la  Rhétorique  n'est  pas 
une  vaine  science  de  mots  et  de  phrases  symétriques. 
Ne  lui  reprochons  pas  non  plus  avec  Platon  (un  si  grand 
orateur  cependant,  et  an  rhéteur  si  habile  !  )  qu'elle  n'est 
bonne  à  rien,  parce  qu'elle  sert  à  tout  et  n'a  pas  d'ap- 
plication spéciale.  La  Rhétorique  est  l'art  de  la  parole 
mis  à  la  portée  de  tout  le  monde,  et  le  développement 
méthodique  et  réglé  d'une  faculté  universelle. 

Il  n'est  pas  besoin  de  démontrer  l'utilité  morale  de  la 
Rhétorique.  Souvent  attaquée  parce  qu'elle  donne  les 
moyens  de  plaider  lo  pour  et  le  contre,  elle  ressemble  par 
cet  endroit  à  toutes  les  forces  de  la  nature,  qui  s'em- 
ploient au  mal  comme  au  bien.  On  connaît  l'apologue 
d'Ésope  servant  des  langues  à  son  maître  Xantus,  comme 
la  meilleure  et  la  pire  chose  qui  soit  au  monde.  «  La 
mer,  dit  Montesquieu,  engloutit  les  vaisseaux  ;  elle  sub- 
merge des  pays  entiers;  et  elle  est  pourtant  utile  aux 
humains.  »  La  Rhétorique  est  comme  la  mer  :  elle  porte 
son  remède  avec  elle,  et  guérit  les  plaies  qu'elle  a  faites. 
Elle  fait  descendre  plus  aisément  la  vérité  parmi  les 
hommes;  elle  empêche  les  erreurs  de  la  Justice;  elle 
combat  ses  propres  excès,  et  corrige  même  les  scandales 
qu'elle  donne.  Enfin,  comme  le  remarque  Aristote,  la 
bonne  caase  est  plus  facile  à  plaider  que  la  mauvaise,  et 
le  bien  se  défend  plus  éloquemment  que  le  mal.  S'il  en 
était  autrement,  et  que  l'homme,  entre  le  sophisme  et  la 
vérité,  s'attach&t  toujours  au  premier  par  instinct  et  par 
intérêt,  il  faudrait  accuser  la  Providence. 

Division  de  la  Rhétoriqw,  —  Tous  les  rhéteurs  ont 
divisé  la  Rhétorique  en  trois  parties,  V invention,  la 
Disposition,  et  VÊlocution,  —  Si  le  sujet  est  laissé  à  la 
discrétion  de  l'orateur  et  de  l'écrivain ,  Vlnvention  le 
trouve  et  le  choisit.  Si,  comme  il  arrive  d'ordioaire  à 
l'oratcnr,  le  sujet  est  donné,  Vlnvention  fournit  les  idées 
et  les  développements  qui  s'y  rattachent,  les  preuves,  les 
arguments,  le  ton,  les  mœurs,  les  passions,  en  un  mot, 
les  moyens  de  la  persuasion.  —  La  Disposition  déter- 
mine l'ordre  de  ces  moyens  et  l'emploi  de  ces  matériaux , 
les  rapports  et  la  progression  des  idées  et  des  sentiments, 
les  divisions  et  le  plan  du  discours.  —  L'i^^ocution  ou  le 
style  traduit  par  le  langage  les  résultats  de  Vlnvention 
et  de  la  Disposition;  elle  ajoute  à  leur  puissance  la  vi- 
gueur et  l'éclat  de  l'expression. 

On  voit  que  cette  ai  vision  est  commune  à  la  Rhéto- 
rique et  à  tous  les  arts.  Le  peintre,  comme  l'orateur  et 
comme  le  poâte,  détermine  en  idée  les  personnages,  les 
épisodes,  les  plans  de  son  tableau  ;  il  les  dispose  et  en 
arrête  l'ordonnance  générale  avant  de  commencer  l'ébau- 
che; il  peint  enfin,  et  la  couleur  est  pour  lui  ce  que  le 
style  est  pour  Pécrivain. 

A  ces  trois  parties  de  la  Rhétorique,  que  Gicéron  ap- 
pelle les  membres  de  Véloquence,  il  en  ajoute  deux, 
VAction  et  la  Mémoire.  L'action  est  la  traduction  du 
discours  par  la  voix  et  le  geste.  Gelle  des  Grecs  et  des 
Romains  était  bien  plus  passionnée  et  plus  violente  que 
la  nôtre.  L'orateur  frappait  du  pied;  il  déchirait  la  robe 
de  son  client  pour  montrer  les  blessures  qu'il  avait  re- 
çues pour  son  pays.  La  tribune  était  pour  lui  un  pié- 


destal et  comme  an  théâtre  où  il  paraissait  tout  entier. 
On  sait  que  Démosthène  proclamait  Vemtion  à  la  fois  la 
première,  la  seconde  et  la  troisième  condition  de  l'élo- 
quence. Les  Modernes  ont  plus  d'écrivains  que  d'orateurs. 
L'action  oratoire  est  d'ailleurs,  de  nos  jours,  bien  plus 
calme  et  plus  modérée.  L'orateur  à  la  tribune,  l'avocat 
au  tribunal,  le  prédicateur  dans  la  chaire,  sont  cachés 
Jusqa'à  la  moitié  du  corps.  L'action  a  donc  perdu  natu- 
rellement le  caractère  tbé&tnJ  qu'elle  avait  chez  les 
Grecs  et  chez  les  Romains.  -Gependant  on  peut  voir,  dans 
le  second  DicUogue  sur  Véloquence,  que  Fénelon  la  re- 
commande au  prédicateur,  et  en  donne  les  règles.  Les 
avocats  et  les  orateurs  en  savent  encore  mieux  le  prix; 
car  l'auditeur  est  toujours  sensible  à  son  influence.  ^ 
La  Mémoire  était  encore  une  partie  accessoire  de  la  Rhé- 
torique, élevée  au  rang  d'une  science,  objet,  sous  1« 
nom  de  Mnémoniqiie,  d'études  longues  et  minutieuses. 
On  en  trouvera  les  singuliers  détails  dans  Gicéron. 

L'Invention  oratoire  se  divise  en  trois  parties,  les  Preu" 
vesy  les  Moeurs,  et  les  Ptissions;  la  Disposition  com- 
prend les  subdivisions  du  discours,  Exorde ,  Confir- 
motion  f  Péroraison,  et  les  antres.  Pour  ces  différentes 
matières,  ainsi  que  pour  VÊlocution  et  le  Style,  no"S 
renvoyons  aux  articles  spéciaux  où  elles  sont  traitées. 

V.  chez  les  Anciens  :  Aristote,  Rhétorique;  Longin, 
Traité  du  sublime:  Gicéron,  les  ouvrages  techniques,  les 
deux  grands  Dialogues  sur  i'orofeur  et  les  orateurs  cé- 
lèbres,  et  le  Traité  de  V orateur;  Quintilien,  V Institution 
oratoire;  Tacite,  Dialogue  sur  les  causes  de  la  corruption 
de  Véloquence;  S'  Aujiçustin,  la  Doctrine  Chrétienne;  — 
chez  les  Modernes  :  Fénelon,  Dialogues  sur  l'éioquence; 
RoUin,  Trailédes  Éludes;  Crévier,  Rhétorique  française  ; 
l'abbé  Batteux,  Principes  de  littérature;  Dumarsals, 
Traité  des  tropes;  Marmontel,  Éléments  de  liltéralure; 
Maury,  Eloquence  de  la  chaire:  Blair,  Cours  de  Rhéto- 
rique; Victor  Le  Clerc,  Rhétorique,  etc.  A.  D. 

RfléroRiQDB  (Ghambres  de).  K.  Ghaiibrcs  db  anéro- 
RiQUB,  dans  notre  Dictionnaire  de  BiogrcBphie  et  d^His- 
totre. 

RHÉTO- ROMAIN  (Idiome).  V.  Rnéncpi. 

RUINGRAVË.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictumntùre  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

RHODES  (Golosse  de),  fameux  monument  de  l'anti- 
quité, au  sujet  duquel  les  érudits  sont  loin  d'être  d'ac- 
cord, et  que  Muratori  a  même  traité  de  chimère.  Selon  la 
tradition  générale,  c'était  une  statue  en  bronze  d'Apollon 
ou  du  Soleil ,  érigée  par  reconnaissance  envers  ce  dieu, 
protecteur  des  Rbodiens,  et  envers  Ptolémée  Soter  qui  les 
avait  délivrés  de  l'armée  de  Démétrius  Poliorcète.  Elle 
fut  faite  vers  300  ou  280  av.  J.-C.,  par  Gharès  de  Un- 
dos,  disciple  de  Lysippe;  Pline  l'attribue,  au  contraire,  à 
Lâchés,  statuaire  du  même  pays,  qui  aurait  consacré  i^  ans 
à  cette  œuvre.  Elle  avait  70  coudées  de  hauteur  (32  met.)  ; 
peu  d'hommes  pouvaient  embrasser  son  pouce,  et  la  lon- 
gueur de  ses  doigui  surpassait  la  hauteur  des  statues  ordi- 
naires. On  avait  aflfermi  cette  masse  de  métal ,  en  l'em- 
plissant de  grosses  pierres.  La  dépense  fut  de  300*talents 
(1,050,000  fr.  ).  Le  colosse  de  Rhodes  fut  renversé  par 
un  tr^oiblement  de  terre,  56  ans  après  son  érection.  En 
055,  ies  Arabes  le  mirent  en  morceaux,  qu'ils  vendirent  à 
un  Juif  d'Emèse;  il  aurait  fallu ,  dit-on,  900  chameaux 
pour  emporter  la  charge,  ce  qui ,  à  400  kllogr.  par  cha- 
meau, donnerait  un  poids  de  300,000  kilogr.  L'écartpment 
des  Jambes  du  colosse  ne  pouvant ,  d'après  sa  hauteur, 
être  de  plus  de  12  met.,  il  n'a  pu  être  placé,  comme  le 
dit  la  tradition,  à  l'entrée  du  grand  port,  où,  d'ailleurs, 
le  tremblement  de  terre  l'eût  précipité  dans  les  flots.  Il 
était  au  fond  du  port  et  en  face  de  l'entrée ,  devant  le 
bassin  des  galères,  au-dessus  de  deux  tours  qa'on  voit 
encore  aujourd'hui. 

RUODIEN  (Style],  genre  de  style  mixte,  qui  tenait  le 
milieu  entre  la  sobriété  attiqûe  et  fabondance  molle  et 
pompeuse  du  style  asiatique.  Il  était  caractérisé  par  une 
certaine  langueur,  un  certain  laisser-aller,  qui  n'était 
pas  sans  consistance  :  un  critique  de  l'antiquité  disait 
qu'on  ne  pouvait  pas  le  comparer  à  l'eau  d'une  source 
limpide  ni  à  celle  d'un  torrent  limoneux,  mais  au'il  of- 
frait plutôt  l'image  d'un  lac  paisible.  Son  dom  lui  vint 
de  ce  qu'on  le  remarqua  pour  la  première  fois,  dans  le 
m*  siècle  av.  J.-G.,  chez  quelques  écrivains  rbodiens, 
formés  à  l'école  des  successeurs  d'Eschine,  qui,  vaincu 
dans  sa  lutte  contre  Démosthène  à  l'occasioD  du  grand 
débat  sur  la  couronne,  et  banni  d'Athènes,  alla  fonder  à 
Rhodes^  une  école  de  rhétorique  restée  longtemps  cé> 
ièbre.  p 

RHOPAUQUES  (Vers),  nom  donné,  chez  les  Andena, 


k 


RHY 


1567 


RHY 


à  une  Mite  de  vers  qui  commençaient  par  yn  monosyl- 
labe, et  qui  continuaient  par  des  mots  tous  plus  longs 
les  uns  que  les  autres.  Le  mot  venait  du  grec  rhopeUon 
(massue),  parce  que  ces  vers  ressemblaient  à  une  mas- 
sue, qui  commence  par  un  bout  très-mince  et  finit  par 
une  grosse  t£te. 

RHOTACISME,  nom  que  les  anciens  Grecs  donnaient 
à  l'usage  fréquent  de  la  lettre  p  (rb).  Telles  sont  ces 
formes  de  Tancien  dialecte  laconien  :  Timotheor  pour 
TimolhêoSf  Milenor  pour  MUesios,  Les  Êléens  et  les  Éré- 
trions  retinrent  plus  longtemps  cet  usage,  et  ces  derniers 
étaient  souvent  tournés  en  ridicule,  à  cette  occasion,  par 
les  poètes  comiques ,  surtout  ceux  de  la  vieille  Comédie. 
Au  reste,  chez  les  Athéniens  eux-mêmes,  le  ^  se  substituait 
assez  souvent  au  a.  Des  changements  analogues  ont  été  ob- 
servés dans  le  latin  :  plures^  plurima,  lares,  amare,  labor, 
arbor,  etc.,  s'écrivirent  primitivement  pluses,  plwima , 
.  lases,  amase,  labos,  arbos,  etc.  En  français,  orfraie  s'est 
formé  de  ossifraga;  varlet  s'est  dit  longtemps  pour  vas- 
let ,  abréviation  de  vasseUt  ;  les  mots  apôtre^  chapitre, 
épltre,  renferment  un  r  peu  conforme  aux  mots  originaux 
qui  ont  l  :  apostolus,  capitulum,  etc.  Diacre  s'est  dit 
aussi  par  une  sorte  de  rhotacisme  au  lieu  de  diacne 
(dioconus).  P. 

KHYPAROGRAPHES  (du  grec  rhuparoe,  sale,  impur, 
î^graphUn,  tracer),  nom  que  les  Anciens  donnaient  aux 
peintres  dont  les  sujets  étaient  licencieux  ou  d'une 
grande  trivialité.   . 

RHYnON  ou  RHYTON,  coupe.  V.  notre  Dicttonnaire 
âe  Biographie  et  et  Histoire, 

RHYTUME  (du  grec  rhythmos,  mouvement  réglé  et 
inesuré),  en  termes  de  Poétique  et  de  Rhétorique,  dé- 
signe un  espace  quelconque  (  vers  ou  membre  de  phrase) 
ayant  un  rapport ,  facile  à  saisir,  avec  un  autre  espace 
semblable,  analogue,  ou  différent;  et  de  ce  rapport  ré- 
sulte ce  qu'on  appelle  Vharmonie,  Le  rhythme  est  natu- 
rellement plus  sensible  dans  les  vers ,  grâce  à  la  symétrie 
des  sons  et  à  la  fixation  régulière  des  espaces.  Ainsi,  dans 
notre  vers  alexandrin,  la  symétrie  des  rimes,  l'égalité 
du  nombre  des  syllabes  de  chaque  vers,  les  repos  de 
l'hémistiche  symétriques  à  la  fois  entre  eux  et  avec  la 
fin  du  vers,  constituent  notre  principal  rhythme  poétique. 
Dans  la  poésie  lyrique,  le  rhythme  se  fonde  en  outre, 
non-seulement  sur  la  symétrie  des  strophes  et  des  stances 
entre  elles,  mais  souvent  encore  sur  la  variété  des  me- 
sures dont  elles  se  composent,  sur  le  mélange  ou  le  retour 
alternatif  des  petites  et  des  grandes  mesures  (  F.  Stancb, 
Strophe).  Le  rtiythme  fait  Ta  base  unique  de  notre  ver- 
sification, au  lieu  que  dans  celle  des  Grecs,  adoptée  de- 
puis le  II*  siècle  av.  J.-G.  par  les  Latins,  le  rhythme 
s'unissait  au  mètre,  lequel  contribuait  bien  au  rhythme, 
mais  néanmoins  s'en  distinguait  nettement.  Ainsi,  le 
rhythme  de  nos  vers  français  de  12  syllabes  ressemble 
assez  bien,  quant  aux  espaces  mêmes,  à  celui  du  vers 
asclépiade  de  l'antiquité;  mais  celui-ci ,  outre  le  rhythme 
proprement  dit,  renferme  encore  un  genre  de  mètre  par- 
ticulier, une  variété  de  pieds  prosodiques  qu'il  est  impos- 
sible de  reproduire  dans  notre  versification  (  V.  NouBaB). 
Lorscpie  le  sentiment  de  la  quantité  prosodique  latine  se 
perdit  à  l'époque  de  la  décadence  littéraire  du  vi*  siècle, 
le  rhythme  fut  néanmoins  conservé  ;  et  le  nouveau  sys- 
tème d'assonances  ou  de  consonnances  en  prit  même  le 
nom  :  de  là  le  mot  rime,  dans  les  langues  néo-latines. 
I^s  premiers  exemples  s'en  rencontrent  dans  les  proses 
chantées  à  Téglise;  elles  offrent  un  rhythme  sensible, 
mais  tout  à  fait  étranger  aux  règles  qui  avaient  prévalu 
pendant  la  durée  de  l'Empire  romain;  car  les  syllabes 
n'y  sont  plus  évaluées,  mais  simplement  comptées. 

Les  ouvrages  écrits  en  prose  sont  susceptibles  d'un 
certain  rhythme  différent  oe  celui  des  vers,  mais  non 
moins  manifeste.  Il  repose  sur  une  série  d'espaces  qui 
peuvent  être  fréquemment  variés  suivant  les  besoins  de 
la  respiration,  la  portée  naturelle  de  l'oreille,  l'expression 
progressive  des  idées  ou  des  sentiments,  enfin  suivant  la 
distinction  naturelle  des  objets  mêmes  des  opérations  de 
l'esprit.  L*exorde  de  l'Oraison  funèbre  de  la  reine  d'An* 
gleterrt  par  Bossuet  débute  par  une  phrase  où  le  rhythme 
n'est  pas  moins  sensible  que  dans  les  vers  les  plus  pom- 
peux, et  où  il  suit  une  progression  frappante.  Celui  qui 
régne  dans  les  deux  |  et  de  qui  relèvent  toiu  les  empires 
(ici  le  rhjfthme  eat  à  peu  près  égal;  il  varie  et  s'étend 
dans  le  membre  qui  suit:);  à  qui  seul  appartient  la 
gloire,  la  majesté,  et  l'indépendance  \  (dans  les  deux  der- 
niers membres  de  la  période  il  monte  encore  :)\est  aussi 
le  seul  qui  se  glorifie  de  faire  la  leçon  aux  rois  \  et  de 
leur  doMher  quisndil  MplaU  de  grandes  et  de  terribles 


leçons,  Mms  cet  exemple,  le  rhythme  suit  une  marcht 
ascenda.:te  :  quelquefois  il  suit  une  progression  contraire. 
L'exorde  d'un  sermon  de  Bourdaloue  sur  la  Résurrection 
{Ces  paroles  sont  bien  différentes  de  celles,  etc...),  et  les 
dernières  lignes  de  l'Oraison  funèbre  de  Condé  par  Bos- 
suet, en  offrent  deux  exemples  remarquables.  Les  Anciens, 
depuis  Thrasymaque  et  Gorçias,  portèrent  souvent  à  l'excès 
l'amour  du  rhythme  dans  Ta  prose.  Isocrate,  à  force  de 
bon  goût,  en  modéra  l'exagération  ;  mais  c'est  chez  Dé- 
mosthène  qu'il  faut  chercher  le  vrai  rhythme  oratoire, 
celui  qui  est  toujours  en  rapport  avec  la  pensés  et  le 
sentiment 9  et  qui  varie  pour  ainsi  dire  de  lui-même  selon 
les  diverses  nuances  qui  s'offrent  à  l'esprit  ou  à  l'imagi- 
nation de  l'orateur.  Chez  les  Romains,  Cicéron,  disciple 
intelligent  des  Grecs,  et  surtout  d'Isocrate  et  de  Démo- 
sthène,  n'a  pas  eu  de  rival  pour  la  science  du  rhythme  :  s'il 
laisse  voir,  à  cet  égard,  plus  d'apprêt  que  Démosthène, 
du  moins  il  échappe  à  la  froideur,  souvent  mêlée  de  vague, 
d'Isocrate.  Le  rhythme,  tant  prisé  des  Anciens,  a  dû  être 
beaucoup  moins  recherché  par  les  modernes,  dont  les 
langues  sont  enpénéral  moins  musicales  que  celles  de 
l'antiquité,  et  qui  d'ailleurs  préfèrent  infiniment  l'abon-i 
dance  et  la  Justesse  des  idées  k  la  richesse  des  cadences. 
Fléchier,  plus  que  tout  autre,  s'est  attaché  à  donner  sur 
ce  point  à  notre  langue  toute  la  perfection  dont  elle  est 
capable;  mais,  à  cet  égard  même,  il  reste  en  général 
inférieur  à  Bossuet ,  qui ,  sans  se  préoccuper  du  rhythme, 
le  trouvait  d'inspiration,  en  faisait  toujours  l'emploi  lo 
plus  naturel  et  le  plus  expressif,  et  toujours  évitait  cette 
monotonie  qui  règne  dans  tous  les  écnts  de  Fléchier  et 
leur  communique  un  certain  caractère  de  froideur.  V.  Ben- 
loBw,  Précis  dune  théorie  des  rhythmes,  1862,  in-8**,  P. 
^  RHTTHMB,  eu  M usiquo,  signifie,  non  pas,  comme  on  l'a 
dit,  le  nombre  des  mesures  que  contient  une  phrase  de 
musique,  mais  la  quantité  et  la  valeur  des  signes  ou 
notes  qui  servent  à  représenter  les  sons  contenus  dans 
une  phrase,  et  dont  les  retours  établissent  un  ordre  quel- 
conque entre  les  temps  qui  font  partie  de  chacune  des 
mesures.  C'est  l'arrangement  symétrique  des  diverses 
valeurs  de  temps,  et  le  retour  périodique  des  formulée  de 
cet  arrangement;  c'est,  si  l'on  veut  encore,  la  symétrie 
appliquée  an  mouvement.  Le  rhythme  est  une  oies  par- 
ties constitutives  de  l'art  musical  :  sans  lui  la  mélodie 
ne  serait  qu'une  succession  de  sons  sans  caractère,  tandis 
f  que,  selon  la  disposition  des  valeurs,  selon  le  degré  de 
vitesse  ou  de  lenteur  avec  lequel  on  l'exécute,  elle  expri- 
mera ou  la  douleur  ou  la  Joie.  Par  le  rhythme,  on  coor- 
donne la  succession  des  sons  au  moyen  de  l'emploi  varié 
de  leurs  signes  représentatifs,  on  les  classe  dans  les 
cadres  appelés  mesures,  on  les  fait  entendre  selon  le 
besoin  sur  les  temps  forts  ou  sur  les  temps  faibles  de 
ces  mesures,  on  établit  un  ordre  entre  les  membres  de 
phrase  et  les  phrases  qui  forment  les  périodes  du  dis- 
cours musical,  lequel,  pour  être  intelligible,  a  besoin 
d'être  ponctué  aussi  régulièrement  que  le  discours  ora- 
toire. Le  rhythme  est  à  la  musique  ce  qu'est  le  mètre  à 
la  versification.  Il  est  indépendant  de  l'intonation  et  de  la 
mélodie  :  un  tambour,  ou  tout  autre  instrument  de  per- 
cussion, nous  transmet  la  nature  du  rhythme  d'un  chant 
quelconque.  Il  est  d'autant  plus  sensible  à  l'oreille  que 
le  mouvement  est  plus  rapide;  plus  il  se  ralentit,  plus  la 
sensation  s'aflfkiblit.  Le  rhythme  est  simple,  lorsqu'il  ne 
renferme  qu'un  seul  genre  de  mouvement;  composé, 
lorsqu'il  en  renferme  plusieurs  :  si  un  rhythme  simple 
est  facilement  appréciable,  il  n'en  est  pas  de  même  de 
celui  dont  les  éléments  sont  multipliés,  lequel  exige  de 
l'auditeur  une  certaine  éducation  musicale.  —  Chez  les 
anciens  Grecs,  le  rhythme  poétique  et  le  rhythme  mu- 
sical étaient  presque  une  seule  et  même  chose,  surtout  à 
l'époque  primitive  où  la  poésie  et  la  musique  étaient  étroi- 
tement unies,  et  composées  d'un  seul  Jet  par  le  même  ar- 
tiste. Il  y  avait  trois  genres  de  rhythmes  :  i^  le  rhythme 
égal,  où  Tarais  était  égal  à  la  thésis  (  V.  ces  mots),  e^  qui 
correspondait  à  notre  mesure  binaire;  à  ce  rhythme  se 
rapportaient  le  pied  pyrrhique  (2  brèves),  le  procéleus- 
matique  (4  brèves),  le  spondée  (2  longues),  le  dactyle 
a  longue  et  2  brèves),  l'anapeste  (2  brèves  et  1  longue), 
ib  double  spondée;  2^  le  rhythme  double,  où  l'arsis  était 
à  la  thésis  dans  le  rapport  de  2  à  1 ,  ou  de  1  à  2,  répon- 
dait à  notre  mesure  ternaire*,  il  comprenait  l'ïambe 
(1  brève  et  \  longue),  le  trochée  (i  longue  et  1  brève),  le 
tribraque  (3  brèves),  et  le  molosse  (3  longues);  3^  le 
rhythme  hémiole  ou  sesquialtère ,  où  l'arsis  était  à  la 
thésis  comme  2  à  3,  ou  comme  3  à  2;  le  péon  (5  brèves, 
ou  1  brève  et  2  longues,  ou  1  longue  et  3  brèves)  était 
particulier  à  ce  rhythme,  qui  est  à  peu  près  perdu  pour 


RIC 


1568 


HIG 


I 

f 

r 


f 

r 


wnm  t  on  a  poorttnt  Maayé  de  créer  une  niesare  à 
5  temps,  employée  par  Catel  dans  deux  études  quMl 
écrivit  pour  te  Consenrstoire  de  musique  de  Paris,  et  par 
Boic.ldieu  dans  l*allégro  de  Taîr  :  Viens,  gentille  dame^  de 
son  opéra  la  Dame  blanche.  Un  autre  rhythme.  l'epi- 
trile.  où  les  deux  temps  étaient  Tud  à  Tautre  dans  la 
proportion  de  4  à  3,  rut  peu  usité  :  nous  en  avons  des 
imitations  dans  un  passage  de  l* Enfance  du  Christ  par 
Berlioz,  et  dans  la  mélodie  du  Voyageur  par  VaucorbeiU 
où  il  y  a  des  alternatives  régulières  de  3  et  de  4  temps.  B. 

RHYTHMIQllE,  nom  qu(>  les  anciens  Grecs  donnaient 
à  la  science  des  durées,  en  tant  que  susceptibles  de  pro- 
portions entre  elles,  depuis  les  rhytlimes  de  la  nature  et 
de  rinstinct,  tels  que  le  battement  des  ailes  de  l'oiseau, 
les  pulsations  du  cœur,  la  cadence  des  marteaux  de  for- 
gerons, etc.,  Jusau'au  rhythme  artistique  et  musical,  dont 
les  parties  ont  des  n^ports  qui  peuvent  s'exprimer  par 
des  nombres. 

RHYTHMOMfeTRE.  K.  CHRONOiifcTRB. 

RHY  PHMOPÊE,  nom  donné  par  les  anciens  Grecs  à 
Tart  de  choisir,  d'employer,  de  varier,  de  mélanger  les 
rhythmes.  C'était  la  pratique  des  règles. 

RHYTON.  V.  Rhytion. 

RIBAUDEQUIN  ou  RIBAUDEAO,  arbalète  de  grande 
dimension.  —  Espèce  d'afTût  des  anciens  canons. 

RIBAUDS.  y.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d* Histoire. 

RIBBONISME,  nom  donné,  en  Irlande,  à  une  associa- 
tion secrète  de  paysans  catholiques,  dont  le  but,  plus  ou 
moins  avoué,  est  de  faire  rentrer  la  propriété  du  sol  aux 
mains  des  catholiques.  Les  membres  de  cette  association, 
qui  emploient  l'incendie  et  l'assassinat,  sont  dits  ribbo~ 
nistes  ou  riband-men. 

RIBORD.    V.  BORDAGB. 

RICA.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d^  Histoire, 

RICERCARI.  V.  Prélude. 

RICHELIEU  (  Cliàteau  de).  Ce  château,  que  le  cardinal 
Richelieu  flt  élever  en  1637  par  l'architecte  Lemercier, 
et  qui  a  été  abattu  à  la  Révolution,  rivalisait  en  étendue 
et  en  magnificence  avec  les  palais  des  souverains.  Il 
s'élevait  au  milieu  d'un  parc  immense,  arrosé  par  l'Ama- 
ble,  et  formait  un  quadrilatère  réiiulier  à  quatre  bas- 
tions, avec  fossés  remplis  d'eau.  Trois  corps  de  bâtiments 
à  double  étage  enclosaient  une  vaste  cour.  A  chaque 
angle  et  au  centre  de  l'aile  opposée  à  la  porte,  ouverte 
dans  une  galerie  à  arcades,  étaient  des  pavillons  plus 
élevés  que  le  reste  des  b&timents;  un  arc  triomphal, 
surmonté  d'une  statue  de  la  Renommée,  couronnait  la 
grande  porte,  où  l'on  parvenait  par  un  pont-Ievis.  Deux 
cours  précédaient  le  château  :  celle  qui  n'en  était  sépa- 
rée que  par  le  fossé  était  un  carré  de  même  surface  que 
celui  du  ch&teau;  les  b&timents  des  écuries  la  bordaient 
lutéralemeut  ;  la  grande  cour,  ou  cour  d'entrée,  était  car- 
rée aussi,  un  peu  plus  large  que  l'autre,  flanquée  aussi 
de  bAtiments  divers,  destinés  à  la  suite  du  cardinal.  La 
pr<*mière  porte  s'ouvrait  au  centre  d'un  demi-cercle  de 
murs,  à  la  jonction  de  trois  routes.  Derrière  le  ch&teau , 
et  comme  lui  entouré  d'eau,  était  un  Jardin  carré,  ayant 
au  centre  on  ch&teau  d'eau,  et  formé  de  quatre  parterres 
symétriques.  D'autres  parterres  s'étendaient  au  delà  du 
fossé,  autour  d'une  grande  pièce  d'eau,  et  se  terminaient 
par  une  galerie  décorée  de  niches,  de  statues,  de  vases,  etc. 
Ces  différentes  pièces  étaient  parfaitement  svmétriques 
entre  elles  :  de  vastes  jardins,  des  potagers,  ae  spacieux 
miissifs  d'arbres  percés  de  belles  allées,  les  entouraient; 
puis,  des  bois  et  des  taillis  complétaient  le  parc,  qui  était 
ceint  d'une  muraille.  Dans  cette  demeure  vraiment  royale, 
los  plus  habiles  artistes  avaient  prodigué  leurs  talents; 
de  nombreux  et  précieux  chefs-d'œuvre  antiques  la  dé- 
coraitMit.  V.  une  Notice  de  M.  de  Chersé  dans  les  Mé" 
moirfs  lie  la  Société  des  Antif^uaires  deVOuest,  t.  IL 

RICHESSE  En  termes  d'Economie  politique,  tout  ce 
qui  a  une  valeur  quelconque,  c.-à-d.  une  utilité  directe, 
comme  Tair,  les  aliments,  ou  une  utilité  indirecte, 
comme  l'argont,  la  marchandise  dans  la  boutique  d'un 


pas  moins  pour  lui  une  utilité  bien  réelle.  Ces  richesses 
n|ont  pas  de  valeur  échangeable  (espèce  de  valeur  bien 
difTérente  de  la  valeur  proprement  dite;  quand  elles  sont 
en  telle  abondance  que  chacun  peut  se  les  procurer  en 
aussi  grande  quantité  qu'il  le  veut  sans  avoir  besoin  du 
secours  de  personne.  Ainsi,  dans  un  village  situé  au  bord 
d'une  grande  rivière,  l'eau  n'a  pas  de  valeur  échangeaUt. 


Ainsi  encore,  l'air  n*a  pas  ^rmi  nous  nne  valear  édian* 
geable;  il  en*  aurait  u"etrè>-prande  pour  des  gens  placés 
dans  un  souterrain  où  ils  étouflTeraienU  —  z*  l«s  ri- 
chesses artificielles  ou  sociales .  qui  «ont  un  prodoit  de 
l'activité  humaine  appliquée  aux  richesses  naturelles.  A 
d*autres  points  de  vue,  on  distingue  :  les  richesses  malè^ 
rielles,  données  par  la  nature  (terres,  forêts,  animaux, 
mines,  etc..  ),  ou  créées  par  l'homme  produits  industriels 
ou  manufacturés^  et  les  richesses  intellectuelles  (instruc- 
tion, œuvres  de  l'esprit)  ;  les  richesses  réelles,  indépen- 
dantes de  conventions  (une  terre,  une  maison,  des  ré- 
coltes, un  capital j,  et  les  richesses  factices  (effets  de 
commerce  )  ;  les  richesses  productives  (les  capitaux  qui, 
par  le  placement  ou  le  travail,  donnent  un  revenu),  et  les 
richesses  improductives  (b&timents  d'une  usine,  vivres, 
approvisionnements  ). 

Relativement  à  la  source  de  la  richesse,  les  Écono- 
mistes ne  sont  pas  d'accord.  Les  uns  l'ont  uniquement 
trouvée  dans  Vargent  :  c'était  le  système  de  l'école  mer- 
cantile, qui  date  de  Colbeit.  Les  autres,  comme  les  Phy- 
siocrates  du  xvni*  siècle,  l'ont  placée  dans  les  seuls  pro- 
duits de  la  nature.  Adam  Smifh  et  ses  disciples  ont 
proclamé  qu'il  n'y  avait  de  richesse  que  dans  le  (raooti, 
parce  que  le  travail  seul  servait  de  mesure  &  toutes  les 
autres  richesses.  Les  trois  écoles  se  montraient  exclu- 
sives, et  prenaient  la  partie  pour  le  tout  :  c'est  la  réunion 
de  ces  divers  éléments  qui  forme  la  richesse  générale. 

RICHESSES  (Production,  Distribution,  Consommation 
des).  V.  pRObucTiON,  Distribution,  Consommation. 

RICINIUM,  vêtement.  V.  notre  Dictionnaire  de  liiogro^ 
phie  et  d'Histoire. 

RICOCHET  (Tir  à).  V.  Tiiu 

RICOS  HOMBRES.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogro' 
phie  et  d'Histoire. 

RIDE,  cordage  qui  sert  à  tendre  les  haubans.  Cette 
tension  se  nomme  ridage. 

RIDEAU  (de  ride,  à  cause  des  plis  de  l'étofTe),  voile  on 
pièce  d'étoffe  dont  on  couvre  ou  ferme  quelque  chose,  et 
qu'on  attache  à  des  anneaux  coulant  sur  une  tringle, 
pour  qu'on  puisse  la  tirer  &  volonté.  On  met  des  rideaux 
surtout  aux  fenêtres  et  aux  lits.  Les  Anciens  n'em- 
ployaient souvent  pas  d'autre  moyen  de  fermeture  pour 
les  portes  intérieures  des  mai<^ons  et  des  palais;  les]uges« 
dans  les  causes  qui  demandaient  un  examen  réfléchi, 
laissaient  tomber  un  rideau  devant  leur  tribunal,  afin  de 
délibérer  avant  de  rendre  la  sentence;  dans  les  temples, 
on  suspendait  souvent  un  rideau  devant  la  statue  de  U 
divinité  pendant  le  temps  qu'on  ne  sacriflait  point.  — 
Au  théâtre,  il  ne  parait  pas  que  les  anciens  Grecs  aient 
eu  des  rideaux  entre  la  scène  et  le  public  ;  le  peripf- 
tasma  dont  Pollux  fait  mention  était  plutôt  une  toile 
qu'on  étendait  par-dessus  le  thé&tre  pour  mettre  les  spec- 
tateurs à  l'ombre.  Chez  les  Romains,  la  aoène  était  fer* 
mée  par  un  rideau  {aulœum,  siparium)^  orné  de  figures 
peintes,  brodées  ou  tissues;  mais  on  ne  levait  pas  œ  ri- 
deau, comme  cela  se  pratique  aujourd'hui;  on  le  baissait, 
et  il  restait  ployé  sur  la  partie  antérieure  du  proscenium, 
ou  était  reçu  en  dessous  par  une  trappe. 

BiDKAu  (Lever  de).  C'était  autrefois  une  gratiflcados 
allouée  aux  auteurs,  à  la  première  représentation  d'un 
ouvrage  dramatique.  Aujourd'hui,  c'est  une  petite  pièce 
qu'on  Joue  au  premier  lever  de  la  toile,  pour  donoiT  le 
temps  au  gros  du  public  d'arriver  au  commencement  de 
la  grande  pi(^ce. 

RIDELLES.  V.  CnARRBTTB. 

RIDICULE.   V.  R^icuLB,  dans  notre  Diclwnnatrs 
Biographie  et  d'Histoire. 

RIEZ  (Rotonde  de)  (Basses-Alpes^,  monument  rom 
formé  de  huit  Jolies  colonnes  corinthiennes  de  granA 
gris,  placées  sur  un  cercle  en  pierre  qui  leur  sert  di 
socle,  et  dont  la  circonférence  est  de  16*"  environ.  On  l> 
surmonté,  d'une  espèce  de  dume  octogonal,  dont  les  face; 
correspondent  au  plan  des  entre-colonnements.  On  croi> 
qu'il  était  consacré  à  Apollon. 

RIFFLART  (de  riffler  ou  raffier),  vieux  mot  qui  dé- 
signait un  sergent,  un  recors.  —  On  s'en  est  serri  poui 
désigner  un  énorme  parapluie,  depuis  qu*un  acteur  à( 
rOdéon,  Jouant,  en  1801,  le  rôle  de  Rifflart  dans  la  P^if* 
ville,  comédie  de  Picard,  parut  en  scène  avec  un  meuble 
de  ce  genre. 

RIGAUDON  ou  RIGODON  (de  Pinventeur  Rigaud'^}, 
ancienne  danse,  dont  l'air,  d'un  mouvement  vif  et  eai, 
se  battait  à  2  temps  et  se  divisait  en  S  reprises,  phi> 
sées  de  4  en  4  mesures  et  commençant  par  la  dcroièic 
note  du  second  tf'mps. 

RIG-VÊDA.  r.  \«0A. 


RIM 


1569 


RIM 


RILEK,  aorte  de  lyre  fort  grossière,  en  usage  cfaei  les 
Russes. 

R]ME  (corruption  euphoniaue  du  mot  rhythme)^  re- 
tour du  même  son  à  la  fin  de  aeux  ou  plusieurs  Yera.  La 
rime  est  dite  masculine,  quand  les  mots  se  terminent 
par  UQ  son  plein,  par  une  syllabe  sonore,  sans  «  muet 
(fierté,  btmUé;  soupir,  désir;  armer,  charmer).  Les  troi- 
sièmes personnes  du  pluriel  des  imparfaits  et  des  condi- 
tionnels en  at0fU  forment  des  rimes  masculines,  parce 
que  ces  syllabes  ont  le  son  de  Ve  ouvert.  La  rime  est 
féminine,  quand  les  mots  se  terminent  par  un  e  muet 
(victoire,  gloire;  s»arète,  poëte;  belle,  rebelle)^  ou  par  un 
e  muet  suivi  de  consonnes  qui  ne  se  prononcent  pas 
(armes,  choÊrmes)  ;  Ve  muet  ne  se  faisant  point  sentir  et 
ne  comptant  pour  rien,  la  ressemblance  de  son  se  tire  de. 
la  pénultième  syllabe.  Le  dernier  hémistiche  des  vers  à 
rime  féminine  a  une  syllabe  de  plus  que  celui  des  vers 
masculins;  c'est  la  syllabe  formée  par  Ve  muet.  Une 
rime  est  riche,  si  elle  est  formée  par  plusieurs  syllabes 
identiques  {auteur,  hauteur;  souvenir,  revenir)  \  pauvre^ 
si  la  ressemblance  n*est  que  dans  le  son  final  (J*atfnat, 
je  parlai)  ;  suffisante^  quand  il  y  a  identité,  non-seule- 
ment entre  les  voyelles  finales,  mais  entre  les  consonnes 
qui  les  précèdent  (candeur,  pudeur)  ;  insuffisante,  quand 
elle  se  borne  à  une  seule  lettre  (ennemi,  ennui), 

Lorsc^ue,  dans  un  poème,  deux  rimes  masculines  et 
deux  rimes  féminines  alternent  constamment,  on  a  des 
rimes  plates  ou  suioies  :  c*est  le  système  adopté  dans 
notre  haute  poésie.  Quand  on  entrelace  les  deux  espèces 
de  vers,  on  masculin  après  un  féminin,  ou  deux  mascu- 
lins de  même  rime  entre  deux  féminins  qui  riment  en- 
semble, comme  dans  Tode,  le  rondeau,  le  sonnet,  etc., 
on  a  des  rimes  croisées.  Un  certain  nombre  de  rimes 
semblables  qui  se  suivent  sans  interruption  sont  appe^ 
lées  rimes  redoublées.  Les  rimes  mêlées  sont  celles  qui 
ne  sont  pas  disposées  dans  un  ordre  uniforme. 

La  prosodie  française  exige,  comme  condition  de  la 
rime,  que  l'un  des  mots  ne  soit  pas  au  singulier,  et 
Tautre  au  pluriel;  ainsi,  loi  ne  rime  pas  avec  bois,  hon- 
neurs avec  bonimur,  jeu  avec  feux.  Mais  il  est  admis 
qa*un  mot  qui,  au  singulier,  s'écrit  avec  s  ou  a?  à  la  fin, 
peut  rimer  avec  un  pluriel  terminé  par  les  mômes  lettres; 
par  exemple,  un  choix  avec  les  voix.  —  Deux  mots  ter- 
minés, Tun  par  r,  Tautre  par  rs  (amour,  recours)^  for- 
ment une  rime  défectueuse.  —  La  dernière  lettre  d*un 
mot  à  désinence  masculine  doit  être  la  même  ou  du 
même  ordre  que  celle  de  Tautre  mot  avec  lequel  on  veut 
le  faire  rimer  :  ainsi,  exploit  ne  rime  pas  avec  noter,  ni 
genou  avec  goût  ou  courroux,  ni  an  avec  enfant,  ni  sut" 
tan  avec  pédant.  Mais,  si  la  dernière  lettre  est  la  même 
ou  de  même  ordre,  on  peut  faire  rimer  des  mots  qui  n*ont 
que  la  consonnance  avec  une  orthographe  toute  diffé- 
rente :  ainsi,  Goths  avec  nouveaius,  accord  avec  fort, 
voix  avec  bots,  mort  avec  6ord,  flanc  avec  sang.  —  La 
consonnance,  tant  pour  les  rimes  masculines  que  pour 
les  rimes  féminines,  doit  tenir  à  la  prononciation  régu- 
lière, à  Taccent  le  plus  généralement  accrédité  dans  le 
langage  correct  :  on  ne  fera  donc  point  rimer  fier  avec 
altter,  mer  avec  aimer,  enfer  avec  étouffer,  fiancés  avec 
succès.  —  Pour  qu'une  rime  féminine  soit  bonne,  il  faut 
qa*en  retranchant  1*6  muet  final,  ce  qui  reste  offre  une  rime 
masculine  suffisante  et  régulière  :  monde  ne  rime  pas  avec 
demande,  mais  peut  rimer  avec  profonde.  —  On  admet  à 
rimer  ensemble  tous  les  mots  dont  la  dernière  syllabe 
a  le  son  de.  la  nasale  m,  de  quelque  manière  qu'elle 
s'écrive  :  main  et  chemin^  faim  et  fin,  etc.  —  Les  mots 
terminés  en  ent  et  en  aient  ne  riment  qu'avec  des  mots 
qui  ont  ces  mêmes  terminaisons  :  on  ne  ferait  pas  rimer 
m^rtsent  avec  entreprise,  surface  avec  surpassent.  Un 
mot  terminé  par  s  (trépas)  ne  peut  rimer  avec  un  mot 
terminé  par  t  (état);  ni  une  syllabe  longue  avec  une 
brève  (maitre  et  mètre^  disgrâce  et  place,  abattre  et  tcfo- 
làtre);  ni  une  lettre  mouillée  avec  une  autre  qui  ne  Test 
pas  (fille  et  fUe)  ;  ni  le  mot  simple  avec  son  composé 
(prudent  et  imprudent,  tieureux  et  malheureux,  juste  et 
injuste)^  à  moins  que  le  composé  ne  difière  tout  à  fait  de 
eeoB  avec  le  mot  dont  il  dérive  (garder  et  regarder,  courir 
et  secourir).  Les  deux  hémistiches  d'un  vers  ne  doivent  pas 
rimer  ensemble.  On  doit  encore  ériter  la  rime  dans  les 
premiers  hémistiches  de  deux  vers  qui  se  suivent. 

La  question  de  Torimne  de  la  rime  est  fort  incertaine. 
La  rime  peut  avoir  été  suggérée  par  le  phénomène  phy- 
sique qu'on  nomme  écho,  sâon  Jean  Lemaire,  elle  aurait 
été  inventée  en  Gaule,  700  ans  avant  la  guerre  de  Troie, 
par  un  roi  Bardus,  dont  le  nom  est  resté  aux  Bardes.  On 
a  remarqué  aussi  que^  dans  la  Bible,  certaines  conso»- 


nances  se  reproduisaient  à  la  fin  des  versets;  que  la  riuM 
n'a  point  été  inconnue  dans  l'Inde,  dans  la  Chine,  et 
même  dans  le  Nouveau-Monde.  Les  consonnances  sem- 
blables, dont  on  constate  le  retour  dans  certains  vers  des 
poètes  de  l'ancienne  Rome,  s'expliquent  autrement  q^e 
par  ie  dessein  de  rimer  (V.  LéoNms  —  Vers).  La  versifi- 
cation latine,  comme  la  versification  grecque,  était  établie 
sur  la  quantité  prosodique,  et  non  sur  fa  rime  :  ce  fut 
seulement  dans  le  désordre  inhérent  à  la  décomposition 
du  latin,  qu*au  lieu  de  prendre  pour  base  dans  les  vers 
la  longueur  relative  des  sons,  on  prit  chaque  syllabe 
comme  unité  vis-à-vis  de  toute  autre  syllabe;  on  ne  me- 
sura plus  les  syllabes,  on  les  compta.  Il  fallut  alors  que 
le  poète  marquât  l'endroit  où  il  avait  accompli  la  seule 
condition  ^*on  exigeait  désormais  de  lui  :  la  rime  parut  ; 
elle  fut,  dit  M.  Sainte-Beuve,  placés  au  lieu  qu'elle  oc- 
cuije,  comme  un  coup  de  cloche  pour  avertir  qu'un  vers 
était  fini  et  qu'un  autre  allait  commencer.  Le  plus  ancien 
chant  latin  rimé  est  peut-être  la  chanson  de  Clotaire  II, 
antérieure  à  l'an  6So.  Dans  les  hymnes  et  les  proses 
d'église,  l'ignorance  ou  la  simplicité  abandonna  comme 
profanes  les  rhythmes  de  l'ancienne  poésie  latine,  et  les 
remplaça  aussi  par  la  rime  :  les  stancps  de  ces  chants 
sacrés  ont  été  composées  de  vers  syllabiques  rimant 
entre  eux;  le  Veni,  sancte  Spiritus  du  roi  Robert,  le 
Lauda  Sion  de  S' Thomas  d'Aquin,  le  Dies  irœ,  le  Stabat 
mater,  etc.,  en  sont  des  exemples.  Rien  n'est  donc  moins 
fondé  que  l'opinion  qui  attribue  l'invention  de  la  rime 
aux  Arabes,  qui  l'auraient  communiquée  à  nos  Trouba- 
dours du  moyen  &ge. 

Une  fois  ce  nouvel  élément  adopté  dans  la  versification, 
on  en  exagéra  l'importance  :  la  nme  devint  pour  le  poète 
et  ftireur  et  fatigue.  Ce  fut  surtout  au  xv*  siècle  qu'on 
poussa  Jusqu'à  ses  dernières  limites  la  recherche  des 
difficultés  en  ce  genre.  Ainsi,  on  appela  rime  annexée^ 
concaténée  ou  enchainée,  une  sorte  d'anadiplose  (  V.  ce 
mot)  consistant  à  commencer  un  vers  par  la  dernière 
syllabe  du  vers  précédent,  ou  par  une  partie  considérable 
du  dernier  mot,  ou  par  ce  mot  tout  entier.  Ainsi  s 

Dien  gard*  ma  maîtresse  et  régente, 
Gmte  de  oorps  et  de  façon; 
Son  cœur  tient  le  mien  dans  sa  tente. 
Tant  et  plus  d'un  ardent  Arisson. 

Les  vers  dont  la  fin  rimait  avec  le  repos  du  vers  suivan 
formaient  une  rime  bàtelée  : 

Quand  Neptnnns,  pnlssant  dlen  de  la  mer. 
Cessa  d'aniwr  caraqaes  et  galées. 
Les  Gallicans  bien  le  durent  aimer, 
Kt  réclama*  ses  grands  ondes  salées. 

Cl.  Marot. 

Les  rimes  brisées  consistaient  à  construire  des  vers  dont 
les  repos  rimaient  entre  eux,  de  façon  qu'en  les  brisant 
on  fit  d'autres  vers  :  Octavien  de  Saint-Gelais  s'est  beau- 
coup exercé  en  ce  genre. 
Voici  un  exemple  tiré  de  ses  œuvres  : 

De  cœur  par/ail,  chassez  toute  douleur; 
Soyes  Boignfvx;  n'uses  de  nulle  feinte; 
Sans  Tllaln  faH  entretenes  douceur  ; 
Vaillant  et  prAis,  abandonnes  la  feinte. 

La  rime  était  couronnée,  quand  elle  se  présentait  deux 
fois  à  la  fin  de  chaque  vers  : 

Ma  blanche  Colombelle,  belle, 
SouTont  Je  Tais  priant,  cridni; 
Mais  dessous  la  eordelle  d'elle 
Me  Jette  un  ccsur  triant,  riant. 

Cl.  Marot. 

La  rime  empérière  était  celle  qui  au  bout  du  vers  frap- 
pait l'oreille  jusqu'à  trois  fois  : 

Bénins  lecteurs,  trës-dili(^efM  gewt,  gens. 
Prenez  en  gré  mes  impar/ojd  faits  faits. 

Dans  les  rimes  équivoques,  les  dernières  syllables  de 
chaque  vers  étaient  reprises  en  un  autre  sens  dans  le 
vers  suivant  : 

En  m'ébattant.  Je  Ikis  rondeaux  en  Hmt, 
Et  en  rimant  bien  souvent  Je  m'enrime. 
Bref,  c'est  pitié  entre  nous  rimaiUevr», 
Car  TOUS  trouTcz  assez  de  Hme  ailleun. 
Et  quand  tous  plait,  mieux  que  moi  rimassn. 
Des  biens  avez  et  de  la  rbne  assez. 

Cl.  Ml  rot. 

99 


RIQ 


1S70 


ROB 


On  tombait  dans  Tineptie,  et  une  réaction  était  inévi- 
table :  mais,  au  lieu  de  ise  borner  à  corriger  les  abus  de 
la  rime,  on  essaya  de  la  supprimer,  et  de  revenir  à  la 
prosodie  ancienne  basée  sur  la  quantité.  De  là  les  nom- 
breux essais  de  vers  métriques  qui  furent  faits  au 
xvi«  siècle  (V.  Vers).  Notre  langue,  notre  accentuation  ne 
s*y  prêtaient  guère;  le  principe  de  la  rime  prévalut.  Sans 
avoir  autant  de  charme  que  la  mesure  des  Anciens,  elle 
plaît  à  Toreille,  soulage  la  mémoire,  et  impose  à  l'esprit 
du  podte  certaines  entraves  d*où  il  peut,  s*il  en  triomphe, 
tirer  de  véritables  beautés.  V,  Poésie.  B. 

RIMINI  (Arc  de),  arc  honoriûre  romain,  dédié  à  Tem- 
pereur  Auguste  à  l'occasion  du  rétablissement  de  la  voie 
Flamioienne  depuis  Rimini  Jusqu'à  Rome.  Il  est  construit 
en  pierre  blanche  d'Istrie,  et  percé  d'une  seule  arcade. 
Le  fronton  est  porté  par  deux  colonnes  corinthiennes  à 
demi  engagées.  Entre  l'arcade  et  les  demi-colonnes  sont 
des  médaillons  contenant  les  bustes  en  demi-relief  de  Ju- 
piter, de  Véous,  de  Neptune  et  de  Minerve,  sculptures 
d'un  très-beau  caractère.  V.  Briganti,  lUtutrazione  delV 
areo  di  AitgusU)^  Rimini,  1825,  in-fol. 

RINCEAU,  en  termes  de  Beaux-Arts,  branche  d'orne- 
ment prenant  naissance  d'un  culot,  et  formée  de  feuilles 
naturelles  ou  '  imaginaires,  de  fleurons,  graines ,  bou- 
tons, etc.  On  en  décore  les  frises,  les  gorges,  les  ruden- 
tures,  les  champs  des  pilastres  et  des  panneaux,  quelque- 
fois les  fûts  de  colonnes,  les  vases,  les  candélabres,  etc. 

RIOT-ACT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

RIPIËNO ,  mot  italien  qui  signifie  remplissage.  En 
Musique,  les  ripieni  sont  les  parties  de  chœur  ou  d'or- 
chestre qui  ne  se  chantent  ou  ne  se  Jouent  que  dans  les 
ensembles,  et  qui  se  taisent  pendant  les  solos. 

RIPU AIRES  (Lois  des  Francs).  On  en  attribue  la  ré- 
daction à  Tbéodoric  ou  Thierry  I",  fils  de  Clovis  et  roi 
d'Ostrasie,  mais  la  forme  sous  laquelle  cette  loi  nous  est 
parvenue  ne  parait  p^  remonter  plus  haut  que  Dago- 
nert.  La  loi  ripuaire  contient  80  ou  01  titres  et  224  ou 
277  articles  (selon  les  distributions  diverses);  il  y  a  164  ar- 
ticles de  Droit  pénal,  113  de  Droit  politique  ou  civil,  de 
Procédure  civile  ou  criminelle.  C'est  donc  une  législation 
essentiellement  pénale,  comme  la  loi  Salique;  toutefois, 
le  Droit  civil  y  tient  plus  de  place.  Le  combat  judiciaire 
est  plus  souvent  mentionné  et  mieux  réglé  que  dans  la 
loi  Salique,  comme  si  la  loi  devenait  plus  puissante  que 
la  vengeance  personnelle;  le  roi  apparaît  comme  posses- 
seur de  plus  vastes  domaines  et  d'une  plus  grande  auto- 
rité. L'Eglise  est  assimilée  au  roi,  et  les  mômes  privilèges 
sont  accordés  à  ses  terres.  Divers  emprunts  ont  été  faits 
aux  lois  romaines,  particulièrement  pour  l'affranchisse- 
ment des  esclaves.  V.  Weber,  De  legihits  Salicà  et  Ri- 
puarià,  Heidelberg,  1821  ;  Rogge,  De  peculiari  legis  Ri- 
puariœ  cum  Salicà.  Kœnigsberg,  1823;  Davoud-Oghlou, 
Histoire  de  la  législation  des  anciens  Germains,  Berlin, 
4845,  2  vol.  in-8».  B. 

RIQUIER  (Église  de  Saint-),  à  10  kilomèt.  d'Abbeville. 
Commencée  dans  les  dernières  années  du  xv*  siècle, 
cette  église,  autrefois  abbatiale,  est  un  des  derniers  mo- 
numents que  l'on  a  élevés  dans  le  style  ogival.  La  fa- 
çade, à  laquelle  on  monte  par  un  perron  de  cinq  marches, 
a  28  met.  de  largeur,  et  présente  trois  portes  pratiquées 
sous  de  profondes  voussures.  La  porte  centrale,  séparée 
des  autres  par  deux  tourelles  octogones  qui  montent  Jus- 
qu'au sommet  de  la  façade,  est  flanquée  des  statues  de 
Louis  XII  et  de  François  I*',  et  de  deux  autres  qu'on 
eroit  représenter  S^  Benoit  et  S^  Maur  ;  dans  les  ban- 
deaux des  voussures,  on  a  figuré  les  principaux  traits  de 
la  vie  de  S'  Riquier  et  de  celle  de  S^  Angilbert,  abbés  du 
monastère;  un  arbre  de  Jessé  occupe  le  tympan.  Dans  le 
fronton  qui  surmonte  la  porte,  il  y  a  un  groupe  de  la 
S^*  Trinité,  et,  de  chaque  côté  de  ce  fronton,  sur  le  mur 
de  face,  sont  pratiquées  des  niches  qui  contiennent  les 
ètatnes  colossales  des  Apôtres.  Un  fronton  triangulaire 
qui  les  surmonte  renferme  les  statues  de  la  S^*  Vierge, 
de  Dieu  le  Père  et  de  J&us-Christ,  et,  un  peu  en  re- 
traite, s'élève,  à  une  hauteur  de  50  met.,  une  tour  carrée, 
percée  de  deux  baies  sur  chacune  de  ses  faces,  et  ter- 
minée par  une  balustrade  à  Jour.  Les  portes  qui  donnent 
entrée  dans  les  bas  côtés  sont  disposées  en  arrière- 
corps  :  celle  de  droite  est  décorée  des  statues  de  S^* 
Marie-Madeleine  et  de  S**  Catherine,  et,  dans  les  vous- 
sures, on  reconnaît  quelques  traits  de  la  vie  de  S' Joachim, 
de  S**  Anne  et  de  la  S^*  Vierge;  celle  de  gauche  présente 
les  statues  de  S^  Antoine  et  de  S*  Roch,  et  les  princi- 
paux traits  de  la  vie  de  ces  saints.  Dans  tout  le  pourtour 
éê  régli09.  tes  murs  sont  lisses  et  sans  ornements  ;  mais 


les  contre-forts  et  leur  double  rang  d'ârcs-boutants  don- 
nent à  l'ensemble  une  certaine  légèreté.  A  rintersection 
des  transepts  s'élevait  autrefois  un  beau  clocher  en  char- 

fente,  couvert  en  plomb;  à  la  suite  d'un  ouragan,  en 
800,  il  fut  abattu.  L'intérieur  de  l'église  de  S'-Riquier, 
en  forme  de  croix  latine,  se  distingue  par  une  noble 
simplicité,  par  la  justesse  et  l'accord  des  proportions  :  il 
a  104  met.  de  longueur,  27  met.  de  largeur  et  autant  de 
hauteur.  Au-dessus  des  arcades  régnent  des  tribuns 
bordées  de  balustrades  à  jour,  et  10  grandes  fenêtres, 
aujourd'hui  privées  de  vitraux  peints,  éclairent  tout  l'édi- 
fice. Autour  du  chœur  on  compte  onze  chapelles  :  l'une 
d'elles,  celle  de  la  S^**Vierge,  offre  un  assez  grand  déve- 
loppement; on  remarque  dans  son  axe  une  déviation 
avec  l'axe  du  chœur.  La  menuiserie  des  stalles  du  chœur 
est  d'un  beau  travail.  Le  pourtour  du  sanctuaire  a  été 
défiguré  par  un  corps  d'architecture  d'ordre  ionique  :  au- 
dessus  du  maître-autel  se  trouve  un  très-beau  Christ  en 
bois,  œuvre  de  Girardon.  A  droite  du  chœur,  au-dessus 
de  la  partie  d'un  ancien  cloître  qui  sert  de  sacristie,  est 
une  pièce  voûtée  en  ogive  et  qu'on  appelle  la  Trésorerie  : 
on  y  conservait  anciennement  les  châsses,  les  reliquaires 
et  les  vases  sacrés;  ce  qu'elle  offre  de  plus  intéressant, 
ce  sont  des  fresques  qui  représentent  la  translation  des 
restes  de  S^  Riquier,  et  quelques  scènes  de  la  Danso  ma- 
cabre, y.  Gilbert,  Description  historique  de  l'ancienne 
abbaye  de  S^-Riquim',  Amiens,  1836,  in-8®. 

RIS,  en  termes  de  Marine,  partie  des  voiles  destinée  à 
être  repliée  quand  le  vent  est  trop  fort  A  cet  effet,  on  y 
pratique  en  ligne  horizontale  un  rang  d'œillets,  dans 
lesquels  on  passe  des  garoettes  ou  cordes  longues  de 
2'",30  à  3'",^0,  pendant  par  moitié*  de  chaque  coté  des 
voiles,  et  servant  à  les  lier  sur  les  vergues.  Les  basses 
voiles  n'ont  qu'un  ris,  les  huniers  en  ont  trois  ou  quatre, 
espacés  de  2  met.  à  2*,60.  Prendre  un  ris,  c'est  raccourcir 
la  voile  dans  le  sens  de  sa  hauteur;  être  au  bas  m,  c'est 
avoir  tous  les  ris  pris;  larguer  les  m,  c'est  détacher  les 
garcettes  qui  tiennent  la  voile  repliée  sur  la  vergue,  lors- 
que le  vent  devient  plus  modéré. 

RISDALE.  V.  RixDALB,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire. 

RISQUE  (de  l'espagnol  risco)^  chance  que  l'on  court 
d'une  perte  ou  d'un  dommage.  Prendre  une  affaire  à  ses 
risques  et  périls,  c'est  s'exposer  sciemment  à  tout  œ,  qui 

{>eut  en  résulter.  Les  risques  loceUifs  sont  les  faits  dont 
a  responsabilité  incombe  aux  locataires  vis-à-vis  do 
propriétaire;  tel  est,  par  exemple,  l'incendie  :  les  com- 
pagnies d'assurances  les  garantissent  à  cet  égard,  moyen- 
nant une  prime  annuelle.  On  nomme  risques  de  mer  les 
chances  i^ultant  pour  l'assureur  d'un  contrat  d'assu- 
rance maritime. 

RISTOURNE,  en  matière  d'assurances  maritimes,  se 
dit  de  la  dissolution  d'un  contrat  à  la  grosse,  soit  pour 
défaut  ou  insuffisance  d'objets  exposés  aux  risques,  soit 
pour  fraude  de  la  part  de  l'emprunteur. 

RIT  ou  RITE  (du  latin  ritus)^  manière  ou  ordre  sui- 
vant lequel  doivent  se  pratiquer  les  cérémonies  du  culte. 
Les  rites  diffèrent  selon  les  religions,  et  il  peut  y  avoir 
aussi  différents  rites  dans  une  même  religion  :  par  exem- 
ple, dans  la  religion  catholique,  on  distingue  les  rits 
ambrosien,  grégorien^  romain,  mozarabe,  etc.  Il  y  a,  à 
Rome,  une  Congrégation  des  rits,  chargée  de  fixer  les 
cérémonies;  elle  a  été  instituée  par  le  pape  Sixte-Quint. 

RITOURNELLE  (de  l'italien  ritoriMilo,  diminutif  de  ri- 
tomo,  retour),  nom  donné  primitivement,  en  Musique,  à 
toute  phrase  (l'accompagnement  qui  répétait  une  phrase  de 
chant,  soit  comme  prélude  en  tête  d'un  air,  soit  au  mi- 
lieu, pour  donner  au  chanteur  un  temps  de  repos,  soit  à 
la  fin  comme  conclusion.  La  ritournelle  a  pris  ensuite 
plus  d'importance,  et  est  devenue  un  trait  de  symphonie 
plus  développé.  Elle  a  surtout  son  emploi  dans  la  mu- 
sique dramatique  ;  elle  annonce  le  sentiment  que  le  per- 
sonnage va  exprimer,  et  permet  les  jeux  de  scène.  — 
Dans  la  poésie  italienne,  on  nomme  ritournelles  de  petits 
chants  populaires,  d'un  caractère  simple  et  mélanooliquer 
et  d'un  rhythme  arbitraire.  B. 

RITUEL,  livre  contenant  les  rites  qu'on  doit  observer 
dans  les  cérémonies  relideuses. 

RIXDALE,  monnaie.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d^  Histoire. 

ROB.  V.  Whist. 

ROBE,  vêtement  ordinaire  des  femmes.  Choi  les  An- 
ciens, une  sorte  de  robe  fut  amsi  la  partie  principale  du 
costume  civil  des  hommes  ;  tels  étaient,  chez  les  Romains, 
les  vêtements  appelés  toge,  prétexte,  trabée.  Nous  don- 
nons encore  le  nom  de  roibe  au  costume  des  magistrilii 


ROB 


1571 


l\OB 


des  avocats,  des  professeurs,  dans  l'exercice  de  leurs 
fonctions.  Par  extension,  le  mot  robe  a  désigné  la  pro- 
fession de  la  judicature,  comme  quand  on  dit  les  gens  de 
robe,  la  noblesse  de  robe.  Autrefois  les  magistrats  et  les 
membres  du  clergé  étaient  dits  gens  de  robe  longue,  et 
ceux  qui  portaient  Tépée  gens  de  robe  courte. 

ROBERT  LE  DIABLE,  poémo  d*ayentures  du  xiii«  siè- 
cle. Une  duchesse  de  Normandie  ne  pouvait  avoir  d'en- 
fants :  après  avoir  vainement  invoqué  Dieu,  la  Vierge  et 
les  saints,  elle  s'adresse  au  diable,  et  devient  mère;  mais 
son  fils  porte  la  peine  de  son  origine  infernale.  Impie, 
déloyal,  féroce,  il  commet  tant  de  crimes,  qu'il  inspire 
à  tout  le  monde  une  profonde  horreur.  L'isolement  où  on 
le  laisse  le  fait  réfléchir  à  son  passé;  il  se  repent  avec  la 
même  ardeur  qu'il  avait  fait  le  mal,  se  rend  à  Rome,  et 
se  soumet  à  une  rude  pénitence  qui  lui  est  imposée  par 
un  saint  ermite.  Bientôt  la  ville  est  assiégée  par  les 
païens.  Un  messager  céleste  apporte  des  armes  à  Robert, 
aai  sauve  plusieurs  fois  Rome  et  l'Empire.  Biais,  humble 
dans  le  succès,  il  ne  se  fait  pas  connaître,  et,  quand 
enfin  il  est  convaincu,  il  refuse  la  main  de  la  fille  de 
l'empereur,  qui  lui  est  offerte  pour  prix  de  ses  services. 
Les  barons  normands  qui  viennent  le  supplier  de  régner 
sur  eux  ne  sont  pas  mieux  accueillis  :  Robert  demeure 
dans  son  ermitage,  et  y  meurt  en  odeur  de  sainteté. —  Ce 
roman  existe  à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris  dans 
an  manuscrit  du  xrii*  siècle;  il  a  été  publié  par  Trébu- 
tien,  Paris,  1837.  Dès  1496,  on  imprima  à  Paris  la  Vie 
du  terrible  Robert  le  Diable,  lequel  fut  après  l'hon^nù  de 
Dieu  :  c'est  de  là  que  fut  tiré  un  vaudeville  de  Robert  le 
Diable,  joué  en  i813,  et  Topera  de  même  nom,  écrit  par 
Heyerb^r  sur  des  paroles  de  Scribe  et  de  Germond  De- 
lavigne,  et  représenté  en  1831.  Un  Miracle  de  Nostre 
Dame  de  Robert  le  Dyable  a  paru  à  Rouen  en  1836  :  les 
éditeurs  supposent  que  Robert  le  Diable  n'est  autre  que 
Robert  Courte-Heuse,  fils  de  Guillaume  le  Conquérant. 
Mais  on  considère  généralement  Robert  le  Diable  comme 
le  type  idéal  de  ces  seigneurs  grossiers  et  violents  qui, 
après  une  vie  de  débauches  et  de  rapines,  allaient  cher- 
cher dans  les  cloîtres  l'oubli  et  le  pardon  de  leurs  crimes. 
La  légende  de  Robert  le  Diable  existe  en  prose  dans  les 
Chroniques  de  Normandie,  œuvre  du  xiii*  siècle.  Elle  a 
été  reproduite  en  anglais  et  en  espagnol;  enfin  clic  a 
inspiré  à  Manzoni  un  épisode  de  son  roman  des  Fian- 
cés, V,  V Histoire  littéraire  de  la  France,  t.  XXII.  H.  D. 
ROBIN,  expression  de  dédain  par  laquelle  les  grands 
seigneurs  et  les  gens  d'épée  désignaient  autrefois  les 
hommes  de  robe,  c-à-d.  les  magistrats  et  le  barreau. 

ROBIN  ET  BIARION  (Le  Jeu  de),  pièce  pastorale  du 
poète  d'Arras ,  Adam  de  La  Halle.  On  j  voit  figurer  dix 
personnages,  Robin,  Marion,  un  chevalier,  six  bergers  et 
une  bergère.  Le  chevalier  rencontre  Marion  et  cherche  à 
la  séduire;  mais  il  perd  son  temps  et  ses  paroles,  et  se 
retire  fort  peu  satisfait.  Arrive  Robin,  k  i^ui  son  amie  ap- 
prend tout  :  le  pauvre  berger,  craignant  le  retour  de  son 
rival,  court  appeler  d'autres  bergers  qui  s'arment  de 
b&tons.  Cependant  le  chevalier  revient,  insulte  Robin,  et 
emmène  de  force  Marion,  que  son  amoureux  n'ose  dé- 
fendre; elle  se  délivre  enfin  elle-même  de  l'importun  che- 
valier, et,  après  divers  jeux  et  divertissements,  la  pièce  se 
termine  par  le  mariage  de  Robin  avec  Marion.  —  Ce  Jeu 
ne  fut  pas  représenté  du  vivant  de  l'auteur;  il  parait, 
d'après  le  prologue  dont  il  est  précédé ,  qu'il  fut  donné 
sur  la  scène  pour  honorer  sa  mémoire.  Il  a  été  publié 
par  Moomerqué  dans  son  Théâtre  français  au  moyen  âge, 
et  par  Renouard,  Fabliauxet  Contes,  Paris,  1829.  V.  V His- 
toire littéraire  de  la  France^  t.  XX.  H.  D. 

ROBIN  HOOD  ou  ROBIN  DES  BOIS  (Ballades  de), 
groupe  de  chants  populaires  de  la  Grande-Bretagne,  com- 
posés sur  Robin  Hood,  chef  d'Outlaws  (  V.  ce  mot  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Histoire).  Les 
Bardes  ont  personnifié,  sous  le  nom  de  ce  chef  de  oande, 
toutes  les  antipathies  des  Anglo-Saxons  contre  les  Nor- 
mands, leurs  vainqueurs  :  toutefois,  Robin  Hood  n'est 
pas  un  personnage  imaginaire.  Né,  d'après  la  tradition, 
en  li60,  il  était  comte  de  Huntingdon  :  après  avoir  perdu 
son  patrimoine  par  ses  prodigalités  et  par  l'injustice  d'un 
shérif  et  d*un  abbé,  il  voua  une  haine  implacable  à  la 
noblesse  normande  et  au  clergé,  recruta  quelques  aven- 
turiers avec  lesquels  il  vécut  au  milieu  de  la  forêt  de 
Sherwood,  et.se  donna  la  mission  de  redresser  les  torts, 
et  de  venger  la  servitude  populaire.  Quelques  critiques 
ont  fait  de  lui  un  soldat  de  Simon  de  Montfort  révolté 
contre  Henri  III;  d*autres  ont  nié  son  existence.  Son  ha- 
bileté k  tirer  de  l'arc  fut  proverbiale,  et  les  corporations 
4'archert  en  Angleterre  Instituèrent  plus  tard  des  Jeux  et 


des  fêtes  en  son  honneur.  Aujourd'hui  encore  on  montre 
des  pierres  où  il  s'est  assis,  des  citernes  où  il  a  bu.  Son 
cor  n'était  pas  moins  célèbre  que  celui  de  Roland  en 
France;  on  conserva  son  arc  et  une  de  ses  (lèches  à 
Fountains-Abbey  jusqu'à  la  fin  du  xvm"  siècle,  et  sa 
tombe  est  dans  le  cinictiùru  Je  Hathersage.  Les  noms  de 
ses  lieutenants  vivent  aussi  dans  la  mémoire  du  peuple  : 
on  remarque  surtout  Arthur,  tanneur  de  Nottingham,  et 
Petit-Jean  {Little  John).  Les  ballades  de  Robin  Hood,  en 
grande  faveur  au  xvi*  siècie,  dédaignées  depuis  le  xvii*^, 
attirèrent  de  nouveau  l'attention  quand  Joseph  Ritson 
en  eut  publié  la  plus  graqde  partie  en  1795,  avec  une 
sorte  d'épopée  qui  a  pour  titre  Lytile  Geste,  et  dont  le 
franc  archer  est  aussi  le  héros.  V,  Aug.  Thierry,  Histoire 
de  la  conquête  de  l'Angleterre  par  les  Normands;  Barry, 
Sur  le  cycle  de  Robin  Hood,  thèse,  Paris,  1832;  Mathcw 
Gutch,  The  Robin  Hood  garlands  and  ballads,  wUh  the 
taie  ofthe  Lyttle  Geste,  Londres,  2  vol.,  1850  ;  J.  Huntcr, 
The  great  hero  of  the  ancient^  minstrelsy  of  England, 
Robin  Hood^  ibid.,  1852;  L.  Etienne,  Les  ballades  du 
cycle  de  Robin  Hood,  dans  la  Revue  des  Deux  Mondes, 
1"  octobre  185t. 

L'Allemagne  possède  aussi  son  Robin  des  Bois  :  mais 
celui-ci  n'est  plus  un  chef  de  proscrits,  un  brigand  ver- 
tueux; ce  n'est  autre  chose  que  le  génie  du  mal,  venu  sur 
la  terre  pour  y  faire  des  victimes.  Un  des  mille  moyens 
employés  par  ce  génie  malfaisant  a  fourni  à  Weber  le 
sujet  de  son  opéra  de  Freyschutz  ou  Robin  des  Dois. 

ROBINSON  CRUSOÉ  (La  Vie  et  les  Aventures  do) , 
célèbre  roman  anglais,  publié  par  Daniel  de  Foë  en  1710. 
Le  succès  en  fut  tel,  que  l'auteur  publia  une  suite,  puis 
une  3*  partie  toute  morale,  qui  ne  réussit  point.  On  ne 
saurait  dire  si  De  Foë  eut  autre  chose  en  vue  que  de  faire 
un  livre  amusant.  En  voyant  son  héros  se  reprocher  sans 
cesse  de  n'avoir  pas  écouté  les  remontrances  de  son  père, 
déplorer  les  dangers  et  les  malheurs  qui  le  frappent 
comme  le  juste  châtiment  de  sa  désobéissance,  reporter 
douloureusement  sa  pensée  vers  les  biens  dont  Ta  privé 
sa  funeste  passion  pour  les  voyages,  on  pourrait  croire 
qu'il  a  voulu  inspirer  à  ses  concitoyens  l'aversion  des 
courses  maritimes,  et  que  la  moralité  de  son  livre  est 
qu'il  y  a  folie  à  courir  les  aventures ,  quand  on  est  à  peu 
près  assuré  de  vivre  sur  terre.  Ce  serait  un  but  assez 
étrange  chez  un  Anglais,  jaloux  de  la  gloire  et  de  la  pros- 
périté de  son  pays.  On  peut  supposer  que,  tout  en  do'n- 
^nant  à  Robinson  un  sentiment  vif  et  profond  de  ses  peines 
*au  moment  où  il  les  éprouve,  et  en  même  temps  une 
passion  irrésistible  qui  Tentraine  toujours  à  de  nouveaux 
voyages.  De  Foô  a  voulu  faire  connaître  aux  Jeunes  ma- 
rins que  leur  profession  a  des  charmes  qui  surpassent 
tous  les  maux  auxquels  ils  peuvent  être  exposés  :  il  aurait 
ainsi  servi  les  intérêts  de  sa  patrie  avec  une  étonnante 
adresse,  puisçiu'il  aurait  tendu  et  serait  arrivé  à  ce  but 
par  des  chemins  dont  la  direction  y  semble  opposée.  Ce 
qui  est  certain,  c'est  que  le  Robinson  Crusoé  a  toujours 
eu  de  nombreux  et  avides  lecteurs  dans  la  marine  an- 
glaise :  le  matelot  prend  un  grand  plaisir  à  tous  les  expé- 
dients que  Robinson  imagine  pour  se  nourrir,  se  loger 
et  se  vêtir "VUr  une  terre  abandonnée;  il  compte  bien 
les  mettre  en  usage  et  en  inventer  de  meilleurs  encore, 
si  la  tempête  le  Jette  seul  aussi  sur  quelque  plage  déserte; 
les  ressources  que  Robinson  fournit  d'avance  à  son  esprit 
pour  se  tirer  d'une  position  critique  sont  plus  propres  à 
lui  déguiser  les  dangers  de  sa  profession ,  que  ses  do- 
léances ne  sont  capables  de  lui  en  inspirer  le  dégoût,  et 
il  doit  lui  sembler  qu'en  pareil  cas  il  prendrait  mieux 
son  mal  en  patience,  qu'il  ne  s'abandonnerait  ni  aux 
mêmes  plaintes,  ni  aux  mêmes  terreurs.  Sans  avoir  au- 
tant de  popularité  qu*en  Angleterre,  Robinson  Crusoé  a 
obtenu  dans  tous  les  pays  de  l'Europe  un  grand  et  dura- 
ble succès.  C'est  partout  le  livre  de  l'enfance  et  de  la  pre- 
mière jeunesse,  qu'il  charme  par  l'intérêt  des  situations 
et  le  merveilleux  des  accidents,  et  qu'il  captive  en  leur 
donnant  des  notions  légères ,  mais  assez  fidèles ,  sur  les 
arts  mécaniques,  la  navigation,  le  commerce,  les  climats, 
les  races  d'hommes  et  d'animaux ,  les  productions  natu- 
relles, les  institutions  sociales,  etc.  J.-J.  Rousseau,  qui 
y  trouvait  beaucoup  d'analogies  avec  le  système  d'éduca- 
tion naturelle  qu*il  préconisa  dans  VÊmile,  en  faisait  une 
estime  toute  particulière.  Pour  les  esprits  les  plus  élevés 
et  les  plus  difiiciles ,  Robinson  Crusoé  se  recommande 
par  la  naïveté  des  récits,  des  réflexions  et  du  style  :  de 
tous  les  voyages  imaginaires  «  e'est  celui  qui  porte  au 

Elus  haut  de^  d'illusion  le  caractère  de  la  vraisem- 
lance.  Aussi  fut-on  longtemps  persuadé  que  De  Foô  avait 
fait  une  relation  d'aventurei  véritables,  et  qu'il  avait  pu- 


ROC 


1572 


ROD 


Mié,  en  changeant  seulement  les  noms  et  les  dates,  le 
Journal  d*iui  matelot  écossais,  Alexandre  Selkirk,  aban- 
donné de  17ai  à  1709  dans  IMle  Jaan-Fernandez.  Toute- 
fois, rintérêt  du  roman  faiblit  lorsque  Robinson  n*est 
plus  seul ,  lorsque  Vendredi ,  puis  deux  autres  person- 
nages, viennent  partager  son  sort  et  Taider  de  leur  indus- 
trie. L*ouvrage  devrait  finir,  quand  un  vaisseau  le  tire  de 
son  Ile  :  tout  ce  qui  sait  est  vulgaire  et  presque  ennuyeux. 
LeA  lecteurs  qui  ne  sont  pas  Anglais ,  et  qui  n'ont  point 
pour  les  discussions  religieuses  le  coût  que  TAngleterre 
avait  pour  elles  au  temps  de  Daniel  De  Fo6,  peuvent 
encore  bl&iner  les  fréquentes  et  longues  dissertations 
théologiques  de  Robinson ,  là  oCi  il  s*agit  de  l'éducation 
chrétienne  de  Vendredi  et  de  la  conversion  de  Guillaume 
Atkins.  —  On  a  fait  beaucoup  d'imitations  de  Robinson 
Crusoé  :  la  meilleure  est  le  Jeune  Robinson^  par  Campe, 
Hambourg,  1780,  3  vol.  in-12.  B. 

ROBOTJBS  (du  slave  robota,  travail) ,  nom  qu'on  donne 
aux  corvées  dans  les  pa^s  slaves. 

ROCAILLE,  composition  d'architecture  rustique  qui 
imite  les  rocailles  naturelles,  et  qui  représente  des  grottes, 
des  fontaines,  etc.,  à  l'aide  de  pierres  irrégulières  et 
brutes.  Il  y  a  une  salle  en  rocaille  an  ch&teau  de  Ram- 
bouillet, lii  grande  cascade  du  bois  de  Boulogne,  à  Paris, 
est  en  rocaille.  —  On  a  aussi  donné  le  nom  de  Rocailles 
à  de  petits  meubles  du  temps  de  Louis  XV,  tels  que  pen- 
dules, vases,  flambeaux,  dont  Textérieur  imite  des  rochers 
ou  des  amas  do  coquillages. 

ROCAMBEAU,  cercle  en  fer  qui  embrasse  librement 
un  mStt;  on  y  fixe  une  voile  par  son  point  d*amure  ou  de 
drisse,  et  cette  voile  est  par  là  susceptible  d'être  amurée 
ou  hiuée  à  divers  points  de  ce  màt.  Le  rocambeau  sert 
principalement  à  l'installation  des  focs. 

ROCAN'flN ,  nom  donné  Jadis  :  1^  aux  vieux  militaires 
qu'on  appelait  aussi  mortes-payes,  et  qui  étaient  prépo- 
sés à  la  garde  des  rocs,  des  lieux  fortifiés;  ^^  à  une 
chanson  composée  de  fragments  de  plusieurs  autres ,  en 
guise  de  centon. 

ROCU  (Église  de  S*-)t  à  Paris.  Cet  édifice,  un  des  plus 
ornés  de  la  ville,  mais  aussi  un  des  plus  répréhensibles 
au  point  de  vue  du  goût  et  de  la  pureté,  est  en  style  mo- 
derne. Lemerder  le  commença  en  1632,  mais  il  ne  fut 
achevé  qu'au  siècle  suivant.  Robert  de  Cotte  en  dessina 
le  portail ,  qui  s'élève  au-dessus  d'un  assez  grand  nom- 
bre de  marches.  Imitation  assez  médiocre  du  style  de 
Mansard,  ce  portail  se  compose  de  deux  ordres,  dorique  et^ 
corinthien ,  superposés  et  surmontés  d'un  fronton  ;  sa' 
largeur  est  de  28  met.,  son  élévation  de  26.  La  disposi- 
tion inténeure  de  l'église  S'-Roch  est  fort  singulière  : 
au  delà  de  la  nef  et  du  chœur,  l'œil  aperçoit  trois  cha- 
pelles qui  se  suivent  dans  l'alignement  du  portail  ;  la 
l'*  est  celle  de  la  S^*-Vierge,  dont  la  coupole,  peinte  par 
Pierre,  représente  V Assomption,  et  où  1  autel  offre  une 
Annonciation  exécutée  sur  les  dessins  de  Falconnet;  la 
2*,  autour  de  laquelle  tournent  les  bas  côtés  de  la  nef, 
est  celle  de  la  Communion,  dont  l'autel  est  surmonté  d*un 
groupe  sculpté  par  Slodtz  ;  la  3*,  dite  du  Calvaire,  est  une 
espèce  de  rotonde  coupée,  ajoutée  depuis  à  l'église,  et  dont 
la  décoration,  composée  par  Falconnet,  a  été  sculptée 
par  Michel  Anguier.  Ces  trois  chapelles  sont  éclairées  par 
une  lumière  difiérente  et  dégradée  à  dessein,  et  l'on  a 
Ainsi  obtenu  un  effet  presoue  théâtral.  Les  diverses  cha- 
]>elles  ont  été  ornées  de  taoleaux  et  de  statues,  dont  plu- 
sieurs ne  sont  pas  sans  mérite  :  on  peut  citer  le  Triomphe 
de  Mardochée  par  Jouvenet,  la  Guérison  du  mal  des 
ardents  par  Doyen,  un  Jésus  de  Vien,  le  Vceu  à  la  Madone 
par  Schnetz ,  les  statues  de  8*  Joachim  et  de  S^*  Aune 
par  Lemoine,  de  S^  Augustin  et  de  S^  François  de  Sales 
par  Pajou ,  du  cardinal  Dubois  par  Coustou,  un  Jésus 
dans  la  crèche  sculpté  par  François  Anguier,  le  buste  de 
Le  Nôtre  par  Coysevox ,  le  monument  du  comte  d'Har- 
court  par  Falconnet ,  celui  de  l'abbé  de  l'Épée  par  Lassus 
et  Préault.  Au  nombre  des  personnages  illustres  qui  ont 
été  enterrés  dans  l'éelise  S^-Roch,  figurent  M"**  Desliou- 
lières,  P.  Corneille,  Te  président  Hénault,  les  frè««s  An- 
guier, Pontchartrain,  Mably,  Maupertuis.  La  chaire,  qui 
passe  pour  une  des  plus  belles  de  Paris ,  est  surchargée 
d'ornements  que  Charles  dessina,  et  qui  ont  été  depuis 
restaurés  par  Laperche;  les  Vertus  théologales  qui  la  sou- 
tiennent manquent  de  grâce  et  de  légèreté.  B. 

R0CHE3TER  (  Cathédrale  de  ) ,  un  des  plus  beaux  mo- 
numents de  l'architecture  romano-byzantine  en  Angle- 
terre, commencé  par  Gondulfe,  ancien  moine  de  l'abbaye 
du  Bec  en  Normandie,  qui  fut  nommé  évoque  en  1077. 
La  dédicace  eut  Heu  en  1 130.  Cette  église  est  b&tie  sur  le 
ptiùi  baailical|  avec  transept  :  une  tour  massive  s*élèvc 


au  point  d'intersection  de  la  nef  et  du  transept.  La  (hçade 
occidentale  est  construite  avec  beaucoup  d'habileté  :  la 
porte  est  formée  par  une  très-belle  arcade  en  retraite, 
dont  les  moulures  sont  couvertes  d'arabesques,  de  feuil- 
lages, de  médaillons,  et  de  tètes  d'animaux,  et  qui  est 
supportée  par  quatre  piliers  annclés;  deux  de  ces  pilien 
sont  en  forme  de  caryatides,  et-pr^ntent  les  statues  du 
roi  Henri  I*'  et  de  la  reine  Mathilde  ;  le  linteau  de  la 
porte  offre  la  figure  des  douze  Apôtres,  et,  sur  le  tympan, 
on  voit  le  Sauveur  accompagné  des  symboles  des  quatre 
Évangélistes.  Les  arcs  de  la  nef,  semi-circulaires,  ornés  de 
zigzags,  et  entourés  d'une  archivolte  couverte  de  pointes 
de  diamant,  reposent  sur  des  piliers  carrés,  garnis  de 
colon  nettes  sur  leurs  faces  antérieure  et  postérieure.  Le 
triforium  est  composé  d'un  grand  arc,  semblable  à  celui 
du  premier  étage,  et  encadrant  deux  arcs  moindres,  ap- 
puyés sur  une  colonnette;  au-dessus  de  ces  deux  arcs 
est  une  ouverture  en  œil-de-bœuf.  Les  fenêtres  sont  éiOL- 
lement  à  plein  cintre,  et  la  voûte  est  en  bois.  Une  vaste 
crypte  s'étend  sous  une  partie  du  chœur  et  sous  le 
transept;  on  y  trouve  encore  des  traces  de  peintures  à 
fresque.  B. 

ROCHET  (de  l'allemand  rock,  vêtement,  robe),  sorte 
d'aube  courte,  garnie  de  broderies  et  de  dentelles,  que 
portent  les  évoques,  les  abbés  et  les  chanoines.  Dans  cer- 
tains diocèses,  les  prêtres  et  môme  tous  les  gens  de  chœur 
portent  des  rochets  dépourvus  d'ornements.  Le  rochct  a 
des  manches  et  des  poignets,  ce  qui  le  distingue  du  sur- 
plis (V.  ce  mot).  —  On  donne  aussi  le  nom  de  rocket  ao 
mantelet  de  cérémonie  des  Pairs  d'Angleterre  :  le  rochet 
des  vicomtes  a  deux  bordures  et  demie,  celui  des  comtes 
en  a  trois. 

ROCHKTTE.  V.  Fosée. 

ROCOCO  (  Style },  nom  qu'on  donne  à  un  certain  style 
d'architecture  et  d'ornementation  du  xviii*  siècle,  lequel 
emploie  les  façades  hérissées  de  lignes  courbes,  les  fron- 
tons recourbés  et  brisés,  les  encadrements  tout  à  fait 
arbitraires  des  portes  et  des  fenêtres,  les  rocailles,  les 
guirlandes  de  fleurs  bizarrement  entrelacées,  et  toutes 
sortes  de  formes  tourmentées  pour  les  tables,  fauteuils, 
sofas,  candélabres,  etc.  Tous  les  moyens  de  l'art  y  sont 
mis  en  œuvre  mal  à  propos  et  uniquement  en  vue  de 
l'effet.  Le  rococo  fit  place,  vers  la  fin  du  siècle,  à  un  nou- 
veau style  classique,  qui  mit  à  la  mode  tout  ce  qui  était 
à  la  grecque. 

RODAGE ,  droit  féodal.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d*Histoire, 

RODEZ  (Église  Notre-Davb,  à).  Cette  église  catlié- 
dralo,  élevée  sur  l'emplacement  d'un  autre  édifice  qui 
s'écroula  en  1275,  est  en  une  sorte  de  grès  rougeàtre.  Elle 
fut  construite  avec  beaucoup  de  lenteur  :  les  chapelles 
absidales  et  les  premières  travées  du  chœur  appartien- 
nent au  XIV*  siècle;  pendant  le  xv*,  le  chœur  fut  terminé 
et  orné  de  stalles,  on  éleva  le  transept,  la  nef  et  la  tour; 
enfin,  au  xvi*,  un  secrétaire  du  cardinal  d'Armagnac, 
Philandrier,  qui  avait  étudié  l'architecture  dans  Vitnive 
et  visité  les  œuvres  de  la  Renaissance  en  Italie,  exécuta 
le  portail  à  fronton,  et  Bachelier  éleva,  dans  le  même 
style  déplacé,  la  lourde  tribune  qui  occupe  le  fond  de  la 
nef  et  se  prolonge  en  partie  sur  les  bas  côtés.  L'exté- 
rieur de  la  cathédrale  de  Rodez  n'offre  pas  ces  merveilles 
de  sculpture  au'on  trouve  dans  les  monuments  gothiques 
de  la  même  époque  ;  tout  y  est  nu  et  sévère.  La  seule 
partie  remarquable  est  la  tour,  achevée  en  1501  ;  elle 
est  carrée  jusqu'au  milieu  de  sa  hauteur,  puis  formée 
d'un  corps  octogonal,  que  flanquent  quatre  tourelles 
posées  sur  les  angles  de  sa  base,  et  portant  chacune  ia 
statue  d'un  Évangéliste.  Elle  se  termine  par  une  plauv 
forme,  au  milieu  do  laquelle  est  une  coupole  qui  contient 
le  timbre  de  l'horloge  et  qui  porte  une  sratue  colossale 
de  la  Vierge.  L'élévation  de  ce  clochei  «t  de  80  met. 
L'église  n'a  que  des  entrées  latérales,  et,  à  l'endroit  où 
se  trouve  d'ordinaire  la  principale  en  rée,  en  face  du 
chœur,  on  voit  un  grand  autol  appuyé  contre  la  muraille. 
La  disposition  intérieure  de  l'édifice  présente  la  forme 
d'une  croix  latine,  avec  collatéraux  et  chapelles  acces- 
soires :  la  longueur  est  de  97'°,45{  la  plus  grande  lar- 
geur, prise  dans  la  croisée,  de  36";  la  hauteor  sons 
voûte,  de  33"'.  Les  chapelles,  au  nombre  de  27,  n'ont 
pas  toutes  le  même  plan  :  celles  qui  accompagnent  la 
nef,  et  les  deux  premières  au  delà  du  transept,  son! 
élevées  sur  un  plan  carré,  tandis  que  celles  qui  rayon- 
nent autour  dn  sanctuaire  sont  hexagonales.  La  chapelle 
du  S^-Sépulcre  est  remarquable  par  la  voûte  plate  qui 
lui  sert  de  plafond.  La  construction  manque  générale- 
ment d'élégance  et  de  gr&ce  :  les  pilien  ne  sont  omto 


ROL 


1573 


ROL 


ipie  de  simples  nervures  prismatiques  ;  les  galeries  sont 
lourde»  ^  obscures  ;  de  grêles  colonnettes,  contournées 
à  ^eul  parUe  supérieure  en  cœurs,  on  flammes  ou  en 
figures  fantastiques,  partagent  les  feiiôtres  en  plusieurs 
compartiments.  Le  chœur  seul  est  bâti  dans  des  propor- 
tions harmonieuses  et  avec  toute  la  perfection  désirable. 
Le  jubé,  quoique  mutilé,  est  une  œuvre  précieuse.  Les 
boiseries  du  chœur  sont  un  des  plus  curieux  monuments 
de  la  sculpture  à  la  fin  du  xv®  siècle  :  c*est  un  ensemble 
de  dais  très-riches,  reliés  aux  stalles  par  un  panneau 
rempli  d*arcades  simulées,  d*ogives,  d'arcs  trilobés  et 
de  quatre-feuilles;  de  chaque  côté  des  stalles  s*élèvent 
des  colonnettes  qui,  partant  d'une  base  commune,  vont 
se  réunir  au  dais  supérieur.  Le  *trône  épiscopal  est  plus 
beau  encore  :  la  stalle  est  formée  de  trois  panneaux, 
dont  les  deux  latéraux  sont  découpés  à  jour;  le  recou- 
vrement supérieur  projette  un  magnifique  pendentif,  et 
est  surmonté  d'une  sorte  de  pyramide  flanquée  de  clo- 
chetons à  ses  angles.  V.  Tabbé  Magne,  Notice  archéolo- 
gique stur  la  cathédrale  de  Bodez,  B. 

BOE ,  vieux  mot  qui  désignait  un  pupitre  disposé  en 
forme  de  roite  tournante,  soit  horizontalement  sur  un 
pivot  perpendiculaire  au  centre,  soit  verticalement  sur 
un  axe  horizontal,  de  manière  à  maintenir  la  même  in- 
clinaison à  tous  les  volumes  au*ii  soutenait.  On  l'appli- 
quait aussi  aux  couronnes  de  lumière  {V.  ce  mot). 

ROG,  instrument  de  musique.  V.  Russe  (Art). 

ROGATEURS.  I  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

ROGATION.     (    de  Biographie  et  d'Histoire. 

ROGATOIRE  (Commission).  V.  Commission. 

ROI,  souverain  d'un  État  ({ui  porte  le  titre  de  royaume 
{V.  RoYADTâ).  —  Le  mot  roi  a  été  employé  dans  d'autres 
acceptions  que  celle-là.  Ainsi,  il  y  avait,  dans  Tancienne 
Athènes,  un  archonte-roi,  chargé  de  présider  à  tous  les 
sacrifices.  Certaines  corporations  du  moyen  &ge  donnè- 
rent à  leurs  chefs  le  nom  de  roi  (F.  Basochk,  Ribadds, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire,  eU 
dans  le  présent  ouvrage,  les  art.  MEnciKns,  MéNéTRiERs). 

BOi  d'armes.  )  V.  ces  mots  dans  notre  Diction- 

Hoi  DES  FESTINS.      [      luzirtf  de  Biographie  et  d^His- 

noi  DES  SACRIFICES.  }      toire. 

ROIS  (  FOte  des),  j  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

ROIS  (Livres  des).  )     de  Biographie  et  d'Histoire. 

ROJOK,  instrument  de  musique.  V.  Russe  (Art). 

ROLAND  (La  Chanson  de)  ou  Chanson  de  Boncevaux, 
la  plus  ancienne  et  la  meilleure  de  nos  Chansons  de 
gestes,  appartenant  au  cycle  carlovingien.  Le  héros  en 
est  Roland,  comte  des  Marches  de  Bretagne,  et  neveu  de 
Charlemagne.  Cette  Chanson,  sous  la  forme  que  nous 
connaissons,  remonte  au  xii*  siècle,  et  on  y  trouve  le 
nom  de  son  auteur,  Turold  ou  Théroulde ,  sur  lequel  il 
n^exiftto  aucun  renseignement.  Mais,  d'après  le  témoi- 
gpage  même  de  Turold,  il  a  puisé  dans  des  œuvres  anté- 
rieures, dans  les  Gesta  Francorum ,  dans  le-  livre  d'un 
certain  Gilie,  qui  est  demeuré  complètement  inconnu 
pour  nous.  Si,  d'ailleurs,  on  se  rappelle  que  Taillefer 
entonna  la  Chanson  de  Roland  avant  la  bataille  d'Has- 
tings,  en  1066,  il  devient  évident  qu'il  y  eut  de  cette 
Chanson  un  thème  primitif,  que  Turold  aura  sans  doute 
recueilli  avec  les  changements  et  les  amplifications  que 
la  tradition  devait  y  apporter  sans  cesse.  Le  fonds  de  son 
œuvre  est  assurément  plus  ancien  que  celui  de  la  Chro- 
nique de  Turpin  {V.  ce  mot).  Voici  la  fable  développée 
par  Turold  : 

Marsile,  roi  musulman  de  Saragosse,  instruit  que 
Charlemagne  venait  attaquer  ses  États,  lui  députe  Blan- 
candrin,  l'un  de  ses  preux  et  conseillers,  dans  l'espoir 
que  des  présents  et  une  promesse  de  se  convertir  arrê- 
teront l'invasion.  L'empereur  assemble  ses  ban^ns,  et  ne 
paraît  pas  éloigné  d'accepter  les  propositions  de  Marsile; 
Roland,  qui  en  suspecte  la  véracité,  demande  à  se  rendre 
auprès  du  chef  sarrasin  ;  mais  c'est  Ganelon ,  son  en- 
nemi, qui  est  chargé  de  cette  mission.  Celui-ci,  entraîné 
par  la  naine  qu'il  porte  à  Roland,  s'entend  avec  les  Mu- 
sulmans pour  le  perdre,  et,  à  son  retour  de  Saragosse , 
persuade  à  Charlemagne  que  Marsile  va  se  rendre  à  Aix- 
la-Chapelle  pour  recevoir  le  baptême.  La  retraite  est  ré- 
solue, et,  par  l'influence  funeste  de  Ganelon,  le  com- 
mandement de  l'arrière  -  garde  est  donné  à  Roland, 
qu'accompagneront  les  autres  Pairs  de  France.  Le  gros 
de  l'armée  est  déjà  loin,  quand  une  armée  considérable 
de  Musulmans  fond  sur  les  Français  dans  la  vallée  de 
Roncevaux.  Roland,  Olivier,  l'archevêque  Turpin  et  les 
autres  paladins  font  des  prodiges  de  valeur;  mais  le 
nombre  l'emporte,  et,  après  cina  chocs  furieux  des  deux 
parais,  il  ne  reste  plus  que  60  chevaliers  chrétiens.  Ro- 


land, couvert  de  blessures,  sonne  de  son  cor  Olifan  pour 
appeler  du  secours  :  Charlemagne,  toujours  trompé  par 
Ganelon,  ne  tient  pas  compte  de  cet  appel,  «t  continue 
sa  route;  mais  le  corse  fait  entendre  de  nouveau;  l'em- 
pereur, désabusé  par  le  duc  Naisme,  fait  arrêter  le 
traître,  et  revient  sur  ses  pas.  Il  arrive  trop  tard,  et  ne 
trouve  que  des  morts  :  pour  les  venger,  il  se  met  à  la 
poursuite  des  ennemis,  et  ce  n'est  qu*après  les  avoir 
taillés  en  pièces,  qu'il  recueille  les  corps  des  paladins. 
Au  moment  où  il  va  rentrer  en  France,  l'amiral  Bali- 
gant,  venu  de  la  Babylonie  sur  la  nouvelle  de  la  défaite 
de  Marsile,  lui  offre  une  seconde  bataille  :  il  est  vaincu 
et  tué.  Les  mosquées  de  Saragosse  sont  détruites  ;  plus 
de  cent  mille  habitants  sont  faits  chrétiens.  Charlemagne 
retourne  dans  ses  États,  dépose  l'Olifan  de  Roland  dans 
l'église  S^-Séverin  à  Bordeaux,  son  corps  à  Blaye,  et, 
arrivé  à  Aix-la-Chapelle,  où  la  belle  Aide,  fiancée  de 
Roland,  meurt  de  douleur,  il  livre  Ganelon  au  supplice. 
Le  poème  se  termine  par  la  conversion  de  la  veuve  de 
Marsile. 

Tel  est  ce  poème  véritablement  épique  par  l'unité  du 
plan,  la  vérité  et  la  variété  des  caractères,  par  la  gran- 
deur des  événements.  «  Les  beautés  dont  il  étincelle , 
dit  M.  Gérusez,  nous  frappent  encore  sous  la  rouille  d'un 
langage  inculte,  sous  la  négligence  d'une  versification 
qui  se  contente,  pour  tout  élément  musical,  du  repos  de 
l'hémistiche,  du  nombre  régulier  des  syllabes,  et  trop 
peuvent  d'une  assonance  imparfaite  bien  éloignée  de  la 
rime.  Toutefois  l'expression  simple  et  forte  y  traduit 
énergiquement  de  belles  pensées  et  de  nobles  senti- 
ments... Le  caractère  exclusivement  guerrier  et  religieux 
de  ce  poème,  où  la  galanterie  n'a  point  de  place,  où  le 
merveilleux  se  laisse  à  peine  entrevoir,  le  sentiment  de 
patriotisme  qui  l'anime,  la  majesté  de  Charlemagne  tou- 
jours respecté,  toujours  obéi,  autorisent  la  critique  à  rat- 
tacher l'inspiration  première  de  la  Chanson  de  Roland 
au  règne  môme  de  ce  prince,  quand  l'autorité  royale 
n'avait  reçu  aucune  atteinte,  et  quand  les  efforts  de  l'hé- 
ritier des  Césars  pour  constituer  l'unité  d'une  grande 
nation  avaient  imprimé  le  patriotisme  au  cœur  des  peu- 
ples unis  sous  sa  main  puissante.  C'est  le  seul  qui  ait 
conservé  profondément  l'empreinte  de  ce  sentiment  de 
nationalité  que  les  divisions  féodales  devaient  altérer  si 
promptement.  » 

Le  manuscrit  de  la  Chanson  de  Boland  est  à  la  biblio- 
thèque Bodléienne  d'Oxford.  Il  a  été  publié  par  Fran- 
cisque Michel  enl837,in-8%  etparGénin  en  1850,  in-8^ 
V,  Monm,  Le  Boman  de  Boncevaux,  Paris,  1833,  in-8;  et 
un  article  de  M.  Vitet  dans  la  Bévue  des  Deux  Mondes, 
juin  1852.  B. 

ROLAND  AMOUREUX  (Le),  en  italien  Onandotnnamorato, 
poème  romanesque  ou  comte  Bojardo,  où  le  merveilleux 
de  la  féerie  est  étalé  dans  toute  sa  richesse.  L'ouvrage  est 
trop  long  et  l'action  trop  vaste,  trop  compliquée,  pour 
qu'on  puisse  en  faire  une  analyse  suivie  :  mais  il  faut 
noter  ce  qu'il  y  eut  de  nouveau  dans  le  plan  de  l'auteur, 
et  dans  sa  manière  de  concevoir  l'action  et  les  person- 
nages. Jusqu'alors  les  romanciers  avaient  respecté  les 
caractères  traditionnels,  notamment  celui  de  Roland, 
toujours  représenté  comme  un  modèle  de  toutes  les  ver- 
tus chevaleresques.  Bojardo ,  le  premier,  en  le  montrant 
amoureux  d'Angélique,  l'a  fait  déchoir  de  cette  hauteur 
morale  où  l'avaient  placé  les  vieux  auteurs.  Non-seule- 
ment il  changea  la  physionomie  des  personnages  connus, 
mais  il  créa  une  foule  de  caractères  de  fantaisie  :  tels  sont 
les  rois  Agramont,  Sobrin,  Bilandricart,  Sacripant  et  Ro- 
domont.  ces  caractères  sont  bien  tracés,  et  contrastés 
avec  art.  Le  plan  du  Boland  amoureux  est  bien  conçu  et 
bien  ordonné  ;  l'imitation  des  Anciens  est  sensible  dans 
quelques  parties.  Malheureusement  la  mort. empêcha  Bo- 
jardo d'achever  son  poème,  et  ce  manque  de  dénoûment 
fait  tort  à  l'ouvrage;  un  misérable  continuateur  essaya 
de  mener  à  fin  les  aventures  de  Roland.  Le  Berni  osa  en- 
treprendre, après  Domenichi ,  de  refondre  entièrement  le 
Boland  amoureux,  en  le  dégageant  des  formes  sérieuses 
que  Bojardo  lui  avait  données,  et  il  y  réussit,  tout  en 
suivant  son  auteur  chant  par  chant  avec  la  plus  grande 
exactitude.  C'est  donc  presque  uniquement  le  style  qu'il 
a  refait  ;  mais  c'est  surtout  par  le  st^le  que  vivent  les 
poèmes.  Le  Boland  amoureux,  refait  par  Berni,  est, 
après  le  Boland  furieux  d'Arioste,  le  romar  épique  ita- 
lien qu'on  lit  le  plus.  ^    E.  B. 

ROLAND  FURIEUX  (Le),  OU  italien  Orlando  furioso, 
épopée  romanesque  qui  parut  en  1516.  Arioste,  attaché 
à  la  maison  de  Ferrare,  et  en  particulier  au  cardinal 
Alphonse  d'Esté,  tout  en  prenant  pour  sujet  apparent  de 


ROL 


1574 


ROM 


ion  ouvrage  la  folie  de  Roland,  neven  de  Charlemagne, 
te  proposa  en  réalité  de  célébrer  l'origine  de  la  maison 
d*Este^  oui  prétendait  descendre  de  Roger  et  de  Brada- 
mante.  Ce  sont  les  véritables  héros  du  poème,  dont  ils 
remplissent  la  plus  grande  partie  :  à  côté  d'eux  nous 
retrouvons  tous  les  personnages  des  romans  carlovin- 
giens  et  de  la  Chronique  de  Turpin,  Charlemagne,  Ro- 
land, Renaud  de  Montauban  et  son  héroïque  famille, 
Ganelon  le  traître,  Roger  et  Bradamante,  Angélique  la 
belle  reine  de  Gathay,  Marflse  l'Amazone,  puis  les  Sar- 
rasins obligés,  Ferragus,  Sacripant,  Rodomont ,  enfin  les 
enchanteurs  et  les  bonnes  et  mauvaises  fées,  indisnen- 
sables  à  ces  sortes  de  compositions  où  le  merveilleux 
Joue  un  grand  rôle. 

Trois  actions  principales  se  partagent  le  poème  :  i*  les 
amours  et  les  exploits  de  Roger  et  de  Bradamante,  dont 
le  mariage  forme  le  dénoôment  de  Touvrage  ;  S**  la 
guerre  imaginaire  que  les  Sarrasins  firent  à  Charle- 
magne, et  les  efforts  de  cet  empereur  et  de  ses  paladins 
pour  délivrer  la  France  et  l'Europe  de  ces  barbares; 
3<*  l'amour  de  Roland  pour  l'insensible  Angélique,  et  sa 
folie  &  la  fois  terrible  et  touchante,  quand  il  apprend  le 
mariage  de  cette  reine  avec  le  beau  Médor.  Au  milieu  de 
ces  trois  actions,  que  Tauteur  mène  presque  toujours  de 
front,  naissent  une  foule  d'incidents  merveilleux  qui  s'en- 
tre-croisent  sans  nuire  à  l'ensemble.  Quelquefois  même 
l'auteur  oublie  son  sujet  pour  conter  une  histoire  qui  lui 
Tient  &  l'esprit ,  comme,  par  exemple,  celle  de  Joconde, 
après  quoi  il  s'excuse  auprès  de  son  auditoire  de  sa  dis- 
traction, et  reprend  le  fil  de  son  récit.  L'épopée  roma- 
nesque admettant  tous  les  tons,  Arioste  a  pu  donner  car- 
rière à  son  génie  inventif:  tantôt  il  imite  heureusement 
Virgile,  comme  lorsqu'il  nous  montre  Buridan  et  Médor 
gardant  le  corps  de  leur  malheureux  roi  Dardinel,  épisode 
peut-être  supérieur  à  celui  d'Euryale  et  Nisus  dans 
V Enéide.  Tantôt  il  lutte  avec  Catulle,  comme  dans  ces 
gracieuses  stances  :  «  La  jeune  fille  est  semblable  à  la 
rose,  etc.  »  Puis  il  nous  raconte  quelque  fait  incroyable, 
et  ajoute  avec  une  fine  bonhomie  :  »  Je  ne  l'aurais  pas 
cni ,  mais  Turpin  l'a  écrit.  »  Sans  cesse  nous  assistons  à 
de  nouveaux  combats,  celui  de  Renaud  et  de  Ferragus,  de 
Sacripant  et  de  Bradamante,  de  Roger  et  de  Mandri- 
cart,  etc.,  et  Arioste  trouve  le  moyen  de  diversifier  à 
l'infini  la  description  qu'il  nous  en  fait.  L'histoire  d'As- 
tolphe  allant  dans  la  lune  chercher  la  raison  de  son  cousin 
Roland,  et  y  trouvant  la  sienne  et  celle  d'une  foule  de 

Sens  que  Jusqu'alors  il  avait  crus  fort  sages,  est  connue 
e  tout  le  monde.  Ces  traits  d'ironie  profonde  sont  semés 
à  profusion  dans  le  Boland  furieux.  C'est  ainsi  que  l'ange 
S^  Michel ,  envoyé  sur  la  terre  pour  chercher  le  silence, 
se  dirige  aussitôt  vers  un  couvent  de  moines,  où  il  no 
trouve  que  la  discorde.  Dans  la  description  des  jardins  do 
l'enchanteresse  Alcine,  Arioste  a  imité  le  Tasse,  et  lui  est 
resté  inférieur;  mais  il  a  réussi  à  créer  des  êtres  fantas- 
tiques qui  sont  presque  devenus  réels,  tant  ils  sont  fami- 
liers à  notre  imagination  :  tel  est  ce  cheval  ailé,  l'Hippo- 
Sriffe,  sur  lequel  voyagent  Angélique  et  Roger.  Au  milieu 
es  aventures  merveilleuses  de  ses  héros,  Arioste  a 
amené  délicatement  l'éloge  de  la  maison  d'Esté,  presque 
toujours  sous  forme  de  prédictions  faites  à  Bradamante 
par  les  enchanteurs,  et  en  particulier  par  la  bonne  magi* 
cienne  Mélisse,  qui  fait  passer  devant  les  yeux  de  la  jeune 
guerrière  toute  la  postérité  d'elle  et  de  Roger.  Chose  triste 
à  dire,  le  cardinal  Hippolvte  d'Esté  ne  sut  apprécier  ni  la 
louange  ni  le  poème;  mais  la  postérité  lui  a  donné  tort , 
et  le  mland  furieux  est  universellement  regardé  comme 
le  modèle  du  genre,  et  même  comme  une  œuvre  unique, 
mélange  de  pathétique,  de  fine  raillerie,  et  d'inventions 
originales  qu'il  est  impossible  d'imiter.  * 

Le  Roland  furieux  a  été  traduit  en  français  par  J.-B. 
Mirabaud,  1741;  d'Ussieux,  1775;  Tressan,  1780;  Panc- 
koucke  et  Framery  ;  A.  Mazuv,  1839  ;  A.  Délateur,  1842; 
Philippon  de  La  Madeleine,  1843.  On  a  aussi  des  traduc^ 
tiens  en  vers  par  Creuzé  de  Lesser  et  Duvau  de  Cha- 
vagne,  et  quelques  courts  fragments  par  Voltaire.  La 
meilleure  édition  de  l'original  est  celle  de  Panizzi ,  Lon- 
dres, 1830,  8  vol.  in-8°.  E.  B. 

RÔLE  (du  latin  rotuius,  rouleau),  feuille  de  papier 
ou  de  parchemin ,  roulé  ou  non,  sur  laquelle  on  écrit  des 
listes  de  non^s,  des  états,  des  expéditions,  etc.  En  ce  sens 
on  dit,  dans  la  Marine,  un  rôle  d'équipage;  dans  l'admi- 
nistration des  finances,  le  rôle  des  cantributions  ;  au  Pa- 
lais, une  affaire  inscrite  au  rôle,  ou  plaidée  à  tour  de 
rôle.  Les  expéditions  des  actes  chez  les  notaires  et  les 
avoués  se  payent  à  tant  le  rôle,  et  par  ce  mot  on  entend 
HO  feuillet  écrit  des  deux  côtés  et  portant  un  nombre  de 


lignes  déterminé.  —  En  Angleterre,  on  nomme  rôiei 
{rolls)  les  anciens  actes  du  Parlement,  les  lettres  royales, 
les  titres  ou  chartes,  et  le  Matire  des  rôles  est  un  magis- 
trat de  li^  Cour  de  la  chancellerie  qui  supplée  le  chanci^ 
lier  dans  ses  fonctions  judiciaires. 

RÔLE,  en  termes  de  Théâtre,  partie  d*une  pièce  que 
cha({ue  acteur  doit  jouer.  Dans  la  copie  qui  lui  en  est 
remise,  on  a  écrit  non-seulement  les  tirades  et  les  phrases 

au'il  a  à  débiter,  mais  aussi  les  répliques,  c.-à-d.  les 
erniers  mots  de  celles  qui  les  précèdent,  afin  qu'il  sache 
quand  il  faut  prendre  la  parole.  On  y  met  également  les 
indications  des  actions  et  des  mouvements  à  exécuter  sur 
la  scène.  Créer  un  rd/«,, c'est  le  jouer  le  premier;  com- 
poser un  rôle,  c'est  se  pénétrer  du  personnage  qu'on 
représente,  de  manière  que  le  jeu,  la  démarche,  les 
gestes,  la  voix,  le  costume,  portent  l'empreinte  spéciale 
de  ce  personnage.  Un  rôle  muet  est  e^lui  où  l'acteur  ne 
parait  sur  la  scène  que  pour  entendre  ce  que  disent  ceux 
qui  sont  chargés  du  dialogue,  ou  pour  exécuter  ce  qu'ils 
commandent.  —  Par  extension.  Rôle  est  devenu  syno- 
nyme à^emploi ,  et  les  rôles  ont  été  soumis  à  une  classi- 
fication, d'après  leur  importance  et  leur  caractère.  Ainsi , 
on  distingue  :  pour  les  honimes,  les  premiers  rôles,  les 
jeunes  premiers,  les  pérej  nobles,  les  deuxièmes  rôles, 
les  troisièmes  rôles  et  raisonneurs^  les  financiers,  les 
amoureux,  les  comiques  jeunes,  grimes  et  marqués,  les 
utilités,  les  accessoires;  pour  les  femmes,  les  premiers 
et  deuxièmes  rôles,  les  jeunes  premières,  les  coquettes, 
les  amoureuses,  les  ingénuités,  les  duègnes,^  les -mér^s 
nobles,  lés  caractères,  les  soubrettes,  les  utilités,  etc. 

ROMAIN  (Art).  —  L  Architecture,  Les  Romains  ne 
furent  pas  doués  d'un  esprit  original  et  créateur  dans 
les  arts  :  après  avoir  reçu  des  étrusques  les  premières 
notions  de  l'architecture,  ils  devinrent  les  élèves  des 
Grecs.  Inférif'urs  à  ces  derniers  par  le  goût ,  ils  mirent 
dans  leurs  constructions  moins  de  pureté  et  de  simpli- 
cité; mais  ils  imprimèrent  à  leurs  œuvres  un  caractère 
remarquable  de  solidité  et  d'utilité  pratique,  et  s'applic[uè- 
rent  à  divers  genres  de  monuments  que  les  Grecs  avaient 
négligés,  tels  que  cloaques,  aqueducs,  amphithéâtres, 
mausolées,  voies  publiques,  arcs  de  triomphe,  thermes,  etc. 
Dans  leurs  imitations  des  ordres  grecs,  ils  s'attachèrent 
peu  au  dorique  et  à  l'ionique  ;  mais  ils  s'approprièrent 
le  corinthien ,  qui  devint  pour  ainsi  dire  leur  ordre  na- 
tional ,  et  auquel  ils  surent  donner  des  formes  nouvelles, 
sans  qu'il  perdît  ses  traits  distinctifs.  Ainsi ,  le  temple 
de  Vesta  à  Tivoli  diffère  autant  de  celui  de  Jupiter  Stator 
à  Rome,  que  celui-ci  du  monument  choragique  de  Lysi- 
crate  à  Athènes,  et  cependant  tous  les  trois  comptent 
parmi  les  modèles  les  plus  beaux  de  l'ordre  corinthien. 
Les  Romains  ont  porté  cet  ordre  dans  toutes  les  contrées 
soumises  à  leur  domination,  en  Espagne,  en  Gaule,  en 
Istrie,  en  Syrie,  en  Egypte,  etc.  L'emploi  de  l'arc,  et, 
par  suite ,  de  la  voûte,  est  un  autre  caractère  de  l'archi- 
tecture romaine  :  plus  de  plates-bandes,  plus  de  toits 
aigus  comme  dans  le  style  grec,  mais  des  arcades  et  des 
coupoles.  A  la  place  des  poutres  et  des  pierres  d'un  seul 
morceau  et  d'une  étendue  nécessairement  limitée,  qui 
formaient  les  plafonds  et  les  entablements  grecs,  les  Ro- 
mains, par  le  moyen  de  Tare,  purent  se  servir  de  pe- 
tits matériaux ,  surtout  de  briques,  qui  ofi'raient  encore 
l'avantage  d'être  peu  dispendieuses  et  de  pouvoir  se  prépa- 
rer sur  le  lieu  même  où  on  en  avait  besoin.  Dans  les  mo- 
numents qui  nous  sont  parvenus,  on  ne  trouve  qu'une  très- 
petite  quantité  de  colonnes  et  d'entablements  en  marbre 
ou  en  granit,  et  fort  peu  d'édifices  en  pierre  travertine; 
le  reste  est  en  briques.  Le  Colîsée,  le  Mausolée  d*Âdrien, 
le  temple  de  la  Fortune  Virile  et  les  anciens  ponts  du 
'nbre  sont  en  travertin;  les  colonnes  des  principaux 
temples,  les  colonnes  intérieures  du  Panthéon,  Textérieur 
des  arcs  de  triomphe,  les  colonnes  des  cénotaphes  de 
Trajan  et  d'Antonin,  sont  en  marbre  :  mais  tous  les  autres 
monuments ,  tels  que  le  Panthéon  (excepté  le  portique 
et  les  colonnes  ) ,  les  temples  de  la  Paix ,  de  Vénus  et 
Rome,  les  thermes  de  Titus,  etc.,  sont  en  briques.  On 
doit  attribuera  l'emploi  de  l'arc  les  vastes  dimensions  des 
édifices  romains  :  mais  ce  moyen  nouveau  exigeait  des 
points  d'appui  dont  la  masse  fût  assez  solide,  assez  ho- 
mogène pour  résister  au  poids  et  à  la  poussée  des  voûtes  ; 
il  fallait  des  matérieux  d'une  parfaite  cohésion,  et  dont 
toutes  les  parties,  dépourvues  d'élasticité,  se  maintinssent 
par  leur  parfaite  adhérence.  A  la  différence  des  Grecs, 
qui  obtenaient  la  solidité  par  la  seule  observation  des 
lois  de  la  pesanteur  et  sans  usage  des  mortiers,  les  Ro- 
mains composèrent  leurs  maçonneries  avec  de  petits  ma- 
tériaux «  des  pierrailles  et  des  cailloux  jeté»  à  bain  âê 


ROM 


1575 


ROM 


mortier,  et  «nformèrent  ces  blocages  dans  an  ancaîMe- 
roent  de  brique,  de  moellon  oa  de  pierre  de  taille.  lia 
formèrent  leurs  voûtes  sur  cintres  au  moyen  d*arcs  de 
briaao  «a  de  pierre  en  tôte  et  de  béton  battu  sur  couchis 
de  Dois. 

G*6st  une  opinion  généralement  admise,  que  les  Ro- 
mains s*adressèrent,  pour  la  construction  de  leurs  mo- 
ouments,  à  des  architectes  grecs  :  toutefois,  il  ne  faut 
riea  exagérer  à  cet  égard.  Il  serait  étrange  que  des  Grecs 
civilisés,  devenus  esclaves  de  maîtres  barbares,  eussent 
abandonné  leurs  traditions  artistiques  pour  se  plier  si 
rite  aux  exigences  d'un  goût  tout  différent.  Or,  de  même 
qu*on  a  trouvé  à  la  villa  d*Adrien  (près  de  Tivoli),  à  Her- 
culanum  et  à  Pompéi,  des  candélabres,  des  vases  et 
autres  objets  en  style  grec,  qui  prouvent  qu*oa  les  avait 
importés  de  la  Grèce  ou  que  les  artistes  gérées  employés 
en  Italie  avaient  conservé  leur  genre  propre  de  travail, 
de  même  il  faut  admettre  quMl  y  eut  en  architecture  une 
direction  essentiellement  romune.  Le  style  romain  ne 
le  distingue  pas  seulement  du  style  grec  par  l'adoption 
presque  exclusive  de  Tordre  corinthien  et  par  remploi 
systématique  de  Tare,  mais  encore  par  le  mélange  des  ar- 
cades avec  la  disposition  en  colonnes.  Ce  mélange,  qui 
fit  naître  les  entre-colon nements  inégaux  et  les  entable- 
ments brisés,  détruisit  l'harmonie  et  la  simplicité  primi- 
tives de  l'art  grec;  on  en  vint  aux  combinaisons  mons- 
trueuses que  présentent  le  palais  de  Dioclétien  àSpalatro, 
le  temple  de  Pallas  et  les  ruines  du  Forum  de  Nerva  à 
Rome.  Que  Ton  compare  l'intérieur  du  Panthéon  dans 
son  état  primitif  avec  l'église  actuelle  de  S^*-Marie-des- 
Anges,  ou  le  temple  de  Jupiter  Stator  avec  celui  de  la 
Concorde,  et  Ton  verra  combien  la  chute  fut  profonde. 
Cest  peut-être  pour  avoir  senti  cp'on  ne  pouvait  mal- 
traiter de  la  sorte  l'ordre  corinthien,  que  les  Romains 
Imaginèrent  le  système  hybride  qu'on  nomme  ordre 
composite. 

Bien  que  la  construction  du  pont  du  Danube  par  Trajan 
soit  un  ouvrage  des  plus  surprenants,  les  restes  des  con- 
structions romaines  publiques  et  privées  font  supposer 
que  l'art  de  la  charpenterie  n'avait  pas  pris  une  grande 
extension  :  autrement,  les  Romains  ne  se  seraient  pas 
donné  la  peine  d'employer  des  arcs,  là  où  la  charpenterie 
aurait  été  préférable.  Il  ne  parait  pas  non  plus  qu'ils 
aient  connu  la  menuiserie  :  les  parquets  étaient  rem- 
placés par  des  pavages  en  mosalojue,  et  le  stuc,  destiné  à 
recevoir  des  ornements,  tenut  lieu  de  lambris. 

Jusqu'à  l'époque  des  guerres  Puniques,  Tarchltecture 
romaine  s'inspira  des  modèles  étrusques.  Sous  les  pre- 
miers Tcîz,  loo  lemples  furent  de  petits  édifices  carrés, 
couverts  de  roseaux,  où  la  statue  du  dieu  pouvait  à  peine 
trouver  place;  les  habitations  n'étaient  que  de  misé- 
rables ccJoanes,  comme  celle  de  Romulus,  que  l'on  con- 
serva soigr£usement  plusieurs  siècles  en  la  réparant. 
Ancus  Marcius  entoura  Rome  de  murs,  et  creusa  le  port 
d'Ostie.  Au  temps  de  Tarquin  l'Ancien  s'élevèrent  les 
premiers  monuments  remarquables,  le  Cirque,  le  temple 
du  Capitole,  et  la  Cloaque  Maxime.  Servius  Tullius  bâtit 
un  temple  à  la  Fortune  sur  le  marché  aul  bœufs  (Forum 
hoarium)y  et  la  prison  appelée  de  son  nom  TuUianum, 
Le  plus  ancien  temple  construit  sous  la  République  fut 
celui  que  Spurius  Cassius  dédia  à  Bacchus,  à  Cérès  et  à 
Proserpine  :  Démophile  et  Gorgase  l'ornèrent  de  statues 
et  de  tableaux  ;  sur  les  tympans  du  fronton  étaient  des 
statues  d'aigle  et  d'airain  doré.  Quand  les  Gaulois  in- 
cendièrent Rome,  en  l'an  300  av.  J.-C.,  la  plupart  des 
temples  échappèrent  à  la  destruction  :  la  ville  fut  recon- 
struite avec  pi^ipitation  et  sans  plan.  Dans  les  guerres 
que  les  Romains  faisaient  aux  peuples  voisins,  les  géné- 
raux vouaîeat  des  temples  aux  divinités  dont  ils  implo- 
raient Tassistance,  et  le  butin  fait  sur  les  vaincus  était 
en  partie  consacré  aux  dépenses  :  parmi  les  édifices  de 
ce  genre,  celui  de  Quirinus ,  bâti  par  Papirius  Cursor 
après  sa  victoire  sur  les  Samnites,  excita  un  intérêt  tout 
particulier,  parce  qu'on  y  avait  établi  le  premier  cadran 
solaire.  A  la  même  époque  appartiennent  l'aqueduc  et  la 
voie  que  le  censeur  Appius  Claudius  fit  construire,  et  le 
tombeau  de  Scipion  Barbatus. 

La  conquête  de  la  Sicile,  et  surtout  celle  de  la  Grèce, 
développèrent  le  goût  des  arts  chez  les  Romains,  et  sub- 
stituèrent le  luxe  et  l'élégance  à  la  simplicité  antique. 
Longtemps  encore  le  progrès  se  borna  à  décorer,  avec  les 
statues  et  autres  objets  emportés  des  pays  conquis,  les 
édifices  que  Ton  continuait  d'élever  dans  le  goût  ancien , 
et  ce  ne  fat  guère  qu'au  temps  de  Sylla  qu'on  se  mit  à 
imiter  rarchitecture  des  Grecs.  Lorsqu'après  la  prise  de 
Syracuse  Marcellus  rapporta  à  Rome  de  riches  dépouilles. 


on  tira  du  butin  les  ouvrages  d'art  pour  en  décorer  nn 
temple  de  l'Honneur  et  de  la  Vertu,  dont  G.  Mutius  fut 
l'architecte;  de  même,  des  dalles  do  marbre  enlevées  aa 
temple  de  Junon  Lacioienne  à  Crotone  servirent  à  cou- 
vrir le  toit  du  temple  que  Fulvius  Flaccus  avait  voué  à  la 
Fortune  Équestre  pendant  la  guerre  des  Celtibériens.  Vers 
cette  époque,  les  riches  Romains,  qui  avaient  vécu  Jus- 
que-là à  la  campagne,  se  fixèrent  à  la  ville ,  et  Rome 
commença  de  s'embellir  :  Caton  l'Ancien  bâtit  la  basi- 
lique Porcia,  et  Titus  Sempronius  la  basilique  Sem- 
pronia;  les  censeurs  Fulvius  Flaccus  et  A.  Postumius 
Albinus  contribuèrent  surtout  à  l'embellissement  de  la 
ville;  ils  la  firent  paver  et  orner  de  portiques,  agran- 
dirent le  Ciraue,  et  établirent  des  voies  publiques  et  des 
ponts  au  dehors  de  la  ville.  Le  péperin  et  la  brique 
avaient  été  employés  presque  exclusivement  dans  les 
constructions  ;  Métellus  le  Macédonique  fit  bâtir  le  pre- 
mier temple  en  marbre,  celui  de  Jupiter  Stator,  œuvre 
d'Hermodore  de  Salamine  :  toutefois  on  continua  à  se 
servir  de  briques  pour  remplir  Tintérleur  des  murs  et 
pour  les  voûtes,  et  de  pierres  de  taille  pour  les  parois 
des  murs,  le  marbre  étant  généralement  réservé  pour  les 
colonnes.  Bien  peu  de  Romains  s'appliquaient  à  l'archi- 
tecture et  allaient  l'étudier  en  Grèce  :  outre  Mutius,  que 
nous  avons  cité,  on  mentionne  Cossutius,  qu'Antiocbus 
Épiphane  prit  à  son  service  pour  réédifier  le  temple  de 
Jupiter  Olympien  à  Athènes,  et  les  frères  Caius  et  Marcus 
Stallius,  chargés  par  Ariobarzane,  roi  de  Cappadoce,  de 
reconstruire  l'Odéon  incendié  pendant  le  siège  de  la 
•  même  ville  par  Sylla. 

De  ce  personnage  date  une  période  nouvelle  de  l'archi- 
tecture romane.  Peu  de  temps  avant  la  3*  guerre  Pu- 
nique, le  Sénat  avait  refusé  aux  censeurs  Messala  et  Cas- 
sius l'autorisation  d'élever  un  thé&tre  à  Rome  :  à  partir 
de  Sylla,  les  constructions  de  ce  genre  se  multiplièrent. 
Le  théâtre  de  Scaurus,  construit  en  bois,  fut  assez  vaste 
pour  contenir  80,000  spectateurs;  Pompée  en  fit  bâtir  un 
en  pierre  ;  Curion  imagina  les  amphithéâtres  (  V.  ce  mot). 
A  cette  époaue  appartiennent  le  Tabulaire  (Archives  et 
Trésor),  qui  se  dressait  sur  la  pente  du  Capitole,  le 
temple  delà  Fortune  Virile  (auj.  S^'-Marie-l'Égyptienne), 
et  le  temple  de  la  Fortune  à  Préneste.  Les  constructions 
particulières  se  ressentirent  aussi  de  cet  essor  des  arts  : 
on  vit  un  Clodius  habiter  une  maison  qui  lui  coûtait 
15  millions  de  sesterces  ;  les  Scaurus  et  les  Lucullus  riva- 
lisèrent de  magnificence  dans  leurs  palais  et  leurs  villas. 
Mais  c'est  surtout  le  règne  d'Auguste  qu'on  peut  regarder 
comme  l'apogée  de  l'architecture  :  l'ancien  triumvir  avait 
voulu  faire  de  Rome  la  ville  la  plus  belle  de  l'univers,  et 
il  put  dire  qu'après  avoir  trouvé  une  ville  bâtie  en  bri- 
ques, il  en  laissait  une  bâtie  en  marbre.  Alors,  en  effet, 
s'élevèrent  les  portiques  du  cirque  Flaminius,  lu  portique 
d'Octavie,  la  pyramide  de  Cestius,  le  théâtre  de  Mar- 
cellus, le  temple  de  Jupiter  Tonnant,  le  mausolée  d'Au- 
guste, le  Panthéon  d' Agrippa,  l'amphithéâtre  de  Statilius 
Taurus,  une  foule  d'aqueducs,  de  bains,  de  fontaines,  etc. 
Des  architectes  grecs  furent  amenés  à  Rome  comme  es« 
claves,  d'autres  y  vinrent  librement,  mais  nous  n'en  con- 
naissons qu'un  très-petit  nombre,  Cyrus,  Posphorus, 
Saurus,  Batrachus.  Parmi  les  Romains,  on  remarque  : 
L.  Gocoéius  Auctus,  qui  creusa  sous  la  montagne  cette 
route  qu'on  appelle  la  Grotte  de  Pouzzoles,  et  que  l'on 
suppose  avoir  bâti  le  temple  de  Pouzzoles  dédié  à  Au- 
guste; Valérius  d'Ostie,  architecte  du  Panthéon,  et  qui 
imagina  de  couvrir  les  amphithéâtres  ;  enfin  Vitruve,  le 
plus  important  pour  nous  à  cause  de  son  Traité  d'archi- 
tecture, le  seul  ouvrage  qui  soit  resté  de  l'Antiquité  sur 
cette  matière. 

Aj>rès  Auguste ,  l'architecture  ne  tarda  point  à  dégé- 
nérer. Déjà  Tare  de  triomphe  élevé  par  Tibère  à  son  pré- 
décesseur est  démesurément  large,  soutenu  par  des 
piliers  de  maçonnerie ,  avec  deux  maigres  colonnes ,  et 
un  fronton  mal  posé  qui  les  relie;  dans  celui  de  Titus, 
les  colonnes  ont  Jusqu'à  9  diamètres  et  demi,  et  ce  dé- 
faut sera  encore  exagéré  dans  la  suite.  Celui  de  Trajan  à 
Ancûne  pèche  par  l'excès  contraire,  écrasé  qu'il  est  entre 
deux  piliers,  et  les  soubassements,  très-élevés,  sont  sur- 
chargés de  moulures  insignifiantes.  Le  goût  des  empe- 
reurs devait  nuire  aux  beaux-arts  :  après  l'incendie  de 
Rome  sous  Néron,  ce  prince  employa  Celer  et  Sévérus  a 
la  reconstruction  de  plusieurs  édifices,  et  principalement 
à  cette  Maison  dorée  dont  les  splendeurs  moules  ne  pou- 
vaient rien  avoir  de  commun  avec  le  bon  goût.  Le  Coli- 
sée  de  Vespasien  et  la  colonne  Trajane  sont  les  seuls 
monuments  de  Rome  qui  portent  encore  un  caractère  de 
grandeur.  Il  n'y  a  pas  de  prince  qui  ait  ordonné  autant 


ROM 


1576 


ROM 


ée  constructions  qu*Adrien,  et  son  nom  était  écrit  sur 
tant  d'édifices,  qu'on  l'avait  surnommé  le  Pariélaire  : 
Il  fit  bfttir  le  Môle  ou  Mausolée  qui  porta  son  nom  et  le 

r»nt  yBtlus  à  Rome,  une  villa  à  Tivoli,  un  amphithéâtre 
Capouc,  une  muraille  destinée  à  protéger  les  Bretons 
contre  les  incursions  des  Pietés  et  des  Scots,  etc.  Les 
archit<Hïtes  connus  de  cette  période  sont  Frontin,  Rabi- 
rius,  ApoUodore  de  Damas,  Julius  LAcérus,  Détrianus. 
Entre  autres  innovations  qui  éloignaient  des  modèles 
grecs  les  monuments  romains,  nous  citerons  les  piédes- 
taux sous  les  colonnes,  les  colonnes  accouplées,  les  bas- 
reliefs  sur  les  côtés  extérieurs  du  b&timent,  les  frontons 
ronds  et  de  profil.  —  Sous  les  Antonins,  on  remarque  le 
temple  d'Antonin  et  de  Faustine,  la  colonne  Antonine  et 
eelle  de  Marc-Aurèle.  Puis,  on  ne  rencontre  plus,  avec 
des  traces  de  décadence  de  plus  en  plus  visibles,  que 
l'arc  de  Septime  Sévère,  les  thermes  de  Caracalla,  le  pa- 
lais de  Dioclétien  à  Spalatro,  et  l'arc  de  Constantin.  La 
translation  du  siège  de  l'Bmpire  &  Byzance  porta  le  der- 
nier coup  aux  arts. 

IL  Sculpture,  —  Les  premiers  ouvrages  de  sculpture 
chez  les  Romains  furent  des  statues  des  dieux ,  faites  de 
bois  et  d'argile  par  des  artistes  étrusques.  On  éleva, 
dit-on,  une  statue  de  bronze  à  Horatius  Coclès,  une  sta- 
tue équestre  à  Clélîe;  ces  œuvres  étaient  saps  doute 
d'un  travail  fort  médiocre.  A  partir  des  guerres  Puni- 
ques, les  Romains  enlevèrent  des  pays  vaincus  une  quan- 
tité prodigieuse  de  statues,  et  ces  spoliations  les  dispen- 
sèrent sans  doute  de  toute  étude,  puisque  l'histoire  de 
l'art  n'a  pas  enregistré  le  nom  d'un  seul  grand  sculp- 
teur romain.  Les  statues  arrachées  aux  vaincus  ne  servi- 
rent d'abord  qu'à  orner  les  triomphes;  puis  on  en  rem- 
plit les  places,  les  monuments  publics ,  et  les  maisons 
des  particuliers.  Quelques  chifTres  peuvent  donner  une 
idée  de  la  quantité  d'ouvrages  qui  s^accumulèrent  à 
Rome  :  280  statues  de  bronze  et  230  de  marbre  embel- 
lirent le  triomphe  de  Marcus  Fuivius  sur  les  Étoliens  -, 
l'abbé  Barthélémy  a  établi  que  le  nombre  des  statues 
et  statuettes  exhumées  du  sol  de  Rome  dépasse  70,000. 
Le  nom  de  VeiTës  rappelle  à  l'esprit  le  moyen  le  plus  ha- 
bituel aux  Romains  pour  acquérir  les  chefs-d'œuvre  de 
l'art.  Depuis  le  temps  de  César,  les  sculpteurs  grecs  affluè- 
rent à  Rome  :  parmi  eux  on  cite  Pasitèle,  Colotès,  Ste- 
phanuB,  Arcésilas,  Posis,  Ménélas,  Décius,  Damasippe. 
VAthénien  Diogène  fit  les  statues  qui  décoraient  le  fronton 
du  Panthéon  d' Agrippa.  Le  Gaulois  Zénodore  exécuta  la 
statue  colossale  de  Néron.  Une  œuvre  très-importante  de 
sculpture  est  la  colonne  Trajane,  dont  les  bas- reliefs 
ne  contiennent  pas  moins  de  2,500  figures  humaines, 
outre  les  chevaux,  les  trophées  et  les  machines  de  guerre. 
Le  buste  célèbre  d' Antinous  date  du  règne  d'Adrien.  Il 
est  certain  que,  jusqu'à  l'époque  de  ce  prince,  il  y  eut  de 
beaux  ouvraîges  :  cependant  il  y  a  décadence  par  rapport 
à  l'art  de  la  Grèce  indépendante,  en  ce  que  1  idéal  n'est 

ftius  la  base  de  la  conception  et  de  l'exécution  ;  le  souflle 
ntcricur,  la  poésie  de  l'inspiration  ont  disparu  ;  les  sta- 
tues se  rapprochent  de  plus  en  plus  du  portrait,  et  le  style 
vise  à  la  perfection  du  poli,  au  raffinement.  La  sculpture 
possède  toujours  la  beauté  harmonieuse  de  la  forme, 
mais  la  sève  native  lui  manque.  Il  faut  remarquer  que 
les  artistes,  adroits  et  élégants  imitateurs  do  tous  les 
styles,  se  sont  exercés  aussi  bien  sur  les  divinités  égyp- 
tiennes que  sur  les  dieux  de  la  Grèce  et  de  Rome  :  ils 
ont  préparé  de  cette  façon  beaucoup  d'erreurs  aux  anti- 
quaires, qui  peuvent  rapporter  certaines  statues  à  un 
âge  plus  reculé  que  celui  auquel  elles  appartiennent.  — 
Après  Adrien,  la  sculpture  fit  une  chute  rapide  et  pro- 
fonde :  quand  on  construisit  l'arc  de  Constantin,  les  ou- 
vriers étaient  si  peu  habiles,  qu'on  fut  contraint,  pour 
l'orner,  d'enlever  des  sculptures  à  l'arc  de  Trajan.  Déjà 
Caligula  avait  donné  l'exemple  de  faire  décapiter  une 
foule  de  statues,  pour  leur  donner  sa  propre  image  :  les 
empereurs  des  derniers  siècles  multiplièrent  aussi  leurs 
portraits;  on  fit  des  bustes  sans  tète, afin  de  les  changer  à 
volonté.  V.  Gauric,  De  sctUpturà  sive  stcUtutrià  veterum, 
Florence,  1504,  in-4*;  Aide  Manuce,  De  coelaturA  et 
sciUpturà  veterum,  opuscule  inséré,  comme  le  précé- 
dent, dans  le  Thésaurus  de  Gronovius;  le  comte  de 
Guasco,  00^145(7016  des  statues  chez  les  Anciens,  Bruxelles, 
1768,  in-8<*;  Hofstœter,  Essai  d'une  histoire  de  la  sculp- 
ture  chez  les  Anciens,  en  allem..  Vienne,  1778,  in-8^ 

III.  Peinture,  —  On  ne  doit  pas  plus  accorder  aux 
Romains  le  goût  de  la  peinture  que  celui  de  la  sculpture. 
Ils  ne  s'en  occupèrent  nullement  pendant  plus  de  quatre 
siècles,  et  les  plus  anciennes  peintures  que  l'on  connaisse 
à  Rome,  du  moins  par  tradition^  furent  exécutées  par 


des  Étrusques.  Depuis  qu'ils  eurent  commencé  à  trans- 
porter dans  leur  capitale  les  dépouilles  artistiques  des 
peuples  vaincus,  on  n'a  tu  chez  eux  aucun  pemtre  re- 
commandable.  Les  généraux  Tictorieux  étaient  flattés 
d'étaler  à  leur  ti'iomphe  les  richesses  dont  ils  s'étaient 
emparés  ;  mais  combien  eût-on  trouvé  pturmi  eux,  pour 
quelques  hommes  de  goût  comme  lesScipions,deMum- 
mius  capables  de  laisser  leurs  soldats  jouer  aux  dés  sur 
les  chefs-d'œuvre  des  peintres  de  laGrècel  L'estime  que 
Ion  faisait  des  tableaux  était  fondée,  non  sur  la  connais- 
sance de  l'art,  mais  sur  le  prix  qu'y  attachaient  les  peu- 
ples auxquels  ou  les  avait  enleves.Le  Fabius  qui  fut  sur- 
nommé Pictor  (le  peintre;  pour  avoir  orné  de  pmntures 
le  temple  de  la  déesse  Salus,  vers  Tan  300  av.  J.-C,  du; 
avoir  bien  peu  de  mérite,  puisque  Pline  s'y  arrête  à 
peine.  Marcus  Valérius  Messala,  Lucius  Scipion,  L.  Hos- 
tilius  Mancinus,  représentèrent  les  combats  qu'ils  avaient 
livrés;  Pline  ne  fait  encore  aucun  éloge  de  leurs  ou- 
vrages. Le  poète  Pacuvius  peignit  le  temple  d'Hercule, 
sur  le  Forum  Boarium  (marché  aux  bœufs).  La  peinture 
fut  de  moins  en  moins  cultivée  par  les  citoyens  romains: 
on  l'abandonnait  aux  étrangers.  On  remarque  toutefois, 
au  temps  d'Auguste,  le  chcvulior  Tnrpilius,  qui  peignait 
de  la  main  gauche,  et  Marcus  Ludius,  peintre  de  ma- 
rines et  de  paysages;  plus  tard,  Amulius,  que  Néron 
employa  à  la  décoration  de  sa  Maison  dorée;  Antistius 
Labeo,  plein  de  vanité  et  objet  de  la  risée  publique: 
Corn.  Pinus  et  Accius  Prisrus,  contemporains  do  Ycs- 
pasien.  Tel  est  le  petit  nombre  de  peintres  que  Rome  a 
produits.  Les  œuvres  de  quelque  valeur  furent  exécutées 
par  des  Grecs. 

IV.  Musique,  —  V.  Mdsique. 

BOMAiN  (Caractère).  V,  CACACTènEs  D'iiT"i\n«T.iE. 

non  AIN  (Droit),  ensemble  des  règles  de  Droit  en  vi- 
gueur chez  les  Romains.  Son  histoire  est  externe  ou 
interne,  selon  qu'elle  embrasse  les  nsodincations  succes- 
sives subies  par  ces  règles  mêmes,  ou  qu'elle  se  borne  à 
l'étude  des  sources  auxquelles  l'histoire  peut  les  étudier. 
L'histoire  externe  du  Droit  romain  peut  se  diviser  en 
quatre  périodes  :  la  première  s'étend  de  la  fondation  de 
Rome  à  la  promulgation  des  Douze  Tables;  la  seconde,  de- 
puis la  promulgation  des  Douze  Tables  Jusqu'à  Cicéron; 
la  troisième,  depuis  Cicéron  jusqu'à  Alexandre  Sévère;  la 
quatrième  finit  à  Justinien. 

Première  période,  —  Rome  dut  sa  naissance  à  une 
fusion  de  peuples  :  son  Droit  civil  se  ressentit  de  cette 
origine  et  des  circonstances  qui  présidèrent  à  la  cn^ation 
de  la  ville  nouvelle.  Les  citoyens  y  furent  divisés  en 
deux  classes,  patriciens  et  plébéiens.  Aux  premiers  seuls 
le  droit  à  Vager  publicus^  aux  charges  publiques,  et  une 
sorte  de  noblesse  héréditaire;  les  seconds  formaient  une 
sorte  de  bourgeoisie  libre,  et  le  patronat  les  rattachait 
en  partie,  sous  le  nom  de  clients,  aux  familles  pa- 
triciennes. A  la  tête  de  l'État  se  trouvait  le  roi,  chef 
unique  et  viager  :  à  ses  côtés  le  Sénat,  corps  délibérant 
composé  de  patriciens.  Les  lois  étaient  votées  par  le 
peuple  en  comices.  Les  anciennes  lois  furent  collisé^ 
par  un  pontife  du  temps  de  Tarquin,  Sextus  ou  Publius 
Papirius  ;  son  recueil  prit  le  nom  de  Droit  Papirien.  On 
suppose  qu'il  n'embrassait  que  les  choses  du  culte. 

Après  l'expulsion  des  rois,  le  pouvoir  passa  à  deux 
consuls  choisis  parmi  les  patriciens.  Jusqu'aux  Douze 
Tables,  l'histoire  de  Rome  est  remplie  de  luttes  entre  les 
deux  ordres,  et  des  succès  des  plébéiens,  obtenant  suc- 
cessivement les  tribuns,  les  édiles,  des  comices  particu- 
liers où  ils  votaient  les  plébiscites,  et  enfin  la  promul- 
gation de  règles  de  Droit  générales  réunies  par  des 
Décemvirs  et  transcrites  sur  \*i  tables  de  pierre.  Elles 
posaient  le  principe  de  l'égalité  légale  entre  les  deux  ' 
ordres,  précisaient  le  pouvoir  Judiciaire,  donnaient  la 
formule  des  actions.  Elles  furent  jusqu'à  Justinien  la  base 
du  Droit  public  et  privé.  Exposées  aux  rostres,  puis  bri- 
sées par  les  Gaulois,  elles  furent  ensuite  reconstituées  et 
remises  à  leur  place  primitive;  on  les  y  voyait  encore 
au  m*  siècle  de  l'ère  chrétienne.  Des  auteurs  modernes 
ont  essayé  de  recomposer  leurs  fragments,  entre  autres 
Godefroy,  Haubold  et  Dirksen.  ' 

Deuxième  période,  —  A  partir  des  Douze  Tables  se  ré- 
vèle une  double  source  de  Droit,  le  Droit  écrit  et  le  Droit 
non  écrit.  Le  Droit  écrit,  ce  sont  :  1**  les  (oit,  votées  dans 
les  comices  par  centuries,  sur  la  proposition  du  magistrat 
qui  présidait  le  Sénat  ;  2<>  les  plébiscites^  votés  dans  les 
comices  par  tribus,  sur  la  proposition  des  tribuns  du 

{>euple;  obligatoires  d'abord  pour  1»  seuls  plébéiens,  ils 
e  devinrent  d'une  façon  générale  :  les  lois  et  les  plé- 
biscites portaient  les  noms  de  ceux  qui  les  avaient  piro- 


ROM 


1577 


ROM 


posés;  3*  les  séncUtu-consultes,  édictés  par  le  Sénat  sans 
Ift  participation  du  peuple;  les  plébéiens  ne  reconnurent 
leur  force  obligatoire  que  (^uand  on  ne  contesta  plus 
celle  des  plébiscites.  Le  Droit  non  écrit  se  puisait  dans 
la  tradition  des  ancêtres  {mores  majorum)^  Topinion  gé- 
néralement reçue  {consuetiido)^  et  Tautorité  de  la  chose 
iugée  {auctoritas  rerum  perpétua  similiter  judicatarum). 
Cette  dernière  se  retrempait  à  une  double  source;  la 
plus  considérable  était  Védit  du  préteur,  magistrat  annuel 
chargé  de  rendre  la  justice  soit  entre  les  Romains  seuls 
iprœtor  urbaniu)^  soit  entre  les  Romains  et  les  étran- 
gers {prœtor  peregrinus).  Ce  fut  surtout  par  les  décisions 
de  ce  dernier  que  s'introduisirent  un  certain  nombre  de 
principes  reconnus  comme  communs  à  toua  les  peuples 
[jus  gentium)^  dont  Tapplication,  d*abord  restreinte  aux 
étrangers,  s'étendit  bientôt  aux  Romains.  Chaque  année, 
en  entrant  en  fonctions,  le  préteur  publiait  l'ensemble 
des  règles  d'après  lesquelles  il  rendrait  la  Justice.  Cétait 
an  moyen  d'éviter  le  soupçon  de  partialité.  Cet  édit,  après 
avoir  fait  de  nombreux  emprunts  aux  coutumes,  était 
chaque  année  complété  par  les  soins  du  nouveau  préteur, 
si  une  lacune  s'était  révélée.  C'est  aux  préteurs  que  le 
Droit  romain  fut  redevable  des  exceptiones  et  prœscrip- 
tiones,  moyens  inventés  par  eux  de  repousser  une  de- 
mande injuste,  mais  conforme  aux  règles  strictes  du 
Droit  civil;  de  même  les  restitutianes  et  les  fictiones 
juris,  moyens  d'attaquer  un  acte  régulier,  quand  l'équité 
en  exigeait  l'annulation.  Ces  édits  n'étaient  pas  changés 
chaque  année,  mais  se  transmettaient  de  préture  en  pré- 
ture,  sauf  les  modifications  qu'exigeait  la  marche  des 
idées.  Les  édiles  publiaient  également  un  édit  qui,  bien 

aue  spécial  aux  aÎTaires  de  police,  n'était  pas  sans  in- 
uence  sur  le  Droit  privé.  La  réunion  des  règles  ducs 
aux  préteurs  et  aux  édiles  reçut  le  nom  de  Droit  préto- 
rien ou  !ionoraire.  Le  Droit  non  écrit  puisa  à  une  autre 
source  :  dans  les  travaux  des  jurisconsultes,  dans  leurs 
consultations  {responsa  prudentum)^  dans  leurs  écrits. 
Ces  écrits  furent  du  reste  postérieurs  à  l'époque  où  un 
secrétaire  d'Appius  Claudius,  Cn.  Flavius,  lui  déroba  la 
formule  des  diverses  actions  de  droit,  et  la  connaissance 
du  calendrier  judiciaire  (dies  fasti  et  nefasti),  suivant  le- 
quel il  était  permis  ou  défendu  d'agir.  Tibérius  Corunca- 
nius,  le  premier  plébéien  parvenu  au  pontificat,  fut  aussi 
le  premier  qui  professa  publiquement  le  Droit.  Sextus 
JEMus  Catus  publia  un  nouveau  recueil  d'actions  (Jus 
^lianum).  Ou  cite  également  à  cette  époque  Caton  l'An- 
cien et  ses  Commentaires  de  droit,  Publ.  Mucius  Scsevola, 
Junius  Brutusy  et  Blanilius,  considérés  comme  les  fonda- 
teurs du  Droit,  enfin  Hostilius,  l'auteur  des  Actiones 
BostUianœ,  qui  probablement  étaient  des  formules  de 
testament. 

Troisième  période.  —  Dans  l'histoire  romaine,  c'est 
l'époque  de  la  dissolution  de  la  République  sous  les  coups 
que  lui  portent  des  ambitions  dévorantes  :  ces  agitations 
sont  terminées  par  le  triomphe  d'Octave  à  Actium.  11 
reçoit  le  nom  d'Auguste,  prend  le  titre  de  princeps  reipu- 
blicœ,  réunit  dans  sa  main  les  plus  importantes  magis- 
tratures, et  Jette  les  fondements  d'un  pouvoir  qui,  sous 
ses  successeurs,  deviendra  du  pur  despotisme.  Les  sources 
du  Droit  sont  alors  :  1**  les  décrets  du  peuple,  lois  ou 
plébiscites,  dont  le  plus  remarquable  fut  alors  la  loi 
Pappia  Poppœa,  qui  avait  pour  but  de  restreindre  le  cé- 
libat; 2o  les  sénatus-consultes,  votés  sur  la  proposition 
du  prince,  que  ce  fût  par  écrit  ou  de  vive  voix  {per  episto- 
lam  ou  cîd  orationem  principis)\  3**  les  constitutions 
impériales  :  placita  ou  constitutiones,  ordonnances  ou 
règlements  rendus  par  le  prince;  décréta,  décisions  ren- 
dues sur  les  décisions  dont  connaissait  en  appel  le  con- 
seil privé  de  l'empereur  {auditorium principis)i  rescripta, 
instructions  qu'il  adressait  soit  aux  particuliers,  soit  aux 
fonctionnaires  ;  A**  les  édits  des  préteurs,  dont  un  tribun, 
Cornélius,  fit  prohiber  les  variations  par  une  loi  rendue 
l'an  687.  Le  premier  travail  d'ensemble  fait  sur  l'édit  fut 
celui  d'Ofilius,  ami  de  César.  Ce  n'était  que  l'osuvre 
d'un  particulier;  aussi  plus  tard,  Salvius  Julianus,  arri- 
vant à  la  préture,  refondit  complètement  l'édit  prétorien, 
avec  l'assentiment  de  l'empereur  Adrien,  qui  confirma 
son  travail»  Il  fut  suivi  de  plusieurs  commentaires,  parmi 
lesquels  on  distingua  ceux  de  Julien  lui-même  et  celui 
d'Ulpien;  5**  les  avis  des  jurisconsultes.  Un  certain  nom- 
tre  d'entre  eux  fut  choisi  par  Auguste  pour  répondre  en 
ton  nom.  Plus  tard,  Adrien  décréta  que,  quand  leurs  avis 
seraient  unanimes,  ils  auraient  force  de  loi.  —  De  nou- 
veaux progrès  furent  eu  outre  réalisés  dans  la  science  du 
Droit  par  les  travaux  des  jurisconsultes;  seulement,  de- 
puis Auguste,  ils  semblent  s'être  divisés  en  écoles,  dont 


l'une,  celle  des  Proculéiens,  eut  pour  ses  plus  célèbres 
maîtres  Antistius  Labeo,  Nerva,  Proculus,  et  Celsus;  et 
l'autre,  celle  des  Sabiniens  et  Cassiens^  compta  Atejus 
Capito,  Sabinus,  Cassius  Longinus,  et  Salvius  Julianus. 
Depuis  Adrien,  les  différences  qui  séparèrent  ces  écoles  et 
qui  furent  vidées  par  les  Constitutions  ou  par  l'usage 
s'effacèrent  insensiblement;  mais  on  vit  encore  briller 
Marcianus,  Pomponius,  Gains,  Papinianus,  Ulpianus, 
Paul  us  et  Modestinus.  Les  Pandectes  offrent  les  noms 
d'un  grand  nombre  d'autres,  mais  d'une  autorité  moins 
considérable. 

Quatrième  période.  —  Les  changements  que  sunit  à 
cette  époque  l'Empire  romain,  la  fondation  de  Byzance, 
l'adoption  du  christianisme  par  les  Césars,  les  invasions 
des  Barbares,  et  enfin  la  conquête  de  Rome  par  Odoacre, 
roi  des  Hérules  (476),  finirent  par  limiter  l'ancienne  do- 
mination romaine  au  seul  empire  d'Orient,  qui  subsista 
Jusqu'à  l'invasion  des  Turcs  en  1453.  Le  Droit  ne  com- 
prit plus,  à  vrai  dire,  que  deux  sources,  les  Constitutions 
et  Vusage,  et  encore,  avant  Constantin,  ces  Constitutions 
font  à  peine  autre  chose  qu'appliquer  les  anciens  prin- 
cipes de  Droit.  On  fes  distingue  en  Constitutions  gèné^ 
rales^  auxquelles  tous  les  sujets  devaient  se  conformer, 
ce  qui  comprend  les  édits,  et  en  Constitutions  person* 
nelles,  spéciales  à  certains,  et  comprenant  les  mandements 
adressés  aux  magistrats  {mandata)^  les  décisions  sur  les 
procès  soumis  à  l'empereur  {décréta)^  les  rescripts  (re- 
scripta).  —  La  décadence  de  la  science  du  Droit,  l'incer- 
titude et  l'arbitraire  judiciaire  résultant  de  la  multiplicité 
des  opinions,  et  de  la  confusion  des  sources,  tel  était 
l'état  du  Droit  au  commencement  du  v*  siècle.  Constantin 
paraît  avoir  senti  le  besoin  de  porter  dans  ce  chaos  quel- 

3ue  lumière;  il  indiqua  les  jurisconsultes  à  l'opinion 
esquels  il  faudrait  avoir  égard,  ce  qui  fut  érigé  en  prin- 
cipe par  une  Constitution  de  Théodose  II  (420  de  J.-C), 
déclarée  applicable  à  l'Occident  par  Yalentinien  III.  Pa- 
pinien,  Paul,  Gains,  Ulpien  et  Modestin  durent  seuls  être 
suivis.  Le  même  désordre  existait  dans  les  Constitutions. 
Gregorianus  et  Hermogenianus,  au  iv*  siècle,  les  réunirent 
en  deux  Codes,  dont  le  premier  embrassait  les  règnes 
d'Adrien  à  Constantin,  le  second  ceux  de  Dioclétien  et 
Maximien. 

En  438,  Théodoso  le  Jeune,  aidé  par  Antiochus,  pu- 
bliait un  recueil  d'édits,  que  Yalentinien  III  adoptait  pour 
rOccident.  Il  était  divisé  en  16  livres,  que  l'on  ne  pos- 
sède complets  que  depuis  la  moitié  du  sixième.  Des  friig- 
ments  des  autres  livres  ont  été  extraits  du  Bréviaire 
d'Alaric.  Théodose  II  et  Yalentinien  III  publièrent  en 
outre  de  nouvelles  ordonnances,  réunies  à  leur  Code  sous 
le  nom  de  Novellœ.  Les  Vaticana  Fragmenta,  la  Notitia 
dignitatum  Orientis  et  Occidentis,  la  Collatio  legum  Mo- 
saïcarum  et  Romanarum,  la  Consultatio  veteris  hti,  tels 
sont  les  seuls  ouvrages  que  nous  ayons  à  citer  sur  cette 
époque  comme  antérieurs  à  Justinien,  et  ils  n'ont  guère 
d'autre  valeur  que  celle  des  fragments  de  jurisconsultes 
anciens  qu'ils  ont  sauvés  de  I'oudU. 

Ces  recueils  ne  pouvaient  être  longtemps  suffisants,  et, 
après  l'invasion,  les  Barbares  eux-mêmes  sentirent  la 
nécessité  do  recueillir,  pour  l'usage  des  Romains  soumis 
à  leurs  lois,  les  principes  de  Droit  qui  devaient  les  régir. 
De  là,  \^  chez  les  Ostrogoths,  VEdit  de  Théodoric,  publié 
à  Rome  en  500,  et  applicable  aux  Ostrogoths  comme  aux 
Romains;  2*'  le  Breviarium  Alaricianum  ou  Aniant, 
qu'Alaric  II,  roi  des  Yisigoths,  fit  extraire  des  Codes  Her- 
mogénien  et  Théodosien,  et  dont  il  fit  revêtir  les  exem- 
plaires de  la  signature  d'Anianus,  son  référendaire.  Cette 
compilation  fut  connue  au  moven  âge  sous  les  noms  de 
Corpus  Theodosianum,  Lex  Theodosiana,  Liber  legum, 
Lex  Romana;  3*  la  Lex  Romana  (517-534)  pour  les  sujets 
romains  des  Burgondes,  à  qui  une  erreur  de  Cujas,  plus 
tard  reconnue  par  lui,  a  fait  donner  aussi  le  nom  de  Pa- 
pmiani  liber  responsorum.  —  En  Orient,  on  ne  trouve 
aucun  essai  de  codification  jusqu'à  l'avènement  de  Justi- 
nien,  en  527.  Les  compilations  qu'il  ordonna  sont  nom- 
breuses, et  leur  importance  les  a  fait  survivre  Jusqu'à 
nous.  D'abord  parut  Vancien  Code,  rédigé  par  une  com- 
mission de  dix  jurisconsultes,  dont  faisait  partie  Tribo- 
nien,  et  qui  comprenait  en  12  livres  les  extraits  utiles 
des  Constitutions  impériales.  II  parut  en  528  ;  il  est  au- 
jourd'hui perdu.  En  530,  Tribonien  fut  chargé  avec  seize 
autres  jurisconsultes  de  compiler  les  ouvrages  des  légistes 
les  plus  considérés.  En  trois  ans,  le  travail  de  la  com- 
mission fut  achevé,  et  les  Pandectes  furent  promulguées. 
Elles  parurent  en  50  livres,  sous  le  nom  de  Digesta  ou 
Pandeclœ  juris  enucleati  ex  omni  vetere  jure  eollecti» 
L'ordre  de  l'ancien  Êdit  y  avait  été  conservé  pour 


ROM 


1578 


ROM 


llter  les  rnchercbes.  Instinien  en  défen^t  les  Commen- 
taires, et  n*en  permit  que  la  traduction  en  grec,  mot 
pour  mot,  et  de  simples  concordances.  De  cette  publica- 
tion si  étendue  naquit  Tidée  d*en  résumer  les  principes 
élémentaires  dans  un  corps  de  Droit  plus  abrégé,  dont  la 
rédaction  fut  encore  confiée  à  Tribonien,  assisté  de  Do- 
rothée et  Théophile.  Ce  recueil  reçut  le  nom  d*lnstitutês. 
ÛB  n'était  à  proprement  parler  que  la  reproduction,  mo- 
difiée et  appropriée  au  temps,  des  Instttutes  de  Ga!us. 
Théophile,  Tun  des  collaborateurs,  publia  le  meilleur 
commentaire  que  ce  travail  ait  pu  recevoir,  sous  le  titre 
de  Paraphrasts  grœca  Instituttonum  Cœsarearum.  Ces 
deux  publications  furent,  sur  Tordre  de  l'empereur,  sui- 
vies d'une  révision  du  Code  publié  en  529;  elle  fut 
achevée  l'année  môme  où  elle  avait  été  commencée,  et  la 
nouvelle  édition  put  être  promulguée  en  534.  On  le  dé- 
signa sous  le  titre  de  Codex  repetitœ  prœlectionis.  Il  est 
divisé  en  12  livres,  qui  se  subdivisent  en  titres.  —  Depuis 
535  Jusqu'en  565,  Justinien  rendit  une  multitude  d'or- 
donnances, écrites  partie  en  latin,  partie  en  grec,  et  qui 
modifiaient  ses  premières  décisions.  Elles  reçurent  le 
nom  de  Novellœ  Constitutiones.  Après  la  mort  de  Justi- 
pien,  on  en  colligea  1(58,  dont  154  seulement  lui  appar- 
tiennent. Plus  tard  les  glossateurs  en  firent  9  collations, 
comprenant  97  novelles,  en  98  titres.  Les  antres  qui  n'y 
figuraient  pas  furent  connues  sous  le  nom  d'extrava- 
gantes :  elles  sont  réunies  aux  autres  dans  les  recueils 
modernes. 

Nous  noterons  après  Justinien  quelques  ouvrages  nui 
découlent  des  siens  :  un  résumé  de  125  Novelles  publié 
par  Julien  en  570,  avec  le  titre  d'Epitome  ou  Liber  No- 
vellarum,  et  plus  tard  une  traduction  des  Novelles  que 
les  glossateurs  désignèrent  sous  le  nom  de  Corpus  on» 
thenticum. 

Bientôt  les  traductions,  les  commentaires  des  livres  de 
Droit  dont  nous  venons  de  parler,  abondèrent  à  un  tel 

Kint,  que  la  confusion  qu'elles  produisirent,  Jointe  à 
ccumulation  des  Constitutions  postérieures,  nécessita 
la  rédaction  do  nouvelles  compilations.  Elles  furent  or- 
données par  l'empereur  Basile  le  Macédonien.  La  pre- 
nûère,  bien  élémentaire,  divisée  en  40  livres,  parut  en 
876  :  ce  fut  le  Tcpoysi^  tôôv  vô(jLa>v.  La  2*,  plus  considéra- 
ble, comprenant  60  livres,  ne  vit  le  Jour  que  sous  le  rè^ie 
de  Léon  le  Philosophe,  qui  lui  donna  le  nom  de  Basihca. 
En  945,  Constantin  Porphyrogénète  en  fit  paraître  une 
nouvelle  édition  :  Basilica  repetitœ  prœlectionis ,  dont 
malheureusement  une  partie  nous  manque.  De  887  à  893, 
l'empereur  Léon  fit  paraître  113  Novelles  qui  portent  son 
nom,  et  qui,  traduites  en  latin  par  Agyleus  en  1560,  sont 
restées  dans  le  Corpus  juris.  Aujourd'hui  les  Basiliques 
et  les  Novelles  sont  encore  la  base  du  Droit  public  des 
Grecs. 

En  Occident,  les  corps  de  Droit  de  Justinien  péné- 
trèrent avec  la  conquête  qu'il  fit  de  l'Italie  sur  les  Ostro- 
eoths  en  535.  Le  Brémaire  d'Alaric  y  fut  cependant 
introduit  plus  tard.  Vers  1100,  un  Lombard  publia  un 
abrégé  de  Droit  civil  intitulé  Brachylogus  juris  ctvUis. 
Au  xn*  siècle,  l'École  de  Bologne  fit  refleurir  en  Italie 
l'étude  du  Droit,  éclairé  par  les  gloses  et  les  leçons  d'Ir- 
nerius,  et  de  ses  disciples  Balduinus  et  Accurse.  C'est 
ftux  glossateurs  que  l'on  doit  encore  l'intercalation  dans 
le  Code  des  Constitutions  postérieures  qui  Tavaient  mo- 
difié. Ces  extraits  prirent  le  nom  d'authenticœ.  Ils  y 
Joignirent  quelques  extraits  des  ordonnances  des  empe- 
reurs d'Allemagne,  Frédéric  I  et  II;  on  les  appela  Au^ 
thenticœ  Fridericianœ, 

La  France,  du  temps  de  Justinien,  avait  sa  population 
romaine  régie  par  le  Bréviaire  d'Alaric  et  le  Code  Théodo- 
sien.  Mais  avant  les  glossateurs,  l'étude  du  Droit  romain 
y  eut  quelques  succès.  Lanfranc,  abbé  du  Bec,  plus  tard 
archevêque  de  Cantorbérv,  enseigna  le  Droit  romain,  et 
e'est  à  un  Français  que  doit  être  attribué  le  livre  connu 
sous  le  nom  de  Pétri  exceptiones  legum  romanarum,  qui 
contient  de  nombreux  emprunts  aux  compilations  Justi- 
niennes.  Les  succès  de  l'école  de  Bologne  excitèrent  en 
France  une  heureuse  émulation.  Le  livre  Ulpianus  de 
edendo,  cours  de  procédure  tiré  des  livres  de  Justinien, 
est  dû  à  la  France  ou  aux  Pays-Bas.  Placentinus  enseigna 
le  Droit  à  Montpellier.  Louis  IX  fit  traduire  des  livres  de 
Droit  romain.  Pierre  Desfontaines  composa  au  milieu  du 
xm*  siècle  le  Coutumier  français^  et  le  compara  au  Droit 
romain.  Ce  Droit  continua  à  être  honoré,  malgré  la  dé- 
fense du  pape  Honorius  III,  et  c'est  à  lui  que  nous  de- 
vons la  grande  école  des  Jurisconsultes  français  du 
svi*  siècle.  Il  demeura  d'ailleurs.  Jusqu'à  la  promulga* 
tton  da  Codé  NapoUon,  la  règle  des  pays  de  Droit  écrii^ 


sauf  les  modiflcatfont  Introduites  par  les  ordonnances 
des  rois.  Dans  les  pays  de  Coutumes,  au  contr^:c,  M  ne 
fut  consulté  qu'à  titre  de  conseil  et  comme  raison  écrite. 
C'est  la  seule  valeur  qu'il  ait  aujourd'hui.  De  nos  Jours 
le  Droit  romain  a  encore  force  de  loi  en  Allemagne,  mais 
seulement  pour  les  parties  que  la  coutume  et  les  lois  ont 
consacrées. 

V.  Bach,  Historia  jurisprudenttœ  romanœ,  Lucques, 
1762,  în-4»;  J.  Berriat  Saint-Prix,  Histoire  du  DroU  ro- 
main, 1821,  in-8o;  Hugo,  Histoire  du  Droit  romain,  trad. 
gar  Jourdan  et  revue  par  Poncelet,  1821-22,3  vol.  ln-8«; 
avigny.  Histoire  du  Droit  romain  au  moyen  âge,  trad. 
par  Guenoùx,  1839,  3  vol.  in-8»;  Holtius,  Historiœ  juris 
romani  Uneamenta,  2*  édit.,  1840,{n-8o;  Giraud,  Histoire 
du  Droit  romain^  Aix,  1841,  in-8o;  Mackeldey,  Hist,  des 
sources  du  Droit  romain,  trad.  de  l'allem.  par  Poncelet, 
1846,  in-12;  Ortolan,  Histoire  de  la  législation  romaine^ 
4*  édit.,  1846,  in-8o;  Troplong,  De  l'influence  du  chris- 
tianisme sur  le  Droit  civil  des  Romains,  2«  édit.,  1855, 
in-i2;  Dupin,  Principia  juris  civilis  tum  romani  tum 
galHci,  1806-1818,  5  vol.  in-12;  Leclercq,  le  Droit  ro- 
main dans  ses  rapports  avec  le  Droit  français,  Liège, 
1810,  8  vol.  in-8<>;  Biret,  Application  au  Code  civU  des 
Institutes  et  des  oO  livres  du  Digeste^  1824,  2  vol.  in-8"; 
Delvincoun,  Juris  romani  elementa,  4«  édit.,  1823,  in-S*»; 
Benech,  Programme  d'un  Cours  de  Droit  romain,  1837, 
in-4<»;  Bravard,  Étude  et  enseignement  du  Droit  romain, 
1837,  in- 8*»;  Savigny,  Traité  de  Droit  romain,  trad.  de 
l'allem.  par  Guenoux,  1840-40,  8  vol.  in-8»;  Poncelet, 
Cours  d'histoire  du  Droit  romain,  1843,  in-8«;  Mackel- 
doy.  I^anuel  du  Droit  romain,  trad.  de  l'allemand  par 
Beving,  18'i6,  in-8®,  et  Systema  juris  romani  hodie  ust- 
tatt,  I^ipzig,  1847.  \n-H^;  Lagrango,  Manuel  de  Droit 
romain,  5*  édit.,  1850,  in-12;  Molitor,  Cours  de  droit 
romain  approfondi,  avec  Us  rapports  entre  la  législation 
romaine  et  la légtslatiom  française,  1850  et  sui  v.     It.  ii'E. 

ROMAIN  (Ordre).  V,  Composite. 

ROMAUV  (Bit),  ensemble  des  rèjglements  prescrits  ou 
recommandés  par  l'autorité  du  Saint-Siège  pour  la  célé- 
bration des  offices  divins,  le  choix  des  prières  liturgiques 
et  les  cérémonies  du  culte. 

ROMAINE  (École),  une  des  g^ndes  écoles  moaemes  de 
peinture  italienne.  Itapliaël,  qui  en  est  le  véritable  fonda- 
teur, procédait  de  l'école  ombrienne,  par  son  maître  Pierre 
Vanucci,  dit  le  Pérugin,  dont  il  eut  la  gr&ce  ascétique,  et 
de  l'école  florentine,  dont  quelques  maîtres,  principale- 
ment Fra  Bartolomeo  et  Michel-Ange,  exercèrent  sur  lu< 
de  l'influence  par  leurs  conseils  ou  leurs  exemples 
Après  Raphaël,  on  doit  citer  comme  ayant  honoré  l'école 
romaine,  d'abord  ses  élèves  Jules  Romain,  Penni  dit  il 
Fattore ,  Perino  del  Yaga,  Jean  d'Udine,  Polydore  de  Ca- 
ravage,  Tisio  dit  le  Garofalo^  puis  Frédéric  et  Thaddée 
Zuccaro,  Nicolas  Circignani,  Jérôme  Muziano.  L'éooie 
négligea,  au  xvu*  siècle,  l'étude  du  dessin  et  de  l'antique 
qui  la  caractérisait,  et  tomba  dans  la  manière  :  celui  qui 
représente  le  mieux  cette  nouvelle  période  est  Joseph 
C^ri,  plus  connu  sous  les  noms  de  Joséphin  et  de  che- 
valier d'Arpino;  on  peut  citer  aussi  Baroccio,  André 
Sacchi,  Pierre  de  Cortone,  Domenico  Feti,  Domenico 
Cresti  dit  Passignano,  Giro  Ferri,  Francesco  Romanelli, 
Louis  Garzi,  J.-B.  Saivi  dit  Sassoferralo ,  Roncalli  dit 
Pomerance,  et  Carlo  Maratta.  En  opposition  à  ces  pein- 
tTEss,  qui  professaient  encore  un  utsiiain  idéalisme,  Mi- 
chel-Ange Amerighi  dit  le  Caravage  copia  la  nature  sans 
choix  et  sans  goût.  Le  paysage,  dernier  venu  dans  l'art 
de  la  peinture,  atteignit,  au  milieu  de  cette  décadence, 
son  plus  haut  degré  de  perfection  en  Italie  avec  Gaspard 
Dughet  dit  le  Guaspre.  Les  peintres  du  xvui*  siècle  sont 
loin  de  leurs  prédécesseurs  :  les  seuls  qui  méritent 
d'être  mentionnés  sont  Jean-Marie  Morandi,  Pierre  NelU, 
J.-B.  Gaulli,  Rapliaél  Mengs,  Pompeo  Battoni. 

ROMAINS  (Langue,  —  Littérature).  V,  Laumb. 

ROMAINE  (Numismatique).  V,  Nuiiisvatiqub. 

ROMAINE  (Philosophie).  A  Rome,  la  philosophie  ne  fut 
qu'une  production  exotique,  une  science  empruntée  à  la 
Grèce;  c'est  à  peine  si  elle  y  fut  considérée  comme 
science  spéculative.  Mais  si  elle  ne  fut  pas  un  but  pour 
le  génie  romain,  elle  fut  étudiée  comme  un  instrument 
utile,  comme  un  moyen  de  se  perfectionner  dans  l'art 
oratoire,  la  politique  et  la  Jurisprudence.  La  plupart  des 
Romains  qui  s'occupèrent  de  philosophie  étaient  des 
poètes,  des  orateurs,  des  furisconsultes.  La  philosophie 
ne  se  montra  dans  Rome,  où  d'abord  .elle  fut  très-mal 
reçue,  qu'après  que  la  conquête  eut  ouvert  le  chemin  de 
la  Grèce  et  de  l'Asie.  VEpicuréisme,  qui  attira  plus  faci* 
lement  l'attention^  eut  pour  premien  interprètes  Amafr- 


ROM 


1579 


ROM 


âtts,  RabMuB,  puÎB  Lucrèce,  qui  fit  oublier  tous  les 
»atres.  I^  Stoïcisme,  pratiqué  par  des  esprits  élevés,  fut 
en  quelque  sorte  une  doctrine  d'opposition  sous  les  em- 
pereurs; il  comptait  dans  ses  rangs  Brutus,  qui  se  rat- 
tachait aussi  à  l'Ancienne  Académie,  et  qui  écrivait  en 
grec  un  livre  de  morale,  Sénèque,  Perse,  Épictéte  et  son 
maître  Musonius  Rufus,  Tempereur  Marc-Aurèle,  et  une 
foule  d'hommes  remarauables  qui  apprenaient  du  stoï- 
cisme à  bien  mourir  On  vit  quelques  pythagoriciens  : 
Nigidius  Figulus,  Sextius,  auteur  présumé  des  Sentences, 
et  dont  la  belle  et  forte  morale  faisait  dire  à  Sénèque, 
son  disciple,  que  la  philosophie  de  Sextius  était  faite  de 
mots  grecs  et  de  mœurs  romaines.  V Ancienne  Académie 
était  représentée  par  Varron  et  Pison,  la  Nouvelle  par 
Cicéroo  principalement.  I^es  deux  caractèries  principaux 
de  ses  écrits  philosophiques  sont  Téclectisme  et  le  scep- 
ticisme. Cicéron  suit  la  Moyenne  Académie  dans  les 
questions  spéculatives,  Platon  dans  la  psychologie,  Aris- 
totoet  surtout  Zenon  dans  la  morale;  il  n'est  dogma- 
tique que  sur  ce  dernier  point.  Cet  éclectisme  aboutissant 
au  scepticisme  se  retrouve,  moins  fortement  accentué,  il 
est  vrai,  dans  presque  tous  les  écrivains  romains  qui 
parlent  de  philosophie;  tous  reprt^scntaient  plus  ou 
moins  respnt  de  l'époque,  où  il  n'y  avait  de  croyances 
bien  arrêtées  sur  rien.  Il  n'y  eut  pas  de  philosophie  ro- 
maine proprement  dite;  mais  il  est  juste  de  constater 
l'influence  qms  le  stoïcisme  exerça  sur  la  jurisprudence  ^ 
Rome;  on  comptait  parmi  ses  adeptes  les  Tubéron^  k*» 
Rutilius  Rufus,  les  Scevola,  les  Luciiius  Barbus,  les 
Servius  Sulpicius,  et  la  secte  des  Proculéiens.  R. 

RovAifSE  (Religion).  La  religion  des  anciens  Romain 
n'a  point  eu,  comme  celle  de  différents  autres  peuples 
une  existence  propre  et  originale,  durant  laquelle  s 
seraient  progressivement  développés  les  dogmes  et  ir* 
culte  :  elle  se  forma  en  quelque  sorte  par  voie  d'acces- 
sion, en  s'assimilant  les  croyances  et  les  rites  des  peu- 
ples qui  subirent  la  domination  romaine.  Ce  fut  un  de^ 
principes  de  la  |>olitique  suivie  par  le  Sénat,  d'accordci 
le  droit  de  cité  aux  divinités  étrangères,  aussi  bien  que 
d'adopter  les  institutions  utiles  qu'il  trouvait  chez  Icf 
vaincus.  Les  Dieux  primitifs  de  Rome  furent  ceux  dt 
l'antique  Italie,  et  ses  croyances  paraissent  avoir  été 
empruntée»  aux  Pélasges,  aux  Étrusques  et  aux  peuplades 
aborigènes  :  au  Latium  appartiennent  le  culte  de  Sa- 
turne, de  Janus,  de  Picus,  de  Faunus,  et,  entre  autres 
rites,  les  Lupercales,  les  Lémurales  et  les  fôtes  de  Paies  ; 
de  la  Sabine  vinrent  les  dieux  Consus  et  Mamers  ou 
Mavors,  le  culte  des  astres,  et  les  idées  'î'une  nntro  vie  ; 
i'Etrurie  donna  aussi  quelques-unes    fie  ses  divinités, 
ses  collèges  de  prêtres,  et  sa  science nugurale.  A  partir 
des  guerres  Puniques,  les  Romains  empruntaient  aux 
(irecs  les  immortels  habitants  de  leur  Olympe;  Apollon, 
Gérés,  Proserpine,  Mercure,  Esculape,  Castor  et  Pol* 
lux,  etc.,  prirent  place  au  Panthéon  romain,  et  eurent 
des  temples  et  des  prêtres,  comme  les  dieux  nationaux 
de  ritaiie.  Sous  l'Empire,  toutes  les  divinités,  toutes  les 
superstitions  de  l'Orient  furent  à  leur  tour  accueillies 
avec  faveur  :  la  pierre  noire,  image  du  Soleil  pour  les 
Syriens,  fut  apportée  au  Capitole  par  Héliogabale;  on 
emprunta  Sérapis  et  Isis  k  l'antique  Egypte  ;  les  danses 
frénétiques  des  prêtres  de  Cybèle  eurent  autant  de  suc- 
cès que  le  baptême  du  Taarobole.  Ainsi ,  sans  avoir  par 
elle-même  aucune  supériorité,  sans  posséder  ni  une  théo- 
gonie plus  élevée,  ni  une  morale  plus  pure,  ni  un  céré- 
monial plus  parfait,  la  religion  romaine,  par  Tanion 
même  de  tous  les  cultes,  prit  un  caractère  d'universalité 
dans  le  monde  ancien.  Elle  imposa  k  tant  d'éléments  di- 
yen  une  forme  toute  latine,  soutenue  qu'elle  était  d'ail- 
leurs par  la  prépondérance  politique  du  peuple  qui  la 
professait.  Toutefois,  il  y  avait  là  un  grave  danger  ; 
l'admission  de  dieux  et  de  cultes  exotiques  implique  une 
foi  peu  robuste  :  quand  on  a  des  convictions  sérieuses  et 
profondes,  on  ne  passe  point  avec  tant  d'aisance  à  des 
conrictions  nonve!!es.  Les  annexions  religieuses  prati- 

Suées  par  les  Romains  ne  pouvaient  engendrer  que  le 
oute,  rincrédulité,  ou  rindifférence.  Les  uns,  à  l'exem- 
ple de  J.  C^ar,  se  moquaient  ouvertement  des  dieux  ; 
les  autres,  comme  Alexandre  Sévère,  pouvaient  associer 
dans  un  même  oratoire  les  images  de  Jupiter,  d'Orphée, 
d'Apollonius  de  Tyane  et  de  Jésus-Christ.  Les  empereurs 
eux-mêmes  occupèrent,  par  l'apothéose,  une  place  con- 
sidérable dans  le  culte  :  on  adora  leur  génie,  ils  eurent 
des  autels  et  des  sacrifices. 

Dn  autre  caractère  delà  religion  romaine  fut  son  union 
intime  avec  la  politique.  Aucun  acte  de  la  vie  publique 
ae  ^aocoiBpUasait  sans  être  précédé,  aecqmpagnéoa  suivi 


de  quelque  cérémonie.  Les  Patriciens,  en  possession, 
pendant  plusieurs  siècles,  des  fonctions  sacerdotales , 
firentde  la  religion  la  servante  de  leurs  intérêts  ;  les  Au- 
gures pouvaient,  sous  prétexte  de  mauvais  présages,  dif- 
férer ou  dissoudre  les  assemblées,  ou  bien,  en  alléguant 
l'omission  de  quelques  rites,  annuler  les  délibérations 
et  abroger  les  lois  ;  ils  faisaient  parler  à  leur  gré  la  voix 
des  oiseaux,  les  éclairs  et  le  tonnerre,  les  entrailles  des 
victimes.  A  mesure  qu'une  province  était  conquise,  Rome 
y  faisait  pénétrer  par  ses  colonies  son  organisation  reli- 
gieuse; elle  admettait  sans  doute  les  divinités  locales, 
mais  en  les  tenant  dans  un  rang  secondaire,  ou  en  les 
identifiant  avec  des  divinités  latines;  ses  pontifes  n'a- 
bandonnaient nulle  part  la  direction  des  rites  ;  ils 
avaient  la  surveillance,  non-seulement  des  cérémonies 
publiques,  célébrées  aux  frais  de  l'État,  mais  des  céré- 
monies privées,  faites  par  les  familles  en  l'honneur  de 
leurs  divinités  domestiques. 

Remarquons  enfin,  dans  la  religion  romaine,  la  place 
immense  qui  était  donnée  au  culte.  Ia  théogonie ,  le 
dogme  n'est  presque  rien  ;  les  rites  sont  à  peu  près  tout. 
Le  génie  éminemment  pratique  des  Romains  a  laissé  ici 
son  empreinte  :  ce  qui  leur  importe,  ce  n'est  pas  de  con- 
naître les  générations  divines  et  les  phases  de  l'existcnco 
du  monde,  ce  sont  les  rapports  entre  les  divinités  et  les 
hommes,  c'est  une  règle  morale.  Il  leur  faut  attirer  la 
«rctection  et  la  faveur  des  dieux,  détourner  Inur  coicnj 
Sis  interrogent  les  phénomènes  de  la  nature,  potir  y  dé- 
couvrir des  marqiK'«  'es  manifestations  d'une  pensée 
ou  d'une  volontt^  divine  :  dn  là  ro^  f^'-'inns  de  !:n\\rcs,  ces 
conjurations,  ces  oxpiaiionj^  multipliées  qui 'composent 
le  culte  romain.  Un  penchant  à  la  superstition,  naturel 
dans  tous  les  temps  aux  populations  italienne*^,  secon- 
dait, chez  les  Romains,  les  desseins  de  la  politique  :  Ils 
s'empressaient  d'admettre  les  divinités  étrangères  à  côté 
de  leurs  dieux  nationaux  ,  parce  qu'ils  croyaient  saisir 
dans  certains  événements,  dans  des  circonstances  for- 
tuites, la  preuve  de  la  puissance  de  ces  divinités.  En  as- 
siéçeant  une  ville,  ils  avaient  soin  d'en  conjurer  les 
dieux;  <;uand  ils  l'avaient  subjuguée,  ces  dieux  faisaient 
partie  des  trophées  de  la  victoire.  K.  Hartung,  La  Reli- 
gion des  Romains,  eu  allemand,  Erlangen,  1830,  in-8<*; 
G.  Zeiss,  Archéologie  romaine,  en  allemand,  léna,  1842, 
in-8*»;  Creuzer,  Religions  de  V Antiquité,  trad.  par  M.  Gui- 
gniaut  ;  Lacroix,  Recherches  sur  la  religion  des  Romains, 
Paris,  1846,  in-8°;  Preller,  Mythologie  romaine,  en 
allem.,  Beriin,  1858,  in-8«. 

ROMAIQUE  (Langue).   V.  Grecs  modernes  (Langue 
des). 

ROMAN.  Un  savant  évêque  du  xvii*  siècle,  Huet,  a 
composé,  à  la  prière  de  Segrais,  sous  le  nom  duquel  avait 
d'abord  paru  le  roman  de  Zayde,  une  dissertation  su» 
Vorigine  des  romans.  Il  les  appelle  «  un  a^^éable  amuse- 
ment des  honnêtes  paresseux,  »  et  les  définit  o  des  fictions 
d'aventures  amoureuses,  écrites  en  prose  avec  art,  pout 
le  plaisir  et  l'instruction  du  lecteur.  »  Cette  définition, 
qu'il  a  doctement  développée,  paraîtra  peut-être  bonne 
pour  les  lecteurs  de  son  siècle,  qui  aimaient,  comme 
M'"*  de  Sévigné,  à  mêler  au  frivole  un  peu  do  solide, 
mais  bien  pauvre  pour  ceux  du  nôtre,  que  la  prodigieuse 
variété  du  roman  moderne  a  gâtés.  Elle  n'est  pas  cepen- 
dant aussi  surannée  qu'on  pourrait  le  croire  ;  tout  au  plus 
est-elle  incomplète.  Né  du  besoin  de  distraction  et  du 
goût  que  tous  les  peuples  ont  pour  les  fables,  le  roman 
est  un  récit  comme  l'épopée,  avec  les  différences  qui  sé- 
parent la  prose  de  la  poésie,  la  narration  familière  et 
facile  de  la  composition  régulière  et  sérieuse,  la  vie  bour- 
geoise de  l'idéal  et  des  sentiments  héroïques.  Dans  notre 
littérature  même,  le  roman  et  l'épopée  se  confondaient  k 
l'origine,  et  n'avalent  ^'-jn  même  nom,  tiré,  selon 
Huet,  du  langage  romaxn  ou  roman,  c-à-d.  du  latin 
transformé  que  parlaient  les  conteurs  de  Provence  :  cette 
étymologie  en  vaut  bien  une  autre.  L'art  de  conter  en 
prose  se  forma  plus  tard,  avec  le  besoin  de  faire  du  nou- 
veau, et  d'écrire  plus  facilement  et  plus  vite.  Les  auteurs 
arrivèrent  à  peindre  les  mœurs,  les  sentiments,  les  pas- 
sions de  leur  époque;  et,  lorsqu'ils  eurent  un  talent 
supérieur,  ils  s  élevèrent  k  l'étude  des  caractères  et  à 
l'expression  de  la  vérité  générale  et  universelle.  —  On 
sait  jusqu'où  ils  ont  porté  l'ambition.  Déjà,  en  18^3,  un 
homme  d'esprit  écrivait,  dans  la  préface  d'un  roman  qu'il 
appelait  une  Histoire  contemporaine  :  «  Tout  peut  être 
compris  dans  un  genre  qui,  embrassant  à  la  fois  V Emile 
et  la  Cyropédie,  Gulliver  et  Tom  Jones,  Corinne  et  le  Ao- 
fTian  comique... .^  les  créations  de  Rabelais  et  le  chef- 
d'œuvre  de  Cervantes,  appartient  en  même  temps  à  la 


ROM 


1580 


ROM 


pastorale  par  Paul  et  Virginie,  à  la  politiaue  par  Béli- 
taire  etLascaris,  à  Thistoire  par  Ivanhoé  ot  les  Puritains 
dÊcosset  à  l'épopée  par  le  Télémaque  et  tes  Martyrs, 
Vaste  comme  rimagination,  et  changeant  comme  la  so- 
ciété, le  roman  échappe  à  toute  définition  comme  à  toute 
entrave.  Il  pénètre  avec  Fontenelle  dans  le  sanctuaire  des 
sciences,  il  interroge  l'Antiquité  sur  les  pas  de  Barthé- 
lémy. Ses  limites  ne  sont  autres  que  celles  du  sentiment 
et  de  la  pensée.  Son  domaine  est  l'univers.  Mesurant  sa 
marche  sur  les  progr^  de  la  civilisation,  et  enrichi  par 
tout  ce  qui  la  développe,  appauvri  par  tout  ce  qui  l'altère, 
il  réfléchit  la  vide  image  dé  cette  reine  du  monde;  c'est 
là  son  vrai  titre  et  sa  gloire.  »  (Do  Salvandy,  préface 
d!Âlon2o.) 

Depuis  ce  brillant  panégyrique,  le  roman  moderne  a 
fait  encore  du  chemin  :  nous  le  voyons,  depuis  4830  en- 
viron, agiter  et  résoudre,  au  gré  de  la  passion  et  du  so- 
f)hisme,  les  questions  les  plus  délicates  et  les  problèmes 
es  plus  redoutables  de  l'humanité.  Il  travaille  «  à  l'in- 
struction des  lecteurs,  »  autrement  certes  que  ne  l'en- 
tendait le  bon  Huet,  et  sans  se  préoccuper  comme  lui  de 
l'art  et  du  style.  Le  public  n'est  cependant  pas  très- 
ambitieux,  et  l'on  peut  croire  que  le  plaisir,  comme  le 
bon  sens  et  le  goût,  s'accommoderait  de  moins  d'au- 
dace et  de  plus  de  simplicité.  Après  tout,  moral,  histo- 
rique ou  philosophique,  le  roman  se  réduit  à  la  peinture 
des  mœurs  ;  et,  comme  l'a  dit  un  juge  que  Ton  aimo  à 
citer  :  a  Ce  que  le  savant  évèque  d'Avranches  désignait 
comme  la  source  unique  des  romans  en  est  toujours  la 
source  la  plus  féconde  et  la  plus  heureuse.  On  ne  peut 
inventer  rien  de  mieux  que  l'amour;  et  de  nos  Jours 
l'admirable  Walter  Scott,  dans  ses  créations  si  éclatantes 
et  si  nombreuses,  dans  cette  vie  nouvelle  qu'il  a  donnée 
au  monde  romanesque,  en  le  rendant  quelquefois  plus 
vrai  que  l'histoire,  emprunte  encore  ses  plus  touchantes 
inspirations  à  la  peinture  de  cette  passion,  qui  a  si  long- 
temps occupé  les  crayons  des  romanciers  et  des  poètes.  » 
(Villemain,  Essai  sur  les  romans  grecs.) 

Dans  une  si  grande  variété  de  matière  et  de  formes, 
les  règles  du  genre  ne  peuvent  être  que  les  grandes 
règles  du  goût  :  vérité  des  caractères,  observation  Juste 
et  délicate,  vraisemblance  des  événements,  mesure  et 
sobriété  des  analyses,  des  descriptions  et  des  peintures, 
mouvement  et  rapidité  du  récit,  surtout  pour  les  lecteurs 
français.  Est-il  besoin  d'ajouter  la  décence  et  la  dignité? 
Malheureusement,  les  livres  ont  plus  de  libertés  quo  le 
thé&tre,  qui  cependant  en  a  beaucoup  ;  et  celles  que  les 
romanciers  prennent  trop  souvent  avec  les  mœurs  ont 
rendu  bien  difficile  le  choix  des  bons  romans.  On  doit 
proscrire  avec  la  même  sévérité  les  paradoxes  ou  les 
mensonges  qui  faussent  ou  détruisent  les  principes  éter- 
nels de  la  morale  et  de  la  société,  a  11  y  a,  dit  un  autre 
critique  qui,  dans  cette  matière,  a  la  double  autorité 
d'une  érudition  peu  commune  et  d'une  raison  aussi  pi- 
quante que  solide,  —  il  y  a  des  romans  qui  ont  la -préten- 
tion pernicieuse  de  mettre  l'idéal  hors  du  bien.  Cette 
prétention  est  ordinairement  celle  des  siècles  dans  les- 
quels la  corruption  passe  du  cœur  à  l'esprit,  et  où  les 
passions  cessent  d'être  des  emportements  des  sens  pour 
devenir  des  doctrines...  Le  sophiste  s'ajoute  au  libertin  : 
le  plaisir  ne  suffit  plus  ;  il  faut  le  scandale,  et  le  scandale 
poussé  jusqu'à  une  sorte  de  victoire  sur  la  morale,  grâce  à 
î'ébahissement  des  badauds,  qui  trouvent  fier  ce  qui  n'est 

3u'insolent.  n  (Saint-Marc  Girardin,  Courx  de  littérature 
ramatique, ch,  xxxix.)  Le  xvm*  et  le  xix*'  siècle  se  sont 
rendus  étrangement  coupables  de  cette  Intrépidité  d'ima- 
gination qui  ne  recule  devant  aucune  licence,  et  de  ces  con- 
ceptions audacieuses  qui,  pour  exciter  le  goût  du  public, 
mélangent  dans  des  proportions  effrayantes  les  éléments 
les  plus  dangereux.  Mais  une  invention  réservée  à  notre 
époque,  c'était  de  faire  du  roman  une  espèce  de  mar- 
chandise littéraire,  de  le  mettre  en  commandite,  ou,  pour 
mieux  dire,  en  atelier,  et  de  distribuer  l'exécution  et  les 
détails  à  des  collaborateurs,  en  réservant  au  chef  de  l'en- 
treprise la  direction  suprême,  l'honneur  du  nom  d'au- 
teur, et  le  principal  bénéfice.  C*est  ainsi  que  nous  avons 
vu  se  conduire  et  s'acbever,  au  profit  des  journaux  poli- 
tiques aussi  bien  que  des  romanciers  à  \a  mode,  ces 

,  longues  ébauches  des  feuilletons,  où  la  main  inhabile  et 
distraite  trace  des  contours  irréguliers  et  confus,  mêle 
les  couleurs,  et  s'inquiète  peu  de  la  ressemblance  des 

I  portraits.  Ainsi  s'ajustent  ces  effets  dramatiques,  achetés 
à  force  d'invraisemblances  et  de  concessions  imposées  au 
bon  sens  ;  ces  canevas  d'intrigues  qui  se  brisent  tous  les 

Îours  à  la  fin  de  la  page,  pour  se  renouveler  péniblement 
e  lendemain,  sasa  souci  des  oublis,  des  contredictioas  ou 


des  redites;  ces  amples  narrations,  renouvelées  d^Alark 
et  de  Cléliey 

OU  Ton  volt  commo  il  (kut  berner  les  nations, 

et  qui  font  regretter  le  bon  temps  où  les  romans  avaient 
une  fin.  Encore  Cyrus  et  Clélie  parlaient-ils  français; 
tandis  que  leurs  héritiers  ont  remplacé  leur  style  pn''- 
cieux  et  leurs  dissertations  subtiles  par  un  idiome  ptat 
et  incorrect,  quand  il  n'est  pas  prétentieux  et  ampoulé. 
Ceci  est  affaire  de  goût  et  de  langage  ;  mais  Thonnêteté 
se  révolte  contre  le  système  odieux  des  romanciers  à 
bout  d'invention,  qui  ont  fait  de  la  société  une  caverne 
de  voleurs,  et  de  la  famille  un  repaire  de  vices  drama- 
tiques. Hâtons-nous  d'ajouter  que  les  Revues  respectent 
le  lecteur  beaucoup  plus  que  ne  le  font  les  journaux  quo- 
tidiens; qu'en  dépit  de  l'engouement  du  public,  les 
œuvres  immorales  ou  extravagantes  font  leur  temps, 
ainsi  que  les  platitudes,  et  que  les  bons  romans  sur- 
nagent seuls,  comme  tous  les  bons  livres. 

L'histoire  du  roman  serait  plus  longue  que  Clélie  et 
Clarisse;  à  peine  pouvons- nous  en  indiquer  les  points 
essentiels.  Les  contes  et  les  fables  sont  communs  à  tous 
les  peuples.  Les  Arabes  ont  les  Mille  et  une  Nuits,  les 
Indiens  leurs  interminables  épopées.  Chez  les  Grccs>  le 
genre  romanesque  semble  dater  de  Platon  et  de  Xéno- 
phon.  L'évêque  d'Avranches  même,  avec  le  plus  grand 
sérieux  et  le  plus  profond  respect,  le  ferait  presque  re- 
monter jusqu'aux  paraboles  des  livres  saints  et  aux  allé- 
gories du  Cantique  des  Cantiques.  Sans  aller  si  loin,  il 
faut  reconnaître  dans  la  Cyropédie  et  V Atlantide  les  ca- 
ractères de  la  fiction,  qui  frappèrent  même  Cicéron.  Mai* 
la  vie  publique  et  poéti(][ue  des  Grecs,  au  temps  de  leur 
prospéité,  se  passait  facilement  de  ce  divertissement  des 
tt  honnêtes  paresseux,  »  parce  qu'elle  était  bien  remplie; 
et  une  civilisation  qui  tenait  les  femmes  de  condition 
honnête  renfermées  dans  l'ombre  du  gynécée  ne  permet- 
tait guère  les  peintures  de  l'amour  tel  que  l'entendent 
les  Modernes.  Il  ne  restait  pour  les  contes  et  les  romans 
que  des  lieux  communs  facilement  épuisés,  des  aventures 
bizarres,  des  histoires  de  pirates  et  d'enfants  enlevés,  et 
des  reconnaissances,  qui  étaient  le  fond  monotone  et 
obligé  du  genre.  Les  Fables  Milésiennes  ne  nous  sont 
connues  que  par  la  tradition  ;  mais  on  devine  aisément  le 
caractère  de  ces  productions  de  la  molle  et  voluptueuse 
lonie,  puisqu'elles  scandalisèrent  les  Partlies,qui  les  trou- 
vèrent dans  le  bagage  des  lieutenants  de  Crassus,  à  peu 
{>rès  comme  nos  officiers  virent  en  1812,  dans  les  riches 
)ibliothèques  de  Moscou,  les  plus  mauvais  romans  du 
xviii*  siècle.  N'oublions  pas  cependant  aue  la  poétique 
histoire  de  Psyché  est  donnée  par  Apulée  comme  une 
fable  milésienne.  —  Dans  la  décadence  des  lettres  grec- 
ques, le  genre  fabuleux  devient  à  la  mode,  et  Lucien 
écrit  son  flistoire  véritable  pour  se  moquer  des  voyages 
imaginaires.  Le  goût  obstiné  de  Racine  et  la  sévérité  de 
Port-Royal  ont  popularisé  le  titre  des  Amours  de  Théagène 
et  de  Chariclee,  premier  type  du  roman  d'amour,  et 
ouvrage  d'Uéliodore,  évêque.do  Tricca.  On  lira  dans  hi 
lettre  de  Huet  à  Segrais,  ou  plutôt  dans  VEssai  de  M.  Vil- 
lemain sur  les  romans  grecs,  ce  qu'il  est  bon  de  savoir 
de  ces  compositions,  qui  peut-être  n'amusaient  pas  trop 
leurs  lecteurs,  sauf  la  pastorale  élégante  et  gracieuse  die 
Daphnis  et  CfUoé,  traduite  par  Amyot  d'un  Longus  in- 
connu, avec  une  naïveté  qui  n'appartient  pas  à  l'auteur 
original. 

Les  Romains  eurent  le  goût  romanesque  par  imitation  ; 
mais  ils  semblent  l'avoir  cultivé  plutôt  dans  lea  décla- 
mations des  écoles  que  dans  les  récits  d'imagination.  A 
peine  peut-on  nommer  le  livre  odieux  de  Pétrone,  où  les 
seuls  passages  lisibles  sont  de  la  critique  et  non  du  ro- 
man. Quant  à  VAne  d'or  de  l'Africain  Apulée,  malgré  des 
défauts  de  même  nature,  au  moins  offre-t-il  des  inven- 
tions plaisantes  et  bouffonnes  dont  on  peut  rire  de  bon 
cœur. 

Avec  le  moyen  âge,  époque  d'aventure&,  de  hasards  et 
de  crédulité,  le  roman  arrive  à  sa  vraie  forme  et  à  sa  po- 
pularité universelle.  En  prenant  son  nom  moderne,  il  a 
d'abord  le  caractère  épique,  et  une  certaine  grandeur 
poétique  et  morale  qu'il  doit  aux  idées  et  aux  sentiments 
chrétiens.  La  femme  a  obtenu  dans  la  société  la  place 
qu'elle  y  tiendra  désormais;  la  chevalerie  remplit  les  inoa» 
ginations  de  sentiments  au-dessus  du  vulgaire  et  d'aven- 
tures  merveilleuses.  Nous  avons  indiqué  plus  haut  rs 
rapport  de  l'épopée  classique  et  du  roman  populaire  :  la 
transition  se  fait  par  les  chansons  de  gestes  et  les  cycles 
épiques  de  BoUmd,  da  Saint-Graci^  d^AleoDœedrê  ie 


ROM 


1581 


ROM 


Qrmi^  de  Rohm  Bood  (  7.  et  mots).  Ces  légendes  en 
vers  amaMDt  Toiaiveté  et  Tignorance  pendant  les  heures 
de  solitude*  ot  les  longues  veillées.  Mais  on  finit  par  se 
lasser  de  Roland  et  de  ses  «  pairs.  %  Le  roman  devient 
allégorique  :  au  xn'*  siècle,  il  conserve  la  forme  des  vers, 
mais  il  s*essaye  à  la  peinture  des  mœurs  et  à  la  satire 
dans  le  Uoman  de  la  Rose,  et  surtout  dans  le  Boman  du 
lienard  [V,  ces  mols)<t  long  fabliau  maintes  fois  imité  : 
nous  ne  sommes  pas  loin  de  la  prose  et  de  Rabelais.  — 
On  sait  tout  ce  que  renferme  «  la  vie  très-horrificque  » 
de  Gargantua  et  de  Pantagruel  ;  il  manque  cependant  à 
cette  verve  prodigieuse  d'invention,  qui  s*est  tout  permis, 
ce  ^rand  él'.'rT^cnt  du  roman  moderne,  Tamour.  Les  con- 
çu rs  (le  récoii!  do  Rabelais,  Bonaventure  Despériers,  la 
reine  de  Navarre  elle-même,  ne  le  connaissent  pas  beau- 
coup plus  que  lui.  La  galanterie  légère  et  brillante  de 
Bocrace  leur  convenait  mieux,  et  le  Décaméron  a  plus 
d'une  fois  servi  de  modèle  aux  bons  conteurs  français, 
tandis  que  d'autres  légendes  italiennes  fournissaient  à 
Shakespeare,  entre  plusieurs  sujets  de  drames,  les  amours 
désormais  impérissables  de  Roméo  et  de  Juliette  et  la 
jalousie  d'Othello.  —  Rabelais  a  porté  dans  le  roman  la 
philosophie,  la  politique,  Tesprit  d'examen  et  de  scepti- 
cisme qui  doivent  aller  si  loin  après  lui.  Et  néanmoins 
c'est  de  son  temps,  c'est  au  xvi*  siècle  que  l'amour  plato- 
nique, poussant  jusqu'à  l'extravagance  l'idéal  de  la  déli- 
catesse, ressuscite  la  chevalerie  dans  les  imaginations 
populaires,  et  fait  éclore  ou  renaître  l'héroïque  et  nom- 
breuse famille  des  Amadis  (  F.  ce  mot)^  qui  a  été  trans- 
portée en  Espagne  et  transformée  :  il  eut  le  privilège  de 
tourner  la  tète  aux  lecteurs  espagnols  et  fhmçais,  jusou'à 
l'immortelle  plaisanterie  de  Cervantes,  plus  meurtrière 
pour  les  romans  de  chevalerie  que  le  bras  même  de  la 
gouvernante  et  des  bons  amis  de  Don  Quichotte.  On 
ne  connaît  plus  ces  ouvrages.  Nous  avons  aujourd'hui 
i'autres  lectures,  d'autres  tentations  et  d'autres  folies 
«  que  celles  de  l'ingénieux  hidalgo  de  la  Manche;  »  mais 
ane  spirituelle  leçon  de  M.  Saint- Marc  Girardin  peut 
iu  moins  nous  donner  une  idée  des  sublimes  amours 
d'Amadis  et  d'Oriane.  Quant  au  Don  Quichotte^  il  a  suffi 
à  faire  la  gloire  littéraire  de  l'Espagne,  puisque,  du  moins 
jusqu'à  ce  jour,  le  seul  livre  espagnol  qui  soit  populaire 
en  Europe  est  un  roman,  chef-d'œuvre  d'invention  phi- 
losophique et  plaisante,  où  la  comédie  et  le  sentiment 
s'allient  avec  autant  de  bonheur  que  la  folie  et  la  raison 
dans  le  héros. 

Une  autre  inftuence  étrangère,  celle  des  pastorales 
italiennes  du  Tasse  et  de  Guarini,  de  VAminta  et  du 
Pastor  Fido  {V,  ces  mots)^  vint  modifier  en  France  le 
caractère  du  roman,  et  donner  au  goût  une  direction 
nouvelle.  VAstrée  marque  une  époque  dans  l'histoire  de 
ce  genre,  devenu  tout  français.  Céladon  remplace  Ama' 
dis;  les  amants  se  font  bergers,  et  quittent  la  lance  pour 
la  houlette  ;  mais  les  sentiments  délicats  et  la  dévotion 
d'amour,  que  d'Urfé  appelle  «  les  effets  de  l'honnête  ami- 
tié, »  n*j  perdent  rien;  au  contraire,  Tanalyse  et  la  dis- 
sertation savante  et  subtile  se  mettent  de  la  partie. 
L'Hôtel  de  Rambouillet  en  fait  ses  délices,  et  M^*  de  Scu- 
déry  consacre  la  fécondité  laborieuse  de  son  imagination 
à  en  divertir  les  pricietues  et  les  honnêtes  gens.  Tout  le 
monde  a  ri  des  vigoureuses  attaques  de  Molière  et  de 
Boileau  contre  les  héros  de  roman  et  leurs  admirateurs, 
contre  les  portraits  de  fantaisie,  les  intrigues  sans  fin.  On 
sait  encore  le  mépris  que  Bossuet  témoigne,  du  haut  de 
sa  chaire,  pour  ces  «  froides  et  dangereuses  fictions.  » 
Elles  ont  amusé  cependant  d'excellents  esprits.  M*"*  de 
Sévigné  et  son  ami  La  Rochefoucauld  «  se  prenaient,  dit- 
elle,  au  style  maudit  et  détestable  de  La  Calprenède 
comme  à  de  la  glu.  »  Peut-être  môme  préféraientr>ils  les 

Quinze  intrigues  de  la  Cléopâtre  aux  vingt  volumes  du 
ynu  et  de  la  Clélie,  fidèle,  mais  trop  longue  expression 
des  idées  et  des  sentiments  d'une  société  spirituelle  et 
polie  jusqu'à  l'excès.  —  Il  faut  remarquer  dans  M"*  de 
Scudéry  la  part  littéraire  que  les  femmes  commencent  à 
se  faire  dans  le  roman,  où  leur  imagination  et  leur  sen- 
sibilité les  appellent  à  de  grands  succès.  Signalons  aussi 
l'apparition  de  l'histoire,  si  défigurée  qu'elle  soit  par  les 
auteurs  qui  l'habillent  à  la  française.  Ces  Grecs,  ces  Ro- 
mains de  fantaisie  ne  sont  pas,  comme  les  chevaliers 
errants,  sortis  tout  armés  du  cerveau  du  narrateur;  ils 
portent  des  noms  vrais,  ils  réveillent  des  souvenirs. 
Nous  n*en  sommes  pas  encore  au  roman  historique; 
mais  on  peut  d^à  le  prévoir.  En  attendant,  la  peinture 
des  mœuTB  devient  plus  simple  et  plus  humaine,  quoi- 
que toujours  noble  et  délicate,  sous  la  plume  de  M'"*  de 
La  Fayette,  dans  Zayde  et  dans  la  Princesse  de  Clèves, 


«  Passer ,  dit  Laharpe,  de  M*"*  de  La  Fayette  à  Scarron, 
c'est  aller  de  la  bonne  compagnie  à  la  taverne;  »  mais  le 
Aoman  comtatie  Justifie  trop  bien  son  titre  pour  se  pas 
compter,  dans  l'histoire  du  cenre,  comme  le  modèle  le 
plus  franc  et  le  plus  vif  de  la  gaieté  populaire  qui  parle 
français.  Scarron  fait  penser  aux  comédies  bouffonnes  de 
Molière,  M™*  de  La  Fayette  aux  comédies  héroïques  de 
Corneille.  Citons  encore,  comme  modèle  d'agrément,  le 
roman  de  Psyché,  où  La  Fontaine  mêle  si  naturelle- 
ment la  fiction,  la  grâce  et  la  plaisanterie.  Nous  ne  ferons 
pas  au  Télémaque  l'injure  de  le  compter  parmi  les  ro- 
mans. Si  Fénelon  écnt  en  prose,  s'il  a  l'esprit  un  peu 


imagination 

couleurs.  —  Mais  la  fiction  «  aspire  à  descendre  »  des 
hauteurs  sublimes  d'autrefois,  à  suivre  la  pente  de  l'es- 
prit et  des  mœurs  du  siècle  nouveau.  Lesage,  qui  tient 
encore  du  xvu*  siècle  par  le  goût  et  le  stvle,  qui  élève 
même  le  roman  au  rang  de  la  haute  comédie  par  la  pein- 
ture des  caractères,  Lesage  n'a  plus  cet  amour  du  grand 
et  de  l'idéal  dont  ses  devanciers  avaient  abusé;  la  prose 
a  pour  longtemps  remplacé  la  poésie.  —  Bientôt  même 
le  roman  s'altère  et  se  dégrade  :  il  ne  se  propose  plus  de 
divertir,  mais  de  détruire,  à  force  de  licence  et  d'impiété  t 
c'est  l'œuvre  déplorable  de  Voltaire,  et  de  ses  imitateurs, 

aui  n'ont  pas  son  génie;  œuvre  qui  se  poursuit  jusque 
ans  la  Révolution,  et  au  delà.  Il  y  avait  cependant, 
même  an  xvni*  siècle,  d'autres  moyens  de  réussir.  LaIs- 
sons  de  côté  la  pédanterie  philosophique  de  Marmontel, 
ennuyeux  dans  Bélisaire  et  dans  les  Incas^  agréable  avee 
effort,  mais  froid  dans  les  Contes  moraux;  laissons  éga- 
lement les  fadeurs  chevaleresques  et  pastorales  de  Fio- 
rian.  Le  grand  roman  de  l'époque  futia  Nouvelle  Héloise^ 
où  la  magie  du  style  fit  admirer  des  sentiments  souvent 
déclamatoires  et  des  situations  fausses,  auxquels  on  est 
moins  sensible  aujourd'hui.  J.-J.  Rousseau,  d'ailleurs, 
avait  dévoré  des  ronians  pendant  son  enfance,  et  il  en  fit 
toute  sa  vie.  Au  moins  n'avait-il  pas,  comme  Diderot  et 
Crébillon  fils,  cherché  de  faciles  succès  dans  la  satire  et 
le  scandale.  Ce  mérite  est  également  celui  de  l'abbé  Pré- 
vost, peintre  touchant,  mais  souvent  diffus,  de  la  passion, 
des  fautes  et  du  malheur.  Il  appartient  surtout  au  pre* 
micr  et  illustre  élève  de  Rousseau,  Bernardin  de  Saint- 
Pierre,  qui  purifie  le  roman  par  l'immortelle  idylle  de 
Paul  et  Virginie, 

Ainsi,  dans  le  xviu*  siècle,  le  fopd  du  genre  s'était  dé- 
veloppé; le  cadre  s'était  agrandi;  à  la  forme  première  de 
la  narration  s'étaient  Routées  celles  de  la  correspon- 
dance, des  mémoires,  des  confessions;  effet  d'une  popu- 
larité qui  augmentait  tous  les  Jours.  Les  autres  peuples 
de  l'Europe  n'étaient  pas  restés  en  arrière  de  la  France; 
Swift,  salué  par  ses  compatriotes  du  nom  de  «  Rabelais 
anglais,  »  fit  servir  le  merveilleux  à  la  satire  mordante 
des  folies  humaines  dans  les  Voyages  de  Gu//tt;er;  Daniel 
de  Foé,  son  contemporain,  rencontra  une  inspiration  de 
génie  dans  l'histoire  de  Robinson  Crusoé^  aux  prises  avec 
toutes  les  misères  et  tous  les  dangers  de  la  solitude. 
Trente  ans  plus  tard,  l'Angleterre  et  la  France  applau- 
dissaient, dans  Tom  Jones,  à  la  gaieté  naturelle  et  plai- 
sante, quoique  trop  libre,  de  Fielding  ;  dans  Grandtsson 
et  dans  Clarisse  Harlowe,  aux  longues  et  pathétiques 
peintures  de  Richardson,  qui  passionnaient  Diderot.  Ci- 
tons aussi,  parmi  les  bons  ouvrages  du  genre,  le  Vicaire 
de  Wake/ield,  où  Goldsmith  a  donné  l'expression  con- 
sciencieuse, édifiante  et  un  peu  prolixe  de  la  vie  familière, 
des  sentiments  honnêtes  et  de  la  vertu.  —  L'Allemagne 
en  était  encore  à  la  chevalerie  et  au  merveilleux  un  peu 
puéril  de  ses  fantômes  et  de  ses  ondines,  lorsque  Gœthe 
vint  ébranler  profondément  les  imaginations  avec  les 
Souffrances  de  Wertfier,  le  seul  bon  roman  qu'il  ait  fait 
S'il  est  vrai,  comme  on  l'a  dit,  que  le  suicide  de  son 
héros  ait  été  contagieux  parmi  les  étudiants  allemands, 
cette  fidélité  trop  scrupuleuse  d'imitation  serait  une 
preuve  singulière  du  danger  des  romans  pour  les  têtes 
peu  solides.  Cétait  bien  assez  d'imiter  de  Werther  les 
vagues  désirs,  les  répugnances,  le  dégoût  de  la  vie,  ainsi 
que  l'a  fait  à  la  même  époque  l'Italien  Ugo  Fosoolo  dans 
son  roman  de  Jacopo  Orlis. 

Le  xviu*  siècle  avait  la  passion  des  romans  ;  le  xix*  en 
a  eu  la  fureur.  Cette  littérature,  lucrative  et  facile,  nous 
a  inondés  de  productions  et  de  produits  éphémères.  C'est 
surtout  depuis  l'industrie  du  roman-feuilleton  que  Ton 
pourrait  dire  avec  Boileau  : 

En  poorrait-oii  troavsr  deiuL  oa  troU  eatrs  iiilU«f 


ROM 


1582 


ROM 


On  peut  cependant  choisir  dans  cette  multitude,  et  s'ar- 
rêter à  quelques  grands  noms  et  à  quelques  bons  ou- 
vrages. En  premier  lieu  se  présentent  deux  écrivains  de 
^nie,  M">*  de  Staâl  et  Chateaubriand,  dont  les  livres  ont 
inégalement  résisté  à  Taction  du  temps.  L*étude  des  carac- 
tères, le  sentiment  passionné  des  arts,  môme  des  scènes 
dramatiques,  n'ont  pas  empêché  Delphine  et  Corinne  de 
vieillir.  Atala,  dont  le  prodigieux  succès  «  enivra  son  au- 
teur des  jouissances  de  Tamour-propre,  »  a  un  peu  perdu 
l'éclat  et'  la  richesse  de  son  coloris.  René  seul,  écrit  avec 
la  force  du  génie  que  la  flatterie  n'a  pas  gftté,  est  de- 
meuré l'expression  la  plus  originale  et  la  plus  belle  de 
ce  «  vague  des  passions,  «  maladie  du  siècle,  qui  com- 
mence à  Rousseau  et  ne  finit  pas  avec  Alfred  de  Musset. 
Les  Martyrs  {V.c$  mot)  n'ont  pas  été  aussi  heureux;  en 
aspirant  à  l'épopée,  l'auteur  ne  s'est  pas  .élevé  au-dessus 
du  roman,  sans  être  d'ailleurs  branchement  romancier, 
parce  qu'il  avait  toutes  les  qualités  du  poète,  excepté 
le  don  des  vers.  —  Après  Chateaubriand,  il  paraîtrait 
presque  ridicule  de  citer  Fiévée  et  la  Dot  de  Suzette, 
M"**  Cottin  et  Malvina,  et  à  plus  forte  raison  les  longues, 
sinistres  et  puériles  élucubrations  de  Ducray-Duminil, 
imitées  de  l'Anglaise  Anne  Radcliffe,  si  ces  ouvrages, 
oubliés  aujourd'hui,  et  refaits  d'ailleurs  dans  d'autres 
conditions,  ne  témoignaient  du  goût  d'une  génération. 
Ce  sont  des  divertissements  plus  littéraires  que  les 
esquisses  de  caractères  et  de  situations  comme  Adolphe 
de  Benjamin  Constant,  Ourika  de  M"**  de  Duras,  Valérie 
de  M"''  de  Krudener.  Les  femmes  ont  excellé  chez  nous 
dans  ces  vives  et  courtes  peintures,  et  rempliraient  à 
elles  seules  une  grande  partie  de  l'histoire  du  roman. 
Mais  le  goût  et  le  progrà  des  études  historiques,  qui 
sont  la  gloire  du  xix*  siècle,  allaient  ouvrir  aux  roman- 
ciers une  vaste  carrière  :  on  a  rencontré  plus  haut  le  nom 
et  l'éloge  de  Walter  Scott  ;  peut-être  sa  popularité  prodi- 
gieuse a-tp^lle  souffert  du  temps,  comme  celle  de  tous 
ses  pareils;  encore  ne  semble-tp-il  pas  qa*Ivanhoë  ou  les 
Puritains  d'Ecosse  puissent  vieillir;  et  si  tel  est  le  pri- 
vilège des  tableaux  historiques  restitués  par  la  longue 
patience  de  l'étude  et  du  génie,  ou  en  peut  dire  autant 
de  conceptions  originales  et  touchantes  comme  la  Prison 
d'Edimbourg.  —  De  tels  succès  mirent  le  roman  histo- 
rique en  grande  faveur.  Depuis  le  Cinq-Mars,  sérieux  et 
rouie,  d'Alfred  de  Vigny,  Jusqu'aux  faciles  et  joyeux  héros 
d'Alexandre  Dumas,  l'histoire  fut  fouillée,  retournée,  ha- 
billée et  falsifiée  de  toutes  les  manières,  sous  prétexte  de 
lui  rendre  son  véritable  costume.  Dan  s  cette  profusion  de 
livres  souvent  amusants  à  lire  vite, comme  l'interminable 
légende  des  Trois^  Mousquetaires  de  Dumas,  se  détache 
ce  que  l'école  romantique  appellerait  le  colosse  du  genre, 
Notre-Dame  de  Paris.  La  critique  a  fait  bonne  et  sévère 
justice  des  invraisemblances,  des  antithèses  systéma- 
tiques, des  tendances  dangereuses,  du  mauvais  goût,  des 
contre-sens  archéologiques;  mais  il  reste  à  l'œuvre  de 
Victor  Hpgo  ce  qui  ne  s'emprunte  ni  ne  s'altère,  c-î-d. 
le  mouvement,  la  vie  et  la  puissance;  on  peut  bl&mer 
les  traits  qu'il  donne  à  ses  personnages  :  on  ne  les  ou- 
blie pas.  —  Les  Misérables,  écrits  trente  ans  après  Notre- 
Dame  de  Paris,  ont  été  l'objet  d'un  véritable  engouement 
de  la  part  des  partisans  déterminés  de  M.  Victor  Hugo; 
il  y  a  cependant  beaucoup  à  réduire  de  tout  le  bruit 
qu'on  en  a  fait.  L'auteur  a  voulu  tout  mettre  dans  cette 
vaste  composition  :  drame,  peinture  des  mœurs,  histoire 
contemporaine,  théories  philosophiques,  sociales,  écono- 
miques, administratives;  mais  il  use  et  abuse  de  tout; 
il  appuie  avec  une  étrange  complaisance  sur  des  idées  et 
des  images  immondes  ;  fi  fatigue  le  lecteur  par  des  di- 
gressions à  perte  de  vue,  par  l'étalage  d'une  érudition 
prétentieuse  et  incommode,  par  un  style  qui  pousse  k 
Dout  tous  les  défauts  de  l'école,  alliances  de  mots  ambi- 
tieuses et  forcées,  néologismes  indigestes  ou  même  bar- 
bares, et  jusqu'aux  incorrections  grammaticales,  où  le 
poète  n'était  jamais  tombé.  Non  pas  qu'il  ne  se  rencontre 
dans  les  Misérables  des  conceptions  touchantes  ou  gra- 
cieuses, quelques  peintures  fortes,  quoique  toujours 
chargées,  des  touches  de  style  excessives  et  vigoureuses  : 
mais  l'impression  générale  du  livre  est  dangereuse,  la 
composition  diffuse,  incertaine,  souvent  puérile,  chargée 
d'invraisemblances  et  de  contradictions  que  le  talent  in- 
contestable de  l'auteur  ne  suffit  pas  à  faire  accepter. 

Ainsi  nos  romanciers  se  font  moralistes  et  philosophes, 
comme  ilss'étaient  faits  historiens.  Nous  rappellerons  seu- 
lement, tans  insister  sur  les  détails,  de  quelle  étrange  ma- 
nière a  été  accommodée  la  morale  dans  les  laborieuses 
mais  énergiques  combinaisons  de  Frédéric  Soulié,  dans 
l'immense  Comédi»  humaine  de  Balzac,  dans  les  concep- 


tions séduisantes,  et  trop  souvent  dangereuses,  de  Georgi 
Sand,  ajoutons  dans  les  tableaux  de  mœurs  contempo- 
raines d'Eugène  Snfi  et  des  deux  Dumas.  £stF<:e  donc  une 
nécessité  pour  les  sociétés  trop  civilisées  de  se  complaire 
dans  les  peintures  réelles  et  vivantes  de  leurs  maux  et  de 
leurs  plaies,  exagérées  encore  par  l'audace  ou  la  fantaisie 
de  l'écrivain  ?  ou  bien  encore  d'accueillir,  sous  le  couvert 
d'une  richesse  admirable  d'imagination  et  d'un  grand 
éclat  de  style,  les  attaques  les  plus  pernicieuses  contre 
des  vérités  dont  le  seul  tort  est  d'être  aussi  vieilles  gue 
le  monde?  La  mode  a  partagé  ses  faveurs  aux  Mémoires 
du  Diable  de  Frédéric  Soulié;  à  Lélia  de  George  Sand  ;  a  j 
Père  Goriot,  aux  Parents  pauvres  de  Balzac;  aux  Mys' 
tères  de  Paris,  à  MathUde  d'Eugène  Sué;  &  Monte-Cristo 
de  Dumas  père,  sans  s'inquiéter  si  les  esprits  faibles  pren- 
draient au  pied  de  la  lettre  ces  vilaines  images  de  b 
société,  comme  le  chevalier  de  La  Manche  tenait  pour  ar- 
ticles de  foi  les  aventures  des  chevaliers  errants. 

Nous  ne  ferons  pas  à  la  littérature  l'injure  d'accepter 
pour  un  dédommagement  de  ces  lectures  dangereuses  la 
gaieté  populaire  et  grivoise  de  certains  romanciers.  Nous 
serions  cependant  injustes  de  ne  pas  signaler  des  compo- 
sitions dont  le  succès  prouve  que  le  naturel  et  l'intérêt 
suffisent  encore  pour  fonder  la  réputation  d'un  homme 
de  talent  et  le  condubre  à  l'Académie,  depuis  Colomba, 
de  M.  Mérimée,  jusqu'à  la  Maison  de  Penarvan  de  M.  J. 
Sandeao,  et  Jusqu'au  Roman  d'un  jeune  homme  pawore^ 
de  M.  Octave  Feuillet.  —  Par  là  s'explique  le  succès  que 
trouvent  chez  nous  les  romans  étrangers,  qui,  d'ailleurs, 
changent  de  caractère  pour  répondre  à  la  mobilité  du  pu- 
blic. Le  jour  où  Walter  Scott  eut  épuisé  le  roman  histo- 
rique, les  Anglais  revinrent  avec  Dickens  au  roman  de 
mœurs  et  d'observation  familières,  tel  à  peu  près  que 
l'avaient  compris,  au  xviu*  siècle,  FieldingetRichardson. 
L'Américain  Cooper  avait  mis  à  la  mode  les  scènes  de  la 
mer  et  de  la  vie  sauvage.  Lorsque  de  nombreuses  imita- 
tions de  ses  romans  le  Pilote  et  les  Mohicans  eurent  usé 
la  mer  et  les  sauvages,  les  romanciers  américains  adop- 
tèrent le  genre  anglais  ;  une  forte  et  pathétique  pointure 
de  l'esclavage,  sortie,  sous  le  titre  de  la  Case  tù  ronde 
Tom,  de  la  plume  d'une  femme.  M"**  Beecher  Stowo, 
émut  et  toucha  les  deux  mondes,  à  la  veille  do  la  lutte  san- 
glante des  deux  Amériques.  Le  goût  anglais,  du  reste, 
est  celui  des  peuples  du  Nord  ;  lorsque  la  Suède  essaye 
d'exprimer  dans  les  romans  les  idées  et  la  vie  de  ses 
froides  régions,  elle  adopte  le  ton,  les  manières  et  le  tour 
d'esprit  de  l'Angleterre  et  de  l'Amérique.  —  Dans  cette 
vogue  universelle  du  roman,  il  n'y  a  pas  jusqu'à  la  piété 
qui  n'essaye  de  combattre  le  mal  par  ses  propres  armes, 
et  d'opposer  le  roman  chrétien  au  roman  philosophique 
et  socialiste  :  un  grave  et  pieux  prélat  refait  dans  Fa- 
biola  le  roman  des  Martyrs,  et  appuie  ainsi,  peut-être 
involontairement,  ce  que  Tévêque  d'Avranches  avait  écrit 
pour  la  justification  de  ses  amis. 

Que  faut-il  conclure  de  cette  revue  si  longue  et  cepen- 
dant si  incomplète  où  nous  ne  pouvions  et  ne  devions 
pas  tout  dire?  La  sévérité  proscrit  des  lectures  presque 
toujours  inutiles.  Si  l'on  regarde  seulement  le  bon  em« 
plot  de  notre  vie,  si  courte  et  si  troublée,  ne  dira-troo 
pas  de  tous  les  romans  ce  que  le  curé  de  Don  Quichotte 
dit  de  V Histoire  du  fameux  Tirant  le  Blanc^  qu'il  dé- 
clare d'ailleurs  «  le  meilleur  livre  du  monde  pour  le 
style  et  le  naturel?  avec  tout  cela,  l'auteur  eût  mérité  de 
passer  le  reste  de  ses  jours  aux  galères,  pour  avoir  débité 
tant  de  sottises  sans  y  être  contraint.  »  Cependant,  les 
romans  ont  rencontré  rarement  des  juges  aussi  sévères. 
L'indulgence  tolère  au  moins  les  bons,  dans  l'intérêt  de 
la  faible  humanité,  qui  demande  une  trêve  et  une  dis- 
traction aux  préoccupations  trop  sérieuses  de  notre  &ge, 
et  répète  timidement  après  La  Fontaine  (VDI,  Cab.  4)  : 

Le  monde  eat  vieux,  dit-on  :  Je  le  crois;  cependant 
Il  le  fiiat  amiuer  encor  comme  an  enfont. 

A.D. 

ROMAN  HDialecte^,  nom  donné  quelquefois  à  lldiome 
rhétien  {V.  ce  mot). 

ROMAN  (S^le).  V,  RoMANB  (Architecture). 

ROMANCE,  mot  qui  désigna  d'abord  un  poôme  composé 
en  langue  romance  ou  romane ,  et  qui  s'est  ensuite  i^h 

fOiqué  dans  un  sens  restreint  aux  cnants  populaires  ds 
'Espagne,  célébrant  les  grands  événements  de  l'histoire 
nationale,  les  hauts  faits  des  héros  et  des  rois.  Ces  n>- 
mances  espagnoles  sont  généralement  divisées  en  cou- 
plets (copias)  de  4  vers  ;  les  vers  ont  8  syllabes,  et  ne  sont 
pas  rimes,  mais  seulement  assenants.  K.  RoMANGiaOt 


ROM 


1583 


ROM 


ROHAiici,  petite  pièce  de  ven,  divisée  en  couplets 
J'égale  étendue  et  de  môme  mesure,  et  destinée  à  être 
chantée.  La  mélodie  que  le  musicien  lui  applique  est  la 
même  pour  les  di?ers  couplets.  La  romance  exprime 
particulièrement  les  sentiments  tendres  et  langoureux, 
mais  peut  prendre  un  caractère  dramatique  ou  passionné. 
L'origine  de  ce  genre  de  composition  remonte  aux  Trou- 
badours et  aux  iSrouyèrM.  Celles  de  leurs  pièces  qui  nous 
ont  été  conservées  avec  une  notation  musicale  prouvent 
que  la  mélodie  était  courte,  sans  tonalité  précise,  d*un 
rnythme  indécis,  et  consistait  en  quelc[ues  sons  plain- 
tifs, monotones,  dont  la  persistance  finissait  par  saisir 
Toreille  et  toucher  le  cœur  :  tel  est  le  caractère  des  chants 
du  châtelain  de  Coucy,  d'Adam  de  La  Halle,  de  Lescu- 
rel,  etc.  A  partir  du  xvi*  siècle,  la  romance  française  eut 
plus  de  vie  et  de  mouvement,  un  rhythme  plus  accusé, 
et  un  air  de  grftce  qui  la  fit  rechercher  par  toute  TEu- 
rope  :  les  musiciens  qui  s*y  exercèrent  avec  le  plus  de 
succès  furent  Guill.  Leheurteur,  Pierre  Vermond,  Beau- 
lieu,  Deschamps,  Ciaudin,  Du  Gaurroy.  On  a  des  ro- 
mances agréables  de  Louis  XIII,  de  Guédron,  son  maître 
de  musique,  et,  sous  Louis  XIV,  de  Lulli,  de  Boisset,  de 
Lambert,  de  Bemier,  de  Colin  de  Boismont,  de  Bory,  de 
Colasse,  de  Campra,  etc.  Vers  le  milieu  du  xviu*  siècle, 
la  romance  prit  un  développement  analogue  à  celui  de  la 
musique  elle-même,  et  Ton  vit  se  succéder  une  multi- 
tude de  fraîches  inspirations,  entre  autres  :  Que  ne  suiS' 
je  la  fougèret  charmante  idylle  écrite  par  Riboutté  sur 
un  vieil  air  gu*on  a  faussement  attribué  à  Pergolèse';  Je 
l'ai  planté,  je  Vai  vu  naStre,  par  J.-J.  Rousseau  ;  0  ma 
tendre  musette,  paroles  de  Labarpe,  musique  de  Monsi- 
gny;  //  pleui,  il  pleut,  bergère,  de  Fabre  d'Églantine, 
musique  de  Simon  (directeur  du  théMre  des  Variétés); 
i* Amour  est  un  enfant  trompeur,  et  Plaisir  d'amour  ne 
dure  fiu'un  moment,  petits  chefs-d'œuvre  du  musicien 
J.;P.  Martini;  les  Petits  oiseaux ,  par  Rigel;  J'ai  vu 
Lise  hier  au  soir,  par  le  hautboïste  Garnier  ;  faime  à 
voir  les  hirondelles,  par  Devienne;  Pauvre  Jacques, 
œuvre  de  la  comtesse  de  Travenet,  que  les  royalistes 
chantaient  dans  les  premiers  temps  de  la  Révolution. 
C'irtains  compositeurs  commencèrent  à  se  consacrer  tout 
entiers  au  genre  de  la  romance;  mais  le  sopraniste  Alba- 
nèse  est  le  seul  de  ce  temps-là  qui  ait  laissé  des  recueils 
agréables  encore  aujourd'hui.  Après  les  orages  de  la 
Révolution,  sous  le  Directoire,  le  Consulat  et  le  premier 
Empire,  plusieurs  musiciens  donnèrent  des  romances 
qui  jouirent  d*une  popularité  méritée  :  de  ce  nombre 
étaient  Garât,  Boleldieu,  Pradher;  on  n*a  point  oublié 
non  plus  Carbon nel,  auteur  de  Brigitte  et  de  Pauvre 
Use  à  quinze  ans,  ni  Lambert,  qui  nous  a  laissé  Les 
bords  de  la  Loire,  et  De  ma  Céline  amant  modeste,  ni 
Choron,  dont  la  Sentinelle  fit  le  tour  de  l'Europe,  ni  Fol- 
let, auteur  de  la  romance  Fleuve  du  Tage,  Mais  les  com- 
positeurs qui  eurent  les  succès  les  plus  nombreux  et  les 
plus  prolongés  furent  Plantade  et  d'Alvimare,  chez  qui 
Ton  commence  à  remarquer  une  certaine  ambition  dra- 
matique dans  les  accompagnements.  Quelques  Italiens 
vinrent  aussi  cultiver  la  romance  française  ;  tels  furent 
Godefroy  Ferrari,  Lamparelli,  Mengozzi,  Ballochi,  et 
surtout  Blangini,  auteur  de  délicieux  nocturnes.  Deux 
femmes  se  firent  également  une  brillante  réputation , 
M'"*  Gail,  et  la  reine  Hortense,  auteur  du  chant  Partant 
pour  la  Syrie,  que  le  second  Empire  français  a  pris  pour 
chant  national.  C'est  à  la  reine  Hortense  qu'on  doit 
l'idée  de  former  des  albums  de  romances,  et  celle  de 
joindre  un  dessin  à  chaque  morceau.  —  Pendant  le  ç;ou- 
vernement  de  la  Restauration,  le  premier  ranç  parmi  les 
auteurs  de  romances  appartint  à  Romagnesi,  dont  les 
mélodies  claires,  faciles,  bien  écrites  pour  la  voix,  ont 
cette  juste  mesure  de  gaieté  et  de  sentiment  qui  est  aussi 
éloignée  du  pros  rire  que  de  l'emportement  de  la  passion. 
A  coté  de  lui  brillèrent  Amédée  Rousseau,  dit  de  Beau- 
plan,  qui  publia  une  foule  de  chansonnettes  vives  et  pi- 
quantes; Edouard  Bruguière,  dont  les  romances  respirent 
une  sensibilité  touchante;  M"**  Pauline  Duchambge, 
M»*  Malibran,  Panseron,  etc.  A  la  suite  de  la  Révoluuon 
de  1830,  ao  même  temps  que  triomphait  dans  la  littéra- 
ture l'école  romantique,  Hippolyte  llonpou  tenta  une 
transformation  analogue  de  la  romance  :  son  Andalouse, 
d'une  tournure  si  cavalière,  eut  une  vogue  immense. 
Mais  la  mort  prématurée  de  Tauteur  fit  avorter  la  mu- 
sique romantique.  Alors  fut  introduit  un  genre  nouveau, 
que  Lotsa  Paget,  gui  en  fut  la  créatrice,  porta  immédia- 
lement  à  la  perfection  :  ses  romances  sont  de  petits 
drames,  de  petits  épisodes  de  la  vie  bourgeoise,  mé- 
l«u)^és  de  douce  seasibilité,  de  bon  sens  et  de  gaieté 


pérée,  avec  des  mélodies  vives,  bien  rb^hmées  et  facilei 
à  saisir.  Dans  le  même  temps,  Masini,  originaire  d^ 
Florence,  mettait  dans  la  romance  la  grîce  et  la  limpi- 
dité qui  caractérisent  le  génie  italien  ;  11  eut  dans  les 
salons  de  Taristocratie  la  même  vogue  que  Loisa  Puget 
avait  obtenue  chez  les  bourgeois.  11  y  eut  moins  de  déli- 
catesse, mais  plus  de  franchise  et  de  couleur,  chez  Théo- 
dore Jjibarre.  Acôté  de  Fréd.  Bérat,  plein  d'émotion  et  de 
naturel,  Grisar,  Clapisson,  Thys,  Lagoanère,  Latour, 
Chéret,  Scudo,  Vimeux,  Vogel,  Arnaud,  Henrion,  Na- 
daud,  se  sont  fait  de  nos  jours  une  réputation  méritée. 

ROMANCERO,  c.-à-d.  en  espagnol  recueil  de  romances» 
Il  y  a  cette  différence  entre  les  Romanceros  et  les  Can» 
cioneros  (  V.  ce  mot)^  que  les  premiers  ne  renfermaient 
originairement  que  des  chants  populaires,  tandis  que  les 
seconds  furent  consacrés  à  des  compositions  étudiées, 
dont  les  auteurs  faisaient  plus  ou  moins  œuvre  de  poésie* 
Le  Romancero  espagnol ,  tel  que  Ta  donné  son  dernier 
éditeur,  M.  Duran  (Madrid ,  1850  ],  renferme  des  pièces 
d'une  nature  et  d'un  mérite  très-différents,  soit  par  le 
sujet,  soit  par  la  date  de  la  composition.  Il  est  arrivé, 
en  effet,  que  les  chants  véritablement  populaires  et  pri- 
mitifs de  l'Espagne  ont  été  imités  et  remaniés  par  les 
poètes  depuis  le  xvi*  siècle,  tels  que  Lope  de  Vega,  Que- 
vedo,  Juan  de  Timoneda,  Cervantes;  en  sorte  qu'il  se 
rencontre,  sous  la  môme  rubrique,  des  pièces  d'une  qua- 
lité, d'une  origine  et  d'un  mérite  extrêmement  divers. 
Assigner  à  chaque  pièce  sa  date  approximative  est  une 
des  plus  graves  difiicultés  qu'ait  rencontrées  M.  Duran  : 
il  distingue  des  romances  de  huit  époques  différentes; 
les  anciennes  sont  les  meilleures,  et  les  plus  curieuses 
comme  écho  naïf  des  sentiments  et  des  opinions  popu- 
laires. Après  la  diversité  des  dates  vient  la  diversité  des 
sujets.  Le  Romancero  peut  être  considéré  comme  offrant 
les  éléments  d'une  ou  de  plusieurs  épopées  :  aussi  les 
dramaturges  castillans  ont  abondamment  puisé  dans  ce 
riche  trésor  des  traditions  nationales.  Nous  distinguerons 
plusieurs  groupes  dans  les  romances  espagnoles  :  1®  les 
romances  chevaleresques;  2*^  les  romances  historiques, 
qui  se  rapportent  à  l'histoire  de  l'Espagne;  3^  les  ro- 
mances ne  mœurs;  4^  les  romances  moresques;  5^  les 
romances,  de  beaucoup  les  plus  mauvaises,  qui  se  rap- 
portent à  l'antiquité  fabuleuse  ou  historique. 

Les  Romances  chevaleresques  se  divisent  en  plusieurs 
cycles,  dont  les  principaux  sont  ceux  de  Charlemagne,  de 
Bernard  de  Carpio,  de  Fernand  Gonzalès,  des  sept  infants 
de  Lara,  et  du  Cid.  Dans  ces  divers  cycles,  les  pièces  vé- 
ritablement anciennes,  ou  même  celles  qui ,  relativement 
modernes,  renferment  Quelques  éléments  d'antiquité, 
offrent  des  morceaux  de  la  plus  grande  beauté.  Le  sujet 
du  cycle  carlovingien  tient  à  l'expédition  de  Charle- 
magne dans  la  vallée  de  l'Èbre,  expédition  qui  se  termina 
par  le  désastre  de  Roncevaux.  Il  fut  donné  au  puissant 
empereur  de  remuer  fortement  les  imaginations  au  Sud 
comme  au  Nord  des  Pyrénées  ;  mais  la  vanité  espa^ole 
se  plut  à  opposer  au  chef  des  Francs  un  héros  national 
dont  l'histoire  paraît  assez  fabuleuse ,  Bernard  de  Car- 

{)io,  fruit  des  amours  furtives  du  comte  de  Saldana  et  de 
a  sœur  d'Alphonse  le  Chaste.  Ces  éléments  fabuleux  sont 
bien  loin  d'être  incompatibles  avec  la  poésie.  Bernard 
humilie  Charlemagne  et  les  douze  Pairs.  —  On  trouve 
également  des  morceaux  étincelants  de  beautés  m&les  et 
fortes,  toutes  colorées  par  les  mœurs  du  temps,  dans  les 
ordes  de  Fernand  Gonzalès  et  des  sept  infants  de  Lara. 
Fernand  Gonzalès,  dont  la  mémoire  est  encore  fidèlement 
conservée  à  Burgos,  fut  un  des  premiers  comtes  de  Cas- 
tille;  il  reconquit  ce  pays  sur  les  Arabes  ou  Mores.  On 
conçoit  donc  la  vénération  dont  son  nom  est  encore  en- 
touré. Quant  à  Thistoire  des  sept  infants  de  Lara,  traî- 
treusement livrés  au  fer  des  Mores  par  leur  oncle  Ruy 
Velasauez,  et  vengés  par  le  bfttard  Mudarra,  elle  est  des 

Elus  oramatiques,  et  a  inspiré  quelques-unes  des  plus 
elles  pièces  du  Romancero. 

Mais  quelque  soit  l'intérêt  que  présentent  ces  divers 
cycles,  cet  intérêt  est  cependant  effacé  par  les  beautés  du 
cycle  du  Cid.  Nul  héros,  en  effet ,  n'a  mieux  résumé  les 
diverses  qualités  du  caractère  espagnol  ;  il  n'y  eut  jamais 
de  figure  poétique  plus  chère  à  un  peuple.  L^magination 
espagnole  s'est  donc  plu  à  parer  le  Cid  des  plus  aimables 
et  des  plus  nobles  qualités.  De  là  un  grand  nombre  de 
romances  destinées  à  chanter  les  grandes  actions  du  héros 
castillan  par  excellence,  depuis  son  enfance  jusqu'à  aa 
mort;  elles  célèbrent  l'appui  prêté  par  le  Cid  à  don 
Sanche,  sa  fidélité  à  l'ingrat  Alphonse,  sa  lutte  contre  les 
Mores,  la  conquête  de  Valence,  le  mariage  de  Ma  fiUet, 
dona  Êlvire  et  dofia  Sol ,  leur  insulte  Tengée  tur  les  In- 


ROM 


1584 


ROM 


fants  de  Carrion ,  principalement  la  vengeance  de  don 
Diègue,  et  Thistoire  des  amours  avec  Chimène.  Les 
pièces  que  renferme  le  cycle  du  dd,  bien  que  de  mérites 
très-divers,  prfeentent  toutes  un  grand  intérêt.  On  doit 
regretter  que  la  m&le  légende  ait  été  quelquefois  affadie 
par  les  poètes  du  xvi*  siècle;  Tintroduction  de  la  galan- 
terie y  gâte  Tesprit  héroïque  du  moyen  Age.  Mais  on 
doit  à  ce  mélange  le  Cid  de  Guilhem  de  Castro  et  de 
Corneille. 

La  classe  très-intéressante  des  rvmanceshistonques  em- 
brasse rhistoire  entière  de  l'Espagne  }usqu*au  xvi*  siècle 
exclusivement.  Dans  ce  vaste  cadre,  limagination  popu- 
laire s'est  naturellement  emparée  de  tous  les  événements 
les  plus  propres  à  la  fhipper.  Elle  a  donc  chanté  la 

{>erte  de  l'Espagne  causée  par  l'amour  de  Roderic  pour 
a  Cava,  la  trop  fameuse  fille  du  comte  Julien  ;  la  défense 
de  Zamora  par  l'infant  Urraca;  les  batailles  du  Rio  Verde 
et  du  Rio  Salado;  le  siège  de  Calatrava  la  Viéla;  le  dé- 
vouement de  Diéso  de  Mendoza  à  la  bataille  d'Aljubar- 
rota;  la  mort  tragique  d'Alvaro  de  Luna;  le  siège  de  Gre- 
nade et  la  fondation  de  Santa-Fé,  etc.,  compositions 
charmantes,  d'une  vérité  et  d'une  variété  qui  sont  la 
source  d'un  inépuisable  intérêt. 

Les  romances  moresqtteSf  composées  dans  les  derniers 
temps  de  la  puissance  des  Arabes  dans  la  Péninsule,  ou 
même  après  la  prise  de  Grenade,  ne  sauraient  présenter 
l'intérêt  puissant  qui  s'attache  à  la  poésie  naive  et  pas- 
sionnée do  certaines  romances  du  cycle  chevaleresf^ue  ou 
historique  ;  leur  intérêt  est  d'un  autre  genre  :  il  tient  à 
la  couleur  originale  qu'elles  empruntent  aux  mœurs,  aux 
usazes  qu'elles  décrivent,  et  qui,  grâce  au  caractère  des 
Arabes  d'Andalousie  et  à  leur  civilisation,  étaient  extrê- 
mement poétiques.  On  retrouve  dans  ces  petites  pièces 
quelque  chose  de  l'originalité  do  l'AIhamora;  et  on  ne 
peut  lire  sans  attachement  les  amours  du  beau  Gazul  et 
de  Xarisa,  les  descriptions  des  Joutes  arabes  sur  la  Viva- 
rambla  de  Grenade,  les  défis  d^Alboacem  et  de  Ponce  de 
Léon,  la  vengeance  que  Garcilaso  de  la  Vega  tire  de  l'in- 
sulte faite  à  l'Ave  Bfana.  Qu'on  ajoute  la  peinture  des 
aimes,  des  coursiers,  des  costumes,  et  toute  la  civilisa- 
tion arabe  de  la  péninsule  reparaît  aux  yeux  dans  ces  ro- 
mances. Quel  parti  un  génie  tel  que  Walter  Scott  ne 
pourrait-il  pas  en  tirer! 

Il  en  est  de  même  des  compositions  populaires  que  nous 
rangeons  sous  le  titre  de  Romances  de  mœurs,  faute  d'en 
trouver  un  autre  ^ui  leur  convienne  mieux.  Nd\is  trou- 
vons ici  l'imagination  du  peuple  espagnol  dans  toute  sa 
liberté,  prenant  tour  à  tour  le  ton  élégiaque,  pastoral , 
burlesque,  satirique,  picaresque.  Le  cadre  des  romances 
est  toujours  restreint.  La  langue  espagnole  fournit  aisé- 
ment la  rime;  par  conséquent,  ce  petit  poème  n'excède 
pas  la  portée  d'un  esprit  même  inculte  ;  de  là  la  saveur 
particulière,  l'agrément  infini  de  cette  classe  de  romances 
qui  durent  encore  aujourd'hui  et  dureront  probablement 
autant  que  le  peuple  espagnol  lui-même.  Les  ballades 
anglaises  et  écossaises,  d'une  époque  plus  rude,  n'offrent 
rien  qui  puisse  être  comparé  à  ces  petits  tableaux  de  la 
vie  espagnole,  composés  en  général  durant  le  xiv*  siècle. 

Nous  ne  citons  que  pour  mémoire  les  romances  dont 
les  si:^ets  sont  cris  dans  l'Antiquité.  Il  suffit  de  les 
nommer  pour  faire  entendre  qu'elles  sont  l'œuvre  de 
poètes  érudits,  et  qu'elles  n'offrent,  par  conséquent» 
aucun  des  caractères  qui  font  le  charme  du  Romancero, 
la  spontanéité,  la  naîjireté.  Ce  sont  des  compositions  p^ 
dantesques  et  d'un  genre  faux.  E.  B. 

ROMANCHE  (Idiome).  V.  Rhétie!!. 

ROMANE  (Architecture),  nom  inventé  par  M.  de  Ger- 
ville  et  généxiilement  adopté  pour  désigner  le  style  d'ar- 
chitecture qui  fut  employé  en  Occident  depuis  le  v*  siècle 
de  notre  ère  Jusqu'au  xn*.  Cest  une  transformation  da 
style  romain  dégénéré,  et  Texpression  de  style  roman  a 
été  formée,  par  analogie,  de  celle  de  langues  romanes, 
qui  désigne  les  langues  dérivées  du  latin  ou  langue  des 
Romains.  Le  Comité  historique  des  arts  et  monuments, 
n'appliquant  qu'aux  constructions  du  xt*  et  du  xii*  siècle 
la  dénomination  de  style  roman,  a  rapporté  celles  des 
âges  antérieurs  à  un  style  particulier,  dit  style  latin. 
L'art  des  premiers  siècles  du  moyen  âge  portant  l'em- 
preinte, non-seulement  de  l'influence  latine  ou  romaine, 
mais  encore  de  l'influence  grecque  ou  byzantine,  l'abbé 
Bourassé  a  proposé  l'expression  d* architecture  romano- 
byzantine,  cfui  ne  convient  en  réalité  qu'aux  monuments 
des  XI*  et  xu*  siècles. 

Les  monuments  de  style  latin  sont  rares,  en  France 
surtout  :  nous  mentionnerons  l'église  SMean  à  Poitiers, 
et  la  Baftse-OEuvri'  à  LSiuiuvais.  D'après  les  dMoripàons 


qu'on  trouve  dans  les  autenrs^  il  y  a  Hea  de  croire  qull 
existait  alors  une  grande  variété  dans  la  forme  et  la  dis- 
position des  édifices  consacn^  au  culte^  et  que  la  plupart 
des  plans  qu'avaient  pu  fournir  les  édifices  profanes  des 
Romains,  basiliques,  thermes,  prétoires,  cénacles,  avaient 
été  adaptés  à  cette  destination.  Toutefois,  la  forme  baai- 
licale,  modifiée  par  l'adjonction  d'un  transept,  parait 
aroir  été  la  plus  générale.  Les  églises  à  trois  nc£B  étaient 
peu  nombreuses;  les  autres  avaient  la  forme  d'un  rec^ 
tangle  terminé  par  une  abside  circulaire.  La  maçonnerie 
était  généralement  de  petit  appareil;  la  brique  simulait 
des  assises  régulières  et  de  grossières  archivoltes.  Les 
colonnes  ont  fait  place  à  de  lourds  supports,  et  les  cha- 
piteaux, quand  ils  existent,  attestent  que  la  sculpture 
était  tombée  dans  la  barbarie.  L'entablement  antique  a 
été  brisé  :  des  trois  parties  qui  le  constituaient,  il  en  est 
deux,  l'architrave  et  la  (rise,  qui  ont  disparu;  la  3',  la 
corniche,  est  imparfaitement  exécutée,  et  s'appuie,  à 
l'extérieur,  sur  des  corbeaux  ou  modillons  de  formes 
très-variées.  Les  arcades,  les  voûtes,  les  portos,  les  fe- 
nêtres, sont  à  plein  cintre.  Quelques  fenêtres  pourtant, 
percées  en  forme  de  meurtrières,  se  terminent  à  la  partie 
supérieure  par  une  espèce  de  linteau. 

Après  l'an  mil,  il  y  eut  une  véritable  renaissance  en 
Architecture,  et  on  reconstruisit  la  plupart  des  églises, 
mais  en  suivant  des  règles  rigoureuses.  C'est  surtout  i 
partir  du  xi*  siècle  <pie  l'influence  byzantine  se  fit  sentir, 
gr&ce  aux  communications  que  les  Croisades  établirent 
entre  l'Occident  et  l'Orient.  Le  plan  des  églises  se  modi- 
fiant, les  bas  côtés  de  la  nef  s'allongent  et  tournent  autour 
du  sanctuaire,  et  l'on  établit  des  chapelles  abndales. 
L'aire  du  chœur  est  souvent  plus  élevée  que  le  pavé  de  la 
nef,  parce  qu'elle  recouvre  une  crypte.  Les  colonnes 
commencent  à  se  grouper  d'une  manière  assez  élégante, 
et  ont  des  chapiteaux  historiés.  Le  plein  cintre  est  tou- 
•Jours  un  caractère  dominant;  toutefois,  on  trouve  aussi 
l'arc  surbaissé  ou  en  anse  de  panier,  et  l'arc  outre-passé 
ou  en  fer  à  cheval.  Les  fenêtres  sont  de  petites  dimen- 
sions :  leur  baie  extérieure  est  formée  de  claveaux  très- 
réguliers  et  artistement  appareillés;  parfois  elle  est  ac- 
compagnée de  deux  colon  nettes,  et  surmontée  d'une 
archivolte.  On  voit  apparaître  les  fenêtret  géminées. 
Dans  plusieurs  églises,  des  voûtes  en  coupole  s'élèvent  à 
l'intersection  des  transepts.  Les  tours,  construites  primi- 
tivement dans  un  but  d'utilité,  pour  recevoir  les  cloches, 
se  multiplient  pour  le  coup  d'œil  et  pour  la  régularité  de 
plan.  Le»  ornements  le  plus  fréquemment  usités  sont  les 
chevrons,  les  étoiles,  les  méandres  ou  frettes,  ]«s  losanges 
enchaînés,  les  tores  coupés,  les  pointes  de  diamant,  les 
câbles,  les  torsades,  les  damiers,  les  têtes  de  clou. 

Le  xn*  siècle  est  un  fige  de  transition.  On  découvre 
la  première  apparition  d'une  nouvelle  forme  d'arcade, 
l'ogive,  qui  caractérisera  bientôt  une  nouvelle  période 
d'architecture.  L'ogive  se  montre  timidement  encore; 
elle  est  employée  concurremment  avec  le  plein  cintre  : 
il  n'est  pas  rare  alors  de  rencontrer  une  ogive  encadrée 
dans  un  plein  cintre,  ou  des  arcades  alternativement 
semi-circulaires  et  ogivales.  L'ogive  n'a  point  encore  sa 
forme  parfaite  :  tantôt  elle  s'éloigne  peu  du  plein  cintre, 
tantôt  elle  est  très-aiguê,  et  elle  conserve  les  ornements 
et  les  moulures  propres  à  l'architecture  romane.  Les  co- 
lonnes continuent  de  se  perfectionner  :  leur  fût  est  mieux 
profilé,  plus  élancé,  et  les  chapiteaux  historiés  sont  rem- 
placés par  les  chapiteaux  à  feuillages.  Les  pieds-droits 
des  portes  reçoivent  des  statues,  et  la  voussure  elle- 
même  se  garnit  de  statuettes.  Les  fenêtres,  comme  les 
portes,  sont  encore  à  plein  cintre,  mais  elles  reçoivent 
des  encadrements  plus  riches,  et  sont  surmontées  de  roses. 
On  applique  l'ogive  à  la  construction  des  voûtes.  Dans 
l'ornementation,  on  aperçoit  pour  la  première  fois  les 
trèfles  et  les  quatre-feuilles. 

Parmi  les  églises  romanes  postérieures  à  l'an  mil,  nous 
citerons  :  S*-Germain-des-Pr^s,  à  Paris  ;  les  cachédralcs 
d'Avignon,  du  Puy,  et  d'Angoulême;  les  abbayes  du 
Montr-S*-MicheI,  de  Jumiéges,  de  Preuilly  ;  S*-Étieonc,  i 
Gaen;  la  Trinité,  à  Angers;  S**- Croix,  à  Bordeaux, 
S^Remi,  à  Reims;  Notre-Dame-de-la-Couture,  au  Mans; 
S'-Paul,  à  Issoire;  Notre -Dame-du-Port,  à  Clermont^ 
Ferrand  ;  les  églises  de  S*-Germer,  de  S'-Georges  de  Bo- 
cherville  ;  une  partie  de  Notre-Dame  de  Noyon.       B. 

ROMANES  (Langues),  nom  qui  convient  à  toutes  les 
langues  issues  du  latin,  parié  joar  les  anciens  Romains. 
Romanes  est  svnonyme  de  lyéo4atinês  {V,  ce  mot  ). 
Ravnouard  appelait  roman  ou  langue  romane  un  idiome 
unique,  formé  aussi  par  corruption  du  latin,  et  qui  aurait 
été  parlé  dans  toat  le  midi  de  l'Europe  depuis  le  x*  iièds 


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ROM 


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ROM 


Jusqu'à  la  fin  du  xm*  ;  de  cet  idiome,  qui  était  le  pro- 
rençal,  seraient  sortis  ensuite  l'italien,  le  français.  Tes- 
nagnol,  et  le  portugais.  Cette  opinion,  combattue  par 
nariel  et  d'autres  philologues,  est  aujourd'hui  aban- 
donnée. Les  compositions  des  T^ubadours  provençaux, 
répandues  hors  de  leur  patrie,  ont  sans  doute  propagé 
la  connaissance  de  leur  langage,  qui  fut  adopté  dans  la 
société  polie  et  dans  le  monde  httéraire,  à  Barcelone 
comme  a  Florence;  le  provençal  eut  une  sorte  d'univer- 
salité, comme  le  français  au  xvin*  siècle.  Mais  on  ne  peut 
pas  admettre  que  le  latin  se  soit  corrompu  d'une  manière 
oniforme  dans  tous  les  pays  où  il  avait  eu  cours  :  l'idiome 
des  Troabad,ours  n'exista  loin  de  la  Provence  que  dans  le 
cercle  étroit  de  la  société  des  princes,  et  concurremment 
avec  divers  idiomes  locaux,  moins  cultivés,  mais  popu- 
laires. Chaque  langue  romane  ou  néo-latine  s'est  formée 
indépendamment  des  autres,  avec  le  concours  d'idiomes 
différents,  celte,  ibérien,  teuton,  etc.  V,  Planta,  Histoire 
des  langues  romanes ,  Colre,  1776;  Roquefort,  Glossaire 
de  la  langue  romane,  Paris,  1808,  3  vol.  in<-8°;  Rav- 
nouard.  Grammaire  de  la  langue  romane,  Paris,  ISlo; 
le  même.  Grammaire  comparée  des  langues  de  V Europe 
latine,  dans  leurs  rapports  avec  la  langue  des  Trouba- 
dours, 1821,  et  LKcique  roman  ^  1835;  Bruce -White, 
Histoire  des  langues  romanes  et  de  leur  littérature, 
Paris,  1841,  3  vol.  \n-%^%  Diez,  Grammaire  des  lan^s 
romanes,  en  allem.,  Bonn,  1836-43,  3  vol.,  et  Diction- 
naire étymologique  des  langues  romanes,  ibid.,  1853. 

ROMANESCA  (La),  danse.  V,  Gaillabdb. 

ROMANISTES,  nom  donné  en  Allemagne  aux  juriscon- 
tultes  qui  se  livrent  à  l'étude  spéciale  du  Droit  romain. 

ROMANO-BYZANTIN  (Style).  V.  Romane  (Architecture). 

ROMANO-SLAVE  (Langue).  V.  Roumanb. 

ROMANTISME.  S'il  est  un  nom  heureusement  né 
pour  exprimer  des  doctrines  mal  définies  ;  nom  vague, 
sous  lequel  peuvent  se  réunir  des  aspirations,  des  ten- 
dances, des  instincts  qui  ont  quelque  chose  de  commun, 
mais  qui  n'ont  pas  trouvé  ou  ne  veulent  pas  de  formule 
commune  ;  nom  de  guerre,  qui  désigne  un  parti  et  non 
des  idées,  commode  pour  l'attaque  et  la  défense,  tant 
qu'on  désire  bien  plus  de  combattre  que  de  s'entendre  ; 
c'est  le  nom  de  Romantisme,  Il  paraît  avoir  pris  nais- 
sance en  Allemagne,  vers  la  fin  du  xvm*  siècle,  avec 
l'école  poétique  dont  Louis  Tieck  fut  l'un  des  principaux 
chefs.  M*"*  de  Staël  l'a  rapporté  de  ses  conversations 
d'outre-Rhin ,  et  naturalisé  en  France.  Suivant  elle,  le 
nom  de  Romantique  désignerait  «  la  poésie  dont  les 
chants  des  Troubadours  ont  été  l'origine,  celle  qui  est 
nOe  de  la  chevalerie  et  du  christianisme.  »  Ainsi  le  ro- 
mantisme serait  l'esprit  des  races  romanes  opposé  à 
Tes  prit  antique,  c.-à-d.  le  génie  moderne  en  lutte  avec 
rinspiration  du  génie  grec  et  romain.  Mais,  s'il  en  est 
ainsi,  pourquoi  emprunter  le  nom  de  l'esprit  moderne 
aux  races  romanes,  qui  tirent  le  leur  de  l'élément  an- 
tique qu'elles  renferment?  C'était  Germanisme  qu'il  eût 
fallu  dire.  En  effet,  les  inspirations  et  les  doctrines  qui 
forment  l'essence  de  ce  qu'on  appelle  le  Romantisme  sont 
nées  du  fond  même  du  génie  que  les  plus  anciens  historiens 
ont  reconnu  comme  propre  aux  peuples  de  la  Germanie  ; 
et  c'est  chez  des  nations  d'origine  germanique  que  nous 
sommes  allés  prendre  les  exemples  et  les  théories  qua- 
lifiés de  romantiques.  Mais  puisqu'on  ne  peut  changer  un 
nom  devenu  historique,  essayons  de  dire  ce  qu'il  désigne. 
On  entend  par  Ikmantisme  deux  choses  différentes,  se- 
lon qu'on  se  place  au  point  de  vue  exclusivement  fran- 
çais, ou  qu'on  embrasse  tout  le  mouvement  littéraire  de 
TËurope  dans  les  temps  modernes.  Le  Romantisme  est 
la  plus  grande  révolution  qui  se  soit  accomplie  dans  les 
lettres  et  dans  les  arts  depuis  l'Antiquité  classique;  ou 
bien  c'est  simplement  une  école  littéraire  du  xix*  siècle 
en  France.  Dune  part,  c'est  nne  transformation  des 
genres  et  de  l'idéal  que  nous  avaient  légués  la  Grèce  et 
Rome,  transformation  qui  s'accomplit  soit  naturellement, 
par  la  simple  force  du  génie  moderne,  soit  de  parti  pris, 
par  la  réflexion  et  la  cntique.  De  l'autre,  c'est  une  réac- 
tion entreprise  par  un  groupe  de  vaillants  esprits,  sous 
la  Restauration,  contre  des  principes  de  goût  alors 
régnants. 

1.  Le  mouvement  littéraire  d'un  peuple  peut  être  le 
développement  naturel  du  génie  propre  à  ce  peuple,  ou 
l'effort  des  imaginations  conduites  par  la  critique  à  la 
poursuite  d'un  idéal  conçu  et  indiqué  par  elle.  Si  l'on 
veut  appréciei-  l'esprit  d'un  temps  ou  d'une  race,  c'est 
dans  les  œuvres  spontanées  qu'il  faut  le  chercher,  bien 
plus  que  dans  celles  qui  sont  nées  de  la  réflexion  et  de  la 
volonté.  Ainaî,  pour  examiner  le  caractère  de  l'esprit 


moderne,  laissons  de  côté  tout  ce  qui  nous  paraltia 
inspiré  de  quelque  modèle  étranger  ou  de  quelque  théorie 
savante  :  attachons-nous  à  ce  qu'il  y  a  de  plus  original 
dans  les  littératures  modernes,  et  voyons  si  ces  œuvres 
ne  présentent  pas  au  premier  aspect  des  contrastes  frap- 
pants avec  les  chefs-d'œuvre  de  l'Antiquité. 

Qu'on  passe  en  revue  le  Dante,  Shakespeare,  le  vieux 
poème  germanique  des  Niehelungen,  notre  Chanson  d^ 
iioland,  le  théâtre  espagnol  du  xvi*  siècle,  on  y  trouvera, 
malçré  la  variété  des  cadres,  des  sujets,  des  pensées, 
plusieurs  grands  traits  communs  à  opposer  à  d'autres 
traits  communs  de  la  po^ie  antique.  La  fatalité  a  dis- 
paru du  monde  :  l'homme  est  libre,  dépendant  de  sa 
volonté,  et  de  la  gr&ce  divine,  qui  peut  lui  faire  déraut, 
mais  non  le  contraindre.  La  divinité  désormais  agit  dans 
les  cœurs,  bien  plus  qu'elle  n'intervient  dans  l'ordre 
physique  des  événements.  L'homme  devient  une  àme , 
le  corps  ne  tient  presque  plus  de  place.  La  souffrance 
physique  n'est  plus  un  sujet  de  tragédie  :  Philoctète, 
Prométhée,  font  place  aux  damnés  du  Dante,  qui  souf- 
frent dans  une  chair  indestructible  et  mystique.  L'amour 
se  dépouille  si  bien  des  sens,  ({u'il  devient  parfois  chi- 
mérique :  c'est  l'union  et  l'aspiration  mutuelle  de  deux 
âmes  à  travers  le  temps,  à  travers  l'espace,  à  travers  la 
mort.  La  nature  extérieure  change  d'aspect  :  elle  est, 
comme  l'homme,  plus  troublée,  plus  inquiète;  il  y  voit 
un  reflet  de  son  &me;  il  la  peuple,  non  plus  de  divinités 
occupées  chacune  de  leur  petit  domaine,  mais  de  puis- 
sances amies  ou  malfaisantes,  d'Ames  bonnes  ou  mau- 
vaises ;  en  un  mot,  de  personnifications  variées  du  bon 
et  du  mauvais  principe  qui  se  disputent  le  monde  sous 
le  gouvernement  de  Dieu.  Mais  la  plus  grande  transfor- 
mation est  celle  de  la  femme  :  elle  a  gagné,  dans  la 
poésie  comme  dans  la  société,  l'égalité  à  l'égard  de 
l'homme,  non  pas  l'égalité  d'intelligence,  de  volonté,  de 
puissance  réelle,  mais  l'égalité  de  dignité,  de  vertu,  de 
respect.  Cest  peu  dire,  l'éf^lité,  il  faudrait  dire  souvent  la 
prééminence.  La  religion  la  met  de  niveau  avec  l'homme, 
parce  que  l'&me  de  l'une  pèse  autant  que  celle  de  l'autre; 
l'amour  la  met  plus  haut  :  ce  qui  la  rabaissait  dans 
l'Antiquité  la  relève  dans  les  temps  modernes.  —  Ainsi 
partout  r&me,  au  lieu  des  sens,  donnant  aux  choses  leur 
prix,  et  partout  des  agents  libres  substitués  à  la  fatalité  : 
tel  est  le  grand  sens  de  cette  révolution  intellectuelle  issue 
du  christianisme  et  du  génie  des  peuples  germaniques. 

De  là  aussi  la  transformation  des  genres,  et  une  esthé- 
tique nouvelle.  D'abord,  l'esprit  d'indépendance  person- 
nelle, inné  chez  les  Germains,  tend  à  s'affranchir  du 
joug  des  formes  étrangères,  ou  plutôt  tend  à  prendre 
celles  qu'il  lui  plaît,  sans  s'occuper  de  celles  qui  satis- 
font les  autres.  Qu'on  ne  parle  donc  pas  à  un  Dante,  à 
un  Shakespeare,  à  plus  forte  raison  aux  vieux  poètes  à 
demi  anonymes,  de  s'enfermer  dans  le  cadre  des  genres 
antiques  :  ils  les  ignorent,  ou  ils  ne  s'en  soucient  guère. 
Si  quelqu'un  prétendait  le  leur  imposer,  ils  répondraient  t 
Il  faut  que  mon  habit  soit  fait  pour  moi,  et  non  pour  un 
autre.  —  En  second  lieu,  dans  l'exposition  du  sujet  et 
dans  le  style,  différence  forcée.  Car  le  sujet  ordinaire  est 
l'àme  et  ce  qu'elle  a  déplus  intime;  mystère  inépuisable, 
où  la  curiosité  enfonce  et  ne  peut  jamais  se  satisfaire; 
en  même  t«mps  source  d'émotions  profondes,  variées, 
inattendues.  Difficilement  le  poète  gardera  ces  belles  or- 
donnances des  œuvres  antiques,  pleines  de  majesté,  de 
sérénité,  qui  exigent  plus  de  possession  de  soi  et  du 
sujet,  quelque  chose  de  mieux  limité.  Le  poète  grec 
dessine  des  perspectives  avec  des  horizons  purs  ;  le  poète 
moderne  laisse  flotter  l'esprit  dans  le  clair-obscur  du 
drame  intérieur,  il  n'ouvre  à  ses  regards  qu'un  lointain 
mêlé  de  nuages.  Le  style  n'aura  pas  non  plus  la  pureté, 
la  simplicité,  la  beauté  du  style  antique.  Le  langage  ne 
rend  pas  aisément  ce  qui  n'offre  aucune  analogie  avec 
les  sens  :  à  vouloir  rendre  ce  que  l'imagination  ne  saisit 
pas  bien,  il  fait  effort,  se  tourmente,  prend  quelque  chose 
de  nngulier,  quelquefois  de  bizarre.  Le  style,  appliqué  à 
des  pensées  quelquefois  un  peu  trop  sublimes  pour  la 
nature  humaine,  et  seulement  entrevues,  ou  à  des  émo- 
tions trop  fortes  pour  la  faiblesse  commune,  perd  cette 
mesure  exquise,  cette  noble  discrétion  de  l'art  antique. 
—  Faut-il  ajouter  enfin  qu'aucun  peuple  moderne  n'a 
été  doué  pour  les  arts  aussi  bien  que  le  fut  le  peuple 
grec,  par  qui  les  Romains  à  leur  tour  furent  initiés  au 
culte  du  beau  ?  Mais  c'est  là  une  cause  pour  ainsi  dire 
accessoire  :  elle  expliquerait  d'ailleurs  l'infériorité,  et 
non  la  transformation. 

En  résumé,  ce  qui  donne  aux  littératures  modemet 
leun  caractères  propres,  c'est  la  nalv«té  et  la  sincérité 

«00 


ROM 


1586 


ROM 


ff ee  lesquelles  l'esprit  moderne  s'est  pris  lui-môme  pour 
lujet  de  ses  œuvres.  Qu'on  exprime  si  Ton  veut,  ayec 
M"*  de  Staël,  cet  esprit  moderne  par  les  mots  de  chris- 
tianisme et  de  chevalertê,  ou  qu'on  mi  assigne  d'autres 
noms  et  d'autres  élôments  ;  toujours  y  a-t-il,  dans  les 

Eeuples  qui  ont  occupé  Tancien  monde  grec  et  romain, 
ï  source  d'une  poésie  nouvelle,  poésie  légitime  au  même 
titre  que  l'ancienne,  et  qui  diffère  d'elle  par  son  fond  et 
par  sa  forme.  Qu'on  préfère  la  poésie  antique  comme 
plus  parfaite  et  moins  ambitieuse,  c'est  le  droit  de  la 
critique  éclairée  par  l'étude  approfondie  de  l'Antiquité; 
mais  on  ne  peut  méconnaître  la  grandeur  et  la  beauté 
particulière  de  cette  poésie  moderne,  que  nous  appelle- 
rons maintenant  romantique. 

Mais,  spectacle  surprenant  I  ces  peuples  de  l'Europe 
moderne,  uni,  en  général,  ont  débuté  d'instinct  par  une 
poésie  originale,  se  sont  presque  tous  réduits  plus  tard, 
leurs  lumières  croissant,  à  une  poésie  d'imitation.  Il 
semble  que  le  progrès  du  savoir  ait  éteint  le  génie  en 
eux,  et  que  le  goût  ait  étouffé  l'imaginationi  ou  bien 

3u'ils  n'aient  pu  voir  les  œuvres  de  l'Antiquité  sans  rougir 
es  leurs.  La  plupart  donc  se  sont  mis  à  imiter,  après 
avoir  été  originaux.  Mais  entre  ces  imitations  il  faut  faire 
une  différence.  Les  Français,  au  ivii*  siècle,  ont  imité 
directement  les  Anciens,  et  se  sont  créé  par  là  une  litté- 
rature, qui  est  la  leur  propre,  bien  plus  que  leur  littéra- 
ture du  moyen  Age,  qu'ils  ont  oubliée  et  reniée.  Les 
autres  nations  ont  imité  la  littérature  française  du 
xvii«  siècle,  et,  par  cette  imitation  de  seconde  main,  n'ont 
fait  qu'énerver  leur  génie  pendant  une  période  plus  ou 
moins  longue.  La  littérature  française  est  donc  devenue, 
au  regard  des  autres  littératures  modernes,  une  nou- 
velle littérature  classique,  ou,  si  l'on  veut,  la  continua- 
tion de  l'Antiquité  classique.  C'est  que  l'esprit,  français 
est  le  seul  dans  l'Europe  moderne  pour  qui  l'esprit  an- 
tique ne  soit  pas  étranger  :  pour  lui  l'imitation  des  mo- 
dèles grecs  et  romains  n'était  pas  servilité  ou  mode, 
c'était  une  sorte  de  tradition  de  famille  retrouvée.  La 
preuve  de  cette  assertion  est  dans  notre  littérature  du 
xvii*  siècle,  qui,  en  imitant  les  Anciens,  est  devenue  un 
modèle  :  on  n'en  saurait  citer  une  autre  de  qui  l'on  en 
puisse  dire  autant.  —  Cependant  cette  nouvelle  littéra- 
ture classique  est  devenue  pour  la  plupart  des  nations  de 
l'Europe  un  Joug  :  elle  a  fini  par  en  devenir  un  pour  la 
France.  Formée  sur  les  modèles  antiques,  mais  bien  plus 
encore  sur  certaines  règles  empruntées,  ou  que  l'on 
croyait  empruntées  à  l'Antiquité,  elle  tendit  peu  à  peu  à  se 
prendre  pour  un  t^pe  de  perfection,  qui  devait  être  im- 
muable. L'immobilité  répugne  à  la  nature  humaine,  et 
particulièrement  dans  les  ouvrages  de  l'esprit,  expres- 
sions d'idées  qui  changent  sans  cesse,  joutons  que 
chaque  nation  a  son  génie  propre,  qui  s'accommode 
malaisément  de  formes  empruntées  à  des  nations  étran- 
gères. Or,  s'il  est  vrai  que  les  littératures  antiques,  par 
un  merveilleux  privilège  des  génies  de  la  Grèce  et  de 
Rome,  ne  sont  étrangères  pour  aucun  peuple  civilisé  de 
l'Europe  moderne,  il  n'en  était  pas  de  même  de  cette 
nouvelle  littérature  classique  façonnée  par  le  génie  fran- 
çais. Elle  portait  si  bien,  malgré  son  caractère  d'univer- 
salité, le  cachet  propre  de  notre  esprit,  qu'elle  devenait 
une  gêne  pour  le  libre  développement  du  génie  original 
chez  les  peuples  étrangers  qui  l'avaient  prise  un  moment 
pour  modèle.  L'influence  rayonnante  de  la  littérature 
française  au  xviii*  siècle  provoqua  une  réaction.  Pendant 
même  qu'elle  régnait  jusque  dans  les  cours  du  Nord  et 
dans  la  plupart  des  cours  de  l'Allemagne,  elle  rencontra 
un  adversaire  passionné  et  clairvoyant  dans  le  critique 
Lessing.  Cet  esprit  érudit  et  sagace  consacra  presque 
toute  sa  cairière  à  ruiner  le  crédit  dont  jouissait  la  liûé- 
rature  française,  surtout  dans  le  domaine  dramatique. 
L'éclat  de  la  poésie  dramatique  en  Angleterre  au  temps 
de  Shakespeare,  en  Espagne  sous  les  premiers  succes- 
seurs de  Charles-Quint,  ne  s'était  jamais  beaucoup  étendu 
%u  dehors,  et,  depuis,  le  thé&tre  français  avait  tout  éclipsé. 
>3sing  voulut  détruire  ce  qui  lui  paraissait  une  tyran- 
nie, pour  rendre  au  génie  allemand  la  liberté  de  ses  mou- 
vements. Il  le  fit  de  deux  manières  :  en  ruinant  les  théories 
sur  lesquelles  reposait  tout  l'art  dramatique  des  Français, 
et  en  proposant  d'autres  modèles  à  l'admiration  des  Alle- 
mands. Le  thé&tre  français  s'appuyait  principalement  sur 
l'autorité  d'Aristote,  et  subsidiairement  sur  celle  d'Ho- 
race t  Lessing  entreprit  de  démontrer  que  les  critiques 
et  les  poètes  français  ne  comprenaient  pas  la  Poétique 
d'Aristote,  et  qu'ils  avaient  substitué  des  règles  arbi- 
traires aux  préceptes  du  philosophe  de  Stagyre,  qu'il  ac- 
ceptait d'ailleurs  pour  à  peu  près  infaillible.  Tout  le 


monde  reconnaît  aujourd'hui  lus  abus  d'interprétation 
de  la  critique  française  du  xvii*  siècle  ;  mais  ce  qui  parait 
quelque  peu  paradoxal,  c'est  que  Lessing,  voulant  mon- 
trer un  exemple  de  l'application  juste  des  enseignements 
d'Aristote,  proposa  aux  Allemands  le  théâtre  de  Shakes< 
peare,  qui  ne  parait  guère  s'être  soucié  des  leçons  du 
philosophe  grec.  Lessing  transportait  donc  l'autorité, 
dans  la  théorie,  des  critiques  français  à  leur  maître  mieux 
interprété,  et,  dans  la  pratique,  des  poètes  français  à 
Shakespeare.  Ce  nouveau  modèle  était,  il  faut  l'avouer, 
beaucoup  plus  conforme  à  l'esprit  germanique,  et  à  h 
liberté  du  génie  en  général,  que  ceux  auxquels  on  le 
substituait.  L'Allemagne,  excitée  par  Lessing,  se  jeta 
dans  des  voies  nouvelles;  l'esprit  allemand  rentra  en 
possession  de  lui-même,  et  produisit  sa  littérature  origi- 
nale, celle  qu'il  a  appelés  sa  poésie  classique.  Les  grands 
noms  de  Gœthe,  Schiller,  Herder,  en  disent  assez. 

Mais  bientôt  cette  révolution  littéraire ,  entreprise  aa 
nom  de  la  liberté  du  génie,  exigea  plus  de  liberté,  tou- 
jours plus  de  liberté.  De  là,  l'école  romantique,  éclose  au 
temps  même  de  la  pleine  floraison  des  grands  génies  que 
nous  venons  de  nommer,  c.-À-d.  dans  les  dernières  an- 
nées du  xviii*  siècle.  La  littérature  allemande  entrait  dans 
sa  période  d'anarchie,  qualifiée,  par  les  esprits  les  plus 
autorisés,  de  retour  à  Vétat  sattvage  (  Verunld^rung  ). 
Comme  si  l'esprit  moderne,  pour  garder  son  originalité, 
devait  être  toujours  dans  l'enfance,  la  poésie  s'efforça  de 
se  replacer  dans  les  temps  du  moyen  ftge,  et  d'en  retrou- 
ver l'inspiration  à  la  fois  violente,  bizarre  et  naïve.  Cette 
résurrection  fut  une  grande  nouveauté;  mais  elle  avait 
le  tort  d'être  une  sorte  de  tour  de  force,  un  pastiche  in- 
génieux de  sentiments  et  de  croyances  disparus.  Aussi , 
après  avoir  ébloui  un  moment,  devait-elle  assez  vite  tom- 
ber dans  le  discrédit,  surtout  quand  les  néophytes  mala- 
droits commencèrent  à  exagérer  les  bizarreries  de  la  secte. 

Mais  on  n'aurait  qu'une  idée  très-incomplàte  du  mou- 
vement romantique,  si  l'on  n'y  voyait  que  des  poètes  épris 
du  moyen  âge,  et  qui  le  ressuscitent  avec  plus  ou  moins 
de  goût.  En  réalité,  c'est  une  grande  révolution  de  la 
critique,  qui  provoque  un  renouvellement  dans  les  arts, 
mids  après  avoir  renouvelé  toutes  le^idées  religieuses  et 
philosophiques  du  siècle.  C'est,  aprè^fa  sécheresse  de  h 
philosophie  négative  et  matérialiste  du  xviii*  siècle,  un 
retour  passionné  et  plein  d'intelligence  vers  les  grandes 
sources  d'émotion,  la  religion  du  cœur,  et  la  sympathie 
enthousiaste  pour  tout  ce  qui  est  sincère  et  puissant.  La 
critique  destructive  du  xviii*  siècle  n'avait  engendré  que 
l'esprit  d'examen  :  le  romantisme  est  l'esprit  d'examen 
uni  à  l'imaçination,  pour  comprendre  la  beauté  du  passé 
qu'on  venait  de  détruire;  c'est  un  effort  généreux  pour 
refaire  une  foi  nouvelle  composée  de  critique  et  d'enthou- 
siasme. De  là,  une  vigoureuse  impulsion  donnée  aux 
études  religieuses  et  philosophiques  en  Allemagne,  avec 
une  largeur  de  vues  jusqu'alors  sans  exemple.  De  là  aussi, 
dans  toute  l'Europe  et  de  proche  en  proche,  un  réveil  des 
sentiments  religieux  et  de  toutes  les  plus  nobles  facultés 
de  l'àme  humaine  ;  et  dans  la  philosophie,  dans  les  arts, 
dans  la  poésie  du  commencement  du  ux*  siècle,  une 
réaction  énergique  de  spiritualisme. 

II.  Quand  M"**  de  Staël ,  de  retour  de  son  voyage 
d'Allemagne,  ravie  des  lumières  que  la  hardiesse  et  reten- 
due des  ^nies  allemands  répandait  sur  la  critique  et  sur 
la  poésie,  voulut,  avec  son  livre  De  VAllemctgriey  les  pro- 
pager en  France,  le  mouvement  romantique  nous  était 
encore  étran^r.  Cependant,  Chateaubriand  avait  déjà 
donné  le  Génte  du  cfiristianisme^  ouvrage  inspiré  de  cette 
foi  refaite  par  la  critique,  dont  nous  venons  de  parler. 
C'était  bien  commencer  la  révolution  littéraire.  Néan- 
moins, elle  couva  encore  assez  longtemps.  Le  livre  de 
M'"*  de  Staôl  demeura  plusieurs  années  enseveli ,  par  les 
soins  de  la  police  impériale.  Tant  que  dura  l'Empire,  la 
littérature  resta  officielle,  comme  toutes  les  opinions  et 
tout  ce  qui  avait  le  droit  de  paraître.  Il  semblait  que  la 
poésie  classique  fût  sous  la  haute  protecdon  du  gouver- 
nement, et  que  l'orthodoxie  littéraire  fit  partie  de  la  fidé- 
lité d'un  bon  citoyen.  Cependant,  si  l'on  examinait  ces 
dogmes  de  la  littérature  soi-disant  classique,  et  les  œuvres 
qui  s'en  inspiraient,  on  n'y  voyait,  d'une  part,  au'nne 
foi  superstitieuse  aux  préceptes  de  l'Antiquité,  déngurés 
par  la  théorie  et  la  pratique  du  xvn*  et  du  xvm*  siècle; 
et  de  l'autre,  que  de  pâles  imitations  des  chefB-d'cenvrs 
de  Corneille  et  de  Racine,  lesquelles  prétendaient  de- 
voir être  ainsi  pour  l'honneur  des  règles.  Les  esprits  plus 
libres,  et  qu'irritait  cette  médiocrité  tyrannique,  com« 
mencèrent  à  prendre  en  haine  les  règles,  et  le  nom  iie 
eUusique.  Les  unes  parureut  n'être  que  des  chaînes 


ROM- 


1587 


ROM 


bilemeot  Jetées  par  rimpuissaiice  sur  le  génie,  et  Tautre 
deriot  synonyme  d'esprit  étroit  et  stérile.  Ainsi  Tabus  de 
Taatorité  en  matière  de  goût  provoqua  une  réaction  vio- 
lente* et  aveugle,  où  le  sens  des  mots  fut  altéré  comme 
les  idées,  et  dont  le  mot  d'ordre  fut  le  mépris  de  toute 
régie.  Ce  (ùt  sous  la  Restauration  que  ce  mouvement 
éclata.  L'imitation  de  l'Antiquité  ayant  été  un  des  canu> 
tëres  de  la  Révolution  et  de  l'Empire,  il  était  naturel  que 
la  royauté  rétablie  tournât  le  dos  à  l'Antiauité.  Ainsi  fit 
la  poésie.  Elle  devint  à  la  fois  royaliste,  catholique  et  ro- 
mantique :  trois  expressions  d'une  même  idée,  au  moins 
à  ce  que  l'on  croyait,  c-à-d.  triple  forme  de  l'esprit  de 
•  liberté,  où  l'on  ne  voulait  voir  qu'un  retour  aux  andennes 
traditions  de  l'esprit  français ,  violemment  rompues  par 
la  Révolution.  Le  Romantisme  s'acclimata  donc  en  France 
sous  un  air  de  piété  pour  le  passé  :  la  plus  audacieuse 
des  révolutions  littéraires  se  prit  peut-^tre  elle-même 
pour  une  restauration. 

Analysjsr  les  différentes  formes  du  Romantisme  et  ses 
phases  diverses  sous  la  Restauration  et  jusque  dans  les 
premières  années  de  la  monarchie  de  1830,  serait  un 
travail  aussi  considérable  que  difficile.  Dans  l'étrange 
effervescence  des  esprits ,  dans  la  confusion  féconde  des 
idées  de  cette  époque,  les  divergences  d'opinions  sont  in- 
nombrables, môme  entre  les  hommes  qui  paraissent 
combattre  pour  la  même  cause.  Nous  l'avons  dit,  le  Ro- 
mantisme est  un  nom  de  guerre:  c'est  assez  dire  toutes 
les  passions  et  toutes  les  injustices  qui  s'y  sont  attachées. 
Les  plus  illustres  combattants  sont  aujourd'hui  presque 
tous  survivants  :  les  uns  ont  modifié  leurs  opinions  de  ce 
temps-là,  d'autres  les  ont  exagérées.  Il  n'est  pas  encore 
temps  de  faire  l'histoire  des  personnes  et  des  oeuvres. 
Bornons-nous  à  indiquer  les  caractères  principaux  de  ce 
grand  mouvement  des  esprits. 

Le  Romantisme  est  d'abord  une  réaction  contre  les  doc- 
trines trop  exclusives  de  l'école  soi-disant  classique.  De 
là,  son  premier  caractère,  qui  est  une  protestation  abso- 
lue contre  toutes  les  r^les  d'école.  Ne  lui  demandez  pas 
de  se  soumettre  aux  lois  d'un  genre;  il  ne  reconnaît  pas 
de  délimitation  formelle  des  genres  :  tout  est  dans  tout. 
Le  premier  livre  du  plus  illustre  poète  de  l'école  roman- 
tique portait  le  titre  d^Odês  et  ballades;  des  critiques 
dirent  à  l'auteur  que  ses  odes  n'étaient  pas  des  ode»,  et 
que  ses  ballades  n^étaient  pas  des  ballades;  il  répondit  : 
«  Soit  ;  qu'on  leur  donne  tel  autre  titre  qu'on  voudra,  j'y 
souscris  d'avance.  »  Quand  on  lui  parlait  des  convenances 
d'un  genre,  il  déclarait  «  ne  rien  comprendre  à  tout  cela  ;  » 
il  y  cherchait,  disait- il,  «  des  choses,  »  et  n'y  voyait 
•  que  des  mots;  »  il  lui  semblait  que  «  ce  qui  est  réelle- 
ment beau  et  vrai  est  beau  et  vrai  partout,  n  Ainsi, 
l'unique  règle  est  de  bien  faire  :  quant  à  des  préceptes 
sur  l'art  de  bien  faire,  le  génie  n'en  veut  pas.  Il  s'inspire 
de  lui-même,  et  ses  lumières  sont  plus  sûres  que  toutes 
les  traditions  d'enseignement.  Il  ne  s'agit  donc  plus  de 
savoir  si  l'on  a  bien  ou  mal  entendu  Aristote  :  discuter  une 
autorité,  c'est  admettre  qu'il  en  peut  exister.  Le  poète  ne 
relève  que  de  son  sens  propre.  Quant  à  la  classification 
des  genres,  c'est  une  abstraction  arbitraire,  une  œuvre  de 
botaniste  qui  range  des  fleurs  mortes  dans  un  herbier. 
Dans  la  nature  vivante,  tout  se  mêle;  ainsi  doit  faire  la 
poésie.  Elle  va  du  tragique  au  comique,  du  sublime  au 
grotesque,  sans  transition.  Elle  n'a  de  dégoût  ni  d'aver- 
sion systématique  pour  rien  :  le  trivial  existe  au  même 
droit  que  le  noble,  et,  pourvu  qu'il  ait  un  sens,  il  est 
poétique  :  «  La  poésie  est  tout  ce  qu'il  y  a  d'intime  dans 
tout.  »  Loin  donc  l'idéal  antique,  ou  du  moins  Tidéal 
pseudo-classique.  Unité  de  couleur  dans  un  ouvrage,  di- 
gnité soutenue,  beaut  ésans  mélange  :  pure  superstition  ! 
Le  laid  et  le  grotesque  ont  droit  de  até  dans  la  poésie 
comme  dans  &  nature  :  les  contrastes  sont  les  grands 
moyens  de  Tart;  les  discordances  sont  les  éléments  de 
l'harmonie.  L'art  traditionnel  s'appliquait  à  donner  à  la 
nature  plus  d'unité;  l'art  romantique  s'attache  à  faire  res- 
sortir les  oppositions  qu'elle  renferme. 

Mais,  disent  les  adversaires  du  Romantisme,  la  raison 
et  le  bon  goût  sont  choqués  de  ces  disparates.  —  Bon 
goût!  Qu'entendez-vous  par  là?  Dites  :  votre  goût.  De  quel 
droit  le  prenez- vous  pour  la  mesure  du  bien?  Si  l'ouvrage 
ne  vous  plaît  pas,  laissez-le,  vous  êtes  libre.  Mais  ne  pré- 
tendez pas  assujettir  le  génie  aux  timidités  ie  votre  goût. 
Quant  à  la  raison,  qu'a-t-elle  à  faire  avec  la  poésie?  La 
puésieest  l'œuvre  de  l'enthousiasme,  et  non  de  la  raison. 
Ccst  rimagî  nation  qui  fait  le  poète  :  la  raison  ne  peut 
créer,  elle  ne  peut  qu'enchaîner.  Tout  au  plus  la  raison 
peut-elle  former  un  critique,  lilais  qu'est-ce  qu'un  cri- 
tiauelî  Un   oisif  maussade  ou  enthousiaste,  selon  qu'il 


est  ou  pour  ou  contre  vous.  Car,  puisqu'il  ne  peut  ni  con- 
seiller le  génie,  ni  juger  ses  œuvres  par  principes,  puis- 
qu'il ne  peut  formuler  d'autres  Jugements  que  ceux-ci  : 
«  Cela  est  bon ,  cela  est  mauvais,  »  et  qu'il  ne  peut  don- 
ner à  ces  appréciations  d'autre  autorité  que  celle  de  son 
goût  personnel,  il  s'ensuit  que  la  critique  n'est  rien ,  et 
qu'il  y  a,  d'une  part,  le  poète,  c-àrd.  le  génie  planant  à 
une  hauteur  effrayante  au-dessus  des  simples  mortels, 
et,  de  l'autre,  des  spectateurs,  admirateurs  ou  ennemis, 
mais  sans  droit  de  contrôle  et  sans  influence  légitime  sur 
le  vol  sublime  de  cet  être  divin. 

Cest  par  là  que  le  Romantisme  devait  périr,  se  rédui- 
sant lui-même  à  n'être  qu'une  coterie,  jpar  cette  supersti- 
tion du  poète  envers  son  propre  génie.  6n  pouvait  prévoir 
que  le  bon  sens  public  ne  se  soumettrait  pas  longtemps 
à  une  pareille  idolâtrie,  et  qu'il  arriverait  en  France, 
plus  encore  qu'en  Allemagne  une  génération  auparavant, 
gu'on  se  lasserait  de  n'avoir  affaire  qu'à  des  génies  qu'il 
fallait  adorer  sans  les  comprendre.  Le  mépris  de  la  cri« 
tique  entraînait  le  développement  exagéré  de  la  person* 
nalité,  la  concentration  du  poète  en  soi,  l'enivrement  de 
soi-même,  les  airs  de  pythonisse  sur  le  trépied,  le  dédain 

Kédant  pour  le  vulgaire  ignorant,  la  hauteur  à  l'égard  du 
on  sens  qui  protestait.  Le  nouvel  idéal  devait  donner 
naissance  à  des  œuvres  difibrmes,  quand  le  génie,  qu'on 
ne  supposait  jamais  absent,  trahirait  l'audace  des  faiseurs 
de  contrastes,  et  que  la  disparate  ou  la  laideur  resterait, 
sans  la  beauté  et  l'effet  saisissant  de  l'opposition.  Enfin 
l'anarchie  absolue,  où  menait  l'exagération  de  l'indépen- 
dance du  génie,  étant  à  chacun  les  rorces  qu'on  puise  dans 
des  doctrines  acceptées  de  tous,  ne  pouvait  aboutir  pour 
beaucoup  d'esprits  qu'à  l'avortement,  et  pour  la  littéra- 
ture qu'au  chaos.  —  Ainsi  finit  l'école  romantique,  ou 
plutôt  la  secte  romantique,  laissant  après  elle  le  souvenir 
d'une  ambition  démesurée  et  d'afTectatioos  ridicules.  Après 
quelques  années  de  silence,  elle  a  reparu  métamorphosée, 
sous  le  nom  de  Réalisme  (  V.  es  mot).  Cette  nouvelle 
secte  n'est  autre  chose  que  le  Romantisme  dépouillé  de 
ses  ailes.  Comaie  celui-ci  avait  la  fureur  de  s'élever  trop 
haut ,  l'autre  a  la  passion  de  ramper. 

Mais  les  excès  du  Romantisme  ne  doivent  pas  nous  fer- 
mer les  yeux  sur  les  éclatants  services  qu'il  a  rendus  à 
l'esprit  humain,  et  à  l'esprit  français  en  particulier  :  il  a 
proclamé  la  liberté  du  génie,  et  l'a  conquise.  On  n'a  pas 
à  craindre  que  le  vrai  génie  en  abuse  jamais  ;  car  un  de 
ses  caractères  essentiels  est  l'instinct  des  véritables  élé- 
ments du  beau.  Il  a  enhardi  notre  langue  trop  timide;  il 
l'a  débarrassée  du  style  de  convention  et  de  la  fausse 
élégance.  Il  nous  a  dotés  d'une  poésie  lyrique  dont  nous 
n'avions  Jamais  eu  l'idée  :  audacieuse,  profonde,  tou- 
chante et  sublime.  Il  a  fait  du  théâtre,  qui  est  la  moins 
bonne  de  ses  créations,  une  arène  où  luttent  les  passions 
de  la  vie  moderne,  au  lieu  d'une  académie  où  foutent 
l'archaïsme  et  le  bon  goût.  Là  aussi,  il  a  comii..  des 
excès;  mais  y  avoir  introduit  la  vie,  après  les  froidISs  re- 
présentations de  la  tragédie  pseudo-classique,  c'est  l'avoir 
sauvé.  Enfin,  ce  qui  est  plus  grand  encore,  il  a  commu- 
niqué une  vaillante  impulsion  à  tous  les  arts,  qui  se  sont 
rajeunis  par  son  souffle;  à  la  critique,  dont  il  a  élargi 
les  horizons;  à  l'histoire,  qu'il  a  animée  de  sa  bienveil- 
lance intelligente  pour  le  moyen  âge,  et  de  son  génie  pour 
ressusciter  les  figures  des  temps  ténébreux  ;  à  la  religion 
même,  où  il  a  fait  circuler  la  sève  de  la  poésie.  On  peut 
donc  dire  que  le  Romantisme  a  été  le  réveil  de  la  littéra- 
ture et  des  arts  au  xix*  siècle  :  cela  doit  faire  pardonner 


bien  des  erreurs. 
ROME  (Monumento  de)  : 

I.  Àntiguités. 
V.  CaprroLB. 
Cirque. 
Gloaqdb. 
Cousis. 
Colonnes  monumbhtalis. 

FORDM. 

Mausoléb. 
Panthéon. 
Prison. 
Tabdlarium. 
Thermes. 
V.  Amphithéâtre. 

Antonin  et  Faustinb  (Temple  d'). 

Aqoeduc 

Abc  de  triomphe. 

Bauliqub. 

Cbstios  (Pjrramide  de). 

Marcellos  (Théâtre  deV 


G. 


dans  notre /)to- 
tionnairs  de 
Biographie  et 
d*Histoire» 


dans  le  présent 
Dictionmair*, 


ROM 

II.  Basiliques  chréitennes. 


1588 


ROM 


f  Samt-Pierre,  V.  Pierre  (Église  de  S»-). 

2°  Saint-Jean-de-Latran,  K.  Jean-db-Lataan  (Église 
de  S»-). 

3°  Sainte-MarU-Maéeure,  V.  MAïuB-liAJBURE  (Église 
de  S»'-). 

4°  Sainte-Croix-^e-Jérusalem.  Cette  église  fut  érigée 
sur  le  mont  Esquilin  par  S**  Hélène,  mère  de  l'empe- 
reur Constantin,  pour  y  déposer  une  partie  de  la  sainte 
croix,  trouvée  par  elle  à  Jérusalem.  L*église  fut  consacrée 
par  le  pape  S'  Sylvestre  I".  Les  constructions  primitives 
ont  depuis  longtemps  disparu ,  et  Tédifice  actuel  ne  date 
que  de  1743;  il  a  été  élevé  par  ordre  de  Benoit  XIV,  par 
Gregorini.  Il  est  divisé  en  trois  nefs  par  8  pilastres  et 
8  grosses  colonnes  de  granit  d*Égypte.  Le  maître -autel 
est  isolé,  et  décoré  de  4  belles  colonnes  de  brèche  sup- 
portant un  baldaquin  :  sous  cet  autel  on  conserve,  dans 
une  urne  antique  de  basalte,  les  corps  de  S'  Césaire  et 
de  S*  Anastasc,  martyrs.  Les  fresques  de  la  voûte  sont 
du  Pinturicchio. 

5°  Saint-Laurent-hors-les-murs.  Construite  par  Con- 
stantin, en 330,  sur  un  terrain  appartenantes^'  Cyriaque, 
à  1  kilomèt.  environ  de  la  ville,  sur  la  voie  Tiburtme, 
cette  église  fut  rebâtie  par  Pelage  II  en  578,  agrandie  en 
1216  par  Honorius  m ,  qui  en  éleva  le  portique,  et  res- 
taurée par  Alexandre  VII  en  1657.  Le  portique  est  sou- 
tenu par  6  colonnes  antiques,  et  peint  à  fresque.  A  côté 
de  la  porte  principale,  un  sarcophage  romain,  avec  un 
bas-relief  représentant  un  mariage,  sert  de  tombeau  au 
cardinal  Fieschi.  L'intérieur  de  la  basilique  est  à  3  nefs, 
séparées  par  22  colonnes  ioniques  de  granit  ou  de  dpol- 
lin,  tirées  de  divers  monuments  antiques  ;  dans  la  nef 
du  milieu  sont  deux  ambons  de  marbre.  La  tribune  éle- 
vée au-dessus  de  la  nef  a  une  mosaïque  du  vi*  siècle  ;  on 
y  voit  un  ancien  siège  épiscopal,  et  le  sarcophage  de 
S^  Zosime,  orné  de  bas-reliefs  représentant  des  sujets 
bachiques. 

6°  Sainte-Marie-in-Cosmedin.  Construite,  au  m*  siècle, 
sur  les  ruines  du  temple  de  Cérès  et  de  Proserpine,  res- 
taurée en  782  par  le  pape  Adrien  P%  cette  église  est  sé- 
parée en  trois  nefs  par  12  colonnes  antiques  de  marbre. 
Le  pavé  est  en  cette  mosaïque  de  pierres  dures  de  cou- 
leur qu'on  appelle  appareil  alexandrin  {V.  C9  mot).  Le 
maltre-autel  est  décoré  d'une  urne  antique  en  ^anit 
d'Egypte,  et  surmonté  d'un  baldaquin  que  soutiennent 
quatre  colonnes  de  ce  môme  granit.  Dans  la  tribune  est 
un  siège  pontifical  de  marbre.  Sous  le  portique  de  l'église 
est  la  Bouche  de  la  vérité  (  K.  ce  mot  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d'Histoire), 

7°  Sainte- Marie-in-TroAtevere,  Cette  église  occupe 
l'emplacement  d'un  oratoire  que  le  pape  S^  Calixte  l"" 
avait  érigé  en  224  :  plusieurs  fois  renouvelée,  elle  date, 
dans  son  état  actuel,  du  pontificat  de  Nicolas  V  (au  milieu 
du  XV*  siècle),  qui  chargea  des  travaux  Bernardin  Ros- 
sellino.  Puis  Clément  XI  fit  faire  le  portique.  Les  mosaï- 
ques de  la  façade  remontent  à  l'année  1139.  L'intérieur 
présente  trois  nefs,  séparées  par  21  grosse^colonnes  de 
granit  rose  d'ordre  ionique,  et  provenant  d'un  temple 
d'isis  et  de  Sérapis.  Le  pavé  est  en  appareil  alexandrin. 
Au  milieu  de  la  voûte,  le  Dominiquln  a  peint  une  belle 
Assomption.  Le  grand  autel  est  décoré  d'un  baldaquin 
soutenu  par  quatre  colonnes  de  porphyre.  La  tribune 
oflre  des  mosaïques  du  xu*  et  du  xiu"  siècle. 

8°  Saint-Pierre-aux-Liens,  Cette  église,  située  près  des 
thermes  de  Titus,  fut  élevée  en  442  par  £udoxie,  femme 
de  l'empereur  Valentinien  III,  pour  y  conserver  la  chaîne 
avec  laquelle  Hérode  fit  attacher  l'apôtre  S^  Pierre  dans 
la  prison  de  Jérusalem.  Le  pape  Adrien  I**"  la  fit  rebâtir  ; 
Baccio  Pintelli  la  renouvela  au  temps  de  Jules  II,  et,  en 
1705,  Fr.  Fontana  la  mit  en  l'état  où  elle  est  aujourd'hui. 
L'intérieur  est  partagé  en  trois  nefs  par  20  colonnes  en 
marbre  antique.  C'est  là  qu'est  la  célèbre  statue  de 
marbre  de  Moïse  par  Michel-Ange. 

9°  Sainl-Pa\U-horsAes-murs,  Cette  basilique,  située  à 
2  kilomèt.  1/4  de  la  ville,  sur  la  route  d'Ostie,  fut  fon« 
dée  par  Constantin,  en  323,  sur  une  propriété  de  S^*  Lu- 
cine,  où  l'apôtre  avait  reçu  la  sépulture  de  Timothée,  son 
disciple.  Théodose  l'agrandit  en  388,  et  Honorius  l'acheva 
'^  423,  telle  qu'on  la  voyait  encore  en  1823.  A  cette 
s.,ioque,  le  feu  prit  à  la  toiture,  qui  était  construite  en 
bois  de  cèdre,  et  l'incendie  se  propagea  partout.  Le  pape 
Léon  XII,  à  J'aide  de  souscriptions  fournies  par  les  ca- 


a  106  met.  de  longueur,  69  met.  de  largeur  au  tran- 
sept ,  et  30  met.  de  hauteur  ;  il  est  divisé  en  5  nefs  par 
80  colonnes  corintlûennes  en  granit,  avec  bases  et  cha- 
piteaux de  marbre  blanc.  Au  milieu  de  la  nef  S6  oresse 
l'autel,  qui  date  de  1280  :  il  a  un  baldaquin  soutenu  par 
4  colonnes  d'alb&tre  oriental,  présent  de  Mébémet-Ali, 
pacha  d'Egypte.  Les  frises  sont  ornées  des  portraits  des 
papes,  en  mosidque.  Les  autels  en  malachite  qui  garnis- 
sent les  extrémités  du  transept  ont  été  donnés  par  l'em- 
Çereur  de  Russie,  Nicolas  I**".  —  Un  beau  cloître,  de 
220,  contenant  des  fragments  et  des  inscriptions  anti- 
ques, est  contigu  à  la  basilique.  V.  Nicolai ,  Deila  6a- 
silica  di  San  Paolo,  Rome,  1815,  in-fol. 

10°  Saint-Sébastien-hors-les-murs.  Cette  église  fut 
bâtie  en  367,  sous  le  pape  Damase,  à  3  kilomèt.  1/2  en- 
viron de  la  porte  Capène,  et  restaurée  au  xvii*  siècle  par 
Flaminio  Ponzio  ;  elle  n'a  qu'une  seule  nef.  Près  de  là  on 
descend  dans  les  Catacombes  de  S^'-Calixte.  V.  Cata- 
combes DB  RoMB,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

m.  Églises  diverses. 

Sainte-Agnès,  Cet  édifice,  situé  sur  la  place  Navone, 
occupe  l'emplacement  d'une  église  plus  ancienne.  (*^m- 
mencé  en  1550  par  Jérôme  Rainaldi ,  achevé  par  Borro- 
mini ,  il  a  la  forme  de  la  croix  grecque,  et  est  surmonté 
d'une  coupole.  L'intérieur  est  en  marbre  blanc  jusqu'à 
l'entablement ,  orné  de  stucs  dorés,  et  décoré  de  8  co- 
lonnes corinthiennes  en  marbre.  Les  peintures  de  la  cou- 
pole sont  de  Ciro  Ferri  et  de  Corbellini;  celles  des  pen- 
dentifs ont  été  faites  par  Baciccio.  Les  quatre  autels  et 
les  chapelles  offrent  des  bas-reliefs  et  des  statues  ;  on  re- 
niarque  principalement  une  S^'  Agnès  voilée  par  ses 
longs  cheveux,  bas-relief  exécuté  par  l'Algarde. 

Une  église  de  S^^-Agnès-hors-les-murs  ,  à  1  kilo- 
mèt. 1/4  de  la  porte  Pia,  sur  la  voie  Nomentane.  est  le 
modèle  qui  se  rapproche  le  plus  des  basiliques  vies  an- 
ciens Romains.  On  y  descend  par  un  escalier  de  45  mai^ 
ches,  parce  que  l'ancien  sol  a  été  rehaussé.  L'église  ren- 
ferme une  statue  de  la  sainte,  formée,  dit-on,  du  torse 
d'une  statue  antique  en  alb&tre  oriental,  un  candé- 
labre antique  en  marbre  blanc,  et  une  tète  de  Christ 
attribuée  à  Michel-Ange. 

Saint-André-della-Valle,  Commencée  en  1501  par  Oli- 
vieri ,  et  finie  par  C.  Maderno,  cette  église  occupe,  selon 
les  uns,  l'emplacement  du  théâtre  de  Pompée,  et,  selon 
les  autres,  celui  de  la  curie  où  César  fut  tué,  salle  qui 
était  contigue  à  ce  théâtre.  Sa  façade,  une  des  plus  belles 
de  Rome,  est  de  Ch.  Rainaldi  ;  elle  est  à  deux  rangs  de 
colonnes  d'ordres  corinthien  et  composite,  et  décorée  de 
statues  sculptées  par  Dominique  Guidi,  Hercule  Ferrato 
et  Antoine  Fancelli.  L'intérieur  de  l'édifice  contient  des 
peintures  célèbres  :  la  coupole,  de  18  met.  de  diamètre, 
a  été  peinte  par  Lanfranc,  et,  sur  les  quatre  penden- 
tifs, le  Dominiquin  a  représenté  les  quatre  Évangélistes. 
C'est  ce  dernier  maître  qui  a  peint  aussi  la  voûte  de  la 
tribune. 

Saint-Clément ,  sur  le  mont  Esquilin,  au  S.  des  thermes 
de  Titus.  On  y  retrouve  la  forme  basilicale  des  église 
primitives.  S^  Jérôme  faisait  déjà  mention  de  cette  ^lise 
en  392  ;  restaurée  plusieurs  fois,  elle  a  été  mise  en  Tétat 
actuel  par  Clément  XI,  au  commencement  du  xvin*  siècle^ 
Fontana  en  fut  l'architecte.  La  porte  est  précédée  d'un 
petit  portique  soutenu  par  4  colonnes  de  granit  ;  de  ce 
portique  on  entre  dans  un  atrium,  environné  d'un  por- 
tique plus  grand ,  que  supportent  16  colonnes.  L*église 
elle-même  est  divisée  en  trois  nefs  par  18  colonnes  de 
marbres  différents.  Le  maltre-autel  est  isolé,  avec  un  ta- 
bernacle porté  sur  4  colonnes  de  marbre  violet.  Une  ba- 
lustrade de  marbre  enferme  le  chœur,  et  sur  les  côtés 
sont  deux  ambons  (F.  ce  mo^-Masaccio  a  peint  l'histoire 
de  S^'  Catherine  d'Alexandrie  dans  la  chapelle  de  la  Pas- 
sion ;  ses  fresques  ont  été  altérées  par  le  temps  et  par  de 
fréquentes  restaurations. 

Église  de  Jésus,  C'est  une  des  églises  les  plus  vastes  et 
les  plus  riches  de  Rome;  elle  est  dans  le  Corso  et  ap- 
partient aux  Jésuites.  Commencée  en  1568  par  Vignole, 
elle  fut  continuée  depuis  1575  par  Jacques  deila  Porta. 
L'intérieur  est  remarquable  par  ses  pilastres  corinthiens, 
ses  stucs  doiés,  ses  sculptures  en  marbre  et  ses  pein- 
tures. Les  fresques  de  la  coupole  et  de  la  tribune  sont 
de  Baciccio.  On  voit  le  tombeau  du  cardinal  Bellarmin  à 
côté  du  maltre-autel.  Les  Jésuites  ont  accumulé  toutes 
les  magnificences  dans  la  chapelle  de  S^  Ignace  de  Loyola^ 
dont  l'autel  a  été  dessiné  par  Pozzi,  membre  de  leur 
orHrtt  .  «  côté  d»«  coloonet  eu  laoia-lazuii.  des  baa-relîcfs 


ROM 


1589 


IlON 


en  bronze  et  en  marbre,  on  distingue  deux  groupes  par 
Théodon  et  LegroB.  La  maison  professe  des  Jésuites,  où 
réside  le  général  de  Tordre,  est  annexée  à  cette  église. 

Sainte-Marit-des-Anges,  Michel-Ange  donna  le  plan  de 
cette  église,  qui  était  une  salle  des  thermes  de  Dioclé- 
ticn.  1^  croix  grecque  qu'elle  figurait  a  été  altérée  au 
xvnr  siècle  par  Vanyitelli.  L*édiiice  a  112  met.  de  lon- 
gueur :  on  y  remarque  les  tombeaux  de  C.  Maratta,  d'Aï- 
ciat  et  de  S/ilvator  Rosa,  une  statue  de  S'  Bruno  par 
lioudon,  vr&i  chef-d'œuvre,  une  fresque  du  Domini([uin, 
enfin  8  colonnes  corinthiennes  d'un  seul  bloc  de  granit, 
hautes  de  15  met.,  et  d'une  circonférence  de  5  met.  — 
Derrière  Téglise  est  un  vaste  cloître  de  Chartreux,  dessiné 
par  Michel-Ange,  et  où  se  trouve  un  portique  soutenu 
par  100  colonnes  de  travertin. 

Sainte 'Marte-in-Ara-CœH,  église  de  Dominicains 
d'abord ,  aujourd'hui  de  Franciscains,  b&tie  sur  l'empla- 
cement de  l'ancien  temple  de  Jupiter  Capitolin,  mais  en 
travers.  On  y  monte  par  un  large  escalier  de  124  marches. 
Elle  est  divisée  en  trois  nefs  par  22  colonnes  diverses, 
mais  presc^ue  toutes  de  granit  d'Egypte.  Quelques  cha- 
pelles contiennent  des  fresques  remarquables  de  Muziano 
et  du  Pinturicchio.  On  conserve  dans  cette  église  le  san~ 
tissimo  bambino,  petite  statuette  que  la  léçende  dit  avoir 
été  taillée  d'un  arbre  du  Jardin  des  Oliviers,  k  Jérusa- 
lem, par  un  moine,  et  coloriée  par  S^  Luc,  et  qu'on  expose 
dans  une  crèche  pendant  les  fêtes  de  Noël. 

Sainle-Marie-de-la-Minerve.  B&tie  au  xiv"  siècle  sur 
remplacement  d'un  temple  de  Minerve,  près  du  Pan- 
théon, elle  est  la  seule  église  de  Rome  où  l'on  conserva 
une  simplicité  dénuée  de  tout  ornement;  mais  les  Do- 
minicains en  ont  récemment  effacé  le  caractère  sous  les 
dorures  et  le  clinquant  de  l'ornementation.  On  y  re- 
marque :  le  tombeau  de  Paul  IV,  par  Pirro  Ligorio  ;  ceux 
de  Léon  X  et  de  Clément  VII ,  par  Antonio  da  San-Gallo, 
avec  leurs  statues  par  Raphaél  dà  Montelupo  et  Nani  di 
Baccio  Bigio,  et  des  bas-reliefs  par  Baccio  Bandinelli  ;  une 
statue  du  Christ  debout,  tenant  la  croix,  par  Michel- 
Ange  ;  diverses  peintures  de  Baroccio,  de  Fra  Angelico, 
de  Filippino  Lippi,  de  Baciccio,  d'André  Sacchi,  de 
C.  Maratta.  —  Le  couvent  attaché  à  cette  église  est  la  ré- 
sidence du  général  des  Dominicains.  Il  contient  une  cé- 
lèbre bibliothèque. 

Saintê-Marie-de-la-Paix.  Elle  fut  construite  en  1487 
par  ordre  de  Sixte  IV,  près  de  la  place  Navone,  en  ac- 
tion de  grâces  pour  la  paix  entre  les  princes  chrétiens, 
sur  les  dessins  de  Baccio  Pintelli.  ÎÂ  façade,  avec  un 
portique  semi-circulaire,  est  de  P.  de  Cortone.  Le  cloître 
est  de  Bramante.  L'intérieur  de  l'église  est  composé  d'une 
nef,  un  peu  étroite,  que  complète  bien  une  belle  coupole 
octogone,  peinte  par  C.  Maratta,  Balthazar  Peruzzi,  et 
Fr.  Vanni.  Mais  l'œuvre  d'art  la  plus  importante  est  la 
fresque  de  Raphaël  représentant  les  Sibylles. 

IV.  PàUns. 

Palais  Barberinû  Un  des  plus  vastes  de  Rome,  et  l'un 
des  plus  remarquables  par  son  apparence  extérieure,  il 
fut  b:\ti  pour  le  cardinal  Barberini,  neveu  d'Urbain  VIII. 
Carlo  Maderno  le  commença  vers  1624,  et  il  fut  continué 
par  Borromini  et  le  Bernin.  Dans  le  grand  salon,  Pierre 
de  Cortone  a  peint  le  Triomphe  de  la  Gloire,  un  de  ses 
plus  beaux  ouvrages.  Le  palais  renferme  un  assez  grand 
nombre  de  tableaux  précieux  et  une  bibliothèque  consi- 
dérable. 

Palais  Borghèse,  V.  Borghèsb. 

Paicûs  de  la  Chancellerie.  Ce  palais,  résidence  du  car- 
dinal vice-chancelier,  et  où  siégea  le  parlement  romain 
en  1848,  est  une  œuvre  capitale  de  Bramante.  Il  fut  b&ti 
pour  le  cardinal  Riario,  neveu  de  Sixte  IV.  La  cour  est 
entourée  d'un  portique  à  double  étage,  formé  par  44  co- 
lonnes doriques,  en  granit,  et  provenant,  dit-on,  du  por- 
tique Hécatonstylon,  joint  an  thé&tre  de  Pompée.  Ce  fut 
sur  les  premières  marches  de  l'escalier  que  le  ministre 
Rossi  fut  assassiné  en  1848. 

Palais  Colonna.  Construit  par  le  pape  Martin  V,  de  la 
famille  des  Colonna,  il  sert  de  résidence  k  l'ambassadeur 
français.  L'extérieur  n'a  rien  de  remarquable,  mais  les 
appartements  intérieurs  sont  de  la  plus  grande  magnifi- 
cence. La  galerie  de  tableaux  est  fort  belle.  Les  jardins 
s'étendent  sur  les  hauteurs  du  Quirinai. 

Palais  des  Conservateurs.  Il  est  ainsi  appelé  parce  que 
des  magistrats  municipaux,  nommés  conservateurs,  et 
comparables  à  nos  anciens  échevins,  y  siégeaient  autre- 
fois. Ce  qui  le  tend  intéressant ,  ce  sont  les  monuments 
de  la  statuaire  antique  qui  ornent  la  cour  et  les  apparte- 


ments. On  y  conserve  les  célèbres  fragments  des  Fastes 
consulaires.  Les  appartements  sont  aussi  ornés  de  fres- 
ques par  le  chevalier  Arpino,  Annibal  Carrache,  Daniel 
de  Volterre,  etc. 

Palais  Corsini.  Bâti  pour  les  neveux  de  Sixte  IV,  ha- 
bité au  xvii*  siècle  par  la  reine  Christine  de  Suède,  le 
cardinal  Neri  Corsini,  neveu  de  Clément  XII,  l'acquît  en 
1732,  et  le  fit  reconstruire  par  l'architecte  Fuga.  Le  ves- 
tibule et  le  double  escalier  ont  un  magnifique  aspect.  Le 
Ealais  contient  une  galerie  de  tableaux  et  une  riche  bi- 
liothèque. 

Palais  Doria  Pamfili.  C'est  une  réunion  de  trois  pa- 
lais*, aussi  son  architecture  manque  d'unité  :  la  cour  en- 
tourée de  portiques  est  peut-être  de  Bramante  ;  mws  on 
reconnaît  une  époque  de  décadence  dans  les  façades,  qui 
sont  attribuées  à  Pierre  de  Cortone,  au  Borromini,  et 
môme  au  Bernin.  La  galerie  de  tableaux  est  importante. 

Palais  Famèse.  V.  Farnèsb. 

Palais  Massimi,  ciief-d'œuvre  de  Balthazar  Peruzzi.  Il 
n'est  pas  moins  remarquable  par  l'habileté  de  son  plan 
dans  un  espace  irrégulier  et  étroit,  que  par  la  pureté  et 
l'élégance  de  ses  profils  et  de  sa  décoration.  La  façade 
consiste  en  une  élévation  circulaire.  Un  portique  élégant, 
de  0  colonnes  doriques,  donne  entrée  dans  un  vestibule 
carré,  qui  semble  être  un  atrium  antique  du  dessin  le 
plus  heureux.  C'est  au  palais  Massimi  que  se  trouve  le 
Discobole  trouvé  sur  l'Esquilin  et  que  l'on  croit  être  une 
copie  du  célèbre  bronze  de  Myron. 

Palais  Ouirinal.  V,  Quirinal. 

Palais  Rospigliosi,  Il  a  été  construit  par  le  cardinal 
Scipion  Borghèse,  sur  les  ruines  des  thermes  de  Constan- 
tin, par  Flaminio  Ponzio,  Vasanzio,  puis  Carlo  Maderno. 
On  y  visite  de  nombreux  tableaux,  mais  particulièrement 
l'Aurore  du  Guide,  qui  orne  la  voûte  du  salon  d'un  pa- 
villon du  jardin. 

Palais  Spada.  B&tî  sous  Paul  III  pour  le  cardinal  Cu- 
podifarro,  par  Jules  Mazzoni,  il  fut  remis  à  neuf  par 
Borromini.  C'est  ce  dernier  qui  a  fait  l'escalier.  Indépen- 
damment d'un  certain  nombre  de  tableaux  modernes,  ce 
palais  renferme  des  antiquités  ;  par  exemple,  la  statue 
colossale,  en  marbre,  de  Pompée,  trouvée  en  1552,  et 
qu'on  suppose  être  celle  aux  pieds  de  laquelle  J.  César 
tomba  assassiné  dans  le  sénat. 

Palais  du  Vatican.  V.  Vatican,  dans  notre  Diction^ 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

ROMÉRIES,  fêtes  villageoises  en  Espagne.  Romeria 
signifie  pèlerinage,  et  rappelle  le  sentiment  religieux  qui, 
dans  l'origine,  attirait  les  populations  à  ces  fêtes. 

ROMESTECQ,  jeu  de  cartes  qui  se  joue  à  2,  4  ou  6 
personnes,  avec  un  jeu  de  piquet  auquel  on  a  ajouté  les 
six.  Son  nom  vient  des  mots  rome  et  stecq,  employés, 
le  !•'  pour  exprimer  une  levée  de  deux  cartes  inférieures 
semblables,  le  2*  pour  la  dernière  levée,  qui  compte  tou- 
jours pour  un  point. 

ROiNCEVAUX  (Chanson  de).  V.  Roland. 

RONDACHE,  bouclier.  F.  notre  Dictionnaire  de  Bio» 
graphie  et  d'Histoire. 

ROND-CREUX.  V.  Scotib. 

RONDE,  visite  qui  se  fait,  surtout  la  nuit,  pour  s'as- 
surer que  les  sentinelles  et  les  corps  de  garde  font  leur 
devoir,  et  pour  voir  si  tout  est  en  bon  ordre.  Le  môme 
nom  se  donne  à  ceux  qui  font  cette  visite.  Les  rondes  se 
désignent  par  le  çrade  de  l'officier  qui  les  fait.  Les  rondes 
ordinaires  d'officiers  sont  reconnues  par  le  caporal  de 
consigne,  qui  en  reçoit  le  mot  d'ordre;  les  rondes  major 
et  d'officiers  supérieurs  sont  reconnues  par  le  chef  du 
poste,  ({ui  donne  le  mot  d'ordre  après  avoir  reçu  le  mot 
de  ralliement. 'Dans  ce  second  cas  seulement,  la  troupe 
prend  les  armes.  Quand  deux  rondes  se  rencontrent,  la 
moins  élevée  en  grade  donne  le  mot  d'ordre  à  l'autre, 
qui  lui  rend  celui  de  ralliement.  Les  sentinelles  isolées 
reconnaissent  les  rondes  sans  les  arrêter. 

RONDE  (Chemin  de) ,  voie  pratiquée  au  haut  du  rem- 
part d'une  place  ou  autour  d'un  camp  retranché,  pour 
servir  de  passage  aux  officiers  qui  font  la  ronde.  Il  y  a 
aussi  un  cnemin  de  ronde  autour  des  prisons,  entre  les 
bâtiments  et  le  mur  d'enceinte. 

RONDS,  note  de  musique,  blanche,  de  forme  ovale  et 
sans  queue,  valant  2  blanches  ou  4  noires.  C'est  la  note 
la  plus  longue,  celle  qui  sert  d'unité  de  mesure. 

RONDE,  chanson  dont  les  couplets  sont  chantés  tour  à 
tour  par  plusieurs  personnes,  avec  un  refrain  en  chœur. 

BONDE,  danse  en  rond,  accompagnée  de  chant. 

RONDE,  sorte  d'écriture  arrondie,  et  dont  les  lettres  sont 
presque  perpendiculaires. 

RONDEAU ,  petite  pièce  de  poésie  particulière  à  la  litté- 


1 


ROO 


1990 


ROS 


rature  françalie.  On  distingue  le  rondeau  commun  ou 
rondeau  rouble^  le  rondeau  redoublé,  et  le  rondeau  5U»- 
ple.  Le  rondeau  commun  comprend  13  vers,  roulant  sur 
deux  rimes  seulement,  dont  la  première  est  employée 
huit  fois,  et  l'autre  cinq,  dans  Tordre  suivant  :  le  l'*"  vers, 
le  2%  le  5«,  le  6«,  le  7«,  le  9«,  le  10*  et  le  13«  riment 
ensemble,  et  sont  masculins  ou  féminins,  comme  on 
veut;  le  3%  le  4%  le  8«,  le  11*  et  le  12«  riment  pareille- 
ment entre  eux,  et  la  rime  y  est  d'espèce  différence  de 
celle  des  autres.  On  forme  avec  les  13  vers  deux  stances 
de  5,  séparées  par  un  tercet,  et  on  ajoute  au  tercet  et  à 
la  dernière  stance  un  refrain  pris  des  premières  paroles 
du  rondeau.  La  grâce,  la  finesse,  la  naïveté,  sont  les  ca- 
ractères principaux  de  ce  genre  de  poème,  où  Ton  em- 
{)Ioie  pres<^ue  exclusivement  les  vers  de  8  et  de  10  syl- 
abes.  Voici  un  rondeau  de  Voiture  : 

Ma  foi,  6*6$$  fait  de  mol,  car  Iiabean 
M'a  commandé  de  loi  faire  an  rondeau. 
Cela  me  met  en  une  peine  extrême. 
Quoi  I  trelie  rer»,  linit  en  eau,  cinq  en  émet 
Je  lui  ferai»  aussi  tOt  un  bateau. 

En  Toilk  cinq  pourtant  en  un  monceau. 
Formona-en  huit  en  invoquant  Brodean; 
Et  puis  mettons,  par  quelque  stratagème, 
Ma  fol,  e'eit  fait. 

Si  Je  pouvais  encor  de  mon  cerveau 
Tirer  cluq  vers,  l'ouvrage  serait  beau. 
Mais  cependant  me  voilà  dans  Tonal ème; 
Et  si  Je  crois  que  Je  fais  le  douzi^e; 
En  vollk  treize  ajustés  au  niveau 
Ma  foi,  c'est  fait. 

Le  rondeau  redoublé  est  ordinairement  composé  d( 
5  quatrains  ;  les  quatre  derniers  se  terminent  successive 
ment  par  un  vers  du  premier.  On  y  Joint  quelquefois  ur 
Envoi  (  K.  ce  mot)^  où  se  trouvent,  par  forme  de  rcfraîn 
les  deux  ou  trois  premiers  mots  de  tout  le  poème.  L( 
rondeau  simple  consiste  en  2  quatrains  sur  mêmes  rimes, 
et  séparés  par  un  distique,  auquel  le  refrain  était  atia 
ché,  ainsi  qu'à  la  iln  du  dernier  quatrain.  —  Le  Rondel 
se  compose  de  deux  couplets  de  quatre  vers,  et  d'un  re- 
frain de  deux  vers  répété  trois  fois,  au  commencement, 
au  milieu  et  à  la  fin  ;  il  est  tout  entier  sur  deux  rimes 
Tel  est  cet  exemple  de  Charles  d'Orléans  : 

Le  temps  a  laissé  son  manteau 

De  vent,  de  froidure  et  de  pluie, 

Et  s'est  vdtu  de  broderie. 

De  soleil  luisant,  clair  et  beau. 

Il  n'y  a  bète  ni  oiseau 

Qu'en  son  Jargon  ne  citante  et  crie: 

Le  temps  a  laissé  son  manteau 

De  vent,  de  froidure  et  de  pluie. 

Rivière,  fontaine  et  rulneau 
Portent  en  livrée  Jolie 
Gouttes  d'argent  d'orfévrerla. 
Chacun  s'habille  de  nouveau. 
Le  temps  a  laissé  son  manteau 
De  vent,  de  froidure  et  de  pluie. 

Selon  Boileau,  Clément  Marot  est  le  premier  qui  sut  as- 
servir le  rondeau  à  des  refrains  réglés  :  toutefois,  Charles 
d  Orléans  et  Villon  en  avaient  déjà  trouvé  le  tour  et  la 
forme.  Saint-Gelais,  Benserade  et  Voiture  ont  fait  égale- 
ment de  bons  rondeaux. 

En  Musique,  on  nomme  Rondeau  toute  œuvre  dont  le 
thème  se  reprend  plusieurs  fois.  Ce  thème  commence  le 
morceau,  et  doit  aussi  le  terminer;  les  différentes  redites 
en  sont  entrecoupées  d'épisodes,  de  phrases  accessoires, 
où  1  on  doit  préparer  avec  art  le  retour  du  motif  principal. 
On  peuf'citer  comme  exemple  le  rondeau  Enfant  chéri 
des  dames,  dans  l'opéra  des  Visitandines  d«  Devienne. 
Beaucoup  d'airs  (F.  ce  mot)  procèdent,  pour  la  redite 
du  motif,  comme  le  rondeau;  mais  le  nom  de  rondeau 
ne  convient  pas  à  un  air  où  les  épisodes  ont  autant  et 
même  plus  d'importance  que  le  thème  primitif. 

RONDE -BOSSE.  V,  Bosse. 

RONDELLE,  bouclier.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

ROND-POINT,  partie  semi-cîroulaire  qui  termine  un 
édifice,  comme  les  églises  qui  finissent  en  abside. 

RONGO,  sorte  de  cor  en  ivoire  dont  on  se  sert  en 
Afrique,  surtout  dans  le  Loango. 

ROQUEFAVOUR  (Pont-aqueduc  de),  pont  Jeté  sur  la 
vallée  de  l'Arc,  à  8  kilomèt.  d'Aix,  et  construit  pour 
amener  les  eaux  de  la  Durance  à  Marseille.  Il  se  compose 
de  trois  ponts  superposés  qui  Joignent  deux  masses  de 
rocs.  Le  premier  a  12  arches,  élevées  à  34'",i0  au-dessus 


de  rétiage  de  la  rivière;  le  second  en  a  15^  à  38  met.  de 
hauteur  au-dessus  du  plain-pied  du  couronnemenv  du 
premier  rang;  le  troisièn^e  en  a  53,  à  10"* ,00  de  hauteur 
au-dessus  du  deuxième  rang.  La  construction,  longue  de 
400  met.,  atteint  une  hauteur  de  86  met.  au-dessus  de  la 
rivière,  non  compris  les  fondations,  qui  ont  de  9  à 
10  met.  de  profondeur.  Les  piliers,  espacés  de  21  m^t. 
d'axe  en  axe,  supportent  des  voûtes  à  plein  cintre  de 
15  met.  d'ouverture  et  arasées  à  2'",50  au-dessus  de  la 
clef,  qui  a  l'",20  d'épaisseur.  Pour  diminuer  le  poids  de 
de  la  construction,  on  a  conservé  vides  les  reins  de  ces 
voûtes  en  les  recouvrant  d'une  petite  voûte  longitudinale 
de  3'",30  de  largeur  à  plein  cintre,  sur  laquelle  est  obtenu 
le  passage  de  plain-pied  da  premier  rang.  Ce  passage, 
d'une  largeur  de  5  met.  sur  les  voûtes,  franchit  les  piliers 

Ear  une  ouverture  de  1  met.  de  largeur  et  de  2  met.  de 
auteur,  que  l'on  a  ménagée  à  chacun  d'eux.  Formée  de 
blocs  énormes  posés  en  plates-bandes,  cette  allée  produit 
l'effet  le  plus  pittoresque,  et  se  répète  sur  le  deuxième 
rang  d'arcades.  Le  pont-aqueduc  de  Roquefavour  a  été 
construit  par  Tingémeur  Mont-Richer,  et  achevé  en  1818; 
c'est  un  des  plus  beaux  ouvrages  de  l'architecture  con- 
temporaine. 

ROQUELAURE,  manteau  fermé  sur  le  devant  par  des 
boutons  depuis  le  haut  jusqu'en  bas.  Il  tire  son  nom  du 
duc  de  Roquelaure,  qui  le  mit  à  la  mode. 

ROQUETAILLADE  (Château  de),  dans  le  département 
de  la  Gironde,  sur  la  route  de  Langon  à  Bazas.  C'est  un 
carré  de  35  met.  de  c6té,  entouré  de  fossés  et  défendu 

Ëar  6  tours  :  4  aux  angles  et  2  devant  la  porte  d'entrée. 
)u  milieu  de  cet  espace  s'élève,  à  la  hauteur  de  35  met., 
un  donjon  crénelé,  percé  sur  sa  face  occidentale  de  trois 
fenêtres  superposas  qui  marquent  les  étages  de  l'inté- 
rieur. Toute  la  construction  date  du  xiv*  siècle.  A  l'époque 
de  la  Renaissance,  on  y  pratiqua  de  vastes  appartements, 
où  sont  de  belles  cheminées  ornées  de  statues  d'un  bon 
style.  A  l'Ouest  du  ch&teau  sont  les  ruines  considéra- 
bles d'un  château  antérieur,  et,  à  rE:>t,  une  chapelle  du 
xiii'  siècle. 

RORAIRES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio» 
graphie  et  d'Histoire. 

ROSACE,  terme  d  Architecture.  V,  Rosb. 

ROSAIRE  (du  latin  rosarium^  couronne  de  roses), 
grand  chapelet  composé  de  150  petits  grains,  et  de  15  grains 
plus  gros  qu'on  nomme  roses  et  qui  séparent  les  autres  de 
dizaine  en  dizaine.  On  récite  un  Pater  sur  les  gros  grains, 
et  un  Ave  Maria  sur  les  petits;  sur  la  croix  qui  pend  au 
bout  du  rosaire,  on  récite  le  Credo,  V.  Chapelet. 

ROSALIE,  ancien  terme  de  Musique,  signifiant  la  ré- 
pétition d*un  même  chant  ou  d'un  même  dessin  de  plu- 
sieurs mesures,  faite  sur  un  de^  chaque  fois  plus  bas 
ou  plus  haut.  Les  rosalies,  quand  elles  étaient  au  nombre 
de  trois,  s'appelaient  des  révérences,  par  allusion  aux 
trois  révérences  qui  étaient  de  rigueur  autrefois. 

ROSE  ou  ROSACE,  ornement  d'Arohitecture  en  forme 
de  rose,  placé  dans  les  caissons  des  voûtes  et  des  plafonds, 
ou  dans  les  intervalles  qui  séparent  les  modillons  d'une 
corniche,  ou  au  milieu  de  chaque  face  de  l'abaque  du 
chapiteau  corinthien,  etc. — On  donne  le  même  nom  aux 
grandes  fenêtres  circulaires  placées  au-dessus  des  portails 
des  églises.  Les  artistes  du  moyen  &geles  ont  découpées  en 
compartiments  variés,  dont  les  intervalles  sont  remplis 
de  vitreux  peints.  Au  xu*  siècle,  les  roses  offrent  l'aspect 
d'une  roue,  dont  les  rais  sont  formés  par  de  petites  co- 
lonnes à  bases  et  à  chapiteaux,  et  ont  été  reliés  entre 
eux  par  des  arcs  en  plein  cintre  ou  trilobés  ;  on  les 
nomme  roues  de  S^*'Catherine.  A  partir  du  xiii*  siècle, 
les  compartiments  qui  rayonnent  du  centre  sont  formés 
d'ogives,  de  trèfles,  de  quatre-feuilles.  Dans  le  style  ogi- 
val tertiaire,  les  meneaux  des  roses  se  contournent  en 
lignes  sinueuses  et  s'entrecoupent  avec  un  art  infini. 

ROSE,  ouverture  circulaire  pratiquée  sur  la  table  des 
téorbes,  des  luths,  des  guitares,  etc. 

ROSE  (Roman  delà),  poème  allégorique,  composé  de 
deux  parties;  la  l"  est  l'œuvre  d'un  Trouvère  du  xiii* siè- 
cle, animé  de  sentiments  chevaleresques,  qui  célèbre  la 
galanterie  des  Cours  d'amour;  la  2%  écrite  an  siècle  sui- 
vant, étale  une  érudition  sceptique,  et  raille  toutes  les 
croyances  du  moyen  ftge.  La  conception  même  da  poème 
est  des  plus  (h>ides.  L'Amant,  qui  n*est  autre  que  le 
poète,  est  dans  un  Jardin,  et  entouré  de  personnages  allé- 
goriques, qui  sont  les  vices  et  les  vertus  chevaleresques, 
Haine,  Félonie,  Villenie,  Courtoisie,  Envie,  Vieillesse, 
Papelardic,  Pauvreté,  et  bien  d'autres.  Il  s'éprend  d'une 
Rose  que  défendent  Dangier,  Male-Bouche^  Bassesse, 
HainOi  Avarice,  Chasteté,  Honte,  Jalousie  et  Peur.  L'Amoar 


ROS 


1591 


ROT 


ftdresse  à  TÂmant  an  long  discours,  où  il  expose  les  devoini 
des  amanu  fidèles,  devoirs  difficiles  et  remplis  d'épreuves 
avant  d'atteindre  au  bonheur.  Bel-Accueil  et  Doux-Regard, 
écuyers  du  dieu  d'amour,  conduisent  l'Amant  vers  la 
Rose;  mais  Dangier,  aussi  vigilant  que  le  dragon  du  jar- 
din des  Hespérides,  déjoue  tous  leurs  efforts,  s'empare  de 
Bel-Accueil,  et  l'enferme  dans  une  tour  construite  par  Ja- 
lousie.—  Là  s'arrête  la  1'*  partie  du  poôme;  elle  com- 
prend environ  4,000  vers.  L'auteur,  Guillaume  de  Lorris, 
imite  et  traduit  souvent  VArt  d'aimer  d'Ovide;  il  est  in- 
génieux et  naïf,  mais  il  manque  de  hardiesse  et  de  poésie. 
C'est  à  peine  si  quelques  traits  heureux  rompent  parfois 
la  monotonie  de  sa  fade  et  ennuyeuse  allégorie.  Son  style, 
doux  et  coulant,  mais  faible  et  langoureux,  n'a  rien  qui 
puisse  saisir  et  attacher  le  lecteur. 

Jehan  de  Mehun  ou  Meung-sur-Loire,  surnommé  Glo- 
pinel  ou  le  Boiteux,  continua  le  Roman  de  la  Rose  : 
son  œuvre  forme  environ  18,000  vers.  Tout  en  accep- 
tant la  forme  allégorique  de  la  première  partie,  il  s'in- 
quiéta peu  d'accorder  ses  opinions  avec  celles  de  Guil- 
laume de  Lorris.  L'action  continue.  L'Amant  se  désole 
au  pied  de  la  tour  où  Bel-Accueil  est  enfermé:  Raison  sur- 
vient, et  lui  donne  d'excellents  conseils  pour  se  débar- 
rasser de  l'amour  et  des  soucis  qu'il  entraîne;  mais  elle 
ne  peut  persuader  l'Amant  et  se  retire.  L'Ami  prend  la 
place  de  Raison  auprès  de  l'Amant;  il  le  console,  et  lui 
apprend  qu'il  pourra  posséder  la  Rose,  s'il  se  peut  aider 
de  Richesse.  Mais  il  ne  peut  s'entendre  avec  Richesse,  et 
serait  réduit  au  désespoir,  si  Amour  ne  lui  promettait 
d'assiéger  la  tour.  Le  dieu  mande  toute  sa  baronnie,  et 
commence  le  siège  avec  Noblesse  de  cœur.  Franchise, 
Largesse,  Courtoisie,  Abstinence,  Contrainte,  Faux-Sem- 
blant. Celui-ci,  déguisé  en  moine,  pénètre  dans  la  tour 
et  égorge  la  garde.  L'Amant  se  croit  vainqueur  ;  mais  Dan- 
gier survient  et  le  bat.  Amour  ramène  ses  barons;  la 
mglée  devient  furieuse;  la  victoire  est  indécise.  Alors 
Nature  envoie  son  confesseur  Genius  au  camp  d'Amour; 
la  crosse  en  main ,  la  mitre  en  tète,  il  harangue  les  ba- 
rons avec  tant  d'éloquence,  qu'ils  sont  tous  transportés 
d'une  ardeur  nouvelle,  culbutent  l'ennemi ,  et  demeurent 
maîtres  de  la  tour.  Courtoisie  intercède  en  faveur  de 
l'Amant ,  et  lui  fait  octroyer  enfin  la  Rose  vermeille.  — 
Jehan  de  Meung  continue  l'œuvre  de  son  devancier,  mais 
il  n'en  conserve  pas  le  caractère.  Son  récit  est  semé  de 
satires.   Bien  différent  de  Guillaume  de  Lorris,  qui  ne 

fiarle  qu'avec  respect  de  l'amour  et  des  femmes,  il  fait  de 
'amour  un  plaisir  tout  physique,  et  de  la  femme  un  être 
capricieux,  esclave  des  sens,  dépourvu  de  tout  principe 
d'honneur  et  de  vertu.  La  royauté,  la  noblesse,  l'Église, 
ne  sont  pas  mieux  traitées.  Jehan  de  Meung  ose  écrire 
que  le  corps  d'un  noble  «  ne  vaut  pas  une  pomme  plus 
que  le  corps  d'un  charretier.  »  Il  explique  l'origine  de  la 
royauté;  il  ne  la  fait  point  procéder  du  droit  divin,  mais 
de  l'élection  des  hommes,  qui  tiennent  ainsi  le  roi  dans 
leur  dépendance.  Le  poète  ne  se  contente  pas  de  poser  ce 
principe  ;  il  en  tire  cette  conclusion  peu  conforme  aux 
traditions  monarchiques  du  moyen  &ge  : 

Quand  ili  voudront 
Leur  aido  an.  roi  retireront, 
Kt  le  roi  tont  senl  restera. 
Sitôt  que  le  peuple  roudra. 

Les  attaques  contre  l'Église  tiennent  aussi  une  place  con- 
sidérable dans  le  Roman  de  la  Rose,  Le  mysticisme  avait 
poussé  beaucoup  de  monde  dans  les  couvents  ;  les  maisons 
religieuses,  en  se  multipliant,  avaient  corrompu  la  pureté 
de  leur  institution,  et  leurs  richesses  étaient  devenues  un 
sujet  de  scandale.  Jehan  de  Meung  attaque  ces  moines  qui 
s'ingéraient  dans  toutes  les  affaires  publiques  ou  privées, 
et  dont  l'humilité  s'accommodait  fort  bien  des  grandes 
affaires  et  des  grandes  pitances,  sans  se  soucier  en  aucune 
façon  des  pauvres.  C'est  sous  la  figure  d'un  moine  qu'il 
représente  Faux-Semblant,  l'hypocrite,  un  des  ancêtres  de 
Tartufe.  Enfin  il  attaque  la  vie  monastique  comme  con- 
traire au  vœu  de  la  nature.  Dame  Nature,  se  confessant  à 
Genius,  se  plaint  de  l'homme,  ^i ,  seul  de  tous  les  ani- 
maux, n*obéit  pas  à  sa  loi  ;  Génius  prêche  aussitôt  sur  ce 
texte  :  crescUeet  multiplicamini,  et  prononce  l'excommu- 
nication contre  quiconque  ne  pratique  point  ce  précepte. 
Jehan 'de  Meung  développe  une  philosophie  grossière  et 
matérialiste,  que  n'arrête  aucune  monstruosité,  pas  même 
la  communauté  des  femmes.  D'interminables  digressions 
coupent  çà  et  là  son  récit,  et  arrêtent  l'action  ;  il  y  expose 
toutes  ses  connaissances  en  philosophie,  dans  les  lettres 
et  dans  les  sciences.  Il  traduit  Platon,  Pythagore,  Virgile, 
GMde,  Lacain,  Cicéron,  Horace,  Juvéoal^  Suétone,  Solin, 


Claudien,  VAlmageste  dePtolémée,  les  Institutea  de  Justi- 
nien  :  c'est  un  amas  indigeste  de  connaissances  confuses, 
une  encyclopédie  sans  méthode.  Malgré  ces  défauts ,  le 
poème  de  Jehan  de  Meung  parut  une  œuvre  admirable  à 
ses  contemporains.  Les  esprits  commençaient  à  se  tour- 
ner vers  les  trésors  de  l'Antiquité  ;  le  Roman  de  la  Rose 
annonçait  la  Renaissance  ;  aussi  fut-il  accueilli  comme  le 
plus  parfait  ouvrage  qui  eût  jamais  été  écrit  en  français  ; 
il  eut  même  tant  d'admirateurs ,  qu'on  dut  bientôt  re- 
douter les  effets  pernicieux  de  sa  morale  rel&chée.  Gerson 
composa  un  traité  pour  condamner  les  erreurs  de  Jehan 
de  Meung;  mais,  en  combattant  ses  doctrines,  il  rendait 
hommage  à  son  érudition,  et  proclamait  que  personne 
en  France  ne  pouvait  lui  être  comparé.  La  Rose  repré- 
sente la  femme  aimée;  cependant  l'éditeur  de  1^38  ex- 
pliqua la  fable  dans  un  sens  religieux,  la  Rose  étant 
l'état  de  grâce  ou  la  Sainte  Vierge  elle-même;  pour  les 
alchimistes,  la  Rose  était  la  pierre  philosophale.  Le  Ro- 
man de  la  Rose  a  été  publié  par  Méon,  1813,  4  vol. 
in^».  H.  D. 

ROSE  d'or.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire. 

ROSEAU,  mot  Quelquefois  employé  comme  synonyme 
de  rudenture,  de  baguette,  de  colonnette. 

ROSES  (Baillée  des).  V,  Baillée  des  roses,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d* Histoire, 

ROSETTE  (Inscription  de).  \  V,  notre  Dictionnaire  de 

ROSIÈRE.  )     Biogr,  et  d^Histoire. 

ROSINE,  ancienne  monnaie  d'or  de  Toscane,  valant 
21  fr.  54  c.  Il  y  avait  des  demi-rosines. 

ROSLIN  (Église  de),  en  Ecosse,  dans  le  comté  de 
Midlothian ,  lieu  de  pèlerinage.  Elle  est  située  sur  une 
hauteur  appelée  College-Hill  et  boisée,  ce  qui  lui  a  fait 
donner  le  nom  de  chapelle  au  milieu  des  bois,  B&tie  on 
1445,  dans  le  style  gothique  Tudor,  elle  est  surmontée  de 
12  clochetons  au  nord  et  de  12  au  sud,  évidés  de  niches 
pour  des  statues,  et  couverts  d'animaux  bizarres ,  de  la 
famille  des  gnomes  et  des  démons.  L'intérieur  est  à 
3  nefs,  et  a  26  met.  de  long,  11  de  large,  13  de  haut; 
5  grandes  fenêtres  l'éclairent  de  chaque;  côté.  Les  piliers 
sont  composés  d'un  faisceau  de  colonnettes,  avec  chapi- 
piteaux  à  feuillages  mêlés  d'animaux.  Il  en  est  un,  qu'on 
nomme  Pilier  de  Vapprenti ,  dont  la  base  est  ornée  de 
dragons  en  bas-relief  et  le  fût  garni  de  trois  spirales  de 
fleurs  :  selon  la  légende,  l'architecte  de  l'édifice  tua  par 
jalousie  un  de  ses  apprentis  qui  avait  sculpté  ce  pilier. 
Sous  les  dalles  de  la  chapelle  reposent  les  barons  de 
Roslin,  enterrés  avec  leur  armure. 

ROSSIGNOL,  nom  que  l'on  donnait,  au  commence- 
ment de  notre  siècle,  &  une  sorte  de  chalumeau  dans 
lequel  on  introduisait  un  piston,  pour  obtenir  différents 
sons  en  raccourcissant  plus  ou  moins  la  colonne  d'air. 
Les  enfants  en  font  ainsi  avec  un  bout  de  branche  de 
tilleul,  de  saule,  ou  de  peuplier,  coupé  au  moment  de  la 
sève,  et  dont  ils  séparent  le  bois  de  Técorce,  en  battant 
un  peu  celle-ci,  sans  la  casser  ;  elle  forme  le  tuyau,  et  le 
bois  détaché  fait  le  piston. 

ROSTRALE  (Colonne,— Couronne).)  V.  notre  Dtct, 

ROSTRES.  [      de  Biographie 

ROTE.  )     et  d'Histoire. 

ROTISSEURS,  ancienne  corporation  qui  existait  dès  le 
xiii*  siècle.  Ou  les  nommait  oyers  ou  oyeurs,  parce  que  les 
oies  étaient  un  des  mets  les  plus  estimés  à  cette  époque. 
Ils  se  confondirent  plus  tard  avec  les  maîtres  queux  ou 
maîtres  cuisiniers. 

ROTONDE  ( du  latin  rotundus^  rond) ,  en  termes  d'Ar- 
chitecture, construction  sur  un  plan  circulaire,  et  parti- 
culièrement celle  qui  se  termine  par  une  couverture  éga- 
lement circulaire  ou  sphérique,  en  bois,  en  fer,  ou  en 
maçonnerie.  La  rotonde  ne  fut  pratiquée  que  chez  les 
peuples  où  l'art  de  b&tir  était  déjà  fort  avancé.  Les 
Égyptiens,  chez  lesquels  cet  art  resta  toujours  presque  à 
l'état  primitif,  ne  la  connurent  pas.  Les  Grecs,  pins 
avancés,  plus  calculateurs,  trouvèrent  les  moyens  de  sus- 
pendre en  l'air,  avec  solidité,  de  vastes  toits  de  rotondes, 
soit  en  charpente,  soit  en  maçonnerie.  Ils  appelaient 
tliolos  ce  genre  de  construction.  On  voyait  à  Athènes  une 
rotonde  en  marbre  où  les  Prytanes  avaient  coutume  de 
sacrifier.  La  rotonde  porte  directement  sur  les  murs  for- 
mant l'enceinte  de  l'édifice;  telle  est  celle  du  Panthéon 
de  Rome,  désignée  souvent  sous  le  nom  de  la  Rotonde; 
la  grande  chapelle  des  Médicis,  à  Florence;  l'église  de 
V Assomption,  et  la  Halle  au  blé,  à  Paris,  la  première  en 
bois,  la  seconde  en  fer,  etc.  Si  la  rotonde  est  une  tour, 
dominant  le  reste  du  monument  dont  elle  fait  partie, 
comme  S^^Pierre  de  Rome  et  d'autres  églises  de  la  m^me 


UOU  1 

TJIIo;  S^'-Gmemim,  les  Invalides,  le  Val-de-Grûce,  la 
Sorboana,  do  Paris;  la  chapelle  de  l'Escurial:  S'-Paul, 
de  Loadres;  S^-Isaac,  de  S*~Pétersbourg,  etc.,  on  l'ap- 
pelle coupoU,  du  nom  seul  de  la  couverture. 

La  Rotond»  d«  Aaomnï,  construite  en  530  pour  Stre 
le  loreieau  de  Théodoric,  roi  des  Ostrogoths,  bien  que  de 
oiËdiocrea  pr^mrlions,  montre  ce  qu'auraient  pu  faire  ea 
ce  g(>nre  les  Egyptiens,  qui  pratiquaient  tant  l'architec- 
ture avec  d'immenses  blocs  de  pierre,  dont  une  seule  ror- 
mut  quclqui:fois  le  plafond  d  un  temple.  Cette  Rotonde 
■e  compose  d'abord  d'un  rei-d»-chsussée  décagone,  orné 
d'une  fausse  arcade  sur  chaque  taxe,  et  formani  à  l'intâ- 
rieur  une  croix  grecque;  ensuite  d'un  étage  circulaire, 
un  peu  en  retraite,  où  l'on  accède  par  deux  escaliers  ei- 
lérieurs.  L'éta^  forme  uoe  salle  ronde,  couverte  par 
une  coupole  monolithe  en  pierre  d'Istrîe,  et  mesurant 
]I  met.  de  diamètre  sur  0"',90  d'épaisseur.  Elle  pèse 
environ  iT0,0O()  kilog.  Les  petites  parties  en  saillie,  au 
nombre  de  douie,  sont  des  espèces  de  poignées  qui  ont 
servi  k  élever  cet  énorme  bloc.  La  hauteur  totale  au  mo- 
nument est  do  IS^iSO.  La  salle  supérieure,  aujourd'hui 
convertie  eu  une  chapelle  dédiée  A  la  Vierge,  n'est  écliiiréo 
que  par  de  petites  Tunetres  placées  soub  la  frise.  V.  la 
figure  ci-desiout. 


Holonât  il  Rrnvnw. 

LC  nom  de  Rotonde  se  donne  aussi  &  des  Cdifice»  cir- 
culaires, en  arcades  ou  en  colonnade,  et  &  del  ouvert  : 
toi  est  le  brillant  Boaqtut  d'Afollon,  dans  te  parc  du 
cfaïteau  de  Versailles. 

On  nomme  Solondt  la  caisse  ordinairement  arrondie 
qui  forme  le  derrière  des  diligences,  —  On  appela  de 
même  au  ivm*  aiècle  une  esptee  de  fraise  que  portaient 
les  élégants.  C.  D— t, 

ROTRCENGE ,  vieux  mot  désignant  une  chanson  que 
l'on  chantait  en  ronde  avec  accompagnement  de  rote 

BOTULUM,  nom  latin  des  rouleaux,  banderolles  ou 
pancartes  que  tiennent  certaines  statues  des  portails  des 
Églises,  et  où  sont  écrits  des  textes  de  l'Écriture  ou  les 
noms  des  personnage». 

ROTURIER.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  da 
Biographie  et  d'Histoire. 

itou  (  Le  Roman  de),  poSme  compote  vers  1170  par 
Robert  Wace,  et  qui  est  comme  une  suite  du  roman  de 
Brut  {V,  ce  moi  ).  L'auieur  retrace  l'histoire  des  Nor- 
mand» et  de  ia  Normandie  depuis  Ron,  Roll  ou  Rollon, 
jusqu'à  Henri  I"  (1106).  Bien  quece.iesoil  qu'une  seule 
et  même  histoire,  les  i50  premiers  vers  sont  octosyllabi- 
ques;  tes  Mi  suivanis  sont  des  aleiaodrins;  puis  on 
retrouvé  la  première  mesure  dans  la  fin  de  l'ouvrage. 
Quelques  crftiqoes  pensent  que  la  3'  partie  du  roman 
pourrait  bien  être  seule  de  Rnben  Wace,  parce  que  : 
i'  les  renseiRnements  qui  lui  sont  personnels  se  trou- 
vent dan*  cette  partie,  tandis  qu'il  n'est  ni  nommé  ni  dé- 
signé dans  lei  deux  premières;  2°  Cous  les  anciens  ma- 
Biucrit*  siijonrd'hu)  connus  ne  renferment  que  la  3* 


n  Rou 

partie,  les  deux  autres  ne  s'y  trouvant  Jointes  que  di.is 
un  seul  manuscrit  dont  il  ne  reste  plus  qu'une  co|iie 
moderne;  3'  on  lit  dans  la  3*  partie  une  tirade  Bar  l'ori- 
gine du  nom  de  Normandie  qui  se  retrouve  k  peu  prùi 
textuellement  dans  ta  première,  et  des  emprunt!  de  ce 
genre  étaient  alors  très-fréquent»;  i'  il  est  difficile  d'ci- 
pliquer  ce  changement  de  rhytlime  dans  l'ouvrage  d'un 
seul  écrivain;  â"  l'auteur  des  vers  alexandrins  déclare 
qu'il  ne  veut  s'en  rapporter  qu'aux  témoignages  garantis 
par  le  nom  d'un  hisioden,  tandis  que  Wace  a'^puie  vo- 
iontiers  sur  de  simples  traditions.  Le  Roman  de  Sou  a 
été  publié  par  Pluquet,  Rouen,  1827,  in-8°. 


ROUAGE.  V.  Rouage, 
graphie  et  d'Rialoire. 

HOUBAYEH,  monnaie  d'or . 
de  sequin,  ou  S  fr.  OU  c. 

ROUGB,  monnaie  d'argentd 
■    n  7*       ■' 


'e  Dictionnaire  de  Ba- 
I  Turquie,  valant  xta  tiers 
.valant  10  pans, 
Dicliomuùre  de 


Dialionnatr»  d*  Bio- 


ROUBLE,  monnaie  russe 
Biographie  et  d'Histoire. 

ROOCHI.  V.WiLLOH. 

ROUE  (Supplice  de  la).  V. 
graphie  et  d'Histoire. 

RODE,  nom  donné  h  ta  bordure  de 
^lises  o^vales  ,  par  exemple  celle  de  la  cathédrale 
d  Amiens,  où  sont  sculpli^  divers  personnages  dont  les 
uns  gravissent  la  rampe  de  l'orbitit,  tandis  que  les  autres 
descendent,  la  tète  en  bas,  du  cùté  opposé.  C'est  une  al- 
légorie de  la  vie  humaine. 

RODR,  V.  CooHOnnE  de  LCHI»HB. 

ROUELLE ,  vieux  mot  signidant  disque,  roue,  et  qui 
désigna,  par  extension,  des  médaillons  et  des  enseignes 
de  cette  forme. 

ROUEN  (l'iglise  NcrTnE-OAKE ,  ù).  Cett«  église  métro- 
politaine, une  des  plus  importantes  de  la  France,  est, 
dans  sa  rousse  principale,  l'ouvragi  des  premières  anij^ 
du  xin'  siècle  ;  quelques  parties,  comme  la  base  de  la 
tour  septentrionale  du  grand  portail,  sont  plus  an- 
ciennes; d'antres  ont  été  ajouta  postérieurement,  ou 
ont  subi  des  modidcations  considérables.  La  chapelle  de 
la  S"  Vierge  est  du  xiv'  siècle;  les  portails  latéraux 
furent  édifléa  au  xv',  le  portail  occidental  et  1»  tour  di 
droite  dans  la  première  moitié  du  ivi*,  ainsi  que  la  pj- 
ramide  qui  s'élevait  au-dessus  du  centre  des  trsnaepts 
et  dont  il  ne  reste  que  la  partie  inférieure.  La  gravitd  du 
s^le  ogival  primitif  se  trouve  donc  tempérée  par  l'al- 
liance des  formes  les  plus  élégantes,  et,  malgré  la  diffé- 
rence des  époques  dont  on  reconnaît  l'empreinte,  on 
trouve  dans  ce  monument  l'unité  de  peniée  et  'xae  cer- 
taine harmonie. 

L'œi  I  ne  peut  embrasser  l'extérieur  de  la  cathédrale  de 
Rouen,  dont  les  flsncs  sont  bordés  de  rues  étroites,  et  à 
laquelle  s'adossent  encore  de  cliétives  maisons  partira^ 
lières;  l'abside  est  enclavée  dans  les  b&timents  de  l'ar- 
cbevècbé,  et  les  abords  de  l'édiilce  ne  sont  d^gésqnel- 

Îue  peu  qu'en  avant  du  portail  occidental.  Ce  portail , 
ont  les  travaux  durèrent  de  4509  k  1530,  serait  an  mo- 
dèle du  style  ogival  de  !a  dernière  époque  dans  toute  la 
richesse  de  son  ornementation,  si  le  temps  et  les  hommes 
n'y  avaient  exercé  d'effroyable»  ravages  -.  e'estun  assem- 
blage étonnant  de  galeries  h.  jour,  de  statues,  de  bas- 
reliefs,  de  feuillages  découpés,  de  colonnettes,  de  dais, 
de  pinacles,  d'aiguilles,  de  Ileurons,  sculptés  arec  une 
grande  flnease,  mais  mutilés  par  les  calvinistes  en  1S63, 
ou  rongés  par  l'humidité  du  climat.  Trois  portes,  qui 
correspondent  aux  nefs  intérieures,  sont  percées  k  la  base 
de  cette  façade  ;  la  porte  cenlralc,  qui  est  la  plus  grande 
et  la  plus  riche,  offre  un  tympan  où  l'on  a  sculpté  l'orfrra 
de  Jessé  {V.  ce  mot);  la  porte  de  gauche  a  aussi  un 
tympan,  représentant  la  danse  d'Hérodiide  et  la  décolb- 
,,,.„  rfoBi  i».n_D-„.;„.„,  I"  tympan  de  la  porte  de  droite 
ible,  La  tour  qui  termine  la 
m  de  Tour  5*  Romain:  lûïe 
C3L  sufiiiuiiire  u  une  pyramide  do  charpente,  recouverte 
d'ardoise,  qui  fut  placée  en  1177;  les  cloches  et  le  mé- 
canisme de  l'horloge  y  sont  placés,  La  toor  méridionale, 
comptée  parmi  les  plus  belles  et  les  plus  grandes  con- 
structions de  ce  genre,  fut  élevée  de  1*85  k  1507  ;  elle  a 
77  met.  de  hauteur  :  on  la  nomme  Tour  de  beurre . 
parce  qu'elle  fut  bfltie  avec  le  produit  des  aumftnes  failps 
par  les  Hdèles,  auxquels  avait  été  accordée  la  permission 
de  faire  usage  de  beurre  pendant  le  C««me.  Elle  conte- 
nait autrefois  une  cloche  dite  de  Georges  d'Amboise.  pe- 
sant 18,000  kilogr,,  ei  qui,  fêlée  lor»  de  l'entrée  de 
Louis  XVI  en  1786,  fut  convertie  en  canons  en  1793.  Sur 
la  tour  de  pierre  dont  il  reste  encore  deux  étages  aa 


de  S' 
est  aujourd'hui 
fa(ade  au  Kord  porte 


ROU 


1593 


RuU 


eenire  du  transept,  Robert  Becquet  aTaît  conttrait, 
]a8qu*^  une  hauteur  de  132  met.,  une  élégante  pyra- 
mide, que  la  foudre  incendia  en  1822  ;  on  Ta  remplacée 
par  une  flèclie  en  fer,  dont  Alayoine  donna  les  dessins, 
et  qui  doit  s'élever  à  148  met.  du  sol.  Cette  œuvre,  dont 
on  évalue  le  poids  à  600,000  kilog.,  est  encore  inache- 
vée; les  lignes  en  sont  dures  et  sèches,  et  Teffet  général 
ne  répond  pas  à  ce  que  Ton  avait  espéré.  —  Le  Portail 
des  Libraires,  àTextrémité  du  croisillon  septentrional, 
emprunte  son  nom  à  des  libraires  dont  les  boutiques  en 
occupaient  Jadis  les  abords  :  commencé  en  1280,  il  ne  fut 
achevé  qu*en  1478,  et  MM.  Desmareat  et  Barthélémy  Tont 
h201)ilement  réparé  de  nos  jours.  Il  est  décoré  d^un  nombre 
infini  de  bas-reliefs,  qui  représentent,  les  uns  des  traita 
de  rhistoire  sainte,  les  autres  des  sujets  bizarres  et 
môme  grotesques.  Le  bas-relief  du  tympan  de  la  porte 
n'a  jamais  été  comploté;  on  n*a  exécuté  que  les  deux 
compartiments  inférieurs,  qui  ont  pour  sujet  la  Résur- 
rection des  morts.  Cette  entrée,  accompagnée  de  deux 
tours  carrées,  ajourées  de  grandes  fenêtres  ogivales,  est 
précédée  d'un  avant-portail,  construit  en  1481,  et  que 
couronne  une  claire-voie  fort  curieuse.  Du  côté  droit  se 
trouve  un  cloître  du  xiii*  siècle,  le  plus  beau  qui  nous 
soit  conservé  possédant  un  premier  étage.  Les  travées 
inférieures  sont  larges,  percées  à  la  base  par  4  arcades 
libres  qui  portent  des  colonnettes  monolithes  et  au- 
dessus  desquelles  la  claire-voie  est  vitrée.  Une  épaisse 
archivolte  soutient  un  grand  talus  sur  lequel  pénètrent 
les  piles  et  trumeaux  des  fenêtres  {umellesdu  1*'  étage,  et 
celui-ci  est  couronné  par  une  corniche  et  une  balustrade. 
Le  cloître  forme,  avec  les  b&timents  de  la  maîtrise,  la 
Cour  de  VAlbane,  ainsi  appelée  de  l'archevêque  Pierre 
de  Colmieu,  cardinal  d'Albe.  Le  portail  méridional,  dit 
de  la  Calende,  fut  b&ti  vers  la  même  époque  que  celui 
des  Libraires,  et  présente  à  peu  près  la  même  disposi- 
tion. Des  deux  côtés  de  la  porte  sont  de  grandes  statues 
plus  ou  moins  mutilées,  et  de  petits  bas-reliefs  à  profu- 
sion. Le  bas-relief  du  tympan,  divisé  en  trois  comparti- 
ments, représente  Joseph  vendu  par  ses  frères,  les  Fun(^ 
railles  de  Jacob,  et  Jésus  sur  la  croix. 

La  cathédrale  de  Rouen  est  un  des  monuments  gothi- 
ques dont  la  vue  intérieure  cause  le  plus  d'impression  , 
bien  qu'elle  ait  été  reblanchie  en  1778.  Le  plan  est  en 
forme  de  croix  latine,  avec  deux  collatéraux  jusqu'au 
transept,  et  quatre  jusqu'aux  chapelles  absidsLies.  Les 
bas  côtés  se  prolongent  dans  les  croisillons  du  transept. 
L'axe  de  l'édifice  présente,  au  chevet^  une  inclinaison 
très-sensible  (K  Axe).  Les  dimensions  générales  sont  : 
longueur,  130  met.;  largeur,  32<", 30;  longueur  de  la 
croisée,  54'", 60 ;  hauteur  de  la  grande  nef  sous  voûte, 
28"*  ;  hauteur  des  collatéraux,  14'"  ;  hauteur  de  la  lan- 
terne au  centre  de  la  croisée,  53'", 30.  Des  chapelles,  au 
nombre  de  25,  régnent  dans  toute  la  longueur  de  l'église; 
celle  de  S^  Etienne,  au  pied  de  la  tour  méridionale,  a  des 
proportions  exceptionnelles;  elle  servait  à  une  paroisse 
de  même  nom,  supprimée  en  1791.  Les  fenêtres,  dont  on 
ne  compte  pas  moins  de  130,  offrent  des  formes  et  des 
compartiments  variés,  suivant  l'époque  où  elles  furent 
construites;  celles  à  lancette,  la  plupart  géminées,  se 
remarquent  particulièrement  au  pourtour  de  l'abside,  et 
sont  garnies  d'éblouissants  vitraux  du  xiii*  siècle;  les 
fenêtres  rayonnantes  et  flamboyantes  ne  sont  pas  toutes 
pourvues  de  verrières,  mais  on  distingue  celles  de  la 
chapelle  S'-Romain,  peintes  au  temps  de  la  Renaissance. 
Les  roses  des  trois  portails  sont  d'un  riche  dessin  :  les 
vitraux  de  celle  de  l'Ouest  représentent  le  Père  éternel 
environné  d'Anges  qui  jouent  de  divers  instruments  de 
musique.  Les  arcades  ogivales  sont  généralement  très- 
aiguës  ;  celles  qui  se  trouvent  au  point  d'union  des  nefs 
et  de  la  croisée  sont  d'une  hardiesse  prodigieuse.  Les 
piliers ,   cylindriques  autour  du  chœur,  se  composent 
partout  ailleurs  d'un  iaisceau  de  colonnettes  ;  les  quatre 
qui  soutiennent  la  lanterne  n'ont  pas  moins  de  12™, 66 
de  circonférence.  Les  galeries  du  triforium  ne  sont  à 
jour  qu'autour  du  chœur  et  du  sanctuaire  j,  dans  le  reste 
de  r^ise,  leur  balustrade  se  détache  sur  le  fond  de  la 
muraille  elle-même,  et  il  y  a  là  une  opposition  de  tons 
sur  deux  plans  différents  (jui  produit  un  agréable  effet; 
Dans  l'encoignure  du  croisillon  septentrional,  un  joli 
escalier  gothique  donne  accès  à  l'ancienne  bibliothèque 
du  Chapitre.   Autrefois,  un  jubé  eh  pierre,  délicatement 
sculpté,  et  es  harmonie  de  style  avec  le  reste  de  l'édifice, 
ornait  l'entrée  du  chœur  :  par  une  faute  de  goût  fort 
commune  au  xvin*  siècle,  on  lui  substitua,  en  1777,  le 
Jubé  d'ordre  ionique  en  marbre  blanc  qui  existe  encore 
aujourd'hui  ;  la  tribune  qui  rèfci^e  dans  la  partie  supé- 


rieure est  surmontée  d'un  Christ  en  plomb  doré,  exécuté 
par  Clodion  ;  deux  petits  autels  s'élèvent  au  pied  de  ce 
jubé,  et  sont  ornés  chacun  d'une  statue  d'un  caractère 
païen ,  une  S**  Vierge  par  Lecomte,  et  une  S**  Cécile  par 
Clodion.  Le  chœur,  long  de  36™,  a  des  stalles  sculptées 
en  1467,  et  dont  les  consoles  sont  décorées  de  sujets 
très-curieux,  pleins  de  naïveté  et  de  verve.  Il  contenait 
aussi  jadis  les  tombeaux  de  Richard  Cœur  de  Lion,  de 
son  frère  Henri,  de  leur  oncle  Guillaume,  et  du  fameui 
duc  de  Bedford  ;  mutilés  par  les  calvinistes  en  1502,  ils 
disparurent  quand  on  exhaussa  le  chœur  en  1736.  Des 
fouilles  ont  amené,  en  1838,  la  découverte  du  cœur  et 
d'une  statue  de  Richard,  et,  en  1802,  celle  du  cœur  du 
roi  Charles  V.  A  la  droite  du  chœur,  dans  le  collatéral , 
on  remarque  la  clôture  en  maçonnerie  et  la  porte  en  fer 
de  la  sacristie,  ouvrages  estimés,  de  la  fin  du  xv*  siècle. 
Les  monuments  funéraires  sont  encore  nombreux  dans 
la  cathédrale  de  Rouen,  et  plusieurs  méritent  de  figurer 
parmi  les  chefs-d'œuvre  de  l'art.  Dans  la  chapelle  dite 
du  Petit  S^  Romain,  la  première  du  collatéral  droit,  près 
du  transept,  on  voit  sous  un  enfoncement  cintré  le  tom- 
beau de  Rollon,  1*'  duc  de  Normandie  :  la  statue  couchée 
sur  ce  tombeau  est  d'un  travail  assez  moderne,  et  forte- 
ment endommagée.  La  dépouille  mortelle  de  Guillaume 
Longue-Épée,  fils  de  Rollon,  se  trouve  en  face,  dans  la 
chapelle  S^*  Aune  du  collatéral  opposé.  Avant  d'entrer 
dans  la  chapelle  de  la  S^*  Vierge,  à  gauche,  on  rencontre, 
soas  une  arcade  à  plein  cintre,  la  statue  couchée  d'un 
évêque  ;  des  Anges,  aux  ailes  déployées,  conduisent  au 
ciel  r&me  du  défunt,  représentée  sous  la  figure  d'un  pérît 
enfant;  à  la  partie  inférieure  du  sépulcre,  sont  quelques 
bas-reliefs  à  demi  efTacés.  Ce  tombeau  est  celui  de  l'ar- 
chevêque Maurice,  mort  en  1235.  —  La  chapelle  de  la 
S**  Vierge,  où  l'architecture  ogivale  a  étalé  toutes  ses  ri- 
chesses, est  une  des  plus  belles  qui  existent  à  l'absido 
des  grandes  cathédrales  ;  elle  n'a  pas  moins  de  29  met. 
de  longueur.  Au  fond,  un  retable  tout  doré  encadre  une 
Adoration  des  bergers,  par  Philippe  de  Champagne.  Sur 
le  côté  gauche  de  la  chapelle  on  remarque  trois  tom- 
beaux. Le  premier,  en  pierre,  sans  inscription,  sans 
statue,  et  néanmoins  remarquable  par  ses  gracieuses 
proportions,  par  l'élégance  et  la  délicatesse  de  son  archi- 
tecture, est  celui  de  Pierre  de  Brézé,  comte  de  Maulo- 
vrier,  grand  sénéchal  de  Normandie,  tué  à  la  bataille  de 
Montlhéry  en  1465.  Le  second  a  été  érigé  à  Louis  de 
Brézé,  petit-fils  du  précédent,  par  sa  veuve  Diane  de 
Poitiers.  Le  cénotaphe  est  de  marbre  noir  :  au-dessus 
gît  la  statne  en  marbre  blanc  du  sénéchal  ;  le  corps  est 
nu,  et  la  mort  y  est  peinte  avec  une  vérité  efiirayante. 
Du  côté  de  la  tête,  Diane  est  agenouillée,  les  bras  croisés, 
et  en  habits  de  veuve;  aux  pieds,  la  S**  Vierge,  tenant 
l'enfant  Jésus.  Cette  scène  est  encadrée  de  4  colonnes  en 
marbre  noir,  dont  les  chapiteaux  et  les  bases  sont  en 
alb&tre.  Au-dessus  de  l'entablement,  dans  une  arcade 
que  soutiennent  quatre  caryatides,  la  Prudence  et  la 
Gloire  d'un  côté,  la  Victoire  et  la  Foi  de  l'autre,  on  voit 
la  statue  équestre  du  sénéchal,  en  marbre  blanc.  Le  cou- 
ronnement est  un  attique  formant  une  niche  :  elle  con- 
tient une  statue  en  alb&tre,  tenant  une  épée,  et  qui  est 
la  Force  selon  les  uns,  la  Justice  selon  les  autres.  La 
corniche  se  termine  par  deux  chèvres  portant  les  armoi- 
ries du  sénéchal.  Toutes  les  frises  sont  en  albfi.trc,  les 
architraves  et  les  corniches  en  marbre  noir.  Ce  beau 
mausolée  est  attribué  à  Jean  Cousin  ou  à  Jean  Goujon. 
Le  troisième  tombeau,  ouvrage  de  M.  Barthélémy,  a  été 
érigé  en  1857  au  cardinal  prince  de  Croy,  mort  en  1844. 
Sur  le  côté  droit  de  la  chapelle  de  la  Vierge  s'élève  le 
magnifique  monument  funéraire  élevé  de  1518  à  1525 
aux  deux  cardinaux  d'Amboise.  La  Renaissance  n'a  point 
d'œuvre  qui  lui  soit  supérieure.  Deux  belles  statues  en 
marbre  blanc,  agenouillées,  la  tête  nue  et  les  mains 
jointes,  sont  posées  sur  le  tombeau  de  marbre  noir.  A  la 
partie  inférieure,  dans  des  niches  séparées  par  des  pi- 
lastres, sont  6  charmantes  statuettes  en  marbre  blanc, 
représentant  la  Foi,  la  Charité,  la  Prudence,  la  Force,  la 
Justice  et  la  Tempérance.  Sur  le  fond,  derrière  les 
grandes  statues,  est  un  bas-relief  représentant  S*  Georges 
qui  terrasse  un  dragon  ;  sur  les  côtés  sont  distribuées 
huit  autres  figures,  parmi  lesquelles  on  reconnaît  la 
S*«  Vierge  et  S*  Romain.  Une  voussure  décorée  de  sculp- 
tures aussi  remarquables  par  le  bon  goût  que  par  la 
richesse  des  ornements  soutient  un  attique,  où  l'on  voit 
les  12  Apôtres,  placés  deux  à  deux  dans  des  niches  élé- 
gantes que  séparent  des  pilastres.  V,  Pommeraye  »  His- 
toire de  l'église  cathédrale  de  Rouen;  Gilbert,  Descrip- 
tion  historique  de  Véglise  cathédrale  de  Notre-Dame  dt 


ROD 


1594 


ROU 


Rouen,  Rouen,  1816,  in-8*;  Dcvîlle,  Tombeaux  de  la 
cathédrale  de  Rouen,  1833,  in-8**;  Langlois,  Stalles  de 
la  cathédrale  de  Rouen,  1838,  in-S».  B. 

ROUEN  (Église  S^-OuEN,  à).  Cette  église,  la  plus  belle 
de  toutes  les  abbatiales,  et  digne  d'être  comparée  aax 
cathédrales  les  plus  illustres,  fut  commencée  en  1318 
sous  ra5bé  Jean  Roussel,  dit  Marc-d*Argent,  par  un  ar- 
chitecte dont  le  nom  est  inconnu ,  et  qui,  dans  l'espace 
de  21  ans,  acheva  le  chœur,  les  chapelles  absidales,  les 
piliers  et  la  plus  grande  partie  du  transept.  Au  siècle 
suivant,  Alexandre  de  Berneval  dirigea  les  travaux.  Vers 
1404,  on  b&tit  deux  travées  de  la  nef  ;  le  reste  ne  fut 
continué  que  vers  la  fin  du  xv*  siècle  et  au  commence- 
ment du  XVI*.  Le  grand  portail  occidental  n*a  point  été 
fait  d*après  les  plans  primitifs  et  grandioses  qui  nous  ont 
été  conservés;  deux  massifs  en  lourde  maçonnerie  flan- 
quèrent le  bas  de  la  nef  pendant  de  longues  années  :  on 
les  a  abattus  de  nos  jours,  et  M,  Grégoire  a  édifié  le  por- 
tail actuel,  large  de  38  mèu 

Trois  portes  s'ouvrent  à  la  base  de  cette  façade.  La 
voussure  de  la  porte  centrale  est  à  cinq  cordons  de  sta- 
tuettes et  de  dais,  sculptés  avec  beaucoup  de  délicatesse  : 
la  baie  est  coupée  par  un  pilier  vertical,  auquel  s'adosse 
une  statue  du  Christ;  les  pieds-droits  sont  garnis  des 
statues  de  10  Apôtres,  parmi  lesquels  S*  Paul  a  été  sub- 
stitué &  S^  Matthias,  et  les  deux  autres  Apôtres  ont  été 
ajoutés,  après  coup,  un  peu  en  saillie  sur  la  façade.  Les 
deux  autres  portes  n'ont  que  deux  cordons  à  la  voussure, 
et  deux  statues  sur  chacun  de  leurs  côtés  :  à  gauche, 
Dagobert,  S*  Éloi,  S»  Philbert  et  S««  Austreberthe  ;  à 
droite.  S*  Nicaise,  S*  Romain,  S*  Benoit  et  S*  Ouen.  En 
retour  sur  les  flancs  de  l'édifice  sont  percées  deux  portes 
semblables  aux  précédentes  ;  celle  du  Nord  présente  les 
statues  de  Glotaire  P',  de  l'impératrice  Mathilde,  de 
S'«  Clotilde,  et  de  Charies  de  Valois  (fils  de  Philippe  le 
ITardi);  celle  du  Sud,  les  statues  aes  abbés  Nicolas, 
Marc-d' Argent,  Hildebert  et  Bohier.  Elles  n'ont  aucune 
utilité,  puisqu'elles  donnent  accès  dans  les  petits  vesti- 
bules qui  sont  à  la  base  des  tours  de  la  façade,  et  où  Ton 
pénètre  déjà  par  les  portes  antérieures.  Les  cinq  portes, 
contrairement  à  l'usage  le  plus  répandu,  n'ont  point  de 
tympan,  mais,  à  la  place,  une  rosace  à  jour.  Elles  sont 
toutes  surmontées  d'élégants  frontons,  découpés  à  jour, 
et  couronnés  d'un  pinacle,  sauf  celui  de  la  porte  cen- 
trale, que  termine  un  groupe  de  la  Trinité.  Au-dessus  de 
cette  porte  et  en  arrière  de  son  fronton  s'ouvre  une  ga- 
lerie vitrée,  et,  plus  haut,  une  magnifique  rose,  à  la- 
quelle beaucoup  d'archéologues  ne  reconnaissent  d'égale 
en  aucun  lieu  du  monde.  La  façade  est  couronnée  par 
une  galerie  ogivale,  où  sont  contenues  onze  statues 
(S^  wandrille,  S^  Germer,  les  archevêques  Flavius,  Ans- 
bert,  Maurileet  Geoff'roy,  Richard  l**",  duc  de  Normandie, 
Richard  II,  Guillaume  le  Conquérant,  Henri  II,  roi  d'An- 
gleterre, et  Richard  Cœur  de  Lion  ),  et  par  un  pignon 
élégamment  sculpté,  dont  une  statue  de  S^  Ouen  occupe 
le  point  culminant.  Les  diverses  statues  du  portail  ont 
été  faites  par  M.  Victor  Villain  ou  sous  sa  direction.  Deux 
tours  s'élèvent  au-dessus  des  petites  portes  :  elles  ont 
deux  étages  de  forme  octogonale,  en  retraite  l'un  sur 
l'autre,  et  percés  de  longues  baies  ogivales  sur  leurs 
faces;  le  1*' encadre  la  grande  rose,  le  2*  dépasse  le 
comble  de  l'édifice  ;  puis,  des  flèches  également  octogo- 
nales atteignent  à  une  hauteur  de  76  met.  On  reproche  à 
Venscmble  du  portail  de  n'être  point  assez  en  relief  sur 
a  nef  de  l'église,  dont  il  masque  la  dernière  travée,  et 
aux  flèches,  de  paraître  un  peu  grêles  à  une  certaine 
distance.  —  Sur  le  flanc  septentrional  de  l'église  est  un 
petit  cloître,  qui  servit  longtemps  de  prison  municipale, 
et  dont  on  a  fait  une  sacristie  après  l'avoir  reconstruit. 
Le  croisillon  du  même  côté,  attenant  à  l'Hôtel  de  Ville , 
qui  était  autrefois  le  dortoir  des  moines  de  l'abbaye,  n'a 
point  de  portail  ;  on  aperçoit  seulement,  au-dessus  du 
comble  de  l'Hôtel  de  Ville,  un  pignon  sculpté  qui  repré- 
sente la  partie  culminante  de  ce  portail.  Au  delà  des 
bâtiments  municipaux,  dans  le  jardin  public  qui  enve- 
loppe tout  le  chevet  de  Téglise,  on  remarque  une  petite 
tour  en  style  du  xi*  siècle,  appelée  la  Chambre  aux 
clercs,  et  qui  parait  provenir  d'une  église  plus  ancienne: 
elle  est  divisée  intérieurement  en  deux  éta<;es,  dont  l'un 
renferme  le  mécanisme  de  l'horloge.  Rien  n'est  plus  beau 
que  la  perspective  de  l'abside,  avec  ses  contre-forts  élan- 
cés, ses  deux  rangs  d'arcs-boutants,  et  ses  onze  chapelles 
à  toits  pyramidaux  en  ardoise.  En  passant  sur  le  côté 
méridional  du  monument,  on  trouve  une  autre  sacristie, 
puis,  à  l'extrémité  du  croisillon,  le  Portail  des  MarmoU" 
sets.  C'est  un  des  spécimens  les  plus  élégants  de  l'archi- 


tecture ogivale  :  la  voûte,  qui  supporte  une  petite  biblio- 
thèque, projette  deux  pendentifs  d'une  exécution  hardie; 
le  tympan  de  la  porte  contient  un  bas-relief  divisé  en 
trois  parties,  qui  sont  consacrées  à  l'ensevelissement  de 
la  Vierge,  à  son  Assomption,  et  à  son  entrée  dans  le  ciel: 
on  n'a  jamais  rien  sculpté  de  plus  gracieux  et  de  plus 
achevé.  Plus  bas  que  le  croisillon,  une  petite  porte  donne 
accès  dans  l'église.  —  La  grande  tour  qui  s'élève  ao 
centre  du  transept,  et  qui  est  haute  de  Si  met.,  est  un 
monument  de  force  et  de  légèreté  tout  ensemble.  Sa  base 
carrée  est  percée  sur  chaque  face  de  deux  grandes  fen^ 
très  surmontées  de  pignons  élégamment  découpés.  La 
partie  supérieure,  de  fbrme  octogone,  est  accompagnée 
de  quatre  jolies  tourelles  qui  se  rattachent  aux  angles  de 
la  tour.  Une  couronne  travaillée  à  jour,  et  d'un  effet  in- 
comparable, la  surmonte.  Qu'on  l'examine  de  près  dans 
SCS  moindres  détails,  ou  des  hauteurs  qui  avoisinent  la 
ville,  c'est  un  chef-d'œuvre  unique  en  son  genre. 

A  l'intérieur,  l'église  de  S*  Ouen  a  138"»  de  longueur, 
dont  80  pour  la  nef  et  35  pour  le  chœur;  26"*  de  liîgeur, 
dont  11*",33  pour  la  nef  mineure  et  7'",33  pour  chaque 
collatéral;  42'",22  de  largeur  au  transept;  32'",50  de 
hauteur  sous  voûte.  Contre  le  premier  pilier  de  droite  en 
entrant  par  le  portail  occidental,  est  un  grand  bénitier 
de  marbre,  où,  par  un  effet  d'optique  assez  curieux,  se 
reflète  l'église  dans  toute  son  étendue.  Nul  édifice  peut- 
être  ne  frappe  les  yeux  et  n'étonne  la  pensée  à  un  si  haut 
degré  :  la  grandeur  des  proportions,  la  régularité  de  l'en- 
semble, l'harmonie  des  parties,  la  pureté  des  lignes,  tout 
concourt  à  former  l'impression  qu'on  éprouve  à  la  vue 
de  ce  vaisseau,  où  aucun  monument  accessoire,  aucun 
ornement  superflu  n'embarrasse  la  perspective;  où  P25 
verrières  disposées  sur  trois  rangs,  sans  y  comprendre 
les  trois  roses,  projettent  leur  lumière  mystérieuse;  où 
enfin  la  pierre,  noircie  par  les  ans,  et  par  les  forges  que 
la  Révolution  installa  aJsns  ces  vastes  nefs,  ajoute  à  la 
sévérité  de  l'architecture.  Le  premier  rang  de  fenêtres 
éclaire  les  collatéraux,  ainsi  que  les  chapelles  absidalei^. 
Les  piliers  de  la  nef,  élancés  et  largement  espacés,  sont 
flanqués  de  colon  nettes  élégantes,  dont  quelques-unes 
montent  jusqu'au  sommet  de  l'édifice,  pour  recevoir  la 
retombée  des  nervures  de  la  voûte.  Un  certain  nombre 
de  ces  piliers  offrent  des  consoles  et  des  dais,  entre  les- 
quels devraient  se  trouver  des  statues.  Le  sommet  des 
arcades  à  ogive  est  à  15'",23  au-dessus  du  sol.  Une  élé- 
gante galerie,  de  6"\2j  d'élévation,  formée  de  colon  nettes 
que  couronnent  des  rosaces  à  cinq  lobes,  surmonte  as 
arcades  dans  tout  le  pourtour  de  l'église.  Plus  haut,  une 
claire-voie  compose  le  second  rang  de  fenêtres.  Le  troi- 
sième rang  est  garni  de  vitraux,  qui  représentent,  sur  le 
côté  méridional  de  l'édifice,  les  personnages  les  plus 
illustres  de  l'Ancien  Testament  et  les  figures  des  Si- 
bylles, et,  sur  le  côté  septentrional,  quelques  sainte  é%c- 
ques  des  premiers  temps  du  christianisme,  des  Pères  de 
l'Église,  et  des  abbés  de  Tordre  de  S^  Benoît.  Les  colla- 
téraux n'ont  pas  de  chapelles  ;  une  seule,  de  très-petite 
dimension,  a  été  pratiquée  près  du  croisillon  méridional. 
Il  en  existe  une  autre,  aussi  peu  importante,  dans  le  croi- 
sillon septentrional.  Les  chapelles  absidales  sont  déco- 
rées pauvrement  et  sans  goût  :  la  l'*  à  gauche  du  chœur 
contient  les  fonts  baptismaux  ;  dans  la  seconde,  on  voit 
la  pierre  sépulcrale  d'Alexandre  de  Berneval  et  d'un  de 
ses  élèves,  qu'il  tua,  selon  la  lé^nde,  pour  avoir  exécuté 
dans  le  transept  une  rose  supérieure  à  celle  dont  il  était 
lui-même  l'auteur.  Dans  quelques  autres  chapelles,  il  y 
a  des  autels  à  colonnes  grecques.  Le  chœur  était  autre- 
fois séparé  de  la  nef  par  un  beau  jubé  du  xv*  siècle , 
dont  on  a  conservé  du  moins  le  dessin  ;  il  possède  encore, 
autour  du  sanctuaire,  plusieurs  grilles  en  fer,  bel  ou- 
vrage de  serrurerie.  Une  chaire  en  bois,  sculptée  dans  le 
style  du  xiv*  siècle,  et  dessinée  par  M.  Desmarest,  a  été 
placée  dans  la  nef  en  1861.  F.  Pommeraye,  Histoire  de 
Vabbaye  royale  de  S^  Ouen^  1GG2,  in-fol.  ;  Gilbert,  Des- 
cription historique  de  Véglise  S^  Ouen  dé  Rouen,  18:î2, 
in-80.  B. 

ROUEN  (Église  S*-Maclod,  à).  Construite  dans  la  se- 
conde moitié  du  xv'  siècle,  cette  église  est  un  charmant 
spécimen  du  style  gothique  fleuri.  Son  grand  portail ,  de 
forme  un  peu  convexe,  offre  cinq  portes ,  dont  deux  ont 
été  condamnées  :  celle  du  centre  est  surmontée  d'un  bas- 
relief  qui  représente  le  Jugement  dernier.  Le  panneau  de 
la  porte  voisine  à  gauche  a  été  sculpté,  ditr09,  par  Jean 
Goujon ,  et ,  au  milieu  d'arabesques,  un  grand  médaillon 
renferme  le  Baptême  de  Jésus-Christ,  On  attribue  an 
même  artiste  la  porte  qui  sert  d'entrée  sur  le  flanc  sep- 
tentrional de  l'église;  le  relief  principal  est  la  Mort  de  Um 


ROU 


1595 


ROU 


Vtêrge,  Du  côté  opposé  se  trouve  un  aitre,  où  Ton  a  dé- 
couvert les  fragments  d'une  Danse  des  Morts  {V,ce  mot), 
Aa-dessus  de  l'église  S^-Maclou,  &  rentrée  du  chœur, 
s'élève  une  tour  formant  lanterne  ;  elle  était  couronnée 
par  une  élégante  pjnramide,  qui  s'élançait  jusqu'à  78  mot. 
du  soi ,  et  qui,  ébrmiée  par  un  ouragan  en  1705,  fut 
bientôt  abattue  :  on  /;  remplaça  par  le  beffroi  disgracieux 
cp  charpente  recoui  -fte  d'ardoise  qu'on  voit  encore  au- 
jourd'hui. A  l'intérieur,  l'édifice  a  47  met.  de  longueur, 
sur  25  de  largeur  en  y  comprenant  les  collatéraux.  On 
remarque  l'escalier  sculpté  h,  jour  qui  conduit  h  l'orgue, 
et  les  vitraux  des  fenêtres,  malheureusement  mutilés.  B, 
RODEN  (Hôtel  du  BouRGTHEnoDLDB ,  à),  édiflco  com- 
mencé vers  la  fin  du  xv*  siècle  par  Guill.  Leroux,  sci- 
i;neur  du  Bourgtheroulde,  et  terminé  par  son  fils,  abbé 
d'Âumale  et  du  Val-Richer.  L'extérieur,  sur  la  place  de 
la  Pucelle  d'Orléans,  offre  un  rez-de-chausséo  avec  un 
étage,  dont  les  sculptures  sont  à  peu  près  détruites.  Le 
corps  principal  d'habitation,  occupé  aujourd'hui  par  le 
Comptoir  d'escompte,  est  situé  au  fond  d'une  cour  à  peu 
pris  carrée  :  sa  façade  est  somptueusement  décorée  de 
bas-reliefs.  Le  1*'  bas-relief  à  gauche ,  sous  la  petite 
croisée,  représente  un  triomphe;  le  2"  a  été  détruit;  le 
3*  offre  une  salamandre  au  milieu  des  flammes,  devise 
de  François  1*';  le  4*  représente  un  phénix  couronné 
dans  les  flammes.  Les  bas-reliefs  de  l'étage  supérieur 
offrent  des  sujets  analogues  aux  précédents.  Les  fenêtres 
du  comble  sont  en  ogivp,  et  couronnées  de  frontons  py- 
ramidaux chargés  d'orn'^jents  gothiques  :  sur  le  tympan 
de  l'une,  on  voit  un  écusson  supporté  par  des  chevaux. 
A  gauche  de  cette  façade,  une  très-belle  tourelle  hexago- 
nale est  ornée  de  6  bas-reliefs,  qui  représentent  des 
scènes  champêtres  et  pastorales,  aussi  remarquables  par 
leur  belle  conservation  que  par  le  mérite  du  travail.  Une 
galerie  couverte,  à  5  arcades,  forme  le  côté  gauche  de  la 
cour,  et  Joint  cette  tourelle  à  la  façade  :  on  y  voit,  à  hau- 
teur d'homme,  au-dessous  des  arcades,  cinq  bas-reliefs 
figurant  l'entrevue  de  François  P'  et  de  Henri  VIII  au 
Camp  du  drap  d'or;  ce  sont  de  véritables  chefs-d'œuvre, 

f)récieux  pour  la  connaissance  des  costumes,  mais  que  les 
ntempénes  de  l'air  et  les  mutilations  ont  singulièrement 
détériorés.  Au-dessus  des  arcades  est  un  entablement, 
dont  la  frise  se  divise  en  6  panneaux,  ornés  d'autres  bas- 
re/iefs  symboliques  :  les  deux  premiers  sont  à  peu  près 
détruits;  le  3'  représente  un  char  traîné  par  des  bœufs, 
et  sous  les  roues  duquel  sont  écrasés  plusieurs  person- 
nages; sur  le  4%  la  Mort  précède  un  char  traîné  par 
deux  éléphants,  et  sur  lequel  une  femme  sonne  de  la 
trompette;  le  5*  offre  un  char  couronné  d'un  dais,  traîné 
par  ôuatre  chevaux,  et  entouré  de  diverses  personnes  ; 
dans  le  6",  les  trois  personnes  de  la  Trinité  sont  sur  un 
char  que  traînent  un  lion ,  un  aigle,  un  bœuf  et  un  ange, 
symboles  des  quatre  Êvangélistes,  et  sous  les  roues  de  ce 
char  une  foule  de  personnages  figurent  sans  doute  les 
hérétiques.  Le  b&timent  &  droite  de  la  cour  n'a  rien  de 
remarquable.  B. 

ROUEN  (Le  Palais  de  Justice  de),  monument  de  l'ar- 
chitecture gothique,  le  plus  beau  de  tous  ceux  qui  sont 
affectés  en  France  au  service  des  tribunaux.  Il  fut  bâti  en 
1409  pour  l'Échiquier  de  Normandie  par  Roger  Ango.  Sa 
façade,  exposée  au  midi ,  a  65  met  de  développement ,  et 
offre  ce  qu'on  peut  ima^ner  de  plus  riche  et  de  plus  dé- 
licat dans  l'ornementation.  L'élégante  tourelle  octogone 
qui  occupe  le  milieu,  les  piliers  angulaires  que  recou- 
vrent de  la  base  au  sommet  les  dais  et  les  statues,  les 
Hnes  sculptures  dont  sont  entourées  les  fenêtres,  la  série 
d'arcades  qu    forment  galerie  sur  toute  la  longueur  de 
l'entablement,  les  belles  lucarnes  percées  à  la  base  du 
toit,  tout  est  d'un  excellent  goût.  Des  statues,  sculptées 
par  M.  Brun  ,  représentent  Louis  XH,  Anne  de  Bretagne, 
le  cardinal  d'Amboise,  François  I^,  la  Justice,  un  labou- 
reur, une  Tillageoise,  une  dame,  un  seigneur,  un  moine, 
un  artiste,  c.-à-d.  les  personnages  qui  concoururent  à 
l'érection  de  l'édifice,  et  le^  différentes  classes  de  la  so- 
ciété du  temps.  A  l'intérieur,  l'ancienne  grande  chambre 
du  parlement,  où  siège  aujourd'hui  la  Cour  d'assises,  est 
une  merveHle  en  son  genre  :  le  plafond,  à  compartiments 
et  caissons ,  décoré  de  rosaces  et  d'ornements  en  bronze 
doré,  est  d'un  bois  de  chêne  que  le  temps  a  rendu  cou- 
leur d'ébèno;  un  Christ  en  croix,  qu'accompagnent  les 
statues  de  la  Justice  et  de  la  Force,  est  placé  à  l'extré- 
mité de  la  82^10,  au-dessus  des  sièges  de  la  Cour.  Dans 
la  chambre  du  conseil,  on  remarque  plusieurs  portraits 
de  présidents  et  conseillers  au  parlement  de  Normandie, 
et  un  Christ  en  croix,  aux  pieds  duquel  sont  deux  saintes 
femm<«9  précieux  tableau  sur  fond  d'or,  donné  par 


Louis  XIL  —  Le  Palais  de  Justice  a  deux  ailes  en  sailUe 
vers  le  midi  à  ses  extrémités  :  toutes  deux  sont  flanquées 
à  leurs  angles  de  tourelles  octogones  qui  contiennent  des 
escaliers.  Celle  de  l'Ouest,  antérieure  au  corps  prin- 
cipal, date  de  1493,  et  fut  construite  pour  servir  de  lieu 
de  réunion  aux  marchands.  Le  rez-de-chaussée  en  est 
occupé  par  la  Conciergerie  et  les  prisons.  Un  vaste  esca^- 
lier  extérieur  donne  accès  au  premier  étage,  en  grande 
partie  formé  par  la  Salle  des  Procureurs  ou  des  Pas 
Perdus.  Cette  salle,  oui  fait  l'admiration  des  architectes, 
est  longue  de  48™,72,  large  de  16™ ,24,  et  sa  voûte  im- 
mense de  charpente,  en  forme  de  carène  de  navire  ren- 
versée ,  n'est  soutenue  par  aucun  pilier.  D'élégantes 
niches,  vides  de  statues,  se  détachent  en  i*elief  sur  les 
murailles.  A  l'une  des  extrémités  de  la  salle,  on  a  placé 
le  modèle  en  pl&tre  de  la  statue  de  P.  Corneille,  par 
David,  érigée  en  1834  au  centre  du  terre-piein  du  pont 
de  pierre  ;  à  l'autre  extrémité,  par  où  Ton  entre  dans  la 
salle  des  assises ,  sont  les  tombeaux  du  premier  prési- 
dent Claude  Groulard  et  de  sa  femme,  provenant  du  châ^ 
teau  de  S^-Aubin-le-Cauf,  près  de  Dieppe.  L'aile  de  l'Est 
avait  été  bâtie,  au  commencement  du  xvni«  siècle  en 
style  moderne,  qui  faisait  disparate  avec  le  reste  du 
monument  :  une  partie  de  cette  construction  s'étant 
écroulée  en  1812,  on  éleva  l'aile  actuelle,  extérieurement 
semblable  à  celle  qui  lui  fait  face. 

RODBN  (Faïences  de).  F.  au  Supplément. 

ROUET,  terme  de  Construction,  synonyme  d'En* 
rayure  (k.  ce  mot), 

ROUF,  terme  de  Marine,  qui  a  le  sens  de  carrosse  ou 
dunette, 

ROULADES,  nom  donné  vulgairement  aux  traits  de 
chant  qui  consistent  à  exécuter  avec  rapidité  plusieurs 
notes  sur  une  même  syllabe.  La  voix  semble  rouler  en 
passant  légèrement  d'un  son  à  un  autre. 

ROULAGt) ,  transport  des  marchandises  ou  autres  ob- 
jets analogues  par  voitures  h  roues,  sur  les  chemins  pu- 
blics ordinaires.  Les  conducteurs  de  ces  voitures  s'appel- 
lent routiers.  On  distingue  le  roulage  ordinaire,  dont  la 
vitesse  est  de  30  à  40  kilom.  par  jour,  et  le  roulage  accé- 
léré^ qui  fait  75  kilom.  Par  le  1"%  le  prix  de  transport 
d'un  tonneau  de  marchandises  à  4  kilom.  de  distance  est 
de  0  fr.  00  c.  ;  par  le  2%  de  2  fr.  15  c.  Pendant  long- 
temps, des  mesures  furent  prises  pour  protéger  les  routes 
contre  les  dangers  qui  paraissaient  résulter  pour  elles  de 
la  circulation  de  voitures  trop  chargées  ou  mal  con- 
struites ;  pour  arriver  à  la  limitation  du  poids,  on  em- 
ployait deux  movens,  la  limitation  du  nombre  des  che- 
vaux, et  un  système  de  pesage  public  (ponts  &  bascule  ]• 
La  loi  du  30  mai  1851  a  remplacé  à  peu  près  par  la  li- 
berté cette  protection  économique  :  elle  pose  en  principe 
que  toute  voiture  peut  circuler  sans  condition  de  poids  ; 
elle  a  réservé  seulement,  au  point  de  vue  de  la  conser- 
vation des  routes,  le  principe  de  quelques  dispositions 
relatives  à  la  forme  des  bandes  de  roues  et  des  clous  de 
bandes,  à  la  circulation  pendant  les  jours  de  dégel,  à  la 
protection  des  ponts  suspendus,  et  ces  dispositions  ont 
4té  l'objet  d'un  règlement  d'administration  publique, 
ëdicté  le  10  août  1852.  Ce  règlement  a  pris  aussi  les  me- 
sures nécessaires  pour  prévenir  les  accidents  qui  résul- 
teraient de  la  manière  dont  les  voitures  sont  construites, 
attelées,  chargées  et  conduites,  et  pour  assurer  la  répres- 
sion des  contraventions.  Les  contraventions  sont  de  la 
compétence  du  Conseil  de  préfecture  du  département  où 
le  procès-verbal  a  été  dressé  :  elles  peuvent  être  consta- 
tées par  les  maires  et  adjoints,  les  commissaires  et  agents 
de  police,  les  ingénieurs  des  ponts  et  chaussées,  les 
agents  voyers,  les  conducteurs,  les  cantonniers-chefs,  les 
gendarmes,  les  gardes  champêtres,  les  agents  forestiers 
on  des  douanes,  les  employés  des  contributions  indireo» 
tes,  etc.  V,  Verlet-Dumesnil,  Police  du  roulaae^  1857, 
in-8';Guilbon,  Traité  de  lapoliceduroiUageyiSoT, in^S', 

ROULEAUX  DES  MORTS.  V,  le  Supplément, 

ROULEMENT,  batterie  de  caisse  produite  par  le  mou- 
vement alternatif  et  très-rapide  des  deux  baguettes.  On 
fait  un  roulement  pour  ordonner  à  une  troupe  de  re- 
prendre son  rang,  de  faire  halte,  de  se  préparer  à  une 
manœuvre,  etc.  —  Dans  un  orchestre,  on  fait  aussi  des 
roulements  sur  les  timbales  :  ils  produisent  un  grand 
effet  dans  le  crescendo  et  le  forte.  Plusieurs  symphonies 
de  Haydn  commencent  par  un  roulement  de  timbales. 

ROULEMENT  (Fouds  do),  eu  termes  de  Commerce  et  de 
Finances,  somme  en  espèces  métalliques  .ou  en  billets 
de  banque  nécessaire  aux  payements  ordinaires  et  quo- 
tidiens. 

ROULETTE,  jeu  de  hasard.  C*est  an  cylindre  dt 


ROU 


1596 


ROU 


0™,66  àe  diamètre  environ,  au  centre  duquel  est  sus- 
pendu uiv  plateau  mobile,  et  dont  les  bords  sont  garnis 
de  petites  eases  numérotées.  Les  numéros  1  à  36,  le  zéro 
simple  et  le  zéro  double  y  sont  mélangés,  et  alternative- 
ment inscrits  en  rouge'  et  en  noir.  Le  cylindre  est  placé 
au  milieu  d'un  tapis  vert ,  divisé  lui-même  en  autant  de 
compartiments  sur  lesquels  les  Joueurs  placent  leurs 
pontes  ou  mises.  Le  banquier  fait  tourner  le  plateau ,  et 
y  lance  une  bille  dMvoire  qui ,  après  un  certain  nombre 
de  tours ,  d'ondulations  et  de  soubresauts,  se  loge  dans 
une  des  cases,  dont  le  numéro  est  le  gagnant.  Si  le  joueur 
a  spéculé  sur  un  seul  numéro,  ou  sur  Tun  des  zéros,  le 
banquier  paye  36  Tois  la  mise;  si  l'enjeu  est  sur  deux  nu- 
méros voisins,  la  sortie  d'un  seul  rend  18  fois  cet  enjeu; 
s'il  est  sur  quatre,  9;  sur  six,  6.  Si  toutes  les  mises 
étaient  égales,  le  banquier,  recevant  38,  ne  rembourse- 
rait que  36,  et  aurait  toujours  un  17*  de  bénéfice.  Mais  il 
s'est  ménagé  des  chances  bien  plus  profitables  encore.  Les 
joueurs,  au  lieu  de  poursuivre  un  numéro,  préfèrent  or- 
dinairement jouer  le  rotige  ou  notr,  le  pair  ou  impair ^ 
le  pcuse  ou  manque  (1  à  18,  ou  10  à  36)  ;  ce  ne  serait 
que  la  chance  vulgaire  de  un  contre  un ,  si  le  banquier 
n'avait  pour  lui  les  zéros  rouge  et  noir  :  un  zéro  sortant , 
la  moitié  des  enjeux  lui  appartient.  La  roulette  est  donc 
un  des  jeux  les  plus  dangereux  pour  les  joueurs.  Intro- 
duite en  France  dans  les  malsons  de  jeu  sous  la  lieute- 
nance  de  police  de  M.  de  Sartine,  elle  a  été  supprimée 
en  1838;  mais  elle  existe  toujours  en  Allemagne  et  en 
Italie. 

ROULETTES.  F.  PnoPYLfes  de  Paris. 

ROULIS,  oscillation  d'un  bâtiment  dans  le  sens  de  sa 
largeur.  L'oscillation  de  poupe  en  proue  se  nomme 
tangage. 

ROUMANCHE  (Idiome).  V,  Rh^ien. 

ROUMANE  ou  ROUMAINE  (Langue),  une  des  langues 
néo-latines  ou  romanes,  parlée  par  les  habitants  de  la 
Valucliic  et  de  la  Moldavie,  qui  aiment  à  se  dire  descen- 
dants des  anciens  Romains.  Le  fond  de  la  langue  est,  en 
efTet,  le  latin ,  apporté  dans  le  pays  au  temps  de  l'empe- 
reur Trajan  ,  après  la  soumission  des  Daces.  Du  nom  de 
ce  peuple  on  l'appelle  daco^omane,  et,  à  cause  des  élé- 
ments slaves  qu'elle  a  conservés,  elle  a  reçu  encore  la 
dénomination  de  romana-slave.  Quelques  racines  grec- 

3ues  et  turques  B*y  sont  introduites.  Parmi  les  termes 
'origine  latine,  il  en  est  qui  ne  se  trouvent  plus  dans  les 
autres  langues  néo-latines,  par  exemple  :  alb,  digitt 
vuorbê,masa,  ruoga,  dérivés  d'albus  (blanc),  aigi- 
tus  (doigt),  verbum  (parole),  mensa  f table),  rogare 
(prier),  etc.  Dans  beaucoup  de  substantifs,  les  Roumans 
se  sont  bornés  à  supprimer  la  consonne  finale,  sans 
altérer  la  voyelle  précédente  comme  l'ont  fait  les  Espa- 
gnols et  les  Italiens  :  ainsi,  de  Dmu  (Dieu),  domus 
( maison \  fructus  (fruit),  ventus  (vent),  vinum  (vin), 
templwn  (temple),  ils  ont  fait  Deu,  domu,  fructu,  ventu, 
vinu,  templu,  etc.  Ils  ont  adopté  l'article  défini ,  mais  ils 
l'emploient  principalement  sous  forme  de  suffixe.  Les 
augmentatifs  et  les  diminutifs  sont  nombreux  dans  la 
langue  roumane.  Les  degrés  de  comparaison  s'expriment 
à  l'aide  de  particules.  La  conjugaison,  assez  compliquée, 
a  plus  d'analogie  avec  celle  des  langues  slaves  qu'avec 
celle  des  langues  néo-latines;  l'emploi  des  auxiliaires  y 
est  fréquent,  non-seulement  pour  la  formation  du  passé, 
mais  aussi  pour  celle  du  futur.  Certains  linguistes  dis- 
tinguent dans  le  rouman  quatre  dialectes  :  le  valaque  ou 
munleni;  le  moldave  ou  moldovenif  usité  en  Bessarabie 
aussi  bien  qu'en  Moldavie;  VardicUien,  parlé  en  Tran- 
sylvanie et  en  Hongrie;  et  le  zinzar,  appelé  aussi  ma- 
cédo-vaXaquBy  vlaco-macédonien  et  thraco-vaîaque.  On 
remarque  dans  la  prononciation  du  rouman  les  voyelles 
nasales  an,  in,  on.  Il  s'écrit  tantôt  avec  les  caractères  la- 
tins, tantôt  à  l'aide  d'un  alphabet  de  28  lettres ,  dont  les 
formes  sont  empruntées  à  celles  de  l'alphabet  slave-illy- 
rien.  V.  Klein  et  Schinkay,  Elementa  lingiuB  daco-ro- 
manœ  seu  walachicas.  Vienne,  1780,  in-8**;  J.  Molnar, 
Grammaire  valaque,  Vienne,  1788,  in-8^;  J.  Alexi, 
Gi'ammatica  daco-romana,  Vienne,  182C,  in-8°;  Jean 
Bob,  Dictionnaire  latin,  roumain  et  hongrois,  Klausen- 
burg,  1830,  3  vol.;  J.-A.  Vaillant,  Grammaire  roumane, 
Bukharest,  1840,  in-8'»;  Poyenar,  Aaron  et  Hill ,  Diction- 
naire français^vialaque ,  Bukharest,  1840,  '2  vol.  in-S*»; 
Iszer,  Dictionnaire  valaque-ailemand ,  Kronstadt,  1850, 
în-8«»,  et  Grammaire  valaque,  ibid.,  1855;  Baritz  et 
Munteau,  Dictionnaire  allemand  et  roumain,  ibid., 
1853-54,  2  vol.  gr.  in-8<»;  Schoimul,  Grammaire  théo- 
rique et  pratique  de  la  langue  roumane,  en  allcm.. 
Vienne,  1855.  —  Les  Holdo-Valaques  ont  des  poésies  na- 


.  tionales.  Un  de  leurs  poètes,  V.  Alexandri ,  a  recueilli  des 
Ballades  et  chants  populaires  de  ta  Roumanie,  et  en  a 
publié  une  traduction  française,  PaMS,  1855,  in  -12. 

ROUPIE,  monnaie.  V.  notre  Diciionnaire  de  Dtogro 
phie  et  d'Histoire, 

ROUSKI.  V,  Rosse  (Langue). 

ROUSSNIAQUE.  V.  RcssifiAQOB. 

ROUT ,  mot  anglais  qu'on  prononce  raout ,  et  qui , 
après  s'être  originairement  appliqué  à  une  bande  tumul- 
tueuse formée  par  des  gens  de  la  populace,  désigne  de- 
puis le  commencement  du  xvm*  siècle  toute  assemblée 
du  grand  monde.  —  Un  véritable  Rout  exige  des  salons 
spacieux,  où  deux  cents  ou  trois  cents  personnes,  la  plu- 

fiart  inconnues  les  unes  aux  auties,  se  promènent  eo 
ong  et  en  large,  et  à  peu  près  silencieusement.  La  su- 
prême fashion  exigeant  que  le  Rout  soit  très- nombreux, 
on  multiplie  les  invitations,  de  sorte  que  les  promeneurs 
se  pressent,  se  coudoyent,  se  heurtent  dans  une  circula- 
tion incessante,  car  il  y  a  peu  ou  point  de  sièges  dans  le 
lieu  de  réception,  et  marcher  vaut  mieux  que  stationner; 
c'est  au  moins  faire  quelque  chose.  La  plupart  du  temps 
les  dames  sont  entre  elles  et  se  donnent  le  bras,  et  les 
hommes  à  parL  Ces  cohues  aristocratiques,  ou  qui  am- 
bitionnent l'air  aristocratique,  ont  un  grand  charme  pour 
le  flegme  des  Anglais.  En  1 802,  la  célèbre  peintre  M"**  Vi- 
gée-Lebrun,  se  trouvant  dans  un  magnifique  Rout,  y  fut 
acostée  par  un  gentleman  qu'elle  avait  connu  en  Italie, 
et  qui,  rompant  pour  elle  le  yî'ence  général,  lui  dit,  avec 
un  air  de  satisfaction  :  «  N'estr-ci'  ]^  que  ces  réunions  sont 
amusantes?  —  Vous  voua  amurtéz,  repartit  la  spirituelle 
artiste,  comme  nous  nous  ennuierions.  »  C.  D — r, 

ROUTE ,  mot  employé  oans  l'usa^  comme  synonyme 
de  voie  et  de  chemin,  mais  qui  éveille  particulièrement 
l'idée  qu'on  peut  y  rouler  en  voiture.  Il  parait,  en  effet, 
dériver  du  latin  rota  (roue),  et  les  Anciens  avaient  per- 
sonnifié les  voies  publiques  sous  la  figure  d'une  femme 
appuyée  sur  une  roue.  En  France,  on  distingue  aujour- 
d'hui :  1^  les  routes  impériales  (ci-devant  nationales  et 
royales)^  subdivisées  en  trois  classes  (14  met.,  12"*,  et 
10  à  11 1^  de  largeur),  et  qui ,  ayant  pour  but  l'utilité  gé- 
nérale de  la  nation,  sont  entretenues  aux  frais  de  l'État; 
2°  les  routes  départementales,  subdivisées  également  en 
plusieura  classes  (8  à  lOi"  de  largeur),  tracées  pour  l'utilité 
particulière  des  départements,  et  entretenues  à  leure  frab  ; 
3*>  les  chMiins  de  grande  communication,  entretenus 
aux  frais  des  départements  et  des  communes  intér^sées; 
4^  les  chemins  vicinaux  ou  communaux  (F.  Cheiii?i 
vicmAL),  destinés  à  établir  les  communications  utiles  à 
l'intérêt  privé  des  communes,  ouverts  et  entretenus  aux 
frais  de  ces  communes.  Il  y  a,  en  outre,  une  catégorie  de 
routes  spéciales  comprises  dans  le  système  général  de 
défense  du  pays,  sous  le  nom  de  routes  stratégiques.  En 
1790,  les  routes  furent  placées  dans  les  attributions  da 
ministère  de  l'Intérieur;  en  1799,  on  en  chargea  un  con- 
seiller d'État;  depuis  1839,  cette  branche  de  l'adminis- 
tration dépend  du  ministère  des  travaux  publics.  Nos 
routes  sont  généralement  empierrées  ou  macadamisées, 
si  ce  n'est  aux  abords  et  dans  la  traversée  des  villes  ou 
villages,  où  Ton  a  presque  constamment  employé  le  pavé. 
L'entretien  d'une  route  impériale  est  d'environ  0  fr. 
82  cent,  par  mètre  pour  les  parties  pavées,  et  0  fr.  30  c. 
pour  les  parties  empierrées.  Les  prix  de  revient  sont 
aussi  à  l'avantage  de  ces  dernières  (19  fr.  par  mètre, 
contre  44  fr.  ).  Les  routes  pavées  sont  plus  commodes 
pour  les  voitures  allant  au  pas;  les  routes  cmpii^rrées 
sont  d'un  moindre  tirage  pour  les  voitures  allant  au 
trot.  Le  rapport  de  l'efibrt  de  traction  au  poids  traîné  C5t 
de  1/40  à  1/60  sur  les  routes  pav^^es,  et  de  1/25  à  1/50  sur 
les  empierrements.  Sur  les  routes  bien  entretenues,  les 
frais  de  transport  sont,  pour  le  roulage  ordinaire,  de 
20  centimes  par  tonne  et  par  kilomètre,  avec  une  vitesse 
de  28  à  40  kiloni.  par  jour  ;  et,  pour  le  roulage  accéléré, 
de  35  centimes,  avec  une  vitesse  de  65  à  70  kilom.  La 
construction  et  l'entretien  des  routes  appartiennent  k 
l'administration  des  Ponts-et-chaussées. 

On  attacha,  dès  la  plus  haute  antiquité,  une  grande 
importance  aux  voies  de  communication,  qui  sont,  à  vrai 
dire,  l'un  des  signes  de  la  puissance  et  de  la  richesse  des 
nations.  Il  y  a,  entre  Bagdad  et  Ispahan,  une  route  très- 
ancienne,  qui  remonte,  dit-on,  jusqu'au  temps  de  Sémî- 
ramis.  Les  Égyptiens,  les  Hébreux  et  les  Grecs  distin- 
guaient les  routes  selon  qu'elles  étaient  d*un  intérêt 
général  ou  d'une  utilité  particulière,  et  donnèrent  aux 
premières  le  nom  de  chemins  royaux  {viœ  regiœ  ).  Le  soin 
de  ces  chemins  était  dans  les  attributions  du  Sénat  à 
Athènes,  et  des  premiers  hommes  de  l'État  à  Sparte,  à 


ROU 


1597 


ROY 


Thèbes  et  dans  d'antres  villes  :  des  ofSciers  subalternes 
étaient  chargés  de  la  police  des  yoies  publiques,  sur  le 
bord  desquelles  on  plaçait  des  dieux  tutélaires.  Ce  furent 
les  Carthaginois  qui  imaginèrent  de  paver  les  routes; 
mais  nous  ignorons  le  mode  de  construction,  de  répara- 
tion et  d*entretien  qu*il8  avaient  adopté.  Les  Romains 
donnèrent  à  cette  invention  tous  les  développements  dont 
elle  était  susceptible,  et  couvrirent  leur  Empire  de  voies 
considérables,  dont  quelques-unes  ont  duré  jusc[u*à  nous 
(  V.  Voies  romaines,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  (V Histoire).  Pendant  les  invasions  des  Barbares,  nul, 
si  ce  n*est  la  reine  Brunebaut,  ne  prit  souci  des  voies  de 
communication  par  terre,  qui  subirent  dMrréparables  dé- 
tériorations ou  furent  entièrement  détruites.  Charlemagne 
tâcha  de  rétablir  les  voies  romaines  ;  mais  Tincurie  repa^ 
rut  après  lui.  Dans  les  temps  féodaux,  chaque  seigneur 
entretint  les  chemins  qui  traversaient  son  domaine,  avec 
le  produit  des  péages  qu^il  exigeait.  Un  système  de  sur- 
veillance générale  sur  la  viabilité  ne  fut  possible  qu*après 
un  accroissement  notable  du  territoire  et  de  la  puissance 
des  Capétiens.  Philippe-Auguste  et  Louis  IX  surtout  s'oc- 
cupèrent de  réparer  les  vieux  chemins  et  d'en  ouvrir  de 
nouveaux.  Philippe  de  Beaumanoir  nous  apprend  qu*on 
distinguait  alors  le  sentier  de  4  pieds,  la  carrière  de 
8  pieds,  le  chemin  de  32  pieds,  le  chemin  de  César  de 
64  pieds,  et  le  chemin  royal.  L'habitude  de  planter  des 
arbres  sur  les  grandes  routes  semble  avoir  pris  naissance 
à  cette  époque,  bien  qu'elle  ne  soit  devenue  générale  que 
plus  tard  ;  on  en  plantait  du  moins  aux  abords  des  villes, 
et  une  ordonnance  de  1358  montre  que  le  concierge  du 
Palais  avait  un  droit  sur  les  ormes  des  environs  de  Paris. 
C'est  aussi  à  une  époque  ancienne  que  remonte  l'usage 
d'indiquer  les  directions  par  une  main  placée  ou  dessi- 
née sur  un  poteau  ;  il  en  est  question  dans  les  romans  de 
chevalerie  du  moyen  âge.  On  construisait  aussi,  sur  les 
chemins,  des  fontaines  entourées  de  bancs  de  pierre  ;  il  en 
existe  encore  quelques-unes.  La  guerre  de  Cent  ans  causa 
la  ruine  d'un  grand  nombre  de  routes,  ou  en  empêcha 
l'entretien.  Louis  XII  enjoignit  aux  tribunaux  de  con- 
traindre les  propriétaires  des  péages,  pavages  et  barrages, 
à  entretenir  les  ponts  et  les  chaussées;  mais  ces  trai- 
tants continuèrent  &  percevoirl'impôtet  à  nerien  réparer. 
Lorsqu'on  1583  on  eut  attribué  la  surveillance  des  chaus- 
sées aux  juges  des  Eaux  et  Forêts,  les  résultats  ne  furent 
pas  plus  satisfaisants.  Henri  lY,  sentant  toute  l'impor- 
tance des  communications,  créa,  en  1500,  un  office  de 
grand  voyer  :  Sully,  qui  en  fut  revêtu,  fit  réparer  les 
routes,  rendit  générale  et  maintint,  malgré  de  nombreuses 
mutilations,  la  plantation  des  ormes.  «  C'est  un  Sully, 
disait  le  peuple  en  parlant  de  chacun  de  ces  arbres  ;  fai- 
sons-en un  Biron,  »  et  ils  le  décapitaient.  Louis  XIII  sup- 
prima, en  1G26,  la  charge  de  grand  voyer,  et,  après  avoir 
attribué  la  surveillance  des  grands  chemins  aux  trésoriers 
de  France,  se  la  réserva  dé^nitivement,  mais  sans  faire 
aucune  amélioration.  Il  était  alors  passé  en  principe  que 
chaque  ville  devait  fournir  de  ses  deniers  à  la  réparation 
des  chemins  ouverts  sur  son  territoire  ;  toutefois ,  dans 
certaines  provinces,  c'était  une  charge  inhérente  à  la  pro- 
priété même  des  fonds  de  terre  riverains.  Sous  Louis  XIV, 
Coibert  apporta  un  soin  particulier  à  la  construction  des 
routes;  les  intendants  des  provinces  reçurent  l'ordre 
d'achever  l'œuvre  de  Sully,  et  nientôt  M™*  de  Sévignô  put 
écrire  ce  qui  suit  :  «  Cest  une  chose  extraordinaire  que 
la  beauté  des  chemins;  on  n'arrête  pas  un  seul  moment; 
ce  sont  des  mails  et  des  promenades  partout.  Toutes  les 
montagnes  aplanies;  la  rue  d'Enfer  est  un  chemin  de 
paradis;  mais  non,  car  on  dit  que  le  chemin  en  est  étroit 
et  laborieux,  et  celui-ci  est  large,  agréable  et  délicieux. 
Les  intendants  ont  fait  des  merveilles,  et  nous  n'avons 
pas  cessé  de  leur  donner  des  louanges.  Si  jamais  j'allais 
à  Dieu,  Dieu  me  préserve  d'une  autre  route  I  »  Le  progrès 
continua  sous  Louis  XV  :  une  administration  spéciale  fut 
créCe  pour  les  voies  publiques.  Les  chemins  étaient  alors 
classés  en  chemins  royaux,  chemins  publics  ou  vicinaux, 
et  chemins  de  traverse  :  étaient  réputés  vicinaux  ceux  où 
il  n'y  avait  ni  postes,  ni  messageries ,  ni  voitures  publi- 

3ues;  un  chemin  de  traverse  était  celui  qui  communiquait 
'une  commune  à  une  autre.  On  doit  au  ministre  Tru- 
daine  les  bornes  placées  sur  les  routes  royales,  à  partir 
du  parvis  de  Notre-Dame  à  Paris,  d'abord  de  mille  toises 
en  mille  toises,  puis  de  lieue  en  lieue.  C'est  aussi  de  son 
temps  que  l'on  fixa  la  largeur  que  chaque  route  devait 
avoir  d'après  son  importance.  En  1776,  Turgot  obtint  un 
arrêt  du  Conseil  qui  établit  une  nouvelle  division  des 
chemins  de  la  France  et  fixa  des  règles  pour  leur  con- 
Blruction,  leur  entretien  et  leur  réparation  :  il  y  eut  quatre 


classes  de  chemins^  ceux  qui  menaient  de  la  capitale  aux 
principales  villes  du  royaume,  ceux  qui  conduisaient 
d'une  province  dans  une  autre,  ceux  qui  établissaient  des 
communications  entre  les  villes  d'une  même  province, 
et  ceux  qui  servaient  à  la  circulation  des  habitants  d'un 
même  bourg  ou  d'un  même  village.  Napoléon  I*^*"  donna 
une  fÇTdXide  impulsion  à  la  construction  des  routes  :  on 
lui  doit,  entre  autres,  celles  du  Cenis,  du  Gcnèvre  et  du 
Simplon.  Le  rogne  de  Louis-Philippe  demeurera  égale- 
ment célèbre  pour  ce  genre  de  travaux  d'utilité  publique. 
Sous  Napoléon  III,  des  sommes  considérables  ont  été 
affectées  aussi  aux  voies  de  communication. 

En  Russie  et  en  Norvège,  où  les  pierres  ne  sont  pas  en 
abondance,  on  construit  des  routes  en  bois  :  des  rondins 
mis  en  travers  d'un  chemin  tracé  par  le  hasard  forment 
la  voie  sur  laquelle  roulent,  avec  d'épouvantables  cahots, 
des  véhicules  d'une  construction  grossière.  V.  X.  Gar- 
nier.  Traité  des  chemins  de  toute  espèce^  1834-42,  2  vol. 
in-8o.  B. 

RODTE  (Feuille  de),  sorte  de  çasse-port  militaire,  écrit 
qu'on  délivre  à  une  troupe,  ou  bien  à  un  soldat  qui  voyage 
isolément.  On  y  indique  les  logements  et  le  chemin  à 
parcourir. 

ROUTIER ,  en  termes  de  Marine,  grand  livre  contenant 
des  cartes  marines,  des  vues  de  côtes  ou  de  terres,  des 
instructions  sur  les  routes  à  suivre,  sur  les  écueils  et  les 
passages  à  éviter.  —  Une  carte  routière  est  une  carte  de 
géographie  où  les  routes  sont  marquées. 

ROUTIERS.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d'Histoire, 

ROVi^IES ,  nom  par  lequel  on  désigne  aux  États-Unis 
les  vagabonds  et  les  voleurs  des  grandes  villes. 

ROXBURGH-CLUB,  société  de  bibliophiles  qui  se 
forma  à  Londres  en  1813.  Chacun  des  membres  devait 
faire  réimprimer  k  ses  frais  un  livre  devenu  rare.  V,  Bi- 

BUOMANE. 

ROYAL  DE  BILLON,  ancienne  monnaie  attribuée  à 
tort  à  Philippe-Auguste,  et  qui  fut  frappée  sous  Philippe 
le  Bel.  Sa  valeur  était  la  même  que  celle  des  deniers 
tournois. 

ROYAL  d'or  ,  monnaie.  V,  notre  Dictionnaire  de  Bio» 
graphie  et  d*  Histoire, 

ROYALE.  V.  Barbe. 

ROYALE  (  Place) ,  à  Paris.  V,  notre  Dictionnaire  de  B\o~ 
graphie  et  d^  Histoire, 

ROYALISME,  mot  qui  date  de  la  Révolution  de  1780, 
et  par  lequel  on  désigna  le  dévouement  à  l'idée  monar- 
chique, l'opposition  au  nouvel  ordre  de  choses  qui  s'éta* 
blissait  sur  les  ruines  de  l'ancien  régime.  Sous  le  1^  Em- 
pire, les  Royalistes  furent  ceux  qui  ne  regardaient  comme 
légitime  que  la  monarchie  ancienne,  et  qui  en  désiraient 
ou  en  secondaient  le  rétablissement.  Pendant  le  gouver- 
nement de  la  Restauration,  on  appela  Royalistes  ^  par 
opposition  aux  Libéraux,  les  hommes  qui  voyaient  un 
danger  dans  les  concessions  faites  par  la  Charte  de  1814, 
et  ^i  les  auraient  volontiers  sacrifiées.  Depuis  la  Révo- 
lution de  1830,  leur  nom  fut  réservé  aux  partisans  de  la 
branche  aînée  des  Bourbons,  ceux  de  la  branche  cadette 
prenant  le  nom  d'Orléanistes  014  de  Philippistes.      B. 

ROYAUTÉ,  dignité,  pouvoir  de  roi.  La  royauté  re- 
monte aux  premiers  temps  des  sociétés  humaines ,  et  elle 
a  pris,  à  travers  les  siècles,  des  caractères  très-divers. 
Dans  l'ancien  Orient,  elle  nous  apparaît  avec  le  plus  fas- 
tueux appareil,  entourée  du  respect  et  de  l'admiration 
des  peuples,  consacrée  par  la  religion  :  rattachés  à  la  divi- 
nité même  par  leur  généalogie,  les  princes  la  représentent 
sur  la  terre;  tout  le  monde  s'incline  devant  leur  pouvoir 
solitaire  et  sans  contrôle.  Vêtus  comme  on  se  figurait  les 
Dieux,  objet  des  mêmes  hommages,  k  peu  près  invisibles 
dans  leurs  palais  comme  au  fond  d'un  sanctuaire,  ils  pui- 
saient dans  la  source  apparente  de  leur  autorité  l'audace 
d'accomplir  de  grandes  choses  et  aussi  de  commettre 
d'effrayants  forfaits.  Ninns,  Sémiramis,  Nabuchodonosor, 
les  rois  de  Perse  depuis  Cyrus,  sont  les  types  de  cette 
monarchie  orientale  qui  s'est  perpétuée  presque  sans 
modification  jusqu'à  nous  au  milieu  de^  peuples  de  l'Asie, 
Il  est  vraisemblable  que  la  théocratie  précéda  partout  la 
royauté  ;  c'est,  du  moins,  ce  que  l'on  peut  affirmer  pour 
l'Egypte,  où  Menés,  chef  de  la  classe  des  gue.nriers,  en- 
leva le  pouvoir  aux  prêtres.  Ceux-ci  conservèrent  néan- 
moins une  grande  influence  dans  l'État;  ils  élurent  les 
rois,  déterminèrent  par  les  règlements  les  plus  minu- 
tieux l'emploi  de  toute  leur  vie,  leur  imposèrent,  aussi 
bien  qu'à  la  nation,  des  lois  qu'ils  disaient  émanéos  des 
Dieux,  et  mirent  un  frein  à  leur  despotisme  par  la  menace 
du  jujsoment  publit  qui  serait  prononré  sur  eux  après  la 


ROY 


1598 


ROY 


iiiorl.  La royaiil'iî^'yp tienne  devint  héréditaire  après 
l'ox  pulsion  des  HyksosouPasteurs. — ChezlesHébroiix, 
laroyauttS  telle  qu'elle  fut  instituée  par  Samuel,  n'était 
qu'un  pouvoir oxécutif  permanent:  le  roi  représentait 
Jéliovab  lui-même;  les  prophètes  et  les  prètre8,^ardieu8 
et  interprètes  des  lois  ecriteSy  étaient  i«es  conseillers  ou 
i en  c'^n^eurs, selon  qu'il  était  ou  n'était  pas  fidèle  au  pacte 
fo  1 1  (lamentai  qui  fixait  ses  droits  et  ses  devoirs.  Ce  pacte, 
nous  n'en  possédons  plus  le  texte'  mais  ilyestiaitde 
fréquentes  allusions  danslaBible.  Les  rois  juifs  avalent 
le  droit  de  juger  en  dernier  ressort,  de  faire  grâce,  de 
déclarer  la  guerre  et  de  conclure  des  traités;  leur  pou- 
voir s'étendait  aussi  sur  Torçanisation  du  culte  et  des 
cérémonies.  La  couronne  devait  passer  à  l'un  des  fils  du 
du  roi ,  et,  à  défaut  de  fils,  au  plus  proche  parent.  SaQl, 
David  et  Salomon  furent  consacrés  par  la  cérémonie 
de  l'onction  ;  mais  ce  genre  de  sacre  ne  fut  pas  reproduit 
pour  leurs  successeurs,  à  l'exception  de  Jéhu,  qui  com- 
mençait une  dynastie  différente  de  celle  de  David.  Salo- 
mon, par  son  goût  pour  la  magnificence  et  les  plaisirs, 
donna  à  la  royauté  hébraïque  le  caractère  des  autres 
royautés  de  l'Orient.  —  La  royauté  existait  en  Grèce  pen- 
dant les  temps  héroïques  :  les  rois,  que  les  poèmes  ho- 
mériques appellent  les  pasteurs  des  peuples,  exerçaient 
une  sorte  de  pouvoir  patriarcal  ;  on  les  voit  surtout  pré- 
sider les  assemblées,  commander  les  guerriers,  adminis- 
trer les  choses  de  la  religion,  et  ce  sont  les  fonctions  qu'ils 
conservèrent  à  Sparte,  (dors  que  la  royauté  avait  fait  place 

f)artout  ailleurs  à  des  gouvernements  aristocratiques  ou  à 
a  démocratie.  —  Chez  les  Romains,  depuis  Romulus  jus- 
qu'à Tarquin  le  Superbe,  le  gouvernement  fut  presque 
une  monarchie  constitutionnelle  :  à  côté  du  droit  d'un 
roi  électif,  il  y  avait  le  droit  de  la  nation,  représenté  par 
le  Sénat  et  les  Comices.  Lorsqu'à  la  République  succéda 
TRlmpire,  un  nouveau  pouvoir  se  forma  de  la  concentra- 
tion des  anciennes  magistratures  dans  une  seule  main  : 
rieti  ne  paraissait  extérieurement  changé  quant  à  la  dis- 
tribution des  fonctions  ;  il  y  avait  toujours  des  consuls , 
des  tribuns ,  des  censeurs ,  des  préteurs ,  etc.,  rouages 
légaux  dans  la  marche  des  aifaires,  mais  Tempereur  pos- 
sédait l'essence  de  leurs  divers  pouvoirs,  et,  comme  ces 
pouvoirs  étaient  autrefois  donnés  par  le  peuple,  il  se  sub- 
stituait au  peuple  lui-même  dans  sa  souveraineté.  Le  dé- 
pôt de  la  souveraineté  dans  les  mains  des  Césars  étant 
personnel  et  viager,  le  peuple  à  leur  mort  était  censé 
rentrer  dans  ses  droits  ;  mais  ce  furent  les  soldats,  et  non 
le  peuple  entier,  qui  exercèrent  le  droit  d'élection.  Depuis 
Dioclétien,  les  empereurs  se  rapprochèrent,  par  le  faste 
et  l'étiquette,  des  rois  de  l'Orient  :  leur  séjour  aNicomédie 
ou  à  Byzance  les  jeta  au  milieu  des  délices  asiatiques;  la 
couronne  de  laurier  et  la  robe  de  pourpre  des  anciens 
Césars  furent  remplacées  par  le  diadème  et  par  la  robe 
de  soie  et  d'or;  la  personne  du  prince  et  son  palais  de- 
vinrent sacrés,  et  l'on  n'approcha  de  lui  ou'en  se  proster- 
nant comme  devant  un  Dieu.  Il  était,  d^ailleurs,  grand 
pontife  du  paganisme,  et  cette  union  du  pouvoir  poli- 
ti(jue  et  du  pouvoir  religieux  dans  le  même  homme  ex- 
plique pourquoi  le  christianisme  ne  put  s'accorder  avec 
l'Empire.  ^ 

Avec  les  invasions  germaniques ,  la  royauté  se  présente 
sous  une  forme  nouvelle.  Par  quelque  filiation  dont  le 
souvenir  s'est  perdu,  les  rois  des  Barbares  se  rattachaient 
aux  Dieux  :  à  ce  titre,  les  Âmales  chez  les  Goths,  les  Agi- 
lolflngeschez  les  Bavarois,  les  Mérovingiens  chez  lesFranks 
Saliens,  étaient  des  familles  privilégiées  dans  lesquelles  la 
royauté,  bien  qu'élective,  se  perpétuait.  Mais  les  guerriers 
n'en  choisissaient  pas  moins,  pour  les  expéditions  particu- 
lières ,  tel  chef  qui  leur  inspirait  confiance  par  sa  force 
physique  et  sa  bravoure.  Ces  deux  qualités  étaient  aussi 
celles  qu'un  roi  devait  posséder,  pour  être  respecté  et 
obéi  :  les  derniers  Mérovingiens,  connus  sous  le  nom  de 
Rois  fainéants,  furent  dédaignés  par  leur  tribu.  Le  pou- 
voir royal  était  limité  :  absolu  sur  le  champ  de  bataille, 
il  s'évanouissait  pendant  la  paix.  Clovis  impuissant  à  dis- 
traire du  butin  le  vase  de  Soissons,  et  se  vengeant  plus 
tard  du  soldat  qui  le  lui  a  disputé  ;  Clotaire  I*'  battu  par 
ses  guerriers,  pour  n'avoir  pas  voulu  marcher  contre  les  ^ 
Saxons;  Frédégonde  obligée  de  comparaître  devant  l'as- 
semblée des  Franks,  et  de  jurer  que  son  enfant  Clotaire  II 
est  le  fils  légitime  de  Chilpéric;  Contran  suppliant  ses 
guerriers  de  le  laisser  vivre  encore  quelques  années,  afin 
qu'il  puisse  veiller  sur  la  jeunesse  de  ses  neveux;  Brune- 
haut  menacée  par  les  Ostrasiens  d'être  foulée  aux  pieds 
de  leurs  chevaux  :  tous  ces  faits  et  beaucoup  d'autres 
donnent  une  idée  de  la  faiblesse  des  rois  Barbares,  même 
après  leur  établissement  sur  les  ruines  de  l'Empire  ro- 


main. Ce  n'est  pas  que  Forganisation  de  cet  Empire ,  et  la 
puissance  impériale  à  laquelle  ils  succédaient,  n'aient 
frappé  d'étonnemunt  quelques-uns  d'entre  eux;  mais 
Théodoric  cliez  les  Ostrogoths ,  plus  tard  Charlemagne 
chez  les  Franks,  ne  firent  qu'une  résurrection  factice  de 
l'administraklon  romaine,  et  ne  purent  transmettre  à  leurs 
descendants  œ  pouvoir  absolu  que  poss(^daient  les  anciens 
empereurs.  Lw  seuls  changements  que  l'invasion  ait  ame- 
nés dans  la  condition  de  la  royauté  barbare,  c'est  d'abord 
la  substitution  assez  prompte  de  l'hérédité  à  Télection; 
c'est  ensuite  qne  la  fiuissance  des  rois  eut  pour  base  la 
possession  des  terres  conquises,  et  que  les  guerriers  qui 
reçurent  quelques  portions  de  ces  terres  en  récompense 
de  leurs  services  devinrent  dépendants,  non  plus  par  le 
respect,  mais  par  les  obligations  auxquelles  ils  s'étaient 
astreints  en  retour.  Ce  caractère  nouveau  de  la  royauté 
devait  causer  sa  ruine  :  car,  à  mesure  que  les  rois  s'ap- 
pau\Tirent  par  leurs  dons,  les  propriétaires  de  terres  fu- 
rent moins  dociles,  et,  après  Charlemagne,  ils  s'attribuè- 
rent sur  leurs  domaines  tous  les  droits  de  la  souveraineté; 
en  sorte  que,  pendant  les  temps  féodaux,  la  royauté  ne 
fut  plus  qu'un  nom.  I^e  clergé,  il  est  vrai ,  la  concevant 
comme  un  pouvoir  social ,  comme  une  magistrature  pu- 
blique, avait  essayé  de  l'élever  au-dessus  de  toutes  les 
forces  individuelles ,  pour  trouver  auprès  d'elle  un  rem- 
part; se  rattachant  à  la  tradition  hébraïque,  il  avait  sacré 
les  premiers  Carlovingiens,  dans  l'espoir  que  Ponction 
sainte  leur  attirerait  la  vénération  des  peuples.  Hais  les 
dignitaires  de  l'Église,  évêques  et  2d)bés ,  puissants  sei- 
gneurs eux-mêmes  à  cause  des  grands  biens  qu'ils  avaient 
reçus,  aflermis  désormais  dans  leiu^  domaines  temporels 
et  dans  leur  empire  sur  les  esprits,  s'isolèrent  du  trône 
à  leur  tour,  pour  être  plus  indépendants,  et  voulurent 
tenir  leur  rang  dans  la  hiérarchie  féodale. 

Il  fallut  plusieurs  siècles  pour  reconstituer  la  royauté 
en  France.  Les  Capétiens,  à  l'origine  seigneurs  peu  res- 
pectés de  l'Ile-de-France,  trouvèrent  pour  auxiliaires, 
dans  leur  lutte  contre  la  féodalité,  tous  ceux  qui  avaient 
à  souffrir  de  ce  s^rstème  social ,  c-à-d.  la  bourgeoisie  et 
l'Église  :  l'une,  privée  de  droits  politiques  jusqu'au  jour 
où  elle  forma  des  communes;  l'autre,  envahie  par  la  (ir- 
ruption et  l'ignorance  des  liûques.  Les  Capétiens  ayaient 
pu  prendre  sans  opposition  le  titre  de  roi  ;  c'était  même 
une  sécurité  pour  les  autres  seigneurs,  qui  n'avaient  plus 
à  craindre,  ainsi  qu'au  temps  des  Carlovingiens,  la  reven- 
dication de  leurs  domaines  usurpés  et  la  menace  d'être 
ramenés  à  l'obéissance.  Toutefois,  le  roi  «enant  le  pre- 
mier rang  dans  la  hiérarchie  féodale,  les  Capétiens  de- 
vaient, du  jour  où  ils  auraient  la  force.  Imposer  comme 
un  droit  leur  autorité  souveraine.  Au  reste,  la  royauté 
tend  de  jour  en  jour  avec  eux  à  exister  indépendamment 
de  la  suzeraineté  :  elle  s'érige  en  pouvoir  d'équité,  d'ordre 
et  de  paix,  qui  a  mission  et  droit  d'intervenir  pour  éta- 
blir la  justice  et  protéger  les  faibles,  et  dont  la  fore»  réside, 
non  dans  quelque  fait  antérieur,  mais  dans  son  harmo- 
nie avec  les  besoins  de  la  société,  dans  le  remède  qu'elle 
apporte  ou  promet  aux  maux  qui  la  travaillent.  Aussi 
les  Capétiens  cherchent-ils  à  faire  renaître  l'idée  chré- 
tienne qui  voit  dans  le  roi  l'image  de  Dieu  même  :  Hugues 
Capet  renouvelle  la  cérémonie  du  sacre  ;  il  demande  aussi 
l'onction  sainte  pour  le  fils  ^ui  doit  le  remplacer,  et  ses 

f>remiers  successeurs,  en  imitant  cet  exemple,  donnent  à 
eur  dynastie  naissante  le  prestige  de  la  religion  et  comme 
la  garantie  de  la  perpétuité.  Sous  les  deux  premières 
dynasties,  à  la  mort  de  chaque  roi,  ses  enfants  se  parta- 
geaient l'hérita^,  conformément  aux  coutumes  de  suc- 
cession des  anciens  Germains  :  les  Capétiens  adoptèrent 
la  loi  d'hérédité  du  Droit  féodal  ;  Hugues  Capet  fixa  Tordre 
de  succession  dans  la  ligne  masculine  par  ordre  de  pri- 
mogéoiture,  et  assura  de  cette  manière  l'unité  et  par  con- 
séquent la  force  du  pouvoir  royal.  Enfin  les  Capétiens^  à 
partir  de  Louis  IX,  se  rattachèrent  à  la  tradition  romaine; 
c'était  l'époque  où  le  Droit  romain  commençait  à  être 
étudié  avec  ardeur;  les  légistes  répandirent  dans  la  so- 
ciété les  maximes  les  plus  favorables  an  pouvoir  absolu, 
et  travaillèrent  à  subordonner  les  nobles,  le  clergé  et  les 
communes,  à  ce  pouvoir  public,  général ,  qu'on  nommait 
royauté.  Le  roi  devint  la  loi  vivante ^  et  la  jurisprudence 
formula  cet  axiome  :  «  Si  veut  le  roi ,  si  veut  la  loi.  » 

Tels  sont  les  éléments  dont  s'est  formée  la  royauté  ca- 
pétienne, qui  se  développa  principalement  par  les  con- 
auêtes  de  Philippe-Auguste,  et  par  les  lois  de  Louis  IX  et 
de  Philippe  le  Bel.  La  guerre  de  Cent  Ans  semblait  de- 
voir lui  être  funeste  :  elle  en  sortit,  au  contraire,  plus 
puissante,  car  elle  prit  en  main  la  défense  du  pays  com- 
promis par  les  fautes  des  seigneurs,  elle  créa  l'ooité  de 


ROY 


1599 


RUD 


la  France,  e(  fut  le  symbole  de  la  nationalité.  C'est  ce  oui 
donna  la  force  à  Louis  XI  d'abattre  une  nouvelle  féoda- 
lité, la  féodalité  princière  ou  apanagée.  François  I*'  mit 
la  royauté  hors  de  pages,  c-à-d.  qu'il  la  délivra  de  tout 
contrôle  et  lui  enleva  tout  contre-poids  :  le  Concordat  de 
iolC,  en  lui  donnant  la  nomination  aux  bénéfices  ecclé- 
siastiques, plaça  le  clergé  sous  sa  main  ;  la  noblesse,  déjà 
rompue  à  l'obéissance  par  les  habitudes  de  la  vie  mili- 
taire pendant  les  guerres  d'Italie,  se  transforma,  au  mi- 
lieu des  plaisirs  et  des  intrigues  de  la  cour  nouvellement 
formée,  en  une  sorte  de  domesticité  des  princes;  le  Par- 
lement, qui  voulait  profiter  de  la  formalité  de  l'enregis- 
trement pour  contrôler  les  édits  royaux,  vit  briser  son 
opposition  par  l'emploi  des  lits  de  Justice,  et  dut  rentrer 
dans  ses  attributions  Judiciaires.  L'arbitraire  règne  alors 
dans  toutes  les  parties  de  l'administration  publique,  et 
l'absolutisme  le  plus  complet  est  résumé  dans  cette  for- 
mule de  conclusion  des  ordonnances  :  «  Car  tel  est  notre 
bon  plaisir.  »  L'anarchie  des  guerres  de  religion  a  pu 
faire  faire  à  la  royauté  un  pas  en  arrière  ;  les  derniers 
Valois  l'o  mèoie  avilie  :  mais,  après  l'œuvre  déjà  répa- 
ratrice de  Henri  IV,  le  cardinal  de  Richelieu  rétablit  dans 
•a  plénitude  la  prérogative  royale,  et  il  a  porté 'de  si 
rudes  coups  aux  ennemis  du  trône,  qu'ils  n'ont  pu,  mal- 
gré leur  vouloir,  renverser  Mazarin  et  prendre  une  re- 
vanche. Le  gouvernement  de  Louis  XIV  marque  l'apogée 
de  la  royauté  en  France  :  alors,  en  effet,  triomphe  la 
doctrine  du  droit  divin  (V.  ce  mot).  Le  caractère  de  la 
monarchie  du  xvii*  siècle,  c'est  de  se  donner  comme  la 
personnification  de  cette  volonté  unique,  supérieure,  es- 
sentiellement légitime,  qui  a  seule  le  droit  de  gouverner 
la  société,  c.-à-d.  de  Dieu  même.  Dans  les  Mémoires  et 
Instrwtions  qu'il  rédigea  pour  le  dauphin,  Louis  XIV 
semble  croire  que  les  rois  sont  d'une  nature  supérieure 
au  reste  de  l'humanité,  et  qu'ils  reçoivent  comme  des 
illuminations  d'en  haut  :  «  La  fonction  des  rois  consiste 
à  laisser  agir  le  bon  sens  ;  un  roi  doit  se  décider  lui- 
même,  parce  que  la  décision  a  besoin  d'un  esprit  de 
maître,  et  que,  dans  le  cas  où  la  raison  ne  donne  plus  de 
conseils,  il  doit  s'en  fier  aux  instincts  crue  Dieu  a  mis 
dans  tous  les  hommes  et  surtout  dans  les  rois...  Celui 
qui  a  donné  des  rois  aux  hommes  a  voulu  qu'on  les  res- 
pectât comme  ses  lieutenants,  se  réservant  à  lui  seul  le 
droit  d'examiner  leur  conduite.  Sa  volonté  est  que  qui- 
conque est  né  sujet  obéisse  sans  discernement.  »  Quoi 
d'étrange,  après  cela,  que  les  rois  aient  disposé  librement 
de  la  propriété  (K.  ce  mot),  de  la  liberté  et  de  la  vie  de 
leurs  sujets?  On  comprend  aussi  qu'ils  aient  cru  parti- 
ciper de  l'infaillibilité,  de  la  sainteté  de  Dieu,  et ,  quand 
le  duc  de  La  Feuillade  entretenait  un  luminaire  devant  la 
statue  de  Louis  XIV,  c'était  un  hommage  naturel  plus 
encore  qu'une  flatterie.  Non-seulement  la  royauté  repré- 
sente Dieu  même,  elle  est  encore  la  personnification  de 
l'intérêt  général;  tous  les  besoins,  tous  les  pouvoirs 
se  concentrent  en  elle  :  «  L'État ,  c'est  moi ,  »  disait 
Louis  XIV. 

Arrivée  à  de  pareils  excès  de  doctrine,  la  royauté  de- 
vait rencontrer  une  autre  puissance,  la  souveraineté 
nationale,  et  succomber  dans  la  lutte.  Dès  le  milieu 
du  XIV*  siècle,  dans  les  États  Généraux  de  1357,  Robert 
Lccoq  et  Etienne  Marcel  avaient  conçu  une  importante 
révolution  ,  la  périodicité  des  assemblées  représentatives 
et  leur  droit  à  voter  l'impôt,  c-à-d.  ce  qui  fait  l'essence 
des  monarchies  tempérées  par  le  pouvoir  national.  Les 
Éi?ts  de  Tours,  en  1484,  avaient  formulé  les  mêmes  dé- 
sirs. Depuis  plusieurs  siècles  aussi,  ces  réformes,  qui 
avaient  paru  prématurées  en  France,  avaient  été  accom- 
plies en  Angleterre,  où  les  libertés  publiques  se  dévelop- 
paient sous  un  gouvernement  constitutionnel.  Après  la  Ré- 
volution anglaise  de  1688,  Locke,  dans  un  Traité  du  gouver- 
nemeni  civU ,  destiné  à  Justifier  philosophiquement  cette 
Révolution,  posa  le  dogme  de  la  souveraineté  du  peuple, 
proclama  la  séparation  du  pouvoir  exécutif  et  du  pouvoir 
législatif,  la  nécessité  que  la  loi  fût  faite  et  l'impôt  dé- 
crété avec  le  concours  des  députés  de  la  nation,  la  révo- 
cabilité de  l'autorité  royale  dont  il  serait  fait  mauvais 
usage,  etc.  Louis  XIV  crut  la  royauté  menacée  par  ces 
doctrines;  en  soutenant  Jacques  II  contre  Guillaume  III, 
il  combattit  pour  le  droit  absolu  des  rois.  Vaincu  sur  la 
question  de  principe,  puisqu'il  reconnut  au  traité  de  Rys- 
wyck  le  nouvel  ordre  de  succession  établi  en  Angleterre 
par  la  volonté  nationale,  il  transmit  à  ses  successeurs  un 
pouvoir  gravement  compromis  par  cette  défaite.  Pendant 
le  xviii*  siècle,  les  idées  anglaises  se  propagèrent  en 
France,  et  Montesquieu  en  fut  un  apôtre  convaincu.  Mais 
|A<  était  le  degré  d'abaissement  où  tombait  avec  Louis  XV 


la  royauté  elle-même.  Qu'elle  fut  emportée  avec  ses  abus 
dans  la  tourmente  de  1789.  Les  efforts  de  Meunier,  de 
Malouet,  de  Lally-ToUendal,  dans  l'Assemblée  consti- 
tuante, ne  purent  faire  adopter  le  mécanisme  de  la  Con- 
stitution anglaise,  et,  quand  il  eut  été  décidé  qu'une 
seule  assemblée,  investie  d'une  autorité  souveraine,  co« 
existerait  avec  la  monarchie,  ce  dernier  rouage  ne  tarda 
pas  à  disparaître.  Le  principe  monarchique  fut  restauré 
par  Napoléon  I**",  et  il  a  toij^ours  subsisté  depuis,  sau! 
pendant  le  règne  éphémère  de  la  République  de  1848. 
liais  il  ne  parait  pas  qu'une  monarchie,  de  quelque  nom 
qu'on  l'appelle,  puisse  désormais  aspirer  à  vivre,  sans 
accepter  d'être  limitée  par  une  Constitution  et  par  divers 
pouvoirs,  et  sans  reconnaître  le  principe  de  la  souverai- 
neté nationale.  Les  idées  libérales  et  les  essais  d'institu- 
tions représentatives  pénètrent  Jusqu'au  milieu  des  mo- 
narchies les  plus  absolutistes,  Jusqu'en  Russie  et  en 
Autriche.  V,  A.  de  Saint-Priest,  Histoire  de  la  royauté, 
considérée  dans  ses  origines,  Paris,  1842.  B. 

RUBAN ,  bande  de  soie,  de  fil ,  de  laine  ou  de  coton , 

2ui  sert  à  lier  ou  à  orner  d'autres  tissus,  des  vêtements, 
es  tentures,  des  meubles,  etc.  Les  rubans  où  entrent 
l'or  et  l'argent  reçoivent  généralement  le  nom  de  galons. 
Dès  les  temps  les  plus  anciens,  on  se  servit  de  rubans 
pour  lier  les  cheveux,  attacher  les  sandales,  orner  cer- 
taines chaussures.  Au  moyen  âge,  les  fabricants  de  ru^ 
bans,  qu'on  appelait  TissiUiers-Bubaniers  ou  Otwriers  de 
la  petite  navette,  formèrent  une  corporation,  dont  les 
statuts  furent  promulgués  en  1403  et  re visés  en  1666  : 
l'apprentissage  et  le  compagnonnage  duraient  chacun 
quatre  ans.  De  1680  date  la  mode  des  rubans  gaufrés,  sur 
lesquels  on  imprimait  certains  ornements,  des  fleurs,  des 
oiseaux,  des  ramages,  des  grotesques.  En  notre  siècle,  la 
rubannerie  de  soie  a  pris  des  développements  considé* 
râbles  :  les  rubans  n'ornent  plus,  comme  avant  1780,  les 
coiffures  et  les  habits  des  seigneurs,  ils  sont  réservés  aux 
femmes,  et  leur  prix  peu  élevé  permet  aux  classes  tout  à 
fait  inférieures  d'en  porter,  même  à  profusion. 

RUBAN,  nom  donné  quelquefois  aux  moulures  appelées 
baguettes.  V.  ce  mot. 

RUBB,  monnaie.  V.  Rodbb. 

RUBEBBE ,  sorte  de  viole  au  moyen  &ge.  Le  dos  de  cet 
instrument  était  rond  comme  celui  des  mandolines,  et  sa 
table  collée  sur  les  bords.  La  rubebbe  n'avait  que  deux 
cordes,  qui  s'accordaient  à  la  quinte. 

RUBRICATËURS,  calligraphes  qui  exécutaient  autre- 
fois les  rubriques  dans  les  manuscrits. 

RUBRIQUE,  en  latin  rubrica  (de  ruber,  rouge),  nom 
que  les  Romains  donnaient  quelquefois  au  Droit  civil , 
parce  que,  dans  les  manuscrits,  les  titres  des  lois  étaient 
écrits  avec  de  la  rubrique,  espèce  de  sanguine  ou  d'ocre 
rouge.  Les  titres  des  livres  de  Jurisprudence  moderne 
sont  dits  de  même  rubriques  :  telle  loi  se  trouve  sous 
telle  rubrique.  Après  la  découverte  de  l'imprimerie ,  on 
imprima  en  rouge  tout  ou  partie  des  titres  des  ouvrages  ; 
de  là  l'usage  d'appeler  rubriques,  non-seulement  ces 
titres,  mais  toutes  les  lettres  rouges  contenues  dans  un 
livre.  Le  lieu  où  l'on  imprimait  un  livre  se  mettait  aussi 
en  rouge;  ce  livre  poitait  donc  la  rubrique  du  lieu.  Par 
extension,  on  dit,  dans  le  Journalisme,  qu'on  lit  telle  ou 
telle  nouvelle  sous  la  rubrique  de  Londres,  devienne,  etc. 
Enfin,  en  termes  de  Liturgie,  le  mot  rubrique  désigne 
les  règles  placées  au  commencement  du  Bréviaire  et 
du  Missel,  et  qui  déterminent  l'ordre  et  la  manière  dont 
il  faut  dire  ou  faire-  les  différentes  parties  de  Toffice  de 
l'Église  :  ces  règles  étaient  autrefois  imprimées  en  carac- 
tères rouges.  B. 

RUCHE ,  bande  plissée  d'étoffe,  de  tulle  ou  de  dentelle, 

i  sert  d'ornement  à  diverses  parties  de  l'habillement 
es  femmes,  tels  que  bonnets,  chapeaux,  robes,  col- 
lerettes.   

RUDENTDRE  (du  latin  rudens,  corde),  moulure  en 
forme  de  corde  ou  de  ruban ,  dont  on  remplit  quelquefois 
les  cannelures  des  colonnes  jusqu'au  tiers  de  leur  hau- 
teur. Ces  colonnes  sont  dites  rudentées. 

RUDÉRATION,  opération  qui  consiste  à  appliquer  sur 
les  parements  d'un  mur  en  moellons  ou  en  pierres  brutes 
un  premier  enduit  de  mortier  grossier,  sur  lequel  on 
étend  ensuite  l'enduit  lisse  et  poli. 

RUDIAIRES.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

RUDIMENT ,  mot  d'origine  latine  qui  signifie  comment 
cernent.  Il  se  dit  des  premières  notions  d'un  art  ensei- 
gnées aux  esprits  non  encore  formés.  Despautère  a  donné 
ce  titre  à  la  1"  partie  de  ses  Commentarii  grammatici^ 
et  QD  1*8  longtemps  appliqué  d'une  manière  toute  spô- 


dei 


RUN 


1600 


RUS 


eiale  aux  livres  élémentaires  sur  la  langue  latine  :  depuis 
Lliomond,  il  ne  se  dit  plus  guère  que  de  la  Grammavr» 
latxM  de  ce  célèbre  professeur.  P. 

RUDIS.  K.  ce  mot  dans  notre  Ihctionnaire  de  Biogra» 
phiê  et  d^ Histoire. 

RUE,  voie  publique  bordée  de  bâtiments  dans  les 
dtles,  bourgs  et  villages.  On  fait  venir  le  mot  du  latin 
rupta  ou  ruga  ( terre  défrichée),  ou  du  grec  rhéô  ou  rhtiâ 
(couler),  parce  que  c*est  par  les  rues  que  s^écoulent  les 
eaux.  La  salubrité,  la  sédùrité  publique,  la  belle  ordon- 
nance des  villes,  exigent  que  des  mesures  soient  prises 
pour  la  largeur  et  le  nettoyage  des  rues,  pour  la  hauteur 
des  maisons,  etc.  V.  Augnement,  Balayage,  Boues  et 
Immondices,  Bâtiments  (Police  des).  Salubrité,  Voirie. 

RUELLE.  Outre  sa  signification  propre  de  petite  rue, 
ce  mot  désigne  Tespace  qui ,  dans  les  chambres  à  cou- 
cher, surtout  dans  celles  qui  ont  des  alcôves,  se  trouve 
libre  entre  le  lit  et  le  mur.  Au  xvn*  siècle,  on  appelait 
ruelles  les  alcôves,  les  chambres  à  coucher  des  Précieuses 
(  V.  ce  mot)  ;  les  visites  y  étaient  reçues,  et  Ton  y  cau- 
sait comme  dans  un  salon.  On  peut  visiter  comme 
exemples  la  chambre  à  coucher  de  Louis  XIV  à  Ver- 
sailles, et  celle  d*Anne  d'Autriche  au  Louvre. 

RUHKENG  (Dialecte).  F.  Birmane  (Langue). 

RULE  BRITANNIA,  c-àrd.  Triomphe,  Bretagne,  chant 
national  des  Anglais,  dans  lequel  le  poôte  célèbre  l'antique 
liberté  de  TAngleterre,  et  revendique  pour  son  pays  la 
domination  des  mers.  Il  a  été  composé  par  Thomson, 
Tauteur  du  poôme  des  Saisons,  dans  un  orame  intitulé 
Alfred,  pièce  fantastique  dite  à  mcuque  par  les  Anglais, 
et  joué  en  1740,  à  Clifden,  devant  le  prince  et  la  prin- 
cesse de  Galles.  Le  chant  se  compose  de  six  couplets  en 
vers  fambiques  de  quatre  pieds,  à  rimes  croisées ,  et 
chaque  couplet  a  6  vers,  y  compris  2  vers  pour  le  refrain. 
Rule  Britannia  est  une  des  plus  belles  inspirations  du 
génie  poétique  et  du  patriotisme  le  plus  profondément 
senti  ;  on  y  trouve  la  calme  fierté  du  caractère  anglais. 
Le  célèbre  compositeur  Arne  en  fit  la  musique,  et  rendit 
assez  heureusement  les  sentiments  énergiques  exprimés 

{»ar  le  poète,  surtout  dans  le  refrain  ;  néanmoins,  il  ne 
'égale  pas.  Ce  chant  a  été  inséré,  sous  le  titre  de  Ode  in 
the  mask  of  Alfred,  dans  les  œuvres  de  Thomson,  car  il 
lui  appartient  en  propre,  bien  que  la  pièce  d'Alfred  ait 
été  écrite  en  société  avec  le  poète  David  Mallett  ou  Mal- 
loch. 

RUMONIQUE  (Dialecte).  V.  Rh^er. 

RUNES,  caractères  particuliers  d'écriture  de  la  race 
germanique  primitive.  Runa  signifiant  mystère,  les  Runes 
étaient  des  signes  mystérieux,  qui  avaient  besoin  d'inter- 
prétation. On  fait  aussi  venir  le  mot  de  runen '(faire 
une  entaille),  et  c'est  en  effet  de  cette  manière  que  se  tra- 
çaient les  runes  sur  la  pierre  ou  le  bois.  Il  existe  en 
Norv^,  et  dans  la  province  suédoise  d'Upland,  des  ro- 
chers couverts  d'inscriptions  runiques.  Plusieurs  lettres 
de  l'alphabet  runic[ue  présentent  un  certain  rapport  avec 
les  caractères  sémitiques  ;  d'autres  ont  de  l'analogie  avec 
l'écriture  cunéiforme  :  on  ne  sait  ni  comment  ni  à  quelle 
époque  elles  arrivèrent  aux  Germains.  11  n'y  avait  primi- 
tivement que  15  runes,  exprimant  les  articulations  a,  b, 
f,  h,  i,  fc,  l,  m,  n,  0,  r.  s,  t,  th,  u.  Les  Scandinaves 
ajoutèrent  plus  tard  quelques  caractères  pour  des  sons 
subordonnés,  et,  en  inscrivant  un  point  dans  ceux  qui 
représentaient  fc,  t,  t,  b,  figurèrent  les  articulations  g, 
e,  d,  p.  De  leur  côté,  les  Anglo-Saxons  constituèrent ,  au 
moyen  de  certains  changements,  retranchements  ou  ad- 
ditions faits  aux  anciens  caractères,  un  alphabet  de 
24  caractères.  Les  run«5  marcomans,  dont  Raban  Maur 
fait  le  premier  mention  au  ix*  siècle,  sont  regardés 
comme  un  remaniement  des  runes  anglo-saxons,  opéré 
par  des  savants ,  sans  aucun  but  d'usage  pratique.  L'in- 
troduction du  christianisme  amena  l'abandon  des  runes  ; 
ils  furent  remplacés,  chez  les  Goths,  par  un  alphabet 
nouveau  que  créa  Ulfllas  au  iv*  siècle,  et  nlus  tard,  dans 
le  nord  et  l'ouest  de  l'Europe,  par  l'alphanet  romain.  — 
Depuis  le  xvi*  siècle,  on  s'est  occupé  de  réunir  des  inscrip- 
tions runiques;  mais  leur  interprétation  donna  lieu  aux 
systèmes  les  plus  divers  et  les  plus  hasardés,  et  les  an- 
ciens ouvrages  relatifs  aux  runes  n'ont  plus  guère  de  va^ 
leur  aujourd'hui  qu'en  raison  d9s  matériaux  qu'ils  peuvent 
contenir.  Cest  G.  Grimm  qui  a  donné  à  la  théorie  des 
runes  une  base  scientifique. 

Les  runes  n'ont  pas  seulement  servi  d'écriture;  on  les 
employa  comme  moven  d'interroger  le  sort  et  de  prophé- 
tiser. Nous  lisons  dans  Tacite  qu'on  prenait  un  certain 
nombre  de  bâtons  runiques,  c-à-d.  sur  chacun  desquels 
00  avait  gravé  un  re^ie,  et  'fu'après  les  avoir  agites  en- 


semble, on  les  Jetait  sur  un  morceau  d'étoffe  déplié;  oo 
cherchait  ensuite  à  trouver  un  sens  dans  les  caractères 
que  le  hasard  avait  Juxtaposés.  Les  noms  des  lettre* 
étant  significatifs,  une  valeur  magique  fut  attachée  à  cha- 
cune d'elles  :  ainsi ,  une  n,  dont  le  nom  est  ncUh  (  néces- 
sité), tracée  sur  le  revers  de  la  main  ou  sur  les  ongles, 
préservait  des  trahisons  féminines;  un  th  {thur,  géant) 
inspirait  l'épouvante;  il  y  avait  des  runes  fanestes,  des 
runes  propices,  des  runes  médicinaux;  les  uns  assoraif'nt 
la  victoire,  d'autres  garantissaient  des  naufrages,  etc.  On 
gravait  des  runes,  comme  signes  préservatifs  et  protec- 
teurs, sur  une  foule  d'objets,  tels  que  cornes  à  boire, 
coupes,  avirons,  fléaux,  fourreaux  d'épée,  manches  de 
hache,  etc.  Ainsi,  on  trouva  en  1734  à  Gallehuas,  près 
de  Tondern,  une  corne  d'or  du  iv«  siècle,  couverte  de 
runes  :  placée  an  musée  de  Copenhague,  elle  fut  volée 
et  fondue  par  des  malfaiteurs.  Une  bractéate  d'or  du 
musée  de  Stockholm  présente  l'alphabet  anglo-saxon  de 
24  lettres.  Il  existe  d'anciens  calendriers  en  bois,  sur  les- 
quels on  a  indiqué  en  caractères  runiques  les  constella- 
tions, le  nombre  d'or,  les  lettres  dominicales,  les  jours 
de  la  semaine;  on  y  voit  souvent  des  gravures  hiérogly- 
phiques qui  représentent  pour  chaque  jour,  soit  la  qua- 
lité dominante  du  Saint,  soit  quelque  circonstance  de  sa 
vie,  par  exemple,  une  harpe  pour  S'  David,  une  paire 
de  souliers  pour  S*  Crépin ,  etc.  —  V.  Grimm,  Sur  les 
Runes  allemands,  Gœttingue,  1821,  et  Sur  la  littérature 
runique,  Vienne,  1828  ;  Brynjulfsen,  Periculum  runolo' 
gicum,  Copenhague,  1823;  Liljezren,  Runlœra,  Stock- 
holm ,  1832  ;  Edelestand  du  Ménl ,  Mélanges  archéolo' 
giques  et  littéraires,  Paris,  1850,  in-8°. 

RUPTURE,  en  termes  de  Peinture,  opération  par  la- 
quelle on  forme  sur  la  palette  les  couleurs  variées,  les 
tons  et  les  teintes,  par  le  mélange  des  couleurs  primi- 
tives entre  elles  ou  avec  le  noir  et  le  blanc. 

RURAL  (Droit),  droit  spécial,  encore  à  codifier,  qui 
comprend  dans  son  ensemble  les  dispositions  législatives, 
traditions  et  usages  auxquels  sont  soumises  l'acquisition, 
la  conservation  et  la  transmission  des  propriétés  rurales. 
Cette  codification,  plusieurs  fois  tentée,  encore  aujour- 
d'hui promise  par  le  gouvernement,  n'a  pas  Jnsçpi'à  pre- 
ssât été  réalisée,  à  cause  des  difficultés  exceptionnelles 
Su'elle  présente,  et  qui  tiennent  à  la  nature  particulière 
e  ce  Droit.  Le  Code  niral  ne  peut  pas  contenir  de  dis- 
positions nouvelles  :  innover,  ce  serait  ou  provoquer 
l'inobservation  de  la  loi,  ou  jeter  dans  les  usages  une 
perturbation  dont  les  effets  seraient  incalculables.  Ici  il 
s'agit  de  réglementer  les  usages,  essentiellement  varia- 
bles, et  de  leur  donner  une  force  nouvelle  en  augmen- 
tant la  publicité.  Les  eaux,  les  bois,  les  moissons,  les 
mines,  les  privilèges  et  les  restrictions  apportés  à  la  pro- 
priété foncière  dans  l'intérêt  public,  la  fixation  et  la  limi- 
tation des  droits  qui  en  découlent,  comme  les  droits  de 
chasse  et  de  pèche,  sont  du  ressort  du  Droit  rural.  Les 
rapports  de  propriétaire  à  fermier  ou  à  colon,  de  maître 
à  ouvrier,  la  législation  des  chemins,  des  cours  d'eau,  les 
charges  qui  grèvent  la  propriété  foncière,  l'impôt  et  son 
assiette,  sont  encore  des  accessoires  du  Droit  rural,  qui 
embrasse  tous  les  moyens  d'acquérir,  de  conserver,  de 
protéger  et  d'aliéner  la  propriété  foncière.  On  ne  peut 
(fue  faire  des  vœux  pour  que  l'ensemble  de  cette  législa- 
tion, réuni  dans  une  compilation  habile  et  complète,  soit 
mis  à  la  portée  de  tous,  et  mette  fin  aux  difficultés  qu'en- 
tretient et  soulève  l'ignorance  ou  l'oubli  des  usages  ru- 
raux. V.  Vaudoré,  le  Droit  rural  français,  1823,  2  vol. 
in-8®  ;  Devemeilh,  Observations  des  commissions  consul^ 
tatives  sur  le  projet  de  Code  rural,  1810-14, 4  vol.  in-4*; 
Biret,  Code  rural,  1824,  in*8";  Cappeau,  De  la  législation 
rurale  et  forestière,  1824,  3  vol.  in-8<*;  Guichard,  Cours 
de  Droit  rural,  1826,  in-8°,  et  Manuel  de  la  police  ru- 
rale et  forestière,  1829,  in-8°;  Foumel,  les  Lois  rurales 
de  la  France,  1833, 2  vol.  in-12;  Neveu  de  Rotrie,  Com- 
mentaire des  lots  rurales  de  la  France,  1815,  in-8";  Val- 
serres,  Manuel  de  Droit  rural;  Bourguignat,  Trotte' com- 
plet  de  Droit  rural  appliqué,  1852,  in-8®.  R.  d'B. 

RUSPONE ,  monnaie  d'or  de  Toscane,  qui  valait  3  se- 
quins  aux  lis,  c.-ii-d.  36  fr. 

RUSSE  (Art).  Les  Beaux-Arts  vivant  d'inspiration  et 
de  liberté,  les  institutions  de  la  Russie  ne  leur  ont  guère 
été  Jusqu'ici  favorables.  Une  belle  nature  ne  leur  a  pa5 
moins  fait  défaut.  Toutefois,  le  gouvernement  n'a  pas  p  u 
négliger  un  aussi  puissant  moyen  de  civilisation;  mais, 
s'il  a  donné  des  encouragements  aux  architectes,  aux 
peintres,  aux  sculpteurs,  aux  graveurs,  il  n'est  point  par- 
venu à  créer  une  école  nationale,  et  les  artistes  qui  vom 
se  perfectionner  à  l'étranger  en  rapportent  qi^clque  i«» 


RUS 


1601 


RDS 


lent,  sans  parvenir  h  roriginalit^.  —  En  Architecture,  les 
Russes  n*ont  rien  trouvé,  et  leurs  imitations  sont  géné- 
ralement peu  judicieuses  :  le  caractère  des  édifices  n'est 
g  oint  en  harmonie  avec  les  conditions  physiques  au  mi- 
eu  desquelles  la  volonté  des  czars  les  a  érigés.  Les  mo- 
ouments  religieux  reproduisent  ceux  de  Tart  byzantin. 
On  est  étonné  de  retrouver  le  style  italien  dans  les  con- 
structions civiles  modernes,  sans  que  rien,  dans  un  pays 
d'une  telle  latitude,  annonce  ou  justifie  le  choix  de  ce 
genre  d'architecture.  Ces  toits  horizontaux,  si  peu  favo- 
rables à  Técoulement  des  neiges;  ces  statues  de  marbre, 
couvertes  de  frimas,  et  dont  la  nudité  donne  le  frisson  ; 
ces  façades  à  colonnes,  dont  les  fenêtres  manquent  de 
lumière  :  tout  cela  est  un  non-sens. 

Les  Russes  sont  doués  d'une  heureuse  organisation 
musicale.  Leurs  chants  nationaux  ont  une  mélodie  douce, 
empreinte  de  mélancolie,  et  (quelquefois  vive  et  gra- 
cieuse. Les  instruments  de  musique  qui  leur  sont  parti- 
culiers sont  :  le  rojok,  espèce  de  cornet  des  montagnes, 
Îu'on  croit  être  le  chalumeau  pastoral  de  Théocrite  ;  le 
udka  {V.  ce  mot);  la  gelaïka  ou  sipooka,  espèce  de 
double  flûte,  semblable  à  celle  des  Grecs  ;  la  swirella , 
flûte  de  roseaux  ou  flûte  de  Pan  ;  le  rog,  espèce  de  trompe 
de  chasse;  le  pilai  y  sorte  de  cornemuse;  la  balaïka,  le 
gudak,  le  gusli,  le  rilek  (  V.  ces  mots);  le  loschki,  modi- 
fication du  sistre  antique.  Les  Russes  ont  aussi  une  mu- 
sique de  cors  d*un  caractère  fort  original  (V.  Cor  busse). 
On  cite,  parmi  les  compositeurs,  Bortniansky  et  Béré- 
■oosky,  dans  la  seconde  moitié  du  xviii®  siècle,  et 
Glinka,  au  xix«. 

RUSSE  (Langue),  la  plus  répandue  des  langues  slaves, 
celle  qui  a  le  plus  fidèlement  conservé  les  éléments  em- 
pruntés au  vieux  slavon  ou  slavenski,  et  qui  présente  les 
traces  les  plas  évidentes  d'une  origine  aryenne.  Le  vieux 
slavon  fut  longtemps  la  seule  langue  littéraire  de  la 
Russie,  et  Ton  ne  {ugea  pas  que  le  russe  vulgaire,  em- 
ployé dans  les  relations  ordinaires  de  la  vie,  fût  digne 
d'être  écrit.  Mais,  depuis  Pierre  le  Grand,  le  slavon  n'est 
plus  qu'une  langue  liturgique  ou  ecclésiastique,  désor- 
mais invariable  :  le  russe,  qui  s'est  élevé  au  rang^  de 
langue  cultivée,  contient,  outre  son  vocabulaire  spécial , 
certains  mots  tirés  du  slavon  des  livres,  quelques  termes 
grecs  gue  la  communauté  de  religion  entre  la  Russie  et 
l'Empire  byzantin  a  naturellement  introduits  et  qui  ex- 
priment principalement  des  idées  religieuses ,  enfin  des 
mots  tartares  apportés  par  l'invasion  des  Mongols,  et  des 
mots  latins,  allemands,  hollandais,  anglais  et  français, 
provenant  du  développement  des  relations  politiques  et 
commerciales.  La  langue  russe  possède  une  grande  abon- 
dance de  racines,  et  une  singulière  facilité  pour  faire  des 
mots  composés,  des  augmentatifs  et  des  dimic^itifs.  Elle 
a  trois  genres ,  que  distinguent  des  flexions  très-carac- 
téristiques, mais  seulement  deux  nombres,  parce  qu'elle 
n'a  pas  conservé  le  duel  du  slavon.  Comme  dans  les 
autres  langues  slaves,  il  n'y  a  pas  d'article  défini.  La 
déclinaison  a  lieu  au  moyen  de  désinences,  et  offre  une 

f'ande  complication  de  règles  et  d'exceptions  :  il  y  a 
cas;  certains  grammairiens  réduisent  à  4  les  para- 
digmes de  déclinaison,  tandis  que  d'autres  en  comptent 
90  pour  les  substantirs  et  40  pour  les  adjectifs.  On  a 
compté  aussi  13  paradigmes  de  conjugaison,  sans  compter 
les  verbes  irréguliers  et  les  verbes  défectifs.  Le  russe 
ne  peut,  comme  les  autres  langues  slaves,  employer  par- 
tout le  verbe  sans  pronom  personnel;  dans  la  plupart 
des  cas,  il  est  obligé  d'y  ajouter  ce  pronom.  On  peut,  à 
l'aide  de  flexions  particulières,  ajouter  à  l'idée  qu'exprime 
la  racine  du  verbe  certaines  circonstances  de  l'action  : 
par  exemple,  l'infinitif  est  susceptible  d'être  indéfini  ou 
défini,  simple  ou  fréquentatif.  Des  auxiliaires,  signifiant 
être  et  devenir,  entrent  dans  la  composition  du  futur 
indéfini  et  de  la  voix  passive;  mais  les  temps  passés  ne 
se  forment  pas  de  cette  manière.  Le  conditionnel  et  le 
subjonctif  n'existent  pas  ;  on  y  supplée  par  des  particules. 
Les  conjonctions  sont  peu  nombreuses.  La  syntaxe  de  la 
langue  russe  est  simple  et  naturelle;  bien  que  les  cas  de 
déclinaison  permettent  de  prendre  beaucoup  de  liberté 
pour  l'ordre  des  mots,  on  remarque  dans  les  écrivains 
une  tendance  de  plus  en  plus  prononcée  à  éviter  les 
inversions.  La  prononciation,  qui  n'est  pas  toujours  con- 
forme à  Torthographe,  a  de  la  gr&ce  et  de  l'harmonie, 
et  le  russe  est  incontestablement  la  plus  douce  des  lan- 
gues du  Nord.  Pour  l'écrire,  on  emploie  34  caractères 
empruntés  à  Talphabet  slavon,  et  qui  ont  reçu  une  forme 
ylus  cursive.  La  langue  russe  [roi^ki)  est  parlée  en  plu- 
sîpiirs  dialectes  :  ainsi,  le  veliki-rouski  ou  russe  de  la 
Grande-RuMÎe,  idiome  de  l'autorité  et  de  la  littératart. 


a  son  type  le  pins  pur  à  Moscou;  le  maUhrouski,  ippeM 
aussi  russniaque  et  petit  russien,  s'éloigne  du  précédent 
pour  l'acception  de  beaucoup  de  mots,  pour  la  gram- 
maire, et  pour  la  prononciation  {V.  Rossniaqob);  il  en 
est  de  même  du  dialecte  en  usage  dans  la  Russie  Blanche, 
dans  les  gouvernements  de  Volhynie  et  de  Podolie,  dam 
une  partie  de  la  Pologne  et  de  la  Gallicie;  le  souzdalienf 
parlé  dans  le  gouvernement  de  Vladimir,  contient  un 
certain  nombre  de  mots  étrangers  aux  langues  slaves  ;  le 
dialecte  d'Olonetz  est  mêlé  de  mots  finnois. 

V.  H.-W.  Ludolf,  Grammatica  rtAssica,  Oxford,  1696, 
in-l°;  Lomonosoff,  Gramnuùre  nuse,  1755;  Charpen- 
tier, Êlémetits  de  la  langue  russe,  S^-Pétersbourg,  1768, 
in-12;  Grammaire  de  V Académie  impériale,  S'  Péters- 
bourg,  1802;  Maudru,  Éléments  raisonnes  delà  langue 
russe  ,  Paris ,  1802,  2  vol.  in-8«;  A.-W.  Tappc,  Gram- 
maire  théorique  et  pratique  de  la  langtM  russe,  en  alle- 
mand, S'-Pétersbourg  et  Riga,  1810;  J.-S.  Vater,  Gram^ 
maire  pratique  de  la  langue  russe,  en  allem.,  Leipzig, 
1815,  in-8°;  Heym,  Grammaire  russe,  en  allem.,  Riga« 
1816  ;  Puchmayer,  Grammaire  russe,  en  allem. ,  S*-Péters- 
bourg,  1821  ;  Hamonière,  Grammaire  russe,  Paris,  1817  ; 
Gretsch,  Grammaire  russe ,  S^Pétersbour^,  1823,  tra- 
duite en  français  par  Reifi*,  1828;  Dictionnaire  de  VAcor- 
demie  impériale,  S*-Pétersbourg,  1789-96,  6  vol.  in-4<*; 
Heym,  Dictionnaire  russe-français-allemand ,  Leipzig, 
3  vol.  in-8®;  Reiff*,  Dictionnaire  français-russe  et  russe- 
français,  1835,  et  Dictionnaires  parallèles  des  langues 
russe,  française,  allemande,  anglaise,  S^-Pétersbourg  et 
Leipzig,  1855,  2  vol.;  Schmidt,  Nouveau  Dictionnaire 
portatif  russe-français  et  français-russe,  Leipzig,  1842  ; 
Lemontey,  Essai  sur  la  littérature  et  la  langue  russe, 
dans  le  t.  V  de  ses  Œuvres  ;  Balbi,  Coup  d*œU  sur  l'hif» 
toire  de  la  langue  slave,  dans  son  Introduction  à  V Atlas 
ethnographique, 

RUSSE  (Littérature).  Les  plus  anciens  monuments  au- 
thentiques de  la  littérature  russe  datent  du  xi"  siècle  : 
ce  sont  les  lois  d'Iaroslaf,  dont  le  texte  a  été  découvert 
seulement  en  1738,  et  la  Chronique  de  Nestor.  Les  chants 
populairp  de  la  même  époque  et  des  âges  précédents  ne 
n'^Qs  sont  parvenus  qu'après  avoir  subi  des  modifications 
ultérieures  :  les  traditions  mentionnent  Bolan  comme  le 
plus  célèbre  des  anciens  poètes ,  et  l'œuvre  la  plus  re» 
marquable  est  VExpéditton  dlgor  contre  les  habitants 
de  Poloutx,  poème  composé  vers  l'an  1200,  et  retrouvé 
seulement  en  1795  à  Kiew,  par  le  prince  Mussin  Pouch- 
kine. Les  discordes  civiles  et  l'invasion  des  Mongols  a« 
xni*  siècle  arrêtèrent  l'essor  des  esprits,  et,  pendant  plu- 
sieurs siècles,  les  études  ne  furent  guère  cultivées  que 
dans  les  couvents.  Quelques  chants  en  Thonneur  de  Vla- 
dimir le  Grand  et  de  ses  chevaliers,  les  Annales  écrites  par 
Simon,  évêque  de  Susdal,  le  Livre  des  Degrés  du  métro- 
politain Cyprien,  et  la  chronique  de  Sophie,  qui  em- 
brasse les  temps  écoulés  de  862  à  1534,  tels  sont  les  seuls 
ouvrages  qu'on  puisse  mentionner  jusqu'au  xvi'  siècle, 
et  ils  appartiennent  à  la  littérature  slave  proprement  dite. 

La  littérature  se  ranima  après  la  chute  de  la  domina- 
tion des  Mongols.  Iwan  IV  fonda  des  écoles,  et  créa,  en 
1564,  la  première  imprimerie  à  Moscou.  L'évêque  métro- 
politain Macarius  publia  des  Vies  de  Saints  et  d'Archi- 
mandrites, et  Zizania  une  Grammaire  slave.  En  1644, 
Alexis  Michailovitch  fit  imprimer  une  collection  impor- 
tante de  lois  russes,  et,  bientôt  après,  fut  fondée  l'Aca- 
démie de  Moscou,  où  l'on  enseigna  la  grammaire,  la  rhé- 
toriaue,  la  poétique,  la  dialectique,  la  philosophie  et  la 
théologie.  Le  ministre  Matfiejeflf,  Nikon,  le  prince  Con- 
stantin Basile  d'Ostrog,  méritèrent  aussi  des  lettres  par 
la  protection  éclairée  qu'ils  leur  accordèrent.  On  vit  pa- 
raître une  foule  d'Annales  écrites  soit  en  slave  plus  ou 
moins  altéré,  soit  dans  le  dialecte  russo-polonais  usité  en 
Lithuanie,  et,  par  suite  des  relations  commerciales  et 

Eolitiques,  le  polonais  domina  dans  les  réunions  des 
oiards.  A  Kiew  surtout,  les  étudiants  se  mirent  à  repré- 
senter des  récits  dialogues  de  la  Bible  ;  ces  essais  gros- 
siers firent  bientôt  place  à  des  drames  composés  par 
Siméon  de  Polocz,  précepteur  de  Fédor  III,  et  traducteur 
d'un  Psautier  en  vers  :  ses  pièces  de  Nabuchodonosor  et 
de  V Enfant  prodigue  furent  jouées  avec  succès  à  la  cour^ 
sous  les  auspices  de  la  princesse  Sophie. 

Jusque-là,  le  russe  n'avait  pas  encore  été  élevé  à  la 
dignité  de  langue  littéraire.  Pierre  le  Grand  voulut  qu'on 
fit  au  plus  vite  à  la  Russie  une  littérature,  comme  on  bâ- 
tissait des  villes  et  des  manufactures.  En  1689,  Te&sing, 
imprimeur  à  Amsterdam,  fit  paraître  le  premier  livra 
russe,  une  sorte  d'Histoire  universelle.  Un  grano  nomnre 
d'ouvrages  français,  allemands  et  hollandais  furent  tra* 

101 


RUS 


1602 


RUS 


4uiU  en  russe.  En  1705,  on  imprima  la  première  gaiette 
rasse  à  Moscou  ;  une  autre  fut  publiée  a  S*-Pétersbour^ 
en  1714.  Pierre  le  Grand  fonda,  d*après  le  plan  qui  lui 
avait  été  fourni  par  Leibniz,  rAcadémie  des  Sciences  de 
S^-Pétersbourg ,  qui  ne  s'ouvrit  toutefois  qu'après  sa 
mort,  et  à  laquelle  fut  i^outé  un  Gymnase,  destiné  à 
former  des  maîtres.  Ces  fondations  éveillèrent  naturelle- 
ment Tesprit  littéraire  et  scientifique.  Les  principaux  au- 
teurs de  cette  époque  sont  :  Dmitri  ou  Démétrius,  évèque 
de  Rostoff,  auteur  d'une  Vie  des  Saints  ;  Jaworski,  pré- 
d'jcateur  distingué;  Prokopovitch ,  archevêque  de  Novo- 
^orod,  qui  publia  plus  de  60  écrits  sur  la  théologie  et 
%ur  rbistoire,  et  auteur  d'une  Oraison  funèbre  de  Pierre 
)e  Grand  dont  Téloquence  est  encore  admirée  ;  le  moine 
Nicodème  SelliJ ,  qui  réunit  beaucoup  de  matériaux  pour 
l'histoire  de  sa  patrie.  Trediakovsky  fixa  les  règles  de  la 
prosodie,  mais  ne  donna  lui-même  qu'une  médiocre  tra- 
duction en  vers  du  TéHmaqxte,  La  poésie  fut  cultivée  avec 
Élus  de  succès  par  deux  auteurs  cosaques,  Klimoffsky  et 
laniloff,  et  surtout  par  le  prince  Kantemir,  auteur  de 
fables  et  de  satires,  et  qui  a  fait  connaître  à  ses  compa- 
triotes Horace  et  Fontenelle.  Enfin  TatischtschefT  com- 
posa une  Histoire  de  Russie,  qui  est  encore  estimée. 

Le  développement  le  plus  brillant  de  la  littérature 
russe  date  des  règnes  d'Elisabeth  et  de  Catherine  II.  La 
première  fonda  l'Université  de  Moscou  en  1755,  et  l'Aca- 
démie des  Arts  en  1758  :  tous  la  seconde,  on  créa  l'École 
des  Mines  en  1772 ,  une  Académie  pour  le  perfectionne- 
ment de  la  langue  et  des  études  historiques  en  1783 ,  et 
l'Académie  des  Sciences  prit  un  rang  émincnt  parmi  les 
sociétés  savantes,  gr&ce  aux  travaux  de  Pallas,  de  Gmelin, 
de  Gyldenstedt  et  de  Roumovski.  La  gloire  d'avoir  nette- 
ment séparé  l'ancien  slave  et  le  russe,  et  d'avoir  fait  pré- 
valoir ce  dernier  idiome  en  poésie,  appartient  à  Lomono- 
soff  :  il  lui  assigna  des  règles  par  la  publication  d'une 
Grammaire,  apprit  aux  Russes,  par  ses  études  sur  le 
rhythme,  toutes  les  ressources  poétiques  de  leur  langue, 
et,  unissant  l'exemple  au  précopte,  donna  des  modèles  de 
tous  les  genres  de  style  ;  on  distingue  son  Ckie  à  la  Paix, 
une  Êpitre  sur  le  verre,  des  Psaumes ,  et  des  Eloges 
acadétniques.  Le  reproche  qu'on  peut  lui  adresser,  c'est 
d'avoir  cherché  à  ne  former  la  langue  que  d'après  le  latin ^ 
à  lui  imposer  en  poésie  les  règles  de  la  versification  la- 
tine, et,  par  conséquent,  de  l'avoir  soumise  à  des  en- 
traves contre  nature.  Sbumarokoff,  son  contemporain  et 
son  émule,  fonda  le  the&tre  national,  et  fut  secondé  par 
un  acteur  de  mérite,  Théodore  Volkoff,  qui  joua  ses 
drames  d'Bamlet,  du  Faux  Dmitri,  etc.  Kniaschnine , 
dont  on  représente  encore  aujourd'hui  quelques  ouvrages, 
où  il  a  peint  divers  ridicules  de  son  temps,  eut  un  style 
plus  pur,  plus  noble,  mais  un  peu  froid.  Wizine,  célèbre 

Sour  ses  contes  en  prose,  écrivit  deux  spirituelles  comé- 
ies,  VEnfant  gâte  et  le  Brigadier,  Kapnist,  poète  ly- 
ri<][ue,  composa  aussi  une  tra^die  d^Anligone,  et  une 
Jolie  comédie  intitulée  la  Chtcane.  Ablesimoff  peignit 
fidèlement  les  mœurs  populaires  dans  son  charmant  vau- 
deville du  Meunter,  On  a  de  Cheraskoff,  outre  des  tragé- 
dies, des  odes  et  des  épltres,  deux  poèmes  épiques  sur  la 
conquête  de  Kazan  et  sur  Vladimir  le  Grand  :  considéré 
de  son  temps  comme  l'Homère  de  la  Russie,  il  est  à  pré- 
sent presque  oublié.  Oserofit  a  composé  des  tragédies  en 
vers  alexandrins ,  telles  que  Fingal ,  OEdipe ,  Dmitri 
DonskoU,  où  il  ne  montre  ni  pureté  ni  élégance  de  style, 
mais  une  certaine  énergie  et  des  peintures  pathétiques. 
Le  prince  Michailovitch  Dolgorouki  a  écrit  des  odes  phi- 
losophiques et  des  épitres.  On  doit  au  comte  Chwostoff 
des  poésies  lyriques  et  didactic^ues  Justement  estimées; 
à  Booroff,  beaucoup  d'odes,  imitations  un  peu  empha- 
tiques des  poètes  anglais,  et  un  poôme  descriptif,  la 
Chersonida;  à  Pétroff,des  odes  riches  d'idées  et  d'images, 
où  il  a  célébré  Catherine  U ,  Potemkin  et  RomanzolT,  et 
fene  traduction  de  V Enéide  en  vers  alexandrins;  à  Bog- 
danovitch,  un  gracieux  pofime  de  Psyché;  à  Popovsky, 
une  élégaute  traduction  de  VEssai  sur  l'homme  de  Pope. 
Citons  encore  Chemnicer,  dont  les  fables  sont  pleines  de 
sel  ;  Neledinsky,  chansonnier  national  ;  Kostroff,  tiaduc^ 
teur  de  Vlliade  et  des  poésies  d'Ossian.  Cette  période 
littéraire  est  close  d'une  manière  brillante  par  Derza- 
wine,  le  premier  poète  de  la  Russie  pour  la  sublimité  des 
pensées  :  son  Hymne  à  Dieu,  reproduit  dans  la  plupart 
des  langues  de  l'Europe,  a  pénétré  Jusqu'au  Japon  et  en 
Chine,  où  il  a  été  inscrit  dans  les  palais  et  les  temples  ; 
d'autres  compositions,  Felica,  la  Cascade,  VÊpUre  à  un 
Grand,  le  placent  aussi  au  premier  rang  des  chantres 
^Tiques. 
Il  fallut  plus  de  temps  à  la  prose  pour  parvenir  au 


degré  de  perfection  qu'avait  atteint  la  poésie.  Elle  dut  ssi 
premiers  perfectionnements  à  la  chaire  évangélique, 
dont  les  productions  déguisent  pourtant  le  plus  souvent 
l'absence  de  pensées  sous  une  fausse  rhétorique.  On  cite 
dans  ce  genre  :  Platon  Levschine,  métropolivûn  de  Mos- 
cou, auteur  d'une  Histoire  de  l'Eglise  nuse,  et  de  plu- 
sieurs sermons  remarquables;  Iwan  Lewanda,  archî- 
prêtre  de  Kiew;  les  prélats  Bodobiedoff  et  Bratanovsky, 
orateurs  pleins  de  gravité  et  d'onction,  dont  le  premier 
s'est  surtout  rendu  fameux  par  V Éloge  funèbre  de  Cathe- 
rine II.  Dans  le  genre  historique  se  distinguèrent  :  Tscher- 
batoff,  auteur  d'ime  Histoire  de  Russie  qui  n'annonce 
pas  des  recherches  bien  profondes  ;  Hilkoff,  collecteur  d0 
documents  sur  le  même  sujet  ;  Golikofi*,  (jui  a  écrit  V His- 
toire de  Pierre  /*■"  ;  Boltin,  critique  Judicieux  des  sources 
de  rhistoire  de  sa  patrie;  Nowikoff,  auteur  d'ouvrages 
biographiques,  et  fondateur  d'une  revue  satirique  inti- 
tulée le  Peintre;  Gérard  Fr.  MùHer,  qui  publia  une  mul- 
titude d'anciens  manuscrits;  MourawiefT,  qui  composa 
plusieurs  traités  d'histoire  et  de  morale. 

Avec  le  xix*  siècle  commence  une  ère  nouvelle  dans 
la  littérature  russe.  Un  désaccord  profond  s'était  peu  à 
peu  manifesté  entre  les  éléments  nationaux  et  les  élé- 
ments provenant  de  l'étranger.  L'influence  des  idées 
étrangères  était  devenue  si  grande  sur  la  noblesse  et  sur 
la  classe  des  fonctionnaires,  que  Paul  I^  en  prit  om- 
bxage,  et  défendit  à  ses  sujets  de  voyager  sans  une  per- 
mission impériale.  U  fonda  néanmoins  l'université  de 
Dorpat.  Après  lui,  Alexandre  I'*"  porta  le  nombre  des  Uni- 
versités à  sept,  fonda  4  Académies  théologiques,  36  sé- 
minaires, et  un  grand  nombre  d'écoles  de  gouvernements 
et  de  cereles.  Une  classe  pour  renseignement  des  lan- 
gues orientales  fut  créée  à  l'Université  de  S^Pétersbourg. 
Un  nom  domine  toute  cette  époque;  c'est  celui  deKa- 
ramsin,  qui  secoua  le  Joug  du  classicisme  imposé  pv 
Lomonosoff  et  dont  Derzawine  avait  déjà  essayé  de  s'af- 
franchir. Après  s'être  fait  connaître  par  d'élé^ntas  poé- 
sies lyriques,  par  ses  Lettres  d*un  voyageur  russe,  par 
une  suite  d'articles  littéraires  où  il  ridiculisait  la  manie 
de  l'ode,  l'enflure  et  le  clinquant  des  poètes,  et  rappelait 
la  poésie  à  sa  véritable  source,  à  la  simplicité  des  senti- 
ments humains,  il  publia  son  Histoire  de  Russie,  mo- 
nument immortel  qui  éleva  la  langue  de  la  prose  à  son 
plus  haut  degré  de  perfection  :  en  la  dégageant  de  la  rai- 
deur et  de  la  complication  des  formes  classiques ,  il  lui 
donna  une  allure  à  la  fois  noble  et  facile,  unissant  la 
vivacité  à  l'harmonie,  l'énersie  à  la  simplicité.  En  même 
temps,  Schiskoff  montrait,  dans  son  Traité  sur  Vancien 
et  le  nouveau  style,  la  supériorité  de  l'ancien  slave  sur 
tous  les  emprunts  étrangère.  Les  poètes  ne  manquèrent 
pas  à  l'école  nouvelle.  Dmitrieff  publia  des  élégies ,  des 
contes  et  des  apologues  pleins  de  grâce  ;  le  genre  de  la 
fable  fut  également  cultivé  par  Izmalloff,  et  par  Kryloff, 
celui  de  tous  les  Européens  qui  a  le  plus  approché  de 
La  Fontaine.  Dans  l'art  dramatique  brillèrent  :  Alexandre 
Schachovskoi,  poète  comique  d'une  imagination  féconde 
et  riante  ;  Gribojedofi*,  auteur  de  la  charmante  comédie 
des  Inconvénients  de  l'esprit;  Kriukovsky,  célèbre  par  sa 
tragédie  de  Pozarskoi  ;  Nicolas  Polewor  et  Nestor  Kukol- 
nik,  qui  ont  emprunté  les  sujets  de  leure  drames  surtout 
à  l'histoire  nationale,  tandis  que  Nicolas  Gogol  peignait 
gaiement  dans  ses  comédies  les  mœurs  des  petites  villes 
de  la  Russie.  La  poésie  didactique  et  héroïque,  soit  ori- 
ginale, soit  imitée,  fut  cultivée  avec  succès  par  Voieikoff, 
traducteur  de  Virgile,  et  auteur  d'ingénieuses  épltres; 
Merzliakoif,  heureux  imitateur  d'un  grand  nombre  de 
poésies  classiques  ;  Gnieditch,  qui  traduisit  Vlliade  d'Ho- 
mère et  le  Roi  Lear  de  Shakspeare  ;  PanaefT,  auteur  de 
gracieuses  pastorales;  Kozloff,  émule  de  Byron,  mais 
avec  une  inspiration  plus  religieuse  et  plus  touchanter 
connu  par  un  poème  remarquable  intitulé  le  Moine, 
Raisch,  qui  a  traduit  les  Géorgiques  avec  une  rare  fidé» 
lité.  Dans  le  genre  lyrique  proprement  dit,  nous  men- 
tionnerons :  Zukovsky,  traducteur  de  la  Jeanne  d^Are  de 
Schiller,  de  la  Lkiore  de  Burger  et  des  poésies  de  Hébel, 
auteur  d'odes  et  de  ballades  originales,  parmi  lesquelles 
on  distingue  Svietlana  et  le  Barde  au  camp  des  Russe- . 
Ba^uschkoff,  qui  a  publié,  entre  autres  poésies,  la  Mor* 
du  Tasse  et  une  ÊpUre  aux  Pénates ,  où  régnent  une 
grâce  naive  et  une  touchante  sensibilité;  Pouschkine, 
auteur  d'une  tragédie  de  Boris  Godunoff,  des  poèmes  de 
Ruslan  et  Ludmila,  du  Prisonnier  du  Caucase,  de  la 
Fontaine,  du  Zigane,  et  dont  toutes  les  poésies,  portant 
le  cachet  de  la  nationalité,  expriment  admira) ile!::;ent  les 
joies,  les  tristesses,  la  gloire,  l'amour  de  la  patrie  et  la 
gaieté  du  peuple  russe;  Lermontoff,  le  génie  le  plus  rs- 


RUS 


1603 


RTP 


marquable  de  notre  temps.  A  ces  noms  IHnstree  on  peut 
ajouter  Baratynskl,  qui  a  laissé  des  épttres  et  des  contes 
ingénieux;  WJasemsky,  inimitable  dans  ses  poésies 
légiàres,  et  connu  aussi  comme  critique  ;  Delwig  et  Rosen, 
chansonniers  renommés;  enfin  lasikoff,  Benediktoff  et 
Podolinski,  auteurs  de  poésies  diverses. 

L'Église  russe  a  eu  de  bons  orateurs  au  xn*  siècle, 
entre  autres,  Eugène  Bolchovitinofr,  évêque  de  Kiew,  et 
Philarète  Drosdoff,  archevêque  de  Moscou,  qui  ont  aussi 
écrit  des  ouvrages  théologiques  d'une  profonde  érudition. 
—  HerslJakofT,  professeur  à  Moscou,  s*est  fait  un  nom 
dans  la  critique,  et  MartynofT  dans  le  genre  de  la  traduc- 
tion. Bischurine  a  publié  des  Mémoires  et  des  Voyages 
remarquables.  Sokoloff,  Wostokoff,  Kalaidovitch,  Stroieff, 
et  surtout  Gretsch,  se  sont  occupés  avec  zèle  des  monu- 
ments de  la  littérature  russe  et  du  développement  pro- 
gressif de  la  langue,  tandis  que  NovikofT,  Kaschine,  Maxi- 
inovitcb,  Makarotr  et  Sacharoff  faisaient  des  collections 
■  de  chants  et  de  traditions  populaires.  Les  travaux  philo- 
sophiones  de  Golubinski,  de  Wellanski,  de  Sidonski,  de 
Kodroir,  se  rattachent  aux  systèmes  de  TAllemagne.  Dans 
la  Jurisprudence  on  remarque  Rewolin,  Moroschkin  et 
Nikita  Krylofi".  Mais  les  deux  genres  en  prose  qui  ont  fait 
le  plus  de  progrès  sont  l'histoire  et  le  roman.  Au  nombre 
des  historiens  se  placent  Ustrialoif,  auteur  d'un  abrégé 
de  l'histoire  de  Russie  destiné  aux  écoles  publiques;  Po- 
dogine,  qui  a  Jeté  une  vive  lumière  sur  les  origines 
russes;  Polewoy,  auteur  d'une  Histoire  de  Russie  très- 
étendue;  Wasili  Berg,  dont  on  a  plusieurs  monographies 
de  czars;  Michallovski  Damlevski,  qui  a  laissé  divers  ou- 
vrages sur  les  guerres  de  la  Russie  et  de  la  France;  enfin 
Glinka,  Siijegfreff,  Slovroff,  Sreznewski,  Samailoff,  Solo- 
vieff,  Strojeff,  NeverofT,  Arzenieff,  etc.  —  Quant  aux  ro- 
mans, nouvelles  et  contes  russes,  on  y  trouve,  en  général, 
la  peinture  d'un  état  social  où  la  barbarie  lutte  contre  la 
âvilisation  :  Bestouchef,  Boulgarine,  Pavloff,  Zagoskine, 
Oschakoff,  LaxeschnikofT,  le  comte  Solohub,  le  prince 
Odojevski,  le  baron  KorfT,  Constantin  Masalski,  Senkovski, 
Sogol,  Grebenka,  Kwitka  (sous  le  pseudonyme  d'Osno- 
^rianenko),  etc.,  ont  rempoité  dans  ce  genre  de  littérature 
tes  succès  les  plus  honorables  et  les  plus  légitimes. 


V.  Goetxe,  Vladimir  !•'  «t  sa  TabU-Rands,  Leipzig, 
1840;  le  prince  GertelefT,  CollecUon  d*anciennss  poésiss 
russes,  S^Pétersbourg,  4822, 2  vol. 

RUSSNUQUE  ou  RUTHËNE  (Langue),  appelée  aussi 
mal(Mrouski  et  petit  russien,  une  des  langues  slaves,  par- 
lée par  les  Russniaks  de  la  Gallicie,  de  la  Hongrie  sep- 
tentrionale, de  la  Podolie,  de  la  Wolhynie  et  de  la 
Lithuanie.  Elle  a  beaucoup  de  ressemblance  avec  le  po- 
lonais. C'était  autrefois  une  langue  écrite,  comme  on  le 
voit  par  une  traduction  de  la  Bible  imprimée  à  Os- 
trog  en  4584.  On  se  contenta  de  la  parler  depuis  qu'au 
XVII*  siècle  les  Russniaks  furent  soumis  aux  Lithuaniens 
et  aux  Polonais;  mais,  de  nos  Jours,  on  a  recommencé  à 
imprimer  en  russniaque.  I>es  chants  mssniaoues  ont  été 
recueillis  et  publiés  par  Waclaw  {Piesni  polskie  i  ruskie, 
Lemberg,  4833).  Leivicki  a  donné  en  allemand  une  Gram' 
maure  de  la  langue  russniaque,  Przemjrsl,  4833. 

RUSTIQUE  (Ecriture),  écriture  grecque  ou  latine  des 
plus  anciennes  inscriptions.  Les  lettres  n'y  sont  formées 
que  des  traits  essentiels,  ajustés  inégalement  et  sans  pr^ 
osion. 

RUSTIQUE  fLangue).  V.  Frarçaisb  ÇLangue). 

RUSTiQUB  (Ordre),  en  termes  d'Architecture,  ordre  dans 
lequel  les  colonnes  et  les  membres  de  l'entablement  sont 
ornés  de  bossages  vermiculés  ou  unis.  —  Une  construc- 
tion est  dite  rustique,  miand  elle  est  fidte  de  pierres 
brutes  ou  de  pierres  taulées  à  l'imitation  des  pierres 
brutes.  La  grossièreté  et  l'irrégularité  des  ornements  n'y 
sont  au'apparentes.  Palladio  a  fait  l'usage  le  plus  heu« 
reux  de  ce  genre. 

RUSTIQUER,  en  termes  de  Construction,  piquer  le 
parement  d'une  pierre  avec  la  pointe  d'un  marteau,  pour 
lui  faire  perdre  le  poli  du  trait  de  la  sde  et  lui  rendre  en 
quelque  sorte  sa  rudesse  primitive. 

RUSTRE,  en  termes  de  Blason,  macle  percée  en  rond. 

RUTHÈNE  (Langue).  K.  Rossnmqob. 

RUYDER  ou  RYDER,  c-à-d.  cavalier,  nom  sous  lequel 
on  désigne  quelquefois  le  ducaton  hollandais.  V,  Ducat, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Histoire. 

RYPBR,  monnaie  d'or  de  Hollande,  valant  à  peu  prêt 
3  ducats,  ou,  en  monnaies  françaises,  34  fr.  65  c. 


S 


S,  19*  lettre  et  45*  consonne  de  notre  alphabet  C'est 
ane  sifflante,  dont  Tarticulatlon  exige  le  concours  de  la 
langue  et  des  dents.  Le  signe  qui  la  figure  en  hébreu  a 
les  deux  valeurs  de  notre  sifflante  s  et  de  notre  chuin- 
tante ch  :  ces  deux  sons  ont ,  en  effet ,  des  rapports  in- 
times; les  Hébreux  de  la  tribu  d'Éphraim,  par  un  vice  de 
prononciation  qui  leur  était  particulier,  remplaçaient 
dans  beaucoup  de  mots  la  chuintante  par  la  sifllante,  et 
il  en  est  de  même  chez  un  certain  nombre  de  nos  en- 
fants, oui  prononcent  sat ,  sien,  au  lieu  de  chat,chien,  etc. 
Les  Allemands  de  l'ancienne  Souàbe  donnent  aussi  à 
Ys  le  son  de  notre  ch.  Les  Grecs  et  les  Romains  chan- 
geaient quelquefois  la  dentale  t  en  sifflante  ;  par  permu- 
tation contraire,  le  français  donne  le  son  de  Vs  au  t  dans 
certaines  finales,  comme  dans  action,  captieux,  martial, 
balbutier,  etc.  Le  même  phénomène  se  remarque  en  an- 
glais, où  le  t  qui  termine  la  3*  personne  du  singulier 
dans  les  verbes  allemands  s'est  coangé  d'abord  en  den- 
tale sifflante  th,  puis  en  s  :  ainsi,  de  hat  (il  a),  on  a  fait 
successivement  nath  et  has.  En  latin ,  Y  s  initiale  repré- 
sente souvent  l'esprit  rude  d'un  primitif  grec  :  c'est  ainsi 
que  des  mots  grecs  ex,  epta^  udàr,  uper,  us,  marqués  de 
l'esprit  rude,  sont  venus  les  mots  latins  sex,  septem, 
sudor,  super,  sus,  etc.  Dans  le  passage  du  latin  au  fran- 
çais, les  mots  qui  commençaient  par  une  s,  suivie  d'une 
autre  consonne,  ont  reçu  un  e  comme  auf^ent  eupho- 
nique :  spiritus,  spcUium ,  spes,  scola,  scribere,  status, 
sttidium,  ont  fait  esprit,  espace,  espérance,  escole  (école), 
•iscrire  (écrire),  estât  (état),  estude  (étude).  Dans  quel- 
ques-uns de  ces  exemples,  Vs  a  fini  par  être  supprimée; 
c'est  une  suppression  semblable  que  rappelle  l'accent 
circonflexe  d'autres  mots,  comme  honnête  (du  latin  ho- 
nestus)^  lie  (de  tiwuia),  etc«  En  français,  Y  s  finale  se 


fait  entendre  dans  as,  aloès,  chorus.  Mars,  Reims,  laps, 
vis,  etc.;  elle  est  muette  dans  un  pins  grand  nombre, 
comme  dans  clos,  dans,  gris,  pas^ous,  très,  etc.;  quand 
elle  se  lie  avec  le  mot  suivant,  elle  a  le  son  du  s  {mes 
amis,  bons  ^èves).  C'est  ce  même  son  que  l'on  donne 
dans  le  corps  des  mots  à  Ys  placée  entre  deux  vovelles  : 
on  en  excepte  désuétude,  monosyllabe,  parasol,  pr^ 
séance,  parce  qu'il  existe  comme  une  séparation  entre  lea 
deux  parties  de  ces  mots  composés,  et  que  l'r  est  l'initiale 
de  la  seconde  partie.  Par  exception  à  l'usage  général  oui 
donne  à  Ys  précédée  d'une  consonne  le  son  x,  on  fui 
donne  celui  du  x  dans  balsamine,  transaction,  transit, 
transiger,  transition.  Dans  les  langues  française,  an- 
glaise, espagnole,  portugaise,  Ys  finale  est  le  signe 
ordinaire  du  pluriel  des  noms  ;  elle  est  aussi  la  carac- 
téristique de  la  2*  personne  du  singulier  dans  les  verbes 
français,  excepté  à  rimpéradf. 

Dans  les  abréviations  latines,  S  est  pour  sanctus,  sa- 
crum,  sua,  solvit,  solutum;  S.  C.  signifie  senatus  eon» 
sulto;  S.  J.,  sacrum  Jovi;  S.  M.,  sacrum  Manibus; 
S.  S.,  supra  scriptus;  S.  P.  Q.  R.,  senatus  populusquê 
romanus.  En  tète  des  lettres  missives,  S.  D.  était  la  for- 
mule de  salutation,  salutem  dicit.  Qiez  nous,  S.  se  met 
pour  Sud,  pour  Scùnt;  SS.  pour  Saints  ou  Sa  Sainteté, 
S.  M.  pour  Sa  Majesté;  S.  H.  pour  SaHautesss;  S.  A.  pour 
Son  Altesse;  S.  E.  pour  Son  Eminence  ou  Son  Excel» 
lence,  etc.  Une  S,  traversée  obliquement  par  une  barre, 
est  employée  en  Musique  comme  rigne  de  renvoi.  Préc^ 
dée  d'un  nom  de  nomore,  la  lettre  S  voulait  dire  en  latin 
semi  ;  barrée  ou  précédée  d'une  bure,  elle  était  le  signe 
du  sesterce.  Dans  le  commerce,  8/C  signifie  son  compte^; 
S.  E.  ou  O.,  sauf  erreur  ou  omission.  On  emploie  en- 
core S.  V.  P.  pour  s^il  vousplail.  —Lettre  numérale,  te 


SAB 


1604 


SAC 


iigtna  grec,  avec  un  accent  en  dessus  (9^^  valait  200,  et, 
avec  l'accent  en  dessous  (,<r),  200,000;  l'S  des  Romains 
valait .7,  et,  selon  quelques-uns ,  90 ;  surmontée  d'un 
trait  (S},  c*éuit  90,000.  •—  S  a  été  la  marque  monétaire 
de  la  ville  de  Reims.  B. 

SABAYE,  cordage  employé  dans  les  canots  pour  leur 
servir  d*amarre  à  terre,  quand  les  grappins  sont  mouillés 
au  large. 

SABBAT.  V,  ce  mot  dans  notre  DicUofunaire  de  Bio' 
graphie  et  d'Histoire. 

SABBATINE,  petite  thèse  que  les  écoliers  des  anciennes 
Universités  soutenaient,  les  samedis,  sans  solennité, 
pour  s'exercer  à  en  soutenir  d*autrûs  publiquement 

SABÉEN  (Alphabet).  V.  Striaqdb  (LAngue). 

SABÉISME,  culte  des  astres,  répandu  dans  TArabie 
avant  Mahomet,  en  Syrie,  en  Mésopotamie,  en  Perse,  et 
même  dans  l'Inde.  Lies  Sabéens  regardaient  les  astres 
comme  la  demeure  de  certains  Esprits,  auxquels  ils  attri- 
buaient une  puissante  influence  sur  l'homme  et  sur  la 
nature  physique  qui  l'entoure.  Par  suite,  ils  accordaient 
une  grande  influence  aux  talismans  confectionnés  d'après 
les  préceptes  de  l'art  astrologique. 

SABELLIEN  (Idiome),  un  des  idiomes  de  l'antique 
Italie,  parlé  par  les  Marses,  les  Marrucins,  les  Picéniens 
et  les  Sabins. 

SABLE ,  en  termes  de  Blason ,  désigne  la  couleur  de  la 
martre  zibeline,  et,  par  suite,  la  couleur  noire.  Des  traits 
croisés  en  sont  l'imaee  dans  la  gravure  des  armoiries. 
Sable  dérive  de  zabeïle,  nom  sous  lequel  on  désignait 
jadis  la  martre  zibeline.  Le  sable  désignait  s;^mbolique- 
ment  la  terré,  la  sagesse,  la  mortalité,  le  deuil. 

SABLIÈRE ,  en  termes  de  fjliarpenterie ,  désigne  : 
I»  toute  pièce  de  bois  posée  horizontalement  pour  porter 
un  pan  de  bois  ou  une  cloison  ;  2®  la  pièce  qui ,  à  chaque 
étage  d'un  pan  de  bois,  en  reçoit  les  poteaux,  et  porte  les 
solives  d'un  plancher;  3<*  les  membrures  qu'on  attache 
aux  côtés  d'une  poutre,  et  qui  reçoivent  par  enclaves  les 
solives  dans  leurs  entailles. 

SABORD ,  ouverture  ordinairement  carrée,  faite  dans 
la  muraille  d'un  navire,  soit  pour  servir  de  fenêtre,  soit 
pour  tirer  le  canon.  C'est  au  côté  supérieur  des  sabords 
que  sont  fixés  les  gonds  des  volets  qui  servent  à  les 
fermer  et  à  les  ouvrir.  Les  sabords  d'un  côté  doivent  être 
exactement  opposés  à  ceux  de  l'autre;  quand  il  y  en  a 
plusieurs  rangs  du  même  côté ,  ceux  de  la  rangée  supé- 
rieure se  placent  au-dessus  du  milieu  de  l'intervalle  qui 
sépare  deux  sabords  de  la  rangée  au-dessous.  Les  grands 
vaisseaux  de  guerre  ont  trois  rangs  de  sabords.  On  nomme 
sabords  de  retraite  ceux  qui  sont  percés  dans  la  poupe, 
pour  tirer  encore  sur  l'ennemi  devant  lequel  on  se  retire; 
sabords  de  chasse,  ceux  qui  sont  placés  dans  le  sens  de 
la  longueur  du  navire  pour  tirer  sur  l'ennemi  qui  fuit. 
Les  navires  marchands  ont  quelquefois  de  faux  sabords, 
exécutés  en  peinture,  afln  de  passer  pour  bâtiments  de 
guerre  aux  yeux  de  l'ennemi  et  de  commander  le  res- 
pect; mais  les  vrais  marins  ne  s'y  laissent  guère  trom- 
per. On  appelle  sabords  de  charge,  de  grandes  ouvertures 
pratiquées  dans  la  cale  des  navires,  à  l'avant  et  à  l'ar- 
rière, au-dessous  de  la  coifle  du  premier  pont  et  de  la 
barre  du  pont,  pour  charger  des  m&tures  et  des  bois  de 
construction,  et  que  Ton  ferme  ensuite  nvec  soin.  Les  sa- 
bords ont  été  inventés  en  1500  par  Descharges,  construc- 
teur à  Brest. 

SABOT,  nom  par  lequel  on  désigne  :  1°  une  chaus- 
sure de  bois  faite  tout  d'une  pièce,  et  creusée  de  manière 
à  contenir  le  pied  ;  2®  toute  garniture  de  cuivre  qu'on 
met  au  bas  des  pieds  de  certains  meubles  ;  3^  la  pièce  de 
fer  creusée  pour  recevoir  le  bout  d'un  pilotis,  et  dont  la 
pointe  doit  s'enfoncer  en  terre  ;  4°  un  outil  de  menuisier 
qui  sert  à  pousser  les  moulures  dans  les  parties  cintrées; 
h^  un  morceau  de  bois  carré,  dont  se  servent  les  maçons 
pour  pousser  des  moulures;  6>  la  pièce  de  fer  ou  de  bois, 
un  peu  courbée  et  à  rebords,  qu'un  mécanisme  adapte 
aux  roues  d'une  voiture  pour  enrayer;  7^  une  sorte  de 
toupie  que  les  enfants  font  pirouetter  au  moyen  d'un 
fouet  ;  8^  un  crochet  autrefois  employé  pour  raccourcir  la 
corde  d'une  harpe  et  la  hausser  d'un  demi-ton.  V.  Harpe. 

SABRE  (de  l'allemand  sabel)^  arme  offensive  et  d'es- 
crime. C*est  une  sorte  d'épée,  dont  la  lame,  moins 
longue,  plus  éfiaisse  et  plus  forte  que  celle  des  épées  or- 
dinaires, n'a  qu'un  seul  tranchant ,  et  se  courbe  un  peu 
vers  la  pointe.  A  l'époque  des  Croisades,  le  sabre  allait 
en  s'élargissant  jusqu'au  bout,  recoupé  en  biais.  Les 
modèles  en  ont,  du  reste,  fréquemment  varié.  Aujour- 
d'hui ,  en  France,  il  y  a  trois  modèles  de  sabre  pour  la 
cav:\Io.rio  :  le  .^ahre  de  la  cavalerie  de  réserve  f  carabiniers 


et  cuirassiers),  dont  la  lame,  appelée  latte,  est  presque 
droite,  et  propre  à  pointer;  le  sabre  de  la  cavalerie  de 
ligne  (dragons  et  lanciers),  à  lame  cambrée,  propre  à 
pointer  et  à  tailler  ;  le  sabre  de  la  cavalerie  légère  (chas- 
seurs et  hussards),  à  lame  cambrée  et  évid^  propre  à 
tailler.  L'infanterie, qui,  jusqu'au  milieu  du  x.viii*  siècle, 
porta  l'épée,  reçut  ensuite  le  sabre-briquet,  lame  à  un 
tranchant,  légèrement  cambrée,  sans  gouttière  ni  pans 
creux,  avec  un  faux  tranchant  vers  la  pointe.  En  183), 
on  l'a  remplacé  par  le  sabre-poignara,  lame  droite  à 
deux  tranchants,  a  gouttière  et  à  pans  creux,  avec  une 
croisière  pour  garde,  et  une  poignée  cisela  en  écailles. 
Plus  tard,  on  a  imaginé  le  sabre-baJlonnette ,  qui  peut 
s'adapter  au  canon  du  fusil  en  guise  de  baïonnette,  et 
qui  est  une  arme  particulière  aux  chasseurs  d'Afrique. 
Le  sabre  d^abordage,  à  l'usage  des  marins,  est  légèremen. 
cambré,  évidé,  et  long  de  75  centimèt.;  la  poignée  est  eo 
bois;  la  garde  est  formée  par  une  coquille  en  fer  forgé, 
avec  branches  portant  une  pièce  de  tôle  qui  protège  la 
main.  «  B.. 

SABRETACHE  (de  l'allemand  sabel,  sabre,  et  t€tschen, 
poche  ),  sorte  de  gibecière  volante,  attachée  au  ceinturon 
du  sabre  des  hussards,  par  trois  bélières  en  bulSe,  et  qui 
pendait  le  long  de  la  cuisse  gauche.  Sa  faoe  extérienre, 
en  vache  noire  et  lisse,  portait  une  plaque  de  cuivre 
estampé  où  était  le  numéro  du  régiment  au  milieu  de 
feuilles  de  chêne  et  delaurier;  l'intérieur  étaiten  basane 
noire.  La  sabretacbe  a  été  supprimée  en  1868. 

SAC-A-TËRRE ,  enveloppe  de  maçonnerie  qu'on  éta- 
blit autour  des  soutes  aux  poudres  pour  les  préserver. 

SAGCOM  (Les) ,  membres  d'une  congrégation  des 
États  romains,  qui  ont  le  droit  de  pénétrer  partout  pour 
s'assurer  qu'on  ne  transgresse  pas  les  prescriptions  de 
l'Église  relativement  aux  abstinences,  et  la  mission  de 
dénoncer  les  blasphémateurs,  de  fouiller  dans  les  papiers 
des  personnes  suspectes.  Ils  perçoivent  une  partie  dos 
amendes  qu'on  inflige  aux  coupables.  Leur  nom  vient  de 
ce  qu'ils  ont  un  vêtement  en  forme  de  sac,  avec  un  ca- 
puchon, une  corde  autour  des  reins,  des  sandales  sui 
pieds,  et,  sur  la  figure,  un  voile  percé  de  deux  trous  à  la 
hauteur  des  yeux. 

SACERDOCE  (du  latin  sacerdos,  prêtre),  diguitê  et 
fonctions  des  ministres  du  culte. 

SACOLÈVE,  navire  du  Levant,  très-tonturé,  avec  l'ar^ 
rière  élevé.  Il  a  trois  m&ts  à  pible,  et  la  voile  à  livarde. 

SACOME.  V.  Sagoma. 

SACRAMENTAIRE,  livre  contenant  des  prières  pour 
l'administration  des  sacrements  et  pour  les  bénédictions. 

SAGRAMENTAIRES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictiot^ 
naire  de  Biographie  et  d^Histoire, 

SACRARIUM,  nom  donné  par  les  auteurs  ecclésias- 
tiques :  1°  à  la  sacristie  d'une  église;  2°  à  une  sort« 
d'armoire  creusée  dans  la  muraille  ou  dans  un  pilier  du 
côté  de  l'Évangile,  et  où  l'on  plaçait  les  espèces  consa- 
crées; 3»  quelquefois  au  sanctuaire.  —  Petit  oratoire, 
dans  les  grandes  maisons  des  riches  Romains;  on  y  gar- 
dait et  on  y  honorait  les  dieux  Lares;  on  y  déposait  aussi 
des  papiers  de  famille;  souvent  ce  petit  temple  domes- 
tique était  somptueusement  orné. 

SACRE  DES  ROIS,  i  V,  notre  Dictionnaire  de  Bio" 

SACRÉE  (  Voie) .       (      graphie  et  d'Histoire. 

SACREMENT.  Chez  les  Romains,  le  mot  Sacramentum 
désigna  d'abord  le  serment  que  prêtaient  les  soldats,  en- 
suite la  caution  qu'on  était  tenu  de  fournir  en  engageant 
une  action  judiciaire,  et  enfin  toute  chose  consacrée  aux 
Dieux.  Il  fut  employé  par  les  premiers  chrétiens  dans  le 
sens  de  secret .  et  signifia  toute  chose  ou  doctrine  mys- 
térieuse. Depuis  le  xii*  siècle,  on  a  appelé  Sacrement  le 
signe  sensible  d'un  effet  intérieur  et  spirituel  que  Dieu 
opère  en  nos  &mes.  En  ce  sens,  la  oirconcision  et  les  pu- 
rifications étaient  des  sacrements  pour  les  Hébreux. 
L'Église  catholique  a  7  sacrements  :  le  Baptême,  la  Con- 
firmation, V Eucharistie,  la  Pénitence,  VOrdre,  le  Ma- 
riage et V Extrême-Onction  {V,  ces  mots).  Outre  la  gr&cc 
sanctifiante  que  produisent  tous  les  sacrements ,  troi^ 
d'entre  eux  impnment  à  l'àme  un  caractère  inefllâçablo, 
et ,  pour  ce  motif,  ne  peuvent  être  renouvelés  :  ce  sont 
le  Baptême,  la  Confirmation  et  l'Ordre.  Les  prêtres  sont 
les  ministres  des  sacrements;  toutefois,  en  cas  de  nt> 
cessité,  le  Baptême  peut  être  administré  par  toute  per- 
sonne raisonnable.  Les  conciles  ont  décidé  qu'il  n'est  pas 
nécessaire,  pour  la  validité  des  tMicrements,  que  le  prêtre 
qui  les  administre  soit  en  état  de  gr&ce.  L'administration 
des  Sacrements  est  gratuite;  les  fidèles  ont  le  droit  de 
les  recevoir  sans  rétribution,  et  ce  qu'ils  donnent  au 
prt'trc  est  une  ofTrrxndf^  volontaire.  Il  y  a  même  des  Sa- 


SAG 


1605 


SAI 


creroeDts  pour  TadmiDistration  desquels  fe  prêtre  ne 
doit  rien  recevoir;  ce  sont:  la  Pénitence,  rEucharistie, 
ei  l'Extrôme-Onction.  —  Sous  le  nom  de  Saint  Sacre- 
ment,  on  désigne  spécialement  Je  sacrement  de  TEu- 
charistie,  et,  par  dérivation,  l'hostie  consacrée,  ou 
même  Tostensoir  qui  renferme  cette  hostie.— L'Eglise 
grecque  et  les  églises  d'Orient  admettent  aussi  sept 
sacrements,  et  les  appellent  mystères,  équivalent  cçrec 
du  latin  sacramentvm.  —  Les  Protestants  n'ont  ^ue 
deux  sacrements,  le  Baptême  et  la  Cène 

SACRIFICATEUR,  ministre  d*un  culte  chargé  des  sar 
criflces. 

SACRIFICATORIUM,  nom  donné  quelquefois  par  les 
écrivains  ecclésiastiques  à  Tautel  des  églises. 

SACRIFICE  (du  latin  sacrum ,  chose  sacrée,  et  facere^ 
faire),  offrande  d*une  chose  extérieure  ou  sensible,  faite 
à  la  Diviuité  par  un  ministre  légitime,  pour  apaiser  sa 
colère  ou  pour  lui  rendre  hommage.  L'usage  des  sacri- 
fices a  existé  de  tout  temps  et  dans  toutes  les  religions, 
et  ce  fut,  jusqu'au  christianisme,  une  opinion  universelle, 
que  le  pardon  ne  pouvait  s'obtenir  que  par  le  sang.  Chez 
les  Hébreux,  les  hosties  ou  victimes  étaient  ordinaire- 
ment des  bœufs,  des  veaux ,  des  moutons,  des  agneaux, 
des  béliers,  des  boucs  et  des  chevreaux.  On  appelait  /lo- 
iocauste  tout  sacrifice  où  la  victime  était  entièrement 
consumée  sur  l'autel  ;  sacrifice  expiatoire,  celui  où  Ton 
ne  mettait  qu'une  partie  de  la  victime  sur  l'autel ,  le 
reste  appartenant  aux  prêtres;  sacrifice  de  prospérité  ou 
de  reconnaissance,  celui  où  l'on  ne  brûlait  que  la  graisse 
des  animaux  immolés.  Celui  qui  avait  offert  la  victime  en 
mangeait  une  partie  avec  ses  convives  sur  la  table  des  sa- 
crifices. —  Chez  les  Païens,  on  offrait  généralement  à 
chaque  divinité  l'animal  qui  lui  était  consacré,  le  cheval 
à  Neptune,  le  bouc  à  Bacchus,  etc.  Les  bœufs,  les  tau- 
reaux, les  moutons,  les  agneaux ,  les  oiseaux ,  étaient  les 
victimes  les  plus  ordinaires.  Un  sacrifice  de  100  bœufs  se 
nommait  Hécatombe;  mais  le  plus  souvent  on  n'immo- 
lait qu'un  seul  de  ces  animaux ,  et  la  valeur  des  autres 
était  donnée  aux  prêtres.  Il  y  avait  à  Rome  un  Boi  des 
sacrifices  iV,ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d^ Histoire).  Les  Germains  sacrifiaient  des  chevaux 
à  Odin.  —  Les  Tyriens  et  les  Carthaginois  offrirent  des 
victimes  humaines  au  dieu  Moloch  ;  les  Gaulois  prati- 
quèrent aussi  ces  horribles  sacrifices  en  l'honneur  de 
Teutatès,  et  l'on  raconte  qu'ils  entassaient  leurs  prison- 
niers de  guerre  dans  de  gigantesques  statues  en  osier, 
auxquelles  ils  mettaient  le  feu.  Les  Européens  qui  dé- 
couvrirent l'Amérique  trouvèrent  l'usage  des  sacrifices 
humains  chez  les  habitants  du  Mexique  et  du  Pérou.  Il 
y  en  a  aussi  à  Nonka-Hiva,  dans  l'Océanie.  —  Pour  les 
ciirétiens,  il  n'y  a  de  sacrifice  réel  que  celui  de  Jésus- 
Christ,  qui  s'est  immolé  pour  le  genre  humain  ;  et  le  sa- 
crifice sanglant  du  Calvaire  est  représenté,  et  renouvelé 
d'une  manière  non  sanglante  dans  la  Messe,  qu'on  ap- 
pelle pour  cela  le  Saint-Sacrifice, 

SACRILÈGE ,  profanation  de  ce  qui  est  sacré.  On  dis- 
tiogue  :  le  sacrilège  personnel ,  par  lequel  on  insulte  un 
ecclésiastique  dans  l'exercice  de  ses  fonctions;  le  sacrilège 
local,  qui  consiste  à  profaner  les  lieux  sacrés,  églises, 
autels,  cimetières,  etc.;  et  le  sacrilège  réel,  par  lequel  on 
profane  les  choses  sacrées,  telles  que  les  sacrements,  les 
vases  sacrés,  les  hosties,  les  reliques,  les  croix,  les 
images  des  saints,  les  ornements  sacerdotaux,  etc.  V.  Sa- 
caiLéoB,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogr.  et  d* Histoire. 

SACRISTAIN ,  celui  qui  a  soin  de  l'élise,  et  qui  a  la 
garde  des  vases  et  ornements  sacrés,  placés  dans  la  sor 
cristie.  C'est  généralement  un  laïque.  A  Rome,  il  y  a  un 
sacristain  du  pape  ou  préfet  de  la  sacristie,  qui  est  d'or- 
dinaire évèque  m  partibus, 

SACRISTIE  (du  latin  sacrarium  ou  secretartum) , 
partie  d'une  église  où  l'on  conserve  les  vases  et  orne- 
ments sacrés,  et  où  le  clergé  se  revêt  des  habits  propres 
à  la  célébration  des  oflSces. 

SAFRAN,  partie  U  plus  large  du  gouvernail,  et  dont  la 
surface,  opposée  à  l'action  des  eaux  vives  qui  fuient  sous 
la  carène,  est  le  principal  agent  du  mécanisme  qui  fait 
évoluer  le  navire. 

SAFRE ,  en  termes  de  Blason ,  aigletto  de  mer  peinte 
dans  quelques  armoiries. 

SAGAIE  oa  ZAGAIE,  espèce  de  dard  ou  de  Javeline 
dont  se  servent  les  habitants  de  l'Océanie. 

SAGARIDE,  arme.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogrc^ 
phie  et  dk  Histoire, 

SAGASf  mot  qui  désignait,  dans  les  anciennes  langues 
du  Nord,  les  récits  concernant  la  vie  des  héros  et  des 
nris.  Cas  Sagas,  qui  forment  une  partie  de  la  littérature 


norvégienne  et  islandaise,  se  transmirent  d'abord  pèt 
tradition  orale  ;  puis,  à  partir  du  xiu*  siècle,  on  en  com- 
posa par  écrit.  Elles  sont  en  prose,  d'un  style  simple  et 
sans  art,  et  ne  contiennent  que  des  faits.  Au  milieu  du 
XIV*  siècle,  le  goût  public  ayant  changé,  les  récits  histo- 
riques cédèrent  la  place  à  des  récits  romanesques,  aux- 
quels on  conserva  néanmoins  le  nom  de  Sagas.  V,  Mill- 
ier, Bibliothèque  des  Sagas,  Copenhague,  1817-tO,  3  vol. 

SAGE-FEMME,  c-à^l.  femme  qui  possède  la  science, 
femme  dont  la  profession  est  de  faire  des  accouchements. 
Il  y  a,  dans  les  Écoles  de  médecine,  des  cours  pour  les 
personnes  qui  se  destinent  à  cette  profession.  Celles  qui 
ne  les  ont  pas  ft*équentés  doivent  avoir  suivi  pendant 
2  ans  les  cours  particuliers  qu'on  fait  pour  elles  dans  les 
grands  hôpitaux  des  villes,  et  avoir  pratiqué  sous  la  sur- 
veillance d'un  professeur.  Le  diplôme  de  1*^  classe,  con- 
féré par  les  Facultés  ou  Écoles  de  médecine,  est  valable 
pour  toute  la  France  ;  celui  de  2*  classe,  conféré  par  les 
Écoles  préparatoires  de  médecine  et  de  pharmacie,  ne 
vaut  que  pour  un  département.  L'un  coûte  130  fr.,  l'autre 
25  fr.  Il  est  défendu  aux  sages-femmes  d'employer  les 
instruments  dans  les  cas  difficiles,  sans  appeler  un  doc- 
teur en  médecine  ou  en  chirurgie  (Loi  du  19  ventôse 
an  XI,  ou  10  mars  1803).  A  défaut  du  père  de  l'enfant 
nouveau-né,  elles  doivent  faire  à  la  mairie  la  déclaration 
de  naissance. 

SAGES  (Les  sept).  V,  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d:*  Histoire, 

SAGES  (Roman  des).  V.  Dolopathos. 

SAGESSE,  mot  qui  fut  d'abord  synonyme  de  science. 
Le  sage  était  le  savant;  la  sagesse  consistait  à  savoir  par 
réflexion,  et  à  appliquer  les  conséquences  des  idées  et  des 
principes.  Elle  avait  un  sens  tout  spéculatif,  et  c'est  dans 
ce  sens  que  Bossuet  a  dit  que  la  sagesse  est  la  connais- 
sance certaine  des  effets  par  les  premières  causes,  comme 
quand  on  rend  raison  des  événements  ou  de  l'ordre  de 
l'univers  par  la  Providence.  Ce  qu'on  appelait  la  sagesse 
des  Égyptiens  et  des  premiers  philosophes  n'était  que 
leur  sctence.  On  s'aperçut  bientôt  que  cette  science  pri- 
mitive ne  répondait  pas  à  la  réalité,  et  la  sagesse  devint 
lu  philosophie  (amour  de  la  sagesse).  Cette  dernière  prit 
alors  un  sens  exclusivement  moral  et  politique  :  ainsi, 
les  sept  Sages  de  la  Grèce  se  montrent  tous  avec  ce  ca- 
ractère commun,  que  leur  sagesse  était  toute  pratique. 
Pour  Socrate,  la  sagesse  était  tout  entière  dans  la  morale, 
et  c'est  ainsi  qu'on  Ta  comprise  depuis  ;  on  vit  en  elle  la 
conseillère  de  l'homme,  lui  disant  ce  qu'il  doit  faire  :  elle 
est  en  quelque  sorte  une  voix  de  la  conscience.  —  Tous 
les  écrits  traitant  de  la  Morale  se  rattechent  à  la  sagesse; 
mais  il  y  a  plus  spécialement  le  Ltvre  de  la  Sagesse, 
attribué  à  Salomon  ;  le  Traité  de  la  Sagesse,  de  Charron; 
les  Leçons  de  la  Sagesse,  de  Débonnaire;  il  faut  citer 
aussi  ce  qu'on  a  des  petites  gnomiques  de  la  Grèce,  et  les 
vers  dorés  de  Pythagore. 

Les  Grecs  personnifiaient  la  Sagesse  sous  la  figure  de 
Minerve,  avec  une  chouette  à  ses  pieds,  pour  montrer 
que  la  sagesse  veille  toujours.  R. 

SAGBSSB  (Le  livre  de  la).  (  V,  notre   Dictionnaire  dé 

SAGIBARONS.  S      Biographie  et  d*Histoire. 

SAGITTAIRE.  V.  Dariqdb,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^Histoire, 

SAGOMA,  mot  italien  désignant  l'étui  qui  contient  une 
arme  et  qui  en  laisse  deviner  la  forme.  Par  extension, 
il  a  signifié  pour  les  artistes  ce  que  nous  appelons 
silhouette  :  ainsi,  la  sagoma  d'une  statue  est  la  silhouette 
de  son  enveloppe  ou  de  ses  contours.  De  sagoma  est  venu 
le  français  sacome,  qui  signifie  le  profil  exact  d'un  membre 
d'architecture. 

SAGONTE  (Thé&tre  de),  un  des  monuments  romains 
de  l'Espagne.  Dans  la  partie  qu'occupait  le  public,  on 
compte  encore  33  gradins  coupés  en  e  divisions  (cunet) 
par  §  escaliers,  qui  aboutissent  à  autant  de  vomitoires. 
Un  rang  de  portiques  règne  à  l'intérieur,  tout  autour  de 
la  partie  supérieure  des  gradins.  Il  existe  aussi  un  autre 
rang  de  portiques  extérieurs,  sous  lesquels  s'ouvrent  les 
portes  d'entrée.  Les  restes  de  ce  monument  sont  encore 
assez  considérables  et  en  assez  bon  état  pour  qu'à  la  fin 
du  siècle  dernier  on  ait  pu  y  donner  une  représentation 
théâtrale.  Il  contenait  dix  mille  spectateurs. 

SAGUM,  vêtement.  V,  notre  Dictionnaire  de  Biogra^ 
phie  et  d* Histoire, 

SAIDIQUE  (Dialecte).  V.  Copte  (Langue). 

SAIE,  vêtement,  v.  Sagcv,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  SHistoire. 

SATGA.  V,  Françaises  (Monnaies). 

SAIGNÉE.  Elle  fut,  au  témoignage  d'Aulo-Galle  (Am»i 


SAI 


1C06 


SAI 


aUitjuett  X,  8),  uû  châtiment  militaire  dans  l'Antiquité. 

SAILLIE,  80  dit  des  constructions  saillantes,  c.-à-d. 
qui  débordent  les  murs  des  bâtiments.  A  Paris,  il  ne  peut 
être  établi,  sur  les  murs  de  face  des  maisons,  aucunes 
saillies  autres  que  celles  qui  sont  déterminées  par  Tor- 
donnance  de  police  du  34  décembre  1823.  L'arrêté  du 
7  brumaire  an  n  charge  les  maires  de  surveiller,  per- 
mettre ou  défendre  les  ouvrages  qui  prennent  sur  la  voie 
publique.  On  ne  peut  avoir  de  balcons  ou  autres  sem- 
blables saillies  sur  la  propriété  close  ou  non  close  du 
voisin,  s'il  n'y  a  1"\9  de  distance  entre  le  mur  où  on  les 
pratique  et  cette  propriété  {Code  Napoléon,  art.  078). 

SAINÈTE,  nom  donné  en  Espagne  à  tout  Divertisse- 
ment joué  après  une  pièce  principale.  Le  mot  signifie 
sauce,  assaisonnement,  et  a  été  employé  pour  la  première 
fois  par  Louis  Quinones  de  Benavente,  dans  ses  Joca- 
Séria,  en  1653.  Les  auteurs  de  nos  jours  qui  se  sont  le 
plus  distingués  comme  auteurs  de  salnètes  sont  Rumon 
de  la  Cruz  et  Gonzalës  del  Gastillo. 

SAINT  (du  latin  sanctiis)^  ce  qui  est  pur,  parfait^ 
exempt  de  vices  ou  de  souillures.  Cette  qualification ,  qui 
ne  convient  absolument  qu'à  Dieu,  a  été  étendue  aux 
hommes  d'une  vie  exemplaire,  irréprochable,  et  appro- 
chant autant  que  possible  du  caractère  de  la  Divinité.  Le 
nom  de  saint  était  autrefois  donné  honorifiquement  aux 
évêques,  et  même  aux  rois;  depuis  le  xiv*  siècle,  il  est 
réservé  aux  papes.  Dans  TÉglise  catholique,  on  nomme 
Saints  les  personnages  qui  ont  été  canonisés.  V.  Cano- 
nisation. 

SAINT  (Le).  V,  notre  Dictionnatre  de  Biographie  et 
^Histoire, 

SAINT-ANGE  (Ch&teau).  V,  BIaosoUb,  dans  notre  Die- 
tumnavre  de  Biographie  et  d'Histoire. 

SAINT-AUGDSTIN.  V,  Caractères  d'im}»rimbrie. 

SAINTE-BARBE,  endroit  d'un  navire  où  sont  renfer- 
mées la  poudre  et  les  munitions.  On  l'appelle  ainsi  du 
nom  de  la  patronne  des  canonniers.  La  sainte-barbe  est 
toujours  un  lieu  séparé  dans  la  première  batterie,  sous 
i'entre-pont,  et  à  l'arrière  du  b&timent. 

SAINTES  (Amphithéâtre  de).  Il  se  trouve  hors  de  la 
ville,  an  fond  d'un  vallon  qui  sépare  le  faubourg  S^- 
Maclou  de  la  paroisse  S^-Eutrope.  Ce  qui  en  reste  suffit 
pour  faire  Juger  de  sa  forme  et  de  ses  dimensions.  C'est 
une  ellipse  de  130  met.  de  longueur  sur  108  de  largeur. 
Il  n'y  avait  qu'un  étage  de  voûtes  inclinées  vers  l'arène, 
et  qu'une  précinction  avec  trois  rangs  de  gradins.  On 
aperçoit  encore  les  restes  du  podium.  Autour  de  l'aire, 
et  dans  ^a  partie  inférieure  de  l'édifice,  se  trouvaient  les 
loges  des  bêtes  féroces;  elles  paraissent  être  enterrées 
aujourd'hui,  mais  on  voit  les  voûtes  qui  conduisaient  aux 
Tomitoires.  Autant  qu'on  en  peut  juger  par  les  ruines 
des  piles,  l'amphithéâtre  devait  contenir  60  voûtes;  il  n'y 
en  a  plu%  à  l'extrémité  méridionale  que  douze  ou  treize 
assez  bien  bien  conservées.  Tout  porte  à  croire  que 
Tarène  servait  non-seulement  à  des  combats  de  gladia- 
teurs, mais  encore  à  des  naumachies  :  c'est  ce  qui  semble 
résulter  de  son  assiette  au  fond  d'une  vallée,  et  de  l'exis- 
tence d'une  voûte  d'aqueduc  dans  la  partie  du  coteau  qui 
descend  de  l'Est.  L'amphithéâtre  de  Saintes  pouvait  con- 
tenir de  20  à  22,000  spectateurs. 

SAINTES  (Arc  ou  Pont  de).  Un  pont  romain,  jeté  sur  la 
Charente,  donnait  entrée  à  la  ville.  Ce  pont,  renouvelé  et 
modifié  à  diverses  époques,  était  précédé  originairement 
d'une  porte  qui  existe  encore,  et  qui  aujourd'hui  se  trouve 
au  milieu  du  pont,  probablement  par  suite  des  change- 
ments qui  se  seront  opérés  dans  le  lit  de  la  rivière.  La 
base  de  cette  porte,  au  fond  de  l'eau,  est  un  massif  de 
maçonnerie  de  20  met.  de  longueur  sur  3"^,05  de  lar- 
geur. Au  niveau  du  pont,  l'édifice  a  15  met.  de  largeur 
sur  10  de  longueur,  et  consiste  en  deux  arcades  à  plein 
dntre,  de  4  met.  d'ouverture  chacune,  et  dont  les  piles 
massives  sont  en  gros  blocs  de  pierre.  Des  pilastres  co- 
rinthiens reçoivent  la  retombée  des  archivoltes,  et  au- 
dessus  dos  impostes  il  y  a,  à  chaque  angle,  une  petite 
colonne  engagée  qui  supporte  l'entablement;  le  tout  est 
surmonté  d'un  attique,  au-dessus  duquel  on  voit  des 
traces  de  créneaux.  Sur  chaque  face  du  monument,  la 
frise  de  l'entablement  porte  une  inscription  ;  on  en  dis- 
tingue une  autre  sur  l'attique,  du  côté  de  la  ville  :  elles 
sont  toutes  trës-altérées,  mais  on  les  avait  recueillies 
avant  leur  entière  dégradation.  L'arc  de  Saintes  fut  élevé 
au  temps  de  l'empereur  Auguste ^  en  l'honneur  de  Ger- 
manicus.  L'architecte  Blondel  le  restaura  en  1665. 

SAINTtlTÉ.  V.  ce  mot  dans  no*re  Dictionna%re  de  Bio- 

uphie  et  d*  Histoire. 

SAINTONGEOIS  (Dialocte).  V.  l'omvm. 


SAINTRÊ  (Histoire  plaisante  et  Cronicque  du  Petit 
Jehan  de)  et  de  la  jeune  Dame  des  Belles  Cousines,  ro- 
man en  prose  du  xv*  siècle.  Jehan  de  Saintré,  k^\  de 
13  ans,  sert  comme  enfant  d'honneur  à  la  cour  du  roi 
Jean,  et,  grâce  à  ses  habiletés,  à  sa  douceur,  à  sa  cour- 
toisie»  à  sa  gentillesse,  il  est  aimé  et  loué  du  roi,  de  la 
reine,  des  seigneurs  et  des  dames.  Une  jeune  veuve, 
ou'on  appelait  la  Dame  des  Belles  Cousines,  lui  déclare, 
dans  le  but  d'en  faire  un  chevalier  renommé,  qu'elle  veut 
être  sa  dame,  lui  fournit  secrètement  tout  l'argent  dont 
il  à  besoin  pour  paraître  avec  éclata  s'occupe  de  son  édu- 
cation, lui  trace  les  devoirs  du  fidèle  amour  qui  chasse 
du  cœur  tous  les  vices  et  préserve  l'homme  de  péché 
mortel.  Elle  lui  ordonne  de  lire  les  histoires  des  anciens 
héros,  afin  de  s'affermir  par  de  beaux  exemples  dans  la 
route  de  l'honneur  et  du  devoir.  Arrivé  à  l'&ge  de  courir 
les  aventures,  Saintré  fait  une  emprise  d'un  bracelet  que 
sa  dame  lui  attache  au  bras  gauche,  se  rend  en  Aragon, 
où  son  vœu  avait  été  publié,  est  vainqueur  dans  tous  les 
combats,  et  revient  en  France  couvert  de  gloire.  Nommé 
chambellan  du  roi ,  il  continue  de  servir  la  I)aine  des 
Belles  Cousines  avec  tant  de  discrétion  et  de  prudence, 
que  nul  ne  soupçonne  leur  amour.  Pour  obéir  à  sa  re- 
quête, il  demande  au  roi  la  permission  d'aller  en  Prusse 
et  de  faire  la  guerre  aux  Sarrasins.  Après  avoir  exterminé 
l'armée  des  infidèles,  il  fait  une  nouvelle  emprise  sans 
l'aveu  de  sa  dame,  qui,  tourmentée  d'inquiétude,  se  re- 
tire dans  ses  terres  pour  penser  à  son  ami  absent.  Mais 
là  elle  succombe  à  une  indigne  passion  pour  l'abbé  d'un 
monastère  voisin.  Saintré,  qui  revient  plein  de  joie  pour 
annoncer  à  sa  dame  ses  nouveaux  triomphes,  est  accueilli 
d'abord  comme  un  importun,  puis  insulté  et  bafoué;  il 
se  venge  en  perçant  la  langue  de  l'abbé  d'un  coup  d'épée, 
et  arrache  à  la  dame  sa  ceinture  bleue,  symbole  de 
loyauté.  Il  retourne  à  la  cour,  où  la  Dame  des  Belles 
Cousines  est  bientôt  rappelée  par  la  reine.  Un  soir,  aprèi 
souper,  en  présence  du  roi,  de  la  reine  et  de  toute  la 
cour,  Saintré,  sans  nommer  personne,  raconte  ce  qui 
s'est  passé,  et  demande  à  chaque  dame  quel  châtiment  a 
mérité  l'amie  déloyale  :  toutes  répondent  qu'elle  doit 
être  chassée  d'honnête  compagnie.  Saintré  s'iidresse  à  la 
Dame  des  Belles  Cousines  elle-même,  et  veut  qu'elle 
donne  aussi  son  avis  :  éludant  la  question,  elle  dit  <^e 
le  chevalier  fut  mal  gracieux  d'enlever  à  la  dame  sa  cein- 
ture. Alors  Saintré  tire  la  ceinture  de  sa  manche,  et,  un 
genou  en  terre,  la  rend  à  la  Dame  des  Belles  Cousines, 

2 ni  fut  ainsi  déshonorée  aux  yeux  de  toute  la  cour.  — 
é  roman,  d'un  style  simple,  naturel  et  agréable,  est  un 
mélange  de  vérité  et  de  fable.  Les  personnages  ne  sont 
point  imaginaires  :  Jehan  de  Saintré  était  fils  de  Jeanne 
Chaudrié  et  de  Jean  de  Saintré  ou  Xaintré,  chevalier, 
sénéchal  d'Anjou  et  du  Maine.  La  Dame  des  Belles  Cou- 
sines est  toujours  désignée  sous  ce  seul  titre,  mais  elle 
appelle  les  ducs  d'Anjou,  de  Berry  et  de  Bourgogne  ses 
beaux  oncles  :  on  suppose  que  c'était  une  petite -fil  le  du 
roi  Jean,  Marie,  fille  de  Jeanne,  reine  de  Navarre; 
cette  Marie  épousa  en  1394  Alphonse  d'Aragon,  duc  de 
Candie.  On  comprend  facilement  que  l'auteur  n'ait  point 
voulu  la  nommer,  à  cause  du  déshonneur  qu'elle  s'attira 
par  sa  déloyauté.  L'histoire  n'est  pas  toujours  rapportée 
avec  fidélité  dans  ce  roman  :  les  anachronismes  y  sont 
nombreux.  La  scène  du  roman  est  placée  sous  le  règne 
de  Bonne  de  Bohême;  or.  Bonne,  première  épouse  de 
Jean,  mourut  en  janvier  1349,  et  ne  fut  jamais  reine  de 
France,  puisque  Jean  ne  monta  sur  le  trône  que  le 
22  août  1350.  Il  ne  régna  que  14  ans,  et  l'auteur  mt  que 
les  amours  de  Saintré  et  de  la  Dame  des  Belles  Cousines 
durèrent  16  années  ;  les  aventures  de  Saintré  n'ont  donc 

fm  s'accomplir  pendant  le  seul  règne  de  Jean.  D'ailleurs, 
es  ducs  d'Anjou,  de  Berry  et  de  Bourgogne  sont  appela 
frères  du  roi,  ce  qui  place  la  scène  sous  Charles  V.  Enfif 
l'auteur  dit  que  le  fameux  Boucicaut  accompagna  Saintii 
dans  son  expédition  de  Prusse;  la  campagne  de  Bouci* 
caut  en  Prusse  est  de  1383,  sous  Charles  YI.  Quoi  qu'on 
pense  de  ces  erreurs,  qui  furent  peut-être  volontaires, 
et  qui  sont  toujours  permises  dans  un  roman,  l'histoire 
du  Petit  Jehan  de  Saintré  n'en  est  pas  moins  une  pein- 
ture naïve  de  l'esprit  et  des  mœurs  du  xiv*  siècle  ;  elle 
est  surtout  précieuse  par  la  description  exacte  des  ar* 
moiries  de  la  plupart  des  grandes  maisons  de  France.  Ce 
roman  fut  écrit  vers  1459  par  Antoine  de  La  Salle,  qu'on 
suppose  avoir  été  secrétaire  de  Jean  d'Anjou,  duc  de  Ca- 
labre  et  de  Lorraine.  H.  D. 

SAINTS  (Actes  des).  V,  Actes  des  SAmrs. 
SAINT -SIMONISME,   ensemble  des  doctrines   reli- 
gieuses, sociales  et  économiques,  professées  par  l'école 


SAI 


1607 


SAI 


qvi  procédait  de  Saint-Simon.  Exposées  dans  plasieurs 
livres  dv  aiattre  au  temps  de  la  Restauration,  elles  y 
sont  noyées  au  milieu  de  grandes  phrases  yides  de  sens, 
et  ne  présentent  le  plus  souvent  que  des  divagations,  des 
lieux  communs  plus  ou  moins  bien  dissimulai  sous  une 
terminologie  nouvelle.  Quand  les  disciples  essayèrent, 
après  la  Révolution  de  1830,  de  les  mettre  en  pratique, 
ils  n'aboutirent  qu*à  se  rendre  ridicules  et  à  pro? oquer 
les  rigueurs  du  pouvoir  Judiciaire. 

Le  saint-simonisme  prétendit  être  une  religion,  et  prit 
le  nom  de  nouveau  cnristianisme.  An  fond,  ce  fut  une 
sorte  de  panthéisme.  «  Dieu  est  tout  ce  qui  est,  disait 
Enfantin,  i*un  des  principaux  sectateurs  de  Saint-Simon; 
tout  est  en  lui,  tout  est  par  lui.  Nul  de  nous  n*est  hors 
de  lui,  mais  aucun  de  nous  n*est  lui.  »  Les  saint^simo- 
niens  firent  de  leur  maître  un  prophète  ou  un  Messie  : 
Moïse,  Orphée,  Numa,  avaient,  disaient-ils,  organisé  les 
travaux  matériels,  Jésus-Christ  les  travaux  spirituels,  et 
Saint-Simon  les  travaux  religieux;  Saint-Simon  avait 
résumé  Moise  et  Jésus-Christ;  pour  les  hommes  de  Tave- 
nir,  Moise  devait  être  le  chef  du  culte,  Jésus-Christ  le 
chef  du  dogme,  et  Saint-Simon  le  chef  de  la  religion  ou 
le  pape. 

Les  théories  sociales  ne  sont  pas  moins  bizarres.  Se- 
lon la  secte,  Jésus-Christ  a  préparé  la  fraternité  univers 
selle,  Saint-Simon  la  réalise.  L'Église  nouvelle  gouverne 
lo  temporel  comme  le  spirituel,  le  for  intérieur  comme 
le  for  extérieur.  La  science  est  sainte,  l'industrie  est 
sainte.  Des  prêtres,  des  savants,  des  industriels,  voilà 
toute  la  société;  les  chefs  des  prêtres,  les  chefs  des  sa- 
vants, les  chefs  des  industriels,  voilà  tout  le  gouverne- 
ment. Ces  chefs  doivent  administrer  la  communauté 
dans  la  voie  et  selon  la  formule  du  maître,  qui  est  Vamé^ 
liorcUion  morale,  tnteliectUêHe  et  physique  dé  la  classe 
la  plus  nombreuse  et  la  plus  pauvre.  L'industrie  doit 
occuper  le  premier  rang,  parce  que  c'est  elle  qui  fournit 
les  moyens  de  donner  satisfaction  à  tous  les  besoins  et  à 
tous  les  désirs  des  hommes  :  la  classe  des  travailUurs , 
sur  laquelle  repose  l'existence  de  la  société,  a  donc  be- 
soin d'être  affranchie  de  l'esclavage  où  la  retiennent  les 
débris  de  l'organisation  féodale  et  la  puissance  des  ban- 
quiers ou  capitalistes.  Cette  importance  accordée  à  l'in- 
dustrie a  fait  donner  au  saint-simonisme  le  nom  d'^o^e 
tndtutrialiste.  Saint-Simon  fut  un  adversaire  de  la  doc- 
trine de  la  libre  concurrence;  il  regrettait  les  corpo- 
rations. —  Les  saint-simoniens  furent  accusés  de  prê- 
cher la  communauté  des  biens  et  la  communauté  des 
femmes;  mais  les  chefs  de  la  secte  protestèrent  énergi- 
quement  :  «  Le  système  de  la  communauté  des  biens 
s'entesd  universellement  du  partage  égal  entre  tous  les 
membres  de  la  société,  soit  du  fonds  lui-même  de  la 
production,  soit  du  fruit  du  travail  de  tous.  Les  saint- 
simoniens  repoussent  ce  partage  égjal  de  la  propriété , 
qui  constituerait  à  leurs  yeux  une  violence  plus  grande, 
une  injustice  plus  révoltante  que  le  partage  inégal  qui 
s'est  effectué  primitivement  par  la  force  des  armes,  par 
la  conquête.  Car  ils  croient  à  l'inégalité  naturelle  des 
hommes,  et  regardent  cette  inégalité  comme  la  base 
même  de  l'association,  comme  la  condition  indispensable 
de  l'ordre  social.  Ils  repoussent  le  système  de  la  commu- 
nauté des  biens  ;  car  cette  communauté  serait  une  violer 
tlon  manifeste  de  la  première  de  toutes  les  lois  morales 
qu'ils  ont  reçu  mission  d'enseigner,  et  qui  veut  qu'à  Va- 
venir  chacun  soH  placé  s^on  sa  capacité  et  rétribué 
selon  ses  csuvres.  Mais,  en  vertu  de  cette  loi,  ils  deman- 
dent Vabolilion  de  tous  les  privUéges  de  naissance,  sans 
exception,  et  par  conséquent  Vctbolition  de  Vhéritage,  le 
pins  grand  de  ces  privilèges.  Ils  demandent  que  tous  les 
instruments  du  travail ,  les  terres  et  les  capitaux  qui 
forment  ai^jourd'hui  le  fonds  morcelé  des  propriétés  par- 
ticulières, soient  exploités  par  cusociaiton  et  hiérar- 
chiquement, de  manière  que  la  tâche  de  chacun  soit 
l'expression  de  sa  capacité,  et  sa  richesse  la  mesure  de 
ses  œuvres.  Les  saint-simoniens  ne  viennent  porter  at- 
teinte à  la  constitution  de  la  propriété  qu'en  tant  qu'elle 
consacre  pour  quelques-uns  le  privilège  de  l'oisiveté, 
c.-à-d.  de  vivre  du  travail  d'autrui  ;  qu'en  tant  qu'elle 
abandonne  au  hasard  de  la  naissance  le  classement  social 

des  individus Le  christianisme  a  tiré  les  femmes  de 

la  servitude;  mais  il  les  a  condamnées  pourtant  à  la  su- 
baltemité,  et  partout,  dans  l'Europe  dirétienne,  nous  les 
voyons  encore  frappées  d'interdiction  religieuse,  poli- 
tique et  civile.  Les  saint-simoniens  viennent  annoncer 
leur  affranchissement  définitif,  leur  complète  émancipa- 
tion, mais  sans  pour  cela  abolir  la  sainte  loi  du  mariage. 
Us  demandent,  comme  les  chrétiens,  qu'un  seul  homme 


soit  uni  à  une  seule  femme;  mais  ils  enjetgnent  que 
l'épouse  doit  devenir  l'égale  de  l'époux,  et  que,  selon  la 

grâce  particulière  que  Dieu  a  dévolue  à  son  sexe,  elle 
oit  lui  être  associée  dans  l'exercice  de  la  triple  fonction 
du  temple,  de  l'État,  et  de  la  famille;  de  manière  qu# 
l'individu  social ,  qui.  Jusqu'à  ce  Jour,  a  été  l'homme 
seulement,  soit  désormais  l'homme  et  la  femme.  » 

Le  saint-simonisme  n'a  eu  aucune  puissance  comme 
religion  ;  il  n*a  pas  non  plus  trouvé  une  bonne  formule 
d'organisation  sociale.  Mais  ses  critiques  ont  du  moins 
attiré  l'attention  sur  plusieurs  plaies  de  la  civilisation 
moderne,  à  savoir,  la  misère  du  plus  grand  nombre  con- 
trastant avec  l'opulence  de  quelques  privilégiés,  la  pro* 
priété  aspirant  au  monopole,  l'héritage  retournant  av 
système  de  la  mainmorte  et  de  la  substitution,  l'oisive; 
des  élus  de  la  fortune.  II  a  réhabilité  le  travail  et  le  grand 
principe  de  la  capacité;  il  a  suscité  des  questions  dont  la 
solution  doit  désormais  préoccuper  les  publicistes  et  les 

Souvemements.  Son  influence  est  incontestable  sur  les 
ivers  socialismes  de  nos  jours,  qui  ont  tant  gémi  sur  les 
souffrances  des  travailleurs  et  poursuivi  le  capital  d'une 
haine  si  ardente.  V.  Socialisvb  ,  Comvunismb.  B. 
SAINTZ,  vieux  mot  qui  désignait  les  cloches* 
SAISIE,  voie  d'exécution  forcée  que  la  loi  met  à  la  dis* 
position  des  créanciers,  et  qui  leur  permet  de  mettre 
sous  la  main  de  la  Justice  les  biens  meubles  ou  immeu- 
bles de  leurs  débiteurs,  et  de  contraindre  ceux-ci  à  l'exé- 
cution des  obligations  qu'ils  ont  contractées.  Il  y  a  pour* 
tant  des  objets  insaisissables  (V.  ce  mot).  Les  saisies 
varient  suivant  la  nature  et  l'importance  des  biens  saisis  ; 
on  distingue  :  1*  la  saisie-^arrét ,  au  moyen  de  laquelle 
le  créancier  arrête  aux  mains  d'un  tiers  les  effets  et  de- 
niers appartenant  à  son  débiteur,  et  s'oppose  à  ce  que 
remise  lui  en  soit  faite.  Le  payement  fait  par  le  tiers , 
au  mépris  d'une  saisie-arrêt  régulière,  l'expose  à  payer 
deux  fois.  Les  sommes  arrêtées  entre  les  mains  des  dé- 
positaires doivent  être  versées  à  la  Caisse  des  dépôts 
et  consignations  [Code  de  Procédure,  art  561  et  suiv.  )  ;  — 
2^^  la  xaifts-6raiiaon,  qui  permet  au  créancier  muni  d'un 
titre  exécutoire  de  saisir  les  fruits  pendants  par  racines 
appartenant  à  son  débiteur,  et  d'en  opérer  la  vente 
pour  s'indemniser  à  due  concurrence  lorsqu'ils  seront 
parvenus  à  leur  maturité;  elle  ne  peut  être  faite  que 
dans  les  six  semaines  qui  précèdent  l'époque  ordinaire 
de  la  maturité.  La  vente  doit  être  faite  un  dimanche 
ou  un  Jour  de  marché  (/bûi.,  art.  626-635);  —  3«  la 
saisie  conservatoire ,  qui  donne  le  droit  au  créancier, 
même  dépourvu  de  titre,  de  faire  saisir  les  effets  mobi- 
liers de  ses  débiteurs,  avant  qu*une  décision  Judiciaire 
soit  intervenue,  à  la  condition  de  s'y  faire  autoriser  i)ar 
le  président  du  tribunal  de  comkierce;  — 4**  la  saisie* 
exécution  ou  saisie  mobilière ,  an  moyen  de  laquelle  le 
créancier  porteur  d'un  titre  exécutoire  peut  faire  saisir 
et  vendre  les  meubles  corporels  de  son  débiteur,  et  se 
faire  payer  sur  le  prix;  elle  doit  être  précédée  d'un  com- 
mandement fait  un  Jour  an  moins  avant  l'exécution  du 
Jugement  (arU  583  à  625);  —  5*  la  saisie  foraine,  exercée 
même  sans  titre,  avec  la  permission  du  président  du  tri- 
bunal de  première  instance,  on  du  juge  de  paix,  et  sans 
commandement  préalable,  sur  les  effets  d'un  débiteur 
forain,  trouvés  dans  la  commune  qu'habite  le  créancier; 
—  6*  la  saisie-nagerie,  en  vertu  de  laquelle  un  proprié- 
taire ou  principal  locataire  fait  vendre,  après  Jugement 
de  validité,  les  objets  nantissant  les  lieux  par  lui  loués, 
et  sur  lesquels  l'article  2102  du  Code  Napoléon  lui  ac- 
corde un  privilège;  —  7^  la  saisie  immobilière,  qui 
permet  au  créander,  après  des  formalités  de  commande- 
ment, de  transcription  et  autres  préparatoires,  d'expro- 
prier les  immeubles  appartenant  a  son  débiteur,  et  de  se 
faire  payer  sur  le  prix.  Elle  a  été  réglementée  a  novo  par 
la  loi  du  2  Juin  1841  ;  —  8*  la  saisie  des  rentes^  qui  ar- 
rête aux  mains  du  débiteur  les  arrérages  échus  ou  à 
échoir  d'une  rente,  et  permet  d'arriver  à  l'adjudication 
publique  du  droit  d*en  percevoir  les  arrérages  ;  —  9°  la 
saisie-revendication ,  au  moven  de  laquelle  un  créan- 
cier prétendant  avoir  des  droits  de  propriété,  de  posses* 
sion  ou  de  gage  sur  une  chose  possédée  par  un  tiers,  la 
met  sous  la  main  de  la  Justice,  jusqu'à  ce  qu'il  ait  été 
statué  sur  le  mérite  de  sa  prétention  (art.  826  et  suiv.). 
V.  Roger,  TVotté  de  la  saisse^rrét,  1837,in-8*;Lacbaixe, 
Traite  de  la  vente  des  immeubles  par  expropriation 
forcée,  1820,  2  vol.  in-8<*;  Paignon,  ComÊnentasre  théo- 
rique et  pratique  sur  les  ventes  judiciaires  de  biens  tm- 
meubles,  1841,  2  vol.  in-8*;  E.  Persil,  Commentaire  de 
la  loi  du  9  juin  4841  sur  les  ventes  judiciaires  de  biens 
immeubles^  1842,  in-8*'t  Ghauvean,  Cod£  de  la  saisit 


SAL 


1608 


SAL 


inmotnlièn,  1843,  2  yoI.  in-8°;  F.  Berriat  Saint-Prix,  I 
Manuel  de  la  saisie  immobilière,  1855,  in-8°;  BressoUes, 
Explication  de  la  loi  du  24  mai  48S8,  contenant  les  tno- 
difications  au  Code  de  Procédure  civile  en  matière  de 
saisie  immobilière,  Toutoase,  1858,  iD-8<*;  Grosse  et 
Rameau,  Commentaire  ou  eooplication  de  la  loi  du 
21  mai  4858,  2  vol.  ia-S»;  Ollivier  et  Mourlon,  Com^ 
mentaire  de  la  loi  portant  modification  du  Code  de  pro- 
cédure  sur  les  saisies  immobilières,  1858,  in -8*';  Piogey, 
Commentaire  de  la  loi  du  21  mcÀ  4858  sur  la  saisi»  tm- 
mobilière,  1858,  iQ-8<*;  Seligman  et  Paul  Pont,  Eayplir' 
cation  théorique  et  pratique  de  la  loi  du  21  mai  4858  sur 
les  saisies  immobilières ,  1859,  iD-8<*.  R.  d'E. 

SAISIE,  en  matière  de  Douanes,  arrestation  que  les  pré- 
posés, et  autres  auxquels  le  droit  en  a  été  conféré,  font  des 
marchandises  à  regard  desquelles  les  lois  sur  les  impor- 
tations, exportations  et  entrepôt  ont  été  violées.  Toute 
feusse  déclaration  dans  la  aualité  ou  Tespèce  de  la  mar- 
chandise pour  éluder  un  droit  de  12  fr.  et  au-dessus, 
toute  importation  illicite  ou  tout  débarquement  sans  per- 
mis de  produits  donnant  ouverture  à  un  droit  de  3  fr. 
au  moins,  peuvent  entraîner  la  confiscation.  Un  déficit 
dans  le  nombre  déclaré,  une  omission  au  manifeste,  ne 
sont  passibles  que  d'une  amende.  L*administration  des 
Douanes  peut  transiger  sur  les  procès  résultant  des  con- 
traventions. 

SAISINE,  terme  de  Droit;  c'est  le  fait  d'être  saisi  d'une 
chose,  c'est-à-dire  la  possession  de  cette  chose.  On  dis- 
tingue la  saisine  de  droit  et  la  samntf  de  fait.  La  première 
est  attachée  par  la  loi  à  certaines  situations  légales; 
ainsi,  celle  d'héritier  légitime ,  par  opposition  aux  en- 
fants naturels ,  au  conjoint  survivant  ou  à  l'État^  qui 
doivent  se  faire  envoyer  en  possession  par  Justice  des 
biens  laissés  par  le  défunt;  —  celle  des  héritiers  à  ré- 
serve, par  opposition  aux  légataires,  même  universels, 
qui  doivent  leur  demander  la  délivrance  des  biens  lé- 
gués; lorsqu'il  n'y  a  pas  d'héritiers  à  réserve,  le  I^taire 
universel  a  la  saisine;  —  celle  d'exécuteur  testamen- 
taire, mais  seulement  au  cas  où  elle  leur  a  été  donnée 
par  le  testateur.  La  saisine  de  fait  suppose  une  possession 
réelle  ;  ainsi,  en  matière  d'action  possessoire.  V,  Simon- 
net,  Histoire  et  théorie  de  la  saisine  héréditaire  dans  les 
transmissions  de  biens  par  décès,  1851,  in-8o.     R.  n'E. 

SAISONS  (Les),  figures  allégoriques  auxquelles  les 
Anciens  ont  donné  des  attributs  rappelant  chaque  saison 
de  l'année.  Le  Printemps  est  couronné  de  fleurs,  et  tient 
par  la  main  un  chevreau,  ou  trait  une  brebis  ;  VÉté,  cou- 
ronné d'épis,  tient  d'une  main  un  faisceau  d'épis,  et  de 
l'autre  une  faucille;  V Automne  a  des  grappes  de  raisin 
dans  les  mains,  ou  un  panier  de  fruits  sur  la  tête;  V Hi- 
ver, couvert  de  vêtements  épais,  tient  d'une  main  des 
fruits  secs,  de  l'autre  des  oiseaux  aquatiques,  et  auprès 
de  lui  est  un  arbre  dépouillé  de  verdure.  V,  au  Suppt, 

SALADE ,  casque.  V.  notre  Dictumnaire  de  Biogra- 
phie et  d*Histoire. 

SALADERO,  nom  qu'on  donne,  dans  l'Amérique  du 
Sud,  à  des  abattoirs  privés,  appartenant  à  des  particu- 
liers ou  à  des  compagnies. 

SALADINB,  cotte  df'armes  du  xn'  siècle,  ainsi  appelée 
sans  doute  parce  qu'on  l'avait  empruntée  aux  Musul- 
mans commandés  par  Saladin. 

SALAIRE,  en  latin  salarium  (de  soi,  sel;  parce  que 
dans  l'origine  les  Romains  payaient  avec  du  sel),  prix 
du  travail  Journalier  de  l'ouvrier,  et  en  général  de  tous 
les  gens  de  service.  Le  Code  Napoléon  accorde  pour  le 

Î payement  des  salaires' un  privilège  sur  les  meubles  et  sur 
es  immeubles  pour  l'année  échue,  et  pour  ce  qui  est  dû 
de  l'année  courante;  l'action  se  prescrit  par  6  mois. 

L'Économie  industrielle  n'envisage  dans  le  salaire  que 
le  prix  de  la  main  d'œuvre  :  elle  a  constamment  en  vue 
la  réduction  de  ce  prix,  parce  qu'elle  ne  se  préoccupe 
que  du  débit  des  produits  et  de  l'abondance  des  béné- 
fices, sans  nul  souci  des  agents  du  travail.  II  en  est  au- 
trement de  l'Économie  politique,  dont  l'objet  est  la  pros- 
périté sociale,  et  par  conséquent  la  meilleure  répartition 
possible  entre  tous  des  avantages  sociaux.  Elle  s'inquiète 
sans  doute  aussi  de  la  multiplicité  croissante  des  pro- 
duits, mais  en  même  temps  de  la  facilité  de  vivre  pour 
ceux  qui  concourent  à  les  faire  naître  ;  elle  recherche  les 
moyens  par  lesçfuels  les  travailleurs  pourront  vivre  dans 
une  certaine  aisance.  C'est  là  un  d^  plus  grands  pro- 
blèmes sociaux.  Il  est  manifeste  qu'un  trop  grand  nombre 
d'hommes  peuvent  être  condamnés  à  une  sorte  d'escla- 
vage, si  l'équité  et  la  pleine  liberté  du  contrat  n'ont  pas 
présidé  à  la  distribution  des  salaires  ;  (pie  le  salarié  est 
souvent  dominé  par  le  besoin,  et  obhgé  de  subir  de 


dures  conditions  ;  que  le  salaire  peut  manquer  on  être 
insuffisant.  La  seule  difl'érence  qui  sépare  alors  le  salarié 
de  l'esclave,  c'est  que  nul  ne  peut  par  sévices  le  con- 
traindre au  travail  ou  punir  sa  résistance  ;  mais  du 
moins  l'esclave  est  toujours  nourri  par  son  maître.  As- 
surer par  une  bonne  législation  la  suffisance  constante 
des  salaires,  et  faire  en  sorte  que,  dans  les  circonstances 
difficiles,  les  mœurs  suppléent  à  ce  que  n'auraient  pu 
faire  les  lois,  voilà  la  question. 

On  a  peine  à  comprendre  que  de  nos  Jours  on  ait  pu  re- 
muer et  passionner  les  travailleurs  avec  un  non-sens  et 
une  chimère  aussi  absurde  que  Végalité  des  salaires. 
Évidemment  l'homme  qui  travaille  plus  ou  mieux  qu'un 
autre  a  droit  à  une  rémunération  plus  forte;  ou  bien  il 
faudrait  que  toute  idée  d'équité  fût  bannie  de  la  terre. 
L'égalité  des  salaires  signifiait  sans  doute,  pour  ceux  qui 
la  réclamaient,  l'élévation  du  salaire  général  au  niveau 
des  gains  de  certains  privilégiés. 

Le  taux  des  salaires  est  nécessairement  variable,  comme 
le  sont  les  prix  de  la  matière  première,  le  loyer  des  ma- 
chines et  des  ateliers,  et  les  frais  généraux.  Lorsque  la 
main  d'œuvre  est  abondante,  la  fabrication  peu  active, 
ou  les  produits  peu  recherchés,  le  salaire  tend  à  la  baisse  ; 
lorsque  les  produits  sont  demandés  et  les  bras  insuffi- 
sants, la  main  d'œuvre  est  à  la  hausse.  C'est  là  une  des 
lois  les  plus  simples  du  mécanisme  industriel.  Ceux  qui 
ont  voulu  faire  intervenir  l'autorité  dans  la  fixation  du  sa- 
laire se  sont  étrangement  trompés  :  toute  liberté  doit 
exister  à  cet  égard,  et  le  débat  est  entre  l'ouvrier  et  le 
fabricant.  Comment,  d'ailleurs,  fixer  le  taux  du  salaire? 
Serait-il  le  même  pour  toutes  les  professions?  L'incapa- 
cité et  la  paresse  seraient  donc  récompensées  comme  le 
talent  et  l'activité?  L'inhabileté  ne  vivrait-elle  pas  aux 
dépens  du  mérite?  A  moins 'de  la  tyrannie  la  plus  com- 
plète, toute  fixation  de  salaire  serait  vaine  :  on  a  fait  bien 
des  tarifs  en  Angleterre,  et  aucun  n'a  subsisté  ;  les  mi- 
nimum et  les  maximum  fixés  durant  les  crises  sont  tou- 
jours devenus  inutiles  au  bout  de  quelques  Jours.  Enfin 
la  fixation  des  salaires  serait  nuisible  à  l'ouvrier  :  car,  en 
haussant  les  salaires,  on  augmente  naturellement  les  prix 
de  vente;  par  suite,  on  diminue  les  achats,  par  consé- 
quent la  production  elle-même.  —  V,  Mac-CuUoch,  Essai 
sur  les  circonstances  qui  déterminent  le  taux  des  sa- 
laires et  la  condition  des  clauses  laborieuses,  en  anglais, 
Edimbourg,  1826,  in-12  ;  Senior,  Trois  leçons  sur  le  taux 
des  salaires,  en  anglais,  Londres,  1830,  in-8<';  Carrey, 
Essai  sur  le  taux  des  salaires,  en  anglais,  Philadelphie, 
1835,  in-8°;  F.  Schmidt,  Recherches  sw  la  population, 
les  salaires  et  le  paupérisme,  en  allemand,  Leipzig,  1835, 
in-8<>;  J.  Gamier,  Étude  sur  les  profits  et  les  salaires, 
Paris,  1848,  in-8o. 

SALAMALEC  (de  l'arabe  salam  alat  kom,  la  santé 
soit  avec  vous),  mot  par  lequel  on  désigne  la  salutation 
des  Orientaux,  accompagnée  de  révérences  profondes. 

SALAMANDRE,  reptile  dont  les  Anciens  avaient  fait 
l'attribut  du  feu,  parce  qu'on  prétendait  qu'elle  pouvait 
vivre  au  milieu  des  flammes.  Les  poètes  la  prirent  aussi 
pour  emblème  de  l'amour. 

SALAMANIE,  flûte  turque. 

SALAMINIENNE  (Galère).  ;  V.  notre  Dictionnaire  de 

SALARIA  (Voie).  )    Biographie  et  d'Histoire. 

SALE,  mot  désignant  autrefois  une  soucoupe  sur  la- 
quelle on  présentait  divers  objets  à  la  reine  de  France. 

SAUCET,  SALCIONALou  SAUCIONAL  (du  latin  salix, 
saule),  un  des  Jeux  de  flûte  de  l'orgue.  On  le  fait  quel- 
quefois à  doubles  lèvres. 

S ALIENS  reliants  des).  V.  Axamsnta. 

SALIÈRE.  V.  au  Supplément. 

8AL1QUË  (Loi).  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  SBisioire 

SAUSBURY  (Cathédrale  de).  Cette  église,  bâtie  de 
1220  à  1260,  c-à-d.  à  l'époque  la  plus  brillante  de  l'ar- 
chitecture ogivale,  est  considérée  comme  la  plus  par- 
faite de  l'Angleterre.  Elle  se  distingue,  en  effet,  par  la 
régularité  du  plan,  l'unité  de  style,  la  noblesse  et  la  I^è- 
reté  de  la  structure,  l'élégante  simplicité  des  détails,  et 
l'harmonie  de  toutes  les  parties.  Son  plan  est  en  forme 
de  croix  archiépiscopale ,  c.-à-d.  à  double  transept.  Sur 
le  milieu  des  transepts  est  une  tour  bâtie  au  temps  d'E- 
douard III  :  elle  est  formée  de  deux  étapes,  distingués 
par  des  fenêtres  que  surmontent  de  petites  arcades  c4 
des  frontons  d'ornementation  ;  aux  angles  se  dressent 
quatre  clochetons  aigus,  qui  dissimulent  avec  art  le  pas- 
sage du  carré  à  l'octogone,  et  une  pyramide  assez  élancée, 
dont  les  longues  lignes  sont  interrompues  par  des  orne- 
ments d'un  bon  effet,  atteint  une  hauteur  de  123  met. 
au-dessus  du  sol  ;  la  pointe  de  la  flèche  est  inclinée  de 


SAL 


1609 


SAL 


0*^,50  environ.  La  façade  occidentale  de  l'église  est  ans»i 
remarquable  par  sa  belle  ordonnance  que  par  la  délica- 
tesse des  ornements.  Trois  portes  un  peu  pauvres,  et , 
au-dessus,  trois  hautes  fenêtres,  puis  un  pignon  aigu; 
aux  angles,  des  tourelles  surmontées  de  clochetons;  le 
tout ,  orné  d'arcatures  ogivales  :  tels  sont  les  traits  dis- 
tinctifs  de  cette  façade.  L'intérieur  de  la  cathédrale  de 
Slisbary  a  138™  de  longueur,  24<"  de  largeur,  25'"  de 
Sauteur  ;  le  premier  transept  est  long  de  65™,  le  deuxième 
de  44"*,20,  et  leurs  extrémités  sont  carrées,  ainsi  que 
rabside.  Tout  est  d'une  froideur  inexprimable,  et  cette 
froideur  provient  de  Tabsence  complète  de  sculpture. 
L'édifice  est  éclairé  par  365  fenêtres  superposées  en  trois 
rangées,  mais  dont  les  vitraux  peints  ont  été  détruits  au 
XVI*  siècle  ;  on  n*en  a  replacé  de  nos  Jours  que  dans  le 
chœur,  où  Ghantrey  a  sculpté  les  tombeaux  du  premier 
comte  de  Salisburv ,  qui  vivait  au  xut*  siècle,  et  d'un 
comte  de  Malmesbury.  —  Sur  le  flanc  méridional  de 
l'église,  depuis  le  grand  portail  Jusqu'au  premier  tran- 
sept, se  développe  un  beau  cloître  carré,  de  55™  de  côté. 
Au  milieu  du  côté  oriental  de  ce  cloître,  un  vestibule 
élégamment  orné  donne  accès  dans  une  salle  capitulaire 
octogone,  de  17™,67  de  diamètre,  éclairée  par  huit  larges 
et  hautes  fenêtres.  Cest  un  monument  incomparable.  Au 
centre  de  la  salle  s'élève  un  çilier  composé  d'un  faisceau 
decolonnettes,  comme  soutien  apparent  des  nervures 
ramifiées  de  la  voûte.  Une  arcade  est  creusée  à  la  partie 
inférieure  des  murailles,  avec  une  plinthe  saillante  en 
pierre,  où  les  chanoines  s'asseyaient  sur  des  tapis  ;  des 
sujets  tirés  de  l'Ancien  Testament  y  ont  été  sculptés  en 
bas-relief.  La  salle  contient  une  table  dont  se  servait  le 
chapitre ,  reposant  sur  huit  colonnettes  que  relient  de 
gracieuses  arcades  ogivales  :  elle  est  un  intéressant  spé- 
cimen du  mobilier  du  xiu*  siècle.  V.  John  Britton,  The 
^istory  and  antiquitiês  ofthe  cathsdral  church  of  Scdis- 
bury,  L/)ndres  1^14.  B. 

SAUTE  (de  l'italien  salita,  montée,  saillie).  Ce  mot, 
quelquefois  employé  dans  la  langue  de  l'architecture, 
désigne  un  genre  de  montée  très-usité  en  Italie  :  c'est 
une  pente  plus  ou  moins  douce,  coupée,  de  mètre  en 
mètre  environ,  par  une  traverse  en  pierre  haute  de  0  à  10 
centimètres,  et  à  bord  très-arrondi.  Elle  forme  une  es- 
pèce de  contre-marche,  dont  le  giron  est  en  pente  très- 
marquée  Cest  une  tradition  de  l'Antiquité,  car  on  en  a 
trouvé  à  Pompéi.  Lessalites  tiennent  la  place  de  marches. 
On  en  fait  quelquefois  de  très-longues,  et  elles  ont  cet 
avantage  que  les  chevaux  et  autres  bêtes  de  somme  peu- 
vent y  monter,  et  même  les  carrosses ,  moyennant  un 
cahot  à  chaque  changement  de  çiron.  A  Rome,  la  montée 
du  Capitole  moderne  est  en  salite.  C'est  également  une 
salite,  mais  en  lima^n,  qui  conduit  sur  la  plate-forme 
de  la  ooloesale  basilique  de  S^- Pierre.  Les  salites  sont 
toujours  construites  en  briques  de  champ,  rangées  en 
épi  ;  le  cordon  seul  est  en  pierre.  On  les  appelle  aussi 
escaliers  à  cordons.  C.  D— t. 

SALIVI  (Idiome^,  un  des  Idiomes  indigènes  de  l'Amé- 
rique da  Sud,  parlé  par  les  Salivis,  sur  les  bords  du  haut 
Orénoque,  entre  ses  affluents  le  Meta  et  le  Guaviare.  Il 
est  plein  de  sons  nasaux.  Le  P.  Anisson  en  a  rédigé  la 
Grammaire. 

SAIXB  (du  celtique  salât  maison),  pièce  plus  ou  moins 
grande  d'une  habitation  privée,  d'un  palais  ou  d'un  éAi- 
flce  public,  destinée  à  un  usage  déterminé.  Il  y  a  des 
salles  à  manger,  des  salles  d'armes,  do  bal,  de  concert, 
d'audience,  de  réception,  de  billard,  de  bain,  etc. 

SALLE  GAPITULAIRB.  V,  CAPITULAiaE. 
SALLE  D*ASILB.  V,  ASILE. 

salle' DE  POLICE,  chambro  d*arrêt  pour  les  militaires 
coupables  de  fautes  légères.  Elle  fait  partie  de  la  caserne, 
et  est  garnie  d*un  lit  de  camp.  On  n'y  entre  pas  |K)ur 
moins  de  24  heures ,  et  l'on  ne  peut  y  rester  plus  de 
15  jours.  Les  détenus  reçoivent  la  nourriture  de  l'ordi- 
naire, sortent  pour  faire  leur  service  et  aller  deux  fois  par 
Jour  à  l'exercice,  et  sont  astreints  aux  corvées  de  propreté 
dans  les  quartiers. 

SALOMON  (Enfants  de).  V,  Covpagnoniiagb. 

SALON ,  pièce  destinée  dans  une  maison  à  recevoir  la 
compagnie.  On  a  donné  le  nom  de  Salon  à  la  galerie  où 
se  font  à  Paris  les  expositions  périodiques  des  Beaux- 
Arts,  et  à  l'exposition  elle-même,  parce  que  les  exposi- 
tions n'avaient  lieu  primitivement  que  dans  le  ffnnd 
salon  carré  du  Louvre.  Les  membres  des  Académies  de 
peinture  et  de  sculpture  avaient  alors  le  droit  exclusif 
d'y  exposer  leurs  ouvrages. 

SALONIKA ,  costume  oriental.  V.  Aba. 

ftALOUNG.  f^.  Challouno. 


SALPÊTIUÈRB  (La),  hospice  de  Paris,  destiné  à 
voir  les  femmes  indigentes,  infirmes  ou  âcées  de  70  ans« 
et  en  outre  au  traitement  des  folles.  Fondé  en  vertu  d'un 
édit  du  27  avril  1656,  on  y  renferma  d'abord  les  men- 
diants, les  vagabonds  et  les  femmes  de  mauvaise  vie. 
Les  constructions  premières  furent  élevées  par  Libéral 
Bruant;  d'autres  corps  de  bâtiment  ont  été  ajoutés  à  me- 
sure que  le  besoin  s'en  faisait  sentir.  L'église  est  bâtie 
sur  un  plan  circulaire  qui  a  près  de  20  met.  de  diamètre, 
et  couverte  d'un  dôme  octogone  :  l'intérieur  est  percé  de 
8  arcades,  qui  communiquent  à  4  nefs,  de  23  met.  de 
longueur,  et  à  4  chapelles  ;  ces  nefs  et  ces  chapelles,  dis- 
posées en  rayons,  ai>outissent  au  centre  de  l'église,  où 
est  l'autel  principal. 

SALTARELLE  (du  latin  saltare,  danser),  danse  ita- 
lienne, d'un  mouvement  rapide  et  toujours  croissant ,  que 
le  danseur  accompagne  avec  sa  guitare.  Elle  est  à  trois 
temps  ou  à  six-huit;  le  premier  temps  de  chaque  me- 
sure est  fortement  marqué,  quoique  commençant  par 
une  brève.  On  la  danse  au  3'  acte  de  la  MuetU  ds  Por^ 
tici,  grand  opéra  de  Scribe  et  G.  Delavigne,  musique 
d'Auber. 

SALTATION ,  nom  donné  par  les  anciens  Romains  à 
l'art  qui  comprenait  la  danse,  la  pantomime,  l'action 
théâtrale  et  l'action  oratoire. 

SALTIMBANQUE  (de  l'italien  saltare  in  banco,  sauter 
sur  des  tréteaux).  Jongleur,  bateleur,  charlatan,  qui  fait 
ses  exercices  et  débite  ses  drogues  sur  les  places  pu- 
bliques. Les  saltimbanques  doivent  être  munis  d'une 
permission  de  la  police.  A  Paris,  d'après  une  ordonnance 
du  30  nov.  1853,  ils  ne  peuvent  exercer  avant  8  heures 
du  matin ,  et  doivent  se  retirer  avant  6  heures  du  soir 
du  i*'  octobre  au  l*'  avril,  avant  9  heures  du  l*'  avril 
au  l*'  octobre;  il  leur  est  interdit  de  se  ûdre  accompa- 
gner d'enfants  au-dessous  de  16  ans. 

SALUBRITÉ  PUBLIQUE,  soin  que  l'Administration 

{>rend  de  la  santé  publique.  Elle  comprend  notamment  : 
es  dessèchements  de  marais;  la  police  sanitaire;  la 
voirie;  la  surveillance  des  halles  et  marchés,  avec  celle 
des  boutiques  à  comestibles  et  liquides,  principalement 
des  boulangers,  bouchers,  marchands  de  vins,  limona- 
diers, épiciers,  pharmaciens  et  confiseurs;  l'arrosement; 
le  balayage  ;  l'enlèvement  des  immondices,  des  neiges  et 
glaces.  Le  gouvernement  prescrit  les  travaux  généraux 
de  salubrité  qui  intéressent  les  villes  ou  communes,  et 
les  dépenses  en  sont  supportées  par  chacune  d'elles.  L'ad- 
ministration munici|>ale  prend  les  mesures  nécessaires  : 
d'abord  pour  assainir  l'air,  afin  de  prévenir  ou  d'arrêter 
les  épidémies,  les  épizooties,  les  maladies  contagieuses; 
ensuite  pour  l'observation  des  règlements  concernant  le 
nettoiement  des  voies  publiques,  les  inhumations,  les 
fosses  d'aisances,  le  curage  des  mares,  puits  et  puisards, 
l'enfouissement  des  animaux  morts,  et  la  suppression  des 
com^tibles  g&tés  ou  corrompus.  Elle  impose  des  obliga- 
tions spéciales  pour  l'établissement  des  manufactures  et 
ateliers  insalubres  ou  incommodes;  elle  surveille  les 
échaudoirs,  les  salles  de  dissection  et  lieux  d'exposition 
de  cadavres  ;  elle  interdit  d'élever,  sans  autorisation,  dans 
certaines  localités,  des  volailles,  lapins,  pigeons,  porcs, 
vaches ,  chèvres  et  moutons.  A  Pans ,  aux  termes  d'une 
ordonnance  de  police  du  23  nov.  1823,  les  maisons  doi- 
vent être  tenues  en  état  de  propreté,  pourvues  de  tuyaux 
et  cuvettes,  afin  que  les  eaux  aient  un  écoulement  con- 
venable sur  la  rue  ou  dans  un  égout  ou  puisard  ;  les  loges 
de  portier  bien  ventilées  ;  les  latrines  sans  odeur,  avec 
tuyau  d'évent  et  sol  imperméable;  le  sol  des  écuries  éga- 
lement imperméable,  et  les  fumiers  enlevés  chaque  jour; 
les  chambres  louées  en  garni  ayant  au  moins  14  met 
cubes  par  personne.  Il  est  défendu  de  Jeter  ou  déposer 
dans  les  cours  aucune  matière  pouvant  entretenir  l'hu- 
midité ou  donner  des  exhalaisons  ;  le  sol  des  ruisseaux 
doit  être  propre  ;  enfin  toutes  les  précautions  d'assainis- 
sement et  d'intérêt  de  santé  publi(|ue  font  le  complément 
d'une  bonne  salubrité.  Les  infractions  aux  règlements  lo- 
caux concernant  la  salubrité  sont  punies  d'amende,  et , 
en  cas  de  récidive,  d'emprisonnement ,  par  les  art.  471 , 
474  et  suiv.  du  Code  pénal.  V.  Monfalcon  et  Polinière, 
Traité  de  la  scUubriU  dans  les  grandes  villes,  Paris,  1840, 
in-8*  ;  A.  Tardieu ,  Dictionnaire  d'hygiène  jmblique  et  de 
salubrité,  Paris,  1852-54,  3  vol.  in-8^  T. 

SALUT  ou  SALUTATION,  action  de  saluer,  par  res- 
pect ,  bienséance  ou  amitié.  Chaque  peuple  a  sa  manière 
de  saluer.  La  plupart  des  Européens  se  découvrent  et 
s'inclinent;  les  Anglais,  et  surtout  les  Américains,  se 
pressent  la  main  sans  se  découvrir  ;  les  Turcs  s'inclinent 
en  portant  la  main  droite  sur  le  cœur,  ou  en  élevant  les 


SAL 


1610 


SAN 


mains  au-dessus  de  la  tète;  les  Japonais  Ment  un  pied  de 
leur  pantoufle;  les  habitants  des  Philippines  prennent  la 
main  ou  le  pied  de  celui  qu'ils  veulent  honorer,  et  s'en 
frottent  le  visage  ;  certains  nègres  d'Afrique  s'abordent 
en  se  serrant  trois  fois  le  doigt  du  milieu  ;  les  Lapons  et 
les  Otaitiens  se  posent  le  nés  l'un  contre  l'autre,  etc.  — 
Les  paroles  de  salutation  ne  sont  pas  moins  vanées  que 
les  gestes.  Les  anciens  Grecs  disaient  en  s'abordant: 
Travaille  9t  prospère,  ou  Occûpe-^toi  awc  stÂCcès.  Les  Ro- 
mains disaient  :  Combien  valez-vous?  ou  Quelle  est  votre 
force?  ou  Sois  robuste  et  bien  sain  {vale  et  saive).  Les 
Prauçais  disent  :  Comment  vous  portez-vous?  ou  Com- 
ment allez-vous?  Un  Espagnol  et  un  Italien  ne  manquent 
pas  de  dirQt:  Comment  vous  tenez-vous  debout?  {Como 
estad?  —  corne  sta?).  On  dit  en  anglais  :  Comment 
faites-vous  faire?  {how  do  you  do?);  en  allemand  :  Com- 
ment vous  trouvez-vous?  {wie  beflnden  sie  sich?)\  en 
hollandais  :  Comment  se  tient  votre  manger?  (smakelijk 
eten?),  ou  Comment  vous  voiturez-vous?  {hoc  waart 
uwe?).  Les  Hébreux  disaient:  La  paix  soit  avec  vous! 
et  les  Turcs  :  Le  salut  ou  la  santé  soit  sur  vous!  —  Il  y 
a  aussi  des  formules  employées  dans  les  lettres,  dans  les 
préambules  des  lois  et  ordonnances,  des  lettres  patentes, 
des  mandements,  des  bulles,  etc.  Ainsi,  les  Romains 
commençaient  leurs  lettres  par  cette  formule  de  salut  : 
S.  D.  [salutem  dicit.,.).  En  tête  des  actes  émanés  de  l'au- 
torité royale  en  France,  on  lisait  ;  A  tous  ceux  qui  ces 
présentes  verront,  salut.  Sous  la  1**  République,  les 
lettres  se  terminaient  par  ces  mots  :  Salut  et  fraternité. 
Autrefois,  dans  l'office  divin ,  les  Épltres  et  les  Préfaces 
portaient  les  mots  :  Au  lecUur,  salut. 

Le  salut  militaire  est  un  témoignage  de  respect  ou 
d'honneur  rendu  par  les  militaires  isolés  ou  en  troupe 
au  souverain,  aux  princes,  aux  grands  dignitaires  de 
l'Etat,  aux  officiers,  aux  décorés,  etc.  Oo  distingue  le 
salut  des  armes,  le  salut  du  drapeau,  le  salut  de  Vépée, 
le  salut  à  feu,  le  salut  sans  armes  {V,  Militaires  — 
Honneurs).  —  Dans  la  Marine,  les  vaisseaux  qui  se  ren- 
contrent, ou  qui  passent  devant  quelque  place,  saluent, 
soit  par  le  pavillon  et  les  voiles,  soit  par  le  canon.  Les 
coups  de  canon  se  tirent  alternativement  d*un  bord  et  de 
l'autre.  Lorsque  le  salut  a  lieu  entre  égaux,  il  se  rend 
en  nombre  pareil;  si  celui  qui  salue  est  inférieur,  le  su- 

f»érieur  rend  quelques  coups  de  moins.  Les  bâtiments  de 
'Etat,  salués  par  ceux  du  commerce,  rendent  ordinaire- 
ment le  tiers  (F.  l'ordonnance  du  31  oct.  1827}.       B. 

SALUT,  dans  le  langage  de  la  Religion,  félicite  étemelle 
qui  attend  le  juste,  mort  en  état  de  gr&ce.  C'est  un  dogme 
que  nous  ne  pouvons  obtenir  le  salut  que  par  Jésus- 
Christ,  et  que  c'est  pour  nous  le  procurer  qu*il  est  venu 
sur  la  terre.  La  maxime  :  Hors  de  l'Eglise,  point  de  salut! 
s'applique,  d'après  les  meilleurs  théologiens,  non  à  tous 
les  hommes  en  général ,  mais  à  ceux  qui ,  ayant  eu  con- 
naissance de  la  vraie  doctrine,  n'ont  pas  voulu  la  suivre. 

SALDT,  en  termes  de  Liturgie,  ensemble  des  prières  qui 
se  chantent  après  Compiles,  ou  dans  un  office  spécial 
du  soir,  et  qui  se  terminent  par  la  bénédiction  du  Saint- 
Sacrement. 

SALUT  d'or,  monnaie  d'or  frappée  en  France  à  la  fin  du 
règne  de  Charles  VI,  et  qui  valait  15  sous  tournois  ou 
environ  11  fr.  41  c.  Elle  portait  l'empreinte  de  la  Vierge 
recevant  la  Salutation  angéliqi^. 

SALUTATION,  terme  de  Diplomatique.  V.  Diplôme. 

SALUTATION  ANGl^LiQUE,  prière  adressée  à  la  S*«  Vierge, 
et  composée  :  1**  des  paroles  que  l'Évangile  met  dans  la 
bouche  de  l'ange  Gabriel ,  quand  il  annonça  à  Marie  le 
mystère  de  l'Incarnation  {Ave,  Maria,  etc.)  ;  2«  de  celles 
que  proféra  Elisabeth,  lorsqu'elle  reçut  la  visite  de  Marie 
IBenedictu  tu.,.)  ;  3<*  de  celles  que  l'Église  emploie  pour 
implorer  l'intercession  de  la  Mère  de  Dieu  {Sancta  Ma- 
ria, etc.;.  Grégoire  I*'  décida  que  cette  prière  serait  ré- 
citée par  les  prêtres,  le  4*  dimanche  de  l'A  vent,  à  l'ofTer- 
toire  de  la  Messe;  depuis  le  xi"  siècle,  elle  est  devenue 
commune  aux  laïques.  V.  Angélus. 

SALDTATORluM,  nom  donné  autrefois  h  une  sorte  de 
sacristie  des  églises,  où  les  prêtres  entendaient  les  affaires, 
discutaient  les  causes,  et  où  se  tenaient  même  des  sy- 
nodes. On  y  venait  scàuer  celui  qui  allait  officier. 

SALVATION,  ancien  terme  de  Pratique,  désignant  un 
écrit  en  réponse  aux  arguments  de  la  partie  adverse. 

SALVE ,  décharge  de  coups  de  canon,  en  l'honneur  de 
quelqu'un  et  pour  le  saluer,  ou  pour  la  célébration  d'une 
fête,  ou  pour  annoncer  une  bonne  nouvelle. 

SALVE  REGINA,  c-à-d.  en  latin  Salut,  reine;  an- 
tienne chantée  en  l'honneur  de  la  Sainte- Vierge,  depuis  la 
Pentec6t«  Jusqu'à  TAvent,  et  attribuée  soit  à  Hermann 


Contract,  soit  à  Pierre  de  Monsoro,  évèque  de  Compos- 
telle,  soit  k  Adhémar  de  Monteil,  évèque  du  Puy. 

SAMARITAIN  (Idiome),  idiome  araméen  qui  se  forma 
en  Palestine,  dans  le  pays  de  Samarie,  lorsque  les  Cu- 
théens,  venus  du  centre  de  l'Asie  après  la  conquête  du 
royaume  d'Israël  par  les  Assyriens,  se  furent  mélangés 
avec  les  Hébreux  laissés  par  les  vainqueurs  dans  le  pays. 
On  y  trouve  naturellement  un  grand  nombre  de  mots  et'de 
formes  hébraïques.  L'alphabet  samaritain  a  été  composé 
avec  les  antiques  caractères,  et  Ton  n'y  rencontre  pas  de 
signes  représentatif^  des  voyelles.  Quelques  familles  de 
la  Syrie  moderne  descendent  des  Samaritains;  elles  pos- 
sèdent en  leur  dialecte  le  Pentatwque,  des  livres  de 
liturgie,  et  un  grand  nombre  de  chants  religieux.  V,  Uhle- 
mann ,  Institutiones  linguœ  Samaritanœ,  Leipzig,  1837, 
in-S<>;  Gesenius,  De  Pentateuchi  Samaritanorum  origine. 
Halle,  1815,  in-4^;  Winer,  De  versionê  Pentateuchi  sa» 
maritanâ,  Leipzig,  1817,  in-S». 

SAMARITAINE  (La),  pompe  et  ch&teau  d'eau,  con- 
struits de  1603  à  1608  à  Paris,  sur  le  côté  occidental  du 
Pont- Neuf,  d'après  les  plans  d'un  Flamand  appelé  J.  Lint- 
lan,  pour  alimenter  d'eau  le  Louvre  et  les  Tuileries.  Le 
nom  venait  d'un  groupe  en  bronze  doré,  placé  sur  la  fa- 
çade, et  représentant  Jésus  et  la  Samaritaine  près  d'un 
vase  d'où  tombait  une  nappe  d'eau.  Toute  la  construc- 
tion, maladroitement  restaurée  en  1775,  ornée  d'une  hor- 
loge et  surmontée  d'un  carillon,  fut  démolie  en  1813. 

SABIA-VÊDA.  V.  Véda. 

SAMBUE,  vieux  mot  désignant  la  selle  particulière  aux 
femmes  pour  se  tenir  à  cheval. 

SAMBÛQUE  (du  latin  sambucus,  roseau),  sorte  de 
flûte  des  Anciens,  ainsi  appelée  parce  qu'elle  fut  primiti- 
vement en  bois  de  sureau.  On  donna  le  m-ime  nom  au 
trigonê  ou  cithare  triangulaire,  et  à  une  trompette  dont 
les  tuyaux  mobiles  s'emboîtaient  les  uns  dans  les  autres. 

SAMDCQUE,  engin  de  guerre  des  anciens  Romains.  C'était 
une  sorte  d'échelle  qu'on  appliquait  aux  murailles  d'une 
place  assiégée,  et  dont  la  forme  rappelait,  selon  Plu- 
tarque,  celle  de  l'instrument  de  musique  qui  portait  le 
même  nom. 

SAMINE ,  vaisseau  propre  aux  Samiens.  Plutarque  dit 
qu'elle  avait  le  corps  fort  large,  la  proue  très-basse,  et 
néanmoins  qu'elle  était  propre  à  la  haute  mer  et  légère  à 
la  course. 

SAMNITE  (Idiome),  un  des  idiomes  de  Tandenne 
Italie.  Il  paraît  avoir  eu  de  grands  rapports  avec  l'osque 
(K.  ce  mot),  puisqu'au  dire  de  Tite-Live  (X,  20),  les  Ro- 
mains envoyOTent,  pour  espionner  l'armée  samnite,  des 
gens  qui  connaissaient  Vosque, 

SAMOYÈDE  (Idiome),  un  des  idiomes  ouralo-altalques. 
Il  a  été  étudié  par  Castrèn,  dont  le& travaux,  traduits  de 
l'allemand,  sont  insérés  dans  les  Nouvelles  Annales  des 
voyages,  5«  série,  et  qui  a  publié  une  Grammaire  sa- 
moyède,  S»-Pétersbourg,  1854,  ln-8«. 

SAMPOGNE  ou  SAMPUNIA,  sorte  de  musette  (K.  ce 
mot). 

SAN-BENITO.  V.  Ghbmisb  ardentb. 

SANCIR,  en  termes  de  Marine,  couler  à  Ibnd  sous 
voiles  et  à  l'ancre,  en  plongeant  par  l'avant. 

SANCTIFICATION  (du  latin  sanctus,  saint,  et  fUri , 
r^evenir),  action  et  effet  de  la  GrAce  qui  nous  rend  purs 
et  saints.  Par  sanctification  des  dimanches  et  des  fêtes, 
on  entend  leur  célébration  suivant  la  loi  et  l'intention  de 
l'Église. 

SANCTION  (du  latin  sandre,  établir).  Sanctionner  une 
loi,  c'est  appliquer  les  peines  ou  décerner  les  Técom- 
penses  attachées  à  la  violation  ou  à  Tobservation  de  cette 
loi.  I^  sanction  ne  s'adresse  pas  à  la  raison,  m^  à  la 
sensibilité;  elle  n'est  pas  le  principe  même  de  la  loi.  L.i 
sanction  est  nécessaire  pour  retenir  l'homme  ou  Pencou- 
rager;  de  là  la  pénalité  introduite  dans  la  législation 
civile,  comme  une  sanction  indispensable  aux  prescrip- 
tions légales.  Au-dessus  de  cette  sanction  des  lois  posi- 
tives, il  y  en  a  une  supérieure,  qui  est  celle  de  la  loi  mo- 
rale. Celle-ci  a  diverses  sanctions  :  1*  la  satisfaction 
morale  et  le  remords;  2*  les  conséquences  de  nos  actes; 
3**  l'opinion  ;  mais  toutes  ces  sanctions,  imparfaites  et  in- 
suffisantes, appellent  la  sanction  religieuse,  qui  repoeê 
sur  l'immortalité  de  l'&me.  R. 

SANCTUAIRE  (  du  latin  sanctuarium),  nom  que  Ton 
donnait  à  la  partie  la  plus  secrète  et  la  plus  intime  da 
Temple  de  Jérusalem,  au  Saint  des  Saints,  où  l'on  con* 
servait  l'Arche  d'alliance,  et  où  le  grand-prêtre  seul  pou- 
vait pénétrer.  On  l'applique  également  à  la  partie  des 
temples  païens  où  se  trouvait  la  statue  du  Dieu,  et,  dans 
les  éidiaes  catholiques,  à  la  portion  da  chœur,  ordinaî- 


SAN 


1611 


SAN 


rement  soi  élevée,  qui  contient  le  maltre-autel ,  et  que 
ferme  une  balustrade  ou  cancel. 

SÂNCrUS,  c.-à-d.  Saint,  mot  latin  par  lequel  com- 
mence la  partie  de  la  messe  qui  suit  immédiatement  la 
Préface.  Le  Sanctus  parait  avoir  été  usité  dès  le  ii*  ou  le 
m'  siècle.  On  le  trouve  désigné  chez  les  Grecs  par  les 
noms  d'Epinicion  (chant  de  victoire]  et  de  Trisagion 
(trois  fois  saint). 

SANDALE,  chaussure.  V.  Solba,  dans  notre  Diction- 
naire d»  Biographie  et  d'Histoire. 

SANDALE,  bateau  de  transport  des  côtes  de  la  Barbarie. 

SANDAPILA,  cercueil  grossier  dans  lequel  on  empor- 
tait les  morts  pauvres  chez  les  anciens  Romains. 

SANDJÂK.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

SANDWICH  (Idiome),  idiome  des  habitants  de  Tarchi- 
pel  Sandwich.  II  n*a  que  deux  pronoms  personnels,  et 
deux  particules  pour  déterminer  le  temps  de  Taction, 
Tune  pour  le  futur,  Tautre  pour  le  passé. 
'  SANDYX,  tunique  lydienne,  du  tissu  le  plus  transpa- 
rent, et  teinte  avec  le  suc  de  la  sandyx,  plante  de  cou- 
leur rouge  de  chair. 

SANGLIER.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

SANGUINE,  crayon  fait  avec  du  fer  oligiste  ou  héma- 
tite rouge,  et  qui  est  d*un  grand  usage  dans  le  Dessin.  On 
voit  au  musée  du  Louvre  des  dessins  à  la  sanguine  par 
Haphaôl ,  le  Corrége,  le  Dominiquin ,  Pierre  de  Cortone, 
Carlo  Maratta,  Vouet,  Van  der  Meulen,  Rigaud,  Largii- 
lière,  Lesueur,  Watteau,  Bouchardon,  Carie  Vanloo, 
Pierre,  Bourher,  Cochin ,  Greuze,  Demarteau ,  etc. 

SANHÉDRIN.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

SANKHYA  (Philosophie).  V.  Indie!«ne  (Philosophie). 

SANKO ,  instrument  de  musique  des  indigènes  de  la 
Sénégambic.  C'est  une  boite  étroite,  dont  la  partie  supé- 
rieure est  couverte  d'une  peau  de  crocodile  :  8  cordes  sont 
tendues  sur  un  chevalet  et  attachées  à  un  bâton  forte- 
ment entaillé  qui  est  fixé  à  l'extrémité  de  la  boite. 

SANNIO,  bouffon  de  théÂtre  chez  les  anciens  Romains, 
celui  qui  cherchait  à  exciter  le  rire  par  des  gestes  gro- 
tesques, des  mouvements  ridicules,  des  contorsions  du 
visage  et  du  corps. 

SANSCRIT  (d'un  mot  composé  qui  signifie  <ichevé, 
parfait)^  antique  idiome  de  l'Inde,  désigné  par  les  pre- 
miers Européens  qui  en  eurent  connaissance  sous  les 
noms  de  hanscret  et  de  sanscredam,  où  l'on  reconnaît  le 
nom  véritable,  et  sous  ceux  de  nagrou  et  de  grantham, 
indiquant  la  langue  écrite,  la  langue  des  livres.  Des  sa- 
vants ont  prétendu  qu'on  ne  parla  jamais  le  sanscrit,  et 
que  c'était  une  langue  artificielle,  créée  par  des  ministres 
du  culte  et  pour  leur  usage  particulier  :  mais  il  est  im- 
possible d'admettre  qu'une  langue  dont  on  trouve  des 
traces  dans  toutes  les  langues  dites  Aryennes  ou  indo-eu- 
ropéennes {V,  ce  mot)  ait  été  une  création  capricieuse 
de  quelques  individus.  Le  sanscrit  a  été  parlé  dans  des 
temps  très^nciens  sur  les  bords  du  Gange  par  les  ado- 
rateurs de  Bràhma.  Ce  n'est  pas  qu'il  y  ait  pris  nais- 
sance; mais  il  fut  apporté  par  cette  race  puissante  qui 
habitait  l'antique  Arie,  sur  le  revers  de  l'Hindou-kho,  et 
qui  a  laissé  de  ses  lointaines  migrations,  en  des  direc- 
tions diverses,  tant  de  témoignages  irrécusables  dans  une 
foule  d'idiomes.  Apporté  par  des  hommes  plus  avancés 
en  civilisation  que  les  habitants  primitifs  de  l'Inde,  il 
régna  de  la  môme  façon  que  plus  tard  le  latin  dans  les 
pays  où  l'imposa  la  conquête  romaine.  Quant  à  l'époque 
où  il  cessa  d'être  employé  comme  langue  vulgaire,  on  ne 
saurait  la  préciser  :  des  idiomes  issus  de  lui  l'ont  rem- 
placé {V,  Indiennes  —  Langues),  et  il  n'est  plus  aujour- 
ci'liui  que  la  langue  de  la  religion,  des  lois  et  de  la  haute 
littérature. 

Le  sanscrit  est  la  langue  la  plus  achevée  de  toute  la 
famille,  celle  qui  satisfait  le  mieux  à  toutes  les  exigences 
du  langage  et  qui  offre  le  plus  de  ressources  pour  l'ex- 
pression de  la  pensée.  Sa  iprammaire,  complexe  en  appa- 
rence, est  en  réalité  d'une  simplicité  étonnante  et  qui 
laisse  loin  derrière  elle  celle  du  latin,  du  grec  et  de  l'al- 
lemand. Synthétique  par  excellence,  le  sanscrit  exprime 
avec  une  aisance  pleine  de  clarté  les  idées  les  plus  abs- 
traites et  les  raisonnements  les  plus  subtils;  c'est  la 
vraie  langue  philosophique  des  hommes. 

C'est  aussi  une  dos  langues  les  plus  poétiques,  par  la 
facilité  qu'elle  a  de  composer  des  mots,  et  par  la  valeur 
pittoresque  de  ses  expressions.  Le  génie  synthétique  de 
la  race  iuyenne  ne  se  montre  nulle  part  aussi  nettement, 
et  DOttB  pouvons  attribuer  à  cette  qualité  des  Aryas  de 


rinde  non-seulement  la  facilité  qu'ils  ont  communiquée 
à  leur  langue  d'exprimer  dans  une  même  phrase  et  par 
de  simples  changements  dans  la  fin  ou  le  commence- 
ment des  mots  un  grand  nombre  d'idées  avec  leurs  rap- 
ports, mais  encore  la  puissance  d'esprit  avec  laquelle  ils 
ont  composé  leurs  grandes  épopées,  non  moins  éton- 
nantes par  leur  ensemble  et  par  l'unité  de  Tintérêt  que 
par  la  variété  infinie  des  détails.  C'est  à  ce  même  génie 
synthétique  des  Aryas  de  l'Inde  qu'il  faut  attribuer,  avec 
le  caractère  si  éminemment  philosophique  de  leur  langue, 
la  grandeur  de  composition  qu'ils  ont  mise  dans  leurs 
conceptions  religieuses  et  philosophiques.  11  est  à  remar- 
quer, en  effet ,  qu'ils  n'ont  emprunté  rien  à  personne,  et 
que,  séparés,  dès  l'origine,  du  tronc  commun ,  ils  ont  b 
eux  seuls  donné  à  leur  langue  et  aux  idées  qu'elle  a  ex- 
primées toute  la  perfection  qui  s'y  trouve. 

Les  racines  de  la  langue  sanscrite  sont  monosylla- 
biques, et,  contrairement  à  ce  qui  s'observe  dans  les 
langues  sémitiques,  les  voyelles  importent  ici  au  sens 
des  radicaux,  qui  finissent  en  effet,  en  prenant  des  va- 
leurs primitives  différentes,  tantôt  par  une  consonne, 
tantôt  par  une  vovelle.  Le  nombre  des  radicaux  ne  s'élève 
pas  à  plus  de  1,700;  mais  des  mots  simples  on  peut  for- 
mer un  nombre  indéfini  de  mots  composés.  Ce  n'est  pas 
seulement  dans  l'identité  des  radicaux  que  consiste  l'ana- 
logie du  sanscrit  avec  les  langues  indo-européennes;  les 
mêmes  rapports  existent  dans  la  structure  grammaticale. 
Par  exemple,  le  sanscrit  présente  l'a  privatif,  les  aug- 
ments  et  les  redoublements  du  grec,  les  créments  du 
latin  ;  il  a,  comme  le  latin  et  le  grec,  trois  genres  gram- 
maticaux; il  a  trois  nombres  comme  le  grec.  Sa  déclinai- 
son offre  huit  cas  (deux  de  plus  qu'en  latin,  le  locatif  et 
l'instrumental  );  toutefois,  au  nombre  duel,  les  cas  se 
réduisent  à  trois.  Les  adjectifs  ont,  aussi  bien  que  les 
substantifs,  les  flexions  casuelles.  Comme  en  latin  et  en 
grec,  la  terminaison  du  nominatif  singulier  est  ordinai- 
rement la  voyelle  a  pour  le  féminin,  et  une  nasale  pour 
le  neutre;  Vs  est  la  finale  la  plus  ordinaire  du  génitif.  La 
conjugaison  sanscrite  présente  6  temps,  6  modes  et  3  voix. 
L'indicatif  a  3  présents  et  2  futurs;  les  modes  subjonctif 
ou  optatif,  impératif,  précatif,  conditionnel  et  infinitif 
n'ont  qu'un  seul  temps,  le  présent.  A  l'actif  les  verbes 
réguliers  présentent,  selon  les  différents  grammairiens, 
de  7  à  14  conjugaisons.  Le  passif  n'a  qu'une  seule  forme, 
mais  il  faut  y  rattacher  les  verbes  causatifs,  désidératifs, 
fréquentatifs,  qui  en  dérivent.  La  conjugaison  n'admet 
qu'exceptionnellement  l'emploi  d'un  auxihaire,  qui  est  le 
verbe  substantif  contracté.  Nos  prépositions  sont  souvent 
remplacées  en  sanscrit  par  les  flexions  casuelles  des 
noms;  cependant  cette  langue  abonde  en  particules  de 
toute  sorte.  Le  sanscrit  est  U^s-libre  dans  la  construction 
grammaticale;  il  offre  dans  la  prose  une  grande  variété 
de  tours  de  phrases,  et  dans  la  poésie  une  grande  ri- 
chesse de  mètres.  On  l'écrit  avec  un  alphabet  qui  lui  est 
propre,  et  dont  la  forme  actuelle  n'est  pas  très-ancienne, 
le  aévanàgari  {écriture  des  dieux)^  alphabet  qui  n'a  pris 
son  {Lspect  actuel  que  du  vu*  au  x'  siècle,  et  qui  com- 
prend 14  voyelles  et  diphthongues,  2  caractères  exprimant 
la  nasalité  et  l'aspiration  finsdes,  et  35  consonnes  :  il  n'y 
a  ni  ponctuation  dans  les  phrases,  ni  séparation  entre  les 
mots,  et  la  connaissance  de  la  langue  fait  seule  distin- 
guer où  chaque  mot  commence  et  où  il  finit.  L'ortlio- 
graphe  est  toujours  d'accord  avec  la  prononciatiou. 

Les  linguistes  reconnaissent  dans  le  sanscrit  deux  états 
différents,  qui  correspondent  aux  deux  périodes  princi- 
pales de  son  histoire.  Les  Védas,  les  monuments  les 
plus  anciens  de  la  littérature  indienne,  s'éloignent  beau- 
coup des  ouvrages  postérieurs  qui  se  rapportent  à  Tàge 
classique  de  cette  littérature.  Le  style  en  est  irrégulier, 
presque  informe;  les  mots  manquent  souvent  de  dési- 
nence grammaticale,  les  phrases  sont  courtes,  et  la  con- 
struction très-simple  ;  on  ne  trouve  pas  cette  recherche 
de  l'euphonie,  qui  a  été  poussée  si  loin  dans  la  suite, 
cette  précision  de  formes  oui  distingue  le  sanscrit  litté- 
raire; certains  mots  dans  les  Védas  n'ont  pas  le  même 
sens  que  dans  la  langue  classique;  enfin  les  particules 
séparaibles  ^  sont  plus  fréquentes. 

Les  principales  Grammaires  de  la  langue  sanscrite  sont 
celles  de  Colebrooke  (Calcutta,  1805),  de  Carey  (Seram- 
pour,  1806),  do  Ch.  Wilkins  (Londres,  1808),  de  H.-P. 
Forster  (Calcutta,  1812),  de  Wilson  (Londres,  1815),  de 
W.  Yates  (Calcutta,  1820),  d'Othmar  Franck  (Wurï- 
bourg,  1823),  de  Fr.  Bopp  (Beriin,  1827),  de  W.  Pricc 
(Londres,  1828),  de  Desgranges  (Paris,  1845-1848,  2  voL 
in-8°),  de  Benfcy  (Leipzig,  1852-54,  2  vol.),  d'Em.  Bur- 
nouf  et  Leupol    (Nancy,  1800).  Le  P.  Paulin  de  SainI» 


SAN 


1612 


SAR 


Barthélémy  en  a  puDlié  une  sous  le  titre  de  Sidharubam, 
seu  Grammatica  iamscrudonica  (Rome,  1790,  in -4°), 
ainsi  qa*un  Dictionnaire  intitulé  i4mar£Utn/ia  (Rome, 
1798,  in-4«).  V.  aussi  Yates,  Saniscrit  Vocabulary,  Cal- 
cutta, 1820,  in-4°;  Bopp,  Glossarium  sanscritum,  1828- 
30  ;  Wilson,  Sanscrit  and  English  Dictionary,  Calcutta, 
1832,  in-4»;  Loiseleur-Deslongchamps,  Amarakocha,  ou 
VocabulairB  fTAmarasinha,  Paris,  1837,  in-8<>  ;  Em.  Bur- 
nouf  et  Leupol,  Dictionnaire  fonscrit-français,  Nancy, 
1863;  Wilkins,  Radicals  of  the  sanskrita  language, 
Londres,  1815,  in-4^;  Fr.  Rosen,  Radices  sanscritœ,  Ber- 
lin, 1827,  in-8<>;  Monier  Williams,  English  and  samcrit 
dictumctry,  Londres,  1851  ;  Westergaard,  Radices  linguœ 
sanscritœ,  Bonn,  1841,  in-8o;  Colebrooke,  On  the  san- 
scrit and  pracrit  langtuiges,  dans  le  tome  VU  des  Re- 
cherches  asiatiques^  et  On  sanscrit  and  pracrit  pœtry, 
dans  le  tome  X;  Bopp,  Sur  le  système  de  la  conjugaison 
en  sanscrit,  en  allemand,  Francfort-sur-Mein,  1816,  et 
Analyse  comparée  du  sanscrit  et  des  langues  qui  s*y  rap- 
portent y  en  allemand,  1824,  in-4®;  Othmar  Frank,  Chres- 
tomathie  sanscrite,  Munich,  1821-22;  Fr.  Adelung,  Es^ai 
sur  la  littérature  sanscrite,  en  allemand,  S*-Pétersboarg, 
1837,  in-8<';  Sroutabodha^  traité  de  prosodie  sanscrite, 
composé  par  K&lidàaa,  traduit  en  français  par  Lancereau, 
1855,  in-8«. 

SANS-SOUCI  (Ch&teau  de).  V.  Potsdav. 

SANTAR,  nom  qu'on  donne  en  Corse  aux  nuraghes 
{V.  ce  mot), 

SANTÉ  (La),  déesse  allégorique  des  Anciens,  fllle 
d'Esculape.  Les  Grecs  la  nommaient  Hygie,  et  les  Ro- 
mains Salus.  On  la  représentait  sous  la  figure  d'une  belle 
jeune  fllle  assise  sur  un  trôoe,  tenant  d'une  main  une 
patère,  de  l'autre  un  serpent,  et  couronnée  d'herbes  mé- 
dicinales. 

SANTé  (La),  nom  donné  quelquefois  aux  établissements 
placés  dans  les  ports  de  mer  ]M>ur  recevoir  les  individus 
soumis  à  la  quarantaine  (K.  ce  mot).  Les  chaloupes  au 
moyen  desquelles  ces  établissements  communiquent  avec 
les  navires  suspects  sont  appelées  bateaux  ou  canots  de 
santé, 

SAini  (Conseil  de).  V.  Conseil  db  sant^,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d* Histoire, 

SANTiS  fCorps  de),  corps  charp;é  du  service  médical  dans 
l'armée.  Il  se  compose  de  Médecins  et  de  Pharmaciens 
{V,  ces  mots),  assimilés  aux  grades  de  la  hiérarchie  mi- 
litaire ainsi  qu'il  suit  :  , 

Inspecteur •  .  Général  de  brigue. 

Principal  de l'*  classe.  .  .  .  Colonel. 

Principal  de  2*  classe  ....  Lieutenant-colonel. 

Major  de  1*^  classe Chef  de  bataillon. 

Major  de  2*  classe Capitaine. 

Aide-major  de  1**  classe.  .  .  Lieutenant. 

Aid&-miJor  de  2*  classe  .  .  .  Sous-lieutenant. 

SANTé  (Maison  de).  V,  Maison  db  sant^. 

SANTé  (Officier  de).  V,  Officier  db  sant^. 

SANTUGO  ou  S«-JACQUES  DE  COMPOSTELLE  (Ca- 
thédrale de).  Un  ancien  sanctuaire  de  l'apôtre  S^  Jacques, 
saccagé  par  les  Sarrasins,  forme  au-dessous  de  la  cathé- 
drale actuelle  une  sorte  de  crypte.  L'église  a  été  com- 
mencée en  1082.  La  façade  principale  présente  an  har- 
monieux ensemble,  à  quatre  corps,  couverts  à  profusion 
de  statues  et  d*omement8  :  les  tours  se  terminent  en 
coupoles  à  67  met.  de  hauteur.  Une  partie  d'une  des  fa- 
çades latérales  est  soutenue  par  une  console  d'une  grande 
hardiesse,  figurant  une  coquille  que  l'on  regarde  comme 
un  chef-d'œuvre  d'architecture.  L'intérieur  de  l'édifice 
est  en  forme  de  croix  latine,  et  mesure  75  met.  de  long 
sur  57  de  large;  25  chapelles  sont  pratiquées  dans  le 
pourtour.  Une  coupole  s'élève  sur  le  transept,  à  une  hau- 
teur de  33  met.  ;  en  trayers  on  a  suspendu,  à  deux  arcs 
en  fer,  une  poulie  qui  sert  dans  les  solennités  à  manœu- 
vrer un  colossal  encensoir.  La  chapelle  de  S^-Christophe 
contient  une  custodia  d'or  et  d'argent.  Joli  temple  de 
1'",50  de  haut,  richement  ciselé,  liais  ce  qu'il  y  a  plus 
curieux  dans  la  cathédrale  de  Santiago,  c'est  l'autel  oe  la 
crypte,  surmonté  de  la  statue  de  S^  Jacques  Qu'environ- 
nent quatre  rois  agenouillés,  et  d'une  pyramide  où  Ton  a 
représenté  le  saint  mettant  les  Maures  en  déroute;  le  tout 
est  d'une  grande  magnificence,  sinon  d'un  goût  bien  pur. 
A  la  cathédrale  est  attenant  un  cloître  carré,  de  39  met. 
de  côté,  dont  on  recouvre  les  murailles,  le  jour  de  l'oc- 
tave de  la  Fête-Dieu,  avec  des  tapisseries  très-précieuses. 

SANTIR,  instrument  de  musique  des  Arabes,  fait  à  peu 
près  dans  la  forme  du  q&non  {V,  ce  mot).  Les  cordes 
sont  en  métal  ;  on  les  frappe  avec  de  petites  baguettes. 


SANTONS.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnatre  de  Bw- 
graphie  et  d'Histoire, 

SAOULE,  jeu.  V,  Soulb. 

SAPE  (de  l'italien  zappa),  action  de  saper,  c.-4-d.  de 
creuser  sous  les  fondements  d'un  édifice  pour  le  faire 
tomber.  Dans  le  Génie  militaire,  la  sape  est  tout  travail 
de  pic,  de  pioche  et  de  hache,  ayant  pour  objet  d'ouvrir 
des  tranchées,  des  chemins  couverts,  des  boyaux  qui  con- 
duisent les  assiégeants  sur  le  corps  de  la  place  qu'ils 
attaquent.  Si  les  feux  de  l'assiégé  ne  peuvent  produire 
que  peu  d'effet,  on  se  contente  d'un  parapet  élevé  leste- 
ment avec  des  gabions;  c'est  la  sape  volante.  Dans  queU 
aues  positions,  il  faut  deux  parapets,  et  alors  la  sape  est 
aouble.  On  nomme  sape  ouverte  celle  qui  se  fait  sous 
terre.  La  tête  de  sape  est  le  point  le  plus  avancé  du  che- 
min qu'on  creuse,  et,  par  conséquent,  le  plus  exposé  : 
c'est  un  poste  d'honneur. 

SAPÈQUE,  monnaie  de  Chine,  le  même  que  le  each 
{V,  ce  mot).  On  en  a  fait  en  fer,  en  plomb,  ou  en  alliage 
de  cuivre,  de  plomb,  d'étain  et  de  zinc.  Les  sapèques  sont 
percées  d'un  trou  carré,  qui  sert  à  les  enfiler  par  cen- 
taines. 

SAPEURS,  y.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO" 
graphie  et  d* Histoire, 

SAPHIQUE  (Vers),  hendécasyllabe  grec  et  latin  com- 
posé de  5  pieds  et  demi,  dont  le  l'*"  est  trochée,  le  2*  tro- 
chée ou  spondée,  le  3*  trochée,  le  4*  et  le  5*  ïambes.  La 
strophe  sapbique  se  compose  de  trois  de  ces  vers  suivis 
d'un  adonique.  On  trouve  quelquefois  en  grec  après  le 
3'  pied  une  césure,  ^ui  est  plus  fréquemment  obser- 
vée par  les  poètes  latins.  Horace  en  met  souvent  une 
après  le  2*  pied.  Lorsque  le  sens  unissait  étroitement  le 
mot  final  d'un  vers  avec  le  commencement  du  vers  sui- 
vant, une  élision  pouvait  avoir  lieu  d'un  vers  à  l'autre; 
quelquefois  même  un  mot  était  commencé  à  la  fin  d'un 
vers  et  terminé  au  suivant  : 

RômtUa  gêna  daté  rèmquè  prôlèmquè 
Et  dècûs  ômnè, 

_  HOKAOB. 

Thrâdlô  bâchante  mUgis  sûb  intër- 
lûriïâ  vèntô. 

In. 

P. 

SAPHIR,  pierre  précieuse,  de  couleur  bleu  d'azur. 
Dans  la  Symbolique,  le  saphir  représente  l'espérance 
chrétienne,  la  sainte  contemplation.  11  était  aussi  l'image 
de  NephUli,  de  S^  Paul,  et  de  S^  André. 

SAPIENCE  (du  latin  sapientia,  sagesse,  science),  mot 
du  vieux  langage,  qui  n'est  plus  guère  usité  que  dans 
cette  phrase  :  Le  pays  de  Sapience,  pour  désigner  la  Nor- 
mandie. L'Université  de  Rome  est  ordinairement  appelée 
Collège  de  Sapience,  à  cause  de  cette  inscription  latine 
placée  sur  l'édifice  qu'elle  occupe  :  Initium  sapientiœ 
timor  Domini, 

SAPIENTIAUX  (Livres).  V.  ce  mot  dans  notre  Diction^ 
naire  de  Biographie  et  d  Histoire, 

SAPINE,  embarcation  légère  en  usage  pour  descendre 
quelques  rivières. 

SAQUEBUTE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^Histoire, 

SARABALLA  ou  SARAfiAllA,  large  et  long  pantalon 
que  portaient  les  Parthes  et  quelques  autres  Asiatiques, 

SARABANDE ,  danse  espagnole  à  3  temps,  sorte  de 
menuet  dont  le  mouvement  est  grave  et  sérieux.  L'air 
se  compose  de  deux  parties,  chacune  de  8  mesures,  et 
doit  être  exécuté  avec  rapidité  et  énergie;  on  le  chantait 
autrefois  avec  des  paroles  en  s'accompagnant  de  casta- 
gnettes. Cette  danse  fut,  dit-on,  introduite  en  France  par 
une  comédienne  espagnole,  Zarabanda,  qui  loi  a  laissé 
son  nom. 

SARAPIS,  tunique  des  anciens  rois  de  Perse,  d*an 
rouge  pourpre,  et  décorée  par  devant  d'une  large  bande 
blanche. 

SARBACANE  (de  l'italien  cêrbottana?)^  tube  droit  de 
verre,  de  métal,  de  sureau,  etc.,  qui  sert  à  lancer  quel- 
que petit  projectile  en  soufiflant  fortement.  Les  enfants 
tirent  avec  des  sarbacanes  sur  les  oiseaux.  Sous  Henri  III 
et  Henri  IV,  les  courtisans  se  prirent  d'une  belle  passion 
pour  ces  engins,  avec  lesquels  ils  Jetaient  des  dn^ées  au 
nez  des  passants.  On  a  employé  des  sarbacanes  pour 
lancer  des  flèches  et  le  feu  gr^eois.  Dans  l'Ile  de  Bornéo, 
on  ne  parle  au  roi  que  par  des  sarbacanes. 

SARCOPHAGE  (du  $rec  sarx,  gén.  sarkos,  chair,  et 
phaghéin,  manger),  nom  aue  l'on  donna,  selon  Pline,  à 
une  pierre  de  la  Troade  dont  on  faisait  des  œiwieila,  à 


SAT 


1613 


SAT 


cause  de  ses  qualités  caustiques  et  de  la  propriété  qu'elle 
avait  de  dévorer  promptement  les  chairs.  Par  extension, 
CD  Tapplioua  à  toute  espèce  de  tombeau  ou  de  cercueil. 
Les  sarcopiiages  qui  nous  sont  restés  de  rAntic{uité  por- 
tent quelquefois  la  statue  du  personnage  quMls  conte- 
naient. Leur  capacité  est  très-variable  :  u  en  est  qui  ont 
reçu  les  corps  de  deux  époux  ;  au  iri*  siècle  de  notre  ère, 
on  en  fit  de  grandeur  colossale,  capables  de  contenir 
toute  une  famille.  Les  bas-reliefs  qui  les  décorent  offrent 
tantôt  des  compositions  de  pure  fantaisie,  tantôt  des 
traits  de  la  Fable  ou  de  Thiatoire,  ou  bien  des  allégories 
morales,  des  figures  relatives  à  la  profession  ou  aux  goûts 
du  défunt.  Les  chrétiens  des  premiers  siècles  ont  con- 
servé Tusage  des  sarcophages  en  pierre,  et  les  ont  dé- 
corés de  sujets  pieux,  tirés  presque  toujours  de  TAncien 
et  du  Nouveau  Testament.  Pour  les  llSdernes,  le  mot 
sarcophage  est  la  partie  d*un  monument  funèbre  qui 
reprâente  le  cercueil,  sans  renfermer  les  restes  du  mort. 
SARDE,  agate  rouge&tre,  transparente,  d'une  teinte 
approchant  de  celle  du  feu.  Dans  la  Symbolique,  elle 
figure  la  foi  et  le  martyre.  Elle  est  aussi  l'image  de  Ru- 
ben,  à  cause  de  la  publicité  de  ses  scandales  représentée 

f^ar  la  lumière.  Comme  on  supposait  qu'elle  épouvantait 
es  b^tes  féroces,  elle  figurait  aussi  S*-  Barthélémy,  ter- 
rible au  démon. 

SARDE  (Idiome),  idiome  dérivé  du  latin,  et  bien  distinct 
ie  l'italien.  On  le  parle  dans  les  montagnes  de  111e  de 
Sardaîgne,  tandis  que  l'italien  est  employé  dans  les  villes 
et  pour  les  actes  administratifs.  On  y  distingue  trois  dia- 
lectes :  celui  de  Capo  Suso  au  N.,  celui  de  Capo  Giusu 
au  S.,  et  Varborese,  parlé  au  centre,  dans  l'ancienne 
Arborea. 

SARDON  YX,  pierre  composée  de  sarde  et  d'onyx,  d'une 
teinte  brillante,  pourpre,  nuancée  de  plusieurs  couleurs, 
et  rappelant  le  plus  souvent  celle  des  grains  de  la  gre- 
nade. Dans  la  Symbolique,  elle  figure  la  charité  vive,  que 
désigne  aussi  ce  fruit;  sa  variété  de  nuance  rappelle  la 
fécondité  de  cette  vertu.  Le  Cabinet  impérial  de  Vienne 
possède  un  sardonyx  d'une  dimension  très-rare  et  d'une 
pureté  remarquable  :  c'est  un  camée  gravé  sur  les  deux 
faces;  d'un  côté  est  une  aigle,  de  l'autre  le  buste  de  l'em- 
pereur Auguste.  Il  existe  aussi  une  apothéose  d'Auguste 
sur  sardonvx  au  Cabinet  des  antiques  de  la  Bibliothèque 
impériale  de  Paris. 

SARISSE,  arme.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire. 

SARRASINE.  l.  Herse. 

SARRASiNB  (Architecture).  K.  Arabe. 

SAS.  F.  Canal  et  Écluse. 

BASSE,  pelle  creuse  munie  d'une  anse  ou  d'une  poi- 
gnée, et  qui  sert  à  jeter  Teau  hors  des  embarcations. 

SATE^  déesse  suprémedu  Ciel  dansl'ancienne  Egypte, 
épouse  de  Kneph^et  mère  d'Anouké.EUe  rappelle  Isis 

8 ar  les  cornes  qui  garnissent  souvent  sa  coiffure,  formée 
e  la  partie  supérieure  du  pschent;  d'autres  fois  ces 
cornes  sont  remplacées  par  Tépervier  étendant  ses  ailes 
sur  la  tête  de  la  déesse,  que  couronne  la  tiare  royale. 
SATIRE,  composition  littéraire  qui  se  rattache  au  genre 
didactique,  à  la  poésie  dont  l'objet  est  d'enseigner  direc- 
tement aux  hommes  le  bien,  le  beau  et  le  vrai.  Elle  fait 
la  guerre  à  tous  les  travers  de  l'esprit  et  du  cœur,  diri- 
geant tour  à  tour  ses  attaques  contre  les  individus  et 
contre  les  hommes  en  général,  contre  la  société  tout  en- 
tière et  contre  les  différentes  classes  qui  la  constituent. 
Sœur  de  la  poésie  comique,  elle  lui  emprunte  ses  armes, 
l'ironie,  le  ridicule,  l'invective,  et  une  observation  impi- 
toyable; et,  sans  monter  sur  la  scène,  elle  poursuit  le 
même  but  et  traite  les  mêmes  sujets.  Morale,  elle  raille 
sous  toutes  leurs  formes  les  faiblesses  ou  les  vices  inhé- 
rents à  la  nature  humaine;  religieuse,  elle  démasque 
l'hypocrite,  et,  aveugle  dans  ses  reproches,  s'en  prend 
parfois  à  Rome  des  excès  dont  celle-ci  ne  peut  mais  ; 
littéraire,  elle  attaque  l'ignorance,  la  sottise  et  le  mauvais 
goût,  et  revendique  les  droits  du  bon  sens  et  de  la  rai- 
son ;  poliUque,éi\e  prend  à  partie  les  chefs  d'État  et  leurs 
ministres,  les  institutions  et  les  lois;  personnelle,  elle 
apostrophe  l'homme  en  particulier  qui  éveille  ses  co- 
lères, ac^ourd'hui  Domitien,  demain  Messaline,  un  jour 
Pradon,  une  autre  fois  l'abbé  Cotin.  Son  langage  est  varié 
comme  ses  sujets  ;  elle  prend  et  parcourt  tous  les  tons, 
depuis  linâulgent  badinage  d'Horace  jusqu'à  l'indigna- 
tion amère,  hyperbolique,  d'un  Gilbert  ou  d'un  André 
Chénier.  —  Quels  sont  les  droits  de  la  satire  à  gourman- 
der  môme  le  ?ice,  à  persifler  et  à  régenter  le  monde? 
Nous  n'avons  pas  à  considérer  ici  ce  que  les  législateurs 
en  ont  pensé,  ni  les  mesures  qii'ils  ont  prises  contre  ses 


excès,  dans  Tintérèt  de  la  société,  ou  pour  complaire  soit 
à  un  despote  ombrageux,  soit  à  des  privilégiés  jaloux  de 
leur  dignité  collective.  Il  y  a  longtemps  que  le  comique 
Névius  payait  de  sa  liberté  le  plaisir  d'avoir  décoché 
quelques  épigrammes  contre  les  Hétellus,  et  que  Cassius 
Sévérus  expiait  en  exil  le  crime  d'avoir  médit  de  la  per- 
sonne sacrée  d'Auguste.  Il  est  clair  €[ue  le  poôte  exerce  à 
ses  risques  et  périls  sa  veine  sarcastique.  Mais  la  critique 
peut  se  placer  à  un  autre  point  de  vue  gue  le  législa- 
teur; elle  est  plus  accommodante  et  plus  libérale.  Elle 
ne  voudrait  pas  que  l'auteur  satirique  consacr&t  son  ta- 
lent à  la  satisfaction  de  sa  haine  personnelle;  que  la 
vengeance,  l'intérêt,  ou  quelque  autre  passion  basse  et 
méprisable,  lui  mit  la  plume  à  la  main  ;  que  sa  Muse» 
insouciante  de  la  mesure  et  des  convenances,  viol&t  sans 
scrupule  ce  qui,  chez  tous  les  hommes,  mérite  et  com- 
mande le  respect,  c-à-d.  les  droits  de  la  liberté  et  de  la 
dignité  humaines;  que  sa  conduite  enfin  donnât  lieu  de 
retourner  contre  lui  ses  propres  traits.  Mais  elle  respecte 
en  lui,  comme  dans  tous  les  écrivains,  les  droits  de  la 
pensée  et  de  Tinspiration  ;  elle  comprend  que  l'indigna- 
tion lui  dicte  ses  vers  (facit  indignatio  versum)<t  de 
même  que  l'enthousiasme  fait  les  poètes  lyriques  ;  elle 
considère  que  le  génie,  le  caractère  et  l'intention  de  l'au- 
teur, le  choix  du  sujet,  la  puissance  même  des  travers  ou 
des  vices  attaqués,  sont  ou  peuvent  être  la  meilleure  jus- 
tification de  la  satire  ;  qu'après  tout,  l'opinion  publique 
demeure  maltresse  de  prononcer  entre  l'agresseur  et  ses 
victimes,  que  ses  arrêts  ne  sont  point  aveugles,  ni  tou- 
jours favorables  au  poète,  et  qu'ainsi  la  nécessité  de 
complaire  à  ce  tribunal  suprême  et  de  mettre  les  rieurs  de 
son  côté  n'est  pas  seulement  la  première  condition  du 
succès,  mais  encore  le  frein  le  plus  salutaire  contre  les 
oublis  de  la  Muse.  —  Il  faut  pourtant  le  reconnaître,  la 
satire  a  ses  écarts;  et  si  son  utilité  n'est  pas  contestable, 
ses  excès  autoriseraient  parfois  le  moraliste  austère  à  lui 
faire  son  procès.  Assurément,  elle  rend  des  services  .de 
plus  d'un  genre  :  elle  a  réformé,  par  Boileau,  la  poésie 
française  ;  dans  l'ordre  moral,  elle  nous  ramène  à  rési- 
piscence, en  nous  faisant  rire  des  travers  de  notre  voi- 
sin, qui  sont  aussi  les  nôtres;  et,  comme  l'a  dit  Boileau 
{Art  poétique,  ch.  II),  elle 

Venge  rhnmble  verta  de  la  ricbeaae  altl^re. 
Et  rhonnite  homme  à  pied  da  ftqnln  en  litière  ; 

elle  ch&tie  du  moins  le  coupable,  quand  elle  ne  l'amende 
pas;  elle  marque  comme  d'un  stigmate  indélébile  et  dé- 
nonce à  la  haine  et  au  mépris  de  la  postérité  les  turpi- 
tudes d'une  société  corrompue,  ou  les  débauches  des 
grands  que  leur  puissance  défend  des  insultes  du  pré- 
sent. Mais  cette  punition  a  ses  dangers.  La  crudité  des 
termes  et  l'énergie  des  peintures,  quand  la  pudeur  n'en 
est  pas  effarouchée,  risquent  d'allumer  l'imagination  des 
lecteurs,  et  il  est  à  craindre  dès  lors  qu'ils  n'arrêtent 
leurs  regards  devant  certains  tableaux  du  vice,  moins  pour 
le  prendre  en  aversion  ou  en  horreur,  que  pour  goûter  le 
plaisir  coupable  d'un  spectacle  qui  flatte  les  mauvais 
instincts  de  la  nature  humaine.  Et  c'est  ainsi  que  le 
poète  va  directement  contre  le  but  qu'il  se  proposait,  et, 
contre  son  attente ,  contribue  à  g&ter  encore  les  cœurs 
déjà  malades,  au  lieu  de  les  guérir  et  de  les  corriger. 

Si  l'on  s'en  rapportait  au  mot  connu  de  Quintilien 
{salira  tota  nostra  est\  la  satire  serait  d'origine  ro- 
maine, et  les  Grecs,  créateurs  des  autres  genres  litté- 
raires, eussent  laissé  du  moins  à  leurs  imitateurs  la  gloire 
de  découvrir  celui-là.  Mais  le  jugement  trop  absolu  du 
critique  latin  souffre  diverses  restrictions.  Horace  ra- 
conte, à  la  vérité,  que  les  premiers  campagnards  du  La- 
tium,  une  fois  la  moisson  faite,  célébraient  la  fin  de  leurs 
travaux,  en  offrant  un  porc  à  la  Terre,  du  lait  à  Silvain, 
des  fleurs  et  du  vin  au  Génie  qui  nous  rappelle  la  briè- 
veté de  notre  existence  ;  puis,  en  vers  dialogues,  ils  se 
renvoyaient  alternativement  des  injures  et  des  bouffon- 
neries, d'où  les  premiers  poètes  romains  devaient  tirer 
la  satire.  De  plus,  le  mot  satire  est  un  mot  exclusive- 
ment latin;  il  signifia  d'abord  la  réunion  de  différents 
fruits  qu'on  offrait  à  Gérés,  ou  bien  un  plat  de  différents 
mets  {satura,  sous-ent.  lanx).  Quand  Ennius  entreprit 
d'enrichir  les  chants  rustiques  des  vieux  laboureurs  ro- 
mains, et  de  les  soumettre  à  une  forme  régulière  et  dé- 
terminée, il  divisa  ses  compositions  nouvelles  en  plu- 
sieurs morceaux,  et  donna  à  chacun  son  mètre  propre. 
De  ce  mélange  de  vers  inégaux  est  sorti  le  nom  que  la 
satire  n'a  plus  cessé  de  porter.  En  ce  sens,  elle  est  toute 
latine,  et  Just.-flo  !e  mat  do  Quintilien.  Maïs,  qu'on  né- 


SÂT 


1614 


SÂT 


gUge  un  instant  la  forme  et  la  dénomination  particulières 
Gue  rimagination  romaine  s^est  plù  à  lui  appliquer,  pour 

I  envisager  dans  ses  caractères  essentiels,  la  Grèce  re- 
prend ses  droits  d'ancienneté.  Et  d^abord,  si  dans  la 
satire  on  considère  seulement  Tinvectiye ,  les  Grecs  en 
ont  donné  l'exemple  :  témoin  Archiloque,  dont  les  ïambes 
poussèrent,  au  ctire  de  la  légende,  une  fiancée  et  un  beau- 
père  infidèles  à  se  pendre  de  désespoir;  témoin  Simo- 
nido  d'AmorgoB,  qui  démontra,  dans  un  pofime  de  119 
▼ers,  que  les  femmes  n*ont  été  créées  que  pour  être  le 
fléau  de  l'autre  sexe;  témoin  le  Margiiàs,  œurre  d*un 
auteur  inconnu,  mais  citée  maintes  fois,  et  où  les  podtes 
comiques,  selon  le  témoignage  d'Aristote,  avaient  trouvé 
plus  d'un  personnage  ;  témoin  enfin  Théognis  de  Mé- 
gare,  qui,  chassé  de  son  pays  par  la  faction  démocra- 
tique, maudissait,  dans  des  vers  pleins  d'amertume  et 
de  rage,  la  tyrannie  de  ses  adversaires.  Mais  la  satire 
n'est  pas  renfermée  dans  l'invective  :  c'est  même  à  la 
condition  d'en  franchir  les  limites  qu'elle  a  tout  son 
prix,  et,  pour  ainsi  dire,  sa  vraie  dignité.  Elle  n'atteint 
à  la  hauteur  d'un  genre  littéraire  qu'en  s'élevant  au- 
dessus  des  personnalités,  pour  faire  la  leçon  aux  travers 
et  aux  vices  d'un  siècle,  d'un  monde,  de  l'homme  de 
tous  les  temps.  Elle  s'imposa  de  bonne  heure  cette  t&che, 
.et  la  remplit  sous  deux  formes  distinctes  :  tantôt  elle 
mêla  la  prose  à  la  poésie;  tantôt  elle  se  refusa  ce  mé- 
lange, et  ne  parla  qu'en  vers.  Un  Grec  encore  inventa  le 
premier  des  deux  genres,  et  lui  laissa  son  nom  ;  c'est  le 
philosophe  Ménippe,  le  héros  des  Dialogues  de  Lucien. 

II  avait  composé,  en  prose  mêlée  de  vers,  13  livres  de 
satires,  où  la  plus  haute  morale,  selon  Cicéron,  s'alliait 
à  beaucoup  d'esprit  et  de  gaieté.  On  n'en  a  rien  con- 
servé, mais  elles  ont  eu  leurs  imitations  célèbres  :  dans 
l'Antiquité,  les  satires  Ménippées  de  Varron ,  et  le  Sa- 
tyricon  de  Pétrone;  au  xvi*  siècle,  la  ScUire  Ménippée, 

2  m  couvrit  les  Ligueurs  de  ridicule  et  acheva  le  triomphe 
'Henri  IV  (K.  MéNippés).  L'autre  genre,  plus  particu- 
lièrement cultivé  chez  les  Latins  que  chez  les  Grecs,  a 
Jour  principaux  représentants,  à  Rome,  Lucilius,  Horace, 
uvénal  et  Perse*  Lucilius  n'a  pas  été  flatté,  du  moins 
comme  artiste  et  versificateur,  par  Horace  :  celui-ci  lui 
reproche,  et  avec  apparence  de  raison,  des  vers  mal  tour- 
nés, bizarrement  mêlés  de  grec  et  de  latin,  dictés  à  la 
hâte,  sans  soud  des  règles  de  l'art  et  de  l'harmonie,  et 
il  le  compare  au  torrent  qui  roule  beaucoup  plus  de  li- 
mon que  de  pailiettds  d'or.  Mais  il  ne  fait  pas  difficulté 
do  reconnaître  que  son  prédécesseur  osa  le  premier  ar- 
racher le  masque  brillant  sous  lequel  l'hypocrite  cachait 
son  hideux  visage,  et  flageller  de  vers  sanglants  un  Mé- 
tellus  ou  un  Lupus;  il  proclame  que  le  vieux  poète,  dont 
la  haute  naissance  assurait  l'impunité,  n'eut  d'^pirds 
qn%  pour  la  vertu  et  les  amis  de  la  vertu.  Pour  la  cri- 
tique, Lucilius  possède  encore,  outre  cette  ressemblance 
de  caractère  et  d'intention  morale  avec  le  vieux  Caton , 
son  contemporain,  un  autre  titre  à  l'estime  publique  et 
au  souvenir  de  la  postérité  :  il  fut  un  novateur.  Il  força 
le  grand  vers,  le  vers  épique,  l'hexamètre  majestueux,  à 
se  plier  au  genre  si  familier  de  la  satire,  et  traça  ainsi  la 
route  que  ses  successeurs  ont  suivie  Jusque  dans  les 
temps  modernes.  Il  est  regrettable  que  de  30  livres  de 
satires  qu'il  avait  composa  en  différents  mètres, 'il  ne 
reste  que  des  fragments.  —  Horace,  dans  ses  18  satires 
comme  dans  Je  reste  de  ses  œuvres,  est  tout  d'abord  ce 
que  Lucilius  ne  fut  Jamais ,  un  artiste  consommé  ;  sous 
sa  plume  industrieuse,  l'hexamètre,  assoupli  et  docile, 
reproduit  la  prestesse,  l'allure  aisée  et  légère,  la  verve  et 
la  variété  de  la  conversation  la  plus  spirituelle,  et  plu- 
sieurs de  ses  petites  pièces  sont  de  véritables  comédies , 
au  même  titre  que  certaines  fables  de  La  Fontaine.  Au 
lieu  de  s'indigner  contre  les  débordements  du  siècle ,  et 
de  traîner  dans  la  boue,  au  risque  de  s'y  salir  lui-même, 
les  vices  de  ses  contemporains,  il  aima  mieux,  doux  et 
modéré  qu'il  était,  ne  voir  (^ue  le  côté  ridicule  des  choses, 
et  il  fut  gai  et  plaisant,  mais  non  pas  irritant  et  acerbe  ; 
il  s'interdit  le  plus  souvent  les  personnalités  blessantes, 
et,  à  part  le  débauché  Nomentanus,  un  RufiUus  trop  par- 
fumé, et  un  Gorgonius  qui  l'était  trop  peu,  tous  les  Ro- 
mains ,  et  lui-même  le  premier,  avaient  droit  de  se  r^ 
connaître  dans  les  travers  qu'il  persiflait  avec  tant  de 
gr&ce  piquante  et  tant  de  bon  sens.  Le  lire  lui-même  est 
le  moyen  le  plus  charmant  de  connaître  tout  ce  qu'il  y 
avait  de  fin,  d'attrayant  et  d'aimable  dans  cet  esprit  ex- 

Suis.  Pourquoi  faut-il  qu'il  ait  payé  tribut  à  la  corrup- 
on  du  temps,  et  qu'il  faille  jeter  un  voile  sur  plusieurs 
de  ses  expressions  et  de  ses  peintures?  —  Juvénal ,  au 
rebours  dliorace,  fut  tout  indignation  dans  les  Id  dia- 


tribes tour  à  tour  générales  et  personnelles ,  mo^es  et 
politiques,  qu'il  a  composées,  «  chronique  privée  d'une 
époque  dont  Tacite  a  écrit  l'histoire  publique.  »  L«  juge- 
ment de  Boileau  {Art  poétique,  ch.  ii)  sur  les  qualités  et 
les  défauts  de  son  génie  satirique  demeure  encore  au- 
jourd'hui le  plus  éloquent  : 

Jartfool,  élertf  dana  1m  eiia  de  Téoole, 
Poona  Jnaquli  Toxoès  m  mordante  hyperboto; 
Sea  oamagea,  tout  pleine  d'affreuaee  véritéa, 
étincellent  pourtant  de  anblimea  besatéa. 

Perse  l'avait  précédé  de  queloues  années  :  quoique! 
fût  mort  à  28  ans,  l'élève  du  philosophe  Comutus,  le 
condisciple  de  Lucain,  eut  le  temps  d'écrire  6  satires,  qui, 
pour  être  d'unetobscurité  proverbiale,  peuvent  se  comp- 
ter cependant  parmi  les  inspirations  élevées  du  Stoï- 
cisme. Il  n'appartenait  qu'à  une  belle  âme  de  trouver  sur 
les  méchants  ce  fameux  vers  (Pers.,  Sat.  3,  v.  38)  : 

Virtntem  videent,  intabeacantqve  rellctâ, 

«  Qu'ils  voient  la  vertu,  et  se  dessèchent  du  regret  de 
l'avoir  quittée.  » 

Citons  enfin  une  contemporaine  de  Domitien,  Sulpicia, 
qui,  pour  venger  les  philosophes  et  son  mari  qu'un  édit 
avait  chassés  de  Rome,  composa  contre  le  tyran  une 
satire  au  demeurant  médiocre ,  et,  au  dernier  siècle  des 
lettres  latines,  Claudien  et  ses  invectives  quelque  peu 
longues  contre  Rufin  et  Eutrope  :  ils  terminent  la  liste 
des  satiriques  romains. 

Le  genre  reparaît  et  brille  en  France  au  xvi*  siècle. 
Mathurin  Régnier  et  Agrippa  d'Aubigné  le  représentent 
alors  avec  honneur  :  Régnier,  disciple  ingénieux  des  An- 
ciens et  de  la  Pléiade,  imitateur  d'Horace  et  des  Italiens 
modernes,  h  la  fois  très-libre  et  très-vigoureux  dans 
quelques-unes  de  ses  peintures,  et,  dans  les  autres, 
d'une  aimable  nonchalance  et  d'une  bonhomie  qui  n'ex- 
clut ni  la  malice,  ni  la  finesse  ;  ennemi  de  Malherbe,  et 
pourtant,  par  les  grâces  nouvelles  de  son  style,  l'un  des 
fondateurs  de  la  poésie  française  ;  —  d'Aubigné,  le  fou- 
gueux huguenot,  l'auteur  des  sept  diatribes  intitulées  TVo* 
giques,  né  satirique,  et  qui  le  fut  d'humeur  et  par  besoin, 
pour  ainsi  dire,  beaucoup  plus  que  par  imitation  de  ses 
contemporains  et  de  l'Antiquité;  «  Juvénal  du  xvi*  siècle, 
dit  M.  Sainte-Beuve,  âpre,  austère,  inexorable,  Hérissé 
d'hyperboles,  étincelant  de  beautés,  rachetant  une  vodesse 
grossière  par  une  sublime  énergie,  esprit  vigoureux, 
admirable  caractère,  grand  citoyen.  »  —  Au  xvn*  siècle, 
la  satire,  sous  la  plume  de  Boileau,  rendit  aux  lettres  un 
double  service.  Elle  triompha  d'abord  du  mauvais  goût, 
que  n'avait  pu  vaincre  Malherbe;  elle  renvoya  aux  Èpa- 
gnols  leur  emphase,  aux  Italiens  leurs  pointes  et  leurs 
iadeurs,  et  força  les  écrivains,  comme  le  public,  de  rêve-, 
nir  au  goût  du  naturel  et  du  vrai.  Elle  ramena  ensuite 
les  poètes  au  respect  d'eux-mêmes,  et  leur  donna  des 
leçons  de  dignité,  qui  n'étaient  pas  superflues  à  une 
époque  où  les  auteurs  faisaient  encore  partie  de  la  do- 
mesticité des  grands  seigneurs,  et  où  le  prince  de  Condé, 
dans  un  jour  de  colère ,  frappait  avec  des  pincettes  son 
poète  Sarrazin.  —  Mentionnons,  dans  l'âge  suivant,  les 
PhilippiqueSf  invectives  sanglantes  que  La^nanfle-Cbanoel 
composa  contre  le  régent  Philippe  d'Orléans;  les  ïambes 
d'André  Chénier  contre  les  proscripteurs  de  1793,  et  les 
satires  de  son  frère  Marie-Joseph  ;  mais  laissons  à  Gil* 
bert  l'honneur  d'avoir,  dans  ses  deux  pièces  intitulées 
le  Dix-huitUme  siècle  et  Mon  apologie,  porté  dignement 
l'héritage  de  Boileau.  Mort  trop  tôt,  et  sans  avoir  eu  le 
temps  d'épurer  son  goût,  le  malheureux  champion  des 
croyances  morales  et  religieuses,  l'adversaire  hardi  de 
Voltaire  et  de  V Encyclopédie,  eut  les  défauts  de  Juvénal 
comme  il  en  avait  les  qualités,  et  fut  tour  à  tour  sublime 
et  déclamatoire  dans  ses  invectives  contre  le  tout-puis- 
sant parti  des  philosophes.  —  Le  moment  n'est  pas  veau 
de  juger  en  toute  franchise  et  sans  préjugé  les  produc- 
tions des  satiriques  de  notre  temps.  Les  ïambes  de 
M.  Barbier,  tout  en  images  matérielles  et  familières  d'une 
singulière  énergie,  ne  méritaient  peut-être  nt  la  vogue 
immense  dont  ils  furent  l'objet  à  leur  apparition,  ni  le 
discrédit  où  ils  semblent  être  tombés  depuis.  MM.  Bar- 
thélémy et  Méry  se  sont  également  signalés  dans  li 
même  genre,  tantôt  en  collaboration,  tantôt  l'un  sans 
l'autre,  par  des  diatribes  morales  et  politiaues  que  l'ave- 
nir appréciera. 

L'esprit  satirique  n'est  pas  la  satire ;1T  l'a  précédée, 
et,  depuis  qu'elle  est  née,  il  n'a  pas  cessé  d'inspirer  ou 
d'animer  d'autres  œuvres;  les  arts  mêmes,  autant  q««o  U 


SAT 


1615 


SAT 


littérature,  en  ont  aubi  Tinfluence.  La  liste  serait  longue 
dos  principales  créations  de  l'esprit  satirique  à  travers 
les  siècles,  Thersite  et  la  mésaventure  de  Mars  et  de  Vé- 
nus dans  Homère  ;  la  Pandore  d*Hésiode  ;  tant  de  chœurs 
des  comédies  d'Aristophane  \  les  Dialogues  de  Platon , 
où  Socrate,  des  traits  de  sa  malicieuse  ironie,  perce  à 
jour  les  travers  des  Sophistes  ;  les  Caractères  de  Théo- 
phi'ftste;  les  Dialogues  de  Lucien  :  voilà  pour  la  Grèce; 
—  les  vers  Fescennios;  les  chansons  des  soldats  derrière 
le  char  des  triompluiteurs  ;  les  mimes  ;  certaines  fables  de 
Phèdre;  les  épigrammes  de  llartial  ;  les  romans,  tels  que 
VAtiê  d'or  d'Apulée  :  voilà  pour  les  Romains.  —  Au 
moyen  âge,  les  sirventes  des  Troubadours  et  les  chan- 
sons des  Trouvères;  certains  Fabliaux  pour  ou  contre  les 
femmes,  les  prêtres,  les  moines  et  les  maris  ;  le  Boman 
de  la  Ros€  et  le  Roman  du  Renard;  les  légendes  sur  les 
tours  et  les  exploits  du  Diable  ;  les  boutades  de  Villon  ; 
les  sermons  politiques  contre  les  Armagnacs  et  les  Cabo- 
chiens;  les  Cent  nouvelles  nouvelles;  et,  sur  le  théâtre 
naissant,  les  Clercs  de  la  Basoche  et  l&s  bottât;— dans  les 
temps  modernes,  le  Gargantua  de  Rabelais,  les  Protnn- 
ciales  de  Pascal,  plus  d'une  fable  de  La  Fontaine,  les 
Caractères  et  Portraits  de  La  Bruyère,  les  Lettres  Per- 
sanes de  Montesquieu,  les  Contes  de  Voltaire,  V Ency- 
clopédie ,  les  romans  de  Diderot ,  et  les  Mémoires  de 
Beaumarchais; — depuis  la  Révolution,  les  Journaux,  les 
Pamphlets,  les  Chansons,  les  Parodies  ;  devant  tant 
d'exemples,  que  peut-on  conclure,  sinon  que  le  rire  est 
aussi  naturel  à  l'homme  que  l'admiration  et  l'enthou- 
siasme, et  que  ces  deux  penchants  vivront  éternellement, 
destina  à  se  partager  les  œuvres  humaines  ?       A.  H. 

SATISFACTION,  dans  le  langage  de  la  Religion,  répa- 
ration qu'on  doit  à  Dieu  ou  au  prochain  pour  Tin  jure 
qu'on  leur  a  faite.  C'est  une  peine  temporelle  que  les  pé- 
cheurs pénitents  s'imposent  ou  acceptent  de  leur  con- 
fesseur. 

SATRAPE.  i  V.  notre  Dictionnaire  de 

SATURNE  (Temple  de).  S      Biographie  et  d'Histoire. 

SATURNIEN  (Vers),  le  plus  ancien  vers  romain,  et 
qui  domina  jusqu'à  ce  qu*£nnius  eût  fait  adopter  le  vers 
héroïque  des  Grecs.  Horace  semble  regretter  fort  peu  cet 
ancien  rhythme,  qu'il  appelle  horridus  et  rustums,  et 
même  grave  virus,  à  peu  près  comme  nous  dirions  mau- 
vaise  drogue.  Il  se  plaint  qu'il  reste  encore  de  son  temps 
des  vestiges  de  l'antique  rusticité,  faisant  peut-être  allu- 
sion à  Varron  qui  avait  composé  quelques  pièces  de  ses 
Satura  dans  ce  vieux  mètre.  Dans  sa  forme  la  plus  ré- 
gulière, le  saturnien  présentait  quelque  chose  comme  le 
dimètre  iambique  catalectique  suivi  d'un  ithyphallique; 
ainsi  : 

Dabnot  I  malarn  |  Metéltll  H  Nnrio  poets. 
Koyem  f  JotIb  I  concordlet  ||  Alla  sorores. 

Vais  les  substitutions  de  pieds  et  les  solutions  de  syl- 
labes ou  de  pieds  longs  étaient  fréquentes,  comme  dans 
celui-ci  où  les  spondées  et  les  dactyles  remplacent  les 
ïambes  et  les  trochées  : 

Oblit|l  RomI«  loqailer  Q  •ont  latins  Ilogua; 

et  dans  cet  autre  qui  commence  par  un  tribraque  : 

8ieill|eiiMi  |  paci8|clt  Q  obsides  nt  reddant 

On  vient  de  voir  le  spondée  dans  l'ithyphallique  final  ; 
on  y  trouve  aussi  l'iambe  et  le  dactyle  ;  et  le  trochée  pou- 
vait être  admis  dans  la  partie  fambique.  G*était  donc  un 
rhythme  confus,  et  il  n'est  pas  étonnant  que  tous  les 
hommes  de  goût  lui  aient  préféré  les  mètres  réglés,  riches 
et  gracieux  de  la  versification  hellénic|ue.  —  Les  inscrip- 
tions trouvées  sur  le  tombeau  des  Scipions  sont  en  vers 
saturniens  très-grossiers.  On  a  cru  découvrir  des  vers  sa- 
turniens dans  l'oracle  delphique  rapporté  par  Tite-Live 
(V,  c.  16)  à  propos  du  siège  de  Véies.  La  fameuse  prédic- 
tion du  devin  l&rcius  relative  à  la  bataille  de  Cannes  pa- 
rait également  composée  de  saturniens.  V*  Dunzer,  De 
vtrsu  quem  vocant  Satwmino.  Bonn,  1838,  in-8<'.      P. 

SATYRES.  V.  notre  Dictumnairê  de  Biographie  et 
d^Histoire, 

SATYRICOI^,  titre  d*un  ouvrage  qui  nous  est  arrivé 
sous  le  nom  de  Pétrone,  et  qui  semble  avoir  été  composé 
sur  le  modèle  des  Saturœ  ae  Varron  et  des  Ménippées; 
car  il  renferme  des  morceaux  de  prose  et  de  vers  entre- 
mêlés dans  la  suite  du  récit.  Cet  ouvrage  ne  nous  est 
parvenu  que  par  fragments,  et  nous  en  possédons  peut- 
être  an  plus  la  dixième  partie.  Il  présentait  sans  doute 
dans  son  enaeoible  Ift  peinture  des  mœurs  dépravées  de 


la  Rome  impériale  et  des  grandes  villes  de  l'Italie,  estrc 
autres  Néapolis.  L'un  des  premiers  fragments  et  le  plus 
long  de  tous  est  la  description  du  souper  de  Trimalcion, 
qui  se  fait  en  très-mauvaise  compagnie  et  avec  un  fiiste 
ridicule  dont  l'auteur  s'est  étudié  à  outrer  l'extravagance. 
Un  autre  fument  d'un  caractère  plus  neble  est  l'histo- 
riette de  la  matrone  d'Éphèse,  rajeunie  par  La  Fontaine. 
Plus  loin,  on  lit  une  correspondance  entre  deux  amants, 
Circé  et  Polyènos,  qui  ne  manque  pas  d'élévation.  Le 
livre  est  parsemé  d'observations  et  de  critiques  littéraires 
mises  dans  la  bouche  d'un  certain  Eumolpe  :  le  censeur 
s'élève  avec  chaleur  contre  le  faux  goût  des  écrivains  du 
temps,  contre  l'abus  des  déclamations  d'école;  on  y  re- 
marque surtout  une  satire  de  la  Pliarsaie  de  Lucain.  Et, 
joignant  l'exemple  à  la  critique,  Eumolpe  trace  l'esquisse 
d'un  poème  sur  la  guerre  civile.  Ces  vers,  dont  il  nous 
reste  environ  300,  n'ont  pas  les  défauts  reprochés  à  ceux 
de  Lucain  ;  mais  ils  n'ont  pas  non  plus  les  fortes  qualités 

3ui  distinguent  le  chantre  de  la  Pharsale;  ils  ont  moins 
e  coloris  que  d'élégance,  moins  de  vigueur  que  de  cor- 
rection, et,  s'ils  se  rapprochent  davantage^  en  général,  du 
bon  goût,  ils  témoignent  d'un  talent  moins  original.  Ce 
morceau  est  ce  qui  nous  reste  de  plus  i]pmarquable  dans 
toute  l'œuvre.  La  prose  de  Pétrone,  souvent  spirituelle, 
rarement  forte,  presque  toi^ours  élégante,  n'est  pas  sans 
aflféterie;  les  expressions  sont  quelquefois  bizarres  et< 
obscures;  et  quoique  son  style  soit  moins  forcé  que  celui 
d'Apulée,  il  s'en  rapproche  presque  toujours  plus  que  de 
colui  de  Sénèque  et  de  Pline  le  Jeune.  Il  a  de  la  vivacité 
et  de  Tan'ination,  mais  il  vise  trop  au  pittoresque,  et 
tombe  ainsi  maintes  fois  dans  les  défauts  qu'il  reproche 
à  ses  contemporains.  Enfin  l'obscénité  de  la  pensée,  l'in- 
famie du  sujet,  se  communiquent  trop  souvent  à  la  forme 
elle-même.  P. 

SATYRIQUB  (Drame),  composition  dramatique  de  l'an- 
cien théâtre  grec,  tenant  le  milieu  entre  la  tragédie  et  la 
comédie,  ou  plutôt  prenant  alternativement  le  ton  de 
Tune  et  de  l'autre.  Dans  l'origine  on  le  joua  seul  ;  mais, 
vers  le  temps  de  la  2*  guerre  médique,on  ne  le  jouait  déjà 
plus  qu'après  la  représentation  d'une  trilogie  tragique. 
Le  nom  de  Satyrique  lui  vint  de  ce  que  le  chœur  était 
toujours  composé  de  ces  êtres  mythologiques  et  bizarres 
qui  formaient  le  oortége  du  grotesque  Silène,  les  SeUyres, 
et  qui  tantôt  exécutaient  des  danses  vives  et  sautillantes, 
particulièrement  la  Sicinnis,  tantôt  dialogiudent  on  chan- 
taient avec  les  dieux  et  les  héros  :  ceux-d  étaient  pris  la 
plupart  du  temps  parmi  ceux  qui  avaient  joué  un  rôle 
dans  la  trilogie.  La  scène  olTrait  des  bocages,  des  mon- 
tagnes, des  grottes,  des  paysages  de  toute  espèce.  La  ca- 
tastrophe du  drame  n'était  Jamais  funeste,  ou  bien  le 
malheur  qui  arrivait  à  l'un  des  personna^  présentait 
un  côté  ridicule  qui  lui  ôtait  toute  ressemblance  avec  le 
sérieux  de  la  tragédie.  Les  traits,  les  bons  mots,  les  bouf- 
fonneries, y  étaient  admis  comme  dans  la  comédie  aristo- 
phanienne,  mais  sans  aucune  de  ces  mordantes  person- 
nalités qui  la  caractérisaient;  dans  certaines  scènes 
régnait  un  ton  de  dignité  et  d'élévation,  qui  contribuait, 
par  le  contraste,  à  l'effet  comique  général.  Le  drame  sa- 
tyrique  s'appelait  aussi  poésie  satyrique,  ou,  par  abrévia- 
tion, une  scUyrique  {saturikè)^  un  satyrique  {saturikon)^ 
ou  bien  encore  satyre  {saturos)  ou  satyres  (saturoï). 
—  Ce  genre  de  représentation  tné&trale  prit  naissance, 
comme  la  tragédie  et  la  comédie,  dans  les  fêtes  rurales 
en  l'honneur  de  Bacchus  ;  il  fut  longtemps  grossier,  et  ne 
revêtit  quelque  élégance  qu'à  dater  de  son  introduction 
dans  les  villes.  On  rapportait  chez  les  Anciens  qu'Arion 
le  premier  imagina  d'introduire  les  Satyres  dans  les 
chœurs  dithyrambiques,  dans  la  composition  desquels, 
suivant  Hérodote,  il  excellait  Pratinas  de  Phlionte  trans- 
porta, dit- on,  cette  innovalolon  en  Attique,  et  donna 
32  drames  satyriques;  après  lui,  son  fils  Aristias,  puis 
Chœrile,  puis  Eschyle,  traitèrent  avec  un  succès  croissant 
ce  genre  demi-burlesque.  Sophocle  et  Euripide  compo- 
sèrent également  des  drames  satyriques;  mais,  d'après 
le  témoignage  des  critiques  anciens,  que  nous  ne  pou- 
vons plus  contrôler,  puisqu'il  ne  nous  est  parvenu  qu'une 
seule  pièce  de  ce  genre,  le  Cyclope  d'Euripide,  ces  deux 
poètes  restèrent  inférieurs  à  Eschyle.  Le  sujet  du  drame 
satyrique  d'Euripide  n'est  autre  que  l'aventure  tragi-co- 
mique d'Ulysse  et  du  Cyclope  racontée  au  9*  chant  de 
VOayssée,  et  mise  en  dialogue  par  le  poète  athénien. 
Ulysse  y  conserve  partout  le  caractère  séneux  qu'Homère 
lui  a  donné,  sauf  la  scène  où ,  comme  dans  YÔdyssée,  il 
dit  au  Cyclope  s'appeler  Outis  (Personne);  les  rôles 
bouflbns  sont  remplis  par  Silène  et  les  Satyres,  qui  étaient 
tombés  aux  nudns  de  Polyphême  tandis  qu'ils  cherchaient 


SAU 


1616 


SAX 


à  travers  les  mers  leur  mattre  Bacchtis  enlevé  par  des 
pirates.  Les  rodomontades  du  pacifique  Silène,  qui  se 
vante  d*avoir  jadis  pourfendu  le  terrible  géant  Encelade^ 
sa  passion  naïve  pour  la  liqueur  vermeille  de  son  ancien 
nourrisson,  la  poltronnerie  des  Satyres  lorsque  Ulysse  ré- 
clame leur  concours  au  moment  où  il  s'apprête  à  crever 
Tœil  unique  du  monstre  à  l'aide  d'une  tige  d'olivier 
taillée  en  pointe  avec  son  épée  et  rougie  au  feu,  tels  sont 
les  éléments  de  gaieté  de  ce  drame  satyrique.  —  V.  Ca- 
saubon,  De  scUyrica  Grœcorum  poesi  $t  romana  salira; 
Spanheim,  Préface  de  sa  traduction  franc,  des  Césars  die 
Julien f  p.  v-xx;  M.  Rossignol,  Dissertation  sur  le  drame 
que  les  Grecs  appelaient  satyrique;  M.  Patin,  Études  sur 
les  tr<igiques  grecs  (1843),  tome  III,  p.  443- i59;  et  sur 
le  Cyclope,  M.  Patin,  ihid.^  pages  459-483.  P. 

SAUCÉES  (Médailles),  médailles  de  cuivre  couvertes 
d'une  mince  feuille  d'argent. 

SAUCIERS,  ancienne  corporation,  dont  les  statuts  da- 
tent de  i394.  Au  commencement  du  xvi*  siècle,  ils  Joi- 
gnirent à  leur  nom  ceux  de  distillateurs,  moutardiers  et 
jinaigriers.  Les  distillateurs  formèrent  une  corporation 
distincte  en  1537. 

SAUCISSON,  ^  termes  d'Art  militaire,  désigne  :  1»  une 
espèce  de  fascine,  confectionnée  avec  des  troncs  d'ar- 
brisseau ou  de  grosses  branches  d'arbre,  et  servant  dans 
les  sièges  pour  la  construction  des  épaulements  de  batte- 
ries ou  pour  réparer  les  brèches;  %^  un  sac  de  toile  ou 
de  cuir,  long  et  étroit,  rempli  de  poudre,  et  dont  on  se 
sert  pour  porter  le  feu  dans  la  chambre  ou  le  fourneau 
d'une  mine. 

SAUF-CONDUIT,  permission  donnée  par  une  autorité 
publique  d'aller  dans  un  endroit,  d'y  séjourner  pendant 
un  certain  temps  et  de  s'en  retourner,  sans  craindre 
d'être  inquiété,  une  personne  munie  d'un  sauf-conduit 
est  inviolable.  On  garantissait  ainsi  autrefois  à  un  accusé 
qu'il  pouvait  se  présenter  devant  la  justice,  et  qu'il  ne 
serait  ni  arrêté  ni  détenu  préalablement.  En  Diplomatie, 
un  sauf-conduit  est  une  sorte  de  passe-port  remis  aux 
étrangers  qui  doivent  se  retirer  d'un  pays  en  guerre  avec 
le  leur.  Un  chef  d'armée  peut  accorder  un  sauf-conduit 
à  un  dos  ennemis  qui,  pour  affaires  privées  ou  pour  cause 
de  santé,  demande  à  passer  sur  le  terrain  qu'il  occupe. 
Dans  le  Droit  commercial,  on  nomme  sauf-conduit  la 
permission  donnée  par  un  tribunal  à  un  failli  ou  à  une 
personne  placée  sous  le  coup  de  la  contrainte  par  corps, 
d'user  provisoirement  de  sa  liberté,  moyennant  une  cau- 
tion et  certaines  formalités  (Code  de  Comm,,  art.  466- 
469,  490;  Code  de  Procéd.  civ,,  art.  782). 

SAUMOIER,  vieux  mot  synonyme  de  psalmodier» 

SAUNAGE  (du  latin  sal,  sel),  fabrication  et  débit  du 
sel  marin.  Le  faux  saunage,  ou  débit  du  sel  en  fraude, 
est  sévèrement  défendu  :  autrefois  il  était  puni  des  ga- 
lères. 

SAUNERIE,  ensemble  des  b&tîments,  puits,  fontaines 
et  instruments  propres  h  la  fabrication  du  sel. 

SAUNIER,  ouvrier  qui  travaille  à  faire  le  sel. 

SAUT,  terme  d'Hydrographie.  V.  Cataracte. 

SAUT,  en  termes  de  Chorégraphie,  pas  de  ballet  où  l'on 
élève  tout  le  corps  en  l'air.  Il  est  simple^  quand  les  jamb^ 
ne  font  aucun  mouvement  ;  battu,  quand  les  talons  bat- 
tent en  l'air  l'un  contre  l'autre  une  ou  plusieurs  fois. 

SAUT  DB  CARPE,  saut  quo  los  baladii.s  exécutent  à  plat 
ventre  en  s'élevant  et  en  retombant  horizontalement. 

SAUT  DE  LOUP,  fossé  quo  l'on  fait  au  bout  d'une  allée, 
d'un  parc  ou  d'un  jardin,  pour  en  défendre  l'entrée  sans 
borner  la  vue. 

SAUTE-MOUTON,  jeu  d'enfants  qui  consiste  à  sauter 
de  distance  en  distance  les  uns  par-dessus  les  autres. 

SAUTEREAU.  V.  Clavecin. 

SAUTEUSE,  espèce  do  valse  à  2  temps  et  d'un  mouve- 
ment très- rapide,  que,  dans  les  premières  années  du 
XIX"  siècle,  on  faisait  succéder  à  la  valse  ordinaire. 

SAUTOIR,  mot  qui  désignait  anciennement  un  cordon 
de  soie  ou  de  chanvre  couvert  d'une  étoffe  précieuse,  at- 
taché à  la  selle  d'un  cheval,  et  servant  d'étrier.  Dans  le 
Blason,  il  désigne  une  pièce  honorable  de  l'écu,  formée 
de  la  bande  et  de  la  barre  mises  l'une  sur  l'autre  de 
manière  à  former  l'X  ou  croix  de  S*-André.  La  dévotion 
à  S^  André  a  pu  rendre  le  sautoir  fréquent  en  armoiries; 
la  cause  en  serait  aussi,  dit-on,  que,  pendant  les  que- 
relles des  Armagnacs  et  des  Bourguignons,  ceux  qui  te- 
naient le  parti  du  duc  de  Bourgogne  portaient  des  croix 
de  S'-André.  —  Un  ordre  de  chevalerie  se  porte  en  sau- 
toir, q\iand  le  cordon  ou  la  chaîne  tembe  en  pointe  sur  la 
poitrine  en  soutenant  l'insigne  de  l'ordre. 

SAUVAGE  (de  l'italien  selvaggio  ou  salvaggio,  dériré 


lui-même  du  latin  silva,  forêt),  se  dit  des  Sommes  qid 
vivent  dans  l'état  de  nature,  au  milieu  des  bois,  sani 
demeure  fixe,  sans  lois,  et  s'oppose  à  civilisé.  Parmi  les 
paradoxes  que  soutint  J.-J.  Rousseau  au  xviii*  siècle,  il 
en  est  un  qui  consiste  à  placer  l'état  sauvage  au-dessus 
de  l'état  de  civilisation,  h  considérer  l'homme  civilisé 
comme  un  être  dénaturé.  liOin  d'avoir  été,  créés  pour  la 
vie  solitaire,  notre  existence  n'est  complète  que  dans 
l'état  social.  Le  sauvage,  toujours  pressé  par  le  besoin, 
devient  égoïste  et  féroc«;  dans  sa  lutte  contre  les  agents 
qui  l'entourent,  il  ne  développe  que  ses  forces  physiques  : 
l'homme  civilisé,  assuré  contre  les  premières  nécessités, 
aspire  plutôt  h  perfectionner  ses  facultés  intellectuelles, 
et  connaît  les  plaisirs  moraux.  Mieux  et  plus  régulière- 
ment nourri,  il  est  même  susceptible  d'une  puissance 
musculaire  supérieure  à  celle  du  sauvage.  Celui-ci,  aban- 
donné dans  ses  maladies,  délai^é  dans  sa  vieillesse  im- 
prévoyante, exposé  aux  bêtes  féroces  et  même  aux  coups 
de  ses  semblables,  est-il  plus  heureux  que  l'homme  so- 
cial, qui  est  préservé  des  maux  extérieurs  et  entouré  de 
soins  affectueux?  Il  n'a  point,  si  l'on  veut,  à  subir  l'op- 
pression ou  l'humiliation  de  l'inégalité  des  rangs  et  de  la 
fortune;  mais  ces  maux  sont  des  accidents,  et  non  l'es- 
sence de  l'état  social.  On  ne  saurait  admettre,  d'ailleurs, 
que,  pour  se  courber  sous  le  joug  des  lois,  l'homme  ab- 
jure toute  indépendance  et  ne  conserve  plus  aucune  di- 
gnité. Enfin,  est-il  plus  glorieux  pour  l'homme  de  vivre 
comme  la  brute,  que  d'atteindre  par  son  intelligence  aux 
connaissances  les  plus  élevées?  La  vie  civilisée  est  si  bien 
supérieure  à  la  vie  sauvage,  que  les  peuplades  barbares 
invoquent  la  science  des  Européens,  redoutent  leurs  ar* 
mes,  étudient  leur  tactique,  admirent  les  produits  de 
leur  industrie.  On  pourrait  donc  dire  avec  H.  de  Bonald 
que  l'état  sauvage  est  une  dégradation  de  notre  nature. 

SAUVEGARDÉ  (Lettres  de).  V.  Lettres  de  sauve- 
garde, dans  notre  Dictionn.  de  Biographie  et  d^Histoire, 

SAUVETAGE.  Un  arrêté  du  17  floréal  an  ix  (7  mai 
1801)  a  réglé  tout  ce  qui  est  relatif  au  sauvetage  des  b&F 
timents  naufragés.  A  défaut  des  armateurs,  propriétaires, 
subrécargues  ou  leurs  fondés  de  pouvoirs,  le  commissaire 
de  l'inscription  maritime,  et,  à  l'étranger,  le  consul,  est 
chargé  des  opérations  du  sauvetage,  et  de  l'information 
sur  les  causes  et  circonstances  du  sinistre.  Les  intéressés 
ont  un  an  et  un  jour  pour  réclamer  ce  qui  leur  appar- 
tient; après  quoi,  il  y  a  lieu  h  vente  publique  par  le 
commissaire,  qui  en  verse  le  produit  à  la  caisse  des  gens 
de  mer.  La  vente  peut  être  avancée  en  cas  de  dépérisse- 
ment ou  de  danger  pour  les  objets.  On  prélève  sur  If 
{>roduit  les  frais  dus  a  l'administration  de  la  marine  et  de 
a  douane,  les  frais  d'expertise,  les  salaires  des  ouvriers 
et  de  l'équipage,  l'enregistrement,  etc.  ;  le  reste  est  ré- 
parti entre  les  intéressés,  qui  doivent  payer  à  la  caisse 
des  invalides  de  la  marine  0  fr.  15  c  p.  100,  comme  in- 
demnité de  dépôt. 

SAVANES.  {  V.  notre  Dictionnaire  de 

SAVANTS  (Journal  des).  )      Biographie  et  d^ Histoire. 

SAVETIERS,  ancienne  corporation  qui  avait  pris  pour 
patron  S'-Pierre-ès-Liens.  L'apprentiùage  était  de  trois 
ans;  le  compagnonnage  de  quatre.  Le  brevet  coûtait 
15  livres,  et  la  maîtrise  300. 

SAVEURS  (Clavecin  des).  F.  CiJiVEcm. 

SAVIN  (Église  de  Saint-),  dans  le  département  de  la 
Vienne.  Cette  église,  dont  on  fait  remonter  la  fondation  à 
Charlemagne,  est  une  ancienne  abbatiale,  qui  se  dis- 
tingue par  le  peu  de  largeur  et  la  hauteur  extraordinaire 
de  sa  nef.  De  chaque  côté,  8  colonnes  isolées  et  2  pi  liera 
la  séparent  des  bas  côtés,  fort  étroits  aussi,  et  dont  la 
voûte  surbaissée  repose  sur  les  mêmes  chapiteaux  qui 
supportent  les  arceaux  à  plein  cintre  de  la  voût«.  Ces 
chapiteaux  sont  à  rinceaux  et  k  larges  feuillages.  Un 
transept  à  bras  assez  longs  sépare  la  nef  d'un  chœur  à 
10  colonnes  isolées,  derrière  lesquelles  tourne  un  couloir 
étroit  où  s'ouvrent  5  chapelles.  Toute  la  grande  voûte, 
séparée  en  4  zones  dans  toute  une  longueur  de  48'",75, 
est  couverte  de  peintures  du  ix*  siècle,  représentant  des 
sujets  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament,  et  ne  com- 
prenant pas  moins  de  250  figures.  On  entre  dans  l'élise 
de  S*-Savin  par  un  porehe  peu  élevé,  surmonté  d'uno 
tour,  dont  la  flèche,  de  construction  plus  récente,  est 
flanquée  de  quatre  clochetons  et  garnie  de  crochets  sur 
les  arêtes.  Une  autre  tour,  d'un  seul  étage  et  à  toit  plat, 
s'élève  sur  la  croix  du  transept. 

SAVONNERIE  (La),  manufacture  de  tapisseries.  V.  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Hisloire. 

SAXE  (Miroir  de).  V.  MrROiR. 

SAXHORN  (de  Sax,  n9»  de  TinvenVear»  et  <•  h 


SAX 


1617 


SAX 


nand  hom,  cor),  nom  d*uoe  fainillo  dMostruments  à  vent 
et  à  bocal,  en  cuivre,  à  embouchure  de  cuivre,  armés 
i*un  mécanisme  de  cylindres,  et  destinés  non-seulement 
à  remplacer  le  bugle  et  Tophicléide  dans  Téchelle  géné- 
rale des  instruments,  mais  encore  à  combler  les  lacunes 
qui  existaient  précédemment.  Cette  famille  comprend,  en 
allant  de  l'aigu  au  grave  :  1^  le  saxhorn-soprano  en  si  &é- 
mol  aigu,  à  Toctave  supérieure  de  Tancien  bugle  en  si 
bémol  ou  db  la  clarinette  en  si  bémol,  ou  encore  une 
quinte  au-dessus  du  petit  bugle  en  mi  bémol;  ^  le  sax- 
jiorn-mezzo-soprano  en  mi  bémol  aigu;  3°  le  saxhorn- 
,  alto  en  si  bémol;  4"  le  saxhorn-ténor  en  mi  bémol;  5°  le 
saxhorn  baryton-basse  en  si  bémol;  G»  le  saxhorn  con- 
tre-basse en  mi  bémol  ;  7®  le  saxhorn  contre-basse  grave 
on  si  bémol;  i^  le  saxhorn  bourdon  en  mi  bémol;  9°  le 
s-ixhorn  contre-bourdon  en  si  bémol,  deux  octaves  au- 
dessous  de  Tophicléide.  Chacun  de  ces  instruments  peut 
•  ti-c  exécuté  un  ton  au-dessus,  c.-à-d.  en  ut  pour  ceux 
en  51*  bémol,  et  en  fa  pour  ceux  en  mi  bémol.  Le  saxhorn 
contre- bourdon,  avec  ses  tubes  additionnels,  n*a  pas 
moins  do  1G  met.  de  développement,  et  cependant  on  en 
joue  avec  facilité  et  sans  fatigue.  Les  saxhorns  se  con- 
struisent ou  droits  en  avant,  ou  avec  le  pavillon  en  Tair. 
Ils  se  sont  introduits  depuis  1843  dans  la  musique  mili- 
taire et  dans  les  orchestres  :  ils  ont  plus  de  force,  d*éclat, 
de  pureté  et  de  justesse  que  n'en  ont  jamais  offert  le 
bugle  et  l'ophicléide.  En  1851,  Sax  a  inventé  les  saxhorns 
doubles,  qui  ont  deux  pavillons  et  sont  armés  de  cinq  i 
cylindres  :  celui  en  mi  bémol  possède  à  lai  seul  retendue  ! 
du  soprano  en  mi  bémol,  du  contralto  en  si  bémol,  et  ^^  l 
l'aho-ténor  en  mi  bémol,  B         ' 

SAXON  (Idiome).  Ce  n'est  pas  autre  chose  que  le  bas 
allemand  ancien,  parlé  non-seulement  dans  la  Saxe,  | 
mais  depuis  la  Baltique  jusqu'à  la  mer  du  Nord.  Un  dej 
monuments  les  plus  précieux  de  cet  idiome  est  un  poëmcv 
intitulé  le  Sauveur,  d'après  lequel  Schmeller  a  compose 
son  Glossarium  sticonicum,  Munich  et  Stuttgard,  18i0. 
11  y  a  plus  de  300  manuscrits  saxons  à  la  bibliothèque  de 
Bourgogne  à  Bruxelles.   V,  Kinderling,   Histoire  de  la 
langue  de  la  bcuse  Saxe^  en  allemand,  Magdebourg,  1800, 
in-8<>  ;  Scholler,  Hibliognosie  de  l'i  liome  saxon  bas  alle- 
mand, en  allemand,  Brunswick,  18*26. 
SAXON  (Style).  V.  Ogivale  (Architecture). 
SAXONS  (La  Chanson  des),  ou  Vidukindde  Saxe,  un 
des  romans  des  douze  Pairs.  Le  sujet  de  ce  poëme  est  la 
f?ijnrre  deCharlemagne  contre  les  Saxons.  Guiteclins(Wi- 
liliind)  apprend  la  défaite  de  l'empereur  à  Roncevaux,  et 
la  mort  d'Olivier  et  de  Roland  :  il  mande  aussitôt  ses 
barons,  convoque  tous  les  rois  sarrazins,  ses  alliés,  et 
envahit  les  possessions  de  Charles  sur  la  rive  droite  du 
Khin.  L'empereur  appelle  ses  barons;  mais  ils  lui  repré- 
sentent qu'il  les  a  retenus  14  années  en  Espagne,  qu'ils 
sont  fatigués  de  toujours  faire  la  guerre  sans  profit,  et 
di^larent  qu'ils  lui  refuseront  désormais  le  service  mili- 
taire s'il  ne  fait  payer  l'impôt  de  quatre  deniers  à  la  gent 
de  Hérupe  (BAaine,  Anjou,  Bretagne,  Normandie).  Charles 
envoie  l'ordre  au  comte  du  Mans  de  payer  cet  impôt,  et 
de  venir  à  la  tête  de  ses  vassaux  pour  repousser  les 
Savons.  Le  comte  convoque  tous  les  barons  de  Hérupe, 
et  leur  communique  le  message  de  l'empereur  :  après 
une  délibération  fort  tumultueuse,  il  est  décidé  que  les 
barons  attacheront  les  quatre  deniers  au  bout  de  leurs 
lances,  et  iront  en  bataille  défier  l'empereur  de  venir  re-  ' 
ccvoir  l'impôt.  En  effet,  ils  se  mettent  en  marche,  pillent 
hiris  et  tout  le  royaume  Jusqu'au  Rhin,  et,  arrivés  à 
une  petite  distance  d'Aix,  envoient  deux  messagers  à 
Charles  pour  lui  porter  leur  défi.  Charles  les  accueille 
avec  courtoisie,  et  Jure  qu'il  n'a  jamais  songé  à  leur  de- 
mander d'autre  impôt  que  le  service  militaire.  La  paix 
est  faite;  les  Hérupois  retournent  chez  eux.  Cependant 
les  Saxons  font  des  progrès;  Guiteclins  doit  surprendre 
les   Français  et  les   exterminer.  Mais  la  belle  Sébile, 
femme  de  Guiteclins,  est  persuadée  qu'un  Jour  viendra 
où  elle  devra  renoncer  à  la  loi  de  Mahomet  pour  suivre 
celle  du  Christ.  D'ailleurs  elle  a  dans  l'armée  française 
on  ami  de  cmur,  Baudoin,  le  propre  neveu  de  l'empe- 
reur. Elle  écrit  donc  à  Charles  pour  lui  faire  connaître 
en  détail  le  plan  d'attaque  des  Saxons.  Les  Français  sont 
vainqueurs.  Les  Hérupois,  <^ue  Charles  avait  mandés,  ar- 
rivent et  se  couvrent  de  gloire.  Maie  Charles  n'a  pas  en- 
core passé  le  Rhin  :  pen&nt  2  ans  et  4  mois  il  est  retenu 
sur  la  rive  gauche  du  fleuve,  toujours  gros  et  profond. 
Baudoin,  appelé  par  l'amour,  pénètre  plusieurs  fois  dans 
le  camp  des  Saxons.  Charles  le  gourmande,  et  lui  défend 
de  s*exposer  sans  profit  pour  l'armée.  Baudoin  s'emporte, 
U  reproche  à  son  oncle  de  n*avoir  fait  encore  aucune 


prouesse  contre  les  Saxons.  Charles,  irrité,  sort  de  son 
camp  le  lendemain  avant  le  jour,  traverse  le  fleuve,  et  se 
dirige  vers  les  Saxons.  11  rencontre  huit  rois  mores;  il  en 
tue  cinq,  les  autres  prennent  la  fuite.  De  retour  parmi 
les  siens,  il  appelle  Baudoin,  et  lui  déclare  qu'il  ne  lut 
pardonnera  son  insulte  de  la  veille  qu'à  une  condition  : 
c'est  qu'il  traversera  le  fleuve,  qu'il  embrassera  sa  mie  à 
la  vue  des  Saxons,  et  qu'il  lui  rapportera  l'anneau  d'or 
de  la  belle.  Baudoin,  obligé  d'accepter  cette  condition, 
passe  le  fleuve  encore  une  fois,  tue  l'infidèle  Justamnn, 
revêt  ses  armes,  prend  son  cheval,  et,  ainsi  déguisé,  pé^ 
nôtre  facilement  dans  la  tente  de  Sébile.  Mais  pendant 
que  les  amants  s'ébattent,  un  espion  voit  leurs  jeux  ;  il 
court  avertir  Guiteclins,  qui  arrive  avec  500  hommes. 
Baudoin  le  défie  en  combat  singulier,  le  renverse  d'un 
coup  de  lance,  et  revient  dans  le  camp  de  Charles,  à 
qui  il  présente  l'anneau  de  Sébile.  Jusqu'alors  il  n'y  a 

f>as  eu  de  bataille  générale;  les  deux  armées  sont  lou- 
eurs séparées  par  le  fleuve.  Le  jour  de  la  Pentecôte,  une 
nche,  poursuivie  par  des  chiens,  se  jette  dans  le  Rhin. 
Charles  voit  dans  cet  événepient  un  avertissement  de 
Dieu;  il  ordonne  de  construire  en  cet  endroit  un  pont 
assez  large  pour  laisser  passer  cent  chevaliers  de  front. 
Les  barons  ne  veulent  pas  faire  métier  de  bûcherons,  et 
se  retirent.  Charles  leur  fait  dire  que,  s'ils  ne  reviennent 
aiussitôt  dans  son  camp,  il  va  faire- la  paix  avec  Guite- 
clins, pour  ensuite  les  exterminer,  l^s  barons  ciïrayôs 
exécutent  les  ordres  de  l'empereur.  Le  pont  est  ronstniit; 
une  grande  bataille  se  livre  snr  la  rive  droite  du  Rhin. 
Charles  tue  Guiteclins;  Sébile  reçoit  le  baptême,  et  de- 
vient l'épouse  de  Baudoin,  à  qui  l'empereur  donne  le 
royaume  de  Saxe.  Ici  finit  la  première  partie  de  la  Ckan- 
son  des  Saxons,  —  Charles,  avant  de  revenir  en  France, 
recommande  expressément  à  Baudoin  de  ne  pas  engager 
de  bataille  au  cas  qu'il  soit  attaqué  par  les  Saxons,  mais 
de  lui  demander  promptemcnt  des  secours.  A  peine  a-t-il 
repassé  le  Rhin,  que  les  Saxons  se  lèvent  do  tous  côtés  : 
Baudoin  oublie  les  conseil:-  de  son  oncle,  et,  après  de 
brillante»  exploits,  il  est  obligé  do  céder  au  nombre,  et  de 
se  retirer  dans  sa  capitale,  où  il  est  assiégé.  Cest  alors 
seulement  qu'il  demande  dos  secours  à  l'empereur. 
Charles  vient  à  la  tête  d'une  armée  :  grande  bataille; 
Baudoin  tue  Fieramor,  un  des  fils  de  Guiteclins  ;  mais  il 
est  lui-même  blessé;  entouré  par  un  corps  de  Saxons,  il 
succombe.  Le  lendemain,  Charles  accepte  le  défi  de  Dya- 
las,  second  fils  de  Guiteclins  ;  il  en  triomphe,  et  l'emmène 
prisonnier.  Dyalas  promet  de  se  faire  chrétien  :  pour 
donner  à  Charles  un  gage  éclatont  de  sa  foi,  il  combat 
v.iillamment  contre  les  Saxons  qui  sont  complètement 
vaincus.  Knfln  il  reçoit  le  baptêuie,  cl  Charles  lui  donne 
le  royaume  de  Saxe.  Quant  âi  Sébile,  elle  s'enfi^rmo  dans 
un  couvent  pour  pleurer  son  ami. 

La  Chanson  des  Saxons  est  un  dô  nos  plus  anciens  ro- 
mans jde  chevalerie;  elle  remonte  au  xiii*  siècle.  L'auteur, 
Jean  Bodel,  était  d'Arras;  il  n'a  pas  épargné  dans  son 
poème  les  expressions  empruntées  au  patois  artésien,  ce 
qui  en  rend  quelquefois  la  lecture  difficile.  Du  reste, 
c'est  une  œuvre  véritablement  héroïque.  En  voyant  ces 
chevaliers  qui  se  défient  sur  le  champ  de  bataille,  qui 
rappellent  leurs  exploits,  qui  se  demandent  leurs  noms, 
qui  se  menacent  et  se  battent  en  présence  des  deux  ar- 
mées, on  croit  assister  à  une  des  batailles  décrites  par 
Homère.  Quant  à  l'exactittide  historique,  elle  est  nulle, 
comme  dans  tous  les  romans  de  chevalerie.  Les  Saxons 
sont  représentés  comme  adorateurs  de  Mahomet,  et  l'on 
voit  parmi  leurs  alliés  des  princes  de  Polo^^ne,  de  Hon- 
grie, de  Turquie,  de  Perse,  de  Nubie,  de  Maroc,  etc. 
Dans  le  roman,  Witikind  est  tué  par  Charlemagne;  dans 
l'histoire,  il  se  fait  chrétien  :  si  l'auteur  eût  conservé  le 
dénoûment  historique,  il  n'aurait  pu  couronner  l'amour 
de  Baudoin,  qui  est  le  véritable  héros  du  poëme.  Bau- 
doin fait  mille  prouesses  pour  l'amour  de  sa  dame  ;  c'est 
un  parfait  modèle  de  chevalerie.  Les  barons  sont  inso- 
lents vis-à-vis  de  l'empereur  ;  ils  lui  marchandent  leurs 
services;  c'est  bien  la  féodalité  du  xn"  siècle,  mais  elle 
n'a  rien  de  commun  avec  Charlemagne.  Un  épisode  cu- 
rieux est  le  siège  de  S^-Herbert,  dont  la  tradition  s'est 
conservée  pendant  tout  le  moyen  âge.  Charles,  avec  les 
rois  ses  alliés,  est  tout  entier  à  la  guerre  :  les  reines  et 
les  duchesses,  qu'on  a  laissées  à  S*-Herbert,  y  mènent 
joyeuse  vie,  et,  pour  se  soustraire  &  la  vengeance  de  leurs 
maris,  elles  se  fortifient  dans  la  place.  Charles  en  fait  le 
siège;  après  une  belle  défense,  les  dames  sont  vaincues. 
D'après  l'ordre  do  l'empereur,  chacun  rvprond  sa  femme, 
et  il  est  convenu  qu'on  oubliera  à  jamais  le  siège  de 
S^-Uerbert.  Cet  épisode  a  été  retranché  de  plusieurs  ma* 

40i 


SCA 


1618 


SCA 


nuscrits,  comme  peu  conforme  h  la  réputation  d'honneur 
des  dauics  françaises.  1^  Chanson  des  Saxons  a  été  pu- 
bliée par  M.  Francisque  Michel,  1839.  H.  D. 

SAXOPHONE  (  de  Sax,  nom  de  l'inventeur,  et  du  grec 
phônè,  voix,  son),  instrument  de  musique  à  vent,  qu'on 
peut  rapprociier  de  la  famille  des  clarinettes,  parce  que 
le  son  y  est  produit,  comme  dans  celles-ci,  par  une  anche 
battant  contre  la  table  d'un  bec.  Le  saxophone  est  un 
cône  parabolique  en  cuivre,  dans  lequel  les  intonations 
se  modifient  par  un  système  de  clefs,  qui  sont  au  nombre 
de  19  à  2*2,  suivant  les  individus  de  la  famille.  Différent 
de  la  clarinette  parles  nœuds  de  vibration  de  sa  colonne 
d'air,  il  est  accordé  par  octaves;  en  sorte  que  toutes  les 
octaves  sont  justes,  ce  qui  n'a  pas  lieu  dans  les  clari- 
nettes. Toutefois,  dans  une  grande  partie  de  son  étendue, 
il  jouit  aussi  de  la  faculté  de  donner  l'harmonique  de  la 
douzième  ou  octave  de  la  quinte.  Le  doigté,  semblable  à 
celui  des  instrument-^  qui  ortavient,  est  peu  différent  de 
celui  de  la  flûte  ou  du  hautbois.  Le  son  du  saxophono 
est  beau,  sympathique,  susceptible  de  toutes  tes  nuauc*  s 
d'intensité  :  son  timbre,  qui  n'est  celui  d'aucun  autre 
instrument,  oiïre  de  vagues  analogies  avec  ceux  du  vio- 
loncelle, de  la  clarinette  et  du  cor  anglais,  et  une  demî- 
tcinte  cuivrée  lui  donne  un  accent  particulier.  On  dis- 
tingue huit  variétés  de  saxopliones  formant  une  famille 
complète  et  qui  sont  à  la  quinte  ou  à  l'octave  les  unes 
des  autres  :  P  le  saxophone  soprano,  en  ut  ou  en  si  bé- 
mol (étendue  chromatique  de  deux  octaves  et  une  tierce)  ; 
2"  le  saxophone  aigu  en  mi  bémol  (môme  étendue);  3"  le 
saxophone  alto,  en  fa  ou  en  mi  bémol  (étendue  chroma- 
tique de  deux  octaves  et  une  quinte  )  ;  4^  le  saxophone 
ténor,  en  ut  ou  en  si  bémol  (même  étendue)  ;  5°  le  saxo- 
plione  baryton,  en  fa  ou  en  mi  bémol  (même  étendue); 
0°  le  saxophone  basse,  en  ut  ou  en  si  bémol  iméme  éten- 
due); 7°  le  saxophone  contre-basse,  en  fa  ou  en  mi  bémol 
(étendue  de  deux  octaves  et  une  seconde);  8°  le  saxo- 
phone contre- basse,  enut  ou  en  si  bémol  (môme étendue). 
Tous  possèdent  la  faculté  d'enfler  et  d'éteindre  le  son 
comme  dans  l'orgue  expressif.  B. 

SâXO TKOMBA,  instrument  en  cuivre  à  bocal,  armé 
d'un  mécanisme  de  cylindres.  Il  a  été  inventé  par  Adol- 

Ehe  Sax  vers  18i3.  Il  comporte  une  famille  de  sept  mcm- 
res,  allant  de  l'aigu  au  grave,  et  divisés  par  quinte  et 
quarte  :  1  °  le  saxotromba  suraigu  en  si  bémol ,  une  oc- 
tave au-dessus  de  l'ancien  bugle  en  si  bémol ,  2°  le  saxo- 
tromba soprano  en  mi  bémols  à  l'unisson  du  petit  bugle 
en  mi  bémol;  3°  le  saxotromba  contralto  en  s}  bémol ,  à 
l'unisson  du  bugle  ordinaire;  A°  le  saxotromba  alto-ténor 
en  mi  bémol,  à  l'unisson  de  l'ophicléide  alto;  5**  le  saxo- 
tromba baryton-basse  en  si  bémol,  à  l'unisson  de  l'ophi- 
cléide basse  en  si  bémol;  G»  le  saxotromba  contre-basse 
en  mi  bémol,  une  octave  au-dessous  de  l'opliicléide  alto; 
7"  le  saxotromba  contre-basse  grave  en  si  bémol,  une  oc- 
tave au-dessous  de  l'ophicléide  basse.  Chacun  de  ces 
instruments  peut  être  exécuté  un  ton  au-dessu»,  c.-à-d. 
en  ut  et  en  fa,  La  voix  du  saxotromba  tient  le  milieu 
entre  celles  des  trompottes  et  des  trombones  d'une  part, 
des  buglcs  et  des  ophicléides  de  l'autre  ;  moins  strident 
que  les  premiers,  il  n'a  ni  la  lourdeur  ni  le  son  empâté 
des  seconds.  Le  doigté  est  le  môme  pour  tous  les  mem- 
bres de  la  famille.  B. 

SAXTUBA,  instrument  de  cuivre  à  bocal,  armé  d'un 
mécanisme  de  cylindres.  Il  fut  inventé  vers  1850  par 
Adolphe  Sax.  II  surpasse  en  puissance  tous  les  instru- 
ments connus  jusqu'à  ce  jour,  sans  cesser  pour  cela  d'ôtre 
un  instrument  musical  d'une  sonorité  claire,  parfaite- 
ment saisissable.  Sa  famille  comporte  sept  membres  de 
l'aigu  au  grave,  comme  celle  du  saxophone.  On  se  servit 
pour  la  première  fois  de  saxtubas  dans  le  Juif  errant, 
opéra  d'Halévy.  Lors  de  la  distribution  des  drapeaux  à 
l'armée  par  l'empereur  (20  mai  1852),  14  saxtubas  domi- 
nèrent une  masse  de  1 ,500  musiciens  militaires.        B. 

SAYNÈTE.  V,  Sainète. 

SAYON,  espèce  de  casaque  ouverte  que  portaient  au- 
trefois les  gens  de  guerre. 

SBIRE  (de  l'italien  sbirro),  nom  donné  en  Italie,  sur- 
tout dans  les  États  de  l'Église,  aux  employés  de  justice 
et  de  police.  Chez  nous  le  mot  ne  s'emploie  qu'en  mau- 
vaise part. 

S(^ABELLON  (du  latin  scabellum,  escabeau),  en  termes 
d'Archite-ture,  sorte  de  piédestal  ou  de  socle  sur  lequel 
on  pose  des  bustes  ou  des  girandoles.  Il  a  la  forme  d'un 
balu«^tre,  ou  d'une  gaine  qui  va  diminuant  de  bas  en  haut. 

SC\IiILLU\L   i   ,,  ^     .  .      n-  .• 

S(;aiiI\S.        t  "'  ^^^  ^^^  °*"*  notre  Dictionnaire 

SCALDES        i      ^  Biograohi»  «t  d'Histoire, 


SCANDALE,  en  termes  de  Droit  canon,  parole  ou  ac- 
tion qui  donne  occasion  à  autrui  de  pécher.  Le  scanflale 
actif  est  celui  dont  nous  nous  rendons  coupables  par  nos 
mauvaises  actions  ou  par  celles  qui  n^en  ont  que  l'appa- 
rence; le  scandale  passif  est  celui  dont  nous  sommes  la 
cause,  sans  en  ôtre  coupables,  comme  lorsque  notre  for- 
tune ou  notre  état  excite  certiûnes  personnes  &  l'envie. 

SCANDER  (du  latin  scandera,  monter),  terme  de  Pro- 
sodie. Dans  les  langues  anciennes,  c'est  mesurer  un  vers, 
c.-à-d.  compter  combien  il  a  de  pieds,  en  indiquant  dans 
la  prononciation  les  longues  et  les  brèves.  Chaque  espèce 
de  vers  se  scande  d'une  façon  différente,  suivant  le 
nombre  et  la  nature  des  pieds  dont  il  est  composé.  Dans 
les  langues  modernes,  scander  c'est  mesurer  les  vers  par 
le  nombre  de  leurs  syllabes. 

SCANDINAVE  (Mythologie).  C*est  par  l'étude  et  la  com- 
paraison des  différents  poèmes  composant  les  deux  Ed- 
das  qu'on  peut  espérer  de  reconstruire  le  système  my- 
thologique des  anciens  Scandinaves.  Il  embrasse  en  même 
temps  unecosmo^nie  et  une  histoire  des  Dieux. 

Au  matin  du  monde,  quand  la  terre  ni  Peau  ni  le  ciel 
n'étaient  encore  créés,  il  n'y  avait  qu'un  abi  me  dévorant, 
nommé  le  Ginungagap.  Le  Nifelhem,  c-à-d.  le  monde 
du  froid  et  des  ténèbres,  situé  aux  extrémités  du  Nord , 
fut  créé  longtemps  avant  la  terre.  Au  milieu  du  Nifelhem 
se  trouvait  la  fontaine  Hvergelmer.  Mais  il  y  eut  aussi, 
aux  extrémités  du  Sud,  le  Muspelhem,  c.-à-d.  le  monde 
de  la  lumière  et  de  la  chaleur  :  Surtur  habite  sur  la  fron- 
tière de  ce  monde  et  en  est  le  dominateur  ;  il  porte  une 
épée  flamboyante,  et  il  viendra  à  la  fin  du  monde  pour 
combattre  et  vaincre  les  Dieux  et  détruire  par  le  feu  tout 
l'univers.  De  la  fontaine  Hvergelmer  s'échappent  douze 
fleuves,  appelés  Elivogor.  Ils  débouchent  dans  le  Ginun- 
gagap, fort  loin  de  leur  source,  et,  comme  la  scorie  du 
métal  en  fusion,  le  poison  que  contiennent  leurs  eaux  se 
condense  et  forme  une  glace  épaisse,  dont  les  couches 
successives  s'accumulent.  La  région  du  Ginungagap  qui 
e^t  située  vers  le  Nord  se  remplit  ainsi  de  glaces  qu'en- 
tourent et  pénètrent  les  vents  et  la  tempête,  tandis  que 
celle  qui  est  située  vers  le  Sud  est  protégée  par  les  étin- 
celles qui  sortent  du  Muspelhem  et  conserve  ainsi  une 
atmosphère  tranquille.  Peu  à  peu  cependant  la  chaleur 
qui  rayonne  de  ce  côté  atteint  les  glaces  qui  se  sont  formées 
vers  le  Nord  ;  ces  glaces  commeocent  à  se  fondre  goutte 
par  goutte  ;  les  gouttes  reçoivent  la  vie  par  l'énergie  de 
celui  qui  a  exhalé  cette  chaleur,  et  elles  prennent  la  forme 
d'un  être  humain  :  c'est  Ymer.  Ymer  est  méchant,  lui  et 
toute  sa  descendance.  Il  s'endort  et  tombe  en  sueur. 
Alors  naissent  de  de.^sous  son  bras  gauche  un  homme  et 
une  femme,  et  d'un  de  ses  pieds  un  fils  :  c'est  l'origine 
de  la  race  des  Hrimthursar.  Mais  en  même  temps  que 
Ymer  les  gouttes  de  la  glace  fondante  ont  engendré  une 
vache  nommée  Audhumbla  :  quatre  ruisseaux  de  lait  cou- 
lent de  ses  mamelles,  et  Ymer  s'en  nourrit.  Audhumbla 
elle-même  lèche  les  rochers  couverts  de  sel  et  de  givre  ; 
il  en  sort  le  premier  jour  une  chevelure  humaine,  le  se- 
cond jour  une  tète  d'homme,  et  le  troisième  jour  un 
homme  entier  x  c'est  Bure;  il  est  beau,  grand  et  fort;  il 
a  un  fils,  BOrr;  de  la  géante  Bestia  il  a  trois  fils  :  Odin, 
Vile  et  Ve,  maîtres  du  ciel  et  de  la  terre.  Ceux-ci  tuent 
le  géant  Ymer;  au  moment  où  il  tombe,  il  s'échappe  taot 
de  sang  de  sa  blessure,  qu'ils  y  noient  toute  la  race 
des  Hrimthursar,  excepté  le  seul  Bergelmer,  le  sage 
géant,  qui,  avec  sa  f^mme,  s'est  échappé  dans  une  barque. 
Ils  forment  à  eux  deux  la  tige  des  nouvelles  familles  de 
Gcauts.  —  Après  la  naissance  du  géant  Ymer  et  de  la 
varhe  Audhumbla,  naissance  due  aux  actions  réciproques 
de  l'obscurité  et  la  lumière,  de  l'eau  et  du  feu,  du  froid 
et  du  chaud,  après  la  défaite  des  Géants  par  les  grands 
Dieu  1,  bienfaisants  et  organisateurs^  issus  de  la  vache 
Audhumbla,  alors  seulement  les  puissances  propices  en- 
treprennent la  création  du  monde  ou  plutôt  l'ordonnance 
générale  des  parties  de  la  matière.  Ils  prennent  le  corps 
d'Ymor;  de  sa  chair  ils  forment  la  (erre,  de  son  sang  la 
mer,  de  ses  os  les  montagnes,  de  ses  dents  les  pierres  et 
les  rocs,  de  ses  cheveux  les  arbres,  et  de  son  crâne  le 
ciel;  de  ses  sourcils  ils  forment  le  séjour  de  Midgord 
pour  les  fils  des  hommes,  et  de  son  front  ils  façonnent 
les  nuages  épais.  Mais  le  soleil  ne  savait  pas  encore  où 
était  sa  demeure,  les  étoiles  ne  connussaient  pas  leur 
place,  et  la  lune  ignorait  quelle  force  elle  avait  en  eHe. 
Alors  les  saints  Dieux,  sur  leurs  sièges  élevés,  tiennent 
conseil.  Ils  prennent  les  étincelles  jaillissant  du  Muspel- 
hem, et  les  fixent  dans  l'espace,  en  haut  et  en  bas,  pour 
éclairer  le  ciel  et  la  terre.  Us  donnent  leurs  noms  à  la 
ttuit,  au  matin  et  au  midi,  lia  façonnent  la  terre;  pdi** 


SCA 


1619 


SCA 


dessus  ils  étendent  les  cieux,  avec,  aux  quatre  coins,  les 
nains  Orient,  Occident,  Nord  et  Sud.  Au  delà  des  rivages 
de  la  mer  du  monde  qui  entoure  la  terre,  ils  placent  le 
pays  des  Géants  ;  on  deçà  du  cercle  extérieur  de  la  terre, 
lis  se  choisissent  à  eux-mêmes  une  demeure,  quMls  pro- 
tègent tout  autour  par  un  mur  contre  les  Géants  ;  la  de- 
meure de  ceux-ci  est  appelée  Utgord,  celle  des  Dieux  et 
des  hommes  est  appelée  Midgord.  Au  milieu  de  Midgord 
ils  se  sont  bâti  une  ville  appelée  Asgord.  Là  habitent  les 
Dieux  et  leur  descendance.  Odin,  avec  les  Dieux  qui  Ten- 
tourent,  8*y  est  édifié  un  temple  nommé  Gladshem,  avec 
douze  sièges  pour  les  Dieux  et  un  haut  siège  pour  lui- 
môme.  Ils  ont  élevé  un  autre  temple,  Vingolf,  avec  des 
autels  pour  les  Déesses.  Ils  ont  ensuite  construit  des  four- 
neaux, et  fabriqué  des  instruments  et  des  armes.  —  Les 
choses  en  étaient  là  quand  trois  puissants  Ases,  fils  de 
Bor,  ayant  quitté  l'assemblée  des  Dieux,  rencontrent  sur 
un  rivage  deux  arbres,  dont  ils  façonnent  deux  êtres  hu- 
mains. Odin  leur  donne  le  souffle,  Haner  IMntelIigence , 
Loder  le  sang  et  la  belle  physionomie;  ils  leur  donnent 
aussi  des  vêtements  et  des  noms  :  Thomme  s'appelle  Ask 
et  la  femme  Embla.  C'est  d'eux  que  sortiront  les  enfants 
des  hommes,  à  qui  il  sera  permis  d'habiter  Midgord. 
Quant  aux  nains,  issus  des  vers  qu'avait  engendrés  le 
torps  d'Ymer,  les  Dieux  leur  ont  donné  la  forme  et  l'in- 
telligence humaines,  mais  ils  habiteront  dans  les  en- 
trailles de  la  terre  et  sous  les  rochers. 
Les  Dieux  ont  construit  de  la  terre  au  ciel  un  pont  ap- 

Kelé  Bâfrôst  ou  Pont  des  Ases.  11  est  de  trois  couleurs,  et 
àti  avec  un  art  admirable.  Au  point  où  ce  pont  rejoint 
Je  ciel,  se  trouve  la  demeure  d'Hcimdal;  c'est  de  là 
qu'Heimdal  surveille  les  Hrimthursar  et  les  Géants  des 
montagnes  qui  pourraient  vouloir  escalader  l'empire  cé- 
Jeste.  Ce  pont  est  visible  encore  aujourd'hui  :  c'est  l'arc- 
en-ciel  ;  le  rouge  qu'on  y  aperçoit,  c'est  le  feu  éclatant  ; 
les  eaux  célestes  bruissent  tout  autour.  Il  se  brisera 
quand  les  fils  de  Muspel  parviendront  à  l'escalader. 

Mais  le  principal  séjour  des  Dieux  est  à  l'ombre  du 
chêne  Yggdrasil;  ses  branches  recouvrent  le  mondç  en- 
tier et  s'élèvent  jusqu'au  ciel.  Ses  trois  racines  traversent 
l'abîme,  le  ciel  et  la  terre.  L'une  pénètre  jusqu'au  Nifel- 
hem^  là  où  le  serpent  NidhOgg,  dans  la  fontaine  de  Hver- 
gelmer,  ronge  sa  racine;  la  seconde  va  jusqu'au  Hrim- 
thursar, et  par-dessous  est  la  fontaine  de  Mimor,  où  sont 
cachées  l'intelligence  et  la  sagesse.  Un  jour  Odin  vint  à 
cette  fontaine  et  voulut  boire;  mais  il  fallut  qu'il  donnât 
un  de  ses  yeux  en  gage,  et  c'est  depuis  lors  qu'Odin  est 
resté  borgne.  La  troisième  racine  s'étend  jusqu'au  séjour 
des  Ases  et  des  hommes,  et  par-dessous  on  trouve  la  fon- 
taine sacrée  d'Urd.  C'est  là  qu'est  le  tribunal  des  Dieux; 
ils  s'y  rendent  à  cheval  chaque  jour  en  franchissant 
BâfrOst.  —  Un  aigle,  qui  sait  beaucoup  de  choses,  se  tient 
perché  sur  le  haut  du  chêne.  Dans  la  demeure  pratiquée 
entre  les  racines  de  l'arbre,  auprès  de  la  source  d'Urd , 
habitent    les  trois  savantes  sœurs,  Urd,  Verdande  et 
Skuld  (c'est-à-dire  le  passé,  le  présent  et  l'avenir).  Ce 
sont  les  Nomes;  elles  sont  très-puissantes;  elles  creu- 
sent  les  runes  du  destin  pour  les  Dieux  et  pour  les 
hommes,*  et  leurs  décrets  sont  irrévocables.  Il  y  a  d'au- 
tres Nornes  encore,  par  exemple  celles  qui,  présentes  à 
la  naissance  d'un  homme,  filent  la  trame  de  son  destin; 
los  unes  sont  bonnes  et  bienfaisantes,  les  autres  mé- 
chantes et  perfides. 

Parmi  les  Dieux  qui  habitent  le  palais  des  Ases  ou 
Asgord,  le  premier  est  Odin  ou  Allfader,  le  père  univer- 
sel. Deux  corbeaux,  perchés  constamment  sur  ses  deux 
épaules,  Hugin  (l'Esprit)  et  Munnin  (la  Mémoire \  lui 
di.^nt  à  Toreille  ce  qu'ils  ont  vu  ou  appris  dans  leurs 
courses  à  travers  le  monde.  —  Freia  ou  Frigga,  proba- 
blement la  déesse  Hertha  des  Germains,  n'est  autre  chose 
oue  la  Terre,  principe  de  toute  fécondité.  —  Thor,  fils 
d'Odin  et  de  Freia,  est  le  dieu  de  la  force  par  excellence; 
il  commande  aux  vents,  aux  saisons,  particulièrement  à 
la  foudre.  Il  est  armé  contre  les  monstres  et  les  géants 
d'un  marteau  qui  revient  de  lui-même  dans  sa  main 
après  qu'il  l'a  lancé  :  il  possède  en  outre  une  ceinture 
qui,  pendant  le  combat,  renouvelle  ses  forces  à  mesure 
qu'il  les  prodigue.  —  Parmi  les  Dieux  du  second  ordre 
on  rencontre  :  Balder,  fils  d'Odin ,  beau,  sage  et  bon. 
L'éclat  de  son  palais  radieux  se  refiète  dans  la  zone  lu- 
mineuse qui  biille  au  ciel  les  nuits  d'été.  Niord  règne 
sur  les  vents  et  la  mer.  Brage  est  le  dieu  de  l'éloquence 
et  de  lf\  poésie.  Loki  personnifie  enfin  le  mauvais  prin- 
cipe. Trois  monstres  sont  nés  de  lui  :  le  loup  Fenris,  le 
srrpwnt  Midgiird,  Hel  ou  la  Mort.  Nous  avons  déjà  nommé 
Heiindal,  le  dernier  de  ces  Dieux  secondaires..  Viennent 


ensuite  les  douze  Déesses,  qui  entourent  Freia:  puis  les 
douze  Valkyries ,  chargées  de  verser  l'hydromel  aux 
braves  du  Valhalla ,  de  choisir  au  combat  ceux  qui  doi- 
vent être  tués,  et  de  faire  pencher  la  victoire  vers  le  côté 
que  favorise  Odin.  Quant  aux  guerriers  qui  ont  mérité 
rimmortalité,  ils  habitent  après  la  mort  le  brillant  VaN 
halla,  dans  lequel  ils  goûtent  éternellement  le  plaisir  de 
boire  la  bière  et  l'hydromel,  ou  celui  de  combattre  sans 
se  lasser. 

L'arrivée  des  filles  des  Géants  troublera  le  bonheur 
parfait  qui  aura  été  pendant  un  certain  temps  le  partage 
des  Dieux  et  des  hommes.  Vainement  Loki,  le  génie  du 
mal,  aura  été  vaincu  une  première  fois.  Vainement  la 
puissance  et  la  vie  même  des  Dieux  auront-elles  été  assu- 
rées pendant  la  vie  de  Balder;  raimalilc  Baldcr,  au  sort 
duquel  est  suspendu  celui  de  la  nature  entière,  avertit 
lui-même  les  Dieux  que  des  songes  lui  annoncent  une  fin 
funeste.  A  la  prière  de  Freia,  sa  mère,  toute  la  nature 
promet  de  l'épargner;  toute  la  nature,  excepté  le  gui, 
qui  s'est  trouvé  omis  dans  cette  prière  universelle.  Loki 
s'en  aperçoit;  aussi,  lors  des  jeux  du  \alhalla,  en  pré- 
sence de  tous  les  Dieux  réunis,  comme  chacun  lançait 
son  arme  sur  la  poitrine  de  Balder  qu'on  croyait  invul- 
nérable, Loki  met  dans  la  main  de  l'aveugle  Hoder, 
frère  du  Dieu,  une  branche  de  gui,  et  lui  fait  commettre 
un  fratricide  involontaire.  Les  Ases  veulent  punir  le  mé- 
chant Loki  ;  mais  il  leur  échappe  sous  la  forme  d'un 
iaumon.  Eux-mêmes  d'ailleurs  doivent  bîenttU  périr.  Le 
poôme  intitulé  Voluspa,  dans  l'ancienne  EtUla,  décrit 
les  signes  précurseurs  de  la  fin  de  ce  monde  :  «  L'arbre 
du  monde  craque  et  se  fend  d'horreur;  le  loup  Fenris 
rompt  ses  chaînes  et  dévore  le  soleil;  la  flamme  détruit 
le  monde...  »  Mais  tout  atissitôt  une  nouvelle  création 
commence  :  «  Une  terre  admirablement  verte  sort  du 
sein  des  fiots.  Les  cascades  se  précipitent.  L'aigle  guette 
le  poisson  du  haut  des  rochers.  Les  champs  jiroduisent 
sans  être  ensemencés.  Tout  malheur  est  détruit.  Balder 
est  de  retour...  » 

Tel  est  le  résumé  de  la  cosmogonie  et  de  la  mv'thologie 
Scandinaves,  telles  que  les  montrent  les  deux  Éddas,  Ce 
sont  bien  les  dogmes  d'un  peuple  qui  croit  à  la  guerre , 
à  la  force,  à  l'énergie  de  la  personnalité  humaine.  On  y 
retrouve  quelques-unes  des  opinions  et  des  espérances 
qui  sont  communes  à  toute  l'humanité  :  celle  d'une  des- 
truction universelle  par  la  victoire  du  mal,  mais  celle 
aussi  d'une  autre  vie,  pendant  la(juclle  le  hien  triouiplicra 
à  son  tour;  double  témoignage  d'un  sentiment  profond 
de  l'imperfection  des  choses  créées  et  d'une  noble  con- 
fiance dans  la  victoire  définitive  de  l'éternelle  justice. 

Nous  nous  sommes  appliqué  à  exposer  ici,  d'après  les 
monuments  écrits,  la  doctrine  mythologique  du  paga- 
nisme Scandinave.  On  sait  combien  c'est  un  travail  aven- 
tureux que  de  chercher  à  interpréter  de  tels  systèmes, 
qui  le  plus  souvent  se  sont  formés  sous  mille  impres- 
sions diverses  et  à  travers  des  époques  fort  différentes. 
Nous  nous  contenterons  d'indiquer  ici  les  livres  où  de 
telles  interprétations  ont  été  sérieusement  tentées.  Nous 
avons  en  français  les  travaux  de  M.  Bergman,  de  Stras- 
bourg; ce  sont  des  traductions  des  Edilas,  accompajiuées 
de  commentaires  perpétuels,  fort  savants,  quelquefois 
obscurs.  On  a  surtout  en  danois  Finn  Magnussen,  la 
Doctrine  de  VEdda  {Edda  laeren),  4  vol.  in-12,  1824-26; 
du  même  :  Priscœ  velerum  Ùorealium  Mythologiœ 
Lexicon,  Havniîe,  i8t>8,  in-4°;  du  même,  une  traduction, 
avec  savants  commentaires,  do  l'ancienne  Edda,  ,Eldre 
Edda,  4  vol.  in-12,  1821-23;  Grundtvig,  Mythologie  du 
Nord,  Copenhague,  1832,  in-8°  ;  N.-M.  Petersen,  His- 
toire  du  Danemark  pendant  le  paganisme ,  3  vol.  in-i2, 
i^'  vol.,  1834.  K.  aussi  Sulir,  Des  croyances,  des  con- 
naissances  et  de  la  poésie  des  anciens  Scandinaves,  Co- 
penhague, 1815;  Nierup,  Lexique  des  mytiies  Scandi- 
naves, ibid.,  1816;  Mone^  Histoire  du  paganisme  dans 
l'Europe  du  Nord,  Heidelbere,  1822-23,  2  vol.  in-8°; 
Berger,  Mythologie  du  Nord,  2«  édit.,  1824.         A.  G. 

SCANDINAVES  (Langues),  nom  donné  aux  langues 
parlées  dans  la  presqu'île  Scandinave  et  dans  les  pays  et 
les  Iles  qui  en  dépendent,  c.-à-d.  au  danois ,  au  norvé- 
gien, au  suédois,  et  à  Vislandais  {V,  ces  mots)^  langues 
formant  une  des  trois  grandes  branches  détachées  du 
tronc  germanique  sous  le  nom  de  Norraana  (  langue  du 
Nord). 

SCANDINAVISME,  mot  créé  de  nos  jours  pour  dési- 
gner la  tendance  des  esprits  en  Danemark  et  en  Suède 
à  reconstituer  l'ancienne  union  politique  des  États  scan* 
dinaves. 

SCANSOAIUM.  F.  ACROBATIGON, 


SCE 


1620 


SCE 


SCAPHISME  (du  grec  skaphè,  auge),  geure  de  supplice 
en  usage  chez  les  anciens  Perses.  Le  patient  était  placé 
sur  le  dos  dans  une  auge  échancrée.,  de  manière  que  la 
tête  et  les  mains  passassent  en  dehors;  une  autre  auge 
de  même  forme  recouvrait  la  première,  avec  laquelle  elle 
était  clouée.  Dans  cet  état,  le  patient  était  abandonné  aux 
tortures  produites  par  la  chaleur  et  par  la  piqûre  des  in- 
sectes. 

SCAPIN.  /  V,  notre  Dictionnaire  de  Biographie 

SCAPDLAIRE.  \      et  d'Histoire, 

SCARABÉE,  insecte  dont  les  Égyptiens  sculptaient 
l'image  au  bas  des  statues  des  héros,  pour  exprimer  la 
vertu  mâle  et  guerrière,  exempte  de  faiblesses.  Cela  vient 
de  ce  qu'ils  croyaient  tous  les  scarabées  m&les.  Le  sca- 
rabée était  aussi  pour  eux  le  symbole  de  Timmortalité  et 
IMmagedu  soleil.  Dans  la  Glyptique,  on  appelle  scarabées 
les  pierres  qui  ont  la  forme  de  cet  insecte  posé  sur  une 
base  aplatie;  elles  sont  tout  à  la  fois  intailles  et  camées. 
On  en  a  de  TÉgypte  et  de  TÉtrurie. 

SCA BAGUA YTA,  nom  latin  de  Téchauguette  (K.  ce 
mot), 

SCARAMOOCHE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d' Histoire, 

SCAZON  (Vers).  V,  Choliambb. 

SCICAU ,  pièce  de  métal  qui  a  une  face  plate  où  sont 
gravés  en  creux  certains  signes,  et  qu'on  applique  sur  de 
la  cire  ou  toute  autre  matière  molle  :  les  empreintes  dé- 
tachées qu*on  a  ainsi  obtenues  s'attachent,  par  un  cordon 
ou  autrement,  aux  lettres  ou  actes  auxquels  on  veut 
donner  de  Tauthenticité.  Les  empreintes  elles-mêmes  se 
nomment  sceaux,  La  Sigillographie  ou  Sphragistique 
(du  grec  sphragis,  cachet,  sceau)  est  intimement  liée 
h  la  science  de  la  Diplomatique;  elle  sert  encore  à  con> 
naître  les  armoiries  des  anciennes  familles,  et  fournit  des 
lumières  sur  les  mœurs  et  les  costumes.  Pour  trouver 
l'origine  du  sceau  dans  les  actes,  il  faut  remonter  aux 
temps  les  plus  reculés  :  on  voit  dans  la  Bible  qu'Achab, 
roi  de  Jérusalem,  avait  un  anneau  dont  Jézabel  se  per- 
mit de  sceller  un  ordre  qu'elle  écrivit  faussement  au  nom 
de  ce  prince.  De  l'Orient  cet  usage  passa  chez  les  Grecs, 
et  des  Grecs  chez  les  Romains ,  dont  la  littérature  men- 
tionne fréquemment  les  anneaux  à  sceller,  annuli  signa- 
torii,  annuli  sigillarii  {V.  Anneau).  Les  peuples  qui 
s'emparèrent  de  l'Empire  Tadoptèrent ,  et  pendant  très- 
longtemps  la  pratique  en  fut  générale,  bien  qu'elle  n'ait 
pas  toujours  eu  la  même  importance.  A  une  époque  fort 
ancienne,  on  signait  et  scellait  en  même  temps  :  au 
vu*  siècle  encore,  nous  voyons  S'  Bertrand,  évêque  du 
Mans,  faire  mettre  à  son  testament  les  signatures  et  les 
sceaux  de  sept  personnes  illustres.  Mais,  du  viii*  à  la  fin 
du  xii*,  dans  une  multitude  de  chartes,  le  sceau  ne  parait 
plus;  on  se  contente,  pour  toute  marque  d'authenticité, 
d'indiquer  les  témoins  aux  dernières  lignes  de  la  charte, 
ou  de  faire  tracer  par  les  parties  intéressées  une  croix 
devant  leurs  noms  au  bas  de  la  pièce.  Même  au  xiv«  siècle, 
il  y  avait  des  pays  où  l'on  ajoutait  foi  à  des  actes  non 
scellés  :  à  Toulouse,  les  actes  des  consuls  n'ont  pas  été 
scellés  jusqu'à  l'ordonnance  relative  à  la  création  des  no- 
taires; il  est  vrai  qu'à  cette  époque,  c'était  là  un  fait  ex- 
ceptionnel. Au  xui"  siècle,  le  sceau  est  employé  d'une  ma- 
nière à  peu  près  constante,  tant  dans  les  contrats  passés 
devant  les  baillis,  les  sénéchaux  et  les  prévOts,  que  dans 
ceux  que  les  parties  rédigeaient  elles-mêmes  ou  faisaient 
rédiger  par  des  clercs  sans  intervention  d'un  officier  pu- 
blic; et  li  était  regardé  comme  suffisant  pour  rendre  les 
actes  authentiques,  à  défaut  de  la  signature,  qui  ne  pou- 
vait être  exigée  dans  un  temps  où  si  peu  de  personnes 
étaient  initiées  à  l'art  de  l'écriture.  Il  y  eut  plus;  le  sceau 
tint  souvent  lieu  de  témoin,  comme  le  prouve  cette  for- 
mule :  Teste  sigillo.  L'usage  de  sceller  les  actes  sans  les 
signer  persévéra  pendant  le  xiv*'  siècle  en  Angleterre,  en 
Ecosse  et  en  Irlande,  et  jusqu'au  xvi*  en  Suisse  et  en 
Allemagne  :  il  en  fut  autrement  en  France;  la  signature 
était  commune  dès  les  premières  années  du  xiv*  siècle , 
et,  au  siècle  suivant,  on  commençait  à  signer  les  actes 
sans  les  sceller. 

L'importance  attribuée  aux  sceaux  explique  les  pré- 
cautions prises  pour  prévenir  leur  contrefaçon  et  l'emploi 
frauduleux  des  sceaux  véritables.  On  peut  citer  pour  leur 
bizarrerie  certaines  pratiques,  au  fond  assez  insigni- 
ilantea,  comme  d'insérer  dans  la  cire  des  cheveux ,  des 
poils  de  la  barbe ,  d'y  imprimer  la  marque  de  ses  dents 
ou  de  ses  doigts.  Le  contre-sceau  (  V,  ce  mot)  était  une 
précaution  mieux  imaginée  et  plus  efficace  :  comment, 
sans  briser  ou  du  moins  altérer  une  seconde  empreinte, 
détacher  le  sceau  de  l'acte  authentique  auquel  il  était 


appendu,  pour  l'appliquer  à  un  acte  supposé?  On  dé- 
truisait aussi  le  sceau  lors  du  décès  de  l'individu  auquel 
il  appartenait  :  cet  usage  s'observait  aux  funérailles  d& 
papes,  pour  le  sceau  et  pour  Vanneau  du  pécheur.  Par- 
fois, au  lieu  de  détruire  le  sceau,  on  le  plaçait  dans  le 
tombeau  du  défunt;  il  y  a  deux  exemples  célèbres  de 
cette  antique  coutume  :  ce  sont  les  40  anneaux  trouvés 
dans  le  tombeau  de  Marie,  épouse  de  l'empereur  Hono- 
rius,  quand  on  jeta  les  fondements  de  la  chapelle  de 
S*-Picrre  au  Vatican,  en  Î54i,  et  le  cachet  de  Cbildéric  1", 
découvert  à  Tournai  dans  son  tombeau  eu  1C03. 

L'anneau  fut  la  première  forme  du  sceau.  Le  mot  an- 
nuius,  qui  servait  à  le  désigner,  tomba  en  désuétude  au 
XII*  siècle.  Jusqu'au  vi",  il  avait  eu  pour  synonyme  le 
mot  signum ,  qui ,  passé  cette  époque ,  change  dé  sens, 
et  s'applique  d'ordinaire  aux  croix  et  aux  monogrammes 
destinés  à  remplacer  les  signatures.  Bulla  (du  grec 
bouUa),  qui  est  surtout  employé  pour  indiquer  les  em- 
preintes sur  métal ,  s'est  entendu,  pendant  un  temps,  de 
toute  sorte  de  sceaux  :  aussi  voyons-uous,  dans  le  pays 
messin,  le  sceau  public  appelé  Burlete  ou  Bullette,  Dans 
d'anciens  textes  français,  les  sceaux  sont  souvent  désignés 
par  le  terme  de  coins^  qu'on  trouve  employé  notamment 
dans  les  Coutumes  du  Ùeauvoisis  de  Beauinanoir  et  d:ins 
les  Assises  de  Jérusalem,  Mais,  quelque  vogue  qu'aient 
eue  ces  divers  noms,  le  mot  sigillum  (on  français  sael , 
seel,  et  postérieurement  et  par  corruption  scel,  sceau ], 
a  été  le  plus  fréquemment  et  le  plus  généralement  em- 
ployé. 11  était  connu  de  la  plus  haute  antiquité,  et  dési- 
gnait proprement  l'empreinte  du  sceau  :  plus  tard,  à 
partir  du  ix*  siècle,  il  désigna  le  type  ou  le  moule  du 
sceau,  tout  en  conservant  sa  première  signification. 

On  distinguiit  le  gros  sceau,  le  sceau  public,  le  grand 
sceau,  du  petit  sceau,  du  sceau  secret  ou  du  secret,  du 
signet  ou  contre-scel.  Le  sceau  commun  paraît  n'Otre 
autre  que  celui  qu'on  appelait  en  France  sceau  ordonné 
en  l*absence  du  grand,  La  qualification  d*authentique , 
attribuée  plus  particulièrement  au  grand  sceau,  n^em- 
pêche  pas  que  les  petits  sceaux  n'aient  participé  à  l'au- 
thenticité des  grands.  Il  n'en  faut  pour  preuve  qu'une 
foule  d'ordonnances  de  nos  rois,  qui  font  foi  comme  les 
autres,  tout  en  n'étant  scellées  que  du  sceau  secret.  L'or- 
donnance de  Compicgne  en  1358,  conformément  aux  ré- 
clamations des  États  généraux,  régla  que  les  lettres  pa- 
tentes ne  seraient  plus,  à  peine  de  nullité,  scellées  du 
sceau  secret ,  hormis  en  cas  de  nécessité  ou  quand  il 
s'agirait  du  gouvernement  de  l'hôtel  du  roi.  On  a  cepen- 
dant des  patentes  du  18  mai  1370  signées  du  signet  et  du 
scel  secret ,  pour  lesquelles  le  roi  réclame  la  même  con- 
sidération que  si  elles  étaient  signées  de  a  son  grant  scel, 
lequel  est  absent.  » 

On  remarque  entre  les  sceaux  une  grande  variété,  soit 
qu'on  les  considère  par  rapport  à  la  matière,  ou  par  rap- 
port à  la  forme,  ou  à  la  couleur,  ou  à  la  manière  dont  ils 
sont  attachés  aux  actes.  —  Matière  des  sceaux  :  —  Les 
auteurs  de  la  Nouvelle  Diplomatique  rapportent  à  Char- 
lemagne  l'institution  des  sceaux  d'or.  Parmi  les  empe- 
reurs de  Constantinople,  Théophile  est  le  premier  qui  les 
ait  employés;  ce  fait  bien  constaté  doit  faire  écarter  l'idée 
que  les  rois  d'Occident  ont  emprunté  cette  magnificence 
à  la  chancellerie  du  Bas-Empire.  Il  est  vrai  que  les  suc- 
cesseurs de  Théophile  ont  affecté  plus  que  les  autres 
princes  de  se  distinguer  par  les  sceaux  d'or,  dout  ils 
usaient  généralement  dans  les  lettres  qu'ils  adressaient 
aux  plus  hauts  personnages,  aux  rois  et  aux  sultans.  On 
connaît  des  sceaux  d'or  des  rois  d'Angleterre,  d'Espagne, 
de  Hongrie  et  de  Bulgarie,  des  empereurs  d'Allemagne, 
des  rois  de  France  et  des  papes.  Le  diplôme  où  Clé- 
ment VII  donne  à  Henri  Vlll,  roi  d'Angletcn-e,  le  titre  de 
défenseur  de  la  foi,  fut  scellé  d'une  bulle  d'or.  Au 
xvi*  siècle,  c'était  l'usage  dans  la  république  de  Venise 
d'attacher  un  sceau  d'or  aux  chartes  qui  conféi'aient  la 
dignité  de  chevalier.  —  Les  sceaux  d'argent,  de  bronie 
et  d'étain  ont  été  très-rarement  employés.  Le  plomb ,  aa 
contraire,  l'a  été  très-fréquemment  et  dans  tous  les  pays. 
Ficoroni  a  publié  un  certain  nombre  de  sceaux  en  plomb 
des  emp(jreurs  chrétiens  d'Orient  et  d'Oocident  Depuis 
Deusdedit,  les  souverains  pontifes  n'ont  pas^  jessé  de 
sceller  en  plomb.  En  Languedoc,  les  plus  anciens  sceaax 
pendants  furent  en  cette  matière,  et  l'usage  en  fut  plus 
général  et  plus  persistant  que  dans  les  autres  contrées  ée 
la  France.  Les  substances  molles  ont  été  employées  pour 
servi/  d'empreintes  aux  sceaux  concurremment  avec  les 
matryes  métalliques,  comme  la  creta,  terre  de  nature  ar- 
gileuse, d'un  usage  général  du  temps  de  Cicéron,  le 
plâtre  (gypsum),  la  glaise  {lutum)^  la  maltha,  composée 


,\ 


SCE 


1621 


SCE 


de  poix,  de  cire,  de  pl&tre  et  de  graine,  et  enfin  la  cire 
divci-sement  mélangée,  qui  fut  préférée  aux  autres  ma- 
tières. La  manière  dont  elle  est  préparée  n'est  pas  indif- 
férente pour  distinguer  les  époques  :  ainsi,  on  ne  sau- 
rait confondre  les  empreintes  d'un  ton  blanch&tre  et 
terne  de  certains  sceaux  carlovingiens  avec  la  cire  blonde 
et  claire  des  xii*  et  xni*  siècles  ;  les  sceaux  fermes  et  ré- 
sistants des  rois  de  France  des  xiii"  et  xiv*  siècles  avec 
ceux  de  leurs  successeurs,  surtout  à  partir  de  la  fin  du 
XV*  siècle  ;  ces  derniers  sont  en  cire  molle  et  ductile,  et 
présentent  des  inscriptions  et  des  reliefs  peu  distincts. 
Auuint  la  matière  des  sceaux  des  anciens  temps  est  sèche 
et  dure,  autant  celle  des  sceaux  des  derniers  siècles  est 
onctueuse.  —  Au  xvi«  siècle  on  rencontre  très-fréquem- 
ment des  sceaux  recouverts  d*un  papier  faisant  corps 
avec  la  cire  et  reproduisant  ^empreinte  du  type.  Le  pre- 
mier sceau  de  ce  genre  que  Ton  connaisse  est  suspendu 
à  un  acte  de  1385;  il  a  été  signalé  par  M.  Natalis  de 
Wailly.  —  La  cire  à  cacheter  connue  sous  le  nom  de  cir€ 
d'Espagne  a  été  inventée  ou  plutôt  introduite  en  France 
sous  Louis  XIII,  par  un  marchand  de  Paris  nommé 
Rousseau ,  qui  en  avait  apporté  le  secret  des  Indes 
Orientales. 

Forme  dês  sceaux,  —  Ni  chez  les  Anciens  ni  chez  les 
Modernes,  les  sceaux  ne  nous  apparaissent  avec  une 
forme  constante.  La  forme  carrée  est  celle  d'une  bulle  de 
plomb  de  l'empereur  Trajan.  C'est  aussi  celle  de  deux 
bulles,  du  même  métal,  portant  les  noms  des  papes 
Serge  et  Etienne,  et  que  l'on  rapporte  au  viii*'  siècle.  La 
simplicité  de  la  forme  ronde  ou  orbiculaire  dut  lui  faire 
donuer  la  préférence.  On  la  remarque  aux  médailles  et 
aux  sceaux  dont  sont  revêtus  les  actes  les  plus  anciens. 
On  a  découvert  un  grand  nombre  de  bulles  de  plomb, 
orbiculaires,  des  empereurs  paiens;  tels  sont  le  sceau 
d'Antonin,  et  celui  sur  lequel  on  voit  réunis  les  bustes 
de  Marc-Aurèle  et  de  Lucius  Vérus.  Les  papes,  les  rois 
de  France  de  la  i*^  race  à  Texception  de  Childéric  I'*'  et 
de  Childéric  III ,  les  rois  Carlovingiens ,  ceux-ci  seule- 
ment pour  leurs  bulles  d'or  et  de  plomb,  tous  les  rois 
Capétiens,  moins  toutefois  le  roi  Robert,  ont  donné  la 
préférence  à  la  forme  ronde.  La  forme  ovale  fut  adoptée 
par  les  deux  princes  Mérovingiens  dont  nous  venons  de 
citer  les  noms,  et  parles  Carlovingiens  pour  leurs  sceaux 
de  cire.  Au  xji*  siècle,  les  sceaux  oblongs,  ufTcctant  le 
plus  généralement  la  forme  ogivale,  sont  extrêmement 
nombreux.  Ils  étaient  surtout  employés  par  les  évêques, 
les  abbés,  les  abbesses,  les  monastères,  les  chapitres,  les 
ofiicialités,  et  par  les  dames.  Les  Bénédictins  ne  faisaient 
remonter  l'origine  des  sceaux  en  ogive  qu'au  xii"  siècle  ; 
M.  N.  do  Wailly  a  cité  comme  présentant  cette  forme  un 
sceau  du  roi  Robert ,  et  un  autre  d'un  évêque  de  Beau- 
vais  de  1090.  Mais  il  ne  faut  voir  là  que  des  faits  excep- 
tionnels ;  il  demeure  constant  que  l'ogive  n'est  pas  or- 
dinaire dans  les  sceaux  avant  le  xii*  siècle.  Rarement 
employée  au  xv*',  la  forme  ogivale  disparaît  au  xvi*.  — 
Sur  les  sceaux,  l'inscription  n'occupe  pas  toujours  le 
môme  plan  que  la  figure,  soit  qu'elle  soit  plus  basse,  soit 
qu'elle  soit  plus  élevée.  Dans  la  seconde  moitié  du 
xiii'  siècle,  on  commence  à  rencontrer  des  sceaux  appli- 
qués dans  une  espèce  de  moule  fait  avec  une  cire  difl'é- 
rente  de  celle  où  a  été  frappée  l'empreinte.  Ils  sont  nom- 
breux au  siècle  suivant.  Aux  xv*  et  xvi*  siècles,  les 
moules  de  cire  sont  souvent  remplacés  par  des  boites  de 
bois,  de  cuivre  ou  de  fer-blanc. 

Couleur  des  sceaux,  —  Depuis  les  premiers  temps  de 
la  monarchie  française  Jusqu'à  la  fin  du  xi*  siècle,  le 
sceau  royal  a  été  appliqué  sur  une  cire  de  nuance  blan- 
rhàtre.  Sous  la  3*  race,  l'usage  de  la  cire  blanche  était 
encore  assez  ordinaire.  Les  rois  d'Angleterre  jusqu'à 
Charles  T'  ont  presque  toujours  donné  la  préférence  à 
la  couleur  blanche.  —  Le  jaune  étant  la  couleur  natu- 
relle de  la  cire,  il  semblait  raisonnable  d'en  faire  re- 
monter l'usage  à  la  plus  haute  antiquité  ;  et  telle  a  été, 
en  effet,  l'opinion  de  certains  diplomatistes.  Mais  Ma- 
billon  établit  que  l'emploi  de  cette  couleur  n*est  point 
antérieur  au  xii*  siècle.  M.  de  Wailly  reconnaît  que  les 
diplômes,  au  xt*  siècle,  étaient  habituellement  scellés 
en  cire  blanche  ;  il  pense  toutefois  qu'il  serait  plus  pru- 
dent de  ne  pas  nier  d'une  manière  trop  absolue  l'usage 
de  la  cire  jaune  à  celte  époque,  parce  qu'on  ignore  jus- 
qu'à quel  point  l'action  du  temps  peut  influer  sur  la  co- 
loration de  la  cire.  —  La  cire  rouge  fut  employée  assez 
fréquemment  sous  nos  rois  Mérovingiens.  Adoptée  sous 
la  3*  rare  dès  Louis  VII  îc  Jeune,  elle  ne  fut  potirtant  d'un 
usage  commun  que  postérieurement  à  la  K*  moitié  du 
lui*  siècle,  et  encore  faut-il  noter  que  le  grand  sceau  de 


France  ne  présente  jamais  cette  coloration  après  le  règM 
de  Louis  VIL  On  voit  la  cire  rouge  à  la  plupart  des  sceaux 
plaqués  des  xiv*  et  xv*  siècles,  et  à  ceux  imprimés  avec 
Vanneau  du  pécheur  sur  les  brefs  des  papes  à  partir  de 
Nicolas  V.  —  L'usage  de  la  cire  verte  ne  remonte  pas  en 
France  au  delà  du  xu*  siècle;  on  pense  que  Philippe-Au- 
guste est  le  premier  qui  s'en  soit  servi.  A  la  chancellerie 
royale,  dès  le  règne  du  roi  Jean,  la  cire  verte  était  ré- 
servée aux  ordonnances,  aux  édits,  et,  en  générai ,  ai'x 
lettres  qui  devaient  durer  à  perpétuité,  tandis  que  la  cire 
jaune  servait  pour  les  lettres  royales  et  les  expédittona 
les  plus  ordinaires. 

Différentes  manières  dont  les  sceaux  sont  attachés  aux 
pièces.  —  Les  sceaux  sont  distingués  en  plaqués  et  pen» 
dqnts  :  les  premiers,  sigilla  membranœ  af^a,  innexa 
dtplomati,  chartœ  agglutinata;  les  seconds,  sigilla  pen^ 
dentia  ou  pentilia.  Les  bulles  métalliques  ont  toujours 
été  pendantes;  les  sceaux  en  substances  molles  ont  jté 
tantôt  plaqués  sur  le  papyrus  ou  le  parchemin,  tantôt 
suspendus  à  l'aide  d'attaches  de  difi'érentes  natures.  Les 
sceaux  en  cire  des  rois  de  France  jusqu'au  xi*  siècle  « 
ceux  des  empereurs  d'Allemagne  jusqu'à  Frédéric  I«',  des 
comtes  de  Flandre  jusqu'à  Baudouin  la  Hache,  ont  été 
plaqués  sur  les  diplômes.  Les  chartes  des  évêques  et  des 
abbés  offrent  des  sceaux  en  placard  jusqu'au  déclin  du 
xu*  siècle.  Abandonnés  à  cette  époque,  ces  sceaux  revin- 
rent en  faveur  au  xiv*  siècle;  on  en  rencontre  de  fré- 
quents exemples  dans  les  ordonnances  et  les  mandements 
des  gens  des  comptes.  —  La  place  des  sceaux  plaqués 
sur  les  diplômes  a  varié  :  sous  les  rois  Mérovingiens,  ils 
sont  un  peu  au-dessus  des  derniers  mots  de  la  date;  sous 
les  Carlovingiens,  ils  sont  après  ou  sur  les  traits  des  pa- 
raphes qui  suivent  le  nom  du  chancelier.  —  L'application 
du  sceau  s'opérait  au  moyen  d'une  incision  dans  le  bas 
du  diplôme:  pressée  par  le  type,  la  cire  débordait  de 
Tautre  côté,  et  se  trouvait  ainsi  fixée  d'une  manière  assez 
solide  pour  qu'un  certain  nombre  de  sceaux  carlovingiens 
soient  arrivés  jusqu'à  nous.  —  D^iprès  Mabillon ,  Louis 
le  Gros  est  le  premier  de  nos  rois  qui  ait  fait  usage  de 
sceaux  pendants  ;  mais  depuis  longtemps  déjà  les  évêques 
et  les  grands  du  royaume  s'en  servaient.  —  On  s'est 
servi ,  pour  suspendre  les  sceaux ,  de  lemnisques  ou 
attaches  de  parchemin,  de  soie,  de  fil,  de  ruban,  de  cuir, 
de  Iriine,  de  cordes  ou  de  cordelettes.  A  la  chancellerie 
des  rois  de  France,  on  employait  les  lacs  de  parchemin 
pour  les  actes  de  moindre  importance ,  et  l'on  réservait 
les  lacs  de  soie  rouge  et  verte  pour  les  diplômes  solen- 
nels. De  même,  à  la  chancellerie  romaine,  la  matière  et 
la  couleur  des  lacs  était  et  est  encore  déterminée  par  la 
nature  des  diplômes.  —  Vers  le  milieu  du  xiii*  siècle*  on 
commença  à  sceller  les  chartes  sur  des  parcelles  mêmes 
de  la  pièce  qu'on  avait  eu  soin  de  découper  :  c'est  ce 
qu'on  appelait  sceller  sur  simple  queue,  M.  de  Wailly  cite 
un  exemple  de  ce  genre  d'application  du  sceau,  de  l'aa 
1215.  Attacher  les  sceaux  aux  actes  avec  une  lanière  dis- 
tincte, une  courroie,  ou  une  cordelette  de  fil,  de  laine  ou 
de  soie,  qui  passait  dans  une  double  fente  du  parchemin 
et  dont  les  extrémités  venaient  ensuite  traverser  le  sceau, 
c'était  sceller  sur  double  queue,  —  Parfois  on  rencontre 
des  inscriptions  écrites  à  la  main  sur  les  lemnisques  de 
parchemin  qui  servent  d'attaches  ;  elles  sont,  en  général, 
sans  importance. 

Des  inscriptions,  des  ornements,  symboles,  etc,  des 
sceaux.  —  Dans  l'ancienne  monarchie  française,  le  grand 
sceau  représentait  le  roi  dans  ses  habits  royaux  et  assis 
sur  son  trône;  sous  la  République,  le  sceau  de  l'Etat 
porta  d'un  côté  la  figure  de  la  Liberté  et  la  légende  Au 
nom  du  peuple  français,  de  l'autre  une  couronne  de 
chêne  et  d'olivier  enveloppant  les  mots  République  fran- 
çaise, une  et  indivisible,  avec  la  légende  Liberté,  Égor 
lité.  Fraternité;  sous  le  gouvernement  do  la  Restaura- 
tion ,  on  y  vit  un  écusson  à  trois  fleurs  de  lis  ;  sous 
Louis-Philippe,  il  représenta  un  livre  ouvert  portant  ces 
mots  :  Charte  de  1850,  et  entouré  de  drapeaux  trico- 
lores; sous  l'Empire,  il  porte  l'aigle,  surmontée  d^une 
couronne  fermée  et  entouré  du  grand  collier  de  la  Lé- 
gion d'honneur,  avec  le  sceptre  et  la  main  de  Justice  en 
sautoir. 

V,  Hœpingk,  De  jure  sigillorum,  Nuremberg,  1642, 
{n-4;  Saumaise,  De  subscribendis  et  subsignandis  testa* 
mentis  et  de  antiquorum  et  hodiemorum  sigiliorum  dif- 
ferenliâ,  Leyde,  1053,  in-8**;  Heineccius,  De  veterum 
Germanorum  aliarumque  nationum  sigillis,  Francfort, 
1709  et  1710;  Ficoroni,  /  piombi  antichi,  Rome,  17  iO; 
Manni,  /  sigilli  antichi  de'  secoli  bassi,  Florence,  1730, 
8  vol.  in-4<>;  Strick,  De  exceptione  deficientis  sioUlin 


/ 


SCË 


1622 


SCE 


Halle,  i702  ;  Leyser,  De  contrasigillis  medii  œvi ,  Helm- 
statit,  1720,  in-4°;  Beck,  De  resirjnatione ,  avulsione  et 
turbatione  sigUlorum,  Altorf,  1723;  Bœhtner,  De  jure 
et  auctontate  sigilli  autlientici.  Halle,  1742,  in-4°;  Thu- 
lemar.  De  buUa  aurea,  argentea,  plumlea  ac  cerea^ 
Hftidelberg,  1682,  in-4»,  et  Opuscula  de  bullis,  1097, 
in-fol.  ;  Muratori,  De  sigillis  medii  cevi,  dans  le  t.  III  de 
ses  Antiquitates  itaiicœ:  Ch.  Lenormant,  Trésor  de 
numismatique  et  de  glyptique;  Chassant  et  Delbarre, 
Dictionnaire  de  sigillographie,  în-12  ;  De  Wailly,  Notice 
sur  les  sceaux,  dans  V Annuaire  de  la  Société  de  l'his^ 
toire  de  France  pour  1840;  et  les  divers  Traités  de  Di- 
plomatique et  de  Paléographie.  C.  de  B. 

SCEAU  DBS  TITRES  (Conscil  du).  Conseil  créé  par  décret 
du  1*''  mars  1808  pour  connaître  des  titres  de  noblesse 
et  statuer  sur  les  constitutions  de  majorât.  11  se  compo- 
sait, sous  la  présidence  de  rarchi-chancelie r  de  l'Empire, 
de  trois  sénateurs,  de  deux  conseillers  d'État,  d'un  pro- 
cureur gt''nénil,  d'un  secrétaire  général  et  d'un  trésorier. 
Une  ordonnance  du  15  juillet  1814  le  remplaça  par  une 
Commission  du  sceau,  que  présidait  le  garde  des  sceaux, 
et  qui  fut  elle-même  supprimée  le  31  octobre  1830.  Un 
décret  du  8  janvier  18j9  a  rétabli  le  Conseil  du  sceau  des 
tii^G",  qui  se  coin  pcsa  de  trois  sénateurs,  deux  ooiiscillei  s 
d  filât,  deux  membres  de  la  (leur  de  cass.ilion,  trois 
maîtres  des  r^quAtes,  un  commissaire  ini[)érial  et  un 
Sfcrétaire  sous  la  présidence  du  ^arde  des  sceriux.  Le 
Conseil  donnait  son  avis  sur  les  demandes  en  collation, 
confirmation  et  reconnaissance  do  titres  sur  I»  s  de- 
mandes en  vérification  de  litres,  sur  le»  d^îmandes  en 
remise  tut.iie ou  |>artie|le(î<'sdr)its  de  sceau.  Des  Droits 
dejtceauhireni  fHîPçus  par  le  Trésor  ainsi  qu'il  suit:  pour 
les  dispenses  de  parenté  ou  d'alliance,  294  fr.;  pour  les 
dispenses  d'Age,  172  fr.  ;  pour  les  additions  et  change- 
ments de  noms,  050  fr.  ;  pour  les  autorisations  de  servir 
ou  de  se  faire  naturaliser  à  l'étranger,  (i60  fr.  ;  pour  les 
admissions  à  domicile,  les  naturalisations  et  les  réin- 
tégrations dans  la  qualité  de  Français,  172.  11  faut 
ajouter  un  droit  proportionnel  d'enregistrement  de  20 
pour  0/0.  B. 

SCtlAUX  fGarde  des).  V.  G\Rnc  des  sceaux,  dans  notre 
Diclumnaire  de.  Biographie  et  d'Histoire. 

SCKLLEMENT,  en  termes  de  Construction,  action  de 
sceller  ou  d'arrêter  l'extrémité  d'une  pièce  do  bois  ou  de 
métal  dans  un  mur,  avec  du  plomb,  du  soufre,  du  plâtre 
ou  du  mortier. 

SCELLÉS,  apposition  par  un  fonctionnaire  public  de 
bandes  de  papier  maintenues  par  l'empreinte  d'un  sceau 
qui  Lui  est  propre,  et  qui  a  pour  but  d'interdire  l'ouver- 
ture d'une  armoire,  d'un  meuble  ou  d'un  appartement. 
Cette  apposition  est  ordinairement  préalable  à  l'inven- 
taire (  V,  ce  mot)y  dont  elle  a  pour  but  de  garantir  la 
sincérité.  L'apposition  des  scellés  est  ordonnée  par  la  loi 
orsque  s'ouvre  une  succession,  si  parmi  les  héritiers  il 
s'en  trouve  de  mineurs,  d'interdits  ou  d'absents.  Dans 
ce  cas  l'apposition  a  lieu  d'office  par  le  juge  de  paix  du 
canton  do  l'ouverture  de  la  succession.  Elle  peut  être 
requise  par  les  créanciers ,  sous  certiiines  garanties. 
Elle  est  ordonnée  par  la  loi,  en  ras  de  faillite,  sur  tous  les 
papiers,  registres,  meubles  et  effets  du  failli  (V.  Code 
Napol.,  art.  8I0-S21  ;  Code  de  Procéd.,  art.  907  et  Ruiv.>. 
Il  y  a  encore  apposition  de  scellés,  (juand  un  individu 
disparaît  et  qu'il  n'y  a  personne  pour  veiller  à  la  conser- 
vation de  ses  effets  et  papiers.  Il  en  est  de  mAme  dans  le 
cas  de  demande  en  séparation  de  corps,  et  lors  d'une  de- 
mande en  interdiction  lorsqu'il  n'y  a  personne  près  du 
défendeur  pour  veiller  à  la  conservation  de  ce  qui  lui 
appartient.  V,  Jay,  Traité  des  scellés,  2*  édit.,  185i-, 
in-8**.  —  Le  bris  des  scellés  est  puni ^  suivant  la  gravité 
des  cas,  de  la  réclusion  ou  des  travaux  forcés  [Code  pé- 
nal, articles  249-256).  R.  d'E. 

SCÈNE,  partie  d'un  théâtre  sur  laquelle  les  acteurs 
Joucîit  devant  le  public  les  ouvrages  dramatiques.  Le  mot 
n'avait  pas  le  mAme  sens  chez  les  Anciens  {V,  Scène, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire).  — 
Par  extension,  le  mot  .Scène  désigne  la  décoration  du 
théâtre,  l'artion  elle-même,  et  enfin  le  lieu  où  un  acteur 
suppose  que  l'action  qu'il  raconte  s'est  passée. 

scKNF,  division  d'un-  acte  d'ouvrage  dramatique,  où 
l'entretien  des  acteurs  n'est  interrompu  ni  par  l'arrivée 
d'un  nouvel  acteur,  ni  par  la  sortie  d'un  de  ceux  qui  sont 
sur  le  théâtre. 

SCÈNE  (Avant-).  V.  Avant-Scknk. 

SCKNE  (Mise  en).  V.  Mise  en  scène. 

SCÉNOGHAPHIE  (du  grue  sUènè.  sc^ne,  et  graphéin, 
décrire),  représentation  d'un  corps  en  perspective  sur  un 


plan,  e.-à-d.  dans  toutes  ses  dimensions,  tel  qn'il  parait 
à  l'œil. 

SCÊPHROS,  nom  d'un  chant  lugubre  chez  les  ancieni 
Grecs,  analogue  au  Linos  {V.  ce  mot), 

SCEPTICISME.  Ce  mot,  dérivé  du  grec  («teptomai , 
j'examine;,  ne  donne  pas  une  idée  bien  exacte  de  la  na- 
ture et  des  caractères  généraux  du  système  qu'il  désigne. 
Rien,  en  effet,  n'est  plus  véritablement  philosophique  que 
l'esprit  d'examen  ;  rien  ne  l'est  moins  que  le  scepticisme 
avec  sa  prétention  de  ne  tenir  quoi  que  ce  soit  pour  as- 
suré, avec  le  doute  et  l'incertitude  perpétuelle  à  laquelle 
il  veut  condamner  l'esprit  humain.  Le  doute  est  excellent; 
mais  dans  quelle  mesure  ?  Descartes  nous  le  dit  :  «  Fai- 
sant réCcxion  en  chaque  matière  sur  ce  qui  pouvait  la 
rendre  suspecte  et  nous  donner  occasion  de  nous  mé- 
prendre, je  déracinais  de  mon  esprit  toutes  les  erreurs 
qui  s'y  citaient  pu  glisser  auparavant.  Non  que  j'imi- 
tasse pour  cela  les  sceptiques,  qui  ne  doutent  que  pour 
douter,  et  affectent  d'être  toujours  irrésolus;  car  au  coii- 
traire  mon  dessein  ne  tendait  qu'à  m'assurer,  et  à  rejeter 
la  terre  mouvante  et  le  sable  pour  trouver  le  roc  ou  l'ar- 
gile. »  {Discours  de  la  Méthode,  3*  partie.)  Ainsi  le  phi- 
losophe doute  et  suspend  son  jugement  jusqu'à  ce  que, 
à  l'aide  d'une  méthode  sévère,  il  ait  trouvé  la  vérité.  I^ 
sceptique  ne  veut  pas  que  la  vérité  soit  accessible  à 
l'homme,  soit  parce  que  ses  facultés  sont  essentiellement 
trompeuses,  soit  parce  qu'il  n'y  a  rien  de  vrai  en  soi;  et 
de  ces  principes  désespérants  il  conclut,  autant  que  le 
scepticisme  permet  de  conclure,  que  nous  ne  pouvons  rien 
croire  ni  rien  affirmer.  Pour  l'un,  le  doute  est  le  com- 
mencement de  la  science;  pour  l'autre,  il  en  est  le  der- 
nier mot  et  le  tout.  Il  est  curieux  de  voir  comment  Hod« 
taigne  exprime  cette  fantaisie  :  «  L'ignorance  qui  sesçait, 
qui  se  juge  et  qui  se  condamne,  dit-il,  ce  n'est  pas  une 
entière  ignorance;  pour  l'estre  il  fault  qu'elle  s'ignore 
soy-mesme  :  de  façon  que  la  profession  des  Pyrrhomens 
est  de  bransler,  doubter  et  s'enquérir,  ne  s'asseurer  de 
rien,  de  rien  ne  se  respondre...  En  tout  ils  cherrheut 
qu'on  les  contredie  pour  engendrer  la  dubitation  et  sur- 
séance du  jugement  qui  leur  est  fin.  Ils  ne  mettent  en 
avant  leurs  propositions  que  pour  combattre  celles  qu'ils 
pensent  que  nous  ayons  en  notre  créance...  Leurs  façons 
de  parler  sont  :  je  n'cstablis  rien;  il  n'est  rien  plus 
ainsin  qu'ainsin  ou  que  ny  l'un  ny  l'autre;  je  ne  le  com- 
prends point;  les  apparences  sont  égales  partout;  la  loy 
de  parler  et  pour  et  contre  est  pareille;  rien  no  semble 
vray  qui  ne  puisse  sembler  fauls...  Leur  efTect,  c'est  u:  e 
pure,  entière  et  très-parfaicte  surséance  et  suspension  do. 
jugement;  ils  se  servent  de  leur  raison  pour  enquérir  et 
pour  desl  attre,  mais  non  pas  pour  arrester  et  choisir.  ■ 
[Essais,  II,  12.) 

Quelles  sont  donc  les  raisons  ou  plutôt  les  prétextes 
sur  lesquels  s'appuie  le  scepticisme?  Nous  avons  déjà  dit 
que  tantôt  il  s'en  prend  à  la  nature  môme  des  choses, 
tantôt  à  celle  de  l'esprit  humain.  L'esprit  de  l'hommo, 
disait  le  sophiste  Protagoras,  est  la  mesure  de  touii^ 
choses,  c.-à-d.,  rien  n'est  absolument  vrai  ;  la  neige  est 
blanche  pour  qui  la  voit  blanche,  noire  pour  qui  la  voit 
noire.  En  réalité,  elle  est  blanche  et  noire  tout  à  la  fois 
ou  elle  n'est  ni  blanche  ni  noire,  ce  qui  revient  au  même, 
et  je  me  trompe  également,  quoi  aue  j'en  affirme  ou  que 
j'en  nie.  Voil«\  bien  la  confusion,  le  chaos,  rincenitudc, 
«  la  très  parfaicte  surséance  et  suspension  de  jugement  «. 
que  l'on  nous  vantait  tout  à  l'heure,  produite  par  le  fait 
même  des  choses.  Il  en  sera  de  même  si  l'on  considère 
rintclligcnce  du  biais  que  veulent  les  sophistes.  Les  uns 
se  bornent  à  en  signaler  avec  complaisance  toutes  les  mé- 
prises :  illusions  des  sens,  mirages  de  l'imagination  et  de 
la  mémoire,  écarts  du  jugement,  contradictions  du  rai- 
sonnement, fluctuations  et  revirements  de  l'opinion,  etc. 
Puis  ils  disent  :  comment  se  fier  à  un  instrument  tant 
de  fois  pris  en  défaut?  D'autres  (il  s'agit  ici  d'un  scepti- 
cisme de  date  as«;ez  récente)  vont  plus  avant,  et,  nôsli- 
geant  tous  ces  détails,  c'est  l'aptitude  générale  de  l'in- 
telligence à  connaître  la  vérité  qu'ils  mettent  en  doute. 
On  pourrait  résumer  ainsi  leur  argumentation  :  «  En 
admettant  qu'il  y  ait  une  vérité  absolue,  rien  ne  nous 
assure  que  ce  soit  celle  que  perçoit  l'intelligence  hu- 
maine. Rien  ne  nous  assure  que  l'intelligence  faite  autre- 
ment n'aurait  pas,  de  toutes  choses,  des  idées  tout  à  fait 
difTérentes;  et  qu'ainsi,  comme  certaines  personnes,  par 
suite  d'une  disposition  particulière  de  rorjiane  de  la  vi- 
sion, éprouvent  la  sensation  de  vert  là  où  d'autres  éprou- 
vent la  sensation  de  rouge,  toutes  nos  conceptions,  môme 
celles  qui  nous  semblent  les  plus  néressaii*es,  ne  seraient 
pas  entièrement  changées,  si  les  lois  et  la  constitution 


SCE 


1623 


SCH 


de  notre  entendement  étaient  tant  soft  peu  modifiées.  » 
Le  germe  de  ce  scepticisme  était  dans  Descartes.  «  Que 
ftais-j«},  dit-il,  si  Dieu  n*a  point  fait  qu'il  n'y  ait  aucune 
lerre,  aucun  ciel,  aucun  corps  étendu,  aucune  figure, 
lucune  grandeur,  aucun  lieu,  et  que  néanmoins  j'aie  les 
sentiments  de  toutes  ces  choses?  Quesais-jc  s'il  n'u  point 
fait  que  Je  me  trompe  aussi  toutes  les  fois  que  je  Tuis 
l'addition  de  deux  et  de  trois,  ou  que  je  nombre  les  côtés 
d'un  carré,  ou  que  Je  juge  de  quelque  chose  encore  plus 
facile,  si  l'on  se  peut  imaginer  rien  de  plus  facile  que 
cela?  n  Et  s'il  répugne  à  la  bonté  de  Dieu  que  je  sois 
déçu  de  la  sorte.  Je  puis  supposer  «  qu'un  certain  mau- 
vais génie,  non  moins  rusé  et  trompeur  que  puissant,  a 
employé  toute  son  industrie  à  me  tromper.  »  (!'«  Médi- 
tation.) Mais  ce  n'est,  pour  Descartes,  qu'une  supposition 
extrême.  Encore  une  fois,  il  ne  s'arrête  pas  au  doute;  il 
ne  fait  que  le  traverser  pour  arriver  à  des  connaissances 
plus  assurées.  C'est  Kant  et  l'École  allemande  qui,  sur 
ce  point,  ont  eu  l'étrange  hardiesse,  ou,  si  l'on  veut, 
l'étrange  timidité  de  ne  vouloir  pas  affirmer  la'  réalité 
objective  des  conceptions  de  la  raison,  et  de  ne  consi- 
dérer les  vérités  nécessaires  que  comme  des  formes  sub- 
jectives de  l'entendement  (^V.  Kantisme,  Forme,  Objec- 
tif). Nous  ne  pouvons  ici  ni  exposer  '  ni  discuter  ces 
théories.  Bornons-nous  à  dire  avec  JoufTroy,  quoique  avec 
moins  de  sympathie  pour  le  scepticisme,  que  la  question, 
en  Philosophie  et  dans  les  sciences  en  gainerai,  n'est  pas 
do  savoir  ce  que  serait  la  vérité  pour  l'intelligence  con- 
stituée autrement  qu'elle  n'est,  mais  de  savoir  ce  qu'est 
la  vérité  pour  l'intelligence  telle  qu'elle  est;  que  d'ail- 
leurs le  scepticisme  dont  il  s'agit,  bien  ou'invincible  en 
théorie,  est  tout  à  fait  sans  danger  duns  la  pratique,  les 
hommes  ne  pouvant  s'empêcher  de  croire;  et  que,  s'il  est 
impossible  de  démontrer  que  l'intelligence  humaine  voit 
les  choses  telles  qu'elles  sont,  il  est  également  impossible 
de  démontrer  le  contraire.  Quant  au  scepticisme  vul- 
gaire, la  grande  et  très-décisive  réfutation  de  tous  ses  ar- 
guments tirés  de  nos  erreurs,  c*est  de  dire  que  toutes  ces 
erreurs,  nous  sommes  capables  de  les  reconnaître.  Donc 
nous  avons  un  critérium  (  V.  ce  mot)  pour  distinguer  le 
vrai  du  faux;  donc,  si  nous  sommes  accidentellement 
exposés  à  nous  tromper,  nous  sommes  par  nature  capables 
de  connaître  la  vérité.  Il  ne  s'agit  que  d'apporter  dans  sa 
recherche  tous  les  soins  et  toutes  les  précautions  néces- 
saires. Une  fois  que  nous  l'avons  trouvée  dans  ces  condi- 
tions, nous  lui  devons  toute  notre  confiance. 

Après  avoir  exposé  les  principes  fondamentaux  du 
scepticisme  et  en  avoir  indiqué  les  principaux  aspects, 
il  suffit  de  quelques  noms  et  de  quelques  dates  pour  en 
esquisser  l'histoire.  Dans  l'Antiquité,  le  scepticisme  date 
presque  de  l'origine  de  la  Philosophie;  il  se  dégage,  avec 
les  Sophistes,  des  premières  luttes  des  systèmes  qui  re- 
présentent à  cette  époque  le  Sensualisme  et  Tldéalisme 
(  V.  ces  mots),  Gorgias  de  Léontini,  Prodicus  de  Céos, 
Protagoras  d'Abdère,  Hippias  d'Élis,  Thrasymaque  de 
Chairédoine,  Polus  d'A^igente,  Calliclès  d'Acharnse , 
Euthydème  de  Chio,  Diagoras  de  Mélos  (fin  du  v*  siècle 
av.  J.-C  ),  sont  les  coryphées  de  la  sophistique.  Un 
scepticisme  frivole,  mais  universel,  dit  M.  Cousin,  faisait 
le  fond  de  leur  enseignement.  Socrate  réagit  avec  succès 
contre  les  Sophistes;  mais  après  lui,  et  cette  fois  encore 
comme  conséquence  de  l'ant^igonisme  des  grandes  écoles 
socratiques,  le  scepticisme,  qui  trouve  plus  commode  et 
plus  court  de  mettre  tout  en  doute  que  de  chercher  à  rien 
concilier,  repnt  de  nouvelles  forces,  et  se  développa,  non 
sans  quelque  éclat,  à  ce  qu'il  semble,  avec  Pyrrhon 
(vers  340),  qui  en  est  resté  longtemps  comme  la  personni- 
fication et  le  type;  avec  Arcésilas  (316-229)  et  Carnéade 
(215-126),  dans  la  Nouvelle  Académie  (  V.  Acaiémie',) 
avec  iEnésidème,  contemporain  de  Cicéron,  Agrippa  (date 
incertaine,  ii*  ou  i"*  siècle  ap.  J.-C.  )  et  Sextus  Empiri- 
cus  (a*  siècle  ap.  J.-C).  Longtemps  étoulTé  par  l'esprit 
dogmatique  de  la  Philosophie  chrétienne,  il  se  ravive  à 
l'époque  de  la  Renaissance,  et  trouve  dans  Charron  et 
dans  son  ami  Montaigne  les  interprètes  les  plus  capables 
de  le  faire  accepter  s'il  était  acceptable.  Au  xvu'  siècle, 
La  Mothe  Le  Vayer,  Bayle,  et  quelques  autres  continuent 
avec  plus  ou  moins  de  force  et  de  talent  la  tradition 
sceptique,  destinée  à  subir  plus  tard,  notamment  avec 
Kant,  la  transformation  notable  que  nous  avons  indiquée 
plus  haut.  Pour  en  revenir  au  xvii*  siècle,  ce  que  cette 
époque  eut  de  plus  original ,  en  fait  de  scepticisme,  c'a 
été  de  tourner  le  doute,  comme  une  machine  de  guerre, 
non-seulement  contre  le  libertinage  et  l'incrédulité,  mais 
encore  contre  la  raison  et  la  philosophie,  au  profit  exclu- 
uf  de  la  Foi  et  de  l'autorité.  Montaigne  en  avait  quelque- 


fois  fait  le  semblant  ;  mais  il  nous  paraît  bien  difficile 
de  le  prendre  au  sérieux  dans  le  rôle  de  défenseur  du 
christianisme.  Telle  fut,  au  contraire,  bien  sincèrement 
la  pensée  de  Huct,  évôaue  d'Avranches,  auteur  d'une 
Censure  de  la  Philosophie  cartésienne  et  d'un  Traité 
philosophique  ile  la  faiblesse  de  l'esprit  humain,  telle 
fut  surtout  celle  de  Pascal ,  qui  mit,  dans  cette  lutte  obsti- 
née contre  la  raison,  toute  la  sombre  ardeur  et  toute 
l'àpreté  de  son  puissant  et  étrange  génie.  Nous  pourrions 
citer  plus  près  de  nous  de  nouveaux  exemples  de  cette 
tactique,  moyen  désespéré  de  précipiter  de  force  l'esprit 
humain  dans  la  Foi,  en  le  dégoûtant  de  la  Raison.  Mau- 
vaise tactique  après  tout ,  et  dangereuse  à  la  cause  même 
qu'elle  veut  servir.  Pour  nous,  non-seulement  nous  ne 
saurions  nous  résigner  à  ne  voir  dans  la  Raison,  qui  nous 
vient  de  Dieu  comme  le  reste,  qu'une  lumière  trom- 
peuse propre  à  nous  égarer  ;  mais,  à  un  autre  point  de  vue, 
nous  ne  croyons  p^is  que  l'esprit  qui  se  déKe  ainsi  de  lui- 
même  puisse  se  reposer  avec  une  parfaite  quiétude  dans 
la  Foi.  Nous  n'en  voudrions  pour  preuve  que  les  anç^oissos 
incurables  de  cet  illustre  et  infortuné  Pascal,  et  nous 
trouverions  encore  ici  la  confirmation  éclatantt  d'une 
pensée  de  Roy cr-Col lard,  que  l'on  a  bien  souvent  citée  : 
tt  On  ne  fait  pas  au  Scepticisme  sa  part;  quand  il  a  pé- 
nétré dans  l'entendement,  il  l'envahit  tout  entier.  »  B— e. 

SCEPTRE  (du  grec  sképtron,  bâton  d'appui),  bâton  de 
commandement,  de  forme  variable,  plus  ou  moins  onié,  et 
qui  est  un  des  insignes  de  la  royauté.  Dans  Homère,  les 
chefs  grecs  ligués  contre  Troie  portent  tics  sceptres  d'or  ou 
garnis  de  clous  d'or  :  le  sceptre  d'Agamemnon  était,  au 
temps  où  chantait  le  pofito,  conservé  i  Chéronée;  mais  les 
Phocidiens  avaient  enlevé  les  lames  d'or  dont  le  bois  était 
recouvert,  Tarquin  le  Superbe  introduisit  à  Rome  Tusasçe 
du  sceptre  comme  attribut  de  la  puissance  souveraine.  IMus 
tard,  Vimperator,  c.-à-d.  le  général  victorieux  et  admis  aux 
honneurs  du  triomphe,  eut  le  droit  de  le  porter.  Le  plus 
ancien  des  sceptres  des  rois  de  France  était  celui  que  te- 
nait Clovis  au  portail  de  l'abbaye  de  S*-Germain-des- 
Prés;  c'était  un  b&ton  surmonté  d'une  aigle.  Childebert 
avait  son  sceptre  surmonté  d'une  touffe  de  feuilles  sem- 
blable par  la  forme  à  une  pomme  de  pin.  Selon  Velly,  le 
sceptre  des  premiers  rois  était  tantôt  une  simple  palme, 
tantôt  une  verge  d'or  courbée  par  le  haut  comme  une 
crosse  :  on  ne  connaît  pas  de  sceptre  de  cette  dernière 
forme.  Sur  le  sceau  de  Dagobert,  tiré  des  archives  de 
S^-Maximin  de  Trêves,  on  voit  un  sceptre  qui  ressemble 
à  une  branche  composée  de  plusieurs  rameaux.  La  partie 
supérieure  du  sceptre  que  l'on  conserva  longtemps  au 
Trésor  de  l'abbaye  de  S'-Denis  sous  le  nom  de  sceptre  de 
Dagobert,  représente  un  homme  placé  sur  le  dos  d'une 
aigle  qui  vole.  Plus  tard  le  sceptre  des  rois  de  France  fut 
surmonté  d'une  fleur  de  lis  double.  Celui  des  empereurs 
d'Allemagne  avait  une  aigle  à  deux  têtes.  —  Jurer  par  le 
sceptre  fut  une  pratique  de  l'Antiquité  ;  on  a  aussi  touché 
ou  baisé  le  sceptre  comme  marque  de  soumission.     D. 

SCEVOPHYLACIUM  (du  grec  skeuos,  meuble,  et  phy- 
lax,  gardien),  nom  donné,  dans  les  églii^s  grecques,  au 
local  où  l'on  renferme  le  mobilier  précieux  dont  on  se 
sert  dans  les  cérémonies. 

SCHABRAQUE,  sorte  de  housse  ou  de  couverture  en 
peau  de  mouton  ou  en  drap,  qu'on  étend  sur  la  selle  et 
qui  couvre  les  fontes  des  pistolets.  Elle  a  été  importée  en 
France  en  li>02  par  les  hussards  hongrois.  Les  scha« 
braques  en  peau  sont  garnies  d'un  galon  en  laine  de  cou- 
leur; celles  en  drap  ont  aussi  un  galon,  avec  le  chiffre  du 
régiment,  ainsi  (qu'une  grenade,  deux  lances,  etc.,  selon 
l'arme.  Les  officiers  ont  deux  galons  d*or  ou  d'argent  à 
leur  schabraque. 

SCHAH.  V.  Chah,  dane  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire. 

SCHAH-NAMÈH,  c-hrà.  le  Livre  des  Rois,  poème  his- 
torique composé  en  persan  par  Firdoucy,  d'après  l'ordre 
de  Mahmoud  le  Gaznévide,  et  consacra  à  la  gloire  pri- 
mitive de  la  Perse.  Il  n'a  point  pour  sujet  un  événe- 
ment important,  qui  naît,  se  développe,  et  se  termine 
par  une  catastrophe,  mais  il  embrasse  une  série  de  faits 
qui  se  succèdent  durant  37  siècles,  jusqu'à  l'introduction 
de  rislamisme  ;  on  y  trouve  peu  d'ordre,  et  l'art  manque 
presque  complètement  dans  la  manière  dont  los  épisodes 
sont  rattachés  à  l'ensemble.  L'unité  de  l'œuvre  réside 
dans  la  lutte  du  mauvais  génie  contre  le  bon,  de  la  civi- 
lisation contre  la  barbarie,  des  rois  de  l'Iran  contre  les 
hordes  du  Touran;  dans  les  vicissitudes  de  l'ordre  sorial, 
assis  par  Djemscliid,  régénéré  par  Zoroastre,  éb.anlé 
sans  être  abattu  par  Alexandre  le  Grand,  opprimé  par 
les  Arsacidcs,  relevé  par  les  Sassanides,  modifié  par  les 


scn 


1624 


SCI 


Arabes.  Firdoucy  ne  s'est  point  yraisemblablement  pro* 
posé  pour  but  de  faire  tourner  son  poëme  au  profit  de  la 
morale;  il  n'a  eu  d'autre  intention  que  de  raconter  les 
faits  qu'il  avait  recueillis  dans  les  traditions  persanes.  On 
ti'ouve  dans  le  Schah-Namèh  le  pendant,  sinon  le  mo- 
dèle, des  mœurs  chevaleresques  de  notre  moyen  âge  : 
Roiistam  et  les  autres  héros  de  Firdoucy  rappellent  les 
personnages  des  DOëmes  de  la  Table  ronde  ou  de  Charle- 
ma<;ne,  et  vivent  au  milieu  d'enchanteurs  et  de  monstres 
fabuleux.  La  valeur  poétique  de  l'ouvrage  ne  répond  pas 
h  ^  on  importance  :  des  distiques  composés  sur  une  me* 
sure  constamment  la  même,  formés  de  deux  vers  qui 
riment  ensemble  et  renferment  presque  toujours  un  sens 
complet,  ne  présentent  que  de  faibles  moyens  au  génie 
quand  il  s'agit  de  grandes  compositions.  Le  Sc/ia/tr-TVamé^ 
a  été  publié  à  Paris  par  Jules  Mohl,  avec  traduction  fran- 
çaise et  commentaires.  II  en  existe  une  traduction  en 
prose  arabe  à  la  BibIioth6que  impériale.  1^.  Langlès, 
Notice  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  Ferdoussif  dans  les 
Fables  et  Contes  persans  publiés  en  1798;  de  Wallem- 
bourg,  Notice  sur  le  SchaJi-Namèh,  Vienne,  1810;  Sil- 
vestre  de  Sacy,  article  dans  le  Magasin  encyclopédique^ 
tome  IV.  B. 

SCHAKO  (du  hongrois  czàko)^  coiiïure  militaire,  parti- 
culière aux  hussards  hongrois,  et  qui,  introduite  en 
France  au  siècle  dernier,  ne  fut  d'abord  en  usage  que 
dans  les  régiments  de  hussards  et  de  chasseurs  &  cheval. 
Il  était  alors  sans  visière  et  orné  de  torsades.  Au  com- 
mencement du  premier  Empire,  toute  l'infanterie  quitta 
le  ciiapeau  à  trois  cornes  pour  prendre  le  schako.  Aujour- 
d'hui les  schakos  sont,  selon  les  corps,  en  feutre  ou  en 
drap  de  couleur  noire  ou  bleue,  soutenu  par  une  car- 
casse en  carton  ou  en  bois  qui  se  rétrécit  au  sommet;  on 
les  orne  de  jugulaires,  de  plaques  à  aigles  et  portant  le 
numéro  du  régiment,  de  galons,  de  cocardes,  de  crinières, 
aigrettes,  panaches  ou  pompons. 

SCHALL.  K.  Chale. 

SCHAMANISMË.  V.  Chamanisue,  dans  notre  Diction- 
naire (le  Biographie  et  d^ Histoire, 

SCHEEREN,  nom  qu*on  donne  aux  récifs  qui  existent 
le  long  des  côtes  de  la  Suède  et  de  la  Finlande. 

SCHEIKH.       i  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

SCHIXLING.  S      de  Biographie  et  d'Histoire. 

SCHÈME  (du  grec  skéma,  forme,  figure),  mot  employé 
autrefois  en  Construction  comme  synonyme  de  Figure  ou 
de  Plan,  Il  a  désigné  aussi  toute  Figure  de  Rhétorique. 
En  Philosophie,  Leibniz  appelle  schème  le  principe  essen- 
tiel à  chacune  de  nos  idées  et  qui  les  distingue  entre 
elles,  tandis  que  Kant,  faisant  du  mt^me  mot  un  syno- 
nyme de  Forme,  l'applique  à  tout  objet  qui  existe  dans 
l'Entendement  indépendamment  de  la  Matière.  Schéma- 
tiser, c'est  considérer  les  objets  comme  des  schèmes  ou 
des  abstractions  ;  faire  des  schématismes,  c'est  faire  des 
actes  résultant  de  l'application  des  formes  de  l'Entende- 
ment pur  à  celles  de  la  Sensibililé  physic{ue  pure. 

S(^HÊUir.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

SCHERZO,  mot  italien  qui  veut  dire  badinage,  et 
qu'on  emploie  en  Musique  pour  désigner  les  morceaux  à 
trois  temps  des  symphonies,  quatuors,  etc.,  qu'on  nom- 
mait autrefois  menuets  {V,  ce  mot).  Le  mot  scherzando, 
c.-^-d.  en  badinant,  indique  un  mode  d'exécution  légère 
et  badine.  Les  Italiens  appellent  scherzi  musicali  cer- 
taines œuvres  plaisantes,  telles  que  les  fugues  qui,  quœ, 
quod  et  hic,  hœc,  hoc  de  Merula,  les  fugues  tri  liées  de 
Porpora,  les  canons  burlesques  du  P.  Martini ,  etc. 

SCHIFATI,  pièces  de  monnaie  grecques  de  la  Sicile  au 
moyen  &gc,  ainsi  appelées  parce  qu'elles  portaient  la 
figure  d'une  barque  {scapha), 

SCHILDERBENT,  association  de  peintres  flamands  qui 
existait  à  Rome  pendant  les  xvi*  et  xvii*  siècles.  Les 
désordres  qu'elle  commit  amenèrent  sa  suppression  par 
le  pape  Clément  IX  en  1720. 

SCHISME.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

SCHLAGUE  (de  l'allemand  schlag,  coup),  punition 
militaire  en  usage  en  Allemagne,  et  qui  consiste  dans 
l'application  de  coups  de  canne. 

SCHOEISBRUNN,  ch&teau  impérial  de  la  Basse-Autriche, 
à  0  kilomèt.  S.-O.  de  Vienne.  Il  occupe  l'emplacement 
d'un  ch£Lteau  de  chasse  b&ti  sous  Maximilien  II,  et  d'un 
palais  d'été  construit  par  Léopold  T'.  L'impératrice 
Marie-Thérèse  le  fit  élever  en  1744  par  Pacassi,  d'après 
les  plans  de  Vatmagini.  L'aspect  du  château  de  Schœn- 
brûnn,  avec  ses  volets  peints  en  vert  sur  des  murs  badi- 
geonnés en  jaune,   n'a  rien   d'imposant  En  ayant   se 


trouve  un  grand  parterre,  orné  de  32  statues  et  grouyvs 
en  marbre,  et  à  l'extrémité  duquel  s'élève  un  amphi- 
théâtre de  verdure  que  couronne  la  Gloriette,  vaste  oor- 
tique  ouvert.  Le  ch&teau  contient  1,441  chambrel  et 
139  cuisines.  Les  appartements  impériaux  sont  richement 
meublés,  mais  n'ont  rien  de  particulièrement  intéres- 
sant. On  remarque  la  grande  salle,  où  peuvent  tenir 
1,500  personnes,  et  qui  a  un  beau  plafond  peint  par  Gu- 
glielmi;  la  salle  Hamilton,  ainsi  appelée  à  cause  des 
peintures  exécutée  par  Jean,  Georges  et  Philippe  Ha- 
milton ;  la  salle  des  cérémo:iies,  avec  peintures  par  Mey- 
tens;  le  cabinet  bleu,  où  Marie-Thérèse  se  tenait  de 
préférence;  la  chambre  habitée  par  Napoléon  I^'en  1809, 
et  où  son  fils,  le  duc  de  Reichstadt,  mourut  en  1S3'i;  le 
cabinet  chinois,  la  galerie  de  tableaux,  la  chapelle,  le 
théâtre,  etc.  Le  jardin  ou  parc,  d'une  très-grande  éten- 
due, est  une  évidente  imitation  de  celui  de  Versailles  :  il 
contient  de  magnifiques  allées,  de  belles  pièces  d'eau, 
une  faisanderie,  une  ménagerie,  une  orangerie,  un  jardin 
botanique,  etc.  B. 

SCHOËNION ,  nom  d*un  air  de  flûtes  chez  les  anciens 
Grecs.  Il  avait  quelque  chose  de  l&che  et  de  flexible, 
comme  le  jonc  {sclioinon  en  grec). 

SCHOLIES  (du  grec  skholè,  loisir),  annotations  appo- 
sées sur  les  marges  des  manuscrits  grecs  par  leurs  pos- 
sesseurs, dans  les  loisirs  d'une  lecture  assidue  et  réitérée. 
Par  extension,  on  a  appelé  Scholiastes  les  auteurs  de  notes 
destinées  à  éclaircir  certains  passages  des  écrivains  clas- 
siques, particulièrement  des  écrivains  grecs.  Les  plus 
célèbres  scholiastes  sont  Eustathe,  Tzetzès,  Didyme,  Mos- 
chopulus,  etc. 

SCHOONER,  nom  que  les  nations  du  Nord  donnent  à 
la  goôlette. 

SCHOTTISH.  V.  Shottish. 

SCHYARI,  ancien  instrument  à  vent,  dont  la  structure 
ressemblait  h  celle  de  la  cornemuse,  si  ce  n'est  qu'il  était 
ouvert  dans  la  partie  inférieure.  Outre  les  trous  ordi- 
naires pour  les  doigts  et  le  pouce,  il  en  avait  d'autres 
qu'on  bouchait  avec  la  paume  de  la  main.  Le  diapason 
du  plus  grand  instrument  de  ce  genre  s'étendait  du  fa 
au-dessous  des  lignes  avec  clef  de  fa,  jusqu'au  si  Itémol 
au-dessus;  le  plus  petit,  du  sol  au-dessus  de  la  4'  ligne 
avec  clef  de  fa  jusqu'à  l'ut  du  3*^  espace  à  la  clef  de  sol. 

SCIAGRAPHlË  (du  grec  skia,  ombre,  et  graphéin, 
tracer),  mot  employé  par  les  anciens  Grecs  pour  dt^i- 
gner  ce  que  nous  appelons  soit  le  clair-obscur,  soit  la 
silhouette.  —  En  Architecture,  il  signifie  la  coupe  d'un 
édifice,  c.-à-d.  la  représentation  de  son  intérieur. 

SCIE  (Dent  de).  V.  Dent  de  scie. 

SCIENCE,  en  latin  scientia  (de  scire,  savoir).  La 
science  à  son  début  n'était  qu'une  synthèse  étroite,  vague 
et  confuse,  comprenant  l'ensemble  du  savoir  humain, 
décoré  du  nom  de  Sagesse  (  V.  ce  mot).  S'il  était  donné  à 
l'esprit  humain  de  s'élever  jusqu'à  une  connaissance 
universelle  et  parfaite,  la  Science  serait  une  syniii^ 
complète,  emhrassimt  l'ensemble  et  les  parties  de  l'uni- 
vers dans  leurs  moindres  détails  et  dans  leurs  rapporU; 
l'homme  posséderait  la  science  absolue,  ce  qui  lui  est 
impossible.  Entre  ces  deux  extH^mes  il  y  a  des  parties  de 
la  science  ou  des  synthèses  partielles  auxquelles  l'homme 
arrive  par  des  analyses  de  plus  en  plus  exactes  et  pro- 
fondes; c'est  ce  qui  donne  les  sciences  particulières. 
Chaque  science,  ayant  son  objet  propre,  comprend  les 
diverses  connaissances  des  faits  qui  sont  relatifs  à  ce4 
objet,  des  lois  qui  régissent  ces  faits;  d'après  cela,  une 
science  est  un  système  de  propositions  qui,  liées  entre 
elles,  dépendent  d'un  seul  et  même  principe.  C'est  ce  qui 
distingue  la  science  de  Vopinion,  qui  juge  sans  motif  suf- 
fisant, et  môme  de  la  connaissance  raisonnée,  qui  ne 
s'appuie  que  sur  des  principes  hypothétiques,  tandis  que 
savoir,  c'est  rattacher  des  notions  positives  à  des  prin- 
cipes clairs,  évidents  et  incontestables.  Toute  science  peut 
être  considérée  comme  renfermant  trois  parties  :  la  des- 
cription des  faits,  la  théorie  des  lois,  et  Tapplication  de 
ces  lois,  qui  constitue  un  art.  C'est  ce  qu'on  voit  dans 
la  marche  de  la  civilisation  ;  mais  cette  marche  est  assez 
difficile  à  suivre  pour  la  science  dans  les  premiers  temps. 
Chez  les  peuples  antiques  de  l'Orient,  l'imagination  Vetn- 
portait  de  beaucoup  sur  l'observation  et  sur  le  raisonne- 
ment. En  Grèce,  la  science  se  confond  d'abord  avec  la 
philosophie  {V.  ce  mot).  Socrate  sépara  cette  dernière  drt 
autres  sciences,  et  Platon  essaya  de  les  diviser  méthodi- 

Îuement,  en  mettant  au  premier  rang  la  connaissance  de 
>ieu  et  des  Idées,  objet  de  la  raison  ;  au  second,  les  ma- 
thématiques,  science  intermédiaire  entre  la  niwo  el 
l'opinion;  ao  troisième,  les  connaissances  pAysiçAC*» 


SCI 


1625 


SCO 


oblet  de  fopfnion.  ArîBtote,  développant  lMd(5e  de  Platon, 
constitua  la  Métaphysique,  puis  l'Histoire  naturelle  et  la 
Météorologie  descriptives,  la  Psychologie,  la  Morale,  la 
Politique,  la  Rhétorique  et  la  Poôtiqu;'.  LYcolc  d'Alexan- 
drie accrut  le  domuine  des  sciences,  surtout  en  ce  qui 
concerne  la  Mécanique,  l'Optique,  TAstronomie,  la  Géo- 
graphie mathématique.  Au  moyen  à|^e,  la  science  subit 
une  éclipse,  pendant  laquelle  tout  se  réduisait  aux  sept 
Arts  libéraux,  comprenant  le  Trivium  (Grammaire,  Dia- 
lectique, Rhétorique)  et  le  Quadrivium  (Astronomie, 
Géométrie,  Arithmétique  et  Musique).  Cependant,  au 
XIII*  siècle,  Vincent  de  r;eauvais  essaya  un  résumé  des 
connaissances  humaines  dans  son  Grand  Miroir ^  divisé 
en  Miroir  naturel.  Miroir  moral,  Miroir  scientifique. 
Miroir  historique.  La  première  classification  sérieuse  est 
celle  de  F.  Bacon,  à  la  fin  du  xvi»  siècle;  elle  fut  adoptée 
au  XVIII*  par  les  auteurs  de  V Encyclopédie,  avec  des  cor- 
rections relatives  surtout  à  la  théologie,  à  la  poésie  et  aux 
mathématiques  {V,  Arbre  BNCYCLOPéDiQUE).  Depuis,  de 
nombreux  essais  ont  été  tentés  pour  arriver  à  une  classi- 
fication plus  exacte.  Ampère  prit  pour  base  ce  principe  : 
que  l'observation  des  faits  apparents  et  de  ceux  qui  sont 
cachés,  puis  la  détermination  des  lois  et  des  causes  de 
ces  phénomènes,  constitue  métaphysiquement  la  marche 
de  l'esprit  dans  l'acquisition  des  connaissances.  M.  Cour- 
not  a  publié  en  1852  un  Essai  sur  les  fondements  de 
nos  connaissances,  utile  à  consulter,  ainsi  que  VEssai 
sur  la  classification  d'Art-et-Science  de  J.  Bentham,  et 
Y  Encyclopédie  d'Krsch  et  Grubcr;  on  trouve  aussi  une 
tentative  de  classification  dans  la  !*h>jsiologie  philoso- 
phique des  sensations  et  de  l'intelligence  du  D'  Gerdy. 
Sans  adopter  exclusivement  aucune  de  ces  classifications 
plus  ou  moins  arbitraires,  il  nous  suffira  de  donner  un 
tableau  abrégé  des  sciences  et  de  leurs  applications  dans 
les  arts. 

D'après  la  nature  des  objets  dont  elles  s'occupent,  les 
sciences  peuvent  être  divisées  en  deux  grandes  classes  : 
1°  les  Sciences  de  raisonnement,  comprenant  :  les  Mathé- 
matiques pures  (Arithmétique,  Algèbre,  Calcul  intégral, 
différentiel;  Calcul  des  variations,  des  probabilités,  etc.;' 
Géométrie,  Trigonométrie,  Géométrie  analytique);  les 
Mathématiques  appliquées  ou  mixtes  (application  des 
sciences  mathématiques  aux  sciences  physiques  et  natu- 
relles); et  les  Sciences  métaphysiques  (Ontologie  ou  Méta- 
pli}sique  générale.  Métaphysique  particulière.  Théologie, 
logique  transcendante  ou  rationnelle.  Morale  transcen- 
dante ou  rationnelle);  2<*  les  Sciences  d'observation, 
ayant  pour  objet  les  corps  et  leurs  modes  (Physique  gé- 
nérale. Chimie,  Gazologie,  Hydrologie,  Minéralogie,  Bota- 
nique, Zoologie,  Physiologie,  Cosmographie,  Astronomie, 
Géographie,  Géologie,  Dynamique,  Mécanique,  Statique), 
et  le  principe  pcn«iant  et  ce  qui  le  concerne  (Psycholo};ie, 
Logique,  Esthétique,  Morale,  Science  historique.  Indus- 
trie, Beaux-Arts  et  Litiératuro).  A  chaqiie  science  princi- 
pale se  rattache  une  application  dans  l'industrie  ou  dans 
l'art.  Ainsi,  à  Tarithmétique  correspond  le  calcul;  à  la 
géométrie,  l'arpentage  ;  à  la  mécanique  pure,  la  mécanique 
appliquée;  à  l'astronomie,  Tart  de  la  navigation  et  de  la 
fabrication  des  instruments  dont  elle  a  besoin;  à  la  géo* 
logie,  la  métallurgie,  et  les  arts  du  lapidaire,  du  joaillier, 
du  bijoutier,  etc.  ;  à  la  physique,  l'optique,  l'acoustique  et 
la  fabrication  des  instruments  nécessaires;  à  la  chimie, 
la  tannerie,  Tamidonnerie,  la  brasserie,  la  distillerie,  et, 
en  général,  les  arts  industriels;  à  la  botanique,  l'agricul- 
ture; à  la  zoologie,  la  médecine,  l'art  vétérinaire;  à 
l'histoire,  la  politique  ;  à  la  théologie,  le  culte. 

Dans  ce  tableau  ne  sont  pas  comprises  les  Sciences 
occultes,  par  la  raison  qu'elles  ne  sont  pas  des  sciences; 
au  lieu  de  s'appuyer  sur  l'observation  et  le  raisonnement, 
elles  ont  recours  au  mystère  et  se  dérobent  au  jour;  elles 
sont  d'ailleurs  tombées  dans  un  discrédit  que  le  progrès 
des  Sciences  réelles  augmente  toujours.  Ces  sciences 
et  iinnt  Talchimie.  l'astrolngie,  la  cabale,  la  magie,  la 
'"liiromancie,  la  nécromancie.  R. 

SCIENCES  (Académie  des),  fondée  en  1666  par  Col- 
I  crt,  sur  l'ordre  de  Louis  XIV,  mais  sans  acte  ofTiciel 
émané  do  Tautorité  royale.  Elle  ne  comprit  d'abord  que 
les  sections  de  géométrie,  d'astronomie,  de  mécanique, 
d*unatomie,  de  chimie,  et  de  botanique;  ses  membres 
funînt  partagés  en  4  classes  :  les  membres  honoraires, 
les  membres  effectifs,  qui  recevaient  des  émoluments,  les 
associés,  et  les  élèves;  la  l""*  se  composait  de  10  mem- 
bres, et  les  trois  autres  do  20  chacune.  Le  roi  choisissait 
/e  président  dans  la  1"  classe;  le  secrétaire  et  lo  trésorier 
étaient  pris  dans  la  2*.  Le  régent  Philippe  d'Orléans  sup- 
orima  les  élèves,  et  créa  deux  nouvelles  classes,  Tune  de 


12  adjoints,  l'antre  do  6  a^^sociés  ;  on  établit  nn  vice-pré- 
sident, choisi  parmi  les  iiici'.îbres  honoraires,  un  direc- 
teur et  un  sous-directeur,  qui  devaient  être  memlirea 
effectifs.  En  i785,  on  créa  des  classes  d'histoire  naturelle, 
d'agriculture,  de  minéralogie,  et  de  physique.  L'Aca- 
demie  des  Sciences,  supprimée  en  1793,  reparut  modi- 
fiée dans  l'Institut.  Elle  avait  publié  jusque-là  139  vo- 
lumes in -4"  de  Mémoires,  Aujourd'hui  elle  se  composa 
de  03  membres,  divisés  en  onze  sections,  savoir  :  pour 
les  Scienctc  matJiématiques,  les  sections  de  Géométrie, 
Mécanique,  Astronomie,  Géogi'aphie  et  Navigation,  Phy- 
sique générale;  pour  les  Sciences  physiqiAes,  Chimie, 
Minéralogie,  Botanique,  Économie  rurale  et  Art  vété- 
rinaire, Anatomie  et  Zoologie,  Médecine  et  Chirurgie. 
L'Académie  des  Sciences  peut  être  regardée  comme  ua 
véritable  tribunal  scientifique,  dont  l'Europe  ^tière  re- 
connaît l'autorité. 

SCIENCES  MORALES  ET  POLiTiQDBS  (Académie  des),  établie 
comme  une  des  classes  de  l'Institut  en  1794,  supprimée 
par  Napoléon  l»»-  en  1803,  elle  ne  fut  rétîiblio((.i'i.n  i«;{2. 
Elle  comptait  alors  30  membres,  répartis  on  5  sections. 
Un  décret  jmpérial  du  14  avril  1855  Ta  divisée  en  six 
aections  :  lo  Philosophie;  2«  Morale;  3"  Législation, 
^roit  public  et  Jurisprudence  ;  4"  Économie  politique  et 
Statistique;  5"  Histoire  générale  et  philosophique;  0"  l>o- 
litique.  Administration  et  Finances.  En  ISfiii.  la  (]"  sec- 
tion a  été  réunie  :\  la  4»  Ses  membres  sont  au  nombre 
de  40.  Elle  publie  des  Mémoires. 

SCIENCES  (Facultés  des),  établissements  d'enseignement 
supérieur,  au  non^bre  de  15  en  France  :  à  Besançon, 
Bordeaux,  Caen,  Clcrmont,  Dijon,  Grenoble,  Lille, 
Lyon,  Marseille,  MuntpeUier^  Nancy,  Paris,  Poitiers, 
Rennes,  et  Toulouse.  L'enseignement  complet  d*une 
Faculté  des  Bciences  comme  celle  de  Parie,  comprend 
l'astronomie  physique,  l'astronomie  mathématique,  l'al- 
ffèbre,  la  mécanique,  la  méciinique  physique,  le  calcul 
diCTérenliel,  la  géométrie,  le  calcul  des  prob  tbilités,  la 
physique,  la  chimie,  la  zoologie,  la  botanique,  la  miné- 
ratogie,  la  géologie.  Dans  les  F.icuît>''s  des  dépnriemcnta, 
le  nombre  des  chaires  varie  de  quatre  à  six.  V.  le  ^uppl. 

SCIENCES  (Ecoles  prepap.ilonesà  î'en^^eignement  su- 
périeurdes)ET  des  lettres,  écoles  institueras  paniéci-et 
au22aoûtl85i.  Ce  soni  desétablissements  municipaux, 
fondés  et  entretenus  aux  Trais  dt*s  communes,  mais  dont 
les  professeurs,  [jHs  k<'' né  raie  ment  dans  le  personnel 
des  lycées,  sont  nom (i]é:<  par  le  min'sirederin'»lruction 
publique.  Il  y  en  a  qunir»»:  \  Anfr<TP,  Cliambéry, 
Nantes  et  Rouen.  L*enscignement  comprend  les  mathé« 
matiques,  la  mécanique,  la  physique,  la  chimie,  riiistoire 
naturelle,  la  littérature  française,  Thistoire  do  France,  la 
géographie  physique  et  politiqiie,  le  dessin  Industriel. 
Les  inscriptions  prises  dans  les  Kcoles  préparatoires  peu- 
vent être  converties  en  inscriptions  dans  les  Facultés  des 
Lettres  ou  des  Sciences.  Ces  Écoles  délivrent  des  certift" 
cals  de  capacité  pour  les  sciences  appliquées, 

SCINDAPSOS,  instrument  de  musique  des  Anciens, 
monté  de  4  cordes  de  laiton  qu*on  touchait  avec  une 
plume. 

SCIOLTI  (Vers).  V.  Italirn?!E  (Versification), 

SCIOLTO.  V,  DfrfACHé. 

SCIPION  (Bouclier  de).  K.  Boccuer. 

SOPIONS  (Tombeau  des),  monument  romain  situé 
près  de  Tarragone  en  Espagne.  La  tradition,  qui  ne  re- 
pose du  reste  sur  aucun  fondement,  veut  que  ce  soit  le 
mausolée  élevé  par  Scipion  TAfricain  h  la  mémoire  de 
son  oncle  et  de  son  père,  et  Ton  a  prétendu  que  les  deux 
statues  mutilées  qui  le  décorent  représentent  Cnélus  et 
Publ.  Cornélius  Scipion  :  mais  leur  costume  n'est  pas 
celui  des  généraux  romains;  il  ressemble  plutôt  à  celui 
des  esclaves.  Des  médailles  d*Auguste,  une  urne  funé- 
raire contenant  les  cendres  d'un  enfant,  et  divers  autres 
objets  trouvés  au  pied  de  cette  construction,  paraissent 
remonter  à  un  temps  moins  éloigné  que  le  prétendu  tom- 
beau des  Scipions. 

SCIROPHÔRION.  K.  Parasol. 

SCOLARITÉ  (  Privilège  dej,  privilège  en  vertu  duquel 
les  causes  des  membres  des  Universités  et  celles  des  étu- 
diants étaient  autrefois  portées  devant  les  Conservateurs 
des  privilèges  de  ces  Universités. 

SCOLASTIQUE,  nom  donné  à  la  philosophie  du  moyen 
âge,  et  dérivé,  dit-on,  du  latin  scolasticus,  titre  de  IVco- 
làtre  qui  enseignait  dans  Técole  attaché*»  aux  cathédrales. 
Le  caractère  de  la  Scolastique  n'était  pas  l'indépendance 
philosophique;  mais  sa  soumission  à  l'autorité  religieuse 
n'allait  pas  Jus<[u'à  la  servilité.  L'histoire  de  la  Scolas- 
tique se  divise  en  4  périodes  :  i^  du  n*  siècle  Jusqu'à  la 


SCO 


1626 


SCO 


relie  des  Unwersaux;  3°  d*Abailard  au  xiv*  siècle,  où 
triomphe  le  Nominalisme  avec  Guillaume  Occam;  4**  de 
ce  dernier  jusqu'à  la  fin  du  xv*  siècle.  —  Dans  la  1""*  pé- 
riode se  montrent  Scot  Érigène,  qui  reproduisit,  dans  son 
ouvrage  De  la  Division  de  la  Nature,  la  doctrine  des 
Alexandrins,  et  avec  lequel  la  Scolastiqne  reflète  le  pan- 
théisme oriental  ;  llaban  Maur,  Lanfranc,  Gerbert  d'Au- 
rillac,  S'  Anselme  de  CantorbC'ry.  Jusqu*alors  le  carac- 
tère de  la  Scolastiijue,  sans  être  bien  déterminé,  inclinait 
à  devenir  ce  qui  fut  le  Héalisme;  il  n'en  Tut  pas  de 
même  à  la  2*  période.  Vers  la  fin  du  m"  siècle.  Porphyre, 
dans  une  Introduction  aux  Catégories  d'Aristote,  s'était 
demandé,  sans  résoudre  la  question,  si  les  genres  et  les 
espèces  répondent  par  une  existence  réelle  aux  idées  gé- 
nérales; en  un  mot,  sMIs  sont  des  êtres.  Roscelin,  cha- 
noine de  Compiègne,  reprit  la  question.  Il  s'agissait  donc 
de  savoir  si  Vhumanité,  par  exemple,  existe  indépen- 
damment des  individus  qui  la  composent,  si  l'idt^e  géné- 
rale humanité  est  un  être,  une  entité,  ou  si  elle  n'est 
qu'une  appellation  collective  donnée  à  un  ensemble  d'in- 
dividus. Boscelin  répondit  négativement;  il  prétendit 
môme  que  les  idées  générales  ne  sont  que  des  mots, 
tlatus  vocis;  que  les  idées  générales,  bien  loin  d'être 
des  réalités  préétablies,  univcrsalia  ante  rem^  comme  on 
disait,  ne  sont  que  des  abstractions  provenant  des  indi- 
vidus, universalia  post  rem.  Ce  Nominalisme  de  Rosce- 
lin, qui  allait  jusqu'à  mettre  en  question  la  Trinité 
divine,  souleva  contre  lui  l'autorité  religieuse,  qui  le 
força  à  se  rétracter.  Au  point  de  vue  philosophique,  il  fut 
combattu  d'abord  par  Guillaume  de  Champeaux,  chef 
des  Réaux  ou  Réalistes.  Ceux-ci  soutenaient  que  les  idées 
générales  sont  des  entités  réelles,  qu'elles  sont  distinctes 
de  l'esprit  qui  les  conçoit,  et  des  individus  dont  elles 
sont  les  types;  bien  plus,  que  les  individus  n'ont  d'exis- 
tence que  par  leur  rapport  avec  elles;  que  c'est,  par 
exemple,  Vnwnanité  qui  existe  réellement,  et  que  les  in- 
dividus n'en  sont  que  des  parties  sans  existence  propre  ; 
ainsi,  d'après  eux,  les  idées  générales  répondent  à  une 
nature  universelle  et  réelle;  de  là  vient  qu'on  appelle 
aussi  toute  cette  polémique  la  question  des  Universaux. 
Abailard,  disciple  de  Guillaume  de  Champeaux,  tenta  un 
compromis  entre  les  deux  doctrines  opposées,  en  cher- 
chant à  établir  que  les  Universaux  ne  sont  ni  des  choses 
ni  des  mots,  mais  des  produits,  des  conceptions  de  l'es- 
prit; de  là  le  nom  de  Concept ualisme  (V.  ce  mot)  donné 
h  son  système.  Abailard  mécontenta  les  deux  partis. 
L'issue  de  cette  première  lutte  fut  la  défaite  du  Nomina- 
lisme,  qui  eut  contre  lui  tous  les  docteurs  qui  croyaient  le 
dogme  catholique  intéressé  dans  le  débat  :  S^  Anselme, 
Alain  de  Rissel,  Bernard  de  Chartres,  Pierre  le  Lombard, 
surnommé  le  Matlre  des  Sentences,  comme  auteur  d'une 
Theologia  christiana  sententiarum,  compilation  qui  flt 
loi  dans  les  écoles  pendant  toute  la  Scolastique.  L'époque 
suivante  fut  celle  des  traducteurs  et  des  commentateurs  ; 
on  y  vit  Robert  de  Lincoln,  Michel  Scot,  Jean  de  La  Ro- 
chelle, Guillaume  d'Auvergne  et  Vincent  de  Beauvais.  Il 
faut  signaler  principalement  Albert  le  Grand,  dominicain, 

aui  professa  en  Allemagne  et  à  Paris  ;  il  s'occupa  beaucoup 
e  physique;  son  principal  mérite  est  d'avoir  en  grande 
partie  traduit  et  commenté  Aristote.  S'  Thomas,  sur- 
nommé VAnge  de  iÉcole,  étudia  aussi  le  StagjTite,  mais 
avec  un  esprit  plus  élevé  et  plus  réellement  philosophe. 
Grand  métaphysicien  et  moraliste  distingué,  il  remonte 
aux  principes  et  en  développe  les  conséquences  avec  un 
esprit  de  suite  et  de  riçucur  inconnu  de  son  temps.  Son 
Commentaire  de  la  Métaphysique  d'Aristote  est  un  des 
meilleurs  qui  existent,  et  sa  Somme,  Summa  Theologiœ, 
est  un  des  grands  monuments  du  moyen  àsçe.  S'  Thomas 
était  dominicain,  comme  Albert  le  Grand,  son  maître. 
Sa  doctrine  se  trouva  en  opposition,  sur  plusieurs  points, 
avec  celle  du  franciscain  Duns  Scot,  né  l'année  même  do 
la  mort  de  S*  Thomas  (1274).  Celui-ci,  tout  en  admettant 
la  liberté  de  Dieu,  était  plus  frappé  de  sa  bonté  et  des 
lois  de  la  nature;  il  fondait  le  bien,  non  sur  la  volonté 
de  Dieu,  mais  sur  sa  nature:  Duns  Scot,  au  contraire, 
faisait  sortir  la  loi  morale  de  la  volonté  divine,  ainsi  que 
la  création  avec  ses  lois  ;  de  là  l'école  des  Thomistes  et 
celle  des  Scotistes,  et  la  lutte  entre  ces  deux  écoles.  Duns 
Scol,  surnommé  le  Docteur  subtil,  est  remarquable  par 
son  opinion  sur  l'origine  de  nos  connaissances;  il  en 
parle  en  rationaliste  éclairé;  il  est  platonicien  et  réaliste, 
comme  Henri  de  Gand.  11  faut  encore  citer  S'  Bonaven- 
turo,  qui  8'adonaa  au  mysticisme,  déjà  apparent  à  la  fin 


du  xn*  siècle,  dans  l'école  de  S'  Victor;  Raymond  Lulle, 
Doctor  illuminatus,  inventeur  d'un  Ars  untversalis,  ma- 
chine dialectique  plus  curieuse  qu'utile;  Roger  Bacon, 
homme  supérieur  à  son  temps,  et  qui,  dans  un  ^rit 
remarquable,  Opus  majus,  faisait  pressentir  la  réforme 
opérée  par  son  homonyme  Fr.  Bacon,  trois  siècles  plus 
tard.  Les  travaux  d'érudition  de  cette  époque  furent  faci- 
lités par  ceux  des  Juîfs  ojt  des  Arabes  sur  Aristote;  les 
plus  célèbres  sont  Alkendi,  Alfarabi,  Aviccnne,  Algazel, 
Tophail,  Averroès,  Mosès  Mai mnnide.  La  dernière  période 
vit  renaître  la  querelle  des  Universaux.  Guillaume  Oc- 
cam, franciscain,  reprit  la  cause  du  NomineUisme.  11  eut 
pour  protecteur  Philippe  le  Bel  et  l'empereur  Louis  de 
Bavière,  pour  lesquels  il  prit  parti  contre  Boni  face  VI  II  (  t 
Jean  XXII.  Plus  tard  les  Nominalistes  furent  pcrsécut''^ 
^  par  Louis  XI.  Les  Thomistes  et  les  Scotistes  se  réunirent 
'  pour  combattre  une  doctrine  qui,  dans  la  bouche  d'Oc- 
cam  et  des  siens,  annonçait  une  tendance  as&az  pro- 
noncée au  sensualisme  et  au  scepticisme.  Les  principaux 
nominalistes  d'alors  furent,  après  Occam,  Gabriel  Bict, 
Durand  de  Saint-Pourçain,  Jean  Buridan,  Pierre  d'Ail- 
ly,  etc.  Gerson,  une  des  plus  imposantes  ri«:urcs  du 
moyen  âge,  ne  fut  pas  un  réaliste  exclusif:  dans  son 
traité  De  Concordiâ  Metaphysicœ  cum  Logicâ,  il  tente 
un  accord  déjà  cherché  par  Abailard;  il  accomplit  l'œuvra 
de  la  dernière  époque,  qui  était  de  juger  les  précédentes, 
Gerson  est  surtout  célèbre  comme  mystique  ;  sa  Theologia 
mystica  présente  le  mysticisme  comme  un  système  bien 
distinct,  ayant  ses  conditions  et  ses  lois.  A  partir  de  la 
fin  du  XIV*  siècle,  la  Scolastique  s'eiïace  graduellement; 
les  découvertes,  les  événements  religieux  et  politiques 
annoncent  une  ère  nouvelle.  Elle  avait  touché  à  toutes 
les  grandes  questions  qui  intéressent  riiommc,  et,  sans 
les  avoir  résolues,  elle  ne  fut  pas  ?^ns  influence  ni  sans 
utilité  pour  les  progrès  de  l'esprit  humain  dans  les  àgi^s 
suivants. 

Deux  éléments  constituent  la  Scolastique  :  l'esprit  du 
catholicisme,  et  la  philosophie  proprement  dite,  mais, 
dans  celle-ci,  la  Logique  surtout.  De  là  sa  méthode  et 
son  principe.  Sa  méthode  6iait  le  procédé  déductif;  son 
instrument,  le  syllogisme.  Une  majeure  étant  donnée, 
en  tirer  la  conséquence  :  telle  était  Tunique  tâche  qui 
semblait  lui  être  dévolue;  ce  qui  aurait  fait  de  la  philo- 
sophie au  moyen  âge  la  servante  de  la  théxilogie.  si  une 
soumission  complète  eût  été  possible.  Son  principe  éuit 
le  principe  d'autorité,  ce  qui  ajournait  le  libre  examen. 
Il  était  diflicile  qu'il  en  fût  autrement  :  au  sortir  de  !a 
barbarie,  l'esprit  humain  ne  pouvait  pas  trouver,  dans  les 
écoles  fondées  par  Alcuin  et  Charlcmagne,  la  méthode 
d'observation  et  d'analyse  qui  ne  fut  en  usaî^  que  long- 
temps après.  Cependant,  si  l'emploi  exclusif  du  procédé 
déductif  eut  de  grands  inconvénients ,  il  produisit  aussi 
d'heureux  résultats,  en  soumettant  l'esprit  et  le  Ianp:age 
aux  habitudes  sévères  du  raisonnement.  V.  Thomas! us. 
De  doctoribus  scolasticis,  Leipzig,  1676,  in-^*;  Salaber- 
tus,  Philosophia  Nominalium  vindicat^ ,  Paris,  1051, 
in-8°;  Ch.  Meiners,  De  Nominalium  ac  Realium  initiis, 
dans  le  t.  XII  dcsCommentairesdela  Société  de  Goettingue; 
Saint-René  Taillandier,  Jean  Scot  Erigène  et  la  philoso- 
phie scolastique,  1S43;  Cousin,  Fragments  philosophi- 
ques, t.  III;  Patru,  De  la  philosophie  du  moyen  âge^ 
in-8°;  X.  Rousselot,  Études  sur  la  philosophie  du  moyen 
âge,  Paris,  1840-42,  3  vol.  in-8**;  Do  Caraman,  ffistoire 
des  révolutions  de  la  philosophie  en  France,  1847,  3  vol. 
in-8<^;  B.  Hauréau,  De  la  philosophie  scolasttque,  185U, 
2  vol.  in-8o.  R. 

SCOLASTIQUES ,  nom  par  lequel  on  désignait,  chez 
les  Romains,  les  maîtres  d'éloquence  attachés  aux  écoles 
impériales. 

SCGLIES,  couplets  chantés  vers  la  fin  des  repas  chci 
les  Grecs,  et  dont  Terpandre  passait  pour  être  l'inventeur. 
Plutarque  donne  quelques  détails  à  ce  sujet,  dans  son 
livre  des  Propos  de  table,  à  la  fin  du  l**"  Problème.  Il 
ne  reste  rien ,  ou  à  peu  près,  des  scolies  de  Terpandre, 
d'Alcée,  de  Sappho;  nous  en  avons  un  d'Hybrias  de  Crète, 
un  de  Gillistratc  d'Athènes,  et  quelques  fragments  de 
ceux  de  Pindare.  Scotie  vient  du  grec  skolios  (oblique 
tortu),  soit  à  cause  de  la  course  irrégulière  de  ce  cluin* 
autour  de  la  table,  soit  à  cause  des  irrégularités  de  forme 
et  des  licences  métriques  qu'on  s'y  permettait.  V.  //iï- 
toire  de  l'Académie  des  Belles- Lettres,  t.  IX,  p.  330. 

SCORDATURA,  mot  italien  qui  n'a  pas  d'équivalent 
en  français,  et  qui  signifie  l'action  de  désaccorder  les  in- 
struments pour  produire  des  efl'cts  particuliers.  Le  fSi- 
meux  violon  Paganini  fit  souvent  usage  de  la  scordatmra; 
les  guitaristes  y  ont  aussi  recours. 


scu 


1627 


SEC 


8C0BPT0N,  machine  de  gaerre.  V.  notre  Dictionnaire 
d$  Riographie  «t  d'Histoire. 

SOOTIE,  moulure  ronde  en  creux  bordée  de  deux  fllets 
plats,  qui  se  place  entre  les  tores  des  bases  attiques, 
corinthiennes,  et  composites.  LorsquMI  y  en  a  deux  dans 
une  môme  base,  comme  à  la  base  corinthienne,  on  les 
nomme  scotie  supérieure  et  scotie  inférieure.  La  scotie 
s'appelle  aussi  Rond-creux  et  TrochUe  (du  grec  irokkos, 
roue,  cercle). 

SCOTISTES.   V.  SCOLASTÎQOB. 

SCRAMSAX  ou  SCRAMASAX ,  poignard  à  double  tran- 
ant  doit  se  servaient  les  Franks. 
SCI\EEN.  V.  ÉCRAN. 

SC-RIBE  (du  latin  scriba,  écrivain),  celui  qui  fait  le 
mH\eT  de  copiste.  A  la  cour  des  rois  de  Juda,  le  mot  Scribe 
(ir-sif^naît  un  haut  personnage,  faisant  l'office  ^e  secrétaire. 
Dans  Jérémie  et  les  Machabées,  il  est  appliqué  &  un  com- 
missaire d'armée,  chargé  de  faire  le  dénombrement  des 
troupes.  Le  plus  ordinairement,  la  Bible  appelle  Scribes 
les  docteurs  qui  interprètent  la  loi,  qui  copient  et  expli- 
quent les  livres  saints;  on  distinguait  :  1"  les  scribes  de 
la  loi,  dont  les  décisions  étaient  reçues  avec  respect; 
3*  les  scribes  du  peuple,  qui  étaient  des  magistrats;  3°  les 
scribes  communs,  remplissant  les  fonctions  de  notaires 
publics  ou  de  secrétaires  du  Sanhédrin.  Chez  les  Grecs  et 
les  Romains,  les  Scribes  étaient  des  employés  subalternes 
qui  transcrivaient  les  lois,  lesédits,  les  juf^^ements  et  tous 
les  artes  publics  :  il  y  avait  des  scribes  prétoriens ,  ques- 
ioriens,  ediliens,  etc. 

SCRINIUM.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

SCRlPTlOiSAL,  nom  donné  autrefois  au  pupitre  que 
l'on  se  mettait  sur  les  genoux  pour  écrire,  ou  qui  était 
monté  sur  pieds. 

SCRIPTORILM,  salle  des  grands  monastères  où  Ton 
transcrivait  des  manuscrits. 
SCROBICl^LUS.  K.  Autel. 

SCRUTIN  (  du  latin  scrutari,  fouiller,  examiner),  opé- 
ration qui  consiste  h  recueillir  les  suffrages  d'une  assem- 
blée délibérante.  Dans  le  scrutin  secret ,  chaque  votant 
d(''pose  dans  l'urne  une  boule  blanche  ou  noire,  qui 
exprime  son  vote;  la  boule  blanche  signifie  l'acceptation, 
la  boule  noire  le  rejet  de  la  proposition  ou  du  projet  sur 
lequel  on  délibère.  Dans  le  scrutin  public ,  les  votants 
écrivent  sur  un  bulletin  leur  nom  avec  oui  et  non.  En 
matière  d'élections,  on  distingue  le  scrutin  simple,  ou 
individuel ,  dans  lequel  les  votants  ne  désignent  sur  leur 
bulletin  qu'une  seule  personne,  et  le  scrutin  de  liste,  où 
Ton  écrit  sur  le  bulletin  autant  de  noms  qu'il  y  a  de  no- 
minations à  faire.  Les  Scrutateurs  sont  ceux  qui  recueil- 
lent les  votes  et  en  font  le  dépouillement.  —  Ancienne- 
ment on  appelait  scrutin  l'assemblée  où  l'on  examinait 
les  dispositions  des  catéchumènes. 

SCU  DO,  monnaie.  V.no^re  Dictùmnairê  de  Biographie 
et  dHistoire. 

SCULPi'URE,  en  latin  sculpfura  [dQSCulpere,  graver, 
tailler  au  ciseau) ,  l'un  des  Beaux-Arts  (  V.  ce  mot) , celui 
qui  forme  une  figure,  une  image,  un  ornement  quel- 
conque, soit  en  taillant  à  Taide  du  ciseau  une  matière 
dure,  comme  le  bois,  l'ivoire,  la  pierre,  le  marbre,  etc., 
soit  en  façonnant  une  pâte  molle,  soit  en  coulant  des 
métaux.  Envisagée  par  rapport  aux  objets  qu'elle  repré- 
sente, la  Sculpture  comprend  la  Statuaire  ou  représenta- 
tion des  figures  animées,  et  la  Sculpture  d^ornements, 
qui  est  inséparable  de  l'Architecture.  D'après  la  manière 
dont  elle  représente  les  objets ,  elle  se  distingue  en  ronde- 
bosse  ou  plein  relief,  et  en  bas-relief  (  V.  ces  mots).  Enfin 
au  point  de  vue  des  procédés  employés ,  cet  art  embi*asse 
la  statuaire,  la  sculpture  proprement  dite,  le  modelage, 
la  ciselure,  et  Tart  du  fondeur  (F.  ces  mots  ).  On  a  réussi, 
depuis  le  xvfii*  siècle  surtout ,  à  exécuter  par  des  pro- 
cédés purement  mécaniques  la  plupart  des  ouvrages  de 
sculpture.  Les  principaux  de  ces  procédés  sont  le  mou- 
lage, le  tour  à  portrait,  Vestampage  (  V.  ces  mots). 

Sur  l'histoire  de  la  Sculpture,  on  peut  consulter,  outre 
les  articles  de  ce  Dictionnaire  qui  lui  ont  été  consacrés 
pou*-  chaque  pays,  les  auteurs  suivants  :  Émeric  David, 
Bec'erches  sur  Vart  statuaire,  1805,  et  Hiataire  de  la 
sculpture  française. puhWée  par  P.  Lacroix  et  Duseigneur, 
1853;  Cigognara,  Histoire  de  la  sculpture,  en  italien, 
Venise  1K13,  et  Prato,  1824:  de  Clara'-,  Musée  de  sculp- 
ture au/ique  et  moderne,  1827-52  ;  Flaxman,  leçons  sur 
la  scilpture,  Londres,  1829;  Folkstone  Williams,  His- 
toire de  la  sculpture  sur  bois,  en  anglais ,  Londres,  1835. 
sc!  i.pTf  PE  { Académie  de  Peinture  et  de).  V,  Peinture. 
SCURAA ,  nom  que  les  anciens  Romans  donnaient  à 


tout  citoyen  pauvre  qui  s'attachait  à  un  riche  et  se  fai- 
sait nourrir  par  lui.  Les  scurrœ  ayant  cherché  à  se  rendre 
agréables  par  toutes  sortes  do  flatteries,  de  bassesses  et 
de  farces,  leur  nom  devint  synonyme  de  parasite  et  de 
bouffon. 

SCUTUM.     i  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

SCYTALE.    I      Biographie  et  d'Histoire. 

SCYTHIQUE  (Ordre).  V.  Ordre  de  bataille. 

SCYTHIQUES  (Ungucs),  dénomination  qu'on  ap- 
plique quelquefois  aux  langues  ouralo-altaïques  (  V,  ce 
mot). 

SDRUCCIOLO ,  mot  italien  employé  en  Musique  pour 
indiquer  une  certaine  manière  de  glisser  enharmonique- 
ment  avec  la  voix  sur  quelques  sons.  C'est  un  agrément 
employé  surtout  dans  le  Cantabile. 

SKBKHA,  nom  domié  en  Afrique  à  des  lacs  formés  au 
milieu  de  montagnes  sans  issue  par  les  eaux  qui  viennent 
s'y  réunir.  Ces  eaux  sont  généralement  chargées  de  sel , 
dont  le  sol  est  imprégné.  Elles  s'évaporent  pendant  les 
chaleurs  de  l'été,  et  finissent  quelquefois  par  disparaître. 

SECEDERS,  nom  d'une  secte  dissidente  de  l'Kglise 
presbytérienne  d'Ecosse.  Cette  secte  remonte  h  1733:  elle 
n'a  rien  changé  aux  doctrines,  mais  son  organisation  est 
essentiellement  démocratique;  tous  les  fidèles  concou- 
rent à  l'élection  de  leurs  prêtres ,  qui  ne  connaissent  au- 
cune hiérarchie. 

SÉCHERESSE,  défaut  du  style  qui  consiste  à  ne  faire 
qu'indiquer  les  idées,  à  ne  leur  donner  aucun  dévelop- 
pement ,  à  omettre  tous  les  détails.  Le  style  précis  dit 
tout  ce  qu'il  faut;  le  style  sec  ne  le  dit  Jamais.  Les  id('>e3 
qu'il  exprime  sont  incomplètes,  et  l'on  ne  voit  pas  le 
rapport  qu'elles  ont  entre  elles  ;  la  composition  manque 
alors  tout  à  la  fois  de  clarté  et  d'intérêt. 

SECHOUANA.  V.  Siciiouana. 

SECONDE,  nom  donné,  dans  les  établissements  d'in- 
struction publique,  à  la  classe  qui  vient  au-dessous  de  la 
Rhétorique,  celle-ci  étant  considérée  comme  la  Première. 

SECONDE,  en  termes  de  Musique,  intervalle  dissonant 
d'un  degré  conjoint.  La  seconde  mineure  est  formée  d'un 
demi-ton  {ut  k  ré  bémol);  la  seconde  majeure,  d'un  ton  (ut 
à  ré  naturel  )  ;  la  seconde  augmentée,  d'un  ton  et  demi  (  tU 
à  ré  dièse).  —  L'accord  de  seconde,  composé  du  son  fon- 
damental dissonant,  de  sa  seconde,  de  sa  quarte  et  de  sa 
sixte  {fa,  sol ,  si,ré) ,  est  le  3»  renversement  de  l'accord 
de  septième  :  la  seconde  peut  être  mineure,  majeure  ou 
augmentée,  la  quarte  juste  ou  augmentée,  et  la  sixte  ma- 
jeure ou  mineure.  Vaccord  de  seconde  et  quinte  est  com- 
posé du  son  fondamental,  de  la  seconde  et  de  la  quinte 
(fa,  sol,  ut)  '.  h  quatre  parties  on  y  aioute  ou  la  sixte 
Ifa,  sol ,  ut,  ré) ,  ou  la  quarte  {ut,  ré,  fa  ,,sol),  ou  la 
tierce  {mi,  fa,  sol  dièse, si) ^ ou  la  septième  {fa,  sol, 
ut,  mi). 

SECONDE ,  en  termes  d'Escrime,  coup  d'épée  qu'on  allonge 
à  son  adversaire  de  dehors  et  sous  les  armes.  C'est  comme 
la  tierce ,  si  ce  n'est  que  la  lame  passe  sous  le  bras  de 
l'adversaire  ;  de  là  le  nom  de  tierce  basse  qui  lui  est  aussi 
donné. 

SÉCOS,  nom  donné  au  naos  (  V,  ce  mot)  des  temples 
égyptiens. 

SLCOURS  AUX  ASPHYXIÉS  ET  AUX  NOYÉS.  Un 
échevin  de  Paris,  nommé  Pia,  eut  le  premier  l'idée,  en 
1772,  de  former  des  établissements  pour  ce  genre  de 
secours;  il  fit  établir  des  boites  fumigatoires.  Ces  instru- 
ments furent  perfectionnés  ensuite  par  Seanegatti ,  et  en- 
fin, en  177ft,  les  boites  de  secoura,  telles  qu'elles  existent 
aujourd'hui,  furent  composées  d'après  les  avis  de  Réaumur 
et  de  Portai.  Une  instruction,  rédigée  par  ordre  de  l'Ad- 
ministration, approuvée  par  le  Conseil  de  salubrité  en 
1850,  et  affichée  dans  chaque  corps  de  garde,  indique  les 
secours  à  donner  aux  asphyxiés  et  aux  noyés  ;  une  boite 
de  secours  doit  être  déposée  dans  les  mêmes  lieux. 

SECOURS  MUTUELS  (Sociétés  de), sociétés  formées  par 
des  personnes  qui  versent  périodiquement  dans  une  caisse 
commune  une  certaine  cotisation,  pour  venir  en  aide, 
dans  une  mesure  fixée  à  l'avance,  aux  sociétaires  vic- 
times des  chances  prévues  par  les  règlements  (chômage, 
maladie,  etc.).  De  tout  temps,  les  corporations,  confré- 
ries et  associations  suscitées  par  l'espnt  religieux,  par  la 
politique  ou  par  l'intérêt  industriel,  ont  assisté  ceux  de 
leurs  membres  qui  tombèrent  dans  le  besoin;  mais  cette 
assistance  était  arbitraire,  elle  dépendait  des  générosités 
individuelles,  et  le  secours  ne  pouvait  être  ni  fixe  ni 
certain.  Au  contraire,  dans  les  sociétés  de  secours  mu- 
tuels ,  la  quotité  des  mises  des  .sociétaires,  les  condi- 
tions, la  forme  et  la  proportion  de  l'assistance,  sont  dé- 
terminées. Le  premier  essai  en  France  fut  fait  en  ilbk 


SRC 


1628 


SËE 


par  les  six  corps  des  marchands  de  Paris,  soas  le  nom 
de  Maison  d* association;  l'entreprise  eut  peu  de  suite. 
Il  en  fut  de  même  d'une  Compagnie  d'assurance  pour  la 
santé,  proposée  en  1770  par  Cliamousset.  A  la  Révolu- 
tion^ jcs  ouvriers  ayant  voulu  s*associer  par  spécialité 
dN^tat,  l'Assemblée  (^.onstituanto  s*y  opposa  par  décret  du 
1i  juin  1791  :  c'était,  disait-on,  l'office  de  la  nation  de 
fournir  du  travail  aux  valides  et  des  secours  aux  in- 
firmes ;  mais  l'État  prenait  ainsi  des  engagements  qu'il 
ne  devait  ni  ne  pouvait  tenir.  En  1702,  un  médecin,  Mar- 
sillac,  conçut  le  projet  de  Sociétés  civiqties  qui  assure- 
raient des  secours  aux  artisans  rnïilad&H  et  nécessiteux , 
et  de  Maisons  d'industrie  qui  donneraient  gratuitement 
à  teurs  enfants  une  certaine  éducation  et  des  métiers. 
Toutefois  les  sociétés  de  secours  mutuels  formées  par  des 
ouvriers  laborieux  et  économes  ne  se  sont  établies  que 
depuis  le  commencement  du  \i\*  siècle.  En  1800,  la 
Société  Philanthropique  de  Paris  institua  dans  son  sein 
un  Comité  chargé  d'étudier  l'organisation  et  de  favoriser 
le  développement  de  ces  sociétés;  en  1820,  elle  publia 
une  instruction  détaillée  sur  l'économie  des  Sociétés 
d'amis  {Friendly  societies)  qui  existaient  déjà  depuis 
longtemps  en  Angleterre.  Depuis  la  Révolution  de  1830 
surtout,  l'appui  et  le  patronage  des  municipalités  firent 
naître  diverses  associations  dans  les  départements,  par 
exemple  à  Rouen  et  à  Nantes  en  1832,  à  Metz  et  h  Niort 
en  1838,  à  Poitiers  en  1840,  à  Colmar  en  1840,  à  Mul- 
house en  1847. 

Les  sociétés  de  secours  mutuels  sont  des  institutions 
e^^sentiellemcnt  locales.  Leur  intervention  e^t  préférable 
à  tout  autre  mode  d'assistance,  parce  qu'elle  ne  peut 
jamais  avoir  l'apparence  humiliante  de  l'aumône.  Dans 
le  plus  grand  nombre  de  localités,  elles  sont  ouvertes  à 
dus  personnes  de  toute  condition,  et  peuvent  être  com- 
posées à  la  fois  de  membres  elTectifs,  soumis  aux  mêmes 
contributions,  jouissant  des  mômes  droits,  et  de  mem- 
bres honoraires,  qui,  tout  en  payant  là  cotisation  conve- 
nue ,  renoncent  à  profiter  des  profits  qu'offre  l'associa- 
tion. Dans  les  villes  les  plus  importantes,  les  sociétés 
sont,  formées  entre  personnes  de  même  profession  ;  elles 
ont  l'avantage  de  constituer  autant  de  familles,  vivant  de 
la  même  vie,  animées  du  même  esprit  de  confraternité, 
où  l'on  apprécie  mieux  les  besoins  de  chacun,  et  où  il 
est  difficile  de  se  faire  donner  des  secours  sans*  y  avoir 
droit;  mais  elles  ont  aussi  un  danger,  c'est  de  pouvoir 
plus  facilement  dégénérer  en  foyers  de  coalitions  indus- 
trielles et  même  d'agitations  révolutionnaires.  Une  loi 
du  15  juillet  1850,  sans  porter  atteinte  à  la  liberté  des 
sociétés,  a  offert  certains  privilèges  à  celles  qui  se  fe- 
raient reconnaître  comme  établissements  d'utilité  pu- 
blicfue.  Pour  obtenir  ce  titre,  elles  doivent  :  1°  se  borner 
à  distribuer  des  secours  temporaires,  et  ne  point  pro- 
mettre de  pensions  de  retraite;  2°  compter  au  moins  100 
membres,  et  ne  pas  dépasser  2,000,  &  moins  d'autorisa- 
tion ministérielle  accordée  sur  la  demande  du  maire  et 
du  préfet  ;  3"  accepter  la  protection  et  la  surveillance  de 
l'autorité  municipale;  4°  fixer  la  cotisation  de  leurs 
membres  d'après  les  tables  de  maladie  et  de  mortalité 
dre>sées  ou  acceptées  par  le  |!;ouvernement.  A  ces  condi- 
tions, elles  possèdent  le  droit  de  recevoir  des  donations 
et  legs  dûment  autorisés,  celui  de  faire  des  dépôts  aux 
caisses  d'épargne,  l'usage  jE^tuit  des  locaux  nécessaires 
à  leurs  réunions,  l'exemption  des  droits  de  timbre  et 
d'enregistrement  pour  les  actes  qui  intéressent  l'asso- 
ciation, et  on  leur  donne  les  livrets  et  registres  requis 
pour  l'administration  et  la  comptabilité.  Un  décret  du 
26  mars  1852  a  cherché  à  écarter  les  périls  que  pour- 
raient présenter  les  sociétés  de  secour»  mutuels  :  pour 
être  approuvées^  elles  doivent  réserver  an  chef  deTEtat 
In  nomination  de  leurs  présidents,  consacrer  l'admission 
de  membres  honoraires^  ne  pas  promettre  de  secours  en 
cas  (le  chômage,  stipuler  qne  le  nombre  des  membres  net 
peut  excéder  500  (à  moins  d'une  autorisation  préfecto- 
rale), n'apporter  aucune  modification  aux  statuts  et  au 
règlement,  sans  autorisation  préalable.  Au  1"  janvie* 
18H8,  on  comptait  en  France  4,1 27  Sociétés  approuvées^ 
et  l,7(i2  Sociétés  simplement  ati/o/'}>^f^.  Les  premières 
comptaient  plus  de  700,000  membres  participants;  le 
nombre  des  membres  honoraires  dépassait  1 00,000.  Les 
secondes  ne  comptaient  que  9,096  membren  honoraires 
et  108,383  membres  participants.  L'avoir  total  des  so- 
ciétés était  d'environ  46  millions. 

Kn  Angleterre ,  les  Sociétés  d^amis  ont  pris  un  déve- 
loppement considérable.  On  voit,  par  un  rapport  présenté 
à  rAsscmbh'c  lé?;islativc  de  France,  le  0  octobre  1849, 
qu'il  y  avait  alors  33,223  sociétés,  comprenant  3,052,000 


individus,  et  possédant  un  revenu  annuel  do  1S5  mil- 
lions de  francs  et  un  capital  accumulé  de  280  millions; 
elles  embrassaient  donc  la  moitié  de  la  population  mâle 
et  adulte.  —  V,  Cerfbeer,  Des  sociétés  di  bienfaisance 
mutuelle,  1830;  Deboutteville,  Des  sociétés  de  prévoyance 
et  de  secours  mutuels,  Rouen,  1842;  Ad.  Bernard,  Trailé 
pratique  dès  Sociétés  de  secours  mutuels,  Paris,  1853; 
Laurent,  Études  sur  les  Sociétés  de  prévoyance  oude  se- 
cours  mutuels,  1856,  in-16.  ^     B. 

SECOURS  PUBLICS^  V.  Assistance,  BnsiiPAiSARCB, 
Charité  légale.  Police,  etc. 

SECRET,  en  latin  secretum  (de  secemere,  mettre  à 
part  ).  En  termes  de  Procédure  criminelle,  mettre  au 
secret,  c'est  isoler  un  prisonnier,  et  l'empêcher  d'avoir 
aucune  communication,  même  avec  ses  codétenus.  La 
mise  au  secret  ne  peut  avoir  lieu  qu'en  vertu  d'une  or- 
donnance dtf  juge  d'instruction  ou  du  président  des 
assises.  —  Quiconque,  chargé  ou  instruit  soit  officielle- 
ment, soit  à  raison  de  son  état,  du  secret  d'une  négo- 
ciation ou  d'une  expédition,  le  livre  aux  étrangers  ou 
ennemis,  est  passible  de  la  déportation  {Code  pénal, 
art.  76;  Loi  des  8-16  juin  1850).  —  L'action  de  livrer  des 
secrets  de  fabrique  à  quelqu'un  en  France  est  punie  d'un 
emprisonnement  de  3  mois  à  2  ans,  et  d'une  amende  de 
10  à  200  fr.  ;  si  c'est  à  un  étranger,  l'amende  est  de  500  à 
20,000  fr.,  plus  une  condamnation  à  réclusion  {Code 
pénal,  art.  418}.  —  Pour  le  secret  des  lettres  à  la  poste, 
V»  Lettre. 

SECRÉTAIRE ,  meuble  où  Ton  renferme  les  papiers 
précieux,  et  sur  lequel  on  peut  écrire.  Les  secrétaires  ont 
souvent  des  serrures  à  secret  ;  l'art  de  l'ébéniste  s'y  dé- 
ploie dans  toute  sa  richesse. 

SBCRéTAiRE,  cclui  dout  l'emploi  est  de  faire  et  d'écrire 
des  lettres,  de  rédiger  des  actes,  pour  une  personne  à 
laquelle  il  est  attaciié.  Dans  les  Ministères  et  dans  les 
graiides  Administrations,  il  y  a  des  secrétaires  généraux, 
secrétaires  du  cabinet  ou  chefs  du  secrétariat,  qui  ont 
mission  d'ouvrir  et  de  distribuer  les  lettres,  de  contre- 
signer les  actes  administratifs,  etc. 

SBCRéTAiRES  o'éTAT.         )  V.  notre  Dictionn,  de  Bio^ 

SKCR^AiRES  DR  LA  If  AIN.  ]     graphie  et  d'Histoire. 

SECRëTARIUM,  abside  secondaire  des  basiliques,  ser- 
vant de  sacristie. 

SECRÈTE ,  oraison  que  le  prêtre  récite  teat  bas  à  la 
messe,  immédiatement  avant  la  Préface.  —  On  nomme 
tables  des  secrètes  les  trois  tableaux  d'autel  sur  lesquels 
l'officiant  lit  le  Canon  de  la  messe,  le  Lavabo,  et  l'Évan- 
gile de  S^  Jean. 

SECTE  (du  latin  secta\^  parti  composé  de  personnes 
qui  font  profession  de  la 'même  doctrine.  Le  root  était 
employé  chez  les  Anciens  pour  désigner  les  écoles  phi- 
losophiques ou  les  partis  politiques  :  ainsi,  l'on  disait  la 
secte  stoïcienne,  la  secte  de  César,  etc.  Pour  les  Mo- 
dernes, il  ne  s'applique  guère  qu'aux  partis  religieux,  et 
ceux  qui  s'en  servent  en  parlant  de  leurs  adversaires  y 
attachent  une  idée  d'erreur. 

SÉCULAIRE  (Poôme),  nom  donné  chez  les  anciens 
Romains  aux  pièces  de  vers  qui  se  chantaient  ou  se  réci- 
taient aux  Jeux  Séculaires  {V.  ce  mot  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d'flistoire).  Nous  avons  un  poème 
séculaire  {Carmen  seculare)  d'Horace. 

SÉCULARISATION,   i   V.  notre  Dictionnaire  de  Bith 

SÉCULIER  (Clergé).  I      graphie  et  d'Histoire. 

SÉCURITÉ  PUBLIQUE,  condition  essentielle  de  l'exis- 
tence et  de  la  prospérité  des  nations.  Elle  embrasse  la 
sûreté  de  l'État,  la  protection  des  personnes  et  des  pro- 
priétés. L'autorité  qui  en  est  chargée  se  nomme  Pmtcf, 
dans  le  sens  le  plus  large  de  ce  mot.  V,  Police. 

SÉDANOISE.   V.  Caractères  d'imprimerie. 

SÉDITION,  en  latin  seditio  (de  sedis  exitio,  action  de 
sortir  du  repos),  révolte  contre  l'action  légale  des  agents 
du  pouvoir.  Tout  ce  qui  tend  à  compromettre  la  sûreté 
intérieure  ou  extérieure  de  l'État,  la  résistance  avec  at- 
troupement aux  ordres  légaux  de  ceux  qui  sont  revêtus 
de  l'autorité  publique,  la  dévastation  et  le  pillage  publics, 
les  violences  commises  par  plusieurs  individus  réunis 
dans  le  but  d'empêcher  autrui  d'exercer  ses  droits  civils 
ou  politiques,  les  provocations  à  la  révolte  par  discourt 
publics,  placards  affichés,  écrits  imprimés  ou  non  im- 
primés, constituent  le  crime  de  sédition,  puni  nar  les 
art.  60  et  82  du  Code  pénal.  V.  Attrodpevent,  âiEim, 

RÉBELLION. 

SÉDUCTION,  y.  Corruption,  Enlèvement. 

SÉEZ  (Église  Notre-Dame,  à).  Quelques  antiquaires 
normands  ont  prétendu  que  ce  monument  remontait  aux 
premières  années  du  xi*  siècle  ;  mids  les  caractères  ar- 


SEI 


1629 


SËM 


ehitectoniques  de  rédlflce  permettent  d'affirmer  que  le 
corps  est  de  la  fin  du  xii*  siècle  et  du  commencement 
du  XIII*.  Oii  sait,  d^ailleurs,  qu'une  église  antérieure  fut 
brûlée  en  1048,  et  qu'une  autre,  pour  laquelle  on  avait 
voulu  employer  les  antiques  fondations,  s'écroula  en 
IIU.  Une  consécration  nouvelle  eut  lieu  en  1126,  et  les 
travaux  duraient  encore  80  ans  plus  tard.  La  cathédrale 
de  Séez  subit  ensuite  des  retouches  nombreuses  :  ainsi, 
la  nef,  bâtie  au  commencement  du  xiii*  siècle,  fut  rema- 
Dire  dans  sa  partie  supérieure  un  demi-siècle  après  ;  le 
chœur,  presque  entièrement  détruit  par  un  incendie, 
dut  ùtrc  repris  de  fond  en  comble  vers  1260;  vers  la  fin 
du  XIV*  siècle,  on  renforça  les  contre-forts  extérieurs  du 
chœur.  Toute  la  construction  a  fait  de  sérieux  mouve- 
ments, ct^   malgré  de  fréquentes  réparations,  la  cathé- 
drale de  Séez  est  un  monument  fort  compromis.  A  l'en- 
trc-(Toi<«oment  des  nefs  et  du  transept ,   s'élevait  une 
pyramide;  on  lui  substitua,  au  xvii*  siècle,  un  dôme 
quadrangulaire,  qui  lui-même  a  fait  place  à  une  flèche 
aiguô  en  forme  d'obélisque.  —  L'extérieur  de  la  cathé- 
drale de  Séez  n'a  rien  de  remarquable ,  sauf  le  grand 
portail,  qui  est  d'une  sévérité  imposante,  et  qui  pré- 
sente, au-dessus  de  la  porte  d'entrée,  deux  étages  d'ar- 
cades, disposition  à  peu  près  unique  en  France.  Les  sta- 
tues et  les  autres  sculptures  ont  été  mutilées..  Les  deux 
tours,  surmontées  de  flèches  iné^les  et  dont  la  plus 
élevée  atteint  75  met.,  produisent  un  bel  effet.  L'inté- 
rieur de  rédifice  se  distingue  par  la  légèreté  de  l'en- 
semble et  l'harmonie  des  parties  ;  les  voûtes  sont  large- 
ment exécutées;  les  piliers,  d'un  profil  élégant  et  hardi, 
ont  des  chapiteaux  formés  de  riches  feuillages.  Les  ar- 
cades et  les  fenêtres  passent  de  l'ogive  très-obtuse  à 
Togive  aigu 6  en  descendant  vers  l'entrée.  La  portion  la 
plus  belle  est  le  chevet,  avec  ses  cinq  chapelles  profondes; 
malheureusement  la  voûte  du  chœur,  primitivement  en 
pierre,  s'est  écroulée  au  commencement  de  notre  siècle, 
et  n'a  été  reconstruite  qu'en  bois.  Le  chœur  contient 
quatre  bas-reliefs  d'un  bon  style,  et  dont  les  sujets  sont 
tirés  de  la  vie  de  la  S^*  Vierge.  Il  y  en  a  un  autre  très- 
beau  à  l'autel,  qui  représente  l'extraction  des  reliques  de 
S*  Gervais  et  de  S*  Protais.  Les  deux  extrémités  du  tran- 
sept ont  été  décorées  de  deux  magnifiques  roses  au 
XVI*  siècle.  B. 

SÉGESTE  (Ruines  de),  en  Sicile.  Ces  ruines,  indépen- 
damment de  quelques  débris  informes,  se  composent 
d'un  temple  et  d'un  théâtre.  Le  temple,  environné  de 
profonds  ravins,  parait  avoir  été  isolé  de  la  ville,  et  l'on 
oe  sait  à  quelle  divinité  il  était  consacré.  Il  est  d'ordre 
dorique,  et  forme  un  rectangle  allongé,  de  59  met.  de 
longueur  sur  25  de  largeur  ;  36  colonnes  l'environnent , 
dont  6  sur  chacune  des  faces  orientale  et  occidentale,  et 
reposent  sur  un  stylobate  divisé  en  quatre  gradins;  elles 
ont  9'",30  de  hauteur,  2"*  de  diamètre,  et  supportaient 
un  entablement  gigantesque  de  près  de  3™.  Des  avances 
laissées  aux  pierres  de  la  base,  et  quelques  traces  de 
cannelures  commencées,  donnent  lieu  de  croire  que  l'édi- 
fice ne  fut  pas  achevé  ;  il  semble  aussi  qu'il  n'eut  jamais 
de  toiture.  Le  thé&tre  de  Ségeste,  situé  à  200  met.  du 
temple,  est  tourné  vers  l'occident  :  la  partie  circulaire, 
adossée  à  un  rocher  et  composée  de  20  rangs  de  gradins, 
a  115  mot.  d'étendue;  une  galerie  s'étend  derrière  les 
gradins,  et  reçoit  5  escaliers,  dont  deux,  aux  extrémités, 
répondent  à  des  vomitoires  communiquant  avec  la  mon- 
tagne. 
SÉGOVIE  (Alcazarde).  K.  Alcazar. 
séGOViB  (Aqueduc  de),  monument  romain  dont  la  grâce 
et  la  légèreté  rappellent  notre  pont  du  Gard.  Il  en  reste 
encore  119  arcades  sur  deux  et  parfois  trois  rangs  su- 
perposés; les  pierres  en  ont  été  taillées  avec  une  ex- 
trême précision,  et  ne  sont  liées  entre  elles  par  aucune 
o>pèc6  de  ciment.  Cet  aqueduc,  qui  atteint  une  élévation 
r'o  34  met.,  traverse  toute  la  ville,  sur  une  étendue  de 
^18  met.,  et  domine  la  plupart  des  maisons  situées  dans 
'  i  partie  basse. 

SEGUIDILLA,  forme  de  vers  particulière. à  la  poésie 
espagnole  {V.  Espagnole  —  Poésie);  —  air  de  chant  et 
de  dianse  à  3  temps  et  d'un  mouvement  rapide.  Il  est 
moins  étendu  que  le  boléro  et  le  fandango,  dont  il  a  le 
caractère;  la  ritournelle  se  fait  entendre  au  commence- 
ment et  même  au  milieu  de  chaque  couplet. 
SEID.  I  V,  ces  mots  dans  notre  Dicttonnaire  de 

SEIGNEUR,  f      Biographie  et  (f  Histoire. 
SEILLE,  ancien  vase  particulièrement  employé  pour 
porter  Teau  bénite. 
SEIM ,  nom  que  portait  autrefois  la  Diète  de  Pologne. 
SEINE  ou  SENNE ,  filet  de  pèche,  beaucoup  plus  long 


Sue  large,  garni  en  tête  de  flottes  et  en  bas  de  plombs  ou 
e  cailloux,  et  que  l'on  traîne  sur  le  fond  des  eaux  et  sur 
les  grèves. 

SEING  (du  latin  signurrif  signe,  marque),  signature 
apposée  par  une  personne  au  bas  d'une  lettre  ou  d'un 
acte,  pour  les  confirmer  ou  les  rendre  valables.  Un  blanc 
seing  est  un  papier  signé  d'avance  et  que  l'on  confie  à  un 
tiers  pour  qu'il  le  remplisse  à  volonté.  On  appelle  Seing 
privé  une  signature  qui  n'a  point  été  faite  en  présence 
d'un  officier  public,  et  on  oppose  les  Actes  sous  seing 
privé  aux  Actes  notariés  ou  authentiques.  Toutes  les 
transactions  de  la  vie  privée  peuvent  être  faites  sous 
seing  privé,  excepté  les  contrats  de  mariage,  les  dona- 
tions, les  actes  respectueux,  les  constitutions  d'hypothè- 
ques, les  sociétés  anonymes,  les  emprunts  avec  subroga- 
tion. Les  parties  peuvent  charger  des  tiers  de  rédiger 
leurs  actes  sous  seing  privé;  mais  il  est  d'usage  qu'elles 
mettent  au  bas  :  Approuvé  Vécriture  ci-dessus,  et  elles 
doivent  les  signer.  Les  personnes  qui  ne  savent  pas  si- 
gner ne  peuvent  faire  des  actes  sous  seing  privé  en  y 
apposant  seulement  une  croix.  Tout  acte  sous  seing  privé 
contenant  des  conventions  synallagmatiques  doit,  à  peine 
de  nullité,  contenir  la  mention  expresse  qu'il  en  a  été 
fait  autant  d'originaux  qu'il  existe  d'intérêts  distincts. 
Ces  actes  sont  soumis  au  timbre;  la  formalité  de  l'enre- 
^strement  leur  donne  seule  une  date  certaine  et  authen- 
tique, et  ceux  qui  ne  l'ont  pas  sont  rejetés  par  les  tribu- 
naux. V.  Biret,  Manuel  des  actes  sous  signatures  privées, 
1836,  inS°  ;  Malepeyre,  Traité  jfratique  des  actes  privés, 
1836,  in-18;  Pivert,  Fonnulaire  universel  et  raisonné 
des  actes  sous  seing  privé,  1844,  in-8*;  Frémy-Li^ne- 
ville,  Dictionnaire  général  des  actes  sous  seing  privée 
1850,  2  vol.  in-8°;  Lhoste,  Le  Praticien  de  la  ville  et  de 
la  campagne,  1852,  in-12;  Lecerf,  Traité  complet  des 
actes  sous  seing  privé,  2*  édit.,  1854,  in-12  ;  Pilard,  Jlfct- 
nuel  des  a^tes  sous  seing  privé,  1856,  in-12. 

SEL  (Impôt  du).  V.  Gabelle,  dans  notre  Dictiennairf 
de  Biographie  et  d^  Histoire, 

S^XAM.  V.  Fleurs  (Langage  des). 

SÉLANDRE.  V.  CHéL\NDB. 

SÊLINONTE  (Ruines  de),  en  Sicile.  Ces  ruines,  fort 
intéressantes  pour  les  antiquaires,  et  les  architectes ,  ne 
présentent  au  premier  abord  que  des  monceaux  de  co- 
lonnes,, de  corniches,  d'architraves,  et  des  restes  de  fon- 
dations et  de  murailles.  Mais  on  parvient  ensuite  à  dis- 
.  tingucr  l'enceinte  de  l'Acropole,  et,  dans  cette  enceinte, 
trois  temples  dirigés  parai ièlq^inent  du  côté  de  l'Orient, 
et  différant  entre  eux  par  les 'dimensions.  Le  plus  grand 
a  mérité  le  nom  de  Piliers  des  Géants  que  lui  donnent 
les  habitants  du  pays,  car  c'était  un  des  plus  vastes  de 
l'antiquité  grecque  :  sa  longueur  est  de  110  met.,  et  sa 
largeur  de  49  met.  Deux  métopes  qui  en  faisaient  partie, 
et  qu'on  a  transportées  au  musée  de  Palerme,  rappellent 
les  types  de  la  sculpture  égyptienne  ;  elles  offrent  un  in- 
térêt d'autant  plus  grand ,  qu'elles  sont  antérieures  à 
celles  d'Kgine,  et  indiquent,  par  conséquent,  le  pas<age 
entre  le  style  égyptien  et  l'art  grec.  Le  temple  est  périp- 
tère  et  hexastyle;  il  est  soutenu,  dans  sa  longueur,  par 
17  colonnes,  disposition  dont  on  n'a  pas  d'autre  exemple; 
la  hauteur  des  colonnes,  y  compris  le  chapiteau,  est  d'un 
peu  plus  de  5  met.  V.  Pisani,  Memoria  suite  opère  di 
scoltura  in  Selinunte  ultimamente  scoperte,  Palerme, 
1824  ;  Harris  et  Angell,  Sculptured  Métopes  discovered 
amongst  the  ruins  of  the  temples  of  the  ancient  city  of 
Selinus;  Hittorff  et  Zanth,  Architecture  antique  de  la 
Sicile,  Paris,  1827  et  suiv.  ;  Martclli,  Le  anlichità  dei 
Siculi,  Aquila,  1830;  Serra  di  Falco,  Le  antichità  délia 
Sicilia,  Palerme,  1834-37. 

SELLE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie  et  d'Histoire. 

SELLETTE,  petit  siège  de  bois  fort  bas  sur  lequM, 
avant  1780,  on  obligeait  un  accusé  de  s'asseoir  pour  subir 
le  dernier  interrogatoire,  lorsque  les  conclusions  du  mi- 
nistère public  tendaient  à  une  peine  afilictive. 

SELLIERS,  ancienne  corporation,  qui  avait  S'  Éloi  pour 
patron.  Elle  absorba  les  Chapuiseurs.  Les  limites  qui  la 
séparaient  de  celles  des  Bourreliers  et  des  Lormierz 
furent  souvent  assez  incertaines. 

SEMAINE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio* 
graphie  et  d^Histoire, 

SEMAINIER,  celui  qui  est  chargé  de  faire  un  service 
quelconque  pendant  huit  jours  de  suite. 

SÊMANTflRION  ou  SÊMANTRON,  instrument  de  per- 
cussion des  Grecs,  consistant  en  une  planche  sur  laquelle 
on  frappait  avec  un  marteau.  C'était  une  espèce  de  cré- 
celle, dont  on  se  servit  dans  l'Église  grecque  pour  appeler 


SÉM 


1«30 


SEM 


les  fidèles  aax  offices  de  la  Semaine  sainte,  quand  les 
cloches  sont  muettes. 

SÉMAPHORE  (du  grec  sema,  signal,  et  p1iérô,JQ  porte), 
m&t  établi  sur  une  côte  ou  dans  un  port,  et  qui  sert,  au 
moyen  d'ailes  semblables  à  celles  du  télégraphe  aérien,  à 
faire  des  signaux. 

St^MBELLA,  monnaie  romaine.  V.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

SÈME  ou  SEPME  (du  latin  septimus,  septième),  vieux 
mot  désignant  le  service  mortuaire  qui  se  faisait  autrefois 
le  7*  jour  aprè»  le  décès. 

SÉMÉIOLOGIE,  SÉMÉIOGRAPHIt:  (du  grec  sêméion, 
signe  ),  termes  employés  Quelquefois  en  Musique  comme 
synonymes  de  iVotofton  (K.  ce  mot), 

SEMESTRE  (Congé  de).  V.  Congé. 

SEMI-BRÈVE,  ancienne  note  de  Musique,  en  forme  de 
losange.  Elle  correspondait  à  ce  que  nous  nommons  la  ' 
ronde. 

SEUI-DOUBLE,  degré  de  festivité  en  usage  dans  TE- 
glise  catholique,  et  placé  entre  le  Double  et  le  Simple. 

SEMI -FUSA,  ancienne  figure  de  notation  musicale, 
répondant  à  notre  croche. 

SÉMINAIRE.  j  V.  notre  Dictionnaire  de  BioQror 

SEMIS,  monnaie.  (    phie  et  d* Histoire» 

SÉMITIQUES  (Langues),  dénomination  introduite  dans 
la  science  par  Eichhorn  pour  désigner  les  langues  parlées 
par  les  peuples  Sémites,  et  qui  a  remplacé  relie  de  Lan" 
gués  orientales,  devenue,  par  TefTet  des  progrès  des  étu- 
des, insv:fTisante  et  peu  pri^rise.  Elle  est  elle-même  dôfec- 
tiifîuse,  en  admettajit  les  données  ethnologiques  de  la 
Bible,  puisque  les  Phéniciens,  dont  Tidiomc  appartient 
a  cette  famille,  descendent  de  Cham,  et  que  les  Elamites 
ou  Perses,  do  race  sémitique,  ne  parlaient  pas  une 
langue  si^mitique.  La  famiile  des  langues  sémitiques  se 
divise  en  trois  branches  :  1*  Varaméen ,  comprenant  le 
chaldéen  et  le  syriaque  ;  2"  le  cananéen,  dont  font  partie 
]q phénicien  et  V hébreu;  3°  V arabe,  auquel  on  peut  ratta- 
cher Véthiopien  {V.  ces  mots).  Ces  langues  pressentent  les 
caractères  suivants,  qui  les  distinguent  essentiellement 
des  langues  indo-européennes  {V.  ce  mot)  :  racines  pres- 
que toujours  composées  de  trois  lettres  ;  système  gram- 
matical où  dominent  surtout  la  roideur  de  l'élément 
consonnant  et  la  fluidité  de  l'élément  vocal  \  système  or- 
thographique d*apr^  lequel  il  n'y  a  que  les  consonnes 
qui  s'écrivent  comme  base  véritable  du  mot,  tandis  que 
les  voyelles  n'y  sont  qu'accessoirement  indiquées  lors-  ^ 

Su'elles  ne  sont  pas  le  plus  ordinairement  supprimées  ' 
ans  l'écriture;  prédominance  des  sons  gutturaux. Tandis 
que  les  formes  pour  les  divers  temps  manquent  à  la  con- 
lugaison,  il  y  a  abondance  d'inflexions  aptes  à  modifier 
la  signification  et  à  étendre  la  valeur  des  verbes,  à  la  fin 
desquels  s'unissent  les  suffixes  des  noms  personnels. 
Dans  le  rapport  du  génitif,  c'est  le  substantif  qui  se  mo- 
difie au  lieu  de  l'adjectif.  Privées  de  particules  et  de  con- 
jugaisons propres  à  préciser  le  rapport  des  paroles  entre 
elles,  les  langues  sémitiques  ne  sont  pas  de  nature  à 
élever  l'esprit  à  des  idées  abstraites  et  spéculatives  :  elles 
sont,  en  revanche,  très-favorables  aux  simples  récits 
historiques,  et  k  une  exquise  poésie  de  pures  impressions 
et  de  sensations  se  succédant  avec  rapidité.  Aussi  n'ont- 
elles  fourni  aucune  école  de  philosophie  rationnelle,  et, 
ians  leurs  plus  sublimes  compositions,  on  ne  rencontre 

Î>as  un  seul  élément  de  pensée  métaphysique.  Les  plus 
lautes  révélations  de  la  foi,  les  prophéties  les  plus  ef- 
frayantes, la  plus  sage  morale,  sont,  dans  la  Bible,  re- 
vêtues d'imaptes  -corporelles  :  il  faut  en  dire  autant  du 
Koran. 

Un  phénomène  assez  surprenant,  c'est  que  la  fa- 
mille des  langues  sémitiques  s'est  réduite  avec  le  temps 
à  un  seul  idiome,  l'arabe  :  aujourd'hui,  tout  ce  qui  s'écrit 
en  sémitique  dans  le  monde  s'écrit  sans  la  plus  légère 
nuance  de  dialecte;  les  idiomes  parlés  eux-mêmes  diflè- 
rent  assez  médiocrement  l'un  de  l'autre.  Tandis  que  les 
langues  indo-européennes  ont  eu  la  facilité  de  former  des 
langues  analogues,  et  que  le  latin,  par  exemple,  engen- 
dra les  langues  néo-latines,  les  Ian;;uo.s  sémitiques  ont 
abouti  à  l'unité,  mais  non  par  développement  orga- 
nique. Ces  langues  ont  aussi  une  nature  primitive  qui 
!d3  distingue  des  autres.  Partout,  en  effet,  les  langues 
nous  apparaissent,  à  leur  début,  synthétiques,  obscures, 
compliquées,  chargées  de  flexions  pour  exprimer  les  rap- 
ports infiniment  délicats  de  la  pensée  ;  l'esprit  y  accu- 
mule les  éléments  dans  une  confuse  unité,  et  perd  dans 
le  tout  la  vue  analytique  des  parties  :  le  besoin  d'un  lan- 
gage facile  porte  les  générations  postérieures  à  aban- 
donaer  la  langue  savante  des  ancêtres  ;  des  dialecte»  plu| 


clairs,  plus  explicites,  correspondant  à  des  progrès  d*ana« 
lyse,  séparent  ce  que  les  anciens  assemblaient ,  brisent 
les  mécanismes  de  l'ancienne  langue,  pour  donner  a 
chaque  idée  et  à  chaque  relation  son  expression  isolée. 
Au  contraire,  plus  on  remonte  vers  l'origine  des  langues 
sémitiques,  plus  elles  se  montrent  avec  un  caractère  de 
simplicité  :  plus  on  s'éloigne  de  leur  berceau,  plus  elles 
se  complètent  et  s'enrichissent.  Ce  sont  des  langues 
essentiellement  analytiques;  la  synthèse  n'existe  pas 
pour  elles,  et  ce  n'est  qu'avec  le  temps  et  par  de  ion^ 
eiïorts  qu'elles  sont  anivées  à  donner  une  expression 
complète  aux  opérations  logiques  de  la  pensée.  Au  lieu 
de  rendre  dans  son  unité  1  élément  complexe  du  dis- 
cours, elles  l'expriment  terme  à  terme.  Elles  ignorent 
l'art  d'établir  entre  les  membres  de  la  phrase  cette  réci- 
procité qui  fait  de  la  période  comme  un  corps  dont  les 
parties  sont  connexes,  de  telle  sorte  que  l'intelligence 
de  l'un  des  membres  n'est  possible  qu'avec  la  vue  collec- 
tive du  tout.  C'est  parce  qu'elles  furent  analytiques  dès 
le  premier  jour,  qu'on  remarque  peu  chez  elles  la  tendance 
à  remplacer  les  flexions  par  le  mécanisme  plus  commode 
des  temps  composés  et  des  particules.  V.  Renan,  Histoire 
générale  et  système  comparé  des  langues  sémitiques, 
Paris,  1855  ;  l'abbé  Leguest,  Études  sur  la  formalion  des 
racines  sémitiques,  1858. 

SEMI-TON.  V.  Ton. 

SEMI- VOYELLES,  c.-à-d.  demi-voyelles,  en  latin  sami- 
vocales,  en  grec  liémipliones ,  nom  donné  par  les  gi^am- 
mairiens  grecs  aux  lettres  X,  !&,  v,  p,  «,  C«  («  4^1  9"^* 
parait-il,  pouvaient  se  prononcer  isolément,  quoique 
d'une  manière  imparfaite  :  ils  les  opposaient  aux  lettres 
muettes,  qui  étaient  les  autres  consonnes.  En  latin,  le 
nom  de  seini-voyolles  était  donné  aux  consonnes  dont  le 
nom  commençait  par  une  voyelle,  f,  l,  m.  n,  r,  s,  x  {ef, 
el,  em,  en,  er,  es,  ix);  celles  au  contraire  dont  le  nom 
faisait  d'abord  entendre  la  consonne,  s'appelaient  mti^tes^ 
b,  c,  d,  p,  t,  etc.  (  be,  ce,  de,  pe,  fe,  etc.].  P. 

SEMONCl^,  en  termes  de  Marine,  signal  que  fait  od 
b&timent  de  l'État  à  un  navire  de  commerce,  par  un  coup 
de  canon  à  poudre  ou  à  l'aide  d*un  porte-voix,  pour  lui 
enjoindre  de  s'arrêter  et  de  se  soumettre  aune  visite. 

SEMONCËUR,  SEMONDEUR  ou  SEMONKUR,  vieux 
mots  désignant  autrefois  le  crieur  d'enterrement,  celui 
ui  distribuait  les  lettres  d'invitation,  et  aussi  le  porteur 
â  cercueils 

SEMUR  (Église  Notre-Dame,  à).  Fondée  en  1065  par 
Robert  le  Vieux,  duc  de  Bourgogne,  cette  église  fut  b&îie 
en  moins  de  G  ans  :  aussi  la  principale  nef  et  le  ponail 
avaient-ils  été  seuls  construits  avec  soin,  et  il  fallut,  ad 
xiv*'  siècle,  reconstruire  le  reste.  Un  incendie,  en  1591, 
consuma  les  campaniles  dont  étaient  surmontées  les  deux 
tours  du  portail.  La  tour  du  Nord  est  aujourd'hui  sur- 
montée d'une  horloge  et  d'un  méridien  sonnant.  Au- 
dessus  du  chœur  s'élève  une  flèche  en  pierre,  àiteClocher 
des  morts,  qui  renfermait  autrefois  un  trezeau  ou  carillon 
de  13  cloches.  L'édifice  entier  s'élève  de  9  marches  au- 
dessus  du  niveau  du  parvis.  Il  est  précédé  d'un  joli  porche 
du  XV'  siècle,  décoré  de  quatre  contre-forts  pyramidaux, 
et  surmonté  d'aune  galerie  à  jour  :  ce  porche  était  orné,  à 
l'intérieur,  de  nombreuses  statues  et  de  riches  sculprures, 
qui  ont  été  mutilées  à  la  Révolution.  Trois  portes,  dont 
les  sculptures  ont  été  mutilées,  donnent  entrée  dans 
l'Église,  qui  a  66  met.  de  longueur.  La  voûte  de  la  nef 
s'appuie  sur  12  piliers  à  colonnettes,  tandis  que  les  arc»- 
doubleaux  des  bas  côtés  reposent  sur  des  pilastres.  I.es 
bas  côtés  tournent  autour  du  sanctuaire,  qui  est  flanqué 
de  cinq  chapelles  absidalcs.  Un  triforium  règne  autour  do 
l'église;  seulement,  dans  le  chœur,  il  y  a  un  double  rang 
de  galeries.  Le  chœur  et  la  sacristie  sont  revêtus  de  bci-* 
séries  de  bon  goût;  le  maltre-autel  a  été  sculpté  par  uQ 
artiste  de  Semur,  Marion,  sur  les  dessins  de  Bruzard^ 
Dans  une  des  chapelles,  on  remarque  deux  volets  d'autel 
peints  au  xv*  siècle,  et  représentant  l'un  l'Adoration  des 
Mages,  l'autre  la  Circoncision.  La  chapelle  dite  des  Dra- 
piers est  fermée  par  une  belle  grille  en  fer  du  xiv*  siècle^ 
et  contient  d'intéressants  vitraux  où  l'on  a  représenté  le 
tissage,  la  tonte,  le  puignage  et  le  foulage  du  drap.  Il  y  s 
aussi  de  curievix  vitraux  dans  la  chapelle  des  Bouchers. 
Une  autre  chapelle  renferme  un  Saint  Sépulc*x  du 
xv^  siècle.  Au  pied  de  l'escalier  de  la  chaire,  on  voit  une 
custode  en  pierre,  haute  de  3  met.,  sculptée  à  jour  avec 
un  goût  exquis,  et  destinée  jadis  à  renfermer  les  saintes 
huiles.  La  porte  septentrionale  de  l'église,  appelée  Porté 
des  blés,  à  cause  des  champs  cultivés  qui  s'étendaient 
autrefois  jusqu'aux  murs  où  elle  fut  ouverte,  présente 
quatre  bas-reliefs,  où  l'on  a  représenté^  dit-oo.  oerMûii 


3 


SEN 


iG31 


SEN 


iklts  de  Ift  vie  de  Robert  le  Vieax.  Il  existe  an  charmant 
petit  cloître  sur  le  flanc  méridional  de  l'église  de  Semur; 
il  est  malheureusement  engagé  dans  des  constructions 
plus  récentes.  V.  Maillard  de  Chambure,  Histoire  d» 
Notre-Dame  de  Semur,  in-8«.  B. 

SENAGULUM.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

SKNAIRE,  nom  donné  chez  les  Latins  au  vers  lambique 
tri  mètre  ou  de  6  pieds  {versus  senarius).  V,  Iambique. 

SÉNANQUE  (  Abbaye  de  j,  dans  le  département  de  Vau- 
cluse.  Cette  abbaye  cistercienne  est  en  style  roman  du 
XII*  siècle.  L'église  rappelle  par  son  plan  la  basilique  la- 
tine. A  côté  s'élëye  un  cloître  quadrilatère  presque  régu- 
lier, formé  par  des  galeries  entourant  un  préau  :  chaque 
face  de  ces  galeries  se  compose  de  quatre  arcatures; 
ciiaque  arcature  se  divise  en  trois  petites  arcades  plein 
cintre,  supportées  par  deux  faisceaux  de  colonnettes  ac- 
coiipk^s.  La  voûte  des  galeries  est  à  plein  cintre,  avec 
quelques  arcs-doubleaux  qui  portent  sur  des  consoles  ou 
t(^te»  grijnaçantes.  La  salle  du  chapitre  est  contigufi  au 
transept  septentrional  de  Téglise;  elle  est  longue  de 
9  met.,  large  de  7,  et  la  voûte  en  est  soutenue  par  deux 
gros  piliers  flnnqués  de  colonnettes  en  saillie  :  à  Tétage 
supérieur  se  trouvent  deux  pièces,  dont  Tune  est  éclairée 
par  une  rose  circulaire.  Une  partie  des  bâtiments  de  Tab- 
baye  est  construite  sur  des  voûtes  au-dessous  desquelles 
coule  un  torrent. 

séisatÊur  I  ^*  ^®*  ^^^  ^^"*  "^^"^  ^^' 

SÉNATORERIE.  A^^tZ.^  Biographie  el 

SÉNATUS-CONSULTE.  )      «  «*«*o«»^«' 
SENAU ,  grand  bâtiment  à  deux  mâts,  gréé  comme  un 
carré,  et  ayant  un  màt  de  tapecu. 
SÉNÉCHAL.  l  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogrch 

SÉNÉCHAUSSÉE.  (      phie  et  d'Histoire, 
SENKSTROCHÈRE,  en  termes  de  Blason,  bras  gauche 
mouvant  du  flanc  dextre  de  Técu.  Il  est  ordinairement  nu, 
et  armé  ou  paré. 

SEN  LIS  (Église  Notre-Dame,  à).  Cette  église,  autre- 
fois cathédrale,  et  qui  reconnaît  pour  patrons  secondaires 
S^  Gervais  et  S*  Protais,  fut  b&tie  dans  la  seconde  moitié 
du  XII*  siècle.  Incendiée  en  partie  par  la  foudre  en  150i, 
elle  fut  restaurée  sous  Louis  XII  et  François  I*'.  Il  en 
résulte  qu'on  trouve  dans  ce  monument  la  trace  de  di- 
verses époques  architectoniques.  L'extérieur  de  la  cathé- 
drale de  Senlis  est  un  peu  lourd  :  les  contre-forts  sont 
épais,  et  surmontés  de  deux  petits  clochetons  à  feuilles 
grimpantes.  La  façade  principale  est  la  partie  la  plus  an- 
cienne :  elle  présente,  à  sa  partie  inférieure,  une  large 
porte  centrale  à  voussure,  dont  les  statues,  mutilées  pen- 
dant la  Révolution,  ont  été  rétablies  par  le  sculpteur  Ro- 
binet, et  deux  portes  latérales  très -étroites;  au-dessus 
de  la  grande  porte  est  une  fenêtre  à  meneaux,  puis  trois 
roses.  Des  deux  tours  du  portail ,  l'une,  celle  du  Sud , 
est  surmontée  d'une  flèche  élégante ,  à  8  pans,  haute  de 
70  met.,  et  Tune  des  plus  belles  de  France  :  deux  étages 
de  clochetons  de  forme  pyramidale  se  dressent  aux  angles 
de  cette  flèche ,  dont  les  arêtes  sont  ornées  de  crochets 
en  pierre  ;  son  rez-de-chaussée  sert  de  vestibule  à  l'un 
des  collatéraux.  La  nef  et  le  chœur  appartiennent  à  la 
construction  restaurée  du  xn*  siècle.  Les  transepts  furent 
édifiés  par  Jean  Desieulx  pendant  le  règne  de  François  I*% 
et  ont  des  portails  de  stjrle  gothique  fleuri ,  flanqués  de 
tourelles  à  dentelle  de  pierre  ;  de  chaque  côté  de  la  porte 
sont  des  colonnes  torses;  la  salamandre,  TF  de  Fran- 
çois I",  les  fleurs  de  lis,  se  montrent  parmi  les  orne- 
ments. Les  bas  côtés  sont  surmontés  de  vastes  tribunes, 
comme  &  Laon,  à  Paris,  à  Chàlons,  etc.  Les  colonnes 
monocylindriques  alternent  avec  les  piliers,  comme  à 
Noyon.  La  balustrade  du  chœur,  qui  était  du  mémo  style 
que  les  balustrades  des  galeries,  a  été  remplacée,  au 
xvni*  siècle,  par  de  lourds  balu«tres.  Tandis  que  les  co- 
lonnettes des  piliers  de  la  nef  montent  jusqu'à  la  voûte, 
celles  du  chœur  ne  descendent  pas  Jusqu'en  bas,  et  se 
terminent  par  des  culs-de-lampe  ou  reposent  sur  Ta- 
baque  des  chapiteaux.  On  remarque  de  belles  clefs  pen- 
dantes dans  deux  chapelles  latérales.  L'église  n*a  pas  de 
vitraux  peints;  quelques  essais  modernes  n'ont  pas  été 
pius  heureux  que  la  restauration  coloriée  de  la  chapelle 
de  la  Vierge.  B. 

SENNE ,  filet  V.  SsniB. 

SENS  (  Église  S*-Éticni«b,  à).  Une  première  église  mé- 
tropolitaine avait  péri  par  un  incendie  en  970  ;  un  autre 
édifice  avait  été  dédié  en  997,  lorsque,  par  suite  d'acci- 
dents graves,  on  le  reb&tit  presque  entièrement  de  1143  à 
ii6<f.  Lea  bu  cOtée  du  sanctuaire  remontent  au  xi*  siècle  i 


le  chœur  et  la  plus  grande  partie  des  nefs  appartiennent 
à  la  fin  du  xu"  et  au  commencement  du  xiir,  et  Ton  y 
trouve  par  conséquent  le  style  romano-byzantin  à  sa  di*r- 
nière  période  avec  le  style  ogival  primitif;  trois  arcades 
à  l'entrée  de  la  grande  nef,  du  coté  droit,  approchent  du 
temps  de  la  Henaissance.  La  cathédrale  de  Sens  se  dis- 
tingue donc  par  son  architecture  mélangée  :  elle  a  de  la 
grandeur  et  de  la  majesté  plutôt  que  de  belles  propor- 
tions et  do  riches  ornements,  et  ne  peut  être  placée  qu'à 
un  rang  secondaire  parmi  les  édifices  religieux  de  la 
France.  Elle  a  117"\35  de  longueur,  38  met.  de  largeur, 
et  30  met.  de  hauteur  sous*voûte.  Son  plan  est  régulier 
dans  l'ensemble  :  mais  il  n'y  a  pas  de  symétrie  dans  la 
disposition  des  chapelles,  dont  on  compte  lU  autour  du 
chœur  et  10  le  long  de  la  nef.  On  remarque  deux  petites 
absides  sur  le  côté  oriental  des  transepts.  L'extérieur  de 
l'édifice  est  d'une  excessive  sc^vériié  :  ce  ne  sont  que  sur- 
faces nues,  murailles  lourdes,  contre-forts  massifs;  les 
arcs-boutants  sont  rares  et  sans  hardiesse,  les  fenêtres 
étroites  et  peu  divisées.  Le  portail  occidental  avait  seul 
reçu  une  belle  ornementation  ;  mais  les  statues  et  les 
bas-reliefs  qui  décoraient  les  trois  portes  ont  été  détruits 
à  la  Révolution.  Dans  cette  façade  à  trois  portes,  d'un 
développement  de  48  m^t.,  une  large  fenêtre  rayonnante 
tient  la  place  de  la  grande  rose  que  présentent  la  plupart 
des  édifices  gothiques.  Deux  tours  carrées  la  flanquent; 
on  a  placé  dans  l'une,  dite  Tour  de  pierre,  et  élevée  de 
73  met.,  deux  cloches  famenses,  fondues  en  1500,  la  5a- 
vinienne  (15,585  kilogr.),  et  la  Potentienne  (13,865  kilogr.). 
L'autre,  appelée  Tour  de  plomb  à  cause  de  sa  couver- 
ture, a  été  découronnée  de  sa  charpente  en  1844,  parce 
qu'elle  menaçait  de  s'écrouler.  Los  portails  latéraux,  dits 
d'Abraham  au  nord  et  de  S^-lUicnne  au  sud,  furent  élevés, 
le  premier  de  141)1  àlDOG,  le  second  au  commencement 
du  XVI*  siècle  ;  ils  ont  également  beaucoup  soufi'ert.  A 
l'intérieur,  la  cathédrale  de  Sens  ofl're  quelques  beaux 
vitraux,  particulièrement  ceux  du  chœur,  de  son  bas  côté 
septentrional,  et  de  la  chapelle  de  S*-Savinicn,  qui  da- 
tent du  XIII*  siècle;  les  roses  des  transepts,  aussi  très- 
remarquables,  furent  exécutées  au  xvi«.  Il  y  a  des  vitraux 
attribués  par  les  uns  au  Primatice,  par  les  autres  à  Jean 
Cousin  ;  la  rose  dite  du  Paradis  est  assurément  de  ce  der- 
nier. Le  chœur,  dont  la  porte  est  un  bel  ouvrage  de  serru- 
rerie du  xviii*  siècle,  est  séparé  de  la  nef  par  un  jubé  en 
stuc,  d'un  goût  déplorable,  construit  en  1072  :  un  beau 
baldaquin,  supporté  par  quatre  colonnes  de  marbre  rouge, 
couronne  le  maltre-autel.  On  vante  avec  raison  le  mauso- 
lée du  Dauphin,  père  de  Louis  XVI,  et  de  sa  femme  Morie- 
Josèphc  de  Saxe,  ouvrage  de  G.  Coustou,  placé  dans  la 
chapelle  de  S^*- Colombe.  Le  Trésor,  malgré  les  pertes 
qu'il  a  faites,  est  peut-être  encore  le  plus  riche  de  France; 
il  renferme,  entre  autres  objets  précieux,  ane  croix  à 
doubles  branches,  donnée  par  Charlemagne  ;  un  ciboire 
en  vermeil ,  qui  fut  volé  en  1541,  et  pour  la  récupération 
du(|uel  on  célèbre  une  fête  annuelle;  une  boite  ronde  en 
ivoire,  qu'on  dit  être  du  m*  siècle,  et  où  l'on  a  sculpté 
une  chasse  aux  lions;  une  autre  boite  découpée  à  Jour, 
portant  des  inscriptions  en  caractères  arabes,  et  qui  fut 
apportée  d'Orient  à  l'époque  des  Croisades;  une  boite 
carrée,  également  en  ivoire,  et  du  xv'  siècle,  représen- 
tant quelques  scènes  de  la  Bible;  un  grand  coflnre  en 
ivoire,  à  l4  faces,  surmonté  d'un  couvercle  de  forme  py- 
ramidale, bordé  d'un  cercle  de  cuivre  émaillé,  appelé 
autrefois  cat<Kombe  parce  qu'il  contenait  des  reliques,  et 
orné  de  trois  rangs  de  bas-reliefs  exécutés  à  la  fin  du 
xn*  siècle,  et  empruntés  à  l'histoire  de  Joseph  et  à  celle 
de  David  ;  le  peigne  de  l'évèque  S^  Loup,  orné  de  figures 
d'animaux  et  de  pierreries;  l'anneau  du  même  saint;  un 
anneau  du  pape  Grégoire  XI  (1378),  cfui  avait  été  grand 
archidiacre  de  Sens;  plusieurs  bas-reliefs  en  argent ,  des- 
tinés à  décorer  la  châsse  de  S^  Loup  et  celles  des  SS.  Po- 
tentien  et  Savinien  ;  quatre  magnifiques  contre-retables 
en  tapisserie;  les  habits  pontificaux  de  Thomas  Becket; 
un  Christ  en  ivoire,  admirable  ouvrage  de  Girardon,  etc. 
V.  Quantin,  Notice  historique  sur  la  construction  de  la 
cathédrale  de  Sens;  Alex,  de  Laborde,  Monuments  de  la 
France,  U  II. 

SENS,  en  termes  de  Grammaire,  se  dit  pour  signi/ico' 
tion.  Le  sens  absolu  est  celui  qui  est  achevé,  complet;  le 
sens  littéral ,  celui  qui  résulte  de  la  force  naturelle  des 
termes.  On  distingue  encore  le  sens  propre,  qui  est  la  pre- 
mière signification  d'un  mot,  et  le  sens  figuré,  lorsqu'on 
change  la  signification  pour  lui  en  donner  une  qu'on  em- 
prunte à  un  autre  ordre  de  faits.  Dans  le  sens  composé, 
un  mot  conserve  sa  signification  à  tous  égu*dB,  et  cette 
•igniflcatioo  entre  dans  la  composition  du  aeiu  de  toute 


SEN 


1632 


SEN 


U  plirase;  tel  est  cet  exemple  :  «  Les  idolâtres  n'entre- 
ront point  dans  le  royaume  des  deux,  n  Dans  le  sens 
divise,  ce  n*est  qu'en  un  certain  sens  et  avec  restriction 
qu'un  mot  conserve  sa  signification,  comme  dans  cette 
phrase  de  TÉvangile  :  «  L^  aveugles  voient,  les  boiteiix 
marchent.  »  Les  saintes  Écritures  ont  un  sens  littéral  et 
un  sens  mystique.  Il  y  a  aussi  le  sens  allégoriquej  le  sens 
moral  d'une  fable. 

SENS,  fonctions  vapées  de  l'Intelligence  appliquée  à 
la  connaissance  des  objets  extérieurs.  La  distinction  des 
sens  est  motivée  d'un  côté  par  les  différences  spécifiques 
des  sensations  (V.  ce  mot)^  de  Fautre  par  celle  des  appareils 
organiques  qui  servent  d'intermédiaires  entre  les  corps 
et  l'intelligence.  Aussi,  malgré  quelques  tentatives  faites 
pour  étendre  ou  pour  abréger  la  liste  des  sens,  la  division 
commune,  fondée  sur  des  faits  positifs  et  faciles  à  saisir, 
a-t-elle  prévalu.  Elle  admet  cinq  sens  :  i°  le  Tact,  qui 
s'exerce  plus  on  moins  confusément  par  toutes  les  par- 
tics  du  corps,  mais  qui  a  pour  instrument  spécial  la  main, 
et  ((ui ,  localisé  dans  cet  ori^ane,  prend  le  nom  de  Toucher; 
2°  la  Vue:  S»  VOuie;  4°  VOdorat;  5°  le  Goût,  On  a  dit 
ailleurs  (V.  Perception)  la  part  pour  laquelle  chaque 
sens  contribue  à  la  formation  de  la  notion  complexe  des 
corps.  Le  Toucher  est  celui  de  tous  les  sens  qui  nous 
donne  les  notions  les  plus  sûres,  et  qui  embrsise  les  don- 
,  nées  les  plus  diverses  :  étendue,  figure,  solidité,  dureté, 
mollesse,  fluidité,  température,  etc.  La  Vue  vient  en- 
suite, avec  les  notions  de  l'étendue  plane,  de  la  lumière 
et  des  couleurs.  Les  données  respectives  des  autres  sens, 
sons,  odeurs  et  saveurs,  sont  moins  instructives  et  plus 
restreintes. 

Ce  n'est  qu'à  l'extérieur  que  les  organes  des  sens  sont 
variés  et  séparés  les  uns  des  autres.  Toutes  les  impres- 
sions reçues  par  eux  doivent,  pour  donner  lieu  à  un  acte 
de  l'inielligence,  être  transmises  au  cerveau.  Des  expé- 
riences dues  aux  physiologistes  les  plus  habiles  ont  fait 
connaître  les  nerfs  par  lesquels  s'opère  la  transmission 
des  sensations  à  cet  orçane,  qui  fait  fonction  de  réceptacle 
commun  des  impressions  organiques.  Elles  ont  prouvé 
que  la  sensation  et  la  perception  peuvent  êtrt;  également 
empochées,  soit  par  la  suppression  ou  la  maladie  de  l'or- 
g  me  extérieur,  soit  par  l'interception  de  l'impression  en 
un  point  quelconque  de  son  trajet  de  cet  organe  au  centre 
cérébral ,  par  paralysie,  section  ou  ligature  des  nerfs  con- 
ducteurs. Ainsi ,  la  cécité  résulte  également  de  la  des- 
truction de  l'œil ,  et,  l'œil  restant  intact,  de  la  paralysie 
des  nerfs  optiques.  Ce  n'est  pas  à  dire  que  le  sens  réside 
dans  l'organe,  encore  moins  lui  soit  identique.  Dire  que 
les  sens  sont  les  mains,  les  yeux,  les  oreilles,  le  nez,  le 
palais,  les  nerfs  ou  le  cerveau,  serait  le  comble  de  l'ab- 
surdité. Mais,  dans  les  conditions  de  l'existence  présente, 
les  sens  ne  peuvent  s'appliquer  à  leurs  objets  respectifs 
et  la  perception  avoir  lieu  que  par  l'intermédiaire  d'or- 
ganes déterminés.  Les  adeptes  les  plus  passionnés  du 
magnétisme  animal  ont  la  prétention  de  se  mettre  au- 
dessus  de  cette  appropriation,  et  exhibent  des  sujets  qui, 
dans  le  sommeil  magnétique,  voient  avec  le  dos  et  lisent 
avec  les  coudes  :  ces  prétendues  merveilles,  qui  n'ont  ré- 
sisté à  aucun  contrôle  nérieux,  doivent,  jusqu'à  nouvel 
ordre,  être  mises  sur  le  même  rang  que  celles  des  presti- 
digitateurs. 

Les  philosophes  sceptiques,  et  ceux  qui  ont  considéré 
comme  une  des  conditions  du  spiritualisme  le  dédain  de 
la  matière  et  le  dénigrement  des  fonctions  où  le  corps 
est  intéressé,  se  sont  étendus  avec  complaisance  sur  ce 
qu'ils  ont  appelé  les  erreurs  et  les  illusions  des  sens.  Nos 
sevs  nous  trompent  est  devenu  en  quelque  sorte  un  des 
lieux  communs  de  la  philosophie.  Si  Ton  examine  de  près 
ces  prétendues  erreurs,  que  Montaigne  et  Bavle,  après 
Pyrrhon  et  Sextus  Empincus,  et,  dans  un  autre  camp, 
Descartes,  Iluet,  Malebranche,  ont  ki  ingénieusement  ra- 
contées, on  reconnaîtra  qu'elles  tiennent  toutes  à  la  pré- 
cipitation de  nos  jugements,  soit  que  nous  jugions  sur 
des  données  manifestement  insuffisantes,  comme  quand 
un  corps  est  trop  mal  éclairé  ou  trop  distant  pour  que 
nous  le  voyions  distinctement,  un  son  trop  éloigné  ou 
trop  faible  pour  que  nous  puissions  l'apprécier;  soit  sur- 
tout que,  par  suite  de  l'habitude  où  nous  sommes  d'asso- 
cier les  perceptions  aux  sensations  et  de  substituer  les 
perceptions  acquises  aux  perceptions  naturelles,  nous 
fassions,  entre  les  fonctions  des  sens,  une  véritable  con- 
fusion, c'est  entre  les  perceptions  du  Toucher  et  celles  de 
la  Vue  que  cette  confusion  a  lieu  le  pins  souvent.  Habitué 
que  l'on  est  à  Juger  de  la  distance,  de  l'étendue,  de  la 
forme  réelles,  par  la  perspective,  l'étendue  et  la  forme 
visibles,  oa  en  vient  à  preudi'c  tout  cela  pour  une  seule 


et  même  chose  ;  et  lorsqu'on  se  trouve  en  réalité  éloigné 
d'un  objet  qu'à  le  voir  on  avait  d'abord  cru  très-proche, 
ou  que  l'on  reconnaît  que  ce  qui  avait  paru  de  loin  une 
petite  éminence  est  une  montagne  énorme,  que  le  bâton 
qu'on  voit  brisé  à  son  point  d'immersion  dans  l'eau  est, 
en  réalité,  parfaitement  droit,  on  accuse  d'erreur  ou  le 
sens  de  la  Vue  ou  la  Vue  et  le  Toucher  à  la  fois.  C'est 
une  injustice  manifeste.  La  Vue,  et,  en  général,  tous  les 
sens,  ne  nous  ont  pas  été  accordés  pour  doubler  le  Tou- 
cher, mais  pour  en  compléter  les  données,  et,  au  besoin, 
pour  y  suppléer.  Si  facile  et  si  naturelle  que  soit  l'asso- 
ciation des  apparences  visibles  avec  l'idée  des  réalités 
tangibles,  les  données  des  deux  sens  ne  sont  identiques 
ni  en  elles-mêmes,  ni  par  les  impressions  qu'elles  pro- 
duisent sur  nous.  L'erri'ur  consiste  donc  à  prendre  le 
signe  habituel  pour  la  chose  même;  et  ce  n'est  pas  au 
sens  qu'il  faut  l'attiibuer,  mais  à  une  précipitation  de 
jugement,  qu'il  dépend  de  nous  de  réprimer.  A  propre- 
ment parler,  il  ne  faut  pas  dire  que  les  sens  nous  trom- 
pent, ce  qui  semble  mettre  en  cause  la  sugcsse  ou  la 
bonté  de  celui  qui  nous  en  a  pourvus,  et  du  mémo  coup 
nous  condamner  toujours  à  l'erreur  ou  tout  au  moins  au 
doute;  mais  il  faut  dire  que  nous  nous  trompons  en 
usant  mal  des  sens.  II  dépend  de  nous  d'atténuer  de  plus 
en  plus  nos  chances  d'erreur,  non-seulement  en  surveil- 
lant les  opérations  des  sens  et  les  jugements  qui  en  sont 
la  suite,  mais  en  exerçant  judicieusement  l'esprit  et  les 
organes,  ce  qui  est  un  moyen  de  les  perfectionner,  et  en 
faisant  concourir  avec  eux  les  instruments  artificiels  qui 
en  étendent  la  portée  et  en  amplifient  la  puissance.  —  Sur 
les  sens  en  général  et  sur  les  lois  propres  à  chacun  d'eux, 
V.  Aristote,  De  l'Ame,  liv.  n;  Descartes,  L Homme:  Ma- 
lebranche, Recherche  de  la  vérité,  liv.  i  ;  Condillac,  trailé 
des  sensations  ;  Reid,  Recherches  sur  V Entendement  et 
Essais  sur  les  facultés  de  l'Esprit  humain,  Essai  ii,  ch.  1 
et  2;  Dugald  Stewart,  Esquisses  de  i*hilosophie  morale, 
\^  partie,  2*^  section;  Éléments  de  la  Philosophie  de  l'Es^ 
prit  humain,  ch.  1  ;  Essais  philosophiques.  Essais  i  et  ii. 
Sur  les  erreurs  des  sens,  on  peut  consulter  les  mémcâ 
auteurs,  et,  sur  le  perfectionnement  des  sens  par  l'exer- 
cice et  par  la  comparaison  de  leurs  données,  quelques- 
unes  des  meilleures  pages  de  VÊmile  de  J.-J.  Rous- 
seau, liv.  II.  D — E. 

SENS  COMMUN.  Dans  une  acception  spéciale,  désor- 
mais tombée  en  désuétude,  les  philosophes  appelaient 
Sens  commun  une  certaine  faculté  destinée  suivant  eux 
à  opérer  la  réunion  des  sensations,  et  à  en  rapporter  la 
cause  à  un  objet  unique,  lorsque  effectivement  nous  nous 
trouvons  en  présence  d'un  objet  dont  les  qualités  pro- 
duisent respectivement,  sur  chacun  de  nos  bens,  des 
impressions  variées.  Nous  croyons  qu'Arist'.»te  est  le  pix*- 
mier  qui  en  ait  parlé  en  termes  explicites  (  Traité  de  l'âme, 
liv.  III,  ch.  2).  Bossuet,  dans  le  Traité  de  la  connaissance 
de  Dieu  et  de  soi-même,  le  définit  «  une  faculté  de  ràitie 
qui  réunit  les  sensations  et  ne  fait  qu'un  seul  objet  do 
tout  ce  qui  frappe  ensemble  nos  sens.  »  «  On  peut,  ajt)i:;.'- 
t-il  un  peu  plus  loin,  douter  du  Sens  commun,  n  En  cIT  -c, 
l'hypothèse  d'un  sixième  sens,  ou  d'un  sens  intérieur, 
comme  on  l'appelle  encore,  n'est  pas  nécessaire  pour  ex- 
pliquer ce  qui  se  passe  quand  nous  affirmons,  parcxeinp  t\ 
que  c'est  le  même  objet  qui  est  blanc  et  doux.  11  su  (lit  de 
dire  que  les  sens  ne  sont  en  réalité  que  les  difrèrciiics 
fonctions  de  l'entendement,  appliquées  à  la  percepiUm 
des  objets  extérieurs;  et  que  c'est  le  moi  inuUligent,  per- 
cevant les  difîércntes  qualités  et  jugeant  ses  perceptions, 
qui  opère  ce  rapprochement. 

Voici  maintenant  queUfue  chose  de  plus  important  ce 
de  plus  usuel.  On  appelle  ordinairement  Sens  commun 
l'ensemble  des  notions  et  des  jugements  communs  à  tous 
les  hommes,  qui  résultent  du  développement  spoi«tar.L 
des  différentes  facultés  de  Tlntelligence,  et  spécialement 
de  la  Raison.  Le  Sens  commun,  à  ce  titre,  est  appelû  à 
exercer,  sur  les  sciences  en  général,  et  notamment  sur  la 
Philosophie,  une  sorte  de  contrôle  et  de  juridiction  dont 
il  convient  de  fixer  l'origine  et  les  limitas.  A  moins  Oe 
prétendre,  ce  qui  nous  parait  insoutenable  {V,  Sctpri- 
gisme)  ,  que  nous  avons  reçu  de  Dieu  des  facultés  essen- 
tiellement trompeuses ,  on  ne  peut  admettre  que  ces  fa- 
cultés fassent  fausse  route,  aussi  longtemps  du  moins  que 
la  volonté  n'intervient  pas  dans  leur  direction.  L^  con- 
naissances que  par  elles  nous  obtenons  de  toutes  chos^.*», 
sont  superficielles  et  confuses,  il  est  vrai,  mais  exactes. 
Toutes  les  erreurs  qui  ont  eu  et  qui  continuent  d*uvoir 
cours  dans  le  monde  sont  l'œuvre,  non  du  Sens  commun, 
mais  de  la  Réflexion  qui,  s'attachant  d'ordinaire  à  un  soûl 
côté  des  choses,  prend  volontien  pour  le  tout  qui  lai 


SEN 


1«33 


SKN 


échappe  la  partie  que  seule  elle  aperçoit,  et  tire,  ùes  don- 
nées  incomplètes  qu'elle  a  recueillies,  des  conclusions 
prématurées  et  excessives.  La  science  a  plus  de  profon- 
deur, plus  de  précision,  mais  moins  de  sûreté  que  le  Sens 
commun,  et  aussi  moins  d'étendue.  D'ailleurs,  le  temps  et 
les  soins  qu*il  faut  lui  consacrer  en  font  naturellement  la 
prérogative  d'un  petit  nombre  d'esprits,  tandis  que  le 
Sens  commun  est  le  partage  de  tous.  Lors  donc  qu'il  s'agit 
des  questions  générales  et  fondamentales,  à  la  solution 
/  desquelles  nul  homme  ne  saurait  sans  inconvénient  de- 
meurer étranger,  on  conçoit  que  le  Sens  commun  (cette 
solution  s'est  produite  spontanément)  la  tienne  eh  réserve 
pour  la  comparer,  à  un  moment  donné,  à  celle  que  la 
science  apporte  sur  le  même  sujet,  et  que  les  philosophes 
eux-mêmes  s'en  servent  comme  d'un  CrUerium  (V.  ce 
mot)  pour  Juger  leurs  propres  doctrines.  Or,  telle  est  la 
nature  des  questions  philosophiques,  que,  sous  une  forme 
ou  sous  une  autre,  elles  intéressent  tout  le  monde.  Il  n'en 
est  pas  tout  à  fait  de  même  des  sciences  physiques  et 
mathématiques.  A  part  quelques  principes  élémentaires, 
et  <|uelques  notions  d'une  utilité  pratique,  il  n'est  pas 
indispensable  que  tout  le  monde  ait  des  idées  arrêtées  sur 
les  questions  dont  elles  s'occupent.  Mais  sur  la  distinction 
de  la  Matière  et  de  l'Esprit,  sur  la  nature  et  les  phéno- 
mènes de  l'Âme  hunuàine ,  sur  le  Vrai  et  le  Faux  en  géné- 
ral, sur  Dieu,  sur  la  Justice,  sur  le  Bien  et  le  Mal,  etc., 
c.-à-d.  sur  tout  ce  qui  fait  l'objet  de  la  Philosophie,  qui 
pourrait  se  résigner  à  une  ignorance  absolue?  Aussi  a-t-il 
été  pourvu  non-seulement  à  ce  que  cette  ignorance  ne  fût 
pas  notre  lot,  mais  encore  à  ce  que  les  idées  les  plus 
communes  sur  ces  divers  sujets  fussent  aussi  les  plus 
vraies  et  les  plus  sûres.  Est-ce  à  dire  que  toute  la  Philo- 
sophie soit  implicitement  contenue  dans  le  Sens  commun? 
Cette  opinion  n'a  pas  laissé  d'avoir  des  partisans ,  parmi 
lesquels  il  faut  citer  au  premier  rang  les  philosophes  de 
l'École  écossaise.  Ce  que  les  Écossais  désignent  sous  le 
nom  de  VériUs  ou  Principes  du  Sens  commun,  ce  sont 
les  principes  mCrmes  de  la  Philosophie,  et  l'écrivain  émi- 
nent  qui,  parmi  nous,  se  borna  d'abord  au  rôle  modeste 
et  laborieux  de  propagateur  de  la  Philosophie  écossaise, 
Jouffroy,  a  dit  expressément  ;  «  Éclaircir  par  la  Réflexion 
les  intuitions  obscures  que  tout  le  monde  reçoit  en  pré- 
sence des  choses,  voilà  tout  ce  que  la  Philosophie  peut, 
et  tout  ce  qu'elle  voudra,  le  Jour  où,  se  repliant  sur  elle- 
même,  etc.  tt  Cest  faire  trop  grande  la  part  du  Sens  com- 
mun, trop  petite  celle  de  la  science.  Le  Sens  commun 
(et  c'est  là  son  seul  rôle)  prévient,  signale,  réprime  les 
écarts  de  la  Philosophie;  il  n'en  forme  pas  le  cadre  tout 
entier;  car  la  réflexion,  en  s'appliquant  aux  questions 
philosophiques,  y  découvre  des  points  de  vue  que  le 
Sens  commun ,  dans  ses  intuitions  rapides  et  synthéti- 
ques, est  incapable  d'y  saisir  ;  et  ces  points  de  vue  sont , 
à  eux  seuls,  de  ^andes  questions.  —  V,  le  P.  Buffier, 
Traité  des  premières  vériUs  et  de  la  source  de  nos  juge- 
ments, Reid,  Essais  sur  les  facultés  de  V Esprit  humain, 
notamment  VEssai  VI;  Jouffroy,  Préface  de  la  traduc- 
tion des  OEuwes  de  Reid,  et  Mélanges,  De  la  Philosophie 
et  du  Sens  commun;  et  un  Mémoire  de  M.  Amédée  Jac- 
ques sur  le  Sens  commun  comme  principe  et  comme  mé- 
thode philosophique.  B — e. 

SBifS  BSTHéTiQUB  OU  SBPiS  DO  BEAU.  C*est  la  même  chose 
que  le  Goût  (  V,  ce  mot). 

SENS  INTIME.  V.  CONSCIENCE. 

SENS  MORAL.  Quelques  philosophes,  professant  d'ail- 
leurs, sur  la  nature  du  bien,  des  idées  différentes,  mais 
également  frappés  de  ce  fait ,  que  l'acte  par  lequel  nous 
distinguons  le  bien  du  mal  est  un  acte  simple  et  irréduc- 
tible, ont  cru  devoir  l'attribuer  à  un  sens  spécial  et  tout 
intérieur,  et  c'est  ce  prétendu  sens  qu'ils  ont  appelé  le  Senx 
moral.  Shaftesbury,  Hutcheson  et  Hume,  sont,  en  tant 
que  théoriciens,  les  principaux  représentants  de  cette 
doctrine.  Au  premier  abord,  on  pourrait  croire  qu'entre 
elle  et  celles  qui  réservent  à  la  Raison ,  sous  le  nom  de 
Conscience,  le  discernement  du  bien  et  du  mal ,  il  n'y  a 
qu'une  différence  verbale  :  pourtant  il  n'en  est  pas  ainsi  ; 
la  faculté  désignée  sous  le  nom  de  Sens  moral,  procé- 
dant à  la  manière  des  Instincts,  reconnaissant  le  bien 
exclusivement  à  ce  signe  qu'il  lui  agrée,  et  le  mal  au 
signe  contraire,  n'a  ni  la  fixité,  ni  l'autorité  de  la  Raison, 
dont  les  Jugements  reposent  sur  la  conception  d'un  prin- 
cipe immuable  et  absolu.  La  doctrine  du  Sens  moral , 
malgré  quelques  côtés  estimables,  est  donc  une  doctrine 
incomplète  et  insuffisante.  K  pour  le  développement  de 
cette  doctrine,  Shaftesbury,  Essai  sur  le  mérite  et  la 
•^t»rfn:  Hutcheson ,  Recherches  sur  les  idéê$  du  beau  et  du 
^en,  Cume,  Essai  sur  VEnt^dement;  et  pour  la  réfu- 


tation, Jouffroy,  Cours  de  Droit  naturel,  t.  Il,  leçons  it 
et  20.  B— E. 

SENS  MUSICAL,  faculté  de  comparer  les  son^  et  d'en 
établir  les  rapports;  par  suite,  sensibilité  qui  se  mani- 
feste dans  l'homme  à  l'audition  des  sons  combinés  sous 
le  triple  rapport  de  la  mélodie,  de  l'hannonie  et  du 
rhythme.  Le  sens  de  l'ouïe  n'est  que  le  sens  du  son  isolé, 
ce  n'est  point  le  sens  de  la  musique,  car  la  musique  est  la 
science  du  rapport  des  sons.  Le  sens  musical  ne  résulte 
pas  de  telle  ou  telle  conformation  particulière  de  l'or- 
gane auditif,  et  c'est  une  mauvaise  locution  dédire  qu'on  a 
de  Voreille,  qu'on  a  Voreille  juste  ou  Voreille  fausse.  La 
conformation  plus  ou  moins  parfaite  de  l'organe  ne  peut 
exercer  d'influence  que  sur  la  perception  plus  ou  moins 
rapide,  plus  ou  moins  fine  et  délicate,  et  non  sur  la  com- 
paraison des  sons  pour  en  déduire  des  rapports.  Le  sens 
musical  a  son  siège  dans  l'âme,  non  dans  l'oreille  ;  il  se 
compose,  d'un  élément  sensible  et  d'un  élément  intel- 
lectuel. Non-seulement  il  distingue  ce  qui  est  beau,  mais 
il  connaît  les  moyens  dont  on  s'est  servi  pour  le  pro* 
duire.  B. 

SENSATION.  Ce  mot  s'applique  à  deux  sortes  de  faits 

3ue,  d'ordinaire,  on  ne  distingue  pas  suffisamment.  Il 
ésigne,  d'une  part,  les  impressions  spéciales  produites 
sur  l'esprit  par  les  objets  physiques  et  par  leurs  diverses 
propriétés,  résistance,  chaleur,  froid,  lumière,  odeur,  sa- 
veur, bruit,  etc.  ;  de  l'autre,  les  phénomènes  affectifs  du 
plaisir  et  de  la  souffrance.  Ces  derniers,  que  nous  appelle- 
rions volontiers  Sensations  affectives,  accompagnent,  il 
est  vrai,  le  plus  souvent,  les  sensations  de  la  première 
espèce  ou  ^tsations  perceptives;  mais  ils  n'en  sont  pas 
inséparables.  Il  est  tel  contact,  telle  odeur,  telle  couleur, 
tel  oruit,  qui  nous  laissent  indifférents,  sans  plaisir 
comme  sans  souffrance  ;  et,  d'un  autre  côté,  nous  (.^prou- 
vons du  plaisir  et  de  la  douleur,  sans  que  les  Sens  y 
soient  pour  rien.  Il  y  a  donc  bien  réellement  deux  sortes 
de  Sensations. 

I.  La  réalité  des  Sensations,  en  tant  qu'impressions 
produites  sur  nous  par  les  objets  extérieurs,  ne  peut  Ctre 
mise  en  doute.  Odeur,  son,  saveur,  ces  phénomènes  ne 
fussent-ils  pas  autre  chose,  seraient  au  moins  des  modi- 
fications internes,  perçues  par  la  conscience  avec  rerti* 
tude.  Leur  caractère  subjectif  est  tout  aussi  incontestable. 
La  Sensation  est  un  acte  de  l'Intelligence  ;  mais  c'est  un 
,  acte  incomplet  et  insuffisant  pour  nous  procurer  directe- 
ment la  notion  de  l'extérieur.  Mais,  ultérieurement,  in- 
struits par  d'autres  voies  de  l'existence  des  corps,  habi- 
tués, par  une  expérience  réitérée,  à  associer  nos  Sensations 
soit  à  l'idée  des  corps  en  général ,  soit  à  l'idée  de  certains 
corps  en  particulier,  nous  jugeons  que  les  causes  des 
Sensations  résident  précisément  dans  les  corps  à  titre  de 
propriétés  (K.  Qualités  pREMiènEs  et  Qualités  secondes), 
et,  par  une  induction  si  naturelle  et  si  rapide  qu'elle  en 
devient  presque  insaisissable,  nous  concluons  de  nos 
Sensations  l'existence  actuelle,  la  présence  des  corps,  alors 
même  que  nous  ne  les  percevons  pas  autrement.  C'est 
ainsi  que  de  l'intérieur  d'une  chambre,  et  sans  avoir 
besoin  de  regarder  dans  la  rue,  nous  inférons  du  bruit  que 
nous  entendons  qu'il  y  passe  une  voiture,  un  corps  de 
troupes,  etc.  (F.  Perception).  L'ouie,  l'odorat,  le  goût, 
ne  procurent  que  des  Sensations  ;  la  vue  et  le  toucher  don- 
nent à  la  fois  des  Sensations  et  des  Perceptions.  Quoique 
faciles  à  distinguer  en  théorie,  les  Sensations  et  les  Per- 
ceptions sont  pour  la  plupart  si  étroitement  unies  et  pour 
ainsi  dire  enveloppées  les  unes  dans  les  autres,  qu'il  fau- 
drait, pour  en  dresser  la  liste  exacte,  entrer  à  ce  sujet 
dans  une  longue  et  minutieuse  discussion.  Il  est  essen- 
tiel surtout  de  ne  pas  assimiler  la  Perception  à  la  Sensa- 
tion ;  car  la  Sensation  étant  un  fait  subjectif  et  relatif, 
il  suivrait  de  là  que  nous  n'aurions  aucune  connaissance 
aJiisolue  des  corps.  C'est  la  conséquence  forcée  contre  la- 
quelle se  débat  vainement  Condillac,  lorsque,  après  avoir 
posé  en  principe  que  nous  ne  connaissons  rien  que  par 
nos  Sensations,  c-a-d.  expressément  par  nos  propres  mo^ 
difications  ou  manières  d'être,  il  s'efforce  de  trouver  dans 
les  Sensations  spéciales  du  toucher  quelque  chose  qui 
décide  l'esprit  à  transporter  au  dehors  les  (|ualités  aue 
Jusqu'alors  il  n'avait  considérées  que  comme  siennes.  Une 
autre  confusion  non  moins  grave,  c'est  celle  des  Sensations 
avec  les  qualités,  soit  que  cette  confusion  se  borne  aux 
qualités  secondes,  soit  qu'elle  s'étende  aux  qualités  pre- 
mières. Elle  s'explique  en  partie  par  ce  fait,  que  les  qua- 
lités secondes  ne  nous  apparaissent  qu'à  travers  nos  Sen- 
sations et  portent  presque  toujours  le  môme  nom  ;  ce  qui 
a  peut-être  été,  dans  l'origine,  un  effet  de  la  confusion 
dont  il  s'agit,  mais  ce  qui,  en  tout  cas,  con'j'ibne  eef* 


SEN 


1634 


SEN 


teioMiient  à  Fentretenir.  Il  ne  faut  pas  se  laisser  abuser 
par  cette  équivoque.  Odeur,  saveur,  etc.,  tous  ces  mots 
désignent  deux  choses  bien  différentes  :  les  Sensations 
que  nous  éprouvons  et  qui  sont  en  nous,  et  les  qualités, 
c.-ik-d.  lea  causes  des  Sensations  qui  sont  hors  de  nous; 
les  premières  relatives  à  la  personne  qui  les  éprouve,  les 
secondes  existant  d*une  manière  absolue,  du  moins  comme 
propriétés  des  corps,  et  subsistant  alors  même  qu*elles 
ne  sont  pas  senties. — On  n*a  indiqué,  dans  ce  qui  précède, 
que  les  conséquences,  déjà  fort  graves,  de  la  confusion  de 
la  Sensation  et  de  la  Perception.  On  n'examine  point  ici 
celles  auxquelles  on  est  conduit  en  réduisant  à  la  Sensa- 
tion, entendue  dans  un  sens  plus  ou  moins  large,  toutes 
les  opérations  de  l'Esprit,  et,  entre  autres,  l'origine  de 
toutes  nos  connaissances  (  F.  Sensualisme).  Pour  Tana- 
Ivse  des  Sensations,  on  peut  consulter  Gondillac,  Traité 
des  Sens(Uions,  et,  sur  les  différentes  questions  auxquelles 
les  Sensations  peuvent  donner  lieu,  Reid,  Recherches  sur 
l'Entendement  humain,  ch.  2-6,  et  Essais  sur  les  facul" 
Us,  Essai  II;  Dugald  Stewart,  Eléments  de  la  Philoso- 
phie de  V Esprit  humain,  ch.  !*',  et  Essais  philosophiques, 
Essais  I  et  II;  et  les  Fragments  de  Royer-CoIIard  an- 
nexés par  Jouffroy  à  la  traduction  des  Œuvres  de  Reid. 

n.  La  Sensation  affective,  c-à^d.  agréable  ou  doulou- 
reuse, souvent  unie  à  la  précédente,  et,  comme  elle, 
subjective  et  relative,  ne  laisse  pas  d*en  différer  essen- 
tiellement. Elle  est  un  des  phénomènes  les  plus  simples 
3ui  s'ofl'rent  à  Tobservation  intime.  Aussi  ne  peut-on  la 
éffnir.  Ses  espèces  sont,  au  point  de  vue  de  l'impres- 
sion produite  sur  l'esprit,  le  plaisir  et  la  douleur;  au 
point  de  vue  de  leur  origine,  la  sensation  proprement 
dite  ou  sensation  physique,  et  la  sensation  morale  ou  le 
sentiment  {V,  ce  mot).  Une  des  principales  questions 
auxquelles  l'étude  de  la  Sensation  peut  donner  lieu,  c'est 
de  savoir  si  l'àme,  dans  le  phénomène  de  la  sensation, 
est  toute  passive.  11  faut  ici  s'entendre  sur  le  sens  qu'on 
prétend  donner  aux  mots.  SI  l'on  veut  dire  que  Vkme  ne 
produit  pas  ses  sensations  comme  elle  produit  une  partie 
de  ses  pensées  et  toutes  ses  résolutions  volontaires, 
qu^elle  les  subit  sans  pouvoir  les  anéantir  ou  en  changer 
la  nature,  l'&me  sans  doute  est  passive  dans  la  sensation. 
Encore  faut-il  remarquer  qu'à  défaut  d'une  action  pré- 
sente et  instantanée,  elle  peut  exercer  sur  la  sensation 
une  action  indirecte  en  s'y  prenant  de  longue  main,  et 
arriver  'à  la  modifier,  même  profondément,  par  l'habi- 
tude (K.  ce  mot).  Hais,  en  outre,  l'activité  de  l'&me  se* 
manifeste  dans  la  sensation  :  i<*  en  ce  que  l'intelligence 
réagit  sur  chacune  des  sensations  pour  en  prendre  con- 
naissance, une  sensation  dont  nous  n'aurions  pas  con- 
naissaace  étant  comme  non  avenue;  îi^  le  fait  de  sentir 
suppose  une  prédisposition  à  l'action,  qui  n'existe  pas 
chez  les  êtres  inertes  et  inanimés.  Dans  quelque  accep- 
tion que  l'on  entende  la  sensation,  elle  n'a  lieu  que  parce 
Su'une  excitation  quelconque  éveille  en  nous  le  pouvoir 
e  sentir,  que  ne  possèdent  ni  les  plantes  ni  les  miné- 
raux. Or,  ce  pouvoir  est  évidemment  une  forme  de  l'ac- 
tivité. Si  donc  il  est  vrai  de  dire  que  cette  activité  n'est 
pas  libre,  au  moins  ne  peut-on  dire  qu'elle  n'est  pas. 
Ainsi  l'&me,  dans  la  sensation  comme  dans  le  développe- 
ment de  toutes  ses  facultés,  conserve  les  mêmes  carac- 
tères et  le  même  type,  et  demeure  essentiellement  la 
cause  des  phénomènes  dont  elle  est  aussi  le  sujet.  B—b. 

SENSIBILITÉ,  faculté  de  sentir.  Gomme  sentir  est  un 
phénomène  parfaitement  simple,  la  Sensibilité  elle-même 
est  une  faculté  irréductible,  et  ne  peut,  à  proprement 
psTler,  se  définir.  En  effet,  ce  n'est  pas  la  définir,  c'est 
seulement  la  diviser  en  ses  différentes  espèces,  que  de 
la  qualifier  de  Faculté  de  jouir  et  de  souffrir,  ou  bien,  à 
un  autre  point  de  vue,  de  répartir  les  phénomènes  sen- 
sibles, sensations  et  sentiments  {V,  ces  mots)^  entre  la 
Sensibilité  physiqw  et  la  Sensibilité  morale.  La  Sensibi- 
lité, chez  l'homme,  parait  destinée  à  suppléer  à  l'imper- 
fection de  rintelligence  et  de  la  volonté,  qui  ne  se  dé- 
veloppent que  lentement  et  progressivement,  et  qui, 
parvenues  i  leur  maturité,  sont  encore  sujettes  à  bien 
des  défaillances.  La  Sensibilité,  plus  restreinte,  mais  non 
moins  vive,  dès  le  premier  jour,  qu'elle  ne  le  sera  plus 
tard,  nous  excite,  par  l'attrait  du  plaisir,  à  rechercher  ce 
qui  nous  convient,  par  l'aiguillon  de  la  douleur  à  éviter 
ce  qui  nous  est  nuisible,  lis  ressorts  qu'elle  presse  sont 
les  instincts  {V.  ce  mot),  qui  correspondent  eux-mêmes 
wi  différents  besoins  de  notre  double  nature.  Ainsi, 
lans  rien  savoir,  sans  rien  vouloir  encore,  l'enfant  fait 
spontanément  et  aveuglément,  sous  l'incitation  de  la  Sen- 
sibilité, ce  que  sa  raison  éclairée  par  l'cxpt^rience  l'an- 
^éii  décidé  à  faire  librement  et  pur  choix.  Pi  us  lard,  ia 


Sensibilité  conserve  un  rôle  analogue.  Elle  nom  Ta|^>eUe 
nos  besoins  et  nos  tendances  naturelles,  lorsqu'au  mi- 
lieu des  distractions  qui  nous  entourent  et  nous  assiè- 
gent, nous  serions  disposés  à  les  perdre  de  vue  et  à  les 
négliger.  Les  phénomènes  sensibles  primitifs  sont  donc 
comme  autant  de  signes  de  la  satisfaction  ou  de  la  non 
satisfaction  des  tendances  de  notre  nature.  Tel  est.  du 
moins,  le  rôle  de  la  Sensibilité  dans  son  développement 
normal,  et  c'est  à  ce  titre  que  l'étude  des  instincts  peut 
être  rattachée  à  celle  de  la  Sensibilité.  Mais,  autant  et  plus 

3ue  les  autres  facultés,  la  Sensibilité  peut  être  détournée 
e  ses  vbies  naturelles  et  légitimes.  Cela  tient  à  plusieurs 
causes.  La  plus  générale  est  notre  imperfection  native. 
En  outre,  la  Sensibilité  se  trouve  excitée  par  des  causes 
et  par  des  oï^eiA  si  variés  et  parfois  si  disparates,  qu'entre 
tous  ces  objets  il  est  difficile  qu'elle  garde  un  parfait 
équilibre.  L'attrait,  d'abord  légitime,  que  nous  ressen- 
tons pour  certains  plaisirs,  bientôt  s'accroît  à  ce  point, 
que  le  goût  des  autres  plaisirs  s'affisiblit  ou  s'efface.  Ainsi, 
trop  souvent,  in  SensibiUté  physique  empiète  sur  les 
jouissances  plus  nobles  de  l'espnt  et  du  cœur.  C'est  alors 
qu'il  y  a  déviation  et  abus.  Le  plaisir  est  devenu  no  signe 
trompeur,  puisqu'il  ne  correspond  plus  à  la  satisfaction 
de  besoins  réels  et  de  tendances  Intimes.  Il  en  est  de 
même  de  la  Sensibilité  excitée  par  les  besoins  factices 
que  créent  l'habitude  et  l'imitation.  Il  faut  donc  sur- 
veiller la  Sensibilité,  et  la  maintenir,  par  le  concoois  de 
la  raison  et  de  la  volonté,  dans  la  ligne  tracée  par  la 
Providence.  Cela  est  d'autant  plus  important,  que,  pat 
l'adjonction  d'éléments  nouveaux,  les  phénomènes  pri- 
mitifs se  transforment  en  passions  qui  tiennent  dans 
notre  vie  une  place  considérable  (  F.  Passion).  Or,  les 
passions,  dès  que  leur  origine  n'est  pas  parfaitement 
irréprochable,  deriennent  bien  vite  dangereuses  par  leur 
vivacité  même.  Aussi,  tandis  que  certains  philosophes 
placent  à  tort  dans  les  phénomènes  de  la  Sensibilité  les 
principes  de  la  loi  morale,  voyons-nous  les  moralistes  les 
plus  sévères,  les  Stoïciens  par  exemple,  et  tous  les  ascé- 
tiques, recommander  ou  mettre  en  pratique  l'anéantisse- 
ment des  passions  et  de  la  Sensibilité;  ce  qui  est  un  excès 
contraire.  —  On  ne  peut  guère  citer  de  traités  spéciaux 
sur  la  Sensibilité;  mais  les  phénomènes  qui  en  dérivent 
ou  qui  s'y  rattachent  ont  été  de  bonne  heure  étudiés, 
analysés  et  décrits.  Platon,  Aristote,  l'École  épiairienne 
et  les  Stoïciens  avaient  accumulé  sur  ce  sujet  une  foule 
d'observations,  que  les  Modems  ont  considérablement 
accrues.  V,  Descartes,  les  Passions  de  Vàme;  Haie- 
branche,  Recherche  de  la  mrité,  liv.  IV  et  V  t  Locke, 
Essais  sur  l'Entendement;  Leibniz,  Nùuœaux  Essais, 
liv.  II,  chap.  XX;  Reid,  Essais  sur  les  Facultés  actives^ 
Essai  III;  Dugald  Stewart,  Esquisses  de  Philosophie  mo- 
rale, 2*  partie,  chap.  i*'  ;  Adam  Smith,  Théorie  des  senti- 
ments moraux;  Jouffroy,  Mélanges  pliUosophiques  (les 
morceaux  intitulés  t  De  V Amour  de  soi  et  Des  Paeiutés 
de  Vâme  humaine)  ;  Paflîe,  De  la  Sensibilité, 

Kant  a  donné  au  mot  Sensilnlité  (en  allemand  sinn- 
lichkeit)  un  sens  différent  du  sens  ordinaire.  D  définit 
expressément  la  Sensibilité  «  la  capacité  de  recevoir  des 
«  représentations  par  la  manière  dont  les  objets  nous 
«  affectent.  »  Elle  est  l'origine  expérimentale  de  nos  con- 
naissances, et  embrasse  à  la  fois  les  représentations  des 
Sens  extérieurs  et  celles  de  la  Conscience,  sous  ia  double 
condition  des  concepts  d'espace  et  de  temps,  ou'on  nomme 
pour  cette  raison  Formes  de  la  sensibilité  (K.  Forme).  La 
partie  de  la  Philosophie  critique  consacrée  à  Tanalyse 
de  la  Sensibilité  norte  chez  Kaat  le  nom  d^Esthélique 
transcendentale  (otaOvivK,  sensation).  F.  dans  Kant  toute 
cette  partie  de  la  Critique  de  ta  raison  pure^  et  l'analyse 
qu'en  a  donnée  M.  V.  Cousin  dans  son  HuUrire  de  la 
Philosophie  au  xviu«  sièele,  P*  série,  t.  V.  B—a. 

.  SENSIBLE  (Accord),  nom  donné  à  l'accord  que  porte 
la  dominante  du  ton,  parce  que  la  note  sensible  eit  ton- 
Jours  la  tierce  de  cette  dominante. 

SENSiBLB  (Note),  7*  note  d'une  gamme.  Elle  est  ainsi 
appelée  parce  qu'elle  est  le  plus  souvent  obligée  de 
monter  sur  la  8*  note,  qui  est  l'octave  de  la  tonique,  et 
qu'elle  fait  pressentir  cette  note.  Dans  le  PlaSn-Ctaaat,  il 
n'y  a  pas  de  sensible,  parce  qu'aucune  note  n'a  de  ten- 
dance nécessaire  vers  une  autre  i  al  on  la  AUt  entendre 
dans  l'harmonie,  c'est  seulement  par  eupliooie,  et  dans 
les  parties  intermédiaires.  • 

SENSIBLERIE,  ridicule  aflécCaftien  de  sensibilité. 

SENSORIUM  ou  6ENS0RIUM  COimUNE.  Dans  rbf* 
pothèse  d'un  sens  intérieur  ou  sens eommun  (V,ce  ssà) 
destiné  à  réunir  les  sensations,  oo  appelait  Sensorium 
Cea  grec  aistliétérion)  Vorssne  dans  lequel  on  supposait 


i 


■I 


SKN 


1635 


SÉP 


que  résida  cette  facalté.  G*était«  en  général,  celui  que  Too 
considérait  comme  le  siège  de  T&me  elle-même  ;  de  sorte 
que,  sur  Tan  ou  sur  l'autre  sujet,  les  hypothèses  philo- 
sophiques ont  subi  à  peu  près  les  mêmes  variations. 
Y.  AMR  (Siège  de  V).     ^  B— e. 

SENSUALISME,  nmit  générique  donné  aux  systèmes 
philosophiques  dans  lesquels  un  rôle  prépondérant  est 
assigné  aux  sensations.  11  faut  entendre  ici  par  sensations 
non-seulement  les  impressions  diverses  produites  snr 
nous  par  les  objets  matériels,  mais  l'élément  expérimen- 
tal qu'a?alent  en  vue  les  auteurs  de  la  maxime  sen- 
sualiste  par  excellence  :  Rien  dans  Tlntelligence  qui  n'ait 
été  d'abord  dans  la  Sensation  ;  Nihil  in  Intellectu  quod 
non  prius  fuerit  in  Sensu.  C'est  dire  qrue  la  signification 
de  ce  mot  est  assez  élastique  pour  que  la  famille  des  sys- 
tèmes lensualistes  embrasse  des  doctrines  qui  présen- 
tent, avec  quelques  grands  traits  communs,  dos  diffé- 
rences encore  très -importantes.  Aussi  n'essayera- 1 -on 
pas  de  faire  ici  l'histoire  du  Sensualisme,  histoire  trop 
vaste,  et  qui  manquerait  d'unité;  mais  on  indiquera  ce 
qui  peut  en  être  considéré  comme  les  pôles  opposés,  en 
comparant  deux  pbilosophies  bien   différentes  :  d'une 
part,  celle  d'Aristote,  dont  le  caractère  sensualiste  est  on 
ne  peut  plus  nettement  marqué  dès  les  premières  lignes 
de  la  Métaphysique  :  «  Les  animaux  naissent  avec  la 
faculté  de  sentir;  de  celle-ci  résulte,  pour  quelques-uns 
d'entre  eux,  la  mémoire...  De  la  mémoire  provient  pour 
les  hommes  l'expérience,..,  et  Texpérience  produit  Tait  et 
la  sciences  »  —  de  l'autre,  celle  de  Condillac,  dans  la- 
quelle tout  dérive  également  de  la  Sensation  :  «  Toutes 
DOS  connaissances  et  toutes  nos  facultés,  dit  Condillac, 
viennent  des  Sens,  ou,  pour  parler  plus  correctement,  de 
la  Sensation;  car,  dans  le  vrai,  les  Sens  ne  sont  que 
cause  occasionnelle.  C'est  l'&me  qui  sent  à  l'occasion  aes 
organes,  et  c'est  des  sensations  qui  la  modifient  qu'elle 
tire  toutes  aes  connaissances  et  toutes  ses  facultés,  n  — 
Ne  semblerait-il  pas  que  des  principes,  en  apparence  si 
semblables,  doivent  conduire  à  des  doctrines  semblables? 
Il  n'en  est  rien  pourtant,  et  il  suffit  de  la  connaissance  la 
plus  légère  de  l'une  et  de  l'autre  pour  dire  que  ce  ne 
sont  pas  seulement  les  doctrines  qui  diffèrent,  mais  l'es- 
prit même  qui  les  inspire.  Le  Sensualisme,  chez  Aristote, 
?st  aussi  mitigé  que  possible;  tandis  que,  chez  Condillac, 
il  est  absolu  et  ne  laiflie  place  à  aucun  autre  élément 
de  pliilosopbie  que  là  Sensation ,  dans  son  acception  la 
plus  étroite.  Que  conclure  de  ceci?  Que  des  désignations 
très-généntles,  comme  celle  dont  nous  nous  occupons 
et  comme  celles  d'Idéalisme;  d'Empirisme,  de  Rationa- 
lisme, etc.,  quoique  justes  dans  une  certaine  mesure,  et 
conmiodes  dans  certaines  circonstances,  restent  néces- 
sairement toujours  un  peu  vagues,  et  ne  caractérisent 
Qu'imparfaitement  un  système.  Nous  sommes  bien  éloi- 
gnés de  vouloir  en  proscrire  Tusage;  mais  il  ne  faut  pas 
leur  attribuer  une  valeur  trop  absolue,  et  on  doit  remar- 
quer, en  outre,  que  l'esprit  humain  est,  suivant  l'expres- 
sion de  Montaigne,  si  ondoyant  et  si  divers,  qu'il  n'y  a 
presque  pas  de  système  philosophique  auquel  une  de  ces 
qualifications  puisse  s'appliquer  de  toutes  pièces,  sans 
restrictions  et  sans  réserves.  B — e. 

SENSUALITÉ,  attachement  aux  plaisirs  des  sens. 
SENTENCE,  en  latin  Sententia  (de  eentire,  sentir), 
proposition  évidente,  vérité  qui  tombe  immédiatement 
•ous  le  sens.  Elle  n'a  point,  comme  la  Maxime,  un  rap- 
port nécessaire  avec  la  Morale,  avec  la  conduite  qu'il  faut 
tenir.  Connaii'ioi  toi-mime  est  en  même  temps  une 
maxime  et  uoe  sentence;  Dieu  est  bon  est  simplement 
une  sentence. 

seutehgb,  en  termes  de  Jurisprudence,  est  svnonyme 
éB  jugement,  et  se  dit  surtout  des  décisions  arbitrales. 

SENTIMENT,  plaisir  ou  peine  résultant  d'une  cause 
morale.  C'est  surtout  par  son  origine  que  le  sentiment 
diffère  de  la  sensation  proprement  dite  (V.  Sensation).  Il 
en  diffère  aussi  en  ce  qu'il  ne  peut  être  localisé  dans 
aocuna  partie  de  l'organisme,  sur  lequel  il  ne  réagit 
qu'indirectement,  et  seulement  auand  il  est  très-intense 
et  trâs-¥ir.  Alors,  qoelle  que  soit  la  nature  du  Sentiment, 
agréable  ou  péiiiblè«  il  en  résulte  uniformément  une  souf- 
france. 

...On  pftme  ds  joie  ainsi  que  de  tristesse  : 
Un  eKcks  de  plaisir  nons  rend  tout  lan^nissens, 
Et»  quand  U  surprend  rtœ,  il  eeeable  les  sens. 

P.  CoanïhUB,  le  Cid,  IV,  •. 

D'ailleurs,  le  Seotiment,  dans  son  expansion  normale,  est, 
comme  la  sensation,  le  signe  des  tendances  satisfaites  ou 
VmtiBriéee.  lias  seosatioos  correspondent  aux  aopijtits. 


les  sentiments  aux  penchants  et  aux  affections.  V.  ces 
mots.  B^B. 

SENTIMENT  RELIGIEUX,  scntîmont  ^ui  naît  en  nous  de 
l'idée  de  l'in/lni,  appliquée  h  la  puissance,  à  l'amour,  h 
la  sagesse  du  Créateur.  Quelque  accablante  que  soit  cette 
idée  pour  la  raison  de  l'homme,  elle  ne  laisse  pas  de  re- 
muer  son  âme  par  les  plus  profondes  émotions. 

SENTIBIENTAIJTÉ,  exagération  de  la  sensibilité.  Elle 
a  constitué  pendant  quelque  temps  en  Littérature  un 
genre  dont  VObermann  de  Sénancour  est  le  type  le  plus 
complet,  et  où  l'on  a  abusé  des  soupirs  et  des  larmes, 
des  imprécations  contre  la  fatalité. 

SENTINE  (du  latin  sentina)^  la  partie  la  plus  basse 
d'un  nayire,  située  au  fond  de  la  cale,  et  le  réceptacle  de 
toutes  les  ordures. 

SENTINELLE  (de  l'italien  sentinella,  fait  du  latin  sen- 
tire,  sentir,  entendre),  soldat  armé  qu'on  charge  de 
veiller  près  d'un  poste,  et  de  prévenir  les  surprises.  On 
nomme  Sentinelle  perdue  le  soldat  qu'on  place  dans  un 
lieu  avancé  et  dangereux.  Les  sentinelles  ne  doivent  pas 
s'écarter  de  leur  poste  au  delà  de  30  pas  :  elles  rendent 
les  honneurs  militaires  à  ceux  qui  y  ont  droit,  arrêtent 
les  rondes  et  patrouilles.  Celles  gui  abandonnent  leur 
poste  ou  qui  s'endorment  sont  punies  plus  ou  moins  sé- 
vèrement, selon  la  gravité  des  cas. 

SÉPARATION.  On  distingue  en  Droit  la  Séparation  de 
biens  et  la  Séparation  de  corps. 

La  Séparation  de  biens  est  la  situation  d'époux  qui  ad- 
ministrent leurs  biens  chacun  séparément.  Elle  est  vo- 
lontaire,  lorsqu'elle  résulte  des  clauses  du  contrat  de 
mariage  :  dans  ce  cas,  la  loi  impose  à  l'époux,  marié  sous 
ce  régime,  qui  devient  commerçant,  de  le  porter  à  la 
connaissance  des  tiers  par  un  extrait  publié  aux  greffes 
des  tribunaux  de  commerce.  Elle  est  judiciaire,  et  peut 
être  demandée  par  la  femme,  lorsque  sa  dot  est  mise  en 
péril,  ou  lorsque  le  mari,  par  le  déisordre  de  ses  affaires, 
fait  péricliter  la  garantie  que  ses  biens  doivent  offrir  aux 
réprises  de  la  femme.  Le  Code  de  Procédure  civile  régle- 
mente (art.  805  et  suiv.)  les  formalités  à  suivre  pour  y 
parvenir.  V.  Dufour  de  SaintrPathus,  Traité  de  la  sépor 
ration  de  biens,  1812,  in-12;  Dutruc,  Traité  de  ktsépa^ 
ration  de  biens  judiciaire,  1853,  in-8<*. 

La  Séparation  de  corps  est  le  moyen  offert  par  la  loi 
de  rel&cher  le  lien  conjugal,  et  de  suspendre  la  cohabita- 
tion des  époux,  lorsque  la  conduite  de  l'un  d'eux  rend 
la  vie  commune  impossible.  Les  seules  raisons  admises 
par  la  loi  sont  :  de  la  part  de  la  femme,  l'adultère;  de  la 
part  du  mari,  l'entretien  d'une  concubine  dans  le  domi- 
cile conjugal  ;  de  la  part  de  tous  deux,  les  excès,  sévices 
ou  injures  graves,  la  condamnation  à  une  peine  infa- 
mante. La  séparation  de  corps  ne  peut  jamais  avoir  lieu 
par  consentement  mutuel.  Elle  entraîne  to'ijours  la  sé- 
paration de  biens.  La  chose  jugée,  l'exception  tirée  de  la 
compensation  des  torts  et  de  la  provocation,  la  réconci- 
liation, sont  des  fins  de  non-recevoir  générales  contre  la 
demande  en  séparation  de  corps.  Il  en  est  une  spéciale  à 
la  femme  demanderesse,  c'est  le  défaut  de  résidence  dans 
le  domicile  qui,  sur  sa  demande,  lui  a  été  désigné  par  le 
président  au  début  de  l'instance.  La  jurisprudence  a  ap- 
pliqué à  la  séparation  de  corps  la  disposition  tirée  des 
règles  du  divorce,  qui  fait  perdre  à  l'époux,  contre  lequel 
la  séparation  intervient,  tous  les  avantages  résultant 
de  son  contrat  de  mariage.  Le  Code  de  Procédure  civile 
(art.  875  et  suiv.)  détermine  les  formalités  des  demandes 
en  séparation  de  corps.  V.  Massol,  De  la  séparation  de 
corps,  1840,  in-8°;  Demolombe,  Du  mariage  et  de  la  se' 
paration  de  corps,  2  vol.  in-8". 

On  appelle  Séparation  de  dettes  une  modification  du 
régime  de  communauté,  par  laquelle  les  époux  stipulent 
qu'ils  paveront  séparément  leurs  dettes  personnelles,  et 
qui  les  oblige  à  se  faire  raison,  lors  de  la  dissolution  de 
la  communauté,  des  dettes  acquittées  par  elle  h  la  dé- 
charge de  chacun  d'eux. 

La  Séparation  des  patrimoines  est  une  faculté  accordée 
aux  créanciers  d'une  succession  cbar^  de  dettes,  de  de- 
mander que  le  palrimoine  du  de  cujus  ne  soit  pas  con- 
fondu avec  celui  de  l'héritier.  Elle  s'exerce  contre  les 
créanciers  de  l'héritier,  mais  ne  peut  réciproquement  être 
exercée  par  eux.  Elle  ne  peut  plus  s'exercer  quand  il  y  a 
eu  novation  de  la  créance,  c-à-d.  quand  les  créanciers 
successoraux  ont  accepté  l'héritier  pour  débiteur  person- 
nel. Elle  se  prescrit  relativement  aux  meubles  par  le  laps 
de  trois  ans,  et  peut  être  invoquée  à  l'égard  des  immeubles 
tant  qu'ils  ne  sont  pas  sortis  des  mains  de  l'héritier. 
V,  Code  Napoléon,  art.  878  et  suiv.;  Blondeau,  Traité 
de  la  séparation  des  patrimoines,  18i0,  in-8<>;  Dufresœ* 


SÉP 


1636 


SÉP 


Traité  de  ta  néparatton  des  patrimoines,  1842,  iii-8<'; 
Bureaux,  Études  sur  le  Code  ciml,  i8i7*53,  3  vol. 
ln-8^  R.  d*E. 

SÉPIA,  espèce  d*encre  provenant  d*une  vessie  que  les 
sèches  (en  italien  ffppt^'j  ont  auprès  du  cœur,  et  qu'on 
emploie  plus  particulièrement  pour  exécuter  les  lavis 
(F.  ce  mot).  Elle  diffère  de  Tencre  de  Chine  par  une 
couleur  plus  rougeàtre.  Dans  les  dessins  à  la  sépia,  les 
couleurs  s'appliquent  par  teintes  superposées  et  plus  ou 
moins  foncées  ;  il  faut  attendre  qu'une  couche  soit  sèche 
pour  la  couvrir  d*une  autre.  Dans  les  endroits  qui  ont  be- 
soin de  vigueur,  les  dernières  touches  se  font  quelquefois 
à  la  plume.  On  attribue  Ut  première  idée  d'emplover  la 
sépia  h  un  Allemand  nommé  Seydelmann,  en  1780. 

SEPME.  V.  SfeME. 

SEPTA.  1  V.notte  Dictionnaire  de  Biogro' 

SEPTANTE  (Les),  l     phie  et  d'Histoire. 

SEPTAIN,  stance  de  7  vers,  composée  d'un  quatrain  et 
d*un  tercet,  ou  réciproquement.  Une  des  rim&s  du  qua- 
train passe  dans  le  tercet  Le  septain  est  fort  ancien  dans 
notre  poésie,  et  remonte  au  xii*  siècle;  presque  toujours 
il  y  fut  isomètre. 

SEPTÉNAIRE,  nom  donné  en  latin  :  !•  au  vers  tro- 
chaïque  tétramëtre  catalectique,  c-à-d.  de  7  pieds  et 
demi.  Ex.  : 

Intallt  se  |  bellicosl  In  |  Romali  geii|tem  feram. 
Mauifici  co|niesqoe  amicis  |  nostria  Tidea|mar  vlri. 

2"  au  vers  lambique  de  même  mesure  : 

Qnid  immerenltibua  noces?  |  quid  inrides  |  amlcls? 
Domum  redijinas  clancalani{;  dormimiiB  ln]cœnati. 
Et  la  mihl  aoaidet  naptiaB  |  quantum  queam  |  maturem. 

F.  Umbiqoe,  TrochaIqub.  P. 

SEPTENAIRE,  nom  qu'ou  donnait  autrefois  au  cours 
d*études  de  7  années,  comprenant  le  Quadrivium  et  le 
Trivium. 

SEPTENNALITÉ,  mot  créé  pour  désigner  la  durée  de 
sept  ans  qui  a  été  assignée  depuis  1716  à  la  Chambre  des 
communes  en  Angleterre.  Une  loi  du  16  Juin  1824  éta- 
blit la  septennalitô  en  France  pour  la  Chambre  des  dé- 
putés ;  cette  loi,  à  laquelle  le  parti  libéral  s'était  vivement 
opposé,  fut  abolie  par  la  Révolution  de  1830. 

SEPTIÈME,  en  termes  de  Musique,  intervalle  disso- 
nant de  sept  notes.  On  distingue  :  la  septième  majeure, 
composée  de  5  tons  et  un  demi-ton  {ut  à  si  naturel  )  ;  et 
la  septième  mineure,  composée  de  4  tons  et  2  demi-tons 
(  ut  à  51  bémol).  L'intervalle  de  septième  n'est  pas  admis 
dans  le  plain-chant  :  on  ne  le  trouve  aue  dans  la  prose 
de  la  Pentecôte,  à  la  strophe  Lava  quoà  est  sordidum ,  et 
encore  n'y^  est-elle  que  comme  reprise  de  chant  qui  n'a 
pas  de  liaison  avec  ce  qui  la  précède.  —  Vaccord  de  sep- 
tième, composé  du  son  fondamental,  de  sa  tierce,  de  sa 
quinte  et  de  sa  septième,  est  de  trois  sortes  :  1<*  il  a  la 
septième  mineure,  et  en  ce  cas  il  aura  ou  la  tierce  ma- 
jeure et  la  quinte  juste  {sol,  si,  ré,  fa),  et  alors  il  est 
aussi  appelé  accord  de  dominante,  ou  la  tierce  mineure 
et  la  quinte  diminuée  (si,  ré,  fa,  la)\  2®  il  a  la  septième 
majeure,  la  tierce  majeure  et  la  quinte  Juste  ;  3°  il  a  la 
septième  diminuée,  la  tierce  mineure  et  la  quinte  dimi- 
nuée {sol  dièse,  si,  ré,  fa),  quelquefois  même  la  tierce  di- 
minuée {ré  dièse,  fa,  la,  ut). 

SEPTIME-SÉVÈRE  (Arc  de).  V.  Arc  de  triomphe. 

SEPTIZONIUM.      i  V,  ces  mots  dans  notre  Diction- 

SEPTUAGÉSIME.   I      naire  de  Biogr.  et  d Histoire, 

SEPT  SAGES  (Le  Roman  des).  V.  Dolopathos. 

SEPTUM,  barrière  qui ,  dans  les  basiliques  romaines, 
séparait  le^  nefs  et  l'abside.  V.  Transept. 

SEPTUOR ,  composition  musicale  à  7  parties  de  voix 
ou  d'instruments. 

SÉPULCRE,  en  latin  sepulcrum  (de  sepelire,  ense- 
velir), lieu  destiné  à  recevoir  un  mort.  A  peu  près  syno- 
nyme de  tombeau,  le  mot  est  assez  peu  usité  aujourd'hui 
dans  le  langage  ordinaire.  On  l'applique  souvent  à  des 
groupes  de  sculpture  qui  représentent,  dans  certaines 
églises,  Jésus-Christ  au  tombeau,  entouré  de  divers  per- 
sonnages. Un  beau  monument  de  ce  genre  est  celui  de 
l'église  de  S'-Mihiel,  sculpté  par  Ligier  Richier.  On  peut 
citer  aussi  celui  de  l'église  SWean,  à  Ghaumont  (Haute- 
Marne),  qui  est  du  xv*  siècle. 

séroLCRE  ^Église  du  S^-),  à  Jérusalem.  Par  ce  nom  l'on 
désigne  réglise  qui  renferme  non-seulement  le  sépulcre 
de  Jésus-Christ,  situé  dans  le  Jardin  de  Joseph  d'Arima- 
thie,  entre  le  lieu  des  exécutions  et  le  rempart  de  la  ville, 
mais  le  Calvaire  ou  les  lieux  consacrés  par  la  Passion. 


Elle  est  fort  irrégulière,  parce  qu'il  a  fallu  s'assujettir  à 
l'irrépularité  des  lieux  qu'on  voulait  y  renfermer  ;  pour 
déduire  en  p\ate- forme  la  surface  iné^e  du  Calvaire,  on 
dut  trancher  le  rocher  en  plusieurs  endroits,  et  Tex- 
hausser  en  certains  autres.  Les  premiers  travaux ,  entre- 
pris par  S^*  Hélène,  mère  de  l'empereur  Constantin,  du- 
rèrent de  l'an  326  à  l'an  335  :  Eusèbe  nous  en  a  laissé  la 
description.  Le  rocher  du  sépulcre  fut  détaché  du  flanc 
de  la  colline,  de  manière  à  former  une  masse  isolée  ;  on 
l'entoura  d'une  chapelle  qui  fut  appelée  Anastasis  (  Ré- 
surrection )  ;  une  autre  chapelle,  nommée  Martyrion,  fut 
élevée  sur  le  lieu  même  de  la  Passion  ;  à  l'orient  du  sé- 
pulcre s'ouvrait  une  basilique,  séparée  du  dehors  psr 
deux  cours,  dont  la  première  était  entourée  de  portiques. 
L'édifice  de  Constantin  fut  ruiné,  en  615,  par  les  troupes 
de  Chosroès  H,  roi  de  Perse.  Mais,  par  l'intervention  de 
la  femme  de  ce  prince,  chrétienne  et  sœur  de  l'empereur 
grec  Maurice,  le  moine  Modeste,  depuis  patriarche  de 
Jérusalem,  put  recouvrir  de  constructions  nouvelles  les 
lieux  vénérés  par  les  chrétiens  :  il  y  eut  une  église  de  la 
Résurrection,  une  église  du  Golgotha,  une  église  de  l'In- 
vention de  la  croix,  nommée  aussi  Martyrium,  et  une 
église  de  la  Vierge.  Ces  monuments  ayant  été  rasés  en 
1010  par  le  calife  Hakem,  des  architectes  grecs,  sur 
l'ordre  de  l'empereur  Constantin  Monomaque,  reprirent 
en  1048  les  travaux  en  suivant  le  plan  de  Modeste,  c-à-d. 
qu'ils  firent  une  rotonde  et  trois  églises  ou  chapelles  sé> 
parées.  En  1130,  les  Croisés  les  réunirent  en  an  seul  mo- 
nument, et  l'on  peut  constater  dans  leur  œuvre  l'alliance 
du  style  roman  et  de  l'ogive  sarrasine.  En  1808,  un  in- 
cendie détruisit  presque  complètement  le  S^-Sépulcre;  on 
l'a  reconstruit  depuis,  sur  un  plan  qui  diffère  peu  de 
l'ancien.  Il  est  aujourd'hui  partagé  entre  des  religieux 
de  huit  nations  clirétiennes,  qui  l'habitent  et  le  des* 
servent  :  Grecs,  Abyssins,  Coptes,  Arméniens,  Nestoriens 
ou  Jacobites,  Géorgiens,  Maronites,  Latins  ou  Romains. 
L'église  du  S* -Sépulcre,  presque  entièrement  enve- 
loppée de  bâtiments  élevés  à  diverses  époques,  n'est  ac- 
cessible que  du  côté  méridional.  Un  parvis,  qci  a  environ 
20  met.  carrés  de  superficie,  et  dont  les  côtés   sont 
occupés  par  des  chapelles,  était  autrefois  précédé  d*un 
portique ,  dont  quelques  chapiteaux   attestent  encore 
l'existence.  A  l'angle  N.-O.  de  ce  parvis  est  un  clocher 
tronqué  à  base  rectangulaire ,  percé  de  trois  fenêtres  sur 
deux  de  ses  faces,  et  de  deux  seulement  sur  les  deux 
autres.  La  façade  du  fond  du  parvis  porte  les  caractèrrs 
de  notre  architecture  du  xii*  siècle  :  deux  portes,  dont 
une  est  murée  actuellement,  sont  en  ogive,  et  ornées  d'ar- 
chivoltes finement  sculptées;  une  espèce  de  frise  est 
couverte  d'un  bas -relief  représentant   l'entrée  triom- 
phante de  Jésus  à  Jérusalem  ;  le  premier  étage  est  percé 
de  deux  fenêtres  ogivales.  Quand  on  a  franchi  la  porte 
d'entrée,  en  laissant  à  gauche  plusieurs  chapelles  armé- 
niennes et  à  droite  l'église  du  Calvaire,  on  rencontre  b 
Pierre  de  l*onction,  rectangle  de  marbre  rouge  presque 
au  niveau  du  sol,  mesurant  2  met.  de  longueur  sur 
0™,50  de  largeur,  et  recouvrant  la  pierre  sur  laquelle  le 
corps  du  Christ  fut  déposé  et  oint  de  parfums  par  les 
saintes  femmes  :  à  quelques  pas  à  gauche ,  une  pierre 
circulaire  indique  la  place  où  se  tenait  la  Vierge  pendant 
l'embaumement.  De  là  on  entre  dans  une  Rotonde  de 
20  met.  de  diamètre,  autour  de  laquelle  sont  pratiquées 
des  chapelles,  et  dont  le  mur  contient  les  sépulcres  de 
Joseph  d'Arimathie  et  de  Nicodème  :  16  colonne»  de 
marbre  soutiennent,  en  décrivant  17  arcades,  une  ga- 
lerie supérieure,  également  composée  de  "16  colonnes  et 
de  17  arcades  plus  petites;  des  niches  corTespondant<*8 
aux  arcades  s'ouvrent  au-dessus  de  la  frise  de  la  der- 
nière galerie,  et  un  dôme  prend  sa  naissance  sur  l'arc  de 
ces  niches.  Ce  dôme,  ouvert  au  sommet,  est  en  bois  et 
en  plâtre,  depuis  l'incendie  de  1808  qui  a  consumé  sa 
belle  charpente  en  bois  de  cèdre.  Au  centre  de  la  Rotonde 
et  au-dessous  de  l'ouverture  qui  donne  entrée  au  jour, 
s'élève  un  édicule  de  forme  pentagonale,  long  de  8  met., 
large  de  5"*,50,  revêtu  de  marbre  blanc  et  Jaune,  et  sou- 
tenu par  de  maigres  colonnes  surmontées  a*un  dôme  qai 
a  un  peu  Papparence  d'une  couronne.  Cet  édicule,  d'an 
goût  détestable,  recouvre  le  saint  tombeau.  Une  porte 
étroite,  qu'on  y  a  pratiquée  à  l'orient,  donne  accès  dans 
une  sorte  de  vestibule,  appelé  CJiapelle  de  VAnge,  parce 
que,  selon  la  tradition,  ce  fut  là  qu'un  Ange  annonça  la 
Résurrection  aux  saintes  femmes;  la  pierre  carrée,  qui 
est  enchâssée  au  milieu,  passe  pour  avoir  recouvert  le 
tombeau  primitif.  Une  seconde  porte  ti^basse  condaît 
dans  le  sanctuaire  ou  chambre  sépulcrale,  qui  n*a  «fue 
2  met.  carrés,  et  qui  est  revêtue  dA  anarbre,  ainsi  que  le 


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•épalcre  placé  da  côté  droit  :  2  tableaux  et  42  lampes 
d'or  et  d'argent  ornent  ce  sanctuaire.  —  Au  N.  de  la  Ro- 
toude,  on  montre  le  lieu  où  Jésus  apparut  à  Madeleine, 
i  endroit  où  celle-ci  demeurait,  la  chapelle  de  la  prison 
^ù  Jésus  fut  enfermé  avant  le  cruciflement,  et  un  couvent 
de  Franciscains  latins,  dont  la  chapelle  marque  le  lieu 
où  le  Seigneur  apparut  à  sa  mère  après  la  Résurrection, 
et  con^'ent  un  fragment  de  la  colonne  de  la  Flagellation. 
A  ri^M  en  face  de  Tentréo  de  Tédicule  de  la  Rotonde,  se 
troQve  ïéglisê  des  Grecs,  encombrée  d'ornements  de  mau- 
vais goût  :  on  y  remarque,  dans  le  pavé,  un  cercle  de 
marbre  blanc,  au  milieu  duquel  est  une  petite  colonne 
indiquant,  disent  les  Grecs,  le  centre  du  monde  ;  le  pour- 
tour du  chœur  présente  la  chapelle  de  Longin,  soldat 
juif  qui  perça  le  Christ  de  sa  lance  et  se  retira  dans  cette 
grotte  après  sa  conversion  ;  celle  où  les  vêtements  de 
Jésus  furent  partagés;  celle  où  on  le  couronna  d'épines, 
et  oui  contient  la  colonne  impropere  (corruption  d'op- 
probrii),  bloc  de  marbre  sur  lequel  il  était  alors  assis. 

Ëntro  ces  deux  dernières  chapelles,  on  descend,  par  un 
escalier  de  28  marches,  à  Véglise  de  S^'-Hélène,  qui  a 
20  met.  de  long  sur  12  de  large.  Elle  est  en  partie  taillée 
dans  le  roc,  et  surmontée  d'une  coupole  surbaissée  per- 
cée de  fenêtres  en  meurtrières.  Cette  coupole  est  soutenue 
par  4  colonnes  massives  à  chapiteaux  corinthiens.  L'édi- 
fice communique  au  S.-E.  avec  la  grotte  de  l'Invention 
de  la  vraie  croix ,  à  laquelle  on  descend  par  un  escalier 
de  13  degrés,  et  que  le  voisinage  d'une  citerne  rend  ex- 
trêmement humide. 

Au  sortir  de  l'église  de  S**-Hélène,  après  avoir  passé 
devant  la  chapelle  du  Couronnement  d'épines,  on  monte 
par  un  escalier  de  18  degrés  à  Véglise  au  Calvaire,  qui 
n'a  que  10  met.  sur  9.  Cette  église  est,  pour  ainsi  dire,  à 
deux  étages  :  la  partie  inférieure,  dite  Chapelle  d^Adam, 
renfermait  les  tombeaux  de  Godcfroy  de  Bouillon  et  de 
son  frère  Baudouin,  détruits  par  des  Grecs  fanatiques 
durant  l'incendie  de  1808;  l'autre  partie,  plus  élevée 
d'une  vingtaine  de  marches,  renferme  le  trou  où  fut 
plantée  la  croix.  Un  escalier,  en  face  de  celui  par  lequel 
on  est  entré,  ramène  à  la  porto  de  la  façade  principale.  B. 
SEPULCRËTUM.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d*Ristoire, 

SÉPULTURE,  en  latin  SepiUtura  (de  sepelire,  ense- 
velir). Donner  la  sépuhure  aux  morts  est  uu  devoir  de 
religion  pour  tous  les  peuples  civilisés,  et  la  privation  de 
sépulture  a  été  considérée  comme  une  punition  sévère, 
quelquefois  même  comme  une  infamie.  Le  mode  de  sé- 
pulture a  varié  selon  les  temps  :  les  Égyptiens  embau- 
maient le»  morts  pour  les  conserver,  les  Juifs  les  dépo- 
saient dans  des  sépulcres,  les  Grecs  et  les  Romains  les 
brûlaient;  depuis  le  christianisme,  on  les  met  en  terre 
(K.  iNcménATiON ,  Inhumation).  Les  rois  d'Egypte  que 
l'assemblée  de  la  nation  avait  condamnés  après  leur 
mort  étaient  privés  des  honneurs  de  la  sépulture  royale. 
Les  Grecs  et  les  Romains  croyaient  que  ceux  qui  n'avaient 
point  reçu  la  sépulture  erraient  pendant  cent  ans  sur  les 
bords  du  Styx,  et  c'est  pour  ce  motif  que  les  généraux 
victorieux  aux  îles  Arginuses,  bien  qu'ils  eussent  été  em- 
pêchés par  une  tempête  de  recueillir  leurs  morts,  furent 
condamnés  à  l'exil  ou  à  la  peine  capitale  par  les  Athé^ 
niens.  —  Dans  les  pays  catholiques,  le  clergé  refuse  la 
sépulture  chrétienne  à  celui  qui  n'est  pas  catholique  ou 
qui  a  abjuré  sa  foi,  à  celui  qui  a  fait  profession  publique 
d'impiété  ou  d'erreur,  qui  est  mort  dans  l'impénitence  ou 
dans  un  flagrant  délit.  Par  une  décision  du  16  juillet 
1806,  Napoléon  l*'  exigea  que  tout  individu  fût  enseveli 
suivant  le  rit  du  culte  qu'il  avait  professé  toute  sa  vie,  à 
moins  qa*il  n'eût  formellement  demandé  le  contraire. 
Notre  Code  pénal  (art.  300)  punit  la  violation  de  sépul^ 
ture  d'un  emprisonnement  de  3  mois  à  un  an ,  et  d'une 
amende  de  IC  fr.  à  200  fr.  —  V.  notre  art.  Cimetière,  et 
B.  Feydeau,  Histoire  des  usages  funèbres  et  des  sépultures 
des  peuples  anciens,  1856,  Paris,  2  vol.  gr.  in-4<>,  fig. 

SÉQUELLE,  ancien  droit  de  demi-dlme,  dû  aux  curés 
par  ceux  qui  labouraient  les  terres  dans  leur  paroisse. 

SÉQUENCE  (du  latin  seqtientia,  choses  qui  se  sui- 
vent), en  termes  de  Jeu,  série  de  cartes  de  môme  cou- 
leur et  dont  les  nombres  se  suivent. 

séguEHCB,  terme  de  Liturgie.  V,  Prose,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

SÉQUESTRATION,  acte  d'enlever  par  violence  une 
personne  e^  de  la  retenir  comme  en  séquestre.  C'est  un 
crime  puni  des  travaux  forcés  à  temps,  si  la  séquestra- 
tion n'a  duré  qu'un  mois,  et  des  travaux  forcés  à  perpé- 
tuité, si  elle  s'est  prolongée  au  delà.  Quand  la  personne 
séquestrée  a  été  rendue  à  la  liberté  dans  les  dix  premiers 


Jours  et  avant  toutes  poursuites,  la  peine  est  réduite  à  uo 
emprisonnement  de  2  à  5  ans.  L'arrestation  exécutée 
avec  le  faux  costume,  sous  le  faux  nom  ou  paf  un  faux 
ordre  d'une  autorité  publique,  entraîne  les  travaux  forcés 
à  perpétuité.  Si  le  séquestré  a  été  menacé  de  mort ,  s'il 
a  été  soumis  à  des  tortures  corporelles,  la  peine  capitale 
doit  être  prononcée.  V,  le  Code  pénal ,  art.  341  et  suiv. 
SÉQUESTRK,  terme  de  Droit.  V.  Dépôt. 

Iw^mw™^^'         }  y-  notre  Dictionnaire  de  Buh 

SéKu  SÉRAIL.  S      ^^'^^^  ''  ^'^^^^»-*- 

SÉRAPÉUM,  nom  de  deux  célèbres  monuments  ég3rp- 
tiens,  l'un  dans  la  ville  d'Alexandrie,  l'autre  dans  celle 
de  Memphis.  —  Le  Sérapéum  d'Alexandrie  était  situé 
dans  le  quartier  dit  Rhacotis,  et  se  compt)sait  d'un  temple 
de  Sérapis,  entouré  de  portiques  et  de  vastes  dépen- 
dances où  l'on  trouvait  des  exèdrcs  (salles  avec  des  sièges) 
pour  la  conversation  des  philosophes,  des  rhéteurs,  des 
amis  des  lettres,  et  une  bibliothèque  célèbre  par  sa  ri- 
chesse. Le  tout  avait  un  caractère  de  magnificence,  et  la 
colonne  faussement  dite  de  Pompée,  encore  debout  auprès 
d'Alexandrie  moderne,  ornait  une  des  cours  de  ce  Si^ 
rapéum. 

Le  Sérapéum  de  Memphis  était  un  monument  sépul- 
cral. On  nourrissait  à  Memphis  et  on  adorait  le  bœuf 
Apis  vivant,  dans  un  temple  dit  Apiéum,  Lorsqu'il  mou- 
rait, on  le  portait  en  grande  pompe  à  la  nécropole  de  la 
ville,  dans  un  temple  de  Sérapis,  le  plus  ancien  de  tous 
ceux  que  cette  divinité  avait  en  Egypte.  Il  fut  choisi 
parce  qu'en  mourant  le  bœuf  divin  s'identifiait  à  Osi- 
ris,  et  recevait  le  nom  d'Osir-Apis,  Osor-Apis,  en  grec 
Sorapis,  Ce  Sérapéum  est  resté  surtout  célèbre,  parce 
qu'on  en  a  retrouvé  une  ruine  importante  dans  les 
sibles  qui  s'étendent  entre  les  villages  d'Abousir  et  de 
Sakkaran.  Il  était  dans  un  temenos,  grande  enceinte  car- 
rée, un  peu  irrégulière,  de  325  met.  du  N.  au  S.,  sur 
300  de  l'E.  à  l'O.,  et  mesurait  environ  130  met.  sur  83. 
Là  était,  ou  plutôt  est  une  descente  qui  conduit,  à 
10  met.  de  profondeur,  à  de  vastes  cavernes  taillées  en 
voûtes  dans  le  calcaire,  et  composées  d'une  gUerie  prin- 
cipale haute  de  8  met.,  large  de  5,  avec  plusieurs  em- 
branchements semblables  qui  se  croisent.  La  plupart  des 
galeries  sont  bordées  à  droite  et  à  gauche  d'arcades  for- 
mant autant  de  chambres  sépulcrales,  avec  chacune  le 
tombeau  d'un  Apis  embaumé;  c'est  un  grand  sarco- 
phage de  granit  poli,  quadrangulaire,  long  de  5  à  6  met., 
haut  de  3  met.  à  3'" ,30,  et  fermé  par  une  énorme  pierre 
surchargée  encore  d'un  pan  de  mur  pour  en  rendre  la 
fermeture  plus  assurée.  En  outre,  la  chambre  était  murée 
à  son  ouverture  sur  la  galerie. 

Le  Sérapéum  sépulcral  existait  déjû  1700  ans  av.  J.-C, 
sous  Aménophis  III,  roi  de  la  18"  dynastie,  la  plus  bril- 
lante de  toutes,  et  il  servit  de  sépulture  aux  Apis  jusqu'à 
l'époque  des  derniers  Ptolémées,  au  i"'  siècle  de  l'ère 
vulgaire.  Un  Sérapéum  grec, élevé  par  les  Grecs  d'Alexan- 
drie, en  conséquence  des  modifications  apportées  au  culte 
de  St^rapis  sous  les  premiers  Lagides,  vers  la  fin  du 
IV"  siècle  av.  J.-C,  ou  plutôt  peut-être  un  propylée,  lui 
servait  d'entrée  à  la  ligne  du  désert.  De  là  partait  un 
dromos  ou  chemin,  long  de  2  kilomèt.,  large  de  4'",50, 
pavé  en  grandes  dalles  de  pierre,  et  bordé  de  160  statues 
de  sphinx,  couchés  sur  autant  de  grands  piédestaux.  11 
aboutissait  au  pylône  d'un  petit  temple  placé  à  l'entrée 
de  l'enceinte  du  grand,  et  y  conduisant  par  une  allée  in- 
térieure bordée  de  statues  de  poètes  et  de  philosophes 
grecs  illustres,  tels  qu'Homère,  Lycurgue,  Platon,  Selon, 
et  de  divinités  comme  Plu  ton,  Bncchus,  etc.,  ou  de  Gé- 
nies montés  sur  des  animaux  qui  les  symbolisaient. 

Le  Sérapéum  de  Memphis  fut  détruit  du  temps  de 
Théodose,  vers  390,  par  les  chrétiens;  ses  ruines  et  ses 
grottes  ont  été  perdues  aux  regards  depuis  le  ivf  ou  le 
v"  siècle  de  notre  ère.  Un  membre  de  l'Institut  d'Egypte, 
M.  Jomard,  avait  indiqué  avec  assez  de  précision  l'en- 
droit où  il  devait  se  trouver;  mais  on  ne  l'avait  pas  bien 
cherché.  Situé  dans  une  plaine  si  sablonneuse  que,  du 
temps  de  Straboh,  les  vents  y  avaient  déjà  poussé  des 
amas  assez  considérables  de  sables  pour  que  les  sphinx 
de  la  grande  allée  y  fussent  enterrés  les  uns  à  moitié,  les 
autres  jusqu'à  la  tête,  il  finit  par  disparaître  entièrement 
quand  la  conquête,  puis  la  destruction,  eurent  affligé 
cette  contrée. 

M.  Aug.  Mariette,  chargé,  en  1850,  par  le  gouvernement 
français  d'une  mission  scientifiçiue  en  Egypte,  entreprit 
la  recherche  du  Sérapéum,  qui  fut  entièrement  déblayé 
sous  sa  direction  après  quatre  années  o^os^cn^ives  de 
travaux.  La  couche  de  sable  enlevée  avait,  dû  f^sri'^^ics 


SFU 


ig:]8 


SEl\ 


endroits,  de  25  à  30  met.  d*épaisseur.  Les  monuments 
principaux  que  M.  Mariette  put  tirer  des  fouilles  se 
voient  au  Musée  égyptien  du  Louvre,  et  consistent  prin- 
cipalemen*  en  grandes  stèles,  datées,  où  sont  gravées 
des  prières  à  Àpis  mort,  en  statues,  statuettes,  bijoux, 
vases,  etc.  —  Nous  avons  rédigé  cet  article  sur  des  notes 
que  nous  devons  à  l'obligeance  de  M.  Mariette.  V.  les  ou- 
vrages suivants  du  savant  ég}'ptoIogue  :  le  Sèrapéum  de 
Memphis^  Paris,  i857  et  suiv.,  in-fol.  (en  cours  d*exécu- 
tion;  l'ouvrage  aura  iiO  planches  photolithographiées, 
avec  un  texte  explicatif  et  critique);  Mémoire  sur  une 
représentation  gravée  en  tête  de  quelques  proscynèmes 
du  Sèrapéum,  Paris,  1856,  in-4°;  Renseignements  sur  les 
64  Apis  trouvés  dans  les  souterrains  du  Sèrapéum,  suite 
d'articles  publiés  dans  le  Bulletin  archéologique  de 
VAthénéum  français  ^  1857-58;  Choix  de  monuments  et 
de  dessins  découverts  ou  exécutés  pendant  le  déblayement 
du  Sèrapéum  de  Memphis,  Paris,  185G,  in-4<^,  10  planches. 
V.  aussi  Strabon,  Geogr.,  liv.  xvii.  C.  D — ^y. 

SÉRAPHINE,  petit  instrument  du  genre  de  l*orgue 
expressif,  construit  en  1830  par  le  facteur  Grûn. 

SÉRAPHINS.  V.  Anges. 

SÉRASKIER.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire, 

SERBE  ou  SERVIEN  (Idiome),  une  des  langues  slaves 
comprises  sous  la  dénomination  générale  d'itlyrien.  La 
langue  serbe  se  rapproche  plus  du  russe  que  du  polonais 
et  du  bohème.  Comme,  à  la  différence  de  ses  sœurs,  les 
voyelles  y  dominent,  elle  occupe  parmi  elles  le  premier 
rang  pour  la  douceur  et  la  mélodie  :  elle  doit  cet  avan- 
tage &  rinlluence  des  langues  italienne  et  grecque,  dont 
Tune  fut  apportée  par  le  commerce,  l'autre  par  la  reli- 
gion. Beaucoup  de  consonnes  sont  ou  supprimées  ou 
transformées  en  vovelles,  par  exemple  {.  L'accent  ne 
s'appesantit  pas  toujours  sur  une  seule  et  même  syllabe, 
comme  en  polonais  sur  l'avant-dernière.  Le  turc  a  in- 
troduit quelques-uns  de  ses  éléments  dans  le  serbe. 
Cette  langue  a  de  commun  avec  les  autres  langues  slaves 
une  déclinaison  et  une  conjugaison  complètes,  ainsi  que 
la  liberté  de  la  construction;  elle  se  prête  facilement 
aussi  &  reproduire  les  locutions  des  anciennes  langues 
classiques,  et  même  la  mesure  de  leurs  vers.  Les  Serbes, 
en  adoptant  l'alphabet  cyrillien,  y  ont  ajouté  quelques 
signes,  destinés  surtout  à  exprimer  Vi  bref  qui  amollit 
et  atténue  les  consonnes.  On  distingue  dans  la  langue 
serbe  trois  sous-genres  :  Vfierzégovin  ou  herzégovique  ^ 
parlé  dans  l'Herzégovine  et  la  Bosnie;  le  rasavique  ou 
ressavique,  parlé  sur  les  bords  de  laRazawa  ou  Ressava; 
le  syrmien  ou  syrmique,  parlé  en  Syrmie  et  en  Kscla- 
vonie.  K.  Wouk  Stéphanovitch  ,  Grammaire  serbe , 
Vienne,  1815,  traduite  en  allemand  par  Jacob  Grimm, 
Leipzig  et  Berlin,  1824;  le  même.  Dictionnaire  serbe- 
latin-allemand,  Vienne,  1818  ;  Berlic,  Grammaire  serbe 
à  Vusage  des  Allemands,  Agram,  1842;  Babukic,  Gram- 
maire serbe,  traduite  en  allemand  par  Frœhlich,  Vienne, 
1844;  Frœhlich,  Grammaire  serbe.  Vienne,  1854,  in-16; 
Richter  et  Ballemann,  Dictionnaire  allemand -illyrien  et 
Uty rien- allemand,  Vienne,  1830-40,  2  vol.  ;  Mouzouranic 
et  Ovzarewic,  Dictionnaire  allemand-illyrien ,  Agram, 
1842  ;  Schafarlk,  Choix  de  lectures  serbes,  ou  Examen 
historique  et  critique  du  dialecte  serbe,  en  allem.,  Pesth, 
1833. 

SERBE  (Littérature).  Les  Serbes,  dont  on  voit  paraître 
le  nom  pour  la  première  fois  au  commencement  du 
vu*  siècle,  se  servirent  d'abord,  ainsi  que  les  Bulgares , 
de  Vancien  slave  ou  langue  ecclésiastique.  A  partir  du 
xi'  siècle,  cette  langue,  réservée  au  style  d'église,  se  dis- 
tingua du  serbe  vulgaire,  employé  pour  le  style  de  chan- 
cellerie. Les  ouvrages  qui  nous  sont  parvenus  en  style 
d'église  ne  sont  pas  seulement  des  livres  de  prières,  mais 
des  écrits  historiques,  composés  pour  la  plupart  par  des 
prêtres  et  des  moines.  Parmi  les  écrivains  on  mentionne: 
le  roi  Etienne  (1195-1228),  qui  raconta  la  vie  de  son  père 
Etienne  Nemanja;  son  frère  l'archevêqae  S<  Sava.  dont 
on  a  des  règles  pour  les  couvents  ;  Dometian,  moine  de 
Chiljendar,  oui  écrivit  les  Vies  de  S^  Siméon  et  de 
S^  Savft;  l'archevêque  Daniel,  dont  la  Chronique  retrace 
rhistoire  de  la  Servie  de  1276  h  1336.  Quant  aux  ou- 
vrages en  serbe  proprement  dit,  il  est  resté  des  di« 
plûmes,  des  lettres  de  donatioo,  âos  actes  de  gouver* 
iiement,  dont  une  partie  a  été  publiée  à  Belgrade  en 
1840:, mais  le  plus  important  monument  est  le  Gode  de 
lois  promulgué  en  1349  par  Douschàn, 

La  Servie  ayant  6té  conquise  par  les  Ottomans  à  lafin 
£!l\  XIV*  siècle,  la  littérature  sacrée  s'éteignit  avec  la  li- 
berté^ une  foulede  manuscrits  furentllvrés  aux  flammes. 


ou  enfouis  et  oubliés  dans  les  couvents.  Tontefoit,  la 
langue  nationale,  abandonnée  dans  les  villes,  trouva  ua 
refuge  au  milieu  des  montagnes.  Des  poésies  popnlairea, 
produits  spontanés  d'une  imagination  ardente  et  mélan- 
colique à  la  fois,  passèrent  de  bouche  en  bouche  et  de 
siècle  en  siècle  :  les  unes  peignent  avec  gr&ce  et  enjoué 
ment  les  plaisirs  et  les  peines,  les  sensations  indivi- 
duelles des  Serbes  )  les  autres,  plus  solennelles  et  plus 
austères ,  retracent  leurs  luttes  et  leurs  exploita,  leur 
dévouement  et  leur  martjrre  pour  la  foi  des  ancêtres. 
Nous  citerons  particulièrement  le  Mariage  de  Maxime, 
la  Fondation  de  Scutari,  les  Aventures  de  Marko,  la 
Bataille  de  Kossovo,  et  tous  les  chants  dont  Stéphano- 
vitch composa  le  premier  un  vaste  recueil.  Une  Histoire 
de  la  Serbie,  écrite  vers  la  fin  du  xvii*  siècle  par  Georges 
Brankovitch,  est  le  dernier  livre  slavon  de  cette  nation. 

Le  réveil  de  la  littérature  eut  lieu  dans  les  dernières 
années  du  xvni*  siècle.  L'archimandrite  Jean  Raitsch 
écrivit  alors  son  Histoire  des  Slaves  (Vienne,  1792-95, 
4  vol.),  dans  un  style  ecclésiastico-4lave,  mêlé  de  msse 
et  de  serbe.  Puis  la  langue  populaire  serbe  fut  élevée  aa 
rang  de  langue  écrite  par  Obradoritch,  auteur  de  plu* 
sieurs  ouvrages  d'éducation;  par  Solaritsch,  renommé 
pour  son  érudition  paradoxale;  par  Davidovitch ,  qui 
publia  une  Gazette  serbe  de  1814  à  1822 ,  puis  un  Al' 
manach  serbe;  par  Wouk  Stéphanovitch,  connu  par  ses 
travaux  sur  la  langue.  Depuis  ces  hommes  de  talent,  des 
Annuaires  serbes  ont  été  publiés  par  Spiridion  Jovitsch  à 
Vienne,  Pavlovic  à  Pesth,  Nikolic  et  Vozarovic  à  Bel- 
grade. Mouschicki,  archevêque  deCarlowitz^  s'est  montré 
lyrique  plein  d'onction  dans  les  Poésies  qui  ont  paru  à 
Ôfen,  1840.  On  a  de  Miloutinovitch,  sous  le  nom  de 
Serbianza,  nne  série  de  chants  héroïques.  Les  plus  im- 
portants des  poètes  serbes  aujourd'hui  vivants  sont 
Branco  Raditschevitz  et  Jov&n  Ilitz.  Des  Chants  serbes 
ont  été  publiés,  en  allemand  par  Kapper  (Leipzig,  1852, 
2  vol.),  en  anglais  par  Bowring,  en  français  par  H°**  E. 
Volart  (183i,  2  vol.),  et  par  Aug.  Dozon  (1859,  in-18). 

SERDAR.     )  K.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

SERDEAU.  j    Biographie  et  d'Histoire. 

SÉRÉNADE  (du  latin  sera,  soir),  concert  donné  le  soir 
ou  la  nuit,  en  plein  air,  sous  les  fenêtres  de  quelqu'un. 
C'est  de  l'Espagne  et  de  l'Italie  que  les  sérénades  sont 
originaires.  On  y  exécute,  sinon  de  la  musique  spéciale- 
ment écrite  pour  cet  emploi,  du  moins  des  romances  et 
des  barcarolles  adaptées  ^  la  situation.  Le  nom  de  séré' 
nade  a  été  étendu  aux  morceaux  exécutés  dans  les  con- 
certs nocturnes,  et  même  à  des  compositions  qui  n'en 
rappellent  que  de  fort  loin  le  caractère  ;  tels  sont  le  trio 
instrumental  que  Beethoven  a  intitulé  Sérénade,  la  mé- 
lodie de  Schubert  qui  porte  le  même  nom,  la  canaonette 
exécutée  dans  le  Don  Juan  de  Mozart  sous  les  fenêtres  de 
la  camériste,  la  barcarolle  du  dernier  acte  de  VOtello  de 
Rossini ,  rintroduction  du  1"  acte  du  Barbier  de  Se' 
ville,  etc.  B. 

SÉRÉNISSIME. 

SFRF 

'    K.  ces  mots  dans  notre  Dic* 
tionnaire  de  Biographie  el 

SERGENT  DKBATAILLE.    '  d'HlStoirS, 

SEROENT  DE  VILLE. 

SEaoENT-Focnaiea*  V,  FocinnisR«  dans  notre  Dte^on^ 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

SBEGENT-MAJOR,  le  premier  sons-officier  d*uDe  compa- 
gnie d'infanterie.  Il  doit  connaître  la  conduite,  les  mœun 
et  la  capacité  des  autres  soua-officiera,  des  caporaux  et 
des  soldats  de  sa  compagnie  ;  il  les  commande  en  tout  ce 
qui  est  relatif  au  service,  k  la  tenue  et  à  la  discipline,  et 
en  est  responsable  envers  les  officiers.  Il  surveille  le  four- 
rier, chargé,  sous  sa  direction,  de  faire  les  écritures.  Il  a 
pour  signe  distinctif  un  double  galon  d'or  ou  d'argent 
cousu  diagonalement  au-dessus  de  chaque  parement  des 
manches  de  son  uniforme.  Dans  l'artillerie,  la  Rendar- 
merie  et  la  cavalerie,  ses  fonctions  sont  remplies  par 
un  marécheÀ-desAogis-chef,  Le  grade  de  sergent^major  a 
été  créé  par  une  ordonnance  de  1770;  ce  grade  avait  déjà 
existé  depuis  longtemps  sous  le  titre  de  sergent  d'af' 
faires.  Au  xvi*  et  au  xva*  siècle,  on  appelait  sergent- 
major  un  officier  supérieur  dont  les  fonctions  étaient 
analogues  à  celles  de  nos  Majors. 

SERGENTËRIE,  nom  donné  en  Normandie  à  des  fiefs 
nobles  patrimoniaux  et  héréditaires,  qui  passaient  aux 
filles  comme  aux  fils,  dont  l'exercice  pouvait  être  affermé, 
et  dont  les  propriétaires  devaient  foi  et  hommafce.  Ceux- 
ci  avaient  pour  fonctions  de  maintenir  le  droit  de  justice 
par  la  force  des  armes;  c'est  poui'quoi  on  les  appelait 


SERGENT. 
SEnoENT  d'armes. 


SER 


1639 


SRR 


tergêfUs  nobles  du  plaid  de  Vépée  on  sergents  de  la  que- 
relle. Ils  jugeaient  provisoirement  dans  les  affaîres  ordi- 
naires, recevaient  les  plaintes,  faisaient  les  informations, 
et  citaient  les  parties  devant  Ib  iuc  ou  la  cour  de  l'Échi- 
quier. 

SERINETTB,  sorte  A'orgue  ^  cylindre  (K  ce  mot) 
dont  on  se  sert  pour  instruire  les  serins.  Son  étendue  est 
ordinairement  d*une  octave;  elle  peut  Jouer  4  ou  5  airs 
différents. 

SERMENT,  acte  civil  et  reli^eux  par  lequel  on  Invoaue 
Dieu  comme  témoin  de  la  venté  d*un  fait,  ou  de  la  sin- 
cérité d'une  promesse,  et  qui  contient  implicitement  une 
sorte  dMmprécation  contre  celui  qui  le  prête,  au  cas  où  il 
se  parjure.  Le  serment  est  dit  affirmatif  ou  assertoire, 
quand  il  s'applique  k  un  fait  passé,  sur  lequel  il  y  a  incer- 
titude; promissoire,  s'il  se  réfère  à  une  chose  future. 
Chez  la  plupart  des  nations,  il  est  accepté  comme  une 
sûreté  des  engagements,  des  témoignages  ou  des  décla- 
rations.  Le  Droit  romain  Tezigeait  des  tuteurs  et  cura- 
teurs avant  leur  entrée  en  fonctions.  Le  serment  poli- 
tique est  celui  qu'on  exige  des  fonctionnaires  publics 
dans  un  grand  nombre  de  pays  au  moment  de  leur 
entrée  en  fonctions,  et  par  lequel  ils  promettent  obéis- 
sance aux  lois  dç  l'État  et  fidélité  au  souverain.  La  né- 
cessité du  serment  de  la  part  de  tout  fonctionnaire  faisait 
pour  ainsi  dire  partie  du  Droit  public  en  France  avant 
1789;  les  rois  le  prêtaient  au  moment  de  leur  sacre, 
et,  pour  les  magistrats,  on  considérait  au'il  accomplissait 
en  eux  le  car^ictère  de  l'office  et  leur  déiéralt  la  puissance 
publique.  La  Révolution  maintint  ce  principe,  et  exigea 
le  serment  civique  :  on  se  rappelle  les  désordres  que  sou- 
leva la  loi  sur  la  Constitution  du  clergé  en  voulant  l'exiger 
des  prêtres.  Les  différentes  '  Constitutions  qui  se  sont 
succédé  ont  maintenu  le  serment  des  fonctionnaires , 
en  modifiant  seulement  ses  termes  i  ordonné  par  la  loi 
du  31  août  1830,  aboli  en  1848,  il  a  été  rétabli  en  1852. 
Un  serment  professionnel  est  imposé  aux  employés  des 
Postes  relativement  au  secret  des  lettres,  ainsi  qu'aux 
avocats  en  ce  qui  concerne  le  loyal  exercice  du  ministère 
de  la  défense,  un  autre  genre  de  serment  spécial  à  la  fonc- 
tion ou  à  la  mission  confiée  est  celui  des  experts  et  des 
interprètes >  des  Jurés  [Code  dUnstruction  criminelle, 
art.  312),  des  témoins  en  matière  criminelle  Ubid.^  art.  75, 
155, 317).  fin  matière  civile,  on  n'exige  des  témoins  que  le 
serment  de  dire  la  vérité.  —  Le  serment  judiciaire  s'ap- 
plique aux  objets  des  contestations  entre  particuliers,  et 
est  de  deux  sortes,  le  serment  décisoire  et  le  serment  dé- 
féré d* office.  Le  serment  décisoire  est  celui  qu'une  partie 
défère  à  l'autre,  pour  en  fdre  dépendre  le  lugement  de  la 
cause  :  quand  il  a  été  accepté  par  l'adversaire,  la  rétracta- 
tion n'est  pas  possible,  et^  après  qu'il  a  été  fait,  on  n'est 
point  recevable  à  en  prouver  la  fausseté.  Mais  le  serment 
doit  avoir  pour  objet  un  fait  personnel  ^  la  partie  à  la- 
quelle on  le  défère.  Il  ne  peut  être  réfiré,  lorsque  le  fait 
n*est  pas  celui  des  deux  parties.  Le  plaideur  qui  refuse 
le  serment  qu'on  lui  défère,  ou  qui  ne  consent  pas  à  le 
référer  à  son  adversaire,  succombe  nécessairement;  il  en 
est  ainsi  de  celui  à  oui  le  serment  a  été  référé  et  qui  le 
refuse.  Un  serment  déféré  d'office  par  le  Juge  à  l'une  des 
parties  ne  peut  être  référé  par  elle  à  l'autre  partie  ;  il  est 
appelé  serment  supplétif  ou  supplétoire,  si  la  décision 
de  la  cause  doit  en  dépendre,  et  serment  in  litem,  s'il  ne 
s'agit  que  de  déterminer  le  montant  de  la  condamna- 
tion. Le  serment  ne  peut  être  déféré  d'office  que  si  la  de- 
mande ou  l'exception  n'est  pas  pleinement  justifiée,  et  si 
elle  n'est  pas  non  plus  totalement  dénuée  de  preuves.  Le 
serment  sur  la  valeur  de  la  chose  ne  doit  être  déféré  qu'au 
cas  où  il  n'y  a  pas  d'autre  moyen  de  la  constater,  et  le  Juge 
doit  déterminer  la  valeur  de  la  somme  Jusqu'à  concur- 
rence de  laquelle  le  serment  fait  foi  (Code  iVap.,  art.  1357, 
1370).  En  général,  le  serment  Judiciaire  doit  être  fait  par 
la  partie  en  personne  et  en  audience  publique  :  mais,  en 
cas  d'empêchement  légitime  et  dûment  constaté,  il  peut 
être  prêté  devant  un  Juge  commis  par  le  tribunal  et  qui 
se  transporte  avec  le  greffier  chez  la  partie  ;  en  cas  d'éloi- 
gnement  trop  grand,  il  peut  èUe  oraonné  que  la  partie 
prêtera  le  serment  devant  le  tribunal  de  sa  résidence.  Il 
n'y  a  pas  de  termes  prescrits  par  la  loi  pour  la  presta- 
tion du  serment  Judiciaire;  mais  le  Juge  aoit  exiger  qu'il 
soit  prêté  suivant  le  rit  de  la  reli^^on  que  professe  la 
partie.  La  personne  à  qui  le  serment  a  été  déféré  et  qui 
est  convaincue  d'avo:r  fait  un  faux  serment  est  punie 
de  la  dégradation  civique  [Code  pénal,  art.  366). 

Chez  les  Anciens,  le  serment  se  prêtait  devant  les  au- 
tels. Chez  les  peuples  chrétiens,  il  s'est  longtemps  prêté 
la  maSa  sur  l'Évangile  ou  sur  des  reliques  :  aujourd'hui 


on  le  prête  debout,  la  tête  découverte,  la  main  droite  nue 
et  levée  vers  le  ciel  ou  en  ftice  d'un  crucifix.  Les  Juifs 

Erêtent  serment  dans  la  synagogue,  en  présence  du  rab- 
in,  et  la  main  sur  le  Talmud.  Les  Quakers,  s'appuyant 
sur  un  passage  de  TÈvangile  de  S' Matthieu  (v,  33),  pro- 
hibent le  serment.  F.  G.  Walckenaer,  De  ritibui  in  it«- 
rando  à  vHeribus,  Hebrœis  maxime  ac  Grœcis,  obser^ 
vatis,  1755,  in-4». 

SERMENT  CIVIQUE,  Serment  d'accomplir  tous  les  devoirs 
du  citoyen^  En  usage  chez  les  Anciens,  il  n'a  aucun  sens 
parmi  nous. 

SERMENT  coNSOLATRB.        )  V.  cos  mots  daus  notro  Dîc- 

SERMENT  DE  GLADIATEUR.  >     ttOMiaire  de  biographie  et 

SERMENT  MiUTAiRE.  )     d*Histoire. 

SERMOLOGE,  c.-&-d.  recueil  de  sermons;  nom  donné 
autre-fois  à  des  livres  qui  contenaient  des  discours  ou 
sermons  des  papes  et  autres  personnes  vénérées  pour 
leur  sainteté.  On  y  faisait  des  lectures  aux  fêtes  des  Con- 
fesseurs depuis  Noj^l  Jusqu'à  l'octave  de  l'Epiphanie,  à  la 
Purification,  à  la  Toussaint,  et  à  quelques  autres  fêtes. 

SERMON  (du  latin  sermo,  discours,  entretien),  dis- 
cours du  genre  démonstratif,  prononcé  en  chaire,  dans 
une  église,  sur  un  sujet  de  morale  ou  de  dogme.  Dans  le 
premier  cas,  on  l'appelle  sermon  de  morale;  dans  le 
second ,  sermon  de  mystère.  Les  règles  du  sermon  ont 
été  développées  par  S*  Augustin  dans  son  traité  De  doc- 
trinà  chrtstianA ,  et  par  Fénelon  dans  ses  Dialogues  sur 
Véloquence,  Ce  qui  le  distingue  de  l'Homélie  et  du  Prône 
{V,  ces  mots),  c'est  qu'il  exige  un  texte,  un  exorde,  un 
plan  régulier,  et  une  péroraison  {V.  ces  mots).  Le  texte, 
emprunté  à  l'Écriture  sainte,  renferme  en  substance  le 
sujet  du  discours.  L'exorde  est  terminé  par  une  invoca- 
tion, à  la  suite  de  laquelle  les  auditeurs  disent  tout  bas 
un  Ave,  Maria,  Le  sermon  est  de  tous  les  discours  reli- 
gieux celui  qui  comporte  le  mieux  une  division  régu- 
lière :  on  le  partage  d'ordinaire  en  deux  points;  le  sicTmoii 
sur  la  Passion  en  a  souvent  trois.  V.  Chaire  (Éloq'.ience 
de  la).  ». 

SERMONNAIRE,  se  dit  tout  à  la  fois  d'un  recuuil  de 
sermons,  et  du  prédicateur  qui  s'est  voué  h,  ce  genre  de 
discours. 

SERPENT,  reptile  dont  on  a  fait  le  symbole  du  men« 
songe,  de  l'astuce  et  de  l'envie,  mais  aussi  l'emblème 
de  Ta  prudence  et  de  la  séduction.  C'est  sous  la  forme 
du  serpent  que  le  démon  tenta  Eve  dans  le  Paradis  ter- 
restre. Dans  l'ancienne  Egypte,  le  serpent  entourait  la 
tête  d'Isis,  le  sceptre  d'Osiris,  le  corps  de  Serapls.  Dans 
la  mythologie  grecque  et  romaine,  des  serpents  arment 
le  fouet  des  Furies  et  forment  leur  chevelure  ;  ils  entou- 
rent le  caducée  de  Mercure.  Le  serpent  était  l'attribut 
d'Esculape,  dieu  de  la  médecine,  et  d'Hygic,  déesse  de 
la  santé,  parce  que,  changeant  de  peau  tous  les  ans, 
il  rappelait  le  malade  entrant  par  la  8un!é  dans  une  nou- 
velle vie.  Un  serpent  sur  un  trépied  marquait  l'oracle 
de  Delphes,  sans  doute  en  souvenir  de  Python,  tué  par 
Apollon  à  Delphes.  Pour  les  chrétiens,  le  serpent  est 
l'image  de  l'esprit  malin  ;  il  est  représenté  vaincu  au 
pied  de  la  croix,  ou  foulé  sous  les  pieds  de  la  Vierge  im- 
maculée. Un  serpent  qui  mord  sa  queue  est  le  symbole 
de  l'éternité.  Les  habitants  de  la  Nigritie  rendent  encore 
aujourd'hui  un  culte  au  serpent.    •  B. 

SERPENT ,  instrument  à  vent,  longtemps  employé  pour 
soutenir  le  chant  d'église,  et  même  pour  Jouer  la  basse 
de  l'harmonie  dans  la  musique  militaire.  Il  était  com- 
posé de  deux  pièces  de  bois  de  noyer  fort  minces,  accolées 
en  regard  l'une  à  l'autre  de  manière  à  former  un  tube 
rond,  tortillé  en  S  comme  un  gros  serpent,  recouvert 
d'un  cuir  très-fin  ou  d'une  peau  de  chagrin,  ouvert  aux 
deux  bouts,  effilé  vers  l'embouchure,  et  grossissant  peu 
à  peu  Jusqu'à  l'autre  extrémité.  Il  était  percé,  sur  le 
côté,  de  0  trous,  dont  les  trois  supérieurs  étaient  bouchés 
par  les  doigts  de  la  main  muche,  et  les  trois  inférieurs 
par  les  doigts  de  la  droite.  Sa  musique  était  écrite  sur  la 
clef  de  fa  4«  ligne.  Le  serpent,  inventé  en  i590  par  un 
chanoine  d'Auxerre,  nommé  Edme  Guillaume,  était  un 
instrument  imparfait  :  il  avait  des  intonations  fausses, 
et,  k  côté  de  notes  très-fortes,  on  en  rencontrait  de  bien 
faibles.  Pour  le  perfectionner,  on  y  ajouta  des  clefs,  qui 
le  rendirent  plus  Juste,  mais  qui  ne  lui  donnèrent  pas 
d'égalité.  Il  a  disparu  complètement  de  nos  Jours,  et  a 
été  remplacé  par  le  basson  russe  ou  par  lophicléide.  — 
Dans  certaines  orgues,  à  la  pédale  de  seize  pieds,  il  y  a 
un  Jeu  d'anche  appelé  serpent.  Le  son  en  est  plus  faible 
que  celui  de  la  posaune  {Y.  ce  mot),  mais  plus  fort  que 
celui  du  basson.  Il  imite  le  serpent  de  la  musique  mili- 
taire. B. 


SRR 


16*0 


SER 


SERPENTEAU ,  fusée  volante  sam  bagpette,  qui ,  au 
ilea  de  monter  droit,  va  obliquement  en  zigzag  et  comme 
en  serpentant;  —  cercle  de  fer  muni  de  grenades  char- 
gées de  pointes  de  fer,  qu'on  Jette  sur  une  brèche. 

SERPILLIÈRE,  toile  grossière  d'emballage,  et,  par 
extension,  tente  que  les  marchands  placent  au  devant 
de  leurs  boutiques  pour  les  garantir  des  rayons  du  soleil. 

SERRE ,  lieu  clos  et  couvert  où  Ton  abrite  pendant 
rbiver  les  plantes  qui  redoutent  le  froid,  et  pendant 
toute  Tannée  celles  qui  demandent  une  température 
constamment  élevée.  Les  serres  doivent  être  abritées 
contre  le  vent,  tournées  entre  l'Est  et  le  Sud,  et  vitrées 
d'un  ou  de  plusieurs  côtés  pour  laisser  pénétrer  les 
rayons  du  soleil.  Il  faut  q[ue  les  vitrages  puissent  s*ou- 
vrir,  afin  de  renouveler  Tair.  On  nomme  Serre  tempérée 
celle  qui  se  chauffe  par  les  rayons  solaires  seulement,  et 
Serre  chaude  celle  qui  se  chauffe  en  outre  au  moyen  de 
\  oêles  ou  de  calorifères,  ou  par  la  vapeur  de  l'eau  bouil- 
lante. B. 

SERRE-BOSSE,  gros  cordage  qui  tient  une  ancre  sou- 
levée par  une  de  ses  pattes,  entre  le  bossoir  où  cette 
ancre  est  suspendue  et  le  porte-hauban  de  misaine. 

SERRE-FILE.  V.  File. 

SERRURERIE,  art  qui  fournit,  non-seulement  les  ser- 
rures, dont  il  tire  son  nom,  mais  à  peu  près  tous  les  ou- 
vrages en  fer  qui  entrent  dans  la  construction  des  ma- 
chines, des  instruments  et  outils,  et  des  édifices  de  toute 
espèce.  Ce  n'est  aujourd'hui,  à  proprement  parler,  qu'une 
industrie;  mais  il  fut  un  temps  où  l'on  pouvait  le  placer 
parmi  les  Beaux-Arts  :  le  maître  serrurier  ne  devait  pas 
se  contenter  de  savoir  travailler  le  fer,  il  fallait  qu'il  fût 
encore  sculpteur,  artiste,  mécanicien.  La  serrurerie  du 
moyen  âge  produisit  de  magnifiques  ouvrages,  grilles, 
croix,  reliquaires,  portes  de  tabernacles,  pupitres,  cof- 
frets, plaques  de  serrures,  ferrures  de  portes,  etc.  On 
Jtaît  les  ferrures  des  portes  de  la  cathédrale  de  Paris. 
Elle  fut  également  florissante  à  l'époque  de  la  Renais- 
sance; on  fit  alors  des  clefs  et  des  plaques  de  serrures 
remarquables  par  leur  fini,  des  bas- reliefs  en  fer  re- 
poussé et  rehaussé  d'or  pour  décorer  les  meubles.  La 
grille  de  la  galerie  d*Apollon,  au  vieux  Louvre,  témoigne 
de  la  perfection  à  laquelle  on  était  arrivé.  Sous  Louis  XIV, 
la  serrurerie  produisit  encore  quelques  oeaux  ouvrages. 

SERRURIERS,  ancienne  corporation,  qui  prit  pour  pa- 
tron S'  Éloi,  et  dont  les  statuts,  accordés  par  Charles  VI 
en  1411,  furent  confirmés  par  François  V  en  1543  et  par 
Louis  XIV  en  1650.  L'apprentissage  et  le  compagnonnage 
duraient  5  ans  chacun.  Le  brevet  coûtait  30  livres,  et 
la  maîtrise  8U0.  Les  serruriers  ne  pouvaient,  sous  peine 
de  punition  corporelle,  faire  ouverture  do  serrures  hors 
de  la  présence  du  propriétaire  de  la  chose,  ou  du  loca- 
taire de  l'appartement.  Il  leur  était  défendu,  sous  peine 
de  mort,  de  fabriçiuer  des  clefs  sur  modèles  de  terre  ou 
*\e  cire,  sans  avoir  la  sen'ure,  ou  de  fa!rc  des  ustensiles 
pouvant  s'Tvir  au  faux  monnayage. 

SERVAGi:.  I    V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 

SERVANT  D'ARMES.  {     graphie  et  d'Histoire. 

SERVANTE,  meuble  qui  commença  à  être  en  usage 
vers  la  fin  du  règne  de  Louis  XIV.  C'était  une  crédence 
de  forme  carrée,  montée  sur  roulettes,  avec  deux  ou  trois 
tablettes  et  deux  ronds  pour  y  placer  une  bouteille  et  une 
carafe,  et  au  moyen  de  laquelle  un  petit  nombre  de  con- 
vives pouvaient  se  servir  eux-mêmes  sans  le  secours  des 
domestiques  et  sans  être  obligés  de  se  lever  de  table. 

SERVANTS,  artilleurs  qui  se  tiennent  de  chaque  côté 
d*une  pièce  pour  la  servir. 

SERVICE  (du  latin  serviref  servir),  état  on  fonctions 
d'une  personne  qui  sert  en  qualité  de  domestique.  Le  mot 
se  dit  encore  de  l'emploi  de  ceux  qui  servent  l'État  dans 
la  magistrature,  les  finances,  Tinstruction  publique,  etc. 
La  durée  du  service  est  déterminée  par  l'âge  auquel  on  a 
droit  à  une  pension  de  retraite  (  V.  Retraite  —  Pensions 
de).  —  Le  Service  militaire  a  eu  une  durée  très-variable. 
Chez  les  Hébreux,  tout  homme  pouvait  être  appelé  de  20  ans 
à  50.  Chez  les  Spartiates,  tout  citoyen  était  soldat  de 
20  ans  à  60  ;  à  Athènes,  on  servait  de  18  à  40  ans  ;  à  Rome, 
de  17  à  45.  Au  moyen  &ge,  chez  les  Franks,  le  LetMfe  ou 
Fidèle  devait  le  service  à  toute  réquisition  de  son  chef  ; 
VAhriman  ou  homme  libre,  seulement  dans  les  guerres 
générales.  A  l'époque  féodale,  le  service  militaire  fut  une 
des  obligations  du  vassal  envers  son  suzerain  :  il  durait, 
chaque  année,  de  40  à  60  Jours.  Depuis  le  xv*  siècle, 
l'armée  en  France  se  recruta  par  enrôlements  volontaires; 
pour  la  Milice  (  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  »•/  (V Histoire) ,  la  durée  du  service  fut  de  5  ou 
%  ftBL  Depuis  la  Hévoiution  qui  soumit  tous  les  citoyens 


à  la  conscription,  le  service  militaire  fut  fixé  à  5  ans  pai 
la  loi  du  18  fructidor  an  vi,  à  6  ans  par  colle  du  18  févr. 
1 808,  k  6  ans  pour  l'infanterie  et  à  S  ans  pour  la  cavalerie 
et  les  armes  spéciales  par  la  loi  du  10  mars  1818  :  porté 
à  8  ans  pour  toutes  les  armes  par  la.  loi  du  9  juin  fS'il. 
il  a  été  réduit  à  7  par  celle  du  21  mar»  1832.  Il  y  eut  des 
exemptions,  et  le  remplacement  fn\  permis  (K.REcauTB- 
MENT,  Exonération^  Remplacement).  F.  le  SuppL    B. 

SERVICE ,  en  termes  de  Liturgie ,  célébration  solennelle 
de  l'office  divin.  Un  Service  de  bout  de  Van  est  celui  qui 
se  célèbre  pour  un  défunt  au  premier  anniversaire  de  son 
décès. 

SERVICE  (Lettre  de).  V.  Lettre  de  service. 

SERVICES  FONQERS.  K.  Servitudes. 

SERVIEN  (Idiome).  V.  Serbe. 

SERVIETTE,  linge  de  table^qui,  si  l'on  en  croit  Mon- 
taigne, ne  fut  en  usage  que  depuis  son  temps,  c.-à-d.  à  la 
fin  du  XVI*  siècle  :  auparavant  les  convives  s'essuyaient 
avec  la  nappe.  Cependant,  on  trouve  dans  des  temps  an- 
térieurs les  mots  facitergium  (  linge  de  figure)  et  manu- 
mundium  (essuie-mains).  Il  fut  un  temps  où,  dans  les 
grandes  maisons,  on  changeait  de  serviette  à  chaque 
service,  et  même  à  chaque  assiette.  —  De  nos  Jours,  on 
donne  aussi  le  nom  de  Serviette  &  un  grand  portefeuille 
mou,  à  deux  poches,  en  maroquin  ou  en  basane,  et  que 
l'on  porte  sous  le  bras. 

SERVITUDES,  en  termes  de  Droit,  charges  établies  sur 
un  héritage  pour  l'usage  ou  l'utilité  d'un  héritage  appar- 
tenant à  un  autre  propriétaire.  On  les  nomme  aussi  Ser- 
vices fonciers.  L'héritage  auquel  la  servitude  est  due  est 
dit  dominant;  celui  qui  la  doit,  se)'vant.  Les  servitudes 
n'établissent,  dit  la  loi,  aucune  prééminence  d'un  héri- 
tage sur  l'autre,  et  dérivent  ou  de  la  situation  naturelle 
des  lieux,  ou  des  obligations  qu'impose  la  loi,  ou  des  con- 
ventions intervenues  entre  les  propriétaires  :  de  là  une 
distinction  des  servitudes  en  naturelles,  légaies,  conven- 
tionnelles. 

Les  servitudes  naturelles  sont,  par  exemple,  celles  qui 
tiennent  à  l'écoulement  des  eaux  (K.  Cours  d*eau),  ou 
encore  l'obligation  au  bornage  entre  propriétaires  voisins. 
V.  Bornage. 

Parmi  les  servitudes  légales,  il  y  a  d'abord  celles  qui 
ont  pour  objet  l'utilité  publique  ou  communale;  ainsi, 
pour  le  marchepied  le  long  des  rivières  {V.  Marchepied), 
la  construction  ou  la  réparation  des  chemins  :  des  règle- 
ments particuliers  les  régissent.  Ce  sont  encore  la  mi- 
toyenneté des  murs,  haies  et  fossés  (F.  Mitotenketf, 
Haie,  Fossé).  La  loi  règle  également  au  titre  des  Servi- 
tudes la  distance  et  les  ouvrages  intermédiaires  requis 
pour  certaines  constructions,  telles  que  cheminées,  fours, 
étables,  fosses  d'aisances,  etc.  Elle  s'occupe  du  droit  de 
vue,  c.-à-d.  qu'elle  détermine  la  hauteur  et  la  dimension 
des  jours  qui  peuvent  être  ouvcits  dans  les  murs  joignant 
la  propriété  d'auVui,  et  fixe  la  distance  obligatoire  pour 
l'ouverture  des  vues  droites  ou  fenêtres  d'aspect  et  celle 
des  vues  obliques.  Végout  des  toits  doit  être  recueilli  par 
chacun  sur  son  terrain,  ou  projeté  directement  sur  la 
voie  publique;  ce  n'est  qu'à  titre  de  servitude  qu'il  peut 
être  projeté  sur  le  fonds  voisin.  Le  passage  sur  le  fonds 
voisin  ne  peut  être  exigé  qu'au  cas  d'enclave  :  il  se  fixe 
alors  moyennant  indemnité,  et  s'exerce  par  Tendroit  le 
plus  court  et  le  moins  dommageable. 

Les  servitudes  établies  par  le  fait  de  l'homme  sont 
susceptibles  de  toutes  les  variétés  que  la  volonté  humaine 
peut  leur  faire  revêtir.  La  loi  les  respecte  toutes,  pourvu 
que  l'usage  et  l'utilité  soient  revendiqués  par  un  fonds 
en  faveur  d'un  fonds  et  n'aient  rien  de  personnel,  pourvu 
encore  qu'ils  n'aient  rien  de  contraire  à  l'ordre  public. 
On  les  distin^e  en  servitudes  urbaines  ^  lorsque  leur 
usage  est  spécial  à  des  bâtiments,  et  servitudes  rurales, 
lorsqu'elles  s'appliquent  aux  fonds  de  terre;  en  servi- 
tudes continues  ou  discontinues,  suivant  que  leur  usage 
a  ou  n'a  pas  besoin  du  fait  de  l'homme  pour  être  con- 
tinué ;  en  servitudes  apparentes  ou  non  apparentes,  sui- 
vant qu'elles  ont  ou  n'ont  pas  un  signe  extérieur  de  leur 
existence.  De  ces  servitudes,  les  unes  peuvent  s'acquérir 
par  titre  ou  par  la  prescription  trentenaire,  ce  sont  les 
servitudes  continues  et  apparentes  ;  les  autres  ne  peuvent 
s'établir  que  par  titre,  ce  sont  les  servitudes  continues 
non  apparentes,  ou  discontinues  apparentes  ou  non  ap- 
parentes. A  l'égard  de  la  première  catégorie,  la  destina- 
tion du  père  de  famille  vaut  titre. 

Les  frais  nécessités  par  l'usage  et  la  conservation  de  la 
servitude  sont,  à  moins  de  conventions  contraires,  à  la 
charge  du  fonds  dominant  :  mais,  au  cas  niêmn  où  le 
'  fonds  servant  y  est  assujetti ,  oc  peut  s'y  soustraire  en 


SES 


1641 


SRV 


abandoniiant  le  fonds  amujetti  au  isropriétaire  da  fonds 
dominant.  Rien  ne  doit  être  fait  ni  par  le  propriétaire  du 
fonds  servant  pour  rendre  l'usage  de  la  servitude  plus 
incommode ,  a/i  par  le  propriétaire  du  fonds  dominant 
pour  a^raver  la  situation  du  fonds  assujetti.  —  Les  ser- 
vitudes s'éteignent  lorsqu'elles  se  trouvent  dans  un  état 
tel  qu'on  ne  peut  plus  en  user;  elles  revivent  lorsque  les 
choses  sont  rétablies,  &  moins  qu'il  ne  se  soit  écoulé  un 
temps  néce<)saire  pour  Pextinction  du  droit.  Ce  temps  est 
thé  par  la  loi  à  30  ans  ;  il  commence  à  courir,  pour  les 
servitudes  discontinues,  du  jour  où  l'on  a  cessé  de  jouir; 
pour  les  servitudes  continues,  du  jour  il  a  été  fait  un 
acte  contraire  à  la  servitude.  La  réunion  des  deux  fonds 
dans  la  même  main  amène  l'extinction  de  la  servitude. 
V,  Lalaure,  Traité  ies  servitudes  réelles,  revu  par  Puil- 
liet,  182X,  in -8^';  Selon,  Traité  des  servitiuies  réelles, 
1837,  iû-8°;  Pardessus,  Traité  des  servittides  ou  Services 
fonciers,  8«  édit,,  1838,  2  vol.  in-8'>;  Astruc,  Traité  des 
servitudes  réelles,  1843,  în-12;  Jousselin,  Traité  des  ser- 
vitudes d'utilité  publique,  18:iO,  2  vol.  in-8°;  Féraud- 
Giraud,  Servitudes  de  voirie,  1851,  2  vol.  in-8<»;  Gavini 
de  Campile,  Traité  des  servitudes,  1853;  Demolombe, 
Traité  des  servitudes  ou  Services  fonciers,  1856,  2  vol. 
in-S».  R.  d'E. 

SERVITUDES  MiuTAiRBS,  restricUons  apportées,  dans  l'in- 
térêt de  la  défense  du  territoire  national ,  au  droit  de 
Jouissance  ordinairement  Inhérent  à  la  propriété  foncière. 
II  existe,  autour  des  places  de  guerre  et  des  postes  mili- 
taires, trois  zones  de  servitudes;  dans  la  première,  qui 
s'étend  à  250  met.  de  l'enceinte  de  la  place  ou  du  poste, 
il  ne  peut  être  fait  aucune  construction,  à  l'exception  des 
clôtures  en  baies  sèches  ou  en  planches  à  claire-voie,  sans 
pans  de  bois  ni  maçonnerie;  les  haies  vives  et  les  plan- 
tations d'arbres  ou  d'arbustes  formant  haies  y  sont  spé- 
cialement interdites.  Dans  la  seconde  zone,  qui  s'étend  à 
487  met,,  il  est  interdit,  autour  des  places  de  premier 
ordre,  d'exécuter  aucune  construction  en  maçonnerie  et 
en  pisé;  mais  on  peut  y  élever  des  constructions  en  bois 
et  en  terre,  à  charige  de  les  démolir,  sans  indemnité,  à  la 
première  réquisition  de  l'autorité  militaire,  dans  le  cas 
où  ces  places  seraient  déclarées  en  état  de  guerre;  pour 
les  places  de  second  ordre  et  les  postes  militaires,  il  est 
permis  d*élever  des  constructions  quelconques,  sous  cette 
même  conoition  de  démolition.  Dans  la  troisième  zone, 
qui  s'étend  à  074  met.  pour  les  places,  et  à  584  pour  les 
postes,  il  ne  peut  être  fait  aucun  chemin,  aucun  exhaus- 
sement de  terrain,  aucune  fouille,  aucun  dépôt  de  maté- 
riaux, sans  que  leur  alignement  on  leur  position  n'aient 
été  concertés  avec  les  ofTlciers  du  génie.  Des  exceptions 
à  ces  règles  peuvent  être  autorisées  par  le  Ministre  de  la 
guerre,  qui  prescrit  les  conditions  qu'il  juge  convenables. 
—  Indépendamment  des  zones  de  servitudes,  il  y  a  la 
zone  des  fortifications  ou  le  terrain  mUitaire,  C'est  le 
sol  sur  lequel  reposent  les  fortifications,  les  fortifications 
elles-mêmes,  et  les  terrains  accessoires  indispensables 
au  service  de  la  défense.  La  zone  des  fortifications  est 
limitée  à  l'intérieur  par  la  rue  Militaire  ou  rue  du  Rem- 
part, destinée  à  assurer  les  libres  communications  le 
long  de  l'enceinte.  Les  contraventions  aux  lois  et  règle- 
ments sur  les  servitudes  militaires  sont  constatées  par  les 
gardes  du  génie,  et,  au  cas  où  des  ouvrages  seraient  in- 
dûment exécutés  par  des  particuliers,  ils  seraient  dé- 
molis aux  frais  de  ces  derniers,  sans  préjudice  des  peines 
applicables  aux  contraventions  analogues  en  matière  de 
grande  voirie. 

II  existe,  dans  tous  les  départements  frontières,  une 
zone  frontière,  dans  l'intérieur  de  laquelle  les  proprié- 
taires sont  soumis  à  des  servitudes  spéciales.  De  plus, 
sous  le  nom  de  polygones  ou  de  territoires  réservés, 
on  désigne  certains  grands  obstacles  naturels,  tels  que 
fleuves,  forêts,  massifs  de  montagnes,  etc.,  qui  bordent 
les  frontières,  et  sur  lesquels  l'État  s'est  réservé  des  droits 
au  point  de  vue  de  la  défense  du  pays.  V.  la  Loi  du 
7  avril  1851,  et  le  Décret  du  10  août  i853;  Delalleau, 
Traité  des  servitudes  établies  pour  la  défense  des  places 
de  guerre  et  de  la  zone  des  frontières,  1836,  in-8<>. 

SESQUI,  particule  employée  par  les  anciens  musiciens 
dans  la  composition  le  plusieurs  mots  qui  servaient  à 
exprimer  différentes  sortes  de  mesures.  Elle  signifiait 
trois  moitiés,  ou  un  et  demi;  ainsi,  on  appelait  sesqui' 
altère  la  mesure  à  3/2,  parce  qu'elle  contient  trois  blan- 
ches ou  trois  moitiés  de  ronde;  sesquinquarte,  la  mesure 
àfy4  ou  neuf  quarts  de  ronde  ;  sesqui-octave,  la  mesure  à 
0/8  ou  neuf  huitièmes  de  ronde.  Le  sesqui-diton  était  la 
tierce  mineure  ou  un  ton  et  demi.  —  Il  y  a  un  jeu  d'or- 
gues appelé  se$q^icUter,  formé  de  deux  rangées  de  tuyaux 


en  étaln  ou  en  étoffe,  du  diapason  du  Principal  (F.  et 
mot).  Il  se  compose  d'une  quinte  et  d'une  tierce  supé- 
rieure, de  manière  que  les  deux  rangées  donnent  une 
grande  sixte. 

SESSION,  en  latin  sessio  (de  sedere,  être  assis),  temps 
pendant  lequel  un  corps  délibérant,  un  tribunal  excep- 
tionnel ,  une  Cour  d'assises,  est  assemblé. 

SESTERCE.        \  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

SESTERTiUM.    {      de  Biographie  et  d'Histoire. 

SESTINA.  V.  Italienne  (Versification). 

SETH,  dieu  égyptien,  type  de  la  force  et  de  la  vic- 
toire. Il  est  représenté  avec  la  tête  d'un  animal  à  museau 
allongé  et  à  oreilles  droites.  Quand  on  en  fit  un  esprit 
malfaisant,  son  image  fut  martelée  sur  les  monuments. 

SEUIL,  partie  inférieure  d'une  porte,  pierre  ou  pièce 
de  bois  qui  est  entre  ses  tableaux  ;  —  pièces  de  bois  qui 
ferment  l'avant  et  l'arrière  des  bateaux.  On  nomme  seuU 
d^écluse  la  pièce  de  bois  qui,  percée  de  travers  entre  deux 
poteaux  au  fond  de  l'eau,  sert  à  appuyer  par  le  bas  la 
porte  d'une  écluse. 

SÉVICES  (du  latin  sœvire,  sévir),  mauvais  traite- 
ments exercés  par  un  mari  envers  sa  femme,  par  un  père 
envers  ses  enfants,  par  un  maître  envers  ses  serviteurs. 
Les  sévices  sont  une  cause  de  séparation  entre  mari  et 
femme  {Code  NapoL,  art.  231  ),  et  de  révocation  de  dona- 
tion entre-vifs  (art.  055  et  1046). 

SÉVILLE  (Alcazar  de).  F.  Alcazar. 

sÉviLLB  (Cathédrale  ae),  un  des  plus  beaux  monu- 
ments de  l'Espagne,  dédié  à  la  S^*  Vierge.  A  part  une 
vieille  muraille  moresque,  située  du  côté  du  Nord ,  cou- 
ronnée de  créneaux  et  de  mâchicoulis,  soutenue  par  de 
lourds  contre-forts,  et  qui  est  un  reste  de  mos(|uée,  l'en- 
semble de  l'édifice  appartient  à  la  fin  du  xv*  siècle  et  au 
commencement  du  xvi"  :  commencé  en  1480,  il  était 
assez  avancé  en  i510  pour  servir  à  la  célébration  du 
culte.  La  façade  principale,  du  côté  de  l'E.,  a  été  achevée 
seulement  en  1827.  Le  plan  de  la  cathédrale  de  Séville 
est  quadrilatéral;  elle  a  132  met.  de  l'E.  à  l'O.,  et  06  du 
N.  au  S.  On  y  entre  par  0  portes,  surmontées  presque 
toutes  de  statues  en  terre  cuite  exécutées  par  Lope  Marin, 
et  dont  les  plus  intéressantes  sont  la  porte  de  S*-Chris- 
tophe,  près  de  laquelle  Luis  de  Vargas  a  peint  à  fresque 
un  S^  Christophe  de  10  met.  do  haut,  et  la  porte  du  Cro- 
codile, sous  laquelle  est  suspendu  un  énorme  reptile, 
envoyé,  dit-on,  a  Alphonse  le  Sage  par  le  sultan  d'Ég>'pte. 
L'intérieur  de  l'église  est  à  5  nefs,  sans  compter  un  double 
rang  de  chapelles  latérales,  au  nombre  de  37  :  il  est 
éclairé  par  03  fenêtres,  dont  la  plupart  sont  garnies  de 
vitraux  peints,  dus  à  des  maîtres  flamands,  tels  que 
Charles  de  Bruges,  Arnaud  de  Flandre  et  son  fils.  L'effet 
est  majestueux  et  saisissant  :  aucune  église  d'Espagne  n'a 
des  proportions  aussi  imposantes  ;  les  piliers,  formés  de 
faisceaux  de  colonnettcs,  ont  près  de  tO  met.  de  hauteur. 
Tout  le  sol  est  pavé  de  grandes  dalles  de  marbre  blanc  et 
noir.  Il  serait  impossible  d'énumércr  toutes  les  richesses 
que  contient  cette  cathédrale  :  l'œuvre  la  plus  célèbre, 
bien  que  le  goût  n'en  soit  pas  très-pur,  est  le  retable  du 
maltre-autel ,  auquel  Alexis  Fernandez,  Arfian,  Antoine 
Ruiz  et  d'autres  artistes  travaillèrent  pendant  68  ans;  il 
est  tout  en  bois  de  cèdre ,  et  composé  de  44  panneaux 
finement  sculptés,  où  l'on  a  représenté  en  bas-reliefs  les 
traits  principaux  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament. 
Le  chœur  est  fermé  par  des  grilles  de  fer  doré  :  il  con- 
tient un  orgue  immense,  127  stalles  de  style  gothique,  et 
un  magnifique  lutrin  exécuté  en  1570  par  Bartolomé  Mo- 
rel  ;  le  cierge  pascal ,  haut  comme  un  m&t  de  vaisseau , 
pèse  1,025  kilogr.,  et  le  chandelier  de  bronze  qui  le  9up« 
porte  a  été  copié  sur  le  chandelier  du  Temple  de  Jéru- 
salem. A  rentrée  de  la  grande  nef,  une  pierre  tombale 
rappelle  que  là  fut  inhumé  Ferdinand  Colomb,  dis  de 
Christophe  Colomb  :  pendant  la  semaine  sainte,  on  élève 
sur  cet  emplacement  un  grand  édifice  de  bois  et  do  p&te, 
haut  de  30  met.,  dans  lequel  on  dépose  le  S^-Sacrement, 
et  qui  produit,  quand  il  est  éclairé,  dans  la  nuit  du 
jeudi  au  vendredi,  un  effet  vraiment  merveilleux.  Au 
nombre  des  chapelles,  nous  citerons  :  celle  du  Baptistère, 
où  se  trouve  le  fameux  tableau  de  S*  Antoine  de  Padoue, 
par  Murillo  ;  celle  de  S^-Pierre,  oui  a  un  beau  retable  de 
style  gréco-romain,  et  neuf  tableaux  de  Zurbaran;  la 
Chapelle  royale,  longue  de  27  met.  et  large  de  20,  à  la- 
quelle donne  entrée  un  arc  de  20  mè^  d'élévaGon  orne 
de  IS  statues  de  rois  de  l'Ecriture,  et  qui  renferme  di- 
vers tombeaux,  la  ch&sse  du  roi  S'  Ferdinand,  l'étendard 
d'Espagne,  etc.  La  sacristie  contient ,  outre  de  précieux 
tableaux  et  un  riche  Trésor,  le  Tenebrario^  chandelier 
triangulaire  en  bronze,  haut  de  7  met.,  portant  15  cierges 


SIC 


1642 


SIÈ 


rr  les  Gérémonies  de  la  semaine  sainte,  terminé  par 
figures  qui  représentent  Jésus,  ses  apôtres  et  dis- 
ciples, et  une  Custodia  d^argent ,  construite  eu  1587  par 
Juan  d*Arfe,  haute  de  4  met.,  que  24  liomroes  portent 
dans  les  processions.  B. 

sÉviLLB  (La  Giralda,  à).  V.  Giralda. 

SÉVIRS.  7.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^HiS' 
toire, 

SëWURI,  espèce  de  citliare  en  usa^e  dans  l*Orient. 
Elle  est  montée  de  4  cordes  d*acier,  et  d*un  rang  de 
€Drdes  doubles  de  laiton. 

SEXACORDE ,  lyre  à  6  cordes. 

|pîi?w?**^*  l  y-  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 
SEXm  S     ^  Biographie  et  d'Histoire. 

SEXTUOR ,  composition  musicale  à  0  parties  obligées 
de  voit  ou  dMnstruments.  Gomme  chefs-a'ŒUYre  de  sex- 
tuors vocaux,  on  peut  mentionner  ceux  de  Don  Juan  et 
des  Noces  de  Figaro  par  Moxart,  de  Lucie  de  Lammer^ 
moor  par  Donizetti. 

SEXTUPLES  (Mesures),  nom  qu*on  donnait  assez  im- 
proprement dans  l'ancienne  musique  aux  mesures  à 
2  temps  composées  de  six  notes  égales,  trois  pour  chaque 
temps. 

SKUMATO,  mot  italien  employé  en  Peinture,  pour  dé- 
signer le  moelleux  extrôme  du  pinceau,  efla  fusion  très- 
douce  des  tons  et  des  contours. 

SGRAFFITO,  c-à-d.  en  iulien  ègrattgnè;  espèce  de 
grand  dessin  qu*on  trace  avec  une  pointe  sur  un  mur  où 
Ton  a  préeilablement  appliqué  une  couleur  noire  ou  grise. 
La  pointe  met  à  découvert  le  blanc  qui  est  dessous.  C'est 
ce  qu'on  nomme  Peinture  de  blanc  et  de  noir  ou  Manière 
égratignée»  Les  sgraffiti,  imaginés  en  Italie,  ont  été  peu 
durables,  parce  que  le  temps  salit  les  murailles;  il  existe 
encore  quelques  restes  de  ceux  que  Polydorc  de  Caravage 
et  Uaturino,  élèves  de  Raphaôl,  avaient  exécutés. 

SHAKO.  K.  Schako. 

cmn  ijowvv  l  V'  cos  mots  dans  notre  Dictionnaire 
SHIRE;  \     ^  Biographie  et  d'Histoire. 

SHO  rnSH  ou  SCHOn  ISH ,  air  de  valse  à  2  temps.  Il 
n'a  d'écossais  que  le  nom. 

SHRAPNEL,  nom  mi'on  donne  qnelquerois  à  Vobfis  à 
mitraille.  C'est  celui  d'un  colonel  d'artillerie  anglais  qui 
en  eut  le  premier  l'idée. 

SI ,  septième  note  de  la  gamme  d'ut.  Elle  n*a  été  intro- 
duite que  fort  tard  dans  la  musique  t  on  y  suppléait  au- 
paravant au  moyen  des  muances  (  V,  ce  mot). 

SIAM,  jeu  qui  se  joue  avec  des  quilles  et  un  disque 
en  bois  qui  sert  à  les  abattre. 

SIAMOISE  ou  thaï  (Langue),  langue  parlée  depuis  la 
frontière  méridionale  de  la  Chine  jusqu'aux  montagnes 
de  la  presqu'île  de  Malacca.  Elle  est  monosyllabique;  on 
y  compte  5  tons  ou  accents  qui  donnent  aux  mots  des 
significations  difTérentes.  V.  J.  Low,  A  grammar  of  the 
Tai  or  Siamese  langiuige,  Calcutta,  1828,  in-4^;  Léon  de 
Rosny,  ObserwUions  sur  la  langue  siamoise  et  sur  son 
écriture,  Paris,  1855,  in-8*. 

SIBYLLINS  (Livres).  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire. 

SICAIRE  (du  latin  sica,  poignard),  mot  synonjrme 
d'assassin  et  de  meurtrier.  Il  implique  l'idée  du  crime 
salarié  par  le  fanatisme  religieux  ou  politique. 

SICHOUANA  ou  BETJOUÀNA  (Idiome),  un  des  idiomes 
calmes  {V,  ce  mot).  Les  articulations  d,  j,  v  et  %  lui 
manquent.  II  y  a  peu  de  syllabes  terminées  par  des  con- 
sonnes, et  très-rarement  par  deux  consonnes  de  suite; 
Tabondanoe  des  voyelles  et  des  lettres  mouillées  rend 
cette  langue  aussi  douce  qu'aucune  autre.  Les  plus  longs 
mou  n'ont  jamais  plus  de  quatre  syllabes,  ni  les  plus 
courts  moins  de  deux.  La  première  syllabe  de  tout  mot 
n'est  qu'un  préfixe ,  et  elle  joue  le  rôle  qui  appartient 
ailleurs  aux  terminaisons.  L'unique  cas  obhque  que  pré- 
sente la  déclinaison,  et  qui  parait  avoir  la  valeur  de 
l'ablatif  ou  plutôt  du  Jocatil',  est  caractérisé  par  la  termi- 
naison ng.  Quant  au  cas  direct,  qui  n'est  que  le  nom 
avec  sa  particule  inséparable,  il  est  à  la  fois  le  nominatif 
et  tous  les  autres  cas.  Le  vocabulaire  des  substantifs  est 
riche,  et  exprime,  dans  l'ordre  physique  du  moins,  des 
nuances  de  signification  fort  délicates.  La  distinction  des 
nombres  se  fait  par  un  changement  dans  le  préfixe;  le 

E réfixe  se  répète  entre  le  substantif  et  l'adjectif  son  attri- 
ut.  Placé  entre  un  nom  et  un  verbe,  le  préfixe  répété 
répond  au  pronom  relatif.  I>e  vocabulaire  des  adjectirs 
•st  très-limité,  et  l'on  (tût  par  suite  un  fréquent  usage  du 
•ttbetantif  comme  attribut  !  ainsi  l'on  dit  nomme  d'amer 


biUté  m  Ifm  de  kmmm  mmahlê.  tfm  même  rmrine  ver* 
baie  peut  passer  par  les  formes  efiective,  causative,  reli»- 
tive,  dans  chacune  desquelles  elle  est  susceptible  de% 
voix  active,  passive,  moyenne  ou  réfléchie,  et  souvent 
encore  d'une  voix  réciproque.  La  conjugaison  se  Torme 
en  partie  au  moyen  de  deux  auxiliaires,  na  pour  le  pa^sé 
et  iv'A  pour  le  futur.  Les  personnes  ne  sont  différencitVs 
p«r  la  désinence  qu'à  l'impératif.  Le  verbe  substantif 
s'emploie  rarement.  La  construction  grammaticale  est 
directe.  Le  préfixe  du  si^et  exerce  une  grande  influence 
sur  toute  la  phrase,  dont  il  modifie,  en  lui  imposant  sa 
propre  initiale,  les  pronoms  et  les  prépositions.  V.  Ca- 
salis,  Études  sur  la  langue  sichouana,  Paris,  1841,  in-S**. 

SICILIEN  (Dialecte),  un  des  dialectes  italiens,  dont 
Vigo  a  trouvé  des  vestiges  évidemment  antérieurs  à 
l'an  1000.  Dante  le  vantait,  pour  l'opposer  au  toscan.  La 
lettre  t  tient  une  grande  place  dans  le  sicilien,  où  elle  est 
substituée  à  Ve  presque  partout.  L'o  des  autres  dialectes 
est  de  môme  chassé  par  Vu;  U  se  change  en  dd,  b  en  v, 
d  en  nn,  I  en  r,  A  en  sci^  que  en  chi.  Les  Siciliens  font 
une  multitude  d'élisions,  de  redoublements,  de  retran- 
chements, de  modifications  particulières,  qui  rendent 
leur  dialecte  vif  et  énergique,  mais  peu  élégant.  V.  Vigo, 
Canti  popolari,  Catane,  1857. 

SICILIENNE .  air  de  danse  originaire  de  Sicile,  dont  la 
mesure  est  à  6/4  ou  plus  souvent  à  6/8,  et  d'un  mouve- 
ment modéré.Chaque  mesure  de  cet  air  commence  par 
trois  croches,  dont  la  première  est  pointée.  —  Le  nom  de 
Sicilienne  a  été  donne  aussi  k  des  morceaux  de  chant; 
telle  est  la  Sicilienne  du  1*  acte  de  Robert  le  Diable 
(0  Fortune,  à  ton  caprice). 

siauENNB  (Comédie).  V.  Dorienns. 

siciUBNNB  (Littérature).  La  Sicile  occupe  une  place 
importante  dans  l'histoire  de  la  littérature  grecque  an- 
cienne, et  le  dialecte  dorien  v  donna  ses  plus  beaux  pro- 
duits. A  Sparte,  chaque  année,  on  lisait  publiquement  le 
traité  de  la  République  ^  composé  par  Dicéarque  de  Mes- 
sine. Épicharme,  l'un  des  premiers,  donna  une  forme  r^ 
guliëre  à  la  comédie;  Sophron  inventa  les  mimes;  Corax 
et  Tisias  ouvrirent  les  premières  écoles  de  rhétorique.  La 
poésie  pastorale  fut  créée  en  Sicile  par  Stésichore,  et, 
plus  tard,  perfectionnée  par  Théocrite  et  Mnschus.  Les 
sciences  ne  brillèrent  pas  d'un  moins  vif  éclat  t  'cétis  de 
Syracuse  connut  la  rotation  de  la  terre;  Empédocle  figura 
l'attraction  et  la  répulsion  newtoniennes  dans  l'Amour  ci 
la  Discorde,  et  l'on  a  prétendu  même  qu'il  n'ignorait  pa^ 
les  phénomènes  de  l'électricité;  Archimède  a  laissé  de» 
traces  indélébiles  dans  l'histoire  de  la  science.  —  Au 
moyen  &ge,  selon  Crescimbeni ,  les  Provençaux  rimèrent 
en  Sicile  avant  les  Siciliens;  mais  les  premières  poésies 
italiennes  partirent  de  la  Sicile  :  au  nombre  de  ceux  qui 
imprimèrent  le  mouvement ,  on  doit  citer  Ciullo  d'Al- 
camo  (fin  du  xn*  siècle),  l'empereur  Frédéric  II,  son 
chancelier  Pierre  des  Vignes,  Hazzeo  di  Ricco,  Nina  de 
Messine,  etc.  De  nos  Jours,  l'abbé  Meli  a  écrit  de  gra- 
cieuses poésies  qui  rappellent  les  bucoliques  de  l'An- 
tiquité. 

SICILIENNE  (Numismatique).  La  Sicile  est  le  pays  qui  a 
fourni  les  monnaies  les  plus  belles  de  l'Antiquité  :  1  or  j 
est  beaucoup  plus  employé  que  dans  la  plupart  des  autres 
contrées.  Le  monnayage,  qui  existait  dans  cette  lie  dès 
les  temps  les  plus  recula,  cessa  à  peu  près  sous  le  règne 
de  Tibère.  Parmi  les  types  particuliers  k  la  Sidle,  on 
doit  citer  :  la  triquetra,  formée  de  trois  jambes  hu- 
maines disposées  en  triangle,  et  faisant  allusion  aux  trois 
promontoires  de  l'Ile;  le  taureau  à  tète  humaine,  em- 
blème de  BaecbuB  i  et  las  bigea,  triges  et  quadriges.  Les 
noms  des  fleuves,  Acragas,  Anîtliuse,  Gelas,  Hipparis,etc., 
sont  souvent  gravés  sur  les  monnaies  siciliennes.  Les  lé- 
gendes sont  écrites  en  grec,  en  puniaue,  en  latin  ;  le  grec 
est  emprunté  principalement  au  dialecte  dorien.  Il  nous 
est  parvenu  de  grands  médaillons  d'argent  représent iiu 
à  l'avers  une  femme  voilée  et  couronnée  d'épis,  au  revers 
une  Victoire  dans  un  quadrige;  ils  ont  été  fhqipés  en 
l'honneur  de  la  Sicile,  on  ne  sait  à  quelle  occasion.  V.  Tor- 
rcmuzza,  Sicilia  populorum  et  urbium  nummi.  Païenne, 
1781,  in-fol. 

ciniNiirc      f  V'  <^es  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 
SICLE.  S      Biographie  et  d'Histoire. 

SIDÈRISME  (du  grec  sidéros,  fer,  acier),  nom  donné 
à  la  faculté  que  prétendent  posséder  certains  individus 
de  reconnaître  sous  terre  l'existence  de  masses  métal- 
liques. 

SIÈCLE  (du  latin  sœculum),  espace  de  100  années.  La 
division  par  siècles  était  en  usage  chez  les  Romains,  4{ai, 


SIR 


16t3 


SIG 


à  ebftque  retour  de  siècle^  célébraient  des  Jeux  Séculaires. 
Chaque  peuple  compte  les  siècles  à  partir  de  l'ère  qu'il  a 
adoptée.  Dans  renonciation  des  années  d*un  siècle,  la 
dernière  seule  (1800  par  exemple]  porte  le  nom  du  chiffre 
de  centaine  qui  sert  a  écrire  ce  siècle.  —  Pline  nous  ap- 
prend que  les  Druides  entendaient  par  siècle  une  durée 
de  30  ans  seulement. 

SIECLE,  période  indéterminée  qui  porte  le  nom  d'un 
grand  homme.  On  dit,  par  exemple,  le  Siède  dû  Péri- 
cUSj  le  Sièele  â^ Auguste,  le  Siècle  de  Léon  X,  le  Siècle  d$ 
louis  XIV,  F.  GaECQint,  RoMAmiy  iTAUBNNit  Française 
(  Littérature  )« 

sifccLB,  mot  qui  s*entend  de  la  vie  mondaine,  par  oppo- 
sition à  la  vie  religieuse  et  cloîtrée.  C'est  de  ce  sens  que 
dérivent  les  mots  séculier  (clergé)  et  sécularisation, 

SIÈGE  (du  latin  sedes]^  tout  meuble  fait  pour  s'as- 
seoir ;  tels  sont  les  bancs,  les  fauteuils,  les  chaises,  etc. 
{V,  ces  mots),  —  Par  extension.  Siège  désigne  le  lieu 
où  résident  certaines  autorités,  par  exemple  un  gouver- 
nement, un  tribunal,  un  év6c|ue.  Cest  en  ce  sens  que 
Rome  est  appelée  le  ScUnt-Siége,  parce  que  le  pape  y 
réside. 

si^GE,  action  d*attaquer  une  place  fortifiée,  dans  le  but 
de  s*en  rendre  maître.  Si  Ton  se  contente  d'investir  la 
place,  d'occuper  les  points  par  lesquels  elle  pourrait  re- 
cevoir des  secours,  et  de  ramener  par  famine  à  se  rendre, 
c'est  un  blocus  (V.  ce  mot).  Si  on  Vattaque  do  vive  force, 
c'est  un  siège  proprement  dit.  Avant  l'invention  de  l'ar- 
tillerie, les  opérations  consistaient  en  jets  de  pierres, 
coups  do  bélier  et  autres  machines,  mines,  escalade; 
aujourd'hui  elles  comprennent  le  tracé  des  parcUlèles  et 
-  des  tranchées,  le  travail  de  la  sape  et  de  la  mine,  l'éta- 
blissement des  batleriesy  la  formation  de  la  brèche  et  Vas- 
saut  (  K.  ces  mots).  Parmi  les  sièges  célèbres,  on  peut 
citer  ceux  d'Azoth  par  Psammétichus  (il  dura,  dit-on, 
20  ans  ),  de  Troie  par  les  Grecs,  de  Tyr  par  Nabuchodo- 
nosor  et  par  Alexandre  le  Grand  (585-573  et  332  avant 
J.-C),  de  Syracuse  par  Marcellus  (212),  de  Carthage  et 
dcISumance  par  Scipion  Émilien  (146  et  134),  d'Alesia 
par  César  (  52),  de  Jérusalem  par  Titus  (70  ap.  J.-C),  de 
Calais  (1347)  et  d'Orléans  (1428)  par  les  Anglais,  de 
Grenade  par  Ferdinand  le  Catholique  (1492),  de  Rhodes 
(1522)  et  de  Vienne  (1520  et  1083)  par  les  Turcs,  de  La 
Uochelle  par  le  cardinal  de  Richelieu  (1628),  de  Lille 
par  les  Autrichiens  (1709  et  1792),  de  Mantoue  par  le 
pt^néral  Bonaparte  (  1 797  ),  de  Saragosse  par  les  Français 
(i8U8),  du  Sébastopoi  (1855)   etc. 

9ih:GE  (Etat  de),  mesure  de  sûreté  publique  qui  suspend 
momentanément  l'empire  des  lois  ordinaires  et  remet 
tout  pouvoir  à  l'autorité  militaire.  lies  lois  du  10  juillet 
1791  et  du  10  fructidor  an  v,  le  décret  Impérial  du  24  déc. 
1811  ei  la  loi  du  9  août  1849  ont  successivement  réglé 
cette  matière.  Dans  les  localités  mises  en  état  de  siège,  la 
Justice  civile  fait  place  au  régime  des  Conseils  de  suerre  ; 
l'autorité  militaire  a  le  droit  de  faire  des  perquisitions 
le  jour  et  la  nuit  dans  le  domicile  des  citoyens,  d'éloi- 
gner les  repris  de  justice  et  toute  personne  non  domici- 
liée, d'enlever  toutes  les  armes,  d'interdire  les  publica- 
tions et  les  réùbions.  V,  le  Suppl, 

SIENNE  (Le  Dôme  de),  église  cathédrale  qu'on  croit 
généralement  avoir  été  b&tie  au  milieu  du  xiu*  siècle.  On 
l'admire  moins  à  cause  de  sa  beauté  que  de  sa  richesse. 
Elle  est  formée  tout  entière  d'assises  horizontales  alter- 
natives de  marbre  blanc  et  noir.  La  façade,  attribuée  à 
Giovanni  de  Pise,  est  couverte  de  sculptures,  parmi 
lesquelles  on  remarque  des  Prophètes  et  des  AngM  par 
Jacques  délia  Quercia,  les  animaux  héraldiques  des  villes 
qui  furent  les  alliées  de  Sienne,  et  un  bas-relief  repré- 
sentant au-dessus  de  la  grande  entrée  la  vie  de  Marie. 
Le  clocher  a  été  élevé  par  Agnolo  et  Agostino  de  Sienne. 
A  l'intérieur,  Duccio  di  Buoninsegna  plaça,  au  commen- 
cement du  xjv*  siècle,  ces  pavages  de  marbre  blanc  qui 
produisent  l'efTet  de  nielles  gigantesques,  et  où  des  traits 
de  dessin  gravés  en  creux  ont  été  remplis  de  poix  en  fu- 
sion :  c'est  un  ouvrage  sans  rival  en  Italie,  et  que  l'on 
tient  couvert  d'un  plancher  mobile,  pour  qu'il  ne  soit 
pas  usé  par  le  frottement  des  pieds.  Les  voûtes  sont 
peintes  en  azur,  avec  des  étoiles  d'or;  les  arcades  infé- 
rieuree  sont  à  ogive.  Les  objets  les  plus  précieux  que 
contient  l'édiflce  sont  :  les  peintures  au  cliœur,  par  Bec- 
cafumi;  le  tabernacle  en  bronze  du  mattre-autel,  par 
Lorenzo  di  Pietro  del  Vecchictta  (1472);  les  vitraux 
peints,  cxé<'Utés  par  Pastorino,  sur  les  dessins  de  Perl  no 
del  Va^si  (1549);  la  frise,  ornée  des  portraits  en  terre 
cuite  des  papes  et  des  antipapes;  la  chaire,  admirable 
ouvnge  de  Nicolas  de  Pise,  qu'aidèrent  ses  enfants  Gio- 


vanni et  Arnolfo;  les  trophées  de  la  bataille  de  TArbia 
(1250),  qui  ornent  les  pilastres  au-dessous  de  la  coupole. 
Au-dessous  du  chœur  est  un  ancien  baptistère,  appelé 
aujourd'hui  chapelle  de  S^-Jean  :  les  foats  baptismaux 
sont  décorés  de  bas-reliefs  par  Donatello,  Ghiberti,  Pol-> 
lajuolo  et  Jacques  délia  Quercia.  La  sacristie,  qu'on  ap- 
pelle aussi  la  Librairie,  parce  qu'on  y  conserve  des 
manuscrits  précieux  sur  vélin,  enlumina,  a  été  peinte 
à  fresque  par  le  Pinturicchio,  d'après  des  dessins  de 
Raphaël  :  au  milieu  est  un  groupe  exquis  des  trois  Grâces, 
un  peu  mutilé,  et  que  l'on  trouva  dans  les  fondations  au 
xm*  siècle.  B. 

SIENNE  (École  de),  école  de  peintres  italiens,  rivale  de 
l'école  florentine,  et  remarc^uable  par  son  style  gai ,  franc 
et  facile,  en  harmonie  parfaite  avec  le  caractère  du  peuple 
lui-même.  Lanzi  en  fait  remonter  l'origine  aux  peintres 
grecs  qui  vinrent  s'établir  à  Sienne  pendant  les  Croi- 
sades :  cependant  cette  ville  comptait ,  dès  le  xii'  siècle, 
un  certain  nombre  de  peintres,  de  miniaturistes  surtout, 
et  l'on  conserve,  entre  autres  manuscrits,  un  Ordo  o/yi- 
ciorum  de  Senensi  ecclesiâ,  enluminé  par  le  chanoine 
Oderigo  en  1213.  Les  Siennois  furent  les  premiers,  eu 
Italie,  qui  apprirent  des  Grecs  la  méthode  do  peindre  sur 
une  couche  de  plâtre  recouverte  d'or.  Le  chef  de  l'école 
fut  Guido  ou  Guidone  (xiii*  siècle),  dont  Mino  d&  Tur- 
rita,  Simone  di  Martino  (dit  Simon  Mommi),  Ambroise 
et  Pierre  Lorenzetti,  Bonaventure  de  Lucques,  Ugoiioo 
de  Sienne,  et  Duccio  di  Buoninsegna,  paraissent  avoir 
été  les  disciples.  La  fameuse  peste  de  1348  moissonna 
beaucoup  d'artistes,  et  la  fin  du  xiv«  siècle  ne  compta 
guère  que  deux  maîtres  célèbres.  Berna  et  Taddco  di  Bar- 
tolo.  Au  xv%  l'école  de  Sienne  se  laissa  devancer  par 
celle  de  Florence  :  elle  montrait  un  singulier  esprit  d'ex- 
clusion, au  point  qu'on  avait  établi  une  taxe  et  l'obliga- 
tion d'une  caution  pour  tout  étranger  qui  voulait  tra- 
vailler dans  le  pays,  une  décadence  sensible  dans  l'art  Ut 
rouvrir  Sienne  aux  étrangers,  et  l'on  y  attira  le  Pérugin, 
le  Pinturicchio,  Luca  Signorelli ,,  et  Raphaôl  lui-même. 
Sous  leur  influence,  la  pointure  prit  un  nouvel  essor 
d  ins  les  œuvres  de  Fungai ,  d'Andréa  del  Brescianino,  de 
Pacchiarotto,  et  surtout  d'Ant.  Razzi ,  dit  le  Sodoma.  Ce 
dernier  eut  pour  élèves  Anselmi,  Bartolommeo  Neroni,  et 
Salimbeni.  Puis,  l'école  eut  pour  chef  Beccafumi ,  le  der- 
nier grand  nom  qui  la  représente,  car  Baltliazar  Peruzzi 
fut  plus  remarquable  comme  architecte  que  comme 
peintre.  On  ne  trouve  plus  à  mentionner  ensuite  que 
Ventura,  Rustici,  Manctti ,  Joseph  Nasini ,  etc. — L'art  de 
la  mosaïque  a  pris  à  Sienne  un  caractère  particulier. 
Duccio  di  Buoninsegna  fut  le  premier  à  exécuter,  sur  le 
pavé  des  églises,  des  dessins  à  sgraffito  (  V'.  ce  moO«  rem- 
plis d'un  mastic  noir,  auauel  Matteo  di  Giovanni  ajouta 
bientôt  des  marbres  de  ai  verses  couleurs.  Le  secret  de 
colorer  les  marbres  pour^'*^  .ter  les  mosuques  fut  trouvé 
par  Michel-Anse  Yanni* 

SIERRA,  j  V,  ces  inuts  dans  notre  Dictionnaire  de 

SIEUR.     )      Biographie  et  d'Histoire, 

SIFFLANTES,  nom  donné  en  Grammaire  aux  lettres 
a,  Zt  c  (doux) ,  X,  parce  qu'on  ne  peut  les  prononcer  sans 
faire  entendre  un  sifflement  F  peut  être  regardée  comme 
une  demi-sifflante.  Le  thdes  Anglais  est  aussi  une  sifflante 
plus  ou  moins  aspirée.  H  en  est  de  même  du  thêta  (6,  0) 
et  du  dzêta  (2,0  grecs  :  la  1***  de  ces  lettres  a  le  même 
son  que  th  des  Anglais,  et  la  2*  un  son  intermédiaire 
entre  le  thêta  et  le  sigma.  Les  Grecs  avaient  encore 
d'autres  sifflantes  :  le  xi  (S,  l)  et  lep^t  (^F).  —  On  ap- 
pelle mot  sifflant,  phrase  sifflante,  langue  sifflante,  un 
mot,  une  phrase,  une  langue,  où  les  sons  siiSants,  par- 
ticulièrement s,  reviennent  fréquemment.  P. 

SIFFLET,  petit  instrument  avec  lequel  on  siffle.  La 
coutume  de  siffler  les  auteurs  dont  on  est  mécontent,  re- 
monte à  l'antiquité  :  il  en  est  question  dans  les  Lettres 
de  Cicéron  {Éplt,  famil,^  viii,  2).  C'est  au  temps  de  l'em- 
pereur Auguste  que  les  coups  de  sifflet  paraissent  s'être 
introduits  dans  les  spectacles  comme  signes  d'improba- 
tion.  Chez  nous.  Préville  regardait  le  sifflet  comme  un 
avertissement  utile,  ce  qui  est  aussi  rare  que  des  auteurs 
et  des  acteurs  détestant  la  claque.  Apjourd'hui ,  il  n'est 
plus  guère  de  bon  ton  de  siffler  au  théâtre  ;  on  murmure 
ou  on  garde  le  silence. 

SIFOINE.  V,  Chifonie. 

SIGILLOGRAPHIE.  V,  Sceao. 

SIGISBÉE  (de  l'italien  cigisbeo)^  nom  donné  en  Italie 
à  l'homme  qui  fréquente  habituellement  une  maison,  qui 
rend  des  soins  assidus  à  la  maîtresse  ot  se  tient  â 
ordres.  C'est  ce  qu'on  appelle  un  cavalitr  servant* 

SIGLES.  V,  Abrévutions. 


SIC 


1644 


S[L 


SIGMA,  lit  romain.  V,  notre  Dictkmnaurê  de  Biogra- 
phie et  dP Histoire, 

SIGNAL,  tout  moyen  employé  pour  transmettre  des 
ordres  ou  des  a^is  à  de  certaines  distances.  Les  feux,  les 
fusées,  les  pavillons,  les  drapeaux,  les  coups  de  canon, 
les  appareils  télégraphiques,  les  batteries  de  tambour, 
les  sons  de  la  trompette,  les  coups  de  cloche,  etc.,  de- 
viennent  des  signaux,  lorsque  les  combinaisons  dans 
lesquelles  on  les  fait  entrer  ont  un  sens  connu  de  ceux  à 
qui  on  les  adresse.  Dans  la  Marine,  il  y  a  un  Livre  de 
signaux  où  les  signes  à  employer  dans  chaque  circon- 
stance sont  indiqués,  et  que  possèdent  tous  les  comman- 
dants de  bâtiment. 

SIGNALEMENT,  dcwnption  d'une  personne,  faite  par 
ses  caractères  extérieurs,  et  qu'on  donne  pour  la  faire 
reconnaître.  Les  passe-ports  et  les  permis  de  chasse  con- 
tiennent le  signalement  de  ceux  auxquels  ils  sont  déli- 
vrés. On  donne  à  la  gendarmerie  les  signalements  des 
déserteurs,  des  accusés,  des  malfaiteurs  évadés. 

SIGNATURE,  nom  d'une  personne,  écrit  de  sa  main  à 
la  fin  d*une  lettre  ou  d'un  acte.  En  Jurisprudence,  la  si- 
gnature est  nécessaire  pour  rendre  un  acte  valable  et 
obligatoire.  Les  actes  peuvent  ne  pas  être  écrits  de  la 
main  de  ceux  qui  les  signent,  excepté  les  testaments 
olographes  (Codi  NapoL,  art.  260)  ;  les  billets  sous  seing 
privé,  portant  obligation  d*une  somme  d'argent  ou  d'une 
chose  appréciable,  doivent,  s'ils  ne  sont  pas  écrits  par 
celui  qui  les  souscrit,  avoir  un  bon  ou  approuvé  (F.  Ap- 
probation t)'^.CRrrimE).  Les  signatures  données  en  blanc 
se  nomment  blancs  seings  (K.  ce  mot).  On  n'est  pas  censé 
avoir  signé  un  acte  sans  l'avoir  lu  :  on  ne  peut  dans  ce 
cas  le  faire  annuler  qu'en  prouvant  qu'il  est  frauduleux 
et  q\iQ  la  signature  a  été  surprise.  Ce  qui  est  ajouté  après 
la  signature  et  sans  approbation  est  regardé  comme  non 
écrit.  Dans  le  cas  où  la  signature  d'un  acte  sous  seing 
privé  est  déniée  par  son  auteur,  et  dans  celui  où  des  hé- 
ritiers déclarent  ne  pas  la  connaître,  la  vériRcation  en 
est  ordonnée  en  justice  {Code  A'apol.,  art.  13241.  Les  actes 
notariés  doivent  être  signés  par  les  parties,  les  témoins  et 
les  notaires;  il  doit  être  fait  mention  de  la  déclaration 
des  parties  ou  témoins  qui  ne  savent  ou  ne  peuvent  si- 
gner (Loi  du  25  ventôse  an  xi).  Un  acte  authentique  fai- 
sant foi  par  fui-mème  de  tout  son  contenu,  celui  qui 
nierait  la  signature  qu'on  lui  oppose  devrait  prouver,  par 
la  voie  de  l'inscription  de  faux,  que  cette  signature  ne 
lui  appartient  pas.  S'il  est  prouvé  qu'une  pièce  est  écrite 
ou  signée  par  celui  qui  l'a  déniée,  il  est  condamné  à 
150  fr.  d'amende,  outre  les  dépens,  dommages  et  inté- 
rêts. L'extorsion  de  signature  par  violence  est  punie  des 
travaux  forcés  à  temps.  —  La  loi  du  10  juillet  1850  exige 
que  les  articles  de  Journaux  sur  les  matières  politiques, 
philosophiques  ou  religieuses,  soient  signés  de  leurs  au- 
teurs. 

SIGNATURE,  terme  de  Diplomatique.  V.  Diplôme. 

siGMATORE,  rescrit  du  pape.  F.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d*  Histoire, 

SIGNATURES,  en  termes  d'Imprimerie,  lettres  ou 
chiffres  qu'on  met  au  bas  de  la  première  page  d'une 
feuille,  pour  en  indiquer  l'ordre  et  faciliter  le  travail  de 
l'assemblage  des  feuilles  de  tout  un  volume.  Ce  moyen  a 
été  employé  pour  la  première  fois  dans  les  Concor- 
dantiœ  Bihliorum  de  Conradus  de  Alemannia,  en  1470. 

SIGNATURES,  caractèros  mystiques,  de  bon  ou  de  mau- 
vais augure,  dont  on  croyait,  au  moyen  &ge,  c^ue  chaque 
homme  était  marqué  par  l'astre  sous  lequel  il  naissait. 

SIGNATURES,  uom  qu'on  donne  aux  figures  des  gens  de 
métiers  ou  d'arts  cpii  se  trouvent  comme  donataires  au 
bas  des  vitraux  peints. 

SIGNAUX ,  nom  donné  auti^fois  aux  gros  grains  qui 
forment  les  séparations  entre  les  dizaines  d'un  chapelet. 

SIGNE,  fait  visible  qui  a  pour  but  de  manifester  une 
chose  invisible  à  l'intelligence;  !1  est  un  intermédiaire 
entre  l'esprit  et  la  chose  signifiée.  Il  ne  peut  révéler  cette 
chose  qu'à  la  condition  d'un  rapport  entre  elle  et  lui;  de 
plus,  il  faut  que  l'esprit  conçoive  ce  rapport  lorsque  le 
signe  parait.  Ce  rapport  étant  naturel  ou  de  convention, 
il  suit  qu'il  y  a,  en  général,  deux  sortes  de  signes  :  no- 
turels  et  artificiels.  11  y  a,  entre  les  signes  et  la  pensée 

2u'ils  sont  appelés  à  manifester,  des  rapports  étroits,  qui 
onnent  lieu  à  une  influence  réciproque.  Cette  liaison 
étroite  est  exprimée  par  le  discours  et  l'analogie  des 
mots  :  >6yoç,  parole,  raison  :  ratio,  oratio.  Pour  les 
Stoïciens,  la  Dialectique  était  la  science  du  signe  et  de  la 
chose  signifiée  {V,  Langage).  Un  ensemble  de  signes  peut 
non-seulement  manifester  une  pensée,  une  croyance^ 
comme  le  eigne  de  la  croix  (V,  ce  moQ,  c'est  quelquefois 


un  système  complet  de  langage,  eomme  ches  les  sovd»- 
muets.  R. 

SIGNES  ACCIDENTELS,  en  Musique.  F.  Acodehts. 

signes  d'accentuation.  V.  Accent. 

SIGNET  (diminutif  de  signe)^  un  ou  plosieurt  petits 
rubans  liés  ensemble,  tenant  à  un  bouton  ou  à  un  pe- 
loton, et  qu'on  place  au  haut  d'un  livre,  pour  marquer 
les  endroits  qu'on  veut  trouver  aisément,  ou  le  lieu  où 
l'on  s'est  arrêté. 

SIGNIFÈRE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

SIGNIFICATION,  en  termes  de  Procédure,  notification, 
connaissance  que  l'on  donne  d'un  arrêt,  d'un  jugement, 
d'un  acte  quelconque  par  la  voie  judiciaire.  Elle  se  fait 
ordinairement  par  ministère  d'huissier,  et,  suivant  les 
cas,  à  personne  ou  domicUe,  ou  par  acte  d'auotie  à  avoué. 
En  cas  de  refus  d'une  signification,  l'original  est  visé  par 
le  procureur  impérial,  et  le  refusant  peut  être  condamné 
à  une  amende  {Code  de  Procéd.,  art.  1030).  Aucune  si- 
gnification ne  peut  être  faite  depuis  le  l''  octobre  jusqu'au 
31  mars  avant  6  heures  du  matin  ni  après  6  heures  du 
soir,  et  depuis  le  l''  avril  Jusqu'au  30  septembre  avant 
4  heures  au  matin  ni  après  9  heures  du  soir,  non  plus 

Sue  les  dimanches  et  les  jours  de  fête  légale,  à  moins 
'une  permission  du  juge  s'il  y  a  péril  en  la  demeure 
(/ôtd.,  art.  1037).  C'est  à  partir  du  jour  de  la  signification 
que  se  comptent  les  délais  de  procédure.  —  Il  y  a  des 
règles  particulières  à  la  signification  de  certains  actes. 
V.  Ajocrnrment,  Citation,  Jugeuent,  etc. 

SIGNINUM  OPUS.  V.  Signia,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

SIGNUM.  (  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 

SILRERGROS.   (      et  d'Histoire, 

SILENCE  (Le),  divinité  allégorique,  représentée  sous  la 
forme  d'un  enfant  qui  tient  un  doigt  appuyé  sur  ses  lèvres. 

SILENCES,  en  termes  de  Musique,  interruptions  me- 
surées comme  les  sons  eux-mêmes,  et  signes  de  ces  in- 
terruptions. Ils  correspondent  aux  différentes  valeurs  des 
notes  :  en  prenant  la  ronde  pour  unité  de  durée  d'un 
son,  le  silence  d'une  ronde  se  nomme  pause;  celui  d'une 
blanche,  demi-pause;  celui  d'une  noire,  soupir  {V.  ces 
mots).  La  ronde  avec  un  point  se  représente  par  une 
pause  suivie  d'une  demi-pause  ;  la  blanche  pointée,  par 
une  demi-pause  suivie  d'un  soupir,  et  ainsi  du  reste.    B. 

SILENTIAIRE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

SILHOUETTE,  visage  tiré  de  profil,  d'après  l'ombre 
qu'il  projette.  Ce  genre  de  dessin  était  connu  des  An- 
ciens, qui  l'appelaient  Sciagraphie  (dessin  des  om- 
bres); mais  le  nom  en  est  tout  moderne,  et  vient  d'Etienne 
de  Silhouette,  contrôleur  des  finances  sous  Louis  XV  : 
les  réformes  que  ce  personnage  entreprit  ayant  paru 
mesquines  et  ndiculcs,  on  appela  silhouettes  les  dessins 
imparfaits  où  l'on  se  bornait  à  indiquer  par  un  simple 
trait  les  contours  des  objets.  Le  nom  de  silhouettes  est 
également  donné  à  des  figures  découpées  aux  ciseaux 
dans  du  papier  noir. 

SILLAGE,  trace  qu'un  navire  laisse  derrière  lui  sur  les 
eaux  et  qui  ressemble  à  un  sillon;  —  par  extension, 
espace  qu'il  parcourt  dans  un  temps  donné,  et  qui  se  me- 
sure avec  le  loch  (  V.  ce  mot). 

SILLES  (du  grec  sillos,  sarcasme),  vers  mordants  cbex 
les  anciens  Grecs.  Xénophane  en  avait  composé  contre 
tous  les  poètes  et  les  philosophes  de  son  temps.  Timon 
de  Phlionte  et  Didyme  figurent  aussi  parmi  les  Sillo- 
graphes. 

SILLET,  en  italien  capotasto,  petit  morceau  dlvoire, 
d'ébène  ou  autre  bois  très-dur,  placé  à  rextr&mité  supé- 
rieure du  manche  des  instruments  à  cordes,  pour  servir 
de  point  d'appui  aux  cordes  et  les  élever  de  manière 
qu'elles  ne  posent  pas  sur  la  touche. 

SILO,  mot  d'origine  espagnole  par  lequel  on  désigne 
une  cavité  souterraine  où  l'on  dépose  les  grains  pour  les 
conserver.  Il  faut  un  terrain  sec,  à  température  con- 
stante, et  où  la  pluie  ne  puisse  pénétrer.  Les  silos  ne 
furent,  à  l'origine,  que  des  moyens  adoptés  contre  le 
pillage  :  les  Anciens  les  connaissaient;  ils  sont  très-com- 
muns en  Algérie,  et  l'on  en  trouve  aussi  en  Chine,  en 
Espagne,  en  Italie,  en  Russie,  en  Pologne,  en  Hongrie.  On 
en  voit  à  Amboise,  sur  le  bord  de  la  Loire.  Ils  sont  tantôt 
circulaires,  tantôt  en  forme  de  cône  renversé,  ou  bien  en 
cône  évané  à  sa  partie  supérieure,  quelquefob  revêlos 
d'une  maçonnerie.  On  a  réussi  en  France  à  faire  de  bons 
silos  en  fer  battu,  vernis  à  l'extérieur,  et  enfoi.is  dans  la 
maçonnerie.  V.  Doyère,  Conservation  des  jrains 
Vensilage,  Paris,  18G2,gr.  in-8«« 


SIM 


1645 


SliN 


SMLVâ.  y.  Espagnols  (Poésie). 

SILVES  ou  SYLVES,  nom  donné  par  les  Latins  &  un 
recueil  d*opuscuIes  littéraires  roulant  sur  différents  sujets 
et  disposés  au  hasard  comme  les  arbres  d*une  foréU 
C*est  à  peu  près  ce  que  nous  appelons  Mélanges.  Ou  ap- 
pelait aussi  du  nom  de  Silve  une  simple  pièce  de  vers  ou 
de  prose  écrite  avec  toute  la  rapidité  et  la  négligence 
d*un  premier  jet,  et  dont  les  détails  avaient  besoin  d'être 
tevus,  élagués,  retouchés,  polis  et  mieux  ordonnés;  à  peu 
^rès  ce  que  nous  nommons  une  esquisse  ou  une  improvi- 
iBfton.  Le  seul  recueil  qui  nous  soit  parvenu  sous  ce  titre, 
if est  celui  du  poôte  Stace,  qui  vivait  au  temps  de  Do- 
^itien.  Il  Ta  nommé  SUves  à  cause  de  la  variété  des  ma- 
tières, et  parce  que  chacune  des  pièces  qui  le  composent  a 
été  écrite  de  prime  saut,  et  porte  tous  les  caractères  de  la 
précipitation  :  au  témoignage  du  poète  lui-même,  quel- 
ques-unes, même  assez  longues,  ne  lui  ont  coûté  qu*un 
Jour  de  travail,  et  aucune  pas  plus  de  deux  jours.  Ce 
recueil  contient  33  poèmes  groupés  en  5  livres.  Stace  y  a 
déployé  de  merveilleuses  ressources  de  style  et  de  ver- 
sification ;  l'esprit  étincelle  dans  les  mots,  dans  les  tours; 
l'imagination  du  poète  enrichit  et  féconde  de  maigres  et 
stériles  sujets  à  l'aide  de  tous  les  procédés  enseignés 
dans  les  écoles  de  rhétorique;  tout  y  sent  l'artifice;  nulle 
part  ne  parait  la  trace  d'un  sentiment,  d'une  pensée  sortis 
de  l'àme;  nul  naturel,  nul  abandon.  Ces  défauts  ne  vien- 
nent cependant  pas  du  manque  d'invention  :  Stace  a  des 
qualités  sérieuses  ;  mais  il  eut  le  malheur  d'écrire  à  une 
époque  où  il  était  dangereux  de  se  montrer  hardi  ailleurs 
que  dans  l'art  d'agencer  des  mots  ingénieux  et  brillants, 
et  de  cadencer  d'harmonieuses  périodes;  où  la  force 
d'àme,  la  vérité,  la  franchise,  menaçaient  sans  cesse 
l'orateur  ou  le  poète  du  sort  d'Helvidius  et  de  Lucain  ;  où 
Tart  suprême  de  faire  fortune  consistait  à  flatter  les 
grands,  l'empereur  et  ses  affranchis.  —  Une  des  meilleures 
éditions  des  SUves  est  celle  de  Markiand,  Londres,  1728, 
in-4^,  reproduite  en  partie  dans  la  Bibliothèqw  latine  de 
Lemaire,  1825,  in-8<*.  Il  existe  une  traduction  française 
des  SUves,  par  Rinn  et  Âchaintre,  dans  la  Bibliotlièque 
latine-française  de  Panckoucke,  Paris,  1829-30,  in-8°.  P. 

S1MARRË  (de  l'italien  zimarray  qu'on  fait  dériver  du 
mot  latin  et  grec  syrma,  robe  à  longue  queue),  habille- 
ment long  et  traînant  que  les  femmes  portaient  autrefois. 
On  donne  le  même  nom  à  une  ample  et  longue  soutane 
que  les  prélats  italiens  et  espagnols  mettent  en  certaines 
circonstances,  et  à  la  grande  robe  que  porte  en  France  le 
chef  de  la  ma^strature. 

SIMIKION ,  instrument  de  musique  des  anciens  Grecs, 
qui ,  selon  plusieurs  auteurs,  était  monté  de  35  cordes. 

SIMILITUDE  (du  latin  similis,  semblable),  ressem- 
blance, rapport  exact  entre  deux  ou  plusieurs  choses^ 
entre  deux  ou  plusieurs  personnes.  En  Rhétorique,  la 
Similitude  est  une  figure  par  laquelle  on  fait  voir  quel- 
que rapport  entre  deux  choses  d'espèces  différentes,  afin 
de  faire  comprendre  l'une  par  l'autre  :  ainsi,  c'est  par 
une  Similitude  que  le  prophète  Nathan,  dans  la  Bible, 
fait  comprendre  a  David  son  péché. 

SIMONIE.  (  V,  ces  mots  dans  notre  Dictumnatre  de 

SIMOUN.    )      Biographie  et  d*Histoire. 

SIMPLE  (  Genre  ou  Style),  un  des  trois  genres  d'élo- 
quence établis  par  les  rhéteurs.  Son  caractère  est  la  clarté, 
la  précision.  Il  s'attache  moins  à  persuader  au'à  instruire; 
aussi  n'a-t-il  pas  besoin  de  véhémence.  Il  luit  donc  tous 
les  artifices  destinés  à  émouvoir  les  passions;  il  néglige 
le  nombre,  il  marche  avec  facilité  ;  mais,  en  évitant  la 
contrainte,  il  ne  se  permet  aucun  écart,  aucune  licence. 
Comme  il  veut,  avant  toute  chose,  être  clair,  il  ne  recule 
pas  devant  une  construction  qui  peut  paraître  quelque- 
fols  languissante;  il  évite  l'inversion,  quand  elle  n'est 
£as  nécessaire  pour  faire  ressortir  la  pensée;  il  rejette 
ien  loin  les  antithèses  et  toutes  les  figures  qui  trahis- 
sent le  travail  et  l'artifice  oratoire.  Il  ne  cramt  pas  de 
décomposer  une  pensée  pour  la  faire  mieux  comprendre, 
mais  il  ne  l'amplifie  pas;  il  se  renferme  dans  les  détails 
nécessaires;  il  n'admet  rien  de  superflu.  Sobre  et  mo- 
deste, il  ne  crée  point  d'expressions  nouvelles,  il  évite 
les  mots  vieillis;  il  est  humble  partout,  et  ne  prétend  pas 
produire  cette  harmonie  qui  remplit  l'oreille  d'un  son 
divin,  a  Sa  construction  n'est  point  pleine  et  serrée;  mais 
ces  hiatus,  ces  voyelles  qui  se  rencontrent,  ont  souvent  je 
ne  sais  quel  aimable  abandon  qui  nous  montre  l'heureuse 
négligence  d'ua  homme  plus  occupé  des  choses  que  des 
mots.  Toutefois  l'orateur,  libre  du  travail  de  la  période, 
de  l'enchaînement  de  la  phrase,  a  d'autres  conditions  à 
remplir  :  ces  tours  si  rapides  et  si  simples  ne  dispensent 
pas  de  toute  application;  il  est  un  art  de  paraître  sans 


art.  Comme  il  y  a  des  femmes  à  qui  il  ûed  bien  de  n'être 
point  parées,  l'élocution  simple  nous  plaît,  même  sans 
ornements  :  c'est  une  beauté  négligée,  qui  a  des  grâces 
d'autant  plus  touchantes  qu'elle  n'y  songe  pas.  »  Msiis  la 
simplicité  n'est  pas  la  sécheresse,  ni  la  bassesse,  ni  Dn- 
corrcction  ;  et  le  style  simple,  quoique  nu,  doit  être  élé- 
gant. Il  n'admet  ni  la  parure  ni  l'éclat,  mais  il  demande 
un  goût  exquis;  l'amour  des  choses  simples  est  la  marque 
d'un  jugement  sain.  L'écueil  du  style  simple  est  la  fami- 
liarité; en  craignant  d'être  recherché,  on  manque  sou- 
vent de  noblesse,  on  emploie  des  expressions  communes, 
on  remplace  la  simplicité  par  la  bassesse.  «  Le  genre 
simple,  dit  Rollin,  n'est  pas  le  plus  facile,  quoiqu'il  le 
paraisse.  Comme  le  style  qu'on  y  emploie  est  fort  naturel, 
et  qu'il  s'écarte  peu  de  la  manière  commune  de  parler, 
on  s'imagine  qu'il  ne  faut  pas  beaucoup  d'habileté  ni  de 
génie  pour  y  réussir;  et,  quand  on  lit  ou  qu'on  entend 
un  discours  de  ce  genre,  les  moins  éloquents  se  croient 
capables  de  l'imiter.  On  le  croit,  mais  on  se  trompe; 
et,  pour  s'en  convaincre,  il  ne  faut  qu'en  faire  l'essai  ; 
car,  après  bien  des  efforts,  on  sera  contraint  souvent 
d'avouer  qu'on  n'a  pas  pu  y  parvenir.  Ceux  qui  ont  quel- 
que goût  de  la  vraie  éloquence,  et  qui  y  sont  le  plus 
versés,  reconnaissent  qu'il  n'y  a  rien  de  si  difficile  que 
de  parler  avec  justesse  et  solidité,  et  cependant  d'une 
manière  si  simple  et  si  naturelle  que  chacun  se  flatte 
d'en  pouvoir  faire  autant.  »  Le  style  simple  convient  par- 
ticulièrement à  la  preuve  et  à  la  narratior  Darties  du 
discours  qui  demandent  plus  de  clarté  que  de  torce  pour 
instruire  les  auditeurs.  Il  peut  arriver  qu'un  discours 
tout  entier  appartienne  à  ce  genre,  lorsqu'il  faut  discuter 
une  question  de  Droit,  une  ordonnance,  un  texte  de  loi. 
Cicéron  nous  en  donne  un  exemple  :  o  Mon  plaidoyer 
pour  Cécina,  dit^il,  roulait  entièrement  sur  l'ordonnance 
du  préteur;  je  me  contentai  d'éclaircir  les  points  obscurs 
par  des  définitions;  je  fis  l'éloge  du  Droit,  j'expliquai  les 
mots  équivoques.  »  En  dehors  de  l'art  oratoire,  il  est  plus 
d'un  genre  qui  exige  le  style  simple.  L'histoire  et  la  phi- 
losopnie,  quand  elles  se  contentent  d'exposer  et  d'é- 
claircir les  Caits,  usent  communément  du  style  simple  : 
tel  est  le  Siècle  de  Louis  XIV  par  Voltaire.  Quand  elles 
y  ajoutent  des  considérations  sur  la  destinée  de  l'homme 
ou  sur  les  agrandissements  et  la  décadence  des  empires, 
alors  elles  s'élèvent  jusqu'au  genre  tempéré  et  quelque- 
fois jusqu'au  sublime,  comme  les  Annales  et  les  Histoires 
de  Tacite  et  le  Discours  sur  Vhistoire  universelle  de  Bos- 
suet.  Le  style  simple  est  celui  qui  s'accommode  le  mieux 
à  l'usagQ  de  la  vie.  Dans  les  Lettres,  quand  elles  ne  sont 
pas  familières,  et  dans  les  Rapports ,  si  nombreux  chez 
tous  les  peuples  modernes,  il  doit  régner  à  l'exclusion  de 
tout  autre.  H.  D. 

SIMPULE,  vase.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire, 

SIMULATION,  mensonge  inséré  à  dessein  dans  un  acte, 
pour  en  cacher  le  sens  et  la  portée,  et  faire  croire  à  des 
conventions  autres  que  celles  qu'il  semble  constater.  La 
simulation  est  faite  dans  un  but  de  dol  et  de  fraude.  Elle 
entraîne  la  nullité  de  l'acte,  si  elle  a  été  employée  pour 
échapper  à  une  prescription  ou  à  une  prohibition  de  la 
loi,  pour  couvrir  une  incapacité  légale. 

SINCA  (Idiome).  V.  Mbxiqdb  (Langues  du). 

SINDHI  (Dialecte),  un  des  dialectes  indiens  dérivés  du 
sanscrit.  On  le  parle  dans  les  contrées  du  Sind  ou  Indus 
inférieur.  Wathen  en  a  publié  une  Grammaire  (Bombay, 
1836),  et  Stack  un  Dictionnaire  (Bombay,  1849). 

SINÉCURE  (du  latin  sine  cura,  sans  soin,  sans  charge), 
se  disait  autrefois  d'un  bénéfice  ou  d'une  dignité  n'obli- 
geant à  aucune  fonction.  Le  mot  désigne  aujourd'hui  une 
charge  salariée  qui  n'exige  que  peu  ou  point  de  traviûL 

SINGALAIS  (Idiome).  V,  Cingalais. 

SINGLER,  en  termes  d'Architecture,  mesurer  au  cor- 
deau les  parties  courbes  d'une  construction. 

SINGLETON,  c.-&-d.  seul  ton^  swle  couleur;  mot  an- 
glais qui  désigne,  au  Boston  et  au  Whist,  l'unique  carte 
d'une  couleur  qui  se  trouve  dans  la  main  d'un  joueur, 
et  qu'il  joue  pour  pouvoir  couper  ensuite. 

SINGULIER,  terme  de  Grammaire.  V.  Nohbbb. 

SINISTRE  (du  latin  sinister,  placé  à  gauche,  et,  par 
suite,  de  mauvais  augure),  se  dit  substantivement,  en 
termes  d'Assurances,  des  p(9rtes  et  dommages  qui  arri- 
vent aux  objets  assurés.  En  matièra  d'Assurance  mari- 
time, la  loi  distingue  les  sinistres  majeurs,  dont  la  sur^ 
venance,  emportant  la  preuve  légale  de  la  perte  de  l'objet 
assuré,  autorise  le  délaissement  (  V.  ce  mo6^^  et  les  n- 
»»'>/rr.ç  mineurs,  qui  n'emportent  point  ave::  cu\  la  preuve 
lOgalc  du  la  perte,  et  qui  donnent  simplemc;i\  k  i'askurà 


SIX 


1646 


SLA 


le  droit  de  réelamer  à  titra  d'avarie  ane  Inuemnité  pro- 
portionnelle an  dommage  éprouvé. 

SINOLOGUE  (da  latin  Sina,  Chine,  et  du  gras  logos, 
discours),  celui  qui  connaît  la  langue  et  la  littérature 
chinoines. 

SINOPLE,  en  termes  de  Blason,  désigne  la  couleur 
Terte.  Dans  la  gravure  des  armoiries,  le  sinople  se  mar- 

Sue  par  des  traits  en  bande,  e.-à-d.  qui  vont  de  l'angle 
roit  du  chef  de  l'écu  à  Tangle  gauche.  Sinoplê  vient, 
•uivant  Court  de  Gébelin,  de  l'arabe  stin,  herbe,  verdure, 
et  de  bla,  blé  naissant  et  d'nn  beau  vert. 
SINTOISME.  \ 

sÎr^*^'^^'    f  F.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 
SIRE  \     ^  Biographie  et  d! Histoire. 

smo'co.      ) 

SIRVENTE,  nom  donné  par  les  Troubadours  à  toute 
poésie  l}Tique  <{ui  ne  roulait  pas  sur  l'amour,  et  qui,  par 
cela  même,  était,  suivant  eux,  d'un  ordre  inférieur,  une 
poésie  de  servant  alarmes  (sirventêse,  de  sirvmt)^  par 
opposition  avec  la  poésie  noble,  qui  roulait  sur  l'amour, 
et  qui  était  appelée  cansd.  Les  sirventes  sont  donc  de  ca- 
ractères et  de  tons  fort  divers.  La  plupart  appartiennent 
ma  genre  satirique  ;  mais  beaucoup  sont  des  chants  de 
guerre,  des  appels  à  la  croisade,  des  manifestes  poli- 
tiques; quelques-uns  sont  des  élégies  {planhs).  Le  sir- 
vente  satirique  dut  être  d'abord  pour  les  Troubadours  un 
moyen  d'exprimer  leurs  passions  haineuses  contre  ceux 
qui  les  avaient  excitées;  mais  il  servit  bientôt  à  censurer 
les  désordres  des  différentes  classes  de  la  société,  à  re- 
procher aux  seigneurs,  aux  souverains,  au  Saint-Sii^ge 
même,  leurs  vexations,  leurs  torts,  leurs  erreurs.  Un  des 
Troubadours  qui  réussirent  le  mieux  en  ce  genre  fut 
Bertrand  de  Born;  il  floriseait  en  1460.  M.  Villemain 
{Littérature  au  tnoysn  âge,  1. 1*')  a  donné  une  belle  tra- 
duction d'un  de  ses  chants  de  guerre.  Bertrand  de  Born 
a  laissé  aussi  une  admirable  élégie  sur  le  trépas  de  Henri 
Court-Hantel,  mort  en  1183.  V,  E.  Baret,  Espagne  st  Pro- 
vence, Paris,  1857,  in-8».  E.  B. 

SISAGHTHIE.    ] 

SISTRE.  (  F.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

SITICINE.         (     ds  Biographie  et  tTHUtoire. 

SITOPHYLAX.  ) 

SIXAIN  ou  SIZAIN ,  petite  pièce  de  poésie  composée 
de  six  vers.  On  distingue  deux  sortes  de  sixains  :  les  uns 
ne  sont  autre  chose  qu'un  quatrain,  auquel  on  ajoute 
deux  vers  d'une  rime  différente  de  celle  qui  a  terminé  le 
quatrjtin  ;  comme  dans  l'exemple  suivant  de  J.-B.  Rous- 
aeau  [Odes,  1, 1)  : 

Selgnenr,  dans  ta  gloire  adorable 

Qael  mortel  est  digne  d'entrer  f 

Qui  poarra,  grand  Diea,  péoétror  , 

Ce  •anctaaire  Impénétrable, 
Oh  tes  saints  inclinés,  d'an  œil  respectueux. 
Contemplent  do  ton  front  Téclat  mi^estueux  t 

Les  autres  comprennent  deux  tercets  (F.  ce  mot),  qui 
ne  doivent  Jamais  enjamber  le  sens  de  l'un  à  l'autre. 
Exemple  s 

QaMls  pleurant,  6  mon  Dion,  qnlls  Arémiseant  de  crainte, 
Ces  malbeorenz,  qui  de  ta  cité  sainte 
Ne  rerront  point  l'éternelle  splendeur. 
Cest  à  nous  de  cbanter,  nous  U  qui  tu  rér^les 

Tes  clartés  ImmorteHes; 
Cest  k  nous  de  chanter  tes  dons  et  ta  grandeur. 

Bagikb,  AUialUf  H,  9. 

RXÂTii ,  monnaie  de  billon  qui  fat  frappée  soui  Fran- 
çois I*',  et  qui  prit  la  place  du  petit  blanc,  comme  le 
douzain  avait  remplacé  le  grand  blanc.  C'était  le  daoïi- 
•ou. 

SIX  BLANCS,  monnaie.  V.  Blanc. 

SSrQoî&RE  (  »*«^"«»  ^)-  ^'  M««»«- 
SIXTE,  en  termes  de  Musique,  intervalle  formé  de  tfo 
sons  diatoniques.  On  distingue  :  la  sioste  mineure,  compo- 
sée de  troll  tons  et  deux  demi-tons  (de  utkla  bémol)  \  la 
sixte  majeure,  composée  de  4  tons  et  1/3  ton  (de  utkla 
naturel);  la  siaUe  augmentée,  dite  improprement  autrefois 
superflue,  composée  de  quatre  tone  et  deux  demi-tons  (de 
vtkla  dièse).  Les  deux  premières  sont  consonnantes,  la 
9*  est  dissonante.  L'intervalle  de  sixte  est  rarement 
employé  dans  le  Piain-Ghant.  —  Vaeeord  de  sixte  est  le 
i*'  renversement  de  l'accord  parfut;  Vaccord  de  sixte  et 
quarte  en  est  le  2«.  Vaccord  de  sixte  et  quinte  est  le 
î*'  renversement  de  l'uccord  de  septième.  11  y  a  un  ac- 


cord de  stxte  augmentée  dans  le  mode  mineur  {fa,  ia, 
ré  dièse);  k  quatre  parties.,  on  y  ajoute  la  quarte  aug- 
mentée (fa,  la,  si,  re  dièse)  ou  la  quinte  naturelle  {fa,  la, 
ut,  ré  dièse). 

81XTINE,  pièce  de  poésie  provençale,  qui  parait  avoir 
été  inventée  par  Arnaud  Daniel.  Elle  se  composait  d« 
6  couplets,  et  chaque  couplet  de  6  vers  ne  rimant  pu 
entre  eux.  Les  bouu  rimes  du  1*'  couplet  étaient  répàés 
à  la  fin  de  tous  les  couplets  suivants  dans  un  ordre  ré^- 
«ilier.  Ceux  du  2*  couplet  se  composaient  de  ceux  dn 
l*',  en  prenant  alternativement  le  dernier  et  le  premier, 
et  successivement  de  bas  en  haut  et  de  haut  en  bas  jus- 
qu'à ce  que  toutes  les  rimes  Tassent  employées.  Chaque 
couplet  suivant  se  comoinait  d'une  manière  semblable 
avec  le  couplet  précédent.  ïjl  pièce  se  terminait  par  un 
Envoi,  dans  lequel  tous  ces  bouts^rimés  se  trouvaient 
répétés. 

sixnNi  (Chapelle).  V,  Vatican,  dans  notre  Dietionnair 
de  Biographie  et  d^ Histoire. 

SKIE ,  sorte  de  patin  dont  se  servent  les  Norvégiens  e* 
les  Lapons  pour  marcher  sur  la  neige.  C'est  une  léger* 
planche,  longue  parfois  de  plus  de  z  met.,  large  seule- 
ment comme  le  pied,  terminée  en  pointe  et  recourbée  à 
ses  extrémités.  On  l'attache  au  pied  avec  une  bride  en 
cuir. 

SKINDAPSOS.  r.  ScnmAPflos. 

SLANG,  langue  du  monde  excentrique  en  Angleterre. 
V.  au  Supplément. 

SLAVE  (AnciEM),  langue  morte  aujourd'hui,  nub  qnl 
est  conservée  dans  la  liturgie  des  peuples  slaves  attaciiés 
à  l'Église  grecque.  On  la  nomme  encore  ancien  davon  on 
esclatxm,  vieux  bulgare^  langue  ecclésiastique  ou  ecclé' 
siastico^lave,  langue  cyrillique.  C'est  la  première  des 
langues  slaves  qui  ait  été  cultivée,  et  elle  en  est  le  type 
orignal,  le  modèle  le  plus  accompli.  Entre  le  vni*  et  le 
xu*  siècle,  on  la  reprda  comme  l'égale  des  langues  grec- 
que et  latine,  tandis  que  les  autres  idiomes  de  l'Europe 
parvenaient  à  peine  à  l'état  de  langues  écrites.  Elle  porte 
à  un  haut  degré  le  caractère  de  langue  synthétique,  el 
elle  est  douée  d'une  richesse  rare  de  racines,  de  formes 
et  d'inversions.  L'admirable  symétrie  et  les  désinences 
sonorçs  de  la  langue  sanscrite,  dit  Eichhoff,  s'y  retrou- 
vent en  grande  partie.  Riche  d'un  alphabet  de  plus  de 
40  lettres,  qui  réunit  presque  tous  les  sons  de  la  voix 
humaine,  elle  rend  facilement  les  nuances  de  la  pensée 
par  la  simple  modification  des  déiinencas.  Sa  déclinaison, 
sans  article,  offre  trois  genres,  trois  nombres,  et  sept  cas 
(nominatif,  vocatif,  accusatif,  génitif,  locatif,  datif,  cau- 
satif).  Sa  conjugaison  est  moins  psrfaite  quant  aux  finales, 
qui  ne  se  distinguent  qu'à  l'indicatif  présent,  au  prétérit 
et  anx  participes,  celles  du  subjonctif  et  du  futur  même 
étant  confondues  dans  le  préient;  mais  elle  olfre  en  re- 
vanche cette  singularité  remarquable,  qu'au  moyen  de 
certaines  additions  faites  dans  le  corps  môme  du  radical, 
elle  peut  exprimer,  dans  leurs  gradations  les  plus  déli- 
cates, non-seulement  les  modes  et  les  temps,  mais  les 
diTérentes  conditions  de  l'action,  son  étendue,  eon  ac- 
tualité, sa  fréquence,  son  accomplissement.  Des  préfixes 
et  des  aflixes.  Judicieusement  déterminés,  conmbuent 
puissamment  à  l'abondance  du  langage,  en  même  temps 

Su'ils  amènent  la  précision  la  plus  grande  en  dispensant 
e  périphrases.  L'ancien  slave  s'est  conservé  pur  dans  la 
traduction  des  saintes  Écritures  par  Cyrille  et  lIétho-> 
dius.  L'antagonisme  des  Slaves  convertis  à  la  foi  grecqne 
et  des  Slaves  convertis  à  la  fol  romaine  empèdia  que 
cette  langue  ne  devint  le  lien  de  toutes  les  tribaa.  V.  Do- 
browski,  Instituiiones  lingum  sla^iccs  diaUcti  veleris. 
Vienne,  1929;  Miklosich,  Radioes  lùigum  slooenieœ  ve^ 
teris,  LeiprijE,  1S45,  eC  LeoBicon  lingum  sloveniem  vetcris. 
Vienne,  4  850;  Joannoviea,  Grammatioa  Ungum  êodasia»^ 
tico-stavicœ.  Vienne,  1851,  in-S». 
SLAVENSU.  V.  Rossi  (Langue). 
SLAVES  (Langoes),  une  des  grandes  famiUet  de  langues 
Indo-européennes  (r.  ce  moi).  On  divise  les  langues 
slaves  en  deux  groupes  :  {•  celles  da  sud  eC  de  l'est, 
c-à-d.  l'ancien  slave,  le  russe,  le  bulgare,  Yillffrien 
(comprenant  le  dalmate,  le  croate,  le  v)ende,  et  le  serbe 
ou  servien)  ;  S*  celles  du  nord  et  de  l'ouest.  c.-à^.  le 
bohème,  le  polonais^  le  sorabe.  Certains  linguistes  y 
ajoutent  le  groupe  des  langues  Lettiques  {borussien  ou 
viettx  prussien,  lithuanien,  letton  ou  /mioimmi^,  doof 
d'autres  font  une  famille  particulière.  Tous  les  idiomes 
slaves  sont  beaucoup  moins  différents  entre  eax  que  ne  le 
sont  les  idiomes  germaniques.  A  l'égard  de  la  grammaire, 
ils  sont  de  beaucoup  supérieurs  à  tous  les  idiomes  ger- 
maniques et  néo-latins.  Le  substantif  u'a  pas darUclo, el 


SLA 


1647 


SOB 


le  verbe  se  conjugue  presque  partout  sans  pronom  per- 
Boonel.  L*exîstence  de  sept  cas  dans  la  déclinaison  rend 
remploi  des  prépositions  très-restreint.  L'adjectif  a, 
comme  en  allemand,  deux  formes  :  Tune  déterminée, 
l'autre  indéterminée.  h&  substantif  a  les  trois  genres; 
mais,  au  pluriel,  le  féminin  et  le  neutre  sont  souvent 
confondus.  Le  masculin  des  objets  animés  se  sert  du  gé^ 
iiitif  au  lieu  de  Taccusatif  pour  se  distinguer  du  masculin 
Inanimé.  Plus  rapprochées  de  la  souche  première  que  les 
langues  germaniques,  les  langues  slaves  ont  naturelle- 
ment des  mots  longs;  par  suite,  elles  ont  beaucoup  moins 
que  Tallemand  et  le  grec  la  faculté  de  former  des  com- 
posés. C'est  aux  langues  slaves  que  les  idiomes  germa- 
ni( 
et 
1 

paraissent  que' rarement  dans  l'ancien  haut  allemand  et 
ranglo-saxon.  Dans  les  idiomes  germaniques,  les  voyelles 
apparaissent  en  majorité;  les  consonnes,  surtout  les  gut^ 
turales  et  les  dentales,  dominent  dans  les  langues  slaves  ; 
la  plupart  des  consonnes  y  sont  doublées,  et  même  beau- 
coup ae  mots,  tels  que  bolk,  pulk.  Ion,  ne  s*y  trouvaient 
primitivement  que  comme  des  agrégations,  des  triples 
consonnes  {blk,  plk,  lin).  C'est  à  la  suite  d'un  mélange 
que  les  gutturales  et  les  dentales  pénétrèrent  dans  les 
langues  germaniques.  Ce  qui  s'est  toujours  opposé  k  la 
fusion  des  idiomes  et  des  littératures  slaves,  c'est  la  di- 
versité de  leurs  alphabets,  tels  que  le  cjrrillique,  le  glago- 
litiqoe,  le  latin,  l'allemand.  V,  Schafarik,  Histoire  de  la 
langue  el  de  la  littérature  slaves  d'après  tous  ses  diaJectes, 
en  allemand,  Bude,  1826;  Talvi  (M"«  de  Iakob),  Coup 
d^œil  historiqiMe  sur  la  langm  slave  et  ses  divers  dia- 
lectes, en  anglais,  1834;  Eichhoff,  Histoire  de  la  langue 
$t  de  la  littérature  des  Slaves,  Paris,  1839;  Mickiewicz, 
Cours  sur  la  littérature  slave,  en  allemand,  4*'  édition, 
Leipzig,  1849;  Schleicher,  les  Langues  de  l  Europe  mo- 
derne,  trad.  de  l'allemand  par  Ewerbeck,  Paris,  1852. 

SLAVES  (MyUiologie  des).  I>es  renseignements  que  nous 
possédons  sur  ce  sujet  sont  peu  nombreux,  et  ne  con- 
cernent le  plus  souvent  que  telles  ou  telles  tribus  slaves. 
Toutefois,  Hamsich  Ûa  Science  du  mythe  slave,  Lemberg, 
1842)  est  parvenu  à  dégager  des  traditions  diverses  un 
certain  nombre  de  faits  généraux.  Il  n'est  pas  vrai,  comme 
l'ont  pensé  la  plupart  des  mythographes ,  que  le  culte 
primitif  d^  Slaves  ait  été  un  culte  grossier  de  la  nature  : 
ce  fut,  au  contraire,  un  monothéisme  qui  s'obscurcit  à 
la  longue,  qui  admit  des  éléments  étran{;ers  et  dégéném 
en  polythéisme.  Si  les  Slaves  ont  honoré  des  divini&s  des 
champs,  des  forêts,  des  fleuves,  etc.,  ils  reconnurent  un 
Dieu  suprême,  tout-puissant,  qui  laissait  le  soin  de  régir 
les  événements  terrestres  à  des  Dieux  subalternes,  issus 
de  lui.  Ce  Dieu,  on  le  trouve  mentionné  sous  les  noms 
de  Swantevit,  Sujetovid  ou  SwiatovU;  c'est  un  Dieu  de 
la  çucrre  :  un  long  glaive  est  suspendu  à  son  côté,  et  sa 
main  gauche  tient  un  grand  arc;  près  de  son  idole  étaient 
déposai  le  frein  et  la  selle  que  l'on  mettait  au  cheval 
blanc  qui  lui  était  consacré,  et  que  le  grand  prêtre  seul 
avait  le  droit  de  monter.  On  croyait  quUl  chevauchait  la 
nuit  sur  ce  mystérieux  coursier,  et  allait  combattre  les 
ennemis  de  son  peuple.  Il  avait  à  Ai'kona,  dans  Tlle  de 
Rugen,un  grand  temple,  qui  fut  détruit  par  Waldemar  P', 
roi  de  Danemark.  Après  Swantevit  venaient  :  Radegast 
ou  Roswodiz,  dieu  de  la  force,  dont  l'idole,  placée  à 
Rhétra,  avait  une  tête  de  taureau,  et  portait  un  cygne 
sur  la  poitrine;  Pérun,  dieu  de  la  foudre;  Prove,  dieu 
de  ré<]uité  et  des  Jugements,  représenté  sous  les  traits 
d'un  vieillard  au  long  vêtement,  et  ayant  pour  attributs 
le  serpent,  symbole  de  la  prudence,  et  le  fer  chaud  des 
ordalies  ;  Stwa,  déesse  de  la  rie  et  de  l'amour,  figurée 
par  une  jeune  fille  aux  longs  cheveux,  couronna  de 
feuillages,  tenant  une  pomme  d'or  d'une  main  et  une 
gnippe  de  raisin  de  l'autre;  Sweitix,  dieu  des  rayons  so- 
lairâs,  représenté  recouvert  de  magnifiques  vêtements  et 
entouré  de  flammes^  Diewana  ou  Oziewonna,  déesse  des 
forêts;  Podaga,  qui  présidait  à  la  chasse,  à  la  pêche,  à 
l'élève  des  bestiaux  et  à  l'agriculture,  et  au'on  figurait 
80U6  les  traits  d'un  vieillard,  court  vêtu,  corné  d'un  bon- 
net pointu,  le  front  surmonté  de  deux  cornes,  et  tenant 
d'une  main  un  olifan,  de  l'autre  une  houlette;  Zislbog, 
dieu  de  la  pleine  lune  et  du  temps;  lutrebog,  dieu  du 
matin  ou  de  l'aurore;  Bjelbog,  le  dieu  blanc,  dieu  du 
bien;  Cxemebog,  le  dieu  noir,  dieu  du  mal,  etc.  Les 
images  des  Dieux  slaves  rappellent  l'Inde  d'une  manière 
frappante  :  c'est  la  même  multiplicité  de  têtes,  de  bras  et 
de  Jambes.  Les  Slaves  croyaient  à  la  résurrection  après 
Ia  mort,  à  rimm.^rtaiité  de  l'àme,  aux  poines  et  auy  ré- 


compenses futures.  Les  prêtres,  organisés  en  une  hiérar- 
chie régulière,  ont  dû  être  primitivement  les  chefs  du 
peuple,  leur  nom  de  Ksiadz  ou  Knies  ayant  la  double 
signification  de  prêtre  et  de  prince.  Hs  accomplissaient 
les  cérémonies  du  culte  dans  des  bois  consacrés  ou  dans 
des  temples  s  les  sacrifices  consistaient  en  bœufs,  mou- 
tons, fruits  ;  les  sacrifices  humains,  introduits  de  l'étran- 
ger dans  quelques  tribus,  n'y  eurent  qu'une  durée  éphé- 
mère. B. 

SUVON.  V.  SuvB. 

SLOKA ,  mètre  héroïque  dans  la  poésie  sanscrite. 

SLOOP,  petit  b&timent  de  cabotage  h  un  seul  màt.  Il 
est  construit  comme  le  cutter,  mais  dans  de  plus  petites 
proportions. 

SLOVAQUE  (Idiome),  idiome  parlé  par  les  Slaves  du 
nord  de  la  Hongrie,  et  que  l'on  regarde  comme  un  dia- 
lecte du  bohème  [V.  ce  mol).  Il  n'y  a  pas  longtemps  au'il 
s'est  élevé  h  la  dignité  de  langue  écrite.  Parmi  les  écri- 
vains qui  l'ont  manié  avec  succès,  nous  citerons,  au  siècle 
dernier.  Bel  etKrman,  traducteurs  de  la  Bible;  Steplian 
Leschka,  iqui  publia  le  premier  un  Journal  en  slovaque; 
BernoUk,  auteur  d'une  Grammaire.  Dans  notre  siècle, 
Georges  Palkovitch,  chanoine  de  Gran,  a  traduit  l'Écri- 
ture sainte;  Plachy,  Tablitsch,  Holly,  se  sont  fait  un  nom 
par  leurs  poésies.  J.  KoUar  a  publié  une  collection  de 
chants  populaires,  1834,  2  vol. 

SLOVÈNE.  V.  Wende. 

SBIACK,  sorte  do  grand  sloop  à  un  màt,  gréé  d'une 
voile  oui  se  hisse  avec  sa  vergue.  Il  est  en  usage  sur  les 
eûtes  d'Ecosse. 

SMALA.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogrch 
phie  et  d'Histoire, 

SMOGLEUR  (de  l'anglais  to  smuggle,  faire  la  contre* 
bande),  petit  bâtiment  du  Nord  destiné  à  la  contrebande. 
On  nomme  aussi  Smogleurs  ceux  oui  le  montent. 

SNAYPURE  (Idiome),  un  des  idiomes  indigènes  de 
l'Amérique  du  Sud,  parlé  dans  le  territoire  du  haut  Oré- 
noque.  Il  a  quelque  affinité  avec  le  caraïbe  tamanaque, 
mais  des  formes  grammaticales  moins  abondantes.  Dans 
sa  construction,  les  prépositions  suivent  leurs  complé- 
ments, et  les  conjonctions,  dont  le  nombre  est  d'ailleurs 
trè»-restreint,  se  mettent  à  la  fin  de  la  phrase.  La  pro- 
nonciation, exempte  de  sons  gutturaux,  a  beaucoup  do 
douceur. 

SOBRIQUET  (du  grec  hybristicos,  injurieux,  ou  du 
latin  subridiculum  ;  ou  du  roman  sobra,  sur,  et  quest, 
acquis  ),  mot  qui  désigna,  dans  le  principe,  un  geste,  un 
acte  outrageant,  de  la  nature  de  lis  chiquenaude,  de  la 
croquignole,  puis  une  injure  en  parole.  C'est  ce  qui  dis- 
tingue le  sobriquet  du  surnom  proprement  dit,  lequel 
rappelle  indifféremment  les  qualités  et  les  défauts  per- 
sonnels. Le  sobriquet  n'exerce  pas  sa  malignité  seule- 
ment sur  les  individus,  il  s'attaque  aussi  à  des  catégo- 
ries, à  des  agrégations  de  personnes,  à  des  populations 
entières;  et  son  caractère  satirique  lui  assigne  une  place 
dans  l'histoire  des  mœurs  populaires,  à  côté  des  pro- 
verbes et  des  dictons,  dont  il  ne  diffère  souvent  que 
parce  qu'il  est  exprimé  en  un  seul  mot.  Les  peuples  do 
l'antiquité  faisaient  usage,  les  uns  envers  les  autres,  de 
qualifications  qui  leur  étaient  inspirées  par  des  senti- 
ments d'exclusion,  d'inimiUé,  de  mépris  ;  les  Hébreux  ne 
connaissaient,  en  dehors  de  la  postérité  d'Abraham,  que 
des  Gentils;  les  Grecs  traitaient  de  barbares  tous  les 
autres  peuples,  et  ils  furent  imités  en  cela  par  les  Ro- 
mains, qui  transformaient  encore  en  coqs  (galli)  les 
puissants,  les  forts  {gallu)  des  bords  de  la  Seine  et  de 
la  Loire,  et  pour  qui  les  Scots  étaient  des  bannis,  les 
Parthes  des  fugitifs,  les  Slaves  des  serfs.  Les  individus 
ne  se  ménageaient  pas  davantage  entre  eux  :  dans  les 
po6mes  d'Homère,  les  héros  s'adressent  des  épithètes 
empreintes  de  la  grossièreté  des  mœurs  de  ce  temps-là, 
et  qui  ont  dans  le  fond  une  certaine  analogie  avec  les  so- 
briquets modernes.  Chez  les  Romains,  les  hommes  dis- 
tingués ne  furent  pas  à  l'abri  de  ces  surnoms  injurieux 
qu'Impose  souvent  le  caprice  ou  l'erreur  de  la  malignité 
publique  :  un  Calpurnius  fut  surnommé  la  Bête  {Bestia); 
un  Scipion,  VAnesse  [Asina);  un  Fabius,  la  Buse  (Bu- 
têo),  etc.  Au  moyen  âge,  en  France,  le  sobriquet  fut  une 
arme  dont  le  peuple  se  servit  contre  ses  oppresseurs.  Les 
provinces,  les  villes,  les  hameaux  qu'animait  une  haine 
réciproque,  se  poursuivirent  d'épigrammes.  Les  sobri- 
quets s'inspirèrent  aussi  des  faits  historiques,  des  insti- 
tutions locales,  des  coutumes  ou  des  travers  particuliers 
à  toute  une  région,  à  une  cité,  ou  à  une  partie  de  ses  ha- 
bitants. On  disait,  par  exemple,  les  Bacouais  d'Amiens; 
Dacouais  est  un  terme  de  mépris  qui  indique  la  niai-* 


soc 


1648 


SOC 


terie,  un  souvenir  de  Tépoque  où  la  ville  d* Amiens  se 
laissa  prendre  par  les  Espagnols,  gr&ce  à  quelques  sacs 
de  noix.  On  disait  les  Sots  de  Ham,  par  allusion  à  la 
compagnie  de  Sots  ou  de  Fous  qui  était  autrefois  établie 
dans  cette  ville.  Les  Chanteurs  de  Sens,  les  Ribauds  de 
Soissons,  les  Usuriers  de  Metz ,  les  Friands  de  Noyon , 
les  Ivrognes  de  Péronne,  les  Dormeurs  de  Compi&ne, 
les  Singes  de  Chauoy,  les  Corbeaux  de  La  Fère,  les  Lar' 
rons  de  M&con,  etc.,  sont  des  dénominations  caractéri- 
sant la  moralité  et  les  habitudes  véritables  ou  supposées 
de  toute  une  ville.  Leur  goût  pour  la  bouillie  a  valu  aui 
Normands  le  sobriquet  de  Bouilleux.  Le  nom  môme  de 
Normand  se  donne  à  quiconque  est  fort  réservé  dans  ses 
paroles  ou  paye  tribut  au  vice  de  la  chicane,  ou  passe  pour 
avoir  la  conscience  un  peu  large.  Le  sobriquet  de  Gascon 
n*est  pas  pris  en  meilleure  part.  Ces  deux  sobriquets  ont 
même  cours  à  rétranger  ;  les  habitants  de  Bade  sont  ap- 
pelés les  Normands  deTAIIemagne;  ceux  de  Berlin  en  sont 
les  Gascons.  On  dit  les  Guêpins  (du  mot^ti^e)  d'Orléans, 
soit  à  cause  de  l'humeur  difficile  dont  les  Orléanais  ont 
été  accusés  quelquefois,  soit  à  cause  des  gens  de  palais 
nombreux,  que  Ton  compara  à  des  guêpes,  et  qui  vivaient 
dans  cette  ville  quand  elle  possédait  une  École  de  Droit. 
Des  sobriquets  furent  aussi  imposés  à  des  partis  poli- 
tiaues  :  tels  sont  cenx  de  Cabillauds  et  de  Hameçons 
(V.  Cabillauds,  dans  notre  Diclionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire) y  de  Chaperons  blancs^  de  Gueux,  dans  les 
Pays-Bas  ;  de  MaiUotins,  et,  plus  près  de  nous,  de  Bleus, 
de  Blancs,  de  Rouges,  en  Francn.  Dans  les  correspon- 
dances diplomatiques,  pour  ne  point  nommer  les  per- 
sonnes dont  on  parle,  on  a  quelquefois  employé  des  so- 
bri({uets  :  il  en  est  ainsi  dans  les  dépêches  de  Villeroy, 
secrétaire  d'État  des  affaires  étrangères  sous  Henri  IV. 
De  nos  jours,  Pusage  des  sobriquets  est  encore  très-ré- 
pandu dans  les  campagnes,  et  principalement  dans  le 
nord  de  la  France  :  un  ridicule,  une  infirmité  physique, 
une  parole  maladroite,  une  bévue,  un  acte  de  poltron- 
nerie, une  condamnation  judiciaire,  sudisent  pour  qu*un 
nom  soit  affublé  d'un  sobriquet,  qui  reste  parfois  hérédi- 
taire. Les  peuples  et  certaines  classes  sociales  n'en  sont 
pas  plus  exempts  aujourd'hui  qu'autrefois.  Sous  le  nom 
flétrissant  de  Giaour  (chien  j,  les  Ottomans  confondent 
tout  ce  qui  n'est  pas  musulman.  L'Anglais  appelle  déri- 
soirement  Yankees {V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire)  les  commerçants  de  l'Amérique  du  Nord. 
Le  peuple,  en  Angleterre,  se  nomme  John  Bull;  aux 
États-Unis  d'Amérique,  Jonathan;  en  France  autrefois, 
Jacques  Bonhomme.  On  dit,  dans  un  sens  ironique,  ler 
badauds  de  Paris,  les  cockneys  de  Londres.  Les  artistes 
et  les  écrivains  traitent  de  bourgeois  quiconque  ne  sait 
tenir  un  pinceau  ou  une  plume,  ce  qui  signifie  dans  leur 
bouche  qu'on  est  dépourvu  d'imagination  et  d'intelli- 
gence. Récemment,  Thackeray,  célèbre  romancier  an- 
glais, a  infligé,  comme  marque  de  niaiserie,  le  sobric^uet 
de  Snob  à  cette  classe  de  gens  toujours  prêts  à  admirer 
sottement  les  choses  plates  et  vulgaires.  P— s. 

SOCCUS,  chaussure.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d^ Histoire. 

SOaABILITÉ.  V.  Société. 

SOCIALISME,  mot  employé  pour  la  première  fois  en 
1835  par  Louis  Reybaud,  et  qui  s'applique  à  tout  système 
ayant  la  prétention  de  refaire  à  neuf  la  société  entière. 
Les  réformateurs  qui  veulent  abolir  toute  propriété  indi- 
viduelle et  mettre  tous  les  biens  en  commun,  sont  dits 
communistes  (  V,  Communisme);  ceux  qui  veulent  seule- 
ment transformer  par  l'association  la  propriété  et  la 
famille,  sont  \&a  sociaiistes  proprement  dits.  Les  socior 
listes  et  les  utopistes  ont  cela  de  commun,  c^u'ils  préten- 
dent non-seulement  réformer  la  société,  mais  la  changer 
de  fond  en  comble  ;  ils  affectent  un  mépris  égal  pour  la 
tradition  et  l'autorité  établie  ;  ils  procèdent  par  la  même 
méthode,  une  imagination  sans  frein.  Mais  ils  diffèrent 
par  un  trait  important  :  les  utopistes,  rêveurs  solitaires, 
plus  soucieux  de  l'idée  que  de  la  pratique,  aspirent  unique- 
ment à  cette  propagande  naturelle  et  insensible  que  tout 
auteur  de  bonne  foi  souhaite  d'exercer  en  publiant  ses 
pensées;  ils  n'ambitionnent  pas  le  rôle  de  chefs  d'école 
ou  de  chefs  de  parti,  et  Thomas  Morus,  par  exemple,  pre- 
nait lui-même  le  soin  de  déclarer  que  ses  idées  n'étaient 
pas  réalisables.  Au  contraire,  les  socialistes  ont  à  cœur 
de  mettre  en  œuvre  leurs  conceptions;  ils  les  déclarent 
immédiatement  oraticables;  dévorés  d'un  prosélytisme 
trdent,  ils  sont  impatients  d'entraîner  les  masses,  et  ne 
néfcligent  aucun  moyen  de  propagande.  Les  uns,  comme 
Saint-Simon  et  Fourrier,  socialistes  philosophes,  veulent 
convaincre  les  hommes  de  rex=ill-.'''«-i-.leursplans:les 


autres,  socialistes  révolutionnaires  ei  anarcniques,comnM 
Babeuf  et  certains  sectaires  de  1848,  spéculent  sur  Is 
misère  publique  et  font  appel  à  la  violence.  Lq  sociaUsme 
proprement  dit  ne  date  donc  aue  de  la  fln  du  xvin*  siècle. 

Gomme  doctrine,  on  en  a  aémontré  le  néant  (V.  Foc- 
RiÉBisMB,  SAiNT-SiMONisyB).  Tout  socialisme  conduit  aa 
despotisme  :  un  maître  absolu,  l'État,  c-à-d.,  après  tout, 
cet  ensemble  d'individus  que  le  hasard  et  l'intrigue,  plu 
souvent  encore  que  le  mérite,  mettent  à  la  tête  de 
affaires,  commanderait  à  tous  comme  à  des  esclaves,  dis 
tribuerait  les  occupations ,  les  honneurs  et  les  profits 
Selon  les  socialistes,  il  ne  doit  plus  y  avoir  d'babitationi 
isolées,  ni  d'entreprises  particulières;  hommes  et  choses 
tout  doit  être  associé.  Sans  doute,  l'association  est  puis- 
sante et  avantageuse;  mais  il  faut,  contrairement  à  ce 
qui  aurait  lieu  dans  le  système,  qu'elle  soit  libre  et  équi- 
table, constituée  de  manière  à  entretenir  l'émulation  et 
non  à  ressusciter  les  corporations,  de  manière  à  respecter 
dans  l'homme  ses  sentiments,  ses  instincts,  ses  idées,  s£ 
nature,  et  non  à  les  combattre  pour  en  faire  un  travail- 
leur sans  intérêt,  un  sociétaire  sans  liberté.  Dans  les 
systèmes  socialistes,  on  institue  des  chefs  qui  règlent  la 
production,  répartissent  le  travail,  fixent  la  consomma- 
tion :  l'homme  n'a  plus  de  droits  propres,  il  est  dépouillé 
de  sa  personnalité,  il  n'est  que  le  rouage  d'une  vaste  ma- 
chine. On  case  chacun  dans  un  métier;  mais  de  quel 
droit?  Et  si  l'ouvrier  ne  veut  pas  du  métier?  S'il  en  a 
voulu,  et  qu'il  lui  déplaise?  S'ils  vont  tous  au  même?  On 
fixe  les  salaires  par  voie  de  règlement;  mais  c'est  mécon- 
naître les  lois  de  l'Économie  politique  (K.  SALAniB),'jt 
assurer  en  quelque  sorte  la  paresse. 

Si  le  socialisme  scientifique  a  fini  sa  carrière,  oe  se- 
rait une  erreur  de  croire  que  te  flot  d'idées  et  de  passions 
qu'il  a  soulevé  se  soit  &  jamais  retiré.  Ce  qui  a  fait  la 
force  et  le  succès  des  socialistes,  ce  ne  sont  pas  les  sys- 
tèmes qu'ils  ont  proposés,  mais  les  critiques  qu'ils  ont 
lancées  contre  les  défauts  et  les  abus  de  l'organisation 
sociale  ;  critiques  qui  n'auraient  pas  ébranlé  le  monde,  si 
elles  n'avaient  renfermé  quelque  part  de  vérité.  Il  faut 
qu'une  sage  politique  et  une  philanthropie  éclairée  s'ef- 
forcent sans  rel&che,  sinon  de  faire  dispaûraltre,  du  moins 
d'atténuer  les  imperfections  de  l'ordre  social.  V,  Du  Puy- 
node,  Dps  lois  du  travail  et  des  classes  ouvrières,  Paris, 
1845,  in-8<*;  L.  Reybaud,  Éludes  sur  les  réformateurs 
ou  scjcialistes  modernes,  1847,  5*  édition,  2  vol.  in-8<>; 
^Vs\ii^  Le  Socialisme  et  le  Communisme  en  France,  2*  édit., 
1847  (en  allemand);  Ozanam,  Les  origines  du  Socia- 
lisme, Paris,  1848,  in-8<'  ;  Ch.  Périn,  Les  économistes  Jes 
socialistes  et  le  christianisme,  1849,  in-8*^;  A.  Sadre, 
Histoire  du  Communisme ,  ou  Réfutation  historique 
des  utopies  communistes,  i*  édit.,  18i9,  in-12;  Tho- 
nissen ,  le  Socialisme  depuis  V Antiquité  jusqu'à  la  Con- 
stitution  française  du  H  janvier  18o2,  Louvain,  1853, 
2  vol.  in-80.  B. 

SOCIÉTÉ,  réunion  d'hommes  assiemblés  par  la  nature 
ou  par  les  lois.  J.^.  Rousseau  a  voulu  soutenir  que  l'état 
naturel  de  l'homme  n'était  pas  l'état  social,  mais  l'état 
sauvage,  qu'il  appelait  état  de  nature  (K.  Sauvage)  ;  il 
a  prétendu  que  la  société  n'avait  d'autre  origine  qu'un 
contrat  entre  les  hommes  (  V,  Contrat  soqal).  Hais 
l'iiomme  est  évidemment  fait  pour  la  société  :  il  y  est 
poussé  par  un  instinct  irrésistible  qu'on  nomme  sociabi' 
Uté;  ses  affections,  comme  ses  besoins,  l'y  appellent  et 
l'y  retiennent.  Ceux  qui,  exagérant  les  imperfections  de 
l'état  social,  et  ne  songeant  pas  que  la  société  ^t  l'œuvre 
du  temps,  prétendent  reconstruire  l'édifice  de  fond  en 
comble,  sont  appelés  Socialistes. 

SOCIÉTÉ,  en  termes  de  Droit,  réunion  de  deux  per- 
sonnes ou  plus,  qui  conviennent  de  mettre  quelque  chose 
en  commun,  dans  la  vue  de  partager  les  bénéfices  et  de 
contribuer  aux  pertes  qui  pourront  en  résulter.  Toute 
Société  doit  avoir  un  objet  licite,  et  être  contractée  pour 
l'intérêt  commun  des  parties.  Chaque  associé  doit  y  ap- 
porter ou  de  l'argent,  ou  d'autres  biens,  ou  son  industrie. 
La  convention  qui  donnerait  à  l'un  des  associés  la  totalité 
de?  bénéfices,  est  nulle.  Il  en  est  de  même  de  la  stipu- 
lation qui  affranchirait  de  toute  contribution  aux  pertes 
les  sommes  ou  effets  mis  dans  le  fonds  de  la  Société  par 
un  ou  plusieurs  associés.  Mais  il  n'est  pas  néce^ire  que 
la  part  de  chaque  associé  soit  proportionnelle  à  son  ap- 
port. Toute  Société  doit  être  rédigé(9  par  éorit,  quand  son 
objet  est  d'une  valeur  de  plus  de  150  fr.,  calculée  sur  le 
montant  réuni  des  apports.  La  preuve  testimoniale  n'est 
point  admise  contre  et  outre  le  contenu  en  l'acte  de  société. 
Clmquo  associé  peut^  sans  le  consentement  des  autres, 
s'u-isocicr  une  tierce  personne  Tela4ivement  à  la  pari  qail 


\. 


soc 


164* 


SOC 


m  dans  la  Société  ;  mais  il  ne  peut ,  sans  ce  consentement, 
l'associer  4  la  Société.  U  Société  finit  :  !•  par  l'expiration 
du  temps  pour  lequel  elle  a  été  contractée;  2«  par  l'ex- 
tinction de  la  chose,  oa  la  consommation  de  la  négocia- 
tion ;  3<»  par  la  mort  de  q  aelatm  ni*'-  Hiociés  ;  4®  par  1  in- 
terdiction on  la  déconfiture  de  l'un  d'eux  ;  5o  par  la  volonté 
qu'un  seul  ou  plusieurs  expriment  de  n'être  plus  en  So- 
ciété. La  dissolution  de  la  Société  par  la  volonté  de  l'une 
des  parties  ne  s'applioue  qu'aux  Sociétés  dont  la  durée 
est  illimitée;  elle  s'opère  par  une  renonciation  notifiée  à 
tous  les  associés.  Cette  renonciation  n'est  pas  admise  si 
elle  n'est  point  de  bonne  foi ,  c.-à*d.  si  l'associé  renonce 
pour  s'appropripr  à  lui  seul  le  profit  que  les  associés 
s'étaient  proposés  de  retirer  en  commun ,  ni  si  elle  est 
faite  à  contre-temps,  c.-à-d.  lorsque  les  choses  ne  sont 

λlus  entières,  et  qu'il  importe  à  la  Société  que  sa  disso- 
ution  soit  différée.  La  prorogation  d'une  Société  à  temps 
limité  ne  peut  être  prouvée  que  par  un  écrit  revêtu  des 
mêmes  formes  que  le  contrat  de  Société. 

On  nomme  Sociétés  civiles  celles  qui  n'ont  pas  pour 
objet  de  faire  un  commerce  ou  des  actes  de  commerce. 
Dans  ces  Sociétés,  les  associés  ne  sont  pas  tenus  solidai- 
rement des  dettes  sociales,  mais  chacun  pour  une  part 
égale  seulement ,  encore  que  la  part  de  l'un  d'eux  dans 
la  Société  BOit  moindre  qfae  celle  des  autres  ;  t  moins 

Îue  l'acte  n'ait  spécialement  restreint  l'obliffatîop  de  ce- 
ui-ci  4itr  le  pied  de  cette  part.  L'un  des  associés  ne  peut 
obliger  les  autres ,  à  moins  qu'ils  ne  lui  en  aient  conféré 
le  pouvoir,  ou  que  l'obligation  n'ait  tourné  au  profit  de 
la  Société.  Les  Sociétés  civHes  sont  universelles  ou  partie 
euiières.  Il  y  a  deux  sortes  de  Sociétés  universelles  : 
i**  celles  de  tous  biens  présents,  meubles  et  immeubles, 
des  profits  qu'ils  peuvent  produire,  et  de  toutes  espèces 
de  gains;  les  biens  à  venir  n'.v  entrent  que  pour  lajouis- 
aance  ;  ^  celles  des  gains  seulement ,  ne  comprenant  que 
ce  que  les  associés  peuvent  acquérir  pendant  la  durée  de 
la  Société,  les  meubles  que  chacun  d'eux  possède  à 
l'époque  du  contrat ,  et  la  Jouissance  de  leurs  immeubles 
personnels.  La  simple  convention  de  Société  universelle 
faite  sans  autre  explication  n'emporte  que  la  Société  uni- 
verselle de  gains.  Nulle  Société  universelle  ne  peut  avoir 
lieu  qu'entre  personnes  respectivement  capables  de  se 
donner  ou  de  recevoir  l'une  de  l'autre,  et  auxquelles  il 
n'est  point  défendu  de  s'avantager  au  préjudice  d'autres 
personnes  :  ainsi ,  elle  ne  peut  exister  entre  un  père  ou 
une  mère  et  son  enfant  naturel  adultérin. — La  Société  par- 
ticulière ne  s'applique  qu'à  certaines  choses  déterminées, 
ou  à  leur  usagis,  ou  aux  fruits  à  en  percevoir.  Le  contrat 
par  lequel  plusieurs  personnes  s'associent  soit  pour  une 
entreprise  désignée,  soit  pour  l'exercice  de  quelque  mé- 
tier ou  profession,  est  aussi  une  société  particulière. 

Les  Sociétés  commerciales  sont  celles  qui  ont  pour 
objet  de  faire  un  commerce  ou  des  opérations  commer- 
ciales. Elles  sont  réglées  par  les  lois  qui  régissent  les 
Sociétés  civiles,  par  les  lois  particulières  au  commerce, 
et  par  les  conventions  des  parties.  Il  y  a  quatre  espèces 
de  Société  commerciale  :  la  Société  en  nom  collectif,  la 
Société  en  commandite,  la  Société  anonyme,  et  la  Société 
00  participation. 

La  Société  en  nom  collectif  est  celle  que  contractent 
deux  personnes  ou  un  plus  grand  nombre,  et  qui  a  pour 
objet  de  faire  le  commerce  sous  une  raison  sociale.  Elle 
doit  être  constatée  par  acte  authentique  ou  sous  seing 
privé  :  dans  ce  dernier  cas,  l'acte  doit  être  fait  en  autant 
d'originaux  qu'il  y  a  d'associés.  On  ne  peut  suppléer  à 
Pacte  écrit,  ni  par  la  preuve  testimoniale,  ni  par  l'aveu 
ou  le  serment.  Les  clauses  de  l'acte  de  èociété  doivent 
6tre  rendues  publiques  :  à  cet  effet,  l'extrait  de  l'acte  est 
enregistré  au  greffe  du  tribunal  de  commerce,  affiché 
pendant  trois  mois  dans  la  salle  d'audience,  et  inséré  dans 
le  Journal  ou  les  Journaux  de  l'arrondissement  désignés 
pour  les  annonces  Judiciaires.  Les  associés  sont  tenus  en- 
tera les  tiers  sur  leurs  biens  personnels,  chacun  pour  le 
tout  et  solidairement.  Quand  il  n'est  pas  nommé  de  gé- 
rant, chaque  associé  a  le  droit  de  gérer  et  d'administrer, 
et,  en  contractant  sous  la  raison  sociale,  il  oblige  la 
Société  sans  avoir  besoin  de  mandat  spécial,  sauf  aux 
autres  associés  à  s'opposer  aux  actes  avant  qu'ils  soient 
accomplis.  Quand  il  y  a  des  gérants,  ils  ont  seuls  le 
droit  d'enga^r  les  autres  associés ,  en  contractant  sous 
la  raison  sociale.  Les  pouvoirs  des  gérants  ne  sont  pas 
Tévoad>les  sans  causes  légitimes,  si  leur  nomination  a  été 
fûte  par  l'acte  de  Société;  ils  sont  révocables  si  ia  nomi- 
nation a  été  faite  par  acte  postérieur. 

La  Société  en  commandite  est  celle  qui  ert  contractée 
entre  un  ou  plusieurs  associés  rcsponsai^^s  et  solidairv^ 


et  un  ou  plusieurs  associés  simples  bailleurs  de  fonds, 
que  l'on  nomme  commanditaires  ou  associés  en  com- 
mandite.  Elle  est  régie  sous  un  nom  social ,  qui  ne  peut  être 
que  celui  d'un  ou  de  plusieurs  des  associés  responsables 
et  solidaires.  Le  commanditaire  n'est  passible  des  pertes 
que  jusqu'à  concurrence  des  fonds  qu'il  a  mis  ou  dû 
mettre  dans  la  Société.  Il  ne  peut  faire  aucun  acte  de 
gestion,  ni  être  employé  dans  les  affaires  de  la  Soci«Hé, 
même  en  vertu  de  procuration  ;  sinon,  il  serait  obligé 
solidairement  pour  toutes  les  dettes  et  engagements  de 
la  Société.  L'acte  de  Société  doit  être  publié;  il  porte  les 
valeurs  fournies  ou  à  fournir  par  les  commanditaires, 
sans  que  les  noms  de  ces  derniers  y  figurent.  Quand  le 
capital  social  n'est  pas  divisé  en  actions,  la  Société  se 
nomme  commandiU  simple;  auand  il  est  divisé  en  ac^ 
tiens,  elle  se  nomme  commandite  par  actions.  Les  asso- 
ciés solidaires  gèrent  tous  ensemble,  ou  délèguent  l'ad- 
ministration à  un  ou  plusieurs  gérants  :  dans  les  Sociétés 
.  ^. i« .  j».  ^—•^•«•ikiAy^A  ^^a/^ftîj^nrKkîfAA    dans 


naires  et  les  représente  auprès  de  la  gérance,  vérifie  i^ 
livres.  In  caisse,  le  portefeuille  et  les  valeurs  de  la  Société. 
Une  loi  du  13  Juin  1867  a  décidé  que  le  capital  ne  peut 
,  être  dirisé  en  actions  ou  coupons  d'actions  de  moins  de 
1 100  fr.,  s'il  n'excède  pas  200,000  fr.,  et  de  moins  de 
500  fr.,  lorsqu'il  est  plus  élevé;  que  la  Société  ne  peut 
être  définitivement  constituée  qu  après  la  souscription 
de  la  totalité  du  capital  social  et  le  versement  du  quart 
au  moins  des  actions  souscrites;  que  les  souscripteurs 
sont  responsables  du  payement  total  de  leurs  actions 
pendant  deux  ans;  que  les  actions  ou  coupons  sont  né- 
gociables après  versement  du  quart  ;  que  la  majorité 
dans  les  délibérations  des  assemblées  générales  doit 
comprendre  le  quart  des  actionnaires,  et  représenter  le 
quart  du  capital  social  en  numéraire;  que  le  Conseil  de 
surveillance ,  composé  de  trois  actionnaires  au  moins, 
est  nommé  la  première  fois  pour  un  an,  et  est  ensuite 
■oimnis  à  la  réélection,  aux  époques  et  suivant  les  condi- 
tions déterminées  par  les  statuts;  que,  quand  une  So- 
ciété est  annulée  pour  contravention  aux  prescriptions 
légales,  les  membres  du  Conseil  de  surveillance  peuvent 
être  déclarés  responsables,  avec  les  gérants,  du  dommage 
résultant,  pour  la  Société  ou  pour  les  tiers,  de  l'annula- 
tion de  la  Société  ;  que  la  même  responsabilité  atteint 
les  fondateurs  qui  ont  fait  un  apport  en  nature,  ou  au 
profit  desquels  ont  été  stipulés  des  avantages  particu- 
liers; que  les  membres  des  Conseils  de  surveillance 
sont  responsables  chacun  de  ses  fautes  personnelles  dans 
l'exécution  de  son  mandat,  mais  n'encourent  aucune 
responsabilité  en  raison  des  actes  de  la  gestion  et  de 
leurs  résultats.  L'émission  d'actions  ou  coupons  d'ac- 
tions d'une  Société  constituée  contrairement  à  la  loi  est 
punie  d'une  amende  de  500  fr.  à  10,000  fr.  Les  mêmes 
peines  frappent  le  gérant  qui  commence  les  opérations 
sociales  avant  l'entrée  en  fonctions  du  Conseil  de  sur- 
veillance. Elles  sont  aussi  applicables  à  ceux  qui,  en  se 
présentant  comme  propriétaires  d'actions  ou  de  coupons 
qui  ne  leur  appartiennent  pas,  ont  créé  frauduleusement 
une  majorité  factice  dans  une  assemblée  générale ,  et  à 
ceux  qui  ont  remis  ces  actions,  sans  préjudice  des  dom- 
mages-intérêts envers  la  Société  ou  envers  les  tiers;  et, 
de  plus,  un  emprisonnement  de  15  jours  à  6  mois  peut 
être  prononcé.  La  négociation  d'actions  dont  la  valeur 
ou  la  forme  serait  contraire  aux  dispositions  de  la  loi, 
ou  pour  lesquelles  le  versement  du  quart  n'aurait  pas 
été  effectué,  est  punie  d'une  amende  de 500  fr.  à  10,000  fr. 
Sont  punii  d*un  emprisonnement  d'un  à  cinq  ans,  et 
d'une  amende  de  50  fr.  à  3,000  fr.  :  P  ceux  qui,  par 
simulation  de  souscriptions  ou  de  versements,  ou  par 
la  publication  faite  de  mauvaise  foi  de  souscriptions  ou 
de  versements  qui  n'existent  pas,  ou  de  tous  autres  faits 
faux,  ont  obtenu  ou  tenté  d'obtenir  des  souscriptions  on 
de  versements;  2o  ceux  qui,  pour  provoquer  des  sou- 
scriptions ou  des  versements,  ont  publié  les  noms  de 
personnes  désignées  contrairement  à  la  vérité  comme 
étant  ou  devant  être  attachées  à  la  Société;  3"  les  gé- 
rants qui,  en  l'absence  d'inventaires,  ou  au  moyen  d'in- 
'ventaires  frauduleux,  ont  réparti  des  divUendes  non 
acquis  à  la  Société. 

La  Société  anonyme  n'existe  pas  sous  un  nom  social, 
et  n'est  désignée  sous  le  nom  d'aucun  associé  :  elle  est 
qualifiée  par  l'objet  de  son  entreprise.  Elle  peut  être 
formée  par  un  acte  sous  seings  privés  fait  en  double  ori- 
Kinal,  et  baus  l'autorisation  du  gouvernement.  Il  ne  peui 

404 


r^ 


son 


1650 


SOI 


y  ftToir  moins  de  7  associés.  Le  capital  est  soumis  aux 
mômes  conditions  que  dans  les  Sociétés  en  commandite. 
L'administration  de  la  Société  anonyme  s'exerce  par  des 
mandataires  élus  pour  6  ans  au  plus  par  rassemblée 
générale,  et  rééligibles  sauf  stipulation  contraire  ;  si  les 
'  statuts  les  désignent  sans  qu'il  y  ait  lieu  de  demander 
Tapprobation  de  l'assemblée,  ils  ne  peuvent  être  nom- 
més pour  plus  àft  3  ans.  V,  le  Supplément. 

La  Société  en  participation  est  celle  par  laquelle  deux 
ou  plusieurs  personnes  conviennent  de  participer  à  une 
affaire,  dans  la  prop<Mon  déterminée  par  leur  conven- 
tion. Elle  est  affranchie  de  toutes  formalités,  et  n'est  pas 
nécessairement  constituée  par  un  acte  écrit.  Le  juge  peut 
la  constater  par  toutes  sortes  de  preuves,  livres  de  com- 
merce, correspondance,  preuve  testimoniale. 

II  peut  être  stipulé  dans  les  statuts  de  toute  Société 

Sue  le  capital  social  sera  susceptible  d'augmentation  par 
es  versements  des  associés  ou  l'admission  de  nouveaux 
sociétaires,  et  de  diminution  par  la  reprise  totale  ou 
partielle  des  apports.  Dans  ce  cas,  le  capital  social  ne 
peut  être  porté  par  statuts  constitutifs  de  la  Société  au- 
dessus  de  200,000  fr.  ;  chacune  des  augmentations,  dé- 
cidée annuellement  par  l'assemblée  générale,  ne  peut 
être  supérieure  à  200,000  fr.  ;  les  actions  doivent  être 
nominatives,  même  après  leur  libération,  et  les  coupons 
ne  peuvent  être  inférieurs  à  50  fr.;  la  reprise  des 
apports  ne  peut  réduire  le  capital  social  au-dessous 
du  10«. 

Dans  tous  les  actes,  factures,  annonces,  pcblications 
et  autres  documents  émanés  des  Sociétés  anonyznes  et 
des  Sociétés  en  commandite  par  actions,  la  natun»  rie 
ces  Sociétés  doit  figurer  en  toutes  lettres,  sous  peine 
d'une  amende  de  50  fr.  à  iOOO  fr. 

V.  Malepeyre  et  Jourdain,  Traité  des  Sociétés  com^ 
merciales,  1833,  in -8®;  Troplong,  Commentaire  sur 
le  contrat  des  Sociétés  civiles  et  commerciales,  1841, 
2  vol.  in-8»;  Del  angle,  Commentaire  sur  les  Sociétés 
commerciales,  1843,  2  vol.  in  8®;  Frouard,  De  ta  So- 
ciété  en  commandite  par  actions  ftaprés  l'ancien  DroU 
1858,  in-8*». 

SOCIÉTÉS  BIBLIQUES.  V.  Bibuques. 

SOaÉTtfS  CHANTANTES  OU  CHOSALBS.  V.  OftPHlSON. 
SOCléTéS  d'AGRICULTOSB.   F.  AGRICULTURE. 
SOCléréS  DB  SECOURS  HUTUELS.   V.  SECOURS  MUTUELS. 
MCIÉTéS  DE  TEMPÉRANCE.  V.  TeMPI^RANCB. 

SOCIÉTÉS  SECRETES,  associations  formées  dans  les  buts 
les  plus  divers  :  les  unes  religieuses,  comme  dans  les 
Mystères  (  V.  ce  mot)  de  l'Antiquité,  parmi  les  Esséniens 
de  la  Judée,  les  Illuminés  du  xviu*  siècle,  etc.;  les  autres 
philosophiques,  comme  la  secte  Pythagoricienne;  celles- 
ci  philanthropiques,  comme  la  Franc-Maçonnerie;  celles- 
là  politiques,  comme  la  Sainte-Vehme,  le  Tugenbund  et 
le  Burschenschaft  en  Allemagne,  le  Carbonarisme  en 
Italie  et  en  France,  THétérie  dans  la  Grèce  moderne,  etc. 
F.  Association  POLmouE. 

SOCLE.  V,  Plinthe. 

SOCQUES,  chaussure  en  bois  ou  en  cuir,  à  semelle 
*  Raquée,  qui  se  met  par-dessus  la  chaussure  ordinaire, 

|ir  garantir  de  la  boue  ou  de  l'humidité.  Elle  a  été  in- 
jntée  en  1822  par  un  certain  Duport. 

SOCRATIQUE  (Philosophie).  Ce  qui  constitue  la  phi- 
losophie socratique  ne  consiste  pas  dans  un  système,  ni 
même  dans  une  école  particulière.  Par  opposition  aux 
écoles  antérieures  et  aux  Sophistes,  Socrate  changea  l'ob- 
jet de  la  philosophie,  en  s'attachant  bien  plus  à  la  con- 
naissance de  rhomme  qu'à  celle  du  monde;  sa  marche, 
en  substituant  la  philosophie  pratique  à  de  vaines  spécu- 
lations; sa  méthode,  en  remplaçant  l'affirmation  hardie 
et  dénuée  de  preuves  des  premiers  philosophes  et  les 
déductions  sophistiques  par  l'observation,  l'analyse  et 
l'induction.  En  ajoutant  à  cela  l'idée  d'un  Dieu-Provi- 
dence, d*une  sanction  de  la  loi  morale  après  la  mort,  on 
aura  la  philosophie  socratique.  Ce  qui  la  distingue  des 
écoles  précédentes ,  c'est  surtout  son  esprit  moral  :  le 
sage,  selon  Socrate,  ne  s'occupe  que  de  sa  nature  morale, 
ne  consulte  que  lui-même  pour  savoir  ce  qui  est  vrai  et 
faire  ce  qui  est  bien.  Les  Écoles  qui  sortirent  du  priur 
cipe  socratique  l'appliquèrent  diversement  et  partielle- 
ment :  les  Cyniques,  les  plus  recommandables,  ne  pré- 
sentèrent que  son  héroïsme  moral  ;  les  Cyrénaïques,  son 
sens  pratique  de  la  vie  ;  les  Méfjariques,  sa  dialecti(|ue, 
mais  tous  avec  exagération.  L'école  d'Êlis  ou  d'Êrettie 
est  regardée  comme  ayant  marché  plus  fidèlement  sur  les 
pas  du  maître;  peut-être  est-ce  parce  que  cette  école  a 
Uièdé  moins  de  traces  dans  l'histoire.  Platon  et  Aristote 
reproduisent  la  philosophie  socratique  dans  sa  métliode 


et  dans  ses  principes  essentiels;  on  y  retroore  l'esprit 
critique,  qui  n'était  pas  le  scepticisme,  et  qui  distinguait 
avec  soin  l'opinion  de  la  science,  deux  choses  que  le  scep- 
ticisme confond  volontiers.  Platon  s'attache  de  préférence 
aux  idées  rationnelles  du  beau,  du  vrai,  du  bien  et  du 
Juste,  que  Socrate  avait  laissé  percer  dans  son  enseigne- 
ment. L'école  d'Épicure  et  celle  du  Portique  se  rattachent 
aussi  à  quelques  égards  à  Socrate  ;  celui-ci  anime  de  son 
souffle  toute  la  philosophie  grecque,  dont  il  est  en  quel- 
oue  sorte  le  fondateur,  de  même  qu'on  retrouve  l'esprit 
de  Descartes  dans  toute  la  philosophie  moderne.       R. 

SODALICIUM.  l  F.  ces  mots  dans  notre  Dictiaimaire 

SODAUS.  y     de  Biographie  et  d'Histoire, 

SORNDAou  SOUNDA  (Idiome).  V.  Javanaise  (Langue). 

SOEUR,  nom  donné  aux  enfants  du  sexe  féminin  par 
les  enfants  du  même  père  et  de  la  même  mère,  ainsi  que 
par  les  enfants  qui  n'ont  de  commun  que  le  père  ou  la 
mère.  On  nomme  sœur  germaine  celle  qui  est  issue  du 
même  père  et  de  la  même  mère  ;  sœur  consanguine^  celle 
avec  laquelle  on  n'a  de  commun  que  le  père  ;  sœur  uté^ 
rine,  celle  avec  laquelle  on  n'a  de  commun  que  la  mère. 
La  belle-sosur  est  la  femme  du  frère.  La  sœur  hérite 
de  ses  frère  ou  sœur  morts  sans  postérité  {Code  Napol,^ 
750-752).  V.  Frère.  —  On  appelle  Sœurs  les  religieuses 
et  certaines  filles  qui  vivent  en  communauté;  elles  quit- 
tent leur  nom  propre  pour  prendre  un  nom  de  sainte, 
comme  sœur  Tnirise,  sosur  Marthe. 

SOFA  ou  SOPHA,  mot  de  la  langue  turque  par  lequel 
on  désigne  une  estrade  élevée,  couverte  de  tapis,  et  sur 
laquelle  le  grand  vizir  donne  ses  audiences.  S'il  reçoit 
des  ambassadeurs,  on  met  leurs  sièges  sur  le  sofa;  c'est 
accorder  les  honneurs  du  sofa.  —  Chez  nous,  un  sofa  est 
utie  sorte  de  lit  de  repos  à  dossiers  ou  à  coussins. 

SOFFITE  (de  l'italien  sof/Ua)^  en  termes  d'Architec* 
ture,  dessous  de  tout  ce  qui  est  suspendu.  C'est  la  sur- 
face de  tout  membre  d'architecture  qui  se  présente  hori- 
zontalement au-dessus  de  nos  têtes,  notamment  d'un 
plafond  à  compartiments  et  à  caissons.  Ia  soffite  d'archi- 
trave, de  larmier,  etc.,  est  la  face  de  dessous  d'une 
architrave,  d'un  larmier,  unie  ou  décorée  d'ornements. 

SOFIS.  V.  SopHis,  dans  notre  Dictionnaire  de  Btûgra» 
phie  et  d*  Histoire. 

SOIERIES,  étoffes  de  soie  de  tous  les  genres.  Dans  les 
temps  anciens,  la  soie  fut  un  produit  spécial  de  la  Chine, 
qui,  pendant  de  longues  années,  en  fit  un  objet  de  tralic. 
De  la  Chine  l'industrie  de  la  soie  passa  dans  l'Inde,  où 
elle  fit  de  rapides  progrès,  puis  en  Perse,  et  les  Phéni- 
ciens firent  commerce  de  ses  produits.  Les  soieries  eurent 
un  grand  succès  à  Rome  aussitôt  que  la  conquête  eut  mis 
les  Romains  en  rapport  avec  l'Orient;  ils  avaient  long- 
temps ignoré  la  nature  et  l'origine  de  la  soie,  pensant 
que  c'était  tantôt  un  duvet  très-fin  qui  naissait  sur  les 
feuilles  de  certains  arbres  et  de  certaines  fleurs,  tantôt 
une  espèce  de  coton  ou  de  laine  très-déliée.  Héliogabale 
fut,  dit-on,  le  premier  qui  porta  chez  eux  des  Têtements 
de  soie.  Aurélien  en  refusa  une  robe  à  sa  femme,  parce 

2u'il  ne  voulait  pas  payer  du  fil  au  poids  de  l'or.  Au  temps 
e  Pline,  on  fabriquait  des  soieries  à  Cos.  Toutefois,  ce  fut 
l'empereur  Justinien  qui,  le  premier,  voulut  affjranchir 
l'Occident  du  tribut  qu'il  payait  à  l'Asie,  et  surtout  du 
monopole  que  les  Perses  s'étaient  attribué  :  par  ses  or- 
dres, deux  moines  pénétrèrent  Jusqu'en  Chine,  et  en 
rapportèrent,  dans  une  canne  creuse,  des  œufs  de  ver  à 
soie,  en  555.  Les  mûriers  et  leurs  hôtes  précieux  s'accli- 
matèrent fort  bien  autour  de  Constantinople,  en  Grèce, 
et  surtout  dans  le  Péloponèse,  qui  prit  pour  ce  motif  le 
nom  de  Morèe.  En  1147,  Roger  II ,  roi  de  Sicile,  a}[ant 
fait  quelques  conquêtes  en  Grèce,  emmena  des  ouvriers 
en  soie  à  Palerme,  où/  s'élevèrent  de  belles  fabriques.  On 
présume  généralement  que  c'est  de  la  Sicile,  et  par  les 
lies  Baléares,  que  l'Espagne  a  connu  le  travail  de  la  soie: 
cependant,  d'après  le  témoignage  d'Édrisi,  les  Arabes 
l'auraient  introduit  dans  ce  pays  avant  le  xii«  siècle. 
Quoi  qu'il  en  soit,  les  soieries  de  Sérille,  de  Grenade,  de 
Tolède,  de  Murcie,  de  Valence,  rivalisèrent  pendant  le 
moyen  âge  avec  celles  de  la  Chine.  En  Italie,  Naples, 
Florence,  Venise,  Milan,  Bologne,  Lucanes  et  Gènes  s'io- 
slruisirent  à  l'école  de  Palerme.  D'Italie,  la  soie  vint  en 
Provence  :  ce  seraient  les  papes  d'Avignon  qui  auraient, 
scion  les  uns,  importé  le  rer  à  soie  et  le  mûrier;  selon 
les  autres,  les  premiers  mûriers  furent  plantés  sous  le 
règne  de  Charles  VIL  Louis  XI  établit,  en  1470,  des  ou- 
vriers italiens  aux  environs  de  Tours.  L'industrie  deLjroo 
date  seulement  de  1520.  En  1546,  l'ambassadeur  vénitien 
Mariuo  Cavalli  écrivait  qu'il  y  avait  en  Toundne  8,000 
métiers.  En  1550,  Henri  II  porta  les  premiers  bas  de  soie. 


SOL 


1651 


SOL 


et  les  seignean  élégants  rimitèrent  à  la  oonr.  Les  guerres 
de  religion  arr^lôrent  Tessor  de  l'industrie  :  après  Te  réta- 
blissement de  la  paix,  Olivier  de  Serres,  en  1599,  dédia 
au  corps  municipal  de  Paris  son  traité  de  la  Cueillette 
de  la  soie;  le  succès  de  ce  livre  di^termina  Henri  IV  à 
faire  planter  des  mûriers  blancs  dans  toutes  les  maisons 
royales,  et  à  en  mettre  20,000  pieds  dans  le  Jardin  des 
Tuileries,  à  Tendroit  où  Le  Nôtre  planta  plus  tard  les 
deux  massifs  de  marronniers  qui  existent  encore  :  dans 
Forangerie  de  ce  jardin  on  éleva  des  vers  à  soie.  Dès  lors 
le  commerce  des  soienes  de  Tours,  Orléans,  Paris  et 
Lyon,  acquit  une  grande  importance  :  des  lettres  pa- 
tentes de  Louis  XIII  disent  que  plus  de  25,000  ouvriers 
travaillaient^  soie  à  Tours.  Sous  l'administration  de  Col* 
bert,  une  pnme  de  20  sols  fut  accordée  aux  agriculteurs 
pour  chaque  mûrier  qu'ils  planteraient.  Lyon  devint, 
grftce  aux  frères  Mascany,  une  fabrique  au  moins  ég:ale 
aux  fabriques  italiennes.  Il  y  eut  un  moment  de  déca- 
dence après  la  révocation  de  Tédit  de  Nantes  et  Jusqu'au 
milieu  du  xviu*  siècle  :  puis  le  travail  se  releva,  et,  au 
moment  de  la  Révolution,  les  18,000  métiers  de  Lyon 
fabriquaient  par  an  pour  plus  de  100  millions  d'étoffes  de 
toute  espèce.  La  République  porta  à  son  tour  un  coup 
fatal  à  cette  industrie,  qui  ne  se  ranima  que  sous  Napo- 
léon I''.  Ce  fut  alors  qu'apparurent  les  appareils  à  la  Vau- 
canson,  le  chaufllage  à  la  vapeur  pour  le  dévidage  des 
cocons;  les  régulateurs  de  Dutilleul  pour  faciliter  le  tis- 
sage, le  système  de  fllaissiat  pour  aider  à  la  confection 
des  étoffes  brochées,  et  enfin  la  découverte  de  Jacquart. 
Aujourd'hui  on  évalue  à  160,000  les  métiers  employés  à 
l'industrie  de  la  soie  dans  toute  la  France,  et  à  plus  de 
400  millions  de  francs  la  valeur  des  soieries  fabriquées 
annuellement.  B. 

SOIES  (Condition  des  ).  V.  CoNDrnoNNEMBNT. 

SOISSONS  (Église  S^-Gervais,  à).  Le  corps  de  cette 
église  cathédrale  a  été  élevé  pendant  le  xu"  siècle,  et  ap- 
partient au  style  romano-byzantin  ;  les  parties  supérieures 
sont  en  style  ogival  primitif.  Le  plan  général  est  régulier, 
avec  cette  particularité  remarquable  que  le  transept  mé- 
ridional est  en  foirme  d'abside  comme  à  Noyon,  et  flanqué 
à  l'Est  d'une  chapelle  circulaire  à  deux  étages  comme  à 
Laon.  L'édifice  a  100  met.  de  longueur,  t26  de  largeur,  et 
33",30  de  hauteur  sous  voûte.  Le  chœur  est  accompagné 
de  5  chapelles  circulaires  et  de  8  chapelles  carrées.  V.  Po- 
quet  etDaras,  Notice  sur  la  cathédrale  de  Soissons,  in-8<>. 

SOL,  en  termes  de  Droit,  fonds  de  la  propriété.  La  pro- 
priété du  sol  emporte  celle  du  dessus  et  du  dessous  :  le 
propriétaire  peut  y  faire  toutes  les  plantations  et  con- 
structions qu'il  Juge  à  propos,  sauf  le  respect  des  servi- 
tudes et  des  règlements  de  police  ;  il  peut  y  faire  des 
fouilles  et  en  retirer  les  produits,  sauf  le  respect  des 
lois  et  décrets  relatifs  aux  mines  {V,  le  Code  NapoL, 
art.  552  et  suiv.).  Tout  ce  qui  se  réunit  au  sol  par  accès-- 
sion  ou  allumon  {V.ces  mots)  ^partient  au  propriétaire, 
A>us  certaines  conditions. 

SOL,  monnaie.  V.  Sou^  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

SOL,  note  de  Musique,  la  5*  de  la  gamme  d'ut.  Les  Al- 
lemands la  nomment  G* 

SOLAllANIE,  sorte  de  flûte  des  Turcs,  faite  avec  un 
roseau  ou  un  morceau  de  bois  mince.  Elle  est  ouverte 
aux  deux  bouts,  sans  embouchure,  et,  par  conséquent, 
difficile  à  faire  résonner  :  certains  dervichea  excellent 
cependant  t  en  jouer. 

SOLAR.         >  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

SOLARIUM.  S      Biographie  et  d: Histoire. 

SOLDAT,  tout  militaire  qui  reçoit  une  solde,  et  spé- 
cialement celui  qui  n'est  pas  gradé.  Suivant  le  baron  de 
Reden,  l'Europe  compterait  actuellement,  en  temps  de 
paix,  2,731, 085  soldats,  c-à-d.  1,02  pour  100  de  sa  popu- 
lation totale,  et  leur  entretien  exigerait  annuellement  la 
somme  de  1,561,618,211  fr.;  de  sorte  que  chaque  soldat 
coûterait  571  fr.  79  c,  et  que  chaque  habitant  contri- 
buerait ponr  5  fr.  78  c.  à  l'entretien  de  l'armée.  Le  coût 
annuel  de  chaque  soldat  serait,  approximativement  :  en 
Russie,  de  362  fr.  78  c.  ;  dans  les  États  allemands,  de 
466  fr.  83  c.  ;  en  Turquie,  de  549  fr.  52  c.  ;  en  Espagne, 
de  718  fr.  63  c.  ;  en  France,  de  860  fr.  17  c  ;  en  Angle- 
terre, de  2,344  fr.  78  c. 

SOLDE  (du  latin  solidus,  soldus,  sou,  monnaie),  ce 
qui  est  alloué  aux  militaires  pour  leur  entretien  et  pour 
les  dépenses  qu'exige  d'eux  le  service.  La  solde  augmente 
^  en  proportion  du  grade,  et  varie  selon  le  pied  de  paix  et 
*  le  pied  de  guerre.  Le  service  de  la  solde  pourvoit  à  toutes 
les  prestations  en  deniers  et  en  nature  qui  composent  le 
traitement  des  troupes.  Los  prestations  en  deniers  sont  : 


la  solde  proprement  dite,  les  suppléments  de  solde, 
les  hautes  payes,  les  frais  de  représentation^  les  indem- 
nités représentatives  de  fourrages,  les  indemnités  de 
logement  et  d'ameublement,  les  frais  de  bureau,  les 
indemnités  en  remplacement  de  vivres,  les  indemnités 
pour  le  cas  de  rassemblement  de  troupes,  les  indemnités 
pour  perte  de  chevaux  ou  d'effets,  les  gratifications  de 
première  mise  d'équipement  allouées  aux  sous-oflîciers 
promus  officiers,  les  gratifications  aux  sous-officiers  in- 
structeurs, les  gratifications  d'entrée  en  campagne,  la 
masse  de  première  mise  de  petit  équipement  donnée  à 
chaque  soldat  à  son  entrée  au  corps,  la  prime  Journalière 
d'entretien  de  la  masse  individuelle,  la  masse  générale 
d'entretien  allouée  aux  corps  de  troupes,  et  la  masse 
d'entretien  de  harnachement  et  de  ferrage.  Les  presta- 
lions  en  nature  sont  les  subsistances  et  le  chauffage.  — 
Avec  la  solde  proprement  dite  du  soldat,  on  fait  trois 
parts  :  la  i^^  destinée  à  alimenter  la  masse  (F.  ce  mot) y 
reste  en  réserve  dans  la  caisse  du  corps;  la  2*  est  con* 
sacrée  aux  dépenses  de  l'ordinaire  {V.  ce  mot)  ;  la  3*  est 
remise  à  chaque  homme  sous  le  nom  de  centimes  de  poche. 
Les  deux  dernières  sont  distribuées  à  l'avance  sous  le 
nom  de  prêt,  les  1",  6,  11,  16,  21  et  26  de  chaque  mois. 
—  La  solde  des  militaires,  inférieure  à  600  fr.,  est  insai- 
sissable; quand  elle  excède  600  fr.,  elle  est  saisissable, 
mais  pour  un  5«  seulement. 

Nous  avons  donné,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d^ Histoire  (art.  Patb),  l'historique  de  la  solde. 
Voici  le  tableau  des  soldes  d'aclivité  accordées  av»nt 
1870,  et,  ao  Supp^, celles  données  le  25  déc.  1875. 

Êlat-major  général. 

Maréchal  de  France 30,000  fr. 

Général  de  division  (pied  de  paix).  .  15,000 

—  (pied  de  euerre).  18,750 
Général  de  brigade  (pied  de  ^x).  .  10,000 

—  (pied  de  guerre).  12,500 

Corps  d^état-major. 

Colonel 6,250  fir« 

Lieutenant-colonel 5,300 

Chef  d'escadron 4,500 

Capitaine  de  i"^  classe 2,800 

—  2«  classe 2,400 

Lieutenant 1,800 

Intendance  militaire. 

Intendant. 10,0<0fr. 

Sous-intendant  de  l'^  classe 6,250 

—  de  2*  classe 5,300 

Adjoint  de  l^**  classe. 4,500 

—     de  2«  classe 2,800 

Garde  impériale. 

Colonel 7,975  fr. 

Lieutenant-colonel 6,235 

Chef  de  bataillon  et  major 5,230 

Médecin-major  de  1'*  classe 6,525 

—  de  2*  classe 4,900 

Médecin  aide-major  de  l'*  classe.  .  .  3,670 

—  de  2«  classe.   .  .  3,300 
Capitaine  de  l'hélasse 4,200 

—  de  2«  classe 3,500 

Lieutenant  de  1'*  classe 2,930 

—  de  2«  classe 2,655 

Porte-aigle 2,560 

Sous-lieutenant  .  .  .  *. |  q  tnK 

Chef  de  musique )  ^'*'^ 

Infanterie, 

Colonel 5,500  fr. 

Lieutenant-colonel 4,300 

Chef  de  bataillon  et  major 3,600 

Médecin-major  de  1'*  classe 4,500 

—  de  2«  classe 2,950 

Médecin  aide-mijor  de  l'*  classe.  .  .  2,000 

—  de  2*  classe.  .  .  1,800 
Capitaine  de  i^  classe 2,400 

—  de  2»  classe. 2,000 

lieutenant  de  l'*  classe 1,600 

—  de  2«  classe. 1,450 

Porte-drapeau 1,400 

Sous-lieutenant 1,350 

Chef  de  musique 1,350 

Cavalerie. 

Colonel 6,000  St. 


SOL 

Llmtenant-colonel..  .  .  . 
Chef  d^escadron  et  major. 
Capitaine  de  l'*  classe.    . 

—  de  2*  classe  .  . 
Lieutenant  de  1*^  classe.. 

—  de  2«  classe.  . 
Sons-lieutenant 


1652 


SOL 


•  •  o  ■ 


Artillerie. 

Colonel 

Lieutenant-colonel 

Chef  d'escadron  et  major.  . 
Capitaine  de\^  classe.  .  • 

—  de  2*  classe. .  .  . 
Lieutenant  de  l'*  classe. .  . 

—  de  2*  classe.  .  • 


4,700  fr. 

4,000 

2,500 

2,300 

i,800 

1,600 

1,500 

6,750  fr. 

5,700 

4,900 

3,000 

2,600 

2,050 

1,850 

Géîiie. 

Colonel 6,250  fr. 

Lieutenant- colonel 5,300 

Chef  de  bataillon  et  major 4,500 

Capitaine  de  1^  classe 2,800 

—  de  2«  classe 2,400 

Lieutenant  de  l'*  classe 2,050 

—  de  2«  classe 1,850 

Gendarmerie  départementale. 

Colonel 6,500  fr. 

Lieutenant-colonel 6,000 

Chef  d*escadron 4,500 

Capitaine  commandant  de  compagnie  |  ,  qq^ 

—  trésorier (  *»""" 

—  command.    d'arrondissem.  2,700 
Lieutenant  trésorier 2,400 

—  d'arrondissement 2,100 

Sous-lieutenant  trésorier 2,100 

—              d'arrondissement..  .  1,800    . 

Âdjudant-sous-officier,  à  cheval. .  .  .  1,536 

—  —            à  pied 1,386 

llaréchal  des  logis  chef,  à  cheval.  .  .  i  ,286 

—  —              à  pied.  .  •  .  1,136 
Maréchal  des  logis,  à  cheval 1,136 

—  —          à  pied 986 

Brigadier,  à  cheval •  1,036 


—  à  pied. 
Gendarme ,  à  cheval.    .  .  . 

—  à  pied 

Élève  gendarme,  à  cheval.  . 

—      à  pied.  .  . 


886 
900 
750 
800 
650 


Marine. 

Amiral 30,000  fr. 

Vice-amiral 15,000 

Contre-amiral 10,000 

Capitaine  de  vaisseau  de  1**  classe.  .  5,000 

—  —       de  2«  classe.  .  4,500 

Capitaine  de  frégate 3,500 

Lieutenant  de  vaisseau  de  l'*  classe.  2,500 

—  —         de  2*  classe. .  2,000 

Enseigne  de  vaisseau 1,500 

Aspirant  de  l'"  classe 1,000 

—      de  2*  classe 600 

Commissaire  général  de  1*^  classe.  .  10,000 

—  —       de  2«  classe.  .  8,000 
Commissaire  de  I'*  classe •  5,000 

—  de  2«  classe 4,500 

Commissaire-adjoint  de  I*"*  classe.  .  3,500 

—  —      de  2"  classe.  .  3,000 
Sous-commissaire  de  1'*  classe. .  .  .  2,500 

—               de  2»  classe.  .  .  .  2,000 

Aide-commissaire 1,500 

OLDE  DB  COMPTE.  V.  COMPTE. 

SOLDURIERS.  V.  notre  Dictionn.  de  Biogr.  et  d'Hist. 

SOLE ,  en  termes  de  Marine,  fond  des  b&timents  qui 
D*ont  pas  de  quille. 

SOLEA ,  chaussure.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d*Histoire, 

SOLÉCISME,  faute  contre  la  syntaxe.  Le  mot  vient  de 
Soles,  colonie  grecque  en  Cilicie  ;  les  habitants  de  cette 
ville  altérèrent  la  langue  de  la  mère  patrie,  où  l'expres- 
sion parler  comme  un  habitant  de  Soles,  faire  un  sole- 
eisme,  signifia  manquer  aux  règles  de  la  grammaire.  11  y 
a,  suivtint  ies  grammairiens  d'aujourd*hui,  un  solécisme 
dans  ce  vers  de  Boileau  {Sat.  IX)  : 

C'eat  d  voué,  mon  esprit,  d  gui  i*  venz  parler  ; 

Mais  il  faut  se  rappeler  que  ce  pléonasme  est  dans  le  gé- 


nie et  la  tradition  de  la  vieille  langue.  V.  Génin,  Lsxiquê 
comparé  de  la  langue  de  Molière,  au  mot  :  A  redoublé, 

SOLENNEL,  en  latin  solemnis  (de  solus  in  annq.  qui 
se  fait  une  seule  fois  Tan),  degré  de  festivité  dans  l'Église 
catholique,  celui  des  fêtes  qu'on  célèbre  avec  le  plus  de 
pompe.  Il  vient  après  V annuel ,  et  se  divise  en  solennel 
majeur  et  solennel  mineur. 

SOLESMES  (Abbaye  de).  Cette  abbaye  bénédictine, 
située  sur  la  rive  gauche  de  la  Sarthe,  à  2  kilom.  de  Sa- 
blé, n'a  plus  rien  de  remarquable  aujourd'hui  que  son 
église,  ancienne  basilique  à  trois  nefs,  dont  il  ne  reste 
néanmoins  qu'une  partie.  Les  voûtes  se  distinguent  par 
Télégance  et  la  pureté  de  leurs  nervures;  une  gros^ 
tour  carrée,  dont  la  base  est  romane  et  la  partie  supé- 
rieure ogivale,  fait  saillie  dans  les  murs  de  la  nef,  et  est 
couronnée,  à  une  hauteur  de  40  met.,  d*un  dôme  à  lan- 
terne construit  en  1731.  Des  sculptures  attirent  Tat- 
tention  sur  deux  chapelles,  dont  Tune  contient  un  Saint 
Sépulcre,  et  l'autre  cinq  grandes  scènes  de  la  vie  de  la 
Vierge,  sa  Pâmoison,  sa  Mort,  sa  Sépulture,  son  Assomp- 
tion, sa  Glôriflcation.  Ces  sculptures  méritent  la  célébrité 
dont  elles  jouissent  :  on  les  a  attribuées  tantôt  à  Ger- 
main Pilon,  tantôt  à  dés  artistes  italiens,  et  même  à  des 
Allemands.  —  En  1833,  une  association  de  jeunes  prêtres 
s'établit  à  Solesmes  pour  ressusciter  Tordre  de  Saint-Be- 
noit, et  se  livrer  à  des  travaux  littéraires.  Le  pape  Gré- 
goire XVI  érigea,  en  1835,  l'ancien  prieuré  en  titre  abba- 
tial, et  déclara  cette  association  chef  d'une  nouvelle 
congrégation  française. 

SOLFÈGE,  livre  élémentaii*e  dans  lequel  sont  réunis 
tous  les  principes  de  la  lecture  musicale,  et  où  Ton  peut 
apprendre  à  solfier  (  V.  Solhisation).  Un  solft^e  doit  con- 
tenir une  série  de  leçons  écrites  alternativement  sur 
toutes  les  clefs,  dans  tous  les  tons,  dans  les  deux  modes 
majeur  et  mineur,  et  dans  les  différentes  mesures.  O^s 
leçons  doivent  être  classées  selon  leur  ordre  de  difficulté 
progressive.  On  les  écrit  d'ordinaire  pour  une  voix,  et 
quelquefois  pour  deux  ou  trois,  afin  d'accoutumer  rélère 
à  entendre  des  sons  différents  de  ceux  qu'il  émet  et  pro- 
cédant par  un  rhythme  tout  autre,  sans  que  la  justesse 
de  son  intonation  et  la  précision  de  sa  mesure  en  soient 
altérées.  L'étendue  du  diapason  n'étant  pas  la  même  pour 
toutes  les  voix,  puisque  celles-ci  varient  selon  les  âges  et 
les  sexes,  on  a  dû  placer,  dans  les  solfèges  complets,  des 
leçons  écrites  tour  à  tour  pour  soprano,  contralto,  ténor 
et  basse  :  autrement,  le  professeur  doit  recourir  à  la 
transposition  pour  élever  ou  abaisser  l'échelle  dans  la- 
quelle les  leçons  ont  été  écrites.  Après  avoir  fait  une 
étude  approfondie  du  solfège,  l'élève  doit  être  en  état  de 
lire  couramment  toute  espèce  de  musique.  On  estime 
les  Solfèges  dits  d* Italie  et  du  Conservatoire  (de  Paris), 
ceux  de  Rodolphe,  de  Chelard,  de  Catrufo,  de  Garaudé, 
de  Panseron,  etc.  B. 

SOLICITOR,  nom  donné,  en  Angleterre,  aux  avoués 
et  aux  fonctionnaires  de  Tordre  judiciaire  qui  portent  h 
parole.  Le  Solicitor  gênerai  est  notre  Procureur  impérial. 

SOLIDARITÉ ,  en  termes  de  Droit,  confusion  établie 
entre  les  droits  de  plusieurs  coîntéressés,  de  telle  sorte 
que  chacun  d'eux  est  obligé  pour  le  tout  comme  s'il  était 
seul  débiteur,  ou  qu'il  a  une  action  pour  le  tout  comme 
s'il  était  seul  créancier.  Ainsi,  le  créancier  solidaire  peut 
réclamer  du  débiteur  la  totalité  de  la  créance,  bien  qu'en 
réalité  il  ne  soit  créancier  que  d'une  partie;  le  d^Ueur 
solidaire  paye  non-seulement  pour  lui ,  mais  pour  autrui 
{Code  Napoléon,  art.  1197-1216).  Une  obligatioti  est  so- 
lidaire, quand  chacun  des  obligés  peut  être  contraint 
pour  le  tout.  Ceux  qui  ont  signé,  accepté  ou  endossé  nr.e 
lettre  de  change,  sont  tenus  à  la  garantie  solidaire  en- 
vers le  porteur,  c.-^-d.  que  celui-ci  a  une  action  pour 
le  tout  contre  chacun  d'eux.  Un  créancier  peut  actionner 
directement  l'une  quelconque  des  cautions  solidaires  de 
la  créance.  La  solidarité  ne  se  présume  pas,  et ,  à  moins 
qu'elle  ne  soit  prononcée  par  la  loi ,  elle  doit  être  cxpre»* 
sèment  stipulée.  La  solidarité  légale  existe  surtout  en 
matière  de  quasi-délits,  de  délits  et  de  crimes.  Ùobliga- 
tion  imposée  à  chacun  de  réparer  le  domust^  qa*il  a 
causé  par  son  fait,  s'étend  à  tous  ceux  qui  ont  pris  pan 
au  fait  dommageable;  tous  sont  tenus  à  cette  rcparatiou 
au  même  titre  et  pour  la  totalité,  parce  que  le  fait  est  in- 
divisible relativement  à  celui  qui  a  souffert.  Tous  ies  in- 
dividus condamnés  pour  un  même  crime  ou  un  même 
délit  sont  tenus  solidairement  des  amendes,  des  restitu- 
tions, des  dommages-intérêts  et  des  frais  ^ode  pénal, 
art.  55  ).  La  condamnation  aux  frais  est  prononcée  dani 
toutes  les  procédures  solidairement  contre  tous  les  au- 
teurs et  complices  du  même  fait  et  contre  les  personoet 


VT 


SOL 


16S3 


SOM 


civilement  responsables  du  délit.  V,  Rodière,  D9  la  «ol»- 
âjQwxié  Bi  de  VxndmsibiliU,  1852,  in-8<». 

SOLÏDEO»  V.  Calotte. 

SOLTDOS ,  monnaie.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d'ffhtoire. 

SOLIER,  vieux  mot  qui  parait  avoir  désigné  un  appai^ 
tement  supérieur  dans  une  maison. 

SOLILOQUE  (du  latin  solus^  seul,  et  loqui,  parler), 
discours  d*un  homme  qui  s'entretient  avec  lui-même.  Le 
mot  est  synonyme  de  Monologue,  S^  Augustin  a  composé, 
sous  le  nom  de  Soliloques ,  un  traité  qui  a  été  traduit  en 
français  par  Pélissier,  1853. 

SOLIN,  en  termes  de  Construction,  se  dit  r  1<>  de  chacun 
des  intervalles  qui  se  trouvent  entre  les  solives;  2<^  du 
pl&tre  qu'on  met  sur  la  poutre  pour  la  séparer  des  so- 
lives; 3<>  de  Tenduit  de  plâtre  fait  le  long  d'un  pignon 
pour  y  joindre  et  retenir  les  premières  tuiles. 

SOLITAIRE ,  espèce  de  jeu  de  patience  que  l'on  joue 
seul.  C'est  une  tablette  de  bois  percée  de  37  trous,  dans 
lesquels  on  introduit  des  fiches  en  os  ou  en  ivoire.  On 
enlève  à  volonté  une  des  fiches,  puis  on  prend  à  ce  jeu 
de  la  même  manière  qu'à  celui  des  Dames.  11  faut  qu'il 
ne  reste  en  définitive  qu'une  seule  fiche  sur  la  tablette  ; 
s'il  y  en  a  plusieurs  qui,  se  trouvant  isolées,  ne  peuvent 
plus  se  prendre  réciproquement ,  la  partie  est  perdue. 

SOLIUM.  V.  ce  mot  duis  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d^ Histoire. 

SOLIVE,  pièce  de  charpente  qui  sert  à  former  un  plan- 
cher, et  qui  porte  sur  les  murs  ou  sur  les  poutres.  On 
nomme  solive  de  brin,  celle  qui  est  de  toute  la  longueur 
d'un  arbre  équarri  ;  solive  de  sciage^  celle  qui  est  débitée 
dans  un  gros  arbre;  solive  passante,  celle  qui  fait  la  lar- 
geur d'un  plancher  sous  poutre;  solives  d'enchevêtrure, 
les  deux  plus  fortes  solives  d'un  plancher,  cpii  servent  à 
porter  le  chevêtre,  —  et  les  plus  courtes  solives  qui  sont 
assemblées  dans  le  chevêtre;  solive  boiteuse,  celle  dont 
une  des  extrémités  est  scellée  dans  le  mur,  et  l'autre  as- 
semblée dans  un  chevêtre;  solive  de  remplissage,  celle 
qui  est  placée  entre  d'autres  solives  pour  remplir  les  in- 
tervalles; solive  en  empanon,  une  solive  assemblée  en 
biais  sous  un  linçoir. 

SOLLERETS,  nom  donné,  à  la  fin  du  xv«  siècle,  à  des 
chaussures  arrondies  du  bout,  suivant  la  forme  du  pied. 

SOLMISATION,  action  de  solmier,  verbe  qui  s'em- 
ployait autrefois  pour  dire  solfier.  Le  mot  vient  de  ce 
que  l'échelle  diatonique  sur  laquelle  était  basé  ce  genre 
a*étude  commençait  par  sol,  et  que  les  notes  sol  et  mi 
constituaient  les  deux  extrêmes  du  système  des  hexa- 
cordes  adopté  primitivement  par  la  musique  moderne. 
Solfier,  c'est  chanter  en  prononçant  les  syllabes  qui 
servent  de  dénomination  aux  notes.  Ces  syllabes  sont 
celles  de  la  gamme  de  Gui  d'Arezzo,  ut ,  ré,  mi,  fa,  sol, 
la,  auxquelles  on  ajouta  plus  tard  le  si.  Nous  n'avons 
aucune  syllabe  usitée  pour  exprimer  en  solfiant  les  demi- 
tons  de  réchelle  :  l'usage  a  repoussé  toutes  les  inno- 
vations qui  ont  été  tentées  pour  remédier  à  cette  imper- 
fection. Les  anciens  Grecs  avaient  pour  solfier  <}uatre 
syllabes  ou  dénominations  de  notes,  qu'ils  répétaient  à 
chaque  tétracorde ,  comme  nous  en  répétons  sept  à 
chaque  octave  :  ces  syllabes  étaient,  du  grave  à  l'aigu, 
té,  tè,  ta,  ta.  V.  BoBiSATio.  B. 

SOLO,  mot  italien  francisé,  par  lequel  on  désigne  un 
morceau  de  musique  joué  par  un  seul  instrument  on 
chanté  par  une  seule  voix,  avec  ou  sans  accompagne- 
ment. Oïl  l'applique  aussi  à  l'artiste  qui,  dans  un  or- 
chestre, exécute  les  solos  écrits  pour  son  instrument  :  un 
violon  solo,  un  violoncelle  solo,  etc..  B. 

SOLSTICES  (du  latin  solis  statto,  arrêt  du  soleil), 
points  de  l'écliptique  situés  entre  les  équinoxes  et  dans 
lesquels  se  trouve  le  soleil  lorsqu'il  est  le  plus  éloigné  de 
l'équateur.  Ils  ont  été  ainsi  appelés,  parce  que  le  soleil 
semble  y  être  stationnaire  pendant  quelques  jours.  Le 
solstice  arrive  deux  fois  l'an  :  le  20  ou  21  juin ,  jour  au- 
quel le  soleil,  après  s'être  approché  du  pôle  boréial ,  s'ar- 
rête à  l'entrée  du  signe  du  Cancer,  est  le  solstice  dété,  le 
jour  le  plus  long;  le  20  ou  21  décembre,  où,  après  s'être 
approché  du  pôle  austral ,  il  s'arrête  à  l'entrée  du  Capri- 
corne, est  le  solstice  d'hiver,  le  jour  le  plus  court.  Les 
cercles  parallèles  à  l'équateur  que  le  soleil  semble  dé- 
crire aux  époques  des  solstices  ont  reçu  le  nom  de  tro» 
piques^  Le  grand  cercle  qui  passe  par  les  pôles  et  par  les 
points  solsticiaux  s'appelle  le  eolure  des  solstices. 

SOLVABILITÉ,  état  de  celui  qui  est  solvable,  c-àrd. 
qoi  peut  payer,  qui  peut  répondre  d'une  dett«.  La  solva- 
bilité d'une  caution  ne  s'estime  qu'eu  égard  à  ses  pro- 
priétés foncières,  excepté  en  matière  de  commerce,  oa 


bien  lorsque  la  dette  est  modique  (Code  Napoléon, 
art.  2019). 

SOMAULIS  (Idiome  des),  un  des  idiomes  africains. 
On  y  remarque,  dans  le  pronom  et  dans  les  terminaisons 
du  verbe,  la  trace  de  l'influence  sémitique.  Il  y  a  deux 
sortes  do  pronoms,  les  séparés  et  les  préfixes.  Le  pronom 
possessif  est  indiqué  par  un  suffixe.  L'article  se  place  en 
suffixe,  et  il  existe  une  véritable  déclinaison  s'effectuant  à 
l'aide  de  propositions.  Les  deux  genres  sont  nettement 
distingués,  et  on  les  attribue,  même  arbitrairement ,  aux 
objets  inanimés.  V.  Rigby,  An  ouUine  ofthe  somauli  lan^ 
guage,  dans  les  Transactions  de  la  Société  géographique 
de  Bombay,  1850. 

SOMBRER,  en  termes  de  Marine,  couler  bas  sous 
voiles  par  l'action  d'un  coup  de  vent.  Le  mot  vient  de 
l'espagnol  sombrero  (chapeau),  parce  qu'on  s'abîme 
dans  les  flots,  le  vaisseau  sur  la  tête  en  gidse  de  chapeau. 

SOMBRERO,  chapeau  à  bords  très-larges  dont  on  se 
sert  en  Espagne  pour  se  garantir  du  soleil.  Il  est  ainsi 
nommé  de  ce  qu'il  assombrit  le  visage. 

SOMMAGE ,  obligation  féodale  de  fournir  des  chevaux 
et  des  voitures  pour  le  transport  des  denrées  ou  des  meu- 
bles du  seigneur. 

SOMMAIRE,  abrégé  contenant  en  peu  de  mots  la 
somme  ou  la  substance  d'un  chapitre,  d'un  traité,  d'un 
ouvrage. 

SOMMAIRES  (  Causes  ou  Matières  ).  V.  Matières  som- 
maires. 

SOMMATION,  action  de  sommer,  c.-à-d.  d'enjoindre  à 
quelqu'un,  suivant  certaines  formes  établies,  qu'il  ait  à 
faire  telle  ou  telle  chose;  sinon,  qu'on  l'y  contraindra. 
Un  général ,  avant  de  donner  l'assaut  à  une  place,  lui  fait 
sommation  de  se  rendre.  Lorsqu'il  se  forme  des  attrou- 
pements sur  la  voie  publique ,  l'autorité  doit  faire  trois 
sommations  avant  de  les  disperser  par  la  force.  —  En 
Droit  ciTil ,  Som^nation  se  dit  des  actes  par  écrit  conte- 
nant une  sommation  faite  en  justice.  Les  avoués  font  des 
sommations  de  donner  des  copies  de  pièces,  de  fournir 
des  défenses,  de  venir  plaider,  etc.  Les  huissiers  font  des 
sommations  de  payer,  de  faire  des  ouvrages,  d'être  pré- 
sents à  telle  opération.  Dans  certains  cas,  le  créancier 
doit  faire  sommation  à  son  débiteur  pour  le  mettre  en 
demeure  (Code  Napoléon,  art.  1139).  Dans  les  offres  de 
payement,  la  sommation  doit  précéder  la  consignation 
(art.l259etl2()4). 

SOMMATION  RESPEGTDEOSE,  synonymo  à* Acte  respectueux. 
V,  Mahiagb. 

SOMME  (du  latin  stêmma),  titre  de  certains  ouvrages 

3ui  traitent  en  abrégé  de  toutes  les  parties  d'une  science, 
'une  doctrine.  Le  plus  célébra  est  la  Somme  de  S' Tho- 
mas d'Aquin ,  sorte  d'encyclopédie  de  théologie  et  de  mé- 
taphysique. La  Somme  rurale  de  Jean  Bouthillier  est  un 
traite  de  Droit  et  de  Pratique  à  l'usage  du  parlement  de 
Paris. 

SOMMEIL.  Après  un  état  de  veille  plus  ou  moins  long, 
l'homme  éprouve  un  sentiment  de  fatigue,  les  mouvements 
deviennent  plus  difficiles,  l'intelligence  se  trouble,  le  be- 
soin d'un  repos  qui  répare  les  forces  perdues  se  fait  im- 
périeusement sentir,  et  l'homme  cède  au  sommeil.  Aloi*s 
les  sens  ne  fonctionnent  plus  ;  la  vue  cesse  d'abord,  puis 
le  goût,  l'odorat,  l'oufe,  et  enfin  le  tact.  Le  sommeil  est 
profond  ou  léger,  mais  il  arrive  souvent  que  plusieurs 
organes  de  la  vie  de  relation  conservent  leur  activitét 
comme  quand  on  dort  debout,  en  marchant.  Un  ou  plu- 
sieurs sens  peuvent  rester  éveillés,  le  cerveau  ressentir 
des  manières  d'être  qui  se  développent;  l'intelligence 
s'exerce  également  (F.  Révb,  Songe,  Somrambuusmb^. 
L'esprit  ne  perd  pas  entièrement  son  activité,  mais  la 
volonté  se  repose.  V.  Aristote,  Du  sommeil  et  de  la  veille; 
Formey,  Essai  sur  les  songes,  dans  les  Mémoires  de 
V Académie  de  Berlin,  1746;  Cabanis,  10"  Mémoire,  Du 
sommeil;  Maine  de  Biran,  Considérations  sur  le  som- 
meil; Jouffroy,  Becherches  sur  le  sommeil,  dans  ses  Mé- 
langes; Macnish,  Philosophy  of  sleep,  Glasgow,  1830; 
Charma,  Du  sommeil,  1851.  R. 

SOMMEIL  (Le)i  divinité  allégorique.  V.  notre  Diction^ 
noire  de  Biographie  et  d^Histoire. 

SOMMELIER  (de  somme  argent,  capital),  celui  qui, 
dans  une  Communauté  ou  dans  une  grande  maison,  sur- 
veille le  linge,  la  vaisselle,  le  pain,  le  vin,  etc.;  —  dans 
un  sens  plus  restreint,  celui  qui  a  la  charge  de  soigner 
le  vin. 

SOMMIER,  en  termes  de  Construction,  première  pierre 
qui  pose  sur  les  pieds-droits  on  les  colonnes,  quand  on 
forme  un  arc,  une  plate-bande  ou  quelque  couverturB 
carrée;  —  cxosse  pièce  de  bois  qui  porte  sur  deux  pieds» 


y 


SON 


1684 


SON 


droiti  de  maçonnerie,  et  sert  de  linteau  à  une  porte  ou 
à  une  croisée;  —  pièce  de  bois  à  laquelle  est  suspendue 
une  cloche,  et  dont  les  extrémités  sont  garnies  de  touril- 
lons ferrés  qui  en  facilitent  le  jeu. 

SOMMIER ,  en  termes  de  Comptabilité,  gros  registre  où 
les  commis  inscriyent  les  twnmat  qu'ils  reçoivent. 

SOMMIER.  C'est,  dans  Torgue,  la  pièce  sur  laquelle  sont 
implantés  les  tuyaux.  Le  sommier,  placé  au-dessus  d*un 
réserroir  d'air  nommé  laye^  reçoit  Pair  qui  lui  est  trans- 
mis par  la  soufflerie,  et  le  distribue  dans  les  différents 
tuyaux  an  moyen  de  registres  (  V,  ce  mot)  que  Torganiste 
fait  mouvoir  à  volonté.  En  pressant  les  touches  du  cla- 
vier qui  correspondent  aux  soupapes  des  sommiers,  les 
tuyaux  parlent  chacun  selon  sa  nature  et  son  intona- 
tion. Il  y  ft  dans  tout  orgue  autant  de  sommiers  qu'il  y  a 
de  claviers.  F.  C. 

SOMBIISTB,  officier  de  la  chancellerie  romaine  dont 
les  fonctions  sont  de  faire  faire  les  minutes,  et  de  les 
plomber. 

SOMNAMBULISME  (du  latin  somnus,  sommeil,  et 
ambiUare,  marcher  ),  état  d'un  homme  endormi  et  qui 
marche,  qui  agit  comme  s'il  était  éveillé  ;  c'est  le  cas  du 
somnambulisme  naturel.  Dans  le  rêve  ordinaire,  le  dor- 
meur reste  couché;  dans  le  somnambulisme,  il  se  lève, 
il  exécute  tous  les  mouvements  volontaires  de  l'état  de 
veille.  La  mémoire  retrace  au  somnambule,  et  dans  un 
enchaînement  parfait,  ses  idées,  ses  affections,  et  l'ima- 

S 'nation  lui  représente  avec  force  et  clarté  les  objets  qui 
i  sont  connus,  et  dans  des  rapports  perçus  durant  la 
veille.  Il  est  probable  que  l'organe  de  la  vue  n'est  pas  en- 
tièrement annulé  dans  le  somnambulisme;  mais  le  sens 
le  plus  éveillé  est  celui  du  toucher.  C'est  par  lui  surtout 
que  le  dormeur  peut  exécuter  ses  promenades  périlleuses 
sur  les  toits,  au  bord  des  fleuves;  comme  il  ne  les  fait 
que  dans  les  lieux  qu'il  connaît ,  la  mémoire  lui  est  d'un 
grand  secours.  C'est  encore  au  toucher  que  le  somnam- 
bule doit  de  pouvoir  écrire,  et  choisir,  parmi  les  objets 
les  plus  ténus,  ceux  au'il  destine  aux  ouvrages  les  plus 
délicats.  On  a  prétendu  que  le  somnambule  ne  conserve 
aucun  souvenir  des  faits  qui  constituent  son  état  pen- 
dant le  sommeil  ;  mais  il  existe  des  exemples  de  som- 
nambules qui  conservaient  quelque  souvenir  de  cet  état; 
le  valet  de  Gassendi  était  dans  ce  cas.  Le  somnambulisme 
résulte  d'une  excitation  du  système  nerveux  qui  agit  sur 
le  cerveau.  ' 

On  rattache  an  somnambulisme  naturel  un  état  avec 
lequel  il  a  de  Tanaloçie,  et  qu'on  désigne  sous  le  nom  de 
somnambulisme  artificiel,  de  magnétisme  animcU.  Le 
corps  et  ses  organes,  ainsi  que  l'&me,  sont  amenés  à  cet 
état  artificiellement,  par  les  procédés  du  magnétiseur.  11 
en  résulte  une  grande  insensibilité  externe,  et  pour  l'in- 
telligence une  lucidité  merveilleuse.  Le  sujet  qui  est 
amené  au  somnambulisme  magnétique  peut  goûter  des 
saveurs  par  le  creux  de  l'estomac,  percevoir  les  objets, 
lire  à  travers  les  corps  les  plus  opaques  et  même  à  des 
distances  sans  bornes.  Il  est  difficile  de  savoir  ce  qu'il  y 
a  réellement  de  vrai  ou  de  faux  dans  ces  prétentions,  en- 
tachées pour  le  moins  d'exagération.  Les  faits  proclamés 
par  les  parti^^ns  du  somnambulisme  artificiel  sont  ren- 
dus suspects  par  tant  de  supercherie,  et  par  des  échecs  si 
notoires,  que  le  doute  est  piermis  pour  une  certaine  caté- 
gorie de  phénomènes  extiturdinaires  ;  ceux  qu'on  peut 
admettre  rentrent  dans  la  classe  des  faits  physiologiques 
et  psychologiques  ordinaires.  V.  Magn^smb  animal.  R. 

SOMPTUAIRES  (Lois).  F.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire. 

SON,  mouvement  de  vibration  ou  d'ondulation  im- 
primé à  un  corps  sonore  ou  élastique,  communiqué  en- 
suite par  ce  corps  à  l'air  qui  l'environne,  et  transmis 
enfin  par  VsXr  à  l'organe  de  l'ouïe,  qui  en  reçoit  l'impres- 
sion. Un  son  est  plus  ou  moins  grave  ou  cûgu,  suivant  le 
nombre  des  ondes  qu'il  produit  en  un  certain  temps  dans 
l'air.  Vintensité  du  son  dépend  des  compressions  plus  ou 
moins  fortes  et  des  vitesses  plus  ou  moins  grandes  que 
l'air  a  reçues  du  corps  sonore  et  qui  se  transmettent  jus- 
qu'à l'ouie.  Le  timbre  des  sons  dépend  de  l'ordre  dans  le- 
<^el  se  succèdent  les  vitesses  et  les  changements  de  den- 
sité dans  les  différentes  tranches  d'air  qui  sont  comprises 
entre  les  deux  extrémités  de  l'onde. 

Il  y  a  une  infinité  d'intonations  possibles  entre  le  son 
le  plus  aigu  et  le  son  le  plus  grave.  Chacune  de  ces  into- 
nations étant  un  son  distinct,  leur  nomenclature  eût  été 
un  embarras  pour  la  mémoire  :  mais,  au  delà  d'un  cer- 
tain nombre  de  sons  rangés  dans  un  ordre  ascendant  ou 
descendant,  les  autres  se  reproduisent  dans  le  môme 
ordre,  et  n'ont  avec  les  premiers  d'autre  différence  que 


celle  qui  résulte  d'une  voix  algue  à  une  voix  grave  qoS 
s'accordent  ensemble  ;  on  a  été  amené  ainsi  à  reconnaître 
que,  parmi  les  sons,  les  uns  ne  sont  que  la  répétition  des 
autres  à  une  certaine  distance,  et  c'est  cette  distance  qui 
s'appelle  octave.  Pour  nommer  les  sons,  on  n'a  donc  en 
besoin  que  de  7  lettres.  A,  B,  C,  D,  E,  F,  G,  ou  de  7  syl- 
labes, ut,  ré,  mi,  fa,  sol,  la,  si.  La  série  de  ces  lettres  on 
de  ces  syllabes  est  la  gamme.  Après  avoir  ainsi  désigné 
les  sons,  on  s'aperçut  qu'il  y  en  avait  d'intermédiaires, 
que  l'oreille  appréciait  parfaitement;  qu^entre  les  sons 
désigna  par  ut  et  ré,  par  exemple,  il  y  en  avait  un  troi- 
sième également  éloigné  de  l'un  et  de  l'autre.  Pour  ne 
pas  multiplier  les  noms,  on  supposa  que  ce  son  est  quel- 
quefois ut  élevé,  quelauefois  ri  abaissé;  on  nomma  l'un 
ut  dièse,  l'autre  ré  bémol,  et  l'on  fit  de  même  pour  les 
antres  sons  intermédiaires  en  conservant  au  mot  dièse  le 
sens  d^élevé,  au  mot  bémol  le  sens  d'abaissé.  La  succes- 
sion des  sons  se  nomme  mélodie  {V.  ce  mot)  ;  de  leur 
simultanéité  résulte  Vharm(mi9  (V.  ce  mot).  Le  rapport 
d'un  son  à  un  autre  est  un  intervcdle  {V,  ce  mot).  La 
musique  ne  s'est  pas  bornée  à  nommer  les  sons,  elle 
les  écrit,  elle  en  détermine  l'intonation  et  la  durée  :  l'en- 
semble des  signes  employés  à  cet  effet  constitue  la  nota- 
tion mtjuicale  (  V,  ce  mot).  —  Les  sons  appréciables  sont 
ceux  dont  on  peut  trouver  ou  sentir  l'unisson  et  calculer 
les  intervalles.  On  compte  8  octaves  et  demie,  depuis  le 
tuyau  de  trente-deux  pieds  de  l'orgue  jusqu'au  son  le  plus 
aigu  de  cet  instrument.  —  Il  y  a  aussi  un  degré  de  force 
au  delà  duquel  le  son  ne  peut  plus  s'apprécier  :  on  ne 
saurait,  par  exemple,  apprécier  le  son  d'une  grosse  cloche 
dans  le  clocher  même.  B. 

SONS  BOUCHÉS.   V,  COR. 

sons  HARMONIQUES.    V,  HARMONIQUES. 

SONATE  fdu  latin  sonore,  jouer  d'un  instrument), 
toute  pièce  de  musique  écrite  pour  un  instrument.  Elle 
se  compose  ordinairement  d'un  allegro,  d'un  adagio ,  et 
d'un  presto  ou  rondo;  quelquefois  on  y  joint  un  menuet 
ou  scherzo,  Sébastien  Bach  a  fait  des  sonates  à  4  et 
même  à  5  morceaux.  Les  Italiens  distinguaient  autrefois 
la  sonate  de  chambre  et  la  son€Ue  â^ église,  celle-ci  de- 
mandant un  style  et  une  harmonie  plus  travaillée  que 
celle-là.  Quand  la  sonate  est  accompagnée  par  un  ou 
deux  instruments ,  elle  prend  le  nom  de  duo  ou  de  trio, 
La  sonate  est  une  étude,  un  exercice,  et  presque  toujours 
très-difficile  :  elle  demande  à  être  jouée  avec  précision, 
sans  broderies  ni  traits  brillants.  Au  xvin*  siècle,  les  com- 
positeurs écrivirent  un  grand  nombre  de  sonates  ;  aujour- 
d'hui c'est  un  genre  abandonné  pour  les  airs  vanéf  et 
les  fantaisies.  Les  meilleures  sonates  de  piano  ont  été 
faites  par  Ch.-Ph.-Em.  Bach,  Haydn,  Mozart,  Beethoven, 
Clementi,  Dussek,  Steibelt,  Pleyel,  Adam,  Cramer,  Kalk- 
brenner,  Moschelôs,  Field,  Hummel;  celles  de  Sébastien 
Bach  pour  clavecin  et  violon  sont  des  chefs-d'œuvre. 
Gorellî,  Tartini,  Locatelli,  Nardini,  Leclair,  Viotti,  Baillot, 
Kreutzer,  Rode,  en  ont  composé  pour  le  piano,  Francis- 
chello  et  Duport  pour  le  violoncelle,  Krumpholtz  pour  la 
harpe.  On  en  fait  beaucoup  moins  pour  les  instruments  à 
vent  :  on  peut  citer  toutefois  celles  de  Krommer,  de 
Reicha,  de  Devienne,  de  Berbiguier,  etc.  B. 

SONGE  (  du  latin  somnium)^  mot  employé  souvent 
comme  synonyme  de  Rêve  {V.  ce  mot)^  et  qui  se  dit  par- 
ticulièrement d'un  rêve  dont  les  idées  sont  bien  suivies, 
qui  a  toute  l'apparence  de  la  réalité,  et  que  l'on  se  rap- 
pelle dans  son  entier.  V.  Songes,  dans  notre  Dictionnah'e 
de  Biographie  et  d* Histoire. 

SONHO  (Idiome),  dialecte  de  l'idiome  congo  (F.  ce 
mot).  Le  P.  Cannecattim  en  a  publié  un  Dictionnaire,  à 
la  suite  de  sa  Grammaire  de  la  langue  abounda. 

SONNERIE ,  son  de  plusieurs  cloches  qui  se  font  en- 
tendre soit  ensemble,  soit  successivement;  —^totalité  des 
cloches  d'une  église.  V.  Carillon. 

sonnerie,  air  de  trompettes  ou  de  clairons  indiquant 
un  service  de  cavalerie.  Il  y  a  2S  sonneries;  les  princi- 
pales sont  le  réveil,  la  générale,  le  bout^^seUe,  Vappel,  la 
retraite^  la  charge^  etc. 

SONNET,  petite  pièce  de  vers  composée  de  deux  qua- 
trains, sur  deux  rimes,  et  de  deux  tercets,  sur  d'autres 
rimes.  Boileau,  dans  son  Art  poétique,  en  a  tracé  les 
règles.  Il  parait  certain  que  le  sonnet  remonte  au  temps 
des  Trouvères,  bien  que  Pétrarque  passe  pour  en  être 
l'inventeur  :  mais  le  sonnet,  à  cette  époque,  n'était  qu'une 
pièce  de  vers  en  stances  ou  coblas,  qu'on  accompagnait 
au  son  d'un  instrument.  Le  véritable  sonnet,  dont  la 
forme  poétique  est  due  peut-être  à  Tinfluence  des  Arabes, 
n'apparaît  en  Sicile  qu'au  xiii*  siècle  :  ce  n'est  qu'au  xvi* 
que  nos  poètes,  Mellin  de  Saint-Gelais,  Joachim  Du  Bel- 


SOP  11 

btjr  M  Pontas  deTbtut,  l'empruntèrent  aux  Italiens.  La 
règle  S  iacjuelle  ont  toujours  cru  devoir  s'astreindre  le» 
pMtes  Italiens,  de  terminer  le  sonnet  par  un  trait  bril- 
lant, est  peiit-etro  une  des  caase»  de  ces  conetUi  qu'on 
leur  reproche.  En  France,  Is  sonnet  ne  fut  dans  toute  sa 
Togue  fpie  sous  I/iuis  Xlll  et  au  commence  ment  du  rèane 
de  Louis  XJV.  Les  deux  factions  qui,  sous  la  nom  i'Ura- 
nisiBïet  de  Jobelms,  divisèrent,  en  1(151,  la  tour  et  Ib 
Tiile,  à  i'occaaioQ  dos  sonnais  asseï  médiocres  da  Voitura 
«  de  Banaerade,  montrent  quelle  importance  on  atta- 
cliait  alors  il  ce  genre  de  poésie.  Desbarreaui,  Malierille, 
Hesnault,  s'y  diaiiaguërent.  Cest  l'époque  enflo  où  Boi- 
lesu  proclamait  le  sonnet  sans  défaut  égal  à  un  long 
poème.  I^  sonnet  da  Miionthropa  Tut  la  premiire  pro- 
testation i  et,  dès  ce  moment,  la  rogne  du  sonnet  déclina 
do  plus  en  plus  Jusqu'au  xvin*  siècle,  oii  U  fut  totale- 
ment abandonae.  Quelques-uns  da  nos  contemporains 
ont  essayé  de  le  rajeunir  :  H.  Sainte-Beuve,  entre  tatres, 
a  pris  chaleuraiiaement  M  défense  dans  un  sonnet  où 
sont  isppelâs  les  ooma  de  tous  ceux  qui  s'y  sont  distin-' 
gaés;  et  c'est  ta  moUt  qui  nous  délarmineà  lecjter: 


:  nm  ID  Thh  va  te 


HtltoD,  cbaDtanE  lei  t1 


S  critiqua  niDqun 
fil  ta  grand  Sbaki; 
IX  qoB  P^trarqns  ■ 


SONNETTE,  machine  dont  en  se  sert  pour  enftincer  des 
pilotis  et  des  pieux.  Elle  parte  le  mouton,  masse  dabois, 
de  Ter  ou  de  fonte,  qu'elle  élère  en  l'air  et  laisse  ensuite 
retomber.  La  force  du  coup  porta  aplomb  sur  la  tète 
des  pilotis.  Oa  distingue  deui  sortes  de  sonnettes  :  !<■  la 
lonnettt  d  tiraude,  composée  d'un  mouton  glissant  dans 
deux  coulisses  ou  montants  verticaui,  et  suspendu  i.  une 
poulie  placée  au  sommet  des  montants  ;  la  corda  se  di- 
vise, de  l'autre  cOté  de  la  poulie,  en  un  faisceau  de 
cordes,  sur  lesquelles  des  ouvriers  tirent  et  qu'ils  IIL- 
chent  ensemble;  2°  ]^ son/ttUt  d diclie ,  plos  puissante 
que  la  précédente,  est  manœuvrée  par  un  cheval  placé 
dans  un  manège,  qui  par  correspondance  fait  marcher  un 
treuil  autonr  duquel  s'enroule  la  corde  du  mouton;  la 
tête  du  mouton  est  saisie  par  des  pinces  en  X,  qui,  ar- 
rivées d  1»  hauteur  voulue,  s'ençagynt  dans  la  déclic  ou 
espèce  d'entonnoir  renversé  qui  les  force  k  s'ouvrir  et 
i.  lâcher  le  mouton  ;  d'autres  fois  le  déclic  porte  sur  1« 
treuil,  y.  au  Supplémtnt.  E.  L. 

SONOMETRE  fdu  latin  loniu,  son,  et  du  grec  mitron, 
mesure),  appareil  composé  de  plusieurs  cordes  paral- 
lèles, supportées  par  des  chevalaU  mobiles.  On  s'en  sert 
pour  trouver  les  rapports  des  Intervalles  harmoniques. 

50PHA.  y.  Sop*. 


temple  A  la  Sagesse  éternelle,  k  Saints  Sophi».  Cet  édi- 
fice, où  l'on  avait  entassé  les  marbres  les  plus  rares  et 
les  matières  les  plus  précieuses ,  fut  agrandi  sous  le 
règne  de  Constance,  mais  devint  la  proie  des  flammes 
dans  une  émeute  soulevée  par  les  Ariens  contre  S'  Jean 
ChrreoslOQie  en  404,  sous  le  régne  d'Arcadius.  Théo- 
dose Il  le  Ht  réparer  en  415;  mais,  en  b32,  un  nouvel 
incendie,  allumé  par  les  factions  du  cirque,  le  consuma 
complètement.  Justinien  ordonna  aussitôt  la  construc- 
tion d'une  nouvelle  basilique,  dont  !aa  travaux,  dirigés 
par  Anthémius  de  Tralies  et  Isidore  de  Hitet,  employè- 
rent 10,000  ouvriers.  Quand  le  monument  fut  achevé, 
l'empereur,  pensant  au  Temple  de  Jérusalem,  s'écria 
avec  orgueil  :  •  Salomon,  Je  t'ai  vaincu  i  ■  La  forme  pri- 
mitive de  S'*-Sophie  était  celle  d'une  croix  grecque  sur- 
montée d'une  coupole  sphérlque  :  un  tremblement  de 
terra  ayant  renversé  le  dûme  en  558,  l'architecte  chargé 
de  le  reconstruire  Qt  la  voûte  surbaissée  et  elliptique,  de 
sphérique  qu'elle  était,  et,  pour  lui  donner  plus  de  soli- 
dité, il  plaça  entre  les  gra[:ds  piliers  deux  rangs  super- 
fmiia  de  colonnes  de  granit  réunies  par  des  arcades. 
(Test  en  cet  étal  que  les  Turcs  trouvèrent  la  basilique 
en  1403,  époque  où  elle  fut  convertie  en  mosquée. 


S5  SOP 

I*  pian  de  S"-Soplil«  forme  prestpie  un  carrf  i  H 

mesure  83  met.  de  longueur,  sur  74  do  largeur.  Dcnx 
galeries  transversales,  longues  do  60  met.,  forment  deux 
vestibules.  Dans  la  1™,  dite  narth»x,  et  large  de  6  met., 
les  pénitents  s'arrêtaient  avec  humilité.  La  !•,  lar^e  de 
10  met.,  donne  entrée  dans  l'i'Rliae  par  9  belles  pones 
de  bronie,  ornées  de  bas-reliefs.  L'édillce,  vu  de  l'ex- 
térieur, présente  un  aspect  peu  agréable,  pa>  le  mélange 
confus  de  constructions  hétérogènes.  Cependant  l'effet 
du  dame,  appuyé  par  d'énormes  contre-forls,  est  impo- 
sant. Les  'lurcs  ont  élevé  aux  angles,  dès  les  premiers 
temps  de  leur  conquête,  quatre  grêles  minarets  iV.  la 
■   ■  était  jadis 


fig.  ci-daiimu).  L'intérieur  du 


Baitlijiu  dt  SaCnle-Soplili. 

couvert  de  peintures  et  de  fresques;  ces  œuvrea  Intéree- 
santes  ont  été  masquées  sous  un  badigeon  par  les  Turcs. 
Le  pavé,  en  mosaïque  de  vert  anticiue  et  de  porphyre, 
est  caché  par  des  tapis,  pour  que  le  bruit  des  pas  du 
passant  ou  du  visiteur  ne  trounle  pas  les  prières  des 
fldèles.  Les  colonnes  de  porphyre,  de  sranit  égyptien  et 
d'autres  marbres  précieux,  sont  fort  belles;  mais  elles 
ont  été  surmontées  de  chapiteaux  mai  assortis ,  et  la 
mélange  des  ordres  et  des  proportions  indique  que  ce 
sont  des  débris  d'autres  temples,  placés  ]k  sans  godtet 
contre  toutes  les  règles  de  l'architecture.  Sur  les  parois 
des  murs  on  volt  de  grandes  tables  où  sont  écriis,  en 
caractères  arabes,  les  noms  de  Dieu,  de  Mahomet,  et  des 
quatre  premiers  califes,  Abou-Beitr,  Omar,  Othman,  et 
Ali.  A  la  hauteur  de  la  naissance  de  !a  voûte,  au-dessus 
des  bas  eûtes,  régnent  de  spacieuses  pleriea,  aniquellee 
on  arrive  par  un  chemin  voûté  et  qui  s'élève  en  spirale; 
elles  étaient  autrefois  réservées  aux  femmes,  qui,  d'après 
le  rit  grec,  devaient  être  séparées  des  hommes  i  l'inté- 
rieur des  églises.  La  voûte,  dorée  i  profusion,  est  com- 
posée de  petits  morceaux  de  pierre  et  de  verre  colorés, 
qui  forment  des  groupes  de  fleurs  ou  des  dgares  géomé- 
triques. La  croix  grecque  est  couverte  d'une  coupole  de 
34  met.  de  diamètre,  reposant  sur  un  tambour  court, 
percé  da  34  fenêtres  petites  et  basses ,  qui  éclairent 
l'église.  C'est  le  premier  modèle  des  coupoles  soutenues 
à  une  grande  hauteur  sur  des  arcs  et  des  pendentifs.  La 
tentative  fut  d'autant  plus  hardie,  que  ta  courbe  du  dama 
est  très- médiocre,  et  que  la  profondeur  du  dbme  n'égale 
pas  un  sixième  de  son  diamètre.  Des  groupes  de  fleurs 
parfaitement  peints  ornent  cette  coupole  ;  aux  quatre 
angles  sont  quatre  Archanges,  avec  leurs  noms  inscrits 
en  coloasales  lettres  turques  :  un  grand  nombre  de  lampes 
en  verres  de  diverses  couleurs,  et  mêlées  de  globes  de 
cristal,  d'œufs  d'autruche,  et  d'ornements  d'or  et  d'argent 
ntiochés  k  des  cercles,  sont  suspendaes  au  dùme.  Une 
large  abside,  (fui  occupe  le  fond  de  la  nef  principale. 


SOP 


1656 


SOT 


Hqae  ;  on  y  conseire  aujourd'hui  rexemplaire  \>riginal 
in  Koran.  Près  de  Tabside  est  le  trône  du  sultan,  en 
marbre  blanc  uni;  du  côté  opposé  est  une  chaire  en 
pierre,  où  le  mufti  monte  tous  les  vendredis  pour  lire  le 
Koran  au  peuple.  L'édifice  ne  renferme  aucuns  sièges 
pour  les  fidèles'.  Quatre  salles  irrégulières,  pratiquées 
extérieurement  à  la  rencontre  des  bras  de  la  croix  grec- 
que ,  ont  donné  au  plan  de  S^-Sophie  la  forme  carrée 
quMI  présente  actuellement.  B. 

SOPHIS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  <r Histoire.  , 

SOPHISME,  faux  raisonnement  qui  provient  de  la 
mauvaise  foi.  Il  se  distingue  du  Paralogisme  {V,  ce  mot)^ 
qui  est  Teflet  de  la  faiblesse  de  Tintelligence.  Le  so- 
phisme suppose  l'intention  de  tromper  ;  c'est  un  argu- 
ment faux,  qui,  revêtu  d'une  forme  captieuse,  est  destiné 
à  exploiter  notre  faiblesse,  nos  préjugés,  notre  igno- 
rance, au  profit  de  la  passion,  du  mensonge  et  de  la  sub- 
tilité. Les  sophismes  sont  innombrables  :  toutes  nos  opi- 
nions, toutes  nos  erreurs  peuvent  devenir  des  sophismes. 
Aristote  les  divise  en  sophismes  de  mots  ou  de  grammaire 
et  sophismes  de  raisonneiïient  ou  de  logique.  Les  pre- 
miers affectent  le  sens  des  termes;  les  seconds  sont  des 
vices  de  raisonnement,  et  sont  relatifs,  soit  à  l'induc- 
tion, soit  à  la  déduction.  Les  principaux  sophismes  de 
mots  sont  :  Véquivoquet  le  sophisme  de  composition^  le 
sophisme  de  division.  Les  sophismes  d'induction  sont  : 
le  sophisme  de  la  cause,  le  sophisme  de  Vaccident,  le 
dénombrement  imparfait.  Les  sophismes  de  déduction 
sont  :  l'ignorance  du  sujets  la  pétition  de  principe,  le 
cercle  vicietix  {V.  ces  mots).  H.  D. 

SOPHISTES  (du  grec  sophos,  sage).  Le  nom  de  So- 
phiste se  prit  d'abord  en  bonne  part,  ensuite  il  devint 
une  sorte  de  flétrissure.  A  peu  d'exception  près,  les  So- 
phistes étaient  des  hommes  avides  et  adroits,  qui  pré- 
tendaient tout  savoir  et  tout  enseigner.  En  Grèce,  où  la 
parole  donnait  le  crédit  et  la  puissance,  ils  gagnaient  la 
jeunesse  en  lui  enseignant  la  rhétorique,  qui  n'était  pour 
eux  que  l'art  de  fortifier' les  mauvaises  causes,  d'affaiblir 
les  bonnes,  et  de  plaider  indifEi^remment  le  pour  et  le 
contre.  Leur  procédé  consistait,  selon  Aristote,  à  com- 
battre par  des  raisonnements  captieux  la  proposition 
(établie,  à  amener  leurs  adversaires  à  avancer  une  chose 
fausse  ou  à  soutenir  un  paradoxe,  à  les  mettre  en  opposi- 
tion avec  les  règles  du  langage,  à  les  faire  tomber  dans 
des  expressions  tautologiques.  Parmi  ceux  qui  marquè- 
rent comme  philosophes,  on  cite  Gorgias  de  Léontium , 
qui  voulut  prouver:  \°  que  rien  n'existe;  2°  que,  lors 
môme  qu'une  chose  existerait,  nous  ne  pourrions  la  con- 
naître; 30  que,  lors  même  que  nous  connaîtrions  ce  qui 
existe,  nous  ne  pourrions  le  faire  connaître  aux  autres. 
Cela  revenait  à  dire  que  l'être  et  la  vérité  sont  impos- 
sibles. Gorgias  laissa  la  philosophie  pour  la  rhétorique 
comme  plus  lucrative  ;  I^otagoras,  dont  le  principe  était 
que  l'homme  est  la  mesure  de  toute  chose,  ce  qui  vou- 
lait dire  que  ce  qui  est  vrai  pour  l'un  ne  l'est  pas  pour 
l'autre,  qu'une  chose  est  et  n'est  pas  à  la  fois,  arrivait 
au  même  résultat  que  Gorgias.  On  a  prétendu  que  ces 
deux  Sophistes,  hommes  d'un  talent  réel,  n'avaient  pas 
parlé  sérieusement,  et  qu'ils  s'étaient  proposé,  dans  leurs 
doctrines,  de  faire  la  critique  des  systèmes  antérieurs, 
surtout  de  ceux  de  l'école  de  Mégare  et  d'Heraclite. 
Après  eux,  on  cite  Métrodore  de  Ciiio,  Prodicus,  Hip- 
pias,  Diagoras,  surnommé  V Athée,  Anaxarque,  Euthy- 
dème,  et  Critias,  qui  fut,  à  ce.  que  l'on  croit,  l'un  des 
trente  tyrans  d'Athènes.  I^  plupart  étaient  plus  rhé~ 
teurs  que  philosophes  :  mais  tous  avaient  en  commun  un 
esprit  de  négation  qui  distingue  les  sophistes  des  scep' 
tiques,  mais  qui  conduisait,  par  le  dérèglement  de  la 
raison,  à  méconnaître  les  vérités  les  plus  précieuses  et 
les  lois  les  plus  sacrées  de  la  morale,  soutenant,  comme 
on  le  voit  dans  le  Gorgias  de  Platon,  que  le  juste  et  le 
beau,  dans  l'ordre  naturel,  consistent  dans  le  bonheur, 
et  le  bonheur  dans  la  liberté  pour  chacun  de  s'aban- 
donner à  ses  passions.  Cependant  les  Sophistes  ne  furent 
pas  sans  utilité.  Ils  rendirent  plus  générale  la  culture  in- 
tellectuelle, l'étude  des  lettres  et  des  sciences;  par  eux  la 
philosophie  et  l'enseignement  en  général  revêtit  les 
formes  d'un  langage  clair,  élégant,  et  accessible  à  tous. 
Ils  firent  comprendre  les  dangers  d'un  dogmatisme  témé- 
raire; par  leurs  excès  mêmes  ils  préparèrent  Socrate. 
F.  la  plupart  des  dialogues  de  Platon,  et  en  particulier 
Les  Sophistes  ou  Protagoras,  le  Gorgias,  le  Premier  Hip^ 
pias,  le  Tlïéétète;  Aristote,  Des  argumentations  sophis^ 
tiques.  R. 

SOPHISTIQUE ,  mot  qui  s'entend  de  l'art  des  So- 


phistes, et  de  la  partie  de  la  Logique  qui  traite  des  so* 

phismes. 

SOPRANO ,  mot  italien  (pii  8*empIoie  pour  désigner  li 
plus  aiguë  des  voix  humaines  (F.  Voix)  et  des  partiel 
vocales  de  la  musique.  On  l'appelle  en  France  le  Dessus 
{V.  ce  mot).  Les  voix  de  soprani  sont  celles  des  femmes, 
des  enfants,  et  des  castrats  (F.  ce  mot)^  et  ces  derniers 
sont  souvent  désignés  par  le  nom  de  Sopranisles.  Un 
mezso  soprano  est  une  voix  de  femme  intermédiaire 
entre  le  soprano  et  le  contralto  (V,  ce  mot)^  et  qui  par- 
ticipe de  l'une  et  de  l'autre.  B. 

SORABE  (Idiome),  appelé  aussi  Vénède,  idiome  slave 
parlé  dans  une  partie  de  la  Lusace,  depuis  Lobau  jus- 
qu'à Labben,  et  qui  était  Jadis  répandu  entre  la  Saaie, 
l'Elbe  et  l'Oder,  dans  toute  la  contrée  occupée  par  les 
Sorbes  ou  Sorabes.  Il  est  partagé  en  deux  dialectes,  rap- 
prochés l'un  du  bohème,  l'autre  du  polonais.  Il  a  em- 
prunté à  l'allemand  beaucoup  de  mots,  l'article  et  antres 
particularités  inconnues  aux  idiomes  slaves  non  mélangés. 

SORBONIQUE,  thèse  qu'on  soutenait  autrefois  en  â>r- 
bonne  pour  être  reçu  docteur  en  théologie  :  elle  durait 
depuis  6  heures  du  matin  jusqu'à  6  heures  du  soir.  On 
appelait  Sorboniste  tout  gradué  de  la  Sorbonno. 

SOHBONNE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

SORDONE  ou  SOURDON,  instrument  à  yent  formé 
d'un  double  tube,  comme  le  basson,  et  qui  n*est  plus  en 
usage. 

SORITE  (du  grec  sôros,  monceau),  raisonnement  com- 
posé de  plusieurs  syllogismes,  enchaînés  entre  eux  de 
telle  sorte  que  l'attribut  de  la  majeure  devienne  le  sujet  de 
la  mineure,  l'attribut  de  la  mineure  le  sujet  de  la  proposi- 
tion suivante ,  et  ainsi  jusqu'à  la  dernière  proposition, 
dont  l'attribut  doit  être  combiné  avec  le  sujet  de  la  pre- 
mière. C'est  à  l'aide  du  sorite  que  les  Stoïciens  démon- 
traient que  le  sage  est  heureux  et  que  la  sagesse  suffit 
au  bonheur.  Voici  ce  raisonnement  :  «  Qui  est  sage  est 
tempérant;  qui  est  tempérant  est  constant;  qui  est  .con- 
stant est  sans  trouble;  qui  est  sans  trouble  est  sans  tris- 
tesse; qui  est  .sans  tristesse  est  heureux  :  donc  le  sage 
est  heureux,  et  la  sagesse  suffit  au  bonheur.  »  Le  sorite 
abrège  et  simplifie  tous  les  syllogismes  dont  il  est  com- 
posé; aussi  convient-il  parfaitement  aux  sciences  ma- 
thématiques, qui,  opérant  sur  une  seule  idée,  celle  de 
quantité,  peuvent  passer  rapidement  d'un  rapport  à  ud 
autre,  en  supprimant  les  propositions  intermédiaires 
dont  la  répétiuon  n'est  pas  nécessaire  à  la  clarté  de  la 
démonstration.  Leibnitz  remarque  que  les  démonstrations 
d'EucIide  ressemblent  à  des  arguments  en  forme,  en  se 
rapprochant  cependant  beaucoup  plus  du  sorite  que  du 
syllogisme  complet.  Mais  si  le  sorite  est  la  forme  la  plus 
commune  des  démonstrations  mathématiques,  il  ne  sau- 
rait être  employé  de  la  même  manière  dans  les  autres 
sciences  ;  il  demande  une  attention  soutenue  pour  saisir 
le  rapport  non  exprimé  des  propositions  entre  elles;  et, 
quand  on  opère  sur  des  idées  complexes,  comme  dans  la 
Jurisprudence  ou  la  Philosophie,  il  faudrait  une  intelli- 
gence au-dessus  de  l'humanité  pour  suivre  uo  raisonne* 
ment  en  sorites,  sans  jamais  se  laisser  abuser  par  ui 
rapport  mal  établi  entre  deux  idées,  ou  par  une  consé- 
quence mal  déduite.  H.  D. 

SORTIE,  grand  morceau  d'orgue  que  l'on  Joue  à  la  fin 
de  l'office  divin,  pendant  que  les  fidèles  se  retirent. 

SORI'ISATK),  nom  latin  que  de  vieux  théoriciens  de 
la  musique  donnent  à  un  déchant  (F.  ce  mot)  improvisé 
à  plusieurs  voix,  et  en  quelque  sorte  deviné.  En  vieux 
français,  sortisser  signifiait  deviner. 

SOTADÉEN  ou  SOTADIQUE  (  Vers),  vers  grec  et  latin, 
ainsi  appelé  d'un  certain  Sotadès  qui  l'avait  ou  inventé 
ou  plutôt  très-fréquemment  employé.  Il  parait  avoir  été 
primitivement  destiné  à  la  récitation  plutôt  qu'au  chant. 
Il  a  pour  base  le  mètre  ionique  majeur,  et  forme  propre- 
ment un  tétramètre  bracbycatalectique,  c.-à-d.  qu'il  se 
compose  de  trois  ioniques  et  d'un  trochée  final  ;  quelque- 
fois les  ioniques  sont  remplacés  par  autant  de  ditrochées; 
d'autres  fois,  et  c'est  la  forme  la  plus  usitée,  il  commenos 
par  deux  ioniques  suivis  de  trois  trochées  : 

Ter  compuit  tembil\em  man\u  bilpennêm, 

(PÉTROTIB.) 

Quelquefois  l'un  des  trochées  se  réaoat  en  un  tri* 
braque: 

Ferrum  ttmu\i,  quod  trepidlo  mal\ë  dSibàt  |  imun. 

(Ptatom.) 


SOT 


1657 


SOU 


Le  Botadéen  par,  lu  h  rebours,  pobvait  former  un  hexa- 
mètre ;  Sotadès,  dit-on,  s'était  amusé  à  ce  jeu.  Quintilien 
cite  un  yers  de  ce  genre,  improvisé  par  un  de  ses  amis  : 

Mêssem  a^'ea],  classes  mare],  ecelum  tênet  \  <utra. 

Les  vers  sotadéens  étaient  souvent  employés  dans  les 
sujets  licencieux,  et  Quintilien  dit  qu'il  n'oserait  pas  ex- 
poser les  règles  de  ce  genre  de  poSme.  P. 

SOTIE,  satire  dramatique  née  du  mélange  de  la  Farce 
et  de  la  Moralité.  Ce  nouveau  genre  fut  mis  en  honneur 
par  les  Enfants  Sans  Souci ,  Joyeuse  réunion  de  jeunes 
gens  dont  le  chef  s'appelait  le  Prince  des  Sots.  Ils  furent 
autorisés  par  Charles  VI  à  élever  des  échafauds  sur  la 
place  des  halles,  pour  y  représenter  leurs  soties.  La  liberté 
de  leurs  attaques  alla  souvent  Jusqu'à  la  licence  ;  ils  ne 
respectèrent  ni  la  religion,  ni  la  politique,  ni  même  la 
vie  privée  des  personnagjBs  qu'ils  mettaient  en  scène.  Il 
est  vrai  qu'ils  commençaient  par  se  Jouer  eux-mêmes,  et 
se  livraient  les  premiers  à  la  risée  de  la  multitude.  Néan- 
moins l'extrême  hardiesse  de  leurs  satires,  le  langage 
irrévérencieux  qu'ils  se  permettaient  dans  des  allusions 
que  tout  le  monde  pouvait  comprendre,  leur  firent  de 
nombreux  ennemis  pacmi  les  gens  de  robe,  d'église  et 
d'épée.  Mais  ils  furent  presque  constamment  protégés  par 
la  royauté.  Charles  VIII  seul ,  dans  un  moment  de  colère, 
leur  enleva  les  privilèges  qu'ils  tenaient  de  Charles  VI  ; 
Louis  XII  les  leur  rendit.  Ce  prince  supporta  avec  une 
admirable  patience  les  railleries  souvent  indécentes  des 
Enfants  Sans  Souci  :  une  seule  fois  la  colère  l'emporta, 
après  une  allusion  blessante  pour  la  reine  Anne  de  Bre- 
tagne; mais  il  se  calma  bientôt,  et,  plus  tard,  quand  il 
fut  en  lutte  avec  le  pape  Jules  II ,  il  se  servit  des  Enfants 
Sans  Souci  pour  faire  approuver  sa  politique  par  l'opinion 
populaire.  Sous  François  I*',  la  liberté  de  ces  représenta- 
tions fut  d'abord  restreinte  par  l'institution  de  la  cen- 
sure, puis  complètement  abolie  par  l'interdiction  des 
Farces  et  des  Soties. 

Les  plus  célèbres  soties  sont  :  le  Vieux-Monde ,  le 
Nouveau-Monde,  et  le  Prince  des  sots,  Vieux-Monde  est 
un  vieillard  décrépit,  qui  se  plaint  toujours.  Abus  l'en- 
gage à  prendre  du  repos ,  et  lui  promet  de  gouverner  le 
monde  pendant  son  sommeil.  Le  vieillard  est  à  peine  en- 
dormi, qu'Abus  appelle  à  lui  tons  les  Sots  ses  amis.  On 
voit  alors  arriver  Sot  dissolu,  habillé  en  homme  d'église. 
Sot  glorieux  en  gendarme.  Sot  corrompu  en  robe  de  pro- 
cureur. Sot  trompeur  en  costume  de  marchand.  Sot 
ignorant,  grand  niais  qui  représente  le  peuple,  et  Sotte 
PoUe,  qui  persuade  aux  autres  de  tondre  le  Vieux-Monde 
et  d'en  b&tir  un  autre.  Ils  conviennent  qu'ils  construiront 
leur  édifice  sur  Confusion  :  c'est  Abus  qui  dirige  les  tra- 
vaux comme  architecte.  Chaque  Sot  construit  son  pilier. 
Sot  Dissolu  met  au  rebut  Chasteté^  Dévotion,  Oraison, 
Humilité,  et  compose  son  pilier  d' Ypocrisie,  Ribaudise, 
Apostasie,  Lubricité,  Symonie,  Irrégularité.  Sot  Glorieux 
rejette  Noblesse  et  Libéralité,  et  leur  substitue  Lâcheté 
et  Avarice.  Sot  Corrompu  repousse  Justice,  et  envoie 
chercher  Corruption.  Sot  Trompeur  bâtit  avec  Usure, 
Larcin  et  Fausse  Mesure,  Sot  Ignorant  rejette  Innocence, 
Simplicité,  Obéissance,  et  s'accommode  de  Murmure,  Fu- 
reur et  Rébellion.  L'édifice  est  construit  ;  les  Sots  se  dis- 
putent entre  eux  pour  savoir  à  qui  appartiendra  la  main 
de  Sotte  Folle.  Dans  la  chaleur  de  la  querelle,  ils  ren- 
versent le  Monde  qu'ils  avaient  à  peine  achevé.  Abus  les 
chasse  ;  le  Vieux-Monde  se  réveille,  déplore  l'imprudence 
des  Jeunes  Sots,  et  engage  les  assistants  à  ne  point  b&tir 
comme  eux  sur  Confusion.  —  La  sotie  du  Nouveau- 
Monde,  attribuée  à  Jean  Bouchet,  est  une  protestation 
contre  les  empiétements  de  la  papauté.  Bénéfice  Gi'ant 
est  vacant.  Ambitieux  vient  solliciter  auprès  du  cardinal- 
légat.  Celui-ci  promet  de  séduire  Élection  et  Nomination; 
mais  il  faut  commencer  par  Pragmatique,  vieille  dame 
qui  a  la  tète  dure.  Comme  elle  ne  veut  pas  entendre 
raison,  l'on  fait  venir  Père  Saint,  qui  arrive  avec  un  gros 
bâton  dont  il  assomme  Pragmatique.  Élection  et  Nomi- 
nation effrayées  s'enfuient  chez  leur  aïeule  Université. 
Cest  ainsi  que  les  Enfants  Sans-Souci  mettaient  à  la 
portée  du  peuple  les  difficultés  de  la  politique  avec  la 
cour  de  Rome.  Trois  ans  après  la  représentation  du  Nou- 
veai^-Monde,  c-à-d.  en  1  Mi ,  la  lutte  était  engagée  avec 
le  pape  ;  il  s'agissait  de  lever  les  scrupules  de  ceux  qui 
pouvaient  en  avoir,  et  de  prouver  au  roi  lui-même,  s'il 
hésitait,  qu'il  pouvait  faire  la  guerre  au  pape  légitime- 
ment et  canonfquement.  Tel  est  le  but  que  se  propose 
Pierre  Gringore  dans  1a  Jeu  du  prince  des.  Sots,  qui  fut 
représenté  le  mardi  gras  de  l'an  i51i.  Cette  pièce  com- 


mence par  une  espèce  de  prologue  où  sont  passées  ea 
revue  toutes  les  affaires  du  temps.  Ensuite  paraissent  les 
Sots  ;  d'abord  la  Noblesse,  le  seigneur  de  Nates,  le  sei* 
gneur  de  Joye,  le  général  d'Enfance,  le  seigneur  du  Plat, 
le  seigneur  de  la  Lune;  puis  le  clergé,  1^  abbés  de 
Plate-Bourse,  de  Frévaulx,  de  la  Courtille;  enfin  le 
prince  des  Sots,  bonhomme  endurant  et  pacifique,  qui' 
n'est  autre  que  Louis  XII  lui-même.  Les  États  du  royaume 
de  Sottise  sont  ouverts  ;  tous  les  Sots  parlent  à  la  fois, 
sar  la  paix,  sur  la  guerre,  sur  les  Jacobins,  sur  le  pape, 
sur  l'Université.  Sotte  Commune,  qui  s'appelait  Jadis  Po- 
vreté,  profite  de  la  bonté  du  prince  des  Sots  pour  dire 
aussi  son  avis  :  elle  n'aime  pas  ces  guerres  lointaines 
dont  il  ne  lui  revient  que  des  charges;  car  c'est  elle  qui 
paye  toujours  Técot.  Les  doléances  de  Sotte  Commune 
sont  interrompues  par  la  brusque  arrivée  de  Mère  Sotte 
sous  les  habits  de  l'Église  ;  elle  est  accompagnée  de  Sotiê 
Fiance  et  Sotte  Occasion  ;  elle  arrive  d'Italie,  d'où  elle 
apporte  une  drogue  nouvelle  qui  s'appelle  Trahison, 
Mère  Sotte,  à  force  de  cajoleries,  séduit  les  abbés;  elle 
leur  promet  de  rouges  chapeaux.  Mais  les  nobles  repous- 
sent avec  indignation  toutes  ses  offres,  et  demeurent 
fidèles  au  roi.  Mère  Sotte,  furieuse,  ordonne  aux  prélats 
de  commencer  l'assaut;  le  Prince  hésite  encore,  mais 
enfin  un  Sot  lui  crie  qu'il  peut  se  défendre  canonique- 
ment.  Bref,  le  Prince  des  Sots  est  forcé  par  ses  sujets  à 
faire  la  guerre  :  c'est  la  conscience  du  peuple,  c'est  l'hon- 
neur national  qui  se  révolte  contre  les  entreprises  de 
l'Église  sur  la  tempoValité.  H.  D. 

SOTTO  VOCE ,  expression  italienne  emplojfée  dans  la 
Musique  pour  signifier  à  demi-voix  ou  à  demi-jeu. 

SOU ,  monnaie.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

SOUABE  (Dialecte).  V.  Al^aniciqob. 

souABB  (Miroir  de).  V.  Miroir. 

SOUAGE,  nom  donné  autrefois  à  une  moulure,  à  une 
sorte  de  boudin,  simple,  double  ou  triple,  enroulé  autour 
du  pied  des  pièces  d'orfèvrerie.  Les  souages  étaient  sou- 
vent verres,  c.-à-d.  qu'ils  se  détachaient  par  la  dorure 
sur  l'argent.  Il  y  avait  aussi  des  souages  aux  bords  supé- 
rieurs des  vases,  des  corbeilles,  et  ils  servaient  quelque- 
fois d'anses.  Le  mot  fut  appliqué,  par  extension,  aux 
bordures  des  vêtements. 

SOUBASSEMENT  (de  sous  et  de  base)^  partie  infé- 
rieure d'une  construction ,  sorte  de  piédestal  sur  lequel 
semble  porter  tout  l'édifice.  Le  mot  s'emploie  surtout  en 
parlant  des  édifices  à  colonnes. 

SOUBISE  (Enfants  du  Père).  V.  Compagnonnagi. 

SOUBRETTE,  en  termes  de  Théâtre,  suivante  de  co- 
médie. Elle  est  rusée,  bavarde,  caustique,  a  le  propos 
leste  et  l'œil  mutin,  et  met  ses  bons  offices  auprès  de  sa 
maîtresse  aux  gages  du  soupirant  le  plus  généreux,  dont 
elle  épouse  souvent  le  valet. 

SOUBREVESTE  (de  veste,  et  de  l'espagnol  sobre,  ))ar- 
dessus),  sorte  de  Justaucorps  sans  manches, que  portaient 
autrerois  les  Mousquetaires. 

SOUCHE,  en  termes  de  Généalogie,  se  dit  du  person- 
nage auquel  remonte  une  famille. 

soDCHB,  en  termes  de  Construction,  partie  du  corps 
d'une  cheminée  qui  sort  du  toit  et  s'élève  au-dessus  du 
comble. 

soDCHB,  tube  de  fer-blanc  peint  couleur  de  cierge  et  en 
ayant  la  forme,  qu'on  met  dans  les  chandeliers  d'église, 
et  dans  lequel  est  un  ressort  de  fil  de  fer  en  spirale  qui 
pousse  la  bougie  et  la  fait  brûler  Jusqu'au  bout. 

SOUCHE,  partie  qui  reste  des  feuilles  d'un  registre  lors- 
qu'on les  a  coupées  en  zigzag.  En  rapprochant  la  partie 
détachée  du  registre  et  celle  qui  y  reste,  elles  doivent  se 
correspondre  exactement.  On  se  sert  de  registres  à  souche 
pour  donner  des  quittances ,  délivrer  des  actions  et  des 
mandats,  etc. 

SOUCHETAGE,  marque  faite  autrefois  par  les  officiers 
des  Eaux  et  Forêts  après  la  coupe  des  bois,  pour  compter 
le  nombre  et  la  qualité  des  souches  abattues  ;  —  compte 
et  marque  des  bois  de  futaie  avant  l'adjudication. 

SOUDAN.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BUh 
graphie  et  éTHistoire. 

SOUnSME.  V.  Arabb  (Philosophie). 

SOUFFLAGE,  en  termes  de  Marine,  revêtement  ea 
planches  qu'on  applique  extérieurement  sur  la  carène 
d'un  navire,  vers  la  flottaison,  soit  pour  l'enfler,  et  re- 
médier ainsi  à  un  défaut  de  stabilité ,  soit  pour  la  pré- 
server du  choc  ou  du  contact  de  ce  qui  po'Hrait  l'endom- 
mager. 

SOUFFLERIE ,  ensemble  des  soufflets  d\m  orgue ,  et 
I  lieu  où  ils  sont  placés.  Le  nombre  des  soufflets  dont  se 


sou 


1G58 


son 


compose  la  soufllerie  variait  auirefoii  de  deux  k  qua- 
torze, suivant  Timportance  de  rinstrument.  Les  soufiQets 
sont  mis  en  mouvement  par  un  ou  plusieurs  hommes, 
tandis  que  Torganiste  touche.  La  soufflerie  est  toujours 
placée  ie  plus  près  possible  de  l'orgue.  Dans  les  orgues 
modernes,  la  soufflerie  a  été  de  beaucoup  simplifiée  :  un 
'eeul  homme  peut,  au  moyen  d'un  moteur  ingénieux, 
emplir  d'air  plusieurs  réservoirs  placés  dans  diverses 
parties  de  Torgue,  et  alimenter  ainsi  un  grand  instru- 
ment. F.  soDKPLET,  au  SuvplémenU  F.  C. 

SOUFFRANCE,  en  Droit  féodal,  surséance  ou  délai  que 
le  seigneur  accordait  à  son  nouveau  vassal  pour  faire  f(H 
et  hommage. 

SOUILLARD ,  en  termes  de  tlharpenterie,  pièce  de  bois 
assemblée  sur  des  pieux,  et  que  Ton  pose  au  devant  des 
glacis  entre  les  piles  des  ponts;  —  en  termes  de  Con- 
struction, trou  percé  dans  une  pierre  pour  livrer  passage 
à  Teau. 

SOOILLE,  Ut  qu'un  navire  se  creuse  dans  la  vase  quand 
il  y  échoue. 

SOULE  ou  SAOULE ,  Jeu  des  paysans  bretons.  Il  con- 
siste à  jeter  un  ballon,  bien  huilé  en  dehors  pour  le 
rendre  plus  glissant;  les  Joueurs  le  poursuivent  en  s'en 
disputant  la  possession  :  celui  qui  parvient  à  le  saisir  et 
à  le  porter  dans  une  autre  paroisse  que  celle  où  se  fait 
le  jeu,  gagne  le  prix  proposé. 

SOULIER  (du  latin  solea,  semelle,  sandale),  chaussure 
de  cuir  qui  couvre  le  pied  en  tout  ou  en  partie,  et  qui 
s'attache  par-dessus  avec  des  cordons,  une  ooucle  ou  des 
boutons.  Il  est  formé  de  quatre  parties  :  Vempeigne,  des- 
tinée à  couvrir  le  pied;  les  qtMrtiert,  qui  emboîtent  le 
talon;  les  semelles,  superposées  Tune  sur  l'autre;  le 
talon,  qui  sert  à  exhausser  le  derrière  du  pied.  De  nos 
Jours,  en  fait  des  souliers  à  vis,  sans  couture. 

SOULIERS  A  LA  PODLAiNB.  V,  PouLAiNB,  dans  notro  DiC' 
tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

SOULTE  (du  latin  solutum,  supin  àesolvere,  payer), 
en  termes  de  Pratique,  est  synonyme  de  retour,  et  se 
dit ,  en  matière  de  succession  et  de  partages,  de  ce  qu'un 
des  copartageants  doit  payer  aux  autres  pour  égaliser  les 
lots,  lorsque  celui  qui  lui  est  échu  est  d'une  valeur  plus 
grande  et  ne  peut  se  diviser  (Code  Napoléon,  art.  833  et 
1i76).  —  Dans  le  Commerce,  Soulte  est  synonyme  de 
Solde  de  compte. 

SOUMISSION,  en  termes  de  Pratique,  obligation  que 
l*on  prend  en  justice  de  faire  une  chose,  d'effectuer  un 
payement ,  d'exécuter  un  ouvrage.  —  Lorsque  les  admi* 
nistrations  publiques  proposent  des  marchés  avec  con- 
currence, pour  fournitures  ou  travaux,  ceux  qui  veulent 
s'en  chaiiger  déposent  des  sown^sUms  cachetées,  conte- 
nant les  clauses  et  conditions  qu'ils  acceptent.  S'il  s'agit 
d'opérations  de  quelque  importance,  on  exige  des  Sott- 
missionnaires  le  dépôt  préalable  d'une  somme  plus  ou 
moins  forte  à  titre  de  cautionnement,  laquelle  leur  est 
restituée  s'ils  ne  sont  pas  déclarés  adjudicataires. 

SOUNDA  (Idiome}.  V,  Soenda. 

SOUPENTE  (du  latin  suspensum,  chose  suspendue), 
petit  réduit,  espèce  de  faux  plancher  à  demi- hauteur 
d'une  pièce  un  peu  élevée,  pour  loger  les  domestiques 
ou  pour  tout  autre  usa^e. 

SOUPER.  V,  notre  Dictionnaire  de  Biogr,  et  d^ Histoire. 

SOUPIR ,  en  termes  de  Musique,  signe  de  silence  dont 
la  durée  est  égale  à  celle  d'une  noire.  On  le  marque  par 
un  signe  assez  semblable  à  un  7  renversé.  Le  demi- 
soupir  est  le  silence  d'une  croche  ;  le  quart  de  soupir, 
d'une  double  croche;  le  demi-qttart  de  soupir,  d'une 
triple  croche. 

SOUPIRAIL,  baie  pratiquée  en  abat-lour  dans  l'épais- 
seur d'un  mur  de  fondation,  ou  aplomb  dans  le  sommet 
d'une  voûte,  pour  donner  de  l'air  et  un  peu  de  Jour  aux 
caves  et  aux.autres  lieux  souterrains. 

SOUQUENILLE  (du  latin  barbare  sttccania ou  surca- 
nia),  espèce  de  surtout  très-long,  fait  de  grosse  toile,  et 
qu'on  donne  aux  palefreniers  pour  s'en  servir  quand  ils 
pansent  leurs  chevaux. 

SOUQUER ,  en  termes  de  Marine,  roidir  un  cordage  ou 
une  amarre. 

SOURDELINE,  ancien  instrument  de  musique  à  vent. 
-C'était  une  espèce  de  musette  (K.  ce  mot), 

SOURDINE ,  petit  morceau  de  bois,  d'ivoire  ou  de  mé- 
tal, en  forme  de  peigne,  à  3  dents  évidées,  que  l'on  en- 
ch&sse  sur  le  chevalet  des  instruments  à  cordes  pour 
assourdir  les  sons  et  produire  certains  effets  particuliers. 
—  Les  sourdines  des  hautbois  et  des  clarinettes  sont  des 
pavillons  rentrants  en  dedans  et  qui  n'ont  qu'une  petite 
ouverture.  La  sourdine  du  cor  est  un  c6ne  de  carton, 


percé  d'un  trou  à  sa  i>ase,  et  qu'on  place  dans  le  pavil« 
ion.  Celle  de  la  trompette  est  un  petit  tube  en  bois  que 
l'on  place  dans  l'ouverture  inférieure.  Un  mouchoir  placé 
entre  la  double  corde  en  boyau  et  la  peau  inférieure  du 
tambour,  intercepte  les  vibrations  de  cet  instrument.  Le 
voile  d'étoffe  qu'on  jette  sur  les  timbales  produit  aussi 
l'effet  d'une  sourdine,  et  donne  au  son  un  caractère 
sombre  et  mélancolique.  Les  pianos  ont  une  pédale  gui 
fait  l'office  de  sourdine  :  elle  fait  mouvoir  des  étouffoirs, 
réglettes  de  bois  garnies  le  peau,  qui  amortissent  le  son 
en  s'appliquant  sous  les  cordes.  B. 

sooRDiNB,  sorte  d'épiaette  (  V,  ce  mot), 

SOUHDON.  V,  SORDONB. 

SOURDS-MUETS.  L'éducation  des  sourds-muets  a  été 
longtemps  considérée  comme  impossible  :  c'était  Taris 
d'Aristote  et  du  poète  Lucrèce,  et  S^  Augustin,  prenant  à 
la  lettre  les  paroles  de  S^  Paul ,  fides  ex  auditu,  croyait 
qu'un  sourd-muet  était  incap{û>le  d'être  admis  dans  le 
sein  de  l'Église.  On  lit  dans  Bède  le  Vénérable  que  Jean 
de  Beverley,  archevêque  d'York  au  vii*  siècle,  apprit  à 
parler  à  un  jeune  sourd-muet ,  qu'il  avait  recueilli  par 
charité.  Au  xv*  siècle,  Rodolphe  Agricola,  profœseur  & 
Heidelberg,  dit  avoir  vu  un  sourd  de  naissance  qui  tenait 
une  conversation  par  écrit.  Au  xvi*.  Cardan  démontra, 
mais  d'une  manière  purement  théorique,  la  possibilité 
d'instruire  les  sourds-muets,  et  bientôt  Pedro  de  Ponce, 
bénédictin  espagnol ,  apprit  h  plusieurs  la  lecture,  l'écri- 
ture et  le  langage.  Pendant  le  cours  du  xvii*  siècle,  des 
essais  furent  faits  avec  bonheur  par  Juan  Pablo  Bonet, 
secrétaire  du  connétable  de  Castille,  par  John  Bulwer, 
John  Wallis  et  William  Holder  en  Angleterre,  par  Van 
Helmont  en  Hollande  et  Conrad  Amman  en  Suisse.  Il  pa- 
rait qu'on  s'en  occupait  également  en  Fnmce;  car  le  par- 
lement de  Toulouse  confirma,  en  1679,  le  testament  olo- 
graphe d'un  sourd-muet.  En  Allemape,  un  certain 
Georges  Raphel  fit  lui-même  l'éducation  de  ses  trois 
enfants  sounls-muets,  et  publia  sa  méthode.  L'éducation 
des  sourds-muets  a  pris,  à  partir  du  xviii*  siècle,  un  d<y- 
veloppement  considérable  :  parmi  ceux  qui  s'y  sont  con- 
sacrés avec  le  plus  d'éclat  jusqu'à  nos  jours,  on  remarque 
Rodrigues  Pereira,  Ernaud,  l'abbé  de  L'Épée,  l'abbé  Des- 
champs, l'abbé  Sicard,  Daniel  Guyot,  Saintr-Sernin,  Lau- 
rent Clerc,  Jean  Massieu ,  Bébian  et  Ferdinand  Berthicr, 
en  France;  Thomas  BraÂdwood,  en  Ecosse;  le  docteur 
Watson,  en  Angleterre;  Miguel  d'Alea,  en  Espagne;  Sa- 
muel Heinicke  et  l'abbé  Storck,  en  Allemagne;  Thomas 
Gallaudet«  aux  États-Unis, 

La  France  possède  aujourd'hui  51  institutions  de  sourd  v 
muets.  Celles  de  Paris ,  de  Bordeaux  et  de  Chambéry 
sont  des  institutions  nationales,  qui  relèvent  du  minis- 
tère de  l'Intérieur  ;  on  y  compte  beaucoup  de  boursiers 
à  titi«  gratuit,  qui  reçoivent  une  éducation  profession- 
nelle  et  industrielle  autant  que  littéraire. 

On  a  employé,  pour  instruire  les  sourds-muets,  plu- 
sieurs métliodes.  Tantôt  on  s'est  borné  à  développer  chez 
eux  le  langage  naturel  d'action,  et  à  en  faire  d'excellents 
mimes;  tantôt  on  a  créé  pour  eux  un  alphabet^manuel 
purement  conventionnel,  désignant  chaque  lettre  par  un 
signe  particulier.  Ce  dernier  système  est  appelé  la  i}ac- 
tylologie,  c-à-d.  l'art  de  parler  à  l'aide  des  doigts.  Les 
signes  se  rapprochent  plus  ou  moins  des  formes  de  récri- 
ture; pour  indiquer  la  fin  d'un  mot,  d'une  phrase,  la 
main  trace  une  ligne  horizontale  de  gauche  k  droite; 
l'accentuation  et  la  ponctuation  sont  tracée  en  l'air  par 
l'index,  qui  peut  aussi  Jouer  le  même  rôle  relativement 
aux  chiffres. 

V*  Juan  Pablo  Bonet,  Reduccion  de  las  letras  y  arte 
para  ensefUir  a  hablar  los  mudos,  Madrid,  1620,  in-4«; 
J.  Bulwer,  Philocophus  (l'Ami  du  sourd-muet),  Lon- 
dres, 1648;  Amman,  Surdus  loquens,  Amsterdam,  ICO'i; 
J.  Wallis,  Epistola..,  de  mutis  surdisque  informandis^ 
dans  les  Transactions  philosophiques  de  Londres,  IGOS; 
Dalgarno,  Didasoalocophus ,  Oxford,  1778;  l'abbé  de 
L'Épée,  Institution  des  sourds  et  muets  par  la  voie  des 
signes  méthodiques,  Paris,  1774,  et  la  Véritable  manière 
d'instruire  les  sourds-muets,  1784;  l'abbé  Deschamps 
Cours  élémentaire  d'éducation  des  sourds-muets,  l^ris, 
1779;  Hervas  y  Panduro,  Escuela  espaHola  de  sord*.»- 
mutos,  Madrid,  1795, 2  vol.  in-8^;  l'abbé  Sicard,  Ifémoir^s 
sur  Vart  d'instruire  les  sourdsrmuets  de  naissance,  1781)  ; 
le  même.  Cours  d'instruction  d*un  sourd-muet  de  naiS' 
sance,  Paris,  1803,  in-8<^,  et  Théorte  des  signes  pour 
l'instruction  des  sourds-muets,  1 808;  Bébian,  Essai  sur  les 
sourds-muets  et  sur  le  langage  naturel,  Paris,  1817,  in-8% 
et  Manuel  d'enseignement  pratique  des  sourds -tnuêts, 
1827,  2   vol.  in-8<>;  Do  Gérando,  De  l'instruction  dei 


son 


1659 


sou 


rowHt-mtiMt  àê  naissance,  Paris,  1827,  2  vol.  in-8o; 
Ferdinand  Berihier^  Histoire  et  statistique  de  l'instruction 
des  sourds'fnuets,  Paris,  1836,  in-8<^,  et  Les  sourds-muets 
avant  et  depuis  Vabbé  de  VÊpée,  1840;  Léon  Vaisse,  Le 
mécanisme  de  la  parole  mis  à  la  portée  des  sourds  de 
naissance,  1834,  et  Essai  d'une  Grammaire  symbolique 
à  Vusage  des  sourds-muets,  1830;  le  môme.  Essai  histo- 
ri(iue  sur  la  condition  sociale  et  l'instruction  des  sourds- 
muets  en  France,  1844;  Valade-Gabel,  Méthode  à  la 
portée  des  instituteurs  primaires  pour  enseigner  aux 
sourds-muets  la  langue  française  sans  Fintermédiaire 
du  langao;e  des  signes,  Paris,  1857,  in-8<>. 

SOURIS,  en  termes  d'Art  militaire,  appareil  destiné  à 
mettre  le  feu  à  un  fourneau  de  mine,  dit  lui-même  Sou- 
ricière. 

sooais  (Pas  de).  V,  Pas  de  sodbis. 

SOUS-BARBE,  en  termes  de  Marine,  pièce  de  bois  qui 
soutient  Fétrave  d*un  navire  dans  le  chantier  ;  —  gros 
cordage  en  double  ou  chaîne  qui  descend  du  beaupré  à  la 
guibre,  pour  retenir  le  beaupré  lorsqu'il  tendrait  à  se  re» 
lever  dans  les  agitations  du  navire. 

SOUS-BASSE,  jeu  de  l'orgue  employé  principalement 
par  les  facteurs  allemands  pour  donner  plus  de  rondeur 
et  de  gravité  aux  jeux  de  fond  des  pédales,  et  introduit 
dans  les  grandes  orgues  en  France  depuis  plusieurs  an- 
nées. C'est  un  huit-pieds  bouché  sonnant  seize-pieds.  Ce 
bourdon  a  un  son  plus  fort  que  le  bourdon  ordinaire;  il 
est  de  plus  grosse  taille,  et  absorbe  une  plus  grande 
quantité  de  vent.  Ses  tuyaux  sont  en  bois.  F.  C. 

SOUSCRIPTION,  apposition  que  l'on  fait  de  sa  signa- 
ture au  bas  d'ua  acte  pour  en  approuver  le  contenu. 

F.  DiPLOVE. 

sooscaiPTiON,  en  termes  de  Librairie,  engagement  pris 
d'acquérir  quelque  grand  ouvrage,  que  l'on  paye  d'avance 
en  totalité,  ou  par  fractions  à  mesure  que  sont  livrées 
certaines  parties  de  l'ouvrage.  C'est  «n  moyen  par  lequel 
le  public  peut  venir  en  aide  aux  éditeurs,  qui  ne  sont 
plus  obligés  d'enfouir  dans  une  entreprise  un  capital  con- 
sidérable, et  qui  rentrent  dans  la  totalité  ou  une  partie 
de  leurs  débours.  L'usage  des  souscriptions  a  pris  nais- 
sance en  Angleterre  au  milieu  du  xvu*  siècle,  à  l'occasion 
de  l'impression  de  la  Bible  polyglotte  de  Walton.  D'An- 
gleterre il  passa  immédiatement  en  Hollande;  mais  il 
n'arriva  en  France  qu'en  1717,  à  propos  du  fameux  ou- 
vrage de  Montraucon  sur  Y  Antiquité  expliquée.  En  1780, 
on  payait  encore  généralement  à  l'avance,  avant  d'avoir 
rien  reçu,  la  moitié  de  l'ouvrage  que  promettait  l'éditeur; 
depuis  60  ans,  on  ne  paye  plus  que  sur  livraison. 

SOUS-DIACONAT,  le  1"  des  ordres  sacrés  ou  majeurs 
dans  l'Église  catholique.  Il  n'imposait  point  autrefois  la 
nécessité  du  célibat.  Les  fonctions  du  Sous-diacre  con- 
sistent à  avoir  soin  des  vases  sacrés,  verser  le  vin  et 
l'eau  à  la  messe,  chanter  l'épltre,  soutenir  le  livre  de 
l'Évangile  au  diacre  et  le  porter  à  baiser  aux  prêtres, 
porter  la  croix  dans  les  processions,  recevoir  \q%  offrandes 
do  peuple,  etc. 

SOUS-DOMINANTE,  la  4»  note  d'un  ton  quelconque. 
Ainsi,  dans  le  ton  d'ut,  fa  est  la  sous-dominante. 

SOUS-FACE,  mot  employé  quelquefois  comme  syno- 
nyme ûesof/lte  {V.  ce  mot), 

SOUS-FAITE,  pièce  du  comble  posée  de  niveau  au- 
dessous  du  faite  et  liée  par  des  croix  de  S^-André  ou  des 
entretoises.  Elle  sert  à  rendre  plus  solides  les  assem- 
blages de  charpente. 

SOUe-UEUTENANT.  V,  Lieotenaht. 

SOUS-LOCATION.  V.  Bail. 

SOUS-MÉDIANTE,  nom  donné  par  quelques  musiciens 
à  la  6«  note  du  ton,  qui  fait  tierce  au-dessous  de  la  to- 
nique comme  la  médiante  au-dessus. 

SOUS-OEUVRE  (Reprise  en).  V.  OSovre. 

SOUS-OFFICIER.  V.  Ofpicieii. 

SOUSOU  (Idiome),  un  des  idiomes  de  la  Nigritie  ma- 
ritime, parlé  par  les  Sousous  ou  Suzees.  C'est  le  premier 
dans  lequel  on  ait  publié  des  livres  pour  instruire  les 
Nègres  dans  le  christianisme. 

SOUS-PRÉFECTURE.  V.  Préfectori.  , 

SOUS-SECRÉTAIRE  D'ÉTAT,  titre  donné  à  de  hauts 
fonctionnaires  qui,  dans  divers  Ministères,  furent  à  cer- 
taines époques  chargés  de  diverses  parties  du  service,  et 
qui  partageaient  la  responsabilité  comme  le  pouvoir  des 
Ministres. 

SOUSTRACTION,  en  termes  de  Droit  criminel,  action 
de  prendre  furtivement.  Les  soustractions  commises  par 
les  dépositaires  ou  comptables  publics,  par  les  fonction- 
naires publics  de  l'ordre  civil  ou  Judiciaire,  par  les  parti- 
culiers dans  les  dépôts  publics,  sont  punies  des  peines 


portées  par  les  art.  169-173  du  Code  pénal.  Celles  com- 
mises par  l'un  des  époux  au  préjudice  de  l'autre  ou  de 
ses  héritiers,  par  les  enfants  ou  descendants  au  préjudice 
de  leur  père  ou  mère  ou  de  leurs  ascendants,  par  ceux-ci 
au  préjudice  de  leurs  enfants  ou  descendants,  par  les 
alliés  au  même  degré,  ne  donnent  lieu  qu'à  des  répara- 
tions civiles  ;  la  loi  ne  prononce  de  peine  que  contre  ceux 
qui  ont  recelé  les  objets  soustraits  par  eux. 

SOUTACHE,  tresse  de  galon  ou  de  lacet  plat  de  soie, 
d'argent,  ou  d'or. 

SOUTANE  (de  l'italien  sottana,  qui  est  en  dessous), 
vêtement  des  ecclésiastiques,  à  manches  étroites,  et  des- 
cendant jusqu'aux  talons.  La  soutane  est  de  couleur  noire 
pour  les  simples  prêtres ,  violette  pour  les  évêques  et 
archevêques,  rouge  pour  les  cardinaux,  blanche  pour  le 
pape.  Du  XII*  au  xv*  siècle,  la  soutane  fut  portée  aussi 
par  les  magistrats,  les  avocats,  les  médecins  et  les  pro- 
fesseurs. 

SOUTANELLE,  petite  soutane  qui  ne  descend  que  jus- 
qu'aux genoux. 

SOUTE  (de  l'italien  sotto,  sous,  au-dessous^,  nom 
donné  à  de  petits  magasins  au'on  établit  dans  l'entre- 
pont ou  dans  la  cale  des  grands  navires.  Il  y  a  la  soute 
aux  poudres,  la  soute  au  biscuit,  la  soute  au  vin,  la  soute 
aux  légumes,  la  soute  aux  voiles,  etc. 

SOUTÈNEMENT,  en  termes  de  Comptabilité,  raisons 
que  l'on  donne  pour  soutenir  ou  justifier  les  articles  d'un  . 
compte. 

SOUTÈNEMENT  (Mur  de).  F.  Mun. 

SOUVENIR,  V,  MÉMOIRE. 

SOUVERAIN,  se  dit  adjectivement  de  tout  ce  qui  est 
au  plus  haut  degré  en  son  genre,  de  ce  qui  ne  reconnaît 
pas  d'autorité  au-dessus  de  soi.  On  appelle  Cour  souve- 
raine. Tribunal  souverain,  une  Cour,  un  Tribunal  qui 
juge  en  dernier  ressort;  leurs  arrêts  sont  des  jugements 
souverains.  —  Pris  substantivement,  le  mot  Souverain 
s'applique  à  tout  chef  d'État. 

SOUVERAIN,  monnaie.  V,  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d'Histoire. 

SOUVERAINETÉ.  Si  l'on  entend  par  ce  mot  la  pleine 
liberté,  l'entière  indépendance,  Dieu  seul  est  souverain, 
parce  qu'il  ne  dépend  que  de  lui-même  et  possède  sur 
toutes  choses  un  pouvoir  inflni.  Le  pouvoir  en  lui  se 
confond  avec  la  souveraineté.  La  créature  dépendant  de 
l'Être  qui  l'a  créée,  ne  peut,  à  l'égard  de  cet  Être,  se 
qualifier  de  souveraine  :  nul  homme  n'est  souverain,  en 
ce  sens  que  sa  raison  et  sa  volonté  soient  pleinement  in- 
dépendantes; car  elles  relèvent  des  lois  du  vrai  et  du 
bien,  qui  ont  leur  origine  en  Dieu.  Mais  tout  homme  est 
souverain,  en  ce  sens  que  ni  sa  raison,  ni  sa  volonté,  ni 
par  conséquent  ses  actes,  ne  dépendent  de  droit  d'aucun 
autre  homme;  il  est  primitivement  et  complètement  libre 
à  l'égard  de  ses  semblables,  il  ne  doit  obéissance  à  aucun 
d'eux,  et,  à  ce  titre,  il  possède  une  souveraineté  relative. 
L'homme  ne  vit  pas  isolé  ;  sa  condition  normale  est  Tétat 
de  société  :  or,  il  existe  deux  sociétés  humaines  :  la  fa- 
mille, et  la  nation  ou  la  société  civile  et  politique.  La 
famille  est  fondée  par  l'ordre  même  de  la  nature,  et  il  est 
de  droit  naturel,  par  conséquent  de  droit  divin,  que  la 
volonté  du  père  fasse  loi  pour  ses  enfants.  Seulement,  la 
société  de  famille  ne  durant  pas  toujours,  la  m^orité 
émancipant  les  enfants,  le  père  n'a  plus  de  droit  strict, 
il  n'est  plus  chef  que  de  nom  et  par  déférence  ;  l'autorité 
n'existe  plus,  et  chaque  enfant  prend  à  son  tour  posses- 
sion de  son  indépendance,  de  sa  souveraineté.  La  société 
civile  et  politique  est,  comme  la  famille,  une  nécessité 
naturelle,  mais  une  nécessité  durable  et  permanente  :  du 
moment  qu'elle  existe,  c'est  une  des  lois  de  l'organisation 
du  monde  qu'il  y  ait  une  puissance  directrice.  Ici,  le  mot 
Souveraineté  prend  une  nouvelle  acception  ;  il  désigne 
le  pouvoir  de  commander  à  tous  les  individus  qui  com- 
posent la  société,  et  le  souverain  est  l'être,  un  ou  mul« 
tiple,  qui  exerce  ce  pouvoir. 

La  souveraineté  sociale  possède  trois  attributions  prin- 
cipales :  faire  des  lois,  veiller  à  leur  exécution ,  et  en 
punir  les  infractions.  Faire  une  loi,  c'est  prescrire  ou 
défendre  :  or,  un  supérieur  pouvant  seul  prescrire  et  dé- 
fendre, et  tous  les  hommes  étant  égaux  par  nature,  un 
homme,  un  conseil  de  plusieurs  hommes,  une  assemblée 
plus  ou  moins  nombreuse,  n'a  pas  le  droit  de  faire,  en 
son  nom,  la  loi  à  tous  les  membres  du  corps  social.  Le 
droit  de  légiférer,  attribut  essentiel  de  la  Souveraineté, 
n'émane  donc  pas  des  hommes.  D'un  autre  côté,  per- 
sonne dans  la  société  civile  n'a  le  droit,  à  part  le  cas  de 
légitime  et  immédiate  défense,  de  se  faire  Justice  à  soi- 
même.  Si  aucun  individu  n'a  le  droit  de  punir,  comment 


sou 


!6(iO 


SPT 


les  individus  réunis  le  po5s<!dcraient-iIs?  Et  cependant  ce 
droit  existe  dans  la  société,  il  est  aussi  un  des  attributs 
de  ia  Souveraineté.  De  tmit  cela  il  résulte  que  la  souve- 
raineté sociale  possède  et  exerce  des  droits  qui  ne  vien- 
nent pas  de  rhommc.  et  qui  supposent  une  puissance 
supérieure.  Cette  puissance,  c'est  Dieu.  Lui  seul  peut 
faire  des  lois,  parce  quMl  est  supérieur  aux  autres  êtres; 
lui  seul  peut  imposer  une  obligation  morale  ou  de  con- 
science, p&Tce  qu'il  est  le  principe  de  la  justice  et  du 
bien  ;  lui  seul  peut  ôter  la  vie,  parce  que  seul  il  la  donne. 
C'est  donc  en  son  nom  seul,  ou,  si  Ton  veut,  au  nom  de 
réternelle  justice  et  du  souverain  bienr  dont  il  est  en 
quelque  sorte  la  substance,  au'une  souveraineté  sociale  a 
le  droit  dMmposer  la  loi,  d'obliger  les  consciences,  de  re- 
dresser les  torts.  —  De  ce  que  tout  pouvoir  vient  de 
Dieu,  de  ce  que  les  attributs  de  la  Souveraineté  n'existent 
qu'en  lui  et  par  lui,  il  ne  faudrait  pas  conclure  que  ceux 
qui  sont  chargés  du  pouvoir  sont  institués  par  Dieu  :  ce 
genre  d'intervention  divine  mettrait  du  surnaturel  dans 
l'histoire,  comme  les  miracles  en  mettent  dans  la  nature. 
La  société  civile  et  politique  ne  se  constitue  pas  par  des 
miracles  ;  elle  est  un  produit  naturel,  et  la  Souveraineté, 
qui  vient  de  Dieu,  se  réalise  dans  la  société  à  la  manière 
d'une  propriété  qui  suit  la   nature  de  la  chose.  11  y  a 

{)assage  tout  naturel  de  la  Souveraineté  en  puissance  à 
a  Souveraineté  en  acte.  Dès  qu'une  société  se  constitue, 
.  elle  ne  peut  pas  ne  pas  produire  spontanément  un  gou- 
vernement qui  la  dirige.  Elle  s'organise  par  l'exercice  de. 
la  raison  et  de  la  volonté  de  ses  membres;  elle  confère, 
par  un  consentement  implicite  ou  explicite,  la  puissance 
qui  lui  vient  de  Dieu,  soit  à  un  homme,  ce  qui  forme  une 
monarchie,  soit  à  plusieurs  hommes,  ce  qui  fait  une 
aristocratie,  ou  bien  ses  membres  cardent  celte  puissance 
pour  l'exercer  en  commun,  ce  qui  constitue  une  démo- 
cratie. Le  pouvoir,  c.-à-d.  la  Souveraineté  en  exercice, 
n'est  donc  légitime,  dans  l'ordre  naturel ^  que  s'il  sort, 
nous  ne  dirons  pas  du  peuple  (le  mot  a  reçu  trop  d'ac- 
ceptions diverses),  mais  de  la  société,  et,  quand  ce  peuple 
ou  œtte  société  fait  entendre  sa  voix,  ce  n'est  pas  lui  seul 
qui  parle,  c'est  le  principe  même  de  toute  souveraineté 
qui  parle  en  lui  :  Vox  populi,  vox  Dei, 

Une  fois  la  Souveraineté  constituée  dans  une  société, 
quelle  est  l'étendue  de  ses  droits?  A  cette  question  deux 
théories  politiques  diamétralement  opposées  ont  donné 
une  réponse  identique  :  «  Le  souverain  est  absolu.»  L'an- 
cienne monarchie,  dite  de  droit  divin,  ne  reconnaissait 
en  dehors  d'elle-même  aucun  droit;  les  apôtres  modernes 
de  la  Souveraineté  du  peuple  attribuent  de  même  au  pou- 
voir constitué  par  le  peuple  un  droit  illimité.  Dans  l'une 
et  l'autre  théorie,  l'individu  est  sacrifié,  avec  ses  droits, 
avec  tout  ce  qui  lui  appaitient.  Il  ne  peut  pas  y  avoir  de 
Souveraineté  illimitée  en  ce  monde,  parce  qu'elle  impli- 
querait la  perfection  et  l'infaillibilité,  attnbuts  qui  ne 
conviennent  qu'à  la  souveraineté  de  Dieu.  Les  individus 
conservent  dans  la  société  un  certain  nombre  de  droits 
qui  sont  supérieurs  à  tous  les  gouvernements.  Toute  au- 
torité civile  et  politique  est  dominée  par  les  règles  im- 
muables de  la  justice,  et  elle  a  mission  de  les  appliquer. 
Ceux  qui  en  sont  les  dépositaires  ont  pour  obligations 
essentielles  de  garantir  l'existence  et  les  biens  des  indi- 
vidus, de  protéger  le  développement  de  leurs  facultés, 
d'empêcher  l'iniquité  et  de  punir  les  désordres,  de  don- 
ner aux  intérêts  légitimes  une  suffisante  satisfaction,  en 
un  mot,  de  travailler  au  bien  de  tous  et  de  chacun  : 
c'est  ainsi  qu'ils  fortifient  par  la  vertu  la  légitimité  de 
leur  oripnne.  B. 

S0UVIGNY(Ëgli8ede],  dans  le  département  de  l'Allier. 
Cette  éelise,  autrefois  abbatiale  de  Bénédictins,  est  re- 
marquable par  sa  longueur.  La  grande  nef,  un  peu 
étroite,  est  d'une  belle  élévation;  elle  fut  bâtie  au 
XIV*  siècle.  Les  deux  tours  carrées  qui  ornent  la  façade 
paraissent  appartenir  à  un  édifice  plus  ancien.  Deux  cha- 
pelles contiennent  les  tombeaux  des  anciens  ducs  de 
Bourgogne  :  on  remarque  surtout  celui  de  Charles  I*'  et 
de  sa  femme  Agnès  de  Bourgogne.  —  On  nomme  Bible 
de  Souvigny  un  précieux  manuscrit  du  xn*  siècle  que 
possédaient  les  religieux,  et  que  l'on  conserve  actuelle- 
ment dans  la  Bibliothèque  de  Moulins  :  il  est  sur  très- 
beau  vélin,  d'une  écriture  fort  nette,  et  enrichi  de  mi- 
niatures; sa  couverture,  en  bois  de  chêne  revêtu  de 
peau  de  truie,  est  ornée  d'animaux  fantastiques  en  cuivre. 

SPADASSIN  (de  l'italien  spada,  épée),  nom  qu'on 
donna  d'abord  a  tous  les  soldats,  puis  aux  ferrailleurs 
seulement,  à  ceux  qui  ne  respirent  que  duels. 

SPADINS,  piikïes  de  monnaie  frappées  par  les  ducs  de 
Lorraine  aux  xui*i  xiv*  et  xv*  siècles 


SPAHIS.  V,  ce  mot  dans  notre  DicUonnain  de  Bùh 
graphie  et  cT Histoire. 

SPEAKER,  c-èi-d.  en  anglais  orateur;  nom  qne  Von 
donne  en  Angleterre  au  président  de  la  Chambre  des 
communes ,  parce  qu'il  sert  d'intermédiaire  à  cette 
Chambre  dans  ses  rapports  avec  la  couronne. 

SPECTE,  monnaie  de  Norvège,  équivaut  à  5  fr.  64  e; 

SPÉCIFICATION,  terme  de  Droit.  V.  Accession. 

SPECTACLE,  en  latin  spectaculum  (de  spectare,  regar- 
der), tout  ce  qui  attire  et  retient  les  regards,  et,  dans  un 
sens  restreint,  représentation  thé&trale  donnée  au  public. 

SPÉCULAIRE  (Pierre).  V.  notre  Dicttonnatre  de  BiO' 
graphie  et  d*Histoire. 

SPÉCULATIF,  SPÉCULATION  (du  latin  speculari,  ob- 
server),  se  dit  des  recherches  et  des  études  entreprises 

Î^our  le  seul  plaisir  de  savoir  et  sans  arrière-pensée  d'uti- 
ité  pratique.  Les  sciences,  suivant  la  nature  des  ques- 
tions dont  elles  s'occupent,  présentent  un  caractère  plus 
ou  moins  spéculatif  :  ainsi  la  Philosophie,  dans  son  en- 
semble, est  une  science  plus  spéculative  que  la  Physique; 
et  entre  les  parties  de  la  Philosophie,  la  Psychologie  et 
la  Métaphysique  sont  plus  spéculatives  que  la  Logique  ou 
que  la  Morale,  qui,  sans  se  résoudre  entièrement  dans 
l'Art  de  penser  ou  de  se  conduire,  ont  un  côté  pratique 
que  la  Métaphysique  ne  présente  pas,  et  que  la  Psycho- 
logie n'offre  qu'indirectement.  B — b. 

SPEOS,  nom  donné  aux  excavations  faites  de  main 
d'homme  dans  les  rochers  en  Égy'pte. 

SPÉRONARE,  petit  navire  maltais  non  ponté,  à  fond 
plat,  gréant  une  voile  à  livarde  sur  un  ra&t  placé  vers 
l'avant. 

SPHÈRE(du  grec^p/iaïra,  globe,  corps rond^,  nom  donné 
vulgairement  aux  elobes  terrestres  {V.  Globe).  On  appelle 
Sphère  armillaire  {d'armilla,  bracelet)  un  assemblage  de 
cercles  de  métal,  de  bois  ou  de  carton,  au  centre  desquels 
est  placé  un  petit  globe  figurant  la  terre  :  on  l'emploie 
pour  représenter  le  cours  apparent  du  soleil  *»t  le  mouve- 
ment des  astres.  Elle  est  dite  Sphère  de  Ptolémèe^  bien 
que  l'invention  en  ait  été  attribuée  à  Thaïes,  ou  à  Anaxi- 
mandre,  ou  à  Archimède.  Il  en  existe  une  autre,  la 
Sphère  de  Copernic^  où  la  terre  et  les  autres  planètes 
sont  placées  à  diflTérentes  distances  do  soleil,  qui  occupe 
le  centre. 

SPHKRISTÈRE.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  el 
d'Histoire, 

SPHÉRISTIQUE,  partie  de  la  Gymnastique  des  Anciens 
qui  comprenait  les  exercices  de  la  balle  (en  grec  sphatra), 

SPHÉROMACHIE.)  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnain 

SPHINX.  ]     de  Biographie  et  d'Histoire. 

SPHRAGISTIQUE.  V.  Sceau. 

SPHYRÉLATON.  V.  Repoussé  (Sculpture  au). 

SPICATUM  OPUS.  y.  Appareil. 

SPICCATO,  terme  italien  de  Musique,  synonyme  de 
staccato  {V.  ce  mot). 

SPICILEGIUM,  c.-à-d.  en  latin  collection  d^épis,  gerbe; 
nom  donné  à  des  recueils  de  pièces,  d'actes,  etc.  Tels 
sont  le  Spicilegium  de  D'Achéry  (1633-77)  et  le  Spicile- 
gium  Solemense  de  dom  Pitra,  1853. 

SPINOZISME,  nom  donné  à  la  philosophie  de  Spinoza, 
citée  comme  un  exemple  frappant  de  l'abus  que  peut 
faire  de  la  pure  Logique  un  esprit  vigoureux,  parti  de 
principes  incomplets  ou  arbitraires.  Spinoza  avait  trouvé, 
dans  Descartes,  cette  définition  de  la  Substance  :  «  Lors- 
que nous  concevons  la  substance,  nous  concevons  seule- 
ment une  chose  qui  existe  en  telle  façon,  qu'elle  n'a 
besoin  que  de  soi-même  pour  exister.  En  quoi  il  peut  y 
avoir  de  l'obscurité,  touchant  l'explication  de  ce  mot 
n*avoir  besoin  que  de  soi-même;  car  à  proprement  parler 
il  n'y  a  que  Dieu  qui  soit  tel...  »  Quant  à  la  notion  que 
nous  avons  des  substances  créées,  matérielles  ou  imma- 
térielles, a  pour  entendre  que  ce  sont  des  substances,  il 
faut  seulement  que  nous  apercevions  qu'elles  peuvent 
exister  sans  l'aide  d'aucune  chose  créée.  »  (  Principes  de 
la  Philosophie,  51  et  52.)  Restriction  Judicieuse  dont  Spi- 
noza n'a  pas  tenu  compte!  Dans  ce  passage,  il  ne  vit  que 
la  définition  deJa  Substance,  qu'il  prit  dans  le  sens  le  plus 
absolu  dont  elle  fût  susceptible  :  «  Il  ne  fit,  dît  quehque 
part  Leibniz,  que  cultiver  certaines  semences  de  la  Pdî- 
losophie  de  Descartes.  »  Ceci  n'est  vrai  qu'à  un  point  de 
vue;  car  cultivant  ces  semences  à  sa  manière,  les  déve- 
loppant dans  un  sens  exclusif,  et  par  une  méthode  qui 
lui  est  propre,  il  en  fit  sortir  un  système  étrange,  dont 
les  vrais  cartésiens  et  les  admirateurs  de  Descvtes  re- 
poussent à  juste  titre  la  solidarité.  D'abord,  rien  de  plui 
opposé  que  sa  méthode  et  la  méthode  de  Descartes.  Celui nâ 
part  du  sentiment  intime  de  l'existence  personnelle  qu'il 


SPl 


1661 


SPI 


dégage  du  fait  de  la  pensée;  et  Bossuet,  avec  sa  puis- 
sance et  sa  clftité  pour  résumer  à  grands  traits  un*  sys- 
tème, n*est  Jamais  plus  cartésien  que  quand  il  écrit  : 
«  La  sagesse  consiste  à  connaître  Dieu  et  à  se  connaître 
soi-même;  kl  connaissance  de  nous-mêmes  nous  doit 
^ever  à  la  eonnaissance  de  Dieu.  »  Spinoza,  tout  au  con- 
traire ,  posé  d'abord  ridée  de  Dieu,  pour  en  déduire 
géométriquement,  et  par  voie  de  démonstration,  toute  sa 
philosophie.  C'est  là  toute  sa  méthode  ;  méthode  dange- 
reuse, quand  même  les  principes  dont  il  partirait  seraient 
irréprochables;  et  l'on  sait  déjà  que  le  premier  de  ces 
principes  est  une  définition  équivoque  de  la  Substance, 
définition  interprétée  de  telle  façon  qu'il  ne  peut  y  avoir 
d'autre  Substance  que  Dieu,  et  que  dorénavant  ces  deux 
Boms  :  DieUf  la  Substance,  n'exprimeront  plus  qu'une  seule 
et  même  idée,  celle  de  l'Être  2d}solu  et  infini,  hors  duquel 
rien  ne  peut  être  conçu.  La  Substance,  ainsi  entendue, 
possède  des  attributs,  sans  quoi  elle  ne  serait  qu'une 
abstraction,  ce  que  Spinoza  nie  énergiquement  ;  et  comme 
infinie,  elle  possède  une  infinité  d'attributs  infinis.  Il  faut 
bien  comprendre,  cependant,  en  quoi  cousiste,  pour  cha- 
cun de  ces  attributs,  son  infinité.  Parlons  des  deux  seuls 
qui  nous  soient  connus,  l'Étendue  et  la  Pensée.  L'Éten- 
due, comme  attribut  de  la  Substance  infinie,  est  infinie, 
mais  seulement  d'une  infinité  relative  ;  c.-à-d.  qu'infinie 
en  tant  qu'Étendue,  elle  n'est  ni  la  Pensée,  ni  tout  autre 
attribut  de  la  Substance  infinie;  et  de  même  la  Pensée, 
infinie  en  tant  que  Pensée,  n'est  point  absolument  infinie, 
car  si  elle  l'était,  elle  serait  et  l'Étendue,  et  tous  ks 
autres  attributs  de  la  Substance  infinie,  et  la  Sub- 
stance infinie  elle-même.  Au  reste,  pourquoi  l'Étendue  et 
la  Pensée  sont-elles  les  seuls  attributs  de  la  Substance  qui 
nous  soient  connus  (car  Spinoza  ne  nomme  pas  attributs 
de  Dieu  son  éternité,  son  immutabilité,  etc  :  il  ne  les  con- 
sidère que  comme  des  conditions  nécessaires  et  inhérentes 
de  son  existence)?  pourquoi  la  faculté  d'intuition  ration- 
nelle, qui  nous  les  découvre,  ne  nous  en  découvre-t-elle 
pas  d'autres?  Nous  aurions  le  mot  de  cette  énigme  s'il 
nous  était  permis  de  faire  appel  aux  facultés  expérimen- 
tales de  l'intelligence  :  mais  il  ne  faut  pas  oublier  qu'elles 
n'ont  rien  à  voir  dans  la  philosophie  de  Spinoza.  Il  faut 
donc  nous  borner  à  prendre,  telles  qu'elles  nous  sont 
données,  les  assertions  hardies  de  son  auteur,  et  voir 
comment  il  conçoit  le  développement  nécessaire  de  l'Être 
dans  ces  attributs  et  dans  les  modes  qui  les  développent 
à  leur  tour.  En  efifet,  tout  attribut  a  nécessairement  des 
modes,  et  un  attribut  infini  a  une  infinité  de  modes,  la 
Pensée  une  infinité  d'idées,  l'Étendue  une  infinité  de 
grandeurs,  de  figures  et  de  mouvements;  mais  ici  s'ar- 
rête l'analogie  du  rapport  des  attributs  à  la  substance  et 
des  modes  aux  attributs. 

U  y  a  pour  chaque  attribut  une  infinité  de  modes;  mais 
chacun  de  ces  modes  est  fini,  déterminé,  et  n'exprime  que 
d*une  manière  finie  l'infinité  de  l'attribut.  N'oublions  pas 
que  les  modes  sont  unis  aux  attributs,  les  attributs  à  la 
substance,  par  un  enchaînement  nécessaire,  et  qu'ainsi 
modes,  attributs,  et  substance,  quoique  distingués  par 
resprit,  forment  un  tout  réellement  indissoluble,  dont  la 
Substance  est  le  fond  et  tout  l'être  :  «J'entends  par  Sub- 
stance, dit  Spinoza  (Éthique,  i^  partie.  Définitions),  ce 
qui  est  en  soi  et  est  conçu  par  soi;  par  Attribut  ce  que  la 
raison  conçoit  dans  la  Substance  comme  constituant  son 
essence;  par  Modes  les  afi^ections  de  la  Substance.  J'en- 
tends par  Dieu  un  être  absolument  infini ,  c'est-à-dire 
une  substance  constituée  par  une  infinité  d'attributs  in- 
finis, dont  chacun  exprime  une  essence  éternelle  et  in- 
finie. »  Et  ailleurs  :  «  Il  est  de  la  nature  de  la  Substance 
de  se  développer  nécessairement  par  une  infinité  d'attri- 
buts infinis  infiniment  modifiés.  »  Grâce  à  cette  assimi- 
lation, à  cette  identification  de  Dieu  et  de  la  Substance, 
Dieu  est  infini.  C'en  est  assez  pour  conclure  qu'il  est  un  ; 
mais  Spinoza  ne  se  borne  pas  aux  considérations  très- 
simples  qui  font  de  l'unité  une  condition  de  l'infinité  ; 
pour  la  démontrer,  il  s'appuie  sur  un  principe  qui,  bien 
que  vrai,  ne  nous  paraît  ni  sulfisamment  établi  par  la 
discussion,  ni  assez  évident  pour  servir  d'axiome  ;  c'est 
à  savoir,  que  deut  substances  d'attributs  identiques  se 
confondraient  en  une  seule;  cela  nous  parait  surtout  le 
résultat,  d'une  part,  de  la  Substance,  de  ses  Attributs 
et  de  ses  Modes  de  l'autre.  On  sait  désormais  très- 
positivement  à  quoi  s'en  tenir  sur  le  véritable  carac- 
tère du  Spinozisme;  on  sait,  non  plus  par  oui-dire  et 
approximativement,  mais  très-précisément,  et  preuves 
en  madn,  qu'il  est  rabM>rption  la  plus  complète,  la 
plus  absolue  de  toutes  choses  en  Dieu,  le  type  le  plus 
complet  du  Panthéisme.  On  verra  un  peu  plus  loin  ce  qui 


reste  à  l'homme  et  à  la  nature.  Achevons  l'exposition  dt 
l'idée  de  Dieu,  autant  que  cela  est  possible  dans  un  ré- 
sumé aussi  rapide  et  à  l'égard  d'un  système  où  cette 
idée  domine  tout,  explique  tout,  se  retrouve  par4:out.  Un 
fait  assez  curieux,  c'est  que  Spinoza,  maître  de  cette  idée 
par  une  intuition  tout  aussi  sûre  et  évidente,  à  ce  qu'il 
semble,  que  celles  qui  donnent  naissance  aux  définitions 
fondamentales  de  la  Géométrie,  ait  cru  nécessaire  d'en 
démontrer  la  réalité.  Il  est  vrai  que  la  preuve  qu'il  in- 
voque pour  démontrer  l'existence  de  Dieu  est  la  preuve 
que  J'appellerais  volontiers  Leibnizo- Cartésienne,  qui 
conclut  l'existence  de  Dieu  de  son  essence  telle  que  nous 
la  concevons  {V,  Dieu  —  Preuves  de  l'existence  oa).  Dieu 
conçu  comme  parfait  est  conçu  par  cela  même  comme 
existant  ;  car  il  ne  saurait  être  parfait  sans  être.  Toutes 
formes  techniques  mises  de  cô^,  ceci  revient  à  dire  : 
Nous  croyons  que  Dieu  existe  parce  que  nous  le  conce- 
vons nécessairement,  et  c'est  en  définitive  ce  qu'il  y  a  de 
plus  vrai  et  de  plus  convaincant.  Spinoza  a  eu,  pour 
rendre  cette  pensée,  une  expression  des  plus  heureuses  : 
«  Si  Dieu  n'existait  pas,  la  pensée  pourrait  concevoir  plus 
que  la  nature  ne  saurait  fournir.  » 

Dieu  est  infini  ;  c'en  est  assez  pour  conclure  qu'il  est 
un  ;  mais  Spinoza  ne  se  borne  pas  aux  considérations 
très-simples  qui  font  de  l'unité  une  des  conditions  de 
de  l'infinité.  Pour  la  démontrer,  il  s'appuie  sur  ce  prin- 
cipe qui,  bien  que  vrai  peut-être,  ne  nous  paraît  ni  suf- 
fisamment établi  par  la  discussion,  ni  assez  évident  par 
lui-même  pour  servir  d'axiome  :  que  deux  substances 
d'attributs  identiques  se  confondraient  en  une  seule.  Ce 
principe  admis,  comme  la  Substance,  telle  qu'elle  a  été 
définie,  ne  peut  êtro  ni  créée  ni  produite  par  une  sub- 
stance difi'érente  d'elle-même,  il  s'ensuit  rigoureuse- 
'  ment  que  Dieu  est  un  ;  cela  nous  paraît  partout  le 
résultat  d'une  appréciation  étroite  et  faible  de  l'intelli- 
gence divine.  -Cette  prétention  nous  semble  surtout  in- 
tolérable et  illogique  ici,  où,  pour  exclure  le  monde  de 
la  pensée  de  Dieu,  il  faut  en  quelque  sorte  scinder  Dieu, 
le  séparer  de  lui-même;  et  cela,  quand  toutes  les  autres 
parties  du  système  tendent  à  l'unification  la  plus  absolue, 
la  plus  excessive.  —  Nous  ne  pourrions,  sans  étendre 
démesurément  cet  article,  insister  sur  des  points  qui  ont 
pourtant  de  l'importance  ;  il  faut  donc  glisser  sur  la  ma- 
nière dont  Spinoza  entend  ce  qu'il  appelle  la  Liberté  en 
Dieu,  conservant  le  nom,  supprimant  la  chose  ;  car  qui 
reconnaîtrait  la  Liberté  dans  cette  activité  gui  n'a  ni  le 
choix  des  motifs,  ni  le  pouvoir  de  ne  pas  faire  ce  qu'elle 
fait,  et  que  Spinoza  ne  qualifie  de  Liberté  que  parce  qu'il 
la  considère  comme  déterminée  par  elle-même  et  par  sa 
nature;  en  d'autres  termes,  parce  que  la  Liberté,  telle 
qu'on  la  comprend  d'ordinaire,  lui  faîit  complètement  dé- 
faut? Aussi  est-il  plein  de  dédain  pour  l'opinion  puérile 
et  superstitieuse,  selon  lui,  qui  fait  de  la  création  l'efiet 
d'une  détermination  prise,  à  un  moment  donné,  par  la 
volonté  divine.  Non,  Dieu  n'est  pas  le  créateur  du  monde, 
comme  on  l'entend  vulgairement  ;  mais  il  en  est  la  cause 
immanente,  créant  sans  cesse,  en  ce  sens  que  sans  cesse 
il  se  développe,  «  remplissant  la  durée  infinie  de  l'iné- 
puisable variété  de  ses  effets.  »  Toutes  choses,  dans  le 
monde,  sont  donc  ce  qu'elles  doivent  être;  il  ne  faut  pas 
en  chercher  hors  d'elles-mêmes  la  cause  finale;  elles  sont 
non  en  vue  d'une  certaine  fin,  mais  par  la  nécessité  qui 
leur  est  inhérente;  elles  font  partie  d'un  ordre  immuable 
et  nécessaire;  tout  est  bien  par  cela  seul  qu'il  est;  il  ne 
faut  pas  chercher  d'autre  idée  du  Bien.  Voilà  le  principe 
métaphysique.  On  verra  tout  à  l'heure  quelles  consé- 
quences Spinoza  en  a  tirées  en  Morale. 

L'Ame,  qui  est  une  idée,  ou,  pour  parler  plus  exacte- 
ment., une  collection  d'idées,  une  suite  de  modes  de  la 
Pensée  étroitement  unie  à  une  suite  de  modes  de  l'Éten- 
due, en  deux  mots  Vidée  du  corps  humain,  n'a  point,  à 
proprement  parler,  de  facultés.  U  serait  assez  difficile 
d'expliquer  comment,  au  sein  de  ce  grand  tout  dont  elle 
n'est  qu'un  humble  élément,  elle  garde  la  conscience  de 
sa  personnalité.  Quant  aux  différentes  fonctions  de  l'En- 
tendement, quant  à  la  volonté,  ce  sont  des  êtres  de  rai- 
son, sous  lesquels  on  ne  retrouve,  au  vrai,  que  telle  ou 
telle  pensée,  telle  ou  telle  volition  déterminée.  La  pensée 
d'ailleurs  et  la  volition  ne  sont  pas  difl'érentes;  la  pensée 
est  l'idée  considérée  comme  représentative;  la  volition 
est  encore  l'idée,  mais  considérée  comme  active;  deux 
points  de  vue  différents  sans  doute,  mais  ml  fond  tout 
tend  à  l'unité.  L'Ame  se  connaît  elle-même,  voilà  Ix 
conscience;  elle  connaît  le  corps  humain,  voilà  les  sens. 
L'impression  des  corps  étrangers  laisse  des  traces  qu^ 
subsistent  en  leur  absence.  L'Ame,  en  saisissant  c» 


SPI 


1662 


SPI 


traees.  Imagine  et  se  souvient  ;  en  les  saisissant  dans  leur 
liaison,  elle  associe  ses  idées.  Tout  cela  constitue  la  por- 
tion la  plus  humble  de  Tintelligence,  YExpériMce  vague, 
au-dessous  de  laquelle  il  n'y  a  que  cette  perception  très- 
imparfaite  qui  se  fonde  sur  un  simple  oui-dire,  mais  au- 
dessus  de  laquelle  la  perception  des  rapports,  puis,  en 
8*élevant  toujours,  la  conception  de  TEssence  et  de  la  cause 
immédiate  des  choses,  sont  le  yéritable  acheminement 
à  la  science.  De  là  une  Logique  que  Spinoza  lui-même  a 
suivie,  ou  du  moins  &*est  efforcé  de  suivre  en  toute  cir- 
constance avec  toute  la  rigueur  possible,  allant  droit,  en 
tout,  à  la  Substance.  Une  conséquence  de  tout  ceci,  consé- 
quence qui  reparaîtra  bientôt  en  Morale  sous  un  jour  tout 
à  fait  singulier  et  inattendu,  c'est  que  plus  TAme  s*élève, 
dans  l'ordre  de  la  pensée,  vers  la  Substance,  c-à-d.  vers 
Dieu,  plus  ses  idées  deviennent  claires  et  adéquates,  et 
plus,  dans  l'harmonie  de  la  Pensée,  de  l'Être  et  de  l'ac- 
tion,  elle  éprouve  de  jouissance  et  de  bonheur.  C'est,  en 
effet,  se  tromper  grossièrement  que  de  séparer  soit  dans 
l'homme,  soit  en  Dieu,  l'action  de  la  Pensée  et  de  l'Être. 
La  manifestation  la  plus  énergique  de  l'activité,  la  vo- 
lonté, n'est  dans  l'homme  que  l'effort  naturel  par  lequel 
il  tend  à  conserver  et  à  augmenter  son  être.  Quand  cette 
tendance  se  rapporte  à  l'homme  tout  entier,  corps  et 
&me,  pensée  et  étendue,  Spinoza  la  nomme  Appétit; 
quand  elle  se  rapporte  exclusivement  à  l'Ame,  il  la 
nomme  Volonté.  «  Le  Désir,  ajoute-t-il,  c'est  l'appétit  avec 
conscience  de  lui-même.  »  Il  est  impossible  d'assimiler 
plus  positivement  le  Désir  et  la  Volonté,  ce  qui  est  une 
source  féconde  d'erreurs  en  Morale.  Et  de  ce^  deux 
phénomènes,  quel  est  celui  au  profit  duquel  cette  assi- 
milation a  lieu,  et  dans  lequel  l'autre  se  trouve  ab- 
sorbé? Le  Désir  est  fatal  (F.  Désm);  selon  nous  et  se- 
lon le  sens  commun,  la  Volonté  est  libre,  tellement  libre, 
qu'elle  est  la  liberté  elle-même  (7.  Volonté,  Liberté, 
LiBRB  Arbitkb^.  Or,  la  liberté  consistant  pour  Spinoza 
dans  une  activité  qui  n'est  déterminée  par  aucune  cause 
étrangère,  qui  se  détermine  par  soi-même  et  se  déve- 
loppe par  la  nécessité  de  la  nature,  non-seulement  la 
liberté,  au  sens  ordinaire  du  mot,  ne  se  trouve  nulle 
part,  mais  cette  liberté  nominale  elle-même  ne  se  trouve 
qu'en  Dieu;  elle  n'existe  point  chez  l'homme.  Si  l'homme, 
dans  le  système  de  Spinoza,  conserve  quelque  chose  qui 
retient  le  nom  de  Volonté,  ce  n'est  en  réalite  que  le  désir 
dont  l'Ame  est  fatalement  possédée  de  persévérer  dans 
son  être  et  de  l'étendre.  Et  comme  l'Ame,  encore  une 
fois,  n'est  qu'âne  collection  d'idées,  qu'ainsi  c'est  par  les 
idées  qu'elle  existe,  d'autant  plus  réelle  qu'elle  a  des 
idées  plus  claires  et  plus  adéquates  ;  comme  il  n'y  a  pas, 
ainsi  qu'on  l'a  dit  pi^édemment,  d'idées  plus  claires^ et 

{)lus  adéquates  que  celles  qui  résultent  de  l'intuition  par 
aquelle  la  Raison  pénètre  les  choses  dans  leur  essence, 
et  comme  Tobjet  le  plus  noble  auquel  elle  puisse  et 
doive  tendre,  c'est  l'Être  infini  et  éternel  qu'elle  possède 
avec  plénitude  dès  qu'elle  le  conçoit  clairement,  il  s'en- 
suit, en  dernière  analyse,  que  le  désir  unique  et  suprême 
dans  lequel  Spino7A  anéantit  la  volonté,  et  dont  il  fait 
dériver  toutes  les  passions  particulières,  est  ce  désir  de 
connaissance  et  de  vérité  qui  ne  peut  être  satisfait  que 
par  la  fusion  et  l'absorption  de  l'Intelligence  dans  l'Être 
absolu.  Tel  est  effectivement  le  dernier  mot  de  la  Morale 
de  Spinoza  (une  Morale,  chose  étrange  dans  un  système  où 
tout  est  livré  à  la  fatalité!)  et  le  contre-poids  qu'il  oppose 
tout  à  coup  aux  conséquences  déplorables  vers  lesquelles 
il  a  marché  avec  une  hardiesse  inouïe.  En  effet,  livrés  que 
nous  sommes  à  dm  appétits  et  à  des  désirs  qui  deyien- 
nent  joie  ou  tris'cesse,  suivant  qu'ils  sont  favorisés  ou 
contrariés  par  l'action  des  causes  étrangères,  ne  faisant 
pas  notre  destinée,  mais  la  subissant,  n'ayant  pas  à 
choisir  entre  le  bien  et  le  mal,  dépourvus  de  vraie  liberté, 
et  réduits  à  l'état  d'automates  spirituels,  que  pourrions- 
nous  faire  de  mieux  que  de  chercher  partout,  toujours  et 
à  tout  prix,  la  satisfaction  de  nos  appétits  et  de  nos  dé- 
sirs? Quel  autre  droit,  quel  autre  devoir  aurions-nous  à 
remplir,  si  cette  Morale  égoïste  et  passionnée  ne  se  rele- 
vait tout  à  coup  par  l'apparition  d'un  principe  qui  vient 
tout  épurer,  l'amour  de  Dieu,  identique  à  l'amour  de  la 
vérité?  A  la  lumière  de  ce  principe,  tous  les  appétits  bas, 
tous  les  grossieors  désirs  s'effacent  et  disparaissent,  et 
l'Ame,  enivrée,  dès  cette  vie.  de  l'avant-goût  de  la  vérité, 
commence  à  jouir  de  la  béatitude  qui  lui  est  réservée  pour 
l'éternité.  Spinoza  professe  très-expressément  la  croyance 
à  l'immortalité  de  l'Ame.  On  lui  a  reproché  de  n  avoir 
point,  dans  sa -Métaphysique,  les  principes  d'une  dé- 
monstration légitime  à  ce  sujet.  Le  reproche  (il  est  vrai 
^e  c'est  là  ce  qu'il  y  a  de  plus  grave)  ne  me  parait  fondé 


qu'en  ce  qui  concerne  l'immortalité  accompagnée  de  con- 
science. Quant  à  la  persistance  dans  l'Être,  elle  résulte 
directement  de  la  manière  dont  l'&me  est  définie  :  un 
mode  de  la  Substance  nécessaire,  éternelle.  11  en  est  de 
même  du  corps,  dira-tron.  Aussi  Spinoza  ne  croit-il  pas 
qu'il  soit  détruit  absolument,  et  sa  Métaphysique  hardie, 
qui  veut,  dans  les  corps,  les  modificauons  infiniment 
variées  de  l'Étendue  infinie,  ne  s'éloigne  pas  trop  des 
conclusions  de  la  Physique  moderne,  qui  ne  voit,  elle 
aussi,  dans  les  phénomènes  relatifs  à  la  génération,  à  la 
vie  et  à  la  destruction  des  êtres  matériels,  qu'une  suite  de 
transformations.  Quant  à  l'immortalité  de  l'Ame  con- 
sciente d'elle-même,  il  faut  avouer  qu'elle  parait  bien 
hypothétique  dans  un  système  qui  n'admet  ni  la  distinc- 
tion fondamentale  du  bien  et  du  mal,  ni  le  libre  arbitre, 
ni  le  mérite  et  le  démérite,  ni  par  conséquent  la  n^ 
cessité  et  la  justice  d'une  réparation.  Il  est  de  fait  ce- 
pendant que  Spinoza,  tout  en  pensant  que  certaines 
actions  de  l'&me  cessent  avec  les  affections  du  corps  qui 
les  i)rovoqoent,  déclare  que  la  meilleure  partie  de  l'Ame 
est  immortelle,  et  que  la  vie  future,  loin  d'exclure  la 
personnalité,  en  fait  une  condition  du  iwnheur  dont  nous 
devons  y  jouir. 

Ce  bonheur,  on  voit  Spinoza  en  jouir  par  avance  dans 
la  vie  austère,  de  solitude,  de  travail  manuel  et  de  mé- 
ditation qu'il  s'était  faite,  et  que  les  biographes  nous  ont 
racontée.  (V.  pour  les  renseignements  à  ce  scyet  l'artide 
Spinoza  de  notre  Dictionnaire  de  Biographie).  Ceci  n'est 
point  une  apologie  de  sa  philosophie,  mais  une  juste  ap- 
préciation de  son  caractère.  Cet  homme,  qui  a  embra^ 
l'erreur  avec  tant  de  résolution,  semble  n'avoir  en  qu'une 
passion,  celle  de  la  vérité.  11  est  et  il  restera  le  type  des 
esprits  hardis  qu'un  premier  pas  jette  à  tout  jamais  en 
dehors  de  la  bonne  voie,  et  qui  se  perdent  par  leur  ar- 
deur et  leur  sincérité  même.  Aussi  ne  peut-on  pas  dire 
qu'il  ait  fait  école.  Le  Spinozisme,  malgré  l'enthou- 
siasme de  quelques  rêveurs,  malgré  la  conformité  plos 
apparente  que  réelle  que  présentent  avec  lui,  sur  cer- 
tains points,  les  doctrines  panthéistes  de  l'Allemagne 
contemporaine,  n'est  et  ne  sera  jamais  que  la  philosophie 
de  Spinoza.  Dans  l'intention  d'absoudre  le  Cartésianisme 
de  la  responsabilité  d'une  pareille  doctrine,  on  a  cherché 
récemment  jusqu'à  quel  point  elle  pourrait  être  rattachée 
à  la  tradition  rabbinique  dont  Spinoza,  bien  qu'en  de- 
hors de  l'orthodoxie  judaïque,  devait  être  pénétré.  Cette 
recherche  a  donné  lieu  à  des  travaux  intéressants, (de 
M.  V.  Cousin,  dans  le  Journal  des  Savants,  de  M.  Ém. 
Saisset  dans  la  Revue  des  Deux  Mondes);  mais  nous  ne 
pouvons  aborder  ici  cette  discussion  érudite  et  délicate. 
Sur  le  Spinozisme,  F.,  outre  les  ouvrages  indiqués  à  l'art. 
Spinoza  de  notre  Dictionnaire  de  Biographie,  l'article 
Spinoza  du  Dictionnaire  critique  de  Bayle,  et,  dans  le 
Cours  de  Droit  naturel  de  Jouiffiroy,  les  deux  leçons  con- 
sacrées au  Panthéisme.   .  B^-e. 

SPINTfiniENNES  (des  Spinthries,  compagnons  de  dé- 
i/auche  de  Tibère  à  Caprée),  nom  donné  à  certaines  mé- 
dailles de  rAnti(}uité,  qui  n'eurent  jamais  cours  comme 
monnaies,  et  qui  représentent  des  sujets  licencieux. 

SPIRE  (Cathédrale  de).  Commencée  vers  l'an  916  par 
le  roi  Conrad  1*',  continuée  par  Conrad  II  le  Salique  et 
Henri  III,  et  terminée  en  i097  sous  le  règne  de  Henri  IV, 
cette  église  jouit  d'une  grande  célébrité  :  on  en  vantait 
les  dimensions,  la  belle  ordonnance  et  les  six  clochers. 
Un  incendie  la  dévasta  en  il65,  et  les  archéologues  rap- 
portent à  la  restauration  considérable'  qui  suivit  cet  acci- 
dent la  coupole  byzantine  à  huit  pans  qu'on  voit  au- 
jourd'hui au-dessus  du  transept.  A  la  suite  de  nouveani 
incendies  en  1289  et  en  1450,  il  fallut  encore  procéder  à 
des  reconstructions.  L'église  de  Spire  eut  ensuite  à  souffirir 
les  horreurs  de  la  guerre  :  les  Français  l'ayant  livrée  aax 
flammes  en  1689,  il  n'en  resta  que  les  deux  tours.  Faute 
d'argent,  on  remit  seulement  le  chœur  en  état  de  servir 
au  culte;  les  nefs  ne  furent  relevées  que  de  1772  à  1784. 
Dix  ans  après,  l'édifice  fut  converti  par  les  Français  en  ma- 
gasin à  fourrages;  il  a  été  réparé  et  achevé  depuis  1823. 
—  La  cathédrale  de  Spire  appartient  à  la  famille  romane 
des  églises  à  double  abside.  Elle  a  117  met.  de  longueur 
et  36  met.  de  largeur  (58  au  transept)  ;  le  diamètre  de 
l'hémicycle  de  l'abside  est  de  19"*,50  ;  les  tours,  appliquées 
aux  bras  du  transept  ont  73  met  d'élévation,  ut  décora- 
tion extérieure  de  l'église  est  simple,  et  néanmoins  d'us 
grand  effet;  elle  se  compose  surtout  de  lignes  ardiitecto- 
rales,  de  colonnes  et  de  colonnettes,  de  cordons,  d'ar-  ' 
cades  et  de  moulures.  L'intérieur  est  couvert  de  belles 
peintures  murales,  exécutées  d'après  les  cartons  de 
Schraudol()h.  0^4uu  piliers  carrés  séparent  la  grande  nd 


SPT 


1G63 


SPl 


A  ses  collatéraux.  An  milieu  de  la  nef,  on  voit,  à  terre, 
a  roses  de  pierre  qui  marquent  la  place  où  S'  Bernard 
Tècha  la  seconde  Croisade.  Une  dizaine  de  marches  con- 
c  lisent  de  la  nef  dix  Chœur  des  roiSf  sous  lequel  Con- 
rad II  et  sa  femme  Gisèle,  Henri  IIJ,  Henri  IV  et  sa  femme 
Berthe,  Henri  V,  Béatrix,  2*  femme  de  Frédéric  Barbe- 
rousse,  Philippe  de  Souabe,  Rodolphe  de  Habsbourg^ 
Adolphe  de  Nassau,  Albert  d'Autriche,  furent  inhumés. 
Neuf  degrés  montent  du  Chœur  des  rois  sous  la  coupole 
où  8*élèye  le  maître- autel.  Sous  la  partie  orientale  de 
l'église  8*étendune  crypte,  soutenue  par  20  piliers  massifs 
et  courts;  on  y  voit  des  fonts  baptismaux  du  ix*  ou 
X*  siècle,  et  un  vieux  tombeau  de  Rodolphe  de  Habsbourg. 
L'église  de  Spire  avait  un  beau  cloître,  bâti  en  1437  ;  il 
n'existe  plus.  On  regrette  également  la  perte  du  Baptis- 
tère, édifice  en  forme  d'octogone,  orné  de  hait  colonnes 
et  surmonté  d'un  dôme.  B. 

SPIRE,  en  termes  d'Architecture,  base  d*une  colonne 
lorsque  le  profil  de  cette  base  va  en  serpentant. 

SPIRITISME,  doctrine  d'après  laquelle  les  Esprits  ou 
âmes  qui  ont  animé  autrefois  des  con>s  humains  sont  er- 
rants dans  le  monde  invisible,  et  peuvent  être  évoqués  et 
interrogés  dans  le  nùtre.  Un  spirite  définit  le  spiritisme  : 
«  la  doctrine  fondée  sur  l'existence,  les  manifestations,  et 
l'enseignement  des  Esprits,  »  [ou,  plutôt, par  les  Esprits]; 
car  cet  enseignement  est  surtout  la  grande  prétention 
des  spirites.  Voici  par  quels  faits  et  quels  raisonnements 
ils  furent  conduits  à  cette  découverte  :  vers  1850,  aux 
États-Unis  d'Amérique,  divers  phénomènes  étranges, 
consistant  en  bruits,  coups  frappés,  et  mouvements  d'ob- 
jets inertes,  attirèrent  l'attention.  Ils  avaient  lieu  spon- 
tanément, disait-on,  mais  plus  particulièrement  (ce  qui 
parait  moins  invraisemblimle)  sous  l'influence  de  cer- 
taines personnes,  qui  pouvaient  en  quelque  sorte  les 
provoquer  à  volonté.  Ces  personnes  étant  les  intermé- 
diaires entre  les  effets  produits  et  la  cause  ou  puissance 
inconnue  qui  les  produisait,  à  peu  près  comme  un  fer 
aimanté  dégage  une  attraction  vers  la  foudre,  on  ima- 
gina de  les  appeler  médiums.  Ces  magiciens  naturels 
firent  tourner  des  tables,  des  chapeaux,  les  firent  même 
frapper  un  certain  nombre  de  coups,  à  volonté.  On  at- 
tribua d'abord  ces  effets  extraordinaires,  et  bien  consta- 
tés, à  un  courant  électrique  ou  magnétique,  à  Taction 
d'un  fluide  inconnu.  C'était  la  conjecture  la  plus  natu- 
relle à  former,  bien  que  ce  ne  fût  pas  une  explication. 
A-t-on  expliqué  les  phénomènes  de  l'électricité ,  ceux  du 
magnétisme,  etc.?  On  les  a  constatés,  et,  jusqu'à  présent, 
la  science  n*a  pu  aller  au  delà.  Les  spirites,  moins  ré- 
servés, ont  absolument  voulu  expliquer  pourquoi  une 
table,  mise  en  rapport  avec  un  médium,  lui  obéissait 
tant  qu'il  la  touchait  ;  se  dirigeait  à  droite  ou  à  gauche, 
suivant  ce  qu'il  lui  commandait,  vers  une  personne  pré- 
sente désignée  ;  frappait  de  ses  pieds  le  nombre  de  coups 
qu'il  lui  demandait,  battait  la  mesure,  etc.  Alors  ils  ont 
conclu  que  ce  phénomène  devait  être  exécuté  par  une 
tntelligence  ;  mais  ne  la  voyant  point  dans  le  médium 
lui  -  môme  ou  dans  les  assistants  à  l'expérience ,  alors 
ils  supposèrent  que  tout  cela  s'exécutait  par  un  être  in- 
visible ,  et  imaginèrent  un  langage  de  convention  pour 
cet  être  non  moins  muet  qu'invisible:  ce  fut,  après 
chaque  question,  un  certain  nombre  de  coups  de  l'Esprit 
frappeur,  les  uns  signifiant  oui,  les  autres  non.  On  alla 
même,  dit-on,  jusqu'à  faire  un  alphabet  au  moyen  des 
coups,  de  sorte  c|ue  l'Esprit  pouvait  converser  avec  au- 
tant de  facilité,  smon  de  célérité,  qu'un  vrai  sourd-muet 
de  naissance,  ou  qu'un  cadran  de  télégraphe  électrique. 
Ce  langage  fut  appelé  tables  parlantes,  terme  un  peu  am- 
bitieux, car  frapper  ou  faire  des  signes  n'est  pas  parler. 
Quoi  qu'il  en  soit,  il  paraît  que  les  coups  de  pied  furent 
si  intelligemment  donnés,  que  «  tous  les  êtres  qui  se 
communiquèrent  de  cette  façon,  dit  un  spirite,  interrogés 
sur  leur  nature,  déclarèrent  être  des  Esprits,  et  appar- 
tenir au  monde  invisible.  »  Cette  déclaration  n'est  peut- 
être  pas  des  plus  concluantes;  car,  dans  tous  les  mondes 
possibles,  qui  n'a  pas  l'ambition  d'être  un  esprit,  surtout 
en  présence  de  gens  disposés  à  vous  croire  tel?  Quant  à 
l'invisibilité,  la  déclaration  était  superflue,  attendu  que  ce 
que  Ton  voyait  le  mieux  dans  chaque  manifestation,  c'est 
qu'on  ne  voyait  pas  l'Esprit  qui  l'efifectuait 

Ces  Esprits,  amsi  que  nous  l'avons  dit  au  début,  étant 
des  âmes,  on  demandera  peut-être  si  la  philosophie  est 
venue  enfin  à  bout  de  résoudre  d'une  manière  formelle, 
positive,  palpable,  pour  ainsi  dire,  la  grande  question  de 
la  nature  de  Tftme?  Voici  ce  que  répond  un  spirite  :  — 
«  On  se  fait  généralement  des  Esprits  une  Idée  complé- 
leniunt  fausse  ;  ce  ne  sont  pas,  comme  beaucoup  se  les 


figurent,  des  êtres  abstraits,  vagues  et  indéfinis,  ni  quAl« 
que  chose  comme  une  lueur  ou  une  étincelle;  ce  sont, 
au  contraire,  des  êtres  très-réels^  ayant  leur  individualité 
et  une  forme  déterminée.  On  peut  s'en  faire  une  idée 
approximative  par  l'explication  suivante  :  —  Il  y  a  en 
l'homme  trois  choses  essentielles  :  i^  VAm&  ou  Esprit , 
principe  intelligent  en  qui  résident  la  pensée,  la  volonté, 
et  le  sens  moral;  2*  le  Corps,  envâoppe  matérielle, 
lourde  et  grossière,  qui  met  l'Esprit  en  rapport  avec  le 
monde  extérieur;  S"»  le  Périsprit,  enveloppe  fluidique, 
légère,  servant  de  lien  et  d'intermédiaire  entre  l'Esprit 
et  le  corps.  Lorsque  l'enveloppe  extérieure  est  usée  et  ne 
peut  plus  fonctionner,  elle  tombe,  et  l'Esprit  s'en  dé- 
pouille conmie  le  fruit  se  dépouille  de  sa  coque;...  c'est 
ce  qu'on  appelle  la  Mort,  L'Esprit  ne  meurt  pas;  il  ne 
quitte  que  le  corps  matériel  :  il  conserve  le  Pénsprit,  qui 
constitue  pour  lui  une  sorte  de  corps  éthéré,  vaporeux, 
impondénible  pour  nous,  et  de  forme  humaine,  qui  pa* 
raît  être  la  forme  type...  C'est  à  l'aide  du  Périsprit  que 
l'Esprit  agit  sur  la  matière  inerte.  » 

Voilà  sans  doute  le  lecteur  bien  instruit  des  forces  de 
l'Esprit,  et  de  l'idée  «  approximative  »  de  sa  forme.  Quant 
à  nous,  cette  forme  «  qui  paraît  être  la  forme  humaine,  » 
nous  ne  la  voyons  qu'à  travers  une  perspective  aérienne 
si  éloignée,  si  éthérisée,  c[ue  nous  ne  distinguons  rien. 
Cependant,  par  impartialité,  hàtons-nous  de  dire  (tou- 
jours au  rapport  du  spirite  qui  nous  sert  de  guide)  que  : 
«  les  Esprits  peuvent  encore  se  manifester  par  la  vue  et 
par  l'audition.  Certaines  personnes,  dites  médiums  au^ 
ditifs,  ont  la  faculté  de  les  entendre,  et  peuvent  ainsi 
converser  avec  eux;  d'autres  les  voient;  ce  sont  les 
médiums  voyants.  Les  Esprits  qui  se  manifestent  à  la 
vue  se  présentent  généralement  sous  une  forme  analogue 
à  celle  qu'ils  avaient  de  leur  vivant,  mais  vaporeuse; 
d'autres  fois,  cette  forme  a  toutes  les  apparences  d'un 
être  vivant,  au  point  de  faire  complètement  illusion,  et 
qu'on  les  a  quelquefois  pris  pour  des  personnes  en  chair 
et  en  os,  avec  lesquelles  on  a  pu  causer  et  échanger  des 
poignées  de  main ,  sans  se  douter  qu'on  avait  affaire  à 
des  Esprits,  autrement  que  par  leur  disparition  subite.  » 

A  la  rigueur,  rien  ne  prouverait  mieux  un  Esprit  que 
cette  disparition  subite,  car  eux  seuls  peuvent  être  doués 
d'une  telle  prestesse.  Mais  le  fait  dt  leur  présence,  in- 
contestable pour  ceux  qui  en  ont  joui ,  n'est  pas  pai*ti- 
culier  aux  médiums;  bien  d'autres  personnes  ont  eu  la 
môme  faveur,  en  tout  temps,  et  l'ont  encore,  sans  l'in- 
voquer, il  est  vrai,  mais  à  la  condition  d'être  plongées 
dan»  le  sommeil.  L'apparition  ne  s'évanouit  qu'à  leur  ré- 
veil, et  en  cela  ces  voyants  ne  sont  pas  des  médiums. 

Un  autre  point  de  supériorité  des  privilégiés  du  spiri- 
tisme, point  attesté  par  des  faits  connus,  c'est  de  pouvoir 
servir  de  secrétaires  aux  Esprits,  et  de  se  transformer  mo- 
mentanément, et  à  leur  propre  insu,  en  savants  ou  en  ar- 
tistes, sans  être  ni  l'un  ni  Tautre,  «  L'écriture,  dit  encore 
un  spirite,  offre  aux  Esprits  le  moyen  'le  plus  complet , 
le  plus  rapide,  et  le  plus  commode  d'exprimer  leurs  pen- 
sées; aussi  est-ce  celui  qu'ils  préfèrent.  Par  la  même 
raison  qu'ils  peuvent  faire  former  des  caractères,  ils  peo- 
vent  guider  la  main  pour  faire  tracer  des  dessins,  écrire 
de  la  musique,  exécuter  un  morceau  sur  un  instrument; 
en  un  mot,  à  défaut  de  leur  propre  corps  qu'ils  n'ont 
plus,  ils  se  servent  de  celui  du  médium  pour  se  manifester 
aux  honames  d'une  manière  sensible.  » 

Nous  lyouterons  que ,  sauf  les  phénomènes  dont  vient 
de  parler  un  adepte  de  la  science,  le  Spiritisme  n'est 
autre  chose  que  la  métempsycose  ou  transmigration  des 
âmes  allant  animer  d'autres  corps  dans  d'autres  pla- 
nètes, mondes  supérieurs  ou  inférieurs,  où  elles  vivent 
heureuses  ou  malheureuses,  suivant  le  degré  de  mérite 
ou  de  démérite  de  leur  conduite  dans  le  monde  dont  elles 
sortent.  Elles  passent  ainsi  indéfiniment,  disent  les  spi- 
rites, d'incarnation  en  incarnation,  jusqu'à  ce  qu'elles 
aient,  par  l'exercice  de  leur  vertu  propre,  acquis  la  per^ 
fection  morale.  Alors  elles  deviennent  de  purs  Esprits, 
admis  à  jouir  de  la  vue  complète  de  Dieu  et  d'un  bon- 
heur sans  mélange,  durant  l'éternité.  Pendant  les  inter- 
valles de  ses  existences  corporelles,  l'Esprit  est  errant  ; 
mais'  rerratidté  n'ayant  pas  de  durée  déterminée,  dans 
cet  état  il  ressent  un  bonheur  ou  éprouve  un  malheur 
proportionnés  au  bon  ou  mauvais  emploi  de  sa  dernière 
existence.  —  Gomment  sait-on  tout  cela,  direz-vous? 
Belle  question  !  Par  ceux  qui  ont  été  y  voir,  par  les  Es- 
prits eux-mêmes,  gens  les  plus  sociables  du  monde,  se 
communiquant  avec  plaisir,  et  décrivant  volontiers  leurs 
impressions  de  joies  ou  de  peines,  dit  encore  notre  spi- 
rite, dans  l'Empyrée  où  ils  se  promènent ,  en  disponib** 


SPÎ 


1664 


sr! 


lité  pour  un  des  milliers  de  mondes  de  Tunivers.  Quand 
ils  entrent  dans  une  nouvelle  incarnation ,  ils  n*ont  plus 
eonscience  de  la  précédente;  ils  n*en  gardent  que  les 
penchants,  bons  ou  mauvais,  qui  sont  les  instincts  ou  les 
aptitudes  de  leur  nouveau  jeune  âge,  et  qu^ils  doivent  dé- 
relopper  ou  combattre  pour  faire  un  nouveau  pas  vers  la 
perfection. 

Le  Spiritisme  a  passé  promptement  d'Amérique  en  Eu- 
rope, et  aujourd'hui ,  dit-on ,  il  est  très-répandu  dans 
notre  vieux  monde.  L'esprit  humain  aime  tant  le  mer- 
veilleux, que  cela  n'a  nen  d'invraisemblable.  Il  serait 
puéril  de  nier  qu'il  y  a  du  surnaturel  dans  certaines  pra- 
tiques du  Spiritisme;  mais  la  prétention  de  l'élever  au 
rang  de  doctrine  philosopliique  et  religieuse  ne  nous  pa- 
rait guère  admissible  de  nos  jours.  Les  raisonnements, 
les  déductions  sur  lesquels  ils  s'appuient,  nous  ont  invo- 
lontairement rappelé  ces  jolis  vers  de  G.  Delavigne,  dans 
ion  Êpttre  à  V Académie  fntnçaise  : 

L'homme  a  dit  :  «  Je  sais  tout ,  et  J'ai  toat  défini  ; 
J'ai  poar  loi  la  raison ,  pour  borne  l'infini  ; 
L'étude  me  rarlt  k  des  hauteurs  sublimes; 
De  ce  globe  étonné  J'ai  sondé  les  abîmes;... 
Est-il  quelques  secrets  cachés  au  fond  des  cieux 
Que  n'ait  point  pénétrés  mon  regard  curieux?  » 
Moias  fier  de  sa  raison  il  eût  mieux  dit  peut-être  : 
«  J'ai  su  tout  expliquer,  ne  pouvant  tout  connaître,  x 

Il  ne  sera  pas  sans  utilité  de  donner  ici  une  courte 
exposition  do  la  doctrine  de  la  métempsycose  chez  les 
Grecs,  qui  la  déduisaient  ainsi  :  «  Nous  avons  deux  &mes, 
l'une  sensitive,  grossière,  corruptible,  périssable,  com- 

fiosée  des  quatre  éléments  ;  l'autre  intelligente,  indisso- 
uble,  émanée  de  la  divinité  même.  Je  ne  parlerai  que  de 
cette  dernière;  elle  établit  les  rapports  les  plus  intimes 
entre  nous,  les  Dieux,  les  Génies,  les  animaux,  les  plantes, 
tous  les  êtres  dont  les  &mes  ont  une  commune  origine 
avec  la  nôtre.  Ainsi  la  nature  animée  et  vivante  ne  forme 

Su'une  seule  et  même  famille,  dont  Dieu  est  le  chef, 
'est  sur  cette  affinité  qu'est  fondé  le  dogme  de  la  mé- 
tempsycose, que  nous  avons  emprunté  des  Égyptiens, 
que  quelques-uns  admettent  avec  différentes  modifica- 
tions, et  auquel  Empédocle  s'est  cru  permis  de  mêler 
les  fictions  qui  parent  la  poésie.  —  Cette  opinion  suppose 
la  chute,  la  punition  et  le  rétablissement  des  âmes.  Leur 
nombre  est  '^limité;  leur  destinée,  de  vivre  heureuses 
dans  quelqu'une  des  planètes.  Si  elles  se  rendent  cou- 
pables, elles  sont  proscrites,  et  exilées  sur  la  terre.  Alors, 
condamnées  à  s'envelopper  d'une  matière  grossière,  elles 
passent  continuellement  d'un  corps  dans  un  autre,  épui- 
sant les  calamités  attachées  à  toutes  les  conditions  de  la 
vie,  ne  pouvant  supporter  leur  nouvel  état ,  assez  infor- 
tunées pour  oublier  leur  dignité  primitive.  Dès  que  la 
mort  brise  les  liens  qui  les  enchaînent  à  la  matière,  un 
des  Génies  célestes  s'empare  d'elles;  il  conduit  aux  En- 
fers et  livre  pour  un  temps  aux  Furies  celles  qui  se  sont 
souillées  par  des  crimes  atroces  ;  il  transporte  dans  les 
astres  celles  oui  ont  marché  dans  la  voie  de  la  iustlce. 
Mais  souvent  les  décrets  immuables  des  Dieux  soumettent 
les  unes  et  les  autres  à  de  plus  rudes  épreuves  :  leur  exil  et 
leurs  courses  durent  des  milliers  d'années  ;  il  finit  lors- 
que, par  une  conduite  plus  régulière,  elles  ont  mérité 
de  se  rejoindre  à  leur  auteur,  et  de  partager  en  quelque 
façon  avec  lui  les  honneurs  de  la  divinité.  —  Empédocle 
disait  :  «  J'ai  paru  successivement  sous  la  forme  d'un 
«jeune  homme,  d'une  jeune  fille,  d'une  plante,  d'un 
«  oiseau,  d'un  poisson.  Dans  une  de  ces  transmigrations, 
•j'errai  pendant  quelque  temps,  comme  un  fantôme  lé- 
«  ger,  dans  le  vague  des  cieux;  mais  bientôt  je  fus  pré- 
«  cipité  dans  la  mer,  rejeté  sur  la  terre,  lancé  dans  le  so* 
«  leil,  jelancé  dans  les  tourbillons  des  airs.  »  (  Voyage 
d'AiMtcharsig,  ch.  64.) 

Le  Spiritisme,  on  le  voit,  ressemble  à  une  opinion 
renouvelée  des  Grecs,  avec  cette  différence,  cependant, 
que  les  Spirites  n'admettent  pas  la  transmigration  des 
âmes  humaines  dans  des  corps  d'animaux,  ou  dans  des 
plantes;  les  Grecs  l'avaient  renouvelée  des  Égyptiens; 
ce  peuple  ou  plutôt  ses  prêtres  l'avaient  probablement 
reçue  des  Indes,  où  elle  règne  encore  chez  les  HiiH 
dous  et  surtout  les  Banians,  qui  s'abstiennent  de  chair, 
respectent,  et  souvent  donnent  de  la  nourriture  à  toute 
espèce  d'animaux  ou  d'insectes.  Les  Siamois,  les  Japo« 
nais,  les  noirs  de  la  Guinée  pratiquent  la  même  croyance. 
Un  point  tù  les  Anciens  et  les  Modernes  demeurent 
inférieurs  aux  spirites  d'aujourd'hui ,  ce  sont  les  tables 
tournantes,  parlantes,  frappantes,  etc.;  encore  faut-il 
mettre  là  «xuelque  réserve,  car  les  castes  religieuses 


pourraient  bien  avoir  connu  et  pratiqué  ces  phénO'^ 
mènes.  Quant  aux  conversations  avec  les  morts,  à  leur 
apparition,  les  Anciens  avaient  leurs  évocations,  et  ils 
ont  dû  jouir  de  toutes  ces  laveurs  spirituelles  réservées 
à  nos  plus  sensitifis  médiums.  Cette  fonction  était  rem- 
plie chez  eux  par  des  personnes  de  la  caste  feligîeuse  : 
devins,  pythies,  pythonisses,  etc.  Certains  Esprits  eurent 
un  avantage  sur  les  nôtres,  ce  fut  de  se  rappeler  leurs 
existences  antérieures ,  comme  Empédocle ,  que  nous 
avons  cité,  comme  Pythagore,  qui  affirmait  avoir  été  Eu- 
phorbe au  siège  de  Troie  ;  ils  l'affirmuent;  disalent^iU 
vrai?  La  métempsycose,  la  divination,  les  évocations, 
voilà  les  compléments  du  Spiritisme.'  En  prenant  l'en- 
semble de  ces  systèmes  tant  anciens  que  modernes  pour 
des  doctrines,  l'une  n'est  pas  plus  explicable  que  l'autre 
dans  le  petit  nombre  de  ses  effets  physiques  réels,  et 
l'une  vaut  l'autre  au  point  de  vue  de  l'utilité  morale^  bien 
que  la  dernière  se  dise  le  spiritisme  chrétien,  ce  qui-ne 
sera  vrai  qu'aprte  que  l'on  aura  prouvé  que  le  christia- 
nisme et  le  dâsme  sont  la  même  chose. 

V.  Allan  Kardec,  Philosophie  spirUwUiste,  le  Livre  des 
Esprits,  5«  édit,  Paris,  1861,  gr.  in-18;  le  Livre  des  Mé- 
diums, Paris,  1862,  gr.  in-18;  le  SpirUisme  réduit  à  sa 
plus  simple  expression,  Paris,  18C3,  br.  in-13;  le  docteor 
Castle,  la  Phrénologie  spiritualiste ,  Paris,  1862,  gr. 
in-18;  de  La  Villemarqué,  VEnchanteur  Merlin,  Paris, 
1862,  gr.  ixiAS;  Apollonius  de  Tyane,  sa  vie,  ses  voyages 
et  ses  prodiges,  par  Philostrate,  traduit  du  grec  par  Chas- 
sang,  Paris,  1862,  gr.  in-18,  etc.  ;  Bibliographie  catho- 
lique, année  1861.  C.  D— T. 

SPIRITUALISME  (du  latin  spiHtus,  esprit).  Le  Spiri- 
tualisme est  une  doctrine  philosophique  qui  a  été  diver- 
sement interprétée.  On  a  nommé  ainsi  le  système  de 
ceux  qui  nient  absolument  la  réalité  de  la  matière,  comme 
Berkeley,  et  qui  ne  croient  cru'à  celle  de  l'esprit.  Ce  n'est 
là  qu'une  des  formes  de  V Idéalisme  (V.  ce  mot).  Pour  le 
distinguer  de  tout  ce  qui  n'est  pas  lui,  il  faut  voir  dans 
le  Spiritualisme  la  doctrine  de  ceux  ((ui  croient  égale- 
ment au  témoignage  des  sens  et  à  celui  de  la  conscience, 
à  l'existence  de  la  matière  et  à  celle  de  l'esprit,  du  corps 
et  de  Fàme,  du  monde  et  de  Dieu.  Le  véritable  Spiritua- 
lisme repose  sur  cette  vérité,  que  nous  ne  pouvons  con- 
naître de  la  même  manière  ce  qui  est  en  nous  et  ce  qui 
est  hors  de  nous.  L'intelligence  sent  ce  qui  se  passe  au 
dedans,  elle  voit  ce  qui  se  passe  au  dehors,  elle  conçoit 
par  la  raison  ce  qui  dépasse  les  limites  des  sens  et  de  la 
conscience.  Croire  aux  sens  et  ne  pas  croire  à  la  con- 
science, c'est  en  même  temps  croire  et  ne  pas  croire  i 
l'intelligence.  Ainsi  compris,  le  Spiritualisme,  faisant 
droit  à  tous  nos  moyens  et  ne  niant  aucune  réalité,  est 
en  quelque  sorte  la  doctrine  commune  du  genre  humain; 
la  majeure  partie  des  hommes  sont  spiritualistes,  les 
les  uns  sans  se  l'expliquer,  les  autres  par  réflexion  et 
après  un  examen  sérieux  du  matérialisme  (F.  ce  mot,  et 
l'article  Ame).  Dans  l'histoire  de  la  philosophie,  les  ma- 
térialistes sont  rares;  le  Spiritualisme,  au  contraire, 
outre  qu'il  est  implicitement  compris  dans  les  religion» 
qui,  avec  l'immortalité  de  l'&me,  admettent  la  sanction 
de  la  loi  morale  dans  une  autre  vie,  est  la  doctrine  des 
écoles  les  plus  recommandables  de  l'Antiquité,  comme 
celles  de  Pythagore,  de  Socrate,  de  Platon,  d'Alexandrie; 
Aristote,  en  lui  refusant  la  personnalité  après  la  mort, 
distinguait  cependant  l'àme  du  corps.  Chez  les  Modernes, 
Descartes  l'a  établie  en  distinguant  d'une  manière  biea 
tranchée  l'esprit  de  la  matière;  s'il  n'a  pas  bien  démontré 
l'existence  de  cette  dernière,  il  ne  l'a  pas  niée  ;  Bossuet, 
Fénelon,  Locke  lui-même,  l'ont  également  soutenue.  CeA 
la  doctrine  de  l'École  française  actuelle,  qui  se  rattache 
à  Descartes  et  à  Platon.  R. 

SPIRITUALITÉ.  En  parlant  de  l'àmo,  ce  mot  indiqae 
la  nature  du  principe  pensant,  différente  de  celle  du 
corps,  et  que  le  Spiritualisme  a  pour  but  de  faire  con- 
naître et  de  démontrer.  Spiritualité  est  synonyme  d*tm- 
matériàlité,  et,  par  conséquent,  opposé  à  matérialité; 
ainsi,  dire  que  l'àme  est  spirituelle,  c'est  dire  qu'elle  est 
incorporelle.  Dans' la  pratique  religieuse,  et  surtout  dans 
la  vie  dévote,  la  spiritualité  s'entend  des  pensées,  des 
actions  et  de  la  conduite  de  l'àme  ;  tels  sont  les  Entre- 
tiens  spirituels  de  S^  François  de  Sales.  La  spiritualité 
est  quelquefois  voisine  du  mysticisme,  comme  dans  quel- 
ques écrits  de  Fénelon  ;  elle  peut  même  devenir  linspi- 
ration  directe  du  mysticisme,  comme  dans  S^  Thérèse 
ou  Jean  de  La  Croix.  C'est  alors  qu'elle  indique  le  r&le 
exclusif  de  l'esprit,  au  mépris  et  souvent  an  détriment 
des  droits  du  corps.  Cest  de  cette  idée  de  spiritualiie 
qu'on  distingue  dans  l'interprétation  des  Écriturea  nintaa 


SQU 


166S 


STA 


le  Aens  spirituel  ou  mystique  du  sens  ttttéraU  De  là 
Tient  encore  Texpression  de  spirituel  en  parlant  de  ce 
qai  concerne  TÉglise,  et  la  distinction  du  pouvoir  spiri- 
iwl  et  du  pouvoir  temporel,  V,  Pouvoir.  R. 

SPOUAIRE.  V.  notre  Dictionn.  de  Biogr,  et  d* Histoire. 
3POLIATORI13M.  V.  BAms. 

SPONDAIQOE  (Vers),  nom  donné  dans  la  Versification 
grecque  et  latine  au  vers  héroïque  dépourvu  de  dactyle 
aa  5"  piedw  Le  vers  totalement  spondaique  est  fort  rare  : 
on  en  trouve  une  douzaine  d'exemples  environ  dans 
YHiade  et  YOdyssée.  A  partir  de  Virgile,  la  poésie  latine 
n'en  offre  plus  d'exemple.  Moins  rares,  surtout  en  grec, 
sont  les  vers  n'offrant  i,  2  ou  3  dactjrles  que  dans  le 
1"  hémistiche  ;  Virgile  en  a  encore  quelques  exemples. 
La  manière  la  plus  ordinaire  de  construire  un  vers  spon- 
daique est  de  mettre  un  dactyle  au  moins  au  4*  pied.  Le 
vers  spondaique  avait  une  allure  plus  élégante  et  plus 
naturelle  en  grec  qu'en  latin  :  aussi  les  poètes  latins  ne 
Temploient-ils  que  dans  les  cas  où  la  pensée  demande 
une  expression  grave;  chez  les  Grecs,  il  suffisait  qu'il 
fût  harmonieux  et  coulant,  et  leurs  poètes  ne  paraissent 
pas  l'avoir  recherché  en  vue  d'un  effet  littéraire.  P. 
SPONDÉASMB,  accident  de  la  musique  des  anciens 
Grecs,  qui  élevait  le  son  de  trois  quarts  de  ton. 

SPONDÉE,  en  termes  de  Versification  grecque  et  la- 
tine, pied  composé  de  deux  syllabes  longues,  comme 
tcmplûm.  Le  nom  vient  du  grec  spondè  (libation),  parce 
que  ce  pied  était  en  usage  dans  les  chants  qui  accompa- 
gnaient les  libations. 

SPONTANÉITÉ*  On  nomme  ainsi  (du  latin  sponte  sud, 
de  son  propre  mouvement)  le  second  moment  ou  la  se- 
conde forme  de  l'activité.  Celle-d  est  d'abord  fatale, 
dans  l'organisme,  elle  produit  les  contractions  du  cœur, 
les  pulsations  des  artères;  dans  l'ordre  psychologique, 
la  pensée;  faits  sur  lesquels  la  volonté  n'a  aucun  em- 
pire. L'activité  devient  ensuite  spontanée;  c'est  la  volonté 
irréfléchie,  produisant  certains  faits,  mais  pouvant  les 
changer  ou  les  arrêter,  comme  certains  mouvements 
musculaires,  certaines  pensées.  L'homme  se  porte  d'a- 
bord à  l'action  sans  avoir  délibéré  ni  réfléchi,  mais  sans 
obéir,  dans  tous  les  cas,  à  une  loi  fatale  de  l'instinct.  II 
y  a  des  actes  spontanés  qui  excitent  l'admiration,  comme 
le  cri  :  il  mot,  Auvergne  !  de  d'Assas.  Dans  ce  cas,  c*est 
la  noblesse  de  la  nature  humaine  qui  se  révèle,  et  l'on 
Ju^re  de  la  valeur  morale  d'un  homme  selon  qu'il  est  plus 
"«lontanéraent  porté  au  bien  ou  au  mal.  On  distingue 
parfaitement  un  acte  fatal  d'un  acte  spontané;  celui-ci 
tient  déjà  de  la  liberté  ;  il  ne  résulte  pas  de  la  volonté , 
mais  il  est  d'un  caractère  supérieur  à  l'instinct,  et  il 
peut  résulter  de  l'habitude.  R. 

SPORT,  mot  anglais  qui  se  dit  de  tout  Jeu  ou  divertis- 
sement en  plein  air,  comme  la  chasse,  la  pêche,  les  com- 
bats de  coqs,  et  les  courses  de  chevaux.  Le  sporlsman 
(iiomme  du  sport)  est  l'amateur  de  ces  sortes  de  plaisirs. 
SPORTULE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

SPRUCH-SPRECHERS,  c.-à-d.  diseurs  de  bons  mots, 
improvisateurs  allemands  du  xv*  siècle,  qui  s'en  allaient 
dans  les  ch&teaux  et  les  villes  rimer  et  faire  des  bouffon- 
neries pour  quelque  mince  salaire.  Parmi  eux  on  citait 
Guillaume  V^eber,  natif  de  Nuremberg. 

SQUARE,  mot  anglais  qui  signifie  carré,  et  qu'on 
emploie  pour  désigner  une  place  publique  dont  le  centre 
est  occupé  par  un  Jardin  clos  de  grilles.  A  Londres  et 
dans  quelques  autres  grandes  villes  de  l'Angleterre,  les 
squares  appartiennent  aux  propriétaires  des  maisons  ri- 
veraines, qui  seuls  en  jouissent.  Le  chancelier  Bacon, 
dans  les  premières  années  du  xvn*  siècle,  étant  ministre, 
se  fit  autoriser  à  convenir  en  promenade  les  champs  de 
Uncoln's  Inn,  et  créa  ainsi,  à  Londres,  le  premier  square. 
—  Depuis  le  règne  de  Napoléon  III,  les  squares  ont  été, 
pour  ainsi  dire,  importés  à  Paris,  maie  pour  être  rendus 
tout  à  fait  publics,  et  fournir  au  peuple  et  à  la  petite 
bourgeoisie,  dans  leur  quartier  et  sans  dérangement,  de 
vertes  et  fraîches  promenades  avec  des  bancs  de  repos  et 
des  chaises  en  fer  et  à  claire-voie.  Le  premier  fquare 
planté  à  Paris  fut  celui  de  la  place  Vintimille  :  il  date 
de  1844,  et,  à  la  mode  anglaise,  resta  propriété  particu- 
lière Jusqu'en  1862,  que  la  ville  en  prit  possessicn  ;  sa 
forme  est  ovale,  et  il  a  822  met.  de  superficie.  Les  autres 
squares  parisiens  sont,  par  ordre  de  création,  ceux  :  — 
de  la  Tour  Saint' Jacques .  ouvert  en  1856,  superficie, 
5,897  met.;  —"de  Sainte-Clotilde ,  ouvert  en  1856,  su* 
pcrf.,  1,797  met.;  —  du  Temple,  ouvert  en  1857,  su- 
perf  ^  7,692  met.;  —  de  Louvois,  ouvert  en  1858,  8u« 
perf,  1,827  met.;  —  du  ?^ouveau  Louvre, divisé  eu  deus 


parties,  ouvert  eu  1859,  superf.,  ensemble,  5,000  met.  ;  *•' 
des  Innocents,  ouvert  en  1860,  superf.,  2,000  met.;  — 
des  Arts-et-Métiers,  ouvert  en  1861,  superf.,  4,145  met.; 
—  de  BellevUle,  ouvert  en  1862,  superf.,  8,645  met.  — 
Chaque  square  est  encadré  dans  un  petit  soubassement 
de  pierre,  portant  soit  un  Joli  treillage  de  feo  haut  de 
l'",iO  ou  l'",20;  soit  une  grille  de  fer,  haute  de  1"*,60  à 
2  met.;  soit  enfin  une  balustrade  de  pierre,  haute  de 
l'",10  :  telle  est,  par  exemple,  celle  du  square  des  Arts- 
et-Métiers.  Quelques-uns,  ceux  de  la  Tour  S^- Jacques, 
des  Innocents,  de  Louvois,  ont  à  leur  centre  d'élégants 
monuments  :  le  l*^  une  belle  tour  gothique  du  xvi*  siècle; 
le  second,  une  charmante  fontaine  de  Jean  Goujon  ;  le  3*, 
une  belle  fontaine  dans  le  style  Renaissance,  œuvre  de 
Visconti;  celui  des  Arts-et-Métiers  est  orné  de  2  bassins 
de  pierre,  oblongs,  avec  une  vasque  et  un  jet  d'eau  entre 
deux  statues  de  bronze  assises  de  chaque  côté;  celui  du 
Temple  a  un  petit  lac  où  tombe,  d'un  rocher,  une  abon- 
dante nappe  d'eau. 

Ces  charmants  jardins  s'augmentent  chaque  jour,  grâce 
aux  soins  constants  de  l'Administration  municipale  pour 
l'embellissement  de  Paris  et  le  bien-être  des  habitants 
de  toutes  classes  :  il  y  a  encore  en  ce  moment  (no- 
vembre 1862)  quatre  squares  en  cours  d'exécution,  qui 
sont  ceux  :  —  de  Montrouge,  superf.,  7,000  met  ;  —  aes 
Batignolles,  superf.,  19,826  met.  ;  —  de  ia  Réunion  (Cha- 
ronne),  superf.,  1,808  met;  de  Malesherbes ,  superf., 
9,000  met  —  On  doit,  en  outre,  transformer  celui  de 
VArchevéché,  en  créer  un  très-beau  à  l'un  des  carrefours 
de  la  rue  La  Fayette  prolongée,  de  sorte  que,  dans  un 
temps  prochain,  Paris  aura  16  de  ces  élégants  et  com- 
modes jardins  de  quartier,  car  il  faut  compter  parmi  les 
sauares  le  jardin  de  la  Place  Royale  (V,  Rotale  — 
Place,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'His" 
toire)  ;  cette  plantation  ayant  tout  à  fait,  par  sa  position 
et  sa  forme  quadrangulaire,  le  caractère  de  ce  que  les 
Anglais  ont  appelé  square,  il  est  probable  qu'elle  en  aura 
donné  l'idée,  car  elle  fut  terminée  en  1612,  sept  ans 
avant  l'entrée  au  ministère  de  l'illustre  chancelier  au- 
quel Londres  doit  son  1*'  square.  —  Les  squares  sont 
créés  et  entretenus  par  V Administration  des  Promenades 
et  Plantations  de  Paris,  sous  la  direction  de  M.  Alphan, 
ingénieur  en  chef.  On  les  ouvre  au  public  dès  6  heures 
du  matin,  et  on  les  ferme  quelque  temps  après  la  chute 
du  jour.  C.  D— Y. 

SQUATTERS.  V.  Pionnikbs. 

STABAT  BiATER,  prose  qu'on  chante  pendant  la  se- 
maine sainte,  et  qui  rappelle  les  souffrances  de  la  Vierge 
pendant  le  crucifiement  de  Jésus.  On  en  a  attribué  la 
composition  au  pape  Jean  XXII,  ou  à  l'un  des  Grégoire, 
ou  à  Innocent  III;  mais,  selon  l'opinion  la  plus  pro- 
bable, l'auteur  est  Jacoponus  ou  Jacques  de  Benedictis . 
jurisconsulte,  puis  fhmciscain  du  xiii*  siècle.  Le  Stabat 
mater  a  été  mis  en  musique  par  Palestrina,  Astorga , 
Pergolèse,  Boccherini,  Haydn,  Winter,  Neukomm,  Ros- 
sini ,  etc.  B. 

STACCATO,  c-à-d.  en  italien  détaché;  mot  usité  en 
Musique  pour  indiquer  un  mode  d'exécution  dans  lequel 
les  sons  doivent  être  vivement  détachés  et  sans  aucune 
liaison  entre  eux. 

STADE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dicttonnatrê  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire, 

STAGE  (du  bas  latin  stagium^  demeure),  temps  d'é- 
preuve dont  on  doit  justifier  pour  être  reconnu  apte  à 
exercer  certaines  professions.  Le  mot  s'entend  de  la  ré- 
sidence que  le  licencié  en  Droit  est  tenu  de  faire,  lors- 
qu'il a  prêté  son  serment,  auprès  d'une  Cour  ou  d'un 
tribunal,  afin  de  suivre  les  audiences  :  la  durée  de  ce 
stage  est  fixée  à  3  ans  consécutifs,  sans  pouvoir  être  in- 
terrompue plus  de  3  mois;  mais  les  Conseils  de  discipline 
ont  le  droit  de  la  prolonger  en  certaines  circonstances. 
La  preuve  du  stage  se  fait  par  un  certificat  du  Conseil  de 
discipline,  ou  du  procureur  impérial,  ou  du  président  du 
tribunal.  Les  avocats  stagiaires  ne  sont  admis  à  plaider 
ou  à  écrire  dans  une  cause  que  sur  un  certificat  d'assi- 
duité aux  audiences  pendant  2  ans,  ou  lorsqu'ils  ont 
22  ans  accomplis.  On  ne  peut  être  inscrit  qu'après  le 
stage  sur  le  tableau  des  avocats  (Décret  du  14  déc.  1810; 
Ordonnance  du  20  nov.  1822).  —  Pour  être  huissier,  il 
faut,  aux  termes  du  décret  au  14  juin  1813,  avoir  tra- 
vaillé au  moins  pendant  deux  ans,  soit  dans  l'étude  d'un 
notaire  ou  d'un  avoué,  soit  chez  un  huissier,  ou  pendant 
trois  ans  au  greffe  d'une  Cour  impériale  ou  d'un  Tribunal 
do  l**  instance.  —  Le  stage  exigé  pour  les  notaires  varie 
de  4  à  5  ans,  selon  qu'ils  sont  établis  près  .4*uno  Cour 
impériale,  ou  d'un  Tribunal  de  1^*  instwice,  ou  d'un  Tri- 

lOB 


STA 


1666 


STA 


bun&l  de  oaix.  Le  ^avernement  accorde  dies  dispenses 
aax  ihdividas  qui  ont  exercé  des  fonctions  adtoinistiA- 
tifm  ou  Indiciaires  (Lbl  da  24  ventôse  an  xi).  —  Il  y  A 
aussi  nn  sta^ce  pour  tes  avoués  (  V.  àvobÉ). — Pour  former 
Ht)  établissement  dHnstnictSon  secondaire,  il  faut  un  cer- 
tificat de  stage,  délivré  pAr  llo  Conseil  départemental  d*in- 
Atmctiôn  puJblique,  et  constatant  que  le  postulant  a  rem- 
pli, piendant  5  ans  au  moins,  les  fonctions  de  professeur 
on  de  surveillant  dans  nn  établissement  de  môme  nature 
(Loi  du  15  mars  1850).  —  Autrefois ,  dans  certaines 
églises.  On  appelût  Stage  la  résidence  que  devait  faire 
j  ttki  chanoine,  pendant  6  mois  ou  an  an,  après  la  prise 
j  de  possession,  pour  jouir  des  honneurs  et  revenus  de  son 
^  canonicat. 

STALLE  fdu  bas  latin  itàllus,  dérivé  de  stare)^  nom 
tfottné  aux  uéges  en  bois  qui  sont  placés  dans  le  chœûr 
des  égtisei,  et  qui  se  haussent  et  se  baissent  à  volonté. 
On  s'est  aussi  servi  du  nom  de  Forme.  Quand  la  stalle 
est  baissée ,  elle  offre  un  siège  assez  bas  ;  levée ,  elle 
présente  un  appui  attaché  sons  te  siège.  Cet  appui ,  en 
forme  de  console  on  de  cul-de-lampe,  permet  de  s'asseoir  : 
où  rappelait  autrefois  pcUienee  ou  miséricorde,  parce  que 
l'uèa^  était  de  chanter  debout,  et  qu'on  permettait  seu- 
lement par  tolérance  au  clergé  de  s'y  appuyer.  Les  sculp- 
teurs du  moyen  ftge  ont  souvent  orné  les  miséricordes  de 
sujets  grotesques  et  même  indécents  :  ils  aimaient  à  jr  re- 
présenter Tes  vices  qui  rampent  dans  les  régions  infù- 
rieurs^  et  amènent  la  chute  de  l'homme  ;  mais  ils  abusè- 
rent dey;etteidée  symbolique  pour  se  Jeter  dans  des  écarts 
bl&ihables.  On  nomme  Accotoir  ou  Accoudoir,  et,  dans  de 
vieuic  documents,  Indulgence  et  Croche,  la  séparation  des 
stalles,  (Jul  permet  auk  personnes  assises  de  s'accouder 
lors(l{ue  les  miséricordes  sont  relevées  :  il  est  élargi  à  son 
extrémité  en  forme  de  spatule,  et  fréquemment  supporté 

Sar  des  animaux,  des  tètes,  des  figures  ou  des  colon- 
ettes.  C'est  à  tort  qu'on  a  dit  que  les  accoudoirs  étaient 
ai^ssi  appelés  Museaux,  parce  qu'ils  étaient  ornés  d'une 
tète  d'animal  :  le  museau  de  la  stalle  est  l'extrémité  die 
ta  pièce  de  bois  dans  laquelle  s'engage  la  partie  supé- 
rfcnre  die  la  parclose  {spcrnda)^  et  par  ce  mot  l'on  entend 
Te  côté  de  la  stalle  auquel  on  a  donné  une  échancrure  et 
nne  cohrbe  élégante.  Dans  les  cathédrales  et  les  grandes 
églises,  il  y  a  deux  rangs  de  stalles  :  lé  dossier  de  celles 
du  premier  rang  est  très-bas  ;  c'est  le  contraire  pour  le 
dossier  de  celles  du  second  rang,  orné  tantôt  d'àrihoi- 
ries,  tantôt  de  bas-reliefs  représentant  des  scènes  em- 
pruntées h  la  Bible  ou  à  la  Vie  des  Saints,  et  quelqui^ois 
surmonté  d'Un  dais  ou  baldaquin,  La  construction  des 
stalles  de  chœur  ne  parait  pas  remonter  plus  haut  que  le 
ti*  siècle  :  auparavant,  les  ecclésiastiques  se  servaient 
d'âne  espèce  de  béquille  appelée  tau,  dissimulée  sous 
les  plis  de  leur  robe,  afin  de  se  soutenir  dans  leurs  lon- 
gues prières.  O'n  voit  de  belles  stalles  aux  cathédrales 
d'Albi,  d'Amiens,  d'Auch,  de  Bayeuk,  de  Rodez,  de  S*- 
Cfaude,  de  l^)itiers,  de  RoueA,  à  l'église  abbatiale  de 
S^-Denis,  à  S^-Bcrtrand  de  Comminges,  à  Notre-Dame 
de  BrOu,  aux  églises  de  Pontigny,  d'Orbais  (Marne),  de 
Cham peaux  (Seine-et-Marne),  de  S*-AnatOîle  à  Salins,  de 
RoTesmos,  de  Pecquigny  (Somme),  de  hue  (Ibid.),  de  S*- 
Martin-au-Bois  (Oise),  de  Mortain,  de  la  Chaise-Dieu,  etc. 
n  y  en  a  aasM  de  très-remarquables  aux  cathédrales 
d'ulm,  de  Tolède,  de  Westminster,  de  Genève,  de  Lau- 
sanne, dé  Montréal  (Sicile),  etc.  B. 

STABLES,  nom  donné,  dans  les  saltes  de  spectacle,  à 
des  sièges  séparés  et  numérotés,  M  qui  ont  ordinaire- 
ment là  forme  dé  fauteuils.  DaUs  fe  théâtre  du  Châtelet 
et  le  théâtre  Lifrique,  construits  eu  1862,  pour  la  ville  de 
Paris,  par  M.  l'architecte  Davioud,  On  a  placé  des  stalles 
en  fantcuilÀ  dont  Te  sfége  se  redresse,  à  la  manière  des 
fitallés  d'église,  maïs  se  redresse  seul,  par  un  mouvement 
mécanique  agissant  dès  qu'on  se  lève. 

SVANCti:  (de  IMtalîcn  stanisa,  arrêt,  repos),  période  de 
S'crs  formant  un  sens  complet,  et  présentant  un  nombre 
déterïhiné  de  vers  dont  le  m'ètre  et  les  rimeà  sont  assu- 
Jottis  à  urie  fègle  qui  s'observie  dans  toute  la  pièce,  tjnc 
sthuce  dompôsée  de  3  vers  (c'est  la  plus  courte  )  s'appelle 
fcrce^'de 4,  quatrain;  de  o,  qtvihtn:  de 6,  sixain;  de 7, 
^eptain;  de  8,  hititain  'ou  octat)e;  de  9,  nevCvain;  de  10, 
dizaîfi;  de  il,  omam;  de  i^^  dousain.  Les  stances  qni 
n'eim^Tofent  qà'un  mètre  unique  sont  isomètres,  par 
Werti^yie,  celles  des  odes  vu  et  x  du  2*  livre  de  J.-B.  Rous- 
-Rcau.  Quelles  que  sôîent  là  "natore  et  l'étendue  de  la  stance, 
WTc  doit,  àotànt  que  possible,  ehîibrasîïer  une  pensée 
ùnïqiïe';  si  elle  comient  plusieurs  '^na  finis,  ces  dïVers 
sens  doîvei^t  toujours  dànft  leur  en*jei^ble  présenter  un 
cadi  0  résMHcr  :  rarement  Tè  sens  est  sospendo  ponr  con- 


tinuer dans  la  stance  suivante  t  cela  est  permis  sortoui 
lorsque  celle-ci  commence  un  discours,  comme  dans 
l'ode  VI  du  2*  livre  de  V.  Hugo.  Les  stances  se  terminent 
presque  toujours  par  une  rime  masculine,  et  commen- 
cent par  une  rime  féminine.  Les  rimes  sont  croisées  r 
deux  rimes  plates  peuvent  s'y  entremêler,  mais  avet 
discrétion ,  et  seulement  lorsque  l'effet  rhythmique  de- 
vient ainsi  plus  sensible.  Le  chœur  du  2"  acte  d^Esther 
en  offre  quelques  beaux  exemples.  P. 

STANCES  ,  pièce  de  poésie  composée  d'un  certain 
nombre  de  stances.  Telles  sont  les  pièces  qui  composent 
le  livre  second  des  poésies  de  Malherbie.  Au  temps  de 
Corneille,  il  était  de  mode  de  partager  en  stances  en 
monologue  dans  les  tragédies.  On  connaît,  dans  (s  Cid 
(fin  du  !•'  acte),  celles  de  D.  Rodrigue ,  et  celles  de  l'In- 
fante (V,  n]  ;  celles  de  Polyeocte  (IV,  u),  imitées  par  Ro- 
trou  dans  le  Martyre  de  ^  Genêt,  etc.  P. 

STANGUëTT£S  ,  en  termes  de  Musique,  barres  de  di- 
vision dans  les  partitions,  d'une  partie  à  l'autre* 

STAROSTIE         ) 

STATËRE  r  V.  ces  mots  dans  notre  DictiQnnaxit 

STATHOUDER.  \     ^  Biographie  et  d^Histoire, 

8TATILÉG1Ë.  V.  LEcnmB. 

STATION,  en  termes  de  Utargie^  tout  lieu,  églisn^ 
chapelle,  autel,  reposoir,  etc.,  où  l'on  s'arrête  dans  Ic^ 
processions  ou  les  pèlerinages  pour  faire  certaines  prières. 
Le  mot  se  dit  aussi  du  temps  pendant  lequel  on  s^arrûtn. 
Dans  te  Chemin  de  ta  Croix  {V»  ce  mot)^  il  y  a  14 
Stations. 

STATION,  en  termes  de  Marine^  séfOur  que  font  pendant 
un  certain  temps  les  b&timents  de  guerre  en  ffBL.y&  étran- 
ger, ou  dans  les  colonies,  pour  faire  respecter  le  pavillon 
national,  protéger  et  favoriser  le  cominerce.  Le  temps  de 
ces  stations  est  de  S  ou  3  ans. 

8TATI0NNAIRE,  en  termes  de  Marine,  petit  bâti- 
ment de  guerre  mouillé  à  l'entrée  d'une  rade  ou  d'un 
port,  afin  d'exercer  une  sorte  de  police  sur  les  navires 
qui  entrent  et  qui  sortent. 

STATISTIQUE,  mot  inventé  par  Achenwall  en  174^^, 
et  qui  signifie  proprement  Science  de  l'État  (  en  latin 
status).  Cest  la  science  des  faits  naturels,  sociaux  et  po- 
litiques, exprimée  pat  des  termes  numériques.  Elle  ne 
doit  rien  laisser  ignorer  de  ce  qui  concerne  les  États, 
territoire,  population,  forces  de  terre  et  de  mer,  finances, 
agriculture,  industrie,  commerce,  etc.  Elle  dresse  ria- 
ventaire  des  sociétés  à  un  moment  donné,  et  donne 
l'état  de  l'humanité  à  telle  ou  telle  époque.  L'étude  de  b 
Statistioue  est  indispensable  à  tout  administrateur,  ï 
tout  législateur;  car,  sans  les  connaissances  qu'elle  seule 
peut  donner,  on  s'expose  à  commettre  les  erreurs  les 
plus  regrettables  et  les  plus  dangereuses,  par  exemple 
s'il  s'a^t  d'asseoir  un  impôt  ou  de  lever  des  soldats. 
Elle  est  nécessaire  i  tout  historien  qui  veut  apprécier 
sainement  les  progrès  d'un  pays,  ou  juger  en  connais- 
sance de  cause  des  raisons  de  sa  décadence.  Elle  n*est 
pas  moins  utile  aux  économistes,  aux  financiers,  aux 
commerçants,  aux  industriels,  aux  agriculteurs,  aux  mo- 
ralfsteà,  etc.  A  l'aide  des  éléments  qu'elle  fournit,  oii 
peut  apprécier  l'état  des  institutions,  et,  par  suite,  pro^ 
poser  Ou  prendre  les  mesunes  nécessaires. 

Si  le  nom  de  Statistique  est  nouveau,  la  chose  ne  IVsà 
pas,  et  quelques-uhs  des  éléments  que  cette  science  em- 
brasse ont  figuré  à  toutes  left  époques  dans  les  traités  de 
Politique  et  d'Économie  sociale.  La  Statistique  exista  pu 
pratique^  elle  intervint  dans  les  aflhîres  gouvernemen- 
tales, bien  avant  que  la  théorie  en  ^ût  reconnu  l'étendue 
comme  science.  Car  lé^  hommes  ont  toujours  troaré 
utile  de  se  compter,  de  compter  leurs  ennemis,  de  nom- 
brer  leurs  troupeaux  et  de  supputer  leurs  richesses.  La 
Bible  nous  offre  l'eXempîe  de  plusieurs  dénombrements; 
et,  sous  l'Emphre  romain,  Ànguste  avait,  au  dire  de  Ta- 
cite, écrit  de  sa  piropre  main  nn  état  des  richesses  de 
l'Empire,  du  nombre  des  citoyens  et  des  alliés  portant 
les  armes,  des  flottes ,  des  tributs  et  autres  parties  du 
revenu  public,  des  dépenses  ordinaires  et  des  gratifica- 
tions au  penpTe.  Au  moyen  ft^,  la  Statistique  partages 
te  sort  de  toutes  iei  sciences  :  on  l'oublia,  on  la  mé- 
conhnt  ;  les  plus  grosses  erreurs  se  répandirent  et  ftarent 
acceptées.  Ainsi,  la  Chronique  de  S'-Denîs  raconte  qn*cn 
1404  Charles  VT  songea  à  rétablir  tes  finances  en  frap- 
pant d'uh  impôt  de  zO  écus  par  an  les  villes,  bourgs  et 
villages  de  la  ÏVance,  et  11  les  évalue  à  l,7W,000î  Ce 
qu'il  y  a  de  curieux  et  de  déplorable  en  mente  temps, 
c'est  que  de  pjùteîlles  appréciations  se  perpétuaient  :  cift 
15^3,  les  auteurs  de  lÀ  Sottirç  Mànippée  parlent  à  I^^ 
tour  de  1,700,000  clodicrs.  A  combien  de  ttOron>rW% 


STA 


1667 


STA 


A^étâlt-on  pas  exposé  dans  une  telle  ignorance?  Les  fiûts 
de  ce  genre  ne  sont  point  particuliers  à  la  France  :  en 
1340,  Edouard  lîl,  roi  d'Angleterre,  voulant  lever  un  im- 
pôt de  50,000  liv.  sterling,  calcula  sur  45,000  communes, 
et  Ton  n*en  trouva  que  0,000;  en  1527,  dans  un  Mémoli-e 
présenté  à  Henri  VIII,  on  affirmait  qu'il  y  avait  en  An- 
gleterre 52,000  paroisses,  et,  quelque  temps  après,  Camb- 
dcQ  constata  qu'il  n*y  en  avait  pas  tout  à  f^it  10,000  ; 
en  1775  même,  la  Chambre  des  Communes,  taxant 
chaque  paroisse  pour  un  impôt,  supposa  qu'il  y  en  avait 
45,000. 

Des  travaux  un  peu  sérieux  de  Statistique  n'ont  com- 
mencé à  être  publiés  que  depuis  le  xviii"  siècle  :  on  doit 
mentionner  ceux  de  Vauban,  de  Messance,  de  Monthyon, 
de  Necker,  etc.  Toutefois,  les  données  publiées  par  ces 
savants  avaient  été  obtenues  au  moyen  de  la  méthode 
d'induction.  Ainsi,  on  comptait  dans  une  province  com- 
bien il  naissait  d'enfants  par  an  sur  une  étendue  d'une 
ou  deux  lieues  carrées,  et  l'on  multipliait  le  chiffre  obtenu 
par  le  nombre  de  lieues  carrées  dont  se  composait  le  ter- 
ritoire :  or,  il  y  avait  là  beaucoup  de  sources  d'erreurs , 
la  population  n*étant  pas  également  dense  em  tous  lieux, 
ni  la  fécondité  des  mariages  la  même  partout.  Lavoisicr, 
voulant  établir  le  chiffre  de  la  production,  comptait  1c 
nombre  des  charrues.  Arthur  Young,  après  avoir  étudié 
l'état  physique  et  agricole  d'un  certain  district  de  la 
France,  puis  évalué  ses  produits ,  découpait  une  carte 
divisée  en  provinces,  prenait  en  guise  de  poids  la  par- 
celle contenant  le  district  qu'il  connaissait,  pesait  chaque 
morceau  aui  représentait  une  province,  et  multipliait  les 
produits  du  district  par  le  nombre  de  parcelles  de  papier 
auc  pesait  la  province.  La  nécessité  des  travaux  de  Sta- 
tistique a  été  bien  sentie  surtout  depuis  la  Révolution. 
Sous  le  Consulat,  un  bureau  de  Statistique  fut  créé  au 
Ministère  de  l'Intérieur;  au  temos  de  1  Empire,  cette 
institution  s'étendit  aux  autres  départements  ministé- 
riels. Mais  les  documents  recueillis  à  cette  époque  furent 
méconnus  et  rejetés,  après  la  chute  de  Napoléon  I**",  par 
la  haine  des  partis;  le  gouvernement  de  la  Restauration 
se  borna  à  faire  dresser  quelques  tableaux  ou  états,  qui 
sont  plutôt  des  pièces  administratives  que  des  données 
dont  la  Statistique  puisse  tirer  profit.  Enfin,  des  sociétés 
se  sont  formée  dans  les  principaux  pays  de  l'Europe 
pour  hâter  les  progrès  de  cette  science;  des  hommes  de 
talent,  MM.  Charles  Moreau,  De  Férussac,  Ch.  Dupin, 
Moreau  de  Jonnès,  etc.,  se  sont  mis  à  l'œuvre;  une  Sta- 
tistiqtie  générale  de  la  France  a  été  publiée  de  1834  h 
1852  par  les  soins  du  Ministère  de  l'Intérieur;  un  décret 
du  l***  janv.  1852  a  créé  dans  chaque  chef-lieu  de  canton 
une  commission  de  Statistique,  dont  les  travaux  doivent 
^tre  centralisés  dans  ce  Ministère.  Les  statistiques  par- 
ticulières sont  aujourd'hui  assez  précises  dans  un  certain 
nombre  d'États  de  l'Europe;  mais  il  n'en  est  plus  de 
même  quand  il  s'agit  des  autres  parties  du  monde,  où 
la  Statistique  est  à  peu  près  ignorée.  V,  Achenwall,  In- 
troduction à  la  science  de  la  description  des  États,  en 
allem.,  Goettingue,  1748;  Gatterer,  Idéal  d'une  statistique 
générale  du  monde,  ibid.,  1773;  Arthur  Young,  Arithmé- 
tique politiqîte,  en  anglais,  Londres,  1774-1779,  2  vol. 
in-8o;  i.  Mader,  Théorie  et  méthode  de  la  statistique, 
en  allem.,  Prague,  1793,  in-8°;  Gœss,  De  la  statistique, 
en  allem.,  Anspach,  1804,  in -8°;  A.-L.  de  Schlœzer, 
Introduction  à  la  science  de  la  statistique,  traduit,  de 
l'allem.  par  Donnant,  1805,  in-8*»;  Niemann,  Abrégé  de 
st^istique^  Altona,  1807  ;  Krug,  Idées  sur  la  Statistique 
dans  ses  rapports  avec  l'Économie  politique,  Berlin, 
1807  ;  Tamassia,  Del  fine  délia  statistica,  Milan,  1808, 
in-8°;  Cagnazzi,  Elementi  deW  arte  statistica,  Napics, 
1808-1809,  2  vol.  iti-8«;  Ltider,  Histoire  cintique  de  la 
statistique,  en  allom.,  Gœttinguc,  1817,  in-8**;  Graberg 
de  Hemsoe,  Théorie  de  la  statistique,  Gênes,  18*21,  in-8°; 
Padovani,  Dou2re  livres  de  la  science  statistique,  en  ital., 
Pavie,  1824,  in-S'»;  Melchior  Gioja,  Filosofla  délia  sta- 
tistica, Milan,  1826,  2  vol.  in-4»;  Mone,  Théorie  de  la 
statistique,  trad.  de  l'allem.  par  Tandel,  Louvain,  1834, 
in -S*  ;  Dufati ,  Traité  de  Statistique  ,  1840  ;  Moreau 
de  Jonnès,  Eléments  de  Statistique,  1847;  G.-F.  Koîb, 
Traité  pi'otiqite  de  la  Statistique  comparée,  en  allem., 
Zurich,  1857.  ,  B. 

STATOR.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'FTistoire. 

STATUAIRE ,  se  dit  du  sculpteur  qui  fait  des  statues, 
et  de  l'art  de  ff^ire  des  statues.  La  statuaire  est  la  partie 
h  plus  importante  de  la  sculpture.  Les  Latins  employaient 
le  mot  itatuafi^  pour  désigner  l'artiste  qui  faisait  dos 
itatutis  en  bronze. 


STATUE,  ouvrage  de  sculpture  qui  représente  la  figure 
humaine  en  plein  relief  et  isolée.  Les  statues  se  divisent 
en  pédestres  et  équestres;  quand  la  figure  humaine  n'est 
représentée  que  jusqu'au  tronc,  c'est  un  buste  (  V,  ce 
mot  ).  L'exécution  d'une  statue  en  marbre  ou  en  pierre 
comprend  :  1°  la  plastique,  ou  composition  du  modèle  en 
matière  molle;  ^^  le  dégrossissement  du  bloc,  exécuté 
par  \q praticien;  3*  l'œuvre  de  l'artiste,  qui  se  fait  avec 
le  ciseau.  Pour  les  statues  coulées  en  bronze,  le  ti*avuil 
comprend  la  composition  du  modèle,  la  fabrication  du 
moule,  et  le  coulage  ;  cette  dernière  opération  est  l'œuvre 
du  fbndeur.  V.  Curyséli^phantine,  Polychromie. 

STATULIBBË.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

STATU  QUO,  mots  latins  qru'on  emploie,  surtout  dans 
le  langage  de  la  Politique  et  de  la  Diplomatie,  pour  dire 
qu'une  chose  reste  dans  le  même  état  qu'auparavant  (m 
eodem  statu  quo  ante). 

STATUT  (du  latin  statutum,  ce  qui  est  statué  ou  dé- 
cidé), nom  donné,  dans  l'ancien  Droit,  aux  règlements 
locaux  qui  avaient  force  do  loi.  On  distinguait  les  Statuts 
personnels,  relatifs  aux  personnes,  et  les  Statuts  réeh, 
relatifs  aux  choses.  F.  Mailher  de  Chassât,  Traité  des 
Statuts,  1845,  in-8°.  —  En  Angleterre,  on  nomme  Statuts 
les  lois  Alites  par  les  trois  grands  pouvoirs  de  l'État.  Star 
tuts  se  dit  aussi  des  règles  établies  pour  la  conduite  d'une 
corporation,  d'une  compagnie,  d'une  communauté,  etc. 

STEAM,  STEAMER  et  STEAJVI-BOAT  (de  l'anglais 
steam,  vapeur),  dénominations  employées  pour  désigner 
les  bateaux  à  vapeur. 

STEEPLE-CHASE.  V.  CoonsES  ne  chevaux. 

STÉGANOGRAPHIE  (du grec  stégatios, couvert, caché, 
et  graphéin,  écrire),  art  d'écrire  en  chiffres.  V.  Crypto- 
ORAPHR,  Chiffres. 

8TEIKKERQUE,  nom  donné  en  1692  à  des  cravates  et 
à  des  fichus,  en  mémoire  de  la  bataille  de  Steinkerquc, 
où  les  officiers  français,- attaqués  à  l'improviste  par  Guil- 
laume ni,  n'avaient  eu  que  le  temps  de  jeter  négligem- 
ment leur  cravate  autour  de  leur  cou. 

STÈLE  fdu  grec  stélè,  colonne),  nom  donné,  chez  les 
Anciens  :  !•  à  un  monument  monolithe  en  forme  d'obé- 
lisque ou  de  fût  de  colonne  ;  2*^  à  une  espèce  de  cippo  ou 
de  colonne  brisée,  destinée  à  porter  une  inscription  fu- 
néraire ou  autre  ;  3*^  à  un  poteau  où  Ton  exposait  les  con- 
damnés. 

STELLIONAT,  du  latin  stellionat^s,  fait  de  stellio, 
espèce  de  lézard  dont  le  corps  est  marqué  de  petites 
taches  qui  brillent  comme  des  étoiles  {stellœ).  Les  Ro- 
umains appelaient  stellaturm ,  stellionaturce ,  steltionata , 
les  vols  et  les  mensonges,  parce  que  les  différentes  taches 
de  ce  lézard  représentent  assez  bien  les  artifices  d'un 
faux  vendeur.  De  même  on  a  donné  en  français  le  nom 
de  grivelées  aux  concussions,  aux  petits  profits  illicites 
que  l'on  fait  dans  un  emploi ,  &  cause  de  la  variété  du 
plumage  de  la  grive,  à  Pimitation  des  Grecs,  qui  disaient 
trôctès  (truite)  pour  désigner  les  voleurs  et  les  men- 
teurs, à  cause  des  diverses  marques  du  dos  de  ce  pois- 
son. En  termes  de  Pratique,  on  comprend  sous  le  nom 
de  stellionat  toute  fraude  qui  n'a  point  de  nom,  et  qui 
est  employée  pour  se  procurer  de  l'argent.  Ainsi ,  celui 
qui  vend  deux  fois  le  même  efi'et  à  deux  différentes  per- 
sonnes, celui  qui  vend  comme  sien  ou  qui  hypothèque  ce 
qui  appartient  à  autrui,  celui  qui  présente  comme  libres 
des  biens  hypothéqués  ou  qui  déclare  des  hypothèques 
moindres  que  celles  dont  ses  biens  sont  chargés,  celui  qui 
donne  en  gage  des  effets  qui  ne  lui  appartiennent  pas, 
celuf  qui  emprunte  avec  promesse  de  faire  tel  emploi  et 
qui  ne  le  fait  pas,  se  rendent  coupables  de  stellionat.  Le 
stellionat  est,  comme  on  voit,  un  abus  de  confiance.  Le 
stellionaîaire  est  passible  de  la  contrainte  par  corps  {Code 
Napol.^  art,  2059).  Il  n'est  pas  admis  au  bénéfice  de  ces- 
sion de  biens  (Code  de  Procéd.^  art.  905),  ni  à  la  réhabi- 
litation après  raillite  {Code  de  Comm,^  art.  612  ).       B. 

STÉNOGRAPHIE  (du  grec  sténos,  resserré,  abrégé,  et 
graphéin,  écrire),  art  d'écrire  aussi  vite  que  la  parole  à 
l'aide  de  signes  abréviatifs  et  conventionnels.  Cet  art  se 
propose  de  réduire  &  sa  plus  simple  expression  la  repré- 
sentation des  sons  du  langage,  et  se  fonde  sur  l'omission 
facultative  de  certaines  lettres.  Il  a  pris  un  très-grand 
nombre  'de  formes,  gu'on  peut  ramener  h  trois  princî 
pales,  la  tachygraph\e,  Vohjgraphie,  et  la  sténographie 
proprement  dite.  La  tachygraphie  est  une  écriture  sylla- 
baire :  chaque  son  c^  rendu  d'après  sa  prononciation , 
sans  égard  à  l'orthographe,  et  par  un  signe  très-simple  ; 
mais  les  différentes  syllabes  du  môme  mol  se  lient  dîfft- 
c^.lement  entre  elles.  Dans  rojkygraphic,  on  écrit  le» 


STÉ 


ir.68 


STO 


lettres  détachées  sur  plusieurs  lignes  tracées  à  ravance 
Komtne  les  portées  de  la  musique.  Dans  la  sténographie, 
on  trace,  ou  plutôt  Ton  devrait  tracer  tous  les  mots  d*un 
seul  jet,  et  sans  jamais  lever  la  plume,  si  ce  n'est  pour 
commencer  le  mot  suivant  :  la  ligne  droite,  le  demi- 
cercle,  la  boucle  et  le  point  sont  les  signes  que  Ton  em- 
ploie, en  leur  donnant  des  positions  diverses. 

L'emploi  de  signes  abréviatifs  a  été  connu  des  Anciens 
{V,  ÂBRéviATioNS);  en  Grèce,  Xénophon  en  fit  usage  le 
premier  pour  reproduire  les  discours  de  Socrate  qu'il  a 
publiés.  Cet  art  ne  fut  point  connu,  ou  du  moins  prati- 

2ué,  à  Rome,  avant  Cicéron  :  il  fit  recueillir  les  discours 
e  Caton,  soit  au  Sénat,  soit  au  Forum,  en  postant  plu- 
sieurs sténographes  parmi  Tauditoire.  Tiron,  affranchi 
de  Cicéron ,  inventa  une  sorte  de  sténographie  connue 
sous  le  nom  de  Notes  tironiennes.  Dès  lors  on  con- 
tinua d'user  de  ce  mo3'en,  môme  pour  des  travaux  par- 
ticuliers :  des  auteurs  avaient  des  esclaves  sténogra- 
phes, et  leur  dictaient  ce  qu'ils  composaient.  D'autres 
déchiffraient  ensuite  ces  dictées,  et  les  mettaient  en  écri- 
ture courante.  Les  deux  Pline,  entre  autres,  procédaient 
ainsi.  Mais  la  véritable  sténographie  ne  remonte  pas  au 
delà  du  xvi*  siècle.  A  cette  époque,  en  Angleterre,  lla- 
caulay  donna  une  méthode  qui  fut  longtemps  en  videur. 
En  1659,  Shelton  en  publia  une  nouvelle,  qui  fut  intro- 
duite en  France  par  le  chevalier  Ramsay  en  1681,  lors- 
que déjà  un  abbé  Cossard  s'était  occupé  de  tachygraphie 
dans  un  traité  Sur  Vart  d'écrire  aussi  vite  que  Von  parle. 
En  1743,  de  nouveaux  procédés  furent  indiG[ués  par  Wes- 
ton ,  et  eurent  un  succès  assez  durable.  Vinrent  ensuite 
les  méthodes  de  Coulon-Thévenot  en  1770  et  de  Taylor 
en  1786.  Depuis  1789,  l'existence  des  Assemblées  délibé- 
rantes rendit  de  plus  en  plus  nécessaire  l'emploi  des 
moyens  tachygraphiques.  Parmi  les  nouvelles  méthodes 
qui  ont  été  proposées,  on  remarque  celles  de  Montigny, 
de  Conen  de  Prépéan,  de  Blanc,  de  Vidal,  d*Astiea,  de 
Chauvin,  de  Lagache,  de  Midy,  d'Aimé  Paris,  de  Prévost, 
de  Patev,  etc.  De  1790  à  1792,  on  fit  usaoe  d'un  procédé 
appelé  Logographie  (V,  ce  mot).  V,  Jomard,  Comparaison 
des  différentes  méthodes  tachygraphiques  et  sténographi- 
ques,  Paris,  1831,  inS^\  Scott  de  Martinville,  Histoire 
de  la  sténographie,  1849. 

STENTÉ,  terme  de  Peinture  emprunté  à  l'italien  sten- 
tato,  et  qui  signifie  pénible.  Un  tableau  slenté  est  celui 
où  se  manifeste  l'effort  du  travail.  Le  faire  stenté  est 
l'opposé  du  faire  facile. 

STEPPES.  V.  notre  Dictionn.  de  Biogr.  et  d^Histoire. 

STÉRÊOBATE,  en  termes  d'Architecture,  soubasse- 
ment sans  itoulure  et  qui  affecte  la  forme  d'un  vaste 
socle 

STÉRÉOGRAPHIE  (du  grec  stéréos,  solide,  ai  gra- 
phéin ,  décrire,  tracer),  art  de  représenter  les  solides  sur 
un  plan.  C'est  la  Perspective  des  solides. 

STÉRÉORAMA  (du  grec  stéréos,  ferme,  fixe),  carte  to- 
pographique en  relief,  faite  de  pâte  de  papier. 

STÉRÉOTOMIE.  V.  Coupb  des  pierres. 

STÉRÉOTYPIE  (du  grec  stéréos^  solide,  et  tupos,  type, 
caractère),  art  de  convertir  en  formes  solides  les  planches 
d'imprimerie  composées  avec  des  caractères  mobiles.  Il  y 
a  trois  procédés  différents  :  \^  prendre  l'empreinte  de  la 
page  de  caractères  mobiles,  en  appliquant  avec  force  cette 
page  sur  une  matière  métallique  particulière,  puis  verser 
dans  l'empreinte  creuse,  prise  pour  moule,  un  métal  en 
fusion  qui  reproduit  le  relief  de  la  nage  primitive  (pro- 
cédés Garez,  F.  Didot,  Genoux);  2»  employer,  pour  la 
composition  en  mobile,  des  caractères  dont  l'œil  est 
frappé  en  creux,  et  qui  servent  eux-mêmes  de  moule 
pour  la  planche  en  relief  (  procédé  Herlian  )  ;  3°  prendre 
l'empreinte  de  la  page  avec  du  plâtre  fin  et  liquide,  ou 
)vec  une  pâte  de  carton,  enfoncée  avec  une  brosse  dans 
1  oeil  de  la  lettre,  pour  le  reproduire  en  creux,  la  sécher 
au  feu ,  et  y  couler  un  alliage  métallique  (procédé  Du- 
rouchail  et  de  Paroy).  Ce  dernier  procédé,  qu'on  nomme 
Clichage  au  papier,  est  à  peu  près  le  seul  employé  aa- 
lourd'hui.  Avec  les  clichés  ou  planches  stéréotypées, 
on  conserve  indéfiniment  la  composition  d'un  ouvrage, 
et  l'on  peut  tirer,  à  mesure  des  besoins,  un  nombre 

Suelconque  d'exemplaires.  On  a,  de  plus,  le  moyen 
'épurer  les  textes  et  d'arriver  à  une  exactitude  de 
plus  en  plus  grande  :  pour  cela,  on  enlève  avet  un  em- 

rrte-pièce  le  passage  fautif  d'un  cliché,  et  l'on  introduit 
la  place  un  nouveau  morceau  que  l'on  soude.  —  Les 
premiers  essais  d'imprimerie  ont  été  de  vrais  stéréotypes, 
puisque  tous  les  caractères  d'une  page  étaient  alors  gra- 
vés en  relief  sur  des  planches  solides.  Vers  1725,  Val- 
levre«  imprimeur  à  Paris,  eut ,  le  premier,  Tidée  d'appli- 


quel  'des  caractères  mobiles  sur  une  madère  argileuse,  et 
de  fondre  un  bloc  en  cuivre  sur  le  monte  ainsi  obtenu. 
Peu  d'années  après,  d'autres  essais  furent  faits  à  Édim-' 
bourg  par  Torfévre  William  Ged,  et  à  Erfurth  par  l'im- 
primeur Funkter.  Hoffmann  à  Strasbourg  (1784),  Carez 
à  Tout  (1786)  ;  F.  Didot  et  Herhan  à  Paris  (1708),  ap- 
portèrent à  la  stéréotypie  de  grands  perfectionnements. 
En  1844,  Duverger  appliqua  cet  art  à  la  reproduction  de 
la  musique  et  des  cartes  géographiques.  Les  graveurs  en 
médailles  ont  recours  an  clichage  pour  faire  épreuve  de 
leurs  ouvrages  :  à  cet  effet ,  ils  appliquent  le  coin  sur  de 
l'étain  en  fusion. 

STERLING.  V.  Livre,  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

STIBADIUM.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  el 
d'Histoire. 

STICUODE  (du  grec  stikhos,  vers,  et  ôdè,  chant),  mot 
par  lequel  les  anciens  Grecs  désignaient  une  sorte  de 
Rapsodes  (  V.  ce  mot) ,  ceux  qui  chantaient  des  vers 
simples,  non  combinés  en  systèmes,  purs  de  tout  alliage 
avec  des  vers  d'autre  mesure. 

STICHOBIÉTRIE  (du  grec  stikhos,  vers,  et  métron,  me- 
sure), numération  des  lignes  d'un  manuscrit.  Les  An- 
ciens, qui  ne  connaissaient  pas  les  divisions  par  para- 
graphes et  chapitres,  supputaient  ainsi  l'étendue  des 
ouvrages.  On  mentionnait  d'ordinaire  à  la  fin  d*un  ma- 
nuscrit combien  il  contenait  de  lignes  ou  de  vers. 

STIGMA ,  ancien  caractère  grec,  composé  du  sigma  et 
du  tau,  était  employé  comme  lettre  numérale,  et  valait  6. 

STIGMATES,  marques  qu'on  imprimait,  dans  TAnti- 
quité,  sur  l'épaule  gauche  des  soldats  enrôlés.  On  a 
donné  le  même  nom  aux  marques  des  plaies  de  Jésus- 
Christ,  miraculeusement  imprimées  sur  le  corps  de 
S^  François  d'Assise. 

STILE,  Stilus,  nom  qu'on  donnait  pendant  le  moyen 
âge  à  tout  ouvrage  qui  exposait  la  procédure  observée 
dans  les  tribunaux  et  les  règles  les  plus  usitées  do  la  Ju- 
risprudence. Tel  était  le  Stilus  curiœ  Parlamenti,  com- 
posé en  133U  par  Guill.  Du  Brueil,  avocat  au  parlement 
de  Paris. 

STIPS ,  monnaie.  V.  notre  Dictumnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire. 

STIPULATION ,  toute  clause,  condition  ou  convention 
qui  entre  dans  un  contrat. 

STIRATOR  (de  l'italien  stirare,  tendre,  étirer),  cadre 
en  bois  dont  les  dessinateurs  à  l'aquarelle  et  au  lavis  se 
servent  pour  tenir  leur  papier  bien  tendu. 

STOCK,  c-à-d.  en  anglais  provision,  s'emploie  dans 
le  Commerce  pour  signifier  la  quantité  d'une  marchan- 
dise qui  se  trouve  en  magasin  dans  les  entrepôts  ou  sur 
les  marchés  d'une  place  de  commerce.  A  la  Bourse  de 
l/>ndres,  on  entend  par  Stocks  toutes  les  actions,  titres 
et  obligations,  et  les  Stock-Jobbers  sont  les  agioteurs 
qui  Jouent  sur  la  hausse  on  la  baisse  de  ces  effets,  et 
riont  les  opérations  se  soldent  presque  toujours  par  de 
simples  différences. 

STOÏCISME.  Le  Stoïcisme,  dont  les  principaux  repré- 
sentants furent  Zenon,  Cléanthe,  Chrysippe,  Panetius. 
l'ossidonius,  Sénèque ,  Épictète,  Arrien  et  l'emp^rcai 
Marc  Aurèle  {V.  ces  noms  dans  notre  Dictionnaire  de 
Ifiographie,  et  l'article  Stoïciens),  fut,  dès  son  commen- 
cement, une  philosophie  morale  et  pratique  ;  et  ce  carac- 
:ère  se  prononça  de  plus  eu  plus,  lorsqu'elle  eut  passé 
de  la  Grèce  à  Rome.  A  ce  point  de  vue  le  Stoïcisme  csi 
généralement  bien  connu,  et;  pour  l'exposer,  nous  n'au- 
rons qu'à  rappeler  et  à  résumer  quelques  idées  déjà 
familières  au  plus  grand  nombre  des  lecteurs.  Il  n'en 
ost  pas  de  même  de  la  Métaphysique  stoïcienne,  qui, 
bien  qu'en  décadence  sur  celle  de  Platon  et  d'Aristote, 
auxquelles  elle  est  postérieure,  ne  mérite  pas  moins 
d'être  étudiée,  tant  comme  exemple  de  ce  qui  pouvait 
encore  être  essayé  après  le  Platonisme  et  le  Péripaté- 
tisme,  que  pour  le  jour  qu'elle  jette  sur  quelques  points 
singuliers  de  la  Morale.  —  Comme  œuvre  de  décadence, 
la  Métaphysique  des  Stoïciens  est  loin  d'être  exempte  de 
contradictions  :  d'abord,  considérée  dans  son  ensemble, 
elle  est  plutôt  une  Physique  qn*une  Méta4)hysiqoe,  ei 
elle  en  porte  le  nom.  Hors  de  Fesprit,  tout  est  corps; 
dans  l'esprit,  tout  est  perception  sensible;  tel  est  le 
double  jprincipe  de  rOntolo|ie  et  de  la  Logique  des  Stoï- 
ciens. On  parle  souvent  du  caractère  idâliste  de  leurs 
doctrines,  et  il  est  bien  vrai  que  l'idéalisme  y  domine  à 
certains  é^ds.  A  côté  de  ce  principe,  voilà  une  de  ces 
contradictions  dont  nous  parlions  tout  à  rheore  :  Tout 
est  corporel;  tonte  connaissance  est  connaissanœ  sen- 
sible. Gela  ne  veut  pas  dce  que  tonte  coonaissanœ  r«stc 


STO 


4669 


STO 


àlVtat  de  sensation  paniculijie^  et  q^c  nous  ne  p-à'.s- 
sions  connattre  que  les  corps  limités  et  périssables  avec 
lesquels  nous  sommes  habituellement  en  rapport.  L'es- 
prit généralise  ses  sensations  ;  en  cela  consiste  l'Antici- 
pation ou  Prolepse  ;  et,  en  les  généiulisant,  il  arrive  à 
concevoir  un  principe  (unique  peutrètre,  peut  être  mul- 
tiple, la  question  se  présentera  plus  loin),  rinflni,  quHl 
serait  plus  exact  de  nommer  rindéflni,  nulle  sensation , 
nulle  expérience  particulière  ou  généralisée  ne  pouvant 
donner  rinflni,  principe  qui  est,  comme  tout  le  reste, 
corporel  ;  de  sorte  que  le  corps  est  partout,  remplit  tout, 
et  que  le  vide,  contrairement  à  l'opinion  des  Épicuriens, 
n'est  nulle  part;  principe  enfin  qui,  en  se  déterminant, 
devient  tout  ce  qui  est,  le  monde,  Dieu  et  l'homme  tout 
à  la  fois.  —  Pr^nté  sous  ce  jour,  le  Stoïcisme  a  tout 
l'air  d'une  philosophie  panthéiste;  mais  en  arrivant  au 
monde  et  à  Dieu,  on  retrouve  le  Dualisme.  Toute  exis- 
tence présente  plus  ou  moins  clairement  un  caractère 
de  dualité  :  dans  la  pierre,  il  y  a  autre  chose  que  les 
molécules  matérielles  ;  il  y  a  la  force  de  cohésion  qui  les 
maintient^  agrégées;  de  même  les  éléments  constitutifs 
de  la  plante  ne  se  ressemblent  et  ne  se  conservent  que 
sous  l'influence  de  je  ne  sais  quelle  force  végétative  ; 
dans  les  animaux,  dans  l'homvie,  la  dualité  est  encore 
plus  marquée.  On  peut  hésiter  et  se  méprendre  sur  la 
question  de  savoir  si  la  vie  elle-même  est  double  ;  mais 
on  ne  peut  méconnaître  la  distinction  de  la  matière  et 
de  la  vie.  Ces  faits  étaient  frappants,  et  d'ailleurs  une 
philosophie  antérieure,  celle  d'Aristote,  avait  profondé- 
ment tracé  la  distinction  universelle  de  la  matière  et  de 
la  force.  Cette  distinction,  les  Stoïciens  se  l'approprié* 
rent  et  en  tirèrent  parti  conformément  à  leurs  idées.  Le 
monde  tout  entier  rés  ilte,  suivant  eux,  de  l'union  de  la 
substance  ou  de  la  matière  (hylé)  avec  la  force  ou  raison 
génératrice  {logos  spermaUkos)  qui  s'appelle  aussi  la 
nature  (physis).  Comment  se  fait  cette  union,  et  qu'est- 
ce  au  juste  que  cette  force  génératrice  qui  s'unit  à  la 
matière  7  C'est  ici  le  lieu  de  dire  quelques  mots  d'un 
nouveau  principe  qui  reparaîtra  à  tous  les  degrés  de 
l'existence,  de  la  Tension,  qui  est,  suivant  les  Stoïciens, 
le  principe  de  tout  bien,  comme  son  contraire,  le  Rel&- 
chement|  est  le  principe  de  tout  mal.  Or,  c'est  précisé- 
ment par  la  tension  de  la  force  dans  la  matière  que  tout 
est  produit.  Jl  ne  faut  pas  s'y  tromper  :  la  substance  est 
corporelle;  mais  la  force  l'est  aussi.  C'est  ce  corps  plus 
subtil  que  l'air,  plus  subtil  que  le  feu,  qu'on  voit  si  sou- 
\ent  fl^rer  dans  la  Physique  des  Anciens;  l'Éther  qui 
échauffe  et  pénètre  toutes  choses,  qui  porte  partout  la 
vie,  et  qui,  combiné  dans  des  proportions  diverses  avec 
la  matière,  devient  force  de  cohésion  dans  le  minéral, 
force  végétative  dans  la  plante,  &me  raisonnable  dans 
l 'homme,  âme  du  monde  dans  le  grand  Tout.  Rien  n'est 
plus  bizarre  et  plus  curieux  que  les  idées  des  Stoïciens 
sur  la  formation,  la  conservation  et  la  destruction  du 
Monde:  il  est,  à  leurs  yeux,  un  grand  être  animé  {Zôon) 
qui  vit  et  respire  comme  les  autres  animaux.  II  y  a,  dans 
le  Monde  comme  dans  les  animaux,  un  véritable  mou- 
vement respiratoire,  dont  les  alternations  forment  les 
phases  de  son  histoire.  Ainsi,  au  commencement  l'Éther, 
la  Raison  ou  l'Ame  (c'est  tout  un^  commence  à  se  tendre, 
c'est-à-dire  à  se  condenser.  De  la  résulte,  dans  son  sein, 
la  formation  d'un  milieu  plus  dense,  d'une  sorte  de 
noyau  ;  c'est  l'Air.  Puis  la  Contraction  se  prolongeant,  la 
sphère  de  l'Eau  se  forme  dans  la  sphère  de  l'Air  ;  puis, 
dans  celle-ci,  la  sphère  solide;  ce  qui  n'empêche  pas  les 
combinaisons  partielles  d'où  naissent  les  plantes,  les 
animaux,  etc.  C'est  là  la  période  du  développement. 
Quand  le  Monde  est  arrivé  au  terme  de  cette  période,  le 
relâchement,  c'est-à-dire  la  dilatation,  succède  à  la  con- 
traction, et,  par  un  mouvement  rétrograde,  tout  s'ab- 
sorbe dans  l'Éther  après  en  être  sorti,  jusqu'à  ce  que , 
les  choses  étant  revenues  à  leur  état  primitif,  une  nou- 
velle contraction  recommence  qui  ramène  les  mêmes 
phénomènes,  non-seulement  dans  leur  ensemble,  mais 
jusque  dans  leurs  moindres  détails,  et  ainsi  de  suite 
pendant  toute  l'infinité  de  la  durée,  où  chacune  de  ces 
périodes  occupe  plusieurs  milliers  d'années.  Les  Stoï- 
ciens, ^ui  aimaient  à  rattacher  leurs  idées  aux  croyances 
populaires  et  mythologiques,  trouvaient,  dans  la  fable 
du  Phénix ,  le  symbole  de  cette  cosmogonie.  Le  Monde, 
comme  l'oiseau,  recommence  indéfiniment  son  existence; 
comme  lui,  il  périt  dans  le  feu  {œlher;  œthô,  brûler)  et 
renaît  'de  ses  cendres.  —  Ainsi  l'Éther  est,  à  propre- 
ment parler,  l'esprit  qui  anime  le  grand  Tout,  l'Ame  du 

monde  i  mens  agitât  mohm âins  la  théorie  stol* 

cienue,  il  n'y  a  pas  d'autre  cause,  pas  d'autre  Dieu ,  à 


îiK  îns  qii'o.i  ne  mouille  donner  ce  nom  à  rincxorable  Fa- 
talité, dont  le  dogme,  par  une  contradiction  non  moins 
étrange  que  les  précédentes,  y  subsiste  à  côté  du  dogme 
de  la  Providence.  Les  Épicuriens  avaient  nié  la  Provi- 
dence, et  étaient  arrivés  au  fatalisme  par  la  doctrine  du 
hasard  ;  les  Stoïciens  y  arrivèrent  par  la  voie  contraire, 
celle  de  l'universelle  détermination  des  causes.  En  réa- 
lité, la  Providence  est  la  sagesse  et  la  puissance  de  Dieu 
librement  appliquée  au  gouvernement  du  monde.  Rien 
de  pareil  chez  les  Stoïciens;  et,  bien  qu'il?  attribuent  à 
Dieu  l'Intelligence  et  la  Puissance,  bien  qu'ils  le  repré- 
sentent comme  s'occupant  des  affaires  de  ce  monde,  il 
est  clair  que  c'est  là  un  soin  stérile,  qui  ne  peut  rien 
changer  à  l'ordre  immuable  des  choses,  qu'une  nécessité 
aveugle  (fatum  stoUcum)  avait  fatalement  déterminé  de 
toute  éternité.  C'est  donc,  pour  ainsi  dire,  d'une  ma- 
nière subreptice ,  que  ces  idées  de  Providence  et  d'at- 
tributs moraux  ont  pénétré  dans  la  théorie  des  Stoïciens. 

Nous  avons  annoncé  que  ces  spéculations  métaphy- 
siques des  Stoïciens,  toutes  chimériques  qu'elles  soient, 
étaient  propres  à  éclairer  quelques  points  de  leur  Morale. 
Il  s'agit  surtout  de  la  Tension,  qui  est,  comme  on  l'a  dit, 
le  principe  de  tout  bien,  et  non-seulement  de  tout  bien , 
mais  de  toute  science;  car,  en  ceci  du  moins,  conséquents 
avec  eux-mêmes,  les  Stoïciens  ont  toujours  eu  cette  idée 
présente  à  l'esprit,  dans  leur  Logique  et  dans  leur  Morale, 
aussi  bien  que  dans  leur  Physique.  Partout  la  force  et 
l'effort.  Hercule  est  le  rénovateur  de  la  Philosophie,  et 
le  stoïcien  Cléanthe  est  le  second  Hercule.  Donc,  au  lieu 
de  se  laisser  aller  au  courant  de  l'opinion,  dont  les  in- 
certitudes troublent  le  sage ,  il  faut  tendre  la  raison , 
d'abord  pour  passer  des  images  sensibles  aux  représen- 
tations compréhensives,  qui  les  rapportent  à  leurs  objets  et 
à  leurs  causes,  puis  aux  Prolepses  qui  expriment  les  rap- 
ports naturels  et  invariables  des  choses.  De  là  à  la  science 
il  n'y  a  plus  qu'un  pas,  et  c'est  encore  l'effet  d'une  ten- 
sion nouvelle  et  supérieure. 

A  la  réception  passive  des  images,  et  aux  trois  degrés 
de  tension  qui  lui  succèdent,  correspondent  différents 
états  de  l'àme,  la  Représentation,  l'Assentiment,  la  Com- 
préhension, la  Science,  respectivement  exprimés  par  les 
emblèmes  de  la  main  ouverte,  demi-fermée,  fermée,  fer- 
mée et  serrée  fortement  avec  l'autre  main.  «  Zenon,  dit 
Montaigne ,  peignoit  de  geste  son  imagination  sur  cette 
partition  des  facultoz  de  l'àme  :  la  main  espandue  et  ou- 
verte, c'estoit  Apparence;  la  main  à  demy  serrée  et  les 
doigts  un  peu  croches.  Consentement  ;  le  poing  fermé. 
Compréhension;  quand  de  la  main  gauche  il  vepoit  en- 
cores  a  clorre  ce  ploing  plus  estroict.  Science.  » 

La  même  préoccupation  se  fera  sentir  dans  toutes  les 
parties  de  la  Morale.  L'homme,  constitué,  comme  tous 
les  autres  êtres,  par  l'union  de  la  Matière  et  de  la  Force, 
qui  est  en  lui  Raison,  a  conscience  de  celle-ci  et  de  sa 
supériorité  sur  la  Matière.  Assujetti ,  comme  les  autres 
animaux,  aux  fonctions  de  nutrition  et  de  reproduction, 
il  sait  bien  que  ce  sont  là  des  fonctions  inférieures ,  et 
que  ce  qui  le  fait  homme,  c'est,  avec  la  Raison  elle-même, 
l'amour  de  la  science  et  de  la  vérité,  les  soins  de  la  fa- 
mille et  de  la  société,  l'exercice  de  la  tempérance,  du 
courage,  de  la  grandeur  d'àme,  de  la  bienfaisance,  qui 
lie  sont  autre  chose  que  le  développement  de  la  Raison. 
Telle  est  la  nature  propre  de  l'homme,  dans  laquelle  les 
derniers  Stoïciens  donnent  surtout  une  grande  place  aux 
vertus  sociales ,  à  tout  ce  qui  tend  au  salut  et  au  bien 
des  autres  hommes.  L'homme,  dit  Marc-Aurèle,  est  na- 
turellement sociable  et  ami  des  autres  hommes  {philan- 
thrôpos  kai  koinânikos  ).  Or,  pour  tout  être,  le  bien,  c'est 
de  vivre  conformément  à  sa  nature,  et  de  maintenir  sa 
constitution  par  des  actes  convenables.  Ce  sera  là  aussi 
le  bien  de  l'homme,  et  par  suite  sa  loi  :  Vivre  conformé- 
ment à  la  nature,  formule  célèbre,  qui  se  traduira  pour 
lui  en  celle-ci  :  Vivre  conformément  à  la  Raison.  Mais 
la  Raison,  c'est  le  principe  de  l'effort  et  de  la  tension. 
11  faut  donc,  ici  encore,  que  l'homme  tende  sa  raison ,  et 
qu'au  lieu  de  céder  à  l'instinct,  comme  les  animaux,  il 
agisse  par  raison,  même  quand  il  s'agit  de  donner  satis- 
faction aux  besoins  inférieurs  de  sa  nature.  A  ce  prix 
seulement,  les  fonctions  naturelles  (bfflcia)  deviennent 
actions  droites  et  vertueuses.  La  vertu  est  un  art ,  c'est 
l'art  de  la  vie,  ou  l'art  de  devenir  bon  ;  et  l'on  devient 
bon  en  rendant  la  Raison  maîtresse  des  passions,  ({ui 
sont  un  relâchement,  une  maladie  de  l'&me,  produite, 
comme  les  maladies  du  corps,  par  l'atonie  (a  privatif, 
tonos,  tension,  défaut  de  tension)  ;  et  l'on  arrive  à  la  per- 
fection, en  étendant  aussi  loin  que  possible  cet  empire  de 
•a  Raison.  —  Jusqu'à  présent  cette  Morale  n'offre  que  do 


sxn 


1670 


STR 


m&tcs  et  vigoureux  préceptes;  mais  voici  le  moment  oCi 
elle  va  dégénérer  en  paradoxes,  par  l'excès  même  d*élé- 
ration  où  elle  s'efforce  de  monter.  Gomme  rien  n'est  bon, 
suivant  les  Stoïciens,  de  ce  qui  n*est  encore  qu'un  moyen 
d'être  appliqué  à  de  mauvaises  fins,  et  comme  on  peut 
faire  un  mauvais  usage  des  richesses,  du  pouvoir,  de  la 
santé,  de  la  vie  même,  au  lieu  de  nous  montrer  le  sage 
gouvernant  par  la  Raison  les  penchants  qui  portent 
l'homme  à  rechercher  ces  biens  inférieurs,  le  Stoïcisme 
placera  l'idéal  de  la  sagesse  dans  je  ne  sais  quelle  vertu 
ascétique  et  hautaine,  plus  négative  que  positive,  s'iso- 
îant  du  monde  et  de  la  vie  active,  et  toute  prête  à  rejeter 
l'existence  même,  pour  peu  qu'elle  y  sente  un  embarras 
et  une  cause  de  trouble.  Il  serait  mjuste,  toutefois,  de 
faire  peser  sur  la  secte  entière  la  responsabilité  de  ces 
maximes,  aussi  bien  que  de  quelques  autres  paradoxes 
bien  connus,  dont  déjà,  de  son  temps,  Horace  se  moquait 
à  bon  droit.  Le  Stoïcisme,  en  descendant  de  cet  hauteurs 
chimériques  pour  se  mettre  à  la  portée  de  l'homme,  non 
tel  que  le  veut  et  le  conçoit  l'esprit  de  système,  mais  tel 
qu'il  est  réellement,  loin  de  rien  perdre  de  sa  puissance 
et  de  son  autorité,  a  conquis,  au  contraire,  par  là  les  titres 

3ui  en  font,  malgré  ses  imperfections,  une  philosophie 
estinée  à  ne  point  périr.  B — s. 

STOLPi.  V.  ce  mot  dans  notre  DicUonnair^  de  Biogra^ 
phiê  et  d'Histoire. 

ST0NEHEN6E.  V,  Celtiques  (Monuments). 

STOP,  c.-à-d.  en  anglais  arrête,  mot  adopté  pour  le 
commandement  dans  la  Marine.  On  appelle  Stopper  une 
machine  en  forme  de  mâchoire,  servant  d'arrêt  aux 
càbles-chalnes. 

STORE  (du  latin  storea,  natte),  rideau  de  coutil,  de 
taffetas  ou  de  toute  autre  étoffe  claire  et  transparente, 
qu'on  met,  en  le  tenant  bien  tendu,  devant  une  portière 
de  voiture  ou  une  fenêtre,  pour  se  garantir  de  la  pous^ 
sière  et  du  soleil.  Il  se  lève  et  se  baisse  par  le  moyen 
d'un  ressort. 

STORTHING.  V.  ce  mot  dans  notre  Dicttotmaire  de 
Biographie  et  d^Histoire, 

STRAMBOTTI,  nom  d'une  sorte  de  poésie  italienne, 
ordinairement  en  octaves,  que  les  amoureux  chantent  à 
leur  maltresse.  L'improvisateur  Serafino  l'inventa  dans 
les  dernières  années  du  xv*  siècle. 

STRAPASSON ,  ancien  terme  de  Peinture,  désignant 
l'artiste  qui  strapassait,  c-à-d.  qui  exagérait  jusqu'à 
l'incorrection  la  forme  et  le  mouvement  des  figures,  qui 
affectait  la  science  dont  il  était  dépourvu.  Le/not  est  une 
abréviation  d'ej;tra-pa9«er,  passer  parniessua  toutes  les 
règles  et  les  mesures,  peindre  ou  dessiner  à  tort  et  à 
travers. 

STRAPONTIN  (du  latin  stratus,  couché,  étendu,  et 
pons,  pont),  siège  qu'on  met  sur  le  devant  d'une  cita- 
dine, au  fond  d'un  omnibus,  ou  dans  les  passages  entre 
les  banquettes  des  théâtres,  et  qui  peut ,  comme  un  pont- 
levis,  se  lever  et  s'abaisser  à  volonté. 

STRASBOURG  (Cathédrale  de).  Cette  église,  bâtie  à 
diverses  reprises,  laisse  beaucoup  à  désirer  dans  l'en- 
semble, ce  qui  ne  permet  pas  de  la  placer  au  premier 
rang  de  nos  édifices  religieux.  Le  chœur  et  le  transept 
appartiennent  aux  xi*  et  xii*  siècles;  le  style  romano- 
byzantin  domine  exclusivement  dans  les  constructions 
basses  de  ces  parties,  tandis  que,  vers  le  haut,  par  suite 
de  restaurations  ultérieures,  il  se  mêle  au  style  ogival.  La 
nef  date  de  la  fin  du  xm*  siècle,  et  présente  tous  les  carac- 
tères du  stvle  ogival  primitif.  En  1277,  l'évêque  Conrad 
de  Lichtenberg  posa  la  première  pierre  du  portail  prin- 
cipal. Deux  flèches  parallèles  devaient  le  couronner  ;  une 
seule  a  été  bâtie  :  les  plans  en  furent  donnés  par  Erwin 
de  Steinbach,  et  l'exécution,  continuée  par  son  fils  Jean , 
fut  terminée  en  1439  par  Jean  HQltz,  maître  de  Cologne. 
La  décoration  de  la  façade  et  la  flèche  élancée  qui  la  do- 
mine ont  valu  à  la  cathédrale  de  Strasbourg  la  célébrité 
dont  elle  jouit.  La  disposition  générale  du  grand  portail 
est  à  peu  près  la  même  que  dans  les  autres  cathédrales 
importantes  :  une  porte  centrale  à  5  voussures,  remar- 
quable par  ses  dimensions,  et  deux  autres  portes  plus 
petites  ;  au-dessus,  entre  deux  galeries,  sculptées  et  trans- 
parentes, une  rose  de  50  met.  de  circonférence,  et  d'une 
grande  magnificence;  puis  deux  tours,  qu'on  a  eu  ensuite 
l'idée  de  relier  ensemble  par  un  corps  de  maçonnerie, 
percé  de  deux  fenêtres  ogivales  juxtaposées,  et  dont  le 
sommet  forme  balustrade  à  une  hauteur  de  60  met.  Mais 
ce  qui  distingue  ce  portail ,  c'est  le  système  de  la  dé- 
coration :  les  moulures  y  sont  disposées  sur  deux  plans 
différents,  de  telle  sorte  que  les  moulures  extérieures 
se  détachent  complètement  de  celles  qui  sont  en  ap- 


plication sur  la  muraille,  et  forment  claîre-yoie;  \»  cr- 
ncments  de  la  façade  sont  comme  placés  derrière  un 
écran  découpé  à  jour.  La  rose,  en  particulier,  est  précédée 
d'un  cintre  isolé,  festonné  en  dentelles,  et  qui  n'est  sou- 
tenu que  par  ses  tangentes  et  par  des  rosaces  plus  petites, 
placées  aux  angles  du  cadre  dans  lequel  il  est  retenu.  La 
flèche  qui  surmonte  la  tour  du  Nord  s'élève  à  142  met. 
au-dessus  du  sol,  et  l'on  parvient  au  sommet  à  l'aide 
d'un  escalier  de  635  degrés  s  la  tour,  au-dessus  de  la 
balustrade,  est  flanquée  de  quatre  tourelles  rattachées 
à  la  pyramide  octogone  par  le  moyen  d'arcs  en  forme  de 
pont  volant,  et  dont  l'une  contient  un  escalier  à  double 
spirale  où  deux  personnes  peuvent  monter  ou  descendre 
en  causant  ensemble  sans  se  voir.  Cette  flèche,  la  plus 
haute  construction  que  les  hommes  aient  élevée,  offre 
une  extrême  légèreté  de  matériaux;  elle  est  ouverte  sur 
toutes  ses  faces.  La  foudre  l'ayant  endommagâe  à  dfiui 
reprises  au  xvii*  siècle,  les  deux  Heckler  (Jean  et  Geor^ps) 
la  restaurèrent.  —  Les  portails  latéraux,  comme  la  grande 
façade,  ont  beaucoup  souffert  pendant  la  Révolunon; 
mais  on  a  réparé  tous  les  actes  de  vandalisme.  Du  côtû 
du  Nord,  il  y  a  un  avant-portail,  dit  de  S^^LoMtrmt,  k 
cause  des  bM*reliefs  qui  rappellent  le  martyre  de  ce 
saint. 

L'intérieur  de  la  cathédrale  de  Strasbourg,  long  seule- 
ment de  112  met.,  large  de  38  met.  au  transept,  ne  répond 
E as  à  la  magnificence  du  grand  portail  :  c'est  un  aaaem- 
lage  disparate  de  constructions  de  diverses  époques,  qui 
néanmoins  ont  leur  intérêt  pour  les  archéologues.  La  par- 
tie voisine  de  la  façade  est  plus  élevée  que  le  reste  de  Tédi- 
flce,  et  forme  comme  un  vestibule  ^gantesque,  éclairé 
par  la  grande  rose  et  par  de  vastes  fenêtres  à  nombreux 
meneaux,  dont  les  vitraux  peints  représentent  d'un  côté 
la  création  de  l'homme,  sa  chute  et  le  déluge,  de  l'autre 
le  Christ  au  milieu  des  splendeurs  de  la  Jérusalem  cé- 
leste. La  nef  majeure ,  remarquable  par  la  noblesse  de 
ses  proportions,  mais  d'une  hauteur  de  25  met.  à  peine.,  s 
aussi  de  belles  fenêtres  et  de  précieuses  verrières,  où  Ton 
voit  un  grand  nombre  de  Saints  et  de  Saintes,  quelques 
figures  emblématiques  ou  allégoriques,  et  doa  traits  de 
l'histoire  sacrée.  Les  piliers,  d'une  coupe  ingénieuse,  sont 
couronnés  de  chapiteaux  à  feuillages  sculptés  avec  élé- 
gance et  délicatesse.  Le  chœur,  d'une  simplicité  extrême, 
n'a  que  14  met.  de  longueur,  et  il  a  fallu ,  pour  l'agran- 
dir, y  ajouter  tout  le  milieu  de  la  croisée  et  une  travée 
de  la  nef  :  il  ne  se  termine  à  l'orient,  ni ,  comme  dans 
le  système  romano-byzantin,  par  une  abside  semi-drcu- 
laire,  ni,  comme  dans  le  système  ogival,  par  un  octo- 
gone, mais  carrément ,  par  une  ligne  droite,  et  ce  fond  est 
percé  d'une  grande  fenêtre,  dont  l'effet  est  peu  agréable. 
Au-dessous  du  chœur  sont  pratiquées  des  cryptes,  qui 
paraissent  être  antérieures  au  x*  siècle  i  les  colonnes  qui 
en  soutiennent  les  voûtes  sont  courtes,  avec  chapiteaux 
cubiques  d'une  excessive  simplicité  et  dont  quelques-uns 
portent  des  figures  bizarres. 

La  cathédrale  de  Strasbour^^  possède  quelques  chefs- 
d'œuvre  isolés.  Tel  est  le  Pilier  des  Anges,  dans  l'aile 
méridionale.  C'est  une  masse  centrale  garnie  de  quatre 
grandes  colonnes  engagées,  entre  lesquelles  quatre  autres 
plus  petites  sont  interrompues  par  trois  étages  de  statut 
de  grandeur  naturelle.  Au  bas  sont  les  Évangélistes,  ca- 
ractérisés par  leurs  attributs  symboliques;  plus  haut, 
quatre  Anges   embouchant  des  trompettes  ;   enfin ,  le 
Christ,  accompagné  de  trois  Anges  tenant  les  instruments 
de  la  Passion.  Ces  statues  sont  travaillées  avec  beaucoup 
de  soin;  on  en  attribue  quelques-unes  à  Sabine,  fille 
d' Erwin,  —  Le  baptistère,  exécuté  en  pierre  sur  les  des- 
sins de  Jodoce  Dotzinger,  en  1453 ,  est  une  merveille  de 
délicatesse  et  de  fini.  —  La  chaire,  construite  en  1480, 
sur  les  plans  de  Jean  Hammerer,  et  restaurée  en  1834, 
est  de  style  ogival  flamboyant;  il  n'en  existe  pas  d3 
plus  belle,  et  on  ne  peut  guère  lui  comparer  que  celle 
do  la  cathédrale  de  Mayence.  Le  dais  qui  la  couvre  a 
été  fait  en  1677  par  Conrad  (^ulUn  et  son  fils,  maîtres 
menuisiers  à  Strasbourg.  — Les  orgues,  fabriquées  en  1 714 
par  André  Silbermann,  sont  placées  sur  le  côté  gauche 
on  entrant  par  la  grande  porte  ;  le  buffet  en  est  entière- 
ment doré.  —  Enfin  on  remarque  dans  l'intérieur  de 
l'église  une  horloge  très-curieuse,  faite  en  1842  par 
Schwilgué.  Elle  comprend  une  sphère  céleste  et  ud  ca* 
lendrier  indiquant  le  temps  sidéral ,  les  fêtes  mobiles,  les 
éclipses,  le  lever  et  le  coucher  du  soleil,  les  équations  so- 
laires et  lunaires,  les  jours  de  la  semai  net-  le  temps 
moyen,  les  phases  de  la  lune ,  les  quatre  âges,  etc.  Da 
oôté  ^uche,  quand  midi  va  sonner,  un  coq  de  métal  bat 
des  ailes,  chante  trois  fois,  et  les  A])ôtrcs  défilent  de?ant 


STR 


1671 


STY 


te  Christ.  V,  Grandidier,  Essai  histoPiq%iê  sur  (a  oeUhé» 
drale  de  Strcubourg,  1780,  in-8<^;  SchweighiBuaer,  Dis- 
sertation  nouvelle  sur  la  cathédrale  de  Strasbourg,  178(i, 
in-8<*  :  Miller,  Nouvelle  description  de  la  cathédrale  de 
Strasbourg,  in-18;  Guesber,  Essai  sur  les  vitraux  de  la 
cathédrale  de  Strasbourg,  in-S^  ;  Fréd.  Pitoa,  La  oathé^ 
drale  de  Strasbourg^  1862,  in-8o.  B. 

STRATAGÈME  (du  grec  stratos,  armée,  et  aghéin, 
conduire),  ruse  de  guerre.  Peux  ouvrages  importants 
pour  )*bistoire  de  Tart  militaire  chez  les  Anciens  nous 
sont  parvenus  sous  le  nom  de  StratagèmeSy  Tun  en  grec 
par  Polyen  ,  l'autre  en  latin  par  Frontin. 

STRATÈGE,  F.  ce  mot  oaqs  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire.  ' 

STRATÉGIE  (du  grec  çtratègos^  général),  partie  de  la 
science  militaire.  Bulow,  dans  son  Esprit  du  système  de 
guerre  moderne ,  distingue  )a  Stratégie  et  la  Tactique. 
Pour  lui ,  la  Stratégie  est  la  science  des  mouvements  nui 
se  font  hors  du  rayoR  visuel  réciproque  des  deui  armées 
combattantes,  ou,  si  Ton  veut,  hors  de  la  portée  du 
canon  t  la  Tactique  (du  latin  tangere,  toucher)  est  la 
science  des  mouvements  qui  se  font  en  présence  de  Pen- 
ncmi ,  et  de  manière  à  pouvoir  être  vu  de  lui  et  atteint 
par  son  artillerie.  Par  conséquent,  les  mouvements  qui 
tiennent  à  un  choc  direct  des  troupes  appartiendraient  à 
la  Tactique,  les  marches  prolongées  et  les  campements 
à  la  Stratégie,  L'archidqc  Charles  a  établi  upe  distinction 
plus  exacte  et  plus  ratioi^nelle.  «  La  Stratégie,  diHl^ 
conçoit  et  forn)e  le  plan  des  opérations  de  la  guerre,  en 
embrasse  l'ensemble,  et  détermine  leur  marche.  La  Tac- 
tique enseigne  la  manière  d'exécuter  )es  plans  4e  1^  Stra- 
tégie, liBS  plans  généraux  d'opérations  militaires,  et  les 
mouvements  d'armées  qui  en  sont  la  conséquence,  sont 
donc  stratégiques^  et  les  mouvements  eu  remploi  parti- 
culier des  troupes  sont  tactiques.  »  Seloii  d'&utres,  la 
Stratégie  est  Tepsenible  des  connaissances  théoriques  et 
pratioues  que  dojt  posséder  un  général  :  les  opérations 
dont  la  conception ,  la  réalisation  et  les  développements 
sont  indépendants  de  la  disposition  particulière  et  des 
manœuvres  de  détail  des  troupes  qui  les  exécutent,  ap- 
partiennent à  cet  art  :  1^  tactique  est  l'art  qui  règle  Tor- 
donnance  et  les  manœuvres  des  troupes  de  la  pnanière  la 
plus  avi^ntageuse  relativement  au  but  de  leur  emploi  ;  les 
différents  ordres  de  bataille,  4e  marche,  de  campement, 
Tarmement  et  l'emploi  des  armes,  sont  de  son  ressort. 
La  Tactique  est  une  action ,  la  Stratégie  est  upe  série  4è 
n^ouvements  préparatoires.  On  peut  être  un  ^n  tacti- 
cien, sans  être  un  bon  stratégiste,  et  réciproouementj 
mais  il  nV  a  pas  de  grand  général  s^ns  lu  réunion  des 
deu:if  qualités.  V,  J.  de  Maizeroy,  Cours  d^  Tactique, 
1706-69;  Guibert,  Essai  général  de  Tactique,  i^n-,  l'ar- 
chiduc Charles*  Principes  fU  la  Stratégie A^\i^  3  vol.; 
Jorainî ,  Précis  de  Vart  de  la  guerre,  1822,  Traité  des 
opérations  militaires,  1830,  et  Tableau  analytique  des 
principales  combinaisons  de  la  guerrfi,  1836;  6.  d'Ar- 
zac.  Traité  de  Tactique,  augmenté  par  ff.  Koch ,  18^2  ; 
Dekker,  Tactique  des  trois  armes,  tra4.  par  ff.  de  Brade, 
1836;  Brémond,  la  Tactique  appropriée  fltA  moumment 
des  armes  à  feu,  1853. 

STRATQCBATIE  (du  grec  stratos,  armée,  et  cratos, 
pouvoir  ),  mot  employé  quelquefois  pour  désigner  \p  gou- 
vernement militaire. 

STRÉLITZ.  V,  ce  .mot  dçins  notre  Dictionnaire  de  Bior 
graphie  et  if  Histoire, 

STRBTTE  (  de  l'italien  stretto,  dérivé  du  latin  strin-r 
gère,  serrer ).  Partie  l<^  plus  brillante  d'une  fugue  (  V.  ce 
mot\  celle  ov  le  sujet  est  traité  d'une  manière  plus  serrée 
qu'au  Gown^encement.  —r  On  se  sert  du  même  mot  pour 
indiquer  le  mouvement  accéléré  d'un  finale^ 

STRIBDBJ).  V.  TniBORD. 

STJUJ^  (  du  latin  stria)j  en  termes  d'Architecture,  eut 
synonyme  de  Cannelure.  Tout  objet  dont  la  surface  porte 
des  cannelures  est  dit  strié. 

STRIÇILE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtçtionnatre  de  B{0' 
graphie  et  d'Histoire. 

STRII^E,  nom  qu'on  donne  en  Angleterre  à  ces  sus- 
pensions générales  du  travail  que  nous  appelons  grèves. 

STAOsIaXES  (du  grec  strômata,  tapisseries),  mot 
employé  dans  Je  sens  do  Mélanges.  Ainsi ,  les  Stromates 
de  S'  CléoAent  d'Alexandrie  se  composent  de  sujets  Sort 
divers  historiques,  philosophiques,  théologiques,  etc. 

STJROPftE.  Dans  l'ancienne  poésie  lyrique  et  reli- 
peyse  des  Grecs.,  ce  mot  .désigne  la  partie  de  l'ode  qui  se 
chantait  ^ads^nt  .le  premier  tour  du  chœur  (stropnè;  de 
stréjphéi'a ,  toiirner)  :  ce  j)re9Tier  laur  se  faisait  de  droite 
k  gauche  (V.  Antistropue).  Strophe  avait  aussi  une  ac- 


ception plus  générale,  et  désignait  le  retour  de  certi^ine^ 
mesures  et  de  certi^ns  rhythmès  à  intervalles  égaux  ou 
inégaux  :  c'était  donc  à  peu  près  ce  qui ,  chez  Tes  Mo- 
dernes, s'appelle  couplet,  stc^ce,  strophe,  etc.  Dans  la 
versiflcation  française,  le  mot  strophe  désigne  les  stances 
de  l'ode.  La  strophe  peut  y  admettre,  soit  un  métro 
unique,  soit  une  combinaison  de  difTérentes  q^esures; 
elle  se  compose  généralement  de  3  vers  au  moins,  4e  lÛ 
au  plus  ;  il  est  rare  d'y  rencontrer  plu^  de  deux  mesures 
différentes.  Les  strophes  lyriques  des  chœurs  d'Eslher  et 
d^Atkalie  ont  une  marche  tout  à  fait  libre  :  le  poëte  leur 
a  donné  une  variété  presque  infinie  j  les  mélanges  de  3, 
de  4  mètres  différents  y  sont  très-usités.  p. 

STROPHIUM.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  dfi 
Biographie  et  d'Histoire. 

STUC,  en  italien  stucco  (de  ralleman4  stack,  frag- 
ment), composition  faite  avec  du  mar|)re  ])lanc  pulvérisé, 
de  la  chaux  éteinte  et  de  la  craie,  qu'on  g&che  dans  ^ea^ 
de  manière  à  obtenir  une  espèce  de  mortier.  On  fî^it  en- 
core du  stuc  avec  du  pl&tre  cqit  exprès,  bien  pilé  et  ta- 
misé, puis  gâché  dans  de  Teau  chaude  contenant  de  la 
colle  de  Flandre  en  dissolution.  Il  peut  recevoir,  qu 
moyen  de  p&tes  colorées,  la  couleur  des  divers  marbres. 
Le  stuc  sert  à  faire  des  revêtements,  des  bas-reliefs,  des 
corniches  et  autres  ornements  :  outre  qu'il  p^ut  reppvoir 
le  poli  du  marbre,  il  a  sur  le  pldtre  Tav^n^ge  àù  ne  pas 
sécher  presque  subitement,  et  de  ponseryer  t^ez  lopgr 
temps  sa  ductilité  ;  il  devient  aussi  4^f  <iuè  la  pierre, 
et  n'est  point  sujet  à  se  fendiUçr  p^r  le  retrait  qu  pn 
cédant  à  une  pression.  Les  Romains  connaissaient  le  stuc 
et  en  faisaient  usage.  ^. 

STUD-BOÛK  (de  l'anelais  stud,  haras,  et  book,  liyre), 
registre  qu'on  tient  des  chevaux  entretenus  dans  le^  haras 
de  l'État  et  de  leur  filiation.  Ia  Fr^ncfs  en  â  epipri^tg 
Pusage  à  l'Analeterre  en  1853. 

STUPASi.   V.  TOMBBAOX. 

STYLE.  Les  Anciens  éprivaieiit  s^r  d@s  tabI^tte#  fecpu- 
vertes  d^une  légère  CQuche  de  cire,  et  le  pipt  styl$  ^| 
venu  de  l'instrument  qui  leur  servait  à  tri^cer  Ipurs 
lettres  i  le  style ,  stylus,  était  proprement  Hn  petit  poin- 
çon. En  Littérature,  on  confond  souvent  le  style  àyef; 
Vélocution ,  bien  qu'il  y  ait  entre  l'un  et  Ta^ti'^  une  po- 
table différence.  En  effet,  l'élocution  est  un  terme  abi^r 
trait  et  général;  elle  consiste  4  traduire  la  pensée  par 
la  parole  ;  c^est  un  art  qui  n'appartient  proprement  ^  per- 
sonne, et  que  chacun  est  maître  de  cultiver  ^  son  gré.  té 
style  indique,  au  contraire,  l'originalité  qn'un  /icri^rai^ 
sait  donner  à  Pexpression  de  ses  idées  et  de  s^  .^jenlir 
ments.  Le  style  est  donc  personnel  ;  chaflue  auteur  a  \9 
sien ,  que  nul  ne  saurait  lui  dérober.  T044  an  pll^  est.- 
ii  possible  de  le  contredire,  au  risque  dV  0li)gner  |^ 
réputation  d'un  maJadroit  ou  d'un  impertioept  imitâr 
teur.  Ainsi  l'entendait  Buffon ,  lorsqu'il  disait  :  «  J^  style 
est  de  l'homme  même.  »  On  peut  ravir  au  sav^^t  ses  dé- 
couvertes, au  philoepphe  ses  principes,  h  l'historien  ses 
observations  morales  sur  l'homme  et  sur  les  progrés  djs 
la  civilisation  ;  tout  cela  se  r^a^d,  se  propage,  et  'ûf^}i 
par  devenir  en  quelque  sorte  uiue  propriété  pul^Jique  : 
maison  o'eniève  point  h  ^écrivain  son  style  ;  par  le  ^yle^ 
il  vivra  ;  faute  de  style,  il  périra.  Toi  est  le  sens  prjécj;^ 
de  la  parole  de  BuSbn.  On  a  pr^èté  p/ouxtant  à  cette 
maxime  une  autre  si^nificatioDi  et  plus  jd'/une  personnvè 
l'emploie,  qui  veut  dire  i  Tel  sjtyle,  te^  hoipaAic.  Voulez- 
vous,  par  exe«Dple,  connaiti»  l'hu^^^e^r  4'un  écriyâiii? 
Lisez  ses  œuvres;  vous  vejrez  »'y  refiéter,  coouné  en  y^ 
miroir,  son  caimotère  el  sas  secrètes  jj^CçUmutâçns.  Cette 
jfvterprétatioQ,  à  la  .vérité,  eat  ai^i traire,  et  dépasse  l^ 
vraie  pensée  de  Butfon;  mais  son  tMf,  y  répugne  si  pei^: 
d'eâMeurs,  qu'on  peut  affirmer  qu'jl  en  dérive.  Oia  ^  le 
«tyle  de  l'éciivain  est  un  ^ien  im^iMetÀ^^  qui  déde  ^ 
pillage  et  le  vol  dans  le  préaen>t  cocnnie  dans  l'avenir; 
mais  cestyle  mème,4'où  le  tient-ij,  MQon  ,4e  ses  Jcnoe^vrs, 
4e  ses  hsintudes,  du  tour  particulier  4e  .son  e^rit  .e,t  de 
son  imagination,  de  sa  senaibiUté,  4e  tbviÀ  .ce  mil  Xait 
enfin  qu'il  n'est  ni  vous  ni  moi ,  mais  ^lui-roème?  J)q  ià 
vient  aussi  que  chaque  nation  a  un  style  4il^érent,  sui- 
vant «on  caractère  et  son  génie.  «  f)es  £g^res  fortes  et 
hyperboliques  donnaient  une  >ive  ohfileur  h  celui  des 
<;k1entaux;  les  Athéniens,  peuple  spirituel  et  poli,  ^!é- 
4aient  formé  un  style .pcéds , .clair  et  joigne;  Jc^  A^îf^- 
«tiques,  licencieux  ôt  amis  du  Ivgte ,  affectaient  un  stylo 
fleuri,  mais  diffus.  On  .remarque  les  mêmes  ,^méreDCQÂ 
caractéristiques  d^nsJe^tyle  des  Français,  dés  Anglf^is  et 
.des  Espagnols. 'En  4>aclaat.du  Atyle  en  gén^U  QP  <4U 
qu'il  «et  necveux,  .faible  «n  .vK^  .qwité9  qui,  dans  i^n 
écrivain,  dôâisjncnt  à.la.-foi^.Qtâa  manière  de  sentir  et  jia 


STY 


1672 


SIJB 


manière  de  s'exprimer;  tant  il  est  difficile  de  les  séparer 
Tune  de  Tautre.  »  L'illustre  académicien  avait  donc 
raison,  et  ceux-là  n*ont  pas  tort  non  plus,  C[ui  com- 
mentent sa  parole  dans  un  sens  qu'il  n'entendait  pas  lui 
donner.  Le  style  est  de  l'homme  même;  mais  c'est  l'hu- 
meur qui  fait  le  s^le. 

Cette  originalité  qu'un  grand  écrivain  sait  communi- 
quer à  l'expression  de  sa  pensée,  le  véritable  artiste  en 
laisse  aussi  l'empreinte  sur  ses  productions.  C'est  ainsi 
que  Michel-Ange  imprimait  à  ses  toiles  une  physionomie 
que  n'oCTrent  pas  celles  de  Raphaël  ;  que  les  mélodies  de 
Mozart  ont  un  caractère  dont  s'éloignent  celles  de  Bee- 
thoven ;  que  les  statues  de  Phidias  annoncent  un  autre 
ciseau  que  celui  de  Praxitèle.  C'est  pourquoi ,  pour  mar- 

3uer  le  talent  particulier,  la  manière  propre  du  peintre, 
u  musicien,  du  statuaire,  on  emploie  le  même  terme 
qui  sert  à  distinguer  entre  eux  les  écrivains,  et  l'on  dit 
le  style  de  Rossini ,  comme  on  dit  le  style  de  Beaumar- 
chais. Le  mot  a  passé  des  individus  aux  écoles,  et,  dans 
l'histoire  des  arts,  il  s'applique  parfois  à  des  périodes  en- 
tières où  règne  quelque  genre  spécial.  De  là  ces  expres- 
sions qui  reviennent  sans  cesse  sous  la  plume  des  cri- 
tiques :  style  roman,  style  gothique,  style  Renaissance, 
style  Louis  XV. 

La  conclusion  qui  ressort  de  tout  ce  qui  précède  s'offre 
naturellement  à  l'esprit  :  de  même  que  les  humeurs  sont 
aussi  dissemblables  que  les  visages,  de  môme  les  styles 
sont  aussi  dissemblables  que  les  humeurs.  Ce  n'est  pas  à 
dire  pourtant  que  cette  diversité  soit  sans  bornes  :  il  y  a 
des  limites  immuables,  marquées  par  le  bon  sens  et  le 
goût,  en  deçà  desquelles  les  écrivains  et  les  artistes  sont 
tenus  de  se  renfermer;  au  delà,  l'originalité  dégénère  en 
bizarrerie,  et  conduit  au  ridicule.  Pour  ne  parler  que  des 
Lettres,  c'est  le  droit  et  le  devoir  d'un  auteur  d'être  lui- 
même,  mais  à  condition  de  respecter  certaines  lois  préa- 
lables que  lui  impose  la  raison.  Parmi  ces  règles  géné- 
rales, les  unes  regardent  l'arrangement  et  la  composition 
des  ouvrages  :  tel  est  le  prix  d'un  plan  bien  fait  et  mûre- 
ment étudié,  que  Buffon  lui-même  n'a  pas  craint  de  définir 
le  style  :  «  l'ordre  et  le  mouvement  (pi'on  met  dans  ses 
pensées;  »  comme  s'il  n'était  pas  possible  que  l'on  conçût 
nettement  la  suite  et  l'enchaînement  de  ses  idées,  sans 
que  les  mots  n'arrivent  aisément  et  comme  d'eux-mêmes 
pour  Tes  rendre  Les  autres  portent  sur  l'expression ,  et 
déterminent  les  qualités  de  l'élocution  indispensables  à 
tous  les  écrivains;  ce  sont  :  la  clarté,  la  prMsion  et  la 
propriété,  la  correction  et  la  pureté,  le  naturel  et  la  no- 
blesse, Vharmonie  (V.  ces  mots).  —  La  Rhétorique  ne 
s'est  pas  bornée  à  dresser  ainsi  la  liste  de  ce  qu'on  appelle 
les  qualités  générales  du  style.  Mais ,  considérant  la  va- 
riété des  œuvres  littéraires  et  la  diversité  des  si^ets 
qu'elles  traitent  sur  des  tons  si  différents,  elle  a  cru  ne 
point  établir  une  classification  arbitraire  en  distinguant 
dans  les  ouvrages  de  l'esprit  et  dans  le  style  trois  genres, 
à  chacun  desquels  elle  assigne  ses  qualités  respectives  : 
le  genre  simple,  qui  recherche  principalement  la  simpli- 
cité, la  brièveté,  la  naïveté,  la  finesse,  la  délicatesse  et 
la  grâce  ;  le  genre  tempéré,  qui  brille  par  la  variété,  l'abon- 
dance, la  richesse,  le  sentiment,  la  vivacité,  l'énergie  et 
le  trait;  enfin  le  style  sublime,  qui  s'accommode  particu- 
lièrement de  la  véhémence,  de  la  magnificence,  de  la 
profondeur  et  de  l'enthousiasme  (V.  Simple,  TmipéRé, 
Sdbumb).  Seulement,  elle  ajoute  que  lef  trois  genres 
peuvent  se  rencontrer  dans  un  même  sujet,  et  notam- 
ment elle  cite  les  Oraisons  funèbres  de  Bossuet  comme 
d'admirables  modèles  où  tous  les  styles  sont  harmonieu- 
sement fondus.  —  Une  autre  subdivision ,  plus  fondée 
peut-être,  certainement  plus  impérissable,  consiste  à  dis- 
tinguer le  style  de  la  poésie,  avec  ses  mouvements  extraor- 
dinaires, ses  tournures  hardies,  ses  expressions  originales, 
ses  épithètes,  ses  synonymes,  et  ses  figures  de  prédilec- 
tion, telles  que  l'inversion,  l'ellipse,  la  périphrase,  du 
style  de  la  prose,  avec  ses  termes  de  la  langue  commune, 
avec  son  allure  libre  et  dégagée,  faite  pour  répandre  sur 
la  pensée  la  clarté  et  la  lumière.  La  langue  française  offre 
à  peine  quelques  mots  exclusivement  propres  au  style 
poétique:  un  coursier,  là  plaine  liquide,  Vétker,  etc.;  mais 
les  Latins  en  comptaient  davantage,  et,  chez  les  Grecs, 
les  deux  idiomes  avaient  si  bien  leurs  termes  et  leurs 
tours  respectifs,  qu'un  critique  Alexandrin  put  un  Jour 
traduire  en  prose  Ylliade  d'Homère.  Dans  la  prose  môme, 
en  a  distlnçié.le  style  sdentifique,  celui  du  géomètre  et 
du  dialecticien,  dont  la  perfection  suprême  semble  être 
d'atteindre  à  la  précision  algébrique,  et  le  style  littéraire, 
où  l'écrivain  met  quelque  chose  de  son  âme.  Il  appartient 
au  goût  de  déterminer  à  quelles  matières  les  différents 


styles  sont  le  mieux  assortis,  et  dans  quelle  mestire  il 
convient,  quelque  sujet  qu'on  traite,  d'en  mêler  les  formel 
diverses.  A«  H. 

STYLE,  en  termes  de  Chronologie,  manière  particulière  d« 
supputer  les  années.  Le  vieux  style  est  la  manière  dont  on 
comptaitavant  la  réforme  de  Grégoire  xm,  etqui  est  encore 
en  usage  chez  les  Russes  et  les  Grecs;  le  nouveau  style 
est  la  manière  dont  on  compte  depuis  cette  réforme.  Le 
vieux  style  est  en  retard  de  12  jours  sur  le  nouveau  :  le 
l«r  janvier  dans  le  vieux  style  est  pour  nous  le  13. 

STYLE  (  Peinture  de) ,  nom  donné  quelquefois  à  la  pein- 
ture d'histoire  (  V,  ce  mot). 

STYLET ,  poignard  à  lame  très-mince  et  ordinairement 
triangulaire.  C'est  l'arme  favorite  des  Italiens  et  des  Es- 
pagnols. 

STYLITES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d'Histoire. 

STYLOBATE  (du  grec  stulos,  colonne,  et  basis,  base), 
en  termes  d'Architecture,  espèce  de  piédestal  continu  ou 
de  soubassement  qui  a  base  et  corniche,  et  qui  forme 
avant  et  arrière-corps  sous  les  colonnes  qu'il  porte.  Sty- 
lobate  a  été  aussi  employé  comme  synonyme  de  Plinthe. 

STYRIEN ,  dialecte  parlé  par  les  \Vendes  de  la  Styric. 
V.  Wende, 

SUAIRE  (du  latin  sudarium)^  nom  donné  d'abord  à 
un  ling<^  dont  on  se  servait  pour  essuyer  la  sueur  du  vi- 
sage, puis  à  un  voile  dont  on  couvrait  la  tête  et  le  visage 
des  morts,  enfin  au  linceul  dans  lequel  on  les  ensevelit. 
Plusieurs  églises  du  monde  catholique  prétendent  possé- 
der le  saint  suaire,  qui  servit  à  la  sépulture  de  Jésus- 
Christ. 

SUASORLE.  V.  DéCLAMATioNS. 

SUBALTERNES  (Propositions),  propositions  formées 
avec  le  môme  sujet  et  le  même  attribut;  opposées  en 
quantité,  l'une  universelle,  l'autre  particulière;  et  de 
même  qualité,  toutes  deux  affirmatives  ou  toutes  deux 
négatives.  Telle  est  la  nature  de  leurs  rapports ,  que  la 
vérité  des  propositions  universelles  entraine  celle  des 
propositions  particulières  :  5t  tout  homme  est  animeU, 
quelque  homme  est  animcU  ;  et  Si  mU  homme  n*est  par- 
fait, quelque  homme  n*est  pas  parfait.  Mais  la  vérité  des 
particulières  n'entraîne  pas  celle  des  universelles.  En 
revanche,  la  fausseté  des  universelles  n'empêche  pas  né- 
cessairement la  vérité  des  particulières;  quoiquMl  no 
soit  pas  vrai  que  tout  nombre  soit  exactement  divisible, 
il  est  vrai  que  certains  nombres  sont  exactement  divi- 
sibles (  V.  fjogique  de  Port-Royal ,  2«  part.,  ch.  IV).  B— e. 

SUBARMALE.-  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  dâ 
Biographie  et  d'Histoire, 

SDBCONTRAIRES  (Propositions).  V.  Cotthaires. 

SUBHASTATION  (du  latin  sub  hastà,  sous  la  pique  s 
en  termes  de  Droit  romain,  vente  à  l'encan.  H  était  d'usage 
de  planter  à  l'endroit  où  devait  se  faire  l'encan  une  pique, 
comme  marque  d'autorité,  parce  que  ces  ventes  ne  se 
faisaient  qu'en  vertu  d'une  ordonnance  du  préteur. 

SUBITAIRES.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

SUBJECTIF.  V.  Objectif. 

SUBJECTION,  figure  de  Rhétorique,  la  même  que 
l'Antéoccupation  (V.ce  mot). 

SUBJONCTIF,  mode  des  verbes  qui  exprime  l'affirma- 
tion d'une  manière  subordonnée  et  comme  dépendante 
d'un  autre  verbe,  auquel  le  verbe  au  subjonctif  est  le  plus 
souvent  lié  par  le  moyen  d'une  conjonction.  Aussi  le  sub- 
jonctif ne  s'emploie-t-il  jamais  que  pour  marquer  une 
chose  douteuse  ou  indécise.  Les  verb^  du  sens  de  per- 
mettre, défendre,  souhaiter,  désirer,  craindre,  vouloir, 
ordonner,  douter,  nier,  etc.,  se  construisent  en  français 
avec  le  subjonctif.  D'autres  verbes  (jui  n'entraSnent  pas, 
par  l'idée  qu'ils  expriment,  l'emploi  du  subjonctif  dans 
une  proposition  subordonnée,  gouvernent  ce  mode  dè^ 
qu'ils  prennent  la  forme  négative  ou  interrogative;  e'e:^t 
ainsi  qu'on  dit  :  a  Je  ne  crois  pas  qu'il  vienne;  Croyez- 
vous  qu'il  vienne?  »  tandis  qu'on  dit  :  «•  Je  crois  qu'il  ne 
vient  pas.  »  Certains  verbes  se  construisent  avec  Tindi- 
catif  ou  avec  le  subjonctif  selon  la  nuance  de  sens  qu'ils 
expriment;  ainsi  le  verbe  prétendre  signifie  à  la  fois 
affirmer  et  vouloir  avec  énergie  :  dans  le  l*'  cas,  il  ist 
suivi  de  l'indicatif;  dans  le  2*,  du  subjonctif.  Il  parait , 
Il  me  semble,  se  construisent  avec  l'indicatif;  //  ne  pa- 
rait pas,  Il  semble,  avec  le  subjonctif.  Toutefois,  il  peut 
arriver  que  II  semble  ait  pour  complément  une  proposi- 
tion exprimant  une  réalité,  surtout  si  ce  verbe  laisse  per- 
cer quelque  ironie,  comme  dans  cette  phrase  de  La 
Bruyère  :  «  Il  semble  que  la  Logique  est  l'art  de  convain- 
cre de  quelque  vérité.  »  C'est  sur  l'idée  d'indéciaion 


SUD 


1873 


SUB 


tehérente  au  sabjonctif  que  repose  remploi  de  ce  mode 
après  tes  pronoms  conjonctifs,  comme  lorsqu'on  dit: 
I  Je  cherche  quelqu'un  qui  me  rende  service.  »  Il  y  a  ce- 
dendant  telle»  manières  de  parler  où  il  est  difficile  de 
rendre  compte  du  subjonctif,  comme  lorsqu'on  dit  :  a  Le 
chien  est  le  seul  animal  dont  la  fidélité  sott  à  l'épreuve.  » 
Le  subjonctif  n'est  pas  pi  us  logique  avec  avant  que,  dans 
beaucoup  de  cas,  que  ne  le  serait  l'indicatif;  la  preuve 
en  est  qu'en  grec  et  en  latin  les  mots  qui  correspondent 
à  cette  locution  conjonctive  se  construisent  fréquemment 
avec  l'indicatif.  Bien  que  et  quoique  ne  gouvernent  pas 
rssentioL'cmcnt  le  subjonctif,  et  cependant  toujours  ces 
conjonctions  sont  suivies  de  ce  mode.  Comment  se  fait- il 
que  la  conjonction  que^  mise  pour  éviter  la  répétition  do 
si,  qui  ne  gouverne  que  l'indicatif,  gouverne  le  subjonc- 
tif? Comment  si  ne  gouveme-t-il  en  aucun  cas  ce  mode? 
Ce  sont  là  de  pures  décisions  de  l'usage  ou  de  l'euphonie. 
Le  subjonctif  n'est  pas  toujours  nécessairement  accom- 
pagné d'une  conjonction;  dans  certains  tours  vifs  de 
phrase,  on  l'omet  avec  avantage  :  «  Écrive  qui  voudra. — 
Fuissé-je  y  voir  tomber  la  foudre  !  —  Dieu  vous  soit  en 
aide  !»  —  Le  subjonctif  a  différents  temps,  le  présent , 
Vimparfait,  le  parfait  ou  passé,  le  plus^que-parfait,  et, 
dans  quelques  langues,  le  futur,  qui  se  confond  le  plus 
souvent  avec  le  présent.  P. 

SUBUCACULUM.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  â^ Histoire, 

SUBLIME  (Genre  ou  Style  ) ,  un  des  trois  genres  d'élo- 
quence établis  par  les  rhéteurs.  «  Il  est  riche,  majestueux, 
éclatant,  armé  de  toute  la  force  de  la  parole.  C'est  cette 
élévation,  cette  grandeur  de  style  qui  a  commandé  l'ad- 
miration aux  peuples,  et  leur  a  fait  accorder,  dans  le 
gouvernement ,  tant  de  pouvoir  à  l'éloquence  :  je  parle 
e  cette  éloquence  qui  se  i>récipite  et  retentit  comme  un 
torrenty  qui  étonne,  qui  saisit,  et  qu'on  désespère  d'at- 
teindre* (Cioeron.)  Le  sublime  est  extraordinaire,  oe 
merveilleux  qui  échauffe  et  remue  T&me,  qui  produit  en 
nous  une  admiration  mêlée  d'étoonemeot  et  de  surprise, 
qui  nous  enlève  par  ses  mouvements  et  sa  véhémence,  et 
nous  éblouit  de  ses  tonnerres  et  de  ses  éclairs.  Le  style 
sublime  admet  la  grandeur,  la  pompe,  l'éclat  de  Texpres- 
sion,  et  tout  ce  qui  peut  produire  sur  les  auditeurs  une 
impression  durable.  Mais  il  repousse  les  ornements  etlcs 
fleurs  qui  font  Tagrémen*  du  style  tempéré;  son  mérite 
n'est  point  dans  na  parure,  mais  dans  sa  force.  Il  exista 
par  l'audace  des  pensées  et  la  véhémence  des  pafstous; 
il  s'tnquiétc  peu  du  choix  des  mots,  et,  loin  d'en,  être 
esclave,  il  leur  commande  comme  un  tyran  ;  il  les  force 
à  rendre  sa  pensée  avec  grandeur  et  noblesse,  en  négli- 
geant souvent  le  nombre  oratoire.  Et  pourtant  c'est  au 
style  sublime  qu'est  réservée  la  grande  période,  avec 
touies  les  figures  et  tous  les  moyens  d'exciter  les  pas- 
sions ;  mais  il  ne  les  emploie  pas  sans  repos,  sans  inter- 
ruption ;  il  sait  user  à  propos  du  simple  et  du  tempéré  ; 
il  produit  souvent  tout  son  effet  par  un  seul  mot;  d'ail- 
leurs, il  ne  peut  se  soutenir  également  partout ,  car  il 
fatiguerait  les  auditeurs. 

On  doit  distingnei^  le  style  sublime  du  sublime.  Les 
rhéteurs  appellent  style  sublime  celui  qui  déploie  toutes 
les  pompes  de  l'éloquence,  et  qui  joint  à  la  grandeur  des 
pensées  la  majesté  de  l'expression,  la  véhémence,  la  fé- 
condité, la  richesse,  la  gravité,  les  grands  mouvements 
pathétiques.  Le  sublime  peut  exister  sans  toutes  ces  con- 
ditions. «  Tout  ce  qui  est  véritablement  sublime,  dit  Lon- 
gin,  a  cela  de  propre,  quand  on  l'écoute,  qu'il  élève  TiUne 
et  lui  fait  concevoir  une  plus  haute  opinion  d'elle-même, 
la  remplissant  de  Joie  et  de  je  ne  sais  quel  noble  orgueil, 
comme  si  c'était  elle  qui  eût  produit  les  choses  qu'elle 
vient  simplement  d'entendre.  »  Le  sublime  suppose  des 
sentiments  élevés,  un  cœur  généreux,  qui  n'a  rien  de  bas 
ni  de  rampant;  il  conçoit  l'idée  dans  sa  plus  grande  élé- 
vation, et  il  l'exprime  comme  il  la  conçoit.  II  y  a  plu- 
sieurs espèces  de  sublime  :  sublime  de  pensée,  sublime 
de  sentiment,  sublime  d^image.  Le  sublime  de  pensée  est 
une  grande  idée  exprimée  soit  avec  simplicité,  soit  avec 
maj€»té.  Longin  cite,  en  le  mettant  au-dessus  de  tout  ce 
qu'il  y  a  de  plus  beau  dans  Homère,  ce  verset  de  Moïse  : 
«  Dieu  dit  :  Que  la  lumOre  soit,  et  la  lumière  fut.  » 
Les  premières  paroles  de  l'Oraison  funèbre  de  Louis  XIV 
par  Massillon,  en  présence  du  cercueil  du  roi,  sont  les 
suivantes  :  Dieu  seul  est  grand,  mes  frères  I  Ici  le  su- 
blime consiste  dans  la  ^nsée,  et  nullement  dans  l'ex- 
pression. Ces  exemples  justiflent  un  philosophe  qui  a  dit  : 
•  Il  n'y  a  point  de  style  sublime;  c^es*  !a  chose  qui  doit 
Tètre.  Et  comment  le  s^le  pourraitp-il  être  sublime  sans 
•llej  on  plus  qu'elle?  »  ^  Le  sublime  de  sentiment  nous 


élève  au-dcs~ns  de  nous-mOmcs,  et  nou^  pt^iièiro  d'eiH 
thousiasme,  d'étonnement  et  de  plaisir.  On  vient  annon- 
cer au  vieil  Horace  que  deux  de  ses  fils  ont  été  tués,  et 
que  le  troisième  a  pris  la  fuite;  il  est  indigné  de  cette 
l&cheté  {Horace,  III,  6)  : 

'   Qae  Touliet-Toaa  qu'il  flt  contre  trois?  —  Qa*il  mourût. 

«Voilà,  dit  Voltaire,  ce  fameux  Qu'il  mourût,  ce  trait  du 
plus  grand  sublime,  ce  mot  auquel  il  n'en  n'est  aucun  do 
comparable  dans  toute  l'Antiquité.  » — Le  sublime  d'ima{;e 
est  celui  qui  présente  d'une  manière  vive  et  eaisissanto 
un  grand  objet,  une  grande  action,  comme  dans  ces  vers 
de  Corneille  sur  Pompée  devant  ceux  qui  allaient  l'as- 
Bassiner  {La  Mort  de  Pompée,  II,  3)  : 

et  8*aTance  an  trépM 
Ayeo  le  mftiae  front  qttll  donnait  les  Étati. 

L'écuoil  du  style  sublime  est  l'enflure.  Quand  on  veut  à 
tout  piix  être  plus  grand  que  son  sujet,  on  entasse  de 
grands  mots  sonores,  des  périodes  ronflantes,  des  expres- 
sions qui  paraissent  hardies,  mais  qui  ne  sont  que  fausses; 
enfin  on  tombe  dans  le  galimatias.  Les  auteurs  les  plus 
sublimes  sont  ceux  qui  offrent  le  plus  grand  nombre 
d'exemples  de  ce  défaut.  Voici  des  vers  de  Corneille  où  il 
est  frappant  {Cinna,  1, 1)  : 

Impatient!  désirs  d*une  illustre  rengcance, 

A  qui  la  mort  d'un  père  a  donné  la  naissance, 

Enfants  impétueux  de  mon  ressentiment, 

Que  ma  doulenr  séduite  embrasse  sveuglément. 

Vous  régnes  sur  mon  âme  sToeque  trop  d'empire; 

Pour  le  moins  un  moment  souATres  que  je  respire... 

Boileau  trouvait  dans  ces  paroles  une  généalogie  des  tm- 
patients  désirs  d'une  illustre  vengeance,  qui  étaient  les 
enfants  impétueux  d'un  noble  ressentiment, et  qui  éttAent 
embrassés  par  une  douleur  séduite,  H.  D. 

SUBRÉCâRGDB  (d'un  mot  espagnol  qui  signifie  pre- 
posé  au  chargement)^  nom  donné  autrefois  h  l'agent 
chargé,  dans  chaque  comptoir  des  colonies  espagnoles, 
d'acheter  et  de  vendre  les  marchandises,  et  aujourd'hui 
au  préposé  choisi  par  un  armateur  pour  veiller,  sur  le 
navire,  à  la  conservation  des  marcnandises  formant  la 
cargaison,  pour  en  rendre  compte  aux  divers  chargeurs 
ou  expéditeurs,  pour  faire  les  achats  d'objets  destinés  au 
retour.  Le  subrécargue  engage  son  armateur  de  la  même 
manière  qu'un  commis  engage  son  commettant. 

SUBRËPTION.  K.Obreptioii. 

SUBROGATION  (du  latin  subrogare,  mettre  à  la  place), 
mot  qui  désignait,  chez  les  anciens  Romains,  tout  articio 
ajouté  à  une  loi.  Il  s'applique  aujourd'hui  à  une  fiction 
de  Droit  par  laquelle  une  chose  ou  une  personne  est  mise 
à  la  place  d*une  autre.  La  transmission  qu'un  créancier 
fait  de  tous  ses  droits  et  actions  contre  un  débiteur,  à 
celui  qui  le  désintéresse,  est  une  subrogation.  La  subro- 
gation peut  être  conventionnelle,  légale  ou  judiciaire 
{CodeNapoL,  art.  1240-52;  Code  de  Procéd.^  612,  721). 
Elle  diffère  de  la  cession,  en  ce  qu'elle  peut  avoir  lieu  à 
rinsu  do  débiteur  et  par  la  seule  volonté  du  créancier. 
V.  Mourlon,  Traité  de  la  subrogation,  1848,  in -8°; 
A.  Bertauld,  De  la  subrogation  à  l'hypothèque  légale  des 
femmes  mariées,  1853,  in-8<^;  Gauthier,  TS'aitéde  la  sub- 
rogation de  personnes,  ou  du  payement  avec  subroga» 
tion,  1853,  in-8«. 

SUBROGÉ  TUTEUR.  V.  Tuteor. 

SUBSIDES  (du  latin  subsidium,  secours),  impôts  que 
les  peuples  payent  au  chef  de  l'État  pour  subvenir  aux 
besoins  publics.  Autrefois,  on  distinguait  l'impôt  propre- 
ment dit,  établi  par  le  gouvernement,  et  les  subsides, 
réglés  par  la  nation  et  donnés  de  son  plein  gré.  Le  se- 
cours d'argent  qu'un  État  donne  à  un  autre,  son  allié; 
en  vertu  de  traités  faits  entre  eux,  se  nomme  également 
subside.  —  En  termes  de  Droit  canonique,  on  appelait 
jadis  subsides  caritatifs  certains  droits  perçus  par  les 
évêques  qui  allaient  à  des  conciles  ou  faisaient  d'autres 
voyages  pour  l'utilité  de  leurs  églises;  le  payement  en 
était  fait  à  titre  de  charité  {caritas), 

SUBSIDIAIRE,  en  termes  de  Droit,  se  dit  de  ce  qui  n'a 
lieu  que  comme  un  dernier  recours,  une  dernière  res- 
source :  ainsi,  des  conclusions  subsidiaires,  V.  Couclo- 

SlOlfS. 

SUBSISTANCES  lilLITAIRES,  partie  du  service  des 
armées,  consistant  à  pourvoir  h  leur  alimentation,  et 
dans  laquelle  on  fait  rentrer  tout  ce  qui  est  relatif  k  l'ha- 
billement et  à  réquipement  des  troupes.  Ce  service  est 
confié  an  corps  de  l'Intendance  militaire  :  en  temps  da 


SUD 


1674 


SUC 


(pierre,  les  Foumtsseurs  ou  Munitionnaires  lui  viennent 
en  aide.  —  Un  Boldat  est  «n  tubêuiancê  dans  un  régi- 
ment, quand  11  y  est  nourri  et  soldé,  en  attendant  qu*il 
puisse  rejoindre  le  corps  auquel  il  appartient  et  dont  les 
circonstances  Tont  éloigné. 

SUBSTANCE,  du  latin  sub,  sous,  et  stare^  se  tenir,  ou 
stemi,  être  étendu  ;  d*où  substantia,  mot  d'origine  sco- 
lastique.  La  substance  est  donc  une  réalité  que  nous  con- 
cevons dans  tous  les  êtres,  revêtant  les  qualités  qu'ils 
possèdent  :  c'est  le  support,  ou,  comme  on  disait  encore 
dans  l'École,  le  st4bstratum  de  toutes  les  manières  d'être. 
Cette  concepUon  se  fait  en  nous  par  une  loi  appelée  loi 
d$  la  substance,  en  vertu  de  laquelle  nous  concevons  fata- 
lement que  tout  adjectif  suppose  un  substantif,  tout  attri- 
but un  sujet,  tout  mocitf  une  substance.  C'est  par  l'idée  que 
nous  prenons  d'abord  de  notre  fnot,  que  nous  acx[uérons 
celle  de  substance,  et,  par-dessus  tout,  celle  du  mot  comme 
cause.  Pour  causer,  il  faut  être,  et,  en  s'affîrmant  comme 
cause,  le  mot  s'affirme  comme  substance.  Les  qualités  des 
corps  nous  révèlent  de  même  qu'il  y  a  une  réalité  qui 
les  revêt.  S'il  est  impossible  de  ne  pas  concevoir  sous 
les  modes  une  réalité  substantielle  qui  les  supporte,  il 
est  impossible  de  la  connaître  en  elle-même.  C'est  ce  que 
tentèrent  les  premiers  philosophes  en  cherchant  à  ex- 
pliquer la  nature  des  choses.  Aristote,  en  disant  que  la 
substance  peut  s'entendre  ou  de  la  matière,  ou  de  la 
forme,  ou  du  composé  des  deux,  ne  fut  pas  beaucoup  plus 
heureux.  En  comparant  la  substance  aux  phénomènes,  on 
fut  amené  à  dire,  par  opposition  h  Vaccident,  qu'elle  est 
ce  qui  existe  par  soi-même.  Cotte  définition  n'était  pas 
sans  danger,  car  on  ne  peut  nier  la  substance  dans  les 
êtres  contingents;  ceux-ci  n'existant  point  par  eux- 
mêmes,  ils  ne  seraient  plus  que  des  modes  de  l'être,  et 
on  arriverait  au  panthéisme.  Au-dessus  des  substances 
contingentes  et  flnics,  il  faut  reconnaître  une  substance 
nécessaire,  qui  est  aussi  la  cause  nécessaire  et  première, 
Dieu.  Par  là  sont  repoussés  le  panthéisme,  qui  nie  la  per- 
sonnalité dans  l'homme  ;  le  sensualisme,  qui  ne  voit  dans 
la  substance  spirituelle  qu'un  assemblage  de  qualités  sen- 
sibles ;  l'idéalisme  de  Kant,  qui  ne  voit  dans  la  substance 
qu'une  forme  de  la  pensée,  ainsi  que  celui  de  Berkeley, 
qui  met  en  question  la  réalité  de  la  matière.  R. 

SUBSTANTIF,  variété  du  nom,  qui  s'appelle  ainsi  lors- 
qu'il signifie  quelque  substance,  quelque  être  ayant  une 
existence  propre.  Tels  sont  :  esprit,  corpt,  plante,  arbre, 
pomme,  fruit,  grain,  etc.  (K.  Nom).  —  On  donne  aussi 
cette  dénomination  au  verbe  être,  parce  qu'il  exprime  par 
lui-même  l'affirmation  de  l'existence  d'une  substance 
sans  égard  à  aucun  attribut  :  l'attribut  doit  être  exprimé 
ensuite  à  part  (Dieu  est  —  juste).  Le  mot  substantif 
s'oppose  en  ce  cas  h,  attributif,  nom  donné  à  tout  verlie 
qui  exprime  tout  à  la  fois  en  un  seul  et  même  mot  l'af- 
firmation de  l'existence  d'une  substance  et  l'affirmation 
de  l'attribut  qui  lui  convient.  Le  verbe  substantif  s'ap- 
pelle aussi  verbe  abstrait.  P. 

SUBSTITUT,  magistrat  chargé  de  remplacer  au  parquet 
le  procureur  général  ou  le  procureur  impérial.  Les  sub- 
stituts sont  nommés  par  le  chef  de  l'État  :  ceux  des  pro- 
cureurs généraux  doivent  avoir  25  ans,  ceux  des  procu- 
reurs impériaux  21. 

SUBSTITUTION  (du  latin  fubêtituêre,  mettre  à  la 
place),  en  termes  de  Droit,  disposition  «n  vertu  de  la- 
quelle on  appelle  à  une  succession  un  ou  plusieurs  héri- 
tiers après  celui  qu'on  a  institué,  de  manière  que  celui-ci, 
qui  doit  Jouir  des  biens  le  premier,  ne  peut  les  aliéner. 
On  nomme  grevé  celui  qui  reçoit  ainsi  à  diarçe  de  con- 
server et  de  rendre  à  sa  mort;  appHé,  celui  qui  doit 
succéder  à  Iliéritier  premier  institué.  Les  substitutions, 
permises  dans  le  Droit  romain  et  dans  l'ancien  Droit  fran- 
çais, furent  prohibées  par  la  loi  du  14  novembre  1702, 
puis  par  le  Code  Napoléon  (art.  896)  :  car  elles  avalent 
l'inconvénient  d'enrichir  une  branche  de  la  famille  au 
préjudice  des  antres,  d'exposer  ceux  qui  contractaient 
avec  OD  grevé  à  la  perte  de  leurs  créances  après  ta  mort, 
et  de  nuire  à  la  propriété  elle-même,  dont  le  gnevé, 
simple  usufruitier,  cherchait  à  tirer  le  plus  de  produits 
possible.  Toutefois,  notre  loi  permet  aux  pères  et  aux 
mères  de  donner  à  un  ou  plusieurs  de  leurs  «ofants  tout 
ou  partie  de  la  nuotiié  éUsponiMe  {V.cê  mot)  de  tours 
biens,  à  charge  de  les  rendre  aux  enfants  née  ov  à  naître, 
au  premier  degré  seulement,  des  donataires.  La  même 
disposition  est  permise  4  celui  qui  ne  laisse  que  des 
frères  ou  des  sœurs,  en  favear  de  leurs  enfants  nés  ou  4 
naître,  «tissl  a»  1*  degré  «eulement.  La  loi  du  17  mai 
lé26  a  atitorisé  pour  toute  personne  la  euèsdtutloii  Jus- 
«{u'aii  î*degré  ;  on  a  touIu  arrêter  ainsi  ta  division  CouJ<Htn 


croissante  de  la  propriété.  La  prohibitioR  de  substiiasr 
n'est  maintenue  qu'en  ce  qu'il  n'est  pas  permis  de  grever 
le  donataire  de  la  charge  de  rendre  à  un  étranger;  ce 
n'est  qu'au  profit  des  enfants  que  la  substitution  peut 
avoir  heu.  -^  La  loi  n'assimile  pas  à  la  substitution  la 
disposition  par  laquelle  un  tiers  serait  appelé  à  reoueillir 
un  legs,  dans  le  cas  où  l'héritier  ne  pourrait  en  profiter, 
et  où  la  disposition  deviendrait  caduque  à  son  égard  : 
c'est  la  Substitution  vulgaire.  Mais  elle  interdit  le  genre 
de  substitution  cfu'on  nomme  Fidéir-commis  {V.  ee  mot). 
V.  Rolland  de  Villargues,  Des  Substitutions  prohibées  par 
le  Codé  civil,  3>  édit.,  1833,  in-S»;  Saint- Ëspèa  Lescot, 
Traité  des  Substitutions  prohibées,  1849,  in-i^ 
SDB8TITDT10N,  tormo  de  Musique,  V.  Accoan. 

SUBSTlTimOll  &■  DBTTB  ET  DE  DéBITEDE.  F.  NOVATIOU. 

SDBSTrruTioN  DB  PART  OD  d'bnpant,  Bction  do  remplacer 
un  enfant  mort-né  ou  dont  le  sexe  ne  répond  point  aux 
vues  que  l'on  peut  avoir,  par  un  enfant  vivant  ou  par  un 
enfant  d'un  sexe  différent.  Elle  est  punie  de  la  reclusîoc 
{Code  pénal,  art.  345). 

SUBSTITUTION  BB  PERSORNB,  délit  quI  oonsiste  à  sa  pré* 
senter  sous  le  nom  d'un  autre.  Il  a  été  prévu  et  puni  par 
la  loi  du  31  mars  1832  sur  le  recrutement  militaire. 

SUBSTRATUM.  V.  Substancb. 

SDBSTRATOH  (  du  Istîn  sub ,  dcssous,  et  structus,  eon- 
struit),  construction  souterraine  ou  qui  en  supporte  une 
autre.  Le  mot  s'emploie  surtout  en  pariant  des  éditioes 
antiques,  sar  les  restes  desquels  on  a  élevé  des  construc- 
tions modemet. 

8UBUCULA.  1  V.  ces  mots  dans  notre  Pietionw 

8UBURBANUM.     I      noire  de  tiiogr,  et  d'Uiitoire. 

SUBVENTION  (du  latin  êubvenire,  venir  an  seeour»), 
secours  en  argent,  accordé  soit  par  les  particuliers  i 
l'État  dans  un  cas  pressant  (c'est  la  subvention  de  guerre)^ 
soit  par  l'État  à  certains  établissements,  à  oertaines  en*' 
treprisea  d'intérêt  publie,  par  exemple  aux  Lycées,  à 
quelques  théâtres,  à  des  entreprises  maritimes,  à  des 
journaux  même.  —  Au  xviii«  siècle,  on  appela  Sub^oên^ 
tîon  territoriale  un  impôt  que  le  ministre  De  Calonne 
voulut  établir  sur  la  propriété  foncière. 

SUCCADE6,  vieux  mot  désignant  les  dragéM*  las 
épices  qu'on  servait  dans  le  drageoir. 

SUCCESSIFS  (Degrés),  en  termes  de  Jurispnidenea, 
df^és  do  parenté  dans  lesquels  on  peut  hériter. 

SUCCESSIFS  (Droits),  sa  dit  des  droits  qu'on  peut  aroir  k 
un  héritage,  et  de  l'impôt  qu'on  doit  payer  sur  uaa  sue* 
cession  à  recueillir. 

SUCCESSION  (du  latin  suceedere,  prendre  la  place  de\ 
mot  qui  désigne  a  la  fols  la  totalité  des  biaas,  droits  cl 
actions  dont  une  personne  est  investie  aetivemeat  ou 
passivement  au  moment  de  son  décès,  et  leur  transmis- 
sion à  une  ou  plusieurs  personnes  qui  sunivent.  Ls 
Cods  Napoléon  distingue  1 1*  la  sfieossstoii  ooniraciudU 
réglée  par  le  contrat  de  mariage  des  époux,  qui  a'aitri- 
buent,  ou  attribuent  aux  enfants  à  naître  de  leur  mariage, 
une  partie  ou  la  totalité  de  la  quotité  dispooîMo  dans  les 
biens  qu'ils  laisseront  au  jour  de  leur  décès  (V.  Qnonvl 
nispoiifBi.E);  ^*  la  moMSfftofi  testamentaire,  c^d.  dé- 
férée par  teetam^nt  (V.ee mot) ; essertielleeseat  révoeaUe, 
elle  diffère  en  cela  As  la  précédente;  3^  la  sueoetsùm  légi- 
time ou  ab  intestat,  transmise  par  la  force  même  de  la  loi, 
en  l'absence  de  dispositions  contraireade  la  part  4u défunt 
{V.  Ab  IfiTESTAT).  Une  saocessioB  légitime  est  réguiière 
quand  elle  est  déférée  aux  parents  lotîmes  du  défunt  ; 
irréguiière,  lorsqu'elle  est  attribuée,  par  défaut  diiéru 
tiers  légitimes,  à  des  personnes  qui  n'avaient  fief  et  ee 

auelque  aorte  «n  titra  régulier  pour  exiger  eatte  mtHknm 
en,  par  exemple  aux  enfants  DKUirels,  à  féposix  eurvl» 
vant,  ottàrÉtat. 

Le  partage  d'une  euceesetoD  pouvant  causer  des  dis* 
eussions  4ans  les  familles ,  la  loi  a  donné  m.  pète  le 
droit  de  répartir  de  son  vivant  ses  biens  entra  ses  ne» 
fants  t  e'est  ee  qu'on  nomme  le  partage  d'eueemdMmiê.  Il 
doit  être  fait  dans  la  ferme  des  déflations  entra  vifs  eu 
des  testaments;  il  n'est  pas  nécessaire  qo^l  compronng 
la  totalité  des  Mens,  owls  11  fkut  que  tous  les  héritiers 
présomptifs  soient  appelés  à  y  prendre  parts  eeu  des 
biens  qui  n'auraient  p«n  dté  eeinjMls  dana  le  psita^e  aeiit 
partagés  conformément  à  la  loi.  Le  partage  fait  par  Tea- 
cendant  peut  être  attaqué  pour  cause  de  lésien  de  pins 
du  quart,  on  s'il  réwlie  des  diepositiene  faites  par  ppéi- 
ciput  que  l'un  des  copartageents  aurait  un  avantage  |d«s 
grand  que  la  loi  ne  le  permet.  Les  frais  de  cette  action 
sont  avancés  par  celai  qui  Itntente,  et  Us  nesteot  à  ea 
<4iarge  «'il  enooembe  dans  ea  demande. 
Penr  «ente  succession,  il  faut  d'abord  Axer  fépe^pfte  de 


suc 


1675 


SUE 


roaverture  et  le»  formalité»  &  remplir  pour  que  la  dé- 
volution des  biens  s*opère  par  la  saisine  de  Thérltier 
(  V.  Saisine).  L'ouverture  de  la  succession  est  fixée,  en 
général,  par  le  fait  du  décès,  et  par  l'acte  qui  en  a  été 
transcrit  sur  les  registres  de  l'état  civil  ;  c*est  à  l'héritier 
qu'il  appartient  de  procéder  &  l'établissement  de  cette 
preuve  du  décès.  Mais  l'ouverture  de  la  succession  peut 
aussi  résulter  d'une  fiction  de  la  loi,  aui,  dans  certaines 
circonstances,  suppose  mort  celui  qui  est  ou  peut  être 
rivant,  comme  cela  arrivait,  avant  1854,  dans  le  cas  d'une 
condamnation  à  la  vnort  civile  (  V.  ce  mot)^  et  comme 
cela  arrive  toujours  dans  le  cas  d'une  déclaration  d^ab- 
sence  (  V.  ce  mot).  Quand  il  y  a  eu  omission  de  la  décla- 
ration de  décès,  ou  impossibilité  de  la  faire,  il  faut 
s'adresser  à  la  justice;  les  tribunaux  apprécient  les  cir- 
constances, et  prononcent  selon  l'équité  sur  les  droits 
de  chacun.  On  a  seulement  posé  quelques  règles,  par 
exemple  :  si  plusieurs  personnes,  respectivement  appe- 
lées à  la  succession  l'une  de  l'autre,  périssent  dans  un 
môme  événement,  et  si  l'on  ne  peut  reconnaître  laquelle 
est  décédée. la  première,  la  présomption  de  survie  est 
déterminée  par  les  circonstances  du  fait,  et,  à  leur  dé- 
faut, par  la  force  de  l'&ge  et  du  sexe;  si  ceux  qui  ont  péri 
ensemble  avaient  moins  de  15  ans,  le  plus  &gé  sera  pré- 
sumé avoir  survécu;  s'ils  étaient  tous  au-dessus  de 
00  ans,  la  présomption  sera  en  faveur  du  moins  &gé;  si 
les  uns  avaient  moins  de  15  ans  et  les  autres  plus  de  60, 
les  premiers  seront  présumés  avoir  survécu  ;  s'ils  avaient 
tous  15  ans  accomplis  et  moins  de  60,  le  m&le  est  présumé 
avoir  survécu  lorsqu'il  y  a  égalité  d'ùge  ou  que  la  diffé- 
rence n'excède  pas  une  année,  et,  s'ils  étaient  du  môn^c 
sexe,  la  présomption  de  survie  est  en  faveur  du  plus 
Jeune. 

La  succession  étant  ouverte,  il  faut  savoir  à  qui  elle 
est  dévolue.  Comme  il  est  de  principe  que  la  transmission 
ne  peut  s'opérer  que  du  mort  au  vif,  celui-là  seul  est 
habile  à  succéder  qui  était  né  à  l'époque  du  décès  de  son 
auteur,  ou  tout  au  moins  qui  était  conçu  à  cette  époque  el 
qui  est  né  viable;  celui  qui  n'est  pas  né  viable  est  réputé 
n'être  jamais  né.  Si  reniant  n'est  pas  né  viable,  il  n'a  pu 
rien  recueillir;  s*il  a  vécu  un  seul  moment,  cela  a  sufh 
pour  qu'il  ait  dû  recevoir  et  transmettre  tous  les  droits 
qui  se  sont  ouverts  en  sa  faveur,  il  a  une  succession  qui 
s'ouvre  et  des  héritiers  qui  recueillent  de  son  chef. 

L'héritier,  étant  subrogé  dans  les  droits  du  défunt,  re- 
cueille ses  biens,  mais  aussi  ses  charges,  comme  s'il  avait 
contracté  les  mômes  obligations.  Mais  la  loi  lui  accorde 
la  faculté  de  renoncer  à  la  succession  (K  Renonciation), 
ou  celle  de  ne  l'accepter  que  sous  bénéfice  d'inventaire 
{V,  ce  mot). 

L'ordre  des  successions  est  déterminé  d*après  le  droit 
de  famille,  dans  un  rapport  direct  avec  les  liens  de  pa- 
renté (V,  ce  mot).  Les  descendants  légitimes  en  ligne 
directe  sont  préférés  à  tous  autres  héritiers  ;  ils  excluent 
les  ascendants  et  tous  les  parents  collatéraux.  Après  les 
descendants^  viennent  en  seconde  ligne  les  ascendants, 
qui  ont  droit  h  une  réserve,  mais  qui  pour  cela  n'ex- 
cluent, parmi  les  collatéraux,  ni  les  frères  ni  les  sœurs; 
ils  prennent  tous  part  concurremment  h  la  succession. 
En  troisième  ordre  sont  les  parents  collatéraux,  autres 
que  les  frères  et  les  sœurs  :  ici  l'on  ne  fait  que  deux 
parts  de  la  succession,  attribuées  aux  lignes  paternelle  et 
maternelle;  dans  chacune  de  ces  lignes,  le  parent  le  plus 
proche  en  degré  prend  toute  la  portion  ;  s'il  y  a  plusieurs 
parents  au  même  degré,  ils  partagent  par  tète.  Le  droit 
de  succéder  ne  s'étend  pas  au  delà  du  12*  degré;  et,  s'il 
ne  se  trouve  pas,  dans  l'une  des  lignes^  de  parent  au  de- 
fxé  successible,  c*est  à  l'autre  ligne  que  le  tout  appartient 
(V.  Dévolution). 

Une  fiction  de  Droit  permet  d'appeler  les  enfants  dos 
frères  et  sœurs  à  partager  avec  leur  oncle  ou  leur  tante?, 
comme  s'ils  étaient  de  même  degré,  quoique  dans  l'ordre 
de  la  famille  ils  soient  placés  a  un  degré  plus  éloigné. 
C'est  ce  qu'on  nomme  la  représentation;  elle  a  pour  effet 
de  faire  entrer  les  représentants  dans  la  place,  dans  le 
degré  et  dans  le  droit  du  représenté.  Du  reste,  les  frères 
et  sœurs,  ou  oncles  et  neveux,  tantes  et  nièces,  partagent 
entre  eux  par  tète,  si  les  frères  et  sœurs  sont  de  même 
lit,  et  sous  la  condition  que  les  enfants  d'un  frère  ou 
d'une  sœur  ne  compteront  que  pour  une  seule  tète.  Si 
les  frères  et  sœurs  sont  de  lits  différents,  la  part  qui  leur 
est  attribuée  se  divise  en  deux  portions  pour  être  distri- 
buées aux  deux  lignes  paternel  le  et  maternelle.  Les  frères 
et  sœurs  germains  qui  appartiennent  aux  deux  ligne? 
viennent  au  partage  dans  chacune  des  deux  portions  ;  les 
frères  et  sœurs  consanguins  et  utérins  ne  viennent  cba* 


cun  que  dans  leur  ligne  seulement.  Les  enfants  qui  se 

f présentent  par  représentation  exercent  dans  chacune  des 
ignés  les  droits  qui  auraient  été  attribués  à  leur  père  ou 
à  leur  mère.  La  représentation  est  admise  en  ligne  di- 
recte &  l'infini  au  profit  des  descendants;  elle  ne  Test 
Jamais  au  profit  des  ascendants,  parmi  lesquels  le  plus 
proche  exclut  toujours  le  plus  éloigné. 

La  loi  a  déterminé  certains  cas  où  l'on  est  frappé  d'in- 
capacité en  matière  de  succession  (V.  Indigne). 

On  nomme  succession  vacante  une  succession  aban- 
donnée par  ceux  qui  auraient  droit  de  la  recueillir.  Sur 
la  réclamation  des  ayants  droit,  ou  sur  la  réquisition 
du  procureur  impérial,  le  tribunal  de  1'*  instance  nomme 
un  curateur  à  cette  succession.  Ce  curateur  a  l'adminis- 
tration des  biens,  dont  il  fait  constater  l'état  par  un  in- 
ventaire ;  c'est  contre  lui  que  peuvent  être  dirigées  les 
actions  qui  intéressent  la  succession,  et  il  en  exerce  et 
en  poursuit  les  droits.  Il  ne  peut  faire  que  des  actes  de 
pure  administration,  sans  qu'il  lui  soit  permis  do  faire 
des  transactions  ou  des  compromis,  encore  moins  d'alié- 
ner et  d'hypothécpier.  Il  ne  doit  toucher  aucuns  deniers, 
mais  les  faire  verser  dans  la  caisse  des  Dépôts  et  Consi- 
gnations; il  ne  peut  acquitter  aucune  dépense.  Il  faut 
qu'il  soit  toujours  prêt  à  rendre  compte  de  sa  gestion. 

Toute  succession  attribue  aux  héritiers  une  propriété 
nouvelle,  pour  laquelle  ils  sont  tenus  do  payer  des  droits 
de  mutation  (V.  ce  mot). 

Le  droit  de  succéder,  conséquence  du  droit  de  pro- 
priété (V.  ce  mot)^  a  été  reconnu  chez  tous  les  peuples 
civilisés;  mais  le  mode  d'exercice  de  ce  droit  a  été  très- 
variable.  Tantôt  la  faculté  de  tester  a  été  accordée,  tantôt 
on  l'a  refusée  ou  restreinte.  Ici  le  partage  s'est  fait  éga- 
lement entre  tous  les  enfants;  là  on  ne  voulut  y  admettre 
que  les  m&les;  ailleurs,  tous  les  biens  furent  réservés  à 
1  aîné.  De  nos  Jours,  le  droit  même  de  succéder  a  été  mis 
en  question  par  certaines  écoles  socialistes,  notamment 
par  les  Salnt-SImoniens. 

V.  Martin,  Traité  des  successions,  1811,  2  vol.  in-8»; 
Favard  de  Langlade,  Manuel  pour  l'ouverture  et  le  par- 
tage des  successions,  1812,  in-8°;  Pailliet,  Législation  et 
jurisprudence  des  swcessions,  1823,  3  vol.  in-8°;  Malpel, 
Traité  élémentaire  des  successions,  1826,  in-8';  Fouet  de 
Confians,  Esprit  de  la  jurisprudence  des  successions, 
1839,  in-8^;  Chabot,  Commentaii^e  sur  la  loi  des  succes- 
sions, i^Oy^  vol.  in-8<^;  DesfTéSiViZypictionnaire général 
des  successions,  1841,  gr.  ^-8";  Richefort,  Traité  de 
Vétat  des  familles  légitimes  et  naturelles,  et  des  succes- 
sions irrégulières,  1842,  S  vol.  in-8«;  Poujol,  Traité  des 
successions,  1842,  2  vol.  ln-8°;  Genty,  Traité  des  par- 
tages d'ascendants,  1850,  in-8®;  Nicolas,  Manuel  du  par- 
tage des  successions,  1855,  in-8o;  Vazeille,  Résumé  et 
conférence  des  Commentaires  du  Code  civil,  sur  les  suc- 
cessions, donations  et  testaments^  1847,  3  vol.  in-8°; 
Dulruc,  Traité  du  partage  des  successions,  1855,  in-8°; 
Demolombej  Traité  des  successions,  i^bl-^0^  3  vol.  in-8°; 
Gans,  Histoire  du  droit  de  succession  en  France  au  moyen 
âge,  traduite  de  l'allemand  par  De  Loménie,  1845,  in-12. 

SUCCURSALE  (  du  latin  succurrere,  secourir,  aider), 
se  dit,  en  général,  de  tout  établissement  subordonné  à 
un  autre  et  créé  pour  lui  venir  en  aide.  Ainsi,  les  Ban- 
ques, les  Caisses  d'épargne,  les  Monts-de-Piété,  ont  des 
succursales.  •—  Dans  une  acception  toute  spéciale,  une 
Succursale  est  une  église  où  le  service  paroissial  est  fait 
par  un  prêtre  qui  n'a  que  le  titre  de  desservant. 

SUDARIUM.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio* 
graphie  et  d'Histoire. 

SUDATORIUM.  V,  Bains. 

SUÈDE  (Les  Arts  en).  Pendant  plusieurs  siècles,  les  Sué- 
dois demeurèrent  presque  complètement  étrangers  aux 
beaux-arts  i  les  sculptures,  d'ailleurs  assez  rares,  de  leurs 
monuments  étaient  exécutées  par  des  artistes  venus  de 
Flandre  et  d'Allemagne,  et  la  fameuse  cathédrale  d'Up- 
sal,  bâtie  sur  le  modèle  de  Notre-Dame  de  Paris,  fut 
commencée  par  un  architecte  parisien,  Bonœil  ou  Bon- 
ncuil.  On  avait  construit  déjà  la  cathédrale  de  Lund 
(10I2-'1123),  décrite  de  nos  Jours  par  Brunius,  et  celle 
de  LinkOping  (1134-1151).  M.  Mandelgrén  a  publié,  en 
1802,  un  important  ouvrage  sur  les  anciens  monu- 
ments d'architecture  Scandinave.  -^  La  Réformation  du 
XVI*  siècle,  avec  ses  tendances  iconoclastes,  n'était  pas  de 
nature  h  encourager  les  arts.  Mais  quand  les  Suédois 
prirent  part  à  la  guerre  de  trente  ans,  ils  rencontrèrent 
on  Allemagne  une  foule  de  chefs-d'œuvre^  dont  la  vue 
éveilla  leur  goût  et  excita  leur  émulation.  La  reine  Chris- 
tine commença  à  former  des  collections  de  tableaux,  de 
sculptures  et  de  médailles;  toutefois,  pendant  son  règjDC, 


SUE 


1676 


SUE 


les  arts  furent  encore  cultivés  par  des  étrangers  :  Tarchi- 
lecture,  par  Simon  de  La  Vallée;  la  peinture,  par  David 
Beck,  Munichhoffen  et  Bourdalot.  Charles  XI  appela  è 
son  tour  auprès  de  lui  les  sculpteurs  Chaveau  et  Laporte, 
auxquels  on  attribue  les  lions  gigantesques  placés  de- 
vant le  ch&teau  royal  de  Stockholm,  et  les  deux  Renom- 
mées qui  surmontent  le  grand  portail  du  Nord.  Alors  aussi 
les  Suédois  se  livrèrent  enfin  avec  quelque  succès  à 
rétude  des  beaux-arts  :  Olor  RQdbeck  devint  bon  Archi- 
tecte et  bon  dessinateur;  Nioodème  de  Tessin  éleva  le 
ch&teau  de  Stockholm,  celui  de  Drottningholm,  la  cathé- 
drale de  Calmar,  et  le  tombeau  de  Benoit  Oxenstierna.à 
Upsal  ;  le  peintre  Ehrenstrahl,  qui  alla  se  perrcctionner 
en  Italie  sous  Pierre  de  Cortone,  fit  pour  la  grande  église 
de  Stockholm  un  Jugement  dernier  dont  la  réputation 
n'a  point  été  usurpée  ;  Philippe  Lcmbke  peignit  les  ba- 
tailles de  Charles  X,  d'après  les  dessins  du  comte  deDahl- 
berg  ;  Pilo  réussit  assez  bien  à  imiter  Téniers,  et  forma  à 
.V)n  tour  Wertmuller  et  AkerstrOm^  Sâfvenborn,  élève 
de  notre  Vernet,  se  distingua  comme  paysagiste;  HofT- 
man  se  rendit  célèbre  par  son  tableau  du  maître-autel 
de  réglise  de  S'*-Claire;  enfin  Hillerstrôm,  après  avoir 
étudié  aux  Gobelins  de  Paris,  peignit  de  charmantes 
scènes  comiques  de  la  vie  domestique.  — Au  xviii*  siècle, 
le  sculpteur  français  Bouchardon  vint  passer  deux  an- 
nées en  Suède,  où  il  exécuta  les  médaillons  des  rois  de 
ce  pa3^s  ;  ses  exemples  et  ses  conseils  donnèrent  une  nou- 
velle impulsion  aux  arts.  On  vit  bientôt  paraître  un 
grand  artiste  suédois,  Sergell,  élève  d'un  autre  Français, 
Larchevêque  :  il  sculpta  d'abord  un  Faune,  qui  décore 
aujourd'hui  le  palais  du  Luxembourg  à  Paris,  puis  donna 
la  statue  du  Spartiate  Olhryadès,  le  groupe  de  Mars  en- 
levant Vénus  blessée  par  Diomède,  celui  de  Diomède  en- 
levant le  Palladium,  les  statues  en  bronze  de  GtuUwe  lU 
et  du  maréchal  A^Éhrensvœrdt  un  bas-relief  représen- 
tant la  Résurrection  du  Christ,  les  mausolées  de  Des- 
cartes,  de  Gustave  111  et  de  Linné,  enfin  un  Cupidon  et 
une  Psyché,  qui  sont  deux  chefs-d'œuvre.  —  Dans  notre 
xi\"  siècle,  la  Suède  a  produit  le  peintre  d'histoire  Wcb- 
tin,  et  les  sculpteurs  Gdthe,  BystrOm  et  Fogelberg.  On  a 
de  Gothc  une  statue  colossale  de  Méléagre  et  un  flac- 
chus.  BystrOm  a  laissé  un  bas-relief  représentant  la  Mère 
des  Gracques,  un  Hercule  allaité  par  Junon,  des  statues  de 
Vénus  et  de  V Amour,  une  statue  colossale  de  Charles  XUl^ 
une  foule  de  tombeaux,  etc.  Quant  à  Fogelberg,  on  lui 
doit  un  Mercure,  des  statues  d'Odtn,  de  Thor  et  de 
Freya,  etc. 

La  Suède  a  eu  de  bonne  heure  des  mélodies  natio- 
nales :  composées  toutes  dans  le  mode  mineur,  elles  sont 
remarquables  par  leur  douceur  et  leur  mélancolie,  et  les 
compositeurs  modernes  les  ont  souvent  prises  pour 
thèmes  de  leurs  fantaisies  variées.  Gergev  et  Afzelius 
ont  publié  une  collection  de  chants  populaires ,  avec  les 
anciennes  m^odies  arrangées  par  Hefner  d' Upsal.  Les 
Suédois  avaient,  dès  les  temps  reculés,  des  harpes  et  des 
violons;  nuds  ces  instruments,  entre  les  mains  des 
paysans,  sont  demeurés  fort  imparfaits.  Jusqu'au  temps 
de  Gustave  Wasa,  les  musiciens  furent  considérés  comme 
inf&mes  et  dangereux  à  l'État  :  peu  d'années  avant  ce 
prince,  il  existait  une  loi  qui  les  bannissait  du  royaume 
et  permettait  môme  de  les  tuer  partout  où  on  les  rencon- 
trait. La  musique  n'est  réellement  goûtée  et  cultivée  au- 
jourd'hui que  parmi  les  hautes  classes  et  les  classes  in- 
termédiaires de  la  nation;  ses  progrès  ont  été  l'effet 
des  relations  de  la  Suède  avec  les  pays  du  Sud.  Une 
Académie  de  musique  a  été  fondée  par  Gustave  III  à 
Stockholm  en  1772,  et  il  y  a  dans  cette  ville  un  thé&tro 
où  l'on  représente  les  opéras  italiens  et  les  opéras  fran- 
çais. Les  compositeurs  les  plus  estimés  de  nos  jours  sont 
Bervald,  Crusell ,  AhlstrOm,  et  le  comte  Skjoldebrand  ; 
mais  leur  renommée  ne  s'est  point  étendue  dîans  le  reste 
de  l'Europe.  La  Suède  a  produit  une  grande  cantatrice, 
Jenny  Lind.  B. 

SUÉDOISE  (Langue^.  La  Suède  fit  usage,  dans  les  pre- 
miers siècles  de  son  histoire,  et  jusqu'au  xiv*  environ, 
de  la  môme  langue  qu'on  parlait  dans  tout  le  reste  du 
Nord  et  ^u'on  écrivit  après  l'époque  de  la  conversion  au 
christianisme  ;  c'est  la  langue  norrène,  conservée  dans 
les  anciens  po€mes  des  deux  Eddas,  dans  les  inscriptions 
runiques  datant  de  l'époque  chrétienne,  et  dans  les  Sagas 
islandaises  les  plus  anciennes  ;  l'Islande  a  parlé  plus 
longtemps  que  !e  reste  du  Nord  cet  idiome,  et  sa  langue 
ne  s'en  éloigne  môme  pas  beaucoup  encore  aujourd'hui  : 
un  paysan  islandais  comprend  aisément  de  nos  jours  les 
anciens  livres  qu'un  Danois,  un  Suédois  ou  un  Norrégiea 
•  de  la  peine  à  interpréter.  Au  xiv*  siècle,  les  idiomes 


suédois  et  danois  se  sont  dégagés  du  tronc  commun,  avec 
leurs  différences  essentielles.  Les  trois  caractères  distînc- 
tifs  des  langues  Scandinaves  se  retrouvent  dans  le  sué- 
dois :  l'article  défini  se  place  à  la  fin  du  substantif,  avec 
lequel  il  fait  corps;  le  passif  se  marque  par  un  simple 
changement  de  désinence;  enfin  l'infinitif  actif  se  tei^ 
mine  toujours  par  une  voyelle.  Les  substantifs  et  les  ad- 
jectifs sont  susceptibles  des  trois  genres  ;  mais,  tandis 
que  les  substantifs  n'ont  que.deux  cas,  dont  l'un,  le  gé- 
nitif, a  pour  caractéristique  une  s  finale,  les  adjertifs  ont 
un  3*  cas,  qui  représente  à  la  fois  l'accusatif  et  l'ablatif. 
Il  y  a  4  déclinaisons  ,  4  conjugaisons,  et  5  verbes  auxi> 
liaires.  Le  suédois  a  puisé  à  la  source  finnoise  un  cer- 
tain nombre  d'expressions  relatives  à  la  pèche  et  aux 
travaux  du  ménage  ;  il  a  fait  de  plus  nombreux  et  de 
plus  importants  emprunts  à  l'allemand,  soit  au  moyen 
âge,  où,  sous  les  comtes  de  Holstein ,  il  y  eut  souvent 
des  troupes  allemandes  en  Suède,  soit  lorsque  ilorissait  la 
Hanse,  soit  pendant  la  Réformation  et  la  guerre  de  trente 
ans.  Il  se  distingue  par  l'énergie  et  l'éclat  de  sa  pronon- 
ciation ,  surtout  à  mesure  qu'on  pénètre  vers  le  Nord. 
La  langue  polie  et  écrite  ne  formait  autrefois  que  le  dia- 
lecte particulier  de  la  province  d'Upland,  où  se  trouTe  la 
capitale.  Les  linguistes  rattachent  à  ce  dialecte  les  idiome 
secondaires  de  la  Dalécarlie  et  du  Norrland,  et  reconnais- 
sent un  autre  dialecte,  le  suédois-gothique,  dominant  en 
Gothie,  et  qui  se  rapproche  plus  que  l'autre  de  l'alle- 
mand. Les  lettres  gothiques  se  sont  longtemps  conser- 
vées dans  l'écriture  suédoise  :  l'alphabet  actuel  diffère  de 
l'allemand  par  l'absence  du  c/i,  auquel  se  substitue  or- 
dinairement le  k,  et  l'emploi  d'une  lettre  spéciale,  à, 
2U1  se  prononce  comme  un  o  très-ouvert.  V,  Jonas  Peter, 
^ictionarium  tatino-stieco-germanicum  ,  Linkuping, 
1640,  in-fol.;  Velerius,  Index  Unguœ  véterù  scytho- 
scandicœ  seugothicœ,  Upsal,  1691,  in-8<*;  Spegel,  Glos- 
xarium  stteco-^othicum ,  Londres,  1712,  in-4";  M511er, 
Dictionnaire  suédois- français,  Stockholm  et  Upsal,  1754, 
in-4<>;  Ihre,  Glossarîum  sueco-^othicum ,  Upsal,  1769, 
2  vol.  in-fol.;  Bjorkegren,  DictionwUre  français-sué- 
dots,  Stockholm,  1705,  3  vol.  in-4'*;  Eric  Nordforss, 
Dictionnaire  suédots-françats,  ibid.,  1805,  2  vol.  in-8"; 
Delen,  Dictionnaire  français-suédois,  ibid.,  1814, 2  vol. 
in-4°;  Hof,  Dialectus  westro-gothica,  Holm,  1772,  in-8<*; 
Suenon  Tiliander,  Grammaiiea  g^rmono-svetica,  Stock- 
holm, 1691,  in-12;  Nils-Tjallmann,  Grammaiiea  sue- 
cana,  ibid.,  1696,  in-8o;  Sahistedt,  Grammaire  suédoise, 
en  allem.,  Lubeck  et  Leipzig,  1796,  in-12;  Rydquist, 
Grammaire  suédoise,  en  suédois,  Stockholm,  1852. 

sréDoiSE  (Littérature).  A  vrai  dire,  il  n'y  a  de  littéra- 
ture suédoise  qu'à  partir  de  la  Réformation.  Quelques 
traductions  de  nos  poômes  français  du  moyen  ftge,  et  de 
fragments  de  la  Bible,  quelques  éditions  d'anciennes 
lois,  enfin  les  chants  populaires,  tels  sont  les  plus  an- 
ciens monuments  de  la  langue.  Les  traductions  nouvelles 
des  textes  sacrés,  faites  par  les  prédicateurs  de  la  Ré- 
forme, ont,  là  comme  partout,  servi  particulièrement  à 
émonder  et  fixer  la  langue  vulgaire.  Les  œuvres  drama- 
tiques sont  assurément  au  nombre  de  celles  qui  consta- 
tent le  mieux  l'existence  d'une  littérature.  Or,  il  est  cu- 
rieux de  remarquer  que  les  premiers  essais  dramatiqQes 
en  langue  suédoise  coïncident  avec  les  traductions  popu- 
laires de  la  Bible  par  les  réformateurs  :  la  comédie  de 
Tobie,  d'Olaûs  Pétri,  est  de  1550,  et  les  traductions  du 
Nouveau  et  de  l'Ancien  Testament  par  Laurentius  An- 
dréas et  Laurentius  Pétri  sont  de  1526  et  de  1541.  La 
traduction  de  toute  la  Bible  par  Laurentius  Pétri  a  sur- 
tout exercé  une  grande  influence  sur  la  langue.  Bientôt 
après,  Jean  Messenius  (mort  en  1637)  se  proposa  de 
traiter  toute  l'histoire  suédoise  en  50  comédies  ou  tragé- 
dies; il  n'en  écrivit  que  6,  assez  platement.  Son  fils 
Arnold  l'imita  (mort  en  1651).  Jean  réussit  mieux  comme 
historien,  et  sa  Scandia  illustrata  (1620-1632),  écrite  en 
latin,  est  encore  aujourd'hui  une  source  importante  pour 
l'histoire  suédoise.  —  Le  xvi*  siècle  fut  d'ailleurs  extrê- 
mement fécond  pour  la  Suède  en  œuvres  historiques.  On 
vit  paraître  (l'imprimerie  avait  été  introduite  vers  1483; 
révoque  Brask  avait  établi  la  première  presse  à  Unkô- 
ping)  de  nombreuses  chroniques  ;  les  rois  Charles  IX  et 
Gustave-Adolphe  furent  eux-mêmes  historiens;  Erik 
Gôransson  Tegel  (mort  en  1636)  donna  une  histoire  de 
Gustave  I*'et  d'Éric  XIV.  L'archevêque  Johanues  Magous 
(mort  en  1541)  écrivit  en  latin  une  curieuse  Histoire  de 
tous  les  rois  des  Goths  et  des  Suédois,  et  son  finère, 
Olatts  Magnus  (mort  en  1558),  une  Histoire  des  natiom 
septentrionales,  d'une  égale  importance,  et  aussi  en  latio. 
Ainsi  se  montrait,  au  début  môme  de  la  littérature  sué- 


SUÉ 


1677 


SUÉ 


doiso«  la  prédilection  qui  devait  8*y  montrer  sans  cesse 
pour  les  études  historiques. 

Vers  le  milieu  du  ivii*  siècle,  un  grand  progrès  s'ac- 
complit :  Gustave-Adolphe  a  réformé  TUniversité  d*Up- 
sal  ;  Christine  a  créé  de  nombreux  gymnases  ;  une  nou- 
velle Université  est  fondée  à  Lund,  dans  cette  province 
de  Scanie  qui  est  précisément  alors  réunie  à  la  Suède, 
et  de  riches  Mécènes,  comme  le  célèbre  Aiel  Oxens- 
tierna,  Pierre  Brahé  le  jeune,  Magnus  Gabriel  de  La 
Gardie,  suscitent  des  savants  et  des  littérateurs.  La  Suède, 
devenue  si  grande  alors  par  la  politique  étrangère,  aspire 
au  même  progrès  dans  la  sphère  intellectuelle  et  morale. 
Les  deux  principaux  noms ,  pendant  la  seconde  moitié 
du  xvii*  siècle,  sont  ceux  de  George  Stiernhielm  et  d'Olof 
RQdbeck.  Stiernhielm  (1598-1672)  a  créé  le  style  poétique 
par  son  poème  d'Hercule,  ses  Chants  héroiques  et  de 
fête,  et  ses  Hallets,  etc.,  composés  pour  la  cour  bril- 
lante de  Christine,  et  il  a  eu  de  nombreux  élèves  :  Sa- 
muel Columbus ,  qui  a  écrit  des  psaumes  et  des  épi- 
grammes  ;  Gustaf  Rosenhane,  qui  a  composé  des  chants 
d'amour  à  la  manière  italienne  ;  Lasse  Lucidor,  poëte 
désordonné  et  passionné;  Haquin  Spegcl,  archevêque 
d*CpsaI,  poëte  religieux.  Olof  RQdbeck,  mort  en  1702,  a 
été  à  la  i^is  naturaliste,  anatomiste,  botaniste,  ornitho- 
logiste; mais  ce  qui  rappelle  surtout  aujourd'hui  son 
souvenir,  c'est  son  grand  ouvrage  de  VAtlantica,  où  il 
cherche  à  faire  de  la  Suède  dans  le  passé  le  berceau  de 
toute  civilisation  ;  il  s'est  montré  là,  avec  un  pareil  excès 
de  qualités  et  de  défauts,  archéologae,  antiquaire,  histo- 
rien ,  philologue  fort  érudit,  et  rêveur  utopiste.  Les 
mêmes  rêveries  patriotiques  avaient  animé  Olof  Vere- 
lius,  mort  en  lo82,  et  ainsi  s'était  fondée  toute  une 
école,  dans  les  rangs  de  laauelle  il  faut  surtout  nommer 
PeringskiOld,  mort  en  1720.  —  La  littérature  Juridique 
de  la  même  époque  a  produit  Loccenius,  mort  en  1677, 
auteur  de  nombreux  ouvrages  {AntiquitCLtes  sveo-gothicœ; 
De  jure  marilimo;  Lexicon  juris  sve(hgothict ,  etc.), 
et  StiernhOôk,  mort  en  1675,  auteur  d*un  livre  resté  cé- 
lèbre dans  le  Nord  pour  la  sûreté  de  ses  vues  sur  le  passé 
de  la  Suède  {De  juré  Sueonum  et  Gothorum  vetusto^ 
1672  ).  —  La  science  du  Droit  public  a  donné  le  Jus  nor 
turcB  et  gentium  de  Puffendoif,  qui  habita  la  Suède  de 
1668  à  1688.  —  I^es  sciences  naturelles  commençaient 
aussi  à  ^tre  étudiées  avec  succès  :  il  su/fit  de  nommer, 
ici  encore,  Olof  Radbeck. 

La  Suède  parut  vouloir  racheter  par  l'essor  des  lettres 
les  humiliations  de  l'époque  dite  de  la  liberté,  qu'on 
nommerait  mieux  l'époque  des  partis,  depuis  la  mort  de 
Charles  XII  jusqu'au  coup  d'état  de  Gustave  ni;  le  nom 
de  ce  dernier  roi  suffit  ensuite  h  désigner  toute  une 
époque  de  développement  intellectuel,  artistique  et  litté- 
raire. Dans  la  première  de  ces  deux  périodes  paraissent 
avant  tout  des  Mécènes  comme  le  comte  de  Tessin,  HOp- 
ken,  Scheffer,  Bielke,  etc.,  et  Louise-Ulrique  elle-même. 
Dès  1710,  une  Société  des  sciences  s'était  formée  à 
Upsal,  qui  devait  être  honorée  par  E.  Benzelius,  Polhem , 
et  le  fameux  Svedenborg;  c'est  toutefois  à  V Académie 
des  Sciences^  fondée  en  1739  à  Stockholm,  que  la  Suède 
est  vraiment  redevable  de  sa  gloire  scientifique.  Parmi 
les  fondateurs  mêmes  de  cette  Académie,  on  rencontre 
tout  d'abord  Charles  de  Linné  (1707-1778),  qui  forma  de 
nombreux  élèves  :  Hasselquist ,  voyageur  en  Palestine  ; 
Forsk&l,  Toyageur  en  Arabie;  Sparrman,  navigateur  au- 
tour du  monde;  Thunberg,  voyageur  au  Japon,  etc.  Tor- 
bem  Bergman  (mort  en  1784),  J.-G.  Wallerius  et  C.-V. 
Scheele  se  distinguent  comme  chimistes  ;  Rosén  von  Ro- 
lenstein,  Olof  Akrell  et  Bierkén,  comme  médecins  et  chi- 
rurgiens; Anders Celsius (1701-1744),  comme  astronome; 
Samuel  Klingenstiema  et  Melanderhielm,  comme  ma- 
thématiciens. C'est  l'époque  du  grand  ingénieur  Polhem , 
constructeur  du  port  de  Carlscrona  et  du  canal  de  Troll- 
hâtte  ;  et  enfin  de  Svedenborg  (mort  en  1772),  philo- 
sophe, poète  latin,  minéralogiste,  zoologiste,  astronome, 
ingénieur,  théosophe  et  mystique.  —  Un  si  grand  essor 
scientiflope  marquait  évidemment  en  Suède  un  dévelop- 
pement intellectuel  dont  la  littérature  devait  profiter.  La 
.  langue  suédoise  dut  beaucoup  à  Jean  Ihre  (mort  en  1780), 
i professeur  à  Upsal,  éditeur  de  la  Bible  gothique  d'Ul- 
philas,  dont  le  précieux  et  uniqne  manuscrit  (Codex  ar- 
genteus)  est  à  la  bibliothèque  de  l'Université  d'Upsal.  On 
doit  encore  à  Ihre  un  Glossarium  Svioçothicum  (1766), 
f^m  Dictûmnain  des  dialectes  suédois,  une  Gram- 
maire, etc.  —  Les  études  historiques  suscitaient  aussi 
des  noms  devenus  célèbres  :  Olof  von  Dalin  (mort  en 
i763)«  auteur  d*nne  Histoire  duroyaumê  de  Suéde  allant 
Jusqu'à  Charles  IX  et  écrite  d'un  stylo  pur,  mais  sans 


critique;  Sven  Lagerbring  (mort  en  1786),  professeur  à 
Lund,  chercheur  érudit  ;  l'évêque  Olof  Celsius  le  jeune 
(mort  en  1794) ,  auteur  d'une  histoire  de  Gustave  I*'  et 
d'Éric  XIV,  et  de  la  première  histoire  critique  de  l'église 
suédoise;  JQran  Norberg,  auteur  d'une  Histoire  de 
Charles  XII ,  etc.  Ajoutons  les  zélés  érudits ,  comme 
Palmskiuld  (mort  en  1719),  dont  les  innombrables  pa- 

Eiers,  intéressant  l'histoire  de  la  Suède,  sont  conservés  à 
i  bibliothèque  d'Upsal  [V.  Notice  et  extraits  des  ma^ 
nuscrits  concernant  Vhistoire  ou  la  littérature  de  la 
France  qui  sont  conservés  dans  les  Archives  de  Suéde, 
par  A.  Geflroy,  1855).  Warmhoitz,  Giurwell,  Loen* 
bom,  etc. ,  ont  laissé  do  pareilles  collections.  L'archéo- 
logie comptait  déjà  BiOrner,  GOransson,  auteur  du  célèbre 
Bautil,  tous  les  deux  élèves  de  Rûdbeçk.  —  La  poésie 
suédoise  s'était  faite,  dès  le  commencement  du  siècle , 
l'imitatrice  du  goût  français;  elle  y  fut  encouragée  encore 
par  Olof  von  Dalin,  dont  les  petits  morceaux  lyriques 
contribuèrent  à  épurer  le  langage.  Bientôt  se  formèrent 
de  nombreuses  sociétés  littéraires  ;  une  des  principales 
avait  pour  centre  Hedvig&-Charlotte  Nordenflycht  (morte 
en  1763),  qui,  avec  les  comtes  Creutz  (auteur  de  l'opéra 
d'Atis  et  Camilla)  et  Gjrllenborg,  fonda  la  société  litté- 
raire appelée  Utile  duld.  Cette  création  et  plusieurs  au- 
tres du  même  genre  amenèrent  l'institution,  par  Louise- 
Ulrique,  de  l'Académie  des  belles-lettres,  dont  le  premier 
secrétaire  fut  Dalin,  et  dont  H&pken,  Ihre,  Scheffer,  etc., 
furent  membres.  Cette  société  succomba  à  la  mort  de  la 
reine;  mais  elle  fut  renouvelée  en  1786,  sous  le  nom, 
Qu'elle  porte  encore  aujourd'hui,  d' Académie  royale  des 
Belles-Lettres ,  Histoire  et  Antiquités.  La  prédominance 
du  goût  français  sur  la  poésie  suédoise  fut  augmentée 
par  l'institution  de  V Académie  Suédoise  ou  des  Duc-hud, 
qui  décerna  son  premier  prix  d'éloquence  à  Gustave  III , 
son  fondateur  (20  mars  1786),  devenu  simple  concurrent. 
Cette  Académie  compta  surtout  parmi  ses  membres 
J.-U.  Kellgren  (mort  en  1795),  auteur  dramatique  et  ly- 
rique ;  Léopold  ;  J.-G.  Oxenstierna  ;  C.-G.  Adlerbeth  ; 
Gustave  III  lui-même,  qui  écrivit  des  harangues,  des 
éloges,  et  de  p&les  œuvres  dramatiques,  comme  Gustave 
Vasa,  'Gustave- Adolphe  et  Ebba  Brafii,  Siri  Brahé  et 
Jean  Gyllenstiema,  etc.  Mais  tous  ces  écrivains,  il  faut  le 
dire,  noyaient  dans  leur  imitation  servile  du  goût  clas- 
sique français  toute  originalité  propre,  et  l'on  aime  à 
signaler  à  côté  d'eux  pendant  la  même  époque  quelques 
«  oiseaux  sauvages  »  qui  revendiquaient  leur  indépen- 
dance, comme  Bellman  (1740-1795),  dont  les  chansons, 
d'une  poésie  souvent  lyrique,  sont  encore  dans  toutes  les 
mémoires;  Bengt  ou  Benoît  Lidner  (mort  en  1793),  poète 
passionné;  Hallman  (mort  en  1800),  habile  auteur  co- 
mique ;  J.  Wallenberg  (mort  en  1778);  Anna  Maria  Lenn- 
gren;  Thorild  enfin  (mort  en  1808],  en  même  temps 
poète  et  penseur  émment.  11  y  a  ae  Toriginalité  aussi 
dans  les  deux  petits  ouvrages  de  l'amiral  Ch.-Aug.  Ehrens- 
v&rd  (mort  en  1800)  :  Voyage  en  Italie,  et  Philosophie 
des  Beaux-Arts  ;  ce  sont  les  principales  œuvres  esthéti- 
ques de  ce  temps. 

La  réaction  suédoise  contre  le  goût  français  date  du 
commencement  du  xix*  siècle.  Elle  fut  suscitée  par  At- 
terbom,  qui  fonda,  en  1807,  à  Upsal  une  société  littéraire 
nommée  Aurora,  Les  membres  de  cette  société,  Palm- 
blad ,  Ingelgren  ,  HammarskOld,  etc.,  initiés  au  récent 
essor  de  la  littérature  allemande,  exprimèrent  leurs  idées 
dans  deux  recueils  périodiques  :  le  Polyphème  et  le 
Phosphores^  d'où  on  appliqua  aux  disciples  de  cette  jeune 
école  le  surnom  de  Phosphoristes.  Ils  publièrent  en 
outre  deux  recueils  :  le  Journal  de  littérature  suédoise, 
et  le  Calendrier  poétique.  De  cette  école  procèdent  :  Wal- 
lin,  mort  archevêque  en  1839,  poëte  et  orateur  sacré;  et 
Franzen  (1772-1847),  né  en  Finlande,  et  dont  les  poésies 
idylliques  vivent  dans  toutes  les  mémoires.  — En  dehors 
des  Phosphoristes,  aussi  bien  que  de  l'école  académique, 
se  forma  ensuite  VÊcole  gothtque,  représentée  surtout 
par  E.-G.  Geijer  (1783-1847),  poète  et  historien,  connu 
en  France  par  une  traduction  de  son  Histoire  de  Suède. 
A  côté  de  lui,  et  devenu  pareillement  célèbre  en  France 
même,  il  faut  nommer  l'évêque  Esaîas  Tegnér  (1782- 
1846),  l'auteur  de  la  Saga  de  Frithiof,  d'Axel,  etc. 
P.-H.  ling  (1776-1839),  qui  a  donné  un  poëme  sur  les  Aies, 
s'est  fait  en  même  temps,  par  une  inspiration  semblable 
à  celle  de  Jahn  en  Allemagne,  le  créateur  de  la  gymnas- 
tique suédoise,  adoptée  aujourd'hui  en  Angleterre  et 
dans  tout  le  Nord  de  l'Allemagne.  M.  Arv.Aue.  Afze- 
lius  (né  en  1785)  a  publié,  de  concert  avec  Ge(jer,  les 
Chants  populairet  suédois^  et  a  écrit  dans  un  ttyle  épique 
les  Traditions  du  peuple  suédois,  ouvrage  devenu  po- 


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1678 


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palaîro  et  non  encore  terminé.  M.  B.  von  Bcskow  (né 
en  1796)  est  fort  connu  car  un  poème  intitulé  :  Les  DeS" 
tinées  de  la  Suède,  Ch.-Aug.  Nikander  (mort  en  1839), 

fioHe  lyrique  dans  le  Itoi  Enzio,  le  Lion  dans  le  désert, 
es  BespérideSf  8*est  montré  poôte  dramatique  dans  le 
Glaive  runiqtie,  qui  a  été  traduit  en  français.  —  Ce  n*cst 
pas  une  école  très-diiTérente  d'inspiration  et  de  principes 

3UÎ  a  produit  Atterbom  (mort  en  1855).  auteur  de  poëmes 
istingués  comme  VOiseau  bleu  et  Vile  du  bonheur,  et 
remarquable  écrivain  en  prose  dans  son  grand  ouvrage 
intitulé  :  les  Poètes  et  voyants  suédois,  suite  d'études 
sur  Svedenborg,  Ling,  etc.  Il  faut  encore  nommer  Stag- 
nelius  (mort  en  1823),  poôte  Ivriaue  supérieur,  et  poète 
dramatique  aussi  (son  drame  des  Martijrs  a  été  traduit  en 
fï-ançais),  et  Vitalis  (Erik  Sjôberg,  mort  en  1828),  talent 
surtout  satirique.  —  Réservons  une  place  à  part  pour 
M.  J.-L.  Runeberg,  le  grand  poGte  Anlandals  ;  il  a  chanté, 
dans  une  belle  langue  suédoise,  avec  l'énergie  d^un  sin- 
cère patriotisme  et  l'élévation  d'un  vrai  sentiment  ly- 
rique, la  résistance  de  sa  patrie  contre  la  conquête  russn 
de  18Ô9.  Les  deux  parties  de  ses  Bécits  de  Venseigfie  Sldl 
forment  une  série  de  petits  poômes  inimitables,  et  que 
Fauteur  de  cette  notice  a  essayé  de  traduire  en  français. 

Nous  ne  devons  pas  omettre  les  œuvres  scientifiques 
de  la  Suède  au  xix*  siècle,  celles  de  Berzélius  en  chimie, 
de  Hisinger  et  Wahlenberg  en  géologie,  de  01.  Swartz, 
Acharius,  Elias  Pries,  G5ran  Wahlenberg  et  C.-A.  Agardh 
en  botaniçiue;  de  Paykull,  Dalman,  SchOnherr  en  zoolo- 
gie; de  NilssoQ,  Sundevall,  B.  Pries,  EkstrOm  pour  l*en- 
tomologie  ;  de  Svanberg  à  Upsal  et  de  Hill  à  Lund  pour 
les  mathématiques  ;  des  astronomes  Cronstrand  et  Sc- 
lander;  du  physicien  Rudberg;  des  médecins  et  chirur- 
giens André  Retzius,  Huss,  San  tesson,  Florman,  etc.  — 
La  science  du  Droit  a  produit  Calonius  (mort  en  1817), 
et  M.  Schlyter,  éditeur  d'une  excellente  cellcction  des 
anciennes  lois  suédoises  qui  se  termine  aujourd'hui  ;  la 
philosophie,  Benjamin  Hôijer,  professeur  à  Dpsal  (1776- 
1812);  l'histoire  enfin,  outre  Geijer,  que  nous  avons 
nommé  déjà,  Strinnholm,  mort  en  1861  ;  M.  And.Fryxell, 
dont  les  Récits  de  Vkistoire  suédoise  se  continuent  au- 
jourd'hui encore  avec  succès;  M.  Wieselgren,  poëtos 
archéologue,  bio^phe,  historien,  à  qui  Ton  doit  une 
excellente  Histoire  de  la  littérature  suédoise,  et  qui  a 
pris  une  large  part  h.  la  publication  du  Dictionnaire  6io- 
graphique  suédois  en  23  volumes,  dont  une  série  nou- 
velle s'entreprend  aujourd'hui;  M.  Garisson,  professeur 
à  Upsal,  continuateur  de  V Histoire  de  Suède  commencée 
par  Geijer;  M.  MalmstrOm,  etc.  L'archéolorae  a  produit 
de  notre  temps  M.  Nilsson,  professeur  à  Lund,  et  H.  Sâve, 
d^Upsal,  qui  a  étudié  profondément  l'ancienne  langue  et 
les  monuments  primitifs  du  Nord.  —  Le  journalisme  est 
florissant  en  Suéde  :  M.  Crusenstolpe,  esprit  satirique , 
publie  une  petite  revue  mensuelle  mrt  curieuse,  sous  le 
titre  de  :  Situation  et  circonstances.  II.  L.  Ilierta  a  fondé 
avec  talent  le  principal  journal  suédois,  VAftonblad,  — 
Nous  ne  devons  pas  taire  les  noms  de  trois  femmes  qui 
lionorent  la  littérature  actuelle  de  la  Suède  :  M^*  Frede- 
rika  Bremer ,  dont  les  romans ,  naïves  peintures  de 
mœurs,  les  Voisins,  le  Foyer  de  famille,  etc.,  ont  été 
traduits  dans  toutes  les  langues;  M"**  Emilie  Flygare- 
Carlén,  et  M*"*  Knorring,  auteur  des  Cousins,  etc.    A.  G. 

SUÈVE  (Monnaie).  H  ne  nous  reste  qu'un  seul  monu- 
ment de  la  numismatique  des  Suèves  en  Espagne  :  c'est 
un  denier  d'argent,  frappé  par  le  roi  Richiaire,  vers  Tan 
470.  Il  porte  d'un  côté  le  buste  et  le  nom  d'Honorius,  de 
l'autre  une  croix  accostée  des  lettres  B  et  R  {Braga,  en 
Lusitanie)  et  la  légende  ivssv  aicRiAnii  régis. 

BUFFÈTES.        (   V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

SUFFIBULUM.    )     de  Biographie  et  d^Bistoire. 

SUFFIXE  (du  latin  sub,  sous,  après,  et  ^xus,  attaché), 
en  termes  de  Grammaire,  lettre  ou  syllabe  qu'on  ajoute 
à  la  fin  d'un  mot  pour  en  modifier  la  signification.  Ainsi, 
la  plupart  des  désinences  dans  les  déclinaisons  et  les 
conjugaisons  sont  des  aufBxes.  Ëx.  :  rosa,  rosarum; 
y  aime,  j'aimerai. 

SOFFRAGANT,  titre  donné  aux  évèques  relativement 
à  leur  archevêque  métropolitain,  soit  parce  qu'étant  ap- 
pelés à  son  synode  ils  y  ont  droit  de  suffrage,  soit  parce 
qu'ils  ne  peuvent  être  consacrés  sans  son  suffrage  ou  con- 
sentement, soit  parce  que,  dans  Torigine,  les  évoques  de 
chiqueprovince  ecclésiastique  élisaient  l'archevôque. 

SUFFRAGE  (du  latin  suffragium)^  voix  que  l'on  donne 
dans  une  assemblée  où  l'oa  délibère  aur  quelque  objet, 
•ù  l'on  élit  quelqu'un  pour  une  charge. 

suFiniAGis  DNivsRSCL.    (  V.  notreUicUonnovre  àet^io^ 

SUGGESTUS.  S      graphie  et  d'Uisioire. 


SUICIDE  (du  latin  sut,  de  soi,  et  cœdes,  meurtre),  acte 
par  lequel  un  homme  est  son  propre  meurtrier.  Qtielle« 
que  soient  les  causes  qui  le  produisent,  excepté  l'état  do 
folie,  le  suicide  est  un  crime  ;  il  sacrifie  le  devoir  à  une 
autre  fin,  ce  qui  est  le  renversement  de  toute  morale.  Il 
a  donné  lieu  à  plus  d'un  débat  entre  les  moralistes; 
mais,  en  principe,  rien  ne  peut  l'autoriser.  Tant  qu'il 
s'agit  du  devoir,  dit  Kant ,  par  conséquent  tant  qnll 
vit,  l'homme  ne  peut  se  défaire  de  sa  personnalité;  il 
y  a  contradiction  à  supposer  qu'il  puisse  8*affranchir 
de  toute  obligation.  Détruire  dans  sa  propre  personne  le 
sujet  de  la  moralité,  c'est,  autant  qu'il  est  en  soi,  faire 
disparaître  du  monde  la  moralité  môme,  c'est  avilir 
rhomme  dans  sa  personne.  La  morale  et  la  religion  sont 
d'accord  pour  condamner  le  suicide^  Il  le  fût  dans  l'An- 
tiquité par  les  P}'thagoriciens  et  les  Platoniciens;  Virplo 
{Enéide,  vi]  livre  les  suicides  au  supplice  de  regrets  éter- 
nels; les  Stoïciens,  dans  leur  exagération,  permettaient 
le  suicide  au  sage,  mais  plus  tard,  sans  le  proscrire  en- 
tièrement, ils  le  subordonnèrent  à  la  pensée  meilleure 
de  la  résignation,  comme  on  le  voit  chez  Épictète.  Les 
lois  civiles  en  Grèce,  dans  plusieurs  États,  étaient  très- 
sévères  à  l'égard  de  ceux  qui  se  donnaient  la  mort  : 
Thèbes  flétrissait  leur  mémoire,  Athènes  mutilait  leurs 
cadavres  et  les  privait  de  la  sépulture.  Depuis,  la  légis- 
lation s'est  montrée  souvent  plus  sévère  encore  :  le  corps 
des  suicidés  était  traversé  d'un  pieu,  ou  traîné  sur  la 
claie;  leurs  biens  étaient  confisqués,  leur  mémoire  flétrie. 

On  a  vu  des  moments  où  le  suicide  devenait  une  ma- 
ladie de  r&me,  où  il  se  propageait  comme  une  contagion 
morale,  soit  dans  les  camps,  soit  au  centre  des  villes  ;  ort 
vit  se  former  des  sociétés  dont  les  membres  devaient 
finir  par  se  donner  la  mort  V.  Robeck,  De  morte  volun- 
tariâ;  Buonafede,  Istoria  critica  e lilosoficadel  suicido, 
Lucques,  1761,  trad.  en  fhinçais  nar  Armellino  et  Gu^- 
rin,  1841;  Hermann,  Disserlatio  ae  autochiria  H  philo ^ 
sophice  et  ex  legibus  romanis  ûonsiderata  ;  StasndYin  ^ 
Histoire  des  opinions  et  des  doctrines  sur  lé  suicide, 
Gœttingue,1824  ;  J.  -J.  Rousseau,  Nouvelle  Héloïst,  y  par- 
tie, lettres  21*  et  22«;  Tissot,  De  la  manie  du  suicidi 
et  de  Vesprit  de  révolte;  l'abbé  Guillon^  Entretien  sur  te 
suicide;  M™*  de  Staôl,  Bé/lexions  sur  le  suicide,  18li; 
Brierre  de  Boismont,  Du  suicide  et  de  la  folie  suicide, 
1855;  E.  Lisle,  Du  suicide,  staiisttque,  médecine,  his- 
toire et  législation,  1856,  in-8<*  ;  L.  Bertrand,  Traité  du 
suicide,  considéré  dans  ses  rapports  avec  la  philosophie, 
la  théologie,  la  médecine  et  la  jurisprudence^  1857, 
in-8«.  R. 

SUISSE  (Langues  de  ta).  V,  Poisse ^  dans  notre  Die- 
tionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire,  et  les  auteurs  sui- 
vants: Bertrand,  Recherches  sur  les  langues  anciennes 
et  modernes  de  la  Suisse,  1758  ;  Stalder,  Dictionnaire  des 
idiomes  de  ta  Suisse^  Genève,  1804 , 2  vol.  in-8<*,  et  Essoà 
sur  les  idiomes  suisses,  avec  des  remarques  étymoio» 
giques,  en  allem.,  Bàle  et  Aarau,  1806  et  1812,  2  vol. 

SUISSES  (Cent-).  V.  Cent-Sdissbs,  dans  notre  Die- 
tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

SUITE  (Droit  de),  droit  féodal  en  vertu  duquel  les  sei- 
gneurs réclamaient  l'héritage  d'un  homme  né  dans 
l'étendue  de  leur  seigneurie^  quoiqu'il  se  fût  absenté  de- 
puis longtemps  et  eût  établi  son  domicile  dans  un  llca 
franc. 

SUITES,  nom  qu*on  donnait  autrefois  aux  Sonaies 
(  V,  ce  mot)^  parce  qu'elles  se  composaient  de  plusieurs 
morceaux. 

SUJET  (du  latin  subjectum,  placé  dessous),  en  termes 
de  Métaphysique,  s'oppose  soit  à  objet ,  soit  à  qualité. 
Dans  le  premier  cas.  Il  s'entend  de  l'être  qui  a  conscience 
de  lui-même,  c-à-d.  du  moi;  dans  le  second,  il  est  sy- 
nonyme de  substance, 

SUJET,  en  termes  de  Cramm^re,  celui  des  termes  de 
la  proposition  dont  on  affirme  l'existence  avec  tel  ou  te) 
attribut.  Il  est  représenté  soit  par  un  nom,  soit  par  un 
pronom  personnel,  démonstratif,  relatif,  soit  par  un 
infinitif.  Quelquefois  c'est  une  proposition  entière  qui 
sert  de  sujet;  mais,  dans  ce  cas,  il  y  a  presque  toi:û<>"^ 
un  double  si^et,  rtin  réel,  et  l'auti^e  apparent,  qui 
sert  soit  à  annoncer  le  sujet  réel,  soit  à  le  rappeler, 
sait  à  soutenir  l'harmonie  de  la  phrase. .  Ex.  :  «  iZ  est 
temps  de  faire  de  plus  grands  efforts;  —  Que  je  re^ 
nonce  à  mes  principes,  {cela)  est  impossible;  —  Ces\ 
une  impiété  de  ne  pas  aimer  ses  parents;  —  Drompe'r 
sciemment  raclaeteur  sur  la  valeur  de  la  marchandise, 
(c')est  montrer  sciemment  la  fausse  route  au  royagear 
égaré,  k  On  voit  par  deux  de  ces  exemples  que  l'infinitif 
employé  comme  sujet  peut  être  précédé  de  la  préposition 


SUP 


!6Î9 


SUP 


d9,  f^\  est  explL^tivc.  dette  cortôtHltUdïl  ÔtniHBUcore  plus 
fréquemment  usitée  dans  Tancieh^elatigtie,  soit  en  vêk^, 
soit  en  prose.  Les  vers  suivants  de  Boileau  {Sat,  IX)  en 
offrent  uti  exemple  : 

De  choquer  un  antenr  qnl  choque  le  bon  sens, 
C'est  ce  que  tout  lectear  eut  toujours  droit  de  faire. 

En  principe»  lorsqu'un  verbe  a  un  sujet  multiple,  il  âe 
met  au  plunel;  néanmoins  il  arrive  souvent  qu'on  le  fait 
accorder  avec  le  sujet  le  plus  rapproché  : 

...Quel  uoureaa  trouble  exdU  en  mes  esprits 
Le  sang  du  pfere,  0  clell  et  les  larmes  du  fll^? 

Kaciks,  âfithridate,  IV,  4. 

...Le  fcTp  le  bandeaut  la  fkanme  est  toute  prête. 

iD.t  Iphigénie,  III,  5. 

surtout  ti  les  deux  sujets  expriment  des  idées  ana- 
logues : 

On  dit  que  ton  ftwa  faune  et  ton  teint  sans  couleur 
Perdit  en  ce  moment  son  antique  pftlenr. 

BoxLKAU,  Le  Lutrin  f  cb.  I. 

«  La  sagesse  et  la  pîêtè  du  souverain  peut  faire  toute 
seule  le  bonheur  des  sujets.  »  (Massillon.) 

La  place  du  sujet  lest  d'ordinaire  et  logiquement  avant 
le  verbe.  Mais  il  y  a  des  cas  où  il  est  placé  aprôâ;  par 
exemple,  dans  les  phrases  interrogatives;  dans  certaines 
phrases  où  cette  inversion  tient  lieu  de  là  conjonction  si; 
dans  les  phrases  exclamât! ves  commençant  par  puisse  ou 
un  subjonctif  quelconque  :  *  Puissions-hotts  réussir!  » 

Tombe  sur  moi  le  eiel,  ponrm  que  Je  me  venge  I 

GoBSBiLLE,  Rodogune,  V,  1. 

lorsque  le  verbe  dire,  répondu»^  repartir,  etc^  est  mis  en 
parenthèse  dans  une  citation  : 

Je  crains  Dieu,  dites-^dxu,  'sa  vdritë  me  touche. 

lUciHJK,  Athalie,  ï,  1. 

C'était  un  usage  général  dans  notre  ancienne  îaugroe 
de  placer  le  sujet  après  le  verbe  dans  les  phrases  qui 
commençaient  par  certains  adverbes  ou  adjectifs,  surtout 
fersqu'elles  venaient  comme  principales  à  la  suite  d'Une 
subordonnée.  Cet  usage  ne  s'est  (nière  maintenu  qu^après 
les  adviert>es  encore,  aussi,  toujours,  etc.,  et  après  l'ad- 
jectif tel.  Dans  les  langues  anciennes,  grtce  aux  termi- 
naisons casuelles,  la  place  du  sujet  est  indifférente;  \\  se 
hiet  toujours  au  nominatif  devant  les  modes  personnels  ; 
avec  rinftnitif,  sou  veut  à  l'accusatif.  Dans  les  phrases 
încîdeùtes  ^ui  ne  renferment  qu'un  participe,  te  sujet, 
s'il  est  sans  aucun  rapport  avec  le  sujet  ou  les  complé- 
ments de  la  proposition  principale,  se  met  au  génitif  eh 
grec,  h  Tablatif  en  ïatin.  P. 

SUJET,  en  termes  de  Musique ,  est  synonyme  oè  thème 
et  de  motif.  V.  Ftocra. 

SULPnCE  (Église  Saint-),  h  Paris.  }  V.  notre  iHct.  âe 

SULTAN.  S    Èiogr.etd'Bist, 

SUMARA,  sorte  de  flûte  double  des  Turcs.  On  se  sert 
de  l'un  des  tuyaux  pour  joUer  l'air  ;  l'autre  fait  estendre 
un  son  semblable  au  boufdon  de  la  musette. 

SUNNITES.  V,  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
â^ffistoû'e. 

SUOM!  (Idiome).  V.  PmLAWBATs. 

SUPERLATIF  (du  latiù  super,  au-dessus,  et  Jatus. 
porté),  en  termes  de  Cramïnaîre,  degré  de  comparaison 
qui  exprime  la  qualité  port^  soit  à  un  très-haut  degré, 
sans  rapport  à  une  autre  chose  ou  à  une  autre  personne, 
comme  très-sage,  fort  bien  ;  soit  au  plus  haut  degré,  eh 
la  comparant  avec  tous  les  objets  semblables,  comme  le 
plus  sage,  la  plus  belle.  Dans  le  premier  cas,  le  Supe^'- 
Ifitifest  dit  absolu:  dans  le  second,  il  est  relatif.  On  dis- 
tingue aussi  un  Superlatif  d'infériorité,  qui  s'exprime 
par  les  mots  le  moins,  la  moins.  Dans  les  langues  an- 
ciennes, le  Superlatif  s'exprime  presque  toujours  par  un 
changement  dans  la  terminaison  de  l'adjectif  :  ainsi ,  en 
latin,  doctuê  (savant),  doctissimvts  (très-savaùt,  le  plus 
savant). 

SUPERNATURALIS?flE.  V.  SupranaVoralisite. 

SUPERPOSïtrON,  nom  donné  autrefois  à  Un  Jeune 
où  Ton  passait  24  heures  sans  manger. 

SUPERSTITION  (du  latin  superesse,  être  superflu,  où 
de  supersta;r'^,  s'élcV'er  au-déSs'us,  être  au  delàj^  mot  paV 
lequel  les  Anciens  entcndaîeïit  en  général  uùe  crainte 
vaine  et  excessive  des  Dieux,  qui  donnait  naissance  à  des 
pratiques  ridicules.  II.  eut  chez  lés  Romains  un  sens  l'es- 
Ircint:  il  déisignait  tous  les  rites  étrangers  ^  la  rc!ip;i6û 


rom&iHe^  tout  culte  non  autorisé.  Quand  le  ch  Istianisme 
tùi  devenu  triom][)hant  dans  le  monde,  le  titre  méprisant 
de  superstition  fut  appliqué  à  toute  pratique  antachéc  de 
paganisme  et  qui  tendait  a  dénaturer  la  religion  nouvelle. 
La  lutte  des  chrétiens  éclairés  conti^  les  superstitions 
païennes  n'a  pas  été  complètement  heureuse,  puisque, 
aujourd'hui  même,  certains  esprits  ciroient  encore  aux 
songes,  aux  présages,  aux  non:U)res  et  aux  Jours  funestes, 
aux  accidents  qui  portent  ma"  eur,  etc.  Parmi  les  chré- 
tiens aussi,  il  n'est  pas  rare  de  trouver  des  superstitions 
d'un  autre  genre,  et  l'on  peut  consulter,  entre  autres  ou- 
vrages sur  ce  sujet,  ceux  du  P.  Lebnin,  Sur  les  pratiques 
superslifieuses  (Pnni,  1732-i738,  4  vol.  in-12),  et  de 
J.-B.  Thiers,  Traité  des  superstitions  selon  VEcriture 
sainte,  17G9,  in-12.  Les  femmes  et  les  enfants  sont  plu? 
superstitieux  que  les  hommes  mûrs,  le  simple  paysan 
plus  que  l'homme  éclairé,  les  nations  barbares  plus  que 
les  peuples  civilisés.  Les  hommes  deviennent  plus  supiîr- 
stitieux  à  mesure  qu'ils  éprouvent  un  plus  grand  nombre 
d'accidents  dans  le  cours  de  leur  vie  ;  les  joueurs  et  les 
marins  en  sont  la  preuve  frappante.  Transporter  à  la 
créature  le  culte  qui  n'est  dû  qu'à  Dieu,  vénérer  de 
fausses  reliques,  ajouter  aux  rites  canoniques  certaines 
cérémonies  ou  pratiques  dont  l'Église  ne  se  sert  point, 
porter  des  amulettes  et  des  talismans,  etc.,  voilà  des  actes 
de  superstition.  La  superstition,  étant  le  résultat  d'un 
sentiment  mal  raisonné,  se  fonde  souvent  sur  des  faits 
vrais  ;  par  exemple,  beaucoup  de  personnes  regardent  le 
vendredi  comme  un  jour  funeste,  parce  que  c'est  ce  jour- 
là  qu'est  mort  N.  S.  Jésus-Christ,  et  elles  n'entrepren- 
draient rien  un  vendredi.  D'autres  ont  une  crainte  super- 
stitieuse pour  le  nombre  13,  probablement  parce  que 
Judas  était  le  13*  apôtre  de  Jésus-Christ.  Voici  un  calcul 
qui  a  été  fait,  d'après  le  Journal  des  règnes  de  tienri  îli 
et  Henri  IV,  par  L'Estoile,  sur  le  nombre  14;  nous 
livrons  ce  catcul  aux  gens  qui  ont  la  superstition  du  13. 
—  Henri  IV  naquit  14  siècles,  14  décades  et  14  ans  après 
la  nativité  de  Notre-Seiçneur  ;  il  vit  le  jour  un  14  dé- 
cembre, et  mountt  uU  14  mai  ;  il  y  avait  14  lettres  dans 
son  nom  (ttenrî  de  Bourbon);  il  vécut  cjuatre  fois  14  ans, 
quatre  fois  14  jours  et  14  semaines;  il  fut  roi,  tant  de 
lYance  que  de  Navarre,  14  triétérides  (période  de  3  ans),- 
il  fut  blessé  par  Jean  Chàtcl  14  jours  après  le  14  dé- 
cembre, en  l'année  159t,  entre  lequel  temps  et  celui  de 
sa  mort  il  n'y  a  que  14  ans,  14  mois  et  14  fois  cinq  jours; 
il  gagna  la  bataille  d'ïvry  le  14  mars;  le  dauphin  naquit 
14  jours  après  le  14  septembre,  et  fut  baptisé  le  14  août  ; 
le  roi  fut  tué  le  14  mai,  14  siècles  et  14  olympiades  après 
l'IncaiDation  ;  l'assassinat  eut  lieu  deUx  fois  14  heures 
après  que  la  reine  était  entrée  en  pompe  dans  l'église 
de  S*-Denis  pour  y  être  couronnée;  havaillac  fut  exécuté 
14  jours  après  la  mort  du  roi,  en  Tannée  ICIO,  laquelle 
se  divise  justement  par  14,  car  \\h  fois  14  font  lOlO. 
Sous  la  l^estauration ,  le  gouvernement  fit  fondre  d'un 
seul  jet,  dans  les  ateliefs  du  Roule,  à  Paris,  une  statue 
colossale,  haute  de  8  met,  de  l'infortuné  roi  Louis  XVl. 
Au  moment  où  l'on  voulut  la  retirer  du  moule,  on  s'a- 
perçut d'un  singulier  accident  :  la  lète  était  séparée  du 
corps,  et  la  statue  sortît  décapitée.  C'était  l'effet  d'un 
bouillon  produit  par  le  refroidissement  de  la  matière. 
L'explication  put  être  donnée  sur-le-champ  ;  mais  les  té- 
moins du  fait  n'y  virent  pas  moins  un  funeste  présage 
pour  la  royauté.  V.  Fr.  Bernard,  Superstitions  anciennes 
et  modernes,  Amsterdam,  1733-36,  2  vol.  in-fol.;  PlU- 
quet.  De  la  Superstition,  1804. 

SUPËRSUS,  nom  qu'on  donnait  dans  l'ancienne  Mu- 
sique au  Dessus  ou  Soprano,  quand  il  était  très-aigu. 

SUPIN  (  du  latin  supinus,  couché  sur  le  dos,  noncha- 
îàti't ,  parce  qu'il  semble  oisif  et  sans  action  ),  forme  vcr- 
baTe  Ipropre  au  latin  et  qui  se  rattache  à  la  conjugaison 
de  l'infinitif.  Le  supin  est  terminé  tantôt  en  um ,  tantôt 
en  tt.  La  forme  en  um  est  une  sorte  d'accusatif  équiva- 
lente au  gérondif  en  dum  accompagné  d'une  préposition  : 
eo  visum  est  comme  s'il  y  avait  eo  ad  visendum.  Il  se 
met  après  tous  les  verbes  qui  expriment  une  directioù 
vers  Un  but  déterminé.  Le  supin  en  u  est  une  sorte  de 
datif  ou  d'ablatif.  Il  se  met  après  les  mots  qui  renferment 
une  idée  de  passivité,  comme  facile,  difficile,  admirable, 
étonnant ,  affreux,  agréable,  honorable,  honteux,  bon , 
mauvais^  incroyable,  etc.  :  Facilis  visu,  facHe  à  voir;  mt- 
rabile  dictu,  étonnant  à  dire;  juctmdum  lectu,  agréable 
à  lire,  etc.  De  là  le  nom  de  supin  passif  donné  à  cette 
ferme  en  u,  tandis  qu'on  donne  celui  d'âcfifà  là  forme  cù 
um.  Quelquefois  il  y  à  confusioti,  au  moîn^  apparente, 
d'acception  entre  les  deux  formes;  ainsi,  facitis  ad  nàf- 
randum  équivaut  h  narratu  facilis;  mais  le  gérondif  u, 


SLP 


1680 


SUR 


dans  ce  cas ,  un  sens  passif.  Le  supin  a  pour  équivalent 
dans  les  autres  langues  Tinfinitif  avec  ou  sans  prépo- 
sition. P. 

SUPPARUH.  V.  ce  mot  dans  notre  Dlciwnnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

SUPPLÉMENT,  ce  qu*on  ajoute  à  un  livre  pour  le  com- 
pléter. C'est  tantôt  une  addition  contenant  les  choses 
omises  ou  celles  qui  sont  survenues  pendant  et  depuis  la 
publication,  tantôt  une  partie  qui  comble  des  lacunes, 
comme  sont  les  Suppléments  de  Tite-Live  par  Freinshe- 
mi  us  et  do  Tacite  par  Brotier. 

SUPPLÉTIF,  en  termes  de  Grammaire,  se  dit  des  mots 
dont  la  destination  dans  la  phrase  est  de  suppléer  les 
idées  accessoires  de  relation  qui  doivent  être  ajoutées  à 
la  signification  primitive  d'autres  mots.  La  liaison  des 
idées  accessoires  aux  mots  principaux  se  fait  par  des  pré- 
positions ou  par  des  adverbes.  Ainsi,  dans  :  «  roi  de 
France,  —  aimer  avec  tendresse,  —  sincèrement  hon- 
nête, »  les  expressions  de  France,  avec  tendresse,  sin-- 
cèrement,  ajoutent  à  la  signification  du  substantif  roi^ 
du  verbe  aimer  et  de  l'adjectif  honnête  des  idées  acces- 
soires de  relation  à  la  France,  à  la  tendresse,  à  la  sin- 
cérité. 

SUPPLICATION.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d' Histoire. 

SUPPLICE ,  châtiment  corporel  Infligé  par  arrêt  de  la 
Justice.  Par  dernier  supplice,  on  entend  la  peine  de  mort. 
Les  supplices  ont  été  très-variés  dans  tous  les  temps ,  et 
rimagination  des  hommes  s'est  souvent  appliquée  à  en 
inventer  d'horribles.  Les  Hébreux  employèrent  la  lapi- 
dation, la  décollation,  la  strangulation,  le  crucifiement, 
le  précipice,  la  scie,  le  feu,  le  chevalet,  la  bastonnade, 
le  fouet,  Tavulsion  des  yeux,  des  cheveux,  de  la  peau  de 
la  tête,  la  flagellation  d'épines.  L'écartèlement ,  l'écorche- 
ment,  l'étouffement  sous  la  cendre,  furent  pratiqués  par 
les  Perses.  A  Athènes,  à  Carthage,  certains  coupables 
étaient  enfermés  et  roulés  dans  des  coffres  ou  des  ton- 
neaux hérissés  de  clous.  Ce  furent  les  Grecs  qui  imagi- 
nèrent de  donner  la  mort  par  la  cigufi.  Les  Romains 
enterrèrent  vivantes  les  Vestales  qui  avaient  laissé  étein- 
dre le  feu  sacré  ;  ils  marquèrent  d'une  lettre  au  front  les 
calomniateurs.  Les  persécutions  dirigées  contre  le  chris- 
tianisme naissant  engendrèrent  des  peines  Jusque-là 
inconnues,  le  gril  ardent,  le  bûcher,  les  bêtes  féroces, 
le  plomb  fondu  et  l'huile  bouillante  versés  sur  les  plaies 
vives,  etc.  Au  moyen  &çe,  on  ^outa  aux  supplices  détà 
usités  le  pilori ,  la  question,  l'estrapade,  l'immersion,  la 
roue,  les  oubliettes,  les  trappes,  les  basses-fosses,  les 
cages  de  fer;  on  perça  d'un  fer  rouge  la  langue  des  blas- 
phémateurs; certains  faux-monnayeors  furent  bouillis 
dans  de  l'eau  ou  dans  de  l'huile.  La  Révolution  de  4789 
abolit  en  France  tous  les  genres  de  supplices,  et  ne  con- 
serva que  la  décapitation  par  la  euillotine;  le  carcan  et 
la  marque  ont  disparu  depuis  4832.  Mais  les  autres  États 
n'ont  pas  tous  suivi  cet  exemple  :  les  Prussiens  ont  con- 
servé les  supplices  du  glaive,  de  la  corde,  de  la  roue,  du 
feu  ;  les  Russes,  le  knout  ;  les  Anglais,  la  corde,  les  ba- 
guettes; les  Espagnols,  la  garrotte,  etc.  Les  Asiatiques 
ont  pratiqué  jusqu'à  nos  jours  les  supplices  les  plus  bar- 
bares :  ainsi,  les  Turcs  ont  le  pal ,  les  Chinois  la  cangue 
[V.  ces  mots)  et  la  scie.  On  peut  remarquer  que,  dans 
tous  les  pays,  la  barbarie  des  supplices  est  en  raison 
directe  du  aegré  arriéré  de  la  civilisation,  et  du  manque 
des  lumières  de  la  religion  bien  comprise,  ou  de  la  phi- 
losophie. V.  Beccaria,  des  Délits  et  des  Peines,  4764, 
in-42.  B. 

SUPPORTS ,  terme  de  Blason.  V.  Tenants. 

SUPPOSITION,  en  termes  de  Droit,  action  de  mettre 
une  personne  ou  une  chose  à  la  place  d'une  autre.  Sup- 
poser un  contrat  ou  un  acte  quelconque,  c'est  arguer 
d'un  titre  nul,  qui  a  bien  les  apparences  extérieures  d'un 
acte  valable,  mais  qui  n'a  pas  été  réellement  passé  entre 
les  personnes  auxquelles  il  est  attribué;  c'est  faire  un 
faux  (V.  ce  mot).  La  Supposition  de  nom,  quand  elle  a 
pour  bqt  de  tromper  la  surveillance  de  la  police,  est  un 
délit  Justiciable  des  tribunaux  correctionnels  ;  en  matière 
de  passe-ports,  elle  est  punie  d'un  emprisonnement  de 
trois  mois  à  un  an.  Quand  elle  s'attaque  à  la  fortune 
d'autrui,  elle  se  confond  avec  la  Supposition  de  personne, 
laquelle  résulte  de  fausses  signatures,  d'altération  des 
actes,  écritures  ou  signatures,  d'interodation  ou  addition 
d'écritures  nouvelles  sur  des  actes,  et  qui  est  punie  des 
travaux  forcés  a  temps.  La  Supposition  de  pa9't  ou  d'en- 
fant consiste  à  présenter  un  enfant  comme  né  de  parents 
dont  il  n'est  pas  issu;  cette  fraude,  qui  a  ordinairement 
pour  but  d'enlever  à  dos  collatéraux  un  titre  ou  une  suc- 


cession, en  introduisant  dans  la  famille  un  héritier  direct, 
est  punie  de  la  réclusion. 

SUPPOSITION,  terme  de  Musique.  Quand  plusieurs  notes 
montent  ou  descendent  diatoniquement  dans  une  partie 
sur  une  même  note  d'une  autre  partie,  elles  ne  sauraient 
toutes  faire  harmonie  ni  entrer  à  la  fois  dans  le  même 
accord  :  celles  qu'on  y  compte  pour  rien  sont  des  notes 
par  supposition.  En  général,  si  les  notes  sont  égales, 
celles  qui  frappent  sur  le  temps  fort  portent  harmonie; 
celles  qui  passent  sur  le  temps  faible  sont  des  notes  par 
supposition.  Quand  les  degrés  sont  disjoints,  il  n'y  a 
point  de  supposition,  et  toutes  les  notes  doivent  entrer 
dans  l'accord.  On  nomme  accords  par  supposition  ceux 
où  la  basse  continue  ajoute  ou  suppose  un  nouveau  son 
au-dessous  de  la  basse  fondamentale  ;  ce  qui  fait  que  de 
tels  accords  excèdent  toujours  l'étendue  de  l'octave. 

SUPPOT  (du  latin  suppositus)^  nom  donné  autrefois 
à  ceux  qui  étaient  membres  accessoires  d'un  corps  et  qui 
remplissaient  certaines  fonctions  pour  le  service  de  ce 
corps.  Ainsi,  les  imprimeurs  et  les  libraires  étaient  les 
suppôts  de  l'Université.  La  Justice  avait  aussi  ses  suppôts. 

SUPPRESSION ,  action  de  supprimer,  c-ànd.  d'em|>ê- 
cher  de  paraître,  ou  de  soustraire,  ou  d'anéantir.  On  dis- 
tinguo :  la  Suppression  d'actes  ou  de  pièces ,  qui  rentre 
dans  la  classe  des  soustractions  frauduleuses  (  V,  Sous- 
traction) ;  la  Suppression  d'écrits,  ordonnée  par  justice 
quand  ils  peuvent  porter  atteinte  à  la  morale  publique 
ou  à  riiouoeur  des  particuliers  {Code  de  ProceVi.,  art.  4<h26): 
la  Suppression  d^etat,  qui  consiste  dans  l'enlèvement,  la 
destruction  ou  la  soustraction  des  registres  constatant 
l'état  civil  d'un  citoyen,  c-à-d.  sa  naissance ,  son  adop- 
tion, son  mariage  ou  son  décès,  et  qui  est  punie,  selon 
les  cas,  de  la  réclusion  ou  des  travaux  forcés  à  temps 
{Code  Napol,  art  326-330;  Code  pénal,  345  )  ;  la  Sup- 
pression de  part  ou  d*enfant ,  consistant  à  soustraire  et 
cacher  un  enfant  après  sa  naissance,  et  à  le  priver  ainsi 
de  son  état  civil ,  crime  puni  de  la  réclusion. 

SUPRANATURALISME  ou  SUPERNATURALTSME  (du 
latin  supra,  super,  au-dessus,  et  natura,  nature).  On 
donne  ce  nom  à  tout  ce  qui  est  en  dehors  des  lois  de  la 
nature,  et  par  suite  en  dehors  ou  au-dessus  de  la  raison. 
Les  sciences  occultes,  comparées  aux  sciences  véritables, 
pouvaient  passer  pour  surnaturelles.  En  matière  de 
Physique  et  de  ce  qui  tient  au  somnambulisme  et  au 
magnétisme  animal,  le  supranaturalisme  se  montre  en 
Allemagne  dans  les  écrits  de  Schubert,  de  Justin  Kerner, 
de  Keiser,  et  dans  le  curieux  ouvrage  de  Gerber  :  le  Do- 
maine nocturne  de  la  nature.  En  matière  religieuse,  le 
Supranaturalisme  repose  sur  des  données  qui  ont  pour 
fondement  la  foi ,  et  qui  sont  inaccessibles  à  la  raison 
humaine.  C'est  encore  en  Allemagne  qu'il  prit  son  carac- 
tère le  plus  prononcé  ;  ses  principaux  organes  sont  Tho- 
luck,  Guericke,  Harms ,  Hengstenberg,  Sartorius.      R. 

SURABONDANTS  (Mots),  terme  de  Grammaire  grec- 
que et  de  Grammaire  latine  qu'on  applique  aux  noius  et 
adjectifs  ayant  deux  ou  plusieurs  formes  de  déclinaison. 
Tels  sont,  en  grec,  les  moU  phylax  (3*  décl.)  et  phyla- 
cos  (2*  décl.  ) ,  gardien  ;  lagos  (  lagou) ,  lagôs  {lagô)^  et 
Ictgôos  {lagôou}^  lièvre;  taos  (  taou)^  taôs  (  taâ),  et  taân 
(todnos),  paon;  en  latin,  vultur  et  mUtuHus  (vautour), 
juventa  et  juventus  (Jeunesse),  evenitis  et  eventum  (issue), 
sentum,  senecta  et  senectus  (vieillesse),  etc.  Quelques 
verbes  latins,  qui  ont  à  la  fois  une  forme  active  et  une 
forme  passive  sans  changer  de  sens,  pourraient  recevoir 
aussi  le  nom  de  surabondants  :  tels  sont  fenero  et  fene- 
ror,\Q  place  à  intérêt;  ludi/ico  et  ludificor,  Je  me  fais  un 
jeu  de;  assentio  et  a^sentior,  Je  donne  mon  assentiment, 
impertio  et  impertior,  je  donne  ma  part  de,  etc.        P. 

surabondants  (Tons  ou  Modes).  On  nomme  ainsi  dans 
le  Plain-Chant  les  tons  ou  modes  qui  montent  ou  descen- 
dent d'une,  de  deux  ou  de  plusieurs  notes  au  delà  des 
limites  de  leur  échelle  diatonique.  Un  ton  cMtJkentiqne 
{V,  ce  mot)  est  surabondant  lorsqu'il  s'élève  au-dessus 
de  l'octave  de  sa  finale;  un  ton  plagal  (V,  ce  mot)  en 
surabondant  lorsqu'il  descend  de  plus  d  une  quarte  au* 
dessous  de  sa  finale.  F.  C 

SURANNATION  (Lettres  de),  nom  donné,  en  termes 
d'ancienne  Chancellerie,  aux  lettres  qu'on  obtenait  pour 
rendre  de  la  force  et  de  la  validité  aux  actes  nurannés. 
Ce  dernier  mot  s'appliquait  :  4<*  à  certains  actes  publics, 
lorsque  l'année  au  delà  de  laquelle  ils  ne  pouvaient 
avoir  d'effet  était  expirée  ;  2®  aux  concessions  qui,  faute 
d'avoir  été  enregistrées  dans  le  temps  prescrit,  deveDsient 
nulles. 

SURARBITRE,  terme  de  Droit,  synonyme  de  lien 
arbitre  on  troisième  arbitre. 


SUR 


1C81 


SUR 


SURBAISSÉ  (Arc).  V,  Arc  en  anse  de  panier. 

SURCHARGE ,  mot  écrit  sur  un  autre  mot.  Les  sur- 
charges sont  interdites  dans  les  actes ,  dans  les  registres, 
dans  les  pièces  comptables  ;  la  rectification  des  erreurs 
commises  ne  peut  se  faire  que  par  rature  (  V.  ce  mot). 

SURCOT ,  riche  vôtement  que  les  dames  au  moyen  ftge 
mettaient  par-dessus  leur  cotte  ou  robe.  Plus  tard,  on 
donna  le  même  nom  au  vêtement  que  les  chevaliers  de 
Tordre  de  rÉtoile  portaient  sous  leur  manteau.  Le  surcot 
devint  enfin  commun  aux  deux  sexes;  ce  fut  une  sorte  de 
soubreveste  descendant  généralement  Jusqu'à  la  ceinture, 
quelquefois  plus  bas. 

SURDASTÎIUM,  nom  donné  anciennement  à  un  tam- 
bour qui  servait  à  accompagner  la  flûte  de  Pan  dans  les 
airs  de  danse. 

SURENCHÈRE,  enchère  mise  sur  une  enchère  précé» 
dente.  Dans  les  ventes  immobilières,  on  distingue  la 
Surenchère  swr  cUiénation  volontaire,  accordée  seulement 
aux  créanciers  qui  ont  hypothèque  inscrite  sur  IMmmeu- 
ble  aliéné,  et  la  Surenchère  sur  expropriation  forcée, 
permise  à  toute  personne  indistinctement  {Code  de  Pro- 
céd.,  art.  710-12,  832-38,  2183-85,  2192).  Dans  les  ventes 
d'immeubles  appartenant  à.  un  débiteur  failli ,  tout  créan- 
cier a  le  droit  de  surenchérir  :  la  surenchère  ne  peut  être 
dans  ce  cas  au-dessous  du  10*  du  prix  principal  de  Tad- 
Judication  [Code  de  Comm,,  art.  565).  V.  Petit,  Traité 
des  surenchères,  1848,  in-S^*;  Piogey,  Commentaire  de  la 
loi  du  Sf  mai  4838  sur  la  saisie  immobilière,  Vordre  et 
surenchère  swr  aliénoAion  volontaire,  1858,  in-8°. 

SURÉROGATION  (Œuvres  de),  en  termes  de  Théo- 
logie, bonnes  œuvres  faites  au  delà  de  ce  qui  est  prescrit 
par  la  loi. 

SURESTARIE  (du  latin  super,  au  delà,  et  stare,  res- 
ter), en  termes  de  Droit  commercial ,  retard  apporté  dans 
le  chargement  d*un  navire  frété.  Quand  le  délai  convenu 
ou  déterminé  par  Tusage  des  lieux  est  expiré,  le  fréteur 
qui  a  mis  TaiTréteur  en  demeure  de  tenir  son  en^e- 
ment  a  droit  à  des  dommages-intérêts  appelés  frais  de 
surestarie. 

SURETE  GÉNÉRALE  (Loi  de),  loi  votée  en  1858, 
et  par  laquelle  le  gouvernement  a  été  armé,  jusqu'au 
31  mars  1865,  de  pouvoirs  extraordinaires.  Etait  puni 
d'iiQ  emprisonnement  de  deux  à  cinq  ans,  et  d  une 
amende  de  t>00  fr.  à  10,000  fr.,  tout  individu  qui  avait 
provoqué  publiquement,  aux  crimes  prévus  par  les 
art.  86  et  87  da  Code  pénal,  lorsque  cette  ppovocalioa 
n'avait  pas  été  suivie  d'effet.  Etait  puni  d'un  emprison- 
nement d'un  moisà  deux  ans,  etd'une  amende  de  1 00  fr. 
à  2,000  fr.,  tout  individu  qui,  dans  le  but  de  troubler 
la  paix  publique,  ou  d'exciter  à  la  haine  ou  au  mépris 
du  Gouvernement,  avait  pratiqué  des  manœuvres  ou  en- 
tretenu des  intelligences,  soit  à  l'intérieur,  soit  à  l'é- 
tranger. Quiconque,  sans  y  être  autorisé,  avait  fabriqué 
ou  fait  fabriquer,  débité  ou  distribué  des  machines 
meurtrières  agissant  par  explosion  ou  autrement,  ou 
de  la  poudre  fulminante,  était  puni  d'un  emprisonremen  t 
de  six  mois  à  cinq  ans  et  d'une  amende  de  50  fr.  h 
3,000  fr.  La  môme  peine  était  app  icable  au  détenteur 
ou  porteur,  sans  autorisation,  des  objets  ci-dessus  spé- 
ciGes.  Ces  peines  étaient  prononcées  sans  préjudice  de 
celles  que  les  coupables  auraient  pu  encourir  pour 
tous  autres  crimes  et  délits. 

Les  individus  condamnés  pouvaient  être  interdits, 
en  tout  ou  en  partie,  des  droits  mentionnés  en  l'art.  42 
du  Cocle  pénal,  pendani  un  temps  égal  à  la  durée  de 
l'emprisonnement  prononcé. 

Tout  individu  condamné  pouvait  être,  par  mesure 
de  sûreté  générale,  interné  dans  un  des  départements 
de  l'Empire  ou  en  Algérie,  ou  expulsé  du  territoire 
français.  La  même  mesure  pouvait  être  appliquée  aux 
condamnés  pour  crimes  ou  délits  prévus:  1^  par  les 
art.86  à  101,153, 154,  §1",  209  à  211,213  à  221  du  Code 
pénal;  2»  par  les  art.  3,  5,  6,  7,  8  et  9  de  la  loi  du  24 
mai  1834,  sur  les  armes  et  munitions  de  guerre;  S*" 
par  la  loi  du  7  juin  1843,  sur  les  attroupements;  4» 
par  les  art.  1  et  2  de  la  loi  du  27  juillet  1849.  Pouvait 
être  interné  dans  un  des  départements  de  l'Empire  ou 
en  Algérie,  ou  expulsé  du  territoire,  quiconque  avait 
été  condamné,  interné,  expulsé  ou  transporté  par 
mesure  de  sûreté  générale,  à  l'occasion  des  événe- 
ments de  moi  etde  juin  1848,  de  juin  4849  ou  de  dé- 
cembre 1851,  et  que  des  faits  graves  signaleraient  de 
nouveau  comme  dançereuz  pour  la  sûreté  publique. 
Tout  individu  interné  en  Algérie,  ou  expulsé  du  ter- 
ritoire, qui  rentrait  en  France  sans  autorisation, 
pouvait  être  placé  dans  uns  colonie  pénilcnliairc,  soit 


en  Algérie,  soit  dans  une  aulre  possession  française. 

Les  mesures  de  sûreté  générale  étaient  prises  par 
le  ministre  de  l'iutérieur,  sur  l'avis  du  préfet  du 
département,  du  général  qui  y  commandait,  et  du 
procureur  gépéral. 

SURFRAPPEES  (Monnaies),  monnaies  qui  ont  reçu 
un  nouveau  type  légal. 

SUBHAUSSE  (Arc).  V.  Arc  surhaussé. 

SURINTENDANT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnatre 
de  Biographie  et  d* Histoire. 

SUR-LE-TOUT,  en  termes  de  Blason,  écusson  posé  sur 
un  écartelé.  On  lui  donne  en  largeur  deux  parties  et 
demie  des  sept  de  la  largeur  de  Técu,  et  en  hauteur  trois 
parties  des  huit.  Le  sur-le-tout  est  ordinairement  affecté 
aux  armes  propres  de  la  famille,  et  les  quartiers  aux 
armes  de  succession  ou  d*alliance.  En  blasonnant,  on 
nomme  d'abord  ces  quartiers,  puis  le  sur-le-tout.  On 
nomme  Sur-le-lout-du-tout  un  petit  écusson  posé  sur  le 
sur-le-tout  :  on  lui  donne,  par  rapport  au  sur-le-tout, 
les  proportions  qu*a  celui-ci  par  rapport  à  Técu. 

SUBNOM  (du  latin  supra  nomen,  en  sus  du  nom),  dé- 
signation qui  sert  ordinairement  à  distinguer  les  indi- 
vidus d*une  môme  famille.  Dans  Torique,  les  surnoms 
ne  furent  pour  la  plupart  que  des  sobriquets  {V.  ce  mot)^ 
dérivés  de  quelque  particularité  physique  ou  intellec- 
tuelle, ou  de  quelque  événement  amvé  au  personnage. 
Puis  ils  devinrent  de  véritables  noms  de  famille.  Tels 
sont  L»  Sourd,  Le  Noir,  Le  Gris,  Le  Blanc,  Le  Gros, 
Le  Roux,  Le  Jeune. 

SURNUMÉRAIRE  (du  latin  super,  au-dessus,  et  nw 
merus,  nombre),  (|[ui  est  au-dessus  du  nombre  déterminé. 
Le  mot  se  dit  particulièrement,  dans  les  Administrations, 
des  commis  qui  travaillent  sans  appointements  et  font 
un  temps  d*épreuve  avant  d'obtenir  une  place  rétribuée. 

SURPLIS,  pour  sur  pelisse  (ea  latin  super^pellidumV 
vêtement  que  les  ecclésiastiques  portent  par-dessus  la 
soutane  lorsqu'ils  assistent  au  service  divin  ou  qu'ils 
prêchent.  Cest  une  sorte  de  tunique  en  toile  ou  mous- 
seline blanche,  sans  manches,  descendant  jusqu'à  mi- 
jambes,  avec  deux  ailes  plissées  qui  pendent  des  épaules 
par  derrière  et  qui  représentent  les  manches.  Dans  quel- 
ques diocèses,  le  surplis  a  de  vastes  manches  pendantes. 

SURPLOMBER,  en  termes  de  Construction,  n'être  pab 
aplomb,  pencher,  le  haut  avançant  plus  que  le  pied. 

SURPRISE,  en  termes  d'Art  militaire,  attaque  prémé- 
ditée par  celui  qui  la  fait,  mais  inopinée  pour  celui  qui 
la  reçoit.  C'est  une  tentative  d'un  des  deux  adversaires 
pour  saisir  l'autre  dans  la  disposition  la  plus  défavorable 
à  la  défense.  Les  surprises  de  jour  sont  rares,  et  ne  réus- 
sissent que  par  un  concours  de  circonstances  qu'il  est 
difficile  de  réunir,  à  moins  d'avoir  affaire  à  un  ennemi 
négligent  ou  inexpérimenté.  Les  surprises  de  nuit  sont 
sujettes  à  de  nombreux  inconvénients,  à  de  nombreuses 
méprises,  qui  peuvent  les  faire  échouer. 

SURSIS,  délai  accordé  par  le  juge  et  pendant  lequel  la 
poursuite  d'une  affaire  est  suspendue.  Le  Code  Napoléon 
(art.  4244,  22i2)  et  le  Code  de  Procédure  civile  (art.  127, 
240^  déterminent  les  cas  où  il  y  a  lieu  à  sursis,  et  ceux 
où  il  est  permis  d'en  accorder. 

SURTOUT,  sorte  de  justaucorps  très-large,  cfu'on  met 
par-dessus  les  autres  vêtements;  — grande  pièce  d'or- 
fèvrerie qu'on  place  comme  ornement  sur  la  table  dans 
les  repas  d'apparat. 

SURVEILLANCE  DE  LA  HAUTE  POLICE,  mesure  de 
sûreté  dont  le  but  est  de  garantir  la  société  contre  les 
nouveaux  crimes  ou  délits  qui  pourraient  être  commis 
par  les  condamnés  libérés.  La  mise  en  surveillance  est 
toujours  prononcée,  dans  certains  cas,  comme  une  con- 
séquence de  la  condamnation  ;  dans  d'autres,  elle  est 
facultative,  et  la  loi  s'en  rapporte  à  cet  égard  à  la  pru- 
dence des  juges.  Elle  donne  au  gouvernement  le  droit 
d'interdire  certains  lieux  au  libéré.  Celui-ci  doit  déclarer, 
à  l'expiration  de  sa  peine,  l'endroit  où  il  veut  fixer  sa  ré- 
sidence :  il  reçoit  alors  une  feuille  de  route  contenant  un 
itinéraire  dont  il  ne  peut  s'écarter,  et  déterminant  la  durée 
du  séjour  qu'il  peut  faire  dans  chaque  lieu  de  passage.  I! 
est  tenu  de  se  présenter,  dans  les  24  heures  de  son  ar- 
rivée, devant  le  maire  de  la  commune  ;  il  ne  peut  changer 
de  résidence  sans  avoir  indiqué  à  ce  magistrat,  3  jours  à 
l'avance,  le  lieu  où  il  compte  aller  habiter,  et  sans  avoir 
reçu  de  lui  une  nouvelle  feuille  de  route.  La  désobéis- 
sance à  ces  prescriptions  entraine  un  emprisonnement 
qui  peut  aller  jusqu'à  5  ans.  —  Vintemement  est  une 
sorte  de  haute  surveillance  administrative,  mise  en  pra- 
tique en  France  depuis  1851,  et  qui  consiste  à  imposer  à 
!  une  personne  le  séjour  d'une  ville,  d'un  endroit  plus  ou 

i06 


sus 


168.2 


SYL 


moins  limité,  avec  obligation  de  se  présenter  devant  les 
autorités  certains  |ours  et  à  toute  réquisition.  En  cas  de 
contravention,  l'interné  peut  être  éloigné  de  France. 
Pour  sortir  du  département,  il  a  besoin  de  l*autorisatioa 
du  ministre  de  Tlntérieur,  sauf  quelques  cas  d'urgence. 

SURVENANCE  D'ENFANT,  en  termes  de  Droit,  nais- 
sance d'un  enfant  légitime  après  une  donation  entre-vifs. 
Elle  révoque  les  donations;  celles-ci  ne  peuvent  revivre 
ou  avoir  de  nouveau  leur  effet  ni  par  la  mort  de  l'enfant 
du  donateur,  ni  par  aucun  acte  conlirmatif  ;  il  faut  pour 
oela  une  nouvelle  disposition  {Code  Napol.,  art  953,  060- 
9G0).  La  révocation  ne  frappe  pas  les  donations  qui 
auraient  été  faites  entre  époux  pendant  le  maxiage  (ar- 
ticle 1006). 

SURVIE  (Gains  de).  V.  Gains  de  survie. 

sunviE  (Présomption  de).  V.  Succession. 

SURVIVANCE,  droit  de  succéder  à  un  homme  dans  sa 
charge.  C'était,  avant  1789,  un  privilège  gue  le  roi  ac- 
cordait à  quelqu'un,  ordinairement  aux  enfants  des  titu- 
laires de  certaines  charges;  ce  droit  avait  fini  par  devenir 
un  abus,  comme  toutes  les  faveurs,  et,  dès  le  temps  de 
Henri  III>  un  si  grand  nombre  de  charges  étaient  deve- 
nues héréditaires,  que  ce  prince  en  signala  les  survivances 
comme  une  des  premières  réformes  à  faire.  Néanmoins 
l'abus  subsista,  et,  sous  le  règne  de  Louis  XIV,  en  1661, 
le  secrétaire  d'État  des  alTaires  étrangères  avait  obtenu  la 
survivance  de  sa  charge  pour  son  jeune  fils,  Loménie  de 
Bricnne.  Il  sufTisait  alors  que  la  charge  convint  à  l'indi- 
vidu, peu  importait  que  l'individu  ne  convint  pas  à  la 
charge.  Les  survivances  sont  un  des  plus  criants  abus 

Sue  la  Révolution  a  déracinés,  et  que  seule  elle  pouvait 
étruire.  C.  D— v. 

SUSCRIPTÏON,  terme  de  Diplomatique.  V.  Diplôme. 

suscRiPTiON  (Acte  de),  acte  qui  est  écrit  par  un  notaire 
sur  la  surface  extérieure  du  papier  clos  et  scellé  conte- 
nant un  testament  mystique,  ou  sur  la  feuille  qui  lui 
sert  d'enveloppe.  Il  doit  être  fait  en  présence  de  six  té- 
moins au  moms,  et  être  siçné  par  le  notaire,  ainsi  que 
par  le  testateur  :  si  ce  dernier  ne  sait  ou  ne  peut  écrire, 
un  témoin  de  plus  est  appelé,  et  signe  l'acte  avec  les 
autres  {Code  NapoL,  art.  976  et  977). 

SUS-DOMCNANTE.  V.  Ton. 

SUSE  (Arc  de),  arc  honoraire  romain,  élevé  à  l'empe- 
reur Auguste.  II  est  assez  bien  conservé,  et  entièrement 
dt'gagé  des  constructions  qui  l'environnèrent  pendant 
plusieurs  siècles.  Il  ne  consiste  qu'en  une  seule  arcade, 
dont  l'archivolte  retombe  sur  des  pieds-droits  formant 
pilastre.  Aux  quatre  angles  extérieurs  du  monument  sont 
des  colonnes  corinthiennes  engagées,  qui  supportent  Ten- 
tablciiient.  V,  AAassazza,  VArco  antico  di  Suza,  Turin, 
1750,  in-fol. 

SUSIN,  pont  brisé  op  partie  du  tillac  d'un  vaisseau  qui 
s'étend  depuis  la  dunette  jusqu'au  grand  m&t. 

SUSPECTS  (^Loi  des).  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

SUSPENSE,  en  termes  de  Droit  canonique,  mesure  par 
laquelle  l'autorité  diocésaine  suspend  un  prêtre  de  ses 
fonctions  ou  le  prive  de  l'usage  de  son  bénéfice  pendant 
un  temps  plus  ou  moins  long.  —  On  appelait  autrefois 
Charte  de  suspense  une  charte  royale  en  venu  de  laquelle 
tout  procès  intenté  à  une  personne  absente  pour  le  ser- 
vice ou  par  les  ordres  du  prince  était  suspendu  jusqu'à 
son  retour. 

SUSPENSION,  figure  de  Rhétorique  qui  consiste  à  tenir 
l'esprit  de  l'auditeur  en  suspens,  pour  mieux  piquer  sa 
curiosité,  et  l'amener  ensuite  à  une  tout  autre  conclusion 
que  colle  qu'il  avait  prévue.  Cette  figure  est  également 
propre  à  tous  les  genres  de  composition.  Bossuct  {Orai^ 
son  funèbre  de  la  reine  d'Angleterre)  en  offre  un  exemple  : 
«  Combien  de  fois  a-t-elle  remercié  Dieu  de  deux  grandes 
grâces  :  Tune,  de  l'avoir  faite  chrétienne;  l'autre...  Mes- 
sieurs, qu'attendez -vous?  peut-être  d'avoir  rétabli  les 
affaires  du  roi  son  fils?  non  ;  c*est  de  l'avoir  faite  reine 
malheureuse.  »  Dans  le  CinnQ,  de  Corneille  (V,  1),  lorsque 
l'empereur  Auguste  déclare  à  Cinna  qu'il  connaît  tous 
ses  projets,  il  y  a  aussi  une  longue  suspension,  qui  se 
termine  par  cette  terrible  parole  s 

Giiina,  ta  t'en  loaTiens,  et  veax  m*MM88lnerl 

Dans  le  genre  simple,  on  connaît  la  fameuse  Lettre  de 
M'"<'  de  Sévigné  à  Bl.  de  Goulanges  sur  le  mariage  de 
Lauzun  ;  la  suspension  y  est  prolongée  indéfiniment,  pour 
mieux  faire  ressortir  ce  que  ce  mariage  avait  d'extraor- 
dinaire. B. 

SUSPENSION,  interdiction  temporaire  d'exercer  une  fonc- 
tion. C'esi  une  peine  que  les  Cours,  les  Tribunaux,  les 


Conseils  de  discipline  des  avocats,  les  Chambres  des  no- 
taires et  des  avoués,  peuvent  prononcer  contre  ceux 
de  leurs  membres  qui  ont  commis  quelque  faute  dans 
l'exercice  de  leurs  fonctions  {Code  de  Procédure  civile, 
art.  90;  Décret  du  30  mars  1808;  Loi  du  20  avril  1810). 
Elle  est  également  applicable  aux  membres  du  corps  en- 
seignant (Loi  du  15  mars  185U).  La  suspension  pour  les 
ecclésiastiques  se  nomme  suspense  {V,  ce  mot). 

SUSPENSION,  en  termes  de  Musique,  retard,  sur  la  basse 
d'un  accord,  d'un  ou  de  plusieurs  sons  de  l'accord  pré- 
cédent. 

SUSPENSION  D*ARMES,  trève  de  quelques  jours,  conclue 
par  les  belligérants  pour  l'accomplissement  de  certaine 
devoirs  indispensables,  comme  l'inhumation  des  morts. 

SUSPENSION  DE  PAYEMENTS.  SI  elle  n'a  pas  été  suivi? 
d'une  cessation  effective,  elle  ne  donne  pas  ouverture  ^ 
la  faillite.  Le  commerçant  qui  a  éprouvé  un  cmban-as 
momentané  peut  trouver  ensuite  des  ressources  et  satis- 
faire à  ses  engagements. 

SUSPICION.  En  Droit,  il  y  a  Suspicion  légitime,  quand 
on  peut  présumer  qu'un  tribunal  saisi  d'une  affaire 
pourra  se  laisser  influencer  par  des  préoccupations  étran- 
gères. Le  renvoi  pour  cause  de  suspicion  légitime  peut 
être  invoqué  en  matière  criminelle,  correctionnelle,  ou 
de  police  ;  il  est  porté  devant  la  Cour  de  cassation  {Code 
d'/HS/r.  crim,t  art.  542-52), 

SUS-TONIQUE.  V.  Ton. 

SUTRAS.  K.  Indienne  (Littérature). 

SUTTIE.       \  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 

SUZERAIN.  î      d'Histoire. 

SWIRELLA.  V.  RossE  (Art). 

SYCOPHANTE.  )  V.  notre  Dictionnaire   de 

SYDENIIAM  (Palais  de),  j      Biographie  et  d'Histoire. 

SYLLABAIRE,  petit  livre  dont  on  se  sert  pour  ap- 
prendre à  lire.  On  l'appelle  ainsi  parce  qu'il  enseigne  à 
assembler  les  syllabes,  c-à-d.  à  épeler. 

SYLLABE,  voyelle  seule,  ou  jointe  à  d'autres  lettres 
(consonnes  ou  voyelles),  qu'on  prononce  par  une  seule 
émission  de  voix.  Les  mots  d  une  seule  syllabe  sont 
dits  monosyllal^es ;  ceux  de  deux,  dissyllabes;  ceux  de 
trois,  trisyllabes;  ceux  de  plusieurs  en  général,  poly^ 
syllabes.  La  prosodie,  dans  toutes  les  langues,  reconnaît 
des  syllabes  longues  et  des  brèves. 

SYLLABIQUE  (Augment).  V.  Augment. 

SYLLEPSE,  mot  d'origine  grecque  {syllepsis,  compré- 
liension),  et  qui  s'emploie  en  Grammaire  pour  désigner 
une  figure  par  laquelle  on  fait  accorder  un  mot,  non  pa^ 
gi*ammaticalement  avec  le  mot  même  auquel  il  se  rap- 
porte, mais  logiquement  avec  l'idée  comprise  dans  ce 
mot;  comme  dans  cette  phrase  de  Bossuet  :  a  Quand  le 
peuple  Mbreu  entra  dans  la  terre  promise,  tout  v  célé- 
brait leurs  ancêtres;  »  dans  celle-ci  de  Racine  {Athalie, 
V,  2)  : 

Fntro  U  pauvre  et  tous,  Toas  prendrei  Dlen  pour  Jnge, 
Vous  sonrenant,  mon  fils,  que,  cachd  sous  ce  lin, 
Comme  eux  vous  fûtes  pauvre,  et  comme  eux  orphelin; 

dans  cette  autre  de  La  Bruyère  :  n  Les  personnes  des- 
prit ont  en  eux  les  semences  de  tous  les  sentiments.  • 
C'est  par  syllepse  que  les  verbes  se  mettent  au  pluriel 
après  les  collectifs  partitifs  suivis  d'un  nom  pluriel,  qui 
souvent  même  est  sous-entendu  :  a  La  plupart  se  lais- 
sent emporter  à  la  coutume.  »  C'est  encore  par  syllepse 
qu'on  dit  en  latin  :  Mea  unius  opéra  factum  est  tout  a 
été  fait  par  mes  seuls  soins),  phrase  où  unius  a  été  ml^ 
au  génitif  parce  que  mea  est  l'équivalent  de  met.  Ce 
genre  de  syllepse  n'est  possible  que  dans  les  langues  à 
flexion  :  aussi  est-il  commun  dans  la  langue  grecque.  P- 
SYLLOGISME  (du  grec  sullogismos.  raisonnement  1, 
argument  régulier  construit  avec  trois  termes  et  trois 
propositions  de  la  manière  et  d'après  les  règles  suivantes  : 
Toute  connaissance  se  résout  dans  un  jugement,  c-à-d. 
dans  l'affirmation  ou  dans  la  négation  d'un  attribut  par 
rapport  à  un  sujet;  de  sorte  que,  si  nous  pouvions  tou- 
jours percevoir  clairement  à  première  vue  les  rapports  de 
deux  termes  quelconques,  nous  aurions  {mu*  cela  même  la 
science  universelle.  Il  n'en  est  pas  ainsi.  On  grand 
nombre  de  rapports  nous  échappent,  et  la  plupart  de 
ceux  que  nous  pouvons  saisir  ne  sont  pas  directement 
perçus,  et  nécessitent  un  travail  de  l'esprit  analogue  à 
celui  que  nous  faisons  pour  apprécier  le  rapport  dedeui 
grandeurs,  lorsque,  ne  pouvant  pas  les  comparer  direc- 
tement, nous  les  comparons  séparément  à  une  troisième 
grandeur  (l'unité,  par  exemple),  et  concluons  leur  rap- 
port entre  elles  de  celui  que  chacune  d'elles  présente 
avec  cette  grandeur  moyenne.  Tel  est  le  mwanisme  fon* 


SYL 


1683 


SYM 


damental  du  raisonnement  déductif  ou  de  la  déduction 
(  V.  c$  rnot)^  qui  revût,  dans  le  syllogisme,  sa  forme  la 
plus  exacte  et  la  plus  rigoureuse.  Le  syllogisme  est  essen- 
tiellement composé  de  trois  termes,  les  deux  dont  on 
cherche  le  rapport  et  que  l'on  nomme  Tattribut  grand 
termêf  le  sujet  petit  terme,  et  le  moyen  terme  auquel  on 
les  compare  successivement.  Soit  le  syllogisme  suivant  : 

Tout  être  citié  est  impwrfUtt 
I«e  inonde  est  nn  être  créé  : 
Donc  le  monde  est  imparfait. 


Imparfait  est  le  grand  terme,  monde  le  petit  terme, 
créé  le  moyen  terme.  Or,  il  suffit  qu'on  sache  le  m( 


être 
qu'on  sacne  le  moyen 
terme  contenu  dans  Textension  du  grand  terme,  et  le 
petit  dans  le  moyen,  pour  que  Ton  conclue  nécessaire- 
ment que  le  petit  est  contenu  dans  le  grand.  C'est  ce  que 
certains  logiciens,  notamment  quelques  éditeurs  d'Aris- 
tote  et  plus  récemment  Ëuler,  ont  voulu  rendre  sensible 
à  l'œil,  en  figurant  les  termes  par  des  cercles.  Un  cercle 
contenu  dans  un  autre  {fig.  4  et  4^  partie  de  la  flg.  3)  re- 
présente une  proposition  affirmative  universelle;  deux 
circonférences  qui  se  coupent  {fig,  2)  représentent  dans 


Fig.  2. 


Fig.  1. 


Fig.  3. 

leur  partie  commune  l'affirmation  particulière,  et  dans 
leura  parties  séparées  la  négation  particulière;  deux 
circonférences  entièrement  extérieures  Tune  à  l'autre 
(/k/*  ^)y  1^  négation  universelle.  Nous  devons  nous  bor- 
ner à  indiquer  cette  méthode  d'exposition.  On  en  trouvera 
le  développement  et  les  applications  dans  Euler  {Lettre 
à  une  princesse  d'Allemagne^  II"  partie.  Lettres  34-37). 
En  résumé,  quels  que  soient  les  rapports  des  termes  et 
leurs  dispositions,  ces  termes  comparés  deux  à  deux  for- 
ment trois  propositions  :  celle  où  l'on  compare  le  grand 
tenne  au  moyen  terme  est  dite  majeure  {a  majore  ter- 
mino)\  celle  où  l'on  compare  le  petU  terme  au  moyen 
terme  est  dite  mineure  {a  minore  termino),  La  roi^jeure 
et  la  mineure  portent  en  commun  le  nom  de  Prémisses 
du  raisonnement;  ce  sont  les  propositions  que  Ton  met 
en  avant  {prœ-^nissœ).  Il  est  bien  entendu  qu'il  ne  suffit 
pas,  pour  qu'il  y  ait  conclusion,  qu'il  y  ait  un  rap- 
port quelconque  entre  le  moyen  terme  et  chacun  des 
extrêmes.  Ces  rapports  sont  strictement  détermina  par 
certains  principes  qui  figurent  soit  dans  les  règles  géné- 
rales du  syllogisme,  soit  dans  les  règles  particulières 
applicables  &6es  différentes  variétés  (F.  Modes  et  Figures 
DU  syllogisme).  Les  règles  générales  sont  :  1°  Le  syllo- 
gisme doit  être  compose  de  trois  termes,  le  petite  le  grand 
et  le  moyen;  2»  les  termes  de  la  conclusion  ne  peuvent 
être  pris  plus  universellement  dans  la  conclusion  que 
dans  les  prémisses;  3°  la  conclusion  ne  doit  jamais  con- 
tenir le  moyen  terme;  4»  le  moyen  ne  peut  être  pris  deux 
fois  particulièrement;  U  doit  être  pris  au  moins  une  fois 
universellement;  bo  on  ne  peut  rien  conclure  de  deux 
propositions  négatives;  6o  on  ne  peut  prouver  une  pro^ 
position  négative  par  deux  affirmatives;  7°  la  conclu- 
sion suit  toujours  la  plus  faible  partie,  c.-à-d.  que,  s'il 
y  a  une  des  deux  prémisses  qui  soit  négative,  elle  doit 
être  négative,  et,s'il  y  en  a  une  particulière^  elle  doit  être 
particuiaire ;  %^  de  deux  propositions  particulières  il  ne 
s*ensuit  rien.  «^  La  théorie  du  syllogisme  a  été  exposée 
de  la  manière  la  plus  approfondie  par  Aristote  dans  son 
traité  Du  Syllogisme  {Premiers  Analytiques),  Les  nom- 


breux travaux  et  commentaires  que  l'Antiquité,  la  Scolas- 
tique  et  la  Renaissance  ont  accumulés  sur  ce  sujet,  n'y 
ont  presque  rien  ajouté  d'important.  En  effet,  les  histo- 
riens de  la  Logique  n'ont  rien  de  plus  remarquable  à 
citer  à  cet  égard  que  l'invention  de  la  4*  figure,  soit  par 
Galien,  soit  par  Eudème  et  Théophraste,  et  les  développe- 
ments donnés  par  Boôce  à  la  théorie  du  syllogisme  hy- 
pothétique. Telle  est  d'ailleurs  l'exactitude  que  ce  sujet 
comporte  et  celle  avec  laquelle  Aristote  en  a  traité  toutes 
les  parties,  que  les  réformateurs  les  plus  hardis  et  les 
plus  hostiles,  Ramus,  Bacon,  n'ont  pas  cru  devoir  com- 
prendre le  syllogisme  dans  les  attaques  qu'ils  ont  diri- 
gées contre  la  Logique  péripatéticienne.  C'est  qu'en  effet 
le  syllogisme  est,  dans  une  sphère  encore  fort  étendue 
quoique  très-nettement  circonscrite,  l'instrument  natu- 
rel du  raisonnement  et  de  la  démonstration.  Il  ne  con- 
vient pas  de  l'employer  dans  toutes  sortes  de  sujets,  et 
d'ailleurs  il  est  facile  d'en  abuser  en  le  faisant  servir  au 
développement  de  principes  faux,  chimériques  ou  mul 
établis.  Mais  lorsqu'on  l'applique  à  des  vérités  claires  et 
certaines,  il  en  met  au  Jour  toutes  les  conséquences  avec 
une  rigueur  et  une  évidence  que  nulle  autre  méthode  ne 
comporte.  V.  Barthélémy  Saint-Hilaire,  Logique  d' Aris- 
tote, traduite  en  français  et  accompagnée  de  notes  perpé- 
tuelles {Premiers  Analytiques) ^  et  De  la  Logique  d' Aris- 
tote, Mémoire  couronné  par  l'Institut  ;  Euler,  iMtres  à 
une  princesse  d'Allemagne;  la  Logique  de  Port-Jloyal,  et 
nos  articles  Prémisses,  Conclusion,  Majeure,  Miivelue, 
Termes,  etc.  B— e. 

SYLVliS.  V.  SiLVES. 

SYMBOLE,  SYMBOLISME ,  SYMBOLIQUE,  mots  dé- 
rivés  du  grec  sj/mfco/on,  signe.  Un  Symbole  est  l'expres- 
sion figurée  d'un  objet  qui  ne  tombe  pas  sous  les  sens,  la 
forme  corporelle,  peinte  ou  sculptée,  d'une  idée.  Le  Sym- 
bolisme est  cette  langue  mystérieuse  qui,  pour  faire  par- 
venir à  notre  intelligence  certaines  idées,  frappe  nos  sens 
et  notre  imagination  au  moyen  de  signes  physiques  liés 
avec  ces  idées  par  une  connexion  intime.  On  nomme 
Symbolique,  soit  l'ensemble  des  symboles  propres  à  une 
nation,  à  une  époque,  soit  la  science  qui  cherche  à  inter- 
préter les  symboles  par  la  critique  et  l'histoire. 

SYMBOUQDE  PAÏENNE. 

I.  Symboles  muets,  —  Le  symbole  a  préexisté  aux 
époques  historiques.  Antérieur  h,  toute  institution  civile, 
son  histoire  est  celle  de  presque  toutes  les  religions;  il  a 
régné  longtemps  dans  la  jurisprudence,  et  occupé  uno 
place  importante  dans  le  domaine  des  arts  plastiques.  Les 
premiers  hommes  se  servirent,  pour  communiquer  entre 
eux,  d'une  pantomime  animée,  d'images  sensibles,  de 
représentations  figurées  :  les  objets  répandus  sur  la  sur- 
face du  globe,  animaux,  plantes,  pierres,  etc.,  furent, 
après  le  geste,  les  éléments  de  la  langue  symbolique.  Les 
premiers  instituteurs  du  genre  humain,  en  présence  du 
langage  si  pauvre  et  des  organes  si  grossiers  des  peuples 
naissants,  eurent  également  recours  à  des  images  prises 
dans  la  nature,  pour  faire  comprendre  leur  enseigne- 
ment :  ainsi ,  par  exemple,  ils  firent  de  l'œuf  le  symbole 
de  la  création,  des  forces  productrices  de  l'univers  ;  le 
serpent  qui  se  mord  le  bout  de  la  queue,  en  formant  un 
cercle,  signifia  l'éternité  de  la  vie  générale,  à  cause  de 
l'analogie  qu'on  avait  remarquée  entre  le  renouvellement 
annuel  de  la  peau  de  ce  reptile  et  celui  des  saisons.  Ils 
ne  se  contentèrent  pas  de  déposer  dans  les  objets  exis- 
tants les  vérités  qu'ils  voulaient  transmettre  ;  ils  créèrent 
d'autres  symboles  en  personnifiant  la  Divinité,  et  furent 
ainsi  les  premiers  sculpteurs.  Mais  il  y  eut  toujours  de  la 
disproportion  entre  la  forme  et  le  sens,  entre  l'expression 
et  l'idée  :  de  là,  dans  le  symbole  religieux,  ce  vague,  cette 
indécision  inhérente  à  tout  symbole,  mais  propre  à 
pénétrer  l'&me  d'une  respectueuse  terreur,  car  ce  que 
l'homme  ne  fait  que  pressentir  lui  laisse  une  impression 
plus  formidable  que  ce  qui  se  présente  ouvertement  à  ses 
yeux.  Quand  le  symbole  entreprend  de  tout  dire,  il  de- 
vient confus,  obscur,  énigmatique  ;  on  appela  mystiques 
les  symboles  de  ce  genre,  parce  qu'ils  contenaient  les 
mystères,  les  doctrines  secrètes,  et  ne  pouvaient  être 
compris  que  des  initiés.  Ce  nom  convient  surtout  aux 
figures  symboliques  de  l'Inde,  de  la  Perse  et  de  l'Égj'pte, 
à  ces  idoles  monstrueuses  et  fantastiques,  à  ces  Dieux  à 
plusieurs  tôtcs  et  à  plusieurs  bras,  surchargés  d'attributs 
dont  l'intelligence  se  fatiguait  à  deviner  ou  à  retenir  le 
sens.  L'absence  de  règle  et  de  mesure,  jointe  à  l'usage  de 
représenter  les  divinités  assises  ou  couchées,  couvertes 
de  riches  étoffes  et  d'ornements  de  toute  espèce,  urrOtii 


s  Y 11 


1GS4 


SVM 


pour  Jamais  les  nations  orientales  dans  la  route  du  beau, 
tundis  que  les  Grecs,  simplifiant  les  attributs,  renonçant 
à  exprimer  ce  qui  est  inexprimable  par  son  essence, 
adoptèrent  lo  nu ,  prirent  pour  type  la  figure  humaine, 
ci  surent  allier,  dans  les  limites  du  possible,  la  beauté  de 
la  forme  avec  la  sublimité  de  Tidée.  Des  signes  caracté- 
ristiques, soit  dans  la  forme  des  membres,  soit  dans  Tha- 
bitude  générale  du  corps,  des  différences  palpables  fon- 
dées sur  une  convention  réfléchie,  établirent  si  bien  les 
individualités  divines,  qu*à  la  fin  le  secours  de  leurs 
attributs  particuliers  n*était  plus  nécessaire  pour  les  faire 
reconnaître.  Ces  statues  symboliques,  créées  au  plus 
beau  temps  de  Tart,  ont  reçu  le  nom  de  symboles  plas- 
tiqties. 

Il  est  des  symboles  qui  se  rattachent  au  symbole  reli- 
gieux et  se  confondent  avec  lui  dans  l'usage,  bien  qu'ils 
en  diffèrent:  ce  sont  V Allégorie  et  V Emblème  (K.  ces 
mots).  L'Allégorie,  soit  muette,  soit  parlée,  renferme  un 
sens  caché  sous  une  figure  ou  un  récit  qui  exprime  une 
chose  et  en  signifie  une  autre,  tandis  que  le  Symbole  est 
ridée  même  rendue  sensible  et  personnifiée.  VEmblème 
est  une  image  dépourvue  de  tout  caractère  auguste  et 
sacré,  où  la  pensée  humaine  se  révèle  bien  plus  que  la 
pensée  divine  :  il  a  un  sens  limité  et  fini,  et  rentre  essen- 
tiellement dans  Tallégorie  ;  la  réunion  de  plusieurs  em- 
blèmes constitue  une  allégorie.  Le»  Anciens  avaient  un 
si  vif  penchant  pour  ce  mode  d'expression,  qu'ils  ne  né- 
gligeaient aucune  occasion  de  l'employer;  ils  allaient 
mênfie  quelquefois  jusqu'à  donner  an  sens  allégorique  à 
la  matière  de  leurs  ouvrages.  Suivant  Pausanias,  une 
statue  de  Vénus,  qu'on  voyait  à  Temnus  en  Éiide,  était 
faite  du  bois  d'un  myrte  femelle  ;  l'Ile  de  Naxos  possédait 
un  Bacchus  fait  d'un  cep  de  vigne.  Les  sculpteurs  choi- 
sissaient, dans  une  vue  d'allégorie,  la  couleur  des  pierres 
qu'ils  mettaient  en  œuvre,  ou  peignaient  leurs  statues  : 
celles  de  Memnon  et  du  Nil  étaient  noires,  par  allusion 
sans  doute  aux  Étliiopiens;  Saturne  était  noir  ou  bleu 
foncé;  Jupiter,  couleur  de  terre,  de  cendre  ou  de  feu; 
Mars  était  rouge;  le  Soleil  était  d'or,  et  portait  un  sceptre 
d'or;  Vénus  paraissait  avec  l'éclat  du  pourpre,  mais  le 
Jaune  et  le  blanc  lui  étaient  aussi  dédiés;  le  temple  de 
la  Lune  était  en  pierre  verte,  son  image  portée  sur  une 
vache  blanche,  et  ses  ministres,  vêtus  de  vert  ou  de 
blanc;  le  bleu  était  consacré  à  Mercure  et  à  Neptune.  On 
représentait  aussi  par  des  couleurs  allégoriques  les  quatre 
saisons  et  les  quatre  éléments.  V.  Cocleurs. 

Voici  des  symboles  antiques  d'un  autre  ordre  :  les 
l^uôpes  placées  sur  le  tombeau  d'Archiloque  représen- 
taient le  trait  acéré  de  l'iambe  ;  le  papillon  était  le  sym- 
bole de  l'àme,  et  en  même  temps  du  sommeil  (V.  Psyché 
et  Mort  —  Images  de  la)  ;  les  Herméfacles  {V.  Hermîîs) 
exprimaient  souvent  l'association  de  la  force  avec  le  génie 
d'invention.  Il  faut  aussi  ranger  parmi  les  symboles  les 
représentations  figurées  qui  désignent  sur  les  monnaies 
les  provinces,  les  villes,  et  servent  à  les  faire  reconnaître 
(1^.  Numishatiquk).  Une  autre  variété  de  symboles  con- 
sistait dans  les  signes  qui  servaient  à  la  fois  d'expression 
b.  certains  dogmes  enseignés  dans  les  Mystères  et  de 
moyens  de  reconnaissance  pour  les  initiés,  tels  que  les 
cigales  d'or  portées  par  les  Athéniens  dans  leurs  cheveux, 
ou  bien  le  triple  triangle,  formant  cinq  triangles  et  un 
pentagone,  adopté  pour  les  affiliés  à  la  doctrine  secrète 
des  Pythagoriciens.  Les  Anciens  désignèrent  enfin  sous  le 
nom  de  symboles  certains  gages  formés  des  deux  moitiés 
d'une  tablette  brisée,  que  se  donnaient  deux  personnes 
qui  contractaient  des  liens  d'hospitalité,  et  qui ,  conservés 
soigneusement,  servaient  aux  hôtes  à  se  reconnaître  par 
la  suite.  Plus  tard,  on  appela  symboles  tous  les  objets 
destinés  à  sanctionner  les  conventions,  toute  espèce  de 
gages,  tout  signe  et  môme  tout  mot  de  reconnaissance, 
tout  si;;nal  à  la  guerre. 

II.  Symboles  parlés,  —  On  entend  par  là  les  symboles 
et  les  allégories  qui  emploient  comme  moyen  d'expres- 
sion le  son  ou  la  voix,  qui  prennent  la  route  de  l'oreille 
pour  arriver  au  sens  intérieur.  A  cette  classe  appartien- 
nent le  Mythe,  V Apologue,  la  Parabole,  la  Sentence  et  !a 
Maxime.  Le  Mythe  n'est  autre  chose  qu'un  récit  plus  ou 
moins  étendu  dont  tous  les  personnages  sont  symbo- 
liques :  quand  il  se  compose  d'antiques  croyances,  de 
dogmes  religieux  et  autres,  de  leçons  et  de  préceptes  de 
morale,  il  est  théologique  ou  mystiqtte;  quand  il  renferme 
d'anciens  événements,  il  s'appelle  proprement  la  tradi- 
iion.  Le  mythe  était  rhythmé,  et  on  le  chantait  dans  les 
f<Hcs  publiques  des  Dieux  et  des  héros;  mais  peu  à  peu 
il  se  dépouilla  des  formes  roides  et  sévères  du  symbole, 
et  prit  une  forme  pbiA  douc^  dIiT  Dure  ni  plua  humaine, 


qui  s'alliait  mieux  avec  la  poésie.  Tel  est  dans  ce  sens 
VHymne  homérique  à  Cérès  :  Démètcr  est  la  fécondité 
de  la  Terre,  la  Terre  même,  comme  l'indique  son  nom , 
car  Dé  n'est  qu'une  forme  de  Gé.  Perséphonè ,  fille  de 
Zeus,  qui  est  la  pluie,  et  de  Démèter,  représente  la  vé- 
gétation qui  nait  de  la  terre  fécondée  par  les  pluies  du 
ciel  ;  elle  est,  dit  Cicéron,  la  graine  des  plantes;  on  l'ap- 
pelle le  plus  souvent  ^é,  forme  féminiàe  de  koros, 
l'abondance.  Elle  est  enlevée  par  Aidés,  l'invisible,  le 
Dieu  souterrain,  parce  que  les  graines  des  céréales  dis- 
paraissent sous  la  terre.  La  tristesse  de  sa  mère  repré- 
sente le  deuil  de  la  Terre  pendant  l'hiver,  quand  la  vé- 
gétation a  disparu.  Perséphonè  passe  un  tiers  de  l'année 
avec  son  époux,  le  reste  avec  sa  mère,  et  cette  alterna- 
tive de  mort  et  de  renaissance  l'a  fait  regarder  comme  la 
Déesse  des  morts;  son  retour  à  la  lumière  est  le  symbole 
de  l'immortalité  de  l'àme.  Les  Grecs  excellèrent  dans  ces 
récits;  leur  imagination  créatrice  s'y  donna  carrière  avec 
tant  de  charme  et  de  fécondité,  que  leur  pays  peut  passer 
pour  la  terre  natale  des  mythes.  —  V Apologue ,  dans  sa 
forme  primitive,  est  un  symbole  moral  développé:  il 
exprime,  comme  le  symbole,  une  vérité  importante,  mais 
plutôt  morale  que  profonde  ou  sublime,  et  prend  égale- 
ment ses  images  dans  le  monde  matériel;  il  s'inspire 
des  habitudes  constantes  des  plantes,  des  lois  invariables 
de  l'instinct  chez  les  animaux,  c.-à-d.  de  l'immuable  na- 
ture. C'est  pour  ses  enseignements  faciles  à  comprendre 
qu'il  était  quelquefois  admis  dans  les  harangues  popu- 
laires, d'où  le  mythe  était  exclu.  L'apologue  existe  chez 
tous  les  peuples  de  l'ancien  monde  qui  atteignirent  un 
certain  degré  de  civilisation  :  chaque  contrée  chercha 
dans  les  races  d'animaux,  dans  les  familles  de  plantes 
qui  lui  étaient  propres,  les  emblèmes  naturels  des  ac- 
tions et  de  la  conduite  de  l'homme.  —  La  Parabole,  cet 
apologue  des  chrétiens,  qu'ils  se  sont  approprié  par  la 
supériorité  de  celles  qu'inventa  Jésus-Christ,  fiction  chère 
dans  tons  les  temps  aux  nations  orientales,  au  lieu  de 
chercher  la  forme  de  ses  enseignements  dans  la  nature 
végétale  et  dans  le  règne  animal,  prend  une  situation  de 
la  vie  humaine,  qu'elle  imagine  à  plaisir,  pour  offrir  au 
peuple  une  leçon  vivante.  A  ce  titre  elle  figure  dans  la 
Symbolique  religieuse.  —  La  Sentence  et  la  Maxime  s'y 
rattachent  également  lorsqu'elles  s'enveloppent  d'une 
forme  allégorique,  comme  celles  dont  se  servaient  quel- 
ques Sages  de  la  Grèce,  et  particulièrement  la  secte  des 
Pythagoriciens,  pour  communiquer  aux  initiés  les  vérités 
pratiques  ou  religieuses  et  les  aécouvertes  de  la  philoso- 
phie spéculative.  Les  symboles  de  Pythagore,  au  nombre 
de  75,  avaient  un  sens  propre  et  littéral ,  et  un  sens  sym- 
bolique, sur  lequel  les  interprètes  ne  sont  pas  toujours 
d'accord.  Ainsi  :  «  Ne  t'assieds  point  sur  le  boisseau  », 
signifiait,  selon  Porphyre  :  «  Ne  vis  point  inactif  »,  et, 
selon  Jambliqoe  :  «  Ne  transporte  point  les  soins  de  la 
vie  animale  dans  le  domaine  de  l'esprit;  vis  plutôt  pour 
l'àme  et  pour  la  méditation  que  pour  le  corps  et  ce  qui  s*y 
rapporte.  »  —  Les  sentences  des  prophètes  hébreux,  les 
oracles  des  sibylles,  sont  aussi  des  symboles  parlés.  II 
faut  encore  donner  ce  nom  aux  nombreuses  applications 
symboliques  que  recevaient  la  musique  et  le  chant,  par- 
ticulièrement dans  le  culte  secret,  chez  les  Grecs,  les  In- 
diens et  les  Égyptiens.  V,  Noiib. 

STUDOUQDE    CHRéTIBNNB. 

Les  mots  Symbole  et  Allégorie  passèrent  du  paganisme 
dans  le  christianisme,  mais  avec  un  caractère  différent 
et  un  sens  tout  spiritualiste.  Les  premiers  chrétiens,  pour 
entrer  dans  la  voie  du  symtK)le,  n'eurent  qu'à  imiter 
leur  divin  maître,  qui  leur  avait  donné  l'exemple  par  ses 
paroles  dans  ses  enseignements  allégoriques,  et  par  ses 
actes  dans  l'institution  du  Baptême  et  de  la  Cène.  U 
religion  mosaïque  avait  eu,  d'ailleurs,  son  Symbolisme: 
ainsi,  le  Tabernacle  représentait  la  résidence  de  Jéhovah 
au  milieu  des  Hébreux  ;  la  circoncision  était  le  symbole 
de  l'élection  du  peuple  juif;  le  sabbat  rappelait  aux  Hé- 
breux le  repos  de  Dieu  après  la  création  ;  la  Pàque  et  ses 
rites  perpétuaient  le  souvenir  des  miracles  qui  accom- 
pagnèrent la  sortie  d'Egypte,  et  la  fête  des  Tabernacles 
celui  du  séjour  dans  le  désert ,  etc.  Les  12  pierres  pré- 
cieuses qui  ornaient  le  rational  du  grand  prêtre  avaient 
un  sens  syinl)olique.  Les  chrétiens  symbolisèrent  de 
bonne  heure  leurs  principales  doctrines.  La  Résurrec- 
tion fut  représentée  dans  le  phénix  sortant  immortel 
de  ses  cendres;  le  Sacrement  de  l'Eucharistie,  par  le 
raisin  et  l'épi  de  blé,  ou  bien  par  uo  agneau  blessé, 
dont  le  sang,  coulant  du  cœur  o».  ji^  pieds,  tombait  dam 


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ICSj 


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an  calice.  L'Église  était  désignée  par  TArche,  et  par  le 
vaisseau  sur  lequel  le  Seigneur  s*est  endormi  ;  la  pu- 
reté et  l'innocence  du  chrétien,  par  la  colombe,  la- 
quelle représentait  encore  les  &mes  de  ceux  qui  avaient 
souffert  pour  la  vérité.  Plus  tard,  la  colombe  figura  le 
S<-Esprit ,  qui  prit  cette  forme  pour  descendre  sur  la  tète 
de  Jésus  au  moment  où  S^  Jean  le  baptisa  dans  les  eaux 
du  Jourdain.  Les  Catacombes  romaines  sont  remplies  de 
peintures  et  de  sculptures  allégoriques,  dont  les  sujets 
ont  été  empruntés  à  TAncien  et  au  Nouveau  Testament. 
Ainsi ,  Noé  dans  T Arche,  sur  les  eaux  déchaînées,  signifie 
la  foi  sûre  de  son  avenir  au  milieu  des  persécutions;  Job 
sur  le  fumier  prêche  la  patience  ;  Daniel  parmi  les  lions 
est  rhomme  de  désirs  domptant  par  la  prière  les  puis- 
sances du  mal:  Élie,  enlevé  sur  un  char  de  feu,  annonce 
le  triomphe  des  martyrs;  la  multiplication  des  pains, 
c'est  la  propagation  de  la  parole  sainte;  la  guérison  des 
paralytiques  et  des  aveugles  prophétise  la  renaissance 
morale  et  intellectuelle  de  Tunivers.  Les  chrétiens  des 
trois  premiers  siècles  avaient  aussi,  pour  se  reconnaître 
entre  eux,  certains  signes,  tels  que  le  signe  de  la  croix,  la 
récitation  de  la  profession  de  foi  des  Apôtres  ou  le  Credo, 
enfin  des  anneaux  sur  lesquels  était  représenté  un  pois- 
son (  V.  ce  mot).  —  Depuis  Constantin  le  Grand,  TÉglise, 
libre  et  triomphante,  multiplia  ses  symboles.  Les  plus 
beaux  spécimens  du  Symbolisme  catholique  sont  encore 
vivants  aujourd'hui,  et  nous  sont  offerts  par  l'architec- 
ture, la  sculpture  et  la  liturgie. 

I.  Architecture,  —  Le  Symbolisme  se  montre  dans  la 
construction  matérielle  des  églises  :  elles  ont  la  forme  du 
vaisseau  de  S*-Pierre,  d*où  le  mot  nef  (dn  latin  navis) 
appliqué  à  leur  allée  principale.  Cette  allégorie  du  vais- 
seau représente  la  condition  de  l'Église  militante,  pour- 
suivant jusqu'à  la  fin  des  temps  sa  navigation  laborieuse, 
et  ballottée  par  les  tempêtes  du  schisme,  de  l'hérésie  et  de 
l'incrédulité.  «  Une  église,  disent  les  Constitutions  apo- 
stoliques, doit  être  de  forme  oblongue,  et  tournée  vers 
rOrient.  »  La  forme  oblongue  était  regardée  comme  le 
symbole  d*un  vaisseau  ou  de  l'Arche  qui  doit  nous  sauver 
d'un  monde  orageux;  la  coutume  de  prier  en  se  tournant 
vers  l'Orient  était  presque  universelle  dans  l'Église  primi- 
tive (  V.  Orientation  ).  —  Le  plan  général  de  l'église  doit 
avoir  la  forme  d'une  croix,  afin  de  rappeler  l'instrument 
de  la  rédemption,  laquelle  a  encore  inspiré  l'idée  de  la 
déviation  de  l'axe  longitudinal  à  partir  de  la  naissance  du 
chœur  Jusqu'au  fond  de  l'abside  (F.  Axe).  —  On  a  donné 
quelquefois  un  sens  mystique  aux  diverses  parties  d'une 
^lise  :  ainsi,  les  murailles  désignent  les  Juifs  et  les 
païens  qui  accouraient  des  quatre  coins  du  monde  vers 
le  Christ;  la  chaux  est  le  symbole  d'un  brûlant  amour; 
les  tours  sont  les  prédicateurs  et  les  prélats,  forteresses 
de  l'Église,  etc.  —  La  doctrine  de  la  Trinité  est  proR)n- 
dément  tracée  dans  la  structure  des  églises  :  à  1  époque 
romane,  elle  est  figurée  par  la  nef  et  les  deux  bas  côtés, 
par  la  triple  division  de  la  nef,  du  chœur  et  du  sanc- 
tuaire, ou  par  la  tour  centrale,  le  chœur  et  la  nef,  enfin 
par  le  triple  arceau  du  chœur.  Le  nombre  trois  domine 
non-seulement  dans  le  plan  général,  mais  encore  dans 
chacune  des  parties,  comme  en  font  foi  la  triplicité  des 
arcades,  le  triple  arrangement  des  moulures,  les  trois 
fenêtres  percées  dans  la  muraille  orientale,  les  marches 
de  l'autel  qui  vont  trois  par  trois  ou  quelque  multiple  de 
trois,  le  tnplet  ou  groupe  de  trois  fenêtres  accolées,  les 
fenêtres  on  forme  de  triangle  éauilatéral ,  les  trois  portes 
d'entrée  de  la  façade  principale,  les  trois  tours  des  grandes 
églises,  etc.  Pour  le  symbolisme  des  nombres,  K.  Nom- 
bres SACRfe,  dans  notre  Dictionnaire  d»  Biographie  et 
d*Histoxre,  —  La  doctrine  de  la  Régénération  est  repré- 
sentée par  les  baptistères  et  les  fonts,  ordinairement 
1>lacés  à  l'entrée,  car  nous  n'entrons  dans  l'Église  que  par 
a  régénération  ;  ils  sont  de  pierre,  parce  que  Jésus-Christ 
est  la  pierre  ;  le  couvercle,  terminé  en  flèche,  nous  avertit 
qu'aprte  être  sortis  des  eaux  purifiantes,  nous  devons 
rechercher  les  choses  d'en  haut.  La  plupart  ont  la  forme 
octon>ne;  la  création  s'étant  accomplie  en  sept  Jours,  le 
nomore  huit  se  prend  pour  indiquer  la  nouvelle  création 
ou  la  régénération.  —  Le  JuM,  qui  sépare  le  chœur 
d'avec  la  nef,  le  clergé  d'avec  les  laïques,  exprime  sym- 
boliquement la  division  entre  l'Église  militante  et  l'Église 
triomphante,  c-àrd.  la  mort  des  fidèles.  Cette  pensa  se 
montre  dans  la  croix  qui  le  surmonte,  dans  l'image  de 
Celui  qui  a  vaincu  la  mort.  Les  saints  et  les  martyrs  ap- 
paraissent dans  les  panneaux  inférieurs  comme  nos  mo- 
dèles dans  la  foi  et  la  patience;  dans  les  couleurs  <}ui 
brillent  à  la  clôture  même,  le  rouge  cramoisi  dépeint 
leurs  tourments,  l'or  leurs  victoires.  Les  sculotures  à 


Jour  sont  l'emblème  du  voile  qui  cache  eneore  à  l'Église 
militante  la  vue  des  choses  célestes  ;  à  travers  on  aper- 
çoit le  sanctuaire  lointain ,  les  stalles  massives  qui  re- 
présentent le  repos  éternel  du  ciel ,  la  piscine  qui  rap- 
{^elle  que  les  élus  ont  lavé  leur  robe  dans  le  sang  de 
'Agneau ,  et  en  dernier  lieu  l'autel ,  figurant  avec  ses 
cierges  allumés  et  ses  sculptures  dorées  la  tête  glorieuse 
du  Christ ,  de  même  que  la  nef  et  ses  transepts  en  rap- 
pellent le  corps  et  les  bras  étendus. 

n.  Sculpture,  —  Les  animaux  tiennent  une  grande 
place  dans  la  Symbolique  chrétienne,  et  ils  apparaissent 
sur  les  monuments  avec  les  mêmes  caractères,  les  mêmes 
attributs  que  dans  les  légendes  et  dans  les  écrits  des 
mystiques,  non  plus  comme  une  conception  incohérente 
de  la  fantaisie  individuelle,  mais  comme  l'expression  ré- 
fléchie de  la  tradition  générale.  Tout  en  adoptant  la  plu- 
part des  représentations  matérielles  de  l'Antiquité,  l'art 
en  change  la  signification,  et  leur  fait  parler  une  langue 
nouvelle.  Ainsi ,  le  cerf,  qui ,  d'après  les  écrivains  païens, 
se  rajeunit  en  mangeant  des  serpents,  devient  l'em- 
blème du  Christ,  qui  régénère  le  monde  en  écrasant  le 
tentateur.  La  colombe,  spiritualisée,  n'est  plus  l'oiseau 
sensuel  qui  traînait  le  char  de  Vénus  :  altérée,  comme  les 
chrétiens,  de  ce  breuvage  divin  que  le  Sauveur  a  versé 
aux  hommes,  elle  est  représentée,  sur  les  sarcophages  des 
Catacombes,  becquetant  des  raisins  et  buvant  dans  une 
coupe  ;  ou  bien ,  les  ailes  étendues,  elle  porte  dans  son 
bec  le  rameau  d'olivier,  gage  de  la  réconciliation  et  de  la 
nouvelle  alliance.  Le  cerf,  altéré,  comme  la  colombe,  de 
la  parole  divine,  boit  duis  les  eaux  du  Jourdain,  le  fleuve 
du  baptême.  Le  serpent,  indice  de  salut  pour  les  Grecs, 
qui  l'attribuaient  au  dieu  de  la  médecine,  et  pour  les 
Hébreux,  auxquels  il  rappelait  la  figure  d'airain  élevée 
dans  le  désert,  devint  l'image  de  l'esprit  du  mal,  et  fut 
représenté  vaincu  au  pied  de  la  croix  ,  puis  foulé  par  la 
Vierge  immaculée.  La  sirène,  en  qui  s'unissent  les  deux 
natures  humaine  et  animale,  représente,  par  sa  portion 
supérieure,  l'excellence  de  l'&me,  et ,  par  sa  portion  in- 
férieure, la  subordination  du  corps.  L'ancienne  chouette 
de  Minerve  est  devenue  le  symbole  de  ceux  qui  voient 
dans  les  ténèbres,  c.-à-d.  qui  sont  sages  et  habiles  dans 
les  choses  de  la  terre,  mais  dont  les  regards  ne  peuvent 
contempler  les  choses  du  ciel.  Le  lion,  image  de  la  force 
brutale,  fut  placé  hors  des  églises  avec  un  agneau  ou  un 
enfant  dans  la  gueule  ;  ou  bien  il  est  un  indice  de  force 
morale,  et  soutient  la  chaire  épiscopale,  le  cierge  pascal 
ou  des  colonnes.  L'agneau  seul,  avec  la  croix,  indique 
le  Sauveur;  combiné  avec  l'image  du  Bon  Pasteur,  il 
exprime  la  communauté  des  fidèles.  Le  coq,  en  compagnie 
de  S^  Pierre,  c'est  la  vigilance;  avec  la  palme,  c'est  le 
triomphe  des  chrétiens  sur  le  démon ,  des  martvrs  sur 
la  cruauté  des  bourreaux  païens.  Le  dauphin  est  le  sym- 
bole du  trajet  des  &mes  vers  une  rive  hospitalière;  le 
pélican ,  celui  de  la  charité.  Le  cheval ,  palmé  comme 
le  coq,  c'est  le  fidèle  qui  a  combattu  vaillamment.  L'an- 
tilope est  la  figure  du  chrétien;  ses  deux  cornes  sont 
l'emblème  de  la  connaissance  des  deux  Testaments , 
c-à-d.  de  la  Loi  ancienne  et  de  la  Loi  nouvelle,  qui 
sont  l'armure  de  son  &me.  —  Mais  si ,  dans  les  premiers 
temps,  le  sens  symbolique  est  transparent,  il  s'obscurcit 
et  se  complique  en  avançant  à  travers  le  moyen  &ge. 
S'éloignant  des  types  ofierts  par  la  nature,  les  artistes 
évoquent  dans  leurs  rêves  des  dragons  à  sept  tètes  et  à 
dix  cornes,  des  léopards  avec  des  pieds  d'ours  et  des 
gueules  de  lion,  des  sauterelles  avec  des  visages  d'homme 
et  des  queues  de  scorpion.  Sur  la  cathédrale  de  Stras- 
bourg, les  Évangélistes  sont  représentés  portant ,  an  lieu 
de  leur  tète  d'homme,  celle  de  l'animal  qu'on  leur  donne 
pour  attribut.  A  cette  époque,  tous  les  êtres  du  monde 
réel  et  du  monde  de  la  vision  se  montrent  dans  les 
églises.  De  même  que  dans  les  écrivains  ecclésiastiques 
les  hommes  sont  toujours  partagés  en  deux  classes,  les 
élus  et  les  réprouvés,  de  même,  dans  la  Symbolique,  les 
animaux  peuvent  se  diviser  en  deux  catégories  expri- 
mant, l'une  l'idée  du  bien,  de  la  vertu,  de  la  pureté, 
l'autre  l'idée  du  vice,  de  la  dégradation,  de  l'impiété  :  les 
premiers  forment  le  cortège  du  Christ  et  des  Saints,  les 
seconds  le  cortéjse  de  Satan,  des  infidèles  et  des  impies. 
Les  représeiitations  de  Satan  sont  tré»-variées  :  on  lo 
trouve  tantôt  sous  la  forme  d'un  aspic,  d'un  loup,  d'une 
couleuvre,  d'un  àne,  d'un  hibou,  d'un  crapaud,  d'un  cor- 
beau, d'un  bouc,  tantôt  unissant  le  type  dégénéra  de 
l'homme  au  type  des  bêtes  dont  il  a  les  grossiers  in- 
stincts. Représenté  par  le  bouc  ou  le  pourceau,  il  per^^on* 
nifie  la  gourmandise,  la  luxure,  tous  les  plaisirs  sensuels, 
et  c'est  pour  cela  qu'on  le  plaçait  auprès  de  S^  Antoine, 


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qui  aralt  rainca  tant  et  de  si  pressantes  tentations.  Le 
loup  et  l'ours,  à  cause  de  leurs  instincts  féroces,  parais- 
sent aussi  dans  les  sculptures  comme  des  emblèmes  se- 
condaires du  Diable.  Il  en  est  de  même  des  gargouilles  et 
de  tous  les  êtres  bizarres  qui  forment  un  contraste  frap- 
pant avec  les  Anges  et  les  Saints.  La  sirène  dévorant  un 
poisson,  c*est  le  démon  faisant  sa  proie  du  pécheur;  le 
dragon  aux  pieds  des  Saints,  c'est  le  démon  vaincu  ou 
ridol&trie  terrassée  {V.  Diable).  —  Les  vices  et  les  pas- 
sions sont,  comme  le  Diable,  symbolisés  par  des  ani- 
maux. Pris  en  général ,  on  les  a  figurés  par  des  rats, 
parce  qu'ils  rongent  celui  qui  leur  donne  asile  en  son 
cœur.  L'orgueil  est  désigné  par  le  cygne,  dont  le  plumage 
blanc  recouvre  une  peau  noire;  l'hypocrisie,  par  Tau- 
truche,  que  ses  larges  ailes  semblent  devoir  porter  au 
ciel,  et  que  ses  lourdes  pattes  retiennent  sur  la  terre;  le 
scandale,  par  le  dragon  à  la  tête  de  femme  et  aux  pieds 
de  cheval  ;  la  rapacité  et  l'injustice,  par  le  griffon  ;  la 
prudence  dans  le  mal,  par  le  hibou,  etc.  Après  avoir 
montré  par  des  images  sensibles  le  vice  et  le  péché,  l'art 
exprimait  encore  par  des  images  nouvelles  la  rémunéra- 
tion des  œuvres  et  les  châtiments.  La  croyance  générale, 
qui  faisait  de  certains  animaux  les  bourreaux  des  dam- 
nés ,  lui  a  fourni  de  nombreuses  inspirations  :  dans 
l'église  S'-Sauveur  à  Dinan ,  un  homme  à  cornes  de  bœuf 
est  écartelé  par  des  crocodiles  fantastiques;  sur  un  cha- 
piteau de  S^-Trophime  d'Arles,  on  voit  des  réprouvés 
dévorés  par  des  lions  ;  sur  la  façade  méridionale  de  la  ca- 
tliédrale  de  Chartres,  des  démons  poussent  les  damnés  à 
coups  de  fourche  dans  cette  large  gueule  de  dragon  qui , 
sur  les  thé&tres  du  moyen  âge,  représentait  rentrée  de 
TE n fer.  V.  Animaux  syiiboliques. 

III.  Liturgie.  —  Le  Symbolisme  de  la  liturgie  catho- 
lique ne  le  cède  en  rien  h  celui  de  l'architecture  et  de  la 
sculpture.  L^  premières  cérémonies  dont  une  église  est 
témoin  sont  la  Dédicacé  {V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
ie  Biographie  et  d'Histoire) ,  puis  la  consécration  de  l'au- 
tel. L'évêque  seul  peut  dédier  les  églises  et  les  autels, 
parce  qu'il  est  l'image  et  le  type  de  l'évêque  par  excel- 
lence, qui  est  J.-C.  Ces  cérémonies,  éminemment  symbo- 
liques dans  leurs  nombreux  détails ,  étant  achevées,  le 
saint  sacrifice  commence.  Vlntrùït  de  la  messe  signifie 
rentrée  du  fils  de  Dieu  en  ce  monde,  la  conversion  des 
peuples  qui  furent  introduits  à  une  vie  nouvelle.  La  Col- 
lecte que  dit  l'ofQciant  en  tenant  ses  bras  ouverts  depuis 
le  coude  et  sans  dépasser  l'épaule,  c'est  le  symbole  des 
âmes  qui  s'élèvent  vers  Dieu.  UÊpttre  aui  se  lit  sur  le 
pupitre  symbolise  la  limite  qui  sépare  la  Synagogue  et 
l'Église,  l'Ancien  et  le  Nouveau  Testament,  la  supériorité 
de  la  loi  chrétienne  sur  la  loi  figurative  des  Hébreux, 
la  promulgation  de  l'Évangile.  La  Préface  est  un  avertis- 
sement symbolique  donné  aux  assistants  sur  le  grand  acte 
qui  va  s'accomplir.  Le  Sanctus,  répété  trois  fois,  signifie 
l'unité  de  Dieu  dans  la  Trinité.  ÏÀ  prêtre  qui,  en  célé- 
brant la  messe,  va  du  milieu  de  l'autel  au  côté  droit , 
exprime  le  passage  de  Jésus-Christ  de  la  Passion  à  la  gloire 
de  sa  Résurrection  ;  (juand  il  va  de  la  droite  à  la  gauche, 
il  rappelle  sa  vie  pénible  et  terrestre  ;  lorsqu'il  se  tourne 
vers  l'Orient,  c'est  encore  pour  rappeler  que  c'est  là  que 
le  Sauveur  a  fait  succéder  la  lumière  aux  ténèbres.  Ven- 
eens  brûlé  avec  profusion  sur  l'autel ,  c'est  la  multitude 
des  prières  qui  s'élèvent  continuellement  vers  le  ciel. 
Le  calice,  c'est  le  symbole  du  sacrifice  universel,  la 
coupe  de  la  vie  céleste.  Le  pain  bénit  qu'on  distribue 
pendant  la  grand'messe  est  un  symbole  de  la  foi  com- 
mune des  chrétiens,  et  de  l'étroite  union  qui  doit  régner 
entre  eux.  Le  saint  sacrement,  le  ciboire,  la  patène,  les 
corporaux,  les  burettes,  sont  autant  de  signes  représen- 
tatifs d'idées  spirituelles  analogues  à  leur  respective  des- 
tination. Il  en  est  de  même  de  l'aube,  de  la  chasuble, 
du  surplis,  de  l'amict,  de  la  chape,  du  manipule  ou  fa- 
non, de  l'étole,  de  la  ceinture,  de  la  dalmatique,  de  la 
mitre  des  évoques,  du  camail,  de  la  croix  pectorale,  de 
la  crosse,  de  l'anneau  épiscopal ,  des  gants,  et,  en  géné- 
ral, des  vêtements  et  ornements  sacerdotaux.  Ce  symbo- 
lisme existe  encore  pour  tous  les  meubles  et  ustensiles 
servant  au  cérémonial  du  culte,  tels  que  l'encensoir,  les 
chandeliers,  le  cierge  pascal ,  les  cierges  ordinaires  allu- 
més en  plein  Jour,  le  dais,  le  baldaquin,  le  siège  élevé 
des  évêques,  le  bénitier,  le  chrême,  l'etiu,  le  sel,  le 
goupillon ,  le  gonfanon  ou  bannière,  les  cloches,  etc. 

SYMBOUQCB  DU  DROIT. 

Le  Droit ,  dans  ses  manifestations  extérieures ,  nVi  pas 
toujours  exclusivement  revêtu  ia  forme  do  la  parole  ou 


[  de  récriture  :  les  premiers  préceptes  de  morale,  qui  étaient 
le  Droit  des  hommes  primitifs ,  furent,  pour  6&e  mieux 
compris,  donnés  sous  une  forme  symbolique.  Le  symbole 
Juridique  a  donc  son  origine  dans  les  mêmes  causes  qui 
ont  produit  le  symbole  religieux.  Dans  sa  signification  la 
plus  élevée,  il  est  une  véritable  émanation  du  ciel,  signe 
soudain,  imprévu,  qui  avertit  l'homme  de  son  droit,  qui 
règle  une  détermination ,  ou  qui  fixe  la  solution  d'une 
difficulté  judiciaire.  Mais  ordinairement  il  est  pris  dans 
une  acception  inférieure;  c'est  un  signe  qui  a  pour  objet 
de  représenter  d'une  manière  fictive,  soit  une  chose  pliy- 
siaue  ou  abstraite  appartenant  au  monde  de  la  vie  usuelle, 
soit  un  acte  ou  une  personne.  Le  symbole  Juridiaue  a 
aussi  ses  formes  diverses,  qui  sont  le  mythe,  V  emblème  y 
la  marque  ou  étiquette,  la  formule,  la  ftction  de  droit. 
Le  mythe  est  une  légende  ou  croyance  populaire  qui  ra- 
conte et  conserve,  sous  une  forme  métaphorique,  un 
ancien  usage,  un  ancien  fait  Juridique.  L'institution  de 
la  propriété,  en  tant  qu'idée  abstraite,  est  figurée  dans 
le  mythe  de  Cérès.  Mais  cette  institution  amène  la  divi- 
sion du  sol,  sa  mensuration,  ses  limites,  éléments  néces- 
saires de  l'idée  concrète  de  la  propriété  :  de  là  le  dieu 
Terme,  pour  représenter  le  principe  pratique  de  l'insti- 
tution. L'idée  générale  de  la  justice  répressive  respire 
dans  les  mythes  de  Némésis  et  des  Euménides,  ces 
vengeresses  du  crime.  — Vemblème  àésigae  ^  dans  le 
Droit,  une  image  ou  représentadon  allégorique  souvent 
accompagnée  d'une  légende  ou  devise,  et  se  rattache  h 
l'art  héraldique,  qui  lui-même  fait  partie  du  domaine 
Judiciaire,  comme  science  des  signes  distinctifs  des  Étatii. 
et  des  villes,  et  comme  explication  des  marques  hérédi- 
taires des  familles.  —  La  marque  ou  étiquette  que  le» 
fabricants  appliquent  sur  leurs  produits  pour  en  prévenir 
la  contrefaçon  est  un  signe  symbolique  de  propriété.  — 
La  formule  Juridique  n'a  de  rapport  avec  le  symbole  que 
quand  elle  s'enveloppe  dans  l'obscurité  et  l'équivoque. 
Telle  est  cette  terrible  formule  des  Romains  :  ïgnis  et 
aquœ  interdictio ,  véritable  mise  hors  la  loi  du  citoyen 
qui  l'avait  encourue,  et  qui  signifiait  l'absence  de  toute 
protection  du  Droit  civil  figuré  par  l'eau,  du  Droit  divin 
figuré  par  le  feu.  Les  formules  d'excommunication  :  Sacer 
esto,  diris  devotus,  sont  également  symboliques.  Il  en  est 
de  même  de  cette  formule  du  moyen  ftge  :  Wargus  sit , 
wargus  habeatur,  appliquée  à  celui  qui ,  banni  et  chassé 
de  son  pays,  pouvait  être  tué  impunément  comme  un 
loup,  s'il  y  rentrait  sans  autorisation.  —  C'est  par  le  fond 
et  non  par  la  forme  que  la  /letton  de  Droit,  comme  image 
de  la  vérité,  prend  les  caractères  du  symbole.  Elle  inter- 
vient entre  deux  faits  pour  les  lier  ensemble,  en  procla- 
mant ce  qui  doit  être,  et  en  donnant  à  une  supposition 
l'autorité  et  la  force  de  la  vérité.  C'est  ainsi  qu'elle  de- 
vient emblématique,  parce  qu'elle  est  chargée  de  repré- 
senter le  vrai ,  plutôt  qu'elle  ne  le  manifeste  en  réaliu' . 
La  règle  qui  décide  que  la  chose  Jugée  est  une  vérité , 
celle  qui  veut  que  les  lois  soient  connues  do  tous  aprùs 
leur  promulgation  officielle,  le  principe  d'après  lequel  nul 
n'est  censé  ignorer  la  loi,  sont  des  fictions  de  ce  qui  doit 
,.être,  bien  plutôt  que  l'expression  de  ce  qui  est. 

Les  symooles  Juridiques  proprement  dits  peuvent  se 
diviser  en  symboles  naturels  et  en  symboles  artificiels. 

I.  Symboles  naturels,  —  Ils  sont  fournis  par  la  nature 
inorganique  (la  terre  et  ses  productions,  le  feu,  l'eau), 
par  la  nature  vivante  (les  bêtes) ,  par  la  nature  vivante 
et  pensante  (l'homme).  Une  motte  de  terre,  une  glèbe, 
pendant  le  moyen  âge,  figure  un  champ.  Vherbe  et  legason 
ont  le  même  sens  symbolique.  Dans  le  Grand  coutumier 
de  France,  on  trouve  :  mettre  le  gazon  de  Vhéritage  en  sa 
main,  pour  signifier  la  saisie  et  le  séquestre  d'un  héritage 
rural.  L'herbe  représente  quelquefois  une  forêU^La  paille 
fut  employée  partout  dans  le  moyen  âge  pour  rinvestiture 
d'un  champ,  d'une  prairie,  d'un  verger,  d'une  maison,  etc. 
Elle  servit  aussi  dans  les  cérémonies  de  l'hommage,  dans 
le  délaissement  d'un  duché;  elle  figura  dans  la  déposi- 
tion du  roi  Charles  le  Simple.  Cest  par  le  symbole  de  la 
f>aille,  du  chaume  qui  couvre  les  maisons,  que  Guillaume 
e  Conquérant  se  saisit  de  l'Angleterre  au  moment  de  sou 
débarquement.  Au  lieu  de  briser  la  paille,  dont  chaque 
contractant  conservait  une  partie  comme  gage  d'une  pro* 
messe  antérieure,  on  l'Insérait  souvent  dans  le  diplôme, 
dans  la  charte;  on  l'y  fixait,  on  l'y  attachait,  afin  de 
donner  à  l'acte  écrit  un  plus  haut  caractère  d'authenti- 
cité. —  Le  rameau  ou  la  branche  d'arbre  est  un  symbole 
très-usité  dans  tous  les  temps.  Tantôt  11  est  enfoncé  dans 
la  motte  de  terre  ou  de  gazon,  pour  indiquer  qu'on  trans- 
porte non-seulement  le  sol ,  mais  encore  tout  ce  qui  le 
couvre  et  ce  qui  en  fait  partie,  y  compris  les  colons  et 


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tes  serfs  ;  tantôt  cl  le  plus  souvent  il  e$t  seu'I ,  et  néan- 
moins il  est  tout  aussi  bien  IMmage  de  la  propriété  fon- 
cière. La  rupture  d'un  rameau  était,  chez  les  Romains, 
un  mode  d'interruption  de  la  prescription  des  biens  ruraux. 
Cette  voie  de  fait  est  encore  usitée  en  France,  notamment 
en  Normandie,  comme  symbole  de  prise  de  possession. 
—  Les  (leurs  et  les  fruits  jouent  un  rôle  symbolique,  chei 
la  plupart  des  peuples ,  dans  les  cérémonies  juridiques 
du  mariage.  On  connaît  le  sent  de  la  couronne  et  du 
bouquet  d*oranger.  Mais ,  en  Russie,  la  couronne  blanche 
n'est  pas  seulement  le  signe  de  la  piflreté  de  la  jeune 
épousée,  elle  est  encore  un  symbole  de  liberté;  car  il  n*y 
a  que  la  flUe  libre  ou  affranchie  qui  puisse  en  orner  son 
front  le  jour  de  son  mariage  ;  la  fille  serve  ne  peut  porter 
qu'un  bandeau  de  laine.  Les  fruits  (noix,  figues,  graines, 
blé,  amandes,  noisettes  )  sont  un  symbole  de  fécondité  et 
d'abondance. — Le  feu,  dans  les  idées  de  tous  les  peuples, 
est  considéré,  au  point  de  vue  cosmogonique  et  religieux, 
comme  un  principe  fécondant  et  générateur;  au  point  de 
vue  juridique,  comme  image  de  la  propriété  :  car  il  n'y  a 
de  propriété  que  par  la  culture,  le  défrichement,  que  le 
feu  seul  a  rendu  possible.  A  ces  idées  se  rattache  le  feu 
allumé  par  l'acquéreur,  en  signe  de  prise  de  possession 
sur  la  propriété  récemment  acquise.  11  y  avait  une  for- 
malité véritablement  obligatoire  dans  ces  bouchons  de 
paille  placés  sur  un  fonds  de  terre  destiné  &  être  vendu 
par  autorité  de  justice  :  pour  consommer  légalement  la 
prise  de  possession,  on  mettait  le  feu  à  ces  bouchons  de 
paille,  après  que  la  vente  avait  été  adjugée;  c'est  de  là 
qu'est  venu  le  nom  de  la  saisie-brandon,  dont  parle  notre 
Code  de  Procédure  civile.  Symbole  de  la  propriété,  le  feu 
est  aussi  nécessairement  le  symbole  de  la  famille  ;  car 
avec  la  propriété  s'est  créée  la  famille,  et  ces  deux  insti- 
tutions son  indissolublement  unies  l'une  à  l'autre.  Les 
Grecs,  en  effet,  comptaient  par  feux  ou  fwnées  les  fa- 
milles nombreuses  composées  de  parents  ou  alliés;  chez 
les  Romains  et  pendant  le  moyen  &ge,  feu  était  synonyme 
de  famille  et  de  maison;  le  même  mot  sert  encore  chez 
nous  aujourd'hui  à  désigner,  dans  le  langage  légal ,  un 
ménage  ou  un  chef  de  famille.  —  L'eau  figure  rarement 
dans  les  usages  juridiques.  Ce  sont  les  peuples  de  l'Orient 
qui  la  font  intervenir  le  plus  fréquemment.  L'eau  répan- 
due sur  la  teiTe,  recueillie  dans  la  main  par  l'acquéreur 
ou  le  donataire,  et  bue  par  lui,  est.  chez  les  Indiens,  un 
mode  d'aliénation  d'un  fonds  ;  en  buvant  cette  eau,  l'ac- 
quéreur fait  acte  de  propriétaire,  il  s'assimile  et  s'appro- 
prie la  chose.  La  terre  et  l'eau  que  demandaient  Darius 
et  Xerxès  aux  Athéniens  étaient  le  symbole  de  la  domi- 
nation. C'est  encore  en  vertu  de  l'eau  puisée  dans  le 
Danube,  d'un  peu  de  terre  et  d'herbe  porté  à  Arpad  par 
son  envoyé,  que  celui-ci  envahit  la  Hongrie  et  la  reven- 
dique comme  sienne  par  la  force  de  ces  symboles. 

Les  bêtes  et  leur  produit  ne  donnent  naissance  qu'à  un 
petit  nombre  de  symboles  Juridiques.  Nous  citerons  le 
coq  y  comme  un  des  principaux  symboles  de  la  maison  , 
de  la  famille  pendant  le  moyen  âge.  Dans  les  Établisse- 
ments de  S*  Louis,  il  désipe,  en  effet,  le  principal  ma- 
noir, celui  qui  doit  revenir  à  la  fille  aînée  d'un  gentil- 
homme, lorsqu'il  ne  laisse  à  son  décès  que  des  filles.  De 
là  peut-être  l'usage  de  placer  au-dessus  du  faîte  des  châ- 
teaux la  figure  d'un  coq.  qui  en  surmonte  les  girouettes. 
Vabeille,  chez  les  Égyptiens,  désigne  soit  un  roi ,  soit 
un  peuple  obéissant  à  son  roi  :  de  là  le  manteau  impérial 
semé  d'abeilles  d'or.  Le  cheval  blanc,  dans. le  moyen  âge, 
représentait  la  domination,  la  suzeraineté  :  les  rois  de 
France  ont  quelquefois  usé  de  ce  symbole  à  l'occasion  de 
leurs  entrées  solennelles  dans  les  villes  de  leur  royaume, 
et  surtout  dans  les  villes  et  pays  de  conquête. 

La  personne  de  l'homme,  avec  ses  membres  principaux 
et  ses  gesles,  son  attitude,  son  regard,  fournit  de  nom- 
breuses variétés  au  Symbolisme  juridique.  La  main  re- 
présente la  force  physique  et  personnelle  de  l'homme; 
elle  devient  dès  lors  le  signe  de  sa  puissance.  De  là  l'usage, 
admis  chez  presque  tous  les  peuples,  d'employer  la  main 
comme  symbole  du  pouvoir.  A  Rome,  le  fils  de  famille 
et  l'esclave,  pour  être  affranchis  de  la  puissance  du  père 
et  du  maître,  sont  placés  hors  de  sa  main  {^emancipatiOy 
manumissio);  la  femme  qui  prend  un  mari  tombe  en  sa 
main  (in  manu  maj-iti).  Pendant  le  moyen  âge,  la  tra- 
dition de  la  propriété  est  consacrée  par  le  symbole  de  la 
main  :  pour  l'acquisition  comme  pour  la  vente,  la  main 
est  indispensable,  car  ces  deux  actes  sont  toujours  suivis, 
l'un  d'une  main  mise  sur  la  chose  par  l'acquéreur,  l'au- 
tre d'une  main  levée  de  la  part  du  vendeur;  les  hommes 
qui  n'avaient  pas  le  droit  d'acquérir,  d'aliéner,  de  mettre 
leur  main  sur  une  chose,  étaient  appelés  lionimcs  de  main 


morte.  Comme  les  gens  d'une  infime  condition  sont  sans 
pouvoir,  presque  toujours  sans  propriété,  on  les  nomma  des 
hommes  de  basse  main.  Si  la  main  est  un  symbole  de 
puissance  et  d'autorité,  elle  est  encore  un  symbole  d'al- 
liance, d'amitié,  de  fraternité,  de  fidélité,  de  paix  et 
d'hospitalité.  Jadis,  dans  une  convention,  le  consentement 
était  exprimé  en  donnant  la  main  à  celui  avec  lequel  on 
contractait,  et  la  convention  ainsi  formée  recevait  le  nom 
de  manu  datum,  qui  est  resté  à  un  genre  particulier 
d'engagement  appelé  mandat.  Ces  deux  significations 
différentes,  mais  non  opposées,  appliquées  à  la  main, 
d'une  part  comme  symbole  de  puissance,  d'autre  part 
comme  signe  de  fidélité,  de  consentement,  naquirent  du 
rit  symbolique  du  serment  féodal ,  qui  consistait  pour  le 
vassal  à  mettre  ses  mains  enire  celles  du  suzerain  ;  for- 
malité qui  présentait  un  double  sens,  sens  de  consente- 
ment mutuel  de  la  part  du  suzerain  et  du  vassal,  et  sens 
de  soumission  de  la  part  de  ce  dernier.  De  là  la  formule 
encore  usitée  :  prêter  serment  entre  les  mains  c/e...,  et 
cette  autre  formule  :  donner  les  mains ,  pour  consentir, 
adhérer,  La  main  nue  qu'on  élève  vers  le  ciel  pour  prêter 
serment  est  considérée  comme  le  symbole  du  serment; 
la  Coutume  de  Reims  fait  du  mot  main  le  synonyme  de 
serment,  —  Dans  la  Symbolique  du  Droit,  le  pied  joue 
aussi  son  rôle.  C'est  en  posant  le  pied  sur  la  terre  que 
l'homme  l'occupe  et  se  l'approprie  naturellement ,  et  de 
là  est  venu  le  mot  po^ie^^ton  {pes-sitio,  quasi  pedum  po- 
sitio);  de  là  sans  doute  aussi,  pendant  le  moyen  âge,  les 
mots  plain  pied  pour  signifier  la  plénitude  du  droit  de 
propriété.  —  I^es  Germains  avaient  fait  de  la  bouche  lo 
symbole  de  l'autorité,  le  «igné  du  pouvoir  royal  comme 
du  pouvoir  domestique  ;  le  même  mot,  chez  eux  {mund^ 
bouche  ) ,  exprimait  en  môme  temps  la  tutelle,  l'autorité 
civile,  et  l'autorité  politique.  On  disait  des  hommes  de 
guerre  rangés  sous  un  chef,  qu'ils  obéissaient  à  sa  bow- 
che,  La  bouche  est ,  dans  l'hommage  féodal ,  le  signe  de 
la  fidélité  :  l'hommage  était,  en  effet,  accompagné  d'un 
baiser  appliqué  ordinairement  sur  la  bouche,  ce  qui  avait 
donné  naissance  à  diverses  locutions  symboliques,  telles 
que  :  être  engagé,  de  la  bouche;  devenir  Vhomme  de 
bouche  et  de  mains  de  quelqu'un  ;  devoir  la  bouche  et  les 
mains.  Mais  il  n'y  avait  que  les  nobles  qui  fassent  admis 
au  baiser;  les  roturiers  possédant  des  fiefs  n'obtenaient 
pas  un  pareil  honneur.  —  Dans  tous  les  temps  et  peut- 
être  chez  tous  les  peuples,  le  casur  a  été  considéré  comme 
le  symbole  de  l'amour,  de  la  conscience,  de  la  vérité; 
chez  les  nations  modernes,  il  est ,  en  outre,  l'emblème 
de  l'honneur.  Les  prêtres  catholiques,  au  lieu  de  lever  la 
main  pour  jurer  devant  les  tribunaux,  la  placent  sur  leur 
cœur.  C'est  aussi  la  main  placée  sur  son  cœur  que  le  chef 
du  jury  prononce  le  verdict,  en  disant  que  la  déclaration 
du  Jury  est  rendue  sur  son  honneur  et  sur  sa  conscience. 
II.  Symboles  artificiels.  —  La  verge,  la  baguette,  le 
bâton  surtout,  furent  longtemps  usités  dans  la  transmis- 
sion de  la  propriété.  Ce  symbole,  lorsqu'il  était  joint  au 
rameau  enfoncé  dans  la  motte  de  gazon,  représentait  le 
droit  et  la  puissance  du  maître  sur  la  chose,  sur  les  serfs. 
La  verge  ou  le  b&ton  étaient  Joints  à  l'acte  écrit,  et  con- 
servés avec  soin.  On  les  brisait  quelquefois  par  le  milieu 
après  la  formalité,  et  chaque  partie  contractante  en  pre- 
nait un  morceau  en  témoignage  de  la  convention.  Le 
bris  du  bâton  ou  de  la  verge  pouvait  parfois  signifier  le 
sentiment  du  vendeur  qui  se  séparait  de  la  chose  sans 
regret  ;  il  indiquait  aussi  la  rupture  du  lien  Juridique,  la 
dépossession,  ce  qui  s'appelait  exfestucare,  exfusticare 
(de  festuca  ou  fustis),  —  L'arc  et  les  (lèches  sont  les 
signes  de  la  force,  de  la  puissance,  du  génie  guerrier. 
Ciiez  les  Indiens,  une  fille  de  la  classe  militaire  qui  se 
marie  avec  un  brahmane  doit  tenir  une  flèche,  à  laquelle 
son  mari  doit  en  même  temps  porter  la  main.  Chez  les 
anciens  Perses,  l'arc  était  le  symbole  de  la  royaui»',  de 
la  puissance  :  homme  fort,  homme  de  Varc,  étaient  syno- 
nymes; sur  les  monuments  de  Persépolis,  on  voit  cette 
arme  entre  les  mains  du  monarque.  La  flèche  et  l'arc 
servirent,  chez  les  Normands,  à  la  tradition  d'un  fonds 
de  terre  ;  ils  transportèrent  cet  usage  en  Angleterre.  ChQz 
les  Germains,  et  particulièrement  chez  les  Lombards,  la 
flèche  servit  dans  la  solennité  de  l'affranchi^^sement.  -^ 
La  lance  fut,  chez  les  Romains,  dans  l'ordre  des  idées 
Juridiques,  le  symbole  do  domaine  quiritaîre,  acquis  à  la 
guerre.  Elle  était  dressée  devant  le  tribunal  des  centum- 
virs,  juges  des  questions  de  propriété.  Les  ventes  pu- 
bliques se  faisaient  sub  hasta,  d'où  notre  ancien  Droit  a 
pris  les  mots  subhastation  et  subhaster.  Nos  anciens 
rois,  en  monUmt  sur  le  trône,  recevaient  une  Innce  ou 
un  javelot  comme  signe  de  leur  pouvoir.  La  lance  est 


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encore  le  symbole  de  la  propriété  féodale  :  le  royaume  de 
France  et  les  fiefs  ne  tombent  point  en  guenoutZ/e,  leur 
héritage  appartient  à  la  lance;  d*où  cette  maxime  :  Vhé^ 
redite  passe  de  lance  en  quenouille^  pour  exprimer  que  la 
fille  est  admise  à  la  succession  du  fief.  —  L^épée  sert  de 
symbole  dans  le  commandement  militaire  chez  les  an- 
ciens Francs.  C*est  par  l'épée  qu'on  était  admis  chevalier, 
qu*on  recevait  Hnvestiture  d*un  royaume;  de  là,  dans  le 
sacre  des  rois  de  France,  Tusage  de  tirer  hors  du  four- 
reau Tépée  du  roi,  dont  il  était  ceint  par  l'archevêque. 
Dans  rinvestitore  do  duc,  Tépée  figurait  le  commande- 
ment militaire  ;  dans  celle  du  comte,  elle  était  plus  ordi- 
nairement le  signe  de  la  Juridiction  criminelle.  —  L'in- 
vestiture des  provinces,  des  grands  gouvernements,  des 
duchés,  des  évêchés,  des  villes,  se  faisait  par  un  étendard 
ou  une  bannière.  Il  en  était  de  même  des  royaumes  ; 
c'est  par  un  étendard  que  le  pape  Clément  IV  investit  le 
frère  de  Louis  IX  du  royaume  de  Sicile,  et  qu'Alexandre  II 
octroya  à  Guillaume  de  Normandie  le  royaume  d'Angle- 
terre. Le  drapeau  est  encore  aujourd'hui  le  symbole  de 
la  nationalité,  de  la  patrie,  n  en  est  de  même  du  pavil- 
lon d'un  navire  :  lorsqu'il  est  hissé,  le  navire  est  le  ter- 
ritoire de  la  patrie  avec  le  pouvoir  de  juridiction  et  de 
souveraineté.  —  La  forme  symbolique  du  gant  fut  usitée 
chez  tous  les  peuples  de  la  race  germanique,  et  particu- 
lièrement en  France.  Elle  consistait,  en  matière  d'inves- 
titure, à  remettre  son  gant,  communément  celui  de  la 
droite,  au  magistrat,  qui  le  passait  à  celui  qu'il  investis- 
sait de  la  chose  donnée  ou  vendue.  Comme  signe  de 
défi,  le  ^nt  était  jeté  à  terre  par  celui  €{111  demandait  le 
duel  judiciaire;  d'où  notre  expression  :  jeter  le  gant.  — 
Vanneau  (  V.  ce  mot)  a  eu  aussi  son  emploi  synâ)olique. 
—  Le  chapeau  ou  le  bonnet,  symbole  d'honneur  et  de 
liberté  chez  les  Romains,  tout  en  conservant  un  sens 
identique  pendant  le  moyen  âge,  prit  une  signification 
opposée  :  il  est  tantôt  le  signe  de  l'autorité  et  de  la  puis- 
sance, tantôt  celui  de  l'ignominie,  de  la  faiblesse  et  du 
déshonneur.  Le  Roi  garde  le  chapeau  sur  sa  tête,  tandis 
qu'autour  de  lui  tous  demeurent  la  tête  nue;  le  vassal  a 
la  tête  découverte  quand  il  fait  hommage  à  son  seigneur; 
le  débiteur  qui  fait  cession  de  biens  se  présente  à  l'au- 
dience descetnt  et  tête  nue;  le  juré  qui  prête  serment 
est  debout  et  découvert,  tandis  que  le  président  qui  re- 
çoit le  serment  est  assis  et  a  la  tête  couverte;  l'avocat, 
comme  signe  de  son  indépendance,  plaide  avec  son  bon- 
net carré  sur  la  tête  ;  nous  gardons  notre  chapeau  à  la 
main,  en  signe  de  salut,  de  soumission,  de  déférence; 
mais  dans  l'Orient  c'est  un  acte  de  mépris  et  une  grave 
incivilité  que  de  se  découvrir  la  tête  en  présence  de 
quelqu'un.  —  Dans  les  idées  des  anciens  Germains,  le 
manteau,  particulièrement  celui  des  rois  et  des  princes, 
des  reines  et  des  princesses,  était  un  signe  de  protection. 
Le  manteau  ou  le  voUe  {pallium)  était  étendu  sur  les 
enfants  qu'on  voulait  légitimer  par  le  mariage  :  le  Droit 
allemand  les  appelait  eafants  du  manteau.  Le  manteau 
fut  usité  comme  mode  d'investiture  dans  la  donation 
d'une  maison  à  un  couvent,  dans  la  mise  en  possession 
d'une  église,  dans  la  nomination  aux  fonctions  de  gou- 
verneur de  la  ville  de  Rome  pendant  le  xii"  siècle.  — 
Chez  les  peuples  du  Nord  de  l'Europe,  chez  les  anciens 
Hébreux,  et  dans  notre  moyen  &ge,  la  chaussure  occupe 
une  place  importante  dans  la  Symbolique  judiciaire.  Le 
soulier  est  un  signe  de  dépendance,  d'infériorité,  d'hu- 
milité, de  soumission  ;  par  opposition,  il  est  quelquefois 
aussi  un  symbole  de  supériorité  et  de  puissance.  Ainsi, 
chez  les  Francs  Saliens,  dans  la  formalité  de  la  cession 
de  biens,  le  débiteur  abandonne  son  habitation  en  che- 
mise et  sans  chaussure.  Chez  les  anciens  Hébreux,  la 
cession  de  droits  et  de  biens  entre  parents  avait  lieu  en 
ôtant  son  soulier,  et  en  le  donnant  à  celui  à  qui  on  fai- 
sait cette  cession.  Dans  le  moyen  &ge,  le  fiancé  présen- 
tait à  sa  future  épouse  ou  lui  faisait  présenter  un  sou- 
lier; ordinairement  c'était  le  sien,  et  quelquefois  il  en 
chaussait  lui-même  sa  fiancée  :  par  cet  acte,  il  s'humi- 
liait devant  elle,  et,  d'un  autre  côté,  en  se  déchaussant , 
il  s'exposait  à  marcher  d'un  pas  moins  ferme,  et  se  pla- 
çait dans  une  condition  inférieure  vis-à-vis  de  sa  fiancée. 
De  là  vient  que,  pour  désigner  un  mari  que  sa  femme 
gouverne,  on  dit  encore  aujourd'hui  en  France  qu'il  est 
«  sous  la  pantoufle  de  sa  femme.  »  —  Ldlit  sur  lequel 
l'homme  repose  est  le  symbole  du  mariage  ;  d'où  enfant 
du  premier  lit,  du  second  lit;  et,  dans  l'ancienne  Cou- 
tume de  Bar,  lit  brisé,  pour  signifier  la  séparation  de 
corps,  etc. 

V.  Creuzer,  Religions  de  l'antiquité,  ouvrage  traduit  de 
l'allemand  par  M.  Guigniaut;  B»hr,  Symbolique  du  culte 


mosaique,  en  allem.,  Heidelberg,  1837-39,  2  vol.  in<j^; 
Mo  ne,  Histoire  du  Paganisme  dans  l'Europe  du  Nord, 
en  allemand,  Heidelberg,  1822-23,  2  vol.  in-S*";  Neale  et 
Webb ,  Du  Symbolisme  dans  les  églises  du  moyen  âge, 
traduit  de  l'anglais ,  Tours ,  1849;  Munter,  Symbola 
veteris  Ecclesiœ  artis  operibus  txpressa ,  Copenhague , 
1819,  în-4'*;  Cyprien  Robert,  Cours  d^hiéroglyphique 
chrétienne,  publié  dans  V Université  catholique;  Félide 
d'Ayzac,  Symbolisme  des  pierres  précieuses,  dans  le 
t.  Y  des  Annales  archéologiques,  1846;  Ch.  Louandre, 
V Epopée  des  animaux,  dans  la  Revue  des  Deux  Mondes, 
décembre  1853;  Michelet,  Origines  du  droit  français  ^ 
1837,  in-8<*;  Chassan,  Essai  sur  la  symbolique  du  Droit, 
Paris,  1847,  in-8°.  P— s. 

STv BOLB ,  formulaire  de  foi.  V.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

SYMÉTRIE  (du  grec  sun,  avec,  et  métron,  mesure), 
rapport  et  proportion  des  parties  entre  elles,  dans  les 
ouvrages  où  doivent  exister  des  parties  égales  et  sembla- 
bles. Par  exemple,  dans  une  œuvre  d'Architecture  où  des 
parties  similaires  se  répètent,  s'il  y  a  4  colonnes  ou  4 
fenêtres  d'un  côté,  il  faut,  pour  la  symétrie,  qu'il  y  en 
ait  4  de  l'autre.  Des  quatre  façades  de  la  cour  du  pîalais 
du  Luxembourg,  deux  sont  symétriques  en  elles-mêm^ 
sans  être  symétriques  entre  elles,  et  les  deux  autres  sont 
symétriques  entre  elles,  sans  l'être  en  elles-mêmes.  Dans 
la  cour  du  Louvre,  les  quatre  façades  sont,  du  moins 
jusqu'à  la  naissance  du  troisième  ordre,  symétriques  tout 
à  la  fois  en  elles-mêmes  et  entre  elles.  —  La  symétrie 
du  style,  en  Littérature,  est  la  correspondance  des  mots 
et  des  membres  d'une  phrase  entre  eux,  ou  de  plusieurs 
phrases  entre  elles.  —  En  Musique,  la  symétrie  est  un 
rapport  de  durée  et  d'intonation  que  les  parties  d'un 
air  ont  entre  elles  et  avec  le  tout  ;  c'est  une  répéti- 
tion ou  une  corresoondance  de  formes.  F.  Carrure  des 

PHRASES.  B. 

SYMPATHIE  (du  grec  sun,  avec,  et  pathos,  affection), 
disposition  naturelle  à  reproduire  instinctivement  en 
nous  le  sentiment  ou  la  passion  que  nous  croyons  voir 
dans  un  être  animé,  et  à  nous  placer  ainsi  dans  un  état 
sensible  analogue  à  celui  où  nous  le  supposons;  à  souf- 
frir de  sa  douleur,  à  Jouir  de  son  plaisir,  à  partager  ses 
émotions;  en  un  mot,  à  sympathiser  avec  lui.  Ce  senti- 
ment s'étend  à  tout  ce  qui  a  vie  et  sensibilité,  mais  il 
devient  plus  vif  à  mesure  que  les  êtres  qui  en  sgnt  l'ob- 
jet se  rapprochent  de  l'homme.  La  sympathie  est  un 
principe  d'expansion  et  de  bienveillance.  Par  elle  nous 
cherchons  le  bien  des  autres,  souvent  même  au  détri- 
ment du  nôtre,  et,  quoiqu'une  émotion  douce  et  agréable 
accompagne  l'exercice  de  ces  affections  bienveillantes,  on 
ne  peut  pas  dire  qu'elles  aient  ce  plaisir  personnel  pour 
objet,  puisque  la  sympathie  s'exerce  instinctivement  et 
spontanément.  Elle  n'a  rien  d'intéressé  ni  d'égoïste; 
c'est  de  tous  points  l'opposé  de  Vantipathie,  principe  de 
concentration  et  de  malveillance.  Adam  Smith,  croyant 
qu'on  pouvait  juger  les  actions  humaines  selon  le  degré 
d'émotion  sympathique  ou  antipathique  d'un  spectateur 
impartial,  donna  la  sympathie  pour  base  à  la  Morale; 
mais  cette  base  est  équivoque,  car  la  passion  est  essen- 
tiellement partiale,  et  si  l'on  invoque  l'impartialité  de  la 
raison,  on  détruit  le  système.  De  plus,  cette  règle  est 
arbitraire,  car  la  sympathie  est  un  fait  instinctif,  qui  n'a 
ni  le  caractère  ni  l'autorité  que  réclame  la  loi  morale. 
—  Une  conformité  d'humeur,  de  goûts,  fait  naître  entre 
plusieurs  personnes  un  sentiment  qui  est  d'abord  de  la 
sympathie,  et  qui,  selon  les  circonstances,  peut  devenir 
de  l'amitié,  de  l'amour;  la  sympathie,  à  son  tour,  fait 
naître  la  pitié,  la  compassion,  la  charité,  et  quelquefois 
le  dévouement.  R. 

SYMPHONIASTE,  compositeur  de  Pkiin-Cli|mt. 

SYMPHONIE  (du  grec  sun,  avec,  et  phônè,  son),  mot 
qui  signifie  proprement  réunion  de  sons,  et  par  lequel 
on  a  entendu  tantôt  un  assemblage  de  voix  ou  d'instru- 
ments de  différentes  natures,  tantôt  la  production  simul- 
tanée de  plusieurs  sons.  En  ce  damier  sens,  il  a  été 
synonyme  d'harmonie  (V.  ce  mot)^  qui  est  aujourd'hui 
d'un  usage  général.  On  l'a  encore  employé  pour  dési- 
gner une  ouverture  d'opéra,  par  exemple  dans  les  œu- 
vres de  Caldara.  Les  Modernes  entendent  par  sympho- 
nie un  grand  morceau  de  musique  d'orchestre,  qu'on 
divise  d'ordinaire  en  quatre  parties  :  1°  un  Allegro, 
d'un  mouvement  plus  ou  moins  rapide,  et  divisé  en  deoi 
sections  dont  la  première  se  reprend  ;  le  compositeur  y 
développe  toute  sa  science,  au  moyen  de  modulatioDs', 
d'imitations,  de  canons  et  de  fugues;  S*  un  AndanU  00 
un  Adagio,  où  la  mélodie  doit  jouer  le  premier  rôle,  ci 


SYM 


1089 


SYN 


1 1\  s*écrit,  soit  dans  le  mode  relatif  du  morceau  prccû- 
lient,  soit  dans  le  ton  de  la  dominante  ou  de  la  sous-do- 
ninante  de  ce  morceau  ;  il  est  divisé  quelquefois  en 
ieax,  plus  souvent  en  quatre,  cinq  et  même  six  re- 

Srises,  dans  lesquelles  on  développe  et  varie  le  motif; 
''un  Menuet,  c-à-d.  un  morceau  écrit  dans  le  style  de 
Tair  de  danse  qui  porte  ce  nom,  et  composé  de  deux  re- 
prises d'un  mouvement  analogue,  entre  lesquelles  se 
place  un  plus  petit  morceau  de  môme  caractère  et  aussi 
de  deax  reprises;  le  compositeur  traite  ici  son  motif 
d*une  manière  un  peu  scolastique,  et  il  termine  par  un 
épisode  appelé  trio ,  sans  doute  parce  qu'il  ne  s'écrivit 
d*abord  qu'à  trois  parties,  mais  qui  ensuite  en  a  compté 
quatre,  cinq  et  même  six  ;  4<*  un  RondeoM  ou  Finale, 
écrit  d'un  mouvement  vif,  dans  le  ton  de  la  première 
partie,  et  où  le  motif  reparait  sous  toutes  sortes  de  formes. 
Une  symphonie  est  dite  caractéristique,  quand  elle  se 

{propose  pour  but  de  peindre  un  caractère  moral,  comme 
e  Distraite  de  Haydn,  ou  un  phénomène  physique, 
comme  une  tempête.  —  La  symphonie  était  en  germe 
dans  les  concertx  grossi  de  Corelli,  de  Geminiani,  de 
Vivaldi;  on  fait  figurer,  parmi  ceux  qui  la  cultivèrent, 
Jean  Agrell,  Vanhall,  Toelsky,  Van  Bfalder  et  Stamitz  en 
Allemagne,  Palludini  et  Sammartini  en  Italie;  mais  ses 
formes  régulières  ne  se  sont  établies  qu'au  xviii*  siècle. 
Gossec,  l'un  des  premiers,  se  distingua  dans  ce  genre  de 
composition,  qui  devait  être  bientôt  porté  k  sa  perfection 
par  Haydn  et  Mozart  ;  Méhul  et  Pleyel  y  obtinrent  aussi 
des  succès,  même  après  ces  deux  grands  génies.  De  nou- 
veaux effets  ont  été  ensuite  introduits  dans  la  sympho- 
nie par  Beethoven,  depuis  Beethoven,  par  SchneitzhœfTer, 
et  de  nos  jours,  par  Onslow,  Mendelssohn,  Reber,  Berlioz 
et  Félicien  David,  qui  s'y  sont  encore  acquis  une  répu- 
tation méritée.  B. 

SYMPHONIE ,  un  des  noms  de  la  vielle  au  moyen  ^. 

SYHPHONIK.  On  nommait  ainsi  autrefois,  suivant  Isidore 
de  Séville  et  Cassiodore,  l'accord  des  sons  graves  et  aigus. 
Suivant  Hucbald,  la  symphonie,  considérée  comme  in- 
tervalle harmonique,  était  un  accord  agréable  de  sons 
dissemblables  réunis  entre  eux.  La  symphonie  était  donc 
le  contraire  de  la  Diaphonie  {V.  ce  mot).  On  comptait 
six  symphonies  :  l'octave,  la  quarte,  la  quinte,  l'octave  et 
la  quinte,  l'octave  et  la  quarte,  et  la  double  octave.   F.  G. 

SYM PHOMSTA,  instrument  de  musique.  V,  au  Sup" 
pléfnent, 

SYMPLOQUE ,  en  grec  symplokè  (  de  syn ,  avec,  et 
plokè,  tissu),  nom  donné  par  quelques  rhéteurs  à  la  Figure 
appelée  Complexion  (K.  ce  mot), 

SÏMPOSIAQUES  (du  grec  symposion,  banquet),  titre 
d'un  ouvrage  de  Plutarque  qui  signifie  proprement  : 
«  Choses  relatives  aux  réunions  de  buveurs  ou  de  con- 
vives, »  et  qu'on  peut  traduire  en  français  par  :  «  Propos 
de  buveurs  »  ou  «  Propos  de  table.  »  Ces  propos  consis- 
taient en  questions  ou  problèmes  roulant  sur  des  ma- 
tières faciles,  agréables,  de  peu  d'importance,  propres  à 
soutenir  le  ton  de  ^ieté  franche  inspirée  par  les  vapeurs 
légères  d'un  vin  pris  modérément ,  mais  aussi  sur  des 
matières  utiles,  graves,  et  même  élevées.  Les  Grecs  re- 
cherchaient beaucoup  les  réunions  à  table,  surtout  en 
vue  du  plaisir  de  la  conversation  ;  on  ne  s'y  réunissait 
qu'entre  amis  et  partant  en  petit  nombre  (neuf  au  plus 
généralement),  de  manière  à  pouvoir  parler  de  tout  libre- 
ment ,  sans  crainte,  sans  autre  gêne  que  celle  des  règle- 
ments établis  par  le  symposiarque  ou  chef  du  banquet 
pour  maintenir  les  convives  dans  les  limites  de  la  modé- 
ration et  des  bienséances  :  l'ouvrage  de  Plutarque  est 
divisé  en  9  livres,  dont  chacun  traite  une  dizaine  de 
questions.  Une  des  parties  les  plus  remarquables  est  la 
in  question  du  H*  livre  :  elle  renferme  d'excellents  pré- 
ceptes sur  la  manière  de  se  questionner  entre  convives , 
sur  la  nature  des  questions  que  l'on  peut  s'adresser,  sur 
l'usa^  qu'on  y  peut  faire  de  la  plaisanterie,  sur  le  genre 
de  raillerie  qu'on  s'y  peut  permettre.  Ailleurs,  Plutarque 
traite  du  nombre  et  du  genre  de  convives  que  l'on  doit 
réunir  suivant  les  différentes  circonstances,  et  s'élève 
contre  le  ridicule  et  le  désagrément  de  ces  réunions  si 
nombreuses  qu'il  semble  qu'on  assiste  à  une  représenta- 
tion musicale  ou  dramatique,  ou  à  une  assemblée  de 
l'Agora  (la  Place  publiaue);  il  veut  qu'on  abandonne 
cette  manie  aux  gens  qui  ne  songent  qu'à  étaler  leur  ri- 
chesse, et  qui  ne  l'estimeraient  pas  richesse,  si  elle  n'avait 
beaucoup  de  témoins.  Il  condamne  aussi  l'usage  d'amener 
avec  sol  à  un  repas  où  l'on  est  convié  ce  qu'on  appelait 
dénombres,  sauf  certains  cas  qu'U  énumère  avec  bon  sens 
(Liv.  VII,  quœit.  G).  Convient-il  de  mêler  les  instruments 
de  musique  à  un  banquet,  et  ne  doit-on  pas  de  préférence 


so  borner  au  simple  chant,  ou  s'accompagaant  tout  au 
plus  de  la  lyre?  Quelles  sont  les  choses  bonnes  à  enten- 
dre pendant  qu'on  est  à  table?  Convient-il  d'y  délibérer 
sur  les  matières  politiques,  d'y  tenir  conseil?  Ce  sont 
encore  des  questions  où  Plutarque  déploie  beaucoup  do 
Jugement  et  de  finesse.  Il  est  remarquable  pour  nous  qu'il 
n'ait  nulle  part  introduit  aucune  femme  comme  interlo- 
cutrice dans  tout  le  cours  de  ses  9  livres  ;  mais  Tusago 
de  l'Antiquité  excluait  les  femmes  des  repas  où  il  y  avait 
des  invités;  on  n'en  voyait  que  dans  les  repas  de  dé- 
bauche, et  ce  ne  pouvait  être  par  conséquent  que  deu 

SYMPOSION.    ;  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographie 

SYNAGOGUE.    {      et  d'Histoire, 

SYNALLAGMATIQUE  (Contrat).  V,  Contrat. 

SYNALOBPHE,  terme  de  Grammaire  grecque  qui  si- 
gnifie /iujton,  mHange  {syn,  avec,  ensemble;  aloiphr, 
onction,  frottement),  et  qui  désignait  d'une  manière  gi*- 
nérale  les  divers  moyens  par  lesquels  les  Anciens  évi- 
taient le  choc  des  voyelles.  La  synalœphe  comprenait 
Vélision,  la  crase,  la  synérèse,  et  d'autres  sous-divisions 
imaginées  par  la  subtilité  des  grammairiens,  et  qui  re- 
viennent à  ce  que  nous  appelons  contraction.  Le  nom 
grec  de  cette  figure  correspond  à  peu  près  au  latin  con^ 
glutinatio,  P. 

SYNATHROISME.  V.  AccoMUiJiTiON. 

SYNAULIE,  en  termes  de  Musique  p^rccque,  réunion 
de  joueurs  de  flûtes  qui  exécutaient  alternativement  la 
même  chose  en  se  répondant  l'un  à  l'autre. 

SYNAXAIRE ,  nom  donné  dans  l'Église  grecque  à  un 
livre  contenant  en  abrégé  la  vie  des  Saints,  avec  une 
courte  explication  du  sujet  de  chaque  fête.  On  appolltj 
encore  Synaxaires  des  tables  qui  se  trouvent  dans  quel- 
ques exemplaires  grecs  manuscrits  du  Nouveau  Testa- 
ment, et  qui  indiquent  les  Évangiles  qu'on  lit  dans  les 
églises  pendant  tous  les  jours  de  l'année. 

SYNCELLE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^ Histoire, 

SYNCHRONISME  (du  grec  sun,  avec,  ensemble,  et 
khrottos,  temps),  rapprochement  de  personnes  qui  ont 
vécu  à  une  même  époque,  ou  d'événements  qui  sont  ar- 
rivés simultanément  dans  divers  pays.  Des  Tableaux 
synchroniques  ont  été  dressés  par  Lamp,  Bredow,  Vater, 
Blair,  Leclerc,  Buret  de  Longchamps.  On  en  trouve  aussi 
dans  les  AtlcLs  de  Gueudeville,  de  Bucy  de  Mornas,  de 
Kruse,  de  Lesage,  etc. 

SYNCOPE  (du  grec  syncopé,  coupure,  retranchement), 
se  dit  de  la  suppression  d'une  lettre,  et  particulièrement 
d'une  consonne,  ou  même  d'une  syllabe,  au  milieu  d'un 
mot;  comme  lorsqu'on  dit  en  latin  amarunt  pour  ama^ 
verunt,  amassem  pour  amauissem,  dixti  pour  dixisti, 
exstinxem  pour  eoistinxissem,  cepse  pour  cepisse,  valde 
pour  valide,  ciUdus  pour  calidtis,  La  syncope  joue  un 
grand  rôle  dans  la  formation  des  mots  français  tirés  du 
latin  ;  c'est  ainsi  que  dubitare  s'est  abrégé  en  doubter, 
puis  douter/  cubitus  en  coubde,  puis  coude;  magis  en 
mais;  magtster  en  maître;  oraculum,  spectaculum,  en 
oracle,  spectctcle,  syncopes  déjà  faites  dans  l'ancien  latin, 
où  l'on  trouve  oraclum,  spectaclum.  La  syncope  se  borne 
à  peu  près  dans  les  mots  français  à  la  suppression  de  Ve 
intérieur  de  certains  mots,  surtout  en  vers  :  comme  dé- 
voûment,  gaité,  pour  dévouement,  gaieté;  yessairai  pour 
yessaiercU,  etc.  P. 

STNcoPB,  en  Musique,  prolongement  sur  le  temps  fort 
d'un  son  commencé  sur  le  temps  faible.  Son  emploi  re- 
monte au  XIV*  siècle. 

SYNCRÉTISME,  c.-à-d.  en  çrec  réunion.  On  désignait 
ainsi  la  réunion*  des  villes  rivales  do  la  Crète  contre 
l'ennemi  commun.  On  l'employa  ensuite  pour  exprimer 
le  mélange  de  plusieurs  doctrines  différentes.  A  Alexan- 
drie, le  syncrétisme  philosophique  se  montra  avec  Philon 
le  Juif,  Potamon,  Numénius  et  d'autres.  A  la  Renaissance, 
on  vit  un  syncrétisme  à  la  fois  philosophique  et  religieux 
dans  les  tentatives  de  Pic  de  la  Mirandole,  de  Beuchlin, 
de  Marsile  Ficin  et  de  plusieurs  autres,  qui  essayèrent  de 
concilier  les  dosmes  du  christianisme,  les  uns  avec  Pla- 
ton et  la  Kabbale,  les  autres  avec  les  doctrines  d'Alexan- 
drie, de  Pythagore  et  du  Stoïcisme.  Le  nom  de  Syn- 
crétistes  fut  donné,  au  xvii*  siècle,  aux  partisans  de 
l'Allemand  Georges  Calixte  ou  Gallisen,  qui  voulait  réunir 
dans  un  même  symbole  les  catholiques  et  les  protestants. 
Le  syncrétisme  diflTère  de  V éclectisme  en  ce  qu'il  n'est 
qu'un  mélange  sans  choix  et  sans  critique  de  doctrines 
opposées  et  souvent  inconciliables.  V,  Éclectishb.    R. 

SYNDÉRÈSE  (du  grec  syndtaXrésis,  déchirement,  dis- 
cernement)! nom  donné  par  les  Tl^éolugicns  à  la  Cuih 


SYN 


1C90 


SYN 


science  morale ,  au  discernement  naturel  du  bien  et  du 
mal,  et  aussi  à  la  contrition  de  l'àmc  qui  voit  son  péclié. 

SYNDIC  ^du  grec  sun,  avec,  et  dikè,  cause,  procès), 
mandataire  chargé  de  veiller  aux  intérêts  d'un  corps, 
d'une  communauté,  d'une  association,  d'une  compagnie. 
Avant  1789,  cliaque  corporation  d*arts  et  de  métiers  avait 
son  syndic,  qui  Taisait  exécuter  les  règlements,  et  on  ap- 
pelait Syndicat  tout  à  la  fois  la  cliarge  de  syndic  et  le 
temps  que  durait  cette  charge.  Le  titre  de  Syndic  était 
aussi,  dans  beaucoup  de  villes,  celui  d'un  magistrat  mu- 
nicipal, dont  les  attributions  avaient  beaucoup  d'analogie 
avec  celles  des  maires  actuels,  et  il  est  encore  porté  aujour- 
d'hui par  le  premier  magistrat  de  Genève.  De  nos  Jours, 
certaines  corporations  privilégiées,  comme  celles  des 
agents  de  change,  des  notaires,  des  avoués,  des  agréés, 
des  imprimeurs,  ont  leurs  Chambres  syndicales,  espèces 
de  tribunaux  disciplinaires  qui  Jugent  les  infractions  aux 
règlements  de  la  corporation  ou  aux  devoirs  imposés  à  ses 
membres.  —  Dans  les  faillites,  on  nomme  Syndics  ceux 
que  le  Tribunal  de  commerce  délègue  pour  représenter 
la  masse  des  créanciers  dans  les  opérations,  pour  réaliser 
et  gérer  l'actif  Jusou'à  la  conclusion  d'un  concordat 
IV.  Faillite).  Virolle  a  publié  un  Guide  des  syndics, 
4838,  iu-8°.  —  Dans  la  Marine,  on  nomme  Syndics  des 
gens  de  mer  les  employés  qui ,  dans  Ips  sous-quartiers 
maritimes,  exercent  à  l'égard  des  marins  classés  et  de 
leurs  familles  le  patronage  attribué  dans  les  quartiers 
aux  commissaires  de  marine.  Les  sous-quartiers  qu'ils 
administrent  s'appellent  Syndicats, 

SYNECDOCHE  ou  SYNECDOQUE  (du  grec  synekdokhè, 
compréhension),  figure  de  Rhétorique  par  laquelle  on 
donne  une  signification  particulière  à  un  mot  qui,  dans 
le  sens  propre,  a  une  signification  plus  générale,  et  réci- 
proquement; c.-à-d.  qu'elle  fait  concevoir  &  l'esprit  pl^rs 
ou  moins  que  le  mot  dont  on  se  sert  ne  signifie  dans  lu 
sens  propre.  Dans  la  Métonymie  (V.  ce  mot)^  c'est  un 
nom  pour  un  autre;  dans  la  Synecdoche,  c'est  le  plus 
pour  le  moins,  ou  le  moins  pour  le  plus.  Elle  étend  ou 
restreint  la  signification  des  mots  :  cent  voiles  pour  cent 
vaisseaius;  deux  cents  feux  pour  deux  cents  maisons; 
mille  âmes  pour  mille  habitants.  Elle  emploie  le  genre 
pour  l'espèce  {les  mortels  pour  les  hommes)^  l'espèce 
pour  le  genre,  le  singulier  pour  le  pluriel  {le  Français, 
né  malin,  créa  le  vaudeville)^  le  pluriel  pour  le  singulier 
(lesCicéron,  les  Virgile),  un  nombre  certain  pour  un 
nombre  incertain  {vingt  fois  sur  le  métier  remettez  votre 
ouvrage]^  la  partie  pour  le  tout  {j'ignore  le  destin  d'une 
tête  si  chère),  le  tout  pour  la  partie  (Virgile  parle  d'un 
bouclier  fait  de  trois  tcMreaux),  la  matière  dont  une 
chose  est  faite  pour  la  chose  même  (Vatrain  pour  le  ca- 
non ou  les  cloches).  G. 

SYNKCPHONÈSE,  V,  SYNiïkSB. 

SYNÉRÈSE  (du  grec  sun,  ensemble,  et  aXrém,  prendre), 
en  termes  de  Grammaire,  désigne  une  contraction  de 
deux  voyelles  qui  ne  fait  que  changer  en  diphthongue  les 
deux  syllabes  formées  par  ces  voyelles.  C'est  par  syné- 
rèse  que  les  poôtes  latins  font  de  deux  syllabes  le  mot 
Orpheus  :  les  deux  lettres  contractées  n'ont  subi  d'autre 
modification  que  d'être  prononcées  en  une  seule  émission 
de  voix.  Lorsque  les  deux  voyelles  en  se  contractant  for- 
ment une  diphthongue  qui  ne  reproduit  pas  les  lettres 
primitives,  il  y  a  crase  (K.  ce  mot), 

SYNERGISTES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'fiistoire» 

SYNGRAPHE  (du  grec  sun,  ensemble,  et  graphéin, 
écrire),  nom  qu'on  donnait  autrefois  à  un  acte  souscrit 
de  la  main  du  débiteur  et  du  créancier,  et  gardé  par 
tous  deux. 

SYNiZÈSE  ou  SYNECPHONÈSE,  énonciation  de  deux 
syllabes  en  une  seule,  lorsque  l'une  d'elles  finit  et  l'autre 
commence  par  une  voyelle.  C'est  ce  qui  arrivait  en  grec 
lorsqu'on  faisait  de  théoi  une  seule  syllabe,  en  latin  lors- 
que meus,  tuus,  eius,  huius,  nauem,  Dauus,  devenaient, 
chez  les  po6tes  comiques  et  sans  doute  aussi  dans  le  lan- 
gage usuel,  monosyllabiques.  Les  syllabes  françaises  en 
te,  to,  résultant  de  l'altération  d'une  voyelle  latine  simple 
comme  a,  e,  o,  se  rattachent  à  la  synizèse  :  ainsi,  chien, 
deoznem;  bt>n,  de  bene;  lieu  de  locus;  (nous)  aimions, 
(vous)  eÀmiez,  de  amabamus,  amabo^û.  La  synizèse  n'a 
plus  lieu  lorsque  deux  syllabes  latines  se  sont  conser- 
vées :  ainsi,  action  forme  trois  syllabe»  {âctïônem);  lien, 
(le  lï{g,àmen,  en  forme  deux.  Voilà  pourquoi  les  substan- 
tifs passion  et  pression  sont  trissyllabiques,  tandis  que 
{nous)  pressions,  (nous)  passions,  ne  sont  qiie  dissyl- 
labes. —  La  synizèse  avait  quelquefois  lieu  en  grec  d'un 
mot  à  un  autre,  lors  même  que  la  finale  du  i***  était 


longue  ;  ainsi,  mè  ou  ne  comptent  presque  Jamais  que 
pour  une  syllabe  dans  les  vers;  0p0i  ou  n'en  forme  que 
deux.  P. 

SYNODE.  V,  ce  mot  dans  notre  DictionnairB  de  B'u>» 
graphie  et  d'Histoire. 

SYNONYME  (ParalléUsme).  V.  HkboaIqub  (Versifio 
tion). 

SYNONYMES  (du  grec  syn,  avec,  et  onyma,  nom),  mot 
qui  s'applique  proprement  à  deux  ou  plusieurs  motsdilTé- 
rents  parla  forme,  mais  qui  expriment  le  même  sens  et  peu- 
vent être  employés  indifféremment  l'un  pour  l'autre.  Tels 
sont,  en  français  :  Benoit  et  Bénédict;  Louis  et  Ludov'r: 
Fabre,  Favre,  Lefèvre  et  Lefébure;  hypothèse  et  supposi- 
tion; péninside  et  presqu^Ue,  cap  et  promontoire,  pénul- 
tième et  avant-dernière,  f>aillant  et  courageux,  immortel 
et  impérissable;  en  latin  :  pater,  parens,  genitor,  sator: 
mcUer,  parens,  genitrix;  filius,  natus;  nata,  filia:  so- 
boles,  progenies,  etc.  Toutefois,  il  arrive  la  plupart  du 
temps  que  deux  ou  plusieurs  mots,  tout  en  désignant  une 
même  idée  principale,  ne  sont  pas  véritablement  syno- 
nymes lorsqu'ils  se  trouvent  aussi  exprimer  des  idées 
accessoires  difilôrentes  qui  ne  permettent  pas  d'employer 
indistinctement  et  au  hasard  ces  mots  les  uns  pour  In 
autres.  Par  exemple,  le  défaut  contraire  à  rapplication 
de  l'esprit,  à  l'amour  du  travail,  peut  s'exprimer  d'une 
manière  générale  en  français  par  les  mots  paresse,  né- 
gligence, indolence,  nonchalance;  mais  on  est  paresseuj 
par  défaut  d'action,  négligent  par  défaut  de  soin,  indolnt 
par  défaut  de  sensibilité,  fionchalant  par  défaut  d'ardeur. 
Considérés  au  point  de  vue  de  ces  idées  accessoires,  ce» 
quatre  mots  cessent  d'être  synonymes,  et,  si  on  les  em- 
ployait les  uns  pour  les  autres,  on  s'exposerait  maintes 
fois  à  parler  sans  netteté  et  sans  Justesse.  On  poumùt 
donc  définir  plus  exactement,  au  point  de  vue  de  la  pra- 
tique, les  synonymes,  «  des  mots  dont  le  tsns  a  de  grands 
rapports  et  des  différences  légères  mais  réelles.  »  (M.  Gui- 
zot.)  11  arrive  fréquemment  aux  écrivains  d'employer 
deux  termes  à  peu  près  synonymes  pour  exprimer'  h 
même  pensée,  comme  dans  cette  phrase  de  MassilloD  : 
u  Toute  sa  vie  n'a  été  qu'un  travail,  qu'uM  occupation 
continuelle  ;  n  et  dans  cette  autre  de  Marmontel  :  «  Dam 
tous  les  ftges  de  la  vie,  V amour  du  travail,  le  goût  de 
l'étude  est  un  bien.  »  Ce  procédé  est  familier  surtout  aux 
poètes  et  aux  orateurs  qui  y  cherchent  un  moyen  d- 
rendre  leur  pensée  plus  nette  et  plus  expressive;  mais  il 
suppose  une  connaissance  approfondie  des  ressources  dt. 
la  langue,  et  une  intelligence  parfaite  des  nuances  le^ 
plus  délicates  et  les  plus  subtiles  qui  différencient  li> 
mots  de  signification  en  apparence  identique.  Sans  cel:. 
on  risque  de  tomber  dans  une  insipide  tautologie  comm.- 
serait  celle-ci  :  «  Les  corps  après  la  mort  sont  réduits  en 
cendre  et  en  poussière;  »  tandis  que  dans  cette  pbra<c  : 
«  Longin  entend  par  le  sublime  ce  qui  fait  qu'un  ouvnzc 
enlève,  ravit,  transporte,  »  la  synonymie  n'est  cru'appj- 
reutc,  et  les  trois  verbes  enchérissent  réellement  l'un  su: 
l'autre;  un  seul  de  ces  verbes  aurait  été  insuffisant  pour 
rendre  la  pensée  avec  cette  clarté  et  cette  force  que, 
réunis,  ils  lui  communiquent. 

Nous  possédons  un  Traité  des  Synonymes  en  grec  par 
Ammonius;  A.  Pillon  l'a  traduit  en  français.  Paris,  iSii. 
Laurent  Valla,  Ausone  Popma,  A.-D.  Richter,  se  sf^nt 
occupés  de  la  synonymie  latine;  les  Synonymes  latih^ 
de  Gardin-Dumesnil,  et  le  Traité  des  synonymes  de  la 
langue  latine  par  Barrault,  Paris,  1853,  in-8",  ont  rendn 
inutiles  leurs  travaux.  Pour  la  langue  fk^uiçaise,  nous  n- 
terons  :  les  Remarques  de  Ménage  et  de  Bouhourv;  K's 
Synonymes  finançais  de  l'abbé  Girard,  1736,  %  vol.  in-12. 
et  ceux  de  Beauzée,  1769,  2  vol.  in -12;  les  /VoiirsiTtu- 
Synonymes  français  de  l'abbé  Roubaud,  1785,  4  roi. 
in-8<*;  le  Nouveau  Dictionnaire  universel  dês  Syiionym^f 
de  la  langue  française  par  M.  Guizot,  1861,  $*  édit.. 
refondue,  gr.  in-8<*;  le  Dictionnaire  complet  des  Syn- 
nymes  français  par  Em.  Haag,  1835;  les  Syntmynifi 
français  de  Benjamin  Lafaye,  1841  et  18&5,  in-8*>.   P. 

SYNOPTIQUE  (du  grec  syn,  ensemble,  et  optomm.  y 
vois) ,  ce  que  l'on  voit  dans  son  ensemble,  du  mêmeo  ir< 
d'œil.  On  nomme  tableaux  synoptiques  les  travaux  r  - 
présentant  sous  un  seul  et  même  point  de  vue  les  prir- 
cipes,  les  classifications  et  les  faits  décrits  en  détail  dans 
le  cours  d'un  ouvrage.  —  On  a  appelé  synoptiques  U^ 
f-vangiles  de  S^  Matthieu,  de  S^  Marc,  de  S^  Luc,  d. 
S' Jean,  et  les  Actes  des  Apôtres,  parce  qu*en  raisnn  de 
leur  ressemblance  dans  les  faits  et  dans  les  paroles  ils  ic 
rencontrent  souvent.    . 

SYNTAGMA,  mot  grec  qui  signifie  ordre,  «miM*- 
mcnt,  et  que  les  philosophes  des  xvi*  et  x\ii*  siècles  pri- 


SYN 


1C91 


SYU 


rent  souvent  pour  titre  de  leurs  recueils  de  dissertations. 

SYNTAOMA ,  corps  dcs  armôcs  grecques.  F.  Armée, 

SYNTAXE,  mot  d'origine  grecque  {suntaxis,  du  verbe 
tynlassô,  coordonner)  qui  signifie  en  Grammaire  ordon- 
nance régulière  des  mots.  Il  y  a  deux  sortes  de  syntaxes  : 
la  syntaxe  d'accord^  et  la  syntaxe  de  régime  ou  de  dé- 
pendance. La  syntaxe  d'accord  détermine  les  formes 
diverses  que  doivent  prendre  les  mots  lorsqu'ils  se  rap- 
portent à  un  seul  et  même  individu  ou  à  plusieurs  indi- 
vidus à  la  fois;  c'est  ainsi  que  l'adjectif  s'accorde  en  genre 
et  en  nombre  avec  le  substantif  qu'il  détermine  ou  qua- 
lifie, et  de  plus  en  cas,  dans  les  langues  à  flexion  ;  que  le 
verbe  suit  le  nombre  et  la  personne  du  sujet  auquel  il 
se  rapporte,  etc.  La  syntaxe  de  régime  ou  de  dépendance 
nous  fait  connaître  quelle  forme  il  convient  de  donner 
au  mot  qui  complète  l'idée  commencée  par  un  substan- 
tif, un  adjectif,  un  verbe,  comme  :  «  La  chambre  du  roi; 
semblable  à  son  père;  né  pour  les  armes;  J'aime  T^tudd; 
Marseille  a  été  fondée  par  une  colonie  de  Grecs  venue  de 
Phocée.  »  Dans  les  langues  pourvues  de  cas,  les  flexions 
casuelles  suffisent  souvent  pour  exprimer  le  rapport  de 
dépendance:  «  cubiculum  régis;  similis  pcUri ;  Massi- 
liam  condidere  Grsci  Phocœa  profecti;  mœrore  conficior.» 
A  la  syntaxe  de  régime  se  rattachent  les  règles  qui  déter- 
minent la  forme  que  doit  prendre  une  proposition  dépen- 
dante d'une  autre  proposition  :  «  On  craint  qu'il  ne  se 
venge;  on  craignait  qu'il  ne  se  vengeât;  j'espère  revenir 
ou  que  je  reviendrai  bientôt.  »  La  syntaxe  d'accord  et  la 
syntaxe  de  régime  ont  pour  objet  commun  la  correction 
et  la  justesse  du  langage.  Appliquer  mal  ou  no  pas  appli- 
quer une  règle  de  syntaxe  s'appelle,  en  termes  de  l'École, 
faire  un  solécisme  (  V.  ce  mot.  ).  P. 

SYNTHÈSE  (du  grec  synthésis,  composition).  Tout 
travail  complet  de  l'intelligence  comprend  deux  opéra- 
tions fondamentales  :  l'une  est  la  décomposition  d'un  tout 
en  ses  parties,  l'autre  la  recomposition  et  par  suite  l'ex- 
posé de  la  science.  La  synthèse  est  la  partie  de  la  mé- 
thode qui  réunit  ce  que  V analyse  a  divisé;  elle  combine 
les  idées,  saisit  les  rapports,  et  forme  des  principes  ;  elle 
va  du  simple  au  composé.  De  même  qu'il  y  a  deux  sortes 
d'analyse,  il  y  a  deux  sortes  de  svnthèse  :  expérimentale, 
logique;  ou  empirique,  rationnelle.  C'est  par  la  synthèse 
expérimentale  qu'on  recompose  un  corp^  décomposé  par 
l'analyse,  soit  une  machine  démontée  pour  en  étudier  les 
parties,  et  qu'on  remonte  dans  l'ordre  voulu;  on  connaît 
SOS  parties,  leurs  rapports  entre  elles  et  avec  l'ensemble, 
on  a  une  connaissance  synthétique,  exacte  et  complète. 
La  synthèse  logique  part  d'une  vérité  générale,  déduit  les 
conséquences  qu'elle  renferme,  et  arrive  ainsi  à  démon- 
trer un  théorème  ou  à  trouver  la  solution  d'un  problème. 
Elle  va  du  général  au  particulier,  du  simple  au  composé. 
Comme  procédé,  la  synthèse  logique  surtout  est  appelée 
méthode  de  composition  et  aussi  méthode  d'enseignement. 
Elle  est  plus  démonstrative  qii'escplicative ;  c*est  le  con- 
traire pour  l'analyse.  La  synthèse  suppose  vrai  le  prin- 
cipe d^où  elle  part,  et,  de  plus,  identité  entre  le  principe 
et  les  conséquences,  ainsi  qu'une  gradation  régulière  et 
bien  fondée ,  d'où  dérivent  la  clarté  et  la  légitimité  dans 
les  déductions  et  les  démonstrations.  R. 

SYNTHÈSE,  tunique  romaine.  V.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

SYNTHÉTIQUE  (Parallélisme).  V.  HébraIqob  (Versi- 
fication  ). 

SYNTHÉTIQUES  (Conjugaisons).  V.  Conjugaison. 

SYNTHÉTIQUES  (Languos),  langues  qui  ont  la  faculté  de 
combiner  en  un  seul  mot  plusieurs  idées ,  à  l'aide  de  suf- 
fixes ,  de  préfixes ,  de  terminaisons  et  flexions  grammati- 
cales, de  voyelles  de  liaison.  Tels  sont  le  sanscrit  et  le 
grec  ancien.  Ainsi,  lélumétha  exprime  en  un  seul  mot, 
dans  la  langue  grecque,  ce  qu'en  français  nous  exprimons 
par  les  quatre  mots  :  nous  avons  été  délivrés.  Le  latin  est 
également  une  langue  synthétique,  mais  à  un  degré  infé- 
rieur par  rapport  au  grec  :  ainsi ,  lélumétha  ne  peut  y 
être  traduit  que  par  deux  mots ,  soluti  sumus.  Le  carac- 
tt^re  synthétique  s'étend  aussi  à  la  syntaxe;  ainsi,  les 
mots  latins  fortior  pâtre  ne  peuvent  se  rendre  en  notre 
langue  que  par  cinq  mots  :  ptttë  brave  que  son  père.  Les 
langues  synthétiques  manqueraient  de  clarté  et  de  pré- 
cision ,  si  elles  n'étaient  riches  en  inflexions  variées  des- 
i.uecs  à  marquer  les  différents  rapports  des  mots  entre 
eux  :  de  là  le  système  de  déclinaisons  et  de  conjugaisons 
qui  les  caractérisent.  Le  grec  et  le  latin  sont  également 
synthétiques  uant  à  la  déclinaison;  mais  cette  égalité 
cesse  au  désavantage  du  latin  en  te  qui  regarde  la  conju- 
gaif^on  et  la  composition.  La  conjugaison  grecque  est 
cutièrement  synthétique,  excepté  pour  exprimer  le  futur 


antérieur  actif  dans  les  propositions  principales.  La  coiH 
jugaison  latine  devient  analytique  aux  deux  futurs  de 
l'infinitif  actif;  au  passif,  le  parfait  et  tous  les  temps  qui 
s'y  rattachent  dans  les  divera  modes  ne  sont  qu'analy- 
tiques. Quant  à  la  faculté  de  composition,  elle  est  rela- 
tivement très-bornée  en  latin.  Au  reste,  lorsqu'on  dit 
qu'une  langue  est  synthétique,  ce  mot  ne  doit  pas  être 
pris  dans  une  acception  trop  absolue  :  il  signifie  seule- 
ment que  cette  langue  a  une  préférence  marquée  pour 
la  syntnèse,  et  que  c'est  là  le  fond  de  son  génie.  Car 
elle  admet  aussi  les  procédés  analytiques,  comme  on 
peut  le  voir  et  par  le  grand  usage  des  prépositions  et  des 
conjonctions  de  subordination  dans  les  deux  langues  clas* 
siques  anciennes,  et  par  la  décomposition  que  subissent 
souvent  en  grec  les  formes  verbales.  De  même,  les  langues 
cmalytiques  sont  ainsi  appelées  d'après  leur  caractère 
général  ;  car  elles  admettent  aussi  dans  une  certaine  me- 
sure les  procédés  synthétiques.  On  entend  souvent  dire 
que  les  langues  synthétiques  sont  moins  claires  que  les 
langues  analytiques  :  ce  jugement  est  faux  dans  sa  géné- 
ralité; la  clarté  d'une  langue  bien  faite  ne  dépend  point 
de  ses  formes  grammaticales  et  syntaxiques,  mais  de 
l'écrivain  qui  la  manie  :  toute  pensée  bien  et  clairement 
conçue  s'énonce  clairement  dans  toute  espèce  de  langue, 
et  la  langue  française  doit  sa  réputation  de  clarté,  non  pas 
à  ce  qu'elle  est  analytique  (car  toutes  les  langues  modernes 
le  sont) ,  mais  aux  esprits  éminemment  nets  et  justes  qui 
lui  ont  donné  sa  forme  littéraire.  P. 

SYNTH  RONOS.  V.  Abside. 

SYRIAQUE  (Langue) ,  une  dos  langues  sémitiques,  do 
la  branche  araméenne.  Masoudi ,  Ibn-Khaldoun  et  d'au- 
tres écrivains  orientaux  considèrent  le  syriaque  comme 
l'idiome  primitif  des  hommes;  c'est,  du  moins,  celui  qui, 
de  tous  les  idiomes  de  l'Orient ,  se  rapproche  le  plus  de 
l'hébreu  par  la  forme  et  la  signification  des  mots;  c'est 
le  seul  qui  puisse  expliquer  bien  des  particularités  qui 
sont  inexplicables  dans  l'hébreu  considéifé  isolément.  Cor- 
tains  linguistes,  qui  ne  tenaient  pas  suffisamment  compte 
deladifl'érence  des  flexions  grammaticales,  ont  été  jusqu'à 
dire  que  le  syriaque  et  l'hébreu  ne  se  distinguaient  que 
par  la  prononciation.  Il  v  a  aussi,  entre  le  sjyriaque  et  le 
chaldéen,  d'assez  grandes  analogies.  Le  dialecte  qu'on 
parlait  en  Judée  à  l'époque  de  Jésus-Christ,  et  que  le 
Nouveau  Testament  désigne  sous  le  nom  d'hébreu ,  mais 
que  les  orientalistes  modernes  appellent  syro-chaldéen , 
tenait  plutôt  du  chaldéen  que  du  syriaque.  Le  syriaque 
eut  plusieura  dialectes,  tels  que  le  palmyrien,  le  sabeen, 
le  nabathéen.  Il  se  modifia  profondément  par  l'adjonc- 
tion d'éléments  persans,  grecs,  latins  et  arabes,  et  l'arabe 
finit  car  le  supplanter  comme  langue  vulgaire  au  moyen 
âge  :  il  n'exista  plus  qu'à  l'état  de  langue  ecclésiastique 
chez  les  Maronites ,  les  Jacobites  et  les  Nestoriens.  On 
prétend  qu'il  est  encore  parlé  aujourd'hui  par  les  Nosaîris 
du  Liban  et  dans  la  petite  ville  de  Mara.  —  Il  existe  plu- 
sieurs alphabets  syriaques,  désignés  par  les  noms  d'e«- 
tranghelo,  de  peschito,  de  nestorien  et  de  sabéen.  Ce 
dernier  fait  entrer  les  voyelles  dans  le  corps  de  l'écriture, 
tandis  que  les  autres  les  placent  au-dessus  ou  au  dessous 
des  consonnes.  V.  A.  Caninius,  InstittUiones  syriacœ, 
Paris,  1554;  Amira,  Grammatica  syriaca,  Bome,  1596, 
in-4°;  Trost,  Lexicon  syriacum,  Cœthen,  1623,  in-4*»; 
J.  Buxtorf ,  Grammqtica  chaldaica  et  syriaca:  Accurens, 
Grammatica  linguœ  syriacœ,  Rome,  1647,  in-8<';  Gutbicr, 
Lexicon  syriacum,  Hambourg,  1667;  Zanolino,  Lexicon 
syriacum,  Padoue,  1742,in-4°;J.-D.  Michaelis,  Traité  de 
la  langue  syriaque,  avec  une  Chrestomathie ,  Gœttingue, 
1772,  etGray^matica  syriaca,  Hall,1784,in-4°;  J.-G.  Hase, 
Grammaire  syriaque,  en  allemand,  1791;  E.  Castell, 
Lexicon  syriacum,  Gœttingue,  1788,  2  volume  in-4<>; 
A.-T.  EoffmBXin,  Grammatica syricuia.  Halle,  1827, in-4»; 
Bar-Hebneus  (Aboul-Faradj),  Grammatica  linguœ  sy- 
riacœ, ouvrage  publié  par  Butheau,  Gœttingue,  1843, 
in-8<'  ;  Brian  Walton,  Disserlatio  de  lingua  syriaca,  dans 
les  Prolégomènes  de  sa  Bible  polyglotte,  Londres ,  1657, 
in-fol.;  J.-G.  Hase,  Dissertatio  aedtalectis  linguœ  syriacœ, 
1787.  Des  Chrestomathies  pourvues  de  Glossaires  ont  été 
publiées  par  Kirsch  et  Bernstein  (Leipzig,  1834),  par 
Oberieitner  (Vienne,  1836),  par  Rœdiger  (Halle,  1838^. 

SYRIAQUE  (Littérature).  La  Syrie  a  été,  pendant  les 
premiers  siècles  de  l'ère  chrétienne,  le  centre  d'un  mou- 
vement littéraire  assez  considérable,  et  les  écrits  qui  sont 
sortis  des  écoles  d'Êdesse  et  de  Nisfbis  ont  une  grande 
importance  pour  l'histoire  de  l'Orient.  Il  on  est  un  cer- 
tain nombre  où  Ton  trouve  la  mention  ou  la  traduction 
de  livres  persans  et  surtout  de  livres  grecs  dont  les  ori- 
ginaux sont  perdus  aujourd*hui.  Les  ouvrages  syriaques 


SYS 


1G92 


SYZ 


sont  principalement  consacréfl  wjx  matières  religieuses  : 
ce  sont  des  versions  et  des  commentaires  de  l'Écriture 
sainte,  des  liturgies,  des  traités  dogmatiques  ou  polé- 
miques. Une  des  versions  de  la  Bible  date  du  i\*  siècle, 
et  l'on  peut  la  regarder  comme  la  première  traduction  qui 
ait  été  faite  de  Toriginal  :  il  y  en  a  une  autre  de  Phi- 
loxène,  évéque  monophysite  d'Hiéropolis  au  v"  siècle,  et 
une  3*  dite  de  Palestine  ou  de  Jérusalem.  Le  gnostiquo 
fiardesane  composa  des  poésies  syriaques  au  u*  siècle. 
Au  IV*,  S^  Éphrem,  auteur  de  poésies  sacrées,  de  com- 
mentaires sur  la  Bible,  et  de  traités  contre  les  Marcio- 
nites  et  les  Bianichéens,  se  servit  tantôt  de  la  langue 
grecque,  tantôt  du  syriaque.  Théophile  d'Édesse  fit,  en 
770,  une  traduction  syriaque  des  poèmes  d'Homère.  Bar- 
HebriBus  (Aboul-Faradj  )  écrivit,  pendant  le  xni*  siècle, 
une  Histoire  universelle,  qu'il  traduisit  ensuite  en  arabe; 
il  a  laissé  en  outre  deux  Grammaires,  l'une  en  vers  et 
l'autre  en  prose.  —  L'attention  de  l'Europe  savante  n*a 
été  attirée  sur  la  littérature  syriaque  que  depuis  le  pon- 
tificat de  Clément  XI,  qui  fit  commencer  une  collection 
de  manuscrits  à  la  bibliothèque  du  Vatican.  Dans  notre 
siècle,  le  Musée  britannique  de  Londres  a  acquis  plus 
de  500  volumes  syriaques,  recueillis  dans  un  couvent  à 
Nitria  (Haute-Égypie);  on  en  a  tiré,  pour  les  imprimer, 
les  Lettres  de  S^  Ignace  de  Césarée  et  la  Théophanie 
d'Eusèbe.  V,  Assemaoi,  Bibliotheca  orientaliSf  Rome, 
1719-28,  A  vol.  in-fol.;  Rosen,  Catalogus  codicum  mon 
rmscriptorum  syriacorum,  Londres,  1838;  Wenrich, 
De  auctorum  grœcorum  versionibus  et  commentariis  sy- 
riacis,  Leipzig,  1842;  Gureton,  Spiciiegium  syriacum, 
Londres ,  1855. 

SYRIEN Ë  (Idiome) ,  idiome  finnois  ou  tartare,  parlé 
par  la  tribu  des  Syriènes  entre  la  Dwina  septentrionale 
et  le  M ézen.  Il  a  souvent  des  formes  plus  anciennes  que 
le  finnois  ou  finlandais  ;  par  exemple,  il  a  la  consonne  t 
là  où  elle  est  remplacée  par  s  dans  les  langues  occiden- 
tales de  la  famille.  Beaucoup  de  mots  russes  s'y  sont  in- 
troduits. La  Bible  a  été  traduite  en  syriène  avec  l'al- 
phabet russe  ;  mais  on  se  sert  aussi  de  l'alphabet  latin. 
V,  Gabelentz,  Essai  sur  la  grammaire  syrien»,  en 
allem.,  Altenbourg,  1841  ;  Castrén,  Elementa  gramma- 
tices  syrienoBf  et  De  nominum  declinoHone  m  lingua  sy- 
riena,  Helsingfors,1844;  Wiedemann,  Essai  sur  la  gram- 
maire de  la  langue  syriène,  en  allem.,  Revel,  1847. 

SYRINGES,  nom  donné  aux  galeries  des  hypogées 
égyptiennes. 

SYRINX.  V.  Flotb  de  Paw. 

SYRMA,  manteau.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire. 

SYRMIEN  (Idiome).  V.  Sebbb. 

SYSSITIES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

SYSTÈME  (du  grec  systéma,  assemblage;  dérivé  de 
syn,  avec,  et  tithémi,  je  place),  littéralement,  réunion 
de  plusieurs  choses  pour  former  un  seul  tout.  Scientifl- 

3uement,  ce  mot  exprime  la  mise  en  ordre  des  idées, 
es  matériaux  d'une  science,  et  son  unité.  Cet  arrange- 
ment méthodique  des  parties  d'une  science  est  encore 
une  synthèse.  11  v  a  autant  de  systèmes  qu'il  y  a  de 
sciences  particulières  ;  et  celles-ci  contiennent  des  sub- 
divisions, qui  donnent  lieu  à  des  systèmes  plus  res- 
treints. Un  système,  étant  le  résultat  d'une  étude  plus  ou 
moins  approfondie,  est  plus  ou  moins  l'expression  de  la 
férité,  selon  que  les  recherches  ont  été  plus  ou  moins 


exactes  et  complètes;  tels  sont  :  en  astronomie,  le  syv 
tème  de  Copernic;  en  philosophie,  le  spiritualisme-,  cq 
histoire  naturelle,  le  système  ou  la  méthode  des  deu\  Ds 
Jussieu  pour  les  végétaux ,  de  Cuvier  pour  les  animaux. 
Un  système  est  le  plus  souvent  un  point  de  vue  exclusif. 
incomplet,  contenant  partiellement  la  vérité,  et,  par 
suite,  l'erreur.  Ainsi  la  philosophie  donne  le  matOrii- 
lisme,  l'idéalisme,  le  mysticisme,  etc.;  l'histoira  niitu- 
relle  donne  les  systèmes  de  Toumefort,  de  Linné,  etc. 
En  général ,  un  système  peut  être  faux  d'autant  de  ma- 
nières que  l'analyse  qui  sert  de  base  à  la  synthèse  doni 
il  est  Texpression  peut  être  inexacte.  De  là  vient  que  lo 
mot  système  se  prend  quelquefois  en  mauvaise  part ,  une 
foule  de  tentatives  dites  scientifiques,  surtout  dans  ki 
temps  anciens,  n'offrant  que  des  conceptions  de  Timagi- 
nation,  comme  on  en  voit  tant  d'exemples  dans  les  s)s- 
tèmes  hypothétiques  des  philosophes,  des  astronomes, 
des  naturalistes,  des  médecins.  —  Système  exprime  en- 
core un  ensemble  de  parties  liées  entre  elles  et  qui  dé* 
pendent  l'une  de  l'autre,  comme  le  système  alpique  pour 
désigner  la  chaîne  des  Alpes.  En  Finances,  le  mot  Sys- 
tème ^  employé  seul ,  veut  toujours  dire  le  système  de 
Law.  Condillac  a  écrit  un  Traité  des  systèmes,  surtout  au 
point  de  vue  philosophique.  R. 

SYSTÈME,  nom  donné,  dans  la  Métrique  ancienne,  à  un 
assemblage  de  plusieurs  vers  formant  un  enchaînement 
continu  :  telles  sont  les  strophes  lyriques  grecques  et  la- 
tines. II  y  avait  le  système  trochaîque,  le  système  dac- 
tylique,  anapestique,  etc.  Tant  que  le  système  n'était 
pas  terminé,  on  pouvait  passer  d'un  vers  k  l'autre  en 
coupant  un  mot;  mais  tout  système  devait  se  terminer 
sur  un  mot  entier.  Un  système  ne  pouvait  contenir  des 
strophes  de  différentes  espèces  ;  mais  une  strophe  pou- 
vait contenir  plusieurs  systèmes,  et  l'on  passait,  par 
exemple,  du  système  anapestique  au  système  dacty- 
lique.  Un  fragment  de  Simonide  présente  des  tercets 
dont  le  l*'  vers  est  un  héroïque,  le  2*  un  élégiaque,  le 
3*  un  trimètre  lambique,  et  la  pièce  tout  entière  devait 
se  poursuivre  dans  cet  ordre.  P. 

SYSTàHB,  mot  employé  dans  la  Musique  des  anciens 
Grecs  pour  signifier,  tantôt  ce  que  nous  appelons  gamme 
ou  échelle ,  tantôt  un  intervalle  composé. 

SYSTOLE  (du  grec  systole,  resserrement,  abrévia- 
tion ),  terme  de  Grammaire  et  de  Prosodie  grecque,  qui 
s'appliquait  k  l'abréviation  d'une  syllabe  longue  soit  à  h 
fin ,  soit  au  milieu  des  mots,  lorsque  cette  syllabe  était 
immédiatement  suivie  d'une  voyelle.  Ainsi  l'oméga  de 
aoDÔ  compte  comme  bref  devant  hélôn;  la  diphthongue  ei 
de  épei  (après  que)  s'abrège  devant  la  particule  e\piétire 
è  (donc);  Véta  de  dèïos  (ennemi)  s*abrége  au  be^ioin, 
surtout  au  ^nitif  et  au  datif  des  trois  nombres  et  à  l'ac- 
cusatif pluriel  ;  la  diphthongue  oï  du  verbe  poïéô  devient 
fréquemment  brève  chez  les  poètes  athéniens,  etc.  On 
retrouve  en  latin  l'équivalent  de  ces  s^toles  dans  c(^ 
deux  fins  de  vers  de  Virgile  :  sûb  ïlïë  alto,  BhÔdÔpèUt 
ârcês;  au  commencement  de  celui-ci  d*Horace  :  Si  mè 
àmàs,  inquit;  dans  l'abréviation  de  la  pénultième  des 
troisièmes  personnes  en  erunt  :  mîscUèruntque  hêrbàs. 
Le  contraire  de  la  systole  est  VEctase  (  V.  ce  mot),    P. 

SYSTYLE  (du  grec  syn,  avec,  et  stylos,  colonne  , 
c.-à-d.  à  colonnes  serrées,  se  dit,  en  Architecture,  d'un 
édifice  dont  les  colonnes  sont  distantes  les  unes  des 
autres  de  deux  diamètres  ou  quatre  modules. 

SYZYGIE ,  terme  de  Prosodie  ancienne.  V.  Dipodib. 


T 


T,  20*  lettre  et  IC"  consonne  de  notre  alphahct,  repré- 
sentant une  articulation  à  la  fois  linguale  et  dentale.  Le 
t  final  dans  les  mots  français  est  généralement  muet  :  bât, 
fluet,  lit,  pot,  fût,  vent,  part,  mort,  tant,  il  vaut, 
veut,  sert,  peint,  meurt,  etc.;  mais  on  le  fait  entendre 
dans  fat,  net,  granit,  dot.  bnU,  rapt,  lest.  Le  t  sMntercale 
quelquefois  comme  lettre  euphonique  entre  le  verbe  et 
le  pronom  sujet ,  quand  celui-ci  est  placé  en  dernier  : 
dkt-tl,  aime-^-on,  ose^U-elle,  L*affinité  naturelle  qui  existe 
entre  les  articulations  t%td  explique  les  permutations 


qui  ont  souvent  lieu  entre  elles  :  ainsi ,  dans  les  anciens 
manuscrits  latins,  on  trouve  set  pour  sed,  quoi  pour 
quod,  haut  pour  haud,  adque  pour  aUjue;  le  motlaiia 
tu  a  pour  équivalent  en  allemand  le  mot  du;  les  Alle- 
mands, qui  distinguent  difiicilement,  en  parlant  les  tan- 
gues étrangères,  les  articulations  t  et  d,  ont  écrit  leur 
nom  national  indistinctement  teutsch  et  detdsch,  et  leur> 
mots  gott  et  tag  sont  devenus  en  anglais  god  et  day;  noua 
avons  écrit  verd  aussi  bien  que  vert,  et  nous  prononr^i 
le  d  final  comme  un  t,  quand  il  est  suivi  d*an  mot  cois- 


TAD 


1693 


TAB 


.ncnçnnt  par  une  consonne  oa  une  h  muette  {grand 
arbre,  grand  homme],  —  Outre  le  tau  (T,  t)  qui  corres- 
pond à  notre  f,  les  Grecs  avaient  une  lettre  appelée 
thêta  (6,  6),  dont  l'articulation,  aspirée  et  sifflante,  était 
analogue  à  celle  du  th  anglais.  Nous  la  traduisons  aussi 
par  le  groupe  th,  auquel  nous  ne  donnons  cependant 
pas  d'autre  son  que  celui  du  t.  Toutefois,  un  son  ana- 
logue à  celui  du  thêta  est  attribué  au  t  suivi  de  i  dans 
certains  mots  :  abbatial ,  ambition,  argutie,  balbutier, 
factiet4X,  initié,  patient,  partiel ,  etc.  —  Comme  abrévia- 
tion dans  les  inscriptions  et  sur  les  médailles  romaines, 
T  indique  certains  noms  d'hommes  ou  de  lieux,  Titus, 
Tibérius,  TiUlius,  Tarraco.  A  Rome,  les  tribuns  du 
peuple  apposaient  un  T,  lettre  initiale  de  leur  nom,  sur 
les  sénatus-consultes  qu'ils  approuvaient.  Dans  la  nota- 
tion musicale  du  moyen  âge,  T  signifiait  ton  on  seconde 
majeure,  TS  ton  et  semi-ton  ou  tierce  mineure,  TT,  ton 
et  ton  ou  tierce  majeure.  T  indiquait  aussi  la  partie  de 
Taille.  Chez  nous,  T.  F.  veut  dire  travaux  forces;  T.  P., 
travaux  forcés  à  perpétuité.  Dans  les  prénoms,  Th.  est 
pour  TModore,  Thomas,  Thérèse,  —  Signe  numéral ,  le 
thêta  grec  valait  9;  le  tou,  300,  et,  précédé  d'un  accent 
en  bas  (^t),  300,000.  Pour  les  Romains,  T  parait  avoir 
représenté  160,  et'T  160,000.  T  a  été  la  marque  monétaire 
de  Nantes.  B. 

TAALIK  ou  TALIK  (Écriture).  V.  Perse  (Langues  de  la). 
TABAC.  L'impôt  sur  le  tabac  en  France  date  de  1629  : 
il  fut  d'abord  de  40  sous  par  100  livres  ;  puis,  en  1638,  on 
le  porta  à  7  livres.  Le  gouvernement,  frappé  de  la  grande 
consommation  de  cette  plante,  se  r^rva  bientôt  Te  mo- 
nopole de  la  fabrication  et  de  la  vente.  Le  privilège  en 
fut  affermé,  en  1674,  pour  6  ans,  à  un  certain  Jean  Bre- 
ton, moyennant  600,000  liv.;  on  flxa  alors  un  certain 
nombre  de  Généralités  où  la  culture  du  tabac  fut  per- 
mise. En  1718,  la  Ferme  du  tabac  fut  cédée  à  la  Compa- 
gnie des  Indes  pour  4,000,000  de  liv.;  en  1771,  elle  éUit 
de  27  millions;  en  1789,  de  32  millions.  En  1791,  le  mo- 
nopole fut  supprimé  et  la  culture  rendue  libre,  moyen- 
nant des  droits  qui  ne  s'élevèrent  pas  en  moyenne  à  plus 
de  15  millions  par  an.  A  la  fin  de  1810,  le  gouvernement 
décréta  la  reprise  du  monopole  des  tabacs,  et  le  reprit 
au  I*' juillet  1811,  en  payant  100  millions  de  tt,  le  ma- 
tériel et  les  marchandises  des  fabricants.  Le  tabac  a 
donné  au  Trésor  des  bénéfices  toujours  croissants  :  en 
1824,  de  42  millions;  en  1841 ,  de  72  millions;  en  1850, 
de  122  millions;  en  1855,  de  152  millions;  en  1861,  de 
183  millions.  Le  système  du  monopole  ayant  développé 
Il  contrebande  sur  une  grande  échelle,  on  vend,  k  prix 
niduits,  dans  les  départements  frontières,  certains  tabacs 
ilits  de  cantine;  mais  ce  moyen  a  peu  d'efficacité  pour 
neutraliser  le  mal.  L'achat,  la  fabrication  et  la  vente  des 
tabacs,  tant  indigènes  qu'étrangers,  sont  attribués  exclu- 
sivement k  la  Régie  des  contributions  indirectes.  Nul  ne 
peut  avoir  en  sa  possession  des  tabacs  en  feuilles,  8*il 
n'est  cultivateur  dûment  autorisé.  Nul  ne  peut  avoir  en 
provision  d'autres  tabacs  fabriqués  que  ceux  des  manu- 
factures nationales,  et  cette  provision  ne  peut  excéder 
10  kilogr.  La  culture  du  tabao  est  autorisée  dans  12 
(lépariements  :  les  Alpeâ-Maritimes,  les  Bouohes-du- 
Hhône,  la  Dordogne,   la  Gironde^   rille-et-Vilaine,  le 
Lot,  le  Lot-et-Garonne,  la  Meurthe-et-Moselle,  le  Nord, 
le  Pas-de-Calais,  la  Haute-Saône,  et  le  Var.  Il  y  a  encore 
l'Algérie,  et,  à  titre  d'essai,  la  Corse  et  la  Haute-Sa- 
voie. Les  cultivateurs  sont  astreints  àtivrer  leur  tabac 
k  la  Régie  à  des  prix  déterminés.  Les  faits  de  vente 
Illicite,  de  colportage,  de  possession  de  tabac  au  delà 
d'une  certaine  quantité,  sont  punis  de  peines  spécifiées 
dans  les  décrets  du  29  nov.  1810  et  12  janv.  4811,  la 
loi  du  26  avril  1816,  et  les  ordonnances  royales  des  27 
août  1839,  22  oct.  1843,  16  juin  1844,  et  28  juin  1846. 
Une  administration  particulière  est  chargée  de  la  fa- 
hrioation  des  tabacs;  on  compte  16  manufactures  na- 
tionales: Paris  (Gros-Caillou  et  Reuilly),  Bordeaux, 
Ohàteauroux,  Dieppe,  le  Havre,  Lille,  Lyon,  Marseille, 
Morlaix,  Nantes,  Nancy,   Nice,  Riom,  Tonneins,  et 
Toulouse  ;  plus  de  20,000 ouvriers,  hommes  ou  femmes, 
y  sont  employés  dans  ces  manufactures.  On  appelle  Bu- 
t-eaux de  tabac  les  licences  concédées  par  le  gouver- 
lement  pour  la  vente  en  détail  des  tabacs  de  la  Régie; 
il  y  en  a  plus   de  36.000.  ^  En  Belgique,  dans  les 
Pays-Bas,  en  Danemark,  en  Suède,  en  Russie  et  dans  les 
États  allemands  du  Zollverein ,  la  culture,  la  fabrication, 
l'introduction  et  la  vente  des  tabacs  sont  abandonnés  à 
riudustrie  particulière,  qui  paye  seulement  un  impôt 
3ivis  ou  moins  élevé  sur  l'importation  et  la  fabrication. 
Zù  Autriche,  le  gouvernement  a  le  monopole,  comme  en 


France.  Le  système  des  fermes  existe  en  Espagne  et  en 
Portugal.  La  fabrication  et  la  vente  sont  libres  en  An- 
gleterre, sauf  le  payement  de  droits  très-élevés  ;  mais  la 
culture  est  interdite.  B. 

TABARD,  ancienne  espèce  de  surtout  ou  de  tunique.  Il 
fut  porté  d'abord  par  plusieurs  classes  d'hommes  pendant 
le  moyen  âge,  puis  réservé  aux  hârauts  d'armes.  Il  porta 
alors  les  armoiries  du  seigneur  que  le  héraut  représen* 
tait  Les  manches  du  tabard,  élargies  par  le  bas,  ne 
descendaient  pas  an-dessous  du  coude. 
TABELLAIRE.  )  K.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 
TABELUON.  )  de  Biographie  et  d^Histoire, 
TABERNACLE.  Ce  mot,  outre  le  sens  qu'il  reçut  chez 
les  Hébreux  (F.  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d*Histoire)y  d&igne  un  édicule  de  marbre  ou  de  menui- 
serie qui  est  placé  au  centre  de  l'autel  dans  les  églises 
catholiques,  et  où  Ton  renferme  le  ciboire  et  les  hosties 
consacrées.  Il  y  a  des  tabernacles  isolés;  d'autres  sont 
assembla  avec  le  retable  et  le  contre-retable.  La  forme 
qu'on  leur  donne  actuellement  ne  remonte  pas  à  une 
époque  très-ancienne  ;  car,  pendant  plusieurs  siècles,  la 
résôre  eucharistique  fut  conservée  dans  le  ciborium 
(K.  ce  mot).  L'art  a  souvent  épuisé  toutes  ses  ressources 
pour  construire  et  décorer  les  tabernacles  ;  parmi  les  mo- 
numents de  ce  genre,  on  peut  citer  ceux  de  la  cathédrale 
d'Ulm ,  des  églises  S^Laurent  k  Nuremberg,  S'-Martin  k 
Courtray,  S^Pierre  à  Louvain,  des  cathédrales  de  Tour- 
nai ,  de  Grenoble  et  de  SWean-de-Maurienne,  de  l'église 
S'-Georges  à  Haguenau,  etc.  —  Quelques  archéologues 
donnent  le  nom  de  tabernacle  au  dais  ouvragé  qui  sur- 
monte les  statues  de  la  période  ogivale,  B. 

TABLATURE  (du  latin  tabula)^  nom  donné,  dans  l'an- 
cienne Musique,  à  la  totalité  des  signes  de  la  musique,  à 
l'art  de  les  employer  pour  noter  un  morceau  vocal  ou 
instrumental,  et  à  l'art  de  les  lire.  Les  Italiens  disaient 
Intavolatura.  Comme  les  signes  étaient  alors  les  lettres 
de  l'alphabet,  majuscules  pour  la  f*  octave  ou  la  plus 
grave,  minuscules  pour  la  i*,  surmontées  d'un  petit  trait 
horizontal  pour  la  3*,  de  deux  petits  traits  pour  la  4*,  et 

3u'on  employait  encore  d'autres  signes  pour  indiquer  la 
urée  des  sons ,  il  y  avait  là  des  difflcultés  sérieuses  .de 
lecture.  Aussi  a-t-on  dit  proverbialement  :  Donner  dé  la 
tablature  k  quel(iu*un,  pour  dire  qu'on  lui  donne  de 
l'embarras.  Depuis  qu'on  a  préféré  les  notes  aux  lettres, 
les  Allemands  ont  seuls  conservé  pendant  quelque  temps 
encore  l'ancienne  tablature.  —  Tablature  a  désigné  aussi 
une  certaine  manière  de  noter  par  lettres  les  parties  du 
luth,  du  théorbe,  de  la  guitare,  et  de  quelques  instru- 
ments du  même  genre.  On  figurait  les  cordes  par  des 
lignes  parallèles  :  A,  sur  la  ligne  d'une  corde,  marquait 

3u'il  fallait  la  pincer  avide;  B,  qu'il  fallait  mettre  un 
oigt  de  la  main  gauche  sur  la  première  touche  du 
manche,  etc.  —  On  i4>pelle  encore  Tablature  un  tableau 
représentant  un  instrument  à  vent  et  k  trous,  flûte,  fla- 
geolet, clarinette,  basson,  etc.  :  de  chacun  des  trous  par- 
tent des  lignes  horizontales,  sur  lesquelles  reposent,  de 
distance  en  distance,  des  O  pleins  ou  vides;  si  l'O  est 
plein,  il  indique  que  le  trou  doit  être  bouché;  s'il  est 
vide,  le  trou  doit  rester  ouvert,  pour  former  tel  ou  tel  son 
désigné  en  marge.  Comme  la  plupart  des  sons  ne  s'ob- 
tiennent que  par  le  concoun  de  plusieura  doigts,  et 
môme  de  tous  les  doigts  ensemble,  la  tablature  présente 
encore  des  lignes  qui  tombent  perpendiculairement  sur  les 
lignes  horizontales  :  en  suivant  cette  autre  direction,  et 
en  faisant  attention  aux  O  pleins  on  vides  qu'elle  donne, 
on  parvient  à  connaître  la  quantité  de  trous  qaMl  faut 
ouvrir  ou  fermer  pour  obtenir  telle  Ou  telle  note.  On 
trouve  la  tablature  de  chaque  instrument  en  tète  des  Mé- 
thodes de  cet  instrument.  Il  y  a  quelquefois  une  tabla- 
ture particulière  qui  marque  le  doigté  de  certains  trilles, 
inexécutables  avec  le  doigté  ordinaire.  B. 

TABLE  (du  latin  ta6tf/a) ,  meuble  de  matière  et  de  formes 
très-variées.  Les  anciens  Grecs  y  apportèrent  un  grand 
luxe.  Leura  tables  étaient  faites  en  bois  poli  avec  art,  les 
pieds  peints  de  couleun  diverses;  les  uns  prétendent 
qu'elles  étaient  circulaires,  les  autres  qu'elles  présen- 
taient un  parallélogramme.  Les  citoyens  de  condition 
moyenne  n'employaient  à  la  fabrication  de  ces  meubles 
qu'un  bois  grossier,  et  des  tréteaux  pour  le  supporter; 
les  riches  se  servaient  de  bois  précieux,  et  les  supports 
ou  pieds,  travaillés  en  ivoire,  représentaient  des  lions, 
des  léopards  ou  quelque  autre  animal.  Comme  l'usage  du 
linge  n'était  pas  connu ,  on  lavait  les  tables  avec  des 
éponges.  —  Les  Romains,  avant  de  pénétrer  an  Asie, 
n'eurent,  comme  nous  l'apprend  Horace,  que  des  tables 
de  frêne,  d'érable  ou  de  chêne,  quadraogulaires,  et  à 


TAB 


1694 


TAB 


tflois  ou  quatre  pieds.  Après  leurs  conquêtes  en  Orient, 
ils  surpassèrent  les  Grecs  en  magnificence  :  leurs  tables, 
rondes,  portées  sur  un  seul  pied  d'argent,  d'ivoire  ou 
d'airain,  furent  formées  des  bois  les  plus  rares,  enrichis 
de  sculptures.  G.  Graochus  en  eut  une  supportée  par 
deux  dauphins  en  argent  massif.  Les  tables  les  plus  re- 
cherchées étaient  prises  dans  un  nœud  de  la  racine  du 
citre,  arbre  qui  croissait  en  Mauritanie,  et  leur  méritn 
consistait  dans  certaines  dispositions  des  Teines  du  bois. 
Il  y  avait  les  tables  tigrines,  où  les  veines  ondulées  s'al-. 
longeaient  comme  les  rayures  de. la  peau  du  tigre;  les 
panthérines,  où  les  veines  contournées  et  revenant  sur 
elles-mêmes  s'arrondissaient  en  forme  de  taches;  les 
apiatês,  dont  les  veines,  entassées  et  serrées,  ressem- 
blaient k  un  semis  de  graines  de  persil  {apium).  D'autres 
oflTraientdes  ondulations  crêpées,  estimées  surtout  si  elles 
imitaient  les  yeux  de  la  queue  du  paon.  La  nuance  do 
vin  miellé,  avec  des  lignes  brillantes,  était  collo  qu'on 
préférait,  La  plus  grande  table  en  citre  que  l'on  ait  vue 
est  celle  de  Ptolémée,  roi  de  Mauritanie;  elle  avait  l'",50 
de  diamètre  et  0"*,8  d'épaisseur.  Cicéron  paya  une  table 
on  bois  de  citre  1  million  de  sesterces  (2 iO,OÛOfr.);Asini us 
Gailua  en  avait  une  de  1,100,000  sesterses  (231,000  fr.  )  ; 
une  table  provenant  du  roi  Juba  fut  vendue  1,200,000  ses- 
terces (252,000  fr.)i  Pline  (XIII,  iî)-30)  en  mentionne  une 
autre  qui  avait  été  achetée  1 ,400,000  sesterces  (294,000  fr.) . 
Les  Romains  eureot  de  petites  tables  appelées  abaques, 
sur  lesquelles  ils  étalaient  des  vases  précieux;  elles 
avaient  un  rebord  destiné  à  empêcher  la  chute  des  ob- 
jets. On  se  servit  aussi  d'abaques  pour  Jouer  aux  dés. 

Les  premières  tables  à  manger  dont  on  ait  gardé  la  tra- 
dition en  France  étaient  des  plateaux  demi-circulaires, 
avec  rebords  ou  galeries  d'où  tombaient  des  draperies  qui 
cachaient  les  tréteaux  :  sur  ces  tables  étaient  posées  seu- 
lement les  choses  solides,  et,  quand  le  convive  avait  soif, 
il  se  levait  pour  aller  boire  au  dressoir  ou  à  lacrédence; 
les  plats  eux-mêmes  n'étaient  pas  toujours  servis,  et  le 
buiTet  en  était  paré;  les  vins  fins,  les  liqueurs,  les  épices, 
attendaient  leur  emploi  sur  de  petites  tables  à  demeure 
on  bois,  en  métal,  en  marbre,  quelquefois  en  argent  ou 
en  or,  enrichies  de  mosaïques,  d'incrustations,  de  pein- 
tures et  de  pierreries.  Plus  tard,  les  tables  devinrent 
ovales,  oblongues,  à  pieds  droits,  à  devanture  découpée, 
grillagée  ou  pleine,  sur  laquelle  pour  amusement  se 
voyaient  des  sujets,  des  devises,  des  sentences  d'hygiène 
ou  de  cuisine.  Au  rapport  d'Éginhard,  Gliarlemagne  fit 
faire  trois  tables  d'argent,  sur  lesquelles  on  avait  repré- 
senté Rome,  Gonstantinople,  et  tout  le  monde  connu.  Il 
y  eut,  au  moyen  âge,  des  tables  tout  étroites,  pour  manger 
deux  seulement,  non  pas  vis-à-vis,  mais  côte  à  côte.  La 
grande  table  des  festins  était  ce  qu'elle  est  restée,  une 
suite  de  planches  assemblées  sur  des  tréteaux,  en  fer  h 
cheval  presque  toujours,  les  convives  assis  d'un  seul  côté, 
le  dos  au  mur,  afin  d'être  h  Taise  pour  voir  les  BtUre^ 
mets  ou  divertissements;  les  domestiques  servaient  par 
devant.  On  fit  sous  Louis  XI  le  guéridon,  la  table  carréo 
à  un  pied,  et  la  table  à  jouer.  B. 

TABLB,  en  termes  d'Architecture,  partie  de  mur  unie  et 
lisse,  saillante  ou  renfoncée,  et  ordinairement  de  forme 
rectangulaire.  Surmontée  d'une  corniche,  elle  est  dite 
table  couronnée.  Quand  une  table  saillante  doit  recevoir 
un  bas^relief  ou  une  inscription,  on  la  nomme  table 
d'attenU. 

TABU^  nom  qu'on  donnait  autrefois  en  Hongrie  à  la 
Diète,  qui  se  composait  de  deux  chambres  ou  Uibles,  la 
table  haute  et  la  table  basse. 

TABLE,  tableau  dti  certaines  matières  sont  disposées  de 
façon  qu'on  peut  les  embrasser  d'un  seul  coup  d'œil 
ou  les  trouver  facilement;  telles  sont  les  Tables  chrono- 
logiques, 

TABLB  (  sainte),  balustrado  ou  grille  qui,  dans  les  églises, 
sépare  le  chœur  du  sanctuaire,  et  où  les  fidèles  viennent 
s'sigenouiller  pour  recevoir  la  communion.  Elle  est  garnio 
de  nappes  que  les  communiants  tendent  au-dessous  de 
leur  visage.  —  Par  extension,  Sainte  Table  s'entend  de 
la  Communion  elle-même. 

TABLB  d'aotel,  table  do  pierre  élevée  sur  des  piliers,  de 
pierre  aussi,  ou  sur  un  massif  de  maçonnerie,  et  sur  la- 
quelle on  dit  la  messe.  Ce  peut  être  aussi  une  table  de 
menuiserie. 

table  dd  «ATI,  nom  donné,  dans  le  Banat  (royaume  de 
Hongrie),  &  la  Cour  de  Justice  qui  siège  à  Agram  et  que 
le  Ban  préside. 

TABLB  D'UARMONIB.  V,  HABPB,   PiAHO. 

table  isiaqdk.        I  V.  ces  mots  dans  notre  Diction' 
T\BLB  nB  vinBRB.   {      naire  (îs  Hiogr,  et  d'Histoive, 


table  des  MATiènEs,  liste,  plus  ou  moins  dûtailUJt»,  i-i 
par  ordre  alphabiHiquc,  des  matières  traitées  dans  tm 
livre.  Elle  se  met  ordinairement  à  la  fin  de  l'ouvrage,  et 
son  but  est  d'y  faciliter  les  recherches,  quand,  aprrs 
l'avoir  lu,  ou  même  sans  l'avoir  lu,  on  veut  le  consulter, 
y  faire  ou  refaire  des  lectures  partielles.  Les  Tables  da 
matières  sont  une  invention  de  l'Antiquité  latine,  mais 
qui  ne  remonte  pas  plus  haut  qu'un  contemporain  et 
ami  de  Cicéron,  le  médecin  Valérius  Soranus  :  dans  un 
ouvrage  intitulé  Épotides,  il  avait  placé  en  tête  on  som- 
maire détaillé  des  chapitres.  Columelle,  dans  son  Aori- 
culture,  mit  &  la  fin  du  onzième  livre  les  arguments  des 
livres  précédents.  Enfin  Pline  l'Ancien,  publiant  son 
immense  recueil  qu'il  appela  Histoire  natwrelle,  le  fit 
précéder,  à  l'instar  de  Soranus,  dont  il  cite  l'exemple, 
d'une  table,  détaillée  chapitre  par  chapitre,  des  matières 
contenues  dans  chacun  de  ses  31  livres.  Avant  Soranus, 
on  avait  eu  l'idée,  pour  jeter  un  peu  de  clarté  dans  les 
livres,  qui  se  copiaient  toujours  à  pages  pleines,  d'uo 
bout  à  l'autre,  de  transcrire  en  marge  de  très-brefs  som- 
maires de  la  matière  traitée.  C'était  exactement  ce  que 
nous  appelons  aujourd'hui  des  manchettes  {V,  ce  mot  >. 

—  Les  Anciens  ne  paraissent  pas  avoir  connu  la  Taille 
analytique,  cette  invention  si  précieuse  pour  faciliter  Ita 
recherches  et  secourir  la  mémoire  des  savants.  Il  faut  un 
certain  talent  pour  bien  dresser  une  pareille  table,  beau- 
coup d'exactitude,  de  la  sagacité  dans  la  lecture  et  le 
dépouillement  préliminaire,  enfin  de  la  concision,  pour 
ne  mettre  dans  la  rédaction  ni  un  mot  de  plus,  ni  un  mot 
de  moins,  et  être  toujours  très-clair.  G.  D— y. 

TABLB  RONDE.  \    y    ^^  ^^j^    j^^S   HOtTe    DlC- 

TABLB  THÉoDOSiENîiB.    (      tlonnaire  de  Biographie  et 
TABLES  (Les  DoDXB).     i      d'Histoirc. 

TABLES  AUMENTAIRES.    ] 

TABLES  d'amalfi.  V.  AtfALnTATNEs  (Tables). 
TABLES  DBS  cÉRiTES.  K.  DotTO  DtctionncUre  d€  Biogra' 
phie  et  d'Histoire, 

TABLES  B0GUBINE8.  V.  EOGUBITIES. 

TABLES  DB  LA  LOI.  V.  notTO  Dictionnoire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

TABLEAU  (du  latin  tubvtla^^  ouvrage  de  panture  exé- 
cuté sur  une  toile,  ou  sur  une  table  de  bois,  de  cuivre,  eir. 

—  Aux  termes  du  Code  Napoléon  (art.  525,  5M),  les  ta- 
bleaux sont  considérés  comme  immeubles  quand  ils  sont 
placés  k  perpétuelle  demeure;  ils  sont  meubles,  quand 
ils  font  partie  d'une  collection  dans  un  cabinet  ou  une 
galerie. 

TABLEAU,  en  termes  d'Architecture,  partie  de  Tépaiv 
sour  d'un  bois  de  porte  ou  de  fenêtre  qui  est  en  dehors 
de  la  fermeture;  partie  de  l'épaisseur  d'un  mur  qui  forme 
le  côté  d'une  baie,  et  s'étend  depuis  l'arête  extérieure 
jusqu'à  la  feuillure. 

TABLEAU,  en  termes  de  Marine,  partie  de  la  poupe  d'un 
navire  qui  est  en  dessous  des  contours  du  couronnement, 
et  où  sont  percées  des  fenêtres.  Elle  est  généralement 
ornée  de  pointures  et  de  sculptures. 

TABLEAU,  sorte  de  planche  ou  de  cadre  où  des  matièrps 
didactiques  sont  rangées  méthodiquement,  de  manièro 
(}u'on  peut  les  embrasser  d'un  coup  d'œil  et  les  retenir 
plus  aisément.  L'Histoire  naturelle  et  l'Histoire  ont  cic 
souvent  mises  en  tableaux. 

TABLEAU,  en  termes  de  Thé&tre,  nom  donné  aux  diri- 
sions  que  l'on  pratique  de  nos  jours  dans  les  actes  des 
pièces,  et  qui  sont  marquées  par  un  changement  instan- 
tané de  lieu  et  de  décoration,  sans  que  l'action  cesse  de 
l'une  à  l'autre. 

TABLEAU  d'or,  nom  donné  autrefois  aux  pièces  d'orfévrc- 
rie  estampées,  représentant  des  scènes  k  personnages, 
et  souvent  rehaussées  d'émaux  ou  de  pierreries.  Elles  nï- 
taient  souvent  que  d'argent  doré,  et  le  métal,  y  compris 
le  cadre,  pesait  moins  que  la  garniture  de  pierreries. 

TABLEAU  voTUP,  tableau  consacré  dans  un  temple  peur 
satisfaire  un  vœu.  V.  Ex-voto. 

TABLEAUX  VIVANTS,  nom  qu'on  donne  aux  repn'^ 
scntations  d'œuvres  de  la  peinture  et  de  la  plastique  p  ir 
des  personnes  vivantes.  H*"*  de  Genlis  inventa,  dit-o:-, 
ce  mode  d'instruction  et  d'amusement  pour  les  princ'^> 
d'Orléans,  et  s'aida  des  peintres  David  et  Isabey  pour  eu 
diriger  la  pratique.  Lady  Hamilton  passe  pour  avoir  ima- 
giné de  représenter,  non  plus  les  tableaux  ou  les  groupo^ 
célèbres,  mais  l'expression  corporelle  des  divers  éMs  de 
l'ùme.  De  nos  jours,  les  tableaux  vivants  ont  eu,  comcie 
spectacle  public,  un  moment  de  succès. 

TABLETIERS^  ancienne  corporation  dont  falaatent  au^si 
partie  les  peign  ter  s  on  marchands  de  peignes,  les /ovr- 
fuiwrs  et  tailleurs  d'images.  î^s  tatuea  de  cette  corpon* 


TAI 


1695 


TAL 


tlon  furent  renouvelés  en  1507,  et  confirmés  en  1578, 
lOOOetlOni. 

TABLKTTE,  en  termes  d'Architecture,  pierre  plate  qui 
termine  les  murs  d'appui  et  autres  pièces  de  maçonnerie; 
—  planclie  de  bois  ou  pièce  de  marbre  qui  est  posée  à 
plut  sur  le  chambranle  d'une  cheminée  ou  sur  Tappui 
d'une  fen^^tre. 

TABLI^rrES,  nom  donné  k  des  livres  où  les  faits  sont 
présentés  sous  formes  de  tables.  Telles  sont  les  Tabletles 
chronologiques  de  Lenglet-Dufresnoy. 

TABLKTTES  A  ^CRiRB.  F,  notFo  Dictionnairs  de  Biogra- 
phie et  d'Histoire, 

TABLKrrERIE,  industrie  qui  tient  à  la  fois  de  l'art  de 
l'ébéniste,  et  de  ceux  du  marqueteur  ot  du  tourneur. 
Elle  embrasse  une  foule  de  menus  ouvrages  d'écaille  en 
lames  ou  fondue,  de  corne,  d'ivoire,  de  nacre,  d'os,  de 
bois,  tels  que  tabatières,  peignes,  pièces  d'échiquier  et 
de  damier,  billes  de  billard,  jetons,  fiches,  dés,  étuis, 
brosses  de  toilette,  boutons,  nécessaires  de  voyage,  cou- 
teaux à  papier,  montures  de  cannes  et  de  lorgnettes,  bé- 
nitiers, crucifix,  etc. 

TABLIER  (de  table)^  pièce  d'étoffe,  quelquefois  de  cuir, 
qu'on  s'attache  à  la  ceinture,  pour  préserver  les  habits 
en  travaillant.  Chez  les  femmes  d'une  certaine  condition, 
c'est  un  ornement  de  toilette. 

TABLIER,  en  termes  de  Marine,  doublage  en  toile  à 
voilps  qu'on  ajuste  au  bas  des  huniers,  pour  les  garantir 
du  frottement. 

TABLiEn,  table  de  tout  Jeu  qui  se  joue  avec  des  pièces 
nr>l)iles  sur  une  surface  plane. 

TABLIER,  en  termes  d'Architecture,  ensemble  des  poutres 
et  des  planches  qui  forment  une  des  travées  d'un  pont  de 
bois;  —  partie  d'un  pont^levis  qui  s'abaisse  pour  donner 
passage  sur  le  fossé. 

TABLINUM.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biouraphie  et  d* Histoire, 

TABLOIN  (de  table) ^  plate-forme  de  madriers,  où  l'on 
place  les  canons  qu'on  met  en  batterie. 

TVROIînFT         l   ^'   ^®*  ™°^    ^^"*   "®*'"®    ^'C*'Oîl- 

TABliLARIliM    \      *^^^^^  ^  Biographie  et  d'Histoire. 

"TABUREL,  nom  du  tambour  au  moyen  ftge.  Cet  in- 
strument a  été  aussi  appelé  taborellus,  tabomum,  tabu- 
rium,  taburcinum,  t^ioorinum. 

TACET,  c.-&-d.  en  latin  {/  se  tait,  mot  qu'on  écrit  dans 
la  musique  pour  indiquer  le  silence  d'une  partie  pendant 
un  morceau. 

TACHYGRAPHIE  (du  grec  takhus,  rapide,  et  graphe, 
écriture),  tout  système  d'écriture  abrégé  qui  a  pour  objet 
do  transcrire  le  discours  au  fur  et  à  mesure  qu'il  est 
prononcé.  V,  Sti^noghaphie. 

TACITE  RECONDUCTION.  V.  Reconduction. 

TACTIQUE.  V.  Stratégie. 

TAEL,  TAIL  ou  TALE,  monnaie  de  compte  usitée  en 
Chine  et  au  Japon,  et  qui  vaut  à  peu  près  8  fr.  25. 

TAGALE  (Langue),  langue  parlée  par  les  Tagales  de 
nie  de  Luçon  (Philippines).  Riche,  harmonieuse,  plus 
compliqué»  dans  ses  formes  q^ue  beaucoup  d'autres  lan- 
gues malaises,  elle  possède  trois  passifs,  un  duel  pour  les 
trois  personnes,  et,  outre  le  pluriel  ordinaire,  un  autre 
pluriel  de  la  1'"  personne  qui  exclut  celle  à  laquelle  on 
parie.  Elle  omet  presque  toujours  le  verbe  être,  dont  le 
sens  est  sous-entendu  ou  exprimé  par  la  position  des 
mots  dans  la  phrase.  Il  y  a  une  littérature  tagale  assez 
abondante,  composée  de  productions  ascétiques,  de  tra- 
gédies traduites  de  l'espagnol,  et  de  poésies  nationales. 
L'alphabet  tagal  est  le  plus  incomplet  que  l'on  connaisse  : 
il  contient  seulement  14  consonnes  et  3  voyelles. 

TAGÉTIQUES  (Livres).  V.  Achérontiens. 

TAILLE,  ancien  impôt,  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

taille,  petit  bâton  fendu  par  le  milieu  en  deux  parties, 
sur  lesquelles,  quand  elles  sont  réunies,  les  boulangers 
marquent  par  de  petites  entailles  les  pains  qu'ils  vendent 
à  crédit  h  leurs  pratiques.  Une  des  deux  parties  reste  au 
marchand,  et  se  nomme  la  souche;  l'autre,  dite  échan^ 
tillon,  reste  b,  l'acheteur. 

taille,  quantité  d'espèces  monnayées  qui  doivent  être 
faites  d'un  marc  d'or,  d'argent,  ou  de  cuivre.  On  disait 
autrefois  que  les  louis  d'or  étaient  à  la  taille  de30  pièces, 
quand  on  faisait  30  louis  avec  un  marc  d'or. 

taille,  en  termes  de  Gravure,  toute  incision  faite  sur 
le  métal  avec  le  burin  ou  la  pointe,  ou  creusée  par 
I  eau- forte.  La  taille-douce  est  la  taille  faite  au  burin 
seul,  et  sans  eau -forte,  sur  une  planche  de  cuivre. 
V.  Contre-taillï,  Gravure. 


taille,  aux  jeux  de  Pharaon,  de  Trente-et-nn,  ctc.«  se 
dit  de  la  si^rie  dos  coups  qui  se  suivent  jusqu'à  ce  que  le 
>  banquier  ait  retourné  toutes  les  cartes  du  Jeu  qu'il  a 
dans  la  main. 

TAnxB,  en  termes  de  Musique,  nom  qu'on  donnait  au- 
trefois h  la  voix  d'homme  intermt^diaire  entre  la  haute- 
contre  et  la  basse,  et  aux  parties  de  chant  qu'elle  exécu- 
tait. On  distinguait  la  haute-taille,  qui  est  notre  ténor 
d'aujourd'hui,  et  la  basse-tcUlle,  qui  est  notre  baryton 
(  V.  ce  mot).  —  Le  mot  taille  a  été  aussi  employé  pour 
désigner  une  variété  de  la  viole,  ainsi  qu'une  espèce  de 
hautbois  à  sons  graves.  B« 

TAILLE  DE  FOND,  TAILLE-POINT.  V.  CaRGDE. 
TAILLE  DBS  PIERRES.   V.  COUPB  DES  PIERRES. 

TAILLÉ,  en  termes  de  Blason,  une  des  partitions  de 
Técu.  Il  le  partage  diagoiialement  de  gauche  à  droite. 

TAILLEURS  D'HABITS,  ancienne  corporation,  formée 
depuis  1C55  par  la  réunion  de  deux  communautés  dis- 
tinctes, les  marchands  tailleurs  et  les  Pourpointiers, 
Pour  parvenir  à  la  maîtrise,  il  fallait  avoir  été  3  ans  ap- 
prenti et '3  ans  compagnon,  et  produire  un  chef-d'œuvre. 

TAILLEVAS,  nom  donné  quelquefois  au  pavois^  bou- 
clier. 

TAILLE-VENT,  voile  de  grandeur  moyenne  qui  rem- 

Elace  la  grande  voile  dans  les  lougres,  chasse-marées  et 
ateaux  de  pèche,  quand  le  vent  soufije  bon  frais. 

TAILLOIR.  V.  Abaqob. 

TAITIEN  (Idiome),  un  des  idiomes  polynésiens,  le  plus 
doux  de  tous.  En  aucun  cas  on  n'y  rencontre  deux  con- 
sonnes de  suite.  Il  lui  manque  les  sons  représentés  par 
nos  lettres  c,  f,  g,  k,  s.  Sa  déclinaison  a  un  duel.  Les 
plus  petits  changements  dans  la  prononciation  des  mots 
modifient  leur  valeur. 

TAK-KAY,  instrument  de  musique  des  Siamois,  assez, 
semblable  à  un  lézard.  Il  est  fait  de  bois  dur,  et  garni 
tout  autour  en  nacre  de  perle.  Le  corps  est  creux,  et  par 
derrière  se  trouvent  trois  ouvertures  sonores.  Trois 
cordes,  une  de  cuivre  et  les  deux  autres  en  soie,  sont 
tendues  sur  l'instrument  d*un  bout  &  l'autre,  et  accordées 
au  moyen  de  longues  chevilles.  L'exécutant  appuie  f%i 
main  çauche  sur  les  cordes,  et  les  frappe  avec  le  bout 
des  doigts  de  la  main  droite. 

TALAPOINS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TALARO,  monnaie  d'argent  de  Venise,  valant  environ 
5  fr.  25  c.  Le  talaro  de  Raguse  ne  vaut  que  3  fr.  90  c. 

TALAVA  (Idiome),  une  des  langues  dravidiennes  (K.  ce 
mot)  de  l'Hindoustan,  parlée  dans  la  zone  comprise  entre 
les  Ghattes  occidentales  et  la  mer  d'Oman. 

TALAYOTS  {d'atalaya,  tour  d'observation),  nom  qu'on 
donne  dans  les  lies  Baléares  à  d'antiques  monuments  de 
forme  conique,  b&tis  en  grosses  pierres  posées  sans  ci- 
ment et  par  assises  horizontales,  et  dont  quelques-uns 
contiennent  des  escaliers  intérieurs.  Les  plus  grands  Ta- 
lavots  sont  accompagnés  de  plus  petits  qui  semblent  en 
dépendre.  Quelques-uns  sont  environnés  de  cercles  for- 
més de  pierres  longues  fichées  en  terre.  On  suppose 
qu'ils  avaient  tous  une  destination  religieuse. 

TALE.  V.  Tael. 

TALEMELIERS,  ancien  nom  des  boulangers  (K.C6 f7M}^) 

TALENT,  aptitude  à  exécuter  quelque  chose  avec  suc- 
cès. Le  talent  est  très-varié;  on  a  le  talent  de  la  parole, 
de  la  musique,  d'un  art  et  d'une  industrie  quelconques, 
comme  on  a  celui  des  affaires  ou  de  l'intrigue.  Le  talent 
ne  demande  pas,  comme  le  génie,  un  esprit  créateur;  un 
musicien,  par  exemple,  passera  pour  avoir  du  talent  dan» 
son  art,  s'il  est  bon  exécutant,  et  l'on  n'exige  pas  de  lui 
qu'il  soit  compositeur;  un  écrivain  de  talent  n'a  pas  be- 
soin d'avoir  des  idées  neuves  et  de  produire  des  aperçus 
nouveaux,  il  suffit  qu'il  dispose  h(û>ilement  et  exprime 
avec  élégance  et  clarté  les  idées  qu'il  a  recueillies,  et 
qu'il  fasse  ainsi  une  œuvre  conforme  aux  règles  de  l'art 
et  du  goût.  Le  talent  peut  être  un  don  naturel,  comme 
le  génie;  mais  il  est  beaucoup  moins  rare,  et  peut  s'ac- 
quérir par  le  travail.  Le  génie  est  une  inspiration  en 
quelque  sorte  passagère,  une  illumination  souda'ne  qui 
brille  et  disparait  tour  à  tour  :  le  talent  est  une  aptitude 
habituelle  et  permanente. 

TALENT,  monnaie,    j  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 

TALION  (Loi  du).  »      phie  et  d'Histoire. 

TALISMAN,  c.-à-d.  en  arabe  consécration,  nom  donné 
à  certaines  figures  en  métal  ou  en  pierre,  à  certains  signes 
gravés  sur  une  matière  quelconque,  et  auxquels  la  su- 
perstition attribue  la  propriété  de  porter  bonheur  k  celui 
qui  les  possède,  de  lui  donner  une  puissance  supérieure 
et  magique. 


TAM 


1696 


TAS 


TALMA,  sorte  de  manteau  d'hiver,  qui  fut  à  la  mode 
vers  1858  et  années  suivantes,  et  dont  la  forme  rappelle 
celle  de  Tancien  balandran  {V.  ce  mot). 

TÂLMUD.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  d$  BiO' 
graphie  et  d'Histoire. 

TALOCHE,  vieux  mot  désignant  un  petit  bouclier. 

—  Les  maçons  donnent  ce  nom  à  une  tablette  de  bois 
longue  de  0",50,  environ,  munie  d'un  manche  court  par 
derrière,  et  sur  laquelle  ils  mettent,  avec  la  truelle,  du 
pl&tre  gâché,  pour  l'appliquer  sur  un  plafond  à  enduire. 

TALON,  en  termes  d'Architecture,  moulure  concave 
par  le  bas  et  convexe  par  le  haut.  Si  la  partie  concave  est 
en  haut,  c'est  un  talon  renversé.  Le  talon  est  composé 
d'un  quart-de-rond  et  d'un  cavet,  dont  la  saillie  égale  la 
hauteur. 

TALON,  en  termes  de  Jeu,  portion  de  cartes  qui  reste 
après  qu'on  a  distribué  aux  Joueurs  1»  nombre  nécessaire. 

TALON,  partie  d'un  registre  d'où  l'on  a  détaché  des 
quittances,  des  actions  ou  des  titres  quelconques,  et  qui 
reste  à  la  souche.  On  y  a  répété  les  indications  inscrites 
au  titre  délivré,  dont  la  découpure  doit  se  rapporter 
exactement  à  celle  du  talon. 

TALON,  en  termes  de  Marine,  extrémité  arrière  de  la 
quille  d'un  bâtiment.  Un  navire  taionne  quand  il  touche 
le  fond  de  l'eau  avec  son  talon.  —  On  nomme  Talonnier 
une  pièce  de  bois  qui  s'applique  sous  le  milieu  d'une  va- 
rangue {V.  ce  mot)  qui  ne  fournit  pas  de  quoi  former  son 
talon  ou  support.  —  La  Talonnière  est  la  partie  basse,  le 
bout  d3  la  mèche  du  gouvernail. 

TALONNIER  ES,  ailes  que  Mercure  porte  aux  talons. 

TALPACHE.  V.  Tolpache. 

TALUS,  pente  qu'on  donne  à  un  fossé,  aune  terrasse,  à 
un  épaulement,  pour  que  les  terres  se  soutiennent  mieux. 

TAMANAQUE  (Dialecte).  V.  Caraïbe  (Langue). 

TAMBOUR  ou  CAISSE  (de  l'espagnol  tanibor,  dérivé 
de  l'arabe  al  tambor)^  en  latin  tympanum,  instrument  de 
percussion  dont  on  fait  particulièrement  usage  dans  l'ar- 
mée. Il  est  composé  d'une  caisse  rende  en  cuivre  jaune 
ou  en  bois,  dont  les  extrémités  sont  couvertes  d'une  peau 
d'iVoe,  de  chèvre  ou  de  veau,  tendue  au  moyen  de  cer- 
ceaux et  de  cordes.  Une  double  corde  en  boyau,  tendue 
sur  la  peau  de  l'extrémité  inférieure,  donne  du  timbre  à 
l'instrument.  On  bat  le  tambour  avec  deux  baguettes. 
Los  principales  bcUleries  sont  :  le  rappel,  ]& générale, 
la  marche,  la  charge,  la  retraite,  le  ban,  la  breloque, 
la  diane,  le  roulement,  etc.  —  Le  tambour  a  été  connu  de 
toute  antiquité  en  Orient,  où  l'on  s'en  servait  dans  les 
lûtes  de  Cybèle  et  de  Bacchus;  mais  il  ne  paraît  pas  avoir 
été  en  usage  dans  les  armées  chez  les  Grecs  et  les  Ro- 
mains, qui  le  remplaçaient  par  les  timbales  et  la  bue- 
cine.  Importé  en  Europe  par  les  Sarrasins,  il  était  déjà 
adopté  par  les  Espagnols,  les  Italiens,  les  Allemands  et 
les  Anglais,  lorsqu'il  fut  introduit  dans  les  troupes  fran- 
çaises en  13i7.  Divers  noms  lui  furent  donnés  pendant 
le  moyen  âge  (K.  Taburel).  On  n'a  cessé  que  de  nos  jours 
lie  remployer  dans  les  musiques  de  cavalerie.  Il  figure  au 
théâtre  dans  les  morceaux  militaires.  Le  son  du  tambour 
n'étant  pas  de  nature  h  ûtre  noté,  les  compositeurs  figu- 
rent par  une  note  arbitrairement  choisie  celle  qu'ils  sont 
censés  attribuer  à  cet  instrument  ;  et  ce  n'est  que  par  les 
valeurs  assij^nées  &  cette  note  qu'ils  indiquent  à  l'exécu- 
tant les  roulements  ou  les  coups  qu'il  doit  frapper. 

TAMBOUR,  soldat  portour  de  l'instrument  appelé  tam- 
bour ou  caisse,  à  l'aide  duquel  il  cadence  le  jis  de  l'in- 
fanterie de  ligne.  En  France,  il  y  a  aujourd'hui  deux 
tambours  par  compagnie.  Chaque  régiment  a  une  école 
de  tambours,  dont  les  élèves  sont  pris  parmi  les  enfants 
de  troupe,  les  enrôlés  volontaires  et  les  nouvelles  recrues. 
L'habit  des  tambours  est  recouvert  de  galons  de  laine  au 
collet  de  l'habit  et  aux  manches.  Tout  détachement  com- 
mandé par  un  officier  est  toujours  précédé  d'un  tam- 
l>our.  Les  tambours  et  les  trompettes  accompagnent  les 
parlementaires  chargés  de  négociations  militaires  en  pré- 
sence de  l'ennemi.  —  Il  y  a,  dans  chaque  bataillon,  un 
Caporal-tambour  ou  Tambour-maitre ,  chargé  de.  l'in- 
struction, de  la  police  et  de  la  discipline  des  tambours. 

—  Dans  chaque  régiment,  un  Tambour-major  surveille 
et  commande  les  tambours  et  les  clairons,  et  dirige  leur 
instruction.  On  le  choisit  parmi  les  hommes  de  haute 
taille,  et  il  a  rang  de  sergent-major.  Son  habit  est  riche- 
ment galonné  d'or  ou  df'argent,  avec  deux  épaulettes  & 
graines  d'épinard  mélangées  d'or  ou  d'argent  et  de  soie 
de  couleur;  sa  coiffure  est  un  colback  avec  un  plumet; 
son  sabre,  suspendu  h,  un  baudrier  brodé,  enfermé  dans 
un  fourreau  en  maroquin  ou  en  métal  doré,  a  la  mon- 
Viro garnie  d'orncnicnts  ciselés;  il  poriccnlin  une  grande 


canne  à  grosse  pomme  argentée,  le  long  de  laqneiW 
s'entre-croisent  deux  chaînes  de  métal,  et  qui  lui  sert  i 
faire  les  commandements.  Le  tambour-major  s'appebdi, 
au  XVI*  siècle,  tambour-colonel  ou  capitaine-tambour. 

TAMBOUR,  en  termes  d'Arehitecture,  chacune  des  as- 
sises de  pierres  cylindriques,  plus  larges  que  hautes, 
(pii  forment  le  fût  d'une  colonne,  ou  le  noyau  d*un  esca- 
lier à  vis.  On  nomme  tambour  de  coupole  l'étage  sur  le- 
quel porte  la  coupole.  —  Le  nom  de  tambour  est  aussi 
employé  comme  synonyme  de  tympan  et  de  fronton. 

TAMBOUR,  en  termes  de  Menuiserie,  enceinte  de  Iam< 
bris  avec  une  ou  plusieurs  portes,  placée  aux  principales 
entrées  des  églises  et  autres  édifices,  à  Tintérieurf  pour 
empêcher  le  vent  d'y  pénétrer. 

TAMBOUR,  en  termes  de  Fortification,  retranchemeoi 
qui  couvre  la  porte  d'une  ville  ou  l'entrée  d'un  ouvrage. 

TAMBOUR ,  coffre  de  plomb  dont  on  se  sert  dans  un  bas 
sin  pour  rassembler  l'eau  qu'on  doit  distribuer  à  diflCé 
rents  conduits  ou  à  plusieurs  jets. 

TAMBOUR,  en  termes  de  Marine,  assemblage  de  plan- 
ches clouées  en  forme  de  coffre  pour  couvrir  soit  la  tète 
du  gouvernail ,  soit  une  écoutille,  soit  les  roues  des  ba- 
teaux à  vapeur. 

TAMBOUR  DE  BASQUE,  petit  tambour  formé  d*an  cercle 
de  bois  de  4  à  5  centimèL  de  large,  avec  une  peau  tendue 
a'un  côté  du  cercle,  et  auquel  sont  attachés  des  grelots 
et  des  plaques  de  métal.  On  fhippe  la  peau  avec  le  dos 
de  la  main;  pour  faire  résonner  les  grelots,  on  agite 
l'instrument,  ou  l'on  glisse  le  pouce  sur  la  peau.  Steibelt 
a  composé  des  bacchanales  pour  piano  avec  accompagne- 
ment de  tambour  de  basque,  dont  la  partie  est  notée.  Le 
tambour  de  basque  a  toujours  été  inconnu  aux  Basques, 
dont  il  porte  le  nom  on  ne  sait  pourquoi.  Il  existait  chez 
les  Anciens,  et  il  est  souvent  figuré  dans  les  bas-reliefs  et 
les  peintures  antiques.  B. 

TAMBOURIN ,  sorte  de  tambour,  moins  large  et  plus 
long  que  le  tambour  ordinaire,  sur  lequel  on  bat  avec 
une  seule  baguette,  et  qu'on  accompagne  ordinairement 
avec  une  petite  flûte  ou  galoubet  pour  faire  danser  les 
villageois.  On  le  nomme  aussi  Tambour  de  Provence.  — 
Le  nom  de  tambourin  fut  donné  autrefois  à  une  danse  de 
théà're,  fort  gaie,  en  mesure  à  2/4,  dont  la  musique  imi- 
tait les  efTetAdutambourinJointau  galoubet.  F.  an  Supn/. 

TAMIL  ou  TAMOUL  (Idiome),  une  des  langues  dr> 
vidiennes  (  V.  ce  mot  )  de  l'Hindoustan,  parlée  sur  la  cète 
orientale  depuis  le  cap  Comorin  jusqu'à  Palicate,  c-à-d. 
sur  les  côtes  du  Coromandel  et  du  Malabar.  Cet  idiome 
diffère  peu  du  malabar  {V.  ce  mot)^  avec  lequel  on  l'a 
souvent  confondu,  et  encore  moins  du  kamatique  (F.  ce 
mot).  Il  est  harmonieux,  et  n'a  pas  les  aspirations  si 
communes  dans  le  karnatique  et  letélinga  (V.  ce  mot). 
Il  possède  3  genres  et  2  nombres.  Ses  adjectifs  sont  in- 
déclinables. Sa  conjugaison  a  le  passif  et  le  mode  sub- 
jonctif qui  manquent  au  malabar,  outre  un  mode  inter- 
rogatif  et  plusieurs  impératifs  qui  lui  sont  particuliers. 
Les  prépositions  sont  jointes  à  la  fin  des  substantifs,  des 
pronoms  et  des  verbes.  La  construction  ne  souffre  aucune 
inversion.  Letamoul  s'écrit  avec  un  caractère  qui  s'éloigne 
plus  du  dêvanàgari  que  ne  le  fait  aucun  des  alphabets  de 
l'Inde.  V.  Beschi,  Grammatica  latino-tamulica.  Madras, 
1816  et  1849;  Brown,  Grammaire  du  langage  tamoul. 
Madras,  1840;  Campbell,  Dictionnaire  tamoul,  Madr&s 
1821  et  1848  ;  Bottier,  Dictionnaire  tamoul.  Madras,  1836 
Dupuis  et  Mousset,  Dictionarium  IcUino-tamulicum, 
1846.  —  Il  existe  beaucoup  d'ouvrages  écrits  en  tamoal, 
et  ils  servent  souvent  k  comprendre  les  livres  sanscrits; 
les  plus  anciens  remontent  à  peu  près  à  l'an  1000  de  notre 
ère.  Parmi  les  productions  originales,  on  remarque  les 
Sentences  (Kural)  de  Tiruvalluver,  dont  Ane!  a  publié 
des  extraits  en  français,  Paris,  1852. 

TAMPON ,  rouleau  avec  lequel  les  imprimeurs  en  taille- 
douce  appliquent  l'encre  sur  la  planche  gravée. 

TAM-TAM  ou  GONG  ou  BEFFBOI,  instrument  de  per- 
cussion ,  originaire  de  la  Chine  ou  de  l'Inde.  C'est  un 
plateau  de  métal  (  4  parties  de  cuivre  jaune  et  une  partie 
d'étain  ) ,  large  et  peu  épais,  qu'on  porte  suspendu  à  une 
corde,  et  sur  lequel  on  frappe  avec  un  marteau  ou  une 
forte  baguette  garnie  d'un  tampon  de  peau.  Le  son  qui  en 
résulte  est  d'un  caractère  luguore;  il  a  d'abord  une  très- 
grande  puissance,  puis  se  perd  dans  des  vibrations  lentes 
et  prolongées.  Le  tam-tam,  fort  en  usage  dans  la  musiqus 
des  Orientaux,  n'est  employé  chez  nous  qu'avec  beau- 
coup de  réserve,  par  exemple  dans  les  cérémonies  fu- 
nèbres, ou  dans  certaines  scènes  de  musique  dramatiqoe 
où  l'on  veut  produire  des  effets  terribles.  Ce  fut  aux 
funérailles  de  Mirabeau,  le  4  avril  1701,  qu'on  entendit 


TAP 


1697 


TAP 


^uui  la  preujière  fois  le  tam-tam  dans  un  orchestre^ 
V.  Stanislas  Julien,  Notice  sur  la  fabrication  des  tom- 
tams ,  dans  les  Comptes^endus  des  séances  de  l'Académie 
des  sciences ,  t.  XXIV.  B. 

TANASSÉRIM  (Dialecte).  V.  Birmane  (Langue). 

TANBOUR,  sorte  de  mandoline  des  Arabes  et  des 
Turcs,  dont  on  frappe  les  cordes  de  métal  avec  un  plectre 
en  écaille.  L'échelle  des  tons  est  marc^uée  sur  le  manche. 
Il  y  a  des  tanboura  de  diverses  dimensions  :  1°  le  tanbour 
kebir-tourki ,  dont  la  partie  inférieure  est  bombée  et  un 

{)eu  plus  qu'hémisphérique;  la  table  d'harmonie  est  plate  ; 
es  cordes,  au  nombre  de  8,  sont  accordées  deux  par  deux 
à  Toctave  et  à  l'unisson,  et  donnent  une  échelle  de  2  oc- 
taves et  demie;  — 2»  le  tanbotur  charki,  long  de  1*",12, 
Rt  monté  dp  3  cordes  doubles,  dont  2  en  laiton  et  une 
en  acier;  son  échelle  est  de  deux  octaves  et  une  quarte; 
^  3**  le  tanbour  bouzourk,  monté  de  6  cordes,  dont  trois 
(en  laiton)  servent  pour  une  seule  note,  deux  (en  acier) 
pour  une  autre  note  accordée  un  demi-ton  plus  haut,  et 
la  dernière  (aussi  en  acier}  pour  une  note  à  une  quinte 
inférieure  de  la  seconde  ;  l'étendue  de  l'instrument  est 
de  deux  octaves  et  demie  ;  —  4°  le  tanbour  baghlamah, 
ou  mandoline  d'enfant,  ne  différant  du  bouzourk  que 
par  la  petitesse  de  ses  dimensions,  et  ayant  une  étendue 
de  2  octaves;  —  5»  le  tanbour  boulgkari,  excessive- 
ment orné,  monté  de  4  cordes,  dont  deux  simples  et  une 
double,  et  d'une  étendue  de  deux  octaves. 

TANENGSARI  (Dialecte).  V,  Birmane  (Langue). 

TANGAGE.   V.  Roulis. 

TANGON ,  en  termes  de  Marine,  espart  double,  placé 
en  travers  sur  l'avant  du  m&t  de  misaine,  et  saillant  au 
delà  du  pont  pour  soutenir  les  ancres  loin  du  bord  ou 
pour  amarrer  les  chaloupes,  qui  ne  peuvent  ainsi  accos- 
ter les  flancs  du  b&timent. 

TAN74EURS,  ancienne  corporation  formée  en  1345, 
sous  le  patronage  de  S^  Barthélémy.  L'apprentissage  était 
de  5  ans  au  moms. 

TAM'E,  sœur  du  père  et  de  la  mère.  V,  Oncle, 
Nevbo. 

TANTEORISTE.  V,  Collier. 

TANTRAS.  V.  Indienne  (Littérature). 

TANZIMAT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d^Histoire, 

TAO  (Religion  du).  V,  Chinois  (Philosophie  des). 

TAORMINI  (Antiquités  de).  Cette  ville  de  Sicile,  ap- 
pelée autrefois  Taurominium,  possède  des  ruines  antiques 
qui  attestent  sa  grandeur  passée.  Ce  sont  :  cinq  réservoirs 
tï,-*.  grande  dimension,  et  les  aqueducs  destines  à  y  con- 
duire les  eaux;  des  murailles  en  brique,  de  près  de 
i'iO  met.  d'étendue,  ornées  d'arcades  et  de  niches,  et  ayant 
appartenu  à  un  édifice  considérable,  naumachie,  gymnase 
ou  cirque  ;  beaucoup  de  tombeaux  ;  les  restes  d'un  bain  ; 
les  murs  latéraux  d'un  petit  temple  dont  on  a  fait  une 
é[;Iise.  Mais  le  monument  le  plus  important  est  un  théâ- 
tre grec,  agrandi  et  orné  par  les  Romains,  saccagé  par  les 
Normands  au  moyen  &ge,  et  réparé  en  1748.  Il  a  69  met. 
de  diamètre,  et  peut  avoir  contenu  25  h  30,000  specta- 
teurs. Les  gradins,  qui  paraissent  avoir  été  au  nombre 
de  28  ou  30,  et  qui  étaient  recouverts  de  plaques  de 
marbre,  sont  aujourd'hui  effacés  ;  cette  portion  de  l'édi- 
fice était  bordée,  à  sa  partie  supérieure,  par  une  double 
galerie  couverte,  construite  en  orique,  et  ornée  de  pilas- 
tres, de  colonnes,  et  de  statues  dont  les  niches  subsistent 
encore.  On  retrouve  aussi  la  trace  de  deux  escaliers  pour 
les  spectateurs,  une  partie  des  petits  murs  qui  entou- 
raient le  podium,  un  étage  de  la  galerie  rectiligAe  qui 
forme  l'avant-scène,  deux  salles  voûtées ,  les  galeries  par 
lesquelles  les  acteurs  entraient  en  scène,  etc. 

TAPAGE.  V.  Bruits  et  tapages. 

TAPE ,  en  termes  de  Marine,  morceau  de  bois  travaillé 
en  cône  tronqué,  qui  sert  à  boucher  hermétiquement  un 
rcubier  ;  —  tampon  en  liège  ou  en  bois  qui  sert  à  fermer 
la  bouche  d'un  canon,  pour  empêcher  l'eau  d'y  pénétrer. 

TAPECU ,  en  termes  de  Marine,  petite  voile  trapézoïdale 
ruiblie  sur  l'extrémité  arrière  des  louées  et  des  cha- 
loupes. On  donne  le  même  nom  au  petit  m&t  qui  porte 
eetie  voile. 

TAPECU,  fermeture  à  bascule,  spécialement  adaptée  aux 
poternes,  et  qui,  roulant  sur  un  axe  horizontal,  retombe 
sur  les  talons  du  sortant. 

TAPECU  y  petit  cabriolet  découvert  et  mal  suspendu. 

TAPER,  en  termes  de  Peinture,  exécuter  d'une  touche 
très-libre,  négligée  en  apparence,  comme  si  l'on  n'avait 
fait  que  taper  la  toile  çà  et  là  de  quelques  coups  de  brosse. 
Un  tableau  tapé  doit  être  vu  d'un  peu  loin. 

TAPIS  (du  mot  grec  et  latin  tap^),  pièce  d'étoffe  en  laine 


ou  en  soie,  à  dessins  variés,  dont  on  eoam  une  table, 
une  estrade,  un  carreau  ou  un  parquet  de  chambre,  etc. 
Il  y  a  6  genres  i>rincipaux  de  tapis  :  i^  les  tapis  veloutés 
ou  de  Savonnerie,  en  haute  lisse  (7.  ce  mot)^  d'un  seul 
morceau  et  des  plus  grandes  dimensions;  la  laine  n'est 

Sue  passée,  et  non  nouée  à  la  chaîne  ;  2^  les  tapis  ras  ou 
"Awmsson,  à  basse  lisse,  d'un  seul  morceau,  et  dont  le 
dessin  s'exécute  à  l'envers  et  par  la  trame;  3»  les  mo' 
quettes  {V.  ce  mot)^  qui  se  fabriquent  sur  un  métier,  et 
dont  le  dessin  s'exécute  par  la  chaîne;  on  les  dit  velou» 
tées  ou  épingléeSf  selon  qu'on  a  coupé  ou  non  la  boucle 
que  forme  la  laine  à  chaque  brin;  4®  les  tapis  écossais, 
ou  à  double  face,  qui  n'ont  pas  d'envers,  et  qui  se  fa- 
briquent sur  métiers  k  la  Jacquart;  b^  les  tapis  véni^ 
tiens,  dont  le  dessin  ne  consiste  qu'en  rayures,  et  qui  m 
s'emploient  aue  pour  passages  d'appartements  et  pou* 
escaliers;  &*  les  tapis  jaspés,  dont  le  fond  est  rayé  o 
chiné,  et  qui  se  composent  d'une  grosse  trame  en  étoupe 
revêtue  d'un  peu  de  laine. 

Les  premiers  tapis  consistèrent  en  tresses  de  Jonc  et 
de  paille,  et  aujourd'hui  encore  il  en  arrive  du  Levant 
qui  sont  fabriqués  avec  une  extrême  délicatesse.  L'Anti- 
quité vantait  les  tapis  d'étoffe  fabriaués  à  Sardes,  à  Per- 
game,  àMilet,  à  Samos,  àl^  et  k  Sidon.  Plus  tard, 
Alexandrie  eut  le  monopole  de  ce  genre  d'industrie.  Dans 
les  premiers  temps  du  moyen  &ge,  les  arts  languirent;  la 
fabrication  des  tapis  ne  reprit  en  France  qu'au  ix*  siècle. 
A  la  fin  du  x*,  l'abbaye  de  S'-Florent ,  à  Saumur,  se  livra 
au  tissage  des  étoffes  ornées  de  fleurs  et  d'animaux.  Au 
XI*,  la  ville  de  Poitiers  eut  une  manufacture  dont  les  pnn 
duits  étaient  fort  recherchés  :  les  tissus  qu'elle  exécutait 
offraient  des  portraits  d'empereurs  et  de  rois,  des  sujets 
tirés  de  l'Écnture  sainte.  A  la  même  époque,  les  peuples 
du  Nord,  et  surtout  les  Anglais,  se  distinguèrent  aussi 
dans  cet  art  nouveau ,  et  l'on  disait  un  ouvrage  anglais 
pour  un  ouvrage  brodé;  l'Orient  envoya  aux  Occidentaux 
ces  étoffes  chargées  d'écussons  ou  d'animaux,  qu'on  ap« 
pelait  scultatœ  ou  ocellcttœ  vestes,  puis  celles  qui  reçurent 
le  nom  de  tapis  sarrasinois.  Aux  xii*  et  xni*  siècles,  les 
villes  de  Flandre  fournirent  de  tapis  toute  la  chrétienté. 
Le  goût  en  était  devenu  si  vif,  qu'on  les  faisait  entrer 
dans  la  confection  même  des  tentes  de  guerre  :  les  tapis 
de  pied,  de  table  ou  de  lit ,  qu'on  plaçait  à  l'intérieur,  se 
nommaient  aucubes;  on  appelait  tref  (de  trt/o/tt^m  )  ceux 
qui  recouvraient  la  charpente,  parce  que  les  draps  de  la 
tente  étaient  partagés  en  trois  lés.  Sous  le  gouvernement 
des  ducs  de  Bourgogne,  Arras  devint  un  grand  centre  der 
fabrication  pour  les  tapis,  d'où  le  nom  d*arrazzi  sous 
lequel  on  les  désignait  en  Italie.  On  employait  générale- 
ment la  laine  ;  la  fabrication  des  tapis  en  soie  ou  en  fils 
d'or  se  concentra  surtout  à  Florence  et  à  Venise.  Au 
XVI*  siècle  s'ouvre  une  ère  de  perfectionnement  et  de 
progrès  :  en  1539,  François  I*'  fonde  à  Fontainebleau  la 
première  manufacture  royale.  Alors  on  se  met  k  tisser  les 
tapis  d'une  seule  pièce,  au  lieu  de  les  fabriquer  par  frag- 
ments, que  l'on  rapprochait  ensuite  en  les  recousant. 
Henri  11  continua  d'encourager  cette  industrie,  et  créa  uns 
autre  manufacture  à  Paris,  dans  l'hôpital  de  la  Trinité. 
Sous  Henri  IV,  il  y  eut  au  Louvre  une  fabrique  de  tapis 
de  Perse  ou  de  Turquie,  nommés  aussi  tapis  du  Levant  « 
sous  la  direction  d'ouvriers  musulmans  attirés  en  France 
au  moment  où  Philippe  IH  venait  de  les  chasser  d'Es- 
pagne et  des  Pays-Bas.  Louis  XHI  transporta  cette  manu- 
facture près  de  Chaillot ,  dans  la  maison  de  la  Savonnerie 
(  V,  ce  mot),  qui  fut  réunie  sous  Louis  XIV  à  celle  des 
Gobelins  (  K.  ce  mot).  La  manufacture  de  Beauvais  fut 
fondée  en  1604  par  Louis  Hinart. 

TAPIS  FRANC,  en  termes  d'argot,  lieu  de  refuge  du 
plus  bas  étage,  où  les  gens  de  mauvaise  vie  se  réunis- 
sent dans  les  grandes  villes  pour  jouer,  boire,  fumer  et 
dormir. 

TAPIS  VEBT,  vaste  pièce  de  gazon,  pleine  et  entière, 
qu'on  trouve  dans  les  grands  jardins.  Le  Tapis  vert  du 
parc  de  Versailles  est  célèbre. 

TAPISSERIE  (de  tapis),  mot  qui  se  dit  :  1°  de  tout 
ouvrage  fait  à  l'aiguille,  sur  du  canevas,  avec  de  la  laine, 
de  la  soie,  du  fil ,  de  l'or,  etc.  ;  c'est  la  broderie  { V.  ce 
mot)  ;  2<*  des  grandes  pièces  faites  au  métier  avec  de  la 
laine,  de  la  soie  ou  de  l'or,  représentant  des  tableaux, 
des  personnages ,  des  dessins  de  toute  sorte,  et  servant 
principalement  de  tentures.  Le  voile  du  Saint  des  Saints, 
chez  les  Hébreux,  dont  la  broderie  représentait  diverses 
figures  de  Chérubins,  était  un  magnifique  ouvrage  dû  & 
l'habileté  du  tisserand.  Chez  les  Babyloniens,  on  se  ser- 
vait de  tapisseries  pour  retracer  les  mystères  de  la  religion 
et  perpétuer  les  faits  historiques;  les  maisons  royalet 

107 


TAP 


1698 


TAP 


tiitnt  ornées  de  tapisseries  tissées  d'argent  et  d*or.  Les 
Égyptiens  paraissent  aToir  été  également  habiles  dans  la 
broderie  et  dans  la  tapisserie.  Chez  les  Grecs ,  selon  la 
Fable,  Philoroèle  exécuta  en  laine  la  triste  aventure  de 
Progné  ;  selon  rhistoire,  Pénélope  broda  sur  la  toile  les 
événements  qui  avaient  agité  la  vie  d*Ulysse.  U Iliade 
d'Homère  nous  montre  Hélène  travaillant  a  un  merveil- 
/euz  ouvrage  de  broderie,  où  étaient  représentés  les  com- 
bat» des  Grecs  et  des  Troyens  ;  Andromaque  est  occupée 
k  un  travail  de  ce  genre,  lorsqu'on  vient  lui  annoncer  la 
mort  d*Hector.  Aristote  parle  d'un  Sybarite  qui  fit  broder 
une  tapisserie  représentant  les  six  grandes  divinités  de 
/a  Grèce;  la  bordure  supérieure  était  ornée  d'arabesques 
de  Sttse,  et  l'inférieure  d'arabesques  persanes.  Les  Ro- 
mains eurent  de  riches  tapisseries  qu'ils  nommaient 
atUœa ,  des  couvertures  qu'Us  étendaient  sur  leurs  lits 
et  qu'ils  appelaient  vestes  :  souvent  on  y  voyait  repré- 
sentés des  sujets  fabuleux  ou  héroïques.  Caton  d'Utique 
posséda  un  tapis  babylonien  qui  valait  800,000  sesterces 
(163,067  (t.),  et,  au  rapport  de  Pline  (Vlli,  48),  Néron 
en  paya  un  4  millions  do  sesterces.  Cartlia^  connaissait 
aussi  les  tentures  brochées,  et  ses  tisseranderies  jouis- 
saient d'un  grand  ronom.  Au  moyen  âge ,  on  voit  fré- 
quemment les  étoffes  brochées  employées  à  la  décoration 
des  églises.  Ce  fut  ainsi  que  Dagobert  fit  couvrir  de  ten- 
tures les  murailles  de  l'abbaye  de  S'-Denis.  Les  châte- 
laines et  leurs  suivantes  brodent  les  gestes  glorieux  des 
ancêtres,  et  l'on  orne  de  ces  nobles  souvenirs  les  mu- 
railles des  châteaux.  Non-seulement  les  tapisseries  ser- 
vent à  tendre  les  appartements  et  à  déguiser  leur  nudité, 
mais  on  les  emploie  dans  les  occasions  solennelles,  par 
exemple,  aux  entrées  des  princes,  pour  donner  une  pny- 
sionomie  Joyeuse  aux  villes  et  aux  places  publiques.  Les 
salles  de  festin  sont  tendues  de  riches  tentures;  dans  les 
tournois,  autour  des  lices  et  du  haut  des  galeries  Jusque 
dans  l'arène,  se  déroulent  les  exploits  aes  preux;  les 
caparaçons  déploient  aux  yeux  de  la  foule  de  riches 
housses  ymagées.  Un  usage  assez  général  à  cette  époque 
fut  que  les  tapisseries  portassent  les  armoiries  de  ceux 
à  qui  elles  appartenaient  ou  par  ordre  desquelf  elles 
avaient  été  confectionnées;  dans  d'autres,  au  contraire, 
les  personnages  représentés  offraient  leurs  propres  armes 
vw  leurs  habits.  Quant  aux  ymaiaes .  elles  étaient  très- 
variées  :  elles  retraçaient  des  scènes  tirées  de  l'histoire 
ancienne,  les  gestes  fabuleux  des  héros,  les  faits  histo- 
riques modernes,  des  chasses,  des  animaux  bizarres,  ou 
encore  des  occupations  propres  aux  diverses  saisons, 
enfin  les  principales  scènes  des  romans  de  chevalerie. 
Ce  qui  pipuve  que  l'Europe  était  loin  de  le  céder  en 
cela  aux  Orientaux,  c'est  que  Louis  IX  envoya  en  pré- 
sent au  khan  des  Mongols  une  tente  en  tapisserie  re- 
présentant l'Annonciation,  et  qu'une  partie  ae  la  rançon 
3ue  Jean  de  Nevers  pa^a  à  Bigazet  I*',  après  la  bataille 
e  Nicopolis  (1396),  était  composée  de  tapisseries  d'Arras 
représentant  l'histoire  d'Alexandre.  Il  nous  est  resté  du 
moyen  ftge  un  certain  nombre  de  tapisseries  historiées, 
ou  à  personnages  ;  voici  quelques  renseignements  sur  les 
plus  célèbres  : 

h  Tapisserie  d*Atx.  —  Achetée  à  Paris  en  1656,  pour  la 
cathédrale  d'Aix,  elle  provient  d'Angleterre,  et  est  une 
de  celles  que  les  Anglais  vendirent  ]orsqu*après  s'être 
séparés  de  l'Église  romaine  ils  dépouillèrent  les  édifices 
religieux.  Dans  les  grandes  fêtes  on  la  place  au-dessus 
des  stalles  des  chanoines;  en  temps  ordinaire,  elle  est 
roulée  et  renfermée  dans  la  sacristie.  £lle  représente 
Thistoire  de  Jésus  et  celle  de  la  Viei^,  et  se  compose 
de  27  compartiments,  qui  offrent  à  eux  tous  une  longueur 
d'environ  62  met.; 'elle  est  travaillée  en  laine  mélangée 
de  soie.  Chaque  panneau  contient  deux  compartiments  ou 
tableaux;  le  dernier  n'en  a  qu*un  seul.  Il  y  a  des  armoi- 
ries de  deux  en  deux  compartiments;  on  remarque  celles 
de  Henri  Vlll,  roi  d'Angleterre,  et  de  William  Warhain, 
archevêque  de  Cantorbéry  de  1506  à  1532.  Le  genre  de 
la  composition  des  sujets,  ainsi  que  leur  exécution, 
appartient  à  l'école  flamande  :  cependant  l'aiti^te  s'en 
est  écarté  en  ce  qui  concerne  les  femmes;  les  figures 
de  femmes  de  la  tapisserie  d'Aix  sont  grandes,  sveltes, 
d'une  nature  fine  et  déliée,  bien  éloignée  du  type  flamand. 
Les  costumes  et  les  armes  sont  des  xv*  Qt  xvi*  siècles.- 
On  voit  qu'au  moment  où  cette  tapisserie  a  été  faite 
I>>i1},  l'ancien  style  et  le  goût  gothique  commençaient 
à  ^der  k  de  meilleures  compositions. 

II.  Tapisseries  d*AiUhac  ouAulhat  (Puy-de-I>ôme). -^ 

£Ues  furent  enlevées  pendant  la  Révolution  à  leur  pro- 

étaîre   qui    résidait  à  Aulhac,   puis   transportées   à 

oire  et  déposées  dans  une  des  salles  du  pa'uis  de 


Justice.  Le  peu  de  soin  qu'on  en  a  pris  depuis  cette  époqae 
est  cause  au'à  cette  heure  elles  sont  détériorées.  Les  car- 
tons d'après  lesquels  furent  exécutées  ces  tapisseries  en 
font  des  objets  d'art  d'un  haut  mérite.  Elles  sont  en  laine. 
On  ignore  le  lieu  où  elles  furent  fabriquées,  ainsi  que  la  di- 
mension totale  de  leur  collection.  Il  est  probable  cependant 
Qu'elles  représentaient  les  principaux  faits  de  la  guerre 
e  Troie.  Leur  hauteur  est  de  4"*,  33.  A  en  Juger  par  le^ 
chaussures  à  la  poulaine,  les  armures,  les  panaches,  lc> 
vêtements,  elles  sont  du  xv*  siècle,  et  plutôt  de  la  seconde 
moitié  que  de  la  première.  , 

III.  Tapisserie  de  Bayard.  —  Elle  décorait  autrefois  la 
grande  salle  du  ch&teau  de  ce  nom,  près  de  Grenoble  ; 
elle  fut  vendue,  en  1807,  à  un  artiste  de  Lyon,  qui  la  céda 
en  1837  à  H.  Achille  Jubinal.  Elle  se  compose  de  trois 
fragments  nui  se  suivent  sans  interruption,  et  qui  ont 
chacun  4"',$3  de  hauteur  sur  2"*, 33  de  largeur;  mais  elle 
devait  être  Jadis  bien  plus  considérable.  L'architecture, 
les  costumes,  les  armes,  tout  dénote  qu'elle  est  du  com- 
mencement du  XV*  siècle;  l'écriture  des  légendes  qui 
expliquent  le  sujet  offre  même  quelques  caractères  pa- 
reils à  ceux  de  la  fin  du  xiv*.  Le  sujet  est  tiré  de  V Iliade 
d'Homère,  et  il  est  probable  que  ce  poôme  se  trouvait 
reproduit  en  laine  presque  tout  entier.  Le  premier  com- 
partiment représente  la  ville  de  Troie  :  les  édifices  sont 
construits  dans  un  sin^culier  système  architectural  qui 
n'appartient  à  aucune  époque;  quelques-uns  cependant 
sont  ornés  de  dentelures  gotlûques.  On  remarque  aa 
premier  plan  un  groupe  dont  toutes  les  tètes  sont  d'une 
grande  correction  de  dessin  et  ont  beaucoup  d'expression 
de  physionomie;  les  personnages  qui  composent  ce  groupe 
portent  leur  nom  écrit  sur  leurs  vêtements,  EnecLS,  An-- 
thénor,  le  roy  Pviam,  Panlhasilea.  Une  l^nde  tracée 
au  bas  du  compartiment  explique  qu'il  s'agit  de  Pentlié- 
Bilée,  reine  des  Amazones,  venant  avec  ses  guerriers  au 
secours  de  Troie,  où  elle  est  reçue  par  Priam  et  sa  cour. 
Les  costumes  et  la  coiffure  se  rapprochent  des  modes  en 
usage  sous  Charles  VU.  Le  2°  compartiment  reprcseutc 
un  combat  dans  lequel  la  lance  de  Polydamas  se  croise 
avec  l'épée  à'Ajax  Télamon;  ou  y  voit  aussi  Philiménés 
qui  combat  et  la  reine  Parunesilea  qui  frappe  de  son 
glaive  Dioniède  renversé  de  cheval.  —  Le  3*  comparti- 
ment offre  une  scène  plus  paisible  Sous  une  tente  {Aè- 

^auie,  Pi/rrhus  est  debout:  ou  l'arme  chevalier  avec  les 
cérémonies  du  moyen  âge;  autour  de  im  se  tieinient  Ajax 

et  Agamemnon,  qui  semblent  lui  servir  de  parrains;  il 
saisit  d'une  main  la  bannière  qu'on  lui  présente^  et  paraît 
ému  de  l'honneur  qu'on  lui  décerne;  à  ses  pieds  est  ud 
écuyer  ^ui  lui  chausse  l'éperon.  —  Au  résumé,  toute  cette 
composition  est  fort  expressive.  La  tapisserie  de  Elayard 
est,  en  outre,  curieuse  par  son  travail ,  qui  est  en  pièces 
de  rapport  comme  les  premières  tapisseries  de  Flandre, 
par  les  costumes ,  qui  sont  riches  et  élégants ,  enfin  par 
la  beauté  des  figures. 
rv.  Tapisserie  de  Dayeux,  —  V.  Batbux  (Tapisserie  de). 
V.  Tapisseries  de  Beauvais.  —  11  y  en  eut  deux  bien 
distinctes,  représentant,  l'une  des  sujets  religieux,  l'autre 
des  sujets  profanes.  Les  tapisseries  religieuses.  Jadis  en 
plus  giund  nombre  qu'aujourd'hui,  furent  données  vers 
1460  a  la  cathédrale,  dont  elles  ornèrent  le  chœur  Juv 
u'au  xviu"  siècle,  par  Guillaume  de  Hollande,  évêque 
e  cette  église.  Elles  sont  présentement  dispersées,  et 
plusieurs  même  ont  péri.  Les  fragments  qui  ont  été  con- 
servés représentent  quelques  faits  miraculeux  de  la  rie 
de  S^Pierre.  Un  de  ces  fragments,  en  la  possession  d^ 
M.  Dusommerard,  est  remarquable  à  cause  des  costuir.os 
militaires  et  de  l'arohitecture  :  c'est  celui  où  est  retracvx* 
l'évasion  de  S*  Pierre,  conduit  par  un  ange  hors  de  aa 
prison,  tandis  que  les  soldats  chargés  de  le  garder  sont 
endormis.  Les  autres  fragments  que  conserve  la  cathé- 
drale do  Beauvais  se  distinguent  aussi  par  la  richesse  des 
costumes  et  le  naturel  des  physionomies;  des  inscrip- 
tions explicatives  et  en  caractères  gothiques  sont  plactiT^ 
au  haut  de  chaque  compartiment.  —  Les  tapisseries  à 
si^Jets  profanes  sont  de  la  première  moitié  du  xvi*  siècle, 
ainsi  que  l'indiquent  le  costume  des  personnages  et  la 
date  de  1530  marquée  sur  l'une  d'elles.  On  supposa 
qu'elles  proviennent  des  manufactures  d'Arras;  il  ne  é^r- 
reit  pas  impossible  non  plus  qu'elles  fussent  sorties  de 
celles  de  Beauvais,  qui  ont  eu  aussi  un  grand  renom. 
Elles  sont  relatives  à  la  fondation  des  principales  rilles 
des  Gaules,  et  offrent  quelques-uns  des  personnages  qui 
ont  donné  leurs  noms  aux  anciennes  divisions  territo- 
riales du  pays,  avec  quelques  lignes  sur  leur  histoire 
plus  ou  moins  apocryphe.  Ces  personnages  sont ,  entre 
autres  :  Bel  {pus,  roi  des  Gaulois,  fondateur  de  Beaavfiit) 


3 


TAP 


1699 


TAP 


P&rîs,  fondateur  de  Paris;  Lugdus,  roi  des  Celtes,  fonda- 
teur de  Lyon  ;  Rômus,  frère  de  Romulus,  fondateur  de 
Reims.  Dans  un  compartiment  qui  représente  la  France 
et  quelques  contrées  voisines,  on  voit  sur  une  carte  géo- 
graphique les  noms  de  rivières  et  de  pays  suivants  :  le 
Rhin,  Souisse,  Savoye,  Méditerranée,  Loyre,  Aquitaine, 
Gironde,  Gascogne,  France,  Seine,  Bretaigne,  Angleterre, 
Normandie,  Picardie,  Flandres,  Artois,  Holande,  Ardene. 
Tout  cela  est  disposé  d'après  les  quatre  points  cardi* 
naux,  dont  les  noms  sont  tracés  aux  quatre  côtés  de  la 
tapisserie. 

VI.  Tapisseries  de  Berne, — Elles  sont  au  nombre  de  dix. 
On  les  conserve  dans  la  sacristie  de  la  cathédrale,  et  elles 
sont  exposées  dans  le  chœur  en  des  occasions  solennelles, 
notamment  lors  de  l'ouverture  de  la  diète  helvétique.  Les 
couleurs  en  sont  parfaitement  conservées,  et  Texécution 
en  est  remarquable.  Six  de  ces  tapisseries  furent  prises 
sur  Charles  le  Téméraire  à  Granson  et  à  Morat  (1476); 
leur  confection  remonte  à  la  première  moitié  du  x  v*  siècle. 
Les  principaux  sujets  qu'elles  représentent  sont  :  TAdo- 
ration  des  Mages;  Trajan  écoutant  la  requête  d*une 
veuve,  faisant  exécuter  le  meurtrier  de  son  mari  tué  in- 
justement, et,  dans  un  dernier  tableau.  S*  Grégoire  de 
Nazlanze  arrachant  aux  Enfers  par  ses  prières  l'âme  de 
cet  empereur;  César  passant  le  Rubicon,  et  livrant  di- 
verses batailles  (cette  tapisserie  a  près  de  8  met.  de  lon- 
gueur sur  4'",50  de  hauteur).  Les  quatre  dernières  ta- 
pisseries proviennent  de  l'ancienne  fabrique  de  Berne, 
ot  datent  de  la  première  partie  du  xvi"  siècle.  Les  deux 
plus  longues  ont  5  met.  de  largeur  sur  1"*,50  d'éléva- 
tion ,  ce  qui  est  aussi  la  hauteur  des  autres.  Le  sujet , 
développé  en  divers  tableaux,  est  la  Vie  de  S^  Vincent  de 
Saragosse,  patron  de  la  cathédrale  de  Berne. 

VIL  Tapisseries  de  la  Chaise-Dieu  (Auvergne).  —  Don- 
nées en  1518  à  l'église  qu'elles  ornent  encore  aujourd'hui 
par  Jacques  de  S^-Nectaire  ou  Sennectère,  dernier  abbé 
régulier,  dont  elles  portent  les  armoiries,  il  serait  diffi- 
cile de  désigner  le  lieu  où  elles  furent  fabriquées,  et  l'au- 
teur des  cartons  originaux.  Tout  ce  qu'on  peut  affirmer, 
c'est  qu'elles  ne  sont  pas  un  ouvrage  flamand  :  le  type 
de  physionomie  donné  à  chacun  des  personnages  est 
trop  empreint  d'idéalité  pour  ne  pas  démentir  cette  ori- 
gine. C'est  ce  qui ,  joint  à  la  flnesse  de  l'exécution  et  à 
la  richesse  du  travail,  fait  penser  qu'elles  sont  sorties 
peut-être  des  fabriques  de  Florence  ou  de  Venise,  ou 
qu'elles  sont  l'œuvre  d'artistes  italiens  établis  en  France 
depuis  l'expédition  de  Charles  VIII.  Ces  tapisseries  sont 
au  nombre  de  14,  dont  3  de  forme  carrée,  ayant  3™,33  en 
tous  sens;  les  autres  ont  2  met.  de  hauteur,  sur  G  de 
longueur,  à  l'exception  d'une  seule  qui  n'a  pas  moins  de 
8"*,Ô0.  Douze  sont  appendues  au-dessus  de  la  boiserie  du 
chœur  de  la  grande  église;  les  deux  autres  sont  placées 
dans  Véglise  des  Pénitents,  ancien  réfectoire  des  moines 
qui  forme  aujourd'hui  une  chapelle.  Les  tapisseries  de  la 
Chaise-Dieu  sont  un  tissu  de  laine  et  de  soie  fait  au  mé- 
tier, et  l'on  aperçoit  encore  sur  presque  toutes  des  flls 
d'or  et  d'argent  que  le  temps  a  respectés.  Elles  repré- 
sentent l'histoire  de  l'Ancien  et  celle  du  Nouveau-Testa- 
ment misps  en  regard ,  c.-à-d.  la  figure  et  la  réalité. 
Chacune  d'elles  est  divisée  en  trois  compartiments  formés 
par  des  colonnettes  :  celui  du  milieu  est  presque  tou- 
jours occupé  par  un  trait  de  l'histoire  de  JésuBr-Christ , 
et  les  deux  autres  par  les  points  de  l'histoire  de  l'An- 
cien Testament  qui  sont  ta  figure  du  Nouveau.  Des 
exergues  placés  en  haut  renferment  un  quatrain  en 
prose  latine  rimée;  les  deux  premières  lignes  sont  tirées 
de  la  Bible  et  expliquent  la  figure,  les  deux  dernières  la 
réalité.  Dans  le  milieu  et  en  bas  de  la  tapisserie,  on  lit 
des  sentences  tirées  des  Prophètes,  des  passages  em- 
pruntés soit  aux  Psaumes,  soit  aux  autres  livres  de  la 
Bible,  mais  toujours  relatifs  au  sujet  représenté  dans  le 
compartiment  où  ils  sont  placés.  Les  trois  tapisseries 
carrées  forment  à  elles  seules  un  abrégé  de  l'histoire  de 
Notre-Seigneur  dans  ses  trois  faits  principaux,  la  nais- 
sance, la  mort  et  la  résurrection.  La  fabrication  des  ta- 
pisseries de  la  Chaise-Dieu  doit  remonter  au  commence- 
ment du  XVI*  siècle  ou  k  la  fin  du  xv«  :  elles  dénotent,  en 
eflet ,  dans  l'architecture  et  dans  les  costumes  qu'elles 
reproduisent,  fes  règnes  de  Charles  VIII  et  même  de 
Louis  XI  plutôt  que  ceux  de  Louis  XII  et  de  François  I*'. 

VIII.  Tapisserie  de  Dijon.  —  Elle  représente  l'histoire 
du  siège  que  soutint  cette  ville  contre  les  Suisses  en  4513, 
et  est  divisée  en  trois  tableaux,  qui  retracent  :  le  l"",  le 
siégQ  à  son  commencement;  le  2*,  la  procession  solen- 
Mlle  qui  eut  lieu  dans  an  momeot  de  trêve,  le  long  du 
Nns^arty  en  l'honneur  do  Notre-Dame-de-Bon-Espoirt 


îo  3%  la  fin  du  siège,  ou  l'exécution  du  traité  conclu  elisn 
les  habitants  et  les  Suisses,  ainsi  que  les  actions  drt 
gr&ces  que  le  gouverneur  vient  rendre  à  la  Vierge.  Cetto 
œuvre  dut  être  faite  peu  de  temps  après  Tévénement 
dont  elle  était  destinée  à  perpétuer  le  souvenir,  puis* 

au'elle  représente  avec  exactitude  les  divers  monuments 
e  la  ville,  les  costumes  et  les  armes  du  xvi*  siècle.  Le 
dessin  se  distingue  par  une  expression  naive  et  par  un« 
grande  richesse  de  composition ,  opposées  à  des  fautes 
d'ordonnance  et  de  perspective.  La  tapisserie  de  Dijon  a 
2'",384  de  hauteur  sur  6">,604  de  longueur;  elle  ne  con- 
tient pas  moins  de  50  personnages  par  compartiment.  On 
ignore  de  quelle  manufacture  elle  sort,  et  par  qui  elle 
fut  commandée.  Elle  dépendait  anciennement  du  mobi- 
lier de  la  fabrique  de  Notre-Dame;  achetée  pendant  la 
Révolution  à  un  brocanteur  par  le  maire  de  Dijon,  et 
placée  dans  une  des  salles  de  l'ancien  hôtel  de  ville,  d'où 
elle  a  passé  au  Musée  en  1832,  elle  est  aujourd'hui  tendue 
dans  la  cage  de  l'escalier  de  ce  Musée;  bien  que  le  temps 
en  ait  altéré  la  fraîcheur,  elle  n'en  est  pas  moins  intacte, 
et  assez  bien  conservée  jusque  dans  ses  moindres  détails. 

IX.  Tapisserie  du  Louvre,  —  Cette  tapisserie,  après 
avoir  passé  en  plusieurs  mains  depuis  Richelieu,  un  de 
ses  plus  anciens  possesseurs,  fut  achetée  par  le  roi 
Charles  X  au  peintre  Révoil.  L'architecture,  les  costumes 
et  les  légendes  qu'elle  offre  placent  son  exécution  vers  le 
milieu  du  xv*  siècle;  malgré  cette  antiquité,  elle  est  très- 
bien  conservée,  et  n'a  subi  que  peu  d'altérations.  Le  sujet 
est  un  miracle  de  S^  Quentin,  qu'expliauent  huit  qua^ 
trains  en  caractères  gothiques  placés  au  oas  des  person- 
nap;es.  Un  larron  a  dérobé  le  cheval  d'un  prêtre;  il  est 
pris,  et  condamné  à  être  pendu.  Le  prêtre  sollicite  sa 
gr&ce,  qui  lui  est  refusée;  il  prie  alors  pour  le  coupable 
devant  la  ch&sse  de  S^  Quentin.  On  procède  à  l'exécution  t 
mais  un  accident  arrivé  au  gibet  fait  que  le  patient  tombe 
avant  le  moment  fatal  :  le  prévôt  reconnaît  dans  ce  fait 
un  ordre  du  ciel.  Le  patient,  délivré,  s'agenouille  devant 
la  chftsse  du  saint ,  et  le  remercie  de  son  intervention. 
Autour  de  cette  tapisserie,  qui  a  environ  8'<>,33  de  lon- 
gueur sur  4  met.  de  hauteur,  règne  une  magnifique  bor-> 
dure  composée  de  feuillages,  de  fleurs,  de  fruits,  et  de 
divers  ornements  très-pittoresques.  Le  terrain  lui-même 
est  semé  d'herbes  et  de  fleurs  sur  fond  vert.  Le  vêtement 
du  prêtre  est  rouge,  celui  du  prévôt  riolet,  celui  des 
gardes  jaun&tre;  les  coifTures  consistent  presque  unifor- 
mément en  une  sorte  de  calotte  ou  bonnet  rouge,  ayant 
une  partie  qui  se  relève  par  derrière  et  s'attache  sur  le 
sommet.  Le  toit  des  maisons  est  tantôt  en  tuiles,  tantôt 
en  ardoises,  à  la  manière  flamande;  ce  qui ,  indépendam- 
ment du  type  général  du  dessin ,  ferait  penser  que  cette 
tapisserie  peut  provenir  des  anciennes  fabriques  d'Arras. 

X.  Tapisseries  de  Nancy.  —  L'une  de  ces  tapisseries 
remonte  à  une  assez  haute  antiquité  :  elle  a  d'abord  ap- 
partenu à  Charles  le  Téméraire;  prise  dans  la  tente  de  ce 
prince  par  les  Lorrains  après  la  bataille  de  Nancy  en 
1477,  elle  servit  au  palais  des  ducs  de  Lorraine  jusqu'à 
Charles  IV,  qui  en  fit  don  à  sa  Cour  souveraine.  Ce  qui 
reste  de  cette  tapisserie  a  25  met.  de  longueur  sur  près  de 
4  met.  de  hauteur,  et  garnit  aujourd'hui  une  des  cham- 
bres de  la  Cour  impériale  et  une  autre  salle  inoccupée. 
C'est  une  de  ces  œuvres  flamandes  dont  le  tissu  de  laine 
trè&-Ane  est  éclairé  par  l'or  et  la  soie;  la  soie  et  la  laine 
subsistent  encore,  mais  l'or  ne  s'aperçoit  plus  que  dans 
quelques  endroits  et  avec  l'aide  d'un  beau  soleil.  Le  sujet 
est  une  histoire  allégorique  qui  a  pour  but  de  repr^ntcr 
les  inconvénients  de  la  bonne  chère.  Les  personnages,  de 
grandeur  naturelle,  portent  leur  nom  écrit  sur  eux;  ce 
sont,  pour  les  amphitryons  :  Dtner,  Souper.  Banquet; 
pour  les  convives  :  Passe ~temps,  Bonne-dompagnie, 
Gourmandise,  Friandise,  Je  Boy-àrvous,  Je  Plaise-^'au^ 
tant,  Acoustumance;  pour  les  maladies  qui  attaquent  les 
convives  après  le  repas  \  Apoplexie,  Paralisie,  Pleurésie, 
Colicque,  Esquinancie,  Tdropisie,  Jaunisse,  Gravelle  et 
Goutte;  pour  les  remèdes  qui  viennent  à  leur  secours  i 
Sobriété,  PiltUe,  Clistère,  etc.  Des  inscriptions  en  carac^ 
tères  gothiques,  placées  dans  le  haut,  expliquent  les 
scènes.  L'histoire  est  incomplète,  et  le  dénoùment  perdu. 
La  tapisserie^  été  coupée  en  plusieurs  morceaux,  et  mal  • 
heureusement  ce  n'est  pas  aux  endroits  indiqués  comme 
changement  d'action  par  les  divisions  de  rarîiste  lui- 
même.  On  n'a  pas  été  plus  heureux  quand  on' a  voulu  re- 
joindre ces  morceaux  :  on  les  a  placés  dans  l'ordre  erroné 
oh  on  les  voit  aujourd'hui  ;  mais  l'ordre  naturel  a  été  ré« 
tabli  dans  la  reproduction  qui  eo  a  été  faite  par  la  gra- 
vure, grftce  à  une  Moralité  dont  le  sujet  a  été  puisé  dans 
cette  tapisserie,  et  qui  peut  servir  aitasi  à  retrouvw  U» 


TAP 


1700 


TAR 


•cèses  qui  manquent.  Cette  Moralité  a  pour  titre  :  Con- 
damnacton  des  banquetz,  et  pour  auteur  Nicole  de  La 
Chesnaye;  on  la  trouvé  isoléuient,  et  dans  un  recueil 
dédié  à  Louis  XII  et  intitulé  :  La  nef  de  santé  avec  le 
gouvernail  du  corps  humain  et  la  condamnacion  des 
bancquetz,  etc.  On  peut  regarder  les  deux  premières 
scènes  de  la  tapisserie  de  Nan(^  comme  le  tableau  fidèle 
d^un  repas  seigneurial  au  xv*  siècle,  tant  sous  le  rapport 
des  ornements  de  la  salle  du  festin  que  sous  celui  des 
vases  qui  servent  à  table  et  des  serviteurs  qui  assistent 
au  repas.  Le  costume  des  personnages  est  aussi  tout  à 
fait  caractéristique  ;  ce  sont  les  vêtements  et  ornements 
en  usage  vers  le  milieu  du  xv*  sié^sle,  et  la  disposition 
artistique,  le  choix  du  sujet,  l'exécution  elle-même,  por- 
tent bien  Tempreinte  du  style  des  œuvres  de  cette  époque. 

—  Le  local  de  la  Cour  d'appel  de  Nancy  possède  une 
autre  tapisserie,  qui  n*a  aucun  rapport  avec  la  précé- 
dente, et  qui  provient,  dit-on,  de  la  même  source.  Elle 
représente  Thistoire  d'Assuérus  révoquant  son  édit  contre 
les  Juifs.  Les  principaux  personnages,  après  le  roi ,  sont  : 
Esther,  Aman  et  Mardochée.  L'artiste,  ayant  voulu  leur 
donner  un  costume  oriental ,  les  a  affublés  de  vêtements 
de  fant^iisie,  qui  ne  sont  d'aucun  peuple  ni  d'aucune 
époque.  Comme  dessin,  les  figures  d'Esther  et  de  ses 
trois  dames  d'honneur  sont  très-belles;  leur  physionomie 
est  d'une  exécution  remarquable,  et,  dans  l'expression 
du  visage,  ainsi  que  dans  la  posture  d^Esther,  il  y  a 
quelque  chose  de  cette  langueur  que  donnèrent  à  leurs 
madones  aux  siècles  suivants  les  grands  génies  de  la 
peinture  italienne. 

XI.  Tapisseries  de  Petms,  dans  l'église  métropolitaine. 

—  Il  y  en  a  environ  40,  formant  diverses  collections,  et 
représentant  toutes,  &  l'exception  de  deux  ou  trois,  des 
sujets  religieux.  L'église  de  S'  Rémi  compte  aussi  dix  ta- 
pisseries, toutes  d'égale  grandeur  et  de  forme  pareille, 
données  en  1531  par  Robert  de  Lenoncourt,  abbé  com- 
mendataire.  Elles  représentent  la  bataille  de  Tolbiac,  le 
baptême  de  Clovis,  la  peste  de  Reims,  et  les  événements 
qui  donnèrent  lieu  aux  miracles  de  S^  Rémi ,  et  sont  très- 
belles  de  couleur  et  de  travail.  C'est  surtout  &  l'envers 
qu'il  faut  les  voir;  les  couleurs,  garanties  de  ce  côté 
contre  l'action  de  l'air,  ont  conservé  presque  tout  leur 
éclat.  Sur  les  dix,  il  y  en  a  quatre  moins  altérées  que  les 
autre^et  qui  paraissent  avoir  moins  servi.  En  effet,  dans 
les  processions  et  autres  cérémonies,  on  n'étale  en  gé- 
néral que  six  tapisseries.  La  perfection  du  travail,  l'agen- 
cement de  la  composition,  l'habileté  avec  laquelle  les 
dessins  ont  été  tracés,  peuvent  être  un  objet  d'étude  et 
d'instruction  pour  les  artistes  de  nos  Jours.  Quant  aux  ta- 
pisseries de  la  cathédrale,  elles  sont  pour  la  plupart 
constamment  exposées  sur  les  murailles  des  nefs  collaté- 
rales et  contre  la  grande  porte  centrale  ;  il  en  est  aussi 
qu'on  tient  roulées  dans  la  sacristie,  et  qu'on  n'expose 
que  dans  les  solennités.  Parmi  ces  tapisseries,  il  en  est 
d'assez  médiocres;  elles  n'appartiennent  point,  comme 
les  autres,  au  xvi*'  siècle,  mais  au  xvii*,  et  sont  l'ouvrage 
d'un  nommé  Pepersak,  artiste  flamand. 

XII.  Tapisserie  de  Valenciennes.  —  Cette  ville,  autre- 
fois célèbre  par  ses  manufactures  de  tapis  de  haute  lisse, 
ne  possède  plus  qu*un  monument  de  ce  genre,  un  de  ces 
admirables  ouvrages  qui  faisaient  la  gloire  des  fabriques 
de  Flandre  aux  xv«  et  xvi*  siècles.  Découverte,  en  1830, 
par  M.  Vitet,  dans  un  grenier  de  l'hôtel  de  ville,  la  ta- 
pisserie de  Valenciennes  occupe  aujourd'hui  une  des 
grandes  salies  de  l'édifice.  La  bordure  seule  est  un  peu 
endommagée,  mais  le  fond  est  dans  un  parfait  état  de 
conservation.  Elle  a  5  met.  de  hauteur,  sur  5™,50  de 
large.  Elle  représente  un  tournoi  :  12  chevaliers,  cui- 
rassés des  pieds  à  la  tête,  et  mont^  sur  des  chevaux 
richement  caparaçonnés  et  couverts  de  housses  armoriées 
et  étincelantes  d'or,  s'attaquent  à  grands  coups  de  dague; 
las  lances  courtoises  ont  été  rompues,  et  leurs  débris 
jonchent  l'arène.  Dans  le  fond,  on  voit  des  tribunes  gar- 
nies d'un  triple  rang  de  spectateurs.  Les  costumes  sont 
de  l'époque  de  Maximilien  (  xv*  siècle),  et  ont  une  ori- 
gine allemande  que  révèlent  la  multiplicité  des  panaches 
et  leur  exagération  ridicule.  Le  sujet  pourrait  bien  appar- 
tenir à  Tun  de  ces  36  tournois  tenus  en  Allemagne  Jus- 

3u'en  1487,  et  décrits  par  André  Favin  dans  son  Théâtre 
'honneur  et  Je  chevalerie.  L'ordonnance  générale  du 
tableau  est 'parfaite;  une  grande  harmonie  règne  entre 
ses  diverses  parties;  les  lois  de  la  perspective,  fort  sou- 
vent oubliées  dans  les  tapisseries,  sont  dans  celle-là  com- 
plètement observées.  On  y  admire  encore  la  fermeté  et 
le  fondu  des  nuances,  la  netteté  et  la  franchise  du  dessin, 
la  hardiesse  et  le  charme  de  la  composmon.  Dans  la  bor- 


dure, formée  d*an  riohe  feuillage  arabesque,  et  terminée 
du  côté  du  tiUïleau  par  une  chaîne  de  pierreries  mer- 
▼eilleusement  imitées,  on  a  placé  vingt  écussons  où  l'on 
a  cru  distinguer,  autant  que  l'a  permis  l'altération  des 
couleurs,  les  armoiries  de  quelques  maisons  du  pays  de 
Liège  et  des  provinces  rhénanes. 

V.  Les  anciennes  tapisseries  historiées,  ou  CoUection 
des  monuments  les  plus  remarquables  de  ce  genre  qui 
nous  soient  restés  du  moyen  âge,  à  partir  du  xi*  siècle 
au  XVI*  inclusivement,  texte  par  Achille  Jubinal ,  dessins 
de  Sansonetti,  Paris,  1838,2  vol.  in-fol.  obloog;  Recher- 
ches sur  l'usage  des  tapisseries  à  personnages,  par 
A.  Jubinal,  18^,  in-8*;  Mémoire  sur  la  tapisserie  du 
choeur  de  Véglise  cathédrale  d*Aix,  par  Fauris  de  Saint- 
Vincent,  Paris,  1812,  in-8**  ;  Toiles  peintes  et  tapisseries 
de  Reims,  par  Paris  et  Leberthais,  2  vol.  in-4o  ;  Notice 
sur  les  tapisseries  de  la  cathédrale  de  Beauvais,  par 
l'abbé  Santerre;  Études  sur  les  beaua>-arts.  Essais  d^ar- 
chéologie et  Fragments  littéraires,]^  Vitet, Paris,  1847, 
2  vol.  in-12;  Lacordaire,  Notice  historique  sur  les  ma- 
nutactures  impériales  de  tapisseries  des  Gobelins  et  de 
tapis  de  la  Savonnerie,  Paris,  1853,  in-8^  P— s, 

TAPISSIÈRE ,  voiture  suspendue  et  couverte,  mais  ou- 
verte sur  les  côtés,  et  dont  les  tapissiers  se  servent  pour 
ti-ansporter  des  meubles.  On  l'emploie  aussi  pour  les  dé- 
ménagements et  pour  le  transport  de  certaines  mar- 
chandises. 

TAPISSIERS,  ancienne  corporation  qui  existait  déjà 
au  temps  de  Philippe-Auguste,  et  qui  avait  plusieurs  pri- 
vilèges de  concession  royale,  entre  autres  l'exemption  du 
guet.  Les  tapissiers  étaient  aussi  appelés  Sarrazinois 
(F.  Tapis);  ils  ne  travaillaient  pas  en  hante  lisse.  Une 
autre  corporation,  celle  des  hauts  lissiers,  se  réuait  à 
eux  en  1302.  En  1625,  il  y  eut  encore  fusion  avec  les 
courtepointiers.  Le  patron  de  la  corporation  était  Saint 
Julien  des  Ménétriers. 

TAPON,  gros  tambour  en  usage  dans  llnde.  On  le 
frappe  avec  le  dos  de  la  main. 

TAQUE,  plaque  de  fer  fondu,  qui  forme  le  contre* 
cœur  d'une  cheminée. 

TAQUET,  morceau  de  bois  taillé  qui  sert  à  maintenir 
l'encoignure  d'un  meuble;  —  piquet  qu'on  enfonce  en 
terre  pour  servir  de  repère  dans  les  alignements;  — cro- 
chet en  bois  auquel  les  marins  amarrent  des  manoeuvres; 
—  pièce  de  bois  sur  laquelle  on  frappe  pour  appeler  les 
oiseaux  dressés  à  la  chasse. 

TAQUOIR ,  morceau  de  bois  tendre,  très-uni ,  et  doublé 
de  bois  de  chêne,  sur  lequel  les  imprimeurs  en  typogra- 
phie frappent  avec  un  marteau,  pour  égaliser  les  carac- 
tères dont  la  forme  est  composée. 

TARAHUMARA  (Langue).  7.  Mexique  (Langues  du). 

TARANTASSE,  grande  et  lourde  voiture  de  voyage, 
dont  la  caisse  repose  sur  deux  longues  traverses  de  bois 
flexibles,  supportées  par  des  essieux.  On  s'en  sert  dans 
le  Midi  de  la  Russie. 

TARASQUË  (Langue).  V,  Mexique  (Langues  du). 

TARBOUCH,  bonnet  de  couleur  rouge  terne,  en  drap, 
avec  un  long  gland  bleu,  et  qui  commence  à  remplacer 
le  turban  chez  les  Musulmans.  Cette  espèce  de  révolution 
a  été  ordonnée  par  le  sultan  Mahmoud  II. 

TARE  (de  l'arabe  tarah,  rejeter),  en  termes  de  Com- 
merce, désigne  tout  à  la  fois  :  \^  tout  défaut  ou  déchet  sur 
le  poids,  la  ({uantité  et  la  qualité  des  marchandises;  ^^  le 
poids  des  colis  ;  3"  la  déduction  faite,  pour  le  poids  de  l'enve- 
loppe, sur  les  marchandises  qui  n'ont  pu  être  posées  à 
nu  lors  de  la  vente. 

TARE  DE  caisse  ,  perte  qui  a  lieu  communément  sur  les 
sacs  d'argent,  soit  à  cause  des  fausses  espèces,  soit  à 
cause  des  erreurs  auxquelles  on  est  exposé  en  payant  ou 
en  recevant. 

TARE  D'ESPfeCES,  diminution  qu'on  supporte  dans  le 
compte  de  l'argent  lorsqu'on  change  un  billet  ou  une 
monnaie,  et  qui  est  le  droit  du  changeur. 

TARENTELLE,  danse  d'un  caractère  gai,  originaire 
du  pays  de  Tarente.  L'air  en  est  à  6/8  ;  il  est  court,  mais 
se  répète  plusieurs  fois.  On  l'accompagne  d'ordinaire  avec 
le  calascione  {V.  ce  mot)  et  le  tambour  de  basque. 

TARGE,  bouclier.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographt 
et  d*  Histoire. 

TARGETTE ,  platine  de  métal  qui  porte  un  verrou  plat, 
et  qu'on  met  aux  portes,  aux  guichets,  aux  croisées,  à  la 
hauteur  de  la  main,  pour  servir  à  les  fermer. 

TARGUM.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Dîo^ 
graphie  et  d'Histoire. 

TARI ,  monnaie  de  Sicile  au  moyen  Age.  Sur  la  fin  dn 
XII*  siècle,  on  faisait  24  tari  avec  une  once  d'or;  le  tari 


TAT 


1701 


TAX 


nJaît  alors  2  fr.  63  e.  d'aujourd'hai.  Plosi  taid ,  on  en 
tira  29  ift  d*ane  once. 

TARIF  (d'un  mot  arabe  aigniftaut  série) ,  tableau  qui 
indique  les  prix  de  certaines  denrées,  de  certains  services, 
et  le  taoz  de  certains  droits.  Il  y  a  des  tarifs  pour  la  na- 
vigation, le  passa^  ou  le  parcours  des  rivières,  pour 
Texportation  ou  Timportation  des  denrées  et  marchan- 
dises, pour  les  ameodes  et  les  AtbIs  judiciaires ,  pour  les 
actes  délivrés  par  les  Administrations,  pour  les  émolu- 
ments des  officiers  ministériels,  etc.  Le  premier  tarif 
général  des  Douanes  en  France  fut  établi  par  Colbert  en 
1604;  d*autres  tarifs  ont  été  ensuite  promulgués  en  1791, 
en  1816,  en  1835,  en  1853,  en  1861  {V.  Douanes,  Librb 
ÉcHATiGB,  I^OTEGTEDB — Systèmo).  Les  Cours  souveraines 
fixaient  autrefois  les  tarifs  dans  toute  la  Juridiction  de 
leur  ressort  :  un  tarif  général  pour  les  tribunaux  de  tous 
les  degrés  fut  établi  par  la  loi  du  6  messidor  an  vi  (24 
Juin  1798);  un  nouveau  tarif  des  frais  et  dépens  a  été 
promulgué  en  matière  civile  par  décret  du  16  févr.  1807, 
en  matière  criminelle  et  de  police  par  décret  du  18  Juin 
1811. 

TAROTS ,  grandes  cartes  à  Jouer,  ainsi  appelées,  dit-on, 
de  la  ville  de  Taro,  en  Lombardie,  où  on  les  avait  in- 
ventées. V.  Cartes  a  joder. 

TARRAGONE  (Cathédrale  de).  Le  portail  de  cette  église, 
auquel  on  arrive  par  un  large  escalier,  se  compose  d*une 
vaste  arcade  à  voussure  ogivale,  dont  les  pieds-droits 
sont  garnis  de  statues  et  flanqués  de  deux  épais  contre- 
forts. En  arrière  d'un  fronton  obtus  et  uni  qui  surmonte 
cette  arcade  s'ouvre  une  rose  à  vitraux,  et,  au-dessus, 
la  façade  se  termine  par  un  autre  fronton  mutilé  et 
découronné.  Un  dôme  octogone,  lourd  et  peu  gracieux, 
s*élève  au  milieu  des  transepts.  La  nef,  très-vaste,  est 
divisée  en  trois  parties  que  séparent  cinq  arcs,  soutenus 
par  des  piliers  massifs  ornés  de  colonnes  corinthiennes. 
Le  style  de  la  voûte  est  ogival.  Le  maltre-autel  est  dé- 
coré de  bas -reliefs  en  marbre  représentant  diverses 
scènes  de  la  vie  de  S**  Thècle.  Des  mausolées  ont  été 
élevés  dans  deux  chapelles  à  deux  archevêques  de  Tar- 
ragone.  A  Téglise  est  attenant  un  grand  cloître  carré , 
dont  la  cour  est  décorée  de  colonnes  doriques  en  marbre, 
avec  chapiteaux  sculptés  avec  beaucoup  d'art  et  de  goût. 

TARTANE,  petit  b&timent  léger  de  la  Méditerranée, 
portant  une^nde  voile  à  antenne  et  un  hunier  au  grand 
màt,  une  autre  voile  à  antenne  au  màt  de  tapecu,  et  deux 
focs  sur  le  beaupré.  On  remploie  pour  la  pêche  et  le 
cabotage. 

TARTANE,  fllot  de  pècho  à  mauche,  dont  on  se  sert  sur 
les  côtes  du  Languedoc. 

TARTARELLE  ou  TARTAVELLE.  V.  Ck^blle. 

TARTARES  (Langues),  dénomination  appliquée  quel- 
quefois &  toutes  les  langues  Ouralo-AUaicines  (  K.  ce  mot)., 
mais  que  Ton  réserve  généralement  &  un  groupe  de  cette 
famille,  lequel  comprend  le  mongol ,  le  bouriate,  le  ^- 
motick,  le  mandchou^  le  turc  (  F.  ces  mots)^  etc.  V.  Abel 
Rémusat,  Essai  sur  les  langues  tartares,  Paris,  1820, 
in-4^;  W.  Schott,  Essai  sur  les  langues  tartares,  on 
allem.,  Berlin,  1836;  Roehrig,  Éclaircissements  sur  quel- 
ques particularités  des  langues  tartares  et  finnoises, 
Paris,  1845,  in-8^ 

TASSE  ou  TASSETTE,  vieux  mot  signifiant  bourse. 
Un  tassetier  était  un  faiseur  de  bourses.  L'étymologie 
reporte  ce  mot  au  te^che  des  Allemands,  au  ttuca  des  Ita- 
liens et  de  la  basse  latinité,  et  au  mot  tasque  usité  en 
France  pendant  le  xvi*  siècle. 

TASSEL,  mot  qui  désignait  autrefois  un  mors  de 
chape,  et  tout  ornement  de  forme  carrée  placé  sur  la 
poitrine. 

TASSETTES,  pièces  de  métal  disposées  sur  quatre 
rangs  et  qui  rattachaient  autrefois  la  cuirasse  aux  cuis- 
sards. 

TASTO  SOLO ,  c-à-d.  en  italien  à  Umche  setde,  mots 
qu^on  écrivait  autrefois  dans  la  partie  de  Torganiste  pour 
lui  indiquer  qu'il  ne  devait  pas  accompagner  la  basse 
par  les  accords  de  la  main  droite. 

TATOUAGE ,  action  de  t€itouer,  c-à-d.  d'imprimer  des 
dessins  indélébiles  sur  la  peau  du  corps.  On  pique  Jus- 
qu'au vif  dans  la  peau  avec  un  instrument  aigu;  on  cou- 
vre immédiatement  la  partie  dessinée  de  poudre  à  canon 
très-fline,  et  on  y  met  le  feu;  l'explosion  fait  pénétrer 
dans  la  peau  des  pirticules  de  poudre,  et  le  dessin  se 
montre  de  couleur  bleue.  En  mélangeant  à  la  poudre  des 
substances  colorées,  on  obtient  des  dessins  Jaunes, 
rouges,  noirs,  etc.  Tel  est  le  procédé  de  tatouage  usité 
en  Europe  chez  un  certain  nombre  de  matelots ,  de  sol- 
dats et  d'ouvriers.  Les  peuples  de  l'Océanic  et  quelques 


tribus  de  l'Inde  se  tatouent  en  versant  des  substances 
colorées  dans  les  incisions  qu'ils  se  sont  faites;  c'est  un 
moyen  de  distinguer  les  races  et  les  rangs ,  de  constater 
des  alliances  contractées ,  de  rappeler  le  souvenir  d'évé- 
nements mémorables.  Il  est  question  du  tatouage  dès 
l'Antiquité,  chez  quelques  peuplades  riveraines  de  la  mer 
Noire,  les  Gelons  par  exemple,  et  chez  les  Pietés  de  la 
Grande-Bretagne. 

TATTERSALL.  F.  au  Supplément, 

TAU ,  instrument  en  forme  de  tau  grec  (  T,  x  ;,  que  plu- 
sieurs divinités  égyptiennes  portent  à  la  main.  V.  Croix. 

TAUD  ou  TAU  DE,  tente  goudronnée  qu'on  établit  sur 
les  embarcations  et  entre  les  deux  passavants  des  b&ti- 
ments,  ou  dont  on  couvre  les  marchandises  sur  les  na- 
vires et  dans  les  ports. 

TAUPINS.  V.  Fbancs-Taupins  ,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

TAUREAU,  en  termes  de  Marine,  navire  de  charge,  en 
usage  dans  la  Manche.  Il  est  très-enflé  de  l'avant,  porte 
deux  mâts  (le  plus  grand  est  à  l'avant)  et  deux  voiles. 

TAUREAUX  (Combats  de).  Ces  divertissements  étaient 
en  usage  chez  les  anciens  Grecs ,  notamment  en  Thes- 
salie  ;  selon  Pline,  ils  furent  introduits  par  César  à  Rome, 
où  les  empereurs,  puis  les  papes,  les  interdirent.  On  n'en 
voit  plus  guère  aujourd'hui  qu'en  Espagne ,  où  on  y  as- 
siste avec  une  véritable  passion  :  il  existe  une  école  de 
tauromachie  k  Séville,  et  la  plupart  des  villes  possèdent 
des  cirques  destinés  aux  luttes  de  taureaux  contre  des 
chevaux  et  des  hommes.  Celui  de  Madrid,  appelé  Coliseo 
de  los  toreros,  contient  plus  de  10,000  spectateurs.  Les 
hommes  qui  combattent  contre  les  taureaux  se  nomment 
toréadors  {k  cheval)  et  toreros  (à  pied};  on  distingue 
parmi  eux  les  picadors,  les  matadors  (  K.  ces  mots)^  et 
tes  chulos  ou  banderilleros,  armés  de  petites  flèches  à 
banderoles  de  toutes  couleurs. 
'  TAUROBOLE.    V.  notre  Dict.  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

TAUTOGRAMMES  (du  grec  tauto,  le  même,  etgramma, 
lettre),  nom  donné  à  des  vers  ou  à  des  poèmes  dont  tous 
les  mots  commencent  par  la  môme  lettre.  F.  Allitération. 

TAUTOLOGIE  (  du  grec  légô.  Je  dis,  et  tauto  pour  to 
auto,  la  même  chose).  C'est  proprement  la  répétition 
d'un  mot  ou  d'une  locution,  mais  presque  toujours  la 
répétition  d'une  seule  idée  sous  deux  ou  plusieurs  formes. 
C'est  d'ordinaire  un  défaut  qui  donne  de  la  lenteur  au 
style  et  le  refroidit  Voiture  a  fait  cette  tautologie  :  «  Cicé- 
ron  avait  étendu  les  bornes  et  les  limites  de  l'éloquence.  » 
Il  y  a  en  grec  un  genre  de  tautologie  très-nsité,  qui  con- 
siste à  exprimer  une  idée  d'abord  sous  forme  affirmative, 
puis  avec  une  double  négation,  ou  réciproquement.  Ren- 
due en  français  avec  une  exactitude  matérielle,  cette 
manière  de  s'exprimer  est  étrange;  mais  on  en  rend 
l'esprit  à  l'aide  de  l'expression  bien  loin  de,  ou  autre  sem- 
blable. Parfois  néanmoins  elle  constitue  un  défaut  réel. 
Il  y  a  enfin  une  espèce  de  tautologie,  fréquemment  em- 
ployée par  les  poètes  et  les  orateurs  anciens  et  modernes, 
et  qui  consiste  à  redoubler  l'expression  d'une  idée  pour 
en  faire  ressortir  la  valeur  et  frapper  plus  fortement  l'at- 
tention. P. 

TAVAIOLE  (de  ^italien  tavaglia,  nappe),  linge  très- 
fin,  garni  de  dentelles,  dont  on  se  sert  à  l'église  pour 
présenter  un  enfant  au  baptême,  pour  couvrir  les  bran- 
cards sur  lesquels  est  placé  le  pain  bénit,  pour  porter  en 
procession  les  statues  de  la  Vierge  ou  des  Saints,  etc. 

TAVERNE  (  du  latin  tabema  ) ,  cabaret ,  auberge  de  bas 
étage. 

TAXE  (du  grec  taxis,  fait  de  tasséin,  régler),  fixation 
faite  par  le  Juge  des  salaires,  émoluments  ou  frais  dus 
aux  officiers  ministériels,  aux  experts,  aux  témoins,  etc. 
Les  parties  condamnées  aux  dépens  peuvent  toujours, 
avant  de  les  payer,  en  exiger  la  taxe,  et  celle-ci  se  fait 
d'après  un  tarif  établi  par  l'autorité. 

taxe,  prix  fixé  par  l'autorité  pour  cortaines  denrées 
(F.  PADt,  Bouchers),  ou  pour  certains  services,  comme 
les  chevaux  de  poste. 

TAXE  DES  lettres  transportées  par  la  poste.  La  taxe  des 
lettres,  en  France,  fut  pendant  longtemps  progressive 
d'après  la  distance  parcourue;  ce  mode  fut  établi  en 
1673,  et  réglé  de  nouveau  par  la  loi  du  15  mars  1827.  Le 
poids  normal  d'une  lettre  était  de  7  1/2  grammes,  et  la 
taxe  de  2  décimes  par  40  kilomèt.  (F.  Poste,  dans,  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d' Histoire),  En  1848,  l'As- 
semblée nationale,  par  décret  du  24  août,  établit  une 
taxe  unique  de  20  centimes  pour  toute  lettre  afi'ranchie, 
et  30  centimes  pour  les  autrâs,  dans  toute  la  France,  ki 
Corse  et  l'Algérie,  à  partir  du  1*  Janvier  1840.  En  1869, 
un  décret  impérial  éleva  le  poids  normal  de  la  lettre  a 


TAX 


1702 


TEE 


f  0  grammes,  sans  changer  la  taxe.  Voici,  dans  les  ta- 
bleaux suivants,  le  tarif  des  lettres  de  tout  poids,  affran- 
cliies  et  non  affranchies  : 

I.  D»  direction  à  direction. 


roiDfl. 


Lrmtn 

«fl^anchies. 

non 

tt.      0. 

fr.      0. 

»     80 

1     80 

»     40 

•     «0 

*     80 

1     80 

1     60 

8     40 

a    40 

8     GO 

Jaaqa'à  10  grammes  incIiisiTement. 

De  10  à  80  gr 

De  80  à  100  gr 

De  100  à  200  gr 

De  iOO  à  300  gr. 


et  ainsi  de  suite,  en  ijoutant,  par  chaque  iOO  gr.  ou 
fraction  de  100  gr.  excédant,  80  c.  en  cas  d'affrancliisser 
ment  et  1  fr.  20  c.  en  cas  de  non-aiïranchissement. 

II.  Dans  Vétendue  d^une  même  direction. 


POIDS. 


Jusqu'à  15  grammes  exclanvement. 

Do  15  à  80  gr 

De  30  à  ÛO  gr 

De  60  à  90  gr 

De  90  à  120  gr 


LniRKS 

aflhinehlM 

ou  non. 


fr.    a. 

10 
80 
30 
40 
50 


» 


et  ainsi  de  suite,  en  ajoutant  10  c.  par  chaque  30  gr.  ou 
fraction  de  30  gr.  excédant, 

ni.  D'une  ville  pour  la  ville  même 
(Paris  excepté) 


POIDS. 

LrtTRBS    • 
alTranchlM 
ou  non. 

lasqu'à  7  gr.  1/8  exclu^lTement. . . . 

De  7  gr.  1/2  à  15  gr 

De  15  i  80  jrr 

fr.     0. 

•  10 

•  80 

•  80 

•  40 
M     50 

De  80  à  60  gr 

De  60  à  90  ta 

et  ainsi  de  suite,  en  ajoutant  iO  c.  par  chaque  30  gr.  ou 
fraction  de  30  gr.  excédant. 

lY.  Intérieur  de  Parti 


POIDS. 


LBTTRKa 
•irraaehiM. 

LKTTRKS 

oiTranehies 
ou  non. 

ff.    c. 
»     10 
»     20 
■     80 

»     40 
M     50 

fr.     0. 

>     15 

*  25 

•  85 

•  45 

*  55 

Jusqu'à  15  gr.  exclusivement. 

De  15  à  30  gr 

De  HO  à  60  gr 

De  60  à  90  gr .' 

De  90  à  180  gr 


et  ainsi  de  suite,  en  ajoutant  10  c  par  chaque  30  gr.  ou 
fraction  de  30  gr.  pour  les  lettres  affranchies  ou  non 
affranchies.  F.  le  Supplément, 

Les  lotlrcs  de  l'intérieur  de  la  France  pour  les  soldats 
à  Tétranger  et  sous  le  drapeau,  pour  les  marins  sous  le 
pavillon  dans  les  colonies,  et  réciproquement  les  lettres 
qu'ils  envoient,  ne  supportent  que  la  taxe  de  direction 
à  direction,  lorsqu'elles  sont  transportées  exclusivement 
par  des  services  français  :  elles  doivent  être  déposées 
dans  les  bureaux  de  postes  militaires,  non  dans  les 
bur^inx  civils. 

TAXE  DES  DéPêCHBS  TÉLÉORAPHIQUES.  LoS  tSXOS  appH* 

cables  k  la  correspondance  télégraphique  privée  circu- 
lant à  rintérieur  de  la  France  furent  fixées  au  début, 
depis  le  1"  janvier  1862,  par  application  de  la  loi  du 
3  juillet  1801.  Pour  une  dépèche  de  un  à  vingt  mots, 
snresse  et  signature  comprises  :  1°  entre  doux  bureaux 
d'une  même  ville  on  d'un  même  département,  1  fr.  ; 
2^  entre  deux  bureaux  de  département*  «liff^rents,  2  fr. 


(par  exception  les  dépèches  à  destination  de  la  Corse 
restent  provisoirement  soumises  à  une  surtaxe  de  1  fr.  50c 
Un  avis  nouveau  fit  connaître  Tépoque  où  ce  sopplc- 
ment  de  prix  cessa  d'être  perçu)  ;  3"  entre  un  bureau 
de  France  et  un  bureau  :  !•  de  l'Algérie,  8  fr.  ;  2*  de 
Tunisie,  10  fr.  Pour  chaque  dizaine  de  mots  ou  fraction 
dedixaine  au-dessus  de  vingt  mots,  les  taxes  précédeo les 
furent  payées  le  double.  L'expéditeur  peut  comprendre 
dans  sa  dépèche  la  demande  de  colla tionoement  ou  d  ac- 
cusé de  réception  par  le  bureau  de  destination.  La  taxe 
do  collationnement  est  é^ale  à  celle  de  la  dépèche.  La 
taxe  de  l'accusé  de  réception  avec  mention  de  rfaeure  de 
la  remise  à  domicile  est  égale  à  celle  d'une  dépèche  sim- 
ple pour  le  même  parcours  télégraphique.  Les  dépèches 
transmises  pendant  la  nuit  ne  sont  soumises  à  aucune 
surtaxe;  mais  il  ne  peut  être  échangé  de  dépêches  de 
nuit  qu'entre  deux  bureaux  ayant  un  service  de  nuit  per- 
manent. Ces  bureaux  sont  Bordeaux,  Boulogne,  Calais, 
Chambérj,  Dijon,  Lille,  Lyon,  Marseille,  Montpellier, 
Nancy,  Narbonno,  Nice,  Paris,  rue  de  Grenelle,  103,  et 
place  de  la  Bourse,  Toulouse,  Tours.  V,  le  Supplément, 

TAXB  DBS  PADVEBS.  \  V.  notre  Dicttonnoire  de  Biogra» 

TAXIARQUE.  |     phie  et  d'Histoire, 

TAXOLOGIE  ou  TAXONOMIE  (du  grec  taxis,  ordre, 
arrangement,  et  de  logos,  discours,  ou  nomos,  loi), 
théorie  des  classifications. 

TAYSIER  (de  tay,  boue,  fumier),  vieux  mot  qui  pa- 
raît avoir  signifié  un  décrottoir. 

TCHÈQUE  (Langue).  V.  Bohême. 

TCHÉRÉMISSE  (Idiome) ,  idiome  finnois  parlé  par  les 
Tchérémisses  des  bords  du  Volga.  Il  a  deux  déclinaisons 
avec  0  cas,  et  une  déclinaison  spéciale  pour  les  pronoms. 
Le  comparatif  se  forme  par  Taddition  de  la  particule  raJ» 
au  positif,  et  le  superlatif  en  lui  préposant  la  particule 
pesch,  La  conjugaison  a  3  temps,  le  présent,  l'imparfait 
et  le  plus-que-parfait  (on  exprime  le  futur  en  ajoutant 
un  adverbe  au  pi-ésent);  elle  a  4  modes,  l'infinitif  «  le 
passif,  le  neutre,  et  le  causal,  ayant  chacun  une  conju- 
gaison différente  lorsque  le  sens  est  négatif.  Les  préposi- 
tions sont  ordinairement  ajoutées  à  la  fin  du  mot  qu'elles 
régissent.  V,  Wiedemann ,  Essai  sur  la  Grammaire  de 
la  langue  tchérémisse,  en  allem.,  Revel,  1847;  le  même. 
Les  Tchérémisses  et  leur  langage,  dans  les  Archives  d'Er- 
man,  1839  ;  Castrén,  Elementa  grammatices  tcheremissœ, 
Kuoplo,  1845,  {n-8». 

TCHERKCSSË  (Langue).  V,  CiRCASsnomE. 

TCHIBYZGA,  instrument  de  musique  des  Tartarcs. 
C'est  une  flûte,  ordinairement  de  roseau,  quelquefois  do 
bois,  longue  d'un  demi-mètre  ou  un  peu  plus,  avec  trois 
ou  quatre  trous  à  l'extrémité.  Elle  a  des  sons  désagréables. 

TCIIICKIRNÉ,  gabarre  de  TÉtat  turc.  Ce  b&timent  n'a 
qu'un  màt  à  pible,  au  centre,  et  un  beaupré.  Il  grée  une 
voile  à  baliston ,  une  grande  voile,  un  hunier,  un  perro- 
quet ,  une  trinquette,  et  un  foc. 

irjlOUDES  (  Langues).  V.  Finnoises. 

TCHOUTCHI  (Idiome),  idiome  parlé  par  les  Tchout- 
chis,  dans  le  Kamtchatka  et  sur  la  côte  d'Amérique  qui 
lui  fait  face.  On  le  rattache  aux  idiomes  eskimaux. 

TCHOUVACHE  (Idiome),  idiome  de  la  famille  turque, 
parlé  par  les  Tchou vaches  de  la  Russie  d'Europe.  Il  con- 
tient plus  d'un  tiers  de  mots  d'origine  finnoise.  Les  sub- 
stantifs, les  pronoms,  les  noms  de  nombre,  se  déclinent, 
mais  non  pas  les  adjectifs.  On  forme  le  pluriel  des  sub- 
stantifs en  ajoutant  zam  ou  sam  au  nominatif  singulier 
et  en  le  déclinant  ainsi.  Les  prépositions  se  placent  après 
leur  régime.  La  conjugaison  a  3  temps  à  l'indicatif;  les 
autres  modes  n'ont  qu'un  temps.  Il  n'y  a  pas  de  passif. 

TECHNIQUES  (Mots),  termes  spéciaux  dont  on  se  sert 
pour  indiquer  les  objets  d'une  science,  les  instruments 
et  les  procédés  d'un  art  (en  grec  tekhnè,  art). 

TECHNOLOGIE  (du  grec  tekhnè,  art,  et  logos,  dis- 
cours), mot  qui  a  signifié  d'abord  la  science  dos  termi^s 
techniques,  c-à-d.  employés  dans  les  arts  industriels,  et 
qu'on  a  transporté  à  la  connaissance  de  ces  arts  meniez. 

TECTORIUM  OPUS,  sorte  de  mortier  des  Anciens,  fait 
avec  de  la  chaux  et  du  sable,  auquel  on  mêlait  quelque- 
fois un  peu  de  marbre  pulvérisé.  On  en  étendait  succf's- 
si  vement  trois  couches  sur  les  murailles  des  appartements; 
il  acquérait  une  grande  solidité,  ne  s'écaillait  en  aucune 
façon,  et  présentait  une  surface  polie,  qu'on  recouvrait 
presque  toujours  do  peintures.  Les  ruines  de  Pompéi  et 
d'Herculanum  ont  fourni  de  précieux  débris  de  ce  genre 
d'enduit. 

TE  DEUM.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio* 
graphie  et  d'Histoire, 

TEETOTALLER,  nom  qu'on  donne,  en  Angleterre  et 


TEL 


1703 


TEL 


aux  ÊCato-UniB  de  TAinérique  du  Nord,  aux  membres  des- 
Sociétés  de  tempérance.  Le  mot,  peut-être  un  peu  iro- 
nique, signifie  partisan  de  Vabstinence  totale, 

TEINTE,  en  termes  de  Peinture,  s'entend  de  diverses 
nuances  d'une  même  couleur,  indépendamment  des  effets 
et  des  combinaisons  du  clair-obscur. 

TEiTfTB  (Dbhi-).  V.  Demi-teinte. 

TEINTER,  en  termes  de  Peinture,  colorier  d'une  cou- 
leur plate,  plus  du  moins  foncée,  comme  on  fait  pour  un 
plan  d'architecture  dont  certaines  parties  sont  teintées 
pour  indiquer  les  diverses  natures  oe  travaux. 

TEINTURIERS,  ancienne  corporation  qui  existait  déjà 
au  temps  de  Louis  IX.  Elle  avait  pour  patron  8'  Maurice. 

TF.KINICA  (Idiome).  V.  Fuégibns. 

TÉLAMONS.  V,  Atlantes. 

TÉLARQUE,  commandant  d'un  Ulos  chez  les  anciens 
Grecs.  V.  AaMés. 

TÉLÊGA,  charrette  russe,  sans  aucune  espèce  d'abri. 

TÉLÉGRAPHE  (du  grec  télé,  de  loin,  et  i)frap/id J'écris), 
appareil  destiné  à  transmettre  rapidement  au  loin  des 
nouvelles,  des  avis  ou  des  ordres,  par  le  moyen  de  si- 
gnaux qui  répondent  à  des  lettres  de  l'alphabet,  à  des 
mots  ou  à  des  chiffres.  La  Télégraphie  est  l'art  d'em- 
ployer ces  signaux.  On  en  fit  des  essais  dans  l'Antiquité. 
Polybe  raconte  qu'au  temps  de  Philippe  III,  roi  de  Ma- 
cédoine, on  imagina  de  diviser  en  5  colonnes  les  24  lettres 
de  l'alphabet  grec  :  la  vigie  qui  donnait  un  signal  levait 
deux  fanaux;  la  vigie  suivante  en  élevait  un  pareil 
nombre  pour  répondre  qu'elle  était  prête;  la  première 
vigie  levait  alors,  à  sa  gauche,  un  nombre  de  fanaux  in- 
diquant le  numéro  de  la  colonne  où  se  trouvait  la  lettre 
à  désigner,  et,  k  sa  droite,  un  nombre  de  fanaux  indi- 
quant le  rang  de  cette  lettre  dans  la  colonne.  Cette  mé- 
thode de  transmission  était  longue.,  mais  précise.  Sur  les 
voies  romaines  étaient  élevées  des  tours  de  distance  en 
distance;  on  en  volt  encore  à  Uzôs,  à  Bellegarde,  à  Arles, 
à  Ntmes,  à  Resançon,  etc.  Suivant  Suétone,  Tibère  ob- 
servait du  haut  des  rochers  de  Caprée  les  signaux  qui  lui 
apportaient  des  nouvelles  de  Rome  et  des  différentes  par- 
ties de  l'Empire.  Un  des  bas-reliefs  de  la  colonne  Trajane 
nous  offre  la  représentation  d'un  poste  télégraphique.  — 
Au  moyen  ftge,  l'art  de  la  télégraphie  fut  néglijsé,  et  il  faut 
regarder  comme  de  simples  et  imparfaits  signaux,  non 
comme  des  signes  télégraphiques,  les  feux,  les  drapeaux, 
les  coups  de  canon,  employés  à  la  transmission  d'avis  dé- 
terminés. Au  xvi«  siècle.  Porta,  physicien  de  Naples,  pro- 
posa d'employer,  pour  communiquer  à  de  grandes  dis- 
tances, quatre  signes  qui,  combines  entre  eux,  pourraient 
tenir  lieu  des  lettres  de  l'alphabet  :  le  l*',  montra  une  fois, 
aurait  représenté  A,  deux  fois  B,  trois  fois  C,  et  ainsi  de 
suite;  le  2%  montré  une  fois,  aurait  correspondu  à  H, deux 
fois  à  I ,  etc.  Dans  les  dernières  années  du  xvu*  siècle, 
l'Anglais  Hooke,  partant  de  cette  idée  que,  pour  écrire  de 
loin  à  l'aide  de  la  télégraphie  aérienne,  il  faut  voir  de  loin, 
imagina  un  appareil  mettant  en  mouvement  des  caractères, 
des  mots  même,  d'une  grosseur  suffisante  pour  être  aperçus 
à  une  certaine  distance  :  son  système  ne  fut  point  appli- 

2ué.  Peu  d'années  après,  vers  1690,  Amontons  proposa 
'employer  des  lunettes  d'approche  ou  longues-vuesjpour 
l'observation  de  signaux  transmis  par  des  postes  nxes  ; 
mais  la  tentative  n'eut  qu'un  commencement  d'exécution. 
Dans  la  seconde  moitié  du  xvui*  siècle,  de  nouveaux  sys- 
tèmes de  télégraphie  furent  proposés  en  France  par  Lin- 
guet,  en  Allemagne  par  Hoffmann  et  par  Bergstrasser. 
Enfin,  les  frères  Ghappe,  aidés  de  l'horloger-mécanicicn 
Bréguet,  imaginèrent,  en  1792,  le  système  que  la  Con- 
vention nationale  adopta  presque  aussitôt,  et  qui  a  été 
appliqué  Jusqu'à  nos  Jours.  Leur  appareil  consistait  en 
une  grande  branche  ou  régulateur,  mobile  sur  un  axe, 
et  dont  les  ailes  on  petites  branches,  indépendantes  l'une 
de  l'autre,  pouvaient  être  mises  en  mouvement  à  l'aide 
de  pédales,  de  cordes  et  de  poulies.  Le  régulateur  était 
susceptible  de  4  positions  :  verticale,  horizontale,  obliciue 
de  droite  à  gauche,  oblique  de  çauche  à  droite  ;  les  ailes 
pouvaient  former  des  angles  droits,  aigus  ou  obtus.  Leurs 
mouvements,  isolés  ou  combinés,  exprimaient  les  lettres 
de  l'alphabet^  les  syllabes,  et  un  certain  nombre  d'idées 
générales.  La  distance  entre  les  stations  télégraphiques 
était,  en  moyenne,  de  12  kilom.  On  put  recevoir  à  Paris 
des  nouvelles  de  Strasbourg  (480  lui.)  en  6  minutes  et 
demie, par  4i  télégraphes;  de  Toulon  (S40  kil.), en  20  mi- 
nutes, par  100  télégraphes;  de  Brest  (600  kil.),  en  8  mi- 
nutes, par  54  télésiaphes.  L'idée  de  pourvoir  les  navires 
d'un  appareil  télégraphique  appartient  au  vice -amiral 
Rosily,en  1806.  Le  brouillard  et  l'obscurité  interrompent 
ta  tnnsmission  des  signaux  de  la  télégraphie  aérienne  : 


plusieurs  systèmes  furout  proposés,  notamment  psf 
MM.  Vilalongue  et  Gonon,  pour  arriver  à  employer  le 
télégraphe  pendant  la  nuit;  mais  les  essais  de  télégraphie 
nocturne  furent  infructueux,  à  l'exception  de  ceux  de 
M.  Château,  qui,  vers  1845,  fit  fonctionner  la  ligne  de 
Cronsiadt  à  Varsovie. 

Déjà  l'on  était  entré  alors  dans  une  voie  nouvelle,  celle 
de  la  télégraphie  électrique,  Cavendish  et  Franklin  con- 
çurent la  possibilité  d'emplover  l'électricité  à  la  transmis- 
sion des  dépêches.  Dès  l'année  1774,  un  Genevois  d'origine 
française,  Lesage,  conçut  le  projet  d'appliquer  l'électricité 
à  la  télégraphie  :  on  devait  se  servir  de  la  machine  élec- 
trique et  de  24  électromètres,  à  chacun  desquels  était 
affecté  un  fil  particulier;  en  faisant  passer  la  décharge  de 
la  machine  à  tfavers  tel  ou  tel  fil,  on  eût  produit  à  l'autre 
extrémité  l'effet  représentatif  de  telle  ou  telle  lettre  de  l'al- 
phabet. En  1787,  le  physicien  Lomond  construisit  à  Paris 
une  petite  machine  à  signaux,  fondée  sur  les  attractions 
et  les  répulsions  des  corps  électrisés,  et  l'ingénieur  *Bet- 
tancourt  se  servit  de  bouteilles  de  Leyde,  dont  il  faisait 
passer  la  décharge  dans  des  fils  allant  de  Madrid  à  Aran- 
juez.  En  1704,  un  Allemand,  Reiser,  proposa  d'éclairer  à 
distance,  au  moyen  d'une  décharge  élfîctnque,  les  lettres 
de  l'alpbi^t  découpées  sur  des  carreaux  de  verre  recou- 
verts de  bandes  d'étain;  l'étincelle  électrique  devait  se 
transmettre  par  24  fils  métalliques  isolés  correspondant 
aux  24  lettres.  En  1796,  le  docteur  Franc.  Salva  reprit  en 
Espagne  les  essais  de  Bettancourt.  La  découverte  de  la 
pile  de  Volta  ayant  donné  le  moyen  de  faire  agir  l'élec- 
tricité à  travers  un  espace  fort  étendu,  sans  déperdition 
sensible,  Soemmoring  proposa  à  l'Académie  de  Munich, 
en  1811,  un  appareil  télégraphique  ayant  pour  principe 
la  décomposition  électro-chimique  de  l'eau  :  cet  appareil  . 
se  fût  composé  d'une  pile  et  de  35  circuits  métalliques, 
dont  25  représentant  des  lettres,  et  10  des  chiffres; 
chacun  de  ces  circuits  eût  été  interrompu  dans  un  vase 
plein  d'eau  distillée,  qui,  en  se  décomposant  dès  que  le 
courant  eût  été  étid)li,  aurait  indiq[ué  une  lettre  ou  un 
chiffre  quelconque.  Cette  idée  était  d'une  application 
diflScile.  La  découverte  de  l'électro-magnétisme  fit  enfin 
faire  un  pas  décisif  à  la  question  :  GErsted  ayant,  en 
1820,  reconnu  qu'un  courant  électrique  fait  dévier  l'ai- 
guille aimantée  de  sa  position  normale.  Ampère  pensa 
qu'on  pouvait  appliauer  ce  fait  à  la  télégraphie.  Après 
que  Scnwei^er  eut  découvert  le  multiplicateur  ou  gcuva-- 
nomètre,  qm  permet  de  faire  produire  aux  forces  électro- 
magnétiques des  effets  sensioles.  Schilling  commença  à 
S^-Pétersbourg,  en  1833,  des  expériences  que  poursui- 
virent Cooke  et  Wheatstone  en  Angleterre,  Morse  en 
Amérique,  Steinheil  en  Allemagne,  et  <^ui  amenèrent 
presque  tout  à  coup  la  télégraphie  électnque  à  sa  per- 
fection. L'appareil  adopté  aujourd'hui  en  Angleterre  et  en 
France  est  celui  que  Wheatstone  inventa  en  1841.  La 
première  ligne  de  télégraphie  électrique  aux  États-Unis 
fut  établie,  en  1844,  entre  Washington  et  Baltimore, 
d'après  le  système  de  Morse.  La  première  en  France  fut 
celle  de  Paris  à  Rouen,  en  1845.  Le  premier  télégraphe 
sous-marin,  celui  qui  relie  l'Angleterre  à  la  France  par 
Douvres  et  Calais,  date  de  1850. 

Les  avantages  de  la  télégraphie  électrique,  réservés 
d'abord  à  l'État,  ont  été  mis  à  la  disposition  des  particu- 
liers en  France  depuis  1851.  Le  service  télégraphique 
comprend  10  Inspecteurs  divisionnaires,  1  directeur  gé- 
néral, 3  inspecteurs  généraux,  65  inspecteurs  départe- 
mentaux, 14  sous-inspecteurs,  93  directeurs  de  trans» 
mission,  plus  les  chefs  de  stations  et  les  autres  em- 
ployés inférieurs.  Leurs  traitements  sont  fixés  ainsi 
qu'il  suit: 


Diractenr  général 

Inspecteurs  généraux 

Inspecteats 

Sous-Inspecteurs 

Directeurs  de  transmission.. 

Chefs  de  station 

Elèves 

Commis  principaux 

Traducteurs 

Oardfs-magasins 

Employés 

Employés  surnuméraires . . . 

Chefs  surveillants 

Surveillants 

Facteuxf 


CLiSSI 
unique. 


85,000 
10,000 

• 
4,000 

» 

1,800 
8,000 

* 
S,000 

1,400 

» 
» 


I'«. 


f 

« 
8,000 

* 
3,500 
8,500 

* 

1 
3,000 

* 
1,800 

* 

« 
1,800 
1,000 


8». 


1 

» 
7,000 

• 
3,000 
2,000 

» 

8,500 

1 
1,000 

»•* 

1,100 
900 


3«. 


* 

1 

6,000 

* 
* 

■ 

8,000 

* 

Moo 
* 
» 

1,000 
H  0 


4«. 


5,000 

M 
» 
> 

f 

* 
» 


TEL 


1704 


TEL 


TÉLÉMAQUE  (Les  AvENTimBS  db),  poSmo  en  prose  ou 
roman  poétique  composé  par  Fénelon  pour  l'éducation  du 
duc  de  Bourgogne,  son  élève.  Les  voyages  de  Télémaque, 
à  la  recherche  d'Ulysse  son  père,  que  l'on  ne  voyait  pas 
revenir  du  siège  de  Troie,  font  le  sujet  du  livre.  Télé- 
maque,  étant  très-Jeune,  part  d'Ithaque  avec  Mentor,  le 
plus  fidèle  ami  d'Ulysse,  et  auquel  ce  prince,  en  allant  au 
siège  de  Troie,  avait  confié  son  fils  et  sa  maison.  Mais  la 
déesse  du  courage  conduit  par  l'intelligence,  Minerve, 
qui,  k  ce  titre,  protégeait  les  héros,  veut,  par  une  fa- 
veur spéciale,  accompagner  elle-même  le  fils  d'Ulysse, 
afin  de  l'instruire  dans  Tart  du  gouvernement;  elle  prend 
la  figure  de  Mentor,  sans  que  Télémaque  en  sache  rien, 
et  part  avec  lui.  Après  qu'ils  ont  visité  plusieurs  pays, 
une  tempête  qui  brise  leur  navire  les  jette  dans  l'ile 
d'Ogygie,  où  règne  la  déesse  Calypso.  Elle  avait  connu 
Ulysse;  elle  s'intéresse  à  Télémaque,  lui  offre  l'hospita- 
lité, et  lui  demande  le  récit  de  ses  aventures  depuis  son 
départ  d'Ithaque.  Télémaque  lui  raconte  qu'il  a  été  à 
Pylos,  à  Lacédémone;  qu'il  a  fait  naufrage  sur  la  cète  de 
Sicile;  qu'il  fut  ensuite  captif  en  Egypte;  que,  rendu  k 
la  liberté,  il  visita  Tyr,  l'île  de  Chypre,  et  la  Crète,  où  il 
prit  part  à  divers  jeux  et  à  diverses  épreuves  pour  décider 
de  l'élection  d'un  roi.  La  couronne  lui  fut  proposée  :  mais 
il  la  refusa,  préférant  sa  patrie,  et  se  rembarqua  pour 
rentrer  à  Itliaque.  Alors  une  horrible  tempête,  suscitée 
par  Neptune,  à  la  prière  de  Vénus,  le  jeta  dans  l'ile  de 
Calypso.  Cependant  la  déesse  a  conçu  une  vive  passion 
pour  Télémaque,  qui,  de  son  côté,  s'est  épris  d'Eucharis, 
une  des  nymphes  de  Calypso.  Mentor,  afin  de  dérober  le 
fils  d'Ulysse  au  danger,  construit  un  vaisseau  pour  quitter 
l'ile;  mais  les  nymphes  l'incendient,  excitées  par  Cupi- 
don.  A  la  vue  des  flammes,  Mentor  précipite  Télémaque 
à  la  mer  et  s'y  jette  avec  lui,  pour  gagner  à  la  nage  un 
navire  phénicien  en  vue  de  l'ile,  et  où  ils  sont  recueillis. 
Adoam,  qui  le  commandait,  et  qu'ils  avaient  connu  k 
Tyr,  leur  raconte  la  mort  de  Pygmalion,  roi  de  cette  ville, 
et  d'Astarbé  son  épouse.  Adoam  naviguait  vers  Ithaque, 
lorsque  Vénus,  toujours  irritée,  demande  à  Jupiter  la 
perte  de  Télémaque;  mais  les  destins  s'y  opposent  :  alors 
elle  obtient  de  Neptune  qu'une  divinité  trompeuse  en- 
chante les  sens  du  pilote  Acamas,  et,  comme  il  croyait 
entrer  à  Ithaque,  il  arrive  dans  le  port  de  Salente.  Ido- 
ménée,  roi  du  pays,  leur  fait  l'accueil  le  plus  affectueux. 
Mentor  arrête  une  guerre  que  les  Manduriens  allaient 
faire  k  son  hôte,  et  la  termine  par  un  traité  de  paix. 
Télémaque  va  soutenir  les  Manduriens  dans  une  guerre 
qu'ils  ont  avec  les  Dauniens.  Idoménée  fait  connaître  à 
Mentor  l'état  de  son  royaume,  les  intrigues  de  sa  cour, 
les  machinations  de  son  favori  Protésilas,  qui  lui  a  fait 
exiler  Philoclès,  ami  sage  et  prudent.  Mentor  lui  ouvre 
les  yeux  sur  l'injustice  de  cette  conduite  :  Idoménée  rap- 
pelle Philoclès,  et  exile  Protésilas.  Cependant  Télémaque 
gagne  l'affection  des  alliés,  celle  même  de  Philoctète,  qui 
lui  raconte  ses  aventures,  et,  par  sa  valeur,  donne  la  vic- 
toire aux  Manduriens.  Pendant  son  séjour  dans  leur 
camp,  averti  en  songe  que  son  père  Ulysse  n'est  plus  sur 
la  terre,  il  descend  aux  Enfers  pour  aller  Vy  chercher; 
là  il  rencontre  Arcésius,  son  bisaïeul,  qui  lui  assure 
(||u'Ulysse  est  vivant.  Il  revient  au  camp.  Une  bataille  est 
livrée,  dans  laquelle  Télémaque  tue  Adraste,  roi  des  Dau- 
niens ;  il  lui  fait  donner  Polydamas  pour  successeur,  et 
retourne  à  Salente,  où  il  admire  la  prospérité  que  Mentor 
y  a  établie.  Il  s'éprend  d*amoor  pour  Antiope,  fille  d'Ido- 
ménée;  mais  il  faut  repartir  pour  Ithaque.  Surpris  par 
un  calme  en  mer,  nos  héros  descendent  dans  une  Ile  dé- 
serte; Mentor  y  reprend  la  figure  de  Minerve,  aux  yeux 
mêmes  de  Télémaque  :  la  déesse  lui  donne  ses  derniers 
conseils,  puis  disparaît  dans  un  nuage  d'or  et  d'azur. 
Télémaque  se  h&te  de  se  rembarquer,  et  arrive  à  Ithaque, 
où  il  reconnaît  son  père  chez  le  fidèle  Eumée. 

Le  Télémaque  est  une  suite  de  VOdyssée;  aussi  tout  y 
est  emprunté  aux  Grecs.  Fénelon  a  pris  pour  modèles  : 
Homère  dans  ses  deux  poèmes  ;  Xénophon,  dans  sa  Cy- 
ropédie;  Platon,  dans  son  Criton  et  ses  traités  de  la 
Politiqw,  de  la  Républiqtie,  et  des  Lois;  enfin,  il  doit  à 
Sophocle  l'épisode  tout  entier  de  Philoctète.  Il  a  fait  de 
tous  ces  emprunts,  à  la  manière  des  grands  poètes,  sa 
propre  substance  ;  il  en  a  tiré  un  ouvrage  vraiment  ori- 
ginal. Néanmoins,  son  livre,  sauf  les  principes  de^morale 
générale,  ne  pouvait  être  bien  utile  pour  le  prince  auquel 
il  le  destinait;  cette  éducation  à  la  grecque,  ces  disser- 
tations philosophiques  sur  la  paix  et  la  guerre,  ces  pré- 
ceptes utopiques  d'administration,  sont  sans  application 
dans  nos  Etats  modernes;  en  les  lisant,  on  ne  peut  s'em- 
jpêcher  de  se  rappeler  les  paroles  de  Louis  XIV  sur  le  bon 


archevêque,  que  c'était  le  plus  bel-esprit  chimérique  ds 
Fnnce. 

Fénelon  n'avait  point  destiné  son  Téléfnaqtêek  la  publi- 
cité ;  il  devait  l'offrir  au  duc  de  Bourgogne,  à  l'époque  oà 
ce  prince  se  marierait.  Mais  ayant  dû  q^itte^  son  élève 
deux  ans  auparavant,  en  1695,  pour  prendre  possession  de 
l'archevêché  de  Cambrai,  il  conserva  son  ouvrage.  Un  do- 
mestique, chargé  d'en  transcrire  le  manuscrit .  en  1698, 
abusa  de  sa  confiance,  et  prit  une  copie  subreptice,  qui 
fut  imprimée  à  Paris,  en  1699,  sous  le  titre  de  :  Suite  du 
quatrième  livre  de  VOdyssée,  ou  les  Aventures  de  Télé- 
maque, fUs  d'Ulysse.  La  cour  y  voulut  voir  des  allusions 
satiriques  à  Louis  XIV  et  à  ses  mim'stres.  Le  livre  fut  saisi 
et  défendu  avant  même  d'être  entièrement  imprimé.  Les 
libraires  de  Hollande  s'en  emparèrent,  et  le  Télémaque 
circula  dans  toute  l'Europe,  avec  des  clefs  imaginées  pai 
la  malignité  :  on  dit  qu'il  fallait  y  voir  Louis  XIV  dans 
les  traits  dont  étaient  peints  Idoménée,  Adraste,  P}'g- 
nudion  ;  Louvois  dans  Protésilas  ;  M"*  de  Maintenon  dans 
Astarbé.  Fénelon  repoussa  avec  force  ces  interprétations 
dans  une  lettre  écrite  en  1710  au  P.  Letellier,  confesseur 
du  roi.  En  effet,  les  seules  allusions  manifestes  ont  rap- 
port au  duc  de  Bourgogne,  que  Fénelon  voulait  éclairer 
sur  ses  défauts  naturels,  et  instruire  des  devoirs  et  des 
périls  de  la  royauté  ;  quant  au  reste,  il  avait,  à  la  ma- 
nière des  grands  moralistes,  peint  les  mœurs,  les  carac- 
tères généraux,  en  s'inspirant  des  modèles  qu'il  avait 
autour  de  lui,  sans  néanmoins  en  faire  les  portraits. 

Ce.  mélange  de  faits  contemporains,  peints  sous  les 
couleurs  d'une  civilisation  antiaue,  avec  un  idéal  fabu- 
leux, jette  un  peu  de  froideur  aans  le  Télémaque,  bien 
que  le  plan  en  soit  heureux,  le  récit  rapide,  et  le  style 

fdein  de  cette  verve  tempérée,  mais  entraînante,  qui  est 
e  propre  du  talent  de  Fénelon.  Trop  souvent,  au  mo- 
ment où  l'imagination  de  l'auteur  nous  emporte  dans  le 
monde  d'Homère,  un  anachronisme  de  politique  et  de 
morale  nous  ramène  involontairement  en  plein  siècle  de 
Louis  XIV.  C'était  un  des  écueils  et,  en  même  temps, 
une  des  nécessités  de  ce  sujet  allégorique.  D'une  autre 
part,  dans  cette  fable  païenne,  et  malgré  l'appareil  my- 
thologique, les  idées  sont  celles  du  christianisme.  Les 
dieux  de  l'Olympe  ne  figurent  là  j[ue  pour  l'embellisse- 
ment de  la  fable.  Considéré  dans  son  but,  l'éducation 
morale  d'un  roi  futur,  le  Télémaque  est  admirable;  par 
le  choix  du  sujet,  Fénelon  mettait  sans  cesse  son  élève 
en  présence  de  lui-même  ;  par  la  création  du  person- 
nage de  Mentor,  il  l'instruisait  à  rapporter  tout  le  mérite 
de  ses  actions  à  la  protection  divine. 

Le  Télémaque  a  éUS  publié  le  plus  souvent  en  24  livres; 
mais  on  sait  maintenant  que  Fénelon  l'avait  lui-même 
partagé  en  18  livres,  ce  qui  est  effectivement  la  division 
la  plus  naturelle,  parce  qu'ainsi  chaque  livre  comprend 
une  série  complète  d'aventures.  Ce  bel  ouvrage  a  été  tra- 
duit dans  toutes  les  lan{:^es  de  l'Europe;  des  professeurs 
( Heurtant,  de  Caen,  1729  ;  Destoùches,  1764  ;  le  P.  Viel, 
1808  )  ont  cru  lui  mieux  donner  le  caractère  de  poème  en 
le  tournant  en  vers  latins;  tentatives  malheureuses,  que 
la  réputation  de  l'original  n*a  pu  faire  vivre.  —  Les  Ci- 
tions françaises  du  Télémaque  sont  presque  innombra- 
bles; nous  citerons  en  première  ligne,  et  pour  l'exacti- 
tude, celles  des  Sulpiciens,  dans  les  œuvres  complètes 
de  Fénelon,  Versailles,  182(^24,  23  vol.  in-8°,  et  de  Le- 
fèvre,  Paris,  1844,  grand  in-16;  et,  comme  édition  plus 
littéraire,  avec  des  notes  et  des  appréciations  littéraires 
et  critiques  de  chaque  livre,  celle  de  M.  Colincamp,  Paris, 
1853,  in-12.  —  V.  de  Bausset,  Histoire  de  Fénelon,  t.  lU, 
liv.  IV;  Voltaire,  Essai  sur  la  poésie  épique^  conclusion; 
Laharpe,  Cours  de  littérature,  2*  partie,  ch.  m,  sea.  2; 
Chateaubriand,  Génie  du  christianisme,  U*  partie,  c.  8,  et 
préface  des  Martyrs  ;  Villemain,  Discours  et  Mélanges. 
Notice  sur  Fénelon  ;  D.  Nisard,  Histoire  de  la  littérature 
française,  U  III,  ch.  13,  S  8;  Rigault,  Histoire  de  la 
querelle  des  Anciens  et  des  Modernes,  3*  partie,  chap.  m 
Becherches  bibliographiques  sur  le  Téleinaque,  2*  édit.. 
Paris,  1840,  in-8<»,  très-intéressante  brochure  de  M**' 
(l'abbé  Caron),  directeur  au  séminaire  de  Saint^Sulpicc 
de  Paris.  F.  B. 

TÉLÉOLOGIE  (du  grec  télos,  fin,  but,  et  logos,  dis- 
cours) ,  traité  des  causes  finales  (  V.  Causes  ninALES).  L« 
preuves  qu'on  en  déduit  en  faveur  de  l'existence  de  Dieu 
sont  dites  téléologiques, 

TÉLÉPHONIE  (du  grec  télé,  loin,  etphânè,  voix,  son  •, 
art  de  correspondre  à  de  grandes  distances  par  le  moyen 
des  sons.  C'est  une  télégraphie  acoustique  ou  musidle» 
Elle  a  pour  inventeur  Sudre,  qui  en  eut  la  premirre 
idée  dès  1817  ;  mais  ce  fut  seulement  10  ans  aurèt»,  qu  il 


TÉM 


1705 


TEM 


proposa  remploi  de  son  système  pour  la  transmission  des 
ordres  dans  Tarmée.  Il  donnait  aux  sept  notes  de  la  mu- 
sique et  à  leurs  diverses  combinaisons  une  valeur  ana- 
logue à  celle  des  signaux  du  télégraphe.  Invité  à  modifier 
sa  méthode  de  façon  à  n*employer  que  les  notes  du  clai- 
ron d'ordonnance  II  y  réussit  en  1829,  et,  depuis  cette 
époque,  il  simplifia  encore  en  réduisant  à  trois  le  nombre 
des  notes  nécessaires,  sol,  ut,  sol.  Deux  signaux  succes- 
sifs, dont  Tun  servait  d'avertissement,  suffisaient  pour 
transmettre  l'un  quelconque  des  ordres  inscrits  à  l'avance 
dans  un  livre  de  tactique  militaire  ou  navale.  Au  lieu  de 
clairons,  Sudre  faisait  aussi  usage  du  tambour,  en  substi- 
tuant à  chacune 'des  trois  notes  une  batterie  particulière. 
Le  canon  môme  pouvait  être  utilisé  dans  les  circonstances 
où  les  clairons  et  les  tambours  n'ont  pas  une  portée  suf- 
fisante. La  faculté  de  changer  à  volonté  la  clef  des  signes 
garantissait  le  secret  des  dépèches.  Enfin  Sudre  employait 
de  la  même  façon  trois  disques  colorés  pendant  le  Jour, 
trois  fanaux  pendant  la  nuit,  trois  fusées  de  couleurs 
différentes.  Il  est  mort  en  1862,  avant  <l*avoir  vu  accepter 
sa  téléphonie,  bien  qu'elle  eût  été  l'objet  de  rapports  fa- 
vorables. B. 

TËLÈTE ,  chant  d'initiation  chez  les  anciens  Grecs. 

TÉLIAMBE,  nom  donné  par  certains  grammairiens 
modernes  aux  yers  hexamètres  héroiaues  terminés  par 
un  ïambe  (du  grec  télos,  fin,  et  iamhoSf  ïambe).  Les 
critiques  grecs  l'appelaient  Meiowos  (  V.  Miurus  et  Ansis). 
Ce  nom  s'applique  également  aux  vers  crétiques  et  aux 
vers  bacchicujues  terminés  par  un  ïambe,  comme  ceux-ci 
de  Plante  : 

Melius  an\nohôc  mtJû \ non  fUit | dômi  (Grétique). 
PôtXôra  ês\sèf  eût  car  i  môdèsiè  |  sïtûm  'sL 

(Bacchiaque)  P. 

TÉLINGA  ou  TEL013G0U  (Langue),  une  des  langues 
dravidiennes  (  V,  ce  mot)  de  l'Hindoustan ,  parlée  dans 
le  bassin  inférieur  du  Godavéry  et  celui  de  la  Kistnah. 
C'est  de  toutes  la  plus  mélangée  de  sanscrit.  Sa  gram- 
maire et  sa  syntaxe  ressemblent  à  celles  du  tamoul  et  du 
karnatique  (  K.  ces  mots).  Elle  a  fourni  un  certain  nombre 
de  mots  au  malais  et  au  Javanais.  Son  alphabet  présente 
le  même  nombre  de  lettres  que  le  dôvanàgari.  L'écri- 
ture, par  ses  formes  arrondies,  a  un  aspect  tout  différent 
de  l'ancien  type  indien  à  forme  carrée.  V.  A.-D.  Camp- 
bell, A  Dicttonary  of  the  Teioogoo  language^  Madras, 
1821,  gr-  in-4^;  Brown,  On  the  language  and  literature 
of  Ihe  Telugu,  Madras,  1840,  2  vol. 

TÉMOIGNAGE,  TÉMOINS.  Le  témoignage  des  hommes 
«'entend  proprement  de  la  déposition  de  nos  semblables, 
qui  nous  fait  connaître  des  faits  passés  loin  de  nous  ou 
avant  nous,  par  un  récit  oral  ou  écrit.  Vautorité  de  ce 
témoignage  est  la  valeur  qu'on  doit  lui  reconnaître,  et  qui 
varie  suivant  le  nombre  et  le  caractère  des  témoins,  et 
suivant  la  nature  des  faits.  Elle  a  son  fondement  dans  la 
confiance  naturelle  de  l'homme  en  la  véracité  de  ses  sem- 
blables. Cette  confiance  est  fondée  sur  l'induction  ;  elle  est 
nécessaire,  parce  que  nos  moyens  individuels  de  con- 
naître sont  limités  en  puissance  et  en  étendue  dans  le 
temps  et  dans  l'espace.  Comme  les  hommes  peuvent  se 
tromper  ou  vouloir  tromper,  il  y  a  certaines  conditions, 
qui  sont  en  résumé  :  la  présence  des  témoins  au  fait,  la 
capacité  relative,  la  moralité  reconnue,  l'absence  de  pas- 
sion et  d'intérêt,  le  nombre.  Ces  conditions  sont  appli- 
cables aux  faits  contemporains;  quant  aux  faits  passés, 
le  témoignage  se  transmet  ou  par  la  tradition,  ou  par  les 
monuments,  ou  par  Vhistoire,  et  souvent  par  ces  trois 
moyens  à  la  fois;  les  conditions  sont  données  par  la  cri- 
tique historique,  qui  est  l'art  de  Juger  la  valeur  des 
témoignages  sur  lesquels  reposent  les  écrits  du  passé. 
La  certitude  qui  résulte  du  témoignage  est  dite  morale, 
parce  qu'elle  est  fondée  sur  les  lois  qui  régissent  les 
nommes  dans  leurs  rapports  entre  eux  ;  elle  est  dite  his" 
torique,  quand  il  s'agit  du  passé. 

En  Droit,  le  témoignage  prend  deux  caractères,  ce  qui 
donne  lieu  à  deux  sortes  de  témoins  :  judiciaires,  instru' 
mentaires.  Les  témoms  judiciaires  déposent  d'un  fait  dont 
ils  ont  connaissance.  Pour  que  leur  témoignage  soit  va- 
lable, ils  doivent  être  &gés  de  15  ans  au  moins;  cepen- 
dant ils  peuvent  être  entendus  avant  d'avoir  15  ans  révo- 
lus, si  cela  est  jugé  nécessaire.  Chaque  témoin  doit  déclarer 
ses  noms,  profession,  &ge  et  demeure,  s'il  est  parent  ou 
allié  d»  l'une  des  parties  et  à  ouel  degré,  s'il  est  servi- 
teur ou  domestique  de  l'une  d'elles;  il  s'engage  par  ser- 
ment à  dire  toute  la  vérité,  n  doit  n'avoir  subi  aucune 
peine  afflictive  ou  infamante.  Les  juges  peuvent  se  dé- 


cider sur  la  déposition  d'un  seul  témoin.  En  matière 
civile,  la  preuve  par  témoins  n'est  pas  toujours  admise 
(V.  Prbcvb).  En  matière  criminelle,  on  ne  reçoit  pas  les 
dépositions  :  1°  du  père,  de  la  mère  ou  de  tout  autre  as- 
cendant de  l'accusé;  2°  des  fils,  fille,  ou  tout  autre  des- 
cendant ;  3°  des  frères  et  sœurs  ;  4*^  des  alliés  aux  mêmes 
degrés;  5**  du  mari  ou  de  la  femme  ;  ti<^  des  dénonciateurs 
récompensés  pécuniairement  par  la  loi.  Si  '^'une  de  ces 
personnes  a  été  entendue  sans  opposition,  il  n'y  a  pas 
nullité  de  la  procédure.  Les  témoins  peuvent  être  forcés 
de  comparaître,  sous  peine  d'amende  et  par  voie  de  con- 
trainte par  corps.  Une  indemnité  leur  est  due  pour  venir 
déposer  en  justice.  Les  personnes  qu'on  a  le  droit  de 
reprocher^  c-à-d.  dont  on  peut  écarter  la  déposition, 
sont  :  les  parents  ou  alliés  Jusqu'au  6*  degré  des  parties 
ou  de  leurs  conjoints,  les  héritiers  présomptifs  ou  dona- 
taires, les  serviteurs  et  domestiques,  ceux  qui  ont  bu  ou 
mangé  avec  la  partie  et  à  ses  frais.  —  En  matière  crimi- 
nelle, le  faux  témoignage  est  puni  des  travaux  forcés  à 
temps;  en  matière  correctionnelle  et  en  matière  civile, 
de  la  réclusion  ;  en  matière  de  police,  de  la  dégradation 
civique,  d'un  an  de  prison  au  moins,  et  de  cinq  ans  au 
plus.  Chez  les  Anciens ,  le  faux  témoin  était  condamné  à 
la  peine  encourue  par  l'accusé,  en  cas  de  culpabilité.  Au 
moyen  &ge,  la  confiscation  des  biens,  la  langue  coupée, 
la  mutilation  du  poignet,  et  le  plus  souvent  la  mort, 
étaient  la  punition  du  faux  témoignage. 

Les  témoins  instrumentaires  sont  ceux  qui  assistent 
l'officier  civil  dans  l'exercice  de  ses  fonctions,  pour  donner 
plus  d'authenticité  à  l'acte  qu'il  reçoit.  Les  témoins 
produits  aux  actes  de  l'état  civil  ne  peuvent  être  que  du 
sexe  masculin;  ils  doivent  être  âgés  de  21  ans  au  moins. 
Pour  les  actes  de  naissance  ou  de  décès,  il  faut  deux 
témoins;  pour  les  actes  de  mariage,  quatre;  pour  les  actes 
notariés,  deux  témoins,  citoyens  français,  sachant  signer, 
et  domiciliés  dans  l'arrondissement  communal  où  l'acte 
est  passé.  Pour  un  testament  reçu  par  deux  notaires ,  il 
faut  quatre  témoins,  deux  s'il  est  reçu  par  un  notaire  ; 
les  témoins  doivent  être  majeurs  et  jouir  de  leurs  droits 
civils;  ils  ne  peuvent  être  ni  légataires  du  testateur,  ni 
ses  parents  ou  alliés  jusqu'au  quatrième  degré  inclusive- 
ment, ni  parents  ou  alliés  des  notaires  présents!  F.  Code 
Napoléon^  art.  37, 975, 980  ;  Code  de  Procédure,  art.  262, 
271  ;  Code  d'Instruction  criminelle,  art.  71,  155,  189, 
269,  317,  etc. 

Autrefois  les  témoins  dans  un  duel  se  battaient  sou- 
vent entre  eux.  Us  sont  poursuivis  aujourd'hui  comme 
complices. 

Par  métaphore  on  nomme  témoins  :  dans  les  travaux 
de  terrassement,  de  petites  élévations  de  terre  qu'on 
laisse  pour  indiquer  le  niveau  primitif  et  la  hauteur  des 
terres  enlevées;  les  arbres  de  lisière,  et  dans  les  forêts 
ceux  qu'il  est  défendu  d'abattre;  les  feuillets  que  les  re- 
lieurs ne  rognent  pas,  pour  montrer  le  soin  qu'ils  ont 
mis  à  laisser  le  plus  de  marge  possible.  R. 

TEMPERA ,  en  termes  de  Peinture,  tout  liquide  avec 
lecpiel  l'artiste  mélange  ses  couleurs  sèches,  afin  de  pou- 
voir les  appliquer  au  moyen  d'un  pinceau.  Dans  une  ac- 
ception plus  restreinte,  on  a  appelé  Peinture  à  tempera 
ce  que  nous  nommons  la  Détrempe  (  V.  ce  mot  ). 

TEMPÉRAMENT ,  en  termes  de  Musique,  manière  do 
modifier  les  sons,  en  accordant  les  instruments  à  clavier, 
de  telle  sorte  qu'au  moyen  d'une  légère  altération  dans 
la  juste  proportion  des  intervalles  on  puisse  employer 
les  mêmes  cordes  pour  moduler  en  tous  les  tons  sans 
déplaire  à  l'oreille. 

TEMPÉRANCE  (Sociétés  de),  associations  dont  les 
membres  prennent  l'engagement  de  ne  pas  s'adonner  aux 
boissons  spiritueuses,  et  surtout  de  s'abstenir,  complète- 
ment ou  dans  une  certaine  mesure,  de  l'usage  de  l'eau- 
d&-vie.  Il  en  exista  quelques-unes  dès  le  xvi*  siècle  en 
Allemagne,  notamment  i  Mayence.  Mais  elles  sont  deve- 
nues nombreuses  de  notre  temps  dans  les  États-Unis  de 
l'Amérique  du  Nord  :  la  première  y  fut  fondée  en  1828, 
et,  deux  ans  après,  on  en  comptait  déjà  1,700.  En  Angle- 
terre, le  P.  Mathew  a  été  le  principal  apôtre  des  Sociétés 
de  tempérance;  il  a  entrepns  des  tournées  et  provoqué 
des  meetings  à  cette  occasion.  Certaines  Sociétés  prescri- 
vent l'abstention  absolue  des  liqueurs  spiritueuses,  ce 
qui  est  une  exagération  ;  aussi ,  en  1844,  le  gouvernement 
prussien  défendit  aux  militaires  engagés  sous  le  drapeau 
de  s'affilier  aux  Sociétés  de  tempérance  4e  cette  sorte. 

TEMPÉRÉ  (Genre  ou  Style),  genre  d'éloquence  qui 
se  place  entre  le  simple  et  le  sublime.  On  l'appelle  aussi 
orné  ou  fleuri^  parce  qu'il  admet  tous  les  ornements ^ 
toutes  les  fleurs  de  la  Rhétorique.  L'orateur  ne  parle  pai 


TEM 


1706 


TEM 


•eulement  pour  se  faire  entendre ,  il  veut  plaire  et  tou- 
cher ;  il  ne  doit  donc  pas  se  contenter  d*ètre  clair  et  in- 
telligible; il  faut  qu'il  charme  Timagination,  et  il  ne  peut 
y  réussir  qu'en  empruntant  son  langage.  «  Le  plaisir,  dit 
Quintilien,  aida  à  la  persuasion,  et  l'auditeur  est  disposé 
à  croire  vrai  ce  quUl  a  trouvé  agréable.  »  L'agrément  naît 
de  la  beauté,  de  la  délicatesse,  de  Téclat  de  Teipression, 

Îui  mettent  en  relief  la  solidité  des  pensées  et  des  preuves. 
e  genre  tempéré  ne  prétend  pas  k  Ténergie  ;  son  carac- 
tère est  la  douceur.  Plus  riche  que  le  simple,  plus  humble 
que  le  sublime,  ce  qui  le  distingue,  c'est  Tart  de  plaire. 
11  ae  présente  avec  une  certaine  gravité,  qui  n'est  pour- 
tant ni  de  la  hauteur,  ni  de  la  dignité.  Il  recherche  la 
phrase  qui  a  du  nombre  et  de  l'harmonie;  cependant  il 
évite  les  grandes  périodes.  11  aime  l'inversion,  parce 
qu'elle  donne  au  discours  la  variété  avec  l'élégance;  mais 
il  ne  la  cherche  pas  Jusqu'à  cesser  d'être  naturel.  Il  bannit 
les  termes  généraux  ;  il  admet  toutes  les  figures  de  mots 
et  quelques  figures  de  pensées.  «  Il  y  a  un  genre  d'élo- 
quence qui  est  uniquement  pour  l'ostentation,  et  qui  n'a 
d'autre  but  que  le  plaisir  de  l'auditeur,  comme  les  dis- 
cours académiques,  les  compliments  qu'on  fait  aux 
puissances,  certains  panégyriques  et  d'autres  pièces 
semblables,  où  il  est  permis  de  déployer  toutes  les  ri- 
chesses de  l'art  et  d'en  étaler  toute  la  pompe.  Pensées 
ingénieuses,  expressions  frappantes,  tours  et  figures 
agréables,  métaphores  hardies,  arrangement  nombreux 
et  périodique;  en  un  mot,  tout  ce  que  l'art  a  de  magni- 
fique et  de  plus  brillant,  l'orateur  peut  non-eeulement  le 
montrer,  mais  même  en  quelque  sorte  en  faire  parade, 
pour  remplir  l'attente  d'un  auditeur  qui  n'est  venu  que 
pour  entendre  un  beau  discours,  et  dont  il  ne  peut  enle- 
ver les  suffrages  qu'à  force  d'élégance  et  de  beautés,  n 
Hais,  même  &ns  ces  discours  qu'on  est  convenu  d'appe- 
ler académiques,  et  où  il  semble  qu'il  y  ait  plus  de  place 
f^our  une  élégance  recherchée  et  des  ornements  travaillés, 
1  faut  éviter  que  l'usage  des  fleurs  dégénère  en  abus.  Un 
plaisir  trop  prolongé  amène  la  satiété  et  le  dégoût  ;  un 
éclat  continu  éblouit  et  fatigue  les  yeux;  ainsi  fait  un 
discours  dont  les  ornements  ne  sont  pas  variés.  Le  style 
tempéré  doit  être  habilement  mêlé  de  style  simple;  ce- 
lui-ci ,  placé  à  propos,  fait  Tofiice  des  ombres  qui  donnent 
du  relief  à  un  tableau.  Les  ornements  que  le  style  tem- 
péré reçoit  ne  doivent  pas  naître  du  caprice  de  l'orateur  ; 
ils  doivent  sortir  du  fond  même  du  sujet  pour  être  mâles, 
nobles  et  sévères.  Car  Téloquence,  même  celle  qui  n'a 
d'autre  but  que  de  plaire,  est  ennemie  de  tout  jfard  et 
de  toute  afféterie;  sa  véritable  beauté  est  dans  sa  force. 
Tout  ornement  qui  n'est  pas  nécessaire  au  sujet  qu'on 
traite  n'est  pas  naturel,  et,Join  d'embellir  le  discours, 
il  le  dépare  et  lui  6te  de  sa  vigueur.  Il  appartient  à  ce 
genre  de  style  dont  parle  Quintilien ,  qui  se  complaît 
dans  le  dérèglement  du  langage,  qui  court  sans  cesse 
après  de  petites  pensées  froides  et  puériles,  ou  qui  s'enfle 
outre  mesure,  ou  qui  s'égare  en  des  lieux  communs  vides 
de  sens,  ou  qui  brille  de  Je  ne  sais  quelles  petites  fleurs 
qui  tombent  pour  peu  ^u'on  y  touche.  Cette  élégance 
recherchée,  ce  travail  mmutieux  pour  polir  et  arrondir 
des  phrases  et  pour  y  semer  des  traits  d'esprit,  n'a  Jamais 
séduit  les  génies  sérieux  ;  ce  sont  des  défauts  communs 
chez  les  jeunes  gens  et  dans  les  écoles ,  ils  ne  sont  pas 
excusables  dans  un  orateur.  Le  genre  tempéré  renferme 
les  discours  du  genre  démonstratif;  il  sert  pour  les  dis- 
cussions longues  et  soignées,  pour  les  lieux  communs 
qui  n'ont  pas  besoin  de  véhémence.  H.  D. 

TEMPLE,  en  latin  templum  (du  grec  twnnert, couper, 
séparer),  nom  donné  par  les  anciens  Romains  aux  ré- 
gions du  ciel  que  les  Augures  formaient  fictivement  avec 
leur  lituus  ou  bâton  augurai  pour  observer  les  présages, 
et  à  tout  lieu  qu'une  consécration  religieuse  distinguait 
du  terrain  environnant.  Par  extension,  on  l'a  appliqué  à 
tous  les  édifices  consacrés  au  culte  de  la  divinité,  et  dont 
la  construction  varia  selon  les  besoins  de  ce  culte  et  selon 
le  degré  de  civilisation  des  peuples.  En  France,  on  ap- 
pelle temples  les  édillces  où  les  Protestants  se  réunissent 
pour  pratiquer  hiurs  cérémonies,  et  on  réserve  la  déno- 
mination d'églises  à  ceux  où  l'on  célèbre  le  culte  ca- 
tholique. 

I.  Temples  indiens»  —  Les  monuments  sacrés  de  l'Inde, 
connus  en  Europe  depuis  un  demi-siècle  seulement,  sont 
sans  contredit  les  ouvrages  les  plus  gigantesques,  les  plus 
extraordinaires  que  nous  ait  laisséa  l'Antiquité.  Ils  peu- 
vent se  diviser  en  trois  classes  :  i<*  les  temples  souter- 
rains, comme  ceux  d'Ellora  (F.  o#  mot),  avec  plusieurs 
étages  de  salles  et  de  galeries  immenses^,  sontenne^  par 
ÙM  pilioi'S  carrés  dont  des  éléohants  colossaux  furincnt 


souvent  la  base;  î?  ceux  qui  sont  construits  an-d»sus 
de  terre,  mais  dont  la  partie  inférieure  est  souterraine,  et 

aui,  se  rapportant  au  second  âge  de  l'architecture  in- 
ienne,  ont  pour  signe  caractéristique  la  colonne  à  cha- 
piteau circulaire;  Z^  ceux  qui  s'élèvent  au-dessus  du  soL 
et  dont  le  style,  correspondant  à  la  troisième  période  de 
l'art,  se  distingue  par  une  grande  variété  de  colonnes,  de 
chapiteaux  et  de  bas-reliers  où  les  attributs  du  boud- 
dhisme se  mêlent  aux  symboles  du  culte  de  firahma. 
V.Indien  (Art). 

n.  Temples  cusyrtêns.  —  Les  monuments  religieux  de 
Babylone  se  rattachent  à  deux  époques  distinctes,  doui 
la  première  correspond  au  règne  des  dynasties  natio- 
nales, et  la  seconde  commence  avep  le  règne  des  prinrcs 
chaldéens,  au  vu*  siècle  av.  Jf.-C.  De  tous  ces  édifices,  le 
type  le  plus  remarquable  était  le  temple  ou  tour  de  Bel  us, 
de  forme  pyramidale,  et  dont  le  sommet  était  recouvert 
d'un  dais  sous  lequel  se  trouvaient  un  grand  siège  et  une 
table  destinée  aux  lectistemiês  ou  repas  du  dieu.  Plus 
tard,  BOUS  les  rois  chaldéens,  au  pied  du  monument  pri- 
mitif on  éleva  un  petit  temple,  pour  recevoir  les  statues 
de  Bélus,  de  Uéra  (  Junon)  et  de  Rhéa  (Cybèle),  qui  for- 
maient la  trinitâ  babylonienne. 

III.  Temples  égypttms.  —  V.  Égyptien  (Art). 

IV.  Temples  grecs,  —  Les  édifices  religieux  de  la  Grèce 
n'égalèrent  Jamais  en  étendue  ceux  de  l'Egypte,  mais  ils 
les  surpassèrent  par  la  beauté  des  formes  et  la  perfection 
des  ornements.  Voici  quelles  étaient  les  principales  dis- 
positions des  temples  chez  un  peuple  dont  le  culte,  tout 
extérieur,  n'exigeait  point  de  monuments  à  grandes  pro- 
portions :  —  le  Naos,  appelé  aussi  Cella^  ou  partie  prin- 
cipale de  l'édifice,  avait  ordinairement  la  forme  d'un  carré 
long,  et  se  trouvait  quelquefois  précédé  d'une  cour  en- 
tourée d'une  colonnade,  comme  aux  temples  d'isis  à 
Pompéi  et  de  Jupiter  Olympien  à  Athènes.  Autour  de  h 
Cella  s'étendait  un  portique  où  s'assembhut  le  peuple,  ci 
dont  la  partie  antérieure  s'appelait  Pronaos,  tandis  oue 
la  partie  opposée  portait  le  nom  de  Posnvtim  ou  Opîstko- 
domos.  La  façade,  tournée  vers  l'Occident,  était  orn^ 
d'un  nombre  pair  de  colonnes;  au  contraire,  sur  les 
côtés,  les  colonnes  étaient  toi^ours  en  nombre  impair. 
L'ordonnance  la  plus  simple  fut  celle  du  temple  à  antes; 
vinrent  ensuite  le  prostyle,  Vamphiprostyle^  le  périptère, 
le  pseudo-périptèref  le  diptère^  Vkypèihre  {V,  ces  mots). 
Selon  le  nombre  des  colonnes  de  la  façade,  le  temple 
était  dit  tétrastyle,  hexcatylet  octostyle,  décattyle,  etc. 
La  partie  supérieure  de  la  façade  était  surmontée  d'un 
fronton,  parfois  richement  décoré  de  sculptures  et  de 
bas-reliefs.  Dans  l'intérieur  du  temple  s'élevait  la  statue 
de  la  divinité  à  laquelle  il  était  consacré  ;  alentour  on 
voyait  encore  d'autres  statues  de  dieux  ou  de  héros,  ainsi 
que  de  riches  offrandes  consacrées  par  la  piété  des 

{(rinces  ou  des  particuliers.  Les  temples  grecs,  parmi 
esouels  se  distingue  encore  le  Parthénon  d'Athènes,  sem- 
blaient réunir  toutes  les  perfections,  la  simplicité  dans 
le  plan,  l'harmonie  dans  les  proportions,  l'élégance  la 
plus  exquise  dans  les  détails.  V.  Ghecqdb  (Architecture). 

V.  Temples  romains,  •— >  Les  premiers  monuments  re- 
ligieux de  Rome  furent  construits  d'après  les  n^les  de 
l'art  étrusque,  comme  le  temple  de  Côrès,  bâti  l'an  494 
av.  J.-C.  Plus  tard,  Rome,  victorieuse  de  la  Grèce,  lai 
prit  son  goût  pour  les  arts,  et  fit  élever,  par  des  archi- 
tectes et  des  ouvriers  grecs,  des  temples  qui  avaient  beau- 
coup de  rapports  avec  ceux  d'Athènes  ou  de  Corinthe.  Une 
différence  essentielle  se  trouvait  toutefois  dans  la  dispo- 
sition et  le  nombre  des  colonnes  placées  sur  les  deut 
faces  latérales  du  monument.  Du  reste,  les  distributions 
et  les  ornements  intérieurs  étalent  à  peu  près  les  mêmes. 

Outre  les  édifices  précédents,  les  Grecs  et  les  Romains 
avaient  des  temples  de  forme  circulaire,  recouverts  d'une 
coupole,  et  appelés  monoptères  ou  périptères  selon  la  dis- 
position de  la  colonnade  extérieure  :  tels  sont  le  Panthéon 
à  Rome,  et  la  Rotonde  de  Philippe  à  Olympie. 

Quant  au  jour  qui  devait  éclairer  les  temples,  îl  pént> 
trait  par  l'intervalle  des  colonnes  dans  les  monoptères; 
mais,  dans  les  périptères,  comme  dans  les  temples  de 
forme  carrée,  il  entrait  par  des  fenêtres  pratiquées  au 
milieu  du  mur  ou  dans  la  partie  supérieure  du  monu- 
ment. Toutefois,  quelques  temples  de  petites  dimensions 
étaient  seulement  éclairés  par  la  porte,  par  exemple  la 
Maison  carrée  à  Ntmes  {V.  IAaison  CARBis).  Les  temples 
hypèthres  étaient  éclairés  par  le  haut.  V.  L.  Allatias,  ÏÏi 
templis  Grœcorum,  Cologne,  1645;  J.  Kool ,  De  templis 
anttqtiorum,  Leyde,  1695;  Ballet,  Histoire  dês  temples 
poleiw,  Paris,  1761 ,  in-i2  ;  May,  Temples  anciens  et  mo- 
detmes ,  Paris,  1774,  gr.  iu-8<*;  Sticgiitz,  Archéoiogie  de 


TEM 


1707 


TEN 


Carehitêeture  des  Grecs  et  des  Romains,  en  allom.,  Woi- 
mar,  1801,  3  toK  in-8*.  B. 

TBMPLB  (Églises  du),  nom  donné  en  France,  en  Angle- 
terre et  en  Allemagne,  à  des  églises  Mties  pendant  le 
moyen  âge  sur  un  plan  circulaire,  en  Thonneur  du  S^  Sé- 
pulcre de  Jérusalem.  L*autel  y  était  placé  au  centre,  et 
entouré  de  colonnes. 

TEMPLE  fLeV  a  Jérusalem.  )  V,  notre  Dictionnatre  dé 

TEUPiji  (Le),  à  Paris.         j     Biogr.  et  d'Histoire. 

TEMPOREL,  revenu  qu'un  ecclésiastique  tire  de  son 
bénéfice. 

TEMPOREL  f  Augment,  Pouvoir).  V.  Adgment,  Poovoir. 

TEMPS.  L  idée  du  temps  ne  peut  pas  se  définir  ;  mais 
on  conçoit  le  temps  comme  une  quantité  continue,  au 
sein  de  laquelle  tous  les  faits  se  produisent,  se  succèdent, 
s*écoulent,  et  sans  laquelle  aucune  succession,  aucun 
changement  ne  serait  possible.  L'idée  du  temps  nous  est 
donnée  par  la  mémoire,  et,  comme  on  ne  se  souvient  que 
de  ses  propres  modes  et  de  ses  états  antérieurs,  c'est  en 
nous  que  nous  trouvons  l'idée  d'une  durée  qui  est  la 
nôtre,  et  que  nous  appliquons  ensuite  aux  choses  du 
monde  extérieur.  Nous  concevons  ainsi ,  par  la  raison , 
une  durée  nécessaire,  étemelle,  le  temps  sans  bornes.  De 
même  que  nous  trouvons  en  nous  l'iaée  de  durée,  c'est 
en  nous  que  nous  trouvons  le  moyen  de  mesurer  le 
temps  ;  et  ce  oui  sert  de  base  à  cette  mesure,  c'est  l'acte 
volontaire,  l'enort  de  la  volonté,  comme  l'a  fait  voir 
Hoyer-Gollard.  —  Les  recherches  faites  pour  connaître  la 
nature  du  temps  n'ont  donné  aucune  solution  satisfai- 
sante. Loclce  ne  voyait  dans  le  temps  que  l'idée  de  suc- 
cession, identifiant  ainsi  les  faits  et  le  temps,  le  conte 
nant  et  le  contenu  ;  Clarke,  adoptant  l'idée  de  Newton  , 
fait  de  l'espace  et  du  temps  deux  attributs  de  Dieu; 
Leibniz  repousse  cette  opinion,  pour  ne  voir  dans  le 
temps  que  l'ordre  des  successions,  comme  il  ne  voyait 
dans  l'espace  que  l'ordre  des  co^stences;  pour  Kant ,  le 
temps  n'est  qu'une  des  formes  de  la  sensibilité;  pour  Schel- 
ling,  c'est  Vactivité  pure  avec  la  négation  de  tout  être.  R. 

TEMPS  (Le),  divinité  allégorique.  V,  Saturne,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

TKMPs,  se  dit  des  moments  précis  où  il  faut  faire  cer- 
tains mouvements  distingués  et  séparés  par  des  pauses, 
dans  le  maniement  des  armes,  dans  l'escrime,  dans  la 
danse. 

TEMPS,  modification  spéciale  de  la  forme  du  verbe  pour 
exprimer  si  le  Jugement  que  nous  portons  d'une  chose, 
objet  de  notre  pensée,  se  rapporte  à  un  t&capn  présent , 
passé  ou  futur.  Mais  chacun  de  ces  temps  est  susceptible 
de  nuances,  qui  amènent  de  nouvelles  modifications  dans 
la  forme  de  la  conjugaison  :  ainsi ,  il  peut  y  avoir  un  pré- 
sent, un  passé,  un  futur  absolus,  et  chacun  de  ces  temps 
peut  être  pris  aussi  dans  une  acception  relative.  L'état  ou 
l'action  exprimés  par  un  verbe  peuvent  être  par  eux- 
mêmes  passés,  mais  présents  à  l'égard  d'un  état  ou  d'une 
action  également  passés;  ainsi  :  «  Je  dormais  quand  vous 
entrâtes.  »  Cette  nuance  du  verbe  a  reçu  le  nom  do  passé 
imparfait  ou  de  passé  simultané.  Un  des  deux  états  ou 
actions  passés  peut  être  antérieur  à  l'autre  :  «  J'arrivai 
lorsque  vous  fûtes  parti  (c'est  ce  qu'on  appelle  passé  an- 
térieur); —  vous  étiez  parti  lorsque  J'anrival  (c'est  ce 
qu'on  appelle  passé  plus-que-parfait),  »  L'expression  de 
cette  nuance  parait  être  particulière  au  français.  De 
môme,  il  peut  arriver  qu'entre  deux  états  ou  actions  ap- 
partenant à  l'avenir,  il  y  en  ait  un  (ou  une)  qui  soit 
passé  par  rapport  à  l'autre,  comme  lorsqu'on  dit  :  «  J'aurai 
terminé  lorsaue  vous  arriverez.  »  C'est  le  futur  antérieur 
ou  passé.  Dans  le  passé  proprement  dit,  on  peut  consi- 
dérer l'action  ou  l'état,  soit  d'une  manière  indéfinie  : 
«  J'ai  commis  bien  des  fautes  (c'est  le  passé  indéfini)^  » 
soit  d'une  manière  dé^nie  :  m  A  ces  mots.  Je  me  préci- 
pitai dans  ses  bras  (c'est  le  passé  défini).  »  Cette  double 
nuance  est  encore  particulière  à  la  langue  française.  — 
On  peut  considérer  aussi  la  passé,  soit  par  rapport  aux 
résultats  actuellement  durables  de  telle  ou  telle  action 
(c'est  le  passé  parfait  ),  soit  simplement  par  rapport  à 
une  époque  plus  ou  moins  vague  et  passagère  (c'est  le 
passé  aoriste)  :  cette  distinction  appartient  à  la  langue 
grecque.  Tout  ce  qui  n'est  pas  rigoureusement  présent 
est  passé  ou  futur;  cependant  on  peut  distinguer  dans  le 
présent  même  des  nuances,  selon  qu'il  exprime  un  sens 
général ,  une  idée  d'habitude,  ou  quelque  chose  d'actuel, 
d'instantané.  Il  n'existe  pas  de  forme  spéciale  dans  la 
conjugaison  pour  chacune  de  ces  nuances. 

Parmi  les  trois  langues  classiques,  la  plus  riche  en 
temps  est  la  langue  grecque  ;  vient  ensuite  le  français,  et 
an  iroisiëme  lieu  le  latin.  Le  grec  compte  à  l'indicatif 


7  nuanées  de  temps  1 1  pour  le  présent,  4  pour  le  paaté 
(  imparfait,  aoriste,  parfait ,  plus-que-parfait),  S  pour  le 
futur  (futur  proprement  dit  et  fatur  antérieur).  Le  mode 
impératif  est  susceptible  de  3  temps,  ainsi  que  le  sub* 
Jonctif  (présent,  aoriste,  parfait).  L'optatif,  rinfinitif,  le 
participe,  ont  tous  les  temps,  excepté  l'imparfait  et  le 
plus-que-parfait.  En  tout,  le  grec  compte  donc  31  temps. 
Le  français  compte  à  l'indicatif  8  nuances  de  temps,  4  au 
subjonctif,  2  au  conditionnel,  1  à  l'impératif,  2  k  l'infinitif, 
2  au  participe;  en  tout  19.  Le  latin  admet  à  l'indicatif 
6  temps  (présent,  imparfait,  parfait,  plus-que-parfait, 
fbtur,  et  futur  passé),  4  au  subjonctif,  1  à  l'impératif,  4  à 
l'infinitif  (actif),  2  au  participe  (présent  et  futur  à  l'actif, 
passé  et  futur  au  passif)  ;  en  tout  17.  Les  temps  grecs  se 
divisent,  dans  les  méthodes  à  l'usage  de  l'enseignement, 
en  temps  principaux  f présent,  parfait,  les  2  futurs)  et 
en  temps  secondaires  (imparfait,  aoriste,  plus-que-par- 
fait). Ils  ont  pour  caractères  distinctifs  d'être  terminés,  les 
premiers  à  la  3*  personne  du  pluriel  par  un  i,  à  la  3*  du 
duel  par  ov  ;  les  seconds,  d'avoir  la  3*  personne  du  pluriel 
terminée  par  un  v  à  l'actif,  un  o  au  passif  et  au  moyen, 
et  par  y|v  au  duel.  Tous  les  temps  du  subjonctif  sont 
considérés,  relativement  à  ceux  de  l'optatif,  comme  temps 
principaux,  et  réciproquement,  ceux  de  l'optatif  comme 
temps  secondaires,  et  ils  en  ont  les  formes  caractéris- 
tiques. En  français,  on  distingue  les  temps,  soit  en  temps 
prtmitifs  et  en  temps  dérivés,  division  peu  précise  et  sur 
laquelle  il  ne  saurait  y  avoir  accord,  parce  qu'elle  est 
arbitraire,  soit  en  temps  simples  et  en  temps  composés, 
division  beaucoup  plus  simple  et  plus  nette;  les  temps 
simples  sont  ceux  qui  n'emploient  ni  l'auxiliaire  être 
ni  l'auxiliaire  avoir.  Au  passif  il  n'y  a  que  des  temps 
composés,  ou  plutôt  il  n'y  a  pas  de  conjugaison.  La 
conjugaison  latine  se  prête  parfaitement  à  la  division 
en  deux  séries  de  temps,  les  uns  exprimant  l'action  non 
accomplie  (présent,  futur  de  l'indicatif,  imparfait),  les 
autres  l'action  accomplie  (parfait,  plus-que-parfait,  futur 
antérieur  de  l'indicatif).  Au  passif  et  dans  les  verbes  dé- 
ponents, les  temps  de  la  2*  série  se  conjuguent  invariable- 
ment à  l'aide  du  verbe  sum,  et  il  semble  que  ce  soit  la 
conjugaison  déponente  qui  ait  servi  de  type  à  la  conju- 
gaison française.  Les  temps  à  forme  composée  se  retrou> 
vent  même  dans  auelques  verbes  de  forme  active,  comme 
audeo,  gaudeo,  ftao,  etc.  Le  grec  n'a  de  temps  invariable- 
ment composé  que  le  futur  antérieur  de  l'actif  :  cette 
forme  est  régulièrement  employée  dans  la  prose  attique 
à  la  3"  personne  du  pluriel  du  parfait  et  du  plus-que- 
parfait  passif  de  certains  verbes. 

La  manière  dont  les  temps  se  forment  dans  les  di- 
verses langues  est  extrêmement  variée  :  tantôt  c'est  par 
un  changement  dans  la  finale,  tantôt  c'est  par  l'union  do 
deux  ou  de  plusieurs  verbes.  Quand  il  s'agit  d'expri- 
mer quelque  circonstance  de  temps  pour  laquelle  une 
langue  ne  fournit  pas  de  forme  particulière,  on  a  re- 
cours, soit  à  des  adverbes,  tels  que  hier,  aujourd'hui, 
demain,  récemment,  bientôt;  soit  à  des  noms  spéciaux 
comme  heure,  jour,  semaine^  mois,  année,  siècle^  unis  à 
des  adjectifs  numéraux  (un,  deux,  trois,  dix,  premier, 
deuxième,  vingtième,  centième,  etc.)  ou  à  des  adjectifs 
formés  de  noms  d'époque,  comme  en  latin  et  surtout  en 
grec  :  inerant  hestema  (ils  s'y  trouvaient  depuis  hier, 
depuis  la  veille),  soit  enfin  à  des  verbes  ou  à  des  locu- 
tions exprimant  un  passé  ou  un  futur  relatif  et  plus  ou 
moins  rapproché.  P. 

TEMPS,  en  termes  de  Musique,  durée  des  sons  marquée 
par  la  mesure.  Une  mesure  contient  autant  de  temps 
qu'elle  a  de  parties  égales  :  elle  est  à  2,  à  3,  à  4  temps, 
selon  qu'elle  se  divise  en  2,  3  et  4  parties.  On  nomme 
temps  faibles,  les  temps  pairs  d'une  mesure  (c'est  le  2* 
dans  les  mesures  à  2  et  à  3  temps,  le  2*  et  le  4*  dans  la 
mesure  à  4  temps;  temps  forts,  les  temps  impairs  (le 
1*'  dans  les  mesures  à  2  temps,  le  l*'  et  le  3*  dans  les 
mesures  à  3  et  à  4  temps).  V.  Mesure. 

TEMPS  LiSoADX,  en  termes  de  Droit,  tout  ce  qui  est  re- 
latif aux  prescriptions,  déchéances,  délais,  dates,  durées, 
àffes  requis  par  la  loi.  Il  existe  un  Dictionnaire  des  temps 
légaux  par  Souquet,  1846. 

TENAILLE,  en  termes  de  ForUflcation,  ouvrage  com- 
poaé  de  deux  faces  qui  présentent  un  angle  rentrant  vers 
la  campagne,  et  qui  sert  à  couvrir  une  courtine.  Une 
double  tenaUle  est  celle  qui  a  un  angle  saillant  au  mi- 
lieu, entre  deux  angles  rentrants.  Dans  le  système  de 
fortification  k  tenailles,  les  bastions  manquent,  et  le 
rempart  ne  consiste  qu'en  angles  saillants  et  rentrants. 
Quelquefois  les  extrémités  do  deux  tenailles  voisines 
sont  reliées  l'une  à  l'autre;  c'est  ce  qu'ont  pratiqué  les 


TEN 


I7ft8 


TÉO 


Ingénieurs  hoIIar.daU  Landsberg  et  Virgin,  ainsi  que 
Montalembert  et  Carnot. 

TENAlLLEMErfT,  supplice.  F.  notre  Dtctionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TËNAILLONf  en  termes  de  Fortification,  petite  tenaille 
qu'on  place  des  deux  côtés  d'une  demi*lune. 

TENANCIER.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'histoire. 

TENANTS,  nom  qu*on  donnait,  dans  les  joutes  et 
tournois,  aux  chevaliers  qui  s*engagaient  à  tenir  contre 
tout  assaillant. 

TENANTS,  en  termes  de  Blason,  figures  d'hommes  ou 
d'anges  qui  soutiennent  un  écu.  Lorsque  ce  sont  des  ani- 
maux, on  les  appelle  Sitpports.  Ils  ne  paraissent  sur  les 
sceaux  qu'à  partir  du  xiV  siècle. 

TENANTS  ET  ABOUTISSANTS,  circonstances  qu'il  faut  avoir 
soin  de  mentionner  dans  tout  acte  relatif  à  un  im- 
meuble, afin  de  fixer  la  situation  et  la  contenance  de  cet 
immeuble.  Les  exploits  d'huissier  et  les  procès-verbaux 
de  saisie  doivent  les  énoncer  (  Code  de  Procédure,  art.  64 
et<27). 

TENDRE  (Pays  de).  V.  Clélie. 

TÉNÈBRES,  terme  de  Liturgie.  V,  notre  Dicttonnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

TENEUR.  V.  Dominante. 

TÉNÏE,  terme  d'Architecture.  V.  Bandelette. 

TElNON  (de  tenir)^  bout  d'une  pièce  de  bois  on  de 
métal  taillée  de  manière  à  entrer  dans  une  mortaise. 

TÉNOR,  terme  de  Plain-Chant  usité  autrefois  pour  dé- 
signer le  chant  sur  lequel  étaient  formées  les  différentes 
parties  qui  constituaient  l'harmonie  simultanée.  V.  Oa- 

GANUM,  TrIPLUM.  F.  C. 

TéNOR,  la  plus  aigufi  des  voix  d'hommes,  égale  en 
étendue  à  celle  de  Soprano  (V.  ce  mot)^  mais  à  une  oc- 
tave plus  bas.  On  la  nommait  autrefois  Taille  (K  ce 
mot).  La  voix  qu'on  appelait  Hauta-contre  (  V.  ce  mot) 
était  une  voix  de  ténor  possédant  à  l'aigu  quelques  notes 
de  plus  que  les  voix  ordinaires.  On  nomme  aussi  Ténor 
le  chanteur  qui  possède  une  voix  de  ce  genre.  La  mu- 
sique écrite  pour  ténor  est  en  clef  d'ut  4*  ligne  ou  en  clef 
de  sol.  Les  sons  de  la  voix  de  ténor  sont  de  deux  sortes, 
les  sons  de  poitrine  et  les  sons  de  tète;  le  passage  des 
uns  aux  autres,  qui  a  lieu  généralement  entre  le  fa  et  le 
sol  au-dessus  du  diapason,  exige  beaucoup  d'art  pour  que 
la  différence  des  timbres  soit  peu  sensible.  Dans  les 
troupes  lyriques,  on  nomme  fort  ténor  le  chanteur  qui 
tient  les  premiers  rôles  de  ténor  dans  le  grand  opéra 
(les  rôles  de  Robert  dans  Robert  le  Diable,  de  Raoul  dans 
(es  HuguenotSy  d'ÉIéazar  dans  la  Juive,  d'Arnold  dans 
Guillaume  Tell,  eto.,  appartiennent  k  cet  emploi);  ténor 
léger,  le  premier  ténor  d'opéra -comique,  lequel  tient 
aussi  certains  rôles  du  grand  opéra,  comme  ceux  de  Raim- 
baud  dans  Robert  le  Diable,  de  Léopold  dans  la  /utve, etc.; 
trial  (du  nom  d'un  ancien  acteur),  le  ténor  comique.  Le 
laruette  (autre  nom  d'acteur),  dans  l'ancien  opéra-co- 
mique, est  aussi  un  ténor.  B. 

TENSA.  V.  Thensa  ,  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

TENSEMENT,  redevance  en  nature  et  en  argent  par 
laquelle  les  vassaux  achetaient  autrefois  la  protection  de 
leur  seigneur. 

TENSON,  pièce  de  poésie  en  dialogue,  particulière  k 
la  poésie  provençale,  et  dans  laquelle  ordinairement  deux 
interlocuteurs  défendaient  tour  à  tour,  par  strophes  de 
môme  mesure,  et  en  rimes  semblables,  leur  opinion  con- 
tradictoire sur  diverses  questions  d'amour,  de  chevalerie, 
de  morale,  etc.  Tenson  veut  dire  débat,  et  vient  du  latin 
contentio,  qui  subsiste  tout  entier  dans  contencio,  nom 
par  lequel  les  Troubadours  désignent  quelquefois  c«  genre 
de  poésie.  Le  dialogue  des  Tensons  était  généralement 
partagé  en  couplets  pairs  suivis  de  deux  envois^  afin  que 
chaque  contondant  eût  un  avantage  égal  dans  l'attaque  et 
dans  la  réplique.  Ce  dialogue  était  quelquefois  divisé  par 
distiques,  et  même  vers  par  vers.  La  question  qui  faisait 
la  matière  de  la  tenson  demeurait  souvent  indécise,  et 
chaque  interlocuteur,  après  avoir  fait  briller  la  finesse  ou 
k  subtilité  ôfi  son  esprit,  s'en  tensût  à  son  opinion.  Il 
arrivait  aussi  parfois  que  le  sujet  proposé  était  soumis, 
après  la  discussion,  ou  k  des  Cours  d*amour,  ou  au  juge- 
ment d'arbitres  choisis  par  les  deux  poètes. 

La  tenson  était  quelquefois  une  satire  dialoguée  entre 
deux  personnages,  qui  se  faisaient  mutuellement  des  re- 
proches hardis  et  injurieux,  et  dont  chacun  attaquait  et 
combattait  l'autre  dans  des  couplets  ordinairement  im- 
provisés, toujours  sur  une  même  mesure  et  sur  les 
.nêmes  rimes.  Parfois  aussi  elle  contenait  des  plaintes 


réciproques  de  deux  amants^  ou  celles  que  l'un  d*eax 
seulement  adressait  k  l'autre.  La  plus  célèbre  teiuon  de 
ce  genre  est  celle  entre  Raimbaud  d'Orange  et  la  comtesse 
de  Die,  qui  offre  quelque  ressemblance  avec  la  pièce 
d'Horace  Ùonec  gratus  eram  tibi. 

Il  est  probable  que  des  tensons  étaient  composées 
quelquefois  par  un  seul  et  même  poète,  qui  se  servait 
alors  de  cette  forme  pour  louer  plus  adroitement  sa  dame, 
ou  le  seigneur  dont  il  était  protégé.  C'est  ainsi  qa*il  y  a 
des  tensons  allégoriques  encre  un  amant  et  un  oiseau, 
ou  même  avec  un  être  moral  personnifié.  Itfais  ces  sortes 
de  pièces  étaient  aussi  l'ouvrage  de  Troubadours  diffé- 
rents. Plusieurs  tensons  contiennent  des  injures,  des 
accusations,  des  reproches,  qui  ne  peuvent  avoir  été 
dictés  que  par  la  haine  ou  une  franchise  grossière.  L» 
monuments  du  temps  indiquent  quelquefois  les  auteurs 
qui  ont  travaillé  concurremment  à  ces  sortes  d'ouvrages. 
—  Par  allusion  à  la  forme  dialoguée  des  tensons  et  à  la 
manière  dont  le  sujet  était  souvent  proposé,  on  les  nomma 
aussi  partimen  (division),  du  verbe  partir  (séparer), 
souvent  employé  dans  le  sens  de  diviser  une  question 
proposée.  Le  titre  de  partimen  s'appliqua  particulière- 
ment aux  tensons  qui  avaient  pour  objet  la  discussion 
d'une  question  d'amour.  On  les  nomma  aussi  joco;  partits, 
ou  simplement  partia  :  les  Trouvères  en  firent  ieti-parti, 
empruntant  aux  Troubadours  le  nom  et  la  chose. 

Les  Troubadours  les  plus  connus  pour  leurs  tensons 
sont  Guillaume  de  Mur  et  Guîraut  Riquier,  Raiotbaud  de 
Vaqueiras  et  Albert  de  Malespina,  Geoffroy  et  Raynaud 
de  Pons,  Hugues  de  Saint-Cyr  et  le  Dauphin  d'Auvergne, 
Gaucelm  Faydit,  Savaric  de  Mauléon,  etc.  E.  B. 

TENTATIVE  (du  latin  tentare,  essayer).  La  tentative  de 
cime,  manifestée  par  des  actes  extérieur,  et  suivie  d*un 
commencement  d'exécution,  si  elle  n'a  été  suspendue  ou 
n'a  manqué  son  effet  que  par  des  circonstances  fortuites  os 
indépendantes  de  la  volonté  de  l'auteur,  est  considérée 
comme  le  crime  même  {Code  pénal,  art.  2, 3,  86).  La  ten- 
tative de  simple  contravention  n'est  pas  punie  par  la  loi. 

tentative,  nom  qu'on  donnait  autrefois  k  la  thèse  qu'il 
fallait  soutenir  pour  obtenir  le  grade  de  bachelier  en 
théologie,  parce  que  c'était  la  première  épreuve  qu'on 
subissait  devant  les  Facultés. 

TENTE  (du  latin  tentoriumj^  espèce  de  pavillon  ou  de 
logement  portatif,  fait  ordinairement  de  grosse  toiie  d( 
chanvre,  et  qu'on  dresse  en  pleine  campagne  pour  s^ 
mettre  à  l'abn  du  soleil  et  des  intempéries  de  Tair.  Lc> 
anciens  patriarches,  les  Hébreux  dans  le  désert,  vécifent 
sous  la  tente;  aujourd'hui  même,  la  plus  grande  partie 
des  populations  Arabes  et  Tartares  ne  connaissant  p:is 
d'autre  habitation.  L'usa^  des  tentes  k  la  guerre  exista 
dès  l'Antiquité;  il  se  perdit  au  moyen  &ge,  parce  qu'où 
ne  faisait  presque  jamais  campagne  pendant  Thiver; 
mais  on  y  revint  en  France  au  temps  de  Louis  XIV,  où 
l'on  tint  sur  pied  des  armées  dans  toutes  les  saisons. 
Depuis  la  Révolution,  la  rapidité  des  mouvements  straté- 
giques n'a  guère  permis  de  se  servir  de  tentes;  alors 
l'usage  du  bivoucui  (V.  ce  mot)  s'est  introduit.  Aujour- 
d'hui on  ne  voit  plus  de  tentes  que  dans  les  camps  do 
manœuvre.  En  Algérie,  les  soldats  se  servent  de  sacs  de 
campement  disposés  de  telle  sorte  que  plusieurs  réunis 
ensemble  forment  une  tente  improvisée.  F.  Baraqce, 
Canonnière. 

Dans  la  Marine,  une  tente  se  nomme  taud  ou  taudt 
{V.  ce  mot). 

TENTURE  (de  tendre)^  toute  pièce  d'étoffe  qui  sert  à 
tapisser  un  appartement.  Le  même  nom  s'applique  aux 
étoffes  de  deuil  que  l'on  tend,  lors  d'un  convoi  funèbre, 
à  la  maison  mortuaire,  dans  l'intérieur  et  à  l'extérieur  de 
l'église,  et  qui  sont  placées  par  l'administration  des 
Pompes  funèbres.  ^ 

TENUE,  dans  le  langage  militaire,  s'entend  de  l'uni- 
forme ou  de  la  toilette  du  soldat.  Il  y  a  la  tenue  d'hiver, 
la  tenue  d'été,  la  petite  tenue,  la  grande  tenue. 

tenue,  temps  durant  lequel  se  tiennent  certaines  as- 
semblées, telles  que  les  Chambres  législatives  et  les 
Assises. 

TENUE,  en  termes  de  Marine,  qualité  da  fond  d'un 
mouillage.  Elle  est  bonne,  quand  l'ancre  y  mord  bien. 

TENUE  DES  livres.    V.  COIIPTABIUTÉ, 

TENURE,  en  Droit  féodal,  se  disait  de  l'étendue  d'un 
fief,  de  sa  mouvance,  et  de  la  manière  dont  il  était  tenu 
ou  possédé.  On  distinguait  la  tenure  féodale  pour  les  fiefs 
nobles,  et  la  tenure  de  roture  pour  les  fiefs  roturiers.  On 
tenait  par  hommage,  par  parage^  par  bourgage,  etc. 

TÉOCALLTS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  dti 
BiograpIUe  et  d'Histoire, 


TER 


1709 


TER 


TÉORBB,  instrument  de  musique.  V,  TiiéonoB. 

TEPIDARIUM.  y.  Bains. 

TEPONAZTLI,  instrument  de  musique  des  anciens 
Mexicains.  C'était  une  sorte  de  tambour,  formé  d'un  cy- 
lindre de  bois  qu'on  avait  creusé  en  dedans,  mais  sans 
autre  ouverture  que  deux  fentes  parallèles  dans  le  milieu, 
sur  lesquelles  on  fhippait  avec  de  petites  baguettes. 

TÉRAGHITE  (Langue),  nom  donné  par  quelques  phi- 
lologues %  la  langue  hébraïque,  et  dérivé  de  Térach  ou 
Tharé,  père  d*Abraham. 

TERCET  (du  latin  ter,  trois  fois),  couplet  ou  stance 
de  trois  vers.  Il  en  entre  deux  dans  le  sonnet  (  V.  ce 
mot).  Le  !•'  vers  rime  avec  le  3»,  le  2*  avec  le  !•'  et  le 
3"  au  tercet  suivant;  ou  bien  il  commence  par  deux 
rimes  plates  suivies  d*un  vers  féminin  rimant  avec  le  3* 
du  tercet  suivant,  comme  dans  cet  exemple  de  VEsther 
de  Racine  (1, 5;  : 

TOUT  LS  CIIŒTTS. 

Lo  Dien  qne  nons  servons  est  le  Dieu  4cs  combats  .* 
Non,  lion,  11  ne  sonffiira  pas 
Qa*on  égorge  i^nsi  rinnocence. 

UVS  IRXAÎLXTS,   tCUle. 

Hé  qnoll  dirait  l'impiëtë, 
Oh  donc  est-il,  ce  Dlea  si  redonté 
Dont  Israël  nons  Tantait  la  puissance? 

Si  les  rîmes  plates  sont  féminines,  le  3*  vers  est  mascu- 
lin. En  tout  cas,  les  deux  premières  rimes  sont  différentes 
dans  Tune  et  Tautre  stance. 

TERCET.  V.  EsPAGNOLi  (VeTsîflcation). 

TEREBRA,  machine  de  guerre  dont  les  Anciens  se 
servaient  pour  percer  les  murs  des  villes  assiégées. 
Cétait  une  espèce  de  bélier  qu*on  faisait  agir  en  le  tour- 
nant sur  lui-même,  comme  une  tarière. 

TERME,  se  dit  des  Idées  (F.  ce  mot)  employées  comme 
éléments  logiques  du  Jugement  et  de  la  Proposition ,  et 
y  figurant  comme  sujet  et  comme  attribut.  Aristote  (Pre- 
miers Analytiques^  liv.  I,  ch.  1*')  définit  le  terme  :  ce  en 
quoi  se  résout  la  Proposition,  c'est-à-dire  l'attribut  et  le 
sujet,  soit  qu'on  les  unisse,  soit  qu'on  les  sépare  par  les 
idées  d'être  ou  de  non>ètre  (affirmation  ou  négation). 
Deux  termes  étant  donnés,  l'un  comme  sujet  et  l'autre 
comme  attribut,  on  peut  toujours,  dialectiquement  du 
moins,  en  former  quatre  propositions,  en  affirmant  ou 
niant,  soit  en  totalité,  soit  seulement  en  partie,  l'attribut 
du  sujet  De  là  les  quatre  espèces  de  propositions  : 
1*  affirmative  universelle  (tout  A  est  B)  ;  2°  affirmative 
particulière  (quelque  A  est  B)  ;  3»  négative  universelle 
(nul  A  n'est  B^;  A^  négative  particulière  (quelque  A  n'est 
pas  B);  à  quoi  il  faut  ajouter  celles  que  l'on  peut  former 
par  le  renversement  des  termes  (  V.  Proposition  et  Con- 
version DBS  propositions).  Si  l'on  prend  pour  type  des 
propositions  la  proposition  affirmative  universelle,  on 
remarque  <|ue  l'extension  de  l'attribut  {V.  Extension)  y 
est  nécessairement  plus  grande  que  celle  du  sujet.  On 
ne  peut  affirmer  l'attribut  divisible  du  sujet  nombre  pair, 
par  exemple,  que  parce  que  ce  sujet  est  compris  (avec 
d'autres,  les  nombres  impairs  non  premiers)  dans  l'ex- 
tension de  l'attribut.  De  là,  dans  l'analyse  du  syllogisme, 
l'adoption  des  désignations  suivantes  :  Grand  Terme;  on 
appelle  ainsi  l'attribut  de  la  Conclusion,  celui  dont  le 
rapport  avec  son  sujet  n'est  pas  d'abord  tellement  clair 
qu'on  puisse  le  saisir  au  mo^en  d'une  comparaison  di- 
recte ;  d'où  la  nécessité  du  raisonnement,  c'est-à-dire  de 
l'intervention  d'une  idée  intermédiaire;  —  Petit  Terme; 
c'est  le  sujet  de  la  Conclusion;  —  Moyen  Terme;  c'est 
l'idée  intermédiaire  qui,  introduite  entre  le  grand  terme 
et  le  petit,  permet  d'opérer  par  voie  indirecte  le  rappro- 
chement ou  la  séparation  que  l'on  n'avait  pas  le  moyen 
de  faire  directement.  Comparé  au  grand  terme,  le  moyen 
forme  avec  lui  la  Majeure;  il  forme  avec  le  petit  terme 
la  Mineure,  Une  fois  le  rapport  du  grand  et  du  petit 
terme  trouvé,  le  moyen  disparaît;  c'est  une  des  règles 
générales  du  svllozisme,  que  la  Conclusion  ne  doit  ja- 
mais contenir  le  Moyen.  —  Aristote,  et  toute  l'ancienne 
Logique  à  son  exemple,  ont  indiqué  certains  procédés 
pratiques  pour  l'invention  du  moyen,  qui  est  comme  le 
nerf  de  la  démonstration.  C'est  là  l'objet  propre  du  Trcùti 
det  Topiques,  Ailleurs  {Premiers  Analytiques,  liv.  I, 
ch.  27  et  28),  il  recommande  plus  simplement,  deux 
termes  étant  donn^  entre  lesquels  il  s'agit  de  trouver 
un  moyen,  d'examiner  tous  les  conséquents  de  l'un,  tous 
les  antécédents  de  l'autre  (K.  Antécédents  et  Consé- 
quents), et  si,  dans  le  nombre,  il  se  trouve  quelque 
terme  que  l'on  puisse  donner  à  la  fois  comme  attribut  à 
l'un  et  comme  sujet  à  l'autre,  d'essayer  si  en  le  prenant 


comme  moyen  on  n'arrivera  pas  à  la  démonstration  chcr« 
chée.  Il  faut  dire  que  la  Logique  a  renoncé  i\  pru  pris 
complètement  à  ces  procédés  factices.  Lorsqu'une  ques- 
tion se  pose,  et  qu'elle  est  susceptible  de  démonstra- 
tion syllogistique,  c'est  dans  l'étude  approfondie  du  su- 
jet, c'est  en  s'aidant  de  la  sagadté  naturelle  de  l'esprit 
fécondée  par  la  réflexion,  qu'on  aura  encore  le  plus  de 
chances  de  trouver  les  éléments  d'une  solution  bien  so- 
lide et  bien  claire.  V.  Syllogisme,  Majeure,  Mineure, 

PRâlISSES.  B— E.  • 

TERVB,  mot  considéré  dans  son  rapport  avec  l'objet 
qu'il  représente.  Ainsi ,  l'on  dit  que  coloris  est  un  terme 
de  Peinture;  mais  on  dira  qull  est  un  mot,  et  non  un 
terme,  de  trois  syllabes. 

TERME,  nom  donné  aux  temps  préflx  de  payement  pour 
les  choses  qu'on  tient  à  loyer.  Par  extension,  on  l'ap- 
plique à  la  valeur  même  du  loyer.  On  distingue  d'ordi- 
naire quatre  termes  par  an,  Noël,  Pâques,  la  S'- Jean,  et 
la  S'-Michel;  nubien,  lesi*'*  Janvier,  avril.  Juillet  et 
octobre. 

TERME,  en  Droit  civil,  limitation  d'un  temps  donné 
pour  faire  une  chose.  Le  terme  de  rigueur  est  celui  passé 
lequel  il  n'y  a  plus  de  délai  à  espérer.  Ce  qui  n'est  dû 
au  à  terme  ne  peut  être  exigé  avant  l'échéance  (  V,  Code 
Napol,y  art.  11S5-88).  Il  y  a,  pour  le  débiteur,  déchéance 
du  bénéfice  du  terme,  s'il  tombe  en  faillite  ou  en  décon- 
fiture, ou  s'il  a,  par  son  fait,  diminué  les  sûretés  qu'il 
avait  données  par  le  contrat  au  créancier. 

TERME,  divinité  allégorique.  V.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TERME  (Marché  à).  V,  MARCHé. 

TERMINAISON,  nom  donné,  en  Grammaire,  aux  suf- 
fixes qui  terminent  un  mot  et  en  caractérisent  l'espèce, 
ou  le  nombre,  ou  le  genre,  ou  le  cas,  ou  la  personne,  etc. 
Ainsi,  ment  est  la  terminaison  de  la  plupart  des  ad- 
verbes de  manière  en  français  {utilement,  méchamment)  ; 
asse  est  la  terminaison  de  l'imparfait  du  subjonctif  à  la 
l'*  personne  du  singulier  dans  les  verbes  de  la  i'*  con- 
jugaison; ir  caractérise  l'infinitif  présent  des  verbes  de 
la  2*,  etc.  En  latin,  us  est  la  terminaison  des  noms  de  la 
2*  déclinaison  au  nominatif  singulier,  os  celle  de  l'accu- 
satif pluriel  ;  ibus  caractérise  le  datif  et  l'ablatif  pluriel 
de  la  3*  déclinaison,  is  les  mêmes  cas  à  la  l^*  et  à  la  2*. 
La  terminaison  modifie  quelquefois  la  dernière  lettre  du 
radical  :  ainsi ,  neu/*  devient  neuv  dans  neuve,  neuvième, 
neuvaine,  etc.  Certaines  terminaisons  sont  assez  fré- 
quentes dans  telle  ou  telle  langue  pour  la  caractériser  ; 
et  c'est  surtout  dans  les  noms  propres  que  cela  se  re- 
marque. Ainsi,  une  terminaison  en  ôs  ou  en  es  ou  en 
idas  annonce  généralement  un  nom  grec;  en  us,  un  nom 
latin;  en  er,  un  nom  allemand;  en  o,  un  nom  italien.  Une 
syllabe  nasale  ou  un  e  muet  annonce  à  coup  sûr  un  nom 
français  {Durand ,  Bertrand ,  Marchand,  Bertin,  Gués- 
clin,  Gilles,  Leblond,  Lecomte,  Laporte,  etc.).  Au  reste, 
les  terminaisons  des  noms  français  sont  extrêmement  va- 
riées ;  il  a  été  tellement  impossible  de  les  ramener  à  des 
classifications  rationnelles,  qu'on  a  adopté  la  division  en 
terminaisons  masculines  et  terminaisons  féminines;  les 
l'**  sont  celles  qui  offrent  un  son  plein  ;  les  2**,  celles  qui 
ne  sont  nuirquées  que  par  un  e  muet  :  si  bien  qu'à  vnu 
dire  les  unes  se  distinguent  à  peine  des  autres  pour  l'o- 
reille, puisque,  dans  les  noms  à  terminaison  féminine, 
la  pénultième  porte  l'accent  tonique.  Si  faible  que  soit 
cette  distinction,  elle  forme  néanmoins  une  des  bases  de 
l'harmonie  de  nos  vers.  V.  Rime.  R. 

TERMINAISON,  terme  de  Plain-Chant  par  lequel  on  dé- 
signe la  modulation  qui  sert  de  cadence  finale  à  chaque 
verset.  Elle  est  indiquée  dans  les  livres  par  les  syllabes 
seculorum  amen  qui  terminent  la  doxologie  Gloria  patH  : 
E uou  a  e.  Comme  tous  les  psaumes  et  les  cantiques 
sont  terminés,  à  de  rares  exceptions  près,  par  le  Gloria 
patri ,  on  en  a  choisi  les  dernières  paroles  pour  y  placer 
les  notes  de  la  terminaison.  La  terminaison  est  la  même 
pour  tous  les  versets.  La  suite  de  sons  qui  forme  la  ter- 
minaison d'un  verset  de  psaume  s'appelait  autrefois 
neume  (V.  ce  mot).  La  terminaison  est  indiquée  par 
l'une  des  sept  premières  lettres  de  l'alphabet  :  A,  B,  C, 
D,  E,  F,  6.  L'une  de  ce3  lettres  est  toujours  la  note  finale 
de  la  terminaison.  La  terminaison  est  complète,  lors- 
qu'elle a  pour  finale  celle  du  ton  auquel  la  mélodie  ap- 
partient ;  on  se  sert  alors  d'une  lettre  majuscule  pour  la 
désigner.  Elle  est  incomplète,  lorsqu'elle  ne  finit  pas  par 
la  note  finale  du  ton,  par  exemple^  lorsau'elle  finit  par 
fa  dans  le  l*'  ton,  au  heu  de  finir  par  re;  par  la  dans 
le  3*,  au  lieu  de  finir  par  mt.  Dans  ce  cas,  on  la  design* 
par  une  minuscule.  F.  G. 


TÈT 


1^10 


THA 


TERMINISME,  mot  qui  a  été  employé  comme  syno- 
nyme de  Déterminisme  (V,  ce  mot). 

TERMINOLOGIE  (du  latin  terminus,  tenne,  et  da 
grec  logos,  discours),  science  des  termes  ou  expressions 
propres  à  une  science,  à  un  art. 

TERNAIRE  (Mesure).  F.  Mbsobb. 

TERNE  (du  latin  temus,  triple,  trois  à  la  fois),  en 
termes  de  Loterie,  réunion  de  trois  nombres  pris  en- 
semble et  qui  sortaient  au  môme  tirage.  Le  terne  sec  se 
composait  de  trois  numéros  pris  sans  jouer  sur  les  trois 
extraits  ni  sur  les  trois  ambes  que  formaient  ces  numé- 
ros; il  se  payait  270  fois  la  mise.  Le  terne  déterminé  était 
celui  où  le  Joueur  avait  indiqué  d'avance  Tordre  dans 
lequel  devraient  sortir  ses  trois  numéros;  il  gagnait 
4,500  fois  la  mise. 

TERPODION,  instrument  de  l'espèce  des  clavi-cy- 
lindres,  inventé  vers  1817  en  Saxe  par  Jean-David 
Buschmann. 

TËRPSICHORE.  i  K.  ces  moto  dans  notre  Diclionnairtf 

TERRAGE.  ]      de  Biographie  et  d*Histore. 

TERRASSE,  nom  de  la  toiture  d*un  édifice  quand  elle 
est  en  plate-forme.  On  voit  beaucoup  de  terrasses  dans 
les  pays  méridionaux  de  l'Europe  et  en  Orient, 

TERHASSB,  élévation  de  terre,  ménagée  dans  un  parc  ou 
an  terrain,  ordinairement  épaulée  par  de  la  maçonnerie, 
et  plantée  d'arbres,  pour  servir  de  promenade  ou  de  point 
de  vue.  Telles  sont  les  terrasses  de  S^-Germain-en-Laye, 
de  Meudon,  de  S*-Cloud,  etc.  On  nomme  Contre-terrasse 
une  terrasse  b&tie  au-dessus  d*une  autre ,  pour  quelque 
raccordement  de  terrain  ou  élévation  de  parterre. 

TEHRASSE,  uom  que  donnent  les  sculpteurs  à  la  partie 
de  la  plinthe  d'une  statue  où  pose  la  figure. 

TERRASSEMENT,  opération  de  Construction  qui  a 
pour  objet  le  déblai  et  le  remblai  des  terres.  Les  ouvriers 
employés  à  ce  genre  de  travail  sont  dits  Terrassiers. 

TERRE,  l'un  des  quatre  élémento  des  Anciens.  L'opi- 
nion qui  fait  de  la  Terre  un  élément  et  l'un  des  principes 
substantiels  de  la  Nature  parait  remonter  à  Empédoclc, 
qui ,  suivant  ce  que  rapporte  Aristote,  t'ajouta  à  l'Air,  à 
l'Eau  et  au  Feu ,  recounus  au  même  titre  par  les  autres 
philosophes  de  l'école  Ionienne,  et  les  soumit  tous  en- 
semble au  pouvoir  de  l'amour  et  de  la  Discorde,  pris 
comme  principes  moteurs.  V.  Ionienne  (École).     B— e. 

TERRE-PLEIN,  amas  de  terres  rapportées  formant  une 
surface  plate  et  unie.  C'est  la  partie  supérieure  d'un  rem- 
part où  se  trouvent  les  canons.  C'est  aussi  tout  terrain 
élevé,  soutenu  par  des  murailles,  comme  le  terre-plein 
du  Pont-Neuf  à  Paris. 

TERRES  CUITES,  nom  sous  lequel  on  désigne  les  an- 
tiques en  argile.  Les  Anciens  employèrent  la  terre  cuite 
pour  les  frises  de  leurs  temples,  pour  les  bas-reliefs  de 
leurs  frontons,  et  en  firent  aussi  un  grand  nombre  de 
vases  cft  ustensiles.  On  distingue  les  ouvrages  séchés 
uniquement  à  l'air,  ceux  qui  ont  été  cuits  tout  simple- 
ment ,  ceux  qui  ont  été  cuito  avec  des  couleurs  étendues, 
mais  non  fixées,  ceux  dont  les  couleurs  furent  cuites, 
ceux  où  les  couleurs  sont  mi-partie  fixes  et  mi-partie 
peintes,  enfin  ceux  qui  sont  plus  ou  moins  richement 
dorés.  Au  xvi«  siècle,  les  artistes  se  remirent  à  employer 
la  terre  cuite  :  Bernard  Palissy  se  rendit  célèbre  par  ses 
figures  et  ses  vases;  on  exécuta  en  Italie  des  bustes  et 
d'autres  ouvrages.  La  terre  cuite  fut  de  nouveau  délaissa 
aux  XVII*  et  xvni*  siècles;  elle  a  repris  faveur  de  nos 
Jours,  et  on  l'emploie  principalement,  à  cause  de  son  bon 
marché,  pour  les  ornemento  architectoniques.  B. 

TERRIER.  \ 

TËRRIPAVIUM.  (  F.  ces  mots  dans  notre  D/c(tontiair0 

TERRITOIRES.         de  Biographie  et  d'Histoire. 

TERUNaUS.       ) 

TERZA  RIMA.  F.  Itauenhb  (Versification). 

TERZËITO,  terme  italien  de  musique,  signifiant  peftt 
trw. 

TERZINA.  r.TaiOLBT. 

TESSÉRAIRE.  \ 

TESSÈRE.        (  F.  ces  moto  dans  notre  Dictionnaire 

TEST.  (      de  Biographie  et  d'Histoire. 

TESTAMENT.   / 

TESTAMENTAIRE  (Exécuteur).  F.  ExécoTBOH. 

TESTIÈRE  ou  TÊTIÈRE,  partie  de  l'armure  du  moyen 
âge  qui  couvrait  la  tète  du  cheval. 

TESTIMONIALE  (Preuve).  V.  Pbeove. 

TESTON ,  monnaie.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  BiograpJUe  et  d'Histoire, 

TÊTE  (Voix  de).  V.  Faucbt. 

tAtb  db  clou.  V.  Gloo. 

fÉn  M  PONT,  ouvrage  de  fortificati«ii  qui  ne  diffère 


du  redan  que  parce  que  les  faces  sont  brisées,  pour 
donner  deux  flancs  dont  les  feux  se  croisent  au  saillant. 
TÔTE  OB  PORC.  V,  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire, 

TÊjB  DR  TRÈE>'LE«  sommet  d'uno  arcade  trilobée. 

TETRACORDE  (du  çrec  tétra,  quatre,  et  khordé,  cor- 
de), en  termes  de  Musique  grecque,  système  de  qnain 
cordes  ou  sons  dont  les  extrêmes  étaient  à  distance  île 
quarte.  Les  Grecs  divisaient  l'échelle  musicale  en  tétra- 
cordes,  et  non  en  octoves  comme  font  les  Modernes. 
A  l'origine,  les  tétracordes  n'étaient  que  diatoniques  ;  par 
la  suite  ils  devinrent  aussi  chromatiques  et  enharmo- 
niques. V,  Gbbcqob  (Musique). 

TéTRAGORDB ,  lyre  ii  quatre  cordes. 

TÉTRADRACUME,  monnaie  d'argent  de  4  drachme^ 
chez  les  anciens  Grecs.  V.  Draghub,  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d* Histoire. 

TÉTRAÉTÉRIDE  (du  grec  tétra,  quatre,  et  étos,  année\ 
en  termes  de  Chronologie,  cycle  ou  période  de  quatre  an- 
nées, en  usage  chez  les  anciens  Athéniens. 

TÉTRAFOLIÉ ,  en  termes  d'Architecture,  qui  est  h 
4  feuilles  ou  à  4  lobes. 

TÉTRALOGIE  (du  grec  tétra,  quatre,  et  logos,  dis- 
cours), représentotlon  de  trois  tragédies  suivies  d'nn 
drame  satyrique,  chez  les  anciens  Grecs.  Un  grammairir-n 
a  cité  celle-ci  d'Eschyle  :  Phinée,  les  Perses,  Glaucus  de 
Potnies,  tragédies;  Prométhée,  drame  satyric^ue.  On  voit 
par  ce  témoignage  qu'il  n'étoit  pas  nécessaire  que  les 
trois  pièces  tragiques  eussent  aucun  lien  entre  elles ,  non 
plus  qu'avec  la  pièce  finale.  On  sait  encore,  soit  par  de» 
scoliastes,  soit  par  des  polygraphes,  entre  autres  Élicn, 

3u'Euripide  donna  une  tétralogie  ainsi  composée  :  Alexcui- 
re,  Païamède,  les  Troyennes,  tragédies;  Sisyphe,  drame 
satyrique,  en  concurrence  avec  une  tétralogie  d'un  certain 
Xénoclès,  comprenant  les  tragédies  d'OEdipe,  de  Lycaon, 
des  Bacchantes,  et  le  drame  satyrique  Athamas.  Médce 
fut  représentée  avec  Philoctète  et  Dtctys^  et  les  Moisson- 
neurs, Enfin  on  cite  une  tétralogie  d'Euripide  sans  drame 
satyrique,  et  composée  des  Cretoises,  d'Alcméan  à  Pso- 
phis^  de  Télèphe,  et  &Alceste.  V,  Patin,  Études  sur  les 
Tragiques  f(recs.  P. 

TÉTRAMÈTRE,  vers  grec  ou  latin  composé  de  quatre 
mesures  représentent  soit  quatre  pieds,  comme  dans  les 
systèmes  cboriambique,  dactylîque,  ionique,  soit  quatre 
dfpodies ,  c-à-d.  huit  pieds ,  comme  dans  les  systèmes 
lambique,  trochalque,  anapestique.  Les  vers  bacchiaques 
et  les  vers  crétiques  admettent  des  tétramètres  téli(unb€S 
(  V.  ce  mot),  P. 

TÉTRAMORPHE,  réunion  des  quatre  attributs  d« 
Ëvangélistes  en  une  seule  figure.  Le  tétramorphe,  fré- 
quemment représenté  dans  l'Iconographie  grecque,  très- 
rare  dans  l'Iconographie  latine,  marque  que  les  quatre 
Évangélistes  ne  font  qu'un ,  et  ne  doivent  pas  être  sC- 
parés. 

TÉTRAPHONIE,  nom  donné,  dans  l'ancienne  Musique, 
à  un  chant  à  4  parties. 

TÉTRAPLES  (Les),  nom  d'une  Bible  où  Origène avait 
placé  sur  4  colonnes  les  quatre  versions  grecques  d'Aquila, 
de  Symmaque,  des  Septante,  et  de  Théodotion. 

TÉTRARCHIR.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

TÉTRASTIQUE,  mot  employé  quelquefois  comme  sy- 
nonyme de  qtuUrain. 

TÉTRASTYLE ,  édifice  qui  présente  quatre  colonnes  à 
sa  façade. 

TÉTRATONON ,  dans  la  musique  grecque,  intervalle 
de  quatre  tons,  ce  que  nous  nommons  une  quinte  aug- 
mentée, ou  une  sixte  mineure. 

TÉTRAVELA.  V.  BALDAQom. 

TÉTROBOLE  (du  grec  tétra,  quatre,  et  obolos,  obole), 
monnaie  de  4  oboles  des  anciens  Grecs.  V.  Obolb,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

TEUGUE  ou  TUGUE,  en  termes  de  Marine,  sorte  do 
gaillard  qu'on  fait  à  l'arrière  d'un  vaisseau  pour  le  ga- 
rantir des  injures  du  temps. 

TEXTE  (du  latin  textus,  tissu),  en  termes  de  Philo- 
logie, les  propres  paroles  d'un  auteur,  par  opposition  aux 
notes  et  aux  commentaires. 

texte  ,  passage  de  l'Écriture  sainte  <ju'un  prédicatwr 
prend  pour  sujet  de  son  sermon,  et  qui  revient  souvent 
dans  le  discours ,  qui  doit  en  être  le  développement  oa 
l'application. 

TEXTE  (Gnos — ,  Perrr).  V.  Gabactèiie»  D'OfFRORBOb 

TEYEMMON.  V.  Ablution. 

thaï  (Langue).  V.  Siamois. 


tHÉ 


lia 


tHÈ 


fHALAHÈGUE ,  navire.  F.  notre  Dktionnatrs  de  Dio^ 
graphie  et  d'Histoire, 

THALAMISTËS.  V.  Navales  (Constractions). 

THALAMUS,  i  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

THALER.       \     Biographie  et  d'Histoire. 

THALMUD.  K.  Taliiud,  dans  notre  Diotionnatre  de 
Biographie  et  d'Histoire» 

THALWEG,  y.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire,  au  Supplément. 

THAUUATOPES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

TUAUUATURGE  (du  grec  thauma,  merveille,  miracle, 
et  er(7on y  ouvrage),  littéralement,  faiseur  de  miracles. 
On  donnait  ce  nom,  surtout  dans  les  premiers  temps  de 
l'Église,  aux  saints  personnages  ;  un  disciple  d'Origône, 
Grégoire  de  Néo-Césarée,  fut  surnommé  le  thaumaturge, 
il  cause  de  tftS  QOBbreux  miracles.  Dans  le  même  temps, 
les  adversaires  du  christianisme  lui  opposaient  de  pré- 
tendus faiseurs  de  miracles,  comme  Apulée  et  le  néopla- 
tonicien Apollonius  de  lyane  ;  ils  citaient  aussi  Pytbagore. 
Les  prêtres  égyptiens  qui  luttèrent  contre  Moïse,  Simon 
le  Magicien,  étaient  des  thaumaturges;  on  peut  d'ailleurs 
donner  ce  titre  à  tous  ceux  qui  prétendent ,  par  des  opé- 
rations quelconques,  produire  des  phénomènes  opposés 
aux  lois  de  la  nature.  Dans  le  xvm'  siècle,  J.  Gassner  fut 
regardé  comme  un  thaumaturge,  ainsi  que  le  prince  de 
Uohenlohe,  évoque  de  Gross-Wardein  en  Hongne.  F.  Bi- 
bliothàque  magique,  1776,  in-8°;  le  Thaumaturgus  physi^ 
ctis,  du  P.  Schott;  Windischmann ,  Essais  de  thaumor 
turgie.  R. 

THÉÂTRALE  (  Législation  ).  La  liberté  des  représenu- 
ttons  théâtrales  peut ,  comme  la  liberté  de  la  presse, 
dégénérer  en  licence,  et  un  gouvernement  ne  saurait 
abandonner  tout  contrôle.  En  Angleterre,  le  pays  le  plus 
libre  du  monde,  la  formalité  de  Tautorisation  préalable 
pour  rétablissement  d'un  théâtre  et  la  censure  drama- 
tique ont  été  étaJ>lies  en  1737.  De  môme,  en  France, 
avant  1780,  les  représentations  théâtrales  ne  pouvaient 
avoir  lieu  qu*en  vertu  d'une  autorisation  expresse  du  gou- 
vernement. La  loi  des  16-24  août  1790  décidaque  les  spec- 
tacles publics  ne  pourraient  être  permis  et  autorisés  que 
par  les  oihciers  municipaux,  et  astreignit  les  directeurs 
et  entrepreneurs  alors  existants  à  se  pourvoir  devant  eux 
pour  faire  confirmer  leur  Jouissance.  Celle  des  13-10  Jan- 
vier 1701  permit  à  tout  citoyen  d'élever  un  théâtre  pour 
y  faire  représenter  des  pièces  de  tous  genres,  sous  la 
seule  condition  d'en  faire  préalablement  la  déclaration  ' 
à  la  municipalité  du  lieu.  Un  décret  du  8  Juin  1806  décida 
qu'aucun  théâtre  ne  pourrait  s'établir  b,  Paris  sans  auto- 
risation de  TEmpereur;  que  le  ministre  de  l'Intérieur 
pourrait  assigner  à  chaque  thé&tre  an  genre  de  spectacle 
déterminé;  que,  dans  les  grandes  villes,  les  théâtres  se- 
raient réduits  à  deux,  et  que,  dans  les  autres,  un  seul 
serait  maintenu;  qu'ils  devraient  tous  être  munis  de 
l'autorisation  du  préfet;  qu'aucune  pièce  ne  pourrait  être 
Jouée  sans  l'autorisation  spéciale  du  ministère  de  l'Inté- 
rieur. La  loi  du  0  septembre  1835,  reproduisant  à  peu 
de  chose  près  ce  décret,  porta  que  l'ouverture  d'un 
Uiéàtre  ou  la  représentation  de  pièces  non  autorisées 
serait  punie  correction nellement  d'un  emprisonnement 
d'un  mois  à  un  an,  et  d'une  amende  de  1,000  à  5,000  fr., 
sans  préjudice  des  poursuites  auxquelles  pourraient  don- 
ner lieu  les  pièces  représentées  ;  et  que,  pour  des  motifs 
d'ordre  public,  .l'autorité  pourrait  toujours  suspendre  la 
représentation  d'une  pièce,  et  même  ordonner  la  ferme- 
ture provisoire  du  théâtre.  Cette  législation  fut  abolie  par 
le  Gouvernement  provisoire  de  1848;  mais  la  liberté  illi- 
mitée ayant  engendré  des  désordres ,  l'Assemblée  législa- 
tive, par  une  loi  du  30  juillet  1850,  rétablit  l'autorisation 
préal-able,  laquelle  pouvait  toujours  être  retirée  pour  des 
motifs  d'ordre  public,  et  porta  à  l'égard  des  contrevenants 
la  peine  d'une  amende  de  100  fr.  k  1,000  fr.,  sans  pré- 
judice des  poursuites  auxquelles  les  pièces  pourraient 
donner  lieu.  Un  décret  de  1863  a  proclamé  la  liberté 
des  entreprises  théâtrales  :  il  n'y  a  pi  un  de  directeurs 
privilégiés  qui  prélèvent  un  cinquième  de  la  recette  brute 
sur  tous  les  spectacles  ;  mais  le  Droit  des  pauvres  a  été 
maintenu.  Aujourd'hui  les  thé&tres  sont  placés  sous  la 
direction  du  ministre  de  Tlntérieur;  leur  police  est 
confiée,  à  Paris,  nu  Prélet  de  police  ;  au  préfet  dans  les 
chefs-lieux  de  département  qui  ont  iO^OitO  âmes  et  au* 
dessus;  et  dans  les  autres  communes  à  i'autoritô  mu* 
nicipaic.  L'exploitation  d'un  théâtre  étant  un  acte  de 
commerce,  lusacleurs,  auteurs,  eréanciers  qui  ont  dee 
féciamaiious  judiciaires  à  exercer  contre  le  directeur, 
'M^iVitat  le  citer  devant  le  tribunal  de  commerce. 


V.  Vulpian  et  Gauthier,  Code  des  théâtres,  1820,in-18t 
J.  Rousseau,  Code  théâtral,  1820,  in-18;  Vivien  et  Blanc, 
Traité  de  la  législation  des  théâtres,  1838,  in-8«;  Mau- 
d'heux  etCh.  d'Argé,  Répertoire  raisonné  dejurispn^' 
dence  théâtrale,  1843,  in-8<^;  Simonet,  Traité  de  la  po- 
lice administrative  des  théâtres  de  Paris,  1850,  in-8«; 
Lacan  et  Paulmier,  Traité  de  la  législation  et  de  la  juris^ 
prudence  des  théâtres,  1853,  2  vol.  in-8°. 

THÉÂTRE  (du  grec  théatron,  dérivé  de  theaomai,  Je 
regarde) ,  édifice  destiné  aux  représentations  scénl'^ues. 
Par  extension,  le  nom  de  tliéâtre  désigne  l'ensemble  des 
ouvrages  dramatiques  composés  par  un  aulemr  (  le  théâtre 
de  Corneille,  le  théâtre  de  Racine,  etc.) ,  ou  qui  figurent 
dans  une  littérature  complète  (le  théâtre  grec,  le  théâtre 
espagnol,  etc.).  Au  point  de  vue  de  l'Architecture,  les 
théâtres  ont  été,  après  les  temples,  les  monuments  les 
plus  remarquables  des  Grecs  et  des  Romains  en  grau* 
deur  et  en  magnificence. 

I.  Théâtres  antiques.  —  La  tragédie  et  la  comédie  sont 
également  nées  dans  les  fêtes  de  Bacchus  :  la  partie  sé- 
rieuse de  ces  fêtes,  représentée  par  le  dithyrambe,  engen- 
dra la  première;  la  partie  Joyeuse,  ou  le  c&mos,  donna 
naissance  à  la  seconde.  Mais  la  fête  entière  eut  toujours 
pour  centre  l'autel  du  dieu,  sur  lequel  se  brûlaient  des 
parfums,  et  qui  reçut  à  cause  de  cela  le  nom  de  thymélé. 
De  bonne  heure  on  prit  l'habitude  de  réciter  ou  de  chan- 
ter auprès  de  l'autel  quelqu'un  des  faits  relatifs  à  l'his- 
toire de  Bacchus  :  le  récitateur  se  tenait  d'un  côté  de  la 
thymélé;  les  assistants  se  tenaient  de  l'autre  côté.  Dans 
la  suite,  au  lieu  de  raconter  simplement  une  aventure 
du  dieu  conquérant,  le  poète  mit  en  dialogue  les  parties 
du  récit  où  une  action  se  passait  entre  deux  personnages , 
et  s'adjoignit  un  répondant  ou  hypocrites  ;  ce  mot  servit 
toujours  depuis  lors  à  désigner  les  acteurs  dr,amatiques. 
En  même  temps,  pour  être  plus  en  vue  des  assistants, 
ces  acteurs  montèrent  sur  une  sorte  d'estrade  qui  portait 
le  nom  de  scène,  et  vis-â-vis  d'eux  l'on  dressa  des  gra- 
dins, nommés  Hcria,  sur  lesquels  se  rangèrent  les  spec- 
tateurs. Tels  furent  les  commencements  du  théâtre,  dont 
on  voit  que  les  trois  parties  essentielles  sont  Vautel ,  la 
scène  et  les  gradins;  au  fond,  les  théâtres  antiques  ne 
continrent  Jamais  autre  chose,  et  toutes  les  parties  qu'ils 
reçurent  en  se  développant  ne  furent  que  des  accessoires 
ajoutés  à  ces  trois  éléments  fondamentaux. 

Les  théâtres  furent  longtemps  de  bois  :  le  premier  théâ- 
tre de  pierre  fut  construit  â  Athènes  au  temps  d'Eschvls 
(76»  olympiade,  500  ans  av.  J.-C.)  sous  le  nom  de  Tlïéâti-e 
de  Bacchus,  après  l'écroulement  des  anciens  gradins  de 
bois.  Les  théâtres  qui  furent  élevés  plus  tard  no  s'éloi- 
gnèrent pas  beaucoup  des  dispositions  adoptées  ici.  On 
choisissait  pour  emplacement  la  pente  de  la  colline  qui. 
dans  toutes  les  villes  grecques,  portait  le  nom  d'Acro- 
pole; dans  ce  terrain,  le  plus  souvent  rocheux,  étaient 
taillés  les  gradins,  que  l'on  complétait  au  besoin  par  des 
blocs  de  rapport  et  par  de  la  maçonnerie;  ces  gradins 
formaient  un  amphithéâtre  demi-circulaire,  d'où  les  spec- 
tateurs Jouissaient  ordinairement  d'un  horizon  étendu. 
Le  dernier  gradin  vers  le  bas  dessinait  ainsi  une  aire  en 
demi-cercle,  dans  laauelle  s'élevait  l'autel.  Cette  aire 
portait  le  nom  ô*orchestre,  parce  que  c'était  là  que  le 
chœur  exécutait  en  chantant  les  mouvements  cadencés 
de  la  strophe  et  de  Vantistrophe  qui  formaient  une  sorte 
de  danse  {orctiésis).  On  voit,  par  les  grandes  ruines  de 
théâtres  qui  existent  encore  en  Grèce  et  en  Asie  Mi- 
neure ,  que  les  mouvements  du  chœur  étaient  indépen- 
dants de  ceux  de  la  scène,  et  que  des  deux  côtés  de 
l'orchestre  il  y  avait  un  passage  qui  lui  permettait  d'en- 
trer et  de  sortir  librement,  selon  les  nécessités  de  l'action. 
Le  front  de  la  scène  s'élevait  en  ligne  droite  devant  l'hé- 
micycle, à  une  petite  hauteur  au-dessus  de  rorchestri\ 
Quand  l'usage  du  rideau  se  fut  introduit,  on  le  logea  dans 
une  rainure  le  long  de  cette  rampe,  et  c'est  là  qu'il  res- 
tait pendant  la  représentation  :  on  disait  donc  baisser  l( 
rideau  dans  le  même  sens  où  nous  disons  lever  le  rideau. 
La  scène  formait  en  face  des  gradins  une  construction 

3uelquefois  très-considérable,  et  généralement  composée 
e  trois  corps  de  bâtiments  :  celui  du  fond ,  qui  portait 
le  nom  d'épiscénion,  et  ceux  des  côtés ,  qui  étaient  les 
ailes.  Ces  bâtiments  étaient  destinés  &  contenir  le  maté- 
riel du  théâtre,  les  machines ,  les  costumes,  les  masques, 
et  â  servir  de  vestiaires  et  de  retraite  aux  acteurs  pen- 
dant les  représentations  ;  ils  remplissaient  donc  le  rôle 
de  garde-meuble  et  de  coulisses.  C'est  devant  ces  façades 
intérieures  que  l'on  dressait  au  besoin  les  décoratftms 
mobiles  appropriées  au  sujet  de  chaque  pièce;  c'est  entre 
elles  que  descendaient  à  ciel  ouvert  les  dieux  et  les  êtrei 


THÉ 


1712 


THÉ 


aériens  que  Ton  fusait  souvent  apparaître;  l'art  du  ma- 
chiniste consistait  surtout  à  dissimuler  les  moyens  de 
suspension  quMl  employait.  La  surface  scénique  comprise 
entre  Tépiscénium  et  les  ailes  était  généralement  très- 
étroite  eu  égard  à  sa  longueur.  Comme  il  paraissait  rare- 
ment sur  la  scène  beaucoup  de  personnages  à  la  fois,  et 
qu'on  n'y  voyait  guère  des  peuples  entiers  ou  des  armées, 
chacun  des  acteurs  sortait  à  son  tour  de  Tune  des  ailes 
et  rentrait  dans  Tautre.  Face  à  face,  et  occupés  de  leur 
propre  action,  ils  n^avsient  pas  sans  cesse  le  visage  tourné 
vers  les  spectateurs*,  m  les  voyait  le  plus  souvent  de 
profil ,  disposés  de  manière  à  ne  pas  se  cacher  les  uns  les 
autres;  et  ils  ressemblaient  ainsi  à  une  suite  de  bas-reliefs 
se  dessinant  sur  la  façade  de  Tépiscénium.  Le  chœur 
n*étant  point  sur  la  scène,  mais  k  Torchestre,  une  faible 
profondeur  de  scène  suffisait  toujours,  même  dans  les 
plus  grands  théâtres.  D'ailleurs,  cette  disposition  nous 
prouve  que  les  décors  ne  pouvaient  qu'être  mis  à  plat 
contre  les  b&timents  de  la  scène,  et  qu'ainsi  les  théâtres 
grecs  ne  pouvaient  offrir  ces  plans  nombreux  et  ces  effets 
de  perspective  obtenus  aujourd'hui  par  les  coulisses  et 
les  échafaudages.  Du  reste,  les  gradins  supérieurs  étaient 
assez  élevés  pour  atteindre  au  niveau  des  constructions 
scéniques,  et  apercevoir  au  delà  les  montagnes  et  les 
horizons  lointains.  Comme  les  représentations  se  faisaient 
en  plein  Jour,  le  paysage  naturel  servait  de  décor  au  fond 
de  la  scène.  Aucune  toiture,  aucun  abri  ne  couvrait  les 
spectateurs  et  ne  leur  dérobait  la  vue  du  ciel. 

La  commodité  du  spectateur  était  entendue  tout  autre- 
ment qu'aujourd'hui.  Car,  s*ils  étaient  exposés  à  la  cha- 
leur du  jour,  ils  avaient  le  plein  air  pour  en  tempérer 
la  rigueur,  lis  étaient  assis  sur  la  pierre;  mais  celle-ci 
était  taillée  suivant  des  plans  bien  conçus,  comme  on  le 
voit  au  théâtre  d'ftpidaure,  œuvre  do  Polyclète.  La  circu- 
lation se  faisait  aisément  par  les  chemins  qui  montaient 
de  l'orchestre  aux  gradins  les  plus  élevés.  Li  le  spectateur 
pouvait  en  outre  prendre  le  frais  sous  une  colonnade  qui, 
le  plus  souvent,  régnait  au  haut  de  l'amphithéâtre,  d'une 
aile  à  l'autre. 

L'illusion  scénique  semble  également  avoir  été  en- 
tendue tout  autrement  que  chez  nous;  en  effet,  d'uoei 
oart,  il  n'est  pas  croyable  que  les  décorateurs  aient  pour- 
buivi  une  représentation  pour  ainsi  dire  scrvile  de  la  na- 
ture, laquelle  eût  été  à  peine  possible  sous  la  lumière  du 
soleil;  ils  ont  dû,  par  conséquent,  s'en  tenir  à  de  cer- 
taines conventions  qui  leur  permettaient  de  simplifier 
leurs  moyens  et  leure  ressorts.  D'un  autre  côté,  l'esprit 
artiste  des  Grecs  n'eût  jamais  souffert  qu'un  acteur  vint, 
avec  sa  figure,  représenter  sur  la  scène  un  dieu,  un  héros, 
ou  un  être  idéal;  on  comprend,  en  effet,  qu'il  eût  paru 
fort  déplacé  au  milieu  d'objets  qui  avaient  un  sens  trop 
étendu  et  trop  général  pour  que  sa  personne  pût  se  ren- 
contrer parmi  eux;  enfin  comprend-on  qu'un  peuple 
réellement  artiste  eût  supporté,  au  milieu  d'événements 
divins  et  sous  un  costume  héroïque  ou  même  céleste,  le 
visage  d'un  homme  que  l'on  rencontrait  chaque  Jour  dans 
la  rue?  L'art  dramatique  fit  donc  usage  du  masque  de 
très-bonne  heure  ;  il  ne  tint  nul  compte  de  l'expression 
des  traits  du  visage  sur  la  scène,  et  trouva  plus  avanta- 
geux de  les  cacher  sous  une  figure  immobile  doutée  d'une 
expression  générale  et  appropriée  au  personnage  et  à 
l'ensemble  des  événements.  Le  masque  avait  pour  effet 
de  dénaturer  les  proportions  du  corps  humain  et  de  gros- 
sir monstrueusement  la  tète  :  de  là  naquit  le  besoin  d'éle- 
ver la  taille  de  l'acteur  au  moyen  du  brodequin  appelé 
cothurne,  et  d'allonger  les  vêtements  en  proportion.  En 
somme,  le  personnage  paraissait  plus  grand  que  nature, 
sa  voix  était  amplifiée,  son  visage  réduit  à  un  type  connu 
du  peuple,  ses  gestes  rendus  plus  lents  et  plus  solennels  ; 
ces  changements  n'avaient  aucun  inconvénieut,  pui;*- 
qu'ils  rapprochaient  l'acteur  de  l'idée  qu'on  se  faisait 
vulgairement  des  héros  et  des  dieux.Ces  cuuditious  scé- 
niques imposées  aux  poètes  les  obligeaient  a  ne  point  re- 
chercher les  petits  moyens  d'action,  et  à  ne  compter  que 
surleagrandespéripétiesetsurlaforce  môme  du  drame. 

Les  dimensions  des  théâtres  antiques  imposaient  aux 
poëtes  et  aux  acteurs  les  mômes  nécessités.  Celles  de  nos 
théâtres  modernes  n'en  donnent  qu'une  très-faible  idée. 
Non-seulement  on  ne  voyait  aucune  construction  ou  gar- 
niture analogue  à  nos  loges  et  à  nos  galeries,  mais  la 
conmiode  disposition  du  théâtre  en  gradins  concentriques 
permettait  à  la  fois  de  loger  le  plus  grand  nombre  pos- 
sible de  spectateurs  sur  un  espace  donné,  et  d'étendre 
vers  le  haut  cet  espace  à  fort  peu  de  frais.  Ainsi,  les 
gradins  du  théâtre  de  Bacchus  à  Athènes  pouvaient  con- 
tenir .^0,000  spectateurs  ;  ceux  d'Épidaure  avaient  146  met. 


de  diamètre  ;  ceux  de  la  petite  ville  de  Sicyone  130",  ceux 
d'Éphèse  214"  et  pouvaient  contenir  150,000  spectateurs. 
La  voix  de  l'acteur,  amplifiée  par  le  masque,  renvoyer* 
par  la  construction  de  la  scène,  et  concentrée  par  la  ga- 
lerie supérieure,  devait  remplir  cette  immense  enceinte  ; 
la  forme  évasée  que  présentait  l'ensemble  des  gradin.o 
était  très  heureuse  pour  l'acoustique,  à  laquelle  d'ail- 
leurs, nous  savons  que  le  plein  air  ne  faisait  aucuu>- 
ment  obstacle.  Le  grand  nombre  des  spectateurs  et  le? 
vastes  dimensions  qu'il  imposait  aux  théâtres  avaif-nt 
plusieurs  causes  chez  les  Grecs  :  d'abord,  les  représenta- 
tions dramatiques  faisaient  partie  d'une  fête  religieu$^ 
et  étaient  un  usage  sacré  auquel  l'art  des  poètes  donna 
une  puissance  nouvelle  sur  les  esprits;  en  second  lieu, 
ces  représentations  étaient  rares  dans  l'année  et  non  quo- 
tidiennes comme  chez  nous,  ce  qui  nécessairement  derait 
attirer  un  grand  nombre  de  personnes,  préparées  d'ail- 
leurs par  leur  éducation  à  comprendre  même  les  chefs- 
d'œuvre  de  l'art  le  plus  élevé  ;  enfin  l'entrée  au  théâtre 
était  gratuite,  et  permise  aux  hommes  de  toute  condition. 
Cette  institution  des  théâtres,  dont  les  villes  faisaient  les 
frais,  était  donc  entièrement  démocratique.  Elle  ne  l'a 
jamais  été  chez  les  modernes,  et  il  est  même  à  remsrquej 

3ue  les  nouveaux  théâtres  construits  chez  nous  éloignent 
e  plus  en  plus  par  le  prix  des  places  les  personnes  que 
leur  fortune  trop  médiocre  retient  chez  elles;  l'argent 
règne  au  théâtre.  Les  Grecs  seuls,  et,  parmi  eux,  les 
peuples  ioniens,  les  Athéniens  surtout  avec  leurs  colo- 
nies, ont  su  faire  des  théâtres  de  vrais  établissements 
démocratiques  :  ce  caractère  est  imprimé  à  toute  Tarcbi- 
tccture  des  théâtres  de  la  Grèce,  aussi  bien  qu'aux  œu- 
vres de  ses  poètes  dramatiques. 

Quand  l'art  dramatique  passa  de  la  Grèce  en  Italie  et 
se  fut  établi  dans  Rome,  son  caractère  religieux  disparut 
d'abord.  Onallaitau  théâtre  pour  se  récréer;  les  repré- 
sentations furent  données  au  public  le  plus  souvent  pour 
briguer  ses  suffrages  ;  les  théâtres  furent  élevés  par  de 
riches  particuliers  pour  les  plaisirs  des  électeurs  popu- 
laires; le  métier  d'acteur  fut  avili,  et  l'auteur  même  fut 
soumis  à  une  censure  rigide  et  arbitraire.  Tout  le  monde, 
(lu  reste,  y  fut  admis,  hommes,  femmes  et  enfant^;  ei 
pour  ne  rien  négliger  de  ce  qui  pouvait  relever  les  don.v 
teurs  aux  yeux  du  peuple,  ■»;)  y  déploya  une  magnificcnre 
inconnue  aux  Grecs.  Tels  furent  le  théâtre  de  Scannl^, 
cnlui  de  Pompée.  Plus  tard  on  en  construisit  dans  io  it 
l'Empire.  Ce  fut  sur  le  modèle  des  théâtres  grecs  :  stuie- 
ment ,  le  caractère  sacré  ayant  disparu  et  avec  lui  l'ori- 
gine même  de  l'art  dramatique,  il  n'y  eut  ni  thymélé  ni 
chœurs;  l'espace  vide  laissé  par  l'orchestre  fut  occupi 
par  l'aristocratie  romaine,  tandis  que  les  gradins  Tétaieni 
par  le  peuple.  On  peut  donc  regarder  les  théâtres  ro- 
mains comme  ayant  formé  la  transition  entre  ceux  de  la 
Grèce  et  les  théâtres  modernes. 

Aux  théâtres  on  doit  rattacher  un  genre  d'édifices  qui 
s'en  rapprochaient  beaucoup  :  ce  sont  les  Odéont  ou  théâ- 
tres de  musique  (  V,  Odéon).  Le  plus  célèbre  fut  rOdé^n 
de  Périclès  à  Athènes.  Les  concours  musicaux  n'ayant 
point  une  origine  sacrée,  il  n'y  eut  point  là  d'autel  de 
Bacchus  ;  et  comme  on  y  allait  pour  entendre  et  non  pour 
voir,  on  n'eut  pas  besoin  de  disposer  les  places  en  cni- 
dins.  De  plus,  les  dimensions  de  ces  salles  étant  loin 
d'égaler  celles  des  théâtres ,  on  put  lea  couvrir  d'un  t»!» 
de  forme  circulaire,  et  donner  à  tout  l'édifice  la  forme 
d'une  rotonde.  On  voit  par  quels  côtés  les  salles  de  mu* 
sique  se  rapprochaient  des  théâtres  et  par  quels  côtés  elks 
s'en  éloignaient. 

V Amphithéâtre  romain,  entièrement  inconnu  des  Grecs, 
n'est  au  fond  qu'un  théâtre  où  les  èpiscénia  ont  été  sup- 
primés avec  la  scène  même,  ce  qui  a  permis  de  doubler 
les  gradins  et  d'en  former  une  enceinte  unique  et  con« 
tinue,  presque  toujours  ovale,  et  où  l'orchestre  également 
doublé  s'est  trouvé  transformé  en  arène  on  espace  sablé; 
et  comme  il  n'était  guère  possible  d'adosser  un  tel  édi- 
fice aune  colline,  on  l'élevade  toutes  pièces  sur  un  trr 
min  plat,  avec  cet  art  des  constructions  voûtées  q<: 
dans  les  ruines  romaines ,  fait  encore  l'admiration  d*  v 
modernes.  V.  Amphithéâtre.  Eh.  B. 

II.  Théâtres  modernes.  —  On  ne  saurait  détermina  r 
d'une  manière  précise  l'époque  de  la  construction  d<'« 
premiers  théâtres  en  Europe  pendant  le  moyen  âge.  !/?« 
Mystères  (F.  ce  mot)  se  représentaient  sur  des  échafa»- 
dages  dressés  dans  les  places  publiques  ou  dans  de  vastes 
salles.  Ce  fut  seulement  au  xvi*  siècle  que  des  archi- 
tectes italiens  édifièrent  des  théâtres  fixes.  Tel  fut  celui 
eue  Bramante  construisit  en  pierre,  et  dans  la  forme  des 
théâtres  antiques,  à  l'extrémité  de  la  grande  cour  du  Va- 


THfi 


1713 


TITft 


tican.  Palladio  éleva  à  Vîcence,  en  1580,  toujours  d'après 
Ips  modèles  laissés  par  les  Anciens,  mais  en  ajoutant  une 
toiture,  un  thé&tre  que  Ton  conserve  encore  aujourd'hui 
avec  un  soin  religieux,  n  est  de  forme  demi-ovale;  la 
scène  ofire  7  rues,  avec  des  palais,  des  temples,  des  arcs 
de  triomphe  en  relief;  mais  ces  édifices  étant  nécessai- 
"«ment  petits,  le  coup  d'œil  est  d'un  mauvais  effet.  Vin- 
cent Sciunozzi  modela  élément  sur  l'antique,  avec  plus 
de  rigueur  encore,  le  thâtre  de  Sabionnetta;  en  lui  don- 
nant la  forme  demi-circulaire,  il  rendit  la  scène  visible 
pour  tous  les  spectateurs.  En  1618,  J.-B.  Aleotti  con- 
struisit le  thé&tre  de  Parme,  dont  la  forme  générale  est 
un  hémicycle  prolongé  par  des  lignes  droites  :  autour 
du  parterre  est  un  vaste  amphithéâtre,  surmonté  de  deux 
galeries  ornées  de  colonnes  et  d'arcades;  au-dessus  est 
un  acrotère  avec  des  figures  qui  semblent  porter  le  pla- 
fond; Tavant-scène  offre  deux  rangs  de  niches  ajustées 
avec  de  petites  colonnes  qui  rappellent  en  grande  partie 
la  décoration  des  scènes  antiques;  vers  les  deux  faces,  en 
retour  de  Tavant^-scène  et  en  retour  avec  les  loges,  sont 
deux  arcs  de  triomphe  surmontés  de  figures  équestres. 

La  disposition  des  thé&tres  antiques  ne  pouvait  pas 
convenir  aux  usages  modernes.  On  ne  tarda  pas  à  rem- 
placer les  gradins  par  des  rangs  de  loges  ou  des  balcons, 
et  la  scène  devint  plus  profonde,  afin  de  faire  jouer  les 
machines  et  de  produire  des  effets  pittoresques.  Dans  le 
xvii*  siècle,  toutes  les  villes  d'Italie  voulurent  avoir  leur 
théâtre  fixe,  et  ces  thé&tres  furent  construits  à  peu  près 
9ur  le  plan  que  nous  avons  conservé  jusqu'à  présent. 
Toutefois,  si  l'on  excepte  le  thé&tre  de  S^  Charles  à  Na- 
ples,  et  celui  que  Galli  da  Bibiena  éleva  à  Bologne  vers 
1703,  les  anciens  thé&tres  italiens  ne  présentaient  pas 
les  conditions  que  l'on  exige  aujourd'hui  :  point  de  fa- 
çade extérieure  qui  les  caractérise;  point  de  portique 
pour  tenir  la  foule  &  couvert  avant  l'ouverture  de  la  salle  ; 
point  d'abri  pour  descendre  de  voiture,  ni  de  foyer  pour 
la  promenade  des  spectateurs  pendant  les  entr'actes; 
point  de  café  à  l'intérieur. 

En  France,  ce  ne  fut  guère  qu*au  xvii®  siècle  nue  l'on 
bâtit  des  thé&tres  durables.  Un  des  premiers  et  des  plus 
importants  fut  le  thé&tre  construit  dans  le  Palais-Royal 
par  ordre  du  cardinal  de  Richelieu  :  l'intérieur  de  la 
salie  consistait  en  27  gradins  et  2  rangs  de  loges  ;  la 
noblesse  occupait  des  banquettes  sur  les  côtés  de  l'avant- 
scène  {V.  BATsotiinrTES ) ;  dans  les  gradins,  les  femmes  de 
la  cour  se  faisaient  apporter  des  fauteuils  ou  des  chaises  ; 
au  parterre,  on  restait  debout.  Les  autres  salles  ont  dû 
présenter  &  peu  près  les  mômes  dispositions.  Les  repré- 
sentations n'avaient  encore  lieu  alors  que  pendant  le 
jour  :  les  ordonnances  de  police  prescrivaient  de  finir  les 
spectacles,  en  hiver,  &  quatre  heures  et  demie.  Louis  XIV 
lit  construire  aux  Tuileries,  par  Tarchitecte  italien  Gas- 
pard Vigarani,  une  salle  de  style  composite  qui  occupait 
toute  la  largeur  du  pavillon  Marsan.  La  scène  avait 
H  met.  de  profondeur,  10'»,66  d'ouverture,  et  H"',33 
ilc  hauteur;  le  dessus,  pour  la  retraite  des  décorations, 
était  de  12'",33,  et  le  dessous  de  5"'.  La  partie  livrée  aux 
spectateurs  avait  16™,33  de  largeur,  sur  31'"  de  profon- 
deur; la  hauteur  du  parterre  &  la  voûte  était  de  i0"',33. 
Quand  on  donna  les  représentations  le  soir,  il  fallut 
éclairer  les  salles  de  spectacle  :  de  1&  l'emploi  du  lustre 
(  V,  ce  mot  ).  On  éclaira  également  la  rampe^  et  tout 
d'abord  avec  des  chandelles,  car  la  salle  de  l'Odéon,  & 
Paris,  fut  la  première  où  l'on  employa  des  lampes  ou 
quinquets  en  1784. 

Les  dispositions  des  thé&tres  modernes  sont  à  peu  près 
les  mômes  chez  toutes'les  nations  européennes.  Cepen- 
dant, l'emploi  des  balcons  appartient  plus  spécialement 
aux  peuples  du  Nord,  et  les  loges  fermées  &  ceux  du  Midi. 
Les  Italiens  ne  connaissent  pas  ces  longues  galeries  qui, 
chez  nous,  font  le  tour  de  la  salle  en  avant  des  loges. 
En  Espagne,  jusqu'à  la  fin  du  xviii"  siècle,  les  salles  de 
spectacle  ont  été  carrées  :  au-dessous  des  trois  rangs 
de  loges  il  y  avait  un  amphithéâtre  où  se  plaçaient  les 
femmes;  dans  toute  la  façade  du  fond  étaient  des  gale- 
ries grillées,  n^rvées  aux  moines,  et  le  parterre  était 
disposé  en  gradins,  avec  un  espace  libre  au  milieu,  qui 
répondait  &  l'orchestre  antique. 

Après  bien  des  t&tonnements  et  des  expériences ,  il  a 
été  reconnu  que  la  meilleure  forme  pour  les  théâtres 
modernes  est  la  forme  elliptique.  Tout  spectateur,  en  se 
rendant  au  spectacle,  se  propose  d'entendre  et  de  voir  ; 
or,  TelUpse  est  la  courbe  la  plus  favorable  &  la  libre  cir- 
culation du  son,  et  la  disposition  des  loges  et  des  galeries 
sur  cette  courbe  est  la  plus  avantageuse  pour  voir  sur  la 
i^èue.  Si,  aoi*èa  avoir  fiié  les  deux  foyers  de  l'ellipse,  on 


tire  une  ligne  parallèle  au  petit  diamètre  et  au  quart  dn 
la  longueur  du  grand,  la  longueur  de  cette  ligne  donne 
exactement  les  meilleures  proportions  de  l'ouverture  de 
l'avant-scène.  Si  l'on  tire  au  ael&  de  l'avant-scène  une 
ligne  parallèle  au  petit  diamètre  de  l'ellipse  et  au  hui- 
tième de  la  longueur  totale  du  grand  diamètre,  si  Ton 
tire  ensuite  deux  lignes  des  extrémités  du  petit  dia- 
mètre et  passant  aux  extrémité  de  la  ligne  parallèle,  le 
point  d'intersection  de  ces  deux  lignes  obliques  donne 
celui  de  la  profondeur  nécessaire  du  thé&tre,  tant  sous  le 
rapport  des  rayons  visuels  que  sous  celui  des  lignes 
acoustiques.  Il  n'est  guère  possible,  pour  que  les  acteurs 
soient  entendus,  de  donner  plus  de  25  met.  à  la  salle, 
depuis  l'avant-scène  jusqu'au  fond  des  loges  du  point 
opposé.  Pour  que  des  places  latérales  les  plus  élevées 
les  spectateurs  puissent  voir  convenablement  sur  la 
scène,  il  faut  que  le  rang  de  loges  ou  de  galerie  le  plus 
élevé  de  la  salle  ne  surpasse  pas  en  hauteur  les  deux 
tiers  de  la  longueur  totale  de  cette  salle.  C'est  d'après 
ces  principe»  qu'ont  été  construits  beaucoup  de  thé&tres 
italiens,  qui  peuvent  servir  de  modèles,  tels  que  :  l'an- 
cien thé&tre  de  Fano,  b&ti  sur  les  dessins  de  Torelli  ; 
celui  de  Mantoue,  dû  &  Galli  da  Bibiena;  celui  d'imola, 
œuvre  de  Cosme  Morelli  ;  le  thé&tre  San-Bcncdetto  à 
Venise,  et  la  salle  Argentina,  &  Rome,  que  le  comte  Teo^ 
doli  a  faite  sur  le  môme  modèle;  le  grand  théâtre  de  la 
Fenice,  à  Venise,  construit  par  Selva;  celui  de  la  Scala, 
&  Milan,  par  Piermarini;  le  nouveau  thé&tre  de  Parme., 
par  Bettoli,  etc.  Les  avantages  de  la  forme  elliptique  étant 
connus,  il  en  résulte  que  le  plafond  d'une  salle  de  spec- 
tacle, surtout  d'une  salle  d'opéra,  doit  être  tracé  sur  une 
courbe  elliptique,  qu'il  faut  se  garder  d'interrompre  par 
une  ouverture  au  centre,  comme  on  le  fait  sous  prétexte 
de  favoriser  le  renouvellement  de  l'air  dans  la  salle  :  avec 
cette  forme,  il  favorise  autant  que  possible  la  circulation 
du  son.  Par  suite,  le  plafond  doit  offrir  une  surface  plane, 
nue  pour  ainsi  dire,  dépouillée  de  ces  compartiments  et 
autres  fantaisies  arcltitecturales  qui  n'ont  d'autre  effet 
que  de  dénaturer  la  masse  du  son,  de  la  disperser,  et  de 
donner  aux  voix  un  caractère  différent  en  divers  points 
de  la  salle. 

11  est  encore  une  forme  que  l'en  peut  donner  aux 
thé&tres  avec  avantage  :  c'est  celle  du  cercle,  tronqué  vers 
le  quart  par  l'ouverture  du  proscenium,  et  au  cinquième 
par  celle  du  rideau.  Elle  a  été  adoptée  complètement  ou 
à  peu  près  au  thé&tre  SM^harles  de  Naples  ;  au  thé&tre 
de  Bordeaux,  construit  par  Louis;  au  Thé&tre  Français 
de  Paris,  ouvrage  du  môme  architecte,  mais  où  l'on  a  un 
peu  perdu  de  la  propriété  du  cercle  par  une  trop  grande 
élévation  intérieure;  dans  la  môme  capitale,  au  théAtre 
de  la  Porte-S*-Martin,  par  Lenoir;  au  thé&tre  des  Va- 
riétés, par  Cellerier  ;  au  thé&tre  de  l'Opéra,  rue  Le  Pele- 
tier,  par  Debret.  —  On  a  fait  &  Londres  un  essai  bizarre, 
et  sans  succès,  celui  d'une  salle  en  forme  de  porte-voix , 
dont  la  partie  la  plus  resserrée  est  vers  la  scène  :  si  cette 
disposition  a  pu  ôtre  déterminée  par  des  raisons  d'acous- 
tique, elle  privait  entièrement  des  propriétés  de  l'optique 
les  parties  latérales  de  la  salle. 

Une  des  erreurs  les  plus  grandes  des  architectes  dans 
la  construction  des  thâttres  a  été  de  séparer  la  scène  et 
le  reste  de  la  salle  par  un  mur  avancé  ou  par  une  masse 
solide,  soit  que  cette  masse  soit  arrondie  en  forme  d'ar- 
chitrave, soit  qfu'elle  forme  un  encadrement.  Ce  mur  ou 
cette  masse  solide  est  un  repoussoir  qui  d'une  part  re- 
jette en  arrière  la  voix  des  acteurs,  et  de  l'autre  produit 
une  répercussion  des  effets  de  l'orchestre,  laquelle  déna- 
ture la  qualité  du  son  et  ne  le  fait  parvenir  que  réfléchi 
jusqu'au  public.  De  môme,  les  colonnes  placées  commu- 
nément aux  loges  de  l'avant-scène,  avec  leurs  chapiteaux 
et  l'espèce  de  fronton  qu'elles  supportent,  non-seulement 
interrompent  la  ligne  acoustique  et  gônent  les  effets 
de  la  vision,  mais  encore  forment  des  gouffres  où  le  son 
s'engloutit.  Cet  inconvénient  a  disparu  dans  le  nouveau 
Théâtre  impérial  du  Châtelet,  ouvert  &  Paris  en  1862  : 
l'architecte,  M.  Davioud,  a  prolongé  jusqu'&  la  scène  les 
galeries  des  spectateurs.  Ce  thé&tre  présente  une  autre 
innovation,  qui  est  toute  une  révolution  dans  le  système 
d'éclairage  des  salles  :  l'énorme  lustre  qui  intercepte  la 
vue  &  un  certain  nombre  de  spectateurs  des  galeries  su* 
périeures,  et  d'où  se  dégage,  surtout  depuis  l'emploi  du 
gaz,  une  chaleur  suffocante,  a  été  supprimé;  >e  plafond 
de  la  salle  est  formé  par  un  immense  verre  ovale,  dépoli 
et  ciselé,  au-dessus  duquel  on  a  concentré  de  nombreux 
becs  de  gaz,  et  la  lumière  arrive  en  quelque  sorte  tamisée 
et  singiili^;rement  adoucie.  Ce  système  d'éclairage  a  été 
«ncore  adopté  au  Tliéâlre-hjrique  de  la  place  dn  Cl»&lo- 


THÊ 


nu 


tHÉ 


let,  da  même  artiste,  ainsi  qu'au  théâtre  de  la  Gaité,  sur 
l«  square  des  Arts  et  Métiers,  Tun  et  l'autre  construits 
aussi  en  1862.  Au  théâtre  de  la  Gaité,  Tarchitecte,  M.  Cui- 
lin,  a  introduit  quelques  modifications  heureuses  :  la 
décoration  du  plafond  a  la  forme  d'une  vêla  disposée  en 
panneaux;  au  centre  est  un  grand  cercle,  rempli  par 
une  sorte  de  culnde-lampe  en  verre  dépoli  et  en  cristaux, 
et  fixé  un  peu  en  contre-bas  du  plafond,  de  sorte  que 
la  lumière  se  projette  mieux  dans  la  salle  ;  l'extrémité 
des  panneaux  est  plissée  en  demi-cercles  par  où  la  lu- 
mière pénètre  encore;  et  en  outre  le  milieu  de  chaque 
panneau  a  un  médaillon  qui  est  aussi  une  ouverture 
pour  la  lumière^  et  qui  sort  au-dessous  de  la  vêla,  à  peu 
près  en  demi-globe.  Cette  disposition  donne  un  effet  gé- 
néral plus  lumineux. 

Tous  les  matériaux  ne  peuvent  être  employés  indiffé- 
remment dans  les  constructions  intérieures  d'une  salle 
(le  spectacle.  C'est  ce  qui  ne  préoccupe  pas  assez  les  ar- 
chitectes, dont  les  uns  multiplient  les  corps  durs  qui 
répercutent  le  son  avec  sécheresse,  et  les  autres  em- 
ploient avec  profusion  les  toiles  et  les  étoffes  qui  l'absor- 
bent. Il  faut  qu'une  salle  soit  sonore,  et  qu'elle  vibre 
dans  son  ensemble  à  peu  près  à  la  manière  d'un  instru- 
ment :  la  pierre,  le  fer  et  les  autres  métaux,  ne  vibrent 
I)oint  harmoniquement,  et  répercutent  avec  dureté;  le 
bois,  au  contraire,  et  surtout  le  bois  léger,  tel  que  le 
sapin,  a  toutes  les  qualités  propres  à  donner  des  vibra- 
tions faciles,  et  conséquemment  à  seconder  la  sonorité 
de  la  salle.  Il  suit  de  là  que  toute  enceinte  intérieure  de 
salle  de  spectacle  doit  être  faite  en  bois  de  cette  espèce  : 
plus  le  bois  est  compact,  moins  il  facilite  la  résonnance  ; 
par  conséquent,  le  chêne,  l'orme,  le  charme  doivent  être 
rejetés  ;  le  hêtre  est  admissible.  On  recouvre  souvent  de 
toile  le  pourtour  des  galeries,  dans  le  but  de  faciliter  les 
travaux  du  peintre  décorateur;  c'est  un  mal  par  rapport 
&  l'acoustique,  car  le  son  s'insinue  et  s'absoroe  dans  les 
mailles  de  cette  toile. 

La  difficulté  do  disposer  convenablement  Torchestre 
pour  la  bonne  résonnance  est  assez  grande.  S'il  est  trop 
bas  à  l'égard  de  la  scène,  il  devient  sourd,  et  ne  forme 
point  un  tout  homogène  avec  les  voix  ;  s'il  est  assez  élevé 
pour  l'effet  musical,  il  devient  un  obstacle  à  la  vue  des 
spectateurs  les  plus  rapprochés  de  la  scène.  La  meilleure 
position,  sous  le  rapport  de  l'homogénéité  des  sons ,  est 
celle  où  l'extrémité  du  plancher  de  l'orchestre  opposée 
à  la  scène  forme  avec  le  plancher  de  l'avant-scène  un 
ongle  d'environ  25  degrés  :  mais  il  n'est  possible  d'élever 
autant  l'orchestre  qu'en  donnant  aussi  beaucoup  d'éléva- 
tion au  fond  du  parterre,  afin  d'obtenir  une  pente  douce 
qui  permette  aux  spectateurs  les  plus  voisms  de  l'or- 
chestre de  voir  la  scène  sans  obstacle.  V,  Orchestre. 

La  décoration  d'une  salle  de  spectacle  n'est  point  livrée 
au  caprice  du  jour  ou  des  hommes  ;  elle  est  prescrite  par 
le  genre  des  représentadons  affectées  à  tel  ou  tel  théâtre. 
Elle  résulte  essentiellement  de  la  disposition  architecto- 
nique,  puis  du  ton  local,  et  enfin  des  détails  d'ornements 
allégoriques  qui  lui  sont  spécialement  applicables.  D'un 
autre  côté,  il  n'est  pas  possible  d'adapter  à  deux  salles  de 
différente  grandeur  une  disposition  semblable,  par  exem- 
ple un  égal  nombre  de  rangs  de  loges  ou  de  loges  fer- 
mées, sans  violer  les  lois  de  l'optique. 

V.  Bulengerus,  De  theatro  ludisque  scenicis  lit.  FI, 
1603,  in-8°  ;  Boindin,  Discours  sur  la  forme  et  la  con- 
struction du  tfiéâtre  des  Anciens,  dans  les  Mém.  de  VAcO' 
demie  des  Inscriptions^  t.  I  et  IV;  Poleni,  Degli  teatri 
antichi,  Vicence,  1735,  in-8°;  J.  Carpi,  Opère  del  teatro 
antico  e  modemo,  Vérone,  1769  ;  Motta,  Trattato  sopra 
la  struttura  dt^  teatri  e  scene^  Guastalla,  1676,  in-fol.  ; 
Roubo,  Traité  de  la  construction  des  tïtéâtres,  Paris, 
1776,  in-fol.;  Lamberti ,  La  regolata  construzione  dé* 
teatri,  Naples,  1787,  in-fol.  ;  Bicati,  Délia  construzione 
de'  teatri,  Bassano,  1790,  in-4'';  Saunders,  Treatise  on 
théâtres,  1790,  in-4°;  Patte,  Essai  sur  l'architecture 
théâtrale,  1782;  Boullet,  Essai  sur  l'art  de  construire 
les  théâtres,  Paris,  an  viii;  Genelli,  Le  théâtre  d'Athènes, 
son  architecture,  son  mécanisme  scénique,  en  allem., 
Berlin,  1818,  in-8°;  J.  Ferrario,  Storia  e  descrizione  de' 
principali  teatri  antichi  e  modemi,  Milan,  1830,  in-8°; 
E.  Trélat,Le  Viéâtreet  i'arcAifecfe,  Paris,  1800,  in-8°.  B. 

THÉÂTRE  (Directeur  de).  Les  théâtres  des  Anciens 
n'avaient  pas  de  directeurs  en  titre  :  les  archontes  et  les 
autres  magistrats  en  Grèce,  les  édiles  à  Rome,  présidaient 
à  Tadministration  de  ces  établissements,  qui  étaient, 
pour  la  plupart,  des  propriétés  de  l'État.  Chez  nous,  nul 
D8  put,  jusqu'en  1863,  être  directeur  de  théâtre  oe 
j8  spectacle,  sans  un  yriviléoe  ou  une  tolérance.  La 


directeur  privilégié  était  à  peu  près  assuré  de  res- 
ter le  maître  de  son  entrepribe  pendant  le  temps  qui 
lui  était  concédé  par  son  privilège;  le  directeur  par  to- 
léranca  u%  relevait  que  de  la  police,  et  pouvait,  sur  un 
simple  ordre  émané  d'elle,  être  contraint  de  fermer  de  1« 
veille  au  lendemain.  A  Paris,  les  directeurs  de  l'Académie 
impériale  de  musique,  dite  plus  habituellement  aujour- 
d'hui VOpéra,  ceux  de  l'Opéra -Comique,  da  Théâtre- 
Français,  du  Thé&tre-Italien  et  du  Théâtre  de  l'Odéon 
sont  subventionnés  par  le  gouvernement;  l'Etat  « 
pris  à  sa  charge  l'excédent  des  dépenses  nécessitées  pour 
la  splendeur  de  l'Opéra.  Dans  les  départements,  les  di- 
recteurs privilégiés  à  résidence  fixe  reçoivent  générale- 
ment des  subventions  des  villes,  tandis  que  ceux  qui 
n'ont  que  des  troupes  d'arrondissement  et  qui  desservent 
plusieurs  localités  sont  à  peu  près  abandonnés  à  leurs 
seules  ressources. 

TH^TRB  (Moralité  du).  S'il  est  vrai  que  le  premier 
thé&tre  digne  de  ce  nom  ait  été  construit  dans  Athènes 
par  Eschyle,  le  père  de  la  tragédie  grecque,  le  glorieux 
prédécesseur  et  rival  de  Sophocle,  on  peut  dire  que  les 
représentations  dramatiques  avaient  pris  naissaaœ  parmi 
les  hommes  sous  les  plus  favorables  auspices.  La  «  hau- 
teur divine  »  où  d'abord  avaient  atteint  les  deux  émules 
était  faite  pour  justifier  et  recommander  les  spectacles 
naissants,  par  les  sentiments  élevés  qu'ils  excitaient  dans 
l'âme  des  spectateurs.  Mais,  depuis,  les  différentes  litté- 
ratures ont  vu  naître  d'innombrables  aspirants  à  la  gloin 
du  cothurne,  qui  n'ont  pas  su  toujours  conserver  à  k 
tragédie  sa  beauté  sévère  et  sa  grandeur  morale  des  pre- 
miers temps.  D'autre  part ,  la  comédie,  sortie  du  délire 
et  de  l'ivresse  des  Bacchanales,  dès  sa  naissance  et  par  la 
suite  parcourut  capricieusement  tous  les  degrés  qui  sé- 
parent le  haut  comique  du  grotesque  et  du  bouffon  :  tour 
a  tour  ou  tout  ensemble,  dans  Molière  comme  dans  Aris- 
tophane, grossière,  licencieuse,  fantasque  et  élé^nte^ 
fine,  épurée,  de  bonne  et  honnête  compagnie.  Ajoutez 
qu'à  toutes  les  époques,  tragiques  et  comiques  se  sont 
montrés  généralement  plus  soucieux  d'être  applaudis  du 
spectateur  que  de  lui  donner,  même  indirectement,  des 
leçons  de  vertu  qu'il  ne  leur  demandait  pas.  Pourvu 
qu'en  somme  le  public  se  pressât  aux  représentations  et 
battit  des  mains,  n'avaient-ils  pas  atteint  leur  but?  Mais 
la  philosophie  ni  la  religion  n'ont  été  d'avis  que  le  succès 
justifiât  l'institution,  et  de  bonne  heure  elles  condam- 
nèrent le  théâtre. 

Platon  commença  l'attaque.  «  Nous  ne  recevons,  dit-il, 
dans  notre  République,  ni  la  tragédie  ni  la  com^e.  » 
Admirateur  des  institutions  de  Lycurgue  et  du  caractère 
Spartiate,  précurseur  du  Stoïcisme,  il  censurait  les  la- 
mentations des  théâtres,  propres  à  exciter  et  à  flatter  en 
nous  cette  partie  faible  et  plaintive  qui  s'épanche  en  gé- 
missements et  en  pleurs,  et  cette  autre  partie  pÂus  em- 
portée de  notre  âme,  où  régnent  l'indignation  et  la  co- 
lère, comme  s'il  y  eût  rien  dans  les  choses  humaines  ouf 
valût  la  peine  qu'on  s'en  irritât  et  qu'on  en  versât  des 
larmes.  Il  n'approuvait  pas  davantage  cette  pente  aveugle 
et  impétueuse  à  se  laisser  emporter  par  l'envie  de  rire, 
aussi  capable  que  les  représentations  tragiques  d'entre- 
tenir et  d'augmenter  en  nous  ce  qu'il  y  a  de  déraison- 
nable. Par  un  autre  principe  encore  plus  universel ,  l'aus- 
tère législateur,  jugeant  que  tous  les  arts  qui  n'ont  pour 
objet  que  le  plaisir  sont  dangereux  à  la  vie  humaine, 
parce  qu'ils  vont  le  puisant  indifféremment  aux  sources 
bonnes  et  mauvaises,  étmt  amené  à  exiler  à  la  fois  de  sa 
cité  idéale  tous  les  poètes  comiques,  tragiques,  épiques, 
Homère  lui-même.  Celui-ci,  d'ailleurs,  était  en  gr^de 
partie  le  créateur  de  la  mythologie  grecque;  n*était-il 
donc  pas  pernicieux  de  nourrir  de  fables  et  de  fictions 
l'esprit  des  jeunes  gens? —  Plus  positif  et  plus  pratique, 
mis  en  garde  aussi  contre  un  esprit  de  système  trop  ex- 
clusif et  trop  absolu  par  ce  sentiment  de  la  réalité  qui, 
chez  lui ,  contraste  si  fort  avec  le  penchant  de  son  maître 
pour  l'utopie,  Aristote  rédigea  les  règles  de  l'art  qu'avait 
réprouvé  Platon.  Et  pourtant,  il  ne  croyait  point  qu'on 
pût  admettre  la  jeunesse  à  la  représentation  dee  comé- 
dies, ni  même  des  tragédies  :  il  craignait  les  impressions 
que  ces  spectacles  produiraient  sur  des  âmes  tendres  et 
novices,  trop  facilement  accessibles  â  l'émotion. 

A  Rome,  Cicéron,  qui,  comme  ami  des  lettres,  goûtait 
les  œuvres  des  vieux  poètes  latins  au  point  de  les  savoir 
par  coeur,  raillait,  comme  philosophe,  la  comédie,  qui 
mettait  au  nombre  des  dieux  l'Amour,  l'auteur  des  ricei 
et  de  la  licence,  et  qui  affichait  néanmoins  la  prétention 
d'être  une  école  de  morale.  Sénèque,  plus  sévâe,  renoo- 
felle,  sous  l'inspiration  de  la  doctrine  steSdemie,  les 


THÉ 


1715 


THÊ 


eusatiooB  de  Platon,  et  enseigne  à  son  ami  Lucilius  qu'il 
n'y  a  rien  de  plot  nuisible  à  Tàme  que  la  fréquentation 
du  thé&tre.  Il  est  vrai  qull  entend  surtout  parler  du 
Cirque  et  des  spectacles  de  gladiateurs.  «  C'est  là,  lui 
dit-il ,  que  le  plaisir  introduit  aisément  le  vice  dans  le 
cœur  des  hommes;  on  en  sort  toujours  plus  cupide,  plus 
ambitieux,  plus  porté  au  luxe  et  au  plaisir.  »  Il  n*est  pas 
étonnant,  d'ailleurs,  que  la  môme  philosophie  qui  con- 
seille d*éviter  le  monde  et  les  nombreuses  compagnies 
recommande  de  fuir  le  théâtre,  qui  n'en  est  souvent  que 
la  séduisante  et  trompeuse  image. 

Le  langage  des  philosophes  fait  pressentir  celui  des 
chrétiens.  Les  Pères  de  TÉglise  furent,  en  effet ,  d*accord 
pour  condamner  les  spectacles,  et  ils  devaient  Tôtre. 
D'abord,  le  thé&tre  était  une  institution  païenne,  et  il 
tenait  par  d'innombrables  liens  à  la  mythologie,  contre 
laquelle  combattaient  unanimement  tous  les  grands  re- 
présentants du  christianisme.  D'autre  part ,  soutiens  et 
propagateurs  d'une  doctrine  plus  rigide  encore  que  le 
Stoïcisme,  laquelle  prétendait  apporter  au  monde  le  culte 
de  la  chasteté  et  tourner  vers  le  ciel  toutes  les  pensées 
des  hommes,  les  reprâientations  théâtrales  avaient  na- 
turellement à  leurs  yeux  le  double  tort  de  porter  atteinte 
à  la  pureté  des  mœurs,  et  de  préoccuper  de  plaisirs  ter- 
restres et  mondains  des  &mes  qui  devaient  chercher 
toutes  leurs  Joies  dans  le  service  de  J^us-Christ  et  les 
espérances  de  l'autre  vie.  —  Leurs  arguments  divers  ont 
été  reproduits  dans  la  polémique  qui  s'engagea  au  xvii*  et 
au  XVIII*  siècle  sur  la  môme  matière.  Le  débat  s'ouvrit  en 
1665  entre  Desmarets  de  Saint-Sorlin  et  Nicole,  qui  re- 
présentait Port-Royal  ;  mais  ce  qui  fut  plus  intéressant 
peut-ôtre  que  la  lutte,  ce  fut  le  rôle  inattendu  qu'y  Joua 
Racine.  Desmarets,  l'auteur  infortuné  de  la  comédie  des 
Visionnaires  et  du  poème  épique  de  Clovis,  las  d'ôtre 
poète,  dit  Louis  Racine  dans  ses  Mémoires  sur  la  vie  de 
son  père,  voulut  ôtre  prophète,  et  prétendit  avoir  la  clef 
de  VApocalypse,  Il  eut  l'honneur  d'être  foudroyé  par 
Nicole.  Celui-ci  composa  contre  ses  prétentions  des  Lettres 
imitées  des  ProvincicUeSj  et  qu'il  intitula  Visionnaires^ 
parce  qu'il  les  écrivait  contre  l'auteur  de  la  comédie  de 
ce  nom ,  devenu  lui-môme  un  visionnaire  d'un  nouveau 
genre.  Dans  la  première  de  ces  Lettres,  il  faisait  remar- 
quer que  ce  prétendu  illuminé  ne  s'était  d'abord  fait 
connaître  dans  le  monde  que  par  des  romans  et  des  co- 
médies; puis  il  ajoutait  :  «  De  telles  qualités,  qui  ne  sont 
pas  fort  honorables  au  Jugement  des  honnêtes  gens,  sont 
horribles,  considérées  suivant  les  principes  de  la  religion 
chrétienne.  Un  faiseur  de  romans  et  un  poôte  de  thé&tre 
est  un  empoisonneur  public ,  non  des  corps ,  mais  des 
Ames.  Il  se  doit  regarder  comme  coupable  d'une  infinité 
d'homicides  spirituels,  ou  qu'il  a  causés  en  effet,  ou  qu'il 
a  pu  causer.  »  C'est  ce  mot  qui  mit  à  Racine  la  plume  à 
la  main.  Formellement  invité,  depuis  ses  liaisons  avec 
les  comédiens,  &  ne  plus  se  présenter  à  Port-Royal ,  et 
cela  par  sa  propre  tante,  qui  faisait  partie  du  couvent, 
il  se  persuada  aisément  que  la  sortie  de  son  ancien  maître 
contre  les  poètes  le  regardait,  se  froissa,  et,  se  lais- 
sant entraîner  inconsidérément  au  premier  mouvement 
de  son  dépit,  répliqua  par  une  Lettre  fort  vive,  spiri- 
tuelle et  mordante,  mais  dans  laquelle  il  tournait  plutôt 
les  Jansénistes  en  ridicule  qu'il  ne  défendait  le  thé&tre. 
Nicole  ne  répondit  pas,  et  fit  bien  :  le  silence,  vis-à-vis 
d'un  élève  oublieux  de  ses  devoirs,  était  de  la  dignité. 
Mais  deux  Jansénistes,  Dubois  et  Barbier  d'Aucourt, 
ripostèrent,  non  sans  succès.  Racine  alors  acceptant 
le  défi,  et  s'enivrant  pour  ainsi  dire  de  son  esprit,  com- 
pose une  seconde  Lettre,  plus  piquante,  plus  amère, 
plus  sarcastique  encore  que  la  première,  et  court  la  lire 
&  Boileau.  Celui-ci  l'écoute  avec  calme,  puis,  pratiquant 
dès  lors  la  sincérité  courageuse  qu'il  recommande,  dans 
son  Art  poétique,  au  critique  honnête  homme,  répond 
d'un  grand  sang-froid  à  son  ami  :  «  Voilà  un  ouvrage  qui 
fera  honneur  à  votre  esprit,  mais  qui  n'en  fera  pas  à  votre 
cœur.  Vous  attaquez,  après  tout,  des  hommes  fort  esti- 
més, et  c(ui  ont  été  vos  maîtres.  »  Ce  mot  fit  une  révolu- 
tion subite  dans  les  dispositions  de  Racine;  ce  fut  comme 
une  lumière  soudaine  qui  lui  dessilla  les  yeux;  Jusque-là 
son  amour-propre  avait  seul  parlé,  le  naturel  mainte- 
nant reprenait  le  dessus  :  Racine  sentit  sa  faute  et  la  re- 
connut noblement.  |.'esprit  est  souvent  la  dupe  du  cœur, 
a-t-on  dit  :  c'est  le  contraire  qui  fut  vrai  dans  cette  cir- 
constance. La  lutte  finit  avec  cet  incident,  qui,  d'ailleurs, 
avait  été  une  querelle  personnelle  plutôt  qu'un  débat 

général  et  régulier  entre  les  défenseurs  et  les  adversaires 
es  spectacles.  Il  n'en  fut  plus  de  môme  en  1694,  lorsque 
Bossuet  descendit  dans  la  hce.  Nicole,  il  est  vrai,  dès  1675, 


et  le  prince  de  Conti,  qui,  de  protecteur  avoué  de  Mo* 
liëre,  était  devenu  dévot  sincère  et  Janséniste,  avaient 
d'avance  publié  l'un  et  l'autre,  sur  la  comédie,  des  consi- 
dérations qui  nous  expliquent  de  reste  le  nom  dont  Port- 
Royal  flétrissait  les  poètes  dramatiques;  mais  Bossuet 
allait  reprendre  pour  son  propre  compte  leurs  arguments 
et  les  animer  de  toute  la  force  de  son  éloquence. 

On  venait  de  publier  le  Thé&tre  de  Boursault,  et, 
comme  préface,  on  avait  reproduit  une  lettre  qu'on 
attribuait  à  un  Théatin ,  le  P.  Caffaro,  et  où  l'auteur  s'ef- 
forçait de  prouver  qu'on  pouvait  très-innocemment  com- 
poser, lire,  et  voir  représenter  des  comédies.  L'arche- 
vêque de  Paris  condamne  publiquement  la  Dissertation , 
et  retire  au  Théatin  tous  ses  pouvoirs,  tandis  que  Bossuet 
lui  écrit  une  lettre  de  reproches  et  de  réfutation.  Le 
P.  Caflàro  se  disculpa,  et,  selon  l'expression  de  Bossuet, 
satisfit  au  public  par  un  désaveu  aussi  humble  que  so- 
lennel ;  mais  le  grand  prélat  controversiste  et  militant  du 
xvu*  siècle,  désirant  prémunir  les  faibles  contre  les  prin* 
cipes  qu'on  cherchait  à  insinuer  dans  leur  esprit,  publia 
son  'ouvrage  intitulé  Maximes  et  Réflexions  sur  ta  Co^ 
médiê,  exposé  complet  des  opinions  de  l'Église  sur  les 
spectacles.  On  avait  dit,  dès  le  début  de  la  Lettre,  que 
les  comédies  du  Jour  étaient  si  épurées,  qu'il  n'y  avait 
rien  que  l'oreille  la  plus  chaste  n'y  pût  entendre.  Blessé 
de  cette  assertion  aventureuse  comme  d'un  sacrilège, 
Bossuet  répond  sans  mesurer  son  irritation  :  «  Il  fauchti 
donc  que  nous  passions  pour  honnêtes  les  impiétés  et  les 
infamies  dont  sont  pleines  les  comédies  de  Molière... 
Songez  si  vous  osez  soutenir  à  la  face  du  ciel  des  pièces 
où  la  vertu  et  la  piété  sont  toujours  ridicules,  la  corrup- 
tion toujours  excusée  et  toujours  plaisante,  et  la  pudeur 
toujours  offensée,  ou  toujours  en  crainte  d'être  violée 
par  les  derniers  attentats.  Je  veux  dire  par  les  expressions 
les  plus  impudentes,  à  qui  Ton  ne  donne  que  les  enve- 
loppes les  plus  minces.  »  —  L'inexorable  théologien  s'en 
prend  ensuite  à  l'Opéra:  à  Quinault,  qui  a  réduit  en 
maximes  la  corruption,  avec  toutes  ses  invitations  à  Jouir 
du  beau  temps  de  la  Jeunesse;  puis  à  Lulli ,  qui  ne  sert 
qu'à  insinuer  les  passions  les  plus  décevantes,  en  les 
rendant  plus  agréables  et  plus  vives  encore  par  le  charme 
de  la  musique.  Puis  enfin,  à  propos  des  tragédies  de 
Corneille  et  de  Racine  qu'il  enveloppe  dans  le  même 
anathème,  s'élevant  à  des  considérations  plus  générales, 
il  affirme  et  démontre  que  la  représentation  des  passions 
agréables  a  pour  objet  de  les  exciter;  que  le  succès  de 
l'auteur  est  à  ce  prix  ;  qu'il  manque  son  but  si  les  spec- 
tateurs ne  sont  pas,  comme  ses  héros,  épris  des  belles 
{personnes,  ne  les  servent  pas  comme  des  divinités,  et  ne 
eur  sacriffent  pas  tout,  sauf  la  gloire;  et  qu'ainsi  ces 
peintures  portent  naturellement  au  péché.  En  vain  pré- 
tendrait-on que  le  thé&tre  purifie  l'amour  en  le  faisant 
aboutir  au  mariage  :  cela  fût-il  vrai ,  répond-il ,  selon  ces 
principes,  on  devrait  au  moins  bannir  du  milieu  des 
chrétiens  les  prostitutions  qu'on  voit  toutes  crues  dans 
les  pièces  de  Molière,  où  sont  étalés  au  grand  Jour  les 
avantages  d'une  inftlme  tolérance  dans  les  maris,  où  les 
femmes  sont  sollicitées  à  de  honteuses  vençeances  contre 
leurs  Jaloux.  Mais  une  telle  excuse  est  vaine,  et  ne  dé- 
fendra pas  plus  des  vengeances  de  Dieu  ceux  qui  s'en 
autorisent,  que  l'auteur  du  Malade  imaginaire  ou  du  Mè- 
decin  maigri  lui.  Car  on  aime  les  personnages,  au  thé&tre, 
non  pas  comme  époux,  mais  comme  amants,  et  c'est 
amants  qu'on  veut  être,  sans  songer  à  ce  qu'on  pourra 
devenir  après.  La  confession ,  disait  la  Dissertation ,  n'a 
pas  encore  manifesté  les  dangers  des  spectacles  :  comme 
si,  réplique  Bossuet,  l'on  ne  pouvait  pas  être  malade 
sans  s'en  apercevoir,  et  que  les  maladies  dont  le  malade 
n'a  pas  conscience  n'étaient  pas  les  plus  dangereuses! 
Et  compte-t-on  pour  rien  les  crimes  des  chanteuses,  des 
comédiennes  et  de  leurs  amants  !  «  Quelle  mère,  je  ne 
dis  pas  chrétienne,  mais  tant  soit  peu  honnête,  n'aime- 
rait pas  mieux  voir  sa  fille  dans  le  tombeau  que  sur  le 
thé&tre?  »  N'y  a-t^-il  pas,  d'ailleurs,  des  choses  qui, 
sans  avoir  des  effets  marqués,  mettent  dans  les  &mes  de 
secrètes  dispositions  très-mauvaises?  «  Qui  saurait  con- 
naître ce  que  c'est  en  l'homme  qu'un  certain  fonds  de 
Joie  sensuelle  et  je  ne  sais  quelle  disposition  inquiète  et 
vague  au  plaisir  des  sens,  qui  ne  tend  à  rien  et  tend  à  tout, 
connaîtrait  la  source  secrète  des  plus  grands  péchés,  a 
Que  si  vous  alléguez  enfin  l'indulgence  des  lois  civiles, 
le  prélat  vous  dira  que  les  lois  de  la  cité  sainte  et  celles 
du  monde  sont  différentes,  et  que  tout  ce  qui  se  permet 
au  dtoven  ne  se  permet  pas  au  chrétien.  —  Après 
avoir  ainsi  montré  que  les  spectacles  sont  mauvais  en 
eux-mêmes,  Bossuet  discute  les  témoignages  que  Thit- 


TIIÊ 


1716 


Tllfi 


toîrc  du  christianismo  fournit  contre  lo  tliéÀtre,  et  dé~ 
montre  qu*à  l'exemple  des  philosophes  paiens,  les  Pères 
de  l'Église  Vont  prosent ,  et  que  les  arguments  qu'ils  ont 
exposés  ne  s'appliquent  pas  moins  aux  laïques  qu'aux 
membres  du  clergé.  On  avait  mis  en  avant  S'  Thomas, 
Fun  des  grands  repr^ntants  de  la  Scolastique  :  Bossuct 
établit  qu'il  n'est  pas  certain  que  S'  Thomas  ait  parlé  de 
la  comédie;  qu'il  est  plutôt  certain  qu'il  n'en  a  pas  voulu 
parler;  qu'enfin  l'eûtril  approuvée  spéculativement,  la 
comédie  moderne  est  explicitement  condamnée  par  ses 
paroles.  Tout  au  plus  S^  Thomas  s'est-il  écarté  de  la  doc- 
trine primitive  au  sujet  des  divertissements,  en  montrant 
plus  d'indulgence  que  les  anciens  Pères  pour  toutes  lc<$ 
sortes  de  discours  qui  font  rire.  Rire  ne  convient  pas  aux 
disciples  de  Jésus-Christ,  qui  a  dit  qu'on  rendra  compte, 
au  Jour  du  jugement,  m^me  des  paroles  oiseuses.  Con- 
cluez donc  hardiment ,  si  vous  suivez  les  maximes  chré- 
tiennes, qu'il  faut  ranger  la  comédie  parmi  les  choses 
les  plus  pernicieuses  qui  se  puissent  concevoir.  Tel  était 
le  dernier  mot  de  Bossuet. 

Religieux  au  xvii"  siècle,  le  débat  redevint  philoso- 
phique au  xviii',  prenant  ainsi  chaque  fois  quelque  chose 
du  caractère  du  temps.  11  s'engagea,  en  1758,  entre 
J.-J.  Rousseau  et  d'Àlembert  inspiré  par  Voltaire.  Ce- 
lui-ci venait  de  s'établir  à  Ferney  :  après  avoir  fait  jouer 
dans  son  ch&teau,  sur  un  théâtre  privé,  plusieurs  de  ses 
pièces,  il  eut  envie  d'un  ^Tai  parterre  et  d'applaudisse- 
ments publics,  à  la  place  de  ses  invités  intimes  et  de  leurs 
éloges  moins  bruyants  et  qu'il  pouvait  croire  quelque 
peu  intéressés.  Genève  était  près  de  Ferney  :  D'Alembert 
insère  dans  VEncyclopédie  un  article  sur  Genève,  et  con- 
seille aux  Genevois  d'avoir  un  théâtre.  Rousseau  lit  l'ar- 
ticle, et  répond  par  sa  Lettre  sur  les  spectacles,  qu'il 
repoussait  au  nom  de  la  famille  et  de  l'État,  comme 
Bossuet  l'avait  fait  au  nom  de  la  religion.  Son  œuvre  com- 
prend trois  parties  :  d'abord  il  justifie  les  pasteurs  gene- 
vois sur  certains  sentiments  que  D'Alembert  leur  attri- 
buait en  matière  de  religion  ;  puis  il  attaque  les  spec- 
tacles pris  en  eux-mêmes,  et  montre  enfin  que,  quand  la 
morale  les  pourrait  tolérer,  la  Constitution  de  Genève  ne 
lui  permettrait  pas  d'en  avoir.  De  ces  trois  points,  le  se- 
cond seul  nous  intéresse.  Parmi  les  arguments  de  Rous- 
seau contre  le  théàtra,  les  uns  sont  reproduits,  à  son  insu 
peut-être,  de  Bossuet,  les  autres  lui  appartiennent  en 
propre.  En  voici  le  résumé.  —  Un  spectacle  est  un  amu- 
sement; or  les  amusements  ne  sont  permis  qu'autant 
qu'ils  sont  nécessaires;  ils  sont  funestes,  s'ils  sont  inu- 
tiles. Celui  des  spectacles  est  inutile,  parce  qu'il  ne  dé- 
rive pas  de  la  nature  de  l'homme.  «  Un  père,  un  fils,  un 
mari,  un  citoyen  ont  des  devoirs  si  chers  à  remplir,  qu'ils 
ne  leur  laissent  rien  à  dérober  à  l'ennui.  »  —  Il  est  fii- 
cheux  pour  les  spectacles  que  leur  espèce  soit  détermi- 
née, non  par  leur  utilité,  mais  par  le  plaisir  qu'y  goûte 
le  spectateur.  Un  peuple  féroce  et  bouillant  veut  du  san^, 
des  combats,  des  passions  atroces  ;  un  peuple  voluptueux 
veut  de  la  musique  et  des  danses;  tous  deux,  des  spec- 
tacles qui  favorisent  leurs  penchants,  au  lieu  qu'il  en 
faudrait  qui  les  modérassent.  Premier  inconvénient.  — 
La  scène  en  général  peint  les  passions  humaines,  mais  en 
les  flattant;  sans  quoi  les  spectateurs  se  rebuteraient,  et 
ne  voudraient  plus  se  voir  sous  un  aspect  qui  les  fît  mé- 

f>rJscr  d'eux-mêmes.  Second  inconvénient.  —  L'émotion, 
c  trouble  et  l'attendrissement  qu'on  emporte  du  spectacle 
n'annoncent  pas  une  disposition  bien  prochaine  &  sur- 
monter et  régler  ses  passions.  L'image  des  peines  qui 
naissent  des  passions  n'efface  pas  celle  des  transports  de 
plaisir  et  de  joie  qu'on  en  voit  aussi  naître.  Ici  Rousseau 
parle  comme  Bossuet  et  Nicole.  —  Le  théâtre,  dit-on , 
nien  dirigé,  rend  la  vertu  aimable  et  le  vice  odieux.  L'une 
était  aimable  et  l'autre  odieux  avant  qu'il  y  eût  des  spec- 
tacles. Ajoutez  qu'il  n'est  pas  rare  de  haïr  les  vices  re- 
présentés beaucoup  plus  avant  la  représentation  qu'après. 
Conclusion  :  le  théâtre  est  au  moins  inutile,  sinon  per- 
nicieux. —  Vous  mettez  en  avant  l'admiration  que  la 
tragédie  produit  dans  les  âmes.  L'effet  de  cette  admira- 
tion est  de  porter  l'homme  qui  l'éprouve  à  s'applaudir  de 
ses  nobles  instincts  ;  précieux  résultat ,  en  vérité  !  Tout 
le  monde  saisit  ici  le  paradoxe.  —  Le  monde  du  théâtre 
tragique  est  si  différent  du  nôtre,  que  nous  n'y  voyons 
plus  rien  qui  nous  convienne  :  le  moyen,  après  cela,  d'en 
faire  sortir  une  leçon?  Les  mœurs  de  la  comédie  se  rap- 
prochent davantage  des  nôtres;  mais  le  plaisir  du  co- 
mique étant  fondé  sur  un  vice  du  cœur  humain,  il  s'en- 
suit que  plus  la  comédie  est  agréable  et  parfaite,  plus  son 
effet  est  funeste  aux  mœurs.  Et  à  ce  propos,  Rousseau , 
prenant  à  partie  Molière,  dit  que  son  théâtre  est  une  école 


de  vices  et  de  mauvaises  mœurs,  plus  dangereuse  qtif 
les  livres  mômes  où  l'on  fait  profession  de  les  enseigner. 
Regnard  est  encore  beaucoup  plus  malmené.  —  L'amour 
fait  le  fonds  des  pièces  françiuses  :  elles  ont  donc  pour 
effet  de  donner  aux  femmes  l'ascendant  sur  les  hommes, 
aux  jeunes  gens  le  pas  sur  les  vieillards;  double  grief, 
dont  le  premier  est  déjà  formulé  daac-  Bossuet.  —  Bos- 
suet avait  signalé  tous  les  dançer&  de  la  peinture  de 
l'amour;  Rousseau  y  revient  et  insiste.  11  revient  aass 
sur  les  acteurs  et  les  actrices.  L'art  du  comédien,  dit-îK 
est  Tart  de  se  contrefaire,  de  revêtir  un  autre  caractère 
que  le  sien,  d'oublier  sa  propre  place  à  force  de  prendre 
celle  d'autrui.  C'est  un  métier  par  lequel  on  se  donne  en 
représentation  pour  de  l'argent,  on  se  soumet  aux  sifilett 
pour  de  l'argent.  Ce  trafic  a  déjà  je  ne  sais  quoi  de  servile 
et  de  bas;  pourtant  il  y  a  quelque  chose  de  pis  encore,  le 
désordre  des  actrices,  désordre  inévitable  et  qui  entraîne 
inévitablement  celui  des  acteurs. 

Tels  sont  les  principaux  arguments  de  la  philoso- 
phie et  de  la  religion  contre  le  théâtre.  Que  conclure? 
D'abord,  on  éprouve  une  répugnance  instinctive  à  pro- 
scrire une  des  formes  les  plus  belles  et  les  plus  élevées 
de  l'inspiration  poétique.  En  niant,  au  nom  de  la  mo- 
rale, les  droits  de  la  poésie  dramatique,  on  tend  à  com- 
promettre ceux  de  l'ode  et  de  l'épopée  :  si  le  théâtre  est 
absolument  condamnable,  en  ce  qu'il  peint  d'une  manière 
séduisante  les  passions  humaines,  il  faudrait  condam- 
ner aussi  toutes  les  œuvres  de  l'imagination ,  dans  le» 
Lettres  et  dans  les  Arts,  puisqu'elles  offrent  ou  peuvent 
offrir  les  mêmes  peintures.  En  ce  qui  regarde  la  tragé- 
die, il  nous  semble  que  la  représentation  des  passions, 
même  la  plus  forte  et  la  plus  vive,  cesse  d'être  dange- 
reuse quand  elle  a  pour  résultat  d'élever  l'&me  par  le 
spectacle  du  grand  et  du  beau ,  ou  de  lui  inspirer,  par 
la  vérité  même  de  la  peinture,  l'horreur  et  l'effroi  des 
passions  criminelles  et  des  vices.  Que  Corneille  et  Racine 
aient  produit  une  seule  fois  cette  impression  (et,  d'an 
accord  unanime,  ils  y  sont  plus  d'une  fois  parvenus),  la 
tragédie  est  justifiée.  Ce  n'est  pas  sa  faute  ai  tous  les 
poètes  dans  toutes  leurs  œuvres  ne  lui  donnent  pas  ce 
caractère.  Pour  la  comédie,  on  peut  dire,  au  point  de 
vue  des  gens  du  monde,  que,  malgré  des  abus  certains, 
le  danger  est  moins  grand  qu'il  ne  le  paraît  à  des  esprits 
austères.  Nous  ne  saurions  convenir  que  le  poète  comique 
prêche  une  mauvaise  morale  et  préconise  des  exemples 
funestes,  parce  qu'en  effet  il  ne  prêche  ni  ne  préconise 
rien;  il  peint  les  vices  sans  les  proposer  pour  modèles;  il 
en  fait  comme  un  miroir  qu'il  met  devant  les  yeux  des 
vicieux,  ainsi  que  <Ies  honnêtes  gens,  et  on  ne  voit  guère 
que  la  corruption  soit  souvent  sortie  de  ces  tableaux. 
Pourquoi?  Parce  que  le  monde  ne  vient  chercher  au 
théâtre  ni  des  leçons,  ni  des  modèles,  pas  plus  en  mal 
qu'en  bien,  mais  une  pure  distraction  et  des  émotions  de 
quelques  instants  :  au  sortir  de  là,  nul  ne  prend  au  siv 
rieux  les  fictions  qu'il  vient  de  voir,  pas  même  ceux  qui 
en  ont  été  les  plus  touchés.  Voilà  2,300  ans  (en  ne  par- 
tant que  des  Grecs)  qu'il  y  a  un  théâtre  public,  et  il  se- 
rait assez  diflScile  de  prouver  que  le  monde  a  été  en 
empirant.  Descendons  jusqu'aux  temps  modernes  :  à 
l'origine  de  notre  théâtre,  à  l'époque  des  Mystères,  où 
les  drames  n'étaient  que  des  représentations  du  Nouveau 
Testament,  voit-on  que  les  mœurs  fussent  meilleures 
qu'aujourd'hui?  Cela  est  plus  que  douteux.  La  préten- 
tion des  partisans  outrés  du  théâtre,  d'y  voir  une  sorte 
d'école  philosophique,  n'est  pas  très-soutenable  non  plus; 
nous  leur  répondrons  par  cette  ingénieuse  observation  de 
M.  Saint-Marc  Girardin  :  «  Nous  ne  croyons  pas  que  le 
théâtre  soit,  de  tous  les  genres  de  littérature^  le  plus  dé- 
pourvu de  morale.  Image  de  la  vie  humaine,  le  théâtre 
est  moral  comme  rexpërience;  et  ajoutons,  hélas!  pour 
ne  rien  déguiser  de  son  inefficacité,  moral  comme  Texpé- 
ricnce  d'autrui,  qui  touche  et  C[ui  corrige  peu.  »  —  Main- 
tenant, pour  les  personnes  c[ui  veulent  se  placer  au  point 
de  vue  exclusivement  chrétien,  il  leur  est  difficile  de  ne 
pas  prendre  pour  règle  le  mot  de  Bossuet  à  Louis  XIV, 
qui  le  consultait  sur  ce  sujet  :  «  Sire,  il  y  a  de  grands 
exemples  pour,  et  des  raisons  invincibles  contre.  »  A.  H. 

THÉÂTRE  FRANÇAIS.  F.  notre  Oicttotmoirtf  de  Biogro' 
phie  et  ^Histoire, 

THÉBAIDB  (La),  pofime  laUn  de  Stace.  Cest  une  épo- 
pée en  12  ishants,  et  en  vers  hexamètres,  dont  le  sujet 
est  la  guerre  de  Poljmice  contre  Étéocle,  sijet  atroce  où 
tout  est  sang  et  carnage.  Il  eut  à  Rome  un  grand  succès, 
qu'il  dut  à  la  sagesse  du  plan  et  à  Télénifcion  des  pensées, 
bien  que  ce  ne  soit  guère  qu'une  œuvre  d'érudition  mjthfh 
logique.  Stace  s'est  vraisemblablement  inspiré  de  la  Thi» 


TnÈ 


1717 


THÈ 


hàide  d'Antimaqae,  aujourd'hui  perdue.  La  ThébaXde  a 
été  traduite  par  Achaintre  dans  la  Bibliothèque  latine^ 
française  de  Panckoucke,  Paris,  48311-32, 2  vol.  in-8». 

THÈBES  (Ruines  de),  en  Egypte.  Ces  ruines,  dont  la 
me  excita  dans  toute  Tarmée  française,  en  1198,  une  ex- 
plosion d'enthousiasme,  couvrent  les  deux  rives  du  Nil, 
et  sont  répandues  au  milieu  de  villages  arabes.  Sur  la 
rive  occidentale  du  fleuve  se  trouvent  les  localités  de' 
Koumah  ou  Gowttah,  et  de  Médinet-Abou  ;  sur  la  rive 
orientale,  Ijiuqsor  et  Karnac. 

Le  PcUais  de  Koumah,  appelé  Ménephthéum,  du  nom 
du  roi  Ménephtha  l***,  son  fondateur,  appartient  aux 
temps  pharaoniques.  Par  la  disposition  de  son  plan ,  il 
annonce  Thabitation  d*un  homme,  et,  par  ses  décora- 
tions, celle  d'une  divinité.  On  y  arrive  par  un  pylône  en 
partie  détruit;  une  allée  de  sphinx,  difficile  à  reconnaître 
aujourd'hui  au  milieu  de  bouquets  de  palmiers  et  de  ma- 
sures moderncsf  conduit  à  un  portique  qui  a  plus  de 
50  met.  de  long,  30  de  hauteur,  et  que  soutiennent  10  co- 
lonnes, dont  le  fût  est  un  faisceau  de  tiges  de  lotus,  avec 
chapiteau  en  boutons  de  cette  même  plante  tronqués 
pour  recevoir  le  dé.  Trois  portes  pratiquées  sous  ce  ves- 
tibule donnent  accès  dans  l'intérieur  de  l'édifice.  La  salle 
du  milieu  a  16  met.  de  profondeur  sur  11  de  largeur,  et  le 
plafond  en  est  soutenu  par  6  colonnes  semblables  à  celles 
du  portique  ;  deux  longues  inscriptions  servent  d'enca- 
drement aux  vautours  ailés  qui  décorent  ce  plafond,  et 
les  parois  des  murs  sont  couvertes  de  bas-reliefs.  C'était 
le  manôskh,  la  salle  d'honneur,  le  lieu  où  se  tenaient  les 
as<iemblées  religieuses  et  polliiques,  où  siégeaient  les 
tribunaux.  A  droite  et  à  gauche  oe  cette  salle  sont  trois 
petites  chambres,  avec  une  salle  latérale  couverte  égale- 
ment de  bas-reliefs;  à  l'extrémité,  s'ouvrent  cinq  autres 
chambres,  dont  l'une,  celle  du  milieu,  conduit  à  une 
nouvelle  salle  soutenue  par  4  piliers  carrés.  Au  delà  était 
enfin  un  sanctuaire;  mais  la  dégradation  de  l'édifice  ne 
permet  plus  d'en  reconnaître  la  disposition.  —  Au  N.  du 
Ménephthéum,  on  trouve  des  hypogées  royaux,  dont  les 
parois  sont  revêtues  de  bas-reliefs  ou  de  peintures  :  les 
tombeaux  dits  de  Sésoslris  et  de  Memnon  sont  particu- 
lièrement remarquables  par  leur  étendue  et  leur  orne- 
mentation. 

En  remontant  le  Nil  à  partir  de  Koumah,  on  arrive  au 
village  de  Médmetr-Abou,  Là  s'élèvent  les  restes  du  Hha- 
messéum ,  palais  de  Sésostris  ou  Rbamsès  II,  connu  dans 
beaucoup  de  relations  sous  la  dénomination  de  MemnO' 
nium,  et  qui  a,  dans  ses  inscriptions,  celle  diAménophionm 
IL  est  admis  que  l'édifice  décrit  par  Diodore  de  Sicile  sous 
le  nom  de  Tombeau  d'Osymandias  n^est  autre  que  le 
Rhamesséum ,  bien  que  les  proportions  de  ce  dernier  ne 
concordent  pas  entièrement  avec  les  données  de  Thisto- 
rien  grec.  Le  palais,  dans  son  ensemble,  se  composait 
d'une  entrée  monumentale,  d'une  vaste  cour  ornée  d'une 
double  ligne  de  colonnes  formant  galerie,  de  deux  grandes 
salles  successives  soutenues  par  de  nombreuses  colonnes, 
enfin  d'une  suite  d'appartements;  l'axe  de  toutes  ces 
constructions,  que  saccagea  vraisemblablement  Cambyse, 
avait  une  longueur  de  167  met.  environ.  Les  deux  py- 
Idnes  qui  formaient  la  façade,  sur  une  largeur  totale  de 
68  met.,  et  entre  lesquels  était  la  grande  entrée,  sont  en- 
core debout ,  mais  dégradés  ;  leurs  bas-reliefs  commen- 
çaient la  série  de  tableaux  historiques  qui  se  déployait 
sur  le  palais  tout  entier.  La  cour  était  presque  carrée 
(  5(î  met.  sur  52^  ;  ses  murs  de  clôture  sont  presque  en- 
tièrement détruits,  ainsi  que  les  galeries  soutenues  par 
la  double  ligne  de  colonnes.  Au  fond  de  la  cour  qui  fait 
face  aux  pylônes,  un  peu  vers  la  gauche,  gisent  les  dé- 
bris d'une  statue  colossale  de  Rbamsès  en  granit  rose  de 
Syène  ;  cette  statue  devait  avoir  plus  de  1 1  met.  de  hau- 
teur. La  salle  carrée  où  l'on  pénètre  en  quittant  la  cour 
a  52  met.  de  largeur  sur  43  de  profondeur  :  une  double 
rangée  de  colonnes,  à  droite  et  à  gauche,  y  formait  deux 
galeries;  le  côté  de  l'entrée  et  celui  du  fond  n'avaient 

3u'une  rangée  de  piliers  à  caryatides,  hauts  de0"S50,  et 
ont  plusieurs  existent  encore  ;  ce  qui  reste  des  murs  est 
couvert  de  bas-reliefs.  Trois  perrons,  dont  l'un ,  celui  du 
milieu ,  est  flanqué  de  deux  bustes  colossaux,  conduisent 
de  cette  première  salle  à  un  vestibule  garni  d'un  rang 
de  colonnes  dans  toute  sa  longueur  de  droite  à  gauche  ; 
de  là  on  pénètre  par  trois  portes,  répondant  aux  trois 
perrons,  dans  la  seconde  salle,  large  de  41  met.,  pro- 
fonde de  31  met.  Les  murs  latéraux  ont  péri.  On  comp- 
tait 48  colonnes,  disposées  sur  8  rangées  de  6  de  profon- 
deur ;  5  rangées  entières  sont  restées  debout,  et  portent 
encore  une  partie  des  plafonds,  qui  étaient  pemts  en 
bieu  et  semés  d'étoilus  dur;  le  plafond  du  ccutru  est 


plus  élevé  que  les  deux  plafonds  latéraux.  Des  chambres 
qui  formaient  le  fond  de  l'édifice,  il  ne  reste  plus  qu'une 
à  peu  près  entière;  le  plafond,  décoré  d'un  curieux  ta- 
bleau astronomique,  est  supporté  par  8  colonnes.  Quatn' 
colonnes  de  la  chambre  suivante  subsistent;  tout  le  rest-; 
est  détruit.  —  A  peu  de  distance  du  Rhamesséum  s/, 
trouve  un  vaste  emplacement  semé  èd  débris,  au  milieu 
desquels  on  distingue  les  fameux  Colosses  de  Memmm 
{V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire).  —  Médinet-Abou  présente  encore  d'autres 
monuments  intéressants.  Le  Petit  temple  des  Thoutmosis 
est  précédé  d'une  cour  rectangulaire  qui  a  25  met.  sur 
39,  et  que  des  murs  en  talus  ferment  sur  trois  côtés;  hi 
porte  d'entrée,  large  de  5  met.,  annonce,  par  les  inscrip- 
tions dont  ses  montants  sont  couverts,  que  ces  construc- 
tions appartiennent  au  temps  des  Antonins.  Le  fond  ùt 
la  cour  est  fermé  par  un  double  pylône,  en  avant  duquel 
s'étend  une  rangée  de  8  colonnes,  que  relient  des  murs 
d'entre-colon ncment.  On  pénètre  dans  une  seconde  cour, 
où  un  autre  pylône,  qui  date  du  vu*'  siècle  av.  J.-C,  ot 
qui  est  à  15  met.  du  précédent,  donne  accès  dans  une 
troisième  cour,  de  19  met.  de  long.  Celle-ci ,  dont  la  clô- 
ture est  une  addition  du  temps  des  Ptoléroées,  offre  de 
chaque  côté  une  rangée  de  9  colonnes.  On  arrive  enfin 
au  temple,  entouré  de  trois  côtés  par  une  galerie  de 
piliers  carrés,  et  du  quatrième  côté  par  un  massif  do 

6  petites  chambres.  A  30  met.  N.-O.  du  temple  sont  W*; 
restes  d'un  bassin  carré  revêtu  en  pierres  de  taille,  et  ce 
15  met.  de  côté,  ainsi  que  les  fragments  de  deux  colossrs 
en  granit.  Au  S.-O.,  un  mur  rattache  aujourd'hui  le  pc:  Il 
temple  au  Pavillon  de  Bliarnsès-Méiamoun.  Deux  tour:» 
rectangulaires  à  murs  inclinés  en  forment  l'entrée.  Des 
appartements  dont  il  se  composait,  quelques-uns  seule- 
ment subsistent  encore  :  ce  qu'ils  ofi'rent  de  plus  digne 
d'attention,  ce  sont  les  peintures  de  leurs  murailles.  La 
partie  supérieure  du  pavillon  se  termine  par  des  cré- 
neaux. Le  Grand  temple,  qui  date  aussi  de  Rhamsès- 
Méiamoun,  est  séparé  du  pavillon  ,  dans  la  direction  du 
N.-O.,  par  un  dromos  de  83  met.  d'étendue.  Deux  touro 
de  forme  pyramidale,  réunies  par  un  portail  intermé- 
diaire, forment  comme  un  seul  pylône  de  63  met.  dt) 
largeur  et  de  22  met.  de  hauteur.  Quand  on  a  franchi  ce 
portail  garni  de  bas-reliefs,  on  se  trouve  dans  une  cour 
de  34  met.  sur  42,  ayant  à  droite  une  galerie  formée  du 

7  piliers  à  caryatides,  à  gauche  8  grosses  colonnes  cir- 
culaires à  intervalles  inégaux.  Elle  est  encombrée  r!*; 
briques  qui  proviennent  de  constructions  modernes.  Un 
pylône  forme  le  fond  :  deux  portes,  qui  y  sont  pratiquées 
à  l'extrémité  des  deux  galeries,  s'ouvrent  sur  un  des  e-'^- 
caliers  qui  conduisent  à  sa  terrasse  supérieure,  garnie 
circulairement  de  cynoscéphales  assis.  La  porte  médialo 
de  ce  pylône  donne  accès  à  une  seconde  cour  de  38  met. 
sur  41,  qu'entourent  des  galeries  formées  à  TE.  et  à  l'O. 
par  8  piliers  à  caryatides,  au  S.  et  au  N.  par  5  colonnci 
massives,  peintes  et  ornées  de  figures  emblématiques  : 
les  plafonds  de  ces  galeries  sont  peints  en  bleu  et  semés 
d'étoiles,  et  les  parois  en  sont  couvertes  de  tableaux  reli- 
gieux et  historiques.  Au  delà  ce  ne  sont  plus  que  des  dé- 
combres. 

Le  Temple  de  Louqsor^  œuvre  d'Aménophis  III  et  do 
Rbamsès  II,  était  précédé  d'un  dromos,  que  recouvre 
aujourd'hui  un  monticule  de  décombres  et  de  sable.  A  lu 
partie  antérieure  des  constructions  sont  quatre  statues 
colossales ,  taillées  dans  un  seul  bloc  de  granit  rouge  de 
Syène,  mais  enterrées  maintenant  aux  trois  quarts  ;  de  \ 
deux  obélisques  monolithes  qui  les  accompagnaient,  l'un, 
haut  de  23">,57,  a  été  transporté  à  Paris  en  1836,  et 
l'autre  mesure  25'",6.  En  arrière  s'élèvent  deux  massifs 
pyramidaux,  hauts  de  23  met.,  distants  l'un  de  l'autre 
de  30  met.,  et  réunis  par  un  portail  de  17  met.  de  hau- 
teur :  après  avoir  passé  ce  pylône,  on  est  dans  une  cour 
rectangulaire  de  59  met.  sur  52,  encombrée  par  une 
mosquée  et  des  masures  musulmanes,  et  entourée  d'un 
double  rang  de  colonnes  qui  formaient  une  galerie  con- 
tinue surmontée  de  terrasses.  Au  fond  de  cette  cour,  on 
franchit  un  second  pylône,  derrière  lequel  14  colonnes 
sur  deux  rangs,  enfouies  jusqu'aux  deux  tiers  de  leur 
hauteur,  qui  est  de  15  met.,  se  déploient  sur  une  lon- 
gueur de  53  met.;  elles  ont  3  met.  de  diamètre.  A 18  mè>. 
de  cette  colonnade,  il  y  a  une  seconde  cour,  farge  de 
52  met.,  profonde  de  48,  avec  deux  galeries  latérales  do 
12  colonnes  sur  deux  rangs,  et,  au  fond,  un  pronaos  ou 
portique  couvert,  soutenu  par  quatre  rangées  de  8  co- 
lonnes chacune.  Au  delà  de  ce  portique,  sans  doute  à  la 
place  d'appartements  antiques,  les  musulmans  ont  bftti 
de  surùidcs  cunsirucilctià.  Laliu  on  atteint  le  nuos,  gi&rca 


TUÊ 


1718 


THÊ 


Mlle  dans  Tintérieur  de  laquelle  est  ane  coastnictioii 
entièrement  isolée,  le  sanctuaire,  dont  le  plafond  est  co- 
lorié et  les  murs  couverts  de  scènes  religieuses.  Après  le 
naos,  on  se  trouve  dans  une  galerie  transversale  de 
22  met.  de  longueur  sur  9  met.  de  profondeur,  soutenue 
par  12  colonnes  sur  deux  rangs,  et  où  6  portes  donnaient 
accès  dans  une  suite  de  chambres,  dont  plusieurs  existent 
encore. 

Les  mines  de  Kamac,  les  plus  vastes  et  les  plus  belles 
de  toute  TÉgypte,  sont  au  N.-E.  de  Louqsor,  à  TE.  et  en 
face  de  Kournab.  On  y  arrive  par  une  avenue  de  2  kilom. 
de  longueur,  dite  Avenue  des  sphinxy  bordée  d*une  double 
rangée  de  600  sphinx  accroupis  sur  leur  piédestal  et  dont 
la  plupart  sont  mutilés;  ils  tiennent  entre  leurs  pattes 
antérieures  la  statue  du  roi  Aménophis  II.  Vient  ensuite 
V Avenue  des  béliers,  un  peu  plus  large  que  la  précédente, 
longue  de  300  met.  environ,  bordée  de  sphinx  à  tète  de 
bélier,  et  à  Textrémité  de  laquelle  est  une  porte  triom- 
phale construite  par  Ptolémée  Évergète.  Au  delà  de  cette 
porte,  une  nouvelle  avenue  de  sphinx,  dont  plusieurs 
subsistent  encore ,  conduit  aux  restes  d*un  temple  con- 
sacré au  dieu  Khons  par  Rhamsès  III,  et  d'un  autre 
temple  dédié  par  Évergète  II  à  la  déesse  Athor.  Au  N.  du 
temple  de  Rhamsès,  se  trouve  le  Grand  temple.  L'entrée, 
tournée  vers  TO.,  c-àr-d.  du  côté  du  Nil,  est  formée  par 
deux  massifs  de  44  met.  de  hauteur,  de  15  met.  d'épais- 
seur, entre  lesquels  est  une  porte  précédée  de  doux  sta- 
tues colossales  :  ce  portail  a  113  met.  de  développement. 
Quand  on  Ta  franchi,  on  arrive  dans  une  cour  longue  de 
84  met.,  large  de  103;  à  gauche,  18  colonnes  de  15  met. 
de  hauteur  forment  une  galerie  de  2'",60  de  largeur  ;  à 
droite,  la  colonnade  est  moins  régulière,  à  cause  d'un 
temple  d'Ammon  qui  est  encastré  dans  le  mur  d'enceinte 
et  qui  s'avance  de  près  de  12  met.  sur  la  cour;  an  centre 
de  la  cour  sont  les  restes  d'une  avenue  formée  par  deux 
files  de  6  colonnes  chacune,  et ,  dans  l'angle  N.-O.,  les 
restes  enfouis  d'un  petit  édifice  construit  par  Ménephtha  II. 
Au  fond  de  la  cour,  un  perron  de  7  marches,  aux  deux 
côtés  duquel  se  dressaient  deux  colosses  monolithes, 
donne  entrée  dans  un  vestibule  pratiqué  au  milieu  d'un 
énorme  pylône,  et  d'où  l'on  passe  dans  la  Salle  des  Co- 
lonnes. Cette  salle,  oui  a  102  met.  de  large  sur  53  de  pro- 
fondeur, présente  dans  son  axe  une  avenue  de  12  co- 
lonnes qui  ont  plus  de  10  met  de  circonférence  et  23  met. 
de  hauteur;  134  colonnes  presque  aussi  colossales  sont 
distribuées  en  quinconce  de  chaque  côté  de  l'avenue,  et 
supportent  le  plafond,  plus  bas  id  de  10  met.  Au  delà 
d'un  troisième  pylône,  à  peu  près  ruiné  comme  le  pré- 
cédent, deux  obélisques  monolithes,  dont  l'un  est  au- 
jourd'hui renversé,  s'élevaient  au  milieu  d'un  espace  dé- 
couvert, large  de  15  met.  Un  quatrième  pylône,  moins 
élevé  que  les  trois  premiers,  et  dont  un  vestibule  de 
13  met.  de  largeur  sur  4  de  profondeur  occupe  le  milieu, 
sépare  cet  espace  d'une  nouvelle  cour  intérieure,  large 
de  75  met.,  profonde  de  19,  et  au  pourtour  de  laquelle 
une  galerie  continue  était  formée  par  des  piliers  à  carya- 
tides. On  sort  de  cette  cour  par  un  vestibule  de  6  met. 
sur  12,  et,  au  delà  d'une  petite  enceinte  découverte,  on 
rencontre  enfin  le  sanctuaire»  Ce  n'est  plus  maintenant 
qu'un  amas  de  décombres ,  qu'on  appelle  les  Ajyparte- 
ments  de  granit,  Deirière  le  sanctuaire,  à  une  distance 
de  50  met,  est  le  Palais  de  Thoutmosis  III,  fort  délabré 
en  général,  mais  où  l'on  remartjue  la  Chambre  des  an- 
cêtres, importante  par  sa  décoration  intérieure.  An  reste, 
toutes  les  constructions  de  Kamac  sont  couvertes  de  bas- 
reliefs  très-intéressants.  Elles  étaient  enfermées  dans 
une  vaste  enceinte  en  briques  crues,  dont  quelques  par- 
ties sont  encore  reconnaissables,  et  au  delà  de  laquelle 
on  voit  les  ruines  d'un  petit  temple  construit  sous  Psam- 
métichus  et  Amasis,  celles  plus  considérables  d'un  Temple 
d^Aménophis  III,  les  restes  d'un  bassin  revêtu  de  pierre, 
une  suite  de  colosses  monolithes  formant  ce  qu'on  nomme 
les  Propylées  du  Sud,  etc. 

Outre  les  ouvrages  cités  à  notre  article  Égyphbn  (Art), 
on  peut  consulter  :  Norden,  Drawings  ofruins  at  Thebes, 
Londres,  1741,  in-4°  ;  Letronne,  Mémoire  sur  le  monu- 
ment dVsymandias ,  Paris,  1831,  in-4%  et  La  Statue 
vocale  de  Memnon,  1833,  in-4^  B. 

THÈBBS  (Le  Roman  de) ,  poème  où  est  retracée  l'histoire 
tragique  d'Étéocle  et  de  Polynice.  L'auteur,  Benoit  de 
Sainte-Maure,  peint  les  héros  grecs  avec  les  mœurs,  les 
costumes  et  les  sentiments  de  la  féodalité.  Ce  roman  du 
XIII*  siècle  forme,  avec  lee  romans  de  Troyes  et  d'Ênéas, 
un  des  plus  beaux  manuscrits  de  la  Bibliothèque  na- 
tionale de  Paris.  V,  V Histoire  littéraire  de  la  France^ 
t  XIX.  H.  D. 


THECA,  étui  à  renfermer  les  styles  à  écrire. 

THÉISME  (du  grec  théos.  Dieu  ) ,  croyance  à  l'existence 
de  Dieu.  Le  mot  s'oppose  à  Athéisme. 

THÈME  (du  grec  théma,  position),  tout  sujet  qu'on 
entreprend  de  tjraiter.  Le  texte  (  V,  ce  mot)  d'un  sermon 
peut  être  appelé  thème»  En  Grammaire,  on  donne  ce 
nom  :  1^  au  radical  primitif  d'où  un  verbe  a  été  tiré,  et 
'spécialement,  chez  les  Grecs,  au  présent  du  verbe,  parce 
que  c'est  le  premier  temps  que  l'on  pose  pour  en  tirer  les 
autres;  2®  aux  morceaux  que  les  écoliers  doivent  traduire 
de  leur  langue  naturelle  dans  une  autre  langue  qu'ils 
apprennent  En  Musique ,  thème  est  synonyme  de  sujet 
ou  de  motif.  Enfin,  thème  a  désigné  une  circonscription 
militaire  de  l'Empire  d'Orient,  r.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  ^Histoire. 

THKNSA ,  char.  F.  notre  IHc^onnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

THEOCRATIE  (du  grec  théos.  Dieu,  et  cratos,  pou- 
voir), gouvernement  où  Dieu  est  regardé  comme  l'unique 
souverain  et  où  les  lois  sont  des  ordres  émanés  de  lui. 
Les  prêtres  y  sont  les  représentants  du  souverain  invi- 
sible, qui  confère  aussi  à  d'autres  la  mission  de  parler  ei 
d'agir  en  son  nom  parmi  les  hommes.  Le  gouyemement 
des  Hébreux  était  une  véritable  théocratie.  Il  en  fut  de 
même  de  celui  de  l'Egypte  primitive,  et  de  celui  des  Incas 
au  Pérou.  La  théocratie  est  en  vigueur  dans  le  Tliibet, 
où  règne  le  Grand-Lama.  On  donne  quelquefois  le  nom 
de  Théocratie  au  gouvernement  des  papes,  tel  qu'il  était 
constitué  pendant  le  moyen  âge. 

THÉODICÉE  (du  grec  théos,  Dieu,  et  dikè,  justifica- 
tion). Ce  mot  fut  introduit  dans  la  philosophie  par 
Leibniz,  qui  l'employa  dans  un  ouvrage  ayant  pour  titre  : 
Essais  de  Théodtcée  sur  la  bonté  de  Dieu,  la  liberté  de 
Vhomme  et  l'origine  du  mal  :  il  se  proposait  de  repousser 
les  attaques  dirigées  contre  la  Providence,  les  objec- 
tions tirées  de  l'existence  du  mal  contre  la  bonté  divine, 
et  de  concilier  la  liberté  humaine  avec  la  sagesse  suprême 
qui  a  tout  prévu  et  tout  ordonné  d'avance.  Il  ne  faut  donc 
pas  confondre  la  théodicée  avec  la  théologie  rationnelle. 
dont  elle  n'est  qu'une  partie.  En  Allemagne,  les  questions 
qu'elle  embrasse  étaient  comprises  dans  la  Métaphysique: 
en  France^  elle  fut  désignée  dans  l'enseignement  comme 
une  partie  de  la  Philosophie,  qui  a  pour  objet  de  démon- 
trer l'existence  de  Dieu,  d'énumérer  ses  principaux  at- 
tributs, d'étudier  sa  sagesse  dans  le  plan  de  l'univers, 
afin  de  mieux  pénétrer  ses  desseins  sur  l'homme,  et 
d'apprendre  à  celui-ci ,  avec  sa  propre  destination ,  ses 
devoirs  envers  le  Créateur. — Avant  Leibniz,  les  questions 
dont  s'occupe  la  Théodicée  avaient  été  traitées  plus  ou 
moins  directement,  surtout  dans  Platon,  Cicéron,  Sénèque: 
on  peut  même  citer,  avant  eux,  le  Livre  de  Job.  Depuis 
la  Théodicée  de  Leibnitz,  on  a  écrit  sur  le  même  sujet, 
entre  autres  ouvrages  :  De  origine  mali,  de  W.  King; 
De  la  Providence,  par  G.  Sherlock;  la  Théodwée  ehre- 
t^enne  de  Mgr  Maret  Kant  a  laissé  un  petit  écrit  intitulé  : 
Du  mauvais  succès  de  tous  les  essais  philosophiques  en 
théodicée.  R. 

THÉODISQUE.  V.  THtonsQOB. 

THÉODORIC  (Cycle  de),  nom  que  l'on  donne  quel- 
quefois aux  poèmes  dont  "Théodoric,  roi  des  Ostrogoths, 
est  le  héros,  et  qui  sont  réunis  dans  le  HMmbuch 
iV.  ce  mot). 

THÊODOSIEN  (Code).  V.  notre  Dicti(mnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire. 

THÈ0D0S1ENNE  (Colonne).  V.  Colonnes  honcmrv- 
TALBS,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ His- 
toire. 

THÉonosTCNTVB  (Table  ou  Carte).  V.  Pecttiigeii,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

THÉOGONIE  (du  grec  théos,  Dieu,  et  gonos,  rare, 
génération  ) ,  tout  système  imaginé  par  les  païens  pour 
expliquer  l'origine  et  la  filiation  des  Dieux.  Chez  les  an- 
ciens Grecs,  Musée,  Orphée  et  quelques  autres  avaient 
composé  des  Théogonies  ;  elles  ont  péri.  Il  ne  nous  en  est 
parvenu  qu'une  seule,  sous  le  nom  d'Hésiode,  et  quelques 
critiques  l'ont  attribuée  à  un  certain  Cynéthus  de  Chio.  Ce 
n'est  pas  qu'Hésiode  ait  créé  la  mythologie  grecque,  ainsi 

Sue  le  croit  Hérodote  :  il  n'appartient  pas  à  un  seul  homme 
'imposer  ses  croyances  à  tout  un  peuple;  c'est  là' une 
œuvre  éminemment  populaire,  qui ,  ébauchée  par  fio- 
stinct  religieux  et  poétique  des  nations,  ne  peut  s'achever 
que  par  le  travail  de  plusieurs  siècles.  Mais  ce  que  peut 
faire  le  génie  d'un  homme,  c'est  de  rassembler  et  de  con- 
cilier ces  croyances  populaires  qui  jusque-là  étaient  in- 
certaines et  flottantes,  et  de  leur  donner  une  forme 
double.  Tel  a  été  le  travail  d'Uêsiodc  sur  la  vieille  ui}  tlio- 


THÉ 


1719 


THË 


logie  (tes  Hellènes;  après  avoir  recueilli  toutes  les  tradi-  \ 
lions  éparses,  il  les  a  constituées  en  un  corps  de  doctrine. 
L'idée  fondamentale  de  la  Théogonie  est  la  succession  des 
générations  dirines  représentant  symboliquement  les 
grandes  phases  de  la  formation  du  monde  dans  Tespace 
et  dans  le  temps  :  on  y  reconnaît  les  efforts  de  IMmagi- 
nation  populaire  pour  peindre  le  chaos  des  vieux  âges  et 
peupler  le  ride  de  ces  siècles  dont  toute  trace  avait  dis- 
paru. Ce  qui  semble  appartenir  au  siècle  d*Hésiode,  ce 
sont  quelques  mythes  semés  çà  et  là  à  travers  son  épopée 
divine;  par  exemple,  celui  de  Prométhée,  où  apparaît  la 
première  révolte  de  Tintelligence  humaine  contre  son 
Créateur,  qui  nMnspire  déjà  plus  cet  invincible  effroi  que 
l*homme  dut  éprouver  d*âbord  à  la  vue  de  la  Nature  ;  ou 
bien  celui  de  Pandore,  gracieuse,  mais  satirique  allégorie 
de  Torigine  du  mal  sur  la  terre.  Ce  qui  appartient  au 
poëte  lui-même,  c'est  l'explication  qu'il  donne  de  cer- 
taines traditions,  et  les  étymologies  par  lesquelles  il  essaye 
de  Justifier  ces  fables  grossières  aux  yeux  de  la  raison; 
on  reconnaît  là  les  premiers  tâtonnements  de  la  critique. 
La  Théogonie  d'Hésiode  jouit  d'une  grande  autorité  dans 
la  Grèce,  et  les  croyances  qu'il  n'avait  pu  accorder  restè- 
rent désormais  reléguées  dans  l'obscurité  des  cultes 
locaux.  Elle  ne  nous  est  point  parvenue  intacte  ;  on  y 
reconnaît  du  désordre  et  des  interpolations.  V,  Gui- 
gniaut.  De  la  Théogonie  d'Hésiode,  Paris,  1835.      B. 

THÉOLOGAL.  V,  ce  mot  dans  notre  DictUmnaire  de 
Biographie  et  d' Histoire. 

THÉOLOGALES  (Vertus).  V.  Vertu. 

THÉOLOGÉION,  machine  de  théâtre  des  Anciens,  pla- 
cée dans  la  partie  supérieure  de  la  scène,  et  qui  servait  à 
faire  descendre  les  Dieux. 

THÉOLOGIE  (du  prec  théos.  Dieu,  et  logos,  discours, 
traité),  science  de  Di«^u,  ou,  plus  convenablement,  rela- 
tive à  Dieu  et  aux  choses  divines.  Les  Anciens  donnaient 
le  nom  de  théologiens  aux  portes  qui  vivaient  à  l'époque 
de  l'école  dite  École  de  la  vieille  théologie,  et  qui  com- 
prenait des  personnages  peut-être  symboliques,  tels  que 
Orphée  et  Musée,  jusqu'à  Hésiode.  La  théologie  ne  devint 
une  science  proprement  dite  qu'à  partir  d'Aristote,  qui 
en  fit  une  partie  de  la  Philosophie.  S^  Jean  Damascène 
est,  parmi  les  écrivains  chrétiens,  le  premier  qui  l'ait 
oumise  à  l'appareil  des  règles  dialectiques,  dans  son  livre 
de  la  Foi  orthodoxe.  Chez  les  Romains,  on  distinguait  : 
la  Théologie  mystiqw,  celle  des  premiers  poètes  de  la 
Grèce;  la  Théologie  physique,  qui  s'unissait  à  la  Philo- 
sophie; la  Théologie  civile,  fondée  par  les  législateurs. 
Avec  le  christianisme,  la  Théologie  prend  un  caractère 
plus  élevé.  Dans  le  moyen  âge,  non-seulement  elle  se 
confond  avec  la  Philosophie,  mais  elle  cherche  à  l'annu- 
ler, sans  y  réussir  entièrement.  C'est  le  règne  de  la  Théo- 
logie scolastique.  Les  docteurs  de  cette  époque  la  traitent 
avec  les  procédés  de  la  méthode  en  usage,  et  au  nom  du 
principe  d'autorité.  Le  nombre  des  écrits  th(iologiques 
d'alors  est  trop  grand  pour  être  tous  cités  ;  il  suffit  de 
rappeler  ceux  d'Abailard,  Sic  et  non  (oui  et  non) ,  Intro- 
duction à  la  Théologie,  et  Théologie  chrétienne  ;  de  Pierre 
Lombard,  Le  Maitre  des  sentences;  d'Alexandre  de  Halès, 
la  Somme  théologique;  d'Albert  le  Grand,  la  Somme  de 
Théologie,  et  V Abrégé  de  Théologie;  enfin  du  plus  grand 
de  tous ,  de  S'  Thomas,  la  Somme  tkéologique ,  et  la 
Somme  contre  les  Gentils.  Ces  grands  docteurs  eurent 
des  continuateurs,  parmi  lesquels  on  remarque  :  Suarès, 
Tournély,  Gabriel  Vasquez,  Jean  de  Salas ,  Billuart ,  Col- 
let, dom  Liguori,  le  P.  Péronne,  etc.  A  mesure  que  la 
Philosophie  prenait  une  position  plus  indépendante,  la 
Théologie  arrivait  à  se  distinguer  en  deux  sortes  :  la  Théo- 
logie naturelle,  qui  se  base  sur  des  conceptions  et  sur  des 
principes  rationnels  (F.  Wolf,77i«o/ofl[ia  naturalis  methodo 
scientifica  pertractata)  ;  la  Théologie  révélée,  qui  se  dis- 
lingue, au  point  de  vue  de  l'enseignement,  en  théologie 
positive  ou  dogmatiqi^y  qui  comprend  le  dogme,  et  théo- 
logie morale,  ce  qu'il  faut  pratiquer  (  V.  la  Théologie  dog- 
matique de  Schleiermacher  ).  —  Les  traités  de  Théologie 
les  plus  suivis  en  France  dans  l'enseignement  sont  ceux 
de  Mgr  Gousset,  de  Mgr  Bouvier,  de  Bailly,  de  Carrière. 
On  a  sur  cette  matière  un  Dictionnaire  des  sciences 
théologiques  de  Richard,  1670;  un  Dictionnaire  théolo- 
gique de  Bergier,  1789,  complété  par  M^  Donnet;  V His- 
toire de  la  Théologie  par  Noêl-Bonav.  d'Argon  ne  (jusqu'à 
S'  Bernard),  Lucques,  1785,  et  par  Staûdlin,  en  allemand, 
Gœttingue,  1810-11  ;  un  Dictionnaire  encyclopédique  de 
la  Théologie  catholique,  publié  par  Wetzer  et  Welte,  et 
trad.  de  l'allemand  par  Goschler,  25  vol.— A  l'étude  de  la 
Théologie  se  rattache  nécessairement  celle  de  l'Écriture 
lainte,  la  Critique  sacrée  et  l'Exégèse,  ce  qui  a  donné  liea, 


en  Allemagne,  à  une  sorte  de  Théologie  rationnelle,  qui 
explique  avec  une  grande  liberté  les  textes  sacrés  et  les 
monuments  sur  lesquels  repose  l'enseignement  religieux. 
^  THÉOLOGIE  (Facultés  de),  corps  d'ensei?nement  supé- 
rieur. Il  y  a  en  France  six  Facultés  catholiques  de  théo- 
logie :  à  Paris,  à  Aix ,  à  Bordeaux,  à  Lyon ,  à  Rouen ,  à 
Toulouse;  et  une  seule  faculté  protestante,  à  Mon- 
tauban.  Les  Facultés  catholiques  comprennent  des 
chaires  de  dogme,  de  morale,  dliiotoire  et  de  discipline 
ecclésiastiques,  et  d'ucriture  sainte.  Quelques-unes  y 
ajoutent  des  chaires  de  Droit  canon^  d'hébreu,  et  d'é- 
loquence sacrée.  Il  y  a  à  Montauban  une  otiaire  de 
philosophie  et  une  chaire  .de  haute  latinité  et  de 
grec.  K.  le  Supplément.  R. 

THÊOPHILANTHROPES.  V.  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire.  - 

THÉORBE,  en  italien  tiorha,  instrument  à  cordes,  in* 
venté  au  xvi*  siècle  en  Italie  par  un  certain  Bardella,  ou, 
selon  d'autres,  par  un  Français  nommé  Hotteman,  et  qui 
fut  en  usage  jusqu'au  milieu  du  siècle  dernier.  C'était 
une  sorte  de  grand  luth  à  deux  manches  accolés  paral- 
lèlement; l'un  portait  le  même  nombre  de  cordes  que  le 
luth,  pour  y  poser  les  doigts  de  la  main  gauche;  l'autre 
soutenait  huit  cordes  plus  grosses  qui  servaient  de  basses 
et  qu'on  pinçait  à  vide.  Le  théorbe  était  en  grande  faveur 
parmi  les  dames  du  temps  de  Louis  XIV  ;  Ninon  de  Len- 
clos  excellait  à  en  jouer.  —  II  y  avait,  dans  les  anciennes 
orgues,  au  clavier  à  la  main,  un  jeu  d'anche  de  quatre 
pieds,  peut-être  de  huit,  qu'on  appelait  théorbe,  parce 
qu'il  imitait  le  son  de  cet  instrument.  B. 

THÉORÈME ,  proposition  qui  doit  être  rendue  évidente 
au  moyen  d'une  démonstration. 

THÉORIE  (du  grec  théôria,  contemplation),  partie 
spéculative  d'une  science;  elle  est  opposée  à  la  Pratique. 
Dans  ce  sens.,  la  connaissance  n'est  çiu'une  idée  sans 
manifestation,  une  règle  sans  application.  Mais  il  n'en 
est  pas  toujours  ainsi.  Quand  l'objet  dont  on  s'occupe  est 
un  fait  dont  toutes  les  circonstances  ont  été  séparées  par 
V analyse,  et  rapportées  aux  lois  qui  paraissent  les  régir 
et  les  expliquer,  la  synthèse  fournit  une  explication  du 
fait  qu'on  appelle  théorie,  et  qui  permet  de  reproduire  le 
fait  à  volonté,  comme  cela  a  lieu  dans  la  médecine,  la 
mécanique,  etc.  Une  théorie  ne  peut  être  exacte  et  vraie 
qu'autant  que  l'analyse  du  fait  a  été  scrupuleuse  et  com- 
plète. Les  théories  explicatives  des  faits  régis  par  les 
mêmes  lois  et  produits  par  les  mêmes  causes,  présentées, 
réunies  et  comme  liées  entre  elles  par  cette  communauté, 
puis  disposées  dans  un  ordre  méthodique,  forment  une 
science  de  théories,  comme  la  physique,  la  chimie,  l'as- 
tronomie, etc. 

Dans  l'Art  militaire,  la  Théorie  est  l'ensemble  des 
principe/s  qui  président  au  maniement  des  armes,  aux 
exercices ,  aux  manœuvres  des  troupes  et  à  la  tactique. 

Les  Grecs  nommaient  Théories  des  députations  envoyées 
pour  honorer  certaines  divinités  à  Delphes,  à  Tempe,  et 
surtout  à  Délos.  Elles  étaient  composées  de  deux  chœurs 
de  garçons  et  de  filles,  et  conduites  par  des  théores, 
ambassadeurs  chargés  d'offrir  des  sacrifices  au  nom  de  la 
ville  qui  envoyait  la  théorie.  Les  plus  brillantes  étaient 
celles  des  Athéniens.  Depuis  le  départ  du  vaisseau  qui 
portait  la  théorie  à  Délos  Jusqu'à  son  retour,  la  loi  dé- 
fendait de  mettre  à  mort  aucun  condamné  ;  son  absence 
durait  trente  jours.  R. 

THÉOSOPHIR  (  du  grec  théos,  Dieu,  et  5op^ûi,  science). 
Il  y  a  cette  différence  entre  la  Théosophie  et  la  Théologie, 
que,  dans  celle-ci,  l'homme  cherche  à  connaître  Dieu, 
et  que,  dans  celle-là,  cette  connaissance  lui  vient  par 
illumination  ;  dans  l'une  l'homme  va  à  Dieu,  dans  l'autre 
c'est  Dieu  qui  vient  à  l'homme.  La  Théosophie  n'est 
qu'une  aberration  de  l'esprit  humain  qui  tient  bien  moins 
du  mysticisme  que  de  Vllluminisme,  dont  elle  n'est  qu'une 
variété.  On  ne  peut  y  voir  qu'un  syncrétisme  où  se  trou- 
vent confondus  l'enthousiasme  et  l'observation  de  la  na- 
ture, la  tradition  et  le  raisonnement,  l'alchimie  et  la 
théologie,  la  métaphysique  et  la  médecine.  Son  langage 
est  ordinairement  symbolique.  On  compte,  parmi  les 
théosophes,  de  grands  esprits,  dupes  de  leur  imagination 
et  d'un  sentiment  religieux  mal  compris  et  mal  dirigé  : 
les  uns,  moins  savants  et  plus  portés  vers  les  idées  reli- 
gieuses, comme  Paracelse,  Jacob  Boehme,  Gichtel,  Saint- 
Martin,  Scheiblet  ;  d'autres,  plus  instruits  et  plus  portés  à 
la  discussion ,  comme  Cornélius  Agrippa,  Valentin  Wei- 
gel,  Robert  Fludd,  Mercurius  Van  Helmont,  Jean  Amos. 
Le»  Néoplatoniciens  se  rattachaient  bien  plus  à  la  théur- 
gie  qn*k  la  théosophie.  —  On  a  donné  le  nom  de  ThéO' 
sophtsme  à  la  doctrine  de  quelques  Cartésiens  qui  se 


THÉ 


1712 


TTTÉ 


aériens  que  l'on  faisait  souvent  apparaître;  Tart  du  ma- 
chiniste consistait  surtout  à  dissimuler  les  moyens  de 
suspension  qu'il  employait.  La  surface  soénique  comprise 
entre  Tépiscénium  et  les  ailes  était  généralement  très- 
étroite  eu  égard  à  sa  longueur.  Gomme  il  paraissait  rare- 
ment sur  la  scène  beaucoup  de  personnages  à  la  fois ,  et 
qu'on  n'y  voyait  guère  des  peuples  entiers  ou  des  armées, 
chacun  des  acteurs  sortait  à  son  tour  de  l'une  des  ailes 
et  rentrait  dans  l'autre.  Face  à  face,  et  occupés  de  leur 
propre  action,  ils  n'avaient  pas  sans  cesse  le  visage  tourné 
vers  les  spectateurs;  m  les  voyait  le  plus  souvent  de 
profil,  disposés  de  manière  à  ne  pas  se  cacher  les  uns  les 
autres;  et  ils  ressemblaient  ainsi  à  une  suite  de  bas-reliefs 
se  dessinant  sur  la  façade  de  l'épiscénium.  Le  chœur 
n'étant  point  sur  la  scène,  mais  à  l'orchestre,  une  faible 
profondeur  de  scène  suffisait  toujours,  même  dans  les 
plus  grands  thé&tres.  D'ailleurs,  cette  disposition  nous 
prouve  que  les  décors  ne  pouvaient  qu'être  mis  à  plat 
contre  les  b&timents  de  la  scène,  et  qu'ainsi  les  théâtres 
grecs  ne  pouvaient  offrir  ces  plans  nombreux  et  ces  effets 
de  perspective  obtenus  aujourd'hui  par  les  coulisses  et 
les  échafaudages.  Du  reste,  les  gradins  supérieurs  étaient 
assez  élevés  pour  atteindre  au  niveau  des  constructions 
scéniques,  et  apercevoir  au  delà  les  montagnes  et  les 
horizons  lointains.  Comme  les  représentations  se  faisaient 
en  plein  jour,  le  paysage  naturel  servait  de  décor  au  fond 
de  la  scène.  Aucune  toiture,  aucun  abri  ne  couvrait  les 
spectateurs  et  ne  leur  dérobait  la  vue  du  ciel. 

La  commodité  du  spectateur  était  entendue  tout  autre- 
ment qu'aujourd'hui.  Car,  s'ils  étaient  exposés  à  la  cha- 
leur du  jour,  ils  avaient  le  plein  air  pour  en  tempérer 
la  rigueur,  lis  étaient  assis  sur  la  pierre;  mais  celle-ci 
éUxh  taillée  suivant  des  plans  bien  conçus,  comme  on  le 
voit  au  thé&tre  d'Épidaure,  œuvre  de  Polyclète.  La  circu- 
lation se  faisait  aisément  par  les  chemins  qui  montaient 
de  l'orchestre  aux  gradins  les  plus  élevés,  bi  le  spectateur 
pouvait  en  outre  prendre  le  frais  sous  une  colonnade  qui, 
le  plus  souvent,  régnait  au  haut  de  Tamphithéàtre,  d'une 
aile  à  l'autre. 

L'illusion  scénique  semble  également  avoir  été  en- 
tendue tout  autrement  que  chez  nous;  en  effet,  d'anci 
oart,  il  n'est  pas  croyable  que  les  décorateurs  aient  pour- 
buivi  une  représentation  pour  ainsi  dire  scrvile  de  la  na- 
ture, laquelle  eût  été  k  peine  possible  sous  la  lumière  du 
soleil  ;  ils  ont  dû,  par  conséquent,  s'en  tenir  à  de  cer- 
taines conventions  qui  leur  permettaient  de  simplifier 
leurs  moyens  et  leurs  ressorts.  D'un  autre  côté,  l'esprit 
artiste  des  Grecs  n'eût  jamais  souffert  qu'un  acteur  vînt, 
avec  sa  figure,  représenter  sur  la  scène  un  dieu,  un  héros, 
ou  un  être  idéal;  on  comprend,  en  effet,  qu'il  eût  paru  , 
fort  déplacé  au  milieu  d'objets  qui  avaient  un  sens  trop 
étendu  et  trop  général  pour  que  sa  personne  pût  se  ren- 
contrer parmi  eux;  enfin  comprend-on  qu'un  peuple 
réellement  artiste  eût  supporté,  au  milieu  d'événements 
divins  et  sous  un  costume  héroïque  ou  même  céleste,  le 
visage  d'un  homme  que  l'on  rencontrait  chaque  jour  dans 
la  rue?  L'art  dramatique  fit  donc  usage  du  masque  de 
très-bonne  heure  ;  il  ne  tint  nul  compte  de  l'expression 
des  traits  du  visage  sur  la  scène,  et  trouva  plus  avanta- 
geux de  les  cacher  sous  une  figure  immobile  douée  d'une 
expression  générale  et  appropriée  au  personnage  et  à 
l'ensemble  des  événements.  Le  masque  avait  pour  effet 
de  dénaturer  les  proportions  du  corps  humain  et  de  gros- 
sir monstrueusement  la  tête  :  de  là  naquit  le  besoin  d'éle- 
ver la  taille  de  l'acteur  au  moyen  du  brodequin  appelé 
cothurne,  et  d'allonger  les  vêtements  en  proportion.  En 
somme,  le  personnage  paraissait  plus  grand  que  nature, 
sa  voix  était  amplifiée,  son  visage  réduit  à  un  type  connu 
du  peuple,  ses  gestes  rendus  plus  lents  et  plus  solennels  ; 
ces  changements  n'avaient  aucun  inconvénient,  puis- 
qu'ils rapprochaient  l'acteur  de  l'idée  qu'on  se  faisait 
vulgairement  des  héros  et  des  dieux. Ces  conditions  scé- 
niques  imposées  aux  poètes  les  obligeaient  à  ne  point  re- 
chercher les  petits  moyens  d'action,  et  à  ne  compter  que 
sur  le8  grandes  péripéties  et  sur  la  force  môme  du  drame. 

Les  dimensions  des  théâtres  antiques  imposaient  aux 
poètes  et  aux  acteurs  les  mêmes  nécessités.  Celles  de  nos 
théâtres  modernes  n'en  donnent  qu'une  très-faible  idée. 
Non-seulement  on  ne  voyait  aucune  construction  ou  gar- 
niture analogue  à  nos  loges  et  à  nos  galeries,  mais  la 
commode  disposition  du  théâtre  en  gradins  concentriques 
permettait  à  la  fois  de  loger  le  plus  grand  nombre  pos- 
sible de  spectateurs  sur  un  espace  donné,  et  d'étendre 
vers  le  haut  cet  espace  à  fort  peu  de  frais.  Ainsi,  les 
gradins  du  théâtre  de  Bacchus  a  Athènes  pouvaient  con- 
tenir 30,000  spectateurs  ;  ceux  d'Épidaurc  avaient  146  met. 


de  diamètre  ;  ceux  de  la  petite  ville  de  Sicyone  130*.  ceux 
d'Éphèse  214"  et  pouvaient  contenir  150,000  spectateurs. 
La  voix  de  l'acteur,  amplifiée  par  le  masque,  renvoyée. 
par  la  construction  de  la  scène,  et  concentrée  par  la  ga- 
lerie supérieure,  devait  remplir  cette  immense  enceinte  ; 
la  forme  évasée  que  présentait  l'ensemble  des  graiiins 
était  très  heureuse  pour  l'acoustique,  k  laquelle  d'ail- 
leurs, nous  sa^'ons  que  le  plein  air  ne  faisait  aucuoc- 
ment  obstacle.  Le  grand  nombre  des  spectateurs  et  le^ 
vastes  dimensions  qu'il  imposait  aux  théâtres  avair-nt 
plusieurs  causes  chez  les  Grecs  :  d'abord,  les  représenta- 
tions dramatiques  faisaient  partie  d'une  fête  religieu»>, 
et  étaient  un  usage  sacré  auquel  l'art  des  poètes  donna 
une  puissance  nouvelle  sur  les  esprits;  en  second  lieu, 
ces  représentations  étaient  rares  dans  l'année  et  non  quo- 
tidiennes comme  chez  nous,  ce  qui  nécessairement  devait 
attirer  un  grand  nombre  de  personnes,  préparées  d'ail- 
leurs par  leur  éducation  à  comprendre  même  les  chefs- 
d'œuvre  de  l'art  le  plus  élevé  ;  enfin  l'entrée  au  théâtre 
était  gratuite,  et  permise  aux  hommes  de  toute  condition. 
Cette  institution  des  théâtres,  dont  les  villes  faisaient  les 
frais,  était  donc  entièrement  démocratique.  Elle  ne  l'a 
jamais  été  chez  les  modernes,  et  il  est  même  à  remarquer 
que  les  nouveaux  théâtres  construits  chez  nous  éloignent 
de  plus  en  plus  par  le  prix  des  places  les  personnes  que 
leur  fortune  trop  médiocre  retient  chez  elles;  l'argent 
règne  au  théâtre.  Les  Grecs  seuls,  et,  parmi  eux,  les 
peuples  ioniens,  les  Athéniens  surtout  avec  leurs  colo- 
nies, ont  su  faire  des  théâtres  de  vrais  établissements 
démocratiques  :  ce  caractère  est  imprimé  à  toute  l'archi- 
tecture des  théâtres  de  la  Grèce,  aussi  bien  qu'aux  œu- 
vres de  ses  poètes  dramatiques. 

Quand  l'art  dramatique  passa  de  la  Grèce  en  Italie  et 
se  fut  établi  dans  Rome,  son  caractère  religieux  disparut 
d'abord.  On  allait  au  théâtre  pour  se  récréer;  les  repré- 
sentations furent  données  au  public  le  plus  souvent  pour 
briguer  ses  suffrages;  les  théâtres  furent  élevés  par  de 
riches  particuliers  pour  les  plaisirs  des  électeurs  popu- 
laires; le  métier  d'acteur  fut  avili,  et  l'auteur  même  fut 
soumis  à  une  censure  rigide  et  arbitraire.  Tout  le  monde, 
(lu  reste,  y  fut  admis,  hommes,  femmes  et  enfants:  et 
pour  ne  rien  négliger  de  ce  qui  pouvait  relever  les  dona- 
teurs aux  yeux  du  peuple,  *'»\  y  déploya  une  magniflcenre 
inconnue  aux  Grecs.  Tels  furent  le  théâtre  de  Scaurus, 
celui  de  Pompée.  Plus  tard  on  en  construisit  dans  to  it 
l'Empire.  Ce  fut  sur  le  modèle  des  théâtres  grecs  :  ssul»*- 
ment ,  le  caractère  sacré  ayant  disparu  et  avec  lui  l'ori- 
gine même  de  l'art  dramatique,  il  n'y  eut  ni  ihymélé  ni 
chœurs  ;  l'espace  vide  laissé  par  l'orchestre  fut  occupé 
par  l'aristocratie  romaine,  tandis  que  les  gradins  Tétaieiu 
par  le  peuple.  On  peut  donc  re^rder  les  théâtres  ro- 
mains comme  ayant  formé  la  transition  entre  ceux  de  la 
Grèce  et  les  théâtres  modernes. 

Aux  théâtres  on  doit  rattacher  un  genre  d'édifices  qni 
s'en  rapprochaient  beaucoup  :  ce  sont  les  Odéons  ou  théâ- 
tres de  musique  (  V,  Odéon).  Le  plus  célèbre  fut  l'Odéon 
de  Périclès  à  Athènes.  Les  concours  musicaux  n'ayant 
point  une  origine  sacrée,  il  n'y  eut  point  là  d'autel  de 
Bacchus  ;  et  comme  on  y  allait  pour  entendre  et  non  pour 
voir,  on  n'eut  pas  besoin  de  disposer  les  places  en  sx^- 
dins.  De  plus,  les  diniensions  de  ces  salles  étant  loin 
d'égaler  celles  des  théâtres ,  on  put  le^  couvrir  d'un  tui» 
de  forme  circulaire,  et  donner  à  tout  l'édifice  la  forme 
d'une  rotonde.  On  voit  par  quels  côtés  les  salles  de  ma* 
sique  se  rapprochaient  des  théâtres  et  par  quels  côtés  elles 
s'en  éloignaient. 

UAmphithéAtre  romain,  entièrement  incoimu  des  Grecs, 
n'est  au  fond  qu'un  théâtre  où  les  épiscénia  ont  été  sup- 
primés avec  la  scène  même,  ce  qui  a  permis  de  doubler 
les  gradins  et  d'en  former  une  enceinte  unique  et  con- 
tinue, presque  toujours  ovale,  et  où  l'orchestre  également 
doublé  s'est  trouvé  transformé  en  arène  on  espace  sablé; 
et  comme  il  n'était  guère  possible  d'adosser  un  tel  édi- 
fice à  une  colline,  on  i'éleva  de  toutes  pièces  sur  un  tr: 
min  plat,  avec  cet  art  des  constructions  voûtées  q^i 
dans  les  ruines  romaines ,  fait  encore  l'admiration  d<  ^ 
modernes.   V,  Amphithéâtre.  Em.  B. 

II.  Théâtres  modernes,  —  On  ne  saurait  déterminf^r 
d'une  manière  précise  l'époque  de  la  construction  de> 
premiers  théâtres  en  Europe  pendant  le  mojren  âge.  U^ 
Mystères  (V.  ce  mot)  se  représentaient  sur  des  échafa»- 
dages  dressés  dans  les  places  publiques  ou  dans  de  vastes 
salles.  Ce  fut  seulement  au  xvi*  siècle  que  des  archi- 
tectes italiens  édifièrent  des  théâtres  fixes.  Tel  fut  celui 
aue  Bramante  construisit  en  pierre,  et  dans  la  forme  des 
tnéâtres  antiques,  à  l'extrémité  de  la  grande  cour  du  Va- 


Tnft 


1713 


TiTft 


tifan.  Palladio  éleva  à  Vioence,  en  1580,  toujours  d'après 
les  modèles  laissés  par  les  Anciens,  mais  en  ajoutant  une 
toiture,  un  thé&tre  que  Ton  conserve  encore  aujourd'hui 
avec  un  soin  religieux.  Il  est  de  forme  demi-ovale;  la 
scène  offre  7  rues,  avec  des  palais,  des  temples,  des  arcs 
de  triomphe  en  relief;  mais  ces  édifices  étant  nécessai- 
"«ment  petits,  le  coup  d*œil  est  d*un  mauvais  effet.  Vin- 
cent Sceunozzi  modela  également  sur  l'antique,  avec  plus 
de  rigueur  encore,  le  thé&tre  de  Sabionnetta  ;  en  lui  don- 
nant la  forme  demi-circulaire,  il  rendit  la  scène  visible 
pour  tous  les  spectateurs.  En  1618,  J.-B.  Aleotti  con- 
struisit le  théâtre  de  Parme,  dont  la  forme  générale  est 
un  hémicycle  prolongé  par  des  lignes  droites  :  autour 
du  parterre  est  un  vaste  amphithéâtre,  surmonté  de  deux 
galeries  ornées  de  colonnes  et  d'arcades;  au-dessus  est 
un  acrotère  avec  des  figures  qui  semblent  porter  le  pla- 
fond; l'avant-scène  offre  deux  rangs  de  niches  ajustées 
avec  de  petites  colonnes  qui  rappellent  en  grande  partie 
la  décoration  des  scènes  antiques;  vers  les  deux  faces,  en 
retour  de  l'avanV-scène  et  en  retour  avec  les  loges,  sont 
deux  arcs  de  triomphe  surmontés  de  figures  équestres. 

La  disposition  des  théâtres  antiques  ne  pouvait  pas 
convenir  aux  usages  modernes.  On  ne  tarda  pas  à  rem- 
placer les  gradins  par  des  rangs  de  loges  ou  des  balcons, 
et  la  scène  devint  plus  profonde,  afin  de  faire  Jouer  les 
machines  et  de  produire  des  effets  pittoresques.  Dans  le 
XVII"  siècle,  toutes  les  villes  d'Italie  voulurent  avoir  leur 
théâtre  fixe,  et  ces  théâtres  furent  construits  à  peu  près 
3ur  le  plan  que  nous  avons  conservé  jusqu'à  présent. 
Toutefois,  si  l'on  excepte  le  thé&tre  de  S^  Charles  à  Na- 
ples,  et  celui  que  Galli  da  Bibiena  éleva  &  Bologne  vers 
1703,  les  anciens  thé&tres  italiens  ne  présentaient  pas 
les  conditions  que  l'on  exige  aujourd'hui  :  point  de  fa- 
çade extérieure  qui  les  caractérise;  point  de  porti((ue 
pour  tenir  la  foule  à  couvert  avant  l'ouverture  de  la  salle  ; 
point  d'abri  pour  descendre  de  voiture,  ni  de  foyer  pour 
la  promenade  des  spectateurs  pendant  les  eiitr'actes; 
point  de  café  à  l'intérieur. 

En  France,  ce  ne  fut  guère  qu'au  xvii*  siècle  que  l'on 
b&tit  des  thé&tres  durables.  Un  des  premiers  et  des  plus 
importants  fut  le  thé&tre  construit  dans  le  Palais-Royal 
par  ordre  du  cardinal  de  Richelieu  :  l'intérieur  de  la 
salle  consistait  en  27  gradins  et  2  rangs  de  loges  ;  la 
noblesse  occupait  des  banquettes  sur  les  côtés  de  Tavant- 
scène  (F.  Baivqdettes )  ;  dans  les  gradins,  les  femmes  de 
la  cour  se  faisaient  apporter  des  fauteuils  ou  des  chaises  ; 
au  parterre,  on  restait  debout.  Les  autres  salles  ont  dû 
présenter  &  peu  près  les  mêmes  dispositions.  Les  repré- 
sentations n'avaient  encore  lieu  alors  que  pendant  le 
jour  :  les  ordonnances  de  police  prescrivaient  de  finir  les 
spectacles,  en  hiver,  &  quatre  heures  et  demie.  Louis  XIV 
lit  construire  aux  Tuileries,  par  l'architecte  italien  Gas- 
pard Vigarani,  une  salle  de  style  composite  qui  occupait 
loutc  la  largeur  du  pavillon  Marsan.  La  scène  avait 
i%  met.  de  profondeur,  10'" ,66  d'ouverture,  et  11 '",33 
lie  hauteur  ;  le  dessus,  pour  la  retraite  des  décorations , 
était  de  12'",33,  et  le  dessous  de  r>™.  La  partie  livrée  aux 
spectateurs  avait  16"*,33  de  largeur,  sur  31"*  de  profon- 
deur; la  hauteur  du  parterre  &  la  voûte  était  de  10™,33. 
Quand  on  donna  les  représentations  le  soir,  il  fallut 
éclairer  les  salles  de  spectacle  :  de  là  l'emploi  du  lustre 
(  V.  ce  mot  ).  On  éclaira  également  la  rampe^  et  tout 
d'abord  avec  des  chandelles,  car  la  salle  de  l'Odéon,  à 
Paris,  fut  la  première  où  l'on  employa  des  lampes  ou 
quînquetsenl784. 

Les  dispositions  des  thé&tres  modernes  sont  à  peu  près 
les  mêmes  chez  toutes'Ies  nations  européennes.  Cepen- 
dant, l'emploi  des  balcons  appartient  plus  spécialement 
aux  peuples  du  Nord,  et  les  loges  fermées  à  ceux  du  Midi. 
Les  Italiens  ne  connaissent  pas  ces  longues  galeries  qui, 
chez  nous,  font  le  tour  de  la  salle  en  avant  des  loges. 
En  Espagne,  Jusqu'à  la  fin  du  xviii"  siècle,  les  salles  de 
spectacle  ont  été  carrées  :  au-dessous  des  trois  rangs 
de  loges  il  y  avait  un  amphithô&tre  où  se  plaçaient  les 
femmes;  dans  toute  la  façade  du  fond  étaient  des  gale- 
ries grillées,  réservées  aux  moines,  et  le  parterre  était 
disposé  en  gradins,  avec  un  espace  libre  au  milieu,  qui 
répondait  à  l'orchestre  antique. 

Après  bien  des  t&tonnements  et  des  expériences ,  il  a 
été  reconnu  que  la  meilleure  forme  pour  les  thé&tres 
modernes  est  la  forme  elliptique.  Tout  spectateur,  en  se 
rendant  au  spectacle,  se  propose  d'entendre  et  de  voir  ; 
or,  l'ellipse  est  la  courbe  la  plus  favorable  à  la  libre  cir- 
culation du  son,  et  la  disposition  des  loges  et  des  galeries 
sur  cette  courbe  est  la  plus  avantageuse  pour  voir  sur  la 
icèue.  Si,  ao^  avoir  fixé  les  deux  foyers  de  l'ellipse,  ou 


tire  une  ligne  parallèle  au  petit  diamètre  et  au  quart  du 
la  longueur  du  grand,  la  longueur  de  cette  ligne  donne 
exactement  les  meilleures  proportions  de  l'ouverture  de 
l'avant-scène.  Si  l'on  tire  au  delà  de  l'avant-scène  une 
liçne  parallèle  au  petit  diamètre  de  l'ellipse  et  au  hui- 
tième de  la  longueur  totale  du  grand  diamètre,  si  l'on 
tire  ensuite  deux  lignes  des  extrémités  du  petit  dia- 
mètre et  passant  aux  extrémités  de  la  ligne  parallèle,  le 
point  d'intersection  de  ces  deux  lignes  obliques  donne 
celui  de  la  profondeur  nécessaire  du  thé&tre,  tant  sous  le 
rapport  des  rayons  visuels  que  sous  celui  des  lignes 
acoustiques.  Il  n'est  guère  possible,  pour  que  les  acteurs 
soient  entendus,  de  donner  plus  de  25  met.  à  la  salle, 
depuis  l'avant-scène  jusqu'au  fond  des  loges  du  point 
opposé.  Pour  que  des  places  latérales  les  plus  élevées 
les  spectateurs  puissent  voir  convenablement  sur  la 
scène,  il  faut  que  le  rang  de  loges  ou  de  galerie  le  plus 
élevé  de  la  salle  ne  surpasse  pas  en  hauteur  les  deux 
tiers  de  la  longueur  totale  de  cette  salle.  C'est  d'après 
ces  principes  qu'ont  été  construits  beaucoup  de  thé&tres 
italiens,  qui  peuvent  servir  de  modèles,  tels  que  :  l'an- 
cien thé&tre  de  Fano,  b&ti  sur  les  dessins  de  Torelli  ; 
celui  de  Mantoue,  dû  à  Galli  da  Bibiena;  celui  d'imola, 
œuvre  de  Cosme  Morelli  ;  le  thé&tre  San-Bencdetto  à 
Venise,  et  la  salle  Argentina,  à  Rome,  que  le  comte  Teo^ 
doli  a  faite  sur  le  même  modèle;  le  grand  théâtre  de  la 
Fcnice,  à  Venise,  construit  par  Selva;  celui  de  la  Scala, 
à  Milan,  par  Piermarini;  le  nouveau  thé&tre  de  Parmp., 
par  Bettoli,  etc.  Les  avantages  de  la  forme  elliptique  étant 
connus,  il  en  résulte  que  le  plafond  d'une  salle  de  spec- 
tacle, surtout  d'une  salle  d'opéra,  doit  être  tracé  sur  une 
courbe  elliptique,  qu'il  faut  se  garder  d'interrompre  par 
une  ouverture  au  centre,  comme  on  le  fait  sous  prétexte 
de  favoriser  le  renouvellement  de  l'air  dans  la  salle  :  avec 
cette  forme,  il  favorise  autant  que  possible  la  circulation 
du  son.  Par  suite,  le  plafond  doit  offrir  une  surface  plane, 
nue  pour  ainsi  dire,  dépouillée  de  ces  compartiments  et 
autres  fantaisies  architecturales  qui  n'ont  d'autre  effet 
que  de  dénaturer  la  masse  du  son,  de  la  disperser,  et  de 
donner  aux  voix  un  caractère  différent  en  divers  points 
de  la  salle. 

H  est  encore  une  forme  que  l'en  peut  donner  aux 
thé&tres  avec  avantage  :  c'est  celle  du  cercle,  tronqué  vers 
le  quart  par  l'ouverture  du  proscenium,  et  au  cinquième 
par  celle  du  rideau.  Elle  a  été  adoptée  complètement  ou 
à  peu  près  au  thé&tre  S^Charles  de  Naples  ;  au  thé&tre 
de  Bordeaux,  construit  par  Louis;  au  Thé&tre  Français 
de  Paris,  ouvrage  du  même  architecte,  mais  où  l'on  a  un 
peu  perdu  de  la  propriété  du  cercle  par  une  trop  grande 
élévation  intérieure;  dans  la  même  capitale,  an  thé&tre 
de  la  Porte-S^-Martin,  par  Lenoir;  au  thé&tre  des  Var- 
riétés,  par  Cellerier  ;  au  thé&tre  de  l'Opéra,  me  Le  Pele- 
tier,  par  Debret.  —  On  a  fait  à  Londres  un  essai  bizarre, 
et  sans  succès,  celai  d'une  salle  en  forme  de  porte-voix, 
dont  la  partie  la  plus  resserrée  est  vers  la  scène  :  si  cette 
disposition  a  pu  être  déterminée  par  des  raisons  d'acous- 
tique, elle  privait  entièrement  des  propriétés  de  l'optique 
les  parties  latérales  de  la  salle. 

Une  des  erreurs  les  plus  grandes  des  architectes  dans 
la  construction  des  thé&tres  a  été  de  séparer  la  scène  et 
le  reste  de  la  salle  par  un  mur  avancé  ou  par  une  masse 
solide,  soit  que  cette  masse  soit  arrondie  en  forme  d'ar- 
chitrave, soit  qu'elle  forme  un  encadrement.  Ce  mur  ou 
cette  masse  solide  est  un  repoussoir  qui  d'une  part  re- 
jette en  arrière  la  voix  des  acteurs,  et  de  l'autre  produit 
une  répercussion  des  effets  de  l'orchestre,  laquelle  déna- 
ture la  qualité  du  son  et  ne  le  fait  parvenir  que  réfléchi 
jusqu'au  public.  De  même,  les  colonnes  placées  commu- 
nément aux  loges  de  l'avant-scène,  avec  leurs  chapiteaux 
et  l'espèce  de  fronton  qu'elles  supportent,  non-seulement 
interrompent  la  ligne  acoustique  et  gênent  les  effets 
de  la  vision,  mais  encore  forment  des  gouffres  où  le  son 
s'engloutit.  Cet  inconvénient  a  disparu  dans  le  nouveau 
Théâtre  impérial  du  Châtelet,  ouvert  à  Paris  en  1862  : 
l'architecte,  M.  Davioud,  a  prolongé  Jusqu'à  la  scène  les 
galeries  des  spectateurs.  Ce  thé&tre  présente  une  autre 
innovation,  qui  est  toute  une  révolution  dans  le  système 
d'éclairage  des  salles  :  l'énorme  lustre  qui  intercepte  la 
vue  à  un  certain  nombre  de  spectateurs  des  galeries  su* 
périeures,  et  d'où  se  dégage,  surtout  depuis  l'emploi  du 
gaz,  une  chaleur  suffocante,  a  été  supprimé;  le  plafond 
de  la  salle  est  formé  par  un  immense  verre  ovale,  dépoli 
et  ciselé,  au-dessus  duquel  on  a  concentré  de  nombreux 
becs  de  gaz,  et  la  lumière  arrive  en  quelque  sorte  tamisée 
et  singulièrement  adoucie.  Ce  système  d'éclairage  a  été 
«encore  adopté  au  Tliéâtre-hjnque  de  la  place  du  Ciiâio- 

:  m 


TIM 


1722 


TIM 


bassin  demi-sphériqne  en  cuivre,  recouvert  d*uDC  peau 
lor  laquelle  viennent  frapper  des  baguettes  de  bois  revê- 
tues de  peau.  P.  G. 

TIBiBRE,  sorte  de  petite  cloche  immobile  et  sans  bat- 
tant, et  qui  est  frappée  en  dehors  par  un  marteau.  C'est 
au  moyen  d'un  timbre  que  les  horloges  et  les  pendules 
sonnent  les  heures.  On  se  sert  aussi,  depuis  une  vingtaine 
d'années  envbron,  de  timbres  au  lieu  de  sonnettes  dans 
les  appartements.  Certains  compositeurs  de  musique  en 
ont  introduit  dans  leurs  œuvres. 

TIMBRE,  qualité  sonore  d'un  instrument  on  d'une  voix. 
C'est,  avec  VitUonaHon  et  Vintensité,  une  des  trois  quar- 
lités  essentielles  du  son  ;  elle  en  est  en  quelque  sorte  la 
matière.  Le  violon,  la  flûte,  la  trompette,  tous  les  instru- 
ments, en  un  mot,  ont  dans  le  son  un  caractère  distinctif, 
indépendant  du  ton  et  de  la  force;  c'est  leur  timbre.  Des 
différences  analogues  existent  entre  la  voix  d'homme  et 
la  voix  de  femme,  entre  la  voix  de  ténor  et  la  voix  de 
basse.  Il  y  a  des  instruments  dont  le  timbre  est  suscep- 
tible de  plusieurs  nuances,  au  moyen  de  changements 
que  l'exécutant  y  pratique,  ou  d'après  le  mode  de  s'en 
servir  :  ainsi,  le  timbre  ou  violon  varie  selon  qu'on  fait 
résonner  l'instrument  avec  un  archet,  ou  en  pinçant  les 
cordes,  ou  en  employant  la  sourdine,  ou  en  tirant  des 
sons  harmoniques  ;  un  même  trait.  Joué  sur  deux  cordes 
différentes,  prend  un  autre  caractère;  on  varie  le  timbre 
de  l'orgue  au  moyen  des  registres;  une  voix  diffère  de 
timbre,  selon  qu'elle  rend  des  sentiments  d'amour  ou  de 
colère,  etc.  B» 

TiMBiiE,  nom  que  les  vaudevillistes  donnent  aux  airs 
connus  sur  lesquels  ils  composent  leurs  couplets. 

TiuBRE,  double  corde  à  boyau  tendue  contre  la  peau 
Inférieure  du  tambour  militaire,  et  qui  vibre  avec  elle. 

TIMBRE,  en  termes  de  Blason,  ce  qui  se  met  sur  l'écu, 
comme  bonnets,  mortiers,  casques,  etc.,  à  cause  de  la 
ressemblance  de  ces  objets  avec  le  timbre  d'une  horloge. 
L'usage  des  timbres  dans  les  armoiries  est  postérieur  aux 
Croisades. 

TIMBRE,  marque  imprimée  par  l'État  sur  le  papier  dont 
la  loi  oblige  à  se  servir  pour  certaines  écritures,  comme  les 
actes  authentiques,  les  titres  de  propriété,  les  contrats, 
tes  effets  de  commerce,  les  actions  et  obligations  négo- 
ciables, les  quittances  dans  les  services  publics,  les  bor- 
dereaux des  agents  de  change  et  des  courtiers,  les  polices 
d'assurances,  les  pièces  destinées  aux  actes  civils  et  judi- 
ciaires, et  même  pour  certaines  impressions,  telles  que 
les  affiches,  les  prospectus,  les  Journaux,  etc.  On  dis- 
tingue le  tinU>re  de  dimension,  dont  le  prix  est  en  raison 
de  la  grandeur  du  papier  employé,  et  le  timbre  propor- 
tionnel, dont  le  prix  varie  suivant  les  sommes  et  valeurs 
auxquelles  il  est  destiné  :  le  premier  s'applique  en  encre 
noire,  le  second  est  frappé  à  sec.  Chaque  timbre  porte 
son  prix.  Le  timbre  de  (Ûmension  est  exigé  de  tous  les 
actes,  extraits,  copies  et  expéditions,  soit  publics,  soit 
privés,  devant  ou  pouvant  faire  titre,  ou  être  produits 
pour  obligation,  décharge.  Justification,  demande  ou  dé- 
rense;  de  tous  les  livres,  registres,  minutes  de  lettres, 
qui  sont  de  nature  à  être  produits  en  justice  et  dans  le 
cas  d'y  faire  foi,  ainsi  que  des  extraits,  copies  et  expédi- 
tions qui  en  sont  délivrés;  enfin,  des  actes  paas^  aux 
colonies  ou  à  l'étranger,  et  dont  il  est  fait  usage  en 
France.  Le  timbre  des  livres  de  commerce  a  été  sup- 
primé par  la  loi  du  20  juillet  1837,  et  remplacé  par  3  cen- 
times additionnels  au  principal  de  la  contribution  des 
patentes.  Tous  les  effets  de  commerce,  tels  que  billets  à 
ordre  ou  au  porteur;  les  rescriptions,  mandats,  mande- 
ments, ordonnances,  lettres  de  change;  les  titres  d'ac- 
tions émises  par  les  sociétés  commerciales;  les  obliga- 
tions sous  seing  privé,  etc.,  sont  assujettis  au  timoré 
proportionnel.  Depuis  1862,  le  timbre  de  dimension  fot 
fixé  ainsi  qu'il  suit  :  demi-feuille  de  petit  papier,  0  fr.  50  c; 
feuille  de  petit  papier,  1  fr.  ;  feuille  de  moyen  papier, 
i  fr.  50  c;  feuille  de  grand  papier,  2  fr.;  feuiUe  de  grand 
registre,  3  fr.  La  faculté  d'a[oonnement  établie  par  la  loi 
du  5  Juin  1850  au  profit  des  sociétés,  compagnies  d'assu- 
rances et  assureurs,  s'exeiça  à  raison  de  0  fr.  03  c.  par 
1,000  fr.  du  total  des  sommes  assurées.  Les  bordereaux 
et  arrêtés  des  agents  de  change  et  des  courtiers  furent 
assujettis  au  droit  de  timbre  pour  les  sommes  employées 
aux  opérations  qui  y  sont  mentionnées  ;  0  fr.  50  c.  pour 
les  sommes  de  10,000  fr.  et  au-dessous;  1  fr.  50  c.  au- 
dessus  de  10,000  fr.  Le  prix  pour  le  timbre  propor- 
tionnel des  effets  de  commerce  tut  de  5  c.  Jusqu'à  100  fr. 
inclusivement,  de  10  c.  jusqu'à  200,  de  15  c.  jusqu'èi 
300,  de  20  c.  jusqu'à  400,  de  25  c.  jusqu'à  500,  de  50  c, 
depuis  501  fr.  jusqu'à  1-000;  au-dessus,  le  prix  aug- 


menta de  50  c.  par  1,000  fr.  jusqu'à  20,000  tr.  Un  act« 
écrit  sur  papier  libre  n'est  pas  annulable  parce  qu'il  n'i 
point  été  écrit  sur  papier  timbré  :  seulement,  la  contra- 
vention donne  lieu  à  une  amende  de  5  fr.,  s'il  fallait 
prendre  du  papier  au  timbre  fixe;  l'amende  est  de  6  pouf 
100  des  sommes  exprimées,  pour  le  souscripteur  d*ua 
billet  ou  obligation  assujetti  au  timbre  proportionnel. 
L'accepteur,  le  bénéficiaire  ou  premier  endosseur  de  Peffct 
non  timbré  sont  aussi  passibles  de  l'amende  de  6  p.  100« 
s'ils  ne  le  font  viser  pour  timbre  dans  les  15  jours  de  sa 
date  et  avant  toute  négociation.  On  i^)pelle  tin^e  à 
Vextraordinaire  celui  qui  s'applique  en  noir  sur  les  pa- 
piers présentés  par  les  particuliers,  comme  les  feuilles 
destinées  à  l'impression  des  Journaux,  des  afiQcbes, 
des  prospectus,  des  écrits  politiques  qui  ont  moins  de 
5  feuillea,  etc.,  les  actes  qui  auraient  dû.  être  écrits  sur 
papier  timbré,  les  effets  de  commerce  dont  la  valeur  dé- 
passe 20,000  fr.  Sont  exemptés  les  avis  contenant  une 
simple  indication  de  domicile,  les  bulletins  du  cours  des 
changes,  les  annonces  et  prospectus  des  Journaux  qui 
s'occupent  exclusivement  de  science  et  d'art,  les  billets 
de  faire  part  de  mariage,  naissance  et  décès.  La  musique 
n'est  dispensée  du  timbre  que  depuis  peu  d'années.  Le 
timbre  des  journaux,  affiches  et  prospectus,  est  propor- 
tionnel à  leur  dimension,  mais  d'une  quotité  bien  infé- 
rieure à  celle  nui  est  fixée  pour  les  actes  :  pour  les  jour- 
naux, le  droit  lut  de  6  c.  par  feuille  de  72  décimèt.  carrés 
et  au-dessous,  dans  les  départements  de  la  Seine  et  de 
Seine-et-Oise,  et  de  3  c.  partout  ailleurs.  Pour  chaque 
fraction  en  sus  de  10  décimèt.  carrés  et  au-dessous,  il 
fut  perçu  1  cent,  et  demi  dans  les  départements  de  la 
Seine  et  de  Seine-et-Oise,  eti  c.  partout  ailleurs.  Il  faut 
encore  mentionner,  comme  frappés  de  la  contribution  du 
timbre,  les  passe-ports  et  les  ports  d'armes  de  chasse.  La 
contrefaçon  des  timbres  de  l'État  est  punie  par  la  réclusion 
ou  les  travaux  forcés  et  la  dégradation  civique.  L'Admi- 
nistration du  timbre  fait  partie  de  la  Direction  générale 
des  Domaines  et  de  l'Enregistrement,  l'une  des  subdivi- 
sions du  Ministère  des  Finances.  —  Le  timbre  fut  établi 
pour  la  première  fois  en  538,  par  Tempereur  Justinien, 
et  reçut  le  nom  de  protocole,  parce  qu'on  ne  l'appliquait 
que  sur  la  première  feuille  des  actes.  Introduit  en  Es- 
pagne et  dans  les  Pays-Bas  en  1553,  puis  en  Allemagne 
et  en  Angleterre,  il  fut  question  de  l'imposer  en  France 
en  1655  ;  mais  l'innovation  ne  fut  consacrée  que  par  les 
déclarations  des  19  mars  et  2  juillet  1673,  et  par  un  édit 
du  mois  d'avril  1674.  Une  ordonnance  de  juin  1680  dé- 
signa les  actes  qui  devaient  être  timbrés.  Cette  ordon- 
nance, une  déclaration  du  18  avril  1600  et  un  édit  de 
février  1748,  augmentèrent  successivement  les  droits  fixé» 
d'abord  par  le  tarif  du  22  avril  1673.  Un  édit  proposé  en 
1787,  pour  augmenter  les  recettes  de  l'impêt  du  timbre, 
fut  un  des  prétextes  de  la  Révolution.  Cet  impôt  reçut  de 
nouvelles  extensions  par  les  lois  du  18  février  1701,  du 
9  vendémiaire  an  vi,  et  du  6  prairial  an  vn.  La  loi  du 
11  nivôse  an  iv  établit  la  distinction  du  timbre  de  dimen- 
sion et  du  timbre  proportionnel.  Les  deux  lois  fonda- 
mentales de  la  législation  du  timbre  sont  celles  du  13  bru- 
maire an  vn  et  du  28  avril  1816;  les  modifications 
qu'elles  ont  subies  par  suite  des  lois  du  25  mars  1817, 
du  15  mai  1818,  du  16  Juin  1824,  du  24  mai  1834  et  du 
5  Juin  1850,  ne  sont  guère  relatives  qu'à  la  quotité  des 
droits  et  à  la  pénalité.  Les  Journaux,  soumis  au  timbre 
par  un  règlement  du  0  vendémiaire  an  vi,  en  furent 
affranchis  par  décret  du  6  mars  1848;  mais  ils  y  ont  été 
soumis  de  nouveau  par  la  loi  du  27  Juillet  1850.  Une  loi 
du  11  Juin  1859  a  créé,  pour  les  effets  de  commerce  ve- 
nant, soit  de  l'étranger,  soit  des  lies  ou  colonies  dans 
lesquelles  le  timbre  n'a  pas  encore  été  établi,  des  timbres 
mobiles  que  vend  l'administration  de  l'Enregistrement, 
et  que  tout  commerçant  peut  apposer  lui-même  sur  ces 
effets  payables  en  France,  avant  qu'ils  soient  endossés, 
acceptés  ou  présentés  à  l'encaissement.  L'impôt  du  timbre 
était  autrefois  très-lourd  pour  les  journaux  en  Angleterre: 
à  la  fin  du  siècle  dernier,  il  était  de  8  sous  par  feuille; 
en  1836,  on  le  réduisit  à  un  penny  (2  sous).  Comme  on 
ne  timbre  qu'à  Londres,  à  Dublin  et  à  Edimbourg,  il  faut 
faire  venir  de  ces  villes  tout  le  papier  timbré.  V.  Tardif, 
Lois  du  Timbre  et  de  V Enregistrement,  1iC26, 2  voL  in-8«: 
A.  Sorel,  Nouveau  tarif  ou  Dictionnaire  abrégé  des  droits 
de  timbre,  d^enregistrement,  de  greffe,  d*hypothèques  et  de 
sceau,  1854,  in-12  ;  Camps,  Code  et  thctionncûre  d'enre- 
gistrement, de  timbre,  de  greffe,  d^kypothèque,  etc.,  1838, 
ln-8^  B. 

TIMBRE,  marque  particulière  que  chaque  bureau  de 
poste  en  France  imprime  sur  les  lettres  qu'il  fait  partir, 


TIR 


1723 


TIR 


po!ir  Indiquer  le  lien  et  le  jour  du  départ,  et  sur  celle 
qu'il  reçoit,  pour  constater  le  jour  de  l'arrivée. 

TIMBRE-POSTE,  estampille  vendue  par  TAdministra- 
tion  des  postes,  et  qae  l'expéditeur  d'une  lettre  colle,  pour 
l'affranchir,  sur  un  coin  de  l'adresse.  Elle  porte  l'effigie  du 
souverain,  ou  les  armes  de  la  nation,  ou  quelque  figure  al- 
légorique. Le  taux  des  timbres-poste  varie  suivant  le  poids 
des  correspondances.  Il  y  en  a,  en  France,  de  6  couleurs 
différentes  :  gris-vert,  valeur  1  centime  ;  vert-clair,  5  c.  ; 
jaune,  10  c;  bleu,  20  c.;  orange,  40  c.  ;  rouge,  80  c.  Toute 
lettre  pour  l'intérieur,  revêtue  d'un  timbre-poste  insuffi- 
sant, est  considérée  comme  non  afihranchie,  et  taxée  comme 
telle,  sauf  déduction  du  prix  du  timbre.  Les  lettres  pour 
l'étranger,  revêtues  de  timbres  insuffisants,  sont  considé- 
rées comme  non  affranchies  et  ne  peuvent  avoir  cours,  si 
elles  sont  à  destination  de  pays  pour  lesquels  l'affranchis- 
sement est  obligatoire.  Le  poids  des  timbres-poste  est  com- 
pris dans  le  poids  des  lettres  sur  lesquelles  ils  soAt  appo- 
sés. L'emploi  fait  sciemment  d'un  timbre-poste  ayant 
déjà  servi  est  puni  d'une  amende  de  50  à  1,000  fr.  (Loi  du 
16  oct.  1849).  — L'idée  première  du  timbre-poste  remonte 
à  l'année  1653  :  la  Muse  historique  de  Loret  (16  août)  fait 
allusion  à  une  Instruction  adressée  au  public,  conservée 
aujourd'hui  à  la  Bibliothèque  impériale  de  Paris,  et  par 
laquelle  on  était  informé  qu'on  pouvait  acheter  d'avance, 
pour  les  attacher  d'une  manière  ou  de  l'autre  aux  lettres, 
des  billets  portant  les  mots  port  payé,  et  sur  lesquels  on 
aurait  à  écrire  le  jour  et  le  mois  de  l'envoi.  Il  y  avait 
aussi,  pour  les  personnes  de  la  suite  du  roi  quand  il 
n'était  pas  à  Paris,  certaines  marques  qu'elles  apposaient 
sur  leurs  lettres  à  destination  de  cette  ville.  Vers  1635 
on  1642,  les  membres  du  Parlement  anglais  obtinrent  le 
privilège  du  port  gratuit  de  leurs  lettres;  il  suffisait  d'une 
enveloppe  ponant  leur  signature  :  les  enveloppes  signées 
en  blanc  devinrent  l'objet  d'un  véritable  commerce.  En 
1823,  un  Suédois,  Treffenberg,  lieutenant  d'artillerie, 
proposa  à  l'ordre  de  la  noblesse  dans  la  Diète  l'émission 
d'un  papier  timbré  destiné  à  servir  d'enveloppe  aux 
lettres,  qui  se  trouveraient  ainsi  affranchies  :  l'idée  fut 
repoussée,  mais  elle  a  été  reprise  depuis  en  Prusse  et  en 
Russie.  Le  timbre-poste,  tel  qu'il  existe  aujourd'hui,  est 
dû  à  sir  Rowland  Hill,  et  fut  employé  en  Angleterre  à 

fartir  de  1840.  L'exemple  a  été  suivi  par  la  Belgique  en 
847,  la  France  en  1848,  l'Espagne,  la  Suisse,  la  Prusse, 
l'Autriche  et  les  principaux  États  de  la  Confédération  ger- 
manique en  1850,  le  Piémont  et  le  Danemark  en  1851,  la 
Hollande  en  1852,  la  Suède  en  1855,  la  Russie  en  1857, 
la  Grèce  en  1861,  la  Moldavie  en  1862.  En  France  et  ail- 
leurs, on  se  sert  de  timbres -poste  comme  de  papier- 
monnaie,  pour  le  payement  de  sommes  minimes.      B. 

TIMOGRATIB  (du  grec  iimè,  cens,  et  cratos,  pou- 
voir], gouvernement  dans  lequel  les  fonctions  appartien- 
nent aux  citoyens  payant  un  cens,  c-à-d.  possédant  une 
fortune  déterminée. 

TIMON  (du  latin  temo)^  longue  pièce  de  bols  qui  fait 
partie  du  train  de  devant  d'un  chariot  ou  d'un  carrosse, 
et  aux  deux  côtés  de  laquelle  on  attelle  les  chevaux.  Les 
chevaux  ainsi  attelés  sont  dits  timoniers. 

TIMONNERIE,  en  termes  de  Marine,  espace  situé  sur 
le  gaillard  d'arrière,  près  du  mât  d'artimon,  et  où  se 
trouvent  la  roue  du  gouvernail,  les  habitacles,  les  com- 
pas de  route,  les  horloges,  les  boussoles,  etc.  Le  nom 
vient  de  ce  qu'autrefois  la  barre  du  gouvernail  s'appelait 
timon.  Les  timoniers  sont  les  hommes  de  l'équipage  à 
qui  l'on  confie  le  soin  de  diriger  le  timon.  Le  Maître  de 
timonnerie  est  chargé  de  tout  ce  qui  a  rapport  aux  si- 
gnaux, aux  sondes,  an  loch,  etc. 

TIR,  action  de  lancer,  avec  une  arme  quelconque,  un 
projectile  dans  une  direction  déterminée.  La  théorie  du 
tir  constitue  la  science  appelée  Balistique.  La  ligne  sui- 
vant laquelle  on  tire  une  pièce  d'artillerie  se  nomme 
également  tir,  et  l'on  distingue  le  tir  plongeant^  le  tir 
perpendiculaire,  le  tir  oblique,  le  tir  rasant,  le  tir  à  ri' 
eochêt  :  ce  dernier  fut  employé  pour  la  première  fois  par 
Vauban  au  siège  d'Ath,  en  1697.  II  y  a,  dans  tous  les  ré- 
giments français,  des  Ecoles  de  tir,  où  Ton  décerne  des 
prix  :  les  instructeurs  chargés  de  cet  enseignement  sont 
formés  à  VÊcole  normale  de  tir  qui  est  établie  à  Vin- 
cennes. 

TIRADE,  nom  qu*on  donne  à  tout  long  développe- 
ment mis  dans  bouche  d'un  personnage  par  le  poète  dra- 
matique.—  Le  même  mot  s'employait  autrefois  en  Mu- 
sique pour  désigner  une  série  de  notes  dont  l'exécutant 
remplissait  un  intervalle,  mais  en  procédant  plus  lente- 
suent  que  dans  la  fusée  (V.  ce  mot). 

TilîAGE,  eu  termes  d'Imprimerie,  se  dit  de  l'action 


de  mettre  les  feuilles  sous  presse  ponr  les  Imprimer.  Le 
tirage  est  confié  à  une  classe  distincte  d'ouvriers,  qui  éta- 
lent l'encre  sur  la  planche,  étendent  et  fixent  les  feuilles 
blanches  sur  le  tympan,  font  mouvoir  la  presse,  etc.  Tout 
ce  travail  a  été  singulièrement  simplifié  par  l'invention 
des  presses  mécaniques.  —  Faire  plusieurs  tirages,  c'est 
exécuter  des  réimpressions  sur  les  mêmes  formes  ou 
planches. 

TIRAGE  AD  SORT.  V,  RbCRDTEITEIIT. 

TIRAILLEURS,  soldats  d'infanterie  qnl  se  dispersent 
en  avant  d'une  colonne  pour  commencer  l'attaque.  Ils  se 
placent  de  4  à  10  pas  de  distance  les  uns  d^s  autres,  ou 
constituent  de  petites  bandes,  et  exécutent  leurs  mouve- 
ments d'après  des  signaux  de  clairon.  Le  feu  une  fois  en- 
gagé, ils  se  soutiennent  mutuellement,  de  sorte  que  l'un 
ne  décharge  son  arme  que  quand  son  voisin  a  fini  de 
charger  la  sienne.  Ils  doivent  être  exerce  à  former,  par 
de  rapides  mouvements  de  concentration,  des  groupes 
capables  de  se  défendre  à  la  baïonnette.  Avant  1789,  on 
se  servit  rarement  de  tirailleurs  :  ils  étaient  appelés  en 
France  Chasseurs  à  pied  et  Enfants  perdus.  Mais  les 
guerres  de  la  Révolution,  où  le  temps  man(jua  souvent 
pour  discipliner  les  troupes,  et  où  le  combat  isolé  fut  au- 
tant de  mode  que  de  nécessité,  en  virent  naître  de  nom- 
breuses bandes.  Quand  on  en  revint  à  la  guerre  de 
manœuvres,  le  nom  de  tirailleurs  cessa  d'être  une  dési- 
gnation de  troupe.  En  1811,  Napoléon  I*'  créa  20  régi- 
ments de  tirailleurs,  rattachés  à  l'arme  des  grenadiers  à 
pied,  comme  les  flanqueurs  l'étaient  aux  chasseurs.  Ils 
furent  licenciés  après  la  chute  de  l'Empire.  Pendant  la 
Restauration,  on  s'occupa  beaucoup,  en  théorie,  de  la 
tactique  des  tirailleurs,  et  ces  études  aboutirent  à  l'or- 
donnance du  4  mars  1831.  En  1840,  on  donna  le  nom  de 
TiraUletérs  aux  bataillons  de  nouvelle  formation,  qui  ont 
été  appelés  ensuite  Chasseurs  d'Orléans,  Chasseurs  de 
Vincennes,  Chasseurs  à  pied.  En  Algérie,  les  troupes  in- 
digènes d'infanterie  sont  dites  Tirailleurs  algériens,  et 
ont  reçu  de  nos  soldats  le  nom  de  Turcos;  tous  les  offi- 
ciers supérieurs,  tous  les  capitaines,  la  moitié  des  lieute- 
nants et  des  sous-lieutenants,  les  sergents-majors  et  les 
fourriers,  y  sont  Français.  B. 

TIRANNAS,  sorte  d'airs  populaires  espagnols  du  genre 
des  boléros  et  des  seguidilles.  Ils  se  cnantent  et  ne  se 
dansent  pas.  La  mesure  est  à  3  temps,  d'un  mouvement 
un  peu  lent.  On  y  introduit  beaucoup  de  syncopes. 

TIRANT,  en  termes  de  Construction,  désigne  :  1^  une 
pièce  de  bois  qui  tient  en  état  les  deux  Jambes  de  force 
d'un  comble;  2^  une  barre  de  fer  attachée  à  une  poutre, 
et  dont  l'extrémité  porte  un  œil  qui  reçoit  une  sorte 
d'ancre  pour  prévenir  l'écartement  au  mur. 

TIRANT  d'eau  ,  quantité  dont  un  navire  enfonce  dans 
l'eau,  mesurée  depuis  le  bas  de  la  quille  jusqu'à  la  flot- 
taison {V.  ce  mot).  Le  tirant  d'eau  est  marqué,  à  l'avant 
et  à  l'arrière,  par  des  chiffres  placés  sur  l'étrave  et  sur 
l'étambot. 

TIRANTS.  V.  Registres  de  l'orgue. 

TIRASSE,  filet  où  l'on  prend  des  cailles,  des  perdrix, 
des  alouettes,  en  tirant  les  cordons  qui  le  ferment. 

TIRASSE,  nom  donné  dans  l'orgue  à  un  clavier  de  pé- 
dale qui  n'a  point  de  sommier  particulier  et  qui  tire  les 
basses  des  touches  du  clavier  à  la  main.  La  tirasse  ne  se 
trouve  que  dans  les  orgues  qui  n'ont  point  de  pédales 
séparées.  F.  C. 

TIRA-TUTTO,  registre  qui  ouvre  tous  les  Jeux  de  l'or- 
gue à  la  fois. 

TIRE,  en  termes  de  Blason,  est  sjmonjnne  de  rangée. 

TIRE-BALLE  ou  TIRE-BOORRE,  instrument  dont  on 
se  sert  pour  décharger  les  fusils. 

TIRE-BORD,  instrument  en  bois,  avis  et  à  écrou,  dont 
ou  se  sert  dans  les  chantiers  de  la  Marine  pour  faire  re- 
venir à  sa  place  le  bordage  d'un  bâtiment  qui  s'en  est 
écarté. 

TIRE-FOND,  anneau  de  fer  terminé  par  une  vis  et  qui 
sert  à  soutenir  au  plafond  un  lustre,  un  dais,  un  ciel  de 
lit,  etc. 

TIRE-LIGNE,  petit  instrument  terminé  par  deux  lames 
d'acier  à  pointe  mousse,  qui  se  resserrent  i)lus  ou  moins 
au  moyen  d'une  vis,  et  qui  sert  aux  dessinateurs  pour 
tirer  des  lignes  plus  on  moins  fines.  On  peut  l'adapter  à 
un  compas. 

TIRET,  petit  trait  horizontal  qui,  dans  un  dialogue 
écrit  ou  imprimé,  indique  le  changement  d'interlocuteur. 
Il  remplace  aussi  les  points  de  suspension,  ou  Indique 
que  l'on  passe  d'un  sujet  à  un  autre. 

TIROIR  (Pièces  à)  on  à  travestisffemenfa ,  pièces  de 
thé&tre  du  genre  comique,  composées  d'une  succession 


TOC 


1724 


TOL 


do  scènes  à  peu  près  détachées  les  ânes  des  autres,  et 
qui  déroulent  autour  d'un  personnage  toujours  en  scène 
Taction  de  plusieurs  autres,  ou  l'action  d*un  seul  sous 
divers  travestissements.  Molière  a  donné  deux  modèles 
du  genre  dans  la  Critiqua  de  l*Êcole  des  femmes  et  dans 
les  Fâcheux.  On  peut  citer  encore  le  Mercure  gaiant,  les 
Fables  d'Ésope  et  Ésope  à  la  cour  de  Boursault,  le  Pro' 
cureur  arbitre  de  Poisson,  les  Originaux  de  Fagan,  etc. 
Le  mérite  des  pièces  à  tiroir  dépend  du  talent  et  du  Jeu 
des  acteurs,  de  Tintérét  des  détails  et  du  style,  car  il  n*y 
a  ni  incidents  ni  mouvement. 

TIROIRS ,  se  disait,  au  moyen  &ge,  des  lanières  qui 
s'attachent  aux  fermoirs  de  livres. 

TIRONIENNES  (Notes).  V.  ÂBnéviATions. 

TISSERANDS,  ancienne  corporation  qui  avait  pour  pa- 
tron S^  Biaise  ou  S^  Roch.  Ses  statuts,  rédigés  en  1281 , 
furent  renouvelés  en  1586,  et  confirmés  en  4608  et  1640. 

TITRE,  degré  de  fin  de  Tor  et  de  l'argent.  V,  Buocterie. 

TrrRB,  inscription  placée  en  tète  d'un  livre  pour  indi- 
quer le  sujet  qui  y  est  traité.  On  donne  le  même  nom  à 
la  page  qui  contient  cette  inscription.  Le  faux  titre  est 
un  titre  abr^é,  imprimé  sur  le  feuillet  qui  précède  celui 
du  titre  entier.  Le  titre  courant  est  la  ligne  en  petites 
capitales  qui  est  répétée  en  haut  de  chacune  des  pages 
d'un  livre. 

TITRE,  subdivision  dans  les  Codes  de  lois,  dans  les  re- 
cueils de  Jurisprudence.  Un  livre  se  subdivise  en  titres, 
et  les  titres  en  chapitres. 

TrmB,  propriété  d'une  charge,  d'un  office,  d'une 
chaire,  etc.  Celui  qui  possède  un  titre  se  dit  titulaire, 

TITRE,  en  termes  de  Jurisprudence,  acte  constatant  une 
propriété,  un  droit  ou  une  Jouissance.  Il  est  autfientique, 
quand  il  a  été  reçu  par  un  officier  public;  exécutoire, 
quand  il  emporte  exécution  parée  contre  l'obligé  ;  gra- 
tuit, s'il  n'entraîne  aucune  obligation  ;  onéreux,  si  cer- 
taines charges  ou  conditions  y  sont  attachées.  Un  titre 
fait  foi  de  ce  qu'il  contient;  il  ne  peut  être  détruit  que 
par  un  titre  contraire,  ou  par  une  inscription  en  faux 
reconnue  fondée.  La  remise  volontaire  du  titre  par  le 
créancier  au  débiteur  fait  preuve  du  payement  ou  de  la 
remise  de  la  dette. 

TITRE,  qualification  honorifique  qu'on  donne  à  certains 
individus,  en  raison  de  la  position  qu'ils  occupent  dans 
les  rapports  de  la  vie  sociale.  Tels  sont  les  titres  que  por- 
tent les  membres  des  maisons  souveraines,  et  les  titres 
de  noblesse.  V.  Nous  et  TnrRBS. 

TITULUS,  placard  attaché  au  bout  d'un  long  bâton,  et 
que,  chez  les  Romains,  les  soldats  portaient  dans  les 
triomphes,  pour  apprendre  à  la  foule  le  nombre  des  pri- 
sonniers, la  quantité  du  butin,  les  noms  des  villes  et  des 
pays  soumis,  renseignements  écrits  en  gros  caractères. 

TITUS  (Arc  de).  V.  Ane  db  Triouphe. 

TLAPANÈQUë  (Idiome).  V.  Mexique  (Langues  du). 

TMÈSE  (du  grec  tmèsis,  coupure,  retranchement),  sé- 
paration des  éléments  qui  concourent  à  former  un  mot 
composé  ;  ainsi,  les  mots  latins  circumdare,  septentrio, 
peuvent  admettre  un  ou  plusieurs  mots  entre  circum  et 
dare,  entre  septem  et  trio  : 

Talls  hyperboreo  teptem  subjects  triinU. 

(ViRoiLB,  Gtorg.,  III,  881.) 


Tergft  daiU 


Ter  sqnamea  dretim 


{ld.,jEneid.,  II,  S18.) 


Les  mots  terminés  par  le  suffixe  cunque  peuvent  se  sé- 

Earer  ainsi  :  «  Quoi  Judicium  cunque  subierat,  damna- 
atur  (Cicéron).  »  La  poésie  grecque  ancienne  et  la  langue 
allemande  offrent  de  nombreux  exemples  de  cette  figure 
de  mots.  P. 

TOAST,  mot  anglais  qu'on  prononce  tôste,  et  qui  est 
dérivé  de  tostus  (participe  de  torrere,  rôtir),  proposition 
de  porter  une  santé  à  quelqu'un,  de  boire  au  souvenir 
d'un  événement  ou  à  la  réalisation  d'un  vœu.  Le  nom  est 
une  allusion  à  la  tranche  de  pain  que  certains  Anglais 
mettent  dans  le  vin  qui  leur  sert  à  boire  des  santés.  Les 
toasts  étaient  connus  dans  l'Antiquité  ;  c'est  ce  qu'on 
appelait  à  Rome  grœco  more  bibere  (boire  à  la  manière 
grecque),  0}iadnumerum  bibere  (boire  un  certain  nombre 
de  fois). 

TOC  rJeu  du),  en  italien  toccadegli  (touchez-les),  en 

espagnol  toccatille,  sorte  de  trictrac  qui  était  en  grande 

vogue  au  xvi*  siècle,  et  où  le  seul  but  du  joueur  était  de 

toucher^  c.-àrd.  de  battre  son  adversaire. 

TOCCATE,  en  italien  toccaka  (participe  féminin  de 

toccare,  toucher),  pièce  de  musique  cci-Ilc  pour  uu  iustru- 

t 


ment  à  touches,  tel  que  le  clavecin,  le  piano,  Torgne.  La 
toccate,  qui  a  été  remplacée  par  la  sonate  (K.  ce  mot)^ 
n'était  le  plus  souvent  composée  que  d'un  seul  morceau. 
TOCSIN  (du  vieux  français  toquer,  frapper,  et  seing  on 
sing,  cloche  ),  façon  de  battre  une  cloche  à  coups  redoa- 
blés  pour  donner  l'alarme.  Autrefois  on  a  aussi  sonné  le 
tocsin  en  signe  de  réjouissance. 

ÎS^  aÎ^**^^*  /     y*  ces  mots  notre  Dktionnaire  de 
TOGE  \       ^^^^P^^  **  d'Histoire. 

TOILETTE  \  mot  d'origine  peu  ancienne,  par  lequel  on 
désigna  d'abord  toute  petite  toile  qui  servait  à  envelopper 
des  vêtements  ou  objets  précieux,  par  exemple  ce  qui 
était  nécessaire  à  l'ajustement  d'une  femme.  Il  s'est  en- 
suite appliqué  à  la  table  sur  laquelle  on  étendait  cette 
toile  pour  y  prendre  les  objets  d'ajustement,  et  à  l'ajus- 
tement lui-même. 

TOISÉ,  art  de  calculer  les  dimensions  des  ouvrages 
d'architecture  civile  et  militaire^  c-à-d.  les  surfaces  et 
les  solidités  de  ces  ouvrages. 

TOIT  (du  latin  tectum,  fait  de  tegere,  couvrir),  couv^- 
ture  d'un  b&timent  (F.  Cooveatdrb).  U  prend  les  form» 
du  comble  (F.  ce  mot). 

TOLÈDE  (Cathédrale  de).  Cette  église,  primatiale  de 
l'Espagne,  a  été  commencée  en  1227  par  ordre  de  S^  Fer- 
dinand, sur  l'emplacement  d'un  autre  édifice  que  les 
Arabes,  pendant  leur  séjour  dans  la  ville,  avaient  con- 
verti en  mosquée.  Le  plan  est  dû  à  l'architecte  Pedro  Pc- 
rez,  qui  présida  aux  travaux  pendant  près  de  50  ans.  I^ 
dédicace  n'eut  lieu  qu'en  1492.  Le  monument  est  en 
style  ogival  le  plus  pur,  variant  parfois  de  caractère  en 
raison  des  époques.  La  grande  façade  occidentale  pré- 
sente trois  portes  garnies  de  statuettes  et  d'ornements 
délicatement  sculptés;  l'arc  de  celle  du  milieu  est  divisé 
en  deux  plus  petits,  et  surmonté  d'une  sainte  Cène.  Deux 
énormes  piliers  en  forme  de  tours,  partagés  symétrique- 
ment en  étages  et  ornés  de  20  statues,  s'élèvent  entre 
ces  portes.  Des  deux  tours  d'angle,  l'une  est  restée  ina- 
chevée, et  a  été  couverte  d'un  dème  octogone  par  Georgirs 
Teotocopuli.  L'autre,  dont  TefTet  est  très-beau,  a  été  ter- 
minée en  1535,  et  atteint  une  élévation  de  90  met.  Elle 
est  partagée  en  trois  grands  corps  :  le  1'',  de  forme  car- 
rée, monté  sur  une  base  massive,  est  décoré  de  colon - 
nettes  et  d'arcs  gothiques,  d'asulejos  ou  faïences  vernier., 
et  couronné  par  un  balcon  à  jour  ;  le  2%  en  retrait  sur 
le  1*',  est  octOKone,  flanqué  à  ses  angles  d'élégantes  py- 
ramides rattachées  à  la  tour  par  des  arcs-boutants,  et 
présente  sur  chaque  face  une  fenêtre  ogivale  double,  ter- 
minée en  fleurons  ;  le  3*  est  une  flèche  octogone  à  la 
base,  arrondie  au  sommet,  cerclée  de  trois  couronnes 
d'épines,  et  finissant  par  une  série  de  globes  et  une  croix 
de  fer.  La  façade  méridionale  de  l'église  a  deux  portes  : 
l'une,  dite  Porte  des  lions,  précédée  d'un  parvis  ferme 
dont  la  grille  est  soutenue  par  6  colonnes  surmontées  de 
lions,  forme  une  belle  voussure  où  les  statuettes  et  les 
dais  ont  été  semés  à  profusion  ;  l'autre,  reconstruite  en 
1800,  est  d'ordre  ionique,  et  fait  un  contraste  malheu- 
reux avec  le  reste  de  Tédifice.  La  façade  du  Nord  est 
encaissée  entre  les  hautes  murailles  d'un  cloître  et  quel- 
ques vieilles  maisons  particulières.  —  L'intérieur  de  la 
cathédrale  de  Tolède  est  à  5  nefs,  séparées  par  88  piliers, 
chacun  de  16  colonnes  groupées.  Il  a  113"  de  longueur, 
57  de  largeur,  45  de  hauteur  à  la  nef  centrale,  et  e^t 
éclairé  par  150  fenêtres  ornées  de  vitraux  de  couleur.  De 
riches  chapelles  sont  pratiquées  tout  autour  de  l'édifice. 
La  Grande  chapelle,  dont  la  grille,  hante  de  9"*,  large 
de  12,  et  surmontée  d'un  Christ  colossal,  a  été  exécutée 

Ear  Francisco  de  Yillalpando,  contient  un  riche  retable  en 
ois  de  mélèze,  un  entassement  bizarre  de  volutes,  de  con- 
soles, de  balustres,  de  chapiteaux,  de  nuages  et  de  rayons 
solaires  qu'on  nomme  le  transparent,  et  les  tombeaux  d'Al> 
phonse  YII,  de  Sanche  le  Désiré,  de  Sanche  le  Brave,  etc. 
La  chapelle  mozarabe  renferme  une  belle  mosaïque  re- 
présentant la  Conception,  et  des  fresques  gotliîques  où 
l'on  a  figuré  des  combats  entre  lesTolédans  et  les  Mores. 
Dans  la  Chapelle  des  rois  nouveaux,  reposent  Henri  II, 
Jean  II,  Henri  III,  et  les  reines  leurs  femmes.  On  re- 
marque encore  le  tombeau  du  connétable  Alvaro  de  Luna 
dans  la  chapelle  S^-Jacques,  celui  du  cardinal  Garillo  de 
Albornoz  dans  la  chapelle  SMldefonse,  ^  dans  la  cha- 
pelle du  Sagrario,  un  riche  monument  de  bronze  et  de 
marbre,  appelé  l'Oc^vo  en  raison  de  sa  forme  octogone, 
et  où  l'on  a  renfermé  un  grand  nombre  de  reliques.  Le 
chœur  attire  l'attention  par  ses  trois  rangs  de  stalles, 
sculptées  au  xvi*  siècle  par  Philippe  de  Bourgogne  et 
Berruguete  ;  il  a  aussi  d'énormes  pupitres  de  bronze ,  et 


TOM 


1725 


TOM 


dtiux  orgues  de  dimensions  colossales.  A  la  sacristie, 
dont  la  voûte  a  été  peinte  par  Luca  Giordano,  est  atte- 
nante ane  salle  où  Ton  conserve,  entre  autres  trésors, 
une  custodia  en  argent  doré  de  3°^  de  hauteur,  un  man- 
teau de  la  S^*  Vierge  tout  couvert  de  pierreries,  plusieurs 
statues  en  argent  massif,  une  urne  contenant  les  osse- 
ments des  rois  gotlis  Receswinde  et  Wamba,  etc.      B. 

TOLÉRANCE,  permission  expresse  ou  tacite  qu*un 
gouvernement  accorde  aux  citoyens  de  pratiquer  telle 
religion  qui  leur  convient.  G*est  ce  qu*on  appelle  la  tolé- 
ranc9  civile.  Ainsi  comprise,  la  tolérance  ne  date  que  de 
la  Réformation  du  xvi*  siècle.  Toutefois,  elle  n'est  point 
inhérente  à  cette  Réformation,  puisque  Luther,  Calvin , 
les  Anglicans,  ont  été  très-intolérants  à  Tégard  des  ca- 
tholiques, tout  en  réclamant  la  tolérance  pour  éux- 
roèmes.  Il  en  est  de  même  de  TÉglise  grecque  russe  à 
regard  des  autres  communions  chrétiennes.  Le  luthéra- 
nisme obtint  la  tolérance  en  Allemagne  à  la  suite  d'une 
guerre  de  religion,  par  la  paix  d'Augsbourg,  en  1555;  le 
calvinisme  ne  s'y  fit  légalement  une  place  qu'après  la 
guerre  de  Trente  Ans,  lors  des  traités  de  Westphalîe, 
en  1648.  En  France,  les  guerres  de  religion  aboutirent, 
en  1598 ,  à  un  édit  de  tolérance  pour  les  calvinistes  : 
ce  fut  redit  de  Nantes,  que  Louis  XIV  révoqua  en  1685; 
la  tolérance  reparut  au  temps  de  Louis  XVI,  mais  elle 
n'est  devenue  complète  que  depuis  1781K  La  tolérance  la 
plus  absolue  règne  aux  États-Unis  d'Amérique.  L'intolé- 
rance dans  l'ordre  politique  et  civil  deviendra  de  Jour  en 
jour  plus  rare  chez  les  nations.  B. 

TOLÉRANCB,  différence  que  la  loi  tolère  dans  le  poids 
légal  des  denrées,  ou  dans  la  fabrication  des  monnaies 
par  rapport  à  l'alliage  et  au  poids  prescrits.  V.  Droit  et 

ABUS. 

TOLET,  cheville  en  bois  ou  en  fer  enfoncée  dans  le 
plat-bord  d'une  embarcation  pour  retenir  l'aviron. 

TOLETIÈRE ,  renfort  en  bois  placé  sur  le  plat- bord 
d'un  bateau  à  rames,  et  dans  lequel  on  perce  des  trous 
pour  recevoir  les  tolets. 

TOLLENON ,  machine  de  siège.  V.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d* Histoire. 

TOLMAN,  mot  employé  en  Angleterre  comme  syno- 
nyme de  dolmen  {V.  Celtiques  —  Monuments). 
^TOLPACHE  ou  TALPACHE,  nom  qu'on  donnait  autre- 
fois aux  fantassins  hongrois. 

TOMAHAWK,  hache  d'armes  ou  casse-tète  des  Indiens 
de  l'Amérique  du  Nord  (  K.  Cassb-tétb).  Il  est  le  symbole 
(lo  la  guerre,  et  Ton  dit  au  figncirô  :  enfouir  le  tomahawk, 
pour  dire  qu'on  observe  la  paix. 

TOMAN.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d^Histoire, 

TOMBALES  (Pierres),  un  des  principaux  ornements 
du  pavé  des  grandes  églises  au  moyen  &ge.  Ces  pierres, 
garnies  d'inscriptions  et  de  sculptures  gravées  en  creux, 
ne  paraissent  pas  remonter  au  delà  du  xii'  siècle;  mais, 
à  partir  du  xm',  elles  reçurent  une  très-riche  ornemen- 
tation :  les  traits  de  la  gravure  furent  remplis  de  mastics 
colorés,  et  môme  de  métal  fondu.  On  représentait  d'or- 
dinaire le  personnage  défunt,  les  mains  jointes  sur  la  poi- 
trine, les  pieds  appuyés  sur  un  animal  symbolique.  Sou- 
vent la  tête  était  abritée  sous  un  dais,  et  de  chaque  côté 
s'élevaient  des  colonncttes  ou  des  contre-forts  simulés, 
interrompus  de  distance  en  distance  par  des  niches  gar- 
nies d'Anges  ou  de  Saints.  Parfois  on  voyait  dans  lo  cou- 
ronnement Abraham  portant  dans  son  sein  l'àme  du 
dt^funt,  à  moitié  cachée  sous  un  voile  tenu  par  ce  pa- 
triarche. Tout  autour  des  pierres  tombales  règne  une 
inscription,  où  sont  relatés  les  noms,  titres,  qualités  du 
défunt,  le  jour  de  sa  mort,  son  âge,  avec  une  courte 
prière.  Au  xv*  siècle,  la  figure  et  les  mains  des  grands 
personnages  étaient  souvent  en  marbre  incrusté  dans 
la  dalle  funéraire.  On  trouve  de  belles  pierres  tom- 
bales dans  les  églises  de  Rouen,  de  Troyes,  de  Noyon,  de 
liaon,  de  Ch&loo-sur-Saône,  etc.  C'est  principalement  en 
Angleterre  qu'on  a  incrusté  du  cuivre  dans  les  dalles  de 
pierre,  pour  représenter,  soit  la  figure  des  morts,  soit  des 
emblèmes  religieux. 

TOMBEAUX,  monuments  élevés  à  la  mémoire  des 
morts,  et  empreints  d'un  caractère  sacré  en  rapport  avec 
la  religion  des  peuples  qui  les  érigent.  Chez  les  Anciens, 
lo  culte  du  tombeau  s'est  partout  mêlé  au  culte  public, 
et  c'est  ce  qui  explique  comment  de  simples  monuments 
funéraires  égalaient  en  grandeur  et  en  magnificence  les 
édifices  consacrés  à  la  Divinité.  Sous  le  nom  général  de 
tombeaiux,  on  comprend  :  les  tombes,  ou  pierres  tom" 
baies,  pierres  tumulaires,  soit  plates,  soit  dressées,  qui 
recouyjriQt  les  modestes  sépultures;  les  tombeaux  pro- 


prement dits,  petites  constructions  au-dessus  des  sépul- 
tures, ou  qui  renferment  des  morts;  les  mausolées,  les 
sépulcres,  les  hypogées,  les  cippes,  les  colombaires,  les 
tumuli  (K.  ces  mots). 

TOMBEAUX  ARTIQUESr 

Hindoustan»  —  Les  topes  ou  stupas,  monuments  funé- 
raires signalés  peut  la  première  fois  par  Elphinston , 
sont  des  édifices  cylindriques  couverts  d'une  coupole 
sphérique,  mais  dont  les  pierres  ne  sont  pas  appareillées 
par  joints  rayonnants.  La  chambre  sépulcrale  était  petite, 
carrée,  et  placée  au  centre  de  la  masse,  que  couron- 
naient souvent  quatre  sphères  placées  en  pyramide.  On 
compte  quatre  groupes  principaux  de  topes  :  le  1''  pn-s 
de  Peichaver,  sur  la  rivière  de  Caboul  ;  le  2*  dans  Ici 
environs  de  Jellabad;  le  3*  près  de  Caboul,  où  on  les 
appelle  burj  ou  tours  ;  le  4*  à  Béghram,  au  pied  de  l'in- 
dou-Kooch.  V.  Ritter,  Die  stupas,  in-8°,  1838.  —  Dans 
l'Ile  de  Ceylan,  les  tombeaux  ou  dagobas  ont  une  grande 
analogie  avec  les  topes.  Ce  sont,  en  général,  des  tumuli 
gazonnés,  recouverts  ou  entourés  d'un  mur  en  brique. 
Le  plus  célèbre,  appelé  Djata-Ouana-Rama,  est  un  cône 
de  gazon  qui  repose  sur  une  large  plate-forme  et  que  sur- 
monte une  construction  ovoide  en  brique  parfaitement 
conservée  ;  ce  monument  n'a  pas  moins  de  80  met.  de 
hauteur.  Un  peu  au  N.-E.  d'Arenadjapura,  on  rencontre 
un  grand  nombre  de  dagobas  entourés  de  rochers  à  pic 
et  abrités  par  de  belles  plantations  d'acacias. 

Chine,  —  Les  cimetières  se  placent  hors  des  villes , 
sur  quelque  éminence  garnie  de  pins  ou  de  cyprès.  Les 
pauvres  se  contentent  d'un  tumulus;  les  princes  et  les 
riches  se  font  construire  de  vastes  tombeaux  contenant 
de  nombreuses  salles,  et  qui  ressemblent  plutôt  à  des 
pillais  qu'à  des  monuments  funèbres.  On  trouve  aussi 
en  Chine  des  monuments  tout  à  fait  analogues  à  ceux 
de  rinde:  on  les  désigne  par  les  noms  de  tha  (tour),  et  de 
sou-tu-po  (éminence). 

Perse.  —  A  8  kilom.  environ  des  ruines  de  Persé- 
polis,  la  colline  qui  circonscrit  la  plaine  de  Mardascht 
renferme  quelques  sépultures  royales.  L'un  de  ces  pré- 
cieux monuments  n*a  pas  moins  de  33  met.  d'élévation  : 
la  porte  donne  accès  à  plusieurs  salles  funèbres  qui  com- 
muniquent entre  elles,  et  dont  les  parois  étaient  ornées 
de  bas-reliefs  aujourd'hui  presque  ruinés,  et  d'inscrip- 
tions qui  ont  permis  de  regarder  les  tombeaux  qu'elles 
renfermaient  comme  ceux  de  Darius  Nothus,  d'Artaxerxès 
Longue-Main,  d'Ochus,  et  d'Artaxerxès  Mnémon.  Quant 
au  tombeau  de  Csnrus,  nous  savons  par  les  traditions 
historiques  qu'il  était  isolé,  et  b&ti  en  forme  de  py- 
ramide. 

Asie  Mineure.  —  Le  monument  funéraire  le  plus  re- 
marquable et  le  plus  fameux  est  celui  que  la  reine  Ar- 
témise  fit  élever  à  Halicarnasse  en  l'honneur  de  son 
époux  Mausole,  roi  de  Carie  :  cette  construction  prit  le 
nom  de  mausolée,  qui  ensuite  a  été  donné  aux  monu- 
ments funèbres  du  même  genre  (V.  Mausolék,  dans 
notre  Diciionn.  de  Biographie  et  d'Histoire).  —  Les  tom- 
beaux de  la  Lycie  ont  cela  de  particulier,  qu'ils  offrent 
an  des  premiers  exemples  de  l'arc  en  ogive. 

Palestine.  —  Près  de  Jérusalem  se  trouvent  un  certain 
nombre  de  tombeaux  des  anciens  Juifs.  Ainsi,  dans  le 
village  arabe  de  Siloan,  qui  occupe  une  partie  de  la  vallée 
de  Josaphat,  et  au  milieu  d'une  multitude  de  débris,  on 
distingue  les  tombeaux  de  Zacharie,  de  Josaphat,  et  d'Ab- 
salon.  Au  N.  de  la  ville,  près  de  la  porte  d'Éphraîm,  sont 
les  Sépulcres  des  rois,  non  pas  des  rois  antérieurs  à  la 
captivité  de  Babylone,  qui  furent  inhumés  sur  le  mont 
Sion ,  mais  des  derniers  rois  de  la  Judée ,  successeurs 
d'Hérode.  C'est  un  précieux  monument  d'architecture 
antique.  On  y  pénètre  par  une  excavation  assez  semblable 
à  une  carrière,  et  l'on  arrive  à  une  salle  taillée  dans  lo 
roc,  de  10  met  de  côté,  et  haute  de  5  met.  Au  centre  de 
l'un  des  côtés,  une  grande  porte  carrée,  d'ordre  dorique, 
surmontée  d'une  frise  très-délicatement  sculptée,  donne 
accès  à  un  couloir  bas,  qui  aboutit  par  une  pente  assez 
roide  à  une  nouvelle  chambre  cairée.  Là,  des  trous  de 
2"*  de  long  sur  l"*  de  large  ont  été  pratiqués  dans  les 
parois,  pour  y  placer  des  cercueils.  Trois  portes  voûtées 
conduisent  de  cette  chambre  dans  d'autres  demeures  sé- 
pulcrales d'iné^Ede  grandeur,  toutes  taillées  dans  le  roc 
vif,  et  où  l'on  voit  aussi  des  trous  pour  les  cercueils,  et 
des  fragments  de  cercueils  en  pierre  ornés  d'arabesaues. 
Il  est  remarquable  que  les  portes  de  ces  chambres  sépul- 
I  craies  sont  de  la  même  pierre  que  la  fn'otte,  ainsi  que 
'  les  gonds  et  les  pivots  sur  lesquels  elles  tournent.  Un 


TOM 


1726 


TOM 


peu  au  N.-O.  des  sépulcres  dt»  rois,  il  y  a  d'autres  tom- 
beaux qu'on  donne  pour  ceux  des  Juges  d'Israél,  Otho- 
aiel,  Gédéon,  Jephté,  Samson,  etc. 

Egypte.  —  Les  sépultures  égyptiennes  sont  de  diffé- 
rents genres.  Il  y  a  d'abord  les  hypogées  ou  syringes , 
creusés  dans  le  flanc  des  montagnes,  et  dont  les  plus  im- 
portants se  rencontrent  dans  la  Nubie  et  dans  la  Haute- 
Egypte.  Depuis  un  certain  nombre  d'années,  ils  ont  été 
visités  et  étudiés  avec  soin  :  on  y  a  trouvé  des  bas-reliefs, 
des  peintures  aussi  vives  que  lorsqu'elles  furent  appli- 
quées, et  où  sont  représentés  tous  les  us  et  coutumes  de 
ces  époques  reculées.  La  façade  est  ordinairement  taillée 
verticalement  dans  le  rocher,  et  ornée  de  peintures  et  de 
sculptures.  La  vallée  de  Biban-el-Molouk,  dépendance  de 
l'ancienne  Thèbea,  présente  un  hypogée  royal,  où  ont 
été  placés  les  souverains  des  18**,  19*  et  20*  dynasties 
de  l'Egypte.  £n  second  lieu,  l'Egypte  nous  a  laissé  des 
monuments  funéraires  isolés,  tels  que  les  Pyramides, 
dont  quelques-unes  avaient  une  entrée  apparente,  tandis 
que  cellç  des  autres  était  masquée  (F.  Pyramides,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire).  Enfin 
les  Nécropoles  étaient  de  vastes  galeries  souterraines  où 
l'on  empilait  les  corps  grossièrement  embaumés  des  gens 
du  peuple.  Les  plus  grandes  qu'on  ait  visitées  étaient 
celles  d'Abydos  et  de  Sais.  Il  y  avait  des  nécropoles  par- 
ticulières pour  les  animaux  sacrés,  tels  que  les  croco- 
diles, les  ibis,  etc. 

Grèce.  —  En  Grèce,  les  lieux  de  sépulture  étaient  situés 
ordinairement  hors  des  villes.  A  Athènes,  on  enterra 
d'abord  les  morts  dans  leur  maison  ;  mais,  aux  temps 
historiques,  les  tombeaux  furent  relégués  hors  des  murs. 
On  les  toléra  dans  l'intérieur  de  Sparte  et  de  Mégare. 
Les  tombes  s'élevaient  le  plus  souvent  au  bord  des  routes 
et  près  des  portes  des  villes.  Dans  le  principe,  les  mo* 
numents  funéraires  furent  d'une  grande  simplicité;  ils 
se  composaient  d'un  tumulus  où  l'on  déposait  l'urne  ci- 
néraire, qu'on  entourait  d'un  mur,  et  qu'on  surmontait 
d'une  stèle  ou  d'une  colonne  commémorative ,  portant 
quelque  figure  allégorique  et  le  nom  du  défunt.  Plus  tard, 
on  déploya  dans  les  tombeaux  une  magnificence  que  les 
magistrats  essayèrent  vainement  plusieurs  fois  de  répri- 
mer. Ce  fut  ainsi  que  Solon  défendit  d'élever  aucun 
tombeau  que  dix  ouvriers  ne  pourraient  bâtir  en  trois 
Jours,  et  que  Démétrius  de  Phalère  interdit  les  monu- 
ments de  plus  de  trois  coudées  de  hauteur  (1"\33).  La 
décoration  reçut  les  ordonnances  dorique,  ionique  ou  co- 
rinthienne, et  il  y  eut  de  vastes  tombeaux  composés 
de  plusieurs  salles  richement  meublées  et  décorées, 
où  les  parents  venaient  à  certains  Jours  offrir  des  sa- 
crifices aux  divinités  infernales.  L'usage  des  peintures 
sur  les  parois  était  inconnu.  On  considérait  les  tom- 
beaux comme  des  propriétés  privée  ;  ils  appartenaient 
exclusivement  aux  familles  dont  les  membres  y  avaient 
été  placés. 

Êtntriê.  —  Plusieurs  colonies  venues  de  pays  divers 
apportèrent  des  coutumes  différentes  :  c'est  ce  qui  ex- 
plique pourquoi,  à  Tarquinies  et  à  Vulci,  fondées  par  des 
peuples  venus  d'Orient,  les  cadavres  étaient  vêtus,  et 
couchés  dans  les  sépultures  sur  des  lits  funèbres;  à 
Castel  d'Asso,  à  Norcnia,  à  Bormazzo,  suivant  les  usages 
des  Aborigènes,  les  corps  étaient  déposés  dans  des  sar- 
copbages  bruts  ou  décorés  de  peintures;  à  Chiusi,  à  Vol- 
terra,  à  Toscanella,  les  cendres  des  corps  brûlés  étaient 
déposées  dans  des  urnes  de  pierre  sculptées,  et  plus  tard 
dans  des  vases  en  terre  cuite.  Dans  les  plaines  de  Vulci 
et  de  Tarquinies,  on  creusait  des  galeries  souterraines 
où  se  plaçaient  les  sépultures,  et  on  les  surmontait  d'un 
tumulus  conique,  soutenu  à  sa  base  par  un  mur  circu- 
laire, et  couronné  d'une  stèle  ou  de  quelque  figure  sym- 
bolique. A  Toscanella,  les  sépultures  sont  creusées  dans 
la  rocbe,  et  présentent,  à  l'extérieur,  des  portes  en  sail- 
lie, formées  d'un  soubassement  du  genre  dorique,  et 
surmontées  d'une  pyramide  quadrangulaire;  à  l'inté- 
rieur, de  lourds  piliers  soutiennent  les  plafonds,  remar- 
quablement découpés  en  caissons  couverts  de  peintures 
et  de  sculptures.  Telles  sont,  notamment,  les  grottes  de 
Corneto.  K.  Étbcsqoe  (Art). 

Rome.  —  Les  sépultures  romaines  présentent  les  formes 
les  plus  diverses.  Dans  le  principe,  elles  reproduisirent 
la  forme  des  monuments  funéraires  de  l'Étrurie;  le  tom- 
beau dit  des  Horaces  et  des  Guriaces  rappelle  celui  de 
Porsenna.  plus  tard,  les  artistes  romains  s'inspirèrent 
des  modèles  de  la  Grèce,  et  créèrent  une  foule  de  monu- 
ments funéraires  riches  et  gracieux,  sur  lesquels  on  lisait 
toujours,  en  tète  de  l'inscription,  les  mots  Dis  Manibus. 
Uiïï  tombeaux  étaient  placés  en  deUom  é9^  villes,  et  s'ac- 


cumulaient près  des  portes  en  formant  de  longues  avenues 
La  grande  porte  de  Pompéi  offre  un  modèle  de  ce  genre  de 
constructions.  On  distinguait  plusieurs  espèces  de  tom- 
beaux :  le  monumentum  était  un  édifice  consacré  à  la 
mémoire  d'une  personne,  de  sorte  que  le  même  mort 
pouvait  en  avoir  plusieurs;  le  sepulcrum  renfermait  b 
dépouille  mortelle;  le  cenotaphium,  tumulus  honorarius 
ou  inanis,  était  destiné  à  conserver  la  mémoire  d*uo 
homme  dont  on  ne  pouvait  retrouver  le  corps;  le  mou- 
soleum  était  un  édifice  d'une  grande  magnificence  ;  il  y 
avait  encore  les  pyramides,  les  columelles  ou  cippes,  qui 
formaient  la  classe  la  plus  nombreuse  des  monuments 
funéraires  des  Romains.  Quelques  tombeaux  ont  atteint 
des  proportions  gigantesques,  comme  ceux  d'Auguste  et 
d'Adrien  (F.  Madsol^b,  dans  notre Diciionn.  de  Biogra- 
phie et  d^ Histoire).  Il  y  avait  des  sépulcres  souterrains 
{conditoria,  conditiva)  où  l'on  plaçait  les  cadavres  qui 
n'avaient  pas  été  brûlés.  L'usage  de  déposer,  dans  les 
tombes,  des  vases,  des  objets  chers  aux  défunts,  a  donné 
une  bien  grande  importance  aux  recherches  archéologi- 
ques, en  faisant  retrouver,  encore  intacts,  après  bien  des 
siècles  écoulés,  tous  les  ustensiles  dont  se  servaient  les 
Romains  dans  la  vie  ordinaire. 

Gaule.  —  V,  Celtiques  (Monuments). 

Sardaignê.  —  Il  existe  dans  ce  pays  des  monuments 
qui  remontent  à  une  haute  antiquité  et  auxquels  on  at- 
tribue un  caractère  funéraire.  Ce  sont  d'abord  des  exca- 
vations pratiquées  dans  le  flanc  vertical  des  collines  :  les 
ouvertures,  petites  et  carrées,  rangées  en  ligne,  ressem- 
blent de  loin  à  une  file  de  fenêtres;  elles  donnent  entri'e 
à  des  chambres  basses,  étroites  et  communiquant  entre 
elles.  Ailleurs,  on  voit  des  pierres  rangées  suivant  un 
contour  plus  ou  moins  régulier,  et  rappelant  les  monu> 
ments  druidiques  de  la  Gaule;  on  les  nomme  les  Sépul- 
tures des  Géants.  Enfin  viennent  les  Noraghes^  construc- 
tions funéraires  bâties  sur  un  plan  elliptique  ou  circulaire 
et  le  plus  souvent  terminées  dans  leur  partie  supérieure 
par  une  espèce  de  tour  en  forme  de  pain  de  sucre.  11  y 
en  a  de  très-compliquées,  qui  sont  entourées  de  construc- 
tions adjacentes,  et,  suivant  leur  forme,  on  les  distingue 
par  les  désignations  dt simples ^  agrégées,  réunies,  et 
ceintes.  V.  Noraghes,  dans  notre  Dictionnaire  d  eBiogra- 
phie  et  d'Histoire.  — V.  Bellori,  Veterumsepulcra,  Lej'de, 
1728,  in-fol.  ;  Quensted,  De  septUcris  veterum,  Yiterbc, 
1700,  in-S*. 

TOMBEAUX  MODERNES. 

Les  pi*emiers  monuments  funéraires  des  chrétiens 
furent  les  Catacombes  (  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d^Histoire).  La  forme  la  plus  ordinaire 
des  tombàiux  depuis  Constantin  fut  la  forme  circulaire. 
Ce  prince,  ayant  perdu  sa  fille  Constance,  en  déposa  les 
restes  dans  le  baptistère  de  S**-Agnès,  dont  il  fit  une 
chapelle  funéraire.  Le  monument  le  plus  remarquable 
de  cette  époque  est  l'église  du  S^-Sépulcre  à  Jérusalem, 
à  laquelle  on  imprima  un  caractère  funèbre  en  lui  don- 
nant la  forme  circulaire,  tandis  que  l'église  de  Bethléem, 
où  l'on  ne  devait  entendre  que  des  chants  de  fête,  avait 
reçu  la  forme  basilicale. 

Dans  les  premiers  temps  de  l'ancienne  France,  les 
tombes  ne  furent,  la  plupart  du  temps,  que  des  au^  de 
pierre  sans  ornement.  Quand  on  voulut,  dans  le  ix*  siècle, 
donner  à  Charlemagne  un  tombeau  digne  de  lui,  on 
n'imagina  rien  de  mieux  que  de  prendre  un  sarcopha^^ 
antique  représentant  l'enlèvement  de  Proserpine.  Plus 
tard,  l'art  s'empara  des  monuments  funèbres.  Le  moyen 
âge  et  la  Renaissance  n'adoptèrent  pas  de  formes  parti- 
culières pour  les  tombeaux,  qui  furent  successivement 
décorés  suivant  le  goût  variable  des  époques.  A  l'arcade 
romane  et  aux  ornements  byzantins  succédèrent  Togive  et 
les  découpures  gothiques.  Il  nous  est  parvenu  beaucoup 
de  monuments  funéraires  du  moyen  &ge  ;  on  en  avait  éri.^é 
de  très -remarquables,  entre  autres  :  ceux  des  comtes  de 
Champagne,  Henri  I*'  et  Thibaut  III ,  dans  l'élise  S^ 
Etienne  de  "Troyes,  mais  qui  n'existent  plus;  ceux  des  ducs 
de  Bourgogne,  Philippe  le  Hardi  et  Jban  sans  Peur,  qui  se 
voient  encore  à  Dijon.  La  Renaissance  italienne  ramena 
la  finesse  des  détails  de  l'art  antique,  et  nous  en  avons 
de  eharmants  modèles  dans  les  tombeaux  de  Louis  XH, 
de  François  I",  et  de  Henri  II  dans  l'église  abbatiale  de 
S^-Denis;  des  cardinaux  d'Amboise  et  de  Pierre  deBré2é 
dans  la  cathédrale  de  Rouen  ;  du  duc  de  Bretagne  Fran- 
çois II,  dans  la  cathédrale  de  Nantes;  de  Marguerite  de 
Bourbon,  de  Philibert  le  Beau  et  de  Marguerite  d'Au- 
triche, dans  l'église  de  Brou  ;  de  Charles  le  Téméraire  et 
de  Marie  de  Bourgogne,  à  Notre-Dame  de  Bruges.  L'Aile* 


tON 


Un 


tON 


ttagno  vante  avec  raison  le  tombeau  de  S*  Sébald  à  Nu- 
remberg, et  celui  de  Tempereur  Maximilien  I*'  à  Ins- 
prQck  ;  ritalie,  les  tombeaux  de  Jules  II  et  des  Médicis 
par  Michel-Ange,  et  celui  du  pape  Alexandre  VII  par  le 
Bernln.  On  aimait  alors  soit  à  placer  Timage  couchée  du 
mort  sur  le  sarcophage,  soit  h.  accompagner  de  statues  le 
mausolée,  et,  tandis  que  les  tombeaux  de  TAntiquité  ont 
été  surtout  des  monuments  de  construction  et  d'archi- 
tecture, les  mausolées  modernes  sont  plutôt  des  ouvrages 
do  sculpture.  Le  xvii«  siècle  introduisit  un  nouveau 
genre  de  mausolées,  composés  de  la  statue  du  personnage 
et  d'un  sarcophage  accompagné  de  statues  allégoriques , 
comme  ceux  de  Colbert,  de  Mazarin,  etc.  De  nos -jours, 
la  forme  des  édifices  funèbres  dépend  du  caprice  de  Tar- 
chitecte,  de  même  que  la  beauté  dépend  de  son  talent. 
Le  cimetière  du  Père  La  Chaise  ou  de  TEst,  à  Paris,  en 
renferme  de  très-remarquables ,  parmi  lesquels  nous  ci- 
terons ceux  d'Héloise  et  d'Abaihurd,  de  Casimir  Périer, 
de  Talma,  de  Masséna,  etc.  L*œuvre  la  plus  remarquable 
est  le  mausolée  de  Napoléon  I''  sous  le  dôme  de  l'église 
aes  Invalides  (  V.  Mausol^b,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire),  ht»  architectes  modernes 
emploient  avec  succès  le  style  ogival  pour  les  tom- 
beaux. 

L'architecture  musulmane  a  donné  aux  tombes  des 
formes  diverses  ;  mais  les  tombeaux  de  quelque  impor- 
tance sont  couronnés  d'une  coupole.  Les  turbés  ou  cha- 
pelles funéraires  se  placent  près  des  mosquées,  auxquelles 
elles  ressemblent  pour  la  forme;  elles  renferment  les 
corps  des  fondateurs  de  la  mosquée  ;  une  grille  laisse 
voir  le  tombeau,  recouvert  de  riches  tapis.  A  la  tète  du 
défunt  est  le  turban  ;  aux  pieds  brûlent  d'énormes  cierges, 
et  un  grand  nombre  de  lampes  éclairent  l'intérieur  de 
l't'difice.  On  élève,  en  Tlionneur  des  scheiks,  des  tombes 
qui  deviennent  un  but  de  pèlerinage,  comme  celles  qui 
renferment  les  corps  des  saints  et  qu'on  appelle  santons. 
Les  tombeaux  des  simples  musulmans  sont  indiqués  par 
une  stèle  portant  inscription  et  couronnée  d'un  turban. 
Dans  l*lnde,  les  tombeaux  des  princes  musulmans  sont 
des  édifices  considérables,  bâtis  sur  le  même  plan  que  les 
mosquées,  et  servant  de  lieu  de  réunion  pour  la  prière  : 
on  en  voit  un  grand  nombre  à  Dehli  et  à  Agra  ;  parmi 
les  plus  remarquables  nous  citerons  ceux  de  l'empereur 
Cbah-Djihan,  d'Akbar,  et  de  Hyder-Ali.  E.  L. 

TOMBELLE.  V.  ïomolos. 

TOMBEREAU ,  ancien  instrument  de  supplice  dont  on 
se  servait  pour  plonger  dans  Teau  les  femmes  coupables 
de  quelque  violence  ;  —  charrette  remplie  d'ordures,  qui 
portait  les  condamnés  au  dernier  supplice. 

TOMBOLA  (de  Titalien  tombolo,  culbute),  sorte  de 
loterie  dont  les  lots  sont,  les  uns  en  objets  de  valeur,  les 
autres  en  objets  ridicules  ou  plaisants. 

TOirBOLA.  V.  Loto. 

TOME  (du  ^c  tomos,  coupe ),  partie  d*un  livre  as- 
semblée et  reliée  à  part. 

TON  (en  latin  tonus,  en  grec  tonos)^  terme  de  Mu- 
sique. La  gamme  se  compose  d'une  succession  de  huit 
sons  différents  :  la  valeur  acoustique  de  réloignement  qui 
existe  d'un  Eon  ou  degré  à  l'autre  le  plus  voisin  se  nomme 
ton.  Toute  gamme  est  divisée  par  tons  pleins  ou  simple- 
ment tons,  et  par  demi-tons.  Les  demi-tons  se  trouvent, 
dans  le  mode  majeur,  entre  le  3*  et  le  4*  degré,  et  entre 
le  7*  et  le  8*;  dans  le  mode  mineur,  le  premier  demi-ton 
est  entre  le  2"  et  le  3*  degré.  Les  demi-tons  peuvent  être 
déplacés  dans  le  cours  de  la  mélodie  par  l'emploi  des 
signes  accidentels  (  V.  AcaoENTS).  La  gamme  du  mode 
majeur,  comme  celle  du  mode  mineur,  contient  une  va- 
leur réelle  de  six  tons.  —  Le  mot  ton  désigne  aussi  le 
degré  de  l'échelle  musicale  que  le  compositeur  choisit 
pour  en  faire  la  base  et  le  point  de  départ  d'un  morceau, 
c-à-d.  pour  lui  faire  prendre  le  rang  de  1*'  degré  :  ainsi, 
un  morceau  est  écrit  dans  le  ton  d'ut,  dans  le  ton  de 
fa ,  etc.  ;  la  nature  de  la  tierce  du  ton  détermine  le  mode 
de  ce  ton,  qui  est  majeur  ou  mineur  {V,  Mode).  La  note 
qui  sert  de  1*'  degré  est  la  tonique  ;  celle  du  2*,  la  sus- 
tonique;^^  3*,  la  méiiante:  du  4*,  la  sous-dominante; 
du  5*,  la  dominante;  du  6%  la  sus-dominante;  du  7*,  la 
ensible;  du  8*,  Voctave,  On  attribue  d'ordinaire  aux  tons 
certains  caractères  particuliers,  qui  varient  l'expression 
musicale  et  ses  effets  :  par  exemple,  les  tons  de  ré  et  de 
mi  majeurs  seraient  propres  à  exprimer  des  sentiments 
nobles  et  belliqueux,  le  ton  de  fa  mineur  serait  lu- 
gubre, etc.  C'est  une  erreur  qui  provient  de  l'usage  des 
instruments  à  tempérament,  c-ii-d.  qui  font  le  dièse 
et  le  bémol  sur  la  même  touche  ou  avec  le  même  doigté  ; 
presque  toujours,  sur  ces  instrnmcnt«,  certaines  gammes 


sont  rendues  plus  justes  aux  dépens  des  autres  :  delà 
l'inégalité  réelle  des  gammes  et  les  effets  différents  qu'elles 
produisent  sur  nous.  Mais  pour  la  voix ,  à  quelque  degré 
gu'on  prenne  la  tonique,  les  rapports  des  sons  restent 
identiauement  les  mêmes;  si  l'air  affecte  plus  ou  moins 
agréablement  notre  oreille,  c'est  qu'il  a  pour  ainsi  dire 
son  point  d'andition,  hors  duquel  il  perd  de  ses  qualités. 
C'est  pour  cette  raison  qu'il  est  mauvais  de  transposer  à 
l'orchestre  certains  morceaux,  pour  la  commodité  des 
chanteurs.  On  appelle  tons  relatifs  ceux  dont  la  gamme 
présente  de  l'affinité  (  V,  ce  mot)  avec  le  Ion  principal. 
—  Dans  le  Plain-Chant,  le  mot  ton  a  reçu  une  acception 
particulière  (  V.  Mode). —  Donner  le  ton,  prendre  le  ton, 
c'est,  dans  une  réunion  de  musiciens,  s'accorder  avant 
de  commencer  (  V.  Accord  des  instruments).  B. 

TON,  degré  d'élévation,  de  gravité  ou  d'acuité,  que 
prennent  les  voix  ou  sur  lequel  sont  montés  les  instru- 
ments. En  ce  sens  on  dit  que  le  ton  d'un  piano  est  trop 
haut  ou  trop  bas. 

TON ,  nom  donné  aux  tubes  qu'on  ajoute  &  certains  in- 
struments, comme  le  cor,  et  dont  le  développement  plus 
ou  moins  grand  baisse  ou  hausse  le  diapason  général. 

TON ,  tonte  inflexion  de  la  parole  humaine.  En  ce  sens 
on  dira  un  ton  suppliant ,  un  (on  de  maitre,  le  ton  plai- 
sant, le  ton  oratoire ,  etc.  De  là  cenaines  locutions: 
prendre  un  ton,  changer  de  ton,  baisser  le  ton,  etc. 

TON ,  se  dit  du  langage  et  des  manières  :  le  bon  ton , 
le  mauvais  ton,  le  ton  de  la  cour,  le  ton  des  halles,  etc. 

TON,  en  termes  de  Peinture,  exprime  la  nature  des 
teintes ,  leurs  degrés  de  force  ou  d'éclat  :  un  ton  clair, 
un  ton  vigoureux,  etc. 

TON,  en  termes  de  Marine,  partie  du  mât  comprise 
entre  les  barres  de  hune  et  le  chouquet.  Là  s'assemblent, 
par  en  haut,  et  au  moyen  du  chouquet,  le  bout  du  tenon 
du  màt  inférieur  avec  le  màt  supérieur  ;  par  en  bas ,  et 
au  moyen  d'une  cheville  de  fer  appelée  clef,  le  pied  du 
mftt  supérieur  avec  le  tenon  du  m&t  inférieur. 

TON  D*onGUE.  Lorsque  l'orgue  était  accordé  d'après  les 
proportions  canoniques  des  longueurs  de  32,  ou  16,  ou 
8  pieds  pour  Vut  grave,  cet  accord  constituait  le  ton 
d'orgue,  et  le  distinguait  du  ton  de  l'orchestre,  plus  haut 
d'un  demi-ton  environ  en  1790,  et  aujourd'hui  élevé  de 
plus  d'un  ton.  Les  facteurs  de  nos  jours  assimilent  le 
diapason  de  l'orgue  à  celui  de  l'orchestre.  Autrefois,  en 
Italie,  en  Espagne  et  en  Portugal,  l'orgue  était  (Dêmc  ac- 
cordé une  tierce  mineure  an-dessous  du  ton  du  aiapason 
moyen. 

TON  DO  QUART,  Dom  qu*oo  a  donné  dans  la  musique 
d'Église  an  plagal  du  mode  mineur,  qui  s'arrête  et  finit 
sur  la  dominante  au  lieu  de  tomber  sur  la  tonique.  II 
vient  de  ce  que  telle  est  la  modulation  du  4*  ton  dans  le 
Plain-Chant. 

TONS  DE  CHASSE,  petits  airs  que  les  piqueurs  son- 
nent sur  la  trompe  pour  guider  les  chiens  dans  une 
chasse.  Ils  sont  écrits  à  G/8,  dans  un  mouvement  vif,  et 
n'ont  guère  plus  de  8  mesures.  Ils  sont  au  nombre  de  10. 

TONADILLA  ou  TONADILLE,  nom  qu'on  donne  en 
Espagne  à  une  chanson  bouffonne  ou  satirique  dont  la 
mesure  et  le  mouvement  changent  plusieurs  fois.  On  l'a 
appliqué  de  nos  jours  à  une  espèce  de  scène  théâtrale, 
assez  semblable  à  notre  vaudeville,  si  ce  n'est  qu'on  y 
introduit  de  grands  morceaux  empruntés  aux  meilleurs 
opéras. 

TONALITÉ ,  en  termes  de  Musique ,  propriété  caracté- 
ristique d'un  ton  (V.  ce  mot),  La  tonalité  d'un  morceau 
est  déterminée  par  la  note  sensible  et  Vaccord  parfait, 
qui  établissent  le  ton  et  son  mode.  —  On  nomme  aussi 
Tonalités  les  diverses  manières  de  combiner  les  sons  et 
d'en  former  un  système.  Chez  les  Anciens,  la  tonalité 
était  formulée  par  les  tétracordes  ou  séries  de  quatre  sons 
qu'on  ajoutait  les  uns  aux  autres,  et  dont  la  combinaison 
produisait  15  notes  ou  échelles  tonales.  Dans  le  Plain- 
Chant  ,  les  formules  ou  intonations  de  la  psalmodie  ont 
été  le  principe  de  quatre  modes,  subdivisés  plus  tard  en 
huit,  et  dans  lesquels  est  compris  tout  le  corps  du  chant 
ecclésiastique.  Dans  la  musique  moderne,  il  n'y  a  plus 
que  deux  modes,  le  majeur  et  le  mineur.  Chacun  des 
modes,  dans  chsique  tonalité ,  a  son  expression  propre, 
qui  résulte  des  rapports  et  de  l'affinité  des  sons  dont  il 
se  compose,  rapports  qu'on  ne  peut  altérer,  soit  dans  la 
mélodie,  soit  dans  l'accompagnement,  sans  changer  im- 
médiatement la  tonalité,  et,  par  conséquent,  l'effet  par* 
ticulier  du  mode.  Il  est  mauvais,  par  exemple,  d'associer, 
dans  l'accompagnement  d*une  phrase  de  Plain-Chant ,  la 
tonalité  actuelle  avec  la  tonalité  ecclteiastiaue,  c-à-d.  d'y 
introduire  de»  modulations,  lea  modes  mineurs  ou  ma« 


TON 


1728 


Ton 


Jenre,  l'ait raction  d'une  note  vers  raatre,  et  toutes  les 
autres  combinaisons  de  Tart  moderne.  B. 

TONARIUM,  nom  que  Quintilien  donne  à  la  flûte  avec 
laquelle  OQ  donnait  le  ton  aux  orateurs. 

TONDIN  (de  l'italien  Umdino),  en  termes  d'Architec- 
'ture,  petite  baguette  ou  astragale  placée  au  bas  d'une 
colonne.  Dans  la  facture  des  orgues,  c'est  un  cylindre  de 
bois  dont  on  se  sert  pour  former  et  arrondir  les  tuyaux. 

TONGA  (Idiome),  un  des  idiomes  polynésiens,  parlé 
dans  l'ile  Tonga  et  dans  les  lies  du  même  archipel.  Il  a 
peu  de  prépositions,  et  un  seul  article,  indéclinable 
comme  toutes  les  autres  parties  du  discours;  mais  il 
possède  trois  nombres  pour  les  verbes  et  pour  les  pro- 
noms personnels.  La  déclinaison  compte  sept  cas;  la 
conjugaison  est  dépourvue  de  passif.  La  prononciation  est 
plus  aspirée  et  moins  douce  que  celle  du  taltien. 

TONIQUE,  en  termes  de  Musique,  note  sur  laquelle 
le  ton  (  V.  c$  mot)  est  établi ,  la  première  de  la  gamme 
de  ce  ton.  Tous  les  aira  finissent  cuinmunéinent  par  cette 
note,  surtout  à  la  basse.  C'est  l'espèce  de  tierce  que  porte 
la  tonique  qui  détermine  le  mode  (  '/.  ce  mot),  —  Dans 
le  Plain-Ghant,  il  n'y  a  pas  de  tonique,  parce  qu'il  n»y 
a  aucune  note  qui  porte  plus  qu'une  autre  le  sent  i- 
ment  du  repos,  et  qui  caractéme  ainsi  la  tonalité.     B. 

TONIQUE  fAccftnt).  V.  Accent. 

TONLlEu.   V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TONNAGE,  capacité  d'un  naTire,  nombre  de  tonneaux 
({u'il  peut  contenir,  un  détermine  le  tonnage  au  moyen 
tiii  jaugeage  (  V,  Jaugedrs),  et  selon  le  mode  établi  par 
une  loi  du  12  nivôse  an  ii.  —  Le  droit  de  tonnage  ou  de 
fonnelage  est  un  droit  que  tout  navire  paye  à  son  entrée 
dans  un  port,  proportionnellement  à  sa  capacité.  Ce  droit 
concerne  le  bâtiment  et  non  la  cargaison.  En  France,  il 
est  de  4  fr.  12  c.  par  tonneau;  les  navires  français  en 
sont  exempts,  à  moins  qu'ils  ne  viennent  d'Angleterre, 
cas  auquel  ils  payent  1  fr.  par  tonneau,  non  compris  les 
décimes. 

TONNE,  unité  de  poids  employée  pour  l'application  du 
tarif  des  marchandises  qui  circulent  sur  les  chemins  de 
fer  :  elle  équivaut  à  10  quintaux  métriques,  ou  1,000  kilog. 
Dans  la  Marine,  la  tonne  est  le  demi-tonneau,  environ 
500  kilogr. 

TONNE  d'or  ,  valeur  de  100,000  florins  en  Hollande,  de 
100,000  thalers  en  Allemagne. 

TONNEAU,  en  termes  de  M.".rine,  ca|/ac(té  de  13  met. 
ctibes  environ,  et  poids  d    1,000  kilogr. 

TONNEAU,  coffre  de  bois  élevé  sur  pieds  à  la  hauteur 
d'un  tonneau,  et  percé,  au-dessus,  de  plusieurs  ouver- 
tures, dans  lesquelles  on  cherche  à  Jeter  de  loin  des  palets 
do  cuivre,  pour  gagner  un  certain  nombre  de  points.  On 
ne  joue  guère  à  ce  jeu  qu'à  la  campagne. 

TONNELAGE.  V,  Tonnage. 

TONNELET.  V.  Braconniêre. 

tonnelet,  vieux  mot  daignant  un  vase  à  boire,  en 
forme  de  petit  tonneau. 

TONNELIERS,  corporation  qui  avait  pour  patron 
S^  Nicolas.  Antérieure  k  Louis  IX,  elle  possédait  des  sta- 
tuts plusieurs  fois  confirmés  par  nos  rois.  L'apprentissage 
était  de  5  ans;  le  brevet  coûtait  30  livres,  et  la  maî- 
trise 800. 

TONNELLE ,  berceau  de  verdure  ;  —  filet  en  forme 
de  tonneau  ouvert,  dont  on  se  sert  pour  prendre  les 
perdrix. 

TONOTECHNIE  (du  grec  tonos,  ton,  air,  et  tekhnè, 
art),  art  denoterde  la  musique  sur  lescylindres  des  orgues 
de  Barbarie,  des  tabatières,  pendules  et  tableaux  à  mu- 
sique. Le  P.  Engramelle  a  publié  une  Tonotechnie  en 
1775. 

TONSTRINE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire, 

TONSURE,  en  latin  tomura  (de  tondere,  raser,  tondre\ 
place  de  forme  orbiculaire  sur  le  derrière  de  la  tète,  où  les 
ciieveux  sont  rasés.  C'est  un  signe  distinctif  des  ecclé- 
siastiques. La  tonsure  romaine  ou  de  S^  Pierre  est  celle 
qui  est  généralement  adoptée  aujourd'hui;  mais  on  dis- 
flngue  encore  la  tonsure  grecque,  qui  s'étend  sur  toute 
la  tête,  et  la  tonsure  écossaise  ou  de  S^  Paul,  qui  va 
d'une  oreille  à  l'autre  sur  le  devant  de  la  tète.  Déjà,  dans 
l' Antiquité,  un  crâne  chauve  était  considéré  comme  l'un 
des  signes  honorifiques  du  corps  sacerdotal.  Ce  fut  le 
concile  de  Tolède,  en  633,  qui  rendit  la  tonsure  obliga- 
toire. La  tonsure  se  confère  avant  les  ordres;  générale- 
ment on  ne  peut  y  être  admis  avant  Tftge  de  14  ans  : 
c'est  le  signe  de  la  prise  de  l'habit  ecclésiastique.  D'après 
le  rituel  romain,  la  tonsure  du  simple  tonsuré  doit  avoir 


32  millimèt.  de  di<imètn);  celle  du  minoré,  4  centimèt.; 
celle  du  sous-diacre,  4  1/2;  celle  du  diacre,  6;  celle  du 
prêtre,  8;  celle  du  pape  occupe  presque  toute  la  partie 
antérieure  de  la  tête. 

TONTINE,  association  de  personnes  qui  placent  chacune 
un  capital  en  commun,  pour  en  retirer  une  rente  via- 
gère à  une  époque  déterminée,  avec  la  condition  que 
l'intérêt  sera  réversible,  à  chaque  décès,  sur  les  survi- 
vants. Le  nom  vient  de  Lorenzo  Tonti,  Napolitain  qui 
proposa  en  1653  au  cardinal  Mazarin  une  opération  de  ce 
genre  :  il  s'agissait  de  faire  un  emprunt,  et  d*attirer  les 
prêteurs  par  l'app&t  de  bénéfices  considérables  en  cas  de 
survie.  Mais  le  Parlement  refusa  d'enregistrer  l'édit  du 
ministre,  En  1689,  Louis  XIV  ouvrit  une  tontine  rouaie 
de  1,400,000  livres  de  rentes,  qui  ne  finit  qu'en  172U. 
L'État  eut  encore  plusieurs  fois  recours  à  ce  genre  d'em- 
prunt, notamment  en  1733  et  en  1734;  mais,  comme  on 
le  reconnut  trop  oné^'eux,  une  déclaration  du  21  no- 
vembre 1763  et  un  arrêt  du  Conseil  de  1770  l'interdirent 
pour  l'^ivenir.  Les  plus  célèbres  tontines  particulières 
qui  aient  été  fondées  en  France  sont  :  la  Caisse  Lafar^e 
autorisée  en  1759,  supprimée  en  1770,  ouverte  de  nou- 
veau en  1791 ,  et  la  Compagnie  royale  d^assurances . 
autorisée  en  1787.  Les  calculs  de  mortalité  avaient  été  si 
erronés,  les  promesses  de  rente  si  exagérées,  et  par  suite 
les  déceptions  si  nombreuses,  qu'un  décret  du  25  mars 
1809  mit  les  tontines  en  gérance,  et  défendit  d'en  établir 
aucune  autre  sans  autorisation  du  gouvernement.  En 
1819,  une  nouvelle  Compagnie  tontinière  d'assurances 
sur  la  vie  fut  formée  à  Paris;  d'autres  ne  tardèrent  pa.^ 
à  suivre.  Ces  entreprises  sont  soumises  à  la  surveillance 
de  l'État,  en  vertu  d'une  ordonnance  du  12  juin  1842  et 
d'un  décret  du  16  janvier  1854.  V.  Assurance. 

TONTURE,  en  termes  de  Marine,  courbure  que  pré- 
sente de  l'avant  à  l'arrière  le  pont  d'un  bâtiment,  et  qui 
fait  que  le  milieu  est  dans  un  plan  inférieur  à  celui  des 
extrémités.  Le  mot  vient  de  l'italien  tondo  (rond,  arrondi/. 

TOPAZE,  pierre  précieuse  d'un  jaune  brillant,  figure 
symboliquement  la  sagesse,  la  chasteté,  le  mérite  des 
l>onnes  œuvres.  Elle  était  la  2*  pierre  du  premier  rang 
sur  le  rational  du  grand  prêtre  des  Juifs,  et  portait  gravé 
le  nom  de  Siméon. 

TOPES.  V.  Tombeaux. 

TOPIARIUM  OPUS,  expression  dont  Pline  se  sert  pour 
désigner  une  espèce  d'ornement  de  jardinage  qui  consis« 
tait  à  donner  toutes  sortes  de  formes,  même  d'animaux, 
aux  buissons  de  certains  arbres  ou  arbustes.  —  Le  root 
topia  signifiait  aussi  les  paysages  qu'on  peignait  sur  ]es 
murs  des  appartements. 

TOPIQUES,  nom  que  les  Anciens  donnaient  aux  traités 
sur  les  lieux  commune  (en  grec  topoï)  d'où  l'on  tire  des 
arguments.  Nous  avons  un  traité  des  Topiques  d*Aristote 
et  un  de  Cicéron.  La  Topique  est  l'art  de  trouver  les  ar- 
guments. La  Topique  grammaticale,  distincte  de  la  To- 
pique oratoire,  traite  de  la  place  qu'il  faut  assigner  aux 
mots  et  aux  phrases. 

TOPOGRAPHIE  (du  grec  topos,  lieu,  et  graphéin,  dé- 
crire), description  exacte  et  détaillée  d'un  lieu  particulier, 
art  de  décrire  un  lieu  et  d'en  lever  le  plan.  Il  y  a,  dans 
le  cadastre,  des  employés  chargés  de  la  confection  des 
cartes  topographiques.  Les  officiers  du  génie  militaire 
auxquels  appartient  cet  emploi  sont  les  ingénieurs-géo- 
graphes. On  enseigne  la  Topographie  dans  les  écoles  mi- 
litaires. 

TOPOLOGIE,  théorie  des  principes  que  doit  suivre  un 
théologien  pour  choisir  et  traiter  les  arguments  qu'il 
emprunte  au  texte  de  la  Bible. 

TOQUE  (en  espagnol  toca:  de  tocar,  couvrir),  coiffure 
ronde  de  drap,  de  velours  ou  de  soie,  quelquefois  brod<^ 
ou  soutachée,  et  garnie  d'un  gland  ou  d'une  houppe.  On 
donne  le  même  nom  à  la  coiffure  des  juges,  des  avocats, 
et  des  membres  de  l'Université. 

TOQUET.  V.  DoQOET. 

TORCHE  (du  latin  torquere,  tordre),  sorte  de  flambeau 
fuit  avec  de  la  grosse  corde  enduite  de  résine  ou  de  c:rt\ 
ou  consistant  simplement  en  un  bâton  de  bois  résineux 
entouré  de  cire  ou  de  suif.  Dans  l'Antiquité,  la  torche 
était  un  des  attributs  de  Diane,  de  Cérte,  de  Bellone,  de 
r Hymen  et  des  Furies  ;  on  représentait  le  Sommeil  et  l.i 
Mort  tenant  une  torche  à  rebours.  On  portait  des  torches 
dans  certaines  processions,  à  la  célébration  des  mariages 
et  des  funérailles.  Les  Modernes  ne  s'en  servent  plus  que 
dans  certaines  cérémonies  funèbres,  et  pour  éclairer 
quelque  cortéj^  pendant  la  nuit.  —  Dans  le  service  litur- 
gique de  l'Église  catholique,  on  nomme  Tordus  de  lon- 
gues tiges  de  bois  contenant  un  souche  [V,cê  mot)^  il 


TOR 


1729 


TOU 


que  Ton  porte  près  du  Saint-Sacrement  à  l'autel  àt  dans 
les  processions.  B. 

TORCHÈRE  (de  torche)^  vase  de  fer  percé  à  Jour,  placé 
au  bout  d*un  long  manche,  et  dans  lequel  on  met  des 
matières  combustibles  pour  éclairer  momentanément  les 
places  et  rues  où  l'on  fait  des  réparations;  —  sorte  Me 
guéridon  à  pied  triangulaire,  et  dont  la  tige  soutient  un 
plateau  disposé  pour  porter  un  luminaire. 

TORCHIER  ou  TORSIER,  chandelier  dans  lequel  on 
brûlait  autrefois  des  torches,  et  qu'on  plaçait  dans  le  mi- 
lieu des  grandes  salles.  Il  avait  quelquefois  l'apparence 
d'une  tour  de  château  fort. 

TORCHIS,  mortier  fait  de  terre  franche  corroyée  avec 
de  la  paille  ou  du  foin  haché,  et  employé  dans  les  con- 
structions rurales,  soit  pour  lier  les  pierres  d'un  mur, 
soit  pour  garnir  les  panneaux  des  cloisons.  Il  se  resserre 
en  Réchant,  et  subit  les  impressions  de  l'atmosphère,  qui 
le  dégradent;  aussi  lui  préfère-t-on  le  pisé  (K.  ce  mot), 

TORE  (du  latin  torus,  corde),  grosse  moulure  ronde 
qui  fait  ordinairement  partie  des  bases  de  colonnes.  |^e 
style  roman  en  a  fait  usage  aussi  dans  les  archivoltes, 
et  le  style  ogival  dans  les  nervures,  les  meneaux,  les 
trèfles,  et«. 

TORÉADOR,  y.  Taureaox  (Combats  de). 

TORELLAGE,  droit  que  les  seigneurs  d'autrefois  pré- 
levaient sur  les  torailles,  lieux  où  Ton  faisait  sécher  les 
grains  servant  à  la  fabrication  de  la  bière. 

TOREOTIQUE,  en  grec  toreutikë  (de  toreiiiiny  décou- 

{»er,  ciseler,  tourner),  mot  par  lequel  on  entend  généra- 
ement  l'art  de  travailler  en  relief  le  bois,  l'ivoire,  la 
pierre,  le  marbre,  et  toutes  les  matières  dures.  Winckel- 
mann  en  limitait  la  signification  aux  œuvres  d'art  en  ar- 
gent ou  en  airain.  Pline  se  sert  du  mot  ToretUique  pour 
désigner  uniquement  l'art  du  fondeur,  et  ne  Tétend  point 
aux  œuvres  produites  par  la  sculpture  ou  par  la  gravure. 
Certains  auteurs  l'ont  employé  en  parlant  des  figures  en 
relief  sur  les  vases  ou  sur  les  pierres  taillées.  Enfin,  il  a 
encore  désigné  le  travail  qui  consiste  à  donner  avec  le 
ciseau  le  fini  à  une  statue  qui  vient  d'être  fondue.    B. 

TORIES.  V.  notre  Dictionn,  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

TORNÂDAS,  dédicaces  que  les  troubadours  mettaient 
à  leurs  pièces  de  vers. 

TORNADO,  c.-à-d.  tourbillon,  Tent  violent  qui  règne 
au  mois  de  juillet,  d*août  et  de  septembre,  sur  la  cÔte 
d'Afrique,  depuis  le  Sénégal  jusqu'à  Téquateur.  II  tient 
de  la  nature  de  la  trombe. 

TORNEBOUTTE,  ancien  instrument  de  musique  à 
vent,  en  usage  en  Angleterre.  11  avait  la  forme  d'une 
crosse,  était  percé  de  10  trous,  et  s'embouchait  avec  une 
anche.  H  n'était  pas  sans  analogie  avec  le  cor  anglais 
(K.  ce  mot), 

TORNEYAMEN,  c.-à-d.  en  provençal  tournoiement, 
nom  qu'on  donnait  à  la  Tenson  (  V.  ce  mot)  quand  elle 
avait  plus  de  deux  interlocuteurs,  parce  que  chacun  avait 
régulièrement  la  parole  à  son  tour. 

TORQUE,  terme  de  Blason.  V.  Bodruelet. 

TORSADE  (de  tors),  frange  tordue  en  spirale,  dont  on 
orne  les  rideaux,  les  tentures,  les  draperies  et  certaines 
coiffures;  —  petits  rouleaux  de  fils  d'or  ou  d'argent  dont 
sont  faites  les  épaulettes  des  officiers  généraux  et  des 
officiers  supérieurs; — moulure  romane  qui  imite  un  c&ble. 

TORSE  (de  l'italien  torso,  trognon),  nom  qu'on  donne, 
dans  la  langue  des  Beaux-Arts,  1<>  à  la  partie  du  corps 
humain  qu'on  nomme  encore  le  tronc,  2^  à  toute  statue 
antique  mutilée,  dont  les  membres  et  la  tête  ont  été 
brisés.  Le  fameux  Torse  du  Belvédère,  qui  est  au  Vati- 
can, et  dont  une  copie  est  à  Paris,  à  l'École  des  Beaux- 
Arts,  est  regardé  comme  un  fragment  d'une  statue  d'Her- 
cule. 

TORSELLUM,  nom  qu'on  donnait  anciennement  aux 
orgues  composées  de  deux,  trois  ou  quatre  jeux  accordés 
à  la  quinte  ou  à  l'octave. 

TORSIER.  V,  ToRCHiKR. 

TORTILE,  terme  de  Blason.  V.  Boorrelet. 

TORTILLIS,  espèce  de  vermoulure  qu'on  fait  avec  des 
outils  sur  le  parement  des  bossages  rustiques. 

TORTUE,  terme  militaire.  V,  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TORTURE  (du  latin  torquere,  tourmenter),  tourment 
accessoire  qu'on  faisait  autrefois  subir  aux  accusés,  avant 
et  après  leur  condamnation,  pour  les  forcer  à  avouer 
leur  crime  et  à  révéler  leurs  complices.  Les  instruments 
les  plus  ordinaires  de  torture  étaient  les  verges,  la  roue, 
le  chevalet,  les  brodeqains  :  ou  bien  encore  on  versait 
une  grande  quantité  cPeau  dans  la  bouche  du  patient,  on 
lui  brûlait  les  extrémités  avec  des  torches  ardentes,  on 


lui  coulait  du  plomb  dans  les  oreilles,  etc.  La  torture  i 
existé  chez  tous  les  peuples  anciens.  A  Sparte,  il  était 
défendu  de  croire  aux  déclarations  d'un  esclave,  s'il 
n'avait  été  mis  à  la  torture.  A  Athènes,  un  citoyen  ne  pou- 
vait y  être  soumis  pour  des  crimes  privés.  La  torture 
s'est  perpétuée  dans  la  plupart  des  États  de  l'Europe  jus- 
qu'à la  fin  du  xvni*  siècle.  V.  QresTiON,  dans  notre  Die 
tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

TOSCAN  (Ordre),  le  plus  simple  et  le  plus  solide  des 
cinq  Ordres  d'architecture.  Il  doit  son  origine  à  d'anciens 
peuples  de  Lydie  qui  vinrent  habiter  l'Étrurie  ou  mo- 
derne Toscane  et  y  b&tirent  des  temples.  Nous  ne  pour- 
rions le  connaître,  si  Vitruve,  au  temps  duquel  il  y  avait 
encore  à  Rome  un  temple  de  Cérès  d'architecture  tos- 
cane, n'en  avait  laissé  une  description.  La  hauteur  de  la 
colonne  toscane,  y  compris  le  chapiteau  et  la  base,  était 
le  tiers  de  la  largeur  du  temple;  le  diamètre  inférieur 
était  égal  à  la  7*  partie  de  la  hauteur,  et  le  fût  diminuait 
du  quart  de  son  diamètre  inférieur.  C'est  à  tort  qu'on  a 
quelquefois  rapporté  à  l'ordre  toscan  les  colonnes  monu« 
mentales  de  Trajan  et  de  Marc-Aurèle  à  Rome,  les  édi- 
fices de  Psstum,  et  l'amphithéâtre  de  Vérone;  on  n'y 
retrouve  pas  les  dimensions  données  par  Vitruve.  La  co- 
lonne toscane  n'est  jamais  ornée  de  cannelures;  son  cha- 
piteau n'offre  que  de  rares  moulures,  et  la  frise  ne  reçoit 
point  d'ornements.  V,  Base. 

TOSCAN  (Art).   V,  ÉTRUSQUE. 

TOSCAN  (Dialecte),  un  des  dialectes  italiens.  C'est  l'ita- 
lien le  plus  pur,  et  il  a  eu  la  principale  part  dans  la 
formation  de  la  langue  classique,  en  raison  de  ce  que  les 
plus  grands  poètes  et  prosateurs  du  xiv*  siècle,  où  cette 
langue  se  forma,  ét^ent  tous  Florentins  ou  Toscans.  Tou- 
tefois, les  Toscans  reconnaissent  qu'ils  ne  parlent  pas  le 
mieux  l'italien,  dont  ils  définissent  l'idéal  «  la  langue 
toscane  dans  une  bouche  romaine.  »  Ils  donnent  à  Vh, 
au  c  dur  et  au  ch  la  valeur  du  ch  allemand  ou  de  la  jota 
(i)  espagnole  :  ainsi,  à  Florence,  on  dit  hasa,  hamera, 
hosta,  pour  casa,  caméra,  costa, 

TOSKARIA  ou  TOSKE  (Dialecte).  V,  Albanais. 

TOSTAO,  monnaie  de  compte  et  monnaie  d'argent  en 
Portugal.  Cest  à  peu  près  0  fr.  60  c. 

TOTONAQUE  (Idiome).  V.  Mexique  (Langues  du). 

TOUAGE  (de  l'anglais  to  tow,  tirer,  attirer),  action  de 
iouer  une  enibarcation,  c-à-d.  de  la  faire  avancer  en  ti- 
rant d'un  point  fixe,  &  force  de  bras  ou  au  moyen  d'un 
cabestan,  un  cordage  appelé  touée.  V,  ara  Supplément 

TOUAILLE,  vieux  mot  signifiant  serviette, 

TOUAREG  ou  TOUARIK  (Idiome).  V.  Berbère 

TOUCHE,  nom  donné,  dans  les  instruments  de  mu- 
sique à  clavier,  aux  leviers  sur  lesquels  les  doigts  agissent 
pour  tirer  des  sons.  Les  touches  destinées  aux  notes  de 
la  gamme  naturelle  d'ut  sont  blanches  ;  celles  destinées 
aux  notes  diésées  ou  bémolisées  sont  noires.  —  Dans  les 
instruments  à  manche  et  à  cordes  pincées,  les  touches 
sont  les  filets  saillants,  d'ivoire  ou  de  métal,  qui  traver- 
sent le  manche,  et  où  il  faut  poser  les  doigts  pour  obtenir 
les  diverses  intonations.  —  Dans  les  instruments  h  ar- 
chet, la  Touche  est  la  partie  supérieure  du  manche  re- 
couverte en  ébène,  et  sur  laquelle  les  doigts  pressent  les 
cordes. 

touche,  en  termes  de  Peinture,  maniement  du  pincean 
et  des  couleurs.  La  touche  est  légère,  ferme,  hardie,  etc. 

TOUE,  embarcation  plate,  faite  de  planches  de  sapin 
assemblées  avec  des  chevilles,  et  dont  on  se  sert  comme 
bac,  ou  pour  le  service  d'un  port,  ou  pour  remonter  une 
rivière  avec  un  chargement  de  marchandises. 

TOUÉE,  en  termes  de  Marine,  gros  c&ble. 

TOUGH.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio* 
graphie  et  d'Histoire. 

TOUGRA.  V.  Thogra. 

TOUL  (Cathédrale  de).  Cette  église,  qui  n'a  pas  con- 
servé son  évêché,  est  un  des  beaux  édifices  religieux  de  la 
France.  Commencée  dans  les  dernières  années  du  x*  siè- 
cle, elle  ne  fut  achevée  qu'en  1496.  Le  portail,  dont  Jac- 
qucmin  de  Commercy  donna  les  dessins  en  1447  et  dirigea 
la  construction,  est  un  chef-d'œuvre.  Large  de  33  met., 
il  présente  trois  portes,  dont  les  voussures  sont  garnies 
de  niches  nombreuses,  à  bases  et  à  dais  élégamment 
sculptés.  Au-dessus  de  la  porte  principale,  une  rose, 
garnie  de  vitraux  de  couleur,  est  encadrée  dans  un  vaste 
triangle  ogival.  Les  trois  galeries  à  balustres  en  feuilles 
de  trèfle  qui  régnent  sur  toute  la  largeur  du  portail  sont 
d'une  élé^nce  sans  rivale.  Deux  tours,  d'une  hauteur  de 
76  met.  environ,  ont  une  couronne  découpée  à  Jour,  et 
rappellent  la  magnifique  tour  de  l'église  de  SMOuen  à 
Rouen*  L'intérieur  de  la  cathédrale  de  Toul  est  d'una 

109 


TOU 


17^0 


Ton 


excellente  architecture  :  il  est  peu  d'églises  da  moyen 
&ge  où  Tordonnance  générale  soit  plus  harmonieuse. 
Touffes  les  ouvertures  sont  en  ogives  à  divisions  paires, 
surmontées  d9  losaces.  La  nef  principale  a  80  met.  de 
longueur  et  3Ô  met.  de  hauteur,  et  a  deux  collatéraux  : 
la  voûte  en  est  soutenue  de  chaque  côté  par  neuf  colonnes 
accompagnées  chacune  de  quatre  colonnettes  engagées, 
deux  qui  supportent  les  arcs-doubleaux  des  ogives  de  la 
nef,  une  pour  Togive  transversale  des  bas  côtés,  et  la 
quatrième  qui  se  prolonge  jusqu'à  la  grande  voûte,  au- 
dessus  des  fenêtres  qui  Téclairent.  On  a  conservé  une 
chaire  en  pierre,  dite  de  S^  Gérard,  et  qui  date  du 
XII*  siècle.  Sur  le  flanc  gauche  de  ré:;tise  est  un  cloître 
carré  long  du  xiii"  siècle,  formant  promenoir,  et  destiné 
originairement  aux  processions  intérieures  ;  il  a  6  divi- 
sions parallèles  à  Téglise,  et  9  dans  l'autre  sens;  le  sol 
des  galeries  est  de  11  marches  plus  bas  que  celui  de 
l'église,  et  le  préau  est  plus  élevé  que  les  galeries  de 
toute  la  hauteur  du  soubassement.  On  remarque  sur  les 
murs  de  ce  cloître  une  suite  d'arcatures  trilobées,  sous 
chacune  desquelles  était  sculpté  un  petit  bas-relief  porté 
sur  une  tablette  saillante.  B. 

TOULINK  (de  l'anglais  tow^  remorquer,  et  Une,  corde), 
en  termes  de  Marine,  cordage  au  moyen  duquel  on  traîne 
un  bâtiment 

TOULOUSAIN  (Dialecte).  V.  Agiînais. 

TOULOUSE  (Cathédrale  de).  Cette  église  est  placée 
sous  l'invocation  de  S^  Etienne.  La  plus  ancienne  de  ses 
parties  est  la  nef,  bâtie  au  commencement  du  xm*  siècle 
par  Raymond  VI,  comte  de  Toulouse,  dont  on  voit  encore 
les  armoiries  sculptées  sur  l'une  des  clefs  de  la  voûte. 
On  devait  construire  une  nef  latérale;  mais  ce  projet  fut 
abandonné  :  de  là  l'irrégularité  de  la  disposition  gé- 
nérale. Le  chœur,  brûlé  dans  les  premières  années  du 
XVII*  siècle,  fut  reconstruit  de  1609  à  1612;  il  représente 
le  commencement  d'une  nouvelle  église  qui  n'a  pas  été 
continuée,  et  son  axe  ne  répond  pas  à  celui  de  la  nef. 
Il  a  quelques  beaux  vitraux.  Un  jubé  à  bas-reliefs  et  à 
arabesques  de  mauvais  goût  le  sépare  de  la  nef.  Le  por- 
tail est  du  XV*  siè'le;  il  a  beaucoup  souffert  des  injures 
du  temps,  et  du  vandalisme  de  la  Révolution  :  on  y  re- 
marque néanmoins  une  rose  à  compartiments  nombreux, 
ciselés  avec  délicatesse. 

TooLOosis  (Église  S^-Sernîn  ou  S'-Satcr!vin,  à),  un  des 
monuments  les  plus  intéressants  du  midi  de  la  France, 
construit  au  xi*  siècle.  Cette  église  est  en  forme  de  croix 
allongée,  et  a  deux  collatéraux.  Des  galeries  supérieures, 
soutenues  par  des  colonnes  élégantes,  donnent  à  l'en- 
semble une  grâce  toute  particulière.  Le  chœur,  dont  les 
stalles  sculptées  sont  couvertes  de  sujets  satiriques,  et  à 
la  voûte  duquel  on  a  peint  Notre  Seigneur  entre  les  sym- 
boles des  quatre  Évangélistes,  est  bordé  de  chapelles, 
qu'on  a  malheureusement  gâtées  par  des  badigeon  nages 
et  des  dorures  de  mauvais  goût.  L'église  S^-Sernin  est 
une  des  plus  vastes  qui  existent  en  style  roman  :  elle 
mesure,  dans  œuvre,  105  met.  de  longueur  et  30  met. 
de  hauteur.  Le  collatéral  du  midi  a  deux  portails  :  l'un, 
précédé  par  une  arcade  de  la  Renaissance,  offre  des  cha- 
piteaux sculptés  qui  représentent  le  massacre  des  Inno- 
cents et  autres  sujets  sacrés,  dans  le  goût  le  plus  pri- 
mitif; l'autre,  plus  grand  et  plus  moderne,  a  des  chapi- 
teaux où  Ton  a  représenté  les  sept  péchés  capitaux.  Une 
crypte  a  été  creusée  sous  l'église  pendant  le  xiv*  siècle, 
pour  y  placer  le  mausolée  de  S^  Saturnin  :  ce  tombeau 
fut  démoli  plus  tard,  et  les  reliques  furent  recouvertes 
du  riche,  mais  peu  convenable  baldaquin  que  l'on  voit 
aujourd'hui.  Le  clocher  de  l'église  S'-Saturnin  est  pos- 
térieur aux  autres  constructions  :  il  repose  sur  des  piliers 
octogones  oui  ne  sont  pas  en  harmonie  avec  l'ordonnance 
générale.  V.  Roachach,  Saint-Semin,  Études  d'art  et 
d'histoire,  Toulouse,  1802. 

TOULOUSE  (Église  des  Jacobitis,  à).  Cette  église,  bâtie 
vers  la  fln  du  xiii*  siècle,  se  compose  d'un  seul  vaisseau 
divisé  en  deux  nefs  par  une  rangée  de  longues  colonnes 
pesées  sur  l'axe  de  ce  vaisseau.  Des  chapelles  rayonnent 
autour  de  l'abside  unique.  Sur  le  flanc  septentrional  de 
l'édifice,  en  avant  des  travées  rayonnantes,  s'élève,  sur 
une  base  épaisse,  un  grand  clocher  octogonal,  tout  en 
briques,  sauf  les  bandeaux,  les  gargouilles,  les  chapiteaux 
et  les  pinacles  qui  sont  en  pierre,  et  les  colonnettes  de 
la  balustrade  supérieure  qui  sont  en  marbre.  Le  rez-de- 
chaussée  de  ce  clocher  est  seul  voûté,  à  une  hauteur  de 
24"\75;  au-dessus  de  cette  voûte,  la  construction  est 
d'une  seule  venue,  sans  voûtes  ni  planchers.  Le  l**"  étage, 
compris  entre  le  dessus  de  la  voûte  et  la  corniche  du 
vaisseau,  est  plus  élevé  que  les  autres,  et  présente,  Bur 


chaque  face,  des  arcades  jumelles  aveugles;  les  qoatro 
autres  étages,  semblables  entre  eux  comme  hauteur  et 
comme  ordonnance,  et  en  retrait  les  uns  sur  les  autres, 
sont  ajourés  d'arcatures  fermées,  non  par  des  archi- 
voltes, mais  par  des  imbrications  formant  des  angles 
droits  au  sommet.  Un  escalier  à  vis  accolé  au  clocîier 
monte  jusqu'à  la  hauteur  de  la  corniche  de  l'église;  de 
là  au  sommet  de  la  tour  on  montait  autrefois  par  des 
échelles.  B. 

TOUPET  (du  latin  tufa,  touffe),  touffe  de  cheveux  qui 
est  en  haut  du  front.  Les  Tartares  se  rasent  la  tète  et  ne 
conservent  qu'un  toupet.  Un  faux  toupet  est  une  petite 
perruque  qui  ne  couvre  que  le  sommet  de  la  tête  et  qui 
se  confond  avec  les  cheveux  naturels. 

TOUPIE  (pour  turpie;  du  latin  turbo)^  jouet  d'en- 
fant. Il  est  en  bois,  en  forme  de  poire,  et  armé  d'une 
pointe  de  fer  sur  laquelle  on  le  fait  tourner  au  aïoycn 
d'une  corde.  La  toupie  d'Allemagne  est  creuse,  percée 
d'un  côté,  ce  qui  la  fait  bourdonner  en  tournant.  Le  jeu 
de  toupie  hollandaise  ou  de  quilles  des  Indes  se  compose 
d'une  table  divisée  en  compartiments,  dans  lesquels  sont 
rangées  les  quilles  qu'on  abat  avec  une  toupie.  Le  scUmi 
est  une  grosse  toupie  qu'on  fait  tourner  en  la  fouettant 
d'une  lanière. 

TOUR  (du  latin  turrts),  construction  d*ane  grande 
hauteur  par  rapport  à  sa  base,  de  forme  ronde,  ou 
carrée,  ou  à  pans,  dont  on  flanqua,  dès  l'antiquité  la 
plus  reculée,  les  murailles  des  villes  et  des  forteresses. 
Les  tours  étaient  destinées  tout  à  la  fois  à  protéger  les 
longues  lipes  des  murs  et  à  fournir  les  moyens 
de  découvrir  au  loin  la  contrée  environnante.  Les  par- 
ties basses  servaient  de  magasins  ou  de  prisons  :  pen- 
dant la  période  romane,  on  les  fit  pleines,  ce  qui  avait 
l'inconvénient  de  ne  laisser  à  l'assiégé  que  le  sommet 
des  tours  pour  se  défendre,  et  de  livrer  tous  les  soubasse- 
ments aux  mineurs  ou  pionniers  ennemis.  Au  moyen  âge 
les  tours  isolées  étaient  fort  en  usage  pour  la  défense 
d'un  défilé  ou  d'une  position  quelconque.  Dans  notre 
siècle,  on  a  appelé  tours  mcummiliennes,  du  nom  de  Tar- 
chiduc  d'Autriche  Maximilien  de  Modène,  des  ouvrages 
murés  et  isolés,  et  protégés  par  un  fossé  ;  on  les  a  em- 
ployées pour  la  première  fois  à  la  défense  de  Lintz.  La 
tour  se  compose  d'un  rez-de-chaussée  surmonté  de  deux 
étages  et  d'une  plate-forme,  dont  les  plafonds  sont  voûtés 
et  à  l'abri  de  la  bombe,  le  tout  haut  de  11  met.;  la  plate- 
forme est  munie  d'un  parapet  circulaire,  et  on  y  place 
des  bouches  à  feu  montées  de  manière  qu'on  puisse  en 
diriger  dix  à  la  fois  sur  le  m^me  point;  les  deux  étages 
sont  également  disposés  pour  recevoir  du  canon  ;  l'étage 
inférieur  loge  la  garnison,  forte  de  150  hommes,  et  les 
munitions  et  provisions  sont  placée  au  rez-de-chaussée. 

TOUR,  sorte  d'armoire  ronde  et  tournante,  placée  dans 
l'épaisseur  du  mur  des  couvents  de  femmes  ou  des  hos- 
pices d'enfants  trouvés,  et  qui  sert  à  faire  passer  ce  qui 
vient  du  dehors,  sans  avoir  besoin  d'ouvrir  la  porte  et 
sans  être  vu.  La  sœur  chargée  du  service  du  tour  est  ap- 
pelée touriè're,  —  Les  tours  d'hospices,  destinés  à  rece- 
voir les  enfants  abandonnés,  ont  existé  dans  quelques 
localités  avant  d'avoir  été  légalement  établis  par  un  dé- 
cret de  ISI1.  La  multiplication  de  ces  tours  est  un  en- 
couragement à  l'exposition  des  enfants,  et  à  l'oubli  des 
devoirs  de  famille.  V.  Hamel  Des  enfants  trouvés  et  du 
danqer  de  la  suppression  des  tours,  Paris,  1838;  Vau- 
doré.  De  la  suppression  des  tours  pour  les  enfants,  ibid., 
1838;  d'Herbigny,  Du  tour  des  enfants  trouvés,  Bor- 
deaux, 1839;  Aug.  Nicolas,  Du  tour  des  enfants  trouvés, 
ibid.,  1839;  Perrot,  Considérations  sur  la  suppression 
des  tours  d'enfants  trouvés,  Paris,  1840;  Nepveur,  De  la 
suppression  des  tours,  Rouen,  1848. 

TOUR  ou  ROC,  pièce  du  jeu  d'échecs  qui  se  place  de 
chaque  côté  et  à  l'extrémité  de  l'échiquier.  Elle  marche 
toujours  en  carré. 

TOUR  A  PORTRAIT,  machinc  au  moyen  de  laquelle  on  re- 
produit un  bas-relief  ou  une  médaille  sur  métal,  sur 
ivoire,  ou  sur  toute  autre  substance  convenable.  Le  tour 
à  portrait  se  compose  essentiellement  d'une  pointe 
émoussée,  entraînée  par  un  mouvement  très -lent  sur 
tous  les  points  du  modèle  à  copier,  et  qu'un  ressort  ou 
un  poids  force  à  pénétrer  dans  toutes  V^  cavités  qu'elle 
rencontre;  et  d'une  pointe  coupante,  qui  suit  tous  les 
mouvements  de  la  première,  et  qui  les  reproduit  sur  une 
échelle  égale,  ou  plus  grande,  ou  plus  petite.  Quand  la 
pointe  émoussée  s'enfonce  dans  une  cavité  de  l'originai, 
la  pointe  coupante  creuse  de  la  même  manière  la  matiera 
à  tailler;  lorsque  la  première  est  sur  une  saillie,  la  se- 
conde ontamc  la  matière  moins  profondément.  Des  tours 


Totr 


ini 


totj 


à  portrait  ont  été  construits  de  manière  à  donner  bosse 
pour  creux,  et  creux  pour  bosse;  par  leur  moyen,  une 
médaille  peut  donner  un  cachet. 

Toim  DE  BATAILLE,  uom  douné  à  des  tours  de  bois  dres- 
sées sur  des  chariots,  et  qui,  dans  TOrient,  surtout  en 
Perse,  faisaient  partie  de  Vattirail  de  guerre.  Cyrus  en 
avait  à  la  bataille  de  Thymbrée  :  elles  étaient  hautes  de 
15  pieds  (4'",64)  ;  chacune  contenait  20  archers;  8  paires 
de  Ixpufs  la  traînaient.  Elles  furent  rangées  derrière 
rinfanterie,  et  les  archers,  se  trouvant  élevés  à  8  ou 
9  pieds  au-dessus  de  la  phalange,  tiraient  avantageuse- 
ment sur  Tennemi  par-dessus  la  tète  des  phalangistes. 

TOUR  D*ér.LiSK.  V,  Clocher. 

TOUR  DE  LONDRES.  V»  LoNDRES,  daus  uotro  DiCtionnairB 
d$  Biographie  9t  d'Histoire. 

TOUR   DE  PORCELAmS.   V.  NaNKIN. 

TODR  DE  siécE,  tour  en  bois,  portée  sur  des  roulettes,  et 
qu'on  garnissait  de  soldats,  qui,  poussés  près  d'une  place 
assiégée,  s'élançaient  sur  le  rempart.  On  en  fit  usage 
dans  l'Antiquité  et  au  moyen  Age. 

TOUR  DES  VEWTS.   V.  VbîITS. 

TOURS  PENCHÉES.  La  plus  célèbre  des  constructions 
de  ce  genre  est  le  Campanile  de  Pise,  commencé  en  1174 
par  Guillaume  d'Insprûck  et  Buonanno  de  Pise,  et  ter- 
miné vers  le  milieu  du  xiv'  siècle  par  Thomas  de  Pise.  H 
est  cylindrique,  haut  de  56  met.,  et  orné  extérieure- 
ment d'une  profusion  de  bas-reliefs  et  de  statues;  sur  lui 
s'enroulent  207  colonnes  formant  sept  étages,  et  dont 
les  ordres  ont  été  alternés  avec  goût  ;  son  diamètre  est  de 
17  met.  Son  inclinaison  est  telle  que,  si  l'on  descend  un 
fil  à  plomb  du  sommet,  il  s'écarte  de  4  met.  de  la  base. 
Cette  inclinaison  effrayante,  qui  ne  parait  cependant 
avoir  altéré  en  rien  la  solidité  du  monument,  provient, 
suivant  toute  probabilité,  d'un  tassement  inégal  dans  les 
fondations.  La  tour  de  Pise,  construite  tout  en  marbre, 
sert  de  clocher  à  la  cathédrale,  et  contient  7  cloches  ;  on 
monte  à  sa  plate-forme  à  Taiâe  d'un  escalier  de  330  de- 
grés. C'est  là  que  Galilée  fit  ses  célèbres  expériences  sur 
les  lois  de  la  gravitation.  —  Bologne  possède  deux  tours 
penchées  :  la  tour  Asinelli,  b&tie  vers  1100  par  la  famille 
Asinelli,  est  hante  de  102  met.  et  a  une  déviation  de 
l'^,55;  la  tour  Garisenda,b&tie  en  11 10  par  Filippo  et  Odo 
Garisenda,  n'a  guère  plus  de  40  met.  d'élévation,  et  in- 
cline de  près  de  3  met.  B. 

TOURBIÈRES.  Elles  ne  peuvent  être  exploitées  que 
par  le  propriétaire  du  fonds  où  elles  se  trouvent,  ou  avec 
son  consentement.  Il  faut  aussi,  sous  peine  d'une  amende 
de  100  Tr.,  avoir  obtenu  une  autorisation  préfectorale. 
Les  règles  relatives  à  la  police  des  mines  sont  appli- 
cables aux  tourbières.  Les  contrevenants  aux  règlements 
d'administration  publique  sur  l'exploitation  sont  con- 
traints à  cesser  leurs  travaux.  Les  habitants  d'une  com- 
mune ne  peuvent  se  partager  les  tourbières  communales, 
ni  vendre  celles  dont  ils  jouissent  en  commun  (Décret 
du  12  frimaire  an  xin,  Lois  du  21  août  1810  et  du 
20  mars  1813).  ' 

TOURELLE ,  petite  tour,  le  plus  souvent  en  encorbelle- 
ment, placée  aux  angles  d'une  construction.  La  tourelle 
est  pour  les  Allemands  ce  qu'est  le  balcon  pour  les  Ita- 
liens :  mais  le  balcon  est  à  découvert ,  tandis  que  la  tou- 
relle est  fermée.  Dans  beaucoup  de  monuments,  les  tou- 
relles renferment  des  escaliers. 

TOURIE,  grosse  bouteille  de  grès,  entourée  de  paille 
ou  d'osier. 

TOURIÈRE.  F.  Tour. 

TOURILLON,  petite  tour  accolée  à  une  plus  grande. 

TOURMENTIN.  V,  Foc. 

TOURNAI  (Église  Notre-Dame,  à).  Cette  église  cathé- 
drale est  une  des  plus  importantes  que  possède  la  Bel- 
gique, et  peut-être  la  plus  remarquable  sous  le  rapport  de 
l'art  et  de  Tantiquité.  On  pense  que  la  construction  en 
fut  commencée  vers  1030;  la  nef  et  les  transepts  sont  du 
XI*  siècle,  c.-à-d.  en  style  roman  ;  les  portails  latéraux,  de 
la  seconde  moitié  du  xn'.  Le  chœur,  incendié  en  1213, 
fut  reconstruit  en  12i2;  il  est  d'architecture  ogivale.  La 
nef  centrale,  d'abord  couverte  d'un  plafond,  n*a  été  voûtée 
qu'en  1777.  Le  grand  portail  est  un  ouvrage  conçu  dans 
le  mauvais  goût  du  xvii«  siècle,  lié  à  gaucne  avec  la 
Bibliothèque  et  un  établissement  de  vieux  prêtres,  à 
droite  avec  les  bâtiments  de  l'archevêché.  Il  se  compose 
d'un  péristyle  en  avant-corps,  à  arcades  ogivales  d'inégale 
ouverture;  au-dessus  et  en  arrière,  un  oculus  s'ouvre 
entre  deux  tourelles  romanes  à  toit  d'ardoise,  et  est  sur- 
monté d'un  pignon.  Quatre  tours  s'élèvent  dans  les 
angles  des  transepts  :  elles  sont  percées  de  plusieurs 
stages  lift  croisées,  toutes  à  plein  cintre  dans  l'une,  mais 


alternant  avec  l'ogive  dans  les  trois  autres,  et  supportent 
des  toits  élancés  en  ardoise.  Les  tours  placées  à  l'occident 
des  transepts  sont  portées  par  des  piliers,  et  les  autres 
sur  des  murs  pleins  avec  voûtes  de  décharge.  Au  centra 
des  transepts  est  un  cinquième  clocher.  Le^  transepts 
sont  terminés  en  abside.  —  La  cathédrale  de  Tournai  est 
à  trois  nefs  :  elle  a  125<",50  de  longueur,  porche  compris, 
24  met.  de  largeur  (67™,25  au  transept),  23",75  de  hau- 
teur. Les  arcades  romanes  de  la  nef  centrale  reposent 
sur  des  piliers  courts  et  trapus  :  au-dessus  du  rez-de- 
chaussée  est  un  second  rang  d'arcades,  formant  une  ga- 
lerie qui  règne  au-dessus  des  collatéraux.  Celle-ci  sup« 
porte  à  son  tour  un  triforium,  surmonté  lui-même  de 
fenêtres  à  plein  cintre.  Dans  les  transepts,  les  colonnes 
sont  très-élancées  au  rez-de-chaussée,  plus  courtes  à  la 
galerie;  elles  sont  à  cintre  surhaussé.  Chaque  transept  est 
composé  d'une  abside,  d'une  travée  à  laquelle  les  faces 
opposées  de  deux  clochers  servent  de  parois,  et  d'une 
troisième  partie  qui  sert  d'entrée  aux  coîlatéraux  du 
chœur,  et  de  sortie  aux  collatéraux  de  la  nef.  La  lanterne 
qui  est  au-dessous  du  clocher  central  s'élève  à  une  hau- 
teur de  48™, 50.  Le  collatéral  de  droite  de  la  nef,  destiné 
dans  le  principe  aux  hommes,  est  plus  large  et  plus  haut 
que  celui  de  gauche.  Le  chœur,  avec  la  légèreté  de  ses  co- 
lonnettes  élancées  et  ses  grandes  fenêtres  ogivales,  forme 
un  heureux  contraste  avec  la  sévérité  de  la  nef;  il  en  est 
séparé  par  un  Jubé  en  marbre  blanc  et  noir,  percé  de 
trois  arcades  à  plein  cintre,  et  dont  les  archivoltes  re- 
tombent sur  des  colonnes  de  marbre  de  couleur.  Ce  jubé, 
élevé  en  1566  par  Corneille  de  Vriendt  ou  Floris,  est  sur- 
monté d'un  S^  Michel  terrassant  le  démon ,  groupe  en 
bronze  exécuté  par  Lecreux,  artiste  de  Tournai.  Le 
chœur  a  perdu  ses  belles  stalles  du  xv*  siècle,  et  n'a  que 
des  verrières  modernes  peintes  par  Capronnier.  A  gauche 
du  maitre-autel  est  une  châsse  de  S*  Éleuthère,  remar- 
quable travail  d'orfèvrerie  qui  jrarte  la  date  de  1247. 
V.  Le  Maistre  d'Anstaing,  Histoire  de  la  cathédrale  de 
Tournai,  2  vol.  in-8°;  Capronnier,  De  Keghel,  etc., 
Vitraux  de  la  cathédrale  de  Tournai ,  in-fol.  B. 

TOURNEBRIDE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TOURNELLE  (La).  V.  Parlement,  dans  notre  Diction^ 
naire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

TOURNEVIRE,  cordage  roulé  autour  d'un  cabestan, 
dont  on  fait  usage  sur  les  navires  pour  élever  les  ancres 
et  autres  corps  pesants. 

TOURNIQUET,  croix  de  bois  ou  de  fer,  posée  horizon* 
talement  sur  un  pivot  dans  une  rue  ou  un  chemin ,  pour 
ne  laisser  passer  que  des  gens  à  pied  et  qu'une  personne 
à  la  fois. 

tourniquet,  disque  autour  duquel  sont  marqués  des 
numéros,  et  portant  au  milieu  un  piton  avec  une  aiguille 
de  fer  ou  de  baleine.  On  le  fait  tourner,  et  le  chiflTre  où 
l'aiguille  s'arrête  indique  la  perte  ou  le  gain. 

TOURNIQUET,  poutTo  garoio  de  pointes  de  fer  qu*on  place 
dans  une  brèche,  pour  disputer  le  passage  à  l'ennemi. 

TOURNIQUET,  rouloau  de  bois  tournant  autour  d'un  axe, 

3u*on  place  près  des  mâts  ou  des  pompes  d'un  navire 
ans  la  direction  des  cordages,  pour  subir  le  frottement 
de  ceux-ci  quand  on  les  manœuvre. 

TOURNISSE ,  terme  de  Charpenterie,  nom  donné  aux 
poteaux  qui  servent  de  remplissage  dans  les  jouées  de 
lucarnes ,  dans  les  cloisons  où  il  y  a  des  décharges,  des 
croix  de  S*  André,  etc. 

TOURNOIR,  vieux  mot  signifiant  tournebroche. 

TOURNOI^.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TOURNUS  (Église  de),  dans  le  département  de  Saône- 
et-Loire.  Cette  église,  ancienne  abbatiale  de  Bénédictins, 
et  placée  sous  l'invocation  de  S'  Philibert,  fut  commencée 
vers  960,  et  consacrée  en  1019;  les  tours  doivent  avoir 
été  terminées  dans  le  xii'  siècle,  et  les  chapelles  latérales 
de  la  nef  aux  xm*  et  xiv*;  le  portail  est  une  mauvaise 
construction  du  xvn*  ou  du  xviii*.  La  tour  de  gauche  de 
ce  portail  a  quatre  étages  :  le  1'%  sans  ouvertures,  est 
couronné  par  un  cordon  à  dents  de  scie;  le  2*  et  le  3* 
présentent  chacun  quatre  fenêtres  inscrites  dans  deux 
autres  plus  grandes  et  à  plein  cintre;  le  4*  est  percé  do 
trois  fenêtres  dont  les  archivoltes  découpées  de  contre- 
arcatures  reposent  sur  des  colonnes  très-ornées,  quelque- 
fois torses.  A  chaque  angle  de  la  tour  sont  des  figures  de 
Saints  grossièrement  sculptées.  La  tour  de  droite  est 
semblable,  sauf  qu'elle  n'a  que  trois  étages.  Entre  les 
deux  tours  et  au-dessus  du  portail,  on  remarque  un  as- 
sommoir en  saillie,  porté  sur  des  mftchicoulis,  et  servant 
autrefois  à  défendre  l'entrée  de  l'église.  Un  troisièiM 


TOU 


1732 


TOU 


docher,  également  carré,  s'élève  ati  peint  d'intersection 
de  la  nef  et  da  transept  :  il  est  à  deux  étages,  dont  le 
premier  offre,  sur  chaque  face,  une  arcature  composée  de 
six  cintres  é^ux,  et  le  second  est  percé  de  trois  fenêtres 
polylobées.  A  Textérieur  du  chœur,  une  rangée  de  lo- 
sanges, surmontés  de  triangles  rouges  incrustés  dans  la 
pierre,  règne  au-dessus  des  fenêtres.  L'église  est  pré- 
cédée d'un  vestibule  ou  narthex,  long  de  18'",70,  large 
de  13™,65,  divisé  en  trois  nefs  par  deux  rangs  de  piliers 
très-bas,  d'un  diamètre  de  2">,60,  terminés,  au  lieu  de 
chapiteau,  par  un  gros  tore,  et  qui  soutiennent  une  voûte 
d'arêtes  cintrée  :  au-dessus  de  ce  vestibule  est  une  vaste 
salle,  dont  la  voûte,  également  soutenue  sur  de  gros  pi- 
liers ronds,  atteint  la  hauteur  de  celle  de  la  nef.  Le  ves- 
tibule donne  accès  par  trois  portes  dans  l'intérieur  de 
l'église,  qui  a  la  forme  d'une  croix  latine,  et  75  met.  de 
long  (y  compris  le  vestibule)  sur  i8™,50  de  large,  et 
17°*,85  de  hauteur.  La  nef  est  accompagnée  de  deux  col- 
latéraux; on  y  voit  huit  piliers  analogues  à  ceux  du  nar- 
thex, mais  plus  élevés  (9'",30  au  lieu  de  7  met.)  et  d'un 
moindre  diamètre  (1<",35).  De  leurs  chapiteaux,  espèces 
de  pyramides  tronquées  dont  les  angles  sont  abattus, 
s'élèvent  des  colonnes  engagées,  qui  reçoivent  les  arcs- 
doubleaux  de  la  maltresse  voûte.  Celle-ci  se  compose 
d'une  série  de  voûtes  en  berceau  transversales;  les  bas 
côtés  ont  des  voûtes  d'arêtes,  et  tournent  autour  du 
chœur.  Toutes  les  fenêtres  sont  étroites,  petites,  cintrées 
et  sans  aucune  décoration.  Les  piliers  des  transepts 
sont  renforcés  d'un  massif  carré.  Le  collatéral  de  gauche 
a  été  élargi  pour  recevoir  une  rangée  de  chapelles  ogi- 
vales; le  transept  du  même  côté  est  terminé  par  une 
grande  chapelle  avec  son  abside.  Un  mur  sépare  du  tran- 
sept les  collatéraux  :  il  est  percé,  à  droite,  d'une  porte 
cintrée,  et,  h  gauche,  d'une  porte  ogivale.  La  cx>upoIe 
ovoïde  qui  s'élève  au  centre  de  la  croisée  est  une  des 
plus  élégantes  qu'on  ait  faites  en  France  durant  le  moyen 
âge  :  à  sa  base  elle  est  décorée  d'arcades  bouchées  re- 
tombant sur  des  colonnes  à  chapiteaux  historiés.  Les  ai^ 
cades  du  chœur,  qui  ont  été  bouchées,  étaient  fermées 
autrefois  au  moyen  d'un  grille  en  fer  ouvragé.  L'absidt 
se  termine  par  trois  chapelles  à  pans  qui  ne  servent  plus 
au  culte.  Sous  le  chœur  règne  une  crypte  accompagnée 
de  cin^  chapelles,  et  divisée  en  trois  nefs  par  deux  rangs 
de  petites  colonnes  cylindriques. 

TOURS  (Église  S'-Gatien,  à).  Deux  églises,  fondées, 
l'une  au  temps  de  Tempereur  Constantin  par  l'évêque 
Lidoire,  l'autre  au  vi«  siècle  par  S^  Grégoire,  l'historien 
des  Francs,  et  toutes  deux  sous  l'invocation  de  S^  Maurice 
et  de  ses  compagnons,  précédèrent  l'église  métropolitaine 
actuelle  de  Tours,  dont  la  première  pierre  fut  posée  en 
1170.  Après  avoir  été  poussée  pendant  quelque  temps 
avec  vigueur,  la  construction  de  ce  monument  fut  sus- 
pendue ;  on  la  continua  plus  tard  avec  lenteur,  et  on  y 
travaillait  encore  en  1547.  Néanmoins  un  heureux  accord 
règne  entre  toutes  les  parties.  Ce  fut  la  confrérie  de 
S^-Gatien  qui  acheva  les  travaux,  et  l'édifice  prit  le  vo- 
cable de  ce  saint.  Quelques  parties  peu  importantes  de  la 
cathédrale  de  Tours  proviennent ,  non  pas  de  la  basilique 
de  S^  Grégoire,  mais  de  constructions  faites  au  xi*  siècle 
pour  la  soutenir  ou  l'agrandir  :  ce  sont  quelques  arcades 
romano-byzantines,  à  la  base  des  deux  tours  du  grand 
portail.  L'abside,  le  chœur  et  les  chapelles  absidales,  qui 
sont  la  plus  belle  partie  du  monument,  appartiennent 
au  style  ogival  primitif;  le  transept  et  deux  travées  de  la 
nef,  au  style  secondaire;  le  reste  de  la  nef,  ses  cha- 
pelles, le  portail ,  au  style  tertiaire.  Un  clocher  en  bois 
avait  été  élevé  en  1377  au-dessus  de  l'entre-croisement  de 
la  nef  et  du  transept  ;  il  fut  détruit  par  la  foudre  en  1425. 
Peu  de  temps  après,  un  certain  Guillaume  Rufus  ou  Le- 
roux  exécuta  la  charpente  des  grands  combles.  La  partie 
supérieure  des  tours  fut  bâtie  pendant  la  période  de  la 
Renaissance  :  elles  reçurent  leur  couronnement,  l'une  en 
1507,  l'autre  en  1547  ;  leur  hauteur  est  de  70  met. 

La  cathédrale  de  Tours  est  en  forme  de  croix  latine, 
avec  déviation  très-sensible  dans  son  axe  longitudinal 
{V,  Axe).  Elle  a  100  met.  de  longueur,  30  met.  de  lar- 
geur (46  à  la  croisée),  et  28  met.  de  hauteur  sous  voûte  : 
elle  ne  peut  être  comparée  à  certaines  autres  églises  go- 
thiques pour  l'étendue  des  proportions,  mais  elle  ne  le 
cède  "  aucune  pour  la  pureté  du  style,  l'harmonie  des 
iigne^,  la  symétrie  dans  la  disposition  des  masses,  l'or- 
donnance pittoresque  et  l'élégance  des  détails.  La  façade 
occidentale  est  complète  :  les  voussures  des  trois  portails 
sont  chargées  de  ces  ciselures  fines  et  délicates  qui  carac- 
térisent Tart  du  xvi*  siècle,  et  sannontées  de  firontons 
pyramidaux  découpés  à  jour  ;  mais  les  niches  sont  vides 


de  leurs  statues,  et  bon  nombre  de  bas-reliefs  ont  ete  dA* 
gradés  par  le  vandalisme  révolutionnaire.  Quatre  contre* 
forts,  couverts  de  panneaux  et  de  crosses  vitales, 
s'élèvent  jusqu'au  sommet  de  la  façade,  et  la  divisent  en 
trois  parties  :  au  milieu  se  déploie  une  belle  rose.  Au 
point  où  les  tours  ogivales  se  terminent  d'ordinaire,  rr- 
posent  deux  pyramides,  tronquées  à  leur  extrémité,  et 
couronnées  par  une  coupole  hémisphérique;  de  la  base 
au  sommet,  elles  sont  couvertes  d*ornementSi  ce  qui  fai- 
sait dire  à  Henri  IV  :  «  Voilà  deux  beaux  bijoux,  il  n'y 
manque  que  des  étuis.  »  Dans  tout  le  pourtour  de  l'édi- 
fice, les  contre-forts  et  les  arcs-boutants,  surtout  vers  la 
région  de  l'abside,  dessinent  une  charmante  perspective. 
—  L'intérieur  de  la  cathédrale  de  Tours  est  d'un  effet 
très-remarquable.  Rien  de  plus  achevé  que  le  chevet, 
dont  l'ordonnance  première  n'a  jamais  subi  d'altération  : 
ses  arcades,  légèrement  surélevées,  lui  communiquent 
un  élancement  qui  étonne;  les  chapiteaux  à  feuillages  et 
à  volutes  des  colonnes  groupées  sont  d'une  gr&ce  exquise; 
des  galeries  à  jour,  composées  de  trèfles,  de  qûatre- 
feuilles,  de  rosaces,  et  les  fenêtres  encore  garnies  â» 
leurs  vitraux  du  xui*  siècle,  forment  une  merveilleuse  dé- 
coration ;  les  voûtes,  d'une  construction  savante,  présen- 
tent des  nervures  toriques  et  des  clefs  sculptées.  Les 
chapelles  absidales  sont  disposées  avec  art  et  avec  goût 
autour  du  chevet.  Aux  extrémités  du  transept  brillent 
deux  splendides  rosaces,  qu'on  doit  ranger  parmi  les 
plus  extraordinaires  productions  de  ce  genre.  La  grande 
nef  parait  un  peu  étroite  par  rapport  au  corps  général  de 
rédifice;  les  colonnes  y  conservent  les  mêmes  proportions 
qu'au  chœur  et  au  transept,  mais  les  chapiteaux  sont 
remplacés  par  de  simples  feuillages  ;  les  galeries  et  les  fe- 
nêtres présentent  les  nombreux  compartiments  du  style 
ogival  flamboyant  ;  les  voûtes,  appuyées  sur  des  arceaux 
prismatiques,  sont  embellies  de  clef  portant  les  armoi- 
ries de  S^  Maurice,  des  papes  et  des  évèques  bienfaiteurs 
de  l'œuvre,  et,  à  leur  sommet,  une  chaîne  de  feuil^ 
lage  s'étend  d'une  extrémité  à  l'autre.  Une  chapelle  con- 
tient le  tombeau  en  marbre  blanc  de.  deux  enfants  de 
Charles  VIII  et  d'Anne  de  Bretagne,  sculpté  par  les 
frères  L^uste,  et  restauré  en  1825.  V.  Manceau  et  Bou- 
rassé,  Verrière  du  choeur  de  Véglise  métropolitaine  de 
Tours,  1849,  in-fol. 

TOURS  (Eglise  S^  Jduen  k)j  ancienne  abbatiale,  con- 
struite dans  la  première  moitié  du  xuio  siècle,  sauf  la 
tour,  qui  provient  d'un  édifice  antérieur.  Cette  tour  car- 
rée, haute  de  25  met.  seulement,  supportait  autrefois 
une  pyramide  en  charpente,  qu'on  a  abattue  pendant  la 
Révolution.  Elle  est  soutenue  par  d'épais  contre-forts 
d'angle,  et  ornée,  sur  chaque  face,  de  deux  étages  de  fe- 
nêtres à  plein  cintre  :  les  fenêtres,  primitivement  ouvertes 
à  rOrient,  ont  été  fermées  au  moment  de  la  construction 
du  nouvel  édifice.  L'église  SWulien  a  46'",85  de  lon- 
gueur, 20  met.  de  largeur  (dont  9",00  pour  la  grande 
nef),  21  met.  de  hauteur  sous  voûte  à  la  nef  majeure^ 
0  met.  aux  nefs  mineures.  Le  transept  a  30  met.  de  lon- 
gueur, et  S"' ,20  de  largeur.  Il  y  a  deux  collatéraux  jus- 
qu'aux branches  du  transept,  et  quatre  dans  la  partie 
absidile,  qui  se  termine  par  une  muraille  droite.  Les 
chapelles  établies  en  prolongement  des  collatéraux  n'ap- 
partiennent pas  au  plan  primitif,  et  furent  ajoutées  pen- 
dant le  XVI*  siècle.  Les  piliers  de  la  nef  majeure  sont  can- 
tonnés de  quatre  colonnes,  et  surmontés  de  chapiteaux  à 
feuilles  recourbées  ;  ceux  de  la  région  absidale  sont  ar- 
rondis en  forme  de  colonnes  monocylindriques.  On 
compte  de  chaque  côté  de  la  nef  neuf  arcades  qui  corres- 
pondent à  autant  de  travées.  La  paroi  du  croisillon  m^- 
dional ,  et  la  muraille  qui  suit  le  collatéral  du  même  côté, 
sont  ornées  d'une  série  d'arcatures;  disposition  qui  ne  te 
répète  pas  du  côté  opposé.  Les  galeries  qui  circulent  tout 
autour  de  l'église  s'ouvrent  par  de  larges  arceaux  trilo- 
bés, dont  le  centre  repose  sur  une  légère  colonnette.  Le 
triforium  n'est  pas  transparent,  parce  que  les  nunpants 
des  toits  des  nefs  mineures  viennent  buter  au  niveau  de 
la  partie  inférieure  des  fenêtres  principales.  Les  colon- 
nettes  de  la  galerie  du  fond  du  transept  méridional  sont 
appuyées  sur  des  figures  bizarres,  idée  peu  commune  et 
dont  on  trouve  une  autre  application  dans  la  cathédrale 
de  Nevers.  Le  transept  méridional  est  terminé  par  une 
rose,  celui  du  nord  par  des  fenêtres  à  lancette.  Une  im- 
mense fenêtre,  d'une  très-belle  constructioQt  mais  sanr 
vitraux  de  couleur,  est  percée  dans  le  mut- de  l'abside. 
Les  voûtes  de  l'église  S'-Julien  sont  d'une  exécution  par- 
faiter  seulement ,  toutes  celles  des  nefs  mineures  ne  sont 
pas  M:>rmées  de  pierres  d'appareil  t  mais  de  libages  r»» 
vêtus  d'un  enduit  sur  lequel  on  a  simulé  les  apparcilf 


TRA 


1733 


TRA 


ftvec  de  larges  traits.  La  charpente  des  combles,  en  bois 
de  chêne  blanc,  offire  un  grand  intérêt.  V,  Manceaa 
et  Bourassé,  iVb/tc0  mr  Véglise  S^-Julien  de  Tours, 
18i0,  in-8«.  B. 

TOURTEAU;  en  termes  de  Blason,  même  figure  que  le 
Besant  (K.  ce  mot);  seulement,  le  tourteau  est  toujours 
de  couleur.  Les  tourteaux  ont  reçu  différents  noms  selon 
leur  couleur  :  on  appelle  agœsses  ceux  de  sable,  guipes 
ceux  de  pourpre,  guses  ceux  de  gueules,  heurtes  ceux 
d*azur,  volets  ceux  de  sinople. 

TOUTES  TABLES  (Jeu  de).  V.  TnicriiAC. 

TRABANS  (de  Tallemaod  traben,  trotter),  anciens  sol- 
dats des  régiments  suisses,  vêtus  à  Tespai^nole,  armés 
d*une  hallebarde  et  d*un  estoc,  et  dont  les  fonctions 
étaient  d'accompagner  le  capitaine  et  de  le  défendre. 

TRABÉE ,  to^  romaine.  K.  notre  Dictionnaire  de  Bi<y- 
graphie  et  d'Histoire. 

TRABUCAIRES ,  soldats  espagnols  armés  du  trahuco. 
Le  mot  a  été  appliqué  spécialement  à  des  bandits  qui  in- 
festèrent la  Catalogne  il  y  a  trente  ans. 

TRABUCO.  V.  EspuiGOLB. 

TRADITION  (du  latin  tradere,  livrer),  en  termes  de 
Droit,  action  de  livrer  une  chose  à  quelqu'un.  Autrefois, 
la  tradition  réelle  était  nécessaire  pour  transférer  la  pro- 
priété, et,  tant  qu'elle  n'était  pas  effectuée,  le  vendeur 
était  encore  maître  de  vendre  et  de  transmettre  à  un 
autre  l'objet  déjà  vendu.  Le  Code  Napoléon  (art.  1138) 
établit,  au  contraire,  que  l'obligation  de  livrer  une  chose 
est  parfaite  par  le  seul  consentement  des  parties;  il  n'y 
a  d'exception  que  pour  les  choses  mobilières,  dont  la  tra- 
dition s'effectue  par  la  remise  réelle  ou  par  la  remise  des 
clefs  des  b&timents  qui  les  contiennent  (art  160G).  La 
tradition  des  droits  incorporels  se  fait  par  la  remise  des 
titres,  ou  par  l'usage  que  l'acquéreur  en  fait  du  consente- 
ment du  vendeur. 

TRADiTion ,  récit  transmis  oralement  de  génération  en 
génération,  et  ce  mode  même  de  transmission.  Avant 
l'invention  de  l'écriture,  la  tradition  orale  était  le  seul 
moyen  de  conserver  le  souvenir  des  événements,  et  c'est 
à  cette  source  que  puisèrent  les  premiers  historiens. 
A  défaut  de  preuves  écrites  et  de  monuments  commémo- 
rât! fs,  la  tradition  peut  fournir  des  renseignements 
utiles,  mats  à  la  condition  d'être  contrôlée  par  la  cri- 
tique; car  elle  est  d'autant  plus  enveloppée  de  mythes  et 
d'obscurités  qu'elle  remonte  plus  haut  dans  le  temps.  — 
Par  tradition,  l'Église  catholique  entend  la  parole  non 
écrite  de  Jésus-Christ,  c-à-d.  ses  enseignements  transmis 
oralement  par  les  Apôtres,  conservés  par  les  Pères  et  par 
les  évêques,  qui ,  avec  l'assistance  du  Saint-Esprit,  se  les 
transmettent  fidèlement  les  uns  aux  autres  ;  elle  attribue  à 
cette  tradition  une  autorité  divine,  et  en  fait  une  des  bases 
de  ses  dogmes.  Les  Protestants  n'admettent  la  tradition 
comme  fondement  d'une  vérité  religieuse  qu'autant  cpi'elle 
est  confirmée  par  quelque  passage  de  l'Évangile  ;  ils  ont 
cependant  conservé  plusieurs  des  usages  qu'elle  consacre. 

TRADUCIANISME  (du  latin  trodiic^re,  transmettre), 
doctrine  suivant  laquelle  Tàme  des  parents  est  transmise 
par  la  génération  dans  le  corps  de  l'enfant  naissant. 

TRADUCTION  (du  latin  traducere,  transmettre),  ac- 
tion  de  faire  passer  un  ouvrage  d'une  langue  dans  une 
autre.  La  première  et  la  plus  essentielle  condition  que 
doive  remplir  un  traducteur  est  de  se  pénétrer  profondé- 
ment de  l'esprit  de  l'ouvrage  qu'il  veut  faire  passer  dans 
sa  langue  maternelle,  et  d'en  rendre  fidèlement  le  ton 
général,  les  idées  partielles,  et  par  suite  d'en  reproduire 
autant  que  possible  le  style.  Dans  le  détail,  il  ne  doit 
s'attacher  à  l'exacte  reproduction  des  tours  et  des  ex- 
pressions au'autant  que  cette  fidélité  pour  ainsi  dire  ma- 
térielle ne  blesse  pas  le  génie  et  les  habitudes  de  la  langue 
dans  laquelle  il  traduit.  Il  en  est  d'une  traduction  comme 
de  la  Justice  :  on  doit  s'y  garder  de  tout  excès;  rien  de 
plus  infidèle  qu'une  extrême  fidélité.  Maintes  fois  une 
expression,  dans  l'original,  est  forte,  hardie,  ou  élevée , 
et  celle  de  la  langue  du  traducteur  qui  y  correspond  di- 
rectement est  faible,  ou  étrange,  ou  basse  ;  une  image 
vive,  brillante,  naturelle,  en  latin  ou  en  allemand,  est 
extraordinaire  ou  triviale  en  français;  une  période  har- 
monieuse et  expressive ,  si  on  veut  la  calquer  de  trop 
{>rè8,  peut  devenir  languissante  et  raboteuse ,  parce  que 
es  deax  langues  n'ont  pas  le  même  génie,  et  que  la  con- 
structioa  des  phrases  ooéit  dans  l'une  et  dans  l'autre  à 
des  lois  nécessairement  différentes.  Il  faut  donc,  dans  ces 
divers  cas ,  recourir  à  des  éouivalents,  se  borner  à  con- 
server le  fond  de  la  pensée,  le  sens  de  chaque  membre 
de  phrase ,  rendre  l'ensemble  d'une  manière  conforme 
au  caractèrs  de  notre  langue,  et  ne  pas  s'exposer  à  re- 


buter le  lecteur  par  une  etrangetd  (roi  dans  son  esprit 
ne  se  distingue  pÂs  de  l'obscurité.  Cha(][ue  écrivain  doit 
aussi  être  rendu  avec  la  physionomie  qui  le  caractérise  : 
une  traduction  d'Homère  et  de  Démosthène  ne  saurait 
être  faite  d'après  les  mêmes  principes  qu'une  traduction 
de  Lucien  et  de  S^  Jean  Chrysostome  ;  la  fécondité  Ingé- 
nieuse, mais  souvent  diffuse,  d'Ovide  doit  reparaître 
sous  la  plume  d'un  habile  traducteur,  qui  ne  saurait, 
sans  ridicule,  adapter  les  mêmes  procédés  au  style  âpre 
et  vigoureux  de  Lucrèce,  &  la  précision  forte  et  brillante 
de  Virgile;  il  ne  tombera  pas  dans  la  faute  pave  du 

5 rince  Lebrun,  qui  a  traduit  du  même  ton  VFltade  et  la 
érusalem  délivrée.  Au  reste,  quoi  que  l'on  fasse,  une 
traduction  est  toujours,  dans  son  ensemble,  inférieure  à 
l'original,  et  ne  peut  donner  d'un  auteur  étranger  qu'uno 
idée  superficielle;  pour  le  connaître  de  près  et  à  fond,  i! 
faut  recourir  à  son  texte,  le  lire  dans  sa  langue.  Il  n'y  a 
d'exception  à  ce  sujet  que  pour  les  écrivains  qui  n'ont 
point  d'originalité  ou  de  talent  sérieux,  ou  qui  ont  écrit 
dans  une  langue  en  décadence  :  souvent  un  habile  tra- 
ducteur donne  à  leurs  ouvrages  un  cachet  distingué  et 
brillant,  seul  capable  de  les  rendre  lisibles;  c'est  ce  qu'a 
fait  souvent  avec  un  remarquable  bonheur  Augustin 
Thierry  pour  les  chroniques  mérovingiennes.  Sans  doute 
une  semblable  traduction  est  trahison,  selon  le  pro- 
verbe italien  (traduttore  traditore);  mais  du  moins  la 
trahison  profite  à  l'auteur  original,  et  ne  lui  fait  pas  le 
tort  que  la  sèche  et  lourde  prose  de  Larcher,  par  exemple, 
fait  au  coloris  naïf  et  gracieux  des  récits  d'Hérodote. 

Quand  on  commence  l'étude  d'une  langue,  il  faut  s'as- 
treindre pour  la  traduction  à  un  double  travail  :  d'abord 
reconnaître  le  sens  de  chaque  mot  et  de  chaque  phrase , 
et  les  rendre,  comme  on  dit,  littéralement  ;  puis,  s'assi- 
miler la  pensée,  et  donner  à  la  phrase  originale  le  tour 
3u'elle  aurait  eu  naturellement  dans  la  langue  du  tra- 
ucteur,  si  la  pensée  lui  en  avait  appartenu.  Dans  les 
écoles,  ce  double  travail  se  fait  le  plus  souvent  de  vive 
voix  après  une  préparation  préalable  ;  quelquefois  aussi 
on  s'aide  de  traductions  imprimées,  présentant  d'une 
part  le  texte  original  et  en  regard  la  traduction  française 
définitive,  d'autre  part  les  mots  ou  groupes  de  mots  tra- 
duits exactement  par  les  mots  correspondants  sans  au- 
cun souci  de  l'élégance,  enfin  des  notes  philologiques  on 
archéologiques  destinées  à  lever  les  diflicultâ  nue  la 
traduction  ne  suffît  pas  à  résoudre,  et  ^i  ont  oesoin 
d'être  telairdes  par  des  explications  spéciales. 

La  traduction  d'un  morceau  détaché  en  une  autre 
langue  s'appelle  Version,  si  cette  langue  est  la  mater- 
nelle; Thème,  si  c'est  une  langue  étranjçère.  Ces  mots 
sont  surtout  usités  pour  les  exercices  scolaires.  V.  Thème, 
Version.  P. 

TRAGÉDIE,  l'un  des  deux  genres  principaux  de  com- 
position dramatique,  celui  où  l'on  met  en  scène  une 
action  héroïque  capable  de  provoquer  la  pitié,  la  terreur, 
l'admiration.  Peindre  l'homme  aux  prises  avec  une  im- 
placable destinée ,  avec  les  grandes  douleura,  avec  ses 
passions  les  plus  fortes,  tel  est  le  but  du  poète  tra- 
gique ;  et,  pour  peu  ^e  ses  peintures  soient  vraies,  il 
n'y  a  pas  d'oeuvre  qui  puisse  offrir  plus  de  charme,  ex- 
citer un  plus  vif  intérêt  ;  car,  au  plaisir  instinctif  qu« 
produit  en  nous  toute  imitation  fidèle  de  la  nature, 
s'ajoute  ici  la  sympathie  que  nous  éprouvons  pour  nos 
semblables.  Aristote,  Horace  et  Boileau  ont  établi  dans 
leura  Poétiques  les  règles  de  la  tragédie  :  mais  si,  parmi 
ces  règles,  les  unes,  fondées  sur  la  raison  H  le  goût, 
sont  imprescriptibles  et  étemelles,  les  autres  ne  sem- 
blent reposer  que  sur  la  tradition  et  la  convention ,  et 
sont  par  là  même  fort  contestables.  Ainsi,  il  est  conforme 
au  bon  sens  (Boileau,  Art  poétique,  ch.  m)  que 

, la  passion  émno 

AUlô  cb«rcher  le  oœor,  réchauffe  et  le  remac. 

parce  que,  selon  le  mot  de  Rousseau ,  singulièrement  ex« 
pressif  par  son  exagération  même  et  son  air  paradoxal,  il 
n'y  a  que  la  raison  qui  ne  soit  bonne  à  rien  sur  la  scène, 
et  que  l'impassibilité  stoïcienne  d'un  Gaton  serait  fort 
peu  tragique.  De  même,  il  est  dans  les  convenances  du 
genre  que  la  tragédie,  qui  est,  après  l'épopée,  la  forme 
la  plus  digne  et  la  plus  belle  de  l'inspiration  littéraire , 
emprunte  à  la  poésie  son  langage;  que  le  sujet  s'explique 
dès  les  premiers  vera;  que  le  trouble  croisse  de  scène  en 
scène,  et  que  l'intrigue  se  débrouille,  tout  à  coup  et  sans 
peine,  au  moment  voulu  ;  que  les  personnages,  s'ils  sont 
connus  d'avance,  conservent  le  caractère  que  l'histoire 
ou  la  légende  leur  attribue  ;  qu'ils  soient,  jusqu'au  bout, 
tels  qu'on  les  a  vus  d'abord  ;  que  chaque  passion  parle 


TRA 


1734 


TRA 


loo  langage  propre  et  conforme  à  la  nature.  Cea  pré- 
ceptes ne  sont  que  les  inspirations  du  sens  commun.  Mais 
la  raison  n*oblige  nullement  à  croire  que  la  règle  des 
trois  unités  {V.  Unités),  à  laquelle  se  sont  péniblement 
asservis  les  tragiques  français,  soit  légitimement  obli- 
çttoire. 

TRACéDIB  CHEZ  L£S  AlfCIKNS. 

I.  Tragédie  ches  les  Grecs,  —  Lar  tragédie  prit  nais- 
sance en  Grèce,  dans  les  fêtes  de  Bacchus.  Chaque  an- 
née, on  chantait  à  Athènes  un  dithyrambe  (V.  ce  mot) 
en  l'honneur  de  ce  Dieu  mis  en  pièces  par  les  Titans  : 
un  chorége  (V.  ce  mot)  rapportait  quelque  partie  de  la 
légende  religieuse,  tandis  qu*un  chœur  de  cinquante 
personnes  hurlait  en  tournant  autour  d'un  autel  où  Ton 
immolait  un  bouc.  De  là  vint  le  mot  tragédie  (  du  grec 
tragos,  bouc,  et  d(ié, chant),  qui  veut  dire  ohantdu  bouc. 
Selon  quelques-uns,  les  personnages  du  chœur  se  dégui- 
saient en  Satyres,  avec  des  jambes  et  des  barbes  de  bouc, 
pour  figurer  le  cortège  habituel  de  Bacchus.  L'auteur  du 
plus  beau  dithyrambe  obtenait  en  récompense  un  bœuf, 
et  non  pas  un  bouc,  comme  l'ont  dit  Horace  et  Boileau. 
Thespis  semble  avoir,  le  premier,  mis  en  action,  en 
drame  (drama)^  la  léjgende,  qui,  jusque-là,  n'était 
qa*un  simple  récit  :  le  chœur  suivit  son  rôle,  mais  non 
plus  d'une  façon  continue;  de  temps  en  temps  un  per- 
sonnage s'en  détachait  et  parlait  seul,  soit  pour  répondre 
aux  cris  du  chœur,  soit  pour  le  provoquer  à  de  nouveaux 
chants.  Une  seconde  et  plus  importante  innovation  de 
Thespis  fut  de  prendre  quelquefois  le  sujet  do  ses  drames 
en  dehors  de  la  légende  consacrée,  et  d'émanciper  la 
tragédie  du  cercle  où  la  renfermait  la  religion  :  c'est  ainsi 
qu'on  lui  attribue  une  Atceste,  De  ce  jour,  la  tragédie, 
telle  (lue  nous  la  concevons  aujourd'hui,  était  au  moins 
ébaucnée;  seulement  le  chœur  la  remplissait  encore 
presque  tout  entière.  Il  appartenait  aux  successeurs  de 
Thespis  de  réduire  l'élément  chorégraphique  et  musical, 
et  de  développer  au  contraire  l'action  proprement  dite. 

Eschyle,  qu'on  regarde  comme  le  père  de  la  tragédie 
grecque,  a  eu  de  glorieux  prédécesseurs.  Phrynichus, 
qui  introduisit  sur  le  théâtre  les  personnage.*  de  femmes, 
avait,  dans  l'une  de  ses  œuvres  intitulée  ta  Prise  de  Mi- 
let,  peint  sous  des  couleurs  si  vives  les  malheurs  de 
cette  cité,  qu'il  fut  mis  à  l'amende  pour  avoir  réveillé 
trop  fortement  le  souvenir  d'une  calamité  nationale.  En 
revanchOp  il  conquit  une  grande  popularité  avec  ses  Phé- 
niciennes, où  il  exposait,  comme  Eschyle  dans  sa  tra- 
gédie des  Perses,  la  défaite  de  l'Asie  et  la  victoire  de  la 
Grèce  à  Salamine.  Pratinas,  à  qui  l'on  rapporte  l'inven- 
tion du  drame  satyrique  {V.  ce  mot),  et  Chœrilus,  qui, 
dit-on,  imagina  les  décorations  de  la  scène  et  fit  prendre 
aux  acteurs  le  costume  propre  à  leur  rôle,  vainquirent 
plus  d'une  fois  Eschyle  dans  les  concours  poétiques.  Le 
temps,  en  détruisant  leurs  œuvres,  ne  nous  a  laissé 
d'autre  preuve  de  leur  génie  que  le  souvenir  de  leurs 
triomphes.  Il  n'a  guère  plus  épargné,  du  reste,  les  com- 
positions d'Eschyle,  puisque,  de  tO  œuvres  dramatiques 
que  les  critiques  anciens  lui  attribuent,  il  ne  nous  en  est 
arrivé  que  7,  avec  quelques  lambeaux  d'autres  pièces. 
Elles  suffisent  néanmoins  pour  attester  la  puissance  et 
l'élévation  de  son  génie.  On  pourrait  dire  qu'il  y  a  trois 
poètes  dans  Eschyle  :  le  poète  lyrique,  avec  toutes  les 
qualités  qui  le  distinguent,  l'enthousiasme,  des  images 
tour  à  tour  sublimes  et  gracieiises,  des  pensées  pro- 
fondes, dignes  d'un  sage  qui  fut  initié  aux  mystères 
d'Eleusis  et  compté  parmi  les  adeptes  de  la  philosophie 
pythagoricienne,  et  un  style  assorti  à  l'audace  de  ses 
conceptions;  le  poète  épique,  dont  les  récits  ont  la  rapi- 
dité, la  chaleur  et  l'éclat  de  ceux  de  V Iliade;  le  po^te 
dramatique,  qui  sait  déjà  l'art  d'exposer  un  sujet  à  l'aide 
du  chœur  ou  d'un  personnage  détaché,  et  de  préparer 
les  spectateurs  aux  scènes  qui  vont  se  dérouler  sous  leurs 
yeux  ;  bien  plus,  dans  une  action  d'une  simplicité  ex- 
trême, où  les  personnages,  animés  d'un  sentiment  unique, 
n'apparaissent  un  moment  que  pour  accomplir  leur  des- 
tinée, instruments  aveugles  et  roides  comme  la  Fatalité 
qui  les  pousse,  il  égale  cependant  du  premier  coup  les 
plus  grands  maîtres  par  la  vivacité  du  dialogue.  Rien  ne 
lui  manqua  que  la  mesure,  qui  fut  le  privilège  de  son 
jeune  rival  Sophocle.  En  effet,  tandis  que  l'un  pousse 
parfois  la  grandeur  jusqu'au  gigantesque,  l'autre  ne 
s'égare  jamais  au  delà  de  certains  limites.  Il  en  résulte 
que  plusieurs  personnages  d'Eschyle,  un  Océan,  un  Pro- 
méthée  même,  nous  surpassent  et  ne  nous  touchent  plus 
guère  ;  ils  excitent  notre  étonnement,  ils  frappent  par  le 
merveilleux  notre  imagination,  mais  sans  remuer  not 


cœars;  ils  nous  sont  devenus  étrangers.  Lea  héros  àt 
Sophocle  demeurent  au-dessus  de  nous,  mais  à  une  hau- 
teur où  l'humanité  peut  encore  atteindre  :  s'ils  nous  sont 
supérieurs,  ils  restent  cependant  des  hommes,  et  provo- 
quent ainsi  chez  les  spectateurs  un  intérêt  qui  ne  lisqoe 
point  de  s'aflTaiblir.  La  langue  des  deux  poètes  présente 
le  même  contraste  :  Eschyle  a  des  images  outrées,  des 
expressions  bizarres  ,  extraordinaires ,  imprévues  ;  le 
style  de  Sophocle  est  élevé ,  mais  sobre  ;  assez  savant 
pour  être  original  et  poétique  jusque  dans  les  détails 
familiers,  il  ne  l'est  pas  au  point  d'offrir,  comme  celui  de 
son  émule,  des  difficultés  insurmontables  ;  sévère  autant 

3u'il  faut  pour  éviter  le  trivial,  il  ne  s'écarte  nulle  part 
e  la  saine  et  vraie  simplicité.  En  un  mot,  la  critique, 
qui  regrette  en  Eschyle  une  inspiration  trop  souvent  in- 
tempérante, admire  en  Sophocle  un  artiste  consommé, 
une  inspiration  toujours  réglée  par  un  goût  exquis.  — 
Les  personnages  d'Eschyle  se  montrent  à  la  fin  du  drame 
tels  qu'ils  étaient  au  début;  un  seul  sentiment  les  oc- 
cupe tout  entiers,  et  les  mène,  sans  exaltation  ni  défail- 
lance, au  but  marqué  par  la  Fatalité.  Sophocle,  au  con- 
traire ,  observe  dans  la  peinture  des  passions  une 
progression  pleine  d'art  et  de  goût;  en  sorte  que,  dans 
Eschyle,  les  événements  semblent  créer  les  caractères, 
au  lieu  que,  dans  Sophocle,  c'est  le  développement  des 
caractères  qui  semble  produire  les  événements.  —  Es- 
chyle laissait  au  chœur  une  place  importante,  quelque- 
fois la  principale  :  Sophocle  lui  donne  une  part  plus 
discrète.  Avec  lui  les  chants  du  chœur  sont  devenus 
comme  le  cri  de  la  conscience  publique,  et  l'expressio'' 
des  émotions  diverses  que  le  spectateur  éprouve  à  tra- 
vers les  péripéties  de  l'intrigue;  son  rôle  désormais  est 
à  la  fois  secondaire  et  moral.  Par  une  révolution  défi- 
nitive, l'intérêt  a  passé  du  dithyrambe  au  dialogue,  des 
choreutes  aux  personnages  ;  la  vraie  tragédie  est  consti- 
tuée, et,  dès  son  début,  a  atteint  la  perfection  suprême. 

Il  est  vrai  qu'elle  déclina  presque  aussitôt  avec  Euri- 
pide. Novateur,  et,  si  l'on  peut  parler  ainsi,  représen- 
tant du  romantisme  en  Grèce,  il  altéra  les  vieilles  lé- 
gendes et  rabaissa  les  héros.  Philosophe ,  il  fit  le  procès 
aux  Dieux  en  vrai  disciple  de  Socrate,  attaqua  les  super- 
stitions, et  sema  inconsidérément  dans  ses  pièces  les  sen- 
tences morales.  D'autre  part,  il  déplaça  la  Fatalité  :  chez 
Eschyle,  elle  était  ce  pouvoir  aveugle  et  tyrannique  qui 
contraignait  invinciblement  au  crime  les  mortels,  puis 
les  punissait  de  leurs  fautes  involontaires;  Sophocle,  &me 
éminemment  religieuse,  avait  cherché  à  concilier  ce 
dogme  inique  et  redoutable  avec  les  inspirations  de  la 
conscience  et  le  sentiment  instinctif  de  la  justice,  et  ses 
personnages,  victimes  du  Destin ,  l'étaient  aussi  de  leurs 
passions  coupables;  Euripide  fit  descendre  du  ciel  dans 
le  cœur  humain  la  Fatalité,  en  présentant  à  l'homme, 
comme  la  cause  souveraine  de  ses  souff'rances,  ses  propres 
faiblesses  {V,  Fatalité).  Orateur,  il  ne  se  garda  point 
assez  des  subtilités  et  des  raffinements  de  la  sophistique, 
et  l'on  vit  les  passions  plaider  sur  son  théâtre  comme 
des  avocats  sur  la  place  publique.  Mais,  en  revanche, 
personne  n'a  connu  plus  profondément  et  décrit  par  des 
analyses  plus  délicates  les  passions  humaines;  personne 
n'en  a  représenté  d'une  façon  plus  tragique  les  mouve- 
ments désordonnés.  De  là  vient  que  chez  lui  le  rôle  prin- 
cipal est  aux  femmes  :  il  en  a  médit  ;  on  l'a  nommé  leur 
ennemi  {misogyne);  il  ne  faut  pourtant  pas  oublier  ses 
touchantes  figures  d'Iphigénie,  de  Polyxène  et  d'Alceste. 
Eschyle  avait  pour  lui  l'enthousiasme,  et  Sophocle  une 
majesté  douce  et  sereine;  Euripide  se  distingua  par  la 
délicatesse  exquise  de  sa  sensibilité  et  quelque  chose  de 
féminin  dans  la  nature  de  son  génie.  Son  style  est  clair, 
harmonieux,  coulant  et  flexible  ;  son  langage  se  prête  à  tous 
les  besoins  de  la  pensée,  et  en  illumine  les  plus  fugitives 
nuances;  mais  on  y  relève  deux  défauts,  le  trivial  et  la 
subtilité.  Il  inventa  les  prologues,  en  homme  qui  veut 
arriver  tout  de  suite  aux  situations  émouvantes,  et  le 
merveilleux,  en  homme  qui ,  ayant  épuisé  le  pathétique 
des  situations,  ne  sait  plus  comment  se  retirer  et  finir. 
Sur  un  théâtre  ainsi  conçu,  le  chœur  était  au  moins 
inutile,  sinon  gênant  :  aussi  la  matière  de  ses  chants 
n'est  le  plus  souvent  qu'un  lieu  commun,  très-indirecte- 
ment lié  au  sujet. 

Avec  Euripide  périt  la  tragédie  grecque  ;  nous  ne  cite- 
rons que  pour  mémoire  Ion  de  Chios,  rival  quelquefois 
heureux  de  Sophocle;  Achéus  d'Érétrie,  qui  excella, 
dit-on ,  dans  le  drame  satyrique  ;  Agathon ,  l'un  des  per- 
sonnages du  Banquet  de  Platon,  auteur  d'une  tragédie  in- 
titulée la  Fleur,  où  tout  était  d'invention  pure  ;  Jophon  et 
Ariston,  fils  de  Sophocle;  Sophocle  le  Jeune  «  son  petit- 


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1735 


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flli;  enfin  Earipide  le  Jeune,  fils  on  nevea  d*Euripidc 
(V.  Grecqob  —  Littérature).  V.  Patin,  Études  sur  les 
tragiques  grecs,  2*  édit..  Pari»,  1858,  4  vol.  çr.  in-l8. 

II.  Tragédie  chez  les  Romains,  —  La  tragédie  latine  est 
trèîv-inférieure  à  la  tragédie  grecque,  et  il  y  a  plusieurs 
raisons  de  cette  infériorité.  D'abord,  la  tragédie  n'était 
pas  une  production  du  pays  :  il  était  difficile  que  les 
Romains  y  prissent  le  même  intérêt  que  les  Grecs,  qui 
avaient  vu  le  drame  sortir  et  se  dégager  progressivement 
du  culte  d*un  de  leurs  Dieux.  Les  premiers  tragiques 
d'Italie,  Livius  Ândronicus,  Névius  et  Ennius,  ne  firent 
guère  que  traduire  les  œuvres  des  Athéniens;  tout  au 
plus  Névius  hasarda-t-il  quelques  pièces  où  les  mœurs 
étaient  latines  comme  la  langue.  Et  à  quel  auditoire 
offraient-ils  leurs  plagiats?  On  était  au  temps  des  guerres 
Puniques,  et  les  Romains  généralement  conservaient  en- 
core la  rudesse  et  Tignorance  des  siècles  primitifs.  Quel 
plaisir  pouvait  leur  procurer  la  représentation  de  ces  lé- 
gendes grecques  dont  ils  ignoraient  le  premier  mot? 
D'ailleurs,  il  faut  des  esprits  déjà  façonnés  par  la  culture 
des  lettres,  pour  trouver  du  charme  aux  spectacles  tra- 
giques. —  Peu  à  peu  cependant,  et  par  l'influence  de  ces 
premiers  spectacles,  et  gr(ice  aux  relations  de  la  Grèce  et 
de  Rome,  les  chevaliers  et  les  sénateurs  se  passionnèrent 
pour  cet  art  nouveau,  et  la  foule,  entraînée  par  leur 
exemple  et  mieux  éclairée,  partagea  dans  une  certaine 
mesure  leur  enthousiasme.  Cette  transformation  s'opéra 
au  u"  siècle  avant  notre  ère,  et  maint  passage  de  Cicéron 
atteste  les  applaudissements  qui  accueillirent  le  DuIch 
restés  (Oreste  esclave)  de  Pacuvius  et  le  Brutus  d'At- 
tius.  Le  premier,  tout  en  imitant  les  Grecs,  savait  mieux 
que  ses  prédécesseurs  mettre  déjà  dans  ses  œuvres  de 
l'&me  et  de  l'originalité;  le  second,  à  qui  Eschyle  avait 
communiqué  quelque  chose  de  son  souffle  puissant ,  eut 
la  gloire  de  créer  la  tragédie  nationale  :  élégance  soute- 
nue, noblesse,  élévation ,  versification  correcte  et  variée, 
telles  paraissent  avoir  été  ses  qualités,  déparées  çà  et  là 
par  des  fautes  de  goût.  Malheureusement ,  de  l'un  et  de 
l'autre  il  ne  nous  reste  que  des  fragments.  Cette  époque 
fut  l'àge  d'or  de  la  tragédie  latine,  et  cependant  elle  conte- 
nait déjà  un  germe  puissant  de  décadence.  En  effet ,  les 
combats  de  gladiateurs  s'étaient  établis  conjointement 
avec  les  théâtres,  et  leur  firent  dès  l'origine  une  concur- 
rence funeste  :  comment  un  peuple  d'humeur  belliqueuse 
et  farouche  eût-il  senti  vivement  les  délicatesses  des  fic- 
tions théâtrales,  et  goûté  longtemps  le  plaisir  purement 
intellectuel  d*une  représentation  tragique,  quan  i  on  l'ac- 
coutumait aux  jouissances  bien  autrement  acres  et  fortes 
que  donne  la  vue  du  sang  humain  coulant  sur  l'arène? 
Les  classes  élevées  se  laissèrent  elles-mêmes  gagner  à 
cette  contagion.  Ni  Asinius  Pollion  ,  tant  vanté  par  Ho- 
race {OdeSf  II,  1  ),  ni  Varius  avec  son  Thyeste,  ni  Ovide 
avec  sa  Médée ,  ne  ressuscitèrent  la  tragédie,  morte  avec 
Attius.  Simples  exercices  d'esprits  lettrés,  leurs  œuvres 
ne  parurent  pas  sur  la  scène,  ou  n'y  furent  pas  écoutées. 
Sénèque  ne  fut  pas  plus  heureux  :  il  emprunta  quelaues 
sujets  à  la  Grèce,  mais  moins  pour  composer  de  véritables 
tragédies  conformément  aux  règles  établies,  que  pour  en- 
fermer dans  un  cadre  d'un  nouveau  genre  ses  tirades 
stoïciennes.  Philosophe  dogmatique  un  jour,  il  rédigeait 
en  prose  un  traité  De  la  Colère;  versiQcateur  dramatique 
le  lendemain,  il  mettait  en  ïambes,  dans  la  bouche  d'une 
Cassandre  ou  d'un  Tbyeste,  des  préceptes  analogues. 
Aussi ,  dans  ces  œuvres  d'un  goût  ^té  moins  encore  par 
le  siècle  que  par  le  ^spectacle  des  cruautés  et  des  turpi- 
tudes de  la  cour,  les  dialogues,  à  part  quelques  situations 
fortes  et  vraiment  tragicjues,  ne  sont  que  des  assauts  de 
bel  esprit;  les  descriptions  superflues  y  succèdent  aux 
déclamations  ampoulées,  et  les  pensées  subtiles  aux  lieux 
communs;  tous  les  personnages  sont  transfigurés  en  stoï- 
ciens, ou  plutôt  sont  copiés  tour  à  tour  sur  Sénèque  et 
sur  Néron ,  quelquefois  sur  l'un  et  l'autre  à  la  fois.  Ta- 
cite, dans  son  Dialogtie  des  Orateurs,  introduit  un  der- 
nier représentant  de  la  tragédie  romaine,  Maternus,  dé- 
fenseur ardent  et  inspiré  de  la  poésie, champion  passionné 
des  Muses  contre  l'interlocuteur  Aper,  qui  avait  dénigré 
leur  culte  au  nom  de  l'éloquence;  mais,  s'il  mérite  d'être 
mentionné,  c'est  plutôt  pour  avoir  bravé  la  niort  en  com- 
posant son  drame  de  Caton,q\ie  pour  la  valeur  de  son 
œuvre,  aujourd'hui  inconnue  et  oubliée  (K  Latins  — 
Littérature).  V.  Boissier,  Le  poète  Attius,  Etude  sur  la 
tragédie  latine  pendant  la  République,  Paris,  1857,  in-8». 

TRAGÉDIE  CHEZ  LES  MODERNES. 

L  Tragédie  en  France,  —  C'est  l'école  aventureuse  et 
vM  rmatrice  de  Ronsard  qui  restaura  U  tragédie.  Seule- 


ment, Jodelle,  le  membre  de  la  Pléiade  qui  s'était  charge 
de  remettre  au  jour  les  tragiques  anciens,  ne  nous  ren- 
dit qu'un  fantôme ,  une  ombre  du  drame  grec.  Rien  ne 
manquait  à  sa  Cléopâtre  de  tout  ce  qui  s'emprunte  : 
l'appareil,  le  dialogue,  les  chœurs,  et  même  le  sacrifice 
du  bouc  ;  mais  rien  ne  s'y  trouvait  de  ce  qui  ne  s'em- 
prunte pas,  les  caractères,  la  passion,  la  vie.  Garnier, 
qui  fit  oublier  Jodelle,  suivit  ses  errements  :  il  imita 
aussi  les  Grecs,  mais  à  travers  Sénèque,  se  jeta  dans  des 
monologues  d'une  longueur  démesurée,  da.ns  des  des- 
criptions minutieuses,  dans  des  récits  plus  épiques  que 
dramatiques  ;  en  même  temps,  comme  Ronsard,  il  parla 
grec  et  latin  en  français,  et,  faute  d'un  théâtre  public,  il 
n'eut  pas,  pour  l'engager  et  le  retenir  dans  la  bonne  voie, 
les  applaudissements  salutaires  ou  les  sévérités  de  la  foule. 
Son  meilleur  titre  sera  d'avoir  élargi  le  cercle  des  sujets 
dramatiques  :  il  emprunta  une  Antigone  à  Sophocle, 
mais  composa  aussi  une  Bradamante,  tirée  peut-être  de 
l'Arioste  ;  il  fraya  la  route  à  Corneille,  en  prenant  pour 
héroïnes  Porcie,  la  femme  de  Brutus,  et  Comélie,  la 
veuve  de  Pompée  ;  il  devança  Racine  par  son  drame  de 
la  Juive  ;  il  donna  sur  la  scène  française  le  premier  mo- 
dèle des  imprécations  trag!(iues,  et  sa  Cornélie,  qui  mau- 
dit les  assassins  de  Pompée,  a  peut-être  inspiré  celle  de 
Corneille.  —  Hardy  commença,  assez  grossièrement  du 
reste,  l'éducation  du  public.  Vers  IGOO,  une  troupe  d'ac- 
teurs s'établit  à  Paris,  sur  un  théâtre  autorisé,  dans  le 
quartier  du  Marais,  et  invita  à  ses  représentations ,  non 
plus  les  lettrés  et  les  savants  officieux,  mais  quiconque 
put  payer  sa  place  au  parterre.  Pendant  vingt  ans,  avec 
le  nombre  énorme  de  cinq  ou  six  cents  pièces  de  tout 
genre,  de  tout  mérite,  dont  les  meilleures  étaient  au  plus 
médiocres,  Hardy  soutint  cette  troupe  :  durer  était  le 
grand  point.  Bientôt  Théophile  apporta  sa  Thisbé,  Mairet 
sa  Sylvie,  sa  Sophonisbe  surtout ,  où  l'on  vantait  l'obser- 
vation scrupuleuse  des  règles  aristotéliques.  Tristan ,  et 
principalement  Rotrou,  futur  auteur  du  VVenceslas  et  du 
Saint-Genest ,  pièces  qui  vivent  encore  par  quelques 
inspirations  vraiment  tragiques,  achevèrent  de  préparer 
l'avènement  de  P.  Corneille.  Celui-ci ,  qui  cherchait  sa 
voie  depuis  1629,  après  avoir  préludé  par  quelques  co- 
médies d'essai  et  la  tragédie  de  Médée,  donna  enfin .  en 
1636,  l'immortelle  «  merveille  du  Cid,  » 

Dans  les  tragédies  de  Corneille,  ce  qui  charme  et  sub- 
jugue, c'est  la  grandeur  et  l'héroïsme  des  principaux  per- 
sonnages; et  l'efi'et  général  est  une  admiration  bienfai- 
sante pour  les  hautes  vertus  dont  la  nature  nous  a  faits 
capables.  Cette  élévation  suit  une  marche  ascendante 
depuis  le  Cte{  jusqu'à  Polyeucte  :  il  est  beau  que  Rodrigue 
et  Chimène  fassent  taire  leur  amour  devant  l'honneur  de 
la  famille  ;  il  est  plus  beau  que  les  aff'ections  de  la  famille 
soient  sacrifiées  dans  Horace  à  l'honneur  de  la  patrie  ;  à 
son  tour,  cet  héroïsme  est  surpassé  par  celui  d'Auguste, 
qu'aucun  devoir  n'invitait  à  la  clémence,  que  l'intérêt  de 
l'Empire  autorisait,  obligeait  peut-être  à  se  montrer 
sévère,  et  qui ,  «  maître  de  lui  comme  de  l'univers  », 
pardonne  à  Cinna.  son  assassin.  Qu'y  a-t-il  de  supérieur 
à  cette  générosité?  Rien,  sinon  l'héroïsme  de  Polyeucte, 
et  la  victoire,  sur  tous  les  attachements  terrestres,  même 
les  plus  purs  et  les  plus  saints,  d'une  àme  pleine  de  la 
grâce  divine  et  de  l'enthousiasme  du  martjnre.  —  Le  goût 
trop  peu  sûr  de  Corneille  lui  a  fait  dépasser  le  but  lors- 
qu'il choisit  le  sujet  de  Théodore,  où  la  délicatesse  mo- 
rale et  la  pudeur  ée  l'auditoire  sont  tenues  à  la  g^ne  et 
dans  une  inquiétude  étrange.  Corneille  fut  un  génie  sin- 
gulièrement inégal,  et  la  critique  est  forcée  de  recon- 
naître que ,  sur  plus  de  trente  pièces  qu'il  a  composées, 
quelques-unes  seulement  sont  des  chefs-d'œuvre  ;  il  crut 
trop  souvent  qu'une  intrigue  industrieusement  conduite 
valait  en  intérêt  la  peinture  des  caractères,  et  l'on  doit 
reconnaître  que,  chez  lui ,  la  grandeur  dégénère  parfois 
en  emphase,  l'éloquence  en  déclamation,  le  raisonnement 
en  subtilités  sentencieuses;  que  des  idées  d'ordre  co- 
mique s'y  mêlent  aux  plus  nobles  pensées;  qu'enfin  il  a 
payé  tribut  à  la  mode  de  son  siècle  en  affadissant  de  ga- 
lanteries déplacées  le  langage  héroïque  de  ses  vieux  Ro- 
mains. Ces  défauts,  moins  le  dernier,  tenaient  d'abord  à 
la  pente  naturelle  de  son  esprit  et  de  son  imagination, 
que  la  fausse  grandeur  semble  avoir  facilement  séduite, 
puis  aux  modèles  espagnols  qu'il  imita  le  plus  complai- 
samment ,  parce  qu'il  y  avait  entre  leur  génie  et  le  sien 
comme  une  affinité  secrète,  Guilhem  de  Castro  et  Lope 
de  Vé^  parmi  les  modernes,  Sénèque  et  Lucain  parmi 
les  Anciens.  Quelque  chose  toutefois  atténue  ces  fai- 
blesses :  il  ne  faut  pas  oublier  que  Corneille  n'avait  eu 
d'autres  guides  que  les  ébauches  informes  de  ses  prédé- 


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1736 


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eMseurt  ou  leurs  calques  froids  et  décolorés  de  la  tra- 
gédie antique,  qu*il  eut  Téritablement  à  créer  son  art,  et 
que^  du  premier  coup,  par  la  seule  force  du  génie,  il  le 
porta  à  la  perfection  ;  que  telle  fut  la  variété  de  ses  con- 
ceptions, qu*il  offrit  à  la  fols  le  modèle  de  toutes  les 
œuvres  thé&txales,  de  la  tragédie  dans  ses  premiers  ou- 
vrages, de  la  comédie  dans  le  Menteur,  du  drame  pro- 
prement cUt  dans  Nicomède,  de  la  tragédie  bourgeoise 
dans  Don  Sanche;  et  qu'enfin  la  gloire  des  grands  hommes 
se  doit  mesurer  aux  moyens  dont  ils  ont  disposé  pour 
l'acquérir. 

On  signale  d'ordinaire  entre  Corneille  et  Racine  deux 
différences  principales  d'où  découlent  toutes  les  autres  : 
l'une  a  sa  source  dans  les  tendances  particulières  de  leur 
génie,  l'autre  dans  la  façon  dont  ils  ont  conçu  le  drame. 
Corneille  avait  incliné  à  représenter  le  côté  noble  de 
l'àme  humaine,  Racine  voulut  peindre  les  hommes  tels 
qu'ils  sont  ;  Corneille  avait  imité  de  préférence  les  Espa- 
gnols, Racine  aima  mieux  chercher  ses  modèles  parmi  les 
tragiques  grecs.  Ces  dispositions  allaient  renouveler  la 
tragédie  française.  —  Puisque  Racine  aspirait  à  mettre 
sur  la  scène  l'homme  après  le  héros,  la  vérité  commune 
après  la  vérité  d'exception,  le  triomphe  de  la  passion 
après  celui  du  devoir,  il  était  naturel  qu'il  recherchât 
surtout  les  sujets  dont  l'am&ar  est  le  fond,  parce  qu'il  n'y 
a  pas,  en  général ,  de  sentiment  qui  remplisse  autant  la 
vie  humaine,  et  dont  la  peinture  puisse  intéresser  et  tou- 
cher plus  d'esprits.  Et  s'il  est  vrai  que  la  passion  exerce 
particulièrement  son  empire  sur  le  cœur  de  la  femme,  il 
était  inévitable  que,  sur  ce  nouveau  théâtre,  les  hommes 
cessassent  de  jouer  les  principaux  rôles.  Chimène,  Ca- 
mille et  Pauline  exceptées,  les  héroïnes  de  Corneille  ont 
une  àme  toute  virile.  En  effet,  selon  la  remarque  d'un 
critique  éminent.  Corneille  «  esprit  plus  vigoureux  que 
délicat ,  plus  subtil  que  pénétrant ,  n'avait  pas  la  curio- 
sité tendre  et  patiente  qui  nous  fait  lire  au  fond  de  ce 
système  de  mobilité  et  de  persévérance,  de  dissimulation 
et  d'abandon ,  d'amour  et  de  haine,  d'ambition  et  de  dé- 
vouement que  recèle  le  cœur  d'une  femme.  »  Cette  ana- 
lyse est*,  au  contraire,  le  triomphe  de  son  rival ,  que  sa 
propre  sensibilité  éclairait  sur  tous  ces  mystères.  Voilà 
pourquoi  il  a  peint  avec  autant  de  variété  que  de  profon- 
deur, danp  Hermione,  Roxane  et  Phèdre,  l'amour  sensuel 
et  violent;  dans  Iphigénie,  Monime,  Junie  et  Bérénice, 
l'amour  innocent,  ou  du  moins  voilé,  timide  et  contenu; 
dans  Ândromaque,  Clytemnestre  et  Josabeth,  la  ten- 
dresse maternelle;  dans  Âgrippine  et  Âthalie,  la  passion 
du  pouvoir  chez  les  femmes;  dans  Esther  enfin,  les 
alarmes  d'un  cœur  en  qui  le  dévouement  à  la  patrie 
Juive  se  confond  avec  la  crainte  et  l'amour  de  Dieu. 
Aussi,  qu'on  écoute  les  héros  de  Corneille  et  les  hé- 
roïnes de  son  émule,  et  que  l'on  compare  leur  langage  : 
les  uns  ne  parlent ,  pour  ainsi  dire,  que  par  sentences, 
et  mettent  en  maximes  les  règles  du  devoir  qui  dicte 
leur  conduite;  les  autres,  dominées  par  la  passion,  en  re- 
produisent dans  leurs  discours  tous  les  mouvements 
divers,  l'ivresse  de  l'espérance,  l'emportement  de  la  fu- 
reur et  de  la  jalousie,  les  agitations,  les  inquiétudes,  les 
défaillances,  le  désespoir.  Corneille  avait  subjugué  l'ima- 

Î;i nation  ;  Racine  toucha  les  cœurs  ;  l'un  avait  produit 
'admiration ,  l'autre  produisit  l'émotion  et  arracha  des 
larmes.  Les  personnages  de  Corneille,  vainqueurs  de  la 

gassion,  recevaient  le  salaire  de  leur  triompne  ;  ceux  de 
lacine,  pour  avoir  succombé,  périrent  ou  perdirent  leur 
raison.  Chaque  thé&tre  eut  ainsi  sa  moralité  appropriée  à 
son  auditoire  :  Corneille  écrivait  pour  les  esprits  indé- 
pendants et  fiers  de  la  Fronde  ;  Racine,  pour  les  courti- 
sans assouplis  et  galants  de  Louis  XIV.  —  La  forme  de 
leurs  drames  n'offrait  pas  moins  de  différence  :  sur  les 
traces  des  Espagnols,  Corneille  avait  penché  de  plus  en 
plus  vers  les  tragédies  où  les  situations  font  les  carac- 
tères, où  la  complication  des  événements  se  substitue  à 
la  peinture  des  passions;  sur  les  traces  des  Grecs,  d'Eu- 
ripide en  particulier.  Racine  demeura  fidèle  au  système 
dramatique  où  les  caractères  font  les  situations,  où  l'ana- 
lyse des  sentiments  tient  la  place  des  incidents,  où  de 
cin^  mots  :  Invitiu  invitam  Titus  Berenicen  dimisit , 
«  Titus,  malgré  lui ,  malppré  elle,  con^dia  Bérénice,  »  on 
tire  une  tragédie.  Euripide  lui  fournit  trois  sujets  :  An- 
dromaque, Iphigénie,  et  Phèdre  ;  il  ne  les  imita  qu'en  les 
transformant  pour  les  accommoder  à  l'esprit  de  son  siècle, 
et  il  réalisa  pour  sa  part  l'idéal  que  la  littérature  pour- 
suivait depuis  la  Renaissance  :  l'harmonieux  accord  de  la 
forme  antique  avec  les  idédà  modernes.  On  a' pu  lui  re- 
procher avec  raison  de  convertir  ses  personnages  grecs 
en  contemporains  de  Louis  XIV;  mais  la  mauvaise  foi 


seule  Itd  refuserait  le  mérite  d'avoir,  sous  llnspiratiov 
du  christianisme,  singulièrement  épuré  et  ennobli  les 
données  de  son  modèle  :  la  chaste  fidélité  d'Ândromaqae 
au  souvenir  de  son  premier  époux,  la  touchante  résigna- 
tion d'Iphigénie,  moins  dramatique,  si  Ton  veut,  que  les 
pleurs  et  les  regrets  de  l'Iphigénie  antique,  enfin  le  sen- 
timent profond  que  Phèdre  a  de  sa  faute^  les  remords 
Su'elle  éprouve  de  ses  «  honteuses  douleurs  »,  ce  sont  là 
es  vertus  chrétiennes  qui  communiquent  aux  imitations 
de  Racine  autant  d'originalité  que  d'élévation. 

Quand  on  passe  aux  tragiques  du  xviii*  siècle,  on 
est  tenté  de  croire  que  le  génie  même  de  Racine  a 
porté  malheur  à  la  tragédie.  L'incomparable  beauté  de 
son  théâtre  avait  si  fortement  saisi  les  imaginations,  que 
tous  les  poètes  y  voyaient  le  type  de  la  perfection.  Ils 
imitèrent  donc  le  maître  avec  une  aveugle  et  déplorable 
obstination.  Le  fond  de  ses  œuvres  avait  été  la  peinture 
de  l'amour;  l'amour  devint  la  règle  fondamentale  de 
notre  théâtre.  Il  avait  débuté  par  une  exposition ,  mêlé 
à  l'action  les  récits,  donné  à  ses  personnages  une  dignité 
royale,  à  ses  dialogues  une  noblesse  soutenue;  ses  habi- 
tudes furent  désormais  des  lois.  Il  avait  demandé  plu- 
sieurs de  ses  sujets  à  Euripide;  on  traduisit  et  défigura 
les  Grecs.  Athalie,  comme  la  Pauline  de  Corneille,  avait 
eu  un  songe;  les  songes  furent  en' possession  de  la  mode. 
Tel  est  le  caractère  commun  que  présentent,  dans  la  di- 
versité de  leur  génie,  les  poètes  dramatiques  depuis  la 
mort  de  Racine  jusqu'à  la  Révolution.  Et  si  parfois  «  un 
homme  de  talent ,  sorti  de  la  foule  des  imitateurs,  entre- 
voyait quelques  effets  tragiques  dans  la  vérité  de  l'his- 
toire, ou  dans  la  libre  hardiesse  d'un  théâtre  étranger,  il 
les  ramenait  aux  conventions  de  notre  scène,  et,  au  mi- 
lieu même  d'une  pensée  originale,  il  évitait  toute  nou- 
veauté dans  les  formes  extérieures  du  drame.  »  C'est  le 
reproche  qu'on  peut  adresser  à  La  Fosse,  l'auteur  de 
Manlius,  qui  consacra  un  incontestable  talent  à  convertir 
en  tragédie  romaine  des  vieux  âges  uu  drame  moderne 
et  vénitien  d'Otway  ;  à  Lagrange-Chancel ,  le  propre 
élève  de  Racine,  qui  épuisa  sa  faible  sève  à  dénaturer 
des  pièces  antiques;  à  Crébilloh  même,  qui,  laissant, 
comme  il  disait ,  le  ciel  à  Corneille  et  la  terre  à  Racine, 
et  se  jetant  à  corps  perdu  dans  l'Enfer,  sut  tirer  de  la 
terreur  quelques  effets  nouveaux;  à  La  Motte  enfin,  qui 
passa  sa  vie  à  protester  contre  les  usages  établis,  contre 
les  trois  unités,  les  confidents,  les  monologues,  les  vers 
mêmes,  et  à  respecter  gauchement  dans  le  corps  de  ses 
œuvres  ce  qu'il  attaquait  dans  la  préface.  Un  homme  de 
génie  devait  seul  opérer  quelques-uns  des  changements 
dont  'La  Motte  n'avait  eu  que  la  théorie,  et  rajeunir  la 
scène  ;  ce  fut  Voltaire. 

Voltaire  a  quelques  rapports  de  resseo'i^lance  lointaine 
avec  Euripide.  Inférieur  à  ses  deux  devanciers,  comme 
Euripide  à  Eschyle  et  à  Sophocle,  il  fut  pourtant,  comme 
lui ,  novateur  ;  il  eut  son  originalité  dramatique  et  son 
idéal.  Chez  Corneille  et  Racine,  le  devoir  et  la  passion 
avaient  lutté  et  vaincu  tour  à  tour,  selon  le  point  de  vue 
particulier  du  poëte  ;  et  l'un  et  l'autre  spectacle  avait  eu 
son  enseignement  moral  :  Voltaire  cessa  de  mettre  la  pas- 
sion aux  prises  avec  le  devoir  ;  il  la  peignit ,  le  plus  sou- 
vent du  moins,  en  elle-même,  et  ne  chercha  d'autre 
effet  que  d'émouvoir  les  âmes.  Ainsi ,  pareillement  à  la 
Fatalité,  qui ,  toute-puissante  chez  Eschyle,  puis  associée 
dans  Sophocle  aux  passions  humaines,  avaft  fini  par 
jouer  avec  Euripide  le  moindre  rôle,  le  principe  moral , 
triomphant  dans  Corneille,  combattu  par  la  passion  dans 
Racine,  apparut  à  peine  sur  le  théâtre  de  Voltaire;  de 
telle  sorte  que  la  tragédie  française  a  été  moins  morale 
à  mesure  qu'elle  est  devenue  plus  pathétique;  si  ce 
n'était  pas  un  progrès,  c'était  du  moins  une  transforma- 
tion et  un  acte  d'indépendance.  —  Euripide  avait  con- 
verti parfois  ses  personnages  en  disciples  de  Socrate; 
Voltaire  eut  le  tort  aussi  de  faire  de  la  scène  une  tribune, 
et  de  ses  héros  des  philosophes ,  bien  i)lus ,  des  révolu- 
tionnaires avant  la  Révolution.  Il  fut  mieux  inspiré  dans 
une  autre  innovation  :  il  osa  demander  à  tous  les  siècles 
ses  sujets  tragiques,  à  l'antiquité,  au  moyen  &ge,  aux 
temps  modernes  ;  il  promena  ses  spectateurs  sur  toutes 
les  terres  et  sur  toutes  les  mers,  de  la  Chine  à  l'Amé- 
rique, du  palais  de  Sémiramis  au  sérail  d'Orosmane;  il 
parcourut  capricieusement  le  champ  de  l'histoire  ou  le 
domaine  illimité  de  l'imagination,  tantôt  sans  guide, 
tantôt  à  la  suite  de  l'italien  Maffei ,  dont  il  imita  la  Me- 
rope,  tantôt  sur  les  traces  de  Sophocle  ou  de  Shakspeare, 
qu'il  eut  le  tort  de  mal  juger,  de  mal  comprendine,  de 
mal  imiter,  et  dont  il  n'atteignit  point  la  profondeur,  le 
naturel  et  la  vérité;  enfin,  dans  l'intention  systématique 


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1737 


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d'enhardir  et  d*an1mer  la  scène,  il  multiplia  les  effets  du 
théâtre,  précipita  inaction,  et,  pour  arriver  plus  sûre- 
ment aa  cœur,  ne  dédaigna  pas  d'intéresser  les  yeux  par 
Tappareil  et  les  pompes  de  la  représentation. 

Tant  de  hardiesses  et  de  nouveautés  n^affranchirent  pas 
Voltaire  des  préjugés  qui  devaient  le  moins  Tasservir. 
En  ce  qui  concernait  les  formes  extérieures  du  drame, 
il  resta  le  disciple  timide  de  Racine;  aussi  manque-t-il 
très-souven*  de  couleur  locale.  Ses  successeurs  crurent 
bien  faire  de*suivre  son  exemple,  et  Ton  ne  voit  pas  que 
le  public  ait  songé  Jamais  à  se  récrier  contre  cette  servi- 
lité étrange,  qui  de  plus  en  plus  écartait  de  la  vérité  la 
tragédie  française.  On  ne  s'imaginait  pas  qu'on  pût  faire 
autrement,  et,  dans  ce  siècle  de  doute  et  de  polémique, 
où  la  philosophie  montait  sur  le  théâtre  pour  attaquer 
publiquement  toutes  les  traditions,  la  tradition  du  théâ- 
*tre  elle-même  était  respectée  jusqu'à  la  superstition.  Les 
formes  transmises  par  le  xvii*  siècle  étaient  devenues 
comme  un  nouveau  lit  de  Procuste  où  l'on  forçait  d'entrer 
tous  les  sujets  dramatiques,  à  quelque  source  qu'ils 
eussent  été  puisés  ;  heureux  encore  lorsqu'à  l'imitation 
de  Racine  on  n'ajouta  point  par  surcroît  l'imitation  de 
Voltaire,  et  que,  dans  l'étemel  cadre  des  trois  unités,  on 
n'amalgama  point  bizarrement,  aux  applaudissements 
d'un  parterre  aveuglé  par  la  mode,  la  philosophie  et 
l'amour!  C'est  sur  ce  modèle  que  travaillèrent,  avec  des 
talents  et  des  succès  divers,  Saurin  {Spartaciu) ,  Lemierre 
(Guillaume  Tell)^  Guimond  de  La  Touche  {Iphigénie  en 
Tauride)^  0e  Belloy  {le  Siège  de  Calais).  La  Harpe,  en 
traduisant  le  PhilocUte  de  Sophocle,  essaya  de  reproduire 
plus  complètement  sur  la  scène  moderne  un  modèle  an- 
tique; le  succès  ne  répondit  pas  à  l'intention.  Ducis  même, 
génie  vigoureux,  et  talent  très-incomplet,  ne  sut  pas  faire 
acte  d'indépendance,  et  continua  d'étreindre  dans  le  moule 
français  ses  imitations  de  la  Grèce  et  de  Shakspeare.  La 
Révolution,  qui  semblait  vouloir  ne  rien  épargner  du 
passé,  laissa  pourtant  subsister  le  respect  des  règles  pré- 
tendues classiques;  alors  naquirent  les  tragédies  répu- 
blicaines, véritables  pamphlets  en  cinq  actes,  remplies 
d'allusions  propres  à  flatter  les  passions  de  l'époque  : 
Charles  IX,  Henri  VIII,  la  Mort  de  Calas  ^  Gracckus, 
Fénelon,  Timoléùn,  de  M.-J.  Ghénier;  Marius  à  Min- 
tûmes  et  Lucrèce,  d'Arnault  Toutes  ces  pièces  ont  eu  le 
sort  des  œuvres  écrites  pour  un  jour,  et  n'ont  pu  sur- 
vivre aux  circonstances  qui  les  avaient  inspirées;  une 
seule,  bien  que  froide  et  sans  animation ,  le  Tibère  de 
Ghénier,  a  été  sauvée  de  l'oubli  par  des  beautés  excep- 
tionneUes  de  style  et  de  situation.  Lemercier,  Luce  de 
Lancival,  Raynouard,  Ancelot,  Banur-Lormian  et  Jouy, 
avec  des  imitations  de  l'antique  telles  qa^Agamemnon  et 
Hector,  ou  des  œuvres  de  fantaisie  comme  Joseph,  ou  des 
drames  historiques  comme  les  Templiers  et  Louis  IX, 
ou  des  tragédies  d'allusion  comme  5y//a,  s'étaient  dis- 
puté la  faveur  populaire,  lorsque  éclata  la  guerre  des 
Classiques  et  des  Romantiques  (  K.  ces  mots).  Quelques 
hommes  de  talent,  G.  Delavigne  sous  la  monarchie  de 
183U,  et,  de  notre  temps,  MM.  Ponsard  et  Legouvé,  sem- 
blent avoir  eu  pour  rôle  de  réconcilier  les  deux  écoles  en 
fondant  ensemble  les  deux  systèmes.  Ils  ont  brisé  réso- 
lument avec  les  prescriptions  trop  rigoureuses  et  trop 
absolues  des  Classiques,  mais  ils  ont  conservé  la  tragédie 
qu'on  avait  proclamée  déchue;  seulement,  pour  la  ra- 
jeunir, ils  ont  emprunté  aux  Romantiques  plus  d'indé- 
pendance dans  la  conduite  du  drame,  plus  de  hardiesse 
dans  les  situations,  plus  de  liberté  dans  l'allure,  plus  de 
simplicité  et  de  familiarité  dans  le  style.  On  peut  croire 
qu'avec  ces  conditions  nouvelles  la  tragédie  survivra,  à 
moins  de  prétendre  que  les  Enfants  d'Edouard ,  Manno 
Faliero,  Louis  XI,  de  G.  Delavigne,  la  Lucrèce  de  H.  Pon- 
sard et  la  Médèe  de  H.  Legouvé,  ne  peuvent  être  appelées 
tragédies  ;  que,  le  tragique  et  le  comique,  le  noble  et  le 
bouffon,  l'héroique  et  le  bas  se  heurtant  sans  cesse  et 
partout  dans  la  réalité,  le  goût  se  refuse  à  permettre 
qu'on  détache  l'un  de  l'autre  dans  aucune  peinture  idéale 
de  la  vie  ;  qui»  la  nature  ne  créera  plus  à  l'avenir  aucun 
poète  capable  de  trouver,  soit  en  histoire,  soit  dans  les 
profondeurs  de  son  imagination,  et  de  traiter  avec  génie 
auelque  scène  tragique  ;  et  qu'enfin  la  source  de  la  pitié, 
ae  la  terreur,  de  toute  émotion  noble,  est  tarie  dans  l'âme 
humaine.  Si  l'homme  naît  sensible  au  spectacle  des  in- 
fortunes ou  des  grandeurs  même  fictives  de  l'homme,  et 
que  les  larmes  ou  l'admiration  lui  soient  aussi  naturelles 
que  le  rire,  il  est  difficile  de  contester  que  la  tragédie 
doive  durer  aussi  longtemps  que  la  comédie.  Toutes  deux 
flattent  un  instinct  de  notre  cœur,  toutes  deux  répondent 
à  un  besoin  de  notre  nature. 


n.  Tragédx»  che»  les  autres  peuples,  —  n  est  si  vrai 
que  la  tragédie,  prise  comme  peinture  des  passions  hu- 
maines, comme  représentation  de  la  vie  dans  ce  qu'elle 
a  d'héroïque  et  d'attendrissant ,  est  une  des  formes  na- 
turelles de  l'inspiration  poétique,  qu'on  l^'-retrouve  chez 
tous  les  peuples  modernes  où  les  Lettres  ont  été  culti- 
vées. Les  Italiens,  les  Espagnols,  les  Anglais  et  les  Alle- 
mands ont  eu,  comme  nous,  leur  tragédie,  mais  sans  la 
calquer,  comme  nous,  sur  des  modèles  étrangers.  Ce  n'est 
pas  (|[ue  leur  théâtre  n'offre  en  aucun  temps  nulle  trace 
d'imitation  :  à  l'époque  de  la  Renaissance,  les  Espagnols 
dressaient ,  en  face  de  leur  scène  nationale,  une  scène 
réservée  aux  œuvres  reproduites  de  l'Antiquité,  et,  chez 
les  Italiens,  le  Trissin  composait  des  drames  dans  le 
goût  des  Grecs,  comme  Alfleri,  deux  siècles  plus  tard, 
composait  les  siens  dans  le  goût  français  ;  sous  les  der- 
niers Stuarts,  les  Anglais  préférèrent  aux  drames  de 
Shakspeare  des  pièces  copiées  sur  celles  que  Ghai'les  n 
et  son  entourage  avaient  vu  jouer  à  la  cour  de  Louis  XIV, 
et,  au  xviii*  siècle,  conformément  à  nos  habitudes,  ils 
acceptaient  comme  un  principe  fondamental  la  sépara- 
tion ,  dans  le  drame,  du  sérieux  et  du  plaisant.  Il  n'est 
pas  jusqu'à  Wieland,  le  Voltaire  de  l'Allemagne,  qui  n'ait 
subi  l'ascendant  des  lettres  françaises,  et  écrit  quelques 
tragédies  à  demi  classiques.  Toutefois  ces  imitations  de 
l'antique  ou  du  moderne  n'ont  pas  empêché  ces  peuples 
d'avoir  leur  tragédie  propre  et  sortie,  pour  ainsi  dire, 
du  sol  même.  Lope  de  Véga,  Shakspeare,  Schiller  et 
Gœthe  en  sont  les  plus  illustres  représentants. 

On  peut  signaler,  entre  la  tragédie  telle  que  l'ont  géné- 
ralement conçue  ces  grands  hommes  et  la  tragédie  fran- 
çaise ,  deux  différences  principales,  dont  l'une  tient  au 
choix  des  sujets,  et  l'autre  à  la  façon  de  les  traiter.  Le 
plus  souvent,  les  poètes  français  ont  emprunté  leurs 
sujets  à  l'histoire  ^ecque  et  à  l'histoire  romaine;  fort 
peu  les  ont  tirés  de  l'histoire  de  France.  Sans  dédaigner 
les  ressources  que  leur  offraient  les  âges  antiques ,  les 
tragiques  étrangers  ont  puisé  de  préférence  leurs  inspi- 
rations soit  dans  les  vieilles  chroniques  de  leur  pays, 
soit  dans  les  légendes  mystérieuses  et  terribles  du  moyen 
âge,  soit  dans  les  événements  les  plus  dramatiques  des 
temps  modernes,  soit  enfin  dans  le  domaine  du  roma- 
nesque, du  fantastique  et  de  la  sorcellerie.  Qui  ne  se 
rappelle  la  Jeunesse  du  Cid,  le  Roi  Léar,  Bornéo  et 
Juliette,  Marie  Stuart ,  la  trilogie  de  Walstein,  le  Comte 
d*Egmont,  Macbeth,  etc.?  L'amour  est  le  fond  obligé  de 
toute  tragédie  française  :  ils  ont  composé  des  tra^dies 
sans  amour,  telles  que  Coriolan ,  et  la  Mort  de  César, 
Des  rois  et  des  reines,  des  princes  et  des  princesses, 
semblent  les  seuls  personnages  dignes  de  figurer  avec 
leurs  confidents  sur  notre  scène  :  ils  ont  introduit  sur  la 
leur  des  fous,  des  geôliers,  des  nourrices,  quelquefois 
une  foule  entière,  pêle-mêle  avec  les  héros  et  les  hé- 
roïnes de  noble  race.  Racine  et  ses  successeurs  se  seraient 
bien  gardés  de  vouloir  unir  le  tragique  et  le  comique  : 
chez  les  tragiques  étrangers,  les  impuretés  grossières  et 
les  bouffonneries  d'un  lago  succèdent  aux  poétiç^ues  ac- 
cents d'amour  d'un  Othello.  Telle  est  la  vie,  dit-on  ;  et 
l'on  ajoute  que  le  drames  grecs  présentent  plus  d'une 
fois  ce  mélange,  témoin  VAlceste  d'Euripide,  et  même 
VAntigone  de  Sophocle. 

Plus  indépendants,  plus  hardis  et  plus  variés  dans 
leurs  sujets,  les  tragiques  étrangers  se  sont  également 
affranchis  des  entraves  que  s'étaient  librement  imposées 
leurs  rivaux  français  dans  l'ordonnance  et  la  conduite  de 
leurs  pièces:  lésons,  comme  Shakspeare  et  Lope  de 
Vé^,  ne  connaissaient  même  pas  les  trois  unités,  excel- 
lente ndson  pour  ne  pas  les  mettre  en  pratique;  les  au- 
tres, comme  Goethe  et  Schiller,  qui  connaissaient  la 
théorie  classique,  n'en  ont  pas  pns  pour  cela  plus  de 
souci.  —  Ce  n^est  pas  tout  :  on  sait  l'idée  que  Racine  se 
faisait  de  la  tragédie  ;  à  ses  yeux,  l'intérêt  et  la  perfec- 
tion du  drame  consistaient  avant  tout  dans  la  peinture 
vraie  des  passions  et  dans  le  développement  habilement 
ménagé  des  caractères  :  aussi ,  combien  les  incidents  tien- 
nent peu  de  place  dans  son  théâtre!  Les  artistes  dont  nous 
parlons  ont  représenté  comme  lui  les  passions  humaines  ; 
mais  ils  ne  se  sont  pas  interdit,  quelque  inférieur  et  quelque 
accessoire  qu'il  pût  paraître  à  l'école  classique^  cet  autre 
genre  d'agrément  que  répandent  sur  une  pièce  fes  coups 
de  surprise  précipités ,  la  variété  des  situations,  la  mul- 
tiplicité des  changements  et  des  péripéties.  Une  analyse 
pénétrante,  pathétique  €\  progressive  de  l'amour  sous 
toutes  les  formes  ou  de  l'aiîibition,  tel  semble  être  l'idéal 
de  Racine;  les  autres  ne  cherchent  pas  moins  à  plaire 
pur  l'intérêt  des  événements,  par  le  mouvement  et  par  la 


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1738 


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Tivadté  de  raction.  De  là  vient  qae,  pour  être  goûtés,  ils 
)*ont  pas  besoin  d'un  parterre  aussi  -délicat ,  instruit  et 
ehoisi  que  le  poète  favori  de  Louis  XIV  et  de  sa  cour. 

Nous  avons  dit  qu*à  certaines  époques  la  littérature 
dramatique  des  peuples  modernes  avait  subi  rinfluence 
de  la  nôtre  ;  /'effet  a  été  réciproque.  Déjà  Corneille ,  an 
xvii*  siècle,  après  avoir  pris  le  Cid  aux  Espagnols ,  avait 
fini  par  adopter  leur  système  dramatique;  ce  qui  Tin- 
duisit  bientôt,  malheureusement  pour  sa  gloire,  à  croire 
que  la  tragédie  la  plus  industrieusement  embrouillée 
était  aussi  la  plus  parfaite.  Au  xviu*  siècle,  Voltaire  inju- 
riait Shakspeare;  mais  il  lui  emprunta  sans  scrupule 
une  bonne  partie  de  ses  sujets,  et  lui  fut  ainsi  redevable 
peut-être  de  ses  plus  heureux  coups  de  théâtre,  comme 
de  ses  plus  beaux  et  de  ses  plus  populaires  succès.  Ducis, 
à  son  tour,  imita  le  poète  anglais  avec  plus  de  respect  et 
autant  de  profit.  Enfin,  de  notre  temps,  c*est  dans  le 
théâtre  de  Shakspeare,  de  Schiller  et  de  Goethe,  que  les 
Romantiques  ont  trouvé  leurs  arguments  les  plus  solides 
et  leurs  meilleures  armes  pour  attaquer  les  doctrines  par 
trop  rigoureuses  des  Classiques,  et  contraindre  la  trar 
gédie  racinienne  à  se  transformer;  transformation  peu 
regrettable,  si,  comme  nous  le  pensons,  elle  doit  ayoir 
pour  effet  de  sauver  la  tragédie  elle-même  [V.  Allemande, 
Anglaise,  1!)spagnolb,  Italienne  —  Littérature).     A;  H. 

TRAGÉDIEN,  acteur  de  tragédie,  chez  les  Modernes. 
On  donne  spécialement  ce  nom  aux  artistes  qui  jouent 
les  premiers  rôles.  Pour  devenir  un  grand  tragédien,  il 
faut  un  génie  naturel,  de  Pinstruction,  beaucoup  d'étude, 
et  de  la  sensibilité,  a  Selon  moi,  dit  l'illustre  tragL'dien 
Talma,  la  sensibilité  n'est  pas  seulement  cette  faculté  que. 
l'acteur  a  de  s'émouvoir  facilement  lui-même,  d'ébranler 
son  être  au  point  d'imprimer  à  ses  traits,  et  surtout  à  sa 
voix,  cette  expression,  ces  accents  de  douleur  qui  viennent 
réveiller  toute  la  sympathie  du  cœnr,  et  provoquer  les 
larmes  de  ceux  qui  l'écoutent;  J'y  comprends  encore  l'effet 
qu'elle  produit,  l'imagination  dont  elle  est  la  source,  non 
cette  imagination  qui  consiste  à  avoir  des  souvenirs  tels 
que  les  objets  semblent  actuellement  présents,  ce  n'est  pro- 
prement là  (^ue  la  mémoire;  mais  cette  imagination  qui, 
créatrice,  active,  puissante,  consiste  à  rassembler  dans  un 
seul  objet  fictif  les  qualités  de  plusieurs  objets  réels;  qui 
associe  l'acteur  aux  inspirations  du  poète,  le  transporte  à 
des  temps  qui  ne  sont  plus,  le  fait  assister  à  la  vie  des  per- 
sonnages historiques,  ou  à  celle  des  êtres  passionnés  créés 
par  le  génie;  lui  révèle  comme  par  magie  leur  physiono- 
mie, leur  stature  héroïque,  leur  langage,  leurs  habitudes, 
toutes  les  nuances  de  leur  caractère,  tous  les  mouvements 
de  leur  àme,  et  Jusqu'à  leurs  singularités  spéciales.  J'ap- 
pelle encore  sensibilité  cette  faculté  de  l'exaltation  qui 
agite  l'acteur,  8*empare  de  ses  sens,  l'ébranle  Jusqu'à 
r&me,  et  le  fait  entrer  dans  les  situations  les  plus  tra- 
giques, dans  les  passions  les  plus  terribles,  comme  si 
elles  étaient  les  siennes  propres. 

«  L'int«IIigence,  qui  procède  et  n'agit  qu'après  la  sen- 
sibilité, juge  des  impressions  que  nous  fait  éprouver 
celle-ci;  elle  les  choisit,  elle  les  ordonne,  elle  les  soumet 
à  son  calcul.  Si  la  sensibilité  fournit  les  objets,  l'intelli- 
gence les  met  en  œuvre.  Elle  nous  aide  à  diriger  l'emploi 
de  nos  forces  physiques  et  intellectuelles,  à  Juger  des 
rapports  et  de  la  liaison  qu'il  y  a  entre  les  paroles  du 
poète  et  la  situation  ou  le  caractère  des  personnages,  à 
y  ajouter  quelquefois  les  nuances  qui  leur  manquent  ou 
que  les  vers  ne  peuvent  exprimer,  à  compléter  enfin  leur 
expression  par  le  geste  et  la  physionomie...  Comme  toutes 
nos  émotions  ont  avec  nos  nerfs  un  rapport  intime,  il 
faut  que  le  système  nerveux  soit  chez  l'acteur  tellement 
mobile  et  impressionnable,  qu'il  s'ébranle  aussi  facile- 
ment que  la  harpe  éolienne  résonne  au  moindre  souffle 
de  l'air  qui  la  touche.  Si  l'acteur  n'est  pas  doué  d'une 
sensihilité  au  moins  égale  à  celle  des  plus  sensibles  de 
ses  auditeurs,  il  ne  pourra  les  émouvoir  que  faiblement; 
ce  n'est  que  par  un  excès  de  sensibilité  qu'il  parviendra 
à  produire  des  impressions  profondes,  et  à  émouvoir 
même  les  âmes  les  plus  froides.  La  force  qui  soulève  ne 
doit-elle  pas  avoir  plus  de  puissance  que  celle  qu'on  veut 
ébranler?... 

(t  Pour  former  un  grand  acteur,  tel  que  Lekain,  il  faut 
la  réunion  de  la  sensibilité  et  de  l'intelligence.  Chez  l'ac- 
teur qui  possède  ce  double  don  de  la  nature,  il  se  fait  un 
genre  de  travail  particulier  :  d'abord,  par  des  études  ré- 
pétées, il  essaye  son  àme  aux  émotions,  et  sa  parole 
aux  accents  propres  à  la  situation  du  personnage  auMI  a 
à  représenter.  Il  va  de  là  au  théâtre  exécuter  non-seule- 
ment les  premiers  essais  de  ses  études,  mais  se  livrer 
encore  à  tous  les  élans  spontanés  de  sa  sensibilité^  à  tous 


les  mouvements  qu'elle  lui  su^re  à  ton  insu.  Qae  faiu 
il  alors?  Pour  que  ces  inspirations  ne  soient  pas  perdues, 
sa  mémoire  recherche  dans  le  repos,  lui  rappelle  les  in- 
tonations, les  accents  de  sa  voix,  l'expresKÎon  de  ses 
traits,  de  son  geste,  le  degré  d'abandon  auquel  il  s*est 
livre,  enfin  tout  ce  qui,  dans  ces  mouvements  d  exalta- 
tion, a  concouru  à  l'effet  qu'il  a  pn>dtiit.  Son  intelligence 
alors  soumet  tous  ces  moyens  à-  la  révision,  les  épure, 
les  fixe  dans  son  souvenir,  et  les  conserve  en  dépôt,  pour 
les  reproduire  à  sa  volonté  dans  les  représentations  sui- 
vantes. Souvent  même,  tant  ces  impressions  sont  fugi- 
tives, faut-il  qu'il  répète,  en  rentrant  dans  la  coulisse, 
la  scène  qu'il  vient  de  Jouer,  plutôt  que  celle  qu'il  va 
jouer.  Par  cette  sorte  de  travail,  l'intelligence  accumule 
et  conserve  toujours  les  créations  de  la  sensibilité.  C'est 
par  là  qu'au  bout  de  vingt  ans  (il  faut  au  moins  cet 
espace  de  temps)  une  personne  destinée  à  avoir  un  beau 
talent  peut  enfin  offrir  au  public  des  rôles,  à  peu  de 
chose  près,  parfaitement  conçus  et  joués  dans  toutes  leurs 
parties.  Telle  a  été  la  marche  qu'a  constamment  suivie 
Lekain,  et  que  doivent  suivre  tous  ceux  qui  ont  l'ambition 
de  marcher  sur  ses  traces.  »  (Talma,  Réflexions  sur  Le- 
kain et  sur  l'art  théâtral,  p.  45  et  suiv.,  in-18.) 

On  peut  considérer  tout  ce  que  Talma  vient  de  dire 
comme  sa  propre  confession,  au  moins  autant  que  comme 
la  tradition  sur  Lekain  ;  car,  étant  né  en  1703,  il  n'avait 
sans  doute  pas  connu  Lekain,  mort  en  1778.  Le  fragment 
suivant  achèvera  de  faire  connaître  l'art  du  tragédien  ;  c'e^t 
un  Jugement, ou  plutôt  ce  sont  des  souvenirs  de  M"**^  de 
Staël  sur  Talma  dans  toute  la  plénitude  et  l'a  perfection 
de  son  talent,  juste  après  cette  période  de  vingt  ans  quMl 
jugeait  lui-même  nécessaire  à  Téducation  d'un  acteur 
tragique.  M">*  dQ  Staël  le  vit  souvent  dans  ses  plus  beaux 
rôles,  et  l'a  Jugé  avec  un  sentiment  de  l'art  aussi  vif 
que  profond.  Elle  s'exprime  ainsi  : 

«  Quand  il  parait  un  homme  de  génie  en  France,  dans 
quelque  carrière  que  ce  soit,  il  atteint  presque  toujours 
à  un  degré  de  perfection  sans  exemple;  car  il  réunit  l'au- 
dace qui  fait  sortir  de  la  route  commune,  au  tact  du  bon 
goût  qu'il  importe  tant  de  conserver,  lorsque  l'originalité 
du  talent  n'en  souffre  pas.  Il  me  semble  donc  que  Talma 
peut  être  cité  comme  un  modèle  de  hardiesse  et  de  me- 
sure, de  naturel  et  de  dignité.  Il  possède  tous  les  secrets 
des  arts  divers;  ses  attitudes  rappellent  les  belles  statues 
de  l'antiquité;  son  vêtement,  sans  qu'il  y  pense,  est  drapé 
dans  tous  ses  mouvements,  comme  s'il  avait  eu  le  temps 
de  l'arranger  dans  le  plus  parfait  repos.  L'expression  de 
son  visage,  celle  de  son  regard,  doivent  être  l'Aude  de 
tous  les  peintres.  Quelquefois  il  arrive  les  jeux  à  demi 
ouverts,  et  tout  à  coup  le  sentiment  en  fait  Jaillir  des 
rayons  de  lumière  qui  semblent  éclairer  toute  la  scène. 

«  Le  son  de  sa  voix  ébranle  dès  qu'il  parle,  avant  que 
le  sens  même  des  paroles  qu'il  prononce  ait  excité  l'émo- 
tion. Lorsque  dans  les  tragédies  il  s'est  trouvé  par  ha- 
sard quelques  vers  descriptifs,  il  a  fait  sentir  les  beautés 
de  ce  genre  de  poésie,  comme  si  Pindare  avait  récité 
luf-même  ses  chants.  D'autres  ont  besoin  de  temps  pour 
émouvoir,  et  font  bien  d'en  prendre;  mais  il  y  a  dans  la 
voix  de  cet  homme  Je  ne  sais  quelle  magie  qui,  dès  les 
premiers  accents,,  réveille  toute  la  sympathie  du  cœur. 
Le  charme  de  la  musique,  de  la  peinture,  de  la  scnlpture, 
de  la  poésie,  et  par-dessus  tout  du  langage  de  Tànie, 
voilà  ses  moyens  pour  développer  dans  celui  qui  l'éoDute 
toute  la  puissance  des  passions  généreuses  et  terribles. 

«  Quelle  ^connaissance  du  cœur  humain  il  montre  dans 
sa  manière  de  concevoir  ses  rôles!  Il  en  est  le  second 
auteur  par  ses  accents  et  par  sa  physionomie.  Lorsque 
Œdipe  raconte  à  Jocaste  comment  il  a  tué  Laïus,  sans  le 
connaître,  son  récit  commence  ainsi  :  Tétais  jeune  et  su- 
perbe; la  plupart  des  acteurs,  avant  lui,  croyaient  devoir 
jouer  le  mot  superbe,  et  relevaient  la  tête  pour  le  si- 
gnaler :  Talma,  qui  sent  que  tous  les  souvenirs  de  l'or- 
gueilleux Œdipe  commencent  à  devenir  pour  lui  des 
remords,  prononce  d'une  voix  timide  ces  mots  faits  pour 
rappeler  une  confiance  qu'il  n'a  déjà  plus.  Phorbas  arrive 
de  Corinthe  au  moment  où  Œdipe  vient  de  concevoir  des 
craintes  sur  sa  naissance  :  il  lui  demande  un  entretien 
secret.  Les  autres  acteurs,  avant  Talma,  se  hâtaient  de 
se  retourner  vers  leur  suite,  et  de  l'éloigner  avec  un  geste 
majestueux  :  Talma  reste  les  yeux  fixé  sur  Phorb^;  il 
ne  peut  le  perdre  de  vue,  et  sa  main  agitée  fait  un  signe 
pour  écarter  ce  qui  l'entoure.  Il  n'a  rien  dit  encore,  mais 
ses  mouvements  é^és  trahissent  le  trouble  de  son  àme; 
et  quand,  au  dernier  acte,  il  s'écrie  en  quittant  Jocaste  : 

Oui,  La!oa  est  mon  père,  et  Je  tuia  votre  tUi» 


TRA 


1739 


TRA 


•a  croit  voir  s*entr*ouyrir  le  séjour  du  Tartare,  où  le  Des- 
tin perfide  entraîne  les  mortel"^. 

«  Dans  Andromaque,  quand  ilcrmione  insensée  accuse 
Oreste  d'avoir  assassiné  Pyrrhus  sans  son  aveu,  Oreste 
répond  : 

Et  ne  m'arez-voua  pas 
VoiUHaafime,  tel,  tantôt,  ordonné  son  trépas? 

On  dit  que  Lekain,  quand  il  récitait  ces  vers,  appuyait 
sur  chaque  mot, comme  pour  rappeler  àHermione  toutes 
les  circonstances  de  Tordre  qu*il  avait  reçu  d'elle.  Ce  se- 
rait bien  vis-à-vis  d'un  juge;  mais  quand  il  s'agit  de  la 
femme  qu'on  aime,  le  désespoir  de  la  trouver  injuste  et 
cruelle  9st  l'unique  sentiment  qui  remplisse  r&ine.  C'est 
ainsi  que  Talma  conçoit  la  situation  :  un  cri  s'échappe  du 
cœur  d'Oreste  ;  il  dit  les  premiers  mots  avec  force,  et 
ceux  qui  suivent  avec  un  abattement  toujours  croissant  ; 
ses  bras  tombent,  son  visage  devient  en  un  instant  p&le 
comme  la  mort,  et  l'émotion  des  spectateurs  s'augmente 
à  mesure  qu'il  semble  perdre  la  force  de  s'exprimer. 

«  L&  manière  dont  Talma  récite  le  monologue  suivant 
est  sublime.  L'espèce  d'innocence  qui  rentre  dans  l'&me 
d'Oreste  pour  la  déchirer,  lorsqu'il  dit  ce  vers  : 

J*aMaMine  à  regret  un  roi  que  Je  révère, 

inspire  une  pitié  que  le  génie  même  de  Racine  n'a  pu 
prévoir  tout  entière.  Les  grands  acteurs  se  sont  presque 
tous  essayés  dans  les  fureurs  d'Oreste;  mais  c'est  là  sur- 
tout que  la  noblesse  des  gestes  et  des  traits  ajoute  singu- 
lièrement à  l'efTet  du  désespoir.  La  puissance  de  la  dou- 
leur est  d'autant  plus  terrible,  qu'elle  se  montre  à  travers 
le  calme  même  et  la  dignité  d'une  belle  nature. 

«  Dans  les  pièces  tirées  de  l'histoire  romaine,  Talma 
développe  un  talent  d'un  tout  autre  genre,  mais  non 
moins  remarquable.  On  comprend  mieux  Tacite  après 
l'avoir  vu  Jouer  le  rôle  de  Néron;  il  y  mani-feste  un  esprit 
d'une  grande  sagacité;  car  c'est  toujours  avec  de  l'esprit 
qu'une  âme  honnête  saisit  les  symptômes  du  crime; 
néanmoins  il  produit  encore  plus  d'efTet,  ce  me  semble, 
dans  les  rôles  où  l'on  aime  &  s'abandonner,  en  l'écoutant, 
aux  sentiments  qu'il  exprime.  Il  a  rendu  à  Bayard,  dans 
la  pièce  de  De  Belloy  {Gaston  et  Bayard) y  le  service  de 
lui  ôter  ces  airs  de  fanfaron  que  les  autres  acteurs 
croyaient  devoir  lui  donner  :  ce  héros  gascon  est  rede- 
venu, grâce  à  Talma,  aussi  simple  dans  la  tragédie  que 
dans  l'histoire.  Son  costume  dans  ce  rôle,  ses  gestes 
simples  et  rapprochés,  rappellent  les  statues  de  cheva- 
liers qu'on  voit  dans  les  anciennes  églises,  et  l'on  s'étonne 
qu'un  homme  qui  a  si  bien  le  sentiment  de  l'art  antique 
sache  aussi  se  transporter  dans  le  caractère  du  moyen 
âge... 

«  On  peut  trouver  beaucoup  de  défauts  dans  les  pièces 
de  Shakspeare  adaptées  par  Ducis  à  notre  théâtre;  mais 
il  serait  bien  injuste  de  n'y  pas  reconnaître  des  beautés 
du  premier  ordre  ;  Ducis  a  son  génie  dans  son  cœur,  et 
c'est  là  qu'il  est  bien.  Tatma  joue  ses  pièces  en  ami  du 
beau  talent  de  ce  noble  vieillard.  La  scène  des  sorcières, 
dans  Macbeth,  est  mise  en  récit  dans  la  pièce  française. 
II  faut  voir  Talma  s'ess:iyer  â  rendre  quelque  chose  de 
vulgaire  et  de  bizarre  dans  l'accent  des  sorcières,  et  con- 
server cependant  dans  cette  imitation  toute  la  dignité 
que  notre  théâtre  exige. 

Par  des  mots  inconnus,  ces  êtres  monstruenz 
S'appelaient  tour  à  tour,  s'applaudissaient  entre  eux. 
S'approchaient,  me  montraient  avec  un  ris  farouche  : 
Leur  doîRt  mystérieux  se  posait  sur  lear  bouche. 
Je  leur  parle,  et  dans  Tombre  ils  s'échappent  soudAlu; 
L'un  avec  un  poignard,  Tautre  un  sceptre  à  la  main. 
L'autre  d'un  long  serpent  serrait  son  corps  livide  : 
Tous  trois  vert  ce  palais  ont  pris  un  vol  rapide. 
Et  tons  trois  dans  les  airs,  en  ftiyant  loin  de  mol, 
U'ont  laissé  pour  adieu  ces  mots  :  «  Tu  seras  roil  • 

«  La  voix  basse  et  mystérieuse  de  l'acteur,  en  pronon- 
çant ces  vers,  la  manière  dont  il  plaçait  son  doigt  sur  sa 
bouche,  comme  la  statue  du  silence,  son  regard  qui  s'al- 
térait pour  exprimer  un  souvenir  horrible  et  repoussant; 
tout  était  combiné  pour  peindre  un  merveilleux  nouveau 
sur  notre  théâtre,  et  dont  aucune  tradition  antérieure  ne 
pouvait  donner  l'idée... 

«  Hamlet  est  son  triomphe  parmi  les  tragédies  du 
genre  étran^r.  Les  spectateurs  ne  voient  pas  l'ombre  du 
père  d'Hamlet  sur  la  scène  française,  l'apparition  se 
passe  en  entier  dans  la  physionomie  de  Talma,  et  certes 
elle  n'en  est  pas  ainsi  moins  effrayante.  Quand,  au  mi- 
lieu d'un  entretien  calme  et  mélancolique,  tout  à  coup  il 
aperçoit  le  spectre,  on  suit  tous  ses  mouvements  dans 


les  yeux  qui  le  contemplent,  et  Tou  ne  peut  douter  de 
la  présence  du  fantôme,  quand  un  tel  re^rd  1  att^ste^ 
Lorsque,  au  troisième  acte,  Hamlet  arrive  seul  sur  la 
scène,  et  qu'il  dit  eu  beau  vers  français  le  fameux  mono- 
logue :  To  be  or  not  to  be, 

La  mort,  c'est  le  sommeil,  c'est  un  réveil  peut-fttre. 
Peut-être  I  —  Ahl  c'est  le  mot  qui  glace,  épouvanté. 
L'homme,  au  bord  du  cercueil,  par  le  doute  arrêté; 
Devant  ce  vaste  ahlme,  il  se  Jette  en  arribre, 
Ressaisit  rexistence,  et  s'attache  k  la  terre. 

«  Talma  ne  faisait  pas  un  ^ste,  quelquefois  seulement 
il  remuait  la  tète,  pour  questionner  la  terre  et  le  ciel  sur 
ce  que  c'est  que  la  mort.  Immobile,  la  dignité  de  la  mé- 
ditation absorbait  tout  son  être.  L'on  voyait  un  homme, 
au  milieu  de  deux  mille  hommes  en  silence,  interroger 
la  pensée  sur  le  sort  des  mortels!  Dans  peu  d'années 
tout  ce  qui  était  là  n'existera  plus,  mais  d'autres  hommes 
assisteront  à  leur  tour  aux  mêmes  incertitudes,  et  se 
plongeront  de  même  dans  l'abîme,  sans  en  connaître  la 
profondeur.  Lorsque  Hamlet  veut  faire  jurer  à  sa  mère, 
sur  l'urne  qui  renferme  les  cendres  de  son  époux,  qu'elle 
n'a  point  eu  de  part  au  crime  qui  l'a  fait  périr,  elle  hé- 
site, se  trouble,  et  finit  par  avouer  le  forfait  dont  elle  est 
coupable.  Alors  Hamlet  tire  le  poignard  que  son  père  lui 
commande  d'enfoncer  dans  le  sein  maternel;  mais  au 
moment  de  frapper,  la  tendresse  et  la  pitié  l'emportent, 
et,  se  retournant  vers  l'ombre  de  son  père,  il  s'écrie  : 
«  Grâce,  grâce,  mon  père!  n  avec  un  accent  où  toutes  les 
émotions  de  la  nature  semblent  à  la  fois  s'échapper  du 
cœur,  et,  se  jetant  aux  pieds  de  sa  mère  évanouie,  il 
lui  dît  ces  deux  vers  qui  renferment  une  inépuisable 
piété  : 

Votre  crime  est  horrible,  exécrable,  odieux  ; 

Mais  il  n'est  pas  plus  grand  que  la  bonté  des  deux. 

«  Ënfln  on  ne  peut  penser  â  Talma  sans  se  rappeler 
Manlius,  Cette  pièce  faisait  peu  d'effet  au  théâtre  :  c'est  le 
sujet  de  la  Venise  sauvée,  d'Otway,  transporté  dans  un 
événement  de  l'histoire  romaine.  Manli us  conspire  contre 
le  Sénat  de  Rome;  il  confie  son  secret  â  Servilius,  qu'il 
aime  depuis  quinze  ans  :  il  le  lui  confie  malgré  les  soup- 
çons de  ses  autres  amis,  qui  se  défient  de  la  faiblesse  de 
Servilius  et  de  son  amour  pour  sa  femme,  fille  du  con- 
sul. Servilius  ne  peut  cacher  â  sa  femme  le  danger  de  la 
vie  de  son  père  ;  elle  court  aussitôt  le  lui  révéler.  Man- 
lius  est  arrêté,  ses  projets  sont  découverts,  et  le  Sénat 
le  condamne  â  être  précipité  du  haut  de  la  roche  Tar- 
péienne. 

«  Avant  Talma,  l'on  n'avaitguère  aperçu  dans  cette  pièce, 
faiblement  écrite, la  passion  d'amitié  que  Manlius  ressent 
pour  Servilius.  Quand  un  billet  du  conjuré  Rutile  apprend 
que  le  secret  est  trahi,  et  l'est  par  Servilius,  Manlius 
arrive,  ce  billet  â  la  main  ;  il  s'approche  de  son  cou- 
pable ami,  que  déjà  le  repentir  dévore,  et,  lui  montrant 
les  lignes  qui  l'accusent,  il  prononce  ces  mots  :  «  Qu'en 
dis-tu?  M  Je  le  demande  âtous  ceux  qui  les  ont  entendus, 
la  physionomie  et  le  son  de  la  voix  peuvent-ils  jamais 
exprimer  â  la  fois  plus  d'impressions  différentes?  Cette  fu- 
reur qu'amollit  un  sentiment  intérieur  de  pitié,  cette  in- 
dignation que  l'amitié  rend  tour  âtour  plus  vive  et  plus 
faible,  comment  les  faire  comprendre,  si  ce  n'est  par  cet 
accent  qui  va  de  l'âme  â  l'âme,  sans  l'intermédiaire 
même  des  paroles?  Manlius  tire  son  poignard  pour  en 
frapper  Servilius,  sa  main  cherche  son  cœur  et  tremble 
de  le  trouver;  le  souvenir  de  tant  d'années  pendant  les- 
quelles Servilius  lui  fut  cher  élève  comme  un  nuage  de 
pleurs  entre  sa  vengeance  et  son  ami. 

«  On  a  moins  parlé  du  cinquième  acte,  et  peut-être 
Talma  y  est-il  plus  admirable  encore  que  dans  le  qua- 
trième. Servilius  a  tout  bravé  pour  expier  sa  faute  et 
sauver  Manlius;  dans  le  fond  de  son  cœur  il  a  résolu,  si 
son  ami  périt,  de  partager  son  sort.  La  douleur  de  Man- 
lius est  adoucie  par  les  regrets  de  Servilius;  néanmoins 
il  n'ose  lui  dire  qu'il  lui  pardonne  sa  trahison  effroyable; 
mais  il  prend  â  la  dérobée  la  main  de  Servilius,  et  l'ap- 
proche de  son  cœur;  ses  mouvements  involontaires  cher- 
chent l'ami  coupable  qu'il  veut  embrasser  encore,  avant 
de  le  quitter  pour  jamais.  Rien,  on  presque  rien  dans  la 
pièce,  n'indiquait  cette  admirable  beauté  de  l'âme  sen- 
sible, respectant  une  longue  affection,  malgré  la  trahison 
qui  l'a  brisée.  Les  rôles  de  Pierre  et  de  Jaffier,  dans  la 
pièce  anglaise,  indiquent  cette  situation  avec  une  grande 
force.  Talma  sait  donner  à  la  tragédie  de  Manlius  l'énergie 
qui  lai  manque,  et  rien  n'honore  plus  son  talent  que  la 
vérité  avec  laquelle  il  exprime  ce  qu'il  y  a  d  invincible 


TRA 


1740 


TRA 


dans  l'amitié.  La  passion  peut  haïr  Tobjet  de  son  amour  ; 
mais  quand  le  lien  s'est  formé  par  les  rapports  sacrés 
de  Tàme,  il  semble  que  le  crime  même  ne  saurait 
^anéantir,  et  qu*on  attend  le  remords,  comme  après  une 
iongue  absence  on  attendrait  le  retour.  »  {De  V Alle- 
magne, c.  27.) 

Après  avoir  lu  ces  pages,  on  ne  peut  s*empècher  de 
dire  qu*un  artiste,  dont  le  talent  et  le  génie  ne  peuvent 
laisser  de  traces  que  dans  les  souvenirs  des  contempo- 
rains, et  qui  emporte  dans  la  tombe  ses  plus  belles  créa- 
tions, est  bien  heureux  de  rencontrer  des  Juges  comme 
M'""  de  Staël. 

TRAGÉLAPHE,  animal  symbolique  figuré  sur  quelques 
monuments.  C'est  un  cerf  à  tète  bumjLine,  saisi  par  un 
lion.  On  y  voit  l'image  du  chrétien  attaqué  par  un 
démon. 

TRAGI-COMÉDIE,  dénomination  autrefois  appliquée 
aux  pièces  de  thé&tre  dont  l'action  est  sérieuse  et  se 
passe  entre  personnages  considérables,  mais  n'a  point  un 
dénoûment  tragique,  ou  est  mêlée  d'incidents  et  de  per- 
sonnages appartenant  à  la  comédie.  Le  Cid  et  Nicomède 
de  Corneille  furent  intitulés  tragi-comédies. 

TRAGIQUES  (Les),  titre  d'une  composition  satirique 
en  près  de  9,000  vers,  commencée  par  Agrippa  d'Aubigné 
dès  1577,  mais  (|ui  ne  vit  le  jour  qu'en  1616.  L'ouvrage 
est  divisé  en  7  livres  :  dans  le  l***,  intitulé  Misères,  l'au- 
teur retrace  les  calamités  et  les  guerres  civiles  qui  ont 
désolé  la  France  durant  la  dernière  moitié  du  xvi*  siècle, 
et  qui  ont  été  amenées  par  les  vices  des  rois  et  des 
grands^  qu'il  flagelle  dans  le  2*  livre,  les  Princes,  et  par 
la  corruption  et  la  bassesse  des  gens  de  justice,  dont  la 
satire  est  le  sujet  du  3*,  la  Chambre  dorée.  Le  4",  les 
Feux,  est  la  peinture  des  persécutions  exercées  contre  les 
Protestants,  et  le  suivant ,  les  Fers,  celle  de  leurs  com- 
bats et  de  leurs  victoires.  Le  6*,  Vengeances,  offre  le  ta- 
bleau des  châtiments  dont  Dieu  a  frappé  sur  cette  terre 
les  persécuteurs,  en  attendant  l'expiation  suprême  h  la- 
quelle le  poète  nous  fait  assister  en  décrivant,  dans  le 
Jugement,  la  fin  du  monde  et  le  jugement  dernier.  D'Au- 
bigné est  en  proie  à  une  colère  continuelle,  qui  finit  par 
être  monotone;  il  a  des  défauts  qui  sont  un  peu  ceux  de 
son  temps,  l'enflure,  le  fatras  théologique,  un  certain 
mysticisme  apocalyptique,  mais  aussi  des  Qualités  incon- 
testables, beaucoup  d'expressions  fortes  et  bien  frappées, 
des  vers  d'une  large  facture. 

TRAHISON,  HAUTE  TRAHISON,  termes  généraux 
applicables  aux  attentats  commis  contre  la  sûreté  exté- 
rieure ou  intérieure  de  l'État.  Les  crimes  contre  la  sû- 
reté extérieure  comprennent  l'acte  de  porter  les  armes 
contre  la  France,  les  machinations,  manœuvres,  intelli- 
gences et  correspondances  coupables  avec  les  ennemis  de 
l'État,  les  communications  de  plans,  le  recel  d'espions 
ou  de  soldats  ennemis,  toutes  les  actions  hostiles  non 
autorisées  par  le  gouvernement  et  qui  sont  de  nature  & 
provoquer  une  déclaration  de  guerre  ou  des  représailles. 
Les  crimes  contre  la  sûreté  intérieure  embrassent  les  at- 
tentats et  complots  contre  le  Souverain  et  contre  les 
membres  de  sa  famille,  les  actes  tendant  à  troubler  l'État 
par  la  guerre  civile,  etc.  Les  crimes  de  haute  trahison 
étaient  jugés  autrefois  par  la  Cour  des  Pairs;  ils  le  sont 
aujourd'hui  par  la  Haute-Cour  de  justice,  (quelquefois 
par  les  Cours  d'assises.  Les  lois  du  21  brumaire  an  v  et 
du  21  prairial  an  vi,  le  décret  du  16  mai  1793  pour  les 
militaires,  les  art.  75  et  suiv.  du  Code  pénal  pour  les 
autres  citoyens,  en  déterminent  le  châtiment. 

TRAILLE  (du  latin  trahere,  tirer,  traîner),  mot  syno- 
nyme de  bac  (V.  ce  mot), 

TRAIN  (du  latin  trahere,  traîner),  convoi  de  marchan- 
dises ou  de  vo3rageurB  sur  un  chemin  de  fer.  On  nomme 
trains  de  plaisir  les  trains  d'aller  et  de  retour  que  les 
compagnies  organisent  pour  les  voyageurs  seulement, 
entre  un  point  et  un  autre,  à  prix  réduits,  mais  dans 
un  temps  déterminé  et  toujours  très-bref. 

TRAIN,  en  termes  de  Typographie,  partie  de  la  presse 
sur  laquelle  on  pose  la  forme,  et  qui  se  meut  sous  la 
platine.  La  mise  en  train  est  l'action  de  tout  disposer 

Eour  le  tirage  d'une  forme,  de  manière  que  celle-ci  presse 
ien  également  sur  le  çapier. 

TSAiN,  mot  qui  désigne  le  matériel  roulant  dont  se 
compose  un  parc*  d'artillerie,  les  caissons  de  vivres  et 
d'ambulance,  etc.  Jusqu'au  Consulat,  on  s'était  contenté 
de  réunir  au  besoin  les  bêtes  de  trait  et  les  gens  d'équi- 
page. Le  général  Bonaparte  créa  un  corps  spécial  sous  le 
nom  de  tram  d'artillerie  ;  chaque  régiment  eut  son  train, 
sous  les  ordres  d'un  capitaine.  Le  train,  primitivement 
formé  de  38  bataillons,  fut  licencié  en  l'ao  ix,  puis  re- 


constitaé  en  8  bataillons  seulement;  mais,  à  la  fin  âa 
premier  Empire,  il  s'était  élevé  à  l'efErayant  effectif  ds 
30,000  hommes.  Sous  la  Restauration,  le  train  fut  remis 
sur  un  pied  nouveau;  les  bataillons  devinrent  des  esca- 
drons, dont  on  compta  six ,  &  6  compagnies  chacun,  avec 
un  cadre  de  dépôt  en  temps  de  guerre;  il  y  eut  en  outre 

3  compagnies  du  train  du  génie,  en  cas  de  guerre  seule- 
ment. Le  train  des  équipages,  pour  le  transport  des  vi- 
vres, des  effets  de  campement,  des  blessés  et  des  ma- 
lades, avait  été  constitué  en  entreprise  vers  1807  ;  il  fut 
constitué,  en  1823,  en  corps  spécial  militaire,  et,  après 
avoir  été  formé  de  8  comptignies,  fut  réduit  à  4  en  1824. 
Sous  le  règne  de  Louis-Philippe,  les  escadrons  du  train 
d'artillerie  furent  portés  k  8  compagnies  chacun  ;  les 
compagnies  du  train  du  génie  furent  incorporées  dans 
les  régiments,  et  leurs  hommes  reçurent  le  nom  de  sof 
peurs-conducteurs;  le  train  des  équipages,  successive- 
ment augmenté,  compta  4  compagnies  d'ouvriers,  et 

4  escadrons  du  train,  avec  4.compagnies  et  un  cadre  de 
dépôt.  De  1852  à  1870,  il  y  eut  :  pour  la  garde  impériale, 
un  escadron  des  équipages,  à  3  compagnies;  pour 
l'armée 5  escadrons  du  train,  et  cinqcompag^nies  d'où- 
yricrs  constructeurs.  F.  le  Su/pplément. 

TRAIN  DE  BOIS.    K.  FlOTTAGB. 

TRAINE,  en  termes  de  Marine,  cordage  qu*on  laisse 
pendre  à  la  mer  lelon^  du  bord,  pour  y  attacher  un  objet 
quelconque  que  le  bâtiment  train»  à  sa  suite. 

TRAINEAU,  sorte  de  voiture  sans  roues  qu'on  fait 
glisser,  en  la  traînant,  sur  la  glace  ou  sur  la  neige.  Les 
traîneaux  sont  les  seuls  véhicules  des  régions  tout  à  fait 
septentrionales,  et  ils  servent  aux  fantaisies  du  luxe 
comme  au  transport  des  provisions  et  des  marchandises. 
Chez  les  Lapons  et  les  Kamtchadales,  on  y  attelle  des 
rennes  et  des  chiens. 

TRAINEAU,  grand  filet  qu'on  traîne  dans  les  champs 
pour  prendre  des  alouettes,  des  cailles,  des  perdrix,  on 
dans  les  rivières  pour  prendre  du  poisson. 

TRAIT,  autrefois  traict  (du  latin  tractus,  formé  de 
trahere^  tirer^,  toute  arme  qu'on  lance  à  la  main,  ou  avec 
l'arc  et  l'arbalète. 

TRAIT,  ligne  qu'on  trace  avec  le  crayon,  la  plume  ou 
tout  autre  instrument,  et  qui  marque  seulement  le  con- 
tour des  objets.  Les  dessins  au  trait  prennent  en  Archi- 
tecture le  nom  d^ épures  (K  ce  mot), 

TRAIT ,  en  termes  de  Musique,  suite  de  notes  rapides 
exécutée  sur  un  instrument  ou  avec  la  voix.  Le  mot  se 
dit  aussi  d'une  phrase  mélodique,  et  d'une  succession 
brillante  d'harmonie. 

TRAIT,  en  termes  de  Plain-Chant,  psaume  ou  partie  de 
psaume  qu'on  chante  après  le  Graduel,  en  remplacement 
de  r  Alléluia,  dans  les  messes  de  l'A  vent,  du  Carême,  et 
des  Morts.  Ce  morceau  de  chant  tire  son  nom  de  la  ma- 
nière en  quelque  sorte  traînante  dont  on  doit  l'exécuter. 
Il  est  toujours  écrit  dans  le  2«  ou  dans  le  8*  ton.  —  Trait 
a  été  encore  synonyme  de  Plique  (K.  ce  mot), 

TRAIT,  en  termes  de  Blason,  se  dit  des  carreaux  de 
l'échiquier.  L'échiquier  est  ordinairement  de  6  traits; 
quand  il  y  en  a  moins,  on  précise  le  nombre. 

TRAIT,  en  termes  de  Marine,  «st  synonyme  de  ixHie. 
On  dit,  par  exemple,  aller  à  traits  et  à  rames.  Un 
trait  carré  est  un  natiment  dont  les  voiles  principales 
sont  carrées. 

TRAIT  d'union  ,  sîgno  d'écrituro  marquant  la  liaison 
entre  plusieurs  mots  qui  n'en  forment  plus  qu'un  ou  qui 
sont  accidentellement  rapprochés  :  chet'd'OBUvre ,  tragi- 
comédie,  vient-il.  etc. 

TRAITANTS.  V.  Partisans,  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

TRAITE,  lettre  de  change  que  les  banquiers  tirent  sur 
leurs  correspondants. 

TRAITE  DBS  Noms.      S       ^^^^^^^  **  ^  Histotre. 
TRAITÉ ,  ouvrage  où  l'on  trait»  de  quelque  art,  de 

Quelque  science  particulière  :  Traité  de  botatwme.  Traité 
es  pierres  précieuses,  etc. 

TRAITÉ ,  convention  faite  entre  deux  ou  plusieurs  États 
pour  le  rétablissement  de  la  paix,  la  conclusion  d*uD6 
alliance,  un  échange,  une  cession  ou  un  partage  de  ter- 
ritoire, pour  des  intérêts  de  commerce,  de  propriété  lit- 
téraire, etc.  Les  anciens  Romains  distinguaient  le  traité 
d'amitié,  qui  avait  pour  objet  le  maintien  de  la  paix  et  la 
protection  du  commerce;  le  traité d*alltance,  qui  n'obli- 
geait pas  seulement  au  maintien  de  la  paix,  mais  qui 
imposait  une  assistance  active  dans  la  guerre;  le  iratU 
d'isopolitie,  qui  établissait  une  sorte  d'é^pdité  politique 


TRA 


ilH 


TRA    . 


entre  le  Romain  dans  le  monicipe  et  le  citoyen  du  mu- 
nicipe  dans  Rome  ;  le  traité  d'nospitaïité,  qui  unissait 
entre  eux  soit  de  simples  particuliers,  soit  des  cités  en- 
tières. F.  Dumont,  Rectml  des  traités  de  paix,  d^al^ 
liancej  de  commerce,  etc.,  Âmst.,  1710,  2  vol.:  Rousset, 
Reci^tl  historique  iTticteSf  négociations,  mémoires  et 
traités  de  paix,  La  Haye,  1728-52,  25  vol.  in-12;  Koch, 
Table  des  traités  entre  la  France  et  les  puissances  étran- 
gères, Bàle,  1802,  2  vol.  in-8°;  Martens,  Becueil  de 
traités  de  paix,  d^alliances,  de  trêves,  de  neutralité,  de 
commerce,  etc.,  depuis  i761,  Paris,  1857,  47  vol.  in-8®  ; 
Schœll,  Histoire  abrégée  des  traités  de  paix,  1832, 
23  vol.  in-8o;  Hoffmans  ,  D^Hauterive  et  de  Cussy,  Re- 
cueil des  traités  de  commerce  et  de  navigation  de  la 
France  avec  les  puissances  étrangères,  1834-44, 10  vol. 
in-8®;  Garden,  Histoire  générale  des  traités  de  paix  et 
autres  transactions  géniales  entre  toutes  les  puissances 
de  VEurope,  1848  et  suiv.,  20  vol.  in-8o;  Ghilland,  Re- 
cueil des  traités  de  paix  européens  les  plus  importants, 
trad.  en  français  par  Schnitzler,  1856,  2  vol.  in-S». 

TRAITEMENT,  émoluments  accordés  par  TÉtat  aux 
fonctionnaires  publics.  Il  est  saisissable  pour  un  cin- 
quième sur  les  premiers  1000  fr.,  un  quart  sur  les 
5000  fr.  suivants,  et  un  tiers  sur  ce  qui  dépasse  6000  fr. 

TRAITEURS.  Y.  Cuisiniers. 

TRAJAN  (Rempart  de).  V,  MunAiixES,  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire, 

TRA  JANE  (Colonne).  V.  Colonnesvonuhentai.es,  dans 
notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire, 

TRAMAIL.  V.  Halueb. 

TRAMONTANE ,  nom  donné  par  les  Italiens  au  vent 
du  Nord,  qui  leur  vient  d*au  delà  des  Alpes  {irans 
montes).  On  rappliqua  aussi  à  l'étoile  polaire,  oui  in- 
dique le  côté  du  Nord  :  de  là  Texpression  perdre  la  tra- 
montane, pour  dire  s'égarer,  parce  que  les  marins  s'o- 
rientent à  Taide  de  Tétoile  polaire. 

TRANCHE,  bord  extérieur  de  l'épaisseur  d'une  mé- 
daille. 

TRANCHÉ  (Le),  terme  de  Blason,  une  des  partitions 
de  l'écu  qui  le  divise  diagonalement  de  droite  à  gauche. 

TRANCHÉE,  ouverture  pratiquée  dans  la  terre  pour 
asseoir  les  fondations  d'un  mur,  placer  des  conduits  pour 
les  eaux  ou  le  gaz,  planter  des  arbres,  faire  un  fossé,  etc. 
En  Architecture,  on  nomme  tranchée  de  mur  une  entaille 
faite  dans  un-  mur  pour  y  encastrer  l'extrémité  d'une 
poutre  ou  un  tuyau  de  cheminée.  En  termes  d'Art  mili- 
taire, les  tranchées  sont  des  fossés  que  les  assiégeants 
creusent  pour  se  mettre  à  couvert  du  feu  de  la  place 
qu'ils  attaquent,  et  dont  les  terres.  Jetées  du  côté  do  cette 
place,  forment  un  parapet  (K.  Parallèles)  ;  par  exten- 
sion, le  mot  s'applique  au  rempart  qu'on  fait  avec  des 
fascines,  des  gantons,  des  sacs  remplis  de  laine  ou  de 
terre,  quand  le  terrain  est  de  roche  ou  difficile  à  creuser. 

TRANCHEFILE,  petit  rouleau  de  papier  ou  de  parche- 
min, recouvert  de  soie  ou  de  fil,  que  les  relieurs  mettent 
aux  extrémités  du  dos  d'un  livre  pour  soutenir  la  coiffe. 

TRANCHOIR,  table  carrée  qui  fait  le  couronnement 
du  chapiteau  des  colonnes. 

TRANCHOIR.    V,  PaIN-ASSIETTE. 

TRANGLES,  terme  de  Blason.  V,  Bdrellb. 

TRANSACTION,  en  latin  TransactU)  (de  transtgere, 
négocier,  s'arranger),  contrat  par  le(juel  les  parties  ter- 
minent une  contestation  née  ou  préviennent  une  contes- 
tation à  naître.  Ce  contrat  doit  être  rédigé  par  écrit,  soit 
dans  la  forme  authentique,  soit  sous  seing  privé.  Pour 
transiger,  il  faut  avoir  la  capacité  de  disposer  des  objets 
dont  il  est  fait  mention  dans  l'acte.  Les  transactions  ont, 
entre  les  parties,  l'autorité  de  la  chose  Jugée  en  dernier 
ressort;  elles  ne  peuvent  être  attaquées  pour  cause  d'er- 
reur de  droit,  ni  pour  cause  de  lésion ,  mais  l'erreur  de 
calcul  qui  y  serait  intervenue  doit  être  réparée.  Il  y  a 
lieu  à  rescision,  lorsqu'il  y  a  erreur  dans  la  personne  ou 
sur  l'objet  de  la  contestation,  lorsque  la  transaction  a  été 
faite  sur  un  titre  nul  ou  dans  l'ignorance  d'un  titre  tenu 
cacJaé  par  Tune  des  parties,  enfin  dans  le  cas  de  dol  ou 
de  violence.  V,  le  Code  Napoléon,  art.  2044-58  ;  Mar- 
beau ,  Traité  des  Transactions,  1833,  in-8°;  Rigal, 
Traité  des  Transactions,  1834,  in-8° ;  Troplong ,  Com- 
mentaire du  titre  du  Mandat,  du  Cautionnement  et  des 
Transactions,  1841,  2  vol.  in-8°. 

TRANSACTIONS  PHILOSOPHIQUES,  célèbre  recueil 
mensuel,  publié  par  la  Société  royale  de  Londres,  et 
composé  surtout  de  Mémoires  et  d'Observations  sur  les 
sciences  mathématiques  et  nat'trelles.  La  plupart  des 
pièces  sont  en  anglais,  et  quelques-unes  en  latin.  La 
publication  commença  en  1665.  Elle  était  anouello»  Inter- 


rompue plusieurs  fois  au  \ynf  siècle,  elle  a  été  reprisé 
régulièrement,  et  compte  auj.  (1862)  151  vol.  in-4^. 

TRANSCENDANTALE  (Philosophie).  Doctrine  philoso- 
phique qui  recherche  ce  que  l'homme  apporte  du  sien 
dans  la  connaissance  des  objets;  sa  méthode  est  cri- 
tique, elle  examine.  Elle  s'occupe  du  sujet,  tandis  que 
la  philosophie  transcendante  s'occupe  de  l'objet,  c-à-d. 
de  toute  connaissance  qu'on  peut  obtenir  sans  l'expé- 
rience. La  philosophie  transcendantale  tend  à  réduire 
l'esprit  humain  à  lui-même,  la  science  à  un  seul  de  ses 
termes  essentiels,  le  sujet,  à  mettre  en  doute  la  nature  et 
Dieu,  et  enfin  à  les  tirer  du  moi^  comme  on  le  voit  dans 
Fichte.  Kant  est  l'auteur  de  cette  philosophie,  dont  il  a 
exposé  les  principes  dans  sa  Critique  de  la  raison  pure. 
Cet  ouvrage  contient  la  théorie  de  la  sensibilité  pure , 
celle  de  l'entendement  pur,  celle  de  la  raison  pure.  Sur 
elles  repose  toute  la  philosophie  transcendantale.  La  pre- 
mière traite  du  mode  de  génération  des  objets  sensibles, 
de  l'espace,  et  du  temps;  ceux-ci  sont  les  deux  formes  do 
la  sensibilité ,  subjectives ,  dont  l'entendement  revêt  les 
êtres  et  les  faits ,  qui  ne  sont  que  des  phénomènes,  Jjà 
2«  est  la  logique  transcendantale,  divisée  en  deux  par- 
ties :  Tune,  s'occupe  du  mode  de  génération  des  lois  uni- 
verselles qui  règlent  les  objets  sensibles,  des  catégories 
ou  formes  de  la  pensée,  reposant  sur  les  guatre  formes 
de  nos  jugements  :  quantité,  qualité,  relation,  modalité; 
Kant  nomme  cette  partie  de  sa  logique  Analytique . 

f^arce  qu'elle  consiste  dans  une  analyse  des  fonctions  do 
'entendement.  L'autre,  nommée  Dialectique  transcen- 
dantale, a  pour  objet  le  mode  de  génération  des  objets 
intelligibles,  les  idées  transcendantales,  les  paralogismes, 
les  antinomies  et  l'idéal  de  la  raison  pure,  les  preuves 
spéculatives  de  l'existence  de  Dieu,  preuves  qu'il  est  con- 
duit à  rejeter.  Kant  Joint  à  ce  qui  précède  une  Méthodo- 
logie transcendantale,  qui  a  pour  but  de  déterminer  les 
conditions  formelles  d'un  système  complet  de  la  raison 
pure.  La  conclusion  générale  de  la  philosophie  trans" 
cendantale,  pour  Kant,  c'est  que  nous  ne  pouvons  affir- 
mer la  réalité  objective  de  rien.  Elle  aboutit  au  scepti- 
cisme. —  Cette  doctrine  de  Kant  manquait  de  rigueur  ; 
Fichte,  son  disciple,  poussa  la  philosophie  transcendan- 
tale à  ses  dernières  conséquences, .  dans  sa  Théorie  de  la 
science.  Pour  lui,  plus  d'élément  objectif;  tout  est  déduit 
d'un  seul  terme  de  la  connaissance,  du  sujet.  La  Nature 
et  Dieu  ne  sont  que  des  développements  du  moi;  le  moi 
est  seul  principe,  il  crée  tout,  il  se  crée  lui-même.  La 
philosophie  transcendantale  devint  ainsi  Vidéalisme  sub- 
jectif absolu  :  mais  les  conséquences  montrèrent  toutes 
les  erreurs  renfermées  dans  le  principe.  Les  successeurs 
de  Kant  et  de  Fichte  la  modifièrent  et  la  transformèrent 
ensuite.  Schclling,  qui  avait  paru  l'accepter  d'abord  dans 
son  premier  écrit  :  Du  moi  comme  principe  de  la  philo- 
Sophie^  y  renonça  bientôt,  et  du  scepticisme  de  Kant  elle 
arriva  au  dogmatisme  de  Schelling  et  de  Hegel.  La  phi- 
losophie inaugurée  par  Kant,  malgré  ses  défauts,  im- 
prima à  l'Allemagne  un  immense  mouvement  philoso- 
phique et  littéraire  ;  elle  fut  la  pensée  mère  des  grands 
travaux  qui  signalèrent  en  ce  pavs  la  fin  du  xviii*  siècle 
et  le  commencement  du  nôtre,  v,  J.  Willm,  Histoire  de 
la  philosophie  allemande  depuis  Kant  jusqu'à  Hegel , 
4  vol.  in-8°,  Paris,  1849;  et,  dans  le  présent  Dictionnaire, 
l'art.  Allemande  (Philosophie).  R. 

TRANSCRIPTION,  en  termes  de  Pratique  et  de  Com- 
merce, action  d'insérer  dans  un  acte  un  autre  acte,  un 
jugement  ou  un  arrêt,  de  transporter  sur  un  autre  livre 
un  article  ou  un  compte.  La  transcription  hypothécaire 
est  le  report  intégral  d'un  acte  translatif  de  la  propriété 
d'immeubles  sur  le  registre  du  conservateur  des  hypo- 
thèques de  l'arrondissement  où  sont  situés  ces  immeu- 
bles :  le  contrat  de  vente  est  parfait  entre  les  parties  par 
le  seul  effet  de  leur  consentement,  mais  il  n'a  d'effet  à 
l'égard  des  tiers  qu'après  la  transcription.  Cette  formai 
lité  a  pour  but  de  prévenir  certains  abus  :  ainsi,  un  pro- 
priétaire ne  peut  plus  vendre  et  se  faire  payer  plusieurs 
fois  le  même  immeuble  ;  il  ne  peut  hypothéquer  un  im- 
meuble déjà  vendu.  L'antichrèse,  la  concession  d'une 
servitude,  les  baux  de  plus  de  18  ans,  les  quittances  an- 
ticipées de  3  années  de  loyer  ou  de  fermages,  ont  été 
soumis  à  la  transcription,  en  vertu  d'une  loi  du  23 
mars  1855.  V.  Boume,  Transcription  hypothécaire. 
Commentaires  sur  la  loi  du  23  mars  i8o5,  in-8°  ;  Herr 
vieu.  Interprétation  de  la  loi  du  23  mars  i855  sur  la 
Transcription  hypothécaire,  1856,  in-8®  ;  Lemarcis,  Com- 
mentaire  de  la  loi  sur  la  Transcription,  1855,  in-S**  ; 
Lesenne,  Commentaire  théorique  et  pratique  de  la  loi 
du  23  mars  1855  sur  la  TrantcriptUm  hypothécaire, 


TftA 


1711 


TUA 


1856,  in-S<*;  Bîvière  et  François,  Explication  ds  la  loi 
du  S3  mars  I800  sur  la  transcription  en  matière  hypo- 
thécaire, et  Questions  ttieoriques  et  pratiques  sur  la 
transcription  hypothécaire,  1856,  in-8";  Troplong,  Trans" 
cription  en  mcUièi-e  hypothécaire,  1856,  in-8°  ;  Mourlon, 
Traite  théorique  et  pratique  de  la  transcription,  in-8°. 

TRANSEPT  (du  latin  trans,  an  delà,  et  septum,  en- 
ceinte), nef  transversale  qui,  dans  une  église,  sépare  du 
chœui  la  grande  nef  et  les  bas  côtés,  et  forme  les  deux 
bras  d'une  croix  dont  le  chœur  et  la  nef  sont  le  montant. 
Le  transept  est  aussi  appelé  croisée;  ses  deux  extrémités 
ont  reçu  les  noms  de  transepts  (par  abus),  d*ailes  de 
croix,  branches  de  croix,  et  croisillons.  Vintertransept 
iiSt  le  centre  du  transept.  Le  transept  se  termine  d'ordi- 
naire carrément,  parfois  en  abside  ou  en  hémicycle.  Cer- 
taines églises  ont  deux  transepts,  de  sorte  que  leur  plan 
rcprL'sente  une  croix  archiépiscopale.  On  trouve  quelque- 
fois, comme  à  Téglise  de  Ijo,  Charité-sur-Loire,  un  tran- 
sept dans  la  chapelle  de  la  Sainte  Vierge. 

TRANSFERT,  acte  par  lequel  on  déclare  transférer  à 
une  autre  personne  la  propriété  d*une  rente  sur  TÉtat, 
d'une  action  de  société,  d'une  marchandise  en  entre- 
pôt, etc.  Un  agent  de  change  doit  certifier  Tindividualité 
du  vendeur  de  rentes,  la  vérité  de  sa  signature  et  des 
pièces  produites,  et  en  demeure  garant  pendant  5  ans 
après  la  déclaration  do  transfert. 

TRANSIT.  V.  Douanes. 

TRANSITIF,  nom  donné  par  les  grammairiens  mo- 
dernes aux  verbes  qui  marquent  une  action  s'exerçant 
par  le  sujet  sur  la  chose  ou  la  personne  qui  sert  de  com- 
plément. Tous  les  verbes  actifs  et  bon  nombre  de  verbes 
neutres  sont  transitifs  (V,  Intransitip  ).  —  D'anciens 
grammairiens  ont  donné  le  nom  de  transitifs  à  certains 
mots  ou  réunions  de  mots  servant  à  marquer  une  tran- 
sition. Telles  sont  les  conjonctions  au  reste,  cependant , 
or,  après  tout,  et  autres  de  sens  analogue.  P. 

TRANSITION  (du  latin  transire,  passer},  en  termes  de 
Rhétorique,  manière  de  passer  d'un  ordre  d'idées  à  un 
autre,  de  lier  ensemble  les  parties  d'un  discours.  Les 
transitions  ne  sont  pas  des  conjonctions  grammaticales, 
mais  de  petites  phrases  pour  ainsi  dire  copulatives,  dont 
on  se  sert  pour  enchaîner  l'une  k  l'autre  plusieurs  pen- 
sées. On  ne  peut  y  réussir  qu'après  avoir  sérieusement  mé- 
dité son  sujet,  de  manière  à  embrasser  d'un  coup  d'oeil 
toutes  les  parties  et  à  en  voir  les  rapports. 

TRANSITION  (Style  de),  nom  donné  en  Architecture  au 
style  intermédiaire  entre  le  roman  et  le  gothique,  et  dans 
lequel  se  trouve  un  mélange  de  ces  derniers. 

TRANSITION,  eu  termes  de  Musique,  passage  d'un  ton  à 
un  autre.  La  transition  enharmonique  est  celle  dans  la- 
quelle une  ou  plusieurs  notes,  après  avoir  été  entendues 
comme  appartenant  à  un  ton ,  sont  employées  comme 
notes  d'un  autre  ton. 

TRANSITORIUM,  nom  donné,  dans  le  rit  ambrosien, 
à  l'antienne  qu'on  chante  après  la  Communion. 

TRANSMIGRATION  DES  AMES.  V,  Métempsycose. 

TRANSPARENT,  peinture  exécutée  sur  toile  fine  en- 
duite d'huile,  ou  sur  papier  serpente,  et  dont  on  fait 
ressortir  les  couleurs  en  la  plaçant  devant  une  vive  lu- 
mière. Les  transparents  sont  suitout  en  usage  au  théâtre, 
et  pour  les  illuminations  dans  les  fêtes  publiques. 

TRANSPORT,  en  termes  de  Jurisprudence,  acte  par 
lequel  on  cède  à  une  autre  personne  une  créance  ou  tout 
autre  droit  incorporel.  Celui  qui  fait  le  transport  est  ap- 
pelé cédant;  le  cessionnaire  est  celui  au  profit  duquel 
l'acte  a  lieu.  Cet  acte  peut  être  fait  soit  en  la  forme  au- 
thentique, soit  sous  seing  privé.  K.  Cession. 

TRANSPORT,  QTi  termes  de  Marine,  bâtiment  affrété  par 
le  gouvernement  p^ur  porter  des  troupes  ou  des  muni- 
tions. Quand  l'État  emploie  à  ce  service  ses  propres  na^ 
vires,  ce  ne  sont  plus  des  transports,  mais  des  corvettes 
de  charge,  des  gabarres,  et  quelquefois  des  vaisseaux  :  00 
dit  alors  que  ces  bâtiments  sont  armés  en  flûtes.\.  Flute. 

TRANSPORTATION,  peine  particulière  à  l'AngleteiTe, 
et  qui  consiste  à  être  emmené  dans  quelque  colonie 
lointaine.  En  France,  elle  a  été  une  mesure  politique  et 
exceptionnelle^  qui  n'implique  point  un  jugement  comme 
la  Déportation  {V.  ce  mot).  D'après  une  loi  de  l'an  11, 
tout  mendiant  repris  pour  la  3*  fois  devait  être  trans- 
porté aux  colonies.  Après  les  journées  de  juin  1848,  la 
transportation  éloigna  du  pays  une  foule  d'individus  ré- 
putés dangereux.  Elle  fut  également  appliquée,  depuis 
1852,  comme  adoucissement  de  peine,  aux  condamnés 
renfermés  dans  les  bagnes;  on  les  transporte  à  la  Guvane. 
La  condition  des  transportés  est  régie  par  la  loi  du  4  Jan- 
fier  1850  et  le  décret  du  28  mars  1852. 


TRANSPOSITION,  en  termes  de  Musique,  changd- 
ment  par  lequel  un  morceau  est  porté  dans  un  ton 
différent  de  celui  dans  lequel  il  a  été  écriL  Une  per- 
sonne transpose  naturellement  et  sans  le  remarquer, 
quand  elle  place  l'air  qu'elle  chante  dans  la  position  la 
plus  favorable  à  sa  voix.  Mais  l'opération  de  l'instrumen- 
tiste qui  accompagne  ou  Joue  un  morceau  en  transposant 
est  beaucoup  plus  compliquée  ;  car  elle  consiste  à  faire 
d'autres  notes  que  celles  qui  sont  écrites,  à  introduire  ou 
à  supprimer  des  accidents,  à  faire  des  dièses  là  où  sont 
indiqués  des  bémols,  et  réciproquement.  H  est  un  moyen 
de  simplifier  cette  opération  :  c'est  de  supposer  une  autre 
clef  que  celle  qui  est  placée  au  commencement  des  por- 
tées, et  de  choisir  celle  qui  correspond  au  ton  dans  le- 
quel on  veut  transposer.  Toutefois,  la  transposition  de- 
meure une  des  plus  grandes  difficultés  de  la  musique  au 
point  de  vue  de  la  pratique  ;  elle  exige  une  aptitude  par- 
ticulière. Les  facteurs  Relier,  Blanchet,  Pfeiffer,  ont  ima- 
giné de  construire  des  pianos  qui  opèrent  la  tranposition 
d'une  manière  mécanique,  et  qu'on  nomme  piano;  trans- 
positeurs. —  Un  instrument  est  dit  transpositeur,  quand 
le  son  qu'il  donne  est  différent  de  la  note  écrite  :  tels 
sont  les  clarinettes,  les  cors,  les  trompettes,  les  cornets 
à  pistons.  B. 

TRANSPOSITIVES  (Langues),  langues  où,  les  rapports 
des  mots  entre  eux  étant  indiqués  par  des  terminaisons 
spéciales,  on  n'est  pas  obligé  de  placer  ces  mots  dans 
l'ordre  analytique,  comme  cela  est  presque  toujours  né- 
cessaire en  français.  Le  système  de  la  transposition  des 
mots  est  propre  à  l'ancien  grec  et  au  latin.  Les  langues 
modernes ,  la  française  surtout ,  ne  les  transposent  qu'avec 
une  extrême  réserve.  Aucune  ne  peut  se  permettre  une 
inversion  du  genre  de  celle-ci ,  qui  est  cependant  très- 
modérée  en  latin  :  Cur  me  querelis  exanimas  tuis  ?  et  qui, 
rendue  mot  par  mot,  donne  en  fiançais  un  assemblage 
de  mots  inintelligible  :  Pourquoi  me  par -plaintes  dé- 
soles-lu  tes?  Or,  la  construction  de  la  phrase  latine  est 
très-naturelle,  très-claire,  et  même  très-simple.        P. 

TRANSSEPT.  V,  Transept. 

TRANSSUBSTANTIATION  (du  latin  trans,  au  delà,  et 
suhstantia,  substance),  changement  d'une  substance  en 
une  autre.  Le  mot  ne  s'applique  qu'au  changement  mira- 
culeux de  la  substance  du  pain  et  du  vin  en  la  substance 
du  corps  et  du  sang  de  N.  S.  Jésus-Christ  dans  l'Ëncba- 
ristie ,  par  la  vertu  des  paroles  sacramentelles  du  prêtre. 
C'est  un  des  dogmes  de  l'Église  catholique. 

TRAPÈZE,  appareil  de  gymnastique,  composé  d'une 
barre  de  bois  suspendue  horizontalement  par  deux  cordes, 
et  sur  laquelle  on  se  livre  à  des  exercices  de  force  et 
d'adresse. 

TRAPÉZITES.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire^  au  Supplément. 

TRAPPE  (  du  bas  latin  trappa,  dérivé  de  trabs,  poutre), 
sorte  de  porte  posée  horizontalement  sur  une  ouverture 
à  rez-de-chaussée  ou  au  niveau  d'un  plancher;  —  fenêtre 
qui  se  hausse  et  se  baisse  dans  une  coulisse. 

TRAPPE,  trou  que  l'on  fait  en  terre,  et  que  l'on  couvre 
soit  d'une  bascule,  soit  de  branchages  et  de  feuillages, 
pour  y  faire  tomber  les  bêtes  fauves.  De  là  le  nom  de 
Trappeurs  donné  dans  l'Amérique  du  Nord  aux  chas- 
seurs de  profession. 

TRAQUENARD  (contraction  de  traque-renard)^  piège 
en  forme  de  trébuchet,  que  Ton  tend  pour  preitdre  lès 
renards,  les  loups,  les  belettes  et  autres  bêtes  nuisibles. 

TRAQUENARD,  nom  d'uuo  ancienne  danse  dont  les  pas, 
prompts  et  mal  réglés,  étaient  accompagnés  de  mouve- 
ments particuliers  du  corps.  Le  mot  venait  du  (roc  ou 
mouvement  de  la  haquenée. 

TRAVAIL,  action  suivie,  dirigée  vers  un  but.  Les  Éco- 
nomistes définissent  le  travail  a  la  puissance  de  Thomme 
appliquée  à  la  Production.  »  L'ouvner  qui  sait  son  métier 
a  en  réserve  un  capital;  cela  ne  lui  suffit  pas  pour  vivre; 
il  faut  qu'il  applique  cette  science  à  la  production;  il 
faut  qu'il  travaille  Le  savant  a  un  riche  capital  de  science; 
mais  ce  capital  est  un  bien  inutile  à  la  société  et  au  ^sa- 
vant lui-même,  tant  qu'il  n'en  use  pas  :  il  faut  que  par 
son  travail  il  produise.  Le  travail  est  donc  la  mise  en 
œuvre,  par  l'activité  de  l'homme,  de  ses  facultés  phy- 
siques et  morales.  Il  est  un  des  instruments  directs  de  la 
Production  ;  il  en  est  l'élément  moral ,  puisqu'il  est  IMo- 
tervention  de  la  personnalité  humaine* 

L'homme  est  subordonné  en  partie  au  capital.  S*il  est 
vrai  de  dire  que  plus  il  y  a  de  capitaux  dans  une  nation, 
plus  il  y  a  de  produits  et  de  richesse,  il  n'est  pas  égale- 
ment vrai  de  aire  que  plus  il  y  a  d'hommes,  plus  il  y  a 
de  travail  et  de  richesse.  Pour  qu'un  Lommc  puisse  ein* 


TftA 


mi 


TRE 


ployer  tes  bras,  il  faat  qu*il  y  ait  un  capital  qui  lui  en 
fournisse  les  moyens.  On  peut  donc  dire  :  il  faut  que  les 
hommes  dans  le  passé  aient  eu  la  prévoyance  de  travail- 
ler et  d^épargner,  pour  que  les  hommes  puissent  tra- 
vailler danf  le  présent.  Il  y  a  toujours  au  fond  de  cette 
doctrine  un  profond  enseignement  moral.  II  s^ensuit  que 
la  population  doit  se  proportionner  dans  un  pays  à  la 
quantité  de  travail  qui  peut  lui  être  fournie;  et,  comme 
le  chiffre  des  naissances  est  presque  toujours  plus  élevé 
que  les  moyens  de  subsistance  ne  le  comportent,  il  ar- 
rive que,  dans  presque  toutes  les  sociétés,  il  y  a  un  grand 
nombre  de  malheureux,  et  que  la  mort  se  charge  de  réta- 
blir réquilibre.  De  là  cette  conséquence  :  multipliez  les 
produits,  et  la  population  augmentera. 

Un  des  moyens  les  plus  puissants  pour  multiplier  les 
produits  est  la  division  du  travail.  «  Cest ,  dit  Rossi ,  le 
grand  levier  de  l'industrie  moderne.  »  Une  carte  à  Jouer 
subit  environ  soixante-dix  opérations  avant  d'être  livrée 
à  la  consommation;  toutes  ces  opérations  sont  d'une 
grande  simplicité;  chaque  ouvrier  n'est  chargé  d'en  exé- 
cuter qu'une,  deux  ou  trois  au  plus,  et  répète  sans  cesse 
le  même  travail,  dans  lequel  il  acquiert  beaucoup  d'ha- 
bileté. Trente  ouvriers  font  ainsi  par  jour  15,000  cartes  : 
soit  environ  500  cartes  par  ouvrier.  Combien  en  ferait  un 
ouvrier,  s'il  devait  tout  exécuter  seul ,  depuis  la  fabrica- 
tion du  carton  jusqu'à  Tempaquetage  des  jeux?  —  La 
division  du  travail  est  souvent  limitée  par  l'étendue  du 
marché.  A  la  campagne,  l'épicier  sera  à  fa  fois  droguiste, 
pharmacien,  marchand  de  nouveauté.  Dans  une  grande 
ville,  un  marchand  ne  tiendra  qu'un  seul  genre  d'ar- 
ticles, parce  qu'il  aura  un  débit  suffisant;  le  consomma- 
teur aura  la  marchandise  à  meilleur  marché  et  en  meilleure 
qualité.  Aussi  la  division  du  travail  ne  peut-elle  pas  être 
prescrite  par  des  règlements  administratifs;  c'est  à  la 
concurrence  des  producteurs  à  l'établir  dans  les  limites 
possibles.  —  La  liberté  du  travail  est  une  des  conditions 
importantes  de  la  production,  et  les  corporations  d'arts 
et  métiers  qui  existaient  avant  1789  étaient  autant  d'en- 
traves au  développement  de  l'industrie  (  V.  Arts  ei  Mé- 
TiEns  ).  L. 

TRAVAIL  (Droit  an],  n ne  des  fausses  doctrines  que  le 
Socialisme  (  K.,ce  mot)  a  mises  en  circulation  pour  agiter 
la  multitude.  C'est  le  droit  qu'aurait  tout  individu  sans 
occupation  d'exiger  de  V  .tat  un  travail  salarié.  Admis 

Çlus  ou  moins  implicitement  dans  les  Constitutions  de 
701  et  de  1793,  il  fut  proclamé  par  les  décrets  du  26  et 
du  28  février  1848.  On  a  été  amené  ainsi  à  la  création 
des  Ateliers  nationaux  (  V.  ce  mot)^  et  à  l'insurrection 
de  Juin  de  la  même  année.  V,  Proudhon,  Le  Droit  au 
travail  et  le  Droit  de  propriété,  1848  et  1850  ;  Léon  Fau- 
cher, Du  Droit  au  travail ,  1848. 

TRAVAIL  (Organisation  du),  une  des  utopies  socialistes 
destinées  à  éteindre  la  misère  parmi  les  hommes.  Elle  a 
pour  base  l'égalité  des  salaires,  et  pour  condition  essen- 
tielle la  direction  universelle  de  l'industrie  par  l'État. 
V.  Communisme,  FouRiéaisMB,  Icarie,  Phalanstère,  Sa- 
laire, Socialisme;  et  Louis  Blanc,  Organisation  du  tra- 
vail ,  1830  et  1850;  Michel  Chevalier,  Uttre  sur  Inorgani- 
sation du  travail,  1840;  Du  Puynode,  Des  lois  du  travail 
et  des  classes  ouvrières,  1845,  in-8';  Wolowski,  De 
l'organisation  du  travail,  1848. 

TRAVAUX  (Les)  et  les  Jodrs.  F.  OEovres  et  Jodrs. 

TRAVAUX  FORCÉS,  peine  afflictive  et  infamante  qui 
a  remplacé  les  galères.  Les  hommes  qui  y  sont  condamnés, 
et  que  l'on  nomme  forçats,  subissaient  préalablement 
autrefois  une  exposition  publique  (  K.  Exposition).  Ils 
sont  employés  aux  travaux  de  l'État  les  plus  rudes  et  les 
plus  pénibles;  ils  traînent  à  leurs  pieds  un  boulet,  ou, 
lorsque  la  nature  des  travaux  le  permet,  ils  sont  attachés 
deux  à  deux  avec  une  chaîne.  Ils  subissent  leur  peine 
dans  les  bagnes  (  V.  n*  mot  ^ ,  et ,  depuis  la  loi  du  30  mai 
18r>i,  dans  les  colonies  pénitentiaires.  Les  femmes  et  les 
filles  subissent  la  peine  dan5  *ine  maison  de  force.  Les 
travaux  forcés  sont  à  perpéiutf  '^^  •  temps  (5  ans  au 
moins  et  SO  ans  au  plus)  :  les  premiers,  avant  1854,  en- 
traînaient la  mort  civile  {V.  ce  mot)\  les  seconds  em- 
portent la  dégradation  civique  et  Vinterdiction  légale 
(  V.  ces  mots  ).  V.  Ltei^.Rés. 

travaux  publics  ,  travaux  qui  intéressent  la  généralité 
des  habitants  du  pays.  Ce  sont  les  routes,  les  chemins 
de  fer,  les  cours  d'eau  navigables,  les  usines  situées  sur 
les  cours  d'eau,  la  police  du  roula^  et  de  la  navigation, 
les  ports  de  commerce,  les  phares,  les  monuments  publics, 
les  dessèchements  de  marais,  les  mines  et  minières,  etc. 
V.  Agriculture  (  Ministère  de  V  ). 

tBAVâui  PUBLICS ,  poine  infligée  aux  militairet  coapablet 


de  désertion.  Les  condamnés  sont  employés  à  des  tra« 
vaux  militaires  ou  civils  :  ils  ne  portent  ni  chaînes  ni 
fers  ;  leurs  vêtements  ne  doivent  point  avoir  la  couleur 
de  ceux  de  l'armée  ;  ils  reçoivent  le  pain  militaire,  et  une 
ration  de  riz  ou  de  légumes  secs. 

TRAVÉE  (du  latin  trabs,  poutre),  espace  compris  entre 
deux  poutres  et  qui  est  rempli  par  un  certain  nombre 
de  solives.  On  nomme  travée  de  comble,  la  distance 
d'une  ferme  à  l'autre  sur  deux  ou  plusieurs  pannes  ;  tror- 
vée  de  balustres ,  un  rang  de  balustres  entre  deux  co« 
lonnes  ou  piédestaux  ;  travée  de  grille ,  un  rang  de  bar- 
reaux entre  deux  pilastres.  Dans  m^  pont,  les  travées 
sont  les  parties  de  la  charpente  qui  forment  les  arches 
et  supportent  le  tablier.  En  Architecture  religieuse ,  on 
appelle  travée  chacune  des  divisions  d'une  nef  d'église  : 
elle  comprend  l'espace  qui  se  trou/e  entre  deux  piliers, 
y  compris  la  moitié  de  chaque  pilier,  et  se  compose,  en 
élévation,  de  l'arc  principal ,  de  la  galerie  ou  triforium , 
de  la  haute  fenêtre  et  de  la  voûte. 

TRAVERS  (Droit  de).  V,  notre  Dicttonnaire  de  Bio- 
graphie  et  d'Histoire. 

travers,  en  termes  de  Marine,  côté  d'un  navire  ^ans 
toute  l'étendue  comprise  entre  la  poupe  et  la  proue. 
Mettre  en  travers,  c'est  mettre  en  panne  ou  à  la  cape. 

TRAVERSE,  pièce  de  bois  ou  de  métal  que  l'on  met  en 
travers  à  certains  ouvrages  pour  les  assembler  ou  les 
affermir. 

traverse,  nom  donné,  dans  la  Fortification,  à  des 
espèces  d'épaulements  qu'on  élève  entré  des  ouvrages, 
surtout  dans  les  chemins  couverts,  pour  qu'ils  ne  soient 
pas  enfilés  par  les  boulets  de  l'ennemi.  Les  soldats  se 
mettent  à  l'abri  derrière  les  traverses. 

TRAVERSIN,  e**  lermes  de  Marine,  se  dit  des  pièces 
de  bois  posées  en  cravers  de  la  charpente  d'un  b&timent. 
Ainsi ,  on  nomme  traversin  des  bittes  une  forte  pièce  de 
bois  qui  croise  horizontalement  les  deux  montants  des 
bittes,  afin  de  les  Mkt  l'une  avec  l'autre;  traversin  d'écou- 
tille,  un  morceau  de  bois  volant  qui  traverse  l'écontille 
par  le  milieu  afin  de  la  soutenir  ;  traversins  de  hune,  des 
pièces  de  charpente  fixées  en  travers  sur  les  élonges  des 
m&ts,  et  sur  lesquelles  reposent  les  hunes,  etc. 

TRÉBUCHET  (de  trébucher),  piège  à  prendre  les 
petits  oiseaux.  Cest  une  sorte  de  cage,  dont  la  partie 
supérieure  est  couverte  de  grain  et  arrêtée  si  délicate- 
ment, que  l'oiseau,  en  se  posant,  fait  partir  un  ressort, 
et  se  trouve  enfermé  dans  la  cage. 

TRÉBUCHET,  engin  de  guerre  du  moyen  Age.  Cétaitune 
machine  de  jet ,  composée  d'une  verge  ou  flèche  tournant 
autour  d'un  axe  horizontal  porté  sur  des  montants  :  à 
l'une  des  extrémités  de  la  verge  on  fixait  un  contre- 
poids, et  à  l'autre  une  fronde  qui  contenait  le  projectile. 
Pour  bander  la  machine,  c.-à-d.  pour  abaisser  la  verge, 
on  se  servait  d'un  treuil.  Une  machine  de  ce  genre  fut 
exécutée  en  1850  par  ordre  du  prince  Louis- Napoléon, 
alors  président  de  la  République;  la  flèche  avait  10"\30, 
le  contre-poids  était  de  4,5U0  kilogr.  :  on  lança  un  boulet 
de  24  à  la  distance  de  175"',  une  bombe  de  0"*,22  rem- 
plie de  terre,  à  145™,  des  bombes  de  0™,27  et  de  0'»,32 
remplies  de  terre,  à  120".    ^ 

TRËCANUM ,  nom  donné,  dans  les  premiers  siècles  de 
l'Église,  à  un  chant  exécuté  par  le  chœur  pendant  qu'on 
distribuait  la  Communion.  On  ne  sait  en  quoi  il  consis- 
tait :  c'était  peut-être  le  Symbole  des  Apôtres,  par  lequel 
on  exprimait  la  foi  en  la  Trinité^  ou  simplement  un  ré- 
pons à  trois  versets. 

TRÈFLE ,  une  des  quatre  couleurs  des  cartes ,  ainsi 
nommée  de  la  feuille  de  trèfle  qu'elles  portent 

TRÈPi.E ,  ornement  d'Architecture  imité  de  la  feuille  de 
trèfle.  On  nomme  trèfles  de  moderne,  dans  les  constnictions 
otnvales,  de  petites  roses  à  jour,  formées  par  trois  arcs  en 
tiers-point. 

TRÈFLE,  en  termes  de  Blason,  figure  du  trèfle  posée  sur 
un  écu  aux  extrémités  d'une  croix.  On  dit  une  croix  tré' 
fiée,  une  croto;  cantonnée  de  trèfie. 

TRÉFONDS  (du  latin  terrœ  fundus,  le  fonds  du  sol) , 
fonds  qui  est  sous  le  sol  et  qu'on  possède  comme  le  sol 
même.  On  appelle  tréfoncier  le  propriétaire  du  fonds  et 
du  tréfonds. 

TREILLE,  terme  de  Fortification,  V.  Galerie. 

TREILLES  '  Les),  lax  Treilhas^  danse  du  paysdeMnnt- 

Cellicr,  exécutée  par  8  à  12  couples  de  femmes,  vêtues  de 
lanc,  avec  des  ceintures  hleues  pour  la  moitié  des  dan- 
seuses, roses  pour  h*s  autres.  Le»  danseuses  portent  des 
fragments  de  cerceaux ,  garnis  de  mousseline  blanche  et 
de  nœuds  bL-nis  ou  roses,  dont  elles  tiennent  les  extré- 
mités à  la  main.  Elles  exécutent  des  évolutions  variées , 


TRE 


1744 


FRÈ 


pendant  lesquelles  les  deux  troupes  se  mêlent  sans  se 
confondre. 

TREILLIS,  ouvrage  de  bois  ou  de  métal  qui  imite  les 
mailles  en  losange  d'un  filet  et  qui  sert  de  clôture. 

TREILLIS,  châssis  divisé  en  compartiments  ou  carreaux, 
et  qui  sert  à  copier  dos  tableaux  qu*on  veut  poiter  à  des 
dimensions  plus  grandes  ou  plus  petites.  V,  Carreaux. 

TREIZIÈME,  en  termes  de  Musique,  intervalle  com- 
posé d'une  octave  et  d*une  sixte.  Il  comprend  13  tons  et 
demi-tons. 

TREKSCHUYTES  (du  hollandais  irékken,  tirer) ,  bar- 
ques pontées  en  usage  sur  les  canaux  de  la  Hollande,  tirées 
par  des  chevaux,  et  servant  au  transport  des  voyageurs. 
Elles  ont  de  12  à  18'"  de  longueur,  et  de  2  à 4'**  de  largeur. 

TRÉLINGâGE,  gros  filin  qui  attache  les  bas  haubans 
do  b&bord  avec  ceux  de  tribord. 

TRÉMA  (du  grec  tréma,  trou),  signe  d'accentuation 
formé  de  deux  points,  que  Ton  place  sur  les  voyelles  e, 
%,  u,  lorsque,  suivant  une  autre  voyelle,  elles  doivent 
être  prononcées  séparément  :  SaÛl ,  ciguë,  neuf.  On  ne 
remploie  pas  s*il  peut  être  remplacé  par  Ve  fermé  :  Chloé, 
poésie, 

TRÉMAIL.  V.  Hallier. 

TREMBLANTS.  V.  Bedooxes. 

TRÉMIE  (Bande  de).  V.  Bande. 

TREMOLO,  mot  italien  qui  signifie  tremblement.  Il 
désigne,  en  Musique,  Teffet  produit  sur  les  instruments 
à  archet  quand  on  fait  aller  et  venir  Tarchet  sur  les 
cordes  avec  tant  de  rapidité,  que  les  sons  se  succèdent 
sans  laisser  r(vnarquer  une  solution  de  continuité.  On 
obtient  cet  effet  sur  le  piano ,  en  frappant  au  moins  deux 
touches  alternativement  et  avec  une  grande  célérité. 

TREMPLIN  (de  trembler) ,  planche  inclinée  et  très- 
élastique,  sur  laquelle  les  gymnasiarques  courent  pour  se 
donner  de  Télan  et  faire  des  sauts. 

TRÉNITZ,  une  des  figures  de  la  contredanse,  ainsi 
nommée  d'un  M.  de  Trénitz,  beau  danseur  de  société,  du 
temps  du  Directoire. 

TRENTE-ET-QUARANTË,  Jeu  de  cartes  où  Ton  se 
sert  de  6  Jeux  entiers ,  mêlés  ensemble,  ce  qui  fait  en 
tout  312  cartes.  Il  y  a  un  banquier  et  des  pontes  ou 
joueurs.  Sur  la  table  sont  deux  cartons,  Tun  rouge,  l'au- 
tre noir,  où  les  joueurs  mettent  leurs  enjeux.  Le  ban- 
quier, jouant  d'abord  pour  la  noire,  découvre  l'une  après 
1  autre  un  certain  nombre  de  cartes.  Jusqu'à  ce  qu'elles 
aient  dépassé  le  nombro  30  et  sans  aller  au  delà  de  40 
(l'as  compte  pour  1,  les  figures  pour  iO,  les  autres  cartes 
pour  les  points  qui  y  sont  marqués  ).  La  même  opération 
a  lieu  ensuite  pour  la  rouge.  Le  point  le  plus  favorable 
est  31,  et  ensuite  celui  qui  en  approche  davantage.  Le 
banquier  double  les  mises  de  la  couleur  gagnante,  et  ra- 
masse les  enjeux  mis  sur  l'autre  couleur.  Si  le  nombre 
31  est  amené,  la  moitié  des  enjeux  appartient  au  ban- 
quier, et,  au  coup  suivant,  il  ne  court  le  risque  d'au- 
cune perte,  parce  que  les  joueurs  qui  gagnent  à  ce  coup 
retirent  simplement  leur  enjeu.  En  cas  d'égalité  dépeints, 
le  coup  est  nul.  —  Le  jeu  de  Trente-et-quarante  avait 
remplacé,  un  peu  avant  1789,  le  Pharaon  et  le  Biribi. 
La  ferme  des  jeux  l'exploita  concurremment  avec  la  Rou- 
lette. Il  est  prohibé  aujourd'hui. 

TRENTE -ET -UN,  jeu  où  l'on  se  sert,  suivant  le 
nombre  des  joueurs,  d'un  ou  de  plusieiirn  jeux  de  piquet. 
Chaque  joueur  reçoit  une  à  une  trois  caïk^s,  et,  à  chaque 
tour,  celui  qui  donne  en  retire  une.  Si  rui<.  des  joueurs  a 
dans  ses  cartes  le  nombre  31,  il  arrête  h*-  jeu;  sinon, 
chaque  joueur  échan^ii  une  de  ses  cartes  centre  une  des 
cartes  retournées,  jusqu'à  ce  que  le  jeu  doit  arrêté  :  on 
abat  alors  les  cartes,  et  celui  qui  a  le  point  le  plus  faible 
perd  un  jeton. 

TRÉON ,  voile  de  forme  carrée  que  les  navires  latins 
hissaient  pendant  le  mauvais  temps  à  la  place  de  leurs 
voiles  latines  ;  c'est  le  tref  des  vieux  documents. 

TRÉPIE,  ancien  nom  du  triangle  i^V,  ce  mot). 

TRÉPIED.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  (V  Histoire. 

TRESGHEUR,  en  termes  de  Blason,  une  des  pièces 
honorables  de  l'écu.  Il  est  fait  comme  un  filet  mis  en 
orle,  et  est  ordinairement  double. 

TRE-SETTE  ou  TROIS-SEPT  (Jeu  de),  Jeu  de  cartes 
d'origine  italienne,  ainsi  appelé  à  cause  de  l'importance 

2u*on  y  donne  aux  nombres  3  et  7.  Il  se  joue  entre 
joueurs  associés  deux  à  deux,  avec  un  jeu  entier  dont 
on  a  extrait  les  8,  les  0  et  les  10.  Le  3  est  la  carte  la  plus 
forte;  viennent  ensuite  le  2,  l'as,  le  roi,  la  dame,  le  valet, 
le  7,  le  6,  le  5  et  le  4.  Les  cartes  sont  partagées  entre  les 
)oaeurSy  qui  ea  reçoivent  cliacua  dix  en  trois  fois.  La 


partie  est  de  21  points,  qui  résultent  des  points  qa*on  t 
dans  la  main  et  des  levées  qu'on  fait  en  jouant.  Le  3,  le 

2  et  l'as  d'une  même  couleur  forment  une  napolUainef 
et  valent  trois  points.  Une  napolitaine  suivie  de  trois 
cartes  pareilles  s'appelle  calladon;  suivie  de  sept  cartes 
de  même  couleur,  elle  est  dite  calladondrùm;  l'une  et 
l'autre  font  gagner  d'emblée.  On  compte  un  point  pour 
chacune  des  cartes  ({ui  font  une  séquence  à  la  napoli- 
taine. On  marque  trois  points  pour  trois  3,  ou  trois  2,  ou 
trois  as;  4  pour  trois  sept;  1  pour  trois  rois,  ou  trois  da- 
mes, ou  trois  valets,  ou  tix>is  6,  ou  trois  5.  Trois  figura, 
de  quelque  couleur  qu'elles  soient,  valent  un  point;  les 

3  et  les  2-  comptent  comme  les  figures  et  se  mêlent  avec 
elles.  Chacun  des  as  compte  pour  un  point.  Chaque  levée 
vaut  aussi  un  point;  la  dernière  en  vaut  deux.  Si  les  as- 
sociés parviennent  au  nombre  21  avant  que  leurs  adver- 
saires aient  marqué  11,  la  partie  leur  est  p^yée  double. 

TRÉSOR  (du  latin  thésaurus)^  mot  qui  se  dit  vulfcaire- 
ment  d'un  amas  d'or,  d'argent  ou  d'autres  choses  pré- 
cieuses mises  en  réserve,  et  que  le  Code  Napoléon  définit 
«  toute  chose  cachée  ou  enfouie  sur  laquelle  personne  ne 
peut  justifier  de  sa  propriété,  et  qui  est  déoDuverte  par 
l'effet  du  hasard.  »  En  ce  dernier  sens,  le  trésor  appar- 
tient à  celui  qui  l'a  découvert  dans  son  propre  fonds; 
s'il  est  trouvé  par  un  tiers  dans  le  fonds  d'autruî,  il  est 
partagé  entre  celui  qui  l'a  découvert  et  le  propriétaire  du 
fonds.  —  Trésor  se  dit  aussi  du  lieu  où  les  choses  pré- 
cieuses sont  renfermées.  —  Le  Trésor  public  est  l'endroit 
où  l'on  renferme  les  sommes  provenant  des  impôts  et 
autres  revenus  de  l'État.  Dans  l'Antiquité,  on  donnait  le 
nom  de  Trésor  à  certaines  parties  secrètes  des  temples, 
et  à  des  temples  tout  entiers,  qui  servaient  de  trésors  pu- 
blics, comme  à  Atliènes,  par  exemple,  les  temples  de 
Jupiter  Sauveur  et  de  Plutus;  à  Rome,  le  temple  de  Sa- 
turne, etc.  —  Enfin  au  moyen  âge,  dans  certaines  églises 
cathédrales,  on  appela  aussi  Trésor  une  chambre  ou  une 
galerie  attenant  à  l'église,  et  contenant  beaucoup  d'objets 
précieux  sacrés  ou  profanes.  Le  Trésor  de  l'abbaye  de 
S^-Denis  était  célèbre  dans  ce  genre. 

TRÉSOR  (Bons  du).  V.  Bons  do  Trésor. 

TRÉSOR  (Chambre  du).  )  V^  notre  Dictionnaire  de  Bto- 

TRÉSOR  DES  CHARTES.     {      graphie  et  d'Histoire. 

TRÉSORERIE,  mot  oui  signifie  tantôt  le  Trésor  publie 
ou  même  le  Ministère  des  Finances,  comme  quand  on  dit 
en  Angleterre  les  Lords  delà  Trésorerie:  tantôt  le  mou- 
vement des  fonds  qui  appartiennent  à  l'État,  comme 
dans  ces  expressions  :  service  de  trésorerie,  opérations 
de  trésorerie,  etc. 

TRÉSORIER,  celui  qui  est  chargé  de  garder,  ou  même 
de  percevoir  ou  de  distribuer  les  fonds  d'un  souverain, 
d'un  État,  d'un  établissement  quelconque.  V.  Trésorier, 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

TRESQUE,  terme  de  Blason.  V.  Bourrelet. 

TRÊVE  (de  l'allemand  treu,  foi,  promesse),  convention 
par  laquelle  deux  parties  belligérantes  suspendent  pour 
un  temps  déterminé  les  actes  d'hostilité  sur  tous  les 
théâtres  de  la  guerre  (V.  Armistice,  Sospension  d'arues). 
Une  tréoe  marchande  est  celle  durant  laquelle  le  com- 
merce est  permis  entre  deux  États  qui  sont  en  guerre. 
On  nomme  trêve  pêcherie  la  convention  de  ne  pas  consi- 
dérer, en  temps  de  guerre,  comme  ennemis  les  navires 
qui  font  la  pêche. 

TRÊVE  DE  DIEU.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biographe 
et  d'Histoire. 

TRÈVKS  (Amphithéâtre  de),  monument  romain,  taillé 
dans  le  Marsberg,  et  déblayé  par  ordre  du  gouvernement 
prussien  en  1817.  Les  uns  en  attribuent  la  fondation  à 
l'empereur  Auguste,  les  autres  le  croient  postérieur  à 
Trajan.  Il  est  de  forme  elliptique,  et  a  75  met.  de  lon- 
gueur sur  52  de  largeur.  II  pouvait  contenir  6,000  per- 
sonnes. Des  portes  flanquées  de  tours,  et  dont  il  ne  reste 
aucune  trace,  y  donnaient  accès  au  N.  et  au  N.-E.;  on  y 
entrait  encore,  du  côté  de  la  ville,  par  deux  vomitoirei 
ou  passages  creusés  dans  le  roc  :  l'un  de  ces  passages  est 
actuellement  fermé,  l'autre  sert  de  cave.  C'est  dans  l'am- 
phithéâtre de  Trêves  cpie  Constantin,  en  306  et  en  313, 
livra  des  milliers  de  prisonniers  franks  aux  bêtes  féroces. 

TRÊVES  (La  Porte  noire,  à),  monument  romain,  situé 
au  N.  de  la  ville,  et  qui  parait  avoir  été  bâti  au  temps  de 
Constantin  le  Grand.  C'est  un  bâtiment  long  de  38  met., 
large  de  22,  haut  de  23,  construit  en  blocs  énormes  posés 
sans  ciment  les  uns  sur  les  autres,  et  qui  étaient  liés 
autrefois  par  des  crampons  de  fer  dont  on  ne  voit  plus 
aujourd'hui  que  les  morsures.  Il  a  deux  portails  et  trois 
étages,  et  est  flanqué  de  deux  tours.  Au  xi*  siècle,  Is 
partie  principale  de  ce  mopumeat  fut  transformée  eo 


TRI 


i74r> 


TRI 


6\;Iise,  en  Thonneur  d*an  anachorète  grec,  nommé  Si- 
méoQ,  qui  s*y  était  tenu  renfermé  pendant  7  ans.  A  la 
lin  du  siècle  dernier,  les  Français  en  firent  un  arsenal  et 
on  magasin.  C'est  aujourd'hui  un  musée  d'antiquités. 

TaèvES  (Cathédrale  de).  La  construction  de  cet  édifice 
appartient  à  plusieurs  époques.  Le  vaisseau  forme  un 
carré  long  divisé  en  trois  nefs.  Aux  deux  extrémités  de 
la  nef  centrale  sont  deux  absides,  occupées  par  deux 
chœurs.  Les  murs  de  la  nef,  depuis  le  chœur  de  l'Est  Jus- 
qu*&  la  hauteur  des  avantrdemiers  piliers  du  côté  de 
rOuest,sont,  dit-on,  de  construction  romaine,  et  auraient 
fait  partie  d'un  palais  d'Hélène,  mère  de  Constantin.  Le 
reste  de  l'église  date  du  xi"  siècle,  et  est  en  style  romano- 
liyzantin.  Au  xii'  on  éleva  les  deux  tours  ;  à  la  fin  du 
y  vu*',  on  accola  &  l'abside  orientale  la  Rotonde  ou  chambre 
du  Trésor.  Un  cloître  du  xin*  siècle  est  adossé  au  flanc 
méridional  de  l'église.  Outre  les  tombeaux  des  anciens 
archevêques-électeurs,  la  cathédrale  de  Trêves  contient 
beaucoup  de  reliques,  parmi  lesquelles  la  tunique  sans 
couture  de  Jteus-Christ. 

TRÉVIRB,  en  termes  de  Marine,  cordage  ployé  en 
double,  amarré  en  son  milieu  au  sommet  d'un  plan  in- 
cliné, et  servant  à  faire  rouler  sur  ce  plan  un  corps  cylin- 
drique tel  qu'une  barrique,  pendant  que  les  deux  bouts 
du  cordage,  un  peu  écartés  l'un  de  l'autre,  sont  tirés  ou 
lâchés  doucement. 

TRÉVIRS.  V,  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et 
d'Histoire. 

TRÊZALÉ,  se  dit,  en  peinture,  d'un  tableau  dont  la 
surface  est  couverte  d'une  multitude  de  petites  fentes 
ou  gerçures.  Cet  accident  est  ordinaire  aux  tableaux 
peints  à  l'huile  sur  une  impression  de  détrempe,  à  ceux 
où  l'on  a  fait  entrer  trop  d'huile  grasse,  ou  qui  ont  été 
exposés  à  l'ardeur  du  soleil. 

TRI  (Jeu  de),  jeu  composé  de  34  cartes.  Il  y  manque  le 
G  de  cœur,  le  10,  le  9  et  le  8  de  cœur,  de  trèfle  et  de 
pique,  et  tout  le  carreau,  à  l'exception  du  roi. 

TRIADE  (du  grec  trias,  nombre  ternaire),  assemblage 
de  trois  unités,  de  trois  personnes,  de  trois  divinités.  La 
Trimourti  des  Indiens  (Brahma,  Vichnou,  Siva)  était  une 
triade.  La  mythologie  égyptienne  contenait  un  grand 
nombre  de  triades,  composées  chacune  d'un  Dieu,  de  son 
épouse  et  de  leur  fils;  le  Jeune  Dieu  de  ces  triades  pre- 
nait le  nom  de  Peschère  ou  PekrotUi  (enfant,  rejeton), 
qu^on  retrouve  dans  celui  d'Harpocrate  ou  Harpekroti, 
désignant  Horus  enfant.  La  triade  thébaine,  composée 
d'Ammon,  de  Mouth  et  de  Khons,  était  manifestée  sur  la 
lerre  par  une  autre  triade,  Osiris,  Isis  et  Horus,  d'où  déri- 
vait une  troisième,  Horus,  Isis  et  Malouli.  Dans  la  ville 
d'Hermonthis,  on  adorait  une  triade  formée  de  Mandou, 
iUtho  et  Harphré;  à  Edfou,  Har-Hat,  Athôr  et  Harsont- 

I  ho  ;  à  Esnèh,  Knouphi3,Néith  et  H&ké;  à  Ombos,  Serak- 
Pia,  Athôr  et  Khons-Hor,  Aroéris,  Tsonénoufré  et  Pnevtho  ; 
à  Mcmphis,  Phtba,  Bouto  ou  Ma,  et  Phré  ou  Ra  (le  Soleil). 
Ciiez  les  Grecs,  il  y  avait  la  triade  de  Jupiter,  "Neptune  et 
Pluton,  celles  des  Grâces,  des  Parques,  des  Furies,  etc. 

TRIAGE  (Droit  de),  privilège  en  vertu  duçiuel  les  sol- 
deurs possédaient  autrefois  le  tiers  des  biens  commu- 
naux. 

TRIAIRE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

TRIAL.  V.  TÉNOR. 

TRIANGLE,  instrument  de  musique  en  acier,  construit 
comme  la  figure  appelée  triangle,  et  dont  on  joue  en  le 
frappant  intérieurement  avec  une  verge  de  même  métal. 

II  produit  un  bon  efiTet  dans  la  musique  militaire,  où  il 
n'unit  aux  autres  instruments  de  percussion  ;  on  l'emploie 
aussi  dans  quelques  airs  de  danse.  Selon  Athénée  (iv,  23], 
il  est  d'origine  syrienne;  au  moyen  &ge,  on  l'appelait 
tripie, 

TRIANON.  V,  Versailles,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

TRIBANAU,  nom  que  l'on  donne  en  gallois  à  certaines 
poésies  morales  dont  l'origine  remonte  aux  temps  drui- 
diques, et  qui  sont  partagées  en  couplets  de  trois  vers 
liés  par  la  même  rime.  Le  mot  revient  à  notre  mot  tercet. 

TRIBONION  (du  grec  trt&dn,  usé,  vieux),  nom  qu'on 
donnait  au  manteau  brun  ou  noir,  souvent  râpé  et  dé- 
chiré, que  les  philosophes  grecs  portaient  par  ostentation. 

TRIBORD  ou  STRIBORD,  cèté  droit  d'un  navire,  en 
regardant  de  l'avant  à  l'arrière.  Le  mot  est  une  corrui^ 
tion  de  dextribord,  côté  droit,  ou  de  styrbord  ou  star- 
board,  t^té  du  gouvernail,  parce  qu'autrefois  le  gouver- 
nail était  à  droite.  V,  Bâbord. 

TRIBRAQUE  (du  ^rec  treis,  trois,  et  brahhus,  bref), 
pied  de  la  versification  grecque  et  latine,  composé  ce  ' 


trois  brèves,  comme  UnèniÔs  en  grec,  et  Hntmii  en  latin. 
On  l'appelle  aussi  Brachysyllabe.  Ce  pied,  étant  l'équiva- 
lent de  l'ïambe  C  -,^  ^  ^)  et  du  trochée (" '^,'^  ^  '^), 
entrait  comme  substitution  dans  les  vers  lambiques  et 
trochaiques.  P. 

TRIBU.  V.  Tribus,  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogro 
phie  et  d'Histoire. 

TRIBULE.  F.  Chaussb-trappb. 

TRIBUN.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  BiO' 
graphie  et  d'Histoire. 

TRIBUNAL,  nom  donné,  chez  les  Romains,  au  siège 
du  haut  duquel  les  tribuns  rendaient  la  justice.  Il  ne 
s'entend  plus  que  du  siège  et  de  la  juridiction  d'un  ou  de 

{plusieurs  magistrats.  En  France,  on  distingue,  suivant 
a  nature  des  matières  qu'ils  ont  à  ju^r,  les  tribunaux 
de  simple  police,  correctionnels,  civils,  criminels,  les 
tribunaux  de  commerce,  les  tribunaux  administratifs, 
les  tribunaux  maritimes:  —  suivant  le  degré  de  juri- 
diction, les  tribunaux  de  4^  instance,  les  tribunaux 
dappelf  anc.  Coure  impériales,  et  la  Cour  de  cassation* 
Les  Tribunaux  se  classent  encore  en  ordinaires  et  e3> 
traordinaires  ou  exceptionnels.  Les  tribunaux  ordinaires 
sont  ou  temporaires,  comme  les  Cours  d'assises,  ou  jper> 
manents,  comme  les  tribunaux  de  simple  police,  les  jus^ 
tices  de  paix,  les  tribunaux  de  i'«  instance  civils  et  correo- 
tionnels,    les  Cours  d'appel  et  h  Cour  de  cassation* 
Les  tribunaux  extraordinaires  sont  les  ConseiU  de  guerre, 
les  tribunaux  maritimes,  la  Haute  Cour  de  Justice,  les 
Conseils  de  discipline,  les  Conseils  de  prud'hommes,  le 
Conseil  de  l'Instruction  publique,  etc. 

tribunal    civil  ou   de   PREWlfeRB   INSTANCE,  Juridlctlon 

établie  dans  chaque  arrondissement  pour  toutes  les  af- 
faires civiles  et  correctionnelles  qui  ne  sont  pas  spéciale- 
ment attribuées  à  d'autres  tribunaux.  Au  civil,  il  connaît 
des  affaires  civiles,  et  même  des  affaires  de  commerce 
quand  il  n'y  a  pas  de  tribunal  de  commerce  dans  l'ar- 
rondissement; de  toutes  les  difficultés  d'exécution  des 
jugements  rendus  par  les  juges  de  paix,  les  arbitres,  les 
tribunaux  de  commerce;  de  celles  qui  naissent  des  con- 
damnations civiles  prononcées  par  les  tribunaux  correc- 
tionnels. Il  juse  en  premier  et  en  dernier  ressort  les 
affaires  mobilières  et  personnelles  jusqu'à  1,500  fr.  de 
principal,  les  affaires  i^Iles  ou  mixtes  dont  l'objet  prin- 
cipal est  60  fr.  de  revenu,  les  affaires  où  les  parties  ont 
consenti  à  être  jugées  sans  appel,  enfin  les  fautes  de 
discipline  des  officiers  ministériels.  Une  des  Chambres 
dont  se  compose  le  tribunal  juge  en  matière  correction- 
nelle (F.  Police  correctionnelle).  Les  fonctions  du  mi- 
nistère public  sont  exercées  dans  chaq[ue  tribunal  par 
un  procureur  ds  la  Rép.on  par  un  substitut.  Il  y  a,  près 
chaque  tribunal,  un  gveilier  et  des  commis  greffiers. 

tribunal  de  com^ERGE.  V.  Commerce  (Tribunal  de). 

TRIBUNAL  criminel.  V.  ASSISES  (Cour  d'). 

TRIBUNAL  MARITIME.   V.  MARITIMES  (TribunaUX). 
TRIBUNAL  MIUTAIRE.  V.  GUERRB  (CoUSeil  de). 
TRIBUNAL  DE  POLICE.    V.  POUCB. 

TRIBUNAT  FRAKgAIS.  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio^ 
graphie  et  d'Histoire. 

TRIBUNE.  V.  Rostres,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^Histoire. 

TRIBUNE,  un  des  noms  donnés  anciennement  à  l'abside 
des  basiliques  ;  —  lieu  élevé,  muni  d'une  balustrade, 
d'où  le  re^rd  domine  dans  toute  une  église. 

TRIBUNE  (Éloquence  de  la).  V.  Politique  (Éloquence). 

TRIBUNITIENNE  (Puissance).  V.  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

TRIBUT  (du  latin  tribr^um,  fait  à^tribuere,  accorder), 
mot  qui  désignait,  chez  les  anciens  Romains,  l'impOt  pu- 
blic, et  qui  signifie,  gour  les  Modernes,  la  redevance  en 
argent  ou  en  nature  qu'un  État  paye  à  un  autre,  comme 
signe  de  dépendance. 

TRICËRION.  V.  Dic^RiON,  dans  notre  Dictionnain  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TRICHORIE  (du  grec  treis,  trois,  et  koros,  choeur^, 
danse  lacédémonienne,  ainsi  nommée  de  ce  Qu'elle  étais 
exécutée  par  trois  chœurs,  représentant  les  trois  âges  de  li 
vie,  l'enfance,  la  jeunesse  et  la  vieillesse,  marchant  dan:i 
cet  ordre.  Les  vieillards  commençaient  et  chantaient  : 

KOQS  arons  été  Jadis 
Jeunes,  vaillants,  et  hardis. 

Les  jeunes  gens  ou  hommes  faits, par  l'Antiquité  compfp 
nait  dans  la  jeunesse  ce  que  nous  appelons  la  force  dé 
r&ge,  répondaient  : 

Nous  le  sommes  mabitananl 
A  rèpreuTC  à  tout  venant. 

il) 


TRT 


17^fi 


TRI 


Rnftn  Im  enfants  dilatent  à  leur  ton.: 

Et  won»  va  jour  le  leronf 
Qqi  M«a  tou  nirpaMeroM. 

La  Triehorie  avait  été  inventée  par  Tyrtée  ;  on  la  chan- 
tait dans  pres<[ue  toutes  les  fêtes  de  Sparte. 

TRIGINIUM,  dans  la  basse  latinité,  chant  à  3  parties. 

TRlCLINiUM.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

TRIC0M08.  K.  CoHos. 

TRICTRAC.  Jen  dont  le  nom,  formé  par  onomatopée, 
rend  asses  bien  le  bruit  que  font  des  dés  agités  dans  un 
cornet  et  Jetés  sur  un  tablier  de  bois.  En  allemand  on 
rappelle  bretspiel  (Jeu  de  tables),  en  italien  tavoliere, 
en  espagnol  tablas  reaies,  en  portugais  jof70  de  tabolas. 
11  se  Joue  à  deux  personnes,  sur  un  tablier  divisé  en  deux 
grands  compartiments  carrés,  que  sépare  une  eloisoii 
moins  haute  que  les  ttords.  De  chaque  côté  dos  bords 
•ont  19  petits  trous  garnis  d'ivoire,  dans  lesquels  on  place 
un  liehêi  chaque  fois  que  Ton  a  gagné  1S  points;  24  flè- 
ches, de  deux  couleurs  difTérentes,  sont  incrustées  sur  le 
fond  noir  du  tablier,  et  opposées  pointe  à  pointe.  Chaque 
Joueur  a  15  dames  d'une  couleur  particulière;  empilées 
d'abord  à  sa  gaucho,  elles  descendent  une  à  une  ou  deux 
^  deux  à  chaque  coup  de  dé.  Par  exemple,  si  les  dés  ont 
amené  5  et  ti,  on  a  la  faculté  d'abattre  du  bois,  c.-à*d. 
de  placer  deux  dames  sur  les  flèches  correspondant  aux 
numéros  5  et  6,  ou  d'abattre  une  seule  dame  sur  le  nu- 
méro 11,  ou  d'avancer  dans  la  mémo  progression  une  ou 
deux  dames  déjà  casées.  On  Joue  généralement  la  partie 
•ni)  trous.  Las  règles  et  les  combinaisons  du  trictrac 
sont  trèoovariéea  ;  les  jans  ou  coups  ont  reçu  des  déno- 
minations bisarrea,  grand  jan,  pettt  jan^  eontre-ian,  jan 
de  rvlotir,  jan  de  méséas,  etc.  Le  double  as  se  nomme 
beset  ou  ambesas ;  le  double  trois,  terne:  le  double  quatre, 
earme;  le  double  cinq,  quine;  le  double  six,  sonneM;  le 
double  deux  est  innommé.  Le  Jeu  de  trictrac  était  connu 
des  Anciens  I  les  Grées  l'appelaient  Diagrammismos, 
et  les  Romains  Duodena  soripta;  la  dénomination  de  jan 
vient  peut*ètre  de  ee  que  les  Romains  l'avaient  placé  sous 
la  protection  de  Jan  us.  Il  fut  en  grande  vogue  au  temps 
de  Louia  XIV,  mais  la  mode  en  passa  sous  la  Régence, 
-^  Il  existe  bien  des  variétés  de  trictrac  :  ainsi,  le  /oc- 
fU0l,  le  Reoertiêr,  le  Too,  le  Baok^ammon  ou  Toutes 
tables,  ete. 


TRIDENT. 

TRIKNNADX. 

TRIEN8, 

TRIKRARQUE. 

TRIÉTÈRIDE. 


r.  ces  mots  dans  notre  Dictionn<iire 
de  Biographie  et  d'Histoire^ 


TRIFORIUH,  mot  imaginé  par  les  antiquaires  anglais 
pour  désigner  la  galerie  qui  s^étend  au-dessus  des  bas 
côtés  d'une  église,  parce  qu'elle  s'ouvre  communément 
sur  la  nef  par  trois  arcades  {très  fores).  Il  n'est  ni  heu- 
reusement trouvé,  ni  très-Juste.  Le  triforium,  partie 
essentielle  des  basiliques  anciennes,  est  rare  dans  les 
églises  romano-byzantines  du  xi' siècle;  il  y  est  seule* 
ment  indiqué  par  des  arcades  aveugles.  Au  xii*  siècle,  il 
reprit  des  proportions  plus  vastes,  et  les  conserva  dans 
certains  monuments  de  la  période  ogivale,  comme  à 
Notre-Dame  de  Ch&lons,  à  Laon,  à  Paris,  etc.,  tandis  que 
dans  d'autres  il  fut  une  simple  galerie  de  passage,  tantôt 
aveugle,  tantôt  éclairée.  V,  Galerif. 

TRIGE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
phie  et  d'Histoire, 

TRIGÉMINKE  (Baie),  baie  subdivisée  en  six  parties. 

TRIGLÈNE,  pierre  précieuse  dont  on  faisait  des  boucles 
d'oreilles  chez  les  Anciens.  On  ne  sait  ce  qu'elle  était.  On 
suppose  qu'elle  était  une  onyx  à  plusieurs  couches  con- 
centriques de  couleurs  différentes  et  qui  offraient  l'appa- 
rence de  la  prunelle  de  l'œil  (en  grec  glènè\, 

TRIGLYPHB  (du  grec  treis,  trois,  et  glyphè,  gravure, 
rainure),  ornement  quadrilatéral  saillant,  placé  à  des  dis- 
tances égales  sur  la  frise  dorique,  entre  les  métopes 
{V,  ce  mot).  Il  présente  sur  la  face  deux  cannelures  ou 
rainures  verticales,  appelées  glyphes  ou  canaux,  et,  sur 
les  côtés,  deux  demi-cannelures,  ce  qui  en  fait  trois.  Les 
triglyphes  représentent  l'extrémité  des  poutres  trans- 
versales posées  sur  l'architrave. 

TRÏGONALE.  V,  Ballb,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

TRIGONE  (du  grec  trets,  trois,  et  ^dnta,  angle),  nom 
que  les  Anciens  donnaient  à  une  cithare  de  forme  trian- 
gulaire, inventée,  dit-on,  par  les  Phrygiens,  et  qu'on  ap- 
pelait aussi  Samùuquê. 


TRIHÉMIMËRE.  V.  Césvslb, 

TRIHÉMITON,  nom  donné  par  lei  anciens  Grecs  | 
l'intervalle  musical  de  tierce  mineure. 

TRTHORI,  ancienne  danse  française. 

TRILITHB8.  V,  Gbltiqubs  (Monuments). 

TRILLE  (de  l'italien  trUlo,  tremblement),  agrément 
musical  consistant  en  une  succession  rapide  et  alterna- 
tive de  deux  notes.  On  dit  qu'il  était  depuis  longtemps  es 
usage  sur  les  instruments,  lorsqu'un  chanteur  de  laclis- 
pelle  pontlflcale,  Lucas  Gonforti,  imagina,  en  1591,  de  le 
pratiquer  avec  la  voix  :  le  trille,  longtemps  appelé  im- 
proprement cadence,  était  indiqué,  sur  la  musicrue  écrite 
ou  gravée,  par  la  lettre  t,  comme  aujourd'hui  par  ir. 
L'abus  des  trilles  est  une  preuve  de  mauvais  goût. 
V.  Battehent,  Diable  (Cadence  du).  B. 

llilLOBÉ,  en  termes  d'architecture,  qui  a  trois  lobes. 

TRILOGIE ,  nom  donné  ches  les  anciens  Grecs  à  une 
réunion  de  trois  pièces  dramatiques  représentées  dans  la 
même  séance  théâtrale,  et  généralement  liées  entre  elles 
par  l'analogie  plus  ou  moins  étroite  des  sujets.  C'est  ainsi 
qu'on  désignait  psr  le  nom  collectif  d*Orestie  VAgamem- 
non.  Us  Coéphores  et  les  Euménides  d*Esehyle.  Dans  sa 
comédie  les  Femmes  aux  Thesmophories,  Aristophane 
parle  d'une  autre  trilogie  d'Eschyle  intitulée  Lvcurgie,ùh 
le  poète  avait  dramatiquement  développé  les  divers  inci- 
dents de  la  lutte  du  roi  de  Thrace  Lycurgue  contre  les 
sectateurs  du  culte  oriental  de  Bacchus,  qu'on  essayait 
alors  d'introduire  dans  les  pays  de  l'Occident  :  elle  com- 

f prenait  les  pièces  intitulées  leêldones,  les  Bassaridet  et 
es  Jeunes  gens.  Lorsqu'à  la  trilogie  tragique  on  ajoutait 
un  drame  satyrique,  cet  ensemble  prenait  le  nom  do  70- 
tralogie  (  V,  ce  mot).  —  Quelques  dialogues  de  Platon 
présentent  aussi  l'apparence  de  trilogies;  tels  sont  la  Ré- 
publique, le  Timée^  le  Critias,  d'une  part;  «t,  de  l'autre, 
le  Théétète,  le  Sophiste,  le  Politique.  P. 

TRIMÈTRE,  vers  grec  et  latin  do  trois  mesures  ou  di- 
podies  {V,  ce  mot}.  Il  y  a  des  trlmètres  ïambiques,  tro- 
chaïques,  anapesltques,  etc.  Pour  les  vers  dactyliques, 
ohontambiques,  ioniq%tes,  le  mot  trimètre  désiane,  non 
pas  trois  dipodies,  mais  trois  pieds  {V.  ces  àifférents 
mots).  P. 

TRIMOURTI.  V.  ee  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  ^Histoire. 

TRINCADOURES,  nom  donné  à  des  péniches  espagnoles 
qui  font  le  service  de  garde-côte  dans  le  golfe  de  Biscaye. 

TRINGLE,  moulure  plate  qui  termine  le  triglypheà  sa 
partie  inférieure. 

TRINITÉ  (du  latin  tnnuf,  triple),  mot  qal  désigne, 
dans  la  Théologie  chrétienne,  le  mystère  d'un  seul  Diea 
en  trois  personnes,  le  Père,  le  Fils  et  le  8'» Esprit.  Il 
représente  l'unité  de  trois  personnes  divoraea,  distin- 
pniéos  réellement,  et  l'identité  d'une  nature  indivisible. 
C'est  un  dogme  fondamental.  —  Les  artistee  du  moyen 
àgc  ont  imaginé  diverses  représentations  de  la  Trinité: 
c'(;st  d'abord  une  main  placée  au-dessus  de  Jésus  cru- 
cifié, qu'elle  bénit,  et  dont  elle  est  séparée  par  la  co- 
lombe, emblème  de  l'Esprit  saint.  Ensuite,  c'est  un 
vieillard  portant  l'enfant  Jésus  sur  ses  genoux,  et  lais- 
sant échapper  vers  lui  une  colombe.  Ou  bien  le  Christ 
en  croix  est  entre  les  genoux  du  Père,  de  la  bouche 
duquel  la  colombe  s'échappe  avec  le  souffle.  Sur  la 
voûte  d'une  chapelle  latérale,  à  l'église  de  Saint-Pol- 
de-Léon,  une  peinture  représente  trois  faces  humaines 
n^.unies  par  le  front,  ayant  un  nei  et  une  bouche 
chacune,  mais  trois  yeux  seulement  pour  le  tout;  on 
réunit  à  volonté  les  yeux  deux  à  deux,  pour  chaque  face 
prise  isolément.  En  plusieurs  lieux  de  la  Picardie,  la 
Trinité  est  représentée  tantôt  par  deux  tètes  humaines 
ayant  trois  yeux,  tantôt  par  deux  tètes  avec  des  ailes. 
On  l'a  figurée  encore  par  trois  poissons  à  une  tète,  par 
un  triangle,  par  trois  cercles  entrelacés.  Dans  un  ma- 
nuscrit du  XV*  siècle,  conservé  à  la  Bibliothèoue  impé- 
riale de  Paris,  trois  hommes  en  tunique  sont  rimage  de 
la  Trinité  :  au  centre,  le  Saint-Esprit  est  bous  la  figure 
d'un  Jeune  homme  sans  barbe,  avec  un  nimbe  surmonté 
d  une  colombe;  à  sa  droite,  le  Père  ost  coiffé  do  la  tiare 
<a  porte  un  globe  surmonté  d'une  croix  ;  à  sa  gauclie, 
Jésus-Christ  tient  sa  croix.  F.  au  SupplémemU 

TRINQUART  (de  l'espagnol  tnncar,  trancher),  petit 
bàtimhnt  léger  dont  on  se  Bert  dans  la  Manche  pour  la 
pèche  du  hareng. 

TRINQUET,  nom  donné  dans  la  Méditerranée  an  mât 
de  misaine  des  blttimenta  gréés  en  voiles  triangulaim 
ou  latines. 

TRINQDBT.  V.  PaUVB. 

TniNQUF.rrE.  V.  Foc 


TRI 


i7n 


TRO 


TRINUNDINUM .  V.  ce  mot  dans  notre  DklwnnairB  de 
Biographie  et  d'HisUnre, 

TRIO,  morceau  de  musique  à  trois  parties  concertantes 
de  voix  ou  d'iDstrament3.  Il  peut  èlre  accompagné  par 
d^autres  parties,  peu  obligées,  sans  cesser  d^ètre  trio. 
Les  trios  de  Viotti,  de  Kreutser  et  de  Balllot  pour  le 
violon  ne  sont  à  proprement  parler  que  de  belles  sonates, 
accompagnées  d*un  second  violon  et  d'un  violoncelle. 
Mozart  et  Beethoven  en  ont  composé  de  très-beaux  pour 
piano,  violon  et  violoncelle.  Les  trios  d'instruments  à 
vent  font  peu  d'effet.  C'est  dans  l'opéra  bouffe  que  Lo- 
groscino  fit  le  premier  essai  du  trio  d'opéra,  vers  1750. 
Il  y  a  des  trios  célèbres  dans  le  Maritige  secret  de  Gima- 
rosa,  dans  Vltaiienne  à  Alger,  dans  la  Pie  voleuse  et 
dans  Guillaume  Tell  de  Rossini.  —  On  appelle  aussi  trio 
la  â*  partie  d'un  menuet  ou  scherzo  de  symphonie,  après 
laquelle  on  reprend  le  morceau  principal.  B. 

TRIODION,  nom  donné,  dans  l'Église  grecque,  au 
livre  de  chant  qui  contient  le  Commun  des  Saints. 

TRIOLET,  petite  pièce  de  huit  vers,  dont  le  i»  se  ré- 
pète après  le  3*,  et  le  i*'  et  le  â*  après  le  6*  <  en  sorte 
que,  de  ces  huit  vers,  il  v  en  a  trois,  le  1*',  le  4*  et  le  1\ 
qui  ne  sont  qu*un  seul  et  même  vers.  C^est  de  cette 
triple  répétition  que  ce  genre  de  poème  est  appelé  triolet. 
Le  mélange  des  rimes  n'est  pas  déterminé.  L'idée  qui 
forme  le  fond  du  triolet  doit  être  agréable  et  gracieuse  ) 
il  faut  que  les  refrains  paraissent  ramenés  sans  effort,  et 
plus  par  agrément  que  par  néousité.  Voici  un  Joli  triolet 
jle  Ranchin,  podte  peu  connu  : 

Le  premier  Jour  du  mois  de  m») 
Put  le  plus  heureux  de  ma  vie  : 
Le  beaq  dessein  que  |c  formai 
Le  premier  Jour  du  mois  de  waI  \ 
Je  vous  via,  et  Je  vous  ^Imal. 
$i  ce  dessein  tous  plut,  Sylvie, 
Le  premier  Jou^  du  mois  de  mai 
Fut  le  plus  benreux  de  su  vlo. 

thiolet,  en  termes  de  Musique,  groupe  de  trots  notes 
pour  deux. 

TRIOMPHALE  (Voie).   )    t^    „^.^   n,v.*.v.«««,v^  ^. 

TRIOMPHATJBUK.  \J^^ ,^^^}^^re  de 

TRIOMPHE.  )      ^*<>9^<*9h^  «*  dlU^stwre. 

TR10MPHB  (Arc  de).  V.  Ane  de  moiiPH». 

THioifPHB  (La)i  Jeu  de  cartes  qui  se  Joue  eomme 
l'écarté  (K.  ce  mol)'^  seulement  en  nV  écMte  pas,  et  l'on 
ne  compte  pas  de  point  pour  le  roi.  —  Dans  certains 
Jeux,  la  couleur  de  la  retourne,  ou  atoui,  se  nomme 
triomphe. 

TRIOMPHÉS  (Psaumes  ou  Cantiques),  nom  que  l'on 
donnait  autrefois  à  certains  psaumes  ou  o^ntiques,  tels 

?ue  le  Bilagnifioa^j  le  Beneduitus,  le  Cogii  enarranty  le 
xiudate  Dominumf  le  Dominus  regfMvii,  etc.,  lorsque 
entre  chaque  vereet  on  répétait  l'antienne,  en  tout  ou  en 
partie.  C'était  une  marque  de  solennité. 

TRIPET,  vieux  mot  désignant  une  sorte  de  gobelet. 

TRIPH01RË,  vieux  mot  synonyme  dHncrusté. 

TB1PHONE,  instrument  de  musique  en  forme  de  cla- 
vecin droit,  inventé  en  1810  par  un  certain  Weidner,  de 
Fraustadt.  Pour  en  jouer,  on  mettait  des  gants  dont  les 
doigts  étaient  enduits  de  colophane  pulvérisée,  et  l'on 
frottait  les  cordes  de  haut  en  bas.  Le  son  du  triphone 
était  agréable,  et  ressemblait  à  celui  de  la  flûte. 

TRIPHTHONGUE  (du  grec  treis,  trois,  et  phthoggos, 
son),  syllabe  composée  de  trois  sons  qu'on  fait  entendre 
en  une  seule  émission  de  voix  ;  par  exemple,  eau.  Les  mots 
oui,  lieUf  yeuXf  bien  qu'écrits  avec  trois  voyelles,  sont 
des  dipbthongues,  parce  qu'ils  font  entendre  deux  sons. 

TRIPITAKA.  y.  iNDiEims  (Littérature). 

TRIPLE  CANON.  V,  Cahagtbbbs  n'utpatMERiB. 

TRIPLES  (  Fêtes),  degré  de  festivité  dans  certains  dio- 
cèses catholiques,  placé  au-dessous  du  Solennel,  11  y 
avait  le  triple  de  4^  classe  et  le  triple  de  ^  classe.  Le 
mot  parait  être  venu  de  ce  qu'on  disait  trois  fbis  les  an- 
tiennes du  Benedictus  et  du  Magnificat ,  la  i'*  avant  le 
cantique,  la  2*  avant  le  Gloria  Patri,  la  3*  après  le 
Sicut  erat. 

TRIPLET,  groupe  de  trois  ienêtres,  placé  assez  corn- 
abunément  aux  façades  des  églises  du  XIII*  siècle.  II  a  une 
signification  symbolique:  c'est  l'eniblème  de  la  Trinité. 
Une  archivolte  couronnant  les  trois  fenêtres  signifie 
Tunité  dans  la  Trinité.  Quelquefois  une  rosace  à  4  ou  5 
divisions  est  placée  au-dessus  du  triplet,  comme  emblème 
de  la  couronne  qui  ceint  le  front  du  Roi  des  rois. 

TRIPLUM ,  nom  donné  au  contre-point  à  trois  parties, 
c.-À-d.  au  d^c^rnt  à  trois  voix.  Francon  de  Cologne  est  le 


premier  qui  en  a  défini  les  règles.  Quand' en  voulait  tain 
un  triplum ,  on  ne  devait  pas  perdre  de  vue  le  ténor  et  le 
déchant  {V.  oe$  fitolf),  et  s*arranger  de  manière  que  si 
la  troisième  voix  discordait  avec  le  ténor,  elle  concordât 
avec  le  déchant,  et  réciproquement.  11  fallait  ensuite  que 
le  triplum  procédât  par  concordances,  tantôt  en  montant 
avec  le  ténor,  tantôt  en  descendant  avec  le  déchant.  F.  C 

TRIPOT  (du  latin  IriptMitui» ,  Vépignement ,  saut), 
mot  qui  signifiait  originairement  un  jeu  de  paume,  et  qui 
ne  désigne  plus  qu'une  maison  de  jeu  clandestine,  un  lieu 
de  mauvaise  compagnie. 

TRIPTYQUE,  mot  d'origine  greeqne  qui  signifie  triple 
ou  plié  en'H'oia,  et  par  lequel  on  désigne  une  tablette 
divisée  en  trois  parties,  dont  les  deux  latérales  se  replient 
sur  celle  du  milieu.  Beaucoup  de  triptyques,  représen- 
tant en  relief  des  sujets  sacré»,  ont  été  portés  au  cou  en 
guise  d'amulettes  ou  de  phylactères.  11  en  existe  un  assez 
grand  nombre  qui  furent  exécutés  par  des  artistes  bysan* 
tins.  Pendant  longtemps  les  tableaux  d'église  furent  en 
forme  de  triptyques. 

TRIQOE.  V.  CoLLiBB. 

TRIQUBTRA.  V.  SidUBiffiB  (Numismatique). 

TRIRÈGNE ,  nom  donné  quelquefois  à  la  tiare. 

TRIRÈME,  y,  ee  mot  dans  notre  ùéctionnmre  de  Bi9» 
graphie  et  (JtHistotre. 

TRISTAN  DE  NANTEUIL.  F.  le  Suppiément. 

TRISTAN  DU  LÉONAIS,  un  des  chevaliers  de  la*|U>le 
ronde,  héros  d'un  grand  nombre  de  romans,  soit  en  vers, 
soit  en  prose.  Le  siyet  du  roman  roule  sur  les  amours 
adultères  de  Tristan  du  Léonais  et  d'Iseult  d'Irlande, 
femme  du  roi  Marc.  Le  roman  de  Tristan  passe  pour 
le  chef-d'œuvre  des  romans  de  la  Table  ronde  :  c'est 
un  des  thèmes  qui  ont  le  plus  exercé  les  poètes.  L'ou- 
vrage le  plus  ancien  sur  Tristan  fût  écrit  en  latin,  el 
traduit  en  prose  française  par  Luce  du  Gast.  Cette  tra* 
duction  fut  imprimée  pour  la  première  fois  ii  Rouen 
en  1489,  et  traduite  elle-même  dans  toutes  les  langues 
de  l'Europe.  Chrétien  de  Troyes  avait  composé  un  ro- 
man en  vers  Du  rot  Mam  et  dtYselt  ta  Blonde,  et 
Ton  a  ora  lonp:temp8  que  le  poème  en  vers  sur  Tristan, 
que  l'on  savait  exister  en  Angleterre,  était  l'œuvre  de 
notre  trouvère  :  on  y  a  reconnu  depuis  tous  les  caractères 
de  la  littérature  anglo^normande,  et  Ton  suppose  ^ue 
c'est  l'œuvre  d'un  poète  anonvme  de  la  ooup  de  Henri  11 
ou  de  Henri  Hl.  Les  manuscrits  du  Tristan  en  prose  sont 
nombreux  à  la  Bibliothèque  nationale  \  le  Tristan  en 
vers  appartient  à  la  bibliothèque  d'un  bibliophile  anglais, 
M.  Douce.  —  Quant  à  la  morale  de  ces  récits,  où  pas  un 
mot  de  blâme  n^t  prononcé  contre  la  femme  adultère  et 
parjure,  où  le  mari  est  toujours  ridicule,  où  ceux  qui 
veulent  défendre  son  honneur  sont  des  traîtres,  elle 
pourrait  donner  une  triste  idée  des  cours  du  xiu*  siècle. 
M.  Francisque  Michel  a  publié  le  Ikcueit  des  poëmes  de 
Tristan,  1835  et  1848, 3  vol.  V.  Histoire  tUtéraire  de  la 
France,  t.  XIX.  H.  D. 

TRITAGONISTB ,  3«  acteur  de  la  tragédie  grecque  pri- 
mitive. C'est  ordinairement  une  puissance  étrangère  et 
invisible,  qui  fait  agir  le  Protagoniste  ou  le  héros  et  est 
l'auteur  de  ses  souffrances. 

TRITON.  V.  QvARTB. 

THiîrîîvÎRè^'  /  V,  ces  mots  dan»  notre  |>tc*w#*»atrs 

TRIVIUM  )      ^*  Biographie  et  d'Histoire. 

TROCHAIQUE  (Césure),  r.  Césorb. 

TROCHAîQUE  (Nomo).  F.  NOVB. 

TROCHAîQUE  (Vors),  vors  grec  et  latin  composé  de  tro- 
chées, ou  dont  le  trochée  fait  la  base.  11  se  scande  par  di- 
podies.  Il  pouvait  être  monomètre,  dimètre,  trimètre, 
tétramètre,  pentamètre.  La  dernière  syllabe  est  indiffé- 
rente. Le  monomètre  ne  s'employait  que  comme  clausule 
d'un  système.  —  Le  dimètre  est  très-usité  dans  le  théâtre 
grec  ;  on  n'en  trouve  d'exemples,  parmi  ce  qui  nous  reste 
de  pièces  latines,  que  chez  les  auteurs  de  la  décadence, 
Boèce,  par  exemplow  II  admet  comme  substitution  le  tri- 
braque  aux  pieds  impairs.  Les  comiques  en  faisaient 
quelquefois  le  pied  final.  Le  dactyle  n'était  admis  que 
dans  les  noms  propres.  —  Le  trimètre  est  inusité  dans  le 
thé&tre  grec,  et  il  ne  nous  en  reste  d^xemples  latins  que 
chez  les  grammairiens,  qui  ne  citent  ppint  les  auteurs,  et 
les  ont  probablement  forgés  sur  quelque  patron  grec.  — 
Le  tétramètre  était  inusité  dans  les  tragédies  et  comédies 
d'Athènes  ;  mais  il  est  fréquent  chez  les  comiques  latins, 
non  pas  cependant  sous  sa  forme  pure  :  Us^y  admettent 
des  substitutions  de  pieds  avec  une  licence  extrême;  le 
spondée,  le  dactyle,  le  tribraque^  Faoapeste,  s'y  reacoa- 
trent  parfois  de  la  manière  la  plus  déréglée. 


TRO 


1748 


TRO 


Les  formes  catalectiques,  brachycatalectiqucs,  hyper- 
catalectiques  de  ces  différents  vers  sont  d'un  grand  usage. 
Le  monomètre  caialectique  ne  sert  que  de  clausule,  et  se 
confond  avec  le  crétique.  Le  monomètre  hypercataleo- 
tiqttê  ne  sert  également  que  de  clausule  :  le  spondée  peut 
y  être  substitué  au  2*  trochée.  —  Le  dimètre  brachycor 
talectiqite  n*est  autre  que  Tithyphallique.  Il  ne  s'emploie 
pas  seul,  et  sert  souvent  de  clausule.  Lorsque  le  dimètre 
catalectique  admet  le  dactyle  ou  le  spondée  au  2*  lieu , 
il  se  confond  avec  le  glyconique  et  le  phérécratien.  Se- 
nèque  offre  quelques  exemples  de  dimètres  hypercai^ir 
lectiques,  avec  le  spondée  au  2«  et  au  4*  lieu ,  ou  avec  le 
spondée  aux  2«  et  3*  pieds  et  Tanapeste  au  4^  —  Le  tri- 
mètre  brachycatcUecttqw  est  le  vers  saphique  avec  sub- 
stitution du  spondée  au  2*  lieu ,  du  dactyle  au  3*^,  et  le 
▼ers  phalécien  lorsque  le  spondée  est  au  1*'  pied,  le  dac- 
tyle au  2*.  Le  trimètre  catalectique  admet  les  mêmes 
substitutions  que  le  saphique,  mais  se  présente  souvent 
pur.  Le  trimètre  hypercatiUectique  reçoit  le  dactyle  au 
2*  lieu,  le  spondée  au  4*,  au  5*  et  au  6*.  —  Le  tétramètre 
hrachycatcuectique  se  trouve  quelquefois  au  théâtre  :  il 
admet  Tanapeste  pour  les  noms  propres.  Le  tétramètre 
catcUectique  est  fort  usité  chez  les  tragiques  et  les  co- 
miques. On  y  remarque  une  césure  après  la  2*  dipodie; 
les  longues  y  sont  fréquemment  résolues  en  brèves  aux 
pieds  impairs,  surtout  lorsqu'il  y  a  une  préposition  ou  des 
monosyllabes  étroitement  unis  ;  le  spondée  est  fréquent 
aux  lieux  pairs,  particulièrement  au  2*  et  au  4*  ;  le  dac- 
tyle se  trouve  quelquefois  aux  lieux  impairs,  surtout 
lorsqu'il  y  a  un  nom  propre.  Sénèque  suit  à  peu  près 
constamment  ces  règles  du  trochaique  grec  :  mais  il 
admet  aussi  Tanapeste.  On  le  retrouve  encore  assez  pur 
dans  l'hymne  d'église  attribuée  à  S^  Bernard,  Ponge  linr- 
giia,  où  l'on  remarque  la  rime  concurremment  avec  la 
mesure  prosodique.  Les  comiques  latins  se  sont  donné 
les  plus  grandes  licences  dans  la  composition  de  ce  vers, 
au  point  de  le  défigurer  quelquefois  :  ainsi,  le  7«  pied, 
où  ils  maintiennent  d'ordinaire  le  trochée  qui  a  disparu 
des  autres  pieds,  présente  souvent  un  tribraque.  Ce  vers 
est  quelquefois  asynartète  (V.  ce  mot).  Les  îambographes 
faisaient  usage  d'un  tétramètre  scason,  c.-à-d.  boiteux, 
parce  que  le  7*  pied  avait  un  spondée  au  lieu  d'un  tro- 
chée. —  On  trouve  dans  Gallimaque  des  pentamètres  ca^ 
talectiques,  ayant  par  conséquent  9  pieds  et  demi.      P. 

TROGHÉ,  vieux  mot  désignant  un  assemblage  de 
pierres  précieuses  et  de  perles  en  boutons,  en  fleurs,  etc. 

TROCHÉE ,  pied  de  la  versification  grecque  et  latine, 
formé  d'une  longue  et  d'une  brève  :  têlà.  C'est  l'inverse 
de  l'ïambe;  mais  il  a,  comme  lui ,  pour  équivalent  le  tri- 
braque. Ce  dernier  nom  lui  est  même  quelquefois  donné 
par  les  Anciens,  Cicéron  et  Quintilien  entre  autres.  Tro- 
chée signifie  proprement  vif  et  rapide  comme  le  mouve- 
ment d'une  roue  {trokhos)j  et  on  le  traduisait  exactement 
en  latin  par  le  mot  rotatilis.  Ce  pied  était  fréquemment 
employé  dans  les  airs  de  danse  animés  et  dans  les  mar- 
ches militaires.  Le  trochée  remplace  très -souvent  le 
spondée  final  de  l'hexamètre  héroïque.  Il  entre  dans  la 
composition  de  certains  mètres  Ijrriqucs  avec  le  rhythme 
(lesquels  il  peut  s'accorder.  Il  fait  la  base  du  mètre  iro- 
chaî(|ue,  termine  les  vers  crétiques  catalectiqucs,  peut 
terminer  l'adonique,  etc.  Dans  l'hexamètre  héroïque,  par- 
ticulièrement en  grec,  il  fait  césure  après  le  2"  pied  : 


It  proni  dont  Icra  j  :  rolat  vl  feryldas  axit. 


P. 


TROCHILE.  V,  ScoTiB. 

TROCHISQUES.  V.  Couleurs. 

TROCHLI^ON,  instrument  de  musique  inventé  par 
Dietz  en  1814.  Il  était  de  forme  ronde;  ses  touches  mé- 
alliçiues  étaient  mises  en  vibration  par  un  archet  cir- 
ulaire  qu'une  pédale  faisait  mouvoir. 

TROCHUS.  K.  notre  Dîct.  de  /Uugr.  et  d'Histoire. 

troïka,  voiture  russe  attelée  do  trois  chevaux. 

'i  ROILUS  (Légende  de).  K.  au  Supplément. 

TROIS  (Le  nombre).  Daûs  l'Antiquité,  ce  nombre  était 
mystérieux  et  en  quelque  sorte  fatidique.  L'empire  de 
l'Univers  était  partagé  entre  trois  dieux,  Jupiter,  Neptune 
et  Pluton;  il  y  avait  trois  Grâces,  trois  Parques,  trois 
Furies,  trois  Harpies,  trois  Gorgones,  trois  Sibylles,  etc. 
Diane  était  au«^i  une  triple  déesse  sous  le  nom  d'Hécate. 
—  Dans  les  cérémonies  sacrées,  le  nombre  trois  était 
sacramentel  :  les  victimes  d'un  sacrifice  étaient  promenées 
trois  fois  autour  de  l'autel.  Les  superstitieux  se  cra- 
chaient trois  fiiîs  dans  le  sein  pour  détourner  un  maléfice. 

TROIS  CHAPITRES  (Les).  V.  notre  Dictionnaire  de 
Bwgrapfueet  d^Htstotre, 


TROIS-MATS ,  terme  générique  par  lequel  on  désigne 
les  navires  à  voiles  carrées  qui  ont  un  grand  mit,  un  aùi 
de  misaine  et  un  m&t  d'artimon. 

TROIS-PONTS,  b&timent  de  guerre  de  la  plus  grande 
dimension,  qui,  indépendamment  de  laesrcasse,  contient 
3  ponts  ou  étages  de  canons. 

TROIS-SEPT  (Jeu  de).  V.  Trb-seite. 

TROITZA  (Couvent  de).  V.  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d  Histoire, 

TROMBA,  nom  italien  de  la  trompette. 

TROMBLON.  V.  EspmooLB. 

TROMBONE,  sorte  de  grande  trompette  composée  de 
quatre  branches  ou  tuyaux  emboîtés  les  uns  dans  les 
autres,  et  qu'on  allonge  ou  raccourcit  à  volonté,  tout  en 
la  jouant,  au  moyen  d'une  pompe  à  coulisse,  pour  pro- 
duire les  différentes  notes,  données  toutes  en  sons 
ouverts.  Si  l'on  veut  quitter  la  marche  diatonique ,  la 
pression  des  lèvres  suffit,  comme  dans  le  cor  et  la  trom- 
pette, pour  faire  résonner  la  tierce,  la  quinte  ou  Toctave 
du  ton  sur  lequel  on  s'est  arrêté.  Lo  trombone  a  trois 
dimensions,  qui  correspondent  à  trois  étendues  de  son 
différentes  :  le  trombone-cUto^qm  est  en  fa;  le  trombont 
ténor,  en  si  bémol  ;  et  le  trombone  basse,  qui  est  à  l'oc- 
tave inférieure  de  l'alto.  La  musique  s'écrit  pour  le  l^'sur 
la  clef  d'ut  3*  ligne,  pour  le  2*  sur  la  clef  d'ut  4*  ligD^ 
pour  le  3*  sur  la  clef  de  Ai,  4*  ligne.  Ces  trois  trombone^ 
s'emploient  presque  toujours  ensemble  k  l'orchestre  et 
dans  la  musique  militaire.  Ils  sont  surtout  bien  plac^ 
dans  les  symphonies,  les  ouvertures,  les  chœurs  guerriers 
et  religieux,  les  marches  triomphales.  Leur  son,  qu'on  ne 
peut  soutenir  longtemps,  est  plus  sec,  plus  dur  et  plus 
énergique  que  celui  de  l'ophicléide  ;  il  a  des  effets  propres, 
et  qui  ne  ressemblent  à  ceux  d'aucun  autre  instrument. 
On  emploie,  dans  la  musique  militaire,  un  trombone  d'une 
espèce  particulière,  appelé  buccin  (F.  ce  mot).  —  Le  trom- 
bone nommé  autrefois  saqiiebute  est  originaire  d'Allema- 
gne, où  on  l'appela  posaune.  II  fut  indxKiuit  en  France 
par  Gossec,  qui  le  fit  entendre  pour  la  première  fois  en 
1773,  dans  son  opéra  des  Sabines.  Il  possède,  à  l'extrémité 
inférieure  de  son  échelle ,  quatre  notes  énormes ,  dites 
pédales,  et  isolées  des  autres  par  une  lacune  d'une  quarte 
augmentée  :  au  moyen  d'un  piston  adapté  au  coips  de 
l'instrument,  et  que  l'exécutant  fait  mouvoir  avec  le 
pouce  de  la  main  gauche  en  conservant  la  liberté  de  son 
bras  droit  pour  agir  sur  la  coulisse,  le  facteur  Sax  a 
comblé  cette  lacune,  et,  ajoutant  ainsi  au  trombone  les 
cinq  demi-tons  qui  manquaient  à  sti  première  octave 
grave,  lui  a  donné  l'étendue  de  trois  octaves  et  demif. 
Il  existe  des  Méthodes  de  trombone  par  Braun,  Frœlirh, 
Schiitz,  Vimeux,  Berr  et  Dieppo,  etc.  —  Le  trombone  à 
pistons,  imaginé  de  nos  Jours,  se  prête  mieux  aux 
inflexions  de  la  mélodie  que  ie  trombone  à  coulisse;  mais 
il  a  moins  d'énergie.  B. 

TROMPE,  en  termes  d'Architecture,  portion  de  votktc 
en  saillie,  servant  à  porter  l'encoignure  d'un  bâtiment 
ou  toute  autre  construction  qui  semble  se  soutenir  en 
l'air;  telle  est,  par  exemple,  à  l'église  S*-Sulpîce  de 
Paris,  la  demi-tour  qui  contient  la  chapelle  de  la  Vîen:i\ 
en  saillie  sur  la  rue  Garancière.  On  nomme  trompe  de 
voûte  une  pierre  ronde  faisant  partie  des  voussoirs  d'uue 
niche  ;  trompe  en  niche,  une  trompe  concave  en  forme 
de  coquille  ;  trompe  en  tour  ronde,  une  trompe  dont  le 
plan,  sur  une  ligne  droite,  rachète  une  tour  ronde  par  le 
devant,  et  qui  est  faite  en  forme  d'éventail;  trompe  sur 
le  coin,  celle  qui  porte  l'encoignure  d'un  b&timent; 
trompe  dans  Vangle,  celle  qui  est  dans  le  coin  d'un  angle 
rentrant. 

TROMPE ,  nom  donné,  pendant  le  moyen  ftge,  non  pas  à 
la  trompette  proprement  dite,  mais  à  une  trompette 
longue  que  les  Grecs  appelaient  strombos.  Puis  on  l'ap- 
pliqua au  cornet  à  bouquin  (K.  ce  mot).  On  ne  connaît 
plus  aujourd'hui  que  la  trompe  de  chasse,  impropre- 
ment nommée  cor  de  cîuisse,  instrument  en  cuivre 
inventé  en  1680.  Malgré  le  peu  de  justesse  et  le  son 
rauque  de  quelques-unes  de  ses  notes,  l'éclat  et  la  force 
de  sa  sonorité  la  rendent  très-propre  à  l'emploi  qu'on  en 
fait  à  la  chasse.  La  trompe  est  en  ton  de  ré;  la  musique 
qu'on  écrit  pour  elle  est  toujours  en  ut. 

TROMPE-L'GEIL,  nom  donné  à  des  tableaux  où  cer- 
tains objets  sont  représentés  avec  une  vérité  qui  fait 
illusion.  On  connaît  l'histoire  des  raisins  de  Zeuxis,  que 
les  oiseaux  vinrentbecqueter,et  celle  du  rideau  de  Par- 
rhasius,  qui  trompa  Zeuxis  lui-même.  Le  Baasan  peignit 
sur  un  tableau  un  livre  avec  tant  de  vérité,  qu'Annibal 
Carrache  y  porta  la  main  pour  le  nreoifTe;  celul-ci  re- 
présenta un  cheval,  dont  la  vue  m  hennir  un  cheval 


TUO 


1749 


7m 


?ivant.  Jean  Rosa,  peintre  de  Técole  romaine,  peignit 
des  lièvres  qui  attirèrent  des  chiens.  Des  paons  se  mirent 
à  becqueter  un  fraisier  que  Bernazzano  avait  peint  dans 
une  basse-cour.  Jean  Contarino  fit  un  portrait  si  ressem- 
blant, que  des  chiens  et  des  chats  le  prirent  pour  leur 
maître,  et  vinrent  le  caresser.  Le  buste  d'un  abbé  peint 
par  Ch.  Coypel,  découpé  et  placé  deiTière  une  table,  pro- 
duisait une  illusion  telle,  que  plusieurs  personnes  le 
saluèrent.  Gennari  et  Bramantino  furent  aussi  très-ha- 
biles à  exécuter  des  trompe-rœil.  Les  peintures  en  gri- 
sailles de  la  grande  salle  de  la  Bourse  de  Paris  sont  des 
trompe-rœil.  Enfin  les  Panoramas  sont  la  plus  vaste  ap- 
plication que  Ton  ait  faite  des  peintures  en  trompe-rœil. 

TROMPETTE,  en  italien  tromba,  instrument  de  mu- 
sique à  vent.  C'est  un  tube  droit  en  cuivre,  sans  trous  ^ 
ni  clefs,  à  petit  pavillon,  et  avec  lequel  on  produit  des 
sons  différents  par  la  pression  plus  ou  moins  forte  des 
lèvres  sur  l'embouchure.  La  trompette,  employée  d'abord 
seulement  pour  les  fanfares  de  la  cavalerie,  puis  admise 
dans  les  orchestres,  sonne  une  octave  au-dessus  du  cor,  et 
peut,  comme  lui,  changer  ses  intonations  au  moyen  de 
tubes  additionnels,  qui  permettent  d'allonger  le  corps  prin- 
cipal de  l'instrument  ;  mais  elle  n'a  cfue  des  sons  ouverts, 
et  sa  qualité  de  son  est  plus  argentine,  plus  claire,  plus 
pénétrante.  La  musique  pour  trompette  est  toujours  notée 
en  ton  d'ut  et  sur  la  clef  de  sol.  Les  parties  de  trompettes 
qu'on  voit  dans  les  opéras  de  Lulli  offrent  des  diffîcultés 
surprenantes;  mais  c'étaient  des  trompettes  à  trous, 
dont  le  P.  Mersenne  nous  a  laissé  la  description.  Au 
commencement  de  notre  siècle,  on  a  fait  des  trompettes 
semi-circulaires,  (^ui  n'étaient  à  proprement  parler  que 
de  petits  cors  ;  mais  leur  son  n'avait  pas  le  même  éclat, 
et  l'on  ne  tarda  point  à  les  abandonner.  Le  clairon 
{V.  ce  mot)  est  une  sorte  de  trompette.  11  existe  des  Mé- 
thodes de  trompette  par  Âltenburg,  Leroy,  BQhl,  etc.  — 
On  a  fait  de  nos  jours  des  trompettes  à  coulisse,  conser- 
vant le  son  strident  de  la  trompette  ordinaire,  tout  en 
donnant  la  possibilité  de  produire  d'autres  notes,*  elles 
ont  été  inventées  par  Legeran.  —  Les  Anciens  ont  connu 
la  trompette,  et  ils  ont  eu  de  cet  instrument  bien  des 
variétés,  dont  il  est  difficile  aujourd'hui  de  préciser 
les  différences.  Jl.eB  noms  de  plusieurs  de  ces  trom- 
pettes, clariOf  claro,  clarasius,  ne  témoignent  que 
de  l'éclat  de  leurs  sons.  D'autres  noms,  taurea,  cor- 
nix,  scUpinx,  indiqueraient  plutôt  leurs  formes  :  on 
sait,  en  effet,  que  les  pavillons  des,  trompettes  repré- 
sentaient ici  une  tète  de  taureau,  là  '  une  tète  d'oiseau , 
ailleurs  une  tôte  de  serpent.  La  cornix  était  appelée 
trompette  gauloise  ou  celtique  ;  la  taurea,  trompette 
paphlagonienne.  La  trompette  argienne  était  droite ,  et 
Végyptienne  recourbée.  Chez  les  Romains,  la  tiiba  était 
la  trompette  droite;  le  lituus  avait  l'extrémité  recourbée. 

TROiffPEiTB  A  CLEFS,  instrument  de  musique  à  vent, 
dont  l'inventeur,  l'Anglais  Halliday,  au  commencement 
du  XIX*  siècle,  croyait  faire  un  perfectionnement  de  la 
trompette  droite,  mais  qui  est  en  réalité  un  instrument 
nouveau,  dont  le  timbre  et  la  qualité  de  son  ont  peu 
d'analogie  avec  ceux  de  cette  trompette.  Halliday  nomma 
son  instrument  bugle-hom,  d'où  l'on  a  fait  simple- 
ment bugle.  11  en  existe  des  Méthodes  par  Schiltz,  par 
Baissières-Faber,  etc. 

TROMPETTB  (Jeu  de),  un  des  jeux  d'anche  de  l'orgue. 
Ses  tuyaux  sont  coniques,  et  en  étain  fin  ;  il  a  2  mètres 
60  centibi.  (8  pieds).  Ce  jeu,  l'un  des  plus  brillants  et 
des  plus  éclatants  de  l'orgue,  et  auquel  on  donne  toute 
l'étendue  du  clavier,  sonne  à  l'unisson  du  huit-pieds 
ouvert,  et  parle  une  octave  plus  haut  que  la  bombarde. 
Les  grandes  orgues  ont  deux  et  quelquefois  trois  trom- 
pettes sur  le  même  clavier;  on  en  met  aussi  une  dans  le 
positif.  Quand  on  se  sert  de  ce  jeu  à  la  pédale,  il  prend 
le  nom  de  pédale  de  trompette;  il  doit  alors  avoir  plus 
d'étendue  dans  les  basses  que  les  autres  trompettes  :  il 
descend  jusqu'à  VF  ut  fa  du  ravalement,  ce  qui  donne  à 
son  tuyau  une  hauteur  de  3  mètres  90  centim.  (12  pieds). 
Le  jeu  de  trompette  employé  au  clavier  de  récit  est 
nommé  trompette  de  récit;  on  le  fait  alors  de  toute  l'é- 
tendue du  clavier.  F.  C. 

TROMPETTB  MARINE,  ancien  instrument  de  musique, 
consistant  en  une  caisse  de  bois  triangulaire,  sur  l'une 
des  faces  de  laquelle  s'étendait  une  grosse  corde  de 
boyau  soutenue  par  un  chevalet.  On  en  jouait  en  pres- 
sant la  corde  avec  le  pouce  de  la  main  gauche,  et  en  fai- 
sant agir  de  la  droite  un  archet  pour  la  faire  vibrer  avec 
une  plaque  de  verre  ou  de  métal  collée  à  la  table.  Le  son 
avait  de  l'analogie  avec  celui  qu'on  tire  de  la  conque  du 
mollusque  appelé  Triton. 


TROMPETTE  PARLANTE,  uom  douné  quelquofois  au  porte* 
voix  dont  on  se  sert  en  mer. 

TROMPILLON,  en  termes  d'Architecture,  pierre  qui 
sert  de  base  à  une  trompe,  et  en  forme  pour  ainsi  dire  la 
clef. 

TRONC,  nom  donné  quelquefois  par  les  architectes  au 
fût  d'une  colonne,  et  à  la  partie  d'un  piédestal  qui  est 
entre  la  base  et  la  corniche. 

TRONC ,  coffre  en  bois  qu'on  place  dans  les  églises  pour 
recevoir  les  aumônes  des  fidèles.  Cet  usage  ne  remonte 
pas  en  France  au  delà  du  xu*  siècle. 

TRONCHINE ,  robe  que  les  dames  du  xyiii»  siècle  se 
faisaient  faire  pour  les  promenades  du  matin  ordonnées 
par  le  médecin  Tronchin. 

TRONE  (du  grec  thronos)^  siège  élevé  où  les  souve- 
rains prennent  place  dans  les  occasions  d'apparat.  On  y 
monte  ordinairement  par  plusieurs  degrés,  et  il  est  sur- 
monté d'un  dais.  Chez  les  anciens  Grecs,  le  trône  ne 
dovint  un  attribut  de  la  royauté  que  dans  les  temps  pos- 
térieurs à  Alexandre;  jusque-là  on  l'avait  réservé  aux 
Dieux. 

TRÔNE  éPISCOPAL.    V,  ChAIRB  ÉPISCOPALE. 

TRONES  (Les).  T.  Anges. 

TROPAIRE,  nom  donné,  dans  l'Eglise  grecque,  à  un 
livre  contenant  des  mélanges  d'hymnes,  de  répons  et 
d'antiennes. 

TROPE,terme  de  Rhétorique.  V.  Figdrb. 

TROPE,  en  termes  de  liturgie,  désignait  autrefois  toute 
partie  intercalée  dans  une  pièce  de  plain-chaut,  pour  en 
développer  ou  en  expliquer  le  texte.  On  regarde  les  traî- 
nées de  notes  sur  la  dernière  syllabe  des  Kyrie  comnui 
dos  tropes  dont  les  paroles  ont  été  retranchées.  —  Trope 
a  été  encore  synonyme  de  mode  ou  ton  d'église. 

Z^9SJ?^^^r,    I  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 

TROTTOIR^ chemin  élevé  de  0"%20  environ  au-dessus 
de  la  voie  publique,  et  qu'on  pratique  le  long  dc:) 
rues,  des  quais  et  des  ponts,  autour  des  places  publi- 
ques, pour  la  commodité  et  la  sécurité  des  piétons.  Les 
trottoirs  étaient  connus  des  Anciens  :  on  en  voit  ^  Pf»«*  - 
péi.  Le  peu  de  largeur  des  rues  et  la  multitude  des  voi- 
tures empêchèrent  longtemps  d'en  établir  dans  les  villes 
modernes  :  les  premiers  trottoirs  furent  faits  à  Londres 
vers  le  milieu  du  xvni*  siècle.  L'exemple  ne  fut  suivi  à 
Paris  qu'au  commencement  du  xix*,  sous  l'administra- 
tion du  préfet  Chabrol  de  Volvîc  :  on  dalla  d'abord  les 
trottoirs  en  lave  poreuse  de  Volvic  (Puy-4e-Dôme),  puis , 
comme  cette  lave  n'était  pas  assez  dure,  on  lui  substitua 
les  granits  de  Normandie;  on  employa  aussi  la  tuile,  les 
cailloux  roulés,  la  brique  posée  de  champ  ;  aujourd'hui 
l'on  se  sert  beaucoup  d'asphalte  étendu  sur  un  lit  de 
béton,  ou  de  petits  pavés  de  grès,  avec  bordure  de  gra- 
nit ;  mais  la  meilleure  construction,  et  la  plus  fréquem- 
ment employée  à  Paris,  est  la  dalle  de  granit.  La  loi  du 
17  juin  1845  permet  de  déclarer  d'utilité  publique  l'éta- 
blissement de  certains  trottoirs,  et  de  mettre  à  la  charge 
des  propriétaires  riverains  la  moitié  de  la  dépense. 

TROUBADOURS  (du  provençal  troubar,  trouver,  in- 
venter), poètes  qui  ont  employé  la  Langue  d*oc  (V.  ce 
mot)  pendant  le  moyen  âge.  L'institution  des  Trouba- 
dours est  d'origine  celtique.  En  effet,  leur  caractère  était 
grave,  et  fort  éloigné  de  cette  fadeur  que  l'ignorance 
leur  a  prêtée  depuis  :  on  s'aperçoit,  en  lisant  leurs  poé- 
sies, que  ce  caractère  était  précisément  celui  des  Bardes 
bretons,  dont  le  rôle  était  si  important  auprès  des  rois 
celtes,  et  dont  le  rang  et  les  privilèges  sont  réglés  par  un 
titre  spécial  du  Code  du  roi  Hoël.  Sans  ce  caractère  qui 
eut  certainement  quelque  chose  de  sacré  à  l'origine,  où 
les  Troubadours  auraient-ils  puisé  la  hardiesse  de  leurs 
sirventes  satiriques  {V,  Si rv ente)?  L'ivresse  avec  la- 
quelle ils  chantent  la  poésie  des  combats,  l'enthousiasme 
avec  lequel  ils  font  l'éloge  des  braves,  les  amers  sar- 
casmes dont  ils  poursuivent  les  couards,  sont  autant  de 
traits  communs  aux  Troubadours  et  aux  Bardes,  et  qui 
doivent  faire  regarder  les  premiers  comme  les  descen- 
dants des  seconds.  L'Origine  germanique  de  quelques 
Troubadours,  tels  que  Bertrand  de  Born,  n'est  pas  \xn^ 
objection  :  les  conquérants  adoptèrent,  on  le  sait,  plus 
d'une  institution  des  peuples  conquis.  —  La  poésie  n'a 
pas  fleuri  dans  tout  le  Midi  de  la  France  avec  la  même 
grâce,  le  même  éclat;  la  Guionne,  TAuvergne  et  surtout 
le  Limousin  ont  produit  les  premiers  et  les  meilleurs 
Troubadours.  Quand  on  embrasse  dans  son  ensemble  le 
développement  général  de  cette  poésie,  on  y  distingue 
cinq  écoles  ou  centres  littéraires  pr:iiripa*.ix,  nn^quclt 


TRO 


1750 


TRO 


eorrespondetit  autant  de  groupes  de  poStes.   L*j 
d'Aquitaine  se  subdivise  en  t  !•  École  lÂmousine, 


VEcoîe 
à  la- 
quelle appartiennent  Guillaume  de  Poitiers,  Bertrand  de 
fiom,  Gftuoelm  Faydit,  Elias  Cairels  de  Sarlat,  Bernard 
de  Ventadour,  Elias  d*Ussel,  Hugues  de  Saint-Cyr,  Gas- 
pard de  Puycibot,  G.  de  Borneilh,  Gir.  de  Salignac, 
Hugues  de  La  Bachellerie;  2®  École  de  Gascogne,  dont 
font  partie  Geoffroy  Rudel,  Arnaud  Daniel,  Elias  de  Bar- 
Jols.  RamoDd  Jordan,  Gir.  de  Calanson,  Arnaud  de  Mar- 
Teilh,  Aymar  de  Belvezer,  Marchebrusc,  Amanieu  des 
Escas,  Gercamons,  Elias  Fonsalada,  Gaubert  Amiels , 
Guillaume  de  La  Tour;  3^  École  de  Saintonge,  où  Ton 
Toit  Savarie  de  Mauléon,  Renaud  de  Pons,  Richard  du 
Barbesieux.  —  VÊcole  d\iuvergne  comprend  :  Pons  de 
Capdueil,  P.  du  Yemègue,  Guilhem  de  Saint-Didier, 
Bertrand  de  La  Tour,  Peirols,  Pierre  de  Maensac,  Pierre 
Pelissier  de  Mardi,  Pierre  Roger  de  Clermont,  Guilhem 
Adhémar  de  Marvis,  Gavaudan  le  Vieux,  Pierre  d'Auver- 
gne le  Vieux,  Perdigon,  Pierre  Cardinal,  la  dame  Castel- 
loze,  Garins  d'Apchier,  Garins  Le  Brun,  Gaubereau  dr>. 
Saintr-Leydier,  le  moine  de  Montauday,  le  vicomte  de 
Turenne.  —  A  r^co(«  de  Bodes  appartiennent  Arnaud  de 
Montcuc,  Deudes  de  Pradesen,  le  comte  de  Rodez,  et 
Hugues  firunec. — VÉcole  de  Languedoc  se  subdivise  en  : 
1^  École  de  Toulouse,  où  Ton  remarque  G.  Leroux,  Peyre 
Remond  le  Preux,  Aymar  de  Pégnilem,  Peyre  Vidal  ^ 
Guillaume  Anelier,  Nat.  de  Mons;  2°  École  de  Narbonne, 
comprenant  Raymond  de  Mirevaux,  Guillaume  de  Ba- 
laun,  Guillaume  Fabra^  Guillaume  Riquier;  3<*  École  de 
Béziers,  que  représentent  Raimond  Gaucelm  et  Ermen- 
gaud.  —  Dans  Y  École  de  Provence,  on  distingue  :  i^  les 
Provençatêao  projMrement  dits,  Raoul  de  Gassin,  Bertrand 
d'AlIamanon,  Raimbaud  d'Orange,  Ouill.  de  Montagna- 
goût.  Gui  de  Cavaillon,  Folquet  de  Marseille,  Raimbaud 
de  Vaqueiras,  Durand  de  Paernes,  Ricard  de  Noves,  Ca- 
denet,  Guilhem  Flguières,  Geofl^y  du  Luc,  Anselme  du 
Mostier,  Bertrand  de  Pezars,  Arnaud  de  Coutignac,  Ray- 
mond de  La  Tour,  Guillaume  de  Bargemon,  Rostang 
Berengnier,  Hugues  de  Loubières,  Pierre  de  SainV-Rem^ 
Bonifaco  de  Gastellane ,  Albertet  de  Bisteron,  Bertrand 
de  Marseille,  Guilhem  des  Amalric,  Raymond  Vidal, 
Raoul  Bistort;  ^'^  VÊcole  de  Vienne,  représentée  par 
Ogiert  de  Saint-Donat  et  Folquet  de  Romans;  3°  VÉoole 
de  Montferrat,  à  laquelle  appartient  Raymond  de  Va* 
queiras.  F.  PaovKNÇALi  (Littérature],  et  les  ouvrages 
suivants  :  Galvani,  08sen)azioni  sulïa  pœsia  de*  Tro* 
vadori,  Modène,  4830;  Gidel,  Let  Troubadours  et  Pé^ 
trarque,  1857,  fn^».  E.  B. 

TROUBLE ,  en  termes  de  Jurisprudence,  interruption 
faite  à  quelqu'un  dafts  sa  possession.  Il  y  a  trouble  de 
fait,  quand  on  nuit  par  action  au  possesseur,  par  exemple 
en  faisant  labourer  ou  ensemencer  la  môme  terre,  en  ré- 
coltant les  fruits,  ou  en  empêchant  le  possesseur  de  le 
faire  ;  trouble  de  droit,  lorsque,  sans  ftdre  obstacle  à  la 

{possession  de  fait,  on  empêche  qu'elle  ne  ioit  utile  pour 
a  prescription,  comme  quand  on  fait  signifier  quelque 
acte  au  possesseur  pour  interrompre  sa  possession.  Le 
propriétaire  ou  bailleur  est  tenu  d'indemniser  le  loca- 
taire ou  fermier  troublé  dans  sa  jouissance  {Code  NapoL. 
art.  1725-26). 

taoufiLi  Ou  TRDBLB,  filet  en  forme  de  poche,  monté  sur 
un  cercle  ou  un  ovale,  traversé  par  une  perche  qui  en 
forme  le  manche,  et  avec  lequel  on  pèche  le  long  des 
rivages  en  troublant  l'eau.  Un  troubleau  est  une  petite 
trouble. 

TROU  DE  CHAT,  nom  donné,  dans  la  Marine,  aux  ou- 
vertures qui  se  trouvent  des  deux  côtés  intérieurs  des 
hunes  de  mftt  d'un  grand  bâtiment,  et  par  lesquelles  pas- 
sent les  hommes  qui  montent  au  haut  du  mftt«  Les  An-' 
glais  disent  trou  du  lâche,  parce  que  les  jeunes  gens  pas-' 
sent  timidement  par  là* 

TROU  DE  LOUP,  nom  donné,  dans  l'Art  militaire, 
aux  excavations  qu'on  fait  sur  trois  rangs  autour  d'une 
redoute,  pour  en  rendre  les  approches  plus  difficiles  à 
l'infanterie  et  impraticables  à  la  cavalerie. 

TROU-MADAME,  jeu  d'adresse  auquel  on  joue  aven 
de  petites  boules  d'ivoire,  qu'on  tAche  de  pousser  dans 
des  ouvertures  en  forme  d'arcades  plantées  sur  une  table 
et  marquées  de  différents  chiffres. 

TROUSSEAU  (de  l'allemand  tross,  bagage],  ensemble 
des  effets  d'habillement  qu'une  fille  reçoit  de  ses  parents 
on  se  mariant.  D'après  l'ancien  Droit  coutumier  de  la 
France,  les  filles  mariées,  quand  elles  étaient  appelées  à 
la  succession  de  leurs  père  et  mère,  devaient  rapporter 
leur  trousseau  à  la  masse  de  la  succession.  Le  Cooe  iVo- 
|K)/0on  décide  que,  si  le  U'ousseau  est  estimé  une  certaine 


somme  par  le  contrat  de  mariage,  cette  somme  ûdt  parti* 
de  la  dot  et  en  partage  les  priviléoes. 

TROUSSES,  nom  qu'on  donnait  autrefois  à  de  largci 
chausses. 

TR0US30UÈRE,  vieux  mot  qui  désignait  l'agrafe  ser- 
vant à  relever  une  robe. 

TROUVÈRES.  K.  ce  mat  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire, 

TROUVÉS  (Enfants,   Objets).  V.  Entants,  Obiets 

TROOViiS. 

TROYES  (Éstlise  de  S^-Pibrrb,  à),  église  cathédrale, 
l'une  dee  plus  belles  de  la  Champagne ,  commencée  en 
1208,  et  achevée  seulement  en  1492.  L'abside,  le  chœur  et 
les  chapelles  absidales  sont  en  style  ogival  primitif;  le 
transçpt  et  quelques  piliers  de  la  nef,  en  style  secon- 
daire ;  la  nef,  les  chapelles  accessoires  et  le  portail  prin- 
cipal, en  style  tertiaire.  Un  ouragan  renversa  en  13^ 
un  clocher  qui  s'élevait  au  centre  de  la  croisée.  Les  fon- 
dements du  grand  portail  et  des  tours  furent  jetés  en 
1506,  et  Martin  Cambiche,  de  Beau  vais,  fut  chargé  do 
cette  construction,  que  poursuivirent  après  lui  Jean  de 
Soissons  et  Jean  BaïUy.  Tous  les  membres  résistants  et 
épais  de  la  construction  sont  en  matériaux  petits,  iné- 
gaux, de  mauvaise  qualité  { les  fondations  sont  composées 
uniquement  de  mauvais  râble  et  de  débris  de  craie;  les 
meneaux,  corniches  et  colonnes  sont  seuls  en  pierre  de 
taille;  les  voûtes  sont  en  craie.  L'extérieur  de  la  cathé- 
drale de  Troyes,  bien  qu'inférieur  dans  l'ensemble  à  celui 
de  plusieurs  autres  monuments  religieux,  ne  manqus 
ni  de  grandeur  ni  de  richesse.  L'abside,  avec  ses  arcs- 
boutants  et  ses  contre-forts  couronnés  de  clochetons  py- 
ramidaux, est  d'un  effet  pittoresaue.  Une  balustrade  en 
forme  de  créneaux  règne  autour  du  comble.  Les  flancs  de 
l'édifice  sont  obstrua  en  plusieurs  endroits.  Le  portail  du 
transept  méridional  et  les  voûtes  du  chœur  ont  dû  être 
reconstruits  de  nos  jours.  Le  grand  portail,  divisé  à  sa 
partie  inférieure  en  trois  portiques  à  voussures  pro- 
rondes,  séparés  par  des  contre-forts  solides,  offre  toute  la 
richesse  de  décoration  qui  caractérise  l'art  voisin  de  la 
Renaissance.  l\  a  53"  de  largeur  et  33"  de  hauteur.  La 
rose  flamboyante  peut  soutenir  la  comparaison  avec  les 
plus  belles.  Une  seule  tour,  celle  du  Nord,  a  été  achevée, 
en  1648;  elle  atteint  une  élévation  de  64";  elle  est  car- 
rée, et  présente  des  tourelles  de  10™  au  sommet  de  deux 
de  ses  angles.  Son  étage  supérieur,  terminé  par  un  cou* 
ronnement  corinthien,  est  en  désaccord  avec  le  reste  de 
l'édifice.  Le  portail  du  croisillon  septentrional,  construit 
au  XIII*  siècle,  est  divisé  horizontalement  par  des  balus- 
trades en  trois  étages  :  le  porche,  une  colonnade  ogivale 
formant  fenêtres,  et  une  rose  de  style  rayonnant.  Il  a 
pour  pignon  terminal  un  pan  de  bois  recouvert  d'ardoises 
et  tout  à  fait  disgracieux.— L'intérieur  de  l'église,  à  5  nefs, 
tout  badigeonné  en  1770,  se  distingue  par  la  richesse  de 
la  perspective  et  l'élégance  des  formes  t  la  longueur  totale 
dans  œuvre  est  de  iSO  met.  environ  ;  la  largeur,  au  tran- 
sept, de  48  met.  \  la  hauteur  sous  voûte,  de  30  met.  Lss 
piliers  sont  flanqués  de  légères  colennettes  destinées  à 
supporter  les  retombées  des  voûtes;  autour  de  l'abside, 
ce  sont  de  grandes  colonnes  mohocylindriques  accompa- 
gnées de  deux  colon  nettes  qui  ne  leur  sont  réunies  que 
par  les  bases  et  les  chapiteaux  :  sur  ces  derniers  s'élève 
un  faisceau  de  trois  oolonnettes  appliquées,  qui  soutien- 
nent les  voûtes  du  sanctuaire,  et  dont  le  fût  est  inter- 
rompu par  des  dais  hexagonaux  recouvrant  autrefois  des 
statues.  La  galerie  ou  triforium  est  à  claire-voie.  Les 
fenêtres  qui  éclairent  la  cathédrale  de  Troyes  sont  larges, 
divisées  en  quatre  compartiments  par  des  meneaux  que 
surmontent  des  roses  à  six  feuilles,  et  garnies  de  magni- 
fiques verrières  de  toutes  les  époques.  Les  vitraux  des 
roses  du  transept  sont  également  très-remarquables.  Les 
chapelles  absidales  sont  admirables  de  tous  points,  sui^ 
tout  celle  de.  la  S'*  Vierge;  les  chapelles  des  coUatémux 
sont  moins  grandes,  et  attirent  peu  l'attention  par  leur 
architecture.  B. 

movas  (Église  8^  Pantal^ôn,  à),  édifice  construit  en 
style  de  la  Renaissance,  et  commencé  en  1527.  Le  portail 
seul  est  du  xvui*  siècle.  L'intérieur  de  cette  église  est 
digne  d'intérêt.  Les  piliers  qui  soutiennent  les  voûtes 
sont  ornés  de  dais  richement  sculptés,  abritant  des  sta- 
tues un  peu  moins  grandes  que  nature  et  disposées  sur 
deux  rangs.  Oh  attribue  ces  statues  à  f.  Gentil  et  &  son 
associé  Dominique.  Les  arcades  de  la  nef  et  du  chœur  out 
été  garnies  de  0  grands  tableaux  de  Carré,  élève  de  Le- 
brun, représentant  la  vie  de  S^  Pantaléon,  ainsi  que  de 
deux  tableaux  d'Herluison,  qui  représentent  la  Nativité  et 
le  Christ  au  tombeau.  De  bonnes  grisailles,  figurant  Ibis* 


TRO 


1751 


UN 


toira  de  Daniel,  celle  do  J.-C,  et  diverses  batailles,  ont 
été  peintes  aux  fenêtres  pendant  le  xvi*  siècle  par  Maca- 
die  et  Lutereau.  La  1'*  chapelle  k  droite  de  la  nef,  dispo- 
sée en  Calvaire,  contient  plusieurs  groupes  remarquables, 
une  Mère  de  pitié,  Pilate  montrant  le  Christ  aux  Juifs,  et 
la  Vierge  soutenue  par  la  Madeleine  et  S^  Jean.  Le  re- 
table de  la  chapelle  quf  suit  immédiatement  est  décoré 
d'un  groupe  en  pierre  représentant  6^  Grépin  et  3^  Gré- 
pinien  occupés  à  fabriquer  des  chaussures,  tandis  que 
des  soldats  viennent  les  saisir.  B. 

TROYPS  (Église  S^-Urbain  ,  à).  Gette  ancienne  collégiale 
est  un  des  chefs-d'œuvre  de  Tarchitecture  ogivale;  elle 
rappelle  par  sa  légèreté,  par  la  pureté  et  Téiégance  de 
son  style,  la  S^«-Chapelle  de  Paris.  Elle  fut  fondée  en 
i2C3  par  le  pape  Urbain  IV,  qui  voulait  perpétuer  le 
souvenir  de  son  origine  dans  une  ville  où  il  était  né  d*un 
pauvre  cordonnier.  L'édiÛce  n*a  pas  été  achevé  :  il  ne 
contient  que  le  chœur,  les  transepts,  et  les  premiërrs 
travées  de  la  nef,  dont  la  voûte  a  une  hauteur  de  36  met. 
A  envisager  la  largeur  des  quatre  piliers  de  la  croisée, 
ils  devaient  supporter  une  tour  probablement  fort  élevée. 
Deux  porches  profonds,  bien  abrités,  donnent  entrée 
dans  les  doux  branches  de  la  croix  i  au-dessus  du  rez- 
de-chaussée,  à  la  hauteur  de  3"*,30,  toute  la  construction 
ne  présente  plus  qu'une  lanterne  vitrée,  d'une  extrême 
légèreté,  maintenue  par  des  contre-forts  pleins  Jusqu'aux 
chéneaux  supérieurs.  L'architecte  de  S^-Urbain  a  fait  sa 
b&tisse  résistante  en  pierre  commune,  dite  de  Bourgogne, 
sorte  de  moellon  piqué,  et  tout  ce  qui  n'était  qu'acces- 
soire, décoration,  chéneaux,  claires-voies,  en  pierres  de 
Tonnerro,  basses  de  banc,  très'fermes,  mais  de  grandes 
dimensions  en  longueur  et  en  largeur  ;  ces  pierres  ne 
sont  réellement  que  des  dalles  do  champ  ajourées.  La 
claire-voie  du  sanctuaire  est  un  charmant  monument  de 
l'art  du  xiu"  siècle,  qu'on  a  eu  de  nos  Jours  la  malheu- 
reuse idée  de  masquer  par  une  énorme  décoration  de 
sapin  et  de  carton^pierre  peinte  en  blanc.  B. 

TROYBS  (Église  S^*-MAOBLBiNB,à)»  Cette  église  est  la 
plus  ancienne  de  la  viUe^  car  on  y  remarque  des  relies 
d'architecture  du  .)îii*  siècle.  Son  plan  fbrme  une  croix 
parfaite.  A  droite  du  portail  s'élève  une  tour  haute  de 
33  met.  On  remarque,  k  l'intérieur  de  l'édifice,  un  ma- 
gnifique Jubé,  construit  au  commencement  du  xvt*  siècle 
par  un  maître  maçon  de  Troyes,  nommé  Jean  Guaylde  ou 
Gualdo.  Il  consiste  en  une  grande  arche,  dissimulée  der- 
rière des  claveaux  pendants  qui  forment  un  feston  hori- 
zontal de  trois  arceaux  gothiques  \  de  sorte  que  l'aspect 
de  la  construction  est  celui  d'une  large  plate-uande.  Une 
incroyable  profusion  de  nroderies,  de  petits  dais  et  de 
pinaclea  garnissent  la  face  de  ce  balcon  aérien,  jeté  de  la 
façon  la  plus  hardie,  à  une  hauteur  de  6*,45,  sur  un  écar«> 
toment  de  li"*,70.  Pour  résister  à  la  poussée  de  l'arche, 
les  deux  piliers  contre  lesquels  il  s*appuie  ont  dû  être 
enveloppés  dans  des  massifs  où  l'on  a  sculpté  des  niches 
et  des  tableaux  dans  le  goût  du  jubé  lui-mômé.  Les 
vitraux  des  chapelles  qui  entourent  le  sanctuaire  sont 
remarquables  par  leur  composition  et  l'éclat  de  leurs 
couleurs.  B. 

ThOYss  (Le  Roman  de) ,  poème  de  Benoit  de  Sainte- 
Maure.  Le  préambule  en  est  curieux  i  l'auteur  déclare  qu'il 
suivra  de  préférence  Darès  le  Phrygien,  et  non  pas  Ho- 
mère, parce  que  celui-ci  a  rempli  son  poflme  de  fables 
en  faisant  combattre  les  dieux  et  les  déesses.  Ce  passage 
prouve  que  les  ouvrages  d'Homère  n'étaient  point  incon- 
nus des  Trouvères.  Benoit  de  Sainte-Maure  nous  apprend 
que  l'histoire  de  Troie  n'avait  pas  encore  été  exploitée  t 
en  eflfet,  les  autres  poëmes  sur  le  môme  sujet  paraissent 
avoir  été  composés  après  la  première  moitié  du  xiii*  siè- 
cle. Benoît  de  Sainte-Maure  transforme  les  héros  grecs  et 
troyens  en  chevaliers  du  moyen  âge.  Son  Roman  dé 
Trouêt  est  dans  un  magnifique  manuscrit*  à  la  Biblio- 
thèque nationale  de  Paris.  Y*  Hiitoirê  littéraire  de  la 
France,  t.  XIX.  H.  D. 

TRUBLE,  filet.  V.  Troublb. 

TRUC  (de  l'italien  trucco)^  grand  billard  plus  long 
et  plus  large  que  les  billards  ordinaires;  —  sorte  de  ca- 
mion ou  plate-forme  montée  sur  des  roues,  où,  dans  les 
gares  de  chemins  de  fer,  on  élève,  à  l'aide  d'un  méca- 
nisme, ies  voitures  qui  doivent  être  transportées  i  -^ 
appareil  en  usage  dans  les  thé&tres  pour  faire  mouvoir 
certains  décors  et  exécuter  des  changements  à  vue. 

TRUCHEMENT.  4^.  DRôoMAfi,  Interprètb. 

TRUMEAU,  partie  pleine  entre  deux  fenêtres,  ou  entre 
deux  baies  de  portes.-^  Le  mot  se  dit  aussi  du  parquet  de 
glace  qui  est  placé  au-dessus  d'une  cheminée.— Dans  l'ar- 
sliitecture  religieuse,  on  appelle  encore  trumeau  le  petit 


piller  qui  sépare  en  deux  les  portes  de  certaines  églises, 
et  auquel  est  adossée  ordinairement  une  statue.  Dans  de' 
vieux  titres,  ce  pilier  est  désigné  sous  le  nom  d'estan* 

TRUMËUÈRES,  pièces  d'armure,  les  mêmes  que  loi 
Grèves. 

TUnULAIRES  (Ponts).  V,  Pont. 

TUDESQUE  ^Langue).  V.  TnéonsQuEi 

TUDOR  (Arc).  V,  Aao  Tunoft. 

TUGUK.  V,  Tedgué. 

TUILE.  Les  couvertures  faites  on  tuiles  sont  d'une 
grande  solidité,  mais  elles  sont  lourdes ,  surchargent  les 
bâtiments,  et  imposent  des  dépenses  plus  considérables 
en  murs  de  soutènement  et  en  charpentes.  On  nomme 
tuiles  plates  ou  à  crochet  celles  dont  on  se  sert  pour  cou- 
vrir les  maisons;  tuiles  faîtières  ou  courbes,  celles  qui 
sont  larges,  de  forme  circulaire,  et  destinées  à  couvrir  les 
faltageè;  tuiles  cornières  ou  girofinéess  celles  qui  se  met- 
tent sur  les  angles,  arêtes  ou  encoignures.  Depuis  quel- 
ques années  on  emploie  des  tuiles  à  recouvrements  sur 
trois  côtés,  dont  l'ensemble  forme  des  quadrilles  en 
losanges,  et  qui  ne  laissent  aucun  passage  pour  les  neiges 
chassées  par  le  vent.  On  se  sert  aussi  de  tuiles  plissées, 
qui  ont  le  même  avantage.  Ces  tuiles ,  mieux  fabriquées 
que  les  tuiles  plates,  sont  moins  épaisses,  moins  lourdes 
et  tout  aussi  solides. 

TUILERIES  (Palais des).  V.  notre  Dictumwûn  d»  Éio* 
graphie  et  d* Histoire* 

TULLE  (Église  S^-Martin.,  à).  La  plus  grande  partie 
de  cette  église  cathédrale  ofifre  les  caractères  architecto- 
niques  de  la  fin  du  ki*  siècle  et  du  commencement  du 
xii*.  Elle  a  toute  la  gravité  du  style  romano-bysantln.  Son 
plan  est  celui  de  la  basilique,  sans  chœur  ni  transept.  La 
construction  extérieure  est  lourde  et  pauvre  d'effet,  à  l'ex- 
ception de  la  tour  et  de  sa  flèche  de  pierre,  une  des  plus 
belles  œuvres  de  cette  espèce,  bâtie  au  temps  de  la  Re^ 
naissance. 

TULLIANUM.  )  V*  notre  Dictionnaire  de  Bwgraphi» 

TUMULTE.      I      9t  d'Histoire. 

TUMULUS,  mot  emprunté  du  latin  t  et  qui  désigne  une 
colline  factice^  un  amas  de  terre  ou  de  pierres  en  fbrme 
de  cône,  entouré  ou  non  entouré  de  fbssés  ou  d^un  cercle 
de  pierres,  et  ayant  servi  de  tombeau  chee  les  peuples 
anciens.  On  trouve  des  constructions  de  ce  genre  uans 
toutes  les  parties  du  monde  \  elles  recouvrent  souvent 
des  cercueils  de  pierre ,  des  ossements^  des  armes,  des 
idoles,  des  vases  et  ustensiles.  Les  noraghes  de  la  Sar- 
daigne,  les  barrows  de  l'Angleterre^  les  galgals  de  la 
Gaule,  les  kourganes  de  la  Russie,  les  ohullpas  du  Pérou, 
les  stupas  de  l'Inde  (V.  ces  mots)^  sont  des  tumulus.  Les 
tumulus  ont  reçu,  dans  certaines  localités  de  la  France, 
les  noms  de  Pujols  et  de  Puys-joliSé 

TUNDRA4  c-â-d.  steppe  de  marais,  nom  que  les 
Russes  donnent  aux  plaines  immenses  qui  bordent  la 
mer  Glaciale*  Ce  sont  des  terrains  marécageux^  en  partie 
couverts  de  mousse* 

TUNIQUE ,  vêtement  des  Anciens.  Fi  notre  Diction* 
naire  de  Biographie  et  d* Histoire. 

TUNiQUB ,  redingote  d'uniforme,  qui  a  été  substituée  à 
l'habit  dans  la  plupart  des  armées  européennes  pour  les 
troupes  d'infanterie.  Elle  a  été  aussi  introduite  dans  quel- 
ques corps  de  cavalerie.  —La  tunique  est  aussi  l^uoiforme 
des  élèves  internes  des  Lycées. 

TUNIQUB,  habillement  que  les  évoques  revêtent  sous  la 
chasuble,  quand  ils  ofiiclent  pontiflcalement  \  —  par-deS" 
sus  richemeot  orné,  en  forme  de  manteau,  que  portent 
les  évoques  ; — dalmatique  des  diacres  et  des  sous^oiaores. 
V.  Dalmatique. 

TUNNEL,  mot  anglais  qui  veut  dire  tuyau^  entonnoir. 
et  par  lequel  on  désigne  tout  passage  souterrain  pratiqué 
à  travers  une  montagne  ou  sous  une  rivière.  Les  tunnels 
sont  des  ouvrages  tr&-dispendieux  :  on  estime  que,  dans 
ceux  qu'on  étsiolit  pour  les  chemins  de  fër,  Ift  dépense 
s'élève  à  1 ,000  fr.  par  mètre  de  longueur.  La  prudence 
exige  qu'ils  soient  voûtés  t  en  France,  on  construit  les 
voûtes  en  plein  cintre;  en  Angleterre,  on  a  adopté  la 
forme  elliptique.  Quand  le  terrain  n'est  susceptible  que 
d'exercer  une  pression  verticale,  on  se  contente  de  donner 
aux  pieds-droits  un  peu  dMncIinaison^  et  à  la  voûte  uns 
épaisseur  qui  varie  de  0"*,70  à  i"S30t  quand  il  y  a  une 

f poussée  latérale,  on  supprime  les  pieds-droits,  ti  on  pro- 
onge  la  voûte  Jusqu'au  radier.  La  largeur  pour  an  ohe» 
min  à  deux  voies  est  de  7'",40,  et  la  hauteur  soUs  clef^ 
de  ô"*»50.  Les  tunnels  doivent  avoir  une  pente  pour  l'écou* 
lement  des  eaux,  qu'on  est  toujours  exposé  à  rencontrer. 
Il  en  est  dont  la  longueur  est  considérable  :  on  en  voi^ 


TDR 


1752 


TUR 


,&n  de  5  kilom.  but  le  cUemin  de  Sheffield  à  Maachesicr; 
UD  de  4,100  met.  à  Blaisy,  sur  le  chemin  de  Paris  à 
Lyon  ;  un  de  4,620*",  sur  le  chemin  d*Avignon  à  Marseille. 
Celui  du  chemin  de  fer  de  Chambéry  à  Turin,  à  travers 
le  mont  Cenis,  aura  12  kilom.  Le  plus  important  tunnel 
sous  un  fleuve  est  celui  de  la  Tamise  à  Londres  (V.  Tun- 
RBL,  dans  notre  Dictionnaire  deBiogr.  et  (^Histoire)» 

TUPI  (Idiome).  V.  BBés[L  (Langues  du). 

TUPINAMBAS  (Idiome  desV,  un  des  idiomes  brésiliens, 
parlé  dans  les  provinces  de  Para,  de  Maranhao,  de  Per- 
nambouc,  de  Sergipe,  et  de  Bahia.  On  le  retrouve  encore 
au  confluent  du  Bfadeira  et  de  l'Amazone. 

TURBAN  (de  Tarabe  £u(&an) ,  coiffure  des  Turcs  et  de 
plusieurs  autres  peuples  orientaux ,  faite  d*une  longue 
pièce  de  toile  ou  de  taffetas  qui  est  roulée  et  entrelacée 
autour  d*un  bonnet.  Il  n*est  permis  de  porter  le  turban 
▼ert  qu*à  ceux  qui  sont  de  la  race  de  Mahomet  :  les  autres 
turbans  sont  blancs  ou  rouges  pour  les  Musulmans, 
noirs  ou  bleus  pour  les  Juifs  et  les  Coptes.  Le  turban 
du  sultan  est  surmonté  de  trois  aigrettes  ;  celui  du  grand 
vizir  en  a  deux  ;  les  généraux  n'en  ont  qu*une.  Le  turban 
commence  à  disparaître  ;  il  est  peu  à  peu  remplacé  par 
le  tarbouch  (  F.  ce  mot), 

TURBINE,  mot  qui  a  été  employé  en  Architecture 
comme  synonyme  de  tribune.  Il  dérive  du  latin  turba, 
foule. 

TURCIES,  nom  donné  jadis  aux  digues  élevées  pour 
contenir  les  fleuves  et  empocher  les  inondations. 

TURCOS.  F.  Tirailleurs. 

TURDITAIN  (Idiome),  un  des  idiomes  de  l'Espagne 
avant  la  conquête  romaine.  Les  Turditains  possédaient  des 
ouvrages  écrits  en  vers,  et  se  vantaient  aavoir  des  an- 
nales qui  remontaient  à  6,000  ans.  Il  n'est  resté  de  leur 
langue  que  de  courtes  inscriptions  à  peu  près  indéchif- 
frables, et  où  les  lettres  grecques  se  mêlent  à  des  signes 
phéniciens  et  lybiques. 

TURF,  mot  anglais  qui  veut  dire  gazon,  pelouse,  et 
par  lequel  on  désigne  le  terrain,  effectivement  gazonné, 
sur  lequel  ont  lieu  les  courses  de  chevaux. 

TURGOTINËS.  F.  Messagbhibs. 

TURLUPINADëS,  insipides  bouffonneries,  ainsi  nom- 
mées de  Tacteur  Henri  Leorand,  dit  Turlupin,  qui  en 
débitait  sur  le  thé&tre  de  Tnôtel  de  Bourgogne  à  Paris, 
dans  les  premières  années  du  xvii*  siècle. 

TURME.  V.  ce  mot  dans  notre  ùictionnatre  de  Biogra- 
phie et  d^  Histoire. 

TURPIN  ou  TILPIN  (Chronique  de),  ouvrage  fausse- 
ment attribué  à  l'archevêque  de  Reims  qui  mourut  vers 
l'an  800.  Il  a  j^our  titre  :  De  vita  et  gestis  Caroli  magni  ; 
mais  il  est  bien  éloigné  d'embrasser  tout  le  règne  de 
Charlemagne.  C'est  un  résumé  très-sommaire  des  exploits 
de  cet  empereur  jusqu'à  son  expédition  contre  les  Sarra- 
sins d'Espagne,  et  encore  est-il  incomplet.  L'histoire  de 
la  guerre  d'Espagne  est  le  véritable  sujet  de  la  Chronique. 
L'auteur  raconte  que  Charlemagne  eut  un  songe  où  il  vit 
S*  Jacques  de  Compostelle  lui  ordonner  de  délivrer  ses 
reliques  tombées  aux  mains  des  Sarrasins.  Chemin  fai- 
sant, il  recommande  au  prince  d'élever  beaucoup  de 
monastères  pour  n'être  pas  damné;  et,  après  le  récit  de 
l'expédition,  il  arrive  à  la  mort  de  Charlemagne.  — On  a 
cru  quelquefois  que  la  Chronique  de  Turpin  était  anté- 
rieure aux  premiers  romans  cariovingiens,  et  qu'elle  leur 
avait  servi  de  modèle.  C'est  une  erreur  que  la  lecture  de 
l'ouvrage  peut  facilement  dissiper  :  on  voit  que  cette 
Chronique  est  une  compilation  mforme,  tirée  des  chants 
populaires,  dont  elle  reproduit  rarement  la  grandeur  et 
la  naïveté.  Elle  fut  d'abord  écrite  en  latin,  et ,  à  ce  qu'on 
suppose,  par  un  moine  de  S'-André  de  Vienne  (Dau- 
phiné)  au  xi*  siècle,  puis  traduite  en  français  au  xii*,  et 
de  nouveau  par  Robert  Gaguin.  Des  éditions  en  ont  été 
publiées  par  Ciampi,  Florence,  1822,  et  par  Reiffenberg, 
Paris,  1836.  H.  D. 

TURQUE  (Langue),  dénomination  sous  laquelle  on 
comprend  Vosmami ,  parlé  à  Constantinople  et  dans  tout 
l'Empire  ottoman,  Voïgour  du  Turkestan,  et  divers  idiomes 
répandus  autour  de  la  mer  Caspienne  jusqu'au  Volga.  On 
croit  y  reconnattre  quelques  racines  germaniques.  Ces 
idiomes  turcs  ont  avec  les  langues  tartares,  particulière- 
ment avec  le  mongol  et  le  kalmouck,  beaucoup  de  res- 
semblance de  mots  et  de  formes  grammaticales.  L'oîgour 
est  le  plus  rude  dans  sa  prononciation,  le  plus  simple 
dans  sa  structure,  le  moins  mélangé  d'éléments  étrangers. 
n  fut,  le  premier.  Axé  par  l'écriture  :  son  alphabet,  ap- 
porté par  des  moines  nestoriens,  est  d'origine  syriaque, 
et  analogue  au  sabéen  ;  il  se  trace  de  droite  à  gauche. 
L'osmani!:  a  fait  de  pombreux  emprunts  à  l'arabe  et  au 


persan,  et  demandé,  pour  1  expression  des  idées  relativei 
aux  sciences  et  aux  arts,  on  cert»n  nombre  de  termes 
grecs  et  italiens.  Sa  grammaire  est  simple  et  régulière. 
11  n'y  a  ni  genres  ni  article.  Les  substantifs  se  déclinent 
et  ont  6  cas  ;  leur  pluriel  se  forme  par  l'intercalation 
d'une  syllabe  particulière  entre  le  radical  et  la  désinence. 
L'adjectif  est  invariable.  Jjq  verbe  substantif  est  à  peu 
près  le  seul  verbe  irrégulier  de  'a  langue.  La  négation 
s'intercale  dans  le  corps  du  verbe,  auquel  elle  forme  ainsi 
une  sorte  de  voix  spéciale.  Certaines  formes  servent  éga- 
lement à  donner  à  un  radical  le  sens  potentiel ,  causatif, 
réfléchi,  réciproque,  etc.  Les  prépositions  se  mettent 
après  leur  complément.  La  construction  est  très-invi  r- 
sive.  L'accent  tombe  sur  la  dernière  syllabe -des  mots, 
quand  elle  n'est  pas  une  flexion  grammaticale.  Le^ 
Turcs  occidentaux  ont  adopté  pour  leurs  vers  la  métrique 
des  Arabes  et  des  Persans.  Leur  alphabet  comprend 
28  lettres  arabes,  les  4  lettres  que  les  Persans  y  ont  ajou- 
tées, et  un  autre  caractère  qui  représente  nos  voyelles 
nasales  an,  in,  on,  M.  de  Saolcy,  après  examen  des  in- 
scriptions cunéiformes  de  l'Asie,  a  démontré  que  c'e^t 
dans  le  turc  principalement  qu'on  retrouve  les  débris  de 
l'ancienne  langue  des  Mèdes.  V,  Megiser,  Institutiones 
linguœ  turcicœ^  Leipzig,  1612,  in-4<';  Duryer,  Rudimenia 
grammatices  linguœ  turcicœ,  Paris,  1633,  in-4*;  les 
PP.  Bernard  et  Pierre,  Grammaire  turque  ^  1667;  Sea- 
man,  Grammatica  linguœ  turcicœ ,  1670,  in-4°  ;  Meninski, 
Linguarum  orientalium,  Turcicœ ,  Arabicœ ,  et  Persicœ 
institutiones,  Vienne,  1680,  in-4^;  Holdermann,  Gram- 
maire turque,  Constantinople,  1730,  in-4<*;  Vignier,  É/e- 
ments  de  la  langue  turque^  ibid.,  1 790,  in-4<>;  Rhasis,  Voca- 
bulaire françaiS'turc ,  Saint-Pétersbourg,  1 828-29,  în-i"  ; 
Jaubert»  Éléments  de  la  grammaire  turque,  Paris,  183-1, 
in-8^;  Blanchi,  Vocabulaire  français-turc,  Paris,  1831  : 
Kieffer  et  Bianchi,  Dictionnaire  turc -français,  1835, 
2  vol.  in-8®;  Haodjeri,  Dictionnaire  françats-turc-pei- 
san-arabe,  Moscou,  1840-1842,  3  vol.  in-4";  Redhouso, 
Grammaire  raisonnée  de  la  langue  ottomane,  Paris, 
1846,  in-8<^,  et  Dictionnaire  anglais-ture,  Londres,  185G, 
in-S»;  Zenker,  Grammaire  turque  de  Kasem-beg,  Leipzig, 
1848;  E.  Bérésine,  Recherches  sur  les  dialectes  turcs, 
Kazan,  18.53,  in-8<*;  L.  Dubeux,  Éléments  de  la  gram- 
maire turque,  Paris,  1856;  Kellgrenn,  Grammeùre  de 
la  langue  osmanli,  IIelsingfors,1856. 

TORQOB  (Littérature).  On  a  cru  longtemps  à  la  barbarie 
intellectuelle  des  Turcs;  cependant  leur  littérature  est, 
sinon  originale,  au  moins  d'une  grande  richesse.  Un  de 
ses  monuments  les  plus  anciens,  le  Trèfle  du  fauconnier, 
composé  de  trois  ouvrages  sur  la  fauconnerie,  offre  beau- 
coup d'intérêt  pour  la  philologie.  Suivant  BL  de  Hammer, 
le  nombre  des  poètes  turcs  s'àèverait  à  plus  de  2,000;  ils 
imitent  presque  toujours  des  modèles  arabes  ou  persans. 
Parmi  eux,  nous  citerons  :  Mohammed  Tchelebi ,  qui  a 
donné  une  collection  des  légendes  relatives  à  Mahomet  : 
Mescihy,  poète  anacréontique,  contemporain  de  Soli- 
man !<';  Liùni,  qui  florissait  sous  Soliman  II  le  Magni- 
fique, et  dont  on  a  quatre  poèmes  épiques  (  Wamik  et 
Afra,  Les  Sages  et  namin,  Absal  et  Selman,  Perhàd- 
Nâmèh)t  ainsi  que  beaucoup  de  poèmes  lyriques  et  didac- 
tiques; Fazii,  au  xvi*  siècle,  auteur  d'un  poème  erotique 
allégorique,  la  Rose  et  le  Rossignol  ;  B&ki,  poète  lyrique, 
mort  en  lOÎM).  —  Dans  le  genre  du  roman  et  du  conte, 
on  remarque  le  Houmayoun-Namèh,  traduction  d'une 
imitation  persane  des  fables  de  Bidpal,  et  le  roman  des 
Quarante  vizirs,  par  le  scheick  Sade. — Il  existe  un  corps 
d'histoire  qui  embrasse  toute  la  dynastie  régnante  des 
Osmanlis  depuis  son  origine  jusqu'à  la  fin  du  xviii*  siècle  : 
il  est  formé  d'ouvrages  composés  successivement  par 
Saad-Eddin,  Nalma,  Reschid,  Tchelebisade,  Sami ,  Scha- 
kir,  Subhi ,  Issi  et  Wasif.  Le  style  de  ces  divers  auteurs 
est  affecté,  prétentieux,  orné  de  métaphores  recherchées 
et  de  comparaisons  étranges.  L'historien  qu'on  lit  peut- 
être  le  plus  souvent  est  Hâ(iyi-Khalfa,  qui  est  aussi  l'au- 
teur d'un  Dictionnaire  géographique.  —  Pour  connaître 
la  dogmatique  musulmane,  aucun  livre  n'est  plus  pré- 
cieux que  la  Doctrine  de  la  Foi,  par  Pir-AIi-el-Berkevr. 
On  peut  étudier  le  Droit  des  Turcs  dans  le  recueil  de 
fetwas  ou  décisions  juridiques  qui  ont  été  publiées  par 
Mustafa-el-Koudousi ,  Abd-our-Rbalm,  Numan-Effendi. 
Dans  le  domaine  de  la  philologie,  on  peut  signaler  les 
Dictionnaires  arabes  de  Djauhari  et  d'Asim-Effendi ,  le 
Dictionnaire  persan  d'Achmet-Emin-Effendi,  le  commen- 
taire de  Soudi  sur  le  Gulistan  de  Saadi ,  etc.  V,  Donado, 
Letteratura  dei  Turchi,  Venise,  1688,  in-12;  Toderini, 
Letteratura  turchesa,  Venise,  1787,  3  vol.;  Chabert, 
Notices  sur  des  poètes  turcs,  trad.  du  turc  de  Latifl  ea 


TUT 


1753 


TYP 


illemand,  Zurich,  1800;  Hammcr,  Histoire  de  la  p:}cste 
des  OsinanUi,  Pesth,  1836,  4  vol. 

TUTELLE  (du  latin  tuerit  défendre,  protéger),  charge 
imposée  à  un  individu,  soit  par  la  loi,  soit  par  la  volonté 
d*autrui,  de  prendre  soin  gratuitement  de  la  personne 
d'un  incapable,  d'administrer  ses  biens,  et  de  le  repré- 
senter dans  tous  les  actes  civils.  Sont  soumis  h  la  tu- 
telle :  le  mineur,.  Vémancipé,  V interdit  et  le  prodigue. 
Notre  Code  distingue  trois  sortes  de  tutelle  :  la  tutelle 
légitime,  légale  ou  naturelle,  la  tutelle  testamentaire,  et 
la  tutelle  dative.  La  tutelle  légitime  est  celle,  qui  appar- 
tient de  plein  droit  au  père,  à  la  mère,  ou,  à  leur  défaut, 
à  l'ascendant  m&le  le  plus  proche,  et  celle  que  la  loi  con- 
fère sur  les  enfants  admis  dans  les  hospices  à  l'un  des 
membres  de  la  commission  administrative.  La  tutelle 
testamentaire  est  celle  aui  est  déférée  par  le  dernier 
mourant  des  père  et  mère;  on  la  nomme  ainsi,  parce 
qu'elle  résulte  le  plus  souvent  d'un  testament,  mais  sur- 
tout parce  qu'elle  ne  peut  produire  d'effet  qu'après  la 
mort  de  celui  qui  l'a  déférée.  La  tutelle  dative  est  celle 
qui  est  déférée  par  le  Conseil  de  famille,  lorsque  le  sur- 
vivant des  père  et  mère  est  excusé,  exclu  ou  destitué, 
lorsque  le  tuteur  élu  par  le  dernier  mourant  est  dans 
l'un  de  ces  cas,  ou  lorsque  l'ascendant  le  plus  proche  ne 
peut  exercer  la  tutelle  qui  lui  est  attribuée  par  la  loi. 
—  La  tutelle  étant  gratuite,  et  les  devoirs  qu'elle  im- 
pose multipliés  et  délicats,  peu  de  personnes  l'accepte- 
raient volontairement;  aussi,  pour  que  les  mineurs  ne 
restent  pas  sans  défense,  la  loi  a  interdit  aux  personnes 
désignées  la  faculté  du  refus.  Elle  ne  reconnaît  que  six 
motifs  d'excuse  ou  de  dispense  :  1*  les  fonctions  pu- 
bliques et  le  service  militaire;  2*  la  qualité  d'étrangôr  à 
la  famille,  lorsqu'il  y  a,  dans  la  distance  de  quatre  my- 
riamètres,  des  parents  ou  alliés  en  état  de  gérer  la  tu- 
telle; 3°  l'âge  avancé  (65  ans);  4<»  les  infirmités;  5<*  le 
nombre  des  tutelles;  6<^  le  nombre  d'enfants.  La  loi  a 
déterminé  aussi  des  causes  d'incapacité,  d'exclusion  et 
de  destitution  :  1<*  l'état  de  minorité;  2«  l'interdiction; 
3^  le  sexe;  4*  l'opposition  d'intérêts;  5^  l'inconduite  no- 
toire; 6°  la  gestion  infidèle;  7<*  la  condamnation  à  une  peine 
afflictive  et  infamante  ;  8<^  la  condamnation  à  une  peine 
correctionnelle  pour  corruption  de  mineurs;  9*  l'inter- 
diction temporaire  de  certains  droits  civils. 

TUTELLE  (Conseil  de),  conseil  que  le  père  mourant  peut 
nommer  à  la  mère  survivante  et  tutrice,  et  sans  l'avis 
duquel  elle  ne  peut  faire  aucun  acte  relatif  à  la  tutelle. 
Cette  nomination  doit  être  faite  par  un  acte  de  dernière 
volonté,  ou  par  une  déclaration  faite  soit  devant  notaire, 
soit  devant  le  Juge  de  paix  assisté  de  son  grefi&er  (Code 
Napoléon^  art  391-392). 

TUTELLE  opnciEUSE,  coutrat  de  bienfaisance  par  lequel 
une  personne  âgée  de  plus  de  50  ans,  sans  enfants  ni 
descendants  légitimes,  s'oblige  à  élever  gratuitement  un 
mineur  &gé  d'au  moins  15  ans,  à  administrer  sa  per- 
sonne et  ses  biens,  et  à  le  mettre  en  état  de  gagner  sa 
vie.  Ce  contrat  a  pour  but  de  faciliter  l'adoption  à  ceux 
qui,  voulant  adopter  un  mineur,  craignent  de  mourir 
avant  qu'il  ait  atteint  sa  majorité  ;  car  on  peut  adopter 
après  5  ans  de  tutelle  officieuse. 

TOTËUR,  celui  qui  remplit  les  fonctions  de  la  tutelle. 
Ses  devoirs  se  réduisent  à  deux  :  i°  prendre  soin  de  la 
personne  du  mineur,  c.-à-d«  pourvoir  à  son  entretien, 
veiller  sur  sa  conduite,  et  lui  procurer  une  éducation  con- 
venable, en  rapport  avec  son  état  et  ses  moyens;  2°  ad- 
ministrer ses  biens  en  bon  père  de  famille,  et  le  repré- 
senter dans  les  actes  civils,  tels  que  les  contrats,  les 
procès,  etc.  Il  y  a  des  actes  qu'il  a  le  droit  de  faire  seul, 
par  exemple,  passer  des  baux,  toucher  des  fermages, 
exercer  des  actions  mobilières.  Il  en  est  d'autres  pour 
lesquels  il  lui  Caut  l'autorisation  du  Conseil  de  famille; 
ce  sont  les  actions  immobilières,  l'acceptation  ou  le  refus 
d'une  succession,  d'une  donation,  d'un  legs.  Les  actes  qui 
ont  pour  objet  de  transiger,  d'emprunter,  d'hypothéquer 
ou  d'aliéner  des  immeubles,  doivent  être  prâilablement 
soumis  à  l'homologation  du  tribunal.  Il  est  interdit  au 
tuteur  d'accepter  la  cession  d'aucun  droit  contre  son  pu- 
pille, ou  de  se  rendre  adjudicataire  de  ses  biens,  par  lui 
ou  par  personnes  interposées.  Le  tuteur  qui  a  de  graves 
sujets  de  mécontentement  contre  le  mineur  peut  obtenir 
du  Conseil  de  famille  l'autorisation  de  provoquer  sa  dé- 
tention dans  une  maison  de  réclusion.  Tout  tuteur  est 
comptable.de  sa  gestion  quand  elle  finit  :  les  père  et 
mère  ne  sont  pas  exceptés  de  cette  obligation.  —  On 
nomme  Tuteur  ad  hoc  celui  aui  est  nommé  pour  un  objet 
déterminé  :  ainsi,  à  défaut  de  parents,  l'enfant  naturel  l 
ac  peut  se  marier  avant  21  ans  qu'avec  le  consentement  j 


d'un  liUeur  ai  hor,  —  Oîipr  tontn  tutelle,  il  y  a  un  ft«- 
brogé  tuteur,  dont  les  fonctions  consistent  à  veiller  aux 
intérêts  du  pupille,  et  à  les  défendre  lorsqu'ils  sont  en 
opposition  avec  ceux  du  tuteur.  Il  est  toujours  nommé 
par  le  Conseil  de  famille,  et  peut  être  dispensé  ou  ré- 
voqué pour  les  mêmes  causes  que  le  tuteur.  Il  ne  rem- 
place pas  de  plein  droit  ce  dernier  lorsque  la  tutollo 
devient  vacante,  et  doit  dans  ce  cas  provoquer  imnu'« 
diatement  la  nomination  d'un  nouveau  tuteur.  Il  a  le 
droit  de  se  pourvoir  contre  toute  délibération  du  Conseil 
de  famille  qui  n'a  pas  été  prise  à  l'unanimité  des  voix. 
— Celui  qui  a  été  nommé  curateur  au  ventre  {V.  ce  mot) 
est  de  plein  droit  subrogé  tuteur  de  l'enfant.  —  Le  co- 
tuteur  est  celui  qui  est  chargé  d'une  tutelle  avec  un  autre. 
Autrefois,  la  mère  qui  n'avait  pas  25  ans  ne  pouvait  être 
donnée  pour  tutrice  à  ses  enfants  qu'en  faisant  nommer 
un  co-tuteur  qui  demeurait  responsable  solidairement  de 
l'administration  avec  elle.  Aujourd'hui,  si  la  mère  se  re- 
marie, le  second  mari  est  cotuteur  et  responsable. 

TGTTI,  mot  italien  qui  veut  dire  tous.  Placé  sur  une 
partition  de  musique,  il  indique  que  toutes  les  parties 
doivent  se  faire  entendre  ensemble. 

TUTULUS,  coiffure.  F.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
phie et  d^Histoire. 

TCYAUX  D'ORGUE.  Ils  sont  faits  d^étain  fin,  ou 
d'étoffe  (alliage  de  plomb  et  d'un  douzième  d'étain). 
Quelques-uns  sont  en  bois  ;  la  forme  alors  en  est  carrée, 
et  le  son  plus  doux.  Les  tuyaux  sont,  pour  la  plupart,  de 
forme  cyhndrique.  Ils  sont  ouverts  par  le  haut,  ou  bou- 
chés :  pour  parler  à  l'unisson  d'un  tuyau  ouvert,  un  tuyau 
bouché  doit  être  de  moitié  plus  court  Les  ieux  composés 
de  tuyaux  bouchés  se  nomment  bourdons  (V,  ce  mot)  ;  le 
son  en  est  plus  sourd  et  plus  doux  que  celui  des  tuyaux 
ouverts.  Certains  tuyaux  ont  la  forme  de  fuseau;  d'autres 
sont  à  cheminée,  c-à-d.  qu'ils  consistent  en  un  petit 
tuyau  soudé  en  haut  d'un  plus  gros.  On  obtient  un  son 
plus  éclatant  avec  les  tuyaux  coniques,  surtout  si  le  cône 
s'évase  en  pavillon  comme  une  trompette  ;  au  contraire, 
la  forme  conique  renversée  donne  un  son  étouffé.  —  Pour 
faire  parler  les  tuyaux,  il  y  a  deux  modes  :  la  bouche  et 
Vanche  (  V,  ces  mots),  —  Le  degré  d'acuité  ou  de  gravité 
d'un  tuyau  dépend  de  sa  hauteur,  de  sa  largeur,  et  aussi 
de  la  grandeur  de  la  bouche,  ou  de  la  rapidité  des  vibra- 
tions de  la  languette  de  l'anche.  Étant  donné,  par  exem- 
ple, le  1*'  tuyau  d'un  jeu,  le  plus  gros,  celui  qui  doit 
donner  la  quarte  au-dessus  n'aura  que  les  trois  <|uarts 
de  la  hauteur,  la  quinte  aura  les  deux  tiers,  etc.  ;  U  y  a 
également  des  calculs  proportionnels  pour  la  hauteur  et 
la  lu^ur,  et  les  chiffres  sont  invariables  et  nécessaires, 
parce  qu'ils  répondent  aux  intervalles  naturels  de  la 
musique.  —  On  accorde  les  tuyaux  au  moyen  de  la  par- 
tition (  V,  ce  mot).  Si  un  tuyau  n'est  pas  juste,  on  res- 
serre ou  l'on  desserre  légèrement  la  rasette  pour  les 
tuyaux  à  anche,  et,  pour  les  tuyaux  à  bouche,  on  élargit 
ou  l'on  rétrécit  de  force  le  haut  du  tube  avec  un  outil 
conique  appelé  accordoir.  —  La  qualité  du  son  dépend  : 
i*'  de  la  matière  dont  le  tuyau  est  fait;  2*^  de  l'épaisseur 
du  métal  ;  3^  de  la  forme  du  tuyau.  C'est  là  ce  qui  ex- 
plique la  différence  des  timbres  et  là  variété  des  réson- 
nances;  c'est  ce  qui  fait  que  les  jeux  ont  un  caractère 
spécial  de  flûte,  de  cornet,  de  hautbois,  etc.  —  On  dé- 
signe un  orgue  par  la  longueur  en  pieds  de  son  plus  long 
tuyau  sonnant  la  note  la  plus  grave  du  clavier.  Ce  tuyau 
a  l'une  des  quatre  grandeurs  suivantes  :  quatre,  huit, 
seize  ou  trente- deux  pieds,  selon  l'importance  de  l'in- 
strument. On  dit  :  un  orgue  de  trente-deux,  de  seize,  de 
huit,  de  quatre  pieds.  Les  tuyaux  de  16  pieds  de  lon- 
gueur en  ont  3  de  circonférence;  ceux  de  32  en  ont  6. 

TYMPAN,  en  termes  d'Architecture,  espace  du  fronton 
compris  dans  le  triangle  formé  par  les  deux  corniches 
et  la  base.  {V.  Fronton).  —  Par  extension,  on  a  appeU 
tympan  de  porte  ou  de  fenêtre  la  surface  comprise  entre 
l'intrados  de  l'arcade  qui  les  couronne  ei  une  ligne  horr- 
zontale  passant  par  les  points  de  naissance  de  cet  arc.  A 
partir  du  xii*  siècle,  les  tympans  des  portes  d'église  ont 
été  ornés  de  bas-reliefs. 

TYMPAN,  nom  donné  en  l^pographie  à  des  ch&ssis  for- 
més de  4  barres  de  bois  ou  de  fer,  et  sur  lesquels  est 
collée  une  feuille  de  parchemin  ou  de  papier  fort.  On 
étend  sur  le  grand  tympan  les  feuilles  à  imprimer,  et  le 
petit  tympan  reçoit  l'action  de  la  platine. 

TYMPANON  ou  TYMPAN UM,  mot  qui  désignait,  chez 
les  Anciens,  toute  espèce  de  tambour.  Tout  en  conser- 
vant ce  sens,  le  mot  fut  encore  appliqué  au  Psaltérion 
du  moyen  âge. 

TÏPE  (du  grec  typos^  empreinte),  empreinte  faite  sui 


TYP 


1754 


TYR 


ane  masse  molle,  et,  par  extension,  modèle,  forme  ori- 
ginale. Dans  la  philosophie  de  Platon,  les  idées  sont  les 
types  des  choses  créées  {V,  Archétype,  IblSat,  Plato- 
nismb).  Bn  Théologie,  on  nomme  type  tout  ce  qui,  dans 
TAncien  Testament,  est  la  figure  ou  le  symhoie  des  mys- 
tères de  la  loi  nouvelle  :  ainsi,  Tagneau  pascal  est  le  type 
de  Jésus-Christ,  et  la  manne  celui  de  l'Eucharistie.  En 
Littérature,  un  type  est  un  caractère  fortement  tracé,  une 
puissante  individualité  formée  par  une  combinaison  sa- 
vante de  divers  traits  épars  :  Achille,  Ulysse,  Âlceste, 
Figaro,  sont  des  types.  En  Numismatique,  Ja  figure  sym- 
bolique empreinte  sur  le  revers  d*une  médaille  se  nomme 
type.  Le  mot  type  s*est  dit,  en  Histoire,  des  ordonnances, 
rescrits  et  lettres  dos  empereurs  bysantins.  Enfin,  en 
typographie,  il  est  svnonymc  de  caractère. 

TYPOCHROMIE.  V.  Cmomotypie,  au  Supplénien'» 

TYPOGRAPHIE  (du  grec  typos,  caractère,  eXgrapfiéin, 
empreindre),  motsynonymp  d'fmprimeriê, 

TYPOLOGIE,  doctrine  qui  considère  les  pratiques  du 
culte  des  Hébreux  comme  autant  de  types  d'une  révéla- 
tion postérieure. 

TYPOMÉTRIE  (du  grec  typos,  type,  et  métron,  me- 
sure), art  de  composer  et  dMmprimer  en  caractères  mo- 
biles des  cartes  géographiques,  des  plans,  des  figures  de 
mathématiques,  des  profils,  des  dessins  d*histoire  natu- 
relle, des  caractères  symboliques,  etc.  Des  essais  furent 
faits  au  XV*  siècle  par  Schweynheim,  au  xvni*  par  Haas 
de  B&Ie,  au  xix*  par  Firmin  Didot  à  Paris,  Wegener  à 
Berlin,  Dauerkeller  à  Francfort  ;  mais  RafTelsberger,  di- 
recteur de  l'Imprimerie  impériale  de  Vienne,  est  le  seul 
qui  ait  obtenu,  en  1830,  des  résultats  satisfaisants. 


TYPOTONE,  sorte  de  diapason  imaginé  en  1820  par  oo 
certain  Pinsonnat.  C'était  une  lanauette  de  métal  fixée 
sur  une  petite  plaque  de  nacre  ou  d'argent  que  l*Oh  pla- 
çait entre  les  dents,  et  que  Ton  mettait  en  vibration  an 
moyen  du  soufile  de  la  bouche.  LMdée  vint  ensuite  de 
réunir  plusieurs  de  ces  languettes  sur  une  même  plaque 
et  d'en  faire  un  Jouet  d*enfant;  puis  on  augmenta  suc- 
cessivement le  nombre  des  languettes  et  les  dimensions 
de  rinstrument,  au  point  de  ne  pouvoir  plus  le  Jouer  à 
la  bouche.  Alors  on  en  fixa  les  lamea  à  un  petit  soufile: 
qu'on  faisait  agir  entre  les  mains,  pendant  que  les  doigts, 
appuyant  sur  un  clavier  de  quelques  touches,  donnaient 
issue  à  Talr  comprimé,  ce  qui  mettait  les  lames  en  vi- 
bration :  on  était  arrivé  à  Vaccordéon  {V,  ce  mot). 

TYRAN.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bioffra- 
phie  et  d'Histoire. 

TYRANNICIDE  (du  latin  tyrannus,  tyran,  et  cddere. 
tuer),  meurtre  d'un  tyran.  Le  cordelier  Jean  Petit,  après 
le  meurtre  du  duc  Louis  d'Orléans  par  Jean  sans  Peur, 
duc  de  Bourgogne,  en  1407,  soutint  publiquement  qu'on 
a  le  droit  de  tuer  un  tyran.  Cette  doctrine,  condamnée 
en  1416  par  le  concile  de  Constance,  fut  reproduite  dans 
le  traité  De  rege  du  P.  Mariana,  Tolède,  1479. 

TYROLIENNE,  chanson  montagnarde  du  Tyrol,  exé- 
cutée avec  un  mélange  do  la  voix  de  tête,  à  laquelle  oti 
arrive  par  des  coups  de  gosier  particuliers  et  en  fhm- 
chissant  de  grands  intervalles.  —  On  donne  le  même 
nom  à  une  valse,  notée  k  trois  temps  et  en  triolets, 
comme  celle  du  t*'  acte  de  Guillaume  Tell,  par  Rossini. 

TYRONIENNES  OU  TIRONIENNES  (Notes).  V.  Abré^ 
vtATioNs,  sect.  II,  page  8. 


u 


u 


ULM 


u,  31*  lettre  et  5*  voyelle  de  ^alphabet  laiin,  et  de 
ceul  des  langues  modernes  qui  en  dérivent*  Elle  n'a  éiù 
en  usage  qu'à  une  époque  asse^  tardive;  car  on  ne  la  ren- 
contre pas  sur  les  anciens  monuments  graphiques,  In^ 
Bcriptioua  lapidaires  et  médailles,  où  elle  est  remplacée 
par  le  V.  Alors  même  qu'elle  fut  inventée,  on  la  confondit 
encore  avec  cette  lettre  !  Ramus  proposa,  au  xVl*  siècle, 
la  séparation  définitive  des  deux  lettres;  cependant,  jus- 
que dans  la  première  moitié  du  xviit*,  bien  que  fixées 
quant  à  leur  valeur,  elles  furent  mêlées  ensemble  dans 
les  Dictionnaires.  L'U  fUt  introduit  dans  la  l^poS^ftphie 
française  par  Zeitner,  imprimeur  à  Strasbourg,  en  1620. 
Les  Romains,  qui  n'avaient  pas  notre  son  u,  pronon- 
çaient ou  la  voyelle  U ,  et  c'est  la  valeur  que  lui  donnent 
encore  les  Italieus ,  les  Espagnols  et  les  Portugais  t  on 
retrouve  un  souvenir  de  cette  prononciation  dans  certains 
mots  français,  qui  offî'ent  Vu  latin  remplacé  par  ou,  tels 
que  sourd  (de  surdus),  genou  (de  genu),  moult  (de 
multi^s)^  doux  (de  dulcis).  Toutefois,  l'U  latin  ne  doit 
pas  s'être  constamment  prononcé  ou;  car  on  ne  pourrait 
s'expliquer  les  changements  orthographiques  de  m(tru- 
mus  en  maximus,  a'optumus  en  optimus,  pessumus  en 
pessimus,  lubet  en  libet.  Sulla  en  Sylla,  ni  celle  de  divos 
on  divtAs,  etc.  ^-  Vupsilon  (U ,  v)  des  Grecs  a  probable- 
ment fourni  le  modèle  de  l'U  latin.  Mais  il  est  difficile 
d'en  déterminer  le  son  d'une  manière  précise  :  certains 
mots,  tels  que  mus  f  souris  ),  transcription  littérale  du 
grec,  ofl'rent  identité  a'écriture  et  sans  doute  de  pronon- 
ciation, tandis  nue  dans  d'autres,  comme  Lucutlus  (en 
grec  LoukouUos)^  la  transcription  exige  un  groupe  de 
lettres  au  lieu  d'une  lettre  simple.  D'un  autre  côté,  les 
Grecs  modernes  donnent  à  Vupsilon  le  son  de  Vi,  et, 
dans  les  mots  français  qui  dérivent  du  grec,  il  est  con- 
verti 'iz^^.  —  Les  Allemands  donnent  ordinairement  & 
ru  le  son  ou  ;  mais  ils  connaissent  notre  son  u,  et  s'en 
servent  ouand  la  lettre  est  surmontée  d'un  tréma  (Uber, 
fur,  etc.).  Suivie  de  q,  elle  forme  une  articulation  dis- 
tincte, qui  a  la  valeur  de  notre  t).  —  En  français,  le  son 
u  n'est  pas  invariablement  attaché  à  la  lettre  U.  Cette 
lettre  est  presque  toujours  muette  après  le  q,  comme 
dans  que,  qui,  quoi,  quatre,  qualité,  quantité,  querelle, 
quittance,  équilibre,  etc.;  il  n'y  a  d'exception  que  pour 
quelques  mots,  comme  équateur,  aquatique,  quadra- 
%mre,  quadrupède,  etc.,  où  elle  a  la  valeur  piionéiiquc  ou, 


et  pour  d'autre,  Comme  équîtattm,  quëiteur,  é^^Êêstre, 
où  elle  a  le  son  il.  Elle  est  muette  encore  dans  cueillir, 
recueil,  cefouéil,  guet,  guérite,  guéridon,  guidon,  gui- 
tare,  etc.,  et  ne  sert  qu'à  Indiquer  le  caractère  guttural 
du  C  ou  du  G  qui  la  précède.  II  y  a  des  groupes  de 
voyelles  que  noustprononçons  comme  un  aimple  o,  et  o6 
i*U  tient  étymologiquement  la  place  d'une  L  qu'ont  ftiit 
disparaître  les  phases  de  la  dérivation  t  ce  sont  les 
groupes  AU  {haut,  de  altui:  aiUnet  de  Alniit;  fauâ»,  de 
falsus)  et  EAU  {château,  manteau,  oiseau,  qui  ont  /Ut 
d'abord  châtêl^  mantel,  oisel,  etc.].  Un  tréma  sur  TU, 
ou  l'interposition  d'une  H,  détruit  les  fausses  diphthon- 
gués  AU  et  OU ,  et  rend  à  chaque  voyelle  sa  valeur 
propre  :  Ésaii,  SaiU,  Antinous^  AchéloUs,  bahut,  tohu- 
bohu.  Précédée  d'un  E,  la  lettre  U  forme  avec  elle  un 
groupe  qu'on  prononce  en  une  seule  articulation  ^rtl- 
culière ,  comme  dans  Eucharistie,  Eustache,  Eunpidf, 
heureux,  jeune^  meuble,  meute,  etc.;  il  y  a  exception 
pour  j'eus,  fai  eu,  j'eusse,  où  l'on  conserve  au  groupe 
eu  le  son  u,  et  pour  gageure,  où  il  se  prononce  de  même, 
en  donnant  au  g  qui  le  précède  la  valeur  du  j.  De  vieux 
mots,  meur,  seur,  veue,  se  sont  changés  en  mûr,  sûr. 
vue.  Le  groupe  UN  représente  un  son  nasal  particulier  : 
brun,  aucun,  chacun,  lundi.  Le  son  mixte  entre  Tu  et 
Vo,  adopté  chez  nous  pour  rendre  les  terminaisons  latine» 
en  um,  est  conforme  à  la  prononciation  des  Romains,  car 
Plante  dit  sans  cesse  equom,  quom  pour  equum,  gtiitm.— 
En  anglais,  la  lettre  U  possède  trois  valeurs  phonétiques  : 
ou  {flute\  eu  (but),  et  tou  {mute). 

UBIQUISTEK.  V.  Ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d^  Histoire. 

UBIQUITÉ  (du  latin  ubiquitas),  propriété  d'ÔUe  par- 
tout. Dieu  seul  est  doué  d'ubiquité. 

UGAB.  V,  OuoAfi. 

tltr  A^?^*  /  y*  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 
ULÉMAS.  \  ^^^r^P^  «*  d'Histoire. 
ULM  (Le  Munster  d'),  église  cathédrale  de  style  ogi- 
val, l'une  des  plus  importantes  de  l'Allemagne.  Ccm- 
mencée  en  1377,  elle  fût  interrompue  en  1494,  et  on  ne 
Ta  point  achevée  depuis.  Elle  est  toute  en  brique,  excepti^ 
la  façade,  qui  est  en  pierre,  et ,  pour  que  cette  partie  de 
l'édifice  put  avoir  un  caractère  de  magnificence  sans  (klTj 
un  contraste  choquant  avec  les  autres,  l'architecte  l'n  ï)^ 


UNI 


1755 


UNI 


Jonnée,  depuis  la  base  jusqu'au  sommet,  de  lignes  har- 
dies et  élégantes.  Une  seule  tour  compose  tout  ce  por- 
tail ;  les  proportions  en  sont  gigantesques,  et,  bien  qu'elle 
n'ait  été  élevée  qu'à  une  hauteur  de  il2  mot.,  au  lieu  de 
158  qu'elle  devait  avoir,  l'effet  en  est  très-imposant.  Sa 
base  forme  un  porche  à  3  portes  de  hauteur  égale,  haut 
de  15  met.,  profond  de  2  met.,  orné  de  bas^reliefs  et  de 
statues  du  xv*  siècle.  Avant  d'entrer  dans  l'église,  on  tra- 
verse encore  un  vaste  portique,  qui  supporte  l'orgue.  Tout 
l'édifice  intérieur  a  162  met.  de  longueur,  68  de  largeur, 
47  de  hauteur,  et  est  divisé  en  3  nefs.  Les  piliers  de  la 
nef  majeure  sont  tout  couverts  de  sculptures  exquises, 
qui  ne  se  répètent  Jamais.  Les  œuvres  remarquables  que 
contient  la  cathédrale  d'UIm  sont  :  un  baptistère,  sculpté 
dans  le  style  de  transition  de  l'art  gothique  à  l'art  de  la 
Henaissance;  la  chaire  en  pierre,  œuvre  de  Syrliu  ou 
SQrlem  le  fils,  artiste  de  la  localité,  et  dont  le  dais,  aussi 
élevé  que  la  voûte  même  de  l'église,  représente  un  petit 
escalier  qui  tourne  dans  un  berceau  de  trèfles  et  qui  se 
rétrécit  à  mesure  qu'il  s'élève;  les  stalles  du  chœur, 
sculptées  de  1460  à  1474  par  Syrlin  le  père,  et  où  sont 
représentés,  en  trois  étages,  les  personnages  célèbres  du 
paganisme,  ceux  de  la  Bible,  et  divers  sujets  du  Nou- 
veau Testament;  le  tabernacle  du  mattre-autel,  sculpté 
en  marbre  en  1469  par  Adam  Ki'afil,  et  qui  forme  une 
riche  spirale  de  30  met.  de  hauteur;  les  vitraux  du 
chœur,  peints  en  1480  par  Hans  Wild  et  Cramer;  les 
Tonts  baptismaux ,  exécutés  par  Syi  !in  le  père  ;  la  cha- 
pelle Besserer,  intéressante  par  ses  vieux  vitraux  et  ses 
vieilles  peintures.  B. 

ULTIMATUM  (du  latin  ultime,  dernier),  mot  qui  dé- 
signa» dans  les  relations  internationales,  une  résolution 
définitive  et  irrévocable  à  laquelle  s'arrête  un  gouverne- 
ment au  sujet  d'une  chose  en  litige,  une  condition  sans 
Tacceptation  de  laquelle  il  sera  impossible  de  s'entendre. 
Signifier  un  ultimatum ,  c'est  faire  acte  d'intimidation , 
c*est  intimer  un  ordre  que  devra  suivre  le  recours  à  la 
iorce. 

ULTRA.  )  Vt  ces  mots  dans  notre  Dictiof^ 

ULTRAMONTAINS.  \     nairê  de  Biogr.  et  d'Histoire. 

ULTRA  PËTITA,  c-à-d.  en  latin  audtlà  de  ce  qui  a 
été  demandé;  mots  qui  s'emploient,  en  Jurisprudence^ 
cour  désigner  ce  qui  a  été  accordé  par  le  luge  sans  avoir 
été  demandé  par  la  partie.  Les  Jugements  ou  il  a  été  ac- 
cordé ultra  petita  peuvent  être  rétractés  (Code  de  Pro- 
c«dur0,  art.  480). 

ÙBI&O.  V.  ce  mot  dans  notre  Ùktionnaire  de  Biogrch 
phie  et  d'Histoire» 

UNCTUARIUM.  V.  Baiws. 

UNDA-MARIS,  c.-à-d.  en  latin  eau  de  la  mer;  nom 
d*un  Jeu  d*orgue  à  anches,  de  huit  pieds,  accordé  un  peu 
plus  haut  que  les  autres  Jeux,  et  formant 4  à  cause  de 
cela,  une  sorte  de  battement  qui  a  quelque  analogie  avec 
le  battement  des  flots. 

UNIFICATION ,  action  de  s'unir  à  un  autre  être  de 
manière  à  ne  plus  former  qu'un  avec  lui.  L'unification 
avec  Dieu  f  en  grec  aplosiSt  enôsis)  était  la  fin  dernière 
pour  les  Néoplatoniciens  et  pour  le  philosophe  chinois 
Lao^tseu. 

UNIFORME  t  mot  employé  substantivement  depuis  le 
siècle  dernier  seulement,  pour  désigner  l'habit  mili' 
taire,  qui  est  le  même  pour  tous  les  nommes  du  même 
corps.  Il  s'applique,  non-seulement  à  l'habillement  pro- 
prement dit,  mais  aussi  à  la  coiffure,  à  l'équipement , 
aux  marques  dlstinctives,  à  l'armement,  au  harnache- 
ment {V,  Costume).  —  Par  extension,  le  mot  uniforme 
se  dit  aussi  du  costume  des  fonctionnaires  publics  autre 
que  la  robe. 

UNILATÉRAL  (Contrat).  V.  Contrat. 

UNION  (Contrat  d').  K.  Faillite. 

omoN  DOUANIÈRE*  F.  ZoLLVBBBiN,  dans  notre  Diction* 
naire  de  Êiographie  et  d'Histoire, 

UNIPERSONNEL  (Verbe).  V.  Impersonnel. 

UNISSON,  en  termes  de  Musique,  rapport  de  deux 
sons  absolument  semblables  entre  eux  pour  le  degré, 
l'intensité  et  la  durée.  L'unisson  est  produit  par  un  égal 
nombre  de  vibrations  de  deux  corps  sonores  dans  un  égal 
espace  de  temps. 

UNITÉ.  Au  sens  philosophique ,  c'est  une  notion  qui 
se  présente  souvent,  à  différents  titres  :  l'Unité  de  Dieu, 
l'Unité  de  Tàme  humaine  (V.  Dieu  et  Ami)  sont  tout 
autre  chose  que  des  hypothèses;  la  première  est  démon- 
trée par  la  raison ,  la  seconde  attestée  par  l'observation 
intérieure*  D'ailleurs,  ni  en  Dieu  ni  dans  l'homme,  l'unité 
substantielle  n'exclut  la  multiplicité  et  la  variété  des 
Attributs  I  et  une  formule,  dont  on  a  pcut-ôtrc  abusé, 


mais  de  soi  fort  exacte,  assigne  l'unité  dans  la  variété,  m 
réciproquement ,  comme  le  principe  de  tout  ordre  et  la 
loi  de  toute  existence.  11  n'est  point  d'être,  en  effet,  qui 
n'ait  son  unité;  et,  d'un  autre  côté,  l'unité  absolue  sans 
aucune  variété,  en  d'autres  termes'  la  substance  sans 
attribut,  n'est  qu'une  abstraction  à  peine  intelligible  pour 
la  raison  pure.  C'est  pourtant  à  ce  principe,  porté  au  plus 
haut  degré  de  généralisation  possible,  que  quelques  sys- 
tèmes philosophiques  ont  essayé  de  tout  ramener.  Cos 
systèmes  sont  les  systèmes  panàiéistes  anciens,  la  philo- 
sophie de  l'école  d'Ëlée,  le  Platonisme  poussé  à  ses  con- 
séquences extrêmes,  et  surtout  le  Néoplatonisme  alexan- 
drin {V.  ÊLifi,  Platonisme,  Alexandrie  —  École  d'). 
L'Unité  Joue  encore  un  grand  rôle,  quoique  moins  ex- 
clusif, dans  la  philosophie  mathématique  des  Pythago- 
riciens (V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire),  Les  Pythagoriciens,  qui  considéraient  le 
nombre  comme  le  principe  substantiel  des  êtres,  et 
aussi  comme  la  cause  de  leurs  modifications  et  de  leurs 
états  divers,  rapportaient,  suivant  ce  que  dit  positive- 
ment Aristote,  le  nombre  lui-même  à  l'Unité,  comme  à 
son  origine;  et  dans  la  liste  des  principes  opposés  deux 
à  deux,  par  lesquels  quelques-uns  d'entre  eux  expli- 
quaient l'existence  et  l'harmonie  du  monde,  on  trouve 
encore  l'unité  comme  le  contraire  de  la  pluralité,  à  côté 
du  fini  et  de  l'infini ,  de  l'impair  et  du  pair,  du  repos  ot 
du  mouvement,  etc.  B — b. 

UNITÉS  (Les  trois).  Les  vers  de  Boileau  (Art  poéL, 
ch.  m)  sont  la  définition  la  plus  précise  de  ce  qu'on  ap- 
pelle, dans  l'art  dramatique,  les  trois  unités  : 

Qu'en  tm  lieu,  qu*en  tin  jmtr  un  seul  fait  accompli 
Tienne  Jusqu'à  1a  fin  le  tbéfttre  rempli. 

C'est  à  ce  précepte,  entendu  souvent  dans  son  sens  le 
plus  étroit  et  le  plus  rigoureux,  que  se  sont  généralement 
asservis  les  tragiques  français.  Ils  n'ont  produit  sur  la 
scène  que  des  événements  qui  pussent  s'accomplir  en 
auelques  heures  \  tout  au  plus  ont-ils  osé  réduire,  sur  le 
thé&tre,  à  la  durée  d'une  représentation,  des  faits  qui 
eussent,  dans  la  réalité,  rempli  la  longueur  d'un  Jour;  et 
tel  est  le  plan  sur  lequel  ils  ont  uniformément  réglé  la 
marohe  de  leun  pièces,  que  le  drame  le  plus  compliqué 
par  la  multipliciîâ  des  incidents  ou  la  lutte  des  passions 
opposées  n'a  eu,  pour  s'exposer,  se  nouer  et  se  dénouer, 
quune  seule  scène  toujoura  la  môme,  temple,  palais, 
maison  privée,  appartement,  simple  vestibule  ou  anti- 
chambre. Ainsi,  chose  étrange  I  les  fondateura  du  théÀtre, 
en  France,  empruntaient  aux  Espagnols  ou  aux  Grecs  la 
tragédie,  et,  sut  la  foi  d'Aristote,  ils  se  refusaient  systé- 
matiquement les  libertés  dont  les  uns  et  les  autres 
avaient  usé.  En  effet,  les  Espagnols  et,  en  général,  les 
modernes,  n'ont  pas  connu  les  trois  unités  ;  Lope  de  Véga, 
Shakspeare,  Schiller  et  Qœthe  les  ont  violées  comme  à 
plaisir;  et  les  tragiques  arecs,  dont  les  chefs-d'œuvre 
avaient  précédé  la  venue  du  prétendu  législateur  de  l'art 
dramatique,  sont  loin  de  les  avoir  toujoura  observées. 
Ajax,  par  exemple,  dans  la  tragédie  de  Sophocle  qui  porte 
son  nom,  se  tue,  aux  yeux  des  spectateura,  sur  un  coin 
écarté  du  rivage,  et  loin  de  la  scène  où  tout  à  l'heure  il 
dOplorait  avec  amertume  le  déshonneur  où  l'avait  Jeté  un 
insiiiut  de  folie.  Aristote  lui-môme  n*a  pas  formulé  la 
règle  en  toutes  lettres  :  seulement,  en  comparant  la  tra- 
gédie et  l'épopée,  il  remarque  que  la  première  s'efforce 
de  mesurer  sa  longueur  «  sur  une  révolution  de  soleil  ou 
à  peu  près,  »  tandis  que  la  seconde  ne  s'impose  «  aucunes 
limites  précises.  »  Comme  il  n'a  prescrit  nulle  part  en 
termes  plus  formels  l'unité  de  lieu,  les  trois  unités,  ou 
du  moins  celles  du  lieu  et  du  temps,  sont  d'invention 
moderne  et  presque  exclusivement  française. 

Toutefois,  il  ne  manque  pas  de  bonnes  raisons  pour  les 
Justifier,  sinon  pour  les  imposer  malgré  tout  à  tous  les 
sujets.  Rien  n'empôche,  en  effet,  d'envisager  la  tragédie 
comme  un  moment  suprême  où  la  destinée  des  peraon- 
nages.  Jusque-là  suspendue,  va  s'accomplir  enfin;  où 
des  passions  rivales  viennent  se  chercher,  se  rencontrent 
ot  se  livrent  un  dernier  combat;  où  quelque  événemeni 
imprévu  suscite  tout  à  coup,  dans  l'&me  d'un  héros,  entre 
des  sentiments  opposés,  une  lutte  violente,  mais  d'un 
moment,  et  qui  constituera  tout  le  drame.  VOEdipe  à 
Colone  de  Sophocle,  VAthalie  de  Racine,  le  Cid  de  Cor- 
neille, sont  trois  tragédies  conçues  et  traitées  sur  ce 
modèle.  ÔËdipe  arrive  près  du  bourg  de  Colone  ;  là  il  ap- 
prend qu'il  est  entré  dans  le  bois  sacré  des  Euménides, 
où,  selon  la  promesse  de  l'oracle,  doit  s'achever  avec  sa 
vie  la  série  de  ses  longues  et  douloureuses  épreuves.  II 
adresse  sa  prii'nc  aux  redoutables  déesses;  il  refuse  de 


UNI 


1756 


URB 


suivre  Créon,  son  beau-frère,  qui  roulait  le  ramener  h 
Thèbes  ;  il  maudit  les  fils  qui  !*ont  délaissé  ;  il  remet  ses 
lUIcs  entre  les  mains  de  Thésée,  et  enfin  laisse  aux  Athé- 
niens, comme  récompense  de  leur  hospitalité,  son  tom- 
beau, gage  mystérieux  de  victoires  futures.  Les  trois 
unités  ne  sont-elles  pas  dans  Tessence  môme  de  ce  sujet? 
Quelques  heures,  ma  théâtre  comme  dans  la  réalité,  ne 
suftisent-elles  pas  à  Œdipe  pour  en  finir  avec  ses  des- 
tins? Et  le  poète  ne  sutisfait-il  pas  à  la  vraisemblance  en 
amenant  les  uns  après  les  autres  tous  ces  personnages 
sur  la  place  où  va  se  débattre  la  dernière  question  qui 
puisse  intéresser  le  vieil  aveugle,  celle  de  savoir  où  re- 
poseront ses  restes?  —  Un  songe  pousse  Athalie  dans  le 
temple  des  Juifs;  elle  y  retrouve  le  meurtrier  de  la  pro- 
phétique vision,  le  Jeune  Joas,  et  veut  l'en  arracher;  Joad 
la  prévient,  et  fait  couronner  Théritier  de  David.  Encore 
ici ,  les  trois  unités  ne  s'offraient-elles  pas  naturellement 
au  poète? -^  Le  comte  de  Gormas  donne  un  soufllet  à 
don  Diègue  :  sur-le-champ,  voilà  Rodrigue  obligé  de 
provoquer  Tagresseur  en  duel ,  Chimène  de  poursuivre  le 
meurtrier  de  son  père,  tous  deux  de  renoncer  peut-être 
pour  jamais  à  l'union  qui  semblait  si  proche.  Faut-il  donc 
plus  de  vingt-quatre  heures  pour  nouer  et  dénouer  cette 
intrigue,  dût  Rodrigue  prendre  le  temps  de  battre  les 
Mores  sur  la  plage  et  à  la  clarté  des  étoiles?  Tant  il  est 
vrai  que,  dans  maint  événement  tragique,  le  poète  trou- 
vera les  trois  unités,  «  non  comme  causes,  mais  comme 
effets,  »  et  les  observera  plutôt  pour  se  mettre  d'accord 
avec  le  bon  sens  qu'avec  les  préceptes  et  les  conventions 
d'école! 

Néanmoins,  il  ne  nous  parait  guère  possible  d'en- 
fermer indistinctement  tous  les  sujets  dans  le  cercle 
étroit  de  la  théorie  classique  :  le  tenter  serait  s'exposer 
à  violer  la  règle  fondamentale  du  genre  dramatique,  la 
vraisemblance.  Lorsque  Lamotte,  un  des  précurseurs, 
sur  ce  point,  des  romantiques  modernes,  commença,  au 
xviii«  siècle,  la  révolte  contre  les  trois  unités,  il  put  sou- 
tenir qu'il  fallait  les  hasards  les  plus  invraisemblables, 
soit  pour  amener,  comme  dans  le  Cinna  de  Corneille,  les 
divers  personnages  toujours  au  même  lieu ,  qui  sert  aux 
entretiens  du  pnnce,  au  complot  des  conspirateurs,  à  la 
confidence  des  amants,  soit  pour  mener  à  bonne  fin  en 
quelques  heufes  l'intrigue  la  plus  complexe.  Il  affirmait, 
avec  autant  Ae  raison,  que,  du  moment  où  les  specta- 
teurs d'un  théâtre  parisien  se  prêtaient  si  volontiers  à  l'il- 
lusion qui  les  transportait  dans  Athènes,  dans  Rome  ou 
chez  le  Grand-Turc,  leur  imagination  ne  répugnerait  pas 
davantage  aux  changements  de  lieu  d'acte  en  acte,  pour 
peu  que  la  vraisemblance  parût  les  réclamer  ou  seule- 
ment les  autoriser.  Et  pour  confirmer  sa  théorie  par  un 
exemple,  il  s'ingéniait  à  tracer  le  plan  d'une  tragédie  de 
Coriolan  ;  au  1*'  acte,  on  est  sur  le  Forum  ;  Coriolan,  ac- 
cusé par  les  tribuns,  est  condamné  à  l'exil.  Au  2"  acte, 
nous  sommes  au  foyer  du  proscrit  :  sa  mère,  sa  femme 
et  ses  enfants  fondent  en  larmes;  lui-même  les  quitte  et 
s'éloigne  partagé  entre  la  douleur  et  le  désir  de  la  ven- 
geance. Le  3*  acte  nous  mène  chez  les  Volsques  :  Coriolan 
se  présente  à  leur  chef,  et  lui  propose  la  guerre  contre 
Rome,  etc.  Je  ne  serais  pas  étonné,  disait  Lamotte,  qu'un 
peuple  sensé,  mais  moins  ami  des  règles^  s'accommod&t 
de  voir  ainsi  distribuer  en  cinq  actes  cet  épisode  de 
l'histoire  romaine.  A  notre  tour,  nous  dirons  :  qu'un 
poète,  en  lisant  le  récit  des  luttes  que  se  livrèrent  au 
moyen  &ge  les  papes  et  les  empereurs,  Gré^ire  VII  et 
Henri  IV,  Alexandre  III  et  Frédéric  Barberousse,  Inno- 
cent IV  et  Frédéric  II ,  s'avise  d'en  tirer  un  sujet  de  tra- 
gédie. Les  spectateurs  se  refuseront-ils  à  passer  succes- 
sivement, dans  le  cours  de  la  représentation ,  de  la 
demeure  pontificale  au  palais  des  empereurs,  et  &*effa- 
roucheront-ils  si  on  les  invite  à  supposer  qu'ils  ont  mis 
plus  d'un  jour  pour  faire  le  voyage?  Ce  changement  de 
scène  ne  leur  semblera-t-il  pas  aussi  naturel ,  plus  na- 
turel peut-être,  que  si  tous  les  incidents  du  drame  étaient 
systématiquement  circonscrits  entre  les  murs  du  Vati- 
can, ou  dans  un  salon  de  la  grande  comtesse  Mathildc,  la 
célèbre  amie  et  protectrice  des  papes?  Concluons  que,  des 
trois  unités,  celle  d'action  ou  d'intérêt  est  la  seule  que  le 
goût  invite  à  ne  pas  violer;  quant  aux  deux  autres,  les 
nécessités  de  la  vraisemblance  doivent  déterminer  dans 
quelle  mesure  il  convient  de  les  observer  ou  de  les  en- 
freindre. lûA  Anglais,  les  Allemands,  les  poètes  français 
de  nos  Jours,  ont  secoué  leur  joug  d'une  manière  nulle- 
ment choquante  et  souvent  heureuse;  par  là  ils  ont  donné 
à  leurs  œuvres  plus  d'intérêt.  A.  H. 

UMVERSAUX.  Ce  sont  les  idées  ou  les  termes  géné- 
raux, distingués  logiquement  en  cinq  classes,  suivant  ce 


2 


u'ils  nous  fout  connaître  de  la  nature  ou  des  propriétés 

es  choses  qu'ils  expriment.  Dans  la  nature  des  choses, 
les  termes  généraux  se  peuvent  rapporter  :  l**  soit  à  ce 
qu'elles  ont  d'essentiel  en  commun  avec  d'autres  choses: 
il  est  essentiel  au  triangle  d'être  une  figure  rectiligne; 
mais  cela  lui  est  commun  avec  beaucoup  d'autres  figures; 
à  rhomme  d'être  animal,  mais  cela  lui  est  commun  avec 
les  poissons  et  les  oiseaux,  etc.;  c'est  le  Genre:  2o  soit 
à  ce  qu'elles  ont  d'essentiel  et  de  propre  à  la  fois,  comme 
d'être  une  figure  rectiligne  à  trois  côtés,  ou  un  animiil 
raisonnable  ;  c'est  V espèce;  3»  dans  leurs  propriétés,  soit 
à  celles  qui  distinguent  l'espèce  du  genre,  et  empêchen 
qu'elle  ne  soit  confondue  avec  les  autres  espèces  du 
même  genre  ;  dans  les  exemples  précédents,  raisonnable, 
avoir  trois  côtés;  c'est  La  différence,  appelée  quelque- 
fois plus  précisément  différence  spéci/ique;  4»  soit  à  quel- 
que manière  d'être,  qui  est  une  dépendance  intime  de  la 
différence;  par  exemple,  pour  l'homme,  parce  qu'il  est 
doué  de  raison ,  avoir  la  notion  du  beau  dont  les  animaux 
sont  privés,  et,  pour  le  triangle,  avoir  la  somme  des 
angles  égale  à  trois  droits  :  c'est  le  propre;  5<*  soit  enfin 
à  quelque  manière  d'être  fortuite,  nullement  essentielle 
à  l'espèce,  et  faute  de  laquelle  elle  ne  laisserait  pas  de 
subsister;  pour  l'homme,  d'être  plus  ou  moins  gai ,  bon, 
spirituel  ;  pour  le  triangle,  d'avoir  telles  ou  telles  dlmco- 
sions;  c'est  Vaccident.  Aristote  parait  avoir,  le  premier, 
fait  ces  distinctions  ingénieuses,  de  peu  d'usage  pour  h 
'pratique  peut-être  ;  mais,  s'il  sert  peu,  comme  disent  le< 
auteurs  de  la  Logique  de  Port-Royal ,  de  savoir  qu'il  y  ;i 
des  genres,  des  espèces,  des  différences,  des  propres  et 
des  accidents,  du  moins  est-il  important,  de  leur  aveu, 
de  reconnaître  les  vrais  genres  des  choses,  les  vraies  es- 
pèces do  chaque  genre,  leurs  vraies  différences,  leurs 
vraies  propriétés,  et  les  accidents  qui  leur  conviennent. 
Bossuet,  qui  a  fondu  en  grande  partie  dans  sa  Logiqw 
le  petit  traité  de  Porphyre,  connu  sous  le  nom  d'Isagoç' 
ou  Introduction  (  De  quinque  vocibus,  seu  in  Categortas 
Aristotelis  Introductio) ^  résume,  dans  les  termes  sui- 
vants, la  nature  des  cinq  Universaux  :  1<*  le  genre  est  ce 
qui  convient  à  plusieurs  choses  différentes  en  espèces; 
2^  Vespèce  est  ce  qui  convient  à  plusieurs  choses  diffé- 
rentes seulement  en  nombre  ;  3»  la  différence  est  ce  par 
quoi  nous  entendons  qu'une  chose  diffère  d*une  autre  en 
essence;  4*^  le  propre  est  ce  qui  dst  entendu  dans  la 
chose  comme  une  suite  de  son  essence  ;  5<>  Vaccident  est 
ce  qui  peut  être  présent  ou  absent  sans  que  le  sujet  pt- 
risse.  —  Ce  senties  Universaux  qui  donnèrent  lieu  à  la 
fameuse  querelle  scolastique  dite  tantôt  des  Universaur, 
tantôt  des  Réalistes  et  des  Nominalistes  {V.  Scolastiqde  . 
Sur  les  Universaux,  au  point  de  vue  théorique,  V.  nos 
articles  Genre,  Espèce,  Différencb,  Propre,  Accident: 
Aristote,  Topiqites;  tous  les  anciens  traités  de  Logique; 
la  Logique  de  Port-Roy  ai ,  I,  7,  et  Bossuet,  Logique,  ), 
38-50.  B. 

UNIVERSITAIRES  (Produits).  Ils  se  composent  :  !•  àr 
la  dotation,  des  rentes  et  des  domaines  appartenant  à 
l'Université;  2^  du  droit  annuel  dû  par  les  chefs  d'insti- 
tution et  par  les  maîtres  de  pension;  3°  des  droits  à  pei- 
cevoir  dans  les  Facultés  de  Droit ,  de  Médecine,  de  Thé<!- 
logie,  des  Sciences,  et  des  Lettres,  ainsi  que  dans  le^ 
Écoles  de  pharmacie.  Ils  font  partie  des  impôts  directs. 

UNIVERSITÉ.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire» 

UN  PAR  CONTRE,  négociation  de  lettres  ou  billets  de 
change  contre  d'autres. 

UPANISHADS.  V.  Indienne  (Littérature). 

URANION,  sorte  de  mélodium  inventé  en  1810  par  un 
Saxon  nommé  Buschmanq. 

URAMSTES  et  JOBKLINS,  nom  donné  à  deux  partis 
qui  s'étaient  formés  au  xvu*  siècle,  et  qui  soutenaient  la 
supériorité,  l'un  du  sonnet  à*Uranie  par  Voiture,  l'autre 
au  sonnet  de  Job  par'Benserade. 

URBANITÉ  (du  latin  urbanit<is),  mot  d'origine  et  de 
famille  latine,  et  qui  a  eu  quelque  peine  à  prendre  droit 
de  cité  chez  nous.  Quintilîen  en  donne  cette  définition  : 
tt  On  appelle  Urbanité  une  manière  de  s'exprimer  qui, 
dans  les  termes,  le  ton,  la  prononciation,  fait  d'abord 
reconnaître  un  certain  goût  particulier  à  la  Ville,  sorte  do 
savoir  pris  dans  le  commerce  des  gens  instruits;  enfin, 
c'est  le  contraire  de  la  Rusticité  {InstU,  oral.,  VI,  3).  r 
C'était,  comme  il  le  dit  plus  bas,  le  ton  propre  à  la  so- 
ciété polie  de  Rome  :  «  VUrbaniÛ,  cette  qualité  propre  n 
notre  Ville,  et  qu'on  n'a  commencé  de  nommer  ains^i 
qu'après  qu'il  fut  reçu  de  dire  la  Ville,  sans  y  ajouter  le 
nom  propre  de  Rome.  »  L'Urbanité  romaine  était  con.- 
patibleavec  la  licence  d'esprit  que  pouvaient  se  permettre 


USA 


1757 


USU 


los  honnêtes  gens;  ainsi  la  raillerie,  la  satire  s'y  mùlaionf , 
au  moins  vers  la  fia  de  la  République,  du  temps  de  Cicé- 
ron ,  qui  s'exprime  ainsi  sur  ce  sujet  :  «  La  médisance 
ne  veut  que  faire  outrage...;  si  elle  est  enjouée,  on  la 
nomme  Urbanité  {Pro  Cœlio,  3).  »  —Et  ailleurs  :  «  C'est 
affaire  aux  ignorants  de  vouloir  qu'après  leur  mort  on 
donne  des  festins  pour  honorer  leur  mémoire.  Comment 
ces  festins  se  passent-ils,  et  comme  vous  vous  exposez  à 
toute  VUrbanité  des  hommes  facétieux  {De  Finib,,  II,  31)  !» 
—  C'est  encore  là,  sauf  des  nuances  que  nous  dirons  tout 
à  l'heure,  le  vrai  sens  du  mot  Urbanité,  et  il  n'y  aurait 
que  par  un  fâcheux  oubli  des  origines  qu'on  voudrait  en 
jiire  une  sorte  de  synonyme  du  mot  Politesse.  «  L'Urba- 
nité ne  fut  connue  que  tard  à  Rome,  »  dit  Quintilien  ;  cela 
devait  être,  car  elle  est  le  fruit  d'une  civilisation  perfec- 
tionnée. En  France,  elle  commença  avec  la  société  pré- 
cieuse du  xvn*  siècle  :  mais  bien  des  gens  repoussèrent 
le  mot  comme  un  mauvais  néologisme,  même  après  que 
TAcadémie  l'eut  admis  dans  la  1'*  édition  de  son  Diction- 
naire, en  1694,  avec  cette  définition  :  o  Politesse  que 
donne  l'usage  du  monde.  »  Elle  parut  se  repentir  dans 
la  3*  édition,  publiée  en  1740,  car  elle  mit  à  sa  définition 
cette  sorte  de  correctif  :  «  Ne  se  dit  guère  au'en  parlant 
de  la  politesse  des  anciens  Romains.  »  C'était  encore 
l'opinion  à  peu  près  générale  en  1771,  lorsque  l'on  pu- 
blia la  î*  édition  du  Dictionnaire  de  Trévoux.  Assez  lonjg- 
temps  auparavant,  Marmontel ,  dans  ses  Éléments  de  lit- 
tércUure,  avait  donné  la  définition  suivante,  qui  est  bien 
celle  de  VUrbanité  française,  mais  au'il  appela  le  bon 
ton  :  «  Le  naturel  dans  la  politesse,  la  délicatesse  dans 
la  louange,  la  finesse  dans  la  raillerie,  la  légèreté  dnns 
le  badinage,  la  noblesse  et  la  grilce  dans  la  galanterie, 
une  libei^  mesurée  et  décente  dans  le  lan^e  et  les 
manières,  et,  par-dessus  tout,  une  attention  impercep- 
tible de  distribuer  à  chacun  ce  qui  lui  est  dû  de  distinc- 
tion et  d'égards.  »  On  voit  que  cette  Urbanité  est  un 
perfectionnement  de  l'Urbanité  romaine.  La  dernière  édi- 
tion du  Dictionnaire  de  V Académie  (celle  de  1835),  de 
cette  compagnie  où  l'on  pratique  éminemment,  au  moins 
dans  les  discours  publics,  tous  les  genres  de  civilisation 
polie  et  de  fines  convenances  du  meilleur  monde,  donne 
une  définition  incomplète  et  peu  exacte  de  VUrbanité, 
qu'elle  confond  avec  la  politesse,  chose  toute  banale  à 
laquelle  tout  le  monde  peut  atteindre,  saluts  et  révé- 
rences mis,  pour  ainsi  dire,  en  paroles  en  même  temps 
qu'en  action  :  on  peut  être  très-poli  et  très-gauche  en 
même  temps.  L'Urbanité  française,  qui  n'admet  la  gau- 
cherie en  rien,  est  donc,  dans  sa  nuance  la  plus  géné- 
rale, cette  fleur  d'esprit  plaisante,  légère,  piquante, 
satirique,  toujours  de  bon  ton  et  de  bon  goût,  fine  ou 
délicate,  et  dont  Paris  est  et  fut  toujours  le  foyer  le  plus 
actif,  comme  le  modèle  le  plus  parfait.  Ce  qui  rend  la 
société  parisienne  si  sympathique ,  si  aimable,  si  amu- 
sante; ce  qui  fait  qu'il  éclôt,  qu'il  se  produit,  qu'il  se 
dépense  plus  d'esprit  en  une  seule  journée  à  Paris  que 
dans  tel  autre  royaume  tout  entier  de  l'Europe,  c'est 
l'Urbanité.  C.  D— y. 

URCÉOLÉE  (Corbeille),  corb^Ue  de  chapiteau  qui  est 
un  peu  resserrée  au-dessous  de  son  sommet. 

URNE.  V.  notre  Dict.  de  Biogr.  #f  ff  Histoire. 

URNL  V.  1m)h-n  (Art). 

US  >,du  lui  lu  Uàsxs,  usage,  coutume),  terme  de  Droit 
^ui  se  joint  presque  toujours  à  coutumes  (  les  us  et  cou- 
tumes) ^  et  qui  signifie  les  règles,  la  pratique  qu'on  est 
habitué  à  suivre  en  quelque  lieu  touchant  certaines  ma- 
tières. 

USAGE  (du  latin  i^sus),  s'entend  vulgairement  d'une 
coutume,  d'une  pratique  reçue.  En  termes  de  Jurispru-, 
dence,  c'est  «  le  droit  de  prendre  sur  les  fruits  d'autrui 
ce  que  l'on  peut  consommer  pour  ses  besoins,  ou  ce  qui 
est  accordé  par  le  titre  constiti:tif.  »  Les  droits  d'usage 
s'établissent  et  se  perdent  de  la  même  manière  que  l'usu- 
fruit  (  V.  ce  mot).,  avec  cette  différence  qu'il  n'y  a  point 
d'usage  établi  par  la  loi,  comme  il  y  a  un  usufruit.  C'est 
ordinairement  le  titre  qui  établit  et  règle  les  droits 
d'usage.  Si  le  titre  ne  s'explique  pas  sur  rétendue  de  ces 
droits,  Vusager,  c-à-d.  celui  à  qui  l'on  a  accordé  Tusage 
des  fruits  d'un  fonds,  ne  peut  en  exiger  qu'autant  qu'il 
lui  en  faut  i^our  ses  besoins  et  ceux  de  sa  famille  (ses 
descendants  et  les  parents  à  qui  il  doit  des  aliments); 
autrement  l'usage  serait  un  droit  d'usufruit.  H  ne  peut 
donc  ni  louer  la  chose,  ni  la  céder  gratuitement  à  un 
autre,  même  pour  le  simple  usage,  ni  vendre  les  fruits 
supo^flus,  comme  le  peut  l'usufruitier.  Le  droit  d'usage 
peut  être  établi  par  acte  entre  vifs  ou  de  dernière  volonté^ 
%  titre  gratuit  ou  onéreux  ;  on  ne  peut  l'exercer  sans 


donner  caution,  et  sans  faire  des  états  et  inventaires  des 
choses  soumises  à  l'usage  {Code  Napol.,  art.  625-30).  — 
Autrefois  on  distinguait  les  francs  usagers,  qjai  ne  payaient 
rien  ou  presque  nen;  les  gros  usagers,  qui  avaient  le 
droit  de  prendre  dans  la  forêt  d'autrui  un  certain  nom- 
bre de  perches  ou  d'arpents  de  bois;  les  menus  usagers, 
qui  n'avaient  que  le  droit  de  pâturage  et  la  liberté  de 
prendre  le  bois  mort  et  épars,  tombé  ou  non.  Les  Ar« 
chives  générales  de  l'Empire,  à  Paris,  possèdent  une 
collection  précieuse  des  Déclarations  ausages  faites  au 
XVII*  et  au  xvTii'  siècle  par  les  communes  qui  étaient  en 
possession  de  droits  d'usage  dans  les  forêts  d'autrui. 

USAGES  LOCAUX,  règles  établies  dans  certains  lieux 
pour  l'exécution  des  conventions,  et  qui»  sans  être  déter- 
minées par  la  loi ,  sont  adoptées  par  tout  le  monde.  Ce 
qui  est  ambigu  s'interprète  par  ce  qui  est  d'usage  {Code 
Napol.,  art  1159).  Les  usages  locaux  sont  obligatoires 
en  certains  cas,  surtout  dans  le  silence  de  la  loi;  par 
exemple,  en  matière  de  locations  et  de  congés.  V.  Clau- 
sade.  Usages  locaux  ayant  force  de  loi,  1843,  in-S**. 

USANCE  (du  latin  usus),  en  termes  de  Banque,  délai 
de  30  jours  qui  est  accordé  pour  le  payement  d'une  lettre 
de  change  à  celui  sur  qui  elle  est  tirée.  On  dit  en  ce  sens 
qu'une  lettre  est  payable  à  deux  ou  trois  usances.  L'usance 
avait  originairement  l'étendue  que  lui  donnait  l'usage  de 
chaque  lieu;  c'est  l'ordonnance  de  1673  qui  la  fixa  à 
30  jours,  disposition  confirmée  par  notre  Code  de  Com- 
merce, 

USATIQUES ,  titre  d*un  code  de  lois  publié  en  latin  h 
Barcelone  en  1068,  traduit  en  catalan  en  1413,  et  qui  était 
encore  en  vigueur  dans  la  Catalogne  au  xviii*  siècle. 

USINE  (du  latin  usus,  utilité),  se  dit  de  tout  établis- 
sement de  fabrication  industrielle  dont  les  produita  sont 
obtenus  plutôt  par  l'action  des  machines  que  par  le  tra- 
vail seul  des  ouvriers. 

USTENSILE  (du  latin  uti,  se  servir),  se  dit  de  tontes 
sortes  de  petite  meubles  servant  au  ménage,  spécialement 
à  la  cuisine. 

USTRINE.       l  F.  ces  mota  dans  notre  Dictionnaire 

USUCAPION.  S     de  Biographie  et  d* Histoire. 

USUFRUIT  (du  latin  usus  fructûs,  usage  du  fruit,  du 
revenu),  droit  de  jouir  des  choses  dont  un  autre  a  la 
propriété,  comme  le  propriétaire  lui-même,  mais  à  la 
charge  d'en  conserver  la  substance.  Il  s'établit  par  la  volonté 
de  l'homme  ou  par  la  loi,  c.-à-d.  qu'il  est  conventionnel 
ou  légal.  L'usufruit  légal  est  celui  que  la  loi  accorde  aux 
pères  et  mères  sur  les  biens  de  leurs  enfanta  pendant 
que  ceux-ci  sont  sous  leur  puissance,  et  au  man  sur  les 
biens  de  la  communauté  et  sur  les  biens  dotaux  de  sa 
femme.  L'usufruit  conventionnel  peut  être  établi  par  tes- 
tament, par  donation  entre  vifs,  ou  par  convention  ;  la 
loi  permet  de  le  constituer,  soit  purement  et  simplement, 
soit  à  durée  fixe,  soit  sous  une  convention  suspensive  ou 
résolutoire;  on  peut  en  faire  profiter  des  communes  et 
des  établissements  publics,  aussi  bien  que  de  simples 
particuliers.  Celui  en  faveur  duquel  est  constitué  l'usu- 
fruit ne  peut  entrer  en  jouissance  qu'après  avoir  fait 
dresser,  en  présence  du  propriétaire,  un  inventaire  des 
meubles  et  un  état  des  immeubles  soumis  à  l'usufruit,  et 
avoir  donné  caution  de  Jouir  en  bon  père  de  famille. 
L'usufruit  est  personnel;  à  moins  de  stipulation  con- 
traire, il  ne  passe  point  aux  successeurs  de  la  personne 
au  profit  de  laauelle  il  a  été  établi.  Tout  usufruitier  doit 
acquitter  les  charges  annuelles  de  la  propriété  dont  il 
jouit,  telles  qp'impôta  et  contributions,  arranges  de 
rentes,  et  pensions  alimentaires.  Il  a  le  droit  de  louir  de 
toute  espèce  de  fruita,  soit  naturels,  soit  industriels,  soit 
civils,  nue  peut  pro  luire  l'objet  dont  il  a  l'usufruit;  C6 
droit  s'étend  à  tous  les  produita  utiles  ou  de  simple  agrè* 
ment,  tels  que  chasse,  pêche,  etc.  Toutefois,  le  mode  de 
jouissance  et  l'étendue  du  droit  varient  suivant  la  nature 
des  objeta  :  si  l'usufruit  comprend  des  choses  mobilières 
qui  se  détériorent  par  l'usage  (linge,  meubles  meublante), 
il  n'est  tenu  de  les  rendre,  à  la  fin  de  l'usufiniit,  que 
dans  l'état  où  elles  se  trouvent,  pourvu  qu'elles  n'aient 
pas  été  détériorées  par  sa  faute.  S'il  s'agit  de  choses  fon- 
gibles,  l'usufruitier  doit  en  rendre  de  pareille  quantité, 
qualité  et  valeur;  d'animaux,  il  doit  leur  conserver  leqr 
destination  ;  de  créances  ou  de  rentes,  il  en  perçoit  les 
intérête  ou  revenus;  de  maisons  et  bâtiments,  il  a  le 
droit  de  les  habiter  ou  de  les  louer,  mais  non  de  changer 
leur  destination  ou  leur  distribution  ;  de  biens  ruraux,  il 
dispose  des  fruita  naturels  et  industriels,  et  Jonit,  à  titre 
gratuit  ou  onéreux,  des  objete  attachés  au  senrice  du 
fonds,  tels  que  bestiaux  et  ustensiles  aratoires  ;  de  bois 
et  forêts,  il  doit  observer  l'ordre  et  la  quotité  des  coapef 


UTI 


1758 


UTO 


leloo  Tusagc  constant  des  propriétaires,  et  ne  peut  tou- 
choT  aux  afbres  d^  haute  futaie,  ai  ee  n'est  pour  faire 
des  réparations.  L'usufruitier  ne  peut  réclamer  de  dé- 
dommagements pour  améliorations  ou  embellissements; 
mais  il  a  le  droit  d'enlever  les  ornements  qu'il  aurait 

E lacés  sur  le  fonds,  en  rétablissant  Tancien  état  des  lieux, 
'usufruit  s'éteint  :  l'par  la  mort  de  l'usufruitier;  2"  par 
l'expiration  du  temps  fixé  pour  sa  durée,  ou  par  l'événe- 
ment de  la  condition  résolutoire;  3*  par  la  consolidationt 
c.-à-d.  par  la  réunion  en  la  mC^me  personne  des  droits 
de  propriétaire  et  d^usufruitier;  4*  par  le  non-usage; 
50  par  la  perte  totale  de  la  chose;  6*  par  la  renonciation 
de  l'usufruitier;  7*  par  la  résolution  du  droit  de  celui 
qui  Pavait  constitué;  8*  par  l'abus  de  Jouissance.  Attri* 
bué  à  des  communautés,  il  s'éteint  ptir  30  ans.  V.  6al- 
viat,  Traité  de  l'usufruit,  de  l'usage  et  de  l'habitation, 
1817,  3  vol.  in-S*»;  Proudhon ,  Traité  des  droits  d'usu- 
fruit, 3«  édit.,  1836-48,  7  vol.  in-8»;  Genty,  Traité  des 
droits  d'usufruit,  d'usage  et  d'habitation  diaprés  le  Droit 
romain,  1854,  in-8°;  Lesenne,  De  la  Propriété  avec  ses 
démembrements,  iHb%y  in-80. 

USURE  (du  latin  usura,  nsage),  mot  qni  signifla 
d'abord  l'intérêt  de  l'argent,  le  loyer  de  son  usage  ou  de 
sa  jouissance,  et  qui,  pris  ensuite  dans  une  acception  dé- 
favorable, n'a  plus  designé  qu'un  intérêt  exorbitant,  su- 
périeur au  taux  fixé  par  la  loi  (V.  Intérêt).  On  nomme 
usurier  celui  qui  prête  à  un  taux  illégal.  Tout  individu 
convaincu  de  se  livrer  habituellement  à  Tusure  est  puni 
correctionnellement  d'une  amende  qui  peut  s'élever  Jus- 

3u'à  la  moitié  des  capitaux  nu'il  aura  prêtés  à  usure,  et 
'un  emprisonnement  de  6  Jours  à  6  mois  ;  s'il  y  a  eu 
escroquerie  de  sa  part,  il  est,  en  outre,  condamné  à  un 
emprisonnement  qui  ne  peut  excéder  deux  ans  ;  un  fait 
unique  dfS  Técidive  entraine  le  maximum  de  la  peine, 
que  le  Juge  peut  encore  porter  au  double  (Lois  du  3  sept. 
1807  et  du  19  déc.  1850).  Les  Économistes  modernes  pen- 
sent que  le  taux  de  l'intérêt  ne  devrait  point  être  limité, 
et  que,  par  conséquent,  le  délit  d'usure  ne  devrait  pas 
exister  :  l'argent,  disent-ils,  est  une  simple  marchandise, 
un  instrument  d'utilité  générale,  un  agent  de  production 
ou  de  travail^  et,  à  ce  titre,  11  doit  être  loisible  à  celui 
qui  le  possède  d'en  louer  l'usage  à  telles  conditions  qu'il 
luge  convenable,  le  prix  étant  librement  débattu  entre 
.  le  prêteur  et  l'emprunteur  ;  ils  croient  que  la  concurrence 
>  offrirait  un  correctif  à  l'avidité  du  prêteur,  et  maintien- 
drait llntérêt  de  l'argent  à  un  niveau  assex  bas  pour  être 
accessible  à  tous  et  dans  un  équilibre  presque  stable. 
V.  UsuRB,  dans  notre  Dictionnaire  de  Bidgraphie  et 
d'Histoire,  et  les  auteurs  suivants  :  J.  Bentham,  Défense 
de  l'usure,  Londres,  1787;  Chardon,  De  l'Usure  dans 
l'état  actuel  de  la  législation,  Paris,  1823,  in-S";  Gar- 
nier.  Traité  de  l'Usure,  18^6,  in-IS;  Petit,  Traité  de 
l'usure,  4840,  in-8«;  Harin-Darbel,  De  l'Usure,  in-18. 

USURPATION  (du  latin  usu  arripere)^  en  termes  de 
Droit,  action  de  s'emparer,  par  violence  ou  par  ruse,  d'un 
bien,  d'un  titre,  d'une  dignité  qui  appartient  à  un  autre. 
L'usurpation  d'une  fonction  publique  est  punie  d'un  em- 
prisonnement de  2  à  5  ans;  celle  d'un  costume  ofTIciol  ou 
d'une  décoration  honorifique  est  punie  d'un  emprisonne- 
ment de  6  mois  à  S  ans  {Code  pénal,  art.  258  et  250). 
Les  demandes  qui  ont  pour  objet  les  usurpations  de 
terres,  arbres,  haies,  fossés  et  autres  clôtures,  commises 
dans  l'année,  doivent  être  portées  devant  le  juge  de  paix 
du  lieu  où  est  situé  l'objet  litigieux  {Code  de  Procédure, 
art.  3). 

UT,  note  de  musique,  la  1**  de  notre  gamme  naturelle. 
Les  Allemands  la  nomment  C.  Les  Italiens  ont  remplacé 
dans  la  solmisation  la  syllabe  utpar  la  syllabe  do,  comme 
plus  douce  et  plus  sonore. 

UTÉRIN,  UTÉRINE,  se  disent  des  frères  et  sœurs  nés 
de  même  mère,  mais  non  de  même  père. 

UTILITARISME,  théorie  professée  au  commencement 
de  notre  siècle  par  Jérémie  Bentham,  et  d'après  laquelle 
l'utile  ou  Vuliltté  générale  doit  être  le  seul  principe  du 
bien.  Ceui  oui  l'acceptent  sont  dits  Utilitaires,  Ben- 
tham poussait  jusqu'aux  plus  extrêmes  conséquences 
l'application  de  sa  théorie,  non"«eulement  dans  la  législa- 
tion et  l'administration  publique,  mais  encore  dans  la 
conduite  privée  des  individus. 

UTILl'TÉ,  en  termes  d'Économie  politique,  propriété 
(ra'ont  les  choses  de  servir  à  l'homme.  L'utilité  est  immé- 
aiate,  dans  les  objets  dont  on  peut  user  immédiatement  ; 
ou  médiate^  dans  ceux  ayant  une  valeur  qui  peuts  ervir 
à  se  procurer  d'autres  objets  d'usage  immédiat.  Les  objets 
de  consommation  ont  une  utilité  immédiate;  une  somme 
d'argent,  un  titre  de  rente,  un  elTet  de  comuierce. 


ont  une  utilité  médiate.  La  mesure  de  l'utilité  d*un  objet 
est  le  prix  que  le  Jugement  des  hommes  attache  à  cet 
objet  et  la  satisfaction  qu'ils  en  retirent  :  rutijité  est 
donc  le  fondement  de  la  demande  qu'on  fait  des  produitst 
et  par  conséquent  de  leur  valeur, 

UTILITÉS,  en  termes  de  Théâtre,  acteurs  qiil  ne  Jouent 
que  des  bouta  Je  rêle.  Ils  occupent  un  rang  inteniiédiairB 
entre  les  douhlures  et  les  comparses, 

UTOPIE  (du  grec  ou,  non,  et  ^os,  lieu),  signifie  une 
chose  qui  ne  se  trouve  nulle  part;  c'est  ié  nom  que  Tho- 
mas Morus  donna  à  la  République  imaginaire  dont^  à 
l'exemple  de  Platon,  Il  se  plut  à  tracer  le  plan  dans  le 
livre  intitulé  :  De  optimo  statu  reipublicœ  deQ\êê  nova 
insuJa  Utopiœ^  Louvain,  1516,  in-4",  plusieurs  fbis  réim- 
primé. Tel  fut  le  succès  de  ee  livre  chimérique,  maif 
brillant  ;  telles  sont  aussi  les  ressemblances  que  présen* 
tent  entre  eux  les  plans  de  réforme  sociale  sortis  dt 
l'imagination  des  écrivains  qui  n'ont  été  pour  la  plupart 
que  des  théoriciens,  que  le  nom  propre  est  devenu  com- 
mun, et,  par  un  effet  rétroactif,  s'applique  même,  dans  le 
passé,  à  la  République  de  Platon  :  ce  livre,  VUtopie,  la 
Cité  du  Soleil  de  Campanella,  la  Nova  Atlantis  de  Bacon, 
l'Oc^ofia  d'Harrington ,  V Histoire  des  Sévarambes  de 
Vairasse  d'Alais,  la  Salente  de  Fénelon,  la  Polysynodif 
de  l'abbé  de  Saint-Pierre,  et,  de  nos  jours,  les  doctrine) 
sociales  et  poHtiaues  de  Saint-Simon,  Ch.  Fourier,  Ro- 
bert Owen  et  de  leurs  disciples,  forment  la  liste  des  prin- 
cipales utopies.  M.  L.  Reybaud,  dans  un  livre  i^gré^le  et 
instructif,  a  traité  des  Utopies  contemporaines,  {j'auteur 
de  cet  article  avait  réuni  les  éléments  d'un  travail  ana- 
logue sur  les  Utopies  antérieures  au  xix*  siècle.  Pe- 
vancé  par  un  hoporable  et  savant  membre  de  l'Institut, 
M.  Franck,  qui  en  a  fait  le  sujet  de  ses  Leçons  au  Collège 
de  France  et  d'articles  publies  par  différentes  Revues,  il 
a  dû  renoncer  à  son  sujet.  Nous  tirons  seulement  des 
notes  que  pous  avions  recueilliios  quelques  renseigne- 
ments qui,  en  faisant  connaître  précisément  dans  ses 
traits  principaux  VUtopie  de  Thomas  Morus,  donneront 
en  même  temps,  en  raison  de  la  ressemblance  précédem- 
ment signalée,  une  idée  approximative  assex  exacte  de 
toutes  celles  dont  on  n'a  pas  eru  devoir  donner  ici  une 
exposition  spéciale. 

Thomas  Morus  feint  qu'il  tenait  ses  renseignements 
sur  l'histoire  et  les  institutions  de  l'Ile  d'Utopie  d'un 
certain  Rafaël  Hytlodeus,  voyageur  portugais  qu'il  aurait 
rencontré  à  Anvers  en  1513.  L'itinéraire  de  Rafaël  et  la 
géographie  des  régions  utopiennes,  quoique  présentés 
sous  une  forme  un  peu  plus  sérieuse,  valent,  au  fond,  ee 
oue  valent  les  plaisanteries  inspirées  à  Rabelais  bien 
évidemment  par  le  livre  de  son  illustre  contemporain  : 
«  De  là  partans  firent  voile  au  vent  de  la  Transmontane, 
passans  par  Méden  (nul),  par  Uti  (aucun),  par  Uden  (rien), 
par  Gelasen  (pour  rire^,  par  les  isies  des  Phéiss,  ei 
jouxte  le  royaume  de  Acnorie  (sans  lieu);  finalement  ar- 
rivaient au  port  de  Utopie,  distant  de  la  ville  des  Amau- 
rotes  par  troys  lieues  et  quelque  peu  dadvantaige.»  Quoi 
qu'il  en  en  soit,  et  quelque  part  qu'elle  soft  située, 
rUtopie  est  une  lie;  ce  détail  n'est  pas  indifférent  comme 
moyen  de  préserver  ses  habitants  du  contact  des  popu- 
lations étrangères,  et  d'assurer  la  durée  des  Institutions 
qu'ils  ont  reçues  de  leur  roi  Utopus.  Son  étendue  est  h 
peu  près  celle  de  la  Sicile;  elle  contient  54  villes,  toutes 
spacieuses  et  magnifiques,  toutes  b&ties,  autant  que  pos- 
sible, dans  les  mêmes  conditions,  à  égale  distance  les 
unes  des  autres  et  au  centre  de  territoires  équivalents, 
sinon  absolument  égaux;  de  sorte  que  qui  a  vu  l'une 
d'elles  a  vu  toutes  les  autres.  Parcourons  Amaurole,  la 
«capitale.  Nous  y  trouverons  de  vastes  bâtiments  uni- 
formes {aulœ)^  espèces  de  phalanstères  habités  chacun 
par  un  groupe  de  30  familles  désigné  par  le  nom  bizarre 
de  Syphograntie.  Ici  arrêtons-nous  un  instant.  Le  mo- 
bile de  Th.  Morus,  en  composant  son  Utopie,  a  été,  d'une 
part,  la  douloureuse  indignation  que  causait  à  son  &mc 
généreuse  le  spectacle  des  misères  et  des  vices  inhérents 
à  l'état  social,  et,  de  l'autre,  le  désir  d'y  porter  le  re- 
mède comme  tous  les  réformateurs  de  cette  catégorie. 
Triomphant  dans  la  critique  et  dans  la  négation,  mnis 
singulièrement  inférieur  dans  l'invention  de  ce  qu'il  veut 
substituer  à  ce  qui  est,  c'est  surtout  dans  la  propritHé 
qu'il  a  vu  l'origine  des  maux  de  la  société,  de  la  richesse 
excessive  des  uns  et  de  l'extrême  misère  des  autres,  de  Is 
dureté  de  ceux-là  et  de  l'envie  farouche  de  ceux-ci,  enfin 
des  vices  de  tous;  et  il  a  cru  que  tout  irait  f>our  le  mieux 
le  Jour  où  la  propriété  serait  radicalement  détruite.  C'est 
dans  cet  espnt  qu'est  inspirée  toute  VUtopie.  ceuvre  fran- 
I  chement  commuuiste.  Ceci  dit,  c'est  là  Tiaée  que  nous 


CTO 


1750 


UXM 


5?i  Mv  '^  développer  presgue  dans  let  plus  petits  détails 
^^  ^^stème,  par  exemple  dans  les  habitations  qai,  belles 
^*  commodes  d'ailleurs,  ne  ferment  que  par  aes  portes 
battantes,  afin  que  chacun  puisse,  à  chaque  instant,  pé- 
nétrer ches  chacun,  et  qa*en  outre  on  auitte  ao  bout  de 
10  ans,  à  cette  seule  fin  de  ne  pas  trop  s^babituer  à  Tidée 
d*on  chei  soi,  d'une  demeure  propre.  Pour  le  même 
motif,  les  hôpitaux,  secours  réserres  ailleurs,  faute  de 
mieux,  à  la  souffrance  indigente,  sont,  en  Utopie,  une 
institution  générale  et  obligatoire.  L'organisation  poli- 
tique est  essentiellement  démocratique,  élective  à  tou» 
les  degrés,  très-simple  si  Ton  admet  comme  un  fait 
réalisé  la  fameuse  maxime  de  Montesquieu,  que  le  res- 
sort d'un  £tat  populaire  est  la  vertu;  dans  le  cas  con- 
traire, ouverte  à  tous  les  désordres,  à  toutes  les  brigues, 
à  toute  IMncohérence  que  comporte  la  démocratie  pure. 
La  fkmilie,  plus  respectée  par  Morus  que  par  Platon,  se 
conserve  par  la  sainteté  du  mariage  et  par  l'aggloméra- 
tion ,  sous  certaines  règles  de  détail ,  de  ses  membres 
autour  de  son  chef.  La  première  loi  de  sa  vie  intérieure 
et  extérieure  est  le  travail,  qui,  comme  dû  à  la  commu- 
nauté, est  aussi  soumis  à  une  réglementation  minii« 
tleuse.  Le  travail  agricole  est  de  beaucoup  le  plus  impor- 
tant dans  une  république  d'où  le  luxe  est  proscrit.  Les 
produits  en  sont  déposés  dans  des  magasins  publics,  où 
ils  sont  délivrés  à  chacun  au  fur  et  à  mesure  de  ses  be- 
soins. D^ail leurs,  la  vie  commune,  les  récréations  et  les 
repas,  tels  qu'ils  ont  lieu  dans  un  collège  ou  dans  un 
couvent,  s'ils  ne  sont  impérieusement  prescrits,  sont  for- 
tement recommandés  par  le  législateur,  qui  a  pensé  que 
tout  le  monde  serait  amené  à  les  accepter  par  l'avantage 
qu'on  V  trouverait,  avantage  matériel,  cela  est  possible, 
mais  gène  perpétuelle  pour  l'esprit,  qui,  passé  une  cer- 
taine époque  ne  la  vfc,  et  hors  de  certaines  conditions. 


a  besoin  de  maintenir  son  indépendance  et  son  vlndll- 
dualité.  Il  n'y  a  pas  lieu  de  s'étonner  en  voyant  un  peuple 
réputé  si  heureux  et  si  sage  prendre  ses  précautions  pour 
la  guerre.  La  guerre  peut  toujours  devenir  une  nécessité 
à  l'égard  de  voisins  entreprenants  et  injustement  agres- 
sifs. Mais  ce  qui  surprend  et  ce  qui  choque,  c'est  de  voir 
Th.  Morus  admettre  dans  son  Utopie  l'odieux  esclavage. 
On  n'est  pas  moins  péniblement  afH^cté  de  ses  idées  sur 
le  suicide,  dont  il  fait  presque  une  obligation  au  mallieu- 
reux  qui,  atteint  de  souffrances  incurables,  est  réputé  no 
pouvoir  plus  servir  ni  à  lui-même,  ni  aux  autres.  Un 
système  de  religion,  plutôt  naturelle  que  positive,  com- 
plète l'histoire  des  Utopiens,  leur  offre,  après  la  mort,  la 
perspective  d'une  vie  nouvelle,  heureuse  ou  malheureuse, 
selon  leurs  mérites,  et  sanctionne  les  principes  de  leur 
morale,  sorte  d'Épicuréisnie  tempéré  oui  repousse  les 
faux  plaisirs  de  la  vanité  et  de  la  cupidité  pour  s'attacher 
aux  plaisirs  modérés  des  sens  et  de  l'intelligence.  Philo- 
sophiquement parlant,  c'est  là  une  des  parties  les  plus 
heureuses  du  livre,  à  cause  de  la  place  qui  y  est  faite  à 
la  tolérance. 

Malgré  rexcellence  des  intentions,  malgré  l'approba- 
tion des  doctes  amis  de  l'auteur,  les  Érasme,  les  Budé, 
YUtoptê  de  Th.  Morus,  comme  toutes  celles  de  la  même 
famille,  doit  être  jugée  sévèrement.  Toute  pleine  de 
maximes  générales  qui  charment,  au  premier  abord,  par 
un  faux  air  d'élévation  morale  et  de  simplicité,  elle  ne 
peut  contenter  à  aucun  égaixl  des  esprits  instruits  par  la 
réflexion  et  par  l'expérience  à  peser  les  difficiles  condi- 
tions de  la  vie  sociale,  et  à  respecter  la  Justice  et  les  pen- 
chants de  la  nature  humaine.  V.  Atlantide,  Cité  du 

SOLKIIm  RépURLIQUR.  B — B. 

UTTARA-MIMANSA.  V,  Imdibnwb  (Philosophie). 
UXMAL  (Buines  d*),  V,  AnéniCAiNBS  (Antiquités). 


V 


VAC 


VAG 


V,  W  lettre  et  17*  consonne  de  notre  alphabet.  Cette 
lettre  représente  une  articulation  semi-labiale  faible,  dont 
la  forte  est  représentée  par  la  lettre  F;  aussi  se  prennent- 
elles  souvent  l'une  pour  l'autre.  Par  exemple,  on  pro- 
nonoe  nêuv  arbres  y  ipoia  neuf  arbres  ;  les  adjectifs  fran- 
çais terminés  en  f  changent  cette  lettre  en  v  pour  le 
féminin  (neuf,  neuve:  bref,  brève;  sauf,  sauve;  actif, 
active)  \  on  dit  nerf  et  nerveux,  motif  et  motiver,  neuf  et 
neuvaine.  Le  V  permute  avoo  le  B  (K.  l'article  B).  Autre- 
fois il  porta  le  nom  d'U  consonne,  lorsque  cette  dernière 
lettre  n'avait  pas  encore  reçu  d'existence  distincte.  L'ar- 
ticulation de  notre  V  est  représentée  en  allemand  par  W, 
et  le  Y  de  cette  dernière  langue  a  le  son  de  notre  F.  — 
Sur  les  inscriptions  et  les  médailles  latines,  V  est  une 
abréviation  pour  Valerius,  Valerianus,  vir,  vole,  vixit, 
Victor,  venerabilis,  otc.j  V.  C,  pour  vir  consularis; 
A.  V.  C,  pour  ab  urbe  condità.  Ches  nous,  V.  est  pour 
Victor^  V.  M.  pour  Votre  Majesté,  V.  S.  pour  Votre 
Sainteté,  V,  A.  pour  Votre  AUesse,  V.  E,  pour  Votre 
Eajcellence  ou  Emtnence,  etc.  Dans  les  écritures  de  com- 
merce, V»  signifie  verso,  —  Signe  numéral,  V  valait  5 
chez  les  Romains,  et,  surmonté  d'un  trait  horizontal  (V), 
5,000. 11  sert,  avec  l'addition  d'un  I  à  sa  gauche,  k  re- 
présenter 4;  avec  un,  deux  ou  trois  I  à  sa  droite,  il  re- 
présente 6,  7  ou  8.  —  V  a  été  la  marque  monétaire  de  la 
ville  de  Troyes. 

VACANCE  (du  latin  vacare,  être  vacant),  état  d'une 
fonction  qui  n'est  point  remplie  ou  occupée.  On  dit  va- 
cances au  pluriel,  pour  désigner  un  temps  de  suspension 
périodique  de  certains  exercices  { telles  sont  les  vacances 
données  dans  les  Facultés,  les  lyeées,  les  collèges,  et,  en 
général,  tous  les  établissements  d'instruction  publique. 
Les  vacances  des  Cours  et  tribunaux,  dites  aussi  vaca" 
tions,  commencent  au  !•'  septembre  et  se  prolongent 
jusqu'au  mois  de  novembre  :  toutefois,  les  tinbunaux  de 
commerce,  les  chambres  correctionnelles  et  les  juges 
d'instruction  ne  prennent  pas  de  vacances.  Les  vacances 
du  corps  enseignant  sont  établies  moins  pour  les  élèves 

3ue  poor  les  maîtres,  dont  la  santé  a  besoin  de  ce  repos 
a»  leur  profession  si  fstigantOt  Cest  dans  le  même 


esprit  que  des  vacances  sont  instituées  pour  les  magfa- 
trats,  dont  les  travaux  obligent,  outre  la  contention  d  es- 
prit, une  assiduité  sédentaire. 

VACANTS  (Biens).  V.  Bibns. 

VACATION,  temps  que  certains  officiers  publies  (juges 
de  paix,  greffiers,  notaires,  avoués,  huissiers,  commis- 
saires-priseurs,  experts,  etc.)  emploient  à  une  opération. 
Une  vacation  ne  peut  être  moindre  de  trois  heures.  Par 
extension,  le  mot  vacation  désigne  le  salaire  qui  leur 
est  dû. 

VACATIONS  (Chambre  des).  Chambre  temporaire  in- 
stituée dans  les  Cours  et  tribunaux  pour  prononcer,  pen-» 
dant  les  vacations  ou  vacances,  sur  les  affaires  civilos  qui 
exigent  une  prompte  décision. 

VACHIDS  (Ranz  des).  V.  Ranz  des  vaches. 

VADE  (du  latin  vade,  va),  se  dit,  aux  jeux  de  cartes, 
de  la  somme  dont  un  joueur  ouvre  le  jeu. 

VADE-MECUM,  c-à^d.  en  latin  va  ou  viens  avec  moi, 
mot  qui  désigne  tout  livre  portatif,  destiné  à  rappeler 
eu  peu  de  mots  les  notions  principales  d'un  art,  d'une 
tLciopco  âtc 

vWêSHÎKA  (Philosophie).  V.  Indiernb  (Philosophie). 

VA-ET-VIENT,  en  termes  de  Marine,  cordage  établi 
soit  entre  deux  navires,  soit  entre  un  navire  et  la  terre, 
soit  entre  deux  rives  opposées,  et  sur  lequel  un  homme 
peut  se  haler. 

VAGABOND  (du  latin  vagahundus,  errant),  celui  qui 
n'a  ni  domicile  certain,  ni  moyens  de  subsistance,  et  qui 
n'exerce  habituellement  ni  métier  ni  profession.  Les  lois 
de  Selon  proscrivaient  les  vagabonds.  Dans  l'ancienne 
Rome,  ils  étaient  l'objet  d'uno  surveillance  spéciale  de 
la  part  des  censeurs;  on  les  condamnait  aux  mines  ou 
à  d  autres  ouvrages  publics.  D'après  le»  Établissements 
de  Louis  IX,  ils  devaient  être  déportée.  Une  déclaration 
du'  32  mai  1586  défendit  expressément  aux  indigents 
u  d'errer  et  de  se  transporter  d'un  lieu  è  un  autre,  »  et 
souvent  on  confondit  les  vagabonds  avec  les  mendiants 
(  V.  MBiiDiciTi).  Notre  Code  pénal  (ait  du  vagabondage 
un  délit.  Tout  individu  déclaré  vagabond  par  jugement 
est  puni  de  3  à  0  mois  do  prison,  et  mis  sous  la  surveU« 


VAL 


1760 


VAL 


.anco  de  laliaulc  police  po.ndant  5  ou  dO  ans  (art.  *271)  ; 
s*tl  a  moins  de  16  ans,  iî  est  mis  sous  cette  surveillance 
jusqu*à  l'âge  de  20  ans,  k  moins  qu'ayant  ce  temps  il 
n'ait  contracté  un  engagement  militaire.  II  peut,  s'il  est 
étranger,  être  conduit  hors  du  territoire.  Le  Ta^d^ond 
porteur  d'un  faux  certificat  ou  d'une  fausse  feuille  de 
route  est  puni  du  maximum  des  peines  portées  en  pareil 
cas;  le  simple  port  d'armes,  ou  d'objets  pouvant  servir 
à  commettre  un  délit  quelconque,  seulement  même  à  pé- 
nétrer dans  les  maisons,  entraîne  un  emprisonnement 
plus  ou  moins  long. 

VAGUEMESTRE  (de  l'allemand  wagenmeister,  maître 
de  chariot,  chef  d'équipage),  nom  de  plusieurs  employés 
du  service  militaire.  Le  vaguemestre  d'armée  ou  vague- 
mestre général  est  un  officier  de  l'état-major  d'un  corps 
d'armée  chargé  de  la  conduite  d'un  équipage;  le  vague- 
mestre de  division  est  un  sous^fficier  qui,  dans  chaque 
division  militaire,  réunit  les  voitures  et  les  fait  marcher 
en  ordre  convenable;  le  vaguemestre  dé  corps  onde  ré- 
giment est  un  sous-officier  qui  a,  dans  chaque  régiment, 
la  surveillance  des  équipages,  et  qui  retire  de  la  poste  et 
distribue  les  lettres,  paquets,  argent  et  effets  adressés 
aux  hommes  de  son  corps. 

VAGULATION.  F.  ce  mot  dans  notre  Dicttonnaire  de 
Biêgraphie  et  d'Histoire. 

VAIGRES,  en  termes  de  Marine,  planches  ou.  bordages 
qui  revêtent  intérieurement  la  muraille  d'un  navire.  Vai- 
grer  un  bâtiment,  c'est  le  revêtir  de  ses  vaigres;  le  t7ai- 
g  rage  est  l'ensemble  des  vaigres. 

VAINE  PATURE.  V.  Parcours. 

VAIR  (du  latin  varius,  varié,  divers),  nom  donné 
autrefois  à  une  fourrure  de  couleur  bigarrée,  blanche  et 
grise.  Le  menu-vair  était  la  peau  de  l'écureuil  du  Nord, 
celle  que  nous  appelons  petit^gris,  —  En  termes  de  Bla- 
son, le  Vair  est  un  métal  formé  de  plusieurs  pièces 
égales,  qui  sont  ordinairement  d'argent  et  d'azur,  rangées 
alternativement,  et  disposées  de  façon  que  la  pointe  des 
pièces  d'azur  est  opposée  à  la  pointe  des  pièces  d'argent, 
et  la  base  à  la  base.  V  ^ontbe-Vair. 

VAISSEAU  (du  latin  va^cellus,  dérivé  de  vas,  vase), 
vase  ou  ustensile  de  matière  quelconque,  destiné  à  con^^ 
tenir  des  liquides. 

VAISSEAU,  en  termes  d'Architecture,  se  dit  d'une  église 
et  de  toute  autre  grande  construction  vue  du  dedans. 

VAISSEAU,  s'entend,  dans  le  langage  vulgaire,  de  tout 
bâtiment  un  peu  considérable  qui  navigue  sur  mer.  On 
Hit  des  vaiss9aux  de  guerre,  des  vaisseaux  marchands. 
Mais  les  marins  ne  donnent  le  nom  de  vaisseau  qu'à  un 
bâtiment  de  guerre  portant  au  moins  80  canons.  La  dé- 
nomination de  vaisseau  de  Ugne,  par  laquelle  on  distin- 
^ait  autrefois  les  vaisseaux  capables  de  combattre  en 
ligne  de  ceux  qui  ne  l'étaient  pas,est  aujourd'hui  inutile. 
On  distingue  en  France  quatre  rangs  ou  classes  de  vais- 
seaux :  ceux  du  l*'  rang  sont  à  trois  ponts  et  à  quatre 
batteries,  et  portent  iW  canons;  ceux  du  2*  ont  deux 
ponts  et  trois  batteries,  armées  de  100  canons  ;  ceux  du 
.1"  et  du  4"  rang  ont  aus<^i  deux  ponts  et  trois  batteries, 
mais  ne  portent,  les  premiers,  que  90  canons,  et  les  se- 
conds 80.  Un  vaisseau  de  i*'  rang  porte  1,087  hommes 
d'équipage  ;  de  2«  rang,  915  ;  de  3«,  810  ;  de  4«,  677. 

VAISSELLE,  mot  qui  désigne  l'ensemble  des  vases  et 
vaisseaux  plus  ou  moins  creux  qui  servent  â  l'usage  de 
la  table,  plats,  assiettes,  soupières,  casseroles,  etc.  La 
vaisselle  commune  est  faite  de  terre,  de  faïence,  ou 
d'étain  ;  celle  de  luxe  est  en  porcelaine,  en  plaqué,  en  ar- 
gent, en  vermeil  ou  en  or.  La  vaisselle  plate  est  la  vais- 
selle d'argent  (de  l'espagnol  plata,  argent);  l'expression 
s'explique  encore  par  le  mot  plata,  qui  signifiait  lingot 
ou  métal  massif  dans  les  langues  du  Nord,  et  Ton  a  dît 
d'abord  vaisselle  en  plate  pour  vaisselle  en  ar^nt  massif. 

VAIVODE.  V.  Vatvode,  dans  notre  /)/cttanfiatre  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

VAKIL  ou  WAKIL,  c.-à-d.  en  arabe  vtcet-rot,  nom 
qu'ont  pris  quelques-uns  des  souverains  de  la  Perse. 

VALAQUE  (Langue}.  V.  Roumane. 

VAL-DE-GRACE.  K.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

VALENÇAY  (Château  de),  dans  le  département  de 
rindre.  Ce  château,  bâti  au  xvi*  siècle  sur  les  dessins  de 
Philibert  Delorme,  et  qui  a  servi  de  résidence  â  Ferdi- 
nand VII  et  aux  Infants  d'Espagne  de  1808  â  1814,  à  Don 
Carlos  de  1840  à  1845,  a  appartenu  au  prince  de  Talley- 
rand.  Il  est  admirable  par  sa  masse,  sa  noble  architec- 
ture, son  parc,  ses  jardins,  ses  belles  eaux.  Quoique  le 
plan  primitif  ait  subi  des  changements,  inspirés  par  le 
caprice  plutôt  que  par  le  bon  goût  des  différents  proprié- 


taires qui  s'y  sont  succédé,  ce  château  a  encore  Tappa- 
rence  d'un  palais.  Voici  la  description  qu'en  faisait,  dans 
le  siècle  dernier,  un  écrivain  qui  l'avait  visité  avant  qu'on 
eût  dénaturé  le  plan  du  ffrand  architecte  contemporain 
de  François  l*^  «  On  y  arrive  par  trois  avenues  qui  con- 
duisent à  quatre  différentes  cours  ovales,  aux  côtés  des- 
quelles sont  les  pressoirs  et  les  ménageries.  De  ces  cours 
on  entre  dans  le  château ,  entouré  de  grands  fossés. 
L'entrée  est  décorée  d'un  fort  grand  pavillon,  aux  deux 
côtés  duquel  sont  deux  grosses  tours,  l'une  desquelles 
communique  à  un  grand  corps  de  logis  double.  Les  tours 
et  le  pavillon  sont  bordés  de  mâchicoulis  sculptés  ^e 
beaux  ornements,  de  même  que  le  corps  de  logis.  La 
cour  est  carrée,  et  vis-àr-vis  du  pavillon  d'entrée  il  y  a 
une  muraille  â  jour  qui  a  vue  sur  un  grand  vallon  creusé 
en  amphithéâtre.  Le  côté  qui  ferme  la  cour  vers  le  Nord 
est  un  bâtiment  qui  a  ses  usages  particuliers.  La  face 
du  grand  pavillon  et  celle  du  grand  corps  de  logis  ont, 
du  côté  de  la  cour,  trois  galeries,  les  unes  sur  les  autres, 
qui  communiquent  â  tous  les  appartements,  et  dont  les 
arcades  sont  ornées  de  fort  beaux  trophées  d'armes,  sculp- 
tés en  bas-relief.  Sous  ces  galeries,  il  y  en  a  une  souter- 
raine qui  conduit  aux  offices  situés  sous  le  gprand  corps 
de  logis.  Le  dedans  du  château  a  un  beau  vestibule  et  un 
bel  escalier  qui  conduit  à  une  grande  salle,  ornée  d'ou- 
vrages de  peinture  et  de  sculpture.  Quelques-uns  de 
ceux-là  sont  de  Pierre  de  Cortone,  et  les  autres  de 
Jean  Mosnier:  mais  l'on  y  fait  surtout  estime  d'une 
Vierge  ornée  d'un  fort  beau  cadre,  donnée  par  le  pape 
Innocent  X  à  messire  Henri  d'Estampes,  commandeur 
de  l'ordre  de  Saint-Jean-de-Jérusalem,  et  grand-priexu 
de  France,  né  en  ce  château.  On  va  du  corps  de  logis,  pai 
un  pont  de  pierre  qui  traverse  le  fossé,  sur  une  grande 
terrasse  ornée  de  beaux  ouvrages  de  sculpture,  Isiquelle 
présente  à  la  vue,  du  côté  gauche,  une  perspective  de 
prairies,  coteaux  et  forêts,  qui  la  bornent  agrâablement; 
à  la  droite  est  un  grand  verger  et  un  clos  &  vignes,  sé- 
parés de  la  terrasse  par  une  longue  allée  d'ormes,  au 
nout  de  laquelle  est  une  sortie  qui  mène  dans  une  riaa*e 
campagne.  » 

VALENCE  (Église  «-^âpolunaire,  à).  Cette  église  ca- 
thédrale, qui,  avant  de  porter  le  nom  de  l'un  de  ses  évè- 
ques,  était  consacrée  à  S^  Corneille  et  à  S^  Cyprien,  fat 
bâtie  au  xi*  siècle.  C'est  un  des  monuments  les  plus  purs 
de  l'architecture  romano-byzantine.  Le  plan  en  est  assez 
régulier  :  il  y  a  deux  collatéraux  le  long  de  la  nef  prin- 
cipale, sans  chapelles  accessoires  :  le  transept  est  assez 
vaste,  mais  le  croisillon  septentrional  a  r^u  des  Mo- 
dernes un  badigeonnage  du  plus  mauvais  goût.  Les  fenê- 
tres à  plein  cintre  de  l'abside  et  du  transept  sont  suré- 
levées, et  entourées  d'une  archivolte  ornée  de  grosses 
perles  ;  au-dessus,  il  y  a  de  petites  fenêtres  géminé^  éga- 
lement à  plein  cintre.  Les  grandes  fenêtres  sont  aé{»rées 
les  unes  des  autres  par  deux  petits  contre-forts  en  épe- 
rons, d'un  aspect  assez  pauvre.  La  corniche  au-dessous 
des  combles  est  ornée  de  modillons  fort  simples.  Les 
toits  sont  aplatis  et  recouverts  de  tuiles  creuses.  Quel- 
ques parties  de  l'église,  dévastées  pendant  les  guerres 
religieuses  du  xvi*  siècle,  ont  été  rétablies  en  1604,  mais 
dans  un  style  dégénéré  d'architecture.  Le  portail  a  été 
fort  endommagé  par  la  chute  de  la  tour,  que  la  foudre 
renversa  en  1806  :  cette  tour  fut  reconstruite  en  1820, 
mais  avec  si  peu  d'habileté,  qu'elle  ne  tarda  pas  â  s'é- 
crouler de  nouveau.  V.  Jouve,  Notice  sur  la  e<Uhédral$ 
de  Valence,  Paris,  1847,  in-S».  —  Au  N.  de  l'église  S»- 
Apollinaire,  dans  l'emplacement  d'un  ancien  cimetière, 
on  remarque  un  petit  édifice  funéraire  â  quatre  faces,  dont 
les  angles  sont  ornés  de  colonnes  corinthiennes  à  demi 
engagées.  Sur  les  faces  du  levant  et  du  couchant  s'ouvrent 
deux  vastes  fenêtres.  La  porte,  ornée  de  sculptures  d'une 
grande  délicatesse,  est  placée  au  nord.  Les  massifs  de 
chacune  face  sont  vermiculés,  semés  d'arabesques  et 
d'animaux  fantastiques.  La  corniche,  richement  décorée, 
est  chargée  des  armoiries  de  la  famille  Mistral.  Une  toi- 
ture â  quatre  faces  et  se  terminant  en  pointe  couronne 
l'édifice.  Ce  petit  monument,  qui  date  de  1548,  a  été  ap- 
pelé le  Pendentif  de  Valence,  a  cause  de  la  construction 
de  sa  voûte,  la  première  de  ce  genre  qui  ait  été  faite  en 
France. 

VALENCE  (Cathédrale  de),  en  Espagne.  Bâtie  sur  l'em- 
placement d'un  temple  romain  de  Diane,  qui  avait  été 
consacré  tour  â  tour  au  Sauveur  par  les  Wisigotbs,  à 
Mahomet  par  les  Arabes,  à  Tapôtre  S^  Pierre  par  te  Cid, 
elle  fut  commencée  en  1262,  et  achevée  seulement  en 
1561.  Au-dessus  de  son  entrée  principale  s'élève  une  lo^r 
octagone,  et  d'une  hauteur  de  45">.76  éisale  à  la  cireon. 


VAL 


1761 


YAN 


férencc.  Le  transept  est  surmonté  d*iine  coupole  octo- 
gone, percée  de  grandes  fenêtres.  Lintérieur  de  Tédiflce, 
long  de  98  met.,  large  de  60  au  transept,  est  partagé  en 
crois  nefs,  que  soutiennent  25  piliers  carrés  formés  de 
pilastres  à  chapiteaui  corinthiens.  On  y  remarque  la 
çrille  du  chœur,  en  bronze,  et  le  retable  du  mattre-autel, 
fermé  par  des  volets  sur  lesquels  Paolo  Areggio  et  Fran- 
cesco  Neapoli,  élèves  de  Léonard  de  Vinci,  ont  peint 
plusieurs  scènes  de  la  vie  de  Jésus-Christ  et  de  la  S^* 
Vierge.  Au-dessus  des  fonts  baptismaux  est  un  immense 
tableau  de  .luan  ae  ioanes.  Le  iresor  ae  Téglise  ren- 
Terme  un  grand  nombre  de  reliques  et  d'ornements  pré- 
cieux. Dans  la  salle  capitulaire  on  voit  les  portraits  de 
tous  les  évêques  et  archevêques  du  diocèse. 

vALENCB  (La  LoNJA  OU  la  Bourse  de],  monument  vaste, 
mais  irrégulier,  remarquable  par  Toriginalité  de  sa  con- 
struction plus  encore  que  par  la  beauté  ou  Télégance  de 
ses  formes.  Ce  monument,  bâti  en  1482,  présente  une 
façade  de  54  met.  de  développement,  divisée  en  trois 
parties.  Le  milieu  est  occupé  par  une  tour  massive  et 
carrée,  plus  haute  que  le  reste  de  Tédifice  -.  Fnne  des 
Ailes,  dépourvue  d'ornements  Jusqu'aux  deux  tiers  de  son 
élévation,  présente  ensuite  une  galerie  de  Teffet  le  plus 
pittoresque,  où  les  deux  architectures  ogivale  et  moresque 
se  mélangent,  et,  entre  les  riches  fenêtres  de  cette  ga- 
lerie, d'élégantes  colonnettes  supportent  les  bustes  et  les 
armoiries  des  rois  d'Aragon  et  de  Castille.  L'autre  aile,  au 
contraire,  nue  dans  sa  partie  supérieure,  est  surchargée. 
Jusqu'à  la  moitié  de  sa  hauteur,  d'une  foule  de  détails 
d'architecture  remarquables  par  la  variété  et  la  pureté 
de  l'exécution.  La  totalité  de  l'édifice  est  couronnée  de 
créneaux.  A  l'intérieur  de  la  Lonja,  la  salle  destinée  aux 
réunions  des  marchands  mesure  36  met.  de  longueur  et 
21  met.  de  largeur  ;  elle  est  partagée  en  trois  nefs  par 
2i  colonnes  torses,  dont  16  sont  appuyées  aux  murs  la- 
téraux, et  8  isolées,  supportant  les  arcs  des  voûtes. 

VALENQEN  (Dialecte),  un  des  dialectes  de  l'Espagne. 
Il  parait  avoir  été  d'abord  identique  avec  le  catalan.  Les 
différences  qui  les  distinguent  aujourd'hui  ne  sont  même 
pas  telles  qu'elles  empêchent  les  habitants  des  deux  pro- 
vinces de  se  comprendre,  puison'cllcs  ne  consistent  guère 
qu  en  idiotismes  locaux.  La  différence  de  prononciation 
est  plus  grande  :  le  valencien  a  plus  de  douceur  et 
d*harmonie. 

VALET.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictxonnairt  de  Bio- 
grctphie  et  d^ Histoire, 

VALEUR  (du  latin  valere,  valoir),' en  termes  d'Éco- 
nomie politique,  ce  que  vaut  une  chose  suivant  l'esti- 
mation qu'on  en  fait.  On  distingue  :  la  valeur  usuelle, 
dépendant  du  prix  que  chacun  attache  aux  choses  qui 
peuvent  satisfaire  ses  besoins;  et  la  valeur  vénale,  ou 
rapport  de  quantité  qui  existe  entre  les  choses  au  point 
de  vue  de  1  échange.  Une  valeur  peut  être  naturelle , 
comme  celle  du  blé,  ou  factice,  comme  celle  du  diamant. 
La  valeur  de  chaque  chose  est  le  résultat  de  l'évaluation 
contradictoire  faite  entre  celui  qui  en  a  besoin  ou  qui  la 
demande  et  celui  qui  la  prodgit  ou  qui  l'offre  :  elle  a 
donc  un  double  fondement,  l'utilité,  qui  détermine  la 
demande  qu'on  en  fait,  et  les  frais  de  sa  production,  oui 
bornent  l'étendue  de  cette  demande,  car  on  cesse  de  de- 
mander ce  qui  coûte  trop.  La  valeur  des  choses  appréciée 
en  monnaie  est  ce  qu'on  nomme  leur  prix.  —  Pour  les 
monnaies,  la  valeur  nominale  est  la  valeur  arbitraire 
que  la  loi  leur  donne;  la  valeur  réelle  ou  intrinsèque  est 
la  valeur  du  métal  dont  elles  font  faites. 

VALEUR,  en  termes  de  Musique,  durée  que  doit  avoir 
chaque  note  et  qui  est  indiquée  par  la  figure  de  cette 
note. 

vAi.EUB  REÇUE,  mots  qu'on  est  tenu  d'employer  dans  les 
lettres  de  change  et  les  billets  à  ordre,  pour  indiquer 
qu'on  a  reçu  autant  que  la  somme  qui  y  est  spécifiée.  On 
doit  encore  y  ajouter  en  espèces,  ou  en  marchandises,  ou 
en  compte,  ou  tous  autres  équivalents  {Codé  de  Com- 
merce, art.  110). 

VALEURS,  toute  espèce  de  biens  disponibles.  Les  va- 
leurs sont  réelles,  quand  elles  reposent  sur  des  biens 
existant  matériellement;  fictives,  quand  elles  ne  repo- 
sent que  sur  des  produits  éventuels.  On  entend  aussi  par 
vcUeurs  les  signes  représentatifs  de  choses  évaluables , 
les  titres  au  moyen  desquels  on  peut  se  les  procurer, 
lettres  de  change,  billets  à  ordre,  billets  de  banqne,  con- 
trats de  rentes,  actions,  obligations,  etc. 

VALEURS  coT^Ks,  objets  précieux  de  petite  dimension 
que  l'Administration  des  postes  se  charge  de  transporter. 
L'estimation  d'une  valeur  cotée  ne  peut  être  fixée  au- 
dcsioas  de  20  fr.,  ni  s'élever  au-dessus  de  1,C00  fr,  l^es 


valeurs  cotées  sont  reçues  à  découvert,  puis  enfennéea^ 
en  présence  du  directeur  du  bureau  de  poste,  dans  nn<ft 
boite  ou  dafis  un  étui,  qui  est  ficelé  et  cacheté.  La  botta 
ou  l'étui  ne  doit  pas  avoir  plus  de  O^^flO  de  longueur* 
0'",08  de  largeur,  et  0'",05  d'épaisseur.  La  boite,  avec  ce 
qu'elle  renferme,  ne  peut  peser  plus  de  300  grammes.  Le 
port  est  de  2  p.  100  de  la  valeur  estimée,  plus  35  cen« 
times  pour  le  timbre  de  la  reconnaissance  remise  au  dé- 

{)0sant.  Les  valeurs  cotées  ne  sont  pas  portées  à  domicile; 
e  destinataire  doit  venir  les  retirer  au  bureau.  En  cas 
de  pnnc  (i  une  valeur  cotfa^.  t' Administration  rembourse  le 
prix  d'estimation.   F.  le  Supplément, 

VALEURS  DÉCLARÉES.  V.  le  Supplément, 

VALIDÉ  (Sultane).  V,  Sultan,  dans  notre  Diction^ 
noire  de  Biographie  et  d^Ristoire,  , 

VALLAIRE  (Couronne).  V,  Couronwb,  dans  notre  DtC* 
tionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

VALMAGNE  (Abbaye  de],  à  27  kilo  met.  de  Montpellier. 
L'église,  commencée  dans  la  seconde  moitié  du  xm'  siècle 
et  achevée  au  xiv*,  a  82  met.  de  longueur,  22  met.  do 
largeur  (30  au  transept^,  et  24"*,33  de  hauteur.  La  nef 
majeure,  quoique  formée  d'arcades  ogivales  très-aiguês, 
n'a  point  une  élévation  suffisante.  Dans  tout  l'édifice,  les 
ouvertures  sont  rares;  les  roses  de  la  façade  et  des  croi- 
sillons paraissent  n'avoir  jamais  été  ouvertes  dans  tous 
leurs  compartiments;  mais  on  a  percé  dans  leur  diamètre, 
en  les  faisant  s*accorder  avec  les  autres  découpures,  de 
hautes  lancettes  géminées.  Le  chœur,  les  neuf  chapelles 
qui  l'entourent  et  les  bras  de  la  croix  sont  d'une  grande 
légèreté  de  construction.  Le  cloître,  construit  à  la  même 
époque  que  l'église,  a  subi  ultérieurement  des  répara- 
tions qui  ont  altéré  la  beauté  de  plusieurs  parties.  Le 
travail  des  sculptures  y  est  très-soigné.  Le  préau  est 
décoré  d'une  fontaine  qu'entoiure  une  galerie  octogone, 
surmontée  'Q'une  voûte  à  jour. 

VALSE  ou  WALSE ,  danse  originaire  d'Allemagne,  où 
on  la  trouve  dès  le  xiv*  siècle,  et  qui  fut  introduite  en 
France  vers  1700.  L'air  en  est  à  3  temps,  à  2  reprises  de 
8  mesures  chacune,  et  s'écrit  à  3/4  ou  à  3/8  :  son  mouve- 
ment varie  de  Vallegretto  k  Vallegro  et  au  vivace.  Le 
retour  périodique  des  temps  forts  en  frappant  détermine 
le  rhythme  d  une  manière  précise  et  caractérisée.  La 
valse  se  danse  à  deux,  un  cavalier  et  one  dame  :  p.n 
France,  on  a  transformé  l'abandon  voluptueux,  le  balan- 
cement que  les  Allemands  lui  donnent,  en  un  mouve- 
ment précipité  de  rotation,  qui  lui  enlève  une  partie  de 
son  charme.  La  polka,  la  maxurka,  la  redowa  (V.  ces 
mots),  se  rapprochent  de  la  valse  par  la  mesure  et  le 
mouvement.  En  Allemagne,  où  la  valse  est  très-répan- 
due, il  est  peu  de  musiciens  qui  n'en  aient  écrit  :  Haydn, 
Mozart,  Weber,  Beethoven  n'ont  pas  dédaigné  ce  genre 
de  composition  ;  les  auteurs  de  valses  les  plus  populaires 
sont  Lanner,  Strauss,  Gungl,  Labitzky.  On  peut  citer  en 
France  Tolbecque.  B. 

VALUE,  vieux  mot  synonyme  de  valeur,  et  qui  ne 
s'emploie  plus  qu'en  Junsprudence,  dans  les  deux  mots 
composés  plus-value  et  moins-value, 

VALVE,  mot  que  certains  archéologues  appliquent  à 
chacune  des  parties  d'une  voûte  divisée  par  des  nervures. 

VAMPUMS,  colliers  composés  de  grains  diversement 
colorés,  au  nombre  et  aux  combinaisons  desquels  les 
Indiens  de  l'Amérique  du  Nord  attachent  un  sens  gra- 
phique, de  manière  à  s'en  servir  pour  transmettre  par 
leur  envoi  certaines  nouvelles,  ou  pour  conserver  le  sou<* 
venir  de  certains  événements. 

VANDALES  (Monnaies).  On  n'a  point  de  monnaies 
d'or  des  Vandales;  mais  il  en  existe  d'argent  et  de  bronze, 
toutes  taillées  d'après  la  loi  romaine.  Les  premières  sont 
des  quinaires  :  elles  portent  au  revers,  soit  les  lettres 
D.  N.  (Dominas  noster)^  soit  une  femme  tenant  des  épis 
dans  chaque  main,  et  la  légende  :  FEUX  CARTHAGO. 
Sur  les  monnaies  de  bronze,  on  voit  les  mêmes  légendes, 
une  tête  de  cheval  (ancien  type  de  Carthage),  un  guer- 
rier debout,  la  femme  tenant  des  épis,  et  des  lettres  nu- 
mérales. Il  reste  un  quinaire  de  Genséric  sur  lequel  on 
lit  ANNO  nil,  légende  indiquant  ane  ère  vandale  qui  no 
nous  est  point  connue  autrement  ;  il  porte  aussi  l'efifigio 
d'Honorius,  moins  sans  doute  par  respect  des  Vandales 
pour  la  majesté  impériale  qu'afin  de  faire  accepter  leurs 
espèces  par  les  populations  romaines. 

VANDAUSMK,  mot  créé  par  l'abbé  Grégoire,  aux  plus 
mauvais  jours  de  la  Révolution  française,  pour  désigner 
toute  aveugle  dévastation  des  œuvres  de  l'art  C'est  en 
souvenir  dos  Vandales,  qui  détruisirent  les  monuments 
romains  en  Afrique. 

VANNE  (du  latin  vannus\  en  termes  d'Architecture 

441 


VAU 


1764 


VÊD 


tssynens  et  les  compositions  gravôcs  sur  les  cylindres 
habylonien&.  Certains  vases  ont  des  peintures  à  teintes 
rouge,  blanche  et  brune,  superposées  sur  une  couverte 
noire.  Si  Ton^a  trouvé  des  vases  asiatiques  dans  les  né- 
n^poles  de  TÉtrurie,  c'est  qu'ils  furent  apportés  dans  ce 
pays  par  des  navigateurs  phéniciens.  Le  plus  beau  modèle 
est  conservé  à  la  galerie  de  Florence  sous  le  nom  de  vase 
François,  —  On  appelle  vases  corinthiens  ceux  dont  les 
inscriptions  sont  en  caractères  de  l'ancien  alphabet  em- 
ployé à  Corinthe.  A  cette  catégorie  appartiennent  le  cé- 
lèbre vase  de  la  chasse  de  Calydon,  oit  vase  Dodtoell, 
trouvé  à  Corinthe  et  qui  est  aujourd'hui  au  musée  de 
Munich,  et  diffcrents  vases  d'Agylla.  C'est  tout  au  plus 
au  VII"  siècle  av.  J.-  C.  que  ces  derniers  doivent  être  rap- 
portés :  on  sait  que  Démarate  vint  de  Corinthe  se  fixer 
en  Étrurie,  vers  ran  655,  avec  une  troupe  de  colons  oà 
i!  y  avait  plusieurs  artistes.  —  Les  vases  d*un  travail 
véritablement  étrusque  sont  en  pâte  noire ,  d'un  émail 
terne,  et  de  formes  quelauefoîs  très-bizarres.  On  y  voit 
le  plus  souvent  des  sujets  bachiques,  quelquefois  des  divi- 
nités étrusques,  rarement  des  inscriptions  en  langue 
étrusque.  L'aspect  en  est  généralement  peu  agréable.  Il 
y  en  a  qui  offrent  tous  les  caract^es  de  l'archaïsme,  et 
(fiui  peuvent  être  antérieurs  à  la  fabrication  grecque  ;  mais 
on  pense  que  les  artistes  étrusques  continuèrent  de  tra- 
vailler dans  leur  style  particulier  jusqu'à  une  époque 
très-rapprochée  de  la  fin  de  la  république  romaine.  — 
Des  vases  italo-grecs,  les  uns  sont  à  fond  jaune  ou  rouge, 
avec  figures  noires,  dont  les  contours  sont  gravés  au  moyen 
d'un  instrument  pointu  ;  quelques  détails  des  vêtements 
au  certains  ornements  sont  rehaussés  de  violet;  les  chairs 
des  femmes,  les  cheveux  et  la  barbe  des  vieillards  sont 
coloriés  en  blanc.  D'autres  vases  à  fond  noir  ont  les 
figures  et  les  ornements  réservés  en  rouge  ou  en  jaune 
sur  le  fond  ;  les  contours,  les  traits  et  les  linéaments  sont 
en  noir,  mais  la  plupart  du  temps  le  dessin  a  été  ébauché 
à  la  pointe  sèche.  Les  vases  de  Nola  à  peintures  rouges  se 
distinguent  par  la  finesse  de  la  terre,  l'éclat  de  la  cou- 
verte noire,  l'élégance  du  dessin  et  la  simplicité  des 
sujets.  Beaucoup  de  vases  à  peintures  noires  sur  fond 
rouge,  quelques-uQs  à  peintures  rouges  ou  blanches  sur 
fond  noir,  portent  la  signature  de  Nicosthènes  ;  plusieurs 
portent  les  noms  de  Phanphaios,  d'Eschyle,  d'Andocide, 
de  Chacylion,  d'Euphronias,  d'Euthymiadès,  d'Épictète, 
de  Phintias,  d'Hiéron,  de  Zeuxithéos,  etc.  Les  vases  de 
la  décadence  de  l'art  grec  dans  l'Italie  méridionale  se  re- 
connaissent à  un  dessin  plus  négligé,  k  la  surcharge  des 
ornements,  à  un  émail  noir  plus  terne;  cette  fabrication 
parait  avoir  persisté  jusqu'à  un  siècle  avant  l'ère  chré- 
tienne. Les  vases  à  peintures  blanches  superposées  sont 
aussi  de  la  fin  de  la  céramique. 

V.  Passeri,  Picturœ  Eiruscorum  tn  vascults,  Rome, 
1767  et  1770,  4  vol.  in-fol.;  d'Hancarville,  Antiquités 
étnjksques,  grecques  et  romaines,  tirées  du  cabinet  de 
M.  Hamilton,  Naples,  1768,  4  vol.  in-fol.;  Tischbein, 
Recueil  de  gravures  d*après  des  va^es  antiques,.»,  tirées 
du  c<û)inet  de  M.  ^amt'/ton ,  Naples,  1791  et  suiv.,  4  vol. 
in-fol.  ;  Millin,  Description  des  peintures  et  des  vases 
antiques,  vulgairement  appelés  étrusques,  Paris,  1808-10, 
in-fol.;  Dubois-Maisonneuve ,  Introduction  à  l'usage  des 
vases  antiques,  Paris,  1817  ;  Hans,  Dei  vasi  Greci,  Pa- 
lerme,  1823;  de  Clarac,  Mélanges  d'antiquités  grecques 
et  romaines,  Paris,  1830;  Fea,  Storia  de'  vasi  ^ttili  di- 
pinti  etruscfU,  Rome,  1832;  De  Witte,  Descriptum  d'une 
collection  dé  vases  peints  et  bronzes  antiques ,  provenant 
des  fouilles  de  l'Êtrurie,  Paris,  1837.  B. 

VASISTAS  (de  l'allemand  was  ist  das,  qu'est  cela?) , 
ouverture  ménagée  dans  une  porte  ou  une  fenêtre,  pou- 
vant s'ouvrir  et  se  fermer  à  volonté ,  et  permettant  soit 
de  parler  aux  gens  du  dehors ,  soit  d'aérer  une  pièce. 

VASQUE  (du  latin  vasculum) ,  bassin  rond  et  peu  pro- 
fond, en  pierre,  en  marbre  ou  en  bronze,  qu'on  place 
comme  ornement  sous  une  fontaine. 

VASSAL,     i  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

VATICAN.  (      Biographie  et  d'Histoire. 

VA  -TOUT  (Faire  son  ) ,  en  termes  de  Jeu,  risquer  tout 
'argent  qu'on  a  devant  soi. 

VAUDEVILLE ,  nom  qui  fut  donné,  au  xv*  siècle,  à  des 
liansons  joyeuses  ou  malignes.  Olivier  Basselin ,  maître 
foulon  de  Vire  en  Normandie,  composa  des  poésies  de  ce 
fi,enre,  qui  coururent  tout  le  val  de  Vire,  et  nui ,  se  pro- 
pageant plus  loin ,  continuèrent  d'être  appelés  ^aux-de- 
vire.  Une  édition  en  a  été  donnée  par  M.  J.  Travers, 
Avrancbes,  1833,  in-18.  Un  avocat  de  Vire,  Jean  Le  Houx, 
en  écrivit  aussi  à  la  fin  du  x\i*  siècle.  Le  mot  vau-de-vire 
fut  déîiguré  par  l'ignorance  :  un  musicien  de  l'Anjou,  Jean 


Chardavoine,  fit  imprimer,  en  1575  et  1576,  des  voix 
de  ville,  et  Jacques  de  Callières,  dans  son  ouvrage  De$ 
mots  à  la  mode  et  des  nouvelles  façons  de  parler  (Paris, 
1690  et  1693,  in-12},  nous  apprend  que  le  mot  vaudeville 
date  du  xvii«  siècle.  On  employa  bientôt  ce  mot  pour  de- 
signer autre  chose  que  des  chanson»  satiriques,  grivoises 
ou  politiques  :  ainsi,  les  comédies  de  Dancourt,  faites 
sur  des  événements  du  jour  et  sur  des  anecdotes  qui 
couraient ,  étaient  appelées  vaudevilles.  Les  vaudevilles 
furent  ensuite  des  pièces  de  théâtre  dans  lesquelles  en- 
traient des  couplets;  ces  compositions  dramatiques,  qai 
prirent  naissance  vers  1700,  aux  foires  S^-Germain  et 
S^-Laurent,  et  auxquelles  se  livrèrent  principalement 
Fuselier,  d'Omeval  et  Le.<%age,  étaient  rimées,  pour  le 
dialogue  comme  pour  les  couplets.  Puis ,  ou  mêla  de  la 
prose  avec  les  vers,  afin  de  mieux  lier  les  couplets,  et  le 
vaudeville  devint,  vers  la  fin  du  xvm«  siècle,  ce  qu'il  ast 
resté  jusqu'à  nos  jours ,  une  petite  comédie  dont  le  dia- 
logue en  prose  est  entremêlé  de  couplets.  Il  se  distingua 
de  la  comédie  à  ariettes ,  appelée  opéra-comique,  en  ce 
que  ses  couplets  furent  adaptés  à  des  airs  vulgaires  et 
connus.  Les  couplets  qui  terminent  quelques  comédies  de 
Picard  et  le  Mariage  de  Figaro  de  Beaumarchais  ne  font 
pas,  de  ces  pièces,  des  vaudevilles  dans  le  sens  récent  de 
ce  mot.  Le  vaudeville  se  prête  à  tous  les  tons  :  comédies 
intriguées,  scènes  de  boudoir,  pièces  villageoises,  tabl<Hax 
de  circonstance,  parodies,  tout  a  été  de  son  domaine.  B. 

VAUDEVILLE  (Théâtre  du).  Un  théâtre  de  ce  nom  fut  bâti 
en  1792  à  Paris,  entre  la  rue  de  Chartres  et  la  rue  S'-Tho- 
mas-du-Louvre,  rues  qui  étaient  sur  l'emplacement  de  la 
galerie  septentrionale  et  d'une  partie  de  la  cour  du  nouveau 
Louvre.  Lenoir  en  fut  l'architecte  et  l'éleva  sur  l'emplace- 
ment qu'occupait  une  salle  de  danse  appelée  Vauxhail 
d'hiver  ou  Petit  Panthéon.  Les  auteurs  qui  contribuèrent 
successivement  à  la  fortune  de  ce  théâtre  furent  Barré, 
Piis,  Radet,  Desfontaines,  les  deux  Ségur,  Prévost  d'Iray, 
Dieulafoy,  Gersin,  Désaugiers,  Moreau,  Francis,  Rouge- 
mont,  Dumersan,  Théaulon,  Dartois,  Dupaty,  Merle, 
de  Jouy,  Varner,  Dupin,  Mélesville,  Delestre-Poirson , 
Carmouche,  Scribe,  Brazier,  Frédéric  de  Courcy,  Bayard, 
Saintine,  Dupeuty,  etc.  La  salle  ayant  été  incendiée  en 
1838,  les  acteurs  allèrent  s'établir  place  de  la  Bourse,  à 
1  ancien  Théâtre desNouveautés.  Depuis  1874,  le  Vau- 
deville a  été  transporté  sur  le  boulevard  des  Italiens. 

VAUX -DE -VIRE.  F.  Vaudeville. 

VAUXHALL ,  jardin  public  de  Londres  \  ainsi  appelé 
d'un  propriétaire  de  cet  emplacement  au  xvi<  siècle.  Par 
imitation,  on  a  donné  le  même  nom  à  des  établissements 
du  même  genre  soit  à  Paris,  soit  dans  d'autres  grandes 
villes. 

VAVASSEUR. 

VAYVODE. 

VEAU  D'OR. 

VECTIGALIA. 

VÊDANTA.  V.  Indienne  (Philosophie). 

VÊDAS.  Ce  mot,  qui  signifie  science,  désigne, un  en- 
semble d'œuvres  poétiques  formant  la  sainte  Écriture 
des  Indiens.  Si,  à  ces  compositions  primitives,  on  ajoute 
les  développements  qu'elles  ont  reçus  sous  le  nom  de 
brâhmanas  et  de  sutras ,  on  a  le  corps  entier  de  ces 
livres  sacrés.  Dans  lenr  état  actuel,  les  Védas  sont  au 
nombre  de  quatre,  le  Rig,  le  Sâma, le  Yajur  et  VAtharva, 
De  ces  quatre  recueils,  les  trois  premiers  sont  reconnus, 
non-seulement  comme  authentiques,  mais  comme  cano- 
niques, par  tous  les  savants  de  l'Inde;  VAtharva-véda 
jouit  d'une  moindre  autorité,  étant  sans  doute  d'une 
époque  postérieure  aux  autres.  Le  Rig-véda,  qui  est  sou- 
vent désigné  par  le  simple  nom  de  Véda^  est  à  la  fois  le 
plus  ancien  et  le  plus  vénéré  de  tous  ces  livres  :  c-omme 
le  Sâma,  il  ne  renferme  que  des  vers  {rik)\  mais  ce  der- 
nier recueil,  qui  forme  en  quelque  sorte  le  rituel  des 
cérémonies  sacrées,  se  compose  de  vers  empruntés  au 
Rig-véda,  et  arrangés  suivant  les  besoins  du  culte,  de 
sorte  qu'il  n'esl  guère  qu'une  reproduction  de  celui-d 
avec  des  variantes  plus  ou  moins  importantes.  Le  yicu'ur- 
véda  contient  des  vers  et  de  la  prose  :  les  vers  appar- 
tiennent généralement  au  Hig-véda:  la  partie  de  prose 
consiste  en  formules  appartenant  à  des  écoles  diverses 
et  signalant  une  époque  plus  avancée  de  la  théologie  in- 
dienne. Il  forme  deux  recueils  (  sanhità)  connus  sous  les 
noms  de  Ya^us  blanc  et  de  Yajus  noir,  dont  les  sujets 
sont  identiques,  mais  qui  ne  présentent  pas  le  même  ar- 
rangement :  dans  le  premier  on  ne  trouve  que  les  for- 
mules du  sacrifice,  les  explications  et  les  développcmenfa 
étant  rejetés  dans  le  bràhma/na;  dans  le  noir,  an  con- 
***!iîrr!,  les  formulas  sont  ordinairement  8ui\'!es  des  cxpl:- 


V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 


VÈD 


1765 


VÈD 


cations  dogmatiques  et  de  tout  ce  quî  concerne  le  céré- 
monial. Quant  à  lAtharva^da,  il  est  composé  exclusi- 
vement d'hymnes  en  vers,  ainsi  que  le  Rig-véda  ;  il  en 
renferme  plus  de  sept  cents  :  mais  ces  chanls  ont  surtout 
pour  objet  les  puissances  malfaisantes  de  la  nature,  les 
animaux  nuisibles,  les  maladies,  les  ennemis  publics  et 
surtout  privés;  et  ils  marquent  une  époque  où  les  doc- 
trines cosmologiques  des  temps  antérieurs,  tombées  dans 
le  bas  peuple,  y  avaient  déjà  engendré  de  grossières  su- 
perstitions. 

L*examen  du  contenu  et  de  la  forme  même  des  quatre 
Védas  prouve  qu'ils  sont  d'époques  assez  difTérentes  et 
même  de  pays  assez  éloignés  les  uns  des  autres.  11  est 
probable,  en  effet,  sinon  tout  à  fait  certain,  que  YAtharvor 
véda,  qui  est  le  dernier  en  date,  a  été  composé  dans 
rinde  orientale,  c.-à-d.  dans  les  vallées  gangétiques;  le 
Yajus  parait  se  rapporter  à  Tlnde  moyenne,  à  l'orient  de 
la  Saraswati  ;  le  Sàma,  comme  composé  de  vers  extraits 
du  Rig,  lui  est  nécessairement  postérieur,  malgré  la 
forme  archaïque  de  beaucoup  d'expressions.  Or,  il  est 
certain  que  l'organisation  définitive  des  cérémonies  du 
culte  a  eu  lieu  sous  le  régime  de  l'institution  brahma- 
nique, dans  un  temps  où  les  Aryas  s'étaient  avancés  de 
rO.  à  l'E.  Jusque  sur  les  affluents  supérieurs  du  Gange, 
au  midi  des  monts  Him&laya.  Quant  au  Rig-véda,  qui 
reste  ainsi  la  plus  ancienne  des  quatre  collections,  sa 
simple  lecture  ne  laisse  aucun  doute  sur  les  lieux  où  il  a 
été  composé.  H  est  certain,  en  effet,  que  c'est  à  une 
époque  assez  récente  qu'il  a  été  présenté  par  les  brah- 
manes sous  sa  forme  actuelle  de  recueil,  et  que  les 
hymnes  y  ont  été  rangés  dans  un  ordre  déterminé;  mais 
ce  travail  a  été  analogue  à  celui  qui  fut  fait  sous  la  di- 
rection d'Esdras,  quand  il  réunit  et  publia  les  anciens 
livres  hébraïques,  qui  lui  étaient  de  beaucoup  antérieurs. 
Les  hymnes  du  Rig-véda,  conservés  dans  les  familles  sa- 
cerdotales, témoignent,  à  cent  reprises,  qu'ils  ont  été 
ehantés  dans  un  pays  nommé  Saptasindhu  ou  les  Sept- 
xîvières;  ces  rivières  sont  nommées,  soit  isolément,  soit 
même  toutes  ensemble  et  dans  leur  ordre  géographique  ; 
les  noms  qui  leur  sont  donnés  sont  ceux  qu'elles  portaient 
au  temps  d'Alexandre  le  Grand,  et  que  les  Grecs  ont  plus 
ou  moms  défigurés;  c'est  encore  ceux  qu'elles  portent 
aujourd'hui  pour  la  plupart;  leur  direction  vers  le  sud 
est  plusieurs  fois  signalée  dans  le  Véda,  ainsi  que  leur 
réunion  dans  un  bassin  commun,  qui  porte  constamment 
le  nom  de  Sindhu,  De  tous  ces  faits  il  ressort  que  ces 
hymnes  ont  été  composés  dans  les  vallées  de  l'Indus  et 
non  dans  celles  du  Gange,  qui  n'y  est  nommé  qu'une 
fois,  dans  un  hymne  de  la  fin  de  la  période.  Cette  con- 
trée est  donnée  comme  comprise  entre  le  désert  (désert 
de  Marwar)  et  la  montagne  (l'Him&laya)  ;  vers  l'O.,  elle 
ne  dépasse  pas  les  monts  Bolor  ;  et  à  l'E.,  elle  s'étend 
jusqu'à  la  Sarayû,  affluent  du  Gange  qui  traverse  la  ville 
d'Ayôdhyà  (Aoude).  Le  noyau  central  des  monts  d'Asie 
est  signalé  dans  le  Rig-véda;  mais  il  n'y  est  point  ques- 
tion des  pays  situés  au  delà  et  arrosés  par  l'Oxus,  bien 
que  les  rives  de  ce  fleuve  soient  le  berceau  même  de  la 
race  des  Aryas;  ce  fait  prouve  qu'à  l'époque  des  hymnes 
du  Rig,  la  séparation  des  Aryas  de  l'Inde  était  accomplie 
depuis  fort  longtemps. 

Le  Rig-véda  n'est  pas  l'œuvre  d'un  seul  homme: 
Vyàsa  est  le  nom  générique  donné  en  sanscrit  à  tous  les 
compilateurs  indiens  ;  les  noms  qui ,  dans  le  recueil,  ac- 
compagnent chaque  hymne,  et  dont  beaucoup  sont  cer- 
tainement authentiques,  sont  au  nombre  de  plus  de 
trois  cents  ;  ils  appartiennent  à  des  familles,  à  des  épo- 
ques et  à  des  parties  du  Saptasindhu  très-différentes  les 
unes  des  autres;  de  sorte  qu'on  estime  à  trois  siècles  en- 
viron la  durée  de  la  période  des  hymnes.  Biais  cette  pé- 
riode a  elle-même  été  précédée  d'une  autre,  partout 
signalée,  pendant  laquelle  ont  chanté  les  ancêtres  des 
auteurs  du  Rig  .  c'est  par  cette  antique  période  que  les 
traditions  indiennes  se  rattachent  à  celles  de  la  Perse,  et 
de  toutes  les  contrées  européennes  occupées  par  des 
peuples  aryens.  A  quel  temps  faut-il  rapporter  les  hymnes 
du  Rig-véda^  On  ne  saurait  le  dire  d'une  façon  précise. 
Mais  il  est  fort  ancien  :  car  le  Bouddha  est  mort  en  l'an 
544  ou  543  av.  J.-C;  sa  réforme,  toute  morale,  supposait 
une  civilisation  déjà  vieillie  et  usée,  la  civilisation  brah- 
manique. Celle-ci  avait  elle-même  eu  son  point  culmi- 
nant, sa  période  de  développement  régulier,  et  son  moyen 
âge,  pendant  lequel  elle  s'était  élaborée.  Cest  ce  moyen 
âge  qui  est  caractérisé  par  la  littérature  des  Bràhmanas, 
écrits  en  langue  védique  et  non  en  sanscrit ,  aussi  bien 
que  les  Védas  eux-mêmes.  Si  l'on  songe  que  cet  immense 
développement  d'idées,  de  civilisation  et  de  puissance. 


chez  les  Aryas  de  l'Inde,  était  spontané,  solitaire,  original 
et  sans  précédents,  tandis  que  celui  des  Barbares  de  l'Oc- 
cident avait  été  précédé  par  les  Grecs  et  les  Romains,  et 
que  le  christianisme  leur  était  donné  tout  fait,  on  sera 
plus  que  modéré  en  donnant  mille  années  d'existence  à 
la  civilisation  brahmanique  avant  le  Bouddha.  On  est 
ainsi  reporté  au  xvi«  ou  au  xvii*  siècle  av.  J.-C.  pour  le 
temps  où  les  hymnes  du  Rtg  furent  composés  ;  mais  il  se 
peut  qu'ils  soient  plus  anciens. 

Comme  œuvres  littéraires,  les  hymnes  sont  l'unique 
monument  de  ce  genre  appartenant  à  notre  race,  puisque 
les  hymnes  antiques  de  la  Grèce  sont  perdus  sans  excep- 
tion. Ceux  dû  Rig-véda  sont  classiques,  dans  leur  fond 
et  dans  leur  forme  :  la  poésie  est  toute  empruntée  à  la 
nature  extérieure  ou  à  la  vie  ordinaire  des  populations 
aryennes.  Les  phénomènes  du  jour  naissant,  de  la  foudre 
et  des  vents;  ceux  du  feu  sacré  qui  s'allume,  se  déve- 
loppe ou  s'éteint;  la  marche  des  Aryas  à  travers  des 
peuples  ennemis  et  barbares;  le  labourage  et  les  trou- 
peaux ;  la  naissance,  le  maria^,  la  mort  avec  la  sépul- 
ture :  tels  sont  les  sujets  ordinaires  des  hymnes,  sujets 
qui  y  sont  traités  généralement  avec  une  grande  sincérité 
d'observation.  A  côté  de  ces  faits  réels,  les  hymnes  pré- 
sentent tout  un  monde  de  conceptions  symboliques, 
offrant  la  plus  grande  analogie  avec  les  divinités  de  la 
mythologie  grecque  :  chaque  ordre  de  phénomènes  na- 
turels est  rapporté  à  une  puissance  vivante,  à  laquelle 
l'imagination  prête  une  forme  humaine,  et  qu'elle  fait 
agir  ensuite  à  la  façon  des  hommes  de  ce  temps;  il  y  a 
donc  un  Panthéon  védique,  tout  composé  d'êtres  idéaux 
présidant  à  la  nature  entière  et  la  reproduisant  d'une 
façon  poétique  et  classique.  On  ne  trouve  pas  dans  le 
vida  ces  êtres  monstrueux  qui  sont  en  si  grand  nombre 
dans  le  Panthéon  brahmanique  des  temps  postérieurs;  il 
y  a  dans  les  idéaux  védiques  autant  de  mesure  et  de  pro- 
portion que  les  artistes  grecs  en  ont  su  donner  aux  divi- 
nités de  leur  pays. 

L'état  de  la  société  où  furent  composés  les  hymnes 
est  fortement  retracé  dans  tout  le  recueil  du  Rig-véda, 
Les  familles  se  rattachent  étroitement  par  leur  origine 
à  des  ancêtres  presque  divins  et  qui  sont  déclarés  être 
eux-mêmes  les  auteurs  des  dieux,  c'est-à-dire  des  sym- 
boles. Comme,  dans  la  doctrine  mystique  de  ces  temps, 
un  même  principe  igné  et  intelligent  anime  tous  les 
êtres  vivants,  se  transmet  à  travers  les  générations  et 
se  manifeste  sur  l'autel  où  brûle  le  feu,  les  pères  sont 
pour  les  fils  non-seulement  les  auteurs  de  leurs  formes 
corporelles,  mais  encore  le  principe  même  d'où  la  vie 
leur  a  été  transmise.  Et  le  principe  de  vie,  ne  pouvant 
périr,  unit  les  générations  les  unes  aux  autres  et  devient 
le  fondement  de  la  famille.  L'état  primitif  de  la  famille 
est  indiqué  par  les  noms  de  parenté,  dont  la  langue  vé- 
dique donne  la  signification  première.  Les  fonctions  et  les 
rapports  de  ses  membres  entre  eux  sont  par  là  claire^ 
ment  aperçus.  Le  père  est  le  chef,  la  mère  est  la  mal- 
tresse de  maison,  la  fille  est  celle  qui  trait  les  vaches,  et 
le  fils  est  le  défenseur;  à  un  autre  point  de  vue,  le  père 
est  le  nourricier  de  la  famille,  et  la  mère  est  la  dispen- 
satrice. Les  mots  védiques  qui  expriment  ces  relations 
sont  les  mêmes  qu'en  latin,  en  grec,  en  allemand,  etc., 
mais  n'ont  de  signification  saisissable  que  dans  la  langue 
des  hymnes.  On  doit  dire  toutefois  que  les  rôles  qu'ils 
expriment  étaient  déjà  fort  altérés  au  temps  du  Véda.  1^ 
effet,  tous  ces  mots  supposent  la  monogamie,  et  il  n'c  \ 
pas  contestable  qu'elle  a  été  et  qu'elle  est  demeurée  l'in- 
stitution commune  des  Aryas  de  l'Inde  :  mais  on  voit 
déjà,  dans  le  Rig-véda^  quelques  exemples  de  polygamie. 
Un  hymne  nuptial  nous  permet  de  suivre  dans  ses  détails 
la  cérémonie  religieuse  du  mariage,  et  nous  montre  qu'une 
métaphysique  sérieuse  y  présidait  dès  cette  époque  :  la 
liberté  de  la  femme  est  complète  jusqu'au  dernier  mo- 
ment; son  autonomie  ne  fut  point  détruite  par  l'usage 
royal  de  la  polygamie;  il  n'y  eut  jamais  de  marché  toléré 
par  la  loi  en  pareil  cas  :  il  semble  que  cette  pratique 
appartienne  presque  exclusivement  aux  sociétés  sémi- 
tiques. 

La  division  en  castes  de  la  société  indienne  n'existe  pas 
encore  au  temps  du  Rig-véda:  elle  existe  à  l'époque  de 
VAtharva-véda;  et  il  semble  qu'elle  existe  même  déjà 
au  temps  du  Yajus,  Il  y  a,  dans  le  Rig^  des  brahmanes, 
des  râ^as  et  le  peuple,  désigné  sous  le  nom  de  viç  :  mais 
on  peut  être  râja  et  brahmane  à  la  fois,  comme  le  prou- 
vent de  nombreux  exemples  :  il  n'y  a  pas  d'hérédité  ab- 
solument établie  dans  les  fonctions;  on  voit  aussi  des 
brahmanes  accomplir  les  actes  qui  plus  tard  furent  ré- 
servés aux  gens  du  peuple  et  même  aux  Çfàdras.  Ce  dor* 


VÊD 


1766 


VÊD 


oier  mot  ne  le  rencontre  même  qne  dans  un  hymne, 
reconnu  pour  appartenir  aux  temps  postérieurs.  Le 
br&timane  du  Rig^éda  est  le  père  de  famille  dans  Texer- 
cice  des  fonctions  sacrées;  le  roi  est  le  père  de  famille 
commandant  à  Tarmée  et  gouvernant  son  territoire  en 
temps  de  paix  ;  le  viç,  c^est  le  peuple  des  Aryas  tout  en- 
tier. Mais,  à  mesure  que  rétablissement  des  Aryas  dans 
rinde  fut  plus  ancien  et  plus  solide,  il  se  forma  des  fa- 
milles sacerdotales  conservant  le  dépôt  de  Thymne  et  de 
renseignement  sacré,  et  des  familles  féodales  dont  Tau- 
torité,  fondée  d*aborcl  sur  la  richesse,  fut  rehaussée  par 
la  cérémonie  du  sacre.  Enfin  il  vint  un  temps  où  la 
richesse  et  le  pouvoir  d*action  des  seigneurs  tinrent  dans 
une  sorte  d*infériorité  la  classe  sacerdotale,  qui  avait 
pour  elle  le  pouvoir  spirituel ,  fondé  sur  la  tradition  et 
la  science  :  la  hiérarchie  des  castes  fut  définitivement 
constituée  lorsque  les  deux  pouvoirs  se  trouvèrent  réunis 
entre  les  mains  d*une  même  famille,  celle  du  grand  poôte 
védique  Viçwàmitra.  Cette  révolution  s'accomplit  entre 
la  période  du  Hig  et  colle  du  Yajus  :  elle  marque  le  com- 
mencement de  la  société  brahmanique  dans  Tlnde  ;  mais 
ces  faits  se  passaient  encore  dans  les  vallées  du  Sap- 
tasindhu  et  non  dans  les  contrées  du  Gange.  Jusque-là , 
tout  Tensemble  de  la  constitution  aryenne  ressemble  de 
la  manière  la  plus  frappante  au  système  féodal  de  notre 
moyen  &ge  :  à  partir  de  la  fin  des  hymnes  du  Eig-^éda, 
la  société  tend  à  se  constituer  héroïquement,  à  la  ma- 
nière de  la  société  grecque  du  temps  d'Homère,  c,-à-d. 
à  se  partager  en  un  nombre  considérable  de  petites 
royautés. 

Quant  au  culte,  les  Vidas  nous  fournissent  les  détails 
les  plus  circonstanciés  sur  ses  cérémonies.  Toutefois, 
pour  les  rétablir  sous  leur  forme  la  plus  ancienne,  il  faut 
surtout  les  chercher  dans  le  Big^  et  constater  ensuite 
leurs  développements  dans  les  autres  recueils,  ainsi  que 
dans  les  BrAhmanas  et  les  Sûtras,  Ce  culte  est  fort 
simple  :  point  de  temple;  un  autel  de  terre  est  dressé 
dans  un  lieu  découvert;  il  y  a  une  enceinte  sacrée  où  les 
prêtres,  au  nombre  de  quatre,  puis  de  sept,  viennent  se 
placer  ;  chacun  d*eux  a  son  rôle.  On  allume  le  feu  sacré 
par  le  frottement  de  deux  pièces  de  bois  Tune  contre 
l'autre;  la  première  étincelle  est  alimentée  avec  le  beurre 
clarifié  ;  le  bûcher  8*enflamme  ;  les  prôtres  y  portent  l'of- 
frande solide  des  gâteaux  et  la  liqueur  fermentée  et 
alcoolique  du  sôma,  qui ,  par  Tintermédiaire  du  Feu ,  est 
offerte  aux  Dieux.  Ceux-ci  sont  présents  à  la  cérémonie  ; 
ils  sont  assis  sur  le  gazon  sacré  répandu  autour  de  l'au- 
tel. Pendant  ce  temps,  les  prêtres  chantent  l'hymne  en 
l'honneur  des  Dieux.  Tel  est  l'ensemble  d'une  céré- 
monie védique  :  on  la  répétait  trois  fois  par  jour,  au  lever 
de  l'aurore,  à  midi ,  et  au  coucher  du  soleil.  Dans  des 
circonstances  rares ,  on  offrait  aussi  des  sacrifices  san- 
glants :  on  immolait  un  cheval  précédé  d'un  bouc  ;  et  la 
chair  de  la  victime,  rôtie  au  foyer  sacré,  était  partagée 
entre  ceux  des  assistants  qui  en  désiraient;  ce  sacrifice, 
étant  fort  coûteux,  resta  une  cérémonie  royale,  connue 
BOUS  le  nom  d*açwamâdha. 

Tous  les  détails  du  culte  védique  étaient  étroitement 
liés  avec  une  métaphysique  déjà  profonde,  partout  ex- 

Eosée  dans  les  Védas  et  dont  voici  les  principaux  traits, 
e  fond  de  cette  doctrine  consiste  dans  la  théorie  des 
Asuras  ou  principes  de  vie  {asu).  Les  Aryas  des  temps 
primitifs,  ayant  été  frappés  par  le  spectacle  de  la  vie  ré- 
pandue partout  dans  la  nature,  en  cherchèrent  l'explica- 
tion ;  et  ils  pensèrent  que  son  principe  devait  être  lui- 
même  vivant,  parce  qu'ils  voyaient  les  êtres  vivants 
s'enchaîner  les  uns  aux  autres  sans  interruption  et  pro- 
venir toujours  d'êtres  vivants.  Ils  constatèrent  que  la  vie 
est  partout  unie  au  mouvement,  et  que,  Tun  s'arrêtant , 
l'autre  s'arrête;  ils  furent  donc  portés  à  concevoir  les 
principes  de  la  vie  comme  doués  de  mouvement,  et, 
ainsi,  comme  ayant  un  corps.  Toutefois,  l'ubiquité  de 
leur  action  était  pour  ces  premiers  philosophes  une  dif- 
ficulté; car  il  fallait  que  ces  corps  fussent  en  même  temps 
universels  et  d'une  durée  sans  fin  :  la  vue  des  phéno- 
mènes de  l'air,  si  puissant  et  pourtant  invisible;  des 
odeurs,  qui ,  invisibles  et  impalpables,  se  répandent  au 
*oin;  du  feu  surtout,  qui  semble  exister  dans  tous  les 
iorps,  depuis  le  bois  qui  brûle  sur  l'autel  Jusqu'au  soleil 
et  aux  étoiles,  et  qui  pourtant  se  dérobe  avec  tant  de 
facilité  ;  tous  ces  pnénomènes  les  portèrent  à  corcevoir 
l'idée  des  corps  glorieux  qu'ils  donnèrent  aux  Asuras. 
Lorsqu'ils  vinrent  ensuite  à  chercher  l'origine  des  ani- 
maux et  de  l'homme,  comme  ils  y  constataient  la  pré- 
sence de  rintelligence  et  son  union  avec  la  fie,  il  leur  fut 
aisé  de  prêter  l'intelligence  aux  êtres  supérieurs  qu'ils 


concevaient,  et  de  faire  d'eux  les  maîtres  et  les  ordon- 
nateurs du  monde.  L'anthropomorphisme  était  la  consé^ 
quence  naturelle  de  cet  ordre  d'idées;  car  le  nom  d'Asura 
est  un  nom  commun,  qui,  4ans  le  Véda,  s'applique  à 
tous  les  êtres  métaphysiques  ou  réels  dans  lesquels  il  est 
possible  de  voir  un  principe  ou  une  cause  de  la  vie.  Plus 
tard,  une  révolution  lente  ayant  substitué  à  ces  pre- 
mières conceptions  un  peu  vagues  des  personnes  divines 
mieux  définies,  on  donna  à  celles-ci  le  nom  de  dévas  ou 
dieux,  et  le  mot  asura  désigna  uniquement  cette  an- 
tique génération  divine ,  analogue  aux  Titans  et  com- 
posée des  ennemis  des  dieux.  Mais  ce  progrès  des  idées 
était  loin  d'être  accompli  au  temps  du  Rig-vêda.  Les  prin- 
cipaux Asuras  sont  :  Agni  ou  le  Feu ,  qui  est  d'abord  le 
feu  qui  brûle,  extrait  du  bois,  et  nourri  sur  l'autel  avec 
le  corps  de  l'offrande;  ce  feu  s'éteint,  mais  en  réalité  ne 
fait  que  se  cacher,  et  peut  renaître  sans  fin  dans  chaque 
cérémonie;  Agni  est  aussi  le  feu  de  la  vie  qui  se  condense 
dans  les  végétaux  et  les  animaux,  le  feu  de  la  foudre  qui 
se  rassemble  dans  le  nuage  et  qui ,  descendant  avec  la 
pluie,  nourrit  les  plantes  et  entretient  la  vie;  c'est  ce 
même  principe  qui  réside  dans  le  beurre  consacré,  extrait 
du  lait,  première  nourriture  de  tous  les  animaux,  et  par 
qui  l'étincelle  du  foyer  produit  un  embrasement.  Comme 
principe  de  vie,  il  est  aussi  l'auteur  des  formes,  et  rem- 
plit les  rôles  de  Prométhée  et  de  Vulcain  ;  enfin,  comme 
les  choses  n'ont  d'utilité  que  par  leurs  formes,  Agni  est 
le  producteur  de  tous  les  biens.  Envisagé  dans  les  ani- 
maux, il  se  transmet  de  l'un  à  l'autre  avec  la  semence, 
et  porte  le  nom  de  Purusha  on  principe  masculin  ;  il  est 
ainsi  l'auteur  des  générations.  Enfin,  comme  auteur  de 
la  lumière  et  producteur  des  formes,  il  est  aussi  l'auteur 
de  l'intelligence  qui  les  conçoit.  Ce  père  universel  des 
vivants  réside  donc  en  toutes  choses  :  tel  est  l'Agni  du 
Big-véda.  Les  Asuras  du  ciel  lui  sont  étroitement  unis  : 
les  uns  représentent  les  diverses  énergies  célestes  du 
Jour  et  de  la  nuit,  sous  les  noms  de  Mttra^  Varuna, 
Aryaman;  les  autres,  celles  du  Soleil,  dont  le  nom  est 
Sûria,  qui  veut  dire  brillant.  Comme  voyageur  célesto, 
Sûria  est  d'abord  un  nain ,  qui  grandit  et  qui  en  trois 
pas  parcourt  le  ciel  tout  entier;  à  son  point  culminant  il 
porte  le  nom  de  Vishnu,  qui  signifie  pénétrant.  Sous  le 
nom  de  Savitri,  cet  Asura  est  désigné  comme  producteur 
dp<^  formes,  et,  sous  le  nom  de  Pushan,  comme  nourri- 
ci  r.  Enfin  Vivasivat  est  le  nom  par  lequel  on  veut  dire 
qu'il  pénètre  dans  tous  les  êtres  et  y  habite  :  et  ici  son 
rôle  se  rapproche  de  celui  d'Agni.  En  effet ,  l'énergie 
atmosphérique  du  soleil  est  symbolisée  dans  la  personne 
d'/ndra,  dieu  des  airs,  qui  parait  le  matin  tout  revêtu 
d'or,  traîné  sur  un  char  d'or  par  des  chevaux  jaunes, 
précédé  par  les  Cavaliers  célestes  et  par  l'Aurore,  escorté 
des  Maruts  qui  sont  les  vents  légers  et  sonores  du  Le- 
vant. Indra  est  un  chef  de  guerre  :  il  vient  pour  livrer 
bataille  aux  génies  qui  retiennent  les  eaux  dans  la  nue 
et  produisent  la  stérilité  ;  le  Véda  est  rempli  d'hymnes 
où  est  décrit  le  combat  d'Indra,  armé  de  la  foudre  et 
aidé  des  vents,  contre  ces  génies  de  l'orage.  Par  sa  vic- 
toire Indra  fait  pousser  les  plantes,  nourrit  les  animaux 
et  l'homme,  et  mérite  par  là  le  titre  d'Asura.  Comme 
symbole,  il  est  surtout  le  dieu  des  guerriers.  Vivaswat  est 
l'auteur  de  la  race  humaine,  et  père  de  Manu,  premier 
être  pensant;  il  est  aussi  le  père  de  Yarna,  dieu  dfô 
morts  et  de  la  Justice  ;  ces  deux  personnages  sont  le 
Mi  nos  et  le  Rhadamante  des  Cretois.  —  Tous  les  détails 
de  la  mythologie  védique  se  groupent  autour  de  ces  deux 
conceptions,  le  feu  Agni  et  le  Soleil.  Or  il  arriva,  du 
temps  même  des  hymnes  du  Rig,  que  les  prêtres  ftrj'ens 
saisirent  une  étroite  relation  entre  le  feu  terrestre,  le  feu 
de  l'éclair  et  le  feu  solaire,  et  ne  tardèrent  pas  à  les  iden- 
tifier :  car  la  race  aryenne  a  toujours  eu  une  tendance 
polythéiste  en  religion ,  et  un  besoin  d'unité  en  méta- 
physique. Ce  dernier  besoin  porta  certains  prêtres  à 
donner  la  prépondérance  à  une  divinité  de  leur  choix, 
jusqu'au  jour  où,  l'unité  d'Agni  ayant  été  entrevue,  ils 
quittèrent  l'ancienne  doctrine  des  Asuras  et  cherchèrent 
à  définir  le  principe  unique  et  suprême.  Mais  dans  le 
Big-véda,  cette  définition  n'est  encore  présentée  que  sous 
la  forme  de  question  et  avec  timidité  ;  l'être  unique  n'y 
a  pas  encore  reçu  son  nom  ;  toutefois  la  tendance  pan- 
thé»»âque  de  la  doctrine  est  fortement  marquée  dans 
plusieurs  hymnes,  lesquels  forment  le  lien  historique 
entre  le  polythéisme  des  temps  antérieurs  et  la  grande 
théorie  du  brahmanisme.  Cette  tendance  est  fortifiée  en- 
core par  la  croyance,  non  à  la  métempsvcose,  mais  h  la 
reviviscence,  constatée  dans  plusieurs  hymnes  où  sont 
d.pj  scènes  et  des  formules  de  résurrectien. 


VftD 


VÊD 


On  se  demande  comment,  aussi  divisa  qu'elle  l'était, 
la  société  aryenne  de  Tlnde  a  pu  parvenir  à  l'unité  de 
croyance  partout  attestée  par  le  Vêda  :  le  Véda  lui- 
même  l'explique.  En  efTet,  fl  est  incontestable  que,  si  le 
culte  a  commencé  par  être  privé,  il  est  de  bonne  heure 
devenu  public  :  la  création  des  symboles,  et  ensuite  leur 
interprétation, distingua  les  prêtres  de  la  foule  du  peuple; 
et  la  nécessité  de  pourvoir  aux  autres  besoins  de  la  vie 
retenant  les  hommes  ailleurs,  il  se  forma  des  familles  sa- 
cerdotales, attachées  au  culte  et  officiant  pour  tout  le 
monde  :  il  y  en  a  un  assez  grand  nombre  de  citées  dans 
le  Véda;  et  ce  farent  colles  qui  continu(^rent  d'être  à  la 
tête  de  la  société  brahmanique.  La  perpétuation  des 
cultes  primitifs  s'opérait  dans  ces  familles  par  l'enseigne- 
ment paternel,  et,  dans  le  peuple,  par  la  répétition 
journalière  des  mêmes  cérémonies;  c'est  ce  qu'atteste 
mainte  fois  le  Rig-véda.  La  présence  de  sept  prêtres  au- 
tour de  l'autel,  l'existence  de  nombreux  aumôniers  à  la 
cour  des  rois  féodaux ,  l'enceinte  fermée  au  vulgaire,  et 
enfin  le  petit  nombre  relatif  des  familles  sacerdotales, 
montrent  que  le  culte  était  public.  Le  roi  en  faisait  le 
plus  souvent  les  frais.  Du  reste,  dans  toute  la  période  du 
Véda,  il  n*^  a  pas  de  clergé;  le  sacerdoce  n*a  point 
de  hiérarchie;  les  br&hmanes  sont  égaux  entre  eux  et  in- 
dépendants les  uns  des  autres.  Si  donc  il  s'établit  une 
unité  de  doctrine,  ce  ne  fut  pas  seulement  la  force  des 
anciennes  traditions  qui  en  fut  la  cause,  puisque  les  opi- 
nions particulières  des  prêtres  étaient  entièrement  libres; 
cette  unité  fut  le  résultat  d'un  accord  entre  les  prêtres 
eux-mème!«.  C'est  ce  que  montrent  plusieurs  hymnes  :  le 
petit  nombre  des  brahmanes  dans  chaque  viUage  les  rap- 
prochait naturellement  les  uns  des  autres;  leur  réunion 
il  la  cour  des  seigneurs  féodaux  et  dans  les  cérémonies 
^solennelles  était  pour  eux  une  occasion  de  discuter  et  de 
s'entendre  sur  les  matières  religieuses;  enfin  les  voyages, 
même  lointains,  aux  lacs  sacrés  et  aux  confluents,  étaient 
(!éjà  en  usage  au  temps  des  hymnes  du  Rig^  et,  s'accom- 
plissant  chaque  année  aux  mêmes  époques,  donnaient 
lieu  à  de  grandes  conférences  métaphysiques,  dont  l'usage 
se  perpétua  dans  les  siècles  suivants.  Il  se  forma  ainsi 
des  écoles  philosophiques  et  des  systèmes,  dont  les  pre- 
mières bases  furent  posées  dès  le  temps  des  hymnes,  et 
3ui  avaient  déjà  reçu  un  grand  développement  à  l'époque 
u  Yajur-véda. 

Les  Védas  nous  font  également  connaître  l*origine  du 
pouvoir  spirituel  des  prêtres  chez  les  Aryas  de  l'Inde.  Ce 
pouvoir  se  confondit  primitivement  avec  l'autorité  pater- 
nelle, parce  que,  le  culte  étant  public,  mais  la  doctrine 
se  transmettant  avec  l'hymne  dans  les  familles,  le  père 
était  le  précepteur  de  ses  propres  enfants,  et  leur  don- 
nait, par  renseignement  sacré,  cette  seconde  naissance 
qui  les  faisait  nommer  dwijcu  chez  les  br&hmanes.  La 
perpétuité  de  cet  enseignement  et  sa  transmission  de 
père  en  fils  constituaient  l'hérédité  du  sacerdoce  :  de 
plus,  le  prêti'e  se  trouvait,  par  sa  science  théologique,  le 
seul  homme  capable  de  comprendre  les  symboles,  d'ap- 
pliquer les  rites,  d'offrir  dûment  le  sacrifice,  d'évoquer 
les  dieux,  et  de  leur  demander,  en  échange  de  l'offrande, 
les  biens  dont  ils  disposaient,  pour  lui-même  et  pour  les 
assistants.  C'est  ce  que  l'on  voit  partout  dans  le  Véda, 
Plus  tard,  au  temps  de  VAiharva^véda,  la  puissance  de 
l'invocation  sacerdotale  était  regardée  comme  si  grande, 
qu'elle  pouvait  donner  la  victoire,  chasser  ou  guérir  les 
maladies,  procurer  toutes  sortes  de  biens  matériels,  ra- 
nimer les  mourants,  ressusciter  les  morts  :  les  prêtres 
avaient  composé  pour  cela  un  ^nd  nombre  de  formules 
en  vers,  nui  sont  dans  ce  dernier  des  Védas,  Enfin,  lors- 
que la  société  aryenne  se  fut  constituée  en  castes  et  qu'elle 
eut  pris  les  çûdras  pour  ses  serviteurs  héréditaires,  les 
rôles  étant  légalement  distribués,  celui  d'étudier  et  d'en- 
sei^^ner  la  science  sacrée  appartint  exclusivement  aux 
br&hmanes  descendants  des  anciens  auteurs  des  rites  et 
des  chantres  du  Véda,  Leur  indépendance  réciproque 
lour  donna  une  entière  liberté  de  penser;  ils  s'enfon- 
cèrent sans  arrière-pensée  dans  les.  problèmes  les  plus 
profonds  de  la  métaphysique,  et  arrivèrent  à  ce  grand 
développement  panthéistique  qui  caractérise  l'Orient  in- 
dien, mais  qui  n'a  jamais  enchaîné  malgré  lui  aucun 
brahmane.  Ces  conséquences  sont  toutes  en  germe  dans 
les  hymnes  mêmes  du  Rig-véda, 

Il  est  aisé  de  comprendre  comment  ces  chants  si  an- 
tiques se  sont  conservés  Jusqu'à  nos  jours.  Il  est  probable 
en  effet  que  la  dernière  recension  des  recueils  védiques 
n'a  eu  lieu  que  quelques  siècles  avant  J.-C.,  et  que  la 
première  ne  remonte  pas  très-haut  dans  l'histoire.  Mais 
l'hymne  contient  le  dépôt  de  la  foi  antique  et  de  la  science 


traaitfonnelle;  fl  est  le  fondement  de  la  religion,  de  It 
loi  et  de  la  morale  publique  ;  toute  la  société  repose  sur 
le  Véda.  La  conservation  des  cultes  de  famille  étant  la 
sauvegarde  de  la  famille  même,  on  avait  un  intérêt  ma- 
jeur à  ne  pas  laisser  périr  les  hymnes  où  les  symboles  de 
foi  étaient  contenus.  On  voit  que  les  enfants  les  appre- 
naient de  bonne  heure  en  les  entendant  chanter  par  les 
pères  autour  de  l'autel,  et  en  les  étudiant  plus  tard  sous 
l'autorité  paternelle.  C'est  ainsi  que  les  hymnes  se  sont 
transmis  pendant  plusieurs  siècles  :  de  sorte  que  le  Jour 
où  l'on  a  éprouvé  le  besoin  de  les  recueillir  et  de  les 
écrire,  on  n'a  eu  qu'à  les  demander  aux  descendants  des 
anciens  prêtres,  qui  les  avaient  conservés  et  qui  les 
chantaient  chaque  jour  à  l'autel.  Il  n'y  a  donc  pas  lieu 
de  douter  de  leur  authenticité,  attestée  d'ailleurs  par  toute 
la  littérature  sansciite  des  temps  postérieurs  jusqu'à  nos 
jours. 

Dans  rinde,  le  Véda  est  le  fondement  de  tonte  la  con- 
stitution religieuse,  comme  l'Évangile  chez  les  chrétiens 
et  le  Koran  parmi  les  musulmans.  11  est  en  outre  la  base 
de  toute  la  constitution  civile  et  politique  et  du  système 
social  des  castes.  Il  n'y  a  donc  dans  ce  pays  aucun  livre 
qui  soit  révéré  à  l'égal  du  Véda,  Le  grand  mouvement 
religieux  qui  produisit  les  divers  cultes  brahmaniques  a 
son  point  de  départ  dans  ce  livre  et  ne  peut  trouver 
qu'en  lui  son  explication.  Les  écoles  dissidentes  y  sont 
déjà  en  germe  ;  il  y  a  des  doctrines  hétérodoxes  signalées 
dans  le  Rig-véda  lui-même;  et  un  esprit  critique  s'y  ma« 
nifeste,  auquel  on  peut  rattacher  les  opinions  de  Kapila 
et  de  Patanjali  {V,  Indienne —  Philosophie),  et,  après 
eux,  la  réforme  bouddhique.  On  voit  qu'il  est  impossible 
de  suivre  les  courants  d'idées  qui  se  propagent  de  siècle 
en  siècle  à  travers  les  trois  mille  ans  de  la  civilisation 
indienne,  si  l'on  ne  remonte  à  la  source,  qui  est  dans  1§ 
Véda,  et  surtout  dans  le  Rig, 

A  un  autre  point  de  vue,  le  V^ia,  quoique  appartenant 
aux  Aryas  de  l'Indus,  jette  les  plus  vives  lumières  sur  les 
temps  primitifs  et  sur  les  anciennes  croyances  et  institua 
tiens  des  autres  peuples  aryens.  Les  plus  voisins  de  l'Inde 
étaient  ceux  de  l'Iran  moderne  comprenant  surtout  les 
Mèdes  et  les  Perses.  Les  peuples  anciens  de  ces  contrées 
nous  ont  laissé  un  livre  sacré,  VAvesta,  qui  n'est  guère 
moins  ancien  que  le  Véda,  et  qui  offre  avec  ce  dernier 
les  plus  grandes  analogies.  Mais  il  renferme  un  violent 
antagonisme  contre  la  doctrine  indienne  des  Dévas,  qui 
a  succédé  à  celle  des  Asuras,  et  il  montre  par  là  qu'il  est  | 
d'une  époque  un  peu  postérieure  aux  hymnes  védiques;  : 
le  Véda,  en  effet,  ne  renferme  aucune  trace  de  cette 
rivalité.  De  plus,  la  grande  conception  métaphysique  de 
VAvesta,  Ormuzd,  porte  en  zend  le  nom  d'Ahura 
{V.  Zend-Avrsta)  qui  n'est  autre  que  celui  d'i4mra,  ce 
qui  rattache  la  doctrine  iranienne  à  celle  qui  est  dév&* 
loppée  dans  les  hymnes  du  Riy  et  du  Sâma;  et ,  comme 
elle  l'est  beaucoup  plus  dans  ces  recueils  indiens  que 
dans  celui  des  peuples  de  l'Iran,  elle  y  offre  une  clarté  qui 
ne  se  rencontre  pas  ailleurs.  Les  cultes  iraniens,  iden* 
tiques  à  ceux  du  Véda,  ont  beaucoup  à  gagner  pour  la 
critique,  si  on  les  compare  à  ces  derniers;  de  sorte  que 
l'étude  des  anciens  temps  de  l'Asie  occidentale  ne  peut 
faire  de  progrès  sérieux  sans  la  connaissance  des  hymnes 
indiens.  Tel  est  l'état  de  la  question.  —  Il  en  est  de  même 
à  plus  forte  raison  des  Aryas  européens,  comprenant ,  au 
Sud,  les  Grecs  et  les  Italiens,  au  Nord  la  plupart  des 
peuples  de  notre  continent  devenus  les  nations  modernes. 
Mais  l'étude  des  traditions  et  des  origines  grecques  est 
beaucoup  plus  diflîcile  que  celle  des  antiquités  indiennes, 
parce  que  les  Grecs  ne  nous  ont  pas  laissé  un  livre  tel 
que  le  Véda,  et  parce  que  leurs  origines  sont  multiples 
et  non  exclusivement  aryennes.  Toutefois  la  majeure 
partie  des  anciennes  religions  grecques,  ainsi  que  les  in*- 
stitutions  civiles  et  politiques  du  monde  helléni']ue,  ap- 
partenant à  la  race  des  Aryas,  trouvent  leur  explication 
dans  celles  du  Véda  :  non  qu'elles  procèdent  de  ces  der- 
nières, ni  qu'elles  soient  d'une  date  plus  récente;  mais 
l'antiquité  du  Véda  et  la  clarté  de  ses  doctrines,  où  l'ex^ 
plication  naturelle  est  presque  partout  à  côté  du  sym- 
bole, permettent  au  critique  d'y  chercher  des  lumières 
que  la  Grèce  même  ne  peut  lui  fburnir.  Il  faut  ajoutet 
que  les  mots,  qui,  chez  les  Grecs,  désignaient  les  dieux, 
les  objets  du  culte,  les  degrés  de  parenté,  les  fonctions 
sociales,  etc.,  n'ont  presque  Jamais  ae  sens  dans  la  langue 
grecque  elle-même,  fort  éloignée  de  son  origine,  tandis 
que  ces  termes  se  retrouvent  dans  la  langue  du  Véda  et 
y  ont  généralement  une  signification  très-claire.  Quand 
on  procède  à  cette  comparaison,  on  est  frappé  de  ce  fait, 
que  les  ancicuucs  populations  grecques,  nommées  Pé* 


VftD 


1768 


YEN 


lasgM,  avaient  apporté  des  croyances  et  dos  institations 
qui  se  rapprochent  de  celles  du  Véda  beaucoup  plus  que 
celles  des  Hellènes  proprement  dits  :  de  sorte  que  la  pé- 
riode des  Titans  semble  répondre  à  celle  des  Asuras,  qui 
est  de  beaucoup  antérieure  aux  Védas,  et  qui  durait  en- 
core au  temps  du  Rig,  tandis  que  les  dieux  nouveaux  ou 
Olympiens  répondent  très-exactement  au  Panthéon  brah- 
manique, postérieur  au  Véda.  Il  est  possible  d^  lors  de 
comparer  point  par  point  ces  anciennes  traditions,  et  de 
comprendre  celles  de  la  Grèce  beaucoup  mieux  au*on  n*a 
pu  le  faire  avant  la  découverte  des  hymnes.  Celle-ci  est 
toute  récente  :  le  premier  spécimen  a  paru  en  1833  ;  la 
traduction  française  du  Rig-véda  date  de  1851  ;  le  texte 
complet  est  encore  postérieur.  Et  cependant ,  malgré  le 

{>eu  que  Ton  sait  encore  sur  le  Yajur  et  sur  VAtMrva, 
es  anciennes  traditions  des  Aryas  européens  du  Nord  ont 
déjà  reçu  de  nombreux  éclaircissements.  Biais,  si  Ton 
excepte  VEdda  de  Sœmund,  où  se  trouve  consignée  la 
mjrthologie  Scandinave  et  qui  ne  date  que  du  xi^  siècle  de 
notre  ère,  on  n*a  guère  pour  se  guider  que  les  traditions 
populaires  répandues  dans  toute  TEurope,  et  dont  un 
grand  nombre  ont  été  recueillies  dans  ces  derniers  temps. 
Or,  il  est  visible  au*une  analogie  profonde  existe  entre 
ces  croyances  anciennes  de  nos  contrées  et  celles  qui 
sont  longuement  consignées  dans  le  Véda  :  dispersées 
parmi  nous,  détachées  de  tout  centre  et  étrangères  aux 
doctrines  chrétiennes  qui  les  ont  remplacées,  elles  sont 
obscures  et  souvent  bizarres  ;  rapprochées  de  leurs  ana- 
logues védiques,  elles  deviennent  naturelles  et  intel- 
ligibles, et  elles  nous  font  entrevoir,  dans  le  passé  de 
nos  ancêtres,  un  monde  mythologi(^ue  et  métaphysique 
que,  sans  le  Véda,  Ton  n'eût  Jamais  soupçonné.  Enfin 
l'apparition  du  texte  du  Véda  en  Europe  a  résolu ,  d'une 
manière  définitive,  une  question  depuis  longtemps  con- 
troversée, celle  de  l'origine  de  nos  langues  et  de  leur  pa- 
renté. On  les  faisait  venir  du  sanscrit,  et  l'on  attribuait 
au  grec  une  antiquité  plus  reculée  qu'au  latin  et  qu'aux 
langues  du  Nord  ;  mais  quand  on  a  vu  que  le  Véda  n'est 
pas  en  sanscrit,  mais  en  une  langue  d'où  le  sanscrit  est 
dérivé  et  qui  se  rapproche  beaucoup  de  celle  de  rAvesta, 
on  a  pu  d'abord  restituer  cette  dernière;  puis,  reprenant 
la  comparaison  des  langues  de  l'Occident  avec  celles  de 
rOrient,  on  s'est  convaincu  que  le  grec  et  le  latin  ne 
sont  pas  venus  Tun  de  l'autre,  que  le  celte  est  probable- 
ment antérieur  à  l'ancien  allemand  et  au  gothique,  aussi 
bien  qu'aux  langues  slaves  et  Scandinaves,  et  que  tous  ces 
idiomes  du  Nord  peuvent  rivaliser  d'antiquité  avec  ceux 
des  Gréco-Latins;  qu'enfin,  tous  ensemble,  les  idiomes 
de  l'Europe  sont  étrangers  au  sanscrit,  et  tirent  directe- 
ment leur  origine  de  la  langue  primitive  parlée  Jadis  aux 
rives  de  TOxus.  Ainsi  s'est  rétablie  dans  ses  éléments 
l'unité  de  la  famille  aryenne,  nommée  à  tort  indo-germa- 
nique. Parmi  toutes  les  langues  qu'elle  a  parlées  ou 
qu  elle  parle  encore,  il  n'en  est  aucune  dont  Tétude  soit 
aussi  profitable  qu<>  celle  du  Véda,  parce  que  celle-ci , 
très-voisine  de  son  origine,  et,  d'ailleurs,  parfaitement 
pure  de  toute  influence  du  dehors,  sert  d'explication  à 
toutes  les  autres;  le  sanscrit,  qui  s'en  rapproche  beau- 
coup, présente  les  mêmes  avantages,  mais  à  un  moindre 
degré. 

Le  caractère  de  la  langue,  des  idées  et  des  traditions 
védiques  est  purement  &ryen  :  aucun  mélange  étranger 
ne  s'y  remarque.  Avant  de  quitter  le  berceau  central  de 
leur  race,  les  Aryas  avaient  pu  être  en  contact,  au  nord, 
avec  des  populations  touraniennes  entièrement  barbares; 
au  sud-ouest,  ils  n'ont  été  en  contact  avec  les  Sémites 
que  par  leur  rameau  iranien,  et  nullement  par  celui  qui 
franchit  les  monts  pour  descendre  sur  l'Indus.  Il  n'y  a 
dans  le  Véda  aucune  trace  d'influence  sémitique,  aucune 
tradition  hébraïque  ou  chaldéenne  :  tout  ce  qu'on  y  ren- 
contre est  même  en  opposition  formelle  avec  ce  que 
contiennent  les  livres  de  Moise.  De  même,  les  premiers 
Indices  de  relations  entre  les  Hébreux  et  les  Aryas,  qui 
se  remarquent  dans  la  Bible,  ne  sont  pas  antérieurs  au 
règne  de  Salomon ,  et  se  rapportent  au  commerce  mari- 
time. On  en  a  conclu  légitimement  qu'au  temps  de  ce  roi 
les  Aryas  étaient  parvenus  au  bord  de  la  mer,  ce  qui  eut 
lieu  dans  les  temps  héroïques  postérieurs  à  la  période 
des  hymnes  du  Rig,  Enfin  les  races  Jaunes,  que  les  Aryas 
rencontrèrent  à  leur  vrivée  dans  le  bassin  de  l'Indus, 
étaient  sauvages,  et  n'ont  exercé  aucune  influence  sen- 
sible sur  les  conquérants  de  race  blanche  Jusqu'au  Jour  où 
lis  ont  pu  être  en  partie  admis  dans  la  société  aryenne  : 
or,  ce  fait  n'avait  pas  eu  lieu  au  temps  du  Rig-ima,  qui 
nous  les  dépeint  comme  des  ennemis  acharnés.  11  faut 
lionc  considérer  les  hymnes  védiques  et  tout  ce  qu'ils 


renferment  comme  un  produit  spontané  et  entièremeni 
original  de  la  race  aryenne.  Et  si  on  envisage  leur  haute 
antiquité,  ils  doivent  être  regardés  comme  le  monument 
primitif  de  notre  race. 

V.  Colebrooke,  On  thé  Védas,  dans  les  Recherchts  osto- 
iiques,  t.  VIII  ;  Roth ,  Littérature  et  Histoire  des  Védas, 
en  allem.,  1846;  Anquetil-Duperron ,  Oupnekkat,  Stras- 
bourg, 1801,  2  vol.  in-4*,  et  Ezour  Vedam,  Yverdun, 
1778,  2  vol.  in-12;  F.  Nève,  Êt%idM  sur  les  hi/mues  du 
Rig-véda,  Paris,  1842,  in-8<*;  Rosen,  RiQ-vedœ  spécimen, 
Londres,  1833,  in-4^  et  Rig-véda  Sanhita,  lib.  /.  ibid., 
1838,  in-4°;  Wilson,  Rig-véda  Sanhita,  avec  trad.  an- 
glaise, 1850;  Max  Mfiller,  Rig-véda  Sanhita,  etc.,  with 
the  comment,  of  Sayanacharya,  Londres,  in-4o;  Rig- 
véda,  traduit  en  français  par  V.  Langlois,  1851,  4  vol. 
in-8<>;  Stevenson,  Sanhita  of  the  Sama-véda,  Londres, 
1843,  gr.  in-8«,  et  Translation  ofthe  Sama-véda,  1842; 
Benfey,  Die  hymnen  des  Sàma^^oéda,  avec.  trad.  alle- 
mande, Leipzig,  1848,  in-4°:  Weber,  The  wf^e  Yajur- 
véda,  Berlin  et  Londres,  1851,  4  vol.  in-4<>;  Roth  et 
Whiteney,  Mharva-véda,  Berlin,  1855:  Barthélémy 
Saint-Hilaire ,  Des  Védas,  Paris,  1854;  Hauvette-Bes- 
nault.  Mémoire  sur  les  hymnes  du  Rig-véda,  couronna 
par  rinstitut  en  1857  ;  Ém.  Bumouf ,  Essai  sur  U  Véda, 
1862,  in-8».  Ém.  B. 

VEDETTE  (de  Titalien  vedeUa,  poste  d*où  l'on  voit  de 
loin) ,  sentinelle  à  cheval.  Les  vedettes  doivent  tenir  à  1a 
main  leur  sabre  ou  leur  carabine,  et  il  leur  est  défendu 
de  mettre  pied  à  terre.  Attaquées,  elles  font  feu  pour 
avertir  le  poste,  et  se  retirent.  On  met  des  vedettes  d^hon- 
neur  auprêa  des  souveraios  et  des  princes  {{ui  comman- 
dent en  chef. 

VÉGÉTATIVE  (Ame),  nom  que  les  Anciens  et  les  Sco- 
lastiques  donnaient  au  principe  des  fonctions  organiques, 
c.-àrd.  de  la  nutrition  et  de  la  reproduction ,  qui  sont 
communes  aux  végétaux  et  aux  animaux. 

VEHME  (Sainte-).     \ 

VEILLE.  J 

VEILLÉE  D'ARMES,  l  F.  ces  mots  dans  notre  Dwtion 

VÉLABRES.  (     de  Biographie  et  d*Bistoire. 

VÉLAIRES.  \ 

VKLARIUM.  / 

VELEITE  (pour  voUette)^  nom  donné,  dans  le  Levant, 
à  une  petite  voile  latine  qu'on  grée  sur  la  vergue  du  grand 
màt  dans  les  mauvais  temps. 

VÉUN  (du  latin  vitellina,  sous-ent.  pellis,  peau  de 
veau  ) ,  sorte  de  parchemin  préparé  avec  des  peaux  de 
veau  dont  l'àg^  ne  doit  pas  dépasser  six  semaines.  Le 
meilleur  vélin  provient  des  veaux  à  poil  blanc,  des  veaux 
mort-nés,  et  de  ceux  dont  la  mère  a  été  tuée  avant  qu'ils 
fussent  nés.  Beaucoup  d'anciens  manuscrits  sont  sur 
vélin.  On  se  sert  encore  aujourd'hui  de  vélin  pour  im- 
primer les  titres  et  diplômes,  pour  dessiner  et  peindre 
en  miniature. 

VÉUTES.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtctumnoire  de  Buh 
graphie  et  d* Histoire. 

VELLON,  mot  espagnol  qui,  en  Numismatique,  est  sy- 
nonyme du  français  hillon. 

VÉLOCIFÈRES  (du  latin  vtHox,  rapide,  et  ferre,  poi^ 
ter),  nom  qu'ont  pris»  il  y  a  un  demi-siècle,  certaines 
voitures  publiques  qui  se  prévalaient  de  leur  rapidité. 

VÉLOâPÈDE.  V.  DaAisiENNB. 

VELTURE,  en  termes  de  Marine,  forte  ligature  qui 
réunit  l'un  à  l'autre  deux  m&ts  superposés. 

VÉLOAU ,  vieux  mot  désignant  une  enveloppe  d'étoiïe 
où  l'on  renfermait  quelque  livre  précieux. 

VÉNALITÉ  DES  OFFICES.  V.  OmcES. 

VENDETTA ,  c-à-d.  en  italien  vengeance;  nom  par  le- 
quel on  désigne  un  usage  de  la  Corse  qui  oblige  tous  les 
membres  d'une  famille  à  venger  le  meurtre  d'un  des 
leurs,  sur  le  meurtrier  ou  sur  sa  famille,  sans  recourir  à 
l'intervention  de  la  justice.  Il  est  rare  qu'on  n*avertiss^ 
point  son  ennemi  de  la  résolution  où  l'on  est  de  le  tuer, 
ou  qu'on  feigne  une  réconciliation  pour  le  mieux  frapper; 
il  n'y  a  peut-être  pas  d'exemple  qu'on  l'ait  frappé  chez 
soi  si  le  hasard  l'y  conduisait.  Celui  qui  s'est  donné  le 
plaisir  de  la  vendetta  est  réduit,  pour  échapper  à  la 
rigueur  des  lois,  à  abandonner  l'Ile. 

VENDIDAD-SADÉ.  Ce  nom  désigne  l'ensemble  des 
anciens  livres  sacrés  de  la  Perse,  comprenant  le  Fau/r- 
dad  proprement  dit,  le  Yaçna  et  le  Vispered.  Cet  ensem- 
ble fait  lui-même  partie  de  la  collection  connue  sous  le 
nom  de  ZendrAvesta  (V.  ce  mot).  Le  Vendidad est  une 
partie  de  la  vingtième  naçka  (en  pcrs»an  nosk)  attribuée 
par  les  Parsis  à  Zoroastre,  qui ,  selon  eux,  en  avait  com- 
posé vingt  et  une;  c'est  un  livre  de  liturgie  et  de  droit; 


YEN 


1769 


YEN 


contenant  des  données  précieuses  sar  la  guograpliie  an- 
cienne du  nord  de  la  Perse,  ainsi  que  sur  les  institutions 
civiles  et  religieuses  de  ce  pays.  Le  Yaçna  (en  persan 
heschné\  est  également  un  livre  de  liturgie,  concernant 
particulièrement  les  sacrifices  et  les  cérémonies  pieuses; 
on  y  trouve  aussi,  comme  dans  le  Véda,  des  doctrines 
métaphysiques  relatives  aux  personnages  divins  et  parti- 
culièrement à  Ormuzd  (Ahuramazda).  Le  Vispered  est 
un  petit  recueil  dMnvocations  et  de  prières.— Le  Vimdidadn 
Scidé  est  tout  entier  en  langue  zende,  et  n'est  guère  moins 
ancien  que  les  Védas.  11  a  été  apporté  en  Europe  par 
Anquetil-Duperron,  qui  en  a  déposé  les  textes  à  la  Biblio- 
thèque du  Roi;  il  a  été  traduit  en  pehlvi  à  une  époque 
inconnue;  et  le  Yaçna  l'a  été  de  plus  en  sanscrit  par 
Neriosengh  ;  nous  avons  ces  traductions.  C'est  d'après  le 
persan  qu'Anquetil  a  traduit  le  Vendidad-Sadé ,  sous  le 
nom  de  Zend-Avesta ,  comprenant  en  plus  les  lescht,  le 
Sirouzé  et  le  Boundehesch,  La  traduction  sanscrite  a 
permis  à  Eug.  Bumouf  de  rectifier  la  traduction  d'An- 
auetil  dans  son  Commentaire  sur  le  Yaçna,  in-4°,  1833. 
V,  Eug.  Burnouf ,  Vendidad-Sadé ,  texte  lithoer.  in-fol., 
1843;  OIshausen,  Vendidad,  Hambourg,  1829,  in-4o; 
I^assen,  Vendiihdi  capila  quinque,  Bonn,  in-8%  1852; 
Vendida  Sade,  diê  heUigen,  etc.,  herausgegeben  von 
Aroc/cAau< ,  Leipzig,  1852,  gr.  in-8*>;  The  Yaçna,  etc., 
vithagujarati  translation,  by  Aspandiarji,  Bombay, 
1843,  §  vol.  in-8».  Em.  B. 

VENDOME  (Colonne).  F.  Colonnes  iionomentalbs  , 
dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire, 

VENDÔME  (Église  de  la  TniNrré,  à),  beau  monument  de 
style  ogival.  La  façade  présente  trois  portes,  entre  les- 
quelles sont  percées  des  niches  où  l'on  a  mis  de  nos 
Jours  les  statues  des  Apôtres,  en  remplacement  de  celles 
que  le  vandalisme  révolutionnaire  avait  détruites.  Les 
panneaux  des  portes  sont  couverts  de  sculptures  repré- 
sentant les  anciennes  cérémonies  de  l'Église;  celle  du 
milieu,  surmontée  d'un  balcon  de  pierre,  est  divisée  en 
deux  par  un  pilier  dans  lequel  est  pratiquée  une  niche 
renfermant  la  statue  du  Christ.  Le  clocher,  haut  de 
70  met.,  masse  carrée  assez  lourde,  accompagnée  de 
petites  tourelles,  et  que  surmonte  une  flèche  octogone 
dont  les  arêtes  sont  ornées  de  petits  cordons  en  croix,  est 
à  droite  du  portail,  et  entièrement  séparé  de  l'église.  Au- 
dessus  des  contre-forts  qui  soutiennent  l'édifice  règne  un 
balcon  découpé  à  jour  qui  fait  le  tour  du  toit.  A  l'inté- 
rieur, la  nef  offre  de  belles  proportions  :  tout  autour 
une  galerie  a  été  percée  dans  l'intérieur  des  murs  à  la 
hauteur  de  la  voûte  des  bas  côtés.  Le  chœur  a  de  beaux 
vitraux  et  des  stalles  sculptées;  la  clôture  du  chœur 
n'existe  plus,  et  a  été  remplacée  par  une  grille. 

VÉNÈDE  (Idiome).  V.  Sorabb. 

VÉNÉRABLE,  titre  d'honneur,  donné  :  1»  dans  l'an- 
cien Empire  d'Orient»  à  une  classe  de  hauts  fonction- 
naires, tels  que  les  proconsuls,  les  secrétaires  des  mi- 
nistres; ^  en  France,  à  quelques  rois,  notamment  à 
Philippe  I*'  et  à  Louis  VI;  3<^aux  personnages  morts  en 
odeur  de  sainteté;  4^  aux  prêtres  et  aux  docteurs  en 
théologie;  5**  aux  francs-maçons  qui  président  les  loges. 

VÉNERIE.  V.  Chasse. 

VENEUR  (Grand-^.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire. 

VENGEANCE,  action  par  laquelle  on  tire  satisfaction 
d'un  tort  ou  d'un  outrage.  Appliquée  aux  actes  que  la 
loi  punit,  la  vengeance  reçoit  le  nom  de  justice  ou  de 
vindicte  publique;  accomplie  par  les  particuliers,  elle 
est  criminelle  {V,  Vendetta).  —  Les  Anciens  avaient 
personnifié  la  Vengeance  divine  sous  le  nom  de  Némésis; 
les  chrétiens,  dans  leurs  tableaux,  la  représentent  par 
un  Anfi^  brandissant  une  épée  flamboyante. 

VÉNIEL  (Péché),  r.  Pécné. 

VENISE  (Église  S^-Marc,  à).  V.  Marc  (Saint-). 

VENISE  (Le  Palais  ducal,  &).  Un  palais  des  doges  avait 
été  commencé  en  800,  et  incendié  soixante-dix  ans  après. 
Le  monument  actuel,  du  xiv*  siècle  et  en  style  ogival,  a 
été  élevé  par  Calendario.  Il  a  quatre  façades  :  l'une,  du 
côté  de  l'église  S*-BIarc,  se  confond  avec  les  l>&timents  qui 
font  partie  de  cette  basilique;  une  autre,  de  la  fin  du 
XV*  siècle  et  en  style  de  la  Renidssance,  regarde  le  canal 
della  Paglia;  les  deux  plus  importantes  sont  sur  la  Piaz- 
zetta  ou  petite  place  S^Marc  e*  sur  la  Riva  ou  le  quai. 
Un  incendie,  en  1577,  détruisit  les  principales  salles  et 
bttiucoup  de  chefs-d'œuvre  de  la  peinture  vénitienne;  la 
restauration  de  l'édifice  fut  faite  d'après  les  plans  d*An- 
konio  da  Ponte.  Le  Palais  ducal  frappe  de  surprise  et 
d'admiradîm  par  la  singularité,  la  hardiesse  et  la  magni- 
f  conce  de  son  ensemble  architectural  autant  aue  par  le 


fini  do  ses  détails.  Une  colonnade  à  fûts  robustes,  forniani 
17  arcades  sur  le  quai  et  18  sur  la  Piazzetta,  soutient 
toute  la  construction;  au-dessus  règne  un  second  rang 
de  colonnes  plus  légères,  formant  une  galerie  trilobée  et 
à  jour.  Tous  les  chapiteaux  sont  d'un  goût  exquis  :  leurs 
bas-reliefs  représentent  des  chimères,  des  enfants,  des 
anges,  des  animaux  fantastiques,  des  sujets  de  la  Bible 
ou  de  l'histoire.  Une  longue  colonnette  torse  décore 
chaque  angle  de  l'édifice.  Les  murailles,  sur  la  Riva  et  la 
Piazzetta,  sont  plaquées  de  marbre  blanc  et  rouge,  dont 
les  dispositions  figurent  des  dessins  dans  le  goût  oriental. 
Une  corniche  se  festonne  en  pjrramides  évidéc»  et  en 
aiguilles  sur  tout  le  sommet  du  Palais.  —  La  porte  d'en- 
trée, dite  della  Carta,  du  nom  d'une  église  voisine  sous 
le  péristyle  de  laquelle  les  écrivains  du  grand  Conseil  et 
du  Sénat  se  réunissaient  autrefois,  est  ornée  de  colon- 
nettes,  de  trèfles  et  de  statues;  elle  conduit  par  un  pas- 
sage voûté  dans  la  grande  cour  intérieure,  au  milieu  de 
laquelle  sont  deux  citernes  en  bronze  d'un  travail  très- 
estimé,  l'une  de  Nicolas  de'  Conti,  l'autre  d'Alberghetti. 
Les  façades  de  cette  cour  situées  du  côté  de  la  Piazzetta 
et  du  quai  ne  sont  pas  terminées;  la  façade  orientale, 
en  style  de  la  Renaissance,  eut  pour  architecte  et  sculp- 
teur Ant.  Rizzo  et  Ant.  Scarpagnino;  la  façade  où  est 
l'horloge  est  décorée  de  huit  statues.  V Escalier  des 
Géants,  magnifique  ouvrage  construit  vers  1485  par  Ant. 
Rizzo,  avec  des  marbres  précieux  délicatement  travaillés 
par  Domenico  et  Bernardine  de  Mantoue,  conduit  de  la 
cour  à  la  seconde  galerie  :  il  tire  son  nom  de  deux  sta- 
tues colossales  de  Mars  et  de  Neptune,  posées  en  hr-"^ 
de  la  rampe,  et  sculptées  en  1554  par  Sansoyino;  au  pie« 
de  l'escalier  sont  les  statues  d'Adam  et  d'Eve,  par  Ant. 
Rizzo.  La  face  interne  de  la  porte  est  toute  fleuron  née  de 
volutes,  toute  plaquée  de  colonnettes  et  de  statues,  ou- 
vrage de  Bartolomeo.  Dans  la  galerie,  VEscalier  d'or, 
ainsi  nommé  à  cause  de  ses  riches  décorations  dirigées 
par  Sansovino,  et  dont  l'entrée  est  ornée  d'un  Hercule  et 
d'un  Atlas  dus  au  ciseau  de  Titien  Aspetti,  conduit  à  la 
bibliothèque  de  S^-Marc,  ancienne  salle  du  Grand  Con- 
seil. Autour  de  cette  salle,  longue  de  53  met.,  large  de  95, 
et  où  des  armoires  à  livres  ont  remplacé  les  anciennes 
stalles  des  sénateurs,  se  déroulent  d'immenses  peintures 
représentant  les  fastes  de  la  république  de  Venise,  et  qui 
sont  de  précieux  spécimens  de  l'emploi  primitif  de  l'huile 
sur  la  toile  :  dans  la  frise  sont  les  portraits  de  76  doges, 
au  milieu  desquels  on  remarque  un  tableau  noir  à  l'en- 
droit où  aurait  Cû  être  Blarino  Faliero  ;  le  plafond,  tout 
doré  et  à  compartiments  carrés,  octogones  et  ovales,  pré- 
sente trois  grandes  compositions  de  Paul  Véronèse,  do 
Tintoret,  et  de  Palma  le  Jeune.  Outre  la  salle  du  Grand 
Conseil,  le  Palais  ducal  contient  :  un  Musée  archéolo- 
gique, formé  dans  les  anciens  appartements  des  doges; 
la  salle  della  bussola ,  ainsi  nommée  d'un  tambour  qui 
couvrait  la  porte,  et  où  l'on  voit  une  ouverture  autrefois 
masquée  par  une  tète  de  lion  en  marbre  dans  la  gueule 
duquel  on  glissait  les  dénonciations  secrètes  ;  la  salle  du 
Conseil  des  Dix;  la  salle  des  Pregadi  ;  la  salle  de  l'Aoti- 
Collège,  où  les  ambassadeurs  attendaient  leur  audience  ; 
la  salle  du  Collège,  où  ils  étaient  reçus,  etc.  Toutes  ces 
pièces  sont  décorées  de  précieux  tableaux.  Dans  les  caves 
du  Palais  sont  les  fameuses  prisons  connues  sous  le  nom 
de  Pozzi  (puits),  et,  sous  la  toiture  recouverte  de  plomb, 
celles  qu'on  appelait  les  Plombs.  Un  long  corridor 
double,  nommé  Pont  des  Soupirs^  met  le  Palais  en 
communication  avec  la  Prison,  bel  édifice  construit  en 
1589  par  Ant.  da  Ponte.  B. 

VÉNITIEN  (Dialecte),  un  des  dialectes  italiens,  et  le 
plus  doux  de  tous.  Il  adoucit  les  consonnes  :  ainsi,  il 
substitue  le  z  au  g;  au  lieu  de  padre,  madrcy  figlU)^ 
C€ua,  il  dit  pare^  mare,  fio,  ca,  etc.  La  prononciation  est 
efféminée,  presque  enfantine.  Le  dialecte  vénitien  a  eu, 
depuis  le  xvi«  siècle,  une  littérature  assez  riche.  La 
Guerra  de  Ntcolottx  e  de  Castellani,  qui  date  de  1521, 
raconte  les  querelles  des  Nicolotti,  gondoliers  du  parti 
démocratique,  qu'on  reconnaissait  au  bonnet  et  à  la  cein- 
ture noirs,  et  des  Castellani,  gondoliers  de  l'État  et  des 
dignitaires,  ayant  le  bonnet  rouge;  Au  xviii*  siècle,  o-" 
peut  citer  les  chansons  d'Ant.  Lambert! ,  les  fables  de 
Franc.  Gritti,  les  comédies  de  Goldoni.  Un  abbé  Boaretti 
traduisit  V Iliade  en  dialecte  vénitien,  sous  le  titre  bizarre 
d'OfiMTO  in  Lombardia,  et  Mordini  la  Jérusalem  délivrée 
sous  celui  de  Tasso  aila  barcarola.  Un  nouveau  chan- 
sonnier, P.  Buratti,  parut  au  commencement  de  notrt 
siècle.  On  a  publié,  en  1817,  une  collection  de  poésiet» 
vénitiennes  en  iA,  volumes.  Des  glossaires  du  dialectp 
ont  été  donnés  par  Gaspard  Patriarchi,  Padoue,  1775,  et 


VEN 


1770 


VÉN 


par  Boerio,  Venise,  1820.  V,  Gamba,  Seri»  degli  scriUi 
tmprêssi  in  dialetto  ven$%iano,  1832. 

VÉNITIENNE  (École),  ane  des  écoles  Italiennes  de 
peinture.  Les  premiers  artistes  furent  des  mosaïstes 
grecs,  appelés  à  Venise  au  xi*  siècle  pour  décorer  la  ba- 
silique de  S^-Marc.  Au  xin%  la  République  posséda  des 
peintres  k  fresque  ou  à  la  détrempe,  très- habiles  pour 
leur  temps,  entre  autres  Jean  de  Venise  et  Marti nello  de 
Bassano  :  leur  style  n*avait  déjà  plus  rien  du  caractère 
byzantin,  ainsi  (|u*on  en  peut  juger  par  «le  cercueil  de 
S'*  Julienne,  qui  offre,  avec  la  figure  de  cette  sainte, 
celles  de  S^  Biaise,  abbé,  et  de  S^  Cataldo,  évèque.  Au 
XIV*  siècle  on  cite  les  noms  d*Esegrenio,  d'Alberegno  et 
d*f.tienne  Pierano.  La  présence  de  Giotto  à  Padoue  en 
1307  donna  à  la  peinture  une  impulsion  qui  se  fît  sentir 
dans  les  autres  parties  des  États  vénitiens,  notamment  à 
Murano.  Les  artistes  de  cette  lie,  au  milieu  desquels  ne 
tarda  point  à  pénétrer  Tusage  de  la  peinture  à  Thuile, 
subirent  aussi  l'influence  allemande,  par  suite  des  rap- 
ports qui  existaient  entre  Venise  et  TAUemagne,  et  Ton 
vit  venir  parmi  eux  le  célèbre  Albert  Durer.  Toutefois, 
cette  influence  fut  modifiée  par  les  leçons  de  Squarcione, 
qui  avait  recueilli  des  fragments  antiques  dans  ses 
voyages  en  Italie  et  en  Grèce,  et  par  les  exemples  de 
Mantegna,  qui  possédait  à  fond  la  science  des  raccourcis, 
l'art  de  draper  et  la  perspective.  Alors  se  forma  une 
grande  école,  déjà  remarquable  dans  ses  premiers  repré- 
sentants, les  Vivarini,  Giovanni  et  Gentile  Bellini,  Cima 
da  Conegliano,  Rocco  Marconi,  Vittore  Carpaccio,  Jérôme 
Mozzetto,  Marco  Basaiti,  et  Palma  le  Vieux.  Privée  des 
encouragements  que  la  peinture  dut  aux  papes  Jules  II  et 
Léon  X  pendant  les  premières  années  du  xvi*  siècle,  et 
des  modèles  antiques  si  nombreux  à  Borne  et  à  Florence, 
l'École  vénitienne  chercha  principalement  à  plaire  aux 
yeux,  et,  avec  cette  tendance  vers  le  coloris  qui  l'a  tou- 
jours caractérisée,  la  peinture  à  l'huile  y  occupa  une 
place  bien  autrement  importante  que  la  fresque  et  la  dé- 
trompe. De  plus  l'école  vénitienne,  toute  Drillante  de 
richesses  extérieures,  préoccupée  avant  tout  de  saisir  la 
vie  réelle,  fut  presque  dépourvue  d'idéalisme  et  de  gran- 
deur sévère  ;  dans  ses  œuvres,  les  sujets  religieux  per- 
dirent tout  cachet  mystique  et  symbolique,  et  le  sen- 
sualisme envahit  l'art  de  jour  en  jour.  'Tels  furent  les 
caractères  communs  de  Georges  Barbarelli,  dit  le  Gior- 
gione,  de  Tiziano  Vecelli,  plus  généralement  nommé  le 
Titien,  de  Paul  Caliari,  dit  le  Véronèse,  de  Jacques  Ro- 
busti,  dit  le  Tintoret,  de  Sébastien  del  Piombo,  et,  à  un 
degré  moins  élevé,  de  Jacopo  dà  Ponte,  dit  le  Bassan,  de 
Palma  le  Jeune,  d'Andréa  Schiavone,  de  Bonifacio,  de 
Pordonone,  de  Paris  Bordone,  de  Moretto.  Avec  le 
wii"  siècle,  la  décadence  de  l'école  devint  manifeste  : 
J.-B.  Novell!,  Carlo  Ridolfi,  Alexandre  Varotari,  Jules 
'Jarpioni,  Pierre  Liberi,  J.-B.  Piazzetta,  n'ont  laissé  qu'un 
nom  peu  connu  en  dehors  de  l'Italie.  Au  xviii^  siècle, 
J.-B.  Tiepolo,  Rosalba  Carriera  et  Canaletto  surent  con- 
quérir une  illustration  plus  grande  ;  puis  toute  trace  de 
génie  disparut  avec  l'indépendance  de  Venise.  V.  Carlo 
Ilidolfl,  fue  maravioHe  deW  arie,  owero  le  vite  de*  pittori 
Veneti,  Venise,  1G48,  2  vol.  in-4*  ;  Longhi,  Compendio 
délie  vite  de*  pittori  Veneziani,  Venise,  17Ô2,  in-fol. 

VENTAIL.  V.  Vantail.    . 

VENTAILLE,  nom  donné  au  moyen  âge  à  la  visière 
des  casques. 

VENTE  (du  latin  venditio)^  convention  par  laquelle 
l'un  s'oblige  à  livrer  une  chose,  et  l'autre  à  la  payer  en 
argent.  Si  l'on  donne  une  chose  pour  en  recevoir  une 
autre,  c'est  un  échange,  et 'non  une  vente,  parce  qu'il  n'y 
a  pas  de  prix.  Si  l'on  transporta  la  propriété  d'une  chose 
moyennant  un  prix  qui  n'est  pas  sérieux,  c'est  une  dona- 
lion,  et  non  une  vente,  dont  le  but  est  de  mettre  en  jeu 
deux  équivalents.  Pour  qu'une  chose  puisse  être  vendue, 
il  faut  qu'elle  soit  dans  le  commerce,  que  l'aliénation  n'en 
soit  prohibée  par  aucune  loi ,  et  qu'elle  appartienne 
à  celui  qui  la  vend.  La  vente  de  la  chose  d'autrui  est 
nulle,  et  peut  donner  lieu  à  des  dommages-intérêts.  Dans 
le  Droit  romain  et  l'ancien  Droit  français,  le  vendeur 
n'était  pas  tenu  de  transférer  la  propriété  à  l'acquéreur; 
il  sudisait  qu'il  fit  tradition  de  l'objet  vendu,  et  qu'il  ga- 
rantit Tacheteur  contre  l'éviction  ;  par  conséquent,  celui- 
ci  n'aurait  pas  eu  le  droit  de  se  plaindre,  si  on  lui  avait 
vendu  un  objet  dont  on  se  croyait  à  tort  propriétaire. 
D'après  le  Code  Napoléon,  au  contraire,  le  contrat  de 
vente  emporte  l'obligation  de  transférer  à  l'acheteur,  non- 
seulement  l'usage  paisible,  mais  la  propriété  même  de  la 
chose.  Le  consentement  des  parties,  condition  essentielle 
de  tous  les  contrats,  doit  être  entièrement  libre,  et 


exempt  d'erreur  soit  sur  le  prix,  soit  sur  la  chose,  soh 
même  sur  la  matière  dont  la  chose  est  composée.  La 
vente  est  parfadte  et  la  propriété  acquise  de  droit  à 
l'acheteur,  dès  qu'on  est  convenu  de  la  chose  et  du  prix, 
et  quoique  la  chose  n'ait  pas  été  livrée  ni  le  prix  payé. 
Le  contrat  de  vente  peut  avoir  lieu  entre  toutes  les  per- 
sonnes que  la  loi  ne  frappe  pas  formellement  d'incapa- 
cité. La  vente  peut  être  faite  purement  et  simplement, 
ou  sous  une  condition  suspensive  ou  résolutoire;  par  acte 
authentique  ou  sous  seing  privé  (les  frais  sont  à  la  chari^ 
de  l'acheteur).  La  promesse  de  vente  vaut  vente  :  si  elle 
a  été  faite  avec  des  arrhes,  chacun  des  contractants  peut 
s'en  départir,  celui  qui  a  donné  des  arrhes  en  les  per- 
dant, celui  qui  les  a  reçues  en  restituant  le  double.  Une 
vente  à  Vamiable  est  celle  qui  est  faite  de  gré  à  gré;  une 
vente  jttdiciaire  est  celle  quf  est  faite  en  justice,  suivant 
certaines  formes  déterminées  par  la  loi.  Les  ventes  judi- 
ciaires sont  forcées,  quand  elles  ont  lieu  par  suite  de 
saisie  et  d'expropriation  ;  volontaires,  lorsqu'il  s'agit  de 
biens  appartenant  à  des  incapables,  à  des  époux  mariûs 
sous  le  régime  dotal,  à  des  absents,  à  des  condamnés  par 
contumace.  V.  Dufour  de  Saint-Pathus,  traité  des  con- 
trats de  vente,  d'échange,  etc.,  4823,  2  vol.  in-12;  Persil 
et  Croissant,  Commentaire  sur  les  achats  et  les  ventts, 
1838,  in-8°;Troplong,  Commentaire  du  titre  6  du  livre  111 
du  Code  civil,  de  la  Vente,  4«  édit.,  1841,  2  vol.  în-8». 

VENTE,  en  termes  d'Eaux  et  Forêts,  coupe  de  bois  dcs- 
tinè3  à  être  vendue,  ou  partie  d'un  bois  qui  vient  d'être 
coupée. 

VENTE,  terme  de  Politique.  V.  Carbonari,  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d^Histoire, 

VENTE  AU  COMPTANT,  A  DéCODVERT,  A  TEIIIIE.  V,  BODRSB. 

VENTILATION,  en  termes  de  Droit,  action  de  ventiler, 
c.-à-d.  d'estimer  les  portions  d'un  tout  vendu,  non  pas 
quant  à  leur  valeur  réelle,  mais  relativement  au  prix 
total. 

VENTOUSE,  ouverture  pratiquée  dans  la  muraille  d'un 
bâtiment,  pour  aérer  l'intérieur.  V,  BAaBACANB. 

VENTBE  (Curateur  au).  F.  CoRATEta. 

VENTBILOQUIE  (du  latin  venter,  ventre,  et  loqm, 
parler),  art  de  parler  sans  remuer  les  lèvres,  et  de  mo- 
difler  sa  voix  au  point  (Qu'elle  semble  venir  d'une  autre 
personne  ou  d'un  endroit  éloigné.  On  nomme  encore  cet 
art  Engrastrimysme  (du  grec  en,  dans;  gastér,  ventre, 
et  mythes,  parole).  On  dirait  en  effet  que  les  ventriloques 
tirent  leur  voix  du  ventre.  La  ventriloquie  était  connue 
des  Anciens,  et  il  en  est  question  dans  les  œuvres  d'Hip- 
pocrate  ;  on  suppose  que  les  prêtres  païens,  les  sibylles 
et  les  devins  en  firent  usage  pour  tromper  les  peuples  et 
rendre  des  oracles.  Ce  n'est  plus  aujourd'hui  qu'un  amu- 
sement de  société.  V.  l'abbé  de  La  Chapelle,  le  Ventri- 
loque ou  VEngastrimythe,  Londres,  1772,  2  vol.  in-i2. 

VENTS  (Tour  des),  un  des  monumento  de  Tancienne 
Athènes,  qui  subsiste  encore  de  nos  jours.  Construite 

Ear  Andronicus  Cyrrhestès,  cette  tour,  revêtue  de  mar- 
re, a  la  forme  d'un  octaèdre,  de  8  mètres  de  diamètre, 
dont  chaque  face  est  ornée  d'une  sculpture  d'un  travail 
précieux  et  représentant  l'un  des  principaux  Vents.  Au 
sommet  s'élevait  un  'lYiton  en  bronze,  qui  tournait  au 
souffle  du  vent  et  en  Indiquait  la  direction  avec  une 
baguette  qu'il  tenait  à  la  main.  Au-dessous  de  chacun 
des  Vents  était  un  cadran  solaire.  Une  clepsydre  était 
placée  à  l'intérieur  de  la  tour.  Chacune  des  deux  portes 
par  où  l'on  entrait  était  précédée  d'un  petit  porche  orné 
de  deux  colonnes.  La  tour  des  Vents  ne  s'est  sans  doute 
si  bien  conservée  que  parce  que  les  derviches  turcs  eo 
firent  une  chapelle. 

VÉNUS,  déesse  de  l'Antiquité  qui  a  inspiré  un  grand 
nombre  d'œuvres  d'art.  La  Vénus  dite  de  Médicis,  que 
l'on  conserve  à  Florence,  est  assurément  un  des  chefs- 
d'œuvre  de  la  sculpture  antique  :  on  a  supposé  qu'elle 
pouvait  être  une  copie  de  la  fameuse  statue  exécutée  par 
Praxitèle  pour  le  temple  de  Cnide  ;  mais  elle  appartient 
au  sculpteur  Cléomëne.  La  Vénus  de  MUo ,  découverte 
dans  l'Ile  de  ce  nom  en  1820^  et  achetée  par  le  gou- 
vernement français  en  183i,  orne  une  des  salles  du  mu- 
sée du  Louvre.  Quelques-uns  ont  pensé  que  c'était  la 
statue  de  Cnide;  mais  on  croit  généralement  qu'elle  a  été 
faite  également  par  Praxitèle,  mais  pour  le  temple  de 
Cos.  Elle  est  du  plus  beau  marbre  de  Paros,  et  a  2",25 
de  hauteur  :  elle  tient  une  pomme  à  la  main.  Le  buste 
s'est  parfaitement  conservé  ;  la  partie  inférieure  du  corps, 
que  recouvre  un  vêtement  ondoyant  de  manière  à  ne 
laisser  apercevoir  qu'on  pied,  a  subi  plusieurs  restaura- 
tions. Il  existe  dans  plusieurs  musées  de  l'Europe,  à 
■  Borne,  à  Florence,  à  Paris,  des  Vénus  accroupies,  qui  s» 


VER 


mi 


VER 


rosMmblent  entre  elles  comme  ces  choses  qiii  naissent 
de  la  mode  et  ont  la  vogue  d*un  moment. 

VÊPRES.  V,  ce  mot  dans  notre  DictionnavrB  de  /?îo- 
graphie  et  d'Histoire. 

VÉRACITÉ.  V.  Crédulité. 

VERANDA,  légère  galerie,  couverte  de  toile  ou  d*un 
tissu  de  Jonc,  et  qui  règne  autour  des  habitations  en 
Amérique  et  dans  Tlode. 

VERBAL,  se  dit  proprement,  en  Grammaire,  de  tout 
nom  formé  d*un  verbe,  comme  en  français  sauveur,  li- 
bérateur,  pourvoyeur,  aimable,  visible,  navigable^  etc., 
mots  correspondant  par  leur  forme  à  des  mots  latins  de 
môme  sens;  et  en  grec  bon  nombre  d'adjeoifs  en  ikos  et 
autres  de  valeur  analogue.  Mais,  dans  Pusage,  on  applique 
spécialement  le  nom  de  verbal  à  des  participes  français  em- 
ployés accidentellement  comme  adjectifs  :  une  histoire 
amusante,  une  peinture  parlante,  une  rue  passante,  des 
cris  perçants,  des  sons  pénétrants,  etc.  L*adjectif  verbal 
diffère  du  participe  en  ce  qu'il  suit  toutes  les  règles  d'ac- 
cord de  l'aidjectif,  tandis  que  le  participe  proprement  dit 
no  varie  jamais  en  genre  et  en  nombre.  Certains  mots 
uniquement  employés  aujourd'hui  comme  adjectifs  ont 
dû  l'être  primitivement  comme  participes  :  tels  sont  les 
mots  puissant,  savant,  nonchalant,  qui  se  rattachent 
aux  formes  je  puis,  savoir,  et  au  vieux  verbe  chaloir 
{ s'échauffer  pour  une  chose,  s'en  occuper  activement). 
Plusieurs  participes,  en  devenant  adjectifs,  ont  changé 
l'orthographe  do  leur  dernière  syllabe,  et  ont  pris  ent  au 
lieu  de  ant  ;  ainsi,  adhérent,  différent,  eoscellent,  négli- 
gent, président,  sont  adjectifs  ;  différant,  adhérant,  né- 
gligeant, présidant,  appartiennent  comme  participes  aux 
verbes  différer,  adhérer,  négliger,  présider.  Quelques 
participes  terminés  en  guant  retranchent  u  lorsqu'ils  de- 
viennent adjectifs,  comme  extravagant,  fatigant,  La 
distinction  orthographique  entre  l'aâjectif  verbal  et  le 
participe,  ou  plutôt  la  distinction  grammaticale,  est  re- 
lativement récente,  et  ne  paraît  pas  remonter  plus  haut 
que  la  moitié  du  xvii*  siècle.  On  trouve  maintes  fois,  de- 
puis, chez  les  poètes  du  moins,  les  participes  écrits 
avec  «,  rarement  avec  e,  lorsqu'ils  se  rapportent  à  un 
pluriel  ou  à  un  féminin  ;  mais  la  prose  observe  constam- 
ment la  règle  fixée  depuis  environ  deux  siècles.  —  On 
appelle  aussi  spécialement  adjectifs  verbaux,  en  grec, 
des  mots  terminés  en  téos  et  en  tos,  qui  sont  forma  di- 
rectement d'un  verbe,  et  expriment,  les  premiers  une 
idée  d'obligation,  de  devoir,  de  nécessité,  les  seconds 
une  idée  de  possibilité  ou  quelquefois  un  état  ac(][uis  : 
on  remplace  les  uns  en  français  par  les  verbes  falloir  ou 
devoir  devant  un  autre  verbe,  et  les  autres  répondent 
soit  à  certains  participes  passés  employés  sans  auxiliaires 
et  sans  compléments,  soit  aux  adjectifs  en  able  et  en 
ible,  P. 

VERBE,  celui  des  trois  termes  de  la  Proposition  qui, 
réunissant  l'attribut  au  sujet,  affirme  que  la  manière 
d'être  marquée  par  l'attribut  convient  au  sujet.  Très- 
souvent  le  verbe  et  l'attribut  sont  renfermés  en  un  seul 
mot;  mais  l'analyse  y  retrouve  distinctement  ces  deux 
termes;  et,  dans  ce  dernier  cas,  comme  dans  le  premier, 
le  verbe  est  toujours  le  verbe  être.  Le  verbe  être  est  donc 
le  verbe  proprement  dit,  le  verbe  par  excellence;  on 
l'appelle  souvent  verbe  substantif  ou  verbe  essentiel.  Tous 
les  autres  verbes  sont  appelés  verbes  attributifs  ou  verbes 
adjectifs.  Tout  verbe  attributif  exprime  soit  l'action ,  soit 
l'état  du  sujet  Cependant  le  français,  et  en  général  les 
langues  modernes,  n'ont  pas  de  verbes  qui  expriment 
proprement  l'état,  tandis  qu'ils  sont  nombreux  en  grec 
et  en  latin  :  par  exemple,  calere,  (lorere,  patere,  etc., 
que  nous  ne  pouvons  rendre  que  par  le  verbe  être  accom- 
pagné d'un  adjectif  :  être  chaud,  être  en  fleurs,  être  ou- 
vert, etc.  Le  verbe  est  susceptible  de  diverses  modifica- 
tions :  il  y  en  quatre,  communes  aux  verbes  qui  expri- 
ment soit  une  action ,  soit  un  état  :  les  personnes,  les 
nombres,  les  temps,  les  modes.  Les  verbes  sont  égale- 
ment susceptibles  de  flexions  particulières,  selon  que  le 
sujet  est  représenté  comme  agissant  (le  verbe  est  dit 
alors  actif )^  ou  comme  recevant,  éprouvant,  souffrant 
l'action  d'autruî  (il  est  dit  alors  passif).  V.  Abstrait, 
Concret,  Actif,  Passif,  Neutre,  Réfléchi,  lypEnsoimBL, 
Déponent,  Moyen,  Conjugaison,  Auxiliaire,  Modes, 
Temps,  Défbctip,  Irrégolier,  Attributif,  Transitif, 
Intransitif,  Fréquentatif,  Pronominal,  Réciproque.   P. 

VERBE,  terme  de  Théologie.  V. 'Logos. 

VERDICT  (  du  latin  verè  dictum,  dit  sincèrement),  dé- 
claration du  jury.  Le  mot  a  été  emprunté  à  la  législation 
anglaise  pour  désigner  la  réponse  que  fait  le  jury  aux 
questions  qui  lui  sont  adressées  sur  la  culpabilité  des 


prévenus,  et  d'après  laquelle  les  Juges  n'ont  plus  qti'à 
faire  l'application  de  la  loi. 

VERDIER.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d*Histoire. 

VERDUN  (Église  Notre-Dame,  à).  Cette  église  cathé- 
drale, après  avoir  été  l'un  des  monuments  les  plus  inté- 
ressants de  France,  est  devenue  un  déplorable  témoi- 
gnage des  aberrations  auxquelles  le  goût  peut  être  en- 
traîné. B&tie  dans  les  premières  années  du  xii*  siècle  par 
un  architecte  nommé  Garin,  dédiée  en  1147,  elle  offrait 
le  même  plan  que  les  églises  métropolitaines  de  Trêves  et 
de  Mayence.  Elle  avait  deux  chœurs,  l'un  à  l'Orient, 
l'autre  à  l'Occident  ;  l'entrée  était  sur  le  flanc  septen- 
trional de  l'édifice,  au  milieu  de  sa  longueur.  Chacun 
des  deux  chœurs  avait  son  transept,  et  chaque  abside 
était  flanquée  de  deux  tours.  Au  lieu  d'être  prolongés 
en  déambulatoires,  les  bas  côtés  se  terminaient  aux 
deux  extrémités  par  des  absides  accessoires.  Des  cryptes 
étaient  pratiquées  au-dessous  des  deux  chœurs.  Le  chœur 
oriental  était  environné  de  murs  qui  en  cachaient  la  vue, 
et  fermé  par  un  jubé;  le  chœur  occidental,  élevé  de 
12  degrés  au-dessus  de  son  transept,  était  pavé  d'une 
grande  mosaïque  exécutée  en  1200 ,  et  représentant  un 
évêque  au  milieu  d'une  vigne.  Dans  toute  l'église,  on  ad- 
mirait des  tombeaux  et  des  dalles  sépulcrales.  —  Vers 
1380,  le  chœur  oriental,  construit  en  style  roman,  fut 
remplacé  par  le  chœur  actuel,  d'architecture  ogivale,  et 
plus  élevé  que  l'ancien;  l'architecte  fut  Jean  Vautrée. 
A  la  même  époque,  on  fit  disparaître  le  toit  de  la  nef, 
qui  reposait  sur  des  poutres  travaillées  et  dorées,  et  Ton 
construisit  des  voûtes  :  les  étroites  fenêtres  romanes  à 
plein  cintre  ayant  été  fermées  par  la  naissance  de  ces 
voûtes,  on  en  ouvrit  de  nouvelles,  qui  sont  également  pou 
étendues,  mais  de  forme  ogivale;  en  sorte  qu'il  ne  sub- 
sista de  la  construction  romano-byza»tine  primitive  que 
les  piliers  carrés,  les  arcades  semi-circulaires  de  la  nef, 
et  quelques  parties  des  collatéraux.  A  la  suite  d'un  in- 
cendie qui  consuma  la  toiture  en  1755,  le  chapitre  entre- 
prit d*embellir  la  cathédrale.  On  abattit  donc  les  quatre 
tours  surmontées  de  flèches,  et  on  construisit,  à  l'occi- 
dent, les  deux  tours  lourdes  et  écrasées  que  l'on  voit  au- 
jourd'hui; on  enfonça  les  fenêtres  ogivales,  avec  leurs 
meneaux  et  leurs  verrières,  pour  les  remplacer  par  de 
grandes  ouvertures  circulaires  à  vitres  blanches  :  on  com- 
bla la  crypte  du  chœur  oriental  et  on  en  fit  disparaitre 
les  voûtes  pour  abaisser  le  sol  trop  élevé;  on  détruisit  le 
chœur  occidental  et  sa  crypte ,  et  à  la  place  on  mit  les 
orgues  et  les  fonts  baptismaux  ;  on  enleva  les  mausolées 
et  les  pierres  funéraires,  afin  de  poser  un  pavé  neuf;  on 
alla  jusqu'à  dégrossir  les  piliers  romans,  k  les  creuser  de 
cannelures  et  k  les  charger  d'affreux  ornements;  des 
portes  exécutées  dans  le  même  goût  furent  placées  aux 
extrémités  des  transepts.  Tel  est  l'état  dans  lequel  des 
remaniements  inintelligents  nous  ont  laissé  îa  cathédrale 
de  Verdun.  L'ancienne  sacristie,  convertie  en  chapelle  du 
catéchisme,  est  une  belle  salle  du  xiii'  siècle,  dont  les 
voûtes  semblent  reposer  sur  un  pilier  central  entouré  de 
légères  colonnettes.  Sur  le  côté  méridional  de  l'église  est 
un  beau  cloître  de  style  flamboyant ,  dont  on  a  malheu- 
reusement badigeonné  les  murailles  et  enlevé  les  dalles 
funéraires. 

VERGETTE,  en  termes  de  Blason,  pal  diminué,  qui 
n'a  que  le  tiers  de  la  largeur  du  pal  quand  elle  se  trouve 
seule,  et  moins  encore  quand  il  y  en  a  plusieurs  dans 
l'écu. 

VERGUES  (du  latin  virga,  verge,  bâton),  pièces  de 
bois  longues  et  arrondies,  plus  grosses  au  milieu  qu'aux 
extrémités,  et  placées  horizontalement  le  long  des  m&ts 
de  navires  pour  porter  les  voiles.  V.  Antennes. 

VÉRIFICATEUR  (du  latin  verum  facere,  rendre  vra 
ou  authentique),  celui  qui  est  commis  pour  vérifier  soit 
des  comptes,  comme  les  Vérificateurs  de  V Enregistre- 
ment ,  soit  des  travaux  exécutés,  comme  les  Architectes- 
vérificateurs,  ou  bien  pour  examiner  si  certains  règle- 
ments sont  observés,  comme  les  Vérificateurs  des  douanes 
et  des  poids  et  mesures,  ou  si  une  écriture  est  vraie  ou 
fausse,  comme  les  Experts-vérificateurs  près  les  tri- 
bunaux. 

VÉRIFICATION  D'ÉCRITURES ,  mesure  ordonnée  en 
Justice  quand  une  partie,  dans  une  contestation  relative 
à  quelque  acte  sous  seing  privé,  désavoue  son  écriture  ou 
sa  signature,  ou  bien  lorsque  les  héritiera  d'un  défunt 
contestent  la  vérité  de  sa  signature  ou  de  son  écriture.  Le 
Code  Napoléon  (art.  1156  et  suiv.)  et  le  Code  de  Procé- 
dure civile  (art.  194-210)  règlent  les  formalités  à  observer 
en  Darcjl  cas.  Celui  qui  a  donné  lieu  k  wne  vérification 


VER 


1772 


VER 


dont  le  résultat  ne  lui  est  pas  favorable  est  passible  d*une 
amende  de  150  fr.  et  de  dommages-intérêts,  et  peut  être 
condamné  au  payement  du  principal  ainsi  qu'à  tous  les 
frais. 

VÉRIFICATION  DES  CREANCES.    V.  PAILLrTC. 

vÉRinCATioN  DBS  POUVOIRS ,  examen  qu*on  fait ,  dans 
une  Assemblée  législative,  des  titres  d*un  député  ou  re- 
présentant nouvellement  élu. 

VÉRITÉ.  La  vérité  résulte  de  Tévidence.  Si  tout  ce  qui 
peut  être  Tobjet  de  la  connaissance  était  évident  pour 
nous,  nous  aurions  la  vérité  sur  toutes  choses;  la  aciencc 
et  la  vérité  seraient  universelles  et  complètes*  L'une  et 
l'autre  sont  impossibles  dans  les  limites  de  notre  intelli- 
gence. La  vérité  consiste  donc  pour  l'homme  dans  cer- 
taines vérité  partielles,  comme  la  science  en  quelques 
sciences  particulières;  elle  se  reconnaît  à  la  conformité 
d'un  ju^ment  certain  avec  la  réalité,  c'est  la  récUité  de- 
^nne  évidente.  En  Lo^que,  la  vérité  consiste  dans  la 
conformité  de  l'objet  aveo  l'idée,  son  contraire  est  l'er- 
reur; en  Morale,  c'est  le  parfait  accord  de  la  parole  et  de 
la  pensée,  son  contraire  est  le  mensonge.  Le  scepticisme, 
mettant  la  certitude  en  question,  conteste  à  l'esprit  hu- 
main le  pouvoir  d'arriver  h  la  vérité,  ou  partiellement, 
comme  Kant,  qui  n'admet  qu'une  vérité  subjective,  ou 
plus  généralement,  comme  Hume  et  l'ancien  pyrrho- 
nisme  (F.  Transcendantalb — Philosophie,  et  Scepti- 
cisme). Toutefois,  la  réalité  des  faits  de  conscience  n'est 
pas  mise  en  doute  ;  quant  au  reste,  l'affirmation  du  scep- 
ticisme suffirait  seule  à  prouver  son  erreur. 

Il  y  a,  pour  chaque  science,  un  ordre  de  vérités  qui 
sont  constatées  par  la  certitude,  car  l'esprit  ne  se  sent 
certain  qu'en  présence  de  la  vérité.  Les  sciences  phy- 
siques et  naturelles  ont  leurs  vérités,  les  sciences  mathé- 
matiques ont  les  leurs ,  la  métaphysique  les  siennes  ;  il 
y  a  les  vérités  déduites,  données  par  le  raisonnement, 
et  les  vérités  premières,  conçues  par  la  raison.  Celles-ci 
sont  les  premiers  principes,  base  de  tous  les  autres; 
Aristote,  Kant,  l'école  écossaise  ont  cherché  à  en  dresser 
la  liste. 

Les  Anciens  avaient  fait  de  la  Vérité  une  divinité.  Fille 
de  Jupiter,  elle  était  mère  de  la  Justice  et  de  la  Vertu. 
Apelles  l'avait  représentée,  dans  son  tableau  de  la  Ca- 
lomnie, sous  les  traits  d'une  femme  modeste.  On  lui  met 
à  la  main  un  miroir  de  forme  ronde.  On  la  représente 
ordinairement  sortant  du  fond  d'un  pi^its,  et  l'air  effrayé 
de  l'accueil  que  lui  font  les  humains.  R. 

VERMICULÉ,  se  dit,  en  Sculpture,  d'un  ouvrage  rus- 
tique avec  certains  entrelacs  ^vés  à  la  pointe,  de  sorte 
qu'on  croit  voir  des  sillons  faits  par  les  vers. 

VERMILLON,  nom  donné  quelquefois  à  l'harmonica 
{V.  ce  mot). 

VÉRONE  (Amphithé&tre  de),  monument  romain,  le 
mieux  conservé  de  tous  ceux  de  ce  genre  qui  existent  en  - 
core.  On  l'attribue  généralement  à  l'empereur  Auguste, 
tandis  que  Sigonius  le  rapportait  au  temps  de  Maximien. 
Il  est  de  forme  ovale  et  construit  en  marbre.  Sa  longueur 
est  de  154">,60,  et  sa  largeur  de  i22",33;  l'épaisseur  des 
constructions  est  de  40  met.  L'arène  a  75  met.  sur  45.  L'é- 
lévation générale  de  l'amphithé&tre  est  de  31  met.  ;  elle 
se  compose  de  trois  rangs  d'arcades,  72  par  étage.  Sur  les 
pieds-droits  qui  divisent  ces  arcades  sont  des  avant-corps 
formant  pilastres,  qui  n'appartiennent  à  aucun  ordre. 
L'appareil  général  est  à  bossages.  Sur  la  galerie  supérieure 
était  un  rang  de  colonnes  portant  des  figures.  Les  deux 
entrées  principales,  pratiquées  dans  le  podium,  et  percées 
sur  le  grand  axe,  étaient  couronnées  de  tribunes  fermées 
par  des  balustrades  sur  le  devant  et  sur  les  côtés,  et  ré- 
servées aux  personnes  de  distinction.  Quarante-six  ran- 
gées de  gradins  en  marbre  rouge,  disposés  circulaire- 
ment,  et  ayant  32  issues  dans  les  arcades,  pouvaient 
recevoir  25,000  spectateurs.  On  pense  que  l'arène  était 
quelquefois  remplie  d'eau  pour  les  naumacliies.  V.  Maffei, 
beglt  an/iUatri  e  singolarmente  del  Veronese,  Vérone, 
1798;  Guilari,  Fouilles  de  Vamphithéàtre  de  Vérone, 
ibid.,  1818,  in-4o. 

VERRAT.  V.  Quart  de  canon. 

VERRE.  La  découverte  du  verre  est  attribuée  par  Pline 
l'Ancien  aux  Phéniciens.  Il  est  certain  que  ce  peuple  est, 
avec  les  Égyptiens,  celui  qui  a  pratiqué  le  plus  ancienne- 
ment l'art  de  la  verrerie.  On  ne  fabriquait  guère  que  des 
vases,  des  coupes  destinées  à  la  table  des  grands,  des 
urnes  pour  leurs  tombeaux.  De  Pauw  prétend  que  les 
coupes  égyptiennes  représentaient  des  figures  dont  l'as- 
pect était  changeant  ;  qu'en  Egypte  on  ciselait  le  verre,  on 
le  travaillait  au  tour,  on  savait  le  dorer.  Rien  n'est  plus 
commun,  dans  les  ruines  égyptiennes,  que  les  pâtes  de 


verre  colorées  et  non  colorées.  Un  beau  et  ghsnd  plaiew 
de  verre  blanc  orne  le  musée  du  Louvre.  Strabon  afhrmf 
qu'on  fabriquait  de  temps  immémorial  à  Thèbes  des 
verres  très-transparents,  dont  la  couleur  imitait  l'hya- 
cinthe, le  saphir,  le  rubis,  et  que  Sésostris  avait  fait 
couler,  en  verre  de  couleur  d'émeraude,  une  statue  qu'on 
dit  ailleurs  avoir  existé  à  Constantinople  jusqu'au  temp» 
de  Théodose.  Appien  affirme  aussi  qu'un  colosse  de 
même  matière  se  voyait  dans  fe  Labyrinthe  d'Egypte. 
Pline  dit  que  le  théâtre  de  Seau  rus  était  composé  de 
trois  ordres,  dont  un  était  en  verre.  On  lit  dans  Clément 
d'Alexandrie  que  S*  Pierre  se  rendit  dans  un  temple 
d'Aradus  pour  y  voir  des  colonnes  de  verre  d'une  grosseur 
extraordinaire.  Il  est  question  dans  Claudien  d'un  globe 
céleste  construit  en  verre  par  Archimède.  Bien  qu'au  dire 
de  Pline  certains  verres  clairs  et  blancs  fussent  e^itimés 
à  l'égal  de  la  vaisselle  d'or  ou  d'argent,  il  est  difficile 
d'admettre  que  la  madère  en  fût  supérieure  à  celle  de 
notre  verre  à  vitre  :  quand  le  même  auteur  parle  de 
deux  coupes  de  moyenne  grandeur  que  Néron  paya 
6,000  sesterces,  c'étaient  sans  doute  de  ces  merveilles 
dont  le  vase  de  Portland  (  V.  ce  mot)  nous  donne  une  si 
haute  idée,  de  ces  coupes  où  les  grands  artistes  ne  dé- 
daignaient pas  de  ciseler  des  bas-reliefs  en  émail  blanc 
sur  un  fond  de  verre  coloré.  Les  verreries  de  l'Antiquité 
fabriquaient  des  vases  à  filets  de  couleurs  diverses,  dont 
les  Modernes  ont  vainement  essayé  d'atteindre  la  perfec- 
tion. Les  Vénitiens,  auxquels  l'art  des  Anciens  sembla 
s'être  transmis  par  une  tradition  non  interrompue  à  tra- 
vers le  moyen  &ge,  n'ont  môme  pas  réussi  à  imiter  ces 
petites  urnes  é^ptiennes  à  filets  dentelés  que  Ton  re- 
trouve dans  les  tombeaux  de  Memphis  et  de  Thèbes. 
Pour  les  Grecs  et  les  Romains,  les  objets  en  verre  furent 
toujours  des  objets  de  luxe,  et  le  prix  en  était  exorbitant. 
Ce  fut  seulement  au  ii*  ou  m*  siècle  qu'on  employa  le 
verre  aux  vitres  :  on  avait  auparavant  fait  usage  de  cette 
matière  pour  paver  les  maisons  d'une  espèce  de  mo- 
saïque. —  Après  la  chute  de  l'Empire  romain,  l'an  de 
la  verrerie  fut  négligé  dans  presque  tout  TOccidenL 
Mais,  en  Egypte  et  en  Syrie,  il  y  eut  toujours  des  fa- 
briques importantes.  On  peut  s'en  convaincre  en  lisant 
la  description  des  trésors  du  calife  Mostanser-Billah  ati 
XI*  siècle,  lequel  possédait  plus  de  20,000  vases  de  venv 
unis  ou  ciselés,  une  multitude  de  miroirs,  et  de  larp^ 
bassins  sur  lesquels  se  dessinaient  des  figures  et  des 
feuillages.  La  verrerie  ne  jeta  un  grand  éclat  dans  le» 
pays  chrétiens  qu'à  Venise  et  à  Murano.  Dans  le  mélange 
d'émail  pointillé  bleu  et  blanc  qu'on  Tencontre  firéquem- 
ment  sur  les  coupes  de  cette  provenance,  on  reconnaît 
l'ornementation  propre  aux  verriers  du  Levant ,  celle  que 
l'on  trouve,  par  exemple,  sur  le  précieux  verre  arabe  con- 
servé à  Chartres,  et  dont  la  tradition  faisait  un  des  pré- 
sents envoyés  par  Haroun-al-Raschid  à  Charlemagne, 
mais  dont  l'époque,  nettement  déterminée  par  les  carac- 
tères couflques  de  la  légende,  doit  être  fixée  au  milieu  du 
XIII*  siècle.  Quant  à  l'émail  appliqué  au  pinceau  et  qui 
s'élève  en  saillie,  en  dessinant,  sur  le  verre  incolore  et 
transparent ,  des  sujets  ou  des  fleurs  fes  ouvriers  orien- 
taux l'employaient  aux  xii*  et  xiii*  siècles  avec  une  soli- 
dité de  procédés  et  une  beauté  de  couleurs  que  les  ma- 
nufactures vénitiennes  n'ont  Jamais  atteintes.  Il  suffit, 
pour  se  rendre  compte  de  cette  supériorité  des  maîtres 
de  la  verrerie  arabe,  de  voir  dans  les  mosquées  du  Ctûre 
et  de  Damas  ces  belles  lampes  sur  lesquelles  sont  inscrits, 
au  milieu  des  arabesques  et  des  fleurs  émail lées,  les  noms 
des  sultans  fondateurs  de  ces  mosquées.  Une  coupe  du 
musée  de  Cluny,  ornée  d'inscriptions  antiques,  prouve- 
rait encore  l'habileté  des  verriers  de  l'Egypte  et  de  la 
Syrie,  et  l'antériorité  de  leurs  produits  sur  les  prodQit>i 
de  Venise.  Au  xv*  siècle,  les  verreries  de  l'Orient  ont  cesst- 
d'exister  ;  Murano  entre  alors  dans  la  période  brillante  de 
sa  fabrication  :  ses  boires,  ses  coupes  sont  recherchées 
dans  toute  l'Europe,  et  parviennent  même  aux  princes 
musulmans  de  l'Asie;  leurs  formes  se  modifient,  leurs 
dessins  se  varient,  et  néanmoins,  dans  cette  industrie  de- 
venue indépendante,  on  reconnaît  encore  les  procédt% 
premiers  et  le  goût  qui  a  dirigé  son  ornementation.  L'Al- 
lemagne tut  la  première  à  s'aff'ranchir  du  monopole  de 
Venise;  la  France,  qui  resta  plus  longtemps  sa  tribu- 
taire, ne  fabriqua  elle-même  d'excellents  produits  que 
depuis  le  règne  de  Louis  XIV  et  par  les  soins  de  Colbert 
(  V.  Glaces  ).  A  mesure  que  l'industrie  française  a  fait  des 
progrès,  l'art  proprement  dit  a  dégénéré  :  en  effet,  au 
lieu  que  toutes  les  facultés  de  l'ouvrier  s'appliquent, 
comme  autrefois,  à  satisfaire  les  délicatesses  du  coût  le 
plus  raffiné,  la  criâatioii  des  fantaisies  de  l'imasnnation  lui 


YER 


177i 


VER 


mt  de  plus  en  pi  as  interdite  ;  cfit^  Imagination  est  môme 
•teinte  par  l*obligation  d*un  travail  presque  mécanique; 
cir  il  faut  fabriquer  le  plus  grand  nombre  possible  de 
pièces  identiques  en  un  temps  donné,  et ,  dans  la  lutte 
r :)ntre  la  concurrence,  on  est  plus  préoccupé  de  trouver 
(  es  méthodes  expéditives  que  de  créer  des  objets  d*art. 
L'art  de  la  verrerie,  dans  ses  conditions  actuelles,  ne 
peut  donc  ni  reproduire  les  chefs-d'œuvre  de  TAntiquité 
et  de  la  Renaissance,  ni  les  surpasser  de  toute  la  supé- 
riorité du  verre  fabriqué  de  nos  Jours.  La  matière  seule 
est  supérieure  à  ce  qu'elle  fut  Jadis.  Vers  le  milieu  du 
xviii*  siècle,  un  certain  Bûcher  apporta  de  Bohême  en 
France  l'art  de  tailler  les  cristaux;  la  taille  et  la  gravure 
se  firent  ensuite  avec  plus  de  promptitude,  gr&ce  à  la  dé* 
couverte  de  Tacide  fluorique  par  Scneele  en  1771.  La  ver- 
rerie de  vitres  s*est  perfectionnée  en  môme  temps  :  le 
verre  avait  été  longtemps  employé  en  panneaux  à  lo- 
sanges plombés  ;  en  1711,  on  commença  a  l'employer  en 
carreaux  ench&ssés  dans  la  menuiserie  de  la  fenôtre.  B. 

VERRR  (Châteaux  de  verre).  V,  Châteaux  de  verre. 

VERRE  (Peinture  sur).  Le  verre  coloré  fut  connu  des 
Anciens,  et,  à  cause  de  sa  ressemblance  avec  les  pierres 
précieuses,  et  de  la  lumière  affaiblie  qu'il  transmettait , 
ils  le  préférèrent  au  verre  blanc  pour  les  édifices  consa- 
crés au  recueillement  et  au  culte.  Les  vitraux  ne  se  com- 
posèrent, au  début,  que  de  compartiments  de  diverses 
couleurs,  dont  TefTet  agréable  résultait  de  leur  agence- 
ment et  de  leur  combinaison.  Plus  tard ,  les  vitriers  cher- 
rlièrent  à  reproduire  les  ornements  employés  dans  Tar- 
chitecture,  et  ils  arrivèrent  enfin  à  la  représentation  de 
scènes  à  personnages.  Il  parait  que  les  premiers  essais  de 
cette  peinture  sur  verre  furent  faits  dans  le  ix*  siècle  de 
notre  ère,  puisqu'au  dire  de  l'historien  de  S^-Bénigne  de 
Dijon  il  existait  dans  cette  église  un  vitrail  du  temps  de 
Charles  le  Chauve,  où  était  figuré  le  martyre  de  S**  Pas- 
chasie.  Quelques  verrières  de  la  nef  de  la  cathédrale  d'An- 
;;er»,  celles  ae  l'abside  de  l'abbaye  de  S*-Denis  et  de  la 
cathédrale  de  Bourges,  celles  du  chœur  de  la  cathédrale 
(le  Lyon,  remontent  au  xii*  siècle.  Hais,  jusqu'au  xiv*,  les 
progrès  de  l'art  furent  très-lents,  puisqu'on  se  bornait  à 
'Je  simples  traits  sans  ombres,  ou  accomp^agné»  de  quel- 
ques hachures  pour  donner  un  peu  de  relief  aux  figures. 
Avec  des  couleurs  très-intenses,  telles  que  le  bleu,  le 
vert ,  et  surtout  le  rouge,  la  lumière  n'eût  passé  que  dif- 
ficilement; on  fabriqua  des  verres  de  couleur  composés 
de  deux  couches,  l'une  de  verre  diaphane  incolore, 
l'autre  de  verre  coloré  et  moins  épaisse  ;  puis  on  enlevait 
à  la  meule  une  portion  de  la  couche  colorée, afin  d'obtenir 
en  blanc  telle  broderie  ou  tel  dessin  où  l'on  pouvait  ap- 
pliquer une  nouvelle  couleur.  On  distingue  trois  manières 
successives  dans  la  peinture  sur  verre.  Dans  la  première, 
qui  fut  en  usage  aux  xm*  et  iiv*  siècles,  les  verrières 
sont  formées  d'un  nombre  plus  ou  moins  grand  de  car- 
touches, qui  renferment  de  petits  sujets  se  rattachant  à 
une  même  légende;  on  les  nomme,  pour  ce  motif,  ver- 
rtérej  Xégwdaxrei,  Le  fond  sur  lequel  se  détachent  les 
cartouches  c»t  ordinairement  une  espèce  d'ornement  ré- 
ticulaire  plus  ou  moins  orné,  où  le  bleu  et  Se  rouge  do- 
minent; et  de  riches  bordures  encadrent  le  tableau.  Le 
môme  genre  d'ornements  et  de  tableaux  est  appliqué  aux 
roses  des  portails  ;  celles  de  Notre-Dame  de  Paris  peuvent 
servir  d'exemple.  A  la  même  période  de  l'art  appartien- 
nent les  verrières  de  la  S^'-Chapelle,  des  cathédrales  de 
Chartres,  de  Reims,  de  Cantorbérv.  Une  seconde  manière 
fut  adoptée  au  xv'  et  au  xvi*  siècle  :  participant  aux  pro- 
grès que  firent  alors  tous  les  arts  du  dessin,  la  peinture 
sur  verre  produisit  ses  plus  belles  œuvres,  dont  les  cou- 
leurs émailié^  au  feu  font  corps  avec  le  verre;  le  modelé 
des  figures  passa  bientôt  dans  les  draperies  et  les  ar- 
mures; les  ornements,  mieux  travaillés,  présentèrent  un 
fini  jusqu'alors  inconnu  ;  personnages  de  grande  dimen- 
sion, sujets  religieux,  scènes  empruntées  à  la  Bible,  à  la 
Vie  des  saints,  à  l'histoire  ou  à  la  vie  civile,  tout  se 
trouve  sur  les  vitraux  de  cette  nouvelle  époque,  qui  four- 
nissent ainsi  de  précieux  renseignements  sur  les  costumes 
et  les  mœurs.  On  peut  citer  prmdpalement  les  verrières 
de  Rouen,  de  Beauvais,  de  Sens,  de  Troyes,  de  Tours, 
d'Amiens,  de  Notre-Dame  de  Brou,  de  Bourses,  d'Auch, 
de  Vincennes,  de  Met2^  de  Tournai,  etc.  Parmi  les  maîtres 
verriers  on  distingue,  tiu  xiv*  siècle.  Clément  de  Char- 
tres, Jehan  de  Damery,  Jacquemin,  Guill.  Canonce;  au 
XV*  Guill.  de  Graville,  Guillaume  et  Jean  Barbe,  Geoffroy 
Klasson,  Arnould  de  La  Pointe,  Cardin  Joyle,  Robin  Du- 
meigne,  Henri  Mellein,  en  France,  Jacques  TAllemand  et 
Albert  Dorer  en  Allemagne;  anxvi*,  en  Flandre,  Valère 
ProfoBval,  Gérard  Oruaire,  et,  6D  France,  Claude  et  Guil-  ' 


laume  de  Marseille,  les  frères  Gontier,  Cornouaillcs,  Ar> 
naud  Desmoles,  Angrand-le-Prince,  Cordonnier,  Gabriel 
Havène,  Michel  Germain,  Jean  Soubdain,  Michel  Be- 
soche,  Pierre  Anquetil,  Valentin  Bouch,  Olivier  Tardif, 
Jean  Lequier,  Derhode,  les  Evrard,  Bernard  Palissy, 
Pinaigrier  et  Jean  Cousin.  Les  artistes  français  allaient 
alors  décorer  les  églises  de  Bologne,  d'Arezzo,  de  Rome, 
et  trouvaient  de  dignes  rivaux  à  Bruxelles,  à  Gouda,  à 
Cologne  et  à  Ratisbonne.  Mais,  arrivé  à  son  apogée,  l'art 
déclina  :  les  peintres  verriers,  trop  fiers  de  la  richesse  de 
leur  palette,  se  mirent  à  mépriser  l'emploi  du  verre  co- 
loré dans  sa  masse,  procédé  qui  avait  pourtant  assuré 
aux  œuvres  de  leurs  devanciers  cet  éclat  de  couleur,  cette 
solidité  de  tons  qu'on  ne  dépassera  jamais.  Ils  se  livrèrent 
presque  exclusivement  à  la  'pemiurt  en  apprêt,  qu'on 
peut  regarder  comme  la  troitiième  manière  de  la  pein- 
ture sur  verre  ;  mais,  malgré  leur  habileté,  leurs  ouvrages 
trahirent  bientôt  l'insuffisance  de  ce  nouveau  procédé. 
Cette  cause  de  décadence  ne  fut  pas  d'ailleurs  la  seule  : 
le  progrès  même  des  beaux-^rts  devait  être  funeste  à  l'art 
des  maîtres  verriers.  En  effet,  comme  on  ornait  les 
églises  de  tableaux  à  fresque  et  à  l'huile,  il  fallut,  pour 
en  apercevoir  les  beautés,  laisser  pénétrer  dans  les  édi- 
fices une  lumière  plus  pure  et  plus  vive.  On  ne  fit  bientôt 
plus  que  des  grisailles,  et,  pendant  le  xvii«  siècle,  on 
substitua  aux  vitraux  peints  des  vitraux  en  verre  blanc 
ou  entourés  seulement  d'une  bordure  en  verre  coloré. 
Jacques  de  I^aroy  en  Bourgogne,  Sempy,  Perrin,  Michu, 
Pierre  Tâcheron,  Claude  et  Israël  Henriet,  et  la  famille 
des  Linck  en  Alsace,  luttèrent  vainement  contre  cette 
décadence.  La  peinture  sur  verre  se  réfugia  dans  les  vi- 
traux blasonnés  et  de  petites  dimensions,  dits  vitraïuc 
suisses,  comme  on  en  voit  à  Bàle,  à  Fribourg,  à  Con- 
stance. 

Au  xviii*  siècle,  P.  Leviel  fit  encore  d*inutllcs  efforts 
en  France  pour  ranimer  les  grandes  traditions  :  elles  ne 
furent  conservées  qu'en  Angleterre,  comme  l'attestent  les 
verrières  d'Oxford,  exécutées  par  Jervayse.  L'art  a  reparu 
de  nos  jours  avec  éclat ,  gr&ce  aux  restaurations  qui  ont 
été  entreprises  dans  les  églises  du  moyen  &ge  et  de  la  Re- 
naissance, et  aux  imitations  que  l'on  a  faites  de  ces  édi- 
fices dans  les  constructions  nouvelles.  La  peinture  sur 
verre  a  été  renouvelée  à  la  manufacture  de  Sèvres  par 
Robert,  sous  le  gouvernement  de  la  Restauration  ;  on  s'y 
livre  aussi  avec  succès  depuis  1823  dans  la  verrerie  de 
Choisy-le-Roi.  Dihl,  Brongniart,  Demarne,  Leglay,  Mor- 
telègue,  Paris,  Leclair,  Constantin,  Vatinelle,  Béranger, 
Vigne,  Hesse,  Schilt,  Maréchal,  Lobin,  Thévenot,  Thi- 
haud,  Bontemps,  Lusson,  Gérente,  Didron,  Oudioot, 
ont  contribué  à  la  renaissance  de  cet  art. 

L'oubli  dans  lequel  était  tombée  la  peinture  sur  verre 
à  la  fin  du  siècle  dernier  avait  accrédité  l'opinion  qu'on 
en  avait  perdu  le  secret.  Mais  les  procédés  de  cet  art  ont 
toujours  été  parfaitement  connus,  et  beaucoup  de  livres 
nous  les  ont  conservés.  Voici  en  quoi  ils  consistaient  : 

Après  avoir  fait  un  carton,  c.-à-d.  une  aquarelle  sur 
papier  du  sujet  qu'on  voulait  exécuter,  on  calquait  sur  un 
autre  papier  le  trait  de  ce  carton ,  et  on  y  indiquait  par 
des  teintes  plates  les  différentes  couleura.  Ce  calque  ayant 
été  découpé  en  autant  de  parties  qvLQ  l'exécution  deman- 
dait de  morceaux  de  verre,  on  indiquait  par  un  trait  sur 
le  carton  original  toutes  les  pièces  découpées,  dont  on 
pouvait,  à  l'aide  de  numéros  de  repère,  reformer  l'as- 
semblage. Quand  les  ouvriers  avaient  taillé  sur  ces  pa- 
trons les  verres  colorés  (et  ils  choisissaient  le  verre  le 
moins  fusible),  les  peintres  les  plaçaient  sur  le  carton,  et 
calquaient  tous  les  traits  qu'ils  voyaient  au  travers,  à 
l'aide  d'une  drague,  pinceau  long  et  effilé,  et  d'un  émail 
noir  composé  de  battitures  de  fer  broyées  avec  de  l'eau 
gommée  et  mélangées  avec  un  verre  très- fusible.  Ce 
même  émail  était  encore  employé  pour  ombrer  les  dra- 
peries. Les  anciens  peintres  de  vitraux  ne  se  servaient 
que  d'un  petit  nombre  de  couleurs,  telles  que  le  rouge, 
émail  dont  la  sanguine  ou  l'hématite  était  la  base,  et  le 
jaune,  produit  par  l'argent.  On  peignait  quelquefois  sur 
les  deux  côtés  du  verre  ;  mais  une  des  couches  de  cou- 
leur était  une  teinte  à  plat,  et  I9  ombres  se  trouvent 
toujours  du  côté  où  est  le  trait.  Le  travail  du  peintre 
étant  achevé,  on  fixait  les  couleurs  qu'il  avait  appliquées 
en  soumettant  le  verre  à  la  cuisson.  Plus  tard ,  la  fabri- 
cation journalière  des  émaux  employés  dans  la  mosaïque 
fit  découvrir  d'autres  couleurs  applicables  sur  le  verre,  le 
pourpre,  le  bleu,  le  vert ,  le  violet ,  etc.,  et  des  procédés 
plus  parfaits  pour  l'application  et  la  fixation  des  cou- 
leurs. La  méthode  des  premiers  peintres,  qui  employaient 
le  verre  coloré  dans  sa  masse,  est  préférable  à  la  simple 


VËtl 


iiu 


VER 


peinture  sur  verre  blanc  ;  outre  qu'il  y  a  économie  de  tra- 
vail ,  elle  donne  des  tons  plus  brillants  et  plus  solides,  et 
certains  effets  qu'on  ne  peut  obtenir  avec  des  couleurs 
d'application.  V.  L&f\e\ ,  Traité  de  la  peinture  sur  verre, 
in-8**;  Alex.  Lenoîr,  Histoire  de  la  peinture  sur  verre, 
Paris,  180-i,  in-8**;  Hyacinthe  Langlois,  Essai  sur  la 
peinture  sur  verre,  Bouen,  1832,  in-8°;  de  Caumont, 
Cours  d*antiquités  monumentales  ^  6*  partie,  chap.  5; 
Émeric  David,  Discours  sur  la  peinture;  Schmitbals, 
Traité  de  la  peinture  sur  verre  chez  les  Anciens,  en  alle- 
mand, Lemgo,  1820;  F.  deLasteyrie,  Histoire  de  la 
peinture  sur  verre  d'après  les  monuments ,  1837,  in-fol.  ; 
Bourassé,  Essai  sur  la  peinture  sur  verre,  dans  son  Ar- 
chéologie chrétienne,  1841,  in-8°;  Jouve,  Aperçu  histori- 
que sur  Vorigine  et  l'emploi  des  vitratur  peints  dans  les 
églises,  Aîx,  1841,  in-8";  Gessert,  Histoire  de  la  peinture 
sur  verre  en  Allemagne  et  dans  les  Pays-Bas,  Leipzig, 
18i2;  Thibaud,  Considérations  historiques  et  critiques 
sur  les  vitraux,  Clermont,  1842;  Thévenot,  E^sat  histo- 
rique sur  le  vitrail,  dans  les  Annaies  scientifiques  et 
littéraires  de  V Auvergne,  1837;  Batissier,  Traité  de  la 
peinture  sur  verre,  Paris,  1850.  B. 

VERRIÈRE ,  verre  à  vitre  dont  on  enveloppe  les  châsses 
et  les  reliquaires,  ou  qu'on  met  devant  les  tableaux,  pour 
les  garantir  de  la  poussière;  —  grande  fenêtre  d'église,  le 
plus  souvent  garnie  de  verres  colorés.  Dans  le  premier 
cas,  on  dit  aussi  Verrxne  et  Vitrine;  dans  le  second, 
Viirail. 

VERRINES,  nom  sous  lequel  on  connaît  les  sept  dis- 
cours composés  par  Cicéron  contre  Verres,  préteur  de  la 
Sicile,  accusé  d'abus  de  pouvoir  monstrueux  dans  sa 
charge. 

VERROTERIE ,  nom  qui  désigne  toutes  sortes  de  pe- 
tits ouvrages  en  verre,  colliers,  bracelets,  pendants  d'o- 
reilles et  autres  ornements. 

VERS  DANS  LES  LANGUES  ANCIENNES.  Le  vers  est 
un  assemblage  de  mots  mesurés  et  cadencés  selon  cer- 
taines règles  fixes  et  déterminées.  Chez  les  anciens 
Grecs,  la  base  des  vers  était  la  mesure  ou  la  quantité 
des  syllabes.  Leur  vers  le  plus  beau,  le  plus  usité  et  le 
plus  ancien,  était  le  vers  héroïque  de  six  mesures  ou 
hexamètre,  dont  la  base  était  W  dactyle  (F.  DACTyuQCE, 
HBXAMÈTnE).  Ils  faisaient  aussi  un  grand  usage  du  vers 
de  5  mesures  ou  pentamètre,  construit  alternativement 
avec  un  hexamètre  (V.  Pentamètre).  D'autres  vers  repo- 
saient sur  Viambe,  le  trochée,  V anapeste,  le  choriambe, 
le  tribraque  {V,  ces  mots).  Beaucoup  de  vers  avaient 
reçu  des  noms  particuliers  de  certains  portes  ou  de  cer- 
tains pays,  tels  que  Aristophanien,  Asclépiade,  Eupoli- 
dien,Alcaique,  Saphique,  Ionique,  etc.  (V,ces  mots).  Les 
Romains  n'eurent  pas  plus  tôt  connu  les  œuvres  de  la 
poésie  grecque,  qu'ils  en  adoptèrent  la  versification  en  la 
modifiant  peu  à  peu  dans  certains  détails  pour  la  mettre 
mieux  en  harmonie  avec  le  caractère  de  la  langue  la- 
tine, et  renoncèrent  à  la  versification  grossière  de  leurs 
chants  primitifs  {V,  Saturnien).  P. 

VERS  DANS  LES  LANGUES  MODERNES.  En  français,  les 
vers  sont  rimes,  et  composés  d'un  certain  nombre  de  syl- 
labes. Le  plus  grand  vers,  qu'on  nomme  alexandrin 
(K.  ce  mot)y  se  compose  de  12  syllabes,  et  est  générale- 
ment coupé  après  la  6",  c.-à-d.  divisé  en  deux  hémi- 
stiches :  cette  versification  serait  monotone,  si  le  poète  ne 
savait  varier  h  propo?  les  coupes  (  V.  Coupe).  Certaines 
langues  ont  des  vers  de  11  syllabes  (  V,  HENoécASYi.- 
labe)  ;  cette  mesure  est  inusitée  en  français.  Le  vers  de 
10  syllabes  {V.  Décasyllabe)  est,  au  contraire,  fort  usité, 
et  l'a  été  surtout  dans  les  derniers  temps  du  moyen  âge 
et  jusqu'à  la  fin  du  xvi*  siècle  :  il  a  une  césure  après  la 
4*  syllabe,  très-rarement  après  la  5*;  il  est  susceptible 
des  mômes  variétés  de  coupes  que  l'alexandrin.  Les  vers 
de  9  syllabes,  assez  rares,  ont  une  césure  après  la  3*.  Le 
vers  de  8  syllabes,  très-usité  au  moyen  âge,  et  depuis 
dans  les  pièces  légères,  n'est  soumis  à  aucune  césure;  le 
poôte  la  place  à  son  gré.  Il  existe  aussi  un  vers  de  7  syl- 
labes, employé  surtout  dans  la  poésie  lyrique  { V,  Hep- 
TASYLLABE^;  uu  vers  de  6  syllabes,  dont  on  se  sert  rare- 
ment seul,  et  qu'on  entremôle  presque  toujours  avec 
d'autres  vers  de  différentes  espèces.  Les  vers  qui  ont 
moins  de  6  syllabes  ne  sont  guère  propres  qu'aux  sujets 
simples  et  badins.  —  Dans  la  versification  française,  Ve 
muet  final,  placé  devant  un  mot  commençant  par  une 
voyelle,  s'élide;  mais  il  compte  toujours  devant  une  con- 
sonne, soit  au  milieu,  soit  à  la  fin  des  mots.  Les  mots 
terminés  en  ées,  ies,  ne  peuvent  s^^fiiMor  qu'à  la  fin  d'un 
vers.  Ceux  qui  ont  la  terminaison  ent  muet,  comme  ils 
mmtnt    font  compter  leur  finale  devant  une  voyelle, 


mais  ne  peuvent  jamais  ^Ire  placés  à  rhémistiche  dans 
le  vers  alexandrin,  ni  à  la  césure  da  vers  de  10  syllabe». 
H  faut  éviter  la  rencontre  d'une  voyelle  sonore,  letle 
que  a,  é,  i,  v,  avec  un  mot  commençant  par  nnt 
voyelle  :  autrement  dit,  Thiatus  est  banni  des  vers 
français  {V.  Césure,  Elision,  Enjambement,  Hémis- 
tiche, Hiatus,  Rejet,  Rime). 

On  nomme  Vers  libres  des  vers  de  diffén^ntes  ra^ 
sures,  entremêlés  selon  le  goût  ou  le  caprice  du  po*?te, 
et  qui  ne  sont  liés  entre  eux  que  par  le  sens  et  lei 
rimes.  Tels  sont  ceux  des  Fables  de  La  Fontaine,  e:, 
en  général,  de  toutes  les  fables  en  vers,  des  obéras  de 
Quinault,  de  presque  toutes  les  pièces  desUnéei  à 
ôtre  mises  en  musique,  eto. 

Au  jLVi«=  siècle,  quelques  écrivains  voulurent  rompo^^ 
des  vers  métriques,  à  l'exemple  des  Anciens.  Un  pf»  u: 
du  nom  de  Mousset,  aujourd'hui  complètement  inconnu, 
en  eut  le  premier  l'idée,  et  entreprit  en  1530  une  tra- 
duction de  VIliade,  dont  il  ne  nous  est  parvenu  que  ce 
seul  vers  : 

Chàntë,  Dè-\êssè,  lé  \  cœûrfiirï'\eiix  et  ]  lire  d:A-\cmh. 

Dorât,  Ronsard,  Bellcau,  Balf,  Pasquier,  Desportes,  Ra- 
mus,  Nicolas* Rapin,  Jean  Passerat,  Henri  Estienne,  So'- 
vole  de  Sainte-Marthe,  d'Aubiené,  etc.,  s'exercèrent  aussi 
dans  la  poésie  mesurée.  Mais  leurs  efforts  furent  stériles, 
ainsi  que  ceux  de  Turgot,  qui  publia  en  4778,  sons  k 
titre  de  Didon,  une  traduction  en  hexamètres  du  4'  chant 
de  VÊnéide  de  Virgile,  et  ceux  du  comte  de  Saint-Len, 
ancien  roi  de  Hollande.  La  plupart  de  nos  syllabes  om 
une  valeur  relative  presque  inappréciable,  et  ne  sont  ri 
longues  ni  brèves;  elles  tiennent  leur  quantité  du  r> 
price  ou  de  l'habitude  particulière  de  celui  qui  les  pro- 
nonce, et,  même  parmi  les  lettrés,  il  n'existe  pas  d'uni- 
formité parfaite  dans  la  prononciation.  Cette  raison  n^l 
impossible  l'introduction  des  vers  métriques  dans  noi  > 
littérature.  D'ailleurs,  la  liberté  illimitée  de  Pinver^i  «  : 
donnait  aux  Anciens  la  faculté  de  rapprocher,  de  dispos  r 
les  mots  de  manière  à  composer  facilement  tous  !  > 
mètres  admis  dans  leur  versification  :  notre  constracii'  - 
analytic[ue,  qui  permet  rarement  à  la  poésie  elle-min^ 
d'enfreindre  ses  lois,  s'oppose  aux  transpositions  d- 
mots,  aux  combinaisons  do  longues  et  de  brèves. 

Les  autres  versifications  modernes  reposent  génénW 
ment  sur  le  nombre  des  syllabes,  mais  sont  de  plus  sou- 
mises à  certaines  règles  d'accent;  en  anglais  et  en  a!!*^ 
mand,  la  rime  n'est  pas  toujours  obligatoire.  Les  \<^r> 
non  rimes  s'appellent  vers  blancs.  On  a  vainement  es»>' 
d'en  faire  en  notre  langue,  qui  ne  peut  se  passer  de  la 
rime.  P. 

VERS  DORés.  V.  Dorés  (Vers). 

VERS  TECHNIQUES ,  vers  faits  pour  aider  la  mémoire,  '^n 
rappelant  beaucoup  de  faits  en  peu  de  mots.  On  en  afiii 
usage,  par  exemple,  dans  la  Grammaire  latine  de  D.^- 
pautère ,  et  dans  le  Jardin  des  racines  grecques  de 
Lanceict. 

.    VERSAILLES  f Château  de).  V,  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

VERSANTS,  pentes  ou  revers  d'une  chaîne  de  mon- 
tagnes. Dans  la  même  chaîne,  les  deux  versants  oppo^'-^ 
n'ont  pas  généralement  la  même  inclinaison  :  l'un  s'in- 
cline doucement ,  l'autre  offre  une  pente  abrupte  ou  ra- 
pide. Quand  on  parle  du  versant  d'une  mer,  on  entend 
l'ensemble  des  terres  qui  s'infléchissent  vers  cette  mer  »t 
lui  envoient  leurs  eaux  :  un  versant  maritime  peut  con- 
tenir un  ou  plusieurs  bassins  (V.  ce  mot). 

VERSELLER,  en  latin  du  moyen  âge  versilare,  vteai 
mot  qui  signifiait  chanter  les  psaumes  alternativement  a 
par  versets. 

VERSET,  division  d'une  phrase  par  membres  et  par 
sections,  écrits  chacun  en  alinéa.  C'était  ce  que  Ton  app^  - 
lait  versus  en  latin,  que  nous  avon&  traduit  par  tvn^'. 
Ce  fut  dans  les  premiers  temps  du  christianisme  que  lo- 
eut  ridée  de  découper  ainsi  les  phrases  de  la  Bible.,  p<'>n- 
en  rendre  l'enseignement  et  l'intelligence  plus  facil*"^  * 
des  multitudes  de  chrétiens  ignorants,  qui  n'en  conipn  • 
naient  pas  toujours  même  la  traduction  latine.  Les  rh«  - 
teurs  et  les  grammairiens  avaient  déjà  pratiqué  ce  mo><-: 
pour  les  auteurs  classiques  qu'ils  mettaient  entre  l**- 
mains  de  leurs  écoliers,  et  du  temps  de  Qaude,  peui- 
étre  même  avant,  il  existait  des  ouvrages  de  Cicéron  e> 
de  Démos^ène  ainsi  transcrits  en  versets;  comme  k^ 
versets  étaient  numérotés,  les  commentateurs  s'en  wr- 
Yt&eni  pour  leurs  citations.  C'est  ainsi  oue  l'Ancien  et  l^ 
Nouveau  Î\i5tanicnt  sont  restés  divisés  de  cette  man.Sirc. 


VER 


un 


VEtJ 


ainsi  qae  beaucoup  d'autres  livres  de  sainteté  ou  de 
piété,  qui  tous  sont  écrits  en  prose.  L'idée  de  la  division 
de  la  Bible  en  versets  remonte  au  iv*  siècle,  au  temps  de 
S^  Jérôme.  La  division  adoptée  aujourd'hui  est  due  à  Ro- 
bert  Estienne.  Le  signe  typographique  qui  marque  les 
versets  est  celui-ci  :  f.  C.  D— t. 

VERSIFICATION,  art  de  faire  les  vers,  ou  exposé  des 
procédés  propres  à  chaque  langue  pour  construire  les 
vers.  La  versification  grecque  repose  sur  la  quantité  des 
syllabes  et  sur  les  différentes  combinaisons  des  longues 
et  des  brèves;  celle  des  Latins  est  entièrement  calquée 
sur  celle  des  Grecs. — La  versification  française  repose  sur 
le  nombre  des  syllabes  et  sur  la  rime, —  Celle  des  Italiens, 
des  Espagnols ,  des  Allemands,  des  Anglais,  repose  sur 
le  nombre  des  syllabes  et  des  accents,  et  sur  la  rime  ou 
parfois  Vassonance,  —  La  versification  est  à  la  poésie  ce 
que  le  style  ou  la  forme,  en  prose,  est  à  la  pensée,  ou  ce 
que  la  Rhétorique  est  à  l'Éloquence.  La  poésie  consiste 
surtout  dans  l'imagination,  dans  la  conception  des  idées 
d'ensemble  et  de  détail;  la  versification  n'est  que  la 
forme  extérieure  dont  elles  sont  revêtues.  Les  véritables 
poètes  sont  toujours  d'excellents  versificateurs,  parce  que 
toujours  ils  savent  trouver  la  forme  convenable  aux  con- 
ceptions de  leur  génie  et  donner  un  tour  naturel  aux 
détails  créés  par  leur  imagination.  Ainsi,  Homère  est  le 
meilleur  versificateur  de  l'ancienne  Grèce,  parce  qu'il 
ra  est  le  plus  grand  poôte  ;  nul  poète  latin  n'ofi're  une 
forme  de  vers  plus  régulière,  plus  nette,  plus  riche  et 
plus  variée  que  Virgile,  le  premier  entie  tous  par  le 
génie.  Corneille,  Molière,  La  Fontaine,  Racine,  nos  plus 
grands  poëtes,  sont  également  nos  plus  purs  modèles  de 
versification.  Le  talent  de  versifier,  sans  le  génie  ou  sans 
le  goût,  n'est  qu'un  ta'ent  froid  et  stérile  :  un  habile  ver- 
sificateur peut  flatter  l'oreille  aussi  bien  qu'un  prosateur 
habile  &  ordonner  de  pompeuses  périodes;  le  poëte  seul 
sait  aller  jusqu'à  l'àme  et  enthousiasmer  les  imagina- 
tions. —  Le  mot  Versification  s'applique  aussi  à  la  ma- 
nière spéciale  à  chaque  poète  de  tourner  les  vers.       P. 
VERSION.  Ce  terme,  comme  synonyme  de  traduction, 
s'emploie  spécialement  pour  désigner  les  traductions  du 
texte  hébreu  de  la  Bible  en  grec,  en  latin,  en  syriaque, 
en  arabe.  Ainsi  on  dit  la  Version  des  Septante,  la  Ver- 
sion de  S^  Jérôme,  etc.  —  En  termes  de  Pédagogie ,  le 
mot  Version  s'applique  aux  exercices  de  traduction  du 
grec,  du  latin,  de  l'allemand ,  de  l'anglais,  en  français, 
qui  font  la  base  de  l'enseignement  secondaire  :  seule- 
ment, au  lieu  de  dire  version  du  grec,  du  latin  en  fran- 
çais, on  dit,  par  une  abréviation  inexacte ,  mais  gue  l'u- 
sage a  conservée,  i;er5ton  grecque,  version  lattne.  Les 
exercices  dé  version  consistent  en  morceaux  extraits  des 
différents  auteurs  appartenant  aux  meilleures  époques 
littéraires,  et  que  l'on  varie  de  manière  à  former  les 
jeunes  intelligences  aux  styles  les  plus  divers,  et  &  les 
initier  à  presque  tous  les  sujets,  historiques,  philoso- 
phiques, moraux,  didactiques,  oratoires,  épiques,  lyri- 
ques, dramatiques,  descriptifs,  critiques,  etc.  L'exercice 
de  la  version  est  fructueux  pour  l'esprit  :  la  lutte  que 
rélève  soutient  pour  reproduire  dans  sa  langue  mater- 
nelle ane  page  de  prose  ou  de  vers  écrite  avec  élégance, 
avec  éclat,  avec  éloquence,  éveille  son  amour-propre, 
excite  son  émulation,  le  force  à  étudier  les  ressources  de 
sa  langue,  lui  apprend  à  la  manier  avec  souplesse,  tout 
en  étant  sévère  sur  le  choix  des  expressions  et  sur  la 
convenance  des  tours  et  du  style.  P. 

YBRSioif ,  se  dit  des  différences  qui  existent  entre  des 
fécits  relatifs  à  un  môme  fait. 
VERSO,  F.  Folio. 

VERTU.  Ce  mot  servit  d'abord  &  exprimer  le  courage  ; 
en  grec  arétè,  de  Ares,  Mars;  en  latin  virtw,  â&vir, 
homme.  On  l'appliqua  ensuite  à  tous  les  genres  de  cou- 
rage, surtout  h  la  force  qui  consiste  à  vaincre  ses  pas- 
sions. C'est  en  ce  sens  moral  qu'on  peut  dire  que  la  vertu 
est  le  sacrifice  de  la  passion  et  de  l'intérêt  au  devoir. 
Selon  Aristote,  la  vertu,  au  point  de  vue  moral,  naît  de 
l'habitude  :  entre  les  habitudes,  dit^il,  on  nomme  vertus 
celles  qui  sont  dignes  de  louante.  A  côté  des  vertus 
morales,  il  distinguait  les  vertus  intellectuelles,  qui  sont 
plutôt  des  facultés;  de  même  qu'en  parlant  des  pro- 
priétés des  corps  on  dit,  par  exemple,  la  vertu  d'une 
planta.  Le  contraire  de  la  vertu,  c'est  le  vice,  La  plus 
ancienne  division  des  vertus  est  celle  faite  par  les  philo- 
sophes grecs  en  vertus  cardinales,  au  nombre  de  quatre: 
la  force,  la  prudence,  la  tempérance,  et  la  justice.  Dans 
Xénophon,  Socrate  remplace  la  prudence  par  le  respect. 
dfi  la  divinité.  Platon  adopte  la  première  division,  en  lui 
donnant  un  caractère  psychologique  :  aux  sens  il  ap- 


plique la  tempérance,  au  cœur  la  force  et  le  courage ,  à 
l'esprit  la  science;  de  Taccord  de  ces  trois  vertus  il  forme 
la  justice.  On  trouve  cette  division  chez  les  Stoïciens  et 
dans  Cicéron,  d'où  elle  passa  chez  les  modernes.  Le 
christianisme ,  trouvant  cette  division  incomplète ,  y 
ajouta  les  vertus  théologales.:  la  Foi,  l'Espérance  et  la 
Charité. 

Dans  la  hiérarchie  céleste,  les  Vertus  forment  le  troi- 
sième ordre;  c'est  le  chœur  des  Anges  placé  entre  les 
Dominations  et  les  Puissances  :  r  n  leur  attribue  le  pou- 
voir de  faire  des  miracles,  et  de  fortifier  les  Anges  d'ordre 
inférieur  dans  l'exercice  de  leurs  fonctions. 

Comme  divinité  allégorique,  la  Vertu,  fille  de  Jupiter, 
était  représentée  vêtue  de  blanc,  tenant  tantôt  la  pique 
et  le  sceptre,  tantôt  la  couronne  de  laurier  ;  elle  était 
ailée,  ou  assise  sur  un  cube  de  marbre,  image  de  la  so- 
lidité. R. 

VERTUGADINS.  V,  Paniebs. 

VERVE,  nom  qu'on  donne,  en  Poésie,  à  la  vive  re- 
présentation d'un  objet  dans  l'esprit  et  à  une  émotion  du 
cœur  proportionnée  à  cet  objet. 

VÈSË,  nom  de  la  musette  ou  cornemuse  dans  plusieurs 
régions  de  la  France. 

VESIGA  PISCIS.  K.  Amande. 

VESPASIENNES.   V,  Colonwbs. 

VESPÉRAL,  livre  d'église  qui  ne  contient  que  le  chant 
des  Vêpres. 

VKSPERIE  (du  latin  vesper)^  nom  d'une  thèse  dans 
l'ancienne  Université  de  Paris,  parce  qu'on  îa  soutenait 
le  soir. 

VESPILLONS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

VEST,  vieux  terme  de  Jurisprudence,  désignant  l'acte 
solennel  par  lequel  l'acquéreur  d'un  héritage  tenu  en 
roture  était  investi,  par  le  seigneur  foncier,  du  droit  do 
propriété  sur  cet  héritage.  Le  Dévest  était  la  permission 
que  le  propriétaire  d'une  terre  donnait  à  un  acquéreur 
d'entrer  en  possession  de  cette  terre. 

VESTIAIRE  (du  latin  vestis),  lieu  où  l'on  conserve  les 
vêtements  ou  costumes  des  membres  d'une  assemblée, 
d'un  tribunal,  etc.  —  Dans  l'Empire  byzantin,  le  Ves- 
tiaire  était  un  fonctionnaire  qui  avait  soin  des  habits  de 
l'empereur,  une  sorte  de  grand  maître  de  la  garde-robe. 

VESTIBULE,  en  latin  vestibulum,  pièce  par  laquelle 
on  entre  dans  un  palais,  dans  un  château,  ou  dans  tout 
autre  grand  édifice.  Le  mot  est  dérivé  de  Vesta,  parce 
que  les  Anciens  entretenaient  souvent  du  feu  en  l'hon- 
neur de  cette  déesse  dans  les  pièces  de  ce  genre.  Le  ves- 
tibule communique  d'ordinaire  à  la  cour  ou  au  jardin  ; 
il  donne  accès  au  rez-de-chaussée,  et  le  principal  escalier 
vient  y  aboutir.  C'est  là  aussi  que  restent  les  gens  de 
service.  Un  vestibule  ne  comporte  ni  meubles,  ni  glaces, 
ni  tableaux,  ni  riches  ornements;  on  le  décore  avec  des 
pilastres,  des  colonnes  simples,  quelquefois  des  statues. 
Il  est  dit  simple,  quand  il  a  ses  deux  races  également  dé- 
corées, comme  celui  des  Tuileries;  figuré,  lorsqu'il  forme 
des  avant-corps  et  des  arrière-corps  revêtus  de  pilastres 
et  de  colonnes  ;  à  ailes,  quand  il  a,  outre  le  passage  prin- 
cipal, des  espèces  de  bas  côtés,  comme  au  Louvre.  — 
Chez  les  Romains,  le  vestibule  était  une  petite  place  de- 
vant la  façade  des  grandes  maisons. 

VÊTEMENTS.  V.  Costume. 

VÉTÉRANS.  )  V.  ces  mots  dans  notre 

VÉTÉRINAIRES  (Écoles).  [    Dictionnaire  de  Biogra- 

VETO.  ,  )    phie  et  d'Histoire. 

VÊTURE,  acte  par  lequel  un  novice  revêt  solennelle- 
ment l'habit  d'iin  ordre  religieux.  La  vêture  précède  d'un 
an  la  profession  {V.  ce  mot). 

VEUVAGE,  état' du  mari  ou  de  la  femme  qui  a  perdu 
son  conjoint.  Chez  les  Hébreux ,  s'il  n'était  pas  né  d'en- 
fants de  la  première  union,  le  beau-frère,  et,  à  son  dé- 
faut, d'autres  parents  devaient  épouser  la  veuve  :  quand 
celle-ci  ne  trouvait  pas  de  mari,  ou  était,  par  son  âge , 
hors  d'état  d'avoir  des  enfants ,  la  loi  pourvoyait  à  sa 
subsistance.  A  Rome,  les  veuves  &gées  de  moins  de  50  ans 
devaient  convoler  à  de  secondes  noces,  si  elles  voulaient 
échapper  aux  peines  dont  les  célibataires  étaient  frappés. 
Dans  les  premiers  temps  du  christianisme ,  les  veuves 
qui  n'avaient  connu  qu'un  seul  mariage  et  qui  avaient 
atteint  60  ans  étaient  associées  à  certaines  fonctions  du 
sacerdoce  :  elles  visitaient  les  malades  et  les  prisonniers, 
portaient  des  secours  aux  pauvres,  recevaient  et  nourris- 
saient les  étrangers,  instruisaieni  et  surveillaient  les 
vJiisrgQS  çl^ç^tiennes,  ensevelissaient  les  morts,  etc.  L'Église 
catholique  admet  aux  ordres  sacrés  l'homme  veuf  d'une 
première  union,  mais  les  interdit  h  celui  qui  se  trouve 


VËtV 


nu 


VER 


peiaturo  sur  verre  blanc  ;  outre  qu'il  y  a  économie  de  tra- 
vail ,  elle  donne  des  tons  plus  brillants  et  plus  solides,  et 
certains  effets  qu'on  ne  peut  obtenir  avec  des  couleurs 
d'application.  V.  Lm'ie\ ,  Traité  de  la  peinture  sur  verre, 
in-8°;  Alex.  Lenoir,  Histoire  de  la  peinture  sur  verre, 
Paris,  1804,  in-8°;  Hyacinthe  Langlois,  Essai  sur  la 
peinture  sur  verre,  Bouen,  4832,  in-8°;  de  Caumont, 
Cours  d'antiquités  monumentales,  6*  partie,  chap.  5; 
Émeric  David,  Discours  sur  la  peinture;  Schmitbals, 
Traité  ds  la  peinture  sur  verre  chez  les  Anciens,  en  alle- 
mand, Lemgo,  1820  ;  F.  de  Lasteyrie ,  Histoire  de  la 
peinture  sur  verre  d'après  les  monuments,  1837,  in-fol.  ; 
Bourassé,  Essai  sur  la  peinture  sur  verre,  dans  son  Ar- 
chéologie chrétienne,  1841,  ïn-8°;  Jouve,  Aperçu  histori- 
que sur  Vorigine  et  l'emploi  des  vitraux  peints  dans  les 
églises,  Aix,  1841,  in-8";  Gessert,  Histoire  de  la  peinture 
sur  verre  en  Allemagne  et  dans  les  Pays-Bas,  Leipzig, 
18i2;  Thibaud,  Considérations  historiques  et  critiques 
sur  les  vitraux,  Clermont,  1842;  Thévenot,  Essai  histo- 
rique sur  le  vitrail,  dans  les  Annales  scientifiques  et 
littéraires  de  V Auvergne,  1837;  Batissier,  Traité  de  la 
peinture  sur  verre,  Paris,  1850.  B. 

VERRIÈRE,  verre  à  vitre  dont  on  enveloppe  lea  châsses 
et  les  reli<juaîrcs,  ou  qu'on  met  devant  les  tableaiix,  pour 
les  garantir  de  la  poussière;  —  grande  fenêtre  d'église,  le 
plus  souvent  garnie  de  verres  colorés.  Dans  le  premier 
cas,  on  dit  aussi  Verrtne  et  Vitrine;  dans  le  second. 
Vitrail. 

VERRINES,  nom  sous  lequel  on  connaît  les  sept  dis- 
cours composés  par  Cicénm  contre  Verres,  préteur  de  la 
Sicile,  accusé  d'abus  de  pouvoir  monstrueux  dans  sa 
charge. 

VERROTERIE ,  nom  qui  désigne  toutes  sortes  de  pe- 
tits ouvrages  en  verre,  colliers,  bracelets,  pendants  d'o- 
reilles et  autres  ornements. 

VERS  DANS  LES  LANGUES  ANCIEP^^ES.  Le  vers  est 
un  assemblage  do  mots  mesurés  et  cadencés  selon  cer- 
taines règles  fixes  et  déterminées.  Chez  les  anciens 
Grecs,  la  base  des  vers  était  la  mesure  ou  la  quantité 
des  syllabes.  Leur  vers  le  plus  beau,  le  plus  usité  et  le 
plus  ancien,  était  le  vers  héroïque  de  six  mesures  ou 
hexamètre,  dont  la  base  était  le  dactyle  (F.  Dactylique, 
HBXAMÈTnE).  Ils  faisaient  aussi  un  grand  usage  du  vers 
de  5  mesures  ou  pentamètre,  construit  alternativement 
avec  un  hexamètre  (V.  Pentamètre),  D'autres  vers  repo- 
saient sur  Viambe,  le  trochée,  Vanapeste,  le  choriambe, 
le  tribraque  (V.  ces  mots).  Beaucoup  de  vers  avaient 
reçu  des  noms  particuliers  de  certains  pointes  ou  de  cer- 
tains pa3rs,  tels  que  Aristophanien,  Asdépiade,  Eupoli- 
dicn,Alcaique,  Saphique,  Ionique,  etc.  {V.ces  mots).  Les 
Romains  n'eurent  pas  plus  tôt  connu  les  œuvres  de  la 
poésie  grecque,  qu'ils  en  adoptèrent  la  versification  en  la 
modifiant  peu  à  peu  dans  certains  détails  pour  la  mettre 
mieux  en  harmonie  avec  le  caractère  de  la  langue  la- 
tine, et  renoncèrent  à  la  versification  grossière  de  leurs 
chants  primitifs  {V,  Saturnien).  P. 

VERS  dans  les  langues  MODERNES.  En  français,  les 
vers  sont  rîmes,  et  composés  d'un  certain  nombre  de  syl- 
labes. Le  plus  grand  vers,  qu'on  nomme  alexandrin 
(K.  ce  mot),  se  compose  de  12  syllabes,  et  est  générale- 
ment coupé  après  la  6*,  c.-à-d.  divisé  en  deux  hémi- 
stiches :  cette  versification  serait  monotone,  si  le  poète  ne 
savait  varier  à  propo?  les  coupes  (  V.  Coupe).  Certaines 
langues  ont  des  vers  de  11  syllabes  (  K.  Hend^casyl- 
laoe)  ;  cette  mesure  est  inusitée  en  français.  Le  vers  de 
10  syllabes  {V.  Décasyllabe)  est,  au  contraire,  fort  usité, 
et  l'a  été  surtout  dans  les  derniers  temps  du  moyen  âge 
et  jusqu'à  la  fin  du  xvi*  siècle  :  il  a  une  césure  après  la 
4*  syllabe,  très-rarement  après  la  5«;  il  est  susceptible 
des  mêmes  variétés  de  coupes  que  l'alexandrin.  Les  vers 
de  0  syllabes,  assez  rares,  ont  une  césure  après  la  3*.  Le 
vers  de  8  syllabes,  très-usité  au  moyen  àige,  et  depuis 
dans  les  pièces  légères,  n'est  soumis  à  aucune  césure;  le 
poôte  la  place  à  son  gré.  Il  existe  aussi  un  vers  de  7  syl- 
labes, employé  surtout  dans  la  poésie  lyrique  (  V.  Hep- 
tasyllabeV,  un  vers  de  6  syllabes,  dont  on  se  sert  rare- 
ment seul,  et  qu'on  entremêle  presque  toujours  avec 
d'autres  vers  de  différentes  espèces.  Les  vers  qui  ont 
moins  de  6  syllabes  ne  sont  guère  propres  qu'aux  sujets 
simples  et  badins.  —  Dans  la  versification  française,  l'e 
muet  final,  placé  devant  un  mot  commençant  par  une 
voyelle,  s'élide;  mais  il  compte  toujours  devant  une  con- 
sonne, soit  au  milieu,  soit  à  la  fin  des  mots.  Les  mots 
terminés  en  ées,  tes,  ne  peuvent  sQ.-p^sigQr  qu'à  la  fin  d'un 
vers.  Ceux  qui  ont  la  terminaison  ent  muet,  comme  ils 
mment    font  compter  leur  finale  devant  une  voyelle, 


mais  ne  peuvent  jamais  élre  placés  à  l'hémistiche  dans 
le  vers  alexandrin,  ni  à  la  césure  da  vers  de  10  syllabes. 
II  faut  éviter  la  rencontre  d'une  voyelle  sonore,  telle 
que  a,  é,  i,  v,  avec  un  mot  commençant  par  une 
voyelle  :  autrement  dit,  l'hiatus  est  banni  des  vers 
français  (r.  Césure,  Eliston,  Enjambement,  Hémis- 
tiche, Hiatus,  Rejet,  Rime). 

On  nomme  Vers  libres  des  vers  de  différpntes  me- 
sures, entremêlés  selon  le  goût  ou  le  caprice  du  po^le, 
et  qui  ne  sont  liés  entre  eux  que  par  le  sens  et  les 
rimes.  Tels  sont  ceux  des  Fables  de  La  Fontaine,  et, 
en  général,  de  toutes  les  fables  en  vers,  des  opéras  de 
Qainault,  de  presque  toutes  les  pièces  destinéei  à 
ôtre  mises  en  musique,  eto. 

Au  îL\  i"  siècle,  quelques  écrivains  voulurent  composer 
des  vers  métriques,  à  l'exemple  des  Anciens.  Un  pf^ti) 
du  nom  de  Mousset,  aujourd*hui  complètement  inconDu, 
en  eut  le  premier  l'idée,  et  entreprit  en  1530  une  tra- 
duction de  VIliade,  dont  U  ne  nous  est  parvenu  que  ce 
seul  vers  : 

Chàntè,  Dè-\èssè,  lé  \  cœitr  fùrï'\eùx  et  |  l'trè  d:A-\chtUês. 

Oorat,  Ronsard,  Bellcau,  Balf,  Pasquier,  Desportes,  Bi- 
mus,  Nicol&s'Rapin,  Jean  Passerai,  Henri  Estienne,  Scé- 
vole  de  Sainte-Marthe,  d'Aubigné,  etc.,  s'exercèrent  aussi 
dans  la  poésie  mesurée.  Mais  leurs  efforts  furent  stérile», 
ainsi  que  ceux  de  Turgot,  qui  publia  en  4778,  sou$  !e 
titre  de  Didon,  une  traduction  en  hexamètres  du  4*  chant 
de  VÊnéide  de  Virgile,  et  ceux  du  comte  de  Saint-Leii. 
ancien  roi  de  Hollande.  La  plupart  de  nos  syllabes  o::t 
une  valeur  relative  presque  inappréciable,  et  ne  sont  i-i 
longues  ni  brèves  ;  elles  tiennent  leur  quantité  du  o 
price  ou  de  l'habitude  particulière  de  celui  qui  les  pro- 
nonce, et,  même  parmi  les  lettrés,  il  n'existe  pas  d'uni- 
formité parfaite  dans  la  prononciation.  Cette  raison  ren^l 
impossible  l'introduction  des  vers  métriques  dans  notn' 
littérature.  D'ailleurs,  la  liberté  illimitée  de  l'inversion 
donnait  aux  Anciens  la  faculté  de  rapprocher,  de  dispc^;  r 
les  mots  de  manière  à  composer  facilement  tous  1s 
mètres  admis  dans  leur  versification  :  notre  construction 
analytique,  qui  permet  rarement  à  la  poésie  elle-mOnie 
d'enfreindre  ses  lois,  s'oppose  aux  transpositions  de 
mots,  aux  combinaisons  de  longues  et  de  brèves. 

Les  autres  versifications  modernes  reposent  générale- 
ment sur  le  nombre  des  syllabes,  m^s  sont  de  plus  sou- 
mises à  certaines  règles  d'accent;  en  anglais  et  en  alii- 
mand,  la  rime  n'est  pas  toujours  obligatoire.  Les  vor« 
non  rimes  s'appellent  vers  blancs.  On  a  vainement  es$avé 
d'en  faire  en  notre  langue,  qui  ne  peut  se  passer  de  la 
rime.  P. 

VERS  DORÉS,  r.  Dorés  (Vers). 

VERS  TECHNIQUES ,  vers  faits  pour  aider  la  mémoire,  en 
rappelant  beaucoup  de  faits  en  peu  de  mots.  On  en  a  rùt 
usage,  par  exemple,  dans  la  Grammaire  latine  de  Des- 
pautère ,  et  dans  le  Jardin  des  racines  grecques  de 
Lancelot. 

.    VERSAILLES  (Château  de).  V.  notre  Dictionnaire  d( 
Biographie  et  d'Histoire. 

VERSANTS,  pentes  ou  revers  d'une  chaîne  de  mon- 
tagnes. Dans  la  même  chaîne,  les  deux  versants  oppo^*^ 
n'ont  pas  généralement  la  même  Inclinaison  :  Tun  s'in- 
cline doucement ,  l'autre  offre  une  pente  abrupte  ou  ra- 
pide. Quand  on  parle  du  versant  d'une  mer,  on  entend 
l'ensemble  des  terres  qui  s'infléchissent  vers  cette  mer  et 
lui  envoient  leurs  eaux  :  un  versant  maritime  peut  coor 
tenir  un  ou  plusieurs  bassins  (  V.  ce  mot). 

VERSELLER,  en  latin  du  moyen  ige  versilare,  rienu 
mot  qui  signifiait  chanter  les  psaumes  alternativement  et 
par  versets. 

VERSET,  division  d'une  phrase  par  membres  et  par 
sections,  écrits  chacun  en  alinéa.  C'était  ce  que  Ton  uppf'- 
lait  versus  en  latin,  que  nous  avons  traduit  par  versft. 
Ce  fut  dans  les  premiers  temps  du  christianisme  que  l'on 
eut  l'idée  de  découper  ainsi  les  phrases  de  la  Bible,  poar 
en  rendre  l'enseignement  et  l'intelligence  plus  faciles  r. 
des  multitudes  de  chrétiens  ignorants,  qui  n'en  compre- 
naient pas  toujours  même  la  traduction  latine.  Les  rlu^- 
teurs  et  les  grammairiens  avaient  déjà  pratiqué  ce  moyt'n 
pour  les  auteurs  classiques  qu'ils  mettaient  entre  les 
mains  de  leurs  écoliers,  et  du  temps  de  Claude,  peut- 
être  même  avant,  il  existait  des  ouvrages  de  Cicéron  e> 
de  Démosthène  ainsi  transcrits  en  versets;  comme  le!^ 
versets  étaient  numérotés,  les  commentateurs  s'en  ser- 
vaient pour  leurs  dtations.  C'est  ainsi  que  l'Ancien  et  le 
Nouveau  Testament  sout  restés  divisés  de  cette  manière. 


VER 


un 


VEC 


ainsi  que  beaucoup  d*autres  livres  de  saiuteté  ou  de 
piété,  qui  tous  sont  écrits  en  prose.  LMdée  de  la  division 
de  la  Bible  en  versets  remonte  au  rv'  siècle,  au  temps  de 
S' Jérôme.  La  division  adoptée  aujourd'hui  est  due  à  Ro- 
beri  Estienne.  Le  signe  typographique  qui  marque  les 
versets  est  celui-ci  :  f,  C.  D— t. 

VERSIFICATION,  art  de  faire  les  vers,  ou  exposé  des 
procédés  propres  k  chaque  langue  pour  construire  les 
vers.  La  versification  grecque  repose  sur  la  quantité  des 
syllabes  et  sur  les  différentes  combinaisons  des  longues 
et  des  brèves;  celle  des  Latins  est  entièrement  calquée 
sur  celle  des  Grecs. — La  versification  française  repose  sur 
ie  nombre  des  syllabes  et  sur  la  rime,—  Celle  des  Italiens, 
des  Espagnols ,  des  Allemands,  des  Anglais,  repose  sur 
le  nombre  des  syllabes  et  des  accents,  et  sur  la  rime  ou 
parfois  Vassonance.  —  La  versification  est  à  la  poésie  ce 
que  le  stvle  ou  la  forme,  en  prose,  est  à  la  pensée,  ou  ce 
que  la  Rhétorique  est  à  TÉloquence.  La  poésie  consiste 
surtout  dans  Timaginotion,  dans  la  conception  des  idées 
d'ensemble  et  de  détail;  la  versification  n*est  que  la 
forme  extérieure  dont  elles  sont  revôtues.  Les  véritables 
postes  sont  toujours  d'excellents  versificateurs,  parce  que 
toujours  ils  savent  trouver  la  forme  convenable  aux  con- 
ceptions de  leur  génie  et  donner  un  tour  naturel  aux 
détails  créés  par  leur  imagination.  Ainsi,  Homère  est  le 
meilleur  versificateur  de  Tancienne  Grèce ,  parce  qu'il 
»n  est  le  plus  grand  poôte  ;  nul  poète  latin  n'offre  une 
forme  de  vers  plus  régulière,  plus  nette,  plus  riche  et 
plus  variée  que  Virgile,  le  premier  entie  tous  par  le 
génie.  Corneille,  Molière,  La  Fontaine,  Racine,  nos  plus 
grands  poètes,  sont  également  nos  plus  purs  modèles  de 
versification.  Le  talent  de  versifier,  sans  le  génie  ou  sans 
le  goût,  n'est  qu'un  ta'ent  froid  et  stérile  :  un  habile  ver- 
sificateur peut  flatter  l'oreille  aussi  bien  qu'un  prosateur 
habile  à  ordonner  dç  pompeuses  périodes;  le  poète  seul 
sait  aller  jusqu'à  l'àme  et  enthousiasmer  les  imagina- 
tions. —  Le  mot  Versification  s'applique  aussi  à  la  ma- 
nière spéciale  à  chaque  poète  de  tourner  les  vers.       P. 

VERSION.  Ce  terme,  comme  svnonyme  de  traduction, 
s'emploie  spécialement  pour  désigner  les  traductions  du 
texte  hébreu  de  la  Bible  en  grec,  en  latin,  en  syriaque, 
en  arabe.  Ainsi  on  dit  la  Version  des  Septante,  la  Ver- 
sion de  S*  Jérôme,  etc.  —  En  termes  de  Pédagogie ,  le 
mot  Version  s'applique  aux  exercices  de  traduction  du 
grec,  du  latin,  de  l'allemand,  de  l'anglais,  en  français, 
qui  font  la  base  de  l'enseignement  secondaire  :  seule- 
ment, au  lieu  de  dire  version  du  grec,  du  latin  en  fran- 
çais, on  dit,  par  une  abréviation  inexacte ,  mais  que  l'u- 
sage a  conservée,  version  grecque,  version  latine.  Les 
exercices  dé  version  consistent  en  morceaux  extraits  des 
différents  auteurs  appartenant  aux  meilleures  époques 
littéraires,  et  que  Ton  varie  de  manière  à  former  les 
jeunes  intelligences  aux  styles  les  plus  divers,  et  à  1rs 
initier  à  presque  tous  les  sujets,  historiques,  philoso- 
phiques, moraux,  didactiques,  oratoires,  épiques,  lyri- 
ques, dramatiques,  descriptifs,  critiques,  etc.  L'exercice 
de  la  version  est  fructueux  pour  l'esprit  :  la  lutte  que 
l'élève  soutient  pour  reproduire  dans  sa  langue  mater- 
nelle une  page  de  prose  ou  de  vers  écrite  avec  élégance, 
avec  éclat,  avec  éloquence,  éveille  son  amour-propre, 
exdte  son  émulation,  le  force  à  étudier  les  ressources  de 
sa  langue,  lui  apprend  à  la  manier  avec  souplesse,  tout 
en  étant  sévère  sur  le  choix  des  expressions  et  sur  la 
convenance  des  tours  et  du  style.  P. 

VERSION ,  se  dit  des  différences  qui  existent  entre  des 
lécits  relatifs  à  un  même  fait. 

VERSO.  K  Folio. 

VERTU.  Ce  mot  servit  d'abord  à  exprimer  le  courage  ; 
en  grec  arétè,  de  Ares,  Mars;  en  latin  virfus,  devir, 
homme.  On  l'appliqua  ensuite  à  tous  les  genres  de  cou- 
rage, surtout  à  la  force  qui  consiste  à  vaincre  ses  pas- 
sions. C'est  en  ce  sens  moral  qu'on  peut  dire  que  la  vertu 
est  le  sacrifice  de  la  passion  et  de  l'intérêt  au  devoir. 
Selon  Aristote,  la  vertu,  au  point  de  vue  moral,  naît  de 
l'habitude  :  entre  les  habitudes,  dit-il,  on  nomme  verttu 
celles  qui  sont  dignes  de  louante.  A  côté  des  vertus 
morales,  il  distinguait  les  vertus  mtellectuelles,  qui  sont 
plutôt  des  facultés;  de  même  qu'en  parlant  des  pro- 
priétés des  corps  on  dit,  par  exemple,  la  vertu  d'une 
plantas.  Le  contraire  de  la  vertu,  c'est  le  vice,  La  plus 
ancienne  division  des  vertus  est  celle  faite  par  les  philo- 
sophes grecs  en  vertus  cardinales,  au  nombre  de  quatre: 
la  force,  la  prudence,  la  tempérance,  et  la  justice.  Dans 
Xénophon,  Socrate  remplace  la  prudence  par  le  respect. 
de  la  divinité.  Platon  adopte  la  première  division,  en  lui 
donnant  ua  caractère  psychologique  :  aux  sens  il  ap- 


plique la  tempérance,  au  cœur  la  force  et  le  courage ,  à 
l'esprit  la  science;  de  l'accord  de  ces  trois  vertus  il  forme 
la  justice.  On  trouve  cette  division  chez  les  Stoïciens  et 
dans  Cicéron,  d'où  elle  passa  chez  les  modernes.  Le 
christianisme ,  trouvant  cette  division  incomplète  ,  y 
ajouta  les  vertus  théologales.  :  la  Foi ,  l'Espérance  et  la 
Charité. 

Dans  la  hiérarchie  céleste,  les  Vertus  forment  le  troi- 
sième ordre;  c'est  le  chœur  des  Anges  placé  entre  les 
Dominations  et  les  Puissances  :  m  leur  attribue  le  pou- 
voir de  faire  des  miracles,  et  de  fortifier  les  Anges  d'ordre 
inférieur  dans  l'exercice  de  leurs  fonctions. 

Comme  divinité  allégorique,  la  Vertu,  fille  de  Jupiter, 
était  représentée  vêtue  de  blanc,  tenant  tantôt  la  pique 
et  le  sceptre,  tantôt  la  couronne  de  laurier  ;  elle  était 
ailée,  ou  assise  sur  un  cube  de  marbre,  imago  de  la  so- 
lidité. R. 

VERTUGADINS.  V.  Paniers. 

VERVE ,  nom  qu'on  donne ,  en  Poésie,  à  la  vive  re- 
présentation d'un  objet  dans  l'esprit  et  à  une  émotion  du 
cœur  proportionnée  à  cet  objet. 

VÈSE,  nom  de  la  musette  ou  cornemuse  dans  plusieurs 
régions  de  la  France. 

VESICA  PISCIS.  K.  Amande. 

VESPASIENNES.   V.  Colonnes. 

VESPÉRAL,  livre  d'église  qui  ne  contient  que  le  chant 
des  Vêpres. 

VESPERIE  (du  latin  vesper)^  nom  d'une  thèse  dans 
l'ancienne  Université  de  Paris,  parce  qu'on  la  soutenait 
le  soir. 

VESPILLONS.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d* Histoire. 

VEST,  vieux  terme  de  Jurisprudence,  désignant  l'acte 
solennel  par  lequel  l'acquéreur  d'un  héritage  tenu  en 
roture  était  investi,  par  le  seigneur  foncier,  du  droit  de 
propriété  sur  cet  héritage.  Le  Dévest  était  la  permission 
que  le  propriétaire  d'une  terre  donnait  à  un  acquéreur 
d'entrer  en  possession  de  cette  terre. 

VESTIAIRE  (du  latin  vestis)^  lieu  où  Ton  conserve  les 
vêtements  ou  costumes  des  membres  d'une  assemblée, 
d'un  tribunal,  etc.  —  Dans  l'Empire  byzantin,  le  Ves» 
tiaire  était  un  fonctionnaire  qui  avait  soin  des  habits  de 
l'empereur,  une  sorte  de  grand  maître  de  la  garde-robe. 

VESTIBULE,  en  latin  vestibulum,  pièce  par  laquelle 
on  entre  dans  un  palais,  dans  un  ch&teau,  ou  dans  tout 
autre  grand  édifice.  Le  mot  est  dérivé  de  Vesta,  parce 
que  les  Anciens  entretenaient  souvent  du  feu  en  l'hon- 
neur de  cette  déesse  dans  les  pièces  de  ce  genre.  Le  ves- 
tibule communique  d'ordinaire  à  la  cour  ou  au  jardin  ; 
il  donne  accès  au  rez-de-chaussée,  et  le  principal  escalier 
vient  y  aboutir.  C'est  là  aussi  que  restent  les  gens  de 
service.  Un  vestibule  ne  comporte  ni  meubles,  ni  glaces, 
ni  tableaux,  ni  riches  ornements;  on  le  décore  avec  des 
pilastres,  des  colonnes  simples,  quelquefois  des  statues. 
Il  est  dit  simple,  quand  il  a  ses  deux  races  également  dé- 
corées, comme  celui  des  Tuileries;  figuré,  lorsqu'il  forme 
des  avant-corps  et  des  arrière-corps  revêtus  de  pilastres 
et  de  colonnes  ;  à  ailes,  quand  il  a,  outre  le  passage  prin- 
cipal, des  espèces  de  bas  côtés,  comme  au  Louvre.  — 
Chez  les  Romains,  le  vestibule  était  une  petite  place  de- 
vant la  façade  des  grandes  maisons. 

VÊTEMENTS.  V,  Costome. 

VÉTÉRANS.  )  F.  ces  mots  dans  notre 

VÉTÉRINAIRES  (Écoles).  J    Dictionnaire  de  Biogra- 

VETO.  .  )   phie  et  d'Histoire. 

VÊTURE ,  acte  par  lequel  un  novice  revêt  solennelle- 
ment l'habit  d'un  ordre  religieux.  La  vèture  précède  d'un 
an  la  profession  {V.  ce  mot). 

VEUVAGE,  état  du  mari  ou  de  la  femme  qui  a  perdu 
son  conjoint.  Chez  les  Hébreux,  s'il  n'était  pas  né  d'en- 
fants de  la  première  union,  le  beau-frère,  et,  à  son  dé- 
faut, d'autres  parents  devaient  épouser  la  veuve  :  quand 
celle-ci  ne  trouvait  pas  de  mari,  ou  était,  par  son  fige , 
hors  d'état  d'avoir  des  enfants ,  la  loi  pourvoyait  à  sa 
subsistance.  A  Rome,  les  veuves  âgées  de  moins  de  50  ans 
devaient  convoler  à  de  secondes  noces,  si  elles  voulaient 
échapper  aux  peines  dont  les  célibataires  étaient  frappés. 
Dans  les  premiers  temps  du  christianisme,  les  veuves 
qui  n'avaient  connu  qu'un  seul  mariage  et  qui  avaient 
atteint  60  ans  étaient  associées  à  certaines  fonctions  du 
sacerdoce  :  elles  visitaient  les  malades  et  les  prisonniers, 
portaient  des  secours  aux  pauvres,  recevaient  et  nourris- 
saient les  étrangers,  instruisaient  et  surveillaient  les 
V^fS^  Cliç^tiennes,  ensevelissaient  les  morts,  etc.  L'Église 
catholique  admet  aux  ordres  sacrés  Thomme  veuf  d'une 
première  union,  mais  les  interdit  h  celui  qui  se  trouve 


VIA 


1776 


Vie 


vâur  pour  la  seconde  fois.  Chez  les  Germains,  les  veuves 
se  remariaient  rarement  :  la  loi  des  Francs  Saliens  vou- 
lait que  le  second  mariage  eût  lieu  la  nuit  {V.  Noces). 
Au  moyen  âge,  la  veuve  qui  renonçait  à  la  succession  de 
son  mari,  pour  ne  point  payer  ses  dettes,  déposait  sur  le 
cercueil  sa  ceinture,  sa  bourse  et  les  clefs  de  la  niaison. 
Lonjrtemps  les  veuves  portèrent,  comme  les  religieuses, 
un  bandeau  qui  couvrait  leurs  cheveux.  Les  reines  veuves 
restaient  enfermées  pendant  les  40  premiers  jours  de  leur 
deuil.  Chez  les  Hindous,  ce  n*est  point  par  la  contrainte, 
mais  par  Tattrait  des  récompenses  célestes,  que  la  veuve 
se  brûle  sur  le  bûcher  de  son  époux.  Le  Code  Napoléon  a 
réglé  avec  soin  la  condition  des  veuves  (F.  Femme);  il 
ne  leur  permet  de  contracter  un  nouveau  mariage  qu'a- 
près dix  mois  révolus  depuis  la  dissolution  du  mariaçe 
précédent.  V,  Venant,  Code  de  la  veuve,  Paris,  1854, 
în-8».  B. 

VEXILLAIRE.»  F.  ces  mots  dans  notre  Dtcftonnatr^ 
VEXILLE.        I      de  Biographie  et  d'Histoire. 
VilZELAY  (Église  S"e-MADELEiNE,  à).  Les  parties  les 
plus  anciennes  de  cette  église  autrefois  abbatiale,  o.-à-d. 


chœur  et  la  voûte  d'une  partie  (fe  la  nef,  et  ce  fut  aussi 
sans  doute  vers  le  même  temps  qu'on  relit  l'étage  supé- 
rieur de  la  tour  méridionale;  le  nartbex,  où  le  plein 
cintre  et  l'ogive  sont  mêlés,  porte  les  caractères  de  l'ar- 
chitecture romano-byzantine  de  la  fin  du  xii*  siècle;  les 
chapelles  absidales  et  la  galerie  du  chœur  appartiennent 
au  style  ogival  primitif.  L'église  de  Vézelay  présente  une 
façade  à  trois  portes,  qui  était  accompagnée  de  deux 
tours  :  la  tour  septentrionale  a  été  détruite  par  les  cal- 
vinistes en  1560.  Les  portes  sont  à  plein  cintre,  ainsi  que 
les  étages  inférieurs  des  tours,  décorés  de  quelques  ar- 
:atures  ;  les  voussures  se  composent  de  tores  épais,  de 
quelques  rosaces  et  de  zigzags;  dans  les  tympans  il  y 
avait  des  bas-reliefs,  qui  ont  été  brisés  pendant  la  Ré- 
volution. L'étage  supérieur  de  la  tour  méridionale  a  des 
arcades  à  lancette  décorées  de  colonnettes.  Au-dessus  de 
la  porte  centrale,  une  verrière  à  arcades  trilobées  gar- 
nies de  statues  produit  un  effet  assez  original.  Le  pignon 
a  été  reconstruit  au  xiii*  siècle.  Les  trois  portes  de  la 
façade  conduisent  dans  an  nartbex,  qu'on  désigne  encore 
par  le  nom  de  porche  des  catéchumènes^  au-dessus  du- 
quel, à  une  hauteur  de  19  met.,  règne  une  tribune  qui 
donne  sur  la  nef.  Ce  vestibule  ouvre  à  son  tour  dans  la 
nef  par  trois  portes,  dont  les  tympans  ont  conservé  leurs 
!)as-reliefs  :  ce  sont  des  sculptures  grossières  et  naïves  ; 
à  la  porte  du  milieu  on  a  représenté  le  Christ  dans  sa 
gloire  et  entouré  de  ses  Apôtres,  et,  aux  autres,  l'Adora- 
tion des  liages,  l'Annonciation,  la  Nativité,  et  les  disci- 
ples d'Emmaûs;  une  des  archivoltes  présente  un  calen- 
drier symbolique,  divisé  en  29  médaillons.  La  nef  a  123"* 
de  longueur,  dont  35  pour  le  chœur,  et  26"^  de  largeur  y 
compris  les  bas  côtés  (30*"  au  transept).  Les  arcades  de 
la  nef  sont  en  plein  cintre,  renforcées  d'arcs-doubleaux, 
les  piliers  trapus  et  peu  décorés.  La  voûte  du  chœur  est 
en  ogive,  ainsi  que  les  arcades  qui  l'entourent,  et  plus  éle- 
vée de  2*"  que  celle  de  la  nef  majeure.  Les  voûtes  des  bas 
côtés  s^appuient  sur  des  piliers  carrés  qui  ont  une  co- 
lonne engagée  sur  chacune  de  leurs  faces.  Les  piliers  du 
sanctuaire  sont  élancés,  ronds  et  monolithes.  Au-dessous 
du  chœur  est  une  crypte  que  soutiennent  12  colonnes. 
Le  bras  méridional  du  transept  se  termine  par  un  clocher 
dit  de  S^-Antoine,  et  dont  la  flèche  est  tronquée;  le  clo- 
cher qui  lui  faisait  pendant  au  Nord  a  été  détruit  par  les 
Protestants.  On  voit  encore,  à  l'extrémité  du  croisillon 
méridional,  une  salle  capitulaire  et  quelques  débris  d'au- 
tres constructions  romano-byzantines.  B. 

VIABLE,  se  dit  de  l'enfant  qui,  au  moment  de  sa  nais- 
sance, est  assez  fort  et  d'une  organisation  telle  qu'on  peut 
espérer  qu'il  vivra.  Tout  enfant  né  après  le  180*  jour  de 
gestation,  ou  môme  le  180*,  est  réputé  viable.  Il  ne 
suffit  pas  qu'un  enfant  soit  né  vivant  pour  être  viable,  il 
faut  encore  ^ue  les  organes  aient  pu  suffire  à  la  vie  pro- 
longée. La  viabilité  est  une  question  importante  de  la 
médecine  légale,  pour  les  cas  d'infanticide. 

VIADUC  (du  latin  via,  voie,  chemin,  et  ducere,  con- 
duire), pont  en  arcades,  semblable  à  un  pont-aqueduc  et 
construit  comme  lui  au-dessus  d'une  route,  d'une  rivière 
ou  d'une  vallée,  mais  servant  pour  le  passage  d'un  che- 
min de  fer.  Les  viaducs  sont  plus  cximmuns  en  Angleterre 
que  sur  le  continent.  Le  plus  grand  viaduc  du  continent 
i  été  construit  sur  le  chemin  de  fer  saxon-bavarois  pour 
franchir  la  vallée  de  Gœltzch  :  il  a  680  met  de  longueur, 


et  89  met.  de  hauteur  au-dessus  du  point  le  plus  profoiM 
de  la  vallée.  Sur  le  chemin  de  fer  de  Londres  à  Bri^ton, 
VOme-viaduc  consiste  en  37  arches  de  10  mèL  d*ouver- 
ture  chacune,  et  élevées  de  30"  au-dessus  de  la  rivière. 
Le  viaduc  du  val  Fleury,  construit  par  l'ingénieur  Payen 
sur  le  chemin  de  fer  de  Paris  k  Versailles  (rive  gauche), 
n'a  que  140™  de  longueur;  mais  son  élévation  hors  de 
terre  est  de  30"%  la  première  rangée  d'arcades  en  com- 
prenant 10,  et  la  seconde  20  ;  les  fondations  ont  12*"  de 
profondeur. 

VIAGER,  ce  qui  est  à  vie,  ce  dont  on  doit  jouir  la  vie 
durant.  Nous  en  avons  déjà  parlé  au  mot  Rente;  nous 
donnerons  ici  quelques  considérations  sur  la  moralité  des 
emprunts  en  viager;  nous  les  empruntons  à  Mollien,  «lui 
fut  ministre  du  Trésor  sous  le  l'**  Empire  français.  Il  les 
publia  en  1789,  à  propos  d'emprunts  en  viager  proposés 
par  Necker  dans  son  premier  ministère ,  et  qui  étaient 
à  10  p.  100  sur  une  tête,  9  p.  100  sur  deux  têtes,  et 
8  p.  100  sur  trois  têtes.  Mollien  représenta  que  :  —  «  Les 
emprunts  en  viager  devaient  détruire  l'esprit  de  famille^ 
porter  les  hommes  à  s'isoler  des  générations  futures;  ces 
ea)prunts,  ajoutait-il,  restreignaient  l'avenir  des  société» 
au  lieu  de  l'étendre;  leur  effet  devait  être  de  diminner  la 
somme  du  travail  dû  à  la  société  par  tous  ses  membres, 
puisqu'on  doublant  au  moins  le  revenu  que  tout  autre 
placement  pouvait  promettre,  ils  favorisaient  le  goût  de 
la  vie  oisive  ;  qu'ils  accoutumaient  l'homme  à  ne  rien 
voir  au  delà  de  soi ,  à  limiter  la  durée  du  monde  à  la 
sienne;  qu'ils  le  détournaient  du  noble  désir  de  se  sur- 
vivre à  lui-même  en  laissant  d'honorables  traces  de  son 
existence  dans  l'amélioration  des  propriétés  immobilières, 
dans  les  établissements  utiles,  dans  les  bienfaits  qu'ils 
pourraient  transmettre  aux  autres;  que  chacun  de  ceux 
qui  s'intéressaient  dans  les  emprunts  viagers  devrait 
s'interroger  sur  ce  qu'ils  seraient  devenus  si  leurs  pères 
avaient  fait  le  même  emploi  de  ce  qu'ils  possédaient  ■ 
{Mémoires,  U  I",  p.  72,  in-8°.) 

VIATEUR.     I  V.  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

VUTIQUE.  ]      Biographie  et  d^Histoire. 

VIBORD,  en  termes  de  Marine,  grosse  planche  posée 
de  champ,  qui  borde  et  embrasse  le  tillac  ou  pont  supé- 
rieur d'un  navire,  et  qui  lui  sert  de  parapet.  Le  mot  pa- 
rait dériver  de  vice-bord  (qui  tient  heu  de  bord). 

VICAIRE.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnait^  de  Bio» 
graphie  et  d^ Histoire. 

VICAIRE  DB  WAKEPiELD  (Le),  Célèbre  roman  anglais  d'OU- 
vier  Goldsmith,  publié  en  1766.  C'est  un  livre  classique 
en  Angleterre^  et  répandu  dans  toute  l'Europe.  Le  but 
en  est  éminemment  moral  :  Goldsmith  a  voulu  éublir 
qu'il  n'est  aucune  infortune  à  laquelle  ne  puisse  résister 
l'homme  de  bien,  avec  une  conscience  irréprochable  et 
une  humble  soumission  aux  décrets  de  la  Providence.  Le 
principal  personnage  du  roman,  le  docteur  Primerose, 
en  butte  à  tons  les  genres  d'épreuves  à  la  fois,  ruiné , 
malade,  captif,  privé  de  ses  enfants,  est  un  modèle  ac- 
compli de  toutes  les  vertus  sociales  et  domestiques;  pour 
ajouter  &  la  vraisemblance,  l'auteur  lui  a  donné  quel- 
ques-unes des  faiblesses  humaines,  une  petite  dose  de 
pédantisme  et  d'amour-propre  littéraire.  Déborah,  l'é- 
pouse du  docteur,  contrariant  ses  plus  sages  projets  par 
vanité  maternelle;  leurs  deux  filles,  Olivia  et  Sophie, 
qui  présentent,  par  la  diversité  de  leur  humeur,  un 
agréable  contraste  :  tout  cela  compose  un  tableau  d'inté- 
rieur que  l'on  n'a  peut-être  jamais  surpassé.  Goldsmith 
a  également  bien  réussi  dans  la  peinture  des  situations 
pathétiques,  dans  les  scènes  plaisantes,  dans  la  descrip- 
tion des  mœurs  et  des  occupations  champêtres.  L'action 
du  Vicaire  de  Wakefield  est  intéressante,  rinûigue  ha- 
bilement conduite,  et  le  dénoûment  amené  avec  art; 
une  foule  de  réflexions  Judicieuses  et  d'aperçus  ingé- 
nieux sur  le  cœur  humain  décèlent  chez  l'auteur  une 
grande  finesse  d'observation.  B. 

VICE.  V.  Vertu. 

VICE-AMIRAL,  le  second  grade  dans  la  marine  mili- 
taire en  France,  correspondant  à  celui  de  général  dfl 
division  dans  l'armée  de  terre.  Il  fut  créé  en  1669.  Les 
vice-amiraux  peuvent  commander  en  chef  les  anné»  na- 
vales; ils  remplissent  les  fonctions  de  gouverneurs  des 
colonies,  inspecteurs  généraux,  préfets  maritimes,  mem- 
bres du  Conseil  d'amirauté,  etc.  Le  vaisseau  monté  par 
un  vice-amiral  porte  le  pavillon  carré  au  grand  màt;  si 
cet  officier  n'est  qu'en  second  dans  l'armée  navale^  ou 
s'il  ne  commande  qu'une  escadre,  son  pavillon  est  hisaë 
au  màt  de  misaine. 

VICE-ROI,  celui  qui  gouverne  au  lieu  et  place  d'uc 
roi.  Les  rois  d'Espagne  ont  eu  Jadis  des  vice-rois  eo  Si- 


VIE 


,1777 


VIE 


die,  aa  Mexique,  au  Pérou  ;  il  y  eut  aussi  des  vice-rois 
dans  les  Indes  portugaises.  Ce  titre  a  été  porté  par  quel- 
ques gouverneurs  de  Tlrlande,  ainsi  que  par  le  prince 
Eugène  Beauhamais,  chargé  par  Napoléon  I''  d'adminis- 
trer ritalie. 

VICESf  en  termes  de  Droit,  défauts  qui  peuvent  causer 
un  préjudice  quelconque.  On  distingue  les  Vices  de  la 
chose  et  les  Vices  de  forme.  Les  Vices  de  forme  ne  peu- 
vent être  opposés  aux  actes  qu'on  a  confirmés,  ratifiés 
ou  exécutés  volontairement  dans  les  formes  et  à  Tépoque 
déterminées  par  la  loi  ;  ceux  d'une  donation  entre  vifs 
ne  peuvent  être  réparés  par  aucun  acte  confirmatif,  et  le 
donateur  doit  la  refaire  dans  la  forme  légale  {Code  Â'apo- 
léon,  art.  1338).  —  Les  Vices  de  construction  peuvent  dé- 
gager le  locataire  de  toute  responsabilité  en  cas  d'in- 
cendie {Ibid.,  art.  1733).  —  Les  Vices  rédhti>itoires  sont 
les  défauts  cachés  dont  l'acheteur  n*a  pu  se  convaincre 
par  lui-même  et  qui  peuvent  donner  lieu  à  une  action 
en  rescision  :  par  exemple,  dans  la  vente  d'un  cheval,  la 
pousse,  la  morve,  le  farci n,  la  courbature,  sont  des  vices 
rédhîbitoires.  V.  Lavenas,  Nouveau  manuel  des  vices 
rèdhihitoires  d*après  la  loi  du  20  mai  4858,  in-12;  Ar- 
bautl.  Des  vices  rédhibitoires,  18i0,  în-8°;  Huzard  et 
Harel,  De  la  garantie  et  des  vices  rédhibitoires^  1844, 
in-1'2;  Galisset  et  Mignon,  Nouveau  traité  des  vices  ré- 
dhibitoires, 2"  édit.,  1852,  in-8»;  Dejean,  Traité  de  Vac- 
lion  rédhibitoire  dans  le  commerce  des  animaux,  1856, 
in-12. 

VICÉSIME.  \ 

VTPOMTP  I 

vi/^-pimat'dd  f  "•  ces  mots  dans   notre 

virîi^ÎR  )  Dictionnaire  de  Biogra- 

Vlt.lliVm.  I  nhittfit  iVHûitnirg 

VICTOIRE  (La).  I  ^'***  ^'  *  utstotre. 

VICTOIRES  (Place  des).    / 

VICTORIA  (Pont),  pont  tabulaire  Jeté  sur  le  fleuve 
S*->Laurent,  à  Montréal  (Bas  Canada).  Les  deux  culées  ont 
chacune  80  met.  de  long  et  30  met.  de  large.  Les  tubes 
sont  supportés  par  24  piliers,  distants  les  uns  des  autres 
de  80  met.,  sauf  les  deux  du  milieu,  que  sépare  un 
espace  de  110  met.;  la  largeur  de  chaque  pilier  est  de 
5  met.,  excepté  celle  des  deux  piliers  du  centre,  qui  est 
de  6  met.  Les  piliers  rapprochés  des  culées  contiennent 
chacun  6,000  tonnes  de  maçonnerie  ;  ceux  qui  supportent 
le  tube  central  en  contiennent  8,000.  On  estime  la  ma- 
çonnerie totale  du  pont  à  un  poids  de  222,000  tonnes; 
les  blocs  de  pierre  qui  entrent  dans  les  piliers  pèsent  ëe 
7  à  10  tonnes.  Les  tubes  de  fer,  dont  le  poids  total  est 
de  10,400  tonnes,  3ont  liés  et  rivés  ensemble  :  chacun 
d'eux  a  5"\30  de  largeur;  6™,30  de  hauteur  à  chaque 
extrémité  et  7"\50  au  milieu.  La  dépense  a  excédé 
30  millions  de  francs.  Le  pont  Victoria  est  le  travail  le 
plus  gigantesque  qu'il  y  ait  au  monde. 

VICTOBIAT,  monnaie.  \  V,  noire  Dictionnaire  de  Bio- 

VIDAME.  S      graphie  et  d'Histoire. 

VIDIMUS,  c-àrd.  en  latin  nous  avons  vu;  ancien 
terme  de  Pratique,  par  lequel  on  certifiait  sur  un  trans- 
crit ou  copie  de  pièce  qu'il  avait  été  collationné  avec 
l'original.  Collationner  un  acte,  c'était,  en  terme  d'an- 
cionne  pratique,  le  vidimer. 

VIDRECOME  (de  l'allemand  wieder,  de  nouveau,  et 
kommen,  venir),  grand  verre  à  boire  que  l'on  se  passe, 
en  Allemagne,  à  chaque  santé  qui  se  porte,  et  que  chacun 
doit  vider  à  son  tour. 

VIE  (du  grec  bios,  ou  du  latin  vita).  Considérée  d'une 
manière  générale,  la  vie  est  l'ensemble  des  phéno- 
mènes variables  qui  s'observent  dans  chaque  être  suscep- 
tible de  formation,  de  développement,  de  décadence  et 
de  mort.  Dans  son  principe,  elle  consiste  en  une  force 
unique  on  multiple  qui  produit  ces  phénomènes  (V.  Vi- 
tal —  Principe).  On  distingue  trois  sortes  de  vies  ;  vé- 
gétative, animale,  humaine;  elles  sont  comprises  dans  le 
règne  organique.  Plusieurs  systèmes,  chez  les  Anciens  et 
chez  les  Modernes,  ont  attribué  la  vie  et  l'animalité  à 
toutes  les  parties  de  l'univers,  sans  exception;  tous  ces 
systèmes,  quelle  que  soit  leur  forme,  reviennent  au  pan- 
théisme (y.  ce  mot,  et  Amb  do  monde).  Dans  le  règne 
inorganique,  les  corps  inertes  ne  naissent  pas;  ils  se 
forment  par  agrégation;  ils  se  développent  par  juxta- 
position ;  ils  ne  meurent  pas,  à  proprement  parler.  Dans 
le  règne  organique,  les  corps  vivants  naissent  d'un  indi- 
vidu vivant,  par  scission,  par  bouture,  par  geijne,  en  un 
mot,  chez  les  végétoux  et  les  animaux,  par  génération. 
Le  développement  des  corps  animés  a  lieu  du  dedans  au 
dehors  par  intus-sasception,  par  nutrition,  par  assimila- 
tion, en  vertu  d'une  organisation  spéciale;  après  une  vie 
plu»  ou  rooisa  longu3,  vient  une  période  de  dôcadonce^ 


et  enfin   la  mort,  quand  les  organes  ne  peuvent  plus 
fonctionner. 

Dans  la  vie  hwnaine,  il  faut  considérer  :  la  vie  de  niH 
trition,  qu'elle  partage  avec  les  végétaux  et  les  animaux 
inférieurs  à  l'homme,  et  qui  comprend  les  opérations  or« 
ganiques  nécessaires  au  développement  et  à  la  conserva- 
tion de  l'individu,  comme  la  respiration,  la  nutrition,  la 
digestion,  la  circulation  du  sang,  etc.  ;\a  vie  de  relation, 
qui  met  l'animal  en  rapport  avec  les  êtres  extérieurs  ; 
I  homme  la  partage  avec  les  autres  animaux,  mais  il  s'y 
joint  d'autres  faits  qui  lui  sont  exclusivement  propres, 
et  qui  constituent  la  vie  humaine  proprement  dite,  ou  la 
vie  morale.  De  même  que  la  vie  des  végétaux  s'arrête 
devant  la  sensibilité  et  le  mouvement  volontaire,  de 
même  celle  des  brutes  s'arrête  aux  limites  de  la  parole 
et  de  la  raison. 

On  a  cherché  à  savoir  quel  était  le  siège  de  la  vie, 
comme  on  avait  fait  pour  l'&me.  C'était  la  même  ques- 
tion ;  ainsi,  Aristote  plaçait  dans  le  cœur  le  principe  de 
la  vie  et  de  l'intelligence;  d'autres  dans  la  poitrine  ou 
dans  la  tête.  Les  physiologistes  modernes  ont  recherché 
quels  sont  les  organes  par  lesquels  l'&me  reçoit  les  im- 
pressions du  corps,  et  lui  fait,  à  son  tour,  subir  sa  propre 
influence.  Dans  ce  double  rapport,  le  système  nerveux 
cérébro-spinal  joue  nécessairement  le  premier  rôle.  Selon 
M.  Flourens,  la  vie  aurait  pour  siège  un  point  de  la 
moelle  allongée,  appelé  le  nœud  vital.  V,  Aristote,  De 
plantis,  lib.  1,  cap.  1,  et  De  animA^  lib.  II,  cap.  10;  Des- 
cartes, V Homme;  Glisson,  De  naiurœ  siibstantia  ener» 
getica,  sivedevitœ  natura,  Londres,  1672;  Stahl,  TheO' 
ria  medica  vera;  Bonnet,  Contemplation  de  la  nature, 
10*  partie,  chap.  30  et  31;  Barthez,  De principio  yitali, 
Montpellier,  1773;  Bichat,  Considérations  sur  la  vie  et 
la  mort;  Legallois,  Expériences  sur  le  principe  de  la 
vie,  1812;  Tiedemann,  Traité  complet  de  physiologie  de 
Vhomme;  Alquié ,  Précis  de  la  doctrine  médicale  de 
Montpellier,  1846;  Flourens,  Recherches  sur  les  fonc" 
lions  du  système  nerveux;  Tissot,  la  Vie  dans  Vhomme, 
ses  manifestations  diverses,  etc.  R. 

viB,  en  Littérature,  est  employé  comme  synonyme  de 
biographie  :  on  dit  les  Vies  de  Plutarque,  de  Cornélius 
Népos,  de  Brantôme;  les  Vies  des  Saints,  etc. 

VIB  (Certificat  de],  certificat  qui  a  pour  objet  de  con- 
stater l'existence  a'un  individu.  Une  ordonnance  du 
6  juin  1839  et  une  circulaire  du  27  juin  suivant  ont  dé- 
terminé les  cas  dans  lesquels  les  certificats  de  vie  sont 
exigibles  et  les  formes  à  suivre  pour  leur  délivrance. 
Pour  demander  le  payement  des  arrérages  d'une  rente 
viagère,  d'une  pension  ou  de  prestations  eu  nature  éga- 
lement viagères,  il  faut  justifier  de  l'existence  soit  du 
créancier,  »oit  de  la  personne  sur  la  tête  de  laquelle  la 
rente  a  été  constituée,  lies  certificats  de  vie  sont  délivrés 
soit  parles  notaires,  soit,  gratuitement,  par  les  présidents. 
Pour  les  rentiers  et  pensionnaires  de  l'État  résidant  hors 
du  territoire  français,  ils  peuvent  s'adresser  pour  certifier 
leur  existence  aux  chancelleries  des  légations  et  des  con- 
sulats, et  aux  magistrats  du  lieu  ayant  qualité  à  cet  effet, 
mais  en  faisant  légaliser  leur  certificat  par  les  agents  di- 
plomatiques. 

VIS  FOTDRB.  La  croyance  à  une  vie  future  est  de  tous 
les  temps  et  de  tous  les  lieux;  il  n'est  pas  de  peuple  qui 
n'y  ait  cru,  pas  de  religion  qui  ne  l'ait  enseignée,  et, 
parmi  les  écoles  philosophiques,  les  plus  recomman- 
dables  se  sont  efforcées  d'en  démontrer  la  réalité.  Les 
Égyptiens  y  croyaient;  on  prétend  même  que  c'est  de 
chez  eux  que  sort  le  dogme  de  la  métempsycose  ;  cIhz 
les  Juifs,  les  Sadducéens  seuls  ont  cherché  ^  repousser 
une  croyance  générale.  Si  le  panthéisme  de  l'Inde  ne 
semble  pas  s'accorder  avec  ce  dogme,  la  religion  de  Zo- 
roastre  ouvre  aux  âmes  des  justes  le  béhescht,  et  à  celles 
des  criminels  Vabime.  Cette  croyance  est  également  ré- 
pandue chez  les  nations  les  moins  civilisées  :  les  Scandi- 
naves avaient  le  palais  d'Odin  ouvert  aux  braves,  et 
le  Niflheim  aux  l&ches  et  aux  coupables;  les  Gaulois 
croyaient  à  une  nouvelle  vie  dans  d'autres  mondes;  les 
Sauvages  eux-mêmes  parlent  du  pays  des  Amss,  Si  l'on 
remonte  aux  opinions  à  la  fois  religieuses  et  philosophi- 
ques les  plus  anciennes,  on  trouve  un  dogme  de  la  vie 
future  commun  aux  Orphiques  et  aux  Pythagoriciens. 
Platon  attribue  aux  disciples  d'Orphée  le  dogme  de  la 
chute  des  &mes  dans  les  corps,  de  la  vie  envisagée 
comme  pénitence,  et  de  la  nécessité  d'une  vie  sainte  pour 
les  fautes  autrefois  commises.  La  doctrine  de  Pythagons 
outre  la  métempsycose,  posait  Texistence  d'un  Ciel  où  les 
purs  seraient  réunis,  et  d'un  Enfer  où  les  méchants  se- 
raicut  chiitiés.  Cj>uint  k  Platon  lui-même,  sans  parler  des 

449 


VIE 


Î778 


i 


VIE 


mythes  du  Pliédon,  du  Gorgias  et  d*ftutrcs  dialogues,  on 
sait  qu'il  donna  le  premier  des  preuves  d'une  vie  future, 
c.'^parant  en  cela  la  religion  de  la  philosophie.  Celle-ci  se 
b^rne  à  démontrer  que  Tàme  ne  meurt  pas  avec  le  corps, 
tans  chercher  à  dire  quelle  sera  sa  nouvelle  vie;  une  re- 
ligion va  plus  loin.  Le  polythéisme  parlait  du  Tartare  et 
des  Champs  Élysées  \  le  christianisme  ne  s'en  tient  pas 
aux  raisonnements  du  spiritualisme.  V,  Th.-H.  Martin, 
la  Vie  future  iuivant  la  foi  9t  suivant  la  raison,  Paris, 
1858,  f  •  édit. ,  1  vol.  gr.  in-18.  R. 

VIeLE,  ancien  instrument  de  Musique.  V.  Violb. 

VIELLE,  instrument  de  Musique,  monté  de  cordes  qui 
ftont  mises  en  vibration  au  moyen  d'une  roue  enduite  de 
colophane.  Cette  roue  correspond  à  une  manivelle  placée 
extérieurement,  et  à  Taide  de  laquelle  Texécutant  lui  im- 
prime un  mouvement  plus  ou  moins  rapide.  Lorsque  la 
vielle  est  débarrassée  du  bourdon,  corde  qui  donne  tou- 
jours le  même  son  et  forme  une  espèce  de  pédale,  les 
sons  qu'on  en  tire  ont,  dans  la  partie  aigué,  de  l'ana- 
logie avec  ceux  du  violon.  Les  sons  s'obtiennent  au 
moyen  d'un  clavier ,  dont  les  touches ,  en  s'enfonçant, 
pressent  les  cordes  contre  la  roue,  qui,  par  le  mouve- 
ment que  lui  communique  la  manivelle,  fait  à  peu  près 
l'efTet  d'un  archet.  —  La  vielle  est  dérivée  de  Vorganis" 
trum  {V.  ce  mot),  qui  était  de  plus  grande  dimension. 
Au  moyen  âge,  elle  porta  les  noms  de  rote,  symphonie, 
ehifonie  ou  sifoine;  elle  ne  fierait  pas  dans  les  concerts 
d'instruments,  et  était  abandonnée  aux  aveugles  et  aux 
mendiants,  qu'on  appelait  pour  cette  raison  ckifonieus; 
ia  Chronique  rimée  de  Du  Guesclin  la  qualifie  d'instru- 
ment truant,  La  vielle  prit  faveur  à  la  cour  de  France 
au  temps  de  Henri  III,  et,  sous  Louis  XIV,  Janot  et 
La  Rose  s'en  servirent  avec  habileté.  On  l'a  de  nouveau 
délaissée  vers  la  fin  du  siècle  dernier,  et  on  ne  la  voit 
plus  père  qu'aux  mains  des  enfants  de  la  Savoie  qui 
sollicitant  la  charité  publique.  B'. 

vtcixB  oRGAFfisÉB,  nom  par  lequel  on  désigne  quel- 
quefois l'orgue  à  cylindre. 

VIENNE  (Église  S^-Étientve,  à),  Tun  des  plus*beaux 
monuments  de  l'ancienne  architecture  allemande.  On  en 
posa  les  premiers  fondements  en  4144,  et  un  architecte 
de  Cracovie,Octavien  Jatkner,  dirigea  les  travaux.  Des 
incendies,  en  1258  et  en  l!2()5,  ruinèrent  l'édifice,  sauf  la 
fkçade  occidentale  et  ses  denx  tours ,  dites  tours  des 
Païeris,  mii  subsistent  encore.  Ottocar,  roi  de  Bohème, 
ordonna  la  reconstruction  de  l'église,  mais  l'ouvrage  n'a- 
vança qu'avec  lenteur  :  Albert  II,  duc  d'Autriche,  fit 
exécuter  des  ouvrages  dont  nous  ignorons  l'importance; 
en  i326,  le  chevalier  Ulric  de  Tlrna  éleva  à  ses  frais  la 
chapelle  de  la  Croix,  placée  aujourd'hui  sous  le  vocable 
de  S^-Eugène;  sous  le  duc  Rodolphe  IV,  Georges  Hauser 
b&tit  les  voûtes  de  la  nef,  le  chemir,  et  la  base  des  deux 
clochers  du  transept.  La  grande. flèche  du  croisillon  mé^ 
ridional,  commencée  en  ls59  pair  Wenzel  de  Klosterneu- 
bourg,  élevée  par  lui  Jusqu'aux  deux  tiers  de  sa  hauteur, 
poursuivie  par  Haas  PrachaUet  de  i404  à  14^,  fut  enfin 
terminée  en  1433  par  Ant.  Pilgram.  En  1450,  on  char- 
gea Jean  Buschbaum  d'édifier  sur  le  même  plan  et  avec 
la  môme  magnificence  la  tour  déjà  fondée  du  croisillon 
septentrional  ;  mais  ce  travail  fut  bientôt  abandonné,  et 
il  n'a  Jamais  été  repris  :  seulement,  au-dessus  de  cette  tour 
haute  de  63  met.,  on  a  bâti  un  petit  clocheton  en  1579. 

L'église  métropolitaine  de  Vienne  est  en  forme  de 
croix  latine,  et  a  les  dimensions  suivantes  :  longueur  to- 
tale hors  oeuvre,  105'",25;  longueur  du  transept,  70  met.  ; 
largeur  des  neft,  3««,30;  largeur  de  la  façade,  44'",60. 
La  charpente  qui  la  couvre,  et  qu'on  nomme  la  Forêt, 
est  composée  de  ^,889  pièces  de  bois  ;  elle  n'a  pas  moins  de 
33  met.  d'élévation  au-dessus  de  la  nef,  et  de  20  met.  au- 
dessus  du  chœur,  et  supporte  une  couverture  en  tuiles 
vernissées,  blanches,  rouges  et  vertes,  qui  forment  des 
dessins  géométriques  et  encadrent  l'aigle  d'Autriche.  La 
jrande  porte  d'entrée,  dite  Porte  et»  Géant,  entre  les 
tours  dcJs  Païens ,  offine  tous  ies  caractère?  du  style  ro- 
mano-byzantin  en  usage  au  xu*  siècle  :  elle  est  ornée 
d'une  statue  du  Christ,  qu'entourent  deux  Anges  et  les 
Apôtres,  et  surmontée  d'une  très-longue  fenêtre  ogivale, 
puis  d'une  galerie  qui  Joint  les  deux  tours,  hautes  de 
00  met.  Aux  extrémités  du  transept  sont  de  beaux  porches, 
sculptés  au  XIV*  siècle  par  Henri  Kumpf  et  Christophe 
Hom  de  Dûnkelsptll  ;  on  y  a  représenté ,  entre  autres 
sujets,  la  mort  de  la  S^*  Vierge  et  son  couronnement 
dans  le  ciel.  Sur  le  mur  septentrional  on  remarque  une 
chaire  de  pierre,  d'où  le  moine  franciscain  Jean  Capis- 
tran  prêcha  la  croisade  contre  les  Turcs  1451.  Mais 
ce  qui  attire  surtout  l'attention  à  l'extérieur  de  l'église 


S^-Étienne,  c'est  la  tour  du  Sud  ;  la  pointe  de  sa  flécha 
hardie,  qui  inclinait  sensiblement  vers  le  Nord,  par  suite 
d'un  tremblement  de  terre  ou  du  tassement  des  maté- 
riaux, a  été  enlevée  en  1839,  et  rétablie  en  1843.  Cette 
flèche,  au  sommet  de  laquelle  on  monte  par  nn  escalier 
de  553  marches,  atteint  une  hauteur  de  135  met.  Les  clo- 
ches sont  placées  dans  la  tour  :  la  plus  grosse,  qpii  pèse 
plus  de  17,000  kilog.,  a  été  faite,  en  1710,  avec  180  ca- 
nons pris  aux  Turcs. 

L'intérieur  de  la  cathédrale  de  Vienne  est  à  trois  nefs, 
d'égale  hauteur  (27«,20).  Il  est  éclairé  par  31  grandes 
fenêtres,  et  soutenu  par  18  piliers  isolés  et  18  pilastres. 
Les  piliers  sont  ornés  chacun  de  six  statues,  dont  quatre 
suivant  deux  diagonales  et  à  la  même  hauteur,  les  autres 
sur  les  faces  et  plus  élevées.  Tous  les  autels  des  cha- 
pelles sont  en  marbre,  et  quelques-uns  surmontés  de 
tableaux  de  maîtres.  Le  chœur,  où  l'on  compte  86  stalles 
sculptées,  est  divisé  en  trois  parties  :  un  chœur  principal 
et  deux  chœurs  latéraux.  Dans  le  chœur  dit  de  la  Pas- 
sion, on  voit  le  sarcophage  en  marbre  de  l'empereur 
Frédéric  IV,  exécuté  par  Lerch ,  artiste  de  Strasbourg  : 
il  est  décoré  de  240  figures  en  relief.  La  chapelle  de 
S**-Catherloe  contient  les  fonts  baptismaux,  œuvre  char- 
mante de  la  fin  du  xv*  siècle,  et  un  crudfix  avec  les 
12  Apôtres,  sculptés  en  marbre  par  Lerch  en  1513.  Dans 
la  chapelle  de  S*-Eugène,  que  ferme  une  grille  en  fer  du 
XVIII*  siècle ,  d'une  richesse  inouïe ,  se  trouve  le  monu- 
ment doré  du  prince  Eugène  de  Savoie.  La  chaire  en 
pierre,  terminée  en  1430,  est  un  chef-d'œuvre,  bien 
qu'on  y  sente  un  trop  grand  amour  du  fouillé  et  de  la 
recherche  :  la  base  est  composée  de  colonnettes,  de  con- 
tre-forts et  d'arcs-boutants,  de  pinacles,  de  feuilles  fine- 
ment découpées,  et  de  niches  où  sont  logées  de  gracieuses 
statuettes;  le  corps  offre  les  bustes  des  quatre  grands 
docteurs  de  l'Église*  latine,  entourés  de  moulures,  de 
feuillages  et  de  fleurons  variés  à  l'infini  ;  le  couronne- 
ment, qui  est  en  bois,  est  couvert  de  bas-relieis  repré- 
sentant les  sept  Sacrements,  et  terminé  par  une  pyramide 
chargée  de  feuilles  épanouies  ;  sous  la  rampe  de  l'e&ca- 
lier,  un  personnage ,  qu'on  croit  être  Ant.  Pilgram,  se 
penche  par  une  espèce  de  fenêtre  carrée.  Le  bnnet  d*or- 
gues  est  encore  une  œuvre  digne  d'être  mentionnée. 
Sous  l'église  de  S^-Étienne  est  une  crypte,  où  les  mcm* 
bres  de  la  famille  impériale  ont  été  ensevelis  du  xv*  au 
xvii*  siècle.  B. 

VIENNE  (Église  S*-Madrice,  à),  dans  le  Dauphiné.  Cette 
église  cathédrale  fut  fondée,  en  1052,  sur  l'emplacement 
d'un  édifice  antérieur  ;  les  travaux,  interrompus  en  1080, 
furent  repris  en  1120,  mais,  par  défaut  de  ressources  et 
par  suite  des  guerres  du  moyen  &ge,  le  monument  ne 
reçut  son  complet  achèvement  qu'en  1533.  n  eut  beau- 
coup à  souffrir  des  dévastations  des  Calvinistes  en  1562 
et  en  1567.  La  foçade  occidentale,  large  de  38  met.,  a  une 
élévation  de  30  met.,  et  est  couronnée  de  chaque  côté  par 
une  tour  carrée,  qui  la  domine  de  10  met.;  elle  est  érigée 
sur  un  parvis  où  l'on  monte  par  28  degrés.  Cette  façade 
appartient  au  gothique  fleuri  ;  les  voussures  des  portes 
sont  remplies  de  charmantes  statues.  Des  deux  côtés  des 
portes  latérales,  on  remarque  des  colonnes  antiques  en 
marbre  blanc,  enlevées  sans  doute  à  des  monuments  ro- 
mains. Le  portail  de  gauche  est  orné  d'un  zodiaque  à  l'in- 
térieur. L'intérieur  de  la  cathédrale  de  Vienne  a  la  forme 
d'une  basilique  terminée  par  trois  absides;  sa  longueur 
est  de  96  met.,  et  sa  largeur  de  31  met.  (dont  11  pour  h 
nef  majeure,  8  pour  les  deux  bas  côtés,  12  pour  les  cha- 
pelles latérales)  ;  la  voûte  de  la  grande  nef  a  27  met. 
d'élévation.  Les  piliers  de  la  nef  sont  décorés  de  pilastres 
cannelés  et  rudentés  ;  des  colonnes  eng^es  soutiennent 
les  retombées  des  arcades,  et  les  chapiteaux  des  uns  vt 
des  autres  sont  historiés  et  de  style  byzantin.  Les  arcades 
en  ogive  sont  entourées  de  billettes.  Une  galerie  percée 
d'arcades  ogivales  règne  autour  de  la  nef  et  du  chœur  : 
les  arcades  autour  du  chœur  reposent  sur  des  colon  nettes 
gothiques,  tandis  que  dans  le  reste  de  la  galerie  les  co- 
lonnes sont  remplacées  par  des  nervures.  Dans  le  chœur, 
au-dessus  et  au-dessous  de  la  galerie,  il  y  a  un  cordon 
d'ornements  rouges,  avec  frise  composée  de  palmettes, 
d'arabesques,  de  figures  d'hommes  et  d'animaux  ;  le  tout 
est  d'un  dessin  grossier,  mais  d'une  bonne  exécution.  La 
cathédrale  de  Vienne  renferme  un  beau  mausolée  du  car- 
dinal Monttaorin,  mort  en  1723. 

VIERGE  (Im^  de  la  S^*).  L'historien  Nicépbora 
(n.  23)  a  tracé  4e  la  S^*  Vierge  un  portrait  emprunté  k 
S^  Epiphane  :  d'une  tidlle  moyenne,  dit-il ,  elle  avait  le 
teint  couleur  de  froment,  les  cheveux  blonds,  les  yeux 
vifs,  la  prunelle  tirant  sur  le  jaune  et  à  peu  près  de  la 


VIL 


1773 


VIN 


couleur  d'uno  olivOi  les  sourcils  d*an  beau  noir  et  bien  ' 
arquési  le  nez  ass6z  long,  les  lèvres  vermeilles,  la  figure 
ovale,  les  mains  et  les  doigts  longs.  On  ne  saurait  dire 
li  ce  portrait  est  ressemblant,  non  plus  que  ceux  qui  ont 
été  peints  dans  les  Catacombes  de  Home,  où  la  Vierge  est 
représentée  assise,  voilée,  avec  les  traits  de  la  Jeunesse, 
de  la  modestie  et  de  la  pureté,  tenant  TEnfant-Dleu  sur 
ses  genoux,  tantôt  en  pied,  tantôt  en  demi-figure,  tou- 
lours  d*une  manière  qui  parait  conforme  à  un  type  hié- 
ratique. Des  sarcopbages  et  des  verres  ])eint8  nous  la 
montrent  encore  dans  Tattitude  de  la  prière,  ou  entre 
deux  arbres,  ou  accompagnée  de  S^  Pierre  et  de  S*  Paul  ; 
ouvent  on  voit  des  colombes  auprès  de  sa  tète.  L*Église 
ipplique  à  la  Vierge  ces  paroles  de  Tamante  du  Can- 
iique  des  cantiques  :  nigra  sum  (je  suis  noire),  paroles 
tjue  Ton  entend  d*ordînaire  dans  un  sens  mystique.  Ce- 
pendant on  les  a  prises  à  la  lettre,  et  il  est  des  pays  où 
l'on  vénère  des  Vierges  noires  :  la  plupart  de  ces  statues 
sont  en  bois,  et  en  vieillissant  le  bois  devient  naturelle- 
ment très-brun  ;  quant  à  celles  en  pierre,  la  Couleur  noire 
leur  est  commune  avec  un  grand  nombre  de  statues  de. 
Saints,  et  elle  provient  de  quelque  vernis.  Il  en  est  qui 
ne  sont  autre  chose  que  des  statues  en  basalte,  rapportées 
d'Orient  à  l'époque  des  Croisades.  V.  Gumppenberg,  i4t/a« 
Marianus,  sive  de  tmaginibtis  Deiparœ,  1657,  in-i8; 
Bombelli,  RaccoUa  délie  imagine  délia  beata  Maria 
Virgme,  Rome,  1792,  4  vol.  în-8*  ;  A.  Égron,  Le  culte  de 
la  S^*  Vierge  dans  toute  la  catholicité,  Paris,  1842,  in-8<^. 

VIGIE  (du  latin  vigilare,  veiller), en  termes  de  Ma- 
rine, matelot  qui  est  en  observation  pendant  le  jour  au 
haut  des  mâts  d'un  navire,  pour  signaler  l'apparition 
d'autres  b&timents  ou  de  la  terre.  On  dit  aussi  :  être  en 
vigie j  pour  dire  veiller*  Sur  les  côtes ,  on  nomme  Vigie 
le  poste  de  guetteurs  chargés  de  signaler  les  bâtiments 
aperçus  au  large.  —  Les  marins  appellent  encore  vigies 
de  petits  écueils  à  fleur  d'eau. 

VIGILE.  (  V.  ces  mota  dans  notre  Dictionnaire 

VIGINTÏVIRS.  J      de  Biographie  et  d'Histoire. 

VIGNE,  terme  de  Fortification.  V.  Galerie. 

Vigne,  nom  oui  a  été  appliqué  aux  maisons  de  plai- 
sance voisines  des  villes  en  Italie. 

VIGNETTE,  petite  estampe  qu*on  met  comme  orne- 
ment dans  les  livres.  Le  nom  vient  de  ce  qne  c'était ,  dans 
l'origine,  un  ouvrage  en  miniature  qui  représentait  des 
feuilles  de  vigne.  Par  extension,  on  a  appelé  vignettes 
toutes  les  estampes  des  livres  illustrés. 

tnr  ATNc  *  (  V.  ces  mots  dans  notre  Dietumnaire  de 
VILLA.      S      Biograptàe  et  d'Histoire, 

VILLA  ALBARi,  uno  des  plus  remarquables  villas  de 
Rome,  située  hors  de  la  porte  Salaria.  Le  cardinal  Ales- 
landro  Albani  la  fit  bâtir,  au  milieu  du  xvlti*  siècle,  par 
l'architecte  Carlo  Marchioni.  Elle  contient  une  riche  col- 
lection d'antiquités,  à  l'organisation  de  laquelle  Winckel- 
mann  prit  une  grande  part.  On  y  remarque  :  la  Cane- 
phore,  chef-d'œuvre  de  Criton  et  de  Critolaas  ;  un  Mercure, 
par  Etienne,  élève  de  Praxitèle  ;  le  bas-relief  d'ÂntinoUs, 
découvert  à  la  villa  d'Adrien  ;  ufl  Apollon  Sauroctone,  le 
Repos  d'Hercule,  etc. 

vfLLA  D'ADRIEN ,  vîlla  bètie  près  de  Tibnr  (Tivoli  )  par 
Tcmpereur  Adrien,  au  retour  de  ses  voyages  dans  les 
provinces.  Elle  avait  un  périmètre  de  8  à  10  milles,  et 
embrassait  un  certain  nombre  de  monuments  imités  de 
ceux  qui  avaient  le  plus  vivement  attiré  l'attention  du 
prince.  Il  n'existe  aujourd'hui  aucune  trace  du  Lycée,  de 
l'Académie  ni  du  Prytanée  d'Athènes;  mais  on  croit  en- 
core reconnaître  une  muraille  du  Pœcile,  quelques  restes 
du  Sérapéum  de  Canope,  le  prosceniuqn  et  les  gradins 
d*un  théâtre,  la  cella  d'un  temple  de  Vénus,  des  bains, 
un  circjne  ou  naumachie,  une  caserne  de  Prétoriens,  un 
palais  impérial,  le  portique  d*un  Nymphée,  une  vallée 
(le  Tempe  avec  un  ruisseau  pour  Pénée,  etc.  La  villa 
d'Adrien  parait  avoir  été  ruinée  au  temps  de  Totila,  roi 
des  Ostrogoths  t  à  diverses  époques,  les  Romains  y  sont 
venus  prendre  des  matériaux  pour  leurs  constructions,  et 
on  efi  a  tiré  aoasi  beaucoup  de  richesses  artistiques  pour 
les  musées  de  l'Europe.  B. 

VILLANCICO,  espèce  d'ode  sacrée  que  les  Espagnols 
chantent  dans  les  églises  à  la  fête  de  NoôL 

VILLANELLE  (de  l'italien  villano,  paysan),  ancienne 
pièce  de  poésie  pastorale,  originaire  de  ritalie  ou  de  l'Es- 
pagne, et  composée  de  plusieurs  couplets  de  3  vers  avec 
reirain  ;  tiû  quatrain  la  terminait.  La  villanelle  fut  mise 
à  la  mode  en  France  au  xvi*  siècle  par  Grevin  ;  Passerai 
et  Honoré  dtirfé  y  excellèrent.  En  toici  un  exemple  de 
Fusserat  i 


J'ai  pcrda  ma  tourterelle: 
Est-ce  point  elle  que  J'oif 
Je  reux  aller  après  elle. 

Tu  regrettes  ta  femelle  i 
Hëlaal  aussi  fais-Je,  moi. 
J*ai  perdu  ma  tourterelle. 

SI  ton  amour  est  fldble  «  * 
De  mfime  est  ferme  ma  foi; 
Je  yeux  aller  après  elle. 

Ta  plainte  se  renouTclle  : 
Toujours  plaindre  Je  me  doi , 
J*al  perdu  ma  tourterelle. 

Kn  ne  Toyant  plus  la  belle. 
Plus  rien  de  beau  Je  ne  vol  : 
Je  veux  aller  après  elle. 

Mort,  que  tant  de  fols  J'appelle, 
Prends  ce  qui  se  donne  II  toi  ! 
J*al  perdu  ma  tourterelle, 
Je  yeux  aller  après  elle. 


VILLE,  asseml)lage  considérable  de  maisons  réunies 
par  des  rues  et  quelquefois 'entourées  de  murs.  Le  mot 
est  dérivé  du  latin  vUla  (ferme,  métairie),  parce  que' 
beaucoup  de  villes  modernes  durent  leur  origine  à  des 
agglomérations  de  maisons  autour  d'une  ferme. 

VILLÉGIATURE ,  mot  emprunté  à  la  langue  italienne, 
où  il  signifie  une  partie  de  plaisir  que  l'on  fait  dans  uno 
villa.  Il  nous  sert  à  désigner  le  séjour  que  les  personnes 
aisées  font  à  la  campagne  pendant  la  belle  saison. 

VILLE^AGE ,  ensemble  des  services  que  devaient  au- 
trefois les  vilains  au  seigneur. 

VILLICUS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio' 
graphie  et  d^Bistoire. 

VIMAIRE  (du  latin  vts  major,  force  majeure),  en 
termes  d'Eaux  et  Forêts,  dégât  causé  par  une  force  ma- 
jeure, telle  au'un  ouragan ,  la  foudre,  etc. 

VINAGE.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  W^ 
graphie  et  d^Histoire. 

VINAIÇRETTE.  V.  Bbooettf. 

VINAYAS,  nom  donné  aux  livres  bouddhistes  qm 
traitent  des  préceptes,  des  règles  et  des  ordonnances. 

VINCENNE3  (Château  de).  Ce  château,  commencé  par 
Philippe  de  Valois  en  1337,  et  achevé  seulement  sous 
Charles  V,  a  reçu,  depuis,  plusieurs  additions  et  modi- 
fications. En  1560,  Catherine  de  Médicis  fit  dresser  les 
f)lans  et  Jeter  les  fondations  des  Pavillons  du  Roi  et  de 
a  Reine,  qui  ne  furent  construits  et  terminés  que  soui 
Louis  XIII,  de  1610  à  1614.  En  1662,  Louis  XIV  réunit 
les  deux  extrémités  de  ces  pavillons  par  deux  galeries 
couvertes,  dont  l'une  a  été  démolie  en  1843  et  l'autre  est 
cachée  actuellement  par  des  casemates.  Tout  le  château 
formait  alors,  comme  aujourd'hui,  un  parallélogramme 
rectangle  de  382  met.  sur  224  ;  mais  il  était  flanqué  de 
neuf  tours  adjacentes  au  mur  d'enceinte  :  ces  tours,  qui 
avaient  31'",60  de  hauteur,  ont  été,  de  1808  à  1810,  ra- 
sées au  niveau  du  mur,  et  servent  do  bastions.  Napo- 
léon P'  a  fait  également  démolir  plusieurs  constructions 
qui  encombraient  les  cours.  Sous  Louis-Philippe  on  a 
construit  des  casemates  pour  la  garnison,  et  on  a  annexé, 
du  côté  de  l'Est,  un  fort  entièrement  neuf  à  l'ancienne 
forteresse.  Avant  la  Révolution,  le  château  de  Vincennes 
fut  une  résidence  royale  et  une  prison  d'État  :  parmi  les 
personnages  qui  y  furent  renfermés,  on  remarque  Henri 
de  Navarre  en  1574,  le  prince  deCondé  en  1617,  d'Or- 
nano  en  1626,  le  duc  de  Beaufort  en  1643,  les  princes  de 
Condé  et  de  Conti  et  le  duc  de  Longueville  en  1650,  le 
cardinal  de  Retz  en  1652,  Fouquet  en  1661,  H'"*'  Guyon 
en  1695,  Latude  et  Diderot  en  1749,  Mirabeau  en  1777. 
On  établit  à  Vincennes  une  fabrique  de  porcelaine  en 
1740,  une  école  militaire  en  1751,  une  manufacture 
d'armes  en  1757.  On  y  jugea  le  duc  d'Enghien  en  1804* 
Aujourd'hui  Vincennes  est  une  forteresse,  une  caserne, 
un  arsenal,  et  une  école  de  tir.  —  Quand  on  a  franchi  la 
porte  d'entrée  et  passé  entre  une  double  ligne  de  bâti- 
ments affectés  à  divers  services,  on  entre  dans  la  grande 
Cour,  où  se  trouvent,  à  gauche,  la  salle  d'armes,  la  ch»- 
peiie,  le  pavillon  de  la  Reine,  et,  â  droite,  le  donjon  et  le 
pavillon  du  Roi.  La  salle  dWmes,  construite  en  1810  f 
comprend  un  rez-de-chaussée  destiné  k  remiser  le  maf 
fériel  d'artillerie,  un  1*'  étage  où  il  v  a  des  armes  en 
Quantité  suffisante  pour  armer  120,000  hommes,  et  un 
V  étage  réservé  &  la  sellerie.  La  chapelle,  fondée  en  1379| 
achevée  en  1552,  est  d'un  beau  style  ogival,  très-simple 
à  l'intérieur,  richement  ornée  au  dehors  »  on  y  admli« 


VIO 


1780 


VIO 


sept  verrières  exéculces  par  Jean  Cousin  d'apivs  HapIiEùH  ; 
«;n  monunmnt  qu'on  y  avait  élevé  au  duc  d*Knghien , 
(►îuvre  médiocre  de  Deseine,  a  été  transporté  dans  une 
ancienne  sacristie.  Le  pavillon  du  Roi  est  converti  en 
V  aseme,  et  celui  de  la  Reine  affecté  au  logement  du  gou- 
verneur et  à  divers  services.  Le  donjon,  entouré  autrefois 
d'un  fossé  indépendant  de  celui  du  château,  est  une  tour 
carrée,  de  52  met.  de  hauteur,  avec  une  tourelle  en  saillie 
à  chaque  angle.  Un  escalier  de  237  marches  en  spirale  , 
fl'une  construction  hardie,  conduit  à  la  plate-forme ,  à 
Tun  des  angles  de  laquelle  s'élève  une  guérite  en  pierre 
d'une  grande  délicatesse.  Le  donjon  est  divisé  en  cinq 
étages;  chacun  d'eux  présente  une  chambre  carrée,  dont 
la  voûte  est  soutenue  par  un  fort  pilier  central,  et  des 
chambres  d'angle,  pourvues  comme  elle  d'une  cheminée. 
Quand  Vincennes  était  résidence  royale,  le  rez-de-chaussée 
du  donjon  servaitaux  cuisines  ;  le  roi  occupait  le  l*""  étage, 
la  reine  et  les  enfants  le  2*,  les  frères  et  proches  parents 
du  roi  le  3«,  les  officiers  de  service  et  les  domestiques  le 
4«  et  le  5«.  Au  3*  étage  est  une  galerie  extérieure  en  saillie 
qui  fait  le  tour  du  donjon. 

VINCENT  DE  PAUL  (Église  Sahst-),  à  Paris.  V.  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

yrîïïHK^e    /  y*  ces  mots  dans  notre  Dictionnaire  de 

vÎnDICTA;  s      ^'^^^-^P^'  ^*  d^Histoire. 

VINDICTE  PUBLIQUE ,  poursuite  et  punition  des 
frimes  et  délits.  En  France ,  elle  n'appartient  qu'au  Mi- 
nistère public. 

VINEA,  appareil  de  siège.  V,  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

VINGTAIN  (  Droit  de),  le  môme  que  le  droit  de  Cfmm- 
part.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biographie 
et  d'Histoire, 

VINGT- ET-UN,  jeu  de  cartes  qui  se  joue  entre  un 
I  anquier  et  des  pontes.  On  se  sert  d'un  ou  de  plusieurs 
j  nix,  selon  le  nombre  des  joueurs.  Les  figures  valent  10; 
los  autres  cartes  valent  le  point  qu'elles  indiquent,  sauf 
l'as,  qui  compte  indifféremment  pour  11  ou  pour.l,  sui- 
vant l'intérêt  du  joueur.  Les  pontes  ayant  fait  leur  mise,  le 
banquier  donne  une  carte  à  chacun  d'eux,  en  commençant 
par  la  droite,  et  à  lui-même,  puis  une  seconde.  Si  l'un 
des  joueurs  «.dans  ses  deux  cartes  le  point  de  21,  les 
autres  payent;  tous  les  joueurs  abattent  leur  ]eu  comme 
lui ,  le  banquier  ramasse  les  enjeux  de  ceux  dont  le  point 
est  inférieur  au  sien,  et  perd  avec  ceux  qui  ont  plus.  Si, 
après  la  distribution  des  cartes,  personne  n'a  21,  le  ban- 
quier offre  une  carte  à  qui  la  veut ,  en  prend  une  lui- 
môme  s'il  le  juge  à  propos,  puis  on  abat ,  et  l'on  procède 
comme  précédemment;  le  joueur  à  qui  la  3*  carte  a  fait 
dépasser  le  point  de  21  créi;«,  c.-à-d.  perd.  Il  y  a,  d'ail- 
leurs, plusieurs  manières  de  jouer  ce  jeu.  Ainsi,  dans  le 
Macao  on  ne  distribue  qu'une  carte  à  chaque  joueur 
(les  fi^rures  et  les  dix  ne  comptent  pas),  et  c'est  le  point 
de  neuf  qui  gagne. 

VINS  (Halle  aux),  à  Paris.  V,  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

VIOLE,  en  italien  Violât  nom  que  portait  autrefois 
toute  une  famille  d'instruments  de  musique  à  cordes  et 
à  archet.  Le  mot  Vièle,  employé  par  les  anciens  auteurs, 
désignait  une  viole.  La  caisse  de  la  viole  était  d'abord 
conique  et  bombée  ;  elle  devint  insensiblement  ovale  ;  elle 
avait  deux  ouïes,  en  forme  d'oreille,  au-dessous  des  cordes. 
Le  manche,  court  et  large,  se  terminait  souvent  par  une 
espèce  de  trèfle  orné,  semblable  à  une  violette^  et  qui 
aura  pu  motiver  le  nom  de  l'instrument.  L'archet,  long 
et  léger,  ne  portait  qu'un  fil  d'archal.  Plus  tard,  la  viole 
allongea  son  manche,  aplatit  sa  caisse  et  en  échancra  les 
flancs.  On  n'avait  primitivement  distingué  que  deux 
violes  :  la  nibebbe,  montée  de  deux  cordes  accordées  à  la 
quinte;  et  la  tn'ote  proprement  dite,  qui  en  avait  cinq, 
accordées  do  différentes  manières.  Dans  la  suite,  on  re- 
connut plusieurs  espèces  de  violes,  qui  tirèrent  leur  déno- 
mination de  l'étendue  relative  et  du  diapason  de  chacune 
d'elles  :  1"  la  Violette,  ou  le  Pardessus  de  viole,  petit 
instrument  dont  les  dames  surtout  aimaient  à  jouer  ;  z'*  le 
Dessus  de  viole;  3»  la  Haute-contre  de  viole,  sonnant  un 
ton  plus  bas  que  le  Dessus;  A^  la  Taille  de  viole,  une 
quarte  au-dessous  de  la  Haute-contre  ;  5°  la  Basse  de  viole^ 
accordée  une  quarte  plus  bas  que  la  Taille,  et  appelée 
par  les  Italiens  viola  da  gamba  (viole  de  jambe),  parce 
que,  pour  en  jouer,  on  la  tenait  entre  les  jambes,  non  à 
l'épaule  gauche  comme  la  viola  di  braccio;  il  y  en  avait 
à  cinq  et  à  six  cordes  ;  6*»  le  Violons,  instrument  de  très- 
grande  dimension,  monté  de  six  cordes,  et  qu'on  peut 
appeler  conlre-bar:ss  de  viole;  on  le  voit  dans  1:  tableau 


des  Noces  de  Cana  par  Paul  Véronèse.  VAccordo  ou  Ae» 
cord  (  V.  ce  mot  )  était  une  variété  de  violone.  En  Italie, 
la  Taille  et  la  Haute-contre  ne  faisaient  qu'un  même  in- 
strument à  la  quinte  de  la  Basse,  dont  le  Dessus  ren- 
dait l'octave.  On  appelait  Viole  bâtarde  une  viole  qui 
ne  différait  de  la  Basse  de  viole  que  par  sa;  caisse, 
plus  longue  et  plus  étroite.  J.-S.  Bach  imagina'la  Viole 
pompeuse,  qui  s'accordait  en  quinte,  comme  le  violon- 
cefle,  avec  une  cinquième  corde  à  l'aigu.  —  Tous  ces 
instruments  ont  disparu:  la  Basse  de  viole  a  été  rem* 
placée  par  le  yioloncelle,  et  le  Violone  par  la  coutrebasso^ 
Il  n'est  resté  que  deux  violes ,  celle  qu'on  a  nommée  de« 
puis  Quinte  et  Alto  (  F.  ce  mot)  et  la  Viole  d'amour. 
L'ancienne  viole  d'amour  était  montée  de  quatre  cordes 
en  boyau  attachées  comme  aux  autres  instruments,  et 
de  quatre  cordes  en  laiton,  passant  sous  la  touche,  accor- 
dées à  l'unisson  avec  les  précédentes,  et  rendant  des  sons 
harmoniques  quand  celles-ci  étaient  touchées  k  vide  :  la 
viole  d'amour  actuelle,  montée  de  sept  cordes,  dont  la 
plus  grave  sonne  le  sol  de  la  1**  ligne  en  clef  de  fa,  et 
les  autres  ut,  sol^  ut,  mi,  sol,  ut,  a  des  sons  pleins  de 
douceur  et  de  charme  ;  elle  sert  à  accompagner  la  ro- 
mance de  Raoul  au  1"  acte  des  Huguenots.  On  ne  lai 
donne  quelquefois  que  6  cordes,  en  supprimant  la  plut 
grave.  B. 

VIOLE  (Basse  de) ,  un  des  jeux  à  bouche  de  Torgue. 
C'est  un  huit-pieds,  mais  de  même  taille  que  le  prestant 
à  l'unisson  duquel  il  parle,  car  on  le  fait  octavier.  Ce  jeu, 
dont  l'usage  est  très-peu  répandu  en  France,  est  fait  en 
étain  ;  il  occupe  toute  l'étendue  du  clavier,  et  s'emploie 
au  grand  orgue  ou  au  positif.  En  ajoutant  une  autre  ran- 
gée de  tuyaux  parlant  une  octave  plus  haut  sur  la  pre- 
mière rangée,  on  peut  faire  de  la  Basse  de  viole  un  jeu 
composé.  F.  C. 

VIOLENCE,  contrainte  physique  ou  morale  exercée 
sur  une  personne  pour  l'obliger  à  un  acte  quelconque. 
En  Droit,  elle  donne  lieu  à  une  action  en  rescision  des 
contrats,  obligations  et  transactions  de  toute  sorte. 

VIOLETTE ,  instrument  de  musique.  V.  Viole. 

VIOLETTE  (La),  ou  GERARD  DE  Nevers,  Ib  pIus  agréa- 
ble et  le  plus  parfait  de  nos  romans  de  chevalerie.  En 
voici  le  sujet  :  —  Le  roi  Louis  tenant  une  cour  plénière 
au  Pont-de-r Arche,  Gérard,  comte  de  Nevers,  y  chante 
la  beauté  et  la  fidélité  de  sa  dame;  Liziart,  comte  de  Fo- 
rest,  fait  le^pari  de  séduire  la  belle  Euriante,  et  le  défi 
est  accepté.  Liziart  se  rend  à  Nevers,  reçoit  l'hospitalité 
chez  le  père  d'Euriante,  et  fait  sa  déclaration  :  ses  sou- 
pirs, son  éloquence,  son  désespoir  ne  produisent  aucun 
effet.  Mais,  à  l'aide  d'une  vieille  qui  ne  pense  qu*à  mal, 
il  peut  apercevoir  Euriante  au  bain  ;  il  lui  voit  sur  le 
corps  un  signe,  une  violette,  et  retourne  à  la  cour,  où  il 
déclare  ce  qu'il  a  vu,  comme  preuve  de  son  succès.  Eu- 
riante est  déclarée  infidèle,  malgré  son  innocence,  et  le 
comté  de  Nevers,  enjeu  du  pari,  devient  la  propriété  de 
Liziart.  Gérard  emmène  Euriante  dans  une  forêt  :  il  va  lui 
trancher  la  tète,  quand  arrive  un  énorme  serpent  ;  il  l'at- 
taque et  le  tue,  puis  il  abandonne  Euriante.  Cependant 
il  veut  revoir  son  ancien  domaine;  là  il  entend  une  con- 
versation de  Liziart  et  de  la  vieille,  et  reconnaît  Tinno- 
ccnce  d'Euriante  :  il  se  met  aussitôt  à  sa  recherche.  Il 
délivre  une  châtelaine,  la  belle  Aigline,  des  persécutions 
du  cruel  Galerant ,  s'éloigne  sans  vouloir  l'épouser,  fait 
une  maladie  à  Ch&lons,  p\iis  arrive  à  Cologne.  Le  lende- 
main, la  ville  est  assaillie  par  les  Saxons  ;  Gérard  y  fait 
tant  de  prouesses ,  que  les  infidèles  sont  repoussa.  Sa 
vaillance,  sa  courtoisie,  sa  bonne  mine,  lui  gagnent  too< 
les  cœurs;  il  plaît  à  Aiglantine,  fille  du  duc  de  Cologne, 
laquelle  lui  fait  boire  un  philtre  au  moyen  duquel  il  ou- 
blie Euriante.  Pendant  ce  temps,  celle-ci  est  accablée 
d'infortunes  :  une  alouette  lui  enlève  l'anneau  qu'elle 
avait  reçu  de  Gérard  ;  elle  repousse  l'amour  d'un  cheva- 
lier nommé  Méliatir,  qui  tue  près  d'elle,  en  croyant  b 
frapper  pendant  la  nuit,  une  autre  femme,  et  qui  l'accuse 
ensuite  d'avoir  commis  ce  crime.  Gérard  est  sur  le  point 
d'épouser  Aiglantine  :  mais,  dans  une  partie  de  chasse» 
son  épervier  lui  apporte  une  alouette  qui  avait  au  coa 
un  anneau;  il  reconniUt  Tanneau  d'Euriante,  et,  sans 
revoir  Aiglantine,  il  s'éloigne  de  Cologne  pour  chercher 
son  amie.  Il  délivre  en  route  une  belle  daœe,  et  la  rend 
à  son  époux.  Puis  il  tue  en  combat  singaller  le  géant 
Brudigolans.  Enfin ,  il  rencontre  une  compagnie  de  che- 
valiers qn'il  accompagne  à  Miès,  et,  ayant  appris  l'his- 
toire d'Euriante,  déclare  qu'il  sera  son  champion  contre 
quiconque  osera  Taccuser  d'avoir  commis  le  meurtre. 
Méliatir,  obligé  d'accepter  le  combat,  est  vaincu,  et  con- 
fesse son  crime.  Enfin,  après  avoir  remporté  le  prix  daai 


VfO 


1781 


VIO 


an  tournoi  à  Blontai'gis  contre  le  comte  de  Forest,  Gérard 
ae  présente  devant  le  roi ,  accuse  Liziart  de  mensonge  et 
de  trahison  envers  Euriante,  et  le  défie  en  combat  singu- 
lier :  le  roi  ordonne  que  cette  querelle  soit  vidée  le  jour 
de  la  Pentecôte,  en  présence  de  toute  la  cour.  Liziart 
vaincu  avoue  soK  crime;  le  roi  le  fait  attacher  à  la  queue 
d'un  cheval ,  puis  pendre  à  un  arbre;  la  vieille  est  bouillie 
dans  une  chaudière,  et  Gérard  épouse  Euriante.  —  Ce 
poème,  en  vers  de  hnit  syllabes,  fut  composé  par  Gibert 
ou  Gyrbcrt  de  Montreuil,  au  commencement  du  xiii*  siècle. 
Il  est  dédié  à  Marie,  comtesse  de  Ponthieu,  fille  de  Guil- 
laume III,  beau-frère  de  Philippe-Auguste.  L'action,  in- 
génieusement conçue,  s*expose  clairement,  se  noue  et  se 
dénoue  avec  facilité,  et  emprunte  une  grâce  toujours 
nouvelle  du  récit,  qui  n*est  jamais  interrompu  par  des 
lieux  communs  amoureux  oa  théologiques.  On  y  trouve 
d'admirables  tableaux  d'histoire  et  de  genre,  des  descrip- 
tions de  combats,  de  tournois,  de  repas,  de  costumes, 
d'armes,  et,  en  général,  des  peintures  de  mœurs  à  la  ma- 
nière d'Homère.  Le  sujet  de  ce  roman  n'est  point  histo- 
rique :  aucun  comte  de  Nevers  ne  s'est  appelé  Gérard,  et 
il  n'a  jamais  existé  un  comte  de  Forez  du  nom  de  Liziart. 
Quant  au  roi  Louis  dont  il  est  question  ici,  M.  Paulin 
Pi\ris  veut  que  ce  soit  Louis  le  Débonnaire  ;  M.  Francis(]ue 
Michel  pense  que  c'est  Louis  VIII,  et  fonde  cette  assertion 
sur  ce  que  le  roi  tient  sa  cour  plénière  à  Pont-de-I'Arche, 
qui  ne  fut  pas  réuni  à  la  couronne  avant  1204.  Cette  ob- 
servation ne  nous  parait  pas  avoir  une  grande  valeur  dans 
un  poème  qui  est  tout  d'imagination,  et  qui  nous  reporte 
aux  guerres  contre  les  Saxons,  au' siège  de  Cologne,  avec 
un  autre  dénoûment,  mais  avec  les  mêmes  détails  et  les 
mêmes  noms  que  dans  le  poème  de  Witikind.  La  tra- 
duction en  prose  (xv*  siècle)  de  ce  roman  place  l'action 
vus  le  règne  de  Louis  le  Gros. 

Les  imitations  du  roman  de  la  Violette  sont  fort  nom- 
breuses. II  existe  un  roman  en  prose  Dou  roi  Flore  et  de 
la  bielê  Jehane,  dont  le  sujet  est  au  fond  le  même,  et 
dont  le  style  parait  être  des  premières  années  du  xiii"  siè- 
cle; peut-être  a-t-il  précédé  le  poème  de  Gibert  de  Mon- 
treuil. Cn  autre  roman  en  vers  du  xiii*  siècle  est  intitulé 
le  Comte  de  Poitiers  :  l'action  se  passe  sous  le  règne  de 
Pépin  ;  elle  est  la  même  que  dans  le  roman  de  la  Vio- 
lette, Enfin  nous  trouvons  encore  une  imitation  du  même 
iujet  dans  un  manuscrit  du  xiv*  siècle  ainsi  intitulé  : 
Cy  commence  J.  miracle  de  Nostre-Dame,  cornent  Ostes, 
roy  d*Espaingne,  perdi  sa  terre  pour  gagier  contre  Bi- 
rengier^  qui  le  tray  et  H  flst  faux  entendre  de  sa  femme, 
en  la  bonté  de  laquelle  Ostes  se  fioit,  et  depuis  le  destruit 
Ostes  en  champ  de  bataille,  fioccace,  dans  la  2*  journée 
du  Décaméron,  et  Shakspeare,  dans  Cymbeline,  ont  aussi 
imité  le  roman  de  la  violette.  Ce  roman  fut  traduit  en 
prose  au  xv*  siècle  par  un  anonyme  :  il  existe  deux  édi- 
tions anciennes  de  cette  traduction.  Tune  de  1520,  l'autre 
de  152C.  Le  roman  en  prose  a  été  traduit  en  allemand 
par  M"**  Uelmina  de  Chézy,  Leipzig,  1804.  Ce  sujet  fut 
représenté  sur  la  scène  française  en  1810,  au  Cirque 
Olympique.  M""  de  Chézy  écrivit  en  vers  allemands  un 
grand  opéra  en  trois  actes,  intitulé  Euryanthe,  dont  la 
musique  fut  faite  par  Webor  (Vienne,  1823);  son  poème 
ne  rappelle  en  aucune  manière  l'aventure  de  la  Violette  : 
au!^si  Castil-Blaze  le  refit-il  complètement ,  quand  il  tra- 
duisit l'œuvre  de  Weber  pour  l'Académie  royale  de  Mu- 
sique (Paris,  1831  ).  Déjà,  en  1828,  le  théâtre  de  l'Opéra- 
Tomique  avait  donné  une  pièce  en  trois  actes,  intitulée  la 
Violette,  paroles  de  Planard,  musique  de  Carafa;  mais  ce 
n'était  qu'une  imitation  éloignée  et  assez  ridicule  du 
poëme  original.  — Le  roman  de  la  Violette  a  été  publié 
par  Francisque  Michel,  Paris,  1834;  celui  Dou  roi  Flore  et 
de  la  biele  Jehane,  1859  ;  le  Comte  de  Poitiers,  1831.  H.  D. 

VIOLI-CEMBALO,  instrument  de  musique  inventé 
cn  1G09  par  Jean  Haydn  à  Nuremberg.  Il  avait  la  forme 
d'un  piano.  Sous  les  tangentes  se  trouvaient  dix  ou  douze 
petites  roues  garnies  en  côté  de  parchemin  frotté  de 
colophane,  et  mises  en  mouvement  par  une  roue  plus 
grande  au  moyen  d'un  cordon  à  plusieurs  poulies.  Cette 
roue  était  mue  elle-même  à  l'aide  d'une  pédale,  soit 
par  l'exécutant,  soit  par  une  autre  personne.  Quand  les 
touches  se  baissaient ,  les  tangentes  serraient  les  cordes, 
qui  étaient  toutes  métalliques,  contre  les  petites  roues, 
et  l'on  obtenait  l'effet  d'un  archet  passant  sur  les  cordes. 
Le  son  durait  tout  le  temps  que  la  touche  était  abaissée, 
et  son -Intensité  dépendait  de  la  plus  ou  moins  grande 
pression  de  la  touche. — Des  instruments  du  même  genre 
furent  fabriqués  ensuite  par  Garbrecht,  Greiner,  Poul- 
(cau,  etc.  On  doit  ranger  parmi  eux  le  clavecin  à  archet 
de  Hohlfeld,  et  le  clav^in-vielle  (  V,  Clavecin).  Dans  le 


violiteinbalo  de  l'abbé  Trcntin,  h  Venise,  les  condfs 
étaient  toutes  en  boyau  :  chaque  touche  mctta't  en  mou- 
vement un  levier,  qui  pressait  la  corde  entrti  sa  tête 
d'ivoire  et  une  barre  horizontale  garnie  de  peau  ;  l'archet, 
composé  de  fils  de  soie  cousus  à  leurs  extrémités  sur  un 
tissu  de  laine,  et  un  peu  élevé  vers  le  milieu,  était  étendu 
horizontalement  sur  les  cordes  d'un  côté  à  l'autre  de  la 
table  d'harmonie,  et  tournait  continuellement  autour  do 
deux  petits  cylindres  de  métal  placés  aux  deux  extrémi- 
tés ;  le  mouvement  lui  était  imprimé  par  une  pédale  k 
roue  que  faisait  marcher  l'exécutant.  On  connaît  encore 
un  violi-cembaio  du  P.  Louis  Tiparelli ,  d'Azeglio.        B. 

VIOLON,  en  italien  Violino,  instrument  de  musique  à 
cordes  et  à  archet,  monté  de  quatre  cordes  en  boyau, 
dont  la  plus  grave,  qui  est  filée  en  laiton  et  s'appelle 
bourdon,  donne  le  sol:  les  trois  autres  portent  re,  la, 
mi,  par  quintes  du  grave  à  l'aigu.  La  plus  petite  se  nomme 
chanterelle.  Plusieurs  bois  entrent  dans  la  construction 
du  violon  :  le  fond  de  la  caisse,  le  manche,  les  éclisses 
et  le  chevalet  sont  en  érable;  la  table,  la  barre  (petite 
pièce  collée  au-dessous  de  la  grosse  corde  ) ,  les  coins,  les 
tasseaux,  les  contre-éclisses,  l'àme,  sont  en  sapin;  la 
touche,  les  filets  d'ornement,  les  sillets,  les  chevilles,  le 
cordier  ou  queue  et  son  bouton,  en  ébène.  La  table  est 
percée,  à  droite  et  à  gauche  des  cordes,  près  de  la  partie 
échàncrée  de  la  caisse,  de  deux  ouvertures  en  forme  d*  f. 
Le  diapason  du  violon  commence  au  3*  sol  du  piano,  et 
est  de  4  octaves  environ  ;  mais  on  peut  l'étendre  plus 
haut  encore  au  moyen  des  sons  harmoniques.  Le  violon 
est  l'instrument  le  plus  important  de  l'orchestre  :  son 
timbre  joint  la  douceur  à  l'éclat;  il  a  la  faculté  de  soute- 
nir, d'enfler  et  de  modifier  les  sons  ;  il  peut  être  tour  à 
tour  simple,  touchant,  gracieux,  noble  et  grandiose, 
plein  d'audace  et  de  feu;  il  est  propre  à  tous  les  tons,  à 
toutes  les  modulations,  et  il  n'est  pas  de  traits  rapides, 
pas  de  difficultés  qu'il  n'exécute.  Il  peut  servir  tour  à  tour 
au  chant  et  à  l'accompagnement  ;  l'archet  pouvant  faire 
parler  plusieurs  cordes  à  la  fois,  il  a  les  ressources  de 
l'harmonie  aussi  bien  que  le  don  de  la  mélodie.  D'habiles 
exécutants  parviennent  même  à  en  tirer  des  sons  qui  imi- 
tent ceux  de  plusieurs  autres  instruments.  Autrefois  en 
Italie  on  distinguait  le  violon  de  concerto  et  le  violon 
d'orchestre  :  on  appelait  le  premier  voix  humaine^  et  le 
second  voix  argentine.  La  musique  pour  le  violon  s'écrit 
sur  la  clef  de  sol  2*  ligne.  Les  méthodes  de  violon 
les  plus  connues  sont  celles  de  Zanetti ,  Montéclair , 
Geminiani,  L.  Mozart,  Tartini,  Lœhlein,  Galeazzi,  Car- 
tier, Baillot,  Rode,  Kreutzer,  André,  Mazas,  Campagnoli, 
Guhr,  etc. 

Le  violon  était  connu  dès  le  x*  siècle ,  et  s'appela  d'a- 
bord Rebec;  il  n'avait  alors  que  trois  cordes.  Sa  forme  ac- 
tuelle date  du  xv*  siècle  :  ce  fut  la  viole  (  V.  ce  mot)  ré- 
duite  à  de  plus  petites  proportions  et  bornée  à  quatre 
cordes.  Il  y  a  lieu  de  croire  que  cette  transformation  se 
fit  en  France,  car  le  violon  est  indiqué  dans  les  parti- 
tions italiennes  du  xvi*  siècle  sous  le  nom  de  piccolo 
violino  alla  francese  (petit  violon  à  la  française).  Le  plus 
ancien  violon  qu'on  ait  conservé  porte  le  nom  de  Jean 
Kerlin,  luthier  breton,  et  la  date  de  1449.  La  supériorité 
des  sons  du  violon  sur  ceux  des  violes  lui  fit  bientôt  don- 
ner la  préférence,  et  il  devint  d'un  usage  général.  Des  lu- 
thiers se  formèrent  en  France,  en  Italie  et  en  Allemagne, 
et  de  leurs  ateliers  sortirent  d'excellents  violons,  qui 
sont  encore  très-recherchés  aujourd'hui  des  virtuoses. 
Parmi  ces  luthiers  on  remarque  :  le  Tyrolien  Duiffopru- 
géar;  Nicolas  et  André  Amati,  de  Crémone,  à  la  fin  du 
XVI*  siècle;  Antoine  et  Jérôme  Amati,  fils  d'André  ;  Paul 
Magini,  Ant.  Stradivari,  Pierre-André  et  Joseph  Guar- 
neri,  Jacques  Steiner,  élèves  des  Amati.  La  fabrication 
des  Tioions  n'a  point  décliné  entre  les  mains  de  Ber- 
gonzi,  Maggini,  Cappa,  Guadani,  Clots,  et,  dans  notre 
siècle,  Pichl,  Lupot,  Gand,  Guersan,  Salomon,  Chanot, 
et  Vuillaume  ont  donné  de  très-bons  instruments.  Dans 
la  seconde  moitié  du  xviii*  siècle,  on  a  fabriqué  des  in- 
struments appelés  petits  violons,  plus  petits  en  efiet  que 
les  violons  ordinaires,  et  montés  une  quarte  plus  haut  : 
leur  accord  était,  en  partant  du  grave,  ut,  sol,  ré,  la. 
Les  sons  en  étaient  maigres.  L'unique  avantage  de  ces 
instruments  était  de  pouvoir  être  joués  par  de  petites 
mains. 

L'usage  du  violon  se  borna  pendant  un  assez  long 
temps  à  jouer  des  airs  populaires  ou  à  faire  danser.  Plus 
tard  on  l'introduisit  dans  l'orchestre;  mais,  au  temps  do 
Lulli  encore,  ceux  qui  en  jouaient  étaient  si  peu  habiles, 
que  ce  compositeur  se  plaignait  de  ne  pouvoir  leur  con- 
fier que  des  parties  d'une  extrùme  simplicité.  Ce  fut  seu« 


YIO 


17i^2 


VIS 


\ 


Icment  à  la  fin  du  xvii*  siècle  queiCorelIi  fonda  en  Italie 
la  première  école  sérieuse  de  yiolon  :  il  introduisit  des 
traits,  des  combinaisons  de  doigté  et  des  coups  d*archet 
dont  on  n'avait  pas  d*idée  ayant  lui.  Albinoni,  Torelli, 
Geminiani,  Valentini,  Mariette,  Vivaldi,  Tartini,  Vera* 
ctni,  Ferrari,  Locatelli,  Nardi,  Somis,  Pugnani,  Mestrino, 
«étendirent  à  leur  tour  le  domaine  de  l'instrument  que 
(^orelli  avait  en  quelque  sorte  créé;  Viotti  recula  encore, 
par  son  exécution  merveilleuse,  les  limites  qu'ils  avaient 
atteintes,  et  surpassa  Jamowick,  qu'on  voulait  lui  op- 
poser. On  distingue  parmi  ses  successeurs  Rovelli,  Gia- 
como  Costa,  et  Alexandre  Rolla.  Dans  notre  siècle,  Paga- 
nini  a  commencé  pour  le  violon  une  ère  nouvelle,  celle 
de  la  difficulté  vaincue  :  sa  main  prodigieusement  grande 
lui  offrait  les  moyens  d'exécuter  des  passages  que  nul 
autre  ne  pouvait  faire  comme  lui.  Le  maniement  de 
l'archet  fut  la  partie  faible  de  son  Jeu;  toute  son  atten- 
tion se  porta  sur  la  main  gauche,  et  il  y  a  fait  une  ré- 
volution complète.  Il  est  le  premier  qui  ait  exécuté  des 
traits  dans  lesquels  la  main  gauche  pince  certaines 
notes  tandis  que  l'archet  en  Joue  d'autres,  et  qui  ait 
trouvé  le  moyen  de  Jouer,  sur  la  4*  corde,  des  morceaux 
entiers  qui  sembleraient  exiger  toutes  les  cordes  de 
rinstrument.  Dupuis  Paganini,  l'Italie  a  encore  pro- 
duit des  exécutants  remarçiuables ,  les  sœurs  Mila- 
nollo,  les  sœurs  Femi,  Sivori,  Baxzini,  Nicosia,  etc.  ^  En 
France,  le  premier  violoniste  remarquable  fut  Leclère, 
dont  la  manière  appartenait  à  l'école  de  Corelli.  Madin 
et  Papin,  qui  vinrent  ensuite,  eurent  plus  de  gr&ce  dans 
leur  jeu,  mais  moins  de  largeur  dans  le  style  et  dans  le 
son.  On  peut  citer  encore  La  Houssaye,  Gervais,  Saint* 
Georges,  Fodor,  Bertheaume,  Guénin.  Jusque-là  on  s'était 
surtout  occupé  de  la  main  gauche  :  Gaviniès  porta  son 
attention  sur  le  maniement  de  l'archet,  et  y  acquit  une 
habileté  que  Viotti  lui-môme  admira.  Après  lui  com- 
mence l'école  moderne,  dont  Kreutzer,  Rode  et  Bai  Ilot 
sont  les  cbefii  :  elle  a  été  la  plus  brillante  de  l'Europe 
par  la  perfection  de  son  mécanisme  et  l'élévation  de  son 
style.  De  cette  école  proviennent  Boucher,  Lafont,  Ha- 
beneck,  Mazas,  Alard,  Blaurin,  llassart,  Cb.  Dancla,  Gi- 
rard, Herman,  Armingaud,  etc.  —  La  Belgique  a  pris 
aussi,  au  xix*  siècle,  un  rang  glorieux  dans  l'art  du  vio* 
Ion,  avec  De  Bériot,  Artotj  et  Vieuxtemps.  -*•  L'Allemagne 
a  été  en  retard  sur  les  pays  voisins.  Wagner,  Pisendel, 
J.-Th.  Graun,  Stamitz,  et  Mozart  père  sont  les  premiers 
violons  de  talent  que  l'on  cite.  Une  école  de  violon  ne 
fut  réellement  fondée  que  dans  la  seconde  moitié  du 
xvni*  siècle  par  Benda.  Depuis  cet  artiste,  Ramnitz,  Rust, 
Matthes,  Guil.  Cramer,  Danner,  Eck,  Frienzel,  Maurer, 
Mœser,  se  mirent  à  la  tête  des  exécutants  de  leur  nation. 
Dans  notre  siècle,  Spohr  a  été  la  chef  des  violonistes  alle- 
mands, parmi  lesquels  on  doit  citer  Mayseder,  Ernst,  et 
Joachim.  La  Pologne  a  produit  de  nos  Jours  Wienawski.  B. 

TIGLON  (Jeu  de),  nom  donné  dans  l'orgue  à  un  jeu  de 
pédale  plus  large  par  le  haut  qu'à  la  bouche,  fait  le  plus 
souvent  en  sapin,  et  qui  a  seize  pieds  ou  huit  pieds.  Ce 
ieu,  qui  n'est  en  usage  qu'en  Allemagne,  est  très-souvent 
confondu  à  tort  avec  le  molck  di  gamba-bast,  qui  n'a 
|)as  le  môme  diapason.  Le  Jeu  de  violon  a  la  propriété  de 
faire  entendre  l'octave  avant  le  son  fondamental.    F.  C. 

VIOLONS  (Roi  des).  F.  MKNBSTasLS. 

VIOLONCELLE  (de  l'italien  viOionceUo\  instrument 
r'e  musique  à  cordes  et  à  archet,  qu'on  nomme  aussi 
liasse,  parce  qu'il  est  la  basse  du  violon.  Il  a  remplacé 
l'ancienne  basse  de  viole  (F.  ce  mot)^  mais  en  ne  con- 
servant que  4  cordes,  dont  deux  filées  en  laiton  et  deux 
on  boyau.  Ces  cordes,  accordées  en  quinte,  sont,  du  grave 
à  Taigu,  ut,  sol,  ré,  la.  Le  diapason  naturel  du  violon- 
celle est  de  quatre  octaves  environ.  On  doit  à  cet  instru- 
ment, ainsi  qu'à  la  contre-basse,  la  puissance  et  les  grands 
effets  de  nos  orchestres  :  mais  il  ne  sert  pas  seulement 
d'accompagnement,  il  est  susceptible  d'exécuter  la  mé- 
lodie ;  sa  qualité  de  son  est  pénétrante  et  a  de  l'analogie 
avec  la  voix  humaine;  il  se  prête  merveilleusement  à 
l'expression  des  sentiments  tendres  et  mélancoliques.  La 
musique  de  violoncelle  s'écrit  sur  la  clef  de  fa  4*  ligne, 
et  sur  toute  autre  clef  quanU  il  y  a  lieu  d'outre-passer 
la  portée.  Les  violoncelles  de  la  fabrique  de  Stradivarius 
sont  presque  tous  plats  ;  ils  ont  un  son  énergique  qui 
les  rend  propres  au  concerto  :  ceux  des  Amati,  bombés  et 
voûtés,  ont  le  son  plus  suave,  et  sont  propres  à  l'accom- 
pagnement de  la  voix,  de  la  harpe,  du  piano,  do  quatuor 
et  du  quintette.  De  nos  Jours,  les  meilleurs  fabricants  de 
violoncelles  sont  Thibout  à  Paris,  Mongaard  à  Amster- 
dam, Padevelt  à  Carlsruhe,  Mirmont  à  New- York.  —  Des 
Méthodes  pour  le  violoncelle  ont  été  publiées  par  Cor* 


rette,  Kauer,  Gunn,  Raoul,  Olivier  Aubert,  Louis  Do- 
port,  Stiastuy,  Dotzauer,  Baillot  (celle  dite  du  Conserva» 
toire)^  et  Baudiot.Dans  la  seconde  moitié  du  xviii*  siècle, 
on  fit  de  petits  violoncelles,  montés  une  quarte  plus  haut 

3ue  le  violoncelle  ordinaire  :  un  Allemand,  nommé  Rie- 
el,  excellait  à  en  Jouer.  -^  Le  violoncelle,  dont  on  at« 
tribue  l'invention,  soit  à  un  Italien  nommé  Buononcini , 
m^tre  de  chapelle  du  roi  de  Portugal,  soit  au  P.Tardieo, 
de  Tarascon ,  fut  introduit  à  l'Aciuiémie  royale  de  mu< 
sique  de  Paris  par  un  certain  Battistini,  de  Florence, 
vers  la  fin  du  xvii*  siècle.  Un  Romain,  Franciscello,  qui 
vivait  au  commencement  du  aiècle  suivant,  se  rendit  le 
premier  célèbre  dans  l'exécution  des  solos.  Berthaud  doit 
être  considéré  comme  le  chef  de  l'école  française  pour 
cet  instrument  :  parmi  ses  élèves  on  compte  les  frères 
Janson  et  les  deux  Duport.  L'école  a  produit  ensuite  I» 
Levaaseur,  Bréval,  Lamare,  Baudiot,  Muntz-Berger,  et, 
dans  des  temps  tout  à  fait  rapprochés  de  nous,  Vaslin, 
Bénazot,  Norolin,  Franchomme,  Alexandre  Batta,  Ser- 
vais. L'Alleouigne  se  glorifie  avec  raison  d'avoir  produit 
Romberg,  Bohrer,  et  Dotzauer.  L'Angleterre  nomme  aussi 
avec  un  Juste  orgueil  Crossdill  et  Lindley.  B. 

VIOLONS,  instrument  de  musique.  V.  Viole. 

VIOLON- VIELLE,  instrument  de  musique  inventé  en 
1700  par  un  certain  Dlaine.  Il  imitait,  dit-on,  parfaite- 
ment le  violon,  et  n'avait  point  le  son  nasal  do  la  vielle. 

VIRELAI.  V.  L4I. 

VIREMENT  (de  virer,  tourner),  en  termes  de  Marine, 
rotatioa  d'un  bâtiment  sur  lui-même  pour  présenter  au 
vent  le  côté  opposé  à  celui  par  leçiuel  il  le  recevait.  On 
dit  alors  qu'on  a  viré  de  bord.  Virer  au  cabestan,  c'est 
faire  tooroer  le  cabestan  sur  lui-même  pour  lever  l'ancre 
ou  tout  autre  poids  au  moyen  de  la  tourne-vire. 

VIREMENT,  terme  de  Banque  et  de  Commerce.  K.  Bauqdb. 

VIRES,  en  termes  de  Blason,  annelets  posés  l'un  dans 
l'autre. 

VIRETON,  arme.  F.  notre  Dictionnaire  d$  Biographie 
et  d'Histoire, 

VIREVAUT  ou  VIREVBAU,  treuil  horizontal  placé  sur 
l'avant  des  petits  navires  marchands  pour  leur  tenir  lieu 
de  cabestan. 

VIREVOLE,  nom  donné,  dans  les  Jeux  de  la  Bête  et  de 
l'Hombre,  au  Joueur  qui,  ayant  entrepris  de  faire  la  vole, 
c.-à-d.  toutes  les  levées,  n  en  fait  pas  une. 

VIRGINALE,  instrument  à  cordes  et  à  clavier,  dont  on 
trouve  le  nom  dès  l'année  1530.  On  a  donc  dit  à  tort  que 
ce  nom  était  une  flatterie  pour  Elisabeth,  reine  d'Angle- 
terre, oui  aimait  à  en  Jouer  i  il  vient  plutôt  de  la  douceur 
du  timoré, 

VIRGULE  (du  latin  virguia,  diminutif  de  virga,  ba- 
guette), signe  de  ponctuation  qui  sert  à  séparer  les  di- 
vers membres  d'une  même  phrase.  —  Dans  l'ancienne 
Musique,  on  appelait  virgule  la  partie  dea  notes  qui  se 
nomme  aujourd'hui  queue.  Les  signes  neumatiques ,  les 
petits  points  placés,  sans  lignes  ni  clefs,  horiiontale- 
ment,  perpendiculairement  ou  obliquement,  au-dessus 
des  textes  liturgiques  dans  les  anciens  manuscrits,  pour 
indiauer  aux  chanteurs  la  position  des  sona,  étaient  dit» 
aussi  virgules» 

VIROLET,  en  termes  de  Marine,  rouleau  de  sapin  long 
et  de  petite  dimension,  qui  sert  à  empêcher  les  cords^'s 
de  frotter  contre  les  corps  durs. 

VIRTUEL  (du  latin  virtus,  force,  puissance^  se  dit,  en 
Métaphysique,  de  ce  qui  est  seulement  en  puissance.  On 
l'oppose  à  actuel, 

VIRTUOSE  (de  l'italien  virtuoso,  habile),  celui  qui  a 
un  talent  remarquable  pour  la  musique,  principalement 
comme  exécutant. 

VIRURE,  en  termes  de  Marine,  toute  la  largeur  d'an 
bordage,  d'un  bout  à  l'autre  du  navire. 

VIS  ou  VIZ,  nom  qu'on  donnait  Jadis  aux  escaliers  en 
hélice  ou  en  limaçon. 

VISA  (du  latin  visa,  sous-entendu  res,  choie  vue),  foiw 
mule  qui  se  met  sur  un  acte,  pour  attester  qu'il  a  été  vn 
et  vérifié  par  celui  dont  la  signature  rend  cet  acte  an- 
thentique  ou  valable,  ou  simplement  pour  certifier  qu'il 
a  été  présenté. 

VISIÈRE,  pièce  des  anciens  casques,  qui  se  haussait 
et  se  baissait  à  volonté,  et  à  travers  laquelle  l'homme 
d'armes  voyait  et  respirait.  Tanttt  s'était  une  grille, 
tantôt  une  pièce  pleine,  percée  de  trous  pour  les  yeux  et 
la  bouche.  —  On  a  aussi  quelquefois  appelé  Vistère  un 
petit  guichet  percé  dans  une  porte,  et  qui  permet  de  rs- 
con naître  ceux  qui  s'y  présentent. 

VISION,  toute  chimère  de  l'àme,  assex  vive  pour  qu'elle 
semble  provenir  d'une  apparition  véritabld.  C'est  an  effet 


VIS 


1783 


VIT 


d'hallucination.  Ceux  qui  ont  des  rlsions  sont  appelés 
Vistonnatres, 

VISION  BÉATiFiQDB,  OU  termes  de  Théologie,  action  par 
laquelle  les  bienheureux  voient  Dieu  dans  le  ciel. 

VISION  KN  DIEU.  C'ost  une^dos  hypothèses  destinées  à 
combler  le  vide  creusé  par  la  Philosophie  Cartésienne 
entre  le  monde  intellectuel  et  le  monde  matériel.  On  a 
souvent  répété  que  Descartes  lui-même  niait  la  commu- 
nication des  deux  substances,  pensante  et  étendue,  qu'il 
avait  si  bien  distinguées.  Descartes  ne  nous  parait  pas 
avoir  été  explicite  à  ce  point  :  il  nous  semble  que,  chez 
lui,  cette  opinion  est  à  Tétat  de  tendance  plutôt  que  de 
théorie  décidément  arrêtée  (  V,  la  6«  MédilcUion  et  les 
Principes  de  la  Philosophie,  2*  partie).  Mais  ce  qui  nous 
semble  au  moins  douteux  pour  Descartes  est  très<certai- 
nement  vrai  de  ses  disciples,  surtout  de  Leibniz  (  V,  Har- 
monie pnééTABLiB)  et  de  Malebranche.  Quoique  Maie- 
branche  parle,  comme  tout  le  monde,  de  l'union  de  Tàme 
et  du  corps,  il  est  loin  d'entendre  par  là  ce  qu'entend  le 
sens  commun;  pour  lui,  T&me  de  l'homme  est  si  peu 
unie,  dans  le  sens  ordinaire  de  ce  mot,  à  son  corps,  et,  par 
le  corps,  aux  autres  corps  de  la  nature,  que  c'est  seule- 
ment par  la  voie  très-indirecte  de  la  Révélation  qu'elle 
est  assurée  de  leur  existence,  u  II  est  vrai ,  dit  Male- 
branche (Préface  de  la  Recherche  de  la  vérité) ^  que  l'&me 
est  unie  au  corps;  mais  elle  est  unie  h  Dieu  d'une  ma- 
nière bien  plus  étroite  et  bien  plus  essentielle.  Le  rapport 
de  l'Âme  à  Dieu  est  naturel ,  nécessaire  et  indispensable  : 
il  n'en  est  pas  de  môme  du  rapport  de  notre  esprit  à  notre 
corps.  »  On  va  voir  que,  de  plus,  dans  sa  pensée,  l'un  de 
ces  rapports  est  immédiat,  tandis  que  l'autre  est  tout  à 
fait  indirect,  et  pour  ainsi  dire  tout  extérieur.  L'Étendue 
et  la  Pensée  sont  trop  différentes ,  substantiellement  et 
essentiellement ,  pour  exercer  Tune  sur  l'autre  une  in- 
fluence quelconque  ;  aussi ,  lorsqu'à  propos  des  modifi- 
cations de  la  substance  pensante  le  corps  est  agité  de 
certains  mouvements ,  c'est  que  Dieu  intervient,  par  un 
acte  exprès  de  sa  volonté,  pour  les  produire.  Tel  est  le 
principe  de  Vassistance  divine,  déjà  indiqué  par  Descartes, 
et  qui  fait  le  fond  du  système  des  Causes  occasUmiMlles 
{ V,  cemot)»  Il  s'agit  ici  de  l'action  inverse,  c.-à-d«  de  la 
manière  dont  apparaissent  à  l'esprit  les  idées  des  rliUtés 
extérieures.  Le  système  de  Malebranche  appartient  à  la 
famille  des  systèmes  idéalistes;  c-à-d.  qu'un  dd  ses 
principes  est  que  nous  connaissons  les  choses,  non  par 
oUes-mômes,  mais  par  les  Idées,  en  entendant  par  Idée 
non  pas  seulement  un  acte  de  l'esprit  (  ce  qui  est  l'opi- 
nion vulgaire,  et  à  notre  avis  parfaitement  sensée),  mais 
un  être  distinct  et  de  l'esprit  et  des  objets  {V,  Id^ausme), 
et  qui  est  lui-même  v  l'objet  immédiat  ou  le  plus  proche 
de  l'esprit  quand  il  aperçoit  quelque  chose.  »  Sans  s'arrê- 
ter longtemps  à  la  question  de  savoir  si  les  Idées  sont 
matérielles  ou  immatérielles,  si  elles  sont  ou  ne  sont  pas 
la  représentation  de  quoique  objet  existant  réellement 
hors  de  l'àme,  Malebranche,  après  avoir  établi  qu'elles 
sont  distinctes  des  pensées  de  l'esprit ,  et  que,  par  con« 
séquent ,  elles  ont  leur  existence  pzopre,  passe  immédia- 
tement à  la  question  de  leur  origine.  «  11  est  absolument 
nécessaire,  dit-il,  que  les  idées  que  nous  avons  des  corps, 
et  de  tous  les  autres  objets  que  nous  n'apercevons  point 
par  eux-mêmes,  viennent  de  ces  mêmes  corps  ou  de  ces 
objets;  ou  bien  que  notre  àme  ait  la  puissance  de  pro- 
duire ces  idées;  ou  que  Dieu  les  ait  produites  avec  elle 
en  les  créant,  ou  qu'il  les  produise  toutes  les  fois  qu'on 
pense  à  quelque  objet;  ou  que  Tàme  ait  en  elle-même 
toutes  les  perfections  qu'elle  voit  dans  ces  corps;  ou  enfin 
qu'elle  sott  unie  avec  un  être  tout  parfait,  et  qui  rvn- 
ferme  généralement  toutes  les  perfections  des  êtres  créés.  » 
Il  parcourt  successivement  ces  différentes  hypothèses,  ré- 
fute les  cinq  premières,  et  s'arrête  à  la  dernière  qu'il 
développe  à  peu  près  comme  il  suit  :  Dieu  seul  possède 
en  lui  les  idées  de  tous  les  êtres  créés,  et  de  toutes  leurs 
perfections.  Les  idées  que  nous  avons  de  ces  êtres  ne 
peuvent  donc  nous  venir  que  de  lui.  Dieu  est  le  lieu  des 
idées,  et  c*est  en  lui  que  nous  les  voyons.  Les  idées  ne 
sont  pas  Dieu,  maJs  elles  en  sont  une  émanation;  elles 
sont,  par  rapport  à  Dieu,  ce  que  la  lumière  est  par  rap- 
port au  soleil,  quelque  chose  de  distinct  de  lui ,  qui  nous 
fait  apercevoir  les  objets.  Comment  s'opère  la  communi- 
cation des  idées  de  l'Intelligence  divine,  où  elles  sont 
toutes  contenues,  à  l'esprit  de  l'homme?  Il  faut  savoir, 
dit  encore  Malebranche,  que  Dieu  est  très-étroitement 
uni  à  nos  âmes  par  sa  présence.  Comme  il  est  le  lieu  des 
idées,  il  est  aussi  le  heu  des  esprits,  de  sorte  que  c'est 
en  lui,  et  par  une  communion  de  l'esprit  avec  son  Intel- 
ligence, que  les  êtres  extérieurs  nous  *^nt  connus.  Cette 


communion  de  l'esprit  de  l'homme  avec  Dieu ,  c'est  la 
Raison,  une  pour  tous  les  hommes  par  cela  même  qu'elle 
est,  en  chacun,  une  participation  à  la  suprême  Raison  de 
leur  Auteur.  Cela  met  les  esprits  créés  dans  une  véritable 
et  entière  dépendance  de  Dieu  ;  car  nous  ne  saurions 
rien  voir  que  Dieu  ne  veuille  bien  que  nous  le  voyions , 
et  (}ue  Dieu  même  ne  nous  fasse  voir  ce  que  nous  voyons. 
Mais  si  l'esprit  est  ainsi  dans  une  étroite  dépendance  de' 
Dieu,  c'est  pour  en  recevoir  la  lumière  :  u  Car  c'est  Dieu 
qui  est  proprement  la  lumière  de  l'esprit  et  le  père  des 
lumières,  c'est  lui  qui  enseigne  la  science  aux  hommes. 
En  un  mot,  c'est  la  véritable  lumière  qui  éclaire  tous 
ceux  qui  viennent  en  ce  monde.  »  Telle  est,  dans  ce 
qu'elle  a  de  plus  général,  la  théorie  des  Idées  de  Male- 
branche et  rhypothèse  systématique  de  la  Vision  en  Dieu. 
Nous  voyons  tout  en  Dieu  ;  Dieu  est  le  lieu  des  Idées. 
Mais  de  Dieu  lui-même,  y  a-t-il  une  idée?  Dans  la  doc- 
tri  ne  de  Malebranche,  il  n'y  a  pas  d'idée  do  Dieu,  et  il 
ne  peut  pas  y  en  avoir;  car  l'idée,  intermédiaire  entre 
l'esprit  et  l'oDJet,  est  d'une  nature  plus  excellente  que 
son  objet.  Si  donc  il  y  avait  une  idée  de  Dieu,  cette  idde 
serait  quelque  chose  de  plus  grand  et  de  plus  relevé  que 
Dieu  lui-même,  C3  qui  est  une  supposition  absurde.  Outre 
cette  première  raison,  il  y  en  a  une  autre  i  c'est  que  l'idéo 
est  un  être  créé,  particulier  et  fini.  Elle  peut  bien  repré- 
senter d'autres  êtres  particuliers  et  finis,  mais  elle  no 
saurait  représenter  l'être  sans  restricttbn,  l'être  immense 
et  universel.  Il  n'y  a  donc  pas  d'idée  de  Dieu.  Est-ce  à 
dire  que  nous  ne  connaissions  Dieu  d'aucune  manière? 
Loin  oe  là  :  nous  le  connaissons  d'une  vue  immédiate  et 
directe,  par  cette  union  intime  où  nous  sommes  avec  lui. 
Rien  ne  peut  le  représenter  ;  mais  nous  le  connaissons 
par  lui-même,  quoique  la  connaissance  que  nous  en  avons 
en  cette  vie  soit  très-imparfaite,  a  et  nous  connaissons  les 
choses  corporelles  par  Iburs  idées,  c-à-d.  en  Dieu,  puis- 
qu'il n'y  a  que  Dieu  qui  renferme  le  monde  intelligible 
où  se  trouvent  les  tuées  de  toutes  choses.  » 

Nous  résumerons  sous  un  petit  nombre  de  chefs  prin- 
cipaux les  critiques  qm  peuvent  et  doivent  être  adressées 
au  système  de  la  Vision  en  Dieu  t  i^  L'existence  des 
idées,  telles  que  Malebranche  les  conçoit,  est  purement 
hypothétique;  2^  On  pourrait  s'y  passer  du  Monde  et  des 
objets  extérieurs.  Que  Dieu  existe,  et  en  Dieu  les  Idées; 
que  l'esprit  de  l'homme  vole  les  idées  en  Dieu ,  cela  suffît  ; 
et  tout  se  passera  absolument  de  la  môme  manière,  soit 
qu'il  y  ait  réellement  ou  qu'il  n'y  ait  pas  d'objets  aux- 
quels ces  idées  correspondent,  ou  qui  correspondent  à 
ces  idées;  3<»  Il  est  impossible  de  se  faire  une  idée  nette 
de  cette  union  dans  laquelle,  suivant  Malebranche,  l'es- 

Krit  de  l'homme  se  trouve  avec  l'Intelligence  divine,  aussi 
ien  que  du  rapport  vrai  de  celle-ci  avec  les  Idées; 
4<>  Enfin,  et  c'est  là,  à  ce  qu'il  pous  semble,  ce  à  quoi 
l'on  fait  le  moins  attention,  la  philosophie  de  Alale- 
branche  est  grosse  de  conséquences  que  son  autour  à 
coup  sûr  eût  repoussées  avec  horreur.  Elle  est  à  deux 
pas  du  Panthéisme;  et  voici  comment  nous  le  prouvons  : 
quoique  Malebranche  ne  prétende  nulle  part  expressé- 
ment que  les  Idées  soient  identiques  à  Dieu  (elles  ne  sont 
pas  Dieu,  dit-il ,  mais  elles  en  émanent ,  et  ceci  sent  déjà 
le  Panthéisme);  quoiqu'il  n'absorbe  pas  non  plus  abso- 
lument la  substance  de  l'àme  dans  la  substance  divine, 
cette  maxime  de  TApêtre,  qu'il  répète  avec  complaisance: 
«  C'est  en  Dieu  que  nous  sommes,  que  nous  vivons  et 
que  nous  avons  le  mouvement,  »  entendue  dans  son  sens 
le  plus  strict,  si  elle  n'énonce  pas  cette  absorption  d'une 
manière  complète,  s'en  approche  singulièrement.  Donc, 
unification ,  ou  peu  s'en  faut  du  moins ,  en  Dieu ,  des 
idées  qud  peuvent  être  sans  aucun  inconvénient  sub- 
stituées aux  objets,  et  de  l'esprit  humain,  qu'est-ce  autre 
chose,  encore  une  fois,  que  le  Panthéisme  (  V,  ce  mot  )  ? 
La  pensée  de  Malebranche,  toute  pénétrante  qu'elle  est , 
n'a  pas  été  à  ces  conséquences  extrêmes ,  qui  l'euss  'nt 
fait  reculer  avec  effroi;  mais  les  systèmes  ont  leur  lo- 
gique, par  laquelle  il  faut  les  Juger;  et  en  vérité  ce  n'était 
pas  la  peine  de  qualifier  Spinoza  de  misérable  et  le  spi' 
nozisme  d*épouvantable  chimère,  pour  finir  par  en  aj> 
prêcher  de  si  près.  R — s. 

VISITE  (Droit  de).  V,  Daorr  de  vism,  dans  notre  Dic- 
tionnaire de  Biographie  et  d'Histoire. 

VISITE  DOMICILIAIRE.  V.  PEHQUlSmOR. 

VISITES,  nom  que  l'on  donnait,  au  xvn*  siècle,  aux 
représentations  que  Molière  et  sa  troupe  allaient  faire 
chez  le  roi,  les  princes  ou  les  particuliers. 

VISPERED.  V,  VENniDAi>-SAn#.  et  Zend-Avesta. 

VITAL  (Principe).  Dès  l'Antiquité  on  avait  cherché  à 
savoir  si  la  vie  a  un  principe  distinct  de  la  matière  et  ^9 


VIZ 


1734 


VOEU 


TAme,  ce  qui  avait  donné  lieu  à  différentes  bypotlièses. 
flippocrate,  et  plus  tard  Galien,  attribuaient  l'harmonie 
des  phénomènes  organiques  à  une  sorte  de  principe  di- 
vin ;  Aristote  semble  avoir  considéré  l'&me,  ou'ii, nomme 
entéléchie^  comme  le  résumé  des  propriétés  de  la' vie.  Le 
moyen  &ge,  marchant  sur  les  traces  les  plus  visibles  de 
l'Antiquité,  admettait  trois  sortes  d'âmes  ou  princi[>e8, 
'pour  se  rendre  compte  de  la  vie  :  végétative,  «enràtoe, 
raisonnable*  Depuis  la  Renaissance,  Paracelse  attribua  la 
génération,  l'accroissement  et  la  conservation  de  tout 
lUre  vivant  à  un  archée,  corps  astral,  logé  dans  Testo- 
mac,  et  qui  nous  défend  contre  les  agents  extérieurs  de 
destruction.  J.-B.  Van-Helmont  fit  de  cetarc/i^ele  prin- 
cipe qui  préside  aux  fonctions  de  la  vie  et  qui  donne  aux 
corps  la  forme  qui  leur  est  propre  :  il  le  nommait  imago 
semincUis,  £n  opposition  à  ces  hypotiièses,  vinrent  les 
vitromécaniciens,  qui  voulaient  rapporter  les  fonctions 
vitales  aux  lois  de  la  mécanique  et  de  Thydraulique,  et 
les  ialrochimistes,  qui  expliquaient  la  vie  par  la  chimie 
ie  leur  temps.  Pour  les  réfuter,  Stahl,  dans  sa  doctrine 
«le  ï Animisme,  donna  à  Tàme  le  rôle  de  Varchée.  Il  fut 
remplacé  par  Técole  des  organicistes,  dont  Bichat  et 
ilroussais  furent  les  principaux  représentants;  mais,  dans 
l'école  de  Montpellier,  V animisme  devint  le  vitalisme. 
Bartbez,  le  chef  de  cette  école,  pensait  que  le  principe 
vital  est  essentiellement  distinct  de  la  matière  organisée, 
et  qu'il  tient  peut-être  en  quelque  façon  à  T&me.  Cette 
question  d\x  principe  vital  est  une  des  plus  sérieuses  dont 
la  Philosophie  et  la  Physiologie  puissent  s*occuper.    R. 

YITCHOURA,  vêtement  polonais  garni  de  fourrure,  que 
l'on  met  en  guise  de  par-dessus  pour  se  garantir  du  froid. 

VITONIÈRË,  en  termes  de  Marine,  ferrure  qui  attache 
le  gouvernail  au  b&timent. 

VITRAIL.  V.  Verrière. 

VJTRK  (Verre  à).  7.  Verre. 

VITRIERS ,  ancienne  corporation  dont  les  membres,  à 
la  fois  artisans  et  artistes,  garnissaient  de  verre  les  pan- 
neaux de  plomb,  les  châssis  de  bois,  les  cadres  d'es- 
lampes  et  de  tableaux,  et  se  livraient  à  la  peinture  sur 
\  erre.  Leurs  statuts  dataient  du  règne  du  Louis  XI,  et 
furent  modifiés  par  Louis  XIV  en  1666.  L*apprentissage 
était  de  quatre  ans,  et  le  compagnonnage  de  six. 

VITRINE.  V.  Vkrrière. 

VIVANDIERS,  VIVANDIÈRES.  V.  CAirraB. 

VIVIER  (du  latin  vivarium)^  bassin  entouré  de  murs 
en  terre  ou  en  maçonnerie,  rempli  d'eau  ordinairement 
courante,  et  destiné  à  recevoir  du  poisson  d'eau  douce. 
Des  grilles  en  bois  ou  en  fer  laissent  un  passage  ouvert  à 
l'eau,  en  même  temps  qu'elles  empêchent  le  poisson  de 
^'échapper.  Les  riches  Romains  avaient  presque  tous  des 
viviers  auprès  de  leurs  villas  :  on  cite  Lucullus,  C.  Hérius, 
Védlus  Pollion,  comme  ayant  fait  pour  cet  objet  des  dé- 
penses prodigieuses;  le  dernier  Jetait,  dit-on,  vivants  à 
ses  lamproies  les  esclaves  qa*il  avait  condamnés  à  mort. 
Quelquefois  on  creusait  des  viviers  dans  les  rochers  près 
(le  la  mer,  afin  d'y  faire  arriver  l'eau  salée.  —  Chez  les 
anciens  Romains,  on  appelait  encore  vivier  (vivarium) 
un  parc  où  l'on  élevait  de  gros  gibier  de  chasse. 

VIVIEN  (Les  Enfances),  11*  branche  de  la  chanson  de 
Guillaume-aiMiourt'nez,  Vivien,  enfant,  est  remis  aux 
Sarrasins  d'Espagne,  en  échange  de  son  père,  qu'ils  re- 
tx^.naient  prisonnier  depuis  huit  ans.  Il  est  enlevé  par  des 
pirates,  et  acheté  par  une  marchande,  qui  le  fait  passer 
I)Our  son  fils.  Bientôt  il  retourne  en  Espagne  à  la  tête  de 
quelques  Jeunes  gens,  et  bat  les  Infidèles;  mais  il  est 
assiégé  dans  une  forteresse  par  une  armée  innombrable. 
Sa  mère  adoptive  accourt  en  France,  et  obtient  que  l'em- 
pereur envoie  des  secours,  grâce  auxquels  Vivien  de- 
meure vainqueur.  —  La  suite  de  ses  aventures,  qui  forme 
la  12"  branche  de  la  chanson  de  Guillaume-au-court-nez, 
a  pour  titre  le  Chevalier  Vivien  et  la  bataille  d'Aleschans. 
A  son  retour  d'Espagne,  Vivien  est  adoubé  chevalier  par 
son  oncle,  et  fait  vœu  de  ne  Jamais  reculer  devant  les 
Sarrasins;  il  commence  contre  eux  une  guerre  d'exter- 
mination. Blessé  et  poursuivi  par  une  armée  entière,  il 
s'enferme  dans  un  château.  Guillaume  accourt,  et  alors 
s'engage  la  terrible  bataille  d'Aleschans,  où  il  coula  tant 
de  sang  que,-Aes  pierres  en  sont  encore  rouges  aujour- 
d'hui. Vivien  y  périt  après  d'héroïques  exploits. 

Les  Enfances  Vivien  sont  conservées  â  la  Bibliothèque 

nationale  de  Paris  dans  cina  manuscrits;  le  Chevalier 

Vivien  et  la  bataille  d'Aleschans,  dans  sept  manuscrits 

du  XIII*  siècle.  La  bibliothèque  de  l'Arsenal  en  possède 

an.  V.  Histoire  littéraire  de  la  France,  t.  XXII.    H.  D. 

VIZIR.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biogror 
fHie  et  d'Histoire, 


VLACO -MACÉDONIEN  (Dialecte).  F.  RocMAin  (Lan- 
gue). 

VLADIKA,  titre  du  chef  des  Monténégrins. 

VOCABLE  (du  latin  vocabulum,  mot),  se  dit  en  général 
de  tous  les'  mots  qui  composent  une  langue,  et  particu- 
lièrement des  substantifs.  —  On  l'emploie  aussi  en  par- 
lant du  nom  du  Saint  sous  le  patronage  duquel  une  églt^ 
est  placée  :  ainsi,  telle  église  est  soui  le  vocabU  de 
S*  Pierre. 

VOCABULAIRE  (du  latin  vocabulum^  nom)«  liste  fie 
mots  disposés  communément  dans  un  ordre  alphabé- 
tique et  accompagnés  d'une  courte  explication.  Le  Voca- 
bulaire est  moins  développé  que  le  Dictionnaii*e.  Il  est 
spécialement  une  liste  de  termes  propres  à  un  art,  à  une 
science.  V»  Dictionnaire,  Lexique.  P. 

VOCALISATION,  partie  de  l'art  du  chant  qui  consiste 
â  bien  gouverner  sa  voix  dans  les  modulations,  les  rou- 
lades et  les  traits  rapides.  On  nomme  Vocalises  les  exer- 
cices destinés  à  donner  de  l'agilité  et  de  la  souplesse  à  ia 
voix  :  ces  exercices  se  font  sans  paroles,  et  sur  une  seule 
voyelle,  a  ou  e  par  exemple.  Vocaliser,  c'est  solfier  sans 
prononcer  le  nom  des  notes,  en  donnant  à  la  voix  ses 
diverses  inflexions  sur  cette  seule  voyelle. 

VOCATIF  (du  latin  vocare,  appeler),  flexion  casuelle 
des  substantifs,  adjectifs  et  participes,  indiquant  qu'on 
s'adresse  â  une  personne  ou  à  une  chose  personnifiée. 
Cette  forme  est  propre  à  l'ancien  grec  et  au  latin.  Le  vo- 
catif a  généralement  la  même  forme  que  le  nominatif, 
excepté  dans  les  noms  masculins  et  féminins  de  la  i*  dé- 
clinaison. Il  est  souvent  accompagné  de  l'interjection  0. 

VOCATION  (du  latin  wcatio,  appel),  penchant  pro- 
noncé qui  nous  porte  à  suivre  telle  ou  telle  carrière.  Dans 
un  sens  religieux,  c'est  cette  voix  intérieure  par  laquelle 
Dieu  nous  invite  d'une  manière  toute  spéciale  à  la  pra- 
tique de  ses  lois.  On  nomme  Vocation  d'Abraham  le 
choix  que  Dieu  'fit  de  ce  patriarche  pour  être  le  chef  de 
son  peuple.  La  Vocation  des  Gentils  est  la  grâce  que 
Dieu  leur  a  faite  en  les  appelant  â  la  connaissance  de 
l'Évangile. 

VOEU,  promesse  faite  à  Dieu  d'une  chose  qu'on  n'est 
point  tenu  de  faire,  mais  que  l'on  croit  lui  être  agréable. 
C'est  une  obligation  de  surérogation  que  l'on  s'impose, 
en  dehors  des  obligations  légales.  Les  vœux  étaient  con- 
nus des  Hébreux,  et  le  chap.  27  du  lÀvitique  entre  dans 
de  grands  détails  à  ce  sujet  :  on  y  voit  que  les  vœux  de- 
vaient être  libres  et  volontaires  ;  que  Moïse  en  condam- 
nait l'indiscrétion,  la  précipitation,  la  témérité;  qu*il 
était  permis  de  modifier  et  même  d'annuler  ceux  qui 
étaient  contraires  â  la  prudence.  Ainsi  dut-il  en  être  du 
célèbre  vœu  de  Jephté.  La  loi  chrétienne  n'a  pas  formel- 
lement ordonné  des  vœux,  mais  elle  ne  les  défend  pas; 
et  s'il  existait,  dans  l'ancienne  loi,  des  moyens  de  cassa- 
tion, de  dispense  ou  de  modification  des  yœux,  à^  plus 
forte  raison  doit^-il  en  exister  dans  la  nouvelle.  L'Église 
catholique  admet  que  les  vœux  du  baptême  obligent  en 
conscience,  et  qu'il  peut  y  en  avoir  d'autres  que  ceux-là  ; 
elle  reconnaît,  par  exemple,  les  vœux  monastiques  de 
pauvreté,  de  chasteté,  d'obéissance,  de  clôture.  Les  ca- 
nonistes  distin^^uent  :  1<*  le  vœu  simple,  promesse  faite 
à  Dieu  en  particulier  ou  dans  une  communauté  non  au- 
torisée :  c'est  un  empêchement  prohibitif  du  mariage  ; 
2<^  le  vœu  solennel,  qui  se  fait  avec  certaines  formalités 
dans  un  corps  de  religion  approuvé  par  l'Église  ;  c'est  un 
empêchement  dirimant  du  mariage;  3^  le  vcbu  absolu  y 
qui  est  sans  condition,  et  qu'on  est  obligé  d'exécuter  aus- 
sitôt qu'il  a  été  fait;  À^  le  vœu  conditionnel,  qui  n'oblige 
qu'après  l'événement  de  la  condition  ;  5»  le  vœu  réel, 
qui  a  pour  matière  une  chose  hors  de  la  personne  qui  ie 
fait  ;  6**  le  vœu  personnel,  qui  se  prend  dans  la  personne 
même  ou  dans  ses  actions  ;  7^  le  vcbu  mixte,  qui  tient  du 
personnel  et  du  réel.  Dans  l'ancienne  France,  où  les  in- 
stitutions religieuses  étaient  inséparablement  unies  avec 
les  institutions  civiles,  les  ordonnances  réglaient  l'âge  de 
l'émission  des  vœux,  la  forme,  la  solennité  et  toutes  les 
conditions  de  ces  vœux.  Un  décret  du  15  février  1790 
prononça  l'abolition  des  vœux  de  religion  en  supprimant 
les  communautés  religieuses.  La  Constitution  de  1791  dé- 
clara que  la  loi  civile  ne  reconnaissait  plus  les  vœux  reli- 
gieux. Bien  cpie  ce  principe  n'ut  pas  été  exprimé  dans  le 
Code  Napoléon,  il  subsiste  toujours;  c'est  ce  qui  résulte, 
par  exemple,  de  la  déclaration  de  ce  Code,  que  la  vœa 
n'empêche  point  le  mariage  civil.  Un  décret  du  18  fé- 
vrier 1809,  qui  rétablit  les  sœurs  hospitalières,  lîmiti 
à  5  ans  la  durée  de  leurs  vœux.  La  loi  du  24  mai  1825, 
qui  a  légalisé  l'existence  de  toutes  les  communautés  de 
femmes,  n'a  rien  statué  de  nouveau  sur  ce  point.  H 


YOI 


1785 


VOI 


nVst  permis  de  faire  des  vœux  que  dans  les  congréga- 
tions religieuses  autorisées  par  rÉtat  et  après  l'^e  de 

10  ans  accomplis.  Jusqu*à  21  ans,  leur  durée  ne  peut  ex- 
céder un  an.  —  Vœu  désigne  aussi  Toffrande  promise 
par  un  vœu   V.  Ex-Voro. 

vogues!,  iiom  donné  aux  fêtes  patronales  dans  cer- 
taines parties  de  la  Provence. 

VOIES  DE  COMMUNICATION.  K.  Canal,  Chbuin, 
Po?iT,  Routes. 

VOIES  DE  DROIT,  en  termes  de  Jurisprudence,  re- 
cours à  la  justice  suivant  les  formes  légales.  V.  F.  Le- 
fiormant.  Des  voies  de  recours,  1857,  in-S*». 

VOIES  DE  FAIT,  actes  de  violence  contre  les  personnes. 
Les  voies  de  fait  sont  poursuivies  correction  nellement  ou 
criminellement,  selon  leur  gravité  (Code  pénal,  art.  209- 
^212,228-233). 

VOIES  ET  MOYENS,  en  termes  de  Législation  et  de 
Finances,  revenus  de  tous  genres  que  l'Etat  applique  à 
ses  dépenses. 

VOIES  ROMAINES.  V.  notre  Dictionnaire  de  Biogra- 
ptUe  et  d'Histoire, 

VOILE,  pièce  d'étoffe  destinée  à  dérober  un  objet  à  la 
vue,  et,  spécialement,  celle  dont  les  femmes  se  couvrent  le 
visage;  dans  ce  dernier  cas  le  voile  est  un  tissu  blanc  ou 
noir,  léger,  et  à  demi-transparent.  Dans  le  Tabernacle  des 
Juifs,  un  voile  précieux  cachait  la  vue  de  TArche  d'al- 
liance aux  profanes.  L'usage  du  voile  parmi  les  femmes 
est  très-ancien  :  dans  la  Théogonie  d'Hésiode,  Minerve 
couvre  Pandore  d'un  beau  voile  ;  dans  VOdyssée  d'Ho- 
mère, Pénélope  ne  se  montre  que  voilée  à  ses  poursui- 
vants. S^  Clément  d'Alexandrie  dit  que  de  son  temps  les 
▼oiles  étaient  de  couleur  rouge.  En  Grèce  et  à  Rome,  les 
nouvelles  mariées  ne  sortaient  sans  voile  que  trois  jours 
après  leurs  noces.  C'est  encore  aujourd'hui  un  usage  que 
les  jeunes  filles  se  parent  d'un  voile  le  jour  de  leur  ma- 
riage ;  il  en  est  de  même  de  celles  qui  font  leur  pre- 
mière Communion.  Le  voile  est  une  partie  indispensable 
du  vêtement  des  religieuses  :  prendre  le  voile  est  devenu 
synonyme  d'embrasser  la  vie  religieuse,  et  la  prise  de 
voile  est  la  cérémonie  qui  a  lien  à  cette  occasion.  Le  Droit 
canonique  distingue  :  le  voile  de  probation^  qu'on  donne 
aux  novices,  et  qui  est  ordinairement  blanc;  le  voile  de 
profession,  donné  aux  religieuses  quand  elles  font  leurs 
vœux;  le  voile  de  prélature,  qu'on  donne  aux  abbesses. 

11  y  avait  encore  autrefois  le  voile  de  consécration,  que 
rOvèque  seul  donnait  aux  vierges  à  certains  jours;  le 
voile  d^ordinaire,  dont  on  ornait  les  diaconesses  ;  le  voile 
d'observation,  réservé  aux  veuves. 

VOILES,  larges  pièces  de  forte  toile,  destinées  à  trans- 
mettre l'eiTort  du  vent  à  un  b&timent,  au  moyen  de  le- 
viers qui  sont  les  m&ts.  Elles  prennent  généralement  les 
noms  des  m&ts  sur  lesquels  elles  sont  fixées,  et  ont  des 
dimensions  et  des  qualités  de  toile  différentes,  selon  la 
place  qu'elles  occupent  et  l'usage  auquel  elles  servent. 
A  mesure  qu'elles  sont  plus  élevées,  elles  ont  moins  de 
force  et  de  largeur  ;  en  sorte  que  toute  la  voilure  dé- 
ployée d'un  m&t  présente  une  forme  pyramidale.  Les 
voiles,  suivant  la  place  qu'elles  occupent,  sont  dites 
voiles  d'avant  et  votles  d'arrière  :  les  premières,  qu'on 
nomme  en  masse  fort  d'avant,  sont  toutes  celles  qui  ont 
leur  appui  sur  le  beaupré  et  le  m&t  de  misaine  ;  les 
secondes,  celles  qui  appuient  sur  le  grand  màt  et  le  màt 
d'artimon.  On  distingue  encore  les  voiles  d'après  leur 
forme.  Les  voiles  carrées,  généralement  en  usage  sur  les 
Océans,  sont  attachées  aux  vergues,  et  sont  dites  hautes 
ou  basses  voiles,  selon  qu'elles  tiennent  aux  hautes  ou 
basses  vergues.  Les  basses  voiles  ont  à  peu  près  la  forme 
d'un  parallélogramme  ;  les  huniers,  les  perroquets  et  les 
cacatoès  {V.  ces  mots)  ont  celle  d'un  trapèze.  Lbs  voiles 
carrées  peuvent  se  rapetisser  au  moyen  des  ris  (  V.  ce 
mot).  Les  bonnettes  (K.  ce  mot)  sont  les  auxiliaires  des 
voiles  carrées.  Les  focs  {V,  ce  mot)  sont  des  voiles  en 
pointe,  de  forme  triangulaire,  fixées  à  l'extrême  avant 
sur  des  étais  du  m&t  de  misaine,  avec  des  bajs^ues  ou  an- 
neaux mobiles  qui  font  l'effet  d'anneaux  de  rideau  et  ser- 
vent à  les  hisser  et  à  les  amener.  La  voile  d'artimon,  à 
l'extrême  arrière,  est  un  puissant  auxiliaire  du  gouver- 
nail. On  nomme  voiles  d'etai  des  voiles  de  toile  légère, 
variant  de  forme  selon  la  place  qu'elles  occupent,  et  qui, 
placées  su**  les  étais,  entre  les  m&ts,  viennent  border  le 
pont  ;  elles  y  sont  fixées,  comme  les  focs,  par  des  bagues 
mobiles.  X^es  voiles  de  cape  sont  celles  dont  on  se  sert 
dans  les  tempêtes  :  ce  sont  l'artimon,  le  foc  d'artimon , 
le  grand  hunier  (tous  les  ris  pris),  la  misaine,  et  le  petit 
foc.  La  voUe  de  fortune  est  une  grande  voile  carrée  qui 
tt'est  pas  fixée  sur  la  vergue,  mais  qui  s*y  place  provisoi- 


rement par  le  moyen  de  trois  poulies,  dont  deux  aux 
extrémités  et  une  au  milieu  :  elle  sert  pour  le  vent 
arrière  ou  le  grand  largue,  dans  les  goélettes  et  les  cut- 
ters. La  voile  livarde,  en  usage  chez  les  Hollandais,  est 
une  voile  à  peu  près  carrée,  lacée  au  m&t  par  l'un  de  ses 
côtés,  et  qui  se  déploie  au  moyen  d'un  espare  fixé  par 
ses  deux  extrémités  aux  deux  angles  opposés  :  ce  genre 
de  voile  est  aussi  très-usité  dans  les  petites  embarca- 
tions. On  appelle  voiles  latines,  parce  qu'elles  furent 
d'abord  en  usage  sur  les  galères  du  pape,  des  voiles  trian- 
gulaires, attachées  à  une  vergue  flexible  par  le  côté  de 
leur  hypoténuse,  et  par  conséquent  terminées  en  pointe 
par  le  bas  :  on  en  voit  beaucoup  dans  la  Méditerranée. 
La  voile  aurique  est  &  quatre  pointes  :  elle  est  lacée  d'un 
côté  à  son  m&t,  et  enverguée  sur  une  petite  vergue  qu'on 
nomme  corne.  La  voile  de  houari  est  une  voile  aurique 
dont  la  vergue  est  tellement  apic^uée  qu'elle  semble  faire 
la  continuation  du  m&t.  La  voUe  à  bourcet  est  qua- 
drangulaire;  le  point  de  drisse  est  au  tiers  de  sa  vergue, 
ce  qui  lui  fait  donner  aussi  le  nom  de  voile  au  tiers, 
—  Amener  une  voile,  c'est  la  faire  descendre  le  long  du 
m&t  quand  elle  a  été  hissée  ;  la  carguer,  c'est  la  serrer 
ou  plier  contre  la  vergue.  V,  Ferler,  Déferler,  Lar- 
guer. 

VOILIER,  se  dit  d'un  navire  considéré  par  rapport  & 
sa  marche  sous  voiles.  On  dit  qu'il  est  bon  ou  mauxms 
voilier. 

VOIRIE  (de  voié)^  mot  qui  désigna  originairement  le 
chemin  sur  lequel  on  jetait  les  immondices  et  vidanges, 
et  qui  signifie,  d'après  nos  anciennes  Coutumes,  voie, 
chemin,  carrière,  sentier,  ou  rue  commune.  Dans  l'an- 
cienne Rome,  les  édiles  eurent  les  premiers  l'adminis- 
tration de  la  Voirie;  en  France  elle  était  autrefois  un 
moyen  de  fiscalité  pour  les  seigneurs.  Entendue  comme 
partie  de  l'administration  publique,  la  Voirie  a  pour 
objet  les  travaux  des  ponts  et  chaussées,  la  confection, 
l'entretien,  l'alignement,  l'amélioration  et  la  police  de 
toutes  les  voies  publiques;  elle  tend  i  rendre  les  com- 
munications promptes,  faciles  et  sûres.  Son  organisation 
est  fort  ancienne;  car,  dès  que  les  hommes  commencè- 
rent &  enclore  leurs  terrains,  à  construire  des  habita- 
tions, ils  durent  faire  des  réserves  aux  besoins  généraux 
par  la  nécessité  d'établir  des  voies  de  circulation  dont  ils 
jouissaient  tous:  mais  l'homme  étant  naturellement  en- 
vahisseur, il  a  fallu  dea  lois  spéciales  pour  faire  cesser 
les  empiétements  et  l'encombrement  des  chaussées  pu- 
bliques, qui  sont  une  propriété  commune  hors  du  com- 
merce, à  laquelle  personne  ne  peut  toucher  sans  permis- 
sion, une  propriété  imprescriptible  et  sur  laquelle  on  ne 
peut  acquérir  aucun  droit,  aucune  servitude,  quelle  que 
soit  la  durée  de  la  possession.  On  distingue  la  grande 
voirte  et  la  petite  votriê,  La  grande  voirie,  placée  dans 
les  pouvoirs  de  l'administration ,  comprend  :  les  routes 
impériales  et  les  routes  départementales;  les  quais  ei 
rues  qui,  dans  les  villes  et  villages,  font  suite  aux  grandes 
routes;  les  chemins  de  fer,  avec  leurs  talus  et  levées: 
les  fleuves  et  rivières  navigables  ou  flottables,  avec  leurs 
chemins  de  halage  ;  les  canaux,  avec  leurs  francs-bord^  : 
les  ponts,  bacs  et  bateaux  publics;  les  ports  maritime^ 
de  commerce;  les  fossés  et  les  plantations  le  long  dé- 
routes; enfin  tout  cp  qui  concerne  les  grandes  communi- 
cations par  terre  et  par  eau;  les  acquisitions  de  ter- 
rains; l'extraction  de  matériaux  ;  la  perception  des  droits 
d'octroi  et  de  péage;  la  police  du  roulage;  la  démolitior. 
desb&timents  menaçant  ruine.  D'après  les  lois  des  14  oc- 
tobre 1790,  29  floréal  an  x,  et  18  juillet  1837,  les  préfets 
dans  les  grandes  villes,  les  maires  ailleurs,  accordent  le> 
permissions  de  b&tir,  et  donnent  les  alignements  de 
maisons,  de  clôture  et  de  soutènement,  pour  construc- 
tions, réparations,  démolitions  et  saillies  de  b&timents 
sur  ou  joignant  la  voie  publique.  Les  dépenses  concer- 
nant la  grande  voirie  sont  &  la  charge  de  l'État,  sauf  les 
contributions  communales  et  individuelles.  Ce  sont  les 
Conseils  de  préfecture  qui  statuent,  sauf  recours  au  Con- 
seil d'État,  sur  les  contraventions  en  matière  de  grande 
voirie,  consistant  en  anticipations,  dépôt  de  fumier,  dé- 
térioration des  arbres,  fossés  et  ouvrages  d'art,  contra- 
ventions <jui  ont  été  constatées  par  les  maires,  adjoints, 
commissaires  de  police,  ingénieurs,  conducteurs,  pi- 
queurs ,  agents  de  la  navigation ,  gardes  champêtres  et 
gendarmes.  Les  propriétaires  riverains  des  voies  publi- 
ques sont  assujettis  à  différentes  obligations ,  telles  que  : 
subir  toute  expropriation  pour  cause  d'utilité  et  moyen- 
nant indemnité  ;  subir  la  luuiUe  de  leurs  terrains  i)our 
l'extraction  des  matériaux  nécessaires  aux  routes;  planter 
des  arbres  le  long  de  ces  routes;  couper  les  bois,  ô-uucs 


VOI 


1786 


VOI 


H  broussailles  qai  les  bordent;  souffrir  râcoulement  des 
eaux  de  la  voie  publique,  quand  elles  débordent  les  fos- 
ses.  Une  loi  du  21  mai  1836  a  divisé  en  deux  classes  les 
chemins  vicinaux  ou  propriétés  communales,  conduisant 
d'un  pays  tu  pays  voisin,  savoir  s  les  chemins  ordi- 
naires, qui  sont  à  la  charge  des  communes,  sauf  Timpôt 
de  prestation  ;  et  les  chemins  de  grande  communication, 
placés  sous  Tautorité  du  préfet,  et  h  la  dépense  desquels 
e  département  contribue.  Conformément  à  la  loi  du 
8  juillet  1837,  les  chemins  ruraux,  appartenant  égale- 
ment aux  communes,  et  qui  ne  servent  habituellement 
qu'aux  riverains,  pour  l'accès  des  fontaines,  abreuvoirs 
ou  pâturages,  sont  réglementés  par  les  maires.  L'admi- 
nistration des  ponts  et  chaussées  est  chargée  de  Texécu- 
tion  de  ce  qui  concerne  la  grande  voirie,  et  du  règlement 
de  sa  comptabilité.  A  Paris,  où  toutes  les  voies  publiques 
appartiennent  h  la  grande  voirie,  le  préfet  de  la  Seine 
s'occupe  des  travaux  de  communication  par  terre  et  par 
la  navigation,  du  pavage  et  des  trottoirs,  de  la  délimita- 
tion des  quartiers  affectés  à  l'exploitation  du  gaz,  de  la 
construction  et  de  l'entretien  des  égouts,  de  la  distribu- 
tion des  eaux,  de  la  consolidation  des  anciennes  carrières, 
des  constructions  en  général,  de  l'ouverture  des  voies 
nouvelles,  de  l'inscription  des  rues,  du  blanchiment  et 
du  numérotage  des  maisons.  Il  rappelle,  ainsi  que  le 
préfet  de  police,  à  l'exécution  des  lois  ;  il  fait  publier  les 
règlements,  suspend  les  constructions  dangereuses,  gê- 
nantes, ou  contraires  aux  règles  de  l'art,  et  prend  enfin 
toutes  mesures  d'intérêt  général  et  de  sûreté  publique. 

La  petite  voirie,  placée  dans  les  pouvoirs  municipaux 
qui  pratiquent  la  police  de  conservation,  comprend  les 
communications  dont  l'utilité  est  purement  communiUe. 
Elle  se  divise  en  voirie  vicinale,  pour  les  chemins  sans 
habitations  agglomérées,  et,  pour  les  autres  voies,  en 
voirie  urbaine,  dont  l'objet  est  l'établissement ,  la  con- 
servation et  la  police  de  ces  voies  publiques  dans  l'en- 
ceinte des  communes;  elle  surveille  la  confection  et 
l'entretien  des  chemins  vicinaux,  des  rues,  places,  pro* 
menades,  quais,  passages  et  impasses  qui  ne  font  partie 
ni  des  routes,  ni  des  chemins  da  grande  communi ration. 
Les  préfets  et  les  maires  font  vérifier  par  des  agents^ 
voyers  la  solidité  des  constructions,  la  fouille  des  caves, 
la  conservation  des  lieux  de  sépulture,  la  clôture  des 
terrains  pouvant  servir  de  refuge  aux  malfaiteurs  ou  de 
dépôt  d'immondices,  le  nettoiement  et  l'éclairage,  la  sû- 
reté et  la  liberté  de  circulation.  Les  contraventions  aux 
ordonnances  concernant  la  petite  voirie  sont  du  ressort 
des  tribunaux  de  simple  police,  qui  prononcent  les  peines 
d'amende,  et,  s'il  y  a  lieu,  d'emprisonnement,  édictées 
par  les  articles  4C4,  471  et  suivants  du  Code  pénal,  et 
qui  ordonnent,  au  besoin,  la  démolition  de  toute  œuvre 
irrégulièrement  élevée,  la  suppression  de  toute  saillie 
non  autorisée,  ou  l'exécution  de  tous  travaux  prescrits 
dans  un  intérêt  da  salubrité. 

Les  décrets  des  27  oct.  1808  et  24  décembre  1823  ont 
fixé  les  droits  de  grande  et  de  petite  voirie  pour  la  capi- 
tale. 11  est  établi  que  ce  qui  excède  le  nu  du  mur  des 
maisons  forme  une  saillie  que  l'autorité  municipale  peut 
accorder  ou  refuser,  tolérer  ou  supprimer.  Il  est  de  prin- 
cipe général  qu'aucun  propriétaire  ne  peut  construire 
ni  réparer  un  bâtiment  on  une  clôture  donnant  sur  la 
voie  publique,  sans  avoir  obtenu  préalablement  une  au- 
torisation écrite  donnée,  soit  par  le  préfet  s'il  s'agit  de 
grande  voirie,  soit  par  le  maire  s'il  s'agit  de  petite  voirie. 
Pour  Paris,  le  décret  du  10  oct.  1859  a  réuni  la  grande 
et  la  petite  voirie  dans  les  attributions  du  préfet  de  la 
Seine.  V,  Isambert,  Traité  de  la  voirie  urbaine,  1828-29, 
3  vol.  in-12;  Fleurigeon,  Code  de  la  voirie,  5*  édition, 
revue  par  Ménestrier,  1833,  in-8^  ;  Gillon  et  Stourm , 
Code  de  la  grande  voirie,  1834,  in-12;  Daubenton,  Code 
de  la  voirie  des  villes,  des  bourgs  et  des  villages,  1836, 
in-8°  ;  Davenne,  Recueil  méthodique  et  raisonné  des  lois 
et  règlements  sur  la  voirie,  1836,  2  vol.  in-8^,  et  Traité 
pratique  de  la  voirie  urbaine^  1858,  in-S^*  ;  Husson,  Traité 
de  la  législation  des  travaux  publics  et  de  Iw  voirie  en 
France,  2«  édit.,  1850,  2  vol.  in-8°;  Herman,  Traité  pra- 
tique de  la  voirie  vicinale,  1854,  in-8^  ;  Gotelle,  Des  oii- 
gnementset  permissions  de  voirie  urbaine,  1836,  in-8<>; 
Féraud-Giraud,  Servitudes  de  voirie,  1850,  2  vol.  \n^9^\ 
Martel ,  Manuel  de  la  salubrité,  de  Véclairage  et  de  la 
petite  voirie,  1859,  in-12.  T— y. 

VOITURIÎ  (du  latin  vectura,  action  de  transporter), 
véhicule  à  deux  ou  à  quatre  roues,  destiné  au  transport 
des  personnes,  des  marchandises  et  des  objets  quel- 
conques, et  que  traînent  des  chevaux  ou  des  bétes  de 
somme.  Il  y  a  des  voitures  d'utilité  et  des  voilures  do 


luxe  !  la  structure,  la  forme  et  l'ornement  dos  unes  et 
des  autres  ont  varié  à  l'infini,  selon  les  temps  et  les 
lieux.  Ainsi,  les  Romains  ont  eu  16  ou  17  espèces  de  voi- 
tures, portant  des  noms  différents  :  benna,  carpentum, 
carruca,  cisium,  covinus,  essedum^  pilenttÊm,  plaus- 
trum,  rheda,  ihensa,etc.  (  V.  ces  mots).  Parmi  les  voitures 
qui  servent  au  transport  des  matières  de  toute  sorte,  on 
peut  citer  la  charrette,  le  tombereau,  le  liaquet,  le  ca- 
mion, le  chariot,  le  fourgon,  la  tapissière,  etc.;  parmi 
celles  qui  servent  au  transport  des  personnes,  le  ca- 
briolet, le  cab,  le  tilbury,  le  phaéton,  la  berline^  le 
coupé,  le  landau,  la  calèche,  le  char-à-bancs ,  Vaméri- 
caine,  la  potache,  l'omnibus,  le  fiacre,  la  diligence,  etc. 
(  V,  ces  mots).  Tous  les  essais  que  l'on  a  faits  de  voituret 
mécaniques,  marchant  sans  le  secours  des  chevaux,  de 
voitures  à  air  comprimé,  de  voitures  à  vapeur,  n'ont  pas 
été  assez  heureux  Jusqu'ici  pour  ^ue  l'on  puisse  etpéret 
Jamais  d'obtenir  des  résultats  vraiment  utiles.  Par  exem- 

Île,  un  ingénieur  militaire,  Gugnot,  exécuta  à  Paris,  eo 
770,  une  voiture  à  vapeur  qui  devait  rouler  sur  les 
routes  ordinaiœs;  après  quelques  essais,  elle  fut  re« 
connue  insuffisante.  En  1804,  un  mécanicien  américain, 
Olivier  Evans,  parcourut  les  rues  de  Philadelphie  dans 
une  nouvelle  voiture  à  vapeur  ;  mais  les  parties  délicates 
du  mécanisme  ne  résistaient  pas  au  choc  du  pavé,  et  les 
mouvements  précis  que  chaque  pièce  exigeait  devenaient 
presque  impossibles  après  un  parcours  de  quelques  kilo- 
mètres. Plus  tard,  deux  Anglais,  Vivian  et  Trevithick, 
prirent  une  patente  pour  des  voitures  à  vapeur  :  ils  ne 
purent  garantir  les  voyageurs  de  la  fumée  et  de  la  cha- 
leur produites  par  la  chaudière.  En  1862,  les  voitures  et 
les  chevaux  ont  été  soumis  à  une  taxe,  déterminée  de  la 
manière  suivante  i 


▼  OITDEB 

CHBVAL 

desello 

'  '"■'      ' 

0 

ou 

à  4  roues. 

à  fi  roues. 

d*attcLii?e. 

Paris .• 

60  fr. 

40  fr. 

25  fr. 

Communes  autres  que  Pa- 

ris ayant  plus  de  40.000 

âmes  de  population. . . . 

50 

95 

20 

Comoiunes   de   20,000    à 

40,000  âmes 

40 

fiO 

15 

Communes    de    8,001    A 

80,000  âmes 

fis 

10 

10 

Communes  de  8,000  âmes 

et  au-dessous. 

10 

5 

5 

Les  ▼oitures  et  les  chevaux  employés  en  parde  pour 
le  service  du  propriétaire  ou  de  la  famille,  et  en  partie 
pour  le  service  de  l'agriculture  ou  d'une  profession  quel- 
conque donnant  lieu  à  l'imposition  d'une  patente,  ne 
sont  point  passibles  de  la  taxe.  Ne  donnent  pas  lieu  au 
payement  de  la  taxe  :  1<*  les  chevaux  et  les  voitures  pos- 
sédés en  conformité  des  règlements  du  service  militaire 
ou  administratif,  et  par  les  ministres  des  différents  cultes; 
2°  les  Juments  et  étalons  exclusivement  consacrés  à 
la  reproduction;  3<*  les  chevaux  et  voitures  exclusive- 
ment employés  aux  travaux  de  Tagriculture  ou  d'une 
profession  quelconque  donnant  lieu  à  l'application  de  la 
patente.  Il  est  attribué  aux  communes  un  dixième  du 
produit  de  l'impôt,  déduction  faite  des  cotes  ou  portions 
de  cotes  dont  le  dégrèvement  aura  été  accordé.        B. 

vorruBB  (Lettre  de).  V,  Lettre  de  vorrcHB. 

VOITURE  CELLOLAiRB,  voituro  k  Compartimenta,  dans 
laquelle  on  transporte  les  prisonniers  au  lieu  de  leur 
destination,  sans  qu'ils  communiquent  ensemble  pen- 
dant la  route.  Depuis  1837,  elle  a  remplacé  la  chaîne  des 
forçats. 

VOITURES  PUBLIQUES.  Tout  individu  qui  veut  mettre 
en  circulation  une  voiture  publique  doit  préalablement  la 
faire  examiner  par  l'autorité,  et  prendre,  après  autorisa- 
tion, une  licence,  un  laissez-passer,  et  une  estampille; 
celle-ci  est  apposée  sur  la  voiture.  Les  entrepreneurs  de 
voitures  publiques  sont  assujettis  à  des  règlements  qui 
font  loi  entre  eux  et  les  autres  citoyens.  Ils  payent  un 
impôt  spécial,  qui  fait  partie  des  contributions  indirectes, 
et  qui  est  du  dixième  du  prix  payé  pour  le  transport  des 
voyageurs  et  des  marchandises  :  toutefois,  la  perception 
détaillée  de  cet  impôt  peut  être  remplacée  par  un  abon- 
nement. Ils  doivent  tenir  registre  de  l'argent,  dos  effets 
et  des  paquets  dont  ils  se  chargent  :  ils  sont  responsables 
de  leur  perte  ou  de  leur  avarie,  à  moins  qu'ils  ne  proo- 
\*mi  que  ces  faits  ont  eu  lieu  par  cas  fortuit  ou  par  foret 


TOI 


1787 


VOL 


mftjeure  {Code  Napoiéon,  art.  178S-86).  Ceux  qui  contre- 
viennent aux  ordonnances  concernant  la  solidité  et  le 
chargement  des  voitures,  le  nombre  et  la  sûreté  des 
royagears,  l'indication  da  nombre  et  du  prix  des  places, 
du  nom  du  propriétaire,  etc.,  sont  punis  d'une  amende 
de  6  &  10  fr.  (Code  pénai,  art.  475).  V.  OrniiBos,  Fjacsb, 
Messagrribs,  Roulage. 

VOITURIN,  en  italien  Veiturino,  celui  qui  loue  des 
voitures  attelées  de  deux  chevaux  et  qui  conduit  lui* 
même  les  voyageurs.  Ces  voitures  sont  des  espèces  de 
berlines,  k  k  places  an  moins,  allant  à  petites  Journées 
et  couchant  chaque  soir.  Elles  font  des  voyages  de  plu- 
sieurs jours,  par  exemple,  de  Rome  à  Naples. 

YOIVODE.  F.  Vatvodb,  dans  notre  Di/otùmnairB  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

YOlX,  on  termes  de  Grammaire,  flexion  particulière 
que  prend  le  verbe  selon  que  le  sujet  est  représenté 
comme  agissant  et  comme  faisant  directement  subir  son 
action  à  autrui,  ou  au  contraire  comme  recevant,  éprou- 
vant, souffrant  Taction  d*autrui.  Dans  le  1*'  cas,  on  dit 
que  le  verbe  est  &  la  voix  active:  dans  le  2*  cas,  quMI  est 
à  la  vota;  passive,  et,  par  abréviation,  que  le  verbe  est 
actif  ou  passif.  Les  verbes  qui  expriment  un  simple  état 
ou  une  action  qui  reste  tout  entière  dans  le  sujet  sans 
avoir  besoin  d*en  sortir  ne  sont  pas  susceptibles  de  la 
voix  passive,  et  s'appellent  verbes  neutres*  La  langue 
grecque  ancienne  reconnaissait  entre  la  voix  active  et  la 
voix  passive  une  voix  intermédiaire  qu*on  appelait  voix 
moyenne  :  cette  forme  verbale,  généralement  semblable 
à  la  voix  passive,  était  plus  souvent  active  quant  au  sens, 
et  en  général  répondait  à  ceux  de  nos  verbes  pronomi^ 
naux  qui,  formés  de  verbes  actifs,  sont  suivis  d'un  com- 
plément direct  et  ont  pour  complément  indirect  le  pro- 
nom qui  les  précède  immédiatement,  lequel,  étant 
implicitement  exprimé  dans  la  forme  moyenne,  n'est  pas 
rendu  directement  en  grec.  K.  Actip^  Déponent,  Motbn , 
Passif.  P. 

VOIX,  ensemble  des  sons  que  l'homme  peut  fkire  en- 
tendre en  chassant  l'air  de  l'intérieur  de  ses  poumons. 
Les  physiologistes  ne  sont  pas  d'accord  sur  le  mécanisme 
de  la  voix  humaine,  et  le  comparent  les  uns  k  un  in- 
strument à  vent,  les  autres  à  un  instrument  à  cordes.  La 
vota;  pa/rlante  et  la  voix  chantante,  si  différentes  entre 
elles,  sont  cependant  produites  par  les  mêmes  organes. 
Relativement  à  l'acuité,  une  voix  est  gratw,  moyewie  ou 
aigtië.  Une  benne  voix  est  celle  qui  a  de  la  pureté,  du 
timbre,  de  l'étendue,  de  la  douceur  et  de  la  force  tout  à 
la  fois;  une  voix  est  mauvaise,  quand  elle  est  faible,  voi- 
lée, aigre,  nasillarde,  gutturale,  etc.  La  voix  fausse  est 
le  résultat  d'une  conformation  imparfaite  des  organes 
vocaux,  et  non  de  la  fausseté  de  1  oreille  :  car  on  voit 
journellement  des  individus  incapables  d'exécuter  avec 
justesse  la  gamme  la  plus  simple,  et  cependant  oui  signa- 
lent avec  intelligence  les  aberrations  de  tonalité  et  pren- 
nent plaisir  à  l'audition  de  la  musique.  La  voix  varie  avec 
l'âge  et  suivant  les  sexes.  Faible  et  aigué  dans  l'enfance, 
celle  de  l'homme  change  à  l'âge  de  la  puberté  r  alors  a 
lieu  la  mue,  pendant  laquelle  la  voix  est  rau(]ue,  d'une 
émission  pénible,  quelquefois  impossible;  puis  la  voix 
%Q  trouve  avoir  pris  de  la  force  et  de  la  gravité,  elle  a 
baissé  d'une  octave  ou  d'une  octave  et  demie.  II  n'y  a  que 
le  castrat  (V.  ce  mot)  qui  conserve  sa  voix  première.  La 
voix  des  hommes  est  d'autant  plus  forte  que  leur  larynx 
est  plus  développé  et  la  capacité  de  leur  poitrine  plus 
grande.  Chez  la  femme,  le  timbre  vocal  change  beaucoup 
moins  que  chei  l'homme,  et  il  conserve  presque  toujours 
les  caractères  de  l'enfance.  Le  timbre  vocal  peut  être 
modifié  par  les  habitudes  des  individus  :  ainsi,  ceux  qui 
se  livrent  à  des  professions  bruyantes  ou  qui  vivent  au 
milieu  des  champs,  obligés  de  dominer  en  parlant  des 
bruits  intenses  ou  de  se  faire  entendre  au  loin,  exercent 
et  développent  davantage  les  organes  de  la  voix.  Le  cli- 
mat doit  avoir  de  l'influence  sur  les  organes  vocaux  :  car 
les  peuples  du  Midi  ont,  en  général,  la  voix  plus  belle  et 
plus  sonore  que  les  habitants  des  pays  froids  ;  la  voix  est 
aussi  plus  belle  et  plus  aiguë  dans  les  saisons  cbaudes, 
plus  rauaue  et  plus  grave  pendant  l'hiver;  la  Picardie 
produit  plut  de  voix  de  basse  qu'aucune  autre  province 
de  France,  le  Languedoc  plus  de  ténors,  la  Bourgogne  et 
la  Franche-Comté  plus  de  voix  de  femmes.  La  situation 
de  l'âme  influe  d'une  façon  marquée  sur  la  voix,  qui 
diffère  selon  le  sentiment  qu'elle  exprime,  et  c*est  là  ce 
qui  fait  de  la  voix  humaine  le  plus  beau  moyen  d'exécu- 
tion que  l'art  musical  possède.  On  distingue,  par  rap- 
port à  la  qualité,  quatre  espèces  de  voix  :  1^  la  voix 
aiguè  de  femme,  appelée  soprano  ou  dessus;  2<*  la 


voix  grave  de  femme,  ou  contralto;  V  la  voix  aignQ 
d'homme,  ou  ténor;  4<*  la  voix  grave  d'homme,  ou  hasse 
{V,  ces  mots).  On  reconnaît  encore  une  voix  intermé- 
diaire chez  les  femmes,  le  meszo-soprano,  et  une  autre 
chez  les  hommes,  le  baryton  (  V.  ce  mot).  L'étendue  de 
toutes  ces  voix,  réunies  et  mises  en  ordre,  donne  cina 
octaves.  Les  voix  aigués  d'hommes  sont  naturellement, 
et  par  l'effet  d'une  conformation  physique  différente, 
plus  graves  d'une  octave  que  les  voix  aigués  de  femmes; 
de  même, le  contralto  est  à  l'octave  supérieure  de  la 
basse.  Les  peuples  du  Midi  aiment  beaucoup  les  voix 
aigufis,  ceux  des  pays  tempérés  préfèrent  les  moyennes, 
ceux  du  Nord  semblent  donner  la  préférence  aux  basses  i 
cela  peut  expliquer  pourquoi,  en  général,  les  premiers 
rôles  d'hommes  dans  les  opéras  ont  été  remplis  en  Italie 
par  des  soprani,  en  France  par  des  ténors,  en  Allemagne 
par  des  basses.  La  voix  comprend  deux  séries  de  sons 
très-distinctes,  les  sons  ou  la  voix  de  poitrine,  et  la  voix 
de  tête  ou  de  faucet  {V.  ce  mot);  la  liaison  de  ces  deux 
espèces  de  voix  est  une  des  grandes  difficultés  de  l'art  du 
chant.  B. 

voix  (Mise  de).  V.  Mise  de  voix. 

VOIX  ANGéLIQOB.  V.  ANOéUQDB. 

voix  humainb,  nom  que  les  Italiens  donnent  au  cor 
anglais. 

VOIX  HDMAiNB  (Jou  do),  uu  dos  jeux  d'anche  de  l'orgue, 
qui  sert  à  imiter  la  voix  humaine.  Ce  jeu,  fait  en  étain, 
et  dont  les  tuyaux  sont  très-courts  et  n'ont  pas  de  me- 
sure fixe,  a  toute  l'étendue  du  clavier  auquel  il  corres- 
pond. Il  est  construit  comme  le  cromorne,  &  l'exception 
de  son  ouverture,  qui  est  à  moitié  couverte  pour  en 
adoucir  le  son.  Il  sonne  4  l'unisson  du  huit^pieds  ouvert. 
Le  jeu  de  voix  humaine,  qui  était  autrefois  employé  à 
l'écho  et  à  la  pédale,  n'est  mis  maintenant  que  dans  le 
grand  orgue  ou  dans  le  positif.  Il  est  rare  d'en  rencontrer 
un  bon  t  celui  de  l'orgue  de  Fribourg  jouit  d'une  réputa- 
tion méritée.  F.  C. 

VOL,  action  '^e  prendre  furtivement  ou  par  force  la 
chose  d'autrul  pour  se  l'approprier.  Notre  Code  péna* 
distingue  le  vol  simple  et  le  vol  qualifié.  Le  vol  simple 
est  un  délit,  puni  correctionnellement  d'un  emprisonne- 
ment d'un  an  à  cinq  ans,  et  d'une  amende  de  16  tr.  à 
500  fr.  ;  les  juges  ont  la  faculté  d'ajouter  l'interdiction 
des  droits  civiques  et  civils  et  la  surveillance  de  la  haute 
police  pendant  5  à  iO  ans.  Le  vol  qualifié  est  celui  qui 
est  accompagné  de  circonstances  aggpravantes  ;  tels  sont  : 
le  vol  domestique,  commis  par  des  personnes  qui  sont 
aux  gages  de  celui  qui  a  été  volé;  le  vol  avec  effraction, 
fait  en  brisant  et  forçant  quelque  clôture;  le  vol  de  grand 
chemin,  le  vol  de  nuit,  le  vol  de  deniers  publics.  Les  vols 
qualifiés  sont  des  crimes,  dont  connaît  la  Cour  d'assises, 
les  peines  édictées  par  la  loi  varient  depuis  les  travaux 
forcés  à  perpétuité  jusqu'à  la  réclusion  (V.  le  Code 
pénal,  art.  370-401).  La  soustraction,  même  frauduleuse, 
entre  époux  ou  parents  et  alliés  en  ligne  directe  n'est 
qualifiée  ni  crime  ni  délit,  et  ne  donne  lieu  qu'à  des  ré- 
parations civiles.  —  Il  existe  dans  l'Inde  certaines  fa- 
milles où  le  vol  est  pour  ainsi  dire  une  profession  t  ceux 
qui  s'y  livrent  ont  une  étonnante  adresse;  pour  com- 
mettre leurs  rapines,  ils  sont  armés,  nus  et  frottés  d'huile, 
de  sorte  qu'il  est  aussi  dangereux  de  les  arrêter  que  dif- 
ficile de  les  retenir.  Diodore  de  Sicile  raconte  que,  dans 
l'ancienne  Egypte,  ceux  qui  voulaient  suivre  la  profes- 
sion do  voleur  se  faisaient  inscrire  chez  le  chef  reconnu 
des  gens  de  cette  espèce,  et  lui  rapportaient  tout  le  fruit 
de  leur  industrie  :  ceux  qui  avaient  été  volés  faisaient, 
chez  ce  même  chef,  une  déclaration  écrite,  contenant 
l'indication  des  objets  qu'ils  réclamaient,  etcelledu  temps, 
et  du  lieu  où  Ils  leur  avaient  été  enlevés  ;  par  une  sorte' 
de  transaction  de  l'ordre  social  avec  les  passions  hu- 
maines, on  laissait,  pour  la  restitution  des  objets,  le  quart 
de  leur  valeur  à  la  société  des  voleurs.  On  raconte  en- 
core que  les  jeunes  Spartiates  étaient  encouragés  au  vol 
comme  moyen  d'exercer  leur  adresse,  et  que,  s'ils  étaient 
pris,  on  les  punissait,  non  comme  coupables  d'un  crime 
ou  ^élit,  mais  parce  qu'ils  avaient  été  malhabiles.  Dans 
le  reste  de  la  Grèce  et  ches  les  Romains,  le  fouet  et 
l'amende  furent  le  châtiment  du  vol  ordinaire  :  accom- 
pagnï  de  violences,  le  vol  entraînait,  suivant  les  cas,  le 
bannissement,  la  condamnation  aux  mines,  certaines  mu- 
tiladons  corporelles,  et  même  la  mort.  Chez  les  Ger- 
mains, il  n'était  puni  que  d'une  amende.  Dans  l'ancienne 
France,  les  voleurs  de  grand  chemin  étaient  condamnés 
au  supplice  de  la  roue.  D'après  le  Code  pénal  de  1791  et 
la  loi  du  25  frimaire  an  viii,  les  peines  contre  le  vol  va- 
riaient deouis  2  ans  de  fers  jusqu'à  la  mort,  i 


VOL 


1788 


VOU 


vol.,  en  termes  de  Blason,  deux  ailes  étendues  comme 
quand  Toiseau  vole.  On  appelait  demi^vol  une  seule 
aile.  Le  vol  mis  au  cimier  se  nommait  vol  banneret,' 

VOLANT  (Jeu  du),  jeu  dans  lequel  deux  personnes 
armées  de  raquettes  se  renvoient  alternativement  une  pe- 
tite boule  de  liège  garnie  de  peau,  et  dans  laquelle  on  a 
planté  do  petites  plumes  qui  ralentissent  et  régularisent 
son  mouvement. 

VOLANTS,  garnkures  légères,  unies,  plissées  ou  tuyau- 
'.ées,  qu*on  attache  au  pourtour  des  robes  de  femmes,  et 
dont  on  met  un  ou  plusieurs  rangs. 

VOLE  (Faire  la).  C'est,  à  certains  Jeux  de  cartes,  faire 
seul  toutes  les  levées. 

VOLÉE,  en  termes  d* Artillerie,  décharge  de  plusieurs 
pièces  en  même  temps.  On  nomme  encore  volée  d*un  ca- 
non la  partie  de  la  pièc«  comprise  entre  les  tourillons  et 
la  bouche. 

voLéE,  pièce  de  bois  de  traverse  qui  s'attache  au  timon 
d'une  voiture  et  à  laquelle  les  chevaux  sont  attelés. 

VOLÉE,  en  termes  d'Architecture,  est  synonyme  de 
rampe.  Par  volée  d'un  arc,  on  entend  sa  courbure,  l'es- 
pèce d'ascension  qu'il  opère. 

VOLERIE,  en  termes  de  Fauconnerie,  chasse  qui  se 
fait  avec  des  oiseaux  de  proie.  On  distingue  :  la  haute 
Valérie  ou  volerie  du  faucon  sur  le  héron,  les  canards, 
les  grues  ;  et  la  basse  volerie,  celle  du  tiercelet  sur  la  per- 
drix, la  pie,  etc. 

VOLET,  fermeture  de  menuiserie  placée  au  dedans  du 
châssis  d'une  croisée.  On  nomme  volet  de  parement 
celui  qui  est  tout  d'une  pièce;  volet  brisé,  celui  qu'on 
peut  replier  sur  l'écoinçon.  On  a  étendu  le  nom  de  volets 
aux  contrevents  extérieurs.  V,  aussi  Colombier. 

VOLIGE,  planche  mince  de  bois  blanc;  —  latte  qu'on 
emploie  pour  porter  l'ardoise.  • 

VOLITION,  acte  de  la  volonté.  Elle  est  à  celle-ci  ce  que 
l'elTet  est  à  la  cause.  Locke  définit  la  volition  «  un  acte 
de  l'esprit  exerçant  avec  connaissance  l'empire  qu'il  sup- 
pose avoir  sur  quelque  partie  de  l'homme,  pour  l'appli- 
quer à  quelque  action  particulière  ou  pour  l'en  détour- 
ner; »  il  ajoute  que  la  volonté  est  la  faculté  de  produire 
cet  acte.  Celui-ci  est  en  raison  de  la  valeur  des  motifs  et 
de  l'énergie  de  la  volonté  :  faible,  si  le  choix  est  dou- 
teux; mais  quand  il  est  motivé  par  une  conviction  entière 
et  invariable,  il  se  manifeste  avec  la  même  force  et  la 
même  énergie.  C'est  par  erreur  qu'on  a  confondu  quel- 
ounfois  la  volonté  et  la  volition,  R. 

VOLONTÉ.  Considérée  dans  sa  manifestation ,  la  vo- 
lonté est  le  pouvoir  de  prendre  une  détermination  ;  dans 
sa  nature,  c'est  la  liberté  spontanée  éclairée  et  conseillée 
par  l'intelligence.  Vouloir,  c'est  se  diriger  soi-même  au 
lieu  de  se  laisser  diriger;  c'est,  à  la  place  d'une  détermi- 
nation qui  vient  du  dehors,  en  prendre  une  qui  vient  de 
nous  ;  c'est  user  de  nos  facultés  pour  atteindre  un  but. 
La  volonté  a  dû  s'éveiller  en  nous  spontanément;  il  faut 
que  nous  ayons  voulu  spontanément,  pour  savoir  que 
nous  pouvons  vouloir;  mais  il  suffit  d'un  seul  fait  pour 
nous  l'apprendre  à  toujours,  et  pour  que  la  conscience 
nous  atteste  que,  môme  quand  nous  ne  voulons  pas,  nous 
pouvons  toujours  vouloir.  La  volonté  se  confond  avec 
l'existence  et  la  causalité  du  mot  ;  aussi ,  comme  dit  Des- 
cartes, elle  est  ce  qu'il  y  a  en  nous  de  plus  proprement 
nôtre,  ou  plutôt  elle  est  nous-même,  et  constitue  pour 
ainsi  dire  à  elle  seule  la  personne  humaine.  C'est  par  la 
volonté  que  l'homme  est  réellement  cause  et  responsable; 
c'est  ce  qui  la  distingue  de  la  sensibilité  et  de  l'intelli- 
gence, qui  sont  de  leur  nature  fatales.  C'est  par  suite  de 
cette  différence  (ju'on  oppose  la  volition,  qui  est  libre  et 
imputable,  au  désir  qui  est  instinctif,  spontané,  non  im- 
putable en  lui-même.  L'homme  a  la  volonté,  pour  qu'il 
tende  lui-même  à  son  bien  ;  il  en  résulte  qu'elle  est  en 
rapport  constant  avec  les  autres  facultés,  dont  elle  subit 
l'induence  et  sur  lesquelles  elle  réagit  d'une  manière  puis- 
sante. Ce  rapport  l'a  fait  souvent  confondre  avec  ce  qui 
n'e^t  pas  elle.  Platon  ne  la  distinguait  pas  du  désir;  Ma- 
Icbranche  eut  le  même  tort  ;  les  Cartésiens  ne  l'ont  pas 
toujours  assez  distinguée  de  l'entendement.  Pour  Con- 
dillac  et  son  écolo,  la  Volonté  était  la  réunion  de  la  sen- 
sation agréable  ou  désagréable,  du  besoin,  du  malaise,  de 
l'inquiétude,  mi  désir,  de  la  passion,  de  l'espérance,  et  du 
phénomène  spécial  que  l'espérance,  jointe  à  la  passion , 
détermine.  La  confusion  est  facile  à  éviter  :  les  autres 
f&cultés  sont  au  moi ,  la  volonté  est  le  mot  lui-même  ; 
c'est  à  elle  seule  qu'appartient,  dans  la  variété  des  élé- 
ments de  notre  nature,  cette  unité  si  manifestement  pro- 
clamée par  la  conscience.  V,  Debs,  Tableau  de  l'activité 
wUontaire,  1844.  R. 


VOLTE  (du  latin  volutus;  de  volvere,  tourner),  en 
termes  d'Escrime,  mouvement  qu'on  fait  pour  éviter  les 
coups  de  l'ennemi.  Vol  ter,  c'est  changer  de  place  pour 
éviter  l'adversaire.  ^-  En  général ,  faire  volte-face,  c'est 
se  retourner  pour  faire  face  à  l'ennemi  qui  poursuit. 

voLTE ,  en  termes  de  Marine,  action  de  se  placer  pour 
livrer  le  combat. 

voLTE,  ancienne  danse,  originaire  d'Italie,  dans  laquelle 
le  cavalier  faisait  tourner  plusieurs  fois  sa  dame,  et  ter- 
minait  en  l'aidant  à  faire  un  bond  en  l'air.  Elle  était  du 
genre  de  la  gaillarde  ;  l'air  était  écrit  en  mesure  à  3/i. 

VOLTIGEUR ,  mot  qui ,  après  avoir  désigné  l'individu 
qui  prati(^ue  la  voltige  sur  une  corde  ou  sur  un  cheval, 
a  été  appliqué  à  certains  soldats  d'infanterie.  Le  premier 
consul  Bonaparte  décréta,  en  1804,  l'institution  des  com- 
pagnies de  voltigeurs;  il  les  attacha  d'abord  à  Tinfanterie 
légère,  et  bientôt  après  à  l'infanterie  de  bataille.  Aujour- 
d'hui ,  les  compagnies  de  voltigeurs  attachées  à  chaque 
bataillon  sont  des  compagnies  d'élite,  que  l'on  compose 
d'hommes  agiles  .et  bons  tireurs,  destinés  à  combattre  en 
tirailleurs.  Ils  occupent  la  queue  du  bataillon ,  et  sont  à 
la  gauche  en  bataille.  Ils  se  distinguent  à  leurs  épaulcitcs 
et  autres  ornements,  qui  sont  jaunes,  et  aux  cors  de 
chasse  brodés  en  jaune  sur  le  collet  et  les  pans  de  leiin 
habits.  —  Depuis  1822,  il  y  a  en  Corse  un  bataillon  de 
voltigeurs  corses^  qui  sert  d'auxiliaire  à  la  gendarmerie. 

VOLUCRAIRES,  compositions  du  moyen  &ge,  écrites 
ordinairement  en  vers,  et  contenant  des  descriptions 
d'oiseaux,  ainsi  que  de  leurs  mœurs,  avec  des  réflexions 
rappelant  aux  fidèles  quelques  vérités  morales  ou  reli- 
^euses.  Les  Volucraires  font  presque  toujours  partie  dis 
Bestiaires  {V,  ce  mot),  V.  Hippeau,  le  Bestiaire  divin  de 
Guillaume,  clerc  de  Normandie,  Introduction,  Caea, 
1852,  in-8».  C.  D— y. 

VOLUME,  en  latin  volumen  (de  voluere,  rouler,  tour- 
ner), nom  que  les  Romains  donnaient  à  leurs  livres, 
composés  de  plusieurs  feuilles  collées  bout  à  bout  et  rou- 
lées autour  d'un  b&ton.  De  là  leur  expression  evolvetr 
librum  (  dérouler  un  livre  ),  équivalant  à  celle  de  lire  un 
livre,  parce  que  pour  le  lire  il  fallait  le  dérouler.  Pour 
nous,  le  mot  volume  désigne  tout  livre  relié  ou  broché, 
considéré  surtout  par  rapport  à  son  format  :  on  distingue 
des  volumes  in-folio,  in-quarto,  in-octavo,  in-douze,  etc. 

VOLUPTUAIRË ,  en  termes  de  Droit,  se  dit  de  toute 
dépense  d'agrément,  de  luxe  ou  de  fantaisie.  Le  vendeur 
de  mauvaise  foi  doit  rembourser  à  l'acquéreur  les  dé- 
penses même  voluptucUres  qu'il  aurait  faites  {Code  Na^ 
poléon,  art.  1635). 

VOLUTE ,  enroulement  en  spirale  qu'on  voit  aux  cha- 
piteaux ionique,  corinthien,  et  composite  (  V,  les  fig.  au 
mot  Arc,  les  colonnes  de  la  fig.  Arc  en  déchturge,  p.  194, 
et  aux  mots  Composite  et  Corinthien).  Il  y  a  quatre  vo- 
lutes au  chapiteau  ionique  ancien,  et  huit  au  moderne; 
il  y  en  a  seize  au  chapiteau  corinthien,  dont  huit  angu- 
laires, et  huit  plus  petites  qu'on  appelle  hélices;  il  y  en 
a  huit  au  chapiteau  composite.  Le  centre  de  l'enroule- 
ment, ordinairement  rempli  par  un  fleuron  ou  rosette, 
s'appelle  œil  de  la  volute,  et  sa  cannelure  se  nomme  ca- 
nal, Vitruve  dit  que  les  volutes  représentent  la  coiiïure 
des  femmes  et  les  boucles  de  leurs  cheveux  ;  d'autres  les 
croient  imitées  de  l'écorce  roulée  du  bouleau,  ou  de  la 
corne  du  bélier.  On  met  aussi  des  volute  comme  orne- 
ments aux  modillons  et  aux  consoles. 

VOMITOIRES.  )  V,  ces  mots  dans  notre  Dictionnairk 

VORORT.  S      de  Biographie  et  d  Histoire. 

VOTE  (du  latin  votum  ),  se  dit  tout  à  la  fois  de  l'acto 
par  lequel  un  citoyen  exerce  le  droit  de  suffrage,  et  du 
vœu  exprimé  par  cet  acte.  On  vote  soit  au  scnUin^  soit 
par  assis  et  levé.  Dans  l'ancienne  Franco,  on  appelait 
vote  par  ordre  une  manière  de  voter  dans  les  États-Gé- 
néraux, laquelle  consistait ,  pour  chacun  des  trois  ordres., 
noblesse,  clergé,  tiers-état,  à  voter  isolément  comme 
corps,  et  non  par  tête  :  c'est  ainsi  que,  chez  les  Romains, 
on  votait  par  curies,  ou  par  tribus,  ou  par  centuries;  on 
exprimait  le  vote  du  groupe,  et  non  les  votes  individuels. 
Sous  la  Restauration,  on  nomma  double  vote  le  droit 
qu'eurent  les  électeurs  les  plus  fort  imposés  de  voter 
deux  fois  dans  la  même  élection ,  la  première  fois  avec 
les  autres  électeurs  dans  le  collège  d'arrondissement,  la 
seconde  dans  le  collège  départemental  où  eux  seuls  étaient 
admis.  V,  Bulletin,  Élection,  Scrutin. 

VOTIFS  (Boucliers,  —  Tableaux).  V.  Bouclier  «  El- 

VOTO. 

VOUSSOIR,  en  termes  d'Architecture,  chacune  des 
pierres  disposées  pour  former  une  voûte;  c'est  la  même 
chose  qu'un  claveau  (F.  ce  mot).  Les  voussoirs  sout 


you 


1789 


VOY 


taillés  en  forme  de  coin  tronqué  par  le  bas  ;  celui  du  mi- 
lieu reçoit  le  nom  de  clef  de  voûte  (F.  Clef).  La  Hire 
a  démontré  le  premier,  en  1695,  que  le  calcul,  et  non 
le  hasard,  doit  régler  la  forme  et  le  poids  de  chaque 
voussoir. 

VOUSSURE,  en  termes  d'Architecture,  portion  de 
voûte  qui  sert  d*empattement  à  un  plafond,  et  qui  en  fait 
la  liaison  avec  la  corniche  de  la  pièce  ;  —  toute  courbure 
en  voûte  (^ui  est  moindre  qu'une  demi-circonférence;  — 
Intrados  biais  et  décoré  de  figures  des  grands  arcs  qui 
couronnent  les  portes  d'église,  ou  encore  chacun  des  com- 
partiments longitudinaux  de  cet  intrados. 

VOUTE  (autrefois  votUte;  de  l'italien  volta,  dérivé  du 
latin  volutus,  participe  de  iX)lvere,  tourner,  rouler),  con- 
struction formée  par  un  assemblage  de  voussoirs  {V.  ce 
mot)^  et  destinée  à  recouvrir  un  espace  vide  compris 
entre  deux  murs  perpendiculaires  qu'on  nomme  pieds- 
droits  de  la  voûte.  Le  poids  des  voussoirs,  ainsi  que  celui 
des  masses  soutenues  par  la  voûte,  se  porte  sur  les  pieds- 
droits,  qui  doivent  toujours  être  très-solides,  parce  qu'ils 
ont  à  résister  tout  à  la  fois  à  un  effort  vertical  et  k  un 
effort  horizontal  ou  de  poussée.  Les  voussoirs  sont  en 
nombre  impair  :  le  plus  élevé,  qu'on  place  le  dernier, 
s'appelle  clef;  les  adjacents  sont  la  contre-clef:  ceux  qui 
posent  immédiatement  sur  les  pieds-droits,  à  la  nais- 
sance de  la  voûte,  se  nomment  sommiers»  Vintrados  et 
Vextrados  sont  la  surface  intérieure  et  la  surface  supé- 
rieure de  la  voûte.  Les  reins  de  la  voûte  sont  le  dessus 
de  la  voûte  aux  deux  côtés  de  la  clef,  c.-à-d.  l'espace 
compris  entre  un  plan  vertical  qui  s'élèverait  de  la 
naissance  de  l'extrados  de  la  voûte ,  et  un  plan  horizon- 
tal tangent  au  sommet  de  cet  extrados.  L'épaisseur  des 
voussoirs  est  ordinairement  déterminée  par  les  dimen- 
sions qu'offrent  les  pierres  à  employer  ;  ils  comprennent 
chacun  une  partie  é^e  de  l'intrados;  leurs  joints  doi- 
vent être  normaux  à  la  courbe  de  ce  dernier.  En  principe 
général,  il  faut  éviter  que  les  voûtes  exercent  sur  leurs 
appuis  une  poussée  trop  considérable  :  on  diminue  la 
poussée  en  augmentant  le  nombre  des  voussoirs,  en  di- 
minuant l'épaisseur  de  la  voûte  de  la  naissance  au  som- 
met ,  et  en  taillant  l'extrados  des  voussoirs  suivant  des 
plans  horizontaux.  La  construction  d'une  voûte  se  fait  sur 
un  cintre  [V.  ce  mot). 

Les  voûtes  affectent  un  grand  nombre  de  formes.  Dans 
une  voûte  à  plein  cintre  ou  en  berceau,  l'arc  est  une  por- 
tion de  cercle  de  180  degrés,  c.-&-d.  un  demi-cercle  par- 
fait; le  centre  est  dans  le  plan  de  la  naissance  de  la 
courbe  :  c'est  le  genre  de  voûte  qui  produit  le  moins  à,e 
poussée  oblique,  parce  que  les  parties  les  plus  basses  de 
l'arc  tombent  perpendiculairement  sur  les  appuis.  —  Les 
voûtes  surbaissées  sont  celles  dont  la  hauteur  est  moindre 
que  récartement  des  deux  points  d'appui.  Tantôt  elles 
sont  formées  par  une  portion  plus  ou  moins  considérable 
du  demi-cercle,  et  elles  présentent  alors,  parmi  toutes 
celles  de  cette  espèce,  le  moins  de  difficultés  d'exécution 
H  Taspect  le  plus  satisfaisant;  tantôt  elles  sont  établies, 
•oit  suivant  ZM  ellipse,  en  prenantl  e  grand  axe  pour 
largeur  et  la  moitié  du  petit  axe  pour  hauteur,  soit  sui- 
vant une  courbe  formée  par  plusieurs  portions  de  cercle. 
Dans  ce  dernier  cas ,  elles  sont  dites  en  anse  de  panier  : 
il  y  en  a  &  3,  à  5,  à  7  ou  à  9  centres,  suivant  le  nombre 
d'arcs  de  cercle  que  leur  section  présente  (F.  Arc, 
p.  i9i,  col.  1),  et  leurs  arcs  extrêmes  se  raccordent  tou- 
jours avec  les  surfaces  des  pieds-droits.  Quand  une  voûte 
surbaissée  a  un  rayon  si  éloigné  qu'on  sent  à  peine  la 
courbure,  on  la  nomme  voûte  plate,  —  Les  voûtes  sur- 
haussées ou  surmontées  sont  celles  qui  ont  une  hauteur 
plus  grande  que  l'écartement  des  deux  pieds-droits,  en 
d'autres  termes,  qui  ont  plus  d'élévation  que  le  demi- 
cercle.  C'est  en  elles  que  la  poussée  est  le  plus  faible. 
Elles  peuvent  être  établies,  soit  suivant  une  ellipse,  en 
prenant  le  petit  axe  pour  largeur  et  la  moitié  du  grand 
axe  pour  hauteur,  soit  suivant  plusieurs  arcs  de  cercle 
qui  se  raccordent ,  soit  enfln  en  prenant  deux  arcs  de 
cercle  qui  se  croisent  au  sommet.  Cette  dernière  disposi- 
tion donne  la  voûte  en  ogive,  qui  est  le  caractère  distinc- 
tif  de  l'architecture  ogivale.  —  La  voûte  en  arc  de  cloUre 
est  formée  par  l'intersection  de  deux  voûtes  cylindriques, 
de  manière  que  celles-ci  produisent,  par  leur  rencontre, 
des  angles  dièdres  rentrants.  Les  pierres  de  ces  angles 
étendent  leurs  bras  dans  les  deux  voûtes,  et  portent  à 
leur  partie  supérieure  une  échancrure  destinée  à  recevoir 
la  pierre  supérieure.  La  clef  est  carrée  en  plan,  et  porte 
en  dessous  le  raccordement  ou  plutôt  la  réunion  des 
quatre  arêtes  rentrantes.  Lorsque  les  voûtes  sont  biaises, 
I  appareil  se  modifie  suivant  le  biais,  qui  porte  eatière- 


ment  sur  les  pierres  d'arêtes.  —  La  voûte  d* arête  c^t 
constituée,  comme  la  précédente,  pai»  rintersection  df 
deux  voûtes  cylindriques,  avec  cette  différence  que  les 
angles  dièdres  de  rencontre  sont  saillants  au  lieu  d'être 
rentrants,  et  forment  quatre  arêtes  vives  qui  viennent  se 
réunir  à  la  clef.  L'appareil  diffère  de  celui  de  la  voûte  en 
arc  de  cloître,  en  ce  que  les  pierres  d'angles  portent  leur 
échancrure  en  dessous  au  lieu  de  l'avoir  dans  la  partie 
supérieure,  et  que  la  clef  de  voûte  est  à  quatre  bras  au 
lieu  d'être  carrée.  —  La  voûte  annulaire  est  celle  qui 
porte  sur  deux  murs  circulaires  concentriques.  Une  des 
variétés  de  ce  genre  est  la  voûté  en  vis  ou  en  limaçon^ 
dite  encore  voûte  hélicoïdale,  dont  l'axe  s'élève  suivant, 
une  suite  de  spires.  —  On  nomme  voûte  en  cul-de-four 
une  voûte  sphérique  ou  sphéroïde ,  surhaussée  ou  sur- 
baissée, élevée  sur  un  plan  circulaire.  Les  voûtes  de  ce 
genre  sont  les  premières  qui  apparaissent  dans  l'archi- 
tecture romane;  elles  couvrent  les  absides  (  V.  ce  mot). 
Quand  elles  ont  peu  d'élévation  de  cintre,  on  les  appelle 
voûtes  en  calotte.  —  La  voûte  en  coquille  a  la  forme  plus 
ou  moins  régulière  d'une  demi-coupole.  Elle  sert  à  cou- 
vrir une  niche.  L'appareil  de  cette  voûte  se  trace  par  des 
divisions  également  espacées  sur  la  façade  verticale  qui 
est  un  arc  de  cercle,  et  venant  aboutir  à  un  point  central 
inférieur,  de  manière  à  former  un  éventail  courbe  ;  les 
claveaux,  étroits  en  bas,  vont  en  grandissant  à  mesure 
qu'ils  s'élèvent.  A  l'époque  de  la  Renaissance,  on  a  sou- 
vent décoré  les  voûtes  en  coauille,  soit  avec  des  caissons, 
soit  avec  des  ornements  en  demi-relief.  —  Une  voûte  co- 
nique est  celle  qui  est  circulaire  en  plan ,  et  angulaire 
en  coupe;  elle  est  formée  d'un  cône  creux.  Si  son  axe 
est  horizontal  au  lieu  d'être  vertical,  on  la  nomme  voûte 
en  canonnière. 

Les  anciens  Égyptiens,  selon  l'opinion  générale,  n'au- 
raient pas  connu  l'art  de  construire  les  voûtes  :  cependant 
la  partie  supérieure  des  murs,  dans  quelques  construc- 
tions de  Médinet-Abou,  prouve  que  les  plafonds,  aujour- 
d'hui tombés,  devaient  être  voûtés  en  pierre.  Strabon 
parle  des  voûtes  des  monuments  de  Babylone.  On  ne  peut 
pas  dire  que  les  Grecs  aient  ignoré  la  voûte,  puisque  l'on 
trouve  des  voûtes  dans  plusieurs  monuments  d'un  âge 
reculé,  par  exemple,  à  Orchomène  et  à  Mycènes  :  mais 
il  est  positif  qu'ils  n'en  firent  point  usage  dans  les  beaux 
temps  de  leur  architecture,  au  moins  d'une  manière  gé- 
nérale; ils  préféraient  les  plates-bandes.  C'est,  au  con- 
traire, l'emploi  de  l'arc  et  de  la  voûte  qui  distingue  l'archi- 
tecture romaine  :  mais,  des  différentes  voûtes  que  nous 
connaissons,  la  seule  qu'on  y  admit  fut  le  plein  cintre. 
Les  Romains  surent  alléger  la  maçonnerie  des  voûtes  en 
y  employant  de  petits  vases  ou  tubes  de  terre  cuite  é vi- 
dés et  enfilés  verticalement  les  uns  dans  les  autres  :  ce 
genre  de  construction  se  retrouve  plus  tard  dans  la  cou- 
pole de  l'église  S^-Vital  à  Ravenne,  et  il  a  été  renouvelé 
chez  les  modernes  par  l'architecte  Louis,  quand  il  bâtit 
le  Théâtre-Français  à  Paris.  n. 

VOYAGE  DU  JEUNE  ANACHARSIS  EN  GRÈCE, 
Voyage  fictif  coniposé  par  J.-J.  Barthélémy  pour  servir 
de  cadre  à  ai*  tableau  de  la  Grèce  ancienne  dans  le  mi- 
lieu du  iv^  siècle  avant  l'ère  vulgaire  ;  il  commence  quel- 
ques années  avant  la  naissance  d'Alexandre  le  Grand,  et 
finit  à  l'époque  où  Philippe  de  Macédoine  a  dompté  toutes 
les  petites  republiques  grecques.  L'auteur  suppose  qu'un 
jeune  Scythe  de  nation,  descendant  du  philosophe  Ana- 
charsis,  curieux  de  connaître  les  Grecs  et  de  s'instruire 
dans  leur  civilisation,  vient  se  fixer  à  Athènes,  d'où  il 
fait  plusieurs  voyages  dans  les  provinces  voisines,  obser- 
vant partout  les  mœurs  et  les  usages  des  peuples,  assis- 
tant à  leurs  fêtes,  étudiant  la  nature  de  leurs  gouverne- 
ments ;  quelquefois  consacrant  ses  loisirs  à  des  recherches 
sur  les  progrès  de  l'esprit  humain;  d'autres  fois,  conver- 
sant avec  les  grands  hommes  qui  florissaient  alors,  tels 
qu'Épaminondas,  Phocion,  Xénophon,  Platon,  Aristote, 
Démosthène,  etc.  Dès  qu'il  voit  la  Grèce  asservie  par  Phi- 
lippe, il  retourne  en  Scythie,  après  une  absence  de 
22  ans  environ,  et  rédige  son  voyage. 

Cette  composition,  très-ingénieuse,  est  en  même  temps 
une  grande  œuvre  d'érudition,  car  Barthélémy  en  a  puise 
les  faits  et  jusqu'aux  moindres  détails  dans  tous  les  au- 
teurs de  l'antiauité  grecque  et  latine,  et  ses  autorités  sont 
citées  au  bas  des  pages  de  son  texte;  Au  point  de  vue  de 
la  science,  de  l'étendue  et  de  l'exactitude  des  recher- 
ches, l'ouvrage  ne  laisse  rien  à  désirer,  surtout  pour 
l'époque  où  il  fut  fait;  mais  le  plan  et  l'exécution  ont 
essuyé  d'assez  graves  critiques  :  on  a  reproché  au  plan 
de  n'être  qu'une  fiction,  où  sont  introduits  quelques 
personnages  imaginaires  qui  n'ont  et  ne  pouvaient  avoir 


VOY 


1790 


VUL 


ftacuQ  intérêt  à  côté  des  personnages  historiques  mis 
en  scène;  la  donnée  acceptée,  l*auteur  n*cn  a  pas  tiré 
tous  les  avantages  qu*eiie  devait  produire.  «  Ce  plan, 
dit  M.  Viliemain,  ce  n^est  pas  une  analyse,  ce  n*est  pas 
un  récit ,  c'est  Timitation  de  la  vie,  la  traduction  litté- 
rale,  pittoresque  de  tout  ce  que  le  spectacle  de  la  Grèce 
aurait  donné  d'émotions  et  d'idées  &  un  contemporain. 
Barthélémy  s'était  donc  imposé  à  lui-même  cette  vivacité 
de  coloris,  ce  naturel  dans  les  détails,  cette  expression 
du  moment  dont  je  lui  reproche  d'avoir  manqué.  »  Avant 
M.  Yillemain,  on  avait  déjà  remarcfué  que  dans  VAna- 
char  sis  la  peinture,  soit  des  scènes  vivantes,  soit  des  sites 
ou  des  monuments,  bien  qu'exacte,  manquait  d'anima- 
tion, de  vérité,  de  couleur  locale;  c'était  sans  doute  un 
peu  le  défaut  du  temps ,  qui  ne  comprenait  rien  &  l'Anti- 

3uité,  et  que  l'auteur  crut  lui  fsûre  coûter  en  Taccommo- 
ant  en  contemporaine;  c'était  aussi,  il  faut  bien  le  dire, 
la  faute  du  tempérament  de  Barthélémy  s  il  n'avait  point 
visité  la  Grèce,  où  l'amour  de  son  sujet  aurait  dû  le  con- 
duire, et  son  imagination  était  trop  calme  pour  suppléer 
par  une  intuition  de  génie  à  tout  ce  que  la  vue  mdme 
des  lieux  lui  aurait  pu  inspirer.  Enfin,  Barthélémy  com- 
mença son  ouvrage  a  47  ans  et  le  finit  à  72  ans,  et  peut- 
être  faut-il  chercher  encore  dans  ces  dates  l'origine  de 
plusieurs  des  défauts  dont  nous  venons  de  parler*  Malgré 
tout ,  le  Voyaçê  d*Anacharsis  n'en  reste  pas  moins  un  livre 
digne  de  la  plus  haute  estime  :  «  On  ne  pourra  facilement 
l'égaler,  et  moins  encore  le  faire  oublier,»  dit  encore  M.  Yil- 
lemain, avec  autant  de  justesse  que  de  justice.  Cet  ouvrage 
d'une  placide  beauté  parut  en  1788,  Paris,  A  vol.  in-i** 
et  atlas;  il  fut  accueilli  avec  une  sorte  d'enthousiasme; 
pendant  un  demi-siècle  il  a  été  très-souvent  réimprimé, 
et  on  l'a  traduit  à  l'étranger.  S'il  est  aujourd'hui  moins 
))opuIure,  il  garde  et  gardera  toujours  un  haut  rang 
parmi  les  meilleures  œuvres  françaises  d'érudition  solide 
et  de  littérature  élégante  et  sérieuse.  K.  M.  Yillemain , 
Tableau  de  la  littérature  au  xvin'  siècle,  42*  leçon .  G.  D-y. 

voYAGB  no  pàLBRiiv  (Le),  célèbre  ouvrage  anglais,  com- 
posé par  Bunyan.  C'est  une  sorte  d'épopée  en  prose  mys- 
tique, une  allégorie  de  la  vie  chrétienne,  qui  a  eu  en 
Angleterre  un  succès  incroyable.  Nulle  part  ailleurs  la 
langue  anglaise  n'a  plus  de  précision,  de  vigueur  et  de 
richesse.  Le  Voyage  du  Pèlerin  est  lu  avec  édification 
par  les  ouvriers  et  les  paysans  eux-mômea<  On  ignore  la 
date  de  la  i'*  édition  de  ce  livre  ;  la  2*  parut  en  1678. 11 
en  existe  une  traduction  française  sous  ce  titre  t  h  Pèle" 
rinage  des  chrétiens  à  la  Cité  céleste,  décrit  soui  la  «i- 
milUude  cTtm  songe  ^  Paris,  1831,  in-12. 

VOYAGE  SENTiMEfiTAL  (Le),  ouvrsge  OÙ  l'auteuf  anglais 
Sterne  raconte  ce  qui  lui  arriva,  vers  U  fin  de  sa  vio, 
dans  un  voyage  en  France,  et  oui  fut  publié  en  1707.  Le 
livre  est  naturellement  épisodlque,  et  composé  d'une 
suite  de  scènes,  de  petits  tableaux  détachés  i  on  y  re- 
marque une  exécution  savante,  une  rare  perfection  de 
détails.  En  rendant  compte  de  ses  sentiments  et  de  se^ 
pensées.  Sterne  se  montre  observateur  profond,  subtil 
môme  et  un  peu  trop  enclin  à  moraliser  :  des  élans  de 
vive  sensibilité  donnent  un  ^nd  charme  au  Voyage 
sentimental,  mais  parfois  aussi  l'on  est  bien  près  de  Taf- 
féterie  et  du  sentimentalisme  précieux.  Au  patIuHique  se 
mêle  le  plaisant,  aux  traits  touchants  les  saillies  de 
gaieté  ;  Sterne  pousse  le  goût  de  l'originalité  jusqu'au 
paradoxe,  l'enjouementjusqu'à  la  bouffonnerie.  Son  style 
ne  vise  ni  à  la  pureté  ni  à  l'harmonie;  il  a  tout  à  la  lois 
des  néologismes  et  des  locutions  archaïques  :  mais  il  est 
flexible,  animé,  pittoresque,  et  rencontre  au  besoin  des 
expressions  d'une  délicatesse  peu  commune. 

Voyages.  On  distingue  les  voyages  terrestres  et  les 
voyages  maritimes,  et,  parmi  ces  derniers,  ]eB  voyages 
de  cabotage  (  V.  ce  mot)  et  les  voyages  de  long  oours^ 
entrepris  généralement  dans  un  intérêt  de  commerce* 
Les  voyages  de  circumnavigation  ou  voyages  autour  du 
monde  ont  pour  but  de  faire  des  découvortes,  des  explo-- 
ratiofis  de  régions  peu  connues.  Les  voyages  ont  toujours 
été  considérés  comme  le  complément  de  toute  bonne 
éducation  :  dès  l'Antiquité,  on  se  formait  en  voyageant, 
et  ce  n'était  qu'au  retour  de  longues  excursions  qu'on 
devenait  législateur  ou  philosophe.  Lycnrgue,  Pythagore, 
Selon,  Hérodote  voyagèrent  dans  les  paysétran|^,  pour 


en  étudier  les  institutions,  les  mœurs  et  riiistoirr.  Ln 
relations  de  voyages  sont  pour  le  géographe  ce  que  les 
Mémoires  sont  pour  rhi»torien  :  elles  lui  fournissent  une 
partie  des  matériaux  qui  lui  sont  nécessaires  pour  U 
composition  de  ses  ouvrages.  C'est  ainsi  que  les  Périplet 
(K.  ce  mot)  des  Anciens  nous  donnent  des  renseigne- 
ments précieux  ;  mais  on  ne  saurait  ranger  parmi  les  re- 
lations de  voyages  les  Itinéraires  {V,  ce  mot)  parvenus 
jusqu'à  nous.  Si  l'on  excepte  les  récits  de  pèlerinages  en 
Terre  Sainte,  le  moyen  &ge  chrétien  offre  peu  de  rela- 
tions intéressantes;  il  en  existe,  au  contraire,  un  certain 
nombre  dans  les  littératures  arabe  et  juive.  A  l'approclic 
des  temps  modernes,  le  sénie  du  commerce  provoqua, 
notamment  chez  les  Vénitiens,  les  recherches  et  les  des- 
criptions utiles  1  puis  les  découvertes  maritimes  du  w*  u 
du  XVI*  siècle,  coïncidant  avec  l'invention  de  l'imprime- 
rie, multiplièrent  les  entreprises  d'exploration.  Des  lore, 
la  littérature  de  voyages  est  devenue  très-féconde.  On 
peut  consulter  Vffisloire  générale  des  Voyages  par  l'abbé 
Prévost,  1746,  20  vol.  in-4<*,  et  la  Bibliothèque  univer- 
selle des  voyages  par  Albert  Montémont ,  1833-36|  44)  vol. 
in-8«. 

VOYAGES  D«  6ULLIVEB.   V.  GdlUVBH. 

YOYELLES  (du  latin  vocalis,  sonore),  lettres  qui  OM 
par  elles-mêmes  un  son,  par  opposition  aux  consonnes , 
qui  ne  sonnent  qu'avec  le  concours  d'une  voyelle.  U  y  s 
en  français  5  voyelles,  a,  e,  i,  o,  u;  6  en  comptant  y, 

3ui  fait  double  emploi  avec  i,  sinon  comme  caractère, 
u  moins  comme  son.  Aux  voyelles  proprement  dites 
s'ajoutent  d'autres  voyelles  composées  de  deux  ou  de 
plusieurs  lettres,  mais  formant  un  son  simple,  comme 
au,  eau f  ai,  aie,-  eu,  ou.  Enfin  il  y  a  les  voyelles  dites 
diphthonçues,  parce  que,  bien  que  prononcées  en  une 
seule  émission  de  voix^  elles  laissent  entendre  un  double 
son,  comme  «t  dans  lui,  ié  dans  amitié,  ieu  dans  lieu,  etc. 
Les  voyelles  ce,  os,  étaient  propres  aux  Latins,  mats  ont 
eu  probablement  une  origine  grecque.  Les  voyelles  grec- 
ques se  divisaient  en  propres  et  impropres  ;  celle»<i 
comprenaient  tout  ce  qui  est  appelé,  daaa  l'enseign»* 
ment  de  cette  langue  morte,  dipnthongoe.  —  La  langue 
française  a  une  espèce  de  voyelles  qui  lui  est  particu- 
lière :  ce  sont  les  voyelles  nasales,  formées  de  la  combi- 
naison des  voyelles  simples  avec  la  consonne  n  ou  Is 
consonne  m,  comme  an,  on,  en,  in,  un,  ym  (thym);  ^m, 
aim,  ein,  etc.  Vt  NasAUs,  BaiVËt,  Loiioois«  Sm- 

YOYELLBS.  P. 

YOYËR0  (Agants),  fonctionnaires  obafgéa  de  l'entve» 
tien  et  de  fa  rectification  des  chemins  vicinaux.  Dans 
cfaaaue  département ,  un  agent  voyer  en  chef  dirige  le 
service  sous  l'autorité  immédiate  du  préfet,  et  centnNse 
au  chef-lieu  toutes  les  opérations  ;  U  a  sous  tes  oré«es 
les  agents  voyers  d'arrondissement^  qui  sont  préposés 
aux  travaux  des  chemins  de  grande  communication,  et 
les  agents  voyers  cantonaux,  chargés  de  surveiller  les 
chemins  de  petite  communioAtlen«  Le  traitement  des 
agents  voyers  est  fixe,  et  déterminé  par  les  Conseils  ^ 
néraux* 

Y  (JE,  en  termes  d'Architecture,  toute  ouverture  pra- 
tiquée à  un  bâtiment  pour  y  faire  pénétrer  le  Joui  ou 
faciliter  l'aspect  des  objets  extérieurs.  Une  vue  peut  être 
ou  droite,  ou  de  côté,  ou  d'en  haut*  ou  d^en  bas*  fills 
est  dite  faitière,  quand  çlle  est  prisé  vers  le  faite  d'un 
comble;  d^roM,  lorsqu'elle  est  iàite  au-dœsns  d'ans 
corniche,  d'une  plinthe,  ou  dans  quelque  ornementi  -* 
Du  droit  de  se  clore  résulte  pour  le  propriétaire  le  droii 
d'empécber  autrui  d'avoir  des  vues  sur  son  liéritagri  t 
aussi  la  loi  a-t-elle  déterminé  d'une  manière  précise  la 
droits  et  devoirs  dos  voisins  en  te  qtii  concerne  lee  vum 
et  jours.  V.  Mitoybnnsté,  Servitode» 

vtiB  (Seconde),  faculté  que  ceftMds  individat  préten- 
dent posséder  de  voir  ce  qui  existe  ou  ce  qui  tfrive  à  de 
grandes  distances.  Une  sorte  de  seconde  vue  est  attri- 
buée  à  Socrate  par  Platon  dans  son  Théagès,  et  à  Apol- 
lonius de  Tyane  par  Philostrate.  Les  phénomènes  de  ce 
genre,  dotit  rien  fie  démontre  la  réalité,  sont  nngés 
dans  la  même  classe  que  ceux  dd  aomnambaltaifie  ma- 
gnétique* 

YUl/GATPi.  V,  ce  mot  dans  notre  Dktionnairê  de  Bio» 
graphie  et  d'flisloireé 


WAL 


1791 


WAL 


w 


\V,  lettre  particulière  aux  idiomes  germaniques,  et  qui 
s'est  introduile  assez  tard  dans  Talphabet  des  langues 
néolatines.  Les  Allemands  la  nomment  vé,  les  Anglais 
doubla  U,  et,  quand  on  l'emploie  en  Avançais  &  la  trans- 
cription de  mots  d'origine  étrangère ,  on  l'appelle  dour 
ble  V.  Selon  MabiUon,  les  deux  V  furent  séparés  jusqu'au 
xu*  siècle,  époque  où  on  les  réunit  en  un  seul  caractère  s 
cependant  le  W  se  trouve  dans  un  diplôme  de  Clovis  III, 
à  la  fin  du  vit*  siècle.  En  allemand,  le  W  se  prononce 
comme  notre  V  simple,  lequel  reçoit  le  son  de  notre  F; 
il  ne  parait  pas  néanmoins  qu'il  en  ait  été  toujours  ainsi, 
car  l'U  de  certains  mots  (prononcé  ou)  a  remplacé  le  W 
qui  s'y  trouvait  anciennement  :  par  exemple,  frau 
(femme)  s'est  écrit  primitivement  frawê.  En  anglais,  le 
W  au  commencement  des  mots  s'articule  ou;  à  la  fin , 
tantôt  il  est  muet,  comme  dans  roto,  lou>,  etc.,  tantôt 
il  indique  une  valeur  exceptionnelle  dans  la  voyelle  qui 
le  précède,  comme  dans  law,  new,  etc.  Nous  avons  con- 
servé au  W  la  valeur  ou  dans  les  mots  venus  de  l'an- 
glais :  ainsi,  whist  se  prononce  ouist;  cependant  wagon 
se  prononce  et  commence  déjà  à  s'écrire  vagon.  Dans  le 
passage  d'une  langue  à  une  autre,  11  y  a  eu  souvent  per- 
mutation du  W  et  du  G  :  guerre  vient  de  wehr,  ga- 
rantie de  warrant  ;  les  Gaulois  et  leurs  descendants 
sont  appelés  Wallons  par  les  Flamands  ;  notre  nom 
propre  de  Gauthier  répond  à  l'anglais  et  à  l'allemand 
IValter,  Guillaume  à  l'anglais  William  et  à  l'allemand 
Wilhelm;  le  nom  que  nous  donnons  au  pays  de  Galles 
vient  de  celui  de  Wales,  qui  lui  est  donné  par  les  An- 
glais. Le  W  n'existe  pas  dans  les  alphabets  slaves  ; 
quand  on  ^£rit  les  noms  rosses  Souwarow,  Nowogorod, 
Oczakow,  Iwan,  etc.,  on  emprunte  cette  orthographe  & 
des  transcriptions  allemandes.  —  Le  W  a  été  la  marque 
de  fabrique  des  monnaies  firappées  à  Lille. 

WAGON,  mot  anglais  qui  signifie  chariot,  et  que  fé- 
blissement  des  chemins  de  fer  a  fait  passer  dans  notre 
langue.  Il  désigne  les  voitures  de  transport  sur  les  voies 
ferrées 

WAGUEMESTRE.  V.  Vagcbmestrï. 

WAKASH  (Langue),  on  NotrrxA,  une  des  langues  indi- 
gènes de  l'Amérique  du  Nord,  parlée  dans  le  Nouveau- 
Hanovre,  aux  lies  du  roi  Georges  et  Quadra-Vancouver. 
Elle  abonde  en  aspirations,  en  consonnes  difiBciles  à  pro- 
noncer, en  terminaisons  sourdes.  C'est  une  des  plus 
dures  que  l'on  connaisse.  Beaucoup  de  ses  mots  finissent 
en  th  et  tx,  comme  dans  la  langue  aztèque. 

WAKF  ou  WAKOUF^  nom  qu'on  donne  en  Turquie 
aux  biens  des  mosquées  et  des  fondations  pieuses.  Ces 
biens  sont  exempts  d'impôts,  à  l'abri  de  toute  confisca- 
tion, et  insaisissables. 

WAKIL.  F.  Vakil. 

WALHALLA.  V,  ce  mot  dans  notre  Dtctionnatre  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

WALI,  nom  que  portent  tes  goavemeors  de  districts 
chez  les  Arabes. 

WALLON  (Idiome),  idiome  parié  par  les  populations 
des  provinces  belges  de  Hainaut,  de  Namur,  de  Liège , 
fie  Luxembourg,  et  dans  une  partie  du  Brabant.  C'est  un 
vieux  didecte  roman  qui  est  demeuré  sans  culture.  11  se 
distingue  du  français  par  une  quantité  plus  grande  de 
mots  latins  ou  à  tournure  latine  qui  s'y  sont  conservés. 
On  y  trouve  aussi  des  mots  empruntés  au  flamand  et  h 
l'ancien  haut-allemand.  Raepsaet  {Analyse  des  droits  po- 
litiques et  civils  des  Belges  et  des  Gaulois,  Gand,  48*25) 
a  soutenu  que  le  wallon  était  un  débris  de  la  langue  cel- 
tique :  il  a  été  réfuté  par  Schayes  {Nouvelles  Archives 
historiques  des  Pays-Bas,  avril  1830).  Le  nom  de  wallon, 
qui  dérive  du  vieux  mot  allemand  whale  (étranger),  a  été 
synonyme  de  gaïUois.  V,  Grandgagnage,  Dictionnaire 
étymologique  de  la  langue  wallonne,  1845-50,  2  vol. 
in-S^*;  Hubert^  Dictionnaire  wallon-français,  i95%,  in-12; 
Remach,  Dictionnaire  wallon -français,  Liège,  1857, 
2  vol.  in-8». 

WALNICA,  chalumeau  en  usage  parmi  les  paysans  de 
la  Hussie,  et  qui  consiste  en  une  vessie  de  bceoi  où  l'on 
ptaci  deux  ou  trois  roseaux. 


WAL8E.  V.  VAI.SF. 

WALTHER  D'AQUITAINE,  ancien  poème  latin  dans  le- 
quel sont  racontées  les  aventures  d'un  personnage  qui 
joue  aussi  un  rôle  important  dans  les  Niebelungen  {V.ce 
mot)»  En  voici  le  sujet  :  Attila,  roi  des  Huns,  attaque  les 
Franks,  qui  obtiennent  la  paix  en  payant  tribut  et  en 
donnant  pour  otage  Hagen,  fils  d'un  do  leurs  chefs,  puis 
les  Burgondes,  dont  le  roi  livre  également  sa  fille  Hilde- 
gonde,  et  enfin  le  roi  des  Aquitains,  qui  donne  son  fils 
Walther.  Il  fait  élever  les  trois  enfants  comme  s'ils 
étaient  les  siens.  Quelques  années  plus  tard,  il  confie  à 
Hagen  et  à  Walther  le  commandement  de  ses  armées  ; 
Hildegonde  est  chargée  de  la  garde  des  trésors  de  la 
reine.  Le  roi  des  Franks  ayant  rompu  le  ti^té,  Hagen 
s'enfuit  du  camp  d'Attila,  et  retourne  dans  son  pays. 
Bientôt  Walther  s'échappe  à  son  tour  avec  Hildegonde, 
qui  lui  avait  été  fiancée  autrefois  par  son  père  :  après 
quarante  jours  de  marche,  ils  traversent  le  Rhin,  et  en- 
trent dans  '  ;  pays  des  Franks.  Arrivé  sur  l'un  des  som- 
mets des  Vosges,  Walther  s'endort  pour  la  première  fols 
depuis  sa  fuite  ;  Hildegonde  veille  pendant  qu'il  repose. 
Elle  voit  briller  des  lances,  et  réveille  son  fiancé,  qui 
examine  les  ennemis  et  reconnaît  Hagen  parmi  eux  : 
de  son  côté,  Hagen  a  reconnu  Walther;  il  engage  le  roi 
des  Franks  à  ne  pas  attaquer  un  guerrier  si  redoutable, 
et  déclare  qu'il  se  tiendra  à  l'écart  pendant  la  lutte.  Le 
roi  fait  assaillir  Walther  par  onze  de  ses  plus  vaillants 
guerriers,  <^ui  succombent  tous  sous  les  coups  de  l'Aqui* 
tain.  Le  roi  conjure  alors  Hagen  de  le  secouqr;  celui-ci 
finit  par  céder;  ils  se  mettent  en  embuscade,  et  fondent 
sur  Walther  au  moment  où,  quittant  la  montagne,  il 
s'engage  dans  la  plaine.  Le  combat,  commencé  à  la 
deuxième  heure  du  Jour,  se  prolonge  Jusqu'à  la  neu- 
vième; les  trois  guerriers  se  font  de  terribles  blessures  ; 
enfin  Hagen  et  Walther  se  réconcilient,  et  ce  dernier 
retourne  en  Aquitaine,  où,  dit  le  poète,  il  régna  durant 
trente  ans  fort  aimé  de  ses  peuples.  —  Là  s'arrête  le 
poème,  qui  a  moins  de  1,500  vers.  Le  premier  manuscrit 
en  fut  trouvé  dans  un  monastère  de  Bavière  au  milieu 
du  siècle  dernier,  et  publié  par  Jonathan  Fischer,  Leip- 
zig, 1780,  in-4^.  Deux  ans  après,  Frédéric  Mol  ter  décou- 
vrit un  second  manuscrit  dans  la  bibliothèque  de  Carls- 
ruhe,  et  en  publia  une  mauvaise  traduction  en  vers 
allemands.  Enfin,  au  commencement  de  notre  siècle,  on 
trouva  deux  nouveaux  manuscrits,  l'un  à  Bruxelles, 
l'autre  à  Paris,  avec  une  dédicace  contenant  le  nom  de 
l'auteur,  un  certain  Gérald,  qu'on  suppose,  d'après  cette 
dédicace,  avoir  été  moine  à  l'abbaye  de  Fleury  ou  Saint' 
BcnoIt-sur-Loire.  Le  poème  est  dédié  à  l'évoque  Archam- 
bauld,  frère  de  l'uuteur  :  cette  indication  ne  peut  servir 
à  déterminer  avec  certitude  la  date  de  l'œuvre,  parce  que 
nous  n'avons  pas  la  liste  complète  des  évoques  de  la 
Gaule  fhmque.  Fischer  pencherait  pour  le  vi*  siècle, 
mais  le  style  parait  appartenir  plutôt  à  l'époque  de  Char- 
lemagne.  L'auteur  dit  qu'il  a  mis  en  vers  une  vieille 
histoire  populaire,  et  comme  les  aventures  de  Walther 
sont  aussi  racontées  dans  les  Niebelungen,  les  Alle- 
mands ont  voulu  en  faire  une  l^ende  d'origine  germa- 
nique. Mais,  outre  que  le  poème  latin  est  bâucoup  plus 
ancien  que  les  Niebelungen,  le  caractère  même  de  wal- 
ther prouve  que  cette  tradition  n'est  point  germanique  : 
Walther  est  ennemi  des  Franks,  il  les  méprise,  il  les 
considère  comme  des  barbares  et  des  brigands,  il  leur 
est  toujours  supérieur  par  la  force  et  le  courage  ;  en  un 
mot,  il  représente  la  résistance  des  Gallo-Romains  dé- 
fendant leur  indépendance  contrôles  Germains.  Aussi  ses 
exploits  ne  paraissent-ils  pas  être  ceux  d'un  seul  homme  ; 
la  tradition  les  aura  embellis  d'âge  en  âge,  en  y  ajoutant 
les  hauts  faits  des  héros  qui  remportèrent  quelque  vic- 
toire sur  les  Germsins.  Une  Chronique  anonyme,  écrite 
vers  l'an  1060  dans  le  monastère  de  la  Novalèse,  au  pied 
du  mont  Cenis,  raconte  que  Walther,  après  un  lone  règne 
et  des  prouesses  sans  fin,  était  venu  s'enfermer  cuins  ce 
monastère  pour  s'occuper  de  son  salut  éternel  t  ce  trait 
rappelle  la  fin  de  Waifre,  le  plus  célèbre  et  le  plus  digne 
adversaire  des  Franks  en  Aquitaine.  Ainsi,  la  traditida 


WEL 


1792 


WES. 


de  Walther  appartient  h  la  Gaule  ;  mais  elle  pt^i^Hra  de 
bonne  heure  chez  les  Germains,  sans  doute  à  cause  de 
rinfluence  que  les  Gallo-Romains  civilisés  surent  prendre 
sur  leurs  vainqueurs.  Elle  se  répandit  mOme  chez  les 
Scandinaves  et  les  Slaves  :  on  la  retrouve  dans  la  WU- 
ktna-Saga,  composée  par  Biom  en  1250,  et  Boguphali, 
évèque  de  Posen,  écrivant  une  histoire  de  Pologne  vers 
le  milieu  du  xiii*  siècle,  y  inséra  les  exploits  de  Walther 
comme  des  faits  d'histoire  nationale.  H.  D. 

WANDilILLE  (Abbaye  de  Saint-).  Cette  abbave,  fon- 
dée par  S^  Wandrille  en  684,  h  8  kilom.  S.  d'Yvetot, 
s'appela  d'abord  Fontanelle  (  d'une  source  voisine  du  mo- 
nastère), et  ne  prit  le  nom  de  son  fondateur  (jue  dans  le 
XI"  siècle.  L'église,  incendiée  en  75<i,  détruite  par  les 
Normands  en  862,  fut  encore  la  proie  des  flammes  en 
1250.  Le  monument  ogival  qui  la  remplaça  ne  fut  jamais 
achevé,  et  la  nef,  par  exemple,  ne  fut  close  et  voûtée 
que  jusqu'à  la  3*  travée.  La  tour,  en  s'écroulant  en  1631, 
renversa  une  grande  partie  du  chœur,  et  détruisit  entiè- 
rement la  nef  :  le  service  divin  fut  rétabli  en  1647,  mais 
on  n'acheva  les  réparations  que  80  ans  plus  tard.  La  lon- 
gueur de  Tédiflce,  hors  œuvre,  était  de  82  met.;  la  lar- 
geur de  la  nef,  de  16  met.,  y  compris  les  collatéraux; 
celle  du  chœur,  de  24  met.;  la  nef  avait  23  met.  d'éléva- 
tion sous  voûte.  Le  centre  de  la  croisée  était  voûté  en 
forme  de  coupole.  En  1672,  on  éleva  à  l'entrée  du  chœur 
un  jubé  surmonté  de  statues.  De  l'abbaye  de  S^-Wan- 
drille  il  ne  subsiste  aujourd'hui  que  le  cloître  et  le  réfec- 
toire, utilisés  poar  des  entreprises  industricMes;  l'église 
n'est  plus  qu'un  monceau  de  ruines.  V.  Langlois,  Essai 
historique  et  description  de  l'abbaye  de  S^-^andrille, 
Paris,  1827,  in-8«. 

WAURANT,  mot  anglais  qui  veut  dire  garantie,  et  qui 
désigne,  dans  la  Jurisprudence  anglaise,  tout  ordre  écrit 
(assignation,  mandat  d'amener,  etc.)  dont  le  porteur  agit 
par  autorité,  et  avec  toute  garantie  contre  les  poursuites 
auxquelles  pourrait  donner  lieu  l'exécution  de  cet  ordre. 
En  termes  de»  Commerce,  un  warrant  est  un  ceitificat  de 
dépôt  de  marchandises  dans  un  dock  ou  entrepôt;  ce  cer- 
tificat est  négociable  l;omme  effet  de  commerce,  et  a  pour 
garantie  la  valeur  constatée  des  marchandises  qu'il  re- 
présente. 

WARVVlCK(Vase  de),  célèbre  vase  antique  colossal,  en 
marbre  blanc,  trouvé  dans  les  ruines  de  Tivoli  en  Italie, 
ei  que  sir  W.  llamilton  fit  transporter  en  Angleterre  eu 
1774.  II  orne  aujourd'hui  le  château  de  Warwick,  situé  sur 
TAvon.  Ce  vase,  que  Ton  croit  être  du  sculpteur  Lysippe, 
était  resté  enfoui  pendant  une  longue  suite  de  siècles 
dans  la  villa  d'Adrien.  La  coupe  en  est  presque  entière- 
ment sphérique.  Deux  ceps  de  vigne  entrelacés  se  déta- 
chent du  marbre  pour  former  les  anses,  et,  serpentant 
avec  grâce  autour  du  bord  élégamment  renversé,  l'ornent 
de  leurs  grappes  et  de  leur  feuillage.  Au  milieu  sont  des 
t^'tes  de  Satyres  en  grand  relief,  et,  au*  dessous,  une  peau 
de  panthère  avec  le  thyrse  de  Bacchus  et  d'autres  em- 
bellissements. La  capacité  du  vase  de  Warwick  est  de 
800  litres  environ. 

WATCHMAN  (de  l'anglais  watch,  veiller,  et  man, 
homme],  gardien  de  nuit  en  Angleterre.  Les  watchmen 
parcourent  les  rues  et  proclament  l'heure  à  haute  voix. 

WEHME  (U  Sainte-).  V.  Vehmb,  dans  notre  Diction- 
naire de  Biographie  et  d'Histoire, 

WEHRGELD.  V,  ce  mot  dans  notre  Dicttonnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

WELCHE  (Idiome).  V.  Gallois, 

WELLS  (Cathédrale  de),  en  Angleterre,  dans  le  comté 
de  Somerset.  Cette  église  de  style  ogival,  commencée 
dans  la  première  moitié  du  xiii*  siècle,  sur  l'emplacement 
d'un  édifice  antérieur,  ne  fut  entièrement  achevée  qu'en 
1465,  Elle  est  en  forme  de  croix  archiépiscopale,  à  moins 
que  les  chapelles  de  S^  Jean  et  de  S^*  Catherine,  qui  se 
'correspondent,  ne  soient  pas  considérées  comme  formant 
i\n  véritable  transept.  La  façade  occidentale  est  accompa- 
:;née  de  deux  tours  carrées,  hautes  de  42  met.,  garnies  de 
(ontre-forts  saillants  et  d'un  charmant  effet.  Les  ornements 
y  sont  multipliés  et  très-délicats  :  du  côté  droit,  des  hauts- 
reliefs  figurent  les  difTérentes  scènes  de  la  Création,  le  Dé- 
luge, et  les  actions  les  plus  importantes  des  Patriarches;  du 
côté  gaucne,  ce  sont  les  principales  circonstances  de  la  vie 
de  J.-C.  Au-dessus,  deux  rangs  de  statues  plus  grandes  que 
nature,  placées  dans  des  niches,  représentent  des  rois, 
des  reines,  des  saints,  des  évoques,  des  moines,  et  les  pa- 
trons de  l'église.  Auprès  du  fronton,  le  Sauveur,  entoure 
pardesAngesetparses  12  Apôtres,  présideau  Jugement 
dernier.  Dans  la  composition  de  toute  la  façade,  ou  ne 
compte  pas  moins  de  450  statues,  dont  150  sont  de  gran- 


deur naturelle.  La  cathédrale  de  Wolls  a  une  tour  centrale 
haute  de  52  met.  A  l'intérieur,  elle  a  100  met.  de  Ion*;: 
(dont  64  pour  la  nef  et  36  pour  le  chœur),  et  45  met.  de 
large  au  transept.  Les  voûtes  sont  soutenues  par  46  pi- 
liers, composés,  dans  la  grande  nef,  de  plusieurs  fais- 
ceaux de  colonnettes,  et  couronnés  de  chapiteaux  à  feuil- 
lages. Les  arcades  sont  ornées  de  nervures  à  leur  intrados, 
et  entourées  d'un  seul  gros  tore,  qui  forme  archi%'olte  et 
s'appuie  sur  une  espèce  de  console  saillante.  La  galerie 
ou  triforium  s'ouvre  sur  la  nef  par  une  série  de  petites 
arcades  à  lancette,  toutes  semblables  entre  elles.  Les 
nervures  de  la  voûte  retombent  sur  des  colonnettes  très- 
courtes,  portées  en  encorbellement  sur  des  feuillages  au 
niveau  de  la  tête  des  arcades  du  triforium  :  c'est  une  dis- 
position qui  manque  de  grâce  et  de  légèreté,  et  l'on  peut 
également  blâmer  la  lourdeur  des  arceaux  qui  séparent  les 
croisillons  de  l'intertransept.  La  chapelle  de  la  S**  Vierge 
est  généralement  regardée  comme  le  chef-d'œuvre  de  l'ar- 
chitecture religieuse  en  Angleterre.  —  Sur  le  flanc  méri- 
dional de  l'église  il  existe  un  vaste  cloître,  composé  de 
39  travées  de  voûtes.  Sur  le  flanc  septentrional*  s'élève 
une  salle  capitulaire,  chef-d'œuvre  du  genre,  b&tie  au- 
dessus  d'une  crypte.  Au  centre  de  l'octogone  de  cette 
salle  est  un  piller  formé  de  colonnettes  groupées,  et  du- 
quel partent  des  nervures  qui  s'épanouissent  à* la  Toûte 
comme  les  branches  d'un  palmier.  B. 

WENDE  (Langue),  une  des  langues  slaves,  parlée 
entre  la  Croatie,  la  mer  Adriatique,  l'Isonzo  et  la  Drave. 
On  la  nomme  aussi  Slovène  et  Couroutane.  Ses  princi- 
paux dialectes  sont  le  carnique,  le  corinthien  et  le  sty- 
rien.  Le  wende  est  un  idiome  antique,  mais  très-peu 
cultivé,  qui  se  rattache  au  slavon  liturgique  ;  il  présente 
toutefois  des  déviations  assez  notables  dans  sa  pronon- 
ciation et  dans  son  orthographe,  représentée  jadis  par  Pal- 
phabet  glagolitique  et  maintenant  par  des  lettres  ro- 
maines. Kopitar  a  publié  en  allemand  une  Grammaire 
de  la  langue  slave  en  Camiolef  en  Carinthie  et  en  Styhe, 
Laybach,  1808.  Murko  est  aussi  l'auteur  d'une  Gram- 
maire  wende  (Gratz,  2«  édition,  1843),  et  Jarnik,  d'un 
Essai  étymologique  sur  l'idiome  Slovène  (Kli^nfurt, 
1832).  —  Parmi  les  productions  écrites  en  langue  wende, 
nous  citerons  la  traduction  de  l'Évangile  par  Trub^r  e? 
Dalmatin  au  xvi«  siècle,  celle  de  la  Bible  par  lapel  îl8(K)}, 
et  les  poésies  de  Vodnik  (1806). 
.   WÉNÉDE  (Idirtme).  V.  Vénède, 

WESTMlNSTEil  (Abbaye  de).  CeUe  abbaye,  dont  le 
nom  signifie  monastère  de  l'Ouest,  fut  ainsi  appelée  à 
cause  de  sa  situation  dans  la  partie  occidentale  de  Lon- 
dres. Elle  porte  aussi  le  nom  à^Êglise  collé^iate  de 
S^'Pierre,  On  en  attribue  la  fondation  à  S^  Mellitus,  qui 
fut  le  1''  évoque  de  cette  ville,  au  commencement  du 
vu*  siècle.  Les  Danois  l'ayant  détruite  au  ix\  S^  Dunstan 
la  releva,  et  le  nouvel  édifice  fit  place  encore  à  un  autre 
plus  somptueux,  que  fit  bâtir  Edouard  le  Confesseur,  et 
dont  la  dédicace  eut  lieu  en  1065.  Henri  III  comme-nça  la 
reconstruction  de  l'église  de  Westminster  par  la  chapelle 
de  la  S^*  Vierge,  dont  il  posa  la  première  pierre  en  1220  : 
tout  le  monument,  fait  en  style  ogival,  fut  achevé  en 
1285,  sous  le  règne  d'Edouard  V^.  D'après  le  registre  des 
comptes,  on  avait  dépensé  environ  5  millions  de  francs 
de  notre  monnaie.  Plus  tard,  Henri  VII  rebâtit  encore  la 
chapelle  de  la  S^*  Vierge,  et  l'architecture  de  la  fin  du 
XV*  siècle  y  déploya  toute  la  richesse  de  ses  ornements. 
L'entrée  occidentale  de  l'église  et  ses  deux  tours,  qui 
s'harmonisent  assez  mal  avec  le  reste  de  l'édifice,  datent 
du  xvm*  siècle  ;  les  dessins  en  furent  donnés  par  Chris- 
tophe Wren  :  la  grande  fenêtre  est  un  morceau  remar- 
quable de  peinture  sur  verre.  L'extérieur  de  l'abbaye  de 
Westminster  est  généralement  lourd  ;  la  partie  la  plus 
remarquable  est  le  portail  gothique  du  croisillon  septen- 
trional, appelé  Porte  de  Salomon;  les  bâtiments  du  cloître 
sont  situés  au  midi.  L'intérieur,  en  forme  de  croix,  a  de  la 
légèreté  et  de  l'élégance  :  toutefois,  la  vue  y  est  en  partie 
obstruée  par  des  cloisons  en  bois,  des  grilles  et  des  con- 
structions accessoires.  Des  piliers  d'une  grande  hardiesse 
soutiennent  la  voûte,  qui  a  33  met.  d'élévation;  ^édifice 
a  92  met.  de  long,  24  met.  de  large  dans  la  nef  et  66'",33 
dans  le  transept.  Il  est  encombré  de  sculptures,  de  tom- 
beaux, de  statues,  d'œuvres  d'art  de  tous  les  âges,  qui 
lui  donnent  l'aspect  d'un  Panthéon  oix  d'un  musée,  mais 
dont  la  plupart  ont  peu  ou  point  de  valeur  artistique; 
dans  le  nombre  il  n'y  a  que  quelques  beaux  ouvrages  ds 
Roubiliac,  de  Rysbrach,  de  NoUekens,  de  Bacon,  de 
Chantrey  et  de  Flaxman.  La  nef  ofi're  les  monuments  ou 
tombes  de  Ben  Johnson,  de  W.  Temple,  de  Congrère,  Hi^ 
Pitt,  de  Fox,  etc.  Dans  le  transept  septentrional,  on  *>* 


WES 


1793 


WIL 


«arque  tes  tombes  de  Grattan,  de  Canning,  de  Castlereagh, 
les  monuments  de  l'amiral  Vernon,  de  lord  Chatham ,  de 
Warren  Hastings,  les  statues-portraits  de  Canning  et  de 
Wilberforce.  Une  partie  du  transept  méridional  a  reçu  le 
nom  de  Coin  des  poêles,  parce  qu'on  y  trouve  les  monu- 
ments de  Chaucer,  Spencer,  Shakspeare,  Butler,  Davenant, 
Cowley,  Prior,  Gay,  Thomson,  Goldsmith,  Southey,  la 
statue  d*Âddison,  los  bustes  de  Hilton  et  de  Dryden,  etc.; 
dans  le  reste  de  ce  transept  on  a  placé  les  monuments  de 
CasauboD,  de  Camden,  du  duc  d*Argyle,  de  Handel,  de 
Garrick,  etc.  Le  chœur,  où  a  lieu  le  couronnement  des 
souverains  d'Angleterre,  a  un  magnifique  pavé  en  mo- 
saïque, disposé  par  des  ouvriers  de  Rome  en  1200,  sous  la 
direction  d'un  certain  Oderic,  et  représentant  le  temps  de 
la  durée  du  monde  ou  le  primum  mobile  suivant  le  sys- 
tème de  Ptolémée.  Mais  un  autel  de  style  grec  en  détruit 
l'unité.  Il  y  a  9  chapelles  :  celles  de  S^-Benolt,  de  S^-Ed- 
mond,  de  S^-Nicolas,  de  S^-Êrasme,  de  S'-Jean-Baptiste, 
et  de  l'abbé  Islip,  ne  renferment  pas  d'œuvres  d'un  grand 
mérite.  On  conserve,  dans  une  salle  annexe  de  la  chapelle 
S^-Jean,  les  figures  en  cire  des  reines  Marie  et  Anne,  et 
celle  de  Nelson,  ornées  de  leurs  costumes  d'apparat.  La 
chapelle  S^Paul  contient  un  monument  élevé  &  la  mé- 
moire de  James  Watt;  celle  de  S^-Édouard  le  Confes- 
seur, les  tombeaux  de  ce  prince  et  de  sa  femme  Edith, 
de  Henry  III,  d*Êdouard  IIl  et  de  sa  femme  Philippa,  de 
Richard  H,  de  Henry  V,  Tépée  d'Edouard  II,  le  casque  et 
le  bouclier  de  Henry  V,  enfin  les  deux  sièges  en  pierre 
qui  servent  au  couronnement,  et  dont  Tun  est  la  célèbre 

Eierre  de  Scone  des  anciens  mis  d'Ecosse,  liais  la  plus 
elle  et  la  plus  importante  chapelle  est  celle  de  la  S^*- 
Vierge  ou  de  Henry  VII,  construite  par  le  Florentin  Tor- 
rigiano  :  plus  élevée  que  le  pavé  du  reste  de  l'abbaye, 
elle  a  de  belles  portes  de  chêne  sculptées  et  dorées,  et 
se  compose  d'une  nef  centrale  avec  cinq  petites  chapelles 
à  son  extrémité,  et  de  deux  ailes  latérales  ;  les  bannières 
et  les  stalles  appartiennent  aux  chevaliers  de  l'ordre  du 
Bain,  qui  y  recevaient  autrefois  leur  investiture.  Les  tiges 
des  arceaux  jaillissent  avec  une  légèreté  inouïe  vers  la 
voûte,  dont  les  clefs  pendantes  ont  une  magnificence  au- 
dessus  de  toute  expression.  Un  artiste  a  appelé  cette  voûte 
a  le  ciel  '^  sculpteurs.  »  La  chapelle  de  Henry  VII  est 
longue  de  30  met.,  et  haute  de  zO.  Là  sont  les  monu- 
ments de  Henry  VII  et  de  sa  femme,  de  Marie  Tudor, 
d'Elisabeth,  de  Marie  Stuart,  de  Jacques  I'%  de  Monk, 
d'Edouard  V  et  de  son  frère  Richard  d'York  ;  Charles  II, 
Guillaume  III,  les  reines  Marie  et  Anne,  George  II ,  le 
duc  de  Cumberland,  etc.,  y  ont  été  également  inhumés. 
Extérieurement  la  chapelle  est  ornée  de  16  tours.  V.  John 
Dorth,  Thê  Histoty  and  antiqiàties  of  thê  abbey  church 
S^'Peters  Westminster,  in-fol.,  pi.;  J.  Tismith,  Antiqui- 
Hes  of  Westminster,  1807,in-4°;  Braylen,  The  histofy  and 
antiquitiesof  the  abbey  churck  ofS^-Peter,  Westminster, 
Londres,  1822,in-4<';  Cottingham,  Plans,  élévations,  de- 
Utils  and  views  of  the  magnificent  chapel  of  kmg  Henri 
Ûie  seventh,  at  Westminster  abbey  church,  Londres, 
1822,  in-fol.  B. 

WESTMINSTER -HALL,  immense  édifice  de  Londres, 
situé  sur  la  rive  gauche  de  la  Tamise,  entre  ce  fleuve  et 
l'abbaye  de  Westminster.  Il  occupe  l'emplacement  de 
l'ancien  palais  royal  de  Westminster,  qu'un  incendie  dé- 
vasta en  1834,  et  a  été  construit  depuis  1840  sur  les 
plans  de  l'architecte  Barry.  C'est  la  plus  grande  con- 
stniction  de  style  gothi<][ue  qui  existe  au  monde.  Elle  a 
quatre  façades  :  la  principale,  qui  donne  sur  la  Tamise,  et 
dont  le  pied  est  btiigné  par  les  eaux,  n'a  pas  moins  de 
300  met.  de  développement.  Trois  tours  principales  do- 
minent tous  les  bâtiments  :  la  tour  royale  ou  Victoria,  à 
l'angle  S.-O.,  s'élève,  sur  une  base  de  25  met.  carrés,  à 
une  hauteur  de  113°*,33;  la  tour  du  centre  a  20  met.  de 
diamètre  et  100  met.  d'élévation  ;  la  tour  de  l'horloge  ou 
du  clocher,  placée  à  l'extrémité  septentrionale  de  l'édi- 
fice,  est  haute  de  106™,66.  Un  grand  nombre  d'autres 
tours,  moins  élevées,  rompent  les  lignes  d'une  vingtaine 
de  toits  de  manière  à  réunir  la  beauté  architecturale  à  la 
noblesse  de  style.  Les  frais  de  construction  se  sont  élevés 
k  près  de  40  millions  de  francs.  De  l'ancien  palais,  on  a 
conservé,  dans  l'édifice  nouveau,  où  elle  tient  lieu  de 
vestibule,  une  ancienne  salle  construite  par  Guillaume  II 
et  réparée  dans  les  dernières  années  du  xiv*  siècle  :  cette 
■aile,  dont  la  toiture  de  bois  de  noyer  sculpté  est  admi- 
rable,  a  02  met.  de  longueur,  63°*,33  de  largeur,  et  30  de 
hauteur;  elle  avait  été  construite  pour  y  donner  des  fôtes 
de  cour,  et  Richard  II,  lors  de  son  couronnement,  y 
traita  10,000  convives;  elle  a  servi  Jadis  aux  séances  du 
Parlement,  et  c'est  Ik  que  furent  jugés  W.  Wall8ca« 


Thomas  Morus,  le  comte  de  Straiïord,  Charles  I"",  les 
nobles  rebelles  de  1745,  et  Warren  Hastings.  La  Chambi-e 
des  Lords  occupe  la  partie  méridionale  des  nouvelles 
constructions;  elle  y  siège  dans  une  salle  de  32  met. 
de  long,  15  met.  de  large  et  15  met.  de  haut.  La  partie 
septentrionale  est  assignée  à  la  Chambre  des  Communes, 
dont  la  salle  a  20  met.  de  longueur,  15  met.  de  hauteur 
et  15  met.  de  largeur.  Les  b&timents  de  Westminster- 
Hall  contiennent  aussi  les  locaux  où  siègent  la  Cour  de 
l'Échiquier,  la  Cour  des  plaids  communs,  la  Cour  de 
diancellerie  et  la  Cour  du  banc  de  la  reine.  B. 

WHIGS.  V.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Dio* 
graphie  et  d'Histoire, 

WHIST,  mot  anglais  qui  veut  dire  chuti  ou  sUence!  et 
par  lequel  on  désigne  un  jeu  de  cartes  où  le  mutisme  est 
de  ngueur.  ii  i»e  joue  avec  un  Jeu  entier  de  52  cartes, 
entre  quatre  personnes,  deux  contre  deux.  L'as  est  la 
plus  forte  carte;  puis  viennent,  dans  leur  ordre  naturel, 
le  roi,  la  dame,  le  valet,  etc.,  jusqu'au  d%rux.  On  joue  en 
parties  liées,  et  les  partners  qui  les  ont  çagnées  ont  fait 
un  rob  (mot  dérivé  de  robre,  prononciation  anglaise  de 
rubber,  partie  liée).  La  partie  est  ordinairement  de 
10  points;  si  on  la  joue  en  5,  c'est  un  short-whist  (vhist 
court).  Pour  donner  les  cartes,  on  fait  couper  à  droite^ 
et  l'on  distribue  13  cartes  à  chaque  joueur,  une  à  une, 
de  gauche  à  droite;  la  dernière  se  retourne,  et  détermine 
l'atout.  Chaque  levée  {trick)  au-dessus  de  six  compte 
deux  points  au  whist  ordinaire,  et  un  seul  au  short-whist; 
trois  honneurs  dans  les  mains  des  associés  valent  deux 
points,  les  auatre  honneurs  en  valent  quatre.  Une  manche 
gagnée,  c.-a-d.  10  points  marqués  sans  que  les  adver- 
saires en  aient  pu  marquer  un  seul,  est  comptée  triple, 
et  l'on  prend  3  fiches;  si  les  adversaires  n'ont  pas  mar* 
que  plus  de  quatre  points,  elle  est  double,  et  l'on  n'a  que 
2  fiches;  s'ils  en  ont  marqué  plus  de  quatre,  elle  est 
simple,  et  l'on  n'a  qu'une  fiche.  Ceux  qui  gagnent  le  rob 
reçoivent,  outre  les  fiches  gagnées  dans  les  manches,  un 
nombre  convenu  de  fiches  dites  de  consolation,  ordinal* 
rement  3  ou  4,  et,  si  l'on  a  joué  trois  manches,  on  dé- 
falque  les  fiches  de  la  manche  gagnée  par  les  perdants. 
Le  prix  de  la  fiche  est  conventionnel.  Si  les  partners  font 
un  chelem,  c-jmI.  les  13  levées,  ils  gagnent  10  fiches,  et 
la  partie  continue.  Le  jeu  de  whist  exige  de  l'attention  et 
de  la  mémoire,  car  il  faut  se  rappeler  les  cartes  qui  ont 
été  jouées  depuis  la  première  jusqu'à  la  dernière.  La 
manière  de  bien  jouer  la  carte  ne  peut  s'acquérir  que 
par  la  pratique  :  il  est,  par  exemple,  telle  façon  d'atta« 
quer  qui  indique  au  partner  k  peu  près  ce  qu'il  devra 
Jouer  quand  il  aura  pris  la  main.  Sur  chaque  coup  de 
cartes,  on  est  tenu  de  fournir  la  couleur  demandée;  si 
l'on  n'en  a  pas,  on  peut,  soit  couper  avec  de  l'atout,  soit 
renoncer,  afin  de  laisser  au  partner  la  possibilité  de  faire 
la  levée.  On  peut  gaçner  la  partie  par  les  honneurs  qu'on 
a  dans  la  main;  mais  on  doit  jouer  le  coup,  parce  que 
les  adversaires  peuvent,  en  marquant  des  points,  dimi<i 
nuer  le  nombre  des  fiches  qu'ils  perdent,  et  même  les 
points  gagnent  avant  les  honneurs.  On  joue  quelquefois 
à  Venfilaae,  c-à-d.  qu'on  reporte  sur  la  manche  suivante 
les  points  faits  en  plus  de  10.  Des  Traités  de  whist  ont 
été  publiés  par  Hoyie  (1786)  et  Deschapelles  (1830). 

WHITE-BOYS.  F.  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire. 

WHITEHALL,  palais  de  Londres,  «a  N.  de  SWames- 
Park.  C'est  un  vaste  édifice  quadrangulaire,  b&ti  au 
xiii*  siècle,  embelli  au  xvi"  par  le  cardinal  Wolsey,  con- 
fisqué après  la  disgr&ce  de  ce  personnage  par  Henri  VIII, 
et  où  résidèrent  les  rois  d'Angleterre  jusqu'à  la  fin  du 
xvn*  siècle.  Whitehall  fut  dévasté  par  un  incendie  en 
1697,  sauf  la  partie  que  Jacques  I*'  avait  fait  reconstruire 
par  Inigo  Jones,  et  que  l'on  nomme  Banquetting-house 
(maison  des  banquets),  à  cause  des  repas  publics  qui  y 
furent  donnés  autrefois.  Le  dôme  de  la  chapelle  est  peint 
par  Rubens,  et  représente,  dans  une  suite  de  neuf 
tableaux,  qui  ont  été  restaurés  par  Clpriani,  l'histoire  et 
l'apothéose  de  Jacques  I'^  Whitehall  est  occupé  aujour« 
d'hui  par  le  commandant  des  horse-'guards,  sauf  l'extré* 
mité  méridionale,  où  sont  les  bureaux  du  Ministère  des 
aflîaires  étrangères.  Ce  fut  contre  ce  palais  que  fut  élevé 
l'échafaud  où  périt  Charles  I^,  près  de  l'endroit  où  s'élève 
maintenant  une  statue  en  bronze  de  Jacques  II  par  Gib- 
bon!},, 

WÎGWAM,  cabane  de  peuplades  indigènes  et  sauvages 
de  l'Amérique  australe. 

WIHARA,  nom  donné,  dans  111e  de  Ge^Ian,  aux  tem- 
ples de  Bouddha. 

WILDGRAVE,  c.-à-d.  oomU  du  gibier,  titre  féodal 

443 


WIS 


1794 


WOR 


paiticiilier  à  TAllemagne,  et  que  prenaient,  à  une  époque 
très-ancienne,  les  petits  seigneurs  des  bords  du  Rhin. 
>  WILHBLMSHQBHE,  château  de  plaisance  situé  à  5  ki- 
klomëtres  de  Gassel  (Hesse).  Une  magnifique  arenue  de 
I  tilleuls,  bordée  de  maisons  et  de  jardins,  conduit  de 
Cassel  au  pied  de  la  hauteur  où  est  o&ti  ce  château,  qui 
date  de  1701.  Le  parc  qui  Tentoure  est  Justement  célèbre 
par  ses  beautés  naturelles,  par  ses  pièces  d*eau,  et  par 
les  ornements  de  toute  espèce  que  Tart  y  a  réunis.  On 
y  remarque  principalement  :  une  cascade  haute  de 
43  met.,  large  de  17;  la  grande  fontaine.  Jet  d'eau  de 
03  met.  de  haut;  le  bassin  des  Géants,  où  Encelade  est 
ensereli  sous  des  masses  de  rochers;  les  cascades,  lon- 
gues de  300  met.,  larges  de  13™,33,  interrompues,  de 
lo  met.  en  50  met.,  par  de  rastes  bassins;  le  ch&teau  des 
Géants,  octogone  dont  la  plate -forme,  soutenue  par 
192  colonnes  toscanes,  supporte  une  pyramide  de  32  met., 
que  couronne,  sur  un  piédestal  de  4  met.,  un  Hercule  en 
cuivre  forsé  de  10"',33  de  hauteur.  B. 

WINA,  mstrument  de  musique  de  Tlnde,  consistant 
en  un  corps  de  bambou  attaché  à  deux  grandes  courges, 
et  qui  est  monté  de  plusieurs  cordes  qu'on  appuie  sur 
des  chevalets  avec  les  doigts. 

WINCHESTER  (Cathédrale  de),  en  Angleterre,  dans  le 
comté  de  Hauts.  On  prétend  qu*une  portion  de  cette 
église  remonte  à  l'édifice  qui  fut  b&ti  par  le  roi  anglo- 
saxon  Ethelwold  et  consacré  en  980.  Certaines  parties, 
reconnaissables  aux  arcs  en  plein  cintre,  aux  chevrons 
brisés,  aux  billettes  et  autres  ornements  usités  dans  l'ar- 
chitecture anglo-normande,  peuvent  être  rapportées  avec 
plus  de  certitude  au  temps  de  Guillaume  le  Conquérant  : 
tel  est,  en  particulier,  le  croisillon  septentrional.  La  fa-, 
çade  occidentale  et  la  nef  furent  reb&ues  en  style  ogival 
très-pur,  dans  la  seconde  moitié  du  xiv*  siècle;  on  re- 
construisit également  la  partie  orientale  de  l'église  au 
XVI*  siècle,  avec  toute  l'élégance  de  la  période  des  Tu- 
dors.  Vue  du  dehors,  la  cathédrale  de  Winchester  a  peu 
d'apparence  :  mais  l'intérieur  en  est  beau.  La  nef  a  onze 
travées  de  chaque  côté;  le  transept  est  plus  rapproché  de 
la  r^ion  absidale  que  dans  d'autres  monuments  d'Angle- 
terre. De  vieux  vitraux  et  de  remarquables  grotesques  en 
bois  sculpié  ornent  le  chœur.  Au-dessous  de  l'abside  il  y 
a  d'anciennes  cryptes.  Alfred  le  Grand  et  plusieurs  autres 
princes  anglo-saxons  ont  été  inhumés  dans  la  cathédrale 
de  Winchester,  où  se  trouvent  aussi  divers  tombeaux 
sculptés  par  Flaxman  et  Chantrey.  Au-dessus  de  l'autel 
est  une  célèbre  Résttrrection  de  Lazare,  peinte  parWert. 
F.  Milner,  HisUnrê  et  detcription  des  anti(iuités  de  Wm- 
ehester,  B. 

WINDSOR  (Ch&teau  de),  une  des  résidences  royales 
d'Angleterre,  dans  le  comté  de  Berks,  à  35  kilomèt.  0.  de 
Londres,  sur  la  rive  droite  de  la  Tamise.  Ce  ch&teau,  b&ti 
par  Guillaume  le  Conouérant,  reconstruit  sous  Heniy  I*', 
puis  sous  Edouard  III ,  fut  encore  embelli  au  temps 
de  Charles  II  et  de  George  IV.  Les  appartements  en  sont 
décorés  avec  la  plus  grande  magnificence  et  ornés  de  belles 
peintures.  La  chapelle  S^-George,  où  sont  les  portraits  des 
chevaliers  de  la  Jarretière,  est  un  remarquable  morceau 
de  style  ogival  fleuri  :  un  caveau  où  reposent  George  IH, 
George  IV,  Guillaume  lY  et  plusieurs  autres  membres 
de  la  maison  de  Brunswick,  en  occupe  l'extrémité  orien- 
tale. La  chapelle  d^CJrswlck  renferme  le  monument  de 
la  princesse  Charlotte,  et  les  restes  de  Henry  VI,  de 
Henry  VIII,  de  Jeanne  Seymour,  d'Edouard  VI  et  de  sa 
femme,  et  de  Charles  I**.  Le  ch&teau  de  Windsor  est 
entouré  d'un  parc  qui  n'a  pas  moins  de  100  kilomèt.  de 
circuit;  le  Jardin  est  décoré  de  statues  de  bronze  et  de 
marbre;  la  terrasse,  longue  de  575  met,  et  d'une  largeur 
proportionnée,  est  unique  en  son  genre.  B. 

WISBY  (Code  de),  compilation  de  règlements  mari- 
times faite  pendant  le  xiv*  siècle  à  Wisby,  dans  l'Ile  de 
Gothland  (Suède).  Les  12  premiers  articles  furent  em- 
pruntés du  code  ue  LQbeck;  les  24  suivants  le  furent  des 
r^ês  d'Oléron  et  des  jugements  de  Dam  me  et  Westca- 
pelie;  la  plupart  des  autres  étaient  conformes  aux  cou- 
tumes d'Amsterdam,  d'Enchuysen,  de  Stavem.  Le  code 
de  Wisby  devint  la  règle  commune  des  navigateurs  qui 
fréquentaient  la  Baltique,  la  mer  du  Nord,  et  les  parages 
d'3  la  Hollande  et  de  la  France.  B. 

WISIGOTHS  (Lois  des).  Les  premières  furent  pro- 
mulguées par  le  roi  Eurik,  dans  la  seconde  moitié  du 
T*  siècle  :  le  travail  de  ce  prince  n'est  parvenu  Jusqu'à 
nous  que  refondu  par  ses  successeurs.  Léovigilde,  au 
aiècle  suivant,  en  fit  une  édition  corrigée  et  ampli- 
fiée, que  nous  ne  possédons  pas  davantage.  Pendant  le 
vu*  siècle,  Récarèdo,  Goodemar,  Siscbut,  Sisenand, 


Chindaswinde  et  Roceswinde  rendirent  un  grand  nombre 
de  lois  nouvelles.  Le  code  des  Wisigoths  que  nous  pos- 
sédons aujourd'hui  est  un  recueil  de  toutes  ces  législa- 
tions éparses,  qui  reçut  sa  forme  définitive  au  vui*  siècle, 
puisqu'on  y  trouve  plusieurs  dispositions  émanées  des 
rois  Wamba,  Ervige  et  Égiza.  Les  lois  des  Wisigoths 
furent  écrites  en  latin,  et  c'est  à  tort  que  le  jurisconsulte 
SavignjT  a  pensé  qu'on  se  servait,  dans  la  pratique,  d'une 
traduction  faite  par  les  Goths  en  leur  propre  langue  et 
qui  se  senût  perdue.  Une  traduction  des  lois  vrisigothi- 
ques  fut  faite  en  Espagne  pendant  le  xiii*  siècle  sous  le 
titre  de  Fuerojuzgo  {Forum  judicum),  Merlin  de  Douai 
dit  nue  ià  loi  des  Wisigoths  est  la  plus  belle  et  la  plus 
ample  des  lois  barbares;  ce  fat  celle  aussi  qui  consens 
le  plus  longtemps  son  autorité.  Elle  régit,  en  effet,  les 
provinces  méridionales  de  la  Gaule  longtemps  après  que 
la  puissance  des  Goths  y  eut  été  ruinée;  elle  régna  dans 
l'Espagne  pendant  tout  le  moyen  &ge,  et  elle  a  servi  de 
base  aux  législations  espagnole  et  portugaise.  Ses  auteurs 
ont  visé  à  l'originalité,  à  l'élégance,  et  même  à  d^  idées 
philosophiques;  ils  ont  prétendu  tracer  des  règles  exclu- 
sives et  complètes  en  déclarant  que  le  Jugement  royal 
suppléerait  à  la  loi  dans  les  cas  non  prévus.  Le  code  wi- 
sigoth  est  divisé  en  12  livres,  chaque  livre  en  litres,  et 
chaque  titre  en  un  certain  nombre  de  constitutions,  dont 
chacune  est  précédée  soit  du  nom  du  prince  qui  l'a  ren> 
due,  soit  du  mot  antiqua  qui  annonce  une  règle  ancienne 
et  d'origine  inconnue.  Partout  on  y  reconnaît  une  imita- 
tion du  code  Tliéodosien.  Le  texte  a  été  publié  pour  la 
première  fois  par  Pithou  en  1570;  l'Académie  royale  de 
Madrid  en  a  donné,  en  1815,  une  édition  accompagnée  de 
l'ancienne  traduction  espagnole.  On  le  trouve  aussi  dans 
le  Corpus  juris  germantci  de  Walter.  V.  Davoud-Oghlou, 
Histoire  de  la  législation  des  anciens  Germains,  Berlin, 
1845,  2  vol.  ln-8<*;  Haenal,  I,êx  romana  Visigothorwn, 
Leipzig,  1847-48,  2  vol.  gr.  in^«.  B. 

WISKI,  voiture  légère  et  très-élevée,  qu'on  importa 
d'Angleterre  en  France  vers  la  fin  du  siècle  dernier,  et 
qui  fut  &  la  mode  sous  la  Restauration. 

WITTENAGEMOT.  V.  ce  mot  dans  notre  Dtctionnaire 
de  Biographie  et  d'Histoire, 

WUDIKA.  V.  Vladika. 

WOIVODE.  V,  Vatvode,  dans  notre  Dictionnaire  de 
Biographie  et  d'Histoire, 

WOLOF,  OUOLOF  ou  GHIOLOF  (Idiome),  langue 
parlée  dans  la  Sénégambie.  Son  système  grammatical  a 
plus  d'un  trait  commun  avec  celui  des  langues  sémi- 
tiques. Dans  cette  langue,  le  verbe  est  susceptible  de 
17  modifications,  qui  consistent  à  ajouter  &  chaque  ra- 
dical une  ou  deux  syllabes,  et  qui  en  étendent  ou  res- 
treignent racceptlon  :  ce  caractère  la  rattache  aux  Idiomes 
africains.  L'article  suit  le  substantif  et  fait  corps  avec 
lui  ;  il  en  modifie  le  sens  selon  que  l'objet  est  présent  on 
absent,  proche  ou  éloigné.  On  ne  distingue  le  genre  que 
dans  les  objets  qui  en  ont  naturellement.  Les  sons  nasaux 
sont  dominants  dans  le  wolof,  et  cependant  cette  langue 
riche  en  voyelles,  est  harmonieuse.  Un  certain  nombre 
de  mots  arabes  et  portugais  s'y  sont  glissés.  V.  J.  Dard, 
GrammcUre  wolofe,  Pans,  1826,  in-8°,  et  Dictionnaire 
français-^wolof,  ibid.,  1825;  l'abbé  Boilat,  Grammaire 
de  la  langue  ouolof,  1859,  in-8*. 

WORCESTER  (Cathédrale  de),  é^lse  ci>>sacrée  & 
S*  Pierre  en  1218  :  le  chœur,  la  chapelle  de  la  S^- Vierge, 
le  transept  oriental,  qui  appartiennent  au  style  ogival 
primitif,  devaient  être  achevés  à  cette  époque.  La  nef  ne 
tarda  point,  du  reste,  à  être  édifiée;  quelques  change- 
ments y  furent  opérés  pendant  la  seconde  moitié  du 
XIV*  siècle.  La  tour  élevée  à  lintersectlon  de  la  nef  et  du 
chœur  avec  le  grand  transept  s'étant  écroulée,  il  fallut  la 
relever;  celle  qui  existe  maintenant,  et  qui  atteint  une 
élévation  de  05  met.,  parait  avoir  été  finie  en  1374,  bien 
que  le  couronnement  ait  dû  être  refait  &  une  époque  plus 
moderne.  La  cathédrale  de  Worcester  est  en  forme  de 
croix  archiépiscopale  :  elle  a  130  met.  de  longueur  dans 
œuvre,  26  met.  de  largeur  y  compris  les  collatéraux,  et 
32  met.  de  hauteur.  Le  transept  de  l'Ouest  a  42  mèL  de 
longueur  et  10  met.  de  largeur;  celui  de  l'Est,  40  met. 
de  longueur  et  8  de  largeur.  Les  arcades  de  la  nef  sont 
ogivales;  le  trifcrium  est  composé  de  deux  petites  ar- 
cades ;  la  claire-voie  manque  de  hauteur.  La  plupart  des 
colonnettes  sont  annelées.  Dans  ce  monument  en  re- 
marque :  la  chaire,  faite  d'une  seule  pierre;  la  tombe  du 
prince  Arthur,  fils  de  Henri  VII,  entourée  dNui  travail 
sculpté  très-délicat;  le  tombeau  de  l'évèque  Ht^gh,  par 
Rouoiliac;  celui  d'Élise  Degby,  par  Cliantrey.  Soos  le 
chœur  est  une  crypte,  qui  se  compose  d'une  noir  termioét 


WOR 


i7a5 


WUR 


eo  abside  semi-circulaire  et  de  deat  ailiss:  la  nef  a  étô 
divisée  en  quatre  couloirs  par  trois  rangées  de  colonnes 
ajoutées,  et  chaque  aile  en  deux  par  un  autre  rang  de 
colonnes.  A  régiise  est  attenante  une  salle  capitulaire 
ronde,  de  32  met.  de  diamètre.  Il  y  a  aussi  un  cloître 
carré,  de  33*^,33  de  côté  ;  il  est  orné  de  sculptures,  dont 
Tune  représente  la  généalogie  des  rois  d'Israël  et  de  Juda. 
V.  Wild,  An  illustration  of  the  architecture,  etc,  of  the 
cathedral  church  of  Worcester,  Londres,  1820,  in-4'». 

WOKK-HOUSB,  nom  qu'on  donne  en  Angleterre  à 
des  maisons  de  travail  forcé  où  Ton  place  les  indigents 
valides  et  où  Ton  reçoit  aussi  les  vieillards  et  les  infirmes. 
Pour  ceux-ci  le  work-house  est  un  hospice,  pour  ceux-là 
un  pénitencier.  Tous  sont  astreints  à  un  vêtement  uni- 
forme. Le  travail  imposé  est  purement  mécanique,  celui 
du  moulin  à  bras  ou  du  moulin  à  pied.  La  nourriture  est 
inférieure  en  qualité  et  en  quantité  à  celle  des  travail- 
leurs libres.  Aussi  le  work-house  est-il  généralement  un 
épouvantai]  pour  la  paresse. 

WORMS  (Cathédrale  de).  Dès  Tannée  638,  une  basi- 
lique consacrée  à  S*  Pierre  avait  été  élevée  sur  remplace- 
ment occupé  par  cette  cathédrale;  elle  fut  réduite  en  cen- 
dres en  872,  et  les  incursions  des  Normands  empêchèrent 
longtemps  de  la  relever.  Ce  ne  fut  qu'à  la  fin  du  x*  siècle 
qu'on  reprit  les  travaux,  et  l'édifice  actuel  fut  consacré 
en  1016.  C'est  une  église  romane  à  double  abside,  sur- 
montée de  deux  dômes.  Le  dôme  oriental,  de  forme  by- 
zantine, porte  les  caractères  du  xi*  siècle  ;  près  de  lui 
est  b&ti  un  transept.  Le  dôme  occidental  est  plus  orné, 
et  l'on  y  aperçoit  plusieurs  ogives.  Dans  la  région  occi- 
dentale du  monument,  il  y  a  deux  tours,  l'une  du 
xn*  siècle,  l'autre  du  xv*.  Les  fenêtres  de  la  cathédrale 
de  Worms  sont  à  plein  cintre,  avec  archivolte  ornée  de 


dents  de  scie;  les  aNâdoes  sont  également  seml-drciH 
laires,  et  les  chapiteaux  des  colonnes  formés  de  simples 
moulures.  Les  chapelles  accessoires  appartiennent  au 
style  flamboyant.  Le  portail  méridional,  qui  est  orné  de 
belles  sculptures,  date  de  1472.  Du  même  siècle  date  la 
chapelle  du  Baptême,  entièrement  isolée,  avec  une  porte 
donnant  sur  la  nef  :  la  voûte  en  est  soutenue  par  deux 
colonnes  à  chapiteaux  décorés  de  feuilles  de  chêne;  on  y 
remarque  des  fonts  baptismaux,  autour  desquels  est 
figuré  Jésus  environné  des  Apôtres,  et  plusieurs  tom< 
beaux  sculptés  dans  un  style  qui  se  rapproche  de  celui 
de  la  Renaissance  française.  B. 

WOTIÈQUE:  (Idiome),  idiome  de  la  famille  ourallenne, 
parlé  par  les  Wotièques  des  gouvernements  russes  de 
wiatka,  d'Orenbourg  et  de  Kazan.  Les  substantifs  s'y 
déclinent  de  six  manières  différentes ,  selon  les  six  pro- 
noms possessifs  qui  les  précèdent.  Le  verbe  n'a  que  deux 
conjugaisons,  et  la  négation,  en  s'y  intercalant,  produit 
de  grands  changements.  Les  prépositions  suivent  leurs 
régimes  :  quelques-unes  ont  trois  terminaisons  difiié- 
rentes,  non  d'après  les  genres,  que  cette  langue  ne  dis- 
tingue pas  dans  les  objets  qui  en  sont  naturellement 
privés,  mais  d'après  les  personnes. 

WOUGOI  (Idiome).  V.  CéL^Biens  adiomes). 

WRIT.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Biograr 
phie  et  d^Bistotre, 

WORST,  G.-à-d.  en  allemand  boudin,  caisson  d'artil- 
lerie de  forme  allongée,  sur  lequel  les  canonniers  étaient 
placés  à  cheval  les  uns  derrière  les  autres.  Originaire 
de  l'Autriche,  11  a  été  abandonné,  comme  peu  commode, 
en  1792. 

WDRST,  nom  que  l'on  donne  à  une  calèche  longue  et 
découverte,  qni  sert  à  la  promenade. 


X 


X 


XYS 


X,  la  23«  lettre  de  notre  alphabet.  Elle  est  la  24*  de 
l'alphabet  des  langues  germaniques,  en  raison  de  la  place 
que  le  W  y  occupe  avant  elle.  Elle  était  la  21*  pour  les 
Romains,  qui  ne  distinguaient  pas  le  J  de  1'  I,  ni  l' U  du 
V.  Comme  forme,  VX  est  semblable  au  khi  (X,  y)  des 
Grecs;  comme  articulation,  il  répond  à  leur  ksi  (3,  ^), 
inventé,  dit-on,  par  Simonide.  Aucun  mot  d'origine  latine 
ne  commence  par  X  ;  les  Romains  employaient  ce  carac- 
tère comme  lettre  médiale  (maximus,  mixtus^uacor)  et 
comme  lettre  finale  {lux,  nox,  pax,  rex,  i)ix).  Dans  les 
cas  obliques  des  noms  qui  se  terminaient  au  nominatif 
par  X,  cette  lettre  faisait  place  à  l'un  des  deux  éléments 
phoniques  dont  elle  représente  la  réunion  :  pax^  pacis; 
rex,  régis;  nox,  noctts;  lux,  lucis.  Les  deux  éléments 
phoniques  de  Vx  se  font  sentir  dans  la  prononciation  des 
mots  français  :  le  c,  dans  axe,  exctàse,  fixe,  luxe,  sphinx, 
Pollux,  etc.  ;  le  g  (suivi  du  son  z  ) ,  dans  examen,  exem- 
ple, exil,  exonération,  exhaler,  exhibition,  Xavier,  Xéno- 
phon,  etc.  On  donne  encore  à  Vx  le  son  du  k  dans  excès, 
exception,  exciper;  de  Vs  dans  six,  dix,  soixante,  Xain- 
trailles^  Auxerre,  Auxonne,  Bruxelles  ;  du  %  dans  sixième, 
dixième.  Il  est  muet  à  la  fin  des  mots  (doux,  faux, 
heureux,  prix,  voix  ) ,  à  moins  qu'i}  n'y  ait  liaison  eupho- 
nique avec  le  mot  suivant,  cas  auquel  il  se  prononce  9 
[doux espoir,  faux  ami,  heureux  état  ^  six  aunes,  prix 
élevé,  voix  humaine).  Vx  est  la  marque  d'un  grand 
nombre  de  pluriels  en  français,  soit  avec  modification  de 
la  dé&\nence{ égal,  égaux;  cheval,  chevaux;  travail,  trfi- 
vaux;  vitrail,  vitraux)^  soit  par  simple  addition  (ba- 
teau, bateaux;  étau,  etaux;  feu,  feux;  chou,  choux). 
La  lettre  X  n'existe  pas  en  italien  :  dans  les  mots  dérivés 
de  mots  grecs  et  latins  où  elle  se  trouvait,  on  la  rem- 
place par  S  simple  ou  double  {escUto,  exact;  esprimere, 
exprimer;  assioma,  uMXfiuxn  Alessandro,  Alexandre),  ou 
par  C  double  {eccellenza,  excellence).  En  espagnol,  on 
donne  ordinairement  a  ijourd'hui  à  l'Xla  valeur  de  notre 
consonne  double  es  ;  cependant  il  a  conservé  le  son  gut- 
tural de  la  joto  (J)  dans  certains  mots,  comme  Ximénès, 
Xucar,  XH-ès,  Xalapa,  En  portugais,  l'X  a  plusieurs  va- 


leurs, dont  la  plus  ordinaire  est  celle  da  ch  français.  En 
russe,  il  se  prononce  comme  le  khi  des  Grecs. 

Le  signe  X,  qu'on  voit  sur  beaucoup  de  médailles  ro- 
maines, est,  selon  quelques  antiquaires,  l'initiale  du 
mot  grec  khrêma  (pièce  de  monnaie).  Coupé  par  un  rho 
(P),  il  forma  avec  cette  lettre,  depuis  Constantin,  un 
monogramme  qu'on  a  expliqué  comme  représentant  le 
nom  du  Christ.  Ce  monogramme,  placé  en  marge  des 
manuscrits,  est  une  abréviation  du  grec  khrèsimon  (utile), 
destinée  à  appeler  l'attention  du  lecteur  sur  certains  pas- 
sages. —  Signe  numéral ,  le  ksi  des  Grecs  valait  60,  et, 
précédé  d'un  accent  (A),  60,000;  le  kM,  600.  Dans  la 
numération  romaine,  X  vaut  10,  et,  surmonté  d'un  trait 
horizontal  (%),  10,000.  Quand  plusieurs  X  se  suivent, 
chacun  d'eux  représente  une  dizaine  (  XX  a=  20  ;  XXXbs  30). 
Un  1,  placé  à  la  gauche  de  l'X ,  retranche  de  la  dizaine 
une  unité  (IX^O).  Placé  après  un  signe  numéral  plus 
fort,  X  y  ajoute  10  (LX  ==  00  )  ;  placé  avant,  il  en  retranche 
une  dizaine  (XL  =3 40,  XCs=90).  Couché  sur  le  côté  (x), 
il  a  valu  quelquefois  1000.  —  La  lettre  X  fut  autrefois  la 
marque  monétaire  d'Amiens. 

XENAGIE.  V,  AftMÉE,  Grèce,  page  213,  col.  i. 

XÉNÉLASIE.       )  „        _  ^    ,  *-^  n-  *• 

XPNIES  >   r.  ces  mots  dans  notre  Dtcttonnatrs 

XÉROPHAGIES.  \     ^  Biographie  et  d^Histoire. 

XENORPHICA,  clavecin  à  archet,  inventé  à  Vienne 
(Autriche),  par  Rœllig,  vers  la  fin  du  siècle  dernier. 

XYLHARMONICON  ou  XYLOSISTRON,  instrument  de 
musique,  du  genre  de  l'Euphone  (V.  ce  moQ,  inventé 
par  Uthe. 

XYLOGRAPHIE  (du  grec  xylon^  bois,  etgraphéin, 
écrire,  tracer) ,  art  de  graver  sur  bois  (V.  Gravcrb).  Avant 
l'invention  de  la  typographie,  on  fH  des  impressions  xylo- 
graphiques, c-à-d.  à  l'aide  de  planchettes  en  b^  dani 
lesquelles  les  mots  étaient  taillés  en  relief. 

XYLORGANON,  instrument  de  musique,  eq>èoe  éê 
claqae-bois  (V.  ce  ««oQ. 

XYSTE.  F.  ce  ofe  Hnt  notra  Dictionnaire  de  Biog/w 
phie  et  d^Histaire, 


YDR 


4796 


YOR 


Y 


Y,  24*  lettre  de  notre  alphabet,  considérée  par  beau- 
coup de  grammairiens  comme  une  6*  voyelle,  tandis  que, 
selon  d*autres,  elle  tient  à  la  fois  de  la  voyelle  et  de  la 
consonne.  Nous  rappelons  t  grec,  bien  qu'elle  ait  été  for- 
mée sur  le  modèle,  non  de  Viola  (I),  mais  de  VupsUon 
(T).  Les  Grecs  anciens  ont  prononcé  VupsUon  tantôt 
comme  notre  u,  tantôt  comme  notre  t;  les  Grecs  modernes 
ont  adopté  ce  second  mode,  et  donné  quelquefois  aussi 
à  Vupsiton  le  rôle  de  nos  consonnes  F  et  V  ;  les  Romains 
adoptèrent  le  son  u,  puisqu'ils  écrivaient  indistinctement 
satura  et  satyra,  Sulla  et  Sylla,  Dans  beaucoup  de  mots 
français  dérivés  du  grec,  Vy  tient  la  place  d*un  upstlon  : 
tels  sont  hymen ,  hymne ,  hypocrite ,  martyr,  mystère , 
physique,  polygone,  syntaxe,  synonyme,  système,  style. 
En  fhincais,  l'Y  représente  plusieurs  articulations  :  tan- 
tôt i,  comme  dans  yeux,  hier,  payen,  hyène,  yatagan, 
Yonne,  Mayence;  tantôt  deux  t  distincts,  comme  dans 
pays,  paysan,  royal,  moyen,  essuyer,  payer  {pai^is,  pat- 
isan,  rov-iat,  moi-ien,  essui-ier,  pai-ier);  tantôt  aille, 
comme  dans  Biaye,  Biscaye,  L'Y  a  disparu  de  certains 
mots,  tels  que  ami,  lis,  roi,  gai.  Douai,  Tournai ,  qu'on 
écrivait  jadis  amy,  lys,  roy,  gay,  Douay,  Toumay,  etc. 
En  allemand,  l'Y  a  le  son  de  l't;  cette  lettre  Ta  même 
remplacé  récemment  dans  beaucoup  de  mots,  puisqu'on 
écrit,  par  exemple,  bei  (près  de)  pour  bey,  sein  (être) 
pour  seyn ,  etc.  En  anglais,  Y  a  aussi  le  son  de  l' t  :  y  es, 
York,  etc.  :  il  a  encore  le  son  ai  à  la  fin  de  certains  mots 
{glory,  gloire;  vanity,  vanité),  et,  dans  d'autres,  un 
son  composé.  Intermédiaire  entre  les  sons  é  et  t,  ou  assez 
semblable  à  ail  (by,  my,  rely,  lay,  may).  Les  Espagnols, 
qui  prononcent  comme  I  leur  Y  dans  yo  (  Je)  et  riy  (roi), 
font  entendre  le  son  de  l'Y  après  la  double  IL  Le  carac- 
tère Y  est  étranger  à  l'écriture  italienne.  Les  Russes  ne 
connaissent  pas  l'Y  que  nous  employons  comme  lettre 
initiale  dans  la  transcription  de  certains  noms,  tels  que 
Yermolof;  leur  Y  se  prononce  ou,  et  ils  ont  une  sorte 
d^upsilon  tronqué,  qui  a  le  son  tantôt  de  l't ,  tantôt  du  v, 
—  Lettre  numérale,  VupsUon  valait  400,  et,  précédé  d'un 
accent  («v),  400,000.  Chez  les  Romains,  Y  marquait^le 
nombre  150,  et,  surmonté  d'un  trait  horizontal  (y), 
150,000.  Il  a  été  la  marque  monétaire  de  Bourges. 

YACHT,  petit  b&timent  de  luxe,  allant  à  voiles  et  à 
rames,  et  dont  se  servent  1rs  riches  Anglais  pour  des 
promenades  en  mer  ou  pour  de  courtes  traversées.  Il  a 
deux  m&ts,  et  est  préé  en  sloop,  en  cutter,  en  goélette, 
suivant  ses  dimensions;  son  port  varie  de  80  à  100  ton- 
neaux. De  nos  Jours,  on  a  fait  des  yachts  de  plus  grande 
dimension,  et  l'on  y  a  appliqué  la  vapeur.  11  existe  en 
Grande-Bretagne  des  associations  appelées  yachtclubs, 
qui  entretiennent  une  foule  de  charmants  yachts  :  e^les 
ont  été  imitées  en  Hollande  et  à  Saint-Pétersbourg. 

YACHT,  partie  du  pavillon  anglais  située  à  l'angle  supé- 
rieur de  la  gaine.  C'est  un  carré  coupé  de  diagonales  et 
de  croix  en  oandes  rouges,  bleues  et  blanches.  Le  yacht 
des  États-Unis  porte  sur  un  fond  bleu  un  nombre  d'étoiles 
égal  à  celui  des  États  de  l'Union. 

YAÇNA  ouIZESCHNÉ.   V.  Vendioad-Sad^  et  Zend- 

ÀVESTA. 

YAJÛR-VÊDA.  V,  Védas. 

YANKEE -DOODLE,  nom  de  l'air  national  des  Yankees 
ou  Américains  du  Nord.  II  fut  composé,  dit-on,  en  1755, 
par  un  médecin  nommé  Schuckburgh ,  qui  le  fit  passer 
pour  une  marche  célèbre  qu'on  jouait  dans  toutes  les 
années  européennes  et  que  devait  adopter  toute  nation 
civilisée.  D'autres  prétendent  quMl  est  tiré  d'une  marche 
que  Jouaient,  pendant  la  guerre  de  l'Indépendance,  les 
troupes  hessoises  à  la  solde  de  l'Angleterre.  Quoi  qu'il  en 
soit,  les  paroles  en  sont  niaises,  et  la  mélodie  triviale. 
Un  autre  chant,  appelé  HaU-Colombia ,  commence  à  le 
remplacer. 

YATAGAN,  arme  des  Orientaux,  un  peu  plus  longue 
que  le  poignard  ;  la  lame  en  est  oblique,  et  le  tranchant 
forme  vers  la  pointe  une  courbe  rentrante. 

YDRE  ou  YDRIE  (du  ^rec  udôr,  eau),  vieux  mot  dé- 
signant un  grand  yase  en  forme  de  cruche,  quelquefois 
fermé  à  clef. 


YEOliAN ,  nom  donné  jadis  en  Angleterre  aux  hommes 
libres  qui  tenaient  le  milieu  entre  la  noblesse  et  les  pro- 
létaires. Le  yeoman  devait  posséder  un  héritage  paternel 
d'environ  130  liv.  sterl.,  et  il  avait  le  droit  de  paralti^ 
partout  vêtu  comme  un  seigneur,  si  ce  n'est  dans  la  mai- 
son d*un  lord.  De  nos  Jours ,  le  mot  yeoman  n'est  qu'un 
titre  d'honneur,  donné  aux  gros  fermiers  et  aux  petits 
propriétaires  fonciers.  A  l'époque  de  la  Révolution  fran- 
çaise, on  forma  en  Angleterre,  pour  la  défense  des  côtes, 
une  cavalerie  qui  fut  appelée  yeomamry,  et  dans  laquelle 
entrèrent  comme  volontaires  les  plus  riches  fermiers  et 
bon  nombre  de  gentilshommes.  A  Londres  on  appelle 
yeomen  un  corps  de  soldats  de  parade,  dont  le  service  se 
borne  à  monter  la  garde  dans  la  Tour;  ils  sont  armés  de 
pertuisanes  et  d'arquebuses,  et  portent  le  costume  da 
temps  de  Henri  Vlil.  B. 

YOGA.  V.  iNDiENHB  (Philosophie). 

YOLE,  canot  fort  léger  et  très-efiilé,  construit  pour 
marcher  à  l'aviron  plutôt  au'à  la  voile,  et  qui  n'est  pas 
propre  à  porter  de  lourds  fardeaux.  Dans  la  Bfarine  mi- 
litaire, les  yoles  servent  particulièrement  aux  officiers 
supérieurs. 

YORK  (Cathédrale  d').  Une  première  église  fut  bâtie  à 
York,  en  627,  sur  les  débris  d'un  temple  païen,  par  Ed- 
win,  roi  de  Norlhumberland  ;  Oswald,  successeur  d'Ed- 
win,  remplaça  cette  construction,  qui  était  toute  en  bois, 
par  un  édifice  de  pierre,  qu'un  incendie,  en  741,  puis  les 

fnrates  danois  mirent  en  ruines.  Après  la  conquête  de 
'Angleterre  par  les  Normands,  une  nouvelle  église,  plus 
importante  que  les  premières,  fut  construite  par  les  soins 
de  l'archevêque  Thomas  de  Bayeux  :  un  incendie  la  con- 
suma encore  en  1137.  Le  monument  actuel  fut  com- 
mencé en  1171  par  le  chœur,  auquel  on  travailla  pendant 
plus  de  vingt  ans;  le  croisillon  méridional  et  la  salle  ca- 
pitulai re  s'élevèrent  dans  la  première  moitié  du  xiii*  siècle, 
le  croisillon  septentrional  en  1200,  et  Ton  n'entreprit  la 
nef  qu'en  1291.  On  reconstruisit  le  chœur  en  1361,  dans 
un  style  ogival  plus  riche  que  celui  des  autres  parties  de 
l'édifice,  et  vers  le  même  temps  on  éleva  la  tour  cen- 
trale. —  La  cathédrale  d  York  est  la  plus  vaste  et  la  plus 
belle  de   l'Angleterre.  La  façade  occidentale,  large  de 
46  met.,  est  surmontée  de  deux  tours  de  58  met.  d'élé- 
vation. Ce  qui  en  fait  la  richesse,  ce  n'est  point,  comme 
ailleurs,  la  profusion  des  statues,  mais  l'adroite  combi- 
naison des  lignes  architecturales,  la  finesse  des  moulures, 
l'abondance  et  l'heureuse  distribution  des  feuillages  et 
des  fleurons,  qui  attestent  la  patience  et  la  dextérité  des 
sculpteurs.  Au-dessus  de  la  porte  centrale,  s'ouvre ,  aa 
lieu  de  rose,  une  grande  fenêtre,  la  plus  riche  peut-être 
qu'il  y  ait  au  monde,  et  dont  on  voit  la  pareille  au  fond 
de  l'église,  dans  la  muraille  de  l'Est  ;  cette  dernière,  haute 
de  25'",  large  de  10,  a  des  vitraux  de  covdeur  exécutés  en 
1405  par  Jean  Thornton  de  Coventry.  Les  deux  tours  sont 
partagées  en  trois  étages  par  des  fenêtres  élégantes.  Une 
troisième  tour  carrée,  couronnée  de  créneaux,  s'élève  au- 
dessus  de  la  croix  du  transept,  à  une  hauteur  de  70*.  La 
salle  capitulaire  attenante  à  l'église  est  de  forme  octo- 
gone, et  a  19*°  de  largeur;  les  fenêtres  sont  divisées  par 
quatre  meneaux  très-légers,  et  terminées  à  leur  sommet 
par  trois  jolies  roses,  superposées.  Le  plan  de  la  cathé- 
drale d'York  est  en  forme  de  croix,  et  à  trois  nefs  :  les 
collatéraux  accompagnent  le  transept,  de  la  même  ma- 
nière que  la  grande  nef.  Le  transept  est  situé  à  égale 
distance  de  la  façade  et  de  Tabside  :  celle-ci  se  termine 
carrément.  Les  dimensions  de  l'édifice  sont  considéra- 
bles :  sa  longueur  est  de  156*",  sa  largeur  de  31"  (70"'  au 
transept),  et  sa  hauteur  sous  voûte  de  33"*.  En  1829,  la 
cathédrale  d'York  fut  incendiée  par  un  stupide  matelot 
nommé  Martin  ;  elle  fut  encore  la  proie  des  flammes 
en  1840,  par  suite  de  l'imprévoyance  d'un  ouvrier:  la 
restauration  est  aujourd'hui  achevée.  Panri  les  objets 
d'art  que  l'église  renferme,  on  remarque  les  mausolées 
de  révêque  Scrope  et  de  sir  George  Saville,  et  le  Jubé, 
morceau  de  sculpture  d'une  exquise  délicatesse,  orné 
des  statues  des  rois  d'Angleterre  depuis  Guillaume  1" 
Jusqu'à  Henri  VJ.  V.  Franc.  Dradce,  Ristorical  antiqui- 


YPR 


1797 


YUC 


ttês  of  thê  City  of  York,  Londres,  in-fol.;  Britton,  An- 
tiquUies  eathêdrals  of  Engiand,  in-4°;  Wiebekink,  les 
Cathédrales  d'York  et  de  Reims  comparées,  in-fol.     B. 

YOROUBA  (Idiome),  une  des  langues  de  la  Sénégam- 
Die.  Son  système  grammatical  est  d'une  régularité  re- 
marquable. On  y  observe  un  ensemble  complet  de  pré- 
fixes qui,  en  se  joignant  au  verbe,  donnent  naissance  à 
une  foule  d'autres  mots  :  le  radical  passe  ainsi  de  Tidée 
abstraite  d*action  à  toutes  les  idées  concrètes  dérivées. 
C'est  encore  l'addition  d'un  préfixe  qui  transforme  le 
substantif  en  verbe  de  possession.  Un  même  adverbe 
varie  de  forme  et  même  de  nature,  suivant  l'espèce  de 
mots  qu'il  Qualifie.  F.  Samuel  Crowther,  A  VocabiUary 
of  tke  yoruoa  languagej  Londres,  1852,  in-8°. 

YOURTE,  nom  de  la  demeure  souterraine  que  se  creu- 
sent les  Kamtchadales  pour  y  passer  Thiver.  On  l*étend 
aux  villages  de  Sibérie. 

YOUYOU,  bateau  chinois  ordinairement  habité  par 
une  famile. 

YPRJËS  (Hôtel  de  ville  d'),  plus  connu  sous  le  nom  de 
Halle  aox  drapiers,  monument  colossal,  le  plus  vaste, 
le  plus  commode  et  le  mieux  conservé  qui  existe  en  ce 
genre.  II  a,  dans  sa  sévère  et  forte  unité,  le  caractère  de 
grandeur  que  les  villes  du  moyen  &ge  en  Flandre  impri- 
maient à  leurs  constructions.  Sa  forme  est  celle  d'un 
trapèze  irrégulier,  de  133  met.  de  longueur.  La  première 


pierre  en  fbt  posée  en  1201  par  le  comte  ikiudouin,  qui 
devint  empereur  deConstantinople;mais  rœuvre  ne  lut 
achevée  qu'en  1342.  Un  beffroi,  tour  carrée  que  flanquent 
quatre  tourelles,  surmonte  l'édifice;  il  passe  ])our  en  être 
la  partie  la  plus  ancienne.  La  façade,  composée  d'un  rez- 
de-chaussée,  avec  portiques  en  arcs-ogives  portés  sur 
des  colonnes,  a  deux  étages  :  entre  les  fenêtres  du  l*' 
étage  on  voyait  autrefois  12  statues  colossales  de  comtes 
et  de  comtesses  de  Flandre;  des  démagogues  les  bri<i 
sèrent  en  1792;  on  les  a  remplacées  depuis  par  der. 
statues  modernes.  Une  aile  seulement  dp  l'édifice  sei<( 
d'hôtel  de  ville. 

TPRES  (Église  S*-Martiii,  à).  Cette  église,  cathédrale  de- 
puis 1559  Juscven  1801,  est  une  des  plus  intéressantes 
de  la  Belgique.  Le  chœur,  qui  date  de  12*21,  est  un  mor- 
ceau remarquable  de  la  transition  entre  le  style  roman  et 
le  style  ogival  ;  le  transept  et  les  nefs  appartiennent  au 
XIV*  siècle,  la  tour  au  xv*.  L'entrée  latérale  du  Midi  est 
décorée  d'un  très-beau  porche,  surmonté  d'une  magni- 
fique rose.  Le  chœur  renferme  la  pierre  tumulaire  du 
fameux  Jansénius.  On  voit  dans  la  cathédrale  d'Ypres  un 
Paradis  terrestre,  tableau  en  six  compartiments,  qu'on 
a  faussement  attribué  à  Jean  Van  Eyck,  et  qui  parait  être 
de  P.  Porbus. 

YRMILIK,  demi-piastre  turque. 

YUCATÈQUE  (Ungue).  F.  Mexique  (Langues  du). 


z 


ZAM 


ZEN 


z,  19*  consonne  et  25*  lettre  de  notre  alphabet.  Sa 
forme  a  été  imitée  de  celle  du  dzêta^  6*  lettre  de  l'alpha- 
bet des  anciens  Grecs,  que  les  Grecs  modernes  appellent 
xita^  et  qu'ils  prononcent,  non  plus  comme  les  doubles 
ds  ou  cU,  mais  comme  notre  s.  Chez  les  Romains,  le  Z 
se  prononçait  ds  selon  Yictorinus,  s  5  selon  Priscien.  Il  y 
avait,  en  grec,  analogie  et  permutation  entre  le  delta  et 
le  dzêta,  puisque  Zeiu  (Jupiter)  faisait  au  génitif  Dios  . 
de  même,  en  latin,  le  D  fut  quelquefois  substitué  au  Z, 
comme  dans  Medentius  pour  Mezentius,  En  français,  Z  a 
le  son  qui  lui  est  propre  dans  azur,  douze,  onze,  zigzag, 
zèbre,  zone,  etc.  ;  mais  il  prend  le  son  de  Vs  à  la  fin  des 
noms  proprei  {Coblentz,  Cortes,  Metz,  Rodez) ^  et,  dans 
d'autres  mots,  son  rôle  ne  consiste  qu*à  donner  le  son 
fermé  à  1*0  qui  le  précède  (nez,  assez,  chez,  avez,  aviez, 
aunez,  ayez,  eussiez) .  Il  a  été  autrefois,  concurremment 
avec  Vs,  la  caractéristique  du  pluriel  :  ainsi,  on  écrivait 
beautez,  véritez,  etc.  Le  son  ::  est  souvent  donné  &  Vs 
dans  le  corps  des  mots  (buse,  chose,  Lise,  Muse,  maison, 
misère,  peser,  usage)  ;  il  appartient  aussi  à  Vs  et  à  Vx 
dans  les  liaisons  euphoniques  {mes  amis,  les  enfants, 
deux  arbres,  trois  hommes,  six  habits).  Par  un  défaut 
de  prononciation,  les  enfants  donnent  souvent  au  J  le 
son  du  Z  (20  zoue,  pour  je  joue)^  et  ce  défaut  a  été  de 
mode  au  temps  du  Directoire  parmi  les  Incroyables  et  les 
Merveilleuses.  Le  Z  a,  en  portugais,  le  même  son  qu'en 
français  ;  en  espagnol,  il  se  prononce  comme  le  thêta  des 
anciens  Grecs  ou  le  th  anglais  ;  en  italien,  on  lui  donne 
la  valeur  tantôt  de  ts  {fazzoletto,  mouchoir),  tantôt  de  dx 
{mezzo,  milieu  )  ;  en  allemand,  il  a  le  son  ts,  et  en  russe 
le  son  z.  L'arabe  et  l'arménien  ont  un  caractère  appelé 
za,  et  qui  se  transcrit  exactement  par  notre  z.  Les  Po- 
lonais emploient  le  groupe  sz  pour  représenter  l'articu- 
lation ch,  et  cz  pour  l'articulation  tch,  —  Lettre  numé- 
rale, le  dzêta  grec  valait  7,  et,  avec  un  accent  en  dessous, 
7,000.  Le  Z  des  Romains  représentait  2,000,  et,  surmonté 
d'un  trait  horizontal  (2),  2,000,000.  Sur  la  marge  des 
manuscrits  grecs ,  un  dzêta  est  l'initiale  du  mot  dzètei 
(cherche),  et  indique  qu'à  cet  endroit  le  sens  ou  le  texte 
est  douteux.  —  Le  Z  a  été  la  marque  monétaire  de  Gre- 
noble. 

ZA,  nom  du  si  bémol  dans  le  Plain-Chant. 

ZAGAIE.  V.  Sagaib. 

ZAHRA  (Palais  de).  V,  Alcazaiu 

ZAMBO,  nom  qu'on  donne  à  l*enfant  d'un  nègre  et 
d'une  Américaine  ou  d'une  mulAtrcssc. 

ZAMORIN.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 


ZAMPOGNARI.  V.  Piffbrari. 

ZAMR  ou  ZOURNA,  sorte  de  grand  hautbois  des 
Arabes.  On  distingue  :  le  grand  za/mr  ou  gabà  zournâ, 
percé  de  7  trous  sur  le  devant  et  d'un  seul  en  dessous,  et 
dont  on  tire  deux  octaves  et  une  tierce  en  faisant  octavier 
l'instrument  pour  les  sons  aigus;  le  zamr  moyen,  d'une 
quarte  plus  aigu  que  le  grand  ;  et  le  petit  zamr  ou  zamr- 
el-soghayr,  plus  élevé  d'une  quarte  que  le  moyen.  On  les 
joue  tous  trois  avec  une  anche. 

ZANI,  personnage  niais  et  bouffon  de  U  comédie  ita- 
lienne, dérivé  du  Sannio  des  Atellanes  {V,  ce  mot),  et 
analogue  à  notre  Jeannot, 

ZAOUIA,  nom  que  les  Arabes  donnent  h.  des  établisse- 
ments qui  comprennent  à  la  fois  un  tombeau  de  famille, 
une  mosquée,  une  bibliothèque,  une  hôtellerie,  un  hô- 
pital et  une  école. 

ZAPOTÈQUE  (Idiome).  V.  Mbxiqdb  (Langues  du). 

ZARZUELAS,  drame  lyrique  espagnol,  qui*  ressemble 
beaucoup  à  i'opérarcomique  français. 

ZÉKAT,  aumône  légale  prescrite  par  le  Moukhtaçar 
{V.  ce  mot).  C'était  originairement  une  espèce  de  taxe 
des  pauvres,  portant  sur  les  biens  meubles  et  immeu- 
bles, sur  les  successions,  sur  les  revenus  de  toute  sorte, 
afin  de  secourir  les  indigents.  Plus  tard,  la  zékat,  per- 
dant son  caractère  religieux,  fut  perçue  par  les  pouvoirs 
publics,  et  appliquée  aux  besoins  administratifs  et  poli- 
tiques. Le  Moukhtaçar  exclut  formellement  les  chrétiens 
des  secours  provenant  de  la  zékat. 

ZEND,  une  des  langues  indo-européennes  [V.  ce  mot)^ 
la  souche  de  la  famille  iranienne.  C'était  l'i^ntique  langue 
des  Mages,  celle  dans  laquelle  Zoroastre  rédigea  sa  doc- 
trine. Elle  avait  déjà  cessé  d'être  langue  vulgaire  à  l'é- 
poque de  l'ère  chrétienne^  et  elle  ne  subsiste  plus  au- 
jourd'hui que  dans  la  liturgie  des  Guèbres  ou  Parsis, 
disséminés  en  Perse  et  dans  l'Inde.  Nulle  langue  n'est 
aussi  chargée  de  voyelles,  et  les  mots  sont  exempts  d'as- 
piration. On  y  trouve  un  a  nasal,  qui  répond  à  peu  près 
au  son  an  du  français.  Le  zend  présente,  comme  le  sans- 
crit et  le  grec,  un  a  et  même  un  e  privatifs.  Il  a  les  trois 
nombres,  mais  n'admet  pas  la  distinction  des  genres 
grammaticaux,  ni  l'article  défini.  On  n*]r  remarque 
pas  de  prépositions  proprement  dites,  mais  un  grand 
nombre  d'afiixes  à  l'aide  desquels  on  forme  des  espèces 
de  cas  dans  les  noms.  Le  zend  possède,  après  le  grêc  et 
le  latin,  l'écriture  la  plus  rigoureusement  alphabétique 
que  l'on  connaisse.  Il  s'écrivit  d'abord  avec  les  caractères 
cunéiformes  (  V,  ce  mot  )  :  aujourd'hui  son  alphabet  rcs- 
scmllc  au  clialdécn  par  la  furmc  des  caractères,  et  il 


ZEN 


1798 


ZEN 


é*^rit  de  droite  à  gaache;  mais  il  reproduit  les  voyelles 
usitées  en  Europe  et  toutes  les  articulations  du  sanscrit. 
Cet  alphabet  se  compose  de  43  lettres,  dont  30  consonnes 
et  13  Yoyelles  ;  Tarticulation  que  nous  rendons  par  la 
lettre  /  y  fait  défaut,  et  est  remplacée  par  r.  V.  Burton , 
Historia  «efem  linguœ  Persicœ,  Londres,  1657  ;  Paulin 
de  Saint -Barthélémy,  De  antiquitate  linguœ  Zendicœ, 
Rome,  1708;  Rask,  SurVâge  et  lé  caractère  original  de 
la  langue  zende,  en  allem.,  Berlin,  182G,  in-8<';  De  Boh- 
len,  Ùe  origine  linguœ  Zendicœ,  dans  le  Journal  des 
Savants  d'août  1832;  J.-A.  Vullers,  Institutiones  linguœ 
Persicœ  cum  Sanscrità  et  Zendicà  linguà  comparatœ , 
Giessen,  1840;  Fr.  Bopp,  Grammaire  comparée  du  sans- 
crit, du  %end,  etc.,  en  allem.,  Berlin,  1833-42,  in-4<>; 
Eug.  Burnouf,  Commentaire  sur  le  Yaçna,  Paris,  1833, 
2  vol.  in-4<*,  et  Études  sur  la  langue  et  les  textes  lends, 
dans  le  Journal  Asiatique,  184(M4. 

ZEND-AVESTA,  collection  des  écritures  sacrées  des 
Parses,  aussi  nommés  Parsis  ou  Guèbres,  qui  en  attri- 
buent la  rédaction  à  Zoroastre  (7.  ce  mot  dans  notre  Die- 
tionnaire  de  Biographie  et  d^ Histoire).  Une  partie  de  cette 
collection,  le  Vendidad,  fut  apportée  en  Europe  en  1723, 
et  déposée  à  la  bibliothèque  d'Oxford,  où  elle  demeura 
sans  pouvoir  étro  lue  de  personne.  Ce  fut  pour  en  étudier 
la  langue  et  en  donner  la  traduction  qu'en  1754  An- 
quetil-Duperron  entreprit  le  voyage  de  Tlnde,  d'où  il 
rapporta,  entre  autres  livres,  le  texte  du  Zend-Avesta, 
avec  une  traduction  française  faite  sous  les  yeux  des 
destours  parsis,  et  publiée  en  1771.  VAvesta  se  compose 
de  deux  ordres  d'ouvrages  :  le  Vendidcui-sadi  et  le  Boun^ 
dehech.  Le  Vendidad-sadé  comprend  lui-môme  trois 
écrits  :  le  Vendidad  proprement  dit,  le  Yaçna  nommé 
en  persan  Iseschné,  et  le  Vispered;  à  ces  livres  fonda- 
mentaux sont  annexés  les  lechts  et  les  Sirouzé.  Le 
Vendidad-sadé  est  écrit  en  langue  zende.  Le  Boundehech, 
beaucoup  plus  récent,  est  en  péhlvi;  mais  il  passe, 
assertion  douteuse,  pour  être  la  traduction  d'un  livre 
zend  dont  l'original  n'existe  plus. 

Quel  que  soit  le  temps  où  l'on  fasse  vivre  Zoroastre  et 
où  l'on  reporte  la  rédaction  définitive  de  VAvesta,  il  est 
certain  que  les  doctrines  contenues  dans  ces  livres  étaient 
admises  dans  l'Asie  centrale  à  une  époque  fort  reculée  et 
longtemps  avant  Darius,  flls  d'Hystaspe;  les  Mages,  qui 
étaient  les  prêtres  de  cette  religion,  sont  de  beaucoup 
antérieurs  a  la  dynastie  Achéménide  :  Zoroastre  n'est 
donc  pas  l'auteur  premier  des  dogmes  iraniens,  mais  on 
peut  dire  qu'il  les  coordonna  et  leur  donna  un  ensemble 
délinitif.  Les  croyances  de  VAvesta  n'étaient  pas  seule- 
ment celles  de  la  Perse,  ni  même  de  la  Médie;  elles 
étaient,  sauf  les  points  de  dissidence,  communes  à  la 
plupart  des  peuples  de  l'Asie  centrale  situés  à  1*0.  de  la 
Bactriane ,  et  elles  s'étendirent  à  presque  toute  l'Asie 
Mineure  :  croyances  pleines  de  grandeur  et  de  pureté , 
dont  la  connaissance  nous  montre  dans  les  Perses,  non 
des  barbaces,  mais  des  peuples  doux  et  pieux,  parvenus 
à  une  haute  civilisation.  Dans  la  suite,  les  doctrines  de 
VAvesta  se  divisèrent  et  s'amoindrirent,  abaissées  par  les 
superstitions  populaires;  et  lorsque  le  monde  romain, 
las  d'un  polythéisme  usé,  chercha  dans  l'Orient  des 
dogmes  réparateurs,  il  n'emprunta  de  la  Perse  qu'une 
partie  de  la  religion  de  Zoroastre,  le  culte  de  Mithra.  — 
Le  nom  des  Mages  ne  vient  pas  du  sanscrit  maya  (illu- 
sion magique)  ;  les  Mages  n'étaient  pas  des  magiciens  : 
leur  nom  dérive  de  maida,  nom  zend  d'Ormuzd  (Ahura-' 
mazda  ),  lequel  parait  signifier  la  Suprême  Intelligence, 
Quant  au  nom  de  Zoroastre,  en  zend  Zarathustra^  le 
sens  n'en  est  pas  encore  éclaird  ;  mais  à  coup  sûr  il  ne 
signifie  pas  astre  de  vie. 

Les  éléments  dont  se  compose  la  doctrine  du  Maz- 
déisme ou  Magisme  ne  sont  pas  empruntés  aux  livres 
hébreux,  comme  on  a  pu  le  croire  au  siècle  dernier,  dans 
un  temps  où  ni  l'Inde  ni  ses  livres  sacrés  n'étaient  con- 
nus :  les  traits  de  ressemblance  entre  le  Mazdéisme  du 
Vendidad  et  le  Judaïsme,  traits  d'ailleurs  fort  rares,  sont 
tout  extérieurs,  et  n'atteignent  le  fond  des  doctrines  que 
si  on  les  dénature  par  des  interprétations  systématiques. 
Les  anciennes  croyances  de  l'Iran,  de  la  Perse,  ae  la 
Médie  et  des  autres  contrées  où  s^étendit  le  Mazdéisme, 
tirent  leur  origine  de  la  Sogdiane  et  de  la  Bactriane,  et 
elles  ont,  comme  le  Brahmanisme,  leur  point  de  départ 
et  leur  point  d'appui  dans  le  Véda  {V.  ce  mot)\  non-seu- 
lement la  langue  zende  est  venue  de  la  langue  védique 
comme  le  sanscrit,  mais  la  plupart  des  êtres  divins,  des 
dogmes  et  des  usages  religieux  contenus  dans  VAvesta 
descendent  directement  de  ceux  qifl  sont  célébrés  dans 
les  Hymnes  védiques.  Il  ne  faut  donc  voir  ici  que  le 


grand  fait  admis  désormais  par  les  asvants,  cefid  de  b 
séparation  dernière  des  peuples  aryens  et  des  religioQs 
asiatiques  dont  les  origines  se  retrouvent  également  <hn 
ce  recueil  sacré;  séparation  qui,  entre  autres  choses,  pro- 
duisit, d'une  part,  le  Brahmanisme  dans  rinde,  eu  de 
l'autre,  le  Magisme  dans  l'Asie  centrale.  Les  traces  de 
cette  division  se  rencontrent  à  chaque  pas  dans  VAvesta- 
on  y  voit  que  non-seulement  ces  deux  rameaux  de  li 
race  blanche,  les  Ar^'as  et  les  Iraniens,  ont  pris  lear  di- 
rection en  deux  sens  opposés,  mais  que,  s*étant  établii 
dans  deux  vastes  contrées  voisines  l'une  de  Tautrejls 
sont  demeurés  dans  un  antagonisme  perpétuel.  Otte 
hostilité,  soutenue  par  d'antiques  traditions  et  consacré? 
par  les  croyances  religieuses,  les  peuples  médo-persiqnei 
l'ont  portée  dans  leurs  relations  avec  les  races  grecques, 
dans  le  polythéisme  desquelles  ils  ont  yu  une  doctrias 
analogue  à  celle  des  Aryas  de  l'Inde.  Quant  aux  Hébrcnx, 
à  leur  Loi  et  à  leur  Dieu,  il  n'y  est  fait  aucune  allus^ 
dans  VAvesta. 

Le  Zend-Avesta  roule  principalement  sur  le  dogme  et 
sur  le  culte  :  il  ne  contient  pas,  comme  les  lois  de  Masa, 
toute  une  organisation  sociale,  politique  et  cÎTile;  il  o'y 
est  parlé  de  la  royauté,  des  castes  et  des  autres  éléments 
de  la  société  iranienne  que  par  allusion  et  comm#  de 
faits  existants  et  non  contestés;  c'est  donc  la  relizîoi 
des  anciens  Perses  et  des  peuples  voisins  que  Ton  y  d^lt 
chercher  avant  tout.  Malgré  l'obscurité  qui  règne  encore 
sur  beaucoup  de  points,  on  peut  dire  que  cette  religtos 
n'est  pas  le  dualisme,  comme  ont  pu  le  faire  croire  et  le 
culte  de  Mithra  qui  en  descendait ,  et  le  Manichéisme, 
véritable  Mazdéisme  réformé.  Mais  nous  admettons  moios 
encore  qu'elle  soit  analogue  à  la  doctrine  chrétienne,  et 
qu'elle  pose  comme  son  point  de  départ  le  dogme  de  it 
création.  Le  Zervane-akerene ,  premier  principe  des 
choses,  n'est  pas  un  être  vivant  et  agissant ,  comme  le 
Dieu  des  Juifs  et  des  chrétiens  ;  c'est  une  conceptioa 
toute  métaphysique;  qu'on  lui  donne  le  nom  d'ftenMi. 
d'Injini  ou  d'Être  absolu,  il  n'arrive  à  produire  ouèlqQs 
chose  qu'en  se  développant  sous  une  forme  définie  et 
personnelle,  que  les  peuples  de  langue  zende  nommerez 
Ahura-mazda  (Ormuzd^  et  qui  est  le  véritable  créateor. 
Il  n'y  a  dans  cette  doctrine  encore  vague  que  le  pendant 
de  la  doctrine  indienne  des  deux  Brahma  (K.  Bbahmi- 
nisme),  c.-à-d.  le  fond  même  du  panthéisme;  et  si  roo 
demande  l'origine  de  cette  première  idée  qui  de  la  Perse 
s'étendit  dans  l'Asie  Mineure  et  dans  la  Grèce  et  Tint  re- 
vivre dans  Platon,  il  la  faut  chercher  dans  le  Rig-vêda. 
Mais  on  doit  observer  en  même  temps  que  le  principe 
abstrait  des  êtres  ne  parait  presque  Jamais  dans  les 
livres  saints  de  l'Iran,  qu'on  ne  lui  offre  aucun  sacrifice, 
qu'on  ne  lui  adresse  aucune  prière;  culte  inutile,  eo 
effet,  puisque  ce  principe,  absolument  immuable,  n'e^ 
là  que  pour  expliquer  l'existence  du  créateur  Ormuzd. 

Ormuzd  est  le  premier  être  issu  du  principe  éternel , 
et,  par  conséquent,  n'est  pas  l'être  absolu  lui-même.  H 
n'est  pas  non  plus  le  feu  ni  le  soleil,  comme  on  Ta  dit, 
et  c'est  une  erreur  de  regarder  les  anciens  Perses  comme 
des  adorateurs  du  Feu.  Ormuzd  est   le   premier  des 
Amschaspands  {Amscha^penta,  Saints  Immortels),  le 
seigneur  de  la  science,  le  principe  actif  de  tout  bien  et 
l'origine  de  la  vie;  s'il  a  pu  être  pris  pour  le  soleil ,  c'est 
qu'en  effet  cet  astre  est  son  emblème,  puisque  de  lai 
émanent  la  lumière  qui  donne  la  connaissance  des  objets 
et  la  chaleur  qui  nourrit  les  êtres  vivants  ;  aussi  Ormuzd 
est-il  appelé  seigneur  de  la  lumière,  et  dit-il  de  lui- 
même  qu'il  était  avant  que  le  ciel  fût ,  avant  le  feu,  l'eso, 
la  terre,  les  arbres  et  les  troupeaux,  avant  l'homme,  avant 
les  esprits  purs  et  les  esprits  impurs.  Cet  agent  suprême 
de  la  création  est  véritablement  le  principe  de  tout  le  bien 
qui  s'y  trouve,  bien  physique  et  bien  moral  ;  non-seal^ 
ment  il  est  l'auteur  de  la  lumière  et  de  la  vie,  niais  il 
est  le  foyer  d'où  émanent,  avec  la  science,  la  bonté  et  It 
sagesse,  la  loi ,  la  pureté,  le  bonheur  et  la  vie  étemelle. 

Ahriman,  né  en  même  temps  qu'Ormuzd,  est  son  plus 
pul8&:mt  ennemi ,  mais  non  son  égal.  A  ce  dernier  trait, 
on  reconnaît  une  doctrine  qui  n'est  pas  absolument  dua- 
liste, puisque  la  lutte  des  deux  principes  n'est  ni  égale,  ni 
éternelle.  Le  nom  d' Ahriman  [Aghr&-mainifas)  signifie 
proprement  Esprit  malin,  et  n'a,  par  conséquent,  au- 
cune analogie  avec  le  nom  védique  d'Aryaman.  L'Esprit 
mauvais  des  Iraniens  est,  au  moral,  la  cause  active  de 
l'ignorance  et  de  l'erreur,  de  la  malice  et  du  mensonge, 
du  vice  et  du  crime  ;  c'est  le  tentateur  ;  au  physique,  i! 
est  l'auteur  de  tout  ce  qui  souille,  attaque  ou  détruit  les 
hommes,  de  leurs  souffrances  et  de  leurs  malheurs. 
Quand  Ormuzd  créa  le  paradis,  Ahriman  fit  l'hiver 


ZEN 


1799 


ZEU 


quand  Ormuzd  créa  la  Sogdiane  et  son  fleuve  purificateur 
le  Çugda,  Âhriman  y  produisit  les  émanations  pestilen* 
tielles,  les  insectes  malfaisants,  les  animaux  impurs  et 
les  plantes  vénéneuses.  C^est  pour  <|ue  Thomme  pût  sou- 
tenir la  lutte  contre  cet  ennemi  puissant  qui  parcourt  la 
terre  de  Tlran,  qu*Ormuzd  a  donné  primitivement  à 
Djem-schid  (en  zend  Yima-khchaétô,  qui  est  Yama,  fils 
de  Vivaswat)  les  livres  de  la  Loi  et  lui  a  enseigné  le  sa- 
criflce  {yaçna). 

Au-dessous  d*Ormuzd  sont  les  six  autres  Amschas» 
pands,  dont  il  est  à  la  fois  Tauteur  et  le  chef.  Ces  esprits 
célestes  le  secondent  dans  Tœuvre  du  bien  et  dans  la 
lutte  contre  le  mal.  Le  créateur  a  partagé  entre  eux  la 
terre  et  le  temps  ;  ils  protègent  la  terre,  et  président  aux 
différentes  parties  de  la  durée,  comme  aussi  aux  organes 
du  temps,  qui  sont  les  astres  ;  par  eux  arrivent  aux  êtres 
d*ici-bas  les  biens  de  toute  sorte  dont  Ormuzd  est  la 
source  première,  biens  de  l'&me  et  du  corps  i  ce  sont  eux 
aussi  qui  dirigent  les  grandes  révolutions  périodiques  du 
ciel ,  les  mouvements  du  soleil ,  de  la  lune  et  des  pla- 
nètes, la  distribution  de  la  chaleur  et  de  la  lumière  dans 
Tespace,  les  jours,  les  mois,  les  années  ;  les  sept  premiers 
jours  du  mois  leur  sont  consacrés.  Les  Amschaspands 
ont  pour  rivaux  les  Darvands^  dont  Ahriman  est  le  chef, 
darvand  lui-même  :  à  chaque  œuvre  bonne  que  les 
grands  Esprits  célestes  accomplissent,  les  Darvands  op- 
posent une  œuvre  mauvaise  ;  les  désordres  de  la  nature, 
dont  l'homme  et  les  êtres  purs  sont  les  victimes,  la  nuit, 
rhiver,  le  froid ,  les  guerres  impies,  les  grands  crimes, 
tous  ces  maux  sont  suscités  par  les  Darvands,  sous  la 
direction  d'Ahriman.  —  Ormuzd  préside  à  toute  une  hié- 
rarchie d'esprits  célestes,  et  Ahriman  à  une  hiérarchie 
d'esprits  mauvais  :  les  Amschaspands  ont  en  effet  pour 
ministres  les  heds  (en  zend  Tazatas,  c.-à-d.  à  qui  Ton 
sacrifie),  dont  le  nombre  est  plus  grand  et  1  empire 
moins  étendu;  et  les  Izeds  ont  eux-mêmes  pour  les  se- 
conder la  foule  immense  et  variable  des  Ferouers  (en 
zend  Frawicin)^  types  divins  des  êtres  intelligents  et 
anges  gtirdiens  de  chacun  d'eux.  Tous  ensemble  ils  for- 
ment une  milice  céleste,  dont  plus  d'une  religion  et  plus 
d'une  philosophie  nous  offrent  l'analogue;  elle  sert,  dans 
la  cosmogonie  irinienne,  à  expliquer  cette  variété  in- 
finie de  biens  dont  la  nature  est  remplie  ;  la  hiérarchie 
des  chefs,  obéissant  à  l'ordre  suprême  de  la  première  in- 
telligence ,  Ormuzd ,  en  explique  l'harmonie  et  l'unité. 
Mais  de  même  qu'à  chaque  bien  moral  ou  physique  est 
opposé  un  mal ,  Ahriman ,  pour  le  produire,  a  mis  sous 
Tempire  des  Oarvands  la  troupe  innombrable  des  ûews 
fen  zend  Daéva), 

Tel  est  l'ensemble  de  la  cosmogonie  contenue  dans. 
VAvtsta.  Le  culte  rendu  aux  esprits  célestes  y  est  égale- 
ment exposé  et  presque  interprété.  Ce  culte,  qui  consiste, 
avant  tout,  dans  le  sacrifice  (yopnaj,  est  donné  dans 
VAoesia,  non-seuiement  comme  enseigné  par  Ormuzd  à 
l'antique  Djem-schid  (Yama) ,  mais  comme  pratiqué  par 
Ormuzd  lui-même  et  par  les  esprits  célestes.  C'est  le  sacri- 
fice védique  dans  son  essence  :  il  consiste  dans  une  offrande 
présentée  à  la  divinité,  consommée  par  la  bouche  du 
prêtre  et  de  l'assistance,  et  accompagnée  de  prières  litur- 
giques. Le  lieu  du  sacrifice  fqui  n'est  Jamais  un  temple), 
les  jours  et  les  heures,  sont  fixés  d'avance;  le  feu  sacré 
destiné  à  préparer  le  corps  de  l'offrande,  les  ustensiles  et 
vêtements  nécessaires  pour  la  cérémonie,  sont  entretenus 
par  les  prêtres,  qui  sont  en  même  temps  les  défenseurs 
et  les  interprètes  de  la  loi ,  les  chefs  des  fidèles  et  les 
ministres  du  sacrifice.  Le  corps  de  l'offrande,  créé  jadis 
par  Ormuzd,  représente  la  double  source  de  la  vie  maté- 
rielle, le  suc  des  plantes  et  la  chair  des  animaux.  Le  sa- 
crifice védique  du  cheval,  l'antique  asvamidha,  noii« 
montre  peut-être  l'origine  de  l'offrande  de  chair  dans  les 
cérémoniM  iraniennes;  mais  ce  qui  est  certain,  c'est  que 
l'offrande  du  hôm  (en  zend,  haâma)^  prescrite  par 
VAvesiaj  n'est  autre  que  l'offrande  védique  du  sôma,  suc 
de  l'asclépiade  acide  :  le  nom,  la  préparation,  les  instru- 
ments, le  vase  de  l'élévation ,  les  vertus  mystiques  de 
cette  liqueur,  tout  est  identique  dans  les  deux  religions 
issues  du  V^,  Cette  pensée  même  que  le  hôm  est  offert 
dans  le  ciel  par  les  plus  grands  esprits  divins  n'appar- 
tient pas  moins  à  l'Inde  qu'à  l'Iran,  car  elle  fait  partie 
essentielle  des  institutions  religieuses  du  Véda,  —  Le  feu 
fait  aussi  partie  du  sacrifice,  non  pas  seulement  comme 
purificateur,  rôle  qui  appartient  surtout  à  l'eau  bénite, 
mais  parce  qu'il  est  l'instrument  du  sacrifice  et  l'agont 
réel  de  la  vie.  Fils  d'Ormuzd,  et  produit  dès  l'origine  des 
choses,  il  servit  à  Vivangham,  père  de  Djem-schid  (  VwaS' 
wat ,  père  de  Yama  ),  à  pr^'parer  le  corps  du  sacrifice, 


c-a-d.  le  hôm  ei  les  gîLtcaux  sacrés.  Mais  ce  feu  avait  été 
lui-même  précédé  par  la  prière  nommée  honovêt,  qui  est 
la  propre  parole  d'Ormuzd.  Aussi,  de  même  que  le  hôm 
et  le  reste  de  l'offrande,  la  prière  exerce  pour  le  bien  des 
hommes  une  influence  toute-puissante.  La  prière  s'adresse 
à  chacun  des  esprits  célestes,  mais  elle  commence  et  finit 
toujours  par  une  invocation  à  Ormuzd,  dont  ils  ne  sont 
que  les  agents,  et  auquel  on  demande  la  pureté  de  pen- 
sée, de  parole  et  d'action,  l'obéissance  à  la  loi  et  le  ciel , 
Téloignement  d'Ahriman  et  des  ministres  du  mal.  La 
prière  peut  se  réciter  ailleurs  qu'au  jour  et  au  lieu  du 
sacrifice;  elle  embrasse  toute  la  vie  du  Parse;  VAvesta 
contient  des  prières  pour  toutes  les  circonstances  impor- 
tantes de  la  vie,  et  pour  celles  qui  reviennent  périodique- 
ment chaque  jour, chaque  mois,  chaque  année;  c'est  à  ce 
titre  surtout ,  et  pour  sanctifier  la  vie  entière,  que  la  loi 
de  Zoroastre  attache  une  si  grande  importance  aux  divi- 
sions du  temps  :  à  chacune  d'elles  est  attaché  un  esprit 
divin,  Âmschaspand,  Ized  tm  Ferouer,  et  à  chacune  se 
rapporte  une  prière;  le  Parse  yrie  à  son  lever,  avant  et 
après  son  repas,  à  son  coucher  ;  k  naissance,  le  mariage, 
la  mort,  ne  s'accomplissent  point  sans  un  acte  pieux  ;  on 
prie  pour  les  morts,  et  VAvêsta  dit  que  cette  prière  allège 

Eour  eux  les  peines  de  l'autre  vie,  hâte  leur  résurrection 
ienheurcuse,  et  prépare  la  conversion  d'Ahriman.  La 
pureté  en  toutes  choses  est  le  but  moral  qui  semble  avoir 
le  plus  préoccupé  le  législateur  de  l'Iran  ;  à  cette  pensée 
se  rattachent  non-seulement  beaucoup  de  vertus  admi- 
rables qu'il  exige  des  fidèles,  mais  une  foule  de  pratiques 
purificatoires  dont  il  donne  les  règles. 

La  religion  de  VAvesta  reconnaît  pour  son  point  de 
départ  géographique  la  Sogdiane,  d'oà  elle  s'est  répandue 
dans  l'Iran  et  dans  une  grande  partie  de  l'Asie  occiden- 
tale. La  montagne  sainte,  œuvre  et  séjour  d'Ormuzd,  au- 
tour de  laquelle  çravitent  les^  astres,  organes  du  temps, 
est  appelée  Borij  ou  Albordj  par  les  Persans,  et  en  zend 
Berezat ,  d'oô  les  Grecs  ont  tiré  le  mot  Bérécynthe,  Cette 
montagne  fait  partie  de  la  grande  chaîne  de  l'Elbourz,  à 
laquelle  se  rattachent  vers  l'est  le  Mêrou  et  l'Himalaya,  et 
qui ,  vers  l'ouest,  se  termine  au  grand  Olympe.  C'est  sur 
ces  sommets  purs  et  exempta  des  intempéries  d'ici-bas, 
que,  chaque  jour,  Mithra,  Ized  du  Soleil,  offre  le  sacrifice 
éternel  ;  c'est  là  qu'Ormuzd  l'a  établi  pour  être  le  média- 
teur entre  les  hommes  et  lui-même.  De  là  découle  la 
source  sainte  Ardviçur,  origine  des  fleuves  purificateurs. 
Là  doivent  se  réunir,  au  jour  de  la  grande  résurrection , 
les  justes  conduita  par  les  Izeds;  ils  y  seront  suivis  par 
les  méchante  que  le  feu  et  la  douleur  auront  purifiés; 
Ahriman  lui-même,  avec  les  Dews  et  les  Darvands,  offrira 
le  sacrifice;  tous  les  êtres  entoureront  le  trône  d'or  d'Or- 
muzd à  côté  des  Amschaspands  ;  et  de  ce  jour  1»  monde 
purifié  commencera  une  nouvelle  existence.  V,  Anquetil- 
Du perron,  traduction  d\i  Zend-Avesta,  Paris,  1771;  le 
même,  trois  Mémoires  dans  le  Recueil  de  VAccuiémie  des 
Inscr.  et  belles-lettres,  t.  XXXIV,  XXX VH  etXXXVIlI; 
l'abbé  Foucher,  Traité  historique  de  la  religion  des  Perses, 
dans  le  même  recueil ,  t.  XXV,  XX VII  et  XXIX  ;  Pastorct, 
Zoroastre.  Confudus  et  Mahomet,  1787,  in-8<^;  Eug. 
Burnouf,  Commentaire  sur  le  Yaçna,  Paris,  1833^  2  vol. 
in-4<^  ;  Reynaud,  art.  Zoroastre,  dans  V Encyclopédie  not^ 
velle;  Pavie,  Mémoire  sur  les  Parsis,  dans  le  t.  l*'  du 
Recwil  de  la  Société  ethnologique  de  Paris;  De  Hammer, 
Mémoire  sur  le  culte  de  Mithra ,  publié  par  J.  Spencer 
Smith,  Paris,  1833,  in-8<*  ;  Lajard,  Recherches  sur  le  culte 
public  et  les  mystères  de  Miihra,  Paris,  1847-48,  in-fol. 
et  in- 4^.  Des  éditions  complètes  du  texte  original  de 
VAvesta  ont  été  commencées  avec  traduction  anglaise  par 
Westergaard  (Copenhague,  1852),  et  avec  traduction  alle- 
mande par  Spreger  (Leipzig,  1853).  Olhausen  a  publié  le 
Vendidad,  et  Mfiller  une  traduction  du  Boundehech,  En.  B. 

ZÉPHYRS  ,  troupes  d'Algérie.  V.  ce  mot  dans  notre 
Dictionnaire  de  Biographie  et  d'Histoire. 

ZÉRO.  En  Musique,  le  zéro  placé  au-dessous  d'une 
note,  dans  une  partie  d'instrument  à  cordes  et  à  manche, 
indique  que  cette  note  doit  être  attaquée  à  v\de. 

ZÉTÉTIQUE  (du  grec  zétéô,  le  cherche),  terme  peu 
usité  de  Philosophie,  par  lequel  on  désigne  toute  mé- 
thode d'invention  ou  de  recherche,  et  spécialement  la 
méthode  analytique. 

ZEUGITES.  y.  ce  mot  dans  notre  Dictumnatr»  de  Bto- 
graphte  et  d^  Histoire, 

ZEUGMA ,  figure  de  Rhétorique  dont  le  nom,  tiré  d*un 
verbe  grec  qui  veut  dÏTQ  joindre  { zeugnumi  ),  signifie  pro- 
prement ionctton  ou  plutôt  jointure.  Ce  terme  s'applique 
aux  constructions  dans  lesquelles  un  seul  et  même  mot 
domine  une  série  de  membres  de  phrase  devant  chacun 


«IN 


1^00 


2YII 


desquels,  pour  ane  régularité  rigoureuse,  il  devrait  être 
répété.  Cette  figure  est  donc  une  variété  de  Tellipse.  En 
voici  des  exemples  :  «  Si  ses  sujets,  si  ses  alliés,  si  VÊglisB 
universelle  a  profité  de  ses  grandeurs,  etc.  »  (Bossuet.  ) 

Je  les  peins  dans  le  meurtre  à  renrl  triomphante, 
Rome  euti^re  noyée  au  eaug  de  aee  enfitata , 
Les  vm  aaaaasinëa....... 

(COBNBILLS.) 

D'autres  fois  le  zeugma  consiste  ^  mettre  un  mot ,  qui  a 
plusieurs  compléments,  en  rapport  seulement  avec  un 
seul.  Ainsi,  Boileau  a  dit  :  «  de  mérite  et  d'honneurs  re- 
vêtu, n  quoique  ce  participe  fasse  avec  mérite  une  alliance 
incohérente;  mais,  de  fait,  la  phrase  équivaut  à  «  revêtu 
d'honneurs  acquis  par  son  mérite  ;  »  et  ailleurs  : 

£t  la  faux  d  la  main,  parmi  voa  marëeagea, 
Allez  couper  vos  joncs  et  presser  vo*  laitages. 

Le  zeugma  fait  généralement  dans  les  langues  anciennes 
un  plus  heureux  effet  que  dans  le  français,  grâce  à  la  fa- 
cilité des  inverslous  et  à  la  variété  des  cas.  Les  gram- 
mairiens anciens,  mais  seulement  au  point  de  vue  de  la 
construction  même,  avaient  distingué  trois  espèces  de 
zeugma  :  le  protozeugma,  lorsque  le  mot  dominant  était  le 
premier;  le  mesozeugma,  lorsque  ce  mot  était  placé  dans 
le  corps  de  la  phrase  ;  Vk\fpo%euQmat  lorsque  le  mot  do- 
minant se  trouvait  à  la  fin  de  la  phrase.  P. 

ZÉZAYEMENT,  vice  de  prononciation  qui  consiste  à 
remplacer  Tarticulation  du  ^  ou  du  g  doux,  quelquefois 
même  du  ch,  par  celle  du  %  :  ptxon,  xuzube,  pour  pigeon, 
jujube, 

ZIGEUNES,  ZINGANES  ou  ZINGARI  (Langue  des). 

V,  BORéMlBNS. 

ZIGZAGS ,  ornement  d'Architecture,  suite  de  chevrons 
formant  des  angles  alternativement  saillants  et  ren- 
trants. —  Dans  la  Fortification,  on  donne  le  nom  de 
iigzags  k  des  tranchées  peu  larges,  formant  une  suite 
d'angles  aigus,  et  tracées  de  manière  à  ne  pas  rencon- 
trer la  face  des  ouvrages  qu'on  attaque. 

ZIKRE,  o^«'émonie  religieuse  expiatoire  des  Musul- 
mans. 

ZINCOGHAPHIB,  procédé  qui  consiste  à  substituer  le 
sine  à  la  pierre  pour  çraver  et  imprimer  des  cartes  géo- 
graphiques ou  des  dessins.  La  zincographie  a  été  inven- 


tée en  1828  par  Brugnot,  et  pratiquée  avec  succès  pu 
Kœppelin. 
ZINZAR  (Dialecte).  V.  Rodmanb  (Langue). 
ZITHER,  instrument  de  musique  à  cordes  pincées, 
originaire  de  la  Hongrie,  et  fort  à  la  mode  aujonrd'hoi  eo 
Hongrie,  en  Bavière  et  dans  les  provinces  rhénanes. 
ZODIAQUE,      j  K.  ces  mots  dans  notre  Dictioimain 
ZOLLVEREIN.  ]      de  Biographie  et  d^ Histoire, 
ZONE  (  du  grec  %onè,  bande) ,  nom  donné  à  des  bandes 
circulaires  que  les  géographes  déterminent  suf  la  surface 
terrestre.  Il  y  en  a  cinq  :  la  zone  torride  ou  intertropi- 
cale,  qui  s'étend  à  23  degrés  et  demi  de  chaque  côté  de 
l'Equateur  Jusqu'aux  Tropiques;  la  zone  tempérée  septen- 
trionale, entre  le  Tropique  du  Ûuicer  et  le  Cer\.Ie  polaire 
arctique,  et  la  zone  tempérée  méridionale,  entre  le  Tro- 

λique  du  Capricorne  et  le  Cercle  polaire  antarctique, 
arges  de  43  degrés  chacune;  les  deux  zones  glaciales, 
comprises ,  Tune  dans  l'hémisphère  septentrional  de  la 
terre  entre  le  Cercle  polaire  arctique  et  le  Pôle  nord,  l'au- 
tre dans  l'hémisphère  austral  entre  le  Cercle  polaire  an- 
tarctique et  le  Pôle  sud,  ayant  chacune  une  largeur  de 
23  degrés  et  demi, 
xom  ni  SERvmjDB,  xonb  fbontiêiib.   F.  Sbb^ttcdes 

MILITAIRES. 

ZOOLATRIE ,  culte  des  animaux.  V,  AimiAux. 

ZOOUQUE ,  bateau  à  manège  inventé  par  Guilbaud 
de  Nantes,  en  1822. 

ZOOPHORE.  V,  Frise. 

ZOTHECA.  V,  Alcovb. 

ZOUAVES.  V,  ce  mot  dans  notre  Dictionnaire  de  Bio- 
graphie et  d'Histoire, 

ZOUGGARAH,  instrument  de  musique  des  Arabf?s. 
C'est  une  sorte  de  cornemuse  composée  d'une  peau  de 
bouc  et  de  trois  bouts  de  roseau ,  percés  tous  trois  de 
quatre  trous  qui  peuvent  donner  chacun  quatre  sons 
différents. 

ZOULOU  (Idiome),  un  des  idiomes  cafres(V.  ce  mof). 
Il  en  existe  un  Vocabulaire  dans  le  tome  II  du  Voyagt 
dans  V Afrique  australe  par  Delegorgue,  Paris,  1847. 

ZOURNA  ou  ZURNA,  instrument  de  musique.  V.Imkl 

ZWANZIGER  (de  l'allemand  zwanzig,  vingt),  pièceàe 
monnaie  autrichienne,  valant  20  kreutzers,  ecTiroi 
80  centimes. 

ZYGITES.  ^.  Navales  (Construction»). 

ZYRIANE  ou  ZYRIÈNE  (Idiome^.  V,  SiRibii. 


DICTIONNAIRE 


DES    LETTRES 

DES    BEAUX-ARTS 


ET 


DES  SCIENCES  MORALES  ET  POLITlQUiES 


SUPPLÉMENT  A  LA  SEPTIÈME  ÉDITION 


REVU  ET  AUGMENTÉ. 


ACCOLADE,  signe  orthographiqae  qui  sert  i  réunir 
plusieurs  articles  en  un  tout,  ou  à  montrer,  en  les  rap- 


copistes  arrivaient  à  la  fin  d*une  ligne,  pour  ne  pas 
porter  à  la  ligne  suivante  un  mot  qui  complétait  le  sens, 
ils  le  plaçaient  sous  le  dernier  mot  de  la  ligne  avec  une 
accolade,  afin  d*indiquer  qu'il  appartenait  A  cette  ligne. 
AGE  DE  PIERRE,  nom  donné,  en  archéologie,  aux 
siècles  primitifs  de  l'humanité,  durant  lesquels  la  pierre 
servit  presque  exclusivement  à  façonner  des  armes  et 
divers  ustensiles.  On  divise  ce  premier  âçe  en  hge  de 
la  vUrre  hrtUe  ou  paléolithique  et  &ge  de  la  pierre 
pone  ou  néolithique.  L'homme  se  fit  d'abord  une  sorte 
de  poignard  avec  une  pointe  d'os  ou  de  corne,  ou  avec 
un  éclat  de  silex:  plus  tard,  sivec  divers  cailloux,  A 
l'aide  du  choc  ou  du  frottement,  il  façonna  des  dagues, 
des  haches,  des  pointes  de  flèches  ou  de  lances,  des 

{>ierre8  de  frondes.  Les  premiers  spécimens  d'armes  de 
'Âge  de  pierre  nous  sont  venus  de  la  région  Scan- 
dinave ;  ils  furent  trouvés  dans  les  cavernes  àossements 
et  dans  les  amas  côtiers  (/EJoeA^lESfifiioecUmors).  Le  Dane- 
mark, en  outre  des  pièces  dont  il  a  enrichi  la  plupart 
des  collections  de  l'Europe,  possède  à  peu  près 
35,000  instruments  de  silex;  le  musée  de  Stockholm  en 
renferme  16,000  environ.  On  a  trouvé  aussi  des  monu- 
ments de  l'âge  de  pierre  en  Irlande  et  en  Suisse,  quand 
on  a  découvert  dans  la  tourbe  les  habitations  lacustres 
(voir  ce  mat),  ainsi  que  dans  les  tumuli  de  l'Esthonie,  de 
la  Livonie  et  de  la  Gourlande,  dans  le  bassin  français 
de  la  Somme,  en  Espagne  et  en  Italie. 

A  l'Age  de  pierre  succéda  Vàge  du  hronxs  ou  âge 
celtique,  qui,  à  son  début,  se  confond  avec  celui  de  la 

Eierre  polie.  L'homme  alors  employa  le  bronze  pour 
L  fabrication  de  ses  armes,  de  ses  instruments  de  tra- 
vail. 


en 

relativement 

en  Europe  par  les  premières  invasions  aryennes(20  siècles 

av.   J.-G.).  Sa  durée  a  été  aussi   relativement  très 

courte. 

Vàge  du  fer  est  le  troisième  Age  de  l'humanité.  Ce 
n'est  réellement  qu'A  partir  de  cette  épo(][ue  que  l'homme 
a  pu  marcher  A  grands  pas  dans  la  civilisation.  Le  feu 
et  les  métaux  ont  été  les  éléments  primordiaux  du 

(progrès  :  sans  l'un,  l'homme  ne  serait  Jamais  sorti  de 
'état  de  la  brute  ;  sans  les  autres,  il  ne  serait  jamais 


âle 

sorti  de  l'état  sauvage.  V.  Joseph  de  Baye,  l^Archéo- 
logie  préhistorique,  1861,  et  plus  loin  Gbrmaui  (Sanrr-) 
AGENCES  MATRIMONIAIJBS.  Ces  institutions  sin- 
gulières sont  de  date  récente.  En  1732,  un  bourgeois  de 
Hambourg  imagina  d'ouvrir  un  bureau  où  l'on  signa- 
lait les  partis  disponibles  ;  il  lançait  de  temps  en  temps 
des  avis,  mais  ne  négociait  pas  lui-môme  les  mariages. 
La  première  agence  régulièrement  constituée  fut  fondée 
A  Paris,  sous  le  Directoire. 

AGRIMENSORES,  collection  de  16  auteurs  latins,  qui 
ont  écrit  autant  de  petits  traités  ou  de  fragments  sur 
l'arpentage.  Goos,  en  latin  Goesius,  en  a  donné  une 
édition  avec  notes,  observations^  glossaire,  etc.  {Rei  agi  a- 
riœ  auctores,  cum  antiquiteUtbus  et  legUnu  agrariisy 
Amsterdam,  1674,  in-4*,  avec  planches) ,  édition  ren- 
due inutile  par  celle  de  Lacnmann  (Berlin,  1848). 
Ces  divers  ouvrages,  assez  arides  en  eux-mêmes,  ont  une 
certaine  importance  par  les  détails  que  Ton  y  rencontre 
touchant  l'histoire  de  la  constitution  et  de  la  législation 
romaines.  Le  nom  d^Agrimensores,  pris  du  sujet  de  ce 
recueil,  a  prévalu  parmi  les  philologues.  La  plupart  de 
ces  auteurs  sont  inconnus  :  il  y  a  dans  la  collection  un 
Traité  de  l'empereur  Arcadius.  CD-— r. 

ALEXIS  (Saint),  un  des  plus  anciens  poèmes  de 
notre  langue,  antérieur  A  la  Chanson  de  Roland  et 
datant  du  xi*  siècle;  découvert  A  Hildesheim  (Hano- 
vre) et  publié  par  M.  Wilhelm  Maller  en  1845  ;  une 
édition  définitive  a  été  publiée  par  MM.  Gaston  P&ris 
et  L.  Panier  dans  la  binliothèque  de  l'École  des  hau- 
tes études  (1872).  Ce  poème  se  compose  de  625  vers, 
répartis  en  125  strophes  de  5  vers  decasyllabiques,  et 
assonant  sur  la  même  voyelle.  Il  a  été  composé  d'a- 
près une  vie  latine  de  saint  Alexis,  publiée  dans  les 
Acta  sanctorum.  Il  raconte  comment  Alexis,  fils  unique 
d'un  grand  seigneur  de  Rome,  ouitte  sa  famille  la 
nuit  même  de  son  mariage  pour  aller  vivre  en  men- 
diant en  Asie  Mineure;  désigné  par  un  miracle  A  la 
vénération  du  peuple,  il  s'enfuit,  et,  poussé  par  la  tem- 
pête, revient  après  17  ans  d'absence  A  Rome,  où  il  va 
demander  l'hospitalité  A  son  père  qui  ne  le  reconnaît 
pas  ;  il  vit  lA  dix-sept  ans  encore,  dans  les  mortifi- 
cations et  les  prières,  assistant  au  désespoir  de  sa 
mère,  de  sa  femme  et  de  son  père  qui  ne  sont  pas 
encore  consolés  de  sa  perte,  sans  que  sa  constance  en 
soit  ébranlée  un  moment.  Épuisé  d'austérités,  il 
meurt  enfin  après  avoir  écrit  le  secret  de  sa  vie.  Un 
miracle  le  fait  reconnaître  au  pape  Innocent  et  aux 
deux  empereurs  de  Rome,  Arcadius  et  Honorius.  qui 

114 


AQU 


—  1802  — 


ARM 


le  fODt  enterrer  aver  pompe  au  milieu  des  adorations 
de  la  fouie  et  de  la  désolation  de  ses  parents.  Ce  poème, 
outre  son  importance  comme  teite  de  langue,  est 
d*une  Taleur  littéraire  hors  ligne,  par  la  sobriété  et  la 
plénitude  de  l'expression,  par  Ut  hauteur  des  senti- 
ments et  en  certains  pa88ag:es  le  pathétique  éloquent 
(plaintes  de  la  mère  d'Alexis].  Il  occupe  dans  la  poé- 
sie religieuse  une  place  aussi  haute  que  Roland  oans 
la  poésie  épique.  —  La  légende  latine,  sur  laquelle  est 
fondé  le  poème  français,  repose  sur  une  légende  grecque 
qui  est  elle-même  d'origine  syriaque.  Le  texte  syriaque 
a  été  publié  par  H.  Amiaud  avec  tradaciion  française 
dans  la  bibliothèque  de  l'École  des  hautes  études,  1882. 

ALINÉA,  disposition  orthographique  qui  sert  à  sépa- 
rer les  diverses  parties  d'un' texte.  Elle  date  de  Pinven- 
tion  de  Timprimerie.  On  distingua  d'abord  les  Alinéa 
alignés,  qui  étaient  de  niveau  avec  les  autres  lignes  de 
la  page  ;  les  Alinéa  saillants,  qui  dépassaient  de  quel- 
ques lettres'les  autres  lignes;  et  les  Alinéa  rentrants, 
(Jui  laissaient  un  espace  Tibre  au  commencement  de  la 
ligne.  Ces  derniers  sont  seuls  usités  aujourd'hui.  Aupa- 
ravant on  marquait  les  divisions  d'un  texte  au  moyen  de 
signes  conventionnels,  qui  variaient  saivant  les  copistes. 

AMBOTRACE,  nom  donné  à  un  instrument  qui  per- 
met d'écrire  simultanément,  sur  des  papiers  séparés, 
deux  copies  du  même  texte.  Des  ambotraces  ont  été 
inventés  par  Gotteneuve  à  la  fin  du  xviii*  siècle,  puis 
par  Lhormite,  La  Chabeaussière,  Obrion,  etc.  Les  pro- 
cédés autographiques  ont  été  préférés. 

AMORCES  ou  Capsclbs  db  gobrab.  En  1610,  l'écri- 
vain militaire  Rivault  proposa  d'employer  l'or  fulminant 
pour  mettre  le  feu  aux  armes  de  guerre.  Cette  idée 
passa  inaperçue  et  ne  fut  reprise  que  dans  notre  siècle, 
a  l'époque  de  l'invention  delà  platine  à  percussion.  Le 
chlorate  de  potasse  et  l'argent  fulminant  furent  d'abord 
expérimeniës,  mais  sans  succès.  Puis  le  mercure  fulmi- 
nant fut  employé  sous  forme  de  pastilles  ou  de  globules. 
L'idée  de  l'enfermer  dans  une  petite  capsule  de  cuivre 
naquit  en  AngleterrOt  vers  1818,  et  cette  invention  fut 
introduite  en  France,  en  1820,  par  l'armurier  parisien 
Deboubert.  On  commença  par  fabriquer  les  amorces 
fulminantes  au  balancier  et  à  l'aide  de  procédée  très 
lents;  mais,  en  1842,  le  capitaine  d'artillerie  Humbert 
inventa  une  machine  qui,  mue  par  un  seul  homme, 
produisait  chaque  jour  dO,000  amorces. 

ANDRICNNE,  nom  donné,  au  commencement  du 
xvui*  siècle,  à  un  vêtement  de  déshabillé  pour  femmes, 
consistant  en  une  robe  longue,  ouverte  et  abattue.  Ce 
vêtement  avait  été  imaginé  par  la  comédienne  Dancourt 
pour  jouAr  dans  VAndrienns  de  Térence,  traduite  par 
Baron. 

AQUED€G  DE  LA  Dhdts.  —  Cet  aqueduc,  qui  amène 
des  eaux  pures  à  Paris,  a  une  longueur  de  lo9  kilom. 
II  prend  naissance  à  Pargny  (Aisne),  traverse  les  dép. 
de  l'Aisne,  de  Seine-et-Marne,  de  Seine-et-Oise  et  de 
la  Seine,  et  aboutit  au  réservoir  de  Ménilmontant.  Il  est 
construit,  partie  en  maçonnerie  (118  kilom.),  avec  pentes 
régulières  de  0'",10  par  kilom.,  partie  en  siphons  ou 
conduites  forées  en  fonte  franchissant  les  vallées,  avec 
charge  de  0'",55  par  kilom.  L'aqueduc  maçonné  a  été 
construit  en  souterrain  sur  une  longueur  de  10  kilom.; 
les  principaux  souterrains  sont  ceux  de  Montmeoard, 
Montretout,  Monceaux  et  Qûincy,  qui  ont  de  700  à 
2,000*"  de  développement.  Les  principaux  siphons  sont 
ceux  du  Petit-Morin,  du  Grand-Monn,  de  la  Marne  et 
de  Villemonble,  qui  ont  de  1,000  i  4,500*"  de  longueur. 
Le  réservoir  de  Ménilmontant  est  divisé  en  deux  étages. 
L'étage  supérieur  a  le  plan  de  son  trop-plein  à  lOS"* 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  et  il  reçoit  les  eaux  de 
source.  Sa  capacité  est  de  100,000°*  cubes  (ou  100  mil- 
lions de  litres)  ;  la  profondeur  de  l'eau  y  est  de  5  "*.  Il 
est  recouvert  d'une  couche  de  terre  engazonnée,  qui 
maintient  le  liquide  à  une  température  constante  et 
suffisamment  fraîche.  Entre  les  piliers  en  maçonnerie 
hydraulique  qui  supportent  le  radier  et  les  murs  d'en- 
ceinte du  réservoir  supérieur,  est  établi  le  réservoir  infé- 
rieur, dont  la  capacité  est  de  30,000<"  cubes,  et  qui 
reçoit  les  eaux  de  la  Marne  amenées  de  Charenton  et 
montées  par  les  machines  de  Saint-Mau«*.  A  Belleville, 
point  plus  élevé  que  Ménilmontant.  on  a  construit  un 
autre  réservoir,  qui  reçoit  les  eaux  du  premier  à  l'aide 
d'une  machine  à  vapeur  de  15  chevaux  de  force,  et  oui 
est  également  fractionné  en  deux  étapes,  l'un  pour  ies 
eaux  de  source,  l'autre  pour  les  eaux  de  rivière.  On  est 
sinsi  à  même  d'affecter  spécialement  les  eaux  de  source 
aux  usages  domestiquesi  et  de  restreindre  l'emploi  des 


eaux  de  rivière  aux  services  publics  (fontaines  rnoon- 
mentalcs,  squares,  arrosages  de  la  voie,  etc.).  Les  tn- 
vaux  de  l'aqueduc  furent  commencés  en  1863,  et  lei 
eaux  arrivèrent  à  Ménilmontant  en  1865.  On  a  emploré 
100,000"  cubes  de  pierre,  88,000»  de  sable,  38  million 
de  kilogr.  de  ciment,  10  millions  de  kilogrr.  de  foote, 
140,000  kilogr.  de  plomb.  Les  premiers  devis  portaient 
le  coût  du  travail  à  40  millions  de  francs. 

ARMÉE.  —  AlUmagnê.  ~  Le  chef  de  l'armée  tHe- 
mande  est  le  roi  de  Prusse.  Dans  la  oionarchie  fédé- 
ra tive  que  forme  actuellement  l'empire  d'Allemagne, 
lea  liens  militaires  qui  attachent  les  États  allemandi 
à  la  Prusse  sont  de  diverses  espèces  et  partagent  ceui-ci 
en  groupes  distincts.    Les  rois    de  Saxe,  de  Wo^ 
temberg  et  de  Bavière  ont  conservé  une  certaine  au- 
torité personnelle  sur  leurs  troupes  qui  forment  res- 
pectivement les  corps  portant  les  numéros  12, 13,  i*'  et 
z*  Bavarois.  Les  troupes  du  grand-duché  de  Bade  qui 
forment  le  14*  corps,  celles  des  duchés  de  Hecklembour; 
qui  font  partie  du  9« ,  celles  de  Brunswick  qui  sont 
comprises  dans  le  10*,  celles   de  Hesse-Nassau-Cas- 
sel  et  des  duchés  de  Saxe,  qui  forment  le  11%  consti- 
tuent des  contingents  sépares,  mais  sont  instruites, 
commandées  et  administrées  par  les  soins  de  la  Prusse; 
les  troupes  provenant  du  Schleswig-Holstein  et  com- 
prises dans  le  9*  corps,  celles  du  Hanovre  qui  sont  com* 
prises  dans  le  10*,  celles  d'Alsace-Lorraine  qui  formeai 
le  15%  celles  de  quelques  petites  principautés  et  celles 
des  villes  banséatiques  sont  entièrement  absorbées  dau 
l'armée  prussienne  qui,  à  elle  seule,  forme,  du  reste, 
8  corps  d*armée  et  un  corps  de  la  garde.  —  Chacun 
de  ces  17  corps  d'armée  réside  en  permanence  sur  une 
étendue  déterminée  du  territoire  allemand  où  fl  ft 
recrute  et  dont  la  population  est  environ  de  S3O.O00 
habitants  :  le  corps  de  la  garde  se  recrute  sur  le  terri- 
toire de   l'ancien  royaume  de  Prusse.  —  Les  corps 
d'armée  ont  tous  la  même  ^  composition  ;    ils  com- 
prennent, sur  le  pied  de  paix  :  les  états-majors  du 
corps  d'armée,  des  divisions  et  des  brigades  ;  2  divi- 
sions, chacune  comprenant  2  brigades  de  2  régiments 
d'infanterie  et  1  brigade  de  2  ou  3  régiments  de  can' 
leric  ;  1   bataillon   de    chasseurs  à  pied,  1  brigade 
d'artillerie  de  campagne  à  2  régiments,  1   régiment 
d'artillerie   à    pied,    1    bataillon   de    pionniers,    I 
bataillon    du     train,    divers   services    particuliers, 
17  districts  de  bataillons  de  landwchr.  —  L'infanterie 
de  ligne  comprend  148  régiments,  dont  9  de  la  garde, 
17  de  grenadiers  et  13  de  fusiliers  ;  il  y  a,  en  outre, 
26  bataillons  de  chasseurs  à  pied  ;  tous  les  bataillons 
ont  4  compagnies  et  tous  les  régiments  3  bataillons. 
La  cavalerie  comprend  93  régiments.  L*artillerie  de 
campagne  comprend  37  règim(*nts,  dont  19  ont  8  bat- 
teries de  6  pièces  et  18  ont  9  batteries  de  6  pièces. 
L'artillerie  à  pied  contient  18  régiments  à  2  batail- 
lons. Il  y  a  18  bataillons  de  pionniers  et  18  bataillons 
du  train.  L'effectif  total,  sur  le  pied  de  paii,  est  de 
17,033  officiers,  401,659  combattants,  3,6U  non  com- 
battants, 96,158  chevaux.  —  Chaque   corps  d'armée 
mobilisé,  c'est-à-dii-e  mis  sur  le  pied  de  guerre,  se 
fractionne  en  troupes  de  campagne,  troupes  de  rem- 
placement et  troupes   d'occupation.  Les  troupes  de 
campagne  sont  formées  par  2  divisions  dont  chacune 
contient  4  régiments    d'infanterie    en    2    brigades, 
1  régiment  de  cavalerie,  4  batteries  d'artillerie  etl  com- 
pagnie de  pionniers;  le  corps  d'armée  comprend  en 
outre  9  batteries,  des  services  de  pionniers,  dn  trsin 
et  de  santé  ;  l'effectif  de  ces   troupes    est  de   881 
officiers,  32,000  combattants,  3,900  non  combatUnis, 
10,600  chevaux,  102  pièces,  1,100  voitures.  Toutes 
les  troupes  de  campagne  de  l'armée  allemande  com- 
prennent 17,600  officiers,  599,000  combattanU,  75,000 
non  combattants,    200,000    chevaux,    1,860    pièces, 
23,500  voitures.   Mais  il  y  a  lieu  de  remarquer  qo'il 
s'agit  seulement  ici  de  18  corps,  d'armée,  tandis  que 
le  nouveau  plan  de  mobilisation  de  l'armée  allemande 
doit  en  contenir  22,  dont  chacun  aura  8,000  hummei 
d'infanterie  et  4  batteries  de  plus  que  jusqu'ici,  eji 
sorte  que  l'on  peut  estimer  à  1,200,000  hommes  sa 
moins  l'effectif  de  l'armée  allemande  et  à  2,8(X)  celui 
des  pièces.  —  Les  troupes  de  remplacement  contien- 
nent les  dépôts  destinés  à  compléter  les  vides  qni  se 
firoduisent  dans  les  troupes  de  campagne  :  les  unes  et 
es  autres  sont  entretenues  par  l'appel  des  hommes  de 
20  à  27  ans,  dont  le  nombre  annuel  est  de  .180,000 
environ,  ce  qui,  déduction  faite   des  pertes,  fonne  à 
peu  près  un  toUl  4e  1,300,000  soldats.  —  Les  troapst 


ARM 


1803  — 


ARM 


d*oceiipatioii  sont  foarnies  par  la  Undwehr  qui 
comprend  des  hommes  de  Ï7  à  32  ans  et  dont  l'effectif 
moyen  est  environ  de  600,000  hommes  ;  elles  sont  ren- 
forcées par  les  iandsturm,  levée  en  masse  organisée 
on  tout  temps,  comprenant  tous  les  hommes  de  17  à 
At  ans  qui  ne  sont  dans  aucune  des  catégories  précé- 
dentes, et  dont  il  est  impossible  d*estimer  la  force 
approximative. 

Angleterre,  —  Les  armées  de  la  Grande-Bretagne 
comprennent  :  1»  Tarmée  active  qui  se  compose  elle- 
foôme  de  Tarmée  permanente,  des  troupes  indigènes  ei 
de  la  première  classe  de  la  réserve;  2®  Parmee  auxi- 
liaire, qui  comprend  la  seconde  classe  de  la  réserve,  la 
milice  et  le  corps  des  volontaires.  —  L*armée  perma- 
nente contient  9,895  ofHciers,  181,997  hommes, 
26,445  chevaux  et  1 ,362  pièces  attelées  ;  elle  comporte 
148  bataillons  d'infanterie  formant  112  régiments, 
448  troops  de  cavalerie  formant  31  régiments,  227  bat- 
teries d'artillerie,  dont  112  de  campagne,  comprises 
dans  un  régiment;  43  compagnies  de  génie  et  des  ser- 
vices divers  ;  63,000  hommes  et  12,000  chevaux  font  par- 
tie de  Karmee  des  Indes  ;  celle-ci  comprend,  en  outre, 
120,000  indigènes.  —  La  première  classe  de  la  réserve 
compte  10,000  hommes;  il  y  en  a  25,000  dans  la 
seconde.  —  La  milice  est  constituée  par  132  bataillons 
d*infanterie,  340  troops  de  Yeomanry  et  30  régiments 
d'artillerie  ;  elle  a  un  effectif  de  155,000  hommes  envi- 
ron, dont  25,000  doivent,  d'après  certaines  conditions 
pécuniaires,  servir  au  même  titre  que  la  première  classe 
de  la  réserve.  —  Le  corps  des  volontaires  comprend 
120,000  rifles  à  pied,  300  rifles  à  cheval,  34.000  artil- 
leurs, 5,000  sapeurs  du  génie,  600  cavaliers  légers, 
c*est-dire  190,000  hommes.  —  Le  total  des  forces 
militaires  de  TAngleterre  est  donc  de  660,000  hommes 
environ. 

Autriche- Hongrie,  —  L'effectif  des  tronpes  de  cam- 
pagne austro-hongroises  est  fixé  à  800,000  hommes  pour 
une  période  de  lU  ans,  de  1868  à  1878  ;  il  convient  d'y 
ajouter,  en  outre,  600.000  hommes  de  landwehr.  —  La 
composition  de  l'armée  active  est  la  suivante  :  80  régi- 
ments d'infanterie  à  5  bataillons  de  guerre  de  4  com- 
pagnies et  de  1  dépôt  ;  40  bataillons  de  chasseurs  à 

4  compagnies,  dont  4  de  guerre,  7  de  ces  bataillons 
étant  compris  dans  le  rôgimentdes  chasseurs  tyroliens; 
61  régiments  de  cavalerie  à  7  escadrons,  dont  1  de  dépôt; 
13  régiments  d'artillerie  de  campagne  à  13  batteries  de 
Spièces,  12  bataillons  d'artillerie  de  place  ;  2  régiments 
de  génie,  1  résiment  de  pionniers,  les  services  acces- 
soires; effectiftoul,  15,315  officiers,  253,040  hommes 
46,667  chevaux.  —  Cette  armée  active  est  portée  à 
800,000  hommes  lors  de  la  mobilisation  par  l'incorpora, 
tion  de  532,000  hommes  de  réserve  ;  elle  peut  former 
13  corps  d'armée  contenant  40  divisions  d'infanterie- 

5  divisionsde  cavalerie  et  la  réserve  générale  d'artillerie; 
son  total  est  alors  de  24,762  officiers,  796,953  hommes 
148,623  chevaux,  1,672  pièces,  23,604  voitures.  —  La 
andwehr  est  distincte  selon  qu'elle  appartient  aux  pro- 
vinces sisleithanes  ou  aux  provinces  transleithanes  ou 
au  Tyrol.  L'effectif  de  la  landwehr  cisleithane  est  de 
250,000  hommes.  Celui  de  la  honwed,  c'est-à-dire  de  la 
landwehr  hongroise  ou  transleithane,  doit  être  en  1878 
de  5,300  officiers,  319,350  hommes,  44,300  chevaux, 
900  mitrailleuses  et  4,000  voitures  ;  son  organisation 
réelle  en  fait  une  armée  de  seconde  ligne.  Le  Tyrol  et 
le  Vorarlberg  fournissent  13,000  landes-schuetzen  aux- 
quels il  convient  d'ajouter  les  deux  bans  du  landsturm 
comprenant  tons  les  hommes  valides  de  18  à  45  ans  et 
qui  existe  légalement  dans  cette  seule  province  de  la 
monarchie  austro-hongroise. 

Belgique,  —  L'armée  belge  comprend,  sur  le  pied  de 
paix,  3,200  officiers,  41,500  hommes,  7,200  chevaux, 
160  pièces  attelées.  Elle  est  constituée  de  la  façon  sui- 
vante :  19  régiments  d'infanterie,  dont  18  ont  3  bataillons 
actifs  de  4  compagnies  et  1  non  actif;  8  régiments  de 
cavalerie  à  5  escadrons,  dont  de  4  guerre  ;  7  régiments 
d'artillerie  dont  4  de  campagne,  ayant  chacun  10  bat- 
teries à  5  pièces  ;  1  régiment  du  génie  et  divers  ser- 
vices. —  En  cas  de  mobilisation,  Teffectif  de  l'armée 
belge  ne  peut  dépasser  80,000  hommes. 

Danemark,  —  L'armée  danoise  comprend  l'armée 
active,  la  réserve  et  le  renfort.  —  L'armée  active 
n'a  qu'un  faible  noyau  à  titre  d'armée  jpèrmanen te  ; 
quand  elle  est  mobilisée,  elle  contient.  38, 100  hommes 
5,300  chevaux  et  64  pièces;  elle  est  alora  composée  de 
21  bataillons  d'infanterie  à  4  compagnies,  11  escadrons 
de  cavalerie,  8  batteries  de  campagne  à  8  pièces,  8  com- 


pagnies d'artillerie  de  placo,  lO  compagnie  du  génie  et 
divers  services.  —  La  réserve  compte  environ  11,700 
hommes  Kt  le  renfort  en  a  10,300.  —  L'effeciif  total,, 
sur  le  pi«*d  de  guerre,  est  à  peu  près  de  60,000  hom- 
mes, 8,000  chevaux  et  96  pièces. 

Espagne,  —  La  situation  intérieure  dans  laquelle  se 
trouve  l'Espagne  par  suite  des  luttes  incessantes  aux- 

auelles  donne  lieu  la  forme  du  gouvernement  rend 
ifficUe  à  apprécier  exactement  l'effectif  des  forcftR  mili- 
taires de  ce  pays.  Toutefois,  on  peut  estimer  que  Tarmée 
espagnole  comprend  environ  100,000  hommes  sur  le 
pied  de  paix  et  qu'il  peut  être  porté  à  250,000  hommes 
sur  le  pied  de  guerre  ;  on  y  trouve  40  régiments  d'in- 
fantene,  20  bataillons  de  chasseurs,  20  régiments  de 
cavalerie,  5  régiments  d'artillerie  de  campagne.  2  do 
montagne,  4  de  forteresse  et  4  régiments  du  génie.  Il 
convient  d'y  ajouter  environ  100,000  hommes,  dont 
30,000  de  troupes  régulières,  qui  sont  employés  dans 
nie  de  Cuba. 

France,  —  L'armée  française,  sur  le  pied  de  paix,  a 
un  effectif  de  440,787  hommes,  dont  27,014  pour  la 
gendarmerie  et  dont  52,558  résident  en  Algc^riè;  le 
nombre  des  chevaux  y  est  de  108,791  dont  13.667  pour 
la  gendarmerie  et  14,953  pour  l'armée  d'Algérie.  — 
Cette  armée  forme  18  corps  d'armée  en  France  et  un 
\9^  en  Algérie.  Les  quartiers  généraux  des  corps  d'ar- 
mée sont  les  suivant  :  1,  Lille;  2,  Amiens  ;  3,  Rouen  ; 
4,  Le  Mans;  5,  Orléans;  6,  Ch&lons;  7,  Besancon; 
8.  Bourges;  9,  Tours;  10,  Rennes;  11,  Nantes;  12, 
Limoges  ;  13,  Clermont  ;  14,  Grenoble  ;  15,  Marseille  ; 
16,  Montpellier  ;  17,Toulouse;  18,  Bordeaux;  19,  Alger. 
Les  troupes  tenant  garnison  à  Paris  et  à  Lyon  sont 
respectivement  placées  sous  les  ordres  d'un  gouverneur 
militaire.  —  La  composition  des  18  corps  d'armée  de 
France  est  la  suivante  :  2  divisions  d'infanterie,  1  bri- 
gade de  cavalerie,  1  brigade  d'artillerie,  1  bataillon  de 
chasseurs  à  pied,  1  bataillon  du  génie,  1  escadron  du 
train  des  équipages  militaires,  les  états-majors  et  les 
services  accessoires.  —  L'infanterie  comprend  144  régi- 
ments de  ligne  à  4  bataillons  de  4  compagnies,  plus  2 
compagnies  de  dépôt  ;  30  bataillons  de  chasseurs  .1  pied 
à  5  compagnies  dont  1  de  dépôt  ;  4  régiments  de  zouaves 
à  4  bataillons  de  4  compagnies,  plus  1  compagnie  de 
dépôt;  3  bataillons  d'infanterie  légère  d'Afrique  à 
6  compagnies  ;  4  compagnies  de  fusiliers  de  discipline  ; 
1  compagnie  de  pionniers  de  discipline  ;  i  légion  étran- 
gère à  3  bataillons  de  4  compagnies  ;  3  régiments  de 
tirailleurs  algériens  à4  bataillons  de 4  compagnies,  plus 
1  compagnie  de  dépôt;  au  total  :  251,676  hommes  et 
2,916  chevaux.  La  cavalerie  comprend  74  régiments  à 
5  escadrons  dont  1  de  dépôt,  savoir  :  12  de  cuirassiers 
26  de  dragons,  32  de  chasseurs,  10  de  hussards  ;  4  esca- 
drons de  chasseurs  d'Afrique  et  3  de  spahis  à  6  régi- 
ments ;  8  compagnies  de  cavaliers  de  remonte;  20  dépôts 
de  remonte  et  d'étalons  ;  au  total  :  65,035  hommes  et 
51,505  chevaux.  L'artillerie  comprend  19  régiments  à 
3  batteries  k  pied,  7  batteries  montées  et  2  batteries  de 
réserve;  19  régiments  à  7  batteries  montées,  3  batteries 
à  cheval  et  2  batteries  de  réserve  ;  1  régiment  de  pon- 
tonniers à  14  compagnies;  lO  compagnies  d'ouvriers, 

3  d'artillerie  et  57  du  train  ;  au  toul  :  55,629  hommes 
28,102  chevaux  et  2,394  pièces  de  campagne.  Le  génie 
comprend  4  régiments  à  5  bataillons  de  4  compagnies 
plus  1  compagnie  de  dépôt,  1  compagnies  d'ouvriers 
militaires  decbemins  de  fer  et  1  compagnie  de  sapeurs- 
conducteurs;  au  total  :  10,960  hommes  et  733  chevaux. 
Le  train  des  équipages  comprend  20  escadrons  à  3 
compagnies  ;  12  compagnies  mixtes  en  Algérie  ;  au 
total  :  7,392  hommes  et  7,680  chevaux.  Le  personnel  en 
dehors  des  corps  de  troupes  comprend  26,409  hommes 
et  4,362  chevaux.  —  La  force  de  l'armée  française  mise 
sur  le  pied  de  guerre  ne  peut  être  donnée  exactement 
la  loi  n'ayant  pas  fixé  les  effectifs  des  troupes  mobilisées; 
mais,  d'après  les  contingents  annuels,  on  sait  que  les 
9  classes  formant  les  troupes  de  campagne  peuvent 
contenir  1,800,000  hommes,  dont  1,300,000  instruits.  — 
L'armée  territoriale>  qui  comprend  les  hommes  de  29 
à  34  ans,  et  la  réserve  de  l'armée  territoriale,  dont  font 
partie  les  hommes  de  34  à  40  ans,  sont  réparties  par 
corps  d'armée.  L'armée  territoriale  est  seule  organisée; 
chaque  région  de  corps  d'armée  est  partagée  à  cet  effet 
en  8  divisions  à  raison  de  1  par  régiment  d'infan- 
terie de  ligne  ;  chaque  subdivision  fournit  à  l'armée 
territoriale  :  1  régiment  d'infanterie  à  3  bataillons  de 

4  compagnies,  plus  1  cadre  de  compagnie  de  dépôt. 
Chaque  région  du  corps  d'armée  fournit,  en  outre 


ARM 


—  1804  — 


ARM 


1  régiment  d'artillerie,  i  bataillon  du  génie,  1  esca- 
dron da  train  des  équipages  militaires,  des  escadrons 
de  cavalerie  et  des  compagnies  du  train  d'artillerie. 
La  force  moyenne  de  1  armée  territoriale  peut  être 
évaluée  à  600,000  hommes  et  celle  do  la  réserve  de 
cette  armée  à  600,000  hommes. 

Grèce.  —  L'armée  grecque  no  contient  environ  que 
8,000  hommes  ftous  les  drapeaux  ;  son  effectif  de  guerre 
est  de  25,000  hommes  environ.  Elle  comprend  16  ba- 
taillons d'infanterie  de  ligne,  4  bataillons  de  chasseurs 
6  escadrons  de  cavalerie,  10  batteries  d'artillerie  de 
campagne.  II  y  a,  en  outre ^  60,000  hommes  de 
garde  nationale  et  30  corps  de  volontaires  contenant 
15,000  hommes. 

Hollande,  —  L*armée  des  Pays-Bas  est  forte  de 
30,000  hommes  et  elle  peut  atteindre  le  chiffre  de 
65,000  hommes  sur  le  pied  de  guerre.  Elle  comprend 
8  régiments  d'infanterie  à  4  bataillons,  4  bataillons  de 
chasseurs  à  pied,  4  régiments  de  cavalerie,  18  batteries 
d'artillerie  de  campagne.  La  garde  civique  peut  donner 
environ  65,000  hommes.  L'armée  des  Indes  contient 
en  outre  30,000  hommes  dont  13,000  Européens. 

Italie,  —  L'armée  permanente  de  Tltalie  contient 
13,000  officiers,  205,000  hommes,  26,000  chevaux  et 
800  pièces  de  campagne.  Sa  composition  estla  suivante  : 
80  régiments  d'infanterie  de  ligne  à  3  bataillons,  3  régi- 
ments de  bersagliers  à  4  bataillons,  20  régiments  de 
cavalerie  à  6  escadrons,  10  régiments  d'artillerie  de 
campagne  à  10  batteries  de  8  pièces,  4  régiments  d'ar- 
tillerie de  place,  1  régiment  du  génie,  des  états-majors 
et  des  services  accessoires.  —  Sur  le  pied  de  guerre 
cette  armée contien il 2,000  officiers, 329.000  hommes, 
56,000  chevaux  et  800  pièces  de  campagne  ;  elle  forme 
20  divisions  et  des  troupes  complémentaires  qui  con- 
stituent 10  corps  d'armée.  ~  L'effectif  de  mobilisation 
est  obtenu  par  le  rappel  d'une  partie  des  hommes  en 
congé  illimité  qui  sont  au  nombre  de  240,000.  —  Il 
convient  encore  de  signaler  l'existence  de  la  milice 
provinciale  qui  contient  environ  200,000  hommes. 

Portugal.  —  L'armée  permanente  du  Portugal  a  un 
effectif  moyen  de  80,000  hommes.  Elle  comprend 
18  régiments  d'infanterie  de  ligne  à  3  bataillons,  12  bat- 
taillons  de  chasseurs  à  pied.  8  régiments  de  cavalerie 
à  6  escadrons,  1  régiment  a'artillerie  de  campagne  à 
i2  batteries  de  6  pièces.  Sur  le  pied  de  guerre,  cette 
armée  peut  contenir  environ  80,000  hommes  ;  mais  le 
Portugal  n'a  pas  de  troupe  analogue  à  notre  armée  ter- 
ritoriale, tandis  qu'il  en  existe  à  peu  près  dans  tous 
les  Etats  européens. 

Roumanie,  —  L'armée  permanente  de  Roumanie  con- 
tient environ  1,000  officiers,  20,000  hommes,  5,000  che- 
vaux, !)G  pièces  de  campagne.  Elle  se  compose  de 
8  régiments  d'infanterie  de  ligne  à  3  bataillons,  4  bauil- 
lons  de  chasseurs  à  pied,  I6  escadronn  de  cavalerie, 
16  batteries  d'artillerie  de  campagne  à  6  pièces.  Cette 
même  armée  mobilisée  peut,  avec  l'armée  territoriale 
la  milice  et  la  garde  nationale,  atteindre  uu  effectif, 
de  125,000  hommes  et  contenir  100  bataillons  d'infan- 
terie, 75  escadrons  de  cavalerie,  100  pièces  d'artillerie 
de  campagne. 

Russie.  —  Les  forces  militaires  de  la  Russie  se  divisent 
en  arméepermanentceten  milice.  L'armée  permanente 
comprend  Tarmée  active  et  sa  réserve,  dans  lesquelles 
tout  'sujet  russe  est  compris   de   20  à  35  ans,  les 
iroupes  cosaques,  les  troupes  asiatiques.  La  milice 
contient  toute  la  population  mâle  valide,  de  20  à  40  ans 
ne  faisant  pas  partie  de  l'armée  permanie.  —  L'armée 
permanente  est  organisée  en  divisions  et  en  brigades  ; 
les  troupes  de  la  garde  forment  uu  corps  d'armée  ; 
C'Ues  de  la  lieutenauce  du  Caucase  forment  une 
armée.  —  Les  troupes  de  la  Russie  d'Europe  contien- 
nent 600  bataillons,  650  escadrons,  2,000  canons  de 
campagne,  300  mitrailleuses  ;  il  y  a,  sur  le  pied  de 
paix,  19,000  officiers  et  5*^0,000  hommes  ;  sur  le  pied 
de   guerre,    24,000   ofliciers   et   1,100,000  hommes. 
L'armée  de  la  Heutenance  du  Caucase  contient   128 
bataillons,  260  escadrons,  300  canons,  50  mitrailleuses  ; 
il  y  a,  sur  le  pied  de  paix,  4,000  officiers  et  140,000 
hommes  ;  sur  le  pied  de  guerre,  5,000  officiers  et 
200,000  hommes.  Les  troupes  asiatiques  contiennent 
61  bauillons,  300  escadrons,  120  canons;  il  y  a,  sur 
le  pied  de  paix,  1,800  officiers  «t  7,800  hommes  ;  sur 
le  pied  de  guerre,  2500  officiers  et  1^5,000  hommes. 
L'ensemble  des  forces  militaires  de  la  Russie,  en  y  com- 
prenant las  services  généraux,  est  de  787  bataillons, 
1,217  escadrons,  2^852  canons  de  campagne,  376  mi- 


trailleuses ;  en  paix,  il  y  a  34,000  officiers  ot  800,000 
hommes  ;  en  guerre,  43,000  hommes,  1,530,000  hom- 
mes. —  Cette  armée  pourrait  former  24  corps  d'armé« 
de  campagne,  non  compris  la  garde  impériale  et  les 
troupes  du  Caucase. 

Servie.  —  L'armée  de  la  Servie  n'a  que  6,000  hommes 
et  1 ,200  chevaux  en  retenus  h  l'état  permanent.  En  cas 
de  guerre,  par  le  rappel  des  réserves  et  par  la  mobilisa- 
tion des  milices,  cette  armée  peut  contenir  140,000 
hommes  formant  7  divisions  et  comprenant  129  batail- 
lons d*infanterie,  34  escadrons  dn  cavalerie  et  42  bat- 
teries d'artillerie  de  campagne  à  6  pièces. 

Suède.  —  L'armée  permanente  suédoise  contient 
6,500  hommes  ;  à  cette  armée  permanente  est  ajoutée 
une  réserve  de  80,000  hommes.  Une  sorte  d'armée  ter 
ritoriale,  analogue  aux  anciens  réf^ments-frontière 
d'Autriche,  contient  environ  27,000  hommes.  Enfin,  il 
convient  d'ajouter  environ  20,000  francs-tireurs  formés 
en  compagnies.  Cette  masse  de  130,000  hommes  environ 
disposH  de  200  pièces  d'artillerie  de  campagne.  L'armée 
norvégienne  se  compose  de  la  ligne,  de  la  réserve  et  de 
la  laodwehr.  La  ligne  contient  12,000  hommes  sur  le 
pied  de  paix,  et  son  effectif  peut  être  porté  à  18,000 
hommes  sur  le  pied  de  guerre;  la  réserve  compte 
20,000  hommes  ;  la  landwebr  est  forte  de  12,000  hom- 
mes. Il  convient  d'ajouter  12,000  soldats  du  train  et  ie 
landsturm,  levée  en  masse  qui  renferme  tous  les  hom- 
mes valides  de  18  à  50  ans  non  liés  au  senrioe.  En  ré- 
sumé, les  forces  du  royaume  Scandinave  sont  environ 
de  200,000  hommes. 

Suisse. — L'armée  suisses  le  caractère  d'une  milice: 
elle  n*exi8te  pas  à  l'état  permanent.  Cett'^  armée  se 
compose  de  1  élite,  forte  de  1 19,676  hommes  âgés  de 
20  à  32  ans,  et  de  la  landwebr,  forte  de  1 06.292 
hommes  âgés  de  32  à  44  ans.  —  L'élite  est  seule  orga- 
nisée ;  elle  peut  contenir  96,232  hommes  dMnfanterie 
répartis  en  98  bauillons  de  ligne  et  en  8  bataillons  de 
carabiniers,  les  unes  et  les  autres  à  l'effectif  de  76? 
hommes  et  se  composant  de  4  compagnies  ;  S,39G 
hommes  de  cavalerie  formant  24  escadrons  de  dragons 
et  8  compagnies  de  guides;  12,100  hommes  d'artillerie 
servant  48  batteries  de  campagnes  et  2  batteries  de 
montagne,  les  unes  et  les  autres  à  6  pièces,  ou  incor- 
porés dans  10  compagnies  de  pontons,  10  compagnies 
de  parc,  10  compagnies  de  train  de  parc,  et  2  compa- 
gnes d'artificiers  ;  4,148  hommes  du  génie,  répartis  en 
12  compagnie  de  pionniers,  6  compagnies  de  ponton- 
niers. 2  compagnies  de  parc  et  8  compagnies  d'ouvriers 
de  chemins  de  fer  ;  enfin,  1,640  hommes  de  troupes 
militaires,  2,160  hommes  de  troupes  d'administration 
à  rétat-major  fédéral.  Cette  armée  peut  former  n  di- 
visions de  campagne  ayant  un  effectif  moyen  de  12,000 
hommes. 

Turquie.  —  Les  forces  militaires  de  l'empire  ottoman 
déductions  faites  des  régences  et  des  principautés  qui 
en  sont  simplement  tributaires,  comprennent  l'armée 
permanente,  les  réserves,  la  levée  en  masse,  les 
troupes  irrégulières.  —  L'effectif  de  l'armée  permanente 
est  du  143,740  hommes,  18,700 chevaux,  624  pièces  sur 
le  pied  de  paix;  elle  comprend  i68  bataillons  d'in- 
fanterie, 15»  escadrons  do  cavalerie,  104  batteries 
d'artillerie  de  campagne,  7  régiments  d'artillerie  d& 
place,  2  bataillons  du  génie  ;  sur  le  pied  de  guerre  elle 
peut  atteindre  le  chiffre  de  171,010  hommes  et  38,258 
chevaux.  Les  réserves  forment  deux  bans  de  même 
force  dont  l'ensemble  est  estimé  à  192,000  hommes.  La 
levée  en  masse  n'est  pas  du  tout  organisée,  mais  eile 
ASi  évaluée  à  250,000  hommes.  Quant  aux  troupes  ir- 
régulières, elles  se  composent  surtout  de  bachi-boa- 
zouks  dont  le  nombre  est  an  maximum  de  30,009. 

Récapitulation,  —  Voici  quelle  est,  en  résumé,  la 
situation  approximative  des  forces  que  les  armées 
européennes  peuvent  contenir,  sans  tenir  compte  de 
la  levée  en  masse  analogue  h  la  réserve  de  notre  ar- 
mée territoriale. 


Pats 

ÂUomagae,  .  •  •  •   •  • 

Angleterre • 

Autriche-Hongrie  •  •  .  . 
Belgique  •••••... 

Danemark.  •••••.• 

Espagne.  ••••••.. 

France.  ••••••.• 

Grèce.  •••,•••.. 

A  r$porter,  .  .  .       '  1,710,000 


Taoum  db 

Taoura 

CAlWAGnS 

Tisarroauut 

1,100,000 

600,000 

350,000 

300,000 

800,000 

600 /)00 

40,000 

40,000 

45.000 

15,000 

160,000 

40,000 

1,000,000 

600,000 

15,000 

75,000 

1,670,000 


ARM 


—  1805  — 


ART 


Hepùri 8,720,000 

nonande «5,000 

Italie 330,000 

Portugal 80,000 

Roamanie •  30,000 

Russie 1,000,000 

Servie 30,000 

Suède-Norvège 50,000 

Suisse 120.000 

Turquie. 170,000 


1,670,000 

25,000 

200,000 

» 

60,000 

50,000 

60,000 

100,000 

105,000 

190,000 


6,300,000  3,500,000 

9,900,000 

ARMES  A  FEU.  La  première^arme  à  feu  portative 
«8t  de  la  fin  du  xvf  siècle  :  elle  parait  originaire  de 
Bologne  et  porta  le  nom  de  scolpetos,  d*où  on  ne  tarda 
pas  à  (aire  scolpeii  et  escopette.  Vers  le  commencement 
dn  XV*  siècle,  on  vit  paraître  la  couleuvrine  à  main 
dont  il  y  a  un  spécimen  au  musée  d*artillerie  de  Paris. 
O^est  un  canon  de  fer,  long  de  0>b,87,  foré  au  calibre 
de  Vt  millimètres,  lié  à  un  fut  de  bois  par  des  brides, 
et  pour  la  manœuvre  duquel  il  fallait  deux  hommes  : 
Tun  portait  la  couleuvrine;  Tautre,  au  moven  d'une 
mèche,  mettait  le  feu  à  la  poudre  d* amorce  placée  dans 
«n  petit  calice  an  centre  duquel  éuit  percée  la  lumière. 
Lorsque,  étant  à  cheval,  on  voulait  se  servir  de  la  couleu- 
vrine à  main,  on  l'appuyait  sur  une  fourchette  rivée  au 
pommeau  de  la  selle  {\.  Couledvrinb,  dans  notre  Dic- 
iionn,  de  biogr.  et  d'htst.).  Vint  ensuite  V arquebuse  à 
•croc,  portant  au  milieu  de  son  canon  un  croc,  au  moyen 
duquel  on  la  fixait  sur  un  chevalet  au  moment  du  tir. 
On  reconnut  bientôt  les  iifconvénients  d'armes  qu'on 
ne  pouvait  utiliser  qu'en  metunt  le  feu  avec  la  main  : 
ce  fut  en  Espagne  qu'on  imaeina  le  mécanisme  du  tnous- 

Îuet  ou  arquebuse  à  mèche  {V,  Arquebuse,  dans  ce 
Hetionnaire),  Cette  arme  se  transforma  k  son  tour  en 
mousquet  ou  arquebuse  à  inniet,  dont  les  armées  alle- 
mandes etiuliennes  furent  pourvues  dès  le  xvi*  siècle, 
tandis  qu'en  France  on  continuait  à  se  servir  de  l'ar- 
quebuse à  mèche.  Le  calibre  et  la  longueur  de  l'arme  à 
rouet  ayant  été  diminués  pour  que  le  cavalier  la  ma- 
niât plus  facilement,  on  eut  un  nouvel  engin  de  guerre, 
\epistoiety  qui,  allongé  ou  raccourci  suivant  les  époques, 
donna  lieu  par  la  suite  aux  carabines  et  aux  mousque- 
tons. Vers  la  moitié  du  xyii»  siècle,  les  Espagnols  ima- 
ginèrent les  platines  à  la  miquelet,  dans  lesquelles  la 
mèche  et  le  rouet  étaient  remplacés  par  le  chien  ei  la 
i>atterie  :  on  eut  alors  une  nouvelle  arme  appelée  fusil 
{ K.  ce  mot  dans  le  Dictionnaire), 

L'idée  de  remplacer  les  canons  lisses  par  des  canons 
raves  remonte  à  plus  d'un  demi-siècle.  En  1793,  on  fit 
à  fa  manufacture  d'armes  de  Versailles  quelques  cara- 
4>ines  rayées,  dont  on  arma  les  offlciers  et  les  soiis-offi- 
ders  des  troupes  légères.  Hais  la  difficulté  de  les  charger 
•et  leur  peu  dn  portée  les  firent  abandonner.  En  1813,  on 
essaya  cependant  d'armer  un  bataillon  avec  ce  genre  de 
carabines,  auxquelles  on  adapta,  non  plus  une  baion- 
flette  simple,  mais  le  sabre-balonnette.  En  1826,  le 
principe  de  la  rayure  fut  repris  par  un  officier  d'infan- 
terie, Delvigne,  qui  imagina  un  nouveau  forcement 
pour  le  projectile  ;  son  arme  n'eut  aussi  que  peu  de 

{>ortée.  En  1839,  on  adopta  pour  les  tirailleurs  algériens 
a  carabine  Pontcharra.  En  1840,  un  nouveau  modèle 
qui  avait  moins  de  rayures  fut  présenté.  En  1843,  la 
«arabine  rayée  fut  donnée  aux  bataillons  de  chasseurs 
îi  pied.  Le  colonel  d'artillerie  Thouvenin,  en  1844,  et 
le  capiuioe  Minié,  en  1846,  présentèrent  de  nouvelles 
armes.  En  1867,  les  armes  rayées  ont  été  adoptées  pour 
toutes  les  troupes  françaises.  B. 

ARMES  HERALDIQUES.  Aux  exemples  don  nés  dans 
le  />tc<tonnAtre,nous  croyons  utile  d'ajouter  les  suivants: 

Bade  :  d'or,  à  la  bande  de  gueules  ;  —  Brunswick  : 
de  gueules,  au  cheval  effrayé  d  argent;  —Hesse:  d'azur, 
an  lion  burelé  d'argent  et  de  gueules,  couronné  d*or; 
—  Holslein  :  de  gueules,  k  trois  œillets  d'argent  mis  en 
pairie  et  à  3  feuilles  d'oriie  du  même  posées  en  triangle, 
mouvants  d'un  écnsson  d'argent,  coupé  de  gueules  ;  — 
Hongrie  :  fascé  d'argent  et  de  gueules  de  8  pièces;  — 
Lucques  :  de  France  à  la  bordure  de  gueules,  chargé 
de  8  coquilles  d'argent;  —  Mecklembourg  :  k  une  tète 
de  buffle  de  sable,  couronnée  de  gueules,  accomée  et 
bouclée  d'argent;  —Afoc/énf  ;  d'azur,  à  l'aigle  d'argent 
couronné  d'or;  —  Monaco  :  fuselé  d'argent  et  de 
feules  ;  —  Nassau  :  d'azur,  semé  de  billettes  d'or,  au 
lion  couronné  du  même  ;  —  Oldenbourg  :  d'or,  à  2  faces 
de  gueules  ;  —  Parme  et  Plaisance  :  d'asur,  k  S  fleurs 


de  lis  d'or,  à  la  bordures  de  gueules,  chargée  de  8  co« 
quilles  d'argent;  ~  Pologne:  de  gueules,  à  l'aigle  d'ar- 
gent membrée  et  couronnée  d'or  ;  —  Toscane  :  d'or, 
à  6  tourteaux  de  gueules,  rangés  en  orle,  surmontés  en 
chef  d'un  écu  rond  d'azur  à  3  fleurs  de  lis  d'or;  — 
Empire  Birman  :  d'argent,  au  coq  de  gueules  mis  de 
profil,  entouré  d'un  cercle  aussi  de  gueules  ;  —  Brésil: 
de  sinople,  k  la  croix  potencée  de  gueules,  bordée  d'or, 
chargée  d'une  sphère  armillalre  d'or,  et  environnée  d'un 
cercle  d'azur  bordé  d'argent  et  chargé  de  18  étoiles  du 
môme  ;  —  Mexique  :  d'azur  à  l'aigle  au  naturel,  po«é 
sur  un  tronc  d'arbre,  et  tenant  dans  une  de  ses  serres 
et  dans  son  bec  un  serpent  aussi  au  naturel  ;  -  Rio  de 
la  Plata  :  coupé  d'azur  et  d'argent  :  l'argent  chargé 
d'une  Bonne  Foi  au  naturel,  tenant  une  pique  de  fer 
surmontée  d'un  bonnet  phrygien  d'argent,  brochant 
sur  l'azur. 

Les  villes  ont  aussi  des  armes.  Ainsi,  Paris  :  de 
gueules,  au  navire  antique  d'argent,  voguant  sur  des 
ondes  du  même;  au  chef  semé  de  France;  —  Lyon: 
de  gueules,  au  lion  grimpant  d'argent,  tenant  de  sa 
patte  dextre  un  glaive  de  même;  au  chef  cousu  de 
France;  —  Marseille  :  d'argent;  à  la  croix  d'azur;  — 
Bordeaux  :  de  gueules,  au  château  d'argent,  ouvert  du 
champ,  maçonné  et  ajouré  de  sable,  à  5  tours  couvertes 
en  clochers  et  girouette  d'or,  accompagné  en  chef  d'un 
lion  léopardé  du  4«  émail,  et  en  pointe  d'un  croissant 
du  second;  au  chef  semé  de  France;  —  Lille:  d'azur, 
à  une  fleur  de  lis  d'or;  —  Nantes  :  de  gueules,  au 
navire  d'or  habillé  d'hermine,  voguant  sur  des  ondes 
au  naturel,  au  chef  cousu  d'hermine  ;  —  Rouen  :  du 
gueules,  k  l'agneau  pascal  d'argent,  portant  une  ban- 
nière d'azur,  an  chef  cousu  de  France. 

ART  DECORATIF  (Ecoles  d').  Cette  dénomination  a 
été  attribuée,  au  cours  de  ces  dernières  années,  à 
quelques  écoles  de  beaux-arts  ou  de  dessin,  soit  an- 
ciennes, soit  de  création  récente,  dont  les  programmes 
visent  surtout  les  diverses  applications  de  l'art  à  l'in- 
dustrie :  la  plus  importante  de  toutes  est  celle  de  Paris, 
fondée  sous  Louis  XV  par  Bachelier,  à  la  requête  dos 
corps  de  métiers  de  la  capitale,  sous  le  titre  d'Ecole 
royale  gratuite  de  dessin;  la  Restauration  l'avait  appe- 
lée Ecole  rot/aie  de  dessin  et  de  mathémathiques  ;  elle 
porte,  depuis  le  9  octobre  1877,  le  nom  d* Ecole  natio- 
nale des  Arts  décoratifs. 

L'enseignement  y  est  gratuit  ;  il  est  donné,  à  l'école 
du  jour,  aux  jeunes  gens  ayant  au  moins  10  ans  révo- 
lus, et  à  l'école  du  soir,  à  ceux  qui  sont  âgés  de  14  ans 
au  moins.  Il  comprend  le  dessin,  la  sculpture,  l'anato- 
mie,  les  mathématiques,  l'architecture,  l'histoire  et  la 
composition  de  l'ornement,  enfin  un  cours  d'applica- 
cations  décoratives  consistant  en  études  exécutées  d'a- 
près les  productions  les  plus  remarquables  de  l'indus- 
trie et  en  exercices  de  compositions  décoratives . 

Les  Écoles  nationales  d'art  décoratif  de  Limoges  et 
d'Augusson  ont  un  programme  analogue,  au  moins 
quant  aux  bases  fondamentales  de  l'enseignement, 
avec  un  but  différent  quant  aux  applications  pratiques 
de  la  céramique  ou  de  la  tapisserie  ;  elles  sont,  d'ailleurs, 
placées  sous  la  même  direction  que  celle  de  Paris; 
cette  sorte  d'union,  qui  date  seulement  de  quelques 
années,  a  déjà  produit  d'excellents  résuluts. 

L'Ëcole  nationale  d'art  décoratif  de  Nice  a  surtout  en 
vue,  en  fait  d'application,  l'architecture  et  les  indus- 
tries qui  s'y  rattachent;  fondée  en  1881,  elle  a  déjà 
pris  un  développement  considérable. 

Celle  de  Saint- Pierre-lez- Calais  est  récente  égale- 
ment; son  organisation  no  sera  définitive  que  Tannée 
prochaine  ;  elle  rond  déjà  d'immenses  services  aux  in- 
dustries des  tissas,  et  est  destinée  à  en  rendre  de  plus 
importants  encore  à  toute  la  région  du  nord.    J.  C. 

ARTS  DECORATIFS  (Société  de  l'Union  centrale 
des)  .  —  Cette  société,  fondée  ea  1863^  et  qui  est  recru- 
tée parmi  l'élite  des  amateurs,  des  artistes  et  des  fabri- 
cants français,  a  exercé  sur  les  progrès  de  l'art,  dans  ses 
rapports  avec  l'industrie,  une  influence  trop  considéra- 
ble,depuisprèsde  vingt-cinq  ans,pour  que  nous  ne  résu- 
mions pas  ici  son  histoire  et  pour  que  nous  ne  rappe- 
lions pas  en  quelques  lignes  son  but  et  la  façon  dont 
elle  l'a  victorieusement  atteint.  Au  lendemain  de  l'Ex- 
position universelle  de  1851,  à  Londres,  qui  avait  été 
pour  l'art  et  l'industrie  de  la  France  un  vériuble 
triomphe,  rien  n'était  plus  légitime  que  le  sentiment 
de  rivalité  qui  se  manifesta  en  Europe  contre  nous,  et 
qui  se  fondait  sur  l'observation  suivante  :  «  La  supé- 
riorité artistique  de  la  France  n'est  pas  simplemont  le 


ART 


1806  — 


ART 


résaltat  d'an  don  de  nature;  ce  n*e8t  pas  sealement 
affaire  de  territoire  et  de  climat  :  c'est  affaire  d'étude 
et  de  tradition.  Le  goût  s'acquiert  par  le  travail  Les 
bons  ouvriers  s'obtiennent  par  l'enseignement  du  des- 
sin .  Il  ne  s'agit  donc  qne  de  fonder  des  écoles  et  des 
musées  pour  lutter  contre  la  France.  »  —  Et  c'est  ce 
qu'on  fit  I  Ce  fut  alors  que  l'Ângletrrre,  notamment, 
qui  s'était  rendu  compte  des  causes  de  son  infériorité 
à  cette  exposition  de  1851,  se  signala  par  son  zèle,  par 
une  activité  prodigieuse  à  créer  des  écoles  de  dessin, 
à  favoriser  la  vulgarisation  dos  chefs-d'œuvre,  etC( 
On  commença  dans  ce  pays  l'organisation  du  magni- 


fique musée,  le  South  Kensington,  qui  est  devenu  par 
la  richesse,  l'abondance,  la  variété  de  ses  collections, 
un  établissement  unique.  Les  conséquences  de  l'acti- 
vité incroyable  dont  1  Angleterre  donna  l'exemple  ne 
tardèrent  pas  à  se  faire  sentir.  Dès  1862,  à  l'exposition 
universelle  qui  eut  lieu  en  cette  année,  des  pro&rrès  réels 
étaient  signalés  par  un  écrivain  éminent,  P.  Mérimée, 
dont  la  compétence  était  trop  certaine  pour  n'être 
point  doublée  de  clairvoyance.  Yoid  ce  qu'il  écrivait 
alors  dans  un  rapport  ofHciel  sur  ce  sujet  :  c  Depuis 
l'Exposition  universelle  de  1851,  et  même  depuis  celle 
de  1855,  des  progrès  immenses  se  sont  manifestés  dans 
toute  l'Europe  ;  et,  bien  que  nous  ne  soyons  pas  demeu- 
rés stationnaires,  nous  ne  pouvons  nous  dissimuler  que 
l'avance  que  nous  avions  prise  a  diminué,  et  qu'elle 
tend  même  à  s'effacer.  Au  milieu  des  succès  obtenus 
par  nos  fabricants,  c'est  un  devoir  pour  nous  de  leur 
rappeler  qu'une  défaite  est  possible,  qu'elle  serait 
même  à  prévoir  dans  un  avenir  peu  éloigné,  si,  dès  à 
présent,  ils  ne  faisaient  pas  tous  leurs  efforts  pour 
conserver  une  suprématie  qu'on  ne  garde  qu'à  la  con- 
dition de    se   perfectionner  sans  cesse.  L'industrie 
anglaise,  en  particulier,  très  arriérée,  au  point  de  vue 
de Tart,  lors  de  l'exposition  de  1851,  a  fait  depuis  dix 
ans  des  progrès  prodigieux,  et,  si  elle  continuait  à 
marcher  du  même  pas,  nous  pourrions  être  bientôt 
dépassés.  » 

De   pareils    avertissements,  devaient  être  enten- 
dus,   et    c'est    de     l'inquiétude    patriotique  qu'ils 
excitèrent  que  naquit  la  Société  de  VUnion  centrale. 
A  diverses  reprises  déjà,  des  tentatives  s'étalent  pro- 
duites pour  créer  en  France  une  association,  avec  le 
projet   d'organiser    un  musée  spécial  consacré  aux 
œuvres  les  plus  précieuses  de  l'industrie.  L'idée  pre- 
mière en  avait' été  émise  par  Eméric  David,  le  critique 
sagace,  dès  1796.  Elle  avait  été  reprise  successivement 
et  sans  succès  en  1806,  en  1814,  en  1834,  en  1845,  puis 
en  1851.  En  en  1861,  quelques  artistes  et  fabricants  se 
mirent  résolument  à  l'œuvre,  et  avec  une  foi,  un  zèle, 
un  désintéressement  absolus,  ils  parvinrent  à  organiser, 
au  Palais  des  Champs-Elysées,  une  exposition  exclu- 
sivement consacrée  aux  produlta  de  l'art  appliqué  à 
l'industrie.  Il  faut  dire  qu'on  avait  obtenu  la  conces- 
sion du  Palais  de  l'Industrie,  au  moyen  d'une  ingé- 
nieuse combinaison  avec  le  baron  Taylor,  qui  l'avait 
demandé  au  gouvernement  sous  le  couvert  d'une  des 
association^  de  bienfaisance  dont  il  était  le  président. 
Quand  à  l'argent,  ce  furent  les  organisateurs  qui  bra- 
venant  l'avancèrent.  De  cette  fagon,  sans  aucune  espèce 
de  protection  de  la  part  du  gouvernement,  par  la  seule 
l'initiative  d'une  douzaine  d'hommes  déterminés,  on 
réussit  à  jeter  les  bases  de  l'édifice  qui  allait  bientôt 
grandir.   Deux  ans  après,  en  1863,   la  tentative  fut 
renouvelée  dans  les  mêmes  conditions.  Le  but  pour- 
suivi avait  été  défini  en  quelques  mots  par  le  président 
du  comité  d'organisation  M.  Guichard  :  a  Honorer,  en- 
courager, stimuler  dans  l'œuvre  industrielles  tout  ce 
que  celle-ci  comporte  d'art.  »  C'est  ce  qu'on  chercha  à 
exprimer  dans  cette  formule  adoptée  par  l'association  : 
Le  beau   dam  Vutite,  qui  est  inscrite  sur  i'écusson 
de  l'Union  centrale.  Aujourd'hui  que  ces  idées  ont 
triomphé,  elles  paraissent  toutes  naturelles,  mais  alors 
le  public  ne  semblait  point  du  tout  pénétré  de  cette 
vérité,  que  le  goût  a  sa  place  partout  en  ce  monde 
et  qu'il  doit  apparaître  aussi  bien  dans  la  forme  des 
meubles  que  dans  un  tableau,  aussi  bien  dans  le  choix 
d'une  étoffe  que  dans  la  composition  d'un  bijou.  Voilà 
ce  qu'il  s'agissait  de  démontrer  au  plus  vite  à  tous. 
Les  organisateurs  de  l'Exposition  de  1863,  après  leur 
premier  succès,  s'occupèrent  donc  de  se  constituer 
en  société  permanente,  en  appelant  a  eux  toutes  les 
bonnes  volontés.  Jusqu'alors,  on  s'était  contenté  de  se 
réunir  me  du  Sentier,  n*  8,  à  intervalles  irréguliers.  On 


place  Royale  (devenue  place  des  Vosges),  un  local  assez 
vaste,  et  l'on  arrêta  les  statuta  qui  donnaient  défini- 
tivement à  l'association  le  titre  i' Union  centrale  de$ 
beaux-arts  appliqués  à  l'industrie  et  déterminaient 
ainsi  la  tâche  qu'on  se  proposait  de  remplir  :  i<>  fonder 
un  musée  rétrospectif  et  contemporain  ;  2<*  constitaer 
une  bibliothèque  d'art  ancien  et  moderne,  où  le  tra- 
vailleur serait,  an  besoin,  aidé  dans  ses  rcciiercbes  ; 
Z^  établir  des  cours  spéciaux,  des  lectures  et  dos 
conférences   publiques   ayant    rapport  à    l'art    ap- 
pliqué et  des  entretiens  familiers  de  nature  à  pro- 
pager les  connaissances  les  plus  essentielles  à  l'ar- 
tiste et  à  l'ouvrier  qui  voudraient  «  unir  le  beau  à 
l'utile  »  ;  4*  organiser  des  concours  entre  les  artistes 
français  et  entre  les  diverses  écoles  de  dessin  et  de 
sculpture  de  Paris  et  des  départements  ;  5<>  faire  des 
expositions  bisannuelles  de  collections  particulières 
présentant  à  l'étude  dn  belles  applications  de  l'art  a 
l'industrie.  Un  article  des  statuta  montrait  surtout, 
dans  sa  briève  simplicité,  le  désintéressement,  l'esprit 
de  sacrifice,  la  générosité  de  ce  petit  groupe  de  fonda- 
teurs. Il  disait  :  u  Tous  les  membres  du  comité  feront 
gratuitement  les  avances  nécessaires  à  l'organisation 
de  tout  ce  que  le  comité  se  donne  la  tâche  de  fonder.  » 
Avec  de  pareils  dévouementaon  devait  sûrement  aboutir. 
Autorisée  par  décision  ministérielle  du  26  juillet  1884 
et  par  arrêté  préfectoral  du  4  août  de  la  même  année, 
la  nouvelle  société  ne  tarda  pas  à  être  entourée  des 
sympathies  des  amateurs  parisiens  les  plus  distingués. 
Les  dons  en  argent^  en  livres,  gravures,  objeto  de  col- 
lections arrivèrent  de  toute  part.  En  définitive  le  pro- 
gramme de  l'Union  centrale  s^afflrmait  avec  une  netteté 
qui  ne  laissait  aucune  interprétation  vague  et  indexe  : 
Il  se  composait  de  deux  idées  fondamentales  un  prin- 
cipe de  doctrine  :  l'dnité  de  l'art  ;  un  principe  d'action  : 
l'appel  a  l'initiative  privée.  Tels  étaient  les  éléments 
avec  lesquels  on  entreprenait  l'agitation  féconde  qai 
avait  pour  but  :  1*  de  secouer  l'Indifférence  du  pnplic 
relativement  aux  productions   de  l'art  appliqué,  et 
d'éclairer  son  goût;  2*^  de  stimuler  le  zèle  des  fabri- 
canta  et  des  artistes  ;  3*  de  transformer  les  méthodes 
courantes  de  l'enseignement  du  dessin  en  méthode 
rationelles,  fondées  sur  la  science,  proscrivant  la  copie 
exclusive  des  estampes  pour  y  substituer  celle  des 
modèles  en  plâtre  ou  l'étude  directe  de  la  nature,  afin 
de  laisser  à  l'élève  une  part  d'interprétation.  Pour 
atteindre  à  ces  résultaU,  les  hommes  disting:ués  de 
l'Union   centrale    n'avaient  point  de  titres  officiels, 
point  de  part  dans  l'administration  des  beaux-arts, 
aucune  action  sur  les  décisions  souveraines  du  gou- 
vernement. Mais  ils  avaient,  pour  les  soutenir,  l'ardeur 
généreuse  de  leurs  convictions  et  la  volonté  opiniâtre. 
Ils  eurent  recours  â  deux  moyens  de  propagande  : 
P  Les  concours  organisés  dans  les  écoles  de  dessin 
et  parmi  les  fabricants  eux-mêmes,  9  Les  expositions 
d'art  appliqué  à  Vindustrie. 

Quelques   mota  d'abord  sur   les   concours   et  les 
méthodes  d'enseignement  ^ue  l'Union  centrale,  après 
de  longs  efforta,  a  fini  par  faire  prévaloir.  Pour  entamer 
la  compagne  on  se  plaçait  au  point  de  vue  suivant  : 
par  un  inexplicable  et  long  malentendu,  entretenu 
jusqu'alors,  1  art  —  et,  par  conséquent,  son  premier 
instrument,  le  dessin  —  avait  été  considéré  comme 
une  superfluité  de  l'éducation;  on  l'avait  relégué  dans 
le  même  et  fastidieux  bagage  des  talents  d'agrément. 
Au  lieu  de  lui  donner  la  part  noble  et  belle  qui  lui 
revient  pour  développer  le  jugement^  élever  des  idées, 
perfectionner  le  sens  d'observation  exacte  par  l'exameo 
direct  des  formes^  en  dédaignait  ses  services,  ou  plut&t 
on  méconnaissait  la  grandeur  de  son  rôle.  Il  importait 
donc  de  déraciner  cette  idée  fausse  que  le  dessin  n'est 
qu'un  sccessoire  plus  ou  moins  brillant  de  l'éducation  ; 
il  importait  de  le  faire  entrer,  au  même  titre  que  la 
grammaire,  l'histoire  et  les  langues  mortes,  dans  le 
traitement  gvmnastique  des  intelligences.  Voilà  an 
des  côtés  de  la  question.  Il  y  en  avait  un  autre  :  c'est 
l'action  féconde  que  doit  exercer  sur  les  ouvriers  l'en- 
seignement bien  compris  du  dessin  dana  les  écoles 
primaires;  car,  alors,  ils  ne  s'agissait  plus  seulement 
de  ces  moyens  généraux  d'éducation  pour  les  hommes 
du  monde,  il  ne  s'agissait  plus  seulement  de  fournir 
à  la  jeunesse  un  exercice  intellectuel  et  moral  ;  il 
s'agissait,  en  outre,  de  donner  aux  jeunes  gens  un 
gagne-pain  en  les  préparant,  par  un  fonds  commun 
de   notions  professionnelles,  aux  carrières  d'art   et 


loua,  au  premier  étage  d'un  des  anciens  hôtels  de  la  1  d'industrie.  Biais  quelle  méthode  employer  pour  eet 


ART 


—  1807  — 


ART 


enseignement  général  du  dessin,  distribué  à  tons  an 
Imème  titre  que  la  lecture  à  récriture?  G^est  ici  qyie 
l'Union  centrale  faisait  intenrenir  ses  doctrines  et  dé- 
fendait la  grande  cause  de  Vuniti  de  Cart^  montrant 
que  rapplication  immédiate  de  ses  prirfcipes  était  de- 
Tenue  rigoureusement  nécessaire,  et  que  les  facultés 
d'invention  que  possède  notre  race,  le  goût  qu'on  croit 
inné  et  dont  témoignent  les  créations  de  nos  ouvnVrs, 
de  nos  industriels  s'épuiseraient  dans  une  immobilité 
affadissante,  si  l'on  ne  se  mettait  énergiquement  à  les 
stimuler.  Or,  la  spécialisation  à  outrance  du  travail, 
qui  est  le  vice  de  notre  époque,  pousse  fatalement 
nos  artistes  dans  une  voie  de  décadence.  On  dédaigne, 
on  ignore  tout  ce  qui  ne  concourt  pas  directement  et 
immédiatement  au  but  restreint  que  Ton  se  propose; 
on  s'imagino  que,  pour  être  peintre,  il  suffit  de  savoir 
copier  des  formes  et  des  couleurs  ;  que,  pour  être 
ciseleur,  il  suffit  de  bien  manier  un  outil  ;  que  pour 
6tre  deasinateur  d'ornements,  il  suffit  de  savoir  com- 
biner les  vieiiK  modèles  choisis  laborieusement  dans 
les  cabinets  d'estampes  !  Est-ce  ainsi  que  faisaient  les 
admirables  ouvriers  de  la  Renaissance?  Par  ce  système, 
ou  s'approprie  simplement  des  formes  impersonnelles, 
on  sacrifie  l'art  au  procédé,  on  étouffe  son  originalité. 
La  phrasa  apprise  tue  la  pensée.  L'auxiliaire,  en  deve- 
nant le  but,  se  transforme  en  obstacle. 

Dans  ces  conditions,  quelle  devait  être  la  méthode 
à  suivre  pour  l'enseignement  du  dessin  ?  Un  artiste 
éminentM.  Eug.  Guillaume,  se  chargea  de  développer, 
le  programme  dans  une  conférence  qu'il  prononça  au 
siège  de  l'Union  centrale,  place  Royale,  le  33  mai 
1866,  et  qui  eut  un  grand  retentissement.  Il  concluait 
ainsi  :  «  Nous  partons  de  cette  idée  que  l'art  étant  un, 
l'on  n'est  pas  plus  autorisé  à  mesurer  ses  vrais  principes 
en  vue  des  professions  et  selon  les  conditions,  qu'on 
ne  le  fait  pour  la  grammaire,  les  sciences  ou  la  mo- 
rale. Nous  professons  cette  opinion,  que  le  sentiment 
de  l'art  peut-être  développé  conformément  à  la  raison, 
et  qu'il  y  a  dans  se»  éléments  plus  de  bon  sens  que 
de  subtilité.  Pratiquement,  nous  pensons  qu'il  est 
bon  de  le  considérer  par  son  côté  exact  et  utile,  de 
lier  entre  eux,  d'une  manière  indissoluble,  le  dessin 
géométrique,  le  dessin  d'art  et  le  dessin  de  mémoire, 
inséparablement  unis  dans  l'idée  générale  du  dessin 
lui-même  et  dans  ses  applications.  Enfin,  en  considé- 
rant que  des  modèles  doivent  être  aussi  parfaits  qu'il 
est  possible,  nous  demandons  que  l'on  mette  entre  les 
mains  des  enfants  les  chefs-d'œuvre  de  l'art,  comme  on 
met  entre  leurs  mains,  pour  d'autres  études»  les  chefs- 
d'œuvre  littéraires. 

Quelle  fut  la  première  conséquence  de  cette  agita- 
tion heureuse  provoquée  par  l'Union  centrale?  C'est 
que  diverses  nations  introduisirent  chez  elles  l'ensei- 
gnement du  dessin  dans  toutes  les  écoles  primaires 
communales,  d'après  les  méthodes  préconisées  par 
l'Union.  En  France,  la  réforme  fut  plus  lente  à  venir, 
bien  que  les  hommes  les  plus  éminents,  écrivains,  ar- 
tistes, professeurs,  emportés  par  ce  mouvement  de 
propagande  qu'imprimait  si  pasionnément  l'Union, 
eussent  fait  cause  commune  avec  elle,  en  se  rangeant 
sous  sa  bannière.  Il  fallut  bien  y  arriver  pourtant  ;  et, 
en  1878,  M.  le  marquis  de  Chonnevlères  soumit  au 
ministre  de  l'instruction  publique  et  fit  adopter  le 
projet  qui  devait  aboutir  peu  après  à  l'organisation  de 
renseignement  obligatoire  du  dessin  dans  toutes  le» 
écoles  du  pays.  Il  s'appuyait  sur  les  doctrines  mêmes 
de  rUnion  centrale,  et  disait  dans  son  rapport  :  «  L'art 
est  un  ;  son  principe  s'étend  des  plus  hautes  concep- 
tions des  grands  maîtres  au  plus  infini  produit  de  la 
main  de  l'artisan  ;  aussi  le  goût  et  rintelligence  de 
Tart  sont- il  s  devenus,  dans  tous  les  pays  civilisés,  la 
condition  première  de  leur  industrie,  la  meilleure 
raison  de  leur  richesse.  »  L'Union  centrale,  on  le  voit, 
avait  conquis  par  l'élévation  de  ses  doctrines,  par  la 

Î;randeur  de  son  but,  une  influence  considérable.  Citer 
es  noms  des  lauréats  formés  à  son  école  serait  pres- 
que dresser  la  Uste  de  nos  artistes  de  l'industrie  ré- 
putés à  l'heure  qu'il  est  parmi  les  plus  habiles. 

La  guerre  de  1870  éclata.  Ce  n'était  plus  alors 
seulement  le  sort  de  l'art  et  de  l'industrie  qui  se  trou- 
vait en  Jeu  ;  c'étaient  les  destinées  mêmes  de  la  patrie. 
D'autres  soins,  pendant  cette  époque  doulourp.use, 
absorbèrent  les  fondateurs  de  1  Union  centrale,  et 
l'œuvre  en  si  bonne  voie  parut  un  moment  abandonnée. 
Hais  c'est  souvent  dans  l'àpreté  des  plus  terribles  re- 
vers que  certains  courages  se  retrempent  avec  le  plus 


de  force.  Après  une  éclipse  trop  explicable,  l'Union 
centrale  se  reforma  sur  des  bases  nouvelles  et  dura- 
bles. Jusqu'alors,  elle  n'avait  existé  que  dans  la  forme 
strictement  régulière  que  la  loi  impose  aux  sociétés 
ordinaires.  On  a  vu  que  ses  initiateurs  avaient  poussé 
le  désintéressement  Jusqu'à  s'engager  «  à  faire  gra- 
tuitement les  avances  nécessaires  à  l'organisation  de 
tout  ce  que  le  comité  se  donnait  la  t&che  de  de  fonder  » . 
Ceux-ci  avaient  si  bien  remplie  leurs  engagements, 
qu'après  la  guerre  on  trouva  ou'ils  avaient  déboursé 
généreusement  une    somme    de    50,000  francs.   Le 
29  Janvier  1874,  la  Société  était  légalement  reconsti- 
tuée, toute  prête  à  continuer  son  rêle  et  à  agrandir 
son  action.  Des  hommes  nouveaux  s'ajoutèrent  aux 
anciens,  et  de  la  première  assemblée  générale  sortit 
un  conseil  d'administration  qui  désigna  comme  prési- 
dent M.   Edouard  André,  ancien  député,  et  comme 
vice-président,  M.  Henri  Bouihet,  ingénieur,  et  l'un 
des  chefs  de  la  grande  maison  d'orfèvrerie  Christofle. 
Il  faudrait  pouvoir  dire  ici  quels  furent  l'activité,  le 
désintéressement,   le    dévouement  de   cos   hommes 
distingués.  Il  faudrait  pouvoir  énumérer  les  services 
de  quelques-uns  de  leurs  collaborateurs  empressés 
qui,   presque  tous  commerçants  et  par  conséquent 
peu  maîtres  de  leur  temps,  ne  ménagèrent  jamais 
ni  leur  temps  ni  leur  argent  pour  la  grande  œuvre 

f poursuivie  en  commun.  On  fera  d'ailleurs  plus  tard 
a  part  des  mérites  de  chacun,  lorsqu'on  écrira  l'his- 
toire de  cette  Société  qui  a  été  si  utile  an  relèvement 
des  industries  françaises.  La  série  des  expositions 
d'art  appliqué  h  l'industrie  fut  reprise  aussitôt  après 
la  reconstitution  de  l'Union  centrale,  c'est-à-dire  au 
mois  d'août  1874.  Après  les  exhibitions  précédentes 
qui  avaient  eu  un  caractère  très  déterminé,  il  fallait 
trouver  un  terme  inédit,  pour  la  section  rétrospective 
ajouter  à  celle  des  écoles  et  à  celle  des  productions 
contemporaines.  On  s'arrêta  à  l'histoire  du  costume, 
et  le  comité  s'efforça  de  rassembler  le  plus  grand 
nombre  possible  des  pièces  de  vêtements  anciens, 
qui  sont  rares.  On  parvint  à  composer  ainsi  un  en- 
semble des  plus  imposants  et  des  plus  instructifs. 
Deux  ans  après,  en   1876,  l'Exposition  rétrospective 
était  consacrée  à  l'histoire  de  la  tapisserie,  et  1  on  or- 
ganisa, pour  une  durée  de  trois  mois,  dans  les  salles 
du  palais  des  Champs-Elysées,  un  merveilleux  musée 
classé  par  époque  et  par  atelier,  dans  lequel  on  vit 
défiler  les  plus  admirables  chefs-u'œuvres  de  l'art  tex- 
tile. Puis  l'Union  centrale,  pour  ajouter  encore  au  ca- 
ractère d'enseignement  qu  elle  voulait  donner  avant 
tout  à  ses  expositions,  pour  affirmer  plus  nettement  la 
pensée  qui  avait  inspiré  ses  fondateurs,  décida  d*a- 
dopter  un  plan  nouveau.  En  ce  qui  concernait  les 
écoles  de  dessin,  le  comité  pensa  qu'il  n'était  plus 
utile  de  recommencer  les  expositions  dans  lesquelles 
les  élèves  venaient  montrer  leurs  travanx.  A  l'origine, 
ces  expositions  étaient  indispensables.  On  avait  dû,  en 
quelque  sorte,  passer  en  revue  les  forces  respectives 
des  divers  centres  d'enseignement,  faire  l'inventaire 
des  ressources  dont  on  disposait.  En  1880,  pour  sa 
sixième  Exposition,  l'Union  n'exposa  pas  les  travaux 
des  élèves  des  écoles  de  dessin,  mais  elle  organisa 
une  série  de  concours,  presque  tous  des  conconrs  de 
compogition,  dont  les  programmes  furent  mis  on  har- 
monie avec  la  force  présumée  des  élèves,  la  libre 
recherche  d'une  création  d'art.  Quant  à  la  partie  de 
l'exposition  comprenant  les  œuvres  des  grandes  indus- 
tries de  luxe,  qui,  d'après  les  traditions  de  l'Union 
centrale,  devait  montrer  à  la  fois  les  productions  de 
l'art  moderne  et  un  choix  des  productions  des  an- 
ciennes époques,  le  principe  en  fut  maintenu,  avec 
une  modification  importante.  Au  lieu  d'y  appeler  en 
même  temps  tontes  les  industries  qui  relèvent  de 
l'art  et  de  disséminer  la  leçon,  on  résolut  de  préciser, 
par  la  voie  de  l'analyse,  l'enseignement  qui  se  dégage 
de  chacune  des  industries,  et  de  montrer  leurs  pro- 
doits dans  nue  série  d'expositions  successives.  On 
pensa  qu'on  rendrait  les  études  plus  faciles  et  plus 
profitables  en  groupant,  sous  la  forme  d'une  démons- 
tration visible  et  parlante,  les  matières  premières,  les 
instruments  qui  servent  à  les  façonner,  l'œuvre  créée 
ou  embellie  par  le  producteur  ou  par  l'artiste.  Il  fu* 
donc  arrêté  qu'on  mettrait  en  évidence,  dans  les  ex 
positions  technologiques  successives,  l'histoire  com- 
plète d'une  industrie  déterminée,  en  montrant  à  côté 
des  éléments  naturels  confiés  à  la  main  de  l'ouvrier, 
le  dessin  ou  la  maquette  qui  lui  sert  de  modèle,  les 


ART 


—  1808  — 


AUG 


oaills  dont  il  dispose,  et  enfin  rœnvre  partcheyée 
sar  laquelle  l'art,  qui  est  le  sceau  suprême,  imprime 
sa  marque  souveraine.  Conformément  à  ce  projet, 
l'Eiposition  de  1880  fut  exclusivement  consacrée  à 
l'industrie  du  métal;  celle  de  1882,  aux  industries 
à.^^  tissus  y  du  papier  et  du  6ot>,  appliqué  au  mobilier; 
celle  de  1884  aux  industries  de  la/iterre,  de  la  terre  et 
du  verre.  Il  faut  ajouter  que,  par  une  disposition  nou- 
velle, rUnion  centrale  appela  les  étrangers  à  exposer 
et  a  prendre  part  à  ses  concours  au  même  titre  que 
nos  nationaux.  L'éclat  qu^ont  eu  ces  exhibitions  et  le 
succès  qu'elles  ont  obtenu  sont  encore  dans  toutes  les 
mémoires.  Plus  de  deux  cent  cinquante  mille  visiteurs 
prirent  part  à  ces  fêtes  de  l'intelligence  ;  et  le  bienfait 
en  est  incalculable,  si  l'on  songe  à  toutes  les  activités 

Sue  de  pareilles  entreprises  ont  fait  naître,  aux  efforts 
es  fabricants  pour  y  figurer  avec  honneur  et  s'y  faire 
représenter  par  des  œuvres  de  choix  ;  aux  publications 
des  remarquables  rapports  des  ^ays,  qui  sont  autant 
de  saines  et  permanentes  leçons;  aux  études  critiques 

2u'à  suscitées  chez  des  écrivains  éminents  le  spectacle 
e  toutes  les  merveilles  accumulées  par  les  soins  de 
l'Union  centrale  ;  enfin  aux  reproductions  par  la  pho- 
tographie des  chefs-d'œuvre  anciens  obligeamment 
prêtés  par  les  collectionneurs  et  qui  sont  de  précieux 
modèles  dorénavant  mis  en  circulation  dans  tous  les 
ateliers.  Voilà  ce  qu'ont  fait  ces  expositions,  organi- 
sées par  l'Union  centrale,  et  l'on  peut  Juger  par  là 
de  la  diffusion,  de  la  puissance  d'influence  que  cette 
Société  a  exercées  et  exerce  encore  sur  nos  industries 
d'art.  Il  est  superflu  d'entrer  ici  dans  de  plus  longs 
développements  sur  l'organisation  intérieure  et  sur 
l'histoire  de  l'Union  centrale.  11  suffit  d'avoir  indiqué 
à  grands  traits  ce  qu'elle  a  accompli.  Depuis  le  mois 
de  Janvier  1882,  l'Union  centrale  des  beaux-aru  ap- 

Sliqués  à  l'industrie  a  fusionné  avec  la  Société  du 
lusée  des  Arts  décoratifs  qui  s'éuit  créée  à  côté 
d'elle,  en  1877,  avec  son  patronage.  Aujourd'hui  les 
deux  Sociétés  n'en  font  plus  qu'une  seule,  sous  le 
titre  é^ Union  centrale  des  Arts  décoratifs,  ayant  plus 
de  cohésion  et  de  force  pour  continuer  leur  entreprise 
patriotique.  Après  la  fdsion,  M.  Edouard  André,  pré- 
sident de  Tœuvre  de  l'Union  centrale,  se  retira.  Le 
duc  de  Chaulnes,  qui  avait  été  à  la  tête  de  la  Société 
du  Musée  des  Aru  décoratifs,  éunt  mort,  il  s^agit  de 
choisir  un  nouveau  président;  M.  Antonin  Proust  fut 
désigné.  Cette  nomination  imprima  une  direction  si- 
non nouvelle,  du  moins  plus  étendue  aux  affaires  de 
VVnion  centrale  des  Arts  décoratifs.  C'est  à  cette 
activité  incessante  que  cette  société  doit  d'être  sortie 
de  son  domaine  primitif,  domaine  privé  en  quelque 
sorte,  pour  prendre  une  vaste  place  dans  l'opinion 
publique,  et  intéresser  désormais  à  ses  destinées  ceux 
qui  Jusque-là  paraissaient  n'avoir  aucun  motif  de  s'en 
préoccuper.  M.  Antonin  Proust  a  développé  le  champ 
d'activité  ùe  l'Union  centrale  dans  tous  les  sens. 
C'est  lui  qui  prit  l'initiative  de  la  vaste  loterie  ^ul  a 
laissé  à  la  Société  un  bénéfice  de  près  de  six  millions, 
avec  lequel  on  pourra  édifier  l'important  musée  récla- 
mé par  les  artistes  de  l'industrie.  Déjà  des  collec- 
tions se  forment,  et  la  Société^  dirigée  par  un  conseil 
d'administration  de  60  membres'  divisés  en  commis- 
sions, a  préparé  tous  les  éléments  de  la  future  orga- 
nisation d'un  pareil  établissement. 

Le  Palais  de  l'Industrie,  primitivement  accordé  par 
l'Etat  à  la  Société  pour  y  ouvrir  dans  quelques  salles, 
à  titre  permanent,  une  exposition  des  objets  d'art  cons- 
tituant i'embnyon  de  ce  musée,  ne  saurait  être  un 
local  définitif  pour  une  institution  de  si  haute  portée 
et  destinée  à  prendre  les  plus  grands  développements. 

V.  Ch. 
ARTIFICE  (Peux  d').  L'art  de  faire  des  feux  d'artifice 
en  signe  de  réjouissance  parait  avoir  été  cultivé  de 
très  bonne  heure  dans  la  Chine  et  dans  l'Inde,  et, 
aujourd'hui  même,  il  est  encore  fort  avancé  dans  le 
premier  de  ces  deux  pays.  S'il  faut  en  croire  les  histo- 
riens grecs,  un  feu  d'artifice  aurait  été  tiré  par  ordre 
d'Alexandro  le  Grand  en  mémoire  de  son  entrée  à  Baby- 
lone.  Flamininus,  le  vainqueur  de  la  Macédoine,  trouva 
les  feux  d'artifice  en  usage  dans  les  principales  villes 
qu'il  conquit.  Le  rhéteur  Philostrate  nous  apprend 
qu'on  utilisait  les  artifices  à  la  défense  des  villes, 
et  cite,  près  du  fleuve  Hyphésis,  une  place  considérée 
comme  imprenable,  parce  que  ses  habitants  lançaient 
des  foudres  et  des  éclairs.  Claudien,  décrivant  les  fêles 
organisées  à  Rome  sons  Théodose,  mentionne  les  ser- 


penteaux et  les  girandoles.  En  ce  qui  concerne  rEoropc, 
les  connaissances  pyrotechniques  ont  été  assez  bornées 
Jusqu'à  l'introduction  de  la  poudre  à  canon  ;  on  s'était 
servi  jusque-là  de  divers  mélanges  incendiaires.  Les 
feux  d'artifice  étaient  à  la  modo  en  Italie  vers  la  fin  do 
xv«  siècle,  où  on  les  employait  particulièrement  pour 
la  célébration  des  solennités  religieuses:  les  Florentins 
etjes  Siennois  se  montraient  les  plus  habiles  dans  la 
pyrotechnie.  Cet  art  passa  d'Iulie  en  France,  en  Espagne 
et  en  Flandre.  En  1569,  un  feu  d'artifice  représentant 
un  combat  naval  fut  tiré  à  Rennes  en  l'honneur  de 
Henri  II.  En  1606,  dans  une  fête  donnée  à  Fontaine- 
bleau par  Sully,  il  y  eut  aussi  un  simulacre  de  combat. 
Depuis  le  xvii«  siècle,  les  feux  d'artifice  ont  pris  un 
développement  toujours  croissant,  et  ils  atteignent 
aujourd'hui  les  limites  du  merveilleux,  grâce  aux  tra- 
vaux des  Ruggieri. 

ARTILLERIE.  Un  décret  du  13  mai  1867  constitua 
de  la  manière  suivante  les  troupes  de  l'artillerie  fran- 
çaise : 

Garde  impériale  :  1  régiment  de  6  batteries  toute» 
montées  ;  1  régiment  de  6  batteries  à  cheval  ;  1  esca- 
dron du  train,  de  2  compagnies. 

Ligne  :  15  régiments  (n*»  1  à  là),  ayant  chacun  4  bat- 
teries non  montées  et  8  batteries  montées;  1  régi- 
ment (no  16),  composé  de  1 4  compagnies  de  pontonniers  ; 
4  régiments  (no>  17  à  20),  ayant  chacun  8  batteries  à 
cheval;  lO  compagnies  d'ouvriers:  6  compagnies  d'ar- 
tificiers; I  compagnie  d'armuriers;  2  rëgimenu  du 
train,  composés  chacun  de  12  cnmpaignies. 

D'après  l'organisation  de  1875,  rartlllerie  française 
comprend,  pour  l'armée  active  : 

i^  38  régiments,  tous  stationnés  en  France,  et  con- 
stituant 19  brigades  à  2  régiments,  à  raison  de  1  brigade 
Car  corps  d'armée.  Le  premier  régiment  de  chaqne 
rigade  est  à  13  batteries,  dont  3  à  pied,  8  montées. 

2  montées  de  dépôt  et  de  sections  de  munitions.  Le 
deuxième  régiment  est  à  13  batteries,  dont  8  montées, 

3  à  cheval,  2  montées  de  dépôt  et  de  sections  de  muni- 
tions; 

20  14  compagnies  d'ouvriers  d'artillerie,  chargea  de 
la  construction  de  la  partie  du  matériel  de  TarUllerie, 
du  génie  et  du  tnin  des  équipages  militaires,  dont  Is 
conœction  ne  serait  pas  confiée  à  l'industrie  privée  ; 

30  s  compagnies  d'artificiers  ; 

40  38  compagnies  du  train  d'artillerie*  à  raison  de 
2  par  brigade  d'artillerie.  Chacune  de  ces  deux  com- 
pagnies est  placée,  pour  l'administration,  la  police  et 
la  discipline,  à  la  suite  d'un  des  deux  régiments  de  la 
brigade. 

Le  service  permanent  de  l'artillerie  en  Algérie  est 
assuré  :  1°  par  des  batteries  à  pied  déucbées  des  régi- 
ments de  1  intérieur  et  dont  un  certain  nombre  sont 
organisées  en  batteries  montées  et  en  batteries  de  mon- 
tagne ;  20  par  des  compagnies  du  train  d'artillerie  four- 
nies également  par  les  corps  de  l'intérieur. 

ASSIGNATS.  L'énorme  consommation  des  «ssignau 
vint  surtout  de  leur  dépréciation.  On  la  devine  aisément 
par  ce  qui  a  été  dit  à  cet  article  :  les  dépenses  publiques  y 
sont  pour  la  moindre  part.  La  dépréciation  commençait 
dans  les  mains  mêmes  du  gouvernement  à  Toccasion  des 
services  qu'il  avait  à  paver  hors  do  France,  non  seule- 
ment aux  armées,  mais  à  ses  agents  et  correspondants. 
Pour  cela  il  fallait  de  l'argent,  car  l'assignat  n'avait 
aucune  valeur  au  delà  de  nos  frontières.  Or  l'argent 
n'était  plus  alors,  en  France,  qu'une  marchandise,  et 
encore  fort  rare,  qu'il  fallait  acheter  à  des  capitalistes. 
Les  assignats  étant  l'instrument  d'achat,  on  devait  en 
donner  des  monceaux  pour  des  sommes  relativement 
petites.  Un  eut  de  situation,  fourni  le  14  frimaire  au  IV 
(22  décembre  1795)  au  Directoire  par  les  commissaires 
de  la  Trésorerie  nationale,  porte,  entre  autres  choses, 
que  2,800,000  fr.,  à  payer  mensuellement  en  numé- 
raire pour  le  prêt  des  troupes,  coûtent  470  millions 
en  assignats;  —  que  21  millions,  en  numéraire,  néces- 
saires pour  le  service  courant,  reviennent  à  3  milliards 
500  millions  en  assignats.  —  Ce  fut  17  Jours  seulemeot 
après  la  remise  de  ce  rapport,  que  le  Conseil  des  Cinq- 
Cents  ordonna  la  fabrication  de  40  milliards  en  assignats 
(K.  Gaudin.ducde  Gaëte,Afé»ioiVw,t.  I,  p.  272/  C.  D — v, 

AUGUSTIN  (Eglise  Saint),  bâtie  par  Victor  Baitard. 
dans  le  VIII«  arrondissement  de  Paris,à  l'angle  du  boule- 
vard Malesherbes  et  de  l'avenue  Porulis.  Le  portail  ete 
un  rettangle  couronné  d'un  pignon,  que  surmonte  uns 
croix  accotée  d'anges  portant  le  calice  et  la  couronne 
d'épines  et  sculptés  par  Schroeder.  Au  res-de*chaussée 


AUT 


—  1809  — 


BAU 


s'ouTre  un  porche  à  trois  arcades,  dont  les  pieds-droits 
biseautés  sont  ornés  de  deux  étages  de  niches  à  colonnes 
et  portent  à  leur  aplomb  l'aigle,  le  lion,  le  bœuf  et 
range,  emblèmes  des  quatre  Evangélistes  sculptés  par 
Jacquemart.  Les  trois  portes  ont  été  exécutées  en  cuivre 
galvanoplastiqueparChristofle.  Surla partie  supérieure 
des  denx  portes  latérales,  Mathurin  M oreau  a  représenté 
de  petits  anges  qui  portent  les  insignes  de  la  Passion, 
et,  sur  la  partie  supérieure  de  la  porte  centrale,  les 
quatre  Vertus  cardinales.  Les  statues  qui  ornent  les 
niches  sont  :  Moïse  et  Elie,  par  Cavelier;  Jérémié,  par 
Chambard  ;Isaio,  par  Farochon  ;  Daniel, par  Chardigny  ; 
Ezéchiel.  par  Gruyère.  Au  dessus  du  porche  règne  une 
large  frise  qui  sépare  le  roz- de-chaussée  du  clair-étage; 
cette  frise  est  décorée  de  bas-reiier^  do  Jouffroy,  repré- 
sentent le  Christ  et  les  douze  Apôtres,  dont  les  nimbes 
d*or  brillentsur  iapîerreà  la  façon  byzantine.  Au-dessus, 
une  immense  arcade  à  gorge,  dont  Tarchivolte  fleuron- 
née  est  doublée  d'un  cordon  dorique,occupe  tout  Tétsge 
supérieur;  sa  voussure  mord  sur  le  tympan  du  pignon. 
Au  fond  de  cette  arcade  est  une  grande  rose  en  métal, 
décorée  de  vitraux  avives  couleurs  par  Lafaye,  et  flan- 
quée de  deux  anges  sons  des  palmiers  tenant  les  tables 
de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament,  œuvre  de  Lepère. 
—  Les  profils  du  portail  sont,  au  rez-de-chaussée, 
ajourés  par  une  arcade  dont  les  pieds-droits  possèdent 
également  deux  rangées  de  niches.  Au-dessus,  deux 
contreforts  à  pilastres  composites  contre-butent  le  grand 
cintre  du  portail,  et  sont  amortis  par  des  groupes  d'en- 
fants et  des  torchères.  Les  sulues  des  faces  latérales 
sont  :  saint  Léon  le  Grand,  par  Farochon;  saint  Gré- 
goire le  Grand,  par  Chambard;  Saint  Augustin  et  saint 
Thomas  d'Aquin,  par  Cavelier;  saint  Jean  Chrysostome, 

Êar  Desprez;  saint  François  d'Assise,  saint  Louis,  saint 
lominiôue,  par  Leqlle^ne;  saint  Basile,  par  Gruyère. 
~  L'édinee  a  la  forme  d'un  parallélogramme  irrégulier, 
dont  le  portail  occupe  la  face  la  plus  étroite.  L'architecte 
a  cherché  à  dissimuler  l'irrégularité  de  cette  coupe  par 
l'obliquité  des  lignes  latérales  du  rez-de-chaussée  ;  de 
sorte  que  les  bas  cAtés,  étroits  à  l'origine,  vont  s'éva- 
santjnsqu'au  transept,  undis  qu'au  dessus  le  clair-étage 
file  en  ligne  droite.  Ces  imperfections  se  traduisent  à 
l'intérieur  par  un  défaut  de  parallélisme  dans  les  pas- 
sages des  collatéraux.  Les  laces  du  transept,  au  lieu 
d'être  percées  de  portes  selon  l'usage,  projettent  entre 
les  tourelles  latérales  une  saillie  trigoniale,  sorte  de 
tour  engagée  dans  l'œuvre,  qui  est  coiffée  d'une  calotte 
hémisphérique  à  hauteur  de  premier  étage.  Ces  tours 
engagées,  les  quatre  tourelles  et  deux  autres  saillies 

3m  se  voient  à  proximité  du  porche,  forment  des  reliefs 
estinés  à  tromper  l'œil  et  à  dissimuler  les  écarts  qu'il 
a  fallu  faire  pour  tirer  parti  d'une  surface  étrangement 
coupée.  L'église  Saint- Augustin  est  surmontée,  à  l'on - 
droit  du  sanctuaire,  par  un  dôme  accompagné  de  tou- 
relles et  auquel  une  lanterne  en  métal  sert  d'amortis- 
sement. —  A  l'intérieur,  les  verrières  à  figures  des 
fenêtres  hautes  ont  été  exécutées  par  BAaréchal  et  Clau- 
dius  Lavergne,  les  grisailles  «des  fenêtres  basses  par 
Oudinot,  Nicod  et  Lusson.  Les  voûtes  des  chapelles 
polygonales  des  bras  de  la  croix  ont  été  décorées  de 
grands  sujets,  saint  Pierre  et  saint  Paul,  par  Bougue- 
reau.  Sur  les  pendentifs  du  dôme,  Signol  a  peint  les 
quatre  Evangélistes  ;  dans  la  voûte  de  la  grande  coupole, 
Bézard  a  représenté  seize  grandes  figures  des  fondateurs 
de  la  religion.  Dans  deux  niches  au-dessus  des  portes 
des  sacristies,  Brunet  et  Taluet  ont  placé  des  statues  de 
saint  François  de  Salles  et  de  saint  Charles  Borromée. 
La  chapelle  de  la  Vierge  contient  des  statues  de  la 
Vierge  par  Jaley,  de  sainte  Marthe  par  Perrey,  et  de 
«ainte  Marie,  par  Leharivel. 

AUTEUR  (Droits  d').  A  partir  du  I»  janvier  1881,  le 
droit  des  auteurs  et  compositeurs  au  théâtre  de  l'Opéra 
a  été  fixé  à  &00  fr.  pour  tout  le  spectacle,  quel  que  soit 
le  nombre  des  représentations  des  ouvrages.  La  sommo 
«st  répartie  conformément  au  tableau  suivant  : 

Un  ourrage  seul 500  fr. 

Uo  opéra  en  5,  4  ou  3  actes 375  i  kaa  r* 

Un  ballet  en  i  acte Ho  I  ^""  "' 

Un  opéra  en  4  ou  3  actes 300  1  kaa  Tp 

Un  opéra  en  2  ou  3  actes 200  I  ^^  ^'' 

Un  opéra  en  2  actes 250  1  raa  r. 

Un  ballet  en  2  ou  3  actes 250  1  «>""''• 

Un  opéra  en  1  acte..... 200  1  kaa  r» 

Un  ballet  en  2  ou  3  actes 300  |  »""»'• 

Un  opéra  ou  ballet  en  2  ou  3  actes 250 

Un  opéra  ou  ballet  en  1  acte. 125  }  500  fr.  '•« 

Un  opéra  ou  ballet  en  1  acte 125 


Un  bpéra  en  1  acte 200 

Un  ballet  en  1  acte 150^      500  fr. 

Unballet  en  1  acte 150 

Un  acte  emprunté  à  un  ouvrage  en  plusieurs  actes 
est  rétribué  comme  un  ouvrnge  en  un  acte.  Les  droits 
d'auteur  sont  partagés  par  moitié  entre  l'auteur  du 
poème  et  le  compositeur  de  la  musique,  s'il  s'agit  d'un 
opéra;  s'il  s'agit  d'un  ballet,  ils  sont  partagés  par  tiers 
entre  le  compositeur  de  la  musique ,  l'auteur  du  pro- 
gramme et  le  compositeur  de  la  chorégraphie.  Pour  les 
opéras  dont  les  poèmes  sont  traduits  en  parodies,  les 
avantages  sont  réduits  de  moitié,  sans  que  cette  réduc- 
tion puisse  influer  sur  la  rétribution  de  l'ouvrage  repré- 
senté dans  la  même  soirée. 

AVIGNON  (Faïences  d').  l/origine  de  cette  fabrique 
de  terres  vernissées  paraît  être  fort  ancienne.  Le  plus 
souvent  les  poteries  d'Avignon  sont  faites  d'une  terre 
légèrement  colorée  que  recouvre  un  beau  vernis  de 
couleur  brune.  La  forme  en  est  toujours  élégante  et 
recherchée.  La  fabrique  d'Avignon  eut  la  sp(^cialité  des 
surtouts  do  table,  fontaines,  aiguières  et  corbeilles  à 
jour  d'un  travail  ingénieux.  Ces  pièces  rappellent  beau- 
coup par  leur  coloration  soutenue  les  ouvrages  du  nord 
de  l'Italie  et  ceux  de  Monte-Lupo,  tout  en  conservant  un 
caractère  bien  tranché  d'originalité.Pendant  le  xvii«  siè- 
cle les  potiers  d'Avignon  transformèrent  la  fabrication 
de  leurs  terres  émaillées.  Ils  y  ajoutèrent  remploi  de 
l'émail  blanc. 


B 


BANQUET,  titre  que  certains  écrivains  grecs  et 
latins  donnèrent  à  des  ouvrages  où  leurs  personnages, 
groupés  autour  d'une  table,  exposaient  et  discutaient 
leurs  opinions  avec  élévation  ou  familiarité.  Ainsi  nous 
avons  les  Banquets  de  Platon  et  de  Xénophon,  le  Bon' 
quft  des  savants  d'Athénée,  les  Banquets  des  Satur- 
nales de  Macrobe,  etc. 

BARRAGES.  Au  nombre  des  grands  travanx  exécutés 
par  les  Français  en  Algérie,  on  doit  remarquer  ceux  qui 
ont  pour  but  d'empêcher  les  eaux  fluviales  de  se  perdre, 
de  les  emmagasiner  dans  des  barrages  réservoirs,  et  do 
les  distribuer  au  moyen  de  nombreux  canaux.  Le  bar- 
rage du  Sig^  construit  en  amont  de  la  petite  ville  de 
Saint-Denis-dtt-Sig,  a  été  commencé  par  le  génie  mili- 
taire, et  achevé  en  1858  par  l'administration  des  ponts 
et  chaussées  sous  la  direction  do  l'ingénieur  Aucour;  il 
contient  8.300,000  mètres  cubes  d'eau,  déversés  dans  la 
plaine  par  deux  canaux  qui  n'ont  pas  moins  de  30  kilom. 
de  développement.  Depuis  l'achèvement  de  ce  travail, 
la  plaine  du  Sig  s'est  couverte  de  riches  cultures,  de 
nombreuses  plantations  de  coton,  d'importantes  usines. 
Le  barrage  de  i'Habra,  beaucoup  plus  Important,  a 
été  exécuté  pour  le  compte  et  par  les  soins  d'un  riche 
capitaliste,  M.  Debrousse  ;  il  sert  à  irriguer  3ti,000  hec- 
tares de  terres.  La  digue  n'a  pas  moins  de  41  mètres 
à  sa  base  :  sa  hauteur  est  de  34  mètres,  et  sa  longueur 
de  346  mètres,  dont  125  pour  le  déversoir.  Le  réser- 
voir contient  35  millions  de  mètres  cubes  d'eau. 

BATARD  DE  BOUILLON  (Le),  chanson  de  gestes, 
terminant  la  série  des  poèmes  qu'on  a  rattachés  au 
cycle  de  la  croisade.  C'est  une  œuvre  du  xiv<  siècle, 
d'origine  wallonne  et  faisant  suite  à  Baudoin  de 
Sebourg.  Le  bAtard  de  Bouillon  est  le  flls  de  Baudoin, 
le  second  roi  de  Jérusalem,  et  d'Érinamonde,  sœur  du 
roi  de  la  Mecque,  qui  est  devenue  amoureuse  de  lui 
sur  le  bruit  de  sa  valeur  et  se  livre  à  lui  pendant  qu'il 
fait  la  guerre  à  son  frère.  Le  roman  raconte  les  aven- 
tures du  fils  en  Syrie  et  dans  le  pays  des  fées.  La  texte 
a  été  publié  par  M.  Scht'ler,  Bruxelles,  1877,  etc. 
(Histoire  littéraire  *ie  la  France^  t.  XXV). 

BATEAU  A  AIR,  appareil  plus  spacieux  que  la  cloche 
à  plongeur,  et  destiné  à  la  remplacer  pour  les  petites 
profondeurs.  C'est  une  grande  caisse  en  fer,  ouverte 
par  le  bas,  et  que  l'on  maintient  éunche  au  moyen  de 
l'air  comprimé.  L'ingénieur  français  Coulomb  eut  li 
première  idée  de  cet  appareil  en  1778;  mais  elle  n'i 
été  pratiquement  résolue  qu'en  1845  par  l'ingénieur 
De  la  Gournerie,  qui  employa  le  batean  à  air  pour  les 
travaux  du  port  de  Croisic.  On  a  construit,  pour  le  ser- 
vice de  la  Seine,  des  bateaux  à  air  qui  peuvent  con- 
tenir 40  ouvriers. 

BAUDOIN  DE  SEBOURG,  nom  d'une  chanson  de 
geste  originaire  des  provinces  wallonnes  dans  li  pre* 


BLI 


—  1810  — 


BRÉ 


mière  moitié  du  xiv«  siècle.  La  lang:ue  n'en  est  pas 
très  pure,  et  ellei^ompte  environ  26,000  vers.  Elle  est 
placée  dans  le  cycle  de  la  croisade.  Le  chevalier  Bau- 
doin est  aventureux,  jovial,  d*humeur  amoureuse,  et 
ses  histoires  semblent  avoir  subi  Tempreinte  satirique 
des  Tabliauz.  Un  certain  Gaufroi,  dominé  par  des 
passions  impies,  matéraliste  et  avide,  le  trahit,  le 
dépouille  et  prétendrait  peut-être  au  trône;  mais  la 
fortune  l'arrête  au  dernier  moment,  et  il  parait  mourir 
au  gibet.  La  chanson  de  Baudoin  a  été  analysée  dans 
V Histoire  littéraire  de  la  France^  t.  XXV,  et  imprimée 
à  Valenciennes,  1842,  2  vol.  in-8o. 

BAYLE  (Dictionnaire  historique  bt  critique  de), 
recueil  de  biographies  choisies  des  hommes  qui,  dans 
tous  les  siècles  et  chez  tous  les  peuples,  ont  le  plus 
influé  sur  les  doctrines  religieuses,  politiques  et  phi- 
losophiques et  de  récits  ou  exposés  des  faits  do  ce 
même  caractère.  Bayle  fait  ainsi  connaître,  dans  sa 
préface,  le  plan  qu'il  s*était  tracé  :  «  J'ai  divisé  ma 
composition  en  deux  parties,  dit-il  :  l'une  est  pure- 
ment historique^  un  narré  succint  des  faits;  l'autre 
est  un  grand  commentaire,  un  mélange  de  preuves  et 
de  discussions  où  Je  fais  entrer  la  censure  de  plusieurs 
fautes,  et  quelquefois  même  une  tirade  philosophi- 

2ue.  M  L'idée  de  cet  ouvrage,  espèce  de  dictionnaire 
e  raisonnement,  est  heureui>e  et  grande  ;  c'est  le  plus 
grand  arsenal  de  septicisme  Jusqu'au  Dictionnaire 
philosophique  de  Voltaire  ;  Bayle,  «  grand  amasseur 
de  nuages  ».  prête  une  attention  particulière  aux 
matières  religieuses,  et  se  plaît  à  reproduire  les 
objections  des  anciens  hérésiarques,  en  leur  prêtant 
encore  des  armes  nouvelles.  Mais  l'ouvrage  n'est  point 
eomposé  :  chaque  article  est  accompagné  d'un  com- 
mentaire, pour  lequel  il  y  a  dans  le  texte  de  fréquents 
renvois,  ce  qui  est  très  fatigant,  car  on  sent  que  tout 
cela  aurait  dû  se  fondre,  s'agencer  avec  le  texte.  En 
outre,  le  style  en  est  incorrect,  toujours  lâche  et  dlfl'us. 
Bayle  n'a  consacré  que  quatre  ans  à  faire  ce  travail, 
et  sa  rédaction  a  été  écrite  au  courant  de  la  plume  et 
pour  ainsi  dire  improvisée.  Ce  Dictionnaire  parut  en 
1697,  à  Rotterdam,  en  2  vol.  in-fol.;  une  2«  édition 
fût  publiée  à  Amsterdam,  en  1101,  3  vol.  in-fol.  ;  puis, 
dans  l'espace  de. 35  ans  environ,  8  autres  éditions 

Çarurent  a  Rotterdam,  Amsterdam,  Genève,  Bàle  et 
^évoux.  L'édlUon  d*Amsterdam,  1740,  4  vol.  in-fol., 
fut  la  plus  estimée  Jusqu'à  celle  de  Bouchot,  Paris, 
1820-24,  16  vol.  in-8«.  L'éditeur  a  rempli  plusieurs 
lacunes  dans  les  citations,  et  donné  au  livre  un  carac- 
tère plus  critique,  en  y  ajoutant  des  notes  extraites 
de  Cliaulfepié,  Joly,  La  Monnoye,  L.-J.  Leclerc^  Le  Du- 
chat,  Prosper  Marchand,  etc.,  et  un  ceruin  nombre 
de  cotes  nouvelles.  C.  D — y. 

BELLEVDE  ^Faïences  de).  La  fabrique  de  Bellevue 
près  de  Toul,  fut  fondée  en  1758  par  un  sieur  Lefran- 
çois.  En  1771  elle  devint  la  propriété  de  Charles 
Bayard,  ancien  directeur  de  la  manufacture  royale  de 
fkience  et  de  terre  de  pipe  de  Lunéville,  et  de  Fran- 
çois Boyer,  artiste  faïencier.  Cette  propriété  fut  ratifiée 
λar  lettres  patentes  de  Sa  Majesté  qui  attribuaient  à 
a  fabrique  le  titre  de  manufacture  royale  de  Bellevue. 
Cette  fabrique,  qui  existe  encore  aujourd'hui,  doit  une 
partie  de  sa  célébrité  à  la  collaboration  du  sculpteur 
Cyfflé,  l'auteur  de  ces  groupes  charmants  et  de  ces 
figurines  qui  portent  encore  son  nom.  C'est  de  Bellevue 

Sue  nous  vient  ce  Joli  petit  groupe  en  biscuit  de  terre 
e  pipe  connu  sous  le  nom  de  :  le  savetier  sifflait  son 
sansonnet  qui  est  dans  une  cage  au-dessus  de  sa  tète 
(H.  9  pouces,  L.  6  pouces  ;  9  livres).  J.  B — z. 

BLANCANDIN  et  VOi  gueilleuse  (Tamour^  roman 
d'aventures  du  yiu^  siècle,  composé  de  3,240  vers. 
Blancandin  est  fils  d'un  roi  de  Frise,  qui  va  se  mêler 
aux  exercices  militaires  et  amoureux  des  chevaliers. 
Le  manuscrit  de  ce  roman  est  conservé  à  la  Bibliothè- 
que nationale  de  Paris  ;  il  a  été  publié  par  M.  Michelant, 
1867.  {V.  Histoire  littéraire  de  la  France^  t,  XXII) 
BLINDAGES  DES  NAVIRES.  On  croit  généralement 
que  la  construction  des  vaisseaux  cuirassés  est  une 
invention  toute  moderne.  Mais  Bosio,  historien  de 
l'Ordre  de  Saint-Jean-de-Jérusalem,  parle  d'une  cara- 
qne  ou  grosse  galère  de  guerre,  appelée  Santa-Anna^ 

Sue  les  chevaliers  avaient  blindée  en  plomb  pour  la 
éfendre  contre  les  boulets.  Ce  navire,  construit  à 
Nice  en  1530,  fit  partie  de  l'expédition  de  Charles-Quint 
contre  Tunis  :  il  avait  six  ponts,  une  nombreuse  et 
puissante  artillerie,  un  équipage  de  300  hommes;  sa 
cuirasse  de  plomb,  fixée  par  des  boulons  d'airain,  ne 


fut  pas  endommagée  parles  projectiles.  On  Toit  encore 
aujourd'hui  une  image  de  la  Santa-Anna  au  milieu 
dos  anciennes  fresques  du  palais  des  Hospitaliers  à 
Rome.  Il  parait  que  des  navires  plus  ou  moins  ana- 
logues è  celui-là  furent  projetés  par  la  suite  dans 
divers  pays,  mais  aucun  ne  fut  exécuté.  Les  bâtiments 
cuirassés  actuels  dérivent  des  batteries  flottantes 
créées,  en  1854,  par  l'empereur  Napoléon  III  pour 
attaquer  les  forteresses  russes  de  la  Baltique  et  de  la 
mer  Noire.  Le  premier  qui  ait  été  exécuté  est  la  fré- 
gate ta  G/otr«,  construite  à  Toulon  en  1858-59,  d'après 
le  plan  de  Dupuy  de  Lôme.  Depuis  cette  époque», 
toutes  les  nations  maritimes  ont  suivi  Texerople  de 
la  France.  Les  navires  cuirassés  sont  tous  à  vapeur  et 
à  hélice.  Plusieurs  sont  munis,  à  l'avant  et  à  fleur 
d'eau,  d'un  éperon  saillant,  destiné  à  pénétrer  dans 
les  navires  ennemis,  D'autres  portent  sur  leur  pont 
une  ou  deux  tourelles  ou  coupoles ^  tantôt  fixes,  tantêt 
tournantes,  et  qui  sont  destinées  à  renfermer  des 
canons  ;  l'idée  premières  de  cette  construction  appar- 
tient au  capitaine  anglais  Cowper  Coles.  Il  y  a,  enfin, 
des  navires  dont  le  pont  est  surmonté  d'un  blockhaus 
ou  petit  fort,  crénelé  pour  la  mousqueterie,  et  qui  a 
pour  objet  d'abriter  le  commandant  et  les  timo- 
niers. B. 

BRÉSILIENNE  (LmrÂaATUBB].  Pendant  tonte  la  durée 
de  la  domination  portugaise,  le  Brésil  fournit  un 
contingent  assez  considérable  à  la  littérature  de  la 
métropole.  Deux  écrivains  seulement  cherchèrent  à  y 
fonder  une  littérature  nationale,  Basilic  da  Gama  et 
Duram  ou  Durfto  :  l'un  chanta,  dans  son  poème  de 
V  Uruguay  (1769),  l'anéantissement  de  la  puissance  des 
Jésuites  dans  les  Missions;  l'autre  publia,  en  178i, 
Caramurii  ou  la  découverte  de  Bahia^  poème  épiqoe, 
dont  une  traduction  française  a  été  donnée  par  Eug.  de 
Monglave  (Paris,  1829,  3  vol.  in- 12).  On  romarqoa 
aussi  les  compositions  d'un  poète  populaire,  Domingo 
Caldas  Barbosa,  homme  de  couleur,  mort  en  1880,  ei 
les  Poésies  sacrées  et  profanes  de  Souza  Caldas  (1821). 

Depuis  Que  le  Brésil  est  séparé  du  Portugal,  on  y 
distingue  oeux  écoles  littéraires  :  l'écoles  portugaise 
dont  Pereira  da  Silva  est  le  chef,  se  fait  une  loi  de 
suivre  sévèrement  les  préceptes  et  les  exemples  des 
bons  écrivains  portugais,  tandis  que  l'école  indigène 
s'inspire  de  la  nature  du  pays,  peint  les  mœurs  de  ses 
habitants,  et  incline  Ters  un  idiome  nouveau.  Maga- 
laens  a  été  le  fondateur  de  cette  littérature  nationale. 
Agent  diplomatique  en  Europe,  où  il  fut  témoin  de  la 
lutte  des  romantiques  et  des  classiques,  il  rapporta  an 
Brésil  l'idée  d'une  régénération  intellectuelle.  On  l'a 
surnommé  le  Lamartine  brésilien  :  ses  Soupirs  poéti- 
ques procèdent,  en  effet  de  la  même  inspiration  qao 
les  Méditations^  toutefois  avec  moins  de  penchant  an 
doute.  On  lui  doit  aussi  une  épopée  en  Thonoeur 
d'une  peuplade  indigène,  la  Confédération  des 
Tamoyos.  —  Plus  franchement  romantique,  Aranjo 
Porto-Alegre  a  transporté  dans  la  poésie  les  procédés 
de  la  peinture,  dans  laquelle  il  excella.  Chantre  de 
ritalie  méridionale  dans  m*  Environs  de  Naples  et  des 
merveilles  de  sa  patrie  dans  les  BrésitienneSf  son 
œuvre  capitale  est  un  poème  de  Colomb^  où  il  a  surtout 
développé  le  côté  religieux  du  caractère  de  ce  naviga- 
teur, et  qui  est  écrit  en  un  style  éblouissant.  —  Les 
guerres  et  les  superstitions  des  Indiens  ont  été 
décrites,  avec  plus  de  délicatesse  que  de  force,  dans 
les  Poésies  américaines  de  Gonçalvez  Diaz.  Noberto  de 
Sousa  et  Silva,  par  ses  Modulatiom  poétiques,  a  natu- 
ralisé la  ballade  au  Brésil.  Le  ton  mélancolique  et  la 
fin  prématurée  de  Dutra  Mello  éveillent  le  souTonir 
de  Millevoyo.  Junqoefra  Freire,  mort  à  22  ans,  eut 
néanmoins  le  temps  de  donner  la  mesure  de  son  génie  ; 
ses  Inspirations  au  cloître  prouvent  qull  serait  devenu 
un  des  premiers,  sinon  le  premier  poète  du  Brésil. 

Ce  pays  a  trouvé  non  seolement  des  poètes  pour 
chanter  ses  beautés  naturelles,  mais  encore  des  his- 
toriens pour  raconter  les  luttes  de  son  indépendance. 
Rocha  Pitta  a  laissé  une  histoire  des  temps  coloniaux 
Juqu'au  xvin«  siècle.  Pereira  da  Silva,  après  avoir  écrit 
une  histoire  des  hommes  illustres  du  Brésil  pendant  lés 
temps  coloniaux,  a  entrepris  une  Histoire  de  la  fon- 
dation de  VEmpire  brésilien.  —  Le  roman,  qui  ne 
fleurit  d'ordinaire  que  dans  la  maturité  et  plus  souvent 
au  déclin  dos  littératures,  a  été  cultivé  au  Brésil  dès 
les  premières  années  de  la  Renaissance.  Mais  on  n'y 
rencontre  ni  aventures  multipliées,  ni  intrigue» 
savamment  conduites,  ni  analyses  délicates  du  cceor 


CAD 


—  1811  — 


GAI 


humain  :  il  a  retracé  les  mœurs  des  tribus  indigènes. 
De  même  que  les  riverains  de  la  Delaware  et  du 
Mississipi,  oui  ont  eu  leur  peintre  dans  Cooper,  les 
peuplades  ae  l'Amazone  et  du  Parahyba  ont  inspiré 
Alencar  pour  son  roman  du  Guarani.  Pereira  da  Silva 
a  mis  en  scène,  dans  une  œuvre  où  la  légende  est 
mêlée  à  l'histoire,  Jéronymo  Gortereal,  ami  et  élève 
de  Camoéns.  —  Bien  que  le  théâtre  soit  un  amusement 
cher  à  la  population  brésilienne,  on  se  borne  le  plus 
souvent  à  traduire  ou  à  imiter  les  pièces  françaises. 
Parmi  les  œuvres  originales  on  doit  citer  Antonio 
José,  drame  en  vers  de  Magalhuens;  ia  Méret  drame 
d*Alancar;  Luxe  et  Vanité  et  le  Nouvel  Othello,  de 
J.  de  Macedo.  —  La  littérature  politique  est  fort 
abondante  au  Brésil  :  parmi  les  hommes  qui  se  livrent 
à  ce  genre,  on  distingue  Sales  Torres  Homen,  ancien 
ministre  des  finances,  les  sénateurs  Paranbos,  Firmino 
et  Octaviano,  puis  Nabuco,  Uruguay,  etc.  (Voy.  Ferdi- 
nand Denis»  Résumé  de  l'histoire  littéraire  au  Portugal 
et  du  Brésil;  Adolphe  de  Varnhagen,  Epicos  Brazi- 
leiros,  1845,  et  Florilegio  da  Poesia  Brazileira, 
1850-53, 3  vol.  ;  Pereira  da  Silva,  Plutarcho  Brazileiro,) 

BROCHAGE.  En  1857,  Sulzberg,  relieur  à  Frauen- 
feld  (Suisse),  imagina  une  Brocheuse  mécanique, 
machine  à  plier  et  à  brocher  les  feuilles  des  livres  ;  il 
s'associa  avec  le  mécanicien  Graf  pour  la  construire 
et  en  montra  un  premier  modèle  à  Leipzig  en  1859. 
n'éuit  encore  qu'un  appareil  imparfait.  Avec  Taided'un 
autre  mécanicien,  nommé  Tanner,  un  nouveau  modèle 
fut  produit  en  1862  à  l'exposition  de  Londres,  et  adopté 
par  les  relieurs.  Cette  brocheuse,  mue  par  deux  jeunes 
garçons,  dont  d'un  la  met  en  mouvement  et  l'autre 
Palimente  de  feuilles,  plie,  pique  et  saline  au  moins 
1,000  feuilles  à  l'heure,  tandis  qu'auparavant  une 
habile  ouvrière,  travaillant  10  heures  par  Jour,  ne 
pouvait  plier  et  brocher  que  2,500  feuilles. 

BRODERIE.  On  ne  sait  à  quelle  époque  précise 
furent  inventés  les  papiers  quadrillés  pour  la  mise  en 
carte  des  dessins  de  broderie  et  de  tapisserie.  Les 
plus  anciens  livres  qui  renferment  des  travaux  de  ce 
genre  ont  été  publiés  à  Venise  en  1554  et  1559.  Quel- 
ques années  après,  Ant.  Bellin  et  Mavol  Larme  firent 
paraître  à  Lyon  un  recueil  semblable.  En  1587,  Vinciolo 
publia  ses  :>in(juliers  et  Nouveaux  Pourtraicts  pour 
toutes  sortes  d'ouvrages  de  lingerie.  Vers  le  même 
tempts  parut  le  Moael  Fuscà  d'Hélène  Furstin,  de 
Nuremberg.  Vers  1745,  Gatin  appliqua  une  gravure 
plus  savante  aux  systèmes  de  mise  en  carte  de  ses 
devanciers.  Plus  tard,  Bellin  et,  au  commencement 
de  notre  siècle,  Natto  et  Lehman  perfectionnèrent 
encore  cet  art.  Ces  artistes  allemands  ont  surtout  fait 
avancer  la  fabrication  des  dessins  de  broderie  ;  ce  sont 
liailer  (de  Vienne),  Wittich,  Grtlnthal,  Hortz  et 
IVegener  (de  Berlin).  En  France,  des  essais  furent 
exécutés,  depuis  1815,  par  Aug.  Legrand,  Mallez, 
Robert  Helbronner  et  Martin;  en  1839,  Rouget  de 
Lisle  introduisit  quelques  améliorations.  C'est  depuis 
1840  que  Sajou  a  fait  des  dessins  aussi  parfaits  que 
ceux  d'Allemagne. 

A  la  France  appartient  l'idée  des  Brodeuses  méca- 
niques. Des  tentatives  furent  faites  dès  1821  ;  mais  la 
première  machine  qui  ait  fonctionné  d'une  manière 
satisfaisante  ne  fut  donnée  qu'en  1829,  par  Josué  Heil- 
mann,  de  Mulhouse.  Parmi  les  autres  brodeuses  inven- 
tées depuis  cette  époque,  on  remarque  celle  de  Chevolot, 
de  Paris,  qui  permet  de  produire  à  la  fois  de  48  à  100 
broderies  semblables,  imitant  les  dessins  au  plumetis 
à  la  main.  La  plupart  des  machines  à  coudre,  peuvent, 
dans  beaucoup  de  circonstances,  être  employées  pour 
la  broderie. 


G 


CADENAS,  serrure  de  fer  primitivement  fixée  aux 
derniers  anneaux  de  toute  chaîne  qu'on  passait  autour 
d'un  coffre  ou  dans  les  barreaux  d'une  grille  pour  les 
fermer.  On  a  prétendu  à  tort  qu'Ehrmann,  de  Nurem- 
berg, en  avait  été  l'inventeur  en  1540  ;  car  le  cadenas 
était  connu  des  Romains  qui  l'appelaient  Sera,  et  on 
en  a  trouvé  des  spécimens  dans  leurs  monuments  en 
mine.  Au  moyen  âge,  les  cadenas  s'appelaient  Ploustres 
Les  cadenas  à  combinaison  datent  au  xvi«  siècle  ;  Car- 
dan {De  subtilitate,  Nuremb.,  1550>  en  a  décrit  un 
qui  avait  été  construit  par  Janellus  Turrianus,  méca- 


nicien de  Crémone.  Au  commencement  de  notre  siècle. 
Régnier,  mécanicien  de  Paris,  inventa  un  cadenas  dont 
les  viroles  étaient  susceptibles  de  331,777  combinai- 
sons. ' 

CiECOGRAPHIE,  art  d'apprendre  à  écrire  aux  aveu- 
gles. Pour  atteindre  ce  but,  le  docteur  Franklin,  au 
siècle  dernier,  se  servait  de  feuilles  d'ivoire  disposées 
d'une  certaine  manière.  D'autres  procédés  ont  été  pro- 
posés  par  Pingeron   (1786),  Lhermina  (1784),  Bérard 
(1801).  La  machine  de  Julien  Leroy  (1817),  appelée 
d'abord  Nyctographe,  reçut,  à  la  suite  de  perfectionne- 
ments, le  nom  de  Cœcograph.  En   1838,  Ferdinand 
Léger  inventa   un  système  de  tablettes  qui,  après 
diverses  améliorations,  fut  approuvé  par  la  Société 
d'encouragement  en  1851.  L'appareil  à  écrire  que  con- 
struisit, en  1843,  l'aveugle-né  Foucauld  est  encore  le 
plus  employé  aujourd'hui.  En  1858,  ia  Société  d'encou- 
ragement accueillit  avec  faveur  deux  nouveaux  appa- 
reils :  celui  de  Golard-Vienot,  de  Paris,  et  celui  de 
Massé,  de  Tours.  Enfin,  en  186*2,  un  rapport  a  été  fait  à 
l'Académie  des  sciencessurle  Cxcirèoleàe  Duvignau. 
CAIRE  (ÉCOLE  FBANÇ4ISB  Du)  OU  désigne  sous  cette 
dénomination  la  Mission  archéologique  permanente 
que  le  gouvernement  français  entrelient  au  Caire  de- 
puis l'année  1879,  dont  l'objet  est  de  préparer  des 
jeunes  savants  à  la  pratique  des  fouilles  et  à  la  pu- 
blication raisonnée  des  documents  destinées  à  perpé- 
tuer  l'œuvre    éminemment  française  du  musée  de 
Boulacq.  A  proprement  parler  l'école  française  du 
Caire  n'a  point   encore  d'autre   existence  officielle. 
C'est  M.  Maspéro  qui  le  premier,  vers  la  fin  de  1879, 
fut  chargé  par  le  gouvernement  do  conduire  quelques 
égyptologues  dans  la  vallée  du    Nil.  Mariette-pacha 
étant  mort  et  M.  Maspéro  ayant  été  appelé  par  le 
khédive  à  prendre  la  direction  du  musée  de  Boulacq, 
l'expédition  scientifique  française  passa  alors  sous  la 
conduite  de  M.  Lefébure,  remplacé  à  son  tour  en  1883 
par  M.  Gréband.   Les  membres  de  la  mission  sont 
choisis  parmi  les  anciens  élèves  de  l'école  des  hautes- 
études   munis  du   diplôme  de  la   licence  es  lettres. 
Des  égyptologues  non  licenciés  peuvent  être  attachés 
à    la  mission  pour  une  durée  de  un   an,   et  plus. 
D'autre  part,  l'école  des  langues  orientales  vivantes 
envoie  aussi  au  Caire  quelques-uns  de   ses  élèves 
désireux  de  se  perfectionner  dans  la  connaissance  de 
la  langue  arabe.  Comme  les  écoles  françaises  d'Athè- 
nes et   de  Rome,  l'école  du  Caire  a  sa  publication 
annuelle  où  sont  consignés  ses  travaux  et  ses  décou- 
vertes. Ces  Mémoires  publiés  par  les  membres  de  la 
missionarchéologique  française  au  Caire  sont  l'œuvre 
des  jeunes  savants   attachés  à  cette  expédition  qui 
tous   sont  tenus   d'y   fournir  au  moins   un  article 
dans  l'année.  G.  D.  y. 

CAISSE  D'ESCOMPTE,  établissement  de  crédit  pro- 
voqué parTurgot,  pour  favoriser  le  commerce  en  géné- 
ral, et  particulièrement  celui  de  Paris,  et  qui  fut  créé 
par  un  arrêt  du  Conseil  du  roi  ou  Conseil  royal  des 
finances  du  24  mars  1776.  Son  capital  fut  Axé  à 
12  millions  de  livres,  divisés  en  quatre  mille  actions 
de  3,000  livres  chacune.  Circonscrite  à  des  opérations 
de  Banque,  la  Caisse  fit  pour  60  millions  d'escompte, 
ce  qui  n'était  pas  extraordinaire.  Comme  dans  ce 
temps-là  l'argent  n'était  pas  encore  assimilé  à  une 
marchandise,  qui  doit  avoir  un  cours  variable,  le  taux 
de  l'escompte  de  la  Caisse  fut  fixé  à  4  p.  lUO  en  temps 
de  paix  et  4  1/2  en  temps  de  guerre.  La  Caisse  d'es- 
compte rendait  de  grands  services  ;  mais  entraînée  par 
les  affaires,  elle  fit  des  émissions  imprudentes,  prêta 
son  crédit  au  gouvernement,  et,  en  1783,  sa  trouva 
embarrassée,  au  point  de  ne  pouvoir  rembourser  ses 
billets  qu'en  lettres  de  change.  Alors  le  gouvernement 
l'obligea  d'augmenter  son  capital  de  3  millions  de 
livres  ;  de  garder  une  réserve  de  2,500,000  livres;  lui 
interdit  d'escompter  des  etteu  à  plus  de  90  iours  ;  lui 
imposa  d'avoir  une  encaisse  énle  au  quart  de  ses  bil- 
lets en  circulation  ;  enfin  ne  dépasser  jamais  6  p.  100 
dans  la  distribution  des  dividendes  à  ses  actionnaires. 
Ces  mesures  assurèrent  sa  prospérité  pendant  4  ans, 
mais  en  17M7  elle  prêta  de  nouveau  à  l'Eut,  d'abord 
70millions,  puis,  en  1789  et  1790, 170  millions,  dentelle 
ne  fut  remboursée  qu'en  assignats.  Necker  avait  tenté 
de  faire  déclarer  cotte  caisse  Banque  nationale.  Lors- 
que vinrent  les  mauvais  jours  de  la  Révolution,  quand 
les  énergumènes  eurent  inventé  le  crime  de  négocian- 
tisme^  qu'il  n'y  eut  plus  ni  commerce  ni  affaires,  et 
par  conséquent  nulles  transactions  dans  les  banques, 


CAN 


—  1812  — 


CAR 


la  Caisse  d*escompte  n'exista  plus  pour  ainsi  dire  que 
de  nom.  La  C^onvention,  par  un  décret  du  24  aoill 
1793  la  supprima.  G.  D. —  y. 

GALCOGRAPHIE,  appareil  inventé»  en  1838,  par 
Gh.  Chevalier,  ingénieur-opticien  à  Paris,  pour  faci- 
liter le  tracé  sur  papier  des  images  fournies  par  la 
•chambre  claire.  Depuis,  Rouget  de  Lisle  a  construit, 
Kous  le  même  nom.  un  instrument  spécialement  ap- 
plicable à  la  reproduction  des  dessins  de  fabrique, 
mais  qui  peut  servir  aussi  pour  dessiner  les  objets  vus 
en  perspective. 

CANNE.  A  diverses  époques,  on  a  imaginé  d*ajouter 
des  accessoires  à  la  canne,  pour  la  faire  servir  à  plu- 
sieurs fins.  Ainsi  la  canne  à  fusil  et  ia  canne  à  épée 
deviennent,  entre  les  mains  du  promeneur  paisible, 
une  arme  de  chasse  ou  une  arme  défensive  ;  la  canne  à 
vent  est  tantôt  une  sarbacane,  tantôt  un  diminutif  du 
fusil  à  vent  ;  la  canne  à  liçne  est  destinée  aux  pécheurs  ; 
la  canne-abri  se  déploie  en  une  tente  portative;  la 
canne- fauteuil  fournit  un  siège  au  voyageur  fatigué  ; 
la  canne  à  lunette  se  change  à  volonté  en  longue-vue, 
etc.  On  a  eu  même  l'idée  d'enfermer  dans  une  canne 
du  gaz  comprimé,  ce  qui  a  produit  la  canne-flambeau 
ou  la  canne  à  gaz.  Quant  à  la  eanne  hydraulique, 
tube  pourvu  d'une  soupape  à  sa  partie  inférieure,  et 
qu*on  peut  employer  à  élever  les  eaux  en  lui  impri- 
mant iiu  mouvement  de  va-et-vient;  ce  n*est  qu'un 
objet  de  curiosité. 

CANON.  Les  premiers  canons  n'avaient  pas  les 
accessoires  qu'ils  présentent  aujourdMiui.  Vers  H28, 
on  commença  a  les  renforcer  à  la  culasse.  Le  renfoi^ 
cément  de  la  bouche  vint  un  peu  plus  tard,  ainsi  que 
les  tourillons.  Les  anses  et  le  cul- de-lampe  ne  furent 
communs  que  sous  Charles-Quint.  Le  grain  de  lumière, 
déjà  connu  à  la  fin  du  xvi«  siècle,  reçut  sa  forme 
actuelle  à  l'époque  de  Louis  XV,  lors  de  la  réforme  do 
Tartillerie  par  Gribeauval. 

L'usage  de  prendre  le  diamètre  du  boulet  comme 
base  des  dimensions  des  pièces  date  du  xv*  siècle. 
Moritz  Meyer  le  fait  remonter,  il  est  vrai,  au  fondeur 
Hartmané,  de  Nuremberg,  1540;  mais  un  texte  cité 
dans  les  œuvres  de  Napoléon  III  prouve  qu'il  existait 
en  1431.  Le  calibre  des  canons  a  beaucoup  varié  :  dans 
les  premiers  temps,  il  y  avait  des  canons  de  toutes 
dimensions  ;  mais  on  reconnut  bientôt  l'utilité  de  les 
ramener  à  un  petit  nombre  de  types.  Le  système  de 
Gribeauval  fut  adopté  par  tous  les  États  d'Europe.  En 
1819,  le  colonel  Paixhans  proposa  un  canon  à  bombes, 
pouvant  lancer  des  boulets  explosirs,  et  qu'un  a  em- 
ployé pour  la  défense  des  côtes  et  l'armement  des 
navires.  Napoléon  111  a  introduit  l'unité  de  calibre  dans 
l'artillerie  de  campagne,  par  la  création  du  canon- 
obusier  de  13,  qui  lance  indistinctement  des  projec- 
tiles creux  et  des  projectiles  pleins. 

Les  résultats  obtenus  par  les  carabines  à  tige  et  les 
balles  cylindro-ogivaics  ont  donné  l'idée  de  fabriquer 
des  canons  rayés,  lançant  des  boulets  coniques  ou 
cylindro-coniques.  Les  premiers  essais  importants 
furent  faits,  en  1845,  à  Ackcr  (Suède),  par  le  major 
piémoniais  Cavalli,  et  répétés  aussitôt  en  Angleterre. 
Le  problème  fut  résolu  en  France  à  la  suite  des  expé- 
riences du  capitaine  Lepage,  en  1854,  du  capitaine 
Samisier,  en  1855,  et  du  major  Ghanal,  en  1856;  les 
nouveaux  canons  furent  employés  dans  la  guerre  de  la 
grande  Kabylie,  en  1857.  Ceux  qui  figurèrent  aux 
batailles  de  Magenu  et  de  Solférino,  en  1859.  étaient 
l'œuvre  du  commandant  Treille  de  Beaulieu.  Depuis 
cette  époque,  les  canons  rayés  ont  été  adoptés  pariout, 
avec  des  modifications  de  détail  :  ceux  de  France  se 
chargent  par  la  bouche  ;  les  canons  italiens  de  Cavaliif 
les  canons  anglais  de  Whithworth,  d'Armstrong,  de 
Horsfall,  les  canons  prussiens  de  Wahrendorflf,  se  char- 
gent par  la  culasse.  L'artillerie  de  place  et  de  marine 
a  pris  également  les  pièces  rayées. 

L'invention  du  blindage  des  navires  à  l'aide  de  pla- 
ques de  fer  a  été  ensuite  le  signal  d'une  révolution  dans 
l'artillerie  de  terre  et  de  mer  ;  il  fallait  renforcer  la 
puissance  des  canons,  afin  de  percer  ces  armures  mé- 
talliques, dont  on  a  même  revêtu  les  batteries  de  terre. 
Le  bronze,  trop  mou  pour  la  résistance  qu'on  deman- 
dait désormais  aux  bouches  à  feu,  a  été  abandonné  ; 
les  Etats-Unis  ont  adopté  la  fonte,  soit  seule,  soit 
soutenue  par  d'autres  métaux  ;  mais  le  fer  forgé  et 
surtout  l'acier,  qui  est  moins  cher,  tendent  à  prévaloir. 
On  en  est  arrivé  à  fabriquer  de  monstrueux  engins  ; 
les  projectiles  des  canons  prussiens  de  Krupp  pèsent 


de  100  à  300  kilog.,  ceux  des  canons  anglais  de  Bla- 
kely,  700  livres  (avec   une  charge  de  70  livres  de 

goudre)  ;  ceux  des  canons  américains  de  Rodman  et 
lahlgren,  500  kilogr.  On  a  vu  à  l'Exposition  univer- 
selle de  Paris  (1867)  un  canon  suédois  de  Fiosponç, 
pèsent  13,600  kilogr.;  un  canon  Armstrong,  33,865  ki- 
logr.; un  canon  Krupp,  50,000  kilogr.;  un  canon  fran- 
çais, 38«r00  kilogr.  La  marine  a  dû  élever  ses  calibres 
de  1B  à  24  et  à  36  centimètres. 

GANT,  idiome  répandu  en  Angleterre  parmi  les 
classes  dangereuses,  argot  des  bohémiens,  des  vaga- 
bonds et  des  malfaiteurs.  Le  mot  cant  n'est  pas,  ainsi 
que  l'a  dit  Addison.le  nom  d'un  prédicateur  écossais. 


élopée  plaintive 
Le  caut  est  dilTérent  du  slang  (V.  ce  mot  plus  loin). 
Il  a  un  fonds  de  vieille  date,  où  l'on  reconnaît  des 
mots  hébreux,  persans,  slaves,  etc.  ;  puis  des  emprunts 
ont  été  faits  aux  langues  vivantes  européennes,  Talle- 
mand,  TiUlien,  l'espagnol,  le  français,  l'anglais.  Un 
tel  mélange  s'explique  par  la  vie  nomade  des  gens 
qui  parlent  le  cant.  A  ce  langage  ont  quelquefois 
puisé  les  auteurs  dramatiques,  Ben  Johnson,  Beaamont 
et  Fietcher,  même  Shakespeare.  (V.  Richard  Head, 
Canting  Academy^  1674  ;  Francis  Grose.  Classical 
Diclionary  of  the  vulgar  tongUe,  1785;  i4  Dictionary 
of  modem  Slang,  Cant,  and  oulgar  Words,  par  un 
antiquitaire  de  Londres,  1864  ;  Forgues,  La  langue  du 
monde  excentrique  en  ÀJigleterre,  dans  la  Hevue  des 
Deux  Mondes  du  15  septembre  1846.)  B. 

CAPET  (poème  de  Hdgues),  chanson  de  geste  con- 
poHée  au  xiv«  siècle  par  un  auteur  inconnu,  et  publiée 
pour  la  première  foiK,  en  1864,  par  le  marquis  de  La 
Grange,  d'après  le  manuscrit  unique  de  Paris  dans  la 
Collection  des  ancienx  poètes  de  la  France.  Contrai- 
rement à  la  tradition  qui  fait  descendre  Hugues  Capet 
du  Saxon  Witikind,  le  poète  donne  pour  père  au  pre 
mier  roi  de  la  8«  dynastie  un  chevalier  de  TOrléanais, 
Richier,  seigneur  de  Beaugency,  vivant  à  la  cour  du  roi 
Louis  V  ;il  l'appelle  par  erreur/^  Débonnaire),  et  pour 
mère  Béàtrix,  fille  de  Simon,  riche  boucher  de  Paris. 
Son  but  était  sans  doute  de  glorifier  l'alliance  de  la 
rovauté  capétienne  avec  le  peuple  ;  cette  tradition  était 
très  répandue  au  moyen  âge  et  Dante  et  Villon  y  font 
allusion.  Hugues  Capet  arrive  au  trône  comme  gendre 
de  Louis  et  avec  l'assentiment  des  bourgeois.  Il  y  a 
donc  ici  un  poème  politique  plutôt  qu'une  chanson  de 
geste  proprement  dite.  Un  autre  caractère  du  poème, 
c'est  1  ardeur  avec  laquelle  la  loi  salique  y  est  défen- 
due :  on  en  peut  conclure  qu'il  fut  écrit  vers  l'avène- 
ment de  Philippe  VI  de  Valois,  quand  il  s'agissait 
d'écarter  le  roi  d'Angleterre,  prétendant  à  la  couronne 
de  France,  et,  à  ce  titre,  il  esi  l'expression  de  l'opinion 
publique.  Le  poème  de  Hugues  Capet,  jeté  dans  le 
moule  des  chansons  de  geste,  diffrère  de  ces  anciennes 
compositions  ;  moins  héroïque  et  plus  littéraire,  il  est 
sobre  de  détails  :  les  dialogues  y  suppléent  les  récits  : 
Tauteur  intervient  quelquefois,  en  mêlant  à  l'action 
ses  sentences  et  ses  réflexions.  Traduit  en  prose  alle- 
mande au  xy^  siècle  par  Elisabeth  de  Lorraine,  com- 
tesse de  Vaudemont,  mariée  au  comte  de  Nassau-Saar- 
brQck,  il  a  été  très  populaire  au  delà  du  Rhin,  sous  le 
titre  de  Hug  Schapefer,  comme  respirant  le  sentiment 
démocratique  ;  Bûlow  Ta  rajeuni  dans  ses  Kouiyelles 
(Brunswick,  1841).  On  n'en  connut  longtemps  en 
France  qu'un  extrait  inséré  dans  la  Bibliothèque  des 
romans.  B. 

CARICATURE.  Les  anciens  Grecs,  qui  assignaient 
pour  but  à  l'art  l'imitation  de  la  nature,  relevée  parle 
sentiment  d'une  beauié  idéale,  ont  généralement  évité 
de  reproduire  le  laid.  Les  peintres  Athénis  et  Bupalus, 
en  se  pendant  de  désespoir  à  cause  des  épigrammesdu 
poète  Hipponax,  dont  il  avaient  fait  la  caricature, 
prouvèrent  que  leur  art  avait  peu  de  crédit.  Aristote  et 
Aristophane  expriment  le  mépris  dont  était  l'objet,  au 
siècle  de  Périclès,  le  peintre  Pauson,  qui  avait  cnitivé 
le  genre  grotesque.  En  Béotie,  une  loi  proscrivait  la 
caricature.  Cet  art  n'a  guère  pris  faveur  que  vers 
l'époque  macédonienne  et  n'a  fleuri  qu^à  l'époque  ro- 
maine ;  les  monuments  de  la  peinture  et  de  la  sculp- 
ture où  l'on  trouve  le  grotesque  ont  été  tirés  des  villes 
d'Herculanum  et  de  Pompéi,  et  ne  représentent  que 
l'art  grec  dégénéré.  Le  grotesque,  chez  les  Grecs,  fat 
moins  dans  les  arts  du  dessin  que  dans  la  littérature, 


CAR 


1813  — 


CAR 


et  les  comédies  d'Aristophane  en  donnent  la  plus  com- 
plète idée  ;  certains  vases  peints  offrent  des  souvenirs 
de  représentations  comiques.  —  Les  grotesques  qui 
nous  sont  parvenus  ne  sont  pas  des  types  grecs;  on  y 
reconnaît  souvent  les  personnages  des  Atelianes, 
Maccus,  Bucco,  Dorsennus,  Pappus,  Manducus.  etc. 
Les  principales  formes  de  la  parodie,  les  principaux 
procédés  pour  produire  le  grotesque,  avaient  été  trou- 
vés par  les  artistes  de  l'Age  gréco-romain  ;  ainsi  ils 
rapetissent,  ils  suppriment  les  proportions,  ils  mettent 
des  tètes  énormes  sur  des  corps  grêles,  ainsi  que  la 
fait  Dantan  de  nos  tours  ;  ou  bien,  comme  Granville 
dans  les  Fables  de  La  Fontaine,  ils  travestissent 
rbomme  en  bète.  (V.  Gbampfleury,  Histoire  delà  Cari- 
cature antique,  18f>5.)  B. 

CARNAVALET  (Hôtel  et  MusIb).  Le  musée  Carna- 
valet, spécialement  consacré  àriiistoire  de  Paris  et  de 
la  Révolution  française,  est  de  fondation  toute  récente. 
Il  doit  son  nom  à  Tancien  hôtel  dans  lequel  il  a  été 
installé;  nous  nous  occuperons  donc  d*abordde  Tédi- 
fice  illustré  par  le  ciseau  de  Jean  Goujon  et  par  le 
souvenir  de  madame  de  Sévigné.  Nous  passerons  en- 
suite en  revue  les  intéressantes  collections  qu'il  ren- 
ferme. 

Par  contrat  passé  devant  Guillaume  Payen  et  Jean 
Trouvé,  notaires  au  Ch&telet  de  Paris,  le  mercredi 
18  mars  1544,  les  chanoines  de  Sainte-Catherine-du- 
Yal-des-Écoliers  vendirent  à  messire  Jacques  des  Li- 
gneris,  président  au  Parlement,  cinq  places  conte- 
nant 8  toises  de  large  sur  15  toises  de  profondeur, 
dans  la  culture  Sainte-Catherine,  moyennant  trente 
livres  de  rente  et  trois  sous  quatre  deniers  du  cent 
au  proAt  des  religieux  de  Saint-Victor,  coseigneurs 
du  fief. 

Jacques  des  Ligneris,  homme  sage  et  de  grand 
savoir,  était  alors  l'un  des  ambassadeurs  pour  le  roi 
au  concile  de  Trente.  Son  père,  René  des  Ligueris, 
échanson  de  la  reine  de  Navarre,  sœur  de  François  I«', 
avait  fait  b&tir  le  célèbre  château  d'Azay-le-Rideau 
en  Touraine .  Jacques ,  qui  tenait  ainsi  de  famille 
le  goût  des  arts,  s'adressa,  pour  construire  son  hôtel 
de  la  culture  Sainte-Catherine  aux  premiers  artistes  de 
son  temps.  Pierre  Lescot,  architecte  du  roi ,  fut  cliargé 
d'en  dresser  les  plans,  et  Jean  Goujon  de  décorer  les 
façades.  Les  dessins  de  Jean  Marot,  antérieurs  à  la 
grande  restauration  de  Mansart,  nous  donnent  une 
idée  exacte  et  assez  complète  de  l'édifice  dans  son 
éiat  primitif.  Suivant  la  coutume  empreinte  encore 
des  usages  féodaux,  les  dehors  restèrent  simples  et 
sévères;  c*était  le  côté  qui  regardait  l'ennemi  on  tout 
au  moins  l'étranger.  Les  façades  intérieures,  au  con- 
traire, exposées  aux  regards  du  maître  et  de  ses 
hôtes,  devaient  être  richement  ornées  ;  elles  présen- 
taient de  gracieux  arceaux,  de  fines  sculptures,  en 
un  mot  toutes  les  séductions  de  cette  architecture 
française  italianisée  que  le  seizième  siècle  vit  éclore, 
s'épanouir,  et  qui  s'éteignit  avec  lui  sous  la  lourde 
influence  du  goût  bourbonien . 

La  façade  sur  la  rue  se  composait  d'un  corps  cen- 
tral flanqué  de  deux  pavillons.  Au  milieu,  se  détachait 
le  portail  ouvert  d'une  large  baie,  en  plein  ceintre, 
dont  la  clef  de  voûte  fut  décorée  d'une  admirable 
figurine ,  VAbondancef  ciselé  par  Jean  Goujon,  qui 
sculpta  au-dessous,  dans  le  tympan  semi-circulaire  de 
la  porte,  un  écusson  armorié  soutenu  par  deux  petits 
génies  portant  des  palmes,  accompagnés  d'élégants 
trophées.  Cette  sobre  et  charmante  décoration  s'est 
conservée  intacte,  à  cela  près  que  le  globe  sur  lequel 
s'appuyait  la  statuette  de  l'Abondance  a  été  trans- 
formé plus  tard  en  masque  de  carnaval,  par  allusion 
au  nom  des  Carnavalet,  les  seconds  propriétaires  de 
l'hôtel. 

Ce  bâtiment  surlaruene  comportait  qu'un  seulétage, 
de  sept  croisées  de  face.  Les  fenêtres  cintrées  et  couron- 
nées de  frontons  arqués  dépassaient  la  naissance  des 
combles  dont  elles  coupaient  la  ligne  en  se  détachant  à 
moitié  sur  la  toiture.  Cette  disposition  d'un  rez-de- 
chaussée  surmonté  de  Incarnes  en  saillie  sur  les  toits 
se  répétait  sur  trois  faces  à  l'intérieur  de  la  cour  et  fai- 
sait valoir  le  corps  de  logis  principal,  plus  élevé  d'un 
étage,  couronné  d'une  balustrade,  derrière  laquelle 
s'élançait  une  haute  couverture  d'ardoise,  surmontée 
d'épis  flenronnés.  De  chaque  côté,  deux  pavillons  avan- 
cés contenaient  les  escaliers  et  vestibules.  On  y  accé- 
dait par  deux  portes  élevées  de  quelques  marches  et 
décorées  d'entablements  sculptés.  A  ces  pavillons  se 


rattachaient  deux  ailes  en  arcades  dont  les  clefs  furent 
ornées  d'admirables  mascarons  par  maître  Ponce.  Ces 
arcades,  ouvertes  du  côté  des  communs  (aile  droite), 
éclairaient  de  l'autre  côté,  un  promenoir  couvert. 
Elles  étaient  fermées,  à  hauteur  d'appui,  par  de  larges 
balustrades  monolithes,  taillées  à  môme  le  bloc,  tra- 
vail singulier  qui  fit  longtemps  l'admiration  des  gens 
de  l'art,  ainsi  que  les  pilastres  accouplés,  également 
monolithes,  qui  portent  cette  galerie. 

Sur  le  quatrième  côté  de  la  cour,  du  côté  de  l'en- 
trée, faisant  face  aux  appartements,  Jean  Goujon 
exécuta  une  décoration  emblématique  fort  ingénieuse 
et  qui  peut  être  considérée  comme  l'un  de  ses  plus 
purs  chefs-d'œuvre  :  à  la  clef  de  voûte  de  la  grande 
porte,  VAutoritéf  figurine  ailée,  tenant  un  sceptre  et 
un  joug  ;  dans  les  tympans,  deux  victoires,  et,  de 
chaque  côté,  au-dessus  des  petites  portes  latérales, 
deux  lions  soumis  foulant  des  trophées  d'armes.  C'est 
le  symbole  de  la  force,  soumise  à  l'autorité  morale  de 
la  justice;  emblème  admirablement  approprié  à  la 
demeure  d'un  magistrat.  Ce  symbole  incompris  a  été 
maladroitement  altéré,  plus  tard,  par  le  transport  des 
deux  lions  à  la  façade  extérieure,  sur  la  rue.  Félici- 
tons-nous cependant  qu'ils  aient  été  conservés  ainsi 
que  toute  la  décoration  de  cet  admirable  portail,  par 
les  soins  do  Mansart,  qui  eut  le  très  grand  mérite, 
plus  rare  encore  de  son  temps  que  de  nos  jours,  d'ap- 
précier et  do  respecter  l'œuvre  magistrale  de  ses  de- 
vanciers. 

En  1546,  Pierre  Lescot  et  Jean  Goujon  abandon- 
naient l'hôtel  des  Ligueris  pour  le  Louvre,  dont 
François  I*'  leur  confia  la  restauration.  C'est  alors 

3ue  Jean  Bullant,  qui  venait  de  terminer  le  château 
'Écouen,  prit  la  conduite  des  travaux.  Il  acheva  le 
bâtiment  principal  entre  cour  et  jardin;  et  des  élèves 
de  Goujon  exécutèrent,  d'après  les  dessins  du  maître, 
les  quatre  saisons  sculptées  entre  les  fenêtres  du  pre- 
mier étage. 

Il  n'est  pas  permis,  en  effet,  d'attribuer  à  Jean 
Goujon  lui-même,  ce»  grands  bas-reliefs,  composés 
dans  sa  manière  caractéristique,  mais  que  déparent 
des  incorrections  évidentes.  La  part  dé^à  fort  consi- 
dérable du  grand  artiste  doit  être  restreinte  à  la  déco- 
ration du  portail  sur  la  cour  et  sur  la  rue,  et  de  la 
porte  du  vestibule  de  l'aile  gauche  à  l'entrée  du  grand 
escalier.  Celle  de  l'aile  droite  est  une  imitation  toute 
moderne. 

Le  président  des  Ligneris  mourut  en  1556,  laissant 
son  hôtel  à  son  fils,  Théodore  des  Ligneris;  capitaine 
de  cinquante  hommes  d'armes,  qui  le  coi)serva  jus- 
qu'à son  mariage  avec  Françoise  de  Billy.  Dès  l'année 
suivante,  1578,  il  le  vendit  à  Françoise  de  la  Heaume, 
veuve  de  François  de  Carnavalet  —  Kernevenoy  de  son 
vrai  nom  breton.  Ce  seigneur,  qui  avait  été  Tun  des 
favoris  de  Henri  II,  et  gouverneur  du  duc  d'Anjou, 
alors  régnant  sous  le  nom  de  Henri  III. 

La  dame  de  Carnavalet,  qui  devait  laisser  définiti- 
vement son  nom  à  cet  hôtel,  ne  le  conserva  que  vingt- 
quatre  ans.  Elle  le  revendit  en  1602  à  Florent  d'Ar- 
gouges,  trésorier  de  la  reine  Marie  de  Médicis.  C'est 
sous  la  désignation  d'hôtel  d'Argouges  que  Jean  Marot 
en  publia  les  plan,  coupe  et  élévation  vers  164G,  alors 
(|ue  Jean  Androuet,  le  dernier  des  Ducerceau,  fils  de 
l'architecte  du  Pont-neuf,  venait  d'y  ajouter,  dans 
l'aile  droite,  un  magnifique  escalier  à  VitcUienne,  dont 
il  n'existe  plus  de  trace. 

L'hôtel  Carnavalet  resta  dans  la  famille  d'Argouges 
jnsqu'en  1654.  «  La  dame  d'Argouges  >»  le  vendit  à 
Claude  Boislëve,  l'un  des  intendants  de  Fouquet, 
financier  véreux,  alors  à  l'apogée  de  sa  trop  rapide 
fortune.  Celui-ci  le  fit  remanier  de  fond  en  comble 
par  François  Mansart,  qui  transforma  l'élégant  manoir 
Renaissance  en  un  somptueux  hôtel  Louis  XIV,  en  y 
ajoutant  un  étage  en  aile  et  sur  la  rue,  surmonté  d'un 
comble  mansardé.  Il  obtenait  ainsi,  au  premier,  une 
belle  suite  de  pièces  de  réception,  faisant  le  tour  de 
l'hôtel.  Du  même  coup  disnarurent  l'escalier  à  l'ita- 
lienne de  Ducerceau  et  l'escalier  à  vis  du  xvi*  siècle, 
sur  remplacement  duquel  le  nouvel  architecte  cons- 
truisit son  grand  escalier,  celui  qui  existe  encore 
aujourd'hui,  et  qui  donne  accès  à  la  bibliothèque. 

Mansart,  nous  l'avons  dit,  respecta  autant  que  pos- 
sible l'œuvre  décorative  de  Jean  Goujon  ;  mais  pour 
conserver  la  symétrie,  il  dut  faire  sculpter  entre  les 
fenêtres  du  nouvel  étage,  en  ailes  sur  la  cour,  pour 
faire  suite  aux  saisons  du  bâtiment  principal»  huit 


CAR 


—  1814  — 


CAR 


flgares  de  môme  proportion  :  à  ganclie,  les  quatre  élé- 
ments, à  droite,  quatre  déesses  qui  sont  loin  de  valoir 
les  bas-reliefs  de  la  Renaissance.  Ces  deux  suites 
furent  confiées  à  deux  sculpteurs  dont  un  seul  nous 
est  connu,  VanObstal,  membre  de  l'Académie  royale, 
auteur  des  figures  de  Taile  droite  qui  ne  lui  font  pas 
honneur.  Celles  de  l'aile  gauche,  les  quatre  éléments, 
sont  incomparablement  meilleures.  C'est  aussi  à  Van 
Obstai  que  l'on  attribue  les  figures  décoratives  du 
premier  éta^e  sur  la  rue.  la  Vigilance  et  la  Fermeté, 
et  le  basrelief  allégorique  en  retour,  à  l'angle  de  la 
rue  des  Francs-Bourgeois^  oui  fait  allusion  au  mariage 
du  roi  et  à  la  paix  des  Pyrénées  conclus  en  1660. 

Bfansart  venait  de  terminer  cette  restauration  et 
d'en  signer  la  date,  1661,  sur  le  stylobate  de  la  statue 
de  Minerve  qui  couronne  l'édifice,  quand  Boislève. 
entraîné  dans  la  chute  de  son  puissant  patron  le  surin- 
tendant Fouquet,  eut  à  rendre  ses  comptes  à  la 
Chambre  de  justice.  Son  hôtel,  saisi  par  arrêt  du 
18  Juillet  1662,  fut  vendu,  le  19  novembre  1666,  et 
adjugé  au  roi,  au  prix  de  cent  mille  livres. 

Le  domaine  le  céda,  en  1667,  à  Gaspard  de  Gillier, 
conseiller  au  Parlement,  en  remboursement  du  prix 
d'une  augmentation  de  gages  révoquée  par  édit  de 
1664. 

Gillier,  protestant  converti,  et,  comme  tel,  très 
bien  en  cour,  n'habita  pas  l'hôtel  Carnavalet,  où  il  eut 
successivement  comme  locataires  madame  de  Lille- 
bonne  et  madame  de  Sévigné. 

La  spirituelle  marquise  est  la  grande  illustration, 
l'auréole  de  l'hôtel  Carnavalet,  qu'elle  habita  pendant 
20  ans,  de  1677  à  I696.  Madame  de  Sévigné,  dont  la 
fortune  avait  été  gravement  compromise  par  les  pro- 
digalités do  son  mari,  n'occupait  pas  seule  l'hôtel 
Carnavalet;  toute  la  famille  s'en  partageait  le  loyer 
qui  pourtant  ne  dépassait  pas  cinq  à  six  mille  livres. 
La  marquise  et  sa  fille  occupaient  le  grand  apparte- 
ment du  premier  an  fond  de  la  cour;  le  comte  de  Gri- 
gnan,  dans  ses  courts  voyages  à  Paris,  le  réz-de- 
chaussée,  au-dessous;  le  marquis  de  Sévigné  fils,  le 
premier  sur  la  rue,  et  l'abbé  de  Coulanges,  le  bien  bon, 
l'aile  droite. 

La  galerie  de  l'aile  gauche  et  le  grand  salon  d'angle 
sur  la  rue  était  réservés  aux  réceptions,  aux  visites  de 
cérémonie  ;  c'est  la  seule  pièce  qui  conserve  encore 
aujourd'hui  la  décoration  du  temps.  On  en  a  fait  la 
salle  publique  des  estampes. 

Nous  ne  pouvons  mieux  faire  que  de  citer  quelques 
extraits  des  lettres  de  madame  de  Sévigné,  relatives  à 
son  installation  dans  cette  chère  Carnavalette^  dont 
la  position,  en  vigie  sur  le  chemin  de  la  Place-Royale, 
des  Minimes  et  des  Grands-Jésuites,  convenait  si  bien 
à  ses  instincts  de  curieuse  et  de  chroniqueuse  de  la 
haute  vie  du  grand  siècle,  ainsi  que  le  témoigne  ce 
cri  du  cœur  adressé  à  sa  fille,  le  4  octobre  1677  : 
tt  Ah!  quel  bon  air  nous  avons  dans  cette  Carnava- 
letle,  au  prix  de  la  Courtaude!  »  Et,  que  l'on  ne  s'y 
trompe  pas,  il  ne  s'agit  pas  du  bon  air  respirable  de 
la  culture  Sainte-Catherine,  comparé  à  celui  de  la 
rue  Court-au- Vilain,  que  quittait  la  marquise,  il  s'agit 
du  bel  air^  de  l'air  à  la  mode  :  a  Dieu  merci,  nous 
avons  l'hôtel  Carnavalet,  ajoute-t-elle,  dans  la  lettre 
du  7,  c'est  une  affaire  admirable  ;  nous  aurons  le  bel 
air..,  une  belle  cour,  un  beau  jardin,  un  beau  quar- 
tier ». 

La  lettre  du  12  octobre  est  pariiculièrement  inté- 
ressante en  ce  qu'elle  nous  indique,  par  le  menu, 
les  aménagements  de  la  famille  :  «  Ma  bonne,  nous 
avons  une  contestation,  d'Hacqueville  et  moi  :  il  veut 
que  vous  soyez  avec  moi  dans  le  bel  appartement; 
mol  je  voulais  que  vous  fussiez  en  bas,  au-dessous 
de  moi,  où  il  y  a  toutes  les  mômes  pièces,  afin  d'être 
moins  cotisues  et  moins  près  de  moi.  Voici  ses  raisons 
contre  les  miennes.  Il  dit  que  le  haut  est  bien  plus 
clair  et  plus  propre  que  le  bas;  il  a  raison. Il  y  a  une 
grande  salle  commune  que  je  meublerai,  puis  un 
passage,  puis  une  grande  chambre  :  c'est  la  vôtre.  De 
cette  chambre,  on  passe  dans  celle  de  madame  de 
Llllebonne  :  c'est  la  mienne;  et  de  cette  grande 
chambre  on  va  dans  une  petite  que  vous  ne  con- 
naissez pas,  et  qui  est  votre  panier ,  votre  grippe^ 
minaudf  que  je  vous  meublerai  et  où  vous  coucherez 
si  vous  voulez.  Cette  petite  chambre  est  jolie.  Il  dit 
que  les  personnages  qui  nous  viendront  voir  toutes 
deux  ne  vous  feront  pas  grand  mal  de  passer  dans 
votre  grande  chambre;  celles  que  je  voudrais  vous  ôter, 


pour  écumer  votre  pot,  viendront  par  un  degré  dé- 
gagé assez  raisonnable  tout  droit  dans  ma  petite 
chambre.  Ce  sera  aussi  le  degré  dv  matin  pour  mes 
gens,  pour  mes  ouvriers,  pour  mes  créanciers.  Il  y  a, 
près  à*i  ce  deg^é,  deux  chambres  pour  mes  filles;  vous 
avez  aussi  de  quoi  mettre  les  vôtres,  et  Monigobert  en 
haut,  avec  mesdemoiselles  de  Grignan,  où  il  y  a  présen- 
tement deux  princesses,  les  deux  filles  de  madame  de 
Llllebonne)  :  cela  s'appelle  la  chambre  des  princesses. 
M.  de  Grignan  sera  au  bout  de  la  salle  (le  grand 
salon),  mon  fils  en  bas,  le  bien  bon  sur  une  petite  aile 
fort  jolie...  »  Ces  dispositions  furent  quelque  peu 
modifiées  :  M.  de  Grignan  prit,  comme  nous  l'avons 
dit,  l'appartement  du  rez-de-chaussée,  et  le  marquis 
de  Sévigné  le  premier  sur  la  rue  «  au  bout  de  la 
salle  p. 

Le  20  octobre,  on  est  en  plein  déménagement,  et 
la  marquise  écrit  à  sa  fille  :  «  Je  reçois  mille  visites 
en  l'air  des  Rochefoucaud,  des  Tarente;  c'est  quel- 
quefois dans  la  cour  de  Carnavalet,  sur  le  timon  de 
mon  carrosse.  Je  suis  dans  le  chaos  :  vous  trouverez  le 
démêlement  du  monde  et  des  éléments  n. 

Malgré  cet  enthousiasme  de  la  première  heure,  on 
faillit  résilier  le  bail  après  la  première  période  de 
trois  ans.  Madame  de  Sévigné  n'était  pas  anUqoaire, 
il  restait  dans  l'hôtel  Carnavalet  des  aménagements 
Renaisssance  qui  n'étalent  point  de  son  goût  et  aux- 
quels elle  eût  préféré  les  parquets  et  les  petites  che- 
minées à  la  moderne.  Elle  s'en  plaignait  déjà  aa 
début  :  «  Comme  on  ne  peut  pas  tout  avoir,  il  faut  se 
passer  des  parquets  et  des  petites  cheminées  à  la 
mode.  »  Plus  tard,  elle  exige  que  les  vieilles  chemi- 
nées Henri  II  disparaissent.  «  II  est  est  surveau  lont 
à  propos  un  fort  honnête  hoihme  à  qui  nous  avons 
affaire  en  l'absence  de  M.  d'Agourry  (représentant  do 
propriétaire)  ;  il  demande  seulement  le  temps  d'écrire 
pour  avoir  la  permission  d'attaquer  la  vieille  anti- 
quaille de  cheminée,  dont  il  ne  doute  point  ;  et  cela 
étant,  il  n'y  aura  rien  de  mieux  ni  de  plus  tôt  fait,  b 
Madame  de  Sévigné  a  pris  possession  de  l'hôtel  Car- 
navalet, elle  y  trônera  vingt  ans  au  milieu  de  cette 
société  d'élite  dont  ses  lettres  réfléchissent  Tesprit 
raffiné  et  nous  ont  transmis  les  noms  éblouissants  : 
Retz,  La  Rochefoucauld,  Séguier,  Condé,  Turenne, 
Bourdaloue,  Mascaron  et  tant  d'autres.  Elle  ne  le 
quitta  que  pour  aller  mourir  au  château  de  Grignan, 
entre  les  bras  de  sa  fille  adorée,  le  17  avril  1696. 

Après  l'illustre  marquise,  le  reste  ne  vaut  plus  que 
l'honneur  d'être  nommé.  Le  10  août  1694,  avant  l'expi- 
ration du  bail  Sévigné,  Brunet  de  Rancy,  receveur 
des  financeSi  achetait  de  Gaspard  de  Gillier  l'hôtel 
Carnavalet  qu'il  vint  habiter  dès  qu'il  put  en  disposer, 
après  l'avoir  fort  embelli  au  dedans,  mais  sans  rien 
changer  à  l'extérieur.  En  1717,  il  le  donna  à  sa  fille, 
mariée  depuis  1703  à  M.  de  la  Briffe,  intendant  de 
Bourgogne.  Madame  de  la  Briffe  y  mourut  le  13  mai 
1747,  le  laissant  à  son  fils  aîné,  intendant  de  la  gé- 
néralité de  Caen.  L'hôtel  Carnavalet  resta  dans  cette 
famille  jusqu'en  1777,  loué  par  ses  propriétaires,  qui 
ne  l'habitèrent  pas,  non  plus  que  M.  Bellanger.  con- 
seiller d'État,  et  son  neveu  Dopré  de  Saint- Maur,  oon- 
seillor  au  Parlement,  derniers  possesseurs  avant  la 
Révolution. 

A  cette  époque  commence  la  décadence,  l'invasion 
administrative.  L'hôtel  Carnavalet  abrite  successive- 
ment la  direction  delà  librairie,  puis  l'École  des  ponts 
et  chaussées  qui  n'en  sortit  qu'en  1830.  Deux  pen- 
sions s'y  succédèrent  ensuite  sous  la  direction  de 
M.  Liévyns  et  de  M.  Verdot.  C'est  à  ce  dernier  que 
la  ville  de  Paris  acheta  l'hôtel  Carnavalet  en  1866  pour 
y  créer  le  musée  historique  dont  nous  allons  parler. 
Sous  le  règne  du  baron  Haussmann,  la  première 
idée  avait  été  de  fonder  k  Thôtel  Carnavalet,  un  musée 
des  mœurs  et  usages  de  nos  ancêtres.  Idée  va^ue  et 
mal  définie  qui  entraîna  d'abord  l'administration  dans 
d'énormes  dépenses  à  côté;  car,  par  suite  de  la  vie 
intense  de  cette  ville,  dont  le  présent  dévore  sans 
cesse  le  passée  on  se  vit  obligé,  à  défaut  d'objets  pcrri- 
sienSf  de  recueillir  tonte  espèce  de  bibelots  d'origine 
provinciale  et  même  étrangère.  Le  musée  Carnavalet 
menaçait  de  devenir  le  réceptable  de  toutes  les  épaves 
du  bric-à-brac  européen.  "Tout  cela  s'empilait  dans 
un  vieil  hôtel  du  quai  de  Béthunc,  sous  la  direction 
de  MM.  Charles  Read  et  Gailharbaud,  tandis  qu'un 
jeune  architecte,  M.  Parmentier,  travaillait  à  rendre 
à  l'hôtel  Carnavalet  sa  physionomie  primitive  et  à 


CAR 


~  1815  — 


CAR 


oflacer  les  traces  des  dortoirs  et  des  classes  qui  avaient 
succédé  aux  briUaots  appartements  des  grands  sei- 
gneurs d'autrerois.  Les  désastres  de  1870,  l'incendie 
de  THôtel  de  ville  en  1871,  vinrent  suspendre  les 
travaux  et  arrêter  les  collections.  Le  règlement  fut 
difficile,  si  difflcile  même,  que  le  nouveau  conseil 
municipal  décida  de  mettre  un  terme  aux  errements 
primitifs,  en  liquidant  le  passé  et  et  en  ramenant  le 
musée  projeté  à  sa  vraie  destination,  la  conservation 
des  souvenirs  du  vieux  Paris  et  des  documents  relatifs 
à  rbistoire  de  Paris  et  de  la  Révolution  française. 

L'ancienne  bibliothèque  de  la  ville  avait  été  anéantie 
dans  l'incendie;  on  résolut  de  la  reconstituer  dans  le 
même  sens  spécial  et  de  la  réunir  au  musée  qui  en 
formait  le  complément  naturel.  M.  Jules  Cousin^  an- 
cien bibliothécaire  de  l'Arsenal,  fut  chargé  de  cette 
réorganisation  définitivement  ordonnée  par  un  arrêté 
de  M.  Hérold.  préfet  de  la  Seine,  du  29  février  1830. 

Le  conseil  municipal  avait  insisté  pour  qu'un  musée 
révolutionnaire,  consacré  aux  souvenirs  du  grand 
mouvement  de  1789  fut  annexé  au  musée  parisien. 
Il  se  trouva  précisément  un  généreux  donateur,  M.  A. 
de  Liesville,  qui  offrit  à  la  ville  sa  précieuse  collec- 
tion des  documents  relatifs  à  l*histoire  de  la  Révolu- 
tion française  qu'il  recueillait  depuis  30  ans.  Cette 
offre  fut  acceptée,  et  M.  de  Liesville  devint  conserva- 
teur adjoint  du  nouveau  musée.  Gr&ce  aux  efforts 
combinés  des  deux  conservateurs  et  aux  libéralités 
du  conseil  municipal  qui  a  largement  doté  le  nouvel 
établissement,  cette  institution  si  récente  est  déjà 
des  plus  florissantes,  et  rond  journellement  de  grands 
services  aux  travailleurs  et  au  public. 

La  bibliothèque  ne  compte  pas  moins  de  soixante- 
dix  mille  volumes  soigneusement  catalogués  et  ré- 
partis en  douze  grandes  divisions  :  1.  Bibliographie 
—  2.  Histoire  physique,  géologie  et  hydrographie  pari- 
siennes. —  3.  Histoires  et  descriptions  do  Paris.  — 
4.  Révolution  française.  —  5.  Topographie.  —  6.  His- 
toire religieuse,  églises  et  communautés.  —  7.  Histoire 
artistique  et  littéraire.  —  8.  Histoire  des  mœurs  et 
ubleaux  de  Paris.  —  9.  Fêtes  et  divertissements, 
comprenant  le  théâtre.  —  10.  Histoire  civile  et  admi- 
nistrative. —  U.  —  Police  et  histoire  judiciaire.  — 
12.  Environs  de  Paris  dans  le  ressort  de  Tancienne 
prévôté. 

Cinquante  mille  estampes,  un  millier  de  plans  an- 
ciens, vingt  mille  monnaies  et  médailles  complètent 
les  collections  de  la  bibliothèque  proprement  dite. 

Le  musée  comprend  d'abord  les  collections  lapi- 
daires et  céramiques  provenant  des  fouilles  et  des 
démolitions  parisiennes,  qui  occupent  tout  le  rez-de- 
chaussée  de  l'hôtel.  On  y  remarque  les  débris  d'un 
magnifique  monument  triomphal  gallo-romain,  dé- 
couverts sur  l'emplacement  du  nouvel  Hôtel-Dieu; 
une  belle  bérie  de  sarcophages,  provenant  des  cime- 
tières mérovingiens  de  Saint-Marcel,  do  Sainl-Ger- 
main-des-Prés  etc.  ;  de  précieux  vestiges  du  vieux 
Louvre,  de  la  basilique  chrétienne  qui  a  précédé 
Notre-Dame,  et  de  nombreux  édifices  parisiens  du 
moyen  âge  et  de  la  Renaissance;  une  série  de  vases 
funéraires  et  objets  diver:*,  provenant  d'un  cimetière 
gallo-romain,  découvert  en  1878,  rue  Nicole;  une 
statuette  équestre  de  Charlemagne,  de  l'époque  car- 
lovingienne;  une  grande  quantité  d'inscriptions  funé- 
raires,  provenant  des  anciennes' églises  de  Paris,  etc. 

Dans  l'ancien  hôtel  du  syndicat  des  drapiers,  rap- 
porté de  la  rue  des  déchargeurs,  et  érigé  au  fond  du 
jardin  encore  inachevé,  est  exposée  une  collection 
d'anciennes  vues  de  Paris  :  incendie  de  la  Chambre 
des  comptes,  14737.  —  Inauguration  de  l'Ecole  de 
chirurgie,  1774.  par  Gab.  de  Saint-Aubin.  —  Ruines 
de  l'Hôtel-Dieu  et  voûte  du  quai  de  (iêvres,  par  Hu- 
bert-Robert. —  Vues  de  l'Hôtel  de  ville,  de  l'Arche- 
vêché,  du  pont  Notre-Dame,  des  Tuileries,  du  Pont- 
Neuf,  de  Chaillot^  de  TIle-Saint^Louis,  de  Tincendie  d*^ 
l'Hôtel-Dieu,  par  Roguenet,  1750  à  1772.  —  Vues  gé- 
nérales de  Paris  en  avant  de  la  tour  de  Nesie,  vers 
1660,  etc.,  etc. 

Au  rez-de-chaussée  de  ce  même  bâtiment,  une  salle 
contient  un  curieux  modèle  en  relief  des  galeries  du 
Palais-Royal,  avec  toutes  boutiques  garnies  de  leurs 
enseignes  et  de  leurs  marchandises  ;  une  belle  collec- 
tion parisienne  des  médailllons  de  David  d'Angers  et 
diverses  autres  vues  du  vieux  Paris,  parmi  lesquelles 
un  grand  profil  du  populaire  boulevard  du  Temple, 
peint  en  1860,  par  MarUal  Potémont;  un  curieux  inté- 


rieur du  cabaret  de  Ramponneau  au  xviiie  siècle,  et 
une  promenade  de  Longchamp  en  1801,  dessin  de 
Carie  Vernet.  Dans  les  escaliers  et  vestibules  ont  été 
disposées  quantité  de  vieilles  eneignesetde  plaques 
de  cheminées,  provenant  de  démolitions, 

La  partie  la  plus  complète  du  musée  est  celle  qui 
se  rapporte  à  l'époque  révolutionnaire  de  1789  à  1804. 
Elle  occupe  une  grande  salle  et  une  longue  galerie 
coupéo  par  un  charmant  salon  Louis  XV,  rapporté  du 
l'hôtel  des  Stuart,  rue  Saint-Hyacinthe.  Les  objets  de 
toute  nature,  marques  au  cachet  du  plus  bouillant 
patriotisme,  y  sont  accumulés  et  ressucitent  pour 
aiusi  dire  la  vie  journalière  de  ces  temps  agités  et 
enthousiastes.  Voici  les  Bastilles  du  capitaine  Palloy, 
les  papiers  de  tentures  aux  rubans  tricolores,  les 
tables  des  Droits  de  Thomme  et  de  la  Constitution, 
les  bonnets  de  liberté,  les  écharpes  municipales,  les 
bagues  en  l'honneur  des  martyrs  Marat  et  Le  Pelle- 
tier, un  petit  reliquaire,  contenant  des  poils  de  la 
veste  de  Chalier,  des  boites,  des  médaillons  à  por- 
traits et  à  emblèmes  républicains,  des  armes  d'hon- 
neur, des  piques,  des  sabres  parmi  lesqueU  on  re- 
marque celui  des  vainqueurs  de  la  Bastille.  Voici  des 
lettres  de  cachet,  des  cartes  de  club,  des  cartes  à 
jouer  purgées  des  figures  monarchiques^  remplacées 
par  des  génies,  des  libertés  et  des  égalités,  des  fers 
de  reliure,  avec  le  niveau  et  le  bonnet,  des  montres 
et  pendules  décimales*  des  cuillères  patriotioues  por- 
tant l'inscription  :  «  Vivre  libre  ou  mourir!  »  Voici 
des  calendriers,  des  tableaux,  de  belles  armoires  de 
mariage  avec  la  prise  de  la  Bastille,  le  serment  ci- 
vique et  les  emblèmes  des  trois  ordres,  sculptés  sur 
les  panneaux  à  la  place  des  colombes  et  des  guir- 
landes de  fleurs  traditionnelles.  Dans  la  galerie,  une 
incomparable  collection  de  céramique  et  de  numis- 
matique. Toutes  les  médailles  et  monnaies  frappées 
de  1709  à  1803;  les  insignes  des  magistrats  et  fonc- 
tionnaires publics  de  1792  et  la  suite  complète  des 
faïences  patriotiques,  depuis  les  premières  assiettes 
décorées  de  la  bêche,  de  l'épée  et  de  la  crosse  soute- 
nant la  couronne  avec  l'inscription  :  W  la  ration, 
jusqu'à  l'assiette  de  la  Carmagnole  : 

Madame  Veto  avait  promis 
De  faire  égorger  tout  Paris. 

Deux  vitrines  contiennent  les  pièces  de  Sèvres, 
exécutées  par  les  artistes  de  la  ci-devant  manufacture 
royale  qui,  aux  fleurs  de  Us,  substituaient  alors  le 
bonnet  rouge,  le  triangle  égalitaire,  et  les  cocardes 
tricolores.  Une  ta^sse  en  porcelaiiie  de  Berlin  repré- 
sente l'exécution  du  roi  et  de  la  reine  ;  en  face  un 
petit  bénitier  apparaît,  décoré  de  l'arbre  et  du  bonnet 
de  liberté.  Il  ne  nous  est  pas  possible  de  détailler 
les  innombrables  pièces  do  haute  curiosité  que  ren- 
ferme cette  collection.  N'oublions  pus,  pourtant,  les 
éventails  de  circonstance,  fêtes  publiques,  mariage 
républicain,  sujets  satiriques,  etc.,  et  une  splendide 
garniture  de  cheminée  :  pendule  décimale,  à  trois 
cadrans  en  émail  et  bronze  doré,  flambeaux  à  médail- 
lons de  Louis  XVI,  Bailly  et  Lafayette^  et  va»es  de 
Sèvres  pâte  tendre,  exécutés  en  mémoire  de  la  fête  de 
l'Être  suprême,  décorés  des  figures  de  la  Liberté  et 
de  la  Raison  qui  portent,  en  manière  de  collier,  les 
dix  chifi'res  du  système  décimal. 

Un  assez  grand  nombre  de  portraits  des  person- 
nages de  la  révolution,  provenant  en  majeure  partie 
de  la  collection  Saint- Albin,  semblent  revivre  au  mi- 
lieu de  ces  accessoires  du  drame  dont  ils  furent  les 
héros.  Il  est  à  regretter  que  le  défaut  de  place  em- 
pêche d'exposer  quelques-unes  des  belles  estampes 
qui  en  reproduisent  les  principaux  événements. 

Car  le  musée  Carnavalet  ne  peut  montrer  qu'une 
partie  de  ses  richesses.  Les  constructions  prévues 
dès  l'origine  restent  suspendues  depuis  plusieurs 
années,  sans  qu'on  puisse  s'en  expliquer  la  cause,  les 
plans  sont  prêts,  la  place  est  libre,  l'argent  ne 
manque  pas,  et  le  zèle  des  conservateurs  mdriterait 
d'être  mieux  secondé  par  les  architectes. 

M.  de  Liesville  est  mort  au  commencement  de 
cette  année  (1885),  au  moment  où  il  achevait  d'ins- 
taller ses  collections  révolutionnaires  à  l'hôtel  Carna- 
valet. Quelques  grands  donateurs  ont  contribué  avec 
lui  et  M.  Jules  Cousin  au  rapide  développement  de  la 
bibliothèque  et  du  musée  historique  de  la  ville.  Ce 
sont  MM.  Amédée  Berger,  président  à  la  Cour  des 
comptes,  fils  de  l'ancien  préfet  de  U  Seine»  le  doc- 


CHA 


—  1816 


GHR 


leur  Besançon,  Charles  Brouty,  architecte,  Damoalin 
et  Cosse  Marchai,  libraires. 

Espérons  que  dans  la  riche  et  nombreuse  famille 
des  collectionneurs  sur  Paris,  quelques  autres  se  son* 
viendront  qu^ils  ont  en  ce  musée  ou  héritier  naturel, 
un  dépôt  public,  où  ils  peuvent  perpétuer,  par  une 
libéralité  intelligenie,  au  profit  de  leurs  coreligion- 
naires, et  ad  majorem  patrije  gloriam  Thonneur  de 
leur  nom  et  de  leurs  chères  collections.    J.  C.  —  in. 

CARRICK,  espèce  de  casaque,  munie  de  plusieurs 
collets  tombants  superposés  pour  garantir  les  épaules 
de  la  pluie.  Les  carricks  forent  à  la  mode  dans  les 
premières  années  de  notre  siècle. 

CARTOUCHE,  mot  employé  autrefois  dans  l'armée 
comme  synonyme  de  congé.  Sur  papier  blanc,  elle 
était  délivrée  aux  libérés  des  travaux  publics;  sur 
papier  jaune,  aux  soldats  dégradés,  passés  par  les 
verges,  ou  renvoyés  du  corps  comme  indignes. 

CAUTIONNEMENT  DES  JOURNAUX.  La  chute  du 
second  Empire  amena  des^modiflcations  dans  la  presse. 

Ear  décret  du  10  octobre  I87o,  le  gouvernement  de  la 
éfense  nationale  supprima  le  cautionnement  des  jour- 
naux et  écrits  périodiques.  Une  loi  rendue  par  TAssem- 
biée  nationale,  le  11  juillet  1871,  établit  un  nouveau 
cautionnement  :  dans  le  département  de  la  Seine, 
4,0(J0  fr.  étaient  versés  par  le  journal  ou  écrit  pério- 
dique paraissant  plus  de  trois  fois  par  semaine,  et 
18,000  fr.  si  la  publication  avait  lieu  trois  fois  et  moins  ; 
dans  les  autres  départements,  si  la  ville  comptait 
50,000  &mes  et  plus,  le  journal  qui  paraissait  plus  de 
trois  fois  versait  12,000  fr.,  et  tout  autre  6,000  fr., 
la  somme  étant  réduite  à  moitié  dans  les  villes  moins 
importantes.  Quand  un  journal  avait  été  définitive- 
ment frappé  d'une  condamnation  à  l'amende  et  k  des 
réparations  civiles  affectant  son  cautionnement,  un 
délai  de  quinze  jours  lui  était  accordé  pour  reconsti- 
tuer ce  cautionnement:  sinon,  il  ne  lui  était  plus  per- 
mis de  le  publier;  la  loi  du  29  juillet  1881  a  supprimé 
le  cautionnement.  (V.  Loi  sur  la  Presse.) 

CÉSAR  (Juuos],  roman  du  xiii<»  siècle,  qui  se  ratta- 
che au  cycle  de  l'antiquité  grecque  et  romaine.  L'ac- 
tion, qui  suit  de  très  près  celle  de  la  Pharsale  de  Lu- 
cain,  est  conduite  jusqu'à  l'entrée  triomphale  de  César 
dans  Rome.  Ce  roman  n'est  pas  écrit  en  vers  de  hui- 
syllabes,  comme  les  autres  imitations  des  épopées  an- 
tiques, mais  en  alexandrins  formant  des  couplets  mo- 
norimes, comme  ceux  des  chansons  de  geste.  Le  ma- 
nuscrit de  Julius  César,  qui  dato  de  1280,  porte  le 
nom  d*un  Jacques  de  Forez,  qui,  dit-il,  n'a  mis  que 
quatre  mois  à  le  faire.  (V.  A.  Joly,  Revue  contempo- 
raine, 15  mai  1870.) 

CHAINE.  Terme  employé  dans  la  fabrication  des 
tapisseries,  pour  désigner  la  rangée  de  fils  blancs  sur 
laquelle  le  tapissier  lissera  les  fils  de  couleur.  La 
chaîne  est  formée  de  coton  (autrefois  de  laine,  parfois 
aussi  de  soie)  ;  quand  la  chaîne  est  horizontale,  tous 
le  fils  de  la  trame  se  trouvent  dans  la  ligne  horizon- 
tale, et  ia  tapisserie  est  dite  de  basse  lice,  ou  lisse. 
Si  au  contraire  la  chaîne  est  verticale,  les  fils  de  lajtrame 
forment  un  plan  vertical,  et  la  tapisserie  est  dite  de 
haute  lisse,  (V.  Lisse  Supplément.) 

CHALCOTYPIE,  procédé  de  gravure  en  relief  sur 
cuivre,  inventé,  en  1851,  par  Reims,  deBerlin.On  exé- 
cute les  dessin  par  les  moyens  ordinaires  de  las  gravure 
à  l'eau-forte,  et  onimprimeà  la  presse  typographique. 

CHAMBRE  CIjVIRE,  en  latin  Caméra  tucida,  appa- 
reil d'obtique  à  l'aide  duquel  on  obtient,  sur  un  écran 
ou  sur  du  papier  blanc,  l'image  des  objets  de  la  nature 
dans  tout  i  éclat  de  leurs  couleurs  et  suivant  les  lois  de 
la  perspective.  On  peut  ensuite  marquer  au  crayon  ou 
à  la  plume  les  traits  et  les  contours  des  images  proje- 
tées, et  même  appliquer  les  couleurs  exactes  aux  en- 
droits où  elles  sont  reproduites.  La  chambre  claire 
reproduit  également  les  gravures  et  les  tableaux.  Ima- 
ginée au  xvii«  siècle  par  l'Anglais  Robert  Hook,  per- 
fectionnée par  Woliaston,  en  1803,  et  par  Amici,  vers 
1814,  elle  fut  introduite  à  Paris,  en  1815,  par  Charles 
et  Vincent  Chevalier,  ingénieurs-opticiens,  qui  l'ont 
encore  améliorée.  —  La  chambre  obscure  ou  chambre 
noire,  qui  sert  aux  mêmes  usages,  mais  dont  la  cons- 
truction est  différente,  a  été  inventée  par  Léonard  de 
Vinci  ;  il  en  est  question  dans  les  notes  de  la  traduc- 
tion de  Vitruve  par  Césariano  (Côme,  1521).  Léo 
Alberti  paraît  être  un  des  premiers  qui  s'en  servirent 
pour  en  obtenir  des  dessins  réduits  de  tableaux  ou  de 
paysages.  Ch.  Chevalier  a  donné  une  £;randc  perfection 


à  l'appareil,  qui  est  devenu  très  important  depuis  l'in- 
vention de  la  photographie. 

CHAPEAUX.  Jusqu'au  oiiliea  du  xviii*  siècle,  on  ne 
fit  guère  que  des  chapeaux  de  feutre.  L'industrie  des 
chapeaux  de  soie  naquit  alors  à  Florence  ;  elle  fut  in- 
troauite  peu  de  temps  après  en  France.  Le  plus  ancien 
chapeau  de  castor  dont  on  fasse  mention  fut  porté  par 
Charles  VII  en  1438.  Les  chapeaux  pliants  ou  mécani- 
ques paraissent  avoir  été  inventés  en  Angleterre,  eo 
1824,  par  Robert  Lloyd  et  James  Rowbashaw;  le  cha- 
pelier Gibus  les  importa  à  Paris  en  1834,  et,  dix  ans 
après,  Duchène  y  adapta  un  ressort  qui  permit  de  les 
ouvrir  et  de  les  fermer  par  une  très  légère  pression.  Les 
chapeavx  de  paille  les  plus  beaux  se  fabriquent  en 
Toscane  avec  la  paille  d'une  variété  de  froment  qne 
Ton  coupe  en  vert  ;  ceux  de  paille  de  riz  viennent  sur- 
tout des  environs  de  modène.  Les  chf/peaux  dits  de 
Panama,  sans  doute  parce  que  les  premiers  furent 
apportés  de  ce  port  en  Europe,  se  font  au  Pérou,  dans 
la  NouTelle- Grenade  et  dans  l'Equateur,  avec  les 
feuilles  du  bombanax,  plante-arbuste  de  U  famille  des 
palmiers. 

CHAPINS,  chaussure  en  usage  chez  les  dames  espa- 
gnoles au  xvii»  siècle.  C'étaient  des  espèces  de  sanda- 
les où  l'on  passait  le  soulier  et  qui  grandissaient  po- 
digieusement  ;  mais  on  ne  pouvait  marclier  avec  qu'en 
s'appuyant  sur  deux  personnes. 

CHARGEMENT,  en  terme  de  marine,  tout  ce  qui 
est  chargé  sur  un  b&timent.  Sur  un  vaisseau  de  guerre, 
ce  sont  les  armes,  les  munitions  et  les  vivres  ;  sur  un 
navire  de  commerce,  ce  sont  les  marchandises.  On  ne 
peut  charger  un  navire  dans  un  port  que  le  jour  et 
avec  un  permis  délivré  par  les  agents  de  la  douane, 
sous  peine  de  confiscation  des  marchandises  et  de 
100  fr.  d'amende. 

CHARLES  LE  CHAUVE,  titre  d'une  chanson  de  gestes 
du  XIV*  siècle.  Celte  œuvre,  de  peu  de  valeur,  n'offre 
aucun  intérêt  historique  ;  il  ne  s'agit  que  d'aventures 
avec  les  Sarrasins.  Le  manuscrit  est  conservé  à  la 
Bibliothèque  nationale.  {V,  Histoire  littéraire  de  la 
France,  t.  XXVI.) 

CHAUFFERETTES  ou  CHAUFFE- PIEDS.  On  a 
trouvé,  dans  des  tombeaux  mérovingiens,  des  chauffe- 
rettes en  terre  cuite,  semblables  à  celles  dont  se  ser- 
vent encore  aujourd'hui  les  femmes  pauvres.  Pendant 
plusieurs  siècles,  on  fit  très  peu  de  chose  pour  les 
améliorer.  A  la  fin,  les  élégantes  se  servirent,  non 
d'un  vase  de  terre,  mais  d'une  boite  de  bois,  où  était 
enfermé  un  récipient  rempli  de  braise  ou  de  cendres 
chaudes.  En  1814,  une  dame  Augustine  Chambon  de 
Mentaux  imagina  de  remplacer  labraise  par  une  petite 
lampe  à  huile,  au-dessus  de  laquelle  était  un  bassin 
de  tôle  rempli  de  sable  :  les  chauffe-pieds  de  ce  genre 
furent  appelés  auguttines.  Puis  on  substitua  à  la 
lampe  à  huile  une  lampe  à  esprit-de-vio.  Enfin  on  a 
supprimé  tout  combustible)  et  fait  des  chaufferettes 
avec  de  l'eau  chaude. 

CHEMINS  DE  FER.  Les  voies  ferrées  que  l'on  con- 
struit pour  mettre  en  rapport  les  différents  quartiers 
d'une  grande  ville  ont  reçu  d'abord  le  nom  de  chemins 
américains,  parce  que  ce  sont  les  ingénieurs  des  Éuts- 
Unis  qui  les  ont  imaginés.  Elles  se  composent  de  rails 
en  forme  d'ornière,  et  les  voitures  y  sont  traînées  par 
des  chevaux.  Le  plus  ancien  ciiemin  de  ce  genre  fut 
construit  à  Nevr-York  en  1845.  Pendant  longtemps, 
I^ris  n'en  posséda  qu'un  qui  commence  à  la  place  de 
la  Concorde  ;  dans  ces  dernières  années,  ce  système 
s'est  considérablement  développé  à  rintérieur  de  Paris 
et  dans  toutes  les  grandes  villes  :  les  voitures  prennent 
le  nom  de  tramways  :  les  tramways,  plus  rapides,  plus 
vastes  et  plus  confortables  que  les  omnibus,  tendent  à 
les  remplacer.  —  En  Angleterre,  il  existe,  pour  le 
service  de  l'agriculture,  des  chemins  de  fer  portatifs. 
Ils  sont  formés  de  longrines  garnies  de  bandes  de  fer 
réunies  par  des  traverses,  et  constituant  des  cadres 
que  deux  hommes  peuvent  déplacer  et  installer;  ces 
cadres  se  réunissent  les  uns  aux  autres  d'une  manière 
très  simple,  et  l'on  établit  ainsi  une  Toie  où  de  petits 
wagons  attelés  d'un  cheval  transportent  des  engrais 
et  autres  choses  pesantes. 

CHROMOTYPIE  ou  TYPOCHROMIB,  art  d'imprimer 
les  dessins  ou  plusieurs  couleurs  par  les  procédéis  ordi- 
naires de  la  typographie.  On  trouve  dans  le  psautier 
exécuté  en  1427  par  Pierre  Schœffer,  un  B  rouge  et 
bleu,  qui  a  été  produit  d'un  seul  coup  de  presse,  au 
moyen  de  bois  gravés  h  part  et  rentrant  Tan  dans 


GLU 


—  1817  — 


GLU 


-raotre  «près  avoir  été  encrés  séparément.  Le  procédé, 
retrouvé  vers  1621  par  rAnglais  Congreve,  et  introduit 
«n  France  par  Firmin  Didot  et  Gauchard,  est  une  im- 
pression ptLT  juxtaposition.  Vers  le  roôme  temps,  un 
•autre  Anglais,  William  Salvage,  employa  le  système 
par  supet-positioUt  qui  donne  de  meilleurs  résultats; 
son  procédé  a  été  perfectionné  par  Haas,  à  Prague, 
et  par  Silbermann,  à  Strasbourg.  En  combinant  un 
ipetit  nombre  de  planches  imprimées  l'une  après  Tautre 
on  obtient  toutes  les  nuances  de  la  peinture. 

GIBIENT.  lÀ  ciment  de  Portland,  inventé,  en  182B, 
par  un  maçon  anglais  de  Leeds,  et  ainsi  nommé  parce 
que  sa  couleur  est  à  peu  près  celle  de  la  pierre  de 
Portland  employée  dans  les  constructions  de  Londres, 
s'obtient  soit  par  un  mélange  artificiel  d*argile  avec  de 
la  craie  ou  des  calcaires  marneux,  soit  à  Taide  de  mar- 
nés  naturelles  renfermant  environ  20  pour  100  d*argile. 
—  Le  ciment  Scott,  qui  porte  le  nom  d'un  capiuine 
anglais  du  génie,  s*obtient  en  faisant  arriver  de  Tacide 
salfurique  sur  la  chaux  vive  chauffée.  —  M.  Kuhl- 
mann,  de  Lille,  prépare  un  ciment  en  mélangeant  à 
froid  le  marc  de  la  fabrication  de  la  soude  artificielle 
avec  le  résidu  laissé  par  la  pyrite  de  fer  après  qu'elle 
a  été  grillée  et  lessivée.  —  Il  existe  plusieurs  ciments  \ 
métaUiques»  Celui  des  Ghenot  est  préparé  avec  des 
minerais  ou  des  battitures  de  fer;  on  en  forme  des  en- 
duits et  dos  moulages  très  durables  et  très  économi- 
ques. Celui  de  Sorel  s'obtient  en  délayant  de  Toxyde 
de  zinc  dans  un  chlorure  liquide  de  même  base;  il 
sert  aux  mômes  usages  que  le  précédent,  et  peut  en- 
core être  employé  à  la  place  des  peintures  à  Thuile 
pour  la  conservation  des  boiseries. 

CLUNY  {Musée  de),  appelé  aussi  musée  des  Thermes 
(voir  Dictionnaire  a'histoire  et  de  géographie)  et  de 
4'hôtel  de  Cluny  (V.  Dictionnaire) ^  a  été  créé  à  Paris 
par  une  loi  du  24  Juillet  1848,  en  vertu  de  laquelle 
l*Etat  se  rendait  propriétaire  de  la  collection  du 
Sommerard  et  de  Vhôtel  de  Cluny.  En  1833  M.  du 
Sommerard,  amateur  infatigable  des  monuments  des 
aiècles  passés,  avait  fait  choix  de  ce  vieux  manoir 
pour  servir  d*abri  aux  précieuses  collections  d*objets 
d*art  du  moyen  âge  et  la  Renaissance  réunis  par  ses 
-soins  penduit  quarante  années  de  recherches  et  d'é- 
tudes. A  la  mort  du  célèbre  antiquaire,  survenue 
en  août  1842,  la  commission  des  monuments  histori- 
ques émit  le  vœu  que  la  collection  du  Sommerard  fût 
achetée  par  la  ville.  M.  Dnchâtel,  ministre  de  Tinté- 
rieur,  présenta  le  projet  de  loi  dont  l'exposé  des  mo- 
tifs fut  lu  dans  la  séance  du  26  mai  1843.  La  loi  fut 
votée  le  24  juillet  suivant  à  une  majorité  considérable 
«ur  le  rapport  de  l'illustre  Arago,  député  des  Pyrénées- 
Orientales.  Ce  rapport,  présenté  dans  la  séance  du 
Tl  mai,  démontrait  avec  une  grande  élévation  d'idées 
les  avantages  que  devait  présenter  la  fondation  de  ce 
nouveau  musée,  tant  au  point  de  vue  de  l'étude  des 
monuments  de  notre  art  national,  qu'au  point  de  vue 
plus  prati(^ue  encore  de  Téducation  de  nos  artistes  et 
de  nos  artisans,  éducation  dont  c  elle  devait  être  le 
magnifique  complément  ».  La  somme  que  proposait 
le  gouvernement  français  pour  l'achat  de  cette  pré- 
cieuse collection  était  de  beaucoup  inférieure  aux 
offres  nombreuses  venues  de  Tétranger.  Poussés 
par  un  sentiment  généreux,  les  héritiers  de  M.  du 
Sommerard  préférèrent  à  la  certitude  d'un  prix  plus 
élevé  la  certitude  de  conservera  la  France  l'œuvre  ad- 
mirable de  leur  père.  Dès  la  première  ouverture  qui 
lui  fut  faite  par  le  ministre  de  Tintérieur,  M.  E.  du 
Sommerard  fils,  mort  récemment,  qui  en  présence  des 
offres  pressantes  de  l'Angleterre  avait  dû  se  rendre  à 
Londres,  rompit  toute  négociation  avec  l'étranger  pour 
rentrer  immédiatement  à  Paris.  On  traita  pour  la 
somme  modique  de  *200,000  francs.  Madame  veuve  du 
-Sommerard  donna  son  complet  consentement  sur  l'en- 
gagement formel  pris  iiérativement  par  le  ministre 
que  la  collection  du  Sommerard  serait  conservée  en 
bloc  et  non  disséminée  dans  les  autres  collections 
publiques,  et  que  la  direction  en  serait  confiée,  sous 
l'autorité  de  lacommisMon  des  monuments  historiques 
et  sa  vie  durant,  au  fils  du  fondateur,  collaborateur 
depuis  de  nombreuses  années  des  travaux  de  son  père. 
De  part  et  d'autre  ces  engagements  ont  été  stricte- 
ment remplis,  à  ce  point  même,  qu'à  l'époque  de  la 
fondation  du  musée  des  souverains  sous  l'empire, 
fondation  qui  a  atteint  toutes  les  collections  publiques, 
l'intégralité  de  la  collection  du  Sommerard  a  été  scru- 
puleusement respectée.  D'autre  part  le  contrôle  de  la 


commission  des  monuments  historiques  a  produit  les 
meilleurs  résultats.  C'est  par  les  travaux,  par  les 
missions*  par  les  fouilles  dont  sont  chargés  les  ins- 
pecteurs dos  monuments  historiques,  c'est  aussi  sur 
les  fonds  dont  ils  disposent  qu'indépendamment  des 
nombreux  dons  qui  lui  sont  faits,  s'alimente  le  musée 
de  Cluny.  Depuis  la  fondation,  la  direction  du  musée 
n'a  laissé  échapper  aucune  occasion  d'enrichir  les 
collections  qui  lui  sont  confiées.  Dans  le  rapport 
qu'il  adressa  au  ministre  de  l'instruction  publique  et 
des  beanx-aru  en  1881,  le  directeur  d'alors,  M.  E. 
du  Sommerard,  donnait  ces  chiffres  éloquents  :  «  En 
décembre  1852,  l'inventaire  du  musée  comprenait 
deux  mille  cinq  cents  numéros  ;  il  atteint  aujourd'hui 
le  chiflire  de  dix  mille  huit  cents  ;  et  il  faut  ajouter 
que  ce  chiffre  est  bien  loin  de  représenter  le  nombre 
exact  des  objets  d'art  existant  au  musée,  car  des 
séries  tout  entières  d'origine  ou  do  provenance  ana- 
logue ont  dûse  trouver  fréauemment  inscrites  sous  un 
mime  numéro  d'ordre.  »  Le  catalogue  de  ce  musée, 
unique  au  monde,  et  dont  la  France  a  le  devoir  d'être 
fière,  comprend  20  séries  Intéressant  i  P  la  sgulptubb, 
pierre,  marbre,  bois,  plâtre,  ivoire,  bronze,  fonte, 
cire;  20  I'ambdblbhbnt  civil  et  religieux,  bahuts,  cré- 
dences,  bancs  d'œuvre,  etc.  ;  Z^  la  pbintdrb,  sur  en** 
duit,  panneau,  toile,  vélin,  manuscrits  :  4°  la  peinturb 
SUR  vbrbb,  vitraux  français,  allemands,  italiens,  suisses  ; 
5<^  la  CÉRAMIQUE,  poteries  de  l'antiquité,  du  moyen  Age 
et  de  la  Renaissance,  porcelaines,  terres  éniaiUées  et 
vernissées  d'Italie,  d'Espagne  et  des  diverses  provinces 
de  la  France;  faïences  italiennes,  françaises,  hollan- 
daises, allemandes,  pei*sane8,  hlspano- mauresques, 
etc.  ;  6«  l'ÉMAtLLBRiB,  los  émsux  incrustés,  champlevés, 
cloisonnés,  en  taille  d'épargne,  les  émaux  peints, 
les  mosaïques;  7*  la  vbrrbrib,  antique,  arabe,  véni- 
tienne >  fhmçaise,  allemande,  etc.;  8»  l'oRpivRERiB, 
civile,  religieuse,  pièces  de  bijouterie,  etc.  ;  9^  I'hor- 
LOGBRiB,  pendules,  montres  des  différentes  fabriques 
d'Augsbourg,  de  Nuremberg,  de  Paris  et  Londres  et  de 
Dieppe;  10^  I'armurbrib,  pièces  d'arquebuserle  de 
toutes  espèces,  armes  offensives,  et  défensives  ;  IP  la 
SBRRURBBIB  ;  12»  la  DiNANDERiE,  objots  usuols  de  cutvre, 
bronze,  métal  de  cloche  ;  1 3»  la  tapisser»,  tapis  de  haute 
et  basse  lisse  ou  brodés  au  point,  tentures;  14<»  les  tis- 
sus de  soie,  de  lin,  costumes,  étendards,  chaussures 
brodées;  15*  la  carrossbrib,  16<>  les  instruments  ob 
musique;  17*  les  instruments  db  pbécision,  astronomie, 
géométrie  ;  I8<*  les  ustensiles  de  table,  de  toilette  et  de 
travail  ;  19»  les  sceaux,  monnaies  ;  20<*  les  objets  prove- 
nant de  fouilles,  collections  préhistoriques. 

Dans  cet  ensemble  il  est  quelques  pièces  tout  à  fait 
uniques,  ou  tout  à  fait  hors  de  prix,  dont  l'énnmération 
ne  saurait  trouver  place  ici.  Toutes  sont  classées  avec 
une  méthode  et  suivant  un  plan  qu'il  est  bon  de  faire 
connaître.  D'après  la  description  qu'en  a  donnée  fou 
M.  Ë.  du  Sommerard,  le  conservateur  mort  récemment, 
et  remplacé  par  M.  Darcel,  l'ancien  directeur  de  la 
manufacture  nationale  des  Gobelins,  u  le  classement 
adopté  pour  l'installation  des  collections  était  tout  in- 
diqué par  Tépoque  à  laquelle  appartiennent  les  deux 
édifices  qui  en  forment  le  cadre.  Sous  les  voûtes  du 
vieux  palais  romain  de  Paris  sont  disposés  tous  les 
monuments  en  pierre  et  en  marbre  de  l'antiquité,  de 
l'ère  gallo-romaine  et  des  siècles  suivants. . .  :  les 
autels  romains  élevés  à  Jupiter  par  les  mariniers  de 
Paris  sous  le  règne  de  Tibère,  les  colonnes  en  marbre 
près  du  temple  sur  les  ruines  duquel  a  été  construite 
l'église  Motre-Dame  de  Paris,  les  statues  du  grand 
portail,  les  chapiteaux,  bas-reliefs,  sculptures  et  frag- 
ments de  toute  nature  provenant  de  Saint-Germain 
des  Prés,  de  Saint-Jean  de  Latran,  de  Saint-Benoit, 
de  la  collégiale  de  Cluny  et  de  tous  les  anciens  édi- 
fices de  Paris,  se  trouvent  rassemblés  dans  le  palais 
romain  avec  les  nombreux  monuments  de  l'ère  gau- 
loise qui  ont  été  rapportés  par  M.  E.  du  Sommerard 
des  divers  points  de  la  France.  Dans  les  galeries  de 
l'hôtel  de  Cluny,  d'un  autre  cêté,  sont  les  monuments 
du  moyen  âge  et  de  la  Renaissance,  les  sculptures  on 
pierre,  en  bois,  en  ivoire,  les  émaux,  les  verreries, 
les  faïences,  l'orfèvrerie,  les  armes,  etc.,  qui  occu- 
paient le  rez-de-chaussée  et  le  premier  étage  de  l'édi- 
fice b&ti  -par  Jacques  d'Amboise.  » 

Le  musée  de  Cluny  est  très  fréquenté  par  un  pu- 
blic composé  en  grande  partie  d'artisans  et  de  tra- 
vailleurs. 

Ce  musée  s'accroît  tous  les  jours  encore.  11  a  rendu 

ii5 


CON 


—  1818  — 


DÉL 


de  gnnds  senrices  k  TinduBtrie  et  aux  arta  modernea, 
en  initiant  noa  artisana  et  noa  artistea  qui  ne  eon* 
naiasaient  guère  que  la  Henaisaance  italienne,  aux 
grand ea  et  aainea  traditiona  de  l'art  national. 

J.  B-z. 
COALITIONS.  Uloi  du  25  mai  1864  aur  les  coalU 
Uona  a  modifié  le  Code  pénal.  Eat  puni  d'un  emprison* 
nement  de  6  jours  à  3  ans  et  d'une  amende  de  16  fr. 
à  3,000  fr.,  ou  de  Tune  de  cea  deux  peines  aeulement, 
quiconque,  à  laide  de  Tlolencea,  voies  de  fait»  menacée 
ou  manœuvres  frauduleuses,  a  amené  ou  maintenu, 
tenté  d*amener  ou  de  maintenir  une  ceasation  concertée 
de  travail,  dans  le  but  de  forcer  la  hausse  des  salairea 
ou  de  porter  atteinte  au  libre  exercice  de  l'industrie 
ou  du  travail.  S'il  y  a  eu  plan  concerté,  lea  coupables 

{>euvent  être  mis  en  outre  sous  la  aurveillance  de 
a  haute  police  pendant  2  ana  au  moina  et  5  ana  au 
plus.  Sont  punis  d'un  emprisonnement  de  6  Jours  à  3 
mois  et  d'une  amende  de  16  fr.  à  300  fr.,  ou  de  l'une 
de  ces  deux  peines  seulement,  tous  ouvriers,  patrons 
et  entrepreneurs  d'ouvragea  qui,  à  l'aide  d'amendes, 
défenses,  proscriptions,  interdictions  prononcées  par 
suite  d'un  plan  concerté,  ont  porté  atteinte  au  libre 
exercice  de  l'industrie  ou  du  travail.  —  Ces  disposi- 
tions sont  applicablea  aux  propriétaires  et  fermiers, 
ainsi  qu'aux  moissonneurs,  domestiques  et  ouvriers 
de  la  campagne. 
COLONIAL  (Régime).  —  Un  aénatus-consulte  du 

10  Juillet  1866  a  permis  aux  coloniea  de  prendre  une 
part  active  au  règlement  de  leurs  propres  affaires.  Le 
conseil  général  atatue  aur  les  acquisitions,  aliénationa 
et  échanges  des  propriétés  de  la  colonie  qui  ne  aont 
paa  affectées  à  un  service  public,  sur  leur  changement 
dedeatinationott  d'affectation,  sur  Innr  mode  de  ges- 
tion, sur  les  baux  de  biens  donnés  ou  pria  à  ferme  ou  à 
loyer,  sur  lea  actlona  à  intenter  ou  à  soutenir  an  nom 
de  la  colonie,  aur  l'acceptation  ou  le  refus  des  dons  et 
legs,  sur  le  claaaement,  la  direction  et  le  déclassement 
des  routes,  aur  les  conceasions  de  travaux  d'intérêt 
colonial,  sur  la  part  contributive  de  la  colonie  dans  la 
dépense  dea  travaux  à  exécuter  par  l'État,  sur  les  assu- 
rances des  propriétés  de  la  colonie .  Il  vote  les  taxes  et 
contributions  de  toute  nature  néceasairea  pour  l'ac- 
quittement dea  dépensée,  lea  tarifs  d'octroi  de  mer  et 
les  tarifs  de  douane  aur  lea  objets  de  toute  prove- 
nance étrangère.  Il  délibère  aur  lea  emprunts  à  con- 
tracter, sur  le  mode  de  recrutement  et  de  protection 
des  immigrants,  sur  le  mode  d'aaslette  et  les  règles  de 
perception  des  contributions  et  taxes,  sur  les  fraiades 
services  de  la  Justice,  des  cultes,  de  l'instruction  pu- 
blique, de  la  police  et  dea  prisons,  aur  l'établlasemeut, 
le  changement  ou  la  auppression  des  foires  et  mar^ 
chés.  Il  donne  son  avis  sur  les  changementa  de  cir- 
conscription des  arrondissements,  des  cantona  et  des 
communes,  et  sur  la  désignation  des  chefa-lleux.  Après 
la  chute  de  l'Empire  (1870-1871),  lea  coloniea  ont  re- 
couvré le  droit  d'envoyer  des  députés  à  l'Assemblée 
nationale. 

COMTE  DE  POITIERS  (Le),  roman  d'aventurea  du 
XIII*  siècle,  composé  de  1 ,700  vers  où  l'on  renconnalt 
beaucoup  d'emprunts  faite  à  la  Violette  {V.  ce  mot). 

11  comprend  deux  suites,  qui  n'ont  aucun  lien  :  dauala 
première,  le  comte  de  Poitiers  triomphe  du  duc  de 
Normandie  dans  une  rivalité  amoureuse;  dans  la  ae- 
conde,  l'empereur  Noiron  (Néron),  tranaformé  en 
prince  chrétien,  eat  délivré  des  mains  des  infidèles. 
Fr.  Michel  a  publié  le  Comte  de  Poitiers^  Paria,  1881, 
in-8«.  {\.  Histoire  littéraire  de  la  France,  t.  XXII.) 

CONGRÉGATIONS  REUGIEUSES.  L'article  11  delà 
loi  organique  du  concordat  du  18  germinal  an  X,  con- 
firmé par  l'article  4  du  décret-loi  du  3  messidor  an 
XII,  déclare  qu'aucune  congrégation  religieuse,  d'hom- 
mea  ou  de  femmes,  ne  peut  se  former  aana  l'autori- 
aation  du  gouvernement.  Néanmoins,  un  grand  nombre 
de  congrégationa  se  formèrent  sans  autorisation,  sur- 
tout aous  le  second  empire  et  après  les  événements  de 
1870.  Un  recensement  opéré  en  1877  constata  l'exia- 
tence  de  500  congrégations  non  autorlaées,  compre- 
nant prèa  de  22,000  religieux  des  deux  sexes.  Les 
Souvoira  publics,  tantôt  tolérèrent,  tantôt  cherchèrent 
faire  ceascr  cet  état  de  choaes,  selon  l'état  do  l'es- 
prit public.  En  1845,  une  interpellation  de  M.  Thiera, 
votée  à  la  preaque  unanimité,  invita  le  gouvernement 
à  appliquer  la  loi.  A  la  suite  de  la  part  prépondérante 
attribuée  par  l'opinion  aux  influences  occultes  du 
parti  religieux  dans  la  politique  réactionnaire  de  1870 


et  dea  annéea  snivantea,  la  Chambre  dea  députée  vota 
le  16  mara  1880,  à  une  immenae  majorité,  un  ordre 
du  jour  faisant  appel  à  la  fermeté  du  gouvernement 
pour  appliquer  lea  lois  relatives  aux  congr^ationa 
non  autorisées.  En  conséquence,  un  décret  du  S  mara 
1880  invita  lea  congrégationa  non  reconnues  à  pré- 
aenter,  dans  un  délai  de  trois  mois,  leur*  atatuta  et 
réglementa  et  à  solliciter  la  reconnaiaaance  lépale  qui 
leur  aérait  accordée,  a'il  y  avait  lieu,  par  une  loi.  Cellea 
qui  ne  feraient  paa  lea  diligences  à  cet  effet  devaient 
subir  l'application  dealoia  en  vigueur  et  se  dissoudre. 

Une  aeule  congrégation  était  exclue  du  droit  de  de- 
mander rautoriaation  et  était  aupprimée  aans  plus 
ample  enquête  :  c'est  la  congr^ation  dea  jéanitea, 
qui  a  été  interdite  à  plusieurs  reprisée  par  lea  pou- 
voira  publica  (arrêt  du  parlement  du  6  août  1762,  édit 
de  novembre  1764,  arrêt  du  parlement  dn  9  mai  1767, 
édit  de  mai  de  1777  ;  arrêt  de  la  Cour  de  Paris  du 
18  août  1826;  pétition  renvoyée  par  la  Chambre  le 
2 1  juin  1 828  ;  ordre  du  Jour  du  3  mai  1 845  ;  ordre  dn  jour 
du  16  mara  1880)  et  contre  laquelle  le  aentiment  na- 
tional a'est  toujours  prononcé.  Un  délaide  troia  moia 
lui  fut  donné  pour  ae  diaaoudre,  délai  prolongé  de 
deux  moia  pour  les  établisaementa  d'enseignement. 

Aucune  dea  congrégationa  non  autonaéea  n'ayant 
fait  les  démarches  nécessaires  pour  obtenir  l'autorisa- 
tion, lea  décréta  furent  appliqués  à  toutea. 

COOPÉRATION,  en  terme  d'économie  politique, 
aaaociation  des  efforts  de  plosieurs  individus  pour 
atteindre  un  même  but.  C'eat  une  dea  lois  du  travail. 
Un  seul  homme,  s'il  voulait  fabriquer  une  montre» 
aérait  obligé  d'abord  d'extraire  du  aol  et  de  préparer 
lea  matièrea  premièrea  dont  se  sert  l'horlogerie  (or, 
argent,  cuivre,  fer),  puis  de  lea  fondre,  de  fabriquer 
iea  ressorte,  etc.  Que  de  temps  serait  néceaaaire!  et 
quelle  serait  l'imperfection  du  produit!  De  même, 
1  élevage  des  moutons,  le  lavage  et  la  préparation  de 
la  laine,  la  filature,  le  tiaaage,  la  teinture,  aont  des 
opérationa  qui  aboutiaaent  à  un  produit  dernier,  le 
vêtement,  et  qu'un  aeul  travailleur  ne  ponrrail  effec- 
tuer. —  On  appelle  sociétés  coopératives  lea  associa- 
tions d'ouvriers  qui  unissent  leurs  braa,  leurs  épargnes, 
leur  intelligence,  pour  exercer  une  industrie  de  la 
même  façon  qu'un  patron  individuel.  Ces  aodétéa 
achètent  lea  matières  premières,  les  façonnent  et  les 
vendent  ;  les  bénéfices  et  les  pertes  se  partagent  sui- 
vant l'intérêt  et  le  travail  de  chacun  dana  Tasaociation. 
(V.  Association,  dans  le  Dictionnaire,) 

COQUET,  nom  d'une  petite  chaloupe  au  moyen 

COQUETIER,  ustensile  de  Uble  dont  l'usage  fat 
longtemps  inconnu.  Jusqu'au  xv^  siècle,  on  l'appela 
engin  à  mettre  et  asseoir  tœuff  ou  encore  chose  d'ar- 
gent à  mettre  lœuf. 


D 


DÉBOUCHÉS,  en  économie  politique,  moyens  d'ef- 
fectuer rechange  des  produits  fabriquée,  et  lieux  où 
l'on  en  peut  trouver  l'écoulement.  Le  mot  eat  à  peu 
près  synonyme  de  marchés. 

DÉLAIS.  Le  Corps  législatif  a  voté,  le  25  mars  1882, 
une  loi  portant  modification  des  délais  en  matière  ci- 
vile et  commerciale.  En  voici  les  dis|>ositlona  : 

«  Si  celui  qui  est  assigné  demeure  hors  de  la  France 
continentale,  le  délai  aéra  :  1*  pour  ceux  ^ui  demeu- 
rent en  Corae,  en  Algérie,  dans  les  Iles-Britanniques, 
en  Italie,  dans  le  royaume  des  Paya-Bas,  et  dans  les 
Etata  ou  Confédérations  limitrophes  de  la  France,  d'un 
mois  ;  2"  pour  ceux  qui  demeurent  dana  les  autres 
Etata  soit  de  l'Europe,  aoit  du  littoral  de  la  Méditer- 
ranée et  de  celui  de  la  mer  Noire,  de  deux  mois; 
30  pour  ceux  qui  demeurent  hors  d'Europe,  on  deçà, 
des  détroits  de  Malacca  et  de  la  Sonde,  et  en  deçà  du 
cap  Horn,  de  cin()  mois;  4<>  pour  ceux  qui  demeurent 
au  delà  des  détroits  de  Malacca  et  de  la  Sonde  et  au 
delà  du  cap  Uorn,  de  huit  mois.  —  Lea  délais  ci-des- 
sus seront  doublés  pour  les  pays  d'outre- mer  en  cas 
de  guerre  maritime. 

«  Le  délai  pour  interjeter  appel  sera  de  denx  mois. 
Il  courra,  pour  les  jugements  contradictoirea,  du  Jour 
de  la  signification  à  personne  ou  à  domicile;  pour 
les  Jugements  par  défaut,  du  Jour  où  l'opposition  ne 


DÉL 


—  4819  — 


BEL 


sera  plus  recevable.  L'intimé  pourra  néanmolnt  inter- 
jeter appel  incidemment,  en  toat  état  de  cause,  quand 
même  il  aurait  signifié  le  Jugement  sans  protestation. 
Ceux  qui  demeurent  liors  de  la  France  continenule 
auront,  pour  interjeter  appel,  outre  le  déiai  de  deux 
mois  depuis  la  signification  du  jugement,  le  délai  des 
ajournements  réglé  ci-dessus.  Ceux  qui  sont  absents 
du  territoire  européen  de  l'empire  ou  du  territoire  de 
l'Algérie  pour  cause  de  service  public  auront,  pour 
interjeter  appel,  outre  le  délai  cle  deux  mois  depuis 
la  signification  du  jugement,  le  délai  de  huit  mois.  Il 
en  sera  de  même  en  faveur  des  gens  de  mer  absents 
pour  cause  de  navigation. 

«f  La  requête  civile  sera  signifiée  avec  assignation 
dans  le  délai  de  deux  mois  à  Tégard  des  majeurs,  à 
compter  du  jour  de  la  signification  du  jugement  atta- 
qué à  personne  on  à  domicile.  Le  délai  de  deux  mois 
ne  courra  contre  les  mineurs  que  du  jour  de  la  signi- 
fication du  jugement,  faite  depuis  leur  majorité,  à 
personne  ou  à  domicile.  Lorsque  le  demandeur  sera 
absent  du  territoire  européen  de  Tempire  ou  du  ter- 
ritoire de  TAlgérie  pour  cause  de  service  public,  il 
aura,  outre  le  délai  ordinaire  de  deux  mois  depuis  la 
signification  du  jugement,  le  délai  de  huit  mois.  11  en 
sera  de  môme  en  faveur  des  gens  de  mer  absents 
pour  cause  de  navigation.  Ceux  qui  demeurent  hors  de 
la  France  continentale  auront,  outre  le  délai  de  deux 
mois  depuis  la  signification  du  jugement,  le  délai  des 
ajournements  réglés  ci-dessus. 

a  Le  jour  de  la  signification  et  celui  de  Téchéance 
ne  sont  point  comptés  dans  le  délai  général  fixé  pour 
les  ajournements,  les  citations,  sommations  et  autres 
actes  faits  à  la  personne  ou  à  domicile.  Ce  délai  sera 
augmenté  d'un  jour  à  raison  de  5  myriamètres  de  dis- 
tance. Il  en  sera  de  même  dans  tous  les  cas  prévus, 
en  matière  civile  et  commerciale,  lorsqu'on  vertu  de 
lois,  décrets  ou  ordonnances,  il  y  a  lieu  d'augmenter 
un  délai  à  raison  des  distances.  Les  fractions  de  moins 
de  4  myriamètres  ne  seront  pas  comptées  ;  les  Tractions 
de  4  myriamètres  et  au-dessus  augmenteront  ie  délai 
d'un  jour  entier.  Si  le  dernier  jour  du  délai  est  un 
jour  fér  é,  le  délai  sera  prorogé  au  lendemain. 

tt  Le  porteur  d'une  lettre  de  change  tirée  du  conti- 
nent et  des  lies  de  l'Europe  ou  de  l'Algérie,  et  payable 
dans  les  possessions  européennes  de  la  France,  ou 
dans  l'Algérie,  soit  à  vue,  soit  à  un  ou  plusieurs  Jours, 
mois  ou  usances  de  vue,  doit  en  exiger  le  payement  ou 
l'acceptation  dans  les  trois  mois  de  sa  date,  sous  peine 
de  perdre  son  recours  sur  les  endosseurs,  et  môme 
sur  le  tireur,  si  celui-ci  a  fait  provision.  Le  délai  est 
de  quatre  mois  pour  les  lettres  de  change  tirées  des 
États  du  littoral  de  la  Méditerranée  ou  du  littoral  de 
la  mer  Noire  sur  les  possessions  européennes  de  la 
France,  et  réciproauement  du  continent  et  des  îles 
de  TEurope  sur  les  établissements  français  de  la  Médi- 
terranée et  de  la  mer  Noire.  Le  délai  est  de  six  mois 
pour  les  lettres  de  change  tirées  des  Ëtats  d'Afrique 
en  deçà  du  cap  de  Bonne-Espérance,  et  des  États  d'Amé- 
rique en  deçà  du  cap  Uorn,  sur  les  possessions  euro- 
péennes de  la  France,  et  réciproquement  du  continent 
et  des  lies  de  l'Europe  sur  les  possessions  françaises 
ou  établissements  français  dans  les  Éuts  d'Afrique  en 
deçà  du  cap  de  Bonne- Espérance,  et  dans  les  États 
d'Amérique  en  deçà  du  cap  Horn.  Le  délai  est  d'un  an 
pour  les  lettres  de  change  tirées  de  toute  autre  partie 
du  monde  sur  les  possessions  européennes  de  la  France, 
et  réciproquement  du  continent  et  des  lies  de  l'Europe 
sur  les  possessions  françaises  et  les  établissements 
français,  dans  toute  autre  partie  du  monde.  La  même 
dédiéanee  aura  lieu  contre  le  porteur  d'une  lettre  de 
change  à  vue,  à  un  ou  plusieurs  jours,  mois  ou  usances 
de  vue,  tirée  de  la  France,  des  possessions  ou  éta- 
blissements français  et  payable  dans  les  pays  étran- 
gers, qui  n'en  exii^era  pas  le  payement  ou  l'accepta* 
tien  dans  les  délais  ci- dessus  prescrits  pour  chacune 
des  distances  respectives.  Les  délais  ci-dessus  seront 
doublés  en  temps  de  g^uerre  maritime  pour  les  pays 
d'outre-mer.  Les  dispositions  ci-dessus  ne  préjudicient 
néanmoins  pas  aux  stipulations  contraires  qui  pour- 
raient intervenir  entre  le  preneur,  le  tireur  et  même 
les  endosseurs.  —  Les  lettres  de  change  tirées  de 
France  et  payables  hors  du  territoire  continental  de 
la  France  en  Europe  étant  protestées,  les  tireurs  et 
endosseurs  résidant  en  France  seront  poursuivis  dans 
les  délais  ci-après  :  d'un  mois  pour  celles  qui  éuient 
payables  en  Corse,  en  Algérie,  dans  les  Iles-Britanni- 


ques, en  Italie,  dans  le  royaume  des  Pays-Bas,  et  dans 
les  Etats  ou  confédérations  limitrophes  de  la  France  ; 
de  deux  mois  pour  celles  qui  étaient  payables  dans  les 
autres  États,  soit  de  l'Europe,  soit  du  littoral  de  la 
Méditerranée  et  de  celui  de  la  mer  Noire  ;  de  cinq  mois 
pour  celles  qui  étaient  payables  hors  d'Europe,  en 
deçà  des  détroits  de  Malacca  et  de  la  Sonde,  et  en 
deçà  du  cap  Horn  ;  de  huit  mois  pour  celles  qui  étaient 
payables  au  delà  des  détroits  de  Malacca  et  de  la  Sonde, 
et  au  delà  du  cap  Horn.  Ces  délais  seront  observés 
dans  les  mêmes  proportions  pour  le  recours  à  exercer 
contre  les  tireurs  et  endosseurs  résidant  dans  les  pos« 
sessions  françaises  hors  de  la  France  continentale.  Les 
délais  ci-dessus  seront  doublés,  pour  les  pays  d'outre- 
mer, en  cas  de  guerre  maritime. 

«  Le  délaissement  doit  être  fait  aux  assureurs  dans 
le  terme  de  six  mois  à  partir  du  jour  de  la  réception 
de  la  nouvelle  de  la  perte  arrivée  aux  ports  ou  côtes 
d'Europe,  ou  sur  celles  d'Asie  et  d'Afrique,  dans  la 
Méditerranée,  ou  bien,  en  cas  de  prise,  do  la  réception 
de  celle  de  la  conduite  du  navire  dans  l'un  des  ports 
ou  lieux  situés  aux  côtes  ci-dessus  mentionnées  ;  dans 
le  délai  d'un  an  après  la  réception  de  la  nouvelle  ou 
de  la  perte  arrivée  ou  delà  prise  conduite  en  Afrique  en 
deçà  du  cap  de  Bonne-fispérance,  ou  en  Amérique  en 
deçà  du  cap  Horn  ;  dans  le  délai  de  dix-huit  mois  après 
la  nouvelle  des  pertes  arrivées  ou  des  prises  conduites 
dans  toutes  les  autres  parties  du  monde  ;  et  ces  délais 
passés,  les  assurés  ne  seront  plus  recevables  à  faire  le 
délaissement.  —  Si,  après  six  mois  expirés,  à  compter 
du  jour  du  départ  du  navire  ou  du  jour  auquel  se  rap- 
portent les  dernières  nouvelles  reçues  pour  les  voyages 
ordinaires,  après  un  an  pour  les  voyages  de  long 
cours,  l'assuré  déclare  n'avoir  reçu  aucune  nouvelle  do 
son  navire,  il  peut  faire  le  délaissement  à  l'assureur 
et  demander  le  payement  do  l'assurance,  sans  qu'il 
soit  besoin  d'attesution  de  la  perte.  Après  l'expiration 
des  six  mois  ou  de  l'an,  l'assuré  a  peur  agir  les  délais 
établis  ci-dessus. 

«  Le  délai  pour  interjeter  appel  des  jugements  des 
tribunaux  de  commerce  sera  de  deux  mois,  à  compter 
du  Jour  de  la  signification  du  jugement  pour  ceux  qui 
auront  été  rendus  contradictoirement,  et  du  jour  de 
l'expiration  du  délai  de  l'opposition  pour  ceux  qui  au- 
ront été  rendus  par  défaut;  l'appel  pourra  être  inter- 
jeté du  Jour  même  du  jugement. 

«  Le  délai  des  ajournements  devant  les  tribunaux 
d'Algérie  pour  les  personnes  domiciliées  en  France  sera 
d'un  mois.  » 

Une  autre  loi,  en  date  du  9  mai  1862,  a  réglé  les  dé- 
lais des  pourvois  en  matière  civile  devant  Ta  Cour  de 
cassation.  En  voici  la  teneur  : 

«  Le  délai  pour  se  pourvoir  en  cassation  sera  de  deux 
mois,  à  compter  du  jour  où  la  signification  de  la  déci- 
sion, objet  au  pourvoi,  aura  été  faite  à  personne  ou  à 
domicile.  A  l'égard  des  jugements  et  arrêts  par  défaut 
qui  pourront  être  déférés  à  la  Cour  de  cassation,  ce 
délai  ne  courra  qu'à  compter  du  jour  où  l'opposition 
ne  sera  plus  recevable.  Le  demandeur  en  cassation  est 
tenu  de  signifier  l'arrêt  d'admission  à  la  personne  ou  à 
domicile,  dans  les  deux  mois  après  sa  date; sinon,  il 
est  déchu  de  son  pourvoi  envers  ceux  des  défendeurs  à 
qui  la  signification  aurait  dû  être  faite.  Le  délai  pour 
comparaître  sera  d'un  mois  à  partir  de  la  signification 
de  l'arrêt  d'admission  faite  à  la  personne  ou  au  domi- 
cile des  défendeurs.  Les  délais  fixés  relativement  au 
pourvoi  en  cassation  et  à  la  comparution  des  défendeurs 
seront  augmentés  de  huit  mois  en  faveur  des  deman- 
deurs ou  défendeurs  absents  du  territoire  français  de 
l'Europe  ou  de  l'Algérie  pour  cause  de  service  public, 
et  en  faveur  des  gens  de  mer  absents  de  ce  même  ter- 
ritoire pour  cause  de  navigation.  Il  est  ajouté  au  délai 
ordinaire  du  pourvoi,  lorsque  le  demandeur  sera  domi- 
cilié en  Corse,  en  Algérie,  dans  les  Iles-Britanniques, 
en  Italie,  dans  le  royaume  des  Pays-Bas,  et  dans  les 
États  ou  confédérations  limitrophes  de  la  France  con- 
tinentale, un  mois;  s'il  est  domicilié  dans  les  autres 
États,  soit  de  l'Europe,  soit  du  littoral  de  la  Méditer* 
ranée  et  de  celui  de  la  mer  Noire,  deux  mois  ;  s'il  est 
domicilié  hors  d'Europe,  en  deçà  des  détroits  de  Ma- 
lacca et  de  la  Sonde,  ou  en  deçà  du  cap  Horn,  cinq 
mois  ;  s'il  est  domicilié  au  delà  des  détroits  de  Malacca 
et  de  la  Sonde,  ou  au  delà  du  cap  Horn,  huit  mois. 
Les  délais  ci-dessous  seront  doublés  pour  les  pays 
d'outre-mer  en  cas  de  guerre  maritime.  » 

DELIT,  terme  de  construction.  La  plupart  des  pier- 


DEM 


—  1820  — 


DÉM 


r€S  ont  été  formées  dans  les  carrières  par  des  dépôts 
successifs  qui,  en  prenant  de  la  consistance,  sont  deve- 
■us  des  couches  on  des  Hts  superposés  d'épaisseur  et 
de  dureté  variables.  Si  donc  une  pierre  est  posée  dans 
un  sens  contraire  à  celui  où  elle  se  trouvait  dans  la 
carrière,  et  que  les  tranches  soient  verticales  au  lieu 
d'être  horizontales,  elle  perd  de  sa  force  et  peut  se 
délite^  ou  s'ouvrir. 

DEMOGRAPHIE,  terme  didactique  (de  If^^u  peuple, 
Ypsf  eiv,  écrire)  servant  à  désigner  la  science  de  This- 
toiro  naturelle  des  peuples  quant  à  la  population  con- 
sidérée suivant  les  âges,  les  professions,  les  demeures 
etc..«,  l'état  civil  et  social.  La  démographie  est  à  pro- 
prement parler  la  statistique  appliquée  à  la  connais- 
sance de  l'homme.  Comme  l'a  fortbiendit  le  D' A.  Ber- 
tillon,  cette  branche  de  la  statistique,  qui  consisie  à 
connaître  les  sociétés  humaines  et  à  les  gouverner,  est 
la  mise  en  pratique  de  l'adage  socratique,  connais-toi 
tai-méme. 

Le  rameau  démographique  s'est  greffé  tout  naturel- 
lementsur  lo  tronc  de  la  statistique.  Des  esprits  attentifs 
tl  philanthropes  ont  reconnu  que  les  lois  naturelles 
qui  règlent  le  cours  des  choses  et  le  sort  des  indi- 
vidus doivent  régler  avec  autant  de  force  et  pent-ètre 
aussi  avec  plus  de  constance  les  collectivités  hu- 
maines. Ils  ont  pensé  que  les  investigations  pratiquées 
avec  succès  dans  le  domaine  des  sciences  économiques 
et  administratives  (voir  Statistique,  Zh'c/.  et Supp.) pou- 
vaient fournir  des  renseignements  non  moins  précieux 
et  non  moins  exacts  sur  les  questions  qui  intéressent 
le  plus  vivement  les  hommes,  à  savoir  :  la  vie  et  la 
mort,  la  santé  et  la  maladie,  la  moralité,  Tinstruction, 
la  famille,  le  bien-être,  en  un  mot  tout  ce  qui  cons- 
titue l'état  civil  de  l'homme  en  société.  La  méthode 
scientifique  moderne  a  péremptoirement  établi  que 
ce  n'est  plus  avec  des  idéalités  subjectives  que  nous 
peuvons  réaliser  ces  connaissances.  Gomme  toute 
Mience  digne  de  ce  nom  dans  sa  moderne  acception, 
la  science  des  existences  collectives  est  un  édifice 
qui  a  pour  matériaux  indispensables  les  faits  objectifs, 
les  faite  sociaux.  La  raison  humaine  est  le  ciment  oui^ 
en  reliant  entre  eux  ces  faits  divers  ou  semblables, 
permet  d'asseoir  les  conclusions  sur  des  bases  d'au- 
tant plus  solides  que  les  faits  recueillis  sont  enx- 
fliAmes  plus  nombreux  et  mieux  ordonnés,  phéno- 
mènes collectifs  dont  l'intensité  et  la  fréquence  sont 
représentées  par  des  nombres.  «  C'est  une  condition 
d'exlMance  pour  chaque  nation,  a  dit  le  D'  A.  Bertillon, 
dans  la  préface  de  son  Atlas  démographique,  d'égaler 
an  moins  les  nations  voisines  par  le  nombre,  la  vi- 
nenr,  l'Intelligence  des  Jeunes  générations.  Et  cepen- 
dant les  hommes  auxquels  sont  remis  les  destins  des 
peuples  ne  s'enquièrent  ni  du  nombre  des  familles  qui 
fournissent  ces  générations,  ni  des  conditions  qui 
augmentent  ou  paralysent  leur  fécondité,  ni  des  causes 
multiples  et  variées  qui  déciment  cette  Jeunesse,  ni  du 
taux  annuel  do  ces  pertes,  ni  de  leur  proportion  crois- 
sante ou  décroissante,  et  encore  moins  des  raisons  qui 
président  à  tous  ces  mouvements.  Si  ces  gouver- 
nements viennent  à  présumer,  nonobstant  les  enseigne- 
ments ecclésiastiques,  que  le  mariage  est  meilleur  que 
le  célibat,  que  l'instruction  vaut  mieux  que  l'ignorance, 
ile  ne  savent  ni  dans  quelle  mesure  ni  dans  quelles 
conditions;  ils  manquent  de  preuves  à  opposer  aux 
adversaires  obstinés  des  voies  modernes,  et  ils  sont 
sans  force  pour  préparer  les  applications  que  la  pra- 
tique réclame.  Il  est  donc  certain  que  pour  constituer 
enfin  les  vraies  sciences  sociales,  pour  obtenir  une 
législation  appuyée  sur  la  connaissance  des  phéno- 
mènes sociaux,  une  administration  éclairée  dans  ses 
agissements,  et  pour  réformer  nos  mœurs  publiques 
et  privées^  il  faut  que  les  hommes  studieux,  touchés 
de  l'amour  de  l'humanité,  acquièrent  de  solides  no- 
tions de  Tanatomie  du  corps  social,  de  son  fonction- 
nement physique,  intellectuel  et  moral,  c'est-à-dire 
de  sa  physiologie  et  de  sa  psychologie  générales.  » 
C'est  de  ce  manque  de  connaissance  précise  des  faits 
sociaux  qu'est  née  la  statistique  humaine.  C'est  de  la 
nécessité  de  combler  cette  lacune  immense  qui  entra- 
vait fatalement  le  développement  des  sciences  huma- 
nitaires en  les  livrant  sans  défense  aux  métaphysiciens, 
qu'est  né  le  projet  de  Jeter  de  nouvelles  assises  au 
grand  monument  que  notre  siècle  élève  aux  sciences 
biologiques.  A  une  science  nouvelle  il  fallait  un  nom 
nouveau.  Le  docteur  Ëngel  de  Berlin  avait  appelé  cette  1 
connaissance  des  peuples  :  démologie.  En  France  et  I 


avant  loi,  M.  Gaillard  avait  trouvé  la  dénomination 
plus  simple  de  :  démographie,  oui  fut  adoptée  en 
France  comme  à  l'étranger.  Nous  donnons  un  résumé 
des  résultats  obtenus  par  la  démographie  appliquée  à 
l'étude  du  mariage,  des  naissances,  et  à  la  mortalité. 

Mariages.  —  La  fréquence  des  mariages  ou  nup- 
tialité est  tn  France  de  8  mariages  annuels  par  lOQO 
habitants  de  tout  Age  (ou,  suivant  une  méthode  pins 
exacte,  de  28  mariages  pour  lOOObabiunts  non  mariés 
et  en  âge  de  Tètre  :  de  15  à  60  ans).  Cette  proportion 
est  assez  satisfaisante.  Pourtant,  l'Angleterre  dépasse 
la  France  sous  ce  rapport  (32  mariages  au  lieu  de  -8); 
elle  a  sur  nous  un  avantage  plus  précieux  :  c'est  que 
les  Anglais  se  marient  plus  Jeunes  que  les  Français  ; 
Age  moyen  des  garçons  :  25  ans  en  Angleterre,  28  en 
France;  Age  moyen  des  filles  :  24  ans  au  lieu  de  25. 
De  plus  les  mariages  disproportionnés  sont  plus  rares 
chez  eux  que  chez  nous.  Mais  la  grande  supériorité  des 
époux  anglais,  celle  qui  assure  dans  l'avenir  la  gran- 
deur de  leur  patrie,  c'est  qu'ils  ont  plus  d'enfants  que 
les  Français.  C'est  un  point  sur  lequel  nous  aurons 
à  revenir. 

On  a  observé  que  la  fréquence  des  mariages  aug- 
mente quelque  peu  dès  que  les  affaires  (industrielles, 
mais  surtout  agricoles)  sont  prospères.  Au  contraire, 
elie  diminue  si  la  récolte  est  mauvaise  ou  si  quelque 
crise  pèse  sur  le  pavs  ;  msis  les  fiancés  dont  une  mau- 
vaise année  a  retardé  le  mariage  le  concluent  généra- 
ralement  l'année  suivante  :  aussi  trouve-t-on  que  les 
années  qui  suivent  une  mauvaise  récolte  sont  géné- 
ralement remarquables  par  une  forte  nuptialité. 

Les  pays  pauvres  (Bretagne-Gévennes-Alpes)  comp- 
tent généralement  peu  de  mariages  ;  il  en  est  de  même 
du  Nord  et  de  la  Normandie. 

Influence  du  mariage  sur  la  santé  physique  et  mo- 
rale, —  La  démographie  établit  entre  l'homme  marié, 
le  célibataire  et  le  veuf  de  profondes  différences,  qui 
sans  elie  ne  pourraient  être  soupçonnées  ;  les  hommes 
mariés  meurent  moins  vite  que  les  célibataires,  et 
ceux-ci  meurent  moins  que  les  veufs.  Et  cette  diffé- 
rence est  tellement  forte  qu'on  calcule  que  les  céliba- 
taires de  25  ans  meurent  dans  les  mêmes  proportions 
que  les  gens  mariés  de  45  ansi  Les  veufs  sont  encore 
plus  mal  partagés  que  les  garçons,  et  l'on  peut  bien 
dire,  en  thèse  générale,  qu'ils  meurent  deux  fois  plus 
que  les  gens  mariés  du  même  âge.  Dans  ce  qui  pré- 
cède, nous  ne  considérons  que  les  hommes.  Pour  les 
femmes,  les  mêmes  lois  se  vérifient,  mais  avec  moins 
de  notteté. 

Il  est  pourtant  un  Age  où  le  mariage,  loin  d*être 
favorable,  est  nuisible  :  c'est  pour  les  très  Jeunes  gens. 
Un  homme  de  18  à  20  ans  n'est  apparemment  pas 
assez  développé  pour  se  marier;  s'il  commet  cette 
erreur,  il  décuple  sa  mortalité  ;  les  Jeunes  veuCs  (ils 
sont  rares  heureusement)  sont  encore  plus  frappés. 

Dire  que  les  célibataires  sont  plus  exposés  à  la  mort, 
c'est  indiquer  qu'ils  sont  plus  exposés  à  la  maladie. 
C'est  en  effet  ce  qui  résulte  des  chiffres  assez  rares 
qu'on  a  sur  ce  sujet. 

L'Influence  du  mariage  sur  le  moral  de  l'homme  est 
encore  plus  grande  que  sur  la  mort.  La  folie  est  plus 
fréquente  chez  les  célibataires,  et  surtout  chez  les 
veufs,  que  chez  les  époux.  De  même  pour  le  crime; 
M.  Bertillon  père,  à  qui  sont  dus  la  plupart  de  ces 
calculs,  a  prouvé  plus  encore  :  les  époux  <^ul  ont  des 
enfants  commettent  moins  de  crimes  (18  crimes  en  un 
an  pour  100,000  époux  avec  enfants)  que  ceux  qui  n'en 
ont  pas  {tS  crimes).  De  même,  les  veufs  qui  ont  des 
enfants  sont  moins  portés  aux  idées  criminelles  que 
ceux  qui  n'en  ont  pas.  Quel  enseignement  moral 
ressort  de  ces  chiffres  et  qu'ils  démontrent  a.vec  évi- 
dence la  sainteté  de  la  famille! 

Les  femmes  commettent  toujours  moins  de  crimes 
que  les  hommes.  Mais,  parmi  elles  aussi,  on  observe 
les  différences  que  nous  venons  de  noter  pour  les 
hommes. 

Un  document  suédois  permet  d'étudier  l'influence 
de  la  famille  sur  la  tendance  au  suicide  :  tandis  que 
l'envie  de  se  tuer  reste  un  phénomène  rare  chez  les 
gens  mariés,  elle  augmente  avec  TAge  chez  les  céli- 
bataires et  les  veufs,  et  finit  chez  eux  par  être  une 
cause  de  mort  assez  fréquente;  les  différences  devien- 
nent prodigieuses  à  la  fin  de  la  vie  (19  suicides  en  un 
an  sur  100,000  époux,  333  pour  les  non-mariés  I).  La 
présence  des  enfants  a  sur  la  tendance  au  suicide  la 
même  influence  salutaire  que  sur  le  crime.  Mêmes 


DÉM 


—  1821 


DEM 


différences  pour  les  femmes,  qui  d*ailleurs  ont  moins 
de  tendances  au  suicide  que  les  liommes . 

Ainsi  nous  Toyons  que  le  célibataire  parait  être  le 
plus  souvent  un  être  malheureux,  plus  exposé  à  la 
mort,  à  la  maladie  et  aux  tentations  mauvaises, 
l/homme  (et  ia  femme  Jusqu'à  un  certain  degré) gagne 
considérablement  au  mariage.  Si  les  individus  y  ga- 
gnent, la  nation  y  gagne  plus  encore. 

Conditions  individuelles  qui  favorisent  le  mariage, 
—  Ces  conditions  sont  nombreuses  et  elles  sont  encore 
assez  mal  connues  au  point  de  vue  statistique.  Nou« 
n'en  mentionnerons  qu'une  :  c'est  que  les  veufs  (et 
jusqu'à  un  certain  point  les  divorcés)  se  marient  beau- 
coup plus  volontiers  que  ceux  qui  ne  connaissent  pas 
le  mariage  par  expérience.  (Pour  les  femmes,  le  fait  se 
vérifie,  mais  moins  exactement.  Il  semble  que  les 
veufs  sentent  eux-mêmes  qu'ils  sont  dans  une  condi- 
tion mauvaise,  ainsi  que  nous  l'avons  montré  tout  à 
l'heure  ;  leur  second  mariage  se  fait  généralement  très 
peu  de  temps  après  la  mort  de  la  première  femme. 
Différents  documents  étrangers  montrent, -en  outre, 
que  les  divorcés  se  remarient  à  vrai  dire  peu  de  temps 
après  la  dissolution  du  premier  mariage,  mais  non 
pas  plus  vite  que  les  veufs. 

NâissAivcBS.  —  Les  naissances  ne  sont  pas  assez 
nombreuses  en  France.  Elles  sont  plus  rares  qu'en 
aucun  pays  de  l'Europe  :  1000  femmes  mariées  pro- 
créent par  an  :  136  enfants  en  Angleterre,  130  environ 
en  Belgique,  en  Hollandi^,' etc.,  150  en  Prusse  et  102 
seulement  en  France  l  On  compte  souvent  la  natalité 
(proportion  des  naissances)  en  comparant  le  nombre 
àeB  enfants  à  la  population  totale  ,*  cette  méthode, 
moins  exacte  que  la  précédente,  donne  d'ailleurs  des 
résultats  analogues  à  ceux  qu'on  vient  de  lire  :  36  nais- 
sances en  France  et  38  en  Prusse  pour  1000  habiunts. 
Au  siècle  dernier,  la  natalité  française  était  d'environ 
40  pour  1000  habitants,  à  peu  près  ce  qu'elle  est  en 
Prusse  aujourd'hui.  Depuis  le  commencement  du 
siècle,  elle  n'a  fait  que  décliner,  en  sorte  que  la  po- 
pulation française  ne  s'accroît  presque  plus  (3,5  habi- 
tants pour  1000  et  par  an) . 

Le  département  le  plus  fécond  de  France  est  le  dé- 
partement du  Nord  (135  naissances  pour  1000  femmes  de 
15  à  50  ans);  mais  il  est  le  seul  dont  la  natalité  res- 
semble à  celle  des  autres  pays  de  l'Europe.  La  rareté 
des  naissances  estun  mal  répandu  à  peu  près  dans  toute 
la  France.  Cestsoriouten  Normandie  et  dans  la  vallée 
de  la  Garonne  (Lot-et-Garonne,  Gers,  etc.)  qu'on  l'ob- 
serve. Au  contraire,  la  Bretagne,  certaines  parties  des 
Gévennes,  l'Alsace,  présentent  un  nombre  plus  grand 
de  naissances. 

M.  Bertillon  père  a  observé  que  les  départements 
dans  lesquels  la  propriété  est  le  plus  divisée  sont,  en 
général,  plus  inféconds  que  les  autres,  ce  qui  confirme 
l'opinion  que  Tobservation  individuelle  a  suggérée  à 
beaucoup  d'auteurs  :  c'est  que  cette  infécondité  est  en 
rapport  avec  le  désir  qu'ont  beaucoup  de  familles  d'évi- 
ter le  partage  de  leur  héritage.  Ce  qui  prouve  que  la 
rareté  des  naissances  n'est  pas,  chez  les  Français,  un 
attribut  de  leur  race,  c'est  leur  fécondité  au  siècle 
passé,  c*est  aussi  ce  fait  que,  transportés  dans  un 
pays  moins  rempli  que  le  n6tre,  tel  que  le  Canada,  ou 
même  que  l'Algérie,  leur  fécondité  devient  beaucoup 
plus  grande. 

Si  l'on  considère  la  natalité  à  un  point  de  vue  plus 
général,  on  voit  que  ce  qui  règle  le  nombre  des  nais- 
sances, c'est  (Jusqu'à  un  certain  point)  la  quantité  de 
vivres  disponibles  :  «  Là  où  naît  un  pain,  naît  un 
homme.  »  Et  inversement,  hélas  :  u  Là  où  disparaît  un 
pain,  disparaît  un  homme.  »  Telle  est  la  formule 
générale  de  Véquation  des  subsistances.  C'est  donc  avec 
raison  qu'on  a  comparé  la  société  à  un  banquet  où 
aucune  place  ne  reste  Jamais  vide  :  dès  qu'un  convive 
disparaît,  par  la  mort  ou  par  l'émigration^  sa  place  est 
prise,  soit  par  un  immigrant,  soit  par  un  nouveau-né. 
Par  exemple,  si  une  mauvaise  récolte,  ou  une  épidé- 
démie,  ou  une  guerre  a  fait  périr  un  grand  nombre 
d'hMames,  on  peut  être  sur  que  pendant  les  années 
suivantes  la  natalité  augmentera  et  l'immigration  aussi, 
en  sorte  que  les  places  qu'ils  ont  laissées  vacantes 
seront  occupées  très  rapidement.  De  même,  si  une 
bonne  récolte,  une  année  industrielle  prospère,  aug- 
mente le  nombre  des  places  disponibles  au  banquet 
de  la  vie,  elle  sera  toujours  marquée  par  une  augmen- 
tation do  naissances. 

Du  même  principe  résulte  que,  si  un  pays  fournit 


beaucoup  d'émigrants  (tels  sont  l'Angleterre,  l'Alle- 
magne, et,  depuis  peu,  les  pays  Scandinaves),  les 
places  que  ces  émîgrants  laissent  vacantes  seront  rapi- 
dement occupées  au  moyen  de  naissances  plus  nom- 
breuses ;  et  c'est  en  effet  ce  qu'on  obserye.  Au  con- 
traire, si  on  pays  jusqne  là  migrateur  censé  subitement 
d'envoyer  au  loin  des  émigrants,  sa  natalité  ne  tardera 
pas  à  baisser  (ce  qu'on  a  observé  en  Suisse). 

Si  un  pays,  jusque-là  stérile,  devient  productif, 
aussitôt  il  se  peuple,  soit  parce  que  des  colons  vont 
s'y  établir,  soit*  parce  que  sa  natalité  augmente,  et  le 
plus  souvent  par  les  deux  procédés  simultanément. 
Tel  est,  pir  exemple,  le  Canada,  où  de  nombreux 
colons  anglais  vont  s'établir  chaque  année,  et  où  la 
fécondité  est  en  outre  très  considérable. 

Exceptions  au  principe  de  Véqtuition  des  subsistant 
ces,  —  S'il  en  est  ainsi  au  Canada,  c'est  que  le  Canada  est 
un  pays  salubre  pour  notre  race.  Mais  en  Inde  ou  e» 
Cocbinchine,  les  subsistances  disponibles  auront  beau 
être  abondantes,  la  natalité  des  hommes  de  notre  race 
n'en  sera  pas  accrue,  parce  que  ces  climats  sont  pour 
nous  rapidement  mortels.  L'Algérie  a  beau  être  un 
pays  fertile,  les  hommes  du  midi  de  TËnrope  (Proven- 
çaux, Italiens,  Espagnols)  sont  les  seuls  qui  y  aient 
beaucoup  d'enfants,  tandis  que  les  Allemandes  y  ont 
une  natalité  inférieure  à  celle  de  leur  pays  et  n'y  élè- 
vent pas  le  peu  d'enfants  qu'ils  y  ont,  parce  que  le  sel 
africain  ne  convient  pas  à  leur  race.  Ainsi  le  climat  a 
sur  la  natalité  une  influence  plus  grande  que  l'abon- 
dance des  subsistances. 

La  quantité  de  subsistances  nécessaire  à  l'entretien 
d'une  population  varie  d'ailleurs  avec  le  climat,  avec 
la  race,  avec  le  degré  de  culture  de  la  population  qu'on 
étudie  :  par  exemple,  la  Sicile  nourrit  une  population 
très  abondante,  quoiqu'elle  soit  moins  riche  que  U 
France,  mais  aussi  faut-il  très  peu  de  chose  pour 
nourrir  un  Sicilien,  paresseux  et  inactif;  au  contraire, 
un  paysan  ou  un  ouvrier  normand  consomme  beau- 
coup plus  :  il  est  vrai  qu'il  travaille  beaucoup  pins 
aussi. 

En  résumé,  on  peut  dire  que  le  nombre ^es  hommes 
dépend  de  la  quantité  de  substances  alimentaires  qu'ils 
savent  tirer  da  9ol  :  Tindu^rie  r^gle  moins  le  nombre 
des  hommes  que  leur  répartition  sur  la  surface  du  sol 
(ils  tendent  naturellement-  à  se  masser  dans  les  ré- 
gions Industrielles).  En  général,  la  population  dans  un 
climat  salubre,  et  toutes  choses  égales  d'ailleurs,  tend 
à  se  propoi^ionner  aux  subsistances  disponibles. 

Proportion  des  sexes.  —  Il  naît  un  peu  plus  de  gar- 
çons que  de  filles  (106.6  garçons  pour  100  filles),  et 
cela  est  fort  heureux,  car  les  garçons  meurent  beau- 
coup plus  que  les  filles  dans  les  premières  années^  en 
sorte  que  l'équilibre  entre  les  deux  sexes  s'établit 
dans  le  cours  de  la  vie.  Parmi  les  naissances  illégi- 
times, la  proportion  des  garçons  est  toujours  un  peu 
moins  considérable  (104).  La  position  sociale  des 
parents,  leur  ige,  leurs  mœurs,  modifient  ce  rapport 
d'une  façon  curieuse,  mais  que  nous  ne  pouvons  étudier 
ici.  En  général  plus  le  père  est  fort  et  bien  portant, 
plus  la  naissance  d'un  garçon  parait  probable. 

Natalité  illégitime,  —  En  France  lOOo  filles  et  veuves 
de  15  à  50  ans  produisent  chaque  année  18  naissances 
illégitimes  :  c'est  une  proportion  qui  n'est  pas  très 
considérable  (elle  est  plus  forte  dans  les  villes,  plus 
faible  dans  les  campagnes),  et  qui,  contrairement  à  ce 
qu'on  écrit  souvent,  est  inférieure  à  celle  qu'on  ren- 
contre en  Allemagne,  même  dans  l'Allemagne  du  Nord 
(Prusse,  35).  L'Allemagne  du  Sud  et  surtout  l'Autriche 
propre  sont  les  pays  d'Europe  où  les  naissances  illé- 
gitimes sont  le  plus  nombreuses.  Dans  beaucoup  de 
villes  autrichiennes,  la  moitié  des  naissances  est 
illégitime  (à  Paris  le  quart  seulement,  soit  55  naissan- 
ces pour  1000  femmes  non  mariées  de  15  à  50  ans). 

Les  naissances  illégitimes  sont  beaucoup  plus  fré- 
quentes dans  le  Nord  et  l'Est  de  la  France  (25  à  30  nais- 
sances pour  1000  filles)  que  dans  le  Midi  (5  à  10  nais- 
sances). On  remarque  que  les  régions  où  les  naissances 
illégitimes  sont  les  plus  nombreuses  sont  aussi  celles 
où  les  légitimations  sont  les  plus  fréquentes  par  rap- 
port aux  naissances  illégitimes. 

La  naulité  illégitime  est  plus  forte  dans  les  villes 
que  dans  les  campagnes;  plus  forte  dans  les  pays 
industriels  que  dans  les  contrées  agricoles;  plus  forte 
chez  les  catholiques  et  les  protesunts  allemands  que 
chez  les  Juifs,  etc.  On  ne  Ta  malheureusement  pas  étu- 
diée suivant  les  conditions  sociales  et  les  professions. 


DÉM 


1822  — 


DEM 


MoBT-Nit,  on  appelle  leur  joroportion  par  rapport 
auK  naisBances  morli-natalité.  Dana  ces  calcols,  il  con- 
vient d'éliminer  les  faux  mort-nés»  ou  enfants  morts 
après  raccoucbement,  mais  avant  Tinscription  sar  le 
registre  des  naissances.  On  observe  en  France  les 
chiffres  solvants  : 

Mort-né»  iur  1000  naûtoncei. 


Parmi  les  légitimes 


i   Gareoi 
..  \  Filles 
(  Deux 


Ds 37 

26 

sexes 32 

i  Garçons 68 

Parmi  les  illégitimes.  ]  Filles 57 

f  Deux  sexes.......  62 


On  voit  que  le  fait  d*ètre  illégitime  double  en  France 
la  chance  d'être  mort-né  (raggravation  est  plus  forte 
pour  les  filles).  En  tout  pays,  Tillégitimité  augmente 
la  mortalité,  mais  nulle  part  dans  des  proportions 
aussi  élevées.  Quand  l'accouchement  a  lien  à  Tbôpital 
(où  la  mère  est  surveillée),  les  illégitimes  cessent 
d'avoir  ce  privilège.  Cette  circonstance  et  plusieurs 
autres  sur  lesquelles  nous  ne  pouvons  insister  ici  ont 
fait  penser  que  ces  prétendus  mort-nés  illégitimes 
sont  dus  tout  simplement  à  des  Infanticides.  Le  fait 
est  incontestable,  au  moins  pour  une  grande  partie 
d'entre  eux.  Ce  qui  le  prouve,  c'est  que  la  fermeture 
des  derniers  tours  a  augmenté  du  tiers  la  proportion 
des  mort-nés  illégitimes. 

HoRTALiTÂ,  on  devrait  ne  jamais  étudier  la  mortalité 
générale  sans  distinction  d'&ges.  Cette  mesure  (sur  100 
hab.,  combien  de  décès)  est  trompeuse,  et  le  plus  sou- 
vent inutile. 

C'est  par  âges  que  doit  être  étudiée  la  mortalité 
d'un  peuple  quand  on  veut  prendre  idée  dos;  condi- 
tions de  salubrité  dans  lesquelles  il  se  trouve.  C'est 
un  point  de  méthode  élémentaire  qui  pourunt  a 
trompé  beaucoup  d'auteurs  ;  mais  nous  ne  pouvons  le 
prouver  ici.  Le  tableau  suivant  donne  les  principaux 
éléments  de  la  mortalité  des  Français  : 

Sur  iOOO  vivants  de  chaque  âge  et  de  chaque  sexe 
combien  de  décès  par  an. 


Ans.                        ]f«ic.  Fém. 

Oà     1 236,0     197,0. 


1  à    5 34,8 

5  à  15 6,8 

15  à  30 8,7 

30  à  60 13,1 

60  à  la  mort..  67,8 


34,5. 

7,6. 

8.6. 
12.7. 
68.4. 


Deux  Mxet. 
.  215,0 
.  34,0 
.  7,2 
8,6 
.  12,9 
.       68,2 


Mortalité  des  enfant*  de  0  à  4  an,  -^  Ia  mortalité  à 
cet  ige  est  sans  doute  très  considérable,  puisqu'un 
enfant  qui  vient  de  naître  a  autant  de  chances  de 
mourir  qu'un  vieillard  de  88  ans.  Cependant,  il  faut 
reconnaître  que,  chez  la  plupart  des  nations  étrangè- 
res, la  mortalité  à  cet  âge  est  plus  forte  encore  que 
dans  notre  pays.  Dans  plusieurs  parties  de  l'Allemagne, 
près  du  tiers  des  enfants  meurent  dans  la  première 
année  de  la  vie.  Au  contraire,  les  pays  Scandinaves  en 
perdent  beaucoup  moins  que  nous. 

Parmi  les  causes  qui  aggravent  la  mortalité  des 
Jeunes  enfants,  il  faut  citer  l'industrie  des  nourrices, 
mercenaires  surtout. 

Les  aliments  solides  leur  sont  encore  plus  funestes. 
Le  lait  de  vache  est  impropre  à  nourrir  les  enfants, 
parce  qu'il  contient  trop  de  caséine,  il  est  donc  néces- 
saire de  le  couper  d'eau  ;  le  lait  d'ànesse  leur  convient 
mieux. 

C'est  pour  surveiller  les  nourrices  et  étudier  la  mor- 
talité des  Jeunes  enfants  qu'a  été  votée  la  loi  du 
23  déc.  ISlé  (loi  Th.  Roussel).  C'est  surtout  autour  de 
Paris,  en  Normandie,  en  Champagne,  en  Bourgogne, 
que  s'exerce  cette  funeste  industrie;  aussi  la  morta- 
•lité  y  est-elle  énorme,  tandis  qu'elle  est  faible  dans  la 
Basse-Normandie,  dans  quelques  départements  au 
centre  et  dans  la  vallée  de  la  Garonne. 

Notre  tableau  montre  que  les  petits  garçons  sont 
beaucoup  plus  exposés  à  la  mort  que  les  petites  filles. 
Il  est  assez  singulier  que  ce  soit  Justement  à  l'âge  où 
le  sexe  est  moins  apparent  que  son  influence  sur  la 
maladie  soit  le  plus  forte.  C'est  surtout  la  diarrhée  et 
la  méningite  (dont  les  convulsions  sont  souvent  les 
symptômes)  qui  font  périr  les  Jeunes  enfants.  Ces 
maladies  sont  surtout  fréquentes  en  été.  En  hiver,  la 
pneumonie  fait  mourir  beaucoup  d'enfants.  Mais  cette 
maladie  est  moins  redoutable  que  les  deux  premières. 
Aussi  la  mortalité  est  double  en  Juillet  de  ce  Qu'elle  est 
en  décembre»  et  l'on  peut  dire  que  les  enfants  à  la 


mamelle  craignent  deux  fois  plus  la  chaleur  que  le 
froid  ;  ce  q^ui  est  contraire  au  préjugé  public. 

SI,  au  heu  de  considérer  la  mortalité  de  l'année 
entière,  ou  étudie  avec  plus  de  détails  Tige  des  enfants, 
ou  trouve  qu'ils  meurent  d'autant  moins  que  leur 
âge  est  plus  avancé.  Il  semble  que  la  naissance  soit  une 
opération  critique  dont  ils  se  rétablissent  progresnve- 
ment. 

La  mortalité  des  enfants  Illégitimes  est  double 
de  celle  des  légitimes.  La  mortalité  de  ces  enfanu 
malheureux  est  surtout  énorme  dans  lèi  premières 
semaines  qui  suivent  la  naissance,  et  principalement 
pendant  la  seconde  semaine.  Cette  circonstance  et 
quelques  autres  encore  font  penser  que  c^est  la 
faim  qui  les  fait  périr.  Est-ce  au  contraire  volontai- 
rement que  les  filles  mères  manquent  souvent  h  nour- 
rir leurs  enfants?  Il  serait  délicat  de  se  prononcer  sur 
ce  point.  Quelle  que  soit  la  solution,  l'enfant  n'en 
meurt  pas  moins,  et  la  cause  première  de  sa  mort  est 
toujours  la  misère. 

Mortalité  de  4  à-S  ans,  —Les  enfants  de  cet  âge  meu- 
rent dans  des  proportions  effrayantes  autour  de  la 
Méditerranée;  tandis  que  leur  mortalité  est  de  20 
à  26  p.  \00  dans  le  reste  de  la  France,  elle  atteint 
autour  de  cette  mer  les  chiffres  inouïs  jde  SO,  60  et 
même  801  «  Il  semble,  dit  M.  Bertillon,  que  de  cette 
mer  d'azur  s'élève  Je  ne  sais  quelle  vapeur  funeste 
qui  répand  la  mort  autour  d'elle,  et  tue  l'enfant  à 
son  ige  le  plus  gracieux  et  le  plus  charmant.  »  Mais 
ce  n'est  là  qu'une  figure  de  rhétorique.  Quelle  est 
la  cause  qui  décime  ainsi  la  population  infantile  de  la 
Provence  et  du  Languedoc?  On  n'en  sait  absolument 
rien.  Elle  coûte  chaque  année  1500  Jeunes  enfants  à 
notre  pays  (non  compris  ceux  dont  la  morlaliié  nor- 
male faisait  prévoir  la  mort). 

Mortalité  de  S  à  \S  ans,  —  Cest  à  l'Age  de  10  à 
lô  ans  que  la  mortalité  atteint  son  minimum. 

Mortalité  de  15  à  80  ans,  ^  La  mortalité  à  cet  âge 
est  plus  forte  en  France  que  dans  la  plupart  des  autres 

{>ays  de  l'Europe.  C'est  à  la  mortalité  des  jeunes 
lommes  de  20  à  2S  ans  que  cette  funeste  aggrava- 
tion est  due.  On  ne  sait  comment  expliquer  cette 
mortalité  si  anormale.  Elle  est  plus  forte  encore 
parmi  les  militaires  que  parmi  les  autres.  La  phtisie 
est  à  cet  âge  la  principale  cause  de  mort. 

Mortalité  de  30  à  60  ans,  —  La  mortalité  à  cet  âge 
est  plus  faible  en  France  que  dans  la  plupart  des 
pays  de  l'Europe.  Plus  nous  avançons  en  âge  et  plus 
nous  l'emportons  sur  nos  voisins.  C'est  surtout  en 
Champagne,  en  Bourgogne,  en  Normandie,  dans  le 
bassin  de  la  Garonne,  que  la  mortalité  est  faible.  Elle 
est  considérable  au  contraire  en  Bretagne,  dans  le 
Centre,  dans  les  Alpes  et  dans  la  Provence.  Les  sai- 
sons n'ont  sur  la  morlaliié  des  âges  adultes  qu'une 
action  peu  prononcée. 

Mortaitté  de  60  ans  à  la  fin  de  la  vie.  -»  A  cet 
Age  la  mortalité  est  moindre  en  France  oue  dans  au- 
cun autre  pays  (la  Norwège  exceptée),  ôe  sont  sur- 
tout la  Champagne  et  la  Bourgogne  qui  se  font  remar- 
quer par  leur  faible  mortalité.  Les  vieillards  meurent 
surtout  par  les  maladies  des  or|;ane8  respiratoires  : 
aussi  est-ce  particulièrement  l'hiver  qui  leur  est  fu- 
neste :  plus  ils  sont  vieux  et  plus  le  froid  leur  est 
nuisible. 

Migrations.  —  De  tous  les  pays,  ce  sont  les  Iles- 
Britanniques  et  l'Allemagne  qui  fournissent  la  plus 
forte  proportion  d'émigrants.  Chaque  année  250,000  An- 
glais et  100,000  Allemands  (ces  nombres  sont  d'ail- 
leurs très  variables)  quittent  leur  pays  pour  aller 
chorcher  fortune  au  loin.  Les  Allemands,  n'ayant  pas 
encore  beaucoup  de  colonies  à  eux,  sont  obligés  d'aller 
chez  les  autres,  et  là  ils  oublient  généralement  assez 
vite  leur  langue  et  leur  patrie.  Il  n*en  est  pas  de 
même  des  Anglais. 

GrAce  à  la  loi  de  l'équation  des  subsistances  expli- 

3uée  plus  haut:  !<>  l'émigration  anglaise  a  pour  effet 
e  stimuler  la  natalité  des  Iles-Britanniques  :  2«  ar- 
rivés dans  leur  nouvelle  patrie  (Amérique  ou  Austra- 
lie), les  colons,  trouvant  devant  eux  d'Immenses 
ressources  naturelles  non  exploitées,  ont  une  fécondité 
souvent  prodijgieuse.  , 

Ain.si  1  émigration  ne  diminue  pas  la  population  de  la 
mère  patrie  (sauf  en  Irlande,  mais  l'Irlande  est  dans 
une  position  particulièrement  malheureuse),  et  accroît 
énormément  celle  des  colonies.  On  compte  aujourd'hai 
dans  les  cinq  parties  du  monde  80  millions  d'indiridus 


DET 


—  1823  — 


DOU 


parlant  anglais»  mais  il  est  impossible  de  deviner 
combien  il  y  en  aura  dans  un  siècle.  On  peut  seu- 
lement assurer  que  ce  nombre  sera  énorme.  Au  com- 
mencement du  siècle,  cette  langue  n*était  parlée 
que  par  15  millions  d'hommes  environ. 

L'accroissement  de  notre  nationalité  est  malheu- 
reusement loin  d*ètre  aussi  rapide.  Nous  étions  26  à 
27  millions  au  commencement  du  siècle,  et  nous 
sommes  31  millions  aujourd'hui  :  cela  constitue  une 
bien  faible  augmentation  ;  notre  population  qui  for- 
mait alon  27  pour  100  de  la  population  des  grandes 
puissances  ne  compte  aujourd  liui  que  dans  la  propor- 
tion de  14  pour  100.  Tel  est  le  résultat  lamentable  de 
la  faible  natalité  que  nous  signalions  plus  haut. 

Le  grand  malheur  de  notre  nation,  c'est  de  ne  tirer 
aucun  parti  de  notre  grande  colonie  algérienne,  où 
près  de  la  moitié  des  immigrants  sont  des  étrangers. 
Si  ce  beau  pays  était  le  but  d'un  courant  colonisateur 
sérieux,  on  peut  espérer  que  notre  natalité  se  relève- 
rait, et  que  le  nombre  de  nos  concitoyens  augmen- 
terait de  manière  à  assurer  à  la  France  la  puissance 
militaire,  la  puissance  économique,  et  surtout  la  puis- 
sance intellectuelle  dont  elle  a  disposé  Jusqu'à  ce  jour. 

J.  B— ON. 

DETTE  PUBLIQUE,  nom  qui  désigne  les  engage- 
ments financiers  d'un  Etat.  Ils  sont  de  trois  sortes  : 
temporaires,  viagers  ou  perpétuels.  En  France,  on 
nomme  les  premiers  dette  flottante  ;  les  seconds,  dette 
viagère;  les  troisièmes,  dette  inscrite  ou  perpétuelle 
(V.  Emprunts  publics)  .  La  dette  dite  perpétuelle  se  com- 
pose de  rentes  à  servir  pour  emprunts  faits  ;  néanmoins 
sa  perpétuité,  obligatoire  pour  les  créanciers,  est  facul- 
tative pour  l'Etat,  qui  peut  se  libérer  soit  en  amortis- 
sant sa  dette  par  des  rachats  successifs  sur  le  marché 
de  la  rente,  soit  même  en  offrant  le  remboursement 
direct  k  ses  créanciers,  par  application  du  principe 
qu*un  débiteur  est  toujours  en  droit  de  se  libérer 
quand  il  lui  plaît,  à  moins  de  conventions  contraires  ; 
FEtatn'en  prend  pas  ordinairement  do  ce  genre  ;  mais 
lorsqu'il  en  existe,  on  a  vu  des  gouvernements  les  faire 
annuler  par  une  loi,  lorsque  cela  paraissait  de  l'intérêt 
public.  Des  économistes  regardent  une  dette  comme 
une  plaie  pour  un  Etat  ;  d'autres  prétendent  qu'elle 
leur  donne  du  ressort  et  peut  créer  incessamment  un 
capital  presque  inépuisatSle.  De  nos  Jours,  Alexandre 
Hamilton,  un  des  secrétaires  de  la  trésorerie  des 
Etats-Unis  d'Amérique,  disait  à  ses  concitoyens  :  «  Il  y 
a  une  espèce  de  capital  existant  qui  exclut  toute  inquié- 
tude sur  le  manque  décapitai,  c'est  la  dette  fondée.  » 
tJne  espèce  de  capital  n'est  pas  un  capital  ;  mais  Ha- 
milion  voulait  dire  que  tout  gouvernement  qui  remplit 
«es  engagements  avec  fidélité,  quelle  que  soit  sa  dette, 
trouve  toujours  à  emprunter.  L'emprunt  est  en  effet 
une  ressource  précieuse  pour  les  gouvernements  dans 
•certaines  circonstances  graves  ;  il  les  met  à  même  de 
-soutenir  une  guerre  imprévue,  d'entreprendre  une 
expédition  lointaine  pour  sauvegarder  rhonneur  ou 
l'indépendance  de  la  nation  ;  car  dans  de  tels  moments 
il  est  toujours  difficile,  et  souvent  impossible  d'aus- 
menter  les  impôts,  parce  qu'à  la  veille  ou  par  la  simple 
menace  de  pareils  événements  les  sources  naturelles 
du  revenu  public  diminuent,  le  crédit  particulier,  qui 
alimente  l'industrie,  se  resserre  ou  se  tarit,  et  il  y  a 
gêne  ou  pénurie  pour  les  gouvernés  ;  leur  demander 
alors  un  surcroît  de  sacrifices,  ce  serait,  comme  disait 
Turgot,  vouloir  faucher  plus  que  l'herbe.  Tout  gouver- 
nement qui  travaille  pour  le  présent,  préparant  ou 
assurant  aussi  l'avenir,  il  n'est  pas  injuste  que  l'ave- 
nir supporte  une  partie  des  charges  qui  auront  assuré 
sa  sécurité,  sa  prospérité,  quelquefois  même  son  exis- 
ience.  Les  emprunts  publics  sont  donc  une  habile  et 
ealutaire  invention  que  l'antiquité  n'a  point  connue, 
et  qui  sauve  aux  gouvernements  bien  des  mesures  ini- 
ques, arbitraires,  et  par  conséquent  immorales  et 
tyranniques.  La  chose  difficile,  c'est  de  n'en  point 
abuser,  comme  on  l'a  fait  assez  souvent  dans  les  temps 
modernes,  depuis  et  avant  Louis  XIV  Jusqu'à  nos  Jours. 

Certains  économistes  ont  prétendu  qu'un  Etat  devait 
toujours  avoir  une  dette,  que  c'était  un  signe  de  force 
et  de  prospérité.  Cela  peut  être  vrai,  mais  dans  une 
mesure  restreinte.  La  fortune  des  Etats,  qui  sont  des 
êtres  immortels,  ne  se  règle  pas  comme  celle  des  par- 
ticuliers ;  un  Etat  qui  se  crée  une  dette  a  des  siècles, 
s'il  veut,  pour  la  rembourser;  un  particulier  n'a  que 
peu  d'années,  et  s'il  transmet  à  ses  héritiers  des 
•dettes  un  peu  considérables,  il  a  fait  acte  de  mauvaise 


gestion.  Ensuite  l'Etat,  en  empruntant  Judicieusement, 
accomplit  un  devoir  et  crée,  en  outre,  des  intérêts  qui 
se  rattachent  directement  aux  siens,  ce  qui  ajoute  à  sa 
force  morale.  Mais,  nous  le  répétons,  il  faut  que  des 
circonstances  impérieuses  nécessitent  l'emprunt. 

Parmi  ces  circonstances,  des  économistes  ront  entrer 
l'exécution  de  travaux  publics  extraordinaires  pour  le 
développement  de  la  richesse  du  sol  ou  de  l'indu  strie 
du  pays  ;  d'autres  nient  la  nécessité  pour  l'État  de  se 
charger  d'une  dette  dans  ce  cas  ;  ils  veulent  que  de 
telles  entreprises  soient  abandonnées  à  l'industrie  pri- 
vée. Peut-être  ont-ils  raison,  mais  ils  n'éviteront  pa^; 
la  création  d'une  dette  publique;  car  ces  travaux  ne 
pouvant  se  faire  que  par  des  associations  de  capitaux, 
c'est,  en  fait,  et  sous  une  autre  forme,  une  dette  pu- 
blique ;  et  d'autant  ptus,  pour  citer  dos  exemples  do 
nos  Jours,  que,  pour  des  entreprises  telles  que  des 
chemins  de  fer,  on  réclame  souvent  l'intervention  du 
gouvernement  comme  caution  d'un  certain  taux  d'in- 
térêt à  payer  aux  actionnaires. 

Nous  avons  fait  l'historique  de  la  dette  publique  de 
France  au  mot  Emprunt. 

En  Angleterre,  la  dette  publique  date  de  1694  et 
débuta  par  un  prêt  de  1^200,000  liv.  sterl.{30,252,0u0fr.) 
fait  par  la  Banque  au  gouvernement.  Dans  ce  pays, 
comme  sous  Louis  XIV,  une  fois  la  voie  ouverte,  on 
usa  largement  de  cette  ressource;  ainsi,  en  1772,  la 
dette  éuit  déjà  de  3  milliards  500,000  fr.  ;de  5  milliards 
passés  en  1784,  et  après  la  grande  lutte  avec  la  Révo- 
lution française,  et  surtout  avec  Napoléon  !«',  elle  s*é- 
levait,  en  1815,  à  28  milliards  de  fr.;  aujourd'hui  elle 
est  encore  de  20  milliards,  et  son  service  absorbe  une 
somme  équivalente  environ  à  celui  de  tout  le  revenu 
foncier  de  l'Angleterre. 

Les  sommes  payées  pour  intérêt  de  dette  publique, 
cette  décharge  du  présent  sur  Tavenir,  mais  non  dé> 
charse  absolue,  grèvent  le  présent  d'une  manière  assez 
sensible;  en  France,  les  intérêts  de  la  dette,  fournis 
par  l'impôt,  comme  partout,  absorbent  presque  le  quart 
du  revenu  public;  en  Angleterre,  près  de  la  moitié; 
en  Espaçne,  les  deux  tiers  environ  ;  en  Autriche,  les 
trois  huitièmes;  en  Prusse,  le  quart;  en  Russie,  le 
dixième. 

Le  baron  Louis,  ministre  des  finances  après  la  Ré- 
volution de  1830^  disait  à  ses  collègues  :  «  Gouvernez 
bien,  et  vous  ne  dépenserez  Jamais  autant  d'argent  que 
Je  pourrai  vous  en  donner.  »  Cela  prouve  que  la  dette 
publique  vient  moins  souvent  des  nécessités  poliiiciuen 
que  de  l'inhabileté  ou  de  l'Imprudence  des  gouverne- 
ments. Les  nombreux  engagements  dont  tous  les  États, 
à  peu  près,  sont  grevés  aujourd'hui  montrent  encore 
une  chose  :  c'est  qu'en  matière  de  dette  publique,  les 
vrais  principes  de  la  science  économique  sont  trop  peu 
connus  ou  trop  souvent  méconnus.         C.  D— Y. 

DOCTEUR  (le)  ou  le  pédant,  un  des  personnages  de 
la  comédie  italienne,  un  des  masques  de  la  commedia 
delVarte,  Ce  personnage,  originaire  de  Bologne,  por- 
tant le  vêtement  noir  des  docteurs  de  l'Université  de 
cette  ville,  était  un  savant,  un  Jurisconsulte  ou  un  mé- 
decin ;  il  prétendait  babiller  sans  fin  et  proférait  des 
sentences  sans  discontinuer.  Le  Docteur,  transporté  à 
Paris  avec  une  troupe  italienne  en  16(i3,  modifia  son 
costume  :  il  prit  une  culotte  courte,  une  grande  fraise 
molle  et  une  veste  à  la  Louis  XIV.  Il  fut  remarquable, 
plus  qu'en  Italie,  par  le  pédantisme.  Dans  les  co- 
médies françaises,  le  personnage  du  Pédant  apparut 
glouton,  malpropre,  et  tint  un  langage  burlesque;  on 
en  trouve  la  preuve  dans  les  pièces  de  Larrivey,  de 
Cyrano  de  Bergerac,  de  Scarron,  etc. 

DOUANES.  Par  suite  des  lois  publiées  en  1872  et 
1873  sur  le  recrutement  et  sur  l'organisation  de  l'armée, 
un  décret  relatif  aux  douaniers  a  été  rendu  le  8  avril 
1875.  Le  personnel  du  service  actif  des  douanes  entre 
dans  la  composition  des  forces  militaires  du  pays. 
Chaque  inspeciion  des  douanes  formo,  pour  la  mo- 
bilisation, un  bataillon  de  douanes  ayant  un  nombre 
de  compagnies  généralement  égal  à  celui  des  capi- 
taineries de  l'inspection.  Dans  chaque  bataillon,  les 
compagnies  formées  pour  la  mobilisation  sont  divisées 
en  deux  catégories  :  les  unes,  contenant  des  hommes 
propres  au  service  de  campagne,  seconderont  les  opé- 
rations de  l'armée  active  ;  les  autres,  comprenant  tous 
les  préposés  valides,  seront  appelées  à  concourir  au 
service  de  l'armée  territoriale.  Les  officiers  peuvent 
être  pris  dans  l'armée;  ils  sont  nommés  par  le  pré- 
sident de  la  république,  sur  la  présentation  du  ml- 


ELE 


—  18i4  — 


EMA 


nittre  de  la  guerre,  et  diaprés  les  propositions  du 
ministre  des  finances.  A  dater  du  jour  de  l'appel  à 
l'activité,  les  bataillons  de  douanes  jouissent  des 
mômes  droits,  honneurs  et  récompenses  que  les  corps 
de  Tarmée 

DOU-YÂZAN,  roman  arabe  qui  porte  aussi  les  titres 
suivants  :  S*iyf  zouH-yeten^  Seyf  el-yesen  et  Seyf  el- 
yesel.  Il  a  pour  sujet  lès  aventures  d*un  roi  du  Yémen, 
Seyf,  fils  de  Dou-Yazan,  qui  vivait  dans  le  vi«  siècle 
de  notre  ère.  Il  n'a  pas  été  imprimé  et  forme  deux 
volumes  manuscrits,  qui  sont  rares.  Il  est  connu  en 
Egypte  ;  mais  on  le  lit  surtout  en  Afrique,  dans  la 
régence  de  Tunis  et  en  Algérie.  Le  style  s*est  conservé 
asseï  correct. 

DROIT  (Facultés  de).  Depuis  le  l*Manvier  1876,  les 
rétributions  éventuelles  qu  on  avait  allouées  aux  pro- 
fesseurs et  aux  agrégés,  à  titre  de  droit  de  présence 
aux  examens,  ont  été  supprimées.  Le  traitement  est 
fixé  ainsi  qu'il  suit  :  professeurs  à  Paris,  15,000  fr.  ; 
professeurs  dans  les  départements,  de  6,000  fr.  & 
11,000  fr.;  agrégés  à  Paris,  7,000  fr.;  agrégés  dans  les 
départements,  de  3,000  fr.  à  3,500  fr. 


E 


ECTYPOGRAPHIE,  procédé  d'impression  au  moyen 
duquel  on  produit  des  livres  dont  les  lettres  ressor- 
tent  en  relief  sur  le  papier,  de  manière  à  pouvoir  ôire 
lues  au  toucher  par  les  aveugles.  L'ectypographie  a 
été  inventée,  en  1784,  par  Valentin  HafVy,  directeur 
de  l'instituiion  des  Jeunes  aveugles  de  Paris.  De»  per- 
fectionnemenu  y  furent  apportés  ensuite  par  GuUlé 
et  Dufau. 

ÉLECTRICITÉ.  (Applications  nouvelles.)  (Voir  notre 
Dictionnaire  des  sciences  et  des  arts  appiiaués.  Pour 
les  savants  et  les  ingénieurs  qui  se  sont  voues  exclusi- 
vement à  rétude  des  phénomènes  électriques,  ce  fut 
un  étonnement  profond  et  une  révélation  que  l'expo- 
sition internationale  d'électricité  organisée,  en  1881,  au 
palais  de  l'Industrie,  à  Paris.  Même  pour  des  acadé- 
miciens, des  professeurs,  des  physiciens,  c'éult  une 
science  nouvelle,  constituée  de  tontes  pièces,  avec  ses 
lois  déjà  étudiées,  qui  faisait  son  appariuon,  accompa- 
gnée d'un  cortège  nombreux  d'applications  les  plus 
variées. 

Parmi  ces  applications,  les  plus  récontes  sont  : 
l'éclairage  électrique,  la  transmission  de  l'énergie  à 
distance,  les  accumulateurs,  la  transmission  des  signaux 
de  chemins  de  fer,  le  pesage  des  rations  de  chevaux 
à  la  compagnie  des  Petites  Voitures,  etc.  Nous  allons 
dire  quelques  mots  sur  chacun  de  ces  sujets,  renvoyant 
aux  articles  spéciaux  pour  la  télégraphie,  le  téléphone, 
la  galvanoplastie  et  autres  découvertes  plus  anciennes. 

I  «  Eclairage  électrique.  —  En  1 8 10,  H .  Davy ,1e  célèbre 
chimiste  anglais,  fit  passer  un  courant  électrique  très 
énergique  entre  deux  morceaux  de  charbon,  conduc- 
teurs de  l'électricité  ;  il  obtint  une  lumière  éblouissante 
formée  par  un  arc  lumineux  que  l'on  a  appelé  l'arc 
voUaique.  C'est  la  découverte  de  la  lumière  électrique. 

Cependant  du  temps  de  Davy  on  ne  trouvait  pas 
dans  l'industrie  le  charbon  nécessaire.  De  plus  les 
deux  charbons  brûlent  et  s'usent  irrégulièrement.  Il 
faut  donc  les  rapprocher  l'un  de  l'autre  au  moyen  d'un 
régulateur,  et  ce  n'est  qu'en  1840  que  le  problème  fut 
résolu  par  Foucault.  Depuis,  on  a  créé  une  infinité  de 
régulateurs. 

Vers  1877,  une  révolution  se  fit  dans  l'éclairage  élec- 
trique, et  l'on  peut  dire  que  la  bougie  Jabloskoff  est 
le  véritable  auteur  du  développement  pris  par  la  lu- 
mière électrique.  M.  Jabloskoff  eut  l'idée  de  placer 
les  deux  charbons  à  côté  l'un  de  l'autre,  en  les  sépa- 
rant par  une  matière  inerte  ;  de  cette  façon,  la  lumière 
se  produisant  à  la  pointe  des  charbons,  ceux-ci  n'avaient 
pas  besoin  d'être  rapprochés  par  un  régulateur.  Pour 
éviter  l'usure  inégale  des  charbons,  on  lait  passer  dans 
chacun  d'eux  un  courant  alternativement  positif  et 
négatif,tel  que  le  fournissent  les  machines  dynsmo-élec- 
triques  ordinaires.  Divers  systèmes  de  bougie  ont 
été  essayés  après  la  réussite  de  ces  belles  expériences. 

Dsns  les  méthodes  précédentes  les  charbons  s'usent. 
Trois  Américains,  Maxim,  Edison,  Swan,  ont  eu  pres- 
que en  même  temps  l'idée  de  faire  rougir  le  charbon 
par  le  courant  électrique  dans  uae  sorte  de  petite 


fiole  de  verre  où  l'on  aurait  préalablement  fait  le 
vide.  Le  charbon  ne  brûle  pas  dans  le  vide«  et  pro- 
duit néanmoins,  sans  se  consumer,  une  vive  lumière. 
C'est  le  principe  des  lampes  à  incandescencCy  qui 
sont  appelées  à  un  brillant  avenir. 

Dans  ces  lampes,  le  charbon  a  la  forme  d'un  fil;  il 
est  fabriqué  avec  du  coton,  du  bristoU  on  d'autres  ma- 
tières. 

2<>  Transmission  du  travail  par  C électricité.  — '  Il  y  a 
bien  longtemps  déjà  qu'on  a  esssyé  de  transmettre  du 
travail,  de  la  force,  par  un  fil  électrique,  comme  on 
transmet  une  dépèche.  Hais  ce  problème  est  irès  com- 
pliqué et  la  transmission  ne  se  fait  qu'aux  dépens  d'une 
grande  partie  de  la  force  à  transmettre.  Il  faut  de  plus 
des  fils  conducteurs  spéciaux  et  des  machines  particu- 
lières, pour  remplir  cet  office. 

Néanmoins,  à  part  ces  observstion s  et  lorsqu'on  a  de 
la  force  en  excès,  on  réussit  à  transmeure  l'énergie  au 
moyen  de  Téleciricité.  Le  moteur,  quel  qu'il  soit,  fait 
mouvoir  une  machine  dynamo-électrique  ;  celle-ci  pro- 
duit un  courant  et  ce  courant,  à  l'autre  extrémité  do» 
fil,  pénètre  dans  une  autre  machine  dynamo-électrique 
semblable  à  la  première.  La  machine  réceptrice  est 
dune  mise  en  mouvement  par  le  courant  que  le  mou* 
vement  de  la  première  machine  a  fait  naître. 

On  peut  citer  comme  exemples  :  le  labourage  à 
l'électricité  pratiqué  à  la  ferme  de  Sermalze;  Téclai- 
rage  des  chutes  du  Niagara  par  l'électridté  qu'elles  pro- 
duisent, les  chemins  de  fer  électriques  constamment 
reliés  par  un  fil  à  la  gare  du  départ  qui  leur  transmet 
la  force,  etc. 

3°  Accumulateurs.  —  Dsns  les  piles  ordinaires.  Use- 
produit  à  la  longue,  par  suite  du  dépôt  des  gaz  sur  lfts> 
extrémités  des  fils  des  courants  secondaires  dirigés  en 
sons  contraire  du  courant  de  la  pile.  Cette  électricité, 
en  s'accumulant,  finit  par  former  des  courants  secon- 
daires aussi  puissants  que  le  courant  primitif,  mais 
directement  opposés.  M.  Planté  a  eu  l'idée  de  recueil- 
lir ces  courants  et  de  constituer  des  piles  secondaires 
en  chargeant  lentement  des  piles  spéciales,  au  moyen 
de  l'électricité  des  piles  ordinaires  II  a  réussi  à  em- 
magasiner, à  accumuler  dans  ces  piles  secondaires  de 
réiectricité  qu'on  peut  ainsi  transporter  comme  dans 
une  boite,  et  dépenser  comme  on  le  désire. 

C'est  là  le  principe  des  accumulateuVs,  quel  que 
soit  le  nom  du  système  en  usage. 

4*  Transmission  des  signaux  pour  chemin  d^  fer.  -» 
C'est  une  des  applications  les  plus  précieuses  de  réiec- 
tricité que  la  transmission  rapide  des  signaux  pour  la 
marche  des  trains.  Nous  ne  signalerons  que  les  pédales- 
qui  font  que  le  train  annonce  lui-même  son  arrivée, 
la  manœuvre  des  disques.  L'électricité  est  surtout 
excellente  pour  contrôler  des  appareils,  effacer  des 
signaux,  etc. 

6°  Pesée  des  rations  de  chevaux.  —  La  compagnie  des 
Petites  Voitures  possède  10,0o0  chevaux,  faisant  quatre 
repas  par'  )our.  Chaque  repas  comporte  du  msis,  des 
fèves,  de  la  paille,  de  l'avoine,  du  foin  et  des  tourteaux. 
Pour  donner  exactement  à  cliaque  cheval  la  quantité 
fixée,  c'est  donc  240,000  pesées  à  faire  chaque  jour. 
Ces  pesées  se  font  électriquement.  Les  matières  tom- 
bent sur  une  balance  ;  lorsque  le  poids  est  complet,  un 
courant  ferme  la  trappe,  et  on  recommence  toujours 
ainsi. 

Les  autres  applications  nouvelles  de  l'électricité, 
transmission  de  signaux,  avertisseurs  d'incendies,  ap- 
pareils médicaux,  sont  également  très  nombreuses  et 
très  intéressantes.  F.L— t. 

ÉLIE  DE  SAINT-GILLES,  chanson  de  geste  du 
xiiio  siècle,  d'environ  2,700  vers,  d'un  style  vif  et  net. 
Élie,  fils  du  comte  Julien  de  Saintr-Gilles,  est  enlevé 
des  msins  des  Sarrasins  par  son  père,  par  l'empereur 
Louis  et  par  Aimeri  de  Narbonne.  Il  ne  peut  épouser 
Rosamonde,  fille  de  l'amiral  sarrasin  Macabre,  lui 
ayant  servi  de  parrsin  quand  elle  a  embrassé  le  chris- 
tianisme. L'empereur  lui  donne  en  mariage  sa  sœur 
Avise,  avec  les  fiefs  d'Orléans  et  de  Bourges.  Aux 
événements  de  cette  histoire  est  mêlé  un  personnage 
qui  figure  dans  d'autres  chansons  de  geste,  le  messa- 
ger Galopin,  alerte,  subtil,  sorcier  et  ivrogne.  ÏJt  Bi- 
bliothèque nationale  possède  le  manuscrit  de  la  chanson 
d'Élie  de  Saint-Gilles  ;  il  a  été  publié  par  H.  Raynaud^ 
dans  la  Collection  des  Anciens  textes  français^  Paris, 
1879.  (F.  Histoire  littéraire  de  la  France,  t.  XXII.) 

ÉMAIL.  L'Asie  a  été  le  berceau  de  l'émaillerie.  De 
l'Inde,  l'art  de  faire  des  émaux  cloisonnés  passa  dans 


EMB 


1825  — 


END 


TÀBie  inférieure,  puis  de  l'Asie  en  Egypte.  Le  musée 
du  LouTre,  à  Paris,  possède  deux  bijoux  égyptiens  dé> 
corés  an  moyen  de  ce  procédé  :  un  petit  épervier  et 
un  bracelet.  On  ne  sait  si  les  Grecs  ont  pratiqué  cet 
art  ;  parmi   les  ornements  et  bijoux  qui  ont  été  dé- 
couverts en  Grèce,  il  n'y  a  pas  aëmanx.  Peut-ètre  le 
goi^t  des  grandes  choses,  traitées  avec  tant  de  déli> 
caiesse  dans  ce  pays,  ât-il  rejeter  un  art  imparfait 
alors,  et  qui  ne  pouvait  supporter  la  comparaison  avec 
les  pierres  gravées.  Quant  aux   Romains,  ils  avaient 
perdu  tout  souvenir  des  bijoux  émaillés  avant  le  siècle 
d'Auguste,  et  Pline  n'en  touclie  pas  un  mot.  C'est  alors 
qu'apparut  dans  la  Gaule  celtique  la  champlevée  ;  mais 
cette  indostrie  fut  bientôt  abandonnée,  car  elle  n'était 
plus  en  usage  du  temps  de  Glovis.  L'émaillorie,  dé- 
laissée pendant  quelque  temps  en  Burope,  était  tou- 
jours en  faveur  en  Orient,  et  c'est  là  que  les  Byzantins 
en  reprirent  le  secret  ;  au  ix«  siècle,  elle  avait  un  haut 
degré  de  perfection  à  Constantinople,  et  c'est  à  cette 
époque  que  les  Grecs  commencèrent  à  faire  le  com- 
merce de  leurs  émaux  avec  l'Occident.  En  1069,  Didier, 
abbé  du  Mont-Cassin,  qui  devint  pape  sous  le  nom 
de  Victor  III,  lit  venir  des  émailleurs  de  Gonsianti- 
nople,  et  éublit  sous  leur  direction,  dans  son  mo- 
nastère, des  écoles  d'où  sortirent  vraisemblablement 
les  artistes  qui  répandirent  en  Italie  la  pratique   de 
cet  art.  Les  émailleurs  italiens  ne  fabriquèrent  que 
des  émaux  cloisonnés  Jusqu'à  la  fin  du  xiii«  siècle; 
mais,  dès  la  fin  du  x%  des  artistes  grecs,  attirés  en 
Allemagne  par  les  empereurs  de  la  maison  de  Ssxe, 
avaient  faitconnaltrerémaillerle  sorciseiure  en  relief, 
et  ce  fut  plus  tard  de  la  Lotharingie  (Lorraine)  que 
Suger  fit  venir  des  émailleurs  pour  la  décoration  de 
l'église  de  Saini-Denis.  On  pense  que  c'est  d'après  les 
modèles  laissés  par  ces  artisans  que  se  forma  l'école 
de  Limoges  (K.  ce  mot  dans  le  l}ieiionnav*e),  dont  les 
productions  firent  oublier  celles  des  Allemands  et  des 
Italiens.  Au  xiv«  siècle,  l'adoption  des  émaux  trans- 
lucides fit  passer  le  goût  de  rémaillerie  par  incrus- 
tation ;  puis,  un  siècle  après,  la  découverte  de  la  pein- 
ture en  couleurs  vitrifiées  sur  émailruina  les  procédés 
antérieurs.  Le  plus  intéressant  de  tous  les  vieux  émaux, 
par  son  antiquité   comme  par  son  exécution,  est  la 
paia  doro,  retable  de  l'autel  de  Saint-Marc  de  Venise. 

—  Depuis  que  les  émailleurs  sont  devenus  des  pein- 
tres, leur  art  a  produit  un  très  grand  nombre  d'ou- 
vrages. Ceux  de  la  Renaissance  sont  particulièrement 
remarquables  pour  le  dessin  et  le  clair-obscur.  Les 
artistes  fançais  les  plus  célèbres  dans  les  siècles  sui- 
vants sont  :  Jean  Toutin,  orfèvre  de  Châieandnn 
(1660);  Gribelin,  Dubié,  Moriière,  Vauquer  (1670); 
Pierre  Cliartier,  de  Blois,  peintre  de  fleurs  très  habile  ; 
Jean  Petitot,  mort  en  1691,  dont  les  portraits  sont  des 
chefs-d'œuvre,  et  son  beau-frère  Bordier.  La  peinture 
sur  émail  tomba  en  décadence  et  fut  abandonnée  dans 
la  seconde  moitié  du  xviii«  siècle.  Elle  s'est  relevée  de 
nos  jours.  La  peinture  en  émail  sur  lave,  inventée  par 
Mortelèque,  a  été  employée  à  rornementation  des 
édifices  ;  on  peut  citer,  à  Paris,  l'autel  de  l'église 
Sainte-Elisabeth  par  Abel  de  Pujol,  une  peinture  de 
Perlet  dans  l'église  Saint-Leu,  les  médaillons  de  Per- 
rin,  d'Orsel  et  d'Êtex  qui  ornent  les  cours  du  palais 
den  Beaux- Arts.  D'autres  ensais  ont  été  faits  par  Jo- 
livet  au  porche  de  l'église  Saint- Vincent-de-Paul.  (F. 
iAhdJ\%y  Recherches  sur  la  Peinture  en  émail  dans  fan- 
tiquitiet  au  moyen  doe,  1865,  in-4o.) 

EVIBLÊMBS.  Les  différents  Ëutsont  adopté  des  em- 
blèmes, dont  voici  quelques  exemples  : 
Perse  ancienne  :  une  aigle  d'or  portée  sur  un  char; 

—  Egypte  ancienne  :  un  épervier  ;  —  Empire  romain  : 
une  aigle  tenant  la  foudre  dans  ses  serres  (remplacée, 
à  partir  de  Constantin,  par  le  labarum)  ;  -»  Repu- 
àitque  française  ;  un  bonnet  phrygien  ;  —  Irlande  : 
une  harpe  d'or;  —  Franc fori-sur-le-Mein  .*une  aigle 
éployée;  —  Luàeck:  une  aigle  à  deux  têtes;  —  Ham- 
bourg :  une  forteresse  ;  —  Hanovre  :  un  cheval  ;  — 
Suisse  :  une  croix  blanche;  Brème  :  une  clef  posée  en 
bande;  —  Moldavie  :  une  tôte  de  bœuf;  — -  Venise  :  un 
lion  ;  Rostock  :  une  chimère  vomissant  des  flammes  ; 

—  Malte  :  une  croix  rouge  ;  —  Iles  Ioniennes  :  une 
croix  byzantine  ;  —  Riga  :  cïqU  en  sautoir  ;  —  Cour^ 
lande  :  une  aigle  blancne  ;  —  Perse  moderne  :  un  lion 
couché;  —  Stam  :  un  éléphant  blanc;  —  Empire 
Birman  :  un  paon  faisant  la  roue  ;  -^  Chine  :  un  dra- 
gon à  5  griffes;  —  Surate  :  une  pleine  lune  entourée 
de  3  croissants;  Mahrattes  :  un  croissant;  — >  Pérou: 


un  lama  ;  —  Haïti  :  un  palmier  vert  ;  —  République  de 
l'Éouateur,  Bolivie,  Costa-Rica,  Guatemala  :  une 
montagne; —  Uruguay,  Buenos- Aures,  un  soleil;-^ 
Chili  :  une  étoile  blanche  ;  —  Etats-Unis  :  autant 
d'étoiles  qu'il  y  a  d'États  dans  la  confédération;  — 
Tunis  :  un  croissant  et  une  étoile. 

ÉMIGRETTB,  jeu  à  la  mode  en  France  à  la  fin  du 
xviii<>  siècle.  Il  consiste  en  un  disque  de  bois,  d'ivoire 
ou  d'écaillé,  creusé  dans  son  pourtour  à  une  certaine 
profondeur,  et  traversé  par  un  cordon  (^u'un  double 
mouvement  successif,  un  peu  sec  et  vertical,  d'abais- 
sement et  d'élévation,  fait  enrouler  autour  de  la  rai- 
nure, de  sorte  que  le  disque  remonto  le  long  du 
cordon. 

ENDIGUEMENT.  Nous  avons  parié  des  endigue- 
mnnts  au  point  de  vue  législatif  et  administratif;  ici, 
nous  allons  en  parler  au  point  de  vue  de  l'art,  et  comme 
grands  travaux  d'utilité  publique.  Il  y  en  a  de  deux 
sortes,  les  fluviaux  et  les  maritimes.  L'endiguement 
des  grands  fleuves  consiste  ordinairement  à  leur  tracer 
un  lit  majeur,  la  plupart  du  temps  à  sec,  mais  ca- 
pable de  contenir  leurs  crues  les  plus  grandes;  quel- 
quefois, à  resserrer  leur  lit  dans  certains  endroits, 
pour  le  rendre  plus  navigable.  L'endiguement  mari- 
time a  pour  but  de  protéger  des  terrains  bas  contre 
l'invasion  de  la  mer.  Nous  citerons  des  exemples  de 
ces  trois  sortes  d'endtguements  pour  le  Pô,  la  Loire, 
la  basse  Seine  et  les  cotes  de  la  Hollande. 

Kndiguements  da  Pô,  —  Ce  fleuve,  le  plus  grand 
de  l'Italie,  a  parmi  ses  affluents  une  foule  de  torrents 
qui  donnent  à  ses  eaux  un  accroissement  subit  et  sou- 
vent considérable;  aussi  estril  un  de  ceux  pour  les- 
quels on  a  exécuté  le  plus  de  travaux  d'endiguement. 
Depuis  Turin  jusqu'à  l'Adriaque,  le  Pô  traverse  d'im- 
menses plaines,  qu'il  peut  submerger  dans  une  lon- 
gueur de  260  kil.,  en  ligne  droite,  sur  une  largeur 
variant  de  10  kil.  jusqu'à  40  et  60;  c'est  pour  s'opposer 
à  ces  submersions  que  l'on  a  établi  un  vaste  système 
d'endiguement,  étendu  à  tous  ses  affluents,  torrents 
ou  rivières.  Les  ingénieurs  ont  adopté  le  mode  si 
rationnel  d'un  lit  majeur.  La  largeur  de  ce  lit  est,  en 
la  plupart  des  endroits,  de  2,000  à  4,000  mètres,  et, 
sur  deux  points,  de  6,000  et  de  6,700  mètres.  C'est 
dans  la  région  moyenne  du  fleuve,  au  point  où  tom- 
bent ses  plus  forts  affluents,  que  l'on  a  ménagé  ces 
grandes  largeurs;  elles  forment  comme  des  réservoirs 
qui  exercent  sur  les  crues  une  action  régulatrice  si 
bien  calculée  et  si  sensible,  qu'elle  leur  permet  de 
s'écouler  par  un  lit  qui  finit  par  n'avoir  plus  que  30O 
mètres  de  large,  tandis  qu'aux  environs  de  Pavie  il  en 
a  un  de  5,000  mètres  au  moins  dans  une  longueur  de 
50  kilum.  environ,  et  un  semblable  et  même  plus  long 
en  aval  de  Crémone. 

Le  lit  majeur,  préparé  pour  les  crues  maxima,  est 
néanmoins  cultivé  sur  les  deux  rives  naturelles  du 
fleuve.  On  donne  à  ces  champs  le  nom  de  golénes^ 
comme  qui  dirait  terrains  de  gorge.  Pour  les  garantir 
des  crues  moyennes,  il  y  a,  partout  où  cela  est  néces- 
saire, des  digues  secondaires  dites  de  golénes,  élevées 
sur  les  rives  mômes  du  fleuve.  Ces  antres,  appelées 
maltresses  digues,  tantôt  touchent  au  fleuve,  tantôt 
s'éloignent  de  l'une  ou  de  l'autre  de  ses  rives  à  des 
distances  parfois  de  5  kilom.  Elles  sont  en  bonne  terre, 
épaisses  do  6  à  8  mètres  an  sommet,  gaxonnées  dans 
les  talus  éloignés,  et  plantées  d'oseraies  dans  les  parties 
plus  habituellement  atteintes  par  les  eaux.  Leur  hau- 
teur est  de  8  à  9  mètres  au-dessus  des  plus  basses 
eaux  de  l'étiage,  et  de  Ob,75  et  O^^gO  au-dessus  des 
plus  hautes  crues.  Ces  digues  maîtresses  sont  continues 
de  Pavie  à  la  mer,  et  leur  surveillance  est  très  bien 
organisée  en  temps  de  crue.  L'État  les  entretient. 
Celles  des  affluents  sont  à  la  charge  des  communes, 
et  celles  de  golènes  à  la  charge  des  particuliers,  et 
construites  par  les  riverains.  M.  Comoy,  inspecteur 
général  des  ponts  et  chaussées,  qui  a  étudié  avec 
autant  de  soin  que  de  lumière  les  endig^ements  dont 
nous  venons  de  parler,  s'exprime  ainsi  :  «  La  vallée 
du  Pô  appelait  les  endiguements  par  la  disposition  et 
l'étendue  des  terrains  exposés  à  la  submersion  ;  mais 
c'est  en  plaçant  les  digues  des  deux  rives  à  de  grandes 
distances  l'une  de  l'autre,  et  laissant  ainsi  des  largeurs 
considérables  aux  lits  majeurs  du  fleuve  et  de  ses- 
affluents,  que  l'on  a  pu  rendre  les  endiguements  aussi 
efficaces  qu'ils  le  sont.  »  (  V,  Annales  des  ponts  et 
chaussées,  1868,  novembre  et  décembre.) 

Endiguement  de  la  Loire,  —  La  Loire  est  un  des 


END 


—  1826  — 


END 


fleuves  les  pins  inconstants  de  France.  Non  seulement 
il  est  sujet  à  des  crues  rapides,  mais  roulant  presque 
partout  sur  un  lit  de  sables  mouvants,  son  chenal 
change  souvent  de  place  d*un  Jour  à  l'autre  :  de  là  une 
largeur  considérable  qui  va  de  300  à  400  mètres,  avec 
peu,  d*eau  une  navigation  dirflcile,  qui  ne  peut  se  faire 
par  halage,  ainsi  qu*elle  se  pratique  sur  presque  tous 
les  grands  fleuves»  mais  seulement  à  la  voie,  et  que 
les  basses  eaux  suspendent  pendant  4  et  5  mois  de 
Tannée.  L'endigoement  de  la  Loire,  soit  pour  la  rendre 
plus  navigable,  soit  pour  combattre  ses  débordements, 
a  occupé  les  ingénieurs  depuis  plus  de  dix  siècles. 
Toute  U  rive  droite  du  fleuve,  de  Blois  à  Angers,  sur 
une  longueur  de  160  kilom.,  est  munie  d'une  digue 
qu'on  appelle  la  Levée,  et  dont  l'origine  remonte  à 
Charlemagne  et  à  Louis  le  Débonnaire.  Elle  a  été  sur- 
tout perfectionnée  vers  la  fin  du  xvii«  siècle  ;  sa  base 
a  de  25  à  7S  met.  sur  6  à  12  à  son  sommet,  et  son  talus 
est  revêtu  d'un  empierrement  buté  sur  deux  rangs  de 

{âloUs.  A  partir  du  Bec  d'Allier,  au  confluent  de 
'Allier  et  de  la  Loire,  il  y  a  des  digues  dans  une  mul- 
titude d'endroits,  Jusqu*k  Nantes  et  au  delà;  mais  on 
s'est  contenté  de  réunir  des  lies,  de  faire  des  barrages, 
sans  chercher  à  obtenir  un  lit  régulier  ;  il  en  est  résulté 
qu'à  de  grandes  largeurs  ont  succédé  d'étroits  passages 
et  réciproquement,  ce  qui  devait  de  toute  nécessité 
rendre  à  peu  près  nuls  les  travaux  entrepris  ;  la  Levée, 
une  des  digues  les  mieux  construites,  Ait  rompue 
vingt-sept  fois  de  1496  à  1711.  Il  faudrait  appliquer  à 
la  Loire  le  système  qui  a  si  bien  réussi  pour  le  P6, 
un  lit  majeur,  avec  des  digues  longitudinales,  et  un 
lit  mineur  pour  la  navigation  en  temps  ordinaire. 

Endiguement  de  la  basse  Seine.  —  La  basse  Seine 
ressemble  un  peu  à  la  Loire,  en  ce  qu'elle  est  aussi 
une  rivière  folle,  à  une  vingtaine  de  kilomètres  au- 
dessous  de  Rouen,  et  que  c'est  son  état  habituel.  Le 
problème  à  résoudre  était  inverse  de  celui  du  Pô  :  car 
on  trouve  un  thalweg  ou  lit  naturel  majeur,  et  beau- 
coup trop  majeur.  En  efliet^à  la  Maillerayo,  à  1 1  kilomèt. 
au-desous  de  Rouen,  et  61  en  suivant  les  sinuosités  du 
fleuve,  le  thalweg  mesure  de  bÙO  à  600  met.;  à 
U  kilomèt.  plus  bas,  il  a  déjà  1,100  met.;  à  Quille- 
bœuf,  3,000  ;  et  sur  d'autres  points  Jusqu'à  S,3S0  ;  au 
droit  de  Berville,  à  8  kilom.  en  aval  du  point  précédent 
5,0(10;  enfin  à  Ronfleur,  10,000  mètres.  R  fallait 
réduire  ce  thalweg  à  des  proportions  telles  que  la 
navigation  en  fût  rendue  plus  facile,  moins  périlleuse, 
et  qu'en  même  temps  la  section  réduite  offrit  encore 
d'assez  larges  débouchés  aux  grandes  eaux,  i  e  projet 
des  ingénieurs  fut  celui-ci  :  endiguer  les  deux  rives 
du  fleuve  depuis  la  Mail! eraye  Jusqu'au  Havre,  sur  une 
longueur  de  52,350  met.,  pour  les  deux  rives;  donner 
au  thalweg  500  met.  de  largeur  à  Quillebœuf,  800  met. 
à  Benrille,  1,000  à  Ronfleur  ;  rejeter  le  fleuve  tout  de 
ce  côté,  et  endiguer,  sur  la  rive  droite,  toute  la  partie 
de  la  baie  de  U  Seine  à  partir  de  Tancarville  Jusqu'au 
Havre,  en  laissant  encore  de  Ronfleur  au  Havre  une 
très  vaste  embouchure.  —  Ce  projet,  dont  l'enquête 
commença  en  1844,  fut  accepté  en  partie,  à  la  suite 
de  longs  débats,  et  les  travaux  commencèrent  en  1847. 
Après  trois  ans,  presque  tous  les  endiguements  étaient 
élevés  depuis  la  Mailleraye  Jusqu'à  Tancarville.  Un  des 
effets  de  ce  grand  travail  fut  de  diminuer  sensiblement 
une  barre  qui  existe  près  de  Quillebœuf,  et  qui  devra 
disparaître  grâce  à  cet  ingénieux  procédé  qui  fait  tra- 
vailler le  fleuve,  en  comprimant  ses  eaux,  à  fouiller 
lui-môme  son  lit  dans  les  endroits  où  il  a  des  hauts- 
fonds;  en  outre,  le  chenal  fut  très  sensiblement 
approfondi  dans  ce  parcours.  Les  digues  sont  en  terre 
et  revêtues  de  pierrées  du  côté  du  fleuve.  —  Cette 
opération  n'est  pas  moins  remarquable  au  point  de 
vue  économique  et  commercial  :  on  a  calculé  que  la 
navigation  et  le  commerce  en  retiraient  déjà  une 
économie  annuelle  de  plus  de  3  millions  de  francs; 
en  outre,  toute  les  parties  conquises  sur  un  thalweg  dé- 
mesurément large  ont  fait  retour  à  l'agriculture.  Dans  la 
portion  déjà  exécutée,  on  a  trouvé  déjà  5,000  hectares 
d'excellentes  prairies  évaluées  8  à  10  millions  de  francs, 
et  dont  les  riverains  ont  payé  à  l'État,  aux  termes  de  la 
loi  du  16  sept  1807,  une  plus-value  de  2,800,000  francs 
environ.  Le  travail  s'arrêtait  en  1862  à  la  pointe  de  la 
Roque,  sur  la  rive  gauche  du  fleuve,  à  4,200  met.  en 
aval  de  Tancarville,  sur  la  rive  droite.  Si  le  tracé  pro- 
posé de  là  au  Havre  s'exécute,  on  retrouvera  encore 
15,000  hectares  environ  de  bonnes  terres  à  prairies, 
outre  de  nouveaux  avantages  pour  la  navigation.  — 


Les  projets  de  ce  magnifique  travail  ont  été  faits  par 
MM.  les  ingénieurs  en  chef  Bleschamp  et  Doyat;  ce 
dernier  en  a  commencé  l'exécution  en  1847;  la  pour- 
suite en  fut  ensuite  confiée  à  M.  Baulien,  puis  à 
M.  Énery. 

De  quelques  endiguements  fluviaux  dans  le  Roifaume- 
Uni  de  la  Grande^retagne,  »  U  y  a  deux  cenu  ans 
environ  que  l'on  demande  et  que  Ton  discute  l'endi- 
guement  de  la  Seine.  En  Angleterre,  où  les  travaux 
publics  qui  intéressent  la  navigation  et  le  commerce 
obtiennent  en  général  une  prompte  faveur,  U  existait 
déjà,  avant  l'entreprise  de  l'endiguement  de  la  basse 
Seine,  des  rivières  à  marées  considérablement  amélio- 
rées, c'est-à-dire  approfondies  par  des  endiguemenu 
longitudinaux  qui  ont  fait  disparaître  Jusqu'à  des 
barres  formées  à  leur  embouchure  ;  nous  citerons  entre 
autres  la  Glyde,  en  Ecosse,  à  Glascow,  endiguée  depuis 
1768  et  surtout  1844;  en  Angleterre,  le  Witham,  à 
Boston,  et  le  Welland,  à  Spalding,  depuis  1837;  la 
Nene,  à  Wiesbeach,  depuis  1848  ;  la  Sevem^à  Glocester 
et  Worcester,  depuis  1840  et  1843.  Dans  la  Glyde,  les 
digues  sont  en  enrochements,  et,  dans  les  autres 
localités  citées,  en  fascines,  dont  chaque  couche  est 
séparée  de  la  précédente  par  un  lit  d'argile,  genre  de 
construction  qui  résiste  très  bien,  môme  aux  effons 
de  la  mer.  —  Ces  travaux  sont  beaucoup  moins  con- 
sidérables que  ceux  de  la  basse  Seine. 

Digues  maritimes  de  la  Hollande,  —  Sur  la  mer  du 
Nord'  depuis  l'embouchure  de  l'Escaut  jusqu'à  la 
pointe  du  Helder,  au  détroit  de  Texel,  sur  une  longueur 
de  200  kilomètres,  les  côtes  de  la  Hollande  sont  défen- 
dues par  quatre  digues  remarquables,  que  séparent  et 
continuent  des  dunes,  faisant  l'office  de  digues  natu- 
relles. La  première  protège  l'embouchure  de  l'Escaut 
occidental,  sur  la  nve  gauche  du  fleuve.  —  La  seconde, 
appelée  Digue  de  Westcapelle^  et  qui  date  du  iz«  siècle, 
enveloppe  toute  la  partie  extérieure  de  llie  de  Wal- 
cheren,  sur  4,000  met.  de  développement*  et  munit 
la  rive  droite  de  l'embouchure  de  l'Escaut  occidental. 
—  La  troisième,  nommé  Digue  de  Petten^  ferme,  sur 
une  longueur  de  3,200  met.  la  partie  de  la  côte  où 
débouchait  autrefois  une  des  branches  septentrionales 
du  Rhin.  C'est  un  des  endroits  les  plus  périlleux  de 
cette  vaste  défense.  Enfin  la  Digue  au  Helder  défend 
la  pointe  de  cette  langue  de  terre.  Construite  en  1774 
pour  arrêter  les  envahissements  de  la  mer,  elle  a 
4,575  met.  de  longueur,  30  met.  de  profondeur  et 
15  hectares  de  superficie.  Elle  est  en  pierree  sèches 
et  défendue  par  des  enrochements  et  des  épis.  —  La 
même  précaution  est  prif>e  pour  les  autres  dignes,  qui 
sont  de  sable  couvert  d*one  couche  d'argile  épaisse 
d'un  mètre,  et  armées  de  rangées  de  gros  pieux  for- 
mant des  brise-lames.  Le  pied  est,  en  outre,  défendu 
par  des  couches  de  fascines  entremêlées  d'argile,  ou 
simplement  par  de  grands  tapis  en  fascines,  construit» 
à  terre  et  échoués  à  leur  pied.  Le  talus  des  digue'* 
est  considérable  du  côté  de  la  mer  (15  à  16  mètr.  de 
base  sur  un  de  hauteur),  afin  que,  les  vagues  venant 
rouler  dessus,  leur  choc  s'en  trouve  amorti.  —  Quant 
aux  dunes,  leur  partie  hors  de  l'eau  est  défendue  de 
l'action  des  vents  et  fixée  par  des  plantations  de 
l'herbe  marine  appelée  helm;  et,  dans  les  cas  urgents, 
à  défaut  d'helm,  par  de  petits  faisceaux  de  paiU«  de 
(t",15  de  diamère,  longs  de  1,50,  ployés  en  deux,  et 
plantés,  à  l'angle  en  bas,  à  des  intervalles  de  0",52. 

L'intérieur  de  la  Hollande  est  rempli  de  dignes  : 
car  depuis  la  fin  du  xiv«  siècle  tous  ses  fleuves  sont 
endigués;  la  plupart  des  digues,  même  maritimes, 
construites  en  fascines»  posées  les  unes  en  long,  les 
autres  en  travers,  avec  couche  d'argile  entre  chaque 
assise,  et,  au  sommet,  une  charge  de  pierres  apportées 
de  Norvège,  ou  de  grandes  briques  d'Arnheim,  dans 
la  Gueldre,  pour  augmenter  la  stabilité  de  la  cons- 
truction. Très  souvent,  ce  sommet  sert  de  chemin,  et 
même  de  route.  C'est  en  Hollande  que  Ton  admire 
surtout  le  génie  et  la  patience  de  l'homme  en  lutte 
perpétuelle  contre  U  nature  :  dans  les  tempêtes,  à  la 
moindre  apparence  de  danger,  le  tocsin  sonne,  le  cri 
d'alarme  retentit,  et  toute  la  population  accourt  sur  le 
point  menacé.  R  y  »  toujours,  de  place  en  place, 
d'immenses  quantités  de  fascines,  de  roseaux,  d'argile, 
de  paille,  de  bois,  de  pierre,  pour  parer  aux  brèches 
qui  peuvent  se  déclarer.  L'entretien  des  digues  coûte 
fort  cher  (environ  20  millions  de  francs  par  an),  mais 
c'est  à  ce  prix  que  la  Hollande  existe  ;  d'une  autre  part, 
la  vente  des  Schorres  (V.  ce  mot  plus  bas)  vient,  pour 


ENP 


—  1827  — 


ENP 


rfitat,  en  allégement  de  ces  dépenses.  (F.  Annales  des 
ponts  et  chaussées^  année  1846,  sept,  et  cet.;  Essai 
sur  Vhist.  hydraulique  delaNéerlandef  par  M.  Lacroix.) 

C.  D— Y. 

ENDUITS  HYDROFUGES,  mélanse  de  cire,  de 
résine,  de  corps  gras,  d'hnile  de  îln  cuite,  qu'on 
emploie  pour  rendre  imperméable  Tintérieur  des  cons- 
tructions, en  les  faisant  pénétrer  dans  les  murs  au 
moyen  d*une  chaleur  très  intense.  Us  préservent  les 
murs  de  l'humidité,  arrêtent  la  formation  du  salpêtre 
et  empochent  la  détérioration  des  peintures.  Thénard 
et  d'Arcet  inventèrent  les  enduits  hydrofugesen  1813; 
on  a  pu  garantir  de  Tinflltratlon  des  eaux  pluviales  la 
coupole  du  Panthéon  de  Paris,  et  préserver  les  pein- 
tures du  baron  Gros.  —  On  emploie  souvent,  surtout 
pour  les  rez-de-chaussée,  des  mélanges  bitumineux. 
On  obtient  aussi  de  bons  résultats,  dans  les  apparte- 
ments, en  recouvrant  les  murs  de  feuilles  de  plomb 
fixées  avec  des  clous  de  cuivre  et  sur  lesquelles  on 
colle  le  papier  de  tenture  :  on  peut  remplacer  le 
plomb  par  l'étain  dit  paillon  de  Cooke,  ou  par  un 
alliage  de  plomb,  étain,  bismuth  et  zinc,  imaginé  par 
Rousseau  et  Poisson. 

ENFANTS  (Travail  des).  L'assemblée  nationale  a 
voté  (19  mai-juin  1874)  une  loi  sur  le  travail  des  enfants 
et  des  filles  mineures  employés  dans  l'industrie.  Ils 
ne  peuvent  èire  admis  dans  les  manufactures,  usines, 
ateliers  ou  chantiers  avant  l'Age  de  douze  ans  révolus, 
«t  employés  plus  de  doruze  heures  par  Jour,  divisées 
par  des  repos.  Si  une  commission  administrative  per- 
met d'emplover  des  enfants  Agés  de  dix  ans  révolus, 
on  ne  peut  les  assujettir  à  une  durée  de  travail  de 
plus  de  6  heures  par  Jour^  divisées  par  un  repos.  Les 
enfants  ne  peuvent  être  employés  k  aucun  travail  de 
nuit  jusqu'à  l'Age  de  seize  ans  révolus.  La  même  inter- 
diction est  appliquée  à  l'emploi  des  filles  de  seize  à 
vingt  et  un  ans,  mais  seulement  dans  les  usines  et 
manufactures.  Les  enfants  de  moins  de  seize  ans  et 
les  filles  de  moins  de  vingt  et  un  ans  ne  peuvent  être 
employés  k  aucun  travail,  par  leurs  patrons,  les  diman- 
ches et  fêtes  reconnues  par  la  loi.  Dans  les  usines  à 
feu  continu,  les  enfants  peuvent  être  employés  la  nuit 
ou  les  dimanches  et  Jours  fériés  ;  on  leur  assure  le 
temps  et  la  liberté  nécessaires  pour  l'accomplissament 
des  devoirs  religieux.  Aucune  fille  n'est  admise  dans 
les  travaux  souterrains  des  mines,  minières  et  car- 
rières. Nul  enfant  ayant  moins  de  douze  ans  révolus 
ne  peut  être  employé  p4r  un  patron  qu'autant  que  ses 
parents  ou  tuteurs  Justifient  qu'il  fréquente  une  école 
publique  ou  privée.  Tout  eufant  admis  avant  douze  ans 
dans  un  atelier  doit,  Jusqu'à  cet  Age,  suivre  les  classes 
d'une  école  pendant  le  temps  libre  du  travail  ;  il  doit 
recevoir  l'instruction  pendant  deux  heures  au  moins, 
si  une  école  spéciale  est  attachée  à  l'établissement 
industriel.  Aucun  enfant  ne  peut,  avant  l'Age  de  quinze 
ans  accomplis,  être  admis  à  travailler  plus  de  6  heures 
psr  Jour,  s'il  ne  justifie  qu'il  a  acquis  l'instruction 
primaire  élémentaire.  Sur  la  demande  du  maire,  les 
chefs  d'industrie  ou  patrons  ont  un  registre  pour  les 
enfants,  leur  font  connaître  et  appliquer  les  conditions 
de  la  loi,  leur  interdisent  certains  travaux  insalubres, 
et  tiennent  les  ateliers  dans  un  état  constant  de  pro- 
preté et  convenablement  ventilés.  L'Etat  désigne  des 
inspecteurs  pour  le  travail  des  enfants.  Les  manu- 
lacieurs,  directeurs  ou  gérants  d'établissements 
industriels  et  les  patrons  qui  ont  contrevenu  aux 
prescriptions  de  la  loi  et  des  règlements  de  l'adminis- 
tration sont  poursuivis  devant  le  tribunal  correction- 
nel, et  punis  d'une  amende  de  16  à  60  fr.  chaque 
fois,  et  pouvant  aller  Jusqu'à  SOO  fr. 

ENFANTS  DE  TROUPE  (V.  Dictionnaire).  Avant 
la  révolution,  les  conditions  qui  réglaient  le  recrute- 
ment de  l'armée  française  étaient  loin  d'être  les  mê- 
mes qu'à  notre  époque.  Etait  soldat  celui  qui  n'avait  pas 
d'autre  métier  et  qui  embrassait  la  profession  dos 
armes  soit  par  goût,  soit,  le  plus  souvent,  par  misère. 
Il  résultait  de  cet  état  de  choses  que  les  régiments 
comptaient  dans  leur  effectif  bon  nombre  de  soldats 
mariés  dont  les  enfants  naissaient  pour  ainsi  dire  à 
l'ombre  du  drapeau,  quelquefois  entre  deux  batailles. 
De  là  le  nom  d'enfants  de  troupe.  Il  n'est  donc  pas  sur- 
prenant que  i'attenUon  des  gouvernants  se  soit  portée 
sur  ces  Jeunes  déshérités  du  sort.  La  première  régle- 
mentation qui  les  concerne  apparaît  dans  l'ordonnance 
du  14  avril  1771  relative  aux  gardes-françaises  et  qui 
attachait  à  chaque  dépôt  trois  enfants  de  troupe  par 


compagnie.  On  ne  sait  si,  dans  l'application,  cette 
première  ordonnance  donna  des  résultats  satisfai- 
sants. Quoi  qu'il  en  soit,  le  ministre  Saint-Germain, 
prenant  pour  point  de  départ  l'ordonnance  de  1771, 
voulut  aller  plus  loin  en  créant  une  sono  de  privilège 
au  profit  des  enfants  de  troupe.  D'après  son  projet, 
les  enfanu  nés  dans  les  corps  devaient  être  élevés 
aux  frais  de  l'Etat.  Malheureusement  ce  projet,  qui 
fut  réalisé  dans  d'autres  milices  étrangères,  n'eut  pas 
de  suites  en  France.  Le  ministre  qui  avait  voulu 
créer  un  privilège  en  faveur  des  enfants  des  soldats 
et  en  même  temps  réduire  notablement  les  dépenses 
occasionnées  par  d'autres  privilèges  dont  Jouissaieiit 
les  nobles  qui  servaient  dans  la  garde  du  roi,  pré- 
para sa  propre  perte  et  dut  se  retirer. 

Il  faut  admettre  que  l'institution  des  enfants  de 
troupe  préoccupa  constamment  l'autorité  militaire  :  car, 
à  partir  de  la  Révolution,  on  voit  apparaître  successi- 
vement une  foule  de  règlements  concernant  la  matière. 
En  1791,  on  croit  simplifier  les  choses  en  abolissant 
les  enfants  de  troupe  et  en  leur  octroyant  seulement 
quelques  secours.  L'arrêté  du  7  thermidor  an  Vlll  ré- 
tablit deux  places  d'enfant  de  troupe  par  compagnie, 
à  la  condition  d'être  nés  d'un  légitime  mariage  et 
d'être  agréés  par  l'inspecteur  aux  revues,  sur  la  |>ré- 
sentation  du  colonel.  Cette  réglementation  subsista 
jusqu'en  1832,  époque  à  laquelle  les  enfants  de  troupe 
furent  astreints  à  l'engagement  militaire;  toutefois, 
en  1837,  on  les  admit  au  nombre  des  vingt-sept  mu- 
siciens que  comportait  chaque  régiment  ;  ainsi  que 
cela  s'était  déjà  pratiqué  sous  le  premier  Empire  et 
sous  la  Restauration. 

Ces  diverses  réglementations  avalent  le  tort  de 
limiter  à  un  chiffre  déterminé  le  nombre  d'enfants  de 
troupe  à  admettre  par  régiment  ou  par  compagnie.  En 
effet,  tel  régiment  n'avait  pas  le  nombre  voulu  d'en- 
fants do  troupe,  tandis  que  tel  autre  n'en  pouvait 
plus  admettre  faute  de  vacances.  Si  en  accordant 
protection  aux  enfants  des  soldats,  on  avait  l'intention 
d'encourager  le  mariage  dans  l'armée,  il  est  certain 
que  par  cette  mesquine  réglementation  on  man- 
quait le  but  cherché. 

Des  décisions  ministérielles  ont  réglé  également  la 
solde  et  les  allocations  è  attribuer  aux  enfants  de 
troupe  ainsi  quA  l'instruction  qu'ils  doivent  recevoir. 
Conformément  à  l'arrêté  du  7  thermidor  an  YIII,  l'é- 
ducation des  Jeunes  enfants  était  confiée  à  des  offi- 
ciers ou  à  des  sous-officiers  de  chaque  corps  qui 
devaient  leur  enseigner  les  éléments  des  lettres  et 
de  l'art  militaire,  ainsi  que  la  course  et  la  natation.  Le 
22  mai  1858,  parut  un  décret  qui  modifia  de  nou- 
veau les  admissions  des  enfants  de  troupe.  D'après  ce 
décret,  chaque  compagnie  d'infanterie  comptait  trn 
enfant  de  troupe  :  les  compagnies,  escadrons  ou  bat- 
teries de  cavalerie,  d'artillerie,  du  train  des  équipa- 
ges ainsi  que  les  sections  d'ouvriers  d'administration 
en  comptaient  deux.  Les  fils  légitimes  de  soldats  et 
d'officiers,  Jusqu'au  grade  de  capiuine,  éuieni  seuls 
admis.  En  cas  de.  mobilisation,  les  enfants  Agés  de 
moins  de  quatorze  ans  restaient  au  dépôt.  Aussitôt 
qu'ils  avaient  atteint  leur  quatorzième  année  ils 
étaient  tenus,  suivant  leurs  aptitudes,  de  servir 
comme  tambour,  trompette  ou  musicien  ou  de  tra- 
vailler dans  les  bureaux  ou  les  ateliers  du  corps.  A 
dix-sept  ans  il  leur  éuit  loisible  de  contracter  l'enga- 
gement volontaire.  Cette  réglementation  ne  devait  pas 
être  la  dernière.  Lors  de  l'élaboration  de  la  loi  du 
13  mars  1875,  relative  à  la  constitution  des  cadres  et 
des  effectifs  de  l'armée,  le  législateur  se  préoccupa 
des  enfants  de  troupe  et  l'article  28  de  ladite  loi 
porta,  en  principe,  la  création  d'écoles  d'enfants  de 
troupe.  L'application  de  cette  même  loi  amena  un 
décret  du  24  avril  1875,  instituant  à  Paris  une  école 
d'essai  qui  devait  être  installée  dans  les  bâtiments  de 
l'hôtel  des  Invalides.  D'après  ce  décret,  l'effectif  maxi- 
mum des  élèves  à  entretenir  à  l'école  d'essai  était  fixé 
à  six  cents,  répartis  en  trois  divisions  formant  cha- 
cune deux  compagnies.  Les  enfants  de  la  première 
division  étaient  armés.  Tous  les  élèves  avaient  droit 
à  une  solde  de  50  centimes  par  jour  et  à  une 
prime  Journalière  d'entretien  de  10  centimes.  Un 
aumônier  était  chargé  du  culte  catholique  et  de  l'ins- 
^uction  religieuse. 

L'école  d'essai  des  enfants  de  troupe  fut  réellement 
installée  non  pas  aux  Invalides,  mais  à  Rambouillet. 
Un  règlement  ministériel  du  4  septembre  1875  fixa  les 


ENS 


—  1828  — 


ESP 


conditiont  d'admission  et  le  fonetionnement  intérieur 
de  l'école  qui  comprit  non  seulement  les  enfants  de 
troupe  immatriculés  dans  les  corps  de  troupe,  mais 
encore  un  certain  nombre  d'enfants  issus  de  familles 
militaires  et  qui  pouvaient  y  être  admis  comme  pen- 
sionnaires. Le  prix  de  la  pension  était  fixé  à  400  francs 
et  celui  du  trousseau  à  450  francs.  Douze  sœurs  de 
Saint-Vincent  de  Paul  étaient  chargées  des  détails  de 
rinflrmerie.  de  Thabillement  et  de  la  nourriture  des 
élètes.  Enfin,  le  8  mars  188S,  parut  un  nouveau  dé- 
cret portant  exécution  de  la  loi  du  19  Juillet  1884 
ayant  pour  objet  la  suppression  des  enfants  de  troupe 
dans  les  régiments  et  la  création  des  six  écoles  mili- 
taires préparatoires.  D'après  ce  décret,  l'école  d'essai 
de  Rambouillet  est  constituée  à  titre  définitif  comme 
école  préparatoire  d'infanterie  et  il  est  créé  cinq  autres 
écoles  militaires  préparatoires  :  trois  pour  Tinfanterle 
i  Saint-Hippolyte  (Gard),  aux  Andelys  (Eure),  â  Mon- 
treoil-sur-BliBr  (Pas-de-Calais)  ;  une  pour  la  cavalerie 
et  la  gendarmerie,  à  Autun  (Saône-et-Lolre),  une 
pour  l'artillerie,  le  génie  et  le  train,  k  Blllons  (Puy- 
de  Dôme).  L'effectif  maximum  de  chaque  école  est 
fixé  h  500  élèves  nt  les  enfants  qui  entrent  dans  ces 
établissements  doivent  y  rester  Jusqu'au  jour  de  leur 
engagement. 

ENSEIGNEMENT  PRIMAIRE.  La  loi  du  16  juin  1881 
a  établi  la  gratuité  absolue  de  l'enseignement  primaire. 
Pour  subvenir  aux  frais,  elle  rend  obligatoires  les 
4  centimes  spéciaux  créés  par  les  lois  de  1850  et 
1875,  sauf  le  droit  pour  les  communes  de  s'exonérer 
en  inscrivant  au  budget,  pour  la  môme  destination, 
une  somme  égale  au  produit  des  centimes  supprimés. 
En  cas  d'insuffisance  des  produits,  l'État  fournit  une 
subvention.  Une  loi  de  la  môme  date  assure  la  com- 
pétence des  maîtres  en  exigeant  le  brevet  de  capacité 
f»our  l'enseignement  primaire  et  jBupprimant  toutes 
es  équivalences  établies  par  la  loi  ae  1850  (lettre 
d'obédience  de  révoque).  Les  personnes  exerçant  sans 
ce  titre  devaient  passer  l'examen  dans  le  cours  d'un  an 
à  partir  de  la  loi  ;  en  cas  d'échec,  le  dernier  délai  était 
le  mois  d'octobre  1884. 

Une  loi  votée  a  la  môme  époque  rend  renseigne- 
ment  primaire  obligatoire  pour  les  enfants  des  deux 
sexes  âgés  de  six  ans  révolus  à  treize  ans  révolus. 
Chaque  année  le  maire  dresse,  d'accord  avec  la  com- 
mission municipale  scolaire,  la  liste  des  enfants  de 
six  à  treize  ans  et  avise  les  personnes  qui  ont  la  charge 
de  ces  enfants  de  la  rentrée  des  classes  ;  cette  personne 
fait  savoir  au  maire  si  elle  entend  faire  donner  l'en- 
seigpiement  à  l'enfant  dans  la  famille  ou  à  l'école  et 
désigne  l'école;  en  cas  de  non-déi*.laration,  le  maire 
choisit  d'office  l'école.  Si  l'enfant  manque  l'école 
quatre  fols  en  un  mois,  sans  excuse  valable,  la  per- 
sonne responsable  est  mandée  devant  la  commission 
scolaire  qui  lui  rappelle  le  texte  de  la  loi  ;  en  cas  de 
récidive  dans  les  douze  mois,  la  commission  ordonne 
l'inscription  pendant  quinze  jours  on  un  mois,  à  la 

λorto  de  la  mairie,  des  nom,  prénoms  et  qualités  de 
t  personne  responsable,  avec  indication  du  fait-relevé 
contre  elle.  En  cas  de  nouvelle  récidive,  on  applique 
Tartlcle  463  du  code  pénal.  Un  certificat  d'études 
primaires  est  décerné,  après  examen  public  ;  l'enfant 
peut  s'y  présenter  dès  l'âge  de  onzH  ans.  Ceux  qui 
ont  obtenu  à  cet  âse  le  certificat  sont  dispensés  des 
deux  dernières  années. 

ENSEIGNEMEiST  SECONDAIRE  DES  FILLES.  Une 
loi  votée  le  21  décembre  1880  a  créé  en  France  rensei- 
gnement secondaire  des  filles  oui  n'y  existait  pas. 
Elle  décide  qu'il  sera  fondé  par  l'État,  avec  le  concours 
des  départements  et  des  communes,  des  externats 
destinés  &  l'enseignement  secondaire  des  filles.  Des 
internats  pourront  y  être  annexés  sur  la  demande  des 
conseils  municipaux  et  après  entente  avec  l'État.  Des 
bourses  seront  fondées  au  profit  des  internes  et  demi- 
pensionnaires.  L'enseignement  comprend  l'enseigne- 
ment moral,  le  français  et  une  langue  vivante  au 
moins;  les  littératures  ancienne  et  moderne;  la 
géographie  et  la  cosmographie  ;  l'histoire  nationale  et 
un  aperçu  de  l'histoire  générale;  l'arithmétique,  les 
éléments  de  la  géométrie,  de  la  chimie,  de  la  physi- 

3ue  et  de  l'histoire  naturelle;  Thygiône;  l'économie 
omestique  ;  les  travaux  à  l'aiguille  ;  des  notions  de 
droit  usuel;  le  dessin;  la  musique;  la  gymnastique. 
L'enseignement  religieux  sera  donné  sur  la  demande 
des  parenu  par  des  ministres  du  culte,  en  dehors 
de     heures   de  classe.    Il  sera,  à   la    sortie    des 


conrs,  délivré   un  diplôme  à  la  suite  d'an  examen. 

Une  loi  du  26  juillet  1881  a  fondé  une  école  normale 
dlnternes,  destinée  à  recruter  des  professeurs  femmes 
pour  ces  écoles  secondaires.  Les  élèves  sont  admises 
au  concours  et  entretenues  gratuitement  par  l'État. 
Cette  école  normale  a  été  établie  à  Sèvres  et  ouverte 
en  novembre  1881  :  elle  contient  40  élèves. 

ÉGLI(X)HDE,  instrument  à  vent  et  à  clavier,  inventé 
à  Paris,  en  1835,  par  le  facteur  Isoard.  Le  ton  y  est 
produit  au  moyen  d'un  courant  d'air  dirigé  par  une 
embouchure  sur  une  corde  de  piano. 

ESCAUFAILUS,  chaufferette  à  main  en  usage  depuis 
le  zii!«  siècle  Jusqu'à  la  fin  du  xvxe.  C'était  une  boule 
creuse  de  métal,  au  centre  de  laquelle  on  plaçait  un 
panier  rempli  de  braise,  disposé  de  manière  à  ne  pou- 
voir se  renverser,  quels  que  fussent  les  mouvements 
de  l'appareil. 

ESPRIT,  mot  de  sens  très  variés  qu'emploient  les 
savants,  les  moralistes,  les  critiques  et  le  vulgaire,  et 
qui  se  prête  à  l'expression  des  choses  les  plus  diverses. 
La  science  étudie  dans  l'homme  l'effet  des  esprits 
animaux  ou  vitaux;  la  psychologie  note  Vesprit  de 
corps  parmi  nos  faiblesses,  et  range  Vesprit  de  con- 
servation au  nombre  des  penchants  qui  nous  distin- 
guent des  autres  êtres;  enfin  la  critique  dogmatique 
ou  simplement  les  entretiens  polis  des  honnêtes  gens 
mettent  sous  le  mot  esprit  une  foule  de  significations 
différentes.  Et  d'abord  il  veut  dire  le  tour  d'esprit 
particulier  à  chaque  écrivain  :  c'est  ainsi  qa*on  pein- 
dra Vesprit  de  Bossnet  et  Vesprit  de  Fénelon  par  les 
qualités  respectives  qui  constituent  l'originalité  pro- 
pre de  ces  deux  génies.  Il  exprime  aussi  les  habitudes 
d'esprit  qui  finissent  par  établir  entre  les  écrivains 
comme  des  catégories  distinctes  :  Pascal  l'entendait  es 
ce  sens  quand  il  écrivait  Vesprit  géométrique  par 
opposition  à  Vesprit  de  finesse;  et  c'est  confoncément 
à  la  môme  signification  que  nous  distinguons  l'etprif 
littéraire  de  Vesprit  philosophique.  Ces  distinctions 
sont  légitimes  et  fondées  sur  la  réalité;  il  est  mani- 
feste que  le  liitérateur  lira  les  Méditations  de  Oescartes 
avec  d'autres  yeux  que  le  philosophe.  —  Ailleurs, 
Vesprit  signifiera  le  caractère^  et  les  plus  ignorants 
comprennent  quand  on  dit  que  Vesprit  anglais  n'est 
pas  Vesprit  français;  que  Napoléon  I*^  avait  Vesprit 
grand,  mais  emporté;  qu'un  enfant  a  Vesprit  mdie  et 
ferme,  ou  doux  et  docile.  D'autres  fois,  il  s'applique 
au  raisonnement  :  quiconque  raisonne  bien  a  i  esprit 
droit  et  juste;  quiconque  raisonne  mal  a  Vesprit  faux 
et  de  travers.  Pourquoi  rencontre-t-on  souvent  des 
esprits,  assez  Justes  d'ailleurs,  qui  sont  absolument 
faux  sur  des  choses  importantes  ?  Par  faiblease  natu- 
relle, par  vanité,  par  présomption,  par  un  effet  de 
notre  éducation,  de  notre  entourage,  de  notre  vie. 
Tant  d'influences  du  dedans  et  du  dehors  obscurcissent 
la  lumière  naturelle,  déjà  si  faible,  si  bornée  par  elle- 
même!  Les  philosophes  signalent  avec  raison  deux 
grandes  manières  d  avoir  l'esprit  faux  :  c'est  d'abord 
de  déduire  hardiment  les  conséquences  d'un  principe, 
svant  d'avoir  examiné  si  le  principe  lui-même  est  vrai, 
(f  Les  ignorants  sont  des  sots  ;  or  vous  êtes  un  ignorant» 
donc  vous  êtes  un  sot  »  ;  un  homme  qui  nous  tiendrait 
ce  langage  serait  non  seulement  un  être  grossier,  mais 
encore  nu  esprit  faux,  quoique  son  raisonnement  fàt 
irréprochable  ;  il  partirait,  en  effet,  d'un  principe  faux, 
car  l'ignorance  et  la  sottise  ne  sont  pas  des  termes 
synonymes.  C'est  ensuite  de  tirer  des  conséquence» 
fausses  d'un  principe  vrai  :  ainsi  ferait  un  Juge  qui. 
parce  que  l'homicide  est  défendu,  condamnerait  on 
homme  qui  tue  son  assassin. 

Enfin,  il  y  a  Vesprit  proprement  dit,  cette  chose 
que  tout  le  monde  voudrait  avoir,  et  dont  la  nature  se 
montre  si  peu  libérale.  Ils  sont  rares,  en  effet,  les 
hommes  qui  savent  trouver  les  idées  ingénieuses,  les 
comparaisons  neuves,  les  allusions  fines,  les  traits 
imprévus,  mômes  les  Jeux  de  mots;  qui  ont  l'art  de 
dire  des  choses  communes  d'une  façon  nouvelle  et 
piquante,  de  substituer  l'image  saisissante  et  la  méta- 
phore singulière  à  l'expression  propre  ou  vulgaire, 
bref,  qui  sont  hommes  desprit.  Il  ne  faut  pas  confondre 
Vhomme  d'esprit  et  le  tel  esprit  :  l'un  tient  de  l'autre, 
il  est  vrai;  seulement  le  premier  terme  ne  se  prend 
jsmais  en  mauvaise  part,  et  le  second  est  quelquefois 
prononcé  ironiquement.  La  raison  de  cette  différence, 
dit  Voltaire,  c'est  qu'homme  d'esprit  ne  signifie  pas 
esprit  supérieur,  ulent  marqué,  tandis  que  bel  esprit 
le  signifie;  homme  d^esprit  n'annonce  point  de  pré- 


FOL 


—  1829  - 


FOL 


tion,  et  bei  tsitrit  est  une  affiche;  c'est  une  espèce 
profession,  et  cela  même  expose  à  Tenvie  et  au 


tention, 
de 

ridicule.  —  L'esprit  n'est  pas  dé  mise  partout  et  ne 
saurait  tenir  lieu  de  tout  le  reste.  Il  y  a  longtemps 
qu'on  a  dit  que  les  grandes  pensées  viennent  du  cœur; 
•ce  qui  signifie  que  l'esprit  peut  inspirer  les  pensées 
agréables,  mais  ce  n'est  pas  la  source  des  sentiments 
élevés.  D'où  il  suit  que  de  Tliomme  d'esprit  à  l'homme 
de  cœur  la  distance  n'est  pas  médiocre.  Et  si  nous 
considérons  les  écrits,  que  d'œuvrestoù  l'esprit  Joue 
le  moindre  rôle,  où  même  il  disparaît  sous  peine 
d'ôtre  un  défaut  I  Le  sublime  et  le  simple,  voilà  ce 
qui  fait  la  vraie  beauté  des  grands  ouvrages  dont  le 
but  est  d'instruire  et  de  toucher.  On  ne  conçoit  guère 
une  tragédie  proprement  spirituelle,  parce  que  les 
personnages  tragiques  sont  sous  le  joug  d'une  passion» 
et  que  la  passion  ne  court  point  après  l'esprit.  Cher- 
ches les  fautes  de  goût  qu'a  laissé  échapper  Corneille: 
beaucoup  proviennent  de  ce  que  l'auteur  s'est  substitué 
an  moment  à  ses  héros,  et  leur  a  prêté  des  propos 
recherchés,  des  mots  d'esprit  à  contre-sens.  Pourquoi 
Voltaire  a-t-il  échoué  dans  la  comédie?  Parce  qu'il 
avait  tant  d'esprit,  qu'il  ne  pouvait  s'empêcher  d'en 


donner  à  tous  ses  personnages,  et  leur  était  ainsi  leur 
il  est  vrai  que  resprit  a  ses  inconvénients 
et  ses  périls!  A.  H. 


naturel.  Tant 


ESSIMER,  terme  de  fauconnerie.  Amaigrir  un  oiseau 
pour  le  rendre  moins  lourd  au  vol.  On  dit  aussi  esseimer, 

^SORANT,  terme  de  blason  ;  se  dit  d'un  oiseau 
représenté  les  ailes  à  demi  ouvertes  et  l'œil  regardant 
le  ciel. 

ESSORÉ,  en  blason,  se  dit  de  la  partie  supérieure 
d'une  tour,  d'une  église,  d'un  château  ou  d'une  maison 
dont  l'émail  est  différent  de  celui  du  corps  de  la  cons- 
truction. Par  exemple  :  tour  d'argent  essorée  d'asur. 
L'expression  est  ici  employée  dans  son  sens  étymolo- 
gique. Essorer^  vent  dire  mettre  k  l'air,  s'élancer  dans 
les  airs,  du  bas-latin  exaurare,  prendre  le  vent.  Son 
application  au  vocabulaire  héraldique  s'explique  ainsi 
que  de  toutes  les  parties  du  bâtiment  il  y  en  a  pas 
de  plus  exposées  à  l'air  que  la  couverture. 

ëOLALIE  (Gantilène  de  sainte),  le  poème  le  plus 
ancien  de  notre  langue,  écrit  au  ix«  ou  au  x»  siècle. 
Elle  a  été  découverte  en  1837,  par  M.  Hoffounn  de 
Fallersleben,  dans  un  manuscrit  de  la  bibliothèque  de 
Yalenciennes  :  elle  a  souvent  été  publiée  et  com- 
mentée :  M.  Gaston  Paris  en  a  donné  un  fac-similé 
dans  sa  reproduction  des  plus  anciens  monuments  de 
la  langue  française.  Elle  contient  23  vers  rimes  deux 
à  deux  ;  le  nombre  de  syllabes  varie  pour  chaque  dis- 
tique de  neuf  à  onze.  Le  sujet  est  une-  complainte  sur 
le  martyre  de  sainte  Eulalie,  brûlée  par  l'empereur 
Maximien. 


F 


FAGTITIVË  (Forme)  ou  causale ^  forme  particulière 
de  la  conjugaison  dans  les  langues  aryennes  et  sémiti- 
ques,  par  laquelle  on  rend  actif  un  verbe  neutre,  et 
tnédiaïe  une  action  simple.  En  hébreu,  la  lettre  h  est 
le  signe  caractéristique  de  cette  forme;  le  AipAi/ repré- 
sente le  mode  factitif  actif, et  le  hophalle  passif;  on  les 
distingue  par  la  différence  des  points  voyelles.  Ex.  : 
yatal,  il  a  tué;  hiktil^  il  a  fait  tuer;  hoktat^  il  a  été 
tué  sur  l'ordre  de  quelqu'un  ;  iochab^  il  était  assis  ; 
hochibf  il  fit  asseoir.  —  Parmi  les  langues  modernes, 
les  langues  germaniques  sont  les  seules  qui  aient 
conservé  des  spécimens  de  cette  forme  à  l'aide  de 
l'inflexion  de  la  voyelle  du  radical,  ou  du  changement 
de  la  consonne  :  trinken,  boire  ;  trûnken^  faire  boire, 
abreuver  ;  sitzen^  être  assis  ;  setzent  asseoir  ;  steften, 
être  debout;  steUen^  placer  debout;  anglais  di-ink  et 
drench^  sit  et  set;  lie,  être  couché  ;  iay,  coucher, 
poser.  Le  dialecte  des  Allemands  méridionaux  a  seul 
conservé  cette  forme  dans  un  grand  nombre  de  verbes 
que  TAUemagne  septentrionale  a  eu  le  tort  de  négliger. 

FOLK-LORE,  mot  composé  anglais  signifiant  au 
sens  littéral  :  savoir  populaire  (do  folk,  peuple  ;  lare, 
savoir,  leçon).  Folk-lore  est  un  terme  de  convention 
qui  sert  à  designer  d'une  façon  générale  et  absolue 
l'étude  comparée  des  traditions  et  des  littératures 
populaires.  En  France,  si  la  chose  est  ancienne,  comme 
nous  le  verrons  plus  loin,  l'usage  de  ce  mot  est  d'ail- 
leurs assex  nouveau.  Folk-lore  avait  été  usité  dans 


son  sens  actuel  ponr  la  première  fois  en  Angleterre, 
dans  le  numéro  de  VAthinoium  portant  la  date  du 
22  août  18&8.  Chez  nous  l'adjectif /îo/Âr/om^e  ne  remonte 
guère  au  delà  de  quatre  années,  et  il  ne  fut  pas 
adopté  sans  une  certaine  résistance.  On  le  conserve 
faute  de  mieux;  on  peut  dire  que  ce  qui  a  fait  sa  for- 
tune, c'est  son  élasticité.  Ne  voulant  pas  dire  grand 
chose  de  précis,  au  sens  littéral,  on  a  pu  l'appliquer 
à  une  collection  de  connaissances,  dont  quelques 
branches  suffiraient  à  elles  seules  par  constituer  une 
science.  Au  début  folk-lore  ne  s'appliquait  guère 
qu'aux  contes,  aux  légendes,  «ux  chants  populaires, 
aux  proverbes,  aux  devinettes,  aux  petites  formules 
du  langage  courant,  aux  axiomes  du  sens  commun,  en 
un  mot  a  cet  ensemble  qu'on  peut  appeler  du  nom 
collectif  de  littérature  orale.  Avec  assez  de  raison  on 
y  a  ajouté  la  linguistique,  étant  donné  qu'il  est 
des  mots  qui  supposent  des  croyances,  ou  des  tra- 
ditions. Puis  est  venue  Tethnograpliie  traditionnelle, 
expliquée  par  l'étude  comparative  des  coutumes, 
croyances,  superstitions,  costumes,  instruments^ 
bijoux,  etc.  Dans  cette  science  nouvelle  des  litté- 
ratures populaires,  des  traditions  locales,  il  faut 
savoir  tenir  com|)te  des  répercussions  nombreuses 
dans  le  cours  des  siècles  et  des  modes  abandonnées  ou 
reprises.  Les  compositions  naïves  et  parfois  môme 
grossières  dans  l'expression  que  les  lettrés  empruntent 
au  peuple  pour  les  revêtir  d'une  forme  élégante,  sont 
susceptibles  de  retourner  un  jour  à  leur  point  d'o- 
rigine, dépouillées  de  tout  revêtement  artistique,  et 
redeviennent  ainsi  populaires.  C'est  pour  cette  raison 
qu'on  a  rangé  sous  la  dénomination  de  folk-lore  cer- 
tains livres  de  colportage,  l'imagerie  populaire,  parfois 
même  l'iconographie  monumentale  en  raison  des  sym- 
boles traditionnels  qu'elle  résume  ou  représente.  On 
peut  donc  dire  qu'en  ce  moment,  sous  le  vocable 
folk-lore,,  en  raison  de  sa  forme  élastique,  il  est  i>er- 
mis  de  ranger  tout  l'ensemble  des  choses  populaires 
à  des  degrés  ou  &  des  titres  différents,  qui  jusou'à 
présent  avaient  été  négligées,  oubliées  ou  non  clas- 
sées. En  Angleterre,  le  pays  de  Walter  Scott,  le 
folk-lorisme  est  d'un  usage  plus  ancien  qu'en  France. 
Avant  Walter  Scott,  AUan  Ramsay,  Pepys  et  le  duc  de 
Roseburgh  avaient  dès  la  fin  du  siècle  dernier  collec- 
tionné de  vieilles  ballades.  En  Allemagne,  dès  1786, 
MuBseus  avait  publié  des  contes  directement  recueillis 
de  la  tradition  orale.  Après  lui,  Herder  écrivit  tout  un 
volume  sur  les  chants  populaires  des  divers  peuples. 
Les  frères  Grimm,  Wolf,  Liebrecht,  Keller,  firent  des 
recherches  passionnées  dans  ce  sens.  Le  mouvement 
s'étendit  d'Allemagne  en  Bohême,  en  Suède,  en  Dane- 
mark. On  n'ignore  pas  que  Wagner  emprunta  beau- 
coup de  ses  livrets  aux  légendes  Scandinaves  et  ger- 
maniques des  Niebelungen. 

Les  Bddas  tiennent  une  grande  place  dans  la 
littérature  Scandinave  moderne  et  aussi  dans  la  cons- 
truction de  certains  monuments  qui  ornent  les  places 
publiques  de  Stockholm.  En  Hongrie  les  recherches 
du  musicien  Listz  ont  ouvert  une  source  abondante 
de  documents  populaires.  Les  bulletins  de  l'Académie 
royale  de  Belgique  publièrent  en  1851  un  très  cu- 
rieux rapport  du  compositeur  Gevaert  sur  la  situai  ion 
de  la  musique  en  Espagne,  rapport  oue  les  folk-loristes 
doivent  considérer  comme  un  précieux  spécimen  des 
traditions  chantées  du  peuple  espagnol.  A  l'heure 
qu'il  est  le  foik-iore  compte  une  armée  d'érudits 
dans  le  monde  entier.  La  Russie,  la  Hollande,  l'Italie, 
le  Portugal,  la  Serbie,  la  Roumanie,  l'Albanie,  la 
Grèce,  ajoutent  leurs  travaux  à  ceux  des  pays  qui  avec 
l'Angleterre,  l'Allemagne  et  la  France,  ont  préparé 
le  renouvellement  des  légendes  primitives.  En  France 
une  vraie  science  s'est  constituée  autour  de  ces  recher- 
ches. Des  érudits  d'esprit  curieux  autant  que  critique 
comme  MM.  Gliampfleury,  Wekerlin,  Gaidoz,  Paul  Se- 
billot,  le  comte  de  i'uymaigre  avec  M.  Renan,  lui  aussi, 
écrivant  l'admirable  histoire  de  son  Broyeur  de  lin  et 
discourant  au  Diner  celtique  sur  le  caractère  des  gens 
de  l'extrême  Occident,  ont  contribué  à  mettre  la 
France  au  premier  rang  des  pays  qui  s'occupent  des 
vieux  souvenirs  populaires  et  veulent  étendre  sur  tous 
les  esprits  cultivés  l'influence  naïve  et  délicieuse  des 
traditions  locales.  Que  la  chose  exprimée  par  ce  mot 
nouveau  soit  ancienne  en  France,  cela  ne  saurait  faire 
de  doute.  Voilà  de  longs  siècles  que  des  écrivains 
français  font  des  folk-lore  sans  le  savoir.  Etienne  de 
Bourbon,  contemporain  de  saint  Louis,  auteur  d'histo- 


FUS 


—  1830  — 


GAR 


ridttet  publiées  récemment,  en  même  temps  ({a*i1  cons- 
tate l'âction  de  la  littérature  écrite  sur  la  littérature 
orale,  prouve  que  plusieurs  contes  recueillis  de  nos 
Jours  oe  la  bouche  du  peuple  étaient  connus  dès  le 
xni*  siècle  et  servaient  aux  lettrés  d'exemple  pour  étayer 
des  moralités.  Sans  parler  des  forts  et  viffourenx  con- 
teurs des  xvi«  etxvii«  siècles,  il  est  bon  de  savoir  que 
dès  1783,  avant  l'allemand  Husseus  et  trente  ans  avant 
Grimm,  Restif  de  la  Bretonne  avait  publié  dans  ses 
Contemporains  par  gradation  cinq  contes  recueillis 
avec  un  souci  de  la  forme  populaire  qu'on  ne  retrouve 
de  nos  Jours  que  chez  les  meilleurs  collecteurs.  Peu 
après,  la  Révolution  et  l'Empire  firent  une  enquête 
sur  les  patois  et  les  statistiques  des  départements  qui 
renferment  un  grand  nombre  de  documents  intéres- 
sants, et  qui  ont  sérieusement  préparé  le  mouvement 
littéraire  auquel  président  aujourd'hui  avec  une  pers- 
picacité et  une  conscience  admirables  des  savants  comme 
HM.  Paul  Sebillot,  Gaidoz  et  de  Puymalgre.  L'énumé- 
ration  des  ouvrages  sur  le  folk-lore  est  considérable. 
Les  llTTesou  les  revues  dont  voici  rénumération  peu- 
vent suffire  à  conduire  aux  sources  les  esprits  curieux 
d'accomplir  tme  excursion  plus  complète  dans  ce 
domaine  de  la  traditioa  populaire,  où  les  origines  de 
l'esprit  français  tiennent  »ne  si  large  place  :  Fofk- 
Lare,  par  H.  le  comte  de  Puymaigre;  le  Dieu  gaulois 
du  soleil  et  le  symbolisme  de  la  race,  par  M.  H.  Gai- 
doz ;  Mythologie  et  Folk^Lore,  par  M.  Chantepie  êm  1& 
Saussaye  ;  Cuslom  and  myth,  par  M.  Lan  g;  Folk-Lore 
journal,  revue  anglaise  ;  voir  aussi  la  Revue  Celtique, 
Melusine,  revue  de  mythologie  et  de  folk-lore  rédigée 
par  Bill.  Gaidoz  et  Rolland  ;  voir  encore  les  différents 
articles  de  MU.  Gaidoz  et  Paul  Sebillot  dans  la  Revue 
archéologique,  la  Revue  ethnographique,  et  la  Revue 
de  l  histoire  des  religions.  (Y.  au  Supplément  les  mots 
Places,  Presses,  Hoté,  Hussudx,  Lits  clos.) 

F.  L. 

FONDATIONS.  Le  système  des  fondations  tubu- 
laires  est  originaire  de  l'Inde,  d'où  les  Anelais  l'ont 
apporté.  Les  Indiens  creusent  le  sol  jusqirà  la  ren- 
contre de  l'eau,  placent  alors  une  couronne  de  bois, 
construisent  au-dessus  un  tube  en  maçonnerie  de 
briques,  et  font  ensuite  descendre  ce  dernier  par 
dragage  intérieur  et  chargé  de  poids.  Us  établissent 
plusieurs  files  de  tubes  semblables  ;  puis,  quand  ils 
sont  parvenus  au  terrain  solide,  ils  les  remplissent 
de  béton,  et  assoient  sur  leur  sommet  les  premières 
assises  de  l'édifice.  Brunel  paraît  avoir,  le  premier  en 
Europe,  employé  en  grand  le  système  des  fondations 
tubulaires  en  1825,  pour  éublir  à  Botherite  le  puits 
qui  donne  accès  an  tunnel  de  la  Tamise.  En  1839,  les 
AnK:lais  remplacèrent  les  pniis  en  maçonnerie  par  des 
tubes  en  fonte  :  dans  le  principe,  on  fit  descendre  ces 
tubes  par  le  procédé  indien;  mais,  en  1843,  Potts 
imagina  de  les  enfoncer  en  faisant  le  vide;  en  1845, 
l'ingénieur  français  Triger  créa  la  méthode  par  l'air 
comprimé,  qui  est  suivie  aujourd'hui. 

FORMAT  DES  LIVRES.  Les  plus  anciens  livres 
imprimés  sont  in-folio.  Le  plus  ancien  in-4*  connu  est 
le  Vocabularium,  publié  en  1467,  à  Etwil,  près  de 
Mayence.  Aide  Manuce  employa  pour  la  première  fois 
rtn-8o,  en  1500,  pour  une  édition  de  Virgile.  L'tn-12 
paraît  avoir  été  connu  dès  1472;  il  fut  réservé  d'abord 
aux  livres  de  piété.  Le  plus  ancien  tn-S2  est  VOf/ice 
de  la  sainte  Vierge  imprimé  à  Venise  en  1473  par 
Nie.  Jenson.  Les  Elzévlers  ont  mis  à  la  modertn-18et 
rtn-24  du  xvi*  siècle. 

FORMES  DE  RADOUB.  Avant  llnvention  de  ce 
genre  de  bassin  en  maçonnerie,  on  était  obligé,  pour 
radouber  un  navire,  de  l'abattre  en  carène  ou  ae  le 
haler  sur  une  cale.  Les  plus  anciennes  formes  de 
radoub  ont  été  établies  en  Angleterre  an  milieu  du 
xviii*  siècle.  La  première  qu'on  ait  eue  en  France  a 
été  faite  à  Brest.  Les  docks  flottants  se  rattachent,  par 
leur  destination,  aux  formes  de  radoub.  Ce  sont  de 

Sandes  caisses  qu'on  remplit  d'eau  de  manière  à  les 
ire  enfoncer  assez  pour  qu*il  soit  possible  d'amener 
au-dessus  le  navire  à  réparer;  après  quoi  on  les  vide, 
ce  qui  leur  permet  de  soulever  le  bâtiment  et  de 
l'amener  à  la  surface  :  ce  sont  des  appareils  indispen- 
sables pour  la  réparation  des  navires  en  fer. 

FUSIL.  En  1809,  un  armurier  de  Paris,  Pauli^,  exé- 
cuta le  premier  fusil  se  chargeant  par  la  culasse,  ce 
qui  simplifie  le  chargement  et  permet  un  tir  plus 
rapide  ;  mais  son  invention  n'eut  pas  de  succès,  il  en 
fut   de  même   du  système  présenté  en    1813    par 


Julien  Leroitj,  dans  lequel  le  canon  se  rabat  sur  le 
cdté  gauche,  parallèlement  à  lui-même,  en  tournant 
autour  d'un  axe  horizontal  parallèle  an  canon  ;  le  fusil 
manquait  de  solidité.  Le  système  Lefaucheux  est 
impropre  aux  armes  de  guerre,  parce  que  le  canon 
s*y  brise  au  tonnerre  et  que  le  soldat  doit  toujours 
pouvoir  se  servir  de  la  baïonnette.  Dans  le  système 
Robert,  la  tranche  poslérieure  du  tonnerre  se  découvre 
au  moyen  d'un  levier  à  poignée  qui  fait  l'office  de 
culasse  :  le  soldat  introduit  la  charge  qal  est  une 
cartouche  munie  d'une  amorce  fulminante,  et  referme 
la  culasse  ;  lorsqu'on  presse  la  détente,  le  chien  vient 
écraser  Tamorce  sur  une  sorte  d'enclume  intérieure, 
et  le  coup  part.  Dans  le  système  Treuille  de  Beaulieu, 
qui  fut  appliqué  au  mousqueton  des  ceut-gardes, 
le  tonnerre  se  découvre  en  abaissant  une  culasse 
moblle«  au  moyen  de  la  sous-garde  elle-même  qui 
forme  ressort;  ce  ressort.  Jouant  le  rôle  du  chien 
lorsqu'on  presse  sur  la  détente,  vient  choquer  une 
petite  tige  métallique  reposant  sur  la  capsule,  qui  est 

B lacée  verticalement  dans  le  culot  de  la  cartouche, 
ans  le  système  Chassepot,  le  canon  se  termine  posté- 
rieurement en  un  manchon  où  vient  s*engager  une 
pièce  mobile,  munie  d'une  poignée  et  d'un  s^tème 
obturateur;  cette  culasse  mobile  sert  à  oavnr  on  à 
fermer  le  canon,  en  glissant  dans  le  manchon.  Le 
système  Monceaux  a  pour  culasse  mobile  un  cylindre 
creux,  aux  extrémités  duquel  sont  fixés,  d*ttn  c6té, 
rapoareil  obturateur,  et,  de  l'autre,  une  poignée  à 
l'aide  éà  laquelle  on  peut  démasquer  l'entrée  du 
canon.  Le  fosil  Spencer  se  charge  par  la  culasse.  Il 
est  à  deux  cane»»  superposés  :  le  canon  inférieur 
contient  6  charges  eft  réserve,  venant  nne  à  une 
prendre  la  place  de  la  7*^  eartonche,  qui  ae  trouve 
dans  le  canon  supérieur.  L»  canon-réservoir  est 
plus  légèrement  établi  que  le  véritaMe  canon  ;  néan- 
moins l'arme  est  lourde,  incommode  à  manier,  et 
se  détériore  facilement  en  campagne.  Le  ftett  Gras, 
qui  a  été  adopté  pour  l'armée  française  en  1879»  est 
à  culasse  mobile,  à  percussion  centrale  ;  le  percateur 
est  mû  par  un  ressort  |i  boudin  :  il  pèse  4  kilog.  350, 
porte  à  1,200  mètres  et  tire  12  coups  à  la  minute.  — 
Un  armurier  d'Erfurth,  Dreyse,  qui  avait  travaillé  à 
Paris,  chez  Pauly,  inventa,  en  1827,  le  fUsil  à  aiguille 
ou  fusii  prussien.  Du  côté  droit  du  canon  à  la  place 
du  chien,  il  v  a  une  clef,  bout  de  fer  haut  de  0*05, 
et  de  0",02  de  diamètre;  en  frappant  un  petit  coup 
sec  du  creux  de  la  main  droite  contre  cette  cief, 
elle  se  déplace,  et  le  canon  s'ouvre  sar  nne  lon- 
gueur de  5  ou  6  centimètres  ;  on  dépose  la  cartouche 
dans  la  cavité,  on  donne  un  léger  coup  à  la  def  en 
sens  inverse,  et  le  canon  se  ferme  hermétiquement. 
A  l'extrémité  du  canon,  au-dessus  de  la  crosse,  se 
trouve  on  bouton  en  fer  terminé  par  un  anneau  ;  en 
le  tirant  d'un  mouvement  du  pouce,  on  comprime  an 
ressort  en  spirale  auquel  est  atuchée  une  aiguille 
d'acier.  Quand  on  presse  la  détente,  le  ressort  devient 
libre,  lance  l'aiguille  dans  la  matière  fulminante  dont 
le  bas  de  la  cartouche  est^arni,  et  produit  Texpiosion. 
Le  premier  fusil  de  Dreyse  se  chargeait  par  la  bouche 
du  canon  et  Taiguille  partait  de  l'intérieur  de  la  culasse  ; 
c'est  en  1836  que  le  chargement  par  la  culasse  fut 
essayé.  Après  divers  perfectionnements  un  modèle 
fut  adopté,  en  1841,  par  l'armée  prussienne. 


G 


GAITÉ  (Théâtre  de  la).  Ce  théâtre  fut  démoli,  sons 
le  second  Empire,  en  1864,  pour  le  percement  du  bou- 
levard du  Prince-Engène.  Une  nouvelle  scène  fut 
alors  bâtie  sur  le  square  des  Arts-et-MétIers.  En  1869, 
l'acteur  Ballande  tenta  d'y  donner,  le  dimanche,  des 
représentations  de  Jour,  généralement  oonsacréss  à 
des  ouvrages  classiques  ;  chaque  pièce  était  précédée 
d'une  conférence  qui  exposait  le  sujet  et  en  faisait 
valoir  les  beautés. 

GARDES  FORESTIERS.  Un  décret  du  président  de 
la  République,  en  date  du  8  avril  1885,  a  donné  nne 
organisation  militaire  au  corps  forestier.  A  l'ordre  de 
mobilisation,  les  agents  et  préposés  sont  organisés, 
par  conservation  des  forêts,  en  compagnies  ou  sections 
de  chasseurs  forestiers,  les  unes  actives,  les  autres 


GOR 


—  1831  — 


GRA 


terrUariales.  Ses  règlements  sont  les  m6moft  que  pour 
les  douaniers.  (K.  plus  haut  Douanes.) 

GASCON  (Dialecte),  une  d,es  variétés  de  la  langue 
d'Oc,  entre  Bordeaux  et  Toulouse.  L'agénois  (V.  ce  mot) 
en  est  le  type  prindpal.  On  peut  juger  du  gascon  par 
les  chansons  imprimés  :  Pey  de  Garros,  Poesia  gnsco- 
nas,  Toulouse,  1667,  ln-4*;  G.  Bedout,  lou  Parterre 
gatcoun,  Bordeaux,  164),  in-4®  ;  Recueil  des  poètes 
gasconSj  Amsterdam,  1700»  2  fol.  in-8*;  Cénac-Mon- 
caut,  Littérature  populaire  de  ta  Gascogne^  Paris,  1868, 
in-18.  Ce  dernier  a  aussi  publié  un  dictionnaire  gascon 
du  département  du  Gers,  Paris,  1863,  in-8o.  V.  Lu- 
chaire,  ies  Idiomes  pyrénéens,  1879,  Paris. 

GERHAIN-EN-LAYl!:  (Château  de  Saint-).  Le  musée 
gallo-romain  de  ce  château,  dont  la  formation  fut 
décrétée  en  1802,  a  éié  ouvert  en  1867.  La  première 
salle  contient  les  objets  trouvés  dans  les  alluvions  qua- 
ternaires, c'est-à-dire  à  lasuite  des  grands  déluges;  ce 
sont  les  silex  grossièrement  travaillés  que  l'on  a  trou- 
vés môléaà  des  ossements  d'animaux  dont  l'espèce  est 
éteinte  {elephas  primigenius^  rhinocéros  &  narines 
cloisonnées,  grand  hippopotame,  cerf  d'Islande,  ours 
des  cavernes,  etc.)  ;  les  brèches  osslfères  des  cavernes 
de  la  Dordo^ne,  avec  les  débris  du  renne,  de  l'auroch, 
du  bouquetin  ;  les  ossements  ciselés,  gravés,  creusés, 
façonnés  aux  usages  domestiques  ou  hiératiques  ;  une 
collection  d'armes  en  silex  donnée  par  le  roi  de  Dane- 
mark; les  résultats  des  fouilles  pratiquées  dans  les 
sablières  du  bassin  de  U  Seine  ;  les  objets  découverte 
dans  la  Somme  par  Boucher  de  Perthes.  —  La  deuxième 
salle  est  consacrée  aux  monuments  sépulcraux  méga- 
lithiques, aux  dolmens  et  anx  menhirs.  Ici  l'industrie 
de  l'homme  se  développe  ;  déjà  il  sait  polir  la  pierre 
et  ébranler  les  masses  rochensea;  il  taille  le  silex,  et, 
on  l'ajusuht  dans  un  bois  de  cerf  fendu,  s'en  fait  une 
arme  ;  il  fait  sécher  l'argile  au  soleil  et  invente  l'art 
du  potier;  il  aiguise  des  os,  et  d'une  arôte  de  poisson 
su  nbrique  une  aiguille.  —  Le  grand  tumulus-dolmen 
de  Gavrinis  occupe  à  lui  seul,  quoique  en  réduction, 
la  troisième  salle.  —  Dans  la  quatrième  salle  sont 
réunion  les  inscriptions  et  les  médailles  gauloises. 

Au  Hf^cond  étage,  où  l'on  monte  par  l'escalier  de 
François  l«',Be  trouvent  d'abord  les  objets  appartenant 
à  l'époque  lacustre,  qui  a  vu  la  Un  de  l'âge  de  pierre 
et  le  commencement  de  l'ère  de  bronxe.  Ce  sont  des 
haches  de  silex,  des  dards,  des  couteaux,  des  outils, 
des  instruments  en  os,  en  écaille,  en  arête,  en  bois 
dur  à  moitié  dégrossi  ;  des  vases  en  terre  ou  en  bronxe, 
si  hermétiquement  clos,  que  des  grains  de  céréales 
et  des  glands  s'y  sont  conservés  Jusqu'à  nous.  —  La 
galerie  voisine  est  consacrée  à  l'âge  de  bronze.  La 
pierre  rède  le  pas  au  métal  :  les  épées,  les  lances,  les 
haches  creuses,  à  gaine,  à  oreillettes,  à  un  ou  deux 
tranchants,  les  marteaux,  les  poignards  ont  succédé 
aux  armes  de  Jet  et  au  casse-tète  du  sauvage.  Avec 
Tairain  se  présentent  les  ustensiles  de  la  vie  domes- 
tique, les  fragments  de  tissus,  les  engins  de  pêche  et 
de  chasse,  les  menus  objets  de  toilette  féminine, 
colliers,  bracelets,  épingles  à  cheveux,  agrafes,  etc. 
—  Une  salle  est  consacrée  à  la  Gaule  de  Brennus.  On 
ne  se  contente  plus  du  bronie  :  on  travaille  aussi  le 
fer,  l'or  et  l'argent.  Il  y  a  là  encore  des  échantillons 
de  poteries  :  ce  n'est  que  de  la  terre  cuite,  sans  cou- 
verte et  sans  émail. 

GLACIÈRE.  L'usage  des  glacières  est  de  temps 
immémorial  dans  plusieurs  parties  de  l'Asie.  Les  Grecs 
et  les  Romains  l'empruntèrent  aux  Orientaux  ;  ils  les 
disposaient  à  peu  près  de  la  môme  manière  qu'on  le 
fait  aujourd'hui.  En  France,  on  ne  connaissait  pas 
encore  les  glacières,  lorsqu'on  1553  le  médecin  natu- 
raliste Pierre  Bodon  décrivit  celles  ou'il  avait  vues  en 
Turquie.  Quelques  années  plus  tard,  on  en  établit  à 
Paris.  Le  mot  glacière  ne  figurait  pas  encore  dans  les 
ditionnaires  en  1636. 

GORMONT  ET  ISEMBART,  chanson  de  geste  du 
xn«  siècle,  dont  le  chroniqueur  du  xiii«  siècle,  Phi- 
lippe Mouskes.  nous  a  conservé  l'analyse,  et  dont  un 
fragment  de  600  vers  a  été  retrouvé  de  nos  Jours  et 
publié  par  M.  de  ReiiTenberg  dans  son  édition  de  la 
Chronique  rimée  de  Ph.  Mouskes,  Bruxelles,  1 883,  in-4*. 
Le  sujet  se  rapporte  à  la  bataille  de  Saucourt.  Gor- 
mont,  chef  normand,  envahit  le  Ponthieu,  accompa- 
gné d'Isembart,  seigneur  de  la  Ferté,  exilé  pour  ses 
crimes,  et  qui  compte  sur  les  Normands  pour  recon- 
quérir son  domaine  et  so  venger  du  roi  Louis  III, 
son  onde.  Ici  les  Normands  sont  changés  en  Sarra- 


sins. C'est  l'épopée  dont  le  Chant  de  Louis  est  la 
cantilène. 

GRAPHIQUES  [nouveaux  procédés  d'arts).  —  Le 
caractère  distinctif  de  nos  éditions  françaises  en  cette 
fin  du  XIX*  siècle  est  certainement  la  multiplicité  et 
la  variété  des  vignettes  et  des  gravures  oui  s'y  marient 
au  texte  ;  dans  les  œuvres  sorties  des  pierres  des  im- 
primeurs renommés,  aux  siècles  précédents,  on  ne 
trouve  pas  cette  môme  recherche  ae  l'ornementation, 
ce  même  souci  du  pittoresque  par  la  couleur;  il 
semble  que  les  Aide  et  les  Ëstienne  avaient  tout  à 
fait  oublié  que  les  habiles  copistes  de  manuscrits  se 
plaisaient  avant  eux  aux  enluminures  brillantes  : 
quelques  lettres  inliiales  tirées  en  noir  et  rouge, 
quelques  filets  et  culs-de-lampe,  rouges  également, 
sont  les  seules  traces  de  fantaisie  décorative  que 
l'on  rencontre  dans  les  belles  éditions,  correctes  et 
froides,  des  xvi*,  xvu«  et  xviii*  siècles.  Tout  au  plus, 
vers  1750,  voit-on  apparaître  des  tentatives  en  vue 
d'égayer  le  livre  :  un  éditeur  nommé  Caracloli  publia» 
à  Paris,  plusieurs  volumes  Imprimés  en  diverses  cou- 
leurs ;  mais  il  s'en  tint  là  et  d'ailleurs,  mourut  dans 
la  ruine  :  le  public  ne  s'engouait  pas  pour  ces  pro- 
ductions d'un  art  Jadis  si  fort  prisé. 

U  nous  faut  arriver  Jusqu'en  ces  trente  dernières 
années  pour  voir  l'impression  illustrée  et  surtout 
Vimpression  en  couleurs^  prendre  un  développement 
extraordinaire.  On  la  doit  à  la  découverte  de  la  pho' 
tographie.  Antérieurement,  on  ne  connaissait,  dans 
ce  genre,  —  sans  parler  des  procédés  de  taille^douce 
—  que  les  impressions  de  Silbermann  (1835)  ;  elles 
étaient  faites  typographiquemeni,  sur  des  planches 
gravées,  en  nombre  égal  à  celui  des  couleurs  que 
l'on  voulait  'obtenir;  Silbermann  produisait  surtout 
ainsi  de  grandes  pages  d'album,  des  compositions 
allégoriques,  imprimées  hors  texte  et  des  affiches. 
Bientôt  ces  essais  attirèrent  l'attention  des  praticiens 
et,  toujours  en  typographie  directe,  c'est-à-dire  on 
osant  des  moyens  t^rpographiques  ordinaires  :  lettres 
et  ornements  en  matière,  vignettes  à  «  rentrures  »  don- 
nant d'abord  los  fonds,  puis  esquissant  les  traits  par 
des  tirages  successifs.  Plusieurs  imprimeurs,  parmi 
lesquels  Pion  (de  Paris)  et  Danel  (de  Lille),  exécu- 
tèrent ce  que  Ton  appela  les  aquarelles  typogra- 
phiques :  elles  eurent  un  grand  succès  de  curiosité, 
à  l'exposition  universelle  de  1867  :  désormais,  l'édition 
ilustrée  allait  acquérir,  en  France,  une  grande  impor- 
tance. Cette  importance,  il  faut  l'imputer  entièrement 
anx  commodités  nouvelles  que  donnent  les  applications 
multiples  de  la  photooraphie  :  ce  dernier  procédé 
supprime  un  intermédiaire,  le  graveur;  11  facilite 
ainsi  le  travail,  en  doublant  sa  rapidité  d'exécution; 
en  outre,  il  permet  de  diminuer  ou  de  grandir,  à 
volonté,  la  composition  originale  ;  on  peut  l'étendre 
Jusqu'aux   proportions   considérables  d'une    grande 

f>lai)che  ornementale  ou  la  réduire  de  façon  à  en  faire 
'en-tête  d'un  chapitre.  La  déconverte  de  la  photo- 
graphie est  donc  le  véritable  point  de  départ  de  la 
révolution  introduite  dans  les  industries  de  livre. 

C'est  à  un  graveur  nommé  Gillot  qu'il  convient  de 
reporter  tout  l'honneur  de  cette  application  de  la 
photographie  à  la  production  des  œuvres  d'art; 
M.  Gillot  s'avisa,  au  moyen  de  certaines  manipula- 
tions chimiques,  de  reporter  sur  xtnc  les  composi- 
tions des  dessinateurs  en  obtenant  des  pleins  et  des 
creux  à  l'aide  de  morsures  répétées  d'acides,  et  il  ob- 
tenait ces  reports  à  toile  ou  telle  dimension  voulue, 
au  tiers,  au  quart,  au  sixième;  ces  plaques  de  xinc 
ayant  un  relief  très  faible,  mais  suffisant,  étaient  alors 
intercalées  dans  le  texte  des  volumes,  puis  placées  sur 
la  machine  typographique  ordinaire,  et  le  tirage  se 
faisait  comme  il  a  lieu  pour  les  bois  gravés  en  relief. 

Telle  est,  en  termes  très  généraux,  et  dans  ses 
très  grandes  lignes,  l'invention  de  M.  Gillot.  On  la 
connut  d'abord  sous  le  nom  de  paniconographie,  puis 
sous  celui  de  gillottage  (qui  s'applique  peut-être 
plus  exactement  à  un  antre  procédé  dérivatif)  ;  enfin, 
on  place  les  différents  moyens  de  reproduction  artis- 
tique ayant  ce  caractère  de  rapidité  et  de  fidélité 
tout  à  la  fois  sous  le  terme  générique  de  zincographie. 

Cette  zincographie  a  donc,  en  supplantant  la  gra- 
vure sur  bois,  rénové  l'imprimerie  moderne.  On  s'i- 
magine aisément  comment  elle  a  décuplé  le  nombre 
des  «  illustrations  en  noir»  ;  —  elle  a  eu  aussi  la  plus 
grande  influence  sur  les  impressions  en  couleurs; 
les  tt  Annales  typographiques  >»,  que  Pion  tirait  vers 


GUD 


—  1832  — 


HYA 


1865f  ne  sont  deYenues  vniment  dignes  de  ce  nom 
qu*à  dater  da  Jonr  où  elles  ont  été  faites  avec  des 
clichés  zincografihiqu^s. 

Cette  innovation  remonte  à  !*année  1875  enTÏron  ; 
le  fils  da  graveur  Giliot  sut  perfectionner  la  branche 
noQTelle  d'industrie  graphique  créée  par  son  père  et, 
h  son  tonr,  il  créa  la  chromotypographie  (V.  Supplé- 
ment);  autrement  dit  la  reproduction  directe,  typo- 
graphiqne^  avec  couleurs  exactes,  des  aquarelles. 

L  opération  se  fait  ainsi  :  L'artiste  remet  Ron 
œuvre,  tout  achevée,  au  chromotypographe  ;  celui-ci 
la  décompose,  autrement  dit  reconnaît  que  pour  tant 
de  couleurs  employées,  tant  de  «  plaques  de  zinc  » 
sont  nécessaires  (cinq  ou  six  en  général)  ;  puis  les 
zincs  sont  confiés  à  Timprimeur  qui  les  tire  sans  plus 
de  peine  que  s*il  s*agissait  de  tous  antres  clichés;  il 
faut  que  chaque  couleur  tombe  bien  à  sa  place  et 
s'encastre  bien  dans  les  traits.  Depuis  quelque  temps 
môme,  on  exécute  des  impressions  simultanées  en 
deux  couleurs:  le  constructeur  mécanicien  Âlauzet 
(de  Paris)  a  Ait,  dans  ce  but,  d'excellentes  machines 
qui  portent  ce  nom. 

A  Paris,  les  premiers  essais  de  ehromotypographie 
proprement  dite  ont  été  tentés  chez  Timprimeur 
A.  Lahure  qui,  avec  Giliot,  a  atuché  son  nom  à  cet 
art  nouveau;  A.  Lahure  a  produit  le  merveilleux 
Yolume  le  Conte  de  C Archer^  qui  obtint  le  prix 
unique  du  Livre  &  l'exposition  des  Arts  décoratifs 
de  1818;  puis  il  fonda  un  Journal  mensuel,  le  Paris 
illustré^  et  bientôt,  étendant  à  sa  clientèle  commer- 
ciale ces  procédés  tout  d'abord  réservés  à  des  éditions 
artistiques,  il  put  tirer  en  grand  nombre  des  cartes 
de  fféographie,  des  prospectus  de  nouveautés  ;  de  son 
côté,  Giliot  exécuta  TalDum  des  Quatre  fils  Aymon^ 
et  après  eux,  MM.  Onsinger,  Jules  Crété,  A.  Quantin 
(avec  son  Gulliver  illustré)  entrèrent  dans  cette  voie 
habilement  tracée  :  en  ce  moment  la  ehromotypogra- 
phie tend  à  remplacer  la  chromolithographie,  son 
aînée,  dont  Vinvention  date  de  Tapparition  même  de 
la  lithographie;  Senelfelder^  dès  ses  débuts,  imprimait 
sur  pierre  aussi  bien  en  couleur  qu'en  noir;  les 
éditeurs  parisiens  demandent  tous  à  la  chromotypogra- 
phie l'heureux  appoint  de  ses  innombrables  ressources 
pour  les  albums  d'instruction  enfantine,  entre  autres, 
pour  les  alphabets,  les  petits  livres  de  classes  ;  cette 
Invention  est  précieuse,  et  les  maisons  d'édition  sco- 
laire, les  éditeurs  Delagrave  et  Hachette,  possèdent, 
dans  ce  genre,  des  collections  très  complètes,  d'un 
godt  parfait,  car  c'est  le  propre  de  cette  ehromotypo- 
graphie, si  justement  appréciée  auiourd'hui,  de  s'é- 
carter également  de  la  fade  et  piate  lithographie, 
et  de  la  brutale  enluminure  d'Epi nsA.  Il  faut  bien  le 
reconnaître,  les  albums  anglais  eurent  une  grande 
influence  sur  les  travaux  qui  s'accomplissaient  en 
France  dans  cet  ordre  dHdées.  Et  actuellement,  l'im- 
pression en  couleurs  est  une  industrie  prospère  parmi 
nous.  Chaque  année  voit  naître  un  systèmo  nouveau, 
qui  se  décore  d'une  appellation  nouvelle.  Tous  ne  sont 
que  des  modifications  plus  ou  moins  heureuses  d'une 
tndtutne  qui  a  pour  base  la  photographie  et  une 
savante  combinaison  de  produits  chimiques. 

P.  B. 
•  GODRUN,  poème  allemand  de  la  fin  du  xii*>  siècle, 
l'épopée  la  plus  complète  de  la  littérature  germanique 
après  les  Niebeiunqenf  une  sorte  d'Odyssée  à  côté 
d  une  autre  Iliade.  En  voici  le  sujet  :  Hagen,  fils  d'un 
roi  d'Irlande,  enlevé  par  un  griffon,  a  été  sauvé  mira- 
culeusement et  nourri  par  trois  filles  d'autres  rois  oui 
ont  eu  le  même  sort.  De  retour  dans  sa  patrie  et  de- 
venu roi,  il  épouse  une  de  ses  compagnes,  Hilde,  dont 
ii  a  une  fille  qui  porte  le  même  nom.  Hagen  fait  tuer 
plusieurs  seigneurs  prétendant  à  la  main  de  cette 
enfant,  mais  périt  dans  cette  lutte,  et  Hettel,  roi  de 
Hegelingen,  épouse  la  jeune  Hilde.  De  cette  union  natt 
l'hérofne  du  poème,  Gudrun.  C'est  une  suite  de  com- 
bats livrés  à  Hettei  par  les  rois  Siegfrid,  du  pays  des 
Maures,  Hartmut,  de  Normandie,  Herwig,  de  Seeland  ; 
et  après  sa  mort  ses  soldats  continuent  la  lutte.  Gu- 
drun prend  pour  protecteur  l'un  des  rivaux,  Herwig, 
dont  elle  devient  enfin  la  femme.  Les  diverses  scènes 
se  passent  en  Allemagne,  en  Frise,  en  Danemark,  en 
Normandie,  en  Irlande,  etc. 

Le  poème  de  Gudt^n  l'emporte  sur  les  Niehelun- 
gen  par  ia  richesse  des  pensées,  l'éciat  jdes  images, 
l'originalité  des  caractères  et  des  situations,  la  déli- 
catesse d'expression,  qui  semble  trahir  un  remanie- 


ment postérieur.  11  semble  être  lo  travail  d'un  seul 
auteur,  et  non  un  assemblage  de  vieux  chants.  11  a 
été  publié  pour  la  première  fois  dans  le  Heldenbuch 
(livre  des  héros),  par  Hagen,  Berlin,  I8?8,  puis  à  part 
dans  les  Classiques  allemands  du  moyen  d^e,  par 
Bartsch,  Leipzig,  1865,  2  vol. 

GUI  DE  WAKWYKE,  roman  d'aventures,  supposé 
du  xiii*  siècle.  Un  jeune  varlet  anglais,  Gui,  est  épris 
de  la  filie  de  son  seigneur.  Pour  la  mériter,  il  se  dis- 
tingue dans  des  tournois  et  va  rendre  dea  services 
à  Tompereur  d'Allemagne,  au  roi  du  Constantinople 
contre  le  Soudan  de  Babylone,  etc.  Ce  poème,  quoi- 
que peu  intéressant,  a  été  trèa  répandu  en  Angleterre. 
Le  manuscrit,  contenant  11,230  vers,  est  i  la  Bi- 
bliothèque nationale  de  Paris.  (K.  Histoire  littéraire 
de  la  France,  t.  XXII.) 

GUIDE-ACCOBD  on  SONOTYPE.  appareil  inventé 
vers  1853,  par  Dclsarte,  pour  faciliter  l'accord  des 
instruments  à  cordes  à  clavier.  Il  simplifie  le  travail 
de  l'accordeur,  et  permet  même  de  ne  pas  recourir 
à  lui. 


H 


HARMONIFLUTE,  sorte  d'accordéon  perfectionné 
par  Busson.  Outre  qu'il  est  d'un  maniement  plus  fa- 
cile que  l'accordéon  ordinaire,  les  sons  qu*il  donne  se 
rapprochent  beaucoup  de  ceux  de  la  flftte.  On  peut 
y  adapter  un  clavier  chromatique  analogue  à  celai  des 
orgues  et  des  pianos. 

HILDEBRAND  ETHADEBRAND,  fragment  d'épopée 
tudesque  retrouvé  en  1812  dans  la  courertare  duo 
manuscrit  de  Fulde  et  que  les  paléographes  ont  Jugé 
écrit  au  viii*  ou  an  n*  siècle.  C'est  an  des  textes  les 
plus  anciens  de  la  langue  allemande.  Ce  fragment 
appartient  au  cycle  des  Niebelungen;  il  décrit  le  com- 
bat d'an  père  et  d'un  fils  qui  se  rencontrent  sans  se 
reconnaître  :  thème  souvent  traité  par  la  poésie  (com- 
bat de  Rusten  et  de  Sohrab  dans  le  Livre  des  Rois  de 
Firdonsi;  combat  de  D'Ailly  avec  aon  flls  dans  la 
Hehriadé).  Hildebrand,  vieux  compagnon  da  roi  Tbéo- 
doric  le  Grand,  revient  d'Italie  après  de  longues 
guerres  et  rencontre  son  fils  Hadebrand  qull  avait 
quitté  tout  enfant.  Les  deux  guerriers  s'interpellent 
et  se.  provoquent  :  Hildebrand  demande  à  Hadebrand 
quel  est  son  père,  et  sur  sa  réponse  qn'il  se  nomme 
Hildebrand,  celui-ci  lui  offre  la  paix  et  des  présents  : 
Hadebrand,  qui  craint  une  trahison,  refuse  et  le  force 
à  combattre.  Le  dénouement  manque.  On  croit  que 
le  poème,  inspiré  par  les  événements  du  v*  siècle,  a 
été  composé  au  viii*.  Voir  la  traduction  complète 
dans  Léon  Gautier,  V Epopée  française ^  lr«  éd.,  t.  I. 

HOCHE-PLIS,  nom  qu'on  donnait,  au  xvi*  siècle, 
aux  cerceaux  de  fer,  de  bois  ou  de  baleine,  qui  aoate- 
naieut  les  robes  des  femmes.  C'est  ce  qu*on  appela 
plus  tard  paniers  et  vertugadins. 

HOQUET,  en  latin  du  moyen  &ge  Hochetus  ou  Hoce- 
sut,  terme  de  l'ancienne  muaique,  désignant  une 
certaine  manière  d'attaquer  les  notes  isolément,  en 
les  séparant  de  celles  qui  les  précèdent  et  de  celles 
qui  les  suivent  par  des  pauses  ou  des  soupirs,  ou 
bien  d'entrecouper  et  interrompre  les  notes  par  des 
silences.  On  avait  ainsi  un  chant  brisé  (truncatus)  et 
non  lié  (eopulattui), 

HOTE,  nom  qui  sert  à  désicner  dans  les  fermes  de 
la  Haute-Bretagne  la  portion  du  bâtiment  où  habitent 
les  gens.  L'hôté  n'a  ordinairement  qu'une  fenêtre; 
on  rappelle  aussi  la  maison  de  demeuranee;  on  y 
accède  par  une  porte  qui  est  généralement  percée 
tout  près  du  mur  de  refend  qui  sépare  rhabltatloo 
des  gens,  de  l'étable,  de  l'écurie  ou  du  cellier. 

nUSSIAUX,  petites  portes  glissant  sur  des  rainu- 
res qui  servent  à  fermer  ce  qu'on  appelle  en  Bretagne 
les  lits-clos.  (Y.  ce  mot.  Supplément).  Les  hus^iaux 
ont  dans  leur  partie  supérieure  un  quart  de  cercle 
à  jour,  orné  de  barreaux  tournés,  rayonnant  autour 
d'un  ornement  rond.  Lorsque  le  lit  n'a  qu'une  porte 
unique,  le  haut  de  Vhussé  est  ajouré  au  demi-cercle; 
du  bas  partent  des  barreaux  tournés. 

HYALOGRAPHIB,  art  de  graver  sur  verre.  Les  an- 
ciens, comme  les  modernes,  exécutaient  des  dessins 
sur  le  verre  au  moyen  du  sable  et  de  l'émeri  appli- 
qués sur  une  petite  roue  qui,  en  tournant,  traçait  des 
lignes  creuses  d'uno  légère  profondeur.  On  croit  qa'ils 


INT 


—  1833  — 


JAP 


te  servaient  qaelquerois  du  diamant.  Vers  1670, 
Henri  Schwanhard,  de  Nuremberg,  grava  sur  verre 
des  dessins  en  creux  et  en  relief  au  moyen  d*un  cor- 
rosif dont  on  ignore  la  nature.  En  1725,  Mathieu 
Pauli.  de  Dresde,  attaqua  le  verre  avec  un  mélange 
d'acide  nitrique  et  d'émeraude  verte  de  Boh6me  ou 
fluate  de  chaux.  En  1790,  l'acide  fluorhydrique,  ré- 
cemment découvert  par  Scheele,  fut  employé  à  Leip- 
zig par  Kliiidworth  et  à  Strasbourg  par  Renard  pour 
exécuter  les  échelles  des  thermomètres;  en  18 lO,  le 
peintre  LendoUe  en  fit  usage  pour  graver  des  glaces, 
undis  que  Gay-Lussac  et  Thénard  perfeciionnalent  le 
procédé.  On  ne  grave  guère  le  verre  aujourd'hui  que 
par  Tacide  fluorhydrique. 


I 


INSCRIPTIONS  SÉMITIQUES  [Corpus  des).  L'im- 
mense développement  de  l'épigrapie  sémiiique  dans 
les  trente  dernières  années  a  rendu  possible  et  néces- 
saire la  formation  d'un  Corpus  semiticorum  inscnp- 
tionurn^  analogue  au  Corpus  latin  de  l'Académie  de 
Berlin  et  au  Corpus  grec  de  Bœckh.  L'Académie  des 
inscriptions  et  belles- lettres  a  pris  l'initiative  de  ce 
monument  scientifique  le  35  Janvier  18(i7.  Ce  recueil 
doit  contenir  tous  les  textes  anciens  en  langues  sémi- 
tiques (ce  qui  exclut  les  inscriptions  cunéiformes  des- 
tinées à  former  un  jour  un  recueil  spécial).  La  limite 
où  l'on  s'arrête  est  en  général  l'apparition  de  Tlsla- 
mlsme  qui  marque  dans  l'histoire  des  langues  et  des 
écritures  sémitiques  une  époque  tout  à  fait  tranchée; 
on  admet  néanmoins  quelques  monuments  postérieurs, 
ceux  de  l'épigraphie  mendaîte  par  exemple,  qui  vien- 
nent tous  après  Thégire,  mais  ne  sauraient  pourtant 
être  mis  dans  un  tableau  de  la  paléographie  sémiti- 
que; de  même  les  monuments  arabes  des  premiers 
temps  de  l'hégire  qui  sont  d'une  iniportance  capitale 
pour  la  paléographie  comparée  du  Hauran,  du  Sloa! 
et  de  l'Iraq. 

Les  inscriptions  sont  divisées  en  quatre  classes 
d'après  la  langue  :  !<>  phénicien^  comprenant  toutes 
les  inscriptions  phéniciennes  de  toutes  les  époques 
puniques,  néopuniques;  —  2»  hébreu,  comprenant 
toutes  les  inscriptions  en  caractère  carré  jusque  vers 
le  v«  ou  le  vi«  siècle  de  notre  ère;  —  3°  araméen, 
comprenant  tous  les  restes  d'ancienne  écriture  sémi- 
tique trouvés  en  Assyrie,  Inscriptions  palmyréniennes, 
nabatéennes,  hauraniennes,  sinaîtlques,  araméennes 
d'Egypte,  estranghils;  —  4»  arahfy  renfermant  les 
ioscriptions  de  Safa  et  celles  du  même  genre  qui  se 
trouvent  ailleurs,  les  inscriptions  himyarites  et  éthio- 
piennes, et  les  plus  anciens  spécimens  de  neskhi. 
On  admet  dans  le  corpus ,  outre  les  inscriptions  pro- 
prement dites»  les  gemmes,  sceaux,  papyrus,  toutes 
les  pièces  enfin  dont  la  nature  est  d'être  uniques  et 
n'avoir  point  de  double. 

Après  quatorze  années  de  travail  préparatoire  a 
paru  en  18K1  le  premier  fascicule  du  Corpus,  com- 
prenant les  inscriptions  phéniciennes  trouvées  en 
Phénicie  et  dans  l'Ile  de  Chypre.  Pour  chaque  ins- 
cription Ton  donne  un  fac-similé  héliographique, 
une  reproduction  gravée  de  l'inscription,  une  trans- 
cription en  caractères  hébraïques,  une  bibliographie 
complète  des  travaux  auxquels  chaque  inscription  a 
donné  lieu,  enfin  une  traduction  et  un  commentaire 
en  latin. 

INTERMÉDIAIRES,  en  terme  d'économie  politique, 
agents  qui  se  placent  entre  les  producteurs  et  les 
consommateurs.  Ce  sont  les  commerçants,  et  leurs 
services  sont  Indispensables  :  sans  eux,  on  serait 
exposé  à  être  trompé  sur  les  qualités,  à  prendre  des 
marchandises  qui  ne  conviendraient  pas  tout  k  fait; 
il  faudrait  faire  des  provisions,  avoir  des  locaux  pour 
les  contenir,  et  il  y  aurait  chance  de  pertes  par  ava- 
ries. Le  bénéfice  qu'on  paye  au  commerçant  est  un 
léger  salaire  dû  à  son  expérience,  à  ses  soins,  et  la 
compensation  des  risques  qu'il  court. 

INTERNATIONALE  (Société),  association  dont  les  ba- 
ses furent  jetées  àl'Exposion  internationale  de  Londres 
en  1862  par  les  délégués  des  corps  d'états  français,  qui 
avait  pour  principe  l'annulation  dns  nationalités,  et 
pour  but  l'union  des  travailleurs  de  tous  pays  contre 
le  capital  qui  les  exploite,  la  défense  des  salaires,  les 


intérêts  divers  des  corporations.  Un  nombre  plus  ou 
moins  considérable  d'associés,  groupés  ensemble 
parce  qu'ils  appartenaient  à  un  même  corps  de  mé- 
tier, ou  parce  qu'ils  habitaient  la  même  ville  ou  le 
mémo  quartier,  formait  section.  Certaines  sections 
ou  groupes  élémentaires,  par  suite  de  circonstances 
parliculières,  restaient  isolés;  mais,  d'ordinaire,  les 
sections  d'une  même  région  formaient  une  féd^fration. 
Toutes  les  fédérations  d'un  même  pays  constituaient 
une  branche.  L'ensemble  de  toutes  les  sections,  de 
toutes  les  fédérations,  de  toutes  les  branches,  formait 
ï  Association  internationale  des  iravuHiews.  Les 
membres  de  chaque  section  choisissaient  parmi  eux 
des  délégués  qui  les  représentaient,  les  uns  au  Con- 
seil fédéral,  les  autres  au  Con^r^5  annuel.  Le  Congrès, 
à  son  tour,  élisait  les  membres  du  Conseil  général, 
qui  gouvernait  l'associai  ion  entière.  —  Les  meneurs 
qui  étaient  parvenus  à  composer  une  section  ou  une 
fédération  étaient  k  peu  près  certains  d'en  rester  les 
délégués;  officiellement,  leur  autorité  venait  d'elle; 
en  réalité,  c'est  elle  qui  n'avait  d'existence  que  par 
eux.  Les  associés  étaient  conduits  par  un  petit  nom* 
bre  de  chefs  qui  disposaient  de  la  caisse  où  étaient 
versées  les  cotisations,  qui  suscitaient  ou  soutenaient 
les  grèves  d'ouvriers;  ils  pouvaient  être  poussés  au 
combat  dans  un  but  et  pour  des  intérêts  qu  ils  igno- 
raient. L'Internationale  devint  rapidement  une  des 
forces  constituées  les  plus  redoutables  de  la  société 
européenne  :  elle  joua  un  grand  rêle  dans  la  Com- 
mune de  1871;  les  deux  tiers  des  membres  étaient 
affiliés.  Une  loi,  votée  le  14  mars  1872,  a  supprimé 
la  société  et  édicté  un  emprisonnement  de  trois  mois 
k  deux  ans,  et  une  amende  do  5U  à  1,000  fr.  contre 
toute  personne  s'affiliant  à  la  société. 

INTERPELLATION.  Le  droit  d'interpellation,  que 
la  Constitution  de  1852  refusait  au  Corps  législatif  et 
au  Sénat,  leur  fut  donné  par  décret  du  19  janvier  18()7. 
Toute  demande  d'interpellation  devait  être  signée  par 
cinq  membres  au  moins;  cette  demande,  indiquant 
sommairement  l'objet  des  interpellations,  était  remise 
au  président,  qui  la  comumniquait  au  ministre  d'État 
et  la  renvoyait  k  l'examen  des  bureaux.  Deux  bureaux 
au  Sénat  et  quatre  au  Corps  législatif  devaient  auto- 
riser l'interpellation,  pour  qu'elle  pût  avoir  lieu. 


JACQUELINES,  pots  de  grès  en  usage  dans  les 
Pays-Bas,  et  dans  le  nord  de  la  France.  Le  nom  en 
serait  emprunté,  dit-on,  k  Jacqueline,  comtesse  de 
Hollande,  dans  les  preiuières  années  du  xv*  siècle, 
parce  qu'au  milieu  de  ses  parties  de  chasse  elle  se 
faisait  porter  k  boira  dans  dos  pots  de  grès,  qu'on 
abandonnait  ensuite. 

JAPONAIS  (Art).  Il  serait  imprudent,  dans  l'état 
actuel  de  nos  connaissances  sur  l'histoire  des  civili- 
sations dans  TExtrême-Orient,  d'tjssayer  un  histo- 
rique un  peu  précis  de  l'art  japonais.  Nous  devons 
nous  en  tenir  k  dos  jugements  sur  l'esiliéiique  qui 
le  caractérise  jusqu'au  moment  où  nous  saurons  plus 
clairement  quelles  sont  sos  origines  autochtones, 
quelles  Influences  étrangères  il  a  subies,  ce  qu'il  a 
^ardé  et  ce  qu'il  a  éliminé.  Ce  pays  rendu  si  original 
par  le  charme  de  ses  paysages,  le  brillant  passé  de 
son  aristocratie,  la  politesse  de  sos  habitants,  l'ingé- 
niosité et  l'éducation  technique  de  ses  artistes  et  de 
ses  artisans  ;  cette  lie  qui  avait  su  résisti  r  jusqu'à 
ces  dernières  années  au  contact  absorbant  de  la  civi- 
lisation occidentale,  qui  opéra  sur  place  et  avec  ses 
ports  fermés  rigoureusement  l'évolution  inhérente 
aux  socléics  comme  aux  individus  de  l'état  primitif  à 
l'état  policé  ;  cette  race  qui  a  eu,  dès  le  via*  siècle, 
des  poètes  exquis,  des  héros  batailleurs,  des  hommes 
d'État  sortis  du  rang  du  peuple  et  accaparant  le 
pouvoir,  des  sculpteurs,  des  bronzlers,  des  laqueurs, 
des  céramistes,  des  forgeurs  d'armes  incomparables, 
n'ont  conquis  en  France  que  quelques  amateurs  et 
quelques  critiques.  Les  académies,  les  musées  natio- 
naux, les  lettrés,  les  savants,  sont  demeurés  sur 
la  réserve,  et  n'ont  coopéré  ni  k  des  travaux  histori- 
ques, ni  k  des  collections  triées,  ni  à  des  traductions. 
Sur  tous  ces  points,  nous  sommes  en  ce  moment 
dépassés  par  l'Angleterre.  Les  rayons  pourpres  de  co 
a  soleil  levant  »,  l'emblème  glorieux  peint  sur  le  dra- 

116 


JAP 


—  1834  — 


JAP 


peau  national,  n'ont  pas  encore  fondu   notre  glace 
académique. 

C'est  dans  les  Transactions  de  la  Société  asiatique 
du  Japon  (laquelle  ai*a  fait  Thonneur  de  me  compter 
parmi  ses  membres),  c'est  dans  le  Guide  au  Japon  de 
M.  Ernest  Satow,  dans  V Histoire  de  la  peinture  de 
M.  Anderson,  dans  les  traductions  de  M.  t'r.  V.  Dic- 
kins,  dans  diverses  relations  de  touristes  que  rou 
rencontre  le  plus  de  documents. 

Mais  il  ne  faut  point  être  injuste  envers  notre  pavs. 
M.  le  professeur  L.  de  Rosny  a  déjà  donné  des 
preuves  d  une  érudition  trop  peu  productive,  mais 
sûre.  M.  Louis  Gonse  a  publié  sous  ce  titre:  VArt 
japonais j  un  livre  fort  bien  appuyé  que  commentent 
des  gravures  nombreuses  et  des  photogravures  d'après 
des  objets  choisis.  A  ses  lectures,  à,  ses  vues  person- 
nelles, M.  Louis  Gonse,  qui  a  réuni  une  colleciion 
considérable,  a  pu  joindre  des  renseignements  inédits, 
fournis  par  des  experts  japonais,  des  lectures  de 
noms  et  de  dates  qui  autorisent  les  classifications  par 
écoles  et  par  succession. 

On  n'a  point  encore  percé  l'obscurité  dont  s'enve- 
loppent les  origines  du  peuple  japonais.  Ses  annales 
rapportent,  après  une  succession  fabuleuse  de  dieux 
et  de  demi-dieux,  l'arrivée  et  l'établissement  dans  la 
province  montagneuse  de  Yamato,  d'un  conquérant 
nommé  Zin-Mou.  Que  ce  fait  se  soit  passé  cinq  ou 
six  cents  ans  avant  l'ère  des  chrétiens,  cette  date  n'a 
d'importance  que  pour  établir  que  la  nationalité  japo- 
naise ne  se  reconnaît  point  pour  très  antique,  com- 
parée à  la  famille  chinoise,  par  exemple.  Ce  qui, 
dans  l'espèce,  nous  importerait,  serait  d'avoir  quelques 
vestiges  de  ses  arts.  Nous  ne  connaissons  que  des 
armes  en  pierre  polie,  des  colliers  en  pierres  dures, 
analogues  aux  spécimens  de*  autres  peuples.  Nous 
savons  que  Zin-Muu  et  ses  compagnons  —  il  n'est  point 
impossible  qu'ils  provinscnt  de  TOcéanie  —  refoulèrent 
vers  le  nord  une  race  occupant  déj^  les  côtes  des 
Ainos,  mais  non  sans  s'èire  alliés  aux  flUes  de  leurs 
chefs,  ces  Ainos  que  nous  rencontrons  encore  dans  les 
lies  du  nord  du  Nippon.  Leurs  femmes  se  tatuuent. 
La  pèche  les  absorbe.  Leur  habillement,  leurs  armes 
sont  ornées  de  dessins  géométriques,  ainsi  qu'on  les 
rencontre  à  l'aube  de  toutes  les  civilisations  et  au- 
jourd'hui encore  chez  les  attardés.  11  est  difficile,  au 
moins  d'après  ce  qu'on  peut  voir,  notamment  au  musée 
ethnographique  du  Trocad^^ro,  de  conclure  à  ce  qu'ils 
auraient  pu  imposer  aux  Japonais  conquérants  en 
fait  d'art. 

On  a  retrouvé  des  vases  en  terre  dans  des  tom- 
beaux de  très  anciens  princes  du  Japon.  Ce  sont,  en 
général,  des  tasses  à  ouverture  évasée.  Dans  un 
fourneau  —  le  fait  a  peut-ètru  une  importance  que 
l'avenir  établira  —  on  retrouve  une  ressemblance 
étroite  avec  des  objets  similaires  mexicains. 

Le  fait  acquis,  puisqu'il  est  donné  par  tous  les  his- 
toriens japonais,  c'est  l'influence  de  la  Corée,  pays 
mal  connu  par  les  Européens,  mais  qui  semble  avoir 
perdu  ju!>qu'aux  derniers  reflets  d'une  civilisation 
artistique  très  rafinée.  Los  poteries  coréennes  sont 
incontestables.  Non  pas  qu'on  les  rencontre  en 
Corée,  mais  chez  les  amateurs  japonais,  les  tcha-jins, 
ces  R  compagnons  du  thé  »,  qui  par  leur  recherche 
de  l'idéal,  leur  stricte  obéissance  aux  règles,  leur 
sentiment  profond  du  patriotisme,  ont  été  les  gardiens 
de  la  flamme  subtile  qui,  au  vu*  siècle,  s'était  allumée 
au  grand  foyer  chinois. 

On  ne  peut  mettre  en  doute  que  la  Corée  ait 
fourni  au  Japon  des  maîtres  potiers  et  des  fondeurs 
de  bronze.  Mais  cette  poterie  était  rudimentaire, 
quoique  singulièrement  pittoresque  et  variée.  La 
Chine  apporta  la  porcelaine,  matière  tout  autrement 
délicate,  en  môme  temps  que  la  peinture,  la  littéra- 
ure,  le  calendrier,  le  vêtement,  les  classifications 
politiques,  etc.  Tout  cela  s'adapte  aussi  exacte- 
ment que  chez  nous,  à  la  fin  du  moyen  âge,  l'in- 
fluence de  la  mode  italienne.  Là-bas^  comme  ici,  le 
peuple  fut  indemne  de  l'engouement  des  hautes 
classes,  et  là  encore  comme  ici  une  réaction  s'est 
marquée  contre  l'enseignement  académique  en  faveur 
d'un  retour  au  génie  national.  Mais  l'ett'et  des  pre- 
miers rapports  avec  la  Chine  avait  été  foudroyant. 
Si  nous  ouvrons  le  Genji  Monogatari ,  délicieux  roman 
de  mœurs,  écrit  au  x'  siècle  par  une  dame  de  la 
cour  du  mikado,  Murasaki  Sikibou,  nous  rencontrons 
à  maintes  pages  les  traces,  chez  les  hautes  classes. 


de  cette  influence.  Tout  un  chapitre  roule  sur  une 
discussion  à  propos  du  style  de  peintres  chinois,  et 
l'on  déroule,  à  l'appui,  des  kakémonos  précieux.  La 
soie  vint  de  l'Empire  du  milieu,  et  ayec  elle  l'art  d*) 
la  broder,  et  avec  cet  art,  pratiqué  par  les  hommes 
et  non  par  les  femmes,  ces  robes  somptueuses  que 
portaient  les  bonzes  dans  les  cérémonies  et  les 
kugliés  (les  nobles)  dans  les  réceptions,  et  ces  fou- 
kusas,  qui  servaient  d'enveloppe  aux  cadeaux  échan- 
gés de  maison  à  maison,  et  sur  lesquels  on  rencontre, 
brodés  en  or  et  en  soies  diverses,  de  véritables  ta- 
bleaux de  maîtres. 

Puisque  nous  nous  bornons  à  des  indications  géné- 
rales, notons  l'impression  profonde  qu'avait  produite 
la  prédication  bouddhique,  apportée  de  la  Corée  dès  le 
VIlo  siècle  par  l'apôtre  Dharma,  un  des  successeurs 
de  Çakia-Muni  dans  la  propagation  de  la  Bonne-Loi. 
Le  bouddhisme  introduisit  le  style  indien,  le  mobilier 
ecclésiastique  dans  la  forme  des  temples,  dans  les 
statues  de  Çakia  et  des  saints,  dans  les  fleures  orne- 
mentales, gardiens  du  ciel,  déesses  de  Fô,  etc.  Ces 
formes  ont  subsisté  jusqu'à  nos  jours,  à  peu  près 
inaltérées. 

Dans  une  série  de  conférences,  faites  en  1884,  dans 
les  salles  de  V Union  centrale  des  Arts  décoratifs^ 
nous  avons  signalé  avec  quelque  insistance  des  traces 
visibles  de  i'ormentation  persane  sur  des  objets  en 
céramique  ou  en  métal.  Nous  avons,  depuis,  recueilli 
dans  les  récits  de  voyages  anciens,  des  citations  qui 
appuient  les  motifs  qui  nous  avaient  été  suggérés 
par  l'étude  de  certaines  formes  et  certains  décors. 
Le  Japon  ancien,  pour  avoir  fermé  et  barricadé  sa 
porte  devant  les  jésuites,  dont  la  prédication  avait 
menacé  la  constitution  même  du  pays,  bien  plus  que  ses 
dogmes  religieux,  n'a  point  été  clos  aussi  rigoureose- 
meni  pour  ses  voisins  de  l'Extrôme-Orient.  iJu  xii* 
au  XVI*  siècle,  le  peuple  s'est  tiré  assez  de  sang,  dans  les 
guerres  féodales  incessantes  et  cruelles,  entre  maisons 
rivales,  pour  ne  point  épronver  le  besoin  d'essaimer. 
H  n'était  point  navigateur,  mais  pécheur  sur  les  côtes, 
bûcheron  sur  les  pentes  et  cultivateur  dans  les  plaines. 
Il  ne  bravait  pas  la  mer  souvent  irritée  qui  bat  ses  ri- 
vages, mais  il  ne  repoussait  point  les  navires  baut- 
pontés  des  Chinois,  qui  lui  apportaient  des  émaux,  des 
porcelaines,  des  ivoires  sculptés,  des  peintures,  des 
gravures  sur  bois  que  l'on  imitait  de  son  mieux 
d'abord  et  que  l'on  surpassa  ensuite  en  verve,  en 
souplesse,  en  couleur,  il  y  eut  donc  aussi,  cela  est 
établi  par  des  textes  et  par  des  monuments,  des  com- 
munications directes  soit  avec  des  ambassadeurs 
persans,  Hoit  avec  des  produits  de  la  Perse.  L'art  d'in- 
cruster le  fer  de  dessins  d'or  et  d'argent  y  acquit 
ou  tout  au  moins  y  puisa  des  éléments  de  gricc 
habile  et  de  solidité  souple. 

Tout  ce  que  nous  venons  d'exposer  n'est  fait  en 
rien  pour  diminuer  l'Art  japonais,  ni  dans  sa  qualité 
personnelle  ni  dans  ses  déductions  pratiques.  De 
même  que  l'art  français  où  une  analyse  chimico-cri- 
tique  constate  des  traces  d'art  romain,  d'art  iu- 
lien,  etc.,  il  est  lui-même  dans  le  résultat,  et  n'a  fait 
servir  ces  éléments  étrangers  qu'à  l'épanouissement 
de  son  idéal  intime.  On  peut  se  rendre  compte  par 
ce  qu'ont  recueilli  des  chefs-d'œuvre  de  ses  maî- 
tres quelques  cabinets  parisiens,  ce  qu'il  offre  d'at- 
trayant, de  logique  et  de  suggestif.  On  peut  cons- 
tater combien  il  est  fâcheux  que  l'Etat  soit  demeuré 
indifl'érent  dans  cette  enquête  et  n'ait  point  ouvert  à 
ces  manifestations  rares  et  précieuses  à  divers  titres 
les  vitrines  de  nos  musées.  Sèvres  même,  intéressé  si 
directement  dans  le  rajeunissement  incessant  de  nos 
produits  nationaux  supérieurs,  n'aurait  rien  en  céra- 
mique ancienne  du  Japon  sans  le  don  d'un  amateur 
parisien,  M.  Vial. 

La  grosse  objection  contre  les  arts  de  l'Extrême- 
Orient,  c'est  qu'ils  ofi'rent  un  rendu  de  la  personne 
humaine  tout  différent  de  celui  que  la  Grèce  a  fixé 
avec  nue  précision  et  une  beauté  qui  feront  l'étemelle 
admiration  des  siècles.  Le  fait  n'est  pas  niable  sur 
le  domaine  de  l'enseignement.  11  est  certain  que 
l'étude  du  modèle  humain  et  surtout  du  canon  ré- 
glé par  quelques  œuvres  du  siècle  de  Périciës  est 
une  étude  d'après  ce  que  la  nature  ou  Tart  offrent  de 
plus  harmonique,  et  que  les  sens  de  l'élève  doivent 
s'imprégner  du  sentiment  des  rapports  exacts  et  des 
lois  de  l'équilibre.  En  développant  le  sentiment  du 
jugement,  les  races  occidentales  obéissent  à  ce  qui 


JAP 


—  1838  — 


JAP 


établit  également  lenr  supériorité  dans  l'ordre  dos 
sciences.  Tous  les  maîtres  s'y  sont  plies,  de  Michel- 
Ange  à  Rembrandt,  de  Yelasquez  à  Eugène  Delacroix, 
mais  en  m6nie  temps  ils  ne  méprisaient  point,  ils 
o'écariaient  point,  de  parti  pris,  ces  autres  éléments 
constitutifs  de  la  peinture  et  de  la  sculpture,  la  cou- 
leur et  le  mouvement,  Tobservation  du  sentiment  et 
de  la  nature. 

Les  Orientaux  raffinent  moins.  Quand  on  connaîtra 
mieux,  d'ailleurs,  la  peinture  des  maîtres  chinois  ei 
des  maîtres  Japonais,  —  le  British  Muséum  en  possède 
un  historique  complet  dans  la  collection  acquise  de 
M.  Andersen  et  Paris  an  a  applaudi  quelques  échan- 
tillons, en  1883,  à  une  exposition,  rue  do  Sèze,  —  on 
sera  pris  de  plus  de  respect  pour  des  écoles  qui  ont 
vu  la  nature,  TéterncUe  et  changeante  beauté,  sous 
un  angle  autre,  mais  non  moins  noble  que  les  nôtres. 
Ce  n'est  point  dans  la  forme  nue  qu'ils  se  sont  can- 
tonnés. Ils  ne  l'observaient  que  sur  les  gens  de 
classes  inférieures.  Les  seigneurs,  les  lettrés,  les 
prêtres  dépositaires  du  pouvoir  sur  le  corps,  sur 
l'esprit  ou  sur  l'imagination,  ne  se  révèlent  que  vêtus 
de  costumes,  drapés  de  plis  qui  répondent  à  la  richesse 
des  palais,  au  recueillement  complet,  à  la  pompe  reli- 
gieuse. Ils  ont  fait  de  cette  manifesuiion  extérieure 
un  usage  aussi  sensé  qu'adroit.  Rien  de  plus  imposant 
dans  son  g^ste  de  doux  prédicateur,  que  la  statue  co- 
lossale du  Bouddha-Cakia-Muni,  l'honneur  de  l'incom- 
parable collection  de  bronzes  de  M.  Henri  Cernuschi; 
et  rien  de  plus  vivant  que  ces  amusants  petits  ivoires 
sculptés  que  l'on  appelle  des  netjukés. 

Les  écoles  ont  suivi,  sur  place,  les  mômes  phases 
que  dans  nos  pays  et  elles  ont  suivi  les  mêmes  évo- 
lutions que  la  société.  A  ne  prendre  que  les  laques 
qui  sont,  par  parenthèse,  le  produit  le  plus  riche,  le 
plus  délicat  et  le  plus  solide  de  la  main  humaine 
dans  aucun  pays,  on  les  voit  simples  par  les  mo- 
tifs et  résistantes,  du  xi°  au  xvi«  siècle;  plus 
somptueuses  quand  la  cour  des  shogouns,  s'oppo- 
sant  &  U  cour  séculaire  des  mikados,  veut  rallier 
l'opinion  populaire  par  son  faste;  plus  fines  et  plus 
gentilles  au  xviii^  siècle,  comme  si  le  souffle  du 
Tococo  français  avait  passé  par-dessus  les  mers. 
L'école  des  laqueurs  va  en  se  maniérant  Jusqu'aux 
premières  années  de  ce  siècle,  et  dans  la  seconde 
moitié  perd  à  peu  près  tout  son  caractère  de  race. 

Nous  avons  écarté  les  noms  d'artistes  et  les  classi- 
fications d'écoles.  On  ne  pourrait  qu'entrer  dans  des 
subdivisions  peu  compréhensibles  pour  le  lecteur  qui 
ne   peut  vérifier  ni  par  des   originaux,  ni   par  des 
fac-similés.  Mais    il    est   un  nom    qui   aujourd'hui 
s'imprime  souvent,  celui  de  Hokusai,  un  maître  dessi- 
nateur qui  naquit  dans  le  second  tiers  du  xviii«  siè- 
clo  et  qui  mourut  plus  qu'octogénaire  en   1849.  Il  a 
accompli  un   œuvre  considérable,  illustrant  de   gra- 
vures les  historiens  chinois,  les  romanciers,  les  poètes 
japonais,  composant  des  sujets  pour  les  recueils  que 
les  tcha-Jins  à  la  fin  de  Tannée  font  de  leurs  propres 
poésies,  fournissant  aux  diverses  industries  des  mo- 
dèles d'une  fertilité  prodigieuse,  composant  des  ency- 
clopédies où  tous  les  corps  de  métiers  sont  en  action, 
reproduisant  en   couleurs   les   cent   aspects  de    la 
montagne   Fouzi,   aux    courbes    harmonieuses,    aux 
sommets  neigeux,  notant  les  modes,  croquant  d'un 
pinceau  agile  les  ridicules,  et  imprégnant  de  la  poésie 
la  plus  émouvante  les  choses  et  les  êtres.  Certes,  ils 
n'est  point  tout  l'art  du  dessin  Japonnais,  comme  on 
l'a  décrit  faute  d'études,  mais   il   marque  dans  l'art 
Japonais   une  évolution  radicale,  et  il  peut  prendre 
place  aux  côtés  d'un  de  nos  maîtres  les  plus  intensifs, 
aux  côtés  de  Rembrandt.  Il  n'eut  rien  de  classique, 
quoique  visiblement  respectueux  des  maîtres  anciens. 
Son  nom  est  aujourd'hui,  parmi  les  collectionneurs 
corrects,  la  pierre  de  scandale.  Mais  pour  les  critiques 
détachés,  il  est  un  des  observateurs  de  la  nature  les 
plus  instructifs  et  les  plus  sincères.  Le   recueil  de 
ses  œuvres,  le  Mangwa  en  dix  cahiers  publiés  en 
des  espaces  de  temps  capricieux,  a  été  gravé  sur  des 
beis  qui  ont  survécu  jusqu'à  ce  temps^  et  fournissent 
des  tirages  usés  mais  qui  parlent  encore  assez  élo- 
quemmcnt  pour  que  nos  jeunes  artistes  se  les  dis- 
putent et  les  consultent  avec  fruit. 

C'est  moins  l'école  du  dessin  que  l'école  du  croquis, 
mais  on  sait  que  le  croquis,  qui  chez  nous  est  un 
essai,  chez  les  Japonais  est  un  résultat.  Un  artiste  doit 
avoir  son  sujet  peint  k  l'avance  sur  le  voile  de  son  cer- 


veau :  il  saisit  son  pinceau,  qu'il  tient  à  pleine  main 
la  pointe  en  bas^  le  trempe  dans  l'encre  de  Chine,  et 
ëcrii  sa  pensée  sur  le  papier  ou  sur  la  gaze  fine 
comme  nous  le  faisons  avec  notre  plume.  Il  ne  doit 
point  revenir  pour  reprendre  son  trait,  que  l'admi- 
rable instrument  qu'il  conduit  a  fait,  au  gré  de  son 
imagination  et  de  son  souvenir,  ou  fin  comme  un 
cheveu  d'enfant,  ou  large  et  gras  comme  un  coup 
de  la  brosso  d'un  décorateur.  Tracé  sur  une  feuille 
de  papier,  au  ton  riche  et  soyeux  de  matière,  le 
dessin,  parfois  aquarelle,  est  tendu  entre  des  étoffes 
anciennes,  aux  mélanges  assouplis  ;  deux  rouleaux 
do  bois  le  maintiennent  tendu  quand  on  l'accroche 
au  mur  :  c'est  le  kakémono^  dont  le  prix  peut  monter 
aussi  haut  chez  nous  que  celui  de  nos  peintres,  selon 
la  signature,  l'ancienneté,  la  rareté,  le  style  en  vogue. 
Si  le  dessin  est  destiné  à  être  gravé,  il  est  tracé  sur 
un  papier  extrêmement  mince  qui  se  colle  sur  un 
bloc  de  cerisier,  moins  compact  que  notre  buis,  et 
il  est  entaillé  au  canif,  comme  on  fait  pour  nos  n  ca- 
nards ».  Les  graveurs  sur  bois  sont  en  général  d'une 
habileté  et  d'une  conscience  qui  réservent  aux  inten- 
tions du  maître  toute  leur  autorité  dans  le  trait,  la 
couleur,  les  valeurs. 

Le  Japon  a  eu  aussi  des  gravures  imprimées  en 
couleur,  avec  de  la  gouache,  qui  dépassent  en  limpi- 
dité et  en  accent  colorant,  en  dégradés  comme  en 
tons  rompus  tout  ce  quo  notre  chromolithographie  a 
réalisé  de  plus  parfait. 

En  résumé  Tart  Japonais  n'est  point  un  art  tran- 
quille. Il  est  vraiment  vif,  remuant  comme  le  sont 
les  arbres,  les  fleurs,  les  oiseaux.  Une  vibration  en 
fait  partie,  comme  l'est  celle  de  la  lumière.  Il  pro- 
cède d'une  observation  constante  de  la  nature  dans 
tout  ce  qui  relève  de  l'ornementation  ou  des  sujets 
familiers.  Il  a  tiré,  dans  les  temps  anciens,  un  parti 
très  décoratif  des  combinaisons  géométriques,  mais 
en  les  dissimulant,  comme  les  Arabes  ou  les  Persans, 
sous  le  charme  des  tons  assoriiâ  pour  se  faire  valoir. 
Il  élimine  tout  ce  qui  ne  concourt  pas  à  l'expression 
nette,  tout  ce  qui  fatiguerait  inutilement  le  regard  : 
par  exemple,  dans  une  vue  panoramique,  —  les  paysa- 
ges sont  presque  toujours  vus  de  haut,  les  plans  s'éta- 
géant,  —  dès  qu'un  morceau  est  insignifiant,  le 
paysagiste  le  dérobe  derrière  une  vapeur  trans- 
versale. 

L'Art  japonais  se  révèle  par  une  extrême  délica- 
tesse dans   les  profils.  Il  est  surtout  appréciable  ou 
vainqueur  dans  les  petits  objets  :  les  gardes  de  sabre 
en  divers  métaux,  les  étofl€s  brodées,  les  laques,  les 
porcelaines,  les  terres  de  setsuma,  les  ivoires  sculptés... 
Maxime  miranda  in  minimis,,,   V.  Ambassade  mé- 
morable de  ta  Compagnie  des  Indes- Orientales  des 
Pf'ovinces-Uniei  vers  les  Empereurs  du  Japon^  con- 
tenant plusieurs  choses  remarquables  arrivées  pen- 
dant le   voyage  des    Ambassadeurs,    et  de  plus   la 
description  des  villes,  bourgs,  châteaux,  fortereses, 
temples  et  autres  bâtiments  ;  des  animaux,  plantes, 
montagnes,  rivières,  fontaines;  des  mœurs,  coutumes 
et  habillements  des  Japonais;  comme  aussi  leurs  ex- 
ploits de  guerre  et  les  révolutions  tant  anciennes  que 
modernes  que  ces  peuples  ont  essuyées.  Le  tout  en- 
richi de  figures  dessinées  sur  les  lieux  et  tirées  des 
Mémoires  des  Ambassadeura  de  la  Compagnie.  Amster- 
dam. 1680.  L'ouvrage  du  père  Charlevoix,  Histoire  et 
descnplion  générale  du  Japon,,,  Paris  17;i6,  est  en- 
tièrement à  négliger;  il  ne  renferme  que  des  docu- 
ments de  seconde  main.  —  Kaempfer,ff»totV«  naturelle 
civile  et  ecclésiastique  de  l'empire  du  Japon^  com- 
posée en  allemand  par  Ëngelbert  Kaempfer,  et  tra- 
duite  en  français  sur  la  version  anglaise   de  J.-G. 
Scheuchzer,  La  Haye,  1729;  2  vol.  in-folio.  Ouvrage 
aussi  intéressant  à  lire  qu'utile  à  consulter.  On  y  voit 
vivre  tout  ce  qu'un  Européen  intelligent  et  sérieux 
pouvait  recueillir  sur  cette  société  et  sa  nature.  ^  His- 
toire de  la  Religion  chrétienne  au  Japon ^  par  M.  Léon 
Pages,  1869,  2  vol.  in-8o.  On  y  trouve  la  bibliographie 
de   loute-i  les   relations  des  missionnaires  avant  et 
pendant  les  événements  qui  les  firent  expulser  à  la 
fin  du  xvi«  siècle.  —  Taies  of  Old  Japon j  by  A.  B. 
Mittford.  London  1871.  2  vol.  in-s*.  —  Kwen-KO'Dxu' 
Selsu.  Notve  historique  et  descriptive  sur  les  Arts  et 
les  Industries  du  Japon,  par  M.  Minagawe  Noritané 
Tokio,  1876-1818.  La  partie  relative  à  l'art  céramique 
et  de  la  parure  a  été  traduite  en  français,  avec  des 
planches  à  l'appui.  •—  Catalogue  of  a  collection  of 


JUR 


—  1836  — 


LAT 


onental  porcelaine  and  pottery^  by  A.  Fraoks.  Lon- 
don.  187^.  Excellent  travail  avec  marques  et  mono- 
grammes. —  VArt  japonais^  parL.  Gonse,  2  vol  in- 
folio. 1883.  Renseignements  basés  sur  dos  notes  four- 
nies par  des  indigènes;  excellentes  gravures. —  Tnm- 
sactions  of  the  Asiatic  society  of  Japon,  Yokoama, 
tomes  I  à  XlII.  —  VEmpire  japonais^  par  Léon 
MentchnikoflT,  1  vol.  avec  gravures,  Genève,  1877.  — 
Nous  même  avons  donné  plusieurs  articles  sur  les  arts 
et  les  industries  du  Japon  au  journal  CArt. 

Ph.  B. 
JEHAN  DE  PARIS,  roman  populaire,  dont  Tauteur 
inconnu  vécut  vers  le  milieu  du  xvi"  siècle.  Jean,  fils 
d'un  roi  de  France,  se  rend  en  Espagne  pour  réclamer 
une  infante  qui  lui  a  éié  fiancée.  Il  voyage  inco- 
gnito, comme  llls  d'un  bourgeois  de  Paris,  en  compa- 
gnie avec  le  roi  d'Angleterre,  le  bafoue  tout  le  long 
du  chemin,  et  lui  enlève  la  princesse  à  laquelle  il 
prétendait.  Le  roman  est  inspiré  par  riiistoire  du 
mariage  de  Charles  VIII  avec  Anne  de  Bretagne,  qu'il 
euleva  à  son  fiancé,  Maximilten  d'Allemagne.  Le  ro- 
man de  Jehan  de  Paris,  d'un  ton  plaisant  et  d'une 
lecture  agréable,  fut  d'abord  publié  en  abrégé  dans  la 
Bibliothèque  bleue  Des  éditions  complètes  furent 
ensuite  données  par  Em.  Mabile,  dans  la  collection 
de  Jannet,  Paris,  1855,  in-18,  et  par  A.  de  Uontaiglon, 
18(i7,  in-l«i. 

JURY.  Les  articles  3S1  et  suiv.  du  Gode  d'instruc- 
tion criminelle  de  1808  organisèrent  le  Jury  en  France, 
en  indiquant  les  conditions  d'aptitude  et  en  désignant 
les  classes  dans  lesquelles  devaient  être  pris  les  ju- 
rés. Les  préfets  formaient  une  liste  60  jurés  toutes 
les  fois  qu'ils  en  étaient  requis  par  les  présidents  des 
cours  d'assises;  cette  liste  était  réduite  à  36  par  les 
présidents  pour  chaque  session.  La  loi  du  2  mai  1827 
déclara  que  les  jurés  devaient  être  pris  parmi  les 
membres  des  collèges  électoraux  et  certaines  caté- 
gories de  personnes.  Elle  chargea  aussi  les  préfets  de 
dresser  les  listes;  mais,  au  lieu  d'une  liste  spéciale 
pour  chaque  session,  ils  devaient  dresser  une  lii>te 
générale  pour  le  service  d'une  année,  et,  sur  cette 
liste,  le  premier  président  de  la  Cour  royale  tirait  au 
sort  36  jurés  pour  chaque  session.  L'A  ««semblée  na- 
tionale de  1848  institua  une  commission  chargée  de 
dresser  la  liste  annuelle  dans  chaque  département; 
mais  celte  loi  du  7  août  1848  fut  abrogée  par  celle 
du  4  juin  1853.  Celle  ci,  n'admettant  pas  pour  base 
la  qualité  d'électeur,  confia  à  une  commission  canto- 
nale le  soin  de  dresser  pour  chaque  canton  une  liste 
préparatoire  ;  elle  créa  une  seconde  commission  qui 
se  réunit  ao  chef-lieu  de  Tarrondiasement  et  qui 
choisit  sur  les  listes  préparatoires  le  nombre  de  jurés 
nécessaire  pour  former  la  liste  d'arrondissement; 
enlin  elle  donna  au  préfet  la  mission  de  dresser  la 
liste  annuelle  du  département  sur  les  listes  d'arron- 
dissement, et  ce  fut  sur  cette  litte  que  s'opéra,  par 
le  président  de  la  Cour  impériale,  le  tirage  au  sort 
des  36  jurés  formant  la  liste  de  chaque  session.  Un 
décret  du  14  octobre  1870  abrogea  cette  loi  de  1853 
et  remit  en  vigueur  celle  de  1848. 

Une  nouvelle  loi  fut  promulguée  le  H  novembre  1872. 
Nul  ne  peut  être  juré  s'il  n'a  30  ans  accomplis,  et 
s'il  ne  Jouit  des  droits  politiques,  civils  et  de  famille. 
Sont  incapables  d'être  lurés  :  les  individus  qui  ont 
été  condamnés,  soit  à  des  peines  afflictives  et  infa- 
mantes, soit  à  des  peines  infamantes  seulement  ;  les 
condamnés  à  des  peines  correctionnelles  pour  des 
faits  qualifiés  crimes  par  la  loi;  les  condamnés  à  un 
emprisonnement  de  trois  mois  au  moins;  les  con- 
damnés à  l'amende  ou  à  Temprisonnement,  quelle 
qu'en  soit  la  durée,  pour  vol,  escroquerie,  abus  d*i 
confiance,  soustraction  commise  par  des  dépositaires 
publics,  attentats  aux  mœurs,  délit  d'usure,  outrage 
à  la  morale  publique  et  religieuse,  atuque  contre  le 
principe  de  la  propriété  et  les  droits  ae  la  famille, 
vagabondage  ou  mendicité;  ceux  qui  sont  en  état 
d'accusation  ou  de  contumace  ;  les  notaires,  greffiers 
ou  officiers  ministériels  destitués;  les  faillis  non  réha- 
bilités ;  ceux  qui  sunt  sous  mandat  d'arrôt  ou  de  dé- 
pôt; les  interdits,  les  individus  pourvus  de  conseils 
judiciaires  ;  ceux  qui  sont  placés  dans  un  établisse- 
ment public  d'aliénés.  Les  fonctions  de  juré  sont 
incompatibles  avec  celles  de  député,  ministre,  conseil- 
ler d'Éiat,  membre  de  la  Cour  des  comptes,  sous-se- 
crétaire d'Ëiat  ou  secrétaire  général  d'un  ministère, 
préfet  et  sous-préfet,  secrétaire  général  et  conseiller 


d'!  préfecture,  membre  de  la  Cour  de  CASsation  ou 
des  Cours  d'appel,  juge  titulaire  ou  suppléant  des 
tribunaux  civils  et  des  tribunaux  de  commerce,  offi- 
cier du  ministère  public  près  les  tribunaux.  Juge  de 
paix,  commissaire  de  police,  ministre  d'un  culte, 
militaire  ou  marin  en  activité  de  service  et  pourvu 
d'emploi,  fonctionnaire  ou  préposé  du  service  actif  des 
douanes,  des  contributions  indirectes,  des  forêts  et  des 
télégraphes,  instituteur  primaire  communal.  Ne  peu- 
vent être  jurés  :  les  domestiques  et  serviteurs  à  ga- 
ges, ceux  qui  ne  sivent  pas  lire  et  écrire.  Sont  dis- 
pensés des  fonctions  do  jurés  les  septuagénaires, 
ceux  qui  ont  besoin  pour  vivre  de  leur  travail  manuel 
et  journalier,  ceux  qui  ont  rempli  lesdites  fonctions 
pendant  l'année  courante  ou  l'année  précédente.  La 
liste  annuelle  du  jury  comprend,  pour  le  département 
de  la  Seine,  8,000  jurés,  et,  pour  les  autres  départe- 
ment, 1  juré  par  500  habitants,  sans  que  toutefiis  le 
nombre  des  jurés  puisse  être  inférieur  à  400  et  supé- 
rieur k  600.  Le  préfet  les  répartit  par  arrondissement 
et  par  canton,  proportionnellement  à  la  population. 
Une  commission  composée,  dans  chaque  canton,  du 
Jnge  de  paix,  de  ses  suppléants  et  des  maires  des 
communes  (du  maire  et  do  deux  conseillers  désignés 
par  le  conseil  municipal,  si  le  canton  est  formé  d'une 
seule  commune),  dresse  une  liste  préparatoire  de  la 
liste  annuelle,  contenant  un  nombre  de  noms  double 
de  celui  fixé  pour  le  contingent  du  canton.  La  li^te 
annuelle  est  dressée,  pour  chaque  arrondissement, 
par  une  commission  composée  du  président  du  tribu- 
nal civil,  des  Juges  de  paix  et  des  conseillers  généraux; 
cette  commission  peut  porter  sur  la  liste  les  noms  de 
personnes  non  inscrites  sur  les  listes  cantonales,  en 
n^excédant  pas  le  quart  de  la  liste;  la  liste  d*i  l'arron- 
dissement est  transmise  au  greffe  de  la  cour  ou  du 
tribunal  chargé  de  la  tenue  des  assises.  La  commis- 
sion de  l'arrondissement  où  se  tiennent  les  assises 
dresse  une  liste  spéciale  de  jurés  suppléants  (300  pour 
Paris,  50  pour  chaque  département),  pris  parmi  les 
jurés  de  la  ville  des  assises.  Le  premier  président  du 
tribunal  chef-lieu  d'assises  dresse  la  liste  annuelle 
du  département,  conformément  aux  listes  d'arrondis- 
sement, et  la  liste  spéciale  des  jurés  suppléants.  Il 
tire  au  sort,  en  audience  publique,  sur  la  liste  an- 
nuelle, les  noms  des  36  Jurés  qui  forment  la  liste  de 
chaque  session,  et  ceux  de  4  jurés  suppléants. 


LACUSTRES  (Habitations),  nom  donné  par  les  archéo- 
logues à  des  cabanes  bâties  sur  pilotis  an  bord  ou  au 
milieu  des  lacs,  dans  les  temps  très  reculés.  Elles 
furent  découvertes  d'abord  en  Irlande.  En  1853,  ou  en 
trouva  sous  la  tourbe  au  bord  des  lacs  de  la  Suisse.  Les 
habitations  lacustres  ont  fourni  beaucoup  de  monu- 
ments de  fdge  de  pierre,  {V,  ce  mot  dans  le  Suy 
plétnent), 

LATINE  MODERNE  (Littérature).  Lorsque  les  Bai^ 
bares  entrèrent  dans  l'empire  romain,  la  décadence 
avait  commencé  depuis  longtemps  pour  la  littérature 
latine  :  tous  les  genres,  en  prose  ainsi  qu'en  poésie, 
étaient  épuisés,  et  la  langue  n'avait  plus  qu'à  achever 
de  se  corrompre  et  à  disparaître,  du  moins  comme 
langue  vivante  et  parlée.  Tel  est  le  spectacle  auquel 
on  assiste  à  partir  du  iv<^  siècle  Jusque  vers  l'époque 
des  croisades.  Cet  intervalle  peut  se  diviser  en  deux 
périodes,  que  sépare  le  règne  de  Charlemagne.  Ce 
prince  réagit,  en  effi^,  contre  le  courant  qui  entraînait 
à  sa  ruine  toute  la  littérature  romaine  ;  mais,  après 
lui,  l'Occident  tomba  dans  des  ténèbres  de  plus  en  plus 
épaisses  jusqu'au  jour  où  le  monde,  qui  s'était  cru  un 
moment  condamné  à  périr  avec  l'an  1000^  sembla  vou- 
loir sortir  enfin  de  son  long  sommeil  et  revivre  aussi 
deJa  vie  de  l'esprit.  De  là  date  l'œuvre  des  littératures 
modernes;  mais  la  littérature  latine  ne  devait  pas  sur- 
vivre au  naufrage  de  l'ancien  monde.  —  Toutefois  une 
distinction  est  ici  nécessaire.  Rien  n'égale,  il  est  vrai, 
la  stérilité  dont  sont  frappées,  à  l'époque  des  invasions 
barbares,  les  lettres  païennes  ou  pro'^anes  ;  mais  le 
christianisme,  surtout  au  iv«  et  au  v<^  siècle,  entretient 
encore  dans  les  intelligences  le  mouvement  et  la  vie. 
La  langue  latitie,  déj^  corrompue  par  les  hordes  ger- 
maniques, se  travestit  encore  par  la  nécessité  d'expri. 


LAT 


—  1837  — 


LAT 


mer  toutes  sortes  dMdées  pour  lesquelles  elle  n'avait 
pas  été  faite  ;  mais  dans  ces  œuvres,  où  Térudit 
chercherait  en  vain  le  vieil  idiome  romain  (saint  Jé- 
rôme,  saint  Ambroise,  saint  Augustin),  sont  agités avpc 
éclat  les  problèmes  do  Tordre  le  plus  élevé  (V.  dans 
ce  dictionnaire  l'art.  Pèrbs  de  L*Eglise).  Au  vi«  siècle, 
malheureusement,  et  dans  les  âges  qui  suivent,  cetto 
agitation  féconde  va  de  plus  en  plus  s'affaiblissant;  les 
malheurs  des  temps  ôtent  le  goût  ou  le  loisir  de  s'ins- 
truire, et  le  nombre  des  lettrés  diminue  progressive- 
ment dans  les  rangs  des  clercs  non  moins  que  parmi 
les  laïques  ;  ce  sera  un  mérite,  au  ix**  siècle,  do  savoir 
encore  lire  et  écrire.  —  Au  reste,  dès  le  iv*  siècle,  la 
critique  renonce  à  séparer  la  prose  de  la  poésie  et  à 
suivre  isolément  leurs  destinées.  Toutes  deux,  d^abord, 
ne  vivent  plus  que  par  leurs  productions  inférinures  : 
l'une  a  tout  au  plus  des  grammairiens,  des  rhéteurs, 
quelques  panégyristes  et  beaucoup  de  chroniqueurs  ; 
l'autre  n'a  que  des  épitaphes,  des  élégies,  des  mor- 
ceaux descriptifs  de  courte  haleine»,  d'autres  qu'on  ne 
sait  à  quelle*  catégorie  rattacher.  Ensuite  il  n  est  pas 
rare  de  voir  le  même  auteur  cultiver  à  la  fois  les  deux 
genres,  composer  aujourd'hui  un  chant  de  noces,  écrire 
demain  une  légende,  ou  mieux  encore,  pour  prêter 
Fans  doute  à  la  prose  les  charmes  de  la  poésie,  rédiger 
en  vers  l'histoire  merveilleuse  d  un  saint  dont  les  ver- 
tus ont  frappé  vivement  les  imaginations  contempo- 
raines. Aussi  n'avons-nous  pas  ici  des  œuvres  à  ana- 
lyser, mais  des  noms  à  énumérer. 

A  première  vue,  le  iv^  siècle  ferait  encore  quelque 
illusion.  Il  se  présente,  en  eflTet,  à  la  critiqua  avec  Au- 
sone  et  Glaudien,  versificateurs  au  demeurant  assez 
estimables;  avec  l'orateur  Symmaque,  cet  autre  Pline 
le  Jeune,  comme  disaient  ses  contemporains  trop  pré- 
venus en  sa  faveur;  avec  les  historiens  Ammicn-Mar- 
cellin,  Ëutrope  et  Sulpice  Sévère,  le  Salluste  chrétien  ; 
enfin  avec  un  cortège  preque  imposant  de  grammai- 
riens et  de  rétheurs,  parmi  lesquels  brillent  :  Donat, 
moins  connu  par  son  Commentaire  de  Térence  que 
pour  avoir  été  le  maître  de  saint  Jérôme;  Népotien, 
ami  d'Ausone,  lequel  dutà  sa  réputation  d'ôtre  nommé 
gouverneur  d'une  province;  Mamertin,  panégyriste 
attitré  des  empereurs,  fils  d'un  antre  Mamertin  qui  fut 
le  premier  décoré  de  ce  titre  ;  Delphide  de  Bordeaux, 
dont  saint  Jérôme  a  écrit  qu'en  prose  et  en  vers  il 
avait  illustré  toutes  les  Gaules  par  son  génie,  etc.  Mais 
quand  on  y  regarde  d'un  peu  plus  près,  l'illusion  se 
dissipe,  et  l'on  est  forcé  de  reconnaître  que,  de  toutes 
ces  œuvres  qui  firent  en  leur  temps  plus  ou  moins  de 
bruit,  pas  une  n'offre  la  trace  d'une  inspiration  origi- 
nale et  ne  mérite  une  considération  sérieuse. 

Le  v*  siècle  ne  pàiit  pas  trop  d'abord  à  côté  de  l'âge 
précédent.  A  Ausone  et  à  Glaudien  il  oppose  Rutilius 
Numatianus  et  Sidoine  Apollinaire.  Rutilius,  qui 
naquit  à  Poitiers  ou  peut-être  à  Toulouse,  était  préfet 
de  Rome  lorsque  l'invasion  barbare  vint  couvrir  de 
ruines  son  pays  natal.  Il  conçut  alors  le  désir  de  revoir 
la  Gaule,  se  mit  en  route,  et,  chemin  faisant,  raconte 
en  vers  élégiaques  son  voyage.  Ce  poème,  connu  sous 
le  nom  d'Ilinerarium  ^  et  dont  il  ne  reste  que  le 
H'  chant  et  une  partie  du  2^  a  été  sauvé  de  l'oubli 
par  quelques  descripiions  gracieuses.  Sidoine  Apol- 
linaire, originaire  de  Lyon,  fut  plus  fécond,  quoique 
beaucoup  moins  pur.  Dans  ses  œuvres  fort  diverses  on 
compte  des  épithalames,  des  panégyri(|ues,  un  éloge 
de  Bacchus,  un  autre  du  monastère  de  Lérins,  et  neuf 
livres  de  lettres  en  vers.  De  même,  si  le  iv*  siècle  s'est 
glorifié  de  ses  rhéteurs  et  de  ses  grammairiens,  s'il  se 
vante  d'avoir  produit  un  Symmaque,  le  v«  répond  par 
les  noms  de  Mamert  Glaudien,  de  Marcien  Capella,  de 
Macrobe  et  de  l*riscien .  Mamert  Glaudien  écrivit  un 
traité  sur  la  nature  de  Tâme  qui  a  survécu  jusqu'à  nos 
jours,  comme  pour  montrer  qu'il  y  avait  encore  à  cette 
époque  des  esprits  capables  de  métaphysique.  Marcien 
Capella,  qui  naquit  à  Madaure,  près  de  Carthage,  com- 
posa un  Satiricon  en  neuf  livres,  mêlés  de  vers  et  de 
prose;  c'est  une  sorte  d'encyclopédie  qui  commence 
par  une  allégorie  bizarre,  l'apothéose  de  la  philologie 
et  son  mariage  avec  Mercure,  et  qui  se  termine  par  un 
traité  des  septs  arts  libéraux,  tels  que  les  étudia  le 
moyen  âge  (la  grammaire,  la  dialectique  et  la  rhéto- 
rique, matière  du  trivium;\K  géométrie,  l'arithmétique, 
l'astronomie,  la  musique,  sujet  du  qundrivium).  Ma- 
crobe a  laissé  un  commentaire  sur  le  Songe  de  Scipion^ 
de  Cicéron,  avec  une  exposition  platonicienne  du  sys- 
tème du  monde,  et  un  recueil  de  conversations  intitulé 


les  Saturnales^  ouvrage  en  sept  livres,  doot  quatre 
sont  consacrés  à  l'examen  critioue  des  poésies  de  Vir- 
gile, et  les  autres  traitent  des  fêtes,  du  calendrier,  de 
la  vie  privée  des  Romains,  etc.  Enfin  Priscien,  qui  na- 
quit à  Césarée  et  tint  une  école  fameuse  à  Constanti- 
nopie,  entre  antres  œuvres,  composa  une  grammaire 
que  mirent  souvent  à  contribution  les  grammairiens  du 
moyen  âge.  —  Toutefois,  dans  cette  comparaison  entre 
les  deux  siècles,  le  v*  a  nn  désavantage  considérable 
aux  yeux  de  la  critique  littéraire  :  c'est  que  la  langue 
qu'il  parle  est  beaucoup  plus  incorrecte.  I^es  Barbares 
contribuèrent  à  corrompre  de  tontes  manières  l'idiome 
des  vaincus.  Ils  apportaient  avec  eux  des  idées  incon- 
nues aux  Romains,  surtout  dans  les  relations  de  la  so- 
ciété :  la  langue  latine  manquant  de  termes  pour  les 
rendru.  il  fallut  avoir  recours  aux  mpts  des  vainqueurs 
qu'on  latinif^a.  Quelquefois  les  Barbares  apprirent  tels 
ou  tols  mots  latins  pour  exprimer  les  choses  de  la  vie 
usuelle  :  mais  ils  les  apprirent  mal  et  les  rendirent 
dénaturés  aux  Romains,  qui,  soit  insouciance,  soit  né- 
cessité, les  adoptèrent  en  cet  état  :  c'est  ainsi  qu'on 
disait  antistis  pour  antistes^  contemptOy  fructo  pour 
contemptu^  fructu.  Les  règles  de  la  grammaire  furent 
altérées  :  on  employa  des  masculins  pour  des  féml- 
nins;  les  verbes  qui  gouvernaient  l'accusatif  gouver- 
nèrent l'ablaiif,  et  ainsi  du  reste.  Souvent  aussi  le 
Barbare  voulut  s'éviter  la  peine  d'apprendre  le  mot 
latin,  et  y  substitua  le  mot  de  sa  langue. 

Ajoutez  que  les  bouleversements  qui  signalèrent  la 
conquête  barbare  réduisirent  singulièrement  le  nombre 
des  gens  lettrés,  et  que,  dès  460,  Mamert  faisait  ainsi 
CEpitaphe  des  sciences  :  a.  On  néglige  la  langue  latine; 
on  méprise  la  grammaire  ;  on  a  peur  de  la  dialectique; 
on  redoute  la  musique,  la  géométrie,  l'arithmétique.  » 
11  y  avait  encore  cependant  de  paisibles  asiles  où  les 
œuvres  de  l'esprit  étaient  en  honneur,  et  où  les  lettre^ 
devaient  trouver  leur  dernier  refuge  ;  ce  sont  les  mo« 
nastères,  au  fond  desquels  s'accomplissent  des  travaux 
de  trois  genres  diff'érents  :  ici  se  copient  et  se  conser- 
vent les  chefs-d'œuvres  de  l'antiquité;  là  s'élaborent 
des  chroniques  naives,  qui  partent  souvent  de  îa  créa- 
tion du  monde  et  sont  conduites  jusqu'à  l'année  même 
qui  les  voit  éclore  ;  ailleurs,  des  méditations  obstinées 
enfantent  des  œuvres  où  la  philosophie  marche  de  pair 
avec  la  théologie  et  l'histoire.  Voilà  comment,  au 
v*  siècle,  la  littérature  religieuse  présente  encore 
qiielqnes  noms  considérables.  Salvien,  moine  de  Lérins, 
puis  prêire  de  Marseille,  surnommé  par  ses  contem- 
porains le  guide  des  évoques,  fait  paraître,  en  455,  un 
Traité  de  la  Providence,  dans  lequel  il  attribue  aux 
crimes  des  Romains  les  désastres  de  l'empire.  Gassien, 
de  Marseille,  voulant  atténuer  l'opinion  de  Pelage  sur 
les  rapports  de  la  grâce  et  de  la  liberté,  prétend  s'in- 
terposer entre  les  partisans  exclusifs  de  la  grâce  ou 
Prédestinatiens  et  ceux  de  la  liberté  ou  Pélagiens, 
fonde  ainsi  h*,  semi-pélagianisme  et  soulève  dans  l'E- 
glise des  débats  auxquels  prennent  part,  d'un  côté, 
Fauste  de  Riez,  abbé  du  monastère  de  Lérins,  Arnobe 
le  Jeune  et  Vincent  de  Lérins;  de  l'autre,  saint  Hilaire 
d'Arles,  saint  Prosper  d'Aquitaine  et  saint  Augustin. 
Ces  démêlés  ob  la  littérature  en  elle-même  n'a  rien 
à  voir  ont  inspiré  toutefois  à  saint  Prosper  son  poème 
sur  les  Ingrats  (ingrati,  qui  repoussent  la  grâce). 
Enfin  Paul  Orose  TÈspagnol  compose,  à  la  demande 
de  saint  Augustin,  une  histoire  du  monde  {PauU 
Orosii  Mœsta  mundi),  ouvrage  moitié  moral,  moitié 
historique  sur  les  calamités  dont  la  terre  a  été  affligée 
depuis  la  création;  réponse  aux  païens  qui  rendaient 
la  religion  chrétienne  responsable  de  la  ruine  de  l'em- 
pire romain. 

Gassiodore  et  Boèce  font  la  transition  du  v«  au 
VI*  siècle,  c'est-à-dire  de  la  décadence  profonde  à  la 
véritable  barbarie.  Gassiodore,  après  avoir  été  mi- 
nistre de  Théodoric  le  Grand  et  de  ses  premiers  suc- 
cesseurs, se  retira  dans  ses  domaines  en  538.  Là  il 
fonda  un  ordre  monacal  consacré  surtout  à  la  copie  des 
manuscrfts  anciens,  et  composa  lui-même  la  plupart 
des  ouvrages  qui  ont  fait  sa  réputation  littéraire  :  les 
Institut  ions  aux  lettres  divines,  programme  de  l'ensei- 
gnement tel  qu'on  le  suivit  au  moyen  âge  ;  un  Traité 
de  l'âme;  des  livres  de  grammaire,  de  mathématiques, 
de  musique.  11  avait  écrit  ru  douze  livres  une  Histoire 
des  GothSj  qui  s'est  perdue,  et  dont  l'on  n'a  qu'un 
abrégé  par  le  Goih  Jornandès;  plus  une  Chronique 
universelle  parlant  du  déluge  et  finissant  à  l'an 
59  après  J.-C.  Mais  son  œuvre  la  plus  importante,  bien 


LAT 


—  1838  — 


LAT 


Sue  sans  caractère  ni  prétention  littéraire,  est  le  recueil 
es  réécrits  et  ordonoances  qa*il  arait  rédigés  dans 
son  administration  ;  ce  sont  douze  lirres  [variorum 
libri  XII)  remplis  de  détails  minutieux  et  curieux  sur 
le  gouvernement  de  l'Italie,  sur  la  constitution  disci- 

Elinaire  de  TEglise  et  sur  l'Etat  intellectuel  du  pays, 
oèce,  ministre  de  Théodoric,  comme  Cassiodore. 
composa,  pendant  les  tristes  loisirs  de  la  captivité  qui 
précéda  sa  mort,  un  livre  De  la  Consolation  de  la  phi- 
losopfiie,  dialogue  en  prose  et  en  vers  où  l'auteur, 
parlant  de  la  Providence,  s'élève  à  une  grande  hauteur 
de  pensées  et  de  sentiments.  On  a  aussi  de  lui  plu* 
sieurs  compositions  philosophiquos  et  des  traductions 
avec  commentaires  des  traités  de  dialectique  d'Aristote, 
ouvrages  qui  ont  été  longtemps  suivis  pour  l'enseigne- 
ment scolastique  ^  moyen  &ge. 

Après  ces  deux  personnages  encore  illustres,  Tâge 
des  ténèbres  commence;  des  écoles  se  ferment;  le 
clergé  lui-même  voit  ses  rangs  envahis  par  des  Bar- 
bares que  tentent  le  titre  d'évèquo  et  les  richesses 
épiscopales,  et  dont  Tignorance  brutale  fait  un  triste 
contraste  avec  la  science  de  leurs  prédécesseurs. 
Saint  Grégoire,  évèque  de  Tours,  est  auteur  d'une 
Histoire  ecclésastique  des  Francs,  qui  n'a  d'intértH  que 
pour  les  historiens.  Fortunat,  Italien,  devenu  évèque 
de  Poitiers,  a  laissé  une  Vie  de  saint  Martin  en  vers, 
et  une  Vie  de  sainte  Radegonde,  des  hymnes,  des 

{»oèmes  sur  des  violettes,  sur  des  châtaignes,  sur  du 
ait,  etc.  Saint  Césaire,  évèque  d'Arles,  versé  dans  la 
connaissance  de  l'Ectiture  et  des  Pères,  porta  le  der- 
nier coup  au  semUpélagianisme  dans  le  concile  d'O- 
range. Saint  Aviie,  évèque  de  Vienne  (Dauphiné), 
écrivit  divers  traités  contre  les  hérétiques  de  son 
temps,  une  homélie  sur  les  Rogations  et  un  poème 
sur  la  Création,  dont  plusieurs  morceaux  ont  pu  sou- 
tenir la  comparaison  avec  des  passages  correspondants 
de  Milton.  Saint  Gildas,  dit  le  Sage,  né  dans  le  pays 
de  Galles,  et  qui  passa  une  partie  do  sa  vie  au  monas- 
tère de  Glastonbury,  est  auteur  d'une  lettre  {Liàer  que- 
rulus  de  excidio  Britannix)  où  il  donne  un  précis  de 
l'histoire  de  la  Grande-Bretagne  depuis  l'invasion  des 
Romains  Jusou'à  son  tpmps. 

Au  VII*  siècle,  l'affaissement  des  esprits  est  plus 
triste  encore.  La  contagion  de  l'ignorance  a  gagné  de 
proche  en  proche  toutes  les  classes;  la  langue  s'est 
corrompue  au  point  que  les  mots  en  sont  devenus 
méconnaissables  et  rhisiorien  Frédt^gaire  annonce  dans 
une  préfaça  qu'il  n'usera  pas  de  tout  son  savoir,  et 
qu'il  parlera  moins  purement  qu'il  ne  pourrait  le  faire, 
«  de  peur  de  n'être  pas  compris  de  tout  le  monde  ». 
Aussi  quelques  hommes  seulement  de  crrtte  époque 
ont  une  sorte  de  notoriété;  encore  est-co  comme  hie- 
toriens  et  non  point  comme  littérateurs  qu'ils  l'ont 
acquise.  Le  moine  Marculfe  a  rédigé  un  recueil  en  deux 
livres  des  formules  usitées  dans  les  actes  qui  se  pas- 
saient :  |o  au  nom  du  roi;  2*^  entre  les  particuliers. 
Fréiiégaire  a  continué  Grégoire  de  Tours  dans  une 
sorte  d'histoir»  universelle  poussée  depuis  Adam  Jus- 
qu'à la  quatrième  année  du  règne  de  Clovis  II:  Saint 
Columban,  missionnaire  d'Irlande,  a  laissé  plusieurs 
ouvrages  religieux  tels  qu'une  Règle  monastique^  un 
Pénitentiely  etc.,  et  trois  petits  poèmes  ascétiques,  avec 
une  épigramme  sur  la  comparaison  d'Eve  et  de  la  sainte 
Vierge.  Bède  le  Vénérable  mit  à  profit  sa  grande  éru- 
dition dans  une  Chronique  qui  commence  avec  l'ori- 
Sine  du  monde  et  finit  avec  1  an  730  après  J. -G.  Enfin, 
'Isidore  de  Séville  il  y  a  une  Chronique  qui  va  jus- 
qu'en 615  après  J.-C.,  et  deux  Abrégés  histotnques  sur 
les  Barbares  qui  occupèrent  l'Espagne  (les  Visigoths, 
les  Suèves  et  les  Vandales). 

Après  le  triomphe  des  Austrasiens,  les  évèchés  et  les 
abbayes  tombèrent  aux  mains  des  compagnons  de 
Charles  Martel,  qui  se  soucièrent  fort  peu  d'y  conser- 
ver les  écoles,  et  l'on  vit  les  bibliothèques  devenues 
inutiles,  habitées,  comme  à  Fontenelle  (Saint-Wan- 
drille),  par  les  chiens  du  seigneur. 

Tel  était  l'état  des  choses  lorsque  parut  Gharlemagne 
qui  forma  le  dessein  d'arracher  son  siècle  à  l'ignorance  ; 
et  il  y  réussit  au  moins  pour  un  moment.  Il  contribua 
au  réveil  des  études  par  ses  lois  et  par  son  exemple.  A 
titre  de  monarque,  il  établit  à  sa  cour  l'école  dite  pa- 
latine, renouvelée  peui-ètre  d'une  école  analogue  qui 
avait  existé  naguère  à  Trêves  dans  le  palais  des  empt^* 
reurs  romains;  il  restaura  les  écoles  épiscopales  et 
celles  des  monastères,  honora  les  savants,  et  l'on  sait 
les  menaces  qu'il  fit  aux  enfants  des  seigneurs  qui  ne 


purent  répondre  à  ses  questions,  jurant  que  les  places 
et  les  bénéfices  iraient  trouver  les  enfants  des  pauvres 
s'ils  étaient  plus  savants  qu'eux.  Gomme  homme  avide 
de  science  ou  comme  auteur,  11  se  mit  sur  les  bancs, 
il  épela  des  lettres,  il  s'exerça  à  bien  écrire;  il  apprit 
les  langues,  l'astronomie;  il  étudia  la  grammaire,  l'or- 
thographe, la  rhétorique,  la  dialectique  ;  s'il  ne  rédigea 
pas  tous  ses  Capitulaires,  il  n'en  reste  pas  moins  con- 
stant que  c'cftt  son  génie  qui  les  a  dictés,  et  qu'il  fut 
rame  de  tout  ce  qui  se  composait  sous  ses  yeux;  il 
écrivit  des  lettres  au  pape,  aux  évêques,  aux  rois  des 
autres  nations,  aux  empereurs  de  Gonstantinople ; 
activité  prodigieuse  et  qui  eût  été  digne  de  produire 
des  faits  plus  durables. 

Charlemagne  apparaît  dans  l'histoire  environné  d'un 
brillant  cortège  de  savants  qu'il  attira  de  tous  les  pays 
d'Europe  à  sa  cour,  et  qui,  joignant  leurs  efforts  à 
ceux  du  maître,  tirèrent  les  esprits  de  leur  létliargie* 
Les  principaux  ouvriers  de  cette  première  Renaissance, 
éphémère  parce  qu'elle  était  prématurée,  furent  Alcuin, 
Esinhard,  Angilbert,  Théodulfe,  Leidrade.  Agobard, 
Paulin  d'Aquilée,  Pierre  de  Pise  et  Paul  Warnefried. 
Les  œuvres  d' Alcuin,  considérée»  au  point  de  vue  lit- 
téraire, sont  au-dessous  de  leur  réputation,  car  elles 
sont  plutôt  d'un  Père  de.  1  É;;lise  que  d'an  homme  de 
lettres.  Elles  n'en  ont  pas  moins  exercé  en  leur  temps 
une  influence  considérable.  Les  unes  concernent  rÉcri- 
ture  sainte,  h^s  autres  sont  des  traités  de  théologie  ; 
celles-ci  ont  pour  objet  de  combattre  les  hérésies  du 
temps;  celles-là  regardent  la  liturgie:  d'autres  enfin 
se  rapportent  plus  particulièrement  aux  sept  arts  libé- 
raux ;  joignez-y  des  poésies  de  différentes  sortes,  et  vous 
aurez  une  idée  de  la  fécondité  de  ce  puissant  esprit. — 
La  belle  œuvre  d'Éginhard,  celle  à  laquelle  il  est  rede- 
vable de.sa  réputation,  est  la  Vie  de  Charlemagne,  qui 
est  restév^  comme  la  grande  autorité  de  cette  époque.  — 
Angilbert  n'a  laissé  que  quelques  poésies  insignifiantes; 
sa  gloire  est  d'avoir  été  l'un  des  membres  de  l'école 
palatine,  et  d'avoir  servi  pour  sa  part  les  desseins  de 
son  roi.  — Théodulfe,  appelé  dltalie  par  Charlemagne 
k  l'évêché  d'Orléans,  fonda  dans  son  dincèse   qnaire 
grandes  écoles,  et  recommanda  à  tous  ses  prêtres  et  cu- 
rés d'ouvrir  dans  chaque  bourg  une  école  où  les  enfants 
des  pauvres  seraient  gratuitement  enseignés.  Il  compo- 
sa, d'autre  part,  des  poésies  diverses  qui  lui  firent  une 
grande  réputation,  bien  qu'elles  n*offrent  aujourd'hui 
que  peu  d'intérêt.  —  Leidrade,né  dans  le  Noriquo,  passa 
aussi  les  Alpes  à  la  voix  de  Charlemagne  pour  diriger 
l'archevêché  de  Lyon.  Ecrivain  peu  fécond,  il  aime 
mieux  propager  les  lettres  en  multipliant  les  écoles  dans 
son  diocèse  qu'en  composant  de  longs  et  nombreux 
ouvrages.  Agobard,  son  disciple  et  son  successeur,  a 
laissé,  au  contraire,  une  trentaine  d'écrits  parmi  les- 
quels on  distingue  un  Traité  contre  le  duel  judiciaire 
qu'il  fit  abolir  par  le  fils  et  successeur  de  Charlemagne. 

—  Paulin  d'Aquilée,  dont  le  grand  empereur  se  plaisait 
aussi  à  consulter  les  lumières  de  l'expérience,  n'écrivit 
rien  qui  marque  une  préoccupation  purement  littéraire; 
mais  son  ardeur  épiscopale  lui  inspira  des  ouvrages  de 
polémique  religieuf^e  et  de  morale  qui  tiennent  une 
place  honorable  parmi  les  productions  contemporaines. 

—  Pierre  de  Pise  enseignait  à  l'école  de  Pavie  lorsque 
Charlemagne  vint  assiéger  cette  ville  et  mettre  fin  à  la 
monarchie  lombarde  :  il  fut  emmené  en  France  par  le 
vainqueur  pour  y  continuer  sos  leçons,  et  fut  regardé 
commi*.  la  part  la  plus  précieuse  du  butin.  —  Enfin 
Paul  Warnefried,  dit  /e  Diacre,  auteur  d'une  histoire 
dns  Lombards  (De  gestis  Longobardorum  libri  sex), 
reçut  de  l'empereur  la  mission  de  composer  différents 
ouvrages  pour  le  cl<^rgé  de  France  et,  entre  autres,  un 
recueil  d'homélies  tirées  des  saints  Pères,  lequel  fut  en- 
voyé à  tous  les  lecteurs  des  Eglises.  On  lui  doit  égale- 
ment une  histoire  des  évêques  de  Mets. 

Tels  sont  les  hommes  les  plus  remarquables  du  règne 
de  Charlemagne,  ceux  dont  les  écrits  et  les  actes  inspi- 
rés, récompensés,  commandés  quelquefois  par  leur 
illustre  protecteur,  suspendirent  environ  pendant  un 
quart  de  siècle  Ja  décadence  de  la  littérature  latine.  Il 
ne  devait  rien  rester  de  cette  glorieuse  tentative,  et 
quand  ces  instruments  d'une  grande  pensée  eurent  dis- 
paru avec  le  maître  qui  s'en  était  servi,  la  barbare  ne 
tarda  pas  à  reconqu<^rir  le  terrain  qu'elle  avait  perdu. 
Les  invasions  normandes  ne  pouvaient  qu'acélérer  son 
triomphe.  Le  ix<»  siècle,  à  la  vérité,  se  ressent  encore 
des  vigoureux  efforts  du  viii^,  et  produit  quelques  uums 
dignes  de    souvenir;  tels   sont  Ermoldus  Nigeilus, 


LAT 


—  1839  — 


LIS 


poète  ;  Thégan,  l'astronome  ;  Ai  mon  et  Fréculfo,  histo- 
riens; Walafrid-Strabon  et  Florus,thôologiens  et  poètes; 
Raban  Maur,  autre  théologien  non  moins  renommé  que 
les  deux  précédents  ;  Jean  Scot,  précurseur  de  la  sco- 
lastique:  Uincmar,  homme  d'écrit  et  d'action,  qui  donne 
k  la  fois  (les  leçons  aux  papes  et  aux  princes  ;  puis 
bien  au-dessous  de  ce  grand  personnage,  le  poète  Mi- 
lon  et  les  théologiens  Tatramne  et  Paschase-Eladbert, 
de  Corbie  ;  Loup,  abbé  de  Ferrières,  et  Qothescalc, 
moine  de  l'abbaye  de  Fulde.  Mais  le  x^  siècle  compte  h 
peine  deux  ou  trois  représentants  fort  médiocres,  tels 
que  Flodoard,  auteur  d  une  histoire  de  l'église  de  Reims 
et  d'une  chronique  plus  générale,  précieuse  par  quel- 
ques faits  dont  la  mention  no  se  retrouve  point  ailleurs, 
et  Abbon  qui  raconta  le  siège  de  Paris  par  les  Normands 
et  diit  une  certaine  célébrité  à  la  triste  popularité  de 
son  suiet.  N'oublionc  cependant  pas,  en  Allemagne, 
la  célèbre  abbesse  de  Gandersheim,  Hroswita,  auteur 
de  plusieurs  drames  imités  de  Térence,  qu'on  avait 
beaucoup  vantés  jusqu'ici,  mais  dont  Tauthontici  té  vient 
d'être  attaquée  par  un  critique  très  distingué  de  l'Al- 
lemagne même,  M.  Joseph  Aschbag  (Gazette  (VAugs- 
bourfff  14  septembre  1867).  Ainsi,  abstraction  faite  des 
discussions  théologiques,  voilà  donc  les  sujets  dans 
lesquels  est  maintenant  confinée  la  langue  latine  :  des 
poèmes  de  tout  genre  et  de  toute  dimension,  qui  n*ont 
guère  d'autre  mérite  que  d'avoir  été  lus  en  leur  temps 
et  d'attester  le  réveil  de  l'esprit  humain  après  les 
terreurs  de  l'an  1000,  et  des  chroniques  ou  des  bio* 
graphies. 

Parmi  les  poètes  du  xi«  siècle  se  distinguent  Hugues, 
évèque  de  Langres;  Guy,  évèque  d'Amien«,  et  Odon, 
évoque  de  Cambrai.  Un  distique  du  premier,  adressé 
à  Guillaume  le  Conquérant,  excita  une  admiration  gé- 
nérale ;  nous  le  citons,  aûn  que  par  cet  échantillon 
on  puisse  juger  du  reste  : 

Si  quis  in  ante  videt  qui  te  circuaspicit,  ex  te 
Golligit,  aute  cornes,  rex  modo  Cœsareris. 

Guy  d'Amiens  écrivit  un  poèmo  sur  la  conquête  de 
l'Angleterre  par  les  Normands  ;  et  Odôn  de  Cambrai, 
rebroussant  vers  un  passé  qui  semblait  oublié,  chanta 
les  vieux  héros  de  la  guerre  de  Troie.  Les  chroniqueurs 
principaux  de  la  même  époque  sont  :  Raoul  Glaber  du 
monastère  de  Gluny;  Guillaume  de  Pouille,  Geoffroy 
de  Malaterra,  Aimon,  Gérard,  Bernon,  Raoul  Tortaire, 
ces  quatre  derniers  sortis  du  monastère  de  Fleury  ; 
Guibert  de  Nogent,  Milon  Crespint  de  l'abbaye  du 
Bec,  etc. 

Mais  nous  voici  venus  aux  croisades.  Au  moment  où 
elles  commencent^  les  idiomes  modernes  ont  déjà  une 
existence,  une  physionomie  disiincte,  et  ils  ne  tarde- 
ront pas  à  produire  eux-mêmes  leurs  œuvres  durables 
et  vraiment  littéraires  :  témoin  le  récit  de  la  quatrième 
croisade  par  Willehardouin,  bientôt  suivi  des  mémoi- 
res du  sire  de  Jolnville.  Le  latin  pourtant  ne  périt  pas; 
on  continue  et  on  continuera  de  le  parler  et  de  le  dé- 
naturer, bruyamment  ou  sHoncieusement,  dans  les 
églises  et  dans  les  écoles  de  la  scolastique,  Jusqu'à  ce 
que  la  Renaissance  remette  en  honneur  la  vieille  lan- 
gue romaine.  (Voyez  Rbnaissancb.)  C'est  alors  qu'ap- 
paraissent, en  Italie  d'abord,  puis  en  France  et  dans 
toute  l'Europe,  ces  savants  qui  se  piquent  d'écrire  aussi 
purement  le  latin  que  Cicéron  lui-même  et  ses  con- 
temporains et  dont  quelques-uns  cultivent  à  la  fois  les 
vers  et  la  prose  (Poggio,  Laurent,  Budé,  Valla,  Erasme, 
Sadolet,  Bembo,  les  Scaliger,  Robert  Estienne,  Paul 
Manuce,  Muret,  Casaubon,  etc.).  D'autres  cependant 
s'exercent  plus  particulièrement  è  la  poésie,  et  l'on 
voit  ainsi  se  transmettre  d'âge  en  âge,  comme  une 
tradition,  et  en  dehors  des  écoles,  le  culte  du  vers  la- 
tin; au  xvo  siècle  brillent  Pétrarque  et  Ange  Politien; 
le  xvi^  plus  fécond,  présente,  non  sans  orgueil,  San- 
nazar,  Vida,  Bembo,  Bèze,  Du  Bellay,  Muret,  Joseph 
Scaliger,  Passeratil'Hospital,  Sainte-Marthe  {Sammar- 
tanus)  et  I'EcosshIs  George  Buchanan.  Ceux-ci  à  leur 
tour  ont,  au  xvit^  siècle,  leurs  succosseurs  :  en  Hol- 
lande, Heinsius  et  Gaspard  BarlaBus;  en  Pologne,  Snr- 
bievius;  en  Ecosse,  Arthur  Johnston;  en  Angleterre, 
Owen,  May  et  le  grand  Milton  ;  en  Italie,  le  P.  Ceva, 
Segardi,et  Strozzi  ;  en  France,  Claude  Quillet,  Ménagn, 
Rapin,  Comniire,  Santcuil.  Le  xviii*,  qui  laisse  affai- 
blir sensiblement  l'étude  de  l'antiquité,  est  encore  re- 
présenté par  Desbilluns,  Vani^re,  Lebeau,  Rollin.  Mais 
au  xix^  il  n'y  a  plus  un  seul  nom  vraiment  digne  d'être 


cité.  Le  vers  latin  survivra -t-il  à  l'engouement  dont 
la  génération  présente  est  saisie  pour  les  sciences  et 
au  discrédit  dont  sont  frappées  les  études  classiques? 
C'est  le  secret  do  l'avenir  A.  H. 

LEGER  (Saint),  un  des  plus  anciens  poèmes  de  no- 
tre langue,  en  dialecte  bourguignon.  Il  comprend 
50  stophes,  de  six  vers  rimant  deux  à  deux;  c'est  un 
poème  en  l'honneur  de  saint  Léger,  le  rival  politique 
d'Ebroîn.  Il  a  été  composé  vers  le  milieu  du  x<^  siècle, 
probablement  à  Autun  dont  saint  Léger  était  évèque 
et  où  son  souvenir  était  resté  populaire.  La  valeur 
poétique  du  poème  est  nulle;  m^iis  il  est  important 
pour  rhistoire  littéraire,  en  ce  qu'il  montre  la  versi- 
fication française  constituée  dès  le  x*  siècle,  et  sur- 
tout pour  l'histoire  de  la  langue.  Le  manuscrit, 
conservé  à  la  bibliothèque  de  Clermont,  a  été  publié 
avec  commentaire  par  M.  Gaston  Paris  dans  la  Roma» 
nia,  1S72. 

LETTRES  (Facultés  des).  A  dater  du  1"  janv.  1876, 
toutes  les  rétributions  éventuelles  qu'on  attribuait  aux 
professeurs  et  agrégés  furent  suprimées.  Le  traite- 
ment fut  fixé  ainsi  qu'il  suit  :  professeurs  à  Paris, 
15,^)00  fr.  ;  professeurs  dans  les  départements,  de 
6,000  à  11,000  fr.  ;  agrégés  à  Paris  et  dans  les  dépar- 
tements, 2,000  fr. 

LIBERTE  PROVISOIRE.  La  loi  du  14  juillet  1865 
décide  qu'en  toute  matière  le  juge  d'instruction  peut, 
sur  la  demande  de  l'inculpé  et  sur  les  conclusions  du 
procureur  impérial,  ordonner  que  l'inculpé  sera  mis 
provisoirement  en  liberté.  En  matière  correctionnelle, 
la  mise  en  liberté  est  de  droit,  cinq  jours  après  l'in- 
terrogatoire, quand  le  maximum  de  la  peine  prononcée 
par  la  loi  sera  inférieur  à  deux  ans  d'emprisonnement. 
Cela  ne  s'applique  ni  aux  prévenus  déjà  condamnés 
pour  crime,  ni  à  ceux  déjà  condamnés  à  un  emprison- 
nement de  plus  d'une  année.  Si,  après  avoir  obtenu  sa 
liberté  provisoire,  l'inculpé  ne  comparait  pas,  on  peut 
décorner  contre  lui  un  mandat  d'arrêt  ou  de  dépôt,  ou 
une  ordonnance  de  prise  de  corps. 

LION  DE  BOURGES,  chanson  de  geste  du  xiii*  siè- 
cle, faisant  partie  du  cycle  carlovingien.  Herpin  de 
Bourges,  duc  de  pure  invention,  s'était  enfui  en  Italie 
pour  avoir  frappé  Clarion,  chevalier  de  la  race  de  Ga- 
nelon,  dont  la  félonie  n'était  pas  encore  connue.  Il  lui 
na(|uit  un  enfant  qu'il  dut  abandonner  forcément,  et 
qu'une  lionne  éleva  dans  une  forêt.  Le  roman  raconte 
l'^s  aventures  du  jeune  Lion,  son  mariage  avec  la  fille 
du  roi  de  Sicile,  ses  victoires  sur  les  Sarrasins  ;  enfin 
Lion  se  rend  à  Bourges,  où  les  héritiers  de  Herpin 
l'acceptent  comme  duc.  La  Bibliothèque  nationale 
possède  Lion  de  Bourges  qui  n'a  pas  moins  de  20,000 
vers  alexandrins  en  tirades  monorlmes,  imité  de  plus 
en  40,0')0  vers  de  huit  syllabos. 

LISSE  (Haute  et  basse)  ou  lice,  terme  de  manufac- 
ture servant  à  distingu'^r  les  tapisseries  d'après  le 
technique  de  leur  fabrication.  Les  tapisseries  se  divi- 
sent selon  le  mode  d'exécution  en  tapisseries  de  haute 
et  en  tapisseries  de  basse  lisse.  (V.  le  mot  Lisse  au 
Dictionnaire.)  Ces  définitions  constituent  un  vocable 
de  mé  lier  plutôt  qu'elles  n'impliquent  une  valeur  mar- 
chande. On  peut  seulement  affirmer  que  la  basse 
lissa  coûte  sensiblement  moins  cher  à  établir  que  la 
haute  lisse,  et  que  si  elle  présente  quelques  infério- 
rités de  style,  la  nuance  n'est  perceptible  que  pour 
les  yeux  très  exercés.  Nous  allons  exposer  en  quel- 
ques traits  généreux  les  caractères  qui  distinguent 
ces  deux  procédés  de  fabrication,  pour  montrer  en- 
suite les  difi'éronces  matérielles  qui  permettent  à 
l'amateur  de  ne  point  les  confondre. 

Pour  fabriquer  la  haute  lisse  la  chaîne  (V.  ce  mot, 
Supplément)  est  tendue  verticalement.  Le  métier  se 
compose  de  deux  montants  en  bois  ou  en  fonte  sup- 
portant deux  cylindres  mobiles,  les  «  ensouples  », 
placés  l'une  dans  la  partie  supérieure,  l'autre  dans 
la  parti^  inférieure.  Ces  cylindres  servent  à  retenir 
les  extrémités  de  la  chaîne  et  à  la  tendre  selon  les 
besoin».  Pour  la  haute  lisse  l'ouvrier  s'installe  non 
pas  devant  mais  derrière  son  métier.  Son  travail  doit 
être  fait  à  l'envers.  Avant  de  tisser  sa  trame,  le  haute- 
lissier  doit  procéder  au  décalcage  de  son  modèle. 
Lorsqu'il  a  préparé  sa  chaîne  par  l'ourdissage,  il  la 
fixe  sur  le  métier,  puis  s'aidant  d'un  calque  fait 
sur  du  papier  végétal  qu'il  applique  sur  sa  chaîne, 
il  marque  à  la  pierre  noire  ou  à  l'encre  les  princi> 
paux  traits  de  son  carton.  Le  contour  n'est  en  somme 
qu'une  suite  de  points  noirs  marqués  sur  autant  de 


LIS 


—  1840  — 


LIS 


fils  séparés.  Ces  points  ne  sont  que  des  reprises,  le 
dessin  n'est  reproduit  qu*à  peu  près,  et  pour  le  rec- 
tifier il  importe  que  le  tapissier  soit  rompu  à  toutes 
les  subiilités  de  Tart  du  dessin,  sans  compter  la 
profonde  connaissance  des  couleurs  qu'exigera  tout 
à  l'heure  l'application  de  la  trame  sur  la  chaîne. 
L'opération  du  décollage  terminée,  le  hantc-iissier 
arrîTe  au  tissage  qui  commence  par  le  bas.  Nous  avons 
vu  que  l'ouvrier  est  placé  derrière  son  métier.  Bien 
plus,  c'est  derrière  lui  qu'est  placé  son  modèle.  Il 
devra  se  retourner  pour  le  voir.  Au  moment  où  sui- 
vant les  points  noirs  tracés  sur  la  chaîne,  le  tapissier 
prend  une  broche  chargée  de  la  couleur  convenable 
et  arrête  son  fil  de  routeur  sur  un  des  fils  do  la 
chaîne,  celle-ci  est  divisée  en  deux  nappes  parallèles, 
séparées  par  un  tube  de  verre  dit  ôâion  de  croisure. 
Ces  deux  nappes  sont  formées  chacune  d'une  moitié 
des  fils  do  la  chaîne.  La  nappe  antérieure  contient 
les  fils  pairs;  la  nappe  postérieure  les  fils  impairs. 
Ces  fils  sont  pris  dans  les  cordeleites  en  forme  d'an- 
neaux appelés  lisses.  Celles-ci  sont  fixées  d'un  côté 
à  tous  les  fils  de  la  nappe  de  devant,  et  de  l'autre  h 
une  perche  placée  en  dehors  de  la  chaîne,  au-dessus 
de  la  tète  du  hante  lissier.  Le  fil  de  la  trame  est  en- 
roulé sur  des  espèces  de  fus^'aux  appelés  broches. 
Pour  fabriquer  le  tissu,  il  faut  d'abord  passer  la 
broche  de  droite  à  gauche  entre  les  fils  d'arrière  et 
les  fils  d'avant.  La  trame  ainsi  passée  couvre  les  fils 
d'arrière.  Un  fil  de  la  chaîne  sur  deux  est  recouvert 
de  fils  de  couleur;  cela  s*appelle  une  demi-passée. 
Puis  si  le  tapissier  attirant  à  lui  au  moyen  des  lisses 
une  poignée  des  fils  d'arrière,  il  fait  passer  la  bro- 
che entre  les  deux  napprs,  cette  fois  en  sens  inverse, 
il  rouvre  les  fils  de  devant.  A  ce  moment  les  deux 
fils  pairs  et  impairs  de  la  chaîne  sont  recouverts  ; 
cela  s'appelle  une  duite.  Ce  croisement  de  gauche  h 
droite  et  de  droite  à  gauche  est  indispensable  pour 
la  formation  du  tissu,  car  si  dans  la  f<ibrication  de  la 
toile,  la  chaîne  n'est  couverte  que  de  deux  en  deux 
fils,  dans  la  tapisserie  il  importe  que  la  chaîne  soit 
entièrement  cachée  par  l'exacte  superposition  des 
fils  de  la  trame,  de  telle  sorte  que,  le  travail  fini,  la 
trame  seule  paraisse  à  l'endroit  comme  à  l'envers. 
Pour  assurer  la  solidité  de  son  ouvrage,  le  tapissier 
tasse  chaque  duite  avec  un  lourd  peigne  d'ivoire.  Ces 
duites  prennent  place  les  unes  à  côié  des  autres,  ou 
les  unes  au-dessous  des  autres  suivant  l'étendue 
que  doit  occuper  la  nuance  dont  la  broche  est  chargée. 
L'artiste  veut-il  passer  à  une  autre  nuance,  il  change 
de  broche  et  recouvre  les  passées  et  les  duites  comme 
nous  venons  de  le  montrer.  Plusieurs  tapissiers  peu- 
vent travailler  simultanément  au  même  ouvrage.  Aux 
Gobelins  on  voit  parfois  jusqu'à  sept  ou  huit  haute- 
lissiers  occupés  au  même  métier.  Le  travail  de  la 
haute  lisse  est  minutieux  et  lent.  Aux  Gobelins  un 
liaute-lissier  ne  produit  en  moyenne  que  28  centi- 
mètres carrés  par  jour,  soit  un  peu  plus  de  8/10  de 
mètre  carré  pour  300  jours  de  travail.  Chaque  mètre 
carré  revient  à  peu  plus  de  2000  francs  pour  la  main- 
d'œuvre  seule.  Le  travail  le  plus  difficile  dans  la 
fabrication  de  la  tapisserie  est  le  choix  des  nuances. 
C'est  là  que  l'artiste  doit  reprendre  toute  sa  personna- 
lité, car  c'est  là  que  le  rôle  d'interprète  commence  véri- 
tablement. Avant  tout  il  importe  que  l'ouvrier  ait  des 
notions  très  précises  sur  les  lois  de  la  couleur.  En- 
suite il  doit  tenir  compte  de  la  contextnre  mère  du 
tissu  dont  il  se  sert.  Chaque  fil  de  la  chaîne  forme 
autant  de  cylindres  coupés  enco'-e  par  les  stries  de  la 
trame.  Il  s'ensuit  que  chaque  fil  de  chaîne  produit 
une  petite  ombre  grise  dans  la  mince  cannelure  qui 
qui  le  sépare  du  fil  voisin.  Cette  ombre  multipliée 
par  le  nombre  des  fils  de  la  chaîne  rend  légèrement 
grise  la  surface  générale  de  la  tapisserie.  L'artiste 
doit  donc  monter  résolument  ses  tons  pour  racheter 
l'aff'aiblissement  de  couleur  qui  résulte  de  la  canne- 
lure. Le  tissu  retrouvera  ainsi  par  un  redoublement 
de  lumière  dans  les  parties  saillantes  ce  qu'il  perd 
d'éclat  pour  la  somme  des  autres  logées  dans  les 
parties  creuses.  L'art  consiste  ici  dans  le  passage 
d'un  ton  à  un  autre,  dans  la  transition  de  la  lumière 
aux  ombres.  L'artiste  se  sert  à  cet  effet  de  couleurs 
moyennes  dont  il  dispose  en  forme  de  hachures,  9fin 
d'éviter  Tefl'et  de  mosaïque,  qui  résulterait  d'une 
simple  juxtaposition.  Cest  par   la  pénétration  réci- 

f croque  des  tons  voisins  qu'on  arrive  à  lier  entre  elles 
es  nuances   au  point  qu'un   œil   exercé   peut  seul 


reconnaître  Tendroit  où  Tua  commence  où  l'autre 
finit.  Les  anciens  tapissiers  n'employaient  que  des 
hachures  à  une  nuance.  Le  système  des  hachures  à 
deux  nuances,  aujourd'hui  seul  en  honneur,  fut  in- 
venté sous  le  premier  empire  par  DeyroUe.  Il  sert  à 
augmenter  la  vibration  des  tons  intermédiaires. 

Pour  la  BASSE  lisse  le  métier  diffère  sur  beaucoup 
de  points.  La  chaîne  est  horizontale.  Les  lisses  au 
lieu  d'être  à  la  portée  des  mains  de  l'ouvrier  sont 
mises  en  mouvement  au  moyen  de  pédales  ou  mar- 
ches. Le  modèle  n'est  plus  derrière  le  tapissier; 
il  est  filé  sur  la  chaîne.  Avec  ce  système,  on  aug- 
mente la  rapidité  de  la  main-d'œuvre,  et  on  écono- 
mise un  tiers  du  temps  nécessaire  à  un  travail  de 
haute  lisse.  Dans  celle-ci  l'ouvrier  ne  peut  travailler 
que  de  la  main  droite,  la  gauche  lui  servant  à  recher- 
cher, séparer  et  croiser  les  fils.  Dans  la  basse  lisse 
l'ouvrier  a  ses  deux  mains  pour  passer  dans  la  chaîne 
les  tt  flûtes  »  chargées  des  fils  de  couleur.  Un  des 
inconvénients  du  métier  de  basse  lisse,  c'est  que 
l'ouvrier  ne  voyant  que  très  imparfaitement  ce  qu'il 
fait,  ne  peut  juger  de  son  travail  qu'une  fois  la  tapis- 
serie terminée,  c'est-à-dire  trop  tard  pour  remédier 
aux  défauts.  D'autre  part,  le  carton  étant  placé  sur 
la  chaîne  ne  reçoit  la  lumière  que  par  l'intervalle  des 
fils  de  cette  chaîne.  La  tapisserie  n'est  plus  qu'une 
contre-épreuve  du  tableau.  L'effet  en  est  affaibli. 
Vaucanson  introduisit  quelques  perfectionnements 
dans  la  fabrication  de  la  basse  lisse.  En  1757  Ncilson, 
surnommé  le  Champion  de  la  basse  lisse,  organisa  nn 
concours  où  ses  productions  firent  croire  un  moment 
que  la  haute  lisse  était  vaincue.  Elle  conservait  mal- 
gré tout  l'avantage  grâce  à  son  style  plus  pur.  Existe- 
t-il  pour  un  amatour  de  connaissances  moyennes  des 
différences  matérielles  qui  lut  permettent  de  distin- 
guer la  haute  lisse  de  la  basse  lisse?  L'interversion 
du  modèle,  sa  reproduction  en  contre-partie  serait 
à  la  rigueur  l'unique  trait  permettant  de  constater 
qu'on  a  devant  soi  une  tenture  de  basse-lisse,  si  la 
comparaison  avec  le  carton  était  une  chose  toujours 
possible.  Pourtant  une  inscription  renversée  perme- 
d'assurer  qu'on  a  affaire  à  un  tissu  de  basse  lisse. 
M.  A.  Darcel  qui  a  écrit  sur  cette  matière  des  cha- 
pitres qui  font  autorité,  affirme  que  les  hommes  du 
métier  retrouvent  parfois  à  l'envers  d'une  pièce  quf*l- 
ques  diffirences  dans  la  «  liure  »  des  fils  de  couleur, 
différences  qui,  il  faut  bien  le  dire,  n'influent  en  rien 
sur  le  résultat  ni  sur  l'effet  produit. 

Le  métier  de  haute  lisse  remonte  à  une  antiquité 
très  lointaine.  Les  peintures  de  Thypogée  du  Beni- 
Hassan,  antérieures  de  3,000  ans  à  notre  ère,  repré- 
sentent un  métier  à  chaînes  verticales,  avec  bâton  de 
croisure  et  peigne  qui  se  rapproche  singulièrement  de 
notre  métier  de  haute  lisse  aujourd'hui  en  U6ag<^.  Le 
métier  de  Pénélope  tel  que  nous  le  montre  un  dessin 
postérieur  de  quelques  centaines  d'années  seulement 
rappelle  par  sa  disposition,  à  quelques  variantes 
près,  le  métier  employé  aujourd'hui  aux  Gobelins. 
En  1302  à  Paris,  le  prévôt  Pierre  Le  Jumeau  incor- 
pora dans  la  maîtrise  des  tapissiers  sarrasinois  «  une 
autre  manière  de  tapissiers,  que  l'on  appelle  ouvriers 
de  haute  lisse  ».  Les  nouveaux  venus  étaient  au 
nombre  de  dix.  Or  on  sait  aujourd'hui  qu'il  existait  en 
Europe  des  ouvrages  comme  la  tapisserie  du  musée 
de  Lyon,  les  tentures  du  dôme  de  Halbersudt  et 
celles  de  l'abbaye  de  Quediimbourg  qui  sont  de 
beaucoup  antérieures  à  cette  date.  Les  dernières 
cioisades  en  mettant  l'Europe  en  contact  direct  avec 
l'Orient  durent  favoriser  le  développement  de  cet  art 
qui  chez  les  Orientaux  n'a  jamais  cessé  d'être  en 
honneur.  Au  xiv*  siècle  les  haute-lissiers  de  Paris 
sont  avec  ceux  d'Arras  les  plus  renommés.  C'est 
Colin  Bataille,  tapissier  fameux,  citoyen  de  Paris,  qui 
reçoit  les  commandes  du  comte  Amédée  de  Savoie 
en  1376.  Quelques  années  plus  tard,  en  139),  Fran- 
çois Gonzague,  capitaine  dM  Manloue,  s'adresse  aux 
haute-lissiers  parisiens  pour  faire  substituer  sur  une 
tenture  les  armoiries  de  la  Bohême  à  celles  des  Vis- 
conti.  On  ne  trouve  de  métiers  de  haute  lisse  en 
Italie  qu'après  que  de  1420  à  150>)  des  ouvriers  ou 
tapissiers  originaires  d'Arras,  de  Lille,  do  Bruges,  de 
Tournai  passèrent  les  Alpins.  A  Rome,  à  cette  épo- 
que, on  trouva  un  tapissier  parisien.  Au  xvi«  siècle 
Kraiiçois  l'i*  et  Henri  II  fondent  à  Fontainebleau  et  à 
Paris,  hôpital  de  la  Trln'té.  des  manufactures  dont 
l'histoire  est  peu  connue,  mais  où  il  y  avait  des  mé- 


LIT 


—  1844  — 


LLO 


tiers  de  hante-IiBse.  Au  xvii«  siècle  les  Gobelins  soDt 
fondés  h.  Paris. 

Le  terme  de  basse  lisse  parait  dans  le  vocabulaire 
vers  la  fin  du  zvi«  ou  le  commencement  du  xviio  siècle. 
Il  est  pourtant  universellement  admis  aujourd'hui  que 
dès  le  ziv«  sièrie  on  fabriquait  des  tapisseries  ainsi. 
On  les  appelait  alors  «  tapisseries  à  la  marche  », 
c'est-à-dire  faites  au  moyen  d*un  métier  qu'une  pé- 
dale mettait  en  mouvement.  En  1607  Henri  IV,  qui 
favorisa  grandement  Tindustrie  et  l'art  des  tapisse- 
ries, outre  les  nombreux  métiers  de  haute-lisse  qu'il 
installa  au  Taubourg  Saint-Antoine  et  au  Louvre, 
installa  aux  Tournelles,  sous  la  direction  de  François 
de  la  Planche  et  de  Marc  Coomans,  des  métiers  de 
basse  lisse  qui  passèrent  ensuite  dans  le  faubourg 
Saint-Marceau.  Louis  XIV  fonda  plus  tard  les  manu- 
factures de  Beauvais,  d'Aubusson  et  rattacha  à  l'État 
les  ateliers  de  Felletin  où  fonctionnent  des  métiers 
de  basse  lisse.  Aujourd'hui  des  métiers  de  basse  lîpse 
sont  exclusivement  employés  à  Beauvais  et  à  Aubus- 
son.  Les  Gobelins  ont  conservé  le  privilège  de  ne 
travailler  qu'à  l'aide  de  métiers  de  haute  lisse.  (V.  Gh. 
Blanc,  Grammaire  fies  nrts  fUcoratifs,  Paris,  188*2; 
J.  Gniffrey ^Tapisseries  françaises^  Paris  ;  —  Dai*cel,  les 
Tapisseries  décoratives  du  garde-meuble  ;  —  Pinchart, 
Histoire  générn le  de  la  Tapisserie; —  Gastel,  les  Tapis- 
seneSf  Bibliothèque  des  merveilles^  Paris,  1876;  — Eu- 
gène MOntz,  Tapisseries  italiennes^  et  la  Tapisserie j 
Bibliothèque  de  l'enseignement  des  beaux-arts.) 

J.  IJ.-z. 

LITS-CLOS.  Boites  fermées  dans  lesquelles  cou- 
chent les  paysans  bretons,  et  dont  l'usage  remonte 
dans  ce  pays  à  une  époque  assez  éloignée.  Les  lits- 
clos  sont  de  deux  espèces.  Tantôt  ils  sont  fermés  par 
des  rideaux  de  cotonnade,  tantôt  par  de  petites  portes 
on  hussiaux^  (V.  ce  mot.  Supplément.)  Il  y  en  a  qui 
ont  deux  étages,  parfois,  mais  plus  rarement,  trois. 
Ces  étages  sont  d'une  faible  hauteur.  (leux  de  ces  lits 
qui  sont  vraiment  anciens  sont  en  général  jolis.  Les 
boiseries  en  sont  d'une  ornementation  soignée;  aux 
environs  de  Rennes,  dans  les  ménages  d'une  petite 
aisance,  beaucoup  de  ces  lits  sont  à  colonnes,  tour- 
nées en  quenouille,  surmontées  parfois  d'un  balda- 
quin en  étoffe  ou  en  papier  peint.  Le  bois  de  ces  lits 
n'est  pas  plud  élevé  de  terre  que  celui  de  nos  lits  or- 
dinaires. La  planche  qui  fait  face  à  la  porte,  haute 
d'environ  quarante  centimètres,  est  ornée  de  moulures 
et  dé  sculptures,  souvent  d'un  bon  style.  Une  échan- 
crure  ménagée  au  milieu  permet  à  un  homme  de  s'y 
asseoir  pour  se  vôtir.  Presque  toujours  le  lit-clos  fait 
partie  de  la  dot  de  la  femme.  C'est  elle  qui  l'apporte, 
ce  qui  lui  donne  le  droit,  si  le  mari  lui  fait  un  reproche, 
do  répondre  qu'elle  est  couchée  dans  son  lit  à  elle. 

L'ouverture  qui  permet  d'entrer  dans  ces  lits  me- 
sure entre  1  mètre  carré  et  1™50.  Une  huche  ou  met 
placée  devant  sert  à  y  monter.  J.  B-z 

LITTÉRATURE.  Ce  mot,  dans  son  acception  la  plus 
abstraite  et  la  plus  étendue,  s'applique  tantôt  à  la 
théorie  générale,  tantôt  à  l'histoire  des  œuvres  de 
l'esprit  humain,  tantôt  à  l'une  et  l'autre  en  môme  temps. 
Ainsi  l'on  dit  qu'un  homme  a  de  la  littérature  quand 
il  a  pris  quelque  tf^inture  des  ouvrages  qu'un  pays  a 
produits  en  ses  différents  âges,  et  que  l'étude  l'a  rendu 
capable  d'apprécier  un  livre  avec  goût,  et  selon  les 
règles  assignées  par  l'art  et  la  critique  aux  genres  lit- 
téraires. Telle  est,  en  effet,  la  variété  qui  règne  entre 
le»  diverses  productions  des  belles-lettres,  qu'on  les  a 
soumises,  comme  celles  de  la  nature,  aux  procédés 
de  la  classification.  D'abord  on  a  distingué  la  prose  et 
la  poésie',  on  a  défini  l'une  la  langue  de  la  raison,  l'au- 
tre celle  de  l'imagination  et  du  sentiment,  et  l'on  a 
établi  les  caractères  propres  qui  conviennent  à  cha- 
cune d'elles.  Ce  n'est  pas  que  la  raison  soit  ou  puisse 
être  sacrifiée  dans  les  œuvres  poétiques,  et  que  l'ima- 
gination et  le  sentiment  n'apparaissent  point  dans  les 
œuvres  de  la  prose;  mais  il  demeure  vrai  que  la  rai- 
son domine  dans  celles-ci,  comme  dans  celles-là 
les  mouvements  passionnés,  l'éclat  et  la  vivacité  des 
peintures.  —  A  leur  tour,  la  poésie  et  la  prose  se  sont 
divi8<^es  en  plusieurs  genres.  La  première  a  produit, 
iM>mme  genres  principaux,  la  poésie  li/rigue,  la  poésie 
épique^  la  poésie  dramatique  et  la  poéne  dUactiqua; 
comme  genres  secondaires,  la  satire,  la  poésie  pasto- 
r  lie,  VapologU9y  Célégie  et,à  un  degré  inférieur  encore, 
les  poésies  légèi-es,  La  seconde  comprend  trois  grands 
genres  :  \* éloquence,  V histoire,  la  philosophie  et  trois 


genres  secondaires  :  le  genre  épistolaire,  la  critique  et 
le  roman.  De  sorte  qu'un  cours  complet  de  littérature 
serait  celui  qui  passerait  successivement  en  revue, 
dans  toutes  leur  variétés,  toutes  les  œuvres  de  l'esprit, 
avec  leurs  divisions  et  subdivisions,  pour  en  marquer 
l'origine,  les  caractères,  les  règles  et  Thistoire. 

Au  sens  historique,  le  mot  littérature  sert  à  dési- 
gner dans  leur  ensemble  les  ouvrages  d'esprit  qui  se 
produisent  d'âge  en  âge  chez  les  différents  peuples,  et 
qui  constituent  comme  leur  patrimoine  littéraire.  Sous 
ce  rapport,  les  nations  ne  sont  pas  également  parta- 
gées; tandis  que  la  Grèce  et  Rome  aux  temps  antiques, 
et  la  France  dans  les  temps  modernes,  brillent  au  pre- 
mier rang  par  la  riche  variété  de  leurs  chefs-d'œuvre, 
combien  de  peuples  semblent  aujourd'hui  déshérités 
de  la  gloire  des  lettres,  les  uns  après  avoir  jeté  jadis 
un  plus  ou  moins  vif  éclat,  les  autres  attendant  en- 
core, ce  semble,  l'heure  marquée  par  la  Providence  ! 
Qu'est  devenue,  depuis  le  Camoëns,  la  littérature  por- 
tugaise, et,  depuis  Cervantes,  la  littérature  espagnole? 
Quand  est-ce  que  la  littérature  américaine  prendra 
véritablement  son  essor?  Cette  inégalité  à  ses  causes  : 
lecli:Dat,  la  situation  et  la  configuration  géographique, 
la  vie  politique  d'un  peuple,  l'époque  enfin  où  il  vient 
remplir  son  rôle  sur  la  scène  de  l'histoire,  sont  autant 
de  circonstances  qui  exercent  une  action  puissante, 
décisive  môme,  sur  le  développement  de  sa  littérature. 
Les  mômes  causes  influent  sur  l'âme  et  l'imagination 
des  écrivains  et  impriment  à  leurs  écrits  un  caractère 
particulier  qui  détermine  ce  qu'on  appelle  Tesprit  de 
la  nation.  Chaque  auteur  a  beau  conserver  son  origi- 
nalité; vainement  un  La  Fontaine,  un  Molière,  un  Cor- 
neille, un  Racine,  un  Boileau  ont  eu  leur  génie  distinct  : 
la  critique  ne  retrouve  pas  moins  entre  eux  comme 
un  air  de  famille^  qu'ils  tiennent  dn  leur  origine  com- 
mune et  de  ce  qu'on  est  convenu  do  nommer  l'esprit 
français.  (V.  ce  mot.)  Tout  peuple  a  son  esprit,  qu'il 
répand  dans  ses  livres,  s'y  peignant  à  son  insu  en  traits 
expressifA  et  ineffaçables.  Les  Nuits  d'Youog  peignent 
aussi  fidèlement  par  un  certain  côté  les  Anglais,  que 
les  comédies  d'Aristophane  peignaient  les  Athéniens  ; 
et  s'il  nous  est  donné  de  nous  mirer  dans  certains  con- 
tes do  Voltaire,  les  Allemands  ont  également  le  pri- 
vilège de  se  reconnaître  dans  les  élucubrations  de 
leurs  métaphysiciens. 

On  s'est  plu  à  reconnaître  dans  le  développement  des 
littératures  trois  époques  :  l'enfance^  l'âge  d'or  et  la 
décadence.  L'histoire  de  la  Grèce  et  de  Rome  ne  con- 
tredit pas  cette  division  :  il  serait  aisé  de  déterminer 
chez  les  deux  peuples  le  commencement  et  la  fin  des 
trois  périodes.  Nous  conviendrons  même  que  cette  divi- 
sion a  quelque  chose  de  fondé  :  n'est-il  pas  naturel  que 
la  vie  littéraire  d'une  nation  se  ressente  des  vicissitudes 
de  sa  vie  politique,  et  que  l'une  se  développe  parallèle- 
ment à  l'autre?  N'est-ce  pas  le  spectacle  que  nous  offre 
l'histoire  de  notre  pays?  Depuis  ses  origines  jusqu'au 
règne  de  Louis  XIV,  ne  semble-t-il  pas  que  la  langue 
et  la  nationalité  françaises  se  forment,  progressent  et  se 
constituent,  pour  ainsi  dire,  ensemble,  et  que  les  des- 
tinées de  l'une  soient  les  destinées  de  l'autre  ?  Cepen- 
dant, à  dire  vrai,  plus  d'une  littérature  moderne  nous 
parait  se  plier  difficilement,  sinon  résister  à  l'applica- 
tion de  cette  théorie.  La  nôtre  même  y  répugne,  La 
langue  proprement  dite,  telle  que  l'ont  parlée  les  con- 
temporains de  Louis  XIV,  s'est  altérée  dès  le  xyiii»  siè- 
cle; l'invasion  de  littératures  étrangères,  le  mélange 
systématique  du  vocabulaire  des  sciences  avec  celui 
des  lettres,  les  passio'is  politiques  qui  ont  falsifié  le 
sens  de  bien  des  termes,  enfin  les  habitudes  peu  scru- 
puleuses du  journalisme  l'ont  gâtée  davantage  encore 
de  notre  temps.  Mais,  d'autre  part,  on  ne  peut  nier 
que  l'école  dite  romantique  n'ait  renouvelé  les  sour- 
ces de  la  poésie  ;  que  les  enseignements  de  la  Révo- 
lution française  n'aient  fait  naître  une  méthode  beau- 
coup plus  philosophique  et  jusqu'ici  inconnue  d'étudier, 
d'interpréter  et  d'écrire  l'histoire,  que  la  critique  en- 
fin, s'affranchissant  de  toute  règle  qui  relevait  moins 
du  bon  sens  que  de  la  convention,  n'ait  trouvé  le 
secret  de  porter,  sur  les  œuvrer*  de  l'esprit,  des  juge- 
ments approfondis,  des  appréciations  originales,  au 
point  que  plusieurs  de  ces  livres  dont  eux-mômes  des 
monuments.  Nous  refusera-t-on  le  droit  d'en  conclure 
que  la  littérature  française  a  subi  depuis  le  xviii<>  siè- 
cle, non  pas  une  véritable  décadence,  comme  on  l'a 
préien'iu.  mais  plutôt  une  transformation?  —  A.  U. 
LLOYD,  grand  établissement  de  Londres,  qui  a  son 


LOG 


—  4842  — 


MAG 


administration  centrale  dans  les  bâtiments  delà  Bourse. 
C'est  tout  à  la  fois  une  compagnie  d^assurances  mari- 
times et  une  agence  de  correspondance  fournissant 
tous  les  renseignements  possibles  sur  les  b&timents 
en  cours  de  navigation  dans  toutes  les  parties  du 
globe.  Il  a  plus  de  mille  sociétaires  divisés  en  trois 
classes  :  1<*  celle  des  assureurs,  en  leur  propre  nom  ; 
^^  les  agents  des  compagnies  d^assurances  maritimes; 
3*  les  courtiers  de  navires.  Quiconque  veut  devenir 
sociétaire  de  Tune  des  deux  premières  classes  paye 
95  livres  sterling  (625  fr  )  lors  de  son  admission,  et, 
de  plus,  une  cotisation  annuelle  de  4  livres  (100  fr.); 
ceux  de  la  3*  classe  ne  payent  que  la  cotisation  an- 
nuelle. Les  affaires  de  la  société  sont  dirigées  par  un 
comité  de  25  membres.  —  Le  Lloyd  entretient  dans 
tous  les  ports  de  quelque  importance  des  agents  spé- 
ciaux qui  lui  transmettent  toutes  les  informations  aussi 
promptement  et  aussi  régulièrement  que  possible.  Le 
secréuire  du  comité  reçoit  leur  correspondance,  dont 
la  teneur  est  transcrite  et  classée  très  méthodique- 
ment sur  des  registres  ouverts  à  tous  les  membres  so- 
ciétaires, avec  renvoi  à  un  livre  principal  qui  contient 
les  renseignements  détaillés  sur  les  points  où  le  na- 
vire a  touché  à  telles  dates,  les  rencontres  qu*il  a  faites 
en  ronte,  les  sinistres  qu'il  a  essuyés,  etc.  —  Cest 
vers  la  fin  du  xvii<'  siècle  que  le  Lloyd  prit  naissance 
à  Londres,  dans  les  environs  de  la  Bourse  :  son  ber- 
ceau fut  un  petit  café  tenu  par  un  nommé  Lloyd  dans 
Lombard  street.  Là  se  réunissaient  des  armateurs,  des 
assureurs  do  navires,  des  courtiers,  qui  finirent  par  se 
constituer  en  société,  avoir  un  local  à  eux,  puis  s'instal- 
lèrent dans  la  Bourse  même,  vers  1727.  Le  Lloyd  fut  le 
premier  établissement  do  ce  genre,  et  c*est  à  son  exem- 
ple qu*il  s'en  établit  d'autres  dans  ds  grandes  villes  de 
commerce  anglaises,  françaises,  allemandes,  etc.  —  Le 
plus  célèbre  après  le  Lloyd  britannique  est  le  Lloyd  au- 
trichien^ qni  a  pris  à  peu  près  les  mêmes  attributions, 
dans  un  cercle  moins  vaste,  et  qui,  de  plus,  e^t  une 
grande  compagnie  de  navigation  à  vapeur  pour  la  Médi- 
terranée, et  surtout  l'Adriatique  et  l'Orient.  Il  est  éta- 
bli à  Trieste,  où  il  fut  fondé  en  1833,  et  se  divise  en 
trois  départements  :  celui  des  assurances  maritimes,  qui 
date  de  l'origine  de  la  société;  celui  de  la  navigation  à 
vapeur  créé  en  1836,  celui  dit  littéraire  et  artistique, 
institué  en  1850,  et  dont  les  attributions  sont  tout  ce 
qui  concerne  la  publicité  de  l'éublissement,  les  livres. 
Journaux,  cartes,  plans,  dessins,  etc.  Chaque  déparie- 
nient  a  un  directoin^,  et  les  trois  directoires  relèvent  de 
l'autorité  supérieure  d'un  conseil  de  délégués.  —  H  y 
a  encore  le  Lloyd  de  l'Allemagne  septentrionale^  fondé 
à  Brème  en  1857,  société  qui  fait  la  navigation  à  vapeur 
transatlantique,  celle  du  Weser,  le  remorquage  fluvial 
et  les  assurances  maritimes.  Il  a  des  succursales  pour 
les  assurances  à  Marseille,  à  Hambourg,  à  Amsterdam  et 
à  Rotterdam. — Une  puissante  compagnie  russe,  dont  le 
siège  est  à  Odessa,  y  fut  fondée  en  1856,  sous  le  nom 
de  Société  de  commerce  et  de  navigation  ;  on  l'appelle 
aussi,  par  analogie,  Lloyd  nuse.  Elle  a  pour  but  de 
développer  le  commerce  de  la  Russie  méridionale  au 
moyen  d'une  véritable  flotte  à  vapeur  desservant  un 
grand  nombre  de  lignes,  non  seulement  sur  le  littoral 
de  la  mer  Noire  et  de  la  mer  d'Azof,  mais  encore  dans 
la  Méditerranée  et  l'Adriatique,  avec  stations  à  Trieste 
et  à  Marseille.  En  1860,  elle  avait  déjà  en  service  plus 
de  40  bâtiments  à  vapeur.  CD  —  y. 

LOCOMOTIVE,  machine  de  traction  sur  les  chemins 
de  fer.  Le  travail  produit  par  une  locomotive  s'élève 
de  250  h  300  chevaux-vapeur,  dont  15U  seulement  uti- 
lisés pour  le  remorquage  des  voitures.  Un  cheval- 
vapeur  équivalant  à  peu  près  à  3  chevaux  ordinaires, 
un  train  est  donc  comme  emporté  par  450  chevaux. 
Construites  pour  traîner  peu  et  aller  vite,  les  machinfs 
à  voyageurs  marchent  avec  une  vitesse  minima  de 
40  kilom.  à  l'heure,  traînant  15  voitures;  elles  peu- 
vent atteindre  une  vitesse  de  60, 80  et  mémo  100  kilom., 
mais  alors  elles  ne  peuvent  remorquer  que  8  ou 
même  6  wagons  :  ce  qu'on  gagne  en  vitesse,  on  le 
perd  en  force.  Les  machines  à  marchandises  vont  plus 
lentement  et  remorquent  davantage  ;  leur  vitesse  ne 
dépasse  pas  30  kilom.  Les  machines  mixtes,  qui  ser- 
vent à  deux  fins,  marchent  à  des  vitesses  comprises 
entre  35  et  50  kilom.  Arrêts  compris,  un  train  omni- 
bus fait  30  kilom.  à  l'heure.  Un  express  fait  40  à  50 
kilom.  L'express  dire(^t  entre  Londres  et  Paris  marche 
avec  une  vitesse  plus  grande,  ainsi  que  le  train  de 
la  malle  des  Indes,  dont  la  rapidité  de  marche  approche 


de  100  kilom.  —  Une  locomotive  Crampton,  remor- 
quant 12  wagons,  consomme  8  kilogr.  de  coke  par 
kilom.  en  été,  et  8  li2  en  hiver.  Une  locomotive 
mixte,  avec  18  voitures,  dépense  autant.  Une  fingerth 
à  marchandises  consomme  16  kilogr.  de  houille  en 
été  et  18  en  hiver.  Somme  faite  des  dépenses  en  com- 
bustible, huile,  graisse,  suif,  chiffons,  éclairage,  eau, 
entretien  personnel,  le  parcours  kilométrique  coûte 
en  moyenne  93  centimes.  —  Les  machines  s'usent 
assez  vite  ;  après  un  parcours  moyen  de  300,000  kilom., 
il  faut  les  reconstruire,  ce  qui  coûte  environ  40,000  fr. 
Par  an,  une  machine  fait  de  30  à  25,000  kilom.;  la  vie 
d'une  locomotive  est  donc  de  dix  ans.  Une  locomotive 
munie  de  son  fonder  revient  en  moyenne  à  60,000  fr. 
Les  Engerth  coûtent  près  du  double.  —  Une  machine 
Crampton  chargée,  avec  tender  approvisionné,  pèse 
45,000  kilogr.  ;  une  machine  mixte,  35,000  kilogr.  ;  une 
Engerth,  6t,000  kilogr.  Ces  poids  énormes  expliquent 
pourquoi  peu  à  peu  il  a  fallu  consolider  les  rails  et 
leur  donner,  par  mètre  courant,  jusqu'à  30  et  38  kilog. 

LORRAINE  (faIbncrs  db).  Les  fabriques  de  Loi^ 
raine  tiennent  une  place  notable  dans  l'histoire  de  la 
céramique;  celles  de  Niderviller,  Lonéville,  Bellevue, 
Toul  et  Vaucouleurs,  entre  autres,  se  distinguent  tout 
spécialement  par  l'importance  de  leur  production,  autant 
que  par  l'habileté  de  leurs  artistes.  Au  xvni*  siècle  ces 
fabriques  sont  en  très  grand  nombre.  Les  produits  des 
fabriques  de  Lorraine  dont  quelques-unes  existent 
encore,  se  distinguent  par  la  finesse  et  la  légèreté  de 
la  matière  et  la  variété  des  couleurs.  Les  émaux  en 
sont  très  beaux,  le  dessin  élégant  et  la  forme  très  re- 
cherchée. Lorsque  des  rehauts  d'or  viennent  compléter 
la  composition,  ils  sont. en  général  très  discrets,  et  les 
reliefs  y  sont  modelés  avec  un  soin  minutieux. 

LOUIS  (Chant  de),  en  allemand  Ludwigslied,  mo- 
nument de  l'ancienne  poésie  allemande,  qu'on  croit 
avoir  été  écrit  par  un  ecclésiastique  en  882.  C'est  un 
chant  de  grâces  sur  la  victoire  remportée  en  cette 
année  par  le  roi  de  France  Louis  III,  sur  les  Normands, 
à  Saucourt,  en  Picardie.  Il  est  divisé  en  strophes  de 
4  et  de  6  vers.  Longtemps  perdu,  il  a  été  retrouvé  par 
Mabillon  et  publié  avec  commentaire  et  traduction 
par  Hoffmann  de  Fallersleben  (1837).  (V.  L.  Gautier, 
les  Épopées  françaises^  Paris,  2«  édit.  1878,  gr.  in-8'. 
tom«  I«'.) 

LUNETTES  Les  anciens  connaissaient  l'effet  des 
verres  concaves  pour  éclaircir  la  vue  des  myopes,  et 
Pline  rapporte  que  Néron  se  servait  d'une  émciïude 
ainsi  taillée  pour  mieux  voir  les  combats  des  gladia- 
teurs. Mais  si  l'on  employa,  à  Rome,  le  monocle  ou 
lorgnon  à  seul  verre,  il  ne  parait  pas  qu'on  ait  eu 
l'idée  d'ajuster  deux  verres  lenticulaires  dans  une 
même  monture  pour  former  des  besicles^  ou  lunettes 
proprement  dites.  Cet  instrument  était,  au  contraire, 
connu  des  Chinois  de  temps  immémorial.  On  ne  sait  à 
quelle  époque  les  lunettes  ont  paru  en  Europe,  ni 
par  qui  elles  forent  inventées  :  du  Cange  ayant  prouvé 
qu'elles  existaient  en  1150,  leur  invention  n'est  due, 
comme  on  l'a  prétendu,  ni  à  Roger  B^con  ni  au  Flo- 
rentin Salvino  degli  Âmati,  son  contemporain,  et  en- 
core moins  à  Alexandre  de  Spina.  moine  dominicain 
du  xiv*  siècle,  ou  au  Napolitain  J-B.  Porta.  On  fixa 
d'abord  les  lunettes  au  moyen  d'un  bandeau  quon 
attachait  derrière  la  tète  ;  plus  tard  on  imagina  de 
réunir  les  deux  verres  à  l'aide  d'un  ressort,  ce  qui 
produisit  les  pince-nez.  C'est  à  une  époque  tout  à  fait 
moderne  qu'on  adapta  des  branches  au  ressort. 

LU  NÉ  VIL  LE  (paIbnces  db).  Cette  fabrique  fut  fon- 
dée sous  le  duc  de  Lorraine  Léopold  (mort  en  1729) 
par  un  sieur  Jacques  Chambrette. 

Elle  atteignit  sa  plus  grande  prospérité  vers  1737. 
Elle  prit  à  ce  moment  le  titre  de  manufacture  du  roi 
de  Pologne.  En  dehors  d'un  grand  nombre  de  produits 
d'ordre  supérieur,  c'est  à  elle  qu'on  doit  ces  repro* 
ductions  d'animaux,  tels  que  lions  couchés,  qui  ont 
décoré  pendant  longtemps  les  piliers  de  nos  maisons 
de  campagne. 


M 


MAGHOL  ou  MAGHUL,  instrument  de  musique  des 
Hébreux.  Le  P.  Kircher  croit  que  c'était  une  sorte  de 
viole.  Forkel  lui  suppose  la  forme  d'un  violon,  dont  les 
dépressions  latérales  n'offriraient  pas  d'angle  dans  la 


ME6 


—  4843  — 


MOU 


partie  moyenne.  D^autres  pensent  que  c'était  un  lulh 
a  huit  cordes,  ou  bien  un  instrument  à  percussion 
comme  le  sistre. 

MARSEILLE  (Faïbncbs  db).  On  trouve  en  1607,  à 
Marseille,  dans  le  quariier  Saint«Jsan-du-Désert,  un 
faïencier  du  nom  de  Clérlssy,  parent  des  Glérissy  établis 
h  Mousiiers  (F.  ce  nom)  :  la  pharmacie  de  Thôpilal  de 
Narbonne  est  garnie  de  pots  façonnés  et  peints  chez  lui. 
En  1709,  Jean  Delaresse  fut  un  des  premiers  céramistes 
en  faïence  blanche,  qui  remplaça  les  faiences  brunes 
d'Avignon  très  élégantes  de  forme,  mais  rentrant  par 
leiur  couverte  dans  le  domaine  de  la  poterie  proprement 
dite.  En  1749,  Honoré  Savy  introduisit  la  faïence  à  dé- 
cors polychromes,  qui  remplaça  Tancienne  faïence  à 
camaïeu  bleu  et  violet.  Les  faïenceries  de  Marseille 
étaient  nombreuses  et  prospères,  lorsqu'un  grand  nom- 
bre d'ouvriers,  à  la  suite  de  contestations  avec  leurs 
patrons,  émigrèrcnfc  à  Gônes,  et,  quand  vint  la  Révo- 
lution, la  concurrence  des  produits  génois  avait  fait 
tomber  presque  toutes  les  fabriques  marseillaises.  Dès 
1784,  Savy  avaitcherché  un  dédommagement  en  créant 
une  manufacture  de  porcelaines. 

Vers  le  milieu  du  xviii«  siècle  les  fabriques  de 
faïence  établies  à  Marseille,  hors  des  portes  et  à  la 
Joliette  étaient  au  nombre  de  dix,  et  leur  produc- 
tion était  considérable.  L'abbé  d'Ëxpilly  prétend  que 
pendant  la  seule  année  1 7 H((  l'exportation  marseillaise 
se  serait  élevée  à  105  000  livres  de  faïence.  De 
toutes  ces  fabriques  la  plus  célèbre  a  été  celle  d'Ho- 
noré Savy,  qui  prit  en  1777,  lors  de  la  visiie  à  Mar- 
seille de  Monsieur,  comte  de  Provence,  le  titre  de  Ma- 
nufacture de  Monsieur  frère  du  roi.  Vinrent  ensuite 
la  fabrique  do  Joseph-Gaspard-Kobert,  dont  les  faïences 
sont  souvent  rehaussées  d'or  et  portent  quelquefois  à 
leur  revers  les  initiales  du  fabricant;  puis  la  fabrique 
de  la  veuve  Perrin  dont  les  produits  sont  fréquemment 
marqués  du  monogrammme  de  la  lettre  V  accouplée  à 
un  P.  Tout  en  présentant  ouehiues  points  de  res- 
semblance avec  les  produits  de  Moustiers,  les  faiences 
de  Marseille  ont  un  caractère  propre  qu'elles  doivent 
moins  à  leurs  formes  rocailleuses  un  peu  semblables 
aux  formes  de  la  fabrique  de  Strasbourg,  qu'à  l'emploi 
de  certaines  couleurs,  telles  que  le  vert  dit  vert  Savy, 
et  l'alliage  du  manganèse  au  bleu  de  cobalt.  C'est  à 
tort  qu'on  a  cru  un  moment  que  la  fleur  de  lis  qu'on 
rencontra  fréquemment  au  revers  des  pièces  niarseil- 
laises  du  xviiie  siècle  était  la  marque  exclusive  de  Mar- 
seille. La  flëur  de  lis  accompagne  des  produits  d'origines 
bien  différentes.  Il  est  probable  qu'elle  était  l'apanage 
de  toutes  les  manufactures  munies  d'un  privilège 
royal.  (V.  Davillier,  Histoire  des  faïences  et  des  porce* 
laines  de  Moutiets^  Marseille,  etc.,  1863.) 

MATÉRIAUX.  En  construction,  on  emploie  un  cer- 
tnin  nombre  de  matériaux  artificiels.  Les  Romains, 
comme  les  modernes,  obtenaient  des  blocs  en  moulant 
des  bétons  dans  les  caisses  de  bois.  Les  matériaux  de 
ce  genre  furent  oubliés  pendant  le  moyen  âge.  En  1776, 
l'ingénieur  italien  Calamatta  s'en  servit,  mais  sans  suc- 
cès, pour  consolider  le  môle  de  Civiia-Yecchia.  On 
ne  réussit  pas  mieuxon  France,  quelques  années  après, 
pour  la  digue  de  Cherbourg  et  les  Jetées  de  Saint-Jean- 
de-Luz.  Mais  les  grands  travaux  de  Vicat  sur  les  chaux 
hydrauliques  résolurent  le  problème  en  1823.  Poirel  en 
fit  la  première  application  heureuse,  après  1830,  pour 
défendre  le  môle  d'Alger  contre  l'action  destructive  de 
la  mer.  Avec  les  mortiers  et  ciments  de  Vicat  on  fait, 
par  le  moulage,  des  dalles  pour  trottoir,  des  seuils  et 
marelles  d'escalier,  des  carrelages,  des  conduites  pour 
l'eau  et  le  gaz,  des  voûtes,  des  vases,  des  colonies,  des 
statues,  des  bas-reliefs,  des  ponts,  et  jusqu'à  des  mai- 
sons entières.  A*  Bérar.l  a  proposé,  pour  les  travaux  à 
la  mer,  des  matériaux  formés,  par  la  fusion,  avec  les 
scories  de  forges.  Dumesnil  en  a  imaginé  qui  s'obtien- 
nent avec  dos  mélanges  de  plâtre  aluné,  de  chaux,  de 
sable  et  d'ocre  jaune.  Le  grès  factice  de  Durand  (1845) 
s'obtient  en  mélangeant  à  chaud  du  sable,  de  la  chaux 
ou  de  la  craie.  La  pierre  artificielle  de  Ransome  se  pri^- 
pare  avec  du  sable,  de  l'argrle  pulvérisée,  de  la  craie 
et  du  silicate  de  soude  liquide,  le  tout  mélangé  à  froid, 
puis  plongé  pans  une  dissolution  de  chlorure  de  cal- 
cium. 

MATIÈRES  PREMIÈRES,  en  terme  d'économie  poli- 
tique, tout  ce  que  la  production  doit  transformer.  Elles 
fout  partie  du  capital  circulant  ou  mobile. 

MÉGALITHIQUES  (Monuments),  nom  donné  aux  mo- 
numents des  âges  très  reculés,  consistant  en  grosses 


pierres  non  taillées  par  l'industrie  humaine,  mais  telles 
que  la  nature  les  donnait. 

MÉGASGOPE,  instrument  d'optique  au  moyen  du- 
quel les  objets  opaques  sont  représentés  en  grand  do 
la  môme  manière  que  les  objets  transparents  le  sont 
dans  la  lanterne  magique,  et  qui  sert  à  obtenir  des 
copies  amplifiées  de  statuettes,  de  bas-reliefs,  de  ta- 
bleaux, de  gravures.  On  en  attribue  rinvention  au  phy- 
sicien (otaries  eu  1780.  "Lf^mégascope  réfracteur  achro» 
matique,  inventé  en  1838  par  l'opticien  Charles  Che- 
valier, puis  amélioré  par  son  fils  Arthur,  sert  pour 
agrandir  les  épreuves  photographiques. 

MÉLOPHONE,  instrument  de  musique  à  vent  et  à 
anches  libres,  extérieurement  semblable  à  une  grande 
vielle.  L'air  est  Introduit  dans  les  tuyaux  par  un  souf- 
flet à  double  vent  que  l'exécutant  manœuvre  aven  la 
main  droite,  tandis  que  de  la  main  gauche  il  attaque 
de  petites  saillies  servant  do  touches.  Le  mélophone 
fut  inventé  par  Lecterc,   horloger  parisien,  en   1839. 

MÉTAUX  PRÉCIEUX,  nom  qu'en  économie  politique 
on  donne  aux  dHux  métaux  qui  servent  à  faire  de  la 
monnaie,  l'or  et  Varge7ii  {V.  ces  mots  dans  le  Diction^ 
naire.)  En  tant  que  monnaie,  ce  senties  types  auxquels 
on  rapporte  la  valeur  de  toutes  choses  (K.  Monnaie); 
leur  abondance  ou  leur  rareté  exerce  de  l'influence  sur 
les  transactions,  sur  la  distribution  de  la  richesse,  et 
occasionne  des  perturbations  quelquefois  profondes.  La 
production  considérable  de  l'or  dans  notre  siècle  parait 
dfivoir  amener  la  baisse  de  ce  métal  :  toutefois  cette 
baisse  est  amoindrie  par  plusieurs  causes,  telles  que 
l'augmentation  de  la  population  appelant  une  extension 
correspondante  de  la  monnaie,  la  naissance  d'États 
nouveaux  dans  df*s  régions  jusqu'alors  vouées  à  la  soli- 
tude (Australie,  Étais-Unis),  le  retour  de  pays  déchus 
à  une  civilisation  avancée  (Turquie),  le  mouvement  qui 
porte  les  peuples  vers  les  Jouissances  du  luxe,  et  par 
conséquent  vers  un  emploi  de  plus  en  plus  grand  des 
métaux  précieux,  l'activité  de  l'Industrie  et  du  com- 
merce, qui  augmente  la  somme  des  monnaies  circu- 
lantes, etc.  L'Espagne  et  la  Belgique,  craignant  que  la 
valeur  relative  de  la  monnaie  d'or  et  de  tout(*s  choses 
ne  fût  bouleversée,  ont  pris  des  mesures  pour  dimi- 
nuer la  circulation  de  cette  monnaie,  (^ue  la  Hollande 
supprima  môme  quelque  temps.  Une  baisse  de  l'argent 
se  produira  peut-être  par  l'exploitation  de  gisements 
qui  n'ont  pas  encore  été  touchés  en  Amérique,  et  par 
un  meilleur  mode  d'exploitation  des  anciens.  —  Il  n'est 
pas  vrai  que  l'or  et  l'argent  soient  Tunique  richesse 
ou  la  richesse  par  excellence  ;  le  système  mercantile 
(K.  ce  mot)  était  fondé  sur  cette  erreur.  (K.  aussi 
Ralancb  du  commerce.) 

MINE.  L'usage  des  mines  de  guerre  remonte  à  une 
époquKreculéf*.  Enée,  le  tacticien  qui  vivait  au  iv«  siècle 
avant  Jésus-Christ,  en  parle  comme  d'une  chose  déJ'X 
très  ancienne.  Les  mines  étaient  alors  des  galeries  sou- 
terraines au  moyen  desquelles  l'assiégeant  cherchait  à 
pénétrer  dans  la  place.  Quelquefois  il  les  arrêtait  sous 
les  remparts,  dont  il  démolissait  les  premières  assises 
sur  une  certaine  étendue,  mais  en  les  étançonnant  ; 
puis,  en  mettant  le  feu  aux  étais,  il  faisait  écrouler  la 
muraille  et  ouvrait  une  brèche  pour  l'assaut.  Depuis  le 
zv*'  siècle  de  notre  ère,  on  charge  les  mines  avec  de  la 
poudre.  L'idée  d'employer  l'électricité  ponr  enflammer 
la  charge  remonte  aux  travaux  de  Franklin,  en  1751  ; 
mais  elle  n'est  devenue  praticable  qu'après  l'invention 
de  l'appareil  de  Rliumkorff^,  en  1853,  et  ce  progrès 
est  dû  principalement  aux  expériences  de  Gregorio 
Verdu,  lieutenant-colonel  du  génie  en  Espagne. 

MOINEAUX,  espèces  de  guérites  qu'on  établissait 
au  xvi«  siècle,  dans  les  fossés  des  places  fortes,  pour 
en  défendre  le  passage.  On  leur  donnait  aussi  le  nom 
de  casematety  qui  prit  ensuite  une  autre  signification. 
MOUSTIERS  (Faïences  de),  en  Provence.  Ces  faiences, 
longtemps  attribuées  à  Rouen,  à  Saint-Cloud,  à  Mar- 
seille, remontent  au  commencement  du  zvii«  siècle.  On 
fabriquait  d'abord  de  la  poterie  ordinaire  ;  un  sieur  Jean 
Clérissy.  mort  en  1689,  travaillait  la  terre  dans  un 
goût  analogue  anx  travaux  de  Palissy.  On  voit  un 
Antoine  Clérissy  fondera  Fontainebleau,  en  1641, une 
fabrique  de  terre  sigillée.  Un  autre  Antoine  Clérissy, 
fils  présumé  du  précédent,  établi  à  Moustiers,  parait 
avoir  appris  d'un  moine  servite,  venu  des  lies  de 
Lérius,  le  secret  de  l'émail  blanc,  qu'il  décora  d'orne- 
ments bleus;  l'essor  de  son  industrie  fut  encouragé 
par  les  ordonnances  do  Louis  XIV,  qui,  dans  les  mo- 
ments de  crise,  contraignit  ses  sujets  à  porter  leur 


NAV 


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NEV 


argenterie  à  la  Monnaie  et  k  la  remplacer  par  de  la 
vaisselle  de  faieuce  et  de  terre.  Pierre  Clérissy,  fils 
d'Antoine,  anobli  par  Louis  XV  en  1743»  adopta  comme 
décoration  des  sujets  mythologiques  :  ses  œuvres 
consistent  en  plats,  bassins,  pots  de  pharmacie,  fon- 
taines, hanaps,  encriers,  vases  de  Jardin,  décorés  de 
camaïeux  bleus,  avec  sujets  copiés  sur  des  gravures 
connues  du  temps.  Au  milieu  du  xviii»  siècle,  le  ca- 
maieti  bleu  ne  fut  plus  Is  seul  procédé  des  Clérissy, 
car  on  sait  que  Mme  de  Pompadour  commanda  à  leur 
fabrique  un  service  orné  d'une  décoration  polychrome. 
La  donnée  décoraiive  changea  en  même  temps  :  on 
entra  dans  Tère  des  écosson s  d'armoiries,  des  entrelacs 
et  des  Amours,  des  balda(|uiiis  abritant  des  Vénus 
marines  et  des  Neptunes.  Joseph  Olery  fut  le  prin- 
cipal représentant  de  cette  école  nouvelle.  La  Révo- 
lution engloutit  les  faïenceries  de  Moustiers,  comme 
celles  de  Nevers  et  de  Rouen.  (V.  Davillier,  Histoire 
des  faïences  et  des  porcelaines  de  Moutiers^  de  Afur- 
selle,  etc.,  1863.) 

MUSEROLLE.  Sorte  de  panier  en  fer  forgé  décoré 
d*ornements  estampés  ou  ciselés,  découpés  en  ajours, 
dont  on  se  servait  au  moyen-âge  pour  museler  les 
haquenées  ou  les  mules  montées  par  les  femmes. 
Lorsque  les  chevaux  des  cavaliers  portaient  des  muse- 
rolles c'était  en  général  dans  les  tournois,  dans  les  fcies 
et  les  cérémonies  pour  ajouter  à  Téclat  du  caparaçon- 
nage.  Quclqufts  muserolles  de  fabrique  allemande, 
italienne  ou  française,  dont  rornementation  est  très 
riche,  sont  devenues  de  très  belles  pièces  de  collection. 

MUSICOGRAPHE,  appareil  destiné  à  écrire  la  mu- 
sique à  mesure  qu'on  la  compose.  Les  musicographes 
présentésjusqu'à  présent  n'ont  guère  réussi.  (  K.  Piano.) 
Dans  celui  du  vicomte  Dumoncel  (1854),  qu'il  appelle 
Enregistreur  électrique  des  ioi  provisa  tiens  musicales^ 
réleciricité  rend  le  piano  libre  de  tout  mécanisme  en- 
combrant ;  l'appareil  peut  être  placé  en  tel  endroit 
que  l'on  veut.  Il  est  construit  de  manière  à  faire  réa- 
gir électriquement  les  touches  du  piano  sur  un  petit 
clavier  composé  d'aiguilles  de  fer  et  mis  à  portée  d'un 
mécanisme  enregistreur  élcctro-chimique. 


N 


NATDRAUSATION.  Une  loi  de  1867  décide  que 
l'étranger  qui,  après  l'âge  de  vingt  et  un  ans  accom- 
plis, aura  obtenu  l'autorisation  d'établir  son  domicile 
en  France  et  y  aura  résidé  pendant  trois  années,  peut 
être  admis  à  Jouir  de  tous  les  droits  de  citoyen  fran- 
çais; que  le  séjour  en  pays  étranger  pour  l'exercice 
d^iine  fonction  conférée  par  le  gouvernement  français 
est  assimilé  à  la  résidence  on  France. 

NAVALES  (Gonstruclions).  Dès  1805,  les  Anglais 
cherchèrent  à  utiliser  le  fer  dans  les  constructions 
navales,  s(ât  pour  augmenter  la  vitesse  en  raison  de  la 
diminution  du  poids  de  la  coque,  soit  ponr  augmenter 
la  quantité  du  fret  utile  en  diminuant  le  poids  mort. 
Les  bateaux  en  fer  apparurent  alors  sur  les  canaux.  En 
1821,  Napier  flr.  construire  à  Horniey  le  premier  bateau 
en  fer,  qui,  muni  d'une  machine  à  vapeur,  se  rendit  de 
Londres  au  Havre,  et  remonta  la  Seine  jusqu'à  Paris. 
En  1822,  la  maison  Gavé,  en  France,  entreprit  à  son 
tour  des  navirrs  en  fer.  C'est  seulement  en  1838  que 
VIronsidfi  fut  construit  en  Angleterre  pour  la  naviga- 
tion de  mer;  depuis  ce  temps,  on  a  fait  des  bâtiments 
en  fer  de  2  à  3,000  tonneaux.  Outre  Tavantage  de  la 
durée  et  de  la  légèreté  qu'ils  ont  sur  les  navires  en 
bois,  les  passagers  et  les  marchandises  y  trouvent  plus 
de  garanties  de  sécurité,  soit  contre  l'incendie,  Hoit 
contre  les  voies  d'eau,  soit  contre  les  causes  de  dislo- 
cation. 

Notre  époque  voit  s'opérer  dans  les  constructions 
navales,  pour  la  marine  militaire,  une  révolution  très 
importante  ;  c'est  non  seulement  la  fin  prochaine  des 
bâtiments  à  vuile,  remplacés  par  les  bâtiments  à  va- 
peur, mais  la  création  des  navires  cuirassés,  A  l'époque 
de  la  guerre  de  Grimée  (1854-1856),  on  voulut  procurer 
aux  murailles  des  navires  de  guerre  une  force  de  ré- 
sistance au  canon  plus  considérable  que  le  bois  ne  pou- 
vait leur  en  donner.  L'idée  n'était  pas  nouvelle  ;  elle 
germait  dans  l'esprit  des  constructeurs  depuis  près  d'un 
siècU',  et,  sous  le  règne  de  Louis- Philippe,  le  général 
Paixhans  proposa  et  préconisa  Teroploi  du  fer.  Mais  le 


premier  essai  n*en  fut  fait  qu'en  1855  :  la  France  en* 
voya,  pour  réduire  Kinburn,  trois  batteries  flottantes, 
vilains  bâtiments  au  point  de  vue  pittoresque,  très  peu 
faits  pour  tenir  la  mer,  mais  tirant  peu  d'eau,  et  por- 
tant une  artillerie  considérable  par  le  nottibre  et  le  ca- 
libre, sous  la  protection  d'une  cuirasse  de  fer  impé- 
nétrable aux  coups  de  l'ennemi.  Il  fut  démontré  qu'on 
arriverait  ainsi  à  détruire  lea  plus  redoutables  fortifi- 
cations. Les  Anglais  suivirent  cet  exemple,  mais  en 
appliquant  le  système  de  la  cuirasse  plutôt  à  des  ca- 
nonnières qu'à  des  batteries  flottantes.  C'est  encore  à 
un  Français,  M.  Dupuy  de  Lôme,  qu'appartient  l'in- 
vention dos  frégates  cuirassées  :  ia  frégate  cuirassée 
la  Gloire  fut  mise  en  chantier  à  Toulon  en  1858,  et 
ce  fut  seulement  Tannée  suivante,  quand  on  allait  la 
mettre  à  l'eau,  que  les  Anglais,  se  décidant  à  rimit^r, 
commencèrent  la  construction  du   WoiTtoi*.  Depu's 
cette  époque,  les  frégates  cuirassées  se  multiplient 
dans  les  deux  pays,  bien  que  l'on  ne  soit  pas  encore 
complètement  fixé  sur  le  système  qu*il  faut  préférer  : 
on  essaye  le  fer  seul,  le  bois  et  le  fer  réunis,  une  com- 
binaison de  fer  et  de  caoutchouc,  ou  de  Al  de  fer  et  de 
chanvre,  etc.  Le  procédé  le  plus  général  consiste  à 
blinder  les  frégates  avec  des  plaques  de  fer,  épaisses 
de  3  pouces  à  4  pouces  1/2.  On  a  pu  se  convainere 
immédiatement  de  l'invulnérabilité  de  ces  navires  par 
l'a'hcienne  artillerie  :  aussi  les  ingénieurs  se  sont-ils 
appliqués  à  donner  aux  projectiles  la  force  nécessaire 
pour  percer  les  cuirasses.  Des  expériences  qui  ont  été 
faites  en  Angleterre  et  en  France,  il  n'est  résulté  rien 
de  très  concluant  :  il  a  été  constaté  toutefois  que  ce 
n'est  point  avec  des  bouches  à  feu  d'un  énorme  calibre, 
avec  des  boulets  d'un  volume  extraordinaire,  qu'on 
peut  arriver  à  percer  les  plaques,  mais  qu'il  faut  avant 
tout  se  préoccuper  de  la  vitesse  du  projectile  au  mo- 
ment où  il  atteint  le  but.  Comme  les  gouvernements 
gardent,  au  sujet  de  leurs  essais,  un  secret  qu'il  est 
difficile  de  percer,  on  ne  saurait  dire  s'il  existe,  en  ce 
moment,  des  pièces  d'artillerie,  canons  rayés  ou  au- 
tres, qui  donnent  aux  projectiles  une  impulsion  as«ez 
vigoureuse,  ni  des  boulets  d'une  nature  et  d'une  forme 
particulières,  qui  aient  une  force  de  pénétration  suf- 
fisante. D'ailleurs,  aucun  combat  de  frégates  cuirassées 
n'a  indiqué  Jusqu'ici  comment  ces  frégates  se  compor- 
tent. Dans  la  guerre  qui  a  éclaté  entre  les  Américains 
des  Etats-Unis  en  1861,  on  a  vu  employer  deux  bâti- 
ments de  formes  nouvelles,  le  Merrimae  et  le  Moni' 
tor,  bientôt  imités  par  les  constructeurs  :  on  fait  des 
navires  rasés  autant  que  possible  sur  l'eau,  presque 
immergés,  pourvus  d'une  artillerie  peu  nombreuse 
mais  de  fort  calibre,  cuirassés  sur  le  pont  comme  au- 
tour de  la  coque,  et  présentant  l'aspect  d'une  vaste 
carapace  de  fer,  percés  seulement  d'étroits  sabords 
pour  laisser  passer  les  canons.  On  donne  aussi  à  ta 
carapace  une  extrême  déclivité,  do  façon  que  le  boulet 
rencontre  toujours  une  surface  fuyante  et  ne  puisse 
battre  de  plein  fouet.  Les  Américains  ont  imaginé 
aussi  d'armer  d'un  fort  éperon  l'avant  des  navires  cui- 
rassés, afin  de  percer  et  de  couler  l'ennemi  par  un 
choc  à  toute  vapeur.  Ils  élèvent  enfin  sur  le  navire 
une  tour  cuirassée  mouvante,  d'où  l'on  peut  tourner 
des  canons  dans  toutes  les  directions,  ce  qui  permet  de 
l)alu>er  le  pont  s'il  était  envahi  à  l'abordage.  L«s  ra- 
vages exercés  par  le  Merrimae  dans  la  flotte  de  bois 
des  Etals  du  Nord  ont  prouvé  d'une  manière  effrayante 
les  avantages  des  navires  cuirassés.  On  avait  contesté 
longtemps  que  les  frégates  cuirassées  pussent  bit^n 
tenir  la  mer  :  la  Gloire  est  sortie  victorieuse  d^s  tem- 
pêtes de  la  Méditerranée.  Sa  vitesse  est,  en  outre,  an 
moms  égale  ^  celle  des  meilleurs  marcheurs.  Enfin 
l'envoi  de  la  Normandie  au  Mexique,  en  1862,  a  établi 
que  les  nouveaux  navires  ne  sont  point  impropres  aux 
plus  longues  navigations.  B. 

NE  VERS  (Faïences  de).  L'autorisation  d'établir  uite 
faïencerie  à  Nevers  fut  accordée  par  Henri  111,  en  lo'îS, 
à  Dominique  de  Gonrade^  gentilhomme  d'Albissola, 
près  de  Savone,  et  la  fabrication  se  développa  sous  la 
protection  desGonzague,  ducsde  Nivernais.  Les  faïences 
furent  une  imitation  presque  servi  le  des  majoliques 
italiennes:  sur  un  fond  bleu  oudé  se  détachent  des 
<iieux  marins^  avec  des  tons  viol«ts  de  manganèse  et, 
au  XVII*  siècle,  avec  des  tons  jaunes  tirant  sur  l'orangé. 
Après  Dominique  de  Gonrade,  son  fiis  Antoine  fit  pros- 
pérer cette  industrie  ;  puis  un  autre  Dominique,  fils 
d'Antoine,  retourna  en  Italie  en  1651.  Huis  la  f»ien- 
cerie  nivernaise  n'en  continua  pas  moina  ses  travaux, 


OIR 


—  4845  — 


OPE 


80US  la  direction  de  six  générations  de  Custode.  Dans 
ce  second  &ge,  l'imitation  italienne  disparu!,  et  le  goût 
persan  éclata  on  bouquets  de  fleurs  et  en  oiseaux  exo- 
tiques, peints  en  jaunoec  en  blanc  sur  fond  bleu  lapis 
applique  par  immersion.  On  mit  aussi  à  contribution 
les  figures  et  les  motifs  des  modèles  chinois,  mais  sans 
leurs  fraîches  et  chaudes  nuances:  c'est  toujours  du 
bleu,  du  blanc,  du  Jaune  sèchement  découpés  l'un  sur 
l'autre,  et  du  vert  quelquefois,  produit  par  un  mélange 
de  ce  juune  et  de  ce  bleu.  Au  milieu  de  ce  xvii*  siècle, 
une  statuaire  grotesque  sortit  des  ateliers  de  Nevers, 
pour  Tornement  des  Jardins,  et  Ton  imita  maladroite- 
ment les  faïences  de  >loustiers  et  de  Rouen.  {V,  ces 
mots).  Knfin  la  faïencerie  nivernaise  mourut  pendant  la 
Bévoluiion,  dont  elle  mitlesemblèmessurses dernières 
pièces,  toutes  pesantes  et  d'un  galbe  disgracieux. 

A  Niivers  comme  k  Rouen  les  signatures  font  presque 
toujours  défaut.  Lessiglesetles  monogrammes  sont  fré- 
quents, mais  sauf  quelques  exceptions,  la  plupart  sont 
encore  inexpliqués.  La  fabricution  nivernaise «e divise 
en  trois  époques  bien  distinctes:  1*  Tinflueiice  italienne. 
A  celle-ci  se  rattache  toutes  les  pièces  dont  la  forme 
et  le  décor  rappellent  la  tradition  de  l'école  d'Urbino 
du  XVI*  siècle;  2*  prépondérance  du  style  orientai  as- 
socié à  l'art  italien.  Les  belles  pièces  k  fond  bleu  vio- 
lacé connues  sous  le  nom  de  6/tfu</ePer«e  appartien- 
nent à  la  deuxième  époque  ;  3*  époque  dite  franco- 
tiivernaise,  qui  ouvre  l'ère  des  faïences  usuelles.  L'art 
n'y  tient  plus  la  première  place.  Les  pièces  qui  datent 
dé  celte  dernière  époque  doivent  plutôt  être  attribuées 
à  la  fabrique  de  la  Chariié-sur-Loire  qu'à  celle  de  Ne- 
vers  proprement  dite,  qui  comptait  encore  onze  ate- 
liers à  la  Révolution  trançaise.  C'est  à  la  Charité-sur- 
Loire,  fabrique  voisine  de  Nevers,  et  aux  fabriques  des 
environs,  dépendantes  de  Nevers,  que  furent  exécutées 
toutes  les  pièces  connues  comme  faïences  nivernaiscs 
des  basses  époques.    (V.  Du   Broc  de  Sagange,   les 
Faïenciers  et  Us  émailteurs  nivernais^  18<i3  in  4«,  et 
Albert  Jacquemart,  les  Merveilles  de  la  Céramique). 
MDERVILLER  (Faîbncbs  Dk).  Cette  fabrique  date  des 
environs  de  1754.  On  en  attribue  la  fondation  à  Jean 
Louis  de  Beyerlé,  conseiller  du  roi,  seigneur  de  Ni- 
derviller.  A  quelques  années  de  là  elle  devint  la  pro- 
priété du  comte  de  Custine.  Le  directeur  y  recevait 
cinq  cents  livres  par  an.   Les  appointements  du  con- 
trôleur ne  dépassaiant   pas  trente  sols  par  Jour.  Les 
artistes  y  étaient  payés  à  la  Journée.  Leurs  gages  va- 
riaient de  douze  à  vingt-quatre  sols,  a  sans  qu  ils  Jouis- 
sent d'autres  facultés  et  revenus  que  de  leurs  ouvrages 
et  mains-d'œuvre,  et  ne  participent  à  aucun  avantage 
de  la  communauté.  »  Les  pièces  de  cette  fabrique  sont 
renommées  pour  la  perfection  de  leur  imitation    de 
gravures,  de  lavis  de  paysages  sur  un  fond  simulant 
le  bois  de  sapin.  L'art  du  trompe-l'œil  y  a  été  poussé 
à  un  grand  degré  d'imitation,  et  témoigne  de  la  rare 
habileté  des  artistes  peintres  de  Niderviller.  Les  faïences 
de  la  fabrique  du  comte    de  Custine  sont    souvent 
marquées  de  deux  Cadossés^  et  quelquefois  surmon- 
tées d'une  couronne  héraldique. 

NINFALI,  ancien  instrument  de  musique  italien.  Il 
parait  avoir  été  un  petit  psaltérion  ou  un  petit  tym- 
panon  à  touche. 


0 


OIRON  (FaIences  d'),  faïences  fabriquées  à  Oiron, 
près  de  Thouars  en  Poitou,  et  dont  on  connaît  seule- 
ment 67  pièces  disséminées  dans  diverses  collections. 
Quelques-unes  portent  le  monogramme  H.  C,  signi- 
fiant Henri  II  et  Catherine  de  Médicis  :  de  là  le  nom 
de  faïences  de  Henri  11^  donné  improprement  à  toute 
la  collection.  La  fabrique  d'Oiron  fut  fondée,  après 
1524,  par  Hélène  de  Hangest,  veuve  d'Artus  Gouffier, 
sire  de  Boisy,  précepteur  de  François  1*',  et  placée 
sous  la  direction  d'un  habile  potier,  François  Cher- 
pentior;  protégée  par  les  Gouffier  Jusqu'en  1568,  elle 
fut  ensuite  soutenue  par  l'industrie  privée  Jusque  sous 
le  règne  do  Hcmri  lll.  Le  caractère  propre  de  la  faïence 
d'Oiron  était  l'incrustation  des  parties  colorantes  dans 
les  parties  concaves  réservées  à  cet  effet  :  on  les  rem- 
plissait, et  on  cuisait  sous  vernis.  Les  plus  anciences 
pièces  ont  des  ornements  incrustés  d'une  seule  cou- 
leur, ou  un  petit  nombre  de  parties  coloriées  autre- 


ment qu'en  brun  noir,  en  brun  plus  clair  ou  en  rouge 
d'œillet  :  elles  sont  au  nombre  de  13.  Dans  quarante 
autres,  plus  compliquées  de  détails,  on  trouve  des  mo- 
nogrammes apocryphes  (H  couronnés,  éeussons  à  fleurs 
de  lis,  croissants),  ajoutés  pour  en  augmenter  la  va- 
leur vénale  ;  l'influence  de  Palissy  se  fait  sentir  par 
l'emploi  encore  timide  d'animaux  en  haut-relief  comme 
motifs  de  décors.  Pour  les  14  dernières  pièces,  les 
anciens  procédés  ont  été  abandonnés  pour  ceux  de  la 
plupart  des  manufactures  contemporaines.  (V.  Fillon, 
iArt  de  terre  chez  les  Poitevins ^  18C3).  Les  docu- 
ments retrouvés  par  M.  Benjamin  Fillon  ont  permis 
de  ressaisir  l'histoire  très  précise  de  cette  poterie  fa- 
meuse. Hélène  d'Angest,  dame  de  Boisy,  veuve 
d'Artus  Gouffier,  mère  du  grand  écuyer  et  ancienne 
gouvernante  du  roi  Henri  II,  habitait  pendant  l'été  sou 
château  d'Oiron  qu'elle  embellit  avec  le  concours  de 
son  fils  Claude.  Une  partie  de  cette  habitation  avait 
été  convertie  en  ateliers  de  poteries.  On  sait  qu'en 
1539  elle  fit  don  de  la  maison  et  du  verger  où  étaient 
éublis  les  fours  des  ateliers  à  Cherpentier,  et  à 
Jehan  Bernart,  gardien  delà  librairie  d  Oiron.  Jehan 
Bernart  avait  en  outre  une  fonction  spéciale  et  non 
sans  importance.  Il  était  chargé,  sous  l'inspiration  de 
la  dame  de  Boisy,  du  choix  dos  dessins^  chiffres, 
armoiries  et  emblèmes  qui  décorent  les  terres  ver- 
nissées d'Oiron. 

Ces  faïences  n'ont  Jamais  été  fabriquées  dans  on 
but  mercantile.  C'était  le  passe-temps  de  luxe  d'une 
femme  de  goût,  versée  dans  l'étude  des  arts,  qui  fai- 
sait confectionner  sur  son  pré  et  sous  ses  yeux  des 
vases  destinés  à  être  offerts  en  présent  à  son  roi,  à 
ses  amis,  à  ses  voisins  ou  à  ses  tenanciers.  C'est  ainsi 
que  s'explique  la  variéié  des  armes,  chiffres  et  em- 
blèmes qui  décorent  ces  objets  dont  aucun  ne  porte 
une  marque  de  fabrique..  La  dame  de  Boisy  mourut 
en  1537.  Son  fils  Claude  continua  la  tradition  ma- 
ternelle. C'est  à  lui  qu'on  fait  remonter  la  plupart  des 
ouvrages  venus  Jusqu'à  nous,  et  entre  autres  le  célèbre 
carrelage  de  la  chapelle  d'Oiron,  à  la  devise  des 
Gouffier,  portant  le  monogramme  du  roi  Henri  II  et 
de  Claude,  avec  l'écusson  des  Montmorency  et  des 
Hangest-tientis.  Ce  pavage  fut  composé  et  dessiné  par 
Jehan  Bernart.  On  en  voit  plusieurs  beaux  échantillons 
au  musée  de  Cluny. 

Il  existe  au  même  musée  une  grande  miniature 
aux  armes,  chiffres  et  devise  des  Gouffier  :  Hic  ter» 
minus  hxret.  Outre  sa  valeur  artistique,  elle  présente 
cette  particularité  très  précieuse  que  c'est  elle  qui 
amena  M.  Benjamin  Fillon  à  faire  de  minutieuses 
recherches  h.  Oiron,  où  il  retrouva  les  traces  de  l'exis- 
tence do  la  fameuse  usine  de  faïences.  Cette  miniature 
est  une  feuille  du  calendrier  du  livre  d'heures  de 
Claude  Gouffier.  £lle  figura  à  l'exposition  de  1867, 
après  quoi  M.  Benjamin  Fillon  la  donna  au  musée  de 
Cluny.  Elle  représente  une  scène  de  moissonneurs. 
Klle  a  pour  titre  :  Le  mois  d'août.  L'un  des  moisson- 
neurs porte  à  sa  bouche  une  bouteille  aux  armes  des 
Gouffier.  Or  cette  bouteille  avec  sa  teinte  claire 
ivoirée,  avec  ses  dessins  bruns  sur  une  faïence  fine, 
ne  laisse  aucun  doute  sur  son  origine.  Elle  est  un 
spécimen  authentique  de  ces  faïences  connues  Jus- 
qu'alors sous  le  nom  de  faïences  Henri  II,  dont  le  lieu 
de  fabrication  resta  ignoré  Jusqu'au  Jour  où  M.  B.  Fil- 
lon, prenant  texte  de  ce  document  peint,  réussit  à  re- 
constituer riiisiorique  de  la  fabrique  d'Oiron.  La  pro- 
duction de  ces  ateliers  fondés  par  la  dame  de  Boisy, 
productions  toutes  de  luxe,  purement  décoratives,  et 
sans  application  possible  aux  besoins  usuels,  demeure 
un  fait  isolé,  sans  précédent,  sans  suite.  C'est  un 
accident  dans  l'histoire  de  la  céramique.    J.  B.-z. 

OPÉRA  DB  Paris.  La  façade  de  ce  monument,  éclai- 
rée par  quatre  grands  candélabres  en  bronze,  est  éle- 
vée sur  un  perron  de  pierre.  Elle  offre  un  soubasse- 
ment percé  de  sept  arcades  à  plein  cintre,  dont  les 
doux  extrêmes  sont  en  avant-corps.  Entre  les  arcades 
centrales  sont  quatre  statues  du  Drame,  du  Chant,  de 
\  Idylle  et  de  la  Cantate,  surmontées  de  médaillons 
représentant  les  profils  de  Bach^  Haydn,  Pergolèse  et 
Cimarosa,  Aux  avant-corps  on  a  placé  quatre  groupes  : 
la  Musique,  la  Poésie  lyrique,  le  Draoïe  lyrique  et  la 
Danse.  Les  arcades  paraissent  un  peu  étroites  et  con- 
trastent p:ir  leur  aspect  sombre  avec  la  pompe  du  grand 
étage  supérieur.  Le  rez-de-chaussée  sert  à  l'entrée  des 
piétons. 
L'éiage  se  compose  d'un  ordre  corinthien  de  colonne^ 


OPE 


—  1846  — 


OPE 


accouplées,  monoUthrs,  de  lGm,?0  de  hauteur,  s«^pa- 
rant  sept  grandes  baies,  et  formant  ce  qu'un  appelle 
en  Italie  une  loggia.  Deux  frontons  s'arrondissant  sur 
Tentablement  dea  avant-corps  rompent  heureusement 
riioi'izontalité  de  la  ligne.  Sous  un  climat  plus  clément 
qne  le  nôtre»  la  colo.inade  eût  pu  rester  ouverte; 
mais  il  a  fallu  fermer  les  baies  par  lesquelles  le  vent 
et  la  pluie  se  fussent  engouffrés.  Le  vide  a  été  comblé 
de  la  façon  la  pins  ingénieuse.  Entre  les  colonnes  ac- 
coupléOv'*,  dont  la  blancheur  se  détache  d'un  fond  en 
marbre  du  Jura,  s*encadre  un  petit  ordre  formé  de 
deux  colonnes  en  marbre  jaspé,  aux  chapiteaux  dorés; 
au-dessus  de  la  frise  qu'il  supporte  s'ouvre,  entre 
deux  consoles,  richement  ornées  et  terminées  par  des 
masques  de  théâtre  dans  un  champ  de  marbre  de  cou- 
leur, un  grand  œil-de-bœuf  ajouré,  encadrant  le  buste  en 
bronze  doré  d'un  compositeur  célèbre.  Chaque  buste 
pose  sur  un  piédouche  bla sonné  des  armes  d'une  ville  ; 
sur  une  plaque  en  marbre  vert  de  Corse ,  incrustée 
dans  la  friae,  figure  le  nom  du  musicien  en  lettres 
gravées  et  dorées.  Un  balcon  en  encorbellement,  dont 
les  balustres  sont  en  marbre  vert  de  Suède,  achève  de 
remplir  la  travée,  et  sa  projection  est  assex  forte  pour 
permettre,  en  se  penchant  un  peu,  de  jouir  du  profil  de 
l'édifice.  Cette  disposition  se  ri'pëte  dans  tous  les  en- 
trc-colonnements.  Dans  le  tympan  du  fronton  droit, 
on  voit  deux  figures  adossées  à  un  écusson  portant  ces 
mots  :  Peinture,  Sculpture ^  et  accompagnées  de  petits 
génies.  Le  tympan  du  fronton  gauche  est  rempli  par 
un  motif  analogue;  l'écusson  a  pour  inscription  :  Ar- 
cftilecture,  Industrie.  Les  frises  d'inscriptions  dans 
Teniablement  de  l'ordre  sont  en  marbre  de  Cannes, 
dit  rouge  antique,  et  présentent  ces  mots  en  lettres 
gravées  et  dorées  :  au  centre.  Académie  nationale  de 
musiaue;  h  droite.  Poésie  lyrique;  à  gauche,  Choré- 
graphie.  (Jn  cordon  de  bronze  richement  orné  arrête 
la  ligne  extérieure  de  l'entablement. 

L'ordre  corinthien  supporte  un  attiqne.  Li,  au-des- 
sus de  chaque  groupe  de  colonnes  accouplées  de  la 
façade,  s'élève  un  groupe  de  deux  femmes  et  d'un  enfant 
qui  soutiennent  un  médaillon-couronné,  en  porphyre 
do  Finlande,  historié  du  monogramme  impérial.  Entre 
les  groupes,  sur  le  champ  de  l'attique,  des  bas-reliefs, 
représentant  des  enfants  presque  en  ronde  bosse,  qui 
se  détachent  d'un  fond,  en  mosaïque  d'or,  ont  pour  con- 
tre des  disques  en  marbre  vi-rt  de  Suède,  marqués 
akernativement  aux  initiales  N  et  E.  Des  bander  de 
marbre  de  couleurs  variées  forment  des  cadres  à  ces 
bas-reliefs.  Un  cordon  de  masques  tragiques  et  comi- 
ques, en  bronze  doré,  termine  l'édifice  sur  la  ligne  du 
ciel.  A  chaque  angle  de  la  façade,  entre  deux  trépieds 
dorés,  se  dresse  un  groupe  de  trois  figures  également 
dorées,  de  7  mètres  de  hauteur,  les  ailes  comprises  : 
l'un  de  ces  groupes  représente  V Harmonie,  l'autre  la 
Poésie,  accompagnées  de  deux  Renommées.  Les  grou- 
pes sont  de  Gumery;  les  femmes  et  les  enfants  sup- 
portant dea  médaillons,  de  Maillet;  les  masques  tragi- 
ques et  comiques,  de  Klagmann  ;  les  sculptures  d'or- 
nement, de  Villemint. 

L'impression  première  de  la  façade  de  TOpéra  est 
surtout  un  effet  de  couleur;  c'est  comme  un  grand 
panneau  de  pierre  sur  lequel  un  artiste  aurait  peint 
dos  décorations.  L'architecte  a  voulu  éviter  la  pâleur 
froide  des  monuments  monochromes,  et  chercher  la  co- 
loration par  la  variété  des  matériaux  gardant  leurs 
nuances  naturelles.  Tandis  que  les  parties  essentielles 
d'architecture  sont  en  pierre  blanche,  il  a  employé 
pour  l'ornement  et  les  constructions  plus  légères  les 
ressources  des  marbres  diversement  colorés,  des 
-bronzes  et  des  ors.  Cette  diversité  des  tons  est  en  har- 
monie avec  l'édifice  :  un  Opéra  est  un  monument  de 
luxe  et  de  joie;  il  doit  exprimer  une  idée  de  fôte,  et, 
dès  sa  façade,  enchanter  les  yeux  ;  des  lignes  dures, 
des  profils  austères,  une  coloration  grise  défigureraient 
sa  physionomie.  Mais  il  y  a  une  mesure  à  garder.  On 
reproche  à  la  façade  de  l'Opéra  une  ordonnance  com- 
pliquée^ à  l'excès,  une  ornementation  fatigante  par  la 
multiplicité  des  reliers  et  la  trop  grande  variété  des 
couleurs;  on  blâme  les  disques  verts  de  l'attique,  qu'on 
a  appelés  des  «  boutons  de  livrée  »;  la  dorure  des 
bustes,  qui  brouille  les  contours  et  altère  la  ressem- 
blance, l'encadrement  qui  donne  aux  œils-de-bœuf  un 
air  d'étagère  en  bois  découpé,  la  prodigalité  des  ins- 
criptions, les  bordures  de  bronze,  qui  doivent  maculer 
la  pierre  de  traînées  d'oxyde. 
En  regardant  de  loin   la  façade,  on  voit  que   les 


grandes  divisions  de  l'édifice  sont  annoncées  et  mi^es 
en  relief  par  la  construction  extérieure.  Une  coupole, 
portée  par  des  pilastres  et  percée  de  fenêtres  rond* s, 
accuse  et  recouvre  la  salle;  son  coaroiinement  est  re- 
vêtu de  bronze  orné  de  sobres  dorures.  Plus  loin,  on 
comble  gigantesque  annonce  remplacement  d*i  la 
scène  ;  le  grand  pignon  de  ce  comble  est  terminé  de 
chaque  côté  par  un  Pégase,  œuvre  de  Lequeane,  et 
dominé  par  un  groupe  de  Millet,  représentant  Apollon 
qui  lève  sa  lyre  d'or.  Cea  parties  si  diverses  sont  rac- 
cordées entre  elles  avec  beaucoup  «l'art  et  d'habileté. 
Sur  les  côtés  de  l'édifice,  Tenceinte  périmétrique  est 
déterminée  par  une  balustrade  en  pierre  polie,  avec  ba- 
lustre  en  marbre  bleu  pâle.  Cette  balustrade  est  cou- 
pée par  onze  entrées  de  grilles  ;  elle  est  snmioniée  de 
22  statues-lampadaires  en  bronze  et  de  huit  colonnes 
en  marbre  bleu  foncé  qui  portent  chacune  trois  lan- 
ternes. Les  façades  latérales  sont  d'une  ornementation 
plus  sobre  que  la  façade  principale.  L'emploi  des  mar- 
bres y  est  plus  rare.  Deux  pavillons  en  rotonde  mar- 
quent, l'un,  sur  la  façade  du  nord,  la  loge  du  i  hef  de 
l'État,  et,  l'autre,  sur  la  façade  du  sud,  l'entrée  et  la 
sortie  du  public  venu  en  voiture.  Le  premier,  précédé 
de  deux  colonnes  rostrales  porte-lanternea  en  granit 
d'Ecosse,  est  muni  d'une  double  rampe  douce,  qui 
permet  aux  voitures  de  s'arrêter  dans  un  vestibule 
clos  et  couvert;  le  second,  percé  à  jour  par  de  hautes 
arcades,  offre  une  descente  à  couvert  aux  voitures. 
Les  couronnements  de  ces  pavillons,  formés  d'aigles 
aux  ailes  éployées  et  de  galères  aux  rames  dressées, 
ne  sont  pas  d'un  effet  heureux.  Au-desaus  des  fenêtres 
des  fitçades  sont  des  bustes  de  musiciens  placés  dans 
des  niches  circulaires.  Ces  bustes,  auxquels  on  a  donné 
des  dimensions  colossales  parce  qu'ils  sont  placés  très 
haut,  font  paraître,  par  comparaison,  les  fenêtres  plus 
petites  qu'elles  ne  sont  réellement.  Aux  extrémités 
des  façades,  les  frontons  sont  oriiés  de  figures  qui 
personniftent  la  Comédie  et  le  Drame,  la  Science  et 
ï'Art,  le  Chant  et  la  Poésie,  la  Musique  et  la  Danse. 

La  partie  postérieure  de  l'Opéra  est  formée  par  les 
bâtiments  de  l'administration  où  sont  installés  les  ser- 
vices du  théâtre,  les  bureaux,  une  partie  des  loges 
d'artistes  et  des  magasins.  Ils  sont  adossés  à  la  scène, 
dont  le  mur  se  termine  par  un  fronton  triangulaire 
portant  à  chaque  coin  une  sorte  de  pyramide  funé- 
raire. On  n'avait  pas  besoin  ici  d'une  riche  ornementa- 
tion ;  l'architecte  s'est  appliqué  surtout  à  bien  aérer 
cette  partie  des  constructions.  La  cour  placée  en  avant 
des  bâtiments  e^t  fermée  par  un  mur  circulaire:  une 
grande  porte  monumentale  et  deux  grilles  servent  à 
l'entrée  et  à  la  sortie  des  chariots  de  décors. 

Pour  pénétrer  dans  l'intérieur  du  théâtre^  après  avoir 
franchi  les  grilles  qui  ferment  les  arcades  de  la  façade, 
on  se  trouve  dans  un  vestibule  éclairé  par  quatre 
groupes  de  lanternes  reposant  sur  dea  gaines  de  mar- 
bre, et  orné  des  statues  assises  de  Lulli,  Rameau,  Gluck 
et  Uœndel.  Dix  marches  donnent  ensuite  accès  à  uu 
second  vestibule  destiné  au  service  du  contrôle,  et 
orné  de  gracieux  candélabres  et  de  huit  paimeaux 
sculptés.  Puis  on  arrive  au  grand  escalier,  de  chaque 
côté  duquel  des  escaliers  secondaires  condoiaent  à  tous 
les  étages  de  la  salle,  et  auquel  le  public  entré  par  le 
pavillon  du  sud  accède  en  traversant  un  vestibule  cir- 
culaire placé  au-dessous  de  la  salle.  Le  grand  escalier, 
dont  la  décoration  est  une  merveille  d'élégance  et  de 
richesse,  mène  entre  le  foyer  et  la  salle.  Après  un 
avant-foyer,  dont  la  voûte  est  revêtue  de  mosaïque, 
le  foyer,  séparé  de  la  loggia  par  cinq  portes  vitrées, 
se  déploie  sur  une  longueur  de  54  mètres;  il  a  13  mè- 
tres de  largeur  et  18  mètres  de  hauteur.  La  tonalité 
générale  de  ce  foyer  est  l'or  vieux.  Il  est  orné  de 
20  colonnes  accouplées,  que  surmontent  30  statues,  de 
splendides  tentures  en  »oie  couleur  d'or,  de  glaces  de 
Saint-Gobain  hautes  de  7  mètres,  ainsi  que  de  beaux 
lustres  dorés.  Au-dessus  de  la  corniche  s'épanouissent 
les  compartiments  qui  entourent  les  peintures  de 
Paul  Baudry.  Aux  extrémitts  du  foyer  sont  de  grands 
salons  octogones,  dont  on  admire  les  cheminées  monu- 
mentales. • 

La  salle  proprement  dite,  qu'entourent  de  vastes 
couloirs,  est  bien  coupée,  et  de  toutes  les  places  on  en 
peut  voir  l'ensemble.  Elle  contient  2»156  places.  Le 
plafond,  sorte  de  coupole  de  cuivie,  sur  laquelle  Le- 
nepveu  a  peint  les  heures  du  jour  et  de  la  nuit,  repose 
sur  un  couronnement  composé  de  12  œils-de-bœaf 
grillés  et  de  12  panneaux  également  â  Jour.  L'entable- 


PAL 


—  1847  — 


PEP 


ment  qui  soutient  ce  conronneoient  est  garni  de  globes 
éclairés  au  gaz;  dans  les  frises,  des  médaillons  à  Jour 
sont  rempli:)  de  pierres  que  le  gaz  fait  briller  comme 
des  topazes  et  des  émeraudes.  Le  lustre  central  a  340  lu- 
mières. Huit  grandes  colonnes,  dorées  en  divers  points, 
supportent  la  partie  supérieure  dé  la  salle.  La  couleur 
générale  des  loges  est  rouge  et  or.  La  scène  est  la  plus 
grande  qui  existe  en  largeur  et  en  hauteur;  on  peut 
en  augmenter  la  profondeur,  en  prenant  le  couloir  de 
fond,  qui  a  î  mètres  de  large,  puis  le  foyer  de  la  danse, 
de  manière  k  obtenir  près  de  50  mètres.  Les  dessous 
du  théâtre,  où  peuvent  descendre  les  décors,  n*ont  pas 
loin  de  20  mètres.  Le  foyer  de  la  danse,  dont  le  mur 
de  fond  est  formé  de  trois  glaces,  a  un  lusire  de  104  lu- 
mières  ;  on  y  a  p^int,  dans  des  médaillons,  20  portraits 
de  danseuses  célèbres.  Le  foyer  du  chant  est  égale- 
ment orné  de  portraits  d'artisies.  Quatre  «vingts  loges 
réparties  dans  retendue  de  deux  étages  sont  destinées 
aux  sujets  du  chant  et  de  la  danse.  Il  existe  aussi  de 
grandes  loges  pour  les  différentes  sortes  de  choristes 
et  de  comparses,  un  foyer  pour  les  répétitions,  des 
magasins  de  costumes  et  d'accessoires,  des  salles  de 
couture  et  de  coiffure,  des  archives,  une  bibliothèque 
musicale,  une  bibliothèque  dramatique,  etc. 

Tel  est  l'ensemble  de  l'Opéra  de  Paris,  édifié  par 
Gh.  Garnier  de  1861  à  1K74.  et  décoré  sous  sa  direction 
par  un  grand  nombre  d'artistes.  {Peintres  :  Barrias, 
Benouville,  Boulanger,  Delaunay,  Harpignies,  PiU; 
Sculpteurs  :  Carpeaux,  Clubaud,  Carrier-Belleuse,  Ca- 
velier,  Denéchaux,  Dubray,  Falguière,  Guillaume,  Gu- 
mery,  Jacquemard,  JoufTroy,  Perraud,  etc.)  Quand  on 
creusa  les  fondations,  on  rencontra  une  nappe  d'eau 
de  5  mètres;  et  il  ne  fallut  pas  moins  de  8  pompes  à 
vapeur  pour  opérer  le  dessèchement  du  terrain.  L'en- 
semble des  conduites  de  gaz  représente  une  longueur 
de  26  kilom.j  elles  sont  en  communication  avoc  10 
compteurs,  d  une  capacité  totale  de  9,200  becs.  Une 
partie  des  sous- sots  est  occupée  par  14  calorifères  à 
l'eau  chaude  ou  à  l'air  chaud,  consommant  tous  en* 
semble  10,000  kilogr.  de  charbon  de  terre  par  jour; 
en  outre,  ou  biûle  du  bois  dans  450  cheminées.  Les 
conduits  de  chauffage  ont  un  développement  de  près 
de  5  kilomètres,  et  le  jeu  de  650  bouches  de  chaleur 
permet  de  régler  la  température.  La  ventilation  de  la 
salle  s'opère  au  moyen  de  prises  d'air  placées  au-dessus 
et  autour  de  la  coupole.  La  canalisation  de  Teau  em- 
ploie 0,918  mètres  de  tuyaux;  0  réservoirs  et  2  tonnes 
permettent  de  tenir  en  réserve  150,000  litres  d'eau, 
qui  serviraient  en  cas  d'incendie.  L'Opéra  occupe 
une  superficie  de  11,237™,70;  il  a  environ  I5,0i)0  mè- 
tres de  toiture.  La  longueur,  du  bas  du  perron  à  la 
grande  porte  de  radmiuistration,  est  de  172™,70;  la 
largeur  de  la  façade  principale,  de  70  mètres,  et  sa 
liauteur,  de  32™. 12;  la  hauteur,  depuis  le  sol  jusqu'à 
la  terrasse  supérieure  du  comble  do  la  scène,  de 
55".97. 

OURDISSAGE,  terme  technique  pour  désigner  la 
préparation  de  la  chaîne  (K.  ce  mot,  Supf>L)  d'un  mé- 
tier de  tapisserie.  Se  dit  aussi  de  l'action  d'entrelacer 
les  cordons  de  paille  pour  faire  une  natte. 


PALISSY  (Faïences  db).  La  vue  d'une  coupe  en  ma- 
jolique  de  Kerrare  éveilla  le  génie  de  Bernard  Palissy, 
qui  avait  été  d'abord  étranger  à  l'art  céramique.  Les 

Înêces  rustiques  qu'il  fabriqua  furent  destinées  &  orner 
es  crédences  et  armoires  du  siècle  des  Valois;  ce  sont 
(les  vasf  s  et  des  plats  chargés  de  végétaux,  de  coquil- 
les, de  poissons,  etc.,  moulés  sur  nature;  il  en  est 
bien  peu  de  défectueux,  parce  que  fauteur  brisait  ses 
rebuts.  On  doit  à  Palissy  des  formes  et  des  ornements 
einpreints  du  beau  style  de  la  Renaissance;  mais  ces 
couleurs  sont  plus  criardes  que  fraîches,  et  le  sombre 
y  domino.  Il  n'y  a  pas  de  lut  une  seule  pièce  d'un 
blanc  pur  ;  le  brun  de  manganèse,  le  VQi't  de  cuivr^), 
un  bleu  pussable^  deux  tons  de  jaune,  un  gris  dérivé 
du  bleu,  voilà  le  cercle  dans  lequel  il  tourne.  Lps 
fHïences  de  Palissy  furent  contrefaites  :  ou  recoimalt 
les  imitaiiuns  uu  brun  marron  des  dessous  ou  revers, 
tandis  que  les  mômes  parties^  dans  les  pièces  origi- 
nales, sont  jaspées  de  jaune  et  de  bleu;  la  pâte  de  la 
faïence  de  Palissy,  qui  est  de  la  terre  de  pipe,  est  aussi 


plus  blanche  et  surtout  plus  dure.  Beaucoup  de  par- 
ties de  son  émail  sont  cra'inelées  :  c'est  un  accident  de 
fournée,  et  non,  comm*)  dans  la  porcelaine  de  Chine, 
une  imperfactton  avouée  et  utilisée.  Palissy  voulut  gar- 
der ses  secrets  de  fabrication,  et  ses  écrits  ne  nous 
apprennent,  en  effet,  rien  de  très  positif  ;  mais  les  pièces 
qu'il  a  laissées  et  les  recherches  de  la  chimie  moderne 
ont  permis  de  retrouver  tous  ses  procédés,  et,  de  nos 
jours,  des  imitations  de  Palissy,  celles  d'Avi^seau  no- 
tamment, ont  surpassé  les  modèles.  (K.  A.  Oumesnil, 
Bernard  Palissy,  Paris,  1851,  in-lK;  G.  Ouplessis, 
ÉluiJe  sur  Palissy,  \S\b  ;  H.  Morlay,  The  lifeof  B.  Pa- 
lissy, his  lab'.urs  and  discoveries  in  art  and  science, 
Londres,  185'î,  2  vol.  in-8o.) 

PARISIENS  (Slusées),  voir  Carnavalet,  Cldnt,  Sup- 
plémffnt. 

PÉNITENCIER.  Indépendamment  des  pénitenciers 
militaires,  il  y  a  des  pénitenciers  pour  les  jeunes  dé- 
tenus à  Petit-Bourg,  à  Clteau'x,  à  Toulouse,  et  trois 
pénitenciers  agricoles  en  Corse  (Casabianca,  Chiavari 
et  Casiellnrcio). 

PliPLOS  D'ATHÉNÈ  (V.  Dictionnaire),  Ce  mot  ne 
désigne  pas  seulement  ce  tissu  de  lain«,  emblème  du 
tissu  du  monde  que  les  Erréphores  brodaient  de  leurs 
mains  virginales,  et  que  tous  les  quatre  ans  on  re- 
nouvelait autour  de  la  statue  d'Aihéuè,  statue  en  bois 
d'olivier  conservée  au  temple  de  Poséidon  Érechms. 
D'après  un  récent  ouvragé  de  M.  L.  de  Ronchaud,  la 
Tapisserie  dans  l'Antiquité,  on  doit  entendre  aussi 
par  cette  dénomination  Péplos  d'Athénè,  cotte  dispo- 
sition de  tapisseries  historiées  à  fond  de  safran  qui, 
dit  l'auteur  de  cette  curieuse  reconstitution,  <  enve- 
loppait si  chastement  le  sanctuaire  d'Athénè,  multi- 
pliait les  voiles  autour  de  la  Divinité,  adoucissait  la 
lumière  qui  tombait  sur  son  casque  et  sur  sa  lance 
d'or,  et  la  faisait  mourir  à  ses  pieds  dans  une  ombre 
transparente,  pleine  de  religieuses  pensées».  Les  textes 
grecs  et  latins  nous  disent  que  la  tapisserie  jouait  un 
grand  rôle  dans  l'ornementation  des  b&tisses  grecques 
depuis  la  tente  jusqu'aux  temples  et  aux  palais.  On 
sait  que  lorsque  Phidias  eut  terminé  sa  grande  sta- 
tue d'or  et  d'ivoire,  on  l'entoura  d'un  peplos.  M.  de 
Ronchaud,  curieux  de  reconstituer  la  décoration  in- 
térieure de  cette  partie  du  Parthénon,  s'autorisa  d'un 
passage  de  Vlon  d'Euripide  pour  arriver  à  son  ingé- 
nieuse resta. iration.  Les  vers  1132-1165  de  cette  tra- 
gédie contiennent  en  effet  la  description  détaillée 
d'une  tente  que  le  jeune  Ion  élève  dans  le  temple  de 
Delphes  avant  un  sacrifice  en  l'honneur  d'Apollon. 
M.  de  Ronchaud  vit  là  une  allusion  précise  à  l'orne- 
mentation intérieure  du  Parthénon,  d'autant  que  la 
tragédie  d'Ion  essentiellement  nationale  est  un  véri- 
table hymne  à  la  louange  d'Athènes.  L'hypothèse  était 
séduisante  pour  nn  savant  désireux  de  faii*e  revivre 
dans  toute  sa  splendeur  religieuse  le  temple  antique, 
et  surtout  celte  chambre  formée  de  riches  draperies 
suspendues  entre  les  colonnes  au  milieu  desquelles  la 
Minerve  chryséléphantine  resplendissait  aux  yeux  de 
ses  adorateurs. 

Ne  savons-nous  pas  par  Plutarque  que  Phidias  pour 
compléter  la  décoration  du  monument  dont  il  était  le 
grand  ordonnateur,  eut  recours  à  la  tapisserie,  et  que 
dans  la  légion  d'artistes  travaillant  sous  ses  ordres, 
on  comptait  des  tapissiers?  Sans  doute  on  peut  faire 
et  on  a  fait  de  savantes  objections  contre  les  vrai- 
semblances proposées  par  M.  de  Ronchaud.  Mais 
n'oublions  pas  que  les  dessins  mêmes  figurés  sur  les 
tapisseries  décrites  par  Euripide  dans  le  temple  de 
Delphes,  sont  tous,  comme  la  bataille  de  Salamine  ou 
l'histoire  de  Cécrops  et  de  ses  fllles,  des  compositions 
d'inspiration  évidemment  attique  et  qui  convenaient 
infiniment  mieux  à  Athènes  qu'à  Delphes. 

L'auteur  du  savant  traité  de  la  Tapisserie  dans  C An- 
tiquité n'a  point,  tant  s'en  faut,  la  prétention  d'avoir 
trouvé  là-dessu9  la  vérité  définitive,  mais  il  parait 
qu'il  s'en  est  fort  approché.  Aussi  bien  croyons-nous 
qu'on  peut  penser  avec  lui  que  les  fameuses  tentures 
décrites  par  Euripide  sont,  selon  toute  apparence, 
celles  qui  ornaient  la  chambre  de  la  Vierge,  ce  sanc- 
tuaire du  Parthénon,  ouvert  du  côté  du  ciel,  mais 
entouré  de  voiles,  d'où  la  divinité  d'Athènes  régnait 
sur  son  temple  et  sur  son  peuple.  De  ces  tapisseries 
les  une«,  verticales,  étaient  suspendues  aux  colonnes 
du  naos,  comme  celles  qu'on  voit  dans  les  mosaïques 
de  Ravenne;  elles  représentaient  des  sujets  de  l'his- 
toire athénienne.  Les  autres  qui    représentaient  le 


PHA 


—  1848  — 


PIA 


ciel  avec  ses  constellations  étaient  atiacliées  au  toit, 
mais  ne  pouvaient  être  tendues  horizontalement  au- 
dessus  du  sanctuaire,  puisque  la  statue  de  la  déesse 
dépassait  de  la  tète  la  iiauteur  des  portiques  et  des 
toiis  latéraux.  Aussi  Al.  de  Ronchaud  esi-il  d'avis  que 
ces  tapisseries  devaient  ôire  drapées  sur  une  char- 
pente eu  forme  de  tente,  par  les  côtés  de  laquelle 
la  lumière  pénétrait  dans  la  cella  et  dont  le  dôme  pro- 
tégeait le  sanctuaire  contre  le»  influences  aimosphé- 
ri(|ue8.  Les  intempéries  de  Tiiir  sont  assez  peu  dan- 
gereuses en  GrècK  pour  qu'une  tente  forméo  de  riches 
étoffes  ait  pu  sufflie  à  protéger  Ipstrésori  arcuniuiés 
aux  pieds  de  Minerve,  surtout  lorsqu'on  sait  que  ce 
voile  était  renouvelé  tous  les  quatre  ans. 

J.-B-z. 
PERSE  (Faïences  de  lk).  Ces  fjiîpnces  ont  été  long- 
temps conTondues  avec  les  porcelaines  de  la  Chine  et 
du  Japon.  La  Tabricatiou  en  remonte  très  haut,  puis- 
qu*on  trouve  des  terres  émaillées,  des  revêtements  cé- 
ramiques Jusque  dans  les  ruines  de  Babylone.  Ceux 
de  la  mosquée  de  Tabriz  (xv«  siècle)  en  sont  un  des 
plus  anciens  monuments  restes  debout.  L'&ge  le  plus 
florissant  des  faïences  persanes  s'étend  de  Tarènenient 
des  Sofls  à  la  mort  de  Schah  Abbas  (1502-1628);  les 
mosaïques  et  peintures  en  faïence  du  palais  et  de  la 
mosquée  d'Abbas  à  Ispahan,  les  dômes  dorés  du  tom- 
beau des  enfants  d'Ali,  les  fai^^nces  à  reliefs  peints  qui 
décorent  le  tombeau  de  Mahomet  I*',  les  revêtements 
du  minaret  et  de  la  mosquée  de  Nicée,  le  tombeau  de 
Koda  Honda  à  Sultanieh,  sont  de  beaux  spéciniens  de 
cet  &ge.  Les  faïences  anciennes  les  plus  connues  sont 
à  fond  bleu,  avec  dessins  blancs  en    relief;   il   ont 
vraisemblable  que  les  potiers  italiens,  nivernais  et 
rouennais  en   connurent  des  échantillons,   mais  ils 
n'égalèrent  Jamais  la  pureté  et  la  beauté  de  leur  émail. 
Une  autre  sorte  de  faïence,  que  sun  tfspect  rapproche 
de  la  porcelaine  tendre,  a  des  reliefs  bleus,  rouges  et 
verts  alternés.  Il  y  a  aussi  une  porcelaine  émail,  dont 
la  p&te  translucide  ne  semble  appartenir  eu  rien  à  la 
faïence,  et  où  il  ne  se  trouve  pourtant  pas  de  kaolin; 
c'est  presque  du  verre.  Enfin,  la  Perse  a  produit  une 
quantité   de   vaisselle    d'une   composition    ambiguë, 
qu'une  translucidité  naissante  rattacherait  aux  porco- 
laines,  si  elle  n'eût  été  produite  uniquement  par  un 
excès  de  cuisson  qui  a  fait  naître  la  vitriflcaiion  :  Té- 
mail  est  blanc  et  profond  ;  les  couleurs  sont  fraîches, 
glacées;  les  émaux  sont  chatoyants,   notamment  un 
cuivre  chaud  de  ton,  rival  de  Tor  bruni,  et  dont  l'effet 
est  admirable  sur  les  fonds  de  couleurs,  tels  que  le 
lapis-lazuli.  La  faïencerie  per>ane  est  tombée  dans  une 
complète  décadence  depuis  deux  siècles.  B. 

PHARES,  il  existe  sur  les  côtes  du  iloyaume-Uni  de 
la  Grande-Bretagne  et  d'Irlande  40&  phares,  dont  213 
en  Angleterre,  114  en  Ecosse  et  78  en  Irlande. 

L'aduûnistraiion  des  phares  est  conflée  à  quatre  cor- 
porations distinctes:  1»  le  Bureau  du  commerce,  dé- 
partement ministériel  dont  le  chef  change  avec  le  ca- 
binet, et  dont  les  membres  ne  sont  pas  choisis  en 
raison  de  leurs  connaissances  spéciales  dans  le  service 
des  phares  ;  2^  la  corporation  de  Trinity-House,  qui  a 
la  suiveillance  et  la  direction  de  tous  les  phares,  feux 
flottants  et  balises  du  l'Angleterre,  du  pays  de  Galles, 
des  lies  du  détroit  de  Gibraltar  et  de  Héligoland,  à 
l'exception  de  ceux  qui  sont  placés  sous  la  surveillance 
des  autorités  locales  ;  3»  les  commissaires  du  nord  sou- 
mis en  quelques  circonstances  au  contrôle  de  Trinity- 
House  et  à  l'approbation  du  Bureau  du  commerce  ; 
ils  ont  dans  l'ËcoâSC  et  l'Ile  de  Man  l'administration  des 
phares  et  bahses,  sauf  ceux  placés  sous  la  surveillance 
des  autorités  locales;  4»  le  Bureau  de  ballast  de  Du- 
blin, qui  Jouit  en  Irlande  des  mômes  droits,  sous  les 
mêmes  réserves  et  restrictions.  Enfin,  un  ceruin  nom- 
bre de  feux  sont  placés  sous  la  direction  de  corpora- 
tions locales. 

Aux  États-Unis,  les  phares  sont  placés  sous  la  direc- 
tion d'un  bureau  central  organisé  en  1852  et  composé 
d'un  membre  du  gouvernement,  d'ingénieurs,  d'ofH- 
clers  de  l'armée  et  de  la  marine,  et  de  personnages 
scientifiques. 

En  Suède,  h'S  phares  sont  sous  la  dépendance  de 
Tamirauié,  et  administrés  par  un  directeur,  des  offi- 
ciers de  l'armée  et  des  ingénieurs;  les  côtes  pont  divi- 
sées en  districts  et  sous-districts  répartis  entre  ces 
fonctionnai!  es.  —  En  Norvège,  le  service  relève  de  la 
marine  royale,  avec  un  directeur  et  des  employés. 
En  Turquie,  le  service  dépend  de  l'amirauté. 


Dans  le  Hanovre,  le  service  est  confié  à  la  direction 
générale  des  eaux  ;  les  bouées  sont  placé«>s  par  les 
pilotes,  et  les  phares  et  balises  sont  visités  par  les  in- 
specteurs du  service  des  eaux. 

A  Hambourg,  les  phares  dépendent  de  la  commission 
des  pons  et  de  la  navigation,  et  sont  placés  sous  U 
direction  du  commandant  et  de  l'inspeciear  du  pilo- 
tage. —  En  Espagne,  le  régime  est  le  môme  qu'ea 
France;  les  phares,  les  feux,  etc.,  sont  du  ressoitd» 
travaux  publics,  et  dirigés  par  une  commission  per- 
manente composée  d'ingénieurs  des  ponts  et  chaussées 
et  d'officiers  de  marine.  —  Dans  le  Danemark,  le  ser- 
vice dépend  du  ministère  de  la  marine,  et  est  confié 
à  un  ingénieur  des  phares  et  à  deux  inspeeieurs  des 
balises,  qui  reçoivent  des  instructions  pour  leur  ser- 
vice respectif. 

En  Russie,  la  direction  est  confiée  au  département 
hydrographique.  —  En  Hollande,  l'administration  des 
phares  et  balises  ressortit  au  ministère  de  la  marine, 
qui  a  sous  ses  ordres  un  inspecteur  général  et  sept 
inspecteurs. 

En  Belgique,  la  construction  des  phares  regarde  lo 
ministère  des  travaux  publics;  mais,  une  fuis  con- 
struits, les  phares  sont  remis  à  la  direction  générale 
de  la  marine,  qui  dépend  des  affaires  étrangères.  Les 
phares,  ainsi  que  les  feux  flottants  et  les  balises,  sont 
sous  la  surveillance  des  inspecteurs  de  pilotage. 

En  Autriche,  la  haute  direction  des  phares  et  bali- 
ses appartient  à  l'amirauté.  Les  députés  de  la  Bourse 
de  Trieste  s'occupent  de  l'exécution  des  phares,  de 
leur  administration,  de  la  perception  des  droits,  etc. 
Le  service  du  balisage  rentre  dans  les  attributions  des 
employés  inférieurs  de  la  marine. 

On  voit  donc  quo  partout,  à  l'étranger,  le  service  de 
l'éclairage  des  côtes,  vu  son  importance  et  les  connais- 
sances spéciales  qu'il  exiffe,  est  centralisé  par  le  gou- 
vernement, et  confié  à  des  personnes  au  courant  de 
ces  questions.  En  Angleterre,  au  contraire,  la  pratique 
semble  avoir  été  de  confier  l'éclairage  des  phares  à 
des  personnes  qui,  par  leur  position,  ne  semblent  pas 
avoir  des  connaissances  spéciales  à  ce  sujet. 

PHOTOSCULPTURE,  procédé  de  sculpture  mécani- 
qui  iufenté  à  Paris,  en  1M63,  par  François  Willème, 
et  au  moyen  duquel  on  obtient  un  nombre  de  repro- 
ductions sculpturales  d'un  même  type,  en  opérant  sur 
des  photographies  de  ce  type.  On  place  la  personne  ou 
l'objet  au  milieu  d'une  salle  autour  de  laquelle  sont 
braqués  24  objectifs  ;  on  obtient  donc,  au  même 
moment,  24  silhouettes  du  même  modèle.  Chacune  de 
ces  images,  grandie  par  un  procédé  d'optique,  se  re- 
flète ensuite  sur  une  glace  dépolie,  derrière  laquelle 
un  promène  l'une  des  branches  d'un  pantographe; 
l'autre  branche,  armée  d'un  ébauclioir,  dégrossit  ma- 
thématiquement une  masse  de  terre  glaise  qui,  à  la 
suite  du  vingt-quatrième  dégrossissenieiit,  se  trouve 
avoir  suivi  les  24  silhouettes  de  l'individu  et  reproduit 
exactement  sa  statuette  ou  son  buste. 

PIANO.  La  fabrication  des  pianos,  introduite  aux 
États-Unis  en  1823,  y  a  pris,  dans  la  maison  Chicke- 
ring,  à  Boston,  un  développement  considérable.  II 
s'agissait  de  construire  des  instruments  capables  de 
résister  aux  brusques  variations  du  climat;  après  des 
essais  infructueux  de  divers  facteurs,  Jouas  Chicke- 
ring  résolut  le  problème  en  1838,  par  l'application  d'un 
bai  rage  de  fonte  dans  l'intérieur  du  piano,  qui,  miin- 
tenu,  protégé  par  cette  armature  robuste,  put  défier 
les  températures  extrêmes  et  les  longs  voyages.  Chi- 
ckoring  a  encore  inventé  le  plan  ciradatre,  o'est-k-dire 
la  répartition,  sur  une  ligne  courbe,  des  marteaux  des 
notes  du  clavier;  on  obtenait  ainsi  l'égalité  et  la  puis- 
sance nettement  graduée  des  registres.  En  1837,  en 
ajoutant  au  cadre  ou  barrage  de  fonte  une  barre  de 
Tonte  faisant  partie  de  ce  barrage  et  sur  laquelle  les 
agrafes  sont  vissées,  la  maison  Chickenng  a  enfin  dé- 
cuplé la  solidité  des  pianos  et  leur  a  donné  une  fixité 
d'accord  extraordinaire.  Ces  divers  perfectionnements 
ont  fait  la  supériorité  des  pianos  américains  de  l'Expo- 
sition universelle  de  1867. 

L'idée  de  donner  aux  instruments  k  clavier  la  pro- 
priété de  soutenir  les  sons  pendant  un  certain  temps 
est  plus  ancienne  qu'on  ne  le  croit  d'ordinaire;  elle  a 
été  appliquée,  dès  1600,  aux  clavecins  de  Jean  Heyden, 
facteur  à  Nuremberg.  De  nos  jours,  les  frères  Boissclut, 
à  Marseille,  ont  fabriqué  des  pianos  à  sons  soiUejms 
(1843).  —  Lesi>ta/(OS  organisés  réunissent  les  effeu  du 
piano  à  ceux  de  l'orgue;  ils  se  composent  d'un  piano 


t>Rb: 


—  1849  — 


PRÉ 


ordinaire  et  d*un  jeu  d'orgue  à  anches  libres,  et  leur 
mécanisme  permet  de  jouer  des  deux  instruments  à  la 
foiSf  ou  seulement  de  l'un  d'eux.  Tels  sont  le  Piano- 
mélodium  d'Alexandre  et  VHarmonicorde  ou  Harmo- 
nium de  Debain.  Les  deux  espèces  d'organes  peuvent 
se  soutenir  et  se  corriger  l'une  par  Tautre,  la  corde 
suppléant  à  la  faiblesse  d'attaque  de  la  lame  vibrante, 
et  celle-ci  voilant  Teffet  mourant  de  la  première.  Dans 
le  piano  à  prolongement  d'Alexandre,  les  deux  sons 
n'en  forment  qu'nn  au  moment  de  l'attaque;  la  vibra- 
tion de  la  corde  venant  à  diminuer  d'intensité  pour 
cesser bienlôt  complètement;  le  son  de  l'anche  libre, 
qui  se  prolonge  seul,  est  tellement  identique  avec  celui 
de  la  corde,  qu'il  est  impossible  de  supposer  que  ce 
prolongement  ne  soit  pas  dû  à  la  corde  elle-même.     B. 

PIERRE  DE  PROVENCE  kt  la  belle  Maguelonb, 
ancien  roman  populaire,  qui  montre  Pierre,  héritier  du 
comté  de  Provonce,  so  faisant  aimer  de  Maguelono, 
fille  du  roi  de  Naples,  et,  après  de  nombreuses  aven- 
tures, arrivant  à  l'épouser.  Selon  V.  Leclerc,  ce  roman 
aurait  été  composé  par  le  chanoine  Bernard  de  Triviez, 
et  écrit  en  provençal  ou  en  latin  au  xiv»  siècle.  Fauriel 
ne  l'attibuait  qu'à  la  littérature  provençale.  Ce  qui  est 
certain,  c'est  que  la  première  rédaciion  n'en  est  pas 
antérieure  au  xv®  siècle;  Pierre  de  Provence  a  été  re- 
fait par  le  comte  de  Tressa n  pour  entrer  dans  sa  Ât- 
bliothèque  des  romans  (1779);  mais  on  a  publié  des 
éditions  plus  fidèles,  non  seulement  en  français,  mais 
en  flamand,  en  allemand,  en  danois,  en  espagnol  et 
même  nn  vers  grecs. 

PLACE.  ~  En  langue  populaire,  nom  donné  en  Bre- 
tagne au  sol  du  rez-de-chaussée  de  l'habitation.  La 
place  est  formée  de  terre  débarrassée  avec  soin  de 
toutes  les  pierres  qui  pouvaient  s'y  trouver.  Comme 
il  arrivera  que  ce  sol  intérieur  sera  arrosé  par  les  eaux 
ménagères,  ou  mouillé  par  la  pluie,  il  importe  de  lui 
donner  une  certaine  consistance.  Pour  cela  on  le  pré- 
pare. D'où  un  usage  très  ancien  qu'on  peut  mettre  au 
rang  des  danses  locales.  On  fait  pour  la  place  de  l'ha- 
bitation ce  qu'on  fait  pour  Vaire  ou  espace  de  terrain 
qui  borde  la  façade  de  l'habitation.  Les  ^ens  de  la  mai- 
son, leurs  voisins  et  les  amis,  se  réunissent,  la  journée 
finie,  et.dausent  jusque  vers  minuit.  Cela  s'appelle  les 
fouleries  de  place  ou  les  piieries  d'aire.  Celui  ou  celle 
à  qui  appartient  la  place  a  fait  venir  un  violon,  et  dis- 
tribue généreusement  des  pichets  de  cidre  aux  dan- 
seurs qui  s'échauffent  promptement  à  cet  exercice,  car 
chacun  danse  de  son  mieux  pour  durcir  et  niveler  le 
sol.  Le  clergé  s'est  attaché  h,  détruire  l'usage  des  fou- 
leries de  place,  comme  toutes  les  autres  danses.  Mais 
elles  ont  lieu  quand  même,  la  nuit,  sans  trop  de  bruit. 

PRESSE.  —  Une  loi  du  9  mars  1868  supprima  l'au- 
torisation préalable  ;  pour  publier  un  journal  ou  écrit 
périodique,  il  suffit  de  faire,  à  Paria  à  la  préfecture 
de  police,  et  dans  les  départements  à  la  préfecture^ 
quinze  jours  au  moins  avant  la  publication,  une  décla- 
ration contenant  le  titre  du  journal,  les  époques  de  sa 
publication,  le  nom,  la  demeure  et  les  droits  des  pro- 

f>riétaires  antres  que  les  commanditaires,  le  nom  et 
a  demeure  du  gérant,  l'indication  de  l'imprimerie.  Le 
droit  de  timbre  fut  réduit.  ^V.  Timbre.)  Aucun  journal 
ou  écrit  périodique  ne  put  être  signé  par  un  membre 
du  Sénat  ou  du  Corps  législatif  en  qualité  de  gérant 
responsable  :  en  cas  de  contravention,  le  journal  était 
considéré  comme  non  signé,  et  l'amende  de  500  à 
3,0(10  fr.  prononcée  contre  les  imprimeurs  et  proprié- 
taires. Toute  publication  d'un  fuit  de  la  vie  privée  con- 
stitua une  contravention,  punie  d'une  amende  de  500  fr., 
si  la  partie  intéressée  portait  plainte.  Une  condamna- 
tion pour  crime  commis  par  la  voie  de  la  presse  en- 
traîna de  plein  droit  la  suppression  du  journal.  Dans 
le  cas  de  récidive  pendant  deux  années  après  une  con- 
damnation pour  délits  de  presse  autres  que  ceux  com- 
mis contre  les  particuliers,  les  tribunaux  purent,  en 
réprimant  le  nouveau  délit,  prononcer  une  suspen- 
sion du  Journal  de  15  jours  à  2  mois.  Une  suspension 
de  2  à  G  mois  put  être  prononcée  pour  une  troisième 
cojidamnation  dans  lo  même  délai;  elle  put  l'être  éga- 
lement par  un  premier  jugement,  si  la  condamnation 
était  encourue  pour  provocation  à  l'un  des  crimes  pré- 
vus par  les  art.  K6,  87  et  91  du  Code  pénal,  ou  pour 
délit  prévu  par  l'art.  0  de  la  loi  du  17  mai  1819.  Les 
gérants  de  journaux  furent  autorisés  à  établir  une  im- 
primerie exclusivement  destinée  à  l'impression  du 
journal. 

PRESSE  (Liberté  delà).  —  La  loi  du  29  juillet  1881  a 


définitivement  établi  en  France  la  liberté  de  la  pressd. 
L'imprimerie  et  la  librairie  sont  déclarées  libres.  Tout 
Français  peut  publier  un  journal  sans  autorisation 
préalable  et  sans  dépôt  de  cautionnement,  sous  la  seule 
condition  d'une  déclaration  préalable,  contenant  le 
titre  du  journal  et  son  mode  de  publication,  le  nom  et 
la  demeure  du  gérant,  l'indication  de  l'imprimerie. 
Los  crimes  commis  par  la  voie  de  la  presse  sont  jugés 
en  cour  d'assises  et  par  le  jury.  La  pruvuration  au 
meurtre,  au  pillage,  à  l'incendié  ou  à  l'un  des  crimes 
contre  la  sûreté  de  1  État  prévus  par  les  articles  75  à 
101  du  Code  pénal,  est  punie,  si  la  provocation  n'a 
pas  été  suivie  d'effet,  de  3  mois  à  2  ans  d'emprisonne- 
ment et  de  100  fr.  à  H,000  fr.  d'amende.  L'offense  au 
président  de  la  République  est  punie  de  3  mois  à  un 
an  et  de  100  fr.  à  3,000;  les  fausses  nouvelles  de  50  fr. 
à  1,000,  et  d'un  mois  à  un  an  ;  l'outrage  aux  mœurs, 
d'un  mois  à  deux  ans  et  de  16  fr.  à  2,000;  la  diffama- 
tion contre  un  fonctionnaire  ou  un  corps  constitué,  de 
8  jours  à  un  an,  de  100  fr.  à  3,000;  contre  un  parti- 
culier, de  6  jours  à  3  mois  et  de  18  à  500  fr.  La  preuve 
de  la  diffamation  est  autorisée  contre  les  fonctionnai- 
res et  les  corps  constitués.  La  poursuite  a  lieu  contre 
le  gérant  ou  l'éditeur;  à  son  défaut,  contre  l'auteur;  à 
défaut  de  l'auteur,  contre  l'imprimeur;  à  défaut  de 
l'imprimeur,  contre  les  vendeurs,  distributeurs  ou 
afficheurs.  Les  propriétaires  des  journaux  sont  respon- 
sables des  condamnations  pécuniaires  prononcées  au 
profit  des  tiers. 

PRESSES.  —  Nom  breton  des  armoires  où  l'habitant 
met  son  linge,  ses  hardes,  son  argent,  ses  souvenirs, 
en  un  mot  tout  co  qu'il  regarde  comme  réservé  pour 
son  usage  particulier.  Dans  les  fermes  et  dans  les 
petits  ménages,  les  presses  sont  en  assez  grand  nom- 
bre. Chacun  des  habitants  a  la  sienne  propre.  La 
presso  du  maître  est  la  plus  rapprochée  de  son  lit. 

Dans  les  presses  des  femmes,  le  linge  et  les  vête- 
ments sont  rangés  symétriquement  :  entre  les  piles  de 
draps  de  lits  ou  de  chemises,  on  voit  pendre  des  cha- 
pelets et  des  rubans  de  noce  :  le  livre  et  le  bouquet 
de  mariage  sont  en  parade  sur  \ê  devant,  et  sont  sou* 
vent  en  compagnie  d'une  statuette  de  la  Vierge. 

Les  presses  n'occupent  point  une  place  indifférente 
dans  l'ordonnance  de  la  chambre.  La  plupart  des  mat- 
sons  de  Bretagne, entre  autres  auxenvironsdeRennes, 
de  Dinan,  de  Loudéac  et  de  Saint-Brieuc,  ont  leur 
façade  au  midi.  Le  mur,  qui  est  le  derrière  de  la  mai- 
son, est  au  nord.  Il  est  rare  qu'il  y  ait  parla  une  ou- 
verture, et  cela  pour  éviter  tout  accès  à  ce  vent  glacial. 
C'est  le  long  de  ce  mur,  qui  fait  face  aux  ouvertures, 
portes  et  fenêtres,  que  sont  rangées  les  armoires,  se 
tenant  généralement  avec  les  lits  (V.  lits-clos,  SuppL). 
Elles  forment  ainsi  une  boiserie  continue,  très  caracté- 
ristique. Dans  nombre  d'habitations  cette  façade  de 
boiseries  ouvragées  est  la  grande  coquetterie  des  mé- 
nagères, bien  cirée,  bien  frottée.  C'est  le  dimanche, 
pendant  la  grand'messe  ou  les  vêpres,  qu'on  procède  à 
cet  astiquage. 

PR.TS  DE  L'ENFANCE  (Société  des)  ou  société 
de  bienfaisance  créée  en  France  en  18G2,  et  placée 
à  l'origine  sous  le  patronage  du  Prince  impérial. 
Elle  avait  pour  but  de  faire  des  avances  aux  classes 
laborieuses  pour  l'achat  des  instruments  de' travail. 
Son  fonds  fut  constitué  k  l'aide  de  souscriptions  vo- 
lontaires, consistant  en  fondations  de  100  fr.  et  on  dons 
quelconques.  La  Société  était  dirigée  par  un  Conseil 
supérieur  et  une  Commission  permanente.  Des  comi- 
tés locaux  étaient  placés  dans  les  villes  et  même  dans 
les  cantons  ruraux  où  les  besoins  des  populations  agri- 
coles et  manufacturières  les  rendaient  nécessaires. 
Chacun  d'eux  comprenait  le  maire  ou  un  adjoint,  pré- 
sident ;  le  curé,  et  là  où  l'un  des  cultes  reconnus  par 
l'État  est  publiquement  exercé,  un  ministre  de  ce  culte; 
un  nombre  déterminé  de  membres,  tirés  des  diverses 
communes  du  canton.  Des  dames  patronnesses  étaient 
chargées  de  recevoir  les  cotisations.  La  Société  n'exi- 
geant aucune  autre  garantie  que  celle  de  l'honneur  du 
débiteur  et  de  sa  famille,  les  prêts  ne  pouvaient  être 
faits  qu'aux  personnes  d'une  conduite  régulière  et 
d'une  moralité  justifiée.  Toute  personne  qui  se  pré- 
sentait pour  emprunter  devait  se  faire  assister  de  deux 
témoins,  qui  attestaient  son  identité,  ses  besoins  et 
sa  moralité.  Les  deux  témoins  devaient  être  domi- 
ciliés dans  la  même  commune  que  l'emprunteur,  être 
choisis  parmi  les  personnes  que  leur  profession  ou 
leurs   occupations  mettaient  en  relations  habituelles 

117 


REC 


—  1830  — 


REC 


Afec  Temprunteur,  et  savoir  écrire.  Leur  responsabilité 
était  purement  morale  :  leur  témoignage  ne  pouvait 
donner  ouverture  à  aucune  action  civile  contre  eux. 
N'étaient  pas  admis  au  bénéfice  des  prôts  les  enfants 
d'un  emprunteur  qui  avait  manqué  à  ses  ungagemenls, 
les  héritiers  d'un  débiteur  mort  sans  avoir  soldé  sa 
dette,  sauf  le  cas  où  les  uns  et  les  autres  avaient  eux- 
mêmes  acquitté  la  dette  de  leur  auteur.  Tout  emprun- 
teur devait  justifier  d'un  séjour  non  interrompu  d'un 
an  au  moins  dans  la  commune  où  il  formait  demande. 
La  durée  des  prôis  ne  pouvait  dépasser  trois  ans.  En 
cas  de  maladie,  d'appel  au  service  militaire  ou  de  tout 
autre  cause  grave  régulièrement  Justifiée,  il  pouvait 
être  accordé  un  renouvellement.  Les  prôts  étaient 
remboursables,  soit  en  totalité  à  une  échéance  déter- 
minée, soit  par  fractions  à  des  époques  successives. 
Les  intérêts  étaient  payables  par  semestre,  sauf  con- 
vention contraire.  La  Société  avait  le  droit  de  surveiller 
l'emploi  des  fonds  prêtés.  La  dette  devenait  immédia- 
tement exigible,  si  le  débiteur  manquait  de  satisfaire 
k  une  de  ses  échéances»  soit  de  capital,  soit  d'intérêts  ; 
s'il  changeait  de  domicile,  sans  en  avoir  préalablement 
donné  avi^  au  comité  local  et  lui  avoir  fait  connaître 
son  nouveau  domicile  ;  enfin,  s'il  quittait  ie  territoire 
français.  Les  comités  locaux  ne  pouvaient  admettre  à 
l'instruction  les  demandes  de  prêts  pour  une  somme 
supérieure  à  500  francs.  Ils  pouvaient  faire  directement 


l'échelle;  la  peine  accessoire  a  été  snecessivement, 
dans  les  Codes  français^  depuis  la  Révolution,  la  trans- 
portation,  la  surveillance  de  la  haute  police  et  la  réié- 
gation.  La  transportation  à  Madagascar  était  prononcée 
dans  le  Code  de  l'an  II  contre  tous  ies  malfaiteurs 
réputés  incorrigibles  ;  l'organisation  de  la  transporu- 
tion  des  récidivistes  devait,  dans  la  pensée  des  légis- 
lateurs de  la  Convention,  être  analogue  à  l'interne- 
ment des  convicts  anglais  en  Australie.  Abandonnée 
par  le  Code  pénal  de  l'empire,  c'est  cette  théorie  qui 
a  été  reprise  dans    la  loi   du   27    mai    1885    sur  la 
relégation  perpétuelle  des  récidivistes  dans  les  colo 
nies.  Les  statistiques  du  ministère  de  la  justice  ayant 
démontré  que  près  de  la  moitié  des  délits  et  plus  de 
moitié  des  crimes  étaient  le  fait  des  repris  de  justice, 
Gambetta  avait  inscrit  la  transportation  des  récidi- 
vistes dans  son  programme  électoral  de  1881.  Déve- 
loppée par  M.  Joseph  Reinach  dans  son  livre  les  Réci- 
divisteSf  cette  idée  fit  rapidement  son  chemin  dans 
l'opinion,  et  un  projet  de  loi  fut  dépo>é  (janvier  1882} 
par  M.  Waldeck- Rousseau,  ministre  de  l'intérieur  du 
cabinet  Gambetta.  Ce  projet,  modifié  par  plu'^ieurs 
amendements,  est  devenu  la  loi  actuelle.  —  La  reié- 
gation^  selon  le  terme  proposé  par  AI.  Reinach,  se 
distingue  de  la  trnnsportation  en  ce  qu'elle  est  tou- 
jours une  peine  accessoire*  tandis  que  la  transportation 
est  une  peine  principale  ;  la  relégation  est  obligatoire, 


les  prêts  qui  n'excédaient  pas  la  somme  de  200  francs,    c'est-à-dire  qu'elle  est  la  conséquence  forcée  de  la 


Le  taux  de  l'intérêt  était  fixé  à  2  1/2  pour  100.      B. 

PUPILLES  DE  LA  MARINE  (Les).  —  Êublissement 
créé  à  Brest  par  un  décret  du  15  novembre  1863.  Il  est 
destiné  à  recevoir  :  1**  les  orphelins  de  père  et  de  mère, 
fils  d'officiers  mariniers  et  de  marins  morts  au  service, 
ou  morts  en  jouissance  d'une  pension  de  retraite  ou 
d*une  pension  dite  demi-solde  ;  2*  les  enfants  des  offi- 
ciers mariniers  et  des  marins  mentionnés  au  para- 
graphe ci-dessus,  dont  les  mères  existent  encore  ;  3"  les 
enfanta  qui  ont  perdu  leurà  mères  et  dont  les  pères, 
officiers  mariniers  ou  .marins,  sont  en  activité  de  ser- 
vice; 40  les  orphelins  ou  enfanu  de  marins  victimes 
d'événements  de  mer  à  bord  de  navires  de  commerce 
ou  de  bateaux  de  pêche. 

Les  orphelins  de  père  et  de  mère  peuvent  être  admis 
à  l'établissement  des  pupilles  dès  l'âge  de  sept  ans; 
les  enfants  compris  dans  les  autres  catégories  ci-dessus 
indiquées  ne  sont  reçus  qu'à  partir  de  neuf  ans  révo- 
lus. Les  pupilles  de  la  marine,  dès  qu'ils  ont  atteint 
l'âge  de  treize  an»,  sont  admis  à  l'École  des  mousses 
avec  les  autres  enfants  de  marins.  Sunt  rayés  des  con- 
trôles des  pupilles  de  la  marine  et  rendus  à  leurs  fa- 
milles :  les  enfanis  qui  ne  sont  pas  Justes  aptes  au 
service  de  la  marine,  ou  qui,  âgés  de  treize  ans  révo- 
lus, refusent  d'entrer  à  l'École  des  mousses.  Le  mode 
d'admission  à  l'établissement  des  pupilles  de  la  marine 
est  déterminé  par  un  arrêté  du  ministre  de  la  marine 
et  des  colonies. 

PYROSTÉRÉOTYPIE,  procédé  d'impression  typo- 
graphique de  la  musique  inventé  en  1861  à  Tlmpri- 
merie  nationale  de  Paris.  On  grave  en  creux  sur  bois 
avec  la  machine  à  brûler  usitée  dans  l'indiennerie;  en 
versant  du  métal  en  fusion  dans  ce  moule-matrice,  on 
obtient  des  planches  solides  fondues  d'un  seul  Jet,  au 
moyen  desquelles  on  effectue  le  tirage  à  la  presse  typo- 
graphique. La  pyrostéréotypie  peut  également  servir 
pour  l'impression  de  toutes  les  figures  au  trait,  à  lignes 
courbes  ou  diagonales. 


R 


tlÉCIDlVlStiùS.  —  On  désigne  sous  Ce  nom,  en  droit 
criminel,  les  hommes  qui  ont  subi  deux  ou  plusieurs 
condamnations  pour  crime  ou  délit.  On  distingue  les 
récidivistes  de  crime  à  crime,  de  crime  à  délit,  de  délit 
à  délit  et  de  délit  à  crime.  —  Les  criminalistes  anciens 
et  modernes  ont  toujours  considéré  que  le  fait  de  la 
récidive  augmente  ie  délit  et  la  peine.  L'habitude  du 
délit  ou  du  crime  est,  en  effet,  l'indice  d'une  nature 
rebelle  contre  laquelle  la  société  est  on  droit  de  prendre 
des  mesures  de  précaution  plus  sévères;  la  récidive 
peut  donc  avoir  une  double  conséquence  :  élévation  de 
fa  peine  principale  et  addition  d'une  peine  accessoire. 
La  peine  principale  est  alors  soit  le  maximum  de  la 
p«ine,  soit  la  peine  im'Dédiatement  supérieure  dans 


condamnation  ;  elle  est  perpétuelle  à  moins  d'un  décret 
de  grâce  ;  elle  s'accomplit  dans  une  colonie,  la  Guyane 
ou  la  Nouvelle-Calédonie.  La  relégation  des  récidivistes 
•!'a  pas  seulement  pour  objet  la  défense  de  la  société; 
elle  doit  encore,  dans  la  pensée  des  auteurs  de  la  loi, 
donner  au  condamné  la  possibilité  de  se  réhabiUter 
par  le  travail  ;  elle  peut  devenir  pour  la  France,  comme 
l'internement  des  convicts  l'a  été  pour  l'Angleterre, 
l'instrument  de  colonisations  prospères  ou  durables. 
La  loi  qui  établit  la  relégation  supprime  la  surveillance 
de  la  haute  police. 

RECRUTEMENT.  —  Allemagne.  —  Tout  sujet  de 
l'empire  allemand  est  soumis  au  service  militaire  per- 
sonnel ;  il  y  a  exception  pour  celui  que  les  infirmités 
rendent  impropre  et  pour  celui  qui  s'est  rendu  indigne 
de  la  qualité  de  citoyen.  —  L'obligation  dure  de  17  à 
42  ans;  de  17  à  20  ans,  le  jeune  homme  est  inscrit  sur 
les  contrôles  du  landstnrm  ou  levée  en  masse  ;  de  20  à 
23  ans,  il  est  présent  sous  les  drapeaux;  de  23  à  27  ans, 
il  fait  partie  de  la  réserve  de  Tarmée  active  ;  de  27  à 
32  ans,  il  est  compris  dans  la  landwehr;  de  32  à 
42  ans,  il  est  placé  dans  le  landsturm.  —  Le  nombre 
desjennes  gens  atteignant  annuellement  l'âge  de  17  ans 
est  de  350,000  environ  ;  sur  ce  nombre  180,000  sont 
jugés  bons  et  disponibles  pour  le  service  de  Tarmée 
active,  quand  ils  ont  l'âge  de  20  ans  ;  il  n'y  en  a  pas 
plus  de  120,000  qui,  désignés  par  le  sort,  passent  sous 
les  drapeaux.  Ce  nombre  est  fixé  de  façon  à  maintenir, 
dans  la  proportion  de  1  %  de  la  population,  l'effectif 
de  l'année  permanente;  le  reste  constitue  une  réserve 
de  recrutement.  —  Chacun  des  17  corps  d'armée  se 
recrute  sur  l'étendue  du  territoire  qu'il  occupe  :  la 
circonscription  du  corps  d'armée  se  divise  en  4  dépar- 
tements de  brigade  d'infanterie  ;  chaque  département 
de  brigade  comprend  4  districts  de  bataillon  de  land- 
wehr :  chacun  de  ceux-ci  est  partagé  on  4  districts 
de  compagnie.  Chaque  régiment  dMnfanterie  se  recrute 
toujours  dans  les  deux  mêmes  districts  de  bataillon  de 
landwehr;  les  régiments  de  dragons  et  de  hussards  se 
recrutent  toujours  dans  le  même  département  de  bri- 
gade d'infanterie  ;  les  bataillons  de  chasseurs  à  pied, 
les  régiments  de  fusiliers,  les  régiments  de  cuirassiers 
et  de  uhlans,  les  régiments  d'artillerie,  les  bataillons  de 
pionniers  et  les  bataillons  du  train  se  recrutent  dans 
toute  l'étendue  de  la  même  circonscription  de  corps 
dlarmée  ;  la  garde  se  recrute  sur  le  territoire  de  la 
monarchie  prussienne. 

Angleterre,  —  L'armée  de  la  Grande-Bretagne  est  la 
seule  de  l'Europe  qui  se  recrute  exclusivement  par 
l'enrôlement  volontaire.  —  Dans  l'armée  permanente, 
l'engagement  volontaire  est  contracté  pour  12  ans,  et  il 
peut  être  renouvelé  pour  9  années;  le  nombre  annuel 
des  engagés  volontaires  est  de  23,000.  —  La  réserve  se 
compose  de  deux  classes  distincte»  :  la  l^e  classe  com- 
prend (ies  hommes  de  l'armée  permanente  qui,  après 
être  restés  3  ans  sous  les  drapeaux,  consentent  à  faire 
partie  de  la  réserve,  à  condition  d'y  rester  deux  années 
pour  chaque  année  de  service  à  faire  encore  dans 


REC 


—  1881  — 


tlËC 


l'armée  permanente,  et  des  miliciens  qai  reçoivent  une 
indemnité  pécuniaire  en  échange  de  rengagement  con- 
tracté par  eux  d^ôtre  incorporés  dans  l'armée  active  en 
cas  de  besoin  :  cette  classe  de  la  réserve  est  destinée  à 
compléter  l'efTectif  des  troupes  de  campagne  lors  de  la 
mise  sur  le  pied  de  guerre.  l.a  2«  classe  doit  toujours 
rester  à  Tintérieur  ;  elle  comprend  des  militaires  retrai- 
tés après  21  ans  de  service,  et  des  militaires  rengagés 
après  12  ans  de  service,  mais  consentant  à  rester  18  ans 
dans  la  réserve  au  lieu  de  9  dans  l'armée  permanente. 

—  La  milice  se  compose  d'tiommes  engagés  pour  5  ans, 
moyennant  une  prime  d'argent.  —  Le  corps  des  volon- 
taires se  compose  d'tiommes  ne  prenant  d'autre  enga- 
gement que  d  assister  à  des  exercices  annuels  ;  les  com- 
pagnies, troops  et  batteries  qu'ils  forment  n'ont  d'exis- 
tence légale  et  n'ont  droit  à  une  indemnité  que  si  les 
unités  d'organisation  atteignent  un  eflectif  déterminé. 

—  L'armée  des  Indes  est  composée  d'une  partie  de 
l'armée  active  et  de  cipayes,  troupes  Indigènea  dont  le 
recrutement  se  fait  par  les  appels  et  les  enrôlements 
volontaires. 

Autriche;- Hongrie.  —  Tout  sujet  de  l'empire  austro- 
hongrois  est  astreint  au  service  militaire  pour  12  an- 
nées, dès  qu'il  a  atteint  l'âge  de  20  ans.  Il  y  a  cepen- 
dant des  cas  de  dispense,  comme  en  Allemagne  et  en 
France,  tant  dans  l'iniérôt  général  de  TÉtat  que  dans 
l'intérêt  particulier  des  familles  ;  mais  les  Jeunes  gens 
qui  sont  dispensés  ou  libérés  par  anticipation  sont  te- 
nus de  verser,  à  la  caisse  des  Invalides,  une  somme 
proportionnée  à  leur  fortune,  et  ils  restent,  pendant 
12  ans,  prêts  à  répondre  au  premier  appel  pour  remplir 
un  emploi  spécial  en  cas  de  besoin.  —  Le  contingent 
annuel  est  fixé  pour  une  période  de  10  ans,  de  façon  k 
fournir  un  effectif  disponible  de  800,000  hommes  sur 
le  pied  de  guerre  :  ce  contingent  est  de  95,474 
dans  l'armée  et  de  9,576  dans  la  réserve  de  remplace- 
ment ;  il  est  prélevé  sur  un  nombre  de  300,000  inscrits, 
dont  150,000  sont  reconnus  bons  au  service.  Les  Jeu- 
nes gens  qui  font  partie  du  contingent  affecté  à  l'ar- 
mée permanente  servent  pendant  3  ans  sous  les  dra- 
peaux, 7  ans  dans  la  réserve  et  2  ans  dans  la  landwehr  ; 
quant  aux  jeunes  gens  qui  sont  placés  dans  la  réserve 
de  remplacement,  ils  y  comptent  pendant  10  ans,  puis 
lis  restent  2  ans  dans  la  landwehr.  La  dernière  partie 
de  la  classe,  forte  de  45,000  hommes  environ,  est  direc- 
tement versée  dans  la  landwehr,  où  elle  compte  pendant 
12  ans.  —  Le  landsturm,  ou  levée  en  masse,  n'est  pas 
organisé;  il  doit,  en  cas  de  besoin,  se  former  par  dus 
engagements  volontaires;  cependant,  dans  le  Tyrol  et 
le  Yorarlberg,  le  landsturm  existe  en  tout  temps;  il  se 
compose  de  deux  bans  :  le  1^'  ban  comprend  tous  les 
hommes  de  18  à  39  ans;  dans  le  2^  ban  sont  les 
hommes  de  39  à  45  ans.  —  Le  territoire  de  la  monar- 
chie austro- hongroise  est  partagé  en  81  cercles  de  re- 
crutement, à  raison  de  1  par  régiment  d'infanterie  à 
5  bataillons. 

Belgique,  —  L'armée  belge  est  recrutée  par  des  ap- 
pels annuels  :  le  service  militaire  n'y  est  pas  obligatoire. 
Tous  les  Jeunes  gens  âgés  de  20  ans  tirent  au  sort  : 
ceux  qui  n'ont  aucun  motif  de  dispense  on  d'exemption 
et  que  le  sort  a  désignés  pour  faire  partie  de  l'armée 
active  peuvent  se  faire  remplacer  soit  directement,  soit 
en  payant  une  prime  à  l'État.  Le  nombre  des  inscrits 
est  annuellement  de  45,000  environ  ;  celui  des  appelés 
est  de  12,000.  La  durée  du  service  est  fixée  à  8  années, 
mais  les  soldats  ne  restent  que  de  2  ans  1/2  à  4  ans  sous 
les  drapeaux,  selon  les  armes  auxquelles  ils  appartien- 
nent ;  pendant  leur  séjour  dans  l'armée  permanente, 
ils  ont,  en  outre,  droit  à  un  congé  de  6  semaines  pur 
année  de  service. 

Danemark.  —  Tout  sujet  danois  doit  le  service  mili- 
taire obligatoire  et  personnel;  il  est  inscrit  sur  les 
rôles  de  recrutement  à  l'âge  de  16  ans,  mais  il  n'est 
contraint  au  service  qu'à  22  ans.  Le  nombre  des  ap 
pelés  est  de  2,650  environ.  La  durée  du  service  est  de 
16  ans,  dont  5  ans  dans  l'armée  permanente,  3  ans  dans  la 
réserve,  8  ans  dans  le  renfort.  En  fait,  la  présence 
effective  sous  les  drapeaux  n'est  pas  continue;  dès  que 
les  Jeunes  soldats  ont  été  instruits,  ils  sont  presque 
tous  licenciés,  puis  ils  sont  rappelés  chaque  année 
pour  les  manœuvres,  de  sorte  que  le  soldat  d'infan- 
terie reste,  par  exemple,  environ  10  mois  1/2  sous  les 
drapeaux. 

Espagne.  —  Le  service  militaire  personnel  n'eH  pas 
obligatoire  en  Espagne,  car  tout  jeune  homme  appelé 
par  le  sort  à  faire  partie  de  Tarmee  peut  s'exonérer  en 


versant  une  indemnité  dans  les  caisses  de  Tl^tat.  Ce 
principe  de  remplacement  a  été  conservé  dans  les  di- 
verses lois  et  décrets  concernant  l'armée  et  rendus  de- 
puis le  29  mars  1870 jusqu'au  10  février  1875.  —  D'après 
la  loi  du  29  mars  1870,  la  durée  du  service  éuit  de 
6  ans  dans  l'armée  active  et  de  2  ans  dans  la  1'»  ré- 
serve ;  l'armée  devait  être  entretenue  par  un  contingent 
annuel,  qui  fut  de  25,000  hommes  en  1870,  de  35,000 
en  1881  et  de  40,000  en  1872  :  le  reste  de  la  classe  for- 
mait une  2*  réserve,  od  le  service  était  de  6  ans.  —  La 
loi  du  17  février  1873  décida  que  l'armée  ne  compren- 
drait plus  que  des  volontaires  s'engageant  à  servir 
pendant  deux  ans  au  moins  et  que  le  contingent  annuel 
des  inscrits  âgés  de  26  ans  formerait  une  réserve  où 
le  service  durerait  trois  ans,  mais  que  l'on  pourrait 
mobiliser.  —  Le  décret  du  18  juillet  1874  appela  sous 
les  armes  tous  les  célibataires  ou  veufs  sans  enfants 
âgés  de  22  à  35  ans,  qui  conservaient  le  droit  de  s'exo- 
nérer; sinon  ils  devaient  servir  pendant  toute  la  durée 
de  la  guerre  civile.  —  Le  10  février  1875,  un  décret  a 
appelé  sous  les  drapeaux  tous  les  jeunes  gens  âgés  de 

19  ans  qui  ne  pourraient  s'exonérer  :  ils  doivent  servir 

4  ans  dans  l'armée  permanente  et  2  ans  dans  la  ré- 
serve. Il  n'y  a  donc  en  Espagne  aucune  disposition  for- 
melle sur  le  service  militaire;  il  faudrait  de  la  stabilité 
dans  les  esprits  pour  que  les  institutions  militaires 
soient  établies  conformément  aux  idées  qui  sont  ad- 
mises dans  la  plupart  des  grands  Éuts  européens. 

France,  —  La  loi  du  27  juillet  1872  a  introduit  en 
France  le  principe  du  service  militaire  obligatoire  et 
personnel.  Le  contingent  annuel  est  prélevé  sur  le 
nombre  de  296,504  hommes  qui  ont  atteint  l'âge  de 

20  ans  dans  le  courant  de  l'année  précédente.  Sur  ce 
nombre,  en  1874,  25,659  Jeunes  gens  ont  été  reconnus 
impropres  à  tout  service  actif  ou  auxiliaire  dans  l'ar- 
mée ;  42,033  ont  été  dispensés  du  service  d'activité  en 
temps  de  paix  ;  savoir  :  2;336,  comme  aînés  d'orphe- 
lins de  père  et  de  mère;  18,7n5,  comme  fils  uniques  ou 
aînés  de  fils,  ou,  à  défaut  de  fils  ou  de  gendre,  petits- 
fils  uniques  ou  aînés  des  petits-fils  d'une  femme  actuel- 
lement veuve  ou  d'une  femme  dont  le  mari  a  été  léga- 
lement déclaré  absent,  ou  d'un  père  aveugle  ou  entré 
dans  sa  soixante-dixième  année  ;  258  comme  aînés  de 
deux  frères  appelés  à  faire  partie  du  môme  tirage; 
15,983,  comme  frères  de  militaires  dans  l'armée  active; 
5,651,  comme  frères  de  militaires  morts  en  activité  de 
service,  ou  réformés, ou  admis  à  la  retraite  pour  bles- 
sures ou  pour  infirmités  contractées  dans  les  armées  de 
terre  et  de  mer.  —  21,355  jeunes  gens  ont  été  ajour- 
nés à  un  nouvel  examen  du  conseil  do  revision,  savoir  : 
7,022,  pour  taille  inférieure  à  1^,54;  14,333,  pour  fai- 
blesse de  complexion.  —  22,387  ont  été  annotes  sur  lea 
listes  comme  présents  sous  les  drapeaux,  savoir  : 
168  élèves  de  l'École  polytechnique  et  de  l'École  fores- 
tière; 7,348  engagés  conditionnels  d'un  an;  11,391, 
comme  servant  en  vertu  d'un  engagement  volontaire  do 
cinq  ans,  d'un  brevet  ou  d'une  commission  ;  3,490  in- 
scrits maritimes.  —  4,313  ont  été  dispensés  du  service 
militaire  à  titre  conditionnel,  savoir  :  2,359,  commet 
destinant  à  l'enseignement  ou  y  étant  déjà  employés  ; 
1,949,  comme  se  vouant  au  ministère  dans  les  cultes 
salariés  par  l'État.  —  179.852  sont  donc  susceptibles 
d'être  appelés  sur-le-champ,  dont  152,425,  pour  le  ser- 
vice armé  et  27,  427  pour  les  services  auxiliaires.  Les 
152,426  jeunes  gens  aisponibles  pour  le  service  armé 
sont  partagés  en  deux  portions  :  la  K^  portion,  qui  doit 
rester  pendant  cinq  ans  sous  les  drapeaux,  lournit 
6,056  hommes  à  l'armée  de  mer,  dont  le  contingent 
annuel  de  7,700  hommes  est  complété  par  1,644  enga- 
gés volontaires,  et  95,086  hommes  à  l'armée  de  terre  ; 
la  2^  portion,  susceptible  d'être  renvoyée  après  un  an 
ou  six  mois  de  service,  est  forte  de  57,339  hommes.  — 
L'effectif  de  la  1'^  portion  da  contingent  est  diminué 
de  5,485  Jeunes  gens  reconnus  comme  soutiens  indis- 
pensables de  famille  et  de  337  jeunes  gens  maintenus 
en  sursis  d'appel;  il  est  augmenté  de  6,797,  ajournés 
l'année  précédente  et  reconnus  ensuite  propres  au  ser- 
vice actif,  de  16,000  engagés  volontaires  et  de  7,748  ren- 
gagés. —  L'armée  permanente  comprend,  en  outre  des 
troupes  recrutées  par  des  étrangers  ou  des  indigènes 
des  colonies,  dans  lesquelles  le  principe  du  service  mi- 
litaire personnel  n'a  pas  été  rendu  obligatoire,  le  nom- 
bre annuel  de  ces  volontaires  est  de  1,739.  La  durée 
du  service  est  de  20  ans,  dont  5  en  activité  ou  en 
disponibilité,  4  ans  dans  la  réserve  de  l'armée  active 

5  ans  dans  l'armée  territoriale,  6  ans  dans  la  réserve 


hEG 


—  I85â  — 


REG 


de  l'armée  territoriale.  —  Les  jeunes  gens  dispensés  du 
s  Tvice  d'activité  en  temps  de  paix,  les  jeunes  gens  dis- 
pi  nsés  à  titre  de  soutiens  de  famille  et  les  jeunes  gens 
maintenus  en  sursis  d'appel  sont  astreints  à  certains 
exercices  ;  ils  sont  soumis  à  toutes  les  obligations  de  leur 
classe  quand  les  causes  de  leurs  dispenses  cessent;  ils 
sont  appelés  en  cas  de  guerre,  comme  les  hommes  de 
leur  classe.  —  Au  point  de  vue  de  la  répartition  des 
forces  sur  le  territoire,  la  France  est  partagée  en  18  ré- 
gions de  corps  d'armée;  chacune  de  celles-ci  comprend 
8  subdivisions,  à  raison  d'une  par  régiment  d'infan- 
terie d'armée  territoriale;  il  convient  d'ajouter  en  outre 
8  subdivisions  pour  les  départements  de  Seine«Seine- 
et-Oiso,  Rhône,  qui  appartiennent  au  territoire  de  plu- 
sieurs corps  d'armée.  Les  hommes  qui  sont  appelés 
sous  les  drapeaux  peuvent  être  et  sont  presque  toujours 
incorporés  dans  des  troupes  ne  résidant  pas  dans  la 
région  où  les  hommes  ont  été  inscrits  et  examinés  par 
les  conseils  de  révision;  les  hommes  de  la  disponi- 
bilité et  de  la  réserve  sont  appelés  au  service  actif 
d'après  le  même  principe  ;  en  un  mot,  les  troupes  de 
campagne  ne  se  recrutent  pas  sur  le  territoire  où  elles 
tiennent  garnison.  L'armée  territoriale,  qui  est  orga- 
nisée en  tout  temps,  et  la  réserve  de  l'armée  territo- 
riale, qui  ne  serait  organisée  qu'en  cas  de  danger,  sont, 
au  contraire,  recrutées  et  reconstituées  par  subdivision 
de  région  ou  par  région,  selon  les  armes.  Le  service 
militaire  compte  à  partir  du  l«r  juillet  de  l'année  du 
tirage  au  sort;  les  libérations  successives  ont  lieu 
le  30  juin  ;  les  soldats  peuvent  se  roarior  dès  qu'ils  ont 
quitté  le  service  actif,  mais  ils  sont  soumis  aux  obli- 
gations de  service  imposées  à  la  classe  dont  ils  font 
partie  ;  toutefois  ceux  qui  sont  pères  de  quatre  enfants 
sont  placés  de  droit  dans  l'armée  territoriale. 

Grèce.  —  L'armée  grecque  se  recrute  par  des  appels, 
avec  faculté  de  remplacement;  le  service  militaire  obli- 
gatoire et  personnel  n'y  est  pas  connu. 

Hollande,  —  L'armée  hollandaise  se  recrute  par  des 
appeb.  avec  faculté  de  remplacement;  le  principe  du 
service  militaire  obligatoire  et  personnel  n'a  pas  encore 
élé  admis  dans  ce  pays.  L'armée  des  Indes  hollandai- 
ses contient  un  grand  nombre  d'Européens  de  tous 
pays,  qui  sont  des  engag^^s  volontaires. 

halte,  —  L'armée  italienne  se  recrute  parun  système 
qui  participe  à  la  fois  des  appels  avec  remplacement  et 
du  service  militaire  obligatoire  et  personnel.  Le  nombre 
des  jeunes  gens  atteignant  annuellement  l'âge  de  vingt 
ans  est  de  240.000.  Sur  ce  nombre,  120,000  sont  dispo- 
nibles pour  le. service  ;  ils  sont  partagés  en  2  catégories. 
La  V^  catégorie,  forte  de  66,000  hommes,  constitue 
le  contingent  budgétaire  ;  elle  doit  le  service  pendant 
12  ans,  sauf  dans  la  cavalerie,  où  la  durée  n'est  que 
de  9  ans;  les  soldats  restent  4  ou  5  ans  sous  les  dra- 
peaux, 4  ou  5  ans  en  congé  limité,  c'est-à-dire  en  ré- 
serve, et  4  ans  dans  la  milice  provinciale.  La  2^  catégo- 
rie sert  pendant  9  ans,  dont  4  ou  a  ans  en  congé  illimité 
et  4  ou  S  ans  dans  la  milice  provinciale.  Les  jeunes 
gens  qui  sont  désignés  par  le  sort  pour  faire  partie 
de  la  1^0  catégorie  peuvent  permuter  avec  d'autres 
jeunes  gens  de  la  même  classe,  désignés  par  le  sort 
pour  faire  partie  de  la  2*  catégorie.  Le  territoire  italien 
est  partagé  en  62  districts  pour  les  opérations  de  recru- 
tement; la  milice  seule  est  organisée  par  districts;  les 
hommes  sous  les  drapeaux  et  en  congé  illimité  sont 
incorporés  dans  toutes  les  troupes  du  royaume  indis- 
tinctement. 

Portugal,  —  Le  principe  du  service  militaire  obli- 
gatoire et  personnel  n'est  pas  admis  en  Portugal,  où 
Tarniée  se  recrute  par  le  système  des  appels,  avec 
faculté  de  remplacement. 

Roumanie .  —  L'armée  de  Roumanie  se  recrute  d'a- 
près le  principe.du  service  militaire  obligatoire  et  per- 
sonnel. Tout  Roumain  doit  le  service  de  26  à  50  ans  ; 
pendant  8  ans,  il  est  sous  les  drapeaux  ou  à  la  disposi- 
tion de  l'armée  active  ;  si  le  tirage  au  sort  l'a  désigné, 
il  reste  ensuite  pendant  8  ans  dans  la  réserve  ;  si  le 
sort  ne  l'a  pas  appelé  au  service  actif,  il  compte  dans 
la  milice.  De  36  à  50  ans,  il  fait  partie  de  la  garde 
urbaine,  s'il  est  habitant  d'une  ville,  et  de  la  garde 
rurale  s'il  habite  la  campagne. 

Russie.  —  L'armée  de  l'empire  moscovite  se  recrute 
d'après  le  principe  du  service  militaire  obligatoire  et 
personnel  ;  celle  armée  comprend  des  troupes  russes, 
cosaques,  asiatiques.  —  Les  troupes  russes  disposent 
annuellement  de  600,000  jeunes  gens  âgés  de  20  ans; 
ceux-ci  sont  désignés  par  le  sort  pour  faire  partie  de 


l'armée  permanente  ou  de  la  milice.  Le  service  dans 
l'armée  permanente  dure  15  ans,  dont  6  sont  sous  les 
drapeaux  et  9  ans  dans  la  réserve.  —  La  milice  com- 
prend toute  la  population  masculine  valide,  de  20  à  40 
ans.  Le  1*'  ban  de  la  milice,  composée  des  4  dernières 
classes,  est  appelé  à  compléter  les  vides  de  l'armée 
active,  en  cas  de  guerre;  le  2*  ban  forme  des  corps 
auxiliaires.  —  Les  troupes  cosaques  sont  astreintes  à 
un  service  de  22  ans,  dont  15  ans  au  service  extérieur 
à  leur  province  et  7  ans  au  service  intérieur  dans  leur 
province;  mais  Tincorporation  effective  n'a  lieu  que 
pour  le  tiers  environ  des  inscrits,  et  le  service  exté- 
rieur ne  dure  généralement  pas  plus  de  3  ans  ;  toute- 
fois, tous  les  Cosaques  doivent  répondre  à  Tappel  en 
cas  de  guerre.  —  Quant  aux  troupes  asiatiques,  elles 
ont  le  caractère  d'une  milice  permanente. 

Serbie,  —  L'armée  de  la  principauté  serbe  se  re- 
crute d'après  un  système  analogue  à  celui  de  Tarmée 
roumaine,  c'est-à-dire  par  l'application  du  principe  du 
service  militaire  personnel. 

Suède  et  Norvège.  —  L'armée  suédoise  se  composa 
de  3  portions  distinctes  :  la  vseerfvade,  armée  perma- 
nente, se  compose  de  volontaires  recevant  une  indem- 
nité d'engagement;  l'indelta,  sorte  de  troupe  de  fron- 
tière, est  formée  de  volontaires  entretenus  par  les 
propriétaires  de  biens  ruraux  ;  la  bevaering,  sorte  de 
réserve,  comprend  tous  les  jeunes  gens  de  20  à  2.S  ans 
qui  ne  font  pas  partie  des  deux  premières  catégories 
et  tous  ceux  qui,  âgés  de  moins  de  40  ans,  ont  été 
libérés  du  service.  —  En  Norvège,  l'armée  se  recrute 
par  des  appels,  avec  faculté  de  remplacement;  la  durée 
totale  du  service  est  de  10  ans,  dont  7  sous  les  drapeaux 
ou  dans  la  réserve  et  3  ans  dans  la  landwsem,  sauf 
pour  les  cavaliers,  qui  servent  seulement  pendant 
7  ans. 

Suisse.  —  En  Suisse,  le  service  militaire  est  obliga- 
toire et  personnel;  il  est  dû  pendant  24  ans,  dont 
12  ans  dans  l'élite  et  12  ans  dans  la  landwehr.  — Les 
forces  militaires  de  la  République  helvétique  n'ont  pas 
le  caractère  permanent  ;  elles  constituent,  à  la  vérité, 
une  sorte  de  milice  qui  se  réunit  annuellement  pour 
des  exercices  ;  ces  cours  d'instruction  et  de  répétition 
ne  concernent  même  que  l'eliie,  la  landwehr  n'étant 
pas  du  tout  organisée  :  on  peut  estimer  que  leur  durée 
moyenne  est  de  l'iO  à  200  jours  pour  tout  homme 
ayant  servi  de  20  à  32  ans  dans  l'élite.  Quant  à  la  land- 
wehr, elle  est  réunie  au  moins  une  fois  pendant  un 
jour  dans  le  courant  de  chaque  année,  et  les  hommes 
qui  en  font  partie  sont  astreints  à  un  exercice  de  tir 
annuel. 

Turquie.  —  Le  service  militaire  est  obligatoire  dans 
l'empire  ottoman  pour  tout  sujet  musulman.  Les 
hommes  qui  ne  pratiquent  pas  la  religion  de  Mahomet 
sont  exclus  de  l'armée.  La  durée  du  service  esi  de  20 
années,  c'est-à-dire  de  20  à  40  ans  d'âge,  savoir  :  4  ou 
5  ans  dans  lo  nizam,  ou  armée  active  ;  2  ou  1  an  dans 
l'ikhtiat,  ou  disponibilité  de  l'armée  active  ;  3  ans  dans 
le  l*r  ban  de  la  réserve;  3  ans  dans  le 2*  ban  de  cette 
réserve,  à  laquelle  on  donne  le  nom  de  rédif;  8  ans 
dans  la  levée  en  masse,  moustafiz.  Le  tirage  au  sort 
désigne  les  jeunes  gens  appelés  au  service  et  dont  le 
nombre  annuel  est  de  25,000  environ  ;  mais  les  exemp- 
tions et  les  dispenses  sont  nombreuses,  outre  que  le 
jeune  soldat  appelé  peut  se  faire  remplacer  ou  se  ra- 
cheter moyennant  indemnité  payée  à  l'ÊtaU 

RÉGLEMENTATION,  ensemble  de  législation  par 
lequel  l'autorité  publique  s'attribue  la  mission  de  diri- 
ger plus  ou  moins  entièrement  un  grand  nombre  de 
travaux  et  de  transactions  qui  sont  du  domaine  de 
l'activité  privée.  Elle  est  une  gêne  plutôt  qu'un  se- 
cours. Kii  général,  on  peut  s'en  rapporter  à  l'intérêt 
privé  du  soin  do  faire  ce  qui  est  opportun,  et  le  seul 
soin  que  devrait  prendre  le  gouvernement  serait  d'em- 
pêcher que  l'intérêt  des  uns  ne  porte  préjudice  aux 
droits  des  autres  ou  du  public.  Cependant  il  est  des 
cas  où  la  réglementation  est  nécessaire.  Par  exemple, 
il  est  dans  les  attributions  de  l'autorité  publique  d'as- 
surer la  conservation  des  bois  des  montagnes,  d'en 
régler  l'exploitation,  parce  que  le  défrichement  de  ces 
bois  entraînerait  la  dévastation  des  plaines;  elle  a  le 
droit  de  réglementer  la  pêche  et  d'interdire  certains 
procédés  qui  dépeupleraient  tes  eaux  ;  de  régler  l'usage 
des  cours  d'eau  de  manière  à  empêcher  qu'il  n'en  ré- 
sulte un  dommage  public,  -et  à  leur  donner  la  plus 
grande  utilité  possible;  de  veiller  sur  la  construction 
des  bâtiments  bordant  la  voie  publique,  sur  le  nettoie- 


RÉU 


—  4853  — 


ROM 


ment  de  cette  voie,  sar  U  tenae  des  lieax  ouyerts  au 
public,  etc. 

RENGAGEMENT.  —  La  loi  militaire  de  1872  «n 
France  décida  qu'il  n*y  aurait  dans  les  troupes  ni 
prime  en  argent  ni  prime  quelconque  d'engagement. 
Mais,  d'après  une  loi  votée  en  1878,  un  rengagement 
peut  être  contracté  par  les  sous-officiers  seuls.  Il  esl 
alloué  pour  la  première  période  de  cinq  ans  :  1»  une 
mise  d'entretien  de  600  fr.,  payée  en  totalité  ou  en 
partie  après  la  signature  de  l'acte  d'engagement,  soit 
en  espèces,  soit  en  livret  de  la  caisse  d'épargne  ; 
2<>  une  indemnité  de  2,000  fr.  dont  le  capital  est  payé  à 
l'expiration  de  l'engagement  et  dont  l'intérêt  est  s^ervi 
par  trimestre  au  taux  de  5o/o.  Cette  somme  de  2,000  fr. 
est  acquise  intégralement  au  sous-officier  rengagé  qui 
est  réformé  pour  blessures  reçues  dans  un  service 
commandé;  en  cas  de  décès,  elle  est  réversible  sur  sa 
veuve  non  séparée  de  corps,  ou,  à  défaut  de  veuve,  sur 
les  héritiers.  Un  deuxième  rengagement  de  cinq  ans 
donne  droit  :  P  à  une  seconde  mise  d'entretien  de 
600  francs,  payable  comme  la  première  ;  2«  à  une  pen- 
sion de  retraite  de  365  francs  après  quinxe  ans  de  ser- 
vices, en  outre  des  2,000  francs  dus  pour  la  première 
période.  Cette  pension  peut  être  cumulée  avec  le  trai- 
tement afférent  &  un  emploi  civil.  Après  dix  ans  de 
services,  un  sous-officier  peut  demander  un  emploi  de 
l'Ëtat  en  satisfaisant  d'ailleurs  aux  examens  prescrits, 
et  il  participe  à  tous  les  avantages  stipulés  par  la  loi 
spéciale  du  34  Juillet  1873.  Enfin,  à  partir  du  jour  où 
compte  son  rengagement  effectif,  le  rengagé  a  droit  à 
une  haute  paye  journalière  de  0,30  cent.,  qui  sera  aug- 
mentée de  0,20  cent,  par  jour  pour  une  seconde  pé- 
riode de  cinq  ans,  c'est-à-dire  après  dix  ans  de  ser- 
vice. 

RENNES  (PâlENCBS  de).  —  Cette  fabrique  paraît  avoir 
existé  vers  la  seconde  moitié  du  xviio  siècle,  mais  le 
premier  document  qui  en  reconnaît  l'existence  date  de 
1748.  Ses  produits  reppellent  ceux  de  la  fabrique 
marseillaise.  Ils  s'en  distinguent  !  par  une  coloration 
spéciale  dans  laquelle  domine  le  manganèse.  C'est 
cet  aspect  grisâtre,  propre  aussi  aux  faiences  de  Quim- 
per,  qui  permet  de  ne  pas  les  confondre  avec  les 
fai<*nces  de  Rouen. 

RETRAlTl!:  (Pensions  de).— Le  chiffre  des  pensions  de 
retraite  dans  l'armée  a  été  élevé  par  une  loi  de  juin  1878. 
Le  tableau  suivant  présente  la  situation  précédente  ot 
la  situation  actuelle  : 

Antérieurement  Actuellement 

Général  de  dÎTisioD  de  5,200  fr.  à  7,800..  de  6.600  ir.  à  10.000 

Général  de  brigade  de  4,000  fr.  à  5,i00..  de  5,800  fr.  à  7,500 

Colonel de  3,120  fr.  à  3,900. .  de  4,500  fr.  à  6.000 

Lieutenant-colonel  de  2.340  fr.  &  3,lâ0..  de  3.700  Tr.  k  4,000 

Chef  de  bataillon.de  1,950  fr.  à  2,500..  de  3,000  fr.  à  5,000 

Capitaine de  1,500  fr.  à  2,400..  de  2,400  fr.  à  3,300 

Lieutenant de  1,120  fr.  à  1,680..  de  1,700  fr.  à  2,500 

Sou8-lieuteuant . .  do     840  fr.  à  1,400..  de  1,570  fr.  à  2,300 

Les  assimilés  profitent  de  la  même  augmentation. 
La  retenue  qui  sert  à  constituer  le  fonds  de  retraite 
est  élevée  de  2  à  4  pour  cent.  La  veuve  d'un  officier 
touche  le  tiers  de  la  retraite  à  laquelle  l'officier  a  eu 
droit. 

RÉUNIONS  PUBLIQUES.  —  Une  loi  du  25  mars  1868, 
modifiant  la  législation  antérieure  {V.  Association, 
dans  le  Dictionnaire) ^  a  décidé  que  les  réunions  n'ayant 

Î)as  pour  objet  de  traiter  de  matières  politiques  et  re- 
igieuses  peuvent  avoir  lieu  sans  autorisation  préala- 
ble. Il  suffit  de  déposer  à  la  préfecture  de  police  à 
Paris,  à  la  préfecture  dans  les  départi^ments,  une  dé- 
claration signée  par  sept  personnes  domiciliées  dans  la 
commune,  avec  indication  de  l'objet  de  la  réunion,  du 
lieu,  du  jour  et  de  l'heure  où  elle  doit  avoir  lieu.  Trois 
jours  francs  doivent  s'écouler  entre  la  délivrance  du 
récépissé  de  cette  déclaratiou  et  la  séance.  Toute  réu- 
nion doit  être  tenue  dans  un  local  clos  et  couvert.  Un 
fonctionnaire  de  l'ordre  judiciaire  ou  administratif, 
délégué  par  l'administration,  peut  y  assister,  il  prend 
une  place  à  son  choix;  il  a  le  droit  de  dissoudre  l'as- 
semblée, si  le  bureau  laisse  mettre  en  discussion  un 
sujet  étranger  à  l'objet  de  la  réunion,  ou  si  la  séance 
devient  tumultueuse.  Des  réunions  électorales  peuvent 
avoir  lieu  à  partir  de  la  promulgation  du  décret  de 
convocation  d'un  collège  pour  l'éleciiori  d'un  député, 
jusqu'au  cinquième  jour  avant  celui  fixé  pour  l'ouver- 
ture du  scrutin;  un  jour  doit  s'être  écoulé  depuis  la 
délivrance  du  récépissé  de  la  déclaration  ;  ne  peuvent 


assister  à  ces  réunions  que  les  électeurs  de  la  circon- 
scription et  les  candidats  c^ui  ont  rempli  les  formalités 
requises.  Toute  contravention  est  punie  d*une  amende 
de  100  fr.  à  3,000  fr.  et  d'un  emprisonnementde6jourB 
à  6  mois.  Pour  résistance  k  Tordre  de  se  disperser, 
Tamende  est  de  800  fr.  à  6,000  fr.  etTemprisonnement 
de  15  jours  à  1  an,  sans  préjudice  des  peines  portées 
par  le  Code  pénal.  Le  port  d'armes  apparentes  ou  ca- 
chées dans  uneréunion  est  puni  d'un  emprisonnement 
d'un  mois  à  un  an  et  d'une  amende  de  300  fr.  à 
10,000  fr.  Toute  réunion  qui  paraîtrait  de  nature  à 
troubler  l'ordre  ou  à  compromettre  la  sécurité  publi- 
que peut  être  ajournée  par  les  préfets  et  interdite  par 
le  ministre  de  l'intérieur. 

Une  loi  sur  la  liberté  de  réunion,  votée  le  30  juin 
1881,  a  établi  et  régularisé  en  France  la  liberté  de 
réunion.  Toule  réunion  publique  peut  .«e  tenir  sans 
autorisation  préalable,  sous  la  condition  d'une  décla- 
ration indiquant  le  lieu,  le  jour  et  l'heure  de  la 
réunion,  signée  de  deux  personnes  au  moins,  dont 
l'une  domiciliée  dans  la  commune  où  la  réunion  doit 
avoir  lieu.  Cette  déclaration  est  faite,  à  Paris,  au 
préfet  de  police;  dans  les  chefs-lieux  de  département, 
au  préfet  ;  dans  les  chefs-lieux  d'arrondissement,  au 
sous-préfet;  dans  les  autres  communes,  au  maire.  En- 
tre la  déclaration  et  la  réunion,  il  doit  s'écouler  un 
délai  de  24  heures,  délai  réduit  à  deux  heures  pour 
les  réunions  delà  période  électorale;  s'il  s'agit  d'élec- 
tions comportant  plusieurs  tours  de  scrutin,  la  réunion 
peut  suivre  immédiatement  la  déclaration.  Chaque 
réunion  a  un  bureau,  composé  au  moins  de  trois  per- 
sonnes et  chargé  de  maintenir  l'ordre,  d'empêcher  les 
infraciions  aux  lois,  d'interdire  tout  discours  sédi- 
tieux. Un  fonctiounaire  de  l'ordre  administratif  ou 
judiciaire  peut  être  délégué  parle  préfet,  le  sous-préfet 
ou  le  maire,  suivant  les  localités,  pour  assister  à  la 
réunion;  mais  il  n'a  le  droit  de  dissoudre  la  réunion 

3ue  s'il  en  est  requis  par  le  bureau  ou  s'il  se  produit 
es  voies  de  fait.  Les  crimes  ou  délits  commis  par  la 
parole,  en  réunion  publique,  sont  punis  des  mêmes 
peines  que  ceux  qui  sont  commis  par  la  voie  de  la 
presse.  Les  clubs  restent  interdits. 

ROMANISTES.—  Nom  donné  en  histoire  de  l'art,  aux 
peintres  qui  firent  décidément  triompher  dans  les 
Flandres  les  principes  de  la  Renaissance  ilalienne. 
Les  confréries  de  romanistes  se  composaient  de  per- 
sonnes ayant  fait  le  voyage  de  Rome.  Celle  d'Anvers, 
établie  en  1.S72  subsista  jusqu'en  1785. 

ROME(écoLB  PRANÇAisB  de).  —  Installée  au  palais  Far- 
nèse  en  1873,  celte  école  porta  d'abord  le  nom  d'E- 
cole d'archéologie.  Ce  titrn  trop  spécial  et  qui  sem- 
blait enfermer  dans  des  limites  trop  exclusives  les 
travaux  de  ses  membres,  fut  bientôt  ramené  à  la  dé- 
nomination actuelle  plus  conforme  à  sop  but.  L'École 
française  de  Rome  est  absolument  distincte  de  la  villa 
Médicls.  Elle  eut  pour  objet  la  préparation  pratique  des 
membres  de  l'École  d'Athènes  (V.  Dict.  d*histoirtf),  aux 
travaux  d'archéologie,  de  philologie,  d'histoire,  de 
philosophie,  d'art  antique  ou  moderne,  qu'ils  doivent 
faire  pendant  leur  séjour  en  Grèce  ou  en  Orient.  Le 
règlement  de  l'École  d'Athènes  imposait  aux  membres 
de  l'École  d'Athènes  l'obligation  de  passer  trois  mois 
à  Rome  pour  s'initier  par  l'étude  de  l'antiquité  ro- 
maine, plus  voisine  de  nous,  à  l'intelligence  de  l'anti- 
quité* grecque.  Ce  terme  de  trois  mois  fut  bientôt 
reconnu  insuffisant.  On  retendit  à  un  an.  Les  élèves 
étaient  placés  sous  la  direction  d'un  savant  autorisé 
qui  prit,  le  25  mars  1873,  le  titre  de  sous-directeur  de 
rÉcole  d'Athènes,  chargé  de  la  succursale  de  Rome. 
Le  26  novembre  1874,  un  nouveau  décret  donnait  à 
la  section  romaine  de  l'École  d'Athènes  le  titre  d'É- 
cole archéologique  de  Rome,  tout  en  laissant  à  son 
directeur  le  titre  de  sous-directeur  de  l'école  d'A- 
thènes. Enfin,  le  20  novembre  1875  l'école  recevait  son 
organisation  définitive.  Elle  devenait  l'École  française 
de  Rome,  placée,  comme  son  aînée  d'Athènes,  sous  le 
haut  patronnage  de  l'Académie  des  Inscriptions  et 
Belles-Lettres.  Ses  membres  devaient  être  au  nom- 
bre de  six,  nommés  d'abord  pour  un  an,  et  pouvant 
successivement  obtenir  une  prolongation  d'une  et  de 
deux  années.  Les  places  devaient  être  attribuées,  soit 
à  des  candidats  présentés  par  l'École  normale  supé- 
rieure, soit  par  l'Ecole  dos  Chartes  et  par  la  section 
ij'hisioire  et  de  philologie  de  l'École  des  Hautes-Études, 
soit  à  des  docteurs  reçus  avec  distinction,  ou  à  des 
jeunes  gens  signalés  par  leurs  travaux.  En  somme  la 


ROU 


—  1854  — 


RUS 


liberté  la  plus  absolae  assurée  au  recrutement,  pas 
d'examen  d'entrée,  et  toutes  les  facilités  données  aux 
Jeunes  gens  qui  ne  seraient  pas  sortis  des  grandes 
écoles  de  l'État.  Ainsi  constituée,  la  nouvelle  école 
avait  son  homogénéité,  son  but  propre,  ayant  à  côté 
de  ses  Athéniens  d'un  an  ses  membres  distincts  ne 
relevant  que  d'elle  seule.  C'est  à  H.  Albert  Dumont, 
mort  en  1884,  directeur  de  renseignement  supérieur, 
qu'est  due  l'initiative  de  la  création  nouvelle.  Il  en 
fut  le  premier  directeur.  En  ISlh  M.  Geffroy  lui  suc< 
céda  dans  ces  dé'icates  et  savantes  fonctions.  Le  di- 
recteur actuel  est  M.  Le  Blant,  membre  de  l'Institut. 
Le  directeur  est  nommé  par  décret,  sur  une  double 
liste  de  deux  candidats  présentés  par  l'Académie  des 
Inscriptions  et  Bnlies-Leitres,  et  par  la  section  de  l'en- 
seignement supérieur  du  Comité  consultatif.  L'École 
française  de  Rome  a  un  budget  qui  doit  pourvoir  à 
tous  les  frais  d'entretien  et  d'études.  La  pension  al- 
louée à  chaque  membre  a  été  portée  de  3,500  à 
4,000  francs. 

Sur  son  budget  Técole  a  réussi  h  entreprendre  trois 
grandes  publications  :  1**  la  Hiblioihèque  des  Ecoles 
françaises  cC Athènes  et  de  Rome,  où  paraissent  les 
mémoires  des  membres  de  l'école  ^  3o  Mélanges  d'ar- 
chéologie et  dhisloire^  recueil  périodique^  accom- 
pagné de  planches  explicatives,  qui  comprend  chaque 
année  au  moins  vingt-cinq  mille  feuilles  d'impres- 
sion ;  S*"  les  Registres  des  Papes,  grande  collection 
in-4<^  qui  a  eu  un  grand  retentissement  dsns  le 
monde  savant,  et  a  mis  au  jour  les  innombrables  vo- 
lumes conservés  dans  les  archives  Eecrètes  du  Vati- 
can, contenant  les  minutes  des  bulles  de  chaque  pon- 
tificat. On  doit  aussi  compter  à  l'actif  de  l'École 
française  de  Rome  les  nombreux  travaux  personnels 
publiés  sur  l'art,  Tarcliéologie  et  la  philologie  par  di- 
vers membres  de  l'école,  MM.  Eugène  MUntz,  Maxi- 
me CoUignon,  Martha,  Pottier,  Lafaye,  Homolle,  Paul 
Girard,  de  la  Blanchère,  Mabille.au,  Antoine  Tho- 
mas, etc...  L'École  française  de  Rome  est  destinée  à 
rendre  d'innombrables  services. 

ROUEN  (FaIkncbs  de).  —  Dès  le  temps  de  FrançoisI»', 
on  fabriquait  des  revêtements  de  faience  à  Rouen  ;  car, 
à  cAté  de  ceux  de  Girolamo  délia  Robbia,  il  y  avait  au 
château  de  Madrid  (près  de  Paris)  des  carreaux  qua- 
drangulaires  d'un  potier  rouennais.'Maclou  Abaquesne. 
Lés  couleurs,  enluminant  des  motifs  italiens  de  la  Re- 
naissance, en  sont  vives  et  variées  ;  l'émail  est  pur  et 
glacé.  Cette  belle  industrie  s'éteignit.  Un  siècle  plus 
tard,  un  (.'ustode  de  Neversvint  initier  la  Normandie 
aux  procédés  nivernais.  En  1673,  Edme  Potlierat,  sieur 
de  Saint-Étienne,  s'abriunt  sous  le  nom  de  Nicolas 
Poirel,  huissier  de  la  Chambre  de  la  reine,  installa 
définitivement  à  Rouen  la  manufacture  royale  de  faïen- 
ces, dont  il  mourut  directeur  en  1687.  Le  mode  de 
décoration  propre  aux  faïenciers  rouennais  consistait 
à  faire  rayonner  autour  du  centre  des  pièces  plates,  et 
à  peindre  sur  la  panse  des  vases  des  bordures  bleues  sur 
blanc,  travaillées  àjour,  au  lieu  d'orner  d'émaux  blancs 
des  fonds  bleus.  Rouen  eut  aussi  sa  statuaire  cérami- 
que, bien  supérieure  à  celle  de  Nevers,  dans  la  pre- 
mière moitié  du  xviii*  siècle.  A  la  môme  époque,  inter- 
prétant avec  liberté  les  porcelaines  de  Chine,  les  potiers 
en  tirèrent  ces  paysages  fantastiques  et  à  oiseaux,  dra- 
gons, marines,  fabriques,  etc.,  qui  ornent  les  spéci- 
mens quelquefois  énormes  de  l'art  normand.  Aux 
approchi^s  de  la  Révolution  française,  la  faïence  de 
Rouen  périt  frappée  par  les  accroissements  de  la  por- 
celaine et  pir  la  concurrence  des  produits  anglais.  B. 

ROULEAUX  DES  MORTS,  bandes  de  parchemin 
roulées  autour  d'un  cylindre  (d'où  le  nom  de  rotuli)^ 
que  les  moines  s'envoyaient  d'un  couvent  à  un  autre, 
pour  annoncer  la  mort  d'un  frère  ou  bienfaiteur  el 
demander  quelques  prières.  L'usage  en  exista  dès  le 
viii*  siècle  et  jusqu'au  xiv(>On  distingua  truis  espèces 
de  rouleaux  des  morts  :  P  les  rouleaux  perpétuels, 
portant  les  noms  de  tous  les  morts  d'une  abbaye, 
qu'on  lisait  une  fois  devant  les  fidèles  ;  2*  les  i^ou- 
leaux  annuels  y  où  figuraient  !•  s  morts  que  des  églises 
associées  recommandaient  aux  prières  chaque  année; 
Z^  les  rouleaux  individuels^  envoyés  après  la  mort  de 
chaque  personnage  important,  et  qui  contenaient  son 
bisioire,  ses  vertus,  son  éloge.  Ces  derniers  rouleaux 
étaient  augmentés,  chez  les  moin'es  qui  les  avaient 
reçus,  de  certaines  réponses  ou  additions  à  l'éloge  fu- 
nèbre, qu'on  appelait  dt'S  litres,  Ain»i,  on  compte  178 
til*es  écrits  sur  le  rouleau  de  saint  Bruno,  V06  sur 


celui  de  saint  Vital,  fondateur  du  couvent  deSavigny, 
et  250  sur  le  rouleau  de  Mathilde,  abbease  de  Gaen. 
Les  rouleaux  contenaient  parfois  des  vers  et  des  Jeux 
de  mots.  (K.  Histoire  littéraire  de  la  France,  t.  IX,  et 
XXIV;  Léopold  Delisle.  Bibliothèque  de  fEcole  des 
Chartes,  2«  série,  vol.  III.) 

ROUPILLE,  large  surtout,  brodé  d'une  croix  blan- 
che, que  portaient  autefroisles  rocantins.  (F.  ce  mot 
dan^  ie  Dictionnaire,)  Leurs  chausses,  qui  renfer 
maient  toute  la  jambe,  se  nommaient  rabach  (du  cel- 
tiqiie  rabe,  jambe). 

RUSSE  (littérature).  —  Avant  Pierre  I»'  (1632),  la 
Russie  encore  toute  proche  de  la  vie  primitive  ne 
possède  qu'une  littérature  religieuse  :  lea  chants,  les 
traditions  et  les  livres  du  christianisme  byzantin. 
Les  tentatives  originales  des  Petits-Russiens,  plus 
ardents  et  plus  rêveurs  que  les  autres  Slaves,  n'ont 
pas  le  temps  d'aboutir.  Les  Mongols  enTahiasent  la 
Russie.  Et,  sous  l'influence  de  cette  culture  conqué- 
rante, la  vie  russe  abandonne  sa  direction  nationale. 
Les  rares  monuments  littéraires  de  ces  époques  sont 
des  mandements  d'évèques  et  des  controverses  de 
moines  au  sujet  des  hérésies.  Vers  le  xvii«  siècle  la 
Russie,  unifiée  par  l'autocratie  des  tsars,  devient  plos 
accessible  à  l'influence  européenne,  qui  s'infiltre  peu 
à  peu  dans  l'esprit  de  la  nation.  Pierre  I«'  (1632), 
trouvant  que  cette  assimilation  ne  s'accomplissait  pas 
assez  vite,  eut  recours  aux  ukases  et  aux  amendes, 
pour  forcer  ses  sujets  à  «  %* européaniser  ».  Cathe- 
rine II  consolida  son  œuvre,  et  la  littérature,  éman- 
cipée de  la  religion,  chercha  à  entrer  dans  l'éTolution 
de  la  pensée  européenne.  De  cette  tentative  sortit  une 
littérature  d'imitation,  pseudo-classique,  qui  fut  en 
faveur  jusqu'au  commencement  du  xix*  siècle  ;  on  peut 
dire  qu'elle  eut  d'heureux  résultats,  puisqu'elle  assou- 
plit et  enrichit  la  langue  russe.  Mais  c'est  le  roman- 
tisme qui  afTranchit  la  littérature  russe.  Toutes  les 
audaces  de  couleur,  de  pittoresque  d'expression  et 
d'analyse  que  les  romantiques  mettaient  à  la  mode 
en  Occident,  les  Russes  les  possédaient  de  naissance. 
En  devenant  romantiques,  c'était  proprement  à  leur 
génie  national  quMls  retournaient.  De  là  (de  1820  à 
1840)  l'épanouissement  subit  de  leur  littérature,  avec 
Pouchkine,  Lermoniof,  Gogol,  Biélinsky  etc. 

Après  eux,  avec  Tourguenefl*,  Pisemsky,  Dostoievsky, 
la  littérature  russe  exprima  toutes  les  souffrances  et 
toutes  les  aspirations  de  la  société.  L'école  naturelle 
protesta  de  tout  son  pouvoir  contre  la  situation  sociale. 
Et,  gr&ce  à  cet  esprit  d'indépendance,  le  règne  de 
Nicolas,  qui  pesa  si  durement  sur  la  Russie,  fut  une 
période  glorieuse  pour  la  littérature  slave.  Les  réformes 
de  1861  créèrent  une  nouvelle  société.  Des  besoins  nou- 
veaux attirèrent  l'attention  publique  sur  des  idées 
nouvelles.  —  Frappée  de  la  misère  générale,  de 
l'inefficacité  des  réformes,  du  chaos  des  idées  et  de 
la  vaine  agitation  des  hommes,  l'école  naturelle  ne 
voulut  voir  dans  le  mouvement  que  l'avortement 
des  espérances,  les  côtés  négatifs  et  repoussants. 
De  cette  conception  pessimiste  de  la  vie  sortit  la 
nouvelle  école  qui,  renonçant  à  l'héritage  idéaliste  des 
ancêtres,  déclara  qu'elle  serait  l'école  du  réalisme 
populaire,  une  littérature  de  moujiks. 

Cette  transformation  subite  s'explique  par  les  qua> 
lités  d'esprit  sérieuses  et  positives  du  Grand-Russien 
et  par  l'influence  prépondérante  qu'ont  exercée  sur  la 
litlérature  russe  moderne  les  littératures  allemande 
et  anglaise.  Quel  que  soit  le  succès  apparent  du  roman 
et  du  théâtre  français  en  Russie,  ni  l'un  ni  l'autre  n'y 
sont  imités.  On  les  considère  comme  de  pures  œuvres 
d'art,  des  modèles  de  forme  et  de  composition  ;  mais 
on  regrette  de  n'y  point  rencontrer  de  conclusions 
pratique;!.  En  effet,  comme  l'esprit  anglais  et  Tesprit 
allemand,  l'esprit  russe  est  préoccupé  d'utilité  et  de 
science.  Il  se  sent  entraîné  vers  tous  les  problèmes 
philosophiques  et  sociaux.  Le  roman  russe  instruit, 
moralise,  développe  une  thèse  ;  quanta  la  comédie  et 
au  drame,  ils  n'ont  aucun  souci  de  l'intrigue  et  des 
coups  de  théâtre,  uniquement  préoccupés  du  dévelop> 
pement  psychologique  des  caractères. 

En  présence  de  la  révolution  historique  qui  se  pré- 
pare en  Russie,  il  est  malaisé  de  prévoir  les  destinées 
môme  toutes  prochaines  de  la  littérature  russe.  Toute- 
foi»,  bien  qun  l'action  ait  succéJé  aux  excitations  des 
livres  à  tewtance,  et,  mal p;ré  l'apparente  barbarie  des 
mœurs  nihilistes  et  terroristes,  il  est  certain  quK  nous 
sommes  en  présence  d'un  réveil  des  instincts  idéalistes 


RUS 


—  1855  — 


SAL 


et  mystiques  du  peuple  russe.  La  première  manifes- 
tation de  cette  renaissance  a  été  un  mouvement  social, 
le  terrorisme.  Il  parait  certain,  aujourd'hui,  que, 
après  l'agitation  sociale,  un  mouvement  littéraire 
idéaliste  se  produira. 

Donnons  maintenant  quelques  renseignements  com- 
plémentaires sur  la  période  moderne  et  sur  la  période 
contemporaine  de  cette  littérature  aujourd'hui  à 
Juste  titre  si  fort  prisée. 

Littérature  modernb.  —  Première  Période^  1820 
à  1848.  —  Les  noms  les  plus  remarquables  de  cette 
époque  sont  :  Griboledof,  auteur  d'une  comédie  sa- 
tirique :  le  Malheur  d'avoir  de  Veaprit  ;  le  célèbre 
Pouchkine,  poète  et  romancier  comme  le  byronien 
Lermontof;  Gogol,  le  grand  conteur,  surtout  connu  en 
France  par  son  roman  les  Ames  mortes,  les  critiques 
Polevoî  et  Biélinsky. 

Tous  ces  auteurs  appartiennent  à  la  période  roman- 
tique. 

Deuxième  période ^  1840  à  la  guerre  de  Crimée.  » 
Une  certaine  lassitude  de  Teiagération  romantique  dans 
le  choix  des  situations  et  l'analyse  des  caractères 
provoque  un  commencement  de  réaction.  Le  goût  des 
auteurs  va  aux  sujets  simples,  aux  caractères  moyens, 
finement  observés.  Ils  apportent  le  même  souci  dans 
la  peinture  des  cadres,  intérieurs  et  paysages,  où 
vivent  leurs  personnages.  Cette  tendance  naissante 
de  réalisme  est  très  sensible  dans  le  livre  d'Uerzen 
A  qui  la  faute?  dans  Une  histoire  ordinaire  de 
Gontcharof,  et  le  Tarautass  de  Sollokoub. 

Elle  s'accentue  encore  avec  les  écrivains  de  l'école 
naturelle,  Grigorovitch,  auteur  des  Emigrants,  avec 
les  Mémoires  d'un  chasseur  Qt  Moumou  de  Tourgueneff, 
le  Lieschi  et  le  Pélersbourgeois  de  Pisemsky,  les 
Pauvres  gens  de  Dostoïevsky.  Le  réalisme  triomphe 
même  au  théâtre,  où  Ostrowski  met  en  scène  des  pe- 
tits bourgeois  et  des  marchands  de  Moscou,  dans  des 
comédies  de  situations  uniformes,  d'intrigues  banales 
ou  mal  conduites,  qui  ne  valent  que  par  la  fidélité 
de  l'observation.  (Entre  tious  nous  nous  arrangerons; 
Chacun  doit  i-ester  à  sa  place  ;  Pauvreté  n'est  pas 
vice,'' etc.) 

LiTTÉRATORB  coNTBiiPORAiNE.  —  Première  Période^ 
de  la  guerre  de  Crimée  à  l'abolition  du  servage,  —  La 
guerre  de  Crimée  porta  un  coup  mortel  au  vieil  édifice 
social  qui  avait  été  si  péniblement  élevé  pendant  des 
siècles.  La  Russie  comprit  son  infériorité  réelle  et  se 
mit  courageusement  aux  réformes.  Les  idées  purement 
théoriques  et  abstraites  dont  elle  s'était  nourrie  jus- 
qu'alors ne  pouvaient  plus  lui  suffire.  La  presse  profita 
de  la  liberté  momentanément  accordée  pour  discuter 
les  questions  du  jour.  La  littérature  avait  devancé  ce 
mouvement  général  de  l'esprit  russe.  Elle  avait  peint 
la  misère  du  moujik,  les  souffrances  des  petites  gens  ; 
maintenant  elle  allait  prendre  à  partie  les  «  classes 
dirigeantes  »,  démontrer  l'impuissance  de  la  généra- 
tion de  1840,  en  présence  de  la  vie  et  des  idées  nou- 
velles, porter  les  derniers  coups  k  la  vieille  société 
dps  «  féodaux  «  en  faisant  ressortir  ses  vices  et  ses 
faiblesses.  C'est  à  cette  période  littéraire  qu'appar- 
tiennent la  Nichée  de  gentishommes^  Dimitri  Roudine, 
et  A  la  veille  de  Tourgueneff,  le  roman  satirique  de 
Pisemsky,  Mille  âmes,  les  Esquisses  de  province  de 
Stchédrine,  Humiliés  et  offensés  de  Dostoïevsky, 
Oblomof,  de  Gontcharof,  et,  au  théâtre,  VEmploi  lu- 
C7*/)/t/d'Ostrowsky,  ainsi  que  VEmployé,  de  Sollukouk. 

Deuxième  période,  depuis  Vabolition  du  servage  jus» 
qu'à  nos  jnurs.  —  Le  l«'  février  1861  l'empereur 
Alexandre  II  rendit  la  liberté  à  24,000,000  de  serfs. 
Cette  révolution  sociale  agita  profondément  la  nation. 
Les  rétrogrades  et  les  conservateurs  regrettaient 
l'ancien  ordre  de  choses,  les  socialistes  trouvaient  que 
l'on  n'avait  pas  assez  fait.  Tout  le  monde  se  jeta  dans 
l'arène;  ce  fut  comme  un  renouveau  de  la  vie  intel- 
lectuelle. Les  sujets,  les  questions  abondaient,  les 
types  se  produisaient  plus  nombreux  et  plus  variés.  Le 
roman  commença  à  s'occuper  d'une  nouvelle  théorie 
sociale  qui  faisait  son  apparition,  le  nihilisme. 

Comme  il  fallait  s'y  attendre,  ce  furent  les  côtés 
purement  théoriques  et  les  exagérations  du  nihilisme 
qui  frappèrent  surtout  les  écrivains  de  l'école  natu- 
relle. En  1840  ils  avaient  attaqué  le  servage,  après  la 
guerre  de  Crimée  ils  avaient  couvert  de  ridicule  le 
parti  de  la  vieille  cour,  ils  ne  virent  dans  la  société 
actuelle  que  des  nihilistes.  Au  lieu  de  peindre  les  luttes 
et  les  aspirations  de  la  génération  contemporaine,  ils 


ne  l'envisagèrent  qu'au  point  de  vue  du  pessimisme. 
Cette  critique  paruale  de  la  révolution  russe  se  mani- 
feste surtout  dans  les  derniers  romans  de  Tourgueneff: 
Terres  vierges,  Pères  et  enfants.  Fumée,  dans  la  Mer 
agitée  et  le  Tourbillon  de  Pisemsky,  dans  Crimée  et 
châtiment  et  les  Possédés  de  Dostoïevsky,  dans  le 
Précipice,  de  Gontcharof. 

Le  pessimisme  russe  a  revêtu  une  forme  particuliè- 
rement originale  dans  l'œuvre  du  comte  Léon  Tolstoï, 
dont  le  chef-d'œuvre  incontesté, /«  Guerre  et  ta  Paix, 
a  été  traduit  dans  toutes  les  langues  et  avidement  lu 
en  Europe.  Le  cadre  de  ce  roman  est  immense,  les 
personnages  innombrables.  On  n'y  compte  pas  moins 
de  trois  empereurs,  avec  leurs  ministres,  leurs  maré- 
chaux, leurs  soldats,  des  nobles  et  des  paysans.  Ces 
l'histoire  de  la  campagne  de  Russie  et  de  la  retraite 
de  Napoléon.  Le  comte  Tolstoï  est  fataliste.  Le  pessi- 
misme suppose  encore  quelque  souci  de  l'industrie, 
le  regret  de  voir  les  choses  tourner  mal  quand  elles 
pourraient  aller  à  bien.  Mais  dans  la  conception  fata- 
liste de  Tolstoï  il  n'y  a  pas  de  place  pour  un  vœu,  un 
choix  ou  un  regret.  Les  choses  ne  vont  ni  à  bien  ni 
à  mal,  elles  vont  au  hasard.  L'admiration  est  aussi 
ridicule  que  l'indignation,  puisque  l'action  est  fatale. 
Il  n'y  a  pas  un  point  déterminable  où  l'initiative  de  la 
volonté  nnit,  et  se  heurte  à  la  destinée.  Il  n'y  a  qu'une 
cause  confuse  et  unique  de  tout. 

Si  nous  avons  analysé  ici  un  peu  longuement  le  fata- 
lisme de  Tolstoï,  c'est  qu'il  nous  apparaît  comme  le 
trait  d'union  qni  relie  le  pessimisme  de  l'école  natu- 
relle à  l'idéalisme  imminent  de  la  Jeune  génération. 
Les  lecteurs  de  Ma  Religion  oseraient-ils  affirmer  que 
ce  mouvement  n'est  pas  déjà  commencé  ? 

V.  C.  Courrière,  Histoire  de  la  littérature  contem- 
poraine en  Rusne.  —  E.  Dupuy,  les  Grands  maîtres 
de  la  littéi'fiture  ri«w.— Stepniak.  La  Russie  souter- 
raine.—Melch'xov  de  \oga^.  Revue  des  Deux-Mondes, 
15  janvier  et  15  novembre  1885.  H.  L.  R. 


SAINTES  (paIence  de).  —  On  trouve  dans  cette  ville 
dès  les  premières  années  du  seizième  siècle  une  im- 
portante fabrique  de  terres  vernissées.  C'est  1&  que 
Bernard  Palissy  fit  ses  premiers  essais.  Vt^rs  la  fin  du 
dix- septième  siècle.  Saintes  se  transforma  par  la  fa- 
brication de  la  faïence  blanche  rehaussée  de  dessins 
en  couleurs.  En  1788,  on  comptait  à  Saintes  quatre 
usines  se  livrant  à  cette  industrie. 

SAISONS  (Les),  poème  descriptif  anglais,  publié  en 
1730  par  James  Thomson.  C'est  la  réunion,  sous  un 
titre  commun,  de  quatre  poèmes  qui  avaient  paru  suc- 
cessivement, VHiver  en  1726,  VEté  en  1728,  le  Prin- 
temvs  en  1729,  V Automne  en  1730.  On  peut  reprocher 
à  Thomson  du  vague,  de  l'emphase,  le  luxe  des  orne- 
ments, la  profusion  des  couleurs.  Mais  il  a  de  l'inspira* 
lion,  de  l'originalité  dans  les  pensées  et  dans  le  style; 
ses  descriptions  sont  remarquables  tout  à  la  fois 
d'exactitude  et  de  magnificence.  A  de  nombreux  ta- 
bleaux on  voit  qu'il  sent  et  aime  la  campagne.  Il  est 
arrivé  au  pathétique  et  au  sublime  dans  la  peinture 
de  l'hiver  au  milieu  des  contrées  hyperboréennes,  et 
des  souffrances  de  l'homme  égaré  parmi  les  neiges  et 
les  glaces.  Thomson  a  semé  son  poème  d'épisodes 
bien  liés  avec  le  sujet,  tantôt  touchants  et  gracieux, 
comme  celui  de  Musidore  surprise  au  bain,  tantôt  ani- 
més du  plus  ardent  enthousiasme,  quand  il  chante  les 
grandes  renommées  de  la  vertu  et  de  la  liberté  anti- 
ques ou  les  héros  de  l'Angleterre.  La  littérature  fran- 
çiiise  a  aussi  son  poème  des  Saisons,  par  Saint-Lam- 
bert (1750).  Ce  poème,  que  Voltaire  trouvait  supérieur 
à  celui  de  Thomson,  et  qui  fut  loué  avec  la  même  par- 
tialité par  la  Harpe,  ouvrit  â  l'auteur  les  portes  de 
l'Académie  française.  Mais  il  trouva  aussi  les  plus  vio- 
lentes critiques  de  la  part  de  Clément  et  de  M"'  du 
Deffant.  Le  fait  est  que  les  Saisons  de  Saint-Lambert 
sont  une  œuvre  froide  et  monotone.  B. 

Le  plus  ancien  poème  des  Saisons  connu  est  le  At- 
tusanbara  (cycle  des  saisons),  poème  sanscrit  du  grand 
po('te  c1n8si(|ue  de  l'Inde,  Katidasa. 

SALIÈRE,  ustensile  de  table  qui,  jusqu'au  xvi*  siècle, 
ne  se  trouva  guère  que  chez  les  rois.  C'était  presque 
toujours  une  pièce  remarquable  d'c«*fèvrerie.  Dans  les 


SGR 


—  1856  — 


SCU 


fesUns  qui  n'étalent  pas  royaux,  la  salière  était  un 
morceau  de  pain  creusé  pour  recevoir  le  sel  et  que 
chaque  convive  plaçait  à  côté  de  son  assiette. 

SANA  (taésor  de).  —On  désigne  sous  ce  nom  un  lot 
de  deux  cents  monnaies  d'argent  trouvé  sous  le  sou- 
bassement d'une  des  portes  de  la  ville  de  Sana,  dans 
le  Yémen,  et  dont  la  découverte  fait  époque  dans  This- 
toire  de  la  numismatique  himyariie.  Ces  monnaies^ 
que  Ton  rapporte  en  général  à  la  deuxième  moitié  du 
ii«  siècle  avant  J.-C,  jettent  un  jour  nouveau  sur 
l'histoire  des  rapports  commerciaux  entre  la  Grèce  et 
l'Orient,  car  ces  monnaies  sont  imitées  du  monnayage 
d'Athènes.  Le  droit  des  monnaies  porte  des  lêtes 
royales  dont  le  style  et  la  physionnomie  donnent  la 
base  d'un  arrangement  chronologique,  tant  pour  le  re- 
vers des  pièces  arabes  que  pour  les  pièces  qu'elles 
imitent.  (V,  G.  Schlumberger,  le  Trésor  de  Sana^ 
Paris,  1880.) 

SCEAUX  (PAÎBNCB  de).  —  Fabriquefondée  vers  le  mi- 
lieu du  dix-huiiième  siècle  par  Jacques  Chapelle.  On 
en  goûte  aujourd'hui  beaucoup  les  produits  à  cause  de 
leur  élégance  et  du  charme  de  leur  décoration.  La 
pâte  est  d'une  grande  finesse  et  l'émail  d'une  limpi- 
dité parfaite.  Les  formes  sont  d'une  grande  re- 
cherche et  les  figures  encadrées  dans  des  motifs  de 
paysage,  des  rinceaux  relevés  d'or  traités  de  mains 
de  maiire,  reflètent  le  goût  précieux  et  les  séductions 
charmantes  de  l'art  français  au  dix-huitième  siècle. 

I^  fabrique  de  Sceaux  a  rarement  marqué  ses  pro- 
duits. Lorsqu'elle  passa  sous  le  patronage  du  duc  de 
Penihièvre,  grand  amiral  de  France^  elle  prit  pour 
marque  une  ancre  de  marine.  Mais  cette  époque  est 
le  commencement  de  sa  décadence.  Les  pièces  d'art 
font  place  aux  produits  du  commerce.  La  décoration 
devient  banale,  et  no  rappelle  en  rien  les  premières 
fantaisies  de  Jacques  Chapelle.  Les  faïences  de  Sceaux 
sont  représentées  au  musée  de  Cluny  par  des  spéci- 
mens importants  qui  donnent  une  idée  eyacte  des 
soins  qui  présidaient  à  la  fabrication  et  au  choix  des 
artistes  attachés  à  l'usine  de  Jacques  Chapelle. 

SCHORRËS. —  On  nomme  ainsi,  dans  la  Nécriande, 
les  alluvions  produites  dans  la  mer  par  certains  cou- 
rants, le  long  des  côtes,  et  qui  appartiennent  à  TKtat. 
Un  srhorre  est  mûr  quand  il  dépasse  un  peu  le  niveau 
des  hautes  marées  et  commence  à  se  couvrir  d'herbes 
fines.  Alors  l'Etat  le  vend  ou  concède  à  une  compagnie 
particulière,  qui  commence  par  l'endiguer  pour  le  met- 
tre en  valeur.  L'Etat  prescrit  et  surveille  i'endigue- 
ment.  Un  schorre  n'est  livré  à  la  spéculation  qu'après 
que  l'on  a  reconnu  par  un  sondage  que  son  sol  ren- 
ferme l'argile  et  le  sable  nécessairf's  à  son  endigue- 
ment.  La  province  de  Zélande,  particulièrement,  s'a- 
grandit de  temps  en  temps  par  des  conquêtes  de  ce 
genre,  dont  l'installation  est  coordonnée  suivant  un 

{>lan  d'ensemble.  Il  se  forme  aussi  des  schorres  dans 
e  Zuyderzée.  C.D— t. 

SCIENCES  (Faculté  des).  ~  A  partir  de  1876,  le  traite- 
ment  a  été  fixé  :  professeurs,  à  Paris,  13,000  fr,  ;  par- 
tout ailleurs,  de  6,000  à  10,000  fr.  ;  agrégés,  en  tous 
lieux,  2,000  fr. 

SCRUTIN  (d'arrondissement,  de  liste).  — Le  scrutin 
dit  d'arrondissement  est  le  scrutin  uninominal  :  l'en- 
semble du  territoire  est  divisé  en  circonscriptions 
électorales,  qui  répondent  pour  la  plupart  à  des  arron- 
dissements, et  chaque  circonscription  nomme  un  dé- 
puté. Au  scrutin  de  liste,  chaque  électeur  inscrit  sur 
son  bulletin  autant  de  noms  que  la  commune  a  de 
conseillers  municipaux,  le  département  de  sénateurs 
et  de  déf^utés  à  nommer.  Le  scrutin  de  liste  a  toujours 
fonctioimé  en  France,  sauf  à  Paris,  pour  les  élections 
communales;  il  a  été  établi  pour  les  élections  sénato- 
riales par  la  loi  constitutionnelle  de  1875;  il  a  alterné 
avec  In  scrutin  uninominal  pour  les  élections  à  la 
Chambre  des  députés.  C'est  ainsi  que  les  assemblées 
de  la  première  et  de  la  deuxième  république  ont  été 
élues   au  scrutin  de   liste;   les  corps  législatifs  du 

gremier  et  du  second  Kmpire,  les  chambres  de  la 
restauration  et  de  la  monarchie  de  Juillet,  ont 
au  contraire  été  nommés  au  scrutin  dit  d'arron- 
dissement. Abrogé  au  coup  d'État  du  2  décembre  par 
Louis-Napoléon,  le  scrutin  de  liste  fut  rétabli  pour  les 
élections  à  l'Assemblée  nationale  de  1871  parun  décret 
du  gouvernement  de  la  défense  nationale;  il  resta 
en  usage  jusqu'en  1875  où  il  fut  de  nouveau  remplacé 
par  le  scrutin  d'arrondissement,  malgré  les  efforts  du 
parti  répubUcain  et  de  Gambetla.   Faire  rétablir  le 


scrutin  de  liste,  qu'il  considérait  comme  le  seul  scru- 
tin politique  et  l'expression  sincère  du  suffrage 
universel,  fut  dès  lors  une  des  pensées  constantes 
du  grand  orateur  et  Tun  des  premiers  articles  de  son 
programme.  Proposée  par  M.  Bardoux  en  1880,  la  ré- 
forme électorale  fut  votée  par  la  Chambre,  aprè^  un 
discours  de  Gambetta  (19  mai  1881)  ;  mais  le  Sénat  la 
repoussa  ;  les  ennemis  du  président  de  la  Chambre  pré- 
tendaient que  le  scrutin  de  liste  serait  entre  ses  mains 
un  instrument  de  dictature.  Gambetta,devenu  président 
du  conseil  des  ministres  le  14  novembre  1881,  proposa 
alors  d'inscrire  dans  la  loi  constitutionnelle,  dont  la 
revision  était  demandée,  le  principe  du  scruUn  de 
liste  :  le  suffrage  universel  aurait  ainsi  quatre  années 
pour  se  préparer  à  cette  grande  réforme  ;  mais  là  en- 
core Gambetta  fut  vaincu  par  une  coalition,  et  le  scrutin 
de  liste  ne  fut  voté  qu'à  la  fin  de  la  législature,  trois 
ans  après  la  mort  du  chef  répubUcain  qui  eût  été  ca- 
pable de  l'organiser,  et  quelques  semaines  seulement 
avant  la  séparation  des  Chambres.  La  nouvelle  appli- 
cation du  scrutin  de  liste  n'a  pas  été,  à  sa  première 
épreuve,  favorable  au  parti  républicain.  —  Les  argu- 
ments pour  et  contre  le  scrutin  de  liste  ont  été  sou- 
vent développés  dan^  des  discours  et  des  articles  : 
pour  :  Gambetta,  Ricard  (l'Assemblée  nationale)  ;  Bar- 
doux,  Waldeclc -Rousseau  (Chambre  des  députés); 
Edouard  Millaud  (Sénat);  Joseph  Reinach,  (brochure 
1880;  contre  :  Dufaure,  Antonin  Lefebvrc-Ponulis 
(Assemblée  nationale)  ;  Roger,  Hémon  (Chambre  d^ 
députés);  Waddington  (Sénat)  ;  duc  de  Broglie  {Vues 
sur  le  gouvernement  de  ta  France),  D'après  les  par- 
tisans du  scrutin  de  liste,  ce  mode  de  votation  est  le 
scrutin  politique  ;  il  ne  laisse  pas  de  place  aux  in- 
fluences locales,  il  rend  impossible  la  corruption  et 
l'intimidation;  il  favorise  l'esprit  de  transaciion;  il 
permet  aux  mandataires  qui  en  sont  issus  de  voiries 
classes  de  plus  haut  et  de  ne  pas  subordonner  Tinté- 
rèt  national  à  des  préoccupations  de  clocher.  Les  ad- 
versaires du  scrutin  de  liste  prétendent  au  contraire 
que  ce  mode  de  votation  favorise  à  l'excès  les  grands 
courants,  conduit  nécessairement  à  de  trop  brusques 
et  trop  fréquents  changements,  supprime  les  in- 
fluences légitimes  de  personnalités  nouvellement  con- 
nues abandonne  la  confections  des  listes  à  des  co- 
mités généralement  improvisés  et  dont  les  membres, 
politiciens  de  profession,  ne  représentent  pas  la 
moyenne  de  l'opinion.  —  Le  scrutin  de  liste  a  été 
établi  pour  les  élections  législatives  en  Italie  par  une 
loi  de  1881  ;  le  scrutin  d'arrondissement  est  le  mode 
de  votation  adopté  pour  les  élections  dans 
tous  les   autres    pays   parlementaires    de   l'Europe. 

J.  R. 

SCULPTURE  COMPARER  (musée  db).  —  Le  musée  de 
sculpture  comparée  du  Trocadéro  a  été  commencé  le 
4  novembre  1879.  Il  a  été  terminé  dans  ses  grandes 
lignes  le  4  novembre  1885.  La  pensée  de  créer  un 
musée  des  monuments  français  date  de  la  Révolu- 
tion. C'est  Alexandre  Lenoir  qui  entreprit  dès  1790  de 
réaliser  cette  pensée.  Les  pouvoirs  publics  lui  prêtè- 
rent une  énergique  assistance,  et  c'est  tout  à  fait  à 
tort  que  dans  le  mémoire  qu'il  adressa  ati  roi  en  18 IS 
et  qu'il  reproduisit  en  tète  de  son  catalogue,  Alexan- 
dre Lenoir  dit  «  que  dans  les  temps  désastreux  de  la 
Révolution  il  empêcha  au  péril  de  sa  vie  nombre  de 
monuments  d'être  la  proie  d'un  vandalisme  destruc- 
teur. »  Cette  assertion  est  si  peu  vraie  que  non  seu- 
lement les  mini'itres  de  l'intérieur  de  la  République, 
mais  encore  les  administrateurs  des  départements  firent 
de  larges  sacrifices  pour  enrichir  le  musée  des  monu- 
ments français.  «  Alexandre  Lenoir  avait  disposé  son 
musée  dans  huit  salles  consacrées  aux  xni*,  xiv<^,  xve, 
xvio,  xvii^etxviii®  siècles.  Ces  salles  étaient  précédées 
d'un  vestibule  qui  renfermait  des  monuments  de  tous 
les  siècles.  Une  dernière  salle  enfin  avait  reçu  le 
monument  élevé  à  la  mémoire  de  François  I«'  et  exé- 
cuté sur  les  dessins  de  Philibert  Delorme.  Dans  la 
première  cour  s'élevait  la  façade  du  château  d'Anet 
bàii  par  Philibert  Delorme  pour  Diane  de  Poitiers, 
dans  la  seconde  un  fï*agment  du  cliàteau  de  Gaillon 
bâti  par  Jean  Joconde,  architecte  de  Louis  XU,  tenait 
la  place  principale.  Enfin  la  troisième  cour  devait 
présenter  aux  artistes  Tensenible  d'un  édifice  gothi- 
que construit  avec  les  débris  d'une  basilique  que 
Pierre  de  Montereau  avait  construite  pour  saint 
Louis.  » 

Une  ordonnance  royale  en  date   du  18  décembre 


scu 


—  1857  — 


SCtJ 


1816  supprima  le  musée  des  monuments  français.  Le 
baron  de  Guilhermy,  dans  les  Annales  archéologiguesy 
a  tracé  un  tableau  de  Teiécution  de  l'ordonnance  ile 
1816:  «  Au  lien  de  réunir  sons  un  abri  commun  les 
sculptures  qui  n'étaient  pas  appelées  à  reprendre  leurs 
anciennes  places,  l'architecte  chargé  des  travaux  de 
la  nouvelle  Kcole  des  Beanx-Arts  fit  jeter  hors  des 
salles  et  entasser  en  plein  air,  dans  une  cour  humide, 
une  énorme  quantité  de  statues  et  de  bas-reliefs  qui 
demeurèrent  ainsi  exposés  à  toutes  les  intempéries 
du  ciel,  jusqu'à  l'époque  de  la  création  des  galeries 
de  Versailles,  c'est-à-dire  pendant  près  d'un  quart  de 
siècle.  J'avais  quatorze  ou  quinze  ans,  quand  un  jour 
mon  père  qui  portait  un  grand  amour  aux  monuments 
de  notre  histoire  nationale,  me  conduisit  dans  les 
cours  désolées  des  Petits-Augustins.  Il  me  semble 
voir  encore  le  sol  tout  jonché  de  débris  de  sculptures 
coloriées,  de  bustes  de  marbre  empilés  comme  des 
bûches  les  uns  sur  les  autres,  de  fragments  de 
faïences,  de  pavés  historiés  et  de  vitraux  dispersés  de 
tous  côtés;  les  sculptures  les  plus  délicates  de  (îail- 
lon  étaient  rangées  comme  des  moellons.  Je  consi- 
dérais de  loin  avec  une  respectueuse  curiosité,  à  tra- 
vers les  fentes  des  palissades,  de  grandes  figures 
agenouillées,  revêtues  de  manteaux  fleurdelisés  que 
que  j'ai  reconnues  depuis  à  Versailles.  Ce  triste  spec- 
tacle ne  s'est  point  effacé  de  ma  mémoire.  Les  monu- 
ments ainsi  traités  subirent  d'irréparables  dégrada- 
tions dont  les  traces  ne  sont  encore  que  trop  apparentes 
sur  ceux  qui  ont  survécu  à  tant  de  vicissitudes.  » 

Dans  la  monographie  de  Saint  Denis,  M.  de  Gui- 
Ihermy  dit  que  fordonnance  de  1816  avait  eu  cepen- 
dant «  un  côté  moral,  la  décence  publique  réclamant 
le  rétablissement  de  tombeaux  profanés  pendant  la 
Révolution  y>.  La  vérité  est  que  la  dispersion  du  mu- 
sée des  monuments  français  et  les  destructions  qui  en 
résultèrent  ont  été  dues  non  seulement  à  l'esprit  clé- 
rical de  la  Restauration,  mais  encore  à  la  haine  que 
l'Ecole  des  Beaux-Artg,  exclusivement  éprise  de  l'anti- 
que, avait  vouée  à  tout  ce  qui  était  français.  M.  de 
Guilhermy  constate  en  effet  que  les  professeurs  de 
l'Ecole  des  beaux-Arts  se  montraient  tout  à  fait  in- 
différents à  l'odieux  spectacle  qu'ils  avaient  chaque 
jour  sous  les  yeux  en  allant  donner  leui-s  leçons.  On 
peut  juger  par  l'acle  de  181H  combien  il  sied  d'ail- 
leurs aux  hommes  de  la  Restauration  de  parler  du 
vandalisme  révolutionnaire  qui  avait  sauvé  des  mo- 
numents qu'ils  ont  pris  à  lâche  de  détruire  ou  de  lais- 
ser perdre. 

Le  projet  de  créer  un  musée  des  monuments  fran- 
çais fut  repris  à  la  date  du  21  mars  1851  par  M.  Léon 
de  Laborde. 

Plus  tard,  au  mois  de  juin  1855,  la  commission  des 
monuments  historiques  demanda  que  les  moulages 
faits  par  les  soins  de  ses  architectes,  particulièrement 
à  Paris,  fussent  réunis  et  exposés  à  l'Ecole  des  Beaux- 
Arts.  En  1860,  au  moment  de  la  réorganisation  de 
l'Ecole  des  Beaux- Arts,  la  proposition  fut  reprise,  mais 
sans  plus  de  succès.  En  1876,  M.  Antonin  Proust  fit 
au  conseil  sapérieur  des  Beaux-Arts  la  proposition  de 
créer  un  musée  des  moulages  français  en  procédant 
avec  les  départements  par  voie  d'échange  et  en  do- 
tant ainsi  chacun  des  chefs-lieux  de  départements  de 
quelques-unes  des  reproductions  qui  prendraient  place 
à  Paris  dans  le  musée  central  projeté.  Cette  proposi- 
tion ne  fut  pas  acceptée,  et  en  lh79,  lorsque  M.  An- 
tonin Proust  fut  appelé  à  la  vice-présidence  de  la 
commission  des  monuments  historiques,  il  renouvela 
sa  proposition  en  demandant  qu'une  somme  fût  pré- 
levée sur  la  dotation  annuelle  du  service  des  monu- 
ments historiques  pour  la  création  des  moulages 
français.  M.  Viollet-Ie-Duc  rappela  dans  cette  séance 
qu'il  avait  proposé  antérieurement  de  placer  à  l'Ecole 
des  Beaux-Arts  la  série  des  mou'ages  faits  d'après  les 
monuments  français,  ce  qui  permettrait  d'établir  des 
comparaisons  avec  des  sculptures  étrangères.  M.  Viol- 
let-le-Duc,  invité  à  présenter  un  rapport  sur  une  créa- 
tion qui  serait  indépendante  de  l'Ecole  desBeaux-Arts^ 
formula  ainsi  le  programme. 

|o  Helations  entre  les  sculptures  appartenant  à 
différentes  époques  et  civilisations  : 

3(>  Pour  la  France,  divisions  par  écoles  aux  diffé- 
rentes époques. 

30  Application  de  la  sculpture  suivant  le  système 
d'architecture  employé. 

Chez  les  peuples  qui  ont  atteint  un  haut  degré  de 


civilisation,  disait  M.  Vlollet-le-Duc  dans  son  rapport. 
Fart  de  la  sculpture  se  divise  en  trois  périodes  : 

Imitation  de  la  nature  suivant  une  interprétation 
plus  ou  moins  délicate  et  intelligente.  Epoque  archaï- 
que pendant  laquelle  on  prétend  fixer  les  types.  Epo- 
que d'émancipation  et  de  recherche  du  vrai  dans  le 
détail  et  perfectionnement  des  moyens  d'observation 
et  d'exécution. 

Tous  les  peuples  ne  remplissent  pas  la  totalité  de 
ce  programme.  Les  uns  parcourent  les  trois  phases 
de  ce  développement  de  l'art,  d'autres  n'accomplis- 
sent que  les  deux  premières  et  ne  dépassent  pas  la 
période  hiératique.  Tels  ont  été  la  plupart  des  peu- 
ples orientaux,  les  Egyptiens  de  l'antiquité  et  les  By- 
zantins. 

Mais,  où  que  l'on  prenne  la  civilisation  à  laquelle 
appartient  l'art  de  la  sculpture,  il  y  a  une  analogie 
frappante  avec  les  produits  de  chacune  de  ces  pé- 
riodes. 

Ainsi  l'époque  dite  éginétique  ou  archaïque  chez 
les  Grecs  présente  avec  l*époque  archaïque  du  xii<^  siè- 
cle en  France  les  rapports  les  plus  intimes.  De  môme 
entre  le  développement  de  l'art  sculptural  chez  les 
Grecs  de  l'antiquité,  à  dater  de  Périclès,  et  en  France, 
à  dater  du  xiii*  siècle,  trouve-t-on  des  analogies  très 
intéressantes  à  constater. 

Donc,  des  moulages  empruntés  à  des  sculptures 
égyptiennes  de  l'époque  sincèrement  archaïque,  c'est- 
à-dire  comprises  entre  les  sixième  et  dix- huitième 
dynasties,  on  des  sculptures  grecques  éginétiques,et 
à  des  œuvres  de  la  statuaire  française  du  xii«  siècle 
mis  en  regard  avec  méthode,  montreraient  com- 
ment ces  trois  expressions  de  l'art,  si  éloignées  qu'elles 
soient  entre  elles  par  le  temps  et  les  conditions  so- 
ciales, procèdent  d'un  môme  principe  et  produisent 
des  résultats  à  peu  près  identiques. 

Il  est  telle  statue  du  portail  royal  de  la  cathédrale 
de  Chartres  qui,  placée  près  de  certaines  figures  hié- 
ratiques grecques,  semblerait  se  rattacher  à  une  môme 
école  par  la  façon  d'interpréter  la  nature,  de  concevoir 
les  types  et  parle  faire.  Il  en  serait  de  môme  pour  les 
sculptures  datant  de  l'afiTranchissement  de  l'hiératisme 
entre  l'art  grec  depuis  Phidias  et  l'art  français  des 
xiii®  et  xive  siècles. 

Ces  grands  principes  rois  en  lumière  et  rendus  in- 
telligibles pour  tous,  au  moyen  d'un  choix  assez  res- 
treint de  moulages,  il  s'agirait  de  donner  une  idée 
complète  de  notre  sculpture  française. 

Un  musée  de  moulages  do  la  sculpture  française 
devrait  être  chronologiquement  classé  en  raison  des 
écoles  diverses  qui  ont  dominé  sur  le  territoire  réuni 
aujourd'hui  en  un  seul  faisceau. 

Au  point  de  vue  de  l'architecture,  les  écoles  fran- 
çaises se  divisent  au  xii^  siècle  en  écoles  cluni- 
sienne  ou  bourguignonne,  provençale,  périgourdine^ 
languedocienne,  auvergnate,  poitevine  et  saintongeoise, 
de  l'Ile-de-France,  champenoise,  normande  et  picarde. 
En  tout  onze  écoles  parfaitement  distinctes  en  ce  qui 
touche  le  système  de  construction  adopté,  la  manière 
de  remplir  les  programmes  donnés,  la  forme  appa- 
rente et  l'ornementation. 

Il  n'en  est  pas  tout  à  fait  ainsi  de  la  sculpture  sta- 
tuaire. 

Certaines  parmi  ces  écoles  dominent  sur  plusieurs 
contrées.  La  statuaire  du  xii*)  siècle  de  TIle-de-France, 
de  la  Champagne,  est  supérieure,  comme  style  et  faire, 
à  celle  des  autres  provinces,  et  compose  un  groupe 
très  puissant.  Celle  de  Cluny  ou  bourguigonne  s'étend 
fort  loin  et  fait  sentir  son  influence  juS(|u'en  Auver- 
gne, dans  la  Haute-Marne  et  sur  les  bords  du  Rhône 
jusqu'à  la  hauteur  de  Vienne. 

L'école  provençale  se  confond  souvent  avec  celle  du 
Languedoc,  qui  jette  un  vif  éclat  au  xii^  siècle  et 
s'ét<  nd  aux  bords  de  la  Gironde  et  dans  le  Péri- 
gord. 

Sous  le  rapport  de  la  statuaire,  l'école  poitevine  et 
saintongeoise  est  la  moins  remarquable  comme  style 
et  comme  exécution,  bien  qu'elle  ait  énormément  pro- 
duit. 

Quand  l'hiératisme  est  abandonné  vers  la  fin  du 
XI*  siècle,  par  suite  du  développement  que  prennent 
les  écoles  laïques  en  France,  et  quand  l'architecture 
délaisse  les  traditions  romanes  monastiques  pour 
inaugurer  un  art  établi  sur  des  principes  nouveaux, 
de  môme  les  sculpteurs  laissent  de  côté  l'archaïsme 
qui  dominait  dans  les  œuvres  antérieures,  pour  re- 


scu 


—  1858  — 


SCU 


courir  k  l'étude  de  la  nature  et  procéder  comme,  avant 
eux,  avaient  procédé  les  Grecs. 

Ces  écoles  disséminées  tendent  k  se  fondre  on, 
pour  parler  plus  exactement,  les  provinces  qui  se  met- 
tent k  la  tête  du  mouvement  architectonique  instal- 
lent des  écoles  de  statuaire  qui  étouffent  les  derniers 
restes  des  écoles  romanes  et  qui  même  pourraient 
être  confondues  en  une  seule.  Toutefois,  on  distingue 
encore  trois  noyaux,  qui  sont  :  l'Ile-de-France,  la 
Champagne  et  la  Bourgogne. 

A  partir  du  iiv*  siècle,  il  n'y  a  plus  que  deux  écoles 
de  statuaire  en  France,  Técole  bourguignonne,  péné- 
trée d'éléments  flamands,  et  Técole  française  propre- 
ment dite. 

Mais  au  xvi*  siècle  se  développent  de  nouveau  trois 
écoles  de  statuaire  :  l'école  de  l'Ile- de-France,  Técole 
bourguignonne  et  Técole  languedocienne,  lesquelles 
ont  produit  chacune  des  œuvres  vraiment  originales 
et  d'une  valeur  incontestable. 

Il  convient  donc  de  classer,  comme  nous  l'avons  dit, 
les  œuvres  de  la  statuaire  française  par  écoles,  en 
suivant  un  ordro  chronologique.  De  cette  classification, 
on  peut  affirmer  qu'il  naîtra  un  enseignement  des  plus 
fnictueux  :  car  il  n'est  nullement  indifférent  pour  les 
artistes  de  savoir  comment  se  sont  développées  les 
belles  écoles,  quelle  voie  elles  ont  suivie,  en  abandon- 
nant l'hiératisme  pour  s'attachera  l'observation  atten- 
tive de  la  nature  et  quelle  influence  les  traditions 
archaïques  ont  pu  avoir  sur  ce  développement. 

Il  restera  k  composer  le  musée  de  la  sculpture  d'or- 
nement ou  décorative,  appliquée  avec  divers  styles 
d'architecture,  et  ces  collections  ne  seront  ni  les  moins 
instructives  ni  les  moins  intéressantes. 

Savoir  pourquoi  et  comment  tel  procédé  de  sculp- 
ture d'ornement  a  été  appliqué  k  telle  architecture 
est  certainement  une  connaissance  qui  nous  fait  abso- 
lument défaut. 

Constater  dans  quels  cas,  par  exemple,  la  sculpture 
fait  pour  ainsi  dire  corps  avec  l'arrhitecture,  dans 
quels  cas  elle  semble  une  décoration  d'emprunt  appli- 
quée, pour  ne  parler  que  des  principes  très  généraux, 
c'est  ceruinement  posséder  les  éléments  de  l'art  dé- 
coratif sculptural. 

Mais  dans  un  musée  de  sculpture  d'ornement  com- 
parée, nos  artistes  trouveraient  bien  d'autres  ensei- 
gnements. Us  y  verraient  comment  la  sculpture  déco- 
rative passe  de  même  par  la  période  hiératique  k 
certaines  époques,  et  comment  elle  s'en  affranchit; 
comment  la  flore  et  la  faune  ont  élé  interprétées  d'une 
façon  conventionnelle  pendant  cette  période  d'hiéra- 
tisme, et  comment  de  leur  étude  attentive  sur  la  na- 
ture datent  les  belles  époques  de  l'art,  aussi  bien  dans 
l'antiquitéque  pendant  le  moyen  âge  et  la  renaissance. 

Mais  pour  qu'uD  semblable  musée  soit  complet  et 
réellement  insullé  pour  l'étude,  ii  faudrait  que  des 
vues  ou  relevés  partiels  des  monuments  d'où  seraient 
tirées  ces  sculptures  fussent  exposés  près  d'elles;  ce 
qui  serait  facile  grâce  aux  archives  des  monuments 
historiques  et  k  la  possibilité  de  se  procurer  des  pho- 
to (traphies  de  ces  édifices  ou  portions  d'édifices. 

Ces  trois  sections  distinctes  du  musée  de  la  sculp- 
ture comparée  'demanderaient,  pour  être  convenable- 
ment exposées,  d'assez  vastes  locaux  ;  toutefois,  en  se 
limiunt,  par  suite  d'un  choix  très  sérieux  des  types, 
aux  seuls  exemples  qui  peuvent  être  considérés  comme 
des  documents  nécessaires  k  l'étude,  nous  ne  pensons 
pas  que  cette  exhibition  dût  occuper  une  place  telle 
qu'on  ne  pût  la  trouver  sans  trop  de  peine,  si  on  veut 
rîécUement  obtenir  cette  installation. 

Nous  avons  dit  qu'il  y  avait  intérêt  k  montrer  les 
analogies  qui  existent  entre  des  œuvres  de  sculpture 
dues  k  l'antiquité,  notamment  des  époques  dites  hié- 
ratiques et  celles  appartenant  k  la  période  archaïque 
du  moyen  âge. 

Une  salle  serait  consacrée  k  faite  ressortir  ces  rap- 
ports : 

r«  salle,  —  Il  conviendrait  d'y  réunir  quelques  types 
égyptiens  appartenant  aux  premières  dynasties. 

Des  types  assyriens; 

Des  types  grecs  de  l'époque  dite  éginétique  ; 

Des  types  de  notre  école  de  statuaire  française  de 
la  fin  du  ii«  siècle  au  milieu  du  xii*. 

Il  ne  serait  pas  besoin  d'un  grand  nombre  d'exem- 
ples pour  faire  ressortir  les  rapports  qui  existent  en- 
tre ces  diverses  expressions  de  la  statuaire  aux  époques 
archaïques.  . 


t«  salle,  —  Une  deuxième  aalle  montrerait  comment 
l'art  de  la  statuaire  a  rompu  avec  les  types  hiératiques 
pour  recourir  k  l'étude  attentive  de  la  natare,  soit 
chex  les  Grecs  k  dater  de  Phidiaa,  soit  chez  nous  k 
dater  du  xiii*  siècle. 

Cette  comparaison  entre  ces  deux  écoles  séparées 
par  des  siècles,  présenterait  un  intérêt  des  plus  sérieux  : 
car  bien  que  les  expressions  d'art  soient  différentes  et 
que  les  objets  représentés  n'aient  aucune  relation  en- 
tre eux,  les  procédés  sont  identiques,  la  manière  d'In- 
terpréter la  nature  est  k  très  peu  près  la  môme  et,  au 
point  de  vue  du  style,  U  supériorité  est  apparente 
dans  les  denx  écoles. 

C'est  k  la  limite  de  ce  premier  développement 
qu'apparaît  chez  les  Grecs  comme  chez  noua  le  por- 
trait (la  reproduction  de  l'individualité  humaine). 
Exemples  k  mettre  en  regard. 

3*  salle,  —  L'art  de  la  sUtuaire  adopte  bientôt  des 
canons  chez  les  Grecs  de  l'antiquité  comme  chez  nous 
vers  la  fin  du  xiii'  siècle. 

La  maniét^e  apparaît.  Il  s'établit  dans  l'une  comme 
dans  l'autre  école  un  beau  de  convention.  L'exécution 
atteint  alors  un  haut  degré  de  perfection.  Alors  Tltalie, 
l'Allemagne  entrent  en  scène  et  leurs  écoles  les  dis- 
tinguent de  celles  de  la  France  pendant  la  durée  du 
xiv«  siècle  et  pendant  le  xv«  siècle. 

On  voit  comment  au  xv«  siècle  Tinfloence  de  l'école 
des  bords  du  Rhin  et  des  Flandres  envahit  la  Bour- 
gogne, comment  la  manière  atteint  les  demièrea  li- 
mites, mais  comment  aussi  l'école  de  l'Ile-de  France 
et  celle  de  la  Champagne  résistent  k  cette  invasion. 

i^  salle.  —  Serait  consacrée  k  la  Renaissance  et  fe- 
rait voir  les  écarts  considérables  qui  existent  entre  la 
sUtoaire  italienne  de  cette  époque  et  la  statuaire 
française;  comment  les  Flandres  échappent  k  peine 
aux  influences  antérieures,  et  comment  l'Espagne  pos- 
sède une  belle  école  de  statuaire  pendant  la  première 
moitié  du  XVI*  siècle. 

5«  salle.  —  Contiendrait  les  continuateurs  de  la  Re- 
naissance, Michel- Ange  et  son  écolOrqui  rapidement 
tombe  dans  l'exagération,  undia  que  la  France  con- 
serve encore,  et  Jusqu'au  xviii*  siècle,  une  bonne  école 
de  statuaire. 

6*  salle,  ^ Cette  salie  serait  destinée  k  contenir  des 
fragmenu  d'ornementation  sculptée  appliquée  à  l'ar- 
chitecture, divisés  par  écoles.  Des  photographies  des 
édifices  auxquels  seraient  empruntés  ces  fragmenu 
devraient  être  exposées  dans  leur  voisinage. 

Une  commission  fut  constituée  par  les  soins  du 
service  des  monuments  historiques,  composée  de 
MM.  Antonin  Proust,  président;  Quicherat,  directeur 
de  l'école  des  Chartes,  Bœswillwald,  Lisch,  Ruprich- 
Robert,  inspecteurs  généraux  des  monuments  histo- 
riques, de  Baudot,  inspecteur  des  édifices  diocésains, 
Castagnary,  conseiller  d'État,  Gustave  Dreyfus,  Gan- 
tier, contrôleur  des  travaux;  Geoffroy -Dechanroe, 
SUtuaire  ;  Robert  de  Lasteyrie,  professeur  k  l'École 
des  Chartes  ;  Poulin,  directeur  des  bâtiments  civils  ; 
du  Sommerard,  directeur  du  mu&én  de  Cluny  ;  Steinheil, 
peintre,  et  Tétreau,  conseiller  d'État. 

Cette  commission  rechercha  tout  d'abord  un  local 
dans  lequel  pourrait  être  placé  le  nouveau  musée.  Le 
palais  du  Trocadéro  présentait  de  bonnea  conditions 
non  seulement  pour  1  installation  des  moulages,  mais 
encore  pour  celle  des  ateliers  de  reproduction  et  des 
magasins  destinés  k  la  conservation  dea  moules.  La 
commission  fit  choix  de  l'aile  du  palais  du  Trocadéro, 
placée  du  côté  de  Paris,  mais  cette  aile  étant  d<^jk 
occupée  par  le  musée  d'ethnographie,  il  fallut  obtenir 
le  transfert  de  ce  musée  au  premier  étage  du  palais, 
puis  demander  aux  Chambres  les  crédits  nécessaires 
pour  le  chauffage  du  musée.  L'appui  que  le  président 
de  la  commission  rencontra  auprès  de  M.Jules  Ferry, 
ministre  de  l'instruction  publique  ;  auprès  de  M.  l'a- 
miral Jauréguiberry,  ministre  de  la  marine,  qui  fit 
transporter  le  musée  ethnographique  par  une  escouade 
de  marins,  et  enfin  auprès  de  M.  Sadi-Carnot,  soos- 
secrétaire  d'État  au  ministère  des  travaux  publics,  per- 
mit de  mettre  rapidement  l'aile  du  Trocadéro  en  état 
de  recevoir  le  musée.  La  commission  décida  de  se 
réunir  chaque  semaine  au  Trocadéro  et  grâce  au  zèle 
de  ses  membres  et  h  l'activité  de  M.  du  Sommerard, 
de  M.  Geoffroy-Dechaunie  et  de  M.  Poizadoux,  qui, 
k  des  titres  divers,  ont  été  ses  agents  d'exécution,  les 
galeries  du  Trocadéro  purent  être  ouvertes  en  partie 
au  public  dès  le  mois  de  mai  1882. 


SIE 


—  1859  — 


SOL 


Conformément  aux  indications  données  par  Viollet- 
le-Dac,  que  la  mort  enleva  an  moment  où  la  commis- 
sion commençait  ses  travaux,  des  termes  de  compa- 
raison empruntés  aux  modèles  de  sculpture  étrangère 
ont  été  placés  dans  les  salles  du  musée  du  Trocadéro. 
Mais  le  musée  de  sculpture  comparée  est  ayant  tout, 
pour  le  public  qui  lui  a  fait  grand  accueil,  le  musée 
des  monuments  français.  Il  est  un  premier  hommage 
rendu  à  Tart  national,  qui  aura  bientôt,  il  faut  l'espé- 
rer, dans  le  musée  du  Louvre  la  place  qui  lui  est  due 
et  qui  verra  dans  la  série  dns  industries  d'art  se 
créer  ces  collections  d'art  décoratif  que  les  travail- 
leurs attendent  depuis  si  longtemps.         A.  P. 

SERVICE  MILITAIRE.  —  France,  —  D'après  la  loi  de 
1868,  la  durée  du  service  pour  les  Jeunes  gens  incor- 
porés à  l*armée  active  était  de  5  ans,  à  l'expiration 
desquels  ils  devaient  servir  4  ans  dans  la  réserve;  la 
durée  du  service  pour  les  jeunes  gens  laissés  dans  la 
réserve  était  de  Sans.  Suivant  la  loi  du  17  Juillet  1872, 
tout  Français  qui  n'est  pas  déclaré  impropre  à  tout 
service  militaire  peut  être  appelé  depuis  r&s;e  de  20  ans 
Jusqu'à  40.  Il  fait  partie  de  Parmée  active  pendant 
5  ans,  de  la  réserve  de  l'armée  active  pendant  4  ans, 
de  l'armée  territoriale  pendant  5  ans  et  de  la  réserve 
de  Tarmée  territoriale  pendant  6  ans.  La  durée  du 
service  compte  du  1»^  Juillet  de  l'année  du  tirage  au 
sort.  Le  ministre  de  la  guerre  fixe  chaque  année  le 
chiffre  des  hommes  appelés  au  service  actif,  lesquels 
sont  pris  par  ordre  de  numéros  sur  la  liste  du  recru- 
tement; les  autres,  auxquels  on  ne  fait  faire  qu'une 
année  de  service,  et  même  6  mois  s'ils  prennent  une 
instruction  sufKante,  restent  dans  leurs  foyers,  mais 
toujours  à  la  disposition  du  goovernementjusqu'à  l'ex- 
piration de  S  ans.  Les  hommes  en  disponibilité  de  l'ar- 
mée active  et  les  hommes  de  la  réserve  peuvent  se 
marier,  tout  en  restant  soumis  aux  obligations  de  ser- 
vice imposées  à  leur  classe;  il  n'y  a  que  les  pères  de 
quatre  enfants  qui  passent  de  droit  duns  l'armée  ter- 
ritoriale. Le  militaire  de  l'armée  active  qui  ne  devait 
rester  qu'un  an  sous  les  drapeaux  est  retenu  une 
seconde  année,  s'il  ne  sait  pas  lire  et  écrire,  et  s'il 
ne  satisfait  pas  aux  examens  de  ses  chefs.  —  En  Hol- 
lande^  la  durée  du  service  nominale  en  temps  de 
paix  est  fixée  à  5  ans  ;  une  loi,  qui  doit  être  votée 
annuellement,  peut  prolonger  cette  durée.  Le  service 
effectif  n'est  que  de  8  mois  par  an.  —  En  Delgiqu^y  la 
durée  du  service  exigible  est  de  8  années  ;  mais  les 
soldats  ne  restent  que  2  ans  et  demi  sous  les  arme», 
puis  passent  dons  la  réserve.  (K.  Armés,  dans  le  Dic- 
tionnaire et  au  Supplément,) 

SIEGE  (Etat  de).  —  Cette  situation  anormale  d'un 
pays  a  été  régie  par  une  loi  du  3  avril  1878,  ainsi 
qu  il  suit  : 

Art.  ]*'.  —  L'état  de  siège  ne  peut  être  déclaré 
qu'en  cas  de  péril  imnminent,  résulunt  d'une  guerre 
étrangère  ou  d'une  insurrection  à  main  armée. 

Une  loi  seule  peut  déclarer  l'état  de  siège  :  cette  loi 
désigne  les  communes,  les  arrondissements  ou  dépar- 
tements auquOiS  il  s'applique.  Elle  fixe  le  temps  de 
sa  durée.  A  l'expiration  de  ce  temps,  l'état  de  siège 
cesse  de  plein  droit,  à  moins  qu'une  loi  nouvelle  n'en 
prolonge  les  effets. 

Art.  2.  —  En  cas  d'ajournement  des  Chambres,  le 
président  de  la  République  peut  déclarer  l'état  de 
siège,  de  l'avis  du  conseil  des  ministres,  mais  alors 
les  Chambres  se  réunissent  de  plein  droit,  deux  jours 
après. 

Art.  3.  —  En  cas  de  dissolution  de  la  Chambre  des 
députés,  et  jusqu'à  l'accomplissement  entier  des  opé- 
rations électorales,  l'état  de  siège  ne  pourra,  même 
provisoirement,  ôire  déclaré  par  le  président  de  la 
République. 

Néanmoins,  s'il  y  avait  guerre  étrangère,  le  prési- 
dent, de  l'avis  du  conseil  des  ministres,  pourrait  décla- 
rer l'état  de  siège  dans  les  territoires  menacés  par 
l'ennemi,  à  la  condition  de  convoquer  les  collèges 
électoraux  et  de  réunir  les  Chambres  dans  le  plus  bref 
délai  possible. 

Art.  4.  —  Dans  le  cas  où  les  communications  seraient 
interrompues  avec  l'AIgt^rie,  le  gouverneur  pourra  dé- 
clarer tout  ou  partie  de  l'Algérie  en  état  de  siège,  dans 
les  conditions  de  la  présente  loi. 

Art.  5.  —  Dans  les  cas  prévus  parles  articles  2  et  3, 
les  Chambres,  dès  qu'elles  sont  réunies,  maintiennent 
ou  lèvent  l'état  de  siège.  En  cas  de  dissentiment  entre 
elles,  l'état  de  siège  est  levé  de  plein  droit. 


Art.  6.  —  Les  articles  4  et  5  de  la  loi  du  9  août  1849 
sont  maintenus,  ainsi  que  les  dispositions  de  ses  autres 
articles  non  contraires  à  la  présente  loi. 

SINCENY  (FAlENCBS  de).  —  La  fabrique  de  Slnceny 
(Aisne)  date  de  la  première  moitié  du  dix-septième 
siècle.  Elle  fut  fondée  par  M.  de  Fayard,  seigneur  de 
Sinceny.  Ses  produits  rappellent  beaucoup  ceux  de 
Rouen.  Souvent  ils  sont  marqués  d'un  S.  Cette  fa- 
brique fut  très  imporunte.  Aux  diverses  époques  de 
sa  prospérité  elle  appela  des  artistes  de  Rouen,  de 
Strasbourg  et  de  Lorraine.  Son  premier  directeur 
s'appelait  Pierre  Pellevé. 

SLANG,  mot  que  les  Gypsies  oi  Zingari  anglais  em- 
ploient comme  synonyme  de  rommany,  langue  bohème. 
Il  désigne  la  langue  changeante  et  capricieuse  des  fa- 
miliarités à  la  mode,  ce  qu'on  appelle  de  nos  jours  à 
Paris  la  longue  verte  et  que  les  Anglais  nommaient 
autrefois  flash.  Le  slang  diffère  du  cànt  (V.  ce  mot)  : 
il  a  un  fond  plus  homogène,  plus  national;  les  expres- 
sions archaïques,  adaptées  aux  besoins  nouveaux,  s'y 
combinent  avec  les  nouveautés  les  plus  hasardeuses  ; 
les  affluents  étrangers  s'y  font  moins  sentir.  C'est  es- 
sentiellement le  langage  du  jour,  non  celui  de  la  veille 
ou  du  lendemain  ;  il  n'a  ni  emploi  sérieux  ni  raison 
d'ôtre  ;  il  est  produit  par  le  heurt  continuel  des  cause- 
ries familières,  par  le  choc  des  répliques  improvisées  ; 
il  se  forme  de  mots  empruntés  de  toutes  parts,  fabri- 
qués de  tonte  main,  ou  détournés  de  leur  sens;  il  varie 
selon  les  classes  qui  le  parlent,  et  il  se  renouvelle  pour 
chaque  génération.  Le  slang  de  VHudribras  de  Butler 
n'est  plus  intelligible  pour  nous;  Smtt,  Arbuthnot,  les 
auteurs  comiques  ont  employé  le  slang  des  époques  où 
ils  vivaient,  et  ils  n'eussent  point  compris  celui  que 
forgent  aujourd'hui,  pour  les  besoins  de  chaque  se- 
maine, les  rédacteurs  du  Punch,  La  chaire,  le  théâtre, 
le  monde  politique,  le  public  des  courses,  les  gens  de 
loi,  les  étudiants,  la  finance,  la  classe  ouvrière,  tout  a 
son  siang. 

SOCIETES  COM  M  RRCI ALES. — On  nomme  Sociétés  à 
responsabilité  limitée  celles  dans  lesquelles  aucun  des 
associés  n'est  tenu  au  delà  de  sa  mise.  D'après  la  loi 
du  23  mai  18B3  qui  les  organisa,  les  administrateurs 
devaient  ôtre  propriétaires  d'un  nombre  d'actions  dé- 
terminé par  les  sututs  :  ces  actions  nominatives,  ina- 
liénables et  déposées  dans  la  caisse  sociale,  éuient 
affectées  à  la  garanties  des  actes  de  la  gestion.  Il  était 
tenu,  cha')ue  annéf)  au  moins,  une  assemblée  générale  ; 
elle  devait  être  composée  d'un  nombre  d'actionnaires 
représentant  le  quart  au  moins  du  capital  social.  Elle 
nommait  un  ou  plusieurs  commissaires,  associés  ou 
non,  pour  faire  un  rapport  sur  la  situation  de  la  So- 
ciété, sur  le  bilan  et  les  comptes  présentés  par  les 
administrateurs  ;  à  son  défaut,  le  président  du  tribunal 
de  commerce  procédait  à  cette  nomination,  sur  la  re- 
quête de  tout  intéressé.  Toute  société  devait  dresser, 
chaque  semestre,  un  état  résumant  sa  situation  active 
et  passive,  et,  chaque  année,  un  inventaire.  Il  était  fait 
sur  les  bénéfices  nets  un  prélèvement  d'un  vingtième 
au  moins,  affecté  à  la  formation  d'un  fonds  de  réserve  ; 
ce  prélèvement  cessait  d'ôtre  obligatoire  lorsque  le 
fonds  de  réserve  avait  atteint  le  dixième  du  capital 
social.  En  cas  de  perte  des  trois  quaru  du  capital 
social,  les  administrateurs  réunissaient  l'assemblée 
générale  pour  faire  décider  s'il  y  avait  lieu  de  faire 
prononcer  la  dissolution  de  la  Société.  A  leur  défaut, 
tout  intéressé  pouvait  demander  la  dissolution  devant 
les  tribunaux.  La  dissolution  pouvait  être  prononcée 
sur  la  demande  de  tout  intéressé,  lorsque  le  nombre 
des  associés  avait  été,  depuis  un  an,  réduit  à  moins 
de  sept.  Des  associés  représentant  le  vingtième  au 
moins  du  capital  social  pouvaient,  dans  un  intérêt 
commun,  intenter  une  action  contre  ses  administra- 
teurs, sans  préjudice  de  celle  que  chaque  associé  pou- 
vait intenter  en  son  nom  personnel.  La  nullité  pro- 
noncée contre  des  actes  de  la  société  ne  pouvait  être 
opposée  aux  tiers  par  les  associés  :  les  fondateurs 
auxquels  elle  était  imputable  et  les  adminitrateurs  en 
fonction  au  moment  où  elle  avait  été  encourue  étaient 
responsables  envers  les  tiers,  sans  préjudice  des  droits 
des  actionnaires.  La  loi  sur  les  sociétés  à  responsa- 
lité  limité  a  été  abolie  en  1807,  et  ces  sociétés  ont  été 
converties  en  Sociétés  anonumes^  auxquelles  s'appli- 
quent les  dispositions  précédentes. 

S0>  DE.  —  Les  tarifs  de  solde  pour  l'armée  ont  été 
revisés  par  décret  du  président  de  la  République,  en 
date  du  25  décembre  1873.  En  voici  le  tableau  : 


sou 


—  1860  — 


STA 


État-major  générai. 

Maréchal  de  France 

Général  de  division  (pied  de  paix) 

Général  de  dÎTision  (pied  de  ^errc) 

Général  de  brigade  (pied  de  paix) 

Général  de  brigade  (pied  de  guerre) 


Corps  (Tétat^major, 


Colonel 

Lieutenant-colonel .... 

Chef  d'escadron 

Capitaine  de  !■•  classe. 
Capit&ine  de  2*  classe. , 

Lieutenant 

Sous-lieutenant. 


Intendance  militaire. 

Intendant  général  inspecteur  (pied  de  paix. . . . 
Intendant  général  inspecteur  (pied  de  guerre) 

Intendant  fpied  de  paix) 

Intendant  (pied  de  guerre) 

Sous-intendant  de  i***  classe 

Sous-intendant  de  2*  classe 

Adjoint  de  1'*  classe 

AdQuint  de  2*  classe 


Infanterie 


Colonel 

Lieutenant-colonel 

Chef  de  bataillon  et  major 

Médecin-major  de  1"  classe 

Médecin-major  de  2*  classe 

Médecin  aide-nugor  de  l'*  classe 
Médecin  aide-major  do  2*  classe. 

Capitaine  de  1  **  classe 

Capitaine  de  i*  classe 

Lieutenant  de  i  '•  classe 

Lieutenant  de  2*  classe 

Sous-lieutenant 


Cavalerie 


Colonel 

Lieutenant-colonel 

Chef  d'escadron  et  major 
Capitaine  de  l**  classe. . . 
Capitaine  de  2*  classe  . . . 
Lieutenant  de  1  '*  classe. . 
Lieutenant  de  2*  classe  . . 
Sous-lieutenant 


Artillerie  et  Génie, 


Colonel 

Lieutenant-colonel 

Chef  d'escadron 

Capitaine  de  1'*  classe.. 
Capitaine  de  2*  classe . . . 
Lieutenant  de  l"  classe 
Lieutenant  do  2*  classo. 


Gendarmerie  dêpartenwntale. 


Colonel 

Lieutenant-colouel 

Chef  d'escadrons 

Capitaine  de  compagnie  et  capitaine-trésorier. 

Capitaine  d'arrondissement 

Lieutenant-trésorier 

Sous-lieutenant-lrésorier 

Lieutenant  d'arrondissement 

Sous-lieutenant  d'arrondissement 


30,122  45 
19,839  93 
21,755  31 
13.224  49 
14,510  20 


9,073  t7 
7,457  15 
6,281  63 
3,783  76 
3,379  73 
2.681  63 
2,499  95 


19,836  03 

21.765  31 

13,224  40 

14,510  20 

9,073  47 

7,457  15 

6,284  73 

5,783  67 


7,897  69 
6,134  69 
5,253  06 
6,281  63 
3  983  67 
2,681  63 
2,608  16 
3.600  89 
3.396  12 
2'597  95 
2,534  69 
2,314  29 


8.485  71 
6,557  14 
5,528  57 
3,746  93 
3,361  22 
2,644  89 
2,547  49 
2,424  49 


9,883  47 
6,557  14 
6.287  63 
3,783  67 
3,376  50 
2,681  63 
2,681  61 


8,779  59 
7,787  75 
5,840  81 
3,783  67 
3,487  80 
3,122  45 
2,828  57 
2,718  37 
2,424  49 


SONNETTES,  tintinnabula.  —  Ces  instruments 
étaient  connus  des  anciens  et  servaient  aui  mômes  usa- 
ges qu*aiijourd'hui.(V.  Clochettes. )Les sonnettes  mises 
en  mouvement  dans  les  maisons  au  moyen  de  fils  de 
fer  ne  datent  que  des  dernières  années  de  Louis  XIV. 
Depuis  rinveniion  du  télégraphe  électrique,  on  les  a 
remplacées,  dans  les  grands  établissements,  par  des 
timbres  sur  lesquels  frappent  des  marteaux  mis  en 
mouvement  par  l'électriciié  :  ces  nouveaux  appareils, 
dus  à  Bréguet,  sont  appelés  Sonneries  électriques, 

SONOTYPE.  V.  Gdidb-accobd. 

SOU  PFLET.—  Cette  appareil  consista  originairement 
en  un  simple  tuyau  de  bois  ou  de  métal,  dans  lequel 
on  injectait  Pair  avec  la  bouche.  Plus  tard  est  venu  le 
soufflet  à  main,  dont  on  a  attribué  l'invention  an  Scythe 
Anacharsis,  mais  qui  est  mentionné  dans  Homère.  Des 
soufflets  semblables  aux  nôtres  sont  représentés  sur  les 
monuments  grecs  et  romains;  ils  sont  tous  à  un  s-enl 
vent.  C'est  à  la  An  du  xvP  siècle  ou  au  commencement 
du  xviP  qu'on  a  imaginé  les  soufflets  à  deux  vents. 


Les  modernes  ont  fabriqué  toutes  sortea  de  machines 
soufflantes  pour  lancer  l'air  nécessaire  à  PalimentAtion 
des  reux  dans  les  établissements  métallurgiques,  ou  k 
Taérage  des  mines,  des  édifices  publics,  etc. 

STATISTIQUE  {V.  Dicftonwaire).  —  Appliquée  à  l'é 
tudedes  collectivités  humaines,  la  statistique  prend  le 
nom  de  Démographie  (V.  Supplément).  Il  n*est  guère  de 
science  qui  ne  puisse  utiliser  la  méthode  statistique. 
Voici  les  principes  essentiels  de  ses  branches  princi- 
pales : 

Statistique  météorologique.  —  L*idée  première  en 
a  été  conçue  par  notre  f^rand  Lavoisier;  il  distribua, 
en  vue  d'en  établir  les  éléments,  un  certain  nombre 
de  thermomètres  et  de  baromètres  dans  différents 
points  de  la  France;  son  idée  fut  si  bien  comprise 
que,  même  au  plus  fort  de  la  Révolution,  on  s'en  sou- 
venait encore,  et  que  le  député  Rom  me  y  fit  allusion 
dans  le  rapport  qu'il  présenu  sur  réubliss«>ment  du 
télégraphe  aérien  de  Chappe.  Toutefois,  il  ne  fut  donné 
suite  en  France  au  projet  de  LAvoisier  que  dans  la 
seconde  moitié  de  ce  siècle. 

C'est  à  l'Américain  Maury  que  revient  l'honneur 
d'avoir  sérieusement  établi  les  statistiques  niétéoro- 
iogiques.  Cet  homme  opiniâtre,  patient,  sagace,  com- 
mença ses  premiers  travaux  en  183t.  Kn  1842,  il  obtint 
du  Commodore  Crâne  une  circulaire  prescrivant  aux 
capitaines  de  la  marine  américaine  de  relever  sur 
leurs  journaux  de  bord  certaines  observations  météo- 
rologiques. Cet  appel  resta  sans  réponse,  les  marins 
jugeant  ce  travail  inutile  et  trop  compliqué.  Maury  ne 
se  découragea  pas  ;  il  profita  des  données  encore  in- 
certaines qui  lui  furent  transmises,  pour  établir  la 
statistique  des  vents  et  courants  existant  le  plus  sou- 
vent entre  Baltimore  et  Rio  de  Janeiro.  Il  put  ainsi 
tracer  une  voie  maritime  qui  réduisit  la  dui^ée  de  ce 
voyage  de  41  jours  à  24  jours. 

A  peine  ce  résultat,  si  péniblement  acquis,  fut-il 
connu  que  les  statistiques  météorologiques  se  malii- 
plièrent.  Maun*,  pour  avoir  un  plus  grand  nombre 
d'observations  facilement  comparables,  provoqua  en 
1853  une  conférence  internationale  qui  se  réunit  à 
Bruxelles  sous  la  présidence  de  l'illustre  statisticien 
Quételet.  Là,  furent  rédigées  les  formules  des  ques- 
tions posées  dans  les  journaux  de  burd;  elles  étaient 
au  nombre  de  19,  et  il  était  prescrit  d'y  répondre  trois 
fois  par  jour.  Le  mode  de  dépouillement  de  ces  jour- 
naux fut  également  arrêté  par  la  conférence. 

Les  documents  furent  de  plus  en  plus  nombreux. 
Maury  dressa  alors  ses  célèbres  cartes  statistiques,  et 
traça  les  routes  nautiques  qui  en  étaient  la  consé- 
quence. Voici  quelques-uns  des  résultats  qu'il  obtint  : 
le  voyage  de  Baltimore  à  Rio,  déjà  cité,  fut  réduit 
non  seulement  de  41  jours  à  24,  mais  ensuite  à  18 
seulement;  la  traversée  des  États-Unis  à  la  Californie 
fut  réduite  de  180  à  100  jours;  celle  d'Angleterre  à 
Sydney  (aller  et  retour)'fut  réduite  de  250  à  125 
jours,  etc.  On  a  évalué  à  plus  de  100  millions  de  francs 
la  somme  annuelle  que  les  travaux  de  Maury  ont  fait 
économiser  aux  différentes  marines  du  globe;  cette 
somme  a  certainement  augmenté  depuis  l'époque  où 
cette  évaluation  a  été  faite. 

Outre  leur  intérêt  pratique,  les  statistiques  météo- 
rologiques de  Maury  ont  une  portée  scientifique  con* 
sidérable.  Elles  ont  conduit  notamment  à  la  découverte 
de  la  loi  des  tempêtes.  Ces  résultats  sont  d'autant 
plus  remarquables,  qu'ils  sont  été  obtenus  à  l'aide  de 
documents  qui,  au  début  surtout,  étaient  fort  mé- 
diocres. 

Statistique  judiciaire.  — On  distingue  la  statistique 
de  la  justice  criminelle  et  elle  de  la  justice  civile 
et  commerciale.  La  meilleure  statistique  judiciaire 
est  jusqu'à  présent  celle  de  France. 

Justice  criminelle.  — Le  nombre  des  affaires  jugées 
par  les  cours  d'assises  est  resté  station naire  en  France 
de  1826  à  IS'iS.  S'il  a  diminué  depuis  cette  époque 
jusqu'en  1881^  c'est  seulement  parce  qu'un  cenaio 
nombre  d'affaires,  autrefois  traduites  devant  le  jury, 
ont  été  depuis  1848  traduites  en  police  correctionnelle. 
Cette  correctionnalisation  de  ceruines  affaires  a  été 
en  se  généralisant  de  plus  en  plus.  —  Dans  cette 
longue  période,  les  années  1840,  1847,  1854,  sont  celles 
où  les  crimes  ont  été  les  plus  nombreux  ;  ce  sont  celles 
aussi  où  l'hectolitre  de  froment  a  été  le  plus  cher. 
Les  années  où  les  crimes  ont  été  le  moins  nombreux 
sont  1830,  1848,  1810,  années  de  troubles  politiques  ou 
militaires;  cette  diminution  est  due  en  partie  au  moins 


STA 


—  1861  — 


SYN 


à  ce  que  la  poursuite  des  crimes  se  faisait  avec  moins 
de  vÏKiiance.  En  moyenne,  pendant  la  période  1826-55, 
le  nombre  des  affaires  criminelles  s'esl  élevé  à  5,346, 
chiffre  dont  il  ne  s'est  Jamais  beaucoup  éloigné.  De- 
puis il  s'est  progressivement  abaissé  à  3,446  (1876-80). 
Quelques  genres  de  crimes  doivent  attirer  Tatten- 
tiou.  Malgré  la  correctionualisalion,  il  en  est  quelques- 
uns  dont  le  nombre  augmente  sans  cesse.  Tels  sont 
les  crimes  contre  la  morale,  et  surtout  les  viols  et  at- 
tentats contre  les  enfants,  dont  la  fréquence  a  sextu- 
plé, s'élevant  progressivement  de  136  (18:^6-30)  à  791 
(1876-80).  il  est  vrai  que  la  loi  de  1863  permet  do 
poursuivre  quelques  crimes  jusqu'alors  impunis,  mais 
raugmen talion  qui  en   résulte   est  peu  importante. 
Ces  crimes  abominables  sont  un  peu  pluç  fréquents 
dans  le  Nord   (14   par  an  et  pour  100,000  hab.)  et 
dans  le  Nord-Ouest  (11)  que  dans  le  Centre  (8)  ou 
dans  le  Midi  (lO).  Ils  sont  plus  fréquents  dans  les 
grandes  villes  et  dans  les  pays  industriels. 

La  fréquence  des  infanticides  poursuivis  va  aussi  en 
augmentant,  surtout  depuis  la  période  1851-55,  énoque 
où  commença  la  suppression  des  tours  ;  cependant  il 
est  certain  qu'un  grand  nombre  de  ces  crimes  ont  été 
correctionnalisés,  surtout  depuis  1863. 

Les  assassinats  ont  été  au  nombre  de  197  (1876-80) 
et  se  sont  peu  éloignés  de  ce  chiffre  pendant  les  pé- 
riodes antérieures.  La  diminution  du  nombre  des 
meurtres  qui  de  229  (1826-30)  descendent  à  143(1876- 
80)  n'est  qu'apparente  et  tient  à  la  correctionnalisa- 
tion.  Voici  la  fréquence  des  causes  qui  occasionnent 
ces  deux  crimes  (1876-80). 

letrtrca.       isuisiut. 

Cupidité 14  i5 

Adultères 2  » 

Dissensions  domestiques 21  22 

Amour  contrarié 2  4 

Débauche,  concubinage t. ...  7  10 

Haine,  vengeance 20  22 

Querelles  de  cabaret,  de  jeu,  elc 34  12 

Totaux 100  100 


Les  meurtres  et  assassinats  sont  surtout  fréquents 
dans  la  Corse,  qui  l'emporte  de  beaucoup  sur  les  autres 
départements,  puis  les  Alpes-Maritimes,  les  Bouches- 
du-Rhône,  etc.  Ensuite  viennent  les  départements  dn 
Nord,  du  Nord-b^t.  Les  assassinats  et  meurtres  sont 
plus  rares  en  Bretagne  et  dans  le  Centre.  —  Il  faut 
ajouter  qu'en  Corse  un  grand  progrès  s'est  fait.  Il  y 
a  30  ans,  il  y  avait  65  assassinats  pour  100,000  habi- 
tants, et  aujourd'hui  il  n'y  en  a  plus  que  13;  il  n'y  en 
a  que  1  à  Paris,  beaucoup  moins  encore  dans  le  reste 
de  la  France. 

Les  empoisonnement»  sont  sept  fois  sur  dix  commis 
par  des  femmes  ;  la  moitié  d'entre  eux  ont  pour  cause 
des  dissensions  domestiques.  Leur  fréquence  diminue 
beaucoup  ;  il  n'y  en  a  plus  que  14  par  an  (1876-80). 

Incenaies. — Leur  nombre  s'est  élevé  lorsque  les  com- 
pagnies d'assurances  se  sont  multipliées.  Puis,  ce 
nombro  s'est  progressivement  abaissé  (sans  que  la 
correctionnalisation  y  contribuât)  :  les  chiffres  sui- 
vants marquent  les  points  extrêmes  de  l'oscillation 
que  nous  venons  d'indiquer  : 

Nombre  des  incendies  criminels  :  118  en  1831-35; 
244  en  1851-55;  180  en  1876-80. 

Délits,  —  Le  nombre  des  délits  a  doublé  depuis 
1826-30,  sans  que  la  correctionnalisation  puisse  être 
invoquée  pour  expliquer  le  fait  (moyennes  annuelles  : 
13,656  prévenus  en  1826-30,  et  24,334  en  1876-80.  Les 
autres  chiffres  sont  intermédiaires.  Le  vol,  l'escro- 
querie, l'abus  de  confiance  ont  augmenté  plus  encore. 
Vols:  moyennes  annuelles:  12,576 prévenus  en  1826-30 
et  41,522  en  1876-80). 

Justice  civile,  —  Nous  serons  plus  bref  sur  ce  cha- 
pitre. En  moyenne  on  compte  en  France  33  procès 
civils  par  an  pour  10,000  habitants.  Les  départements 
montagneux,  dans  lesquels  les  héritages  sont  très  di- 
visée, tels  que  l'Aveyron,  les  deux  Savoies,  les  Alpes- 
Maritimes,  etc.  en  comptent  bien  davantage  (de  53  à 
57).  De  môme  presque  tous  les  départements  des  Cé- 
vennes,  des  Alpes,  des  Pyrénées,  du  Jura,  comptent 
beaucoup  de  procès.  Le  département  de  la  Seine  doit 
à  son  commerce  très  actif  d'en  présenter  plus  encore 
que  ceux  dont  nous  venons  de  parler.  Ëntln  les  Nor- 
mands, connus  par  leur  esprit  de  chicane,  ne  démen- 
tent pas  leur  réputation.  Au  contraire,  les  procès  sont 


rares  sur  les  bords  de  la  Garonne,  plus  rares  encore 
dans  le  bassin  delà  Loire,  et  plus  rares  encore  en  Bre- 
tagne, où  l'on  n'en  compte  que  13  à  7  par  an  et  par 
10,000  habiunts. 

Statistique  pénitentiaire.  —  Aa  31  décembre  1880,  la 
population  des  prisons  était  la  suivante  : 

H.  F.  TOTAL."] 

24  maisons  pénitentiaires  (dont  6  de 

femmes).... «3,928     2,729     16,637 

Dépôt  des  forçats  de    Saint-Martin 

deRé 284  «  284 

68  maisons  d'éducation  correction- 
nelle (dont  23  de  filles) 7,216     1,7d«      8,973 

3,034  chambrer  et  dépôts  de  sûreté 38  4  42 

382  maisons  d'arrêt,  de  justice  et  de 

correction lî».332    4,327     23.659 


40,797     8,818     49,615 

Ces  chiffres  diffèrent  assez  peu  de  la  population 
moyenne  de  ces  diverses  classes  d'établissements.  Il 
convient  d'ajouter  que  sur  le  nombre  de  ces  prison- 
niers, 5,929  étaient  seulement  prévenus,  accusés  ou 
condamnés  en  appel  ou  en  pourvoi.  ' 

Le  total  des  frais  nécessités  par  cette  population  a 
été  de  21,036,129  francs  dont  4,949,141  ont  été  recou- 
vrés gr&ce  au  travail  des  condamnés  (sur  cette  somme* 
4,547,349  francs  ont  été  produiu  par  les  maisons  cen- 
trales). La  dépense  nette  s'élève  donc  à  16,086,988  fr. 

En  outre  le  nombre  des  déportés  était  : 


H. 


A  la  Guvnnne 3,443 

A  la  Nouvelle-Calédonie. .       8.009 


F. 
110 

155 


TOTAL. 

3,562 
8,164 


Totaux 11,451       274     11,726 

Sur  ce  nombre,  9,261  seulement  étaient  de  race 
blanche.  1,661  forçats  étaient  Arabes,  719  nègres,  85 
Asiatiques  ou  Océaniens.  J.  B.  —  on 

SYMPHONISTA,  sorte  d'harmonium  inventé  vers 
1850  par  Guichené.  curé  de  Mont-de-Marsan,  pour  ac- 
compagner le  chant  d'église.  Le  davier  ordinaire  fait 
résonner  un  jeu  d'anches,  mis  en  mouvement  par  une 
soufflerie.  Au-dessous  est  un  autre  clavier,  dont  les 
larges  touches  en  bois  portent  le  nom  des  notes.  En 
posant  le  doigt  sur  la  touche  de  ce  second  clavier, 
dont  le  nom  correspond  à  la  note  du  chant,  on  fait 
entendre  une  harmonie  complète  et  redoublée  dans 
plusieurs  octaves. 

SYNDICATS  PROFESSIONNELS.  —On  désigne  sous 
cette  dénomination  générale  les  associations  formées 
par  des  personnes  exerçant  la  même  profession,  afin 
de  pourvoir  collectivement  à  leurs  intérêts  profession- 
nels. Leur  constitution  et  leur  fonctionnement  sont 
réglés  par  la  loi  du  21  mars  1884,  en  tète  de  laquelle 
figure  l'abrogation  des  mesures  prohibitives  et  de  leur 
sanction  générale.  Cette  loi  contient  en  outre  des  dis- 
positions concernant  :  1°  l'existence  légale  des  syn- 
dicats professionnels,  leur  composition,  leur  objet; 
2»  les  formalités  imposées  aux  syndicats,  le  dépôt  des 
sUtuts,  l'obligation  pour  les  administrateurs  et  direc- 
teurs d'être  de  nationalité  française;  S»  les  unions 
entre  syndicats  ;  4°  la  personnalité  civile  reconnue  aux 
syndicats,  les  limites  des  facultés  concédées  par  la 
loi,  la  liberté  garantie  à  chaque  membre  de  se  retirer 
de  l'association;  5°  les  sanctions  civiles  et  pénales 
des  prescriptions  de  la  loi  ;  6^  l'application  de  la  loi 
en  Algérie  et  dans  les  colonies  (Guadeloupe,  Marti- 
nique, Réunion).  .  j    i    i  • 

L'article  2  indique  en  ces  termes  l'esprit  de  la  loi 
«  Les  syndicats  ou  associations  profeisionnelles, 
même  de  plus  de  vingt  personnes,  exerçant  la  môme 
profession,  des  métiers  similaires  ou  des  professions 
connexes  concourant  à  l'établissement  de  produits 
déterminés,  pourront  se  constituer  librement,  sans  l'au- 
torisation du  gouvernement.  »  L'institution  est  ainsi 
définie  par  l'article  3  :  «  Les  syndicats  professionnels 
ont  exclusivement  pour  objet  l'étude  et  la  défense  des 
intérêts  économiques,  industriels,  commerciaux  et  agri- 
coles. »  Les  syndicats  ont  la  faculté  de  se  concerter 
et  de  s'unir  entre  eux;  mais  ces  unions  ne  peuvent 
posséder  aucun  immeuble,  ni  ester  en  justice  (art.  5), 
ce  droit  étant  réservé  à  chaque  syndicat  de  patrons 
ou  d'ouvriers  (art.  6).  Le  seul  tempérament  apporté 
au  principe  de  liberté  consiste  dann  l'obligation  pour 
les  fondateurs  de  tout  syndicat  professionnel  do  dé- 
poser à  la  mairie  les  sUtuis  et  les  noms  de  ceui  qui, 


TAX 


—  1862  - 


TEL 


à  un  titre  quelconque,  sont  chargés  de  l'administra- 
tion ou  de  la  direction. 

La  loi  du  21  mars  1884  est  restée  plus  de  trois  ans 
sur  le  chantier,  sans  parler  de  la  propc-ition  de  M.  de 
Marcère  (1876)  et  de  celle  dn  M.  Lockroy  (1818).  Un 
premier  projet  fut  présenté  à  la  Chambie  des  députés 
par  M.  Cazot,  garde  des  sceaux,et  par  M.  Tirard,  mi- 
nistre de  l'agriculture  et  du  commerce,  le  22  novem- 
bre 1880.  Ce  projet,  rapporté  par  M.  Allai n-Targé, 
le  15  mars  1881,  occupa  six  séances,  du  16  mai  au 
9 juin,  et  fut  transmis,  le  21,  au  sénat  qui  le  discuta 
du  l**  Juillet  au  1*'  août  1882,  sur  lu  rapport  de 
M.  Marcel  Bartbe.  Le  maintien  de  Tarticle  416  du 
Code  pénal,  interdisant  le  concert  entre  patrons  et 
ouvriers  en  vue  d'une  suspension  de  travail,  la  sup- 
pression de  la  faculté  d'union  entre  syndicats,  faddi- 
tion  de  pénalités  rigoureuses,  dénaturaient  foncière- 
ment le  texte  voté  par  la  Chambre.  A  la  suite  d'une 
nouvelle  délibération  (12-19  juin  1883),  celle-ci  refusa 
d'adhérer  à  ces  modiHcations,  et  dans  un  débat  dé- 
cisif (15  janvier-23  février  1884),  où  M.  Tolain,  rap- 
porteur, et  M.  Waldeck- Rousseau,  ministre  de  l'inté- 
rieur, prirent  une  part  très  active,  elle  obtint  gain  de 
cause  devant  le  Sénat  sur  les  points  principaux.  Elle 
crut  devoir  céder  sur  quelques  détails  secondaires, 
aRn,  comme  le  déclarait  M.  Lagrange  dans  son  der- 
nier rapport,  de  ne  pas  décourager  par  une  attente 
indéfinie  la  classe  nombreuse  des  travailleurs,  patrons 
ou  ouvriers,  que  la  lui  intéressait. 

Telle  qu'elle  est,  en  effet,  et  quelques  critiques 
qu'elle  comporte,  cette  loi  du  21  mars  1884  peut  être 
considérée  comme  un  des  grands  progrès  économiques 
de  notre  époque.  Ce  qui  la  caractérise  avant  tout,  c'est 
qu'elle  substitue  la  liberté  à  l'arbitraire,  qu'elle  con- 
sacre légalement  l'existence  des  associations  syndi- 
cales qui,  auparavent  ne  se  créaient  et  ne  fonction- 
naient en  fait  qu'en  vertu  d'une  tolérance  incompa- 
tible avec  la  dignité  des  travailleurs  et  avec  le  respect 
des  lois  antérieurement  en  vigueur  (lois  des  2-14 
mars,  14-17  juin  1791;  articles  291,  292,  293,  294  et 
416  du  Code  pénal ,  loi  du  10  avril  ]8it4)-,  c*est  enfin 
qu'ellereconnalt  et  garantit  Texercice  d'un  droit  là  où 
les  régimes  précédents  semblaient  n'admettre  qu'une 
concession  toujours  révocable  faite  à  des  mineurs. 
«  En  droit,  suivant  l'expresssion  de  M.  Tolain,  les  sa- 
lariés sont  déclarés  majeurs  i,  et  la  conviction  de 
l'honorable  sénateur,  si  expert  en  ces  matières,  est 
que  toutes  les  importantes  questions  économiques  qui 
intéressent  la  gloire  et  la  prospérité  do  nos  industries 
s'élaboreront  désormais  dans  les  chambres  syndicales, 
patronales  et  ouvrières.  Si  les  intentions  et  les  prévi- 
sions, du  législateur  se  réalisent,  la  loi  de  1 81:^4  est 
donc  destinée  à  faire  cesser  l'antagonisme  entre  le 
capital  et  le  travail  et  à  rendre  de  plus  en  plus  rare 
l'expédient  des  grèves.  E.  F. 


TAMBOURIN,  ancien  instrument  de  musique,  en 
bois.  Il  étj'it  fait  en  triangle  et  fort  long,  monté  d'une 
seule  corde  qu'on  frappait  avec  un  petit  bâton. 

TATIERSALL,  établissement  de  Londres  qui  est  à 
la  fois  un  marché  où  les  éleveurs  de  chevaux  de  pur 
sang  adressent  leurs  produits,  et  une  sorte  de  Bourse 
où  se  règlent  les  prix  des  courses.  Il  date  de  1780  et 
tire  son  nom  de  Richard  Tattersall,  son  fondateur. 

TAXE  DBS  LETTRES.  —  En  187?,  dans  Tespoir  d'aug- 
menter le  revenu  de  l'Etat,  on  releva  la  taxe  de  la  lettre 
comme  avant  1848.  L'affranchissement  fut  de  0  fr.  25 
jusqu'à  15  grammes  inclusivement  ;  0  fr.  50  c,  au-des- 
sus de  15  grammes  jusqu'à  30  grammes  inclusivement; 
0  fr.  75  c,  au-dessus  de  30  grammes  jusqu'à  50  gram- 
mes inclusivement  ;  0  fr.  50  c,  au-dessus  de  60  gram- 
mes, augmentant  par  50  grammes  ou  fragment  de 
50  grammes.  La  lettre  non  affranchie  payait,  selon  le 
poids,  40  c,  80  c,  1  fr.  20.  —  D'après  la  loi  sur  la 
réforme  postale  de  1878,  en  commençant  le  1*'  mai,  la 
taxe  des  lettres  affranchies  est  fixée  à  0  fr.  là  c.  par 
15  grammes  ou  fraction  de  15  grammes  ;  celle  des  let- 
tres non  affranchies,  à  0  fr.  30  c,  pour  toute  la  France 
et  l'Algérie.  En  dehors  de  ces  pays,  les  taxes  des  let- 
tres affranchies  sont  de  25  et  de  35  c,  selon  la  dis- 
tance ;  les  lettres  non  affranchies  payent  50  et  60  cent. 


Désormais  aussi,  la  carte  postale  est  abaissée  pour 
toute'  la  France  à  0  fr.  10,  et  la  carte  de  visite  non 
cachetée  à  5  c^nt. 

Taxe  des  dépêches  TÉLécRAPHiQUCS.  —  Depuis  le 
1**  mai  1 878,  toute  dépèche  pour  Tintérieur  de  la  France 
n'est  taxée  que  5  centimes  par  mot,  à  la  seule  condition 
que  la  dépèche  ne  contienne  pas  moins  de  10  mots. 

TÉL1^GRAPHIE  OPTIQUE.  —  Tout  signal  fait  à  dis- 
tance, de  Jour  ou  de  nuit,  constitue  la  télégraphie  op- 
tique. Mais  depuis  quelques  années  on  a  trouvé  moyen 
d'échanger,  à  de  longues  distances,  non  plus  des  si- 
gnaux, mais  des  phrases  entières,  et  la  télégraphie 
optique  est  alors  devenue  une  science  complète.  Le 
principe  consiste  à  projeter  à  distance  un  faisceau  de 
rayons  lumineux  et  a  produire  sur  ce  f«isc«an,  au 
moyen  d'un  écran,  des  interruptions  correspondant 
aux  points  et  aux  traits  de  l'alphabet  télégraphique  de 
Morse. 

La  source  lumineuse  employée  peut  être  te  soleil, 
1  électricité  ou  une  lampe  à  pétrole  à  mèche  plate. 

Les  appareils  optiques  pour  produire  les  rayons  lu* 
mineux  sont  de  plusieurs  systèmes.  Ceux  qui  sont 
employés  dans  la  télégraphie  optique  militaire  résul- 
tent des  travaux  de  M.  Maurat  et  de  MH.  les  colonels 
Laussedat  et  Mangin. 

Lorsqu'une  communication  est  établie  entre  deux 
postes,  celui  qui  désire  communiquer  fait  les  attaques 
réglementaires  de  l'alphabet  Morse.  La  manipulation 
doit  être  lente  et  saccadée.  Les  intervallea  entre  les 
mots  doivent  être  exagérés.  Si  une  lettre  échappe, 
le  télégraphiste  récepteur  coupe  son  correspondant  en 
envoyant  un  rayon  lumineux.  Le  télégraphiste  du  poste 
transmetteur,  ayant  l'œil  à  la  lunette,  s'interrompt  et 
répète  le  dernier  mot  transmis. 

Ce  sont  des  règles  faciles  à  suivre,  et  la  télégraphie 
optique  serait  parfaite  si,  d'une  part,  les  brouillaîrds, 
la  fumée,  ne  coupaient  les  communications,  et  si, 
d'autre  part,  les  dépèches  s'inscrivaient  elles-mêmes 
comme  on  cherche  à  le  réaliser,  au  lieu  de  disparaître 
à  mesure  Qu'elles  sont  lues. 

Telle  qu  elle  est,  la  télégraphie  optique  a  déjà  ren- 
du de  grands  services.  On  s'en  est  servi  avec  fruit 
dans  les  campagnes  de  Tunisie  et  du  Tonkin.  Il  est 
question  d'installer  dans  les  sémaphores  des  postes 
de  télégraphie  optique  pour  communiquer  avec  les 
navires.  Mais  les  deux  applications  les  plus  importantes 
qui  en  aient  été  faites  jusqu'à  présent  sont  d'abord 
celles  de  M.  le  colonel  Perrier,  qui  a  pu  relier  la  côte 
d'Espagne  au  Maroc  pour  le  prolongement  de  l'arc  da 
méridien,  et  ensuite  la  communication  établie  entre 
rtle  Maurice  et  l'Ile  de  la  Réunion,  à  215  kilomètres 
de  distance,  avec  des  appareils  cédés  par  le  départe- 
ment de  la  guerre. 

F  L.  —  T 

TÉLÉPHONE  (V.  Dict.,  Téléphonie  et  notre  Dic- 
tioimaire  des  Sciences  et  des  Arts  appliqués).  —  L'ins 
venteur  du  téléphone  actuellement  en  usage  est 
l'Américain  Graham  Bell.  Son  appareil,  qui  n'emploie 
pas  l'électricité  de  la  pile,  est  fondé  sur  le  principe 
suivant:  une  plaque  de  cuivre  est  placée  devant  on 
aimant,  et  au  bout  de  cet  aimant  est  enroulé  un  fil  mé- 
tallique. Lorsque  l'on  parle  sur  la  plaque  ou  la  fait 
vibrer,  ces  vibrations  la  rapprochent  et  l'éloigneut  ra- 
pidement de  l'aimant,  et  par  suite  augmentent  et  di- 
minuent rapidement  la  puissance  de  ce  dernier.  Ces 
variations  produisent  dans  le  fil  métallique  des  cou- 
rants électriques.  Ces  courants  entrent,  à  l'autre 
extrémité  du  fil,  dans  un  appareil  semblable  an  pre- 
mier, augmentent  et  diminuent  la  puissance  da  second 
aimant,  et  ces  variations,  en  faisant  vibrer  la  plaque  du 
second  appareil,  lui  font  reproduire  les  sons  émis  dans 
le  premier. 

Ce  téléphone  est  généralement  trop  faible.  Les  nou- 
veaux appareils  sont  fondés  snr  ce  principe,  décou- 
vert par  Edison  :  si  on  fait  passer  un  courant  élec- 
trique dans  du  cliarbon,  il  paftse  d'autant  plus  d'é- 
lectricité que  le  charbon  est  plus  comprimé.  Donc  en 
parlant  au  dessus  d'une  plaque  sous  laquelle  est  un 
morceau  de  charbon,  les  vibrations  de  la  plaque  pro- 
duiront des  variations  de  pression,  et  le  courant  élec- 
trique qui  passe  dans  ce  charbon  aura  des  intensités 
variées.  Ces  variations  d^intensité  reproduiront  dans 
le  récepteur  les  vibrations  et  les  sons  qui  ont  prodoit 
les  premières  compressions. 

C'est  là  le  principe  de  tous  les  téléphonea  actuels, 
quelles  que  soient  leurs  formes.  Au-dessus  des  charbons 


TOM 


—  4863  — 


TOR 


II.  Ader  »  ea  l'idée  de  placer  aue  lame  de  bois  sur 
laquelle  on  parle  pour  augmenter  la  sonorité.  Gr&ce  à 
cet  appareil  on  fait  entendre  à  de  grandes  distances 
les  tons  les  pins  légers,  comme  le  tic-tac  d'une  mon- 
tre parexemple.  Le  nombre  de  systèmes  téléphoniques 
est  déjà  très  grand. 

Les  communications  téléphoniques  sont  établies 
entre  chaque  abonné  et  le  bureau  cenral  par  des  fils 
généralement  logés  dans  les  égouts.  Ou  arrife  aujour- 
d'hui à  faire  communiquer  les  villes  entre  elles  à  des 
distances  considérables,  chaque  abonné  d'une  compa- 
gnie téléphonique  peut  communiquer  avec  tous  les 
autres  abonnés  de  la  môme  compagnie. 

Le  perfectionnement  du  téléphone  est  soumis  à  des 
recherches  constantes.  Un  ingénieur  américain  a  fait 
breveter  en  Allemagne  un  dispositif  qui  a  pour  objet 
de  transmettre  au  téléphone  la  voix  humaine  seule  à 
Texclusion  de  tout  autre  bruit.  Une  pièce  élargie  en 
forme  de  cloche  est  appuyée  contre  le  gosier  ou  con- 
tre une  autre  partie  du  cou,  qui  prend  part  aux  vibra- 
tions produites  par  la  voix  ;  elle  est  reliée  au  téléphone 
par  un  tube  élastique  ou  rigide  renfermant  uu  volume 
d*air  dont  les  ondulations  frappent  le  diaphragme  à 
l'exclusion  de  tout  bruit  étranger.  Un  des  perfection- 
nements des  plus  importants  est  l'emploi  de  la  télé- 
phonie k  grande  distance.  Des  communications  fonc- 
tionnent déjà  entre  Paris  et  Reims,  Paris,  Rouen  et  le 
Hivre.  F.  L,  —  t. 

THÉOLOGIE  (Facultés  de).  —  Depuis  le  mois  d'août 
1884,  les  facultés  de  théologie  catholique  ont  été  sup- 
primées. Les  deux  facultés  de  théologie  protestante 
eut  été  maintenues  en  vertu  des  lois  organiques  du 
Concordat  par  lesquelles  l'État  s'engageait  à  conserver 
des  acatlimies  protestantes.  Les  professeurs  de  théo- 
logie protestante  reçoivent  de  4,500  à  6,500  francs. 

TIMBRK.  —  La  loi  du  9  mars  1868  réduisit  le  timbre 
des  journaux  à  cinq  centimes  dans  les  départements 
de  la  Seine  et  de  Seine-et-Oise,  et  à  deux  partout 
ailleurs  ;  celui  des  écrits  périodiques  ne  dépassant  pas 
six  feuilles  d'impression,  à  quatre  centimes  par  feuille. 
Elle  assujettit  an  timbre,  aussi  bien  que  le  Journal, 
les  feuilles  d'annonces  qui  y  sont  annexées  ou  qui  leur 
servent  de  couverture,  et  n'en  dispensa  les  supplé- 
ments qu'autant  qu'ils  ner  comprennent  aucune  an- 
nonce. Furent  affranchies  du  timbre  les  affiches  élec- 
torales d'un  candidat  contenant  sa  profession  de  foi, 
une  circulaire  signée  de  lui,  ou  seulement  de  son 
nom.  Le  timbre  a  été  aboli  à  la  révolution  de  1870. 

TOM  JONES,  célèbre  roman  anglais,  publié  par 
Fielding  en  1750.  L'auteur  a  accumulé  sur  son  héros 
tous  les  genres  d'infortunes,  pour  faire  ressortir  les 
dangers  de  l'imprudence,  et  c'est  là  la  conclusion 
morale  de  l'ouvrage.  La  fable  est  bien  conçue  et  réel- 
lement attachante,  les  personnages  et  les  aventures 
habilement  diversifiés,  les  épisodfes  choisis  avec  art, 
et,  à  Texception  d'un  seul,  celui  de  l'Homme  de  la 
montagne,  rattachés  naturellement  au  sujet.  L'action 
se  développe  sans  embarras,  et  l'intérôt  augmente 

Jirogressivement.  Une  étude  sérieuse  des  caractères 
ait  de  Tom  Jones  le  premier  modèle  du  roman  de 
mœurs  en  Angleterre  :  Tom  Jones  est  un  jeune  homme 
franc,  généreux,  brave,  mais  inconsidéré,  sévèrement 
puni  de  ses  étourderies  par  de  nombreuses  disgrâces; 
il  semble  que  Fielding  ait  voulu  prouver  qu  on  ne 
doit  pas  se  fier  aux  apparences  en  fait  d'éducation, 
et  qu'un  caractère  ouvert  et  loyal,  quoique  passionné, 
est  préférable  chez  les  Jeunes  gens  à  un  caractère 
prudent,  mais  froid  et  hypocrite.  Le  personnage  de 
Sophie  Western  est  un  modèle  de  douceur  et  de 
gr&ce,  de  bon  sens  et  de  modestie  ;  sensible,  mais 
chaste;  respectueuse  et  soumise,  mais  capable  de 
résolution;  il  ne  lui  manque  qu'un  peu  plus  de  déli- 
catesse morale.  Un  excellent  caractère  est  aussi  celui 
du  sir  Allworthy,  type  des  vertus  sociales,  véritable 
philosophe  chrétien,  bienfaisant  sans  ostentation, 
indulgent  sans  faiblesse,  vertueux  sans  aucun  excès. 
Blifll  est  un  fourbe  dont  la  duplicité,  l'égolsme  et 
l'avarice  font  ressortir  la  franchise  et  la  générosité 
de  Tom  Jones.  On  voit  encore,  par  le  personnage  de 
lady  Bellaston,  que  Fielding  excellait  à  peindre  les 
femmes  du  grand  monde.  Sir  Western,  père  de  Sophie, 
brutal.  Cynique  et  lâche;  sa  sœur,  d'humeur  flegma- 
tique et  d'habitudes  cérémonieuses;  Honora,  suivante 
et  confidente  de  Sophie;  Patridge,  valet  et  compa- 
gnon de  Tom  Jones  aans  toutes  ses  aventures,  destiné 
à  égayer  le  roman  par  se  poltronnerie,  sa  naiveté  et 


ses  balourdises,  mais  trop  souvent  babillard  et  pé- 
dant :  voilà  autant  de  caractères  d'une  vérité  et  d  un 
naturel  généralement  soutenus.  On  peut  reprocher  à 
Fielding  de  se  montrer  trop  à  découvert,  de  prodi- 
guer sur  la  conduite  de  ses  personnages  les  explica- 
tions et  les  conjeetnres  qui  enlèvent  au  lecteur  la 
satisfaction  de  réfléchir  et  de  Juger,  de  multiplier  les 
conversations  vulgaires  et  leâ  dialogues  de  bas  comi- 
que, de  ne  point  raconter  avec  assez  de  sobriété  les 
âuerelles  de  taverne  et  les  scènes  de  pugilat,  enfin 
'affecter  parfois  dans  son  style  les  images  poétiques, 
les  périphrases  et  les  comparaisons  ambitieuses.  Les 
différents  livres  de  Tom  Jones  sont  précédés  de  dis- 
sertations morales  ou  littéraires,  qui  n'ont  point  été 
reproduites  dans  toutes  les  éditions  :  ces  digressions 
coupent,  en  effet,  le  récit  et  ralentissent  l'action;  elles 
sont  néanmoins  intéressantes,  et,  selon  la  remarque 
de  Walter  Scott,  ce  sont  peut-être  les  chapitres  qui 
plaisent  le  plus  à  une  seconde  lecture.  B. 

TORPILLE.  —  La  torpille  est  un  poisson  de  la  fa- 
mille des  raies,  armée  par  la  nature  d'un  organisme 
spécial  qui  lui  permet  de  transmettre  des  commo- 
tions électriques  aux  corps  qui  l'environnent.  Par  ex- 
tension, on  a  donné  le  nom  de  torpille  à  un  appareil, 
surtout  destiné  à  la  guerre  navale,  qui  peut  produire 
des  commotions  assez  violentes  pour  détruire  les  navi- 
res ou  les  fortifications  maritimes.  C'est  pour  cette 
dernière  désignation  que  le  mot  torpille  est  le  plus 
souvent  employé.  La  torpille  est  l'arme  de  guerre  la 
plus  terrible  que  l'on  ait  encore  inventée.  Elle  peut 
immobiliser  les  flottes  les  plus  puissantes,  et  comme 
elle  est  &  la  disposition  des  États  les  plus  pauvres,  il 
est  probable  qu'elle  mettra  un  terme  aux  horreurs  des 
batailles  navales. 

La  torpille  a  été  inventée  par  Fulton,  qui  lui  donna 
le  nom  de  torpédo.  Mais  ces  premiers  essais  furent 
oubliés,  et  la  torpille  ne  prit  guère  sa  place  dans  l'art 
militaire  qu'au  mument  de  la  guerre  de  Crimée,  lors- 
que les  Russes  en  firent  usage  pour  défendre  le  port 
de  Cronstadt.  Plus  tard,  lors  de  la  guerre  do  la  Sé- 
cession, les  deux  partis  américains  en  adoptèrent  lar- 
gement l'emploi.  Depuis  cette  époque  toutes  les  puis- 
sances sont  munies  de  services  complets  de  torpilles  et 
de  torpilleurs  (Voir  ce  mot.  Supplément), 

Primitivement  les  torpilles  étaient  des  boites  métal- 
liques séparées,  par  une  cloison,  en  deux  comparti- 
ments :  Tun  pour  contenir  la  matière  explosible  ;  l'au- 
tre, Tair  qui  devait  lui  permettre  de  flotter  au-dessous 
de  la  surface  de  l'eau.  Le  choc  d'un  navire  contre 
l'appareil  provoquait  la  chute  d'une  petite  tige  de  fer, 
qui  enflammait  une  capsule,  et  produisait  l'explosion. 

Aujourd'hui  on  fait  les  torpilles  de  plusieurs  façons, 
suivant  le  mode  d'emploi  auquel  elles  sont  destinées. 
Ce  sont  toujours,  à  proprement  parler,  des  cartou- 
ches métalliques  de  forme  et  de  dimensions  particu- 
lières, mais  on  les  charge  tantôt  avec  de  la  poudre, 
tantôt  avec  du  fulmicoton,  tantôt  avec  de  la  dynamite. 
L'explosion  par  le  choc  des  navires  est  bien  toujours 
employée,  mais  le  plus  souvent  on  se  sert  de  1  élec- 
tricité pour  provoquer  l'inflammation  du  mélange  dé- 
tonant. Grâce  à  cette  méthode,  le  navire  qui  fait  usage 
des  torpilles  peut  ne  les  faire  partir  que  lorsqu'il  est 
àTabridu  choc,  et  dans  un  port,  défendu  par  les  tor- 
pilles, on  peut  de  terre  les  faire  sauter,  à  coup  sûr, 
lorsqu'un  navire  ennemi  passe  au-dessus  du  point  où 
elles  sont  immergées. 

L'invention  la  plus  récente  est  celle  que  l'on  a  ap- 
pelée Whitehead  fish.  Ce&i  une  torpille  en  forme  de 
poisson.  A  l'avant  et  à  l'arrière  se  trouvent  deux  petits 
réservoirs  d'air  qui  la  font  flotter  entre  deux  eaux. 
Au  centre  se  trouve  la  matière  explosible,  et  une  pe- 
tite machine,  mue  par  de  l'air  co;nprimé  emmagasiné 
dans  la  torpille,  et  qui  fait  mouvoir  une  hélice  placée 
à  l'arrière.  La  torpille  Wliitehead,  lancée  par  un  navire, 
peut  parcourir  plus  de  1  000  mètres  sous  l'eau  et  aller 
frapper,  invisible,  le  vaisseau  ou  les  fortifications  à 
détruire,  sans  que  le  torpilleur  qui  l'a  envoyée  coure 
aucun  risque. 

On  emploie  heureusement  les  torpilles  dans  d'au- 
tres circonstances  que  dans  les  guerres.  On  s'en  sert 
aussi  très  avantageusement  pour  l'exploitation  des 
carrières,  la  destruction  des  roches  sous-marines  ou 
à  la  surface  du  sol,  le  percement  des  souterrains,  l'en- 
lèvement des  épaves  gênant  le  mouvement  des  ports, 
et  pour  tous  les  travaux  qui  exigent  le  développement 
instantané  d'une  grande  énergie.  F.  L.  —  t. 


TRI 


—  1864  — 


TRO 


TORPILLEURS.  —  Les  torpillenrs  sont  les  ouvriers 
qui  manœurrent  les  torpilles.  Mais  on  désigne  sur- 
tout par  ce  nom  les  bateaux  qui  sont  armés  de  tor- 
pilles. 

Primitivement  les  torpilleurs  étaient  desimpies  ca- 
nots à  vapeur.  A  Tavant  de  ces  canots  était  attachée 
une  longue  perche  dont  la  pointe  plongeait  sous  Teau. 
L'extrémité  qui  se  trouvait  ainsi  au-dessous  de  la  sur- 
face de  la  mer  portait  la  torpille.  Le  canot  se  lançait 
sur  les  fortifications  ou  les  navires  à  détruire,  le  choc 
faisait  éclater  .la  torpille  sans  que  le  canot  courût  au- 
cun risque,  grâce  à  la  longueur  de  la  perche. 

Pins  tard,  ces  canots  furent  perfectionnés.  Outre 
la  perche  porte-torpille,  ils  sont  munis  à  Tavant  d'un 
tampon  qui  renvoie  le  canot  en  arrière  après  le  choc. 
Un  blindage  en  lôle  met  les  matelots  k  l'abri  des 
coups  de  fusil.  Enfin  et  surtout  leur  vitesse  a  été 
augmentée.  Pour  obtenir  ce  dernier  résultat,  la  ma- 
chine marine  ordinaire  a  été  modifiée,  et  Ton  s'est 
rapproché  du  type  de  la  locomotive. 

Gei  bateaux,  très  solidement  construits,  et  ayant 
jusqu'à  26  mètres  de  longueur,  étaient  embarqués  & 
bord  des  gros  navires  qui  les  mettaient  à  la  mer  au 
point  où  ils  devaient  opérer.  Mais  depuis  quelques  an- 
nées on  semble  avoir  adopté  un  système  difi'érent.  On 
n^embarque'plus  abord  des  gros  vaisseaux  de  guerre 
que  de  petits  canots  porte-torpilles.  Les  cuirassés 
eux-mêmes  sont  munis  d'un  appareil  à  lancer  les  tor- 
pilles Whitehead.  —  Enfin  on  a  créé  un  nouveau 
type  que  l'on  appela  torpilleur  de  haute  mer. 

Ces  derniers  bateaux  ont  ordinairement  37  à  40  mè- 
tres de  longueur.  Ils  sont  munis  d'une  puissante  ma- 
chine qui  pent  leur  donner  une  vitesse  de  18  nœuds, 
et  sont  capables  de  tenir  longtemps  la  mer.  Les  uns 
sont  munis  de  la  perche  port e-tor pille,  les  autres  de 
tubes  à  lancer  les  torpilles  Whitehead.  Ces  bateaux 
peuvent  jouer  le  rôle  de  croiseurs  et  de  garde-côtes. 
Leur  faible  tirant  d'eau  leur  permet  de  remonter  dans 
beaucoup  de  rivières. 

Cependant  les  torpilleurs  de  haute  même  semblent 
pas  destinés  à  s'imposer  définitivement.  Des  expé- 
riences faites  en  Angleterre  en  1885  ne  leur  ont  pas 
été  favorables.  Une  corvette  cuirassée  le  A/ercure,  un 
bélier-torpilleur,  le  Poft/phèmej  cuirassé  à  éperon  de 
80  mètres  de  long  et  muni  d'un  tube  à  lancer  les  tor- 
pilles, ont  facilement  échappé  à  l'attaque  simultanée 
de  plusieurs  torpilleurs. 

La  lutte  reste  donc  engagée  entre  les  partisans  des 
cuirassés  et  ceux  des  torpilleurs.  Chacun  des  deux  sys- 
tèmes a  donné  des  victoires,  Il  semble  toutefois  que, 
depuis  que  l'on  peut  lancer  les  torpilles,  au  lieu  de 
les  faire  éclater  parle  choc,  il  est  inutile  d'avoir  des 
torpilleurs  spéciaux  et  qu'il  suffit  de  munir  les  navires 
de  guerre  des  appareils  nécessaires  pour  envoyer 
contre  les  navires  ennemis  les  terribles  engins. 

F.  L-T. 
TOUAGE.  —  Ce  système  de  remorque  sur  les  canaux  et 
les  rivières  paraii  avoir  été  expérimenté  pour  la  pre- 
mière fois  en  1732,  par  le  maréchal  de  Saxe,  qui  se 
servait  de  ses  chevaux  pour  faire  tourner  les  treuils.  En 
1813,  Sullivan,  mécanicien  de  Paris,  essaya  de  mettre 
ces  appareils  en  mouvement  au  moyen  d'une  machine 
à  vapeur.  De  18(9  à  18*21,  Toura9se  et  Courteault, 
ingénieurs-mécaniciens  à  Lyon,  établirent  leur  sys- 
tème sur  la  Saône;  il  a  été  adopté  pour  la  Seine  dans 
la  traversée  de  Paris.  Ce  système  consiste  à  faire 
agir  le  treuil  du  bateau  loueur  sur  un  câble  en  fer 
installé  dans  le  lit  du  fleuve  et  sur  toute  la  longueur 
du  trajet  à  parcourir.  On  l'a  appliqué,  dans  ces 
dernières  années,  sur  la  Seine,  de  Paris  à  Rouen. 

TRAIN  DES  ÉQUIPAGES  MILITAIRES.— D^sprès  l'organiss- 
tion  de  1875,  il  comprend  20  escadrons  tous  stationnés 
en  France.  Chaque  escadron  est  de  4  compagnies.  Le 
service  de  l'Algérie  est  assuré  par  un  certain  nombre 
de  compagnies  mixtes  rattachées  pour  l'administration 
aux  Oitcadrons  de  l'intérieur. 

THIMTÉ  (ÉGLISE  DE  la),  à  Paris.  — •  Cette  église  s'é- 
lève dans  le  quartier  de  la  Chaussée-d'Antin,  sur  les 
derniers  restes  des  b&timents  et  jardins  du  hameau  des 
Porcherons.  Elle  est  précédée  d'un  square  d'environ 
8,000  mètres  de  superficie.  Ce  square,  de  forme  ovale, 
est  emprisonné  dans  un  mur  que  surmonte  une  ba- 
lustrade en  pierre,  ornée  d'élégants  candélabres  en 
bronze.  Trois  fontaines  en  décorent  le  fond  :  chacune 
d'elles  se  compose  de  trois  va^iques  superposées,  dans 
lesquelles  les  eaux  tombent  en  cascade.  Sur  les  piédes- 


taux engagés  dans  la  partie  supérieure  de  la  balustrade 
qui  entoure  le  bassin  des  fontaines,  on  a  placé  tro  s 
statues  en   marbre  blanc,  la  Foi,  TEspérance  et  h 
Charité.  En  arrière  des  fontaines,  deux  rampes  car- 
rossables conduisent  sous  le  porche  de   l'église.  — 
La  Trinité  couvre  un   espace  de  2,900  met.;   elle  a 
90  met.  de  longueur  sur  30  met.  de  largeur»  et  est 
percée  de  trois  grandes  portes  à  la  façade,  de  deux 
plus  petites  sur  les  côtés,  de  quatre  autres  à  la  partie 
postérieure.   La  construction   générale   est    dans   le 
style  florentin  des  xvi»  et  xvii»  siècles.  La   façade  se 
compose  d'un  vaste  porche,  surmonté  d'un  étage  a\ec 
rosace,  et  d'un  clocher  qui  atteint  65  met.  de  hauteur. 
Les  voussures  du  porche  ont  été  rehaussées  de  laves 
brillantes,    inaltérables,  ouvrage    des   frères    Jialze. 
Quatre  groupes,  placés  en  amortissement  aux  angles 
de  la  balustrade  de  la  façade,  représentent   la  Pru- 
dence, la  Justice,  la  Force  et  la  Tempérance,  accom- 
pagnées d'enfants  ou  génies  :  ils  sont  dus  aux  sculp- 
teurs Cavelier,  Carpeaux,  Crauck  et  Maillet.  Les  statues 
des  Evangélistes,    qui  se  détachent  aux  angles    du 
campanile,  sont  l'œuvre  de  Cugnot,  de  Gauthier!,  de 
Gilbert  et  de  Fresquet  ;  Guillaume,  Loison,   Aiaelin 
et  Dûublemard  ont  sculpté  les  saints  des  niches  exté- 
rieures. Une  balustrade  découpée  à  jour  court  sur  le 
mur  pignon,  que  couronnent  à  droite   et  à  gauche 
deux  tourelles;  celles-ci  renferment  les  escaliers  qui 
mènent  aux  tribunes  et  aux  parties  supérieures  de 
l'édifice. 

L'intérieur  de  l'église  n'est  point   divisé  en  nefs; 
c*est  un  grand  vaisseau,  de  chaque  côté  duquel  s'ou- 
vrent quatre  travées  formant  chapelles,  avec  tribunes 
au-dessus.  Les  pilastres  qui  séparent  ces  chapelles  le-s 
unes  des  autres  sont  à  deux  étages  de  niches  et  de 
colonnes  engagées  dans  la  masse,    et  se   ternainent 
dans  les  combles  par  des   arcs  doubleaux,   dont  la 
courbe  paraît  légèrement  ogivale.  Les  chapelles  elles- 
mômes  et  les  tribunes  qui  les  surmontent  sont  dirisées 
en  deux  travées  secondaires  par  une  colonne  et  deux 
archivoltes  :  le  sommet  forme  une  arcade  trilobée  en 
pénétration    dans  la  voûte,  et  reproduit  ainsi,  mais 
dans  des  dimensions  colossales,  le  dessin  des  fenêtres. 
Les  grands  médaillons  des  arcades  trilobées  ont  été 
décorés  de  peintures  sur  fond  d'or  par  Barrias   et 
Jobbé-Duval.  Entre   les  arcs  doubleaux  la  voûte  est 
ornée  de  rosaces  et  teintée  dans  les  pendentifs,  avec 
petits  bouquets  d'épis.  Tout  ce  qui  est  sculpture, 
moulage,   relief  quelconque  dans  ce   décor,  les   rin- 
ceaux, les  caissons,  les  arêtes,  tout  est  doré.  —  Aux 
deux  tiers  de  la  longueur  de  l'église,  le  sol  s'élève, 
et  un   escalier  aux   marches  spacieuses  conduit  au 
chœur  formé  d'un  ordre  corinthien   en  avancement 
sur  la  nef.  Dans  les  retraites  que  forme  cet  avance- 
ment,   deux   portes  latérales  donnent  accès  à  deux 
sacristies.  Tout  au  fond  est  la  chapelle  de  la  Vierge, 
dont  les  peintures  ont  été  exécutées  par  Emile  Lévy 
et  Delaunay;  la  statue  do  la  Vierge  est  de  Paul  Du- 
bois. Le  grand  arc  de  l'abside  a  été  peint  par  Barrias 
et  Jobbé-Duval;  les  bénitiers  sont  de  Gumery  ;  on  doit 
les   statues  des  niches  intérieures  à  Lebourg,   Cha- 
trousse,  Bosio,  Dantan  jeune,  etc.,  et  les  sculptures 
d'ornement  à  Murgey  et  Libersac.  Les  verrières  sont 
d'Oudinot  et  Nicod. 

La  Trinité  est  une  église  destinée  au  monde  élégant  : 
tout  y  semble  fait  pour  le  plaisir  des  yeux;  des  lustres 
d'or  l'éclairent  de  leurs  girandoles  de  feux;  les  pieds 
reposent  sur  un  parquet  de  chêne,  où  s'ouvrent,  de 
distance  en  dislance,  les  bouches  d'un  calorifère.  Les 
cérémonies  de  la  mort  ne  mêlent  pas  leurs  tristesses 
aux  joies  du  baptême  et  du  mariage  ;  on  leur  a  réservé 
une  chapelle  souterraine,  aux  piliers  et  aux  fortes 
arcatures  en  fer  recouvert  de  stuc.  M.  Ballu  a  été 
farchitecte  do  la  Trinité,  consacrée  en  1867.  B- 

TRISTAN  DE  NANTEUIL,  chanson  de  geste  ano- 
nyme du  XIV®  ou  du  xve  siècle,  et  dont  on  fait  une 
suite  d'Aye  d'Avignon  et  de  Gui  de  NanteuiL  Tristan, 
fils  de  Gui,  seul  en  son  enfance  sur  un  navire  et  nourri 

far  une  sirène,  grandit  au  milieu  de  mille  dangers. 
I  épouse  Blanchandine,  qui  donna  le  jour  à  Rainiond 
de  Saint-Gilles.  Comme  il  fut  ensuite  assassiné,  Dieu 
sauva  la  veuve  en  la  changeant  en  homme,  Blanrhsn- 
din.  Le  poème  de  Tristan  de  Nanteuiit  fort  de  2i,(i(l0 
vers,  et  que  possède  la  BibliothèqXie  nationale,  a  été 
publié  par  P.  Meyer  dans  les  Anciens  poètes  de  la 
France. 
TROILUS  (légende  DE).~Dans  V Iliade,  Priam  déplore 


VAL 


—  1865  — 


WAL 


la  mort  de  son  fils  Trollus.  Précisant  cette  vagne  men- 
tion d*Homère,  Stasinus  de  Chypre  dit  que  Troilus  fut 
tué  par  Achille.  Ce  fat  sans  doute  de  légendes  pos- 
térieures sur  la  guerre  de  Troie  que  Phrynichus  et 
Sophocle  tirèrent  le  sujet  de  leurs  tragédies  consacrées 
au  Jeune  Troyen  et  qui  soot  aujourd  hui  perdues.  Un 
trouTère  du  xii*  siècle,  Benoit  de  Saint-Maur,  nous  a 
laissé  un  poème  tout  à  fait  fictif  ou  puisé  à  quelque 
source  actuellement  inconnue,  et  dont  foici  le  sujet 
réduit  à  sa  plus  simple  expression.  Le  chevalier  troyen 
Trollus  aime  Briséida  ou  Gressida,  fllle  du  transfuge 
Galchas.  Celui-ci,  en  abandonnant  Troie,  n*a  pu  emme- 
ner sa  fille  :  il  la  réclame  et  l'obtient  en  échange  du 
prince  Anténor,  prisonnier  des  Grecs.  Briséida  quitte 
TtoilQS  désolé,  avec  de  grandes  protestations  de  fidé- 
lité, et  cependant  le  trompe  pour  le  vaillant  capitaine 
Diomède.  Cette  fable,  imitée  en  prose  latine  par  le 
médecin  silicien  Gui  do  délie  Colonne,  passa  ensuite 
entre  les  mains  de  Boccace,  qui  en  fit  son  poème  italien 
de  FUostrato,  en  v  introduisant  une  figure  nouvelle, 
celle  de  Pandaro.  Reprise  en  Angleterre  par  Chaucer, 
elle  donna  encore  naissance,  au  iiv*  siècle,  à  un  roman 
en  prose,  écrit  par  le  seigneur  de  Besuvau,  sénéchal 
d'Anjou.  Enfin  elle  a  fourni  la  matière  de  l'une  des 
dernières  pièces  de  Shakespeare,  Troîtm  et  Cressida. 
(K.  Moland  et  d'Héricault,  Nouvelles  françaises  en 
prose  du  xiv«  siècle^  Paris,  1858.) 

TSARSKOÉ-SÊLO,  résidence  d'été  de  la  famille 
impériale  de  Russie,  à  20  kilom.  de  Saint-Pétersbourg. 
La  façade  du  palais  était  Jadis  dorée;  mais  la  dorure 
ne  put  résister  au  froid  et  a  été  remplacée  par  du 
bronze.  Il  n'y  a  plus  de  doré  que  la  coupole  de  l'église, 
toute  bleue  à  l'Intérieur  et  ornée  d'excellents  ta- 
bleaux; on  y  conserve  une  clef  de  la  ville  d'Andri- 
nople.  Une  des  salles  du  palais  est  en  lapis-lasuli, 
une  autre  en  ambre  du  plus  bel  effet.  Une  salle  chi- 
noisOf  où  se  tient  d'ordinaire  l'impératrice,  est  une 
merveille.  Le  parc  est  un  des  plus  beaux  qui  existent  : 
statues,  lacfl,  fabriques,  colonnes  y  abondent,  ainsi 
que  des  arbres  magnifiques.  Un  petit  ch&teau  fort 
renferme  une  admirable  collection  aarmes  anciennes. 


VALEURS  COTÉES.  —  Les  bijoux  ou  objets  précieux 
circulant  par  la  poste  acquittent  aujourd'hui  un  droit 
fixe  de  chai^gement  de  0  ir.  50  c,  et  une  taxe  de  1  p. 
100  de  leur  valeur  Jusqu'à  100  fr.  et  de  0.50  c.  par 
chaque  100  fr.  on  fraction  de  100  fr.  en  plus. 

VALEURS  DÉCLARÉES,  valeurs  qu'un  expéditeur  a 
insérées  dans  une  lettre  et  déclarées  au  bureau  de 
poste,  afin  de  s'assurer  le  remboursement  en  cas  de 
perte,  sauf  le  cas  de  force  majeure.  La  déclaration  est 


portée  en  toutes  lettres  à  la  partie  supérieure  de  la 
suscriptlon  de  l'enveloppe.  Jusqu'au  1*'  mai  1878,  la 
taxe  fut  le  port  de  la  lettre,  le  droit  fixe  de  0  fr.  50  c, 
et  un  droit  de  0  fr.  20  c.  par  100  fr.  ou  fraction  de 
100  fr.  déclarés.  Actuellement  le  droit  à  payer  est 
abaissé  de  20  à  10  cent,  par  100  fr.  ou  fraction  de 
100  fr.  déclarés. 

VOILE.  —  Le  voile  que  fit  faire  Moïse  dans  le  dé- 
sert pour  séparer  le  sanctuaire  du  Très-Saint,  était 
un  rideau  de  pourpre  violette  et  rouge,  de  cramoisi 
et  de  Un  retors,  en  tissu  à  figures  de  Keroubs  (ché- 
rubins). Placé  dans  le  Ubernacle  en  avant  de  l'arche 
de  la  loi,  il  était  suspendu  à  quatre  colonnes  de  bois 
d'acacia  plaquées  d'or,  ayant  des  clous  d'or  et  repo- 
sant sur  quatre  supports  d'argent. 

Un  archéologue  distingué,  M.  de  Saulcy,  croît  que 
cette  tenture,  comme  celles  qui  ornaient  le  taberna- 
cle de  Moïse,  étaient  des  broderies  faites  à  la  na- 
vette avec  des  fils  de  différentes  couleurs^  tissées  avec 
art,  analogues  aux  toiles  dont  se  servaient  les  Égyp- 
tiens pour  envelopper  les  momies.  M.  E.  MQaU  pense 
qu'il  s'agit  simplement  de  broderies  à  la  mafn,  exé- 
cutées après  coup  sur  le  fond  bleu,  rouge  ou  jaune 
des  tentures. 

Le  voile  dont  Salomé  orna  le  temple,  représentait 
les  Chérubins  traditionnels,  brodés  sur  un  fond  d'azur, 
de  pourpre  et  d'écarlate.  Le  voile  du  temple  rebâti  au 
retour  de  Babylone,  vers  l'an  536,  était  un  tissu  de 
lin  fin  et  d'écarlate.  En  l'an  19  avant  notre  ère,  lors- 
que Hérode  le  Grand  réédifia  le  temple  de  Jérusa- 
lem, il  fit  suspendre  devant  les  portes  s'ouvrant  sur 
la  partie  la  plus  vénérée  de  l'édifice,  une  tapisserie 
babylonienne,  haute  de  50  coudées,  large  de  16. 
L'azur,  le  Un,  l'écarlate  et  la  pourpre  y  étaient  mê- 
lés avec  une  intention  symbolique,  offrant  l'image 
des  quatre  éléments.  L'écarlate  représentait  le  feu; 
le  lin  la  terre  ;  l'azur,  l'air  ;  la  pourpre,  la  mer.  Cette 
signification  avait  sa  raison  pour  les  deux  premières 
de  ces  matières,  dans  la  similitude  des  couleurs.  Les 
deux  autres  empruntaient  leur  langage  mystique  à  leur 
provenance: car  la  terre  produit  le  lin,  lamerlapour- 

Sre.  Tout  l'ordre  du  ciel,  à  l'exception  des  signes,  était 
guré  sur  ce  voile  (Voir /a  Tapisserie,  par  E.  MOntz, 
Bibliothèque  de  l'enseignement  des  beaux- arts). 

J.  B-z. 
VOLONTARIAT.  (F.  Rbcrctbment). 


W 

WALLONNE  (Épéi).  —  Épée  à  lame  droite  et  à  deux 
tranchants,  qui  80us  Louis  XUI  et  Louis  XIV  était 
l'arme  de  la  cavalerie  régulière.  La  garde  de  cette 
épée  est  pleine  et  percée  de  petits  trows  ;  elle  se  re- 
lie au  pommeau  par  trois  branches. 


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